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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Tuesday, October 24, 2000 - Vol. 36 N° 128

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de parlementaires de la Douma de l'État fédéré régional de Samara, en Russie

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Je ne vous dispense pas de vous recueillir quand même quelques instants, si je vous invite à vous asseoir.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ha, ha, ha! Alors, nous allons débuter nos travaux, et j'inviterais madame...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah oui! M. le leader adjoint. M. le leader adjoint du gouvernement, alors je vous cède la parole.

M. Boulerice: Je disais, M. le Président, que notre vie est un perpétuel recueillement. Donc, nous en étions dispensés ce matin.

Alors, je vous réfère à l'article 2 du feuilleton.

Affaires du jour

Débats sur les rapports de commissions

Prise en considération du rapport
de la commission qui a procédé à une
consultation générale sur le plantriennal
d'immigrationpourla période 2001-2003

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le leader adjoint du gouvernement. À l'article 2 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de la culture qui a tenu des auditions publiques dans le cadre d'une consultation générale sur le plan triennal d'immigration pour la période 2001-2003. Ce rapport, déposé le 17 octobre dernier, contient des recommandations. Je vous rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, j'ai pris en considération de tenir un débat restreint d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable.

À la suite d'une rencontre avec les leaders, je vous informe de la répartition du temps de parole établie pour la durée de ce débat restreint: cinq minutes sont allouées au député indépendant; les deux groupes parlementaires se partageront également le reste de la période consacrée à ce débat. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes pourra être utilisé par l'autre et le temps non utilisé par le député indépendant sera redistribué également entre les deux groupes. Et les interventions ne seront soumises à aucune limite. Enfin, je vous rappelle que, en vertu du deuxième alinéa de l'article 95, ce débat n'entraîne aucune décision de l'Assemblée.

Je suis maintenant prêt à céder la parole au premier intervenant, et ce sera M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député.

M. Léandre Dion

M. Dion: M. le Président, je suis très heureux de participer à ce débat sur le plan triennal d'immigration du Québec. Nous avons en effet eu la chance de participer à une session de consultation publique sur ce plan triennal qui nous a permis de prendre le pouls de ce que pense la population de l'ensemble du phénomène de l'immigration et de l'intégration des immigrants au Québec.

Évidemment, quand on écoute ce qui se dit dans la population au sujet de l'immigration, on entend toutes sortes de choses, et une chose qui ressort souvent, c'est le fait que les gens ne sont pas conscients à quel point les nouveaux arrivés au Québec, les immigrants, sont non pas une charge pour l'économie du Québec, mais un atout, à quel point ces gens-là contribuent à l'enrichissement collectif. Les études qui ont été faites à cet effet démontrent toutes que l'immigration constitue ou entraîne un enrichissement pour la société québécoise d'un point de vue économique, sans tenir compte des aspects culturels qui sont aussi des aspects très importants.

Il est bien entendu que chaque culture comporte sa façon de vivre, sa façon de regarder le monde, sa façon de faire face aux problèmes existentiels, M. le Président. Et donc, chaque culture a développé une façon de vivre ensemble qui est une richesse pour l'humanité. Alors, quand des immigrants arrivent ici, évidemment, ils arrivent avec une façon de voir, une façon d'être et une façon de parler, la plupart du temps, qui est différente de la nôtre, qui est différente mais non moins riche. Et, en venant se joindre à nous, ils contribuent à l'enrichissement collectif de notre culture.

Évidemment, le plan triennal d'immigration portait principalement sur des options différentes de nombre d'immigrants qu'il y aurait lieu d'accueillir dans les trois prochaines années au Québec. Cependant, je dois admettre que la plus grande partie des débats ont porté non pas sur le nombre d'immigrants, mais sur un certain nombre d'autres facteurs. On peut dire que 80 % à 90 % des échanges ont porté soit sur la régionalisation des immigrants, soit sur l'intégration des immigrants, soit sur la langue des immigrants, est-ce qu'on doit inviter davantage de francophones parmi les immigrants qui viennent ici ou davantage de gens d'autres origines.

Il y a eu aussi des discussions importantes sur l'intégration des professionnels immigrants. Vous savez que chaque ordre professionnel a comme fonction de protéger l'intérêt de la population. Et, dans ce sens, tous les ordres ont des exigences face aux immigrants qui arrivent et qui, tout en disposant d'un diplôme, que ce soit en droit, que ce soit en médecine, que ce soit en génie, que ce soit en architecture, dans un autre pays doivent ici satisfaire à un certain nombre de conditions pour être reconnus comme tels. Par exemple, il y a certaines professions qui sont très exigeantes, comme la médecine, où ça prend plusieurs, plusieurs années et des examens très complexes pour pouvoir être admis à pratiquer la médecine ici, alors que dans d'autres domaines, en génie par exemple, on est un peu moins exigeant.

n(10 h 10)n

Alors, tout ça a fait l'objet de discussions. Et, de façon générale, ce qui est ressorti, c'est qu'il y avait lieu de demander aux ordres professionnels de faire preuve d'un peu plus d'ouverture face aux gens qui arrivaient avec des diplômes ici, des diplômes supérieurs, et qui avaient déjà satisfait dans leur pays à des exigences importantes, avaient déjà pratiqué souvent leur métier plusieurs années.

Par exemple, j'ai vu arriver à Saint-Hyacinthe un médecin qui arrivait du Kosovo. Eh bien, ça faisait une quinzaine d'années qu'il pratiquait au Kosovo. C'est un médecin qui avait une compétence reconnue. Évidemment, en arrivant ici, il ne pouvait pas pratiquer du premier coup parce que les exigences sont à l'effet d'exiger plusieurs années, d'exiger des stages, des études complémentaires, et tout ça. Donc, on a émis une recommandation, la recommandation n° 5: Que le gouvernement incite les ordres professionnels à revoir leurs procédures de reconnaissance des statuts professionnels des nouveaux arrivants de manière à accélérer l'insertion de ceux-ci au marché de l'emploi.

C'est bien sûr que la médecine, c'est toujours la médecine, mais la médecine comporte beaucoup d'aspects. Vous connaissez sans doute, M. le Président, cette phrase célèbre que nous a apportée Averroès, au XIe siècle, concernant la pratique de la médecine, où ce grand médecin venu d'Orient disait ceci: En médecine, il y a d'abord la parole. Ensuite, il y a l'herbe. Et, ensuite, il y a le bistouri, si nécessaire. C'était la façon de parler à l'époque. La parole, c'est la psychologie. C'est sûr que, quand on est malade, qu'on ne va pas bien, souvent le contexte psychologique dans lequel on se trouve est un élément qui favorise ou qui retarde notre guérison. Donc, déjà au XIe siècle, le grand médecin Averroès avait découvert cela. Ensuite, il y a l'herbe, il y a les médicaments. Et, ensuite, il y a, s'il le faut, une intervention chirurgicale.

Tout ça pour démontrer que, quand on arrive d'un pays à un autre, la façon d'exprimer sa psychologie, sa façon d'être est différente. Il est normal qu'un certain nombre de mois soient nécessaires pour qu'on puisse pratiquer son art ici en bonne connaissance de cause. Cependant, on a émis l'opinion, à partir de tout ce qu'on a entendu des gens qui sont venus en commission, qu'il y avait lieu d'accélérer l'insertion. Ça ne prend pas nécessairement six ans de présence au Québec pour apprendre à pratiquer la médecine au Québec quand ça fait 20 ans qu'on pratique la médecine au Kosovo, ou en France, ou en Angleterre. Alors, il y a donc probablement lieu de raccourcir les délais pour permettre à ces gens-là de faire bénéficier à la société québécoise de ce qu'ils savent faire, donc de manière à accélérer l'insertion de ceux-ci au marché de l'emploi, et cela, dans le respect de la mission première des ordres professionnels, c'est-à-dire la protection du public.

Alors donc, les consultations ont porté sur plusieurs sujets. Entre autres, on a convenu, tout le monde est d'accord sur le fait que les deux facteurs principaux qui favorisent l'intégration des immigrants et qui leur permettent vraiment de s'adapter à la société du Québec et d'y vivre heureux sont, premièrement, lorsqu'ils arrivent ici, un milieu d'accueil qui les reçoit et, deuxièmement, un emploi dans lequel ils puissent s'épanouir. Donc, l'accueil, d'une part, le milieu sociologique et, d'autre part, la possibilité de gagner sa vie. Quand les gens viennent ici comme immigrants, c'est pour gagner leur vie, c'est pour améliorer leur sort, généralement. Donc, ils veulent gagner leur vie.

Alors, on a mis en place différents mécanismes au Québec pour accélérer la collaboration et faire en sorte que les immigrants s'intègrent bien au Québec. Mais, dans nos consultations, il a été question d'une façon particulière, et beaucoup de gens, je crois qu'on pourrait dire la majorité des gens qui sont venus devant la commission, ont insisté sur l'importance de régionaliser l'immigration. On sait que le ministère de l'Immigration a déjà tout un plan de régionalisation, et il a commencé il y a deux ans à permettre, à faire en sorte que les régions puissent accepter, accueillir de nouveaux immigrants.

Cependant, de façon générale, il a été établi que ce plan de régionalisation aurait peut-être besoin d'un souffle nouveau et d'une capacité de se développer plus rapidement. Par exemple, à Saint-Hyacinthe, on a en place un certain nombre d'organismes qui ont contribué, comme organismes communautaires, à l'accueil des immigrants. Je pense en particulier à la Maison de la famille. Quand on a reçu, il y a deux ans, un groupe de réfugiés ? c'étaient des immigrants, mais c'étaient des réfugiés kosovars ? la Maison de la famille a réuni tout un groupe de bénévoles, des couples, des familles, des gens célibataires, beaucoup de gens qui se sont mis ensemble pour accueillir les réfugiés kosovars dès leur arrivée au Québec, leur trouver un endroit, un logement qui soit à leur convenance, les aider à meubler ces logements-là, les aider à faire l'inscription de leurs enfants à l'école, s'inscrire eux-mêmes aux cours de français, les aider à trouver un emploi, savoir comment pouvoir avoir accès à des médecins, avoir accès à différents services qu'il y a dans la société. Donc, ça a été un travail formidable qui a été réalisé par la Maison de la famille.

D'un autre côté, une autre institution, Le Baluchon, la maison Le Baluchon, qui est une petite institution absolument merveilleuse qui s'occupe des adolescents qui sont en instance de rupture ou de difficulté avec leur famille, donc, la maison Le Baluchon les accueille et, pendant une journée, une semaine ou un mois, elle va les aider à faire cette transition qui va leur permettre de retourner rapidement dans leur famille et d'y être heureux. Alors, la maison Le Baluchon a accueilli beaucoup de jeunes Kosovars, les a aidés à développer des liens harmonieux avec les autres Québécois et à faire une chose qui semble peut-être de peu d'importance et qui cependant peut être très importante pour les jeunes, par exemple, organiser tout un système pour les aider à faire leurs devoirs d'école, parce que ces jeunes-là, quand ils arrivent à la maison, leurs parents ne connaissent pas la langue souvent, ne connaissent pas nos méthodes d'éducation, et c'est difficile pour les parents de les aider. Donc, la maison Le Baluchon les a aidés. Un tas de gestes ponctuels comme ça qui ont permis de les aider à les intégrer au milieu.

J'ai ici, devant moi, un document très intéressant, qui est un protocole d'entente signé entre le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration et M. Ghislain Bouchard, qui est le directeur du Club de recherche d'emploi de Saint-Hyacinthe, dans lequel évidemment le ministère apporte une contribution au Club de recherche d'emploi pour permettre à ce dernier d'accepter à Saint-Hyacinthe des immigrants. Dans ce cas-ci, il s'agit d'aller chercher dans les autres régions du Québec, à Montréal en particulier, des gens qui ont déjà une formation et qui ne savent pas qu'à Saint-Hyacinthe il y a des emplois pour cette formation-là.

Donc, entre autres engagements pour faire ce travail, l'organisme s'engage à réaliser les activités suivantes: faire la promotion de la région ciblée auprès des immigrants francophones inscrits à la session d'information socioprofessionnelle dispensée aux immigrants francophones et auprès d'autres organismes de la région; recruter des immigrants ayant un profil professionnel qui prend en compte le contexte local et les besoins de main-d'oeuvre. Alors, ce sont des gestes concrets qui ont été faits par le ministère de l'Immigration et les gens de chez nous pour amener plus d'immigrants dans les régions. Et on sait que les gens qui sont venus devant la commission ont insisté beaucoup pour que le plan de régionalisation soit enrichi, qu'il soit diversifié.

Et, entre autres, ils nous ont demandé de faire en sorte que le ministère de l'Immigration se dote des équipements, des instruments nécessaires pour mieux connaître les besoins en main-d'oeuvre des régions. Que ce soit à Matane, que ce soit à Rimouski, que ce soit à Chicoutimi, à Amos, ou à Saint-Hyacinthe, ou à Sherbrooke, ou à Trois-Rivières, qu'il y ait un instrument national, une grille d'analyse des besoins de main-d'oeuvre qui puisse s'appliquer partout au Québec et qui puisse permettre, au niveau national, de faire la somme de tous ces besoins-là de façon à ce que les agents d'immigration à l'étranger, qu'ils soient en Algérie, qu'ils soient en Europe Centrale, en Afrique, en Asie ou en Amérique latine, aient ces instruments et soient capables de dire aux gens en connaissance de cause: Eh bien, À Matane, au Québec, on a besoin de machinistes, on a besoin de gens comme vous qui avez ce profil professionnel, dont on a besoin à Matane ou à Saint-Hyacinthe.

Donc, on a demandé, beaucoup de gens ont demandé au ministère de l'Immigration d'améliorer son système de repérage des besoins des régions ou des besoins anticipés pour les prochaines années, de façon à ce que les agents d'immigration puissent mieux cibler les immigrants et leur offrir, au moment où ils décident de venir au Québec, des lieux d'insertion au Québec où ils trouveront un emploi, un milieu d'accueil.

n(10 h 20)n

Parce que, vous savez, M. le Président, on a insisté beaucoup sur ce fait aussi: quand l'immigrant arrive à Montréal, il descend de l'avion; s'il est immédiatement pris en charge par sa communauté ? parce qu'il y a des communautés de toutes les origines, à Montréal ? et qu'il demeure là un mois, deux mois, trois mois, quatre mois, cinq mois à apprendre le français avec les gens de son milieu, c'est magnifique. Sauf que, comment va-t-il faire après pour faire un autre saut et aller jusqu'à Saint-Hyacinthe, ou à Matane, ou à Rimouski, ou à Sherbrooke? Ça sera difficile. Déjà, l'immigration implique un déracinement; si, après quatre mois, on demande un deuxième déracinement, c'est peut-être trop exigeant.

Alors, il y a intérêt à faire en sorte que, dès que l'immigrant arrive à l'aéroport de Mirabel ou de Dorval, il y ait sur place un comité d'accueil, qui vienne de Saint-Hyacinthe, de Rimouski ou de Sherbrooke, qui le prenne en charge, qui puisse déjà l'amener dans la région, créer des liens d'amitié, créer des liens d'insertion dans le milieu... apprennent le français dans le milieu, de telle sorte qu'ils aient plus intérêt et que ce soit plus facile pour eux de s'intégrer aux différents milieux d'accueil.

Donc, on a la recommandation 7 qui a été faite par la commission: Que l'effort de régionalisation de l'immigration s'appuie sur une véritable politique de concertation entre le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration et les instances locales et régionales, de même que les associations communautaires et les municipalités dans chaque région, de telle sorte que l'insertion soit plus facile, que l'intégration soit plus facile aussi et que les immigrants, tout en contribuant comme ils le font à la richesse économique du milieu et en contribuant aussi à la richesse culturelle du Québec, se sentent heureux parmi nous, viennent enrichir notre collectivité et puissent avec nous faire ce grand voyage de la construction d'un Québec vraiment qui soit capable de prendre en charge sa destinée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne. Mme la députée.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. M. le Président, il me fait vraiment plaisir d'intervenir à l'étape du rapport des travaux de la commission de la culture, suite à la consultation publique qui a eu lieu en septembre dernier, en ce qui a trait aux différents scénarios qui ont été proposés par le gouvernement quant à la planification de l'immigration pour la période 2001-2003.

M. le Président, tout près d'une cinquantaine de groupes, d'individus, d'intervenants, de municipalités sont venus en commission parlementaire enrichir, je dois le dire, nos connaissances par leurs témoignages, par leur expérience, par leur expertise sur le terrain, mais surtout par leurs recommandations. Il y a eu, il va de soi, des groupes communautaires qui oeuvrent quant à l'intégration et l'accueil des nouveaux arrivants; il y a eu également des groupes spécialisés en employabilité, des centres de femmes, des chambres de commerce, le Barreau du Québec aussi, et tout le monde, d'une même voix, est venu plaider devant les membres de la commission pour conserver, au Québec, une plus grande ouverture face à l'enrichissement qu'est l'immigration sur le territoire québécois.

Je tiens aussi, au nom de mes collègues qui ont participé à la commission, le député d'Anjou, la députée de Sauvé et la députée de La Pinière, et au nom de l'opposition officielle et de son chef, à remercier très chaleureusement tous les intervenants qui sont venus à cette commission parlementaire enrichir... et aussi pour leur contribution tout à fait exceptionnelle et essentielle à nos travaux et aussi exceptionnelle et essentielle quant à la réflexion du gouvernement. On espère toujours, M. le Président, suite à une telle consultation, que le gouvernement en place n'a pas seulement entendu les groupes qui se sont présentés devant la commission, mais qu'ils ont été écoutés et qu'il prendra compte des recommandations et des observations que ces groupes ont faites aux membres de la commission.

M. le Président, une chose est claire, une chose est limpide, c'est que le consensus ? qui a été exprimé en 1990, lors de la mise en place, je dois le dire, par un gouvernement libéral, sous la gouverne de feu M. Robert Bourassa ? entourant notre politique d'intégration et d'immigration, eh bien, suite à cette consultation, on peut confirmer qu'il demeure toujours intact et inchangé.

Il en va de même, M. le Président, pour les quatre grands principes qui guident, au Québec, notre politique d'intégration et d'immigration, soit la dynamique démographique, la pérennité du fait français, le développement, la prospérité de notre économie et aussi notre ouverture sur le monde. Ce consensus-là a aussi été à l'unanimité lors de cette consultation.

M. le Président, vous me permettrez de reprendre brièvement certaines grandes préoccupations, constatations et recommandations qui émanent de nos deux semaines d'audiences publiques. Premièrement, quant aux orientations générales qui apparaissent dans le document ministériel et dans les scénarios proposés par le gouvernement, la majorité des groupes sont d'accord avec une hausse des niveaux d'immigration, sans toutefois, je l'admets, préciser exactement quel scénario les groupes privilégient. Certains groupes, tout comme l'opposition officielle d'ailleurs, lors du début de la commission, ont questionné le pourquoi et la pertinence du scénario 4 dans le document ministériel ? scénario 4, M. le Président, qui suggère une croissance de 68 %, ce qui veut dire une admission alentour de 55 000 nouveaux arrivants ? quand le texte qui nous est proposé dans le document ministériel rejette d'emblée cette option.

Je vais vous lire seulement le petit paragraphe de la page 23: Et plusieurs groupes ont demandé pourquoi finalement le gouvernement avait proposé le scénario 4, quand lui-même, dans le document, suggère aux lecteurs de rejeter ce scénario. Le document dit ceci, pour le scénario 4: «L'admission de volumes d'immigration de cette envergure ? soit 55 000 en 2003 ? provoquerait une mutation brusque de la dynamique démographique. Elle exigerait donc une révision en profondeur des consensus sociaux qui déterminent la capacité d'accueil et la réussite d'une intégration harmonieuse des nouveaux arrivants.» Alors, il était clair, M. le Président, qu'en écrivant ces mots le gouvernement n'était pas intéressé à aller de l'avant avec le scénario 4.

D'une même voix également, les groupes ont exprimé une grande, grande ouverture quant à l'apport économique, à l'apport social, à l'apport culturel de l'immigration au Québec. Mais, aussi, certains groupes ont dit au gouvernement qu'il était important que le gouvernement provoque l'évolution des valeurs et la compréhension de la population québécoise face à la contribution, face à l'enrichissement, face aux valeurs et aux atouts qu'apporte l'immigration au sein de la société québécoise. À plusieurs reprises, des groupes ont suggéré au gouvernement de faire des campagnes de sensibilisation auprès de la population.

Et, pour attirer davantage votre intérêt, M. le Président, je vais vous lire ce que le Conseil des relations interculturelles disait à l'égard de l'évolution des valeurs de la société québécoise, à la page 9 de son mémoire. On dit ceci, dans le mémoire du Conseil des relations interculturelles: «Toute perspective d'augmentation des niveaux d'immigration devrait aussi s'accompagner d'une sensibilisation de l'opinion publique sur la contribution de l'immigration au développement de la société québécoise. Ajoutons aussi que, peu importe la période ? on parle des sondages qui sont faits durant l'année quant à savoir comment les Québécois se sentent face à l'augmentation de la venue d'immigrants au Québec ? les sondages révèlent qu'une faible proportion de la population souhaite augmenter les niveaux, la plupart des gens considérant qu'il faut maintenir le nombre d'immigrants ou, selon une opinion plus minoritaire, les diminuer.» Le Conseil dit ceci: «Aussi ne faut-il pas négliger l'importance de bien informer les Québécois sur les caractéristiques des immigrants, sur leur apport, sur leur nécessité pour chaque milieu social de prendre en charge le soutien à leur intégration.» Et, M. le Président, je le souligne, plusieurs groupes ont demandé au gouvernement de faire un effort supplémentaire quant à une campagne de sensibilisation sur les atouts de l'immigration au Québec.

M. le Président, un autre point, l'orientation d'accroître le nombre d'immigrants francophones. Personne, en commission parlementaire, ne met en doute cette approche, mais certains groupes ont dit au gouvernement de ne pas se priver d'immigrants dont la venue serait bénéfique et avantageuse à tous les niveaux pour la société québécoise pour la seule raison qu'ils ne maîtrisent pas le français. On nous a donné des exemples assez flagrants où des gens ont été refusés et qui auraient été des atouts indispensables et très bienvenus sur le territoire québécois. On demande au gouvernement, dans cette approche-là, d'avoir peut-être un petit peu plus de souplesse.

n(10 h 30)n

M. le Président, le député qui vient tout juste de parler avant moi, de Saint-Hyacinthe, en a fait mention, il a été beaucoup, beaucoup question de la reconnaissance des diplômes à l'étranger. Et on a beaucoup parlé aussi, certains groupes qui travaillent avec les nouveaux arrivants qui ont des compétences professionnelles nous ont parlé de la rigidité, de la complexité de notre système afin d'obtenir la reconnaissance des diplômes et aussi des acquis à l'étranger. À plusieurs reprises, M. le Président, on nous a fait remarquer qu'à l'étranger, lorsque les gens vont dans les bureaux d'immigration, on fait miroiter au candidat qui possède des compétences professionnelles qu'une fois qu'il arrivera au Québec il pourra pratiquer, un, sa profession et aussi qu'il aura un niveau de vie enviable. Mais, malheureusement pour ces personnes-là qui ont des compétences professionnelles, la réalité est bien différente, et on nous a démontré que souvent ça provoque beaucoup de désillusion et de découragement et que certaines personnes, quand elles arrivent au Québec, sont confrontées à la longue période d'attente avant que leurs compétences soient reconnues et aussi sont confrontées à de la rigueur, de la rigidité, mais aussi à la complexité de notre système pour reconnaître les acquis à l'étranger. Alors, on a demandé à plusieurs reprises de peut-être revoir, de regarder de près cette situation.

Un point, M. le Président, qui a rallié tout le monde en commission parlementaire, c'est bien la reconnaissance du rôle essentiel et de la mission primordiale des organismes communautaires quant à la réussite du processus d'accueil et d'intégration des nouveaux arrivants.

Certains groupes ont exprimé leur déception et ont déploré le mutisme et le silence dans le document ministériel quant à la reconnaissance du rôle des organismes communautaires dans la réussite de l'intégration des immigrants, parce que, malheureusement, dans le document ministériel, on ne fait pas allusion, il n'y a même pas trois, quatre paragraphes pour remercier et exprimer la reconnaissance qu'on a envers les organismes communautaires qui font un travail tout à fait exceptionnel à cet égard-là. Puis ça, ça a été dit par plusieurs groupes, qu'ils étaient très déçus qu'on n'ait pas parlé de la reconnaissance et de l'apport incontournable des organismes communautaires quant à la réussite de l'intégration des nouveaux arrivants.

La grande, grande majorité, M. le Président, des groupes entendus, et je ne parle pas ici... Mettons de côté les groupes communautaires, mais les autres groupes, comme la ville de Québec, le maire de Montréal, le Barreau du Québec, le Conseil des relations interculturelles, ont tous déploré le fait qu'actuellement au Québec les organismes communautaires qui oeuvrent à l'intégration et à l'accueil des nouveaux arrivants sont présentement sous-financés et que ce sous-financement-là met en péril le succès de leurs interventions. Et il y a un voeu unanime qui a été exprimé en commission parlementaire, c'est que, si le gouvernement décide d'aller de l'avant en augmentant les niveaux d'immigration au Québec pour la période 2001-2003, il devra aussi, M. le Président, hausser le financement et les ressources accordées aux organismes communautaires. Parce que, s'il hausse les niveaux d'immigration et ne hausse pas le financement et les ressources, eh bien, on est voué peut-être à certains échecs dans certaines régions, certainement dans la ville de Montréal.

M. le Président, tous s'entendent pour dire que l'intégration des nouveaux arrivants passe par l'emploi. On a suggéré au gouvernement à quelques reprises d'identifier les besoins en matière d'emploi, particulièrement dans les régions. Et on a aussi dit au gouvernement ? une autre campagne de sensibilisation sur un autre sujet ? peut-être de faire une campagne de promotion, de sensibilisation auprès des employeurs, auprès des entrepreneurs afin de développer une plus grande ouverture quant à la venue de personnes immigrantes au sein de leur entreprise.

C'est vrai, le député de Saint-Hyacinthe a en fait mention, on a beaucoup parlé de la régionalisation de l'immigration. Plusieurs groupes ont remarqué le manque de volonté qui apparaît, si ce n'est pas dans les gestes, M. le Président, dans le document qui nous a été présenté, la volonté gouvernementale quant à vouloir faire beaucoup mieux au niveau de la régionalisation de l'immigration. Parce que les mots qui sont écrits dans le document, on doit se dire, ça a été fait par le gouvernement, alors c'est en quelque part une volonté politique, en tout cas gouvernementale. Et, en ce qui a trait à la régionalisation de l'immigration, plusieurs groupes ont dit au gouvernement: On ne comprend pas ce que vous dites dans le document parce que, nous, on a la volonté contraire de qu'est-ce qui est exprimé.

Et j'attire, M. le Président, votre attention à la page 18 du document ministériel quant à la régionalisation. Le gouvernement dit ceci: «Tout programme devant inciter les immigrants à s'installer en dehors des grands centres exige du temps, de l'énergie et des ressources. Force est de constater l'efficacité limitée des interventions en régionalisation. Les résultats demeureront toujours modestes et ne permettront pas de solutionner le problème démographique de dépeuplement de certaines régions ou de neutraliser la concentration d'immigration dans les grands centres urbains.» Vous comprendrez, M. le Président, que, quand on prend des mots comme «exige du temps, de l'énergie et des ressources», «résultats modestes» ? je reprends les mots qui ont été dits par les groupes en commission parlementaire ? c'est une attitude défaitiste et peu prometteuse de...

M. le ministre, je reprends ce qui a été dit en commission parlementaire. Plusieurs groupes ont parlé de la non-volonté du gouvernement à vouloir mettre tous les outils nécessaires pour la régionalisation. Et, en prenant de tels propos dans le document ministériel, on se demande vraiment si le gouvernement a vraiment la volonté de vouloir faire les efforts qu'il faut pour régionaliser l'immigration.

Si le gouvernement, par les propos tenus dans son document, ne semble pas vouloir démontrer tous les efforts nécessaires pour la régionalisation, je dois dire que qu'est-ce qu'on a entendu en commission parlementaire par les intervenants des régions, par les municipalités qui venaient des régions, M. le Président, eux ont vraiment toute la volonté et la détermination afin que soit réalisée cette régionalisation.

Les groupes, M. le Président... Oui, je voulais vous lire un petit bout. Attendez. Oh oui! Ce que les groupes nous ont dit en commission parlementaire, c'est que, oui, on veut dans nos régions avoir de l'immigration, mais le Conseil des relations interculturelles dit, lui, que, si on veut vraiment faire la régionalisation, il faut donner les outils nécessaires aux régions pour qu'elles puissent y arriver. Et, pour y arriver, il faut décentraliser, il faut décentraliser les pouvoirs, il faut décentraliser les ressources et il faut décentraliser les budgets vers les régions.

Et, M. le Président, je vais vous lire ce que le Conseil des relations interculturelles nous dit au niveau de la régionalisation, et un grand, grand nombre de groupes qui sont venus en commission ont tenu les mêmes propos: «Pour vraiment réaliser, pour arriver à une réussite de la régionalisation, la stratégie à mettre de l'avant passe prioritairement par la décentralisation des décisions et des budgets.» Et le Conseil dit également que, avant de dire: On vous envoie tous les outils nécessaires dans votre région, il faut commencer par le début, M. le Président, il faut faire une évaluation de la capacité d'accueil de la région. Et le Conseil nous dit que, sur une base régionale, ça n'a jamais été fait à date. Il n'y a jamais une évaluation sur une base régionale qui a été faite de la capacité d'accueil d'une région. Et le Conseil nous dit que, si le gouvernement décide de partir par le début et de faire une évaluation de base des régions pour savoir si les régions ont les capacités, autant au niveau de la capacité d'accueil et de perspectives d'emploi... C'est bien beau d'envoyer les gens dans les régions, mais, si, déjà, il n'y a pas d'emplois pour les gens qui sont là, vous allez créer un autre problème pour les nouveaux arrivants qui vont arriver pour s'établir dans cette région-là.

Alors, il faut faire le portrait régional, il faut regarder la capacité d'accueil, regarder les perspectives d'emploi, la situation économique en cours, celle du marché du travail, l'ouverture sur le monde, les besoins démographiques et aussi, et on revient à la campagne de sensibilisation sur l'évolution des valeurs de la population québécoise, l'attitude de la population à recevoir et à accepter les nouveaux arrivants dans sa région. On dit aussi que, une fois que cette évaluation-là est faite et que tous les outils sont là pour recevoir les gens dans leur région, il faut à ce moment-là... c'est là qu'on greffe, M. le Président, la décentralisation des décisions, des pouvoirs et des ressources vers les régions.

n(10 h 40)n

M. le Président, si, par les propos tenus dans ce document, le gouvernement semble désabusé face à la possibilité de réussir la régionalisation de l'immigration, eh bien, par les interventions en commission parlementaire, par le dynamisme et la détermination des gens des régions, je pense que, si le gouvernement accepte d'aller de l'avant et de leur donner les outils nécessaires pour qu'ils puissent faire une bonne régionalisation de l'immigration, moi, je suis convaincue que ça va fonctionner et que le vouloir collectif régional est bien présent dans les régions du Québec.

Certains groupes communautaires, M. le Président, et, je dois préciser, le maire de Montréal et aussi des centres de femmes ont rappelé avec justesse la situation préoccupante que vivent les femmes immigrantes, particulièrement dans la grande région de Montréal. Il est clair et il est urgent que le gouvernement mette en place des mesures de soutien, des mesures d'aide directe afin d'améliorer la condition de vie de ces femmes, condition qu'elles vivent malheureusement quotidiennement. Elles vivent, ces femmes-là, de l'isolement, elles vivent de la détresse, elles vivent de l'instabilité et plus souvent qu'à leur tour elles ont la problématique de la précarité d'emploi. Alors, M. le Président, j'espère que la Marche mondiale des femmes arrivera à sensibiliser davantage le gouvernement à cet égard, car il y a plusieurs revendications, dans le document de la Marche des femmes, qui demandent au gouvernement un effort supplémentaire quant à la condition de vie des femmes immigrantes au Québec.

Alors, c'est les grandes préoccupations, les observations que j'ai retenues de cette commission parlementaire, de ces travaux qui se sont échelonnés sur tout près de deux semaines, en septembre dernier. Alors, nous, de l'opposition officielle, on attend avec impatience les décisions qui seront prises par le gouvernement quant à la planification de l'immigration pour la période 2001-2003. Et, je le redis, on espère que les gestes qui seront posés par le gouvernement répondront aux recommandations, aux observations et aux attentes qui ont été exprimées par les groupes communautaires et tous les intervenants et les individus qui ont eu l'amabilité de venir s'exprimer et nous enrichir de leurs témoignages et de leur expertise. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de... Excusez, j'ai un blanc de mémoire sur votre comté, M. le député.

Des voix: D'Iberville.

Le Vice-Président (M. Brouillet): D'Iberville. C'est très bien. M. le député d'Iberville, je vous cède la parole.

M. Jean-Paul Bergeron

M. Bergeron: M. le Président et député de Chauveau...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bergeron: ...il m'est agréable aujourd'hui de prendre la parole par rapport au mandat qui a été conféré à la commission de la culture au sujet de l'étude du plan d'immigration 2001-2003 du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Je voudrais, d'entrée de jeu, M. le Président, remercier toutes les personnes ou les organismes qui ont participé à ces consultations qui ont eu lieu entre le 6 et le 14 septembre dernier. Un total de 47 mémoires ont été déposés, ce qui illustre bien l'importance du sujet, ce qui illustre bien que la question de l'immigration est capitale dans le développement du Québec en cette veille de troisième millénaire.

Je voudrais profiter de la tribune qui m'est offerte pour souligner le travail exemplaire de l'ex-député de Mercier et ministre, Robert Perreault, qui avait lancé cette vaste consultation au printemps dernier. C'est en quelque sorte sa dernière réalisation dont moi et les collègues de la commission de la culture allons vous dévoiler quelques recommandations, non sans fierté, M. le Président. Mon intervention portera sur trois points majeurs: l'accueil des immigrants, leur intégration au marché du travail ainsi que la francisation, le dernier mais non le moindre des trois points abordés.

Tout le monde en cette enceinte conviendra pour dire que l'immigration est un sujet important, un sujet déterminant, un sujet majeur dans l'avenir du Québec, pour l'avenir du Québec. J'y faisais référence la semaine dernière alors que j'ai commenté le rapport de la mise en oeuvre de la Loi sur le Conseil des aînés. Comme société, nous faisons face à un sérieux problème de dénatalité au Québec depuis plusieurs années, et la situation deviendra difficile. On fait remarquer, et c'est le Bureau de la statistique du Québec qui le note, qu'en 2005-2006, si rien n'est fait, et pour reprendre l'adage maintenant classique, si la tendance se maintient, il y aura inversion du rapport de dépendance démographique entre les générations. Nous aurons une population qui, chez les plus de 65 ans, dépassera en nombre ceux de 0 à 15 ans. Voilà pourquoi le gouvernement doit agir immédiatement, car cette situation risque d'entraîner des coûts énormes, notamment pour les dépenses de santé et de services sociaux.

Mais je reviens sur l'accueil des immigrants. Nous l'avons vu pendant les travaux de la commission de la culture, il y a beaucoup des initiatives québécoises qui ont trait à l'accueil des immigrants, beaucoup d'initiatives qu'il faut saluer, des initiatives originales, des initiatives généreuses. Par exemple, à Montréal, là où se concentre plus de 80 % de l'immigration, le guichet d'accueil est un service sur mesure pour les entreprises et les travailleurs stratégiques. Le guichet d'accueil offre à ces travailleurs et aux entreprises qui cherchent à les recruter une gamme de services personnalisés, facilitant leur sélection et leur établissement au Québec. On entend par «travailleurs stratégiques» les personnes dont la formation ou l'expertise spécialisée fait qu'elles sont très recherchées dans les milieux industriels, scientifiques et d'affaires internationales. Le Québec fait donc des efforts particuliers pour les inciter à faire carrière chez lui et pour faciliter leur intégration et celle de leur famille.

Sur le site Internet du ministère, nous trouvons une foule de renseignements utiles, de renseignements pertinents à l'accueil des immigrants. Prenons l'exemple de la trousse du nouvel arrivant. Également, Montréal, Saint-Léonard, Saint-Lambert, Laval, Pointe-Claire, Sherbrooke, Trois-Rivières, Hull, Québec, Jonquière ont des carrefours d'intégration. Mais, cependant, il n'y a rien dans les autres régions du Québec, mon collègue député de Saint-Hyacinthe a en parlé tantôt, et la régionalisation est un défi important qui nous est posé et qui est posé à l'ensemble de la société québécoise. L'accueil des immigrants se fait peu en région. Lorsqu'il se fait, il se fait en partenariat avec des organismes communautaires. Cependant, ce partenariat pourrait être accru avec l'implication des CLD et des CLE ainsi que des chambres de commerce locales.

Le Centre des femmes de Montréal a fait une intervention remarquée, une intervention bien sentie, une intervention sincère aux audiences sur le fait que le ministère des Relations avec les citoyens devrait avoir une préoccupation particulière à l'intention des femmes immigrantes pour une meilleure intégration. Il faut le rappeler, souvent la femme immigrante arrive ici peu scolarisée, ne connaissant peu ou pas la langue de la majorité. Elle doit s'occuper d'élever les enfants et, de ce fait, peut difficilement trouver un travail.

n(10 h 50)n

Une constante est demeurée lors des travaux de la commission: le financement. Le gouvernement québécois devra revoir le niveau des organismes qui s'occupent spécifiquement de la clientèle immigrante. J'aimerais ajouter une chose importante, M. le Président, c'est que l'accueil des immigrantes et des immigrants, c'est l'affaire de tout le monde. Tous sont concernés là-dedans. Nous devons, comme société, organiser des activités pour mieux accueillir nos immigrants, pour mieux les intégrer, pour intégrer ceux et celles qui composent et composeront la mosaïque culturelle du Québec de demain, organiser, par exemple, des dîners regroupant de nouveaux arrivants, demander aux municipalités de préparer un petit document d'intégration spécifique pour les immigrants.

J'aimerais vous mentionner, lors des audiences, ce qui a été dit par le Conseil des relations interculturelles, et je cite: «À cette méconnaissance de la situation au Québec s'ajoute aussi la reconnaissance des diplômes ou des expériences acquises à l'étranger. Des efforts accrus seraient nécessaires pour adapter les formations que l'on juge non adéquates. On déplore aussi le manque d'adaptation des institutions québécoises à la diversité. Les entreprises sont très peu sensibilisées au bassin existant de main-d'oeuvre qualifiée. Les grandes entreprises, qui semblent plus conscientes de la diversité, embauchent relativement peu encore alors que les petites et moyennes entreprises s'avèrent craintives devant cette main-d'oeuvre potentielle.» Vous remarquerez, M. le Président, que nous avons bien du travail à faire.

De plus, l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration, lors de la présentation de son mémoire, a dit des choses étonnantes, des choses très révélatrices. «La politique linguistique a connu un certain succès au Québec quant à la langue de travail des immigrants et quant à l'éducation française de leurs enfants, les enfants des immigrants. Il y a donc lieu, à notre point de vue, d'être plus souple en matière de langue et d'accorder plus de points à la connaissance de l'anglais.»

Et ils continuent, ces gens-là: «Nous suggérons également la mise sur pied d'un programme de parrainage civique avec l'aide des municipalités, des chambres de commerce, afin d'attirer des candidats vers les régions ? ce dont parlait mon collègue député de Saint-Hyacinthe et ce dont la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne a fait mention précédemment. Cela répondrait en plus aux besoins de main-d'oeuvre qui sont manifestés dans les régions, tel que nous l'indique récemment la création de foires d'emplois dans différentes régions afin d'attirer des travailleurs d'autres régions du Québec dans une région donnée.»

Quand on parle d'immigration, quand on parle d'intégration, quand on parle de formation, le Centre justice et foi, lors de la présentation de son rapport, a dit des choses qui sont intéressantes concernant l'intégration, et je cite: «Cependant, de nombreux immigrants qui ont reçu leur formation professionnelle à l'extérieur du Québec ont de la difficulté à faire reconnaître leur compétence par les ordres professionnels du Québec. Cela signifie qu'ils ne peuvent pratiquer la profession pour laquelle ils ont été formés, à moins de retourner sur les bancs d'école. Bien que nous soyons en accord avec les raisons d'être des ordres professionnels, soit la protection du public, il serait peut-être possible d'envisager une plus grande flexibilité quant à l'attribution des équivalences professionnelles. La rétention des immigrants hautement qualifiés s'avère difficile, surtout s'ils sont sollicités par d'autres pays où leur intégration professionnelle pourrait être mieux assurée.»

Maintenant, j'aborderais toute la problématique de la francisation. À cet égard, le Syndicat des professeurs de l'État du Québec nous disait: «L'apprentissage du français sans la valorisation de nos us et coutumes ne facilite pas l'insertion du nouvel arrivant dans le réseau francophone. C'est le travail bien sûr de l'ensemble des professeurs qui dépendent du MRCI, et on se fait un devoir en outre de parler français, en outre de s'exprimer en français, de faire en sorte que nos gens veuillent aussi vivre en français.» Et les gens qui viennent s'établir au Québec doivent et sûrement ont cette volonté que de vouloir vivre en français.

Le Syndicat des professeurs de l'État du Québec continue en ce sens: «Nous maintenons que le français doit être le passeport de la culture québécoise. C'est presque une banalité oubliée, mais, lorsque vous avez des gens de différentes ethnies, c'est évident que le dialogue, pour qu'il se fasse, va se faire en français. Et, pour nous, ce que nous vous livrons de façon très humble à travers les classes de COFI, les classes des carrefours, c'est tout simplement que ces gens-là qui sont obligés de parler français pour échanger entre eux, ça fait preuve, si vous voulez, d'un a b c de l'intégration en classe.»

Et le Centre des femmes de Montréal a dit: «Nous considérons qu'il est essentiel de continuer à offrir des services d'accueil dans les diverses langues parlées dans les pays d'origine, et ce, afin d'éviter l'isolement des ressortissants étrangers. Pour nous, cette stratégie leur garantit un soutien à l'établissement et l'intégration au niveau des services de première ligne et le temps nécessaire dont ils ont besoin pour réaliser leurs apprentissages.» Ils continuent: «Par ailleurs, ces femmes-là ont besoin de mesures de soutien particulières pour pouvoir participer à des mesures de francisation. Elles ont besoin de soutien pour se dégager de leurs responsabilités familiales. Je pense que c'est important de noter aussi que la méconnaissance du français et de l'anglais est largement plus marquée au niveau des femmes que des hommes dans la grande région métropolitaine.» Et le Centre des femmes de Montréal a conclu de cette façon: «Donc, conséquemment, nous demandons que l'apprentissage du français s'inscrive dans un plan d'intervention plus large tenant compte de tous les obstacles à l'intégration en emploi rencontrés par les nouvelles arrivantes en recherche d'emploi et par les nouvelles arrivantes travaillant à la maison, et que ces formations continuent d'être dispensées par les organismes communautaires spécialisés auprès de cette clientèle ? bien sûr ? et que les participantes ayant des enfants puissent bénéficier d'un soutien financier particulier.»

Un dernier groupe, le cégep de Jonquière. Mme Prébinski est venue nous dire que «la condition essentielle à l'intégration, c'est la francisation». Donc, à Jonquière, ils ont mis sur pied de nouveaux modèles d'enseignement et d'immersion. Donc, c'est un centre qui compte déjà 30 années d'expérience dans l'enseignement du français langue seconde. Le cégep de Jonquière a élaboré des mesures de francisation répondant aux besoins spécifiques d'apprentissage de la clientèle immigrante et réfugiée.

Je terminerais, M. le Président, en vous disant que la société québécoise est une société généreuse, que la société québécoise est une société accueillante, ouverte, dynamique, très majoritairement francophone. C'est à toutes ces valeurs que les immigrants et que les immigrantes sont conviés. Si nous sommes bien capables de leur transmettre ces valeurs, nous allons réussir à intégrer positivement ceux et celles qui choisissent le Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Iberville. Je vais céder la parole maintenant à M. le député d'Anjou. M. le député.

M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole ici ce matin à titre de nouveau porte-parole, au niveau de l'opposition, pour les relations avec les citoyens. D'entrée de jeu, je veux saluer le ministre et l'assurer, non seulement dans ce débat, mais dans tous les débats qui vont venir, de mon entière collaboration et de mon souhait le plus cher que, malgré les différends qui pourraient peut-être arriver au fil de nos discussions, le débat soit toujours serein et empreint de respect. Et je l'assure de mon entière collaboration à ce niveau-là.

n(11 heures)n

M. le Président, on est ici ce matin pour faire un peu le bilan de ce qu'on a pu entendre en commission parlementaire au niveau de la culture, au niveau du plan triennal d'immigration pour les années 2001 à 2003. D'entrée de jeu, j'aimerais remercier tous les groupes, tous les intervenants et intervenantes qui ont pris le temps et la peine des rédiger des documents excessivement sérieux, complets pour venir chacun leur tour nous faire part de leur vision en ce qui a trait à l'immigration, qui est un sujet capital dans l'avenir du Québec. Vous savez, M. le Président, le débat qu'on tient

aujourd'hui et les débats qu'on tiendra au cours des prochaines années quant à la place de l'immigration et à la façon de procéder, ça va avoir un impact majeur sur le visage qu'aura le Québec au cours du prochain siècle.

M. le Président, il y a quelques points, je pense, qui sont ressortis de façon un peu plus claire et que j'aimerais aborder avec vous, au niveau des consultations publiques.

Dans un premier temps, je pense que tous les organismes ? ma collègue de Saint-Henri?Sainte-Anne et les autres intervenants également y ont fait référence ? sont ouverts et souhaitent que le Québec fasse encore une plus grande place à l'immigration au sein de sa société. Mais ça, M. le Président, je pense que c'est une bonne nouvelle, je pense que c'est une représentation de ce qu'est le Québec, c'est-à-dire une société ouverte, dynamique, qui est chaleureuse, qui fait place aux autres, mais ça ne devrait pas nous empêcher de penser au fait que ? et ça a été soulevé à plusieurs reprises ? il faudrait, encore aujourd'hui, faire des campagnes de sensibilisation auprès des citoyens et des citoyennes du Québec pour les initier, dans le fond, à cette réalité qu'est l'immigration, mais surtout à la richesse que les différents immigrants et immigrantes amènent au Québec, cette richesse qui a fait du Québec aujourd'hui une société encore plus forte, encore plus dynamique.

Ça, cette contribution de l'immigration, il faudrait la mettre de l'avant, et c'est un souhait non seulement des organismes, mais également de l'opposition officielle, que le gouvernement ? et je pense que c'est son rôle ? que le ministère puisse mettre des campagnes de sensibilisation afin de sensibiliser non pas seulement les citoyens et les citoyennes quant à la richesse de cet apport-là, mais les entreprises, les employeurs partout au Québec, dans les régions comme dans Montréal ou dans Québec, pour leur expliquer et les sensibiliser justement à cette réalité-là, à l'apport que ces entreprises pourraient obtenir de la part de ces nouveaux arrivants.

M. le Président, on a également parlé beaucoup, évidemment, du fait français, de la francisation des immigrants. Évidemment, je pense que c'est un consensus très large, et je m'en réjouis, M. le Président, au niveau de la francisation. Certains organismes nous ont mis en garde sur le fait suivant: Ne nous privons pas d'immigrants de calibre sur cette base-là. Dans le fond, le message est le suivant, c'est: Donnons-nous les moyens ici d'intégrer correctement les immigrants, donnons les moyens aux organismes communautaires de pouvoir les intégrer et de les franciser une fois qu'ils seront rendus ici, au Québec. Un des moyens, je pense, qui est très important, ce serait certainement de passer par l'emploi. Je pense que plusieurs groupes l'ont soulevé, c'est en favorisant l'emploi de ces nouveaux arrivants qu'on va justement favoriser encore plus cette intégration à la société québécoise, les aider justement à faire partie intégrante du Québec et, finalement, non pas seulement les aider, mais, comme société, obtenir leur apport comme celui de tous les citoyens.

On a également parlé des exigences de sélection quant à la recherche de candidats possédant des compétences professionnelles. J'y reviendrai peut-être un peu plus loin. Les fameuses reconnaissances des diplômes étrangers, je pense que ça a été soulevé à plusieurs reprises et avec raison. Comme député, j'ai eu quelques expériences de rencontres dans mon bureau de comté qui m'ont laissé bouche bée: des gens qui viennent de pays étrangers avec un dossier académique très impressionnant, une expérience aussi, je parle particulièrement au niveau de la médecine. Ces gens-là viennent nous voir... Je ne suis pas expert, M. le Président; je ne peux pas, sur la base d'un curriculum vitae, dire si telle personne est apte ou non à exercer, à pratiquer la médecine au Québec ? je m'en confesse. Seulement, quand je constate que ces gens-là travaillaient dans des hôpitaux à l'étranger, ont des études impressionnantes, une expérience également, je ne peux pas m'empêcher de me poser la question: Est-ce que c'est si différent que ça, être chirurgien cardiaque en Algérie et au Québec? On m'a déjà répondu qu'il y avait des différences, et je suis prêt à en convenir: l'équipement peut être différent, les pratiques peuvent être différentes. Seulement, je veux simplement illustrer le fait que ce n'est peut-être pas nécessaire de faire passer trois, quatre, cinq et six années à ces gens-là pour qu'ils puissent se ressourcer au Québec.

Est-ce qu'on peut se substituer aux corporations professionnelles? C'est quelque chose que je ne voudrais pas faire, M. le Président. Je pense que les corporations professionnelles ont un rôle à jouer au niveau de la protection du public, j'en conviens. Seulement ? on nous a donné des exemples et on le voit dans la réalité ? il y a lieu de se questionner s'il n'y aurait pas des biais culturels qui feraient en sorte que certains types de professions, ou certaines personnes, de différents endroits dans le monde... feraient face dans le fond à ce biais-là. Je pense qu'il y a des cas qui nous sautent aux yeux. Le Barreau du Québec est venu nous voir. Moi, c'est évident, M. le Président, j'ai peut-être plus de connaissances à ce niveau-là, il y a une réalité incontournable au Québec, c'est le droit civil. Quand bien même quelqu'un a pratiqué le droit pendant 10 ans à l'extérieur, il y a une réalité québécoise, qui est typique ici. Il n'y a pas un avocat, M. le Président, au Québec qui ne peut pas connaître le droit civil, et c'est normal que ce soit ainsi.

Je vous ai parlé des cas de médecins, sur lesquels je n'ai pas nécessairement de réponse, mais ce sont des cas, je pense, sur lesquels le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration... on nous l'a mentionné d'ailleurs en commission parlementaire, qu'il y avait des pourparlers à ce niveau-là. Mais il faudrait explorer plus à fond cette réalité-là, parce que, M. le Président, on nous l'a dit et on le voit quand on rencontre ces gens-là, il y a une énorme incompréhension au sein de ces immigrants-là qui, lorsqu'ils étaient en attente d'une réponse du Québec, croyaient de bonne foi, M. le Président, que ce serait... soit qu'ils pourraient d'office pratiquer leur profession ou bien encore que de simples tests tout à fait faciles et des formalités à remplir feraient en sorte qu'ils pourraient pratiquer.

Qu'est-ce que ça donne, M. le Président? Bien, ça donne des corporations professionnelles qui se retrouvent peut-être avec sur les bras des cas difficiles, des cas lourds à régler, et, de l'autre côté, des gens qui se voient désillusionnés, qui vivent un choc assez important. Parce que, non seulement ces gens-là quittent leur pays, dans certains cas quittent leur famille, laissent des gens derrière eux, mais se retrouvent au Québec sans emploi, sans possibilité d'aller de l'avant. Et ça, je pense, M. le Président, que c'est quelque chose d'excessivement important. Il va falloir se pencher sur ce qui se passe ici avec les corporations professionnelles. Également, je pense que le ministère serait bien avisé de s'assurer que les immigrants qui s'en viennent ici aient toute l'information nécessaire et pertinente pour qu'ils puissent savoir dans quoi ils s'embarquent, puissent connaître la situation lorsqu'ils débarqueront ici, et qu'ils se mettront à la recherche d'un emploi, leur faire savoir tout simplement, M. le Président, qu'il y a des exigences au Québec, qu'on va tenter de les guider à travers ça et de les aider justement à gagner leur vie. Puisque, M. le Président, je demeure convaincu qu'encore la meilleure façon d'intégrer ces gens-là dans notre société et de faire en sorte qu'ils puissent collaborer pleinement, c'est de les aider à travailler.

On nous a parlé également, M. le Président, de l'accueil et de l'intégration de ces nouveaux arrivants. Je pense qu'il y a quelque chose qui est ressorti, c'est un constat qui a été fait, c'est que les organismes communautaires sont sous-financés. Dans bien des cas, M. le Président, on ne leur donne pas les moyens nécessaires pour mener à bien la mission qu'on leur confie. Moi, j'ai simplement un exemple en tête, l'an dernier, puis ça m'avait fait réfléchir justement sur ce sous-financement-là, au niveau d'un cas de comté, au niveau d'un organisme qui s'appelle Carrefour solidarité Anjou. J'ai donné une subvention, M. le Président, pour qu'ils puissent mener à terme le projet suivant, qui était celui d'encadrer les jeunes enfants pour qu'ils puissent faire leurs devoirs après l'école. Il m'est apparu immédiatement que c'était un projet rempli de bon sens, sauf que ce projet-là dépendait directement de la subvention discrétionnaire de leur député. Je pense que, compte tenu de l'importance, puis je pense qu'on est revenu tellement souvent là-dessus, que les immigrants, au niveau de la francisation, on doit tout mettre en oeuvre pour que ceux qui ne maîtrisent pas le français puissent le maîtriser afin de faciliter leur intégration à la société québécoise. Bien, je pense, M. le Président, que c'est impératif que l'on donne les moyens aux organismes communautaires de mener la mission fondamentale qu'on leur confie dans le cadre du plan d'immigration.

n(11 h 10)n

Un autre point, M. le Président, sur lequel beaucoup d'organismes sont revenus, c'est la régionalisation de l'immigration. Je pense qu'il faut faire plus, c'est aussi simple que ça. La députée de Saint-Henri?Sainte-Anne a fait allusion tout à l'heure, a lu des passages du plan triennal, que certains organismes ont déploré. Est-ce que c'est facile de favoriser l'immigration en région? Non, ce n'est pas facile, mais ça ne veut pas dire, M. le Président, que l'on doive baisser les bras; ça veut tout simplement dire qu'il faut redoubler d'ardeur, qu'il faut que le gouvernement se pose la question. Si c'est important, bien, c'est de se donner les moyens. On a entendu énormément de groupes régionaux qui sont venus nous dire: Nous sommes prêts, nous n'attendons que ça.

Maintenant, il y a un travail préparatoire. On ne peut pas décider du jour au lendemain d'envoyer des gens en Abitibi tout simplement comme ça, il y a un travail de préparation à faire. Et ça, je pense que le ministère devra, au cours des prochains mois, travailler ces pistes de solution là. Parce que, vous savez, M. le Président, la réalité, c'est que bien souvent ces gens-là, quand ils arrivent de l'étranger ? de nouveaux immigrants ici ? vont être tentés de s'en aller dans un grand centre où ils vont peut-être des fois connaître des gens, où leur intégration va leur apparaître plus facile.

Mais la question qu'il faut se poser, et on l'a soulevée, c'est: Est-ce que le Québec, le gouvernement du Québec, à l'étranger, fait la promotion des régions du Québec? Ce n'est pas seulement de les attirer ici et de les accueillir à Montréal en leur disant: Alors, bonjour! vous êtes présentement à Montréal; il y a de nombreuses régions du Québec qui ont plein de choses à vous offrir, et vous pourriez peut-être aller en Outaouais, aller en Mauricie ou aller en Abitibi. Je pense qu'il faut, dès les débuts des démarches de ces gens-là, leur indiquer que le Québec, ce n'est pas seulement Montréal ou la région de Québec, mais c'est beaucoup plus que ça, et qu'il y a des possibilités. Mais, ces possibilités-là, M. le Président, il faut les exposer aux nouveaux arrivants, et peut-être que spontanément certains d'entre eux seront intéressés à y aller.

Et je le mentionnais, il y a un travail à faire là-dessus. Il faut donner aux régions les moyens nécessaires de répondre à ce souhait-là que l'on a comme société de faire en sorte que l'immigration puisse également se faire en région. Ça voudrait dire décentraliser les pouvoirs, décentraliser également les ressources et les centres de décision. C'est immanquable, M. le Président. Et je pense qu'on a eu des exemples, durant la commission parlementaire, qui nous ont fait réfléchir sur le dynamisme dont ces régions-là font preuve pour accueillir ces nouveaux arrivants là. Et je pense que ça va être essentiel.

Je me souviens du cégep de Sainte-Foy qui nous mentionnait... je pense que c'étaient une poignée de ses étudiants seulement qui fréquentaient le cégep à temps plein, qui n'étaient pas nés ici, au Canada. Je vous avoue que, dans cette perspective de régionalisation là, il y a un pas important à faire, et il va falloir faire preuve, je pense, de courage, de dynamisme et de leadership. Et ça, je pense que c'est au ministère de se pencher là-dessus, parce que les solutions ne viendront pas facilement. Je me souviens, moi... Je l'ai posée même à certains de ces organismes-là: Vous souhaitez qu'il y ait une régionalisation, avez-vous des solutions concrètes à proposer aux parlementaires pour faire en sorte que plus d'immigrants aillent chez vous? On nous a mentionné: Il va falloir innover, parce que, jusqu'à présent, on n'est pas sorti suffisamment des sentiers battus. Et on aurait tout avantage, comme collectivité, je pense, à le faire.

Un autre point, c'est certainement au niveau du manque d'information, par rapport aux informations qu'obtiennent les nouveaux immigrants ici, au Québec, et ça, ça touche plusieurs points. Je me souviens, M. Jacques Proulx, qui était ici, en commission parlementaire, à ce sujet nous avait mentionné: Écoutez, c'est difficile de faire le lien avec l'immigration en région, c'est difficile d'attirer ces gens-là quand on ne leur explique pas ce qu'est la ruralité québécoise puis quand on ne leur en parle pas. Ce n'est pas seulement de faire un voeu pieux; il faudrait leur expliquer et voir en quoi les compétences, les habilités de ces gens-là pourraient peut-être convenir à ce qui se passe au niveau de la région. On nous a donné des cas, des exemples bien concrets de gens qui ont réussi à s'intégrer parfaitement dans les régions du Québec. Donc, on a déploré ce manque d'information là.

Il faudrait mieux informer les immigrants, je l'ai mentionné tout à l'heure, au niveau des perspectives d'emploi. Je pense que c'est essentiel de ne pas créer d'attentes inutiles envers ces gens-là. Il faut leur donner l'heure juste, il faut leur donner le bilan de ce qu'est le Québec d'aujourd'hui pour faire en sorte que ces gens-là, lorsqu'ils arrivent ici, puissent avoir le portrait le plus exact possible de la situation, tant au plan des perspectives d'emploi qu'au plan de la situation linguistique.

On a également mentionné que, dans ce cadre-là, il faudrait donc créer un véritable partenariat avec les régions et sensibiliser tant les employeurs que toutes les entreprises du Québec sur les possibilités énormes ? énormes, M. le Président ? qu'elles ont d'ajouter à leur richesse en embauchant des immigrants.

M. le Président, je ne voudrais pas terminer sans mentionner également une autre situation qui a été soulevée et, je suis sûr, sur laquelle ma collègue députée de La Pinière va revenir. Elle l'avait soulevée durant la commission parlementaire, et les gens étaient comme sortis d'une bulle. C'est la situation des immigrants francophones. On a beaucoup, beaucoup, beaucoup parlé de la francisation de nos immigrants, des mesures à apporter ou des mesures supplémentaires pour faire en sorte que les immigrants puissent suivre des cours de francisation et être intégrés. M. le Président, c'est faire abstraction d'une catégorie importante de ces immigrants-là qu'on a ici, au Québec, et ce sont les immigrants francophones.

Je vais vous donner un exemple. Nous, dans Anjou, au niveau de la communauté haïtienne, l'organisme CHORRA, qui vient justement en aide à ces gens-là dont la première barrière n'est pas nécessairement la langue... Mais, des barrières, ces immigrants-là en ont, et on doit s'assurer de les reconnaître pour pouvoir les abattre. Et ça, ils sont souvent oubliés, ils ne font pas partie des discours. On parle comme si le seul fait de pouvoir parler français était suffisant. Comment ces gens-là peuvent inscrire leurs enfants à l'école, ouvrir un compte de banque puis utiliser des guichets automatiques, toutes sortes de gestes concrets, communs que l'on pose, nous, tous les jours... mais ces gens-là, M. le Président, ont beau comprendre le français, ça ne veut pas dire que leur intégration se fait automatiquement. Et ça, je pense, M. le Président, que le ministère devra s'assurer de donner les moyens d'intégration justement de ces organismes-là. Nous, dans Anjou, je vous donne l'exemple du CHORRA au niveau des Haïtiens, parce que c'est un travail de tous les jours pour faire en sorte que les gens de la communauté haïtienne qui habitent à Anjou puissent s'intégrer au Québec, puissent évoluer de façon efficace et de façon tout à fait normale dans la société... Donc, cet aspect-là, on ne doit pas l'oublier, c'est essentiel. C'est une catégorie très importante de l'immigration au Québec, et ça serait, je pense, un drame que de l'oublier dans les plans d'action que l'on mettra en oeuvre au cours des prochaines semaines et des prochains mois.

Donc, M. le Président, je pense que j'ai tenté de résumer un peu ce qu'on avait entendu lors des commissions parlementaires. On a eu beaucoup de recommandations. Je pense que le ministre aura amplement matière à réflexion au cours des prochaines semaines, de voir qu'est-ce que le Québec, et ce, de toutes les régions du Québec, nous a apporté en commission parlementaire comme pistes de solution. C'est important. Les décisions que l'on va prendre, M. le Président, vont avoir des répercussions non pas seulement sur trois ans, mais sur le Québec de demain, sur la face qu'aura le Québec dans cinq, 10, 15, 20, 25 ans. Et c'est là, je pense, que le débat prend toute son importance, puisqu'on se doit aujourd'hui, et c'est le rôle qu'auront le gouvernement et l'ensemble de la société, de prendre une direction pour faciliter justement cette intégration, pour que le tout se fasse de la meilleure façon possible.

Et je tiens à nouveau, M. le Président, à rappeler au ministre toute ma collaboration et toute la collaboration de l'opposition officielle dans ce dossier-là, parce que c'est un dossier qui s'élève nettement au-dessus des tendances partisanes, c'est un dossier capital pour l'avenir du Québec. Et j'ai l'intention, ainsi que l'opposition officielle, de répondre présent dans ce dossier. Merci, M. le Président.

n(11 h 20)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Anjou. Je vais céder la parole maintenant à M. le député de Matane. M. le député.

M. Matthias Rioux

M. Rioux: Merci, M. le Président. J'essaierai d'être bref, mais je vais mettre l'accent sur deux ou trois points qui me sont apparus importants lors de l'examen du plan triennal du ministère. D'abord, sur le plan démographique, il s'agit d'un enjeu qui, à mon avis, est majeur. Le Québec présentement a un taux de natalité de 1,4 %, c'est-à-dire que chaque femme québécoise en âge de procréer met au monde 1,4 enfant. Le taux de remplacement des générations, lui, il est de 2,1 %. Il me semble que la conclusion se tire d'elle-même: on a donc un besoin extrêmement important de l'apport de l'immigration si on veut maintenir au Québec une population stable ou en croissance.

M. le Président, on a beaucoup discuté de l'intégration des immigrants pendant les travaux de la commission, c'est vrai. On a fait référence à nos faibles moyens d'intégration, mais on a très peu fait référence à notre vigueur et à notre détermination dans la perspective de mettre en place des moyens efficaces pour y arriver. Moi, j'ai toujours compris que l'intégration se faisait par deux grands moyens: l'école pour les jeunes, puis ça a été aussi les COFI pour les adultes, à une époque, et l'autre volet qui est fondamental, c'est le travail.

Un allophone qui arrive ici, quelqu'un qui ne parle ni l'anglais ni le français et qui tombe dans un quartier ouvrier francophone et qui s'intègre à une usine, j'ai l'impression, M. le Président, que sa capacité à apprendre le français et la rapidité avec laquelle il va apprendre le français est assez impressionnante. J'ai eu l'occasion de l'observer dans des milieux où j'ai vécu, dans la Côte-des-Neiges notamment, où on a vu des immigrants qui arrivaient et qui passaient dans une entreprise plurilinguistique où les actionnaires ou les propriétaires de l'entreprise étaient des anglophones; l'immigrant s'intégrait évidemment à la minorité anglaise, mais, dans les entreprises francophones, c'était automatique. J'y reviendrai un petit peu plus tard, quand on va parler de régionalisation, vous allez voir que ça a un impact considérable sur les décisions qu'on peut prendre éventuellement.

Donc, l'apprentissage et l'intégration d'un immigrant à la culture francophone, il n'y a pas 15 000 moyens, il y a la qualité de l'accueil, la qualité de la langue qu'on va lui enseigner et qu'on va lui apprendre, et le français langue de travail. Moi, j'aimerais souligner aux collègues qui ont eu l'occasion de participer à cette commission qu'on a évoqué devant les groupes qui sont venus la possibilité d'amender la Charte de la langue française pour faire en sorte que les entreprises du Québec aient la langue de travail qui est la langue de la majorité. Quand on pense qu'au Québec présentement un pourcentage important d'entreprises n'ont pas encore leur certificat de francisation ? non-respect de la loi et de la Charte ? moi, je pense qu'il y a un resserrement à faire là. C'est sûr que ça prend une volonté politique pour le faire, mais le ministre actuel, qui a été un leader de la cause francophone au Québec, est certainement notre allié, notre allié probablement le plus précieux.

Évidemment, il y a des aspects intéressants, et il y a eu des résultats aussi à nos politiques d'intégration, d'accueil des immigrants. 71 % de la population immigrante recensée ces dernières années parle français, est capable de converser en français. Ce n'était pas le cas en 1986, où il y en avait 67 %. Et je me souviens de l'époque héroïque des années 1971, où il y avait à peine 50 % des immigrants arrivés au Québec qui avaient le français comme langue à la maison ou langue de communication. Il y a quand même eu des progrès. Il faut les saluer, il faut s'en féliciter, mais il ne faudrait surtout pas en rester là.

M. le Président, je vais parler beaucoup de travail et de main-d'oeuvre parce que ça m'apparaît tellement important lorsqu'on veut amener chez nous et inviter chez nous des immigrants à venir partager notre vie québécoise. Je regarde juste la réalité qui est la nôtre dans certains milieux qui pourraient constituer des bassins stratégiques. Je pense à l'Afrique francophone, les pays du Maghreb. S'il y a une terre de prédilection pour intéresser des candidats à l'immigration, c'est bien cette région-là du monde. Bien, dans ce coin-là du monde, particulièrement au Maroc, qui est un pays francophone, on a réussi à fermer notre service d'immigration. Moi, ce que j'aimerais envoyer comme signal, c'est qu'on rouvre ce service au plus vite. J'aimerais bien aussi qu'on prospecte davantage toute cette Afrique francophone. Nous allons y découvrir un potentiel extraordinaire d'immigration de qualité, et des gens de belle qualité et des gens compétents.

On a souvent dit pendant les travaux ? puis je pense que la député de La Pinière l'a dit très souvent également: Il n'y a rien de mieux que de trouver un emploi lorsqu'on arrive au Québec; c'est la meilleure méthode à utiliser pour intégrer un immigrant. Moi, je vais aller plus loin, puis j'espère que la députée de La Pinière va partager mon opinion. Quelqu'un qui arrive au Québec, qui a une compétence professionnelle reconnue, qui est désireux de travailler évidemment pour gagner la vie de sa famille, s'il a de la difficulté à s'exprimer en français et en anglais, à mon avis, ce candidat qui arrive chez nous devrait recevoir une attention toute particulière non seulement pour l'aider à apprendre le français rapidement, mais trouver un emploi selon sa compétence. Il y a des bassins de main-d'oeuvre, il y a des coins au Québec où on est en attente de compétences qu'on n'a même pas chez nous. Alors, moi, je crois que ces immigrants-là qui ont de la difficulté, qui arrivent d'Asie, par exemple, et qui ne parlent ni anglais ni français, devraient recevoir une attention toute particulière. Ceux qui parlent anglais et français, c'est une chose, mais ceux qui parlent ni l'une ni l'autre des langues devraient recevoir une attention toute particulière.

Je voudrais, M. le Président, vous parler un tout petit peu d'un autre blocage qui embête l'immigrant qui arrive ici, c'est le corporatisme professionnel érigé en système. Moi, lorsqu'on a créé l'Office des professions, il y a quelques années, j'étais journaliste, j'ai béni ce jour où on créait des corporations professionnelles et on créait l'Office des professions qui chapeaute le corporatisme professionnel québécois. Mais, lorsque le corporatisme professionnel se comporte comme une centrale syndicale, ce n'est plus du corporatisme professionnel, c'est du corporatisme tout court, égoïste, aveugle. Ça, là, ça nous nuit dans notre processus d'intégration des immigrants, et leur recherche d'emploi est souvent compromise à cause de ça.

n(11 h 30)n

Je ne vous dis pas qu'il faut mettre la hache dans le corporatisme professionnel, parce qu'ils sont là pour protéger le public. Et pourquoi j'étais tellement heureux lorsqu'on a créé ces ordres, c'est qu'on mettait les Québécois et Québécoises à l'abri de professionnels à la compétence douteuse et à la morale encore plus douteuse. C'était très bien. Mais, aujourd'hui, lorsqu'on regarde le comportement de certaines corporations face aux immigrants, face à leur intégration sur le marché du travail, à la reconnaissance des acquis, comme l'évoquait le député tout à l'heure, quand on regarde les chinoiseries qui entourent tout ça, il me semble que la tentation devrait être forte pour dire à notre nouveau ministre: Est-ce qu'il y aurait moyen de jeter un coup d'oeil là-dessus? Moi, je l'ai vu, de mes yeux vu, pendant des années, des corporations professionnelles se comporter comme des syndicats, alors que ce n'est pas du tout leur rôle. C'est vrai qu'elles doivent voir à la qualité professionnelle de l'ordre, les diplômes, la compétence puis à protéger le public. Mais de là à se comporter comme des syndicalistes. Les syndicalistes ont leur mission dans la société; les corporations professionnelles ont la leur. Je pense qu'on devrait jeter un coup d'oeil là-dessus.

M. le Président, j'aimerais qu'on accorde une priorité à la mise en oeuvre du programme d'apprentissage du français chez les immigrants qui arrivent au Québec et qui ne connaissent ni le français ni l'anglais. M. le Président, c'est majeur, ce dont je vous parle. Il y a une lenteur là qui, encore une fois, m'oblige à dire à notre nouveau ministre: Le jour où on intégrait les COFI au régime scolaire, au réseau de l'éducation, on a tous cru qu'on avait fait un bon coup. Je le crois encore. Mais le jour n'est pas loin où j'aurai des doutes. Et, avant que le doute s'installe en moi? vous savez que le doute méthodique, il n'y a rien de pire que ça ? j'aimerais bien que le ministère responsable de l'immigration et le ministère de l'Éducation s'arriment pour que le programme d'apprentissage du français aux immigrants qui arrivent ici et qui ne parlent pas cette langue soit accéléré, mieux organisé, mieux encadré et confié à des mains expertes. Je choisis mes mots, «confié à des mains expertes». La bonne foi ne suffit pas. La bonne volonté non plus. Surtout dans des domaines semblables.

M. le Président, un tout petit mot en terminant sur les régions. C'est bien difficile pour un immigrant qui arrive au Québec ou qui est candidat à l'immigration, c'est bien difficile pour lui de choisir de s'installer à Montréal, à Québec, ou à Saint-Hyacinthe, ou en Gaspésie s'il ne connaît pas les régions du Québec et qu'on ne lui explique pas c'est quoi, le Québec et ses régions. Actuellement, les informations qu'on possède, les questions qu'on a pu poser, la petite enquête que j'ai pu mener me conduisent à la conclusion que l'immigrant, lors de la sélection, est mal informé sur ce qu'est le Québec et ses régions.

Deuxièmement, M. le Président, il me semble, lorsqu'on est candidat à l'immigration et qu'on veut venir vivre au Québec, qui est la province française du Canada, que les gens soient informés de nos besoins de main-d'oeuvre et des compétences que ça nous prend pour répondre aux besoin de main-d'oeuvre spécialisée. Et, si on avait un inventaire exhaustif de nos besoins en main-d'oeuvre en région, ça faciliterait drôlement la tâche de nos fonctionnaires qui travaillent à l'étranger et qui ont à sélectionner, en partenariat avec le gouvernement fédéral, les immigrants qui viennent s'installer au Québec.

C'est sûr qu'une bonne information, bien faite ? bien faite ? faite par des gens sérieux et compétents nous aiderait grandement et simplifierait probablement à 30 % ou 40 % notre très grande difficulté d'intéresser des gens qui arrivent chez nous à venir s'installer en Gaspésie ou dans le Bas-Saint-Laurent, terres de prédilection, francophones presque à 100 %, d'autre part, qualité de vie extraordinaire, potentiel de développement aussi plus que convenable. Il me semble que, si on était mieux équipé, mieux outillé, on pourrait en arriver à attirer des immigrants chez nous, des immigrants dont on a besoin, et des immigrants investisseurs aussi.

Jusqu'à maintenant, ça n'a pas été un très grand succès. Je pense qu'il y a quelque chose à tourner, là. Ça va prendre pas mal de doigté et de courage, mais on devrait être capable d'y arriver.

On a émis toutes sortes d'hypothèses qui pourraient aider le ministère dans son arrimage avec les organismes régionaux de développement en vue d'attirer chez nous des immigrants, dans nos régions. Moi, je ferai la petite suggestion suivante à M. le ministre: Venez donc nous voir. Venez voir dans le milieu comment ça pourrait se faire. Ne laissez pas des fonctionnaires vous dire comment le faire, parce que vous pouvez vous faire jouer des tours. Eux autres, ils organisent ça à leur façon, et je les comprends, ils sont payés pour nous organiser. Mais, M. le ministre, dans un domaine aussi délicat et aussi vital pour l'avenir du Québec qu'est l'immigration, vous devriez aller vous mettre le nez là-dedans: comment faire les arrimages qui nous permettraient d'accueillir, d'intégrer de façon professionnelle et sérieuse les immigrants qui auraient peut-être le goût d'aller vivre une expérience en Gaspésie, dans le Bas-Saint-Laurent ou sur la Côte-Nord.

Nous avons de multiples organismes. Certains sont d'une grande efficacité, d'autres tournent dangereusement en rond. On ne sait jamais, on pourrait peut-être leur trouver un créneau où ils se rendraient très utiles. Nous avons des organismes, qui sont les CLD, les carrefours jeunesse-emploi, les conseils régionaux de développement. On a des SADC, on a des conseils de la culture. Tiens, on fait de la sédimentation structurelle en région. Puis il y a des jours où on n'est pas très, très efficace.

Alors, la façon de livrer un service gouvernemental aussi important que l'immigration en région? Moi, je ne dis pas au ministre d'ouvrir des bureaux régionaux dans toutes les régions du Québec. Ne gaspillez pas d'argent pour ça. Mais, par exemple, le ministère, en s'arrimant avec les organismes existants et en prenant bien soin d'aller voir sur place comment ça pourrait se faire et comment ça pourrait être fonctionnel, moi, je vous le dis, M. le ministre, vous allez marquer des points comme ce n'est pas possible, et de façon ultrasimple. Les gens sont prêts à ça, et on vous attend. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Matane. Il reste au groupe de l'opposition 17 min 30 s. Et je vais céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais joindre ma voix à celle de mes collègues des deux côtés de la Chambre qui ont pris la parole sur le rapport de la commission de la culture en rapport avec la consultation sur les niveaux d'immigration.

Je voudrais tout d'abord féliciter le député de Richelieu pour sa récente nomination à titre de ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Je pense que l'immigration, en particulier, sans négliger les relations avec les citoyens, est un dossier très important et j'espère que le ministre va jouer un rôle important avec l'appui de l'opposition. Je salue également mon collègue le député d'Anjou, qui est également nouvellement porte-parole des relations avec les citoyens et de l'immigration.

J'ai participé aux travaux de cette commission de la culture avec ma collègue la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne, qui était jusque-là porte-parole du dossier, et on a eu beaucoup de plaisir parce que le président, le député de Matane, a été un grand facilitateur de nos travaux et je pense qu'on a su s'élever au-dessus de la mêlée pour discuter des véritables enjeux.

n(11 h 40)n

M. le Président, à ces audiences que nous avons menées au mois de septembre dernier, il y a eu une cinquantaine de groupes assez diversifiés, essentiellement les organismes communautaires, les groupes de femmes, les municipalités, les représentants du patronat, des syndicats, les milieux institutionnels, les organismes d'employabilité, le milieu de l'éducation. Tout ça démontre l'intérêt que la société civile porte à ce dossier.

Et ce qui se dégage globalement de ces auditions, M. le Président, c'est que les organismes qui sont venus nous voir nous disent qu'ils en veulent, de l'immigration. Ils nous disent aussi qu'ils reconnaissent l'apport constructif de l'immigration. Et, pour ma part, je peux en témoigner, puisque le comté La Pinière compte quelque 70 communautés culturelles différentes. Elles viennent de tous les coins du monde, particulièrement d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine, mais également d'Europe. Alors, quand on est près de cette réalité, on ne peut pas faire autrement que d'être sensible, surtout lorsque l'histoire de sa vie est aussi une histoire d'immigration.

Je tiens à rappeler, M. le Président, qu'en 1990 le gouvernement de l'époque avait rendu public l'énoncé de politique d'immigration et d'intégration. Et cette politique a été rendue publique suite à une vaste consultation de toute la société par rapport aux enjeux qui avaient été identifiés et articulés autour de quatre principes.

Premièrement, l'apport de l'immigration à la démographie du Québec. Et je fais écho aux propos qui ont été tenus ici ce matin par rapport à ça en disant cependant que l'immigration ne compensera pas pour les enfants que les Québécois ne feront pas. Elle va certainement aider à un certain équilibre, mais elle ne compensera pas pour le poids démographique du Québec dans le Canada, à moins d'augmenter les niveaux à une barre assez élevée. À titre indicatif, en l'espace de 30 ans, de 1970 à 2000, le poids démographique du Québec est passé de 28 %, autour de 1970, à 24 %. Donc, c'est vrai que l'apport de l'immigration est très important au niveau démographique, mais ce n'est pas l'unique solution.

Également, il y a eu un consensus sur le fait que l'immigration avait une contribution significative au niveau de l'économie du Québec. Et, pour cela, les chiffres sont disponibles pour démontrer qu'effectivement la contribution de l'immigration au plan du développement économique est très significative, non seulement dans la seule catégorie des immigrants investisseurs, dont on parle souvent parce qu'ils arrivent avec de l'argent, mais aussi en termes de capital humain qui, lui-même, contribue au développement économique. C'est très, très important comme facteur.

Également, l'autre priorité, c'est la pérennité du fait français au Québec. Et, là encore, le gouvernement ou les gouvernements qui se sont succédé au Québec ont toujours eu une sensibilité très particulière pour la sauvegarde et la promotion du français et pour aussi sélectionner un segment important de l'immigration parlant déjà français.

Et, finalement, l'ouverture du Québec sur le monde. Et ça, également, ça se passe de démonstration. Puisque les immigrants ont des liens privilégiés avec les pays étrangers, pas étonnant qu'un certain nombre d'entre eux s'engagent effectivement dans les échanges internationaux, les exportations, etc.

Alors, de cette consultation, M. le Président, au-delà des scénarios qui ont été proposés, il s'est dégagé un certain nombre de constats. Et, pour ma part, ça m'a fait énormément plaisir d'entendre un certain nombre de groupes venir plaider pour plus d'immigration, particulièrement les organismes en région. Il faut également dire que le Québec a été depuis toujours une terre d'accueil pour des vagues d'immigration et pour des immigrants qui sont venus des quatre coins du monde.

Souvent, quand on parle de l'immigration, on en parle comme si c'était un phénomène nouveau. Ce n'est pas un phénomène nouveau. C'est une réalité qui est inscrite dans l'histoire du Québec, M. le Président, et dans l'histoire du Canada. Je lisais récemment, pour me le rappeler à la mémoire, que, à Montréal, le Rideau Vert, qui est un des symboles culturels du Québec, le Théâtre du Rideau Vert a été fondé par un immigrant, libanais d'origine, au début du siècle. Et ça s'appelait à l'époque le Chanteclerc. Et ça a été le premier théâtre qui s'exprimait en français avec des acteurs francophones. Donc, M. le Président, il y a des exemples comme ça, ils sont nombreux, qui illustrent l'importance de l'immigration dans le développement du Québec à tout point de vue.

Ce que nous avons entendu lors de cette consultation, au-delà des points de vue assez spécifiques, c'est qu'il y a de grandes préoccupations en rapport avec un certain nombre de points précis. D'abord, l'intégration, comment créer les conditions favorables pour intégrer les nouveaux arrivants, pour les accueillir et pour les aider dans leur adaptation.

Deuxième préoccupation, la rétention des immigrants. Il ne s'agit pas seulement d'accueillir les nouveaux arrivants, de les aider à s'adapter, il faut les retenir pour qu'ils se fixent au Québec, parce que le départ des immigrants dans les premières années de leur arrivée a un prix et un prix important.

Également, la problématique de la régionalisation a été soulevée par différents groupes, et, dans ce cas précis, ce qui me préoccupe particulièrement, c'est deux choses. D'abord, on est venu nous dire qu'en région on a besoin de l'immigration, on a besoin d'une certaine immigration qui répond de toute urgence à des emplois qui sont disponibles mais pour lesquels on n'a pas de travailleurs qualifiés dans le moment. On nous a dit ça. Et on nous a aussi parlé de ce que je peux appeler des «success stories», c'est-à-dire comment, lorsqu'une communauté veut, dans la région du Saguenay ou dans les Laurentides... lorsque les communautés veulent s'approprier le dossier de l'immigration, ils sont capables de mettre de l'avant des solutions novatrices. Je pense, par exemple, aux gens du cégep de Jonquière; je pense, par exemple, aux gens de Coffre, qui ont développé des outils, des moyens et des expertises pour accueillir adéquatement les nouveaux arrivants, pour faciliter leur insertion et pour les garder en région. Et on réalise à travers ces expériences que vraiment ça prend une mobilisation très importante de différents partenaires pour faciliter et atteindre ces résultats.

L'autre problème qui a été soulevé et abordé abondamment, c'est la reconnaissance des diplômes acquis à l'étranger. Et c'est aussi la problématique, même dans les pays francophones. On aurait pu croire que, parce que le Québec fait partie de l'aire de la francophonie mondiale, l'information circulant grâce à Internet, et tout ça, on est capable de connaître la valeur d'un diplôme, de savoir quels sont les cours qui ont été donnés pour mener à l'obtention de ce diplôme. Or, encore aujourd'hui, M. le Président, les groupes viennent réclamer à nouveau, parce que ce n'est pas une réclamation tout à fait nouvelle, mais ils viennent réclamer à nouveau du gouvernement de faciliter la reconnaissance des diplômes acquis à l'étranger.

Et, par rapport à ce point précis, ce qu'on constate, c'est que, lorsqu'un nouvel arrivant vient au Québec, il veut faire une demande de reconnaissance de son diplôme, alors il rentre dans la machine via le gouvernement, les ministères, etc. Ça, c'est une démarche. Mais, en même temps, ce même nouvel immigrant veut aussi poursuivre ses études, alors il va s'inscrire à l'université dans un des programmes qu'il souhaite. Et, par hasard, à l'université, ça prend quelques semaines pour avoir la reconnaissance de son diplôme, qu'est-ce qu'il vaut, alors qu'au niveau du gouvernement ça peut prendre des mois. Et, deuxièmement, la deuxième surprise, c'est que, lorsqu'on a l'équivalence, ce n'est pas la même chose, et très souvent, au niveau universitaire, on va reconnaître peut-être une année de plus que ce qui est reconnu par le gouvernement. Alors, pour abonder un peu dans le même sens que le député de Matane, il faut que les gens du gouvernement se parlent entre eux pour trouver une façon de reconnaître les diplômes à leur juste valeur.

L'autre élément aussi, cinquième problème, c'est celui de la reconnaissance des acquis, des expériences de travail acquises à l'étranger. Lorsque vous regardez, par exemple, les annonces concernant les emplois, et on dit «expérience au Canada», «expérience de travail au Canada», automatiquement, quelqu'un qui n'a pas eu l'expérience au Canada se trouve exclus, hein... ou «expérience au Québec». Donc, il faut trouver aussi des moyens équitables pour reconnaître les expériences acquises à l'étranger.

n(11 h 50)n

On a parlé également des difficultés que rencontrent les nouveaux immigrants par rapport à la reconnaissance professionnelle, par rapport à certains ordres professionnels ou certaines corporations professionnelles. Il faut souligner à cet effet qu'il y a des professions qui sont fermées, c'est-à-dire que l'exercice de ces professions au Québec est quasiment infranchissable, notamment dans le domaine de la médecine, bien que l'Ordre des médecins commence à prendre peut-être, chaque année, un certain nombre de médecins formés à l'étranger et que, via la résidence, on essaie de les intégrer dans le système. Mais c'est très peu, lorsqu'on connaît la pénurie que nous avons de médecins et particulièrement les médecins en région, M. le Président. Il y a là un potentiel qui existe, qui dort et qu'on ne peut pas exploiter. C'est très dommage.

Certainement, l'accès au marché du travail est une des barrières structurelles et institutionnelles la plus importante à traverser pour les immigrants. Or, c'est par le travail que l'on s'intègre à la société québécoise. Que l'on soit un immigrant indépendant, que l'on soit un revendicateur de statut de réfugié lorsque le statut est établi au Québec, la première préoccupation, c'est de gagner sa vie. Les immigrants ne veulent pas vivre aux crochets de la société, ils ne veulent pas vivre du bien-être social, ils veulent apporter leur contribution, ils veulent travailler. Or, le marché du travail est semé d'embûches. La discrimination est une réalité qui existe encore, et les groupes demandent la sensibilisation des organismes, demandent la sensibilisation des entreprises et aussi la sensibilisation au sein de l'appareil gouvernemental.

Car, lorsqu'on parle de l'accès au marché du travail, le gouvernement n'est certainement pas un modèle. On s'entend là-dessus là, parce qu'à peine 2 % des citoyens qui font partie de la fonction publique québécoise sont issus de l'immigration, 2 %, alors qu'ils représentent plus de 10 % de la population québécoise. On voit la sous-représentation chronique dans l'appareil gouvernemental. Mais cela ne compense pas pour le travail qui doit être fait sur le terrain pour amener les entreprises, qu'elles soient publiques, parapubliques ou privées, à faciliter l'intégration des immigrants sur le marché du travail.

M. le Président, les groupes qui oeuvrent dans l'intégration des nouveaux arrivants, dans leur accueil et dans leur adaptation sont venus nous dire à quel point leur situation est précaire au niveau du financement, au niveau de la reconnaissance de leur travail. Car c'est comme ça qu'ils le sentent, ils sentent qu'ils ne sont pas reconnus dans le travail qu'ils font, qui est un travail colossal, un travail extrêmement important. Et j'interpelle le ministre, parce qu'il est nouveau dans ce dossier, mais l'immigration, c'est un dossier qu'il connaît, je l'interpelle pour qu'il prête attention aux demandes des organismes communautaires. Vous savez, s'il fallait que le gouvernement assume entièrement la fonction d'accueil, d'intégration et d'adaptation, ça coûterait les yeux de la tête aux contribuables québécois.

Nous avons des organismes communautaires qui se multiplient en quatre, qui fonctionnent souvent aussi avec l'apport des bénévoles et qui mobilisent la société autour d'eux, il faut leur donner les ressources appropriées pour faire leur travail. L'immigration francophone qu'on priorise, je suis effectivement intervenue en commission parlementaire pour dire que cette immigration qui parle français, qui ne prend pas le chemin des COFI, qui ne prend pas le chemin des carrefours qui vont être mis de l'avant pour remplacer les COFI, ces gens-là, ils ont un besoin urgent et immédiat, celui de s'intégrer au marché du travail le plus rapidement possible. Alors, il faut que les services d'intégration s'adaptent à cette réalité. Si on envoie des messages dans les pays de la francophonie que le Québec veut avoir des immigrants francophones, il ne faut pas que ces gens-là, qui arrivent avec une maîtrise du français, une compétence professionnelle toute en français se ramassent sur le bien-être social ou se découragent assez pour quitter le Québec et aller ailleurs. Donc, il faut être cohérent et il faut donner les services appropriés.

Les services d'immigration ont été traditionnellement conçus en fonction de l'immigration allophone. Il faut se réveiller. On a une proportion significative d'immigrants qui nous viennent avec une connaissance du français, et il faut leur donner les services dont ils ont besoin immédiatement pour faciliter leur intégration au marché du travail. Cela ne veut pas dire qu'il ne faille pas s'occuper des autres catégories d'immigrants, loin de là. Il faut s'occuper des immigrants qui ne parlent ni français ni anglais, il faut s'occuper aussi des immigrants dont l'anglais est la première langue seconde.

Tout ça, M. le Président, pour vous dire ? parce que je pense que le temps achève ? que l'immigration est un dossier très important. Il faut ramener ça au niveau des citoyens aussi, les impliquer, en région plus particulièrement. On ne peut pas fixer l'immigration en région si les décideurs locaux, si les décideurs régionaux, si les municipalités, si les chambres de commerce, si les cégeps, si les groupes communautaires ne s'impliquent pas ensemble dans une symbiose pour faciliter l'accueil et l'intégration de ces nouveaux arrivants. C'est essentiel, M. le Président.

Et, pour notre part, on va collaborer avec le gouvernement, parce que c'est un dossier majeur pour le Québec, pour l'avenir du Québec et pour aussi les nouveaux arrivants qui nous arrivent de partout à travers le monde. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de La Pinière, et je vais céder la parole à M. le député de Frontenac pour une intervention de sept minutes. M. le député.

M. Marc Boulianne

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, je suis très heureux, à titre de membre de la commission de la culture, d'intervenir sur le plan d'immigration triennal 2001-2003.

Lorsqu'on parle d'immigration au Québec, il faut considérer, M. le Président, deux réalités autour d'enjeux très spécifiques. D'abord, il faut signaler dans un premier temps que depuis plusieurs années la problématique de l'immigration au Québec s'inscrit dans une perspective d'ouverture au monde, à la diversité culturelle et à l'enrichissement mutuel. Dans un deuxième temps, je pense que les orientations du Québec en matière d'immigration doivent tenir compte d'enjeux importants. Ils sont au nombre de trois: les enjeux démographiques, économiques et linguistiques.

On l'a vu et on nous l'a dit en commission, M. le Président, je vais d'abord m'attarder sur les enjeux démographiques. On en a parlé tout à l'heure, la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne en a parlé, M. le président de la commission aussi en a parlé, je pense qu'il y a quatre éléments qui caractérisent la dynamique démographique du Québec.

D'abord, le taux de fécondité, on l'a mentionné, se situe au-dessous du seuil de remplacement. Il a baissé presque continuellement au cours des 30 dernières années. À ce rythme-là, il deviendra négatif dans les années 2020, 2026. Alors donc, c'est important d'en tenir compte. Il y a un deuxième élément aussi: le vieillissement de la population. Alors, si on conjugue ce fait-là au faible taux de fécondité, nous avons encore là des problèmes au niveau de la population active. Il y a aussi, que l'on doit mentionner, le poids démographique du Québec au sein du Canada, qui est à la baisse depuis plusieurs années. Enfin, on a aussi le solde migratoire, c'est-à-dire les entrées moins les sorties, tant au point de vue de l'immigration internationale qu'interprovinciale, qui est devenu aussi négatif.

Alors, nous avons là, M. le Président, à l'aube de l'an 2000, des tendances très négatives qui peuvent malheureusement se maintenir et qui pourraient avoir des conséquences assez graves sur l'avenir du Québec. Par exemple, nous savons très bien que la réduction du volume d'activité économique est proportionnelle évidemment aux acteurs économiques. Il va en découler aussi des difficultés au niveau des masses critiques, comme en éducation, par exemple. On pourrait aussi vivre des diminutions, comme on disait tout à l'heure, de taille de population et de main-d'oeuvre, des pénuries de main-d'oeuvre, des problèmes de financement aussi.

Alors, toute cette dynamique pose donc plusieurs défis au Québec, et le Québec doit maintenant concevoir l'immigration comme un levier d'intervention susceptible d'atténuer les effets négatifs des tendances démographiques.

n(12 heures)n

Alors, la mise en oeuvre de cette politique... Et on l'a mentionné tout à l'heure, le député d'Iberville l'a mentionné, l'augmentation de volumes d'admission est indispensable pour contrer ces effets négatifs sur la démographie. De plus, M. le Président, tout en poursuivant ses objectifs démographiques, le Québec, dans son plan triennal d'immigration, doit se fixer aussi des objectifs de composition de l'immigration, parmi lesquels ? et on l'a mentionné ? on retrouve le plus de personnes connaissant le français. Et enfin, toujours en ce qui a trait à la démographie, pour parvenir à reporter cette échéance du déclin de la population, il faudrait des niveaux d'immigration qui représentent le triple de ceux qui sont pratiqués actuellement.

En plus de la démographie, nous avons des enjeux économiques extrêmement importants. De façon générale, on nous a dit, donc, en commission, qu'on estime que l'immigration représente une valeur ajoutée ? et je pense que tous sont d'accord sur ça ? pour l'économie du pays d'accueil.

Alors, si l'on considère trois facteurs, d'abord, que la population immigrée est plus jeune et plus scolarisée surtout dans les cohortes plus récentes, un deuxième aspect, c'est que les immigrants sont proportionnellement aussi plus nombreux dans des secteurs névralgiques, et, selon aussi certaines données, les populations bénéficient d'un revenu moyen important, donc l'augmentation de l'immigration, peu importe dans quel secteur, aura des effets positifs sur l'économie, comme, par exemple, le développement des biens et services, je pense que c'est majeur, particulièrement dans des régions ? on l'a mentionné tout à l'heure ? avec une immigration appropriée. Les programmes aussi des immigrants qui sont admis à titre d'entrepreneurs, c'est important, comme travailleurs autonomes, qui vont contribuer, par leurs réalisations, à l'activité économique. Et enfin, vous avez toujours, dans ces enjeux économiques là, la part de l'immigration pour des candidats qui sont sélectionnés pour des besoins de main-d'oeuvre très spéciaux; on en a parlé tout à l'heure. Et tout ça se situe, M. le Président, au Québec, qui profite actuellement de retombées de croissance économique exceptionnelles.

Il y a un troisième facteur, il y a les enjeux linguistiques. Alors, c'est important aussi. La volonté de préserver l'identité culturelle de la société québécoise et d'assurer ? la députée, tout à l'heure, en a parlé, de Saint-Henri?Sainte-Anne ? la pérennité du fait français représente un des enjeux majeurs du développement du Québec. Alors, le consensus ? et on nous l'a dit en commission ? est ferme au Québec, l'immigration doit être accueillie et intégrée en français. Ajoutés aux dispositions législatives relatives à la langue d'enseignement, à la langue d'affichage et à la langue du travail, l'obtention et l'exercice par le Québec de pouvoirs accrus en matière d'immigration et d'intégration ont contribué à renforcer la place du français. Donc, aux arguments démographiques qu'il faut augmenter le volume des immigrants, aux arguments économiques en faveur de la hausse et de la proportion des travailleurs sélectionnés, s'ajoutent par conséquent ces arguments d'ordre linguistique.

La progression du nombre et de la population des francophones admis au Québec n'est toutefois pas sans limite et se heurte à un certain nombre de contraintes comme le bassin de candidats. Ainsi, il est prévisible, et on nous l'a mentionné aussi en commission, que le Québec doit continuer d'accueillir, toutes catégories confondues, une forte proportion d'immigrants ne connaissant pas le français, évidemment, mais par ailleurs connaissant l'anglais.

Vous me faites signe, M. le Président. Donc, si le Québec veut structurer un plan triennal d'immigration efficace, il nous faudra tenir compte de ces enjeux majeurs que sont les enjeux démographiques, économiques et financiers. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Frontenac. Ceci met donc fin au débat restreint de deux heures sur le rapport de la commission de la culture qui a tenu des auditions publiques dans le cadre d'une consultation générale sur le plan triennal d'immigration pour la période 2001-2003.

Maintenant, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 5)

 

(Reprise à 14 h 6)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés! Nous allons nous recueillir un moment.

Présence de parlementaires
de la Douma de l'État fédéré
régional de Samara, en Russie

Bien. Veuillez vous asseoir. À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, pour débuter la séance, j'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes de parlementaires de la Douma de l'État fédéré régional de Samara, en Russie. Alors, il s'agit de M. Vassily Potiakine, qui est le chef de la délégation, et de M. Nicolay Malakhov.

Affaires courantes

Aux affaires courantes, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Nous avons plusieurs dépôts de documents, encore une fois, aujourd'hui. Alors, nous allons débuter par M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.

Rapport annuel de l'Inspecteur général
des institutions financières

M. Landry: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1999-2000 de l'Inspecteur général des institutions financières.

Le Président: Bien. Alors, ce document est déposé. Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Rapports annuels du Conseil médical
du Québec, du Conseil de la santé
et du bien-être, de la Corporation
d'hébergement du Québec
et de l'Institut national de santé
publique du Québec

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je dépose les rapports annuels 1999-2000 suivants: le Conseil médical du Québec, le Conseil de la santé et du bien-être, la Corporation d'hébergement du Québec et l'Institut national de santé publique du Québec.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre des Transports et responsable de la Réforme électorale.

Rapport sur les causes techniques
de l'effondrement de poutres de béton
lors de la construction du viaduc du boulevard

du Souvenir, à Laval, et avis de la CDPDJ
et de la CAI sur l'émission
d'une carte d'électeur

M. Chevrette: M. le Président, je dépose, pour l'information de l'ensemble des membres de cette Assemblée, le rapport sur les causes techniques de l'effondrement de poutres de béton lors de la construction du viaduc du boulevard du Souvenir, à Laval, ainsi que les demandes d'avis reçues de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et de la Commission d'accès à l'information sur les modalités d'application de l'émission d'une carte d'électeur.

Le Président: Alors, ces documents sont également déposés. Mme la ministre des Relations internationales.

Rapport annuel de la Commission
de protection de la langue française

Mme Beaudoin: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1999-2000 de la Commission de protection de la langue française.

Le Président: Alors, ce document est déposé. Mme la ministre de la Justice et ministre responsable de l'application des lois professionnelles.

Rapports annuels de divers ordres
professionnels et rapport d'activité
du Tribunal administratif du Québec

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je dépose les rapports annuels 1999-2000 des ordres professionnels suivants, à savoir les chimistes, ergothérapeutes, ingénieurs forestiers, physiothérapeutes, urbanistes, ainsi que le rapport d'activité 1998-2000 du Tribunal administratif du Québec.

Le Président: Très bien. Tous ces documents sont aussi déposés. M. le ministre de l'Environnement.

Rapport annuel de RECYC-QUÉBEC

M. Bégin: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1999-2000 de RECYC-QUÉBEC.

Le Président: Alors, le document est déposé. M. le ministre de la Solidarité sociale.

Engagements de solidarité
conformément au projet Solidarité jeunesse

M. Boisclair: Oui, M. le Président, après une tournée à travers l'ensemble des régions du Québec, je dépose 55 engagements de solidarité signés par 1 200 partenaires: des députés, des maires, des présidents de commissions scolaires, des carrefours jeunesse-emploi, des chambres de commerce, des D.G. de cégeps, de CLSC, de comités jeunesse, de CLD, de présidents de la Commission des partenaires du travail et, bien sûr, de l'ensemble des directeurs des ministères de la Solidarité sociale, de la Sécurité du revenu et d'Emploi-Québec.

Le Président: Bien. Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce.

Rapport annuel de la Société du parc
industriel et portuaire de Bécancour

M. Julien: Alors, M. le Président, je dépose le rapport annuel 1999-2000 de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour.

Le Président: Bien. Alors, ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.

Réponse à une question inscrite au feuilleton

M. Brassard: Alors, M. le Président, je dépose la réponse à la question 23 inscrite au feuilleton du 28 mars 2000 par le député de Verdun.

Textes des lois adoptées par les membres
de la Première Législature du Parlement des sages

Le Président: Bien. Alors, la réponse est déposée. Pour ma part, je dépose les trois textes de lois qui ont été adoptées le 13 septembre dernier par les membres de la Première Législature du Parlement des sages qui s'est tenue à l'Assemblée nationale du 11 au 13 septembre dernier. Le premier texte de loi concerne la mise en oeuvre d'un revenu de citoyenneté. Le deuxième texte avait pour objet la reconnaissance économique de l'engagement social du citoyen. Et le troisième visait la création d'un programme de transfert du savoir et de savoir-faire en milieu de travail.

Préavis d'une motion des députés de l'opposition

J'ai reçu également, dans les délais prescrits, préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Alors, conformément à l'article 97.1 de notre règlement, je dépose copie du texte et de ce préavis.

n(14 h 10)n

Alors, il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Décision du président concernant l'exercice
du droit d'adresser des pétitions à l'Assemblée

Au dépôt de pétitions, il n'y a pas de pétitions aujourd'hui, mais, comme je l'avais indiqué la semaine dernière à l'Assemblée, je vais maintenant rendre la décision concernant les pétitions. Je voudrais m'excuser auprès des membres de l'Assemblée, j'aurais souhaité pouvoir leur distribuer le texte de la décision pour qu'ils puissent la lire en même temps que je la lis également, mais disons que les corrections de dernière minute ont fait en sorte que j'ai préféré finalement faire en sorte que le texte soit correct plutôt qu'on ait les facilités techniques.

Alors, au cours des derniers mois, la présidence d'Assemblée a été saisie à trois reprises eu égard à l'exercice du droit d'adresser des pétitions à l'Assemblée nationale. Pour chacune des questions soulevées par ces trois cas, on demandait à la présidence de se prononcer. Après analyse des faits qui m'ont été soumis, j'ai identifié quatre questions auxquelles j'ai décidé de répondre dans la présente décision. Ces quatre questions traitent de l'impact de la codification du droit de pétitionner, dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, sur la procédure d'exercice de ce droit dans le cadre des délibérations parlementaires. C'est l'article 21 de la Charte qui traite du droit de pétitionner, et il se lit comme suit, je le cite: «Toute personne a droit d'adresser des pétitions à l'Assemblée nationale pour le redressement d'un grief.» Fin de la citation de l'article.

Alors, les questions sont les suivantes. La première: La présidence de l'Assemblée peut-elle empêcher le dépôt d'une pétition mettant en cause la conduite d'un député? La deuxième: Est-ce qu'une personne peut adresser directement une pétition à l'Assemblée, c'est-à-dire sans passer par l'intermédiaire d'un député? La troisième: Est-ce que l'article 21 de la Charte des droits et libertés de la personne impose à l'ensemble des parlementaires de statuer sur le redressement demandé? Et, quatrièmement: Est-ce que des suites, particulièrement des réponses, doivent être données au contenu d'une pétition qui a été adressée à l'Assemblée?

Il s'agit de questions importantes qui mettent en cause à la fois le droit fondamental reconnu par la Charte des droits et libertés ainsi que des principes importants qui sous-tendent notre droit parlementaire. Avant d'aborder les principes, il importe de remettre chacune des questions dans son contexte.

À l'égard de la première question, celle-ci consiste à savoir si la présidence peut empêcher le dépôt d'une pétition mettant en cause la conduite d'un député. Les faits à l'origine de cette question sont les suivants. Le 23 mai dernier, je refusais le dépôt à l'Assemblée, par une députée ministérielle, d'une pétition non conforme au règlement. Des concitoyens et concitoyennes voulaient, par l'entremise de cette députée, adresser à l'Assemblée une pétition dont le contenu remettait en cause la légitimité du mandat confié à un député par la population de sa circonscription électorale.

Compte tenu que le règlement prévoit que le député qui transmet une pétition doit l'avoir remise au Bureau du secrétaire général au moins une heure avant la période des affaires courantes, j'avais pu prendre connaissance du contenu de la pétition avant son dépôt à l'Assemblée. Le jour même, je rencontrais la députée concernée pour lui faire part de ma décision de refuser le dépôt de la pétition. Le vendredi 26 mai suivant, le député de Saint-Jean me questionnait à cet égard. Je m'étais alors engagé à clarifier davantage cette question sur laquelle j'avais cependant statué sur-le-champ.

La deuxième question consiste à savoir si une personne peut saisir directement l'Assemblée d'une pétition et la troisième interroge la portée de l'article 21 pour savoir si ce dernier article impose à l'ensemble des membres de notre Parlement de statuer sur le redressement demandé. Ces deux questions découlent des faits suivants. Le 2 juin 2000, M. Jacques Dubreuil, à titre de représentant des Courtiers J.D. & Associés ltée, a demandé au président de l'Assemblée nationale, par l'entremise de ses procureurs, d'inscrire au feuilleton une pétition qu'il désirait soumettre à l'Assemblée afin que celle-ci intervienne pour juger son dossier litigieux avec le gouvernement.

M. Dubreuil ne s'est donc pas prévalu des dispositions des articles 62 et suivants du règlement qui traitent de la procédure pour adresser des pétitions à l'Assemblée. M. Dubreuil est d'avis que l'article 21 de la Charte des droits et libertés de la personne lui permet d'adresser des pétitions directement à l'Assemblée, et ce, sans qu'il ait l'obligation de suivre la procédure prévue au règlement. Cette procédure prévoit notamment que c'est par l'entremise d'un député qu'une personne peut adresser une pétition à l'Assemblée. En demandant d'inscrire la pétition au feuilleton, le pétitionneur désire, en plus, que l'Assemblée débatte de la pétition et qu'elle se prononce obligatoirement sur son contenu, car, prétend-il, la Charte des droits et libertés de la personne du Québec impose un devoir constitutionnel à l'Assemblée d'exercer une fonction d'administration de la justice.

Quant à la quatrième question, soit l'obligation de donner des suites aux pétitions adressées à l'Assemblée, elle provient du député de Nelligan. Dans une lettre qu'il m'adressait, le 18 septembre dernier, notre collègue me demandait si des suites avaient été données à une pétition qu'il avait déposée à l'Assemblée, le 30 mai de l'an 2000. Cette pétition de M. Paul Robin concernait l'industrie de l'assurance de dommages. Dans sa lettre, M. le député de Nelligan suggérait qu'un suivi officiel soit donné au dépôt de toute pétition. Selon lui, il pourrait s'agir d'une lettre transmise au ministre, au ministère ou à tout organisme gouvernemental directement concerné par la pétition. Par la suite, la réponse obtenue pourrait être expédiée au député qui a déposé la pétition.

En consultant les auteurs en droit parlementaire britannique, on apprend que le droit d'un citoyen d'adresser une pétition à la couronne ou au Parlement, en vue de redresser un grief, est un droit fondamental qui tire son origine avant le règne du roi Édouard 1er, au XIIIe siècle. En fait, on peut même trouver des traces de ce droit dans les pratiques démocratiques de la Grèce antique.

Le droit de pétitionner, tel qu'on le connaît aujourd'hui en Angleterre, a été exprimé dans deux résolutions adoptées par la Chambre des communes de Londres, en 1669. À la lecture de ces résolutions, on peut constater cependant qu'en contrepartie au droit de pétitionner on reconnaît également le privilège de la Chambre des députés de déterminer à quelles conditions une pétition peut être reçue.

Au Québec, le droit de pétitionner existait et il était utilisé bien avant sa codification dans la Charte des droits et libertés, en 1975. Même si elle a consacré son importance, cette codification n'a toutefois pas changé la nature du droit de pétitionner. Certes, le droit existe et est reconnu dans une loi fondamentale qui a préséance sur toute loi qui n'y déroge pas expressément, mais son exercice reste toujours soumis aux privilèges de l'Assemblée. C'est pourquoi, même si, au Québec, le droit de pétitionner est codifié dans une loi, l'encadrement procédural de son exercice est prévu dans le règlement de l'Assemblée nationale. En fait, la Charte des droits et libertés du Québec est complètement muette quant à sa façon de saisir l'Assemblée nationale d'une pétition.

À cet égard, nous savons tous que l'Assemblée, en vertu de ses privilèges parlementaires collectifs, a le pouvoir exclusif de régir ses travaux sans aucune entrave extérieure. Ce privilège est d'ailleurs codifié à l'article 9 de la Loi sur l'Assemblée nationale, qui prévoit que celle-ci établit les règles de sa procédure et qu'elle est la seule compétente pour les faire observer. Il importe de préciser que le droit exclusif qu'a l'Assemblée de régir ses affaires internes ne dépend pas de cette codification législative. Il s'agit, en fait, d'un privilège parlementaire dont l'Assemblée dispose de façon inhérente et qui jouit d'un statut constitutionnel. Le statut constitutionnel des privilèges parlementaires inhérents a été reconnu par la Cour suprême du Canada, en 1993, dans l'arrêt New Brunswick Broadcasting contre Nouvelle-Écosse, communément appelé l'arrêt Donohue. Leur statut constitutionnel fait en sorte que les privilèges parlementaires ont une préséance sur les droits dans la hiérarchie des sources juridiques.

D'ailleurs, il pourrait difficilement en être autrement, puisque la Cour suprême a décidé, dans cet arrêt, que la liberté d'expression, y compris la liberté de presse garantie par la Charte canadienne des droits et libertés, laquelle fait partie de la Constitution formelle du Canada, ne peut avoir préséance sur les privilèges parlementaires, et ce, pour le motif que les privilèges parlementaires inhérents ont le même statut constitutionnel que les droits prévus par ladite Charte.

Les privilèges parlementaires font en sorte que l'Assemblée et ses membres ne peuvent d'aucune manière être gênés ou entravés dans l'exercice de leurs fonctions. En d'autres mots, les délibérations de l'Assemblée ne peuvent être sujettes à des pressions qui proviennent de l'extérieur. Il en va de l'intérêt public. S'il en était autrement, les travaux de l'Assemblée pourraient être constamment paralysés, ce qui, on en conviendra tous, n'est pas souhaitable. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les tribunaux ne s'immiscent pas dans les travaux parlementaires.

n(14 h 20)n

En outre, et cela est très pertinent dans la présente décision, les tribunaux reconnaissent le droit exclusif des assemblées parlementaires d'appliquer certaines dispositions législatives lorsque celles-ci concernent leur fonctionnement. À titre d'exemple, l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867 prévoit qu'une recommandation royale est nécessaire pour l'adoption par l'Assemblée d'un projet de loi qui a une incidence financière. Même si toutes les assemblées législatives au Canada sont soumises à l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867, il semble que cet article soit appliqué d'une manière différente d'une assemblée à l'autre. À ce sujet, la Cour suprême a déjà mentionné, et je cite: «La déclaration et le dépôt d'un projet de loi font partie du processus législatif dans lequel les tribunaux ne s'immiscent pas. C'est le cas également de l'exigence purement procédurale que l'on retrouve à l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867.»

À la lecture de ce passage, nous constatons donc que, même s'il s'agit d'une disposition qui fait partie de la Constitution, la Cour suprême a reconnu le droit exclusif des assemblées parlementaires d'appliquer l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867. Même si cette disposition codifie un principe constitutionnel important dans le fonctionnement d'un État issu du modèle de Westminster, soit l'initiative financière du pouvoir exécutif, la Cour suprême en vient de toute évidence à la conclusion que son application constitue une affaire interne des assemblées parlementaires.

Compte tenu que le droit de pétitionner concerne, au premier chef, le fonctionnement de l'Assemblée nationale et compte tenu que le fonctionnement de celle-ci, en vertu de ses privilèges parlementaires, ne concerne qu'elle-même, le droit de pétitionner inscrit dans la Charte des droits et libertés doit donc être modelé aux règles de procédure de l'Assemblée. Ces règles de procédure auraient pu être prévues par la Charte elle-même, en fait, dans la Charte elle-même. Il arrive effectivement que le législateur préfère codifier des règles de procédure parlementaire dans la loi plutôt que dans le règlement. À titre d'exemple, la Loi sur la consultation populaire prévoit certaines règles particulières pour la tenue des débats référendaires.

Comme le Parlement, au moment d'adopter la Charte, n'a pas jugé opportun d'inclure une procédure pour encadrer le droit de pétitionner, c'est donc à l'Assemblée, en vertu de son droit constitutionnel de régir ses affaires internes, que revenait le droit d'établir les règles. Dans notre règlement, le droit de pétitionner est encadré par les articles 62 à 64 qui établissent des critères de fond et de forme pour qu'une pétition soit recevable à l'Assemblée. Ces règles de procédure ne sont pas incompatibles avec le droit de pétitionner prévu à la Charte des droits et libertés de la personne. Certes, cet article reconnaît un droit, mais les modalités d'exercice de ce droit sont prévues dans le règlement de l'Assemblée nationale. Et, comme je l'ai mentionné précédemment, il aurait pu en être autrement si la Charte avait édicté des règles particulières.

Cela dit, le respect des règles de procédure de l'Assemblée n'a pas pour effet de rendre théorique l'application de l'article 21 de la Charte. En fait, ces règles peuvent parfaitement coexister avec l'article 21. Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que ce n'est pas parce qu'un droit de s'adresser à l'Assemblée nationale est prévu dans une loi, fusse-t-elle la Charte des droits et libertés de la personne, que l'exercice de ce droit peut se faire n'importe comment. Il faut un certain encadrement, et, du reste, les députés eux-mêmes sont les premiers à être limités par les règles du droit de parole parlementaire lorsqu'ils interviennent à l'Assemblée, et ce, même s'ils jouissent par ailleurs du privilège constitutionnel protégeant leur droit de liberté de parole. En d'autres mots, ce n'est pas parce que le droit de pétitionner est prévu dans la Charte que l'encadrement procédural échappe à l'Assemblée.

Toutefois, je tiens à le répéter, l'existence de règles de procédure n'a pas pour effet de nier le droit des citoyens d'adresser des pétitions à l'Assemblée. Le Parlement du Québec respecte le droit de pétitionner qu'il a lui-même codifié dans la Charte. Aucun citoyen n'est empêché de l'exercer, sous réserve bien sûr des règles de procédure. D'ailleurs, en ce qui a trait à la coexistence des articles 62 à 64 du règlement et du droit de pétitionner prévu à la Charte, les professeurs Henri Brun et Guy Tremblay mentionnent ce qui suit dans la troisième édition de leur traité de droit constitutionnel, et je cite: «Il semble bien que l'article 21 de la Charte des droits et libertés de la personne, qui formule le droit de toute personne d'adresser des pétitions à l'Assemblée nationale, ne peut être sanctionné que par l'Assemblée elle-même. Voir les articles 62 et suivants du règlement de l'Assemblée nationale.» Fin de la citation. Il est important de noter que ce passage doctrinal s'inscrit dans la même logique que l'extrait précité du jugement de la Cour suprême qui reconnaît le droit exclusif des assemblées parlementaires d'appliquer l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867.

Eu égard à l'exercice du droit d'adresser des pétitions dans le cadre des délibérations parlementaires, soulignons que les pétitions présentées à l'Assemblée nationale ne se conforment pas, en grande majorité, aux critères de recevabilité prévus au règlement. À titre d'exemple, la plupart des pétitions non conformes le sont pour le motif qu'elles ne s'adressent pas à l'Assemblée ou pour le motif encore qu'elles ne demandent pas l'intervention de notre Assemblée. À moins d'un consentement unanime de l'Assemblée, une pétition qui ne respecte pas les critères prévus au règlement ne peut être déposée à l'Assemblée, et ce, même si le droit de pétitionner est prévu dans la Charte des droits et libertés. Nous en avons des exemples pratiquement à chaque séance de l'Assemblée. Cela démontre clairement que les députés n'ont jamais accepté jusqu'à maintenant que le droit de pétitionner s'exerce de n'importe quelle manière.

Afin d'exercer ses fonctions avec l'efficacité et dans l'ordre, le Parlement se doit absolument d'établir des règles du jeu dans son enceinte. Incidemment, le même principe s'applique pour l'autorité judiciaire quand il s'agit d'établir ses règles de procédure devant les tribunaux. Si le droit de pétitionner n'était pas encadré par les règles de procédure, les parlementaires devraient donc accepter le dépôt de n'importe quelle pétition à l'Assemblée, peu importent sa forme et son contenu. On doit comprendre que l'Assemblée ne peut pas perdre complètement le contrôle sur ses travaux parce que le droit de pétitionner est prévu par la Charte des droits et libertés.

De toute manière, nous avons vu précédemment que le droit qu'a notre Assemblée de régir ses affaires internes sans ingérence de l'extérieur découle d'un privilège constitutionnel qui, en droit parlementaire, ne peut être ignoré. En somme, une disposition législative qui traite de façon générale d'un droit sans prévoir les modalités d'exercice de ce droit ne peut avoir pour effet de faire perdre au Parlement son droit constitutionnel de régir ses affaires internes. C'est pourquoi la présentation d'une pétition doit se faire en conformité des règles relatives aux pétitions prévues au règlement. En pratique, cela n'a pas pour effet de brimer les citoyens dans leur droit d'adresser une pétition à l'Assemblée, puisque les députés acceptent généralement le dépôt de toute pétition, qu'elle soit conforme d'ailleurs ou non au règlement.

Il est intéressant de noter que toutes les règles de procédure des autres assemblées législatives que nous avons consultées encadrent le droit de pétitionner. À titre d'exemple, à la Chambre des communes du Canada, le règlement prévoit qu'une pétition doit porter la signature d'au moins 25 pétitionnaires pour qu'elle puisse être présentée. C'est donc dire que, si nous avions eu une telle règle à Québec, M. Robin ou M. Dubreuil, par exemple, n'auraient même pas le droit d'adresser leur pétition à l'Assemblée nationale.

Outre les critères précités relatifs à la conformité des pétitions prévus par la procédure parlementaire, il va de soi que les pétitions doivent respecter les autres dispositions du règlement. Même si elles ont un droit fondamental de pétitionner, les personnes qui adressent une pétition à l'Assemblée ne peuvent avoir plus de droit que les députés eux-mêmes de se soustraire aux règles de procédure qui régissent les travaux parlementaires.

Parmi ces règles, il y a, bien sûr, celles contenues au titre VI du règlement qui traite de l'intégrité du Parlement et de ses membres. Nous savons qu'il est interdit de mettre en cause la conduite d'un député dans le cadre des débats de l'Assemblée sans recourir aux dispositions de ce titre. C'est pourquoi l'article 35 du règlement prévoit notamment que le député qui a la parole ne peut attaquer la conduite d'un député si ce n'est par une motion mettant sa conduite en question.

Compte tenu des principes de droit parlementaire que je viens d'exposer ? bien sûr, un peu longuement ? je vais maintenant répondre précisément aux quatre questions qui font l'objet de la présente décision.

À la première question, je réponds par l'affirmative. Oui, la présidence de l'Assemblée était justifiée d'empêcher une députée de déposer une pétition qui mettait en cause la conduite d'un collègue, et ce, indépendamment du consentement de l'Assemblée. La pétition soulevait un doute quant à la légitimité du mandat du député et lui demandait de mettre son siège en jeu.

Bien sûr, en vertu de la doctrine parlementaire expliquée précédemment, l'Assemblée aurait pu déroger aux dispositions du règlement concernées pour permettre le dépôt de la pétition qui, en mettant en cause la conduite d'un député, n'était pas conforme. Toutefois, dans un tel cas, il aurait fallu, ni plus ni moins, demander au président de mettre de côté le devoir fondamental qu'il a de voir au maintien des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses membres.

À cet égard, je rassure tout de suite les membres de l'Assemblée en leur mentionnant que je n'entends d'aucune façon renoncer à ce devoir qui, d'une certaine manière, constitue la base même des fonctions de la présidence. C'est pourquoi, tant que je serai président de l'Assemblée nationale, je n'accepterai pas que soit déposée une pétition qui met en cause la conduite d'un député ou qui remet en question la légitimité du mandat confié à ce dernier par la population. Ainsi donc, je ne permettrai pas, dans ces circonstances, qu'un consentement soit donné pour déroger au règlement.

n(14 h 30)n

La bonne marche des travaux parlementaires ne pourrait être assurée si on remettait constamment en question la légitimité du mandat d'un député. De toute manière, notre société démocratique s'est donnée des moyens de contrôle pour s'assurer de l'application du droit électoral. À moins d'une décision contraire de la part des autorités compétentes en cette matière et à moins d'une motion présentée à l'Assemblée conformément au règlement mettant clairement en cause la conduite d'un député, tout député sans exception doit jouir pleinement, dans le cadre des travaux de l'Assemblée, de la confiance populaire qui lui permet de siéger parmi nous. Aucun député, quel que soit le côté de la Chambre où il siège, n'a intérêt à ce qu'il en soit autrement; il en va de la crédibilité même de notre institution. Voilà les motifs qui m'ont amené à refuser le dépôt de la pétition de la part de la députée ministérielle.

En ce qui a trait à la deuxième question, à savoir si une personne peut saisir directement l'Assemblée d'une pétition, la réponse est simple, non. C'est par l'entremise d'un député qu'une pétition peut parvenir à l'Assemblée nationale. Le Parlement en a décidé ainsi, et, tant que cette règle de procédure sera en vigueur, c'est de cette façon qu'il faudra pétitionner. Il importe de rappeler que cette procédure est conforme à celles des autres assemblées du type britannique que nous avons consultées.

J'en arrive maintenant à la troisième question qui consiste à savoir si l'Assemblée est tenue de se prononcer dans le cadre d'un débat sur le contenu des pétitions qui lui sont adressées. La réponse est également non, et ce, pour des motifs similaires à ceux qui ont justifié la réponse à la deuxième question. Rien dans les règles de procédure de notre Assemblée, adoptées en vertu de son privilège constitutionnel de régir ses affaires internes, ne prévoit particulièrement que l'Assemblée doive débattre des pétitions et se prononcer sur celles-ci en tant que tribunal d'arbitrage de litiges et de griefs. Certes, il pourrait en être autrement si l'Assemblée le décidait.

De même, en vertu des règles actuelles, l'Assemblée pourrait, à titre d'exemple, confier à une commission le mandat d'étudier une pétition. Mais, dans l'état actuel du droit parlementaire québécois, je ne peux voir une telle obligation dans le libellé de l'article 21 de la Charte des droits et libertés de la personne. Nous convenons tous que le droit d'adresser des pétitions à l'Assemblée est important, mais, avec égard pour l'opinion contraire, ce droit, qui incidemment n'est pas un droit constitutionnalisé en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne, ne peut faire perdre à l'Assemblée le contrôle de ses délibérations. C'est l'Assemblée qui doit décider à quelles conditions elle peut être saisie d'une affaire. Si l'article 21 de la Charte à lui seul avait pour effet d'obliger l'Assemblée de débattre chacune des pétitions qu'elle reçoit pour adresser des griefs, les travaux parlementaires seraient donc, en pratique, presque meublés entièrement de débats sur des pétitions.

En adoptant le libellé de l'article 21, l'Assemblée n'a certes pas choisi de paralyser son propre fonctionnement, et c'est pourquoi, si l'Assemblée décidait éventuellement d'accorder un tel traitement aux pétitions, il faudrait des règles très claires et très strictes pour encadrer tout cela, et ces règles, bien entendu, seraient élaborées par l'Assemblée elle-même. Je traiterai, d'ailleurs, dans ma réponse à la quatrième question, d'une proposition de modification du règlement que j'avais proposée à cet égard en avril 1998. Les motifs précités disposent, dans mon esprit, de la demande de M. Jacques Dubreuil qui désire que sa pétition soit inscrite au feuilleton et que l'Assemblée statue obligatoirement sur le fond du litige qui le confronte au gouvernement.

Enfin, en ce qui a trait à la quatrième question soulevée par le député de Nelligan et qui traite de l'obligation de donner des suites aux pétitions, je partage les préoccupations de notre collègue. De fait, rien dans le règlement actuel ne prévoit la possibilité de donner des suites aux pétitions adressées à l'Assemblée. En fait, selon nos règles de procédure, le traitement donné aux pétitions est le suivant et il se résume ainsi: au moment prévu des affaires courantes, le député qui agit comme intermédiaire auprès des pétitionnaires à l'Assemblée dépose un document intitulé Extrait de pétition. Celui-ci indique le nombre de signatures que comprend la pétition, la désignation des pétitionnaires, les faits invoqués dans la pétition et l'intervention réclamée par les pétitionnaires. Le secrétaire général conserve l'original de la pétition au moins sept jours. Après ce délai, il le remet au député qui l'a transmis à l'Assemblée. Rien d'autre dans le règlement n'est prévu concernant les suites à donner aux pétitions.

Comme je l'ai relaté au début de la décision, le député de Nelligan suggère que toute pétition déposée à l'Assemblée devrait être transmise au ministère ou à l'organisme concerné, une réponse du ministère ou de l'organisme devant ensuite être expédiée au député qui a déposé la pétition. Mais, pour en arriver là, il faudrait des modifications aux règles de procédure de l'Assemblée. Ainsi, j'avais fait une proposition de changement, en avril 1998, dans le cadre d'un projet de réforme de nos règles de procédure parlementaire. Cette proposition avait d'ailleurs été discutée à la commission de l'Assemblée nationale, mais, malheureusement, les groupes parlementaires n'ont pas choisi d'y donner suite. Dans cette proposition, je suggérais notamment que le gouvernement ait l'obligation de répondre aux pétitions déposées à l'Assemblée, sans quoi celle-ci aurait pu discuter du contenu de la pétition lors d'un débat de fin de séance, par exemple, le mercredi. Voilà un exemple de règle de procédure parlementaire qui pourrait permettre de donner des suites aux pétitions adressées à l'Assemblée. Il est important de noter qu'une procédure semblable existe dans d'autres assemblées. Est-il nécessaire d'ajouter que je souhaite personnellement toujours que les citoyens reçoivent des réponses aux pétitions qu'ils se donnent la peine d'adresser à l'Assemblée de leurs élus?

Je me permets de soulever de mon propre chef, en terminant, certaines autres questions qui se posent relativement à la présentation de pétitions à l'Assemblée nationale. D'abord, si aucun député ne désirait déposer une pétition, comment pourrait-on s'assurer que le droit de pétitionner de la personne soit respecté? Est-ce que la présidence devrait alors jouer un rôle? Nous savons que notre droit parlementaire ne permet pas au président de déposer une pétition, pour le motif qu'il ne prend pas part aux débats de l'Assemblée et, en outre, qu'il doit juger de la conformité de ces pétitions. De même, comment la présidence pourrait-elle s'assurer qu'aucun autre député ne désire présenter la pétition? Est-ce que la présidence devrait devenir la personne par l'intermédiaire de qui passerait le dépôt de toute pétition à l'Assemblée? Chose certaine, il y a actuellement un vide procédural qui théoriquement pourrait empêcher l'exercice du droit de pétitionner consacré dans la Charte des droits et libertés, et, à mon avis, il importe de combler ce vide.

Une autre problématique relative aux pétitions concerne leur conformité au règlement. Comme je le mentionnais précédemment, la plupart des pétitions déposées à l'Assemblée sont non conformes. Même si cette non-conformité n'amène pas, en pratique, le rejet des pétitions, puisque les députés donnent généralement leur consentement au dépôt, j'avais également fait à ce sujet une proposition de réforme en avril 1998. Cette proposition n'a toujours pas reçu de réponse des groupes parlementaires. Cela dit, je ne crois pas qu'il revienne à la présidence seule d'établir le cadre procédural du dépôt des pétitions à l'Assemblée. Il s'agit d'un droit fondamental, nous le reconnaissons tous. En parallèle, il y a aussi un droit constitutionnel primordial, celui qu'a l'Assemblée nationale de régir ses propres affaires internes sans ingérence de l'extérieur. Je suggère donc aux députés, en particulier aux leaders parlementaires, de reprendre le processus de réforme. Nous pourrions alors nous attarder en priorité aux termes qui traitent des pétitions.

En terminant, il importe de préciser que la présente décision ne vise pas à banaliser le droit d'adresser des pétitions à l'Assemblée. À ce propos, le fait, pour des citoyens et des citoyennes, de pouvoir exprimer des points de vue et réclamer des corrections à l'Assemblée des élus du peuple, la première et la plus importante institution politique de notre société, n'est pas banal, en démocratie, et cela, même si les règles de procédure et la loi ne font pas obligation aux députés de se prononcer. De plus, disons-le clairement également, au-delà de la place qu'elle occupe dans la hiérarchie juridique, l'importance de la Charte réside d'abord et avant tout dans le fait qu'elle renferme les valeurs humaines les plus importantes pour notre société.

L'inclusion à cette loi du droit ancestral d'adresser des pétitions aux élus du peuple nous démontre jusqu'à quel point le Parlement du Québec y accordait une importance particulière. Néanmoins, je crois qu'il faudra tôt ou tard nous demander si nos règles de procédure sont à la hauteur de la reconnaissance juridique que nous avons accordée à ce droit démocratique fondamental.

Bien. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, compte tenu des dispositions de l'article 41 qui stipulent que la décision du président ou de l'Assemblée ne peut être discutée, très brièvement, vous avez créé des ouvertures. Présentement, nous avons un droit fondamental qui est garanti dans la Charte des droits et libertés de la personne, nous avons également une procédure de l'Assemblée nationale qui ne permet pas à ce droit de s'exercer correctement.

L'avocat de M. Dubreuil a été sévère dans son constat. Après avoir eu un avis favorable du Protecteur du citoyen, trois jugements de cour favorables, il s'exprime comme suit: «Si mon constat s'avère exact, cela signifierait qu'au cours des 25 dernières années l'Assemblée nationale a traité la pétition non pas comme l'exercice par les citoyens d'un droit constitutionnel mais plutôt comme un dérisoire et stérile rituel ne servant qu'à justifier l'utilité des déchiqueteuses de l'Assemblée nationale du Québec.» C'est assez grave comme constat, et c'est la situation dans laquelle nous sommes placés.

Vous avez invité, M. le Président, les leaders à collaborer à la réforme que vous avez proposée et peut-être à la bonifier comme tel de façon à ce que la justice ne soit pas au service de la procédure mais que ce soit un petit peu l'inverse. Moi, je sens ? ou j'ai déjà senti dans le passé ? du côté du leader du gouvernement une certaine ouverture, mais je n'ai jamais senti cette ouverture du côté du premier ministre. C'est le 25e anniversaire de la Charte des droits et libertés de la personne. On parle d'un droit fondamental des individus et des citoyens du Québec. Est-ce que le premier ministre peut s'engager aujourd'hui à donner son aval à ces modifications procédurales?

n(14 h 40)n

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui, bien, d'abord, M. le Président, je ne sais pas où le leader de l'opposition est allé chercher cette interprétation qui s'est transformée en accusation, à tout le moins en insinuation injustifiée et non fondée. Vous avez demandé au leader de se joindre à vous pour examiner la possibilité de combler ce que vous avez qualifié de lacune procédurale. Je peux vous dire, de notre côté, que nous sommes tout disposés à travailler avec vous.

Le Président: Bien. Et je voudrais rappeler, M. le leader de l'opposition officielle, que, dans la décision, à la fin, j'ai pris la peine de me dissocier des commentaires des avocats de M. Dubreuil. Il peut, lui, avoir le point de vue que depuis 25 ans, finalement, l'Assemblée tourne en dérisoire le droit de pétitionner. Moi, je pense ? et c'est ce que je dis ? que le simple fait de pouvoir, dans une démocratie, permettre aux citoyens, quels qu'ils soient, de s'adresser aux élus de leur Parlement, c'est déjà pas banal.

Est-ce que ça veut dire que, ici, à chaque fois qu'un citoyen peut s'adresser à l'Assemblée et s'adresse, effectivement, parce que sa pétition est déposée, automatiquement il y a une obligation pour le Parlement de se saisir et de se prononcer? Bien, je veux dire, en regard des redressements de griefs, la plupart des pétitions qui sont présentées à l'Assemblée concernent les redressements de griefs. Et, comme je l'ai indiqué dans la décision ? et je le répète ? s'il fallait en venir à cette façon de concevoir les choses, ça voudrait dire que le Parlement passerait son temps à ne discuter que de redressements de griefs présentés par des citoyens. Et, si on ne veut pas que cela intervienne...

Et ce n'est pas ce que voulait le Parlement, en 1975, quand il a adopté la Charte des droits et libertés, notamment l'article 21, et je pense que les législateurs qui nous ont précédés mais qui siégeaient dans la même enceinte savaient très bien ce qu'ils faisaient, en 1975. C'est-à-dire, ils savaient très bien que, s'ils écrivaient autrement l'article 21, on interpréterait finalement cet article comme donnant ouverture à faire en sorte que, à chaque fois qu'il y a une pétition présentée à l'Assemblée, il y a aussi un débat sur la pétition et une obligation pour l'Assemblée de statuer. Il faut voir ce que ça veut dire dans les faits concrètement.

Moi, je crois qu'actuellement ce n'est pas ce que la loi prévoit ni la procédure parlementaire prévoit, et, en conséquence, si on veut changer la procédure, on peut le faire, mais, à ce moment-là, on le fera en connaissance de cause. Et j'indique que, si jamais on devait le faire, bien, il faudrait qu'on ait des sacrées balises pour faire en sorte qu'on finisse par faire autre chose que de discuter de pétitions à l'Assemblée. Voilà l'essentiel de la déclaration. Pour le reste, je pense que le texte, qui était long mais qui était...

Des voix: ...

Le Président: Je vous remercie, M. le premier ministre, de votre indulgence. Et je comprends que j'obtiens la même indulgence du chef de l'opposition officielle. Bien.

Alors, avant de passer à la période de questions et de réponses orales, je vous rappelle qu'il y a un vote reporté sur la motion de censure de M. le chef de l'opposition officielle qui a été débattue le 19 octobre dernier.

Questions et réponses orales

Alors, maintenant, je vais céder la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

Participation des personnes âgées aux tables
de négociations sur les surplus des caisses de retraite

M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. Je ne voulais pas vous interrompre non plus et je veux justement soulever un grief très important au premier ministre, un grief qui vient, cette fois, des retraités du Québec, beaucoup de personnes âgées au Québec, parce que nous avons, à l'Assemblée nationale, actuellement un projet de loi, un projet de loi que le gouvernement a amendé, le projet de loi n° 102, qui vise à établir les règles quant à l'utilisation du surplus des caisses de retraite et qui ne reconnaît que deux parties au contrat, la partie syndicale et la partie patronale. Ainsi, des travailleurs non syndiqués et les retraités sont non seulement ignorés, mais seront, en plus, liés par des décisions auxquelles ils n'auront pas participé.

M. le Président, le premier ministre le sait, j'en suis convaincu, que le coût de la vie augmente, qu'il y a plusieurs personnes âgées au Québec qui doivent faire appel à des soins à domicile, que le gouvernement a fait monter en flèche les primes d'assurance médicaments, que les personnes retraitées ont de moins en moins de moyens et de moins en moins de pouvoirs, et le premier ministre doit savoir également qu'un système de retraite, ce n'est pas un cadeau de l'employeur, c'est un salaire différé. C'est donc un principe extrêmement important, un salaire différé qui appartient aux gens qui y ont contribué.

Alors, j'aimerais savoir de la part du premier ministre s'il a l'intention finalement d'écouter les gens qui sont ici aujourd'hui et d'autres qui lui demandent justice et de ne pas flouer les retraités du Québec avec la loi n° 102.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de la Solidarité sociale.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Oui, M. le Président. Je remercie le chef de l'opposition pour sa question. D'abord, un certain nombre de choses. Lorsqu'on prend un peu de distance par rapport au débat qui a cours, de quoi est-ce qu'on s'aperçoit? D'abord, que l'intérêt public commande que nous solidifiions les outils de canalisation de l'épargne des travailleurs québécois et québécoises. Pourquoi? Parce que le revenu de retraite privé des Québécois et des Québécoises stagne, voire même, dans certains cas, diminue, au Québec.

Je pense que l'intérêt public aussi commande que l'on solidifie cet excellent outil qui est celui des régimes complémentaires de retraite et que nous levions, du fait même, des incertitudes juridiques qui planent sur l'utilisation des surplus. Nous sommes la seule province au Canada, le seul État en Amérique du Nord à ne pas avoir réglé cette question.

Je pense aussi, M. le Président, que l'intérêt public commande que l'on simplifie l'administration des régimes et qu'on adapte cet outil aux nouvelles réalités du marché du travail, particulièrement aux besoins des travailleurs qui sont, comme vous le savez, de plus en plus mobiles sur le marché du travail. Finalement, l'intérêt public commande que nous fassions preuve de davantage de transparence et que nous donnions une meilleure information à l'ensemble des participants, qu'ils soient actifs ou retraités, et c'est à ces trois missions que le gouvernement s'attaque, et c'est à ces trois objectifs que le projet de loi n° 102 répond, et je suis fier de le présenter.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, permettez-moi de dire ma très vive déception que le premier ministre ait choisi de faire parler son ministre, qui lit très bien ses notes mais qui nous répète des réponses qu'on a entendues déjà des centaines de fois, et qu'il ne réponde pas directement aux personnes qui se sont déplacées aujourd'hui pour entendre non pas la réponse de celui qui lit les notes du ministère mais entendre la réponse du premier ministre du Québec.

Est-ce que le premier ministre va se lever debout pour répondre à ces gens-là, oui ou non?

Le Président: M. le ministre.

M. André Boisclair

M. Boisclair: D'abord, M. le Président, ce qu'il faut regarder, c'est: Est-ce que la situation préjudiciable... Le mécanisme qui est prévu à la loi n° 102 est celui qui existe en ce moment, que nous bonifions par 102, parce que tout le monde va convenir que 102 apporte de nombreuses bonifications. Les libéraux ont voté en faveur de 90 % des articles du projet de loi. Est-ce que la situation actuelle est préjudiciable à l'endroit des retraités? Je peux rendre publique aujourd'hui, à la suite des discussions que nous avons eues en commission parlementaire, une étude qui a été rendue publique. C'est des conclusions, j'en ai déjà parlé au député de Verdun.

Mais, lorsqu'on regarde la situation entre 1995 et 1999 sur l'utilisation des surplus, les règles du jeu actuelles ont fait en sorte que 60 % de l'utilisation des surplus a été aux participants, qu'ils soient actifs ou retraités. Et, de ce 60 %, 59 % est allé aux retraités. Alors, M. le Président, il n'y a pas de préjudice, comme semble le soutenir l'opposition. Dans les faits, les choses fonctionnent bien, les retraités sont, parmi les participants, ceux qui ont le plus bénéficié de l'utilisation des surplus.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

Publication de rapports
sur les fusions de municipalités

M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, je peux juste répéter ma déception que le premier ministre n'ait pas choisi de s'exprimer sur cette question-là. Mais son ministre soulève une question intéressante, puisqu'il a en main, il dit, des études. Il va les rendre publiques. Oui, drôle de coïncidence, parce que je voulais poser une question au premier ministre au sujet de ses études à lui dans les affaires municipales. Puisque son ministre semble prêt à les rendre publiques sur la loi n° 102, sur le principe, il n'y a pas de problème.

n(14 h 50)n

Et le premier ministre, la semaine dernière, a été mis au courant, il le savait déjà, qu'il a des études, lui, à l'intérieur de son gouvernement sur les conséquences des fusions pour les municipalités au Québec, sauf que, la semaine dernière, il a plaidé qu'il n'allait pas les rendre publiques, que les fusions forcées allaient se faire sans que les citoyens du Québec aient accès aux études. Il y a même pire que ça, sa ministre des Affaires municipales est allée plus loin en disant qu'on va seulement rendre éventuellement publiques les études qui font notre affaire, c'est-à-dire sur les sujets qui font notre affaire, M. le Président.

Alors, ma question est au premier ministre: Est-ce qu'il va faire preuve de transparence? Est-ce que le premier ministre va arrêter d'agir en catimini? Et pourquoi trafiquer en cachette des études alors que c'est les contribuables et les citoyens du Québec qui ont fait des choix de milieux de vie qui seront affectés par les décisions de fusions forcées?

Le Président: Alors, c'est une seconde question principale, et je voudrais vous indiquer, M. le chef de l'opposition, que j'apprécierais que vous n'utilisiez plus le terme «trafiquer» dans le sens où vous venez de le faire parce que ça fait en sorte que vous prêtez une intention au premier ministre, donc à un membre de l'Assemblée, ce que notre règlement interdit de faire. M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je pense que le chef de l'opposition va reconnaître ? enfin, je ne désespère pas qu'il le reconnaisse ? que tout le processus qui conduit à la réforme municipale s'est accompli dans une très grande transparence. Depuis maintenant un an à peu près, d'innombrables personnes ont été consultées, les élus, la commission Bédard a entendu plus d'une centaine de mémoires, nous avons eu ensuite des mandataires qui ont sillonné tous les territoires, d'autres le font encore dans d'autres parties du Québec. Nous sommes maintenant en possession, s'agissant de l'Outaouais, des régions métropolitaines de Montréal et de Québec, de rapports très étoffés qui proposent au gouvernement un tableau de ce qui peut être fait pour remédier au grand problème du morcellement municipal au Québec. Le gouvernement est en train d'analyser à fond ces rapports qui sont complexes ? certains mêmes les ont accusés d'être, dans un cas, trop complexes ? nous sommes en train de sortir de ces rapports ce qui devrait être des options à favoriser. Nous ne travaillons pas de façon unique, nous regardons quelles sont les différentes possibilités. Nous en distinguons, dans chaque cas, mettons, deux ou trois, et nous avons demandé des évaluations de ce que signifie, notamment en termes d'impact fiscal, le choix de l'une ou l'autre de ces options.

Le gouvernement va faire son lit, la décision gouvernementale va être prise au cours des prochaines semaines et nous allons déposer un ou des projets de loi qui feront état des décisions qui seront prises, et en même temps, et auparavant si nous le pouvons, M. le Président, nous allons déposer des études, des projections qui vont montrer quels sont les impacts des différentes options que nous avons regardées. Alors, je ne vois pas qu'on puisse encourir ce reproche du chef de l'opposition que nous travaillons en catimini; au contraire, nous souhaitons travailler avec la population, avec l'opposition, en toute clarté, en toute lumière, comme nous l'avons fait depuis le début.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, le premier ministre dit qu'il n'est pas d'accord avec la déclaration de l'opposition officielle qui dit que le gouvernement travaille en catimini. S'il n'est pas d'accord avec l'opposition officielle, est-ce qu'il peut me dire s'il est d'accord avec la déclaration suivante, et je cite: «"Pour lui, il faudra ? il s'agit d'un ministre de son gouvernement qui parle ? que le débat reprenne en toute transparence. On peut se parler et discuter au niveau des idées même si on n'aime pas", croit Guy Chevrette, qui avoue que ce ne sera pas facile quand même, car on vient de se déchirer sur la place publique, et le tout va laisser des séquelles. "C'est ainsi lorsqu'on veut tout faire seul en catimini"»? Ce n'est pas l'opposition officielle qui reproche au premier ministre d'agir en catimini, c'est son ministre des Transports, le député de Joliette, qui lui reproche ça, à M. le premier ministre.

Mais il y a plus que ça, M. le Président, et je peux lui donner la citation, c'est le journal L'Action du 22 octobre 2000. Dans le journal L'Expression du 22 octobre également, M. Chevrette parlait de la mairesse de Joliette qui, elle, veut faire des fusions. Il disait: «Mme Lafrenière doit comprendre qu'on ne peut pas arriver en matamore et imposer ses idées ? ça ressemble drôlement à son premier ministre. La vérité absolue ne réside pas en une seule tête. Ce dossier ne se trafiquera pas en cachette.»

Alors, M. le Président, ma question est la suivante: Est-ce que le premier ministre, compte tenu des déclarations de son ministre qui va plus loin et qui nous déclare ceci: «De plus, j'ai reçu l'assurance du premier ministre, Lucien Bouchard, que chaque député impliqué dans un dossier de regroupement sera mis à contribution»... Il a donné la garantie que chaque député de l'Assemblée nationale serait mis à contribution. Si c'est le cas, où sont les études?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition, vous conviendrez que c'était une longue question complémentaire. Alors...

Des voix: ...

Le Président: Ce n'est pas au président de juger si elle était bonne, mais je vais être indulgent à l'égard du ministre pour la réponse. M. le ministre des Transports.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, vous aurez remarqué que le chef de l'opposition a commencé à faire de mes propos des avertissements envers mes collègues alors que le tout est quelque chose de très local. Exactement, il y a eu un discours de la mairesse de Joliette, à la Chambre de commerce de Joliette, qui a soulevé un tollé. Elle a refusé de donner ses discours et ses lettres regardant ce dossier-là. C'est là que j'ai déclaré que ça se ferait en toute transparence, que j'aiderais le dossier en temps et lieu, mais pas du tout dans le sens que le fait le chef de l'opposition, qui, par honnêteté intellectuelle, doit au moins affirmer que mes propos ne touchent en rien mes collègues de l'Assemblée nationale.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Quel exemple de solidarité ministérielle, M. le Président! Un ministre du gouvernement qui se lève pour nous dire que ses propos ne touchent en rien ses collègues de l'Assemblée nationale du Québec, ça va passer aux annales, ça, de l'histoire parlementaire québécoise. Mais il y a plus que ça, parce que le ministre a peut-être oublié que, il y a moins d'un an, lorsqu'il a pris la parole devant la Chambre de commerce de Joliette, il a également déclaré que les mariages forcés, ce n'était pas bon. Ça, il l'a peut-être oublié, et ça, ça touchait tous ses collègues de l'Assemblée nationale du Québec.

Mais, tant qu'à avoir le ministre devant moi, M. le Président, et pour garder le premier ministre bien informé des positions du ministre, je veux reprendre l'article de L'Action du 22 octobre où on dit ceci: «Guy Chevrette a confié à la presse que le premier ministre l'a assuré que tous les députés représentant les villes touchées par un projet de fusion forcée seront consultés et qu'on les écoutera ? entre guillemets: "Moi, j'ai des idées pour une formule différente et je parlerai le temps venu."» Eh bien, M. le ministre, le temps est venu! Levez-vous, parlez!

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je vais tenter de parler et non pas de crier comme le fait le chef de l'opposition. Tout d'abord, j'ai entendu à maintes reprises en cette Chambre que ce ne serait pas du mur-à-mur mais que ça pourrait être du sur mesure. Et, oui, comme député de mon comté et de ma région, j'ai des hypothèses de solution qui assurent l'équité fiscale. En temps et lieu, d'abord auprès de mes collègues, je les ferai connaître, et je suis persuadé que ce sera beaucoup plus constructif que peut l'être le chef de l'opposition par ses questions.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Mon additionnelle va être très courte. Le premier ministre a donné des assurances à son député de Joliette, ministre des Transports, que tous les députés seraient consultés sur les fusions forcées, M. le Président. C'est ce que le ministre vient de nous confirmer, c'est ce que le député de Joliette a dit. Est-ce qu'il est prêt à donner cette même garantie à tous les députés de l'Assemblée nationale sans exception?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, les décisions qui seront prises nécessiteront d'être soumises au processus législatif. Je ne doute pas que tous les députés voudront être présents en cette Chambre lorsqu'il s'agira de débattre de ces questions importantes et d'en décider.

Le Président: Alors, en question principale, maintenant, M. le député de Limoilou.

Effets d'éventuelles fusions municipales
sur les comptes de taxes

M. Michel Després

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. En principale, le 5 octobre dernier, les députés péquistes de la région de Québec ont endossé le rapport Lapointe, rapport qui est lourd de conséquences pour les citoyens de la capitale. Ils ont, en conférence de presse, clairement indiqué que, si les fusions municipales entraînent une hausse du compte de taxes, ne serait-ce que d'une seule municipalité d'agglomération, ils retireraient leur appui à la ministre des Affaires municipales.

n(15 heures)n

Et je cite, M. le Président, le ministre de la Capitale: «Il n'y aura pas de perdant. La condition sine qua non qu'il n'y ait pas d'augmentation de taxes dans les villes...», et ça, M. le Président, ça inclut la ville de Sainte-Foy ? il doit bien la connaître ? la ville de Sillery, la ville de Cap-Rouge et la ville de Saint-Augustin.

Le problème, M. le Président, c'est que ? c'est dans la même journée ? le président du caucus, le député d'Abitibi-Ouest, a dit tout à fait le contraire du ministre de la Capitale, et je le cite, M. le Président. Il faut le citer, hein? Il disait quoi, le président du caucus? «Il n'est pas possible de donner de garantie qu'il n'y aura pas de hausses de taxes pour personne. Je connais assez les affaires municipales.»

Des voix: Ah!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Alors, M. le député de Limoilou, votre question maintenant.

M. Després: Ah! mais ce n'est pas terminé, M. le Président, parce qu'il y a eu des contradictions. Voyez-vous, là...

Le Président: Non, mais, un instant! Je m'excuse, mais vous avez un temps limité. Si vous voulez, selon votre point de vue, exposer des contradictions, disons que le chef de l'opposition ? votre chef ? a un peu plus de latitude que vous.

M. Després: Mais, M. le Président, c'était pour prendre les paroles du premier ministre. Lui-même, en cette Chambre, il a dit quoi, M. le Président? Il a dit: «Ceux qui, présentement, sont mieux traités en termes de fardeau fiscal vont, bien sûr, participer davantage.».

À la lumière de ces déclarations, ma question est fort simple. Au ministre de la Capitale, M. le Président, lui et ses collègues, étant donné qu'ils ont pris l'engagement qu'il n'y aura pas d'augmentation de taxes, quand vont-ils retirer leur appui à la ministre des Affaires municipales, comme ils se sont engagés à le faire, le 5 octobre dernier?

Le Président: Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. J'en profite, puisque il est question de taxes municipales, pour rappeler que nous avons signé, il y a maintenant à peine deux semaines, une entente que l'on qualifie d'historique, dans le milieu municipal, en matière de pacte fiscal.

Des voix: Bravo!

Une voix: Une autre, mais maintenant c'est sûr.

Mme Harel: Voilà. Alors, chaque semaine... donc, il y a deux semaines, une entente qui va injecter 1,5 milliards de dollars, au cours des cinq prochaines années, dans le milieu municipal.

Et je vais simplement citer le président de l'Union des municipalités du Québec, M. Guy Leblanc, qui disait ceci, et je cite: «Un événement significatif historique pour le gouvernement, pour les municipalités et pour le Québec tout entier, et elle marque une ère nouvelle dans nos relations».

Alors donc, M. le Président, ce pacte fiscal tourne la page sur les nuages qui s'étaient accumulés et nous permet d'envisager les prochaines années dans une saine collaboration.

Alors, M. le Président, je vous rappelle que nous travaillons très fort, mes collègues et moi, pour qu'il y ait, grâce à ces programmes d'aide aux regroupements que nous retrouvons dans le pacte fiscal, un montant global, sur cinq ans, de 225 millions, grâce aussi aux mesures d'atténuation pour lesquelles nous entendons légiférer, grâce également à ces mesures déjà adoptées dans la loi n° 124 qui prévoit une intégration à coût nul des conventions collectives de travail.

Nous travaillons, M. le Président, pour qu'il n'y ait pas une hausse globale du fardeau fiscal et pour faire en sorte que chacun en vienne, cependant, graduellement, à payer sa juste part.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Hull.

M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Est-ce que la ministre, qui vient de nous parler d'un pacte fiscal bâclé, peut nous dire exactement comment expliquer aux citoyens de l'ensemble des régions du Québec qu'ils devraient prendre 225 millions de dollars de leur poche, des impôts qu'ils paient, pour subventionner la folie des structures à Montréal, Québec et l'Outaouais?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Tout simplement, M. le Président, en citant le président de la Fédération québécoise des municipalités, qui regroupe un millier de petites municipalités sur tout le territoire du Québec, et qui s'est dit plus que satisfait de l'accord signé avec le gouvernement du Québec en matière fiscale.

Le Président: ...à nouveau M. le député de Hull.

M. Roch Cholette

M. Cholette: Est-ce que la ministre peut au moins nous dire en cette Chambre que le résultat net du pacte fiscal, c'est que le monde municipal et surtout les citoyens du Québec vont perdre au bout de cinq ans 1 milliard de dollars à cause de son collègue des Finances qui a enlevé la TGE dans les poches des citoyens du Québec?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, je comprends qu'il n'y a que l'opposition libérale qui a l'air d'être mécontente, puisque cette entente a fait l'affaire de 88 % des municipalités présentes au congrès de la Fédération québécoise des municipalités du Québec et de 85 % des municipalités présentes au congrès de l'Union des municipalités du Québec.

Le Président: M. le député.

M. Roch Cholette

M. Cholette: Malheureusement, le son voyage mal, je vais reprendre ma question: Est-ce qu'elle peut confirmer que le monde municipal est perdant de 1 milliard de dollars sur cinq ans à cause de la ponction du budget du ministre des Finances du 14 mars dernier? Les citoyens du Québec vont subventionner la folie des structures du gouvernement, M. le Président.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Je pense que c'est avec une très honnête satisfaction et un peu d'enthousiasme que le monde municipal a signé cette entente fiscale qui lui permet de voir le gouvernement payer ses «en lieu» de taxes au niveau des institutions primaires et secondaires jusqu'à 75 % et au niveau supérieur et établissements de santé jusqu'à 98 %. Je pense que ça réjouit, n'est-ce pas? Mais l'opposition, M. le Président, ne se satisfait pas quand ça va bien, il faudrait que ça aille mal.

Le Président: En question principale maintenant, M. le député de Rivière-du-Loup.

Position du gouvernement
sur la tenue d'élections à date fixe

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, M. le Président. On s'est retrouvés cette semaine plongés dans une élection fédérale dont plusieurs intervenants au Québec nous ont dit qu'on n'en voulait pas, et le premier ministre lui-même a qualifié cette élection-là de précipitée. Parce que, dans notre système démocratiquement archaïque, il est d'office que la date des élections est décidée par le premier ministre et que le premier ministre peut finalement jouer, pour différents critères, avec la date des élections. Alors, j'étais heureux d'entendre le premier ministre du Québec commenter là-dessus, parce que c'est bien et c'est beau de commenter pour élever le débat public, sauf que, sur la scène québécoise, c'est lui qui a le pouvoir.

Alors, ma question au premier ministre est fort simple: Lui qui est au pouvoir au Québec, est-ce qu'il a l'intention d'aller de l'avant avec une réforme démocratique qui inclurait des scrutins à date fixe?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, ça n'a pas encore fait l'objet de discussions au comité consultatif des élections, la question des dates fixes. On ne s'entend pas nécessairement là-dessus. On ne s'est jamais entendus, il n'y a jamais eu de consensus là-dessus au Québec, et il y a beaucoup d'hésitations. Et je vais vous donner des exemples. Est-ce que M. Lesage et M. Lévesque auraient pu procéder à l'étatisation de l'hydroélectricité si on avait eu des élections à date fixe, par exemple? Je pense qu'il y a des conjonctures qui font en sorte qu'on doit se présenter devant l'électorat pour des choses fondamentales comme celle-là. Mais, règle générale, on est toujours prêts, en ce qui nous concerne, à faire des discussions, à des questions d'encadrement, à fixer peut-être des corridors. Mais de là à s'engager à des dates superfixes comme le font certains pays, on n'est pas encore mûrs pour ça au Québec.

n(15 h 10)n

Le Président: M. le député.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Est-ce qu'on doit comprendre, M. le Président, des commentaires du premier ministre cette semaine, que, sur la forme, à un moment précis où ça fait son affaire politiquement, le premier ministre se scandalise, comme il est si bien capable de le faire, mais que, sur le fond, il est d'accord avec Jean Chrétien...

Des voix: ...

Le Président: Vous remarquez qu'il reste encore 18 minutes, alors je peux reconnaître quelques députés en additionnelle sur la question du député de Rivière-du-Loup. M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, il y a deux aspects dans la question très pertinente que pose le député de Rivière-du-Loup. Le premier aspect en est un de conjoncture. Dans notre système, il est vrai qu'il est du ressort du chef du gouvernement de décider de la date des élections, mais ça doit se faire avec circonspection et dans le respect des contribuables et de l'intérêt public. Alors, ce n'est pas moi qui soulève le débat en cette Chambre, c'est le député de Rivière-du-Loup. Il m'invite à donner mon opinion, je ne peux que répéter ce que d'autres pensent. Je pense que c'est quasiment unanime non pas seulement au Québec, mais dans l'ensemble du Canada, qu'il s'agit d'une élection qui constitue un gaspillage d'argent et qui n'est justifiée par aucune espèce d'impératif d'urgence et qui semble mue dans sa motivation par le désir d'aller chercher le pouvoir plus rapidement afin de s'assurer que certains sondages temporaires puissent être maintenus. Je crois que la population n'est pas dupe de ce genre de chose et qu'elle saura faire payer le prix d'un pareil cynisme.

L'autre aspect, c'est la question de fond, la question structurelle. Le chef de l'ADQ propose que, dans un régime québécois, les élections soient tenues à date fixe. Ce sont des choses qui ne... Ce n'est pas des choses transcendantales, dans le sens que ça peut se regarder, mais ça suppose des changements fondamentaux. Dans un régime parlementaire britannique, il ne peut pas y avoir d'élections à date fixe, puisqu'il faut la confiance de la Chambre en tout temps pour pouvoir gouverner. La confiance de la Chambre, ça peut cesser n'importe quand. Et, en conséquence, M. le Président, il est normal que, dans un régime parlementaire de type britannique, on puisse faire des élections lorsque l'intérêt public et la stabilité du gouvernement le requièrent. Mais, si on veut à tout prix fixer les élections de façon périodique, comme par exemple aux États-Unis ou en France, il faut des régimes présidentiels et je ne pense pas que c'est ce qu'on souhaite. Nous voulons conserver au Québec un régime parlementaire britannique.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, tout en rappelant au premier ministre que le vieux régime britannique, il n'y a personne depuis 1948, à part l'Inde, qui l'a institué comme étant véritablement un bon système démocratique. Je lui demande: Est-ce qu'on doit comprendre du premier ministre que, lorsque...

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Est-ce qu'on doit comprendre, de la réponse du premier ministre, que, lorsque ça vient d'Ottawa, c'est l'intérêt partisan, mais, si ça venait de lui, ça serait de l'intérêt public? Est-ce que c'est ça qu'on doit comprendre de sa réponse et de son refus de s'engager à que ce qu'il commente, lui, ailleurs, comme étant peu démocratique... nous, ici, au Québec, on puisse en profiter pour améliorer notre propre système?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: Non, M. le Président, on peut débattre longtemps de ces questions, mais il y a une phrase que je veux relever dans l'affirmation du député de Rivière-du-Loup, c'est qu'il s'en est pris au caractère démocratique du régime de type parlementaire britannique. Il a laissé entendre que c'est un régime qui n'était pas démocratique. Je crois que c'est un régime qui a fait ses preuves et qui a laissé chez nous un grand patrimoine de parlementarisme démocratique, et je crois que nous devons être fidèles à cet héritage et qu'on devrait éviter de laisser croire que le régime parlementaire que nous avons n'est pas démocratique. Il est fondamentalement démocratique.

Le Président: En question principale, maintenant, M. le député de Saint-Laurent.

Lutte contre le crime organisé

M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Oui, M. le Président, pour revenir à des choses plus actuelles, le ministre de la Sécurité publique est-il au courant, comme nos sources nous le confirment, qu'il se tient actuellement, régulièrement, à toutes les semaines, des rencontres entre les membres des Hell's Angels et des Rock Machine pour se diviser le territoire du Québec pour la vente de drogue?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Serge Ménard

M. Ménard: M. le Président, évidemment je lis les journaux comme tout le monde. Je suis au courant des spéculations qui courent sur les rencontres que l'on voit. Les informations que la police recueille en plus des informations qui sont publiques, il est préférable qu'elles soient gardées secrètes. Mais, qu'ils se réunissent pour se partager... ou qu'ils continuent à se battre, c'est le même combat que les policiers mènent contre le crime organisé. Et, si nous avions de meilleurs outils, nous mènerions un meilleur combat.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Le ministre réalise-t-il, M. le Président, qu'à chaque fois que les bandits cherchent à faire entre eux la paix on menace la sécurité de la population en général au Québec et en particulier celle des commerçants et éventuellement celle de nos enfants dans les écoles relativement au trafic de la drogue? Attend-il un autre Daniel Desrochers, un autre Pierre Rondeau, une autre Diane Lavigne, un autre Michel Auger, un autre Francis Laforêt pour mener une lutte efficace au crime organisé et mettre sur pied des outils qu'il peut faire, qu'il peut mettre sur pied aujourd'hui même? Service de renseignements criminels indépendant, bureau de protection des plaintes, bureau de protection des témoins délateurs, cours sur le crime organisé à l'École de police, ça, c'est des choses qu'il peut faire aujourd'hui. Qu'attend-il?

Le Président: M. le ministre.

M. Serge Ménard

M. Ménard: C'est le Québec qui, au Canada, mène la lutte au crime organisé la plus efficace et qui a actuellement les meilleurs outils. On vient d'ailleurs des autres provinces pour examiner la façon dont nous avons abordé ce sujet. L'escouade Carcajou en est un exemple frappant.

Maintenant, justement, je suis parfaitement conscient du danger... du monopole que peuvent créer certaines organisations criminelles, et c'est justement pour cela que j'ai changé d'opinion fondamentalement et que je crois qu'il est nécessaire d'avoir une véritable loi antigang, c'est-à-dire une loi qui rendrait illégale la simple appartenance... une loi antigang.

J'ai longtemps cru qu'ils étaient bien bêtes de s'afficher en public comme cela, mais je m'aperçois que le fait qu'ils s'affichent en public facilite beaucoup le recrutement, leurs méthodes d'intimidation et leur organisation.

Maintenant, quant aux autres choses qui sont suggérées, oui, c'est en train. De toute façon, comme les escouades Carcajou ou les escouades mixtes sur le crime organisé ont des enquêteurs de différents corps policiers, elles ont accès à toutes les banques, mais je suis en train d'obtenir un consensus à l'intérieur des corps policiers pour que finalement les banques sur le renseignement criminel soient réseautées de sorte que, selon des critères de sécurité donnés à certains enquêteurs, on pourra avoir accès à l'ensemble des renseignements criminels. Et puis, nous en faisons bien d'autres, nous dépensons au-delà de 100 millions sur la lutte au crime organisé. Je le rappelle, nous sommes la meilleure province au Canada.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: M. le Président, le ministre de la Sécurité publique pourrait-il, s'il vous plaît, avoir la lucidité de réaliser que de réclamer une loi antigang, ce n'est pas la réponse à tout et qu'il est éminemment malhonnête de faire croire à la population...

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, je pense que vous êtes maintenant un habile parlementaire et je crois que vous pouvez formuler votre question sans utiliser des termes que nous préférons ne pas entendre ici. Alors...

M. Dupuis: Et qu'il s'agit, M. le Président... et qu'on raconte des histoires à la population lorsqu'on lui fait croire que la loi antigang est la réponse à la lutte au crime organisé.

M. le Président, est-ce que le gouvernement Bouchard, à défaut de trouver en lui-même le courage politique de combattre le crime organisé avec des outils efficaces, ne pourrait pas aller chercher, ne pourrait pas aller puiser ce courage-là dans les milliers de personnes qui ont marché dans les rues pour Francis Laforêt, pour Michel Auger et pour le local des Hell's à Saint-Nicolas?

n(15 h 20)n

Une voix: Bravo...

Le Président: M. le ministre.

M. Serge Ménard

M. Ménard: Justement, s'il y avait une loi antigang, les groupes organisés ne pourraient pas avoir un local et s'afficher ainsi publiquement. Des milliers de personnes ont aussi marché en appui à une véritable loi antigang, et je pense qu'elles comprennent ce que ça veut dire, c'est-à-dire une loi qui rend illégale la simple appartenance à un groupe criminel.

Nous avons les escouades spécialisées. Nous venons de former l'École nationale de police et nous répandons les cours sur le crime organisé. Notre taux de criminalité, par contre, diminue. Nous avons, en matière juvénile, le taux de criminalité le plus bas du Canada; le taux moyen du Canada est de 50 % plus élevé que celui du Québec. De dire que nous ne sommes pas efficaces dans notre lutte au crime, franchement, je ne sais pas de quelle planète il arrive ou combien de temps il a été absent du Québec, mais il ignore totalement les dossiers de sécurité publique.

Le Président: En question principale, maintenant, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Coûts de la gestion du programme
d'allocations familiales

M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Sous le gouvernement du Parti québécois, le programme des allocations familiales a connu une curieuse évolution. Il y a trois ans, plus de 900 000 familles québécoises recevaient 800 millions de dollars en aide gouvernementale pour leurs enfants alors que le programme coûtait un peu plus de 6 millions de dollars à gérer. Aujourd'hui, moins de 600 000 familles québécoises reçoivent environ 600 millions de dollars en allocations familiales alors que le programme coûte 16,6 millions de dollars à gérer. Donc, tout près de 200 millions de dollars de moins pour 300 000 familles de moins égalent, pour le Parti québécois, plus de 10 millions de dollars de coûts de gestion.

M. le Président, comment la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance explique-t-elle qu'un tel programme qui donne moins d'argent à moins de familles coûte presque trois fois plus cher à gérer sous son administration?

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Oui, M. le Président. D'abord, je tiens à préciser à M. le député que nous avons tenu nos engagements, d'une part. Nous avons complété la prestation fiscale pour enfants afin de maintenir la couverture des besoins essentiels, d'une part. Nous avons aussi, comme nous nous étions engagés à le faire, accéléré l'implantation des services de garde, amélioré la fiscalité des familles. Alors, nous donnons un soutien financier aux familles. Le gouvernement du Parti québécois est fier du soutien qu'il donne à toutes les familles du Québec.

Maintenant, face à la question que vous me posez, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous faites appel à toutes les dépenses de transfert reliées au coût de l'administration de la prestation familiale, d'une part. Je veux quand même dire que les chiffres que vous m'apportez, qui sont de 1997-1998, qui étaient de 6 millions, qui étaient partagés avec l'Emploi et la Solidarité et, nous, la Famille et l'Enfance, sont des chiffres pour sept mois, donc ce n'est pas toute l'année financière, d'une part. Pour cette année, pour celle de 1998-1999, c'était de 10 millions. C'est de 10 millions, mais elle conserve toute une année complète, d'une part.

Et, maintenant, toute la transition qui s'est faite pour le ministère de la Famille et de l'Enfance, avec toute la nouvelle façon de faire l'allocation familiale du Québec, s'est faite... Anciennement, on le faisait selon des coûts fixes qu'on donnait à toutes les familles. Maintenant, la gestion du programme nous a demandé de faire cette transition-là, qui est de s'accommoder avec tout ce qui touche les revenus familiaux des familles et le genre, le type de famille. Donc, la gestion de ce programme-là demande un effort supplémentaire pour s'assurer de répondre quand même à ces 900 000 familles. Même s'il n'y a que 600 000 familles maintenant, il y a toujours des communications et de l'administration qui doivent se faire auprès de ces 900 000 familles là.

Alors, quand on apporte des chiffres, M. le Président, faisons attention, quand on les apporte, de les apporter pour une année financière complète, et, en même temps, de s'assurer de voir cette transition-là qui s'est faite d'avant 1997 à après 1997.

Le Président: En question principale, maintenant, M. le député de Châteauguay.

Accessibilité du programme de dépistage
du cancer du sein

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, M. le Président. Ma question portera sur la région que représente le premier ministre. Mais, pour cette première intervention en santé, je voudrais profiter de l'occasion pour saluer l'orientation de l'Ordre des infirmières vers le statut d'infirmière praticienne. Non seulement cette orientation permettrait une meilleure flexibilité dans l'aménagement du travail, mais, encore plus, M. le Président, elle permettrait de signifier l'importance que tous les Québécois accordent aux infirmières, elles qui ont reçu ici un tout autre signal du gouvernement, quand la machine du PQ avait été lancée pour les discréditer.

Cela dit, M. le Président...

Des voix: ...

Une voix: C'est vrai, c'est vrai.

M. Fournier: ...ma question concerne la loi antidéficit, mieux nommée «antiservices», et ses effets en région. Ma question: Qu'est-ce que la ministre a apporté comme correctifs, depuis qu'elle a appris, le 5 septembre dernier, de la bouche de Lillie Simard, présidente de la Régie régionale du Saguenay?Lac-Saint-Jean, et je cite: «Mentionnons que les compressions budgétaires, conjuguées à l'obligation de l'équilibre budgétaire en 2000-2001, n'ont pas permis de mettre en place le programme québécois de dépistage du cancer du sein alors que les femmes de notre région se classent parmi les plus affectées par cette maladie»?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je veux d'abord féliciter mon collègue le député de Châteauguay pour avoir maintenant la responsabilité du dossier comme critique en matière de santé; il le fera avec deux autres collègues. Je ferai remarquer d'ailleurs que les postes de critiques en matière de santé sont plus instables que celui du poste de ministre de la Santé et des Services sociaux. Cela étant...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Alors, comme il y a eu un commentaire sur...

Des voix: ...

Le Président: Connaissant le député de Châteauguay, je suis convaincu qu'il voudra avoir une question complémentaire. Alors, si on pouvait laisser la ministre parler. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. D'abord, évidemment je pense que les premiers propos de notre collègue le député de Châteauguay étaient de trop. Il sait très bien, à moins qu'il n'ait pas encore pris connaissance de cette information, que nous travaillons actuellement, autant avec l'Ordre des infirmières qu'avec le Collège des médecins qu'avec d'autres professionnels concernés, pour justement reconnaître le poste d'infirmière clinicienne, qui pourra éventuellement intervenir au niveau de spécialités, que ce soit en cardiologie, que ce soit à l'urgence ou ailleurs. Et je le mets au défi de relever quelque propos méprisant à l'égard des infirmières de notre part.

Par ailleurs, en ce qui a trait au programme québécois de lutte contre le cancer, je veux préciser une chose. D'abord, il faut rassurer le député de Châteauguay. Ça ne veut pas dire que, parce qu'il n'y a pas comme tel une organisation ou un comité de mis en place dans chaque région, les personnes n'ont pas accès à des services de prévention et de dépistage, entre autres, par exemple, du cancer du sein, M. le Président. Et j'ajoute que déjà, dans quatre régions, le comité de lutte contre le cancer est implanté, ce qui couvre près de 4 millions de personnes, soit près de 60 % de la population québécoise.

Le Président: M. le député.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Est-ce que la ministre est consciente que la loi antiservices, cumulée à l'absence de prévisibilité dans son mode de gestion, va empirer une situation déjà catastrophique? Selon le magazine MacLean's d'hier, sur 51 régions canadiennes, on retrouve cinq régions du Québec parmi les 10 dernières, et l'avant-dernière, c'est Chicoutimi.

Le programme de dépistage a beau être bon, M. le Président, mais pourquoi avoir choisi qu'il ne soit pas accessible à toutes?

n(15 h 30)n

Le Président: Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, c'est une mauvaise habitude que d'autres avaient avant lui, je crois que le député de Châteauguay n'a pas écouté ma réponse. Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas comme tel de comité de lutte contre le cancer dans chacune des régions du Québec que des activités de prévention, de dépistage et d'intervention ne se font pas, M. le Président. Au contraire, dans l'ensemble des régions du Québec, il y a autant des interventions de lutte contre le tabagisme que des interventions de dépistage du cancer du sein que des examens qui se font partout où c'est nécessaire, et cela est nécessaire dans toutes les régions du Québec.

D'ailleurs, je vais informer le député de Châteauguay et je l'invite à prendre connaissance de cet excellent document qui est justement le programme québécois de lutte contre le cancer. Nous avons été les premiers dans tout le Canada à adopter un tel programme. Il est reconnu comme l'un de ceux qui sont le plus articulés, qui sont le plus clairs et le plus intéressants pour atteindre les objectifs que nous poursuivons. Il est adopté depuis deux ans par le gouvernement du Québec, et c'est ce que nous sommes à mettre en place sans négliger notre responsabilité de rendre disponibles des services partout sur le territoire québécois. Je vous remercie, M. le Président.

Votes reportés

Motion de censure proposant que
l'Assemblée blâme le gouvernement
qui procède sans mandat dans le dossier
des fusions municipales forcées

Le Président: Bien. Alors, la période de questions et de réponses orales est terminée pour aujourd'hui, et, comme je l'avais annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de censure de M. le chef de l'opposition officielle qui a été débattue la semaine dernière, le 19 octobre. Alors, je rappelle le texte de la motion:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois qui procède sans mandat dans le dossier des fusions municipales forcées.»

D'abord, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Bien. Maintenant, que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Simard (Richelieu), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Chevrette (Joliette), M. Baril (Arthabaska), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Papineau (Prévost), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 42...

Le Président: M. le... Est-ce que nous accordons l'autorisation à notre collègue de Marquette d'enregistrer son vote?

Des voix: Oui.

La Secrétaire adjointe: M. Ouimet (Marquette).

Le Secrétaire: Pour: 43

Contre: 66

Abstentions: 0

Le Président: Bien. Alors, la motion du chef de l'opposition officielle a été rejetée. Maintenant, une motion sans préavis?

M. Brassard: Non, c'est...

Le Président: Au préalable, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui. C'est parce que, comme il y a consultation en commission puis qu'il y a des intervenants qui nous attendent, je voudrais encore une fois solliciter le consentement pour convoquer la commission.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement, M. le leader?

Une voix: ...

Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Alors, il y a consentement, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, je voudrais aviser cette Assemblée que la commission de l'économie et du travail poursuivra les consultations générales sur le projet de loi n° 136, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, à partir de maintenant jusqu'à 18 heures, à la salle du Conseil législatif.

Motions sans préavis

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous revenons aux motions sans préavis. M. le whip en chef de l'opposition officielle et député de Châteauguay.

Remplacements permanents dans la composition
de commissions parlementaires

M. Fournier: M. le Président, je fais motion, conformément à l'article 129 du règlement de l'Assemblée nationale, afin de procéder à des remplacements permanents dans la composition des commissions parlementaires suivantes:

À la commission de l'administration publique, le député de Robert-Baldwin, M. Pierre Marsan, remplacera le député de Vaudreuil, M. Yvon Marcoux; le député de Limoilou, M. Michel Després, remplacera le député de Mont-Royal, M. André Tranchemontagne;

À la commission des institutions, la députée de Bourassa, Mme Michèle Lamquin-Éthier, remplacera le député de Marquette, M. François Ouimet;

À la commission des affaires sociales, le député de Châteauguay, M. Jean-Marc Fournier, remplacera la députée de Bourassa, Mme Michèle Lamquin-Éthier;

À la commission de l'économie et du travail, le député de Kamouraska-Témiscouata, M. Claude Béchard, remplacera la députée de Bonaventure, Mme Nathalie Normandeau; le député de Mont-Royal, M. André Tranchemontagne, remplacera le député de LaFontaine, M. Jean-Claude Gobé; le député de Beauce-Nord, M. Normand Poulin, remplacera le député de Robert-Baldwin, M. Pierre Marsan;

À la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, le député d'Argenteuil, M. David Whissell, remplacera le député de Beauce-Nord, M. Normand Poulin;

À la commission de l'aménagement du territoire, le député de Marquette, M. François Ouimet, remplacera le député de Limoilou, M. Michel Després;

À la commission des transports et de l'environnement, le député de LaFontaine, M. Jean-Claude Gobé, remplacera le député d'Argenteuil, M. David Whissell;

À la commission de l'éducation, le député de Vaudreuil, M. Yvon Marcoux, remplacera le député de Kamouraska-Témiscouata, M. Claude Béchard.

Ces changements prennent effet immédiatement.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Toujours aux motions sans préavis, M. le député de Nelligan.

Féliciter les membres du premier Comité
provincial pour la prestation des services de santé
et des services sociaux en langue anglaise

M. Williams: Oui. Merci, M. le Président. Je demande le consentement pour déposer la motion sans préavis suivante:

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse et félicite les membres du premier Comité provincial pour la prestation des services de santé et des services sociaux en langue anglaise, notamment Eric Maldoff, président, Ron Creary, vice-président, Archie Deskin, Darlene Johnstone, Marylee Kelley, Sheilagh Murphy, Marisa Tessier, Richard Walling, James Warbank et Jim Carter, secrétaire. Le leadership, le dévouement et le respect qu'ils portent aux droits et aux besoins de la communauté d'expression anglaise ont été remarquables au cours des sept dernières années.»

«That the National Assembly recognize and congratulate the members of the First Provincial Committee on dispensing of health and social services in the English language, namely Eric Maldoff, president, Ron Creary, vice-president, Archie Deskin, Darlene Johnstone, Marylee Kelley, Sheilagh Murphy, Marisa Tessier, Richard Walling, James Warbank et Jim Carter, secretary. Their leadership, commitment and respect of the rights and needs of the English-speaking community have been remarkable over the last seven years.».n(15 h 40)n

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement, y a-t-il consentement? Oui? Alors, M. le député de Nelligan, je vous cède la parole.

M. Russell Williams

M. Williams: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je ne suis pas convaincu que, si les membres de ce Comité avaient été au courant de la durée de leur mandat, sept ans passés, ils auraient accepté le mandat, parce que c'est un mandat de trois ans, et, finalement, en 1993, quand nous avons demandé à ces membres de participer dans ce premier Comité, nous avons promis que c'était un mandat de trois ans, mais, pour beaucoup de raisons, nous avons eu le premier Comité qui a un mandat de sep, ans. Et je voudrais juste, pour cette fin-là, féliciter tous les membres.

Je voudrais faire un bref rappel de l'histoire. C'est la loi n° 142 qui est la première loi qui a donné les garanties législatives pour la communauté d'expression anglaise, qui a été passée par le gouvernement libéral malgré l'opposition du Parti québécois, à l'époque. Le Parti libéral a aussi bonifié ces garanties avec la loi 120 en créant beaucoup de garanties dans la loi, incluant la création des comités régionaux et provinciaux.

Les membres que j'ai juste nommés, M. le Président, sont les bénévoles. These people are volunteers, members of our community who, with passion and devotion and commitment, have represented the English-speaking community. They have brought thoughtful analysis, they have brought thoughtful evaluation and very clear studies to a very emotional and important debate.

They have presented to the Government, Mr. Speaker, over 30 opinions. Ils ont donné, je pense, plus de 30 avis malgré un très petit budget. They have become the definitive leaders, the definitive guardians of those legislative guarantees that are so important for the English-speaking community. They have become the guardians to make sure that the Government respect the law, to make sure that we take what we debate here, in the National Assembly, and put it in place within the regions. They have worked tirelessly as volunteers with regional boards and institutions across this province. Ils ont fait ça même avec les autres bénévoles francophones souvent dans les régies régionales et, dans mon opinion, ils ont fait un travail extraordinaire.

Mr. Speaker, this Government has not made it easy for them. There have been continued delays, there have been continued detours, there has been harassment, in terms of the regional boards, in giving services. Their analysis, their opinion that they gave this Government showed that the Government has reduced services in some areas, and it is because of their thoughtful analysis that we can track that continually. So, they have done an incredible service to us and they can all be very proud.

Il y a plusieurs défis, M. le Président. Je lance ça encore avec la ministre qui est ici aujourd'hui. J'espère que le Comité provincial peut convaincre ce gouvernement de retourner avec l'entente provinciale-fédérale. Il y a de l'argent pour payer les coordinateurs dans chaque région, les gouvernements provincial et fédéral divisent les coûts. On peut sauver de l'argent. On peut rendre les services plus accessibles avec ça. Et j'espère aussi que le Comité peut convaincre le gouvernement de s'assurer que tout nouvel argent qui va entrer dans une région va avoir une garantie que les services soient aussi disponibles pour le comité d'expression anglaise.

Mr. Speaker, very personally and very sincerely, I'd like to thank each of those members. If I mention some of them, I'll unfortunately forget others. But Eric Maldoff, the president, did an incredible job, an admirable job in leading this Committee. Ron Creary, Archie Deskin, Darlene Johnstone, Sheilagh Murphy, Marisa Tessier, Richard Walling and James Warbank have done an incredible amount of work. I left one person out because I thought I would highlight her here, because her son is sitting here in this room: Marylee Kelley, a wonderful friend of all of us, who's been a devoted, devoted volunteer. And please convey my thanks, my personal and sincere thanks to Marylee Kelley. All of them have done an incredible job.

The message today, Mr. Speaker: We are very proud of them. It's one thing to make a debate about language; it's another thing to, day by day, make sure it's protected. They've rendered an incredible service.

Je souhaite aussi, M. le Président, bonne chance au nouveau Comité. Je souhaite bonne chance avec le Comité et j'espère que j'ai entendu que la ministre, malgré qu'elle n'ait jamais rencontré l'ancien Comité mais qu'elle ait déjà promis de rencontrer le nouveau... Avec ça, j'espère qu'on peut faire avancer la cause ensemble. J'espère que cette intervention, que j'espère unanime, va être un pas dans la bonne direction pour assurer que la communauté d'expression anglaise va avoir toujours accès à la santé et aux services sociaux dans sa langue, nonobstant les normes, et dans chaque territoire du Québec.

Merci beaucoup, M. le Président, pour cette opportunité de féliciter un groupe de bénévoles extraordinaires qui ont fait ça pour leur communauté mais aussi pour le Québec. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Nelligan. Nous allons maintenant céder la parole à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je joins ma voix à la motion du député de Nelligan. Il m'est en effet toujours agréable de souligner la contribution de la multitude de bénévoles impliqués dans les différents comités et instances du réseau, et je dois dire que c'est sans aucune réserve que je m'associe donc à cette motion présentée par mon collègue.

Je peux vous dire d'ailleurs que j'ai eu l'occasion à différentes reprises lorsque j'étais ministre de l'Éducation, depuis que je suis ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux, d'avoir des groupes comme ceux-ci me conseillant sur différentes questions concernant l'accessibilité aux services en langue anglaise, et je puis vous dire qu'à chaque fois nous avons reçu les recommandations avec grand respect. Nous en avons retenu, pour la plupart, la majorité, c'est-à-dire, dans la plupart des cas, la majorité, parfois certaines recommandations ne pouvant être retenues. Mais je dois vous dire que j'ai toujours eu beaucoup de respect pour ces gens qui ont accepté de donner de leur temps à des causes auxquelles ils croyaient et à prêter aussi leurs voix, comme citoyens, pour représenter des membres de leur communauté.

Je veux donc en profiter aussi pour féliciter les nouveaux membres nommés depuis le 6 juillet dernier. Ce nouveau Comité assure, croyons-nous, une meilleure représentativité des régions ? c'était une de mes perspectives ? et assure aussi la continuité avec la présence de deux membres de l'ancien Comité. J'ai déjà eu le plaisir de remercier les nouveaux membres et j'aurai l'occasion de réitérer mon appréciation en personne lors de la rencontre qui est prévue avec le Comité d'ici quelques semaines. Je vous remercie, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Y a-t-il d'autres motions sans préavis?

Avis touchant les travaux des commissions

Nous passons maintenant à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions. Les avis ont tous été... O.K. Alors, les avis ont été donnés tout à l'heure par le leader du gouvernement.

Alors, pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira aujourd'hui, mardi, le 24 octobre 2000, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de poursuivre la vérification des engagements financiers du ministère de la Famille et de l'Enfance contenus dans les listes d'avril 1997 à mars 2000.

Je vous avise également que la commission de la culture se réunira aujourd'hui, mardi, le 24 octobre 2000, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de procéder à l'étude du rapport annuel de la Commission d'accès à l'information, et ce, conformément à l'article 119.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

Je vous avise également que la commission des affaires sociales se réunira en séance de travail demain, le mercredi 25 octobre 2000, à compter de 9 heures, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'organiser les travaux de la commission.

n(15 h 50)n

Je vous avise enfin que la commission de l'administration publique se réunira en séance de travail demain, le mercredi 25 octobre 2000, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle RC.171 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de préparer l'audition du sous-ministre du Revenu concernant la gestion de la taxe de vente du Québec et de la taxe sur les produits et services, de même que la fiscalité des sociétés.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

À la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous rappelle que, de consentement, à la suite de la période de questions du mercredi 18 octobre dernier, les deux débats de fin de séance prévus pour le 19 octobre ont été reportés à la fin de la séance d'aujourd'hui mais qu'ils ne seront pas comptabilisés aux fins de l'application de l'article 312 du règlement.

Le premier portera sur une question adressée le 18 octobre dernier par M. le député de Nelligan à M. le ministre délégué à la Santé, aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse concernant les compressions budgétaires dans les centres jeunesse du Québec.

Le second débat portera sur une question adressée le 18 octobre dernier par M. le député de Kamouraska-Témiscouata à M. le ministre de l'Éducation concernant l'évaluation des élèves prévue dans sa réforme scolaire.

Je vous informe que, demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député de Verdun. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse dans la loi le droit des actuels et futurs retraités et celui des non-syndiqués à un mécanisme leur permettant d'être parties aux décisions portant sur l'utilisation des excédents d'actif des régimes complémentaires de retraite.»

Alors, ceci met fin aux affaires courantes.

Nous allons donc débuter immédiatement les affaires du jour, mais, avant de céder la parole au leader adjoint du gouvernement, permettez-moi de vous annoncer que nous aurons, ce soir, en plus des deux débats de fin de séance déjà annoncés, un troisième débat entre le député de Limoilou et Mme la ministre des Affaires municipales concernant les contradictions entre le ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale, le président du caucus et le premier ministre concernant les hausses de taxes municipales.

Nous aurons également un quatrième débat de fin de séance entre le député de Hull et la ministre des Affaires municipales concernant les coûts pour les citoyens des structures municipales proposées par la réforme Bouchard-Harel.

Et, enfin, nous aurons un cinquième débat de fin de séance entre le député de Notre-Dame-de-Grâce et Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance concernant les coûts de la gestion du régime d'allocations familiales.

Donc, ces cinq débats de fin de séance pourront débuter immédiatement à 18 heures.

Affaires du jour

Alors, aux affaires du jour, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président. L'article 21 du feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 102

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée
et des amendements transmis

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 21 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le ministre de la Solidarité sociale et par M. le député de Verdun.

Les amendements du ministre sont tous recevables. Ils concernent les articles 33, 38, 39, 61, 99, 103.1, 104.1 et 173 du projet de loi. Les amendements proposés par le député de Verdun concernent les articles 85 et 96 du projet de loi. Les deux amendements à l'article 85 sont recevables en totalité.

Quant à l'amendement à l'article 96, il est recevable sous réserve d'en modifier la forme. Cet amendement devrait, dans son libellé, modifier l'article 96 du projet de loi amendé en commission et non directement par l'article 166 de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite que l'article 96 du projet de loi modifie. Il devrait donc se lire comme suit:

1° insérer, avant le paragraphe 1°, le suivant:

0.1 par l'insertion, dans la deuxième ligne du premier alinéa et après le mot «Régie», des mots «ou à la demande de l'employeur»;

2° insérer, après le paragraphe 3°, le suivant:

4° par l'addition, après le deuxième paragraphe du premier alinéa, du paragraphe suivant:

«permettre au groupe des participants actifs non couverts par les paragraphes 1° et 2° de l'article 146.5 et au groupe des participants non actifs de donner éventuellement son assentiment à toute proposition de l'employeur prévue à l'article 146.5 suivant le mode que peut proposer le comité ou, s'il n'y en a aucun de proposé ou si le groupe refuse celui proposé, suivant le mode qui, décidé par le groupe, permet de procéder. Toute décision est prise à la majorité des voix exprimées par les participants de chaque groupe.»

Alors, y a-t-il des interventions sur le rapport et également sur les amendements? M. le ministre de la Solidarité sociale.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, l'auditeur attentif des débats de l'Assemblée nationale pourrait se demander, à ce moment-ci, pourquoi nous sommes à débattre d'une loi adoptée il y a plus de 10 ans, pour laquelle finalement peu de gens, dans l'opinion publique, ont posé des questions importantes et sur laquelle il devient aussi quelque peu difficile d'agir sur le plan politique, puisque, effectivement, bien des gens ont des points de vue qui se font entendre sur ces questions, et parfois, faut-il le noter, des points de vue qui sont, l'un avec l'autre, en parfaite contradiction. Alors, en somme, quelqu'un qui est peu soucieux de l'intérêt public, peu soucieux d'agir dans le sens de ce qui est juste, donc dans le sens de l'intérêt public, aurait pu tout simplement ne pas soulever des questions importantes qui sont pourtant déterminantes et qui sont répondues en grande partie par le projet de loi n° 102.

M. le Président, j'ai la conviction que, au-delà de l'intérêt privé qui peut se faire entendre et au-delà des points de vue divergents, nous avons, comme parlementaires, la responsabilité, après plus de 10 ans d'application d'une loi d'encadrement sur les régimes complémentaires de retraite, nous avons l'obligation d'apporter un certain nombre de réponses à des questions qui sont soulevées tant par des employeurs que par des participants, qu'ils soient des participants actifs ou des participants retraités. Nous devons le faire parce que l'outil qui est en cause, l'outil RCR, est un bon outil, est un outil qu'il nous faut crédibiliser dans un contexte où la société québécoise ? dans un contexte de vieillissement accéléré de la population ? se pose une question légitime qui est celle du revenu de retraite privé auquel les Québécois auront accès au moment de leur retraite.

Cette question est d'autant plus pertinente et il faut y revenir parce que c'est là le pourquoi de toute la démarche et de l'initiative gouvernementale. Cette question est déterminante au point que, ces dernières années, on a vu baisser le revenu de retraite privé des Québécois et des Québécoises, alors que, par exemple en Ontario, il augmente. Bien sûr, derrière ces réalités, il y a une question de revenu disponible, mais on ne peut pas faire fi de la question de l'efficacité des outils que nous mettons aujourd'hui à la disposition des travailleurs et des travailleuses pour qu'ils puissent accumuler de l'épargne. Il faut le faire aussi dans un contexte où la réalité du marché du travail est complètement différente de celle qu'on a pu observer il y a quelques années. Pensons tout simplement aux gens qui sont de plus en plus mobiles sur le marché du travail, qui changent souvent d'employeurs. Ce sont des réalités auxquelles la loi adoptée il y a 10 ans ne répond plus. Donc, tant pour des impératifs d'intérêt public, tant aussi parce que la loi, vieille de 10 ans, doit être adaptée aux nouvelles réalités du marché du travail, le législateur ? le gouvernement et moi en premier ? a cru bon de proposer à mes collègues, qu'ils soient du Conseil des ministres ou du caucus, une réflexion sur le projet de loi n° 102.

Cette réflexion était d'autant plus impérieuse qu'en ce moment subsistent un certain nombre d'incertitudes juridiques qui pourtant, partout ailleurs au Canada et partout en Amérique du Nord, d'ailleurs, ont été levées et qui, dans les faits, pour des entreprises qui ont des travailleurs dans différentes juridictions, donc qui ont des travailleurs au Québec ou en Ontario, posent des problèmes très précis dans l'application de la loi. Donc, forts de ces quelques idéaux, nous proposons une réflexion, une réflexion qui s'inscrit avec des principes qu'il faut rappeler.

D'abord, le projet de loi ne s'applique qu'à celles et ceux qui contribuent à des régimes complémentaires de retraite. J'ai beaucoup entendu, M. le Président, des gens du secteur public s'exprimer, des gens qui ont contribué au RREGOP s'exprimer, des retraités de l'enseignement s'exprimer sur ces questions. Ils ne sont pas visés par le projet de loi n° 102. Il s'agit essentiellement de travailleurs du secteur privé, le secteur des gens qui oeuvrent dans les municipalités, dans quelques sociétés d'État aussi. Essentiellement, ce sont des travailleurs du secteur privé, des municipalités et, comme je le disais tout à l'heure, de quelques sociétés d'État. Ce sont environ 620 000 personnes qui sont touchées par ces régimes. On dit environ aussi, pour la compréhension du débat, qu'un travailleur sur quatre seulement a accès à des régimes de retraite.

n(16 heures)n

Donc, avec les constats que je dressais tout à l'heure, avec les statistiques que je vous présente, on s'entend sur un certain nombre d'objectifs: d'abord, d'être capable de lever les incertitudes qui nuisent au développement des régimes en établissant des règles qui sont des règles claires et stables pour tous, notamment en clarifiant le droit au congé de cotisation pour les employeurs. Nous tentons aussi par ce projet de loi ? je pense que nous le faisons très bien ? de renforcer la confiance des travailleurs en accentuant la transparence dans l'administration des régimes. Nous tentons aussi d'améliorer la situation des jeunes travailleurs en leur permettant d'acquérir plus rapidement, de façon plus simple, la part de l'employeur dès l'adhésion au régime.

Nous leur permettons aussi de tenir compte de la plus grande mobilité des travailleurs en prévoyant l'amélioration des prestations de départ et nous simplifions de façon considérable la tâche et l'administration des régimes en faisant un certain ménage dans les exigences législatives qui se trouvaient dans l'actuelle Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

Et je dois vous dire, M. le Président, que les débats que nous avons eus en commission parlementaire me permettent encore, à nouveau, de réaffirmer qu'à bien des égards ce projet de loi visait juste: 90 % des articles du projet de loi ont été adoptés à l'unanimité par l'ensemble des membres de la commission parlementaire. C'est donc dire qu'entre nous, là, il y a un large consensus qui se dessine sur la pertinence de nombre des amendements du projet de loi. Donc, tous conviennent qu'il était temps de faire le ménage dans cette loi. C'est un ménage qui était dû depuis longtemps, auquel d'ailleurs le gouvernement libéral a essayé de s'astreindre sans succès dans le passé, et nous avons donc décidé d'agir et d'apporter une réponse définitive par le projet de loi.

Donc, sur ces questions, consensus. Donc, je ne reviendrai pas essentiellement sur l'essentiel du débat, mais retenons que, comme orientations de fond, nous pensons que, en favorisant la transparence dans l'administration des régimes et en favorisant l'implication des gens aussi dans la gestion de leur régime, nous allons renforcer les droits qui sont ceux des travailleurs, qui sont ceux aussi des retraités.

Subsiste une question, M. le Président, qui fait encore l'objet de discussions. Je salue les représentants de l'Alliance des retraités qui sont aujourd'hui parmi nous. J'ai eu l'occasion de les rencontrer et d'échanger à plusieurs reprises avec eux, et ? il faut le dire très clairement, sans aucune cachette ? il y a, sur le fond des choses, une divergence profonde. Cette divergence, M. le Président, d'où vient-elle? D'abord, elle vient en grande partie non pas de ce que le projet de loi n° 102 contient, elle vient en grande partie de ce que le projet de loi n° 102 ne contient pas. Parce que ? des collègues me le faisaient remarquer dans notre caucus de députés ? si je retire le projet de loi n° 102, comme certaines personnes me le demandent, je n'ai rien réglé. Je n'ai pas du tout fait avancer la situation des retraités puis je n'ai, d'aucune façon, amélioré le statu quo, et la revendication des retraités, des gens de l'Alliance demeure toujours d'actualité. Elle demeure d'actualité non seulement dans les régimes privés, mais elle demeure aussi d'actualité dans les régimes publics.

Et, sur la question des régimes publics, faut-il noter que plusieurs retraités sont divisés sur cette question. Le recours collectif qui était celui des retraités du secteur privé a été abandonné. Ces derniers sont venus s'exprimer récemment en commission parlementaire et ont très bien compris que, sur le droit au surplus qu'ils revendiquaient, il y avait une faiblesse dans l'argumentation, particulièrement au point de vue juridique. Ils l'ont reconnu en commission parlementaire, il y a quelques mois, alors que mon collègue Jacques Léonard s'exprimait sur des amendements à apporter, entre autres, au RREGOP, au régime des employés du gouvernement du Québec. Donc, sur cette question, je vois comme tout le monde qu'il y a une difficulté.

D'où tient l'essentiel du débat, M. le Président? D'abord, sur ce désir qu'ont des retraités d'avoir un droit au surplus. Première des choses que je tiens à préciser d'entrée de jeu, c'est que les surplus actuariels en cours de régime sont ceux dont il est question aujourd'hui. D'aucune façon nous ne remettons en cause des débats qui se sont faits sur l'utilisation des surplus en fin de régime. Cette question a été réglée, si ma mémoire est juste, par le député de Laporte alors qu'il occupait les fonctions que j'occupe. Cette question est réglée, il s'agit de surplus qui apparaissent en cours de régime.

Il y a effectivement des sommes importantes qui sont des surplus accumulés dans les régimes de retraite. Il y a aussi des déficits tout aussi importants, à peu près du même ordre, dans l'ensemble des régimes complémentaires de retraite. Donc, partant de cette réalité, quel est le postulat du gouvernement? D'abord, une lecture sereine de la situation, parce que, avant de remettre en cause l'équilibre fondamental dans la gestion des régimes de retraite puis l'équilibre des rapports de force qui existent en ce moment, il faut se poser une vraie question: Est-ce que la situation actuelle pénalise les retraités? Et cette question m'a préoccupé. Est-ce que les patrons, les syndicats, par exemple, comploteraient ? j'illustre de façon un peu forte mon propos ? contre les retraités?

Et puis on a regardé la situation et on a fait un relevé à partir d'estimations qui sont basées sur un échantillon de régimes. Et à quoi servent donc les surplus? En ce moment, avant le projet de loi n° 102, de quelle façon se comportent les parties? On s'aperçoit que 60 % des surplus ont servi à bonifier les droits des retraités et des travailleurs; 40 % ont servi aux employeurs. Donc, vous voyez que le gros des surplus est allé dans un échantillon représentatif... Il y a sûrement des nuances, ce n'est pas la même chose pour l'ensemble des régimes, j'en conviens. Mais, règle générale, le gros des surplus est allé dans la poche des participants, travailleurs et retraités. Et on remarque aussi qu'entre les travailleurs et les retraités, ce sont à 59 % les retraités qui ont bénéficié de l'utilisation des surplus. Donc, l'iniquité à laquelle prétendent certains, dans les faits, ça se vérifie plus ou moins. C'est plus ou moins vrai, ça se vérifie plus ou moins.

Donc, il y a en ce moment, quand on regarde les choses, des parties qui sont devant nous qui se comportent de façon responsable. La question est donc de voir, est-ce qu'il faut une intervention du législateur pour venir protéger une partie plus qu'une autre? En vous rappelant tout à l'heure, M. le Président, ce que j'affirmais, que le choix de l'État, c'est d'abord et avant tout de définir les règles alentour desquelles les gens vont jouer, mais d'abord et avant tout de respecter les contrats signés entre les parties et de ne pas intervenir dans ces négociations qui se font entre patrons et syndicats. Donc, un statu quo qui n'est pas si dérangeant que ça; toutefois, un statu quo qui, en ce moment, prive un certain nombre de personnes de droits parce que des gens ne se sont pas informés au préalable de l'utilisation des surplus, parce que des retraités n'ont pas le droit en ce moment d'élire eux-mêmes leurs représentants au comité de retraite, parce que le comité de retraite n'a pas le pouvoir de faire des recommandations sur l'utilisation des surplus. Et je pourrais donner comme ça d'autres exemples.

Le projet de loi n° 102 apporte des réponses à ces questions, et je dis haut et fort que c'est au Québec, M. le Président, que les retraités pourront s'impliquer comme nulle part ailleurs dans la gestion de leur régime de retraite. Une étude qui a été faite où on a relevé l'ensemble des droits qui étaient accordés aux retraités nous amène effectivement à conclure de cette façon et de façon non équivoque. Et les faits ont aussi droit d'être rappelés, et il y a une place aussi sur ces questions pour un peu de vérité, et je n'ai entendu personne me faire la démonstration qu'ailleurs au Canada des retraités avaient davantage de droits que ceux que la loi actuelle et le projet de loi n° 102 leur confèrent. Et, à cet égard, tous les spécialistes qui ont regardé cette question confirment, à commencer par le Barreau, cet état de fait.

Donc, il faut partir de là, M. le Président, et se demander en quoi la revendication qui était celle de l'Alliance des retraités pourrait nous permettre de faire progresser les choses. Et je l'ai dit d'entrée de jeu puis je présume que tout le monde là-dedans est de bonne foi. Je comprends que tout le monde cherche à s'agripper au projet de loi n° 102 pour aller chercher davantage de droits, mais agir comme on me le proposait et faire en sorte de donner un droit à un arbitrage obligatoire si 30 % des retraités présents dans une assemblée s'opposent à une entente intervenue entre patrons et syndicats, ça serait là une intervention du législateur qui serait malvenue, qui viendrait protéger une partie plus qu'une autre.

En quoi le législateur, M. le Président, serait justifié, au nom de quel intérêt le législateur serait justifié de donner suite à une demande alors que patrons et syndicats, de bonne foi, négocient une entente, de prendre cette entente, de l'envoyer à une association de retraités et faire en sorte que, si 30 % des retraités s'y opposent, il y ait un arbitrage obligatoire? Agir de cette façon, c'est retirer du champ des négociations les conditions de travail. Et le chef de l'opposition nous rappelait tout à l'heure que ça fait partie de la rémunération globale, les régimes de retraite. Ça serait sortir les régimes de retraite du champ de négociations. Plus personne ne serait intéressé à négocier les régimes de retraite avec un arbitrage obligatoire avec 30 % de retraités qui s'y opposent. Ça n'a pas de bon sens. C'est une proposition qui était nulle et non avenue.

Voilà donc un argument de plus qui m'a amené, parce qu'il faut avancer dans les propositions puis dans les solutions, à faire en sorte de voir d'abord et avant tout, plutôt que de favoriser une intervention législative rigide, puis à changer l'équilibre dans la gestion du rapport de force, qui m'amène plutôt à favoriser la transparence dans l'administration des régimes.

n(16 h 10)n

Autre élément, M. le Président, qui fait l'objet de nombreuses discussions. Il est clair qu'en ce moment le député de l'opposition ramène une proposition, à l'occasion du débat sur le rapport, une proposition qui a été débattue à l'occasion de la commission parlementaire. Mais force nous est de constater, M. le Président, que, plutôt que de faire avancer le débat et de travailler avec le gouvernement à trouver une zone de confort plus large, le député de Verdun est venu semer la zizanie. Ni les patrons ni les syndicats ne sont d'accord avec sa proposition. Alors, il y a là une espèce de test de réalité que le député de Verdun a lamentablement échoué. Parce que nous pourrions très bien, dans une loi, mettre des articles et, à la limite, voter sans nous soucier de la réalité puis répondre à l'ensemble des gