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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Tuesday, May 16, 2000 - Vol. 36 N° 107

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures deux minutes)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Affaires du jour

Alors, nous allons entreprendre nos affaires du jour. J'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer l'ordre du jour.

M. Brassard: Alors, M. le Président, suite à une entente avec le leader de l'opposition officielle, je vous demanderais de suspendre les travaux à 14 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, il y a effectivement entente, M. le Président, à l'effet que les travaux soient suspendus.

Simplement une question de précision au leader du gouvernement. Comme le premier ministre et la ministre de la Santé ont rencontré l'Association des hôpitaux, la semaine dernière, et ont remis d'un mois le délai de réflexion quant à l'adoption de la loi qui vise à contrôler les déficits des hôpitaux en coupant les services aux bénéficiaires, est-ce que le gouvernement a l'intention de prendre ce mois avant de rappeler le projet de loi en Chambre?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui. C'est une bonne question. Il aura sa réponse cet après-midi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, conformément, donc, à cette entente, est-ce qu'il y a consentement pour que nous suspendions les travaux jusqu'à 14 heures cet après-midi? Il y a consentement. Alors, nous suspendons nos travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 10 h 3)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président: Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir un moment.

Bien. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous abordons immédiatement les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de projets de loi présentés aujourd'hui.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Rapport annuel de la Commission de la santé et de la sécurité du travail

Mme Lemieux: Alors, merci, M. le Président. Je dépose le rapport annuel d'activité de la Commission de la santé et de la sécurité du travail pour l'année 1999.


Rapport sur l'application des articles 2 et 14 de la Loi modifiant le Code du travail

Je dépose également le rapport sur l'application des articles 2 et 14 de la Loi modifiant le Code du travail adoptée par l'Assemblée nationale le 11 mai 1994.

Le Président: Alors, les deux documents sont déposés. M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


Documents de consultation intitulés L'immigration au Québec 2001-2003

M. Perreault: Oui. Alors, M. le Président, je dépose un document de consultation intitulé L'immigration au Québec des années 2001-2003, un choix de développement .

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement.


Consultation générale

M. Brassard: Alors, M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante qui est reliée au dépôt du document qui porte sur une consultation générale en commission parlementaire au début de l'automne.

Le Président: Il y a consentement.

M. Brassard: «Que la commission de la culture procède à des consultations générales concernant le plan triennal d'immigration pour la période 2001-2003 en prenant notamment comme outil de référence le document intitulé L'immigration au Québec, un choix de développement , et ce, à compter du 5 septembre 2000;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 15 août 2000; et

«Que le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration soit membre de ladite commission pour la durée de ce mandat.»

Le Président: La motion est adoptée? Très bien.


Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Pour ma part, j'ai reçu dans les délais prescrits un préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Alors, conformément à l'article 97.1 du règlement, je dépose copie de ce texte de préavis.


Dépôt de rapports de commissions

Alors, au dépôt de rapports de commissions, maintenant, M. le président de la commission des finances publiques et député de Richelieu.


Étude détaillée du projet de loi n° 82

M. Simard (Richelieu): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé les 24, 25 et 30 novembre, les 2 et 8 décembre 1999, les 27 janvier, 6 et 11 avril et 11 mai 2000 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 82, Loi sur l'administration publique. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Alors, ce rapport de commission est déposé.


Questions et réponses orales

Nous allons immédiatement aborder la période de questions et de réponses orales. Alors, je cède la parole pour la première question principale au chef de l'opposition officielle.


Avenir des régies régionales de la santé et des services sociaux


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci beaucoup, M. le Président. Ma question s'adresse à la ministre de la Santé. Après s'être fait rabrouer par son collègue ministre des Finances, il y a quelques semaines seulement, alors qu'il déclarait que le problème du gouvernement actuel pour le réseau de la santé, c'était un problème de gérance, on apprend maintenantque son voisin de bureau, le président du Conseil du trésor, blâme les régies régionales de la santé, il dit que c'est une erreur. Par contre, son autre voisin de bureau, le ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie, vient tout juste de faire un point de presse pour dire que les régies régionales, ce n'est pas une erreur.

Alors, est-ce que la ministre pourrait nous dire la position du gouvernement aujourd'hui? Est-ce que c'est la position de son voisin de droite ou la position de son voisin de gauche?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je suis un peu étonnée d'entendre le chef de l'opposition nous dire et me dire que je me serais fait rabrouer après que le ministre des Finances a consenti à investir 2,7 milliards dans le réseau de la santé et des services sociaux. C'est assez étonnant.

Et par ailleurs, M. le Président, mon collègue le président du Conseil du trésor a fait un certain nombre de commentaires sur les régies, d'autres collègues de mon gouvernement en feront sûrement, mais ils ne sont pas seuls. Le chef de l'opposition aussi a fait des commentaires sur les régies et il en a fait à deux reprises, du moins dans ce que j'ai pu relever. Il a fait d'abord une conférence de presse à la fin de son caucus, au début de l'année actuelle, le 10 janvier 2000: Il y a un problème de bureaucratie. Je pense qu'on doit aborder le rôle des régies. Ça nous semble évident qu'il faut revoir de fond en comble le rôle des régies.

Et il nous dit: Est-ce que c'est nécessaire d'avoir 17 régies régionales au Québec? Et il pose la question au premier ministre. Donc, j'imagine que lui réfléchit à ces questions-là. Nous réfléchissons aussi de notre côté quant à l'organisation des soins et des services de santé, M. le Président, et c'est normal qu'on puisse le faire et que certains de mes collègues aient des points de vue à ce sujet.

(14 h 10)

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: La ministre se dit étonnée, M. le Président. Ça doit être l'histoire de sa vie d'être étonnée à tous les jours avec ses collègues, puisqu'elle apprend aujourd'hui qu'il y en a un qui dit que c'est une erreur. Son voisin de droite, lui, dit exactement le contraire, que ce n'est pas une erreur.

Ce n'est pas sur une question secondaire, M. le Président. Après tout, il s'agit de notre système de soins de santé. Alors, on aimerait savoir si le gouvernement, après avoir blâmé les hôpitaux, après avoir dit aux médecins de se taire, va maintenant commencer à blâmer les régies régionales pour leur propre incompétence.

M. le Président, on aimerait savoir, de la part du gouvernement, quelles sont les intentions pour les régies régionales: Est-ce que c'est le président du Conseil du trésor qui a raison ou est-ce que c'est le ministre de la Science, de la Recherche, de la Technologie, M. le Président?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Puisque le chef de l'opposition a fait référence aux médecins, je croyais que la première question qu'il allait me poser, ce matin, c'était à quelle entente nous étions parvenus avec la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, puisque c'est fait, M. le Président.

Le chef de l'opposition, comme d'ailleurs les membres de l'opposition, savent très bien que, depuis quelque temps, j'ai eu des échanges et des discussions avec les représentants des régies, avec les régies elles-mêmes, parce que je crois qu'il sera nécessaire, sûrement, de revoir, en partie, leurs responsabilités et leurs fonctions et que l'on puisse avoir une ligne d'autorité un peu plus directe entre le ministère et les régies, de même qu'une imputabilité un peu plus significative. Je pense que c'est normal qu'on arrive à de telles conclusions.

Mais je pense qu'en même temps on ne doit pas perdre ce qui a fait la richesse du travail accompli par nos régies en termes de régionalisation et de concertation sur le territoire. Donc, c'est de garder le meilleur et de corriger les difficultés auxquelles on est confronté, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le député de Vaudreuil.


Maintien de l'équilibre budgétaire des établissements du réseau de la santé et des services sociaux


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: En principale, M. le Président. En date du 9 mai dernier, la ministre de la Santé, via son sous-ministre, a envoyé une directive à tous les établissements de santé pour dire que la ministre, et je cite, «a la volonté ferme de s'assurer du respect de l'équilibre financier des établissements publics».

De plus, cette directive demande aux conseils d'administration des établissements d'adopter un budget de fonctionnement en surplus ou en équilibre et aussi de produire à la ministre une déclaration qui atteste, et je cite, «qu'ils ont mis en place des mesures qui leur permettent d'assurer l'équilibre budgétaire pour l'exercice en cours».

Or, M. le Président, dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux, un des premiers articles de cette loi proclame que toute personne a le droit de recevoir des services de santé et des services sociaux adéquats et que tout établissement doit recevoir toute personne qui requiert des services et lui fournir ces services.

M. le Président, est-ce que la ministre de la Santé peut nous dire ce qu'un dirigeant d'établissement doit faire? Respecter la Loi sur les services de santé et les services sociaux et fournir les services aux patients, aux malades, aux personnes âgées ou encore respecter la directive qu'elle a émise et couper dans les services?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je répète, M. le Président, ce que j'ai dit à plusieurs reprises, ce que notre gouvernement a réaffirmé: Les établissements doivent respecter l'équilibre budgétaire, les gestionnaires, les administrateurs doivent agir à cet égard de façon responsable, et, avec les ressources nouvelles qui leur ont été confiées, ils sont capables, ces mêmes établissements, de répondre aussi aux besoins de la population québécoise en matière de santé et de services sociaux.

Le Président: M. le député de Vaudreuil.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: M. le Président, question additionnelle: Est-ce que la ministre considère qu'un conseil d'administration qui, lui, désire... Son devoir, c'est de fournir les services aux patients et respecter la loi. S'il présente un budget déficitaire pour respecter cette obligation, est-ce que la ministre va continuer de dire, comme elle l'a affirmé la semaine dernière, que ce conseil d'administration est irresponsable ou encore qu'il prône la désobéissance civile?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, les établissements ont accès, ont eu accès et auront accès à des ressources financières supplémentaires, doivent assumer leurs responsabilités. Je compte sur leur sens des responsabilités qui est très grand et je demeure persuadée que l'on pourra continuer d'offrir des soins et des services de qualité à l'ensemble de la population du Québec.

Le Président: M. le député.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: M. le Président, est-ce que je puis rappeler à la ministre que, lorsqu'elle mentionne qu'elle rehausse les bases budgétaires des établissements, ce n'est pas vrai? Ce qu'elle fournit, ce sont des sommes qui, partiellement, compensent pour les déficits que les établissements ont dû encourir l'année dernière pour fournir les services, et c'est insuffisant cette année.

Plusieurs dirigeants ont déjà indiqué qu'ils étaient incapables de fournir les services sans faire de déficit et, au lieu de les inciter à dire la vérité, comme l'a demandé l'Association des hôpitaux du Québec à ses membres, la ministre veut les faire taire lorsqu'ils disent la vérité. Pourquoi la ministre veut-elle faire taire le monde et les empêcher de dire la vérité pour les patients et les malades qu'on a à soigner?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Même si j'en avais vraiment l'intention, M. le Président, est-ce que quelqu'un croit dans cette Chambre que je peux faire taire ou des administrateurs d'hôpitaux ou des responsables dans des institutions? Alors, c'est vraiment...

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Ce serait me prêter un pouvoir démesuré que je n'ai pas et que je n'exercerai pas non plus, M. le Président. Alors, je suis convaincue que les établissements, avec les ressources qu'ils ont reçues, c'est vrai que nous avons compensé pour les déficits accumulés et les déficits de base et structurels, mais n'oubliez pas, M. le Président, que nous avons rajouté plus de 760 millions de dollars pour reconnaître les coûts de système, c'est-à-dire la progression des coûts dans l'ensemble de notre réseau de la santé et des services sociaux.

J'ai de plus convenu avec l'Association – qui était d'ailleurs à la dernière rencontre que j'ai eue avec des représentants des centres hospitaliers et des hôpitaux, des instituts universitaires – qu'il était sûrement nécessaire de revoir la façon dont on allouait les sommes budgétaires aux différents établissements, donc quant aux méthodes d'allocation. Et, sur ça, nous avons aussi convenu que cette année nous nous entendrions sur des outils de travail pour nous permettre d'être plus justes, plus équitables et de mieux tenir compte de la progression de la demande, donc de la notion de coût-santé. Mais je crois que, avec les ressources actuellement disponibles, les établissements sont capables d'assumer leurs responsabilités.

Le Président: En question principale maintenant, M. le député de Shefford.


Maintien de l'équilibre budgétaire des établissements du réseau de la santé et des services sociaux de la région de Granby


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Vendredi dernier, l'hôpital de Granby adoptait son budget. Tel qu'indiqué à la une du journal La Voix de l'Est du lendemain, on pouvait y lire: «L'hôpital défie Marois. Le centre vote un déficit de 7,8 millions de dollars.» M. le Président, le directeur général de l'établissement dit qu'il ne peut rencontrer l'équilibre budgétaire avec le budget souhaité par la ministre, et ce, dans le maintien des services de base seulement. L'hôpital de Granby a réussi à attirer quelques spécialistes, le budget voté est nécessaire pour les garder en place.

Donc, la ministre de la Santé peut-elle s'engager aujourd'hui à respecter la demande de l'hôpital de Granby, et ce, seulement pour offrir un service de base à la population?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Les budgets équilibrés des établissements devaient être effectivement adoptés vendredi dernier. Nous les recevrons au ministère. Mais cela reste une obligation que de devoir respecter l'équilibre budgétaire dans chacun des établissements, et je crois que cela est possible de le faire.

(14 h 20)

Le Président: M. le député de Shefford.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: M. le Président, que répond la ministre de la Santé à la population desservie par le CLSC de Farnham qui défie également la loi? C'est un établissement qui a adopté un déficit de tout près de un demi-million de dollars. On pouvait lire aujourd'hui dans le même journal: «La Pommeraie se met aussi hors la loi. S'il faut aller à Québec, on va y aller.»

Donc, M. le Président, que répond la ministre aux gens de la région de Farnham?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je comprends bien que le député n'incite pas les établissements à faire des déficits, hein, là? Je comprends bien ça, là, hein? Il ne fait pas un appel à cet égard-là.

Une voix: ...

Le Président: M. le député de Chomedey, on vous entend très bien, et vous n'avez point la parole. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je réitère le fait que nous avons réinvesti, dans le dossier de la santé et des services sociaux, 2,7 milliards: 760 millions allant vers la reconnaissance des coûts de système, 430 millions allant vers le redressement des bases pour convenir que certains établissements étaient sous-financés. En sus de cela, nous avons ajouté des budgets de développement à hauteur de 200 millions qui sont répartis selon que l'on veut régler des problèmes liés à la réadaptation des jeunes, à la santé mentale, au traitement de listes d'attente dans les hôpitaux, à l'amélioration des services aux personnes âgées.

Donc, coûts de système reconnus, redressement des bases budgétaires, ajout de budgets de développement et, après avoir fait un tour de piste de l'ensemble des régions du Québec avec mon équipe sous-ministérielle, oui, avec la collaboration des régies, on nous a informés que les établissements, si nous étions capables de prendre à charge la question de la sécurité d'emploi et de la stabilité d'emploi, devraient normalement avoir les ressources nécessaires pour répondre aux besoins, pour répondre aux besoins de la population en matière de santé et de services sociaux, et qu'il pouvait y avoir à la marge quelques exceptions, et c'est ce dont nous avons convenu avec les hôpitaux la semaine dernière. Mais la règle, c'est qu'on respecte l'équilibre budgétaire, qu'on est capable de le faire sans priver la population de l'accès à des soins de qualité.

Le Président: M. le député de Shefford.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: M. le Président, dans le contexte de ceux qui disent... à la loi antiservices de la ministre de la Santé, que répond la ministre à la population de la région de Granby, où le CLSC, lui, a décidé de respecter la loi antidéficit, mais au prix d'aviser la régie qu'il abandonne 218 500 $ de services aux malades?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Peut-être ce CLSC – je ne veux pas commenter chaque cas, M. le Président – a-t-il trouvé les moyens de répondre aux besoins de sa population en respectant son équilibre budgétaire. Et, moi, j'ai suffisamment confiance en la capacité de gestion de nos responsables dans les établissements pour croire qu'ils seront capables de respecter notre loi, tout en continuant, je le répète, d'offrir des services de santé, des services sociaux de qualité à l'ensemble de la population québécoise. Soyons de bon compte, M. le Président, je trouve quand même un peu inadmissible... Quand on se dit que nous avons réaugmenté les budgets, depuis trois ans, dans le secteur de la santé et des services sociaux, de 4,4 milliards, ce n'est pas négligeable.

Le Président: En question principale, M. le député de Hull.


Pénurie de personnel infirmier en Outaouais


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Ça fait maintenant plus d'un mois que la ministre de la Santé connaît la situation critique que l'on vit à l'hôpital de Hull en raison de la pénurie d'infirmières et d'infirmiers. À ce jour, bien, on n'a pas encore proposé une seule mesure concrète, de ce côté, pour répondre à cette situation. Et, évidemment, on pouvait s'y attendre, au lieu de s'améliorer, la situation s'aggrave. Jeudi dernier, 85 % des infirmières ont décidé de ne plus faire de temps supplémentaire à partir du 19 mai. Ça, le 19 mai, c'est vendredi de cette semaine. Impuissant, le directeur général de la Régie régionale de l'Outaouais ne se cache pas pour dire tout haut que les malades de l'Outaouais sont en danger.

Alors, ma question est simple: M. le Président, est-ce que la ministre peut pour une fois répondre au cri d'alarme lancé en Outaouais et nous dire qu'est-ce qu'elle entend faire pour éviter la catastrophe prévisible de la fin de semaine qui s'en vient?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je pense que le député de Hull devrait d'abord s'informer avant d'affirmer des choses qui sont fausses.

D'abord, c'est complètement faux que nous n'ayons pas fait de propositions aux infirmières et à l'équipe de soins de l'Outaouais. Au contraire, je vais vous dire ce que l'on a proposé, ça l'informera en même temps, M. le Président. Alors, d'abord, nous avons eu un certain nombre de rencontres avec des représentants des infirmières, avec des représentants de l'administration de l'hôpital de même qu'avec la Régie, et il y en a une autre de prévue entre mon sous-ministre et le directeur de la Régie. Mais voici les...

Une voix: ...

Mme Marois: Non, ce n'est pas des voeux pieux, on a fait des propositions, hein. Alors, voilà les propositions que nous avons faites. Nous avons proposé d'accélérer la révision de l'organisation du travail pour dégager l'infirmière de certaines tâches et nous avons proposé l'ajout d'autres catégories de personnel: des infirmières auxiliaires – vous le souhaitiez, nous en proposions – brancardiers, commis, préposés aux bénéficiaires et certaines catégories de professionnels et de techniciens, premièrement.

Deuxièmement, stratégie de recrutement d'infirmières hors Québec à l'aide de primes, comme le fait l'hôpital d'Ottawa. Cette prime, offerte dans les unités stratégiques les plus à risque, pourrait également être offerte aux infirmières de l'établissement susceptibles de quitter l'Ontario; des critères sont actuellement en élaboration.

Dans les unités spécialisées...

Le Président: En conclusion.

Mme Marois: ...rehaussement de la formation à l'embauche, pour être plus compétitif et permettre à l'infirmière d'être mieux intégrée dans son milieu de travail; augmentation du bassin d'infirmières... Ce sont des propositions concrètes, à ce que je sache!

Le Président: M. le député.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Est-ce que la ministre réalise que, dans ce qu'elle vient de nous dire, il y a zéro de mis en place aujourd'hui? Il y a zéro pour l'Outaouais, il y a zéro pour les infirmières, mais il y a surtout zéro pour les patients de l'Outaouais. Quand va-t-il y avoir une véritable solution pour soigner les gens chez nous?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Non seulement, M. le Président, je suis prête immédiatement à mettre cela en place, je l'étais lorsque nous l'avons proposé. On n'a pas proposé ça sans savoir quelles conséquences cela aurait, M. le Président, ça va de soi.

Cependant, les infirmières voulaient autre chose que cela. Nous pensons que le programme...

Des voix: ...

Mme Marois: Ah oui! elles voulaient des primes plus élevées, elles les voulaient pour tout le personnel de l'hôpital. On pensait que ça pouvait régler le problème identifié actuellement à l'hôpital puis on pense que c'est raisonnable. Parce que, nous, on pense, comme personnes responsables, ici, qu'on a encore à gérer pour l'ensemble du Québec, M. le Président, et aussi, bien sûr, en tenant compte de particularités comme celles que l'on connaît en Outaouais, que j'ai le plaisir et la chance de bien connaître, d'ailleurs, M. le Président.

Alors, nous avons fait cette proposition. C'est une proposition... D'ailleurs, je n'ai pas élaboré, j'ai d'autres éléments qui étaient dans cette proposition, mais je crois que vous ne me le permettriez pas. Actuellement, c'est devant le Conseil des services essentiels. Mais, évidemment, selon la décision du Conseil des services essentiels, nous prendrons acte et nous interviendrons en conséquence, M. le Président. Mais je continue de croire que les mesures qui ont été proposées, d'autres qui pourraient s'ajouter si on acceptait d'en débattre...

Le Président: M. le député.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Quand la ministre parle des services essentiels, est-ce qu'on doit comprendre qu'elle n'est absolument pas aux faits de ce qui va se passer? Parce que, peu importe les ordonnances, le problème, c'est qu'il n'y en a pas, d'infirmières. Puis pourquoi il n'y en a pas? C'est parce qu'il y en a 75 qui ont quitté l'Outaouais pour l'Ontario, où est-ce que c'est plus payant.

Qu'est-ce qu'on va faire avec une ordonnance quand on n'a pas d'infirmières pour l'exécuter, M. le Président?

(14 h 30)

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: C'est une autre façon de faire peur au monde, M. le Président, parce que, dans les faits, jusqu'à maintenant, nous avons réussi à maintenir les services. Nous allons continuer à le faire. J'imagine qu'il y a, en Outaouais comme ailleurs, et partout ailleurs à travers le Québec, du personnel professionnel compétent et consciencieux et respectueux des lois, et j'imagine que tous les députés ici vont partager mon point de vue à cet égard.

Je réitère que toutes les propositions que nous avons faites demeurent faites, demeurent accessibles, pourraient nous permettre, je crois, de régler le problème d'une façon assez significative. Et il ne s'agissait pas de 75 personnes qui ont quitté mais d'une cinquantaine et avec une possibilité que d'autres quittent, M. le Président. Comme d'habitude, le député de Hull, comme de ses collègues, exagère toujours un peu, inflationne toujours un peu, comme l'inflation d'ailleurs de leur...

Le Président: En question principale?

M. Duguay: En principale, M. le Président.

Le Président: M. le député de Duplessis.


Quota alloué au Québec pour la pêche à la crevette


M. Normand Duguay

M. Duguay: Alors, ma question s'adresserait au ministre de l'Agriculture. M. le Président, vous savez, dans le passé, l'an passé précisément, au niveau de la Côte-Nord, dans le secteur des pêches, plus précisément pour la pêche à la crevette, la fameuse crevette de la Côte-Nord, on avait obtenu, au niveau du Québec, 2 %. Ça, c'est le quota que le fédéral nous avait alloué, comparativement aux années consenties antérieures où le Québec, bon an, mal an, avait au-delà de 20 %. Or, l'an passé, le gouvernement a consenti 98 % pour Terre-Neuve. Alors, cette année, ce qu'on espérait, c'est la possibilité de pouvoir obtenir un 3 000 tonnes de crevettes pour nos pêcheurs nord-côtiers.

Alors, ma question pour M. le ministre: Plus d'une fois, M. le ministre, vous avez indiqué au ministre fédéral des Pêches et Océans que l'industrie québécoise des pêches n'entendait pas être laissée de côté quant aux allocations pour la crevette du Nord. Croyez-vous que votre homologue fédéral répondra enfin favorablement à la demande légitime du Québec et qu'il permettra ainsi aux communautés de la Côte-Nord, plus précisément de la Basse-Côte-Nord, d'accéder à la part des ressources naturelles que nous avons sur le territoire?

Le Président: Alors, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: Merci, M. le Président. La question s'adressait évidemment au ministre des Pêcheries, et je sais qu'il faut toujours s'adresser à la présidence, mais, s'il écoute ça, à Ottawa, là, j'ai quelque chose à leur dire aussi, s'ils peuvent regarder ça. Parce que, effectivement, le député qui représente la Basse-Côte-Nord en particulier a bien raison de se scandaliser. Le Québec détient 20 % des permis de capture de la crevette. Actuellement, à cause de l'interruption de la pêche au poisson de fond, en particulier de la morue, il y a un développement assez spectaculaire, au niveau de la biomasse aquatique, du côté de la crevette, et en particulier de la crevette du Nord, au nord de Terre-Neuve, mais, au nord de Terre-Neuve, là, c'est aussi au nord de Blanc-Sablon, ça, parce que Port au Choix, là, puis Blanc-Sablon, c'est drette en face, ça, c'est la même distance. Alors, quand arrive la responsabilité du ministre fédéral d'accorder des ressources équitables pour le Québec maritime, on ne doit pas être tout seul, comme on a fait en Gaspésie en fin de semaine, à relancer l'économie des régions maritimes du Québec en Gaspésie.

Les pêcheurs du Québec, les transformateurs réclament un accès aux bancs de crevettes du Nord équitablement, suivant la part historique qui leur a été accordée, 20 % des permis. L'an passé, 98 % à Terre-Neuve, 2 % au Québec. Tellement vrai que les pêcheurs de Terre-Neuve, les transformateurs ont loué des bateaux du Québec, ils ont loué des installations des Québécois parce que nous avons la capacité d'aller chercher cette ressource-là. M. le Président, ces gens-là, ils doivent rendre une décision pour la Côte-Nord et la Basse-Côte-Nord en particulier. Les régions maritimes du Québec, on s'en occupe. Il faut qu'on ait notre part équitable. C'est 3 000 t de crevettes du Nord qu'il faut donner aux pêcheurs pour soutenir l'économie de la Basse-Côte-Nord.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Subventions et prêts accordés à des entreprises multinationales


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Le ministre des Finances nous a annoncé la semaine dernière avec grand déploiement la Cité du commerce électronique, et, à cette occasion, on a appris que CGI, une filiale des entreprises Bell Canada, a trouvé la corne d'abondance et mettra la main sur 200 millions de dollars en subventions pour des postes déjà existants. Ajoutez à cela 2 000 nouveaux postes d'ici cinq ans qui auraient été créés de toute façon, et CGI recevra la rondelette somme de 300 millions de dollars – 300 millions de dollars à une compagnie richissime.

Mis à part le goût insatiable du ministre des Finances de couper des rubans et, qui sait peut-être, de mettre ses empreintes sur le trottoir en face de CGI, est-ce que le ministre réalise que dépenser 150 000 $ par employé pour les déménager d'un coin de rue à l'autre, c'est gaspiller l'argent des payeurs de taxes, surtout que ce même gouvernement force les établissements de santé à couper dans les services de santé?

Des voix: Voilà! Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry: D'abord, couper des rubans, oui, puisque l'opposition le signale, c'est vrai, comme il ne s'en est jamais coupé dans l'histoire du Québec. Et souvent on invite les députés locaux, qu'ils soient de l'opposition ou du gouvernement, à le faire avec nous parce que ce n'est pas aux rubans qu'on pense, c'est aux emplois, c'est à la prospérité. L'économie du Québec n'a jamais été aussi en forme aujourd'hui qu'à aucun moment de son histoire contemporaine. Et, à l'époque où ceux qui sont en face gaspillaient 1 milliard de dollars uniquement dans la SDI, le taux de chômage à Montréal était de plus de 10 %; aujourd'hui, il se rapproche de 5 %. C'est ça, la différence dans la gestion des fonds publics.

Quant à CGI, bien, vous contredisez ce que dit CGI et son président et vous vivrez avec les conséquences. CGI s'engage à créer 2 000 emplois supplémentaires qui n'auraient pas été créés au Québec, car CGI, qui est la cinquième de sa catégorie en Amérique du Nord et la première au Canada, est courtisée par tout le monde, y compris avec l'argent fédéral à Kanata, et dans d'autres provinces, et d'autres États américains. Alors, cette époque-là est finie où les entreprises allaient se concentrer dans cette petite bourgade au nord d'Ottawa. On a redonné à Montréal sa vocation technologique et on a redonné à Montréal la prospérité, puis on va continuer.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, malgré ses beaux discours interventionnistes dignes des années cinquante, est-ce que le ministre des Finances peut comprendre qu'il utilise l'argent des contribuables pour subventionner des emplois existants, des emplois qui auraient été créés au Québec? Il dépense 300 millions de dollars pour une entreprise, pour zéro emploi additionnel.

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: On voit souvent que les questions de l'opposition sont le fait de lectures superficielles des journaux. C'est leur affaire, mais, au moins, ils devraient lire tous les journaux. Ce que la députée de l'opposition dit, là, c'est la position d'un commentateur, alors que tous les autres ont bien compris, ont été d'accord avec nous, que ce soit du Journal de Montréal ou du Devoir , pour dire qu'en moins de cinq ans tout cet argent est revenu dans les poches du contribuable et que tout le reste est net, net, net. Alors, voilà de la bonne gestion, façon de créer des emplois pour des jeunes gens et des jeunes femmes.

Je l'ai dit, il y en a 7 500 dans la Cité du multimédia. Alors que vous contempliez vos doctrines ultralibérales et ne faisiez rien, ces jeunes gens, ces jeunes femmes étaient en chômage. Aujourd'hui, ils travaillent, puis, en plus, nos impôts étant ce qu'ils sont, même si on les a baissés, cet argent revient très rapidement dans les poches de l'État. Donc, les jeunes et les entreprises y trouvent leur compte, et le contribuable aussi. C'est ça, de la gestion économique.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bonaventure.


Modification des pouvoirs de la Régie de l'énergie


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Les Québécois sont aujourd'hui les victimes de la manipulation, du camouflage et du manque de transparence du gouvernement péquiste.

Le Président: J'ai déjà indiqué, Mme la députée de Bonaventure, que le terme «manipulation», comme vous venez de l'employer, est un terme qui est non parlementaire et pas à propos dans nos débats. Alors, je vous prierais de retirer ces propos et de reformuler votre question correctement.

M. Paradis: Oui. Strictement, M. le Président, le leader du gouvernement s'est levé. Il a senti que la question s'adressait à lui. La semaine dernière, vous avez réhabilité en cette Chambre, après une douzaine d'années de jurisprudence constante, les termes «faux» et «fausseté». Cette semaine, vous changez...

(14 h 40)

Le Président: Non, non, non. C'est très bien essayé, mais ce n'est pas ça que j'ai dit la semaine dernière, d'une part. Et je vous invite à relire la transcription du Journal des débats , que je peux vous envoyer si vous voulez, mais je n'ai pas l'intention de revenir sur ma décision de la semaine dernière, qui est claire. Mais, en ce qui concerne celle d'aujourd'hui, elle est également claire. Mme la députée de Bonaventure, je comprends que vous allez retirer vos propos et reformuler votre question correctement, s'il vous plaît.

Mme Normandeau: M. le Président, les Québécois sont aujourd'hui les victimes du camouflage, des faussetés, du manque de transparence du gouvernement péquiste. En retirant des pouvoirs importants...

Le Président: On peut dire, madame, que quelque chose est faux parce que, là, c'est une question d'appréciation. Quand on dit que c'est des faussetés, ça veut dire que finalement nos vis-à-vis mentent délibérément. Alors, ce que je vous demande, c'est de formuler votre question sans attaque inutile, Mme la députée de Bonaventure. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Simplement une mesure d'équité. La semaine dernière, vous avez accepté, de la part de la partie gouvernementale, l'utilisation du terme «fausseté». Cette semaine, l'opposition l'utilise. Qu'est-ce qui vous a fait changer d'idée, en fin de semaine?

Le Président: Vous savez toujours que, finalement, d'abord, la présidence apprécie le contexte, d'une part. Et, deuxièmement, la semaine dernière, ce que j'ai indiqué, c'était le mot «faux». Et, quand on prétend que quelque chose est faux, c'est une question d'appréciation. Quand on indique à un vis-à-vis qu'on dit des faussetés, c'est qu'on indique au vis-à-vis qu'il nous ment délibérément, et c'est très différent. Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: M. le Président, en retirant des pouvoirs importants à la Régie de l'énergie, le ministre des Ressources naturelles l'a complètement dénaturée. Il a enlevé de la loi tout ce qui ne faisait pas l'affaire du premier ministre, du ministre des Finances et du président d'Hydro-Québec pour en faire un instrument docile au service de son gouvernement. Ce nouveau triumvirat a imposé à Hydro-Québec une nouvelle mission, celle de devenir la nouvelle machine à imprimer de l'argent du gouvernement. Et le plus ridicule dans tout ça, c'est que le ministre des Ressources naturelles tente d'induire tout le monde en erreur en affirmant qu'il veut protéger les Québécois en leur offrant les plus bas tarifs d'électricité.

Alors, M. le Président, pendant que le ministre des Ressources naturelles tente de s'autoconvaincre, parce que manifestement personne ne le croit, comment peut-il accepter d'être celui qui prive les Québécois d'une baisse de tarifs, et tout ça pour ne pas déplaire au ministre des Finances, au premier ministre et au président d'Hydro-Québec?

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, d'abord, ce n'est pas en utilisant des gros mots que l'opposition va nécessairement rendre sa position plus crédible. Il n'y a pas de corrélation entre les deux, aucune corrélation. Ceci étant dit, je vais répéter de nouveau à la députée de Bonaventure ce qui guide le gouvernement, quel est l'objectif que nous poursuivons, quelle est l'orientation que nous avons adoptée.

M. Mulcair: ...

M. Brassard: Oui, M. le député de Chomedey. Est-ce que vous le voyez faire des gestes?

Des voix: ...

Le Président: Est-ce qu'on peut revenir à un décorum acceptable et permettre au ministre des Ressources naturelles de s'exprimer? M. le ministre.

M. Brassard: M. le Président, si le député de Chomedey pense qu'avec ses gestes vulgaires il va m'intimider, il se trompe drôlement.

Des voix: Bravo!

Le Président: Il n'y a pas de question de règlement sur ça, M. le député de Chomedey, là.

M. Mulcair: ...

Le Président: Non, mais, monsieur, pas à la période de questions, pas de cette façon-là.

M. Paradis: ...

Le Président: Sur une question de fait personnel, M. le leader de l'opposition officielle, vous savez très bien qu'il y a des règles à suivre.

M. Paradis: M. le Président, le règlement s'applique également au leader du gouvernement, même s'il s'écrase devant ses collègues dans des questions d'intérêt public.

Le Président: Encore une fois, ce n'était pas un question de règlement. C'est une façon très habile de donner une réplique. Monsieur, non.

Une voix: ...

Le Président: Une vraie question de règlement?

M. Paradis: M. le Président, c'était évident, là, la façon dont le leader du gouvernement a pris la parole contrevenait...

Une voix: ...

M. Paradis: Il y a quelqu'un, un nouveau député en cette Chambre qui veut savoir quel article. Les articles 35.4°, «s'adresser directement à un autre député», et 35.7°, «se servir d'un langage violent, injurieux ou blessant à l'endroit de qui que ce soit», M. le Président.

Le Président: D'abord, j'ai déjà rappelé la semaine dernière et à plusieurs reprises que, dans cette Chambre, il faut avoir un peu la couenne dure, d'une part. Et, d'autre part, s'il fallait que j'applique le règlement comme vous me proposez de le faire, il n'y aurait pas beaucoup de questions qui seraient posées à l'Assemblée et peut-être autant de réponses qui ne seraient pas données également. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, M. le Président, je rappelle l'objectif poursuivi par le gouvernement et je vais répéter de nouveau à la députée de Bonaventure que ce qui m'intéresse, moi, et ce qui intéresse le gouvernement, c'est la facture que reçoivent mensuellement des millions et des millions de consommateurs d'électricité au Québec. C'est ça qui nous intéresse. Actuellement, présentement, ce sont les plus bas tarifs en Amérique du Nord, et le gouvernement veut que ça demeure ainsi, et il va prendre les moyens pour que ça demeure ainsi.

Des voix: Bravo!

M. Brassard: Et, M. le Président, si la députée de Bonaventure trouve ça scandaleux qu'Hydro-Québec connaisse un taux de rendement de 6,8 %, si elle trouve ça scandaleux, bien, elle devrait aller voir ailleurs. Ça n'a rien de scandaleux, ce n'est pas assez élevé. Il faudrait que ça monte au moins à 10 % puis que ça rapporte au moins 1,6 milliards de bénéfice net, dont 800 millions dans les coffres de l'État. Ça veut dire, ça, moins d'impôts, moins de taxes à payer par les Québécois.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député Chomedey, en question principale?

M. Mulcair: Non, en additionnelle.

Le Président: En complémentaire? Très bien.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Est-ce que le leader du gouvernement se rend compte que le seul geste qu'on faisait, de ce côté-ci, c'était de répéter son petit geste des Dalton? Et ce que ma collègue est en train d'essayer de lui faire comprendre, c'est que ce n'est pas en criant qu'il va intimider l'opposition ni faire taire le public qui n'en peut plus de ce gouvernement qui veut émasculer des institutions comme la Régie de l'énergie. Ce n'est pas en faisant un eunuque au service du triumvirat de son gouvernement qu'il va desservir la population, ni dans ce dossier ni dans tout autre. Et il ne nous fait pas peur, à nous autres, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, en matière de cris et de hurlements, je n'ai pas de leçons à apprendre à l'opposition parce que c'est son comportement habituel que de masquer par des cris et des hurlements son absence d'idées et de positions.

Des voix: Bravo!

M. Brassard: Je répète, M. le Président, que, en ce qui concerne le projet de loi n° 116, je pense que l'opposition aurait intérêt à bien l'analyser, et à bien l'étudier, et à prendre parti pour les millions de Québécois qui paient des factures d'électricité. Je pense que ce serait préférable parce qu'il me semble que l'opposition cherche avec beaucoup de vigueur et d'ardeur à augmenter sa cote de popularité dans certaines régions du Québec. Bien, ce n'est pas par cette attitude-là qu'elle va réussir.

(14 h 50)

Le Président: Mme la députée.

Mme Normandeau: En additionnelle.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Bonaventure.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Comment le ministre des Ressources naturelles peut continuer de prétendre qu'il défend les intérêts des Québécois, alors que tout le monde s'entend pour dire qu'on est victime d'une arnaque? Dans La Presse du 12 mai: Hydro soustraite au regard de la Régie ; dans Le Devoir du 12 mai: Ce projet de loi bafoue l'héritage de René Lévesque ; dans Le Devoir du 13 mai: Main basse sur les hydrodollars ; et, dans Le Devoir du 15 mai, un éditorial de Jean-Robert Sansfaçon: Coup fourré . Alors, est-ce que le ministre des Ressources naturelles peut admettre qu'il fait fausse route? La mission première d'Hydro-Québec, ce n'est pas d'être une vache à lait pour le gouvernement mais c'est d'offrir les meilleurs tarifs d'électricité aux Québécois.

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, bien oui. Bien, c'est précisément ce qu'Hydro-Québec fait, d'offrir les plus bas tarifs en Amérique du Nord aux consommateurs québécois, aux Québécois. C'est ça qu'elle fait, et le gouvernement souhaite et prend les moyens pour que ça continue de cette façon-là.

Mais, M. le Président, je signalerais à la députée de Bonaventure que, l'héritage de René Lévesque, je le connais très bien. C'est le pacte social que tous les gouvernements qui se sont succédé, y compris les gouvernements libéraux, de l'Union nationale... Tous les gouvernements qui se sont succédé au Québec depuis près de 40 ans ont consolidé, maintenu, sauvegardé le pacte social justement issu de cette élection quasi référendaire de 1962 grâce à René Lévesque, et à Jean Lesage, je le reconnais aussi. Eh bien, ce pacte social, il faut le maintenir et le conserver. C'est un des objectifs du projet de loi n° 116.

