(Dix heures deux minutes)
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Merci. Veuillez vous asseoir.
Affaires du jour
Affaires inscrites par les députés de l'opposition
Motion proposant que l'Assemblée exige du gouvernement qu'il diminue les taxes sur l'essence
Alors, nous débutons les affaires du jour. Et, comme vous le savez tous, le mercredi, ce sont les affaires inscrites par les députés de l'opposition. Alors, à l'article 32 de notre feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 du règlement, Mme la députée de Bonaventure présente la motion suivante:
«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement péquiste qu'il cesse de profiter des consommateurs du Québec en maintenant les taxes sur l'essence les plus élevées au Canada et en Amérique du Nord.»
Nous avons préalablement tenu une réunion avec les leaders parlementaires afin de répartir le temps de parole pour le déroulement du débat. Alors, le partage a été établi de la façon suivante: l'auteur de la motion disposera d'un droit de réplique de 10 minutes, cinq minutes sont allouées au député indépendant, 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement et 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes s'ajoutera à l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par le député indépendant pourra être redistribué entre les groupes parlementaires. De plus, je vous signale que les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.
Je suis maintenant prêt à entendre le premier intervenant. Mme la députée de Bonaventure.
Mme Nathalie Normandeau
Mme Normandeau: Merci, M. le Président. La motion qui est présentée ce matin est une motion qui touche l'ensemble des consommateurs de carburant au Québec. C'est une motion qui rejoint l'ensemble de la population au Québec. C'est une motion importante. Et, si l'opposition la présente, cette motion, ce matin, elle est également le reflet des préoccupations de l'ensemble des consommateurs de carburant au Québec. Alors donc, ce matin, M. le Président, cette motion, elle est aussi présentée par des millions de consommateurs au Québec et par toute la population du Québec.
La question des prix de l'essence, c'est une question qui a pris beaucoup de place dans l'actualité au cours des dernières semaines, au cours des derniers mois, et c'est une question qui risque encore d'occuper tout le champ de l'actualité au cours des prochaines semaines, des prochains mois. Plusieurs analystes s'entendent pour dire que les prix élevés de l'essence ne devraient pas connaître de diminution importante au cours des prochaines semaines, au cours des prochains mois. En fait, M. le Président, plusieurs s'entendent pour dire qu'on ne connaîtra une diminution qu'à l'été ou encore à l'automne de cette année.
Alors, la motion qui est présentée par le Parti libéral du Québec ce matin, par l'opposition officielle, se lit comme suit:
«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement péquiste qu'il cesse de profiter des consommateurs du Québec en maintenant les taxes sur l'essence les plus élevées au Canada et en Amérique du Nord.»
Alors, M. le Président, cette motion, donc, elle est fondée, elle est légitime, car les consommateurs d'essence sont effectivement les plus taxés au Canada et en Amérique du Nord. Et donc c'est une situation qui doit cesser parce que c'est tous les consommateurs qui font les frais de cette taxation qui est tout à fait inacceptable.
M. le Président, donc ce matin la motion qui est présentée par l'opposition est le voeu, est le reflet des inquiétudes qui ont été exprimées par plusieurs groupes au Québec, par des millions de consommateurs qui demandent une chose au gouvernement provincial, ils demandent que les taxes sur l'essence soient baissées, et tout ça pour leur permettre de souffler un peu plus.
Les consommateurs au Québec, les contribuables québécois ne sont pas les plus taxés uniquement au niveau des carburants, au niveau de l'essence, ils le sont de façon générale, M. le Président. L'opposition l'a démontré à maintes et maintes reprises, les contribuables québécois sont les plus taxés au Canada et en Amérique du Nord. Alors, le gouvernement provincial évidemment pourrait pour une fois tendre l'oreille auprès de la population du Québec, auprès des consommateurs et donner suite à cette demande qui est formulée par les consommateurs au Québec à l'effet de diminuer les taxes sur l'essence.
Alors, lorsqu'on regarde, M. le Président, la composition du prix de l'essence au Québec, on se rend compte qu'effectivement nous sommes la province qui taxe le plus les consommateurs au niveau du Canada et au niveau de l'Amérique du Nord. Et cette affirmation s'appuie sur un rapport qui a été rendu public par M. Robert Gagné, qui est un spécialiste qui travaille à l'École des hautes études commerciales, un rapport qu'il a produit en juillet 1999 et qui a été soumis à l'Institut canadien des produits pétroliers.
Donc, l'étude de M. Gagné met en lumière justement le fait que le Québec est la province qui taxe le plus les consommateurs d'essence et de carburant au Canada et en Amérique du Nord. Par exemple, ces données s'appuient, en 1997-1998... Au niveau de la taxe spécifique sur l'essence au Canada, on nous démontre qu'effectivement le Québec, avec sa taxe spécifique et sa taxe dévolue à la TVQ, est la province qui taxe le plus au niveau du Canada et au niveau de l'Amérique du Nord.
M. le Président, l'opposition réclame depuis plusieurs semaines, depuis plusieurs mois une diminution des taxes sur l'essence. Il n'y a pas que l'opposition qui la réclame. Il y a plusieurs organismes au Québec qui ont tendu la main au gouvernement provincial, qui ont formulé à de nombreuses reprises des demandes à l'effet de diminuer les taxes, et tout ça pour soulager évidemment le fardeau des automobilistes, entre autres, pour soulager le fardeau des consommateurs.
Alors, un de ces groupes, et, en passant, ce sont tous des groupes qui sont très représentatifs de la population du Québec... Le premier de ces groupes est le CAA Québec, alors un organisme qu'on connaît tous très bien. Peut-être que plusieurs personnes, ici, plusieurs députés en sont membres. Donc, le 16 mars dernier, le CAA, dans le journal Le Devoir : Le CAA presse Québec de soulager les automobilistes . La demande est claire, le CAA lance un appel au gouvernement pour qu'il baisse ses taxes. Alors, on sait que le CAA Québec représente des centaines et des milliers d'automobilistes partout au Québec. Cette demande, elle est légitime, puisque le CAA a évalué que les automobilistes font les frais directement de l'augmentation des prix de l'essence.
Il y a un autre groupe d'importance qui a demandé au gouvernement de diminuer les taxes sur l'essence, un organisme qui est encore très représentatif de la population au Québec, et c'est la Chambre de commerce du Québec. La Chambre de commerce du Québec, dans un communiqué qu'elle a émis le 1er mars dernier alors, on se rend compte que c'est des demandes qui ne datent pas d'il y a six mois, c'est des demandes qui sont très récentes demande à Québec et Ottawa parce qu'il faut le dire, on n'est pas gêné de le dire, il y a le gouvernement provincial qui est interpellé dans le contexte actuel, dans le dossier actuel, mais il y a aussi le gouvernement fédéral qui est interpellé donc réclame une diminution des taxes. Elle va même plus loin en soulignant que les diminutions de taxes devront donc représenter une diminution de 0,03 $ le litre. La Chambre de commerce souligne que «le niveau actuel des prix de l'essence et vous me permettrez de citer un extrait du communiqué pénalise des secteurs importants de l'économie québécoise comme les transports et le tourisme».
(10 h 10)
Alors, M. le Président, si, le 1er mars, la Chambre de commerce du Québec a fait une mise en garde au gouvernement sur les effets pervers dans des secteurs d'importance comme le transport et le tourisme, c'est donc dire que le gouvernement doit prendre très, très au sérieux, le ministre des Ressources naturelles, qui est responsable du dossier, donc, de l'énergie au Québec, doit prendre très, très au sérieux cet appel qui est lancé par la Chambre de commerce du Québec.
En région, vous avez la Chambre de commerce de Matane qui a livré également le même message, qui a formulé la même demande, donc, la Chambre de commerce de Matane, située dans la belle région de la Gaspésie, M. le Président, qui s'inquiète des effets, pour une région comme la Gaspésie, de voir les prix de l'essence augmenter d'une façon aussi importante.
On sait, M. le Président, que, pour plusieurs régions au Québec la Gaspésie ne fait pas exception à la règle cette augmentation des prix est très, très, très importante et peut être très préjudiciable à l'économie locale et régionale.
Alors donc, je me demande, M. le Président, sur la base de cette demande qui a été formulée par la Chambre de commerce de Matane, si le député de Matane, lui, a prêté une oreille attentive à cet appel qu'a lancé la chambre de commerce située dans son comté. Il serait intéressant qu'on puisse l'entendre éventuellement sur cette question. Mais, de toute évidence, sur la base de la position actuelle du gouvernement, le député de Matane s'est probablement fait très discret suite à l'appel qui a été lancé par la chambre de commerce de son comté.
Une autre chambre de commerce, M. le Président, a aussi interpellé le gouvernement provincial, c'est la Chambre de commerce de Baie-Comeau. Alors, la Chambre de commerce de Baie-Comeau a même envoyé des lettres au député sur le prix de l'essence. Il y a le député qui siège en cette Chambre, le député du comté de Saguenay, qui a été interpellé sur la question. Il serait encore évidemment très intéressant, M. le Président, donc de pouvoir entendre le député de Saguenay sur le suivi qu'il a fait à cette demande qui lui a été adressée par la Chambre de commerce de Baie-Comeau.
Et, encore une fois, il a probablement eu les mêmes réflexes que le député de Matane: ses représentations auprès de son gouvernement se sont probablement faites très, très discrètes, puisque le gouvernement n'a pas daigné donner suite donc à l'appel qui lui a été lancé par la Chambre de commerce de Matane et par la Chambre de commerce de Baie-Comeau, et de façon évidemment plus importante par la Chambre de commerce du Québec.
M. le Président, il y a d'autres groupes au Québec qui se sont organisés récemment pour signifier au gouvernement leur mécontentement, pour signifier leur grogne à l'endroit de l'augmentation des prix de l'essence. Il y a une importante coalition qui a vu le jour, la Coalition pour la défense des consommateurs d'essence du Saguenay Lac-Saint-Jean. Et là le ministre des Ressources naturelles bien sûr connaît très, très bien les initiateurs et les leaders qui sont à la tête de cette Coalition, une coalition qui représente plus de 50 000 travailleurs. Alors, c'est vraiment une coalition très représentative de la région du SaguenayLac-Saint-Jean, une coalition qui est composée notamment de syndicats et de la Chambre de commerce de Jonquière. Alors, on parle de la FTQ, de la CSN, de la CEQ et de la Chambre de commerce de Jonquière.
Cette Coalition, on l'a vu au cours des derniers jours, a décidé de boycotter certaines stations d'essence dans la région du SaguenayLac-Saint-Jean. Mais ce qu'il ne faut pas oublier, M. le Président, c'est que, si le boycott de cette Coalition... Et, il faut le dire, ça représente plus de 50 000 travailleurs, mais il y a toute une population aussi qui est derrière cette coalition. Si, donc, la population du SaguenayLac-Saint-Jean a décidé de boycotter certaines stations d'essence dans cette région, ça témoigne de la grogne et du mécontentement qui gagnent les consommateurs d'essence partout au Québec.
De toute évidence, le ministre des Ressources naturelles, qui est député de cette région, est plutôt insensible jusqu'à maintenant à l'appel qui lui est lancé par ses propres citoyens, par les citoyens de son propre comté, de sa propre région. Et la Coalition, en plus de boycotter certaines stations d'essence dans la région du Saguenay Lac-Saint-Jean, a été très claire: la Coalition demande aux deux paliers de gouvernement de réduire ses taxes sur l'essence, et tout ça pour laisser souffler les consommateurs partout au Québec.
Il ne serait pas étonnant qu'au cours des prochains jours, au cours des prochaines semaines la Coalition, qui a vu le jour cette fameuse Coalition dans la région du SaguenayLac-Saint-Jean, puisse trouver écho dans d'autres régions du Québec. Il se peut fort bien, M. le Président, que d'autres groupes de citoyens décident de s'organiser pour signifier au gouvernement qu'ils en ont assez. Et je pense que le gouvernement à ce moment-là pourra difficilement rester ou continuer de rester insensible aux arguments qui sont invoqués par la population du Québec et par un groupe comme la Coalition pour la défense des consommateurs d'essence du SaguenayLac-Saint-Jean.
Un autre groupe d'importance qui s'est érigé, évidemment qui a signifié ses attentes à l'endroit du gouvernement actuel, c'est Action Réseau Consommateur, qui représente les intérêts ou qui défend les intérêts de l'ensemble des consommateurs du Québec, qui s'est joint à l'ACEF de l'Estrie, l'ACEF, qui est l'Association coopérative d'économie familiale, donc, de la région de l'Estrie. Ils se sont donc... En février dernier, ils ont joint leurs efforts pour demander au gouvernement de réduire ses taxes sur l'essence.
M. le Président, si vous le permettez, je vais vous faire lecture d'un passage du directeur de l'ACEF de l'Estrie, M. Robert, qui rend très, très bien la demande qui est formulée par son Association et Action Réseau Consommateur. M. Robert nous dit ceci... Il note que les gens auront beau imaginer tous les scénarios pour réduire les coûts, le transport en commun, le covoiturage, il reste que les gouvernements peuvent intervenir, par exemple, avec une réduction temporaire des taxes, ce qui ne causerait guère de manque à gagner, car les revenus de cette source ont été déterminés suivant des prix plus bas des produits pétroliers.
Alors, c'est donc dire qu'à très court terme, comme les consommateurs d'essence et de carburant au Québec sont captifs de ce marché, les alternatives qui s'offrent à nous, comme consommateurs, pour trouver des alternatives, donc, à l'augmentation des prix de l'essence, elles sont très réduites, voire pratiquement nulles.
Si, moi, comme résidente de la Gaspésie, si, par exemple, mon collègue ici, à ma gauche, résident de l'Outaouais, si les gens de l'Abitibi, si les gens de la Montérégie veulent se déplacer, dans le Bas-Saint-Laurent, également, si les gens veulent se déplacer dans leur région, M. le Président, ils ne peuvent pas avoir un autre moyen que leur voiture dans leurs déplacements quotidiens, évidemment à moins de troquer la voiture contre la bicyclette, mais je ne suis pas sûre que ce soit la bonne solution dans le contexte actuel. Remarquez, je n'ai rien contre la bicyclette, c'est un très bon moyen de transport. Ceci étant dit, dans nos déplacements quotidiens, je ne pense pas qu'à très court terme ce soit la solution évidemment pour les gens qui ont à se déplacer partout en région.
Évidemment, il y a plusieurs secteurs d'activité qui sont touchés. Mais, avant, j'aimerais vous rappeler qu'il y a un autre groupe d'importance, un parti politique, qui fait beaucoup de travail en ce moment, c'est le Bloc québécois, au niveau fédéral, les cousins de nos amis d'en face, qui déploient énormément d'énergie, donc, pour convaincre le gouvernement fédéral de baisser les taxes.
Alors, ce matin, j'aimerais peut-être dire aux cousins de nos amis d'en face, aux bloquistes, donc, qui déploient beaucoup d'énergie pour convaincre le gouvernement fédéral, que, puisque le ministre fédéral des Finances a annoncé dernièrement une ouverture à l'effet de s'asseoir avec les provinces pour réduire les taxes sur l'essence, j'aurais envie ce matin de dire aux bloquistes que maintenant ils se trompent de cible en continuant de travailler, donc, en continuant de tenter de convaincre le fédéral de diminuer ses taxes, puisque le ministre fédéral des Finances a annoncé ses couleurs dans le dossier. Le ministre nous a dit: Écoutez, nous, on est prêts à s'asseoir avec les provinces et on est prêts à s'asseoir avec elles pour négocier une diminution des taxes.
Alors, le message que ce matin nous envoyons aux bloquistes, M. le Président, c'est qu'ils devraient maintenant déployer leurs énergies à convaincre leurs amis ici, au Québec, à convaincre le gouvernement péquiste qu'il est grand temps de soulager le fardeau des consommateurs d'essence, le fardeau des consommateurs de carburant au Québec. Alors, les bloquistes devraient, à partir d'aujourd'hui, s'atteler à la tâche et convaincre le gouvernement actuel, convaincre le ministre des Finances, convaincre le ministre des Ressources naturelles qu'il est grand temps de baisser les taxes sur l'essence.
(10 h 20)
Alors, M. le Président, on sait que la situation actuelle est très préjudiciable pour plusieurs secteurs de l'économie au Québec. La flambée des prix actuelle, en passant, c'est une augmentation des prix qu'on n'a pas vue depuis à peu près, quoi, 10 ans puis peut-être encore plus. Je pense que l'augmentation actuelle, c'est du jamais vu. Dans certaines régions, il y a quelques semaines, on dépassait les 0,80 $ le litre, alors on atteignait même un peu plus de 0,82 $.
C'est donc dire, M. le Président, que c'est des augmentations très, très importantes. Et ces augmentations-là, c'est les consommateurs, c'est la population qui doit les assumer, et ça lui coûte plus cher, conséquemment, à chaque semaine lorsqu'elle va faire le plein d'essence.
Alors, les secteurs de l'économie qui sont touchés, M. le Président, il y en a plusieurs, et, ce matin, j'aimerais prendre quelques minutes donc pour vous dresser un peu un portrait de la situation à l'heure actuelle au Québec.
Il y a le secteur des pêches, dont on parle très, très peu et à mon grand regret, le secteur des pêches qui est un secteur d'importance pour des économies comme la Gaspésie, comme les Îles-de-la-Madeleine et en partie pour le Bas-Saint-Laurent, qui a, lui aussi, lancé un appel au gouvernement provincial et au gouvernement fédéral.
Il y a le Conseil canadien des pêcheurs professionnels qui réclame des mesures d'urgence pour contrer la montée en flèche du prix du carburant au niveau diesel. On sait, M. le Président, que les pêcheurs qui doivent aller en mer utilisent le diesel. Et cet appel, c'est récent, il a été fait le 23 mars dernier. Alors, les pêcheurs nous disent que cette augmentation est une augmentation de 40 % par rapport au prix de l'an dernier. C'est donc dire que l'impact sur les coûts d'opération et d'exploitation pour les pêcheurs est immense.
M. Daniel Bernier, qui est le président de cet organisme, précise que le Conseil canadien des pêcheurs professionnels demande l'intervention des deux paliers de gouvernement pour amoindrir l'impact de la hausse de prix, en demandant notamment une diminution des taxes.
Il y a également une autre association qui est très importante, qui est la Fédération des pêcheurs semi-hauturiers du Québec, qui estime que l'augmentation des coûts du diesel aura des impacts sur la rentabilité des entreprises de pêche. Et on sait, M. le Président, que tout le domaine des pêches, quand on parle de rentabilité, ce n'est pas une rentabilité, bien sûr, au niveau uniquement du bateau du pêcheur qui va pêcher le poisson, c'est une rentabilité également qui peut se traduire dans les usines, dans les travailleurs qui font de la transformation dans différentes régions du Québec. Alors, cet appel, il est lancé par le secteur des pêches.
Il serait également très intéressant de connaître l'intention du ministre des pêches en regard de l'appel qui lui est lancé aujourd'hui. J'aimerais bien savoir également quelles sont les énergies que, lui, comme ministre des pêches, a déployées pour défendre une industrie qui relève de son ministère, quelles sont les énergies qu'il a déployées pour convaincre le ministre des Ressources naturelles, pour convaincre le ministre des Finances de réduire urgemment les taxes sur l'essence.
Il y a un autre domaine important qui également écope actuellement de l'augmentation des prix du diesel, des prix de l'huile à chauffage, des prix du mazout, c'est tout le secteur, M. le Président, de la production en serre. Et mon collègue, hier, le député de Richmond, en période de questions, a interpellé le ministre de l'Agriculture justement et il a très bien mis en lumière l'impact en termes de création d'emplois que cette industrie pourrait vivre au cours des prochaines semaines.
Il y a un cri du coeur qui a été lancé, M. le Président, au cours des dernières semaines. En fait, M. André Mousseau, qui est le président du Syndicat des producteurs en serres du Québec, lui, soutient que les augmentations du mazout porteront un dur coup à l'industrie. On parle en fait de 1 000 emplois qui sont en péril dans le domaine de la production en serre au Québec. Alors, écoutez, il y a plusieurs de ces productions en serre, de ces producteurs qui craignent littéralement la faillite. Donc, 1 000 emplois dans un secteur comme celui-là qui, évidemment, est un secteur qui est très compétitif. Nos voisins en Ontario, eux, évidemment ont compris la situation et ont pris les mesures nécessaires justement pour permettre à leur industrie de demeurer très compétitive.
Alors, évidemment, le message et l'appel qui a été lancé par les producteurs en serre du Québec, c'est: Est-ce que le gouvernement provincial peut diminuer ses taxes pour qu'on puisse préserver justement les milliers d'emplois qui sont rattachés donc à ce domaine important d'activité? Et, encore une fois, hier, le ministre des pêches, le ministre de l'Agriculture a tenté de se faire rassurant, mais je ne pense pas, M. le Président, que ce soit une réponse satisfaisante pour rassurer l'ensemble de cette industrie. Et je vous rappelle qu'il y a plus de 1 000 emplois qui sont en péril.
Un autre impact, de l'augmentation des prix de l'essence, c'est l'augmentation sur les tarifs de taxi. Alors, dans le journal La Presse du 7 mars dernier, on apprend que les tarifs de taxi sont haussés de 10 %. 10 %, M. le Président, vous, quand vous allez prendre le taxi, vos coûts vont augmenter de 10 %, une augmentation qui est attribuable en totalité à l'augmentation des prix de l'essence.
Alors, c'est donc dire, M. le Président, qu'on a le secteur des pêches, on a le secteur de l'agriculture, on a le secteur du transport en commun jusqu'à maintenant qui sont touchés de plein fouet par l'augmentation des prix de l'essence. Alors, quand le ministre des Finances tente de banaliser les impacts sur l'économie du Québec, j'ai le regret de lui dire qu'il fait fausse route parce qu'on a la preuve, on a la démonstration qu'il y a plusieurs secteurs d'activité qui sont en péril. Il n'y a pas seulement les secteurs d'activité qui sont en péril, en fait, c'est toute l'économie québécoise qui est en péril suite à l'augmentation des prix de l'essence.
Autre augmentation, M. le Président, dans une industrie du transport: c'est Orléans Express qui a annoncé très récemment, le 16 mars dernier, une augmentation de ses prix de 4 %. Alors, les gens qui doivent se déplacer par autobus devront maintenant assumer une augmentation des prix de 4 %. Alors, c'est donc dire que le ministre des Finances et le ministre des Ressources naturelles qui nous disent qu'il n'y a que les consommateurs d'essence qui sont touchés, c'est faux, c'est toute la population qui est touchée. Parce que, si, par exemple, vous, M. le Président, vous n'avez pas de voiture pour vous déplacer, vous faites appel, par exemple, au taxi ou à l'autobus, vous devrez, suite à l'augmentation des prix, payer, payer pour cette augmentation.
M. le Président, un autre secteur important d'activité qui est touché et qui est non négligeable, c'est la hausse du prix du pétrole qui va toucher les érablières. Alors, on sait que les érablières, c'est un secteur d'activité très, très, très important au Québec. Et il y a, encore une fois, mon collègue de Richmond qui a interpellé le ministre de l'Agriculture là-dessus.
Récemment, le 12 mars dernier, c'est la Fédération de l'Union des producteurs agricoles de la Beauce on sait que la Beauce, c'est une très grande région qui est productrice des produits de l'érable qui justement envoie un signal, envoie un message à l'effet que les propriétaires d'une érablière, par exemple, de 5 000 entailles devraient débourser des coûts additionnels de 3 500 $ par année parce que justement les prix du diesel ont augmenté.
Ce qu'il faut savoir, M. le Président, c'est que le secteur des érablières au Québec a plusieurs producteurs importants qui ont changé leur type de consommation. Traditionnellement, on chauffait les érablières, la production se faisait à partir d'un chauffage au bois. Alors, cette production a été changée et on s'est tourné maintenant vers le chauffage au mazout.
Alors, évidemment la situation actuelle cause un préjudice énorme aux propriétaires d'érablières, aux producteurs acéricoles. Et tout ça, M. le Président, cette augmentation des coûts de production devra être refilée, elle va être refilée aux consommateurs. Et on risque d'avoir une industrie qui sera moins compétitive et on risque d'avoir des impacts importants pour une industrie comme celle-là.
Il y a également nos agriculteurs. De façon générale, nos agriculteurs, qui vont reprendre leurs activités au cours des prochaines semaines, au cours du printemps, qui vont aller dans les champs, qui vont commencer à semer, eux aussi devront en faire les frais, donc verront une augmentation de leurs coûts de production.
Alors, évidemment, M. le Président, on voit, encore une fois, qu'il y a plusieurs secteurs importants de notre économie qui sont touchés de plein fouet par cette augmentation des prix de l'essence. Et évidemment il y a des consommateurs qui réagissent à cette augmentation.
On apprenait récemment qu'il y a des consommateurs en zone frontalière qui se ruent carrément vers les pompes de l'autre côté de la frontière. Ces comportements sont perceptibles dans la région de l'Estrie, notamment. Il y a des consommateurs qui font quelques kilomètres pour justement aller s'approvisionner du côté américain parce que les prix de l'essence sont beaucoup moins importants de l'autre côté de la frontière qu'ici, au Québec. Et il y a un consommateur qui nous dit qu'il économise, lui, entre 10 $ et 15 $ à chaque fois qu'il fait le plein. Alors, c'est donc dire que ça a aussi un effet pervers, l'augmentation des prix de l'essence au Québec, puisque certains consommateurs en région frontalière décident d'aller s'approvisionner ailleurs.
Alors donc, ce qu'on constate finalement, M. le Président, c'est que le message qui est lancé par la population et le message qui est lancé par plusieurs secteurs d'activité économique eux-mêmes, il y a vraiment unanimité sur la question partout au Québec: on doit réduire les taxes liées au prix de l'essence. Alors, je vous dirais même, à la limite: Peu importent les partis politiques, bloquistes, libéraux, on demande la même chose, on demande que les taxes sur l'essence soient réduites.
(10 h 30)
Mais, si on regarde la situation d'un peu plus près, en fait, on nous dit souvent que les taxes, effectivement, composent une partie importante du prix au litre d'essence. Prenons un scénario x, M. le Président. Vous payez votre litre d'essence 0,75 $. Alors, ce qu'il faut que vous sachiez, c'est que les taxes fédérales et les taxes provinciales forment, de ce 0,75 $ le litre, 47 %. Il y a 47 % de votre prix qui s'en va en taxes, autant au niveau provincial qu'au niveau fédéral.
Plus concrètement, ce qu'il faut comprendre, c'est que vous avez les taxes qu'on dit fixes: la taxe d'accise qui relève du fédérale, qui est à 0,10 $ du litre, et vous avez la taxe sur l'essence, au Québec, qui est la taxe spécifique sur l'essence, qui, elle, est à 0,152 $ le litre. Alors là vous avez 0,252 $ qui sont dédiés aux taxes fédérales et provinciales mais, tout ça, uniquement pour les taxes qu'on dit fixes. À ça s'ajoutent la TPS et la TVQ. Alors, si, vous, comme consommateur, vous payez 0,75 $ du litre, vous avez 0,0456 $ qui s'en vont à la TPS et 0,0523 $ qui s'en vont à la TVQ. Au total, presque 0,35 $ sur votre 0,75 $ du litre s'en vont en taxes.
Alors, écoutez, il y a près de 50 % du prix, à chaque fois que vous faites le plein, 47 % de chaque litre qui s'en va, sur l'essence, au niveau des taxes. C'est très important, M. le Président, c'est majeur comme taxes.
Au niveau du diesel, la situation n'est pas plus rose. Évidemment, il y a les camionneurs partout au Québec qui ont fait de nombreuses représentations pour que le gouvernement puisse réduire ses taxes. Pour le diesel, la taxe fixe, elle est 0,162 $ le litre au provincial, et, au fédéral, 0,04 $ la taxe d'assises sur le diesel est de 0,04 $. Alors, évidemment vous avez encore un peu plus de 0,20 $ en taxes fixes qui sont dévolues au diesel.
Alors, M. le Président, ce qu'il est important de comprendre, c'est que, lorsqu'on place la situation du Québec à l'échelle canadienne et à l'échelle au niveau de l'Amérique du Nord, on constate une chose: c'est qu'au Québec les consommateurs d'essence, de diesel, d'huile à chauffage sont taxés 31 % plus élevé qu'en Ontario, 80 % plus taxés qu'au Nouveau-Brunswick. Et là-dessus je m'appuie toujours sur le rapport qui a été produit par un spécialiste de la question, M. Robert Gagné, en juillet 1999, et M. Gagné, dans son analyse, s'appuie sur des données produites en 1997-1998.
Alors, M. le Président, vous, comme consommateur d'essence, vous êtes 31 % plus taxé qu'en Ontario et 80 % plus taxé qu'au Nouveau-Brunswick. Évidemment, à l'échelle de l'Amérique du Nord, la situation n'est pas plus rose. Si on se compare avec l'État de New York, on constate qu'on est 65 % plus taxé que l'État de New York. On constate également qu'on est 163 % plus élevé que l'État du Maine, 163 %. Alors, évidemment, on bat tous les records en termes de taxation. Et, par rapport à la Californie, 50 % plus élevé. Alors, quand on essaie de nous faire toutes sortes de démonstrations à l'effet que les consommateurs partout au Québec ne sont pas les plus taxés, c'est faux, parce que les données de 1997-1998 nous confirment qu'on est les plus taxés. On est les champions au Canada, on est les champions en Amérique du Nord, M. le Président.
Alors, évidemment cette situation est importante. Il y a un spécialiste, M. Gagné, qui voit là une situation préjudiciable, parce que M. Gagné soutient que l'objectif premier pour lequel les consommateurs ont été taxés est aujourd'hui dévié. Et je m'appuie toujours sur son rapport, sur une analyse que lui-même a produite. Il nous dit ceci et c'est très important dans le débat actuel, M. le Président: «En taxant l'essence au-delà de ce qui est justifiable économiquement, l'État tire parti de la faible sensibilité de la demande d'essence au prix et utilise le marché de l'essence à des fins redistributives, ce qui, d'un point de vue économique et social, n'est certainement pas souhaitable.» Et il rajoute ceci: «Il demeure que le Québec est la province au Canada qui taxe le plus l'essence, et il n'y a aucune justification économique à ce phénomène.»
Alors, quand le ministre des Ressources naturelles vient nous dire et c'est une affirmation qu'il a faite le 5 mars dernier que le gouvernement ne peut pas se priver des revenus liés aux taxes sur les carburants, il vient exactement nous confirmer l'intention que poursuit son gouvernement et il vient exactement nous confirmer la thèse de ce spécialiste, M. Gagné, à l'effet que le gouvernement profite actuellement de la situation pour augmenter ses revenus, et tout ça, sur le dos des consommateurs du Québec, sur le dos des consommateurs d'essence, d'huile à chauffage et de diesel au Québec. Et ça, M. le Président, c'est inacceptable. C'est inacceptable. Et ce qu'on demande ce matin, c'est que le gouvernement, une fois pour toutes, soit sensible à l'appel qui est lancé par l'opposition, par l'ensemble de la population du Québec, et réduise ses taxes sur l'essence. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Bonaventure et critique officielle de l'opposition en matière de ressources naturelles. Nous allons maintenant céder la parole au ministre des Ressources naturelles. M. le ministre.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, je pense que tout ce débat-là doit d'abord être situé dans la perspective de l'évolution des prix des carburants, et particulièrement du pétrole brut, depuis un certain nombre de mois. Si on ignore cela, là, on est vraiment sur une autre planète ou dans une autre galaxie, en termes de débat. Il faut avoir à l'esprit cette réalité incontournable, c'est que, depuis un an, le prix du pétrole brut est passé de 11,6 $US le baril à 30,6 $US le baril. Ça, c'est une augmentation de 164 %, le prix du pétrole brut. C'est considérable, et évidemment ça a des effets et des répercussions sur le prix à la rampe de chargement, qui a augmenté de 144 %, et ça se répercute aussi forcément dans le prix affiché à la pompe. Il n'y a pas de mystère là-dedans. C'est la matière première, c'est le pétrole brut, et, quand son prix augmente, ça se répercute à la fois sur le prix à la rampe de chargement, une fois raffiné, puis aussi le prix affiché à la pompe.
Et les causes de cette augmentation, elles sont fort connues à moins qu'on veuille les ignorer encore une fois elles sont très connues, c'est suite à une décision des pays de l'OPEP de réduire l'offre, de réduire délibérément leur production. Or, ça a eu évidemment sur le marché du pétrole cet effet à la hausse pour ce qui est des prix du brut. Je pense qu'on ne peut pas ignorer cela. Si on ignore cela, on ne peut pas porter des jugements adéquats ou pertinents sur la réalité du marché des carburants, aussi bien dans les grands centres que dans les régions dites périphériques.
Mais le sens de la motion, c'est de dire ou c'est de prétendre que le gouvernement profite des consommateurs par l'imposition de taxes sur les carburants trop élevées mais aussi par le biais de la taxe de vente du Québec. C'est une affirmation, une allégation qui est revenue constamment, aussi bien en période de questions que dans d'autres débats en cette Chambre. C'est la thèse ou c'est le mythe parce que c'est un mythe, c'est une fausseté c'est la thèse défendue, véhiculée: Le gouvernement profite des consommateurs, le gouvernement siphonne les consommateurs et fait de l'argent parce que le prix de l'essence est élevé pour le consommateur.
C'est faux. C'est faux, M. le Président. Je pense qu'il faut encore le redire, même si je suis à peu près certain que, dans les interventions à venir des députés de l'opposition, ils ne tiendront pas compte de ce que j'ai dit. Je suis sûr de ça. Mais je vais le dire quand même parce que ça m'apparaît essentiel.
D'abord, les taux de taxes sont fixes. Il n'y a plus de taxe ascenseur. On ne cesse de le répéter, mais il faut le redire encore une fois, ça n'existe plus, les taxes ascenseur, depuis presque 15 ans. Ça n'existe plus. C'est une taxe fixe. Elle est de 15,2 % pour un litre d'essence.
Une voix: Cents.
(10 h 40)
M. Brassard: Cents, oui, du litre. Que le prix du litre soit de 0,60 $ ou de 0,82 $ du litre, c'est 0,152 $. C'est fixe, ça ne bouge pas. Ça n'a rien à voir avec le prix. Ça ne varie pas, ça ne fluctue pas avec le prix. Et puis il y a un rabais de taxes aussi pour un certain nombre de régions. Donc, en plus, il faut ajouter à ça que le gouvernement doit assumer une augmentation des coûts pour lui, comme État employeur.
On l'a vu également dans le secteur du camionnage en vrac, du déneigement, du déglaçage, du transport d'écoliers, ça entraîne des coûts comme État employeur. On a pris des mesures, d'ailleurs. Donc, on a dépensé davantage. C'est près de 6 millions d'ici le mois de juin pour assumer ces coûts qui se sont ajoutés.
De plus, lorsque le prix des carburants augmente, les volumes consommés augmentent moins vite. C'est ce que le ministre des Finances essayait d'expliquer moi, j'ai trouvé ça très lumineux, très compréhensible, très accessible en disant que ça se traduit par moins de revenus de taxes sur l'essence pour le Québec. C'est le principe de l'élasticité de la demande c'est ce qu'il a indiqué en période de questions: plus les prix augmentent, plus la demande diminue.
Les preuves, M. le Président? Budget de 1999-2000. Le budget de 1999-2000, on avait prévu une croissance anticipée des volumes de carburant de 2,9 %, et le taux de croissance n'a été que de 0,9 %. Les revenus de taxes sur l'essence entre 1998-1999 et 1999-2000 ont diminué de 5 millions, alors qu'on prévoyait une augmentation de 64 millions pour cette même période.
On avait anticipé une augmentation, ce n'est pas arrivé. Pourquoi? Parce que les prix des carburants ont augmenté. Donc, la demande fléchit lorsque les prix montent. Ça, ce n'est pas une affirmation gratuite; on pourrait citer des chiffres et des chiffres sur des années et des années qui démontrent cela. La demande fléchit lorsque les prix montent. Par conséquent, les revenus de taxes sur le carburant diminuent. Mathématique, logique. Donc, on ne fait pas plus d'argent, le gouvernement ne fait pas plus d'argent, ne siphonne pas plus le consommateur, comme l'affirment les députés de l'opposition.
Pour ce qui est de la TVQ, elle, c'est vrai, c'est un pourcentage. Les prix élevés augmentent les revenus. Savez-vous de combien? De 4 millions par mois, en décembre. En décembre, c'est 4 millions de plus. Mais en plus il faut considérer les dépenses que le gouvernement a dû assumer en plus aussi par suite de l'augmentation des prix à la pompe. Et ses revenus supplémentaires, c'est 4 millions par mois. Puis ça ne sera pas 4 millions par mois toute l'année, là, les prix vont baisser. On le sait très bien, que les prix vont baisser à partir de juin et de l'été. Les prix vont baisser; donc, ce ne sera pas 4 millions par mois tout le temps.
