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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Friday, June 11, 1999 - Vol. 36 N° 45

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Table des matières

Présence de l'ambassadeur du royaume de Norvège, M. Johan Ludvik Lovald

Présence du consul général du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord à Montréal, M. Marcus Hope

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés! Nous allons d'abord nous recueillir un moment.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Présence de l'ambassadeur du royaume de Norvège, M. Johan Ludvik Lovald

Avant de débuter la séance, j'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes de l'ambassadeur du royaume de Norvège, Son Excellence M. Johan Ludvik Lovald.


Présence du consul général du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord à Montréal, M. Marcus Hope

J'ai également le plaisir de souligner la présence dans les tribunes du consul général du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord à Montréal, M. Marcus Hope.


Affaires courantes

Alors, nous abordons maintenant les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

À la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui, M. le Président. Veuillez prendre en considération l'article c.


Projet de loi n° 69

Le Président: Alors, à l'article c de notre feuilleton, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux présente le projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Ce projet de loi modifie le régime général d'assurance-médicaments afin d'exempter du paiement de toute contribution les personnes qui reçoivent des prestations en vertu d'un programme d'aide de dernier recours ou qui sont âgées d'au moins 60 ans et de moins de 65 ans et qui détiennent un carnet de réclamation délivré en vertu de la Loi sur l'assurance-maladie lorsque ces personnes présentent des contraintes sévères à l'emploi.

Le projet de loi prévoit aussi que la liste des médicaments dont le coût est garanti par le régime général sera dressée par règlement du ministre. Les cas, les conditions et les indications thérapeutiques selon lesquels le coût de certains médicaments est assumé par le régime général seront aussi déterminés par règlement du ministre et non plus par règlement du gouvernement.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Deux questions, M. le Président. Compte tenu de l'importance de la réglementation qui va découler de ce projet de loi, est-il de l'intention de la ministre ou du gouvernement de communiquer à l'Assemblée nationale le contenu de ces règlements? Et est-il de l'intention du gouvernement de procéder à l'adoption de ce projet de loi? Et j'indique immédiatement que l'opposition est prête à consentir, là où les consentements seront requis, pour que le projet de loi soit adopté d'ici la fin de la présente session.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, pour ce qui est des règlements, on va examiner la situation et ce qui se fait et ce qui s'est fait également dans le passé. On n'est pas fermé à l'ouverture présentée par le leader de l'opposition. Et je suis content évidemment d'apprendre que l'opposition entend collaborer à son adoption d'ici la fin de la session.

Le Président: Alors, je comprends que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi. Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, je vous réfère à l'article d.


Projet de loi n° 70

Le Président: À cet article du feuilleton, Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi présente le projet de loi n° 70, Loi visant à assurer les services essentiels à l'Office municipal d'habitation de Montréal. Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'assurer l'établissement et le maintien de services essentiels à l'Office municipal d'habitation de Montréal.

À cette fin, il assimile cet Office à un service public au sens du Code du travail jusqu'à la date que déterminera le gouvernement.


Mise aux voix

Le Président: Bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: M. le Président, avant, nous regrettons que ça ait pris 10 mois pour se rendre compte que les services publics...

Des voix: ...

Le Président: Non. Ce n'est pas l'étape de faire des discours sur le projet. À la limite, la pratique veut qu'il y ait des questions techniques, comme celle qui vient d'être posée par...

Une voix: ...

Le Président: M. le député.

M. Gobé: Est-ce que la ministre a l'intention de décréter rapidement, après que l'opposition aura donné son accord au projet de loi, en vertu de l'article 111.0.17, une demande au service des services essentiels afin que le droit de grève soit suspendu et que les services essentiels soient impliqués rapidement pour les personnes âgées et les locataires de Montréal?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui.

Le Président: Alors, l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi. Adopté. M. le leader du gouvernement.

(10 h 10)

M. Brassard: L'article b, M. le Président.


Projet de loi n° 66

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le leader du gouvernement, au nom du ministre délégué aux Affaires autochtones, présente le projet de loi n° 66, Loi permettant la mise en oeuvre d'ententes avec la nation mohawk.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Alors, M. le Président, ce projet de loi modifie diverses dispositions législatives afin de permettre la mise en oeuvre d'ententes conclues avec la communauté mohawk de Kahnawake et de donner suite aux négociations qui sont en cours en vue de la conclusion d'ententes avec d'autres communautés mohawks.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, maintenant, Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Avis de classement concernant le Domaine Joly-De-Lotbinière

Mme Maltais: M. le Président, je dépose l'avis de classement concernant le domaine et manoir Joly-De-Lotbinière, Lotbinière et Sainte-Croix.

Le Président: Alors, le document est déposé. M. le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce.


Rapport annuel de Sidbec

M. Julien: Alors, M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998 de Sidbec.

Le Président: Alors, le document est déposé.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, Mme la présidente de la commission de l'économie et du travail et députée des Chutes-de-la-Chaudière.


Étude détaillée du projet de loi n° 18

Mme Carrier-Perreault: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé le 10 juin 1999 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 18, Loi modifiant la Loi sur le développement de la région de la Baie James. La commission a adopté le projet de loi.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé. M. le président de la commission de l'aménagement du territoire et député de Richmond.


Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 214

M. Vallières: Oui, M. le Président, je voudrais déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 10 juin 1999 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 214, Loi concernant la Ville de Saint-Hubert. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.


Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 216

Vous me permettrez également, M. le Président, de déposer un second rapport de la commission de l'aménagement du territoire, toujours, qui a siégé à la même date, le 10 juin 1999, afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 216, Loi concernant la Ville de Saint-Laurent. La commission a adopté le projet de loi avec un amendement.

Le Président: Bien. Ces rapports sont déposés.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, Mme la députée de Terrebonne et whip en chef du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je sollicite le consentement pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement, Mme la députée.


Réintégrer dans leur emploi les agents correctionnels congédiés à la suite d'un débrayage à l'Établissement de détention de Rivière-des-Prairies

Mme Caron: Je dépose l'extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par 26 911 pétitionnaires, la désignation: Syndicat des agents de la paix.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que tous les agents correctionnels de l'Établissement de détention de Rivière-des-Prairies ont débrayé le 13 mars 1999 pour protester contre de nouvelles coupures d'effectifs qui réduisaient la sécurité du personnel et de la clientèle;

«Considérant qu'ils ont tous repris le travail dès le lendemain matin, se soumettant ainsi à l'ordonnance émise par le Conseil des services essentiels;

«Considérant que le ministère de la Sécurité publique a réprimé ce geste en congédiant 33 agents correctionnels, mesure ultime en matière disciplinaire;

«Considérant que cette action illégale doit être disciplinée mais par une mesure plus appropriée que le congédiement;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir: pour que le ministère de la Sécurité publique réintègre dans leur emploi tous les agents congédiés; pour qu'une mesure disciplinaire plus appropriée leur soit appliquée; pour que les coupures budgétaires et/ou d'effectifs cessent dans les services correctionnels du Québec.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée.


Dépôt de rapports de commissions (suite)


Mise aux voix des rapports de la commission qui a procédé aux auditions et à l'étude détaillée des projets de loi nos 214 et 216

Simplement à l'égard des rapports qui ont été présentés par le député de Richmond et président de la commission de l'aménagement du territoire, ces rapports concernent des projets de loi d'intérêt privé, alors ces rapports sont-ils adoptés? Parce qu'il n'y a pas uniquement le dépôt, mais il faut les adopter. Alors, ils sont adoptés. Très bien.

Je vous avise qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de Mme la ministre de la Justice proposant que le principe du projet de loi n° 16, Loi modifiant la Loi sur la division territoriale et la Loi sur les tribunaux judiciaires, soit adopté.


Questions et réponses orales

Nous allons maintenant entreprendre la période de questions et de réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle, en question principale.


Réduction des impôts et augmentation des dépenses en santé


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. Dans les derniers jours, des élections générales ont eu lieu à la fois en Ontario et au Nouveau-Brunswick. Dans les deux cas, des gouvernements ont reçu des mandats de réduction d'impôts. Dans le cas de l'Ontario, ils avaient déjà réduit les impôts personnels de 30 %, ils ont reçu le mandat de réduire à nouveau les impôts; dans le cas du Nouveau-Brunswick, le nouveau gouvernement a également reçu le mandat de réduire les impôts personnels, de telle sorte que l'écart va s'aggraver, va s'agrandir entre le Québec et ses voisins, et l'étau commence à se resserrer de plus en plus autour du contribuable québécois déjà étouffé par les taxes et les impôts.

M. le Président, comme le ministre des Finances du gouvernement actuel a déjà dit à plusieurs reprises, et je cite: «L'impôt tue l'emploi et, par conséquent, les revenus que peut retirer un gouvernement d'une personne qui travaille», j'aimerais savoir et j'aimerais offrir au premier ministre, une fois de plus aujourd'hui, la collaboration de l'opposition officielle pour qu'on puisse proposer aux contribuables québécois des réductions d'impôts immédiates et, au besoin, le dépôt d'un budget spécial pour qu'on puisse offrir aux justiciables québécois un peu, justement, d'équité sur le plan de l'impôt.

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement considère qu'il a, lui aussi, reçu le mandat de réduire les impôts, lors des dernières élections, puisque nous avons pris l'engagement de réduire les impôts, après avoir été les premiers à commencer à les réduire, compte tenu du fait que le gouvernement qui nous a précédés les a augmentés de 10 000 000 000 $. Donc, je ne pense pas qu'on ait de leçons à recevoir du chef de l'opposition là-dessus.

Et, M. le Président, je note l'offre du chef de l'opposition de nous aider à baisser les impôts, alors je me demande quelles sont les mesures constructives qu'il a à nous proposer. Oui, il faut réduire les impôts, mais on les réduit avec quel argent? On ne veut pas réduire les impôts en retombant dans les déficits. Il n'est pas question de faire de déficits.

Et ce que je sens dans toutes les questions de l'opposition, c'est d'augmenter le niveau des dépenses pour qu'on retombe dans les déficits. Ce n'est pas vrai qu'on va maintenir le niveau de dépenses, qu'on ne fera pas de déficits, et puis que, même, on va augmenter les dépenses puis qu'on pourra réduire les impôts. Il faut continuer de gérer avec rigueur les dépenses publiques, continuer de maintenir des services de qualité, mais gérer des dépenses publiques avec rigueur et, oui, bien sûr, en faisant en sorte qu'il n'y ait pas de déficit et en dégageant des marges de manoeuvre.

Réduire les impôts, c'est ce que nous ferons. Nous le ferons de façon responsable, nous ne le ferons pas avec des déficits, nous ne le ferons pas en creusant des trous, nous n'allons pas augmenter les impôts comme l'ont fait les libéraux, de 10 000 000 000 $, pendant leur mandat. Nous sommes un gouvernement qui gère avec responsabilité, les gens le savent, et nous allons livrer la marchandise, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, en question complémentaire.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: En complémentaire. Est-ce que le premier ministre peut comprendre que le débat de faire un choix entre la baisse des impôts et les services de santé ou les services publics est un faux débat? Et, à l'exemple, on peut prendre l'exemple ontarien qui est frappant, car on a baissé les impôts de 30 % et on a augmenté les revenus de 8 000 000 000 $.

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: Je crois que la députée et critique de l'opposition dans le domaine des finances a justement soulevé un très beau cas, celui de l'Ontario: l'Ontario, qui augmente ses dépenses de la santé et qui réduit ses impôts. D'abord, nous aussi, on a augmenté les dépenses de la santé de 1 700 000 000 $. Nous, on a ajouté 1 700 000 000 $ dans le budget de cette année au titre des dépenses de la santé...

Des voix: Non!

M. Bouchard: M. le Président, j'ai écouté les questions avec politesse. J'aimerais qu'on écoute avec courtoisie les réponses que je donne.

Des voix: Oui!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Donc, nous avons également augmenté le niveau des dépenses et les ressources affectées au budget de la santé de l'ordre de 1 700 000 000 $, mais, M. le Président, l'Ontario, c'est un beau cas parce qu'ils ont reçu du gouvernement fédéral 5 000 000 000 $ pour la santé; on a reçu 800 000 000 $. On l'a dénoncé avec force, l'opposition a pris le côté du fédéral là-dedans, puis aujourd'hui ils viennent de nous reprocher ce qu'ils disent. Il y a une logique qu'il faut avoir, même dans l'opposition. On peut critiquer, on peut hurler, on peut vouloir embarrasser le gouvernement, mais il faut être logique puis il faut être vrai. Alors, soyons responsables, soyons de bon compte. Est-il vrai, oui ou non, que l'Ontario a eu 5 000 000 000 $ qu'elle peut utiliser pour augmenter la santé et baisser les impôts, puis qu'on a eu 800 000 000 $ du fédéral en même temps? Oui ou non, est-ce vrai?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, le premier ministre nous demande ce qui est vrai. Ce n'est pas à l'opposition officielle qu'il faut demander ça. Qu'il demande donc ça au Conseil...

Des voix: ...

M. Charest: Qu'il demande donc...

(10 h 20)

Des voix: ...

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Charest: Si je peux finir ma question, M. le Président. Je comprends qu'ils n'aiment pas beaucoup ce genre de question là. Parce que ce n'est pas l'opposition officielle qui a dit que la publicité que son gouvernement avait faite, justement sur les transferts fédéraux, c'était une publicité trompeuse. Ce n'est pas nous qui l'avons dit, c'est les gens qui ont évalué sa propre publicité et qui l'ont accusé d'induire la population en erreur, justement sur cette question-là.

Alors, qu'ils ne viennent pas nous faire la morale aujourd'hui sur les vérités. La réalité est la suivante. Le gouvernement de l'Ontario a eu les mêmes coupures que le gouvernement du Québec. Dans la même période de temps, ils ont augmenté leurs dépenses dans la santé de 1 500 000 000 $; vous avez coupé de 1 100 000 000 $. Et, dans la même période de temps, ils ont réduit les impôts. Mais ils ont créé de l'emploi!

Puis l'argument est le suivant, M. le Président. Si on veut créer de l'emploi, si on veut mettre du monde au travail, si on veut arrêter de les étouffer avec des taxes, des impôts puis la souveraineté du Québec, est-ce que le gouvernement va enfin agir pour donner une chance aux contribuables de travailler?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, il arrive très souvent, lorsque le gouvernement du Québec est en contestation, en difficulté avec le gouvernement fédéral, que l'opposition prend partie pour le fédéral. Heureusement que, dans le Parti libéral, il y a des gens qui sont plus réalistes et moins partisans. Je pense à la position que vient d'adopter et de rendre publique M. Claude Ryan dans le débat sur l'union sociale. Alors que le chef de l'opposition disait qu'il y avait du progrès dans l'union sociale, des pas en avant, M. Ryan dénonce fortement cela comme un recul, comme un autre abandon du Québec. Il reconnaît la bonne foi avec laquelle le gouvernement du Québec a négocié dans ce dossier. Le Parti libéral en était incapable.

Et, puisque le chef de l'opposition place la discussion sur le plan de la vérité, je voudrais lui rappeler que, dans le Globe and Mail du 29 mai, il est cité par un journaliste éminemment crédible qui s'appelle Graham Fraser et qui lui fait dire entre guillemets – n'est-ce pas, entre guillemets: «It was very clear to me from my experience in travelling throughout Canada that the Quiet Revolution in Québec was producing poor, mediocre results.»

Et, dans le journal d'avant-hier, le Journal de Québec : Charest nie tout . «Le chef libéral affirme n'avoir jamais déclaré que la Révolution tranquille avait donné des résultats "pauvres et médiocres".» Il est cité entre guillemets dans les deux cas.

Alors, quand a-t-il dit la vérité? Quand il parlait au journaliste Normand Girard ou quand il parlait à Graham Fraser? Qui a raison entre les deux cas? Est-ce qu'il a déposé une demande de rectificatif au Globe and Mail ? Est-ce qu'il a poursuivi le Globe and Mail ? Qu'est-ce qu'il a fait? Est-ce qu'il persiste à nier?

Des voix: Ha, ha, ha! Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.


Fardeau fiscal des contribuables


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, je constate que le premier ministre est fidèle à ses habitudes, il aime bien citer ce qui fait son affaire. Sauf que, s'il avait lu tous les journaux cette semaine et tous les commentateurs sur ses commentaires à lui et sa position justement sur sa défense de l'identité québécoise, ça l'aurait peut-être amené à réfléchir un petit peu sur les résultats, justement, de ses propres politiques. Et c'est là-dessus qu'on en est aujourd'hui. Alors, la fuite en avant, aujourd'hui on peut s'en passer.

J'aimerais savoir de sa part...

Des voix: ...

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Charest: M. le Président, j'aimerais savoir, moi, de la part des Québécois qui, eux, souffrent d'un niveau de chômage plus élevé qu'ailleurs au pays, un taux de croissance économique plus faible, des revenus disponibles qui baissent, un plus haut niveau de pauvreté que n'importe où ailleurs au Canada, les impôts et les taxes les plus élevés en Amérique du Nord, j'aimerais savoir pour combien de temps encore ils seront obligés de tolérer un gouvernement qui est le seul en Amérique du Nord qui pense que les impôts et les taxes, c'est la seule réponse. À quand l'équation entre la réduction d'impôts, de taxes et la créations d'emplois? À quel moment le gouvernement va finir par allumer ses lumières et rattraper le reste de l'Amérique du Nord et enfin s'occuper de sa population?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: Quand on entend des propos comme ceux qu'on vient d'entendre, des accusations à l'emporte-pièce... Ma sécurité et celle du gouvernement, ce sont les faits, M. le Président. Les faits, c'est que les gouvernements libéraux qui nous ont précédés ont augmenté les impôts et les taxes de 10 000 000 000 $ et ce sont eux qui ont porté à ce niveau actuel le niveau intolérable et le fardeau intolérable de taxes que nous avons. Et la vérité, c'est aussi que, nous, nous sommes le gouvernement qui a commencé à les réduire, les impôts, qui les a réduits déjà de 6 %, qui s'est engagé à les réduire d'un autre 9 % durant le mandat. C'est un minimum, M. le Président, parce que nous travaillons très fort à dégager une marge de manoeuvre qui va permettre de baisser les impôts.

Pour baisser les impôts, il faut une marge de manoeuvre. Et, quand on part avec un déficit de 6 000 000 000 $, comme celui dont nous avons hérité, ça partait mal. Malgré tout, on a non seulement réussi à supprimer le déficit un an avant le temps, on a même réussi à commencer à baisser les impôts, puis on va continuer. Qu'on nous regarde aller, M. le Président, on va montrer qu'on n'est pas des libéraux au pouvoir.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Je ferai remarquer au premier ministre qu'il a longtemps appuyé ce gouvernement libéral, celui à qui il reproche aujourd'hui certaines choses. Mais, puisqu'on ne réussit pas à avoir d'engagement pour la réduction d'impôts, est-ce que le premier...

Le Président: Je m'excuse, M. le chef de l'opposition officielle. Jusqu'à maintenant, l'échange se fait entre le premier ministre et le chef de l'opposition officielle, et, à tour de rôle, ils sont les seuls à avoir le droit de parole. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Charest: Est-ce que le premier ministre peut au moins s'engager aujourd'hui à ce que son gouvernement n'augmente pas les impôts, les taxes, les tarifs directement ou indirectement, puisqu'il ne réduit pas les impôts, au moins s'engager fermement, sans équivoque, à ne pas augmenter les impôts, taxes ou les tarifs directement ou indirectement?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, oui, j'ai appuyé le Parti libéral et j'en ai été membre, du Parti libéral, comme l'a été René Lévesque, comme l'ont été beaucoup de Québécois à l'époque du grand Parti libéral, du vrai Parti libéral progressiste de Jean Lesage. Il n'y a pas de comparaison avec aujourd'hui, n'est-ce pas?

Des voix: Bravo!

M. Bouchard: Et, sur la question du fardeau fiscal, M. le Président, ce n'est pas seulement des paroles qu'on prononce, hein, il y a les gestes que nous avons posés. Et puis le geste que nous posons, là, nous allons déposer la motion tout à l'heure, après la période de questions, pour constituer la commission qui va lancer de grandes consultations sur la façon de baisser les impôts. Baisser les impôts, c'est une chose, mais comment le fait-on? Alors, c'est ça, ça va partir à l'automne. C'est un geste très important qui non seulement lance le grand débat de la réduction des impôts, mais qui, en même temps, va permettre aux citoyennes et aux citoyens, et aux contribuables en général, et à tous les députés de s'exprimer sur la façon de le faire.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, on va offrir l'occasion au premier ministre et à son gouvernement de se prononcer sur cette question-là. Puisqu'ils veulent déposer une motion aujourd'hui, nous allons en déposer une, motion, qui propose à l'Assemblée nationale de geler les impôts, les taxes, les tarifs, de ne pas les augmenter, puisque le gouvernement actuel s'engage à ne pas les réduire.

Est-ce que le premier ministre peut nous dire si, oui ou non, son gouvernement va appuyer la motion?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement a pris l'engagement de réduire le fardeau fiscal dans son ensemble. Alors, je ne sache pas qu'il faille visser tous les tarifs partout. On peut très bien décider de baisser les tarifs, on peut très bien décider d'en fixer. On sait très bien que l'important, c'est l'ensemble du fardeau fiscal. L'engagement, c'est de le réduire, c'est ce que nous ferons.

(10 h 30)

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, maintenant, en question principale.


Congédiement d'agents correctionnels à la suite d'un débrayage à l'Établissement de détention de Rivière-des-Prairies


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: En parlant d'un grand geste accompli par ce gouvernement, M. le Président, je voudrais revenir sur le sujet de la pétition qui a été déposée par la whip en chef du gouvernement ce matin et qui concerne le congédiement de 32 agents des services correctionnels au centre de détention de Rivière-des-Prairies, congédiement effectué par le ministre de la Sécurité publique il y a trois mois.

Ces gens sont là aujourd'hui, dans les galeries, M. le Président, et ils sont venus chercher une réponse du ministre, une réponse parce que, à leur insistance, la seule fois qu'ils ont rencontré le ministre de la Sécurité publique dans leur dossier, c'était au Conseil national du Parti québécois, lors d'une manifestation. À ce moment-là, M. le Président, le ministre de la Sécurité publique leur avait redonné espoir parce qu'il avait écouté leurs représentations, il avait promis de vérifier certains faits nouveaux et il avait aussi promis de leur revenir. Depuis, plus aucune nouvelle du ministre de la Sécurité publique. Ce matin, ils sont ici.

Est-ce que le ministre, ce matin, va avoir le courage d'aller les rencontrer, la sagesse de se montrer indulgent vis-à-vis d'eux et comprendre que ces gens-là sont prêts à accepter n'importe quelle sanction, sauf le congédiement, pour retrouver leur emploi et leur gagne-pain?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Serge Ménard

M. Ménard: C'est après une mûre réflexion, et je peux dire que c'est une décision que j'ai trouvée douloureuse à prendre, que j'ai pris la décision que je croyais devoir prendre dans l'intérêt public.

Je vois qu'ils reconnaissent eux-mêmes que les actions qu'ils ont posées étaient illégales. Pour des agents de la paix, c'est quand même quelque chose d'assez grave que d'avoir laissé tant de prisonniers avec si peu de gardiens pour démontrer que c'est dangereux quand on laisse des prisonniers avec si peu de gardiens.

J'ai eu l'occasion de rencontrer le président du syndicat à deux reprises depuis le débrayage illégal du 13 mars dernier, ainsi que certains membres de l'association. Après chacune de ces rencontres, j'ai demandé à m'entretenir avec les autorités du ministère pour vérifier la validité des informations que le syndicat avait portées à mon attention. Après vérification auprès des autorités du ministère, les informations que je possédais m'amènent toujours à conclure que les congédiements sont justifiés.

Alors, j'ai offert au syndicat d'aller en arbitrage, de choisir eux-mêmes une cause type et, ce faisant, je croyais donner un recours à certains de ces agents qui n'en avaient pas. Et j'ai pris l'engagement de respecter la décision de l'arbitre pour l'ensemble des agents, même ceux qui n'avaient pas de recours. Cette offre a été refusée. On m'a dit: Oui, mais tout à coup il y en a un qui décide que, parce que c'était illégal, le congédiement était la mesure appropriée. J'ai dit: Si vous avez peur de l'opinion d'une seule personne, je vous offre d'aller devant trois arbitres. Et j'ai pris le même engagement.

Alors, je pense que nous avons fait preuve de bonne foi. Nous avons démontré que nous étions prêts à accélérer la procédure d'arbitrage aussi. Nous leur avons proposé de choisir eux-mêmes le cas. Bon. Je me suis même engagé que je ne contesterais pas la décision qui serait rendue par l'arbitre ou les arbitres dans ces cas-là. Ils ont choisi une autre voie. Puisqu'il y a toujours différence d'information, je pense que le système judiciaire ou quasi judiciaire est le plus approprié pour déterminer quels sont exactement les faits, avec les deux versions, les deux parties en présence l'une de l'autre.

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Ménard: Alors, je pense que, sur cette question-là, s'ils croient qu'ils ont une bonne cause, plutôt que de présenter partiellement les faits aux députés comme au public en général, ils ont décidé eux-mêmes de prendre des recours devant les arbitres, alors, qu'ils y aillent. Je vais respecter la décision des arbitres.

Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata, en question principale.


Nature des informations transmises par le ministère de l'Éducation à une firme privée concernant les déclarations d'élèves handicapés ou en difficulté d'apprentissage


M. Claude Béchard

M. Béchard: M. le Président, voilà trois jours que nous avons posé des questions précises au ministre de l'Éducation concernant la transmission de renseignements personnels au sujet d'enfants handicapés ou en difficulté d'apprentissage à des firmes privées. Hier, ni ses réponses ni les documents déposés ne permettaient de répondre aux questions essentielles que se posent présentement les personnes préoccupées par le sort des informations qui circulent sur les enfants handicapés au Québec.

M. le Président, est-ce que le ministre peut enfin nous dire clairement combien d'enfants verront leur dossier transmis à une firme privée, quelles sont les données relatives à leur handicap ou à leur difficulté d'apprentissage qui ont été transmises à une firme privée, et quels sont les résultats de ces analyses?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, je ne sais pas si le député de Kamouraska-Témiscouata a eu le temps de prendre connaissance des documents, mais, s'il l'avait fait, il pourrait retrouver, entre autres dans une lettre datée du 13 novembre 1997, envoyée par la Commission d'accès à l'information du Québec au ministère de l'Éducation, la phrase suivante: «La Commission me prie de vous informer qu'elle ne s'oppose pas au traitement par une firme privée de la saisie des formulaires de déclaration des élèves. Elle vous demande cependant de faire signer un engagement à la confidentialité par chacune des personnes employées par la firme et impliquées dans le processus de saisie des données.»

Ce processus a été suivi. Donc, toute la confidentialité a été suivie. La seule chose qui n'a pas été faite, c'est le dépôt du contrat, parce qu'il n'avait pas été demandé d'être déposé, le contrat. C'est seulement en juin, après que le contrat ait été signé, en avril 1998, que cette demande a été faite dans un rapport – pas dans une lettre – qui a été fait sur un paquet de sujets par la Commission d'accès à l'information. Donc, je pense, M. le Président, qu'on n'a pas à s'inquiéter de la confidentialité des informations sur les élèves handicapés et en difficulté d'apprentissage. Toutes les procédures ont été suivies. La seule chose qui n'a pas été faite, parce que ça n'a pas été demandé, c'est le dépôt du contrat, M. le Président.

Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


M. Claude Béchard

M. Béchard: M. le Président, ma question est simple: Est-ce que le ministre de l'Éducation peut nous dire combien d'enfants verront leur dossier transmis à une firme privée et quelles données relatives à leur état de santé, leur niveau d'apprentissage ou leur niveau de handicap ont été transmises à une firme privée? La question est simple et, depuis trois jours, nous n'avons pas de réponse à cette question-là.

Le Président: M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, toutes les données sont gardées confidentielles. Il faut savoir aussi que ces données, la raison pour laquelle c'est important de les avoir au ministère, c'est parce qu'à l'intérieur des règles budgétaires une partie du financement est pour justement ces élèves. Donc, c'est important de faire le suivi pour pouvoir financer correctement l'aide à ces élèves.

Donc, je ne vois pas où le député veut en venir. Je pense qu'il serait beaucoup plus intéressant d'avoir des questions de fond sur les grands enjeux de l'éducation plutôt que de parler de détails comme il le fait depuis quelques jours, M. le Président.

Le Président: M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Permettez-moi, M. le Président, de prendre en note que, pour lui, les données sur les enfants handicapés, c'est un détail.

Le Président: Vous êtes en complémentaire, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: M. le Président, lui qui hier voulait faire toute la lumière sur le dossier, peut-il nous expliquer pourquoi, dans le contrat qu'il a déposé... Dans le contrat qu'il a déposé, il était indiqué notamment que le septième chapitre devrait contenir des exemples de formulaires, de questionnaires, les règles de saisie, à la page 52. Le document qu'il a déposé contient 51 pages, M. le Président. Pour quelqu'un qui veut faire toute la lumière, il en manque un peu.

Et, pour quelqu'un qui veut faire toute la lumière, M. le Président, je tiens à lui souligner qu'il manquait aussi une lettre du 23 avril 1999, du ministère de l'Éducation du Québec à la CAI, la lettre de la CAI en réponse à celle du 23 avril, qu'il manque le registre des communications du ministère de l'Éducation, qu'il manque la lettre par laquelle le ministère de l'Éducation transmet finalement le contrat à la CAI, qu'il manque le dossier d'analyse de l'enquêteur de la CAI. Et, puisqu'on apprend ce matin dans les journaux que la CAI lui dit qu'elle ne voulait plus voir le contrat et qu'il l'a répété encore, il manque aussi cette confirmation de la CAI.

Donc, M. le Président, pour quelqu'un qui veut faire toute la lumière dans le dossier, je trouve qu'il aime l'obscurité.

Le Président: M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, je n'ai jamais dit que les enfants qui étaient handicapés ou qui avaient des difficultés d'apprentissage étaient un détail; j'ai dit que les questions sur la confidentialité des renseignements qui sont posées actuellement sont plus un détail, puisque toutes les données, toutes les procédures ont été suivies.

M. le Président, ces enfants et la priorité pour ces enfants, c'est tellement important pour moi que, déjà, au ministère de l'Éducation, on investit 975 000 000 $ par année pour ces enfants. Dans le dernier budget, on a ajouté 13 500 000 $. On est en train de faire une nouvelle politique d'adaptation scolaire. C'est ma priorité numéro un. Et, M. le Président, le contrat a été transmis à la Commission d'accès à l'information, alors qu'elle disait ne même pas le vouloir, au cours des derniers mois. Donc, M. le Président, tout a été respecté. Et on s'occupe des enfants, pas des supposés scandales.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Brome-Missisquoi.


Transmission par le ministère de l'Éducation à une firme privée des déclarations d'élèves handicapés ou en difficulté d'apprentissage


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui. Le ministre prétend qu'il a raconté exactement ce qui est arrivé, qu'il a répondu à toutes les questions. Ce matin, un peu comme les lecteurs des journaux, là, on lit le mot «pagaille», on lit les mots «pour des raisons mystérieuses», on lit le mot «confusion» dans les articles qui sont rapportés.

(10 h 40)

Les questions sont claires, nettes et précises. Le ministre a fourni de la documentation à l'Assemblée nationale du Québec qui est incomplète, dans un premier temps. Le ministre s'est abstenu de répondre aux questions directes posées par l'opposition. Il s'est posé des questions, il s'est apporté des réponses.

Je reviens sur la question posée par mon collègue le député de Kamouraska-Témiscouata: Pourquoi le ministre n'a pas déposé la lettre du 24 mars dernier? Pourquoi le ministre refuse de déposer la lettre du 23 avril dernier? Pourquoi le registre des communications du ministère de l'Éducation n'a pas été communiqué aux membres de l'Assemblée nationale? Pourquoi la lettre par laquelle le ministère de l'Éducation transmet finalement le contrat à la CAI n'a pas été rendue publique par le ministre? Pourquoi, M. le Président, le dossier d'analyse de l'enquêteur de la Commission d'accès à l'information n'a pas été rendu public? Et également, M. le Président – au cours de la fin de semaine, le ministre aura le temps – est-ce qu'il peut déposer à l'Assemblée nationale l'ensemble de la correspondance entre sa sous-ministre en titre, Mme Champoux-Lesage, et le président de la Commission d'accès à l'information, M. Paul-André Comeau?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, je trouve un petit peu désolant qu'un parlementaire avec autant d'expérience que le leader de l'opposition donne le mauvais exemple à mon critique de l'éducation. Je répète ce que j'ai dit...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Legault: Oui, M. le Président, comme je l'ai dit tantôt, toutes les lettres qui concernaient l'affaire mentionnée, tous les échanges ont été déposés. S'il y a d'autres documents qui sont jugés pertinents, ils seront déposés, on n'a qu'à le demander, M. le Président.

Le Président: Alors, je voudrais faire la mise en garde aux députés qui n'ont pas la parole et qui lancent des accusations, parce qu'il n'y a aucun intérêt actuellement à ce que ce genre de propos soient entendus ici, à l'Assemblée nationale.

M. le député de Saint-Laurent, question principale.


Approbation d'un bail pour l'implantation d'un foyer de groupe pour jeunes en difficulté à Saint-Léonard


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: En principale, M. le Président. M. le Président, le 5 mars dernier, un dénommé Pierre Cardinal demandait au Centre jeunesse de Montréal de lui consentir un bail pour l'implantation d'un foyer de groupe pour jeunes en difficulté dans un immeuble situé à Saint-Léonard et dont il n'était pas encore propriétaire. Trois jours plus tard, le Centre jeunesse acquiesce à sa demande et transmet le dossier à la régie pour approbation d'un bail de cinq ans évalué à 250 000 $, montant qui correspond, comme par hasard, à la valeur de l'immeuble. La signature du bail est approuvée le 31 mars 1999, mais l'immeuble n'est acheté par M. Cardinal que deux mois plus tard, soit le 31 mai 1999, tout ça, M. le Président, sans appel d'offres et au mépris de la loi et des règlements. La passe, c'est que ce sont les contribuables québécois qui vont payer à M. Cardinal son immeuble, pour une somme de plus de 250 000 $. Le ministre délégué aux Services sociaux a été mis au courant de ces faits le 20 avril dernier par le député du comté, et il décidait, hier, de ne faire entreprendre qu'une inspection interne.

Compte tenu de ces faits qui sont pour le moins troublants, M. le Président, le ministre de la Sécurité publique va-t-il demander à son collègue délégué aux Services sociaux de lui transmettre immédiatement le dossier et faire entreprendre par la section des crimes économiques de la Sûreté du Québec une vraie enquête immédiatement?

Le Président: M. le ministre délégué aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse.


M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): M. le Président, je remercie le député de Saint-Laurent de sa question. D'abord, il y a un principe que je veux rappeler de façon très claire devant cette Chambre: je crois à la réadaptation puis à la réhabilitation des jeunes dans notre société. Je pense que, oui, on peut s'en sortir, et que les jeunes du Québec méritent qu'on leur accorde cette chance extraordinaire, y compris les jeunes de Saint-Léonard.

En ce qui concerne la situation qui m'a été soulevée par le député de Jeanne-Mance, qui a eu des relations extrêmement étroites avec mon cabinet et moi-même sur le dossier, je veux rappeler que j'en ai pris connaissance. Dès que le député de Jeanne-Mance m'a saisi du dossier, j'ai demandé des éclaircissements à la Régie régionale de Montréal sur le processus qui a été suivi. La Régie de Montréal m'a dit, m'a rassuré sur la rectitude du processus. Toutefois, M. le Président, dans le souci d'agir en toute transparence et parce que, moi-même, comme ministre responsable, j'ai encore des interrogations et un certain questionnement sur le dossier, j'ai maintenant décidé de faire un pas de plus et de nommer un vérificateur interne pour que je puisse avoir toutes les informations pour être en mesure d'apporter une décision finale dans le dossier, et c'est pour ça que j'entends dépêcher très rapidement sur place un vérificateur du ministère afin de nous assurer que tout a été fait dans les règles de l'art. Ça, c'est clair, net et précis. On ne déviera pas du règlement ou des règles qui sont prévues par la loi, et, dans ce sens-là, c'est pour ça que j'ai envoyé quelqu'un du ministère, pour être en mesure d'avoir toutes les informations et de prendre une décision finale dans le dossier, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Le ministre de la Sécurité publique, qui a écouté attentivement la réponse, j'en suis persuadé, du ministre délégué aux Services sociaux, se rend-il compte que, s'il y a un aveu là aussi d'un manquement à la loi, d'une part, que, d'autre part, il va comprendre qu'une inspection interne ne peut pas permettre d'interroger M. Cardinal, qui n'est pas un employé du gouvernement, ça prend absolument une enquête policière pour aller au fond des choses? Ce monsieur-là avait en poche un contrat de location sur un immeuble qui n'était même pas le sien. Voyons donc!

Le Président: M. le ministre.


M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): M. le Président, on va laisser de côté l'enflure verbale, puis les cancans, puis les rumeurs, on va travailler sur des faits, et c'est pour ça que j'ai dépêché quelqu'un du ministère, pour avoir tous les faits, toutes les informations pour être en mesure de prendre une décision finale dans le dossier.

Des voix: Bravo!

Le Président: En complémentaire, M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, qu'attend le ministre délégué pour véritablement prendre ses responsabilités dans ce dossier et donc de faire annuler le permis qui a été octroyé à M. Cardinal et d'annuler également le bail, puisqu'il en a le pouvoir, d'annuler le bail qui fait en sorte que M. Cardinal se retrouve avec un immeuble qui sera payé par les fonds publics des contribuables?


M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): Même réponse, M. le Président.

Le Président: M. le député de...

M. Williams: En complémentaire.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Nelligan.


M. Russell Williams

M. Williams: Comment se fait-il que, hier, la ministre de la Santé a dit qu'elle n'avait pas d'argent pour les services aux jeunes en difficulté et qu'aujourd'hui on apprend qu'il y a de l'argent pour les flignes-flagnes et la fraude administrative?

Des voix: Ah! Ah!

M. Williams: Est-ce que la ministre...

Le Président: Je vous rappelle que...

Des voix: ...

Le Président: Alors, M. le député de Nelligan, l'immunité parlementaire, si c'est un principe sacré, la présomption d'innocence, dans notre société, en est un autre aussi. Et je ne crois pas qu'à cet égard, jusqu'à maintenant, on puisse permettre à un membre de l'Assemblée, même sous le sceau de l'immunité parlementaire, d'accuser un citoyen de fraude sans qu'on ait des preuves. Il y a un questionnement légitime qui a été soulevé par deux de vos collèges, il y a eu des réponses qui ont été données, elles peuvent satisfaire ou non, mais je vous invite finalement, à ce moment-ci, à faire attention aux propos. N'importe quel citoyen du Québec, même s'il ne jouit pas, parce qu'il n'est pas député, de l'immunité parlementaire, a le droit à la présomption d'innocence. M. le député de Nelligan.

(10 h 50)

M. Williams: Est-ce que le ministre délégué va utiliser son pouvoir afin d'annuler ce fligne-flagne pour assurer que l'argent est utilisé pour les jeunes et pas pour les spéculateurs?

Le Président: M. le ministre.


M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): M. le Président, je pense qu'on ne rend pas service à la population en transformant la période de questions en un tribunal d'inquisition. M. le Président, je l'ai dit, j'ai questionné dans ce dossier et j'ai décidé, à la lumière de la situation du dossier qui m'a été déposé, d'envoyer quelqu'un sur place pour faire le point sur le dossier en vue d'avoir toutes les informations, pour prendre une décision finale dans le dossier de Saint-Léonard.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup, en question principale.


Représentation des jeunes au sein de la fonction publique


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Au cours de la session, le gouvernement a pris deux initiatives concernant la fonction publique: d'abord, un projet de loi pour l'intégration des minorités dans la fonction publique; et, cette semaine, un nouveau cadre de gestion de la fonction publique.

Malgré qu'on soit, selon les dires mêmes du premier ministre au début de la session, dans le mandat de la jeunesse, les seuls oubliés de ce printemps dans la fonction publique sont effectivement les jeunes. Je l'ai dit, je le répète aujourd'hui, plusieurs le pensent, la fonction publique québécoise est vieillissante, jusqu'à un certain point, sclérosée. Les situations...

Des voix: ...

Le Président: Est-ce que nous pouvons permettre à notre collègue, comme c'est son droit, de poser sa question? Merci. M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Et l'embauche chez les jeunes, le peu qui se fait, ça continue à être des postes d'occasionnels, plus la nouvelle formule de stages pour avoir des jeunes dans la fonction publique à moitié payés et de façon temporaire.

Ma question au premier ministre est bien simple: Est-ce qu'il reconnaît que, à l'intérieur de la présente session qui s'achève d'ici quelques jours, les oubliés en matière de réforme de la fonction publique ont été les jeunes? Est-ce qu'il peut nous dire... Est-ce qu'il va mandater le président du Conseil du trésor, à l'intérieur des négociations qui s'en viennent, pour corriger cette situation-là?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, comme on le sait, au cours des quatre dernières années, dans l'objectif d'atteindre le déficit zéro, il n'y a malheureusement pas eu beaucoup d'embauche dans la fonction publique. Donc, c'était difficile d'augmenter le nombre de jeunes. Malgré tout, on a eu, l'an passé, des stages pour 200 personnes. On va répéter, cet été, les stages pour 200 étudiants. Aussi, mon collègue président du Conseil du trésor a annoncé qu'il y aura bientôt 1 000 emplois, dont 800 avec des critères d'embauche minimums, donc qui vont permettre à tous les jeunes d'intégrer la fonction publique. Bien sûr, M. le Président, nous allons examiner les conclusions du rapport du Conseil permanent de la jeunesse. Mais je dirais, M. le Président, en terminant, que ce n'est sûrement pas avec la promesse du chef de l'ADQ en campagne électorale, de réduire de 25 % le personnel de la fonction publique, qu'on va augmenter le nombre de jeunes dans la fonction publique.

Le Président: M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Le ministre, en lui rappelant que le programme de l'ADQ sera jugé en temps et lieu par la population, est-ce que lui aujourd'hui...

Des voix: ...

Le Président: M. le député.

M. Dumont: Est-ce que lui, aujourd'hui, qui est élu, qui est ministre et qui est responsable des engagements de son gouvernement en cette matière-là, peut au moins s'engager à ce que, à l'intérieur du Sommet sur la jeunesse, un chantier important soit créé, un chantier important soit dévolu à cette question de l'intégration d'un plus grand nombre de jeunes puis du rajeunissement de la fonction publique, puis que les personnes commencent dès maintenant à travailler sur des propositions concrètes, avec un engagement du gouvernement de leur donner suite?

Le Président: M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, comme je le disais tantôt, malheureusement, dans la fonction publique, on n'a pas eu beaucoup d'embauche au cours des dernières années. Cependant, dans les réseaux, on a eu beaucoup d'embauche. Et je préciserais, M. le Président, que, entre autres dans l'éducation, on a eu 9 000 nouveaux enseignants, qui sont surtout des jeunes. Dans la santé, on en a eu plus de 5 000 qui ont été embauchés. Donc, M. le Président, à l'intérieur des marges de manoeuvre qui sont permises au gouvernement, oui, ça va être une priorité d'embaucher des jeunes, parce qu'il faut faire plus de place aux jeunes dans notre société. C'est d'ailleurs un des sujets importants qu'on va discuter lors de notre prochain Sommet du Québec et de la jeunesse.

Le Président: Mme la députée de Bonaventure, en question principale.


Commentaires du Barreau concernant le projet de loi n° 42 sur la construction par Hydro-Québec d'équipements et d'infrastructures


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Dans le dossier Hertel–des Cantons, l'opposition officielle décrie depuis plusieurs semaines le caractère abusif du projet de loi n° 42. Le 9 juin dernier, le ministre des Ressources naturelles a reçu un avis du Barreau du Québec, un avis, M. le Président, très sévère à l'endroit du gouvernement et qui confirme notre position. Et vous me permettrez, M. le Président, de lire quelques extraits de cet avis. Le Barreau nous dit, premièrement, que «les dispositions du projet de loi n° 42 font perdre des recours légitimes à des citoyens qui voudraient faire valoir leurs droits à l'encontre de travaux ou d'opérations réalisés en contravention de la loi». Et le Barreau d'ajouter, M. le Président, que «cette législation soulève également des inquiétudes en regard du principe de l'égalité devant la loi». Et, en conclusion, M. le Président: «Le Barreau du Québec s'inquiète de cette façon de légiférer.» Vous me permettrez, M. le Président, de demander le consentement de cette Chambre pour déposer l'avis en question.


Document déposé

Le Président: Il y a consentement, Mme la députée.

Mme Normandeau: Merci. Alors, ma question au ministre des Ressources naturelles, M. le Président: En vertu de la teneur de l'avis formulé par le Barreau du Québec, est-ce que le ministre va accepter l'offre formulée par le Barreau afin de procéder à la révision de la loi n° 42 pour en faire un projet de loi qui respectera les principes d'égalité et de légalité?

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, effectivement, j'ai reçu une lettre du nouveau bâtonnier, que je félicite d'ailleurs, il vient d'entrer en fonction depuis quelques jours. Je lui souhaite un bon mandat. Il m'a écrit effectivement sur le projet de loi n° 42. J'ai bien l'intention d'ailleurs de lui répondre de façon très substantielle. Mais je rappelle, M. le Président, la réalité et l'alternative devant laquelle le gouvernement se trouvait: ou nous prenions les moyens législatifs pour sécuriser, sur le plan juridique, des infrastructures déjà en place, déjà construites, ou alors on laissait les choses telles qu'elles étaient et, à ce moment-là, on était placés devant un risque, à tout moment, de demande, devant les tribunaux, de démolition et de démantèlement de ces infrastructures. Le choix du gouvernement a été très clair, ça a été de présenter le projet de loi n° 42 justement et... Écoutez, on a des exemples dans le passé, entre autres, un projet de loi de 1990 du gouvernement libéral d'alors qui, pour construire un tronçon de l'autoroute 30, a soustrait ce projet à toutes les lois, la Loi sur la qualité de l'environnement, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur la protection du territoire agricole, rétroactivement. Alors, on a de beaux exemples, et ces exemples nous ont inspirés, M. le Président.

Le Président: Alors, la période de questions et de réponses orales étant maintenant terminée, nous allons passer aux votes reportés.

M. Ouimet: M. le Président...

Le Président: M. le député de Marquette, sur une question de règlement.

M. Ouimet: Sur une question de directive.

(11 heures)

Le Président: Oui, M. le député de Marquette.


Question de règlement sur la répartition des questions entre l'opposition officielle et le député indépendant


M. François Ouimet

M. Ouimet: Question de directive, M. le Président. Lors de la période des questions, le député de Saint-Laurent a adressé une question au ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux. Nous avons eu trois questions additionnelles, je m'apprêtais à me lever pour quatrième et dernière question additionnelle. M. le Président...

Le Président: J'aimerais entendre, si vous le voulez bien, l'intervention du député de Marquette. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, non seulement je m'apprêtais mais je me suis levé debout et je suis resté debout pour vous dire que j'avais une question additionnelle, et vous avez reconnu le député de Rivière-du-Loup pour la troisième fois de la semaine, me signale-t-on.

J'aimerais savoir, M. le Président, comment vous interprétez les droits de parole des membres de l'opposition lorsque nous vous signalons non pas une question principale mais une question additionnelle extrêmement importante. Parce qu'on se retrouve devant une situation où, malgré une inspection commandée par le ministre, la personne va quand même empocher...

Des voix: Bon!

Le Président: Je voudrais, à ce moment-ci, M. le député de Marquette, entendre la question de règlement mais je ne voudrais pas que cette question se transforme en la question complémentaire que vous n'avez pu poser effectivement.

M. Ouimet: C'était juste pour vous indiquer, M. le Président, que ce n'était pas une question principale, c'était une question additionnelle adressée au ministre pour savoir comment il se fait que la personne va se retrouver...

Des voix: Oh!


Décision du président

Le Président: Je vous rappelle d'abord les dispositions de l'article 78 de notre règlement en regard des questions complémentaires. Il est indiqué, à la fin de cet article: «Il appartient au président d'en déterminer le nombre.» Et le critère que la présidence utilise pour déterminer le nombre de questions complémentaires, c'est entre autres l'équilibre qu'il doit observer entre les membres de l'Assemblée qui lui signalent qu'ils souhaitent poser des questions, d'une part, et, deuxièmement, en regard aussi de l'équilibre des forces en présence. Évidemment, la période de questions est...

Je peux vous indiquer les statistiques depuis le début de notre session parlementaire, le temps occupé par l'initiative prise par les députés de l'opposition officielle, selon la tradition: 93,6 % du temps de la période de questions et de réponses orales est occupé par des échanges initiés par l'opposition officielle, ce qui correspond...

Une voix: ...

Le Président: Oui, oui, c'est ça. Ce n'est pas uniquement les questions, c'est également les réponses. Mais les échanges initiés par... Et, dans le cas du député indépendant, c'est 5,2 %. Alors, je crois qu'en l'occurrence... J'ai entendu le leader adjoint de l'opposition officielle indiquer tantôt qu'il y a eu trois questions. Je signale qu'il y a eu deux questions principales accordées au député de Rivière-du-Loup, cette semaine, et nous sommes toujours en période de session intensive.

Et il y a eu, à la première occasion, quand le député de Rivière-du-Loup s'est vu accorder un droit de parole à la période de questions et des réponses... c'était en question complémentaire, pour la troisième et quatrième question complémentaire d'une question posée par un député de l'opposition officielle.

Alors, voilà. Je crois que je ne souhaite pas aller plus dans le détail des règles qui sont suivies par la présidence.

Nous allons...

Question. Rapidement, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Toujours sur la question de directive, vous venez vous-même d'admettre que vous aviez permis une troisième et une quatrième question complémentaire. Vous avez permis les deux dernières, lorsqu'il s'agissait du député de Rivière-du-Loup, sur une question que nous avons soulevée. Vous vous êtes arrêté à trois questions complémentaires. J'aimerais connaître, M. le Président, les règles, parce que je croyais que la pratique établie, que vous avez vous-même suivie au cours des trois ou quatre dernière années, c'était toujours de permettre jusqu'à quatre questions complémentaires et d'en arrêter là.

Le Président: C'est-à-dire que je n'ai pas fait de statistiques, mais je peux vous dire que je ne me suis jamais donné comme règle d'accorder jusqu'à quatre questions complémentaires, d'une part. Deuxièmement, je vous ai indiqué que le critère que la présidence utilise, c'est l'équilibre. En l'occurrence, quand vous vous êtes levé pour poser une nouvelle question complémentaire, le député de Rivière-du-Loup et la députée de Bonaventure s'étaient tous les deux levés, et il restait un temps qui, je l'espérais, permettrait aux deux députés de poser des questions, ce qui a été possible. Autrement, ça n'aurait pas été possible.

Je crois qu'en l'occurrence il appartient à la présidence... Et c'est l'esprit du règlement. Si on voulait que ce soit très mécanique, le règlement prévoirait toute une série de règles et on n'aurait pas, à la limite, besoin d'un président d'Assemblée, on pourrait simplement avoir une machine électronique qui calculerait le temps.


Votes reportés


Adoption du principe du projet de loi n° 16

Alors, nous allons passer au vote, s'il vous plaît, maintenant. Tel qu'annoncé précédemment, nous allons voter sur la motion de Mme la ministre de la Justice qui propose que le principe du projet de loi n° 16, Loi modifiant la Loi sur la division territoriale et la Loi sur les tribunaux judiciaires, soit adopté.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever d'abord.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Baril (Arthabaska), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), Mme Papineau (Prévost), M. Paquin (Saint-Jean), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Désilets (Maskinongé), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Président: Que le députés contre cette motion veuillent se lever maintenant.

Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke)...

Des voix: Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Cholette (Hull), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:64

Contre:36

Abstentions:0

(11 h 10)

Le Président: Alors, la motion de Mme la ministre de la Justice est adoptée et, en conséquence, le principe du projet de loi n° 16, Loi modifiant la Loi sur la division territoriale et la Loi sur les tribunaux judiciaires, est adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des institutions

M. Brassard: Alors, M. le Président, je voudrais faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des institutions pour étude détaillée.

Le Président: La motion est adoptée? Très bien.


Motions sans préavis

Aux motions sans préavis, maintenant, M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


Féliciter nos représentants au 35e Mondial des métiers et techniques

M. Legault: Oui. M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec reconnaisse la dextérité, l'habileté, la patience et la persévérance de jeunes qui, grâce à leur travail exceptionnel, méritent l'honneur de nous représenter au 35e Mondial des métiers et techniques; et

«Que l'Assemblée nationale félicite chacune et chacun des participants du Québec – et on en a beaucoup ici aujourd'hui dans les tribunes – à ce grand concours international.»

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, nous devons comprendre qu'il y a consentement pour débattre de la motion. M. le ministre, d'abord.


M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, en fin de semaine dernière, lors des cérémonies de clôture des Olympiades canadiennes de la formation professionnelle et technique, organisées à Kitchener, en Ontario, on a dévoilé les noms des 40 candidats canadiens qui représenteront le Canada lors du grand Mondial des métiers qui aura lieu au Stade olympique, du 11 au 14 novembre prochain.

M. le Président, je me permets de souligner que, parmi les 40 candidats retenus, on en retrouve 10 qui proviennent de l'Alberta, deux qui proviennent de la Nouvelle-Écosse, deux qui proviennent de la Colombie-Britannique, un qui provient de l'Ontario et 25, M. le Président, 25 qui proviennent du Québec...

Des voix: Bravo!

M. Legault: ...donc 25 sur 40, donc 62 % des participants qui proviennent du Québec. Je pense qu'on peut être fier de ce qui se fait au Québec en formation professionnelle et technique et qu'on peut être fier des jeunes. Et je tiens à les saluer, encore une fois. Bonne chance, au Mondial, à l'automne qui vient! Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le ministre de l'Éducation. Je vais céder maintenant la parole... Il y en a beaucoup qui sont debout, là.

M. Béchard: Non, non, c'est moi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vais céder maintenant la parole au député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: J'étais probablement le plus debout parmi ceux qui étaient debout. M. le Président, à mon tour de saluer les participants qui représenteront le Canada et le Québec au 35e Mondial des métiers et leur souhaiter la meilleure des chances. Je pense qu'il faut se rappeler que les premières épreuves, les Olympiades de formation professionnelle au Québec, comme telles, ont été mises de l'avant pour la première fois en 1992 par une série de partenaires, dont l'Alliance des manufacturiers du Québec, l'Association des entrepreneurs en construction, le Club automobile, Emploi et Immigration Canada, Hydro-Québec et le ministère de l'Éducation. Et vous me permettrez de saluer la ministre de l'Éducation de l'époque, qui avait participé à la mise en place de cette première Olympiade, Mme Lucienne Robillard.

On peut saluer non seulement, je pense, ceux et celles qui participeront à ces Olympiades mondiales des métiers au mois de novembre prochain, à Montréal, mais, moi, je tiens, M. le Président, à saluer le choix que ces gens-là, ces jeunes-là ont fait, comme choix de carrière, de choisir la carrière professionnelle et technique.

Et je vous dirai qu'au cours des derniers mois j'ai eu l'occasion de voir de près ces gens-là travailler, m'étant fait construire une maison, et je vous dirai qu'on est toujours surpris de voir le talent de ces gens-là et la passion qu'ils exercent chacun dans leur métier.

Je pense qu'il y a beaucoup de gens, présentement, au Québec qui exercent ces métiers-là, de jeunes qui choisissent ces métiers-là, qui peut-être ne seront pas au Grand Mondial du mois de novembre prochain, mais je tiens à les saluer, ces gens-là, à saluer leur travail et à leur dire combien leur travail est important et il est apprécié dans notre société, où, souvent, on oublie ces gens-là. Et on parle toujours de grandes industries du savoir, mais ces gens-là sont la base comme telle de notre société, et ces métiers-là, ce sont les métiers qui ont bâti le Québec tel que nous le connaissons, qui ont bâti nos infrastructures.

Et il faut aussi, je pense, M. le Président, saluer le travail de leurs enseignants et de leurs enseignantes et voir à quel point, avec quel niveau de professionnalisme ces gens-là exercent. Je pense que, s'il y a aujourd'hui 62 % de la délégation canadienne qui vient du Québec, c'est grâce au talent des jeunes, mais c'est aussi grâce au talent de leurs professeurs, de leurs enseignants et enseignantes.

Donc, bonne chance à tous. Et espérons que le même pourcentage de gains et de victoires au grand Mondial de novembre prochain se reflète pour le Québec et pour le Canada, mais, cette fois, avec les concurrents du monde entier. Félicitations à tous. Bonne chance.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le débat étant maintenant terminé, est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Alors, M. le leader du gouvernement.


Procéder à une consultation générale sur la réduction de l'impôt des particuliers

M. Brassard: M. le Président, je voudrais solliciter le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que la commission des finances publiques procède à une consultation générale et qu'elle tienne des auditions publiques sur la réduction de l'impôt des particuliers, en prenant notamment comme outil de référence le document de consultation intitulé Réduction de l'impôt des particuliers qui a été déposé par le ministre des Finances lors du Discours sur le budget 1999-2000, à compter du 12 octobre 1999;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 15 septembre 1999; et

«Que le ministre d'État à l'Économie et aux Finances soit membre de ladite commission pour la durée de ce mandat.»


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de cette motion? Consentement. Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, pour ce qui des avis touchant les travaux des commissions, M. le Président...

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Simplement reconnaître les autres motions, M. le Président. Il n'y a pas seulement qu'un côté, là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement du Québec la tenue d'une consultation publique élargie pour entendre les chômeurs, les personnes assistées sociales, les chercheurs d'emplois, les groupes communautaires et les entrepreneurs des différentes régions du Québec sur la gestion et l'administration d'Emploi-Québec.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de cette motion? Pas de consentement.

Alors, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin d'adopter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale, à défaut d'une baisse d'impôts immédiate, demande au gouvernement de s'abstenir d'imposer toute nouvelle forme de tarif, taxe ou impôt, de façon directe ou indirecte, ou d'augmenter les taux des taxes, tarifs ou impôt existants.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de cette motion? Pas de consentement.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous allons passer maintenant à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Merci, M. le Président. Alors, j'avise cette Assemblée, d'abord, que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi de police, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 42, Loi concernant la construction par Hydro-Québec d'infrastructures et d'équipements par suite de la tempête de verglas survenue du 5 au 9 janvier 1998, aujourd'hui, de 11 h 30 jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission des finances publiques entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 213, Loi modifiant la Loi concernant le Mouvement des caisses Desjardins, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Et, une fois que l'étude détaillée de ce projet de loi d'intérêt privé sera complétée, la commission des finances publiques entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 217, Loi concernant Club de Curling et Social de Magog, Limité, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 28, Loi sur les sages-femmes, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

(11 h 20)

Que la commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre: projet de loi n° 30, Loi modifiant la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités et d'autres dispositions législatives; projet de loi n° 55, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, aujourd'hui, de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif.

Que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi de police, le lundi 14 juin 1999, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Et que, en dérogation aux règles de fonctionnement de l'Assemblée nationale quant au délai de convocation des intéressés dans le cadre de l'étude d'un projet de loi d'intérêt privé, la commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 218, Loi concernant Ville de Chapais – que le leader de l'opposition connaît bien – le mardi 15 juin 1999, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau. En vous signalant que, concernant le projet de loi n° 218 concernant Ville de Chapais, il n'y a aucun intéressé d'inscrit.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, pour ma part, je vous avise que la commission de l'aménagement du territoire...

M. Brassard: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader.

M. Brassard: ...j'ai formellement demandé un consentement pour dérogation. La dernière.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que le consentement est accordé?

M. Paradis: Oui. Ça touche le projet de loi n° 218, Chapais, M. le Président. On nous informe qu'il n'y a aucun intéressé qui s'est manifesté pour le moment. Mais, compte tenu que les délais sont raccourcis, est-ce que soit le leader soit le député représentant la région peut assurer les membres de cette Assemblée qu'il n'y a pas de citoyens qui vont être privés, s'ils le manifestent, de leur droit de se faire entendre et que tous les moyens publicitaires vont être pris pour que la population soit clairement avisée?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: La réponse est oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, est-ce qu'il y a consentement pour qu'on déroge aux règles de fonctionnement? Consentement.

Alors, je poursuis en vous avisant que la commission de l'aménagement du territoire se réunira en séance de travail aujourd'hui, vendredi le 11 juin 1999, vers 13 heures et pour une durée approximative d'une heure et demie, à la salle 3.07 de l'édifice Honoré-Mercier. L'objet de cette séance est de discuter de l'organisation des travaux de la commission.

Alors, nous passons maintenant à la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.


Affaires du jour

Comme nous terminons maintenant les affaires courantes, nous abordons les affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, on commencerait par l'article 26, M. le Président.


Projet de loi n° 4


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 26 de notre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 4, Loi sur Immobilière SHQ. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du rapport de la commission de l'aménagement?

Alors, nous cédons la parole au critique officiel de l'opposition en matière d'affaires municipales, M. le député de Laurier-Dorion. M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. J'étais certain que la ministre et les députés ministériels allaient intervenir sur cet important projet de loi qui va être pris en considération par l'Assemblée nationale, ici, après son étude approfondie en commission parlementaire. Je dis ça avec un petit peu de sourire en coin parce que, effectivement, c'est un projet de loi qui n'a pas suscité d'énormes passions et de débats. Il s'agit d'un projet de loi qui donne suite à quelques recommandations, je pense bien, du Vérificateur général quant à la comptabilité gouvernementale. Ça permet de créer une société à part, c'est un genre de coquille administrative qui va administrer ou en tout cas être propriétaire des immeubles de la SHQ pour créer une entité distincte de la SHQ quant aux immeubles qui sont administrés actuellement par la SHQ en vue de loger les personnes sur le territoire du Québec à des prix modiques, communément appelés des HLM.

Alors, on avait indiqué au gouvernement, dès le départ, que ça serait un projet de loi qui trouverait rapidement notre assentiment au niveau de l'adoption du principe. On a pu, effectivement, débattre ici, en cette Chambre, moi et la ministre, on a échangé, on s'est compris pour dire qu'il y avait des choses qu'il fallait examiner un peu plus loin au niveau de la commission parlementaire parce qu'il y avait effectivement beaucoup de technicalités là-dedans et qu'on n'avait pas la compréhension technique d'un certain nombre de choses. Ce qu'on a fait par la suite, on a regardé ça en commission parlementaire. On a eu effectivement, de la part de la SHQ, tous les éclaircissements nécessaires, M. le Président.

Alors, suite à cette étude article par article, nous avons pu donc comprendre toutes les questions qu'on avait, et c'est pour ça, M. le Président, qu'il me fait plaisir aujourd'hui de recevoir ce rapport de la commission à l'Assemblée nationale. Et je suis certain qu'on pourra, dans la prochaine étape, qui sera son adoption en troisième lecture, poursuivre cette voie sur laquelle on s'est engagé afin de créer cette entité nouvelle. Je pense que, pour l'essentiel, ça complète les remarques que j'avais à faire, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laurier-Dorion et critique officiel de l'opposition en matière d'affaires municipales. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du rapport de la commission?


Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission de l'aménagement du territoire, portant sur le projet de loi n° 4, Loi sur Immobilière SHQ, est-il adopté? Adopté.

M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article 33 de notre feuilleton, s'il vous plaît.


Projet de loi n° 23


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 33 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal.

Y a-t-il des interventions sur l'adoption du rapport de la commission de l'aménagement du territoire? Alors, M. le député de Laurier-Dorion et critique officiel de l'opposition en matière d'affaires municipales. M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Voilà une autre de ces occasions que nous avons, M. le Président, de dire combien on est heureux de pouvoir accueillir le rapport d'une commission, qui a fait l'objet d'études minutieuses, je dirais, détaillées, approfondies, et qui a résulté en des amendements qui ont amélioré le projet de loi, des amendements qui sont issus d'un certain nombre de questionnements qu'on avait présentés à la ministre et aux intervenants qui demandaient les pouvoirs qui sont octroyés à la Communauté urbaine de Montréal dans ce projet de loi.

Permettez-moi, rapidement, M. le Président, de faire un bref rappel sur la nature de ce projet de loi. C'est un projet de loi qui vise à assainir et à mettre de l'ordre dans une industrie sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal, c'est-à-dire l'industrie du remorquage. On se rappelle qu'il y a eu, au cours des dernières années, des incidents troublants quant à la façon dont cette industrie se développait, de façon très anarchique, parce que finalement il n'y avait aucune règle, aucun permis nécessaire et n'importe qui, avec n'importe quel genre d'équipement, s'improvisait un remorqueur. Et il y avait souvent, à cause du fait que la technologie le permet maintenant, de suivre sur les ondes ce qui se passe en discussion entre la police, par exemple, et des gens qui rapportent des accidents, le déclenchement d'un certain nombre de courses folles, comme on les a appelées dans cette commission, entre des remorqueurs compétiteurs pour arriver les premiers sur la scène de l'accident afin d'accrocher la voiture puis de l'amener au garage, M. le Président.

Et, au garage, souvent, on s'est fait dire, lors de cette étude en commission, qu'il y avait aussi une question de collusion possible entre les remorqueurs qui s'improvisaient comme ça... arrivés premiers sur la scène de l'accident, ils apportaient la voiture à un garage avec lequel ils avaient un arrangement, entre guillemets, afin de leur permettre de profiter, sans guillemets, des réparations qui, des fois, étaient gonflées, profitant aussi du fait que le conducteur était souvent en état de choc ou, en tout cas, ne se trouvait pas tout à fait capable de bien réfléchir à ce qu'il devrait faire pour mieux protéger son investissement que représente la voiture, etc.

(11 h 30)

Alors, là, ce qu'on a fait, M. le Président, on a créé une situation où on a donné le pouvoir de réglementation de cette industrie à la Communauté urbaine de Montréal. Plus précisément, ça va être le Bureau du taxi de la Communauté urbaine de Montréal qui va avoir la responsabilité de gérer cette question. Et on va établir, on a établi un certain nombre de critères sur les compétences nécessaires, les connaissances nécessaires, les équipements nécessaires, etc., avant qu'un permis soit octroyé. Donc, la possibilité maintenant de faire du remorquage devient dépendante de la détention d'un permis, qui, elle, devient dépendante d'un certain nombre de règles, sur les tarifs entre autres, sur un code d'éthique par exemple, que les gens doivent suivre, sur les relations avec les clients.

Mais, ce faisant, M. le Président, il y avait initialement une demande aussi, qui émanait de la Communauté urbaine de Montréal, de pouvoir octroyer sur des zones des contrats exclusifs de remorquage afin de pouvoir dégager des situations, ou des accidentés, ou des voitures en panne qui obstruaient la circulation et/ou créaient un danger à la circulation et au public par ce fait même, M. le Président. Et notre crainte était de voir la création de zones exclusives de remorquage, M. le Président, où, finalement, on mettrait un «impediment» à la concurrence, le droit de commerce en quelque sorte des gens qui voudraient faire du remorquage comme façon de gagner leur pain et, de l'autre côté, où on mettrait les conducteurs dans des situations où ils perdraient des droits de libre choix, M. le Président.

Alors, on a su trouver, je pense, un bon équilibre entre cette nécessité de protéger le bien public par la capacité de rapidement donner à un policier l'autorité de désigner un remorqueur qui va venir enlever un véhicule qui obstrue la circulation ou présente un danger au public et de le faire rapidement, mais on a balisé ça en s'assurant que ces personnes-là n'auront pas le droit exclusif, une fois cet enlèvement de la scène de l'accident et de l'obstruction fait... d'avoir la possibilité exclusive aussi d'être celui qui va remorquer la voiture à un garage de son choix.

Parce qu'on sait fort bien – et vous me suivez attentivement, M. le Président, alors je suis convaincu que vous connaissez la situation très bien – qu'il y a plusieurs d'entre nous et de nos concitoyens qui sont, par exemple, abonnés au CAA, comme club de remorquage, ou qui ont des garanties avec des concessionnaires pour ce genre de situation. Et on ne voudrait pas les mettre dans une situation où, finalement, on forcerait ces gens-là ou on créerait l'impression dans leur esprit qu'ils étaient forcés de prendre le remorqueur qui arriverait, suite à l'appel du policier, jusqu'au garage.

On comprend la nécessité de dégager, mais, une fois que ce dégagement est fait, le conducteur devrait être libre de choisir qui il veut qui serait celui qui le remorquerait jusqu'au garage, M. le Président. Et ça se pourrait qu'à ce moment-là il dise: Moi, maintenant que je n'obstrue plus la circulation, maintenant que je ne représente plus un danger pour le public, je suis à côté, sur le coin de la rue, appelez le CAA ou appelez mon concessionnaire, afin de ne plus avoir à payer la suite et de se retrouver pénalisé par ce fait même.

Alors, ces points ont été soulevés en commission parlementaire. Après plusieurs heures de discussion et débat, parce que je dois dire qu'au début, ce n'était pas facile de faire comprendre les inquiétudes qu'on avait aux députés ministériels, puis à la ministre en particulier, mais, à force d'insister, M. le Président, puis à force de le faire avec des arguments qui mettaient en lumière cette situation, et à force de s'asseoir aussi avec les gens de la CUM qui demandaient ces nouveaux pouvoirs de réglementation sur cette industrie, et à force de s'entendre tous qu'il fallait absolument assainir cette industrie afin d'avoir la certitude que les consommateurs ne seraient pas... comment puis-je dire, ne se retrouveraient pas pénalisés parce qu'il y aurait des gens complètement sans scrupule qui opéreraient dans le domaine, et, du même coup, d'avoir aussi rapidement la possibilité de dégager les voies publiques de circulation...

Parce qu'on sait combien c'est important, quand on arrive, par exemple, le matin pour aller au travail puis il y a quelqu'un qui bloque la route, bien il faut être capable rapidement de dégager ça, sur le boulevard René-Lévesque par exemple, ou sur Papineau, ou je pourrais prendre toutes les rues de la ville de Montréal par exemple, M. le Président, pour vous indiquer combien c'est important, sur chaque artère, d'avoir cette possibilité-là. Alors, on a voulu le faire.

On a réussi finalement à faire cet équilibre en convainquant la ministre, la CUM et tous les concernés d'adopter à l'unanimité des amendements que nous avons proposés, faisant la démonstration ainsi combien l'opposition est constructive dans son approche et combien le gouvernement devrait se mettre à l'écoute de l'opposition, parce que nous avons plein d'idées, M. le Président. Et d'ailleurs une plus grande partie de nos concitoyens ont reconnu notre capacité de présenter des idées meilleures, lors des dernières élections, parce que nous avons eu plus de votes que le parti gouvernemental. Et je suis convaincu que – comme je vois ici mon collègue qui est responsable du dossier de la réforme électorale – nous allons pouvoir ensemble cheminer pour qu'on ait une véritable démocratie, ici, qui reflète, à cette Assemblée, le résultat fondamentalement qu'on retrouve au niveau de la population. Et, comme on est sur la question de la démocratie, M. le Président, plus tard aujourd'hui nous aurons aussi l'occasion de discuter d'un autre niveau de démocratie, la démocratie municipale.

Mais je reviens au projet de loi n° 23, M. le Président, et je m'arrêterai là pour remercier tous ceux qui ont participé avec nous à ce travail de bonification du projet de loi, et en particulier la ministre, qui, après avoir écouté attentivement, même si elle résistait au départ, a finalement dit: C'est raisonnable, non seulement c'est raisonnable, c'est bon, ce que fait l'opposition, et elle s'est jointe à nous pour s'assurer que ce projet de loi soit adopté. Et c'est pour cette raison d'ailleurs que j'interviens, pour souligner combien je suis heureux et content de recevoir ce rapport de la commission, M. le Président, et on verra les suites. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Alors, M. le député d'Anjou, sur le même sujet. M. le député.


M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir à ce stade-ci concernant le projet de loi n° 23. Depuis que je suis ici, à l'Assemblée nationale, il y a de nombreux projets de loi qui sont présentés. Mais ce projet de loi là, je dois vous dire, il y a quelque chose de particulier là-dedans parce que ça reflète particulièrement bien une situation que j'ai vécue, moi, il y a quelques années, au niveau du remorquage. J'avais eu un accident. Ça fait que c'est pour ça que, quand j'ai vu, d'une part, le projet de loi mais, également, les modifications qui ont été apportées, les propositions qui ont été faites par l'opposition, je me suis dit que c'était peut-être une belle occasion d'intervenir, à ce niveau-là, je le rappelle, sur le projet de loi n° 23 qui vise ni plus ni moins qu'à permettre à la Communauté urbaine de Montréal de réglementer les activités de remorquage sur son territoire.

On l'a mentionné, jusqu'à présent il y a une absence de réglementation, ce qui fait qu'on se retrouve souvent avec des situations où les remorqueurs se précipitent, mettant bien souvent la vie des gens en danger, sur les lieux des accidents. Et à une certaine époque il y avait même eu – je pense que ça avait été documenté – des accidents qui avaient été créés de toutes parts, justement, visant à créer une situation de remorquage.

Je vous mentionnais tout à l'heure, M. le Président, que j'avais pu moi-même goûter à cette compétition féroce des remorqueurs. Il y a quelques années, j'ai eu le malheur d'être victime, d'être impliqué dans un accident de la route, sur les lieux d'un accident. Il y avait un accident qui s'était déjà déroulé, donc grande chance pour moi, il y avait deux remorqueurs. Mon auto ne s'était même pas encore immobilisée que j'avais déjà les deux remorqueurs sur moi. Ça fait qu'à ce moment-là non seulement j'ai eu beaucoup d'offres de service pour être enlevé des lieux publics, mais également c'était la compétition pour savoir où est-ce qu'on allait amener ma voiture. J'ai eu beau m'obstiner pour l'amener chez le concessionnaire, on voulait m'amener à gauche puis à droite.

(11 h 40)

Je pense que c'est un peu l'idée du projet de loi et c'est la valeur des arguments qui ont été amenés par l'opposition. Je suis bien heureux de voir que la ministre et que le gouvernement ont prêté une oreille attentive à ça. On me demande souvent, dans mon comté: Est-ce que c'est tout le temps comme ce qu'on voit à la télé? On fait souvent référence à la période de questions où, des fois, les échanges sont musclés. Mais ce que je mentionne aux gens, c'est qu'il arrive, dans bon nombre de cas, que et le gouvernement et l'opposition travaillent ensemble pour améliorer le bien-être des citoyens.

Puis je pense que c'est important qu'à titre de député on puisse intervenir – puis c'est pour ça que je le fais aujourd'hui – pour justement parler en faveur d'un projet de loi, pour enlever justement cette conception qui fait que souvent les gens ont l'impression qu'on est à Québec seulement pour s'opposer. On a apporté des solutions constructives, la ministre a écouté, les différents intervenants qui étaient impliqués dans le projet de loi l'ont fait, puis ça donne un projet de loi qui, à mon sens, aujourd'hui est bonifié, beaucoup plus efficace et qui, en bout de ligne...

Et puis je pense que c'est l'essentiel, c'est la raison pour laquelle les 125 députés sont ici, à Québec: c'est d'améliorer la qualité de vie au quotidien des gens. Et ce projet de loi là répond, à mon sens, dans la région de Montréal, à quelque chose qui était problématique. Et puis, comme députés de l'opposition, on peut participer puis apporter des échanges constructifs. Puis je peux peut-être à ce moment-là d'ailleurs souligner le travail de mon collègue de Laurier-Dorion, qui, en commission parlementaire, a apporté des solutions, des solutions concrètes et précises qui ont fait en sorte que le projet de loi aujourd'hui est bonifié, qui ont fait en sorte qu'aujourd'hui les gens qui habitent la communauté urbaine de Montréal vont pouvoir avoir un service efficace, un service encadré au niveau du remorquage, éviter les excès à l'avenir.

Puis quelque chose aussi d'important, on l'a mentionné, il y en a plusieurs qui sont membres du CAA. Les concessionnaires privés d'automobiles, ça fait maintenant partie des arguments de vente, on offre des services de remorquage, d'après-vente 24 heures sur 24. Mais on laisse la liberté à ces gens-là, qui bien souvent ont payé pour ces services-là, de recourir aux services qu'ils veulent bien avoir, mais tout en évidemment faisant en sorte de respecter l'intérêt public puis qu'on puisse retirer les véhicules rapidement.

C'est donc avec beaucoup de plaisir que je suis intervenu aujourd'hui, puis, encore une fois, souligner la collaboration tant de l'opposition que du gouvernement dans un projet de loi qui vise tout simplement à améliorer la qualité de vie des citoyens. Je vous remercie, M. le Président.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Anjou. Comme il n'y a pas d'autres intervenants sur l'adoption du rapport de la commission, le rapport de la commission de l'aménagement du territoire portant sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Mme la ministre.

Mme Léger: M. le Président, si vous voulez prendre en considération l'article 46 du feuilleton.


Projet de loi n° 59


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 46 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 59, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires municipales et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du rapport de la commission de l'aménagement du territoire?

Alors, je serais prêt maintenant à reconnaître le député de Laurier-Dorion et critique officiel de l'opposition en matière d'affaires municipales. Alors, M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: M. le Président. Alors, encore une fois, nous voilà dans une situation et, cette fois-ci, c'est un peu différent. Je dois dire, c'est un peu différent, parce que nous avons ici un projet de loi qui fait quoi? Un projet de loi qui a été discuté en cette Chambre, en deuxième lecture, dans son principe, il y a une couple de semaines et qui a été vu en commission parlementaire aussi, mais qui n'a eu aucun amendement, M. le Président, parce que – et c'est pour ça que je dis que c'est tout à fait différent des autres – ça reprenait une proposition de l'opposition d'il y a quelques années. Après que le gouvernement eut pris un autre chemin, ils ont décidé, avec ce projet de loi, de revenir là où ils étaient avant de faire l'erreur de créer deux ministères, M. le Président, celui de la Métropole et celui des Affaires municipales.

Je me rappelle très bien des débats qu'on a eus à ce moment-là, même si je n'étais pas responsable du dossier des affaires municipales et de la métropole à l'époque, parce qu'on trouvait à l'époque que le gouvernement essayait de résoudre des problèmes en créant des structures. Et, comme, M. le Président, il est très rare qu'on réussisse à résoudre des problèmes réels que les gens vivent dans leur quotidien, sur le terrain, avec la création de structures qui émanent d'une conception intellectuelle, théorique et souvent déconnectée de la réalité, on avait dit à ce moment-là que ça allait être voué à l'échec, qu'on n'allait pas améliorer les conditions de vie, puis les conditions financières, puis les conditions en termes de développement économique de la métropole en créant un ministère de la Métropole séparé du ministère des Affaires municipales.

On aurait pu identifier, si on avait besoin de le faire, des pouvoirs particuliers qu'on aurait pu donner au ministre responsable des Affaires municipales et de la Métropole, mais on avait déjà un processus qui existait au sein du gouvernement, où on avait un comité interministériel qui regardait la question de la métropole sous un angle multisectoriel afin de s'assurer que tout ce qui doit être fait au niveau des améliorations, ou des programmes gouvernementaux, ou des décisions gouvernementales qui doivent être prises aille dans le sens de l'amélioration des choses et de la convergence des efforts pour rentabiliser au maximum l'efficacité des décisions qui sont prises par rapport aux objectifs recherchés: la croissance économique, l'équité fiscale, même l'amélioration des services au niveau de nos concitoyens.

Et ils sont nombreux, ils sont nombreux autour de la métropole, M. le Président, parce que, quand on prend ce qu'on appelle la région de recensement métropolitaine, qui est communément, dans l'esprit tout au moins des planificateurs, vue comme l'agglomération urbaine – pour prendre les mots qui deviennent de plus en plus en usage courant – M. le Président, on parle de presque la moitié de la population du Québec. Donc, c'est très important, sans minimiser en rien l'importance de nos régions, sans minimiser en rien l'importance de mettre tous les efforts pour améliorer aussi les conditions de vie de nos gens en région. Et d'ailleurs on voit combien peu ce gouvernement fait de façon concrète dans ce sens-là, et combien peu de gens, dans le Québec tout ensemble, bénéficient d'un essor économique réel, ce qui aurait des retombées tant sur le plan métropolitain que sur le plan des régions.

Mais, une fois qu'on a identifié le fait, M. le Président, qu'il y avait ce comité interministériel qui fonctionnait et qu'on aurait pu donner aussi à la ministre – ou au ministre, à l'époque – responsable des Affaires municipales et de la Métropole des pouvoirs afin de s'assurer que des programmes soient mis de l'avant, ce n'était pas nécessaire de procéder à la création d'un autre ministère, avec un autre sous-ministre, avec un autre sous-ministre adjoint, avec toute une autre structure qui allait prendre le temps de se justifier sur le plan du fonctionnement en créant des répondants dans le milieu, en essayant de se donner aussi des orientations par rapport aux structures qu'ils allaient utiliser pour justement faire la suite des choses entre les décisions prises au ministère puis leur application sur le terrain.

Donc, on avait identifié dès le départ qu'il allait y avoir une période de flottement, une période de gaspillage de temps et d'énergie qui allait nécessairement découler du fait que, pour résoudre les problèmes, qui étaient le problème du sous-développement et le problème de manque de coordination aussi, des fois, sur les actions qui intervenaient sur le territoire, le grand territoire métropolitain, on se donnait comme moyen la création d'un ministère, comme si, parce que ici, au Québec, on a quelqu'un qui occupe un siège de l'autre côté, avec tous les extras qui vont avec, il en résultait automatiquement des solutions qui étaient apportées dans la situation de nos concitoyens. On sait que ce n'est pas le cas, M. le Président.

Donc, avant d'arriver au point où ça prend un ministre particulier pour gérer la situation, il faut avoir au préalable au moins la justification de cette nécessité par la démonstration qu'il y a suffisamment d'éléments déjà en opération sur le terrain qui nécessitent un répondant particulier ici, qui sera questionné par l'opposition quand le temps vient de poser des questions, qui sera ici pour prendre les responsabilités par rapport à ce qui se passe dans son ministère, mais non pas de procéder à l'inverse, c'est-à-dire d'abord créer le ministère, après ça créer les structures que le ministre va gérer, essayer de remplir ces structures-là pour qu'il ait quelque chose à gérer, pour qu'il ait la possibilité de répondre à des questions, M. le Président, vraiment procéder à l'inverse.

Alors, on avait dit à ce moment-là au gouvernement: Vous vous trompez, ce n'est pas la bonne façon, vous êtes sur le mauvais chemin, vous allez faire perdre le temps et l'énergie et, par ce fait même, vous allez gaspiller des fonds publics, vous allez mal gérer nos deniers publics, ce faisant. Mais le gouvernement disait, à l'époque: Non, non, non, il faut absolument faire ça, nous allons vraiment aller de l'avant avec cette façon de faire. Nous allons donc revigorer la métropole, vous allez voir. On va créer une nouvelle structure de coordination. On va mettre les maires, on va mettre les groupes communautaires, on va mettre tout le monde qui est là-dedans. Puis on va chapeauter ça avec le ministre, et, vous allez voir, le ministre va donner une direction à des choses. Puis on va être capable de venir ici puis se péter les bretelles, M. le Président, puis dire: On a fait de grandes choses et de bonnes choses.

(11 h 50)

Eh bien, trois ans plus tard, évaluons le résultat. Regardons ce qui s'est passé. Il y a eu deux ministres successifs, un après l'autre, à la Métropole. À ce nouveau ministère qui venait d'être créé, on n'avait pas le temps de voir le ministre réchauffer son fauteuil ni user les pneus sur sa voiture, M. le Président, entre Montréal et Québec qu'on le changeait. Il y en avait tout d'un coup un deuxième qui arrivait pour essayer de réussir là ou le premier avait échoué avec célérité, je dirais. Il a échoué avec célérité. On l'a vite, donc, remplacé par un autre ministre, qui, lui aussi, a dû prendre le temps effectivement de regarder ces questions, faire le tour du jardin, voir comment lui voudrait intervenir par rapport aux actions que son prédécesseur avait à peine d'ailleurs réussi à entamer. Mais tout ça aussi encore une fois a créé un gaspillage de temps, d'énergie et de deniers publics, M. le Président.

Et, encore une fois, on avait dit à ce moment-là au gouvernement: Vous vous trompez, vous êtes sur le mauvais chemin. Ce n'est pas parce que vous avez changé de ministre que ça va réussir plus. C'est la structure même qui est non nécessaire. C'est la structure même qui fausse un peu la situation. Ce n'est pas la structure qui va résoudre le problème, c'est une cohérence au niveau du milieu, une coordination du milieu et un leadership, M. le Président. Et ce n'est pas parce que vous créez ministère que vous assurez le leadership.

Alors, nous sommes donc devant, ici, aujourd'hui... Je me lève, je parle depuis neuf minutes maintenant sur le rapport qu'on a reçu de la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi n° 59 – je pense que c'est son numéro – qui fait quoi, M. le Président? Bien, je vais vous dire ce que ça fait: ça abolit le ministère de la Métropole. C'est la fin de la séparation entre les municipalités et la métropole. C'est une bonne chose. C'est une bonne chose. D'ailleurs, c'est tellement bon qu'on l'avait dit dès le départ. Et je viens de vous faire toutes ces démonstrations depuis les neuf dernières minutes qu'il ne fallait pas aller sur cette voie-là.

Alors, trois ans plus tard, un troisième ministre arrive. Un troisième. Et celle-là, parce qu'il s'agit d'une femme, elle a peut-être compris que ce n'est pas dans son avantage d'avoir un autre collègue qui s'occupe des affaires municipales pendant qu'elle s'occupe de l'affaire de la métropole. Ou vice versa. Parce que je ne sais pas qu'est-ce que c'est, son but dans ce ministère qu'elle occupe maintenant, M. le Président. Est-ce qu'elle a voulu être responsable des affaires municipales dans le sens des municipalités à l'exclusion des agglomérations urbaines ou, tout au moins, à l'exclusion de la métropole, ou est-ce qu'elle voulait vraiment avoir les deux et c'est elle qui a fait en sorte qu'on a aboli maintenant ce ministère?

Mais, peu importent les raisons, nous sommes heureux de constater que le gouvernement a retrouvé le bon chemin, a remis ensemble les éléments qui constituent tout ce qui est nécessaire pour gérer correctement les affaires municipales. Dans les affaires municipales, il y a au moins une municipalité ou une région municipale, une région urbaine qui est ce qu'on appelle la métropole. Et là, ici, ça vaut la peine de s'arrêter un petit peu, M. le Président, afin de faire le tour du jardin de ce qu'on comprend par «métropole». Parce que, depuis que, moi, je suis nommé critique de l'opposition aux affaires municipales et à la métropole – parce qu'on occupe maintenant comme vis-à-vis les mêmes fonctions – on parle de la région de recensement métropolitaine comme l'élément qui est la base de l'agglomération métropolitaine autour de l'île de Montréal et de la ville de Montréal.

Et, savez-vous, M. le Président, que cette région de recensement métropolitaine est constituée de 111 municipalités et s'extensionne de Saint-Hyacinthe jusqu'à la frontière de l'Ontario, quasiment, et de Saint-Jérôme jusqu'à la frontière des États-Unis, quasiment? Et je comprends cette notion statistique, théorique de la région de recensement métropolitaine constituée de ces 111 municipalités, parce que c'est basé quelque part sur la relation et la fréquence des échanges entre les résidents autour de l'île de Montréal dans ce regroupement-là et l'île de Montréal, M. le Président.

Je dois vous dire pourtant que j'ai une certaine difficulté conceptuelle à comprendre que, quand on dit «la métropole», on inclut tout ce territoire. Normalement, je pense, dans la tête de la plupart des gens.... Et je vois le ministre de l'Éducation ici, et je suis sûr que c'est de même pour lui aussi. Il a vécu à Montréal et évolué en affaires dans la région métropolitaine, et je suis sûr que, quand on lui parle de la région métropolitaine, dans son esprit va surgir quoi? Il va surgir l'île de Montréal, puis certainement l'île de Laval, et certainement une partie de la rive sud comme région métropolitaine. Mais je pense qu'on va commencer à se forcer à aller plus loin, à aller... je ne sais pas, moi, une fois qu'on dépasse Saint-Hubert, ça commence à être difficile de conceptualiser Saint-Hyacinthe, par exemple, comme appartenant à la région métropolitaine.

Imaginez pour deux secondes si logiquement on arrivait à avoir le pendant ici de ce qu'ils ont en Ontario, la mégapole là-bas, bien, ça serait un peu de prendre tout ce recensement et de faire une ville, M. le Président. Le maire de Montréal parle d'une île, une ville, mais les planificateurs, si on commence à incruster dans la tête des gens que la métropole ou la région métropolitaine, c'est tout ce grand territoire que je vous décris, ils pourraient arriver à la conclusion qu'il faudrait avoir une ville qui irait de Saint-Hyacinthe à Vaudreuil et de la frontière des États-Unis jusqu'à Saint-Jérôme. Vous voyez tout de suite, M. le Président, que ce n'est pas quelque chose qui vient naturellement.

Donc, quand on parle du ministère des Affaires municipales et de la Métropole, il faudrait bien s'entendre sur quoi on parle. Je sais que statistiquement et théoriquement on parle de ces 111 municipalités. Mais, à l'intérieur de ça, on est en train d'examiner et de voir comment est-ce qu'on va réorganiser les forces du milieu, M. le Président, afin d'assurer à la fois une équité fiscale réelle à nos concitoyens qui habitent sur le territoire de la métropole et de la région et à la fois qu'on va pouvoir faire la coordination correcte et efficace des éléments qui amènent un développement économique, un développement social et nous permettre en tant que citoyens québécois de tirer profit du fait que nous avons effectivement une région métropolitaine qui, si les synergies se jouent comme elles le doivent, peut concurrencer beaucoup d'autres grandes villes.

Mais, nous, notre situation est la suivante: nous n'avons pas beaucoup de métropoles sur notre territoire. Il n'y en a qu'une, hein. Alors, bon, il faut faire bien attention parce qu'il ne faut pas croire qu'on est invulnérable par rapport à la compétition, et donc il faut vraiment essayer de tirer le mieux possible notre épingle du jeu en maximisant nos ressources et en s'assurant qu'on les utilise de façon efficace. Parce que nous n'avons pas beaucoup... au niveau métropolitain, tout au moins, il y a juste une métropole, on est juste... en tout cas.

Cela étant dit, M. le Président, on est donc heureux de voir que le gouvernement revient sur la voie du bon sens, abolit le ministère de la Métropole, intègre les fonctions du ministère de la Métropole à celles du ministère des Affaires municipales et, ce faisant, se donne minimalement, au départ, la possibilité d'avoir une vue plus cohérente et plus d'ensemble dans la relation qui doit exister entre les municipalités en dehors de cette région métropolitaine et la région métropolitaine, étant donné que le gouvernement a pris un autre élément de notre passé, M. le Président, et a recréé le comité interministériel qui existait avant que ce gouvernement arrive, qu'il avait aboli parce qu'il avait créé le ministère de la Métropole. Mon dieu! Après trois ans, ils sont revenus exactement là où on leur disait qu'ils devraient rester. On a perdu notre temps en attendant, de l'argent. On a perdu tout le temps, l'argent, l'énergie et toutes les choses qui vont avec les exercices inutiles, M. le Président.

(12 heures)

Donc, vous comprenez que, si j'ai pris ces 17 minutes pour parler sur cette question suite à la réception du rapport, c'est parce que je voulais absolument souligner combien je suis heureux de constater que le gouvernement accueille des fois, enfin, même si c'est tardif, les indications de l'opposition. Et ils n'ont qu'à continuer dans ce sens-là, M. le Président, on pourra les guider correctement dans tout ce qui vient, jusqu'à temps qu'on puisse avoir un système électoral qui fasse en sorte que ceux qui devraient normalement être au pouvoir, ceux qui ont reçu une plus grande part des votes, ceux qui ont reçu plus de votes de la part de nos concitoyens le soient, et c'est ceux qui se trouvent malheureusement en minorité au Parlement qui ont eu la pluralité des votes, M. le Président.

Alors, ça étant dit, je tenais à le rappeler, c'est important, écoutez-nous de temps en temps. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du rapport de la commission de l'aménagement du territoire?


Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission de l'aménagement du territoire portant sur le projet de loi n° 59, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires municipales et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président, l'article 25 du feuilleton de ce jour, s'il vous plaît.


Projet de loi n° 1


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 25 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 1, Loi concernant l'obligation pour l'électeur de s'identifier au moment de voter, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le ministre responsable de la Réforme électorale. Ces amendements sont déclarés recevables. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 1?

M. Chagnon: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le président du caucus de l'opposition officielle et député de Westmount–Saint-Louis.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 1 porte le numéro 1 non seulement à cause de son contenu, mais à cause du symbole auquel il semblait référer. Ce projet de loi avait été promis dans des considérations puis dans une situation fort politiques, pour ne pas dire fort partisanes, c'est-à-dire au moment de congrès... conseil général, dis-je... Conseil national, devrais-je dire plutôt, du parti gouvernemental. L'objectif du projet de loi visait à créer une nouvelle obligation pour l'électeur de s'identifier au moment du vote.

J'avoue honnêtement que, en ce qui concerne la philosophie même de notre parti, nous sommes plutôt portés... non seulement plutôt, mais nous sommes définitivement portés à croire que les électeurs, par bonne foi, vont bien agir au moment des élections. Il semble que ce ne soit pas là le point de vue gouvernemental, point de vue gouvernemental qui a été, il faut le dire, un peu déterminé sûrement par des émissions télévisées qui ont porté sur des possibilités de supposition de personne, c'est-à-dire de voter au nom de gens inscrits sur la liste électorale, de voter en leur nom. Ces émissions de télévision ont eu un effet impressionniste extrêmement important, M. le Président, il ne faut pas se le cacher. Toutefois, nous en sommes rendus, même si on est, quoi, le 11 juin, midi... ça fait déjà plus de six mois que ces événements-là ont été relatés, ont été démontrés, et, encore aujourd'hui, le Directeur général des élections n'a pas fini son enquête sur le sujet. Peut-être s'agissait-il d'un vaste canular, mais, de toute façon, on n'a pas à se mettre la tête dans le sable et, si ce n'était pas le cas et si c'était réel, il y a évidemment des choses qui doivent être corrigées.

Mais, de toute façon, au-delà de la réalité potentielle, plausible, il n'en demeure pas moins que le phénomène qu'on a démontré puis qu'on a filmé, si c'était exact, demeure quand même tout à fait marginal à l'égard de l'ensemble de la manifestation démocratique que représente une élection générale ou une élection partielle. Lorsque 5 000 000 de personnes ont le droit de vote, lorsque 4 700 000 personnes vont effectivement voter, on ne peut pas s'imaginer qu'il y a des niveaux de supposition de personne qui sont très élevés. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas le cas.

Mais, quand même, le gouvernement s'était créé lui-même une obligation politique et partisane, je le disais, pour faire en sorte de créer une nouvelle obligation à chacun des électeurs de s'identifier au moment de voter.

Or, M. le Président, dans le projet de loi n° 1, il y a eu de nombreux, nombreux, nombreux amendements qui ont été apportés. Je vais vous en citer quelques-uns. D'abord, après plusieurs explications et plusieurs réunions du comité consultatif du Directeur général des élections, comité consultatif qui, je vous le rappelle, regroupe les représentants de chacun des partis politiques qui siègent à l'Assemblée nationale, avec le Directeur général des élections, après trois réunions, d'intenses discussions tant au niveau du comité consultatif qu'en commission parlementaire, nous avons convenu d'amender le projet de loi de façon importante. Si, comme opposition, nous avons décidé, sur le plan des principes, d'accepter la proposition gouvernementale que l'électeur s'identifie, puisque c'était nécessairement et viscéralement important chez le gouvernement, nous avons fait en sorte d'éliminer des problèmes d'application du projet de loi, d'application pratique du projet de loi. Je vous rappelle que le projet de loi prévoyait non seulement une identification obligatoire des électeurs auprès des boîtes de scrutin, auprès des scrutateurs et des officiers d'élection dans les boîtes de scrutin, mais aussi au moment où ces derniers, s'ils n'avaient pas de preuve d'identification, se retrouvaient avec des complications assez sérieuses pour attester leur identité auprès des différentes boîtes de scrutin à travers la province. Nous avons convenu, suite à des amendements que nous avons proposés, de modifier un peu le déroulement, que vous aurez l'occasion de voir au cours de la prochaine élection.

Bref, M. le Président, la mécanique que nous avons mise en place fera en sorte que, par exemple, lorsque les gens iront voter, lorsque les gens entreront et seront dans un endroit de votation, arriveront dans l'école Jean-XXIII, dans l'entrée de l'école, à la salle des pas perdus, avant d'arriver dans la salle où sont les polls, les PRIMO, les aides au Directeur général des élections, feront en sorte d'aviser les électeurs qu'ils ont besoin de leur carte d'identité pour s'identifier au moment de l'élection, au moment où on leur remettra leur bulletin de vote. S'il y a des gens qui n'ont pas leur carte d'identité ou qui n'ont pas la carte d'identité mentionnée dans le projet de loi, ces derniers auront recours, auront droit non pas à se faire assermenter et à faire une preuve d'identité au poll, mais dans une table de litige, une table de vérification de ces cas qui préparera et qui servira à ces électeurs à se faire identifier, oui ou non, dépendamment évidemment des conclusions que cette table de litige pourra prendre et permettant à l'électeur, avec un document de cette table de litige, de pouvoir aller voter à son lieu de votation.

Bref, M. le Président, nous allons éviter que le temps que prendrait l'identification des électeurs qui n'auraient pas leur carte dans leur poll, avec l'assermentation, et tout, et tout, fasse en sorte de limiter la capacité de voter dans les polls, d'éviter les queues, les temps d'arrêt, les temps d'attente qui pourraient être très grands dans chacune des sections de vote. C'était là l'objectif de notre représentation, et le gouvernement a jugé que c'était pertinent. Et nous avons donc créé cette table de litige, qui s'appellera dans les faits table de vérification, et qui exclura, qui sortira des polls, des endroits de votation, des tables de votation, les problèmes litigieux concernant l'identification des électeurs.

De plus, M. le Président, j'avais soumis à plusieurs reprises qu'un des plus grands problèmes, au moment où on se parle, de notre organisation électorale découle de la problématique que nous avons à avoir des listes qui soient justes, justement organisées. Notre liste électorale permanente souffre de quelques carences – je vous en énumérerai quelques-unes – qui ont fait en sorte qu'à la dernière élection ce n'est pas marginal, mais c'est des dizaines de milliers de personnes, de résidentes ou de résidents du Québec, qui n'ont pas eu le droit de vote parce qu'elles n'étaient pas inscrites sur la liste électorale, parce que la révision de la liste électorale ne se faisait pas d'une façon permanente, mais uniquement durant la période électorale.

(12 h 10)

Or, le projet de loi n° 1, à cause de ses amendements, à cause de l'étude qui a été faite préalablement au comité consultatif, a créé une nouvelle commission permanente de révision de la liste électorale. Je vous souligne un aspect assez curieux de la mécanique de modification de notre liste électorale permanente: par exemple, un individu qui habitait Sept-Îles, qui divorçait, qui déménageait à Montréal, qui demandait un transfert de son permis de conduire, voyait automatiquement la Société de l'assurance automobile du Québec octroyer le nouveau permis de conduire à la nouvelle adresse de cette personne-là à Montréal, mais en même temps faisait en sorte, automatiquement, à cause du système mécanique qui est utilisé à la SAAQ, de déplacer l'épouse de cet homme divorcé, les enfants majeurs ayant des permis de conduire, à la nouvelle adresse du domicile de l'ex-mari.

Imaginez! Quand on a 25 000, 26 000 divorces par année, les problèmes que cela peut causer uniquement au niveau des corrections qu'il faut apporter à la liste électorale, qui elle-même a été mal dirigée, mal informée, à cause d'un problème mécanique de la Société de l'assurance automobile du Québec. Alors, ce problème-là va se régler à la SAAQ cet automne. On aura quand même la chance de pouvoir avoir une commission de révision permanente des listes électorales qui, au bureau du Directeur général des élections, tant à Montréal qu'à Québec, ou même n'importe où en province, selon le desiderata, les besoins rencontrés par le Directeur général des élections, fera en sorte que les gens qui ne sont pas inscrits sur la liste électorale pourront le faire n'importe quand durant l'année.

Vous comprendrez, M. le Président, particulièrement dans les zones urbaines, au moment où il y a des transferts massifs de gens... Je pense entre autres à dans un mois, là, dans trois semaines: les gens vont commencer à déménager pour le 1er juillet. Dans les trois prochaines semaines, des dizaines, des centaines de milliers de personnes vont déménager. On estime, au Québec, à peu près à 900 000 à 1 000 000 de foyers, de ménages qui déménagent, qui changent d'appartement ou de maison dans la période qui est en train de commencer. Alors, vous comprenez aisément les problèmes que ça cause au niveau de la suite des choses, de l'organisation de la liste électorale permanente. Donc, bref, M. le Président, il y aura désormais, une fois l'adoption de ce projet de loi là, création d'une commission de révision permanente de la liste électorale.

D'autres amendements, M. le Président, ont été apportés. Nous avons aussi profité – c'est un peu plus mineur, M. le Président, mais quand même – du projet de loi sur la réforme électorale pour nous assurer que nous ferions une remise annuelle de la liste des électeurs aux députés, en même temps puis une seule fois par année, autour de la fin d'octobre, pour s'assurer que toutes les modifications à la liste électorale les plus importantes – entre autres celles qui découlent de la période des déménagements et celles qui découlent de la rentrée scolaire – soient prises en considération, pour permettre de donner aux députés, et donc aussi, en même temps, aux partis politiques, une liste électorale qui soit la plus complète possible, au moment désigné par le Directeur général des élections, qui se retrouverait vers la fin d'octobre.

Nous avons aussi, compte tenu de l'expérience de la dernière élection, créé une nouvelle interdiction, je dirais, dans la Loi électorale: il sera désormais interdit de changer la dénomination ou le nom d'un parti en cours de campagne. Lorsqu'une campagne électorale commence, vous n'aurez pas le droit de changer le nom de votre parti. Ça fait suite évidemment à l'expérience que nous avons vécue avec le député de Rivière-du-Loup qui avait un peu copié... pas un peu, qui avait littéralement copié, son parti, l'ADQ, avait littéralement copié ce que Vision Montréal, à l'élection de la ville de Montréal, avait fait.

Vous vous rappellerez que le parti politique municipal Vision Montréal s'appelait Vision Montréal jusqu'à temps que... même au début de la campagne électorale municipale. On a changé le nom de Vision Montréal pour Vision Montréal, parti de Pierre Bourque, alors que le député de Rivière-du-Loup a fait la même chose, a copié l'astuce de Vision Montréal en changeant le nom de Action démocratique du Québec pour Action démocratique du Québec, parti de Mario Dumont. Alors, il est convenu que ce genre de tour ne se répétera plus et qu'il sera désormais interdit de changer la dénomination d'un parti politique au cours d'une campagne électorale.

Nous avons aussi passé des amendements concernant la remise des rapports de dépenses électorales. Les rapports de dépenses électorales, comme vous le savez, M. le Président, devaient être remis soit au directeur local de scrutin, soit au Directeur général des élections. Nous avons convenu qu'il était plus facile de transmettre le rapport de dépenses électorales de chacun des candidats non pas au directeur local de scrutin – parce que, lui, après l'élection, il ferme les livres puis il est assez difficile à rejoindre – mais bien plutôt au Directeur général des élections.

Et, finalement, il y a avait une demande, entre autres, du Directeur général des élections pour réviser à la baisse le nombre d'heures permises pour les citoyennes et les citoyens pour aller voter. Le Directeur général nous suggérait de baisser à trois heures le temps prévu, qui est de quatre heures actuellement dans la loi, et nous avons plutôt décidé de conserver les quatre heures prévues dans la loi, mais de laisser aux employeurs le soin et le droit de gérance de décider quelle plage de quatre heures pourrait fonctionner dans le temps de travail des travailleurs à travers le Québec.

Et, finalement, M. le Président, nous avons jugé utile – et même à la demande de l'Union des municipalités du Québec – de faire en sorte que les nouvelles règles concernant l'identification des électeurs soient aussi des règles qui soient celles qu'on retrouvera au cours des élections municipales et des élections scolaires à venir. De plus, l'Union des municipalités du Québec nous a demandé que ces règles s'appliquent aussi dans les cas de situations où l'on viendrait... pour fins de demander, par exemple, un référendum local sur une question, lorsqu'il s'agit, dans une municipalité, de signer le registre de la municipalité pour demander un référendum, que la même règle s'applique. Cette demande nous a été formulée par l'Union des municipalités du Québec, et nous y avons agréé.

M. le Président, nous avons aussi discuté et tiré quelques conclusions sur trois autres dossiers. Le premier, compte tenu un peu – comme l'a suggéré le précédent intervenant, l'orateur et député de Laurier-Dorion – des situations particulières que nos avons connues au cours de la dernière campagne électorale, c'est-à-dire qu'on se retrouve avec des grands écarts en termes de représentants, tout en ayant, comme parti de l'opposition, la pluralité des voix; les discussions que nous avons eues au cours du comité consultatif nous ont permis de tirer quelques conclusions. Le ministre responsable de la Réforme électorale nous a écrit, les deux autres membres du comité consultatif, pour nous annoncer qu'il discuterait, dans le caucus du parti ministériel et au cabinet, de l'opportunité d'une commission parlementaire sur la réforme de la représentation, réforme de représentation qui se pencherait sur deux items en particulier: écouter ce que les citoyennes ou les citoyens pourraient avoir à dire sur une réforme d'un mode de scrutin et aussi écouter ce que les gens ont à dire sur une éventuelle réforme de la carte électorale.

Vous savez que la loi actuelle prévoit que, suite à la deuxième élection sur la même carte électorale, automatiquement, une commission de représentation électorale est constituée, est dirigée par le Directeur général des élections et deux autres commissaires, qui sont M. Bourassa, de Montréal, et puis un autre de Québec, qui travaillent à reconfectionner la carte électorale en fonction, évidemment, des critères qu'on retrouve dans la Loi électorale, des critères qui, évidemment, avec le temps, sont parfois... ce n'est pas les critères qui sont modifiés, mais le résultat des critères est modifié. Par exemple, notre Loi électorale prévoit qu'on doit avoir une moyenne de 42 000 électeurs par comté, avec un écart type de plus ou moins 25 %. C'est évident qu'au moment où on se parle, 10 ans après la dernière confection de la carte électorale, plusieurs comtés ont un nombre d'électeurs plus élevé que le 25 % prévu dans la Loi électorale, 25 % de 42 000, ou encore sont dans la situation où ils ont moins d'électeurs que le 25 % prévu. Alors, ça implique un mandat automatique de reconfection de la carte électorale.

(12 h 20)

Compte tenu de la situation, compte tenu de la volonté gouvernementale d'étudier cette question-là, d'abord au caucus et éventuellement au cabinet, pour qu'éventuellement nous ayons une audience publique sur la réforme de la représentation et de la carte électorales, nous avons convenu... et aussi je devrais ajouter, parce que c'est extrêmement important, compte tenu du fait que le Directeur général des élections a malheureusement perdu la vie il y a quelques mois, nous avons convenu, le gouvernement, et l'opposition, et le représentant indépendant de Rivière-du-Loup, de reporter de un an le mandat de la Commission de la représentation électorale, ce qui fait que ce n'est pas à l'automne 1999, mais plutôt à l'automne de l'an 2000 que la Commission de la représentation électorale déposera à l'Assemblée nationale la proposition qu'elle fera d'une nouvelle carte électorale. C'est assez important, parce que, évidemment, ça touche l'ensemble, tous les membres ici sont susceptibles d'être affectés par cette question. Et, évidemment, si, cet automne, nous pouvons avoir une commission parlementaire, nous serons à même d'avoir et d'entendre ce que les gens ont à dire sur cette question-là.

Et c'est un des amendements que nous retrouvons dans la loi. Évidemment, vous aurez compris qu'avec le nombre d'amendements dont je viens de vous parler, la loi n° 1 a pris un sens un petit peu différent de ce qu'elle était au départ. Il faut ajouter aussi, M. le Président, qu'au cours de l'étude en troisième lecture du projet de loi d'autres amendements seront apportés, d'autres amendements qui découleront d'autres discussions que nous avons eues cette semaine au comité consultatif et qui feront en sorte qu'en troisième lecture nous transformerons, comme la procédure parlementaire nous le permet, l'Assemblée nationale en commission pour étudier quelques amendements, quelques articles nouveaux du projet de loi.

Un de ces articles – c'est celui qui sera sûrement le plus médiatisé – portera sur l'augmentation de une heure du droit de vote la journée des élections pour l'ensemble des électeurs du Québec. La situation est la suivante, M. le Président. Il n'y a que trois provinces au Canada qui n'offrent que 10 heures la journée de l'élection, 10 heures de temps de votation à leurs constituants, soit l'Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick et le Québec. Toutes les autres provinces canadiennes offrent au moins 11 heures et plusieurs aussi offrent 12 heures de temps de votation pour les électeurs de chacune de ces provinces. Or, nous avons considéré que de passer de 10 heures à 11 heures serait un geste qui serait considéré comme étant un geste d'ouverture pour permettre au plus grand nombre de gens de pouvoir aller voter. Même si notre taux de votation est relativement élevé au Québec, même si on le compare avec les autres provinces, on a souvent pu remarquer que le taux de participation aux élections provinciales, et même fédérales, est souvent plus élevé au Québec que dans d'autres provinces... Mais, le pire ennemi du bien étant le meilleur, je pense qu'il faut offrir à chacun des citoyens du Québec le plus grand nombre d'opportunités possible pour pouvoir s'exprimer au cours d'une période électorale.

Et, M. le Président, donc, la prochaine élection se fera avec une heure de plus, c'est-à-dire que les gens pourront commencer à aller voter à 9 h 30 le matin jusqu'à 20 h 30 le soir, au lieu de 10 heures le matin à 20 heures le soir, alors on commencera une demi-heure plus tôt puis on finira une demi-heure plus tard. Alors, ce n'est pas à 20 h 25 que Bernard Derome, à la prochaine élection, pourra annoncer que, si la situation se maintient, un gouvernement pourra être élu, il devra attendre au moins à 21 heures, 21 h 5, 21 h 10 pour le faire. Ça, c'est clair.