Le Président: Alors, M. le député de Robert-Baldwin, en question principale.


Financement du Carrefour jeunesse-emploi Saguenay


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. La ministre de l'Emploi et le gouvernement du Parti québécois sont en train de couper le budget du Carrefour jeunesse-emploi du Saguenay. Après avoir retranché 30 000 $ en novembre dernier, la ministre impose une autre coupure de 100 000 $ pour les trois prochaines années, et ce, malgré la promesse formelle du premier ministre au Sommet de la jeunesse, promesse de renforcer les carrefours jeunesse-emploi. De plus, nous apprenons que ce même gouvernement ajoute aux responsabilités de ce Carrefour jeunesse-emploi en y référant de jeunes assistés sociaux à forte problématique.

Ma question à la ministre de l'Emploi, M. le Président: Sachant que le taux de chômage est très élevé chez les jeunes du Saguenay, les jeunes du Saguenay et les administrateurs du Carrefour jeunesse-emploi aimeraient connaître vos critères, vos raisons qui ont conduit à une diminution si importante du budget du Carrefour jeunesse-emploi du Saguenay.

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, merci, M. le Président. Je suis un peu étonnée de la question du député de Robert-Baldwin parce que son collègue, au moment de l'étude des crédits, le député de LaFontaine, lorsque j'ai répondu à des questions sur les critères que j'ai établis pour cette année et les prochaines années quant au financement des carrefours jeunesse-emploi, donc son collègue député de LaFontaine m'en a félicitée. Alors, je suis un peu étonnée qu'aujourd'hui on s'offusque du fait que j'ai essayé d'établir des critères qui font en sorte que le financement des carrefours, il est maintenant basé sur des critères équitables.

Par ailleurs, c'est un réseau auquel, personnellement, je crois et auquel le gouvernement croit, puisque je me suis engagée dans du financement sur une base triennale. Je pense que c'est une des premières que je mets en oeuvre dans le réseau d'Emploi-Québec. Et, finalement, je préciserai que, dans le cas précis qui est souligné par le député de Robert-Baldwin, il ne s'agit pas de coupures; au contraire, si j'avais appliqué les critères tels quels, ça aurait posé des problèmes. Je suis consciente que, ce Carrefour-là – il y en a quelques-uns au Québec – qui couvre plus d'un territoire, il y a là des enjeux particuliers. C'est la raison pour laquelle je n'ai opéré aucune ponction de leur budget cette année, parce que je veux chercher avec eux des solutions leur permettant de couvrir plus d'un territoire sans être pénalisés.

Le Président: Alors, la période de questions et de réponses orales est terminée.

Nous abordons l'étape des motions sans préavis. M. le député de Marquette, en motion sans préavis.

M. Ouimet: M. le Président, je sollicite le consentement pour présenter la motion qui suit:

«Que l'Assemblée nationale réaffirme que, malgré les améliorations notables apportées par la ministre fédérale de la Justice lors du dépôt des 162 amendements, le projet de loi C-3 concernant le système de justice pénal pour les adolescents nécessite d'autres modifications afin de s'assurer que le Québec puisse maintenir sa stratégie d'intervention basée sur les besoins des jeunes et privilégiant la prévention et la réhabilitation.

«En conséquence, l'Assemblée nationale demande:

«1° à la ministre fédérale de la Justice ce qui suit:

«1. de prendre acte du principe reconnu par la Cour suprême du Canada en vertu duquel le Parlement fédéral peut légitimement permettre qu'il existe entre les provinces des différences dans la question du traitement des infractions criminelles commises par des adolescents;

«2. d'amender le projet de loi C-3 afin de soustraire le Québec de l'application de dispositions relativement à:

«a) la présomption aux peines adultes pour les adolescents âgés de 14-15 ans;

«b) la publication de l'identité des adolescents;

«3. d'introduire dans la déclaration de principe du projet de loi C-3 la notion que l'intervention auprès des jeunes doit se faire avec diligence;

«2° à la ministre de la Justice du Québec de prendre sans délai toutes les mesures nécessaires à la mise en oeuvre de la présente motion.»

M. le Président, c'est une motion que j'ai présentée jeudi dernier. Le consentement a été refusé pour permettre à la ministre de prendre connaissance de la motion, d'en faire l'analyse et l'étude, puis, par la suite, j'attends la réponse de la ministre.

Le Président: Est-ce qu'il y a d'abord consentement pour débattre de la motion? M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Non. M. le Président, nous avons examiné la motion du député de Marquette, et le gouvernement en est arrivé à la position qu'il vaut mieux s'appuyer sur une motion déjà adoptée unanimement en novembre dernier. Alors, c'est ce que nous avons l'intention de faire.

Le Président: Alors, il n'y a pas consentement. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Strictement pour plaider auprès de mon vis-à-vis, je comprends qu'il y a déjà eu une motion de l'Assemblée nationale unanime sur le même sujet. Maintenant, depuis ce temps, les choses ont évolué, le projet fédéral a évolué, et, à partir du moment où l'Assemblée nationale demeure silencieuse, à ce moment-ci, il ne peut qu'en résulter un affaiblissement de la position du Québec. À ce moment-ci, si le gouvernement n'est pas d'accord avec la motion telle que libellée par le député de Marquette, il y aurait peut-être lieu que Mme la ministre de la Justice et le député de Marquette se rencontrent de façon à ce que le Québec affirme, au moment où en est rendu le débat, la volonté unanime des Québécois et des Québécoises sur le sujet.

M. Brassard: M. le Président, nous pensons qu'il n'est pas opportun ni pertinent de multiplier les motions pour exprimer la volonté unanime de l'Assemblée, elle s'est déjà exprimée. Et c'est en s'appuyant sur cette motion unanime d'ailleurs que le premier ministre a écrit récemment à son homologue fédéral pour lui demander de soustraire le Québec à l'application de cette loi.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Bien. Alors, puisqu'il n'y a pas consentement pour débattre de la motion, s'il n'y a pas d'autres présentations de motions sans préavis, nous allons aller aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée, d'abord, que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 87, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle du Conseil législatif, ainsi que demain, le mercredi 17 mai 2000, de 10 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des affaires sociales poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que demain, le mercredi 17 mai 2000, de 9 h 30 à 11 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine; et enfin

Que la commission des transports et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 93, Loi sur la sécurité des barrages, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, ainsi que demain, le mercredi 17 mai, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Président: Bien. Alors, aux renseignements sur les travaux de notre Assemblée, je vous informe que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député de Rivière-du-Loup qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale du Québec exige du gouvernement péquiste la mise en place immédiate des services gouvernementaux en ligne auprès des entreprises et des citoyens.»


Affaires du jour

Alors, aux affaires du jour, maintenant, M. le leader du gouvernement. M. le leader du gouvernement, nous sommes rendus aux affaires du jour.

(15 heures)

M. Brassard: Oui. Alors, je vous référerais, M. le Président, à l'article 5 du feuilleton.


Projet de loi n° 107


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Président: Alors, à cet article, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 11 mai dernier sur l'adoption du principe du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux.

Alors, je suis prêt à reconnaître une première intervention. M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. C'est pour moi l'occasion de me joindre à une trentaine de collègues du côté de l'opposition officielle qui ont eu l'occasion de se prononcer sur le projet de loi n° 107 et qui, dans la foulée du travail fait par le député de Vaudreuil, par notre collègue de Bourassa, ont plusieurs fois commenté un projet de loi qui, avouons-le, est un projet de loi inhabituel. Je dois vous avouer, moi, que, depuis que j'ai l'occasion de siéger dans un Parlement ou dans l'autre, j'ai rarement sinon jamais vu un tel projet de loi, un projet de loi qui déclare, qui ordonne, qui va bien au-delà des ordres pour faire décréter que dorénavant, dans le système de soins de santé, il y aura un équilibre budgétaire, peu importent les conséquences.

Il faut s'interroger sur le raisonnement, sur les raisons, les motivations du gouvernement, alors que, depuis plusieurs années maintenant, on vit avec cette réforme de la santé, une réforme de la santé qui a été une opération budgétaire, tous ceux qui ont vécu dans le réseau de la santé le savent, en premier lieu les patients, les malades qui ont dû vivre avec les conséquences des décisions de ce gouvernement-là. Alors, ce gouvernement a imposé au réseau de la santé une réforme qui était une opération budgétaire, en prenant des engagements très clairs que l'argent économisé avec la fermeture des hôpitaux, par exemple, allait servir à des services ambulatoires, allait servir aux soins à domicile, sauf que l'argent ne s'est jamais rendu.

En plus de ça, M. le Président, ce gouvernement, depuis qu'il a mis en place sa réforme, nous a imposé une succession de mauvaises décisions qui vont nous coûter très, très cher pour l'avenir. Pensons à la décision de mettre à la retraite des milliers d'infirmiers et d'infirmières, la décision de payer des mises à la retraite pour des médecins, incluant des médecins spécialistes, incluant dans certains cas des médecins radio-oncologues. Pensons à ces décisions de restreindre l'accès à la formation, aux inscriptions, dans les collèges, pour les étudiants en sciences infirmières ou de couper le nombre d'entrées dans les Facultés de médecine. Voilà une succession de décisions qui ont eu un effet désastreux sur le système de soins de santé que les Québécois et Québécoises ont construit de leurs mains et pour lequel ils paient beaucoup, beaucoup d'impôts aujourd'hui.

Eh bien, M. le Président, le gouvernement a commencé à remettre de l'argent, dit-il, dans le système de soins de santé. Encore là, faut-il préciser, le gouvernement a forcé le système à faire des déficits, ce qui n'était pas le cas lorsqu'il a été élu en 1994, rappelons-le. D'ailleurs, pour faire la courte histoire, lorsque le gouvernement libéral a été élu, en 1985, il y avait effectivement, suite à la gestion du gouvernement du Parti québécois, des déficits dans le système de soins de santé. Le tir a été rectifié, le gouvernement libéral, de 1985 à 1994, a réparé les pots cassés du gouvernement du Parti québécois, de telle sorte qu'au moment où il quittait les affaires, en 1994, il n'y en avait pas, de déficit, dans le système de soins de santé.

Ce que le gouvernement actuel a choisi de faire à la place, c'est d'imposer l'équilibre budgétaire, de le faire sur le dos des établissements et, en particulier, des malades, de faire en sorte que l'équilibre budgétaire comptable qu'il faisait à Québec se transportait automatiquement pas seulement dans le système de soins de santé, mais aussi dans les universités, les commissions scolaires. N'oublions pas les municipalités qui se sont fait transférer des factures, hein: 356 millions de dollars, pris à même vos taxes foncières, qui devaient servir à des services qui relèvent des municipalités mais qui ont été transférés à Québec à la place.

Alors, le résultat de tout ça, M. le Président, c'est quoi? Des coupures de 2,1 milliards directement du gouvernement du Québec. À cela s'ajoutent les déficits que les établissements ont dû encourir pour rendre des services à la population, parce qu'ils étaient bien obligés, eux, de répondre aux gens qui frappaient à leur porte. Et là le gouvernement, dans son dernier budget, propose d'injecter de l'argent neuf, mais attention, M. le Président, attention, l'argent qu'il injecte, c'est d'abord pour combler le trou qu'il a lui-même creusé. Ce trou-là n'était pas là avant.

Alors, quand le gouvernement et la ministre nous disent, à l'Assemblée, qu'on a injecté tant de milliards de dollars, ceux qui écoutent devraient faire attention et devraient lire, en tout cas, l'imprimé dans le bas des réponses. Parce que, s'ils lisaient correctement les imprimés, ce qu'ils relèveraient, c'est que, d'abord, ils ont remis de l'argent après avoir coupé 2,1 milliards, ils ont remis de l'argent après avoir imposé des déficits et des dettes aux établissements, à tout le réseau, ils ont remis de l'argent dans un système qu'ils ont aidé à défaire avec les mises à la retraite massives.

Et, M. le Président, ayant posé ces gestes-là et maintenant qu'ils arrivent finalement à le réaliser avec un surplus budgétaire qui nous permet de respirer un petit peu, le gouvernement se retourne de bord avec un projet de loi et ordonne, décrète, oblige les établissements à faire l'équilibre budgétaire. Or, il se pose un problème important, un problème qui, à sa face même, me semble insoluble. Notre collègue le député de Vaudreuil l'a soulevé aujourd'hui. Voyez-vous, il y en a déjà une, loi de la santé et des services sociaux, une loi qui dit des choses également, M. le Président.

D'abord, la première chose que la loi dit, ce qui paraît fondamental, c'est que les établissements de santé ont l'obligation de rendre des services aux gens qui se présentent à leur porte. Il n'y a pas de surprise là-dedans, M. le Président, c'est logique. C'est le minimum auquel on a le droit de s'attendre dans notre société, après avoir payé de nos impôts pour faire fonctionner les CLSC, les hôpitaux, les centres hospitaliers de soins de longue durée. Évidemment, les établissements ayant reçu de l'argent des contribuables québécois ont l'obligation de rendre des services.

Mais là, M. le Président, ils vont faire quoi, les établissements, si quelqu'un se présente à la porte puis qu'il n'y a plus d'argent? Ils vont leur répondre quoi au juste? D'autant plus que, fait inusité, on a un gouvernement qui, lui, contrôle les cordons de la bourse. C'est lui qui décide de l'argent qui va dans le réseau et c'est lui qui, ayant décidé combien d'argent allait dans le réseau, se retourne de bord puis dit: Je vous oblige à faire l'équilibre budgétaire.

Sauf qu'il faudrait dire en même temps que les gens, à l'autre bout, dans le réseau, ils ne contrôlent pas, eux, le nombre de personnes qui se présentent à leur porte tous les jours, ils n'enlèvent pas d'impôt, eux, dans le réseau. Ce n'est pas comme s'ils pouvaient compenser en disant: Bien, voilà, le gouvernement du Québec, lui, nous donne tant, on a tant de services à rendre, il y a un déficit de tant, on va donc aller chercher l'argent dans les poches de quelqu'un d'autre. Ils n'en ont pas, de choix.

Or, M. le Président, la loi les oblige à rendre des services et la loi les oblige aussi à tout mettre en oeuvre pour faire l'équilibre budgétaire. Et la loi va plus loin que ça – la ministre l'a déjà évoqué à l'Assemblée nationale. Il y a toutes sortes de mécanismes de prévus qui sont enclenchés dans l'hypothèse où un établissement prévoit faire un déficit: il y a un dialogue qui s'établit; il y a des échanges d'informations. C'est ce que la loi existante dit déjà. Or, soudainement, le gouvernement sort de son chapeau la loi n° 107 et dit: Non, non, non. Dorénavant, ça va être l'équilibre budgétaire «or else», comme on dit, les conséquences seront là.

Bien, M. le Président, c'est une bonne question que posait le député de Vaudreuil aujourd'hui. Moi, je ne voudrais pas être à la place d'un conseil d'administration d'un hôpital qui va faire un déficit cette année et être l'aviseur légal du conseil d'administration, du directeur général à qui on demande un avis. Alors, on demande à l'aviseur légal: Quelle loi nous régit dans ces circonstances-là? Moi, j'ai une loi qui me dit que je dois rendre des services à une personne qui est dans notre salle d'urgence, mais j'ai une autre loi qui me dit que, si je n'ai pas l'argent pour soigner cette personne-là, je dois faire l'équilibre budgétaire. On répond à quelle loi au juste?

Bien, M. le Président, la ministre n'avait pas de réponse aujourd'hui, parce que la réponse, je présume, ne venait pas d'elle. Ça devait venir de son collègue du Conseil du trésor, qui est en voyage à l'extérieur, qui, lui, ne s'est pas gêné pour dire que les régies régionales, c'était des erreurs, alors que, aujourd'hui, le voisin de droite de la ministre disait que ce n'était pas des erreurs. La réponse, on le sait bien: cette loi-là ne vient pas du ministère de la Santé, M. le Président, c'est une loi qui a été téléguidée par son collègue président du Conseil du trésor, qui rappelle à l'ordre sa collègue de la Santé, dans le fond. C'est un règlement de comptes, ce projet de loi là, c'est un règlement de comptes ministériel.

(15 h 10)

Sauf que, M. le Président, on n'est pas rendus au bout de nos peines, parce que, le temps que les ministres tentent de régler leurs affaires entre eux, pendant ce temps-là le réseau de la santé continue à souffrir de problèmes très graves. Je vais vous donner des exemples, parce que le gouvernement ne semble pas, dans sa tour d'ivoire, être capable d'entendre, de voir, de tenir compte de ce qui se passe dans les établissements, sur le terrain. Alors, aujourd'hui je vais vous donner des exemples.

Malgré ce que la loi prévoit, à l'hôpital Sainte-Justine, ils seront obligés de couper dans les services aux jeunes patients et à leur famille. Le déficit va être de 8 millions de dollars à Sainte-Justine. À propos de l'équilibre budgétaire exigé par la nouvelle loi antidéficit, plusieurs médecins soutiennent que la commande du gouvernement est impossible pour un centre comme Sainte-Justine qui traite des enfants très malades de tout le Québec. Alors, je ne sais pas c'est quoi, la réponse aux médecins de Sainte-Justine. Ça va-tu être une loi antimaladie pour les enfants? Ça va-tu être une directive envoyée à l'hôpital Sainte-Justine disant: Dorénavant les enfants qui sont de la région de la Côte-Nord ne peuvent plus fréquenter l'hôpital Sainte-Justine, car vous devez d'abord faire l'équilibre budgétaire, M. le Président? On voit bien l'absurdité de ce qui est présenté, de ce qui est proposé aujourd'hui.

Deuxième exemple, à l'hôpital Saint-Jean-sur-Richelieu. Puis Dieu sait si à Saint-Jean-sur-Richelieu la population se démène pour envoyer des messages au gouvernement: des manifestations avec des milliers de personnes, M. le Président. Des milliers de personnes à Saint-Jean-sur-Richelieu, des conditions terribles pour les administrateurs. Bien, à Saint-Jean-sur-Richelieu, le président du conseil d'administration prévoyait, en date du 4 mai dernier, faire un déficit de 2 millions de dollars. Et c'est appel après appel, faits publiquement, de détresse, littéralement des appels de détresse venant du centre hospitalier de Saint-Jean-sur-Richelieu qui ne sont pas entendus par le gouvernement.

Le directeur général de l'hôpital de Drummondville déclare qu'il sera dans l'obligation de fermer des services. Ça vaut la peine de relever ça, M. le Président, parce que je ne sais pas combien de fois on entend la ministre nous dire à l'Assemblée nationale: On a remis des milliards de dollars. Et, en même temps, on se retourne de bord dans nos régions puis on se fait dire par les directeurs généraux des établissements qu'on coupe les services.

Alors, je me mets à la place du citoyen moyen, il doit bien s'interroger sur ce qui se passe: Mais qui dit vrai au juste, là? La ministre, à l'Assemblée nationale, prétend dépenser des milliards, il ne semble pas y avoir de fin à l'argent qu'elle dépense, selon elle, puis, en même temps, partout dans les régions les gens qui dirigent les établissements nous parlent juste de coupures de services. Il doit bien y avoir, là, un morceau qui nous manque.

Bien, le morceau, c'est facile à comprendre, ils ont affamé le système. Ces établissements-là ont été coupés. Alors, même si la ministre annonce de l'argent qu'elle prétend être neuf, il reste toujours qu'elle ne réussit pas. C'est comme des escaliers roulants, elle ne réussit pas à monter jusqu'en haut parce qu'ils ont tellement coupé, improvisé dans ce qu'ils avaient fait dans leur fameuse réforme que maintenant c'est devenu impossible pour eux de le rattraper.

Bien, à Drummondville, on en a un bel exemple. Ils vont être obligés de fermer des services. Ils parlent de services de gériatrie, peut-être même des soins palliatifs, M. le Président. Peut-être même tous les services d'hématologie et d'oncologie. Et je ne sais pas si la ministre l'a vu – peut-être qu'elle ne l'a pas vu – il y avait un reportage où on nous présentait justement une personne de l'hôpital de Drummondville dans une aile neuve. Le gouvernement du Québec venait de dépenser de l'argent pour construire quelque chose de neuf, puis la personne qui est interviewée est en train de nous annoncer qu'il va le fermer du même souffle. On ne peut pas avoir un exemple plus éloquent de gaspillage de fonds publics que celui-là, M. le Président.

Le 20 avril, les établissements de santé du Saguenay–Lac-Saint-Jean anticipent un manque de 3,4 millions pour l'année en cours. Dans ma région à moi, dans les Cantons-de-l'Est, le conseil d'administration du CHUS, autrefois connu sous le nom du CUSE, parlait d'un manque à gagner de 5 millions avec les conséquences désastreuses qui s'ensuivent, M. le Président. On parlait encore de coupures de postes et de listes d'attente.

Ça, c'est le centre hospitalier qui est dans le comté de ma collègue députée de Saint-François. Je le sais, je connais bien ce centre hospitalier, qui est d'ailleurs un centre hospitalier universitaire de premier niveau, mais qui malheureusement n'arrive pas, lui non plus, à rejoindre les deux bouts et qui annonce qu'il va encore être obligé d'annoncer des coupures. Alors, pour la population, une fois de plus, qui écoute, bien ça doit être intrigant un petit peu, là. Qui croire? Bien, on finit par savoir qui croire quand on se présente pour obtenir des soins, M. le Président, parce que les soins n'y sont pas.

Le 5 mai, dans le journal La Presse, on apprenait que «l'Hôpital du Haut-Richelieu se dit condamné à mettre en péril la sécurité de la population». Le 4 mai, le conseil d'administration du CLSC du Richelieu refusait d'adopter le nouveau budget proposé par la Régie régionale parce qu'il se dit incapable de respecter la loi anti-déficit imposée par Québec.

Mon collègue député de Shefford, aujourd'hui, posait une question au sujet du CLSC La Pommeraie qui se met hors la loi et adopte un budget déficitaire. Et, le 13 mai, le centre hospitalier Piedmont-Yamaska, par son conseil d'administration, a unanimement approuvé un budget déficitaire de 7,8 millions. Ils l'ont fait en toute connaissance de cause, M. le Président. D'ailleurs, mon collègue de Shefford posait la question avec la première page du journal La Voix de l'Est , qui dit, noir sur blanc, qu'il défie la ministre, M. le Président.

Eh bien, on peut juste arriver à une seule conclusion: il va y avoir de la désobéissance civile au Québec, si j'ai bien compris, M. le Président; c'est inévitable. Il va y en avoir d'une façon ou d'une autre parce que ces gens-là vont ou contrevenir à une loi ou contrevenir à l'autre. Ils n'ont pas le choix. Ou ils vont obéir aveuglément aux ordres que le gouvernement du Parti québécois leur donne avec son projet de loi n° 107 puis ils vont équilibrer le budget sans tenir compte des conséquences, ou ils vont alternativement obéir à la loi sur la santé et les services sociaux et rendre les services que la loi leur oblige de rendre. Ça va être un ou l'autre, M. le Président. Mais inévitablement il y aura de la désobéissance civile si on doit croire, en tout cas, les dirigeants d'établissements qui nous disent, très clairement, lucidement, ce qui ce passe.

M. le Président, on aurait souhaité beaucoup plus, de la part de la ministre, en termes de solutions. Depuis le temps que nous interrogeons le gouvernement sur les questions de santé, on réclame qu'il y ait une consultation, une consultation qui, en passant, au premier chef, doit inclure les députés de l'Assemblée nationale. Après tout, c'est notre institution, à nous, Québécois, l'Assemblée nationale. C'est ici que les décisions se prennent, c'est les hommes et les femmes qui sont ici, dans l'enceinte de l'Assemblée nationale, qui sont imputables de ces décisions-là. Eh bien, on nous annonce des consultations mais sans trop être précis sur les échéanciers, en retardant ça à l'automne et en évitant, M. le Président, on le sent bien, de prendre de plein front les vrais enjeux causés par une réforme de la santé bâclée, qui aura eu des conséquences désastreuses pour la population du Québec.

M. le Président, suite à la proposition de ce projet de loi, la présentation de ce projet de loi, on doit demander au gouvernement certaines questions sur les conséquences. D'abord, à qui va-t-on refuser des soins? Ça, c'est la première question. Pensons, entre autres, aux gens dans les centres hospitaliers de soins de longue durée qui déclaraient récemment être les grands oubliés du dernier budget, qui en sont rendus à donner un bain par semaine aux personnes âgées. On sait, la ministre, elle, elle pense que c'est correct, ça, hein? Ça, c'est correct. Dans le standard du gouvernement du Parti québécois, ça, c'est suffisant pour des personnes âgées qui, de toute façon, peuvent difficilement se plaindre, hein? Leur niveau d'autonomie est relativement bas.

Mais à qui va-t-on continuer de refuser des soins? Qui va continuer à se faire refuser des soins à domicile, M. le Président? À quelle salle d'urgence allons-nous envoyer les patients qui seront refusés dans un autre centre hospitalier? M. le Président, quels services coupera-t-on pour pouvoir continuer à en donner d'autres, hein, comme, à Drummondville, ils sont obligés de le faire en faisant des choix?

Les heures de service, M. le Président. Qui va décider, maintenant et dorénavant, des heures de service? Et est-ce que ça veut dire que les patients, les citoyens du Québec devront ajuster leur maladie, leurs souffrances aux horaires de la ministre et du gouvernement et se mettre au service de son équilibre budgétaire? M. le Président, on aura rarement vu, dans l'histoire parlementaire, un projet de loi, je le dis, je choisis mon mot, aussi absurde, un projet de loi qui passe à côté du problème, un projet de loi qui ordonne, là, un résultat qui ne tient aucunement compte de la réalité, un projet de loi qui vient déshumaniser le système de soins de santé.

On ne pensait pas... On pensait que le gouvernement était peut-être rendu au bout de son opération budgétaire, mais on ne soupçonnait pas qu'il était capable de proposer un projet de loi qui touche le système de soins de santé qui vient à ce point déshumaniser les soins pour tous ceux et celles qui ont grandement besoin des services pour lesquels ils ont payé, M. le Président. Parce qu'il faut le dire, les personnes âgées, les hommes, les femmes qui se présentent, là, dans nos établissements de santé, ils ont payé de leur poche. D'ailleurs, ils sont les plus taxés en Amérique du Nord.

(15 h 20)

En retour, le minimum auquel ils pourraient s'attendre, c'est de recevoir un minimum de services. Mais non, on leur enfonce dans la gorge un projet de loi puis on dit aux dirigeants des établissements: Enlignez-vous ou on vous mettra en tutelle.

On a l'impression d'avoir les échos d'une autre époque, M. le Président. Quand le premier ministre et la ministre de la Santé ont réuni les dirigeants des établissements, on a comme eu le sentiment d'entendre le bon vieux «Toé, tais-toé». Ça résonne encore. Eh bien, on ne pourra pas faire taire les malades, on ne pourra pas faire taire les familles, on ne pourra pas faire taire les personnes âgées puis on ne réussira jamais à faire taire l'opposition officielle pour que nous puissions avoir, au Québec, les soins de santé que la population mérite.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, en réplique, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Merci, M. le Président. N'en déplaise au chef de l'opposition, vous avez devant vous un gouvernement responsable et un gouvernement aussi sensible aux besoins de la population québécoise, sûrement aussi sensible que l'était le gouvernement du Parti libéral de l'époque, au moment où les listes d'attente étaient trois fois plus longues que celles que nous avons, du côté de la chirurgie cardiaque entre autres, et où par ailleurs on accumulait, année après année, déficit sur déficit. Il n'y en avait pas dans les hôpitaux; ils étaient tous au gouvernement de Québec, M. le Président. Quand il a commencé à y en avoir dans les hôpitaux, le Parti libéral, en face, a été le premier, l'opposition a été la première à nous dire qu'on camouflait les déficits dans les hôpitaux. Alors, il faut choisir son discours, mais l'important, c'est la cohérence parce que ça, ça finit toujours par nous rattraper quelque part.

Les nombreuses heures de débat que nous avons tenues sur le projet de loi sur l'équilibre budgétaire du réseau de la santé et des services sociaux m'ont convaincue, en fait, plus que jamais de sa pertinence à ce moment précis de l'évolution des finances publiques du Québec. Et, au-delà des formules et des arguments partisans, comment peut-on s'opposer au principe même de l'équilibre budgétaire d'une composante aussi importante en quantité et en qualité de notre secteur public?

Le réseau de la santé et des services sociaux, à la faveur du dernier discours sur le budget, est en mesure de relancer son action à partir d'une assise budgétaire plus saine. Le premier ministre avait promis aux Québécoises et aux Québécois, en janvier dernier, que la santé serait la priorité de l'année. Il faut reconnaître qu'il a bel et bien tenu parole, M. le Président.

C'est vrai, par ailleurs, un budget ne peut à lui seul tout régler, mais la hauteur de l'effort financier consenti par le gouvernement permet de répondre, et ce, de façon véritablement structurante, à plusieurs des attentes les plus importantes dont m'avaient fait part les gestionnaires du réseau de la santé et des services sociaux.

À la faveur de ce budget, j'ai été en mesure de prendre des décisions. D'abord, pour libérer le réseau et tous ses établissements – autant les CLSC, les centres d'hébergement et de soins de longue durée que les hôpitaux – de leur dette accumulée qui était à hauteur de quelque 420 millions de dollars pour les établissements et d'une quarantaine de millions pour les régies régionales.

J'ai été à même de rehausser les bases budgétaires des établissements, d'effacer le passé, d'ajouter 425 millions pour leur permettre d'entreprendre un nouveau cycle sans l'hypothèque que représente un déficit structurel, des crédits permanents récurrents dans les bases budgétaires de nos établissements.

J'ai été en mesure d'ajuster l'ensemble des budgets de manière à tenir compte de l'augmentation des coûts, soit 765 millions de dollars, incluant bien sûr les hausses de salaires consenties dans les dernières négociations.

J'ai investi 200 millions de dollars dans le renouvellement des équipements. Combien de fois, partout sur le territoire québécois, on m'a dit, mais particulièrement dans les hôpitaux universitaires, dans les instituts universitaires, on m'a mentionné la désuétude de certains équipements. Une réponse claire, nette, importante en termes de valeurs financières: 200 millions de dollars. J'ai pu injecter des sommes nouvelles encore là récurrentes, c'est-à-dire que l'année prochaine ces sommes, elles seront toujours là dans les établissements, dans des activités prioritaires, 200 millions de dollars dont 20 millions pour aider les régions devant compenser avec une augmentation rapide de leur population, dont la mienne, M. le Président, celle que je représente, la Montérégie. J'admets facilement que, dans ce domaine comme dans les autres, on ne peut jamais en faire assez.

Mais vous conviendrez certainement avec moi, M. le Président, qu'il s'agit d'un effort énorme et que nos concitoyennes et concitoyens, après des années de sacrifices, sont en droit de s'attendre à des résultats concrets. Et il faut bien comprendre que le réseau recevra sa juste part au moment de la préparation des prochains budgets.

À entendre certains commentaires de la part de l'opposition, on croirait pourtant que le gouvernement a annoncé en mars dernier la fin des réinvestissements, ce qui est faux, M. le Président. Le gouvernement du Parti québécois a ouvert en mars dernier un nouveau chapitre en matière de réinvestissements dans le domaine de la santé et des services sociaux.

D'ailleurs, je relisais les propos du chef de l'opposition lorsqu'il se trouvait en campagne électorale et il disait qu'il allait réduire l'effort budgétaire des établissements de santé et de services sociaux de 200 millions, M. le Président. Ça devient risible avec quelques mois et quelques années de distance, puisque, dans les faits, on aura réinvesti 4,4 milliards dans l'ensemble de ce réseau.

En fait, cette année, nous avons mis l'accent sur la réhabilitation financière du réseau parce que je crois que nous étions menacés de voir se rompre notre capacité à offrir des soins et des services de qualité. J'étais beaucoup plus inquiète, M. le Président, de ce qui se passait il y a quelques années que de ce qui se passe maintenant. Je suis convaincue par ailleurs qu'il fallait agir de la sorte si nous voulions nous donner pour maintenant et pour plus tard des assises assez solides pour accomplir tout ce qui reste à faire et qui sera fait.

La loi que l'Assemblée nationale est invitée à adopter, et qui s'appliquera dès cette année budgétaire 2000-2001, corrige d'abord la séquence d'attribution des ressources financières. Ainsi – et c'est là un premier volet – l'enveloppe budgétaire régionale sera dorénavant transmise aux différentes régies régionales très tôt dans l'année financière, alors que, par le passé, on a vu ces enveloppes officiellement dégagées et approuvées plutôt au début de l'année scolaire alors que, pour l'année financière des établissements, déjà quatre, cinq et six mois s'étaient passés.

Donc, très tôt dans l'année financière, les enveloppes budgétaires seront transmises aux différentes régions. Celles-ci auront quelques semaines pour faire connaître aux établissements – c'est-à-dire les régies – le budget qui est attribué à ceux-ci. Enfin, ces derniers devront aussi faire preuve de diligence pour produire et transmettre un budget en équilibre avant la mi-mai.

Évidemment, M. le Président, cette nouvelle façon de faire impose aussi des contraintes à mon propre ministère qui assumera ses propres responsabilités en la matière. Cette accélération du processus d'attribution et de répartition des budgets, ce n'est pas un caprice; en fait c'est un préalable absolument essentiel à une saine gestion. Comment demander aux directeurs généraux, aux directrices générales du réseau de gérer adéquatement un budget dont ils connaissent mal les véritables contours durant le premier quart ou, je le rappelais, la première moitié de l'année?

Le deuxième volet du projet de loi s'adresse aux établissements qui éprouveraient certaines difficultés à respecter leur budget. Ils auraient alors à travailler de concert avec leur régie régionale et avec le ministère pour déterminer les causes de ce déséquilibre financier et les correctifs à apporter de manière à ce que l'on puisse, le cas échéant, corriger la situation.

Il faut que les effets, les décisions budgétaires sur les services offerts à la population soient bien mesurés et partagés par toutes les parties en cause et à tous les niveaux, et, en ce sens, nous sommes très sensibles à la réalité que vivent nos concitoyens et nos concitoyennes.

(15 h 30)

Le troisième volet du projet de loi prévoit certains mécanismes de contrôle. Ces mécanismes sont gradués, mais je tiens cependant à être claire. Je ne privilégie surtout pas la manière forte. Cependant, M. le Président, en gestionnaire responsable, je ne saurais accepter que tout le réseau, qui a fait et devra encore faire de gros efforts de rigueur, en vienne à être pénalisé parce que nous n'aurions pas eu le courage de corriger quelques situations inacceptables. C'est clair, des déficits dans le domaine de la santé et des services sociaux, ce n'est plus acceptable, M. le Président.

Au cours de la prochaine année, un comité de travail sera chargé de revoir les modalités d'allocation des ressources aux établissements, notamment les centres hospitaliers, les centres locaux de services communautaires et les centres d'hébergement et de soins de longue durée, de manière à ce qu'il soit mieux tenu compte de la performance des établissements et de l'évolution du volume d'activité. De nature essentiellement technique, le présent projet de loi ne prétend évidemment pas régler tous les problèmes en matière de financement de la santé et des services sociaux. Les enjeux sont plus vastes et ils tiennent à des facteurs comme l'évolution démographique, les avancées technologiques, les priorités sociales, l'articulation entre le public et le privé, et sans oublier, M. le Président, les sempiternelles ingérences fédérales assorties bien sûr d'un désengagement financier qui se poursuit depuis 1982, soit depuis maintenant 18 ans. Et on se demande pourquoi on a dû faire des efforts aussi considérables pour retrouver notre équilibre budgétaire. Une partie, une grande partie de la réponse se trouve de l'autre côté de la rivière des Outaouais. Il faudra donc – et la démarche s'engagera prochainement – discuter publiquement et largement de l'avenir du réseau de la santé et des services sociaux.

Ce débat, il ne sera pas seulement l'occasion de confronter des points de vue, il aura aussi – et j'y tiens beaucoup, M. le Président – un rôle pédagogique, car je veux pouvoir permettre à la population de bien saisir la complexité des enjeux en cause. Les grands thèmes abordés à l'occasion de ce débat seront le caractère public du réseau, le financement des soins et des services ainsi que l'organisation de ces services dans une approche de gestion intégrée plutôt que parcellaire. Nous avons donc bien circonscrit les trois thèmes du débat, le caractère public, le financement et l'organisation, et je crois que nous parviendrons à enrichir sensiblement nos perspectives de décision et d'action pour les prochaines années.

Il ne s'agit pas bien sûr de reprendre le travail colossal qui a été accompli sous la présidence du Dr Jean Rochon, notre collègue actuel qui a présidé une commission qui nous a remis un ensemble de propositions nous permettant de transformer en profondeur le réseau de la santé et des services sociaux. Il ne s'agit donc pas de refaire cet exercice qui a été fait et qui nous a servis fort bien jusqu'à maintenant. Il s'agit cependant de nous poser maintenant, au moment où nous en sommes, les questions en ce qui concerne l'avenir de notre système sous d'autres angles, soit celui du financement, bien sûr, et celui de l'organisation des services. Et, même si ces travaux doivent être menés rondement – je l'ai dit à quelques reprises – cela ne doit surtout pas nous empêcher d'agir entre-temps, d'où l'importance du présent projet de loi qui fournira au réseau un cadre de référence qui lui évitera de retomber dans la solution de facilité que peut parfois représenter – je dis bien «parfois», je choisis et pèse bien mes mots – un déficit. Je suis d'ailleurs convaincue – je l'ai dit à plusieurs reprises, je le leur ai dit à eux-mêmes, je le redis ici aujourd'hui – que les gestionnaires du réseau, en personnes intelligentes, sensibles, efficaces, profiteront de l'occasion pour enrichir leur gestion et pour offrir à la population, qui leur fait confiance, des services encore meilleurs.

J'ai déjà expliqué à ces gestionnaires, qui ont compris le message, qu'ils devraient impérativement développer de nouveaux modèles pour assurer l'accessibilité et la continuité des soins, en établissement comme à domicile. En ce sens, ils savent déjà que, dans l'avenir, l'un des critères d'allocation des ressources sera leur capacité à travailler en réseau. Tel est l'un des secrets d'ailleurs d'une santé financière durable pour nos établissements, ne pas refaire ce que l'autre à côté a fait, l'examen qui est déjà disponible dans l'autre établissement.

M. le Président, si ce projet de loi comporte effectivement des contraintes, elles sont de celles, je crois, qui peuvent stimuler la créativité et non pas l'étouffer. Les personnes qui ont la charge des établissements de santé et de services sociaux sont des gestionnaires du plus haut niveau. Elles ont à coeur d'offrir des services de qualité et accessibles et elles y parviendront avec mon soutien et celui de mon ministère. À la faveur de la loi que l'Assemblée est invitée à adopter, elles ne devraient plus avoir le réflexe, alors que surviendra une difficulté – et il y en aura encore – de régler ces difficultés en faisant un déficit. Elles chercheront plutôt des moyens novateurs de collaborer, d'interagir, de travailler en partenaires soucieux d'une efficacité véritablement collective et non seulement individuelle. Le spectre des coupures de services qui a été brandi par les libéraux au cours du présent débat n'est donc qu'un épouvantail. La vérité, c'est que le projet de loi dont nous faisons l'étude propose au réseau un encadrement financier solide et stable, qui lui donnera les moyens de se consacrer sereinement à la tâche qui est la sienne, servir les Québécoises et les Québécois. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Le principe du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, est-il adopté?