Et ces revenus supplémentaires de la taxe de vente, taxe à la consommation, sont loin de compenser les rabais de taxes sur les carburants qui sont consentis à un certain nombre de régions. Parce que le gouvernement n'est pas inactif, il fait un certain nombre de choses pour aider les consommateurs. D'abord, il agit comme un employeur responsable, on l'a vu, en majorant, en augmentant ses contrats de près de 6 millions pour les camionneurs qui transportent soit du sel ou de la neige, ou les transporteurs d'écoliers. Hydro-Québec a fait la même chose aussi. Puis on a encouragé le secteur privé, qui a emboîté le pas aussi. Dans le secteur forestier, par exemple, ça s'est fait également, on a suivi l'exemple du gouvernement. La concertation, donc, qui a été menée par le gouvernement a permis de rétablir le climat social à la satisfaction des intéressés.
Il faut se rappeler aussi que les consommateurs des régions bénéficient d'un rabais de taxes sur le carburant c'est le cas chez nous, c'est le cas dans la région de la députée de Bonaventure et d'un rabais des droits d'immatriculation dans les régions frontalières périphériques et spécifiques, qui ont représenté, pour l'année 1998-1999, 115 millions. En d'autres termes, si, dans ces régions-là on était traité de la même façon que dans les régions centrales, le gouvernement aurait empoché 115 millions de plus: 94 millions pour ce qui est du rabais sur le carburant puis 24 millions pour ce qui est du rabais sur les droits d'immatriculation. Et, en 1999-2000, c'est 102 millions que le gouvernement aurait en plus s'il n'y avait pas ces rabais de taxes et ces rabais sur les droits d'immatriculation. Il faut aussi noter évidemment que les entreprises ne sont pas affectées par la hausse de la TVQ parce que c'est considéré comme des intrants et qu'elles ont droit au remboursement de ces taxes, TPS et TVQ. Ça, c'est ce que le gouvernement fait pour alléger le fardeau du consommateur. C'est assez considérable, 115 millions, 102 millions annuellement, ce n'est pas rien.
Le rôle de la Régie de l'énergie auprès des consommateurs. La Régie a un mandat de surveillance des prix de détail des produits pétroliers puis elle a aussi un pouvoir d'enquête sur les prix de détail des carburants et elle a aussi la capacité de fixer un prix plancher de l'essence. Qu'est-ce qu'elle a fait, la Régie? La Régie, d'abord, elle a tenu une audience publique sur les coûts d'exploitation d'une essencerie. Ça a duré plusieurs mois. Et, après de longues audiences publiques, elle a décidé que, pour la protection des intérêts des consommateurs, étant donné la situation concurrentielle du marché au détail de l'essence au Québec, elle n'ajoutait pas les coûts d'exploitation d'une essencerie dans le calcul du prix plancher. Une décision importante que la Régie a prise.
Elle l'a déterminé, ce coût d'exploitation. Elle l'a déterminé, elle l'a fixé à 0,03 $ du litre, mais en regard d'une essencerie type, d'une essencerie qui débite au moins 3 millions de litres et également qui a des activités connexes, en particulier des activités de dépanneur. C'est ça, l'essencerie type, selon la Régie. Et une essencerie type qui débite 3 millions de litres avec 0,03 $ du litre comme coût d'exploitation arrive de façon tout à fait convenable, réussit à fonctionner de façon convenable et de façon rentable.
Mais elle a aussi mené des enquêtes. Tout récemment, elle a mené une enquête dans certaines régions, dont la mienne, SaguenayLac-Saint-Jean, mais aussi l'Abitibi-Témiscamingue et la Haute-Mauricie. Quelles sont les conclusions de cette enquête? Dans son rapport du mois de février, elle considère d'abord que la réponse à une situation de prix de vente au détail élevé est stable, ne passe pas par un réajustement régional des rabais de taxes au détriment d'autres régions. Elle a exclu, dans ces régions-là où les prix étaient plus élevés qu'ailleurs, le recours à un autre rabais de taxes. Et surtout elle a conclu que le marché avait peut-être des particularités, dans ces régions, des traits distinctifs, disons, mais que c'était un marché concurrentiel, que les lois du marché jouaient. C'est ça, la conclusion de la Régie. Ce n'est pas la conclusion du gouvernement, là. C'est la Régie qui a fait une enquête.
Et, je sais bien, parfois, de l'autre côté, on est donc élogieux à l'égard de la Régie. La Régie, c'est donc une institution extraordinaire, qu'il faut conserver. C'est quasiment une vache sacrée, de l'autre côté. Quand elle prend des décisions, par exemple, qui ne vont pas dans le sens qu'ils souhaitent, bien là cette décision-là n'est pas justifiée.
Une voix: Elle perd du galon.
M. Brassard: Elle perd du galon. Sa réputation en prend pour son rhume. Mais, dans le cas présent, la Régie, après une enquête sérieuse, a décidé, a conclu qu'au SaguenayLac-Saint-Jean, en Abitibi-Témiscamingue le marché de détail des carburants était un marché concurrentiel. Il y avait des traits particuliers pour ces marchés-là, mais ça n'enlevait pas ce caractère essentiel que les lois de la concurrence jouaient pleinement. Donc, forcément, elle ne recommandait pas d'intervention de la part de l'État.
(10 h 50)
Il y a eu aussi plusieurs enquêtes au niveau du Canada là-dessus. Depuis 1990, il y en a eu une quinzaine d'enquêtes. Parce que, périodiquement, il y a toujours des accusations qui reviennent, fréquemment, pour prétendre qu'il y a collusion entre les parties pour fixer des prix, pour maintenir les prix élevés. C'est fréquent. À chaque fois que les prix sont à la hausse, là, ces accusations, ou ces affirmations, ou ces prétentions refont surface, c'est inévitable. Et donc, très fréquemment, le bureau de la concurrence fédéral, par exemple, et la Régie aussi, maintenant, depuis quelque temps, font des enquêtes pour vérifier ces allégations. Et les conclusions sont toujours les mêmes. Il y en a eu une quinzaine, de ces enquêtes-là, et les conclusions, c'est d'abord que les prix sont établis par les forces de la concurrence, les lois du marché s'appliquent.
La différence de prix de l'essence existant entre certains grands centres et d'autres régions résulte en grande partie des guerres de prix qui diminuent les marges bénéficiaires et des raffineurs et des détaillants. C'est ça, l'explication. Et l'autre élément majeur de ces enquêtes, c'est que c'est le marché mondial le marché mondial qui contrôle l'industrie de l'essence quand vient le temps d'acheter du brut, et que les gouvernements, qui ne sont pas producteurs de pétrole, les États qui ne sont pas producteurs de pétrole n'ont pas de contrôle significatif sur le marché mondial. Ce sont là les conclusions de ces diverses enquêtes. Toujours les mêmes. Toujours les mêmes conclusions.
M. le Président, je pense que le problème des libéraux, soit délibérément soit par ignorance, c'est l'incompréhension des forces du marché. Ils ignorent encore une fois, est-ce délibéré ou pas? les forces du marché et comment fonctionne le marché, et aussi le poids négligeable des pays consommateurs dans l'évolution des prix du marché mondial. La position du Québec, du gouvernement du Québec, c'est une position responsable et qui est conforme à celle de tous les gouvernements. Je l'ai dit, je le répète de nouveau: Comment se fait-il que, dans le monde entier, il n'y a pas un seul gouvernement, face à cette réalité de prix du brut qui monte en flèche, qui a jugé que c'était approprié ou pertinent de réduire ses taxes, donc ses revenus? Pas un seul. Pas un seul! Je mets au défi l'opposition de me citer un exemple, un seul exemple d'un gouvernement qui a baissé ses taxes à cause de la situation actuelle du marché du pétrole.
Parce que ce n'est pas une bonne solution. Le ministre des Finances l'a déjà indiqué: Une baisse de 0,01 $ de la taxe 0,01 $ seulement de taxe c'est une baisse de 100 millions de revenus. C'est une réduction de 100 millions de revenus. Alors donc, si on veut que ça soit un peu significatif, il ne faut pas se limiter à 0,01 $, il faudrait donc baisser mettons de 0,05 $ la taxe sur les carburants. Mais là ça veut dire, à ce moment-là, 500 millions de revenus de moins dans les coffres de l'État. Ce 500 millions de revenus là on n'a pas de machine pour fabriquer les dollars qui va manquer, il va falloir le trouver quelque part. On le trouve où? Vous voyez le dilemme. Parce que baisser les taxes, ça veut dire réduire ses revenus. Si on réduit ses revenus, on affecte les équilibres budgétaires de l'État, il faut trouver moyen d'avoir de nouvelles ressources. Alors, on va augmenter de nouveau l'impôt sur le revenu des particuliers, qu'on vient de baisser? Il n'y a pas un gouvernement qui a choisi cette voie-là, pas un seul.
Au lieu d'accuser le gouvernement de profiter des consommateurs, ce qui est faux, je pense que la critique de l'opposition en matière de ressources naturelles devrait répondre à une question très simple, qui lui permettrait de mieux comprendre ce qu'est le marché mondial du pétrole et puis de l'expliquer aussi à ses concitoyens, ça serait plus pédagogique et plus utile. La question est très simple: Pourquoi les membres de l'OPEP ont-ils décidé cette semaine d'augmenter leur production de 1,4 million de barils par jour, ce qui correspond au niveau de production du débit de 1999? La réponse, c'est tout simplement parce que cette mesure de l'OPEP visait à faire baisser le prix du baril de brut à un prix variant entre 22 $US et 25 $US le baril. Il est monté à 30 $US. Juste le fait d'annoncer cette décision-là, ça l'a fait baisser à 25 $US sur les marchés. Pourquoi? Parce que l'OPEP reconnaît qu'un prix dépassant 30 $US le baril n'est pas tolérable pour les pays consommateurs puis qu'il est finalement nuisible pour les pays producteurs, parce que, là, il y a risque d'inflation, augmentation possible de la production des pays qui ne sont pas membres de l'OPEP, introduction de nouveaux joueurs, nouveaux concurrents sur le marché mondial qui finiraient par diminuer la position dominante des pays producteurs actuels. Ça pourrait entraîner toutes sortes de conséquences. Et, donc, c'est par intérêt que les pays de l'OPEP ont finalement décidé d'augmenter leur production de façon significative, avec l'effet que ça va avoir sur les prix sur le marché mondial, mais aussi ça va finir par se répercuter sur les prix à la rampe de chargement puis sur les prix affichés à la pompe.
M. le Président, lors de périodes de questions et de débats de fin de séance, j'avais indiqué à la députée de Bonaventure que je n'avais pas de contrôle sur la hausse des prix du pétrole brut, que le gouvernement n'avait pas le contrôle sur la hausse des prix du pétrole brut. Ce qui est strictement et rigoureusement vrai. Mais je lui confirme aussi que je n'ai pas plus de contrôle sur la baisse annoncée des prix. Alors, je ne veux pas qu'on m'attribue la responsabilité de la hausse ou qu'on l'attribue au gouvernement, mais je ne veux pas non plus qu'on attribue au gouvernement la responsabilité de la baisse qui va intervenir puis qui a commencé à intervenir. Donc, on n'est pas responsable de la hausse et on n'est pas plus responsable de la baisse non plus. Je pense que c'est logique.
Pour terminer, M. le Président, je voudrais dire quelques mots sur la Coalition dont elle a parlé et qui a vu le jour chez nous, dans ma région. Je veux simplement vous dire que je trouve ça surprenant, pour le moins curieux, que le maire d'une ville le maire de Jonquière, Daniel Giguère entreprenne avec d'autres des actions et des interventions qui n'auront pas d'effet sur les prix. Ça n'aura pas d'effet sur les prix, ces boycottages-là de détaillants. Ça n'aura pas d'effet sur les prix. Par contre, ça risque de mettre en péril l'existence de petites entreprises de sa propre ville. Ça, je trouve ça un peu étonnant.
On voit des réactions, là, de propriétaires détaillants... Parce qu'on est dans une région où les propriétaires détaillants sont plus nombreux qu'ailleurs et où les propriétaires locataires, qui sont maîtres, qui sont responsables du prix affiché, sont plus nombreux qu'ailleurs. Alors, ça fait tort à qui, de pareilles actions? Ça fait tort à des petits détaillants propriétaires, ça met en péril leur existence même. Et je vous dirais que, si M. Giguère, maire de Jonquière, veut manifester au bon endroit, ce n'est pas devant ces petites entreprises, les petites entreprises de sa ville; il devrait aller devant l'ambassade de l'Arabie saoudite ou des Émirats arabes à Ottawa. C'est là qu'il devrait manifester, parce que ce sont là les responsables des hausses qu'on connaît et aussi des baisses qui vont survenir bientôt, et non pas devant des petits détaillants propriétaires de sa propre ville, ses propres contribuables dont il met en péril l'existence. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Ressources naturelles et également député d'Alma. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière de développement des régions et député de Montmagny-L'Islet. M. le député.
M. Réal Gauvin
M. Gauvin: Merci, M. le Président. Je pense que le débat, ce matin, qui a été initié par notre collègue du comté de Bonaventure, était un débat d'actualité et d'importance pour tout le Québec, et principalement pour les régions du Québec, et je vais essayer de vous faire la démonstration, M. le Président, sur certains points. Mais avant j'aimerais tout simplement revenir à la présentation que M. le ministre vient de nous faire.
Il se questionnait si on l'ignorait, je veux l'informer qu'on n'ignore pas le fait que le prix du pétrole brut ait augmenté, et on sait très bien que ça en est la cause. Le débat, ce matin, ce n'est pas le fait qu'on ignore puis qu'on veut apprendre du ministre tous ces détails-là, c'est d'actualité, et ça fait six mois que c'est dans l'actualité québécoise, canadienne, mondiale.
(11 heures)
M. le ministre, pas un seul gouvernement n'a baissé les taxes. C'est possible que pas un seul gouvernement... Mais le débat de ce matin est de demander au gouvernement du Québec, au ministre des Finances de revoir cette position-là étant donné que les Québécois sont les plus taxés, les plus taxés de tous les citoyens, surtout au niveau de la taxe sur l'essence. Donc, il y a une marge de manoeuvre, et nous tentons de vérifier, encore une fois, la sensibilité et la compréhension. M. le ministre, je vous retourne l'expression: Est-ce que le ministre des Finances ignore que les Québécois sont les plus taxés? Je ne le pense pas, parce que plusieurs citoyens au Québec ont la chance de lui en faire la démonstration et de le lui rappeler.
Donc, M. le Président, ça a un impact; le prix, l'augmentation de l'essence depuis quelques mois a un impact très important sur la vie de tous les jours, sur l'économie de chacune de nos régions ici, au Québec, et sur certaines régions davantage. Je pense que notre collègue tantôt a fait la démonstration de certains secteurs de l'économie. Vous avez le transport de produits fabriqués en région. Il y a des entreprises, des petites entreprises manufacturières qui aujourd'hui, au moment où on se parle, ont des problèmes pour assurer la livraison de leurs produits, surtout sur le commerce extérieur dont les frais de transport sont très élevés. Donc, ça a un impact en région, ça remet en question certains emplois, ça insécurise, du moins pour le moment, un certain nombre de travailleurs et certaines entreprises.
Donc, le but de l'intervention de ce matin, c'est à nouveau de rappeler au gouvernement qu'il a la responsabilité, qu'il a une belle occasion d'envoyer un message dans ces régions étant donné sa marge de manoeuvre et qu'on a déclaré des surplus. S'ajoutent à ça certains montants qui ont été cachés à l'attention de plusieurs ministres du gouvernement du Québec. Le ministre des Finances avait ses réserves personnelles et il a été obligé de les confirmer, de les admettre récemment. Donc, il a une marge de manoeuvre. Et ce qu'on lui demande ce matin, c'est d'envoyer un message comme quoi le gouvernement est sensible aux problèmes que pose l'augmentation du prix de l'essence, d'abord dans les frais de coût de transport, comme je vous le mentionnais.
Ma collègue a parlé des pêcheurs. Les pêcheurs du Québec, ça va changer drôlement leurs coûts, et ça, c'est une économie qui est fragile dans plusieurs régions du Québec, donc la région de la Gaspésie entre autres, d'une part. Vous avez aussi les producteurs en serre. Plusieurs députés en ont fait la démonstration ici, dans cette Chambre. Nous avons des interventions de plusieurs producteurs de chacune de nos régions. Et je ne peux pas imaginer que c'est seulement les députés de l'opposition, les députés libéraux qui reçoivent des revendications de la part de certains de ces producteurs. Je suis convaincu qu'il y a plusieurs députés de l'opposition... Et, évidemment, je ne suis pas membre de leur caucus, j'ai choisi plutôt d'être membre du caucus du Parti libéral, mais il y en a qui sont membres et qui siègent ici, dans cette salle.
J'aimerais vous rappeler, M. le Président, que, dernièrement, certains députés du Parti québécois, dont la députée de Rimouski et le ministre responsable des Régions qui étaient à ce moment-là à Saint-Fabien près de Rimouski... La députée de Rimouski disait à son gouvernement, elle affirmait qu'«il n'est pas question pour le gouvernement de modifier la taxe, mais qu'il allait plutôt choisir je crois dans le budget de M. Landry qui sera déposé mardi, d'annoncer des compensations, des compensations spécifiques». Donc, vous voyez que sa région l'avait sensibilisée, et elle interpellait son gouvernement: «Le prix élevé de l'essence rapporte sûrement plus de revenus au gouvernement c'est ce qu'on sait tous mais je pense qu'au budget il aura la compensation pour tenir compte de ces coûts élevés. Je suis aussi déçue que n'importe quel autre consommateur enfin, elle ne mentionnait pas son gouvernement de la situation qui prévaut dans chacune de nos régions et de l'attitude du gouvernement.» Donc, là, c'est la députée de Rimouski qui parle, qui a eu la chance de s'exprimer, comme bien d'autres.
Vous avez aussi le ministre des Régions qui se promène en région puis qui explique qu'il a confiance, comme il nous le disait encore hier, au ministre des Finances et que c'est la responsabilité du ministre des Finances.
Donc, M. le Président, ce que j'aimerais vous dire aujourd'hui, c'est que la population s'attend à ce que son gouvernement, le gouvernement du Parti québécois, le gouvernement du Québec pose des gestes pour supporter les régions. Et ces gestes-là, ça va... La demande qu'on fait et la demande qui est faite de façon générale: revoir la taxe sur l'essence pour sécuriser l'économie dans chacune de nos régions et permettre justement aux gens de relancer et de se relancer en confiance à l'occasion de cette saison-ci.
Tantôt, je vous parlais des pêcheurs. Vous avez les producteurs de serre, mais vous avez aussi, ce qui est très d'actualité, les producteurs de sirop d'érable. La saison ne s'avère peut-être pas être la meilleure qu'on ait connue dans les dernières années. En plus, plusieurs d'entre eux auront un coût supérieur de consommation de combustible, dans certains cas, de 3 000 $ à 5 000 $ d'augmentation. Donc, M. le Président, ces producteurs-là, si jamais ils avaient prévu faire un profit sur leur production de 3 000 $, 4 000 $ ou 5 000 $, il faut qu'ils s'attendent aujourd'hui que... ils doivent oublier, justement, les profits possibles sur leur production de sirop d'érable de cette année. Vous avez l'activité agricole qui va commencer bientôt, avec les beaux jours. Eux aussi, ils auront des frais additionnels. Vous avez l'activité forestière qui assez souvent, le printemps, est plutôt au ralenti, mais reprend avec les beaux jours d'été. Cette industrie-là aussi sera affectée.
Donc, c'est le but de notre intervention, M. le Président. Ce n'est probablement pas la dernière parce que la population du Québec, ceux et celles qui vivent des problèmes de coûts élevés de production dus à l'augmentation du prix de l'essence, ces gens-là vont à nouveau interpeller. Probablement que ça sera vous, dans votre région, et d'autres députés, comme ceux de notre côté. Et nous allons devoir être attentifs aux préoccupations de ces gens-là; nous avons été élus pour ça. J'ose croire que le ministre des Finances et le gouvernement du Québec sauront en faire autant. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Montmagny-L'Islet, également critique officiel de l'opposition en matière de développement des régions. Nous allons maintenant céder la parole au député de Groulx et adjoint parlementaire au vice-premier ministre. M. le député.
M. Robert Kieffer
M. Kieffer: Merci, M. le Président. Permettez-moi de relire la motion qui a été présentée par la députée de Bonaventure pour qu'on comprenne très bien le sens de l'intervention de l'opposition. Alors, il est dit: «Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement péquiste dont je suis très fier qu'il cesse de profiter des consommateurs du Québec en maintenant les taxes sur l'essence les plus élevées au Canada et en Amérique du Nord.» Qu'il cesse de profiter des consommateurs, qui sont aussi par ailleurs évidemment des payeurs de taxes.
Les deux députés de l'opposition qui m'ont précédé n'ont eu de cesse de mentionner que les Québécois et les Québécoises payeurs et payeuses de taxes étaient les plus taxés en Amérique du Nord. M. le Président, ils ont parfaitement raison. Nous sommes, comme peuple, comme nation, les plus taxés dans le continent nord-américain. Là où je commence à avoir de sérieux problèmes, là où je diffère fondamentalement d'opinions avec l'opposition, c'est quant à la crédibilité même de ceux qui ont déposé cette motion.
(11 h 10)
Je commencerai par l'affirmation, de dire: Nous sommes les consommateurs et payeurs de taxes les plus taxés en Amérique du Nord. Ils ont la mémoire bien courte, l'opposition. Il faudrait peut-être leur rappeler que, de 1985 à 1994, alors qu'ils assumaient le pouvoir, ils ont eu neuf années consécutives de déficit. Le règne du Parti libéral au gouvernement du Québec a amené la dette du Québec à doubler, passant de quelque 30 milliards à plus de 70 milliards. Chaque année, entre 1990 et 1994, le gouvernement du Parti libéral a commis la petite erreur de mal évaluer le déficit par, au minimum, 1 milliard par année. Quand on comprend ces éléments de l'histoire récente du Québec, on comprend pourquoi nous sommes les plus taxés en Amérique du Nord. C'est de leur faute. C'est eux qui ont doublé le déficit. C'est eux qui ont surtaxé les Québécois.
Nous, on a été élus en septembre 1994. Un des grands objectifs de la campagne de septembre 1994 était de dire aux Québécois et aux Québécoises: Arrêtons de payer avec des emprunts la liste d'épicerie. Il nous fallait absolument, comme société, arrêter d'hypothéquer les générations futures.
Alors, le PLQ ou l'opposition officielle me fait un peu penser à celui qui veut le beurre et l'argent du beurre lorsqu'il est dans l'opposition ce qui signifie qu'il demande à la fois des réductions de taxes, des augmentations de services, en se demandant: Ou est-ce qu'ils vont prendre le fric? mais, qui, lorsqu'il est au pouvoir, fait exactement le contraire en accumulant des déficits successifs, en haussant les taxes de plus de 10 milliards durant leurs deux séjours au pouvoir et, pour ce qui est de l'argent du beurre, en ne créant aucun emploi net entre 1990-1994. Alors, comment peut-on réduire les taxes, augmenter les services lorsque nous sommes au pouvoir et que nous ne créons pas d'emplois et que nous augmentons lesdites taxes? Alors, cette motion de l'opposition me laisse quelque part un goût, peut-être pas amère, mais à tout le moins dubitatif vis-à-vis la crédibilité de ceux-là mêmes qui posent la question.
Qu'est-ce qu'on a fait, nous? Bien, nous, on a passé quatre ans à traverser le désert. Pendant quatre années successives, nous avons demandé à l'ensemble de la population du Québec de faire les sacrifices qui allaient enfin permettre au gouvernement de pouvoir gérer les taxes de telle sorte qu'il n'y aurait plus de déficit et que nous allions enfin arrêter d'hypothéquer les générations futures. Le fameux déficit zéro, M. le Président, nous l'avons atteint une année c'est pas mal, ça avant l'objectif que nous nous étions fixé. C'est pas mal mieux, c'est pas mal mieux que de mal prévoir les déficits et de couler de 1 milliard de plus que ce qu'on avait prévu à chaque année.
Lors de l'élection de 1998, l'engagement que nous avons pris vis-à-vis les citoyens et les citoyennes du Québec, c'était de procéder, d'une part, à une réduction de taxes. Compte tenu d'une gestion serrée que nous avions effectuée, compte tenu de nos politiques fiscales et économiques qui avaient permis l'essor de l'économie québécoise, nous nous sommes engagés à réduire le taux de l'impôt sur le revenu de 1,4 milliard durant notre mandat. On aurait pu choisir d'autres façons de soulager le fardeau fiscal des citoyens les plus taxés au Québec. On aurait pu abaisser la taxe de vente. On aurait pu aussi réduire les taxes sur l'essence. Nous avons choisi la voie la plus juste, la plus légitime et la plus sage parce qu'elle permet au gouvernement de moduler ses mesures fiscales en fonction du niveau de revenu des citoyens et des citoyennes du Québec.
Ce qui nous permet de dire maintenant que, selon le niveau de revenu, les citoyens et les citoyennes du Québec profiteront d'une réduction de l'impôt à des degrés divers pour faciliter la tâche à ceux qui en ont le plus besoin. Et on se retrouve devant la situation suivante, où une personne seule, par exemple, profitera de 16 % de réduction de l'impôt sur le revenu. Une famille monoparentale ayant un enfant profitera d'une réduction sur le revenu de 32 %. Je parle évidemment d'une réduction de l'impôt sur le revenu. Prenons un couple ayant deux enfants et un seul revenu, réduction de 27 %.
Alors, ce que je veux dire, c'est que nous en sommes actuellement à corriger les problèmes que l'opposition officielle a créés à la nation québécoise durant les neuf années où ils ont été au pouvoir. Évidemment, ça ne leur plaît pas qu'on leur remette sur le nez les erreurs qu'ils ont commises durant les neuf années où ils ont été au pouvoir, là. Puis ces neuf années-là n'étaient pas toutes des années de récession. Il y a eu de très fortes années de croissance économique à l'époque où les libéraux étaient au pouvoir. Alors, maintenant, ils nous arrivent puis ils nous disent: Oui, vous n'en avez pas fait assez. En fait, ils n'ont pas été capables de nous planter sur le budget. Ils l'ont déclaré catastrophique, alors que 81 % de la population du Québec sont satisfaits de ce budget-là, M. le Président. Alors, ils se reprennent. L'essence monte, boum! bonne place. Ils nous disent: Il faut baisser les taxes sur l'essence.
Écoutez, les choses n'arrivent jamais par hasard complètement. Le Soleil , ce matin, qui ne se gêne jamais pour nous dire sa façon de penser lorsqu'il considère que nos politiques ne sont pas valables, dans son éditorial signé par Brigitte Breton je ne le lirai pas tout, mais je vais vous en lire un ou deux passages il est dit la chose suivante, et je cite:
«Par ailleurs et elle parle du consommateur lorsqu'il voit qu'environ 50 % du prix d'un litre d'essence va dans les coffres des gouvernements fédéral et québécois, le pauvre contribuable a évidemment le réflexe de réclamer une baisse de taxes. Cette réduction pourrait toutefois s'avérer un mirage pour le consommateur car rien ne garantit que les détaillants afficheraient des prix plus bas à la pompe. Les gouvernements pourraient bien annoncer à pleine page que les bons élus ont fait un beau geste, les pétrolières pourraient néanmoins rester impassibles, assurées que les automobilistes continueront de venir faire le plein. Au mieux, c'est en détaillant le prix de l'essence, à savoir le prix du brut, le coût d'exploitation, les profits et les taxes, devant chacune des stations-service qu'une véritable pression pourrait s'exercer.
«Le ministre des Finances le bon ami de plusieurs des députés du parti de l'opposition, le ministre des Finances fédéral M. Paul Martin, sait tout cela. Après la présentation de son budget, lors d'une entrevue au Soleil , il avait écarté l'idée d'une baisse de taxes pour alléger le fardeau des automobilistes, désignant l'OPEP comme responsable de la situation. Son ouverture de la semaine dernière apparaît davantage comme un truc de politicien pour mettre ses homologues provinciaux dans l'embarras.»
Ça, c'est Le Soleil qui dit ça, là. Ce n'est pas M. le ministre des Finances, ce n'est pas quelqu'un de notre parti, c'est Le Soleil qui dit que la petite passe de Paul Martin, ça vise beaucoup plus à mettre les gouvernements des différents États du Canada dans l'embarras.
(11 h 20)
Qu'en est-il du prix à la pompe? Moi, je suis parti de Montréal lundi, en fin d'après-midi, pour me rendre à Québec. J'ai fait le plein, M. le Président. Ce plein m'a coûté 0,78 $ et quelques centimes le litre. Je trouve ça cher, moi aussi. J'arrive à Québec, je refais le plein: 0,74 $ et quelques centimes, 0,04 $ de différence le litre. Alors là je me dis: Coudon, y a-t-il un complot machiavélique qui viserait à pénaliser les Montréalais et qui viserait à soulager les Québécois? C'est-u ça, l'affaire? Comment se fait-il que je paie 0,04 $ moins cher le litre à Québec? C'est-u parce que l'Assemblée nationale s'y trouve? C'est-u parce que Québec est la capitale de l'État du Québec? Non. C'est clair. Non. C'est uniquement les lois du marché qui font en sorte qu'à Québec la compétition est probablement plus sévère, ce qui fait en sorte que les pétrolières sont plus disposées, pour garder leur clientèle ou l'augmenter, à réduire les prix qu'à Montréal.
La députée de Bonaventure disait tantôt: Il faudrait une réduction de la taxe d'au moins 0,03 $. Bien, mon Dieu, il y avait 0,04 $ de différence entre Québec et Montréal, qu'est-ce que vous pensez qu'il va arriver? Il va arriver ce que l'on disait dans l'éditorial: ça va aller dans les poches des pétrolières, pas dans les poches des citoyens en termes d'économie, dans les poches des pétrolières. Qu'est-ce qu'il va arriver si on perd... 105 millions par cent c'est ça que ça veut dire, hein 105 millions par cent de réduction; 0,03 $ de réduction: 315 millions. Il va où, ce 315 millions là? Aux dernières nouvelles, il n'allait pas dans les poches des ministres ni dans les poches des députés. Il va dans les services de santé, dans les services à l'éducation, dans la sécurité du revenu et dans les différents ministères du gouvernement du Québec. 315 millions de moins, on va aller le chercher où? Est-ce qu'on va commencer à réaugmenter les taxes? Non, M. le Président.
Le Québec, déjà, par ses politiques de soutien aux régions périphériques, réduit la taxe sur les carburant et la taxe à l'immatriculation et il octroie à ces régions-là, déjà, compte tenu de ses politiques, 102 millions. Et je voudrais souligner d'ailleurs que cette réduction, qui est en l'occurrence de 0,045 $, profite justement au comté de Bonaventure dont la députée réclamait, il y a à peine quelques minutes, que le gouvernement réduise ses taxes sur le pétrole, la députée de Bonaventure et les citoyens de ce comté. Et je suis parfaitement d'accord avec ça, parce que c'est une région périphérique, il faut trouver moyen d'aider. Peut-être que la députée serait prête à partager.
M. le Président, l'OPEP, la semaine dernière, à Genève, a décidé, comme le mentionnait le ministre tantôt, d'augmenter sa production pour l'année qui vient de 1,4 milliard de barils par jour, ce qui va faire en sorte que, avec les autres pays qui ne font pas partie de l'OPEP, on se retrouve avec une augmentation de 1,7 milliard de barils par jour, ce qui devrait rétablir la situation, comme l'a très bien expliqué le ministre des Ressources naturelles. Merci.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Groulx et adjoint parlementaire au vice-premier ministre et ministre des Finances. Alors, nous allons maintenant céder la parole au whip adjoint de l'opposition officielle et député de Papineau. M. le député.
M. Norman MacMillan
M. MacMillan: Merci, M. le Président. Il me fait surtout plaisir de pouvoir ce matin me joindre à ma collègue de Bonaventure et surtout de pouvoir faire mon discours après mon collègue de Groulx, parce que qu'est-ce qu'on vient d'entendre... On va quand même essayer, avant de parler vraiment dans le vif du sujet, de parler de la réalité.
On a blâmé tantôt le Parti libéral du Québec avec des déficits quand on a laissé le pouvoir et avec la dette: 6 milliards. C'est vrai, mais la réalité, M. le Président, de 1976 à 1985, quand le gouvernement du Parti québécois était au pouvoir, la dette a augmenté de 23 milliards. De 1985 à 1994, quand c'était le Parti libéral du Québec qui était au pouvoir, la dette a augmenté de 37 milliards. Et, depuis 1999, la dette a augmenté de 35 milliards avec le gouvernement actuel, deux fois plus que dans le temps que le Parti libéral était au pouvoir. Quand le Parti libéral a pris le pouvoir en 1985, si ma mémoire est fidèle, le déficit était de 3 ou 4 milliards de dollars. Et, quand M. Bourassa avait nommé Paul Gobeil président du Conseil du trésor, il avait mis sur la table une manière de baisser le déficit, de 1985 à 1999. M. le Président, le déficit a été baissé à 1,5 milliard en 1989. Et, si on se rappelle bien comme il faut, en 1990, il y a eu une récession au Québec, au Canada, à travers le monde, et le gouvernement du temps a été obligé, à cause du déficit et à cause de la récession, d'augmenter les déficits pour ne pas couper sauvagement dans tout comme le Parti québécois l'a fait depuis quatre ans: en santé, en éducation et toute autre chose, même aux transports.
M. le Président, il faut dire la vérité. C'est bien beau de blâmer toujours le fédéral puis de blâmer toujours le gouvernement du Parti libéral qui a laissé des déficits de 6 milliards sur la table. Et, le 6 milliards, il y a 1 milliard qui a été rajouté par le premier ministre du temps, M. Parizeau, en tournant les chiffres de comptabilité pour augmenter puis dire que c'était la faiblesse et le ministre des Finances du temps. Mais ça, ça fait partie de la game. On comprend tous ça. Mais la vérité, M. le Président: les efforts avaient été faits aussi par le gouvernement libéral du temps qui avait baissé son déficit à 1,5 milliard, en 1989. Et, si on comparait les chiffres des années 1980 à 1985 à la valeur de l'argent aujourd'hui, alors que le déficit était à 3 milliards, on se demanderait, en 1985, ce qu'était réellement le déficit du Parti québécois du temps, quand il était au pouvoir.
Depuis près d'un an, M. le Président, les pays de l'OPEP ont décidé de réduire leur production, ce qui a eu pour effet de provoquer une hausse générale des prix de pétrole sur le marché mondial. Le prix du baril de pétrole est passé de 10 $ à 30 $, et l'on ne prévoit pas de diminution de prix avant plusieurs semaines. Il y a des diminutions de prix entre différentes régions. Nous, on le sait, dans l'Outaouais, il y a une différence à cause qu'on est frontaliers. Nous avons un rabais de 0,01 $ le litre régulièrement. Mais, quand même, avec l'augmentation, tout le monde maintenant paie à peu près la même chose. Parce que, chez nous, lundi je vais faire comme mon collègue de Groulx c'était 0,729 $ et, à Québec, c'était 0,689 $. Alors, il s'est trompé de place pour mettre du gaz, ça aurait été moins cher d'aller ailleurs. Il n'a pas regardé comme il faut.
Alors, l'important de prouver, c'est que c'est vrai. Puis on n'est pas obligé de toujours blâmer le gouvernement, puis c'est la faute de tout le monde. Il y a un problème qui existe présentement pour l'augmentation de la gazoline au Québec, au Canada, à travers le monde. C'est un problème majeur. Il faut quand même essayer de trouver des solutions pour aider les gens.
Je vais vous donner un exemple. Quinze camionneurs sont venus à mon bureau, M. le Président. Vous connaissez ça, vous faites du bureau, vous, à toutes les semaines. Donc, 15 camionneurs qui font les trajets des États-Unis et du Canada sont venus à mon bureau avec la CSN. On ne parlera pas de la CSN au moment où on se parle. Ces camionneurs-là venaient de mon comté, des camionneurs qui, un exemple, avaient fait 4 000 milles parce que les camionneurs sont payés au mille, pas au kilomètre. Un exemple. Ce monsieur-là qui parlait, lui, avec un paiement sur son camion, une famille avec deux enfants, sa femme qui était à la maison, il lui restait 600 $ au bout du mois après avoir fait 4 000 milles dans son mois. Déjà, avant que le gaz augmente, il pouvait aller se chercher un salaire au moins plus que la moyenne, mais maintenant, à cause du gaz puis, lui, il travaille à son compte c'est 600 $ qu'il lui reste pour manger, payer son loyer, ou sa maison, ou son auto, ou quoi que ce soit.
(11 h 30)
M. le Président, il y a un problème quelque part. On veut trouver une solution. On veut aider ces gens-là. Oui, le gouvernement a mis de l'argent sur la table pour les camionneurs puis il a incité les propriétaires, les compagnies de camionnage à faire la même chose. Il y en a qui l'ont fait, il y en a d'autres qui ne l'ont pas fait. Il faut le dire. Il faut dire la vérité. C'est clair que c'est un problème majeur puis que tout le monde essaie de trouver une solution.