Je tiens aussi à signaler que nous aurons comme autre amendement dans ce projet de loi un amendement de concordance, M. le Président, avec les autres lois, qui touche des gens qui sont nommés par l'Assemblée nationale. Des gens qui sont nommés par l'Assemblée nationale, que ce soit le Vérificateur général ou l'ombudsman – et ce sera le cas aussi du Directeur général des élections – auront le droit d'éviter un recours devant le tribunal. Puis, dans le cas du Directeur général des élections, c'est, entre autres, pour faire en sorte d'éviter que des informations confidentielles qu'il détient puissent le voir être amené à la barre des témoins au cours d'une enquête ou d'un procès qui pourrait toucher des tiers du Directeur général ou qui pourrait toucher d'autres sujets, mais qui pourrait faire en sorte que le Directeur général soit amené à la barre des témoins pour des raisons qui ne doivent pas se faire. Par exemple, on ne pourrait pas forcer le Directeur général des élections à rendre publiques ou à donner des informations qui sont de nature confidentielle, sur la liste électorale, par exemple. Voilà le genre d'immunité que nous pensons devoir accorder au Directeur général des élections, puisque c'est déjà une immunité qui est aussi accordée au Vérificateur général du Québec et qui est aussi accordée au Protecteur du citoyen.

Alors, bref, M. le Président, il y a plusieurs amendements, comme je vous l'ai signalé. Je vous en ai fait non pas la lecture, mais au moins donné une explication d'une bonne partie de ces amendements-là qui feront en sorte que le projet de loi n° 1 aura, grâce au travail qui aura été fait en commission parlementaire, qui aura sûrement permis d'améliorer le projet de loi, de le bonifier...

Mais, encore une fois, c'est bon de se le dire, si le travail a été excellent, la réforme complète de notre Loi électorale n'est pas terminée pour autant. Le comité consultatif, réuni cette semaine, a rencontré, par exemple, les dirigeants de... M. Kingsley, le Directeur général des élections au gouvernement canadien, au gouvernement fédéral. On a regardé différentes dispositions concernant, par exemple, les serments des électeurs; par exemple, le vote par correspondance; par exemple, la capacité du Directeur des élections – puis c'est le cas au fédéral – de pouvoir recevoir le vote des citoyens tout au long de la période électorale à partir du moment où le bref est émis. La façon dont on fait le vote itinérant au fédéral est extrêmement intéressante. L'organisation du vote hors Canada, qui se répercute chez nous par le vote hors Québec, soulève des interrogations. Les discussions que nous avons eues cette semaine avec les autorités fédérales dans ces questions-là ont été assez révélatrices de certaines méthodes qui peuvent être utilisées et qui pourraient être réutilisées ici, à condition, évidemment, de changer notre Loi électorale, ce qui pourrait être le cas cet automne.

Je souligne aussi à l'ensemble des collègues qu'il nous faudra revoir des dispositions concernant particulièrement le financement des périodes électorales. Le gouvernement a soulevé des questions extrêmement importantes et intéressantes sur le fait qu'effectivement depuis 20 ans nous disposons exactement des mêmes budgets pour l'organisation des campagnes électorales, malgré le fait que nous ayons connu une inflation quand même importante qui fait en sorte que la publicité, l'écrit en particulier, l'imprimerie, par exemple, n'ont pas de commune mesure en termes de coûts avec ce qu'ils étaient il y a 20 ans. Par contre, si nos budgets sont les mêmes, c'est entendu qu'on risque d'avoir des problèmes, et des problème qui pourraient éventuellement devenir des problèmes de probité.

(12 h 30)

Alors, au lieu de faire en sorte de se mettre dans une situation malheureuse, je pense qu'il vaut mieux faire face à la musique et regarder les dispositions de notre loi concernant le financement des activités, particulièrement, électorales et éventuellement peut-être même des activités partisanes, de façon à éviter toute espèce de problème futur et de faire en sorte que nos institutions démocratiques, notre Loi électorale, notre Loi sur le financement des partis politiques puissent continuer à servir de modèle à un plus grand nombre de pays à travers la planète et qu'elles puissent encore faire en sorte de nous mettre dans une situation, nous placer dans une situation où la rigueur et la qualité de nos moeurs démocratiques pourront encore une fois servir de démonstration puis de modèle pour les gens qui veulent bien s'y conformer. Merci, M. le Président.


Mise aux voix des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du rapport de la commission des institutions? Alors, les amendements proposés par M. le ministre responsable de la Réforme électorale sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 1, Loi concernant l'obligation pour l'électeur de s'identifier au moment de voter, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président, l'article 35 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 26


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 35 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. Alors, y a-t-il des interventions sur l'adoption du rapport de la commission des affaires sociales? Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce et critique officiel de l'opposition en matière d'enfance.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. C'est un plaisir pour moi d'intervenir à l'étape de la prise en considération du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance.

M. le Président, je vais vous rappeler simplement le cheminement du projet de loi à date. Le principe du projet de loi a été adopté le 13 mai dernier, et nous avons fait, à la commission des affaires sociales, une étude détaillée, le mercredi 26 mai, et nous sommes aujourd'hui à l'étape de la prise en considération du rapport.

M. le Président, je dois vous signaler immédiatement que j'ai la pleine conviction, comme parlementaire, qu'une des étapes les plus importantes dans l'étude de nos projets de loi est l'étude détaillée en commission parlementaire. C'est là où des parlementaires peuvent avoir une influence, nous pouvons échanger entre nous, avec le ou la ministre responsable, sur le projet de loi, faire valoir nos points de vue de façon constructive, bonifier le projet de loi, si on peut. Et je dois vous dire que, après un faux départ qui a duré juste quelques minutes à la commission, dû à une mésentente probablement entre moi et la ministre, les choses se sont très bien déroulées, et nous avons pris quelques heures, trois heures de temps, pour étudier à fond le projet de loi dans une atmosphère sereine et calme, l'atmosphère qu'il mérite.

M. le Président, je veux vous rappeler simplement les cinq éléments fondamentaux qui sont dans le projet de loi. Nous étions parfaitement d'accord sur trois des cinq éléments, on avait des questionnements sur un élément puis on était pas mal contre un des éléments.

Les éléments avec lesquels on est pour: le projet de loi modifie le calcul des enfants à l'intérieur des ratios des responsables de services de garde en milieu familial pour inclure la notion des enfants qui habitent ordinairement avec la responsable de services de garde. Beaucoup de termes, M. le Président. Je vais l'expliquer très brièvement et le clarifier. Il y a des maximums établis par règlement, par la loi, maximum de six enfants en milieu familial pour une responsable des services de garde, incluant ses propres enfants. Et, si la responsable est assistée par une autre personne, incluant les enfants de la responsable des services de garde... on s'est trouvé dans une situation, semble-t-il, où, à cause des phénomènes des familles recomposées, et ainsi de suite, il y avait des enfants qui habitaient ordinairement avec la responsable des services de garde qui échappaient à ces ratios. Autrement dit, si la responsable avaient deux des ses propres enfants, évidemment, la responsable ne peut qu'accepter quatre autres enfants, pour le maximum de six. Mais il y avait une petite échappatoire qu'il a fallu boucher – si vous me permettez l'expression, M. le député de Johnson – avec la notion des enfants qui habitent ordinairement avec la responsable des services de garde – peut-être les enfants de son conjoint – qui échappaient à ces ratios. Alors, cet échappatoire est fermé. Je pense que c'est une bonne chose. Les ratios sont là, les maximums sont là pour une bonne raison et ils doivent être respectés en tout temps, M. le Président, il n'y a pas de difficulté avec ça.

Le projet de loi étend l'accès aux enfants des gens qui assistent la responsable des services de garde et les enfants de la responsable du service de garde au système de garderies à 5 $, s'ils reçoivent ces services, en ce qui concerne la responsable des services de garde, dans un milieu autre que chez elle. Et on a eu un intéressant débat sur la question: Pourquoi est-ce que les enfants mêmes des responsables des services ne peuvent pas être inclus dans le système s'ils se font garder en milieu familial chez eux? Le débat est ouvert, toujours, M. le Président. Il y a des pour et des contre. Il y a des gens qui disent: On ne peut pas faire ça parce que c'est une subvention déguisée pour une mère qui veut élever ses propres enfants chez elle. C'est un débat, ça va continuer, j'imagine. Il n'y a pas l'unanimité sur la question, mais il y a un fort consensus à l'intérieur des groupes dans le domaine. Il y a un consensus, en tout cas, M. le Président, qu'on ne devrait pas permettre aux responsables de services de garde d'avoir accès à la tarification pour leurs propres enfants s'ils se font garder à leur domicile. Mais on reconnaît que l'assistante peut bénéficier du tarif réduit de 5 $ et que la responsable du service de garde peut faire garder ses enfants en milieu familial, dans un autre lieu. C'est une amélioration, M. le Président, à la situation actuelle. L'opposition officielle est favorable à cette question.

Le troisième élément où on avait certaines réserves – on était également favorables – c'est la possibilité pour la responsable des services de garde qui voit sa reconnaissance suspendue ou révoquée par le CPE, au lieu d'aller en appel de cette décision directement à la Cour supérieure, ce qui est le cas actuel, on va lui permettre d'aller devant le Tribunal administratif du Québec pour contester la décision. Sur papier, M. le Président, c'est une bonne nouvelle parce que ça déjudiciarise le processus pour des responsables de services de garde. Témoigner devant ou déposer des plaintes, des causes devant le Tribunal administratif du Québec, c'est un processus moins lourd que d'aller en justice devant la Cour supérieure. En principe, c'est une bonne chose.

Nous avons soulevé par contre, M. le Président, des inquiétudes quant au nombre de cas devant le Tribunal administratif du Québec, à la division des affaires sociales. On m'a informé – je n'ai pas pu vérifier moi-même – qu'il y a 17 000 causes pendantes devant la division des affaires sociales du Tribunal administratif du Québec. Alors, nous avons exprimé nos craintes, nos vives craintes que, sur papier, en principe, vouloir élargir l'accessibilité à ces responsables de services de garde, on ne veut surtout pas qu'on se retrouve à être dans la situation où on retarde le processus. C'est des inquiétudes, mais, fondamentalement, nous sommes également favorables à cette modification.

Là où on avait de plus sérieuses réserves, c'était au niveau des pouvoirs de dérogation accordés à la ministre. Il y avait deux différentes catégories de pouvoirs de dérogation, M. le Président: un pour les projets-pilotes puis un plus général. J'avais émis des réserves quant aux projets-pilotes, mais, après avoir entendu la ministre, son sous-ministre et ses conseillers juridiques, ses sous-ministres adjoints, j'arrive à la conclusion que, malgré le fait que je n'aime pas acquiescer à des pouvoirs de dérogation donnés à l'Exécutif comme législateur, ça pouvait être justifié dans le cas des projets-pilotes, s'ils sont bien encadrés, qu'il y a une durée limitée dans le temps, qu'il y a un but spécifique. Parce que, effectivement, M. le Président, il faut être plus flexible dans nos services de garde. Il faut prévoir le service de garde de nuit, il faut prévoir d'autres possibilités de services de garde. Et je reconnais qu'il est légitime pour le gouvernement de vouloir se doter d'un pouvoir de dérogation à nos normes, exercé par la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, afin de mettre en vigueur des projets-pilotes.

(12 h 40)

Alors, malgré une certaine réticence sur le principe des pouvoirs de dérogation, M. le Président, dans le cadre spécifique des projets-pilotes, après réflexion, après avoir écouté les explications de la ministre, j'arrive à la conclusion que c'est quelque chose auquel on devrait acquiescer, avec certaines balises qui sont prévues dans la loi. Et les balises sont assez claires, M. le Président. Il faut que ces projets-pilotes soient limités dans le temps, ils ont une durée limitée, c'est... Je cite le premier alinéa de l'éventuel article 73.2 de la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance: «Il peut également autoriser, dans le cadre de ces projets-pilotes, toute personne ou organisme à offrir des services de garde selon des normes différentes de celles prévues par la présente loi et ses règlements.»

Le deuxième alinéa, M. le Président: «Ces projets sont établis pour une durée maximale d'un an que le ministre peut, s'il le juge nécessaire, prolonger d'au plus six mois.»

Troisième alinéa: «Le ministre établit, par directives, les normes applicables dans le cadre de ces projets-pilotes. Le ministre peut, en tout temps, modifier un projet-pilote ou y mettre fin après en avoir avisé la personne ou l'organisme autorisé.»

Alors, je pense que les balises sont là, elles sont légitimes, et dans le but, évidemment, d'assurer une meilleure flexibilité au ministère de la Famille et à la ministre pour développer des projets-pilotes pour d'autres services de garde, comme la garde de nuit. Nous sommes d'accord. La ministre a fait une démonstration assez convaincante là-dessus en prenant simplement, M. le Président, quelques normes ou règlements, comme le projet éducatif. Mais, si on établit la garde de soir ou de nuit, la nécessité d'avoir des services de garde éducatifs est beaucoup plus remise en question, M. le Président. Les enfants, en principe, si c'est une garde de nuit, ils vont dormir. On ne donne pas des services éducatifs à des enfants qui dorment. Alors, la logique de ça est pas mal pertinente, je l'ai comprise vite, comme père de famille, M. le Président. Alors, effectivement, on en a parlé d'autres: les normes d'aménagement... Effectivement, pour la garde de nuit, il est peut-être moins nécessaire de prévoir les fenêtres, la luminosité, et ainsi de suite. La logique était implacable. Et, malgré les réticences, j'étais obligé de donner raison à la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance là-dessus.

Là où on avait certaines difficultés, et on les a toujours parce qu'on a voté sur division sur un autre article, malgré une certaine amélioration – et on va en parler, M. le Président – c'est l'article 8, qui est l'article le plus général, qui accorde des pouvoirs de dérogation, je dirais, plus généraux à la ministre. Ça vaut la peine de le lire, M. le Président, l'article 8.

«Le ministre peut, dans un cas exceptionnel et s'il le juge d'intérêt public – deux choses, hein – autoriser l'application d'une mesure différente d'une norme prévue à la présente loi.» Puis là il y a une série d'énumérations des normes et règlements, M. le Président. Des pouvoirs de dérogation aussi larges, M. le Président, il faudrait, quant à moi, s'interroger beaucoup avant d'acquiescer.

Je vais reprendre autrement, M. le Président. Dans le projet de loi, il y a trois paliers de règlements auxquels on peut déroger, où on donne le pouvoir à la ministre. Il y a une série de règlements auxquels on ne peut pas déroger, en tout temps, c'est dans le premier alinéa de l'article 8. On ne peut pas déroger, point, à la ligne, aux paragraphes 13°, 13.1°, 14°, 15°, 18° à 24° de l'article 73. C'est un peu dur de savoir ce que ça veut dire, tout ça, M. le Président, parce que ce n'est que des chiffres, mais, essentiellement, la ministre ne peut pas déroger à tous ces articles de règlement là parce qu'ils ont des incidences financières. Je peux comprendre que, selon 155, on n'y touche pas parce que ça peut occasionner des dépenses additionnelles pour le gouvernement, et ça, on ne veut pas jouer avec ça à la légère. Il y a une logique administrative impeccable là-dedans, M. le Président.

Il y a un deuxième palier de règlements auxquels on peut déroger, avec certaines protections, M. le Président. Toutefois, avant que la ministre n'autorise une mesure qui déroge à une norme établie en vertu des paragraphes 2°, 6°, 6.1°, 10.2°, 16.1° et 17° de l'article 73, le demandeur ou le titulaire d'un permis doit lui démontrer – à la ministre – que la mesure proposée est adéquate et assure autant la santé, la sécurité, le développement et le bien-être des enfants. On a mis une nouvelle ceinture, une ceinture de sécurité sur ces règlements-là, puis on dit: On peut déroger, mais il faut que le demandeur ou le titulaire du permis démontre à la satisfaction de la ministre que la mesure proposée est adéquate et assure autant la santé, la sécurité, le développement et le bien-être des enfants. On parle de quoi, M. le Président? On parle de normes assez importantes, merci, pour la vie quotidienne des enfants. On parle de normes d'aménagement, d'équipement, d'ameublement, d'entretien et de chauffage. Ça, c'est des normes pas mal importantes, M. le Président. Ma fille est dans une garderie, si on n'est pas chauffé adéquatement, ça pose un problème quotidiennement. L'entretien, ça peut poser des problèmes. Les normes d'hygiène, de salubrité et de sécurité, encore une fois, M. le Président, c'est des règlements excessivement importants pour la vie quotidienne des enfants. Les normes de qualification pour les éducatrices, M. le Président, qui sont contenues dans ce deuxième palier de règlement auquel on peut déroger avec certaines balises, et on l'a protégé avec une ceinture de sécurité.

Là où on avait des problèmes, plusieurs problèmes, c'est que, entre autres, le nombre maximum d'enfants au permis n'était pas inclus dans ce deuxième palier. Autrement dit, la ministre aurait pu – aurait pu – déroger au nombre maximum d'enfants au permis, sans aucune obligation du titulaire de lui démontrer que le bien-être, la santé, la sécurité des enfants étaient mis en cause. J'avais beaucoup de difficulté avec ça, M. le Président, parce que le nombre maximum d'enfants au permis est, quant à moi, quelque chose qui est aussi important que les normes d'aménagement, d'équipement, d'ameublement, d'entretien, de chauffage, d'hygiène, de salubrité, de sécurité, et ainsi de suite. Alors, là, on a fait un long débat là-dessus, et je dois vous dire, M. le Président, très humblement, que la ministre a accepté la notion qu'il faut ajouter une autre ceinture de sécurité. En ce qui concerne le nombre maximum d'enfants, elle a proposé un amendement qui fait en sorte que le nombre maximum d'enfants au permis est maintenant inclus dans le deuxième palier. Elle peut toujours déroger dans des cas exceptionnels et si elle le juge d'intérêt public, mais il faut que le titulaire du permis démontre à la ministre que la mesure proposée est adéquate et assure autant la santé et la sécurité, le développement et le bien-être des enfants.

M. le Président, c'est à mi-chemin, un petit pas, la moitié de pas que, nous, on réclamait. Moi, je réclamais, au nom de l'opposition, qu'on ne pouvait pas déroger du nombre maximum d'enfants au permis en tout temps. Je trouvais les arguments généralement avancés par la ministre un peu... pas assez convaincants, mais le compromis qu'elle a proposé était de dire: Écoutez, on veut toujours cette flexibilité de vouloir le faire, mais je reconnais qu'il faut une ceinture de sécurité additionnelle. Là-dessus, elle a proposé l'amendement, et c'est à son honneur qu'elle l'a fait, M. le Président. On a accepté l'amendement, on a toujours voté sur division à cause de la question plus large.

Là où j'ai encore quelques interrogations, M. le Président, et je suis un peu déçu, je dois vous le dire tout de suite, M. le Président... C'est parce que l'argumentation utilisée par la ministre en commission parlementaire pour vouloir déroger au nombre maximum d'enfants au permis incluait – parce que j'ai le transcript de nos travaux en commission parlementaire – entre autres, la crise du verglas. C'est un cas d'exception qu'elle a soulevé pour justifier la possibilité de déroger au nombre maximum d'enfants au permis. S'il faut qu'on ferme un CPE à cause d'une situation exceptionnelle, on va peut-être vouloir transférer certains enfants à un autre CPE, de façon temporaire, pour assurer la continuité des services, dans des cas exceptionnels. J'ai dit sur-le-champ, M. le Président, que j'étais d'accord avec ça, mais que c'était effectivement un cas pas mal exceptionnel, très rare.

(12 h 50)

Elle a indiqué la situation en milieu de travail, le Casino de Montréal où il y a du va-et-vient à l'extérieur des heures normales, des chiffres qui changent, et ainsi de suite. Alors, il pourrait y avoir la situation où, pour une durée limitée de temps, on déborde le maximum d'enfants au permis. J'étais un peu moins convaincu par ça. Puis elle a soulevé la question des communautés autochtones, inuit entre autres, qui ont des valeurs un peu différentes des nôtres dans le Sud, M. le Président. Alors, je la cite, la ministre, au texte, le 26 mai: «Alors, il y a des cas vraiment spécifiques, et je tiens à bien préciser que c'est exceptionnel, c'est dans des situations exceptionnelles...» Parce qu'on a discuté de ce que ça veut dire «exceptionnel»; la ministre m'informe que des situations sont exceptionnelles quand elles ne sont pas ordinaires – correct – et ça doit toujours quand même rester dans l'esprit de la loi parce que c'est le but, c'est ça, le but, vraiment, d'avoir cette dérogation-là.

Là, j'ai été un peu surpris, M. le Président, quand j'ai reçu le partie accessible au public du mémoire déposé au Conseil des ministres par Mme la ministre en titre de la Famille et de l'Enfance et Mme la ministre déléguée quant au projet de loi. J'ai été déçu dans un premier temps, M. le Président, et j'y ai fait référence brièvement tantôt, au sujet du petit pépin au début du processus; un des pépins était autour de cette question de la partie du mémoire accessible au public. Vous le savez, M. le Président, la partie accessible au public, normalement, devrait être accessible au public, hein? C'est pour ça qu'elle est libellée «partie accessible au public», alors, en tout cas, il m'apparaît assez normal qu'on puisse avoir accès, du mémoire au Conseil des ministres, à la partie accessible au public.

Nous avons demandé cette partie accessible au public du mémoire présenté devant le Conseil des ministres le 19 mai. C'était verbal. Peut-être qu'on a fait une erreur, parce que, semble-t-il, on le fait par écrit. À l'avenir, on va le faire par écrit. On a reçu une réponse. Et j'avais demandé, le 26 mai, quand on faisait l'étude détaillée, d'avoir copie de ce mémoire parce que ça pourrait être très utile, à l'étape de l'étude détaillée en commission parlementaire, d'avoir ce document. J'ai fait la demande formelle devant la commission, le ministre m'a dit: C'est en traitement au ministère. Une réponse qui était exacte. J'ai plaidé, j'ai dit: Écoutez, là, si on va le recevoir après l'étude détaillée, ça devient un peu caduc, c'est un peu plus difficile pour nous de faire notre travail. Il est d'une utilité absolument exceptionnelle au moment de l'étude détaillée, c'est pour ça qu'on l'a demandé le 19, qui était une semaine avant d'entreprendre l'étude détaillée en commission.

Le ministre m'a répondu: C'est à l'étude au ministère. Correct, il n'y a pas moyen de forcer, on a laissé passer ça. Mais, 13 jours plus tard après la demande et une semaine après l'étude détaillée en commission, nous recevions une petite lettre très gentille: «En réponse à votre demande verbale d'accès à l'information du 19 mai à Mme Sylvie Charbonneau du cabinet de la ministre déléguée, vous trouverez ci-joint une copie de la partie accessible au public du mémoire.» Une semaine trop tard pour l'étude détaillée, deux semaines après la demande. C'est lent, semble-t-il, mais c'est peut-être dans les normes, je l'ignore, M. le Président. Peut-être que la ministre va nous dire: Oui, mais, quand vous étiez au pouvoir, c'était encore plus long. Je l'ignore, pour l'instant, M. le Président. On n'est pas là pour faire de la partisanerie politique là-dessus.

Mais, dans le mémoire, on peut lire à la page 2, au sujet d'une modification par l'ajout d'un pouvoir de dérogation, ce qui suit. Je cite: «La loi permet au ministre de déroger aux normes applicables en ce qui a trait aux locaux où sont reçus les enfants. Il est proposé d'étendre ce pouvoir de dérogation à tout cas où l'intérêt public le justifie.» Ce qui est conforme, M. le Président.

Mais c'est le deuxième paragraphe qui est intéressant: «Une telle modification pourrait s'avérer utile dans le cadre d'un développement accéléré de places et ainsi permettre d'être en mesure de mieux répondre aux besoins des parents. M. le Président, j'étais un peu surpris, parce que c'est la première fois, en lisant cette phrase-là, qu'on évoque la nécessité ou le désir d'avoir le pouvoir de dérogation afin d'aider dans l'accélération de développement de places. C'est un nouvel élément. La ministre n'en a jamais parlé, le 26 mai. Elle a parlé des cas exceptionnels, comme la crise du verglas, qui est, je le sais, un cas très exceptionnel, dans une centaine d'années, c'est arrivé une fois. Même moi j'ai été obligé d'admettre que c'est effectivement très exceptionnel. Elle a parlé du Casino de Montréal, le va-et-vient des employés, le service de garde, elle a parlé des communautés inuit et autochtones, innu, ainsi de suite. Et, effectivement, c'est des cas exceptionnels.

Elle n'a jamais fait référence au développement des places, M. le Président, et c'est, pour moi, très préoccupant, très préoccupant, parce que, si on veut effectivement donner le pouvoir de modification, de dérogation afin d'aider dans le développement accéléré des places, ça peut remettre en question la notion de qualité. On ne peut pas simplement développer des places vite pour répondre à un besoin réel sans souci de qualité. Pour moi, comme critique, comme père de famille, comme utilisateur de services de garde pour ma fille, la notion de qualité de services est primordiale, d'abord et avant tout, et de loin. S'il faut que les personnes attendent parce qu'on n'est pas capable d'offrir des services de qualité, bien, qu'elles attendent, parce que la qualité est plus importante. On n'est pas là pour apporter des amendements puis les... on dirait en anglais «warehouse». Ce n'est par un «warehouse», c'est une atmosphère où il faut développer des services de qualité.

Alors, ça m'inquiète beaucoup, cette référence, ça m'inquiète beaucoup. J'étais prêt à suivre un peu la ministre dans ses explications quand il s'agissait des pouvoirs très exceptionnels, des cas exceptionnels. C'est elle qui a soulevé cette nature de dérogation, mais le mémoire déposé devant le Conseil des ministres soulève d'autres préoccupations. Je ne dis pas que ça va complètement à l'encontre des explications de la ministre, mais il y a un nouvel élément qui est, je le répète, qu'une telle modification pourrait s'avérer utile dans le cadre d'un développement accéléré des places. On n'est pas dans les projets-pilotes. Ça, c'est autre chose, là, la ministre ne peut pas plaider que... en tout cas, je pense que cette référence du mémoire s'applique à des projets-pilotes, parce que c'est un autre ordre d'idées.

M. le Président, il me reste quelques minutes dans mon intervention, je vais utiliser jusqu'à à peu près la suspension de nos travaux, j'ai l'intention de faire une motion dans quelques secondes.

Tout ça pour dire, M. le Président, que cette incongruité dans l'argumentation de la ministre m'inquiète beaucoup, j'aimerais bien qu'elle l'explique un peu devant la Chambre au niveau de la prise en considération du rapport. Ce n'est pas tout à fait conforme, le mémoire n'est pas tout à fait conforme aux explications données par la ministre au sujet de ses pouvoirs de dérogation généraux, sur lesquels on a toujours nos oppositions et nos réserves très sérieuses, M. le Président.

Alors, compte tenu de l'heure, M. le Président, je demande d'ajourner le débat afin de pouvoir poursuivre, pendant quelques minutes, mon intervention cet après-midi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, est-ce que cette motion est adopté? Adopté.

Nous suspendons immédiatement nos travaux, et je vous souhaite à toutes et à tous bon appétit!

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 5)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place. C'est un nouveau style.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, l'article 35 du feuilleton de ce jour.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 35. L'Assemblée prend en considération...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...est-ce qu'on a déjà commencé là-dessus?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): La poursuite. Alors, l'Assemblée poursuit l'étude de la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. Et je vais reconnaître le député de NDG en lui indiquant qu'il lui reste trois minutes à son temps de parole. M. le député, la parole est à vous.

Une voix: Bravo!

M. Copeman: Merci. M. le Président, j'imagine que les députés ministériels m'applaudissent parce qu'il reste juste trois minutes. Ça doit être ça, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

Des voix: ...

M. Copeman: Oui. J'ai tout compris, M. le Président, voyez-vous.

M. le Président, avant la suspension pour notre heure du dîner, j'ai indiqué à la Chambre que nous allions voter pour la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales, malgré le fait qu'il y a un article du projet de loi avec lequel nous sommes toujours en désaccord, celui qui accorde des pouvoirs de dérogation à la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance dans des cas exceptionnels et si elle le juge d'intérêt public. Nous avons longuement débattu de cette question en commission parlementaire. Comme je l'ai indiqué à la Chambre avant 13 heures, il y a une certaine amélioration dans la substance du projet de loi, l'article 8, mais pas assez pour qu'on acquiesce là-dessus de ce côté de la Chambre, d'autant plus que la partie accessible au public du mémoire déposé devant le Conseil des ministres concernant le projet de loi n° 26 fait référence au fait que c'est peut-être utile de vouloir déroger à ces règlements très importants pour la santé, la sécurité, et le bien-être des enfants afin d'accommoder le développement accéléré des places.

Et je vais conclure, M. le Président, en disant très simplement que, malgré le fait qu'il y ait une forte demande pour les places en service de garde – de tous les types, hein – malgré le fait que le gouvernement soit sous beaucoup de pression d'accélérer le développement de ces services, quant à nous, il ne devrait jamais être question de remettre en question les normes, les règlements qui assurent la sécurité, la santé, le développement de nos enfants. La qualité avant tout, M. le Président.

Malheureusement, avec le mémoire devant le Conseil des ministres sur le projet de loi, avec les explications de la ministre, on peut se poser la question, M. le Président... Je ne dis pas qu'il y a un lien direct, je n'accuse la ministre de rien, mais il faut surtout s'assurer qu'on développe des places, des services de qualité. Un centre de la petite enfance n'est pas un «warehouse», ce n'est pas une place où on entrepose nos enfants, c'est une place où on confie nos enfants dans une atmosphère de qualité qui respecte les normes et règlements du ministère, où on suit un projet éducatif. Et je vous en remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vois, M. le député, que vous êtes intelligent et que vous êtes à l'écoute également. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur le même sujet? Mme la députée de Sauvé, la parole est à vous.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Il me fait vraiment très plaisir de prendre la parole sur le projet de loi n° 26, qui est la Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. Ça me fait plaisir, puisque le sujet de la jeunesse, et plus particulièrement des enfants, je pense que c'est un sujet qui nous tient tous à coeur. Et, comme l'a souligné mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, la notion de qualité de services, d'assurer la qualité du développement de nos enfants, je pense que c'est un sujet qui doit tous nous préoccuper.

(15 h 10)

Je tiens tout de suite à souligner, d'entrée de jeu, que l'opposition officielle est en accord avec la prise en considération du rapport de la commission parlementaire ayant étudié le projet de loi n° 26. Il est important de procéder pour continuer à assurer la qualité des services dans les centres de la petite enfance.

Je suis également d'autant plus heureuse de prendre la parole sur ce sujet que, en campagne électorale, donc l'hiver dernier, ça m'a beaucoup frappée, vraiment, le nombre de personnes qui ont tenu à me parler de la problématique – je vais employer ce mot-là – des services de garde pour les enfants. Tant dans le porte-à-porte qu'au comité électoral, il y a plusieurs personnes qui sont venues m'indiquer leurs attentes, non seulement leurs attentes – et là je ne veux pas avoir un discours vraiment alarmiste – mais néanmoins leurs préoccupations quant au maintien de la qualité des services pour nos enfants qui sont dans les centres de la petite enfance. Donc, la préoccupation, non seulement la mienne, mais la préoccupation des électeurs, des parents, c'est sur la qualité des services.

Vous me permettrez de préciser que ça me préoccupe d'autant plus que, dans la circonscription de Sauvé, que je représente, on retrouve 3 000 familles monoparentales. C'est le plus grand nombre de familles monoparentales au Québec. Et vous comprendrez que, pour donner une chance aux chefs de familles monoparentales, la plupart du temps des femmes, de retourner sur le marché du travail, il faut bien sûr leur offrir des possibilités d'emploi – ça aiderait, avec des diminutions d'impôts, ça, c'est évident – mais aussi il faut les rassurer en faisant en sorte que leurs enfants soient dans des centres de garde d'excellente qualité, vraiment avec la plus grande qualité possible. Vous me permettrez aussi de souligner que, moi-même, je n'ai pas d'enfant, mais j'ai la chance d'être la marraine d'une petite merveille qui aura trois ans la semaine prochaine et qui utilise les services de garde, entre autres en milieu familial, et que donc c'est un sujet qui m'intéresse au plus haut point.

Le projet de loi devant lequel on est, certaines des modifications qu'il apporte ont été faites à la demande de la Fédération des centres de la petite enfance et à la demande également de la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec. Ces modifications avec lesquelles nous sommes en accord touchent vraiment, justement, au coeur, entre autres, de la notion de qualité des services, puisqu'une de ces modifications concerne le calcul des ratios des enfants, entre autres, bien sûr, dans les services de garde en milieu familial. Très rapidement, M. le Président, ce que ça signifie, c'est que jusqu'à maintenant les responsables de centres de garde en milieu familial, si ces responsables avaient des enfants et si leurs assistants ou assistantes avaient des enfants, ces enfants n'étaient pas calculés dans le ratio des enfants dans le service en question. Ça faisait en sorte qu'il pouvait y avoir des disparités assez importantes, d'autant plus qu'on connaît notre société québécoise avec les familles reconstituées, ça faisait en sorte que, quelquefois, dans un milieu familial, on pouvait retrouver trois, quatre, cinq enfants et, lorsqu'on y ajoutait le ratio d'enfants dans les services de garde en milieu familial, on pouvait se retrouver avec des disparités assez importantes entre deux milieux de garde, en milieu familial. Ce projet de loi fait en sorte qu'il n'y aura plus ce qu'on pourrait appeler d'échappatoire dans ce sens-là pour les responsables de services de garde en milieu familial. Donc, les enfants, entre autres, de leurs assistants, devront être calculés dans le ratio du nombre d'enfants en milieu familial.

Il y a aussi un autre élément avec lequel nous sommes en accord, et c'est la possibilité, si une personne responsable d'un service de garde en milieu familial, si sa reconnaissance a été suspendue et révoquée, c'est maintenant la possibilité de faire appel devant le Tribunal administratif du Québec plutôt que devant la Cour supérieure du Québec. Nous sommes en faveur d'une telle modification, M. le Président, parce que ça permet de déjudiciariser le processus. Nous sommes favorables à une telle mesure. Néanmoins, comme l'a fait mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce et comme il l'a fait en commission parlementaire, nous sommes en mesure de nous poser quand même quelques questions sur l'efficacité d'une telle mesure.

Donc, sur le fond, nous sommes pleinement en accord, mais, comme l'a déjà également mentionné mon collègue porte-parole dans le domaine de la justice, il faut quand même réaliser que le Tribunal administratif du Québec, la division au niveau des affaires sociales est en ce moment submergée, littéralement submergée sous les cas à étudier; c'est plus de 1 000 cas qui sont devant le Tribunal administratif, à la division des affaires sociales. On doit se demander, même si, au niveau de la procédure, je pense qu'il est de bon ton de faire en sorte que les personnes dont la reconnaissance aurait été suspendue ou révoquée comme services de garde en milieu familial, même s'il est de bon ton de faire en sorte qu'elles ne doivent plus intenter des appels au niveau de la Cour supérieur du Québec, il faut quand même se demander quelle sera la qualité de services qu'elles retrouveront au niveau du Tribunal administratif du Québec, lorsqu'on connaît les délais d'attente extrêmement longs lorsqu'une personne fait appel devant la division des affaires sociales du Tribunal administratif du Québec.

Maintenant, M. le Président, il faut aussi aborder un volet qui n'était pas revendiqué par la Fédération des centres de la petite enfance ou la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec, et c'est tout un volet du projet de loi qui donne des pouvoirs de dérogation à la ministre. Mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce a bien expliqué que la commission parlementaire a permis aux membres de cette commission de mieux apprécier la possibilité d'accorder un pouvoir de dérogation à la ministre dans le cas, par exemple, de projets-pilotes pour des services de garde en milieu familial. On sait, M. le Président, que notre société québécoise fait en sorte, en ce moment, qu'il y a un certain éclatement au niveau du marché du travail, des gens sont soit travailleurs autonomes, bien sûr peuvent aussi travailler de nuit, et qu'il peut être intéressant de parler de projets-pilotes pour des services de garde en milieu familial, par exemple pour une garde de soir ou une garde de nuit. Et nous sommes prêts à... Nous reconnaissons que, pour une garde de soir ou de nuit en milieu familial, peut-être que certaines normes au niveau par exemple de l'éclairage, de l'équipement, de l'ameublement peuvent différer des services de garde en milieu familial de jour, qui doivent offrir, par exemple, tout un service éducatif.

Donc, nous sommes ouverts à cette dérogation dans le cas de projets-pilotes. Mais il faut voir – et pour cela on a un peu plus de réserves, M. le Président – que ce pouvoir de dérogation accordé à la ministre est également extrêmement large et va même dans le cas du nombre maximum d'enfants qui peuvent être reçus dans les locaux d'un service de garde en milieu familial. Je pense qu'il est bien connu que le Parti libéral du Québec, donc l'opposition officielle, est pour la souplesse d'aménagement dans les services tant privés que publics. Nous sommes ouverts à une notion de souplesse, mais, avant tout et vraiment prioritairement, nous voulons défendre la qualité des services de garde en milieu familial. Et il est un peu inquiétant de voir qu'il pourrait y avoir un processus de dérogation, une dérogation possible pour le nombre d'enfants maximum admis dans un service de garde en milieu familial, et cela, même si la ministre a accepté en commission parlementaire de faire sien un amendement qui avait été amené – la suggestion de mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce – qui disait qu'il faudrait au moins qu'une telle dérogation, par exemple au niveau du nombre maximum d'enfants, que le demandeur vraiment défende le fait que cette mesure est adéquate et assure la santé, et la sécurité, et le développement, et le bien-être de l'enfant.

Je me dois de terminer en disant que, malgré le fait que nous sommes en accord avec ce projet de loi, il faut se poser des questions, lorsque le mémoire, la partie publique, accessible au public, du mémoire, déposé au Conseil des ministres concernant ce projet de loi mentionnait que la dérogation au niveau du nombre maximum d'enfants dans un milieu de garde pourrait être utile dans le cadre d'un plan de développement accéléré des places. M. le Président, vous comprendrez qu'on doit exprimer notre inquiétude au niveau du maintien de la qualité des services de garde en milieu familial. Je vous remercie, M. le Président.

(15 h 20)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Sauvé, de votre intervention. Nous continuons l'étude de la prise en considération de la Commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 26, et je vais céder la parole au député de Shefford. La parole est à vous, M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. On sait que c'est un sujet qui préoccupe énormément nos concitoyens. D'ailleurs, vous, dans votre comté, ma collègue de Sauvé, certainement mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce et tous les collègues de l'Assemblée nationale ont eu souvent l'occasion d'entendre des parents, d'entendre des responsables de services de garde, surtout depuis quelques semaines et quelques mois, dans leur bureau de comté. Il est de toute évidence que c'est un sujet qui préoccupe énormément la population.

On est devant un projet de loi qui permet, à un certain égard, entre autres, de faire des appels à la Commission des affaires sociales, par exemple, si votre reconnaissance est suspendue en ce qui concerne les services en milieu de garde. Donc, M. le Président, c'est un apport additionnel à la loi, aux services de garde, qui est donné par ce projet de loi. Comme le disait ma collègue de Sauvé, il y a quand même des difficultés qui demeurent, parce qu'il est bien connu que la division des Affaires sociales est présentement, comme le disait ma collègue de Sauvé, submergée. J'étais pour dire «engorgée» mais c'est vraiment «submergée». Et vous avez sûrement eu l'occasion, comme moi, de recevoir des commettants au bureau de comté qui vous signifient qu'ils sont en attente d'être entendus dans différentes causes, dans la division des Affaires sociales. Donc, possiblement, il serait souhaitable que des aménagements soient faits pour permettre d'accélérer les auditions, les causes, à la division des Affaires sociales.

Le projet permet également de faire certaines dérogations à la loi. Dans l'ensemble, M. le Président, ça permet... On n'a rien contre les projets-pilotes; d'ailleurs, on doit les souhaiter parce que ça fait avancer beaucoup de choses, ça nous permet d'évoluer dans toutes les sphères de la société. Donc, c'est aussi souhaitable, ça nous permet de nous adapter au milieu de travail.

Dans mon comté, plusieurs citoyens souhaitent, par exemple, voir des projets-pilotes pour les gardes de nuit. On sait que nous devons absolument nous adapter aux conditions de travail actuelles. Présentement, il y a de plus en plus de gens qui n'ont pas un horaire régulier, ou qui travaillent de soirée, ou qui travaillent de nuit. Les garderies actuelles sont adaptées aux gens qui ont un horaire de travail régulier, de jour; donc, on peut souhaiter voir des projets-pilotes s'adapter aux conditions de travail actuelles.

La loi permet aussi certaines dérogations. Et là, M. le Président, j'aimerais vous entretenir plus particulièrement de l'article 8; l'article 8, d'ailleurs, qui a chatouillé un peu plus le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je vois que la ministre arrive et sourit lorsque je lui parle de l'article 8. L'article 8 nous soulève un lot d'interrogations puisqu'il permet, de façon très discrétionnaire, à la ministre, en fin de compte, suivant l'intérêt public – et là l'intérêt public n'est pas décrit, c'est suivant des causes d'intérêt public qu'elle aura bien décidé – de déroger à la loi.

M. le Président – et puis ça me fait de la peine de dire ça – il semble que le gouvernement, pour eux, ça devient une méthode de gouverner. Ce n'est pas seulement dans ce projet de loi là qu'on voit des clauses ou des articles qui permettent de déroger à une loi, qui permettent un pouvoir discrétionnaire excessivement grand au gouvernement, donc à la ministre – puis je vois la ministre qui réagit – sauf qu'il y a des projets de loi qui sont présentement à l'étude, et que j'ai eu l'occasion de débattre en commission parlementaire, qui ont des similitudes.

Et, pas plus tard que ce matin, M. le Président, vous vous en souviendrez, la députée de Bonaventure posait une question sur le projet de loi sur Hertel–des Cantons et soulevait une opinion du Barreau du Québec qui se questionnait sur ce genre de clauses là dans une loi, sur ce genre de modèle législatif que le gouvernement du Québec est en train de mettre sur pied. J'ai sorti quelques lignes de cette opinion juridique, adaptées à l'article 8 du projet de loi n° 26 qui nous occupe. Et, par similitude... Puis vous conviendrez que l'opinion du Barreau nous permet de s'interroger sur la façon dont le gouvernement actuel légifère. Puis retenez bien ces phrases-là. J'ai sélectionné trois phrases dans l'opinion du Barreau, dont la ministre, à l'avenir, devrait s'inspirer lorsqu'on dépose un projet de loi.

M. le Président, je vous lis ça. Et, vous qui êtes avocat, vous comprendrez très bien que les grands principes de démocratie doivent être respectés. Et je vous lis la page 2 de l'opinion du Barreau du Québec, datée du 9 juin 1999. Donc, ce n'est pas tellement loin, c'est une opinion qui est récente, j'imagine qu'elle est toujours en vigueur. Le bâtonnier, M. Denis Jacques, nous dit que «cette législation – on parle de la loi sur Hertel–des Cantons mais on peut facilement, par analogie, l'appliquer à la loi n° 26, M. le Président – soulève également des inquiétudes en regard du principe de l'égalité devant la loi».

L'article 8 permet à la ministre d'intervenir à peu près dans toutes les conditions de garde. On parle d'aménagement, d'équipement, du nombre d'enfants, de l'hygiène, de la salubrité, de la sécurité, etc. La seule chose où elle ne peut pas intervenir, c'est dans les budgets. Mais, dans les conditions de garde des enfants, ça, elle peut intervenir, invoquant l'urgence.

M. le Président, je continue une autre phrase du Barreau du Québec. «N'y a-t-il pas là un déséquilibre qui pourrait être de nature à miner – M. le Président, à miner – la crédibilité du principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi?» Donc, même le gouvernement doit respecter les lois, les citoyens, les citoyens ordinaires, les citoyens corporatifs. Le gouvernement doit respecter les lois. Et, lorsqu'on a des articles qui permettent de déroger à la loi, en fin de compte, on rouvre la porte puis on dit: Si ça adonne, la loi ne s'applique pas. On décide tout seul, on ne vous posera pas de questions. On doit se questionner sur ce genre de grand principe là qu'on veut établir au Québec.

Je vous lis une autre phrase, M. le Président. «Le Barreau du Québec s'inquiète de cette façon de légiférer.» Donc, il n'y a pas seulement l'opposition qui s'inquiète des façons de légiférer du gouvernement du Québec, il y a le Barreau du Québec, à moins que le leader du gouvernement nous parle du Barreau comme d'un groupuscule. Mais, M. le Président, vous êtes membre du Barreau et je pense que le Barreau est tout à fait légitime d'émettre ces opinions-là et représente une opinion qui est majoritaire dans le monde juridique du Québec.

Je continue, M. le Président. «Le respect du principe de primauté du droit constitue une condition incontournable de la liberté des individus dans notre société et l'État, comme toute autre personne, y est assujetti. En matière de respect des lois, nous croyons que le gouvernement a une obligation d'exemplarité.» Le gouvernement se doit d'être exemplaire.

M. le Président, nous ne sommes pas contre le projet de loi, sauf que nous mettons le gouvernement en garde – nous le mettons en garde – contre ce genre d'article qui permet, en fin de compte, de passer par-dessus les droits des gens, ce qui donne au gouvernement la possibilité de passer à côté des lois. M. le Président, on l'a vu trop souvent. Depuis quelques mois en particulier, on l'a vu dans Hertel–des Cantons. Par exemple, il y a une loi sur les courses de chevaux. Jusqu'à tout dernièrement le gouvernement voulait nommer une partie du conseil d'administration à vie, choisissait tout son monde pour siéger à ce conseil-là. En fin de compte, en nommant des gens à vie, on créait une monarchie assujettie au gouvernement du Québec. On l'a vu aussi dans la loi au sujet de la rivière Churchill, où on ne veut pas entendre les autochtones, les principaux concernés par le projet de loi.

Donc, M. le Président, je pense que le gouvernement doit faire un examen de conscience et éviter de légiférer avec des articles comme l'article 8 de la loi n° 26 qui permet de déroger aux lois. Le gouvernement doit avoir les mêmes droits que les citoyens, respecter ses lois et faire en sorte qu'on n'introduise pas des articles qui nous permettent de passer à côté de ces lois-là, à côté de ces règlements.

(15 h 30)

Donc, M. le Président, tout ça pour vous dire que nous allons voter en faveur du projet de loi, mais aussi mettre en garde le gouvernement suivant les façons qu'il a de faire les lois présentement, et peut-être durant l'été faire un examen de conscience et nous revenir avec des meilleures lois à l'automne. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Shefford. Nous poursuivons le débat sur la prise en considération du projet de loi n° 26, et je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, le porte-parole officiel de l'opposition en matière de travail. M. le député de LaFontaine, la parole est à vous.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, le projet de loi n° 26 s'inscrit dans le cadre de la réorganisation des services de garde à l'enfance. On sait que le gouvernement, et c'est là son privilège, a décidé de faire en sorte de revoir l'ensemble de la façon dont les enfants pouvaient profiter des services de garde au Québec, et particulièrement, bien sûr, on parle des enfants en âge non scolaire. On parle des enfants dont les parents travaillent. On parle des enfants qui, qu'on appelle communément... vont dans les garderies le matin, et il y a un volet aussi qui regarde les enfants qui sont en garde familiale. La garde familiale, pour les citoyens qui nous écoutent cet après-midi, c'est lorsque vous amenez votre enfant dans une maison ou dans un appartement où une mère de famille décide de garder des enfants en plus des siens.

Certes, ça se fait depuis très longtemps, vous allez dire, et ça se fait dans certains cas de manière officielle et dans d'autres cas de manière non officielle. Alors, il y avait, dans le temps, des ententes avec la voisine, avec la tante, avec d'autres personnes, et on disait: Je t'amène les enfants contre une rétribution, bien souvent, ou à l'occasion, pas officielle. Bien, cette personne prenait soin des enfants pour la semaine ou pour la journée, en tout cas, mais durant les jours ouvrables de la semaine.

C'est un endroit, M. le Président, où, certes, si on laisse le libre arbitre aux citoyens de décider où ils veulent faire garder leurs enfants et par qui ils veulent qu'ils soient élevés et éduqués... Parce que rappelons-nous quand même que les enfants en âge préscolaire qui passent leurs journées dans une garderie ou dans un milieu de garde familial, eh bien, ils ne font pas juste y manger, dormir et jouer, ils y reçoivent le début d'une éducation ou d'une manière de vie ou d'apprendre à vivre, comparativement au système de garde en garderie, qui, lui, est de type scolaire, on va dire. On dit «type scolaire» non pas parce que c'est un établissement scolaire, mais de type d'encadrement scolaire avec une monitrice ou une éducatrice, avec d'autres enfants, une dizaine ou 12 par groupe; et ils peuvent se retrouver à trois ou quatre enfants en milieu familial.

Alors, c'est là, M. le Président, certainement une manière très, très intéressante de faire garder ses enfants, et c'est surtout l'occasion de plus de souplesse dans le système. Pourquoi plus de souplesse dans le système? Parce que cela ne nécessite pas, de la part des gouvernements ou de la collectivité, l'investissement majeur dans des systèmes de garderie traditionnels. Ça ne veut pas dire pour autant... Et, même si ça fait beaucoup plus appel à l'initiative privée et aux talents privés que la personne qui travaille dans une garderie de type conventionnel, il n'en reste pas moins que ça prenait, et ça prend, un certain nombre de réglementations. Car, en effet, on ne peut pas laisser nos enfants comme ça.

Et moi qui suis père de famille, qui ai deux enfants dont un va à la garderie, qui a quatre ans et demi, et dont l'autre, qui a 18 mois, va commencer à l'automne la garderie, eh bien, soyez assuré, M. le Président, le petit pincement que nous avons le premier matin où on l'amène à la garderie... D'abord, on traîne l'enfant, puis il nous regarde: Oui, est-ce qu'il va m'abandonner là? Est-ce qu'il va me laisser? Et puis je pense que le plus gros pincement, c'est nous autres qui l'avons pour nous-mêmes parce qu'on laisse notre enfant, et c'est la première fois de la vie où on va le laisser pour plus que quelques heures avec une gardienne ou avec un parent ou une parente, et on a toujours ce questionnement, cette inquiétude: Que fait-il dans la journée? Que lui arrive-t-il? Comment est-il traité? Est-il heureux?

On sait qu'à cet âge-là ils ne peuvent pas communiquer, ou pas beaucoup, et qu'ils ont de la difficulté à faire comprendre tout ce qu'ils peuvent avoir ou connaître dans une journée. Alors, l'importance, donc, dans ce système de garderie, premièrement, traditionnelle, c'est que ça a beau être des normes de haut niveau, des standards de haut niveau, que ça soit d'abord, bien sûr, de sécurité physique, que ça soit d'espace dans les locaux, que ça soit de nourriture, d'alimentation, que ça soit d'habileté des monitrices qui, bien sûr, vont s'en occuper, ou des éducatrices qui vont devoir s'en occuper, bon, d'avoir les compétences et les qualifications professionnelles nécessaires, d'avoir la moralité nécessaire, d'avoir les normes d'hygiène nécessaires pour les enfants et bien sûr la sécurité physique...

Ça, c'est les normes, c'est les choses auxquelles on pense en premier, le reste étant de dire, aussi en premier, mais c'est-à-dire, bon: Est-ce que ce qu'il va faire va être pour lui intéressant, va être pour lui enrichissant – ou pour elle si c'est une petite fille – est-ce qu'il va être heureux dans cet endroit? Et, quand même on y mettrait toutes les normes, on ne peut pas changer grand-chose, ce n'est pas normalisable, ça, hein. Le bonheur, et la joie, et l'entrain, dans une garderie, ce n'est pas dans les normes du ministère. Il n'y a aucun ministère, aucun gouvernement qui peut codifier ça dans un code, dans un projet de loi qui s'appellerait le projet de loi n° 26 ou le projet de loi n° 2025. On ne peut pas codifier le bonheur, on ne peut pas codifier la joie. Ça, ça dépend des gens qui y travaillent, des gens qui ont à s'occuper de nos enfants.

Dans le système en milieu familial, c'est un peu plus compliqué, parce que, là, on doit se fier à une impression que nous avons, parce que c'est un choix personnel, dans un environnement différent qui est peu codifié ou qui est moins codifié et moins réglementé, certainement, que la garderie traditionnelle. Alors, là, M. le Président, je vois que le projet de loi n° 26 se penche sur un certain nombre de paramètres, va amener d'autres paramètres en ce qui concerne ces services de garde en milieu familial et fait en sorte d'édicter un certain nombre de règles.

Je crois que c'est là des choses très intéressantes et tout à fait normales, car, en effet, les gens qui ont fait le choix d'ouvrir ce service de garde en milieu familial, eh bien, doivent eux aussi bien sûr, parce qu'ils sont responsables d'enfants qui ne sont pas les leurs et parce qu'ils reçoivent une rémunération, une rétribution pour ce travail, faire en sorte de maintenir un certain nombre de standards, de normes et de réglementations afin d'assurer ce que je disais qui est assuré normalement par le cadre réglementaire dans les garderies traditionnelles où il y a beaucoup d'enfants.

Alors, ça va être des cadres bien sûr de sécurité, d'hygiène, de propreté, d'espace aussi, d'espace vital. Il ne faut pas qu'il y ait, dans un petit appartement, avec une brave dame qui garde, 15, 16 enfants ou 12 enfants. Il faut que ça corresponde au nombre de personnes qui peuvent être là. Est-ce qu'elle a une assistante? Est-ce qu'il n'y a pas d'assistante? Et je trouve tout à fait normal, lorsqu'il s'agit de la sécurité et du bien-être de nos enfants, que l'État... même si je ne suis pas forcément en faveur que l'État rentre dans la vie et dans toutes les choses, là. Moi, je crois qu'on doit laisser le plus de libre arbitre possible aux citoyens et aux Québécois et aux Québécoises, mais, dans certains domaines très sensibles, je crois que le rôle de l'État est de voir à définir un certain cadre, un certain encadrement. Et, dans les garderies en milieu familial, c'est tout à fait le domaine dans lequel on doit assurer ce genre d'encadrement.

Alors, M. le Président, le projet de loi n° 26 répond à un certain nombre de ces choses-là et donne à la ministre les moyens, aussi, d'agir et de réagir si l'encadrement ou si les normes ne correspondent pas ou ne correspondent plus à ce qui est la normalité, ce qui est prescrit. Alors, elle peut révoquer le permis. Elle peut le donner, mais c'est évident que, lorsqu'on peut donner un permis, on peut le révoquer. Alors, lorsqu'on révoque un permis, eh bien, c'est parce que les gens ne se conforment pas à ce qui est normal. Je crois que c'est, dans ce cas-là, quelque chose d'intéressant.

La ministre se donne aussi le choix de ne pas suivre toutes les normes qui sont édictées normalement, certaines dérogations. J'ai retenu, dans le projet de loi, qu'on parle de projets-pilotes. On peut voir ça comme étant vouloir se soustraire aux lois puis faire deux mesures ou... Peut-être que les gens ont raison, mais, moi, je vois ça un peu plus ouvertement. C'est vrai que, dans la société, il faut innover. Toutes choses étant en pleine évolution constamment, la société évoluant, surtout à l'époque que nous connaissons, il faut pouvoir garder une certaine liberté de mouvement.

Je me souviens, moi, lorsque la ministre de Dorion, Violette Trépanier, était ministre responsable des garderies, avoir été à son bureau parce qu'une garderie de ma circonscription avait des problèmes avec les Services de garde parce qu'il y avait un lavabo qui était dans un coin d'une pièce alors qu'il aurait dû être dans l'autre coin. Il avait fallu – si vous permettez, M. le Président, avec consentement, pour terminer cet exemple frappant – que j'amène moi-même Mme la ministre qui passait dans l'est de Montréal à un moment donné visiter cette garderie qui était ultramoderne et ultraclean, une construction très, très belle à Rivière-des-Prairies, mais à qui on faisait des problèmes et à qui on demandait de changer ce lavabo. Les gens ne comprenaient pas, et la ministre s'est rendu compte, à l'époque, qu'elle n'avait pas le pouvoir de déroger à la norme qui faisait qu'il y avait un lavabo avec une porte spéciale dans ce coin de la garderie, et ça a coûté quelques milliers de dollars aux citoyens.

(15 h 40)

Et là, lorsque je vois que – en terminant, M. le Président – la ministre se donne la possibilité de déroger aux normes, j'espère que c'est pour des cas comme celui-là, entre autres, mais que c'est aussi pour pouvoir faire des projets-pilotes. Ça pourrait être pour faire d'autres expériences de garderies. Et je vois qu'elle se donne un an de délai pour revoir les choses, alors je crois, M. le Président, en terminant, bien sûr, que nous ne pouvons pas faire autrement, comme mes autres collègues, que d'être pour ce projet de loi là, tout en étant vigilants sur les nouveaux pouvoirs que la ministre se donne au point de vue de dérogation et voir s'ils sont utilisés, bien sûr, d'un point de vue positif et non pas pour se soustraire aux lois normalement établies. Alors, je suis pour le projet de loi, mes collègues sont pour le projet de loi, et il nous fera plaisir de voter avec la ministre cette fois-ci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de LaFontaine. Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. Et je vais reconnaître le prochain intervenant, il est le porte-parole de l'opposition officielle en matière de sports et loisirs et député d'Anjou. M. le député, je vous écoute.


M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: M. le Président, merci. Il me fait plaisir d'intervenir en ce moment au niveau du projet de loi n° 26 qui vise à modifier la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance.

M. le Président, je ne sais pas s'il va pleuvoir ce soir quand je vais retourner dans mon comté, mais c'est la deuxième fois aujourd'hui que je prends la parole dans le but de soutenir un projet de loi qui est apporté par le gouvernement. Un peu comme ce matin, je pense que c'est quand même important comme député, parce qu'on est tous... Les 125 députés sont amenés à légiférer, à prendre des positions et à intervenir sur des projets de loi, puis je pense que c'est de bonne guerre puis que c'est tout à fait légitime, lorsqu'un projet de loi a des visées intéressantes puis qu'il vise justement à simplifier puis à améliorer la qualité des gens, que, comme opposition, on puisse apporter une voix constructive. Je pense que ça a été fait au niveau des commissions parlementaires durant le projet de loi, et c'est pour ça que ça me fait plaisir d'intervenir ici aujourd'hui.

J'ai peut-être une perspective différente, M. le Président, à ce niveau-là. Moi, évidemment, je n'ai pas encore d'enfants, mais, si je regarde autour de moi au niveau des jeunes de ma génération, ce que je peux constater, c'est que, contrairement à ce qu'on a pu vivre au niveau de nos parents, on a des familles beaucoup plus restreintes. Puis une des choses dont on discute souvent entre nous, c'est inévitable, c'est que les deux conjoints – puis je pense que c'est tout à fait légitime – que les deux conjoints, maintenant – puis c'est la réalité – travaillent. Je pense que, comme gouvernement, comme État, on se doit de se poser des questions puis on se doit de faciliter, dans la mesure du possible, sans être démesurément interventionniste... mais on se doit de faciliter les choix que les jeunes familles vont porter.

La conséquence inévitable du fait que les deux conjoints puissent travailler, c'est le fait que les enfants, on doit s'en occuper, on doit les garder. Puis c'est un peu dans ce sens-là que le projet de loi intervient. Puis c'est pour cette raison-là que, comme député, j'ai l'intention, tout comme les membres de l'opposition officielle, d'appuyer cette initiative, ce projet de loi là de la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, mais en y apportant évidemment certaines critiques positives, comme ça a été apporté par mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce en commission parlementaire.

M. le Président, une des choses que j'ai remarquées quand j'ai amorcé mon porte-à-porte au mois d'août passé, puis c'est un sujet qui revenait très fréquemment... Moi, je vous l'ai mentionné, je n'avais pas d'enfants. C'est évident que c'était peut-être une préoccupation moins immédiate, mais c'est une préoccupation que plusieurs citoyens m'ont soulevée, entre autres au niveau des gardes. Je me rappelle, entre autres, un soir, d'avoir rencontré des gens qui avaient une garderie en milieu familial, qui avaient des préoccupations bien légitimes et qui m'avaient posé des questions à ce moment-là. J'avais tenté de leur répondre au meilleur de ma connaissance. Mais il y a définitivement un intérêt puis une préoccupation tout à fait légitime, puis je pense que le projet de loi amène certains éléments de réponse. Là-dessus, je pense qu'il faut s'en réjouir.

Entre autres, au niveau du calcul des ratios, je pense que ça a été soulevé entre autres par la députée de Sauvé, c'est d'assurer une certaine uniformité, de s'assurer évidemment, là... Parce qu'on vit d'autres réalités. Je le mentionnais, les gens qui m'entourent, nous, on vit une réalité différente de ce que mes parents ont pu vivre. Il faut s'adapter à ça, mais il faut s'adapter aussi... Les familles reconstituées, ça a été mentionné. Ça fait que je pense que, au niveau du calcul des ratios, c'est un élément positif qui est amené.

Au niveau du droit d'appel pour les gens dont le permis peut être suspendu ou révoqué, je pense que l'idée est valable, l'idée est intéressante. Seulement, j'espère que la ministre pourra avoir... comment pourrais-je dire, ajuster le discours avec la ministre de la Justice pour s'assurer... Parce qu'il y a un élément bien important, puis je pense que c'est l'élément qui est visé par le projet de loi, c'est d'alléger la tâche des gens qui veulent aller en appel, de faciliter le traitement de leur demande. Moi, c'est un thème auquel je suis sensible, étant avocat de formation. C'est quelque chose qui est souvent reproché au système judiciaire, que ça paralyse les gens. Les gens ont l'impression que c'est lourd, que c'est compliqué.

Je félicite l'initiative qui est apportée, qui est de sortir, si on veut, le litige de la Cour supérieure qui est beaucoup plus... Le carcan est peut-être plus lourd pour les gens. Mais il faut s'assurer que ces dossiers-là, justement, puisque c'est l'idée, soient traités rapidement. Ça fait qu'il faudrait s'assurer, je crois, avec la ministre de la Justice, que le dossier soit traité beaucoup plus rapidement qu'en Cour supérieure, que le citoyen, que la personne qui exerce ce recours-là se sente beaucoup plus à l'aise aussi de le faire. Je pense que c'est l'objectif. L'idée est noble, je le mentionne en toute franchise, mais il faudra s'assurer que non seulement dans la théorie, mais dans la pratique... Et je pense que c'est là que c'est important, M. le Président, c'est dans la pratique. Puis c'est souvent là, comme parlementaires, qu'on est confrontés. C'est qu'on émet des belles théories, mais, dans la pratique, ça ne se traduit pas. Et je peux juste souhaiter que la ministre s'assure que, dans la pratique, l'idée et les motivations qui sont derrière cette idée-là se traduisent de façon bien concrète.

M. le Président, un des éléments – et puis je ne serai pas le premier à le soulever – qui mettent les gens de l'opposition un peu plus sur leurs gardes et qui nous amènent à amener des réserves ou, à tout le moins, à souligner la situation à la ministre, c'est certainement le pouvoir discrétionnaire qui lui est accordé. J'écoutais mon collègue député de LaFontaine exprimer un cas bien précis où le pouvoir discrétionnaire de la ministre pouvait être utilisé pour faciliter, justement, la vie des gens qui veulent tout simplement oeuvrer dans le domaine de garderies en milieu familial. À ce niveau-là, moi, je n'ai aucun problème là-dedans. Je pense que c'est le rôle d'une ministre ou de n'importe quel parlementaire que de faciliter la vie des gens.

Seulement, je la mets en garde parce que, dans le projet de loi, si on regarde, M. le Président, le pouvoir discrétionnaire est très, très large, le pouvoir discrétionnaire est large. Et, quand il y a un pouvoir discrétionnaire sur bon nombre de sujets... Puis, si je regarde le critère qui est dans les cas où l'intérêt public le justifie, je la crois de bonne foi, M. le Président. Je connais ma voisine de comté, on s'est rencontrés à quelques reprises. Je suis convaincu qu'elle est de bonne foi.

Seulement, et ça me rappelle une citation d'un de mes professeurs de droit international public qui est bien connu ici, en cette Assemblée, Jacques-Yvan Morin, qui, dans le cadre d'un de ses cours, nous avait donné la citation – je la cite de mémoire – qui disait: Le pouvoir rend fou, mais le pouvoir absolu rend absolument fou. Et ce que je veux dire, je ne mets pas du tout l'état d'esprit de ma voisine de comté et ministre en cause, mais, si je peux faire le parallèle avec le cas présent, c'est que plus on donne des pouvoirs, plus la tentation... Et, si ce n'est pas elle, ça sera peut-être quelqu'un qui lui succédera. Ou tout simplement encore, c'est que, puisqu'elle a ce pouvoir-là, M. le Président, des groupes de pression pourront peut-être venir la voir, lui dire: Vous l'avez, le pouvoir. Donnez-nous ci, donnez-nous ça. Ça fait que, dans le fond, c'est une arme à double tranchant également pour elle, puisqu'elle se retrouve prise avec un pouvoir qui est très large.

Comme je vous dis, je lui réitère, je suis convaincu de sa bonne foi, de ses bonnes intentions, mais il y a néanmoins un élément potentiellement dangereux parce que le pouvoir discrétionnaire, quand le critère est dans les cas où l'intérêt public le justifie, je pense qu'il y aurait peut-être eu lieu, et je le dis bien simplement, d'encadrer ce pouvoir discrétionnaire pour donner peut-être un pouvoir discrétionnaire exactement dans le sens que mon collègue de LaFontaine soulevait: un pouvoir discrétionnaire qui vise ni plus ni moins qu'à faciliter l'application de la loi, moi, ce que j'appellerais le gros bon sens. Souvent, on l'entend, mais il me semble que la loi, telle qu'elle est rédigée, ou du moins l'application qu'on en fait, va à l'encontre du gros bon sens.

(15 h 50)

Rien contre le fait de donner le pouvoir discrétionnaire à la ministre d'appliquer la loi ou de l'interpréter dans la voie du gros bon sens. Seulement, je lui rappelle, et c'est important, je pense que, quand on donne un pouvoir discrétionnaire, il est à souhaiter qu'elle l'applique avec beaucoup de discernement. Mais il faut quand même toujours en tenir compte. Ce qui ne nous empêchera pas, M. le Président, d'appuyer le projet de loi qui a été présenté par la ministre. Avec les amendements qui ont été apportés, toutes les discussions qui ont été faites, je pense qu'en bout de ligne les familles québécoises... et j'espère, moi, comme futur utilisateur, que j'y trouverai mon compte. Mais je réitère à nouveau peut-être ce petit bémol que j'apporte à ce projet de loi.

À nouveau, ça m'a fait grand plaisir évidemment d'être intervenu sur cette motion-là puis de prouver encore une fois que, comme opposition et comme gouvernement, les 125 députés, une fois que tout est fait, je pense qu'on a tous et chacun le même objectif, qui est celui d'améliorer la qualité de vie des citoyens et des citoyennes du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député d'Anjou. Nous poursuivons le débat sur la prise en considération du projet n° 26. Et je vais céder la parole à la porte-parole officielle de l'opposition en matière de dossiers de l'autoroute de l'information et des services gouvernementaux, Mme la députée de La Pinière. Mme la députée, vous avez la parole.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, à mon tour, je suis extrêmement heureuse d'intervenir sur le projet de loi n° 26 à cette étape de la prise en considération du rapport. Le projet de loi n° 26 est la Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. J'interviens évidemment à titre de député de La Pinière, mais aussi à titre de mère qui a des enfants, qui a utilisé les services de garde. Ils sont un peu grands maintenant pour aller à la garderie. On essaie de les accompagner au niveau de l'école secondaire. Mais, pour avoir utilisé les services de garde, M. le Président, je peux vous dire que je sais de quoi je parle. Et je comprends les parents qui me rencontrent et qui me parlent de leurs difficultés par rapport aux services de garde.

Donc, M. le Président, ce projet de loi, c'est un projet de loi de 12 articles. Il a été soumis à l'adoption de principe, je crois, le 13 mai dernier. Mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce et porte-parole de l'opposition en matière de dossiers de la famille et de l'enfance a eu l'occasion de présenter, avec éloquence d'ailleurs, une argumentation assez étoffée en rapport avec ce projet de loi. Il a exposé les raisons qui font que notre formation politique accorde son appui à ce projet de loi. Il a également exprimé des réserves et des questionnements par rapport à certaines dispositions du projet de loi n° 26.

M. le Président, à l'étude détaillée du projet de loi, qui a eu lieu le 26 mai dernier, on a pu clarifier un certain nombre d'articles, de zones grises et de points de désaccord aussi, parce qu'il y en a eu à l'étude de principe. Et nous voilà maintenant en train de disposer finalement du projet de loi n° 26.

Alors, comme députée de La Pinière et porte-parole de l'aile parlementaire libérale pour la région de la Montérégie, j'ai eu l'occasion de traiter de ce dossier de façon plus intensive lorsqu'il y a eu la fameuse réforme des services de garde qu'on a communément appelée les garderies à 5 $. À cette époque, j'ai eu l'occasion de rencontrer de nombreux parents qui étaient très inquiets par rapport aux implications que ça pouvait avoir. J'ai également rencontré à de multiples reprises les propriétaires des garderies privées, dans mon comté d'abord et également des garderies privées de la rive sud, dans le comté de Taillon. La ministre de la Famille et de l'Enfance était, à l'époque, la députée de Taillon, précisément. Et il y a eu, M. le Président, on se rappellera, de nombreux problèmes à ce moment-là, compte tenu d'abord de la restructuration mais aussi des conditions dans lesquelles s'est faite cette restructuration.

Je représente un comté, une région où les jeunes familles constituent un segment important de la population. J'ai donc travaillé avec le milieu sur ce dossier-là, M. le Président, et je peux dire que, si aujourd'hui je prends la parole sur ce projet de loi, c'est parce que c'est un projet de loi qui me tient à coeur. Ça touche un dossier qui me touche, qui m'affecte, sur lequel je travaille avec les gens du milieu.

Disons, M. le Président, que, dans cette question de services de garde, il y a un certain nombre de constats incontournables. D'abord, selon une enquête sur les besoins des familles en matière de services de garde qui a été effectuée par le Bureau de la statistique du Québec récemment, près d'un enfant sur trois n'a pas accès à un service de garde. Et on parle ici seulement des enfants qui sont éligibles, c'est-à-dire qui rentrent dans la tranche d'âge permise.

On sait aussi que, d'ici 2005 à 2006, c'est 100 000 places en services de garde qu'il faut combler pour répondre à la demande. La région de la Montérégie est affectée de façon dramatique par le manque de places, M. le Président, les listes d'attente. C'est une région de 1 300 000 habitants, une région où la démographie est en croissance, mais où le nombre de places est très, très, très déficitaire, et ce, toutes catégories confondues.

C'est également en Montérégie qu'on trouve les MRC les plus déficitaires en services de garde, notamment la MRC Lajemmerais et la MRC Champlain, la MRC Champlain qui inclut la ville de Longueuil où se trouve le comté de la députée de Taillon et ministre en titre du portefeuille de la Famille et de l'Enfance. Se trouvent aussi dans cette MRC la ville de Saint-Hubert, la ville de Brossard, qui correspond au contour du comté de La Pinière, et je sais pertinemment, pour avoir discuté avec de nombreuses familles et de nombreuses personnes impliquées directement dans les systèmes de services de garde, que nous avons de gros problèmes dans la région.

Le déficit total est de l'ordre de 2 572 places pour la seule MRC Champlain. À Brossard, où on compte à peu près 70 000 habitants, il y a 10 garderies de toutes catégories qui totalisent 539 places, dont 356 places subventionnées. Donc, dans le comté de La Pinière, qui correspond à la ville de Brossard, le déficit du nombre de places de services de garde en installation est de 626 places, ce qui est considéré comme un gros déficit selon les normes mêmes du ministère de la Famille et de l'Enfance. Donc, je profite de cette occasion qui m'est donnée pour rappeler à la ministre la réalité à laquelle des centaines de parents, en Montérégie, sont confrontés. Ils sont confrontés aussi ailleurs au Québec à cette réalité, mais chez nous, M. le Président, c'est assez criant. Ça pose d'énormes problèmes, d'autant plus que nous avons aussi dans cette région, parallèlement à l'augmentation, à la croissance démographique, parallèlement à la croissance et à l'arrivée de jeunes familles – donc, les besoins sont là – il y a également une croissance de la monoparentalité et de la pauvreté, et ce sont des facteurs aggravants qui font que les besoins en services de garde s'en vont croissant.

Alors, il faudrait que la ministre comprenne – et je l'interpelle aujourd'hui – qu'il est urgent de répondre aux besoins criants de la population montérégienne en services de garde. Il faut également envisager la levée du moratoire sur les garderies privées qui est prévue pour le 2 juin 2002. Et, pour nous, ça aurait pu débloquer un certain nombre de places si ce moratoire-là avait été levé.

(16 heures)

La situation qui se vit en Montérégie affecte, bien entendu, d'autres régions au Québec. C'est pourquoi l'opposition officielle apporte son appui au projet de loi n° 26 sur les services de garde en milieu familial. C'est parce que nous avons à coeur et nous avons le souci de servir et de bien servir les familles québécoises, car, malgré le développement des places en installation, c'est dans le milieu familial que l'on enregistre la croissance la plus significative. D'abord, la plupart des 19 700 places annoncées pour cette année sont créées et seront créées en milieu familial. Au 31 mars 1999, le pourcentage des places en centres de la petite enfance est tombé de 45 % en 1998 à 41 % en 1999, alors que les places en milieu familial sont passées de 26 % en 1998 à 34 % en 1999. Donc, on voit la tendance qui s'accroît dans les services de garde en milieu familial. Le projet de loi n° 26 vient donc baliser ce secteur et il limite le nombre d'enfants placés en milieu familial, en précisant que les enfants de la personne responsable du service de garde en milieu familial ainsi que les enfants du conjoint doivent être inclus pour les fins du calcul du nombre d'enfants reçus en garde familiale.

M. le Président, il y a plusieurs choses à dire là-dessus, mais je m'arrêterai là, faute de temps, considérant que mon temps est écoulé, et je dirai à la ministre qu'il y a des besoins, des besoins urgents, et la Montérégie est en manque et en déficit, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de La Pinière. Alors, nous en sommes toujours à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 26, et je cède maintenant la parole au porte-parole officiel de l'opposition en matière de justice et député de Marquette. M. le député, la parole est à vous.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi n° 26 qui modifie les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. Et je suis heureux que la ministre soit présente avec nous, que le ministre qui a mis sur pied le Tribunal administratif du Québec soit également présent avec nous et que le ministre qui est responsable de l'engorgement du Tribunal administratif du Québec soit aussi avec nous. Ça va me donner l'occasion de passer mon message directement, comme critique en matière de justice.

J'attire l'attention de la ministre responsable des services de garde et de la famille et de l'enfance sur un droit qu'elle accorde aux personnes responsables d'un service de garde en milieu familial, mais dont la reconnaissance a été soit suspendue ou révoquée. La ministre, dans son projet de loi, indique clairement que cette personne-là aura le droit d'aller devant le Tribunal administratif du Québec pour essentiellement contester la suspension ou la révocation de son permis. M. le Président, je ne sais pas si la ministre se rend compte, mais le Tribunal administratif du Québec est engorgé. Il y a plus de 17 600 dossiers en attente, largement dû au fait que le ministre responsable de la Solidarité sociale, ça a été démontré en cette Chambre par ma collègue la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, suite à un document interne du Tribunal administratif du Québec... Et j'ai entendu dire que le ministre responsable de la Solidarité sociale avait même contesté les chiffres avancés par le président du Tribunal administratif du Québec qui, il y a à peine quelques mois, écrivait dans une note interne qu'il y avait plus de 17 600 dossiers en attente, dont 90 % sont reliés à la section des affaires sociales, au niveau du Tribunal administratif du Québec. C'est à ce point vrai que la ministre de la Justice a fait appel au ministre responsable de la Solidarité sociale pour qu'il puisse attribuer les ressources humaines suffisantes pour faire en sorte que les dossiers soient entendus et pour qu'on puisse procéder le plus rapidement possible à désengorger le Tribunal administratif du Québec.

Or, M. le Président, je ne sais pas si la ministre se rend compte qu'elle est en train de donner un pouvoir qui, dans les faits, va prendre un certain temps avant de pouvoir s'exercer compte tenu que le Tribunal administratif du Québec est engorgé, avec plus 17 600 dossiers qui sont en attente. Et l'attitude gouvernementale, par ailleurs, de ne pas renommer des juges administratifs qui ont été reconnus comme étant compétents par le comité mis sur pied par le gouvernement à cette fin n'aide pas la situation.

Alors, M. le Président, il n'est pas toujours évident... Lorsqu'on prépare un projet de loi, ça nous est soumis par nos services, les services de la ministre, et en apparence on dit: On va leur donner un droit. Si jamais le permis, il est révoqué, si jamais le permis, il est suspendu, ne vous inquiétez pas, nous ferons appliquer les règles de justice naturelle, nous allons vous donner le droit d'être entendus, de pouvoir contester la décision prise par l'administration, et ce droit-là, vous allez pouvoir l'exercer au Tribunal administratif du Québec.

Mais la seule chose dont la ministre doit être consciente et dont elle doit se rendre compte, c'est: Comment peut-on exercer ce droit-là lorsqu'on n'arrive pas à être entendu devant le Tribunal administratif du Québec parce qu'il y a trop de causes qui sont en attente et que les audiences sont suspendues ou sont annulées? Ma collègue la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne – vous étiez là, M. le Président, vous l'avez vu comme moi – avait déposé un certain nombre d'exemples d'audiences qui ont été annulées parce que le Tribunal administratif du Québec n'avait pas, à cause des décisions prises par le ministre responsable de la Solidarité sociale, les effectifs voulus pour faire avancer les causes.

Donc, c'est quoi, le droit qu'on est en train de donner? J'aimerais, M. le Président... puis je sais que ce n'est pas la responsabilité de la ministre responsable de la Famille et de l'Enfance, ce qu'elle fait dans le projet de loi, et nous allons voter pour ce projet de loi, je pense que c'est une bonne chose, mais je l'invite à sensibiliser sa collègue ministre de la Justice et surtout celui qui est responsable de l'engorgement, qui est présent dans cette Chambre, le ministre responsable de la Solidarité sociale, de le sensibiliser à pouvoir développer et pouvoir débloquer des sommes d'argent nécessaires pour que les ressources humaines soient engagées, afin qu'il puisse accorder toute l'attention et tous les effectifs qui sont nécessaires pour faire avancer, pour faire monter les dossiers, parce que le gouvernement va contester devant le Tribunal administratif du Québec les causes que les prestataires de la sécurité du revenu, entre autres, vont aller débattre devant le Tribunal administratif du Québec.

Donc, c'est bloqué. C'est malheureux, mais c'est ça. Nous sommes face à une réforme qui a été mise sur pied par le député de Louis-Hébert, actuel ministre de l'Environnement, ex-ministre de la Justice. Mais il est à même de voir et de constater que la réforme a été, sous plusieurs volets, un échec, et un échec lamentable. Ça a été dit par le député de Marquette, mais ça a été évoqué dans les journaux à plusieurs reprises et il y a eu même des aveux de la part du président du Tribunal administratif du Québec, qui, dans des documents internes, faisait état des nombreux dossiers qui sont en attente.

Alors, on se rappelle, M. le Président, que l'objectif de la réforme, c'était de viser deux choses. Un, de mettre un terme aux nominations politiques partisanes, et on sait que le gouvernement ne l'a pas fait. Parce qu'on sait que, quelques jours, quelques semaines avant l'entrée en vigueur du Tribunal administratif du Québec, le gouvernement s'était organisé pour que les amis du régime puissent entrer par la porte d'en arrière, devenir juges administratifs au Tribunal administratif du Québec, alors que, s'ils avaient été nommés deux semaines plus tard, ils n'auraient pas eu la compétence.

Le ministre responsable de l'Industrie et Commerce semble indiquer que ce n'est pas le cas. Il me fera plaisir de lui faire la démonstration noir sur blanc, décrets à l'appui, lui indiquant que M. Michel Daviault, qui a été député du Bloc québécois, quelqu'un qui est bien connu de la formation politique de l'autre côté, ainsi que François Landry, qui a été un organisateur politique pour le Parti québécois au cours d'une période de neuf années, qui est devenu par la suite directeur général du Bloc québécois à Ottawa alors que l'actuel premier ministre était chef du Bloc québécois, ces deux personnes-là ont été affectées, ont été nommées au Tribunal administratif du Québec. Mais le hic, c'est que trois personnes jugées compétentes, qui ont servi l'État de façon admirable au cours d'une illustre carrière, ces personnes-là, on a vu leur mandat ne pas être renouvelé. C'est ça qui est triste, M. le Président. Et, par la suite, lorsqu'on regarde le bilan plus d'un an après la mise sur pied du Tribunal administratif du Québec, quoiqu'en dise le gouvernement dans ses discours, les chiffres sont là pour démontrer que ça a été un échec retentissant. Alors, ce n'est pas la faute de la ministre responsable de la Famille et de l'Enfance. J'attire juste son attention sur le fait qu'elle accorde un droit à des personnes dont le permis sera soit suspendu ou révoqué d'aller devant le Tribunal administratif du Québec. Mais comment pourront-elles exercer ce droit-là lorsque, malheureusement, le Tribunal est engorgé, lorsqu'il y a congestion?

(16 h 10)

Ça, ça indique, M. le Président, que les personnes qui voient leur permis suspendu vont attendre des mois, et des mois, et des mois avant que leur cause soit entendue. Ils seront privés de revenu. Bien sûr que les familles devront trouver d'autres familles où loger leurs enfants, parce que cette garde-là en milieu familial qui sera victime de la suspension ou de la révocation de permis, eh bien, ne pourra pas continuer à opérer, et ça ne se réglera pas avant une longue période de temps.

Alors, j'ai été très heureux que vous m'accordiez ce temps, M. le Président, pour sensibiliser la ministre. Et j'ai confiance qu'elle va passer le message, entre autres au ministre responsable de la Solidarité sociale. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Marquette. Alors, Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, pour votre droit de réplique à M. le député.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, le projet de loi n° 26, qui est la Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance, corrige certains irritants en milieu familial particulièrement et donne l'esprit que le ministère avance, celui d'innover, d'évoluer, de progresser et de s'adapter aux besoins de notre société québécoise. Alors, je remercie la bonne collaboration du député de Notre-Dame-de-Grâce et l'appui de l'opposition. Effectivement, les débats en commission parlementaire ont été harmonieux et dans l'intérêt de l'avancement des services de garde du Québec.

Je suis fière, comme ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, que nos services de garde soient de qualité, sécuritaires et éducatifs. Et le projet de loi nous permettra, encore une fois, d'améliorer notre réseau de services de garde du Québec et s'inscrit, comme on le sait, dans la belle politique familiale du Québec, qui est vue comme un modèle et qui nous permet d'avoir une vision dite progressiste dans une société qui se soucie de ses familles et particulièrement de ses enfants, M. le Président. Merci.

Une voix: Bravo!


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Le rapport de la commission des affaires sociales portant sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président. L'article 43 du feuilleton de ce jour, s'il vous plaît.


Projet de loi n° 50


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 43, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 50, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives concernant le travail des enfants.

Alors, est-ce que... M. le député de LaFontaine, en vous indiquant que vous avez, en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de travail, un droit de parole maximum de 30 minutes. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Il me fait plaisir de parler sur ce projet de loi là. Je dirais de prime abord que c'est un projet de loi sur lequel nous avons fait consensus et dont les articles ont fait l'adoption, en commission parlementaire, à l'unanimité des membres de la commission, qu'ils soient du côté gouvernemental ou du côté de l'opposition, ce qui fait que je suis fort aise d'en parler en cette Chambre. C'est un projet de loi qui, bien sûr, a reçu l'agrément de l'ensemble des parlementaires parce qu'il touche à un problème ou une certaine situation de notre société, qui est très important pour tout le monde et qui est le travail des enfants.

Bien souvent, on a tendance à croire que le travail des enfants, c'est une situation qui se produit, qui se passe dans les pays du tiers-monde. On voit à l'occasion, régulièrement, des articles dans les journaux qui traitent du travail des enfants: 2 500 enfants, ou 22 000 enfants travaillent dans les industries en Thaïlande ou dans certains pays du Middle East. Alors, on a toujours l'impression que ce sont des choses qui se passent ailleurs que chez nous, alors que ce n'est point vrai, M. le Président. Dans la société, dans les sociétés occidentales développées, comme la nôtre, eh bien, nous avons aussi ce phénomène, même s'il n'est pas tout à fait de la même catégorisation que dans les sociétés que je mentionnais précédemment. Mais, quand même, force est de constater que de plus en plus de jeunes enfants, de jeunes Québécois et Québécoises cherchent très rapidement à occuper une activité rémunératrice.

Alors, pourquoi, M. le Président, on va dire, les jeunes, aujourd'hui, alors que notre société est quand même une société très évoluée, une société qui figure parmi celles dans le monde où, si on prend la norme de l'ONU sur le Canada... Bon. On dit que le Canada est un des endroits où le niveau de vie est parmi les plus élevés. Bon. Je présume que, pour le Québec, c'est la même chose. Le Québec, certainement, a des endroits, même s'il n'y a pas eu d'études spécifiquement sur le Québec, qui sont parmi les endroits où les normes de vie sont les plus élevées. Mais, quand même, les enfants, les jeunes cherchent du travail rapidement.

Alors, ils cherchent du travail parce que bien souvent les familles ont un peu de difficulté à leur accorder peut-être un certain nombre de choses qu'ils aimeraient pouvoir s'acheter. Les budgets familiaux étant assez serrés, les obligations familiales en matière de logement, en matière d'habillement pour le père, la mère, les enfants, certains frais qu'on a à payer au niveau d'équipement scolaire à l'occasion, au niveau sportif, font que les jeunes, eh bien, jugent nécessaire d'aller gagner eux-mêmes très rapidement une certaine somme d'argent afin de pouvoir la dépenser à leur guise, ou même venir en aide, soulager leurs parents et leur famille.

Alors, M. le Président, on a vu par le passé qu'il pouvait aussi, dans nos sociétés, suite à cette situation, se créer des cas ou des situations où les enfants pourraient être exploités ou être victimes de charge de travail importante. On a vu aussi que des fois il arrive aussi à l'occasion, et même dans certains secteurs de la société moins favorisés – peut-être plus souvent – que les jeunes, eh bien, en allant travailler, sacrifiaient le temps qui était disponible pour leurs études et faisaient en sorte, à ce moment-là, pour gagner de l'argent rapidement et à court terme – ce qui, pour eux, est une nécessité – eh bien, ils allaient mettre en péril leur cheminement scolaire et leurs études.

Et quand on sait, M. le Président, que c'est dans l'âge de l'enfance et de l'adolescence qu'on acquiert la plus grande majorité de nos connaissances, et particulièrement à l'école primaire et secondaire, eh bien, l'État ne doit pas, ne pouvait pas... Et même, je le disais précédemment dans un autre projet de loi, même si je dis que l'État ne doit pas intervenir et ne doit pas être dans tous les secteurs d'activité pour tout régir, pour tout réglementer et pour faire en sorte de décider à la place des citoyens, il n'en reste pas moins que, dans ce qui touche... Comme, tout à l'heure, je parlais de la petite enfance et de la garde en milieu familial en disant que l'État avait un rôle d'encadrement et de normalisation dans ce secteur, il est exact aussi que, dans le domaine du travail des enfants, l'État a une responsabilité importante en matière de réglementation et de limitation des heures et du genre de travail que les jeunes peuvent faire.

Le projet de loi n° 50 est un projet de loi qui donne suite à un projet de loi qui avait été amené dans le temps par l'ex-ministre Matthias Rioux, le ministre et député de Matane. Et on se rappellera, M. le Président, que ça avait été un projet de loi qui me tenait à coeur, moi, comme porte-parole de l'opposition, à l'époque, en matière de travail. Et c'était la première entente que j'avais faite avec le député de Matane. Lorsque j'avais été nommé à ce poste et lui ministre du Travail, nous avions chacun fait un discours de présentation parce qu'il y avait l'étude des crédits. Et, lorsque j'étais intervenu, j'avais mentionné, dans ce que je voyais être les priorités du mandat que nous aurions à faire, lui comme ministre et moi comme son vis-à-vis, eh bien, que nous devrions légiférer ou nous pencher sur la problématique du travail des enfants. Et ça a été fait, le ministre de l'époque s'était penché dessus, avec la collaboration, bien sûr, de l'opposition – et j'en étais très heureux, d'ailleurs – pour faire un certain nombre de législations, un certain nombre de règles d'encadrement.

Mais, comme tout projet de loi, eh bien, il demande à l'occasion, suite à son application, à être bonifié ou être amélioré, parce que, lorsqu'on applique un projet de loi, nous nous rendons compte bien souvent qu'il y a là des fois des failles, des fois des trous, des manquements ou simplement de l'exagération dans la formulation ou dans les règles qui sont édictées par ce projet.

(16 h 20)

Et, dans celui-là, il y avait, M. le Président... En particulier, on n'avait pas pensé à un côté qui était de faire en sorte que les enfants qui ont 14 ans et moins... On sait qu'au Québec, à 16 ans, on est considéré, au niveau de... On est majeur à 18 ans au Québec, mais au niveau du travail on est considéré comme majeur, pour pouvoir travailler, à 16 ans. C'est-à-dire, en d'autres termes, le droit au travail au Québec est reconnu à 16 ans, avec certaines réglementations, avec certaines balises, mais, en bas de 16 ans, M. le Président, il y avait comme une zone floue un peu, dépendant du genre de travail que les enfants faisaient. Il peut être camelot, aller porter des journaux, il peut aller vendre du chocolat, vous savez, comme on voit, ces jeunes qui quelquefois sont dans les rues avec des boîtes puis sonnent aux portes, vendent du chocolat pour la commission scolaire, des fois pour une organisation à but non lucratif, mais qui fait des profits pareil.

On a vu qu'il y avait même des réseaux qui existaient d'employeurs qui vont chercher des jeunes, vont chercher aussi une commandite d'un organisme, ça peut être le club Optimiste, ça peut être les cadets, ça peut être une école, et disant aux dirigeants de cet organisme, de cette organisation: Voilà, nous allons mettre votre nom, je ne sais pas, moi, les Cadets de la ligue navale de Rivière-des-Prairies, par exemple, ou de Saint-Léonard, et votre nom va être sur l'emballage de chocolat. Vos membres, les jeunes cadets, vont aller vendre le chocolat dans les portes aux citoyens. À 2 $, ce qu'on appelle une palette – moi, j'appelle ça une tablette – de chocolat, eh bien, nous allons garder 1 $ puis on vous donnera 1 $ pour vous. Alors, l'organisation, même si elle travaille pour un organisme à but non lucratif, elle est lucrative et fait de l'argent.

Alors, on se retrouvait avec des jeunes qui faisaient ce travail-là. Et là, M. le Président, ça peut aussi être pris comme du bénévolat et non pas comme du travail, mais l'État, et à juste titre... Et ça, il y a d'autres exemples, mais celui-là en particulier nous démontrait qu'à 15 ans, 16 ans les jeunes sont assez autonomes, ce n'est pas si mal, mais, à 14 ans et en bas de 14 ans, ça peut causer problème. Alors, le législateur a pensé qu'il serait important de baliser cela. Dans le projet de loi n° 50, nous faisons en sorte d'apporter un changement, un renforcement à la loi précédente qui fait en sorte que maintenant, lorsqu'un enfant a 14 ans et moins, avant d'avoir une activité professionnelle, de travail dans lequel il va recevoir de l'argent ou qu'il va y avoir un profit qui va être donné à une organisation avec le travail qu'il a fait, eh bien, ça prendra l'autorisation des parents. Un employeur ne pourra plus, dans le Québec, faire travailler un enfant de 14 ans s'il n'a pas une lettre signée des parents autorisant cet enfant à travailler.

Pour ça, M. le Président, je pense que c'est certainement là un ajout important. Imaginons les parents. Vous savez, aujourd'hui, les pères, les mères, la société moderne nous interpelle. On travaille le matin, le soir. On rentre à la maison, la circulation, on est fatigués. Les enfants, pendant ce temps-là, quittent l'école à 14 h 45, à 12 ans, 13 ans, 11 ans, 14 ans. Ils n'ont pas tellement une surveillance. La journée, on ne sait pas qu'est-ce qu'ils font, et ils peuvent chercher à avoir des activités pour justement gagner de l'argent. Alors, M. le Président, on perd un peu le contrôle. On pouvait rentrer le soir puis demander à son fils qu'est-ce qu'il a fait aujourd'hui. Bien: Je n'ai rien fait, j'étais à la maison, alors qu'il était allé travailler, il avait gagné de l'argent. Et peut-être que le père de famille n'est pas intéressé, ou la mère de famille, à voir son garçon aller travailler puis être dans un milieu de travail, un milieu d'adultes, pour des raisons éducatives, peut-être aussi parce qu'il n'est pas intéressé à voir son garçon se promener avec de l'argent en quantité un peu plus importante que ce que lui pense qu'il devrait avoir comme argent de poche. Donc, ça prend un certain contrôle.

Ça, ça ne pourra plus se produire maintenant, parce que l'employeur qui va employer ce jeune homme-là devra obtenir une autorisation. Si votre fils a moins de 14 ans et qu'il veut travailler l'après-midi, en dehors de ses heures scolaires, M. le Président, ou les fins de semaine, ou quand vous n'êtes pas à la maison pour toujours surveiller ce qu'il fait, eh bien, il devra avoir votre autorisation. Les employeurs qui ne respecteraient pas cela, ça sera soumis bien sûr, en vertu de la Loi sur les normes minimales de travail, à des poursuites et à des amendes qui viendront avec. Je crois que cela est une bonne chose.

Il y avait un autre point dans la loi qui faisait en sorte d'assujettir à l'autorisation parentale les enfants de 14 ans et moins seulement s'ils travaillaient pour une société à but lucratif. Là, M. le Président, lorsque j'ai vu, moi-même, personnellement, à l'étude des crédits avec mes collègues députés, lorsque nous avons vu cette chose-là, il nous est venu à l'idée qu'on pouvait travailler pour une société à but lucratif ou à but non lucratif, mais que le travail était du travail et que l'effort, ou l'activité, ou le risque était la même chose, que ça soit pour une société qui va faire de l'argent dans un but de profit ou dans un but de financer des activités bénévoles.

Alors, nous avons demandé à Mme la ministre du Travail de faire un amendement du projet et de faire en sorte que maintenant non seulement les enfants de moins de 14 ans qui occupent une activité, qui veulent travailler pour une société à but lucratif, obtiennent l'autorisation parentale, mais que l'ensemble des enfants qui veulent travailler pour une société à but lucratif ou non lucratif, qu'importe, eh bien, que les deux soient assujettis à l'obtention d'une autorisation parentale.

Puis l'exemple que ça donne, c'est que maintenant, M. le Président, vous ne pourrez plus voir arriver chez vous votre petit-fils qui aurait 12 ans ou 13 ans avec une boîte pleine de tablettes de chocolat, qui vous dira: Grand-papa, il faut que je vende ça pour l'école, ou, papa, il faut que je vende ça pour l'école, ou, maman, il faut que je vende ça pour l'école. Et là vous êtes pris avec; il faut que vous alliez marcher avec lui, essayer de le vendre, ou même, vous êtes pris à l'acheter, ou alors dire au petit enfant: Ramène ça à l'école, et ça crée tout un traumatisme. Maintenant, les directions d'école, les directions de cadets, et autres, entre autres choses, eh bien, devront eux aussi obtenir une autorisation parentale pour pouvoir faire faire ces activités par leurs enfants.

Alors, M. le Président, la dynamique générale de ce projet de loi est certainement un plus pour la société, mais ça nous amène à nous interroger sur la normalité du travail vers ces âges-là, de 14 ans. Je me souviens, et peut-être vous aussi, M. le Président, parce que je sais le cursus que vous avez traversé avant de devenir avocat et vice-président de cette Chambre, il y a plusieurs décennies, alors que j'étais jeune, nous commencions à travailler à 14 ans. Les gens allaient à l'école, terminaient leurs études primaires à 14 ans – du moins dans le pays d'où je viens, un pays européen qui s'appelle la France – et nous pouvions à cette époque-là rentrer en apprentissage pour apprendre un métier chez un artisan, une boucherie, une boulangerie, enfin quelque corps de métier que c'était, quelque corps d'artisanat que c'était, ou alors nous pouvions aller occuper un travail, simplement garçon de ferme ou un travail de commis dans une épicerie. Ce n'était pas donc des apprentissages, mais tout simplement des activités, et, à partir de 14 ans, c'était légal, nous le pouvions.

Par la suite, les États modernes ont jugé que, jusqu'à 16 ans, eh bien, il était important de maintenir les enfants dans l'école, de leur maintenir un milieu d'apprentissage et d'éducation, et donc on a modifié les lois et on l'a mis, comme je le disais précédemment, l'âge limite, l'âge légal pour travailler, à 16 ans. Et ça nous intéresse, M. le Président, de penser qu'aujourd'hui, malgré ces changements, on n'ait pas réussi ce que les sociétés modernes voulaient faire. On a dû manquer quelque part, parce que nous sommes obligés de légiférer pour empêcher les enfants de travailler sans autorisation parentale, alors que normalement ces enfants-là devraient être à l'école jusqu'à au moins 16 ans et n'avoir comme seule activité que d'aller à l'école.

Alors, pourquoi? Bien, certainement parce que nos sociétés ne se sont pas enrichies, parce qu'elles se sont appauvries probablement, parce qu'aujourd'hui les familles québécoises n'ont plus les moyens de faire en sorte que leurs enfants soient maintenus à l'école, pour qu'une partie d'entre eux travaillent avant l'âge de 16 ans. Parce que, M. le Président, aussi, le temps consacré à l'école par rapport au temps consacré au travail par les mères de famille, qui à l'époque ne travaillaient pas, a changé; aujourd'hui, nos enfants quittent l'école à trois heures moins le quart, ou quelque chose de cet ordre-là, et les mères de famille finissent de travailler à cinq heures, cinq heures et demie et, lorsqu'elles prennent le métro, l'autobus ou leur automobile pour rentrer à la maison, il est bien souvent six heures, six heures et demie.

Alors, nous nous retrouvons avec des enfants qui sont laissés à eux-mêmes, avec peu ou sans surveillance de, je dois dire, trois heures de l'après-midi à six heures le soir, et ça amène des enfants des fois, dans beaucoup de cas, à se désintéresser du système scolaire, à se désintéresser de l'apprentissage. Et ça amène bien sûr une incitation à aller gagner de l'argent, à aller travailler ailleurs. Et c'est comme ça qu'une partie des jeunes Québécois se désintéressent d'aller apprendre et vont décrocher de l'école. Ils ont hâte rapidement d'arriver à 16 ans, parce qu'ils ont commencé à travailler avant, puis: Vivement mes 16 ans que je puisse m'en aller puis travailler puis gagner un peu d'argent pour m'acheter quelques affaires, pour pouvoir avoir des moyens. Et c'est là le grand échec de notre société, M. le Président.

(16 h 30)

Parce que nous savons, et vous savez comme moi que, dans les temps que nous connaissons... À l'époque, quand j'étais jeune, ça prenait sept années de scolarité, le certificat d'études primaires, pour être facteur. Vous aviez ça et vous passiez le concours, puis vous pouviez, après le service militaire, devenir facteur. Aujourd'hui, M. le Président, pour être facteur, ça prend un baccalauréat, hein, pour passer le concours. Parce que ça a changé, les technologies ont changé, le mode de fonctionnement a changé. Et on se rend compte que, plus ça va aller, M. le Président, avec la révolution informatique, la domotique, de plus en plus, il faut que nos jeunes acquièrent des qualifications, des connaissances de plus en plus fortes, de plus en plus pointues, tout en conservant des connaissances générales. Ne sombrons pas non plus dans l'excès contraire: On va juste leur donner des connaissances pointues, techniques, technologiques. Il faut qu'ils aient une connaissance générale afin de développer leur pensée, leur réflexion, leur jugement, bien sûr, c'est évident, et de faire évoluer la société aussi.

Alors, si je dis ça, c'est parce que ça m'amène à faire ce constat. Aujourd'hui, nous légiférons pour empêcher ou pour canaliser une situation qui, d'après moi, est le début du problème du décrochage de nos enfants de l'école et qui est le début, que nous allons connaître, d'un parcours qui peut être difficile pour le restant de leur vie pour ces jeunes-là, parce que, s'il est vrai que, quand ils sont jeunes, en travaillant, ils gagnent un peu d'argent, ils n'ont pas beaucoup de besoins, ils habitent chez leurs parents, ils sont nourris. On mange moins quand on est jeune. Je veux dire, on ne va pas dans les restaurants, et tout ça. On a des petites dépenses, hein, parce qu'on est chez papa et maman ou... Plus tard, on va aller en appartement, mais, encore là, on est assez attentionné avec l'argent qu'on gagne. On n'en a pas assez, mais on peut vivre. Mais, en vieillissant, ces gens qui n'ont aucune qualification professionnelle, qui ont quitté l'école pour aller travailler de bonne heure, eh bien, M. le Président, vont se retrouver cantonnés dans des emplois, des jobs de qualité très basse, des emplois avec peu d'avenir, avec peu de débouchés, avec beaucoup d'incertitude aussi, dans les secteurs les plus vulnérables aux grands changements ou aux changements cycliques de certaines industries.

Alors, je crois qu'aujourd'hui nous faisons bien, nous renforçons pour les jeunes le passage vers le travail. Nous faisons en sorte non pas de l'interdire, mais de le renforcer en donnant aux parents une responsabilité. On a enlevé beaucoup de responsabilités aux parents. L'État a pris toutes les responsabilités ou a laissé croire qu'il était pour gérer la vie de tout le monde, et les parents, tranquillement, bien, ont laissé l'État décider pour eux. Et aujourd'hui, M. le Président, avec ce projet de loi là, on leur redonne une de leurs prérogatives, on leur redonne le droit de dire à leurs enfants, jusqu'à l'âge de 14 ans, au moins: Non, tu ne travailleras pas. Non, parce que je ne donnerai pas la lettre à l'employeur pour que tu ailles travailler. Ou alors, si je donne la lettre, tu vas aller à l'école, tu vas suivre tes cours, puis, quand tes notes, tes cours seront raisonnables, bien, je donnerai la lettre pour que tu puisses travailler, puis tu vas faire tant d'heures seulement, parce que je vais vérifier. Et c'est là redonner certainement aux gens, aux Québécois et aux Québécoises, eh bien, l'occasion de reprendre un peu de contrôle sur une certaine partie de la jeunesse et de l'enfance que leur progéniture connaît.

Alors, ce projet de loi, M. le Président, bien sûr, on pourrait en parler longuement. On pourrait parler en même temps – élargir – de tous les abus qui sont faits malgré toutes ces réglementations sur les enfants: les enfants qui travaillent dans des conditions parfois difficiles, insalubres, dans des environnements où la moralité est parfois un peu défaillante. Le projet de loi le prévoit aussi. Mais comment légiférer ça? Comment appliquer tout ça? On ne peut que le mettre dans le projet de loi et espérer que ces barrières vont faire en sorte d'éviter que ça ne se produise, mais faire en sorte aussi que, si ça se produit, les gens puissent avoir des recours avec la Commission des normes, ce qui est très bien. Mais, quand même, cela est quelque chose de très difficile.

Mais enfin, je crois que nous avons, avec l'autre projet de loi, M. le Président, précédent, et celui-ci, fait avancer la cause des enfants, nous avons renforcé certainement l'autorité parentale, et je crois qu'en cette Chambre, vu que c'est un projet de loi qui a été travaillé des deux côtés de la Chambre, et par le ministre député de Matane et par, maintenant, la ministre du Travail, députée de Bourget, et quelques députés libéraux, dont moi comme porte-parole du travail, eh bien, il me fait plaisir d'être en sa faveur et de voter pour. Donc, au nom de ma formation politique, je réitère que nous allons voter en faveur du projet de loi n° 50.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je vais maintenant céder la parole au prochain intervenant ou intervenante. Alors, il n'y en a pas. Donc, cela met fin au débat.


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 50, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives concernant le travail des enfants, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président. L'article 49 du feuilleton de ce jour.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous avez bien dit 41, monsieur? L'article 49? Excusez. Je m'excuse, je n'ai pas ça dans l'ordre des numéros, alors c'est un peu plus...

M. Boisclair: Projet de loi n° 2, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, à l'article 49, M. le ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi n° 2, Loi sur la réforme de la comptabilité gouvernementale. Y a-t-il des interventions? Alors, il n'y a... Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, je pense que la porte-parole de l'opposition n'a pas été avisée. Est-ce qu'on pourrait prendre connaissance de ça?

M. Boisclair: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Enfin, la porte-parole, M. ou Mme la députée de...

Une voix: Marguerite-Bourgeoys.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Marguerite-Bourgeoys.

M. Boisclair: Bien là, il est...

Le Vice-Président (M. Brouillet): On peut peut-être suspendre quelques minutes pour vous donner le temps de l'avertir, et tout.

M. Boisclair: Oui.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, nous allons suspendre quelques minutes pour donner une chance de vérifier si Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys peut être ici dans quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 37)

(Reprise à 16 h 42)


Projet de loi n° 2


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Nous étions à l'article 49. M. le ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi n° 2, Loi sur la réforme de la comptabilité gouvernementale, et Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys va faire une intervention. Mme la députée.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, je ne vais pas parler très longtemps sur ce projet de loi, puisque j'ai été très claire lors de l'étude en commission parlementaire et au niveau de la présentation du projet de loi. Bien sûr qu'on endosse le principe. C'est un projet de loi qui fait suite à des recommandations qui ont été faites par le Vérificateur général et, par conséquent, nous endossons non seulement le principe, mais nous allons voter avec ce projet de loi.

Par ailleurs, j'aimerais faire un peu l'historique de ce projet de loi, puisque ça ne nous arrive pas comme par hasard. Le projet de loi avait été annoncé lors du discours du budget le 31 mars 1999, discours prononcé par le ministre des Finances qui relatait justement la nécessité d'apporter les correctifs qu'on apporte aujourd'hui avec ce projet de loi.

Donc, le projet de loi n° 2, Loi sur la réforme de la comptabilité gouvernementale, ce projet de loi a une petite histoire. Au fait, il amène des correctifs de l'ordre de 15 000 000 000 $ au niveau de la dette que doit absorber le gouvernement. Bien sûr, il y avait toujours ce déficit actuariel du gouvernement au niveau des pensions de la fonction publique, et ça, ça faisait des années que le Vérificateur général demandait qu'il y ait des correctifs apportés aux états financiers du gouvernement pour que le déficit actuariel des fonctionnaires apparaisse aux états financiers. Cette somme était de 13 000 000 000 $.

Or, que s'est-il passé de plus pour que, tout à coup, on soit d'accord pour amener les changements que nous apportons aujourd'hui? L'histoire s'est corsée entre-temps, M. le Président. L'histoire s'est corsée parce que, tout à coup, le gouvernement est arrivé avec ce que j'appellerais une litanie de fonds spéciaux. Il y a eu d'abord le Fonds de conservation et d'amélioration du réseau routier, et, dans ce fonds spécial – et c'est peut-être le fonds qui a le plus suscité la curiosité des gens à l'extérieur – c'est qu'il y a eu, dans ce fonds spécial, des salaires du ministère qui s'occupait des routes. Il y avait une flotte de camions, et cette flotte de camions, finalement, l'amortissement se faisait sur tellement d'années qu'il fallait remplacer nécessairement les camions avant qu'on atteigne l'amortissement.

Donc, il y avait là des irrégularités qui ont piqué le Vérificateur général, et des irrégularités qui n'ont pas piqué seulement le Vérificateur général, mais qui ont piqué tous les gens de l'extérieur qui ont décidé de regarder de près les états financiers du gouvernement. Il y avait également, M. le Président, les départs assistés des fonctionnaires, qu'on avait mis de côté. Et il y avait plusieurs autres fonds. Si bien qu'on a décidé bien sûr d'apporter des correctifs.

Donc, qu'est-ce qu'on faisait avec ces fonds spéciaux? Bien, ce n'est pas sorcier. Ce qu'on faisait, c'est qu'on reportait sur plusieurs années des dépenses qui auraient dû être comptabilisées dans les états financiers de l'année courante. Sans vouloir être méchante, M. le Président, et sans vouloir faire de démagogie – ce n'est pas beaucoup mon style – je vais vous dire qu'il y avait peut-être un souci de vouloir atteindre absolument le déficit zéro et de vouloir l'atteindre dans l'année ou dans l'année qui allait venir. Et, par conséquent, donc, on prenait toutes sortes de moyens, moyens qui n'ont échappé ni au Vérificateur général ni aux critiques qui venaient de l'extérieur. Donc, il y a eu ce que j'appellerais un tollé de critiques. Je n'étais pas à cette Assemblée quand ça s'est passé, mais je me rappelle pertinemment de critiques qui avaient été exprimées dans plusieurs journaux, par plusieurs chroniqueurs et plusieurs éditorialistes. Je vous épargnerai la lecture de toutes ces chroniques et de tous ces éditoriaux.

Donc, ce qu'on a fait avec ce projet de loi, c'est qu'on a décidé d'absorber d'un coup le passif actuariel pour les retraites des fonctionnaires. Il y en avait pour 13 300 000 000 $. Ce côté, ça faisait des années que le Vérificateur général, année après année, dans le fond, apportait aux états financiers des notes disant qu'il fallait que ce passif actuariel soit noté au niveau des états financiers. Et, par conséquent, ce 13 300 000 000 $ m'apparaît comme ayant été là depuis longtemps. Et le Vérificateur général exigeait ce correctif, l'exigeait depuis des années.

Et je passerai presque sous silence ce 13 300 000 000 $ du passif actuariel au niveau de la caisse pour les pensions des fonctionnaires. Je ferai plus d'emphase, M. le Président, pour le 1 200 000 000 $ additionnel de déficit que j'appelais caché. Dans ça, il y avait 305 000 000 $ pour le Fonds du réseau routier, ce dont je parlais plus tôt. Et, au niveau des départs assistés, il y en avait pour 685 000 000 $.

(16 h 50)

Je parlerai également d'autres déficits qui n'apparaissent pas et qui n'apparaissaient pas et qui n'apparaîtront jamais dans les états financiers du gouvernement. Je pense notamment aux 700 000 000 $ qu'il y avait de dettes qui étaient assumées par le secteur hospitalier du Québec. Il y avait également un 350 000 000 $ qui était assumé, celui-là, par les universités. C'était, au fait, une dette qui appartenait au gouvernement, parce que le réseau hospitalier et notre système d'enseignement universitaire ne peuvent financer autrement que par des revenus de l'État ces dettes-là. Il y en avait, M. le Président, pour plus de 1 000 000 $. Donc, voyant la critique qui était venue du Vérificateur général, critique acerbe... Je vous lirai par ailleurs la critique du Vérificateur général, qui disait ceci: «Compte tenu, entre autres, de l'importance des sommes en cause, au regard des fonds et des autres entités qui ne sont pas inclus dans les états financiers du gouvernement, nous sommes d'avis que ces états ne présentent pas fidèlement, selon les conventions comptables applicables au gouvernement et recommandées par l'ICCA, la situation financière du gouvernement du Québec au 31 mars 1997.»

C'est donc dire que le Vérificateur général n'y allait pas avec le dos de la cuillère. Il était très clair dans sa critique qu'il y avait là une façon qui cachait des fonds et qui nuisait à la transparence des comptes publics que doit transmettre le gouvernement. Et donc, suite à cette critique, le ministre des Finances a mis en place un groupe de travail qui se composait du Vérificateur général, d'un représentant du ministère des Finances et un comité également qui comprenait... du Contrôleur des finances et du Vérificateur général – donc je disais le Vérificateur général. C'est donc dire que ce comité s'est penché de façon très sérieuse et ce comité a examiné l'envergure, dans le fond, je ne veux pas dire du dégât, mais l'envergure des irrégularités contenues dans les états financiers. Que nous propose ce comité?

Premièrement, de modifier ses conventions comptables afin que son périmètre comptable consolidé englobe la totalité des organismes, agences, fonds spéciaux, entreprises du gouvernement. Je ne relaterai pas toutes les recommandations, M. le Président, mais je vais relater celles auxquelles je m'adresse aujourd'hui. Dans un deuxième temps, d'inscrire la totalité du passif actuariel non inscrit des régimes de retraite et de modifier sa convention comptable afin que le coût des modifications soit constaté dans l'exercice où elles ont lieu. Troisièmement, de modifier sa pratique comptable relative à la comptabilisation des mesures de départs volontaires assistés ainsi que pour les changements structurels, afin que les coûts de ces mesures soient imputés dans l'année financière où elles sont effectuées.

C'est donc dire, M. le Président, que les comptes publics, les états financiers du gouvernement, ça doit relater les dépenses du gouvernement et ça doit donner une image juste, une image qui reflète ce qui s'est passé au niveau du gouvernement. Or, le résultat aujourd'hui, c'est qu'on doit passer ce projet de loi, projet de loi par lequel le ministère, le gouvernement s'impose les règles qu'il aurait dû suivre au départ, à part peut-être les fonds de pension, le 1 200 000 000 $. Il s'impose des règles qu'il aurait dû s'imposer lui-même. Et c'est là peut-être l'odieux. C'est là l'odieux, parce que je pense que, à force de manipuler des chiffres de cette importance, à force d'apporter des distractions dans ce que dépense le gouvernement et dans le rapport qu'il donne au public quotidiennement et qu'on peut lire une fois par année quand on donne les états financiers, je pense que c'est là un danger grave qui mine la crédibilité des gouvernements.

D'ailleurs, M. le Président, contrairement à ce qu'on pense, la dette du gouvernement n'est pas de 100 000 000 $, mais elle est plutôt de 120 000 000 $. C'est-à-dire que toutes les dettes qui sont assumées par d'autres fonds, notamment au niveau des immobilisations, des hôpitaux et des universités, ces dettes n'apparaissent pas dans les états financiers du gouvernement. C'est donc dire que nous aurons encore des volets de dépenses publiques qui ne seront pas comptabilisés dans les états financiers du gouvernement.

Bien sûr, le ministre des Finances a raison. Il a raison de dire que ce volet n'était pas réclamé par le Vérificateur général. Et le Vérificateur général a émis des règles. Je pense que le Vérificateur général va repenser sa position. Il va repenser sa position parce qu'il va se rendre compte qu'encore là peut-être que les états financiers ne reflètent pas encore l'état d'endettement public de la société québécoise.

Et de savoir où nous en sommes, M. le Président, c'est fondamental parce que c'est la seule façon de nous assurer que nous allons non seulement prendre la décision d'apporter les correctifs qui s'imposent, mais avoir l'appui du public pour nous supporter à apporter ces correctifs qui s'imposent. C'est donc dire que je trouve ça vital que les états financiers reflètent parfaitement, mais parfaitement, la situation dans toute sa transparence et dans toute sa clarté et dans toute sa limpidité.

Prenons, par exemple, M. le Président, les déficits que vont encore encourir les hôpitaux cette année. La ministre de la Santé nous l'a bien indiqué, elle a demandé aux établissements d'apporter des correctifs encore, donc de couper dans les services de santé. Et ça va se traduire encore cette année par un déficit, déficit absorbé par un réseau à l'extérieur du périmètre comptable. Et il y en aura probablement encore cette année pour 250 000 000 $. Où est-ce que ça va apparaître, ça? Nulle part. Nulle part, encore. Et, s'il y a des déficits après déficits et s'il y a des dettes qui sont absorbées, finalement, on ne les... elles n'apparaîtront pas dans le périmètre comptable.

C'est donc dire qu'on peut bien estimer que ces établissements sont des établissements privés avec leur propre conseil d'administration, il n'en demeure pas moins que c'est l'État québécois qui assume les coûts de ces établissements. On ne peut pas estimer qu'un hôpital, même si l'hôpital a sa charte, même si l'hôpital a son conseil d'administration, peut tout à coup aller solliciter des fonds pour payer sa dette. Il doit recourir ou à des emprunts ou au gouvernement pour payer sa dette.

(17 heures)

Donc, M. le Président, ce que je voulais dire aujourd'hui au niveau de ce projet de loi, c'est de nous rafraîchir tous la mémoire quant à l'importance de l'imputabilité, l'importance de la transparence et l'importance de donner aux Québécois et aux Québécoises, aux payeurs de taxes, à ceux qui ne sont pas payeurs de taxes, à tous ceux qui veulent savoir, une image fidèle de ce qu'est la situation financière et les états financiers de notre gouvernement. Je pense que c'est là une sagesse. Comme je disais plus tôt, M. le Président, ce n'est pas simplement pour nous, à titre de politiciens, à titre de responsables des deniers publics de l'État, ce n'est pas seulement à nous qu'il revient de nous inspirer de ça, mais de transmettre auprès du public l'image qui reflète la réalité pour amener nos citoyens dans le sillon de la transparence et dans une vision qui donne une image complète des états financiers du Québec, M. le Président.

Alors, j'ai terminé mes paroles, M. le Président, et je vous remercie de m'avoir écoutée.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Il n'y a plus d'autres intervenants? Alors, le projet de loi n° 2, Loi sur la réforme de la comptabilité gouvernementale, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, le substitut du leader adjoint. Ha, ha, ha!

M. Boisclair: Je ne suis qu'une pâle copie, M. le Président. L'article 51, s'il vous plaît. Ha, ha, ha!


Projet de loi n° 9


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 51, M. le ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi n° 9, Loi sur Financement-Québec. Alors, y a-t-il des interventions?

Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, je vous cède la parole.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Alors, M. le Président, ce projet de loi donne suite à la réforme de comptabilité gouvernementale annoncée dans le discours du budget le 31 mars 1998 et institue la société Financement-Québec qui a pour mission de fournir des services financiers aux organismes publics du réseau de l'éducation et de la santé notamment en leur accordant des prêts, c'est ce à quoi je faisais référence un peu plus tôt, M. le Président, lorsqu'on examinait le projet de loi n° 2. La société peut en outre fournir des services techniques en matière d'analyse et de gestion financière.

Ce projet de loi établit notamment les pouvoirs de Financement-Québec, en précise les modalités d'exercice que la société et ses filiales sont autorisées à prendre et détermine les règles à suivre pour son organisation. En plus, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur l'administration financière afin de permettre au ministre des Finances, à titre de gestionnaire de fonds de financement, de fournir aux ministères, aux organismes publics et aux fonds spéciaux visés par cette loi des services financiers déterminés par le gouvernement.

Il modifie également la Loi sur le ministère des Ressources naturelles afin d'octroyer au ministère des Ressources naturelles, à titre de gestionnaire du Fonds d'information géographique et foncière, encore là, le pouvoir d'emprunter auprès du ministre des Finances des sommes prises sur le Fonds de financement du ministère des Finances.

Enfin, ce projet de loi contient des dispositions transitoires destinées notamment à assurer le transfert en faveur de Financement-Québec des droits et obligations du ministère des Finances à titre de gestionnaire du Fonds de financement résultant des transactions financières, des avances et des prêts déjà contractés par celui-ci à l'égard des organismes publics visés par ce projet de loi.

Le Fonds de financement et la Corporation d'hébergement du Québec, la CHQ, sont des organismes qui oeuvrent à titre d'intermédiaires financiers entre les différents établissements des réseaux éducation et santé et services sociaux et le gouvernement afin de financer leurs nombreux programmes d'investissement.

Ces organismes effectuent des emprunts et font par la suite des prêts aux organismes, lesquels prêts sont remboursés par des crédits budgétaires ultérieurs. Une partie importante du financement de ces organismes est obtenue du Fonds de financement. En cas de consolidation du Fonds de financement dans les états financiers du gouvernement, il en résulterait donc que les prêts consentis par le Fonds de financement – le gouvernement – seraient remboursés par les subventions octroyées par la même entité, soit le gouvernement.

Donc, en juin 1995, le Conseil sur la comptabilité et la vérification du secteur public a émis de nouvelles recommandations – c'est ce dont je parlais plus tôt lorsque je discutais le projet de loi n° 2, M. le Président – et donc, les recommandations concernant des prêts consentis à des organismes par le gouvernement et devant être remboursés au moyen de crédits budgétaires ultérieurs.

Et voici ce que recommande ce Conseil. Lorsqu'un prêt est consenti à un organisme, c'est-à-dire un hôpital ou une université, donc un organisme à l'extérieur du périmètre comptable, et qu'il doit être remboursé au moyen de crédits budgétaires ultérieurs, dont des promesses de subvention, donc, le montant qui sera recouvré sur un prêt, selon ce qui est prévu, au moyen de crédits budgétaires ultérieurs doit être comptabilisé à titre de dépense de l'exercice lorsqu'un lien direct peut être établi entre le remboursement d'un prêt et les fonds que le gouvernement procure à l'emprunteur.

Le comité suggère les solutions suivantes, M. le Président, soit de cesser les opérations actuelles du Fonds de financement ou encore de modifier son statut légal. Si le Fonds de financement était une société d'État à caractère commercial et qu'elle se finançait directement sur les marchés financiers, avec la garantie du gouvernement, afin d'effectuer des prêts aux établissements, le gouvernement pourrait alors continuer à subventionner les établissements des deux réseaux sans avoir l'obligation d'imputer ces engagements aux dépenses budgétaires. Ces engagements continueraient d'être divulgués en note complémentaire aux états financiers du gouvernement, comme il le fait actuellement.

À cette fin, il est donc nécessaire que le gouvernement modifie la structure administrative et légale du Fonds de financement et de la Corporation d'hébergement du Québec de façon qu'ils soient traités comme des entreprises commerciales. Si le gouvernement manifeste clairement ses intentions en déposant un projet de loi en ce sens, des organismes pourraient être comptabilisés au même titre que les autres entreprises, et les opérations effectuées à partir du 1er avril 1997 seraient réputées avoir été exécutées sur la base d'une entreprise commerciale.

Donc, qu'est-ce que fait ce projet de loi? Ce projet de loi crée un nouvel organisme afin de se conformer au rapport du comité sur la réforme que propose le Vérificateur général. Les activités du Fonds de financement, dont l'encours des prêts atteint 10 600 000 000 $ d'obligations, seraient scindées en deux. Le Fonds de financement continuera d'exister, mais ses opérations ne serviront qu'au seul besoin de financement du gouvernement et de ses organismes consolidés, soit environ 7 200 000 000 $ des 10 600 000 000 $ des emprunts totaux négociés par le ministère des Finances.

Le Fonds de financement ne pourra plus effectuer le financement regroupé pour les organismes du réseau de l'éducation et de la santé, sinon la réforme ferait en sorte qu'il y aurait une augmentation de la dette directe du gouvernement. Donc, on crée Financement-Québec. Financement-Québec se consacrera à offrir ses services aux organismes publics et qui oeuvrent à l'extérieur du périmètre comptable. Et donc, il y aura les hôpitaux, les services de santé; il y aura également les organismes d'éducation, et il y aura également les services aux municipalités. Et on estime les besoins financiers à 3 400 000 000 $, qui seront couverts par le fonds de Financement-Québec.

On pourrait se poser des questions quant à l'exclusion des réseaux du périmètre comptable gouvernemental, mais le comité n'a pas cru bon de les inclure pour le moment. C'est ce à quoi je faisais référence plus tôt, M. le Président, en disant qu'en n'incluant pas dans le périmètre comptable du gouvernement les dettes qui sont assumées par et les hôpitaux et les universités je pense qu'à ce moment-là on transmet une image qui ne reflète pas totalement la réalité. Alors, je voulais soulever certains points, M. le Président, parce que je voulais soulever encore le besoin de nous rattacher à la transparence des états financiers du gouvernement.

(17 h 10)

Quant à Financement-Québec, il va par ailleurs permettre à des municipalités, des petites municipalités qui doivent faire des emprunts de pouvoir le faire à meilleur compte. Donc, il y a un côté extrêmement positif, et le ministre des Finances a estimé l'épargne, en passant par le fonds de Financement-Québec, à presque 100 000 000 $. Je ne sais pas, on verra. L'histoire nous dira si c'est exact, mais, jusqu'à preuve du contraire, je dirai que c'est probablement là une très bonne décision.

Alors, quant à nous, nous avons appuyé le principe de ce projet de loi et nous allons également appuyer, bien sûr, le projet de loi. Alors, je veux vous remercier, M. le Président, j'ai terminé mes propos.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Pas d'autres intervenants? Le projet de loi n° 9, Loi sur Financement-Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: L'article 45, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 47, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du...

Des voix: ...

M. Boisclair: M. le Président, l'article 45.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah!

M. Boisclair: L'article 45.

Le Vice-Président (M. Brouillet): J'avais compris l'article 47, je m'excuse. Excusez-moi, on va se reprendre.


Projet de loi n° 56


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Alors, l'article 45: L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

Alors, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, encore à vous la parole.

Une voix: ...


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Ha, ha, ha! M. le Président, alors, le projet de loi n° 56, c'est, dans le fond, pour mettre en oeuvre le guichet de multiservices, la zone dérogatoire qu'on a appelée communément – ce qui n'est pas exact – la «zone franche de Mirabel». Alors, c'est une idée qui est porteuse... c'est une idée que le Parti libéral du Québec avait dans son programme électoral et c'est une idée que nous appuyons, puisque nous espérons, par cette zone de commerce international, redonner à Mirabel une vocation qui va lui permettre de jouer un rôle actif au niveau de la communauté et permettre la création d'emplois dans ce secteur.

Que fait ce projet de loi, M. le Président? Le projet de loi veut donc supporter ce projet, la création de cette zone dérogatoire, en aidant à l'investissement, en apportant une aide aux opérations également. L'aide aux investissements n'est pas négligeable. On donne un crédit d'impôt remboursable de 25 % pour l'acquisition ou la location de biens, d'équipements. C'est donc dire que, si vous devez louer des espaces, acquérir un édifice, vous aurez, là, l'appui du gouvernement à raison d'un crédit d'impôt de 25 %. C'est énorme comme appui financier, et c'est donc dire que ce n'est pas un projet de loi qu'il faut sous-estimer. On peut le passer rapidement, mais je pense que le public a intérêt à savoir ce qu'il y a dans ce projet de loi, ce qu'il contient et quels sont les bénéfices que vont pouvoir en tirer les citoyens et citoyennes du Québec dans son entier, mais plus particulièrement pour les citoyens qui vivent dans la région de Mirabel. Donc, on va également donner une aide financière à la construction de bâtiments, non seulement à l'acquisition et la location, mais, si vous décidez de construire parce que vous avez besoin d'espace, on va vous donner un crédit d'impôt, encore, pour 25 % de la valeur de la construction des espaces que vous aurez à effectuer.

Que donne-t-on également comme autres bénéfices, M. le Président? On donne d'énormes bénéfices au niveau de l'aide aux opérations, on donne une exemption d'impôts sur le revenu, on donne une exemption de la taxe sur le capital, une exemption de la cotisation au Fonds des services de santé, on donne également un crédit d'impôt remboursable sur le salaire d'employés, un crédit quant aux honoraires versés à un courtier en douanes, une exemption d'impôts pendant une période de cinq ans à certains spécialistes étrangers qui seraient à l'emploi de telles sociétés. On peut s'interroger. Que seront ces spécialistes étrangers? Est-ce qu'ils feront compétition à d'autres secteurs qui font venir des spécialistes étrangers? Il y a là quand même une certaine ambiguïté, et espérons qu'on sera capable d'apporter suffisamment de clarté pour ne pas gérer trop de confusion.

Or, qu'y a-t-il dans ce projet de loi, de danger? Parce qu'il y a un certain danger, M. le Président, et c'est un danger inhérent à une telle formule, parce que la seule personne autorisée, qui peut accorder à cette zone dérogatoire, une entreprise quelconque qui décide de s'installer au Québec, alors, la seule personne qui peut l'autoriser, parce qu'il s'agit d'impôt et de crédits d'impôt, c'est le ministre des Finances. Il est la seule personne qui peut le faire. Et, par conséquent, quel est le danger d'une telle entreprise? Le danger – et je l'ai souligné au ministre des Finances – c'est que, bien sûr, pour effectuer ce travail, il va s'entourer de personnes, il va devoir s'entourer de personnes, parce que, bien sûr, le ministre des Finances ne pourra pas lui-même examiner chaque dossier à sa valeur. Il va devoir demander à des personnes qui l'entourent si tel projet est acceptable ou pas. Or, s'il fait une telle analyse et s'il dépend de personnes pour autoriser si un projet est acceptable ou pas, vous donnez alors énormément de pouvoir à des individus, et c'est là le danger, l'effet pervers. Est-ce qu'on pourra s'assurer de toute la transparence? Est-ce que parfois on n'aura pas des doutes quant aux décisions qui sont prises?

(17 h 20)

Donc, les secteurs d'activité, M. le Président, qui seront reconnus. Le ministre a décidé quand même d'établir des balises, une espèce de périmètre, des secteurs qui vont pouvoir se qualifier pour faire partie de cette zone franche. Alors, il inclut dans ce projet de loi la logistique internationale, c'est-à-dire le processus de gestion et de contrôle des mouvements de marchandises, par exemple le tri de marchandises, l'étiquetage. L'étiquetage, c'est-à-dire que vous recevez de la marchandise en gros et vous vous assurez que vous apportez une valeur ajoutée d'une entreprise qui va ensuite... d'un produit qui va ensuite aller ailleurs. Le danger, M. le Président, c'est qu'il va falloir donner des permis ou accorder à des entreprises de participer à la zone franche internationale, zone de commerce international, zone dérogatoire, mais il ne faudra pas pénaliser des entreprises qui vont s'installer dans d'autres sites commerciaux au Québec. Il ne faudra pas que cette zone dérogatoire aille pénaliser d'autres secteurs, d'autres sites qui ont connu un succès. Il ne faudra pas permettre à des entreprises qui sont déjà installées ailleurs, à Laval, à Saint-Laurent, ailleurs au Québec, de venir tout à coup décider de profiter de la zone dérogatoire pour transporter leurs effectifs parce qu'il y a là des avantages financiers.

Or, le ministre peut vouloir nous rassurer totalement que ce ne sera pas permis. Bien, je l'ai mis au défi, à certains moments, qu'il va y avoir des difficultés à apporter des nuances, il va y avoir des difficultés pour être sûr que... Quelqu'un, par en arrière, pourra dire qu'il retire son entreprise, pour ensuite se repositionner dans ce secteur.

Le ministre des Finances a décidé, dans ce projet de loi, également le gouvernement a décidé d'inclure l'entretien et la réparation d'aéronefs. Bien sûr, c'est Mirabel, il y a des pistes. Ça sera facile pour les avions de se rendre, atterrir, et voilà un secteur qui va se qualifier pour bénéficier de cette zone dérogatoire.

Troisième secteur qu'il reconnaît, M. le Président... Je parlais donc de la logistique internationale, c'est-à-dire le tri, l'entretien et réparation des aéronefs. Et le troisième, c'est la formation complémentaire dans le domaine de l'aviation, complémentaire à ce qui se fait déjà au Québec, parce qu'il se fait déjà de la formation au Québec, et du personnel naviguant ne vivant pas au Québec. Autrement dit, il offre ce service à des entreprises qui vont vouloir bénéficier de bénéfices au niveau des impôts et de crédits d'impôt pour assurer la formation de personnel qui travaille au niveau des avions, le service qu'on offre au niveau des avions et, par conséquent, tous les services qui sont rattachés à une flotte d'avions.

Et le quatrième secteur, M. le Président: on inclut par ce projet de loi la transformation légère, c'est-à-dire que la fabrication en zone de commerce international ne devra pas dépasser 50 % du coût du produit. Autrement dit, vous ne pouvez pas utiliser cette zone dérogatoire pour faire un produit du début à la fin; il faudra que ce produit soit fabriqué à 50 % ailleurs que dans cette zone.

Donc, je parlais plus tôt du danger, M. le Président, des effets pervers de ce projet de loi, à savoir qu'on ne veut pas qu'il déplace des entreprises ailleurs au Québec. Donc, on fait appel à ce qu'on parle, on parle de complémentarité à ce qui se fait ailleurs au Québec. Alors, il ne faudra pas que ce soit quelque chose qui se fait déjà, mais ça pourrait être complémentaire. Encore là, je pense qu'on va parfois avoir des doutes quant à la complémentarité. Et je disais au ministre des Finances qu'il court un danger énorme d'être critiqué, et ce sera là notre mission, notre mandat, de le faire en temps et lieu.

Mais c'est là un des effets pervers de ce projet de loi. C'est qu'il va devoir trancher souvent dans des nuances. Ça lui apparaîtra peut-être clairement à lui quand il aura eu ses experts pour lui expliquer, mais, quand il s'agit de transmettre une opinion venant d'experts et la traduire au public, à l'effet que tout ça, c'est correct et ça tombe dans la logique, vous verrez là des entreprises ailleurs au Québec qui vont se soulever et qui vont dire: Ça n'a pas d'allure, c'est une compétition déloyale parce que ces gens reçoivent des bénéfices que nous, situés dans d'autres régions du Québec, nous n'avons pas. Alors, c'est clair, M. le Président, que le danger, ce n'est pas la députée de l'opposition qui va le courir, mais le ministre des Finances. Et il vivra... Je le lui ai porté à son attention, et il est prêt, je présume, à en assumer le coût.

Parce que les bénéfices, M. le Président, ne sont pas négligeables. Les bénéfices sont quand même importants. Un employé, pour bénéficier d'un rabais, au niveau du salaire des employés, doit travailler 26 heures au moins par semaine et 40 semaines par année. On exclut de ce périmètre, M. le Président, les services administratifs de l'entreprise, c'est bien normal. Mais on donne jusqu'à 15 000 $ de crédit d'impôt au niveau du salaire. C'est quand même important. Ça, ça va jusqu'à l'an 2001. Du 30 décembre 2000 à 2004, on donne jusqu'à 12 000 $ par année de crédit au niveau d'un salaire. C'est donc dire que ce n'est pas négligeable comme subvention, M. le Président. Et, de 2003 à 2010, on subventionne à raison de 8 000 $ par année des salaires. Alors, M. le Président, je pense qu'il s'agit là d'une contribution énorme, au niveau des entreprises.

Et, comme je disais précédemment, et même si on doit répéter plusieurs fois les mêmes choses en politique pour bien se faire comprendre, il n'en demeure pas moins que je pense qu'il va falloir que le gouvernement soit extrêmement prudent, extrêmement limpide pour s'assurer que les citoyens comprennent, et surtout les autres entrepreneurs au Québec qui ne bénéficieront pas, eux, de ces bénéfices.

Alors, M. le Président, je pense que je vais terminer mes propos, parce que je vais... ou plutôt je vais conclure. J'ai fait mention des effets pervers. Il y a une part importante de jugement de valeur. Et, quand il y a un jugement de valeur et qu'on est en position de donner de l'argent, on risque de s'attirer énormément de critiques et surtout de discréditer le gouvernement et de discréditer nos institutions, à cause de cette part importante de jugement, parce que, comme je le disais, comme j'en faisais mention, on ouvre la porte au favoritisme.

Qu'un fonctionnaire dise oui à un et non à l'autre, vous imaginez, si vous êtes l'autre, comment vous allez vous sentir? Vous allez bien sûr protester. Vous allez faire appel au ministre pour qu'il change d'idée. Vous allez faire appel pour qu'il révise votre dossier. Et, par conséquent, je pense qu'il y a là un grand danger. Et je ne veux pas dire, M. le Président, que le ministre des Finances va le faire délibérément, pas du tout. Mais je dis qu'il y a une prise, là, qui risque d'être dangereuse pour le ministre, dangereuse parce que, comme je le mentionnais, le ministre également doit se fier à des gens, comme on le fait dans le travail que nous effectuons, et, quand il y a un risque de favoritisme, il y a là toujours un danger.

Tout ce qui est discrétionnaire, M. le Président, est dangereux. Tout ce qui est discrétionnaire est dangereux. Et, bien sûr, je voulais mettre en garde le gouvernement face à certains dangers. Je suis consciente qu'il est le seul à pouvoir accorder ce crédit d'impôt. Ce que je dis: il va devoir définir des normes et des règles très claires pour ne pas exposer nos institutions à la critique et miner davantage le gouvernement. Merci beaucoup, M. le Président.

(17 h 30)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Alors, sur ce rapport, il y a des interventions? M. le député de Papineau, je vous cède la parole.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Ça me fait extrêmement plaisir de pouvoir intervenir à ce moment-ci sur le projet de loi n° 56 parce que dans tout le projet de loi il y a quelque chose, quand on parle d'infrastructures pour notre région, qu'on n'a pas du tout. Je vois le député de Richelieu, le ministre délégué au Transport; je suis très content qu'ils soient présents ici parce qu'ils vont pouvoir écouter. Et, quand on parle d'infrastructures alentour d'un aéroport, on oublie la partie qui est la plus importante quant à moi, c'est une autoroute.

Chez nous, dans le comté de Papineau, depuis nombre d'années, les députés qui étaient là avant, les députés d'aujourd'hui, le député de Richelieu, qui a travaillé très fort d'ailleurs pour pouvoir faire avancer le dossier de l'autoroute 50 dans l'Outaouais... On n'en parle pas du tout. On établit une zone franche Mirabel pour développer le développement économique, pour la création d'emplois, pour sauver l'aéroport de Mirabel, mais le point principal pour nous, les gens de l'Outaouais, c'est l'autoroute 50. En aucun temps dans tout le dossier, ici, quand il a été déposé et que j'ai lu le projet de loi... On parle de promotion, on parle de susciter et d'accueillir, mais comment on fait pour tout faire ça? Ça prend une autoroute. Ça prend des autoroutes alentour d'un aéroport aussi important que Mirabel.

Chez nous, dans l'Outaouais, il y a un gros manque, c'est l'autoroute 50. Il y a eu des débuts de travaux qui ont été faits. Il y a de Hull jusqu'à Buckingham, dans mon comté, qui a l'autoroute. Prochainement, on va débuter les travaux du contournement de la ville de Buckingham pour aller vers le nord. Mais principalement comment on fait du développement économique? Ça prend une autoroute.

Comment les gens vont pouvoir développer ou faire du développement économique ou que l'aéroport de Mirabel devienne un outil important... Comme il est dit ici: «La Société a principalement pour mission de favoriser la mise en valeur des infrastructures de l'aéroport de Mirabel par le développement et l'exploitation de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.»

Mais, pour se rendre à Mirabel, ça prend une autoroute. Ça, je ne pense pas qu'il y ait personne ici qui puisse m'enlever ça. Ça prend une autoroute pour se rendre à Mirabel. Je vois la députée de Mille-Îles qui va régulièrement dans mon comté les fins de semaine, quand elle peut être libre, pour aller visiter sa mère à la maison Chéné à Chénéville. Elle est obligée de prendre la route 148. Puis le vendredi...

Je vous lance un défi, M. le Président. Ce soir, là, prenez votre auto, malheureusement comme vice-président vous n'avez pas de garde du corps – et comme le député de Richelieu tantôt qui me disait qu'il espérait qu'on finirait à 19 heures ou 19 h 30, moi aussi d'ailleurs, il faut s'en retourner chez nous dans l'Outaouais – et je vous lance le défi de prendre la route 148. Je vous lance le défi. On veut développer un aéroport. Si vous n'y avez pas été dernièrement, vous allez vous apercevoir que l'aéroport de Mirabel, il manque une autoroute. Je vois notre ministre, M. Facal, c'est un bon message. Je suis content qu'il soit ici. Comment on peut développer un aéroport s'il n'y a pas l'autoroute 50? On ne peut pas.

On parle d'infrastructures, on parle de promotion, on parle de susciter de l'intérêt pour Mirabel, mais on n'a rien alentour. Même pour aller à Montréal, on est obligé de prendre la 15, on est obligé de prendre la 13, qui n'est pas finie. On est obligé de prendre la 40 vers Québec, qui va très bien d'ailleurs, parce qu'on a fait un bout à Mirabel, à peu près 20 km, et c'est formidable, 15 minutes à 20 minutes de moins pour prendre... Mais on ne développe pas vraiment. On ne parle pas du problème. On veut que l'aéroport de Mirabel devienne un aéroport important au point de vue du développement international. Comment on peut développer quelque chose internationalement s'il n'y a pas d'autoroute pour se rendre chez lui, pour se rendre à Mirabel?

Il y a des gens, je pense, ici, qui trouvent ça un peu drôle qu'on parle de ça, mais c'est la réalité. On fait du développement économique comment? C'est qu'on puisse se rendre, qu'on puisse attirer alentour de l'aéroport des commerces, des commerces qui vont pouvoir se rendre. Je veux dire, on ne peut pas partir d'Ottawa puis se rendre à Mirabel puis prendre l'avion à chaque fois, ça prend une autoroute. Le camionnage qui va se rendre chez nous, qu'ils vont développer, il va y avoir des motels industriels alentour de l'aéroport de Mirabel... Mais on ne l'a pas. L'intérêt n'est pas là. Le point principal dans tout ce dossier-là, le point qui manque, d'après moi, c'est l'autoroute 50, qui n'est pas terminée, dans la région de l'Outaouais, qui va rejoindre le comté d'Argenteuil. Si le député d'Argenteuil, qui aujourd'hui malheureusement ne pouvait pas être ici pour discuter du dossier de Mirabel... Il vous dirait la même chose, sûrement.

Et, quand on parle des gens et quand on parle des gens du gouvernement qui nous représentent, qui sont les ministres attitrés à l'Outaouais, il y en a qui ont voulu le défendre. Et je dois le dire honnêtement, M. le Président, le député de Richelieu, pendant qu'il a été responsable de l'Outaouais, qui demeure dans l'Outaouais et qui est député de Richelieu, puis ce n'est pas... il n'a plus de faveurs, il n'est plus ministre. Alors, il ne peut pas m'aider, là. Mais, lui, il l'a défendue, il l'a défendue, l'autoroute 50. Il y a eu des argents qui ont été investis. On a même annoncé, durant la campagne électorale, le contournement de Buckingham. Ça va être fait? Tant mieux. Je dois vous dire que la moitié est payée par le fédéral. Il ne faut pas oublier, ça, là. Sur 1 000 000 quelques 100 000 $, la moitié est payée par le fédéral.

Mais, quand on parle de l'aéroport de Mirabel, il ne faut pas oublier que, pour avoir un aéroport qui fonctionne, qui marche, qui va se développer, qui va avoir de la promotion, qui va avoir du commerce international, ça prend une autoroute qui s'appelle 50. L'autoroute 50, qui a bien de la barbe – parce que j'ai 50 ans, ça fait 30 ans qu'on la promet – qui a pas à pas avancé... Tous les gouvernements, que ça soit le gouvernement du Parti québécois, que ça soit le gouvernement du Parti libéral qui a fait toutes les démarches... Toutes les études d'impact ont été déposées. M. le député de Richelieu, vous êtes d'accord. Je peux vous le prouver, on avait tout fait ça. Maintenant, on commence à petits pas.

On a même suggéré, chez nous – et ça n'a pas été une suggestion qui a été très populaire mais qui est discutée – qu'on ait, nous autres aussi, une autoroute payante; regarder, faire une étude pour une autoroute payante. Si on implique dans le projet de loi n° 56, quand on parle de promotion de l'aéroport de Mirabel... On pourrait faire en même temps une étude pour voir comment on pourrait, avec partenariat... Et c'est mentionné dans le projet de loi. On parle de partenaires. Alors, pourquoi, pour développer l'aéroport de Mirabel, du côté est de Buckingham, du comté de Papineau, on ne pourrait pas regarder la possibilité d'avoir un partenaire? Puis ça pourrait peut-être être la Société de développement de Mirabel qui pourrait nous aider à développer ça. Et le regarder sérieusement.

Ce n'est pas obligé que ce soit une autoroute à quatre voies. On peut avoir une autoroute avec des voies de dépassement pour commencer, puis préparer... pour le futur, s'il y a 8 000, 9 000, 10 000 automobiles, ou camions, ou quoi que ce soit qui passaient à tous les jours, avec un prix minimum... On pourrait même demander aux MRC de la région, qui deviendraient partenaires, qui pourraient, sur 25 ans, sur 30 ans, sur 40 ans, emprunter puis que ça ne toucherait pas du tout le fonds consolidé, ou la dette, ou quoi que ce soit du gouvernement. C'est eux qui seraient responsables, et ce serait le gouvernement qui pourrait même faire le paiement. Pourquoi pas? On ne le regarde pas. Je l'ai suggéré à mon gouvernement, je l'ai suggéré au gouvernement actuel; je n'ai pas réussi. C'est un des dossiers, je dois dire, depuis que je suis en politique, dont je suis le plus déçu. Honnêtement. On n'a pas vraiment avancé comme les gens de chez nous voudraient le faire, voudraient se servir de ça.

Comment une région peut se développer? On le voit. Regardez l'Estrie, la Montérégie, regardez dans le bout de Montréal, regardez sur la rive sud, il y a des autoroutes. Nous, on n'en a pas, d'autoroute. Alors, on a un problème majeur avec ça parce que le développement économique ne peut pas s'améliorer, on ne peut pas créer de l'emploi, on ne peut pas demander que l'aéroport de Mirabel devienne un commerce international s'il n'y a pas d'autoroute entre Ottawa et Montréal qui peut se rendre. On est obligé de passer par l'Ontario. Alors, pour passer par l'Ontario pour venir à Mirabel, il y a vraiment un détour qui est énorme.

Alors, je pense que le projet de loi n° 56, malheureusement, M. le Président, si j'avais la chance de mettre un amendement, moi, de rajouter un article au projet de loi, je rajouterais... Et sûrement que je serais appuyé par le député de Richelieu et par notre ministre, comment on dit ça, responsable de l'Outaouais. Ils m'appuieraient sûrement. Je suis sûr de ça. Et ça ferait un article formidable dans LeDroit . Les gens diraient: Aie! Qu'est-ce qui se passe? On va l'avoir, l'autoroute 50.

Et on en a besoin. C'est un besoin qui... Je vous le dis honnêtement, je ne sais pas qu'est-ce qui se passe, mais tous les gouvernements, ça avance à petits pas, mais on ne réussit pas vraiment à mettre ce dont on on a besoin.

(17 h 40)

On voit Lachute. Depuis que l'autoroute est ouverte entre Lachute jusqu'à Montréal, déjà il y a des compagnies qui se sont établies, depuis deux ans, sur le côté. Quand on passe, à toutes les fois, on voit déjà des créations d'emplois, on voit des gens qui ont trouvé de l'emploi. Pourquoi? Ce n'est pas Mirabel, c'est l'autoroute 50 qui s'est agrandie ou allongée, qu'on appelle ça comme on veut.

Alors, je ne sais pas si on a un temps limité pour notre discours. Je pourrais en parler pour une heure, si vous voulez.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...on est rendu quasiment à 11, M. le député. Ha, ha, ha!

M. MacMillan: J'avais déjà... Ah! Mais je n'ai pas fini, M. le Président. Je vais voler un peu de temps à mon futur collègue.

Mais, juste pour faire un résumé, si vous me permettez...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Terminez, si vous voulez, à l'intérieur de 11.

M. MacMillan: ...là, 30 secondes. Je pense qu'il serait important pour un gouvernement, pour n'importe qui ou pour n'importe quel député qui siège ici que, si on veut qu'un aéroport devienne aussi important comme on veut le faire... Bien, ça prend une autoroute alentour. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Papineau. Alors, sur le même rapport, Mme la députée de La Pinière, je vous cède la parole.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, à pied levé, je voudrais intervenir sur le projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

J'ai écouté attentivement les présentations qui ont été faites par ma collègue la députée de Marguerite-Bourgeoys et porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances, et, avec son éloquence habituelle, elle nous a argumenté éloquemment les points qui sont importants dans ce projet de loi.

J'ai eu également l'occasion, M. le Président, de participer à l'étude article par article, dans la commission des finances publiques, du projet de loi n° 56 et de faire des commentaires en rapport à certains articles qui me semblaient problématiques, ou ambigus, ou qui méritaient d'être clarifiés.

Donc, M. le Président, ce projet de loi, il a une portée extrêmement importante pour l'économie de la région de Montréal et pour l'économie du Québec dans son ensemble. C'est un projet de loi de 51 articles. Certains sont plus lourds de conséquences que d'autres. Il constitue, en fait, la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

On sait que cette Zone-là a été durement éprouvée par les événements qui ont amené le déplacement du trafic aérien de Mirabel à Dorval, et donc les infrastructures existantes méritaient qu'on leur trouve une vocation et qu'on puisse développer cette région-là. Mon collègue le député de Papineau a plaidé pour l'autoroute 50 parce qu'il voit le développement économique dans une optique intégrée qui ferait de cette région, la Zone de Mirabel, un pôle économique qui rayonnerait sur l'ensemble des régions voisines.

La Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel a principalement pour mission de favoriser la mise en valeur des infrastructures aéroportuaires de Mirabel par le développement et l'exploitation de la Zone de commerce international et également par la promotion de l'implantation d'entreprises dans cette Zone. Elle veillera aussi à susciter, accueillir et évaluer les projets d'investissement qui pourraient favoriser le développement de la Zone.

Entre autres, la Société a pour fonction de formuler des recommandations au ministre des Finances sur les demandes d'attestation d'admissibilité aux mesures d'incitation fiscales prévues à la loi à l'égard des activités des entreprises exercées à l'intérieur de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

De plus, la Société administre notamment les programmes d'aide financière élaborés par le gouvernement pour favoriser le développement de la Zone, ceux prévus à son plan d'affaires ainsi que tout autre programme dont l'administration lui sera confiée par le gouvernement.

Donc, M. le Président, lorsqu'on regarde le profil de ce projet de loi tel qu'explicité dans les notes introductives, on remarque que c'est un projet qui a une portée extrêmement importante sur l'économie du Québec, sur la grande région de Montréal et Mirabel, d'abord parce que, par la création de cette Société, on vise à créer un guichet multiservices pour les entreprises qui voudraient s'implanter dans cette zone dérogatoire.

On vise aussi à développer autour de cette Zone une ère économique nouvelle qui permettrait d'attirer des entreprises, qui permettrait de développer et d'exploiter cette Zone de commerce international, qui ferait l'implantation et la promotion d'accueil des entreprises qui viendraient s'installer dans la Zone et qui permettrait donc, à partir d'une synergie régionale mais aussi internationale, parce qu'on fait appel aussi aux entreprises étrangères qui pourraient s'installer dans la région, de développer une synergie qui pourrait favoriser l'économie, la création d'emplois, etc.

Tout ça part de bonnes intentions, sauf que, M. le Président, il y a des petits problèmes qui risquent potentiellement de survenir si on n'est pas vigilant. Notamment, il y a toute la question du mandat de cette Zone de commerce international de Montréal à Mirabel, le mandat qui est là, au chapitre de la promotion et du développement, le fait de vouloir attirer des entreprises dans la Zone. Cela pourrait amener la Société qui est nouvellement créée dans cette Zone à tomber en concurrence avec d'autres zones de développement, notamment Montréal international.

Et j'insiste là-dessus, M. le Président. J'ai eu l'occasion d'exprimer ce point de vue en commission parlementaire. Le ministre des Finances ne m'a pas convaincue dans les réponses qu'il m'a apportées, mais je vois là un potentiel très sérieux de collision, parce que Montréal international est un organisme qui est relativement jeune, qui a été créé précisément pour faire la promotion de Montréal à l'étranger, Montréal ici s'entend comme étant le Grand Montréal, avec sa rive nord, avec sa rive sud, la ville de Laval, M. le Président, les villes de la rive sud: Brossard, Saint-Hubert, Longueuil et au-delà.

Donc, il y a déjà un organisme qui s'appelle Montréal international, créé, entre autres, avec la collaboration de l'entreprise privée, le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec, qui a pour mandat de faire cette prospection et d'attirer les investissements au Québec, puis, en même temps, on a une autre zone qui a un mandat identique par certains volets. Donc, il faut voir comment l'harmonisation entre ces deux sociétés va se faire dans le concret si on cherche, M. le Président, à attirer des entreprises et à attirer des investissements et qu'il faille batailler pour savoir s'il faut qu'elles soient localisées à Mirabel, à Laval, à ville Saint-Laurent, à Saint-Hubert ou à Brossard. C'est un constat qu'on peut faire qui est réel.

Pour ma part, je considère que, si cette Zone-là doit exister, il faut qu'elle fonctionne dans un esprit de complémentarité, complémentarité avec les autres zones économiques, les autres régions du Québec qui ont déjà des acquis, qui ont déjà des expériences, qui ont déjà des entreprises. Et, on le sait, le Québec est une des sociétés les plus ouvertes au niveau du commerce international, au niveau de l'exportation. Les régions aussi sont rendues dans le monde. Les organismes des milieux dans les régions, même les organismes locaux, n'hésitent pas à explorer les possibilités du commerce international, de faire des maillages avec des entreprises étrangères. Il y a également des investissements qui nous viennent de l'étranger et qui font en sorte que, dans certains domaines, surtout des domaines de haute compétitivité, notamment les technologies de pointe...

(17 h 50)

Je prends comme exemple les technologies de l'information. J'ai eu l'occasion de rencontrer des gens d'affaires, M. le Président, dans ce secteur. Ce qu'on me dit, c'est que souvent les initiatives gouvernementales en ce qui touche les subventions de certaines entreprises, les avantages qui sont octroyés à certaines entreprises, comme c'est le cas actuellement pour la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel, elles créent beaucoup de compétition et elles déplacent le personnel, les employés. On ne crée pas nécessairement de nouveaux emplois, mais on se pirate les emplois. Et ça, c'est une conséquence réelle qui m'a été exprimée par les gens qui vivent cette situation-là.

Donc, lorsqu'on accorde des avantages fiscaux, des subventions qui permettent à certaines entreprises d'être mieux outillées pour affronter l'internationalisation et le commerce international, ça peut délocaliser des emplois, et c'est très regrettable. Je le souligne pour qu'on puisse exercer tous une vigilance par rapport à cette Zone. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Anjou. M. le député.


M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir à ce stade-ci au niveau du projet de loi n° 56, projet de loi qui, comme on le sait, découle du dernier budget présenté par le ministre des Finances au mois de mars dernier, projet de loi qui vise à créer la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

Vous savez, M. le Président, c'est un dossier dont on entend parler depuis longtemps, je pense, la fameuse dualité entre Dorval et Mirabel. Je ne reviendrai pas sur le prolongement de l'autoroute 50, je pense qu'on a eu un vibrant plaidoyer tout à l'heure de la part de mon whip adjoint, mais il y a quand même des composantes intéressantes puis importantes dans ce projet de loi là.

Je vous dis d'emblée qu'on a l'intention, nous, du côté de l'opposition officielle, d'appuyer ce projet de loi là pour une raison bien simple, M. le Président, c'est que je pense que la région de Mirabel, si on veut, la région élargie de Mirabel, au cours des dernières années, a subi plusieurs coups durs. Qu'on pense à Kenworth qui a été en suspens pendant un certain temps, General Motors qui est l'usine au niveau de Sainte-Thérèse, ça va... des bonnes nouvelles, des moins bonnes nouvelles, l'espoir, des déceptions, et, évidemment, au niveau de l'aéroport: changement de vocation, M. le Président, qui a placé la région face à un choix. Et le choix est bien simple, c'est soit de se laisser aller ou de se prendre en main et de continuer puis d'essayer de faire le mieux possible avec la situation dans laquelle on se retrouve.

M. le Président, dans ce projet de loi là, ce qu'on veut créer, c'est une société qui aura pour mission de favoriser la mise en valeur des infrastructures aéroportuaires de Mirabel par le développement et l'exploitation de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel. À cette fin, évidemment, on mentionne dans le projet de loi que «la Société fera notamment la promotion de l'implantation d'entreprises dans la Zone de commerce international».

M. le Président, je pense que c'est un concept qui est intéressant, mais je mets en garde tout le monde, ceux qui seraient appelés à penser que la solution se trouve dans ce projet de loi là. J'aimerais bien dire que la solution, à jamais, se trouve là-dedans, mais il y a plus, M. le Président. Je pense qu'il y a une question de volonté. Le projet de loi en est un bon exemple, et je pense que c'est la pierre d'assise de cette volonté-là.

Mais, là où se trouve la clé du succès, c'est qu'est-ce qu'on va faire avec la Société que le projet de loi va créer. Qu'est-ce qu'on va faire, M. le Président? Je pense que ma collègue de La Pinière a soulevé une crainte légitime, qui est de dire: Est-ce qu'on va assister à un combat visant à amener des entreprises là plutôt que de les mettre dans d'autres régions du Québec? Je sais que le ministre des Finances, pour l'avoir entendu entre autres en commission parlementaire, mentionnait: Écoutez, ce n'est pas l'idée, ce n'est pas l'objectif.

Vous semblez en être conscient, vous semblez être conscient de cette possibilité bien réelle qu'une guerre se développe entre des régions, ce qui n'est pas l'objectif visé. Et ce qu'il mentionnait, c'est qu'il voulait éviter justement que l'on vide dans le fond une région au profit d'une autre. Je pense que ça, ça serait changer quatre 30 sous pour une piastre, puis collectivement, au niveau de la société québécoise, on n'en sortirait pas gagnant.

Ça fait que c'est pour ça, je pense, qu'il faut faire preuve de vigilance, parce que qu'est-ce qu'on veut faire avec ce projet de loi là – et ça revient à ce que je vous mentionnais – ça va être là la clé du succès pour les gens de Mirabel. Une des façons, M. le Président, je pense – et ça, c'est indépendamment des deux côtés de la Chambre – que, comme parlementaires, si on veut favoriser et contribuer au développement de la région de Mirabel, nous tous, les 125 députés et d'autres intervenants, on va devoir se mettre dans la tête une chose bien précise, c'est que ce ne sont pas des problèmes nécessairement du provincial, du fédéral ou du municipal.

Une situation bien simple, bien claire, M. le Président. Il y a des gens, dans une région, qui ont subi, il y a de cela plusieurs années, une expropriation massive puis qui se retrouvent aujourd'hui avec un aéroport qui est en très bon état, pour l'avoir moi-même utilisé encore récemment. On est très bien à l'aéroport de Mirabel. Les installations sont modernes. Sauf qu'il y a un changement de vocation. Puis ça revient à ce que je vous mentionnais, M. le Président, c'est que le message qu'on peut envoyer aux gens... Parce qu'eux, les gens de la région de Mirabel, ce qu'ils nous disent, c'est: On veut s'en sortir. Donnez-nous les moyens, vous, les politiciens, pour qu'on puisse collectivement faire avancer les choses.

Bien, je pense que, comme parlementaires, M. le Président, il va falloir, nous, assumer un leadership puis assumer nos responsabilités. Ce que j'entends par là, c'est qu'on ne peut pas continuellement, qui que ce soit des gens ici... Je sais que le ministre des Transports à un moment donné avait soulevé l'hypothèse qui est celle de dire: Ce n'est pas irréversible; ce qu'on a fait à Dorval va être ramené à Mirabel. Puis il y a d'autres personnes qui, de bonne foi – et je ne remets pas en cause les intentions de ces gens-là – continuent de façon occasionnelle, sporadique, à soulever l'hypothèse que peut-être le transfert vers Dorval pourrait se refaire à Mirabel.

Moi, sur ce que j'en suis, M. le Président, puis je n'ai pas participé à la décision de transférer de Mirabel vers Dorval, il y a quelque chose de bien simple qui me frappe, moi. C'est que, si on veut, tout le monde ensemble, aider les gens de la région de Mirabel et si on est sincère dans l'approche que l'on a face au projet de loi et dans toutes les mesures qui peuvent être entreprises, bien, je pense que, si on a un message bien clair à leur envoyer, au-delà des discours, je pense, dans notre attitude, c'est de dire: On va dans une direction et on fait tout notre possible pour que ça réussisse.

Le projet de loi, M. le Président, semble tenir pour acquis que le transfert de Mirabel vers Dorval, c'est fait. Et on pose un constat bien simple, qui est celui de se dire: Bon, qu'est-ce qu'on fait? Les gens de la région veulent se prendre en main, quels outils peut-on leur fournir pour que, collectivement – et puis ça déborde les gens dans la région immédiate – on puisse les aider à poursuivre leur développement et à donner une autre vocation, si on veut, à la région de Mirabel?

Je pense, M. le Président, que le premier geste qu'on peut faire, comme parlementaires – et c'est la même chose pour les ministres – c'est d'arrêter une fois pour toutes de donner ce que je qualifierais, moi, de faux espoirs aux gens de Mirabel, c'est-à-dire, d'un côté, de leur dire: On vous propose une nouvelle solution, la nouvelle solution, c'est de créer une zone franche qui vous permettrait d'attirer des nouvelles entreprises puis de développer une nouvelle économie puis de mettre en valeur les installations, puis, de l'autre côté, c'est de dire: On a voté ce projet de loi là, on a cette approche-là, mais c'est possible qu'on revienne à la situation antérieure, qui est de dire: On va retransférer des vols de Dorval à Mirabel.

Ce que j'en suis, M. le Président, c'est que je pense que, si on veut optimiser les chances de succès au niveau de Mirabel, c'est qu'il faut s'enligner dans une direction. La décision semble avoir été prise, M. le Président. Le ministre des Finances, dans son dernier budget, nous apporte une solution, nous propose une nouvelle piste de solution, piste de solution qui avait été soulevée par les gens de la région. Je pense que c'est important, si on vote ce projet de loi là, que, tous, on prenne la résolution, si je peux m'exprimer ainsi, qui est de faire réussir ce projet de loi là, le projet de loi qui est proposé devant nous.

(18 heures)

En terminant, M. le Président, il y a un dernier point que j'aimerais soulever. Comme je vous l'ai mentionné, on est en faveur de ce projet de loi là, mais j'aimerais attirer l'attention, peut-être, du ministre responsable dans ce dossier-là... Il y a une crainte dans la région, bien légitime, puis je pense qu'elle peut être facilement corrigée. Je pense que, au-delà des discours partisans, on peut avoir des idées, des vues sur certaines avenues dans ce dossier-là. Puis c'est l'intérêt ou, comment je pourrais dire, la détermination des gens de la région que d'avoir eux-mêmes le contrôle, entre autres, au niveau du conseil d'administration qui va siéger là. Je pense que c'est légitime de la part des gens de la région de Mirabel de souhaiter que ce soient des représentants mêmes de la région qui se retrouvent là-dessus. Je pense, M. le Président, que, au cours des dernières années, ils ont subi plusieurs coups durs. Bien, ils ont décidé de se prendre en main puis de foncer et de travailler pour essayer de rebâtir quelque chose de concret dans la région.

Je pense qu'ils ont droit à cette façon de voir les choses, c'est-à-dire qu'on veut, nous, avoir des gens de notre coin qui s'occupent de la nouvelle Société de développement qui sera créée par le projet de loi. Je pense qu'il n'y a pas là quelque chose de majeur. Ce n'est pas un changement fondamental au niveau du projet de loi. Je pense que c'est un accommodement légitime qui pourrait être donné au niveau des gens de la région de Mirabel. Je pense qu'il serait de mise que, dans l'application de ce projet de loi là, on en tienne compte. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Anjou. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce rapport? Alors, s'il n'y a pas d'autres intervenants, je vais mettre aux voix le rapport de la commission des finances publiques portant... Excusez-moi, M. le... Il va y avoir d'autres intervenants possibles?

M. Paradis: Oui.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Ah bon! Alors, s'il y a d'autres intervenants possibles, comme l'heure est passée, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 3)

(Reprise à 20 h 2)

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Une voix: Il n'y a pas de leadership.

Une voix: Il n'y a pas de leader.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je suspends.

(Suspension de la séance à 20 h 3)

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés qui sont debout, veuillez vous asseoir.

Alors, comme je le mentionnais tout à l'heure, nous redébutons, nous continuons nos travaux que nous avions suspendus à 18 heures. Et, à ce stade-ci, je demanderais au leader adjoint du gouvernement de bien vouloir appeler un article.

M. Boisclair: M. le Président, le leader de l'opposition pourra valider, je comprends que nous en étions toujours à la prise en considération du projet de loi n° 56. Et je comprends que le leader de l'opposition s'apprêtait à prendre la parole. Nous serons très heureux de l'entendre.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, est-ce que, effectivement...

Alors, on appelle l'article 45 de notre feuilleton. L'Assemblée prend donc en considération le rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

Alors, je vous cède la parole, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Compte tenu d'informations qui nous ont été acheminées en toute fin d'après-midi et qui révèlent un caractère grave, une décision que nous n'avions pu anticiper, je vous demanderais, à ce moment-ci, de reconnaître mon collègue le député de Marquette.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Marquette.

M. Boisclair: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez, là. Moi, je voudrais bien comprendre quelque chose. Vous aviez un droit de parole de 20 minutes, M. le leader de l'opposition?

M. Paradis: Non, 10 minutes.

Le Vice-Président (M. Pinard): Dix minutes? Oui. Excusez-moi. Alors, votre temps de parole va donc être...


Demande d'un débat d'urgence sur le projet de loi n° 54 modifiant la Loi sur les substituts du procureur général


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Non, M. le Président. Il s'agit...

Le Vice-Président (M. Pinard): Un point de règlement?

M. Paradis: ...d'un cas spécial d'appel au règlement. Compte tenu d'une correspondance qui nous a été acheminée à trois reprises, de façon insistante, en toute fin d'après-midi, nous allons requérir, à ce moment-ci, la tenue d'un débat d'urgence à l'Assemblée nationale sur une question qui touche la sécurité des enfants au Québec. Je vous demanderais de reconnaître le député de Marquette pour des explications.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez. Une seconde.

M. Boisclair: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Un instant. Un instant, M. le député de Marquette. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, nous en sommes toujours à la prise en considération du projet de loi n° 56. Vous aviez reconnu le leader de l'opposition. Je comprends qu'à ce moment-ci le leader de l'opposition a terminé son intervention et souhaite qu'un de ses collègues puisse continuer la discussion sur le même article qui a été appelé par le leader du gouvernement, M. le Président.

M. Paradis: M. le Président, peut-être, pour fournir de plus amples informations, à ce moment-ci, à mon collègue le leader du gouvernement ainsi qu'à la présidence de l'Assemblée nationale...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le leader.

M. Paradis: ...nous requérons la tenue d'un débat d'urgence à l'Assemblée nationale. Mon collègue le député de Marquette a été saisi...

Une voix: ...quel article?

M. Paradis: ... – 80 et suivants – en toute fin de journée d'une lettre importante du président de l'Association des procureurs-chefs et chefs adjoints du gouvernement du Québec, du ministère de la Justice, Me Jean Lortie, une lettre qui a été adressée à notre collègue Mme la ministre de la Justice qui se trouve à quelques pas, dans l'autre commission parlementaire sur les sages-femmes, M. le Président, elle s'acquitte de ses fonctions de parlementaire.

L'Assemblée nationale ne siégera pas demain. L'Assemblée nationale ne siégera pas après-demain. L'Assemblée nationale ne siégera pas le jour suivant. Je vous demanderais à ce moment-ci de reconnaître brièvement le député de Marquette...

Une voix: ...

M. Paradis: Je m'excuse, là, s'il y a des gens qui sont au courant du contenu de la lettre et qui disent non...

Le Vice-Président (M. Pinard): Un instant. Un instant, s'il vous plaît. Là, on a quand même une procédure... Les articles 88, 89 et 90... L'article 88, au niveau de la demande: «Tout député peut demander la tenue d'un débat d'urgence...» S'il vous plaît. S'il vous plaît.

En vertu de l'article 88, tel que vous l'avez formulé, «tout député peut demander la tenue d'un débat d'urgence sur un sujet précis, d'importance particulière, qui relève de l'Assemblée et qui ne peut ou n'aurait pu être discuté autrement. La demande ne doit être accompagnée que de brèves explications».

L'article 89 stipule que «le député doit, au plus tard une heure avant la période des affaires courantes, remettre un avis écrit de sa demande au président».

Alors, le président, à ce moment-là, décide sans discussion si la demande est recevable ou pas en vertu de l'article 90.

M. le leader.

(20 h 10)

M. Paradis: Sur le sujet, M. le Président, vous avez lu les articles du règlement. Il s'agit d'une des sources et une source très importante sur laquelle vous devez baser votre décision. Toutefois, la présidence est également liée par la Loi de l'Assemblée nationale, par l'article 2 du règlement de l'Assemblée nationale et par les précédents à l'Assemblée nationale.

J'aimerais attirer votre attention sur deux précédents qui ont été rendus par deux grands présidents de l'Assemblée nationale issus de fonctions distinctes, de partis distincts. Je fais référence à une décision qui a été rendue le 11 août 1977 par Me Clément Richard, président de l'Assemblée nationale à l'époque, et je ne pense pas que..

Une voix: ...

M. Paradis: S'il y a quelqu'un de l'autre côté, là, qui se pense meilleur président que Me Richard, qu'il fasse application pour l'emploi.

Une voix: ...

M. Paradis: Me Richard a décidé, à ce moment-là: «...un moment où des occasions prochaines d'en discuter n'existent pas, constitue un élément important que la présidence retiendra pour permettre un débat sur cette question.» Juin 1977, pages 2887-2890.

Également, M. le Président, une autre décision qui, dans des circonstances analogues, a été rendue par un de vos prédécesseurs, Me Jean-Noël Lavoie – tout le monde connaît le règlement Lavoie de l'Assemblée nationale – un des grands présidents de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas une situation qui est facile, parce que le règlement, qui est une de vos sources d'inspiration, stipule exactement ce que vous avez dit, M. le Président. On doit donner un avis d'une heure avant la période des questions, et la présidence doit se prononcer à ce moment-là. C'est ce que le règlement dit. Et je ne plaide pas que le règlement n'est pas correct dans ce sens-là, sauf que, dans des situations exceptionnelles... Je vous soumets qu'à ce moment-ci nous sommes dans une situation exceptionnelle. Cette décision a été rendue par Me Jean-Noël Lavoie, le 19 novembre 1974. Le président, constatant l'urgence de la question... Ça, ça relève totalement de votre discrétion. On n'est pas dans le cas de l'application des articles 180 et suivants où c'est l'Assemblée qui décide de l'urgence. À ce moment-ci, c'est la présidence qui se doit de décider de l'urgence, permettre un débat d'une heure, qui devra se dérouler après 20 heures, M. le Président.

En ce qui concerne la lettre, si vous voulez, à ce moment-ci, que je vous donne les faits comme tels qui...

Une voix: ...

M. Paradis: ...je vous demanderais de reconnaître le député de Marquette, ou je peux le faire, M. le Président. Mais le député de Marquette a été saisi par le substitut chef.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...leader de l'opposition. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, très brièvement.

Une voix: Très brièvement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Un instant, avant d'aller plus loin, je voudrais entendre le député de Marquette qui, pendant quelques minutes, peut me diriger. S'il vous plaît.

Une voix: ...

M. Boisclair: ...reconnaître le droit de parole, mais je voudrais quand même rappeler que votre prédécesseur, en novembre 1997, indiquait qu'en période de travaux intensifs – ce qui est le cas à l'heure actuelle – la priorité doit être donnée aux affaires législatives du gouvernement.

M. Paradis: Et c'est une question législative du gouvernement.

Des voix: ...

M. Paradis: ...il s'agit d'une question législative.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...avoir la référence à ce que vous venez de nous dire, monsieur.

M. Boisclair: Oui, d'accord, mais, on va...

Le Vice-Président (M. Pinard): On va l'écouter? D'accord. Alors, j'aimerais vous entendre.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, je tiens à vous assurer de mon siège que ce n'est pas une stratégie du leader de l'opposition.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ouimet: M. le Président, ça peut peut-être les faire rire, mais je suis convaincu que, lorsque le leader adjoint va entendre le contenu de la lettre que j'ai reçue, il va acquiescer à la demande. M. le Président, je vous l'expose.

À trois reprises, j'ai reçu, au fax, en ma qualité de critique en matière de justice et de critique de la Procureur général, une missive importante venant de Me Jean Lortie, qui est le substitut en chef de tous les procureurs généraux pour la ville de Montréal. Dans la missive qui a été transmise à la ministre et dont copie a été envoyée au critique... Et c'est une situation qui est tout à fait exceptionnelle. Jamais je n'ai reçu... j'ai vérifié avec mes prédécesseurs, jamais ils n'ont reçu de missive de la part d'un substitut en chef des procureurs généraux.

Le substitut croit la situation suffisamment grave qu'il a voulu attirer l'attention de l'Assemblée nationale dès ce moment. Avec votre permission, M. le Président, je vais vous lire le contenu de la lettre. Et je fais appel à votre formation de juriste, vous allez comprendre de quoi il s'agit. La lettre, je l'ai reçue à 16 h 3 min à mon bureau...

Des voix: ...

M. Ouimet: M. le Président, le ministre responsable va comprendre qu'il s'agit d'enfants. C'est un cas sérieux. Alors, c'est adressé à Mme Linda Goupil, ministre de la Justice et Procureur général.

«Mme la ministre, je m'adresse à vous comme Procureur général du Québec et comme législateur pour mettre fin à l'incertitude et au danger – ce n'est pas l'opposition, là, c'est le substitut en chef, qui relève directement de la ministre de la Justice et qui, normalement, ne communique jamais avec l'opposition – que pourrait représenter le report de l'adoption du projet de loi n° 54 pour l'administration de la justice au Québec.

«Le substitut du Procureur général a discrétion pour autoriser une dénonciation à l'égard de tous les crimes prévus au Code criminel, y compris un meurtre, sans le consentement du Procureur général, dans le cadre de directives émises par le Procureur général dont l'application fait consensus.

«Toutefois, le législateur fédéral a prévu que, pour un petit nombre d'infractions, dont l'enlèvement d'enfants, le consentement du Procureur général est obligatoire. Il est toutefois reconnu, par la définition de l'article 2 du Code criminel, que le Procureur général comprend leurs substituts légitimes.

«Au Québec, et c'est un cas unique au Canada, la Loi sur les substituts du procureur général a restreint cette définition en imposant l'obligation du consentement par le Procureur général lui-même ou le sous-Procureur général, mais en déléguant l'exercice de ce pouvoir aux procureurs-chefs ou leurs adjoints.

«Une décision récente et inattendue a rendu illégale cette sous-délégation. Il s'agit de l'arrêt Thibault – dont j'ai copie, M. le Président. L'étude sur l'opportunité d'en appeler de cette décision, à laquelle a participé l'Assemblée des chefs et chefs adjoints, amène à la conclusion que les chances de succès étaient minces et que l'amendement à la loi demeure le seul outil pour remédier aux effets de ce jugement, puisque la cause en est la loi du Québec.»

J'attire votre attention sur le paragraphe suivant, M. le Président. C'est sur la base du paragraphe suivant que nous demandons, à la demande du procureur général chef adjoint de Montréal, nous vous demandons un débat d'urgence: «Il m'appert, tant personnellement qu'au nom de l'association que je représente – c'est-à-dire les substituts en chef du Procureur général du Québec; pas tous les substituts, mais les substituts en chef et les adjoints des substituts en chef, le plus haut échelon des procureurs de la couronne à travers la province – que retarder à octobre ou novembre prochain l'adoption de cet amendement nous plongerait dans cinq ou six mois d'incertitude pendant lesquels ne fût-ce qu'une seule situation ou, à titre d'exemple, un enlèvement d'enfant réussi constituerait un drame de trop pour le Québec.

«Je me permets, Mme la ministre, d'envoyer copie de la lettre au critique parlementaire de l'opposition en matière de justice. En espérant que l'Assemblée nationale prendra noblement ses responsabilités de législateur, je vous prie d'agréer l'expression de mes sentiments les meilleurs.»

C'est signé: Le président de l'Association des procureurs-chefs et chefs adjointes et adjoints du Québec, Me Jean Lortie.

(20 h 20)

M. le Président, là on peut comprendre que nous sommes dans une fin de session, on peut comprendre que parfois l'opposition ne souhaite pas faire avancer certains projets de loi avec lesquels elle est en désaccord, mais on a alerté notre attention sur le projet de loi n° 54 pour nous énoncer l'impact dans un cas qu'il pourrait s'agir d'enlèvement d'enfant.

M. le Président, dans le cadre de l'arrêt Thibault, un criminel ou une personne qui a été accusé d'un crime a été libéré parce que la délégation de pouvoir qui a été faite du substitut au substitut au procureur général en chef ou adjoint a été jugée illégale par la Cour du Québec. C'est la raison pour laquelle, le 13 mai dernier, la Procureur général a déposé le projet de loi n° 54.

M. le Président, on ne porte pas de jugement sur les gestes posés par la Procureur général, mais, lorsqu'à 16 h 4 trois missives me sont envoyées de façon urgente et incessante pour que l'Assemblée nationale puisse intervenir, je pense que, comme Législature, nous avons une obligation de traiter ce dossier avec toute l'urgence qui est indiquée par quelqu'un qui relève au premier titre de la Procureur général, à qui il doit une obligation de loyauté et de fidélité.

Il a demandé la permission à la Procureur général pour me saisir de ce dossier, et à mon tour je fais appel à votre formation comme juriste, M. le Président, et au droit que vous avez en vertu de l'article 2 du règlement de l'Assemblée nationale pour que nous puissions procéder de façon urgente à un débat d'urgence.

J'ai cru comprendre que la Procureur général est au salon rouge pour débattre d'un autre projet de loi. Je suis convaincu, nous avons eu des communications avec le cabinet de la Procureur général, je pense que maintenant l'heure est suffisamment grave que nous devons nous en saisir et procéder le plus rapidement possible à l'étude du projet de loi n° 54, puisqu'il est dans l'intérêt... Comme le disait, et je... là-dessus...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...bon, alors, concluez.

M. Ouimet: Je conclus sur les propos du substitut du procureur en chef, Me Lortie, qui dit que «cinq ou six mois d'incertitude pendant lesquels ne fût-ce qu'une seule situation ou, à titre d'exemple, un enlèvement d'enfant réussi constituerait un drame de trop pour le Québec.»

Dans mon âme et conscience, comme critique en matière de justice, je ne peux pas, M. le Président, accepter que nous prenions ce risque-là comme Législature.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement, j'aimerais vous entendre.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, j'ai bien écouté le député de Marquette et le leader de l'opposition. Cette demande de débat d'urgence n'est pas recevable. À l'appui de ma thèse, je voudrais vous présenter un certain nombre de décisions qui ont été retenues.

D'abord, je voudrais vous rappeler qu'en vertu de la décision 88-40 que vous retrouvez dans le recueil des décisions – je vous donne la référence, M. le Président, 88-40 – il est clair que, en juin et en décembre, la priorité est donnée aux affaires du gouvernement, premièrement. Deuxièmement, certains cas d'exception, comme le leader de l'opposition l'a rappelé et, effectivement, la présidence a parfois accordé certains débats d'urgence, le critère qui était retenu, c'est le fait, d'abord, qu'il n'existait pas d'autres occasions de discuter de ces questions. Je vous rappelle que, sur le projet de loi n° 54, nous n'avons pas terminé l'adoption du principe – elle n'est sans doute même pas commencée. Il existe donc plusieurs autres occasions de discuter de ces questions.

Et, en ces matières, je pense qu'il y a une décision définitive sur cette question, qui est la décision 88-48, qui s'ajoute à l'autre que je vous citais tout à l'heure, qui est un critère d'exception, 88-41. Mais je reviens à la dernière décision, 88-48, qui est toute récente, avril 1999, de votre collègue Charbonneau qui disait: «Toutefois, la demande doit répondre à un autre critère mentionné à l'article 88 et jugé déterminant – j'attire votre attention, M. le Président – par la jurisprudence, et c'est celui en vertu duquel le sujet ne peut ou n'aurait pu être discuté autrement.»

La prétention du gouvernement, M. le Président, à ce moment-ci, est à l'effet que nous aurons amplement le temps de discuter de ces questions, et je ne voudrais pas qu'autrement on nuise au programme qui est à l'heure actuelle fixé. Les critères de la jurisprudence sont bien clairs, et la demande m'apparaît tout à fait irrecevable, M. le Président.

M. Paradis: Sur la recevabilité, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Aux deux décisions que je vous ai préalablement citées, j'aimerais attirer votre attention sur d'autres décisions qui ont été rendues par vos prédécesseurs, dans un premier temps: la décision du 11 août 1977, Clément Richard, par la suite celle du 20 octobre 1987 par le président Lorrain, une autre du président Lorrain le 16 décembre 1988, une autre du président Saintonge le 8 juin 1990, une autre du président Saintonge le 18 – et j'attire votre attention sur la date, M. le Président – le 18 décembre 1992 – donc, l'argument de fin de session peut être invoqué, je le souligne, sauf qu'il n'a pas été retenu – et le 25 novembre 1997, par le président Charbonneau.

Je profite également de l'occasion, parce qu'il s'agit d'un cas urgent... L'Assemblée est saisie du projet de loi n° 54 qui viserait à remédier à la situation, sauf que le gouvernement n'a pas jugé, là, pour le moment, opportun de l'appeler. Il est déposé, la discussion au niveau du principe n'a pas encore débuté, M. le Président. J'insiste auprès de mon collègue le leader adjoint du gouvernement pour qu'il effectue des vérifications qui s'imposent, à mon avis – je lui souligne – auprès de Mme la Procureur général, qui est dans la pièce à côté. Parce que, parfois, dans des situations semblables, il y a eu entente entre les formations politiques pour que le débat procède rapidement...

Des voix: ...

M. Paradis: M. le Président, est-ce que... La Procureur général a une autonomie et une indépendance de décider en ces matières. Et, si elle veut à ce moment-ci intervenir auprès de la présidence de l'Assemblée nationale pour faire valoir qu'elle juge que c'est urgent ou pour faire valoir même la thèse du leader adjoint du gouvernement, moi, je n'ai aucune objection, sauf que, quand le substitut en chef des procureurs généraux nous dit qu'«un seul enlèvement d'enfants serait un drame de trop», je ne veux pas que cette Assemblée prenne sa décision, que la Procureur général du Québec prenne sa décision suite à cette intervention qui... Moi, c'est la première fois, en 20 ans de vie politique, que je vois quelqu'un de ce niveau judiciaire intervenir à l'Assemblée nationale et attirer l'attention sur nos devoirs. Je ne veux pas que ce soit pris de façon précipitée.


Document déposé

À ce moment-ci, M. le Président, je fais appel à la collaboration du leader adjoint du gouvernement. Je lui demande non pas de prendre de décision sur l'impulsion du moment... Je ne sais pas s'il a pris le temps de lire la lettre et je demande consentement pour que la lettre...

Le Vice-Président (M. Pinard): Soit déposée?

M. Paradis: ...soit déposée à l'Assemblée nationale pour que l'ensemble des parlementaires qui souhaitent intervenir sur ce sujet puissent intervenir en toute connaissance de cause, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y aurait consentement? Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, est-ce que vous acceptez d'abord le dépôt de la lettre?

M. Boisclair: Le dépôt, oui, oui, en toute transparence, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci. M. le leader.

M. Boisclair: Mais je voudrais juste, M. le Président, que vous saisissiez bien le piège qu'est en train de vous tendre le leader de l'opposition. Le leader de l'opposition...

M. Paradis: ...l'article 35...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le leader de l'opposition. Je cède la parole au leader adjoint du gouvernement en vous demandant de respecter en tous points le règlement et surtout pas d'embarquer, de monter, là, dans... M. le leader adjoint du gouvernement.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, je reste sur les faits. Le leader de l'opposition vient d'utiliser, à l'appui de sa thèse, la décision rendue le 25 novembre 1997 par le président Charbonneau. Le président Charbonneau, effectivement, a jugé recevable une demande de débat d'urgence. Mais le critère qu'il utilisait avant de rendre le débat recevable, c'est qu'il n'existait pas d'occasion prochaine d'en discuter, puisqu'il n'existe pas de motion du mercredi ni d'interpellation en période de travaux intensifs et puisque l'opposition a épuisé le nombre de motions de censure qui lui est octroyé par le règlement.

M. le Président, il y a plein de temps, jusqu'au 23 juin, pour débattre de ces questions. Différents moyens sont à la portée de l'opposition. À ce moment-ci, reconnaissez tout simplement le droit des parlementaires de procéder en fonction du règlement et, s'il vous plaît, mettez à l'écart les fausses prétentions de l'opposition.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, j'ai écouté, de part et d'autre, les arguments.

Une voix: ...

(20 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, vous désirez intervenir sur le point? Alors, M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: ...strictement sur le point qui vient d'être soulevé par le leader adjoint du gouvernement. Il a raison de souligner que le président Charbonneau, dans sa décision, a fait référence à une occasion prochaine.

Je vous ai indiqué, dès le début de mon intervention, M. le Président, que la prochaine occasion ne sera pas avant mardi de la semaine prochaine, et j'attire son attention sur le deuxième paragraphe de la lettre de Me Jean Lortie, procureur chef des substituts, qui dit: «Ne fusse qu'une seule situation ou, à titre d'exemple, un enlèvement d'enfants réussi constituerait un drame de trop pour le Québec.» Je ne sais pas en vertu de quelle prémonition il peut nous dire qu'il n'en arrivera pas au cours de la journée de demain, la journée de dimanche, la journée de lundi. S'il est certain, là, dans sa science intérieure, ça le regarde. Mais, nous, de ce côté-ci, on ne peut pas prendre de chance avec la vie des enfants du Québec.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vous ai entendus, de part et d'autre. Je vais me retirer quelques instants avec les officiers de la table pour regarder ce point.

(Suspension de la séance à 20 h 31)

(Reprise à 21 h 12)


Décision du président

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir. Alors, nous sommes maintenant prêts à rendre la décision sur la demande du débat d'urgence de la part du député de Marquette.

Dans un premier temps, il importe de rappeler les dispositions de notre règlement concernant la saisine de l'Assemblée d'un débat d'urgence. D'abord, comme je le rappelais précédemment, l'article 88 de notre règlement prévoit que tout député peut demander la tenue d'un débat d'urgence sur un sujet précis d'importance particulière qui relève de l'Assemblée et qui ne peut ou n'aurait pu être discuté autrement. La demande ne doit être accompagnée que de brèves explications. Cet article contient, en fait, certains critères de recevabilité d'une demande de débat d'urgence.

Mais, avant de se prononcer sur ces critères, la présidence doit être valablement saisie de la demande de débat d'urgence. À cet égard, l'article 89 de notre règlement prévoit que le député qui demande un débat d'urgence doit, au plus tard une heure avant la période des affaires courantes, remettre un avis écrit de sa demande. Ensuite, le deuxième alinéa de l'article 92 prévoit que, en période de travaux intensifs, le débat prend fin trois heures après l'heure fixée pour l'ouverture de la séance, c'est-à-dire à 13 heures.

Comme le mentionne le leader de l'opposition officielle, la présidence a, certes, un pouvoir d'interpréter l'urgence de tenir un débat d'urgence. Il s'agit d'ailleurs du principal critère de recevabilité. Mais, avant d'évaluer l'urgence de tenir le débat, la demande de débat doit préalablement respecter les prescriptions du règlement quant à la procédure de saisine de l'Assemblée d'un tel débat.

Contrairement à une violation de droit ou de privilège, qui, en vertu de l'article 69 de notre règlement, peut être soulevée tout de suite après le fait, une demande de débat d'urgence nécessite obligatoirement un préavis. De plus, il est très important de rappeler le contenu du deuxième alinéa de l'article 92, qui prévoit que, en période de travaux intensifs, un débat d'urgence se termine trois heures après l'heure fixée pour l'ouverture de la séance. En pratique, un député qui demande un débat d'urgence doit donc, en période de travaux intensifs, remettre un avis au président au plus tard à 9 heures. Si la demande est déclarée recevable, le débat a lieu après les affaires courantes et se termine au plus tard à 13 heures.

Le leader de l'opposition officielle et le député de Marquette ont invoqué l'article 2 du règlement, qui a trait aux fonctions de la présidence. Je présume qu'ils invoquent le paragraphe 8°, qui prévoit que le président exerce les autres pouvoirs nécessaires à l'accomplissement de ses fonctions et au maintien des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses membres. Sans décider que cette disposition est applicable en l'espèce, il importe de préciser qu'elle doit néanmoins se lire avec le paragraphe 3° du même article, qui prévoit que le président fait observer le règlement.

Compte tenu que, dans le cas qui nous occupe, le règlement est clair, très clair, je ne peux accéder à la demande de débat d'urgence du député de Marquette. Comprenons-nous bien, je ne porte pas un jugement sur la pertinence et sur le sérieux de la demande du député de Marquette. Tout simplement, la demande est irrecevable parce qu'elle ne respecte pas les conditions de forme qui sont imposées par notre règlement actuel. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, votre décision est en tous points conforme à la lettre et à l'esprit du règlement. Dans les circonstances, est-ce qu'il y aurait, de la part du gouvernement, consentement à ce que nous puissions procéder au débat d'urgence ou est-ce que le gouvernement considère qu'il n'y a pas urgence, malgré la lettre du substitut du Procureur général? Et, si c'était le cas, M. le Président, nous reprendrions nos travaux tel que prévu ce soir. J'insiste, mais, si le gouvernement est d'opinion contraire, nous devrons nous soumettre, nous sommes minoritaires en cette Assemblée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je tiens à préciser que, de consentement unanime, l'Assemblée peut tout faire. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, je remercie le leader de l'opposition pour l'ouverture qu'il vient de nous manifester. Elle sera certainement déterminante lorsque nous reprendrons nos travaux mardi prochain, mais, d'ici ce temps-là, nous nous en tenons à l'ordre du jour qui a été préalablement fixé.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Simplement une précision de la part du leader adjoint du gouvernement. Le substitut en chef mentionne, dans sa lettre, que la ministre demeure autorisée à signer en cas d'urgence comme telle. Est-ce qu'il constitue que ce paragraphe-là garantit suffisamment la sécurité des enfants en cas d'un enlèvement potentiel?

Le Vice-Président (M. Pinard): Je n'ai pas eu de réponse. Alors, à ce stade-ci, M. le leader de l'opposition... Oui.

M. Paradis: Le leader a indiqué qu'à son avis il n'y avait pas d'urgence. Je lui demande simplement, dans un cas qu'on considère important de ce côté-ci, et, s'il refuse de répondre, on comprendra qu'il ne le considère pas suffisamment important... le fait que la Procureur général puisse elle-même signer, dans l'éventualité, que personne ne souhaite, d'un enlèvement d'enfant, que c'est une sécurité suffisante pour la population du Québec. Et, si c'est le cas, à ce moment-ci, procédons, M. le Président.


Projet de loi n° 56


Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, nous allons maintenant, cette motion étant débattue et réglée... M. le leader du gouvernement, vous aviez appelé l'article 45. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel. Y a-t-il des interventions sur le rapport de la commission? M. le député de Nelligan, vous avez un droit de parole de 10 minutes.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Oui, j'ai demandé d'avoir la chance de faire une intervention sur le projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel; Bill 56, An Act respecting the Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

M. le Président, je suis obligé de parler sur ce projet de loi parce que, avec la décision qui était une décision assez difficile sur l'utilisation de nos deux aéroports, comme député de l'Ouest-de-l'Île de Montréal, je voudrais dire que je pense que la décision était une bonne décision. Mais nous avons besoin de faire toutes les choses possibles, selon les règles et dans toutes les mesures possibles, de répondre aux besoins de la population de Mirabel. Je vois que le député de Sorel est aussi d'accord avec moi, et je suis content parce que très souvent lui et moi travaillons ensemble, comme vice-président et président de la commission des finances publiques.

M. le Président, la loi est une loi importante qui répond aussi à qu'est-ce que le Parti libéral s'est engagé pendant les élections: de collaborer avec le gouvernement fédéral et les autorités municipales de Mirabel et les villes avoisinantes pour convenir des différentes mesures d'allégement fiscal pour favoriser l'implantation des nouvelles entreprises étrangères.

(21 h 20)

La Société va faire beaucoup de choses, M. le Président. Je ne lis pas tout le projet de loi, mais certainement qu'ils vont accueillir, évaluer les projets d'investissement susceptibles de favoriser le développement de la Zone. Ils vont aussi encourager et formuler des recommandations au ministre des Finances sur les demandes d'attestation d'admissibilité aux mesures d'incitation fiscale prévues à la loi. La Société administre aussi notamment les programmes d'aide financière élaborés par le gouvernement pour favoriser le développement de la Zone de commerce international.

M. le Président, il me semble que ce sont toutes des choses très louables et très, très positives. Mais j'ai écouté avant, c'est sûr, la dernière intervention du député de Papineau, et je pense que je peux dire que l'Outaouais et tout le Québec peuvent être tellement fiers du caucus de l'Outaouais, le caucus libéral de l'Outaouais, parce qu'ils ont défendu leur population et la population de tout le Québec ouest. Particulièrement, ce soir, je voudrais souligner l'excellent travail et intervention du député de Papineau dans ce dossier.

Ce soir, nous avons discuté un amendement, un amendement sur le projet n° 56. Je pense qu'on peut l'appeler l'amendement 50, l'amendement MacMillan ou l'amendement du député de Papineau, qui, avec son gros bon sens, est arrivé et a dit: Faites qu'est-ce que vous voulez, créez les sociétés et toutes les bonnes choses qu'on peut trouver dans le projet de loi n° 56, mais, si vous n'avez pas accès à cette Zone commerciale, cette zone franche, ça ne marche pas. Il me semble que c'est tout à fait logique, clair et le fait du gros bon sens. Je voudrais féliciter aussi le député de Papineau pour sa ténacité.

Pendant l'heure du souper, j'ai sorti une carte de Mirabel qui vient du site Web de l'aéroport Mirabel. Et il a raison. Moi, j'approche Mirabel par le côté sud de mon comté, c'est dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal. Si on emprunte la 13, on frappe la 640, et il y a un cul-de-sac. Ça ne dépasse pas la 640. Ce n'est pas fini. On ne peut pas avoir accès. J'ai besoin de prendre la 640 après celle de l'autoroute des Laurentides. Et j'ai besoin de retourner.

Mais aussi, comme le député de Papineau a toujours dit dans cette Chambre – il n'a jamais lâché la bataille pour ça – quand vous regardez le côté Hull– Buckingham, le côté ouest, il y a le même problème avec la 50. La 50, comme la 13, arrête avant Mirabel. M. le Président, je pense que le député a tout à fait raison. On peut créer toutes les sociétés qu'on veut, on peut créer toutes les structures, et ce gouvernement est bon dans ça, il aime créer des structures, mais, si on ne donne pas l'accès aux camions, aux voitures pour la population, on peut faire tous les programmes d'appui gouvernemental, ça ne marchera pas. Il avait tout à fait raison, M. le Président.

Et l'accès 50, c'est assez important pour Hull, pour Buckingham, pour tout l'accès du côté ouest. Et, si on veut créer une zone franche, une zone commerciale... Et on appuie ça, ne lis pas autre chose entre les lignes; on appuie toutes les démarches d'aider cette Zone, c'est ce que nous avons dit pendant les élections. Mais, là, là, il n'y en a pas. Ils vont avoir les décollages, les atterrissages, les avions entrent et partent. C'est bon. Nous allons encourager tout ça. Mais, si la population ne peut pas entrer, là, si les camions ne peuvent pas entrer, si on ne peut pas envoyer les produits par camion là, si on ne peut pas envoyer les produits une fois qu'ils sont rendus à Mirabel, est-ce que ça va marcher? Si on veut vraiment encourager l'international... il me semble que l'international, ça veut dire un échange de produits, on veut faire des exportations, mais pour exporter les choses on doit avoir accès à cette Zone.

Avec ça, j'ai pensé, ça va être assez important d'encourager encore une fois, d'appuyer mon collègue le député de Papineau avec son amendement 50, que j'appelle, et je pense que la population québécoise va appeler à partir de ce soir, l'amendement MacMillan, à cause de sa ténacité. Je l'appuie de ça, parce que le projet de loi n° 56, il y a beaucoup de bonnes de choses dans ça. Mais il y a toute une lacune. Si on ne corrige pas les problèmes sur le terrain, des problèmes concrets, on peut faire toutes les choses ici, à l'Assemblée nationale, tout le monde peut se lever et peut donner les bons discours qu'effectivement ils veulent faire tout leur possible pour la population de Mirabel, mais, si on ne donne pas d'accès, si nous n'avons pas le courage de connecter les routes, de donner l'accès à la population, il me semble que ça ne va jamais marcher.

M. le Président, le député de Papineau, the MNA for Papineau showed his common-sense wisdom tonight. The deputy of Papineau often stands in this house and says: I may not be an expert on something, I may not be a professional, I may not be a lawyer, but he knows what makes sense. And he looks at this map as he's been doing since he's been elected in this House. This is his fourth mandate, Mr. Speaker.

He has been fighting for the 50, the Autoroute 50 to connect that region. And tonight, he proposed an amendment, that Bill 56 would have an amendment 50 that would include Autoroute 50, because without it we can create all the structures in the world, but if trucks and the population and people and cars can't have access to that region, we can create all the little Government projects, we can give all the tax incentives that we want in the world, and it won't make a bit of difference, Mr. Speaker.

As it is, there's been some adjustments from the access to Montréal as I described. I know I'm talking very concrete issues here while the Government likes to create more structures, but I was inspired by the tenacity and the clarity of the arguments from the MNA for Papineau. He very clearly stated that we can do all these things that are in this bill – yes, we can – but we have to also say that on the day-to-day working relationships between companies, they need to be able to move products around.

And one of the big problems with that area is there is an access. So, if we go and create, as we did, an airport, now we've changed the vocation of that airport, and there's been a shift of priorities into Dorval, and that's been quite a debate. We have a responsibility to that region to make sure that the Government of Québec responds to their concerns. And, yes, part of Bill 56 responds, part of Bill 56 responds to those concerns, but then if you don't take the concrete measures to move forward and support the amendment that the MNA for Papineau proposed tonight, it's not going to work. We need to, first and foremost, connect the 50, we have to complete it. That's going to help his region, he's never hidden that fact, but it'll help all the folks in Mirabel, it would help the products move around, it will help Dorval, it will help Québec.

So, Mr. Speaker, I though it was absolutely important tonight to, one, state that again this is something the Liberal Party has been pushing for for some time to respond to the real and pressing concerns of the people of Mirabel. But I also wanted to say that I think the folks in Outaouais can be proud that they have such an MNA that works so hard and is so tenacious and shows so much logical good sense to keep working for Autoroute 50. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan. Et nous cédons maintenant la parole au député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Je suis heureux d'intervenir à mon tour sur le projet de loi n° 56 concernant la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

Je vous dirais en commençant, M. le Président, que ce projet de loi, cette idée de zone franche comme telle à Mirabel est un élément extrêmement intéressant dans le contexte de Mirabel, mais est un élément extrêmement intéressant, je vous dirais, dans le contexte du développement économique du Québec au complet. Et, là-dessus, je tiens d'abord à souligner le travail de mes collègues, la députée de Marguerite-Bourgeoys et le député d'Argenteuil, qui, je vous dirais, au sein de notre caucus et de notre parti, se font les défenseurs de ce type de concept. Et je vous dirais que je les appuie parce que, comme notre parti a déjà adopté cette idée de zone franche pour Mirabel lors de notre Conseil général d'octobre 1998, je vous dirais que cette idée-là est partagée par l'ensemble des partis politiques au Québec, sauf peut-être l'ADQ, lequel on n'a pas entendu parler de ce concept encore.

Mais, je vous dirais, M. le Président, que cette idée-là de zone franche est une idée qui est porteuse d'avenir pour l'avenir économique du Québec. Et j'en veux pour témoin le fait que, dans mon propre comté, dans ma région, des gens ont aussi cette idée de voir le commerce international se développer de plus en plus, étant donné surtout que le Témiscouata, chez nous, est accolé aux frontières du Maine, donc des États-Unis, et aussi du Nouveau-Brunswick.

(21 h 30)

Et, là-dessus, je vous dirais que j'ai le plaisir de travailler sur un comité comme ça, de zone franche, avec des gens de chez nous. Je pense, entre autres, aux Sylvain Thiboutot, Denis Ouellet, aux gens de la SADC du Témiscouata, de la SADC du Kamouraska, Brigitte Pouliot, Gérald Marquis pour le Témiscouata, les gens de la CORPEX à Rimouski, qui, justement, à partir d'une idée de zone franche comme ça, tentent de voir comment on peut implanter ce type de concept là en région aussi.

Cependant, M. le Président, quand on regarde le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui, il y a un élément qui est assez inquiétant, c'est-à-dire la mainmise qu'a le ministre des Finances comme tel sur cette organisation-là, sur ce projet-là. On voit, dans le projet de loi n° 56, que la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel a, entre autres, pour fonction «de formuler des recommandations au ministre des Finances sur les demandes d'attestation d'admissibilité aux mesures d'incitation fiscales prévues à la loi à l'égard des activités des entreprises exercées à l'intérieur de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel».

C'est donc dire, M. le Président, que la Société comme telle est vraiment sous la responsabilité, sous la tutelle du ministre des Finances du Québec, qui, dans le fond, sera celui qui aura à prendre toutes les décisions relatives à qui va s'implanter dans cette Zone, comment ils vont s'implanter, quels seront les avantages fiscaux qu'ils pourront avoir et comment la zone franche sera développée, quels seront les secteurs principaux d'activité qu'on y retrouvera.

Et ça, nos collègues nous soulignaient justement qu'un des éléments qui peuvent peut-être accrocher est le fait qu'ils ont peur que la Zone de commerce international de Mirabel soit beaucoup plus une zone qui dépendra des orientations que voudra bien lui donner le ministre des Finances, beaucoup plus que des orientations que voudront bien lui donner les gens de la région, les gens impliqués comme tels sur le conseil d'administration de cette zone franche là.

Par ailleurs, M. le Président, je vous dirais, pour justement démontrer le rôle important que prend le ministre des Finances dans ce cas-là, qu'il est indiqué à l'article 37, entre autres, que «le ministre peut donner des directives sur l'orientation et les objectifs généraux que la Société doit poursuivre». C'est donc dire qu'on peut se retrouver dans une situation où les gens du conseil d'administration pensent que, par exemple, on est mieux d'aller vers une zone franche qui fera des activités davantage orientées sur le secteur manufacturier, de l'assemblage, dans des domaines bien précis, mais où, d'un autre côté, on aura le ministre des Finances qui décidera de donner une tout autre orientation à la zone franche et les secteurs d'activité qu'on y retrouvera.

Qui gagnera? C'est bien simple, c'est le ministre des Finances, parce que les directives que l'on donne à la zone franche... Et, toujours dans l'article 37, on indique que les «directives doivent être approuvées par le gouvernement et entrent en vigueur le jour de leur approbation». Donc, c'est le gouvernement qui va décider, qui va dire exactement: Voici le type de zone que l'on veut voir, voici le type d'activités que l'on veut y retrouver et la façon dont on pense que ça se fera.

Et l'article 38, entre autres, le démontre clairement, quand il est indiqué que «le gouvernement peut, aux conditions et selon les modalités qu'il détermine», en plus de déterminer le secteur, «garantir le paiement en capital et intérêts de tout emprunt contracté; autoriser le ministre des Finances à avancer à la Société ou à une de ses filiales tout montant jugé nécessaire pour rencontrer les obligations et la réalisation de leur mission». Donc, on va déterminer les mandats, et, par la suite, le gouvernement a aussi le pouvoir de déterminer l'aide financière.

Donc, c'est vraiment une zone franche non pas gérée par le conseil d'administration qui sera nommé comme tel, mais bien par le gouvernement, qui en fixe les orientations. Et, juste pour être certain que ces orientations-là vont être suivies, il va fixer le type d'aide financière qu'on va donner aux entreprises que l'on y retrouve. Et ça, M. le Président, je vous dirais que, pour une zone franche comme telle, c'est peut-être restreindre un peu l'imagination des gens du milieu, des gens vraiment impliqués, des gens qui vont travailler jour après jour avec les entreprises au niveau international, qui vont voir leur Zone en compétition avec d'autres zones au Canada, par exemple à Winnipeg, à Vancouver, d'autres zones aux États-Unis, où on en compte plus de 200, dont une à Plattsburgh. Et ils ne pourront pas y aller vraiment de leur propre initiative mais devront suivre ce que le gouvernement leur dit de faire.

Je vous dirais, M. le Président, qu'un des éléments majeurs d'une zone franche... Parce qu'il faut bien comprendre que c'est un endroit où il se fera du commerce de façon intensive, il y a beaucoup de marchandises qui vont entrer là, il y a beaucoup de marchandises qui vont aussi en ressortir. Et là-dessus je tiens à souligner l'importance de l'apport de notre collègue le député de Papineau, qui a clairement démontré dans une des ses interventions précédentes que finalement cette zone franche là peut être un beau concept sur papier, mais que, quand du côté qui vient du sud, c'est-à-dire en direction de Montréal ou encore du côté de l'ouest sur l'autoroute 50, il n'y a pas d'accès comme tel à cette Zone-là, c'est un peu comme un aquarium dans lequel il n'y aurait pas d'eau.

Et ça, la clairvoyance de mon collègue de Papineau est extrêmement importante dans ce dossier-là. Et ce n'est pas juste d'être dans l'opposition et de dire à peu près n'importe quoi. Mon collègue de Papineau a amené un amendement à ce projet de loi là pour dire: Si on a un projet de cette importance-là pour une région, si on a un projet qui est aussi important pour le développement et la relance de Mirabel, ça ne peut pas se faire sans des infrastructures importantes au niveau, entre autres, de l'autoroute 50.

Mais encore là on voit un peu la gestion à la petite semaine de ce gouvernement-là, à la va comme je te pousse puis trouve l'idée quand ça adonne. On n'a pas prévu d'amener vraiment les infrastructures routières nécessaires au développement de cette Zone-là. Et, s'il n'y avait pas eu le député de Papineau pour le soulever ici, à l'Assemblée nationale, M. le Président, bien, ces gens-là pourraient dire: Voici, on a mis un beau concept sur la table et peut-être qu'on se rendra compte dans deux, trois ans que ça ne fonctionnera pas.

Mais mon collègue de Papineau est passé de la parole aux actes. Il a dit au gouvernement, et ce, dans l'esprit d'une opposition constructive: Voici comment vous pouvez rendre la zone franche de Mirabel, la Zone de commerce international, encore plus performante. Rendez-vous aux arguments qui disent que l'on doit doter cette Zone-là d'infrastructures routières importantes, d'infrastructures routières adéquates, dont la réalisation de l'autoroute 50, qui feront en sorte, je l'espère... et que l'on pourra qualifier peut-être un jour, quand mon collègue de Papineau aura quitté la vie politique, et nommer cette route-là, l'autoroute 50, l'autoroute MacMillan.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Béchard: Je pense que ça serait un bel hommage à lui rendre, d'appeler cette autoroute-là... Parce que, lui, il y croit. Mais, lui, il n'y croit pas seulement dans l'esprit de développer une route pour développer une route, mais dans l'esprit de développer l'économie d'une région. Et je pense que, en ce sens-là, j'ose espérer, M. le Président, que je vivrai assez vieux pour voir le jour où j'aurai le plaisir d'aller inaugurer l'autoroute 50 qui fera le lien entre l'ouest du Québec et la zone franche de Mirabel et que cette autoroute-là, on la nommera l'autoroute MacMillan. Donc, nous serons pour ce projet de loi là en espérant que nos voeux futurs se réaliseront aussi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, et j'entends très bien les applaudissements nourris du député de Papineau.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, comme il n'y a plus...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...alors, M. le député de Marquette, un temps de parole de 10 minutes.

M. Ouimet: M. le Président, je vous remercie. Mais avant d'aller plus loin, auriez-vous la gentillesse de constater s'il y a quorum?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, effectivement, nous avons quorum, M. le député Marquette, et tous les députés, d'ailleurs, sont là pour vous entendre. M. le député.

M. Ouimet: Vous comprendrez, M. le Président, que je voulais m'assurer qu'il y ait quorum afin de sensibiliser le plus grand nombre de députés des deux côtés de la Chambre sur les propos...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, j'aimerais que vous regagniez vos banquettes, s'il vous plaît, parce qu'il y a trop de députés debout. Vous connaissez le règlement. Je dois céder la parole au député qui est debout.

Des voix: ...

(21 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous cédons la parole au député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président, et vous aurez constaté, tout comme les téléspectateurs qui nous écoutent, que ce ne sont que des libéraux qui parlent sur le projet de loi n° 56. De ce côté-là de la Chambre, on pose un geste ou on prononce des propos qui sont quasi à l'encontre du règlement, parce qu'on n'est pas censé identifier l'absence de un ou quelques collègues, mais nos téléspectateurs auront compris que seuls les libéraux prennent la parole sur le projet de loi n° 56.

Mais je voulais revenir sur les derniers propos extrêmement sages du député de Kamouraska-Témiscouata qui indiquait l'importance de continuer et de bâtir l'autoroute 50 afin de réaliser et de renforcer le projet de loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel. Il semble y manquer un chaînon important. Il manque un chaînon important, parce que tout le commerce qu'on pourrait développer, accentuer, améliorer, augmenter ne peut pas se réaliser parce que l'autoroute 50 n'a jamais été complétée, et je pense que, malgré quelques engagements politiques de l'autre côté de la Chambre, malgré le fait qu'ils ont pris le pouvoir en 1994 et, dernièrement, en 1998, l'autoroute 50 n'a pas été encore, à ce jour, construite.

On se rappelle des propos de l'ancien premier ministre du Québec Maurice Le Noblet Duplessis, qui, lui, disait qu'avec des routes on fait trois élections. M. le Président, je peux vous assurer d'une chose, c'est qu'avec l'autoroute 50 le gouvernement du Parti québécois ne pourra pas faire plus que deux élections, ce sont les libéraux qui tiendront leur engagement lors de l'élection, dans trois ans, afin de réaliser l'autoroute 50.

M. le Président, c'est un maillon extrêmement important qui est celui-là parce que le projet de loi vise ni plus ni moins à créer une zone de commerce international, en d'autres termes, un guichet multiservices pour les entreprises qui voudraient s'implanter dans cette zone dérogatoire. On souhaiterait, et c'est l'intention manifestée par le ministre des Finances lors du dépôt de son budget il y a quelques mois... Il indiquait son intention de faire la promotion étrangère du programme et d'administrer les programmes d'aide financière du gouvernement.

Lorsqu'on prend connaissance du projet de loi – et nous indiquons à l'avance que l'opposition appuie et souscrit à un tel projet de loi – on ne peut pas s'empêcher, cependant, de souligner certaines lacunes. Je pense que des amendements ont été apportés extrêmement importants pour améliorer, pour bonifier le projet de loi, et malheureusement cet amendement-là, le gouvernement n'a pas cru bon, encore, de l'intégrer à l'intérieur du projet de loi. Et je sais que parfois on ne dépose pas la proposition d'amendement comme telle, sachant fort bien que le gouvernement, s'il n'est pas d'accord, risque de nous battre, mais cependant l'opposition a communiqué son intention, son intérêt pour un tel amendement, mais nous n'avons pas encore trouvé preneur à cet égard.

L'avenir de Mirabel repose sur un positionnement continental et international et non plus seulement sur les besoins montréalais ou québécois, mais je vous signale, M. le Président, qu'il ne faut pas ignorer les besoins montréalais ou québécois. Il faut absolument en tenir compte, les consolider, dans la mesure du possible les augmenter et travailler également sur le volet international. L'un n'empêche pas l'autre. Et le positionnement continental de Mirabel est peut-être important dans une perspective plus large, mais on sait que ce genre de développement là prend un certain nombre d'années, requiert des investissements, requiert des énergies et une continuité du point de vue de la volonté politique d'un gouvernement.

Or, je vous indiquais, M. le Président, tantôt quelques lacunes au niveau du projet de loi. On a attiré l'attention de l'opposition sur la composition du conseil d'administration. La région comme telle, qui est en mesure de se prendre en main, qui est en mesure d'indiquer les personnes qui seraient les plus aptes à ce faire... Les gens qui vont mettre de l'avant la valeur de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel, eh bien, ces gens-là ne se retrouveront pas nécessairement sur le conseil d'administration. Pourquoi? Parce que c'est le ministre des Finances qui se garde la prérogative de nommer les personnes sur ce conseil d'administration.

Le danger avec cela, M. le Président, c'est qu'on ne connaît pas toujours les critères de nomination d'un ministre des Finances. On ne sait pas sur quoi il se base. On ne sait pas qui il nommera. On ne sait pas toujours à quelle fin il nommera ces personnes-là. On peut soupçonner et on peut supposer qu'à première vue il les nomme dans une perspective du développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

Mais, de ce côté-ci de la Chambre, nous vous soumettons que les personnes qui seraient les mieux placées pour développer leur propre région, pour prendre leur région en main, pour s'en faire les ambassadeurs sur le plan local, sur le plan national et sur le plan international, ce sont, bien sûr, les gens de la région. Les gens de la région qui connaissent leur région, qui vivent dans leur région, qui ont une expertise comme personne d'autre ne peut avoir, ces gens-là devraient être les personnes les mieux placées pour constituer le conseil d'administration de cette nouvelle Société là.

Je peux vous dire, M. le Président, que le positionnement du Parti libéral du Québec à cet égard-là a reçu des éloges pendant la dernière campagne électorale. Je vous rappelle que, dans notre programme électoral à nous, nous nous étions engagés, entre autres, à collaborer avec les différents paliers de gouvernement ainsi que les autorités municipales de Mirabel, également des villes avoisinantes, pour convenir de différentes mesures d'allégement fiscal pour favoriser l'implantation de nouvelles entreprises étrangères.

Et on se souvient que, pendant la campagne électorale, c'était notre marque de commerce, c'était notre engagement, de viser et d'assurer un allégement du fardeau fiscal des Québécois, qui a été fortement contesté, au départ, par le gouvernement et l'actuel premier ministre lorsqu'il a vu que nous avions un succès parce que notre programme politique avait été extrêmement bien planifié au cours des trois dernières années, enrichi avec des économistes, des fiscalistes, des spécialistes sur la question. Nous avions, M. le Président, et nous avons un programme de croissance économique, un programme d'allégement fiscal pour les contribuables québécois et québécoises qui demeure une pierre angulaire pour notre société.

Le seul problème, M. le Président, c'est que le gouvernement a adopté notre discours mais sans concrétiser ce discours-là dans les gestes. Et on le constate, M. le Président, un budget qui a été déposé récemment ne prévoit aucun allégement fiscal. Aujourd'hui, en Chambre, le premier ministre a refusé – a refusé – l'engagement proposé par le chef de l'opposition de geler les taxes, les tarifs et les frais de toutes sortes que le gouvernement perçoit et impose aux contribuables québécois depuis les dernières années.

Nous, M. le Président, notre engagement est clair, et nous sommes convaincus que le Québec retrouvera sa croissance économique dès que les Québécois éliront un gouvernement du Parti libéral. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette. Nous cédons maintenant la parole au député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, merci, M. le Président. Je veux me joindre à mes confrères ici, en ce vendredi soir, pour dire deux mots sur le projet de loi n° 56. Vous savez comment, le Parti libéral, la croissance économique, ça nous tient à coeur. Je vous parlerai des 100 000 emplois de Robert Bourassa, je vous parlerai de la Baie James de Robert Bourassa, je vous parlerai des grappes industrielles de Gérald Tremblay.

Moi, je me souviens que le distingué député de Joliette et combien d'autres ridiculisaient mois après mois, semaine après semaine, jour après jour, heure après heure les grappes industrielles de notre collègue Gérald Tremblay. Les universités, en ce moment, le réquisitionnent pour enseigner. Il est sur plus de conseils d'administration qu'il nous est possible de choisir, de grands conseils d'administration d'entreprises en ce moment. Et, au moment où il est arrivé en cette Chambre, qu'il a proposé les grappes industrielles, j'ai vu l'opposition de l'époque dire à peu près n'importe quoi.

(21 h 50)

Bien, aujourd'hui, l'euphorie, c'est que le vice-premier ministre est en Europe avec les gens de la grappe en environnement et il se pète les bretelles, il se pète les ententes, il se pète le portefeuille. Grâce à la grappe en environnement, c'est extraordinaire, ce qu'on est après faire en Europe et au Canada.

Bien, il a fallu qu'on ait un libéral qui se tienne debout, qui, lui, ne parlait pas de souveraineté, lui, il parlait d'économie, il parlait des grappes. Il les a créées, puis ça fonctionne. Il a fallu qu'on ait Robert Bourassa qui, pendant des années, parle de 100 000 emplois, et y croit, et les crée. Et ça, c'est l'histoire du Parti libéral.

La Révolution tranquille, c'était d'abord une révolution économique. Jean Lesage y croyait et Jean Charest y croit encore, à la Révolution tranquille. Et Jean Charest dit, 30 ans après: Il faut requestionner. Et c'est la force du Parti libéral de constamment requestionner des choses qui furent faites et voir si on peut les améliorer. C'est ça, le sens de l'interprétation que j'en retiens.

Alors, comme on est une opposition positive et comme vous avez proposé un projet de loi n° 56, bien on a voulu collaborer à ce projet de loi là. Et le distingué député de Papineau, notre ami à tous, a fait une recommandation, a fait un amendement. Cet amendement, il est tout à fait logique. Et c'est là qu'on voit les députés qui sont sur le terrain, qui écoutent le monde, pas un pelleteux de nuage, pas les gars en dessous des cloches de verre, pas ceux qui sont sortis des grandes universités qui oublient de parler au vrai monde. Ça, le député de Papineau, c'est le bon gars du coin. C'est le gars qui écoute le monde, qui va être réélu. Oubliez ça, le PQ, vous ne vivrez pas assez vieux pour être élu dans ce comté-là. C'est le député du coin.

Alors, le député de Papineau, dans un esprit très positif, comme le Parti libéral l'est toujours dans ce genre de débat là, a proposé un amendement. On a un aéroport qui s'appelle Mirabel. Ça va très bien si on arrive de Montréal, il y a des autoroutes qui montent là, mais, si vous arrivez de l'autre côté... Je comprends que, vous autres, ça vous rapproche du reste du Canada, vous n'aimez pas ça, mais, nous autres, on aime ça, être liés avec le reste du pays. On pense qu'il y a quelque chose. Quand on sait qu'on fait plus d'échanges avec le reste du pays qu'on en fait avec les États-Unis, on se dit: On a tout le bien avantage à être plus près de nos partenaires économiques. Juste sur une base économique, on a avantage à avoir des bons liens de transport.

Alors, voilà t'y pas qu'on a un aéroport qui communique avec la Gaspésie, avec la Beauce, avec Montréal, avec le Lac-Saint-Jean. Bien, là, il n'y a pas d'autoroute, au Lac-Saint-Jean, il y a une petite route qui se rend là. On a promis une route, mais il y a une petite route qui se rend au Lac-Saint-Jean. Mais il y a aussi une petite route qui se rend dans l'Outaouais. Puis, comme l'aéroport est dans le milieu, le distingué député de Papineau a fait un amendement: qu'on finisse cet engagement que vous avez pris de finir l'autoroute 50.

Le président, tantôt, quand je suis passé à côté de son sofa, m'a dit...

Une voix: Son sofa!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: M. le Président, le président tantôt, de sa chaise, me disait qu'il y a tellement de monde qui appuie la suggestion du député de Papineau que l'autoroute 50, si jamais elle se faisait, on devrait peut-être l'appeler l'autoroute MacMillan effectivement.

Alors, cet amendement, je le propose. Et je ne veux pas aller plus loin, M. le Président, je veux revenir d'une façon plus sérieuse. Ce projet de loi là, il est fondamentalement valable. On veut faire la promotion et l'implantation d'entreprises. Et on sait qu'au moment où nous vivons dans un village global on a besoin d'outils effectivement pour compétitionner. Il est évident que tout le monde s'arrache les parcelles de l'économie. Et, si on veut être dans ce marché-là, dans ce village global là, on n'a pas le choix, le Québec, que de se positionner dans un village où tout le monde essaie de créer la richesse.

Le Québec a un problème à cet égard-là. Le Québec a un problème. Nous sommes les plus taxés, M. le Président, en Amérique du Nord, les plus taxés. Alors, je comprends que le PQ est obligé de faire une zone franche. Il n'y a personne qui va venir s'installer au Québec quand on sait qu'on est plus taxé que le Vermont, le Maine, le New Hampshire, que l'État de New York, qu'on est plus taxé que l'Ontario, que le Nouveau-Brunswick.

Pourquoi vous qui avez une entreprise, à moins que vous soyez capable, ici, d'y trouver certains avantages, peut-être l'électricité à très bon marché et la main-d'oeuvre disponible, M. le Président... Bien, oui, on a le plus haut taux de chômage en Amérique. Alors, ça, il y a une main-d'oeuvre disponible, mais des fois je me dis: C'est-u un avantage ou un inconvénient? Puis même, souvent, je me dis: Probablement que c'est un inconvénient, parce qu'on a beaucoup de main-d'oeuvre, M. le Président; c'est probablement parce qu'on a eu de la misère à créer l'emploi.

Alors, moi, je pense que cette zone franche... Et, si on pouvait en même temps arriver à faire cette autoroute qui communique avec le reste du pays... Moi, je vous dis, M. le Président, on s'en va dans la bonne direction. Le fardeau fiscal est nettement trop élevé. Et c'est votre premier ministre, d'ailleurs, qui disait: La taxe tue l'emploi. La taxe tue l'emploi. Bien, c'est tellement vrai, hein. On a 9,8 % de chômage. Le mois passé, c'est quoi, 39 000 emplois de moins au Québec, alors que tout le monde crée de l'emploi.

Là, on n'a pas entendu que ça allait bien. Le vice-premier ministre est parti depuis quelques jours, mais, normalement, tous les jours, il nous dit que ça va très bien au Québec. Tout le monde va mieux que nous autres. Ils ont tous créé plus d'emplois que nous autres. L'Ontario va rebaisser ses impôts d'un autre 20 % après les avoir baissés de 30 %. Le Nouveau-Brunswick vient de gagner une élection où ils vont baisser les impôts de 20 %. Pendant ce temps-là, nous, on crée des frais directs et indirects. On a appris aujourd'hui que, là, ceux qui ont des ascenseurs vont maintenant avoir une taxe sur les ascenseurs. Alors, là, il faut le faire: une taxe ascenseur sur les ascenseurs, M. le Président. Là, on arrête ça où, là? C'est vendredi soir, je caricature un peu mes propos, mais franchement où est-ce qu'on va arrêter ça, M. le Président?

Alors, j'arrête ici, et j'espère qu'on va voter rapidement sur ce projet de loi là. On a besoin de ça, et espérons qu'on apporte l'amendement sur l'autoroute 50. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Orford. Alors, nous cédons maintenant la parole au leader de l'opposition et député de Brome-Missisquoi. M. le leader.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. J'interviens à ce moment-ci sur la prise en considération du projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel. Pour les gens qui nous écoutent encore à cette heure, ils connaissent davantage ce projet de loi, pour la population surtout de la région de Mirabel, sous l'appellation de «zone franche». C'est la façon dont les politiciens ont choisi de présenter ce projet de loi à la population de cette région, M. le Président.

Quand on parle de zone franche, c'est que parfois on tente de cacher la vérité. C'est la marque de commerce du Parti québécois, d'avoir un discours qui dit des choses et de poser des gestes qui vont exactement dans le sens contraire. Donc, le premier avertissement que l'on peut donner à la population de cette région: Quand le Parti québécois vous parle de zone franche, méfiez-vous. Ce n'est peut-être pas ce que vous désirez complètement. Ce n'est peut-être pas ce que vous voulez complètement.

Les gens de cette région ont été négligés par le passé. Tous les experts qui ont étudié le cas de l'aéroport de Mirabel, une fois que vous avez accepté une décision qui n'a pas nécessairement été voulue par l'ensemble de la population... Une fois que l'aéroport est installé, ça, c'est un choix puis une décision du gouvernement fédéral. Sur ça, on peut chialer puis on peut crier, mais une fois que l'aéroport est là, la façon de s'assurer que ça va fonctionner, la façon de s'assurer que le développement économique de cette région va évoluer, c'est de doter la région des infrastructures absolument nécessaires pour assurer son épanouissement économique. Et, quand on parle d'infrastructures qui relèvent non pas de la juridiction du gouvernement fédéral, mais qui relèvent de la juridiction du gouvernement du Québec, on parle de construire des autoroutes pour faciliter le va-et-vient entre Mirabel et les autres régions du Québec.

Moi, je regrette, ce soir, de ne pas avoir entendu un seul député de l'autre côté, un seul député de la partie ministérielle, du Parti québécois, se lever en cette Chambre, et dire: Moi, je comprends la difficulté de ces gens-là, je comprends que, sans une intervention dans le domaine de la juridiction du Québec, là, dans le domaine des routes – ce n'est pas trop compliqué, là, pour personne de l'autre côté – cette région-là va continuer à souffrir d'un sous-développement, M. le Président.

C'est pourquoi le député de Papineau a proposé, proposé de bonne foi, là... Il y en a qui ont mentionné que peut-être, si ça se réalisait, l'autoroute 50, ça devrait s'appeler l'autoroute MacMillan. Mais je connais le député de Papineau. Il est suffisamment humble comme parlementaire. S'il y a quelqu'un de l'autre côté qui veut appeler ça l'autoroute Simard, à condition qu'elle se fasse, à condition que ça serve les intérêts de la population de cette région-là, à condition que ça serve les intérêts des Québécois et des Québécoises, il va consentir à ce que ça ne s'appelle pas l'autoroute MacMillan, mais que ça s'appelle l'autoroute Simard, M. le Président.

(22 heures)

Des voix: Bravo!

M. Paradis: Si ça c'est ça qui retient le gouvernement, vous avez notre consentement. Mais, en plus des infrastructures routières, M. le Président, le projet de loi vise à le faire... C'est un des objectifs, c'est dans les notes explicatives que le ministre des Finances nous a présentées. On le retrouve au troisième paragraphe: «La Société a, en outre, pour fonction de formuler des recommandations au ministre des Finances sur les demandes d'attestation d'admissibilité aux mesures d'incitation fiscales.» Ça veut dire quoi, M. le Président? Ça veut dire que les taxes sont trop hautes. C'est ça que le député d'Orford a expliqué aux députés de cette région-là. Puis, des zones franches, on est rendu qu'on en réclame partout dans toutes les régions du Québec, parce que partout, dans toutes les régions du Québec, on en a assez des taxes et des impôts qui ne sont plus compétitifs et qui font en sorte qu'on perd des emplois un peu partout au Québec, M. le Président.

M. le Président, le problème premier et le problème particulier du gouvernement d'en face se retrouvait dans un titre de La Presse , il y a à peu près un mois, vendredi le 14 mai 1999, l'éditorial d'Alain Dubuc: Non merci, tout va bien . Quand on leur parle de construire des routes, quand on leur parle d'hôpitaux, quand on leur parle de palais de justice, quand on leur parle de services en région, quand on leur parle de fiscalité, de création d'emplois, les gens d'en face nous disent: Non merci, tout va bien; on vient de faire un mandat, et on ne peut pas s'être trompé, et on va s'assurer que, pendant le mandat actuel, on ne change rien de ce qui a été fait dans le passé. M. le Président, ça devient inquiétant parce qu'en prêchant le statu quo, en maintenant le statu quo, on se paralyse, on se sclérose et on s'empêche de toute initiative au profit de la société québécoise.

Ce n'est pas un député libéral, M. le Président, qui vous le dis. Je vous lis un extrait de ce Non merci, tout va bien qui campe bien, en matière d'emploi... je sais que la ministre de l'Emploi est à l'écoute. Je cite Alain Dubuc: Ce que l'on observe, c'est que le taux d'emploi, qui était de 56,7 %, en décembre et en janvier – décembre et janvier, là, M. le Président, qu'on vient de passer – n'est plus que de 56,1 % – ça baisse, M. le Président. Il retombe presque au niveau d'août et septembre derniers, soit 56 %. Cela indique une certaine détérioration du côté de l'emploi, que l'on ne retrouve pas en Ontario, où le taux d'emploi est à 62,5 % depuis le début de l'année. Dans l'ensemble du Canada, 60,5 %, 60,7 %.

Quand on se compare à ce qui se passe ailleurs au Canada, on ne crée pas les emplois que nos voisins créent. Le ministre des Finances, responsable de l'économie, quand il n'est pas, sur les dix ministres des Finances, dernier, il est avant-dernier. Son meilleur mois... Quand il nous dit qu'il a progressé, là, dites-vous bien qu'il est passé de dixième à neuvième. Mais ce qui est inquiétant, c'est que le mois d'après, il retombe dixième. Et c'est l'ensemble de la population du Québec qui paie parce que ces gens-là disent: Tout va bien, on n'a pas à changer nos recettes; les vieilles recettes, on va les garder, c'est les recettes qui marchent.

M. le Président, Alain Dubuc conclut, en disant: «Il est assez clair que le gouvernement du Québec, par attachement idéologique et culturel – il est poli, lui, il y en a qui appellerait ça de l'obsession – craint la remise en cause du modèle économique québécois.» Ils sont attachés au passé. On est à la veille de changer de millénaire, et ces gens-là nous parlent du début du millénaire dans lequel on vit comme modèle économique, ou peut-être du milieu, pour les plus progressistes d'entre eux, peut-être pour les plus jeunes qui viennent d'être élus aux dernières élections. Mais personne nous parle des modèles économiques qui sont déjà en application, en force, et qui font preuve de positivisme et de création d'emplois en Europe, aux États-Unis, en Asie, sur tous les continents. Nous, on s'attache à des vieilles formules.

Prétendre que l'économie va très bien, ce que les gens d'en face nous disent à chaque jour, vous en êtes témoin, M. le Président, à la période des questions... Encore le premier ministre à matin: L'économie va très bien. Quand ce n'est pas vraiment le cas, c'est la meilleure façon de justifier l'inaction. Ça, M. le Président, quand on ne veut pas agir, on dit que ça va bien. Puis, vu qu'on pense que ça va bien, on ne pense pas à changer les choses. Mais les gens qui paient pour cette inaction, pour cette obsession, c'est l'ensemble des gens qui sont à la recherche d'emploi un peu partout. Il y a des gens qui pourraient dire: Oui, mais ça fait un mois de ça. Le mois passé... et c'est ce que le ministre des Finances nous dit à chaque mois: Ça va beaucoup mieux au Québec.

M. le Président, ce matin, Alain Dubuc, encore une fois, un mois après, et je pense qu'il a décidé de suivre le gouvernement à la trace mois après mois, cite pourquoi. Parce qu'il y en a, de l'autre côté, qui ne comprennent pas, et, quand ils ne comprennent pas, ils disent: Pourquoi? Mais Dubuc, il pose la question, et ils lui donnent la réponse ce matin: «Les données sur l'emploi rendues publiques par Statistique Canada montrent que la situation a continué de se dégrader au Québec.» Au mois de mai, ça allait mal. Ça continue à empirer en mai, comme depuis le début de l'année. Mois après mois, on perd des emplois. La façon la plus rigoureuse de mesurer le progrès de l'emploi consiste à suivre l'évolution du taux d'emploi, c'est-à-dire la proportion des adultes qui détiennent un emploi. Ce taux d'emploi est de 60,4 % au Canada, de 62,6 % en Ontario et de 55,9 % au Québec. On traîne le pays par le bas sur le plan de la moyenne de création d'emplois. On devient un boulet, alors qu'au Québec on se devrait d'être la province qui est à la tête de la création d'emplois.

Il conclut son éditorial, M. le Président, il dit: «La réponse est simple. Pourquoi, M. Landry, la situation de l'emploi se dégrade-t-elle, au Québec, au lieu de s'améliorer?» Ce n'est pas compliqué: des impôts et des taxes trop élevés. Le ministre des Finances l'a lui-même dit: Ça tue l'emploi comme tel. L'obsession séparatiste, l'obsession référendaire qui crée de l'instabilité politique, crée de l'instabilité économique. Tout ce que l'on demande au gouvernement, lorsqu'il pense à créer des zones franches, c'est de dire la vérité à la population et de faire le contraire de ce qu'il a fait ce matin, lorsque le chef de l'opposition a proposé une motion visant à s'assurer qu'il n'y en aurait plus, d'augmentation d'impôts, de taxes, de frais, etc. Le premier ministre a refusé de s'engager non pas à baisser les impôts et les taxes, mais à ne plus les augmenter. Ce que nous disons au gouvernement d'en face, c'est que ces impôts, ces taxes, ces droits, ces frais ont atteint un niveau tel que chaque jour ils blessent l'économie québécoise. Et en blessant l'économie québécoise, ils blessent les Québécois et les Québécoises qui sont à la recherche d'emploi. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Le rapport de la commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président. L'article 47 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 60


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 47, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'environnement et député d'Orford, la parole est à vous.

Des voix: Bravo!


M. Robert Benoit

M. Benoit: M. le Président, vous me voyez un peu surpris. Normalement, le ministre devrait parler avant l'opposition. Je me serais attendu à ce que le ministre défende son projet de loi et le bien-fondé de son projet de loi. Là, je m'aperçois que non seulement les députés ne parlent pas au gouvernement, mais voilà que les ministres ne parlent pas. On n'en est pas à la dernière de nos surprises.

(22 h 10)

M. le Président, mercredi soir, le gouvernement et l'opposition étaient réunis pour voter le projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill. Je vous dirai d'emblée que l'opposition avait avisé, dès le dépôt de cette loi-là, le ministre, son personnel, ses conseillers que nous voterions pour la loi. Il nous semblait qu'il était tout à fait valable que le gouvernement canadien, les provinces, les communautés autochtones, les deux compagnies d'hydroélectricité de Terre-Neuve et du Québec puissent faire une évaluation globale du projet et que nous n'ayons pas ça en tranches, trois, quatre études, comme ça a pu se produire dans d'autres provinces sur d'autres projets. Alors, sur le fond du projet, nous étions tout à fait d'accord.

Mercredi de cette semaine, nous sommes convoqués à 20 heures, le soir, mes confrères et moi, le représentant de l'opposition pour les communautés autochtones...

M. Béchard: M. le Président, juste parce que, non seulement... Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui. Quelle est votre question de règlement?

M. Béchard: Non seulement le ministre ne veut pas parler, mais même ses collègues ne sont pas là pour...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Quelle est votre question de règlement?

M. Béchard: On demanderait le quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, demandez le quorum, vous avez le privilège de le demander. Alors, qu'on appelle les députés.

Si vous voulez prendre place, si vous voulez vous asseoir. Alors, nous poursuivons le débat sur la prise en considération du rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill. Et je demande à M. le député d'Orford de poursuivre son intervention.

M. Benoit: Oui. Je vous remercie, M. le Président. Alors, je disais donc que, mercredi, le gouvernement et l'opposition, nous avions consenti à aller de l'avant avec le projet de loi, nous approuvions la démarche. Et nous pensons qu'elle est heureuse dans son fond même. Vous savez que nous avons demandé, 38 d'entre nous, ici, de l'opposition, entre autres, qu'il y ait des études d'impact environnementales, par exemple sur la ligne Hertel–des Cantons. Je ne veux pas refaire tout le débat. Nous savons tous maintenant qu'une juge a dit qu'il aurait dû y avoir des études d'impact. Le rapport Nicolet a démontré qu'il n'y avait pas urgence. Et nous avons aujourd'hui le Barreau du Québec qui nous dit que cette loi sera... Ils nous disent presque qu'elle ne serait pas légale, finalement, là. C'est à peu près ça que le Barreau nous dit.

Alors, M. le Président, on ne peut pas, nous de l'opposition, d'un côté, demander des études d'impact sur la côte des Éboulements, sur Hertel–des Cantons et, d'un autre côté, ne pas dire que ce projet-là est valable. Or, on a consenti. Mercredi soir, mes confrères et moi nous sommes ramassés en commission à 20 heures avec le ministre. Il y a exactement, dans ce projet de loi là, cinq articles, dont les deux derniers ont moins d'une demi-ligne, dont le dernier, qui est, finalement, la date qui sera fixée éventuellement. Donc, vous réaliserez que notre intention, c'était d'entrer là à 20 heures, mercredi, et d'en être ressortis à 20 h 20.

Pendant le souper, le Regroupement des communautés autochtones était de passage dans la ville de Québec et a demandé au porte-parole de l'opposition de le rencontrer. Le porte-parole de l'opposition, le député de Jacques-Cartier, les a rencontrés, et ils ont demandé à être entendus. Et nous avons été très surpris, à ce moment-là – on apprendra ça, pendant la veillée, de la bouche du député de Jacques-Cartier – d'apprendre qu'à aucun moment ni le ministère de l'Environnement, ni le ministère de l'Énergie, ni le ministère des communautés autochtones, pas plus que le bureau du premier ministre, à cet égard, n'étaient entrés avec la communauté autochtone pour leur dire qu'il y avait un projet de loi là-dessus. Et là on se rappelle qu'un an avant, pendant l'élection, il y a eu la dépense de 1 500 000 $, 1 100 000 $, finalement, où le premier ministre avait été dans la région de Churchill annoncer le projet. Je vous rappelle les faits.

Le premier ministre donne rendez-vous au premier ministre de Terre-Neuve, ils s'en vont là, la communauté autochtone n'est pas avisée de cette conférence de presse là qui va coûter 1 100 000 $, M. le Président, organisée par un petit ami du parti, M. Luc Lavoie, qui travaille chez National – on va tout découvrir ça par la suite, pendant la campagne électorale – ancien chef de cabinet du premier ministre, et le premier ministre admettra lui-même que c'est lui qui l'a recommandé, hein? J'ai ici les paroles de M. Lucien Bouchard, 20 juin 1998, finalement, quasiment jour pour jour une année aujourd'hui, il dit: «Bien, sans penser plus loin que mon nez, j'ai dit: Bien, il y a la firme National puis il y a Luc Lavoie qui sont très bons. C'est vrai, je l'ai dit, je l'ai reconnu, et l'Hydro, par la suite, a engagé la firme. C'est ça qui est arrivé.»

Alors, les faits: M. Bouchard recommande un de ses amis. Cet ami-là travaille dans une firme de communication. Ils recevront d'humbles honoraires de 1 100 000 $ pour organiser une conférence de presse. Euphorie! Les autochtones n'y sont point conviés. Les autochtones, bien sûr, vont finalement empêcher la conférence de presse là-bas. Et, on voyait ça à la télévision, le soir, c'était de toute beauté, hein? Ils ont essayé d'organiser ça dans une salle communautaire, c'était de toute beauté de voir les deux premiers ministres. C'était tout croche, cette affaire-là. Ça a coûté 1 100 000 $, en tout cas.

Alors, on s'est dit, nous, de l'opposition: Ils ont dû comprendre que, pour 1 100 000 $... La première fois, ils ne le savaient pas. Cette fois-ci, il y a un projet de loi qui s'en vient, et c'est gros, ça, M. le Président, Churchill Falls. Je vais vous donner quelques chiffres: on parle entre 10 000 000 000 $ et 14 000 000 000 $. C'est beaucoup d'argent. On parlait de deux rivières – j'expliquerai tantôt ce qui s'est passé là-dessus – et de 1 000 km² qu'on va mettre sous l'eau. On parle de transporter, de la région de Terre-Neuve, finalement, jusque dans le centre des États-Unis, de l'électricité. C'est un immense projet.

D'ailleurs, la communauté autochtone, dans un communiqué qu'elle émet aujourd'hui, dit que, après celui des Trois Gorges en Chine, ça sera le deuxième plus gros projet hydroélectrique au monde. Je vous lis exactement, là, ils disent ici: «Deuxième plus gros chantier hydroélectrique au monde après celui du barrage des Trois Gorges en Chine.» Et on sait que le barrage des Trois Gorges, c'est immense, hein, 1 000 000 de personnes qui vont être déplacées en Chine. Il y a je ne sais plus combien de firmes d'ingénieurs à travers le monde qui vont travailler là. C'est un immense projet.

Vous vous imaginez, vous, M. le Président, et les gens qui nous écoutent ici ce soir, que, ayant déjà eu une expérience avec la conférence de presse, les premiers qu'on va appeler, les premiers qu'on va consulter, les premiers qu'on va entendre, ça va être les comités autochtones. Tout ça va se passer sur leur territoire, sur des terres ancestrales. Eh bien, M. le Président, je vous lis une lettre qu'ils ont envoyée le lendemain matin au ministre de l'Environnement. Je vais vous lire la lettre au complet tantôt, mais je veux vous lire à ce moment-ci seulement ce paragraphe.

La lettre est adressée au ministre Paul Bégin, ministre de l'Environnement. Ils disent au ministre: «M. le ministre, laissez-nous vous dire ceci. C'est une chance que le député de Jacques-Cartier ait pris la peine de nous informer de l'étude par le gouvernement du Québec de ce projet de loi parce que en aucun moment – en aucun moment – le gouvernement du Québec a tenté de nous impliquer de quelque façon que ce soit sur notre façon de voir le projet de loi n° 60.» Ça, M. le Président, c'est le regroupement des sept communautés inuit de la région où sera bâti le projet. Les phrases sont fortes ici, hein: «C'est une chance que le député de Jacques-Cartier – qui est un libéral – ait pris la peine de nous informer de l'étude par le gouvernement du Québec de ce projet de loi parce que en aucun moment le gouvernement du Québec – et il y a trois, quatre ministères qui touchent à cette histoire-là – a tenté de nous impliquer de quelque façon – E-mail, fax, téléphone, rencontres, d'aucune façon – [...] de voir le projet de loi n° 60.»

Je vous disais donc tantôt qu'ils ont rencontré vers l'heure du souper notre porte-parole et ils ont demandé à être entendus en commission parlementaire. Ils ont dû prendre un avion. C'est ce qu'ils expliquent au ministre, qu'ils ont dû prendre un avion à 19 heures, le soir. Parce qu'ils seraient restés, c'est aussi ce qu'ils expliquent au ministre.

On a demandé, M. le Président, au salon rouge de l'Assemblée nationale... Probablement qu'il y a des citoyens qui ont suivi ça, c'était diffusé en direct. Beaucoup de citoyens m'ont dit d'ailleurs qu'ils n'en revenaient pas de ce qu'ils avaient vu là, de l'indifférence du gouvernement au sujet d'une communauté. Et Dieu sait qu'on doit avoir de l'expérience, au Québec! On a connu la Baie-James, on a connu Grande-Baleine.

(22 h 20)

C'est Harry Truman, aux États-Unis, ex-président américain, qui disait: «C'est toujours la même pièce de théâtre, il n'y a que les acteurs qui changent.» M. le Président, c'est évidemment la même pièce de théâtre: un immense projet hydroélectrique; des promoteurs, qui sont Hydro-Québec – dans ce cas-ci il y aura d'autres promoteurs qui se seront joints à eux; les acteurs, la communauté autochtone.

Nous savons combien il fut difficile, dans le cas de la Baie-James, dans le cas de Grande-Baleine, d'arriver à des entendements. Dans le cas de la Baie-James, nous y sommes arrivés. Et je veux saluer ici le défunt Robert Bourassa, l'ex-ministre de l'énergie, M. Ciaccia, des gens qui ont fait un ouvrage extraordinaire. Ça a marqué l'histoire du Québec, cette entente-là. Grande-Baleine, ça n'a pas fonctionné. M. Parizeau, après avoir dépensé 500 000 000 $ dans Grande-Baleine, a scrapé le projet.

Maintenant, on va aller sur Churchill. On a l'impression qu'on a appris. Mais non, M. le Président, on ne les invite pas à la première conférence de presse. Et là on fait le premier pas. On dit souvent que le pas le plus long dans un voyage, c'est le premier pas. Ici, mercredi soir, nous faisions le premier pas d'une longue histoire. On parle de commencer les travaux, si tout va bien, en l'an 2002. On dit que les travaux pourraient être terminés aux alentours de l'an 2008, que le premier kilowatt d'électricité serait vendu probablement aux alentours de 2009 aux centres américains. C'est très long, M. le Président. C'est un long voyage qu'on va faire avec la communauté autochtone, pas une, sept communautés, deux premiers ministres, deux provinces, un pays, deux compagnies d'électricité. Il faut agencer ça un petit peu, M. le Président. Eh bien, non, on n'a pas invité la communauté autochtone.

Alors, l'opposition, mercredi soir, ce qu'on a fait, M. le Président, on a demandé au ministre, de 20 heures à 22 h 30 – après ça, on a décidé d'étudier le projet de loi, on ne voulait pas le retarder parce qu'on pense que c'est important – on lui a suggéré l'heure qu'il voulait, quand il voulait la semaine prochaine, on lui a suggéré immédiatement après la période de questions... On s'est fait traiter, M. le Président, comme il traite beaucoup de monde d'ailleurs en ce moment au Québec, de groupuscule – de groupuscule. Ils ont décidé de ne pas les entendre.

Le lendemain, à ma grande surprise, nous recevions tous une copie d'une lettre qui était envoyée à Paul Bégin, très sévère, M. le Président, très sévère. Je veux vous en lire des passages parce que ça illustre... D'ailleurs, Le Devoir le reprend aujourd'hui. Les gens qui nous écoutent, si vous allez sur le site Web du Devoir ou si vous avez Le Devoir , vous pouvez voir cet article: Les Innu prêts à bloquer Churchill Falls en cour. «On refuse de nous écouter. On refuse de nous entendre. »

M. le Président, c'est la saga que nous avons vécue mercredi soir. Je vous lis... Je n'ai jamais fait ça à l'Assemblée nationale, mais cette lettre-là, elle est tellement percutante, elle va tellement marquer toute cette histoire de la rivière Churchill qu'il faut immédiatement comprendre les enjeux. Il faut absolument que ce gouvernement réalise qu'ils ont là un allié des plus importants qui veut défendre son territoire, et c'est normal.

On voit ce que les gens d'Hertel–des Cantons font en ce moment: ils se battent pour leur territoire. On voit ce que les gens des Éboulements font pour leur territoire. Les gens sont fiers. Imaginez-vous, là-bas, ce ne sont pas des gens qui vivent là depuis 50 ans, depuis 70 ans, qui ont un bungalow, qui vont déménager; c'est ancestral, c'est depuis des millénaires que ces gens-là sont là, M. le Président. Ils ont ça dans le sang. Ils nous demandent de respecter leurs droits, ils nous demandent de respecter leurs coutumes, ils nous demandent des ententes, et on ne les invite même pas, on ne les avise même pas qu'un projet de loi va les toucher.

Alors, ils écrivent au ministre, le lendemain de la commission, donc jeudi. Ils parlent au ministre: «Contrairement à vos prétentions, ce n'est pas le député de Jacques-Cartier qui nous a invités à Québec. Nous étions de passage à Québec pour des affaires autres et avons profité de notre présence pour le rencontrer afin de discuter de nos inquiétudes concernant le projet de loi n° 60. Un peu avant 18 heures, nous avons dû quitter pour l'aéroport afin de revenir sur la Côte-Nord en territoire innu-nitassinan. Enfin, M. le ministre, M. Kelley est la seule personne de la société québécoise qui s'est donné la peine de nous écouter sur notre façon de voir le projet de loi n° 60.

«En tant que ministre responsable de ce projet de loi, il me semble – alors, la lettre est signée... le "ils", là, c'est Armand MacKenzie, représentant Matimekosh du lac John, alliance Innu, et Guy Bellefleur, représentant Mamit Innuat, alliance Innu; c'est le regroupement là-bas – que vous aviez la responsabilité d'aviser les Innu, de les informer, de les consulter sérieusement, d'en discuter avec eux. Mais, malheureusement, à l'instar de la très dispendieuse conférence de presse manquée à Churchill Falls le 9 mars 1998 par les premiers ministres Tobin et Bouchard, vous avez préféré nous ignorer. Ce n'est pas là la responsabilité de l'opposition...» C'est fort, ce qu'ils disent, hein? Ils disent: Ce n'est pas à l'opposition à nous convoquer en commission parlementaire. «Ce n'est pas là la responsabilité de l'opposition officielle de convoquer des groupes intéressés à un projet de loi, c'est la responsabilité du parti ministériel.»

Ils continuent en disant: «Soyons sérieux, M. le ministre. Vous voulez être sérieux. Quand avez-vous téléphoné aux Innu pour les informer de ce projet de loi? Ou quand avez-vous l'intention de nous aviser de vos démarches? Quand aviez-vous l'intention de communiquer par fax, par courrier ou par E-mail avec le groupe qui sera sans doute le plus affecté par la réalisation du deuxième plus gros chantier hydroélectrique au monde après celui du barrage des Trois Gorges en Chine?

«Quand avez-vous demandé au président de la commission chargée de l'étude du projet de loi n° 60 de nous faire part d'un avis de convocation afin que nous puissions décemment nous préparer à comparaître devant cette commission? Car, M. le Président, cela fait partie de nos droits d'être avisés d'avance de l'étude d'un projet de loi qui nous concerne au premier chef, et non pas une demi-heure ou un quart d'heure avant.»

Est-ce que ça les concerne, M. le Président, ce projet de loi là? Allons donc voir. À l'article 1, on dit: «Toute partie autochtone intéressée peut également être signataire de l'entente.» Si le ministre l'a écrit, ça doit être vrai. Ça doit les concerner. C'est écrit dans le projet de loi, M. le Président.

Alors, vous nous reprochez, M. le ministre, de ne pas être présents à une rencontre à laquelle nous ne sommes pas dûment convoqués ou invités. À ce sujet, nous faisons nôtres les... député d'Argenteuil, M. Whissel, c'est un député libéral... qui sont pleins de bon sens.

M. le député d'Argenteuil, il disait, sur la motion du député de Jacques-Cartier, M. Whissel: M. le Président, c'est embêtant, c'est aberrant, c'est impossible, ce que l'on entend ici. Savez-vous la force de ce gouvernement? C'est d'accaparer une situation bien précise qui leur est défavorable, qui démontre clairement à la population leur incompétence à administrer le Québec, de prendre cette situation-là et de la mettre à leur avantage et, en plus, à la fin, ils osent mettre le blâme sur l'opposition. On vient d'entendre M. le ministre qui reproche à l'opposition de ne pas avoir amené les groupes innu à la commission parlementaire. Je n'en reviens pas, je n'en reviens pas. Je pourrais continuer, M. le Président, je vois qu'il ne me reste que quelques minutes.

M. le Président, il y a une autre affaire qui nous a un peu fatigués dans ce projet de loi là; il y en a pas mal d'ailleurs. Au même moment où le ministre faisait son discours, dans cette Chambre – j'aimerais que la députée écoute, elle va être impressionnée par son ministre – au même moment où son ministre nous annonçait que le projet de Churchill aurait deux rivières, qu'il aurait 1 000 km², Hydro-Québec à Montréal – c'est un projet de loi qu'on fait pour Hydro-Québec – annonçait au même moment qu'il y aurait une rivière et 700 km². Alors, là, là, on peut se poser des questions. Est-ce que c'est le ministre qui donne des ordres à Hydro-Québec ou si c'est Hydro-Québec qui donne des ordres au ministre? Quelque chose de sûr, c'est qu'aux nouvelles, le soir... Première nouvelle, le ministre qui nous annonçait le projet de loi n° 60, deux rivières, 1 000 km²; deuxième nouvelle, Hydro-Québec qui nous annonce que le projet est maintenant d'une seule rivière et de 700 km².

(22 h 30)

Ceci dit, M. le Président, nous, de l'opposition, demandons encore au ministre, même si nous allons voter sur le projet de loi et allons voter avec le gouvernement, nous aimerions – il nous reste quelques jours à l'Assemblée nationale – nous lui disons, nous lui offrons toute notre collaboration... et la fin de semaine est de deux jours, il peut entrer après, avec les groupes, leur demander d'être entendus. Vous savez, c'est toute la réputation internationale du Québec. On sait combien on vient de se faire frapper par un film sur la coupe des forêts. On nous dit que c'est maintenant projeté dans plusieurs pays. La compétition s'en occupe, soyez en assuré. On a ici un projet qui est important pour le devenir du Québec, que nous supportons, dans lequel nous croyons; faisons tout pour que ça marche, M. le Président. Et, une des chose pour que ça fonctionne, il nous faut avoir des associés, des partenaires qui sont la communauté autochtone. Nous devons les écouter, travailler avec eux. Si nous ne faisons pas ça, nous courons à notre perte indéniablement.

M. le Président, il y a d'autres aspects de ce projet de loi là qu'il nous faut regarder, et je terminerai avec ça. On devra s'assurer... Vous savez, au Québec, il y a une chicane historique entre les petits producteurs d'électricité et Hydro-Québec. Les petites centrales ont déposé un rapport tout récemment à la Régie de l'énergie, et il démontre systématiquement, systématiquement, que le coût de production de cette électricité-là, rendue au centre des États-Unis, chaque kilowatt qui sera produit, Hydro-Québec y perdra 0,02 $. Et ils ont fait la démonstration à la Régie de l'énergie.

Je pense que ce débat-là, il va devoir se faire sur la place publique, pour ne pas qu'on ait encore les petites centrales sur un côté puis Hydro-Québec sur l'autre et que le citoyen soit pris dans le milieu à essayer de voir ce qui se passe. Je pense que c'est la responsabilité du ministre de l'Énergie d'aller au fond des inquiétudes et de voir si effectivement ce projet-là, il sera rentable. La prétention des petites centrales, le regroupement des petites centrales, c'est que finalement on n'a pas pris en compte le coût du transport de l'électricité. Pour avoir lu certaines études sur ce projet, j'avoue qu'ils m'ont à peu près convaincu qu'ils avaient raison. Je vais encore donner le bénéfice du doute à Hydro-Québec et j'aimerais bien qu'Hydro-Québec éventuellement nous démontre que le projet Churchill Falls sera rentable.

Il est aussi un peu surprenant de voir qu'après avoir cancellé le projet de Grande-Baleine, qui était à 100% aux Québécois, sur un territoire québécois, après y avoir dépensé 500 000 000 $, quand je les entends dire que, sur Hertel–des Cantons, on a dépensé 300 000 000 $ il faut continuer... Bien, dans Grande-Baleine, c'était plus de 500 000 000 $ qui avait dépensé, et pourtant, pendant la campagne électorale, M. Parizeau, le premier ministre, n'a pas hésité un instant à dire: On arrête ça là puis on recommence ailleurs.

C'est ce qu'on leur dit, d'ailleurs, c'est ce qu'on leur dit, nous, dans Hertel–des Cantons: Écoutez, arrêtons un peu, là, faisons une évaluation de tout ça. Pas ce qui reste à construire, oui, il faut le faire, mais aussi ce qui est déjà construit. Questionnons les citoyens, allons avec le BAPE, entendre s'il faut tasser quelques piliers. Parce que ce qu'on a oublié aussi de nous dire, M. le Président, dans Hertel–des Cantons, j'ai découvert ça dans un document d'Hydro: avez-vous une idée quelle est la hauteur des poteaux de téléphone? Moi, je pensais que c'était des poteaux de téléphone qu'on installerait. J'en vois bien sur la 55 qui me paraissaient très hauts, très, très hauts, assez hauts qu'on met des petites lumières rouges sur le dessus pour pas que les avions les accrochent le soir.

Alors, je suis arrivé ici, j'ai demandé à la bibliothèque de me sortir quelque chose sur les tours d'Hydro-Québec qu'on installerait dans Hertel–des Cantons. Vous savez, on a tout à la bibliothèque, ici. Alors, ils m'ont apporté ça. J'ai été très impressionné de notre bibliothèque nationale. Savez-vous combien 80 % des tours qu'ils ont installées ou vont installer à côté des petits bungalows puis des fermes puis des agriculteurs, combien hautes sont ces tours-là, M. le Président, des belles petites tours Eiffel? Si je vous disais 50 pi, vous trouveriez ça très haut, c'est la hauteur du plafond ici, si je vous disais 100 pi, vous trouveriez ça très, très haut, c'est la hauteur du parlement, ici. Si je vous disais que 80 % de ces tours-là auront 196 pi de haut, c'est deux fois haut comme le parlement, ici. Ils ne comprennent pas pourquoi les gens sur le long de Hertel–des Cantons sont révoltés. Vous avez une belle petite terre, une belle petite maison, et soudainement on vous bâtit une tour de 200 pi avec des belles petites lumières dans le haut. Le ministre pourrait toujours dire que ça l'air de la tour Eiffel, il a peut-être raison, mais ce n'est pas exactement la prétention des gens là-bas.

On demande encore au ministre, il a encore le temps, le ministre de l'Environnement, de changer son fusil d'épaule, on ne finit que la semaine prochaine. Il peut encore se servir de son pouvoir de ministre de l'Environnement et dire à son premier ministre: Réétudions toute cette affaire-là. On l'a fait dans Grande-Baleine. On a flushé 500 000 000 $. Je ne vous dis pas de flusher 300 000 000 $ dans Hertel–des Cantons, loin de là. Mais, si on pouvait écouter les gens, si on pouvait peut-être tasser quelques tours ici et là, bâtir un bosquet, baisser une tour, je ne le sais pas, moi, je ne suis pas ingénieur... Il y en a sûrement, des possibilités, M. le Président. Mais non! On ne veut pas réétudier la partie déjà construite; alors, bien sûr qu'on ne la débâtira pas non plus, hein. Et ça, en environnement, c'est terrible.

Moi, je m'en vais parler, dimanche, regroupement... ce qu'on appelle les CRE au Québec, les conseils régionaux d'environnement. Tous les présidents vont être là. Ça vient de partout au Québec. Moi, je suis convaincu que la première question qu'ils vont me poser va être sur Hertel–des Cantons: Comment se fait-il qu'après le rapport Nicolet, comment se fait-il qu'après un jugement, comment se fait-il qu'après le Barreau, ce matin, un avis du Barreau, ce gouvernement n'arrête pas ce projet-là?

Alors, j'arrête ici, M. le Président. Encore une fois, je demande aussi au ministre... Si, mardi, il veut entendre la communauté autochtone, nous allons nous y prêter. Même si le projet de loi, nous l'avons voté, nous pensons qu'ils doivent être entendus. Ils en seront reconnaissants éternellement. Oui, ils en seront reconnaissants éternellement, ainsi que leurs enfants. Nous embarquons dans un très long périple dans l'histoire de la rivière Churchill et nous avons à mettre toutes nos chances sur le bon côté.

Savez-vous les gens qui nous appelaient suite à ce débat à la télévision mercredi soir? Oui, il y a eu la communauté autochtone, mais il y a eu les gens qui disaient: Écoutez, nous, nous sommes des ingénieurs, nous, nous sommes des forestiers, nous, nous sommes des constructeurs de routes, nous, nous sommes des constructeurs de barrages. Comment se fait-il que le gouvernement n'a pas compris que, si on veut que les choses aillent bien, qu'elles aillent vite, qu'on crée la richesse collective au Québec, qu'on crée l'emploi, les premières personnes qu'il nous faut impliquer dans ce débat-là sont les communautés autochtones du territoire, là-bas?

J'irai plus loin que ça. Il va falloir même, je pense, les aider financièrement pour qu'ils puissent faire valoir leur point de vue, M. le Président. Qu'on ne fasse pas comme dans Hertel–des Cantons où, en bout de ligne, c'est la juge qui a obligé le gouvernement à payer les avocats, alors qu'on aurait dû, en premier lieu, payer pour les entendre, payer pour qu'ils puissent faire des documents. Parce qu'on voulait aller vite, et j'en suis. On aurait dû les aider, M. le Président. On aurait pu aller vite et ça nous aurait évité tout le bourbier dans lequel le ministère de l'Environnement se retrouve maintenant.

Alors, encore une fois, nous allons voter pour le projet de loi. Nous voulons que ça aille bien, que ça aille vite. Nous voulons créer la richesse collective au Québec. Mais nous demandons au ministre: Entendons ces gens-là. Nous allons collaborer avec vous, nous allons vous aider. Ce n'est pas parce qu'on fait une erreur qu'on ne peut pas la rectifier, M. le Président. On dit au ministre: On va effacer le tableau, puis on recommence. Moi, je n'ai jamais de problème avec des gens qui admettent qu'ils ont fait une erreur puis qui vont de l'avant ensuite.

Alors, M. le ministre, vous êtes devant nous, vous nous entendez, ici, ce soir. Nous, on vous offre, mardi, après la période de questions... Nous avons les numéros de fax, nous avons les numéros de téléphone, vous les avez tous reçus à votre bureau. Invitez-les en commission parlementaire, entendons-les pendant une demi-heure, trois quarts d'heure, allons dîner avec eux, rebâtissons des ponts avec ces gens-là, aidons-nous à créer un projet qui va fonctionner dans Churchill Falls, et Québec dans son ensemble sera heureux de ce projet-là en l'an 2009. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à la prise en considération du rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill. Je vais reconnaître le prochain intervenant, M. le député d'Anjou.


M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir ici ce soir au niveau du projet de loi n° 60, projet de loi qui s'intitule Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill.

(22 h 40)

M. le Président, les gens qui nous écoutent à la maison vont probablement se rappeler que la rivière Churchill, on en a entendu beaucoup parler en mars 1998. On se souvient de la fameuse conférence de presse organisée tant par Hydro-Québec que les gens de Terre-Neuve, qui visait à faire un gros spectacle sur une entente à venir. Le député d'Orford, je pense, a rappelé le fiasco médiatique, évidemment, que ça a entraîné, mais également les coûts de 1 100 000 $. Pendant que le gouvernement du Québec, par l'entremise, entre autres, du premier ministre, préparait ce spectacle médiatique, qu'est-ce qu'on apprenait de l'autre côté, M. le Président? C'est que ce gouvernement-là refusait de signer l'accord d'harmonisation entre toutes les provinces canadiennes, une entente... C'est un accord pancanadien qui visait l'harmonisation en matière d'environnement afin d'assurer une plus grande collaboration entre les différents paliers de gouvernement. M. le Président, on a refusé de faire ça. On a refusé de le faire, pourquoi? Je ne sais pas. On a un projet de loi ici aujourd'hui, justement, qui vise à harmoniser tous ces projets-là pour qu'on puisse aller de l'avant. Si on avait signé cette entente-là, M. le Président, on ne serait pas ici ce soir à en débattre. Puis, comme à son habitude, le gouvernement a refusé. Un accord pancanadien, ça ne se signe pas.

Puis ça, c'est quelque chose qu'on avait mentionné durant la campagne électorale: le danger de l'obsession référendaire qui peut se poursuivre pendant quatre ans. Je l'expliquais, puis ça avait été expliqué pendant la période électorale. Malheureusement, là, le référendum puis l'obsession du gouvernement, ce n'est pas juste pendant les 30 et quelques jours que dure un référendum, c'est tout ce qui précède, c'est tout ce qui conditionne les gestes, la pensée. Puis, on en a un bel exemple concret, M. le Président, on n'a pas voulu le faire pour des motifs liés à cet objectif-là qui est la souveraineté. Le gouvernement a décidé de le faire, je ne suis pas sûr qu'en bout de ligne tous les citoyens du Québec s'en trouvent grandis.

Donc, on se retrouve aujourd'hui... Puis, en plus, cet accord-là, M. le Président, ce qui est assez exceptionnel, c'est que tout ce qu'on demandait de faire, hein, ce que l'accord prévoit, c'est que tout le monde s'harmonise. L'environnement... Puis, je pense que c'est un exemple qui avait été repris à plusieurs reprises; un nuage, là, ça voyage. On a beau être souverain, M. le Président, il ne dressera pas une barrière.

Puis c'est ce même gouvernement là qui nous dit depuis 1995, entre autres le premier ministre, thème qui lui est bien cher... Le fameux partenariat, on nous le ressort à tout bout de champ: On va se séparer, mais on va s'unir. On va faire un partenariat. Vous en avez un bel exemple, M. le Président, on ne l'a pas fait. Comment peut-on croire que ces gens-là ne sont pas capables, en ce moment, de s'entendre puis de signer des accords d'harmonisation, un accord qui prévoyait que tous les paliers de gouvernement conservaient leurs pouvoirs? Je pourrais comprendre s'il y avait une main basse sur les pouvoirs. Pas du tout, ce n'était pas mis en cause. Ce n'était pas mis en cause en aucun moment, le gouvernement du Québec conservait ses pouvoirs qu'il a déjà. Mais on n'a pas voulu le signer, M. le Président. Ils n'ont pas voulu le signer, puis c'est ces mêmes gens-là qui nous disent, d'un côté, qu'ils ne peuvent, en aucun temps, signer des accords avec le reste du Canada, il n'y a rien qui fonctionne. Mais donnez-moi un oui, donnez moi la permission de briser le pays, puis là on va s'entendre. Ça va fonctionner, on va se trouver des terrains d'entente, on va harmoniser nos lois, nos gestes en matière d'environnement, si je suis souverain. Si on est une province canadienne, c'est impossible de le faire.

J'ai bien de la difficulté avec ça, M. le Président, puis c'est un exemple bien concret, je pense, dans l'application de tous les jours de cette obsession-là. Puis des débats, j'en ai eu à plusieurs reprises avec des gens, et je leur dis: Écoutez, le partenariat, je ne vois pas comment vous pouvez faire fonctionner ça, dans la mesure où on se sépare, mais qu'on n'est pas capable en ce moment, même, de se parler ou de signer des accords comme ça. Ça fait que, M. le Président, on se retrouve aujourd'hui avec un projet de loi qui vise à harmoniser tout ça.

On ouvre les journaux ce matin, ici, le titre: Les Innu prêts à bloquer Churchill Falls en cour . Encore une fois, M. le Président, je pense, c'est malheureux, on n'a pas voulu les écouter, on se retrouve comme dans Hertel–des Cantons, possibilité de poursuite devant les tribunaux. Et la question qu'il faut se poser, je pense, comme parlementaires, indépendamment des partis politiques, c'est: Est-ce que, collectivement, ça nous sert? Permettez-moi d'en douter. Permettez-moi d'en douter, M. le Président, parce que: est-ce que, sur la scène internationale – et le député d'Orford le soulignait avec justesse – collectivement, comme Québécois, on va en retirer un bénéfice quelconque? Je l'avoue, pendant quelques jours, si les Innu décident d'aller en cour, ça va peut-être susciter des questionnements, mettre le gouvernement sur la défensive. À la période de questions, ça va peut-être nous donner une ou deux bonnes questions, mais est-ce que, collectivement, les 125 députés ici puis tous les Québécois et Québécoises, ceux qui nous écoutent et les autres, vont en retirer un quelconque bénéfice si, comme société, on se retrouve à nouveau, M. le Président, mêlés, sur la scène internationale, avec des poursuites?

On mentionnait tout le déroulement et le cheminement qu'il y a eu avec la Baie James. On serait porté à penser qu'on aurait appris. Malheureusement, on lit ce matin que, si on se fie à ce que les Innu nous mentionnent, et je ne pense pas que ça a été contredit, on fait fi d'eux. On fait fi d'eux. Puis, on l'a mentionné, on est prêts, nous, à appuyer le projet de loi. On est prêt à l'appuyer parce qu'au niveau du développement économique ça serait positif. On va en retirer des bénéfices collectivement. Puis je reviens à nouveau sur ce thème-là: Collectivement, le Québec pourrait en retirer des bénéfices. Le ministre des Finances, vice-premier ministre, on lui a mentionné à de nombreuses reprises que les performances de son gouvernement n'étaient pas fameuses au niveau de l'emploi, bien, on va l'aider. On est prêt à aller de l'avant avec ce projet de loi.

M. le Président, il m'apparaît que la moindre des choses, c'est qu'on donne la chance aux Innu d'être entendus; on ne le fait pas. On ne le fait pas et on court le risque, encore une fois... Et c'est inutile, c'est complètement inutile que, comme gouvernement, comme Assemblée nationale, l'on fasse courir le risque que le Québec ait à nouveau un oeil au beurre noir sur la scène internationale. On le mentionnait tout à l'heure au niveau du court métrage de Richard Desjardins, ce n'est pas au Québec qu'on s'est fait le plus mal. On a pris le problème qu'il y avait ici, et il y a des gens à l'extérieur qui, pour des motifs économiques, ont décidé d'utiliser ça contre nous parce que ça faisait leur affaire. Je pense que c'est en Suède que des entreprises ont déjà commencé à utiliser L'Erreur boréale de Richard Desjardins pour nuire aux compagnies du Québec.

Est-ce que, de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, on se réjouit? Pas du tout, parce qu'il n'y a rien de réjouissant là-dedans. Au-delà des politiques partisanes puis de la période des questions, puis des échanges musclés, je pense que, malgré les divergences d'opinions sur des sujets bien importants, j'en conviens, on a tous à coeur le développement économique du Québec. On le mentionne et on le dit au ministre: On est prêts à aller de l'avant, on est prêts à aider le développement économique du Québec, parce que c'est excessivement important. C'est pour ça qu'on a été élus en cette Chambre, c'est pour aider le développement et l'essor du Québec. Mais ce qu'on dit au ministre, c'est: S'il vous plaît, ne faites pas exprès pour nous mettre dans le trouble. Il reste quelques jours avant l'adoption. Je pense que le ministre, devant cette situation-là, devrait, par respect des peuples autochtones mais aussi par logique et par nécessité de défendre le Québec, s'assurer qu'on ne se retrouve pas à nouveau inutilement devant les tribunaux, inutilement, encore une fois. On le mentionne encore une fois, parce qu'on l'a eu dans Hertel–des Cantons. J'ose croire que la réponse qu'on leur donne cette fois-ci, ce n'est pas: Faites respecter vos droits, on respecte ça, allez devant les tribunaux.

Nous, ce qu'on dit au ministre ce soir, c'est: Vous voyez la situation, vous voyez les dangers qui se présentent, agissez en conséquence pour le bien-être du Québec, pour le bien-être de l'ensemble des Québécois et Québécoises, pour le bien-être économique des gens qui l'habitent.

C'est pour ça, M. le Président, que je terminerai tout simplement en mentionnant que le ministre peut compter sur notre collaboration. Le député d'Orford, je pense, s'est avancé. On est prêts à collaborer, parce que c'est un projet de loi qui peut avoir des retombées économiques importantes pour le Québec, à aider le ministre des Finances dans ses chiffres au niveau de l'emploi. On veut aussi l'aider à éviter un autre oeil au beurre noir pour l'ensemble du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Anjou. Nous poursuivons le débat sur la prise en considération du rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 60. Et je cède la parole à un prochain intervenant, M. le vice-président de la commission des finances publiques et responsable des dossiers des services sociaux pour l'opposition officielle et député de Nelligan. M. le député, vous avez la parole.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai demandé le droit de faire une brève intervention sur le projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill, Bill 60, An Act respecting environmental assessment of the proposed Churchill River hydroelectric development.

(22 h 50)

M. le Président, je ne me suis pas levé tout de suite, parce que j'ai vu que le ministre de l'Environnement était devant moi et j'ai pensé, après les interventions de mes collègues, qu'il aurait voulu dire qu'effectivement il a compris le message et qu'il était prêt à retirer le projet de loi n° 60. Mais, finalement, il ne s'est pas levé. Aussi, j'ai pensé que peut-être ce soir nous allons entendre au moins un mot de quelques députés ministériels, qui, il me semble, sont tous bâillonnés – ou il y a un manque d'intérêt dans les dossiers – qui ne veulent pas faire des interventions et passer leurs opinions dans des dossiers aussi importants pour la population québécoise.

Pour ceux et celles qui sont ici ce soir et pour ceux et celles qui nous écoutent, laissez-moi expliquer qu'est-ce que nous sommes en train de discuter. Nous avons un projet de loi qui dit, dans une première partie, que «toute partie autochtone intéressée peut également être signataire de l'entente». Avec ça, il parle qu'il peut y avoir la participation des groupes. Sauf que, ce matin, c'est assez clair, c'est pourquoi j'ai pensé que le ministre de l'Environnement va arrêter le projet de loi, on dit: Les Innu prêts à bloquer Churchill Falls en cour . On refuse de nous écouter, on refuse de nous entendre .

M. le Président, le gouvernement péquiste a refusé d'écouter les partenaires les plus importants dans ce projet de loi. Il a carrément refusé – et je vais retourner sur ce sujet un peu plus tard. M. le Président – ils ont refusé d'écouter. Souvent, comme vous le savez – vous avez participé longuement, M. le Président, dans les débats et dans les commissions parlementaires – quand on accepte d'écouter un groupe, un témoin devant une commission parlementaire, souvent ça prend une heure. Dans les cas exceptionnels, ça prend deux heures. Ça dépend quel type de groupe, mais actuellement c'est souvent 20 minutes de présentation, 20 minutes pour le côté ministériel, 20 minutes pour l'opposition.

Ce soir, nous avons commencé à 20 heures. Si le gouvernement veut vraiment entendre les groupes, le ministre de l'Environnement est ici devant nous, nous sommes ici, souvent, pas tout le temps, nous avons quorum, avec ça, il y a quelques députés ministériels ici, pourquoi nous n'avons pas utilisé le temps ce soir – ce soir – pour écouter? Il y a juste deux commissions parlementaires qui siègent ce soir, pas toutes. Nous avons eu quelques soirées, supposé, pendant cette session intensive où nous n'avons pas siégé. M. le Président, pourquoi le gouvernement n'a pas utilisé l'opportunité d'écouter ces autochtones qui ont demandé le droit de faire une intervention? M. le Président, c'est inacceptable! C'est inacceptable que ce gouvernement ait carrément refusé d'écouter les partenaires les plus importants.

C'est une autre démonstration, ce projet de loi n° 60, que c'est un gouvernement déjà à sa fin de régime. Déjà, ils ne sont pas capables d'écouter la population. M. le Président, ils ont passé avec le bâillon, la semaine passée, une loi dont le seul objectif, c'est de protéger le ministre du Revenu. C'est ça qu'ils ont fait avec le bâillon. Ils ont passé une loi avec les bulldozers de la majorité, la loi sur Hertel–des Cantons. Ils ont utilisé le bulldozer dans les Cantons-de-l'Est déjà. Maintenant, ils utilisent leur majorité pour ne pas écouter la population pour un autre projet électrique. Mais, ce soir, avec toutes les questions que nous avons tous eues sur ce projet de loi, ils refusent d'écouter.

M. le Président, dans une démocratie, nous avons tous le droit d'avoir une différence d'opinions, mais, au moins, on doit écouter ceux et celles qui sont touchés par ce projet de loi. La seule et unique raison pour laquelle les autochtones sont au courant de ce projet de loi, malgré qu'il soit dit dans l'article 1: «Toute partie autochtone intéressée peut également être signataire de l'entente», c'est parce que c'est le député de Jacques-Cartier, un député libéral, mon député, M. le Président, qui a pris la peine de contacter ce groupe et a dit: Effectivement, est-ce que vous êtes au courant que ce gouvernement est en train de passer un projet de loi qui vous touche directement? Et le ministre et le gouvernement n'ont pas eu la simple politesse de contacter ces groupes. Mais, après ça, une fois que les groupes ont été informés, ils ont demandé d'avoir une opportunité de témoigner. C'est une base fondamentale de notre démocratie, M. le Président. Le gouvernement a utilisé sa majorité, encore une fois, pour refuser, pour refuser la possibilité pour les Innu de se présenter devant la commission parlementaire. Pourquoi? Est-ce qu'ils n'ont pas assez de courage pour défendre leurs idées? Est-ce qu'ils ne sont pas fiers de leurs idées? Est-ce qu'ils ont peur des échanges démocratiques? Est-ce qu'ils ont peur d'avoir un changement dans ce projet de loi? Mais, M. le Président, c'est la démocratie. C'est le principal principe fondamental de la démocratie.

Mais, à cause de l'arrogance de ce gouvernement, de son incapacité d'écouter la population, nous avons maintenant des manchettes comme nous avons eues ce matin, et le porte-parole, M. Armand Mckenzie, a dit: «Tout est maintenant possible. Nous pensons, par exemple, à contester en cour la constitutionnalité de la loi.»

M. le Président, pourquoi? Pourquoi ce gouvernement a décidé de juste utiliser son pouvoir de bulldozer ce projet de loi, de ne pas avoir le minimum de respect pour la communauté autochtone, d'entendre ces groupes-là? Souvent, le gouvernement se lève, il part, et ils sont le gouvernement de tous les Québécois et Québécoises et ils vont faire les meilleures choses pour eux, incluant ce projet de loi.

Je me souviens des débats que nous sommes en train d'avoir sur le projet de loi n° 51. Supposé, le gouvernement va augmenter la représentation des minorités dans la fonction publique. Mais, quand vous regardez dans le projet de loi, les minorités ne sont pas mentionnées. Et, dans l'expérience que nous avons eue l'an passé, deux groupes minoritaires, les autochtones et les communautés d'expression anglaise, qui n'ont pas un programme d'accès à l'égalité, peuvent être oubliés. Le gouvernement fait de grands discours, mais, quand on regarde les lois, quand on lit les lois, ils ne sont pas là, M. le Président.

C'est le même type de comportement qu'on voit ce soir. Et vous souvenez-vous, M. le Président, de la fameuse conférence de presse qui a coûté 1 100 000 $ de vos impôts, de mes impôts, d'argent public pour faire le gros marketing du premier ministre pour Churchill Falls? Ça n'a pas marché. C'est le type d'arrogance qui est inacceptable, M. le Président.

M. le Président, le gouvernement n'écoute pas. C'est un gouvernement qui n'est pas capable de faire les alliances, de faire les partnerships, un gouvernement avec cette incapacité de travailler ensemble et une indifférence aux besoins de la population québécoise. M. le Président, nous avons montré que nous sommes ouverts à travailler et à supporter toutes les choses économiques avec ce gouvernement. Le Parti libéral est prêt à faire cela. Mais, avec le comportement de ce gouvernement, je suis tellement mal à l'aise. C'est pourquoi, M. le Président, je demande encore, et j'espère que le ministre de l'Environnement nous écoute ce soir... On peut siéger lundi ou on peut utiliser une partie de mardi. On peut entendre ces groupes-là. On peut travailler ensemble.

Mr. Speaker, it's a fundamental, basic right in democracy to have exchange, and if there is a bill that directly affects a certain community, don't you think it's a fundamental, basic right that they can come and present, in an institution of democracy in Québec, their point of view? This Government denies them that right, a simple fundamental right. I'm not even asking tonight, Mr. Speaker, that the Government agrees with them. I hope they would. I'm not even asking that they agree with every word they say. I'm asking for the simple right to be heard. It seems a fundamental principle, Mr. Speaker, and it's outrageous that the only contact that these groups had in the beginning of this was from the Liberal Opposition. If the deputy, if the MNA from Jacques-Cartier hadn't contacted them, they wouldn't have been aware of it. Was that the strategy of this Government? Is that the strategy of the Pequist Government? Is that what they mean when they say, in Bill 60, that an interested Native party may also be signatory to the agreement? Are they going to come in the last minute and say: Sign this, take it or leave it? That's not the way you build partnerships. That's not the way you bring in partners to work hand in hand.

(23 heures)

Et, M. le Président, si on veut assurer que ces types de projets marchent ensemble, on doit le faire dans le respect mutuel et on doit le faire dans l'esprit de partnership. Et, je m'excuse, M. le Président, le gouvernement, cette fois encore, a démontré un non-respect pour ces communautés, et j'espère qu'il va corriger son erreur et entendre ces groupes la semaine prochaine. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, nous poursuivons le débat sur la prise en considération du projet de loi n° 60. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, la parole est maintenant au porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éducation et député de Kamouraska-Témiscouata. Nous vous écoutons, M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. À mon tour d'intervenir sur le projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill.

M. le Président, je vous dirais que ce n'est pas avec une petite surprise que j'interviens sur ce projet de loi là. Parce que je vous dirais qu'un projet de loi normalement pour lequel tout le monde s'entend, pour lequel il ne semble pas y avoir de contestation majeure, pour lequel on dit que ça semble aller dans les intérêts du Québec et des Québécois et Québécoises, ce projet de loi là se retrouve malgré tout contesté.

Contesté pour quelle raison, M. le Président? Pour une raison bien simple, c'est que les intervenants dans ce dossier-là disent qu'ils n'ont pas été consultés, qu'on ne les a pas entendus. Mais, M. le Président, quelle surprise à entendre les gens nous dire qu'ils n'ont pas été entendus quand ce soir même ici, à l'Assemblée nationale, nous n'avons pas entendu un seul député ministériel venir nous donner la réplique.

Est-ce que c'est une nouvelle dictature du leader du gouvernement, qui dit: Nous devons passer les projets de loi, nous devons absolument régler ça avant la fin de la session et on ne laisse même pas nos députés parler? Est-ce que c'est ça, la nouvelle dictature où un gouvernement lui-même n'ose pas entendre ses députés sur un projet de loi ou sur des projets de loi? Pas un, pas un, M. le Président, ne s'est levé ce soir. Et, sur le projet de loi n° 60, on se retrouve dans la même situation.

J'ai été quand même extrêmement heureux, et je pense que c'est bon pour un système démocratique, qu'on se retrouve dans une situation où finalement, c'est le porte-parole et critique de l'opposition officielle en matière d'affaires autochtones qui procède à ces consultations-là. Et je pense que c'est pour ces raisons qu'on doit rendre hommage à mon collègue de Jacques-Cartier, qui, lui, a fait des consultations, qui, lui, est allé voir, a dit aux groupes: Est-ce qu'on vous a consultés, est-ce qu'on vous a entendus sur ce sujet-là? Et les groupes de répondre: Non.

Et je vois ma collègue la députée de Prévost qui s'instruit sur l'oeuvre et sans doute tout le travail du curé Labelle. Sans doute, M. le Président, que lui consultait les gens, lui travaillait avec les gens, contrairement à ce qu'on voit dans ce projet de loi là.

Donc, M. le Président, je vous dirais que ce qui est très surprenant, c'est qu'on est face à un projet de loi qui se retrouve sans opposant majeur. Cependant, même dans ces cas-là on boycotte les groupes qui aimeraient être entendus, qui aimeraient dire: Nous, on veut améliorer un peu ce projet de loi là, on veut dire notre point de vue sur ce projet de loi là.

Et je vous dirais, M. le Président, que les risques ne sont pas grands, tous s'entendent sur l'opportunité de ce projet de loi là. Et des gens viennent dire, par exemple les Innu du Québec, qui ont indiqué qu'ils avaient l'intention de contester en justice la constitutionnalité du projet de loi n° 60, projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill, M. le Président, ces gens-là viennent dire: On ne nous a pas entendus; on va contester le projet de loi au niveau de la Constitution. Et on ne nous donne pas l'occasion de l'améliorer. Et je vous dirais que, plus loin, M. le Président, ces gens-là indiquent qu'ils avaient manifesté l'intention de s'exprimer. Et M. Armand McKenzie indique: On refuse de nous écouter, on refuse de nous entendre; ce ne sont que de belles paroles, car il n'y a pas de communication.

Pourquoi il dit ça? C'est bien simple, parce que, au bureau du ministre de l'Environnement, c'est une porte-parole qui a indiqué que les autochtones n'avaient pas été exclus du processus de consultation et qu'ils n'avaient pas manifesté l'intention de s'exprimer. On est face à une porte-parole du ministre de l'Environnement qui dit: Ces gens-là ne nous ont pas dit qu'ils voulaient s'exprimer sur le projet de loi. Ils ne nous l'ont tellement pas dit que maintenant ils veulent contester au niveau constitutionnel le même projet de loi. Il y a quelqu'un quelque part, M. le Président, qui ne dit pas toute la vérité. Est-ce qu'on les a consultés? Est-ce qu'on les a mis dans le coup? Et, si oui, pourquoi veulent-ils contester ce projet de loi là au niveau constitutionnel?

Ils ont même écrit une lettre au premier ministre et au ministre de l'Environnement, où ils expliquent qu'ils n'ont jamais été impliqués de quelque façon que ce soit sur leur perception du projet de loi n° 60. Ils ne disent pas: Nous sommes contre. Ils ne disent pas: Nous ne voulons pas, à aucun prix, que ce projet de loi là passe. Ce qu'ils disent, c'est: Nous n'avons jamais été impliqués de quelque façon que ce soit sur le projet de loi n° 60. Et ils indiquent, plus loin: «Soyons sérieux, M. le ministre, quand avez-vous téléphoné aux Innu pour les informer de ce projet de loi ou quand aviez-vous l'intention de nous aviser de vos démarches?» Ils ne l'ont pas fait. Il a fallu que le député de Jacques-Cartier lui-même le fasse, qu'un député de l'opposition, le porte-parole, fasse ces contacts-là, fasse ces consultations-là pour les informer qu'il y avait un projet de loi.

Et, M. le Président, ils indiquent, plus loin, dans leur lettre toujours, M. Mckenzie, qui, parlant d'impérialisme économique, a écrit: «Vous allez peut-être éventuellement vous réveiller un jour, M. le ministre, dans un pays où des gens qui rêvent de souveraineté se trouvent tout d'un coup dans une situation où ils s'aperçoivent qu'ils ont fait leur pays sur le dos d'un autre peuple, en colonisant et en utilisant les richesses naturelles de ce peuple. Est-ce cela, le modèle québécois?» C'est la question qu'il pose.

Cette question-là, M. le Président, est lourde de conséquences pour un gouvernement qui, depuis... On n'est pas devant un gouvernement qui est là depuis 20 ans, on est devant un gouvernement qui, depuis l'arrivée du nouveau premier ministre, n'est là que depuis trois ans. Et déjà on n'écoute plus les gens. On dit que les gens qui ne sont pas d'accord avec nous sont soit des groupuscules soit, comme le dit le député de Joliette... je n'ose pas le mentionner, mais c'est relatif à des grenouilles. Mais, s'ils ne sont pas d'accord avec ce que le gouvernement veut faire, avec le modèle que le gouvernement veut mettre en place, on ne les écoute pas. Et on se retrouve, tout cela, dans une situation d'un contexte de développement hydroélectrique.

Les plus anciens de cette Chambre se souviennent sans doute, M. le Président, que, lors des premières discussions relatives au développement de la Baie James, les gens du Parti québécois étaient contre et favorisaient plutôt le développement de l'énergie nucléaire. Beau choix, beau choix! Ça nous rappelle certaines orientations des gouvernements soviétiques des années quarante et cinquante, M. le Président. Et, dans leur façon de faire, on ne peut s'empêcher de penser que ce gouvernement s'oriente vers une façon où, s'il le faut, on va mettre les moyens.

On se souvient tous, M. le Président, de la fameuse conférence de presse de Churchill Falls: 1 100 000 $ à une firme de communication pour faire comme si tout allait bien, comme si tout était beau, comme si tout le monde était d'accord, comme si on allait signer le tout dans la plus grande effervescence. 1 100 000 $ pourquoi? Pour pas grand-chose, parce qu'on se rend compte qu'aujourd'hui on abandonne des pans de ce projet-là. Et on se rend compte surtout qu'on n'a pas consulté les premiers impliqués dans ce dossier-là. Et c'est un peu la même chose qui s'est produite dans le dossier d'Hertel–des Cantons, on ne peut pas passer sous silence le parallèle qui doit être fait.

Mais, dans tous ces débats, M. le Président, qu'est-ce qu'il ressort? Il ressort qu'il y a un député de l'opposition, le député de Jacques-Cartier, qui a consulté ces gens-là, qui les a informés. Et il ressort surtout qu'il y a un porte-parole de l'opposition officielle en matière d'environnement, un porte-parole qui se tient debout pour l'environnement, un porte-parole qui défend ses idées, qui défend les droits des moins bien munis de notre société pour que leur voix se fasse entendre. Dans le cas d'Hertel–des Cantons, mon collègue d'Orford était là, dans le cas qui nous préoccupe aujourd'hui, mon collègue d'Orford était encore là.

Bien, M. le Président, il y a un jour où on devra peut-être penser à renommer d'une façon différente les études environnementales du BAPE pour dire: Voici la méthode Robert Benoit, voici l'intégrité de Robert Benoit et voici comment le député d'Orford, qui a toujours cru à ces principes en environnement, a réussi à concilier ces principes-là avec un développement économique durable, un développement économique qui respecte les droits environnementaux et un développement économique qui est prospère pour l'avenir, qui remet certaines choses en question mais qui vise à assurer le bien-être et l'avenir des Québécois et des Québécoises. Merci, M. le Président.

(23 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Sur le même sujet, M. le leader de l'opposition officielle et député de Brome-Missisquoi.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président, c'est la deuxième fois que j'interviens dans le cadre de ce projet de loi qui vise l'évaluation ou qui est supposé, plutôt, devrais-je dire, viser l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill. J'ai eu l'occasion de m'adresser à cette Assemblée à l'occasion de l'adoption de principe dudit projet de loi. Je prends cette occasion qui m'est offerte après en avoir discuté hier avec le ministre de l'Énergie à l'occasion d'une discussion informelle. Je suis inquiet de la façon de procéder du gouvernement dans cette matière. Le gouvernement du Parti québécois n'est certes pas un expert dans ce qu'on appelle les projets de développement hydroélectrique, et on le comprendra aisément, M. le Président.

Tous se souviendront qu'au moment où Robert Bourassa a voulu lancer les premiers grands projets hydroélectriques au Québec il a été combattu férocement par nos amis d'en face, qui, à l'époque, forts, toujours, des visions d'avenir qu'on leur connaît, souhaitaient que le Québec s'oriente plutôt vers le nucléaire. Des débats en cette Assemblée nationale, que d'autres ont présidés à votre place à l'époque, véhéments, où on disait à Robert Bourassa qu'il se trompait, qu'il faisait fausse route, qu'il entraînait le Québec dans une voie de perdition économique s'il choisissait l'hydroélectricité, que la voie d'avenir, c'était le nucléaire et la séparation dès ce moment-là. Vous voyez le mélange. Ces gens-là ont toujours eu des projets d'avenir, lorsqu'ils en avaient, un peu douteux quant à la sécurité de la population québécoise.

Le projet de loi, M. le Président – et, j'insiste, j'attire l'attention du ministre de l'Environnement, je pense que j'ai capté celle, hier au soir, du ministre de l'Énergie – c'est un projet de loi qui met, en termes ruraux – je vois le député d'Arthabaska – la charrue devant les boeufs, et vous allez comprendre aisément pourquoi.

Lorsqu'on procède à la mise en commun des conditions qui doivent précéder le début de travaux de construction d'un projet qui frise les 10 000 000 000 $ – on ne parle pas d'un projet qui est mineur, M. le Président – on agit maintenant en tenant compte de ce que l'histoire nous enseigne au Québec, des erreurs qui ont été commises comme des décisions heureuses qui ont été prises à l'occasion d'autres grands projets hydroélectriques. Je fais référence surtout – et d'aucuns s'en rappelleront – au projet de la Baie James et au projet de Grande-Baleine. On a appris de ces projets que mettre la charrue devant les boeufs, ça veut dire se présenter d'abord à l'Assemblée nationale du Québec et dire dans un projet de loi ce que ce projet de loi nous dit, M. le Président: «Toute partie autochtone intéressée peut également être signataire de l'entente.» Si vous êtes un autochtone, vous décodez quoi? Pas toute partie autochtone intéressée doit être signataire de l'entente, ça, c'est autre chose. Si les autochtones signent, ils signeront, puis, s'ils ne signent pas, bien, ça va faire pareil, on va le faire pareil.

M. le Président, j'ai des petites nouvelles pour vos amis les péquistes, ce n'est plus de même que ça marche en matière de relations avec les autochtones. Ce n'est pas la manière péquiste, la manière forte, la manière oppressive qui est appréciée par ces populations qui étaient sur le territoire avant même, M. le Président, que vos ancêtres ou mes ancêtres n'y arrivent. Le ministre de l'Environnement, lui, a une approche qui est devenue... Tantôt on a parlé de l'approche Benoit, on pourrait parler de l'approche Bégin. Ainsi, sont réputées satisfaire aux exigences de la Loi de la qualité de l'environnement et de ses règlements l'étude d'impact environnemental... Ça, ça veut dire: Qu'ils fassent n'importe quoi, ça va être légal.

On connaît le ministre, la côte des Éboulements, Hertel–des Cantons, tous les groupes environnementalistes vous diront, au Québec, qu'ils n'ont jamais été en présence de quelqu'un qui a baissé les bras aussi rapidement, aussi facilement devant les développeurs, devant les collègues du Conseil des ministres qui ont d'autres vocations. L'abdication, c'est sa règle. La non-application de la Loi sur la qualité de l'environnement, c'est sa règle. Les audiences publiques, ça le dérange. M. le Président, ça serait peut-être un bon ministre d'autre chose, on n'a pas encore trouvé quoi. Ça fait quelques ministères qu'il fait. Peut-être qu'un jour il atterrira au bon endroit, mais ce n'est pas encore le cas.

Puis là il nous présente ça en toute fin de session, vendredi soir. M. le Président, vous voyez l'heure? 23 h 15. On dit aux parlementaires: Il faut absolument que vous discutiez de ça, c'est urgent, il faut que le projet de loi soit adopté. Là, on va au dernier article du projet de loi, puis qu'est-ce qu'on voit: «La présente loi entrera en vigueur à la date fixée par le gouvernement.» Les gens qui ont de l'expérience de l'autre côté, là, ils vont se poser la question. Habituellement, ce qu'on lit c'est que le projet de loi va être en vigueur dès sa sanction. On l'adopte, le lieutenant-gouverneur signe, il est en vigueur.

Ça veut dire quoi, ça, quand on dit «en vigueur à la date fixée par le gouvernement»? Vous autres, les parlementaires, là, vous veillez tard, vendredi soir, puis nous autres, le gouvernement, mais que vous l'ayez adopté puis qu'il soit sanctionné, on pensera à ça. On réfléchira à ça après avoir utilisé l'Assemblée nationale, après vous avoir utilisés, les parlementaires de l'autre côté, ceux et celles qui ont pris la parole ou qui souhaitent la prendre sur ce projet de loi. Le gouvernement, bien, au Conseil des ministres, ils vont dire: Bien, peut-être qu'un mercredi, si ça nous tente, on va mettre ça en vigueur.

M. le Président, moi, j'ai de la misère à comprendre que des gens qui sont supposés être fiers – parce que, quand tu es député, tu as un minimum de fierté – se présentent devant leurs électeurs, acceptent de jouer dans une telle comédie, d'autant plus que cette comédie-là risque de coûter cher aux Québécois et Québécoises en termes de développement économique durable, dans le respect de l'environnement, en termes de création d'emplois puis en termes de retombées économiques. Ces gens-là sont en train de retarder le projet de Churchill. Leur façon d'agir, leur non-respect pour les communautés autochtones, leur non-respect pour l'environnement vont faire en sorte que ce projet de loi là va nuire à la réalisation du projet. Je m'explique. Vous allez vous en souvenir.

Quand on a voulu lancer Grande-Baleine, vous vous souvenez à l'époque, quand M. Bourassa est revenu au pouvoir, les autochtones n'étaient pas d'accord. Ils ont orchestré des campagnes en Europe et aux États-Unis, des campagnes où ils ont – à juste titre ou à mauvais titre, moi, je ne suis pas là pour juger – fait en sorte que la perception des Européens et des Américains était que le gouvernement du Québec n'avait pas de respect pour ses communautés autochtones. C'était ça, le résultat net puis le résultat final. Ça nous a coûté, pour tenter de réparer cette image, des centaines de milliers de dollars, pour ne pas parler de millions de dollars.

Du côté américain, même phénomène. Vous vous souvenez du leader de la communauté crie, Matthew Coon Come, qui s'est présenté aux États-Unis, un peu partout, dans les capitales puis qui a véhiculé son message avec succès? Il a fallu y aller pour tenter de réparer l'image du Québec à l'extérieur. Mais, parce qu'ils n'ont pas compris qu'un projet hydroélectrique d'envergure, ça ne se fait pas sans la complicité, sans la participation des autochtones, ça ne se fait pas sans le respect des règles environnementales, des règles d'évaluation environnementale, ces gens-là sont en train de bousiller le projet Churchill.

Ce projet de loi là est directement dans la continuité de ce qui a été fait le printemps passé. Vous vous souvenez? Le premier ministre pensait déclencher les élections au printemps. Il avait besoin de ce qu'on appelle un petit peu de bon vidéo, là. Il s'est présenté à Churchill sans avertir les communautés autochtones. Il a donné un contrat qui a dépassé le million de dollars à un de ses amis qui travaille pour la firme National, puis ça a été un fiasco. Ça, ça a été le premier pas dans le dossier Churchill, un cas de patronage politique, un cas de fiasco. Là, on est en train de franchir le deuxième pas, M. le Président, où on se dit: On n'en a pas besoin, on peut mettre de côté les autochtones puis on peut mettre de côté des évaluations environnementales correctes et reconnues sur le plan international.

Moi, je le prédis tout de suite: Il va vous arriver ce qui est arrivé à un moment donné dans Grande-Baleine. Quand votre processus n'est pas crédible sur le plan du respect des communautés autochtones, quand votre processus n'est pas crédible sur le plan environnemental, vous n'êtes pas capables d'obtenir le financement pour réaliser le projet. Et, quand vous n'êtes pas capables d'obtenir le financement pour réaliser le projet, vous privez le Québec de retombées économiques, vous privez le Québec de centaines et de milliers d'emplois, vous privez le Québec et ses générations futures d'une source d'énergie qui est propre, et les Québécois et les Québécoises se rappelleront que vous étiez pour le nucléaire et que vous avez gaffé dans l'hydroélectricité. Merci, M. le Président.

(23 h 20)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le leader de l'opposition officielle. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Le rapport de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 60... Oh! Je m'excuse, M. le ministre de l'Environnement, je vous cède la parole.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Alors, il s'est dit beaucoup de choses de la part de l'opposition relativement à ce projet de loi, et je pense que certains faits doivent être rectifiés, puisqu'ils pourraient avoir des conséquences graves et négatives par rapport à ce qui va se produire dans l'avenir dans nos relations avec les communautés autochtones et innu.

M. le Président, deux promoteurs qui s'appellent Hydro-Québec et Hydro Labrador ont comme projet de compléter le développement de la rivière Churchill, qui se situe dans le territoire du Labrador. Ce projet comporte à la fois la construction additionnelle de capacité de développer de l'hydroélectricité, et en même temps, pour le faire, de construire un barrage qui contiendrait entre 700 et 1 000 km² et qui aurait pour effet également de dévier initialement deux rivières, la rivière Saint-Jean et la rivière Romaine, et, dans un projet plus récent, une seule des rivières, la rivière Romaine. Par ailleurs, ceci entraînera la construction de lignes de transmission sur le territoire québécois.

Quand deux promoteurs ont un projet comme celui-là, ça pose la question de savoir de quelle manière nous allons faire les études d'évaluation environnementale pour nous assurer que justement l'environnement sera bien protégé. En situation normale, lors d'un projet qui se situe entièrement au Québec, il est relativement facile de le faire, puisque nous avons déjà tous les instruments, qui sont la Loi sur la qualité de l'environnement qui prévoit, dans le cas de ces projets, que le BAPE pourra et devra faire les audiences publiques, et donc qu'on pourra faire une évaluation ensemble, tous ceux et celles qui veulent intervenir dans ce projet, au-delà du promoteur.

Cependant, quand il arrive un projet comme celui-là, la Loi sur la qualité de l'environnement ne prévoit pas de mécanisme pour dire de quelle façon nous allons procéder pour faire une évaluation environnementale. Par exemple, il y a trois intervenants, minimum... quatre intervenants, en fait, dans le projet: le Québec, Terre-Neuve, le gouvernement fédéral et les communautés innu. De quelle façon allons-nous procéder? En faisant quatre évaluations environnementales? En faisant trois évaluations environnementales? En faisant deux évaluations environnementales? Ou en faisant une procédure unifiée, après s'être parlé pour s'assurer que tous les intérêts sont tenus en compte et qu'on s'entende bien sur les façons de faire?

M. le Président, nous convenons qu'il est souhaitable que nous fassions une seule évaluation environnementale et que nous ayons un processus unifié pour le faire. Alors, nous allons donc avoir à discuter avec le gouvernement fédéral, avec le gouvernement de Terre-Neuve, avec des communautés autochtones et, bien sûr, le gouvernement du Québec. Pour ce faire, le gouvernement du Québec n'a pas l'autorité légale pour y arriver. À date, les lois du Québec ne le permettent pas. Il faut donc que nous ayons une loi qui dise: Oui, le ministre de l'Environnement, au nom du gouvernement du Québec, procédera à conclure une entente avec le gouvernement fédéral, avec le gouvernement de Terre-Neuve, avec les communautés autochtones, pour dire de quelle manière nous allons faire l'évaluation environnementale. Et ça, ça prend une loi, c'est exactement la loi qui est devant nous aujourd'hui.

Il ne s'agit pas de savoir ce que le gouvernement fédéral pense, il ne s'agit pas de savoir ce que le gouvernement de Terre-Neuve pense, ni les communautés autochtones, il s'agit de savoir comment nous allons être légalement autorisés à parler avec ces personnes-là, parce que, actuellement, nous ne l'avons pas, ce pouvoir. Alors, il faut donc adopter une loi qui ne dit pas: Nous devrons conclure une entente avec le gouvernement fédéral, avec le gouvernement de Terre-Neuve ou avec les communautés autochtones, mais: Nous pourrons conclure une entente. Et, quand on dit, en se scandalisant, que dans la loi on n'a pas dit: On devra conclure une entente avec les autochtones, on ne dit pas non plus, à l'égard du gouvernement fédéral ou de Terre-Neuve, qu'on devra conclure une entente. La façon légale de dire les choses, c'est que nous serons capables de le faire, nous invitons les autres à le faire, et nous pourrons donc conclure une entente. Nous tendons la main autant au gouvernement fédéral qu'au gouvernement de Terre-Neuve, qu'aux communautés autochtones. Et c'est ce moyen que nous nous sommes donné.

Alors, les communautés autochtones concernées, intéressées, c'est lesquelles? Bien, c'est celles qui sont là et qui voudront bien le faire.

On s'est scandalisé, antérieurement, en disant: Oui, mais les «communautés autochtones», ce n'est pas une façon de qualifier ces gens-là. Je répète que c'est l'expression qui a été utilisée dans la Convention de la Baie James. Et cette Convention n'a pas posé de problème. Donc, nous avons réutilisé cette expression-là. Il ne faudrait pas nous en faire grief, puisque c'est l'opposition qui, à l'époque, avait fait cette entente. Si c'était bon dans le temps et que ça n'a pas posé de problème, pourquoi se scandaliser que nous ayons utilisé cette même expression? Je pense, M. le Président, que nous avons été sages de le faire, et nous maintenons ce que nous devons faire.

Alors donc, nous devons nous donner, le Québec, une loi qui va nous permettre de faire ça. On s'est scandalisé que nous n'ayons pas convoqué les autochtones pour être entendus sur ce projet de loi. M. le Président, c'est faire fi de choses qu'on connaît très bien. Comment procède-t-on, quand on fait un projet de loi? Nous le déposons, après un avis au feuilleton, nous le déposons en cette Chambre. Et, à ce que je sache, les débats qui ont cours ici sont des débats publics. Maintenant, ce sont des débats non seulement qui sont publics, mais qui sont sur Internet, dont tout le monde peut prendre connaissance n'importe où au Québec, que ce soit le gouvernement de Terre-Neuve, le gouvernement fédéral ou les communautés autochtones et y compris l'opposition bien sûr, s'ils n'écoutent pas lorsqu'on le fait, alors ils peuvent toujours en prendre connaissance.

Le projet de loi a été déposé le 12 mai, M. le Président, il a été étudié le 10 juin. Tout à coup, on nous dit, à 20 heures moins une minute: Mon collègue le député de Jacques-Cartier, dit le député d'Orford, est en train de souper avec des communautés autochtones, ils voudraient être entendus. Je lui réponds: Certainement, je suis disponible, nous allons le faire. À 20 heures et trois, comme le député de Jacques-Cartier n'est pas arrivé, je dis au président de suspendre le débat jusqu'à temps que le député de Jacques-Cartier soit là, puisque son collègue vient de nous dire qu'ils veulent être entendus – les communautés autochtones – et qu'ils sont avec lui.

Ils arrivent, et je dis: Bon, bien, qu'est-ce qu'on fait? Bien, il dit: Ils ne sont pas là, ils sont partis. Bon, bien, je dis: C'est de valeur, on aurait été prêt à les entendre, et tout ça. Mais là, surprise, quelques minutes après, ils font une motion pour entendre les communautés autochtones, qui étaient là quelques minutes auparavant, qui discutaient avec eux. Et ils disent: Nous avons envoyé un fax pour qu'ils soient à Québec. Ils viennent sur l'envoi d'un fax à Québec, ils rencontrent l'opposition, ils disent: On voudrait être entendus, puis, 10 minutes avant, ils s'en vont. M. le Président, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans cette histoire.

Alors, nous étions prêts à les entendre le soir. Trois semaines auparavant ils avaient été informés. Et l'opposition qui se scandalise qu'on ne les ait pas invités. Si c'était si important que ça, s'il fallait absolument qu'on le fasse, pourquoi n'ont-ils pas envoyé leur fax trois semaines avant, deux semaines avant, une semaine avant? Pourquoi ont-ils attendu la dernière journée, à la dernière minute, pour souper avec ces gens-là puis dire: Ils voulaient être entendus puis ils ne le savaient pas? Espèces de...

Voyons donc, M. le Président! Ce n'est pas sérieux. Nous étions prêts à les entendre, même si, techniquement, sur le plan de la procédure, comme je vous disais, M. le Président, il s'agissait de savoir si le Québec se donnait les moyens de faire une chose. Il se les est donnés, il va se les donner ce soir. Alors, M. le Président, je pense qu'il serait important de le rappeler.

Enfin, dernier détail, mais, vu qu'ils en ont parlé beaucoup, je vais le dire, le gouvernement du Québec n'a pas signé l'accord d'harmonisation des lois en matière environnementale parce que le gouvernement canadien a refusé de modifier, comme je l'avais demandé et comme l'avait demandé mon collègue qui est en face de moi, qui semble avoir oublié qu'il a déjà été ministre de l'Environnement et qu'il a déjà dit qu'il ne voulait pas signer l'accord d'harmonisation tant et aussi longtemps qu'on ne modifierait pas la Loi sur l'environnement du Canada. Alors, j'ai refusé de signer.

Et, même si j'avais signé, M. le Président, je voudrais rappeler à mon collègue et à l'opposition que la juge Barbara Reed, le 28 mai 1999, a dit, concernant cet accord d'harmonisation, qu'il n'avait aucun effet légal, qu'il était vide de toute substance. La juge Reed dit: Nous n'arrivons pas à comprendre quel impact ceci peut avoir sur les lois canadiennes. Ce n'est pas moi, ce n'est pas un péquiste, ce n'est pas un souverainiste qui dit ça, là, c'est une juge de la cour fédérale consultée par des groupes environnementaux qui disaient au gouvernement canadien: Vous avez renoncé à vos droits. La juge n'a pas pu dire qu'ils renonçaient à leurs droits parce qu'elle a dit: Ça n'a aucun effet légal, on ne comprend pas ce que ça veut dire.

(23 h 30)

M. le Président, même si nous avions signé l'accord d'harmonisation, nous serions obligés ce soir d'adopter la loi que nous avons là pour être capables de nous entendre avec Terre-Neuve, avec le gouvernement fédéral, avec les autochtones. Je leur tends à nouveau la main. Nous sommes prêts à discuter, à nous entendre pour savoir comment nous aurons une seule façon de procéder pour faire l'évaluation environnementale, les quatre parties ensemble. Et je suis certain que, ce faisant, nous aurons l'harmonie et nous aurons un projet qui va rapporter des dividendes en termes économiques, en termes d'emplois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de l'Environnement. Alors, M. le leader, sur une question à l'article 213, possiblement?

Une voix: L'article 212.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Article 212? Je m'excuse, 212.

M. Paradis: M. le Président, 212. Simplement pour rectifier un fait. Le ministre a dit que nous n'avions pas signé ou que je n'avais pas signé d'entente d'harmonisation avec le fédéral, ce qui est faux. J'ai eu beaucoup de difficulté. Ça n'a pas été facile. Le fédéral voulait, sur le plan de ses juridictions, empiéter sur les juridictions du gouvernement du Québec. J'ai toujours refusé, tant et aussi longtemps... À ce moment-là, le ministre fédéral de l'Environnement était l'actuel premier ministre du Québec, Lucien Bouchard, mais j'ai réussi à signer avec son successeur qui est l'actuel chef de l'opposition. L'entente de Grande-Baleine a effectivement été signée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je ne susciterai pas un débat. Ça va. Ça va. Ça va.

Alors, est-ce qu'il y a d'autres intervenants?


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président. Je vous prierais de prendre en considération l'article 32 du feuilleton de ce soir.


Projet de loi n° 21


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 32, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 21, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

Y a-t-il des interventions? Mme la députée de Beauce-Sud et porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu. Mme la députée, la parole est à vous.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Alors, nous en sommes rendus à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 21, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

Ce projet de loi, qui contient 81 articles de nature très technique... Vous savez, M. le Président, on a l'habitude, au ministère du Revenu, de déposer des projets de loi de nature très technique; alors, il n'y a pas beaucoup de philosophie à faire avec ces projets de loi là. Alors, ça va modifier aussi sept lois. Les changements demandés n'ont pas d'incidence sur le fardeau fiscal des contribuables, et je tiens à vous le signaler.

Alors, ce projet de loi modifie en premier lieu la Loi concernant l'impôt sur le tabac et la Loi concernant la taxe sur les carburants, notamment afin de supprimer l'obligation de détenir un certificat d'enregistrement et certains permis prévus par ces lois.

Il modifie, en deuxième lieu, la Loi sur les impôts et la Loi sur le Régime de rentes du Québec pour prévoir que, dorénavant, les retenues à la source devront être établies conformément aux tables dressées par le ministre du Revenu et pour prévoir que ces tables entrent en vigueur à la date de leur publication à la Gazette officielle du Québec ou à toute autre date ultérieure qui y est fixée.

Il modifie, en troisième lieu, la Loi sur les licences afin de prévoir les modalités et le délai de versement au ministre du Revenu des droits de licence exigibles lorsque ceux-ci n'ont pas été payés par le détaillant au moment de l'achat de boissons alcooliques.

Il modifie, en quatrième lieu, la Loi sur le ministère du Revenu afin d'intégrer des dispositions relatives à la perception des créances fiscales, au Fonds de perception et à la majoration de l'amende relativement à certaines infractions, à la communication de certains renseignements et au moment où un paiement effectué au moyen d'une carte de crédit est présumé avoir été fait.

Il modifie, enfin, la Loi sur la taxe de vente du Québec afin de rendre obligatoire l'inscription des petits fournisseurs de carburant et pour y apporter des modifications de concordance.

Alors, en clair, M. le Président – parce que ce n'est pas toujours évident de lire des notes explicatives et de comprendre la portée réelle d'un projet de loi – et pour utiliser un langage que je pourrais dire plus clair, un langage plus accessible, disons que le premier changement important qu'on retrouve dans ce projet de loi, c'est l'élimination de l'obligation de détenir plus de 17 000 certificats et permis de vente de tabac et de carburant.

En vertu du principe que je défends toujours... Vous le savez, M. le Président, depuis que je suis ici, à l'Assemblée nationale, j'ai toujours défendu le principe de l'allégement réglementaire. Et, à cet effet, il y a un groupe de travail qui a été formé par le ministère du Revenu et qui était constitué justement des représentants des deux industries concernées, soit l'industrie du tabac et l'industrie du carburant, et ce groupe de travail avait recommandé au ministre l'abolition de ces permis. Je suis donc ravie de voir que le ministère a donné suite, une suite favorable, si vous voulez, à cette recommandation du groupe de travail. Par ailleurs, le projet de loi remplace cette obligation de détenir un certificat ou un permis de vente de tabac ou de carburant par une obligation, cette fois-là, d'être inscrit à la taxe de vente du Québec, même pour tout vendeur de carburant qui fait des ventes inférieures à 30 000 $ par année.

Le deuxième changement important que l'on retrouve dans ce projet de loi, c'est que celui-ci vient resserrer les règles concernant la perception des créances, en majorant l'amende, afin de désinciter les contribuables à ne pas payer, par exemple, leur dû au fisc québécois. Et là les pénalités ne sont pas minces. Ça va peut-être vous surprendre – si je vous l'apprends, tant mieux – dorénavant, dans certaines circonstances, le maximum prévu des amendes passera de 25 000 $ à 1 000 000 $. C'est toute une majoration, M. le Président, et cette disposition était rendue nécessaire, malheureusement, parce qu'on s'est rendu compte que le montant des fraudes fiscales peut atteindre aujourd'hui des sommes faramineuses. On a parlé, au cours de l'étude détaillée du projet de loi en question, d'un cas, sans vous le nommer, M. le Président, où la fraude avait atteint un montant de 800 000 $. Alors, c'est de l'argent, ça. Vous conviendrez avec moi qu'une simple amende de 25 000 $ dans ces cas-là, bien, ce n'est pas assez et qu'il fallait prendre les mesures dissuasives nécessaires afin d'éviter que les gens fassent une fraude, parce que c'est payant de faire des fraudes.

Le troisième changement d'importance à ce projet de loi concerne la remise d'une somme due au ministère du Revenu. La remise de ces sommes-là, que vous devez au fisc, au ministère du Revenu, pourra dorénavant se faire au moyen d'une carte de crédit. Peut-être que ça pourrait être bien bon pour vos milles Aéroplan, mais il y a d'autres inconvénients à ce genre d'utilisation là. Du côté de l'opposition officielle, nous y avons vu là un danger que le fisc tente d'esquiver une entente de remboursement avec les contribuables qui lui doivent de l'argent, si ces derniers possèdent une carte de crédit. En fait, ce que nous craignons, M. le Président, c'est que le fisc oblige dorénavant les contribuables qui doivent de l'argent au ministère du Revenu à utiliser leur carte de crédit pour rembourser le ministère. Alors, compte tenu que le taux d'endettement des Québécoises et des Québécois est déjà très élevé – vous en conviendrez avec moi – compte tenu aussi que le taux d'intérêt des principales institutions financières émettrices de cartes de crédit se situe bien au-delà de 18 %, nous avons cru qu'il serait préférable d'user de prudence sur cet article, et là je fais référence à l'article 33 du projet de loi.

Le quatrième changement, qui est d'importance encore, concerne un autre point qui a attiré l'attention de l'opposition officielle, soit l'article 41 de la loi. Par cet article, on a modifié encore une fois – encore une fois, M. le Président – l'article 69.1 de la Loi sur le ministère du Revenu du Québec, vous savez, ce fameux article dont on parle tant depuis des semaines ici, ce fameux article qui a amené la démission de l'ex-ministre du Revenu et députée de Rosemont, je crois. C'est ce même article qui a amené le dossier du BSQ, ce qu'on a vu, par lequel le ministre a été obligé de présenter un projet de loi pour légaliser ce qu'il avait fait de pas légal par le passé. Alors, on parle encore, dans ce projet de loi là, du fameux article 69.1 de la Loi sur le ministère du Revenu. Or, cet article-là, vous le savez, traite de la confidentialité du secret fiscal et de l'obligation qu'a le ministre et ses employés de ne pas faire usage des renseignements fiscaux à d'autres fins pour celles pour lesquelles elles ont été prévues par la loi.

(23 h 40)

On vient d'ajouter, donc, deux autres organismes qui ont le droit de prendre connaissance des renseignements obtenus dans l'application d'une loi fiscale. Je veux parler ici de la Régie des rentes du Québec, notamment dans la mesure où ces renseignements sont nécessaires pour vérifier l'admissibilité d'une personne à une allocation familiale, et aussi la Commission des transports du Québec, mais cette fois-là uniquement dans la mesure où ces renseignements sont nécessaires à l'application du paragraphe 5° de l'article 9 de la Loi concernant les propriétaires et les exploitants de véhicules lourds.

On vient donc encore une fois, M. le Président, faire une nouvelle brèche dans l'article 69.1 de la loi en y ajoutant ces deux organismes, portant ainsi la liste des exceptions à 15. Et que nous disent justement cet article 69 et l'article 69.1? Quels sont ces organismes à qui le ministre du Revenu du Québec peut transmettre des renseignements fiscaux? Alors, je suis certaine que ça va vous intéresser.

D'abord, l'article 69 de la loi nous dit ceci: «Sont confidentiels, tous renseignements obtenus dans l'application d'une loi fiscale. Il est interdit à tout fonctionnaire de faire usage d'un tel renseignement à une fin non prévue par la loi, de communiquer ou de permettre que soit communiqué à une personne qui n'y a pas légalement droit un tel renseignement ou de permettre à une telle personne de prendre connaissance d'un document contenant un tel renseignement ou d'y avoir accès.»

Alors, ça, c'est le fondement, si vous voulez, M. le Président, l'article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu, qui fait en sorte de protéger le secret fiscal, de protéger les données que vous indiquez dans votre déclaration de revenus à chaque année et qui comporte votre nom, votre adresse, votre numéro de téléphone, votre employeur, qui comporte vos revenus, qui comporte les montants que vous avez versés en pension alimentaire – ça été le cas – les montants que vous avez versés en contribution à votre REER. Enfin, il y a une multitudes de renseignements là-dedans dont je suis certaine que vous ne voulez pas qu'ils se promènent à la grandeur du Québec.

Or, cet article 69 de la loi a justement ce but-là, de protéger le secret fiscal. Mais d'un autre côté le gouvernement a adopté l'article 69.1 qui, lui, permet une certaine communication de renseignements à des organismes. Alors, on y lit ceci: «Aux fins de l'article 69, une personne ou un organisme mentionné dans le deuxième alinéa a, dans la mesure prévue, droit de prendre connaissance des renseignements obtenus dans l'application d'une loi fiscale et tout fonctionnaire peut les lui communiquer ou permettre qu'ils lui soient communiqués.» Alors, on dit bien le contraire de ce que je viens de vous lire dans l'article 69.

Alors, qui sont ces organismes qui ont le droit de transmettre des renseignements au ministère du Revenu ou par lesquels le ministère du Revenu peut transmettre des renseignements à ces organismes? Eh bien, voici, et ça va peut-être vous paraître un peu long, M. le Président, mais je pense que ça vaut la peine qu'on fasse cet exercice-là pour comprendre bien le geste qu'on vient de porter aujourd'hui, c'est-à-dire qu'on vient de permettre à deux autres organismes gouvernementaux d'obtenir cet échange de renseignements là.

Alors, ces organismes-là sont:

«a) le Contrôleur des finances, à l'égard de l'exercice des pouvoirs visés aux articles 13, 13.1, 14 et 14.1 de la Loi sur l'administration financière;

«b) le Conseil du trésor, à l'égard d'une demande visée au paragraphe a qui doit lui être soumise pour approbation;

«c) le Vérificateur général, à l'égard des vérifications et enquêtes nécessaires à l'exercice de ses fonctions;

«d) le ministre des Finances – alors c'est plus plausible, parce qu'on parle de revenus, on parle du ministre des Finances – à l'égard des renseignements qui sont nécessaires à l'évaluation et à la formulation de la politique fiscale du gouvernement.» Alors, si on veut que la politique fiscale soit sur des bons renseignements, on transmet des informations au ministre des Finances.

Ensuite, tout fonctionnaire, employé ou préposé d'un organisme public au sens de l'article 31.1.4 ainsi que tout employé ou préposé d'un agent de cet organisme, à l'égard d'un renseignement qui leur est communiqué dans l'exercice de leurs fonctions en application du deuxième alinéa de l'article 30.1 et des articles 31 et 31.1». Très technique, M. le Président, je vous l'ai dit tantôt.

«Le ministre des Ressources naturelles – un autre à qui on peut échanger des renseignements – à l'égard des renseignements concernant les exploitants au sens de la Loi concernant les droits sur les mines.»

Ensuite, en g, «la Commission des normes du travail, à l'égard – cette fois – des nom et adresse d'un employeur visé par la Loi sur les normes du travail ainsi que, lorsqu'un tel employeur est une société, son statut juridique et les nom et adresse de ses administrateurs».

En h, «la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, à l'égard des nom et adresse d'un employeur visé par la Loi favorisant le développement de formation de la main-d'oeuvre, de sa masse salariale, de ses dépenses de formation admissibles au sens des règlements de la Société pris en application de cette loi, de sa cotisation au Fonds national de formation de la main-d'oeuvre, du code d'activité économique qui lui a été attribué par le ministre, du nombre de déclarations relatives à ses employés transmises au ministre et du matricule qui lui a été attribué en vertu de la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés, des personnes morales». Alors, ça fait beaucoup de renseignements à transmettre, M. le Président.

En i, on y voit «le Protecteur du citoyen, à l'égard des renseignements concernant un contribuable ou un groupe de contribuables pour le compte de qui il intervient». Et on sait, M. le Président, qu'à chaque année le Protecteur du citoyen, justement, dépose à cette Assemblée un rapport dans lequel il fait état de nombreuses plaintes qu'il a reçues de la part des contribuables. On l'a vu cette semaine, le rapport du Protecteur a été déposé, et, entre autres, le ministre du Revenu est un des ministères qui est le plus cité par le Protecteur du citoyen comme étant un ministère qui ne respecte pas le fondement de sa loi.

En j. En j, on y voit «le ministre de la Sécurité du revenu, mais uniquement dans la mesure où ce renseignement est nécessaire pour vérifier l'admissibilité d'une personne ou de sa famille à un programme prévu par la Loi sur la sécurité du revenu, pour déterminer le montant des prestations ou des versements anticipés, pour identifier une situation non déclarée par un prestataire conformément au paragraphe 1° de l'article 65 de cette loi ainsi que pour vérifier le lieu de résidence et la solvabilité d'une personne qui doit rembourser une somme en vertu de la section V du chapitre II de cette loi».

Enfin, «le Bureau de la statistique du Québec, mais – et là j'insiste là-dessus – uniquement dans la mesure où ces renseignements sont nécessaires à l'application de la Loi sur le Bureau de la statistique du Québec». C'est ce qui a fait l'enjeu de beaucoup de débats ici, à l'Assemblée, dernièrement, M. le Président, vous vous en souviendrez sûrement.

En l, on y voit «le ministre des Affaires municipales, à l'égard des noms et adresses de la personne qui exploite ou a exploité un réseau de distribution de gaz, de télécommunications ou d'énergie électrique et qui est assujettie à l'article 221 de la Loi sur la fiscalité municipale, ainsi que le montant de la taxe perçue, des arrérages, des remboursements, des intérêts exigibles ou crédités».

Une voix: ...

Mme Leblanc: Je n'ai pas terminé, M. le Président, il en reste encore trois.

«m) la Régie de l'assurance-maladie du Québec, mais uniquement dans la mesure où ces renseignements sont nécessaires pour vérifier si une personne réside bien au Québec ou est réputée y résider au sens de la Loi sur l'assurance-maladie.»

Enfin, en n, la Régie des rentes du Québec, mais uniquement dans la mesure où ces renseignements se rapportent aux gains et cotisations des cotisants, lesquels sont nécessaires, on le sait, pour calculer le montant de toute prestation payable et le montant aussi de tout ajustement financier, ou encore dans la mesure où ces renseignements sont nécessaires à la tenue du registre des cotisants au sens de la Loi sur le régime des rentes du Québec. Et là, à ce n là qui traite de la Régie des rentes du Québec, on a ajouté, on a fait un ajout permettant, par exemple, de transmettre des informations sur la base de ceux qui reçoivent des allocations familiales.

(23 h 50)

En o, le ministre de l'Éducation aussi, mais uniquement, cette fois-là, dans la mesure où ce renseignement est nécessaire pour vérifier l'admissibilité d'une personne à l'aide financière prévue par la Loi sur l'aide financière aux étudiants. Et ça a pour but d'établir le montant de l'aide financière pour identifier, par exemple, une situation non déclarée par un étudiant, conformément au paragraphe 1° de l'article 39 de cette loi, ou pour vérifier l'adresse et les revenus de la personne qui doit rembourser un montant en vertu de cette loi et, le cas échéant, le nom de son employeur.

Alors, là, on sait que le projet de loi en question vient de rajouter un p, un p qui concerne la Commission des transports du Québec, qui va faire en sorte qu'on va pouvoir transmettre des renseignements là aussi. Alors, depuis 1997, M. le Président, c'est la sixième fois – ça va sûrement intéresser mon collègue de Richelieu – que l'on amende l'article 69.1 de la Loi sur le ministère du Revenu, tout ça pour satisfaire, si vous voulez, l'appétit du gouvernement de quêter des renseignements sur la vie privée des citoyens.

Je tiens à vous signaler, M. le Président, que l'opposition officielle a exigé, dans ces deux derniers cas, un avis de la Commission d'accès à l'information sur ces deux nouvelles exceptions. Dans le cas de la Commission des transports du Québec – et je vois que ça intéresse le leader du gouvernement – la Commission d'accès à l'information a été favorable, c'est-à-dire que, sans être favorable, elle a plutôt dit ne pas s'objecter à la modification proposée à la loi. Alors, c'est différent; entre être favorable et ne pas s'objecter, il y a quand même une nuance.

Mais, en ce qui concerne la Régie des rentes du Québec, là, M. le Président, ça a été beaucoup plus compliqué. La Commission d'accès à l'information, dans un premier temps, soit le 1er mars, s'opposait à la première version de la loi. On y dit – et là je fais référence à la fameuse lettre du 1er mars envoyée par Commission d'accès à l'information à Me Marie-Claude Lévesque, qui est secrétaire directrice des Affaires juridiques à la Régie des rentes du Québec – alors ce qu'on y lit sur ce premier avis, c'est que «la communication de renseignements visés par le paragraphe n du deuxième alinéa de l'article 69.1 n'a aucun rapport avec la lutte contre le travail au noir ou l'évasion fiscale. Dans ces circonstances, la Commission peut difficilement accepter que la disposition dérogatoire prévue à l'article 71.4 puisse viser toutes les communications énumérées à l'article 69.1, d'autant plus que la liste des communications rendues possibles par cette disposition s'allonge sans cesse».

Quand le commissaire d'accès à l'information nous dit ceci, M. le Président, il nous met en garde, il nous met en garde que c'est quand même la sixième fois qu'on amende l'article 69 depuis 1997, qu'on en est rendus à la quinzième exception pour laquelle le ministère peut transmettre des renseignements à des organismes publics.

Alors, comme la Commission s'opposait à ce premier article qui était dans la loi, le ministère a modifié son article et proposé un deuxième à la Commission d'accès l'information. Il y a eu, si vous voulez, un deuxième avis de la Commission d'accès, cette fois qui était daté du 12 mars. Dans ce nouvel avis là, la Commission d'accès à l'information disait qu'il fallait un projet d'entente avec la Régie et que, ce faisant, cela finirait par amenuiser l'impact de cette disposition dérogatoire.

Alors, je vous lis ce que la Commissions dit, encore une fois le 12 mars dernier, à Marie-Claude Lévesque, de la Régie des rentes du Québec. On y lit que, tout en réitérant les craintes qu'elle exprimait dans son premier avis... Donc, la Commission maintient qu'elle n'est pas encore tout à fait favorable. Alors, elle dit, au sujet de la disposition dérogatoire inscrite à l'article 71.4 de la Loi sur le ministère du Revenu: «La Commission d'accès à l'information constate que la procédure que vous avez établie avec le ministère du Revenu amenuisera l'impact de cette disposition dérogatoire et la Commission analysera donc avec célérité toute entente que vous nous soumettriez en vertu de cette procédure.» Alors, vous voyez, là, M. le Président, que ce n'est pas encore tout à fait clair que la Commission d'accès à l'information est favorable à ce nouvel article là.

Alors, l'opposition officielle a manifesté, si vous voulez, son désir de voter sur division sur cet article-là. Voyant cela, le ministre a fait amende honorable et a dit: On va suspendre l'étude de cet article-là et on va aller modifier l'article jusqu'à temps qu'on obtienne cet avis favorable de la Commission d'accès à l'information.

Alors, le ministre est donc revenu plus tard avec un nouvel amendement et un nouvel article, si vous voulez, afin d'exclure le paragraphe m qui concerne la Régie des rentes du Québec – on l'a dit tantôt – de l'article 69.1 de la loi. Alors, on exclut ça de l'application de la clause dérogatoire prévue à l'article 71.4 de la loi.

Nous avons donc soumis ce nouvel article à la Commission d'accès à l'information et, finalement, la Commission a dit, dans une nouvelle lettre, qu'elle ne s'opposait plus à l'adoption de la modification législative proposée à l'article 69m. Et, le 7 juin dernier, on lui avait demandé, après avoir étudié le projet de loi en commission, de se prononcer sur ce nouvel article-là qu'on venait d'ajouter, et on a fini par obtenir, cette fois-là, un avis favorable, M. le Président. Et je vous lis intégralement ce que dit la Commission, et là, cette fois-là, il s'adresse à Me André Brochu qui est le sous-ministre adjoint au ministère du Revenu. Alors, il dit: «La Commission a pris connaissance de la lettre que vous m'avez transmise le 4 juin dernier, ainsi que de la version refondue des dispositions adoptées par la commission parlementaire sur les finances publiques. Après étude, la Commission me prie de vous informer qu'elle est favorable aux amendements adoptés par cette commission parlementaire.»

Alors, voyez le cheminement, M. le Président: au départ, on a un article, l'article 41 de la loi, qui, dans un premier temps, ne reçoit pas l'accord de la Commission d'accès à l'information; puis, de nouveau, on reçoit un accueil, cette fois-là mitigé, par rapport à un nouvel article que le ministre a inclus dans sa loi, pour finalement, après plusieurs discussions, après un amendement qui avait été proposé au départ par l'opposition officielle, finir par recevoir un accueil favorable de la Commission d'accès à l'information. Comme quoi, M. le Président, le rôle de l'opposition officielle peut en être un très constructif, on en a la preuve ici aujourd'hui.

Alors, je pense, M. le Président, qu'il s'agit ici, quand même, d'un bon projet de loi. D'un bon projet de loi, mais en raison, je vous l'ai dit tantôt, de certaines réserves que je vous ai exprimées, nous voterons sur division dans ce projet de loi.

Et, en terminant, M. le Président, j'aimerais vous réitérer ma fierté, ce soir, de faire partie de ce groupe d'hommes et de femmes qui votent des lois, de faire partie de ce groupe d'hommes et de femmes de l'opposition officielle qui ont eu le droit, ce soir, de s'exprimer sur des projets de loi, alors qu'on a défendu, de l'autre côté, du côté ministériel, à ces mêmes députés de pouvoir se prononcer, de pouvoir s'exprimer. Alors, je suis fière de faire partie de l'opposition officielle, M. le Président, parce que je pense que c'est notre rôle, notre rôle premier, l'essence même des législateurs que nous sommes d'adopter des lois et de pouvoir s'exprimer au nom de notre population sur les projets de loi en question. Et alors, je vous le dis, M. le Président, je vous souhaite une bonne nuit. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Et je ne suis pas rendu chez moi. Vous savez, quand vous avez une limousine, ça va plus vite. Alors, il est minuit. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants qui veulent... Il n'y a pas d'ajournement de débat? Alors, le rapport de la commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 21, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal... Oui, M. le député de Brome-Missisquoi?

M. Paradis: M. le Président, non, non, à ce moment-ci, je souhaite vous indiquer qu'il y aura d'autres intervenants.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il y a d'autres intervenants, donc le projet de loi n'est pas adopté.

Compte tenu de l'heure – il est minuit – est-ce que vous avez une motion d'ajournement, M. le ministre?

M. Boisclair: M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au mardi 15 juin 1999, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, juste avant, pour être bien clair, il y a ajournement du débat sur le projet de loi n° 21 et il y a une proposition d'ajournement de l'Assemblée au 15 juin, à 10 heures. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, les débats de cette Assemblée sont ajournés à mardi prochain le 15 juin, à 10 heures. Et bonne soirée à tous.

(Fin de la séance à minuit)


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