M. Chagnon: Vote sur appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote nominal? M. le leader adjoint... M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, conformément à l'article 223, je vous demanderais de reporter le vote à demain, aux affaires courantes.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À votre demande et conformément au règlement, le vote est reporté à la période des affaires courantes demain, le 17 mai, à l'item Votes reportés.

Je voudrais vous informer de trois débats de fin de séance qui auront lieu à 18 heures aujourd'hui: le premier à la demande du député de Hull suite à une question qu'il a posée à la ministre de la Santé et des Services sociaux concernant le dossier de la pénurie d'infirmières à l'hôpital de Hull; également, une demande de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys suite à une question qu'elle a posée au ministre des Finances concernant une subvention de 300 millions à la compagnie CGI; et un dernier débat de fin de séance à la demande du député de Chomedey suite à une question qu'il a posée aujourd'hui au ministre de l'Énergie et des Ressources concernant les pouvoirs à la Régie de l'énergie. Donc, ces trois débats de fin de séance auront lieu après les affaires du jour, à 18 heures. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, M. le Président, je vous réfère maintenant à l'article 43 du feuilleton.


Projet de loi n° 6


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Article 43. Oui, ça va. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi n° 6, Loi modifiant la Loi sur la Société de la Place des Arts de Montréal et la Loi sur la Société du Grand Théâtre de Québec. Est-ce qu'il y a des interventions? Mme la ministre de la Culture et des Communications, je vous cède la parole.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: M. le Président, je suis très heureuse de faire part à cette Assemblée des travaux parlementaires entourant l'adoption du projet de loi n° 6 modifiant la Loi sur la Société de la Place des Arts de Montréal et la Loi sur la Société du Grand Théâtre de Québec. La commission de la culture a siégé le mardi 18 mai 1999 pour procéder à l'étude détaillée de ce projet de loi. Les échanges que nous avons eus à cette occasion ont été fort intéressants. Un seul amendement a été apporté afin d'y préciser que tous les organismes économiques et culturels à vocation régionale ainsi que ceux à vocation nationale soient consultés dans le processus de nomination des membres des comités d'administration de la Société de la Place des Arts de Montréal et de la Société du Grand Théâtre de Québec.

Alors, M. le Président, je suis convaincue que l'Assemblée nationale accordera un appui, que j'espère sans réserve, à ce projet de loi que je considère conforme, tout à fait conforme aux besoins et aux attentes de la population et de la communauté artistique. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Alors, je vais céder maintenant la parole à la porte-parole officielle de l'opposition en matière de culture et de communications. Mme la députée de Sauvé, je vous écoute.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, il faut bien situer les gens qui nous écoutent. Ils ont bien entendu la ministre de la Culture préciser que l'étude de ce projet de loi article par article s'est faite il y a pratiquement exactement un an. Donc, c'est un projet de loi assez technique qui a dormi assez longtemps au feuilleton de cette Chambre. C'est effectivement un projet de loi qui modifie la Loi sur la Société de la Place des Arts de Montréal et la Loi sur la Société du Grand Théâtre de Québec.

(15 h 40)

D'entrée de jeu, M. le Président, je pense qu'il faut reconnaître l'importance des institutions en cause, à savoir la Place des Arts de Montréal et le Grand Théâtre de Québec, d'autant plus que le récent conflit de travail à la Place des Arts, à Montréal, je pense, a vraiment mis en lumière le fait que c'est des institutions extrêmement importantes, qui offrent des services à plusieurs organismes artistiques ou compagnies résidentes et qui accueillent également plusieurs événements qui se sont retrouvés parfois compromis ou affaiblis par le récent conflit de travail. Mais donc, la Place des Arts et le Grand Théâtre de Québec, ce sont des organismes de diffusion, des organismes phares, si on peut dire, et c'est important qu'ils continuent dans leur mission tout en étant accessibles et en accueillant un plus grand nombre possible de citoyens et citoyennes du Québec.

Et je me permettrai ici de repréciser, pour les gens qui nous écoutent, le fait que ces deux institutions accueillent des organisations culturelles d'importance, comme bien sûr l'Orchestre symphonique de Montréal et l'Orchestre symphonique de Québec, l'Opéra de Montréal et l'Opéra de Québec, la Compagnie de théâtre Jean-Duceppe et également la compagnie Le Trident, à Québec. Inaugurée en 1963, la Place des Arts est aussi devenue un lieu de rassemblement extérieur, comme en font foi les activités tenues par le Festival de jazz de Montréal. Inauguré en 1971, le Grand Théâtre de Québec est largement reconnu pour son importance dans la communauté de la région de Québec. Relevant du ministère de la Culture et des Communications depuis 1982, je pense qu'il était effectivement approprié de revoir et de préciser les rôles et les mandats de ces institutions, quelque 20 ans plus tard.

Dans le projet de loi n° 6, l'étude article par article m'a permis de repréciser le fait que nous étions en accord avec la reconnaissance de ces institutions gouvernementales comme étant des entreprises de diffusion des arts de la scène, et également le fait qu'on a précisé dans leur mission le fait qu'elles devaient procurer des lieux de résidence à des compagnies artistiques d'importance. Nous avons aussi rappelé que nous étions en faveur du fait que, par ce projet de loi, la Place des Arts et le Grand Théâtre de Québec pourront dorénavant conserver leurs surplus budgétaires, ce qui, à notre sens, est une façon d'encourager l'efficacité et l'autonomie des administrateurs, autant les administrateurs rémunérés par la Corporation que bien sûr les membres du conseil d'administration.

Maintenant, il y a quand même des visions qui se sont, si on peut dire, opposées durant cette étude article par article du projet de loi n° 6.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Pourriez-vous lui demander... Je m'excuse, madame.

Mme Beauchamp: Je vous remercie, M. le Président. C'est une vision, si on peut dire, nationale par rapport à une vision plus régionale de ces institutions. Lors de l'étude article par article, la ministre de la Culture et des Communications a reconnu qu'elle souhaitait élargir son champ d'influence sur les orientations de ces institutions, entre autres en modifiant le processus de nomination des administrateurs. Nous reconnaissons que ces équipements sont des équipements nationaux, mais nous considérons qu'il est extrêmement important que des institutions comme la Place des Arts, à Montréal, ou le Grand Théâtre, à Québec, soient aussi des institutions bien enracinées et partenaires de leur milieu plus régional, et c'est pourquoi nous avons longuement discuté, lors de l'étude de ce projet de loi article par article, du processus de nomination des administrateurs.

En ce moment, l'actuel projet de loi prévoit qu'il y a trois sièges, sur les neuf composant chacun des conseils d'administration, qui sont remplis, si je peux dire, sur recommandation de la Communauté urbaine de Montréal et de la Communauté urbaine de Québec. La ministre procède à un changement législatif où on dit que, dorénavant, ces institutions – Communauté urbaine de Montréal, Communauté urbaine de Québec – seront consultées par la ministre, ce qui change de façon définitive le processus de nomination des administrateurs de ces institutions. Effectivement, il y a un amendement qui a été proposé et accepté par la ministre, qui précise tout de même le fait que, lorsque la ministre consultera des représentants de la Communauté urbaine de Montréal – il est précisé dans l'article «ainsi que d'autres organismes socioéconomiques et culturels» – ce sera fait non seulement à une échelle nationale, mais bien aussi régionale. Donc, on a effectivement introduit à cet article une notion de consulter des organismes socioéconomiques et culturels à vocation régionale et à vocation nationale. Et la ministre nous a confié, lors de l'étude article par article, qu'elle avait l'intention de faire une place au milieu régional, mais ça ne s'est pas reflété par un amendement apporté qui aurait vraiment confirmé cette intention ministérielle de faire en sorte que ces institutions soient bel et bien ancrées dans leur milieu de développement, si je peux dire, régional.

Permettez-moi de vous donner un exemple de cette importance que nous accordons au fait que ces institutions culturelles soient bien ancrées dans leur milieu régional. J'ai oeuvré pendant quelques années au développement de l'est de l'île de Montréal, et, bien que le Stade olympique, la Régie des installations olympiques et le Parc olympique soient définitivement des institutions à caractère non seulement national, mais même international, il a toujours été évident pour les résidents et résidentes, citoyens et citoyennes de l'est de l'île de Montréal, qu'il était important que ces équipements soient aussi en synergie avec les quartiers environnants de l'est de l'île de Montréal. Ce n'est pas inscrit dans la Loi de la Régie des installations olympiques, mais vous comprenez que, par l'introduction et la reconnaissance que le milieu régional...

Prenons, par exemple, ce qui est déjà prévu dans cette loi. Le fait que la Communauté urbaine de Montréal, la Communauté urbaine de Québec déléguaient, choisissaient elles-mêmes leurs représentants au conseil d'administration, c'était quand même une façon, je pense, efficace de faire en sorte que le milieu régional s'assure d'une saine synergie entre ces équipements qu'on dit nationaux et leur milieu environnant, et, définitivement, de ce côté-ci de la Chambre, nous aurions été beaucoup plus confortables avec ce projet de loi si l'intention que nous a confiée la ministre s'était vraiment reflétée dans les articles.

Maintenant, il y a un autre élément qui fait en sorte que nous ne sommes pas confortables avec le projet de loi n° 6, et c'est le troisième paragraphe de l'article 20. Ça aussi, ça a fait l'objet de longs débats lors de l'étude article par article. Ce troisième – et je vous le cite, M. le Président – élément de l'article 20.1 se lit comme suit: «Offrir des services particuliers aux organismes artistiques et aux producteurs et établir une politique de fonctionnement à cet égard.» Bien sûr, cet article-là s'inscrit dans l'article 20.1 qui précise ce que les sociétés en question peuvent faire pour la réalisation de ces projets. Selon nous, cet article est extrêmement large, et, malgré de longues minutes consacrées à la discussion sur quelles étaient vraiment les intentions de la ministre en confiant cette possibilité à la Place des Arts et au Grand Théâtre de Québec, j'avoue que le sujet est resté très, très vague.

Lorsqu'on a voulu faire décrire quelle était cette notion de «services particuliers» que la Place des Arts et le Grand Théâtre pouvaient offrir, on nous a parlé, par exemple, de la mise en place de lutrins sur la scène. Mais, plus récemment encore, lorsque j'ai eu des discussions informelles avec un administrateur d'une de ces résidences, on m'a confié qu'effectivement ça pouvait être des services de soutien à la promotion de spectacles ou des compagnies résidentes, par exemple. Donc, on s'aperçoit qu'on a ici une difficulté à définir ce qu'on veut vraiment entendre par «services particuliers».

On nous a dit aussi que c'était surtout pour les compagnies résidentes, mais on n'a pas voulu préciser par un amendement cette intention, parce que, ici, l'article dit bien que c'est «des services particuliers aux organismes artistiques et producteurs». On ne précise pas que c'est pour les compagnies résidentes à la Place des Arts ou au Grand Théâtre de Québec. On a dit: On souhaite laisser ça large. Mais la difficulté, M. le Président, c'est le fait que, en laissant ça très large, on ouvre peut-être la voie au fait que la Place des Arts et le Grand Théâtre de Québec pourront dorénavant offrir des services particuliers qui entreront en concurrence avec des entrepreneurs, des compagnies privées ou même sans but lucratif mais qui déjà offrent de tels services à la communauté artistique et aux organismes culturels, et je vous avoue que, même s'il est clair que, pour nous, nous sommes...

(15 h 50)

Et nous favorisons une certaine souplesse dans les projets de loi puis, bien sûr, une notion de partenariat. Ici, nous sommes devant une notion très, très vague, et il faut lire cet article dans le contexte où l'article 9 du même projet de loi permet à la Place des Arts et au Grand Théâtre de Québec de conserver leurs surplus budgétaires. Je vous avoue, M. le Président, que, si j'étais administratrice d'une de ces institutions, je me dirais: Bon, bien, maintenant que je peux conserver mes surplus budgétaires – et tant mieux, et nous souhaitons tous que ces surplus budgétaires soient consacrés au développement de projets artistiques et culturels – je serais bien tentée, comme administratrice, d'offrir des services, de plus en plus de services qui empiéteront peut-être et sûrement sur le champ d'action et le marché, si je peux dire, de compagnies privées déjà existantes. Je déplore le fait que nous ayons essuyé un refus pour tenter ensemble, la partie gouvernementale et l'opposition, de préciser cet article et d'atténuer ainsi les craintes que nous avons que la Place des Arts et le Grand Théâtre en viennent à être en concurrence directe avec le marché privé, pouvant aussi offrir des services.

M. le Président, ce paragraphe 3 sous l'article 20.1 est d'autant plus interrogeant que la situation a grandement évolué dans au moins une des institutions en cause. Nous savons que la Place des Arts a vécu, au cours de la dernière année, un conflit de travail, et un conflit de travail assez important pour que le conseil d'administration de la Place des Arts en vienne à dire que la Place des Arts n'offrait plus de services techniques aux compagnies ou organismes culturels qui louent leurs salles. Donc, il est assez étonnant – puis j'ai envie de dire un peu discordant – de voir le fait qu'on prend le temps de préciser dans un article du projet de loi que la Place des Arts et le Grand Théâtre pourront offrir des services particuliers non définis mais que, par ailleurs, au moins un des conseils d'administration de ces institutions a pris comme décision de ne plus offrir de services techniques que d'aucuns pourront considérer comme faisant partie habituellement des attentes des clients d'une institution comme une place des arts, un grand théâtre. Si on loue une salle dans ces institutions, qu'on vient des États-Unis, bien, je pense qu'on s'attend habituellement à ce que de tels services soient offerts.

Donc, il est assez discordant de prendre en considération le rapport de la commission plus d'un an après l'étude article par article et en sachant que des développements majeurs ont eu lieu dans la mission d'au moins une institution, la Place des Arts, la mission telle que définie par les administrateurs. Nous déplorons, M. le Président, que la ministre de la Culture et des Communications ait refusé d'apporter des amendements qui auraient pu vraiment éclaircir cette notion de «services particuliers».

M. le Président, en conclusion, je vous rappellerai que nous sommes favorables à une vision de développement des institutions comme la Place des Arts et le Grand Théâtre de Québec, une vision de développement qui les définit bel et bien comme étant des entreprises de diffusion ayant le droit de conserver leurs surplus budgétaires. Nous sommes très favorables au fait que, dans ce projet de loi, nous précisions que ces institutions doivent offrir des lieux de résidence à des compagnies majeures, le partenariat également qui est prévu avec ces compagnies résidentes et d'autres organismes culturels, mais nous considérons qu'il y a quand même des risques à donner notre accord au projet de loi tel que défini maintenant. Je vous ai expliqué que nous déplorons le fait que le milieu régional, entre autres les communautés urbaines, ne pourra plus désigner lui-même ses membres au conseil d'administration, et également le fait que nous ne définissions pas la notion des services qu'offriront dorénavant la Place des Arts et le Grand Théâtre de Québec. Autrement dit, en fait, je pense qu'il aurait été opportun que le gouvernement refasse ses devoirs autour du projet de loi n° 6 à la lumière des développements qui sont survenus dans la dernière année, entre autres à la Place des Arts. Il sera important qu'on connaisse la vraie position de la ministre de la Culture, du gouvernement. Est-ce que, par exemple, la Place des Arts peut, doit, ne doit pas offrir de services techniques?

Une autre incongruité qui s'est introduite, puisque ça a pris 12 mois pour étudier le rapport de la commission de la culture, c'est le fait qu'on mentionne, qu'on fasse référence dans ce projet de loi au fait qu'on va dorénavant consulter la Communauté urbaine de Montréal et la Communauté urbaine de Québec alors qu'on sait qu'il y a également un projet de loi déposé devant cette Chambre, le projet de loi n° 134, qui prévoit l'abolition de la Communauté urbaine de Montréal. Donc, vous comprendrez, M. le Président, qu'on a l'impression que peut-être on aurait pu prendre le temps de refaire ses devoirs. Tant qu'à revoir une loi constituant la Place des Arts et le Grand Théâtre de Québec, autant faire ses devoirs comme il faut. Donc, on regrette que ce projet de loi, à cette étape-ci, ne soit pas plus clair, et, malheureusement, nous ne pourrons voter en faveur du projet de loi n° 6. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Est-ce que vous avez une intervention à faire? Vous avez un droit de parole de cinq minutes.

Mme Maltais: Je serai brève, monsieur...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Je sais qu'on a attendu longtemps, M. le Président, mais je serai quand même très brève. C'est un projet de loi, je le rappelle, qui est un projet de loi d'ouverture, basé sur l'ouverture. C'est un projet de loi qui est une demande. Il répond exactement aux demandes des milieux culturels. C'est un projet de loi qui part d'une...

Il faut se rappeler du départ, de ce qu'était la Place des Arts qui avait été nommée, à l'époque, peut-être bien nommée, la «place des autres». Là, aujourd'hui, on a un projet de loi où la Place des Arts pourra conserver ses surplus pour aider la vitalité artistique de sa région, où le Grand Théâtre pourra conserver ses surplus pour aider à la vitalité artistique de sa communauté. Il y aura maintenant un processus de consultation beaucoup plus ouvert. Dieu du ciel! si je le sais, M. le Président! J'ai été présidente d'un conseil de la culture des régions de Québec–Chaudière-Appalaches, j'ai été présidente de deux grands organismes régionaux, je sais à quel point la consultation a été importante. Et, effectivement, suite aux demandes de l'opposition qui a demandé que ce soit écrit nommément, c'était mon intention, mais c'est écrit nommément maintenant dans le projet de loi. Ils seront consultés officiellement, c'est inscrit dans la loi. Et il y a une synergie avec les régions, il y a une synergie avec les communautés artistiques. Ce projet de loi est un projet de loi enfin qui complète l'ouverture de ces deux institutions. Merci, M. le Président.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la ministre. Le rapport de la commission de la culture portant sur le projet de loi n° 6, Loi modifiant la Loi sur la Société de la Place des Arts de Montréal et la Loi sur la Société du Grand Théâtre de Québec, est-il adopté? Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, je vous réfère maintenant, M. le Président, à l'article 11 du feuilleton.


Projet de loi n° 114


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 11, Mme la ministre de la Culture et des Communications propose l'adoption du principe du projet de loi n° 114, Loi modifiant la Loi sur le cinéma. Mme la ministre, je vous cède la parole.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, le projet de loi n° 114, ou Loi modifiant la Loi sur le cinéma, dont je propose aujourd'hui l'adoption du principe par l'Assemblée nationale vise à modifier le statut de la Régie du cinéma pour en faire un organisme autre que budgétaire. Ce projet de loi s'inscrit dans les suites du processus de modernisation du cadre de gestion gouvernementale amorcé par l'énoncé de politique publié en juin 1999 et intitulé Pour de meilleurs services aux citoyens – Un nouveau cadre de gestion pour la fonction publique . Alors, centrée sur les résultats à atteindre, cette politique vise, entre autres, à accroître la liberté d'action des gestionnaires publics dans l'utilisation des ressources et des moyens dont ils disposent tout en garantissant l'imputabilité.

Créée en 1983 en vertu de la Loi sur le cinéma, la Régie a pour mandat de classer les films mis en circulation au Québec et d'exercer un rôle de surveillance des segments de l'industrie du cinéma qui se situent en aval de la production, soit la distribution, l'exploitation de lieux de présentation de films en public et le commerce de détail des films. À la fin de l'année 1999, 172 entreprises de distribution, 822 exploitants de salles et près de 6 000 commerçants de détail de matériel vidéo étaient titulaires d'un permis délivré par la Régie.

Les objectifs qui guident son action sont la protection de certaines valeurs de la société québécoise, principalement auprès du jeune public, le contrôle des droits de distribution et la promotion du français à l'écran. Les fonctions attribuées à la Régie du cinéma en vertu de la loi sont le classement des films en tenant compte de l'âge des spectateurs auxquels ils s'adressent. Ce classement contribue au respect des valeurs de la société québécoise, plus précisément à protéger les jeunes spectateurs et à informer la population en général sur la nature des produits qui lui sont adressés. C'est le fameux classement général – 13 ans et plus – qu'on connaît très bien et que les gens consultent avant d'aller voir un film avec leurs enfants. Plus de 14 000 films ont été de la sorte classés en 1998-1999.

Autre fonction de la Régie, l'émission de divers permis en vue d'encadrer l'exercice de certaines activités de l'industrie du cinéma au Québec, soit le permis de distributeur, le permis d'exploitation de lieu de présentation de films en public et le permis de commerçant de détail de matériel vidéo. Le contrôle de la distribution des films est une autre fonction de la Régie, tout comme, enfin, la surveillance de l'application de la Loi sur le cinéma dans les salles de cinéma et les commerces de détail de matériel vidéo. La clientèle de la Régie du cinéma se départage ainsi en deux catégories: la population, qui est consommatrice de films, et les entreprises qui assurent une large part de leur diffusion.

(16 heures)

M. le Président, le projet de loi n° 114 vise à modifier le statut budgétaire de la Régie du cinéma tout en maintenant exactement les mandats et les fonctions qu'elle exerce. Actuellement, les crédits de la Régie sont votés annuellement par l'Assemblée nationale en vertu de l'élément 3 du programme 3 du ministère de la Culture et des Communications. Ces crédits sont cette année de l'ordre de 3,5 millions de dollars.

Au cours de l'exercice financier précédent, la Régie a versé au fonds consolidé du revenu du gouvernement plus de 8 millions de dollars perçus en droits divers. Le projet de loi n° 114 accorde désormais à la Régie du cinéma un statut lui permettant d'autofinancer ses obligations à même les revenus perçus en application de la loi. Ce nouveau statut lui attribue une souplesse et une marge de manoeuvre qui lui permettront, dans un cadre supervisé par le gouvernement, d'ajuster ses activités en fonction des variations du marché de l'industrie du cinéma.

Les mesures d'ordre budgétaire et financier proposées s'appuient sur des principes d'autofinancement et sont à l'effet que:

1° les droits et frais payés à la Régie et les autres sommes qu'elle perçoit en application de la loi font partie de ses revenus;

2° ces sommes ainsi reçues par la Régie doivent être affectées au paiement de ses obligations;

3° le surplus, s'il en est, est versé au fonds consolidé du revenu.

Le gouvernement conserve par ailleurs un droit de regard sur le financement de la Régie, puisqu'en vertu d'une disposition introduite par l'article 2 du projet de loi n° 114 il approuvera à chaque année ses prévisions budgétaires. De plus, les états financiers de la Régie seront transmis à la ministre à chaque année et déposés devant l'Assemblée nationale.

Par ailleurs, M. le Président, l'évolution accélérée du milieu dans lequel évolue la Régie peut l'appeler à moduler ses tarifs. Elle a le mandat et l'expertise pour bien circonscrire les effets de cette évolution sur les tarifs et, en conséquence, soumettre au gouvernement des propositions appropriées à l'égard des modifications nécessaires à y apporter.

Le projet de loi n° 114 attribue ainsi à la Régie des pouvoirs réglementaires qui étaient jusqu'alors dévolus au gouvernement en vertu de cette même Loi sur le cinéma. La Régie aura désormais le pouvoir de fixer, par règlement, les conditions d'obtention ou de renouvellement des permis. Elle aura aussi le pouvoir de fixer, par règlement, le montant des droits exigibles pour l'obtention d'un visa, d'un certificat de dépôt ou d'une attestation. L'exercice de ces pouvoirs reste cependant soumis à un droit de regard du gouvernement, puisque les règlements édictés par la Régie sont soumis à son approbation et qu'il peut les modifier, notamment par souci de cohérence administrative.

Le projet de loi n° 114 prévoit enfin que la Régie, à l'instar du CALQ et de la SODEC, transmettra à la ministre un plan de ses activités, lequel devra tenir compte des orientations et des objectifs que la ministre donnera à la Régie.

En conclusion, M. le Président, les changements que nous proposons d'apporter à la Loi sur le cinéma ne font pas seulement en sorte de modifier le statut budgétaire de la Régie, ils accroissent aussi son autonomie et augmentent son niveau d'imputabilité. Cette approche est conforme à la nouvelle philosophie de gestion du gouvernement du Québec, lequel met davantage l'accent sur les résultats à atteindre plutôt que sur la normalisation des gestes administratifs.

J'invite donc les membres de l'Assemblée à procéder à l'adoption du principe du projet de loi n° 114. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 114, Loi modifiant la Loi sur le cinéma. Je reconnais maintenant la porte-parole officielle de l'opposition en matière de culture et de communications et députée de Sauvé. Mme la députée, je vous écoute.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Effectivement, le projet de loi n° 114 s'intitule Loi modifiant la Loi sur le cinéma. De nouveau un projet de loi assez technique, puisqu'il modifie le statut de la Régie du cinéma. Effectivement, il modifie les dispositions financières qui régissent la Régie du cinéma, mais également il transfère du gouvernement à la Régie certains pouvoirs réglementaires. Ainsi, dorénavant, par règlement, c'est la Régie elle-même qui pourra fixer les conditions d'obtention et de renouvellement des permis, le montant des droits exigibles pour l'obtention d'un visa, pour une révision de classement ainsi que pour la délivrance d'un certificat de dépôt et d'une attestation.

Je pense qu'il est intéressant de resituer la Régie du cinéma dans son contexte historique. Ce n'est pas d'aujourd'hui que, au Québec, le cinéma fait l'objet d'une certaine surveillance gouvernementale. Du début du siècle jusqu'aux années cinquante, en fait, cette surveillance consistait essentiellement à censurer des oeuvres cinématographiques. Il faut attendre les années soixante pour que la censure, carrément, cède le pas à un processus de classement par catégories d'âge, que les gens connaissent bien, comme le soulignait la ministre de la Culture. En 1967, il y a eu la mise sur pied d'un bureau de surveillance, et c'est en 1983 qu'a été créée la Régie du cinéma telle que nous la connaissons aujourd'hui.

Maintenant, la Régie du cinéma, outre la fonction de classement des films selon des catégories d'âge qu'on associe traditionnellement comme mission première, bien, comme le soulignait la ministre, a aussi d'autres mandats importants qui sont un mandat de contrôle et de surveillance pour l'exploitation, la distribution et le commerce au détail des films au Québec. Effectivement, donc, la Régie classe les films mais également délivre des permis pour l'exercice de certaines activités dans l'industrie du cinéma. On pense au permis de distributeur, au permis d'exploitation permettant d'exploiter une salle de cinéma, un ciné-parc par exemple, mais aussi – et c'est important – au permis de commerçant au détail pour le matériel vidéo.

La Régie a aussi le mandat de contrôler la distribution des films, entre autres par l'émission de visas, mais aussi par un certificat de dépôt et une étiquette. Vous savez, c'est les étiquettes émises par la Régie mais qu'on retrouve sur chacun des exemplaires de film qu'on retrouve dans nos magasins vidéo. La Régie, également, surveille et contrôle l'application de la Loi sur le cinéma dans les salles de cinéma et les commerces de détail.

Comme la ministre de la Culture le soulignait, donc, le projet de loi n° 114 modifie les dispositions financières mais aussi le pouvoir réglementaire que peut exercer la Régie. D'entrée de jeu, je voudrais mentionner que l'opposition officielle est favorable à un projet de loi qui assure une plus grande autonomie à un organisme comme la Régie du cinéma, mais qui est également associée, cette autonomie grandissante, à un processus, nous l'espérons, d'allégement administratif, mais tout ça accompagné, bien sûr, d'un accroissement de l'imputabilité de la Régie devant les membres de cette Assemblée.

Lors de la prochaine étape de ce projet de loi, lors de l'étude article par article, il y aura tout de même certaines questions et dispositions qu'il faudra éclaircir, par exemple sur la nature exacte que prend la Régie par les différents articles de ce projet de loi. Sommes-nous devant une unité autonome de service, comme par exemple l'est Emploi-Québec, ou si nous sommes plus devant un organisme autonome de réglementation à financement extrabudgétaire – je sais que ça paraît un peu chinois, M. le Président, mais c'est les termes qu'on peut employer – où, là, c'est un peu plus comparable à la Commission des valeurs mobilières du Québec? Je pense qu'il faudra obtenir des réponses claires pour qu'on se comprenne bien, bien sûr.

Il y a aussi l'impact réel du fait qu'on transfère du gouvernement vers la Régie certains pouvoirs réglementaires. Je vais vous donner un exemple, M. le Président. Récemment, nous avons entendu les arguments d'organismes comme l'Association des propriétaires de cinémas et de ciné-parcs du Québec et également l'Association canadienne des distributeurs et exportateurs de films qui demandent une révision des catégories de classement pour reconnaître l'accompagnement d'un enfant par un adulte lorsqu'on veut aller au cinéma.

La réglementation actuelle – vous le savez très bien, vous êtes sûrement un assidu des cinémas, M. le Président – prévoit que le visionnement en salle des films classés 16 ans et 18 ans soit complètement interdit aux publics plus jeunes même si ceux-ci sont accompagnés d'un adulte consentant. Plusieurs croient que cette réglementation doit être revue pour plus reconnaître la responsabilité parentale dans la société québécoise et que la Régie ne se substitue pas à cette responsabilité parentale.

On dit que, actuellement, il y a de multiples façons pour un jeune d'avoir accès à des films classés 16 ans et 18 ans qui sont interdits en salle. On pense à la télévision payante, à la location de vidéocassettes, de DVD, où, même si officiellement vous devez avoir 18 ans, par exemple, pour louer un tel film dans un magasin vidéo tel qu'on le connaît, par la suite le visionnement de cette cassette n'est pas contrôlé, sauf par la responsabilité parentale qui doit être exercée. Nous pensons, bien sûr, au développement d'Internet qui permet d'ouvrir de plus en plus, sur les ordinateurs, le visionnement de bandes cinématographiques, à la difficulté pour les gestionnaires de salles aussi de contrôler réellement l'accès aux salles de visionnement, puisque maintenant le contrôle se fait plutôt à la porte d'entrée du cinéma et non pas à la porte de chaque salle.

Je vous donne les arguments de ces compagnies, donc, qui souhaitent, elles, qu'il y ait un débat pour revoir la question de la réglementation dans ce sens. Elles précisent d'ailleurs, en passant, que partout ailleurs au Canada les catégories de classement offrent aux jeunes de moins de 18 ans, s'ils sont accompagnés d'un adulte, la possibilité de visionner en salle des films classés pour des âges supérieurs.

(16 h 10)

Lorsque nous lisons le projet de loi n° 114, il n'est pas clair, M. le Président, si la Régie sera tout à fait autonome pour examiner cette question et procéder à la révision des catégories de classement et l'accès de jeunes à des catégories de classement, par exemple, 16 ans aux 18 ans. Nous avons bien lu le fait qu'on transfère des pouvoirs réglementaires à la Régie. Mais, par ailleurs, selon certaines réponses que nous avons obtenues à des questions, la réponse, c'est de dire: Non, la Régie ne pourrait pas procéder à une révision tel que le lui demandent certains de ses partenaires.

Donc, lors de l'étude de ce projet de loi article par article, nous devrons obtenir des réponses claires en prenant, sur la base d'un tel exemple qui est assez chaud, qu'est-ce qui va arriver dans les faits et quel sera le réel pouvoir de la Régie pour procéder à des révisions réglementaires.

D'ailleurs, M. le Président, j'aimerais vous citer l'extrait d'une lettre qu'a expédiée dernièrement la présidente de la Régie du cinéma, Mme Jeanne Blackburn, à la ministre de la Culture. C'est daté du 25 février dernier, où la présidente, elle-même, de la Régie du cinéma disait ceci, et je vous la cite:

«Finalement, la Régie estime qu'il y a lieu de se pencher sur le caractère restrictif ou indicatif des classements 16 ans et plus et 18 ans et plus. Des solutions intermédiaires pourraient être envisagées lors d'une éventuelle révision de la Loi sur le cinéma. Ainsi, les films de 16 ans et plus et 18 ans et plus pourraient être accessibles aux jeunes de 13 ans et plus, dans un premier cas, et de 16 ans et plus, dans le deuxième cas.»

Mais c'est donc pour vous dire que la présidente de la Régie du cinéma a, elle-même, l'attente que, lors de la révision de la Loi sur le cinéma, on réponde à de telles questions. Or, M. le Président, en ce moment, à la lumière des articles du projet de loi n° 114 devant nous, la réponse n'est pas très claire. Et je pense que, tout comme la présidente de la Régie du cinéma, nous croyons que nous devons profiter du fait que nous rouvrons la Loi sur le cinéma pour vraiment répondre à toutes ces questions et à toutes les attentes du milieu.

Il y a également d'autres dossiers qui ont été dans l'actualité au cours de la dernière année, et je pense, par exemple, à la question de la promotion du doublage des films par des industries et bien sûr, donc, par des artistes et artisans québécois. L'Union des artistes, l'année dernière, a fait des représentations extrêmement musclées et convaincantes pour dire qu'il fallait encourager les citoyens et citoyennes du Québec à visionner au cinéma mais aussi, surtout, dans les magasins vidéos, à louer et visionner des cassettes de films doublés par des Québécois et des Québécoises.

Je pense que nous devons profiter du fait qu'on rouvre la Loi sur le cinéma pour, aussi, obtenir des réponses sur le pouvoir réel qu'aura dorénavant la Régie pour répondre, par exemple, à une telle revendication non seulement du milieu des artistes... et, en fait, plus principalement cette revendication de l'Union des artistes endossée, on le sait, par plusieurs représentants du milieu culturel québécois.

Maintenant, M. le Président, je voudrais aborder – parce que, là, c'étaient surtout des commentaires sur l'impact réel qu'auront maintenant les nouveaux pouvoirs réglementaires ou, en fait, le transfert des pouvoirs réglementaires directement à la Régie – les questions plus budgétaires.

En fait, la ministre de la Culture a précisé, dans son allocution d'ouverture, qu'un tel organisme à qui on confie plus d'autonomie mais également dont on augmente l'imputabilité, eh bien, que c'était dans un cadre d'une attente d'autofinancement. Par exemple, on sait que, effectivement, la Commission des valeurs mobilières doit présenter un budget de revenus et de dépenses qui doit, dans l'attente, là, du gouvernement, s'équilibrer.

Or, la Régie du cinéma a, en ce moment, des surplus budgétaires assez considérables. Par exemple, pour l'année, et là je m'inspire du document déposé en cette Chambre, le rapport annuel 1998-1999 – c'est le dernier rapport annuel disponible, celui de 1999-2000 n'a pas encore été déposé – donc, à l'aide de ce document, nous pouvons voir que, pour l'année 1997-1998, la Régie a eu un surplus budgétaire de 3 886 000 $ et des poussières. Mais, comme vous voyez, c'est des chiffres considérables et également c'était de façon provisoire.

Mais on disait que, pour l'année 1998-1999, la Régie du cinéma aurait un surplus budgétaire de 4 763 817 $ et, selon nos informations, pour l'année en cours... même pas en cours, pour l'année s'étant terminée le 31 mars de l'an 2000, il est prévu, à la Régie, d'avoir un surplus budgétaire de plus de 5 millions de dollars. Donc, nous sommes loin de l'autofinancement.

C'est un organisme qui, clairement, retourne de l'argent – et un montant d'argent considérable – au gouvernement, à chaque année. Et plusieurs représentants du milieu de la culture, au Québec, se posent la question si la Régie du cinéma, en imposant des tarifs pour les visas et les autres services qu'elle offre, s'il n'y a pas là-dedans pour le gouvernement une façon détournée d'appliquer une forme de taxe pour le citoyen et la citoyenne, qu'il n'y a pas là une façon détournée d'avoir appliqué une taxe sur la culture. Parce que ces frais-là qu'on impose aux exploitants de salles, aux distributeurs de films, ces frais-là qui dégagent des surplus – on dit, pour cette année, de près de 5 millions de dollars – c'est évident, M. le Président, que ces surplus-là, en fait, se reflètent sur le coût du billet d'entrée lorsque vous allez au cinéma quotidiennement ou hebdomadairement.

Donc, je pense que nous devons profiter de l'ouverture de la Loi sur le cinéma par le projet de loi n° 114 pour aussi se questionner sur le mode de fonctionnement de la Régie. La ministre a précisé que la Régie pourrait dorénavant modifier ses tarifs elle-même, à la lumière de l'évolution du milieu du cinéma, mais il faudra voir quelle est la volonté gouvernementale quant à ces surplus budgétaires qui sont assez imposants, surtout lorsqu'on les compare aux moyens mis à la disposition des producteurs de films au Québec.

On sait que ces mêmes producteurs, il y a encore à peine 24 mois, revendiquaient le fait qu'on puisse, à même le billet d'entrée au cinéma, constituer un fonds – par exemple, collecter 0,25 $ par billet d'entrée au cinéma – de développement du long métrage, par exemple, au Québec. Lorsque nous voyons les surplus budgétaires importants qu'a la Régie du cinéma, il faut se poser les questions s'il n'y a pas là une révision nécessaire de quelle est la réelle volonté, au niveau gouvernemental, au niveau de la tarification de la Régie.

Pour terminer, M. le Président, je voudrais aussi mentionner que, lorsque nous procédons, comme ça, à une révision du statut d'un organisme d'État, il est, je pense, toujours important, comme parlementaires, comme représentants d'une population, qu'on se pose ultimement la question de la place du citoyen et des façons dont le citoyen pourra dorénavant se faire entendre.

Donc, lorsqu'on dit que la Régie aura des pouvoirs réglementaires accrus, puisqu'on lui transfère les pouvoirs réglementaires du gouvernement, je pense qu'on devra se poser la question: Comment le citoyen ou ce qu'on pourrait également appeler la société civile – ça peut être des organismes qui représentent des citoyens – pourront se faire entendre s'ils sont en désaccord avec une décision prise par la Régie? Bien sûr, d'autres diront que le plus souvent ce sont les distributeurs de films qui veulent remettre en question les décisions de la Régie.

Il faudra aussi parler du pouvoir de révision des décisions de la Régie, mais je suis plus principalement concernée également par la façon dont le citoyen et la citoyenne pourront se faire entendre auprès de la Régie. Je vais vous souligner un élément, par exemple. C'est que la Régie du cinéma, en ce moment, a trois membres. Si mes informations sont bonnes et mes lectures sont bonnes et à date, la Régie du cinéma a trois membres au niveau de ce qu'on pourrait appeler son conseil d'administration. Si je compare à la Commission des valeurs mobilières du Québec, on y retrouve sept membres.

Je pense qu'on sera en mesure, lors de l'étude article par article, de voir que, lorsqu'on accroît donc l'autonomie d'un organisme, lorsqu'on lui concède des pouvoirs réglementaires importants, une autonomie budgétaire également, je pense qu'il est de bon aloi de se poser la question si les citoyens et citoyennes sont suffisamment représentés, par exemple, au conseil d'administration mais également s'ils ont des mécanismes pour se faire entendre directement auprès de la Régie.

Enfin, vraiment pour terminer, je pense également que, lorsque nous sommes devant un organisme qui est maintenant extrabudgétaire, qui sera, si ce projet de loi suit bien son cours, extrabudgétaire, il est aussi important de se poser la question sur la place et le rôle des parlementaires en termes de surveillance de ce type d'organisme. Et je peux déjà annoncer à la ministre de la Culture et des Communications qu'il y aura, de notre côté, une proposition pour que les rapports financiers de la Régie soient dorénavant non seulement déposés, bien sûr, à la ministre qui les déposera en cette Chambre, mais également qu'ils soient étudiés par des parlementaires de chaque formation dans la commission parlementaire appropriée afin qu'effectivement les parlementaires conservent un droit de regard, d'interrogation et de questionnement, de part et d'autre, sur ces organismes extrabudgétaires.

(16 h 20)

Donc, M. le Président, vous aurez compris que nous sommes à ce moment-ci favorables au fait que nous accordions plus d'autonomie à la Régie du cinéma. Mais, bien sûr, nous réviserons cette position à la lumière des réponses aux questions que j'ai ici, je pense, de façon très transparente, fourni au gouvernement en espérant avoir des réponses lors de l'étude article par article. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée. Le principe du projet de loi n° 114, Loi modifiant la Loi sur le cinéma, est-il adopté? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...motion pour commission parlementaire.

M. Brassard: Comme il y a trois débats de fin de séance à 18 heures, alors c'est une suspension que je...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, mais avant, une motion.

M. Brassard: Ah! pardon. Excusez-moi!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ça va?

M. Brassard: Je vous entends bien maintenant, là.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je n'ai jamais fait votre fonction, mais il me semble que vous devriez faire ça.


Renvoi à la commission de la culture

M. Brassard: Ah! je trouve que c'est un conseil tout à fait pertinent, alors je vais le suivre et je vais faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de la culture pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, maintenant, comme il y a trois débats de fin de séance, nous suspendons jusqu'à 18 heures, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, à votre demande, je suspends les travaux de cette Assemblée jusqu'à 18 heures.

(Suspension de la séance à 16 h 21)

(Reprise à 18 h 3)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Débats de fin de séance


Subventions et prêts accordés à des entreprises multinationales

Alors, nous débutons les trois interpellations de ce soir. La première interpellation aura lieu entre Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys et M. le ministre député de Vimont. Le premier débat aura lieu sur une question qui a été posée au ministre des Finances concernant une subvention de 300 000 $ à la compagnie CGI. Alors, les règles de l'interpellation sont les suivantes: vous avez un temps de parole de cinq minutes, une réplique de cinq minutes, M. le ministre, et vous avez une réplique finale de deux minutes. Alors, Mme la députée.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Alors, merci, M. le Président. Non pas que je veuille avoir l'air hautaine à l'endroit du député de Vimont, mais je suis bien triste que le ministre des Finances n'ait pas cru bon d'être ici ce soir pour pouvoir répliquer, rétorquer à cette critique que j'ai faite aujourd'hui. Je pense que c'est inacceptable et je pense même que le ministre des Finances est parti à un cocktail. Je pense qu'il est en train encore d'aller célébrer quelque chose, d'annoncer quelque chose dans un cocktail quelque part, tout ça pendant que le Québec vit une situation loufoque. Pendant qu'on parle de doubler les primes d'assurance médicaments, pendant qu'on parle de couper les services de santé en imposant une loi antidéficit aux hôpitaux, voilà que le ministre des Finances distribue l'argent de nos impôts à coups de centaines de millions de dollars à des entreprises richissimes qui n'en ont pas besoin et qui font trop d'argent. Pensons à des entreprises comme Pepsi-Cola, Coca-Cola, Air Liquide, les entreprises Bell Canada. Vous conviendrez avez moi que c'est des entreprises qui se tirent assez bien d'affaire.

À l'image de sa soeur jumelle la Cité du multimédia, nous voilà maintenant avec la Cité du commerce électronique, une subvention au déménagement. Tout ce que vous devez faire, c'est changer d'adresse, et vous devez, à l'intérieur des cinq prochaines années, créer autant d'emplois que vous avez subventionné. C'est comme si le ministre des Finances ne savait pas que les emplois doublent ou presque dans ce secteur depuis les derniers cinq ans. Or, le ministre des Finances, lui, veut prendre le crédit de la création de ces emplois. Allons voir, M. le Président, si le commerce électronique, une industrie qui connaît une croissance fulgurante, avait besoin de lui.

Le ministre des Finances va sans doute nous répondre que, sans ces contributions, ces subventions, ces emplois seraient créés ailleurs plutôt qu'ici. Pourtant, notre voisin, l'Ontario, a créé 200 000 emplois l'an dernier, alors que le Québec n'en créait que 90 000. Deux fois plus, ce n'est pas négligeable. Et comment a réussi l'Ontario à créer 200 000 emplois? C'est en baissant les impôts, mais en baissant véritablement les impôts et en les baissant de façon significative. D'ailleurs, pas plus tard que, je pense, ça fait à peu près deux semaines, l'Ontario a de nouveau baissé ses impôts, et l'avantage qu'avaient les entreprises québécoises au niveau de la taxation va fondre comme du beurre dans la poêle.

Le ministre des Finances, lui, pense qu'il peut mieux choisir le type d'entreprise qui doit se développer: Oui au commerce électronique, non à l'industrie du meuble. Un «doorman» qui choisit qui va en profiter et qui ne va pas en profiter. Rappelons-nous que nous avons le championnat des impôts du Québec. Que répond le ministre des Finances à la Place Bonaventure qui, il y a quelques mois, a décidé d'investir 80 millions de dollars pour précisément accueillir des entreprises dans le commerce électronique, M. le Président? Les propriétaires de la Place Bonaventure ont six mois trop tôt décidé de poser un geste structurant, et aujourd'hui ils font face à une concurrence déloyale. Est-ce que le ministre des Finances veut qu'on déplace la Place Bonaventure à côté du Centre Molson? Pourquoi pas? Quand on a des idées de grandeur comme le ministre des Finances actuel, on peut s'imaginer qu'il est capable de penser avec cette situation: Déménageons la Place Bonaventure à la place du Centre Molson; après tout, on paie pour du déménagement.

Est-ce que le ministre des Finances ne voit pas les effets pervers de ces subventions injustes? Est-ce que le ministre des Finances ne voit pas le côté inéquitable de donner 300 millions de dollars à une seule entreprise pour déménager d'un coin de rue à l'autre? Pendant ce temps-là, les malades, eux, ils attendent. Ils n'attendent pas dans des locaux à 45 $ le pied carré mais dans les corridors d'hôpitaux. Ils attendent parce qu'ils ne sont pas capables d'avoir des services équitables, ils attendent parce que le ministre des Finances n'a pas cru bon d'inclure à temps l'achat d'accélérateurs linéaires pour traiter les cas de cancer.

Hier, j'ai reçu une lettre d'une femme dont le frère attendait depuis deux mois pour recevoir des services de santé. Or, qu'est-ce que je dois dire à cette personne-là? Écoutez, le ministre des Finances n'y a pas pensé; lui, il a pensé aux entreprises. Il voulait distribuer des millions de dollars, des centaines de millions de dollars à des entreprises qui faisaient des profits, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys et critique officielle de l'opposition en matière de finances. Je cède maintenant la parole au député de Vimont et ministre délégué à l'Autoroute de l'information et aux Services gouvernementaux. Alors, M. le ministre.


M. David Cliche

M. Cliche: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir, au pied levé, de remplacer mon collègue des Finances qui, je l'espère, est encore en train d'annoncer une bonne nouvelle, l'ouverture d'une entreprise, parce que, on peut se le dire, on peut en être fier, l'économie du Québec va comme jamais. Et, en termes de chômage, en termes de création d'emplois, en termes d'économie, ça va mieux que même durant les bonnes années dont on se souvient, le début des années soixante-dix, autour des Olympiques de Montréal. Donc, l'économie du Québec va bien. Et, si l'économie du Québec va bien, c'est, entre autres et notamment, grâce aux mesures qui ont été mises en place pour favoriser les nouvelles technologies de l'information.

M. le Président, je pourrais vous parler longtemps de l'autoroute de l'information qui est une utilisation des nouvelles technologies de l'information, mais je veux vous parler plus précisément des mesures qui ont été mises en place et qui ont permis de créer ces emplois qui amènent le Québec dans la modernité et dans la prospérité. On a beaucoup parlé des CDTI, des centres de développement des technologies de l'information, on a parlé de la Cité du multimédia et maintenant on parle de la Cité du commerce électronique. Bien, là-dessus, on bâtit sur du solide parce que la démonstration est faite sans l'ombre d'un doute que les décisions qui ont été prises dans le cadre des CDTI et de la Cité du multimédia, qui sont des décisions similaires à l'annonce qui a été faite il y a une semaine, ont porté fruit.

(18 h 10)

On se souviendra que ça avait été critiqué, au début, la Cité du multimédia, par nos amis d'en face, invoquant essentiellement les mêmes arguments: Pourquoi donner de l'aide à des entreprises qui peut-être créeraient ces mêmes emplois sans aide et qui peut-être n'auraient pas besoin de l'aide de l'État? Alors là je regrette de diverger avec eux parce que non seulement la Cité du multimédia est au-delà de tous les espoirs, mais, au moment où on se parle, alors que nous visions l'atteinte de 10 000 emplois sur 10 ans, ça fait seulement trois ans et on est rendu à 8 500 emplois engagés, créés par 90 entreprises.

La question fondamentale posée par ma collègue, c'est la suivante: Est-ce qu'il est nécessaire de donner ces subventions? La réponse à ça, c'est oui. J'ai moi-même eu le privilège et le plaisir de rencontrer les dirigeants d'Ubi Soft – parce qu'ils utilisaient les mêmes arguments lorsque Ubi Soft s'est installée à Montréal dans la Cité du multimédia. Qu'est-ce qu'ils nous ont dit? Qu'est-ce qu'ils m'ont dit? Je l'ai entendu de mes oreilles et je les ai vus de mes yeux, M. le Président. Ils nous ont dit que, lorsqu'ils avaient eu à décider entre Montréal et les autres endroits du monde où ils pouvaient investir, ils ont choisi Montréal pour toutes sortes de bonnes raisons, mais une des raisons qui ont fait pencher la balance, ce sont les crédits d'impôt, dans ce cas-là, qui vont jusqu'à 40 %, 15 000 $ par année par création d'emploi.

Eux voient l'économie de Montréal en termes de coins de rue – déménager une entreprise d'un coin de rue à un autre. Nous, nous avons une vision mondiale, ouverte sur le monde. Et le Québec n'est pas une compétition de coins de rue, M. le Président, entre des coins de rue à Montréal, le Québec est en compétition avec le monde. Et, lorsqu'on rencontre les représentants de ces entreprises, les gens des entreprises – nous avions à choisir entre Montréal, Hong-Kong, Singapour, la Silicone Valley – ils ont choisi Montréal. Et, quelques années plus tard, ce qu'ils nous disent, c'est que ce choix-là a été judicieux. J'ai même rencontré les gens de Walt Disney qui vont maintenant concentrer toute la création dans la Cité du multimédia à Montréal.

Alors, on refait la même chose, c'est une recette éprouvée, avec la Cité du commerce électronique, M. le Président, qui va passer de 111 milliards US en 1998 à, tenez-vous bien, 1,9 trillion – un trillion, c'est 1 000 milliards – de dollars en 2003. Nous allons construire la Cité du commerce électronique, CGI va s'y installer en nous garantissant non seulement qu'elle conserve les 2 400 emplois qu'elle a, mais elle s'engage à en créer 2 000 nouveaux, et nous visons à créer, sur un horizon de 10 ans, 20 000 emplois dans la Cité du commerce électronique à Montréal. Et, oui, nous allons investir 1,5 milliard de dollars sur ces 10 ans, mais, oui, comme nous le démontrons dans la Cité du multimédia, dans cinq ans, l'État du Québec sera remboursé par ses investissements, par ses aides directes, parce qu'on aura créé de l'emploi, qu'on aura créé une synergie dans l'économie, et c'est tout le Québec qui sera gagnant.

M. le Président, la grande différence entre nous et les libéraux, c'est le bilan. Le bilan, c'est que ça va bien au Québec. Ça va bien pourquoi? Parce qu'on est un gouvernement qui intervient au bon moment. Nous avons tout recentré l'économie du Québec dans des créneaux porteurs, dans les créneaux de la nouvelle technologie, dans les créneaux de la nouvelle économie. Le Québec s'en porte mieux. On fait dans la Cité du commerce électronique ce qu'on a fait avec les CDTI, les centres de la nouvelle économie et la Cité du multimédia, et c'est ça qui a remis le Québec au coeur de l'économie mondiale, et nous en sommes fiers. Ça va marcher, puis...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, M. le ministre. Malheureusement, votre temps de parole de cinq minutes est maintenant écoulé. Alors, merci, M. le ministre délégué à l'Autoroute de l'information et aux Services gouvernementaux. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, un temps de réplique de deux minutes.


Mme Monique Jérôme-Forget (réplique)

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, je vois que le député de Vimont s'est inspiré de son maître à penser, le ministre des Finances, il dit à peu près n'importe quoi, lui aussi. Et ce qu'il aime le plus au monde, probablement, c'est de se faire imaginer le maître d'oeuvre de tous ces «success stories» à Montréal. Trois cents millions à des entreprises qui n'en ont pas besoin pour déménager du monde, c'est une prime au déménagement. 300 millions, ça fait bien 100 000 $ par employé pour déménager d'un coin de rue à un autre.

Le député de Vimont nous dit qu'il n'a pas une vision de coins de rue. Il n'a que ça, une vision de coins de rue. Tout ce dont on parle, c'est de tel périmètre à tel périmètre, de telle rue à telle rue. D'ailleurs, c'est tellement faux, ce qu'il dit, M. le Président, qu'imaginez-vous donc que, dans la Cité du multimédia, 75 des 96 entreprises n'ont pas déménagé, ne sont pas encore dans la Cité du multimédia, puis elles fonctionnent. Il mentionne Ubi Soft. Je comprends Ubi Soft d'accepter la subvention, 25 000 $ par employé pour les salaires. 25 000 $. Pas 15 000 $, 25 000 $ plus une subvention de 7 millions de dollars. Bien, la différence, c'était de payer la totalité des salaires et des coûts et de dire que le gouvernement se lançait en business d'Ubi Soft.

De plus, le député mentionne combien Montréal va bien. J'ai des petites nouvelles à lui apprendre. S'il savait que Montréal, en termes de niveau de vie... Quand on additionne tous les États américains puis qu'on met toutes les provinces ensemble, sur 60, le Québec se situe 52e. Je veux bien que ça aille mieux, il faut que ça aille mieux, tout le monde est sur une comète, M. le Président. Ça fonctionne à bout de train en Amérique du Nord. Il fallait bien qu'on ait au moins la queue de la comète.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys et critique officielle de l'opposition en matière de finances. Ceci met fin à notre premier débat de fin de séance.


Pénurie de personnel infirmier en Outaouais

Nous allons maintenant procéder à notre second débat de fin de séance entre le député de Hull et Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vous rappelle nos règles à l'effet que vous avez un temps de parole de cinq minutes, M. le député de Hull. Mme la ministre a également un temps de parole de cinq minutes, et vous avez une dernière réplique de deux minutes. Alors, je suis prêt maintenant à vous entendre pour cinq minutes. M. le député.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, j'interviens ce soir parce qu'il faut rétablir certains faits. C'est absolument désolant de voir les réponses de la ministre à la période de questions aujourd'hui. Comme député de Hull durement touché par la question frontalière, je disais à la ministre: Écoutez, là, je vous tends la main, j'ai besoin de votre aide. Il faut régler la pénurie d'infirmières dans ma région, à mon hôpital. On a un exode massif des infirmières, on ne peut pas les attirer, et l'hôpital est en train de craquer de partout. La ministre se lève et elle me répond: M. le député ne connaît rien, il y a toutes sortes de mesures qui fonctionnent, tout va bien dans le meilleur des mondes. Le député de Hull est déconnecté. Eh bien, la déconnexion, ce n'est pas de ce côté-ci, c'est de l'autre côté.

M. le Président, un document d'aujourd'hui de la Régie régionale nous indique ceci: la situation est grave. Si je regarde pour les deux prochaines années, le manque d'infirmières se situe à 178 personnes pour les deux prochaines années et, si je regarde le nombre d'infirmières qui ont quitté ou qui vont quitter suite à une demande de permis pour l'Ontario pour les deux années, c'est-à-dire l'an passé et cette année, le chiffre... J'ai fait erreur, tantôt, j'ai mentionné 75. C'est faux, c'est 80. Il y a 80 infirmières qui ont quitté.

M. le Président à tout ça on doit rajouter un autre chiffre parce que la ministre a décidé de mettre des gens à la retraite. Comme si on avait trop d'infirmières, elle a mis 37 infirmières à la retraite de façon volontaire. Elle leur a dit: Prenez un bon «cash out» – dans notre jargon – et quittez le réseau parce qu'on n'a plus besoin de vous. Eh bien, ceux qui en ont besoin, des infirmières, c'est les malades, c'est les patients en Outaouais.

Et, vous savez, on parle de postes à combler, on a 100 postes à combler chez nous. Personne ne veut de ces emplois-là. Personne ne veut de ces emplois-là, M. le Président, parce que, c'est simple, le réseau craque, les gens sont brûlés, ils sont démotivés et ils sont sous-payés de 16 000 $ par rapport aux conditions en Ontario après huit ans de service. J'invite la ministre à me contredire. Je l'invite. Elle est férue de statistiques, alors je l'invite, là, à me contredire sur les chiffres, qu'après huit ans d'expérience en Ontario une infirmière ne gagne pas 16 000 $ de plus de l'autre côté. Alors, je l'invite. C'est les chiffres qu'on me donne et c'est normal de voir qu'il y a un exode vers l'autre côté.

Mais là, quand on parle des quatre conditions où on a travaillé à mettre des choses en place, parce que la ministre nous parlait de ça tantôt, je les connais bien, ces conditions-là, parce qu'on y a travaillé. Mais c'est insuffisant. C'est nettement insuffisant. On parle notamment des solutions proposées, des primes au recrutement, d'une meilleure formation, des primes de rétention puis d'une meilleure organisation du travail, et c'est insuffisant parce que ce sont des moyens locaux. Ce sont des moyens mis à la disposition des dirigeants d'hôpitaux et de régie régionale dans notre région. Et, avec toute la bonne volonté qu'ils ont, ils sont incapables de faire le travail parce qu'ils n'ont pas les outils, qu'ils n'ont pas les moyens pour réellement livrer la marchandise et faire de l'Outaouais une région propice où travailler notamment en soins infirmiers.

(18 h 20)

La ministre nous dit que ça a été mis de l'avant. Elle a raison, je m'entends avec elle là-dessus. Il y a des choses qui ont été mises de l'avant, mais on va s'entendre sur quelque chose d'autre, par contre: c'est nettement insuffisant. C'est nettement insuffisant quand on fait le tour des étages et qu'on voit le nombre insuffisant d'infirmières sur les étages, quand on voit les lits fermés, quand on voit les urgences débordées. Lorsqu'on voit les fermetures d'urgences, lorsqu'on voit des reports de chirurgies, on doit constater que c'est criant, le problème. Et savez-vous ce qui m'effraie, M. le Président? C'est que, grâce aux libéraux qui ont commencé mais aussi au Parti québécois qui a poursuivi, on avait réussi à rapatrier la clientèle, on avait réussi à rapatrier les gens qui allaient se faire soigner de l'autre côté, ce qui coûte une fortune au Québec. Eh bien, avec la situation qui prévaut, avec le fait que le directeur général de la Régie régionale dit: Les patients sont en danger, il est clair que c'est un message aux gens de dire: Allez de l'autre côté vous faire soigner, allez du côté ontarien, et il ne faut pas lancer ce message-là, il ne faut absolument pas lancer ce message-là.

Alors, M. le Président, moi, aujourd'hui, là, je veux lancer un message à la ministre. Je veux lui tendre la main et je veux lui demander une fois pour toutes de ne pas envoyer un émissaire, de ne pas envoyer un fonctionnaire. Il y a une crise qui se prépare pour la fin de semaine. Je lui demande de rencontrer les dirigeants de la Régie et du Centre hospitalier des Vallées de l'Outaouais afin de trouver une solution rapide, immédiate au problème criant de pénurie de médecins afin que la population de l'Outaouais soit bien desservie, soit bien desservie au Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Hull. Nous allons maintenant céder la parole à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Le député de Hull sait très bien que je connais particulièrement bien la région de l'Outaouais, Hull d'une façon toute particulière, évidemment, puisque que j'y ai travaillé dans les services sociaux, et c'est une région que j'ai beaucoup aimée et que j'ai tenté aussi de défendre à d'autres moments de ma vie professionnelle, puisque le premier ministre, dans un premier mandat et lorsque j'étais dans l'opposition, m'avait aussi confié la responsabilité de faire le lien entre ma formation politique, et notre gouvernement, et la région outaouaise.

Je suis heureuse aussi de constater que le député de Hull a corrigé un petit peu le tir par rapport à ses propos de cet après-midi, parce qu'il m'accusait, à ce moment-là, et affirmait que rien n'avait été fait et que nous n'avions rien proposé. Alors, je suis heureuse d'entendre qu'il a corrigé son propos à cet égard et que maintenant il admet que nous avons été très actifs dans ce dossier. Alors, je vais rappeler, M. le Président, les échanges qu'il y a eu avec les gens de la région. Je vais rappeler quelques éléments de la situation et dire à nouveau que toutes les mesures que nous avons proposées demeurent actuellement disponibles. Si nous sommes prêts à faire un petit effort pour nous entendre sur ce qui est là, demain matin nous solutionnerions une partie du problème, sachant que nous devons aussi faire des efforts en moyenne et longue période pour nous assurer que nous aurons un plus grand nombre d'infirmières formées pour offrir les services.

Par ailleurs, quant aux dernières demandes d'échanges avec notre ministère, je peux vous dire que j'ai demandé formellement à mon sous-ministre en titre d'avoir une rencontre avec le directeur régional de la Régie de la santé et des services sociaux de l'Outaouais, de telle sorte que, si d'autres avenues apparaissaient intéressantes à explorer, nous ne sommes pas fermés, d'aucune espèce de façon, à cet égard-là, d'ailleurs, comme nous avons travaillé jusqu'à maintenant.

Il y a eu d'abord trois rencontres entre le ministère, la Régie et le Centre hospitalier de la vallée de l'Outaouais. Il faut dire qu'à deux des rencontres le centre d'hébergement et de soins de longue durée de Hull était aussi présent. Il y a toujours eu des rencontres de représentants des syndicats locaux et régionaux de la FIIQ ou qui ont été vus dans la foulée de ces échanges, évidemment, soit pour connaître leur point de vue, dans un premier temps, et ensuite, dans les deux autres cas, pour faire connaître les résultats des travaux.

Il faut bien comprendre que, oui, j'admets qu'il y a une pénurie actuellement d'infirmières. Nous ne sommes pas les seuls dans cette situation; du côté de l'Ontario, c'est exactement les mêmes problèmes auxquels ils sont confrontés. Sauf que, oui, il faut bien constater que l'Ontario, il a été très agressif pour aller recruter des infirmières et a mis sur la table des sommes faramineuses que nous ne pouvons pas mettre en contrepartie à cet égard. Mais, cependant, nous avons fait preuve d'imagination et nous avons proposé une série de mesures. J'en rappelle quelques-unes. C'est un plan d'action, je pense qu'il est bien articulé. D'abord, accélérer la révision de l'organisation du travail pour dégager l'infirmière de certaines tâches, ajout d'autres catégories de personnel – on pense aux infirmières auxiliaires, à des commis, à des préposés aux bénéficiaires qui peuvent accompagner, à ce moment-là, les infirmières – du recrutement d'infirmières hors Québec à l'aide de primes aussi. Comme le fait l'Hôpital d'Ottawa, nous proposons une prime de 3 000 $ à des infirmières hors Québec, aux infirmières du Centre hospitalier de la vallée de l'Outaouais susceptibles de quitter pour l'Ontario, aux infirmières qui travaillent dans les unités stratégiques les plus à risque et qui voudraient quitter pour l'Ontario. Dans les unités spécialisées surtout, rehaussement de la formation à l'embauche pour être plus compétitif avec l'Ontario, permettre à l'infirmière d'être intégrée dans son milieu de travail – un budget de 200 000 $ voté par la Régie a été dégagé à cet effet – augmentation du bassin d'infirmières disposées à faire du temps supplémentaire en bonifiant les mesures déjà prises pour les inciter à le faire.

Oui, je vois que mon temps se termine. Ce que je veux signifier autant au député de Hull qu'à la population outaouaise, c'est que nous avons des mesures concrètes qui sont proposées. Nous les maintenons, nous sommes prêts à garder le dialogue entre les différentes parties actuellement au dossier pour nous assurer que la population outaouaise, hulloise et de l'ensemble de la région puisse avoir accès aux services de santé dans son hôpital, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le député de Hull, une réplique de deux minutes.


M. Roch Cholette (réplique)

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, cinq minutes, beaucoup de mots mais très peu d'action. La ministre nous a expliqué qu'elle connaissait bien l'Outaouais; je veux bien. Elle nous a expliqué qu'il y avait des mesures concrètes de mises de l'avant; peut-être, sauf qu'il n'y a aucun résultat, et ça, elle a oublié d'en parler. Elle n'a jamais dit, la ministre, là, que les mesures concrètes qui avaient été mises sur la table avaient réglé le problème des infirmières. Elle n'a pas dit que ça allait empêcher les infirmières de voter sur le fait qu'elles ne feraient plus de temps supplémentaire. Elle n'a pas abordé la question non plus du fait que demain le Conseil des services essentiels va statuer. Et, peu importe ce qu'il va statuer, savez-vous quoi? Bien, c'est les citoyens de Hull et de l'Outaouais qui sont perdants parce que, s'ils statuent en faveur de l'hôpital, c'est clair, il n'y a pas assez d'infirmières pour faire la job, et, s'ils statuent en fonction des infirmières, ça va juste venir décrier une situation qui existe déjà à l'effet qu'ils ne sont pas suffisamment nombreuses et nombreux sur les étages à l'hôpital pour donner des soins de qualité. Pas un mot de la ministre là-dessus.

On arrive à la fin de semaine. Est-ce qu'on va encore fermer l'urgence? Est-ce qu'on va encore fermer des lits? Est-ce qu'on va encore prendre la population en otage? Plutôt que de se cacher derrière des fonctionnaires et des rapports qu'elle lit sur le tas, est-ce qu'elle peut accepter une rencontre de toute urgence avec les intervenants locaux, venir à Hull rencontrer les gens de la Régie et du Centre hospitalier des Vallées de l'Outaouais? C'est ce que je lui demande, c'est ce que les gens lui demandent en Outaouais. Parce qu'il y a des mesures qui sont contre-productives, M. le Président. On nous dit qu'on va offrir des primes à celles qui sont susceptibles de quitter. Comprenez-vous que ça, ça a un effet pervers parce que, quand les infirmières voient ça, elles mettent toutes leur nom sur la liste pour quitter? Voyez-vous que, des mesures comme celle-là, le ministère ne réfléchit pas très longtemps avant d'aller de l'avant? Et là ça fait en sorte qu'on a boule de neige et que tous veulent partir pour bénéficier d'un 2 000 $ pour qu'ils soient capables de rester. Le ministère n'a pas réfléchi à ça avant de faire l'annonce et de prendre cette mesure-là.

Ce que je demande à la ministre, là, c'est qu'elle arrête de lire les rapports, qu'elle s'occupe du vrai monde et qu'elle vienne à Hull discuter avec les vrais gens pour soigner les gens chez nous. Merci, M. le Président.


Modification des pouvoirs de la Régie de l'énergie

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Hull. Ceci met fin à notre second débat de fin de séance, et nous allons maintenant procéder à notre troisième et dernier débat de fin de séance entre M. le député de Chomedey et M. le ministre des Ressources naturelles du Québec. Alors, M. le député de Chomedey et leader adjoint de l'opposition, vous avez un temps de parole de cinq minutes.

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président.

(18 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Je vous cède immédiatement la parole.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Un échange aussi costaud qu'inattendu avec mon vis-à-vis le leader du gouvernement cet après-midi m'a incité à mettre cette question majeure à l'index, et j'espère qu'avec un petit coup de pouce on va pouvoir rectifier le tir, parce que, effectivement, je me sentais un peu pointé du doigt par le leader du gouvernement cet après-midi qui, en vieux routier et parlementaire très expérimenté qu'il est, a décidé de trouver n'importe quel prétexte pour éviter de répondre à la question de ma collègue la députée de Bonaventure concernant le travail, la job de bras que lui et son gouvernement s'apprêtaient à faire sur la Régie de l'énergie, privant ainsi les consommateurs d'un outil indispensable pour les protéger dans une situation de monopole contre les visées d'Hydro-Québec. Vous savez, c'est un peu comme un naufragé qui se promène sur une plage et qui cherche n'importe quel objet qui brille pour attirer l'attention sur lui-même, un peu la stratégie de mon collègue le leader du gouvernement cet après-midi. Et je ne l'en blâme pas parce que c'est fort embarrassant pour lui et son gouvernement de répondre sur le fond de cette importante question.

Rappelons les faits, M. le Président. Dans le premier mandat du gouvernement du Parti québécois, celui qui a commencé en 1994, plus précisément en 1996, le gouvernement du Parti québécois, donnant suite à une volonté unanime exprimée par de nombreux groupes communautaires, a décidé d'aller de l'avant avec la création d'un organisme quasi judiciaire qui allait jouer un rôle important dans la fixation et la détermination de ce qui serait un prix juste. Vous savez, la ministre de la Santé parle souvent de la nécessité de vérifier si les organismes tels les hôpitaux sont en train de faire une job correcte, de mesurer leur performance. Il n'y a personne qui mesure la performance d'Hydro-Québec, sauf Hydro-Québec. Il y a une énorme bureaucratie, puis, comme toute bureaucratie qui se respecte, la bureaucratie se nourrit elle-même avant de faire quoi que ce soit d'autre.

Le ministre aurait dû défendre l'idée de promouvoir et de maintenir un organisme indépendant. Mais ce qu'il a fait, c'est de créer un eunuque qui est au service de ce triumvirat du pouvoir de son gouvernement, lui, son ministre des Finances, le premier ministre, qui, eux – et c'est le ministre des Finances qui l'a dit en autant de mots – voient Hydro-Québec comme étant une machine à imprimer des dollars. C'est le terme exact qui a été utilisé par le ministre des Finances. Oui, ils impriment des dollars, mais des dollars qui viennent d'où? Bien, des poches des payeurs de taxes, des poches des consommateurs d'hydroélectricité au Québec, M. le Président.

Mais on a déjà vu ce gouvernement agir de la sorte avec d'autres institutions. Lorsqu'il s'agissait de l'ombudsman, celui qu'on appelle le Protecteur du citoyen, Me Daniel Jacoby, ils n'ont pas eu d'hésitation à le pointer, lui aussi, et à dire: Étant donné que vous êtes intervenu d'une manière qu'on n'a pas appréciée dans un dossier, on ne veut pas reconduire votre mandat. Quand le Vérificateur général est intervenu – et ses collègues – sur d'importantes questions d'ordre public, le ministre des Finances l'a rabroué, le traitant de... Il a envoyé un de ses collègues pour commenter une situation particulière, un sous-fifre. Vous voyez un peu le respect pour les institutions. Commission d'accès à l'information, une situation identique lorsqu'ils lui ont refilé un dossier pour lequel elle n'avait aucune expérience, aucune formation et elle était absolument inapte à remplir le rôle. La Régie de l'énergie, donc, s'inscrit dans une longue série.

Mais, avant, les péquistes se contentaient seulement de noyauter, de contrôler, d'influencer, de subordonner à leur volonté ces organismes-là. On peut penser à l'Office des professions, on a vu l'exemple dernièrement, la ministre de la Justice, responsable de l'application des lois professionnelles, disant: Écoutez, moi, je n'ai vraiment pas regardé cette question des infirmières auxiliaires, j'ai laissé ça à ma collègue la ministre de la Santé et des Services sociaux, et l'Office des professions, qui est censé être un organisme autonome qui vise à surveiller les professions dans l'intérêt primordial de la protection du public, balayé d'un revers de la main. Les gnomes du ministère de la Santé et des Services sociaux avaient édicté quelque chose, on allait donner suite. C'est la ministre de la Justice qui a été obligée de faire cet aveu vraiment embarrassant ici, en Chambre, M. le Président.

Alors, voilà que la valse-hésitation se poursuit. Le ministre des Ressources naturelles est en train de changer le fond d'une loi qui a été votée par son collègue le ministre des Transports qui, lui, entre-temps, se démène avec une autre décision du même ministre, lorsque lui était ministre des Transports, de scraper les cours de conduite. Vous savez, tout le monde se lamente aujourd'hui. Ils disent comment c'est terrible qu'il y ait tant d'accidents de motos et d'accidents de la route. C'est la même personne qui a annulé, malgré notre position, les cours de conduite obligatoires. M. le Président, c'est de l'ingérence dans les institutions, c'est toujours à tort. Ils auraient dû garder la Régie de l'énergie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Chomedey. Nous allons maintenant céder la parole pour cinq minutes au leader du gouvernement et ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, d'abord, je constate que me voilà maintenant avec deux critiques en matière de ressources naturelles, la députée de Bonaventure et le député de Chomedey. Alors, je prends acte. Et je vais reprendre parce que, manifestement, le député de Chomedey n'a pas eu beaucoup de temps pour approfondir le dossier et la question, ça m'apparaît une évidence qui saute aux yeux. Il aurait dû laisser la députée de Bonaventure exercer son mandat et sa fonction.

Ceci étant dit, M. le Président, d'abord, je rappellerai, premièrement, d'entrée de jeu, que la déréglementation de la production n'est pas une nouveauté, ce n'est pas une surprise, c'était prévu dans la politique, page 21 exactement, que brandit constamment la députée de Bonaventure, pour laquelle elle éprouve une grande admiration. C'est dedans. Donc, on met en oeuvre exactement ce qu'on avait prévu il y a trois ans en matière de déréglementation de la production. Maintenant, c'est toujours le bon vieux discours de l'opposition. Quand on n'a pas grand-chose à dire, on prétend que tel ministre est assujetti soit au Conseil du trésor, soit au ministre des Finances, ou soit mis en tutelle par le premier ministre. Enfin, c'est la bonne vieille tactique habituelle tout simplement parce qu'on a peu de chose à dire. Moi, j'ai deux, trois choses à dire, je vais les répéter constamment.

D'abord, premièrement, au Québec, on a la chance et le privilège d'avoir les tarifs les plus bas en Amérique du Nord pour ce qui est de l'électricité. Ça fait partie du pacte social issu de l'élection de 1962 et de la nationalisation de l'électricité. Ce pacte social, tous les gouvernements se sont efforcés de le maintenir, de le sauvegarder et de le renforcer. C'est ce qu'on fait, maintenir des tarifs bas. Voilà l'objectif du gouvernement. Et les changements qu'on apporte à la loi ont justement pour fins de maintenir et de garantir que les Québécois vont continuer de bénéficier pour de nombreuses années de tarifs d'électricité bas et les plus bas en Amérique du Nord.

Deuxièmement, ça ne veut pas dire qu'il faut qu'Hydro-Québec s'enfonce dans la non-rentabilité. Depuis quelques années, Hydro-Québec s'est engagée sur la voie de la rentabilité, et, cette année, par exemple, elle a fait près de 1 milliard de bénéfice net, ce qui veut dire, donc, la moitié, 50 %, qui revient à l'État, dans les coffres de l'État, sous forme de dividendes. Il y en a qui se scandalisent de ça. Ça n'a rien de scandaleux, c'est très peu. C'est même insuffisant comme taux de rendement. C'est un taux de rendement de 6,8 %, même pas 7 % de taux de rendement sur l'avoir propre. C'est peu, ce n'est pas assez, c'est insuffisant. Il faut qu'Hydro-Québec atteigne des taux de rendement beaucoup plus raisonnables, de l'ordre de 10 % globalement, ce qui signifie, à ce moment-là, des bénéfices nets de 1,6 milliards. Quand on connaît le chiffre d'affaires, le volume d'affaires d'Hydro-Québec, 1,6 milliards, ça n'a rien d'indécent ni de scandaleux comme bénéfice net. C'est simplement une rentabilité tout à fait raisonnable et des retours à l'État, en 2004, à la fin du plan stratégique, de l'ordre de 800 millions de dividendes.

Je vois, de l'autre côté et dans certains milieux, certains se scandaliser de ces chiffres. Il n'y a rien de scandaleux. S'il y a 800 millions de dividendes qui tombent dans les coffres de l'État, bien, ça veut dire que le ministre des Finances n'a pas à taxer puis à imposer les contribuables québécois à la même hauteur. C'est ça que ça signifie. Ça veut donc dire moins de taxes et d'impôts parce que l'actionnaire unique d'Hydro-Québec, c'est le gouvernement, c'est-à-dire les millions de Québécois. Ce sont les Québécois qui sont les actionnaires d'Hydro-Québec et qui bénéficient de la rentabilité d'Hydro-Québec en même temps que des tarifs les plus bas en Amérique du Nord.

M. le Président, je pense que l'opposition aurait intérêt, y compris le député de Chomedey et sa collègue de Bonaventure, a bien prendre connaissance des éléments du projet de loi n° 116, des objectifs et des orientations que nous poursuivons via ce projet de loi n° 116. Et je pense que, si l'opposition veut défendre les intérêts des Québécois, la meilleure façon, c'est d'appuyer le gouvernement, d'appuyer le projet de loi n° 116.

(18 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Ressources naturelles. M. le député de Chomedey et leader adjoint de l'opposition officielle, votre temps de réplique de deux minutes.


M. Thomas J. Mulcair (réplique)

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Lorsque j'entends le ministre des Ressources naturelles se lamenter, comme ça lui arrive malheureusement souvent en Chambre, du sort que réserve Hydro-Québec aux citoyens, il avoue qu'il est impuissant devant Hydro-Québec. La création d'une régie de l'énergie était censée pallier à cette impuissance. Avoir recours à un organisme quasi judiciaire pour faire des analyses objectives basées sur de la science et pas du guessage, voilà ce qui était le but louable de la création de la Régie de l'énergie. Ça a fait l'objet de l'unanimité et d'un consensus social sans pareil.

Mais il y a quelque chose qui ne marche pas. La Régie de l'énergie, contrairement à toutes les autres institutions dans lesquelles le Parti québécois ne se gêne pas pour intervenir, voulait faire son travail correctement, voulait être objective, ne voulait pas travailler sous les diktats du gouvernement du Parti québécois, et c'est pour ça que, comme organisme, elle paie la peine capitale. Ils se font éliminer de tout le dossier principal pour lequel l'organisme a été créé. Le gouvernement du Parti québécois est toujours fidèle à son objectif primordial, une cause. Tout doit être balayé devant la cause. Avant, ils avaient au moins la décence de créer un organisme et de faire semblant que ça existait et que c'était autonome, mais ils le contrôlaient par en arrière. Maintenant, c'est le tais-toé, tais-toé systématique, que ce soit dans le domaine de la santé... Ici, Régie de l'énergie, vous ne dites pas ce qu'on veut entendre? On va éliminer des pans entiers de votre autonomie, de votre indépendance, de votre mandat, même si ce mandat, c'est de checker Hydro-Québec et de protéger les consommateurs. Ça, c'est quelque chose que le gouvernement du Parti québécois ne veut pas. C'est pour ça qu'ils sont en train de scraper l'essentiel de la Régie de l'énergie, et on le déplore, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Chomedey. Alors, ceci met fin à nos trois débats de fin de séance. J'ajourne donc nos travaux à mercredi, 17 mai, à 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 42)

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