Nous, on pense que peut-être... moi, en tout cas, je pense que baisser la taxe temporairement d'un mois, deux mois, trois mois, jusqu'au 1er juin, jusqu'au 1er juillet on aura sûrement... on pourrait aider ces gens-là à continuer à travailler. Payer leurs plaques, là, payer leurs plaques au moment où on se parle, c'est des coûts, si je ne me trompe pas, de 12 000 $ ou 13 000 $ pour certains, puis il y a des gens qui ne sont pas capables de payer leurs plaques au moment où on se parle à cause de l'augmentation du prix du gaz ou du diesel. C'est important qu'on trouve une solution pour aider ces gens-là, de la classe moyenne, qui travaillent régulièrement puis qui présentement ne font pas d'argent.
Est-ce que c'est mieux si on met ces gens-là sur le bien-être social, M. le Président? Si ces 15 camionneurs là décidaient de remettre les clés de leurs camions à la banque ou à l'endroit où ils ont une location puis décidaient d'aller sur le bien-être social, si on comparait une cent du litre, le 100 millions que ça coûte, puis que tous les camionneurs du Québec qui présentement ont des problèmes remettaient leurs clés puis allaient sur le bien-être social, loin d'être un gars qui sait compter comme il faut, mais je m'imagine qu'au bout de ligne on pourrait dire que, pour le gouvernement, ça serait probablement égal dans les pertes des revenus et de la taxe.
Alors, je pense que conjointement... Ma collègue de Bonaventure, M. le Président, a clairement indiqué que le Bloc québécois, les petits cousins du gouvernement en face, va faire une tournée à travers le Québec pour demander aux gens ou pour expliquer aux gens ou pour mettre des pressions sur le gouvernement fédéral pour baisser la taxe. Alors, on se dit cousins, puis on se dit amis, puis on se dit quoi que ce soit, pourquoi ne pas faire la même chose ici? Temporairement, pas pour l'année. Moi, je pense qu'on pourrait le faire d'ici à la fin juin, au 1er juin, 1er juillet, et toutes les indications des experts qui travaillent dans le pétrole nous indiquent qu'il y aura sûrement d'ici à la fin juin une baisse ou un retour au prix qu'on avait déjà à cause que l'OPEP a décidé d'augmenter sa production.
Alors, pour résumer, M. le Président, ces gens-là ont besoin d'aide. Moi, je parle au nom des camionneurs. Parce que, nous, ça nous coûte 20 $, 25 $ par semaine de plus pour nos dépenses, nous, on est chanceux, on a du kilométrage, alors les dépenses sont couvertes, mais il y en a d'autres que ce n'est pas ça. Ceux qui font beaucoup de millage, ceux qui travaillent, les gens dans nos comtés qui travaillent, les gens dans le bois qui ont leurs vieux camions pour sortir le bois du bois oui, ha, ha, ha! c'est bon de le dire comme ça ou on sort le bois de chez eux mais le coût d'opération est élevé, c'est énorme, puis ces gens-là n'ont vraiment pas d'aide de personne. Les gens continuent à travailler pareil. Les gens sont d'une conscience extraordinaire. Les gens veulent continuer pour donner...
Mais je me répète, M. le Président, je suis sûr que, si on faisait l'équation, les gens qui travaillent avec des gros camions, s'ils décidaient de retourner, et ceux qui l'ont fait déjà, la clé de leur camion puis qu'ils étaient obligés d'aller sur le bien-être social parce qu'ils n'ont pas le droit à l'assurance chômage parce que c'est des travailleurs autonomes, on pourrait sûrement dire que, pour le budget du gouvernement du Québec, ça pourrait être égal dans les pertes de revenus pour... si on parle de trois douzièmes d'un an, on parlerait seulement de 6 millions, ou 7 millions, ou 8 millions pour trois mois au lieu de 100 millions durant l'année.
Alors, M. le Président, je veux appuyer fortement la motion de ma collègue de Bonaventure: «Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement péquiste qu'il cesse de profiter des consommateurs du Québec en maintenant les taxes sur l'essence les plus élevées au Canada et en Amérique du Nord.»
Je veux revenir au début. Quand on accuse le gouvernement libéral d'avoir laissé 6 milliards sur la table en déficit en 1994, il faut regarder les chiffres du Parti québécois quand il était au pouvoir: 23 milliards de dettes, d'augmentation de dettes de 1976 à 1985, 37 milliards de 1885 à 1994 et 35 milliards depuis qu'ils sont au pouvoir. Et eux ont eu la chance de pouvoir gérer un budget dans des bons temps. Nous, de 1989 jusqu'en 1994, ça a été des années très difficiles pour tous les gouvernements du continent, comme dit notre cher ministre des Finances du Québec.
Alors, j'espère, M. le Président, que le gouvernement du Québec... Et je vois que le ministre des Transports va sûrement avoir un discours. Je lui demande de l'aide pour nos camionneurs du Québec, qui ont vraiment, vraiment besoin d'aide, M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Papineau et whip adjoint de l'opposition officielle. Nous allons maintenant céder la parole au député de Joliette et ministre des Transports. En vous signalant, M. le ministre, qu'il reste à votre formation un temps de parole de...
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Pinard): Voilà! Alors, allons-y.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Alors, M. le Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur cette motion. Et, d'entrée de jeu, je vous dirai que, sur la plan de la gestion des deniers publics, très honnêtement, je souhaiterais une confrontation populaire sur la crédibilité que peuvent avoir nos formations politiques en cette Chambre.
J'écoutais le député de Papineau, qui est bien sûr obligé de défendre son point de vue, mais, entre vous et moi, il avait beaucoup de difficultés à retenir son rictus quand il sait très bien que le Parti libéral, de 1985 à 1994, a doublé la dette du Québec. Il le sait, ça. Il a beau dire que ça a été dur. C'est dur longtemps, avec eux autres. Ils prévoyaient 2 milliards de déficit; il y en avait 3. Ils en prévoyaient 1; il y en avait 2,5. Ils en prévoyaient 3; ils ont eu 6 milliards, la dernière année, de déficit.
Je pense que la crédibilité du gouvernement actuel concernant le contrôle des dépenses publiques... On a atteint tous nos objectifs, on les a même devancés, nos objectifs de l'atteinte du déficit zéro. On a passé une législation pour respecter ce déficit zéro là. Et je pense que tout le monde dans la population... D'ailleurs, on regarde les derniers sondages, même s'il ne faut pas toujours s'embarquer de façon euphorique suite à des sondages, on se rend bien compte que, chez les francophones du Québec, le Parti québécois, le gouvernement du Parti québécois dépasse largement en crédibilité le Parti libéral, qui est en train à toutes fins pratiques de s'effondrer devant les francophones. Même l'ADQ dépasse l'opposition libérale en matière de crédibilité.
À en mettre trop, M. le Président, des fois, c'est comme pas assez. Essayer de donner une leçon de rigueur administrative, quand on entend ça dans la bouche de ceux qui ont doublé la dette du Québec dans l'espace d'un rien de temps, qui nous ont demandé de ne pas avoir de déficit... On livrait ça plus vite, en plus de ça. Puis ils viennent nous dire aujourd'hui: Il faudrait faire...
Si on les écoutait, on retomberait exactement dans le cafouillis dans lequel ils nous ont laissés en 1994. Si on les écoutait, M. le Président, on mettrait de l'argent qu'on n'a pas, on paierait tout. À la fin de l'année, on arriverait puis on dirait: Nos jeunes, on vient de vous endetter votre avenir puis on vient d'hypothéquer votre avenir de x milliards. Ce n'est pas ça qu'on a choisi comme voie, ce n'est pas ça qu'on entend suivre comme voie. Et, M. le Président, j'espère qu'on va continuer à garder la cap de la rigueur administrative au niveau des dépenses publiques.
Deuxièmement, la députée de Bonaventure, que je croyais un peu plus sérieuse que d'autres, vient de déposer une motion qui dit: «Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement péquiste qu'il cesse de profiter des consommateurs du Québec.» À Rimouski, dans son propre arrondissement, on a tenté l'expérience de la baisse de taxes du pétrole. La députée de Rimouski va s'en rappeler et elle va nous le dire. L'expérience qu'on avait faite de baisser, de plafonner les taxes, savez-vous qui prenait la place, le lendemain matin? Les pétrolières. Les pétrolières, tout de suite, prenaient la place laissée vacante par le gouvernement.
Pourquoi nous priverions-nous de revenus pour la santé et pour l'éducation si on sait que, si on se retire, ça va être les pétrolières qui vont empocher? Et j'ai un tableau, un tableau pour essayer de le leur faire comprendre, puis je le leur enverrai d'ailleurs. On se rend compte que, même si le prix du baril baisse, on se rend compte que, même si les taxes demeurent, croyez-le ou non, les taux ne baissent pas, eux. Qui s'accapare la marge si ce n'est pas encore les pétrolières? Bien, le tableau le démontre très, très bien. Jusqu'au mois de janvier, la marge bénéficiaire était plus ou moins grande, mais, depuis que le prix du baril au port de New York baisse, la marge bénéficiaire s'élargit, M. le Président. Elle s'élargit au profit de qui? Pas au profit de l'État. Elle s'élargit au profit des pétrolières.
(11 h 40)
La députée de Bonaventure, à toutes fins pratiques, vient nous demander: S'il vous plaît, baissez donc les taxes pour que les pétrolières en bénéficient. C'est ça qu'elle nous dit à toutes fins pratiques. Je comprends que ce n'est pas de mauvaise foi qu'elle fait ça. Je comprends qu'elle devrait, par exemple, s'informer de ce qui s'est passé comme expériences dans sa propre région, dans la région de Rimouski...
Une voix: Bas-Saint-Laurent.
M. Chevrette: C'est tout près, ça, madame. Il faut être capable de sortir de son village de temps en temps pour avoir une ouverture d'esprit. Ceci dit, M. le Président, je vous dis très honnêtement que le gouvernement ne marchera pas dans cela. Le gouvernement ne fera pas de place pour augmenter la marge bénéficiaire des entreprises. C'est ça que le Parti libéral voudrait. Et, nous, on dit: Non, non et non. On va garder la rigueur administrative et on va faire en sorte que les citoyens du Québec puissent continuer à bénéficier de services.
D'ailleurs, M. le Président, c'est la même formation politique qui trouve qu'on n'en met jamais assez en éducation. C'est la même formation politique qui trouve qu'on n'en met jamais assez en santé. À tous les jours, comme des automates, comme des robots mécaniques, ils se lèvent: Puis la santé? On met 2,7 milliards. On ne met rien. Il n'y en a pas assez. Mais là ils voudraient qu'on reprenne de l'argent qui rentre dans les coffres de l'État, qu'on redonne ça aux pétrolières. Vous en aurez juste moins pour la santé puis l'éducation.
Est-ce que c'est ça qu'ils veulent? Je ne serais pas surpris. Parce qu'ils ont eu une tendance à s'approcher de ces genres de petits amis. Alors que, nous, on a promis de la rigueur administrative, puis on va le faire. On va le faire au profit des citoyens et des citoyennes du Québec dans des grandes priorités nationales, qui sont la santé, qui sont l'éducation, qui sont la baisse de taxes et d'impôts. C'est ça qu'on fait, baisse d'impôts pour les contribuables cette année.
Alors, M. le Président, moi, personnellement, je voudrais nous réjouir, tous ici, du côté ministériel, du fait que notre appel qu'on a lancé... Rappelez-vous, en février, le ministre de l'Éducation et moi, qui avons deux ministères donneurs d'ouvrage aux camionneurs, qu'est-ce qu'on a fait? On a corrigé la situation, nous autres. On a dit à l'entreprise québécoise: Faites de même. La grande majorité des entreprises québécoises a emboîté le pas au gouvernement. Dans le domaine de la forêt, dans le domaine des pâtes et papiers, dans le domaine des entreprises en général, on a rouvert les tarifs. On a redonné aux camionneurs une partie de cette augmentation, de cette augmentation qui ne se contrôle pas, qu'on ne contrôle pas.
J'espère que l'opposition est au courant que les pays de l'OPEP, ce n'est pas le Canada, ça. J'espère que l'opposition sait que les pays de l'OPEP, ce n'est pas le Québec, ça. J'espère qu'elle sait très bien, cette opposition dite libérale elle a beau être libérale que les pays de l'OPEP avaient développé une stratégie pour faire augmenter les prix précisément en produisant moins: 75 millions de barils par jour de moins. C'est vrai qu'ils ont réussi à faire monter les prix. C'est vrai qu'on en est victimes collectivement au Québec, au Canada, aux États-Unis aussi.
Mais c'est vrai aussi que la pression concertée de l'ensemble nord-américain et d'autres a réussi à faire reprendre la production. La production a recommencé à augmenter présentement. Et on espère que les taux vont baisser. Ils vont baisser en retard parce que le coup qui a été donné depuis un an va sûrement se faire sentir encore cinq à six mois. Mais, au moins, on sait une chose, c'est qu'on n'aura pas tombé dans le piège de faire faire de l'argent exclusivement à des pétrolières. On aura contribué logiquement, correctement à faire partager par l'ensemble de la collectivité ce coup dur que nous ne contrôlons pas.
Je ne crois pas que ce soit l'opposition libérale qui nous ait aidé bien fort à faire en sorte qu'on ait partagé le coût de ces augmentations entre les industries. C'est le gouvernement du Québec actuel qui a donné le ton, qui a lancé un appel, puis l'entreprise québécoise a suivi. Et c'est tout à l'honneur de l'entreprise québécoise, d'avoir su partager ces coûts, cette augmentation de coûts qui était incontrôlable par le gouvernement du Québec.
On a beau être dans l'opposition, on n'est pas obligé d'être stupide dans notre argumentaire. Dans l'opposition, la plus grande façon d'être crédible... D'ailleurs, le chef l'a déjà dit: Si on veut grimper dans l'opinion publique, si on veut monter dans l'opinion publique, il faut s'arranger pour être constructif et crédible. Ce n'est pas la motion d'à matin qui va les faire monter, je peux-tu vous dire ça? La motion d'à matin dénote un manque de connaissance même du dossier, surtout qu'il y a des expériences-pilotes dans une des régions contiguës de la députée qui a déposé cette motion-là. On n'est pas là pour redonner une marge additionnelle aux pétrolières, on est là pour donner un service de qualité aux citoyens et aux citoyennes du Québec.
M. le Président, soit dit en passant, toute cette question de pétrole dénote bien, je pense, d'autre part, qu'il y en a qui ont essayé de profiter de la situation pour faire de la petite politique. J'ai entendu des gens, moi, des leaders au Québec, dire que la taxe était ascenseur. Bien, on va rappeler à la députée de Bonaventure que la taxe ascenseur, elle a été gelée au plus haut niveau par Gérard D. Levesque, en mai 1986, dans cette Chambre. Puis j'étais de l'autre côté de la Chambre. On avait reproché à M. Parizeau d'avoir imposé une taxe ascenseur. Mais une taxe ascenseur, un ascenseur, ça monte puis ça descend. Pour le Parti libéral, eux autres, ça a monté puis ils l'ont accrochée là. Puis c'est depuis 1986, c'est les libéraux qui avaient fait ça. Donc, vous comprendrez qu'on n'a pas tellement de leçons à retirer, M. le Président, de cette noble opposition en décrépitude.
Je pense très honnêtement que, s'ils veulent avoir une crédibilité, qu'ils agissent de façon constructive, qu'ils prennent connaissance, d'abord, de leurs dossiers, qu'ils soient conscients que les gestes qu'on pose ne doivent pas être au profit d'une minorité, mais on doit avoir toujours dans le giron, dans notre vision de développement, dans notre vision de la gestion globale, le sens de la rigueur.
Et c'est avec beaucoup de fierté, M. le Président, en tout cas en ce qui me concerne... Je suis très heureux, après 22, 23 ans de vie politique, de voir qu'on a enfin atteint une rigueur dans l'administration publique, une rigueur qui est tout à l'honneur du gouvernement actuel. On avait pris des engagements, et la crédibilité politique, c'est de respecter ses engagements. On avait dit qu'on atteindrait le déficit zéro, on l'a atteint, M. le Président. On a dit qu'on continuerait à gérer avec rigueur les deniers publics, on va le faire, M. le Président.
Et, soyez sans crainte, je voudrais aviser l'opposition officielle que les recettes toutes faites dans des petites motions du mercredi pour tenter pour tenter, je dis bien d'amenuiser ou de diminuer la capacité de l'État de maintenir une qualité de services et qui au contraire nous entraîneraient encore une fois dans des marges bénéficiaires qui ne profitent pas du tout à l'ensemble des citoyens mais qui ne profiteraient qu'à quatre grandes pétrolières, on a compris ça, de ce côté-ci de la Chambre. On va voter agréablement contre cette motion et on va continuer à dire à l'opposition: Vous faites très bien ça, c'est de même que vous allez rester de l'autre bord. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Transports et député de Joliette. Alors, puisqu'il n'y a pas d'autres intervenants, je vais demander à Mme la députée de Bonaventure et critique officielle de l'opposition en matière de ressources naturelles de procéder à son droit de réplique de 10 minutes. Mme la députée.
Mme Nathalie Normandeau (réplique)
Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, évidemment on vient d'assister à, j'oserais dire, une montée de lait du député de Joliette et ministre des Transports. Évidemment, j'aimerais lui dire qu'on n'a pas de leçons à recevoir de sa part en termes de bonne gestion des deniers publics et de crédibilité. Tous les Québécois, M. le Président et ça, ça va passer à l'histoire vont se rappeler du 841 millions de dollars que ce gouvernement-là a sciemment caché dans une banque de Toronto, alors qu'il y a des secteurs comme la santé et l'éducation qui sont en train de s'écrouler littéralement.
M. le Président, le débat de ce matin est un débat très important. Et le député, tout à l'heure, le ministre des Transports nous parlait de stupidité. Alors, de toute évidence, il aurait intérêt à parler à son collègue des Ressources naturelles, parce que, là, il y a un nouveau discours, en ce moment, de la part du gouvernement péquiste: C'est la faute des grandes pétrolières, M. le Président! C'est la faute des grandes pétrolières, c'est elles qui encaissent les deniers suite à l'augmentation des prix. Et c'est le même discours que tient le ministre des Finances.
Alors, derrière le discours du ministre des Transports, on comprend que les grandes pétrolières, donc, se mettent ensemble pour... Le ministre des Transports aurait même pu nous parler de collusion. Alors, le ministre des Transports nous dit que c'est la faute des grandes pétrolières, et le ministre des Ressources naturelles, lui, nous dit exactement le contraire, M. le Président, que, suite à l'enquête qui a été menée par la Régie de l'énergie, le marché est parfaitement concurrentiel, donc qu'il n'y a pas de collusion entre les grandes pétrolières. Alors, M. le Président, les deux ministres auraient intérêt à se parler parce que, de toute évidence, le discours n'est pas crédible et ne tient pas. Alors, que le ministre des Transports arrête de nous faire la morale à ce sujet-là.
(11 h 50)
Alors, le ministre des Finances et ces discours qu'a tenus le député de Groulx ce matin et que tient le député de Joliette disent: Les grandes pétrolières, donc, s'en mettent plein les poches. Et vous me permettrez de citer le ministre des Finances, le 23 mars dernier, en commission parlementaire, qui nous a dit ceci, M. le Président: «Si on bouge, c'est les compagnies qui vont mettre ça dans leurs poches.» Et d'ajouter, M. le Président: «Pourquoi est-ce que le gouvernement du Québec diminuerait ses revenus pour augmenter le prix des revenus des multinationales du pétrole ou des pays producteurs de pétrole?» Alors, ce qu'il nous dit, M. le Président, c'est que, encore une fois, les grandes pétrolières s'en mettent plein les poches. Ce que j'aimerais lui répondre, M. le Président, c'est que l'article 68 de la Loi sur les produits pétroliers permet au gouvernement de fixer un prix maximal.
Prenons un scénario x. Le gouvernement décide de diminuer temporairement une partie ou la totalité de sa taxe spécifique sur l'essence. Donc, pour éviter que les grandes pétrolières empochent de l'argent dans leurs coffres, le gouvernement fait appel à cette loi-là et fixe un prix maximal lié à une diminution de la taxe spécifique sur l'essence, et tout ça, M. le Président, pour s'assurer que les grandes pétrolières justement n'en mettent pas plein leurs poches, tout ça en mandatant la Régie de l'énergie, qui, sur la base d'un mandat de surveillance, pourrait s'assurer effectivement que les objectifs que poursuit le gouvernement sont bien respectés.
Alors, j'aurais envie de vous dire ce matin, M. le Président, que l'intervention du ministre des Transports n'a absolument rien d'étonnant. On tente, une fois de plus, donc, de dévier le débat. Ce qui est en cause ici, ce matin, M. le Président, c'est que l'ensemble des consommateurs d'essence et de carburant au Québec demandent une diminution des taxes, point à la ligne. Le gouvernement a la marge de manoeuvre pour le faire. Et la preuve, M. le Président, c'est qu'ils ont caché 841 millions de dollars dans une banque de Toronto. Alors, qu'on ne vienne pas nous dire qu'on n'a pas la marge de manoeuvre nécessaire et suffisante pour diminuer le fardeau fiscal des contribuables.
Des voix: ...
Mme Normandeau: Et là il y a énormément de réactions de l'autre côté, évidemment, en face de moi, et ça se comprend parce qu'on dit toujours que la vérité choque.
M. le Président, je vais vous dire ce matin qu'il y a huit bonnes raisons de baisser les taxes sur l'essence au Québec. Huit bonnes raisons. Je vous les énumère. Tout d'abord: les consommateurs du Québec sont les principales victimes de l'augmentation des prix de l'essence et il n'y a aucune mesure spéciale qui existe en ce moment pour permettre à chacun de ces consommateurs de retirer, de bénéficier d'une compensation au niveau de l'augmentation des prix, contrairement à certaines entreprises qui peuvent récupérer une partie des taxes.
Les consommateurs, partout au Québec, dans toutes les régions du Québec, sont doublement touchés, voire même triplement touchés: à la pompe, lorsque les gens font le plein; dans les régions du Québec, lorsqu'on a à parcourir de très grandes distances; également un impact qu'ils ont à assumer, une augmentation qu'ils ont à assumer liée à l'augmentation des biens de consommation et des services.
Une troisième raison de diminuer les taxes: on sait que l'essence est un bien essentiel. Alors, quand le ministre des Ressources naturelles nous dit faire référence au fameux principe de l'élasticité, que c'est un principe qui vaut pour le domaine de l'essence, bien, je regrette, à très court terme, c'est faux, c'est complètement faux. Puisque nous sommes captifs du marché de l'essence, à court terme, nous n'avons aucune autre alternative possible à l'essence.
Quatrième raison, M. le Président, de diminuer les taxes: les consommateurs partout au Québec sont à bout de souffle. Les consommateurs souhaitent qu'on diminue les taxes sur l'essence pour leur permettre donc d'avoir une marge de manoeuvre plus importante. Et la grogne commence à s'installer partout au Québec, mais plus spécialement dans le comté du premier ministre et dans le comté du ministre des Ressources naturelles.
Cinquième raison de diminuer les taxes sur l'essence et j'en ai fait la démonstration ce matin: il y a plusieurs secteurs de l'économie au Québec qui sont touchés par cette augmentation des prix de l'essence. Dans le domaine touristique, dans le domaine agricole, dans le domaine des pêches, dans le domaine de la forêt, dans le domaine du transport, tous les secteurs d'activité sont touchés par l'augmentation des prix de l'essence.
Sixième raison, M. le Président, de diminuer les taxes sur l'essence: le fédéral, par la voix de son ministre des Finances, a ouvert une porte très grande à l'ensemble des provinces partout au pays pour qu'on puisse diminuer les taxes. Le ministre fédéral des Finances est conscient de la gravité de la situation actuelle, est conscient qu'il y a nécessité et urgence d'intervenir.
Et ce qu'on comprend, sur la base des propos que nous ont tenus nos amis d'en face ce matin, c'est qu'ils banalisent tous, autant le ministre des Ressources naturelles, autant le ministre des Transports, les effets sur l'économie et sur les consommateurs du Québec. Et ce qu'on doit comprendre, c'est que le ministre fédéral des Finances, c'est que le gouvernement canadien est beaucoup plus sensible, lui, à ce que vivent les consommateurs de partout au Canada et partout au Québec, contrairement au gouvernement d'en face.
Septième raison, M. le Président, de diminuer les taxes sur l'essence: le gouvernement actuel pourrait envoyer un message très clair et diminuer le fardeau fiscal des contribuables partout au Québec. Le député de Groulx l'a admis, nous sommes les citoyens, nous sommes les contribuables, les consommateurs les plus taxés au Québec au Canada, en Amérique du Nord. Champions sur toute la ligne au niveau des taxes! Alors, le gouvernement pourrait évidemment entendre l'appel qui lui est lancé par l'ensemble des consommateurs et donc accepter de diminuer, de réduire les taxes sur l'essence. Et ça, même s'il le fait d'une façon temporaire, il nous ferait la démonstration qu'il est à l'écoute de l'ensemble des consommateurs au Québec.
Dernière et huitième raison de diminuer les taxes sur l'essence: c'est la marge de manoeuvre dont dispose le gouvernement actuel. Et comment voulez-vous qu'on accorde une crédibilité au gouvernement péquiste à l'effet qu'il n'y aurait pas en ce moment de marge de manoeuvre pour réduire les taxes, alors qu'on sait très bien qu'il y a 841 millions de dollars qui ont été cachés dans une banque à Toronto? Écoutez, il n'y a plus aucun Québécois qui croit le gouvernement actuel lorsque le gouvernement nous fait la morale sur la bonne gestion des deniers publics.
Alors, ce matin le gouvernement a la chance, sur la base de la motion qui est présentée par l'opposition, d'envoyer un message clair à l'ensemble des consommateurs d'essence et de carburant au Québec. Que le gouvernement une fois pour toutes prenne ses responsabilités et prenne le leadership sur cette question au Canada et signifie au gouvernement fédéral et aux consommateurs qu'il est prêt à prendre ses responsabilités et à diminuer les taxes sur l'essence.
Alors, ce matin j'espère que le gouvernement, par la voix du ministre des Ressources naturelles, par la voix du ministre des Transports, par la voix du ministre des Finances, va une fois pour toutes entendre l'appel qui est lancé par l'ensemble des consommateurs. Ce que nous voulons, M. le Président, c'est très simple, très, très simple: diminuons les taxes sur l'essence pour soulager le fardeau des consommateurs partout au Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de Bonaventure et critique officielle de l'opposition en matière de ressources naturelles. Le débat étant terminé, nous allons maintenant mettre aux voix la motion de Mme la députée de Bonaventure, qui se lit comme suit:
«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement péquiste qu'il cesse de profiter des consommateurs du Québec en maintenant les taxes sur l'essence les plus élevées au Canada et en Amérique du Nord.»
M. le ministre des Transports.
M. Chevrette: Conformément à l'article 223, je vous demanderais de reporter le vote aux affaires courantes.
Vote reporté
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous reportons donc le vote lors des affaires courantes, cet après-midi.
Alors, ayant terminé, nous suspendons donc nos activités jusqu'à cet après-midi, 14 heures.
(Suspension de la séance à 11 h 59)
(Reprise à 14 h 3)
Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés. Nous allons d'abord nous recueillir un moment.
Affaires courantes
Bien. Veuillez vous asseoir. Alors, nous débutons immédiatement les affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.
Dépôt de documents
Au dépôt de documents, M. le ministre de la Solidarité sociale.
Document de consultation intitulé Le milieu communautaire Un acteur essentiel au développement du Québec
M. Boisclair: M. le Président, le gouvernement du Québec continue d'innover, et il me fait grand plaisir de déposer un document de consultation, Le milieu communautaire Un acteur essentiel au développement du Québec , et profiter de l'occasion pour annoncer que M. Gérald Larose a accepté, au nom du gouvernement, de mener d'importantes consultations sur ce document.
Des voix: Bravo!
Le Président: Bien. Ce document est déposé. Puisqu'il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni de pétitions, je vous avise qu'après la période de questions et de réponses orales va être tenu un vote reporté sur la motion de Mme la députée de Bonaventure, présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.
Questions et réponses orales
Nous allons immédiatement aborder la période de questions et de réponses orales. M. le député de WestmountSaint-Louis.
À l'ordre, s'il vous plaît! En question principale, M. le député de WestmountSaint-Louis.
Modification des articles 45 et 46 du Code du travail dans le cadre des fusions de municipalités
M. Jacques Chagnon
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Non seulement le gouvernement s'apprête-t-il à faire des fusions forcées, mais, pour être sûr de les rendre invivables, il refuse de modifier le Code du travail. La ministre du Travail a même déclaré hier à La Presse canadienne , et je la cite: «Les villes font bien des bulles autour de l'article 45 du Code du travail, qui a pris une dimension mythologique.»
M. le Président, parmi les mythomanes, citons Mario Laframboise, président de l'Union des municipalités du Québec: «Le gouvernement doit commencer par poser deux gestes: premièrement, décréter l'abolition des planchers d'emploi dans les municipalités, et, deuxièmement, suspendre l'application des articles 45 et 46 du Code du travail pour les municipalités.»
Parmi les autres mythomanes, M. Florian Saint-Onge, président de la Fédération québécoise des municipalités: «Les municipalités demandent, entre autres, des modifications au Code du travail ouvrant la voie au recours à la sous-traitance, à l'élimination des dédoublements de conventions et d'accréditations syndicales.»
Parmi les autres mythomanes, M. le Président, le maire de Montréal, M. Bourque, à qui on posait la question: Est-ce que votre plan ne suppose pas obligatoirement des modifications aux conditions de travail? Et sa réponse: Oui, j'en ai souvent parlé au premier ministre qui en est très conscient.
Si le premier ministre en est conscient, si les ministres et le cabinet en sont conscients, M. le Président, qui de la ministre du Travail ou de sa voisine de banquette, la ministre des Affaires municipales, va comprendre la première l'importance de modifier le Code du travail et, entre autres, les articles 45 et 46?
Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: Alors, M. le Président, je l'ai dit hier et je le répète: le projet qui va prévoir la réorganisation du monde municipal va comporter des dispositions pour que, en ce qui a trait aux relations de travail, ça puisse se passer de manière ordonnée, tout en respectant les droits et obligations de tout le monde. Nous avons donc prévu un processus qui a été piloté par le ministère du Travail, avec la complicité du ministère des Affaires municipales, et nous sommes conscients qu'une opération d'envergure de regroupement des municipalités comporte un certain nombre de défis et qu'il nous faut prévoir un processus distinct.
Ceci étant dit, tout le monde le sait, nous sommes dans une démarche de révision du Code du travail, j'ai commencé à avoir des discussions avec les unions municipales, avec les syndicats, avec les principaux acteurs qui sont concernés par la réforme du Code. Alors, en temps et lieu, nous ferons part des choix gouvernementaux en ce domaine.
Et je terminerai en disant que, bien sûr, il faut penser à des aménagements pour les municipalités, qui sont aussi des employeurs, mais j'ai aussi la préoccupation de penser et de m'attarder à la réalité des gens qui travaillent dans les municipalités, et, ça aussi, il faut y penser, il faut donc faire les choses correctement.
Le Président: En question principale à nouveau, M. le député de WestmountSaint-Louis.
Modifications législatives favorisant le regroupement de municipalités
M. Jacques Chagnon
M. Chagnon: M. le Président, parlant de bulles, on peut continuer. J'ai fait état de gens qui sont du secteur municipal. Pensons maintenant à des firmes. SECOR, par exemple, qui est une firme que cite souvent le gouvernement. Que dit SECOR? Une étude commentée par cette firme démontre que «les économies de 100 millions par année pourraient être possibles advenant une fusion, mais elles sont conditionnelles à des changements majeurs de la part du gouvernement du Québec, entre autres dans le Code du travail».
M. le Président, la Chambre de commerce de Montréal dit ceci: Elle n'appuiera jamais un projet de fusion à Montréal sans avoir l'assurance d'obtenir des changements législatifs importants, notamment au Code du travail.
La réunion de cette semaine avec des députés du Québec puis de l'Ontario, M. le Président, est arrivée à ceci comme conclusion: l'expérience ontarienne des fusions municipales prouve aussi que l'État doit d'abord leur fournir des lois du travail moins contraignantes.
(14 h 10)
Et, M. le Président, vous vous souvenez de ça? Vous vous souvenez du rapport Bédard? 1,8 million que vous avez dépensés pour le faire faire. Bien, je vous suggère de relire la page 340. En page 340, à l'article 104, les conclusions du rapport Bédard: «Que le Code du travail soit...»
Le Président: M. le député de WestmountSaint-Louis, je m'excuse, mais vous avez déjà très largement dépassé le temps accordé à un préambule. Alors, je vous invite maintenant à poser votre question.
M. Chagnon: M. le Président, il me reste une ligne à lire avant de poser cette question-là. Je lis le rapport Bédard, ce sera très court: «Que le Code du travail c'est la réflexion et la suggestion du rapport Bédard soit amendé préalablement à tout changement aux structures municipales préalablement pour que les articles 45 et 46 ne s'appliquent pas aux cas de sous-traitance quand il s'agit d'une simple concession de fonction de travail.»
M. le Président, encore une fois, au lieu de faire des bulles, est-ce que la ministre des Affaires municipales et la ministre du Travail pourront nous dire laquelle va commencer à comprendre la première que d'enlever des irritants dans le secteur du Code du travail, c'est la seule façon de faire en sorte qu'il puisse y avoir des fusions volontaires? Merci.
Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: M. le Président, je ne sais pas comment être plus claire, je dis en cette Chambre que le projet de loi qui va concerner la réorganisation du monde municipal va comporter un processus spécifique, justement parce qu'on est conscient que le processus normal ne permettrait pas de procéder à des regroupements de municipalités dans un esprit ordonné et dans le respect de tout le monde. Il y aura dans cette loi des dispositions qui vont prévoir un processus spécifique pour que cette période de regroupement des municipalités se fasse en respect des droits de tout le monde.
Alors, je ne sais pas sur quel ton le dire, pour moi, ça m'apparaît clair, le gouvernement est conscient qu'il fallait prévoir un processus particulier, et nous allons le faire.
Le Président: En complémentaire, M. le député...
M. Chagnon: En additionnelle, M. le Président.
Le Président: Sans préambule.
M. Jacques Chagnon
M. Chagnon: Sans préambule. Qu'est-ce que la ministre veut dire lorsqu'elle nous parle du processus? Est-ce que le processus dont elle nous parle va affecter, oui ou non, les articles 45 et 46?
Une voix: Voilà.
Une voix: Bravo!
Le Président: Mme la ministre.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: M. le Président, lorsque cette loi sera déposée, qu'elle aura été convenue au gouvernement, qu'elle sera déposée, le processus sera au clair, il sera au grand jour, et nous pourrons en discuter à ce moment-là.
Le Président: En question principale, M. le député de Vaudreuil.
Embauche de personnel en prévision d'une pénurie appréhendée de personnel infirmier à l'été
M. Yvon Marcoux
M. Marcoux: Merci, M. le Président. Alors, cet été, le réseau de la santé va vivre une pénurie d'infirmières sans précédent, et ce, pour deux raisons: premièrement, parce que le gouvernement a mis à la retraite 4 000 infirmières et, deuxièmement, parce que, cette année, nous aurons la plus petite cohorte de diplômées, d'infirmières, des cégeps depuis 20 ans, principalement parce que la ministre de la Santé, qui était à l'époque ministre de l'Éducation, avait restreint, avait établi des contingentements pour l'accès aux sciences infirmières au cégep, une année auparavant.
Donc, en raison de cette pénurie, on parle de fermer 1 500 lits dans la région de Montréal et près de 200 lits dans la région de Québec, sans compter dans les autres régions. Pour essayer de pallier à cette situation déplorable qui a été créée par le gouvernement, ce dernier s'apprête à reconnaître les étudiants de deuxième année, leur reconnaître des actes délégués afin qu'ils puissent pratiquer en milieu hospitalier.
Est-ce que la ministre ne croit pas qu'en ajoutant aux infirmières diplômées, qui sont déjà en nombre restreint, qui sont déjà surchargées de travail, des responsabilités supplémentaires d'encadrement et de surveillance à l'égard de ces étudiantes, elle ne pourra pas contribuer à rendre la situation plus difficile à la fois pour le travail des infirmières et à la fois pour les services aux patients?
Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Je ne crois pas, M. le Président, que ce sera le cas. Nous avons demandé à toutes nos institutions d'essayer d'alléger le travail des infirmières cet été en embauchant du personnel auxiliaire, en embauchant du personnel administratif qui peut accomplir des tâches périphériques qui ne sont pas le propre des responsabilités des infirmières. Cette entente, nous l'avons faite avec l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec dont la mission essentielle est de protéger le public dans le cadre de l'exercice de leur profession. Et, en ce sens, je pense qu'au contraire on va venir faciliter le travail accompli dans les hôpitaux cet été et permettre que le niveau de service soit acceptable, M. le Président.
Le Président: M. le député de Vaudreuil.
M. Yvon Marcoux
M. Marcoux: En complémentaire, M. le Président. Est-ce que la ministre, compte tenu de l'ampleur de la pénurie anticipée et de l'impact sur les services aux patients, ne pourrait pas faire appel aux infirmiers et infirmières auxiliaires en raison de leur expérience elles l'ont prouvé, d'ailleurs, lors de la grève des infirmières, l'été dernier ou encore est-ce que la ministre a simplement l'intention de les ignorer?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Non, M. le Président, je n'ai pas l'intention de les ignorer. Ce qu'il faut aussi ajouter à ma réponse, c'est que les établissements, en vertu d'une entente que nous avons eue d'ailleurs même avant la grève des infirmières, l'année dernière, ouvrent actuellement des postes réguliers, à temps plein ou à temps partiel, mais réguliers, donc garantissant un certain nombre d'heures de travail, ce qui stabilise aussi le niveau d'emploi dans les hôpitaux.
Non, nous n'avons pas l'intention d'empêcher que les établissements puissent embaucher des personnels auxiliaires, des infirmiers et infirmières auxiliaires, absolument pas. Cependant, les établissements, fonction de leurs besoins, évaluent le nombre de professionnels qu'ils ont à embaucher, compte tenu du personnel qui vient des universités ou des cégeps, et ils compléteront, s'il y a lieu et si nécessaire, avec du personnel auxiliaire. Mais il n'y a pas d'opposition de ma part en ce sens.
Le Président: En question principale?
M. Mulcair: Additionnelle.
Le Président: En complémentaire, M. le député de Chomedey.
M. Thomas J. Mulcair
M. Mulcair: M. le Président, est-ce que la ministre responsable de l'application des lois professionnelles peut nous dire en vertu de quel principe on s'apprête à faire un règlement de délégation d'acte parce que ce n'est pas la ministre de la Santé qui va en être responsable, c'est elle, la ministre responsable des professions qui va être responsable de ce règlement de délégation d'acte en vertu de quel principe on s'apprête à déléguer des actes médicaux à des gens qui sont non membres d'un ordre professionnel? Et qu'est-ce qu'elle a eu comme évaluation de l'Office des professions à cet égard, notamment en ce qui concerne le secret professionnel et le secret des informations confidentielles concernant les patients?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Je n'avais pas relevé cet élément dans l'intervention du député de Vaudreuil, M. le Président. Il ne s'agit pas de délégation d'acte, et les ententes que nous avons eues et l'encadrement auquel nous nous attendons compte tenu de cette entente avec l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec respectent en tous points les exigences au plan professionnel. Et je trouve absolument inacceptable qu'on sème le doute quant à la qualité des services qui seront rendus dans nos hôpitaux cet été, M. le Président.
Le Président: M. le député.
M. Thomas J. Mulcair
M. Mulcair: Est-ce que la ministre responsable de l'application des lois professionnelles est consciente que la Loi médicale et la Loi sur les infirmières constituent des professions à exercice exclusif et que les tâches ne peuvent pas être déléguées au terme d'une simple entente administrative, ça prend une loi ou un règlement de délégation d'acte?
Alors, de deux choses l'une: ou on est en train de se leurrer si on dit que ces étudiantes-là vont pouvoir poser des actes réservés aux infirmières ou on est en train de nous dire quelque chose qui est contraire aux lois professionnelles.
Alors, encore une fois, notre question s'adresse à la ministre responsable, c'est-à-dire à la ministre de la Justice, responsable des lois professionnelles: Oui ou non, est-ce qu'il y a eu consultation à l'Office des professions? Oui ou non, est-ce qu'on va attribuer des tâches réservées aux infirmières aux étudiantes et, si oui, comment on va assurer le secret professionnel?
Le Président: Mme la ministre de la Justice.
Mme Linda Goupil
Mme Goupil: Alors, M. le Président, l'Ordre professionnel des infirmières ainsi que les infirmières et infirmiers auxiliaires que j'ai rencontrés jusqu'à maintenant nous ont exprimé la réalité qu'ils vivent sur le terrain. Alors, il est évident que ce sont des gens professionnels qui depuis de nombreuses années, pour ce qui est infirmiers et infirmières auxiliaires, offrent des services à la population du Québec, et le travail qu'ils ont fait jusqu'à maintenant, ils l'ont toujours fait avec beaucoup de professionnalisme. Quant aux infirmiers et aux infirmières, ils le font également avec beaucoup de professionnalisme. J'ai confiance à ces gens qui depuis de nombreuses années donnent le meilleur d'eux-mêmes pour les soins des Québécois et des Québécoises, qui réussissent à s'entendre pour permettre à notre institution d'offrir des soins de santé, et ce sont des professionnels qualifiés pour le faire. Et nous n'accepterons jamais que vous discréditiez un ou l'autre, que ce soient les infirmiers et infirmières auxiliaires ou les infirmiers professionnels.
(14 h 20)
Le Président: M. le député.
M. Thomas J. Mulcair
M. Mulcair: Est-ce que la ministre responsable de l'application des lois professionnelles peut comprendre qu'on n'est pas en train de lui demander un choix entre les infirmières ou les infirmières auxiliaires, qui sont effectivement professionnelles, membres de leur ordre respectif? Ce qu'on est en train de lui demander, c'est ceci: Comment est-ce qu'elle va déléguer des actes à des étudiantes qui ne sont membres ni de l'un ni de l'autre, qui n'auront aucun encadrement, pas de code de déontologie, pas de comité de discipline, aucun encadrement législatif?
Elle est ministre responsable de l'application de lois professionnelles. On n'est pas en train de parler d'opinion personnelle ici, on veut savoir comment elle va assurer la protection du public, et notamment le respect du secret professionnel dans le domaine médical, en utilisant des étudiantes pour faire un travail autrement réservé aux membres d'ordres professionnels.
Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Je reconnais bien là les tactiques du député de Chomedey, M. le Président, qui essaie par avance de dénoncer des situations qui n'ont pas à l'être et de discréditer du travail professionnel qui sera accompli dans nos institutions par des professionnels.
D'abord, il parle à travers son chapeau, là, parce que l'entente, elle n'est pas terminée avec l'Ordre des infirmières, et nous sommes à finaliser le tout pour nous assurer justement du respect du Code des professions et de l'implantation de mesures adéquates, sous supervision d'infirmières diplômées et responsables.
Le Président: En question principale, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Contenu du prospectus de Vidéotron
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Le 25 février dernier, le voile a été levé sur une entente secrète entre la Caisse de dépôt et Vidéotron. Or, il y a trois principes qui doivent guider l'information que donne une entreprise aux actionnaires qui veulent détenir des actions ou des titres.
D'ailleurs, M. le Président, la loi est claire. Que doit contenir un prospectus? Le prospectus doit contenir toutes les informations suivantes, mais il doit notamment révéler tous les faits importants susceptibles d'affecter la valeur ou le cours des titres qui font l'objet de placements.
Or, la situation qui prévaut actuellement pour les actionnaires de Vidéotron illustre parfaitement que l'information n'est pas complète et est pleine d'omissions. Le ministre des Finances connaît parfaitement les exigences de la loi. Comment va-t-il s'assurer de faire respecter l'esprit et la lettre de la loi?
Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.
M. Bernard Landry
M. Landry: Bien, premièrement, s'il s'agit d'un prospectus, je présume que c'est celui de Vidéotron, où la Caisse est très, très minoritaire. Ça veut dire que la députée laisse entendre que les principaux actionnaires de Vidéotron, la famille Chagnon, ont menti au reste des actionnaires ou n'ont pas dévoilé toute l'information concernant l'état de leur compagnie et je présume que les citations de la députée sont exactes ce qui est théoriquement leur devoir. Si tel est le cas, ça ne relève pas du ministère des Finances, qui ne peut pas donner d'ordre à la Caisse de dépôt et, de toute façon, la Caisse est minoritaire, à hauteur de 15 ça relève de la Commission des valeurs mobilières. Et je pense que cette Commission, si elle n'est déjà alertée, pourrait l'être aussi bien par la députée que par moi-même ou par quiconque, et on va s'arranger pour que ça se fasse si c'est pertinent.
Le Président: Mme la députée.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Est-ce que le ministre des Finances n'est pas en train de se laver les mains de la responsabilité qui lui incombe face aux petits investisseurs et de cautionner des irrégularités en évitant de s'engager aujourd'hui, dans cette Chambre, à apporter des correctifs?
Le Président: M. le ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: Je me lave les mains quand j'ai les mains sales, M. le Président. Et, dans ce cas-là, si j'avais tripoté dans la Caisse de dépôt, oui, j'aurais les mains sales, mais ce n'est pas le cas.
La Caisse de dépôt et placement, de par sa loi, gère ses affaires en son âme et conscience, avec grand succès d'ailleurs, des rendements de 17 % cette année, dont on peut les féliciter au passage. Et, pour le reste, le gouvernement nomme les administrateurs de la Caisse de dépôt, a le devoir de déposer le rapport annuel ce que j'ai fait il y a quelque temps et le droit de s'informer de ce qui se passe. Et mes prédécesseurs se sont toujours fait un point d'honneur de ne pas gérer la Caisse de dépôt et placement. Ils avaient bien des torts, mes prédécesseurs, ils nous avaient mis dans les dettes, il y avait eu un déficit de 6 milliards, mais ils ne géraient pas la Caisse de dépôt et placement, et je n'ai pas l'intention de le faire non plus, M. le Président, parce que j'obéis aux lois de cette Assemblée.
Une voix: Bravo!
Le Président: En question principale, maintenant, Mme la députée de Bonaventure.
Voie du rendement accru en matière d'exploitation forestière
Mme Nathalie Normandeau
Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Plus les jours passent, plus on constate à quel point le ministre des Ressources naturelles a de la difficulté avec la gestion des forêts au Québec. Il y a à peine cinq mois, devant l'Association forestière de l'Abitibi-Témiscamingue, le ministre déclarait que le Québec devait maintenir l'orientation du développement soutenu des forêts. Or, en commission parlementaire hier, le ministre a surpris tout le monde en annonçant qu'il avait décidé unilatéralement de faire passer le développement des forêts au rendement accru, et ce, M. le Président, même si le projet de loi sur la révision du régime forestier n'est pas encore présenté à l'Assemblée nationale. Et ce qui est le pire, c'est que ce ministre a déjà fait son nid dans cette question-là, alors que la consultation publique sur la révision du régime forestier n'a pas encore eu lieu.
Alors, ma question est bien simple, M. le Président: Comment le ministre des Ressources naturelles, qui affirmait il y a moins d'un an que la forêt au Québec se régénère naturellement, peut expliquer ce virage à 180 degrés? Et comment peut-il nous expliquer quels sont les résultats de l'inventaire forestier qui justifient un virage à 180 degrés?
Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, d'abord, je suis content de voir que la députée de Bonaventure, cinq mois plus tard, vient de découvrir le discours que j'ai prononcé en Abitibi, dans le comté de Rouyn-Noranda. Et, en certains milieux, le mot «rendement» effarouche et, quand on parle de rendement accru, parfois ça sème la panique, mais je vous dirais que, moi, ça ne m'inquiète pas. Quand on a fait la consultation en région, au début du processus de révision du régime forestier, il y a eu des centaines de mémoires qui ont été déposés dans les diverses régions, et une majorité d'intervenants s'est prononcée en faveur du rendement accru, de faire en sorte que, en certains territoires, pas partout, pas dans toute la forêt publique, dans certains territoires, on puisse envisager une forêt plus productive, et tout le monde était d'accord avec cette orientation-là. C'est ce que j'ai indiqué en Abitibi-Témiscamingue, c'est ce que j'ai repris hier en commission parlementaire en disant à la députée de Bonaventure que effectivement il fallait s'engager dans la voie du rendement accru. Ce qui ne signifie pas, M. le Président, qu'en vertu de la loi ce sera une obligation pour tous les détenteurs de contrats d'approvisionnement de faire du rendement accru. Le rendement soutenu va demeurer l'assise du régime forestier, mais il faudra permettre, là où c'est possible, là où c'est faisable, de s'engager dans la voie du rendement accru. C'est ça, l'orientation.
Le Président: Mme la députée.
Mme Nathalie Normandeau
Mme Normandeau: M. le Président, comment le ministre des Ressources naturelles peut justifier une décision d'importance comme celle-là, alors que le projet de loi n'est pas encore déposé, alors que les intervenants n'ont pas pu encore s'exprimer en commission parlementaire? La question est simple: Comment il peut justifier sa décision?
Le Président: M. le ministre.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Mais, au cas où la députée n'aurait pas compris, là, un projet de loi, ça va être déposé à l'Assemblée nationale puis ça va comporter un certain nombre de modifications à la Loi sur les forêts, un certain nombre d'orientations, dont l'orientation portant sur le rendement accru, et il y aura une consultation en commission parlementaire. Si l'opposition est contre cette orientation-là, elle l'exprimera à ce moment-là. S'il y a d'autres intervenants qui sont contre, ils viendront nous le dire.
Le Président: En question complémentaire, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président, question additionnelle. N'est-il pas exact, M. le ministre des Ressources naturelles, que, lorsque vous êtes venu en Abitibi-Témiscamingue, il y a un grand nombre d'intervenants très préoccupés par une gestion intelligente de la forêt, axée sur le développement durable, qui vous ont prouvé dans un document étoffé que, dès qu'on intervient dans une forêt d'une façon intelligente, on génère plus de possibilités forestières, ça s'appelle le rendement accru, et c'est peut-être ça, la décision que vous avez prise?
(14 h 30)
Des voix: ...
M. Brassard: M. le Président, d'abord...
Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce et celui de Kamouraska-Témiscouata également. Alors, M. le ministre, pour votre réponse.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Je veux simplement, d'abord, vous signaler que je n'étais pas avisé de cette question...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: ...mais, effectivement, c'est une excellente question et c'est vrai que, lors de mon passage en Abitibi-Témiscamingue, on m'avait déposé un document qui effectivement faisait la démonstration que sur certains territoires encore une fois, pas partout, mais sur certains territoires on peut envisager de rendre la forêt plus productive dans le respect des écosystèmes, dans le respect des principes du développement durable et dans le respect des autres utilisateurs de la ressource. Et pas seulement en Abitibi-Témiscamingue, mais, vendredi, il y aura le congrès des coopératives forestières qui va se tenir ici, à Québec, et, elles aussi, les coopératives forestières, m'ont déposé un projet très étoffé, très articulé qui, évidemment, va dans le sens de rendre la forêt québécoise plus productive, encore une fois, sans affecter les écosystèmes et sans trahir les principes du développement durable.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup, en question principale.
Accès des stagiaires et des nouveaux diplômés aux emplois dans la fonction publique
M. Mario Dumont
M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Le gouvernement du Parti québécois, autant dans la dernière campagne électorale que dans son programme politique et au Sommet de la jeunesse, a annoncé ses intentions de faire davantage de place aux jeunes dans la fonction publique, d'avoir des règles plus équitables pour les jeunes à l'intérieur de la fonction publique. Pourtant, dans l'action, c'est exactement le contraire, c'est l'instauration de barrières pour les jeunes par rapport à la fonction publique. D'abord, les plus jeunes occasionnels qui ont des barrières à l'accès à des emplois réguliers, les stagiaires qui ont des barrières à l'accès à des emplois occasionnels, ça fait que l'Association des jeunes de la fonction publique du Québec a fortement dénoncé le président du Conseil du trésor et le gouvernement du Parti québécois sur cette question-là, parlant même de jeunes fonctionnaires jetables.
Alors, ma question au président du Conseil du trésor est fort simple: Qu'est-ce qu'il entend faire pour lever ces barrières-là?
Le Président: M. le président du Conseil du trésor.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, nous avons posé beaucoup de gestes depuis quelques années à l'endroit des jeunes pour leur faciliter l'accès aux emplois dans la fonction publique, dans la mesure où nous faisions de l'embauche. Alors, on sait que, durant un certain temps, il n'y a pratiquement pas eu de remplacements pour ceux qui partaient, et donc cela a eu un effet, effectivement. Mais, malgré tout cela, nous avons d'abord demandé aux ministères qu'ils embauchent aux conditions minimales d'emploi, c'est-à-dire qu'ils justifient les cas où ils demandent de l'expérience à ceux qui postulent un emploi, et cela nous a amené beaucoup plus de jeunes dans la fonction publique.
Nous avons ouvert aussi des emplois d'été. Nous avons ouvert la possibilité de faire des stages et nous allons l'accélérer. Nous avons ouvert ce programme qui s'adressait aux nouveaux diplômés et nous avons eu des succès sur ce plan-là, à tel point, M. le Président, que, actuellement, de toutes les embauches qui se font, 56 %, 57 % sont remplies par des jeunes de moins de 35 ans, ce qui est la définition qui a été admise au Sommet de la jeunesse. Moins de 35 ans, plus de la moitié, 56 %, 57 %.
Le Président: M. le député.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Comment le ministre peut parler de succès dans le cas du Programme de jeunes stagiaires, alors que ces jeunes-là ont une barrière à l'accès à des emplois occasionnels lorsqu'ils ont fini leur stage? Et pourquoi le ministre n'applique pas l'exception relative dans le processus de recrutement et de sélection de l'employé occasionnel, le huitième alinéa qui dit qu'une personne non inscrite au fichier central peut être recrutée et sélectionnée lorsqu'il s'agit de doter un emploi occasionnel par une personne ayant participé à un programme de la fonction publique approuvé par le Conseil du trésor, qui vise à développer l'employabilité ou l'expertise en emploi? Pourquoi le ministre n'applique pas cette directive qui lui est disponible pour permettre au stagiaire, si c'est un succès, d'avoir par la suite un emploi?
Le Président: M. le ministre.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, toutes les personnes qui ont une citoyenneté au Québec peuvent postuler sur les postes qui sont offerts. C'est le cas d'ailleurs pour les occasionnels, et nous venons de régler la question des faux occasionnels, ce qui a facilité l'accès des jeunes à l'emploi dans la fonction publique parce que, les concours, il y a plus de jeunes qui les réussissent que ceux qui sont admis de façon automatique comme c'était le cas auparavant. Alors, sur ce plan-là, nous avons amélioré les conditions de succès des jeunes quand ils veulent accéder à la fonction publique.
Le Président: M. le député.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Est-ce que le ministre se rend compte qu'il remplace les faux occasionnels par des stagiaires jetables et qu'en pratique il a une directive, au Conseil du trésor, qui lui permet tout à fait de permettre à ces stagiaires-là d'avoir un pont vers la fonction publique? Et c'est lui et son gouvernement qui décident que ces stagiaires-là n'auront pas de place. Les règles là-dessus lui permettraient de le faire.
Le Président: M. le ministre.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Non, non, non. M. le Président, il y a... Non, mais il y a une confusion entre certains éléments de la loi. D'abord, la Loi de la fonction publique permet de faire du recrutement sur les campus universitaires par des concours réservés. Nous les avons ouverts pour la première fois depuis 10 ans cette année. Ça, c'est une chose. Deuxièmement, en ce qui concerne les stagiaires, le Programme de stages pour nouveaux diplômés ne donne pas un droit acquis pour accéder à la fonction publique, et surtout pas un droit automatique, parce qu'ils ne sont pas considérés comme des fonctionnaires. Ce sont des gens pour qui on veut améliorer l'employabilité. Mais ils conservent pleinement, entièrement leur droit de postuler dans un poste qui est ouvert, et plusieurs l'on fait, de telle sorte que, même dans la première cohorte, plusieurs dizaines ont trouvé des emplois dans la fonction publique actuellement.
Le Président: M. le député de Mont-Royal, en question principale.
Niveau de la taxe sur l'essence
M. André Tranchemontagne
M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. La semaine dernière, en réponse à une question du chef de l'opposition sur la nécessité de baisser la taxe sur l'essence afin de diminuer le fardeau fiscal des citoyens, le ministre des Finances a faussement fait appel à la théorie de l'élasticité de la demande au prix. Or, ce que le ministre des Finances ne réalise pas, c'est qu'aujourd'hui l'essence est maintenant un besoin essentiel et pour lequel il n'y a pas de produits de substitution. C'est donc dire que la demande ne variera pas en fonction du prix de l'essence. Et la plus belle preuve de ça, c'est qu'au cours des 12 derniers mois l'essence a augmenté énormément. Par contre, les ventes de l'essence, si on parle d'essence à moteur pour des automobiles, ça a augmenté, au cours des 12 derniers mois, de 5,3 %, et l'essence diesel a augmenté de 19 %, et c'est la consommation des consommateurs qui a augmenté de 5 % et de 19 %. Alors, étant donné qu'il n'y aurait pas de variation dans la demande, c'est donc dire qu'une baisse des taxes refléterait une baisse de prix, et, à ce moment-là, ce serait le consommateur québécois qui bénéficierait directement de ces baisses de taxes là.
Alors, je me permets donc de rappeler la question du député de Sherbrooke et chef de l'opposition: Qu'est-ce que le ministre des Finances attend pour baisser les taxes de l'essence et faire bénéficier la population du Québec de ces baisses-là?
Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.
M. Bernard Landry
M. Landry: Bien, la question de la part du député de Mont-Royal me surprend d'autant plus qu'il a passé sa carrière essentiellement dans la vente de produits extrêmement sensibles évidemment au rapport entre la demande et le prix. Il me tend une perche incroyable. Je me souviens qu'une fois, sous sa responsabilité, on a lancé deux bières: la Grand Nord puis la Rousse. Ça a coûté 10 millions de dollars, puis, au bout de quelques mois, ces deux bières n'étaient plus sur le marché. Probablement un beau cas d'ignorance de la loi de l'élasticité de la demande par rapport au prix.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Landry: Si l'opposition continue à vouloir nier cette loi, ça ne me surprendrait pas qu'elle essaie de présenter un amendement à la loi de la pesanteur.
Des voix: Ha, ha, ha!
(14 h 40)
M. Landry: Soyons sérieux. Ce que j'ai dit, je le répète, c'est admis non seulement par les économistes qui se meuvent dans des sphères savantes, mais par le moindre commerçant de détail qui sait que, s'il vend trop cher, il va vendre moins, et c'est ce que les chiffres du gouvernement du Canada, du nôtre, de celui de l'Ontario démontrent. Quand les prix montent, la tendance à la baisse de la demande n'est qu'une question de temps et elle est rigoureusement proportionnelle à la hausse elle-même. Alors, ça veut dire que ceux qui ont prétendu que le gouvernement, ou les gouvernements le nôtre, en tout cas faisaient de l'argent avec la hausse du prix de l'essence malheureusement se trompent. J'espère que c'est une erreur de bonne foi. Mais les séries historiques sont là.
Par ailleurs, si ça baisse et on croit que ça va baisser... Après la Conférence de Genève, tous les observateurs pensent que le geste de l'OPEP...
Des voix: De Vienne!
M. Landry: De Vienne, c'est vrai. C'était à Genève autrefois, mais ils ont changé de place.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Landry: Tous les observateurs s'attendent...
Le Président: M. le ministre. M. le ministre.
Des voix: ...
Le Président: Alors, en conclusion, rapidement, M. le ministre.
M. Landry: Bien, je voudrais conclure que je pense que l'opposition est plus forte en géographie qu'en mathématiques.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: M. le député.
M. André Tranchemontagne
M. Tranchemontagne: M. le Président, je suis content de ne pas avoir gradué à la même place que pour les cours d'économie du ministre des Finances.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tranchemontagne: Est-ce que le ministre des Finances comprend le français quand je lui dis que l'essence à moteur a augmenté de 5,3 % puis que le diesel a augmenté de 19 %? Puis on parle de gallonnage, M. le Président. On ne parle pas de dollars, on parle de gallonnage. L'augmentation de l'essence a eu lieu en même temps qu'une augmentation des prix de l'essence. Est-ce que le ministre des Finances va réaliser qu'une baisse des prix de l'essence augmenterait le revenu disponible des Québécois, ce dont ils ont grandement besoin?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: Il me semble que j'avais expliqué de qui cela augmenterait les revenus si on baissait les prix de l'essence par le jeu de la fiscalité. Ça augmenterait le revenu des compagnies d'essence. Alors, quand vous faites semblant de représenter le public puis les gens qui n'ont pas un revenu disponible suffisant, vous parlez directement au nom des multinationales et des transnationales du pétrole.
Des voix: Wo!
M. Landry: D'ailleurs, ce danger a été évoqué lui-même par le ministre des Finances du Canada.
Autre facteur que j'ai bien expliqué et ça, je remercie le député de me donner la chance de le dire encore ça coûte 100 millions de dollars au gouvernement pour 0,01 $ de baisse. Cette variation-là, elle a peut-être eu lieu déjà depuis qu'on a commencé cet échange. Alors, des mesures marginales qui coûteraient 100 millions au gouvernement, qui consisteraient à jeter de l'argent à l'eau, ou des mesures très importantes, donc 0,10 $, 1 milliard de dollars, où est-ce qu'on va les prendre? Dans le déficit comme vous le faisiez autrefois? Jamais. Dans les hausses de taxes? Non plus. On ne hausse pas les taxes, nous, on les baisse.
Des voix: Bravo!
Le Président: En question principale, M. le député de Papineau.
Perspectives de développement économique pour la Mauricie et le Centre-du-Québec
M. Norman MacMillan
M. MacMillan: Merci, M. le Président. La semaine dernière, les députés péquistes de la Mauricie et du Centre-du-Québec ont encore une fois négligé et je répète, encore une fois négligé de défendre les intérêts de leurs régions et ont voté contre une motion apportée par mon collègue de Mont-Royal visant à rendre ces régions admissibles au crédit d'impôt accordé aux entreprises de transformation de l'aluminium. Certains députés de la région, Beaumier, Jolivet, Maskinongé...
Des voix: Oh!
Le Président: Alors, je comprends, M. le député de Papineau, que vous comprenez que ce que vous venez de faire n'est pas acceptable et que vous allez poursuivre de façon réglementaire.
M. MacMillan: M. le Président, je m'excuse, j'ai eu un blanc de mémoire, je ne pose pas de questions souvent, mais j'ai oublié Trois-Rivières, Julien puis Laviolette.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: En fait, vous venez de faire la démonstration qu'il ne s'agissait pas d'un blanc de mémoire mais d'une erreur volontaire de nommer les députés par leur nom, alors que notre règlement l'interdit. Votre préambule, de façon réglementaire.
M. MacMillan: Les députés des régions de Champlain, de Maskinongé, de Laviolette, de Trois-Rivières, de Drummond, d'Arthabaska ont même poussé l'audace, M. le Président, jusqu'à affirmer que le SaguenayLac-Saint-Jean ne faisait que récolter les efforts déployés par les intervenants régionaux, laissant ainsi entendre que les industriels de leurs propres régions avaient été inactifs. Pourtant, comme le souligne au député de Champlain à juste titre M. Roger Béland, directeur général du Centre local de développement de la MRC Francheville des régions de la Mauricie et du Centre-du-Québec, on a identifié depuis près de 10 ans le secteur de la transformation secondaire des métaux légers comme axe prioritaire de développement.
Ma question est très simple, M. le Président: Qu'est-ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui est en charge du parc industriel de Bécancour, responsable de la région de la Mauricie, attend pour reconnaître ce pôle majeur de développement de la Mauricie et du Centre-du-Québec et pour faire des représentations appropriées auprès de son collègue des Finances et du premier ministre?
Le Président: M. le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce.
M. Guy Julien
M. Julien: Alors, M. le Président, d'abord vous mentionner que, M. Béland, ça fait deux ans qu'il est à Trois-Rivières, donc il ne peut pas en parler depuis 10 ans. Maintenant, je voudrais dire ceci.
Des voix: ...
M. Julien: Non, mais c'est bon d'avoir les affaires claires. Il faut que ce soit clair. Je voudrais dire, d'abord, M. le Président, que le vote des députés, c'est un vote qui dit au gouvernement: Continuez d'avoir des mesures pour supporter la transformation secondaire de l'aluminium au Québec. C'est ça qu'on a voté, on a voté pour la transformation secondaire, et l'opposition a voté contre. Elle a voté contre ça, elle était contre ça, elle. Elle était contre la transformation secondaire. Nous, on a voté pour.
Maintenant, on dit: Pourquoi le SaguenayLac-Saint-Jean? Au SaguenayLac-Saint-Jean, vous savez, M. le Président, il y a eu un symposium à l'automne dernier, et, après une analyse, ils ont fait une demande au gouvernement pour les aider à les supporter dans la transformation secondaire de l'aluminium. On est un gouvernement qui est près de ses régions, on a écouté la demande et on a donné une réponse favorable à une demande qui venait d'une région en particulier qui est le Saguenay Lac-Saint-Jean. Puis je voudrais rappeler aux gens de l'opposition que, une fois que l'aluminerie d'Alma sera en opération, 42 % de la production de l'aluminium primaire se fera au SaguenayLac-Saint-Jean, 40 % au niveau de la fabrication semi-ouvrée.
Ceci étant dit, on a eu des rencontres avec le ministre des Finances, j'ai eu des rencontres chez nous. Je pense, comme je l'ai mentionné, qu'on a aussi nos devoirs à faire dans notre région. On va faire nos devoirs et on s'en reparlera.
Le Président: M. le député de Papineau.
M. Norman MacMillan
M. MacMillan: En parlant de devoirs, M. le Président, est-ce que le ministre est conscient que le chômage en Mauricie pour les 15-24 ans est de 22,8 %, statistiques de février 2000, et, au Centre-du-Québec, de 19,5 %? Alors, vous allez faire quoi pour baisser l'assurance chômage chez vous? Vous êtes responsable, M. le ministre.
Le Président: M. le ministre.
M. Guy Julien
M. Julien: Alors, M. le Président, d'abord informer le député de Papineau qu'en Mauricie, l'an dernier, nous avons eu la plus grande création de PME dans l'ensemble de la région chez nous. Donc, chez nous, on est en train de prendre un virage, et il est majeur.
Deuxièmement, dans le budget du ministre des Finances, il y a un 100 millions qui concerne le domaine des pâtes et papiers, et, chez nous, le domaine des pâtes et papiers est une entreprise majeure. Alors, ce 100 millions là va nous permettre de moderniser nos entreprises, de les rendre aptes à développer de nouveaux produits, que ce soit du papier à valeur ajoutée, pour affronter, si on veut, la compétition.
Troisièmement, on va bonifier l'enveloppe budgétaire du CLD. Et une des raisons d'être du CLD, qu'est-ce que c'est? C'est de supporter le départ de nos PME chez nous, de permettre à nos jeunes de partir nos petites et moyennes entreprises, de s'assurer, en fait, que notre virage puisse se faire concrètement.
Quatrièmement, l'investissement qu'on a annoncé...
(14 h 50)
Le Président: Une dernière question principale, M. le député d'Argenteuil.
Dates d'ouverture de la pêche commerciale et de la pêche sportive à la perchaude
M. David Whissell
M. Whissell: Merci, M. le Président. Le ministre responsable de la Faune et des Parcs s'apprête encore une fois à devancer la période de pêche commerciale à la perchaude dans le lac Saint-Pierre, et ce, en pleine période de frai ou, si vous voulez, en période de reproduction. Les biologistes de la Société de la faune et des parcs, qui relève du ministre en question, sont unanimes et dénoncent de façon vigoureuse la décision du ministre. Je vais citer un des fonctionnaires, un des biologistes du ministère, qui nous dit: «Une décision qui va à l'encontre de toutes les positions scientifiques de l'organisation.» Le ministre nous disait en cette Chambre le 15 avril 1999, suite à une question sur le même sujet et je cite ce que le ministre nous disait: «...nous suivrons le dossier cette année, ce qui nous permettra de voir l'état exact des stocks» de perchaude.
Alors, M. le Président, est-ce que le ministre peut s'engager à déposer les études qui ont justifié sa décision de maintenir la pêche en période de frai ou est-ce qu'il préfère nous avouer qu'il a pris une décision purement politique au détriment de la protection de la faune et contre la volonté de ses propres biologistes?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre responsable de la Faune et des Parcs.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, tout d'abord, je dois vous dire que les annonces que nous avons faites conjointement avec le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation font suite à un comité de travail que nous avions mis sur pied dans le but précisément de sauvegarder ou d'assurer la pérennité de l'espèce, sauf qu'on voulait aussi permettre une activité économique qui déjà crée des emplois dans la région du lac Saint-Pierre de façon importante. Ce que nous avons donc fait, c'est que nous avons mis un groupe de travail qui nous a recommandé des choses bien précises: une diminution de 25 %... On a rapetissé même la grosseur du poisson de 7,5 po à 6,5 po pour permettre précisément de sauver le plus d'espèces possible. On a mis sur pied...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Mes collègues trouvent ça drôle, mais, qu'est-ce que vous voulez, c'est la longueur du poisson, je n'ai pas...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: M. le ministre, je vous invite à contrôler la longueur de votre réponse. En terminant.
M. Chevrette: M. le Président, vous venez de me faire perdre 15 secondes. Je voudrais aussi vous dire que nous avons un programme de rachat qui est mis sur pied, et c'est une façon plus intelligente que de jouer au matamore, puis d'arriver, puis de dire: On arrête tout. Je pense que c'est plus brillant, ce qu'on a fait, que les suggestions que vous nous faites.
Votes reportés
Motion proposant que l'Assemblée exige du gouvernement qu'il diminue les taxes sur l'essence
Le Président: Alors, j'invite les membres à rester à leur place, puisque nous allons immédiatement procéder au vote reporté sur la motion de Mme la députée de Bonaventure présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Alors, cette motion se lit comme suit:
«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement péquiste qu'il cesse de profiter des consommateurs du Québec en maintenant les taxes sur l'essence les plus élevées au Canada et en Amérique du Nord.»
Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, d'abord.
Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (WestmountSaint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).
M. Dumont (Rivière-du-Loup).
Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda Témiscamingue), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), Mme Goupil (Lévis), M. Chevrette (Joliette), M. Baril (Arthabaska), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Rioux (Matane), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Signori (Blainville), M. St-André (L'Assomption), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Désilets (Maskinongé), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).
Le Président: Y a-t-il des abstentions?
Le Secrétaire: Pour:40
Contre:59
Abstentions:0
Le Président: Alors, la motion de Mme la députée de Bonaventure est rejetée.
L'étape des motions sans préavis.
Avis touchant les travaux des commissions
Alors, s'il n'y a de motions sans préavis aujourd'hui, nous allons aller aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: Oui. Alors, M. le Président, je voudrais aviser...
Le Président: Je voudrais demander aux collègues de rester à leur place quelques instants, le temps que les avis soient donnés, là.
M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: ...cette Assemblée, d'abord, que la commission des institutions poursuivra et terminera les consultations particulières sur le projet de loi n° 87, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau; et
Que la commission des finances publiques poursuivra et terminera l'étude détaillée du projet de loi n° 29, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, et, si nécessaire, demain, le 6 avril 2000, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.
Le Président: Bien. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique va se réunir cet après-midi, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, afin d'entendre le sous-ministre de la recherche, de la science et de la technologie concernant la coordination de la recherche en santé et de la recherche sociale.
Alors, l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Pas d'interventions?
Affaires du jour
Nous allons aborder les affaires du jour, maintenant. M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: Alors, je vous réfère d'abord, en premier lieu, à l'article 18, M. le Président.
Projet de loi n° 105
Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Président: Alors, l'article 18. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 105, Loi régissant les activités d'aménagement forestier de bénéficiaires de contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier pour les années 2000-2001 et 2001-2002. Alors, est-ce qu'il y a des interventions sur cette prise en considération du rapport?
M. Brassard: Pas pour ma part, M. le Président. Je ne sais pas si la députée de Bonaventure, elle, entend intervenir.
Le Président: Est-ce que, Mme la députée de Bonaventure, vous souhaitez intervenir à cette étape?
Mme Normandeau: Oui, quelques minutes.
(15 heures)
Le Président: Très bien. Alors, peut-on, juste avant, demander aux collègues qui doivent travailler à l'extérieur de l'enceinte du salon bleu de le faire pour permettre à notre collègue de Bonaventure de faire son intervention sur le rapport de la commission de l'économie et du travail? Bien, Mme la députée de Bonaventure.
Mme Nathalie Normandeau
Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, mon intervention sera brève sur le projet de loi n° 105. Nous sommes maintenant au stade de l'adoption... ou de la prise en considération du rapport. La commission parlementaire de l'économie et du travail a procédé à l'étude détaillée de ce projet de loi qui, je dois le rappeler, est un projet de loi d'urgence, qualificatif qu'a lui-même employé le ministre des Ressources naturelles pour décrire ce projet de loi, le projet de loi n° 105 qui vise à régir les activités d'aménagement forestier de bénéficiaires de contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier pour les années 2000-2001 et 2001-2002.
Alors, essentiellement, ce qu'on doit retenir avec le projet de loi qui a été présenté à l'Assemblée nationale par le ministre des Ressources naturelles, c'est que le projet de loi permet au ministre d'accorder ou de procéder à la délivrance des permis d'intervention qui permettront aux industriels, aux entreprises forestières d'effectuer leurs travaux en forêt. Et ce qu'il faut comprendre, puisqu'il est important de remettre le projet de loi en perspective, tout ça, M. le Président, n'arrive pas, n'est pas un procédé, n'est pas une procédure courante, au ministère des Ressources naturelles, pour permettre, assurer en toute légalité la coupe de bois en forêt. Le ministre, en utilisant le qualificatif «d'urgence» pour décrire son projet de loi, a conséquemment illustré le fait que son ministère lui, comme ministre fait appel à un projet de loi spécial pour autoriser les entreprises forestières à retourner en forêt.
M. le Président, la situation actuelle est importante. Il y a l'industrie forestière au Québec, évidemment, c'est plus de 80 000 emplois, c'est plus de 250 municipalités qui vivent directement de la forêt. Il y a des impacts énormes qui découlent du laxisme du ministre des Ressources naturelles dans ce dossier.
Et pourquoi, M. le Président, le ministre n'a pas pris ses responsabilités? La situation est fort simple. Sur la base de la Loi sur les forêts, en vertu de l'article 63, le ministre a la responsabilité de fournir les données d'inventaire à l'ensemble des bénéficiaires de CAAF au Québec, données d'inventaire qui leur permettent de déposer leurs fameux plans généraux, ou leur plan général d'aménagement forestier, ce qu'on appelle en langage de bois, en langue de bois, leur fameux PGAF. Alors, le ministre nous a confié, a admis que son ministère avait connu des retards dans la mise à jour des données d'inventaire. Et c'est important, parce que cet inventaire se fait à tous les 10 ans. Et ce qu'on constate, c'est que ce retard hypothèque aujourd'hui l'ensemble de l'industrie forestière au Québec. Et, au moment où je vous parle, nous avons des informations à l'effet qu'il y a plus de 300 travailleurs dans la région du ministre des Ressources naturelles qui ne travailleraient pas, justement parce que ce projet de loi n'est pas encore adopté, et ne travailleraient pas, parce que le ministre n'a pas pris ses responsabilités à temps.
Et ce qu'on a déploré jusqu'à maintenant, c'est que le ministre a attendu à la toute dernière minute pour présenter un projet de loi. Les données d'inventaire n'étaient pas complétées, n'étaient pas disponibles. Et on n'a pas su ça la semaine dernière ou il y a deux semaines; le ministère était très au fait de la situation il y a un an, il y a deux ans. Alors, on s'interroge, de ce côté-ci de la Chambre, et on se demande pourquoi le ministre a attendu encore à la dernière minute. Évidemment, le ministre tente de se faire sécurisant, et tout ça, pour masquer, dans le fond, son manque de responsabilité à l'endroit de la forêt, la gestion de nos forêts au Québec.
M. le Président, ce qu'il est important de rajouter et j'en ai fait mention tout à l'heure à la période de questions nous avons appris un certain nombre de choses hier en regard des tenants et aboutissants du projet de loi n° 105. Il y a une chose importante qu'on a apprise, c'est la décision qu'a prise le ministre des Ressources naturelles donc une décision unilatérale à l'effet d'augmenter le rendement de nos forêts. On passerait maintenant d'un rendement soutenu à un rendement accru. Le ministre des Ressources naturelles nous a dit: Écoutez, ce n'est pas une nouvelle, ça, ça fait longtemps que je parle de rendement accru au Québec. Mais, ce qu'on comprend difficilement, c'est que le ministre, lui, parle des deux côtés de la bouche. Hier, en commission parlementaire, il nous rassurait en nous disant que le débat public qui aura lieu sur la révision du régime forestier à l'automne 2000 permettrait à l'ensemble des intervenants du domaine forestier de discuter des enjeux liés à la gestion de nos forêts au Québec. Le ministre, là-dessus, s'est fait rassurant. Il le répète. Il l'a répété encore hier.
Alors, M. le Président, aujourd'hui, on est très surpris et, hier, on a été très surpris d'apprendre qu'au même moment où le ministre affirme, donne son assurance que le débat se fera en toute transparence, que le débat se fera en discussion avec l'ensemble des intervenants, autant les industriels que les écologistes puis les environnementalistes, au même moment où il nous dit ça, M. le Président, il prend la décision, seul, sans consultation, sans nous avoir démontré scientifiquement, preuves à l'appui, noir sur blanc, qu'une augmentation du rendement de nos forêts ne sera pas préjudiciable à nos écosystèmes. Et ça, c'est décevant, parce que le ministre des Ressources naturelles a la responsabilité de faire toute la lumière sur cette question-là. C'est une question d'importance.
Collectivement, M. le Président, on est tous interpellés, tous appelés à se positionner sur une question de cet ordre-là. Et ce qu'il faut bien comprendre, c'est que le passage de rendement soutenu au rendement accru est à la base même, est au coeur même de la révision du régime forestier. Alors là, ce que le ministre nous annonce, c'est qu'il y a un pan important, il y a un élément majeur et fondamental du projet de loi qui est déjà... on a déjà décidé que cette question-là, elle était réglée, le ministère a déjà fait son nid là-dessus. Alors, le ministre, évidemment, tente de discréditer l'opposition en affirmant que sa décision était déjà prise dans le passé, mais tous les intervenants aujourd'hui sont très surpris d'apprendre que le ministre a lui-même pris sa décision.
M. le Président, ce projet de loi n° 105 est... Bon, malheureusement, le ministre ne fait pas d'intervention, mais il aurait peut-être été intéressant de connaître...
Une voix: ...
Mme Normandeau: Bien, évidemment, si le ministre réplique, ce serait intéressant d'en savoir un peu plus sur les impacts, à l'heure où on se parle, de ce fameux projet de loi n° 105. Tout à l'heure, je l'interpellais sur le nombre de travailleurs dans sa région, il semblerait, qui ne travaillent pas à l'heure actuelle parce que le ministre n'a pas pris ses responsabilités à temps. Il serait peut-être intéressant d'entendre le ministre là-dessus.
Alors, M. le Président, cette étude détaillée du projet de loi nous a permis de comprendre quels étaient les buts, les objectifs que poursuit le ministre des Ressources naturelles sur ce projet de loi n° 105. Le ministre a répondu à nos questions. Il y avait avec lui ses fonctionnaires qui ont répondu à toutes nos questions, et on remercie l'ensemble des collaborateurs du ministre.
L'opposition a donné son appui à l'adoption du principe du projet de loi. L'opposition, hier, M. le Président, a fait preuve d'une grande collaboration en commission parlementaire en n'ajoutant pas d'autres amendements au projet de loi. Nous avons questionné, nous avons des réponses à nos questions, nous avons donc décidé d'appuyer le gouvernement avec ce projet de loi n° 105.
M. le Président, à ce stade-ci du processus, au niveau de la prise en considération du rapport, la position de l'opposition n'a pas changé. Mais ce que je déplore, c'est que, plus les jours passent, plus on constate à quel point le ministre gère nos forêts, mais sans aucune vision. En fait, on y va goutte à goutte finalement, M. le Président.
On a reporté la révision du régime forestier à trois reprises: l'ancien ministre des Ressources naturelles, le député de Joliette, nous avait annoncé un dépôt d'un projet de loi pour mai 1999. Le même ministre, c'est-à-dire le député de Joliette, nous a dit: On vous promet ça pour l'automne 1999. Le ministre des Ressources naturelles, lui le ministre actuel nous dit: Écoutez, ce projet de loi là va probablement être déposé en décembre 1999. Nous sommes au printemps 2000, M. le Président, et il n'y a toujours pas de projet de loi sur la révision du régime forestier qui est déposé.
Les intervenants, partout au Québec, s'inquiètent, M. le Président. On s'inquiète du retard indu qui a conduit le ministre à reporter à trois reprises le dépôt du projet de loi qui va conduire à la révision du régime forestier. Là, évidemment, on apprend, avec ce projet de loi n° 105, que le ministre, à la hâte, en toute urgence, pour assurer la légalité des interventions en forêt, doit déposer un projet de loi, le projet de loi n° 105. Alors, M. le Président, il y a de quoi être inquiet.
Les questions que soulèvent les intervenants du domaine forestier sont légitimes, et ce que je demande au ministre des Ressources naturelles, M. le Président, c'est de ne pas encore une fois reporter le dépôt de son projet de loi sur la révision du régime forestier, c'est de tenir le plus rapidement possible des consultations sur la gestion de nos forêts au Québec.
Et ce qu'on demande, M. le Président, c'est très simple. Ce qu'on veut avoir, c'est la démonstration que nos forêts au Québec sont très bien gérées. Et le ministre a une responsabilité de taille, une responsabilité d'importance. Il doit nous faire, une fois pour toutes, la démonstration que la foresterie au Québec, la gestion de nos forêts, les méthodes qu'on prend pour gérer notre forêt, elles sont satisfaisantes, M. le Président.
(15 h 10)
Plusieurs intervenants, jusqu'à maintenant, ont émis des doutes, par exemple, sur les efforts qui sont déployés de la part du ministre des Ressources naturelles, de la part de son ministère donc, pour contrôler les coupes qui sont faites en forêt, les effectifs qui sont déployés sur le terrain pour s'assurer que les industriels ne contreviennent pas à la Loi sur les forêts, au fameux règlement sur les normes d'intervention, le fameux RNI.
Alors, M. le Président, en terminant, je réitère l'appui de l'opposition officielle à ce projet de loi, le projet de loi n° 105. Il y a certains de mes collègues qui sont intervenus jusqu'à maintenant. Le député d'Orford qui a livré une prestation magnifique et qui a fait part, donc, des inquiétudes de la part de certains groupes environnementaux. Des préoccupations qui sont très légitimes. Et, jusqu'à l'heure actuelle, au moment où on se parle, M. le Président, si tous ces intervenants ont encore des préoccupations, c'est qu'ils n'ont pas encore eu de réponses claires à leurs questions. Et ce qu'on demande au ministre, c'est qu'en toute transparence il nous assure d'un débat public où on pourra discuter, donc, de tous les enjeux qui concernent la bonne gestion de nos forêts.
Alors, M. le Président, je ne peux que déplorer une fois de plus le fait que le ministre des Ressources naturelles, qui, d'un côté, nous assure que le débat public va se faire en toute transparence et que l'ensemble des intervenants pourront intervenir sur la question des forêts, ait pris déjà sa décision et campé déjà la position de son ministère sur cette importante question, donc, du rendement soutenu au rendement accru.
Il y a également mon collègue de Jacques-Cartier qui a livré ses commentaires en regard des préoccupations des Cris de la Baie-James, qui s'inquiètent du dépôt de ce projet de loi n° 105. Alors, en terminant, je vous le dis encore une fois, l'opposition est d'accord avec ce projet de loi et donc va donner suite à l'appui que nous avons déjà formulé. Merci.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bonaventure. Maintenant, est-ce que l'auteur du projet de loi... M. le ministre, vous avez une intervention de cinq minutes après chaque intervention de l'opposition. Alors, je vous cède la parole pour cinq minutes.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Alors, M. le Président, quelques remarques. D'abord, concernant le rendement accru, je l'ai signalé en période de questions, je n'ai pas inventé ça, là, ce n'est pas une invention de ma part. Ce n'est pas une génération spontanée non plus, c'est lors de la consultation de l'automne 1998 sur la révision du régime forestier, sur la base d'un document qui faisait un bilan du régime depuis 1986 et qui identifiait aussi les enjeux, tout cela en vue d'en arriver à réviser le régime forestier puis à déposer un projet de loi modifiant la Loi sur les forêts.
Alors, c'est dans le cadre de cette consultation-là que des dizaines et des dizaines et, je dirais, des centaines d'intervenants sont venus dire en région au ministère et au gouvernement qu'il fallait s'engager résolument dans la voie du rendement accru, que le principe du rendement soutenu devait être maintenu dans la loi ça, c'est bien évident pour faire en sorte que les générations futures puissent compter sur la pérennité de la ressource. Mais ils sont venus nous dire aussi que, dans bien des territoires de la forêt, sur bien des parterres, on pouvait envisager et qu'on devait envisager de passer du rendement soutenu au rendement accru, donc d'envisager une forêt plus productive, de telle sorte que ça augmente la possibilité forestière sur ces territoires-là. Des dizaines et des centaines d'intervenants, des coopératives forestières, des industriels, mais aussi le monde municipal, le monde du développement économique, ont pressé le gouvernement de s'engager dans cette voie-là.
Et c'est ce que j'ai indiqué il y a quelques mois en Abitibi-Témiscamingue devant des groupes forestiers, je leur ai dit: Oui, il faut faire le choix de cette orientation. Il faut s'engager dans cette voie-là, c'est la voie de l'avenir, et puis les générations qui vont nous suivre vont pouvoir se retrouver avec une forêt qui produit davantage. Tout cela peut se faire en respectant les écosystèmes. Tout cela peut se faire en respectant les autres utilisateurs de la ressource, donc en pratiquant la planification intégrée des ressources. Tout ça peut se faire dans le respect aussi des principes du développement durable.
Et c'est précisément dans la région de la députée qu'on a réclamé également avec force qu'on passe au rendement accru. D'ailleurs, dans bien des coins de la Gaspésie, le dernier inventaire fait apparaître des baisses de possibilités dans certains territoires; il y aura des baisses de possibilités, donc des baisses d'attribution de volumes. Et, dans cette perspective-là, je dirais, l'immense majorité des intervenants en Gaspésie nous invitent, nous incitent à nous engager dans la voie du rendement accru justement pour faire en sorte qu'on puisse augmenter dans l'avenir la possibilité forestière et se retrouver avec une forêt qui produit plus, qui produit davantage. C'est ça. Alors, j'ai pris mes responsabilités.
Et, là-dessus, je voudrais conclure, M. le Président. En regard de la loi n° 105, la députée ne cesse de répéter que j'ai mal assumé mes responsabilités. Bon, bien, écoutez, j'ai le dos large, comme on dit, je suis capable d'en prendre, je suis responsable, même si tout ça a commencé il y a 10 ans, à l'époque où ils étaient là. Parce que l'inventaire décennal, là, ça s'étend sur 10 ans, hein, ça a commencé il y a 10 ans. Bon. Alors, quand les retards ont-ils été pris? Est-ce que c'est au début des années quatre-vingt-dix, au moment où on a fait des compressions budgétaires substantielles en matière d'inventaire? Ou est-ce que c'est au moment où on est arrivé au pouvoir? Qui saurait le dire? Mais enfin, je suis responsable, très bien, elle ne cesse de le dire, j'assume mes responsabilités.
Mais, dans le cas du rendement accru, j'assume aussi mes responsabilités, je les assume aussi dans le cas du rendement accru. Ce que j'ai à présenter dans le processus de révision du régime forestier, c'est un projet de loi. Il le sera, présenté. C'est évident que, si c'est un projet de loi, le gouvernement aura au préalable fait le choix d'un certain nombre d'orientations, fait le choix d'un certain nombre de changements à apporter au régime forestier, sinon qu'est-ce que vous voulez que je présente? Je vais déposer des feuilles blanches? Alors, déposer un projet de loi, ça implique nécessairement qu'on a fait des choix puis qu'on a adopté des orientations. Et alors, après ça, ça n'empêchera pas les autres intervenants de se prononcer contre ou d'approuver les choix qu'on aura faits au moment de la commission parlementaire, à l'automne.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. Alors, il n'y a pas d'autres interventions?
Mise aux voix du rapport
Le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 105, Loi régissant les activités d'aménagement forestier de bénéficiaires de contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier pour les années 2000-2001 et 2001-2002, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: Alors, je vous réfère maintenant à l'article 8, M. le Président.
Projet de loi n° 107
Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, à l'article 8, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux. Alors, Mme la ministre.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Nous abordons aujourd'hui l'étude du projet de loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux. Ce projet de loi a pour objectif de maintenir la santé financière retrouvée des établissements de santé et de services sociaux du Québec. Il s'inscrit dans la foulée des mesures de réinvestissement et de saine gestion financière qui ont été annoncées lors du dernier budget.
En effet, M. le Président, grâce aux efforts de toutes les Québécoises et de tous les Québécois, nous avons réussi au cours des dernières années à assainir les finances publiques en éliminant complètement l'énorme déficit dont nous avions hérité. Grâce à cet effort collectif, grâce aux dividendes découlant de l'atteinte du déficit zéro par notre gouvernement, mon collègue le ministre des Finances a pu annoncer dans son budget 2000-2001 des réinvestissements majeurs, de 2,7 milliards de dollars, dans la santé et les services sociaux.
En plus de nous permettre de faire face à l'évolution des coûts des programmes, telle l'indexation salariale, ces réinvestissements nous permettront d'atteindre, cette année, trois grands objectifs dans le secteur de la santé et des services sociaux. D'abord, bien sûr, liquider le passé. Grâce aux subventions accordées aux établissements en déficit en 1999-2000, le réseau amorce l'exercice 2000-2001 libéré de toute dette accumulée.
(15 h 20)
Deuxièmement, il faut bien sûr régler le présent et assurer l'avenir. Donc, en rehaussant le financement des établissements en déficit, ceux-ci pourront désormais bénéficier d'une meilleure situation financière pour mieux répondre aux besoins de la population. Nous nous entendons cependant que certains établissements qui ont réussi à garder le cap sur un budget équilibré et qui pourtant ont vécu des difficultés en termes d'organisation de services participeront aussi à l'exercice de telle sorte qu'on puisse éventuellement corriger certaines lacunes quant à l'offre de service dans ces institutions.
Troisièmement, améliorer l'accessibilité et la qualité de nos services. En fait, les crédits additionnels qui ont été alloués ont été alloués pour réduire les listes d'attente, pour faire face aux besoins des clientèles prioritaires, de même, bien sûr, que pour l'achat d'équipements médicaux de haute technologie. Tout cela devrait permettre au réseau, dès cette année, de traiter plus de patients en offrant des soins de meilleure qualité.
Je vous dirais que ce que nous visons surtout, c'est d'assurer en tout temps une meilleure accessibilité aux soins de santé et aux soins sociaux, parce qu'il faut sans doute se le redire, se le répéter, malgré tout ce qu'on a pu dire sur ce qui se passe dans nos institutions, nous y offrons des services d'une très grande qualité. Cela se vérifie continuellement, à chaque fois que nous posons la question lors d'enquêtes d'opinion, lors d'évaluations dans les institutions. Par observation spontanée, vous ne pouvez pas imaginer, M. le Président, le nombre de personnes qui m'interpellent dans des assemblées, dans des rencontres, même sur la rue, pour me dire comment elles ont eu, lorsqu'elles ont eu à utiliser les services de santé, des soins adéquats et de grande qualité, comment elles ont des témoignages exceptionnels à faire sur la qualité du personnel qui travaille dans nos institutions.
Cependant, nous savons qu'il y a un problème d'accessibilité, au sens où nous constatons bien qu'un certain nombre de listes d'attente devraient être plus courtes, M. le Président. Et, malgré ce que peuvent en penser certains commentateurs, il est évident que, comme gouvernement, jamais, jamais nous ne souhaiterions que de telles listes existent ou même s'allongent. C'est un concours d'événements qui font en sorte que nous n'avons pas suffisamment de ressources financières pour investir dans notre réseau, qui fait que nous devons malheureusement constater ce niveau d'attente pour un certain nombre d'interventions dans nos institutions.
Donc, M. le Président, j'attire votre attention sur le fait que ces réinvestissements de 2,7 milliards sont beaucoup plus élevés que ceux accordés par ailleurs par le gouvernement fédéral dans le cadre du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Parce que, M. le Président, on nous a dit: Vous avez des sommes disponibles et vous ne les utilisez pas pour la santé. Faux, faux, faux, puisque, dans les faits, les sommes disponibles, par exemple, dans ce fonds en fiducie de l'ordre de 840 millions ne correspondent pas, évidemment, et sont bien en deçà des sommes de 2,7 milliards que nous investissons.
Et quant à la contribution d'Ottawa, M. le Président, d'abord, c'est une contribution ou un ajout qui est temporaire. Ça aussi, c'est important. Moi, quand j'investis dans des services dans les hôpitaux, dans les CLSC, dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, dans les centres de réadaptation, je dois garantir la continuité de ces investissements. Je ne peux pas dire, l'année suivante: Bien, merci beaucoup. Je vous ai donné 10 millions l'année dernière, mais, cette année, je ne l'ai plus, même si vous avez embauché du personnel pour répondre aux besoins de la population.
C'est ça qu'Ottawa nous fait, hein, dans l'augmentation du transfert, en laissant croire à la population québécoise qu'il est très généreux et qu'il a restauré les transferts. Faux! Ce sont des montants versés et qui ont une fin, qui sont donc temporaires, et, moi, j'ai des besoins qui sont constants, continus. Et lorsque j'investis, je dois assurer aux institutions qu'elles pourront continuer, d'une année à l'autre, à compter sur ces crédits.
Qu'est-ce que le fédéral a versé, dans les faits, M. le Président? D'abord, le transfert, on oublie souvent qu'il englobe non seulement la santé, mais qu'il englobe aussi l'éducation postsecondaire et la sécurité du revenu. C'est un peu gênant de voir le fédéral, d'ailleurs, nous dire: Vous pourriez mettre le montant complet du transfert, de la hausse à laquelle nous avons procédé, même si elle est temporaire, vous pourriez la mettre au complet dans la santé. Merci beaucoup. Rien, par ailleurs, pour les personnes bénéficiaires de l'aide sociale; rien, par ailleurs, pour l'enseignement et la formation postsecondaire, puisque le transfert social canadien, il couvre aussi cela. On est à la limite de la malhonnêteté quand, à Ottawa, on nous indique qu'on a des sommes, comme ça, disponibles qui pourraient aller essentiellement et uniquement dans le secteur de la santé.
Par ailleurs, M. le Président, si, nous, nous ajoutons 2,7 milliards 1999-2000, 2000-2001 dans le dossier de la santé et des services sociaux, le rehaussement, lui, du transfert social canadien, il a été de combien? 841 millions en 1999-2000, 600 millions en 2000-2001, et sur une base temporaire, non récurrent. Alors, on n'a pas à cet égard beaucoup de leçons à recevoir de leur part. Il y a un engagement qu'ils avaient pris à l'endroit de toutes les provinces, pas seulement du Québec. Lorsqu'on a adopté les grandes lois concernant le régime d'assurance hospitalisation et d'assurance maladie, on s'était engagé à couvrir à hauteur de 50 % les coûts réels encourus pour supporter le réseau de la santé et des services sociaux.
Actuellement, quand 1 $ est investi en santé, M. le Président, au Québec, il en vient 0,14 $ de la part d'Ottawa, et le reste, c'est la population québécoise, par ses impôts, qui y contribue. Alors, vous constaterez qu'il est tout à fait justifié et vous accepterez avec moi de constater qu'il est tout à fait justifié que nous demandions le rehaussement du niveau de transfert au moins aux sommes que nous recevions en 1994-1995.
Je trouve ça d'ailleurs un peu gênant, M. le Président, quand je vois M. Rock nous faire des leçons. Il va venir planifier la main-d'oeuvre infirmière au Québec. Non, mais il faut le faire, hein, il faut le faire! Alors que, nous, on a les difficultés, nous, on a les problèmes, nous, on n'a pas les moyens d'assumer nos responsabilités c'est très clair, on voudrait pouvoir investir davantage et là un gérant d'estrade est en train de nous dire comment il va venir gérer nos choix à domicile, comment il va venir gérer nos ressources humaines. Bonne chance, hein!
Donc, nous procédons actuellement, au Québec, à des réinvestissements majeurs, réinvestissements dans le secteur de la santé. Cela correspond aussi, je crois, à l'attente qu'ont les Québécois et les Québécoises à l'égard de leur gouvernement. Je crois aussi que ces investissements témoignent de la confiance que nous avons comme gouvernement à l'égard de notre réseau public de santé et de services sociaux.
Parce qu'il faut se le rappeler aussi, M. le Président, ces ressources, on ne doit jamais l'oublier...
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il n'y a pas quorum présentement. Je prends quelques minutes pour que vous puissiez rétablir l'ordre, sinon je devrai suspendre. Il n'y a pas quorum.
Écoutez, là, je vais suspendre quelques minutes.
(Suspension de la séance à 15 h 29)
(Reprise à 15 h 30)
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons poursuivre nos travaux. J'inviterais Mme la ministre à poursuivre, s'il vous plaît.
Mme Marois: Bien sûr, M. le Président. Donc, nous procédons à des réinvestissements majeurs que nous consacrons à la santé. Cela répond au voeu des Québécois et des Québécoises, mais je crois aussi, comme je le mentionnais lorsque nous avons interrompu nos travaux, que cela témoigne également de la confiance qu'a notre gouvernement envers le réseau public de la santé et des services sociaux, parce que, il faut se le rappeler, ces ressources et on ne doit jamais l'oublier sont des fonds publics et que ces fonds ne nous ont pas été confiés sans condition, nous en sommes tous et toutes imputables, c'est-à-dire que nous devons rendre des comptes. Au moment, donc, où nous procédons à des ajouts de fonds publics aussi massifs, il nous apparaît essentiel d'assurer les citoyennes et les citoyens que leurs taxes et leurs impôts seront utilisés efficacement et que les objectifs poursuivis par ces réinvestissements seront bien atteints. C'est pourquoi le ministère entend se donner les moyens de s'assurer de l'atteinte d'objectifs de résultat mesurables, donc exercer un suivi constant de l'évolution de la situation et, bien sûr, s'assurer de l'imputabilité des gestionnaires du réseau.
En annulant les déficits, M. le Président, en rehaussant la base de leur budget, le gouvernement remet en quelque sorte les compteurs à zéro. Nous donnons aux établissements déficitaires toutes les conditions leur permettant d'assumer leurs opérations sur de bonnes bases financières. Les citoyens sont donc en droit de s'attendre à ce que ces établissements respectent, à l'avenir, leur équilibre budgétaire. Alors, c'est en s'imposant une discipline intelligente que le gouvernement du Parti québécois a pu et pourra dans l'avenir répondre aux aspirations des Québécoises et des Québécois, et surtout à leurs besoins. Il ne pourrait en être autrement bien sûr dans notre réseau, et je crois que le bon sens nous oblige aujourd'hui collectivement à reconnaître que, si la santé et le bien-être de la population doivent passer par des ajouts de ressources conformes à la dynamique particulière du secteur, elles doivent aussi passer par un réseau responsable qui fait clairement tout son possible pour se maintenir en bonne santé financière. C'est pourquoi, tout en réinvestissant massivement dans la santé, le gouvernement a exprimé des attentes claires sur le plan de la gestion financière.
Le réseau devra, à l'avenir, maintenir la santé financière retrouvée en évitant d'entrer à nouveau dans le cercle vicieux des déficits, cercle vicieux que nos amis d'en face connaissent d'ailleurs particulièrement bien, compte tenu qu'ils l'ont pratiqué tout au long de leur mandat, avec les résultats désastreux que nous connaissons. Pour rassurer nos concitoyens qu'il ne s'agit pas d'un voeu pieux, le présent projet de loi édicte des mesures visant à assurer le maintien de l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux.
Quelles sont les principales mesures qui sont contenues au projet de loi dont nous entreprenons l'étude aujourd'hui? D'abord, un établissement public ne devra plus, à l'avenir, encourir de déficit à la fin d'une année financière. Deuxièmement, les dépenses et les engagements de dépenses autorisés par une régie régionale au cours d'une année financière ne devront pas excéder les sommes comprises dans l'enveloppe budgétaire qui lui est allouée pour cette même année. En cas de non-atteinte de l'équilibre budgétaire, je pourrai, comme ministre, assujettir l'approbation et la réalisation de projets d'immobilisation et d'achat d'équipements médicaux au retour à l'équilibre budgétaire. Un établissement public ne pourra plus contracter d'emprunt pour le paiement de ses dépenses de fonctionnement, sauf avec l'autorisation de la ministre. Bien sûr, il faut prévoir de telles soupapes parce que des circonstances peuvent tout à fait justifier qu'une institution puisse faire un déficit. Enfin, un déficit anticipé par un établissement au 31 mars d'une année financière ce qui est la fin de l'année financière de nos institutions devra apparaître comme dépense au budget de l'année financière subséquente.
M. le Président, une gestion rigoureuse des fonds publics s'impose comme corollaire des réinvestissements. Elle s'impose aussi comme une condition garante de l'avenir du système de santé et de services sociaux. Si des obligations de résultat doivent être instituées, nous devons aussi soutenir les établissements dans leurs efforts de gestion. À cet égard, j'annoncerai bientôt la création d'un groupe d'appui à la gestion financière sur le modèle du Groupe de soutien aux urgences. Ce groupe, qui sera formé d'experts et de gestionnaires chevronnés, aura pour mandat de soutenir et d'accompagner les établissements aux prises avec des problèmes budgétaires.
Par ailleurs, depuis mon entrée en fonction comme ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux, une meilleure intégration et une meilleure articulation des interventions de chacun des acteurs du réseau sont une préoccupation que je poursuis sans relâche, suivant en cela l'exemple de mon prédécesseur. J'entends déposer d'ailleurs à cet effet un projet de loi structurant qui viendra préciser la ligne d'imputabilité et la répartition des responsabilités entre la ministre, le palier régional et les établissements. L'Assemblée nationale aura aussi à reconnaître les particularités des centres hospitaliers universitaires, notamment sur le plan de l'allocation des ressources. Cela viendra, M. le Président, dans une seconde phase, un peu plus tard.
Malgré le fait que les coupes cumulatives aux transferts fédéraux pour la santé ont représenté un fardeau énorme, le Québec a malgré tout réussi à rétablir la santé de ses finances publiques tout en préservant les acquis essentiels de ses services publics, dont ceux de notre système de santé, de services sociaux et, j'ajouterais, d'éducation. Notre gouvernement a réitéré, dans son récent budget 2000-2001, son engagement à continuer à maintenir nos services de santé universels en dépit et malgré l'attitude du gouvernement fédéral. D'ailleurs, les ajustements récemment annoncés dans les transferts fédéraux à la santé et aux programmes sociaux, comme je l'ai démontré tout à l'heure, sont en effet bien inférieurs à la croissance structurelle des besoins des Québécoises et des Québécois.
D'ailleurs, il n'est pas inutile de se rappeler, M. le Président, que différents facteurs contribuent à la hausse des besoins dans le réseau de la santé, des besoins de financement dans le réseau de la santé et des services sociaux essentiellement d'abord par les nouvelles découvertes sur lesquelles nous pouvons compter depuis quelques décennies et qui vont en s'accélérant, nous permettant de poser des diagnostics plus tôt, de poser de meilleurs diagnostics, d'intervenir de façon plus adéquate auprès de malades en évitant de longues hospitalisations, en soignant donc mieux, plus rapidement, dans des meilleures conditions. Mais, évidemment, il y a un coût à cela. Par ailleurs, à cause des découvertes aussi de nouveaux traitements pour des maladies qui sont apparues dans les dernières décennies, nous pouvons, à cet égard, intervenir de façon beaucoup plus adéquate, encore là, avec un coût plus grand.
Comme nous vivons plus longtemps, nous avons la possibilité, bien sûr, ou nous connaissons le risque d'avoir à utiliser davantage les services de santé. Ça va de soi, puisque, à un âge plus avancé, certains problèmes apparaissent, et les institutions sont là pour nous servir. Donc, tous ces facteurs combinés font en sorte que les coûts dans le secteur de la santé et des services sociaux, mais particulièrement en santé, augmentent plus rapidement que la croissance de notre richesse collective. Il ne faut pas être grand clerc pour pouvoir constater cela. Il semble que cependant ça échappe à Ottawa qui, lui, a décidé de s'asseoir sur ses surplus et de ne pas respecter l'engagement pris à l'égard des provinces quant au financement du système de santé, M. le Président. On préfère nous faire la leçon et nous suggérer ce que nous devrions faire sans nous en donner les moyens. Il me semble qu'on devrait plutôt commencer par faire l'inverse, nous donner les moyens, puisque nous savons quoi faire avec les sommes qui seraient restaurées, nous permettant de mieux intervenir pour offrir encore davantage de services.
(15 h 40)
S'il est une leçon que nous devons collectivement retenir de l'expérience des dernières années, à part bien sûr le fait que l'on ne peut se fier au gouvernement fédéral, c'est bien que générosité et rigueur, en réalité, vont de pair. Si les Québécois peuvent aujourd'hui être fiers, s'ils peuvent enfin se tourner vers l'avenir avec confiance, c'est bien en raison des réinvestissements dans les services publics et dans les allégements fiscaux que le gouvernement québécois a accordés. Cela n'aurait pu être réalisé sans la rigueur dans la gestion exercée par un gouvernement du Parti québécois.
En ce qui concerne notre secteur, ces réinvestissements, nous l'avons déjà dit, font partie d'un tout qui comprend plusieurs éléments. J'en rappelle quelques-uns: la mise en place d'une véritable imputabilité axée sur l'atteinte d'objectifs et de résultats mesurables, l'obligation de respecter l'équilibre budgétaire et un projet de loi structurant qui viendra préciser la répartition des responsabilités entre la ministre, le palier régional et les établissements.
M. le Président, le présent projet de loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux fait partie intégrante de ce tout, incluant les réinvestissements majeurs de 2,7 milliards de dollars accordés et les autres mesures qui viendront le compléter. Cet ensemble de mesures permettra au réseau de se tourner résolument vers l'avenir avec la confiance que lui confère la santé financière retrouvée. De plus, il permettra d'assurer aux Québécoises et les Québécois que les services sociaux et de santé seront accessibles lorsqu'ils en auront besoin. Ce projet de loi joue un rôle particulier important dans cet ensemble de mesures, il vient les assurer que les ressources considérables qu'ils y consacrent seront gérées efficacement, avec toute la rigueur requise et aussi de façon responsable et transparente.
Pour ces raisons, M. le Président, je propose donc à l'Assemblée nationale l'adoption du principe du présent projet de loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Je vais céder la parole à M. le député de Vaudreuil. M. le député.
M. Yvon Marcoux
M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Je prends la parole dans cette Chambre au nom de l'opposition officielle pour discuter du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, un projet de loi qui a été annoncé en toute catastrophe puis qui a été déposé à toute vapeur à l'Assemblée nationale par la ministre de la Santé. Pourquoi? On peut trouver une explication qui est la suivante: c'est qu'elle a réagi évidemment aux propos de son collègue des Finances, ce dernier lui ayant dit que la ministre avait des problèmes de gérance. Donc, elle réagit pour répondre à une commande de son collègue et pour donner l'impression qu'elle a la situation en contrôle.
M. le Président, les problèmes auxquels nous faisons face aujourd'hui dans le réseau de la santé, ils n'ont pas été créés par d'autres que le gouvernement actuel, et je voudrais vous faire un bref historique. Le gouvernement, il a mal géré depuis 1995, il a mal planifié, il a pris des mauvaises décisions et il a appliqué des coupures budgétaires qui ont massacré le système, et aujourd'hui ce sont les patients, les malades, les personnes âgées qui paient le prix de cette improvisation. Ce sont les professionnels de la santé, ce sont les infirmières, les employés qui travaillent dans le réseau qui sont dans un contexte où il y a un manque de personnel, où c'est l'épuisement et la détresse psychologique pour plusieurs, et tout ça, évidemment, ça a été fait pour atteindre supposément le déficit zéro qui était une des conditions gagnantes.
Évidemment, on vient de revenir, il y a quelques mois, en disant: Maintenant, non, la condition gagnante, c'est la santé. La santé, on doit s'en occuper non pas pour les patients, pour les malades, pour les personnes âgées mais parce que ça constitue maintenant une condition gagnante, parce qu'on a tellement dégradé le réseau. Parmi ces exemples de mauvaise gestion, de décisions improvisées prises sans mesurer les impacts négatifs que ça pouvait générer dans le réseau, il y a celui des mises à la retraite, mises à la retraite d'abord des médecins où, au 31 août 1998, 1 259 médecins, dont 700 spécialistes, 559 omnipraticiens, ont été incités à prendre leur retraite et, non seulement ça, ont été payés pour prendre leur retraite plus tôt. On a, pour favoriser ces départs, déboursé des montants, des centaines de milliers de dollars. On a donné aux médecins 150 000 $, 200 000 $, 250 000 $, jusqu'à 300 000 $ par médecin pour les inciter à prendre leur retraite, et tout le Québec a été affecté, M. le Président.
Si on regarde les tableaux des départs, soit le Bas-Saint-Laurent, l'Abitibi-Témiscamingue, 15 et on se rappellera que notre collègue d'Abitibi-Ouest mentionnait la pénurie extraordinaire qui existe dans la région d'Abitibi-Témiscamingue maintenant la Mauricie Bois-Francs, 85 médecins à la retraite, la Montérégie, 105 médecins, et on pourrait continuer comme ça. Sur le plan des spécialités, les anesthésistes dont on manque présentement, 97, 35 cardiologues, 23 ophtalmologistes, et hier soir on me disait justement que, dans une région, la liste d'attente pour les cataractes, c'est entre un an et demi et deux ans, M. le Président. Donc, maintenant, dans toutes les régions du Québec, il y a une pénurie de médecins.
Et, lorsqu'on je demandais à la ministre, il y a quelques semaines, qu'est-ce qu'elle allait faire pour justement résoudre cette pénurie de médecins, notamment en région, évidemment elle me répondait, comme d'habitude, que, oui, elle avait promis ça pour l'automne 1999. Après ça, elle l'avait promis pour décembre 1999 puis, après ça, elle l'avait promis pour les débuts de l'année 2000. Là, elle dit: Écoutez, maintenant, je ne peux rien faire, c'est le mandat de négociation avec les fédérations médicales. Mais, M. le Président, elle le savait, l'automne dernier. Pourquoi ne pas avoir dit la vérité et avoir été transparente au lieu de faire des promesses et qu'elle ne soit pas capable, après ça, de respecter ses engagements?
Parlons maintenant des employés à la retraite dans le réseau, autres que les médecins, et surtout des infirmières. On se rappellera que le Conseil du trésor, vous savez, avait décrété, oui, un plan de mise à la retraite pour pouvoir réduire de façon drastique les coûts. Mise à la retraite, vous savez, les conditions ont été présentées, non ciblées, de sorte que deux fois plus de personnes ont pris leur retraite dans le réseau et que, parmi ces personnes-là, notamment les infirmières, 4 000 infirmières, M. le Président, en l'espace de deux ou trois mois ont quitté le réseau de la santé, et ça, parmi celles qui avaient le plus d'expérience, celles qui travaillaient dans les unités de soins les plus névralgiques, que ce soient les soins intensifs, les blocs opératoires ou l'urgence, et aujourd'hui, évidemment, le personnel qui fait, dans les centres hospitaliers et partout dans les établissements, un travail extraordinaire est épuisé, il en manque.
Cet été, on fait face à une pénurie d'infirmières jamais vue dans le réseau. On devra fermer 1 500 lits dans la région de Montréal, près de 200 lits dans la région de Québec parce qu'on a créé un trou béant avec la mise à la retraite de 4 000 infirmières. Et, en même temps, la ministre de la Santé, qui était alors ministre de l'Éducation, avait contingenté l'accès au programme de techniques infirmières dans les cégeps, de sorte que, au moins de juin de cette année, nous aurons la plus petite cohorte d'infirmières qui vont graduer des cégeps. M. le Président, ce sont là des exemples d'improvisation, de décisions qui ont massacré le système, et ça, ce n'est pas la faute des autres, c'est le gouvernement qui a pris ces décisions-là, c'est la ministre qui a pris ces décisions-là. Vous savez, ça a généré des coûts énormes. Le Vérificateur général, qui a examiné toute cette opération qui avait été improvisée, nous dit: 2,3 milliards dépensés en pure perte dans cette opération de mise à la retraite des employés. Alors, imaginez, si nous ne prenions que la moitié de cette somme qui a été dépensée en pure perte et que nous l'appliquions à fournir des soins et des services aux patients, ce que ça pourrait représenter de différence pour les soins et les services aux patients.
D'ailleurs, c'est M. Parizeau lui-même, vous savez, qui disait justement, il n'y a pas si longtemps, au mois de décembre dernier: À la santé, où on s'attendait à 6 000 départs sur 135 000 employés, il en est parti 17 000. On s'est assis sur la marmite et on a donné des primes de départ. On aurait pu cibler l'affaire; on a laissé place à l'imagination créatrice. Voilà, M. le Président, ce que M. Parizeau lui-même a comme évaluation de cette décision extrêmement malheureuse qui a été prise par le gouvernement et par la ministre.
(15 h 50)
On a également, vous savez, fermé des hôpitaux, sept hôpitaux dans la région de Montréal, sans prévoir cependant l'agrandissement des hôpitaux qui restaient. On devait agrandir les urgences. On disait: Oui, on ferme des hôpitaux, mais on va agrandir les urgences, on va faire des rénovations. Non. Depuis trois ans, il n'y en a pas encore de faites. Les fameux centres ambulatoires qu'on avait promis à grand renfort de publicité, ils ne sont pas encore là, on n'a pas encore levé la première pelletée de terre. En plus, on a fait toutes sortes de changements dans la structure du réseau: on a fusionné, on a défusionné des conseils d'administration. Évidemment, pendant qu'on jouait avec les structures, on mettait moins d'efforts pour fournir les services aux patients.
D'ailleurs, le Dr Yves Lamontagne, qui est le président du Collège des médecins, donnait sa propre évaluation de toutes ces improvisations gouvernementales dimanche le 2 avril dernier dans Le Journal de Montréal . Il dit: «Mais j'ajoute d'emblée: même s'il fallait le faire pour réduire des coûts c'est-à-dire d'assainir les finances publiques, et non pas dans la santé je conteste fortement la manière dont on a coupé dans le réseau de la santé. Mettre à la retraite des milliers d'employés, de médecins, de techniciens, d'infirmières d'expérience fut la pire erreur. Les politiciens ont toujours une vision de courte vue. Aujourd'hui et pendant plusieurs années, on en paiera le prix dans le réseau québécois de la santé.» Ça, M. le Président, c'est le Dr Yves Lamontagne, le président du Collège des médecins, qui fait cette évaluation extrêmement pénible et négative des actions du gouvernement.
En plus, le gouvernement a coupé dans le réseau de la santé 2,2 milliards, plus que n'importe quelle autre province au Canada, alors qu'au Québec nous avons une population qui est plus vieillissante qu'ailleurs au Canada. Évidemment, on connaît le résultat: l'engorgement aux urgences malgré toutes sortes de mesures, de tentatives qui ont été faites par le gouvernement.
La ministre nous parlait tantôt d'un groupe d'appui maintenant à la gestion financière. Vous savez, il y a trois ans, pour aider le problème des urgences, ne se rendant pas compte que c'était un problème de financement, le ministre avait mis sur pied un groupe tactique des urgences, imaginez-vous, et ça n'a rien réglé. M. le Président, les listes d'attente. On voit, dans tous les domaines des spécialités, et particulièrement si on parle, par exemple, de la cardiologie, que la liste continue de s'allonger. À Montréal, 620 personnes sur la liste d'attente; il y en avait 519 il y a quelques mois. Et le Dr Langlois, qui est un spécialiste, nous dit, et je cite: «Ce n'est pas un problème d'équipement, de médecins, parce qu'il y a des salles d'opération présentement qui ne sont pas utilisées. Mais, voilà, les sous ne sont pas là. Il faut de l'argent pour payer le personnel et les blocs opératoires.» Et il ajoute: «En octobre, la ministre a promis d'agir immédiatement. Elle a créé un comité c'est ça, la ministre crée un comité; parfois, ça change de nom, un groupe de travail, un groupe de consultation, bon, ça peut varier; évidemment, les comités, ce n'est pas nouveau, la ministre en crée à peu près à tous les jours, des comités; c'est ce que le médecin dit qui a émis des recommandations, mais on n'en a pas encore vu la couleur.» Où sont les problèmes de gestion, M. le Président? Encore une fois, c'est la ministre et le gouvernement qui ne sont pas capables de mettre en oeuvre les mesures requises pour donner suite aux recommandations et pour pouvoir organiser les services et fournir aux patients les soins requis.
En radio-oncologie, la liste d'attente continue de s'allonger également: 1 225 personnes sont prises en otages en radio-oncologie. Et, pendant ce temps-là, évidemment, on envoie des patients se faire soigner aux États-Unis et les hôpitaux aux États-Unis peuvent se procurer des équipements avec les paiements qu'on leur fait. Et ce n'est pas tous les patients qui peuvent aller aux États-Unis, j'en ai dans mon comté, des femmes atteintes de cancer du sein qui sont sur une liste d'attente de trois ou quatre mois à Montréal et qui ne peuvent aller aux États-Unis parce qu'elles ont une famille. Elles sont soutien parental et elles ne peuvent se permettre de quitter pendant des semaines pour aller aux États-Unis, M. le Président.
Le virage ambulatoire, 40 000 Québécois qui sont privés de services à domicile, nous dit l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec. Pour les personnes âgées, celles qui ont le plus contribué à bâtir notre société, celles qui sont aujourd'hui les plus vulnérables, eh bien, les services ne sont pas là. Dans un article, vous savez, c'est l'Ordre des infirmières qui a fait une enquête et qui dit: «Les personnes âgées qui séjournent dans des établissements publics de soins de longue durée font pitié, manquent de soins. Contention, atteinte à leur dignité, violence physique et verbale font partie de leur quotidien.» Et, lorsqu'on regarde tout ce qu'a fait le gouvernement du Québec en termes de mauvaises décisions, en termes de coupures, nous en arrivons maintenant à une situation où le Québec est la province où les soins et les services de santé sont le plus sous-financés. Le Québec est la province qui, pour les dépenses totales de santé per capita, en 1999, était la dernière: 2 486 $ par personne, par habitant, moins que l'Île-du-Prince-Édouard, moins que Terre-Neuve, M. le Président, et ça, c'est à conditions égales, les transferts fédéraux, ils sont les mêmes partout. Donc, un sous-financement chronique qui se reflète dans ces statistiques où on indique clairement que l'on dépense, au Québec, le moins, parmi les provinces canadiennes, par habitant. Donc, pas de surprise maintenant lorsqu'on dit: On ne peut pas fournir des services adéquats.
Et le virage ambulatoire, un exemple: per capita, on dépense 46 $ au Québec en 1999; la moyenne, c'est de 80 $ au Canada, M. le Président. Et cette situation financière, vous savez, elle existe ce sous-financement depuis que le Parti québécois est au pouvoir. Quand la ministre parle de déficits dans les établissements, M. le Président, en 1993-1994, il n'y en avait pratiquement pas, de déficits. Les déficits se sont accentués avec les coupures budgétaires drastiques qui ont été imposées par le gouvernement du Québec. Et on voit très bien, sur ce tableau-là, l'évolution de la situation financière des établissements. Voyez-vous, le déficit n'existait pratiquement pas... En 1998-1999 et en 1999-2000, c'est encore pire. Pourquoi? Parce que le gouvernement n'a pas fourni le financement adéquat.
Vous savez, la ministre maintenant nous parle de réinvestissements, nous dit: Les nouveaux investissements vont permettre de rehausser la base budgétaire des établissements. Or, M. le Président, lorsqu'on regarde ce que la ministre fait, elle ne fait que combler les déficits anticipés pour la prochaine année, et dans une mesure qui est moindre que les déficits qui ont été encourus l'année précédente. C'est ça qu'elle fait, et elle ne prévoit que 200 millions au grand total pour le développement de nouveaux services ou l'ajout de nouveaux services. Donc, ce que ça veut dire, M. le Président, c'est que, avec ces investissements, qu'elle compte deux fois, d'ailleurs lorsqu'elle nous parle des crédits de 2,7, elle compte les chiffres deux fois la ministre, ce qu'elle nous dit, c'est qu'elle va maintenir les listes d'attente, qu'elle va maintenir les délais sur les listes d'attente, qu'elle va maintenir le manque de soins aux personnes âgées, qu'elle va maintenir le manque de soins à domicile.
(16 heures)
M. le Président, ces nouveaux investissements, ils ne viennent pas combler les compressions budgétaires draconiennes qui ont été faites au cours des dernières années, ils ne viennent pas non plus régler le problème de sous-financement chronique dont souffre le réseau. Ces nouvelles sommes dont elle parle, elles sont loin de couvrir les besoins requis au niveau des soins à domicile pour les ressources en hébergement, pour la déficience physique et intellectuelle, pour la réadaptation, pour la santé mentale, pour les traitements en radiothérapie, pour les chirurgies, pour l'orthopédie, l'ophtalmologie. La ministre ne reconnaît pas non plus l'augmentation des besoins dus au vieillissement et l'alourdissement des soins dus au vieillissement de la population. Elle ne reconnaît pas non plus les augmentations de dépenses en raison du développement technologique, M. le Président.
Vous savez, elle nous dit: Oui, on va rehausser la base budgétaire, d'un côté, et, de l'autre côté, elle nous dit: Ce qu'on fait, on comble les déficits. Alors, qu'est-ce qui va arriver avec des établissements... Par exemple, il y a bien d'autres types de dépenses, vous savez, que les établissements doivent encourir en raison des décisions antérieures du gouvernement.
Je donne un exemple, ici, pour le directeur général de l'hôpital de Maniwaki, dans le journal Le Droit , à Ottawa. Il dit: «Présentement, on doit compter sur des médecins dépanneurs. Cela implique des dépenses inhabituelles importantes. La pénurie d'infirmières oblige également la direction de l'hôpital à payer énormément d'heures supplémentaires. En janvier seulement, nous avons dû payer 140 quarts de travail en heures supplémentaires. Cette année, l'hôpital de Maniwaki a versé au moins 300 000 $ en heures supplémentaires, alors que la moyenne est habituellement de 75 000 $ par année. Les médecins dépanneurs occasionnent, de leur côté, une dépense de 60 000 $ par année à l'établissement hospitalier. Toutes ces dépenses, jumelées à un alourdissement de la clientèle, expliquent le déficit annuel de l'hôpital de Maniwaki.»
Donc, M. le Président, ce sont des dépenses additionnelles que les établissements doivent couvrir dans leurs dépenses de fonctionnement.
Au CLSC de la ville d'Anjou, le CLSC Olivier-Guimond, on dit: «On a décidé à la mi-février de ne plus ouvrir la fin de semaine, réaffectant l'argent ainsi économisé à d'autres services d'aide à domicile.» Et le CLSC n'a d'autre alternative, pour l'aide à domicile, que de créer une liste d'attente. Pour remplir les besoins, il faudrait dépenser davantage, donc faire un déficit.
Vous savez, c'est dans ma région, le CLSC La Presqu'île, où la présidente a écrit au président de la régie régionale, au mois de mars, en disant: Les premières prévisions budgétaires pour l'an 2000-2001 font état d'un déficit de l'ordre de 500 000 $, et ça, c'est simplement pour répondre aux besoins de services ambulatoires et pour accompagner les gens qui sortent de l'hôpital et qui s'en vont à domicile.
Alors, M. le Président, les investissements annoncés par la ministre ne suffiront pas à combler ces nouveaux besoins, et elle le sait très bien. Mais, pour démontrer qu'elle agit, qu'elle veut paraître comme étant une bonne gestionnaire, elle dépose un projet de loi, dit-elle, antidéficit, évidemment qui est improvisé, qui est répétitif on en reparlera incohérent d'ailleurs avec la Loi sur les services de santé et les services sociaux actuelle.
Elle nous parlait tantôt des objectifs de résultats. Elle dit: Écoutez, c'est important que nous puissions nous entendre avec les établissements sur des objectifs de résultats et qu'on puisse les suivre. Nous sommes entièrement d'accord, M. le Président, sur un tel objectif, mais elle nous racontait la même chanson l'an dernier, lors du dépôt du budget. La ministre, à ce moment-là, avait trouvé comme moyen la négociation d'ententes de gestion entre les régies et les établissements, et ça, c'était pour renforcer la responsabilité du réseau. Donc, elle dit: «Nous allons mettre en place des mesures incitatives aussi pour récompenser les succès. Nous pourrons, par exemple, allouer certains crédits additionnels. Ces mesures sont prévues pour les établissements qui sont à la fois en surplus ou en équilibre budgétaire on penserait relire le texte que la ministre nous a lu tantôt qui ont enregistré un surplus accumulé au 31 mars 1999. Elles pourraient se traduire sous différentes formes, par exemple autoriser des projets d'acquisition de nouveaux équipements, des projets d'immobilisation. Nous voulons ainsi susciter la créativité et le sens des responsabilités dans le réseau.»
Nous parlant des ententes de gestion, lors de sa conférence de presse du jeudi 11 mars 1999, elle disait: «Outre ces conditions prévues dans les ententes de gestion, le gouvernement entend lier l'allocation de crédits additionnels qu'il accordera au réseau de la santé et des services sociaux à la démonstration de l'atteinte des objectifs de résultats convenus dans les ententes de gestion.» Et, au mois de novembre dernier, en réponse à une question en Chambre, ici, elle nous a parlé de critères de performance, ce avec quoi nous sommes entièrement d'accord, et je pense que tous les établissements dans le réseau souhaitent qu'il existe des critères d'évaluation de performance qui soient les mêmes pour tous. C'est ça qui permet d'évaluer et de comparer. Et la ministre nous disait: Écoutez, nous sommes à travailler sur ça. J'ai d'ailleurs rencontré, hier matin, l'Association des hôpitaux du Québec pour nous entendre sur ce qu'allait être un guide d'évaluation pour les critères de performance, pour corriger la situation, de telle sorte que la population québécoise continue de compter sur des services de qualité.
Évidemment, les ententes de gestion également, elle en a signé, vous savez, au moins une cinquantaine, 60, 70, dans la province. Les dernières ententes ont été signées au mois de février 2000, il y a à peu près deux mois, M. le Président, ce qui devait donc être mis en place et constituer un moyen de travailler en partenariat avec les établissements pour atteindre des objectifs de résultats, s'assurer que les services étaient bien rendus. Bien, la ministre, après avoir fait travailler un nombre incroyable de personnes durant l'année, dit maintenant: Non, là, ça ne fonctionne plus, ça. Écoutez, c'était en place, mais ça ne marche pas. On ne donne pas le temps de voir si ça va fonctionner. Compte tenu des critiques qu'elles a eues, elle dit: Non, maintenant, on arrive avec un projet de loi antidéficit et, avec ça, on va régler la question de la performance, avec ça, vous savez, on va s'organiser pour travailler sur l'organisation des soins.
D'entrée de jeu, si on va du côté du projet de loi et qu'on examine de façon un peu plus approfondie les principes qui y sont contenus et les articles, évidemment, ce qu'elle a pu constater en partant, c'est que l'ensemble des dispositions qui sont contenues dans ce projet de loi là, évidemment, elles existent déjà sous une forme ou l'autre dans la loi actuelle sur les services de santé et les services sociaux, et notamment toutes les dispositions nécessaires visant l'obligation d'équilibre budgétaire, principe, M. le Président, avec lequel nous sommes entièrement d'accord, l'équilibre budgétaire, c'est déjà inscrit dans la loi. Mais nous ne sommes pas d'accord cependant au prix de couper les services aux patients, de fermer les portes aux malades, d'enlever la dignité aux personnes âgées parce que le gouvernement n'accorde pas suffisamment de crédits aux établissements pour fournir ces services-là.
D'ailleurs, je voudrais simplement vous rappeler ce que je mentionnais tantôt, et c'est assez ironique, hein: Les déficits, ils existent depuis 1996, quand le gouvernement a commencé à couper dans les budgets du réseau. C'est à ce moment-là, M. le Président, que les déficits ont commencé à s'accumuler. Et, comme les coûts augmentaient et qu'on coupait en même temps, bien, les déficits se sont accumulés à un rythme exponentiel. D'ailleurs, vous savez, la ministre nous parlait tout à l'heure des régies. Elle disait: Dorénavant, dans ce projet de loi là, on va contrôler les régies, elles n'auront plus le droit de faire des dépenses en sus de leur budget. Je voudrais simplement lui rappeler, à la ministre, que, il y a deux ans, c'est elle qui a autorisé des régies régionales à emprunter pour fournir des crédits additionnels aux établissements de la région: dans Lanaudière, la Montérégie, Montréal. Parce qu'elle dit: Non, le président du Conseil du trésor ne veut pas que j'accorde de crédits additionnels, ça serait mauvais pour les objectifs budgétaires du gouvernement au total, mais je ne vous dis pas quels services couper. Donc, je vous permets d'emprunter. Et ça a été fait au su, connu de la ministre. Donc, ce n'est pas dire: Aujourd'hui, là, on a besoin d'un projet de loi pour empêcher les régies d'excéder leur budget. Les régies, elles sont déjà contrôlées par la ministre. Donc, la ministre, au lieu d'agir, de régler les vrais problèmes, elle dit: On va patenter un projet de loi politique pour divertir l'attention, ignorer les vrais problèmes et donner l'impression, vous savez, au bon peuple qu'on agit.
(16 h 10)
Et c'est ce que d'ailleurs reprend, M. le Président, une opinion juridique du bureau d'avocats Heenan, Blaikie, qui conclut également avec nous, et je cite: «Dès lors, il faut peut-être conclure que le dépôt du projet de loi répond davantage à des impératifs de nature politique qu'à une véritable nécessité juridique. Si la Loi sur les services n'a pas, quels que soient les motifs, été appliquée, rien ne démontre qu'il faille une nouvelle loi qui énonce les mêmes principes pour que son application soit assurée.»
Si nous allons, M. le Président, par exemple, du côté des articles 3 et 4 du projet de loi, qui touchent, enfin qui prescrivent qu'un établissement doit maintenir l'équilibre entre ses revenus et dépenses, et: «Aucun établissement public ne doit encourir de déficit à la fin d'une année financière»... Les articles 284 et 285 de la loi actuelle sur les services de santé et les services sociaux reprennent exactement, M. le Président, sous des formes différentes, les mêmes obligations. On dit bien: «Les prévisions budgétaires des dépenses et des revenus doivent être en équilibre. Lorsqu'un plan d'équilibre budgétaire est requis pour qu'un établissement que le conseil administre puisse se conformer à son budget» le conseil d'administration doit l'adopter. M. le Président, donc, c'est déjà prévu dans la loi actuelle.
Si on va à l'article 5, les articles 5, 6 et 7. Ce que ces articles-là prévoient, M. le Président, ce sont des modes de transmission des budgets du ministère aux régies et des régies aux établissements. Pourtant et avec des dates déjà, M. le Président, il y a également dans la loi actuelle des dates de prévues. On prévoit, par exemple, que, avant le 1er avril de chaque année, une régie doit faire connaître aux établissements son budget. Ce n'est pas nécessaire d'avoir une loi pour dire que la ministre doit envoyer ça avant le début de l'année. Déjà, la loi actuelle prévoit que les régies doivent transmettre les budgets avant le 1er avril de chaque année, alors qu'on saura que dans le passé le ministère, par incurie, transmettait les budgets aux régies au cours de l'été, et ça allait, vous savez, au mois de septembre avant que les établissements puissent recevoir leur budget pour une année financière qui commence le 1er avril. Loi ou pas loi, M. le Président, déjà l'obligation existait dans la loi actuelle.
Si nous allons maintenant à l'article 9, évidemment, l'article 9 prévoit que «le directeur général d'un établissement [...] doit préparer et soumettre au ministre, à sa demande [...] un état de la situation financière». Et là on prévoit, bien... En passant, il pourra le transmettre au conseil d'administration, aux membres de son conseil d'administration. Pourtant, à l'article 288, il y a des prescriptions touchant les rapports financiers que doit produire un établissement aux régies régionales, des rapports périodiques relatifs à l'utilisation du budget, au fonctionnement de l'établissement. Les rapports doivent contenir tous les renseignements requis par la régie ou par le ministre, et la régie fournit une copie de ces rapports au ministre. M. le Président, c'est déjà prévu. Évidemment, là, on essaie de contourner, de passer par-dessus la tête des conseils d'administration en disant: Dorénavant, le directeur général enverra son rapport financier directement à la ministre. Et, à l'alinéa 2, comme je mentionnais, bien, il pourra, après ça, le transmettre aux membres. À côté, la loi actuelle prescrit: il faudra également qu'il l'envoie à la régie. Il va faire quoi? Il va l'envoyer à la régie? Il va l'envoyer au ministre, au conseil d'administration? M. le Président, une confusion totale qui démontre que ce projet de loi a été préparé à la hâte.
D'ailleurs, on peut reprendre, également, dans l'avis juridique dont je vous parlais tantôt, où on dit, vous savez, justement sur cet aspect-là: Les conseils d'administration, de toute façon, doivent établir un plan d'équilibre budgétaire; c'est déjà prévu dans la loi. Et, pour ce qui est des rapports, notamment sur l'article 9, je cite l'opinion juridique: «À seul titre d'exemple...», parce qu'on dit que c'est un projet étonnant, ce projet de loi n° 107. Non pas seulement étonnant, on se questionne sur ses motifs. «Il suffit de comparer le texte de l'article 9 du projet et celui de l'article 288, sur les services actuels. Les deux dispositions visent la transmission d'informations financières, les unes à la régie régionale, les autres au ministre. Dans les deux cas, ces informations peuvent être requises aux dates et selon la forme prescrite par celui qui les exige. Celles à la régie doivent contenir les renseignements requis par le ministre. Le double régime est source de confusion et de redondance. Bien sûr, on souhaitera qu'il y ait cohérence entre les demandes émanant de part et d'autre, mais rien ne le prévoit expressément.» Vous savez, le ministre nous a parlé tantôt d'efficacité administrative, il nous a dit: Il faut être plus efficace. Donc, il faut simplifier les processus de gestion. Là, par loi, on vient complexifier les processus de gestion avec des mesures, des rapports qui seront redondants.
Si nous allons maintenant, M. le Président, l'article 10 prévoit, lui, que «le ministre peut établir des mécanismes de contrôle afin de s'assurer de l'atteinte de l'objectif de la présente loi».
«Le ministre peut également, dans les mêmes circonstances, prendre, à l'égard d'un établissement public, une directive sur la gestion de ses ressources humaines, budgétaires, matérielles ou informationnelles.»
M. le Président, c'est de la tutelle par directives. Et, vous savez, présentement, dans la Loi sur la santé et les services sociaux, les régies ont un rôle à jouer dans le cadre de la gestion d'un établissement, de la supervision de son évolution, de sa gestion financière. Donc, qu'est-ce qui va se passer? On ne prescrit pas que les régies ne seront plus impliquées, donc on laisse la loi actuelle telle quelle. Par ailleurs, ici on dit: La ministre va pouvoir contourner complètement le rôle des régies régionales.
Et on peut évidemment se questionner sur l'impact de ces directives. Qu'est-ce qu'elle peut faire, la ministre? Je voudrais vous référer encore une fois, M. le Président, à un extrait de l'avis juridique dont je vous parlais, il dit: «Les exemples qui suivent, comme la mise en place d'un programme d'évaluation, ne constituent que des illustrations de l'exercice d'une discrétion qui n'est pas autrement balisée. Toutefois, le second paragraphe de ce même article évoque ce qui pourrait être fait. S'y trouve consigné le pouvoir du ministre d'agir par directives à l'égard d'un établissement. Les établissements et leur conseil d'administration n'auront d'autre choix que de se conformer aux directives. Ils pourraient être appelés à mettre fin à l'emploi de certaines catégories de personnel, à stopper le développement de programmes ou, plus simplement, à diminuer le volume de l'offre de soins dans un secteur d'activité. Il s'agit ni plus ni moins d'une tutelle par directives, c'est-à-dire que l'autorité de tutelle n'assume pas la responsabilité de gestion, mais qu'à distance elle force les conseils d'administration à agir dans le sens de ses décisions.»
M. le Président, la ministre veut se camoufler en arrière de directives comme paravent pour forcer des conseils d'administration, lorsqu'elle le jugera à propos, à réduire des services qu'elle n'a pas le courage d'identifier. C'est exactement à quoi va conduire cette loi, de sorte que ça pourra devenir non pas une loi, vous savez, antidéficit, mais une loi antiservices.
M. le Président, à l'article 12, vous savez, on prescrit: «À moins que le ministre ne l'y autorise expressément, un établissement public ne peut contracter un emprunt pour le paiement de ses dépenses de fonctionnement.»
L'article 296 de la loi actuelle prescrit qu'un établissement doit obtenir l'autorisation préalable de la régie régionale pour emprunter. Il prévoit également que c'est le ministre qui détermine les conditions et les circonstances dans lesquelles la régie régionale peut autoriser des emprunts. Il n'y a rien de nouveau, encore une fois, là-dedans, M. le Président.
À l'article 11, on dit: Le ministre peut assujettir l'approbation et la réalisation d'un projet d'immobilisation ou d'achat d'équipements au respect par l'établissement de l'équilibre entre ses revenus et dépenses. Mais la loi actuelle prévoit déjà qu'un emprunt pour fins d'immobilisation doit être autorisé par la ministre et par le Conseil du trésor. M. le Président, c'est déjà prévu, donc on n'ajoute absolument rien de nouveau dans le projet de loi.
(16 h 20)
Il y a, M. le Président, en terminant, l'article 14, où on prévoit qu'un établissement qui anticipe un déficit au 31 mars d'une année... S'il y en a donc on ne dira pas «déficit» on doit l'intégrer comme dépense à son budget de l'année financière subséquente. Imaginez, M. le Président, ce qui se serait passé, avec les coupures sauvages qu'a faites le gouvernement dans le réseau de la santé, en appliquant ce principe-là, et demandez-vous où serait rendue la balloune des déficits des établissements qui, comme je le mentionnais tantôt, a commencé à augmenter avec les coupures du Parti québécois.
Donc, force est de conclure que ce projet de loi, c'est une façon détournée et insidieuse de vouloir continuer à appliquer des coupures dans le réseau de la santé. Il n'y a pas d'autre conclusion qu'on peut en tirer. La ministre dit: C'est nécessaire et on doit le faire.
M. le Président, je voudrais simplement vous rappeler, en terminant, que le Québec est la province où on dépense présentement le moins per capita dans le domaine de la santé et des services sociaux. Dans les soins à domicile, on consacre à peu près 40 $ per capita, la moyenne canadienne est de 80 $. Et c'est pour ça qu'il y a 40 000 Québécois présentement qui sont privés de services à domicile. C'est pour ça que dans les centres d'hébergement, parce qu'il n'y a pas assez de sommes pour les personnes âgées, le personnel est obligé de faire des choix déchirants.
Quand la ministre nous dit que les nouveaux investissements permettront de hausser la base de financement des établissements du réseau, ce n'est pas exact. Ce qu'elle fait, c'est qu'elle ne comble que les déficits prévus pour l'année, et sur une base qui est un montant moindre que l'an dernier. La ministre sait très bien que les nouvelles sommes ne viendront pas combler l'impact des compressions budgétaires et des autres erreurs de gérance qui ont été prises par le gouvernement au cours des cinq dernières années. Elle sait très bien que ces sommes ne viendront pas combler les besoins qui sont requis à tous les niveaux du réseau, que ces sommes ne pourront pas combler l'augmentation des besoins et l'alourdissement des soins dus au vieillissement de la population. Elles ne tiennent pas compte également de l'augmentation des dépenses en raison du développement technologique.
M. le Président, dans la loi, la ministre prescrit des obligations pour les établissements, aucune obligation pour le gouvernement, aucune obligation de dire: En contrepartie du fait que vous ne devrez plus faire de déficit et que, de toute façon, l'équilibre budgétaire, c'est déjà prévu dans la loi actuelle... Et on est d'accord là-dessus, mais à aucun endroit elle dit: Le gouvernement, cependant, s'engage à fournir aux établissements les sommes requises pour donner les services qui sont requis par les malades, qui sont requis par les personnes âgées. Il me semble que c'est comme ça, une entente de partenariat. Or, il n'y a rien dans la loi à cet égard-là. Donc, ce qu'on doit conclure, c'est que la ministre, elle ne s'adresse pas aux vrais problèmes, elle ne veut pas s'adresser aux vrais problèmes, elle veut plutôt les camoufler et divertir l'attention.
Vous savez, maintenir l'équilibre budgétaire, oui, si le gouvernement s'engage à fournir les sommes requises, mais maintenir l'équilibre budgétaire au prix des services, des soins à fournir aux malades, maintenir l'équilibre budgétaire au prix d'être obligé de refuser des patients dans les hôpitaux, au prix de faire allonger les délais des listes d'attente, au prix de ne pas être capable d'accompagner les patients qui sortent de l'hôpital et qui s'en vont à domicile, au prix de ne pas pouvoir fournir les services aux enfants atteints de déficience physique et qui ont entre zéro et cinq ans, au prix de ne pas être capable de fournir les services de soutien dans le secteur de la santé mentale, au prix de réduire les soins dans les centres d'hébergement au point d'atteindre à la dignité des personnes âgées, nous ne pouvons accepter un tel projet de loi au prix de ces sacrifices pour la population du Québec, pour les malades, parce qu'à ce moment-là on va appuyer ce que j'appelle, moi, une loi antiservices. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Vaudreuil. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan.
M. Russell Williams
M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais appuyer mon collègue le député de Vaudreuil avec ses remarques sur le projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, «An Act to provide for balanced budgets in the public health and social services network». Je voudrais féliciter mon collègue pour son intervention tellement claire. On avait beaucoup de bonnes questions et, malheureusement, nous n'avons eu aucune réponse aujourd'hui sur ces questions.
M. le Président, j'essaie de comprendre la logique derrière la loi n° 107, et il n'y a pas de logique. Il n'y a pas de logique pour les services de santé et les services sociaux. Il y a une logique politique. Je voudrais savoir: Est-ce que la ministre, à toute vitesse, comme elle l'a fait souvent avec son style d'improvisation, est-ce qu'elle a créé le projet de loi parce que le vice-premier ministre et ministre des Finances a clairement et publiquement dit que c'est à cause de la mauvaise gérance que nous avons un problème dans ce système? Est-ce que c'est à cause qu'il y a une toute une bataille entre elle et lui pour d'autres raisons? Je ne sais pas. Est-ce que c'est une autre façon de vraiment cacher que le gouvernement est en train de couper encore dans la santé et les services sociaux? Les déficits des établissements, c'était environ 700 millions cette année. Sans avoir de changement dans le système de financement, ce projet de loi est, en effet, une autre coupure dans le système de la santé et des services sociaux.
Je vois un niveau d'hypocrisie incroyable, M. le Président, dans ce projet de loi. Aussi, il y a une vieille phrase qui m'a frappé quand j'ai vu ce projet de loi: Plus ça change, plus ça reste le même. J'ai sorti les manchettes de 1985, les dernières années péquistes. Ils ont, eux autres, à l'époque, créé des déficits records. Ils ont demandé des recomptes, avec le ministre de l'époque, M. le député de Joliette, quand ils ont parlé d'un déficit de 145 millions de dollars. Et c'était nous autres, le Parti libéral, quand nous sommes entrés au pouvoir en 1985, qui avons été obligés de corriger cette situation. Le gouvernement péquiste maintenant est en train de retourner dans sa vieille pratique, c'est une autre astuce. Et j'espère que ça va être assez clair, que la population puisse comprendre. «Le projet de loi n° 107, la Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, est complètement inutile, superflue, un geste politique.» Ce ne sont pas mes mots, ce sont les mots des journalistes aujourd'hui. Après, l'Association des hôpitaux du Québec a fait un avis assez clair sur cette question. Ils n'ont pas besoin de ce projet de loi.
Si, clairement, ils n'ont pas besoin de ce projet de loi, pourquoi nous avons ça devant nous? Parce que le gouvernement, avec son improvisation, est en train de trouver une autre façon de faire des coupures, transférer des fardeaux aux patients. M. le Président, la ministre est contre les déficits, mais, par son comportement, par le comportement de ce gouvernement, nous sommes en train de créer un déficit de services. Un déficit de services, je pense que c'est beaucoup plus important.
J'ai juste questionné sur un autre dossier la semaine passée, sur l'accessibilité des prothèses et orthèses, les fauteuils roulants. La ministre dit qu'il n'y a pas de liste d'attente pour ça. Mais, en réalité, il y a une liste d'attente, mais la Régie de l'assurance maladie du Québec dit aux CLSC: Il n'y a pas d'argent. «That's it, that's all, too bad». Les CLSC disent: On n'accepte pas les demandes. Avec ça, le gouvernement dit: Il n'y a pas de liste d'attente, il n'y a pas de déficit. Mais, en réalité, le déficit est sur le dos des patients parce qu'ils sont privés de leurs services.
M. le Président, nous avons vu un comportement complètement inacceptable dans le dossier de la santé et des services sociaux depuis l'entrée de ce gouvernement. Nous avons vu les six ans de coupures, nous avons un gouvernement qui a massacré le système de santé et de services sociaux, qui a coupé des milliards et des milliards de dollars.
(16 h 30)
M. le Président, vous êtes au courant, je suis convaincu que vous avez eu des appels dans votre bureau de comté sur les questions des arrangements de préretraite. Ils ont payé 700 spécialistes, plus que 500 omnipraticiens pour quitter leur travail. Ils ont payé, ils ont créé un pénurie. La ministre elle-même... Et ce n'est pas gouvernemental, mais elle-même est responsable de la pénurie des infirmières maintenant, parce que elle-même, comme ministre de l'Éducation, a commencé toutes les coupures dans l'éducation. Et maintenant elle est vraiment responsable, c'est elle qui a créé cette situation. Je sais que ce gouvernement est le gouvernement «faute des autres», mais elle ne peut pas blâmer, dans ce cas-là, les autres ministres, les autres gouvernements, elle doit juste regarder dans le miroir. C'est elle-même, personnellement, qui a créé cette situation, M. le Président.
Mais, M. le Président, je vois le projet de loi, j'ai lu ça plusieurs fois, et la chose qui me frappe beaucoup, c'est que je trouve beaucoup les mêmes choses déjà dans la loi existante, dans des mots assez clairs. Je ne répète pas toutes les choses que mon collègue le député de Vaudreuil a juste mentionnées, mais, comme l'Association des hôpitaux du Québec a mentionné dans son mémoire, dans son avis légal, ce n'est pas nécessaire, il y a répétition, et tous les moyens sont disponibles déjà dans la loi actuelle.
Je vois le ministre délégué à la Santé devant moi maintenant. Il écoute attentivement, je suis content de ça. Est-ce que lui va se lever dans cette Chambre et dire: Les 14 centres protection jeunesse, 14 sur 16, qui sont en déficit cette année, c'est à cause de mauvaise gérance? J'espère que non. Il sait mieux que ça, il sait que les centres de protection de la jeunesse sont en train de faire leur possible avec les moyens que le gouvernement a donnés. Malheureusement, ce gouvernement a coupé, avant qu'il soit nommé ministre, 55 millions de dollars juste dans ce réseau. Il arrive maintenant avec les petites sommes d'argent et essaie de donner à l'un et l'autre pour corriger ce problème, mais ils ont coupé aveuglément 55 millions de dollars.
Il me semble, M. le Président, que le ministre délégué ne peut pas dire, avec ce projet de loi, que, lui, il pense que 14 sur 16 centres de protection jeunesse en déficit cette année... il ne peut pas dire que c'est de la mauvaise gérance. Il ne peut pas dire que c'est de leur faute, eux autres. Mais, dans ce projet de loi, si 14 centres sur 16 font un déficit l'année prochaine, ils vont être obligés de mettre ça, dans le budget de l'année prochaine, dans leurs dépenses. Qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président? C'est assez clair, c'est une autre coupure cachée. Parce que, dans votre dépense, dans votre budget de fonctionnement, si vous avez besoin de prendre le déficit de l'année passée, que vous n'avez pas eu le choix de faire parce que le niveau de services ou le niveau de demande est assez élevé, vous avez besoin de couper d'autres services.
Et j'espère et je plaide au ministre délégué aujourd'hui qu'il ne passe pas un mémo aux centres de protection jeunesse, ou dans les CLSC, ou dans les autres établissements, au mois de janvier, ou au mois de décembre, ou au mois d'octobre, quand les budgets seront tous vidés, et qu'il y a une crise dans une zone, dans un territoire, chez lui, chez moi, chez vous, M. le Président... j'espère qu'il ne va jamais écrire une directive comme je vois dans le projet de loi, et dire à ces centres: Fermez vos portes. Ah, j'espère que nous n'allons jamais avoir un système qui va refuser à quelqu'un qui a besoin d'une intervention médicale ou d'une intervention sociale, à cause que ce projet de loi...
Mais le problème de ça, M. le Président, après tout un projet de loi supposé pour faire un antidéficit, à la fin du projet de loi, ils disent: «Si, malgré les mesures prises pour se conformer à l'article 4, un établissement public anticipe un déficit au 31 mars de l'année financière, il doit intégrer ce déficit comme dépense à son budget de l'année financière subséquente.» Avec ça, où est la loi qui interdit un déficit? Je ne vois pas ça, mais, vérifiez les années comme il faut, M. le Président, il dit que le projet de loi commence à être en vigueur en 2000-2001. La première fois que vous avez un déficit, vous allez mettre ça dans le budget de 2001-2002. Ça va le rendre assez difficile encore, mais peut-être, encore une fois, nos établissements vont trouver un moyen de faire ça. Rien de changé; le système est encore sous-financé, comme le député de Vaudreuil l'a déjà mentionné. Per capita, nous sommes le sous-financé au Canada au Canada nous sommes le bas de l'échelle. Inacceptable, M. le Président.
Avec ça, ce n'est pas une grande surprise que, l'année prochaine, les 14 sur 16, et les hôpitaux aussi, les CLSC, ils vont arriver... Ce n'est pas une question de mauvaise gérance, mais, à cause des besoins de notre population, nous avons besoin de faire un déficit. 2001-2002, ça va être la première fois; ils vont avoir le même problème l'année prochaine. Après ça, pour le budget 2002-2003, ça va être deux années de déficit, incluant, si ça existe, dans leur fonctionnement... dans leurs dépenses... 2002-2003, juste avant les élections: est-ce qu'il y a une coïncidence dans tout ça, M. le Président? Est-ce que y a une coïncidence qu'il y a...
Non, moi, j'ai de la misère à ne pas arriver avec cette conclusion. C'est une astuce de ce gouvernement, et, comme je l'ai mentionné, «once bitten, twice shy». Ce gouvernement péquiste, ils ont fait ça en 1985, à la fin de leur mandat deuxième mandat, fatigués, pas capables de trouver les choses créatives, pas capables de financer notre réseau. Ils ont fait les déficits, ils ont caché le déficit, et c'était juste à notre arrivée que nous avons corrigé ce problème. Et, comme le député de Vaudreuil l'a déjà mentionné, les déficits ont commencé en 1996, quand le gouvernement péquiste a commencé à couper aveuglément tous les services.
Et aussi, dans la loi, je vois une contradiction flagrante dans le discours de ce gouvernement pour la régionalisation, pour le respect des régions, et la tendance centraliste de cette ministre. C'est incroyable. Elle a dit... Et je ne sais pas, M. le Président parce que je comprends, vos tâches sont assez occupées si vous avez eu une chance de lire, je présume que oui, vous avez lu les articles dans la loi, et j'étais tellement étonné que ce gouvernement, cette ministre centraliste a dit: Les régies, là, eux autres, ne sont pas importantes; les conseils d'administration de chaque établissement, ce n'est pas important. C'est moi et le directeur général. Moi et le directeur général. Et si les députés péquistes devant moi n'ont pas lu cet article 10, vous pouvez vérifier ça, et j'attends des commentaires sur ça plus tard. C'est moi et le directeur général. Imaginez-vous le poids lourd, l'influence que la ministre peut exercer sur le directeur général.
Mais, aussi, écoutez bien le message que ce gouvernement centraliste est en train de passer aux régies régionales: Vous autres, les régies... Ah oui! centraliste qui veut... La ministre elle-même veut décider tout ça. C'est assez clair. Lis le projet de loi, là. Vous êtes en train de dire: Les régies régionales ne sont pas importantes. Vous êtes en train de dire que les patients ne sont pas importants. Vous êtes en train de dire: Nous avons juste trouvé une autre astuce pour cacher le déficit, pour couper les services. Expliquez-moi, si ce n'est pas vrai. Vous n'êtes pas capables, parce que c'est assez clair. Si vous êtes forcés d'inclure votre déficit dans les dépenses de l'année prochaine, vous allez encore couper les services.
Mr. Speaker, this is the Government that has showed itself to be completely incapable of planning health and social services. This is a Government that has improvised. This is a Government that, again, in their budget showed no vision, no understanding of the real needs of the people of Québec. The day before the budget, I was one of the most taxed people in North America. The day after the budget, I was also one of the most taxed people in North America. But yet, on a per capita funding level of health care, we are the lowest in the country, slightly over $2 400, $2 486, if I recall correctly, less than every other province. You can't be proud of that. Most tax, least service. It doesn't work that way. If we're going to have high taxes, we should be getting some good services, and the money... but it's not devoted to that. We've seen the Government buy out professionals, over 1 000 doctors, specialists and family practitioners leave.
The Minister herself is personably responsible for the problems with our nurses. She cut the education program, the admissions into nursing. She has created artificially this terrible shortage of nurses that we have. We see that we give, in terms of home care, almost half what the rest of the country gives in terms of support of it.
(16 h 40)
So, Mr. Speaker, the Minister, in this law, what is she trying to say? Is she trying to say that in fact the patients have been abusing the system? Is she trying to suggest that somebody goes into a hospital for a hip replacement because it's universally accessible? That somebody goes into a hospital with heart problems because the food is good? I don't think so, Mr. Speaker. There's not abuse there. They have been cut and cut and cut, over $2 billion.
But now, the Government is saying: I'm going to come up with this political manoeuver to pretend we're now in charge to pretend. Because the Minister of Finance hurt the Minister of Health when he said: It's not a question of money, it's a question of management. You know, the debates between those two, what's going on. That hurt her, so she had to come up with something. This is a political document. It doesn't make any sense. You know what? If we needed it, if we needed controls in our health care system, I'd be the first and the deputy de Vaudreuil would be the first supporting them. But the problem is, Mr. Speaker, those controls already exist in law in very clearly enunciated articles.
Il y a déjà toute la notion de contrôle, déjà toutes les notions d'équilibre. Et nous avons, avec les régies maintenant, devant notre commission, tout entendu et fait le débat sur les ententes de gestion. On doit assurer que notre système est bel et bien géré. Mais on ne met pas ça en doute, M. le Président j'essaie de comprendre c'est quoi, en arrière de ce projet de loi.
Moi, j'arrive avec une conclusion: C'est une astuce politique, parce que, dans une main, avec le titre, elle essaie de convaincre la population que maintenant elle est en train de contrôler le déficit. Les déficits sont créés par eux-mêmes, ils ont commencé les déficits quand ils ont commencé à couper. Est-ce que bientôt ils vont passer un projet de loi qui interdit à la population québécoise d'être malade? Est-ce que c'est ça qu'ils vont faire? Est-ce qu'ils vont dire: Vous n'avez pas le droit de vieillir, M. le Président?
Bien, voyons donc, M. le Président! Ils ont eu des besoins qui ont augmenté parce que... et c'était plus ou moins les mêmes en 1985. Parce qu'en 1985 ils ont parlé aussi du vieillissement de la population, des nouvelles technologies, les immobilisations, etc. Il n'y a rien de nouveau. Le problème en arrière de tout ça, le gouvernement est en train, encore une fois, d'improviser.
M. le Président, il me semble que le gouvernement est vraiment hors track. Oui, on veut avoir une bonne gestion; oui, on veut ça. Je ne veux pas être au plus bas, à l'échelle du Canada, sur le financement du capital. Je ne veux pas avoir un projet de loi une loi qui va créer encore une fois les déficits de services. Et j'espère que le gouvernement comprend ce concept. Quand vous êtes en train de fermer les portes, quand vous êtes en train de créer les listes d'attente plus longues, quand vous donnez la pitoyable augmentation pour les familles d'accueil cette année, 0,24 $ par jour, 0,01 $ par heure, ils ont augmenté quand vous êtes en train de faire ça, vous êtes en train de créer des déficits de services. Il me semble, M. le Président, qu'on doit faire mieux que ça. La population québécoise mérite mieux que ça.
On arrive avec un projet plein de non-sens, et c'est assez clair que c'était inutile, M. le Président. C'est un acte politique et, dans mon opinion, M. le Président, c'est aussi un autre non-respect pour nos régies régionales, parce que la ministre a dit qu'elle va faire toute une réforme dans le futur. Si tu n'appelles pas ça une réforme, je ne sais pas qu'est-ce que vous allez appeler une réforme. Parce qu'elle peut, par ses actes, mettre presque en tutelle, directement en relation avec un directeur général, nonobstant la régie régionale, nonobstant le conseil d'administration des établissements, et là je pense que c'est assez dangereux, M. le Président.
Mr. Speaker, in conclusion, I firmly believe that we need proper controls in our health care system. But this Government is denying services to people. This Government this law is blaming institutions, but, more importantly, this Government is blaming Quebeckers and patients and people who get sick. They have severely cut our system, massacred our system. Yet, they are going to try to convince us that, somehow, it's somebody else's fault. It's their fault. They have mismanaged it. You've seen it in health care, you've seen it in social services, we've seen it recently on the drug debate, when this Government has not been able to respond to the real issues. They're pouring money in the United States and not pouring money into here, it's unacceptable!
Most importantly, Mr. Speaker, and what hurts me the most is that citizens, residents of Québec are being deprived of services. And this Government comes out with political laws that don't respond to real issues. What I want them to do is to return back to the drawing table, fix this law and respond to the real issues of the people of Québec. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Nelligan. La présidence a reçu dans les délais requis une demande de débat de fin de séance du député de Papineau, suite à une question qu'il a posée aujourd'hui au ministre délégué à l'Industrie et au Commerce concernant le traitement injuste accordé à la région du Centre-du-Québec dans le dossier de la transformation de l'aluminium. Ce débat de fin de séance aura lieu demain, jeudi le 6 avril, après les affaires du jour, à 18 heures.
Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux. Et je suis prêt à reconnaître maintenant Mme la députée de Crémazie. Mme la députée, la parole est à vous.
Mme Manon Blanchet
Mme Blanchet: Merci, M. le Président. Le projet de loi que nous sommes à examiner et dont on débat le principe aujourd'hui vise essentiellement deux choses: soit garantir l'équilibre entre le maintien de l'assainissement des finances de notre réseau d'établissements, acquis grâce au dernier budget annoncé il y a trois semaines par le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances, et aussi l'accès aux services pour toute la population du Québec.
Une des critiques que l'on a entendues depuis quelques jours est que ce projet de loi serait un acte qui répondrait à des préoccupations d'ordre essentiellement politique. Ce reproche me semble des plus étonnants, et je dirais même que ça devient presque une aberration. Depuis quand effectivement adopter des lois est-il autre chose qu'un acte essentiellement politique? Dans quelle démocratie le privilège de modifier les règles de vie en société, que l'on nomme justement des lois, échappe-t-il à la sphère politique? Je n'en connais pas du tout.
Alors, oui, M. le Président, le projet de loi qui vous est soumis et qui nous est soumis répond à des impératifs politiques, comme tous les projets de loi que nous avons l'honneur d'examiner en notre qualité d'élus, et nous le faisons au nom de toutes les Québécoises et de tous les Québécois, et ce, dans leur meilleur intérêt. La gestion du bien commun et des acquis sociaux qu'il suppose est confiée par la population québécoise aux personnes auxquelles elle donne sa confiance et à qui elle donne le mandat de la représenter. C'est l'essence même de l'activité politique, et nous avons l'honneur d'y être impliqués.
Le projet de loi qui nous est soumis introduit des changements relatifs à la gestion financière de nos établissements. Il vient aussi préciser certaines règles et il en modifie certaines autres. Maintenant que nous avons permis aux établissements de rétablir l'équilibre budgétaire et que nous injectons, de plus, de nouveaux fonds pour ajuster leur base de financement, il fallait garantir d'une façon forte, par l'adoption d'une loi spécifique, afin que nous ne retombions pas dans les mêmes ornières, c'est-à-dire les déficits annuels qui ont été faits lors des neuf années de mandat de l'opposition officielle et qui ont été sous-évalués pour un montant total de 6 milliards de dollars, à notre arrivée en 1994. C'est révolu, le temps où il fallait emprunter, comme on dit, pour faire l'épicerie.
L'article 284 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux prévoit que les prévisions budgétaires des dépenses et des revenus qu'un établissement doit préparer aux fins d'une nouvelle année financière doivent être en équilibre. Les articles 285 et 286 de cette même loi précisent que, dans les 30 jours qui suivent la transmission par la régie régionale du budget projeté d'un établissement, celui-ci doit réviser ses prévisions budgétaires de fonctionnement de manière à pouvoir adopter un budget conforme à celui proposé par la régie. Un établissement peut alors être tenu d'élaborer un plan d'équilibre budgétaire afin de se conformer à ce budget de fonctionnement.
Compte tenu que les établissements commenceront l'année financière 2000-2001 en équilibre, les dispositions des articles 2, 3 et 4 du projet de loi n° 107 viennent donc intensifier l'obligation faite aux établissements de maintenir l'équilibre budgétaire entre leurs dépenses et leurs revenus et de ne pas encourir de déficit à la fin de l'année financière. Les articles 5, 6 et 7 du même projet de loi n° 107 aménagent un processus budgétaire différent de celui prévu dans la loi précitée, et tout en insistant sur l'importance du maintien de l'équilibre budgétaire tant pour les établissements publics que pour les régies régionales. Toutefois, ce nouveau processus n'évacue pas pour autant les préoccupations ministérielles et régionales en matière d'organisation et d'accessibilité aux services.
(16 h 50)
L'article 8 du projet de loi n° 107 ne trouve pas son pendant dans la loi actuelle. Il vise, encore ici, à accentuer l'objectif d'équilibre budgétaire du réseau en indiquant aux régies qu'elles ne doivent pas prendre des engagements au-delà des sommes qui leur sont allouées par le ministère.
L'article 9 du projet de loi impose un devoir au directeur général d'un établissement public, devoir qui n'existe pas dans la loi générale.
L'article 10 du projet de loi n° 107 attribue à la ministre de la Santé et des Services sociaux le pouvoir d'intervenir directement et de différentes manières auprès des établissements dont le maintien de l'équilibre budgétaire est menacé, notamment de prendre des directives sur la gestion des ressources de ces établissements, directives qui les lieront immédiatement. De telles mesures n'existent pas présentement.
Les articles 11 et 12 du projet de loi constituent aussi de nouveaux moyens pour la ministre de subordonner la réalisation d'un projet d'immobilisation au respect de l'équilibre budgétaire et de contrôler seule tous les emprunts non seulement d'immobilisation, mais également de fonctionnement des établissements concernés. L'article 296 de la loi générale, dans la mesure où il attribue aux régies régionales le pouvoir d'autoriser des emprunts pour les dépenses de fonctionnement des établissements, se trouve donc mis en veilleuse.
L'article 13 de ce projet de loi habilite maintenant la ministre à prendre l'administration provisoire d'un établissement public ou d'une régie régionale dès qu'elle constate une situation de déséquilibre budgétaire au cours de l'année financière. Il s'agit d'un nouveau motif qui s'ajoute à ceux déjà prévus aux articles 490 et 491 de la loi générale et qui permettra la mise en tutelle. De même, M. le Président, l'article 13 habilite dorénavant la ministre, plutôt que le gouvernement, à nommer un enquêteur, un contrôleur ou un administrateur, et ce, dans les mêmes circonstances de déséquilibre budgétaire.
Enfin, l'article 14 introduit une règle qui n'était qu'implicite dans la loi générale mais qui crée une exigence qui ne pourra souffrir aucune exception: celle de combler un déficit anticipé comme première dépense dès le début de l'année suivante.
Donc, M. le Président, les dispositions qui sont introduites dans le projet de loi n° 107 vont garantir que les établissements de notre réseau ne seront plus mis en péril par des situations financières hors contrôle. Au-delà de cette garantie formelle, ce projet de loi est aussi un geste de responsabilité à l'endroit des générations futures, puisqu'il vient aussi assurer les bases de la pérennité du dispositif de protection sociale que représente le système de santé et de services sociaux québécois que nous pourrons léguer à nos enfants.
En ce sens, M. le Président, c'est vrai qu'il s'agit là d'un acte politique, mais dans ce que la politique a de mieux, c'est-à-dire la gestion du bien commun non pas à courte vue, mais aussi dans le souci de ceux qui viendront après nous. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je voudrais remercier l'adjointe parlementaire à la ministre d'État au Travail et à l'Emploi et députée de Crémazie.
Nous poursuivons les débats sur l'adoption du principe du projet n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux. Je reconnais le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'Emploi et député de Robert-Baldwin. M. le député, la parole est à vous.
M. Pierre Marsan
M. Marsan: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. À mon tour de vouloir supporter l'argumentation qui a été présentée par le député de Vaudreuil un peu plus tôt et d'émettre quelques réserves qui, je pense, sont assez importantes quand même dans le projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux.
D'abord, nous avons toujours été et nous sommes toujours en accord avec un équilibre des dépenses et des revenus. Je pense qu'au fil des ans dans le domaine de la santé, depuis la fin des années soixante, début des années soixante-dix, le Parti libéral a toujours manifesté son support le plus total à l'atteinte de l'équilibre financier.
Il faut se rappeler que, si ma mémoire est bonne, c'est sous le régime de M. Castonguay qu'on a introduit la notion de budget global qui était une enveloppe fermée et qui ne permettait pas de dépassement. C'était le sous-ministre à l'époque, M. Charles Chamard, qui était un sous-ministre extrêmement influent et qui avait introduit cette notion extrêmement importante. Il faut savoir que les budgets d'aujourd'hui sont tributaires des décisions qui ont été prises à ce moment-là, puisqu'on a toujours réajusté la base budgétaire originale, si vous me permettez. Eh bien, elle a été rajustée en fonction, souvent, des coûts de la vie ou d'injections plus ou moins sporadiques.
Il y a eu deux approches. Une approche que vous allez me permettre de qualifier de libérale, qui consistait à financer adéquatement le réseau de la santé pour éviter les déficits; et, année après année, bon an, mal an, les hôpitaux, les établissements de santé arrivaient à équilibrer leurs dépenses. Certains hôpitaux pouvaient faire des déficits, mais d'autres avaient des surplus. Dans l'ensemble, c'était toujours un équilibre et c'était, je pense, sûrement identifiable à la philosophie libérale.
Du côté péquiste, il y a eu une approche différente, et, dans le premier gouvernement du Parti québécois, plus particulièrement lorsqu'ils ont laissé le pouvoir, en 1985, on avait déjà, à ce moment-là, laissé les hôpitaux dans une situation financière extrêmement difficile et pénible, et on laissait 300 millions de dettes dans les établissements de santé. Je me rappelle, à l'époque, c'était Mme Thérèse Lavoie-Roux qui était la ministre du Parti libéral vous vous souvenez sûrement, M. le Président qui avait eu l'obligation d'éponger les déficits. Et ça avait été fait dans le cadre d'une opération qui avait été appelée «l'opération blitz» et qui servait à combler les déficits des hôpitaux performants qui étaient capables de démontrer qu'ils avaient eu un sous-financement. Alors, ça a été la première fois que le gouvernement du Parti québécois avait enregistré des déficits pour les établissements de santé.
Plus récemment, l'an passé, c'est l'histoire qui s'est répétée: 700 millions de déficit dans une seule année, M. le Président, à éponger. Et, cette année, on répète la même chose, c'est 400 millions de nouveau. Et la vraie raison pour laquelle nous devons avoir cette loi qui nous est présentée aujourd'hui, je pense que c'est le message qui est envoyé aux établissements de santé, aux administrateurs: Faites un déficit, le gouvernement du Parti québécois va le combler. Et ça, ce n'est pas de la bonne gestion. Alors, je pense que la ministre, qui craignait cette interprétation, a décidé de présenter un projet de loi qui, somme toute, n'est qu'une reprise et on le démontrera tantôt le projet de loi, de la loi 120, la Loi sur les services de santé et les services sociaux, qui avait été approuvée par cette Assemblée sous le gouvernement libéral au début des années quatre-vingt-dix.
Je voudrais aussi rappeler ce que le Vérificateur nous a dit, en termes d'investissements de la part du gouvernement du Parti québécois. On aurait investi, dans la dernière journée de la dernière année financière, un montant assez important je crois qu'on parlait de 300 millions. Alors, dans une seule journée, évidemment, la dernière journée, c'est impossible de donner le fruit de ces argents aux patients ou aux établissements. Et, là aussi, c'étaient toujours des astuces comptables.
(17 heures)
M. le Président, vous allez me permettre de reprendre quelques-uns des articles qui sont présentés ici et de faire quelques commentaires. D'abord, l'article 5. On mentionne: «Dès le début d'une année financière...», et j'écoutais Mme la ministre mentionner que c'était bien important qu'on puisse parler ou donner les budgets aux établissements au début de l'année financière. C'est une pratique qui a toujours été courante, qui pourrait être encadrée aussi bien dans la loi actuelle des services de santé par un simple amendement. Je pense que personne ne s'objecterait à cela. Cependant, on insiste pour le traduire dans un nouveau projet de loi et on ajoute: «...le ministre transmet à chaque régie régionale l'enveloppe budgétaire qui lui est allouée conformément à la Loi sur les services de santé [...] aux fins d'assurer le financement des dépenses relatives à la prestation des services que les établissements publics sont appelés à fournir.» Là, on parle des obligations qu'on veut donner aux établissements, mais on ne parle pas des obligations du gouvernement, on ne dit pas que le gouvernement a l'obligation de donner des budgets justes et raisonnables aux établissements de santé. Pourquoi, dans un nouveau projet de loi, ne pas avoir profité de cette occasion pour se donner vraiment cette obligation qu'on puisse la reconnaître? Alors, on est toujours devant cette possibilité... Ce qui est arrivé au cours des dernières années, on donne des budgets, on fait des coupures aveugles, et les établissements doivent vivre avec ça. Donc, ils font des déficits, et ensuite on vient combler les déficits. C'est un cycle qui est très, très discutable, et je pense, M. le Président, qu'il n'est pas de la saine gestion d'agir de cette façon. Alors, pourquoi le gouvernement refuse-t-il de s'engager?
Un autre article, c'est: «Le directeur général d'un établissement [...] doit préparer et soumettre au ministre, à sa demande et selon la fréquence et aux dates qu'il détermine, un état de la situation financière de cet établissement.» Je ne sais pas si la ministre le sait, mais nous avons l'obligation, dans un centre hospitalier, par exemple, de faire un suivi budgétaire extrêmement important et très, très serré, qui est toujours public, qui est déposé à l'assemblée du conseil d'administration. Le prochain paragraphe mentionne que le directeur général doit s'assurer que cette information soit transmise à chacun des membres du conseil. C'est déjà fait, c'est déjà dans la loi actuelle et c'est une obligation extrêmement importante et de saine gestion. Pourquoi l'inclure dans un nouveau projet de loi?
Ici, il y a un lien qui semble être nouveau, c'est le lien entre le directeur général et la ministre, et, moi, j'ai une inquiétude et j'ai déjà été directeur général, M. le Président c'est de politiser le poste de directeur général. Il peut arriver, pour toutes sortes de raisons, que la ministre ou le ministre ou le directeur général ou la directrice générale ne s'entendent pas, et, à ce moment-là, je pense qu'il y a une relation politique qui ne devrait pas exister. Il y a des conseils d'administration qui sont là, et je pense que c'est important que cette relation soit encadrée par les conseils d'administration et qu'elle demeure ainsi.
Un autre article: «Lorsque la situation financière d'un établissement [...] le justifie, particulièrement lorsque le maintien de l'équilibre budgétaire de cet établissement est menacé, le ministre peut établir des mécanismes de contrôle afin d'assurer l'atteinte de l'objectif de la présente loi. Il peut notamment exiger de cet établissement la mise en place d'un programme d'évaluation ou d'un programme de vérification interne.» C'est déjà des pratiques de gestion qui sont habituellement reconnues et qui existent dans le réseau de la santé, M. le Président. On se demande pourquoi, à ce moment-ci, se sentir obligé d'intégrer ça dans la loi, alors que déjà, dans la Loi sur les services de santé, beaucoup d'articles sont prévus à cet effet.
J'ai vraiment une difficulté, M. le Président, avec l'article 11, parce que là c'est une forme... Vous allez me permettre le mot, c'est du chantage, et je vous explique pourquoi. «Le ministre peut assujettir l'approbation ou la réalisation d'un projet d'immobilisation ou d'achat d'équipements d'un établissement public au respect, par ce dernier, de l'équilibre entre ses revenus et ses dépenses.» Qu'est-ce que ça veut dire? C'est que, si vous n'êtes pas en équilibre dans un établissement de santé pour quelque raison que ce soit ça peut être des bonnes raisons: votre urgence est débordée, vous avez eu une épidémie dans une région donnée, et ça a occasionné des dépenses additionnelles eh bien, le ou la ministre peut décider que votre appareil, l'équipement que vous deviez recevoir, bien, vous ne l'aurez pas. Et ça, c'est très, très discriminatoire et, à mon avis, M. le Président, c'est carrément inacceptable dans un système où la priorité devrait être le bien-être du patient.
M. le Président, le dernier article, on l'a mentionné tantôt, le 14. Et, là j'ai un petit paradoxe à vous expliquer, c'est qu'on fait une loi, cette loi-ci, qui est une loi antidéficit on s'entend là-dessus? mais là, à la fin du projet de loi, on nous dit: Bien, tout à coup il y a quand même un déficit, on va faire une prévision pour ça. Il y a un paradoxe là-dedans. On fait une loi antidéficit, mais, au cas où elle n'est pas suivie, on va regarder qu'est-ce qu'on fait. Alors: «Si, malgré les mesures prises pour se conformer à l'article 4, un établissement [...] anticipe un déficit au 31 mars d'une année financière, il doit intégrer ce déficit comme dépense à son budget de l'année financière subséquente.» Bien, ça, M. le Président, dans la réalité hospitalière ou pour les autres établissements de santé, c'est la même chose, c'est tout simplement pelleter en avant. Essayez de comprendre, un établissement qui a un déficit assez important au 31 mars, au 1er avril, bien, il va être obligé de transférer son déficit. Ça veut dire que, bon, peut-être les salles d'opération n'ouvriront pas à partir du 1er avril, on ne peut pas fermer l'urgence. Alors, c'est toutes les mesures de la chirurgie qui vont écoper. Alors, comment ça va se traduire? Comment ça être fait, ça, M. le Président?
M. le Président, j'aimerais poursuivre en rappelant un avis qui a été donné à l'Association des hôpitaux du Québec, et c'est la firme d'avocats Heenan Blaikie, qui est une firme extrêmement reconnue, aussi bien pour ses compétences que pour la qualité des avis qui sont donnés. Ils sont impliqués évidemment dans le milieu de la santé et ils font plusieurs constatations. La première, c'est... on parle de projet d'exception: «Il est tout d'abord un peu curieux qu'on ait choisi de procéder par la rédaction d'un texte législatif spécifique alors que les mesures qu'il contient sont, pour la plupart, déjà prévues dans la loi.» Et là, ce n'est pas l'opposition libérale qui parle, ce n'est pas non plus un critique parmi d'autres, c'est vraiment une firme d'experts qui mentionne cet avis. «Comme on pourra le lire plus loin, le projet comporte des dispositions qui sont bien souvent répétitives puisqu'elles se retrouvent déjà dans le texte de l'actuelle Loi sur les services de santé.» Et on continue... D'autres se superposent et donnent plusieurs exemples.
Un autre point qui caractérise, je pense, le mode de gestion du gouvernement du Parti québécois: «Bien qu'il faille reconnaître que les auteurs du projet ne disposaient peut-être pas de tout le temps requis pour intégrer les objectifs ministériels au texte de la loi de manière à favoriser la cohérence et l'harmonie, il faut regretter une approche qui consiste, en apparence, à simplifier la rédaction, mais qui en définitive sera source d'ambiguïté lorsque viendra le moment de son application.» Alors, c'est quelqu'un de l'extérieur qui vient nous dire qu'on a été trop vite dans la rédaction du projet de loi. Ce gouvernement-là est là depuis plus de cinq ans, ça fait au moins deux ans coup sur coup qu'il y a des déficits qui se produisent. Eh bien, c'est toujours le même dénominateur commun, c'est l'improvisation.
M. le Président, un deuxième constat de cette firme, on parle d'un projet répétitif: «Depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les services de santé, il est clairement établi que les budgets de fonctionnement des établissements doivent être en équilibre. C'est clair, il y a plusieurs articles qui y font référence dans la loi actuelle. On mentionne l'article 284 qui est encore plus clair à cet égard. Il est également fort clair que les conseils d'administration de ces établissements doivent mettre en oeuvre un plan d'équilibre budgétaire lorsqu'il existe un écart négatif entre la dotation budgétaire transmise par la régie et les dépenses prévues à l'établissement.» M. le Président, on affirme, comme nous, que le projet de loi qui est devant l'Assemblée aujourd'hui est, à toutes fins pratiques, un simple dédoublement de ce qui existe dans la loi actuelle, Loi sur les services de santé et les services sociaux.
On mentionne également: «Dès lors, il faut peut-être conclure que le dépôt du projet répond davantage à des impératifs de nature politique qu'à une véritable nécessité juridique.» Je pense, M. le Président... De nouveau, je vous le rappelle, ce ne sont pas des politiciens qui parlent, ce sont des experts, des avocats experts dans le domaine de la santé et qui qualifient le projet de loi d'ayant des objectifs politiques.
Je peux poursuivre: «Un projet étonnant. Le projet de loi n° 107 étonne à plus d'un titre. Déjà, on peut se surprendre qu'il ne fait que répéter des mesures prévues dans le droit actuel et que sa valeur symbolique en est ainsi réduite. On doit aussi se surprendre qu'il introduit un régime de surveillance des activités des établissements publics qui est plus ou moins compatible avec les responsabilités juridiques déjà assumées par les diverses instances auxquelles le législateur québécois a choisi, de manière continue depuis près de 30 ans, de confier la gestion.» Alors, c'est un peu une entaille qu'on fait aux modes de gestion qui ont eu cours sous les différents gouvernements. Eh bien, tout à coup, on nous présente un projet de loi où la ministre répète ce qui était déjà dit dans la Loi sur les services de santé.
Le dernier constat, M. le Président, toujours par cette firme d'experts: «Un projet qui doit être revu en profondeur. Somme toute, le projet de loi n° 107 ne saurait être adopté par l'Assemblée nationale sans qu'il ne soit revu en profondeur. Il s'agit d'une exigence minimale, sans aucun doute rendue nécessaire par le fait qu'il est manifeste qu'il n'a pas été conçu en tenant compte de l'ensemble de l'environnement juridique actuel. Une lecture attentive de la Loi sur les services de santé, de ses règlements d'application et de ses nombreuses normes contenues, par exemple, dans les règles budgétaires émises par la ministre ainsi que dans les normes d'orientation qui ont été adoptées démontre que la nécessité de recourir à une loi nouvelle n'est pas du tout établie.»
(17 h 10)
Et, par expérience, ici, en cette Chambre, M. le Président, je sais que le gouvernement n'a jamais peur de recourir à un bâillon. On commence la session du printemps et on termine toujours avec un bâillon quelque part dans le mois de juin. Et je suis très inquiet qu'un tel projet de loi, qui n'est pas acceptable pour des experts dans le domaine de la santé, pour des experts juridiques, eh bien, on nous l'impose sous forme de bâillon. On pourrait continuer à délibérer longtemps sur ce projet de loi, mais je vais faire mes conclusions. Je vois que le temps passe rapidement.
Première conclusion: Pourquoi le gouvernement ne s'est pas donné l'obligation minimale, l'obligation de donner des budgets décents aux établissements de santé? Les établissements sont toujours à la merci d'un gouvernement qui veut faire des coupures aveugles comme on l'a vu dans le passé avec ce gouvernement et créer des déficits artificiels à cause d'un sous-financement parce qu'on ne donne pas les argents nécessaires. Alors, première conclusion: Pourquoi ne pas avoir donné cette obligation au gouvernement?
Deuxième conclusion: on s'aperçoit que c'est une loi qui a été faite à la hâte difficile à imaginer pourquoi, mais on peut s'en douter et c'est un projet qui doit être revu en profondeur, M. le Président, et, de nouveau, ce n'est pas les critiques du Parti libéral qui disent ça, ce sont des experts reconnus dans le domaine de la santé, le cabinet d'avocats Heenan, Blaikie. Mon confrère de Nelligan l'a mentionné tantôt: La loi ne diminue en rien la structure et la bureaucratie. Je vous rappelle très rapidement que, au niveau des régies régionales, il y a des coûts qui approchent les 100 millions de dollars et, une fois que vous avez payé ce montant, il n'y a pas 1 $ qui a été donné, dépensé au patient.
M. le Président, j'aurais une autre constatation à soumettre. Pourquoi aujourd'hui nous avons une loi antidéficit pour les établissements de santé? Pourquoi on n'en aurait pas une dans l'éducation? Pourquoi on n'en aurait pas une dans le transport, dans d'autres domaines? Qu'est-ce qui fait que la ministre a décidé de donner ou de proposer un projet de loi sur l'équilibre budgétaire seulement aux établissements de santé, compte tenu qu'il y a déjà une loi qui assume l'ensemble des responsabilités qui sont déférées? Alors, je suis certain que c'est une question qui n'aura pas d'écho de l'autre côté de cette Chambre.
Je voudrais faire une courte remarque et sûrement pas tomber dans des débats, mais il y a des indicateurs qui sont importants. On les regarde chacun à notre façon. Récemment, on s'aperçoit qu'il y a quelque chose qui bouge du côté de l'espérance de vie aussi bien chez les hommes que chez les femmes. Moi, j'aimerais tout simplement attirer l'attention des gens dans cette Chambre de bien suivre cet indicateur-là. Il n'y a pas de raison qu'au Québec l'espérance de vie diminue et il semble y avoir des indications qui vont dans ce sens. Alors, je pense qu'il y a des interrogations qu'on doit se poser, M. le Président.
Un grand oublié du projet de loi, sûrement celui qui est le plus important, celui pourquoi nous sommes ici aujourd'hui, c'est le patient. On ne parle jamais du patient dans le projet de loi. Il n'y a pas un mot qui parle du patient. On est toujours dans des structures. On est dans des indicateurs de performance, dans des façons d'augmenter le pouvoir de l'un pour que l'autre puisse être soumis à un pouvoir politique. Je pense que c'est vraiment la façon de le dire. Mais, avec ce projet de loi, est-ce qu'on va soigner plus de patients? Non. Avec ce projet de loi, est-ce qu'on va donner de meilleurs services aux patients? Non, M. le Président. Le patient demeure le grand oublié du projet de loi et, pour toutes ces raisons, je suis associé à mes collègues, à celui qui est le critique en matière de santé, et je vais voter contre le projet de loi dans sa forme actuelle. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. Nous poursuivons les débats sur le principe du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, et je vais céder la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière de travail et député de LaFontaine. M. le député, la parole est à vous.
M. Jean-Claude Gobé
M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Le projet de loi n° 107 rejoint certainement la mouture d'un grand nombre de projets de loi déposés par ce gouvernement, soit un projet de loi qui n'apporte rien, mais qui va probablement compliquer les choses, tout en faisant preuve d'une certaine redondance. Car, en effet, c'est un projet de loi avec lequel le gouvernement ou la ministre peut se targuer ou laisser croire qu'elle va régler le problème des déficits à l'intérieur des hôpitaux. Certes, cela va certainement plaire peut-être, dans le discours, à un certain nombre de personnes. Mais, dans la réalité, force est de constater tout d'abord qu'il y a là un faux débat. Pourquoi un faux débat? Parce que les déficits dans les hôpitaux, ce n'est pas quelque chose qui se règle par loi, mais c'est quelque chose qui se règle par administration, qui se règle par une allocation de finances et des moyens suffisants pour les faire fonctionner en tenant compte de leurs objectifs et des priorités de la population dans les différentes régions du Québec, premièrement.
Deuxièmement, M. le Président, nous retrouvons, dans des lois actuelles... Et prenons la Loi sur les services de santé et services sociaux du Québec d'accord? qui a été mise à jour le 12 octobre 1999 et qui est la loi, la bible un peu, de l'ensemble des services sociaux au Québec, leur administration, enfin tout comment cela doit fonctionner. C'est quelque chose qui a ici au-delà de 230, 240 pages, et je dis ça pour les gens qui nous écoutent, afin qu'ils voient vraiment qu'il existe au Québec certainement un certain nombre d'outils ou de moyens pour administrer les services sociaux. Et nous retrouvons dans le projet de loi actuel, dans ce qui nous est présenté, dans le projet de loi n° 107, à peu près ce qui est dit dans la Loi sur les services de santé qui existe déjà.
Alors, quand je dis de redondance, c'est même répétitif, alors pourquoi faire cela si ce n'est une opération politique qui a certainement pour but cosmétique de faire croire aux citoyens, aux concitoyens malmenés dans un système de santé qui se dégrade régulièrement et constamment, eh bien, que l'on fait quelque chose pour eux? Et, si je prends, pour appuyer mes dires, M. le Président, l'article 284 de la Loi sur les services de santé et services sociaux, je vais vous dire ce qu'il dit: «Le directeur général de l'établissement soumet au conseil d'administration, avant la date que ce dernier détermine, les prévisions budgétaires de fonctionnement de l'établissement ou de chacun des établissements que le conseil administre pour l'exercice financier suivant. Ces prévisions sont préparées en fonction des paramètres budgétaires que la régie régionale a fait connaître, lesquels paramètres sont déterminés en conformité avec ceux transmis par le ministre.»
Donc, on voit déjà là que c'est le ministre qui transmet les paramètres financiers, les paramètres de dépenses d'argent au départ, donc on ne peut pas dire que c'est quelqu'un d'autre que le gouvernement qui a la responsabilité de mettre ou ne pas mettre des sommes dans le réseau. D'accord?
Équilibre de dépenses. Le paragraphe suivant. «Les prévisions budgétaires de fonctionnement établissent le montant requis par un établissement pour assurer les opérations relatives à la prestation des services qu'il est appelé à fournir et qui sont essentiels à la réalisation de la mission de tout centre qu'il exploite.» Écoutez bien cela: «Les prévisions budgétaires des dépenses et des revenus doivent être en équilibre.» Ça, l'article 284, Loi sur les services de santé et services sociaux du Québec, donc cela existe, cela n'est pas quelque chose de virtuel, cela est une réalité, même si ce n'est pas actuellement respecté.
Et pourquoi, actuellement, ce n'est pas respecté, M. le Président? Eh bien, je vais vous l'expliquer. Mais je vais vous dire: Ce n'est pas en passant un projet de loi que ça va régler le problème. Ce n'est pas respecté actuellement parce que le gouvernement a procédé à des coupures extrêmement graves, extrêmement dures certains emploient le mot «sauvages», moi, je prendrai le mot «drastiques» dans le réseau de la santé depuis 1996, des coupures comme on n'en a jamais vues, des départs à la retraite d'infirmières, des départs à la retraite de techniciens, un chambardement très important dans ce réseau. Et, même, on a pu voir que les effets des mesures favorisant le départ à la retraite ont fait en sorte que le double à peu près de ce qui avait été prévu comme départs, ou beaucoup plus, en tout cas, si ce n'est pas complètement le double des employés en ont profité, et particulièrement dans le réseau de la santé, ce qui a créé un déséquilibre extrêmement fort, extrêmement important mettant là en danger, pas en danger, mais compromettant la mission de l'hôpital, la mission des services de santé qui était de distribuer à la population des services de santé adéquats. M. le Président, voyez-vous, tout le monde au Québec est unanime pour le reconnaître.
(17 h 20)
Malheureusement, tout ce qu'on nous amène comme remède, c'est des projets de loi encore. On sombre encore dans le projet de loi, la bonne vieille réglementation, comme si, par miracle, par magie, en déposant un projet de loi, en l'appelant le projet de loi n° 107, 108, 109 que sais-je comme numéro on n'en manque pas ici, de numéros, pour en mettre des projets de loi on allait à coup de baguette magique régler tous les problèmes. Mais, malheureusement, ce n'est pas le cas, ils ne se régleront pas. Ils ne se régleront pas parce que, au Québec, on a cette maladie dans l'administration, dans les gouvernements, c'est d'agir par loi ou par comité. Je lisais il y a quelque temps le Dr Yves Lamontagne, dans le Journal de Montréal , il n'y a pas longtemps, dimanche 2 avril 2000, donc c'est dimanche dernier. Le Dr Yves Lamontagne, comme tout le monde le sait, est président du Collège des médecins. C'est lui qui est l'autorité un peu régulatrice mais morale aussi des médecins au Québec, quelqu'un d'un niveau d'intégrité intellectuelle et morale très, très élevé. Et que disait-il? Le Québec malade de «bureaucratite», de «commissionnite» et de «commitite.» Voilà, M. le Président, certainement un diagnostic venant du Dr Yves Lamontagne qui est très percutant et très pertinent en ce qui concerne un des problèmes de l'organisation de notre service de santé. Et que disait-il encore? Je vais vous en citer. Je pourrais vous citer l'article au complet, mais je pense que malheureusement le temps... Je ne sais pas si le temps nous permettra, M. le Président, de faire tout ça. Je pense que oui, mais je vais au moins en citer quelques-uns, hein? Il dit, voyez-vous: Santé: l'échec . «Le Dr Lamontagne estime que le gouvernement du Québec n'avait pas le choix d'assainir les finances de l'État.»
Mais, tout le monde en était, nous-mêmes avons voté, avons proposé la loi antidéficit parce que nous savions, nous voyions comme tous les Québécois que les gouvernements, depuis 15, 20 ans, eh bien, étaient allés, pour des raisons idéologiques, dans une direction administrative qui était de faire de plus en plus de déficits en se substituant aux forces naturelles du marché et aussi en pensant que l'interventionnisme de l'État réglerait les problèmes des citoyens et ferait le bonheur des gens malgré eux bien souvent, d'ailleurs. On avait cette prétention-là. Eh bien, tout le monde s'était rendu compte à un moment donné que ça ne menait nulle part et qu'il fallait changer cela. Le gouvernement de Brian Mulroney avait commencé ça, les libéraux de M. Chrétien l'ont fait, le gouvernement de M. Bourassa avait compris ça, et bien sûr le gouvernement actuel allait dans cette direction-là, et nous, de l'opposition, nous les encouragions à le faire. C'est évident que personne ne veut de déficit et que tout le monde veut des dépenses équilibrées.
Par contre, faire attention, il ne s'agit pas de faire ça à n'importe quel prix, n'importe comment, parce que... Est-ce qu'on doit absolument, pour réaliser ces objectifs-là, faire souffrir les citoyens? Est-ce qu'on doit mettre en péril la vie de dizaines ou de centaines de milliers de Québécois et Québécoises ou d'autres qui sont sur notre territoire? Est-ce que l'on doit augmenter l'anxiété, l'inquiétude de mères de famille, de parents qui ont des enfants malades, de personnes âgées qui, ne sachant plus ce qui leur arrivera quand ils seront malades dans un hôpital, développent là même, par leurs anxiétés, d'autres maladies ou d'autres problématiques? Je crois que ce n'est pas là le but d'un gouvernement ou que ça ne doit pas être le but d'hommes politiques, même si on se dit qu'on doit absolument, malgré tout, faire en sorte d'équilibrer les finances. Et ce n'est pas ce que le gouvernement a fait, parce qu'il l'a fait d'une façon qui justement a créé cette situation d'anxiété, d'inquiétude et cette situation qui a fait que les soins de santé au Québec se sont détériorés grandement.
Alors, M. le Président, pour en revenir à ce brave Dr Lamontagne qui disait, voyez-vous... «Mais, ajoute-t-il d'emblée, même s'il fallait le faire donc aller au déficit, couper les déficits, les dépenses excessives je conteste fortement la manière dont on a coupé dans le réseau de la santé. Mettre à la retraite des milliers d'employés, de médecins, de techniciens, d'infirmières d'expérience fut la pire erreur. Les politiciens ont toujours une vision de courte vue. Aujourd'hui et pendant plusieurs années, on en paiera le prix dans le réseau québécois de la santé.» Voilà ce qu'il dit. Voilà ce que le Dr Yves Lamontagne dit, et j'encourage chacun des collègues, chacun d'entre nous à prendre connaissance s'ils ne l'ont pas vu.
Je sais qu'il y a des députés qui viennent de régions où le Journal de Montréal n'est pas distribué, et peut-être ne l'ont-ils pas vu. Je ne l'ai pas vu dans la revue de presse de l'Assemblée nationale. J'aurais aimé ça qu'il soit dans cette revue de presse, ce que nous appelons L'Argus , afin que tout le monde puisse prendre avis et connaissance des propos et du diagnostic fait par le Dr Yves Lamontagne qui est le président du Collège des médecins du Québec qui, comme je le répète, est l'institution la plus haute, la plus représentative et la plus crédible de l'organisation de la médecine, en ce qui concerne les médecins en particulier, dans notre société québécoise.
Alors, M. le Président, une fois qu'on a dit ça, on va dire: Oui mais... Il n'y a pas juste le Dr Lamontagne, les chiffres parlent par eux-mêmes, M. le Président. Vous savez, une manière de calculer l'effort qui est fait par un État dans les différents services qu'il distribue ou qu'il dispense à sa population... Eh bien, ce n'est pas toujours facile parce qu'il y a tellement de champs dans lesquels on dépense qu'il y a un rapport, des fois, lointain ou plus ou moins proche avec ce dont nous discutons, qu'il peut être aisé, des fois, de comparer des choses qui ne sont pas toujours comparables. Il y a quand même un certain nombre d'outils, un certain nombre d'éléments qui ont été mis en place, qui existent pour comparer, à travers les pays dans le monde, à travers les régions, les États, les fédérations ou ailleurs, ce qui se fait dans certains domaines comme intervention gouvernementale.
Alors, pour la santé et services sociaux, en ce qui concerne les comparaisons interprovinciales dans les États provinciaux du Canada, parce que c'est là que les budgets sont bien sûr dépensés, eh bien, il y a un certain nombre de statistiques qui existent, et on peut donc facilement, lorsqu'on va sur le site Internet du ministère de la Santé du Québec, trouver ces statistiques. Donc, ce n'est pas les statistiques que l'opposition a prises et que l'opposition elle-même a arrangées d'une façon ou d'une autre afin d'étayer les arguments que nous amenons à l'effet que le gouvernement, bien sûr, ne fait pas ce qu'il devrait faire pour les Québécois et les Québécoises dans le réseau de la santé, c'est-à-dire investir et intervenir adéquatement et suffisamment pour faire en sorte que tout le monde, ici, au Québec, puisse avoir un niveau de soins et d'intervention qui corresponde à des standards de bonne qualité et de rapidité.
Alors, je vais vous lire, M. le Président, pour les Québécois et les Québécoises qui nous écoutent et aussi mes collègues députés... Je suis certain qu'ils vont être certainement extrêmement intéressés d'avoir ces chiffres. Là encore, s'ils ne les ont pas, bon, je pourrai me faire un plaisir de les déposer en cette Chambre pour que tout le monde puisse peut-être en prendre connaissance. Mais c'est les dépenses totales de santé per capita, provinces, territoires du Canada, de 1975 à 1999.
Ça, ça veut dire combien chaque gouvernement dépense par année par citoyen pour la santé. Alors, c'est plus facile à calculer comme ça, on peut comparer. On ne calcule pas les 10 millions d'habitants de l'Ontario avec les 7 millions du Québec en disant: Bien, ils mettent tant de milliards, mais eux autres ont plus de monde. Nous, on en a moins, puis... En tout cas, c'est per capita. On prend la somme totale qui est dépensée, qui apparaît dans les budgets, dans les colonnes des crédits, et ce qui a été fait à la fin de l'année; tout ça confondu, on divise par le nombre de population. Ce n'est pas vraiment plus compliqué que ça.
Et, bien sûr, ce n'est pas moi qui l'affirme, c'est les statistiques du gouvernement du Québec, 1999. C'est un site officiel, comme on peut le voir, disponible sur le réseau Internet. Et, grâce à la technologie, maintenant, les Québécois peuvent enfin avoir toute la lumière, M. le Président, sur ce qui se passe vraiment, alors qu'auparavant il fallait aller dans les livres, il fallait aller dans des archives, il fallait fouiller. Aujourd'hui, c'est plus facile.
Alors, je vais revenir à l'essentiel de ce que je disais. La province de Terre-Neuve, en 1997 d'accord? eh bien, elle dépensait 2 412 $; en 1999, 2 641 $ par habitant. L'Île-du-Prince-Édouard... On ne peut pas dire que c'est les provinces tellement les plus prospères du Canada, hein? Les États provinciaux canadiens ont différentes richesses. Ce n'est pas la même prospérité partout, ce n'est pas le même taux de chômage, ce n'est pas la même imposition de taxation partout. Donc, c'est quand même assez intéressant de voir ça. Bien, l'Île-du-Prince-Édouard dépensait 2 536 $. C'est la deuxième province qui dépense le plus per capita, par habitant. La Nouvelle-Écosse, 2 845 $ en 1999; en 1997, 2 475 $. Vous voyez, elle a augmenté quasiment de 400 $ ses dépenses. Le Nouveau-Brunswick nos voisins 2 702 $. L'Ontario, 2 989 $. On va dire: Oui, ils sont plus riches. Mais regardez la Nouvelle-Écosse. On ne peut pas comparer l'économie de la Nouvelle-Écosse avec celle de l'Ontario, mais elle dépense pourtant quasiment autant pareil. Le Manitoba, 3 025 $ per capita. Il y a 3 025 $ par personne que l'État dépense. La Saskatchewan, 2 950 $. L'Alberta, bon, 2 872 $. Certains pourraient dire: Oui, la réforme, les conservateurs, Ralph Klein a coupé les dépenses de l'Alberta dans les services de santé. On peut dire ça aux gens pour leur faire peur, mais la réalité parle par elle-même. Maintenant, on arrive en Colombie-Britannique, 2 872 $. Alors, M. le Président, on va aller au Québec maintenant. Comme vous voyez, il n'y en a aucun à part le Québec qui est en bas de 2 500 $, car le Québec est à 2 486 $ par habitant.
En d'autres termes, ce que ces chiffres officiels du gouvernement nous disent, c'est qu'au Québec on est l'État ou la province qui dépense le moins par personne, per capita, pour les services de santé de ses concitoyens. La voilà, la réponse, une partie de la réponse. Et ce n'est pas avec un projet de loi sur le déficit, alors qu'il existe déjà dans la loi, qu'on va régler ça.
(17 h 30)
Comment on va régler ça, M. le Président? On va régler ça d'abord en arrêtant les comités, comme disait le Dr Lamontagne, «la bureaucratite», «la commissionite», et on va faire en sorte de redonner aux intervenants, aux établissements, l'autonomie et la latitude nécessaires pour pouvoir administrer les services de santé dans leurs régions et dans leurs établissements. Et je crois que nous avons, au Québec, dans ces établissements-là, des gens qui sont suffisamment qualifiés pour pouvoir le faire. Et je crois, M. le Président, aussi, qu'il va falloir que le gouvernement fasse un effort pour faire en sorte que les dépenses per capita dans la santé soient au moins l'équivalent de la moyenne des provinces qui sont semblables à nous. On ne peut pas rester en arrière encore longtemps comme ça.
Alors, on a écouté tout à l'heure un collègue, le député de Robert-Baldwin, qui nous parlait des citoyens, du malade. On ne parle plus des «comitites» ou des comités, on ne parle plus de tout ça, là, on revient à ce que le docteur Yves Lamontagne nous disait: Le plus grand échec, les citoyens.
Moi, j'ai connu, la semaine dernière, peut-être que ça va intéresser quelqu'un, M. le Président... C'est vrai qu'il ne faut jamais personnaliser les choses, mais, la semaine dernière, lorsque jeudi soir j'ai quitté cette Assemblée, vers 20 h 30, 21 heures, pour rentrer à Montréal, je suis rentré à la maison. Une heure après, mon épouse a dû prendre ma fille j'ai une fille qui a deux ans et se rendre d'urgence à l'hôpital avec ma fille qui avait 41,3 °C de fièvre.
Alors, elle est partie et je lui ai dit: Bien, tiens, prends mon téléphone cellulaire, au cas où ça prendrait un peu de temps, puis appelle-moi ce n'est pas toujours facile avec un jeune enfant dans les bras, malade, d'aller à une borne téléphonique. Et elle est partie. Moi, je suis resté avec mon autre fils qui, lui, a cinq ans. Et savez-vous à quelle heure mon épouse est revenue avec ma fille? Elle est revenue à 5 h 30. Ça veut dire qu'elle a passé de 23 heures, à peu près, jusqu'à 5 h 30, avec un enfant de deux ans qui avait 41,3 °C de fièvre, dans une salle d'urgence, d'attente, d'un hôpital.
Dans cette salle, il y avait des gens qui étaient malades, la petite pleurait, les gens de mauvaise humeur d'attendre et d'entendre des enfants crier grognaient et criaient aussi un peu après les préposés. Ça ressemblait, selon ce qu'elle m'a décrit, à une espèce de... quelque chose d'assez spécial où tout le monde était énervé, tout le monde attendait et il n'y avait rien qui se passait.
Et, lorsqu'elle est rentrée, c'est parce qu'il n'y avait personne qui donnait le service. Elle a décidé de rentrer. Après avoir vu quelqu'un, plus personne ne lui a parlé. Et savez-vous qu'ils ne l'ont pas rappelée encore, depuis ce temps-là, pour lui dire, malgré qu'ils aient fait une prise de sang, quel était le diagnostic, pourquoi ma fille avait fait 41,3 °C de fièvre? Ils ne l'ont pas rappelée aujourd'hui, à date, et je parle de jeudi dernier. Est-ce qu'on trouve ça normal?
Oublions que c'est la fille du député Gobé. Ça peut être la fille ou la petite fille de n'importe lequel d'entre nous, la fille ou la petite fille de n'importe lequel de nos voisins, de nos concitoyens. Imaginez dans quelle anxiété il se retrouve, premièrement, mais imaginez aussi que, peut-être, cette enfant-là aurait pu ou pourrait avoir des séquelles ou des suites parce qu'elle n'a pas été diagnostiquée, parce qu'elle a attendu trop longtemps dans cette salle d'hôpital sans qu'on donne quelque chose comme réponse ou une bonne réponse ou un diagnostic à ce qui lui est arrivé.
Bien, ça, M. le Président, c'est le plus bel exemple de ce qui peut arriver. Et, quand ça nous touche personnellement, dans nos proches, dans nos familles, dans nos enfants, force est de constater que quelque chose ne va pas dans le système de santé au Québec. Et, sans faire de démagogie, sans faire de sensationnalisme, nous devons, nous, ici, en cette Chambre, réfléchir à cela et faire le constat que quelque chose de pas normal se produit, quelque chose ne va pas, et que notre rôle, ce pour quoi les citoyens nous élisent, c'est pour faire en sorte que ces choses-là n'existent pas.
Alors, M. le Président, je ne suis pas heureux de voir le projet de loi n° 107 parce que, dans le projet de loi n° 107, il n'y a rien qui va régler les problèmes de l'urgence quand un enfant de deux ans et demi va se retrouver là. Je vois la ministre qui rit. Je lui souhaite, un jour, d'avoir un enfant de deux ans et demi dans ses bras, dans une salle d'urgence, jusqu'à 5 h 30. La ministre du Travail, qui rigole, je ne lui souhaite pas de faire ça, M. le Président.
Et ce projet de loi là, il ne réglera rien, Mme la ministre, il ne fera pas en sorte que les gens attendront moins longtemps. Peut-être qu'il continuera à vous faire sourire, mais, moi, il ne me fait pas sourire, il ne fait pas sourire les Québécois et les Québécoises, et c'est pour ça que je vais voter contre ce projet de loi, Mme la ministre. Et, le jour où la ministre de la Santé amènera des choses qui vont faire évoluer le système de santé d'une manière positive pour les Québécois et les Québécoises, bien là je voterai pour. Et ce n'est pas le cas avec celui-là. Alors, je vote contre, comme mes collègues.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député, de votre intervention. Alors, nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, et je reconnais le prochain intervenant, M. le porte-parole de l'opposition officielle en matière de Famille et d'Enfance, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je vous cède la parole.
M. Russell Copeman
M. Cope
man: Merci, M. le Président. J'avais hésité à me lever immédiatement, par souci d'alternance, à savoir s'il y avait un député ministériel qui voulait prendre parole. Ce ne fut pas le cas, M. le Président. Alors, il me fait plaisir, à mon tour, de prendre la parole à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 107, la Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, Bill 107, Mr. Speaker, An Act to provide for balanced budgets in the public health and social services network.
M. le Président, à première vue, le projet de loi, avec un titre comme ça, «l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux», on aurait tendance à dire: Bien, qui peut être contre le principe des budgets équilibrés dans les établissements publics de santé? Bien, évidemment, M. le Président, dans un monde idéal, il n'y aura pas grand monde qui sera contre le principe d'exiger un équilibre budgétaire dans les établissements de santé publique au Québec. Mais, évidemment, M. le Président, nous ne vivons pas, sous le gouvernement du Parti québécois, dans un monde idéal, mais loin de là. Le contexte est aussi important que le projet de loi qui est présenté devant la Chambre, M. le Président.
La situation générale, quel est ce contexte? Le gouvernement du Parti québécois, depuis son arrivée au pouvoir, a coupé maintenant tout près de 2,2 milliards de dollars dans les dépenses de santé. Ça veut dire, M. le Président, tel que mon collègue le député de LaFontaine l'a indiqué... Qu'est-ce que ça veut dire concrètement? Bien, entre autres, ça veut dire que le Québec est la province canadienne je sais que les députés ministériels n'aiment pas le mot «province», mais je peux dire «l'État», à l'intérieur du Canada, pour leur faire plaisir qui dépense le moins, per capita, en santé, au Canada. On dépense le moins, per capita, en santé, au Canada.
On dépense moins que Terre-Neuve, M. le Président. Je n'ai absolument rien contre nos amis de Terre-Neuve. Mais, chose certaine, le ministre des Finances nous dit de temps en temps: Tout ce qui se passe à l'ouest du Québec va très bien, l'économie va très bien; et, à l'est, ils ont des difficultés économiques. Alors, on peut, je pense, facilement dire que la province de Terre-Neuve et le Labrador est une province où il y a des difficultés économiques, une certaine difficulté en termes de richesse publique. Mais, eux autres, ils réussissent à dépenser plus que nous, M. le Président, en matière de santé. C'est le cas de le dire, M. le Président, que le Québec se trouve à être dixième en rang de dépenses publiques en matière de santé au Canada.
Ils ont coupé 2,2 milliards depuis leur arrivée, M. le Président. Ils ont fermé des hôpitaux, comme mon collègue porte-parole en santé, le député de Vaudreuil, a indiqué. Évidemment, j'ai été touché de près, M. le Président, comme des dizaines de milliers de mes concitoyens dans le comté de Notre-Dame-de-Grâce, avec la fermeture de l'hôpital Reine Elizabeth, dans le temps. Je me souviens très bien des longs débats avec le ministre de la Santé d'alors, le député de Charlesbourg, que sa réforme était planifiée dans les moindres détails. L'objectif, en fermant les hôpitaux, était de donner plus de ressources à d'autres établissements, d'autres formes de santé. On parlait de soins à domicile. Mais, M. le Président, malheureusement, dans une très grande majorité, ça ne s'est pas produit, que ces économies escomptées sont allées ailleurs, ne sont pas retournées dans le système de santé.
Il y a un désengagement de l'État dans le domaine de la santé et c'est un désengagement qui devrait préoccuper au plus haut point la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance. Elle sait très bien l'impact de ce désengagement, M. le Président. Elle a déposé, la semaine passée, un rapport du Conseil de la famille et de l'enfance, en cette Chambre, qui parlait, entre autres, des difficultés des aidants naturels, la pression qui est mise sur les aidants naturels, M. le Président, parce que notre système de santé ne donne plus les services qu'il donnait il y a cinq ans, il y a 10 ans.
Alors, la pression sur la famille est accrue, surtout sur les femmes, de remplir ce vacuum créé par ce gouvernement en matière des services de santé. Ça crée une pression sur les familles et ça vient d'être signalé par le Conseil de la famille et de l'enfance dans son rapport annuel sur la situation des familles 1999-2000. J'imagine que ça préoccupe la ministre déléguée. J'espère que c'est le cas, j'espère qu'elle réalise que les agissements de son propre gouvernement mettent énormément de pression sur les membres d'une famille, ceux qu'on appelle les aidants naturels, pour combler le vide créé par ce gouvernement, M. le Président, en parlant de bénévolat dans cette Semaine québécoise du bénévolat.
(17 h 40)
M. le Président, j'ai entendu la ministre de la Santé, lors de ses remarques, et une partie de ses remarques pourraient se résumer par l'expression qui est utilisée... C'est d'ailleurs même le nom d'une chanson qui a été proposée pour un Oscar. Une des cinq chansons des films du palmarès des Oscar aux États-Unis, une des chansons sortait du film South Park: Bigger, longer & uncut , puis le titre de la chanson était Blame Canada .
And that's, Mr. Speaker, you know... It should be really, practically the national anthem of this Government, I think, Blame Canada . Because this Government, this Parti québécois Government manages to find ways to blame Canada for all sorts of situations, Mr. Speaker. Despite the fact that we know we've gone through difficult times with the reduction of the Canada health and social transfer, but all the other provinces in Canada have gone through similar situations, we are the province that spends the least amount of money on public health care expenditures per capita.
So, you know, the national anthem of the Parti québécois, they should really adopt this song from South Park: Bigger, longer & uncut , Blame Canada . Part of the refrain is, Mr. Speaker: «Blame Canada, blame Canada. We need to form a full assault, everyone, it's Canada's fault.» That's the approach of this Government with regard to health care.
And furthermore, you know, Mr. Speaker, sometimes pearls of wisdom are hidden in strange places. It's like when you open up an oyster, you find a pearl occasionally. An oyster is not a particularly attractive creature, but, sometimes, when you open up, you can find a pearl in there. Well, to my mind, Mr. Speaker, this song is not a particularly attractive song, but there's a pearl in there, and the pearl is the line again from the movie South Park: Bigger, longer & uncut : «We must blame them referring to Canada and cause a fuss before someone thinks of blaming us.» And that's been the hallmark of this Government: Let's find a way to blame someone else before the population begins to blame them for the real problems in our health care system. That's where the problem lies, Mr. Speaker, it lies with this Government, and not another level of government.
M. le Président, les déficits actuels... Parce qu'on parle d'une loi qui va obliger un équilibre budgétaire, des gestes qui vont éponger des déficits, qui vont indiquer que les déficits ne sont plus acceptables, ils sont même contre la loi. Les déficits actuels dans les établissements, on parle d'une centaine d'hôpitaux, des centres de jeunesse, les CLSC, les centres d'hébergement.
J'ai été d'ailleurs étonné par le discours de la députée de Crémazie, parce que, elle et moi, comme vous le savez, on est membres de la commission des affaires sociales. Elle et moi, nous avons entendu ensemble les rapports annuels de six régies régionales récemment, M. le Président, la commission avait terminé son mandat à cet égard. Régie après régie sont venues devant la commission des affaires sociales pour dire: Nous avons x nombre d'établissements en situation déficitaire, nous ne pouvons pas subvenir aux besoins exprimés par la population de notre région. Régie après régie, M. le Président. À ma mémoire, il n'y en a pas une qui est venue nous dire: Nous, nous avons assez d'argent pour subvenir à tous les besoins en santé de notre population. Pas une, à ma mémoire.
Alors, moi, je retiens ça de cette commission, M. le Président: un manque de ressources dans le financement de nos soins de santé. La ministre se gargarise qu'elle va injecter 2,6 milliards de dollars dans le système de santé cette année. Mais, comme l'ont si bien démontré mon collègue le député de Vaudreuil et d'autres collègues, après qu'on enlève le déficit des établissements, le déficit de la Régie de l'assurance maladie du Québec, les coûts du système qui ne donnent pas de nouveaux services il faut absorber les coûts de système, ce n'est pas un ajout de services les coûts de la main-d'oeuvre, après qu'on a soustrait toutes ces sommes, nous, notre évaluation, c'est qu'on arrive à à peu près 200 millions de dollars d'argent neuf dans le système de santé, qui représentent une goutte d'eau dans le budget de notre système de santé.
Après 2,2 milliards de coupures, le gouvernement a l'audace de vouloir injecter 200 millions de dollars d'argent neuf puis de se gargariser de ça. Quel bel accomplissement du gouvernement du Parti québécois, d'être capable de trouver 200 millions de dollars d'argent neuf après 2,2 milliards de coupures depuis qu'ils sont là! S'ils sont contents de ça, M. le Président, tant mieux. Nous ne le sommes pas, puis la population ne l'est pas non plus.
Les déficits accumulés au 31 mars 1999 étaient de 700 millions de dollars dans les établissements; en 1999-2000, de l'ordre de 462 millions. Qu'est-ce que ça représente, ces déficits-là, M. le Président? Parce que la ministre nous dit: Des déficits, c'est mauvais, quand vous étiez au pouvoir, vous avez eu un déficit record, puis des déficits, c'est mauvais, puis, nous, nous sommes de bons gestionnaires puis on contrôle nos coûts, puis regarde-nous aller, on est bons, on est bons, on est bons, nous autres. C'est une approche, mais, quant à moi, c'est une approche strictement comptable. Si le député de Montmorency aimait compter des beans dans la vie, bien, qu'il compte des beans. Mais il me semble que la ministre de la Santé, il faut qu'elle fasse autre chose que simplement gérer une approche comptable à notre système de santé.
Parce que des déficits, qu'est-ce que ça représente? Bien, je vais informer les députés ministériels, qu'est-ce que ça représente un déficit dans un établissement. Je vais citer la sommité dans ces matières, l'experte, la ministre de la Santé elle-même. En réponse à une question posée le 17 novembre 1999 par mon collègue le député de Vaudreuil au sujet des déficits dans les hôpitaux, la ministre a dit ceci en Chambre, je la cite au texte: «S'il y a eu des déficits dans le cas des hôpitaux de même qu'au régime d'assurance médicaments, c'est parce qu'il y a eu des services de rendus.» Fin de la citation. Pour la ministre de la Santé, le 17 novembre 1999, des déficits dans les hôpitaux, c'est des services rendus, c'est ça qu'elle a dit. Elle a répondu aussi, M. le Président, quelques semaines avant, à une question... La première question était en réponse à une question posée par le chef de l'opposition.
À une autre occasion, M. le Président, en réponse à une question de mon collègue cette fois-ci, le député de Vaudreuil concernant également un déficit des établissements hospitaliers, la ministre de la Santé a dit ceci, M. le Président, je la cite au texte, le 2 novembre 1999: «Le député conviendra avec moi qu'on ne peut conclure qu'il y a eu des coupures dans les services. Si ça s'est traduit en déficit, c'est que les services ont été rendus et qu'on a augmenté le déficit. Donc, il ne peut pas parler de coupures à un service, première chose.»
C'est clair. C'est clair, clair, clair pour la ministre de la Santé, en tout cas. Ça a été clair, au mois de novembre, que des déficits dans les établissements de santé étaient équivalents à des services rendus. C'est ça qu'elle dit des déficits: «Le député conviendra avec moi qu'on ne peut conclure qu'il y a eu des coupures dans les services. Si ça s'est traduit en déficit, c'est que des services ont été rendus.» M. le Président, pour une rare fois, je suis d'accord avec la ministre de la Santé que, dans un moment de lucidité transitoire, la ministre a avoué, en Chambre, que des déficits dans les établissements étaient essentiellement des services qui ont été rendus.
(17 h 50)
Alors, M. le Président, on poursuit la logique à son extrême. S'il y avait des déficits qui ont donné des services puis on veut éliminer les déficits, ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'on va être obligé de couper dans les services. Ça m'apparaît d'une logique absolument impeccable que... Il y a cinq mois, la ministre de la Santé nous disait: Si les établissements ont fait des déficits, c'est parce qu'ils ont donné des services. Là, le gouvernement nous arrive avec une loi qui dit: Plus de déficit. Prends une baguette magique, mets dans l'air, plus de déficit! M. le Président, le monde ne marche pas de même.
You can't, with a magic wand, Mr. Speaker, simply wave it in the air and make deficits disappear. It's not possible. If deficits are going to disappear, if this Government is going to impose balanced budgets on hospitals and other health establishments, institutions, it's because they're going to have to cut services, Mr. Speaker. It's very, very clear. It couldn't be any clearer. Even the Minister of Health understands that principle, Mr. Speaker. And to suggest that they can avoid cutting services because they're going to inject $2.6 billion into the health care system... First of all, it's an illusory amount, Mr. Speaker. By the time you factor in the system's costs, the wiping out of previous deficits, by the time you factor in the increase in manpower costs, you're down to what we consider to be about $200 million worth of new money in the health care system, Mr. Speaker.
Now, if the Minister wants to stand up and say: With $200 million of new money, I'm going to be able to prevent all those establishments from running deficits and maintain the current level of services, well, she should try and say that. I would think, Mr. Speaker, that the vast majority of directors general, of directors of regional health boards and others would laugh her out of this Chamber if that were to be the case, because it just doesn't hold together.
Alors, M. le Président, ce qui manque avec l'approche comptable de ce gouvernement, comme l'a si bien dit mon collègue le député de Robert-Baldwin, c'est un souci pour les patients, pour la population. Si on accepte, comme l'a si bien dit la ministre de la Santé, il y a cinq mois, que des déficits donnent des services... Des services où, M. le Président? C'est des services à la population, c'est des services à des personnes, aux malades, à des gens dans le besoin, à des gens qui sont hébergés en centre d'accueil, en centre de soins de longue durée, une population, des personnes qui ont besoin de manger convenablement, qui ont besoin d'être lavées régulièrement pour maintenir leur dignité, qui ont besoin d'un certain niveau de vie convenable à un être humain.
Alors, nous prétendons, de ce côté de la Chambre, que, si on accepte que des déficits fournissent des services, on arrive avec un projet de loi d'une approche excessivement comptable, qui d'ailleurs est largement redondant, on ne peut pas ne pas couper dans des services.
Je termine juste avec l'exemple des hôpitaux. À peu près le seul poste budgétaire qui n'est vraiment pas contrôlé dans un hôpital, c'est les urgences. Mais comment voulez-vous qu'un directeur général d'un hôpital planifie, à l'année longue, de ne pas dépasser son budget dans une urgence? Est-ce qu'il va dire, à vous: Vous n'avez pas le droit de vous présenter ici parce que, moi, il faut que j'équilibre mon budget? Est-ce qu'il va dire à la ministre de la Santé: Mais, Mme la ministre, vous n'avez pas le droit de mettre les pieds ici, dans ma salle d'urgence, parce que je n'ai plus d'argent, ou il va couper ailleurs? Et c'est ça qui est éminemment regrettable avec le projet de loi n° 107. Ça va se traduire dans des coupures de services pour la population du Québec. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le whip de l'opposition officielle, mais, compte tenu qu'il reste cinq minutes et que vous avez droit à 20 minutes, avec un consentement, si vous voulez faire une motion pour ajourner à demain. M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: Je ferais motion pour que nous ajournions nos travaux à jeudi, le 6 avril, à 10 heures.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, cette motion est adoptée. Donc, les travaux de cette Assemblée sont ajournés à demain, jeudi, le 6 avril, à 10 heures.
(Fin de la séance à 17 h 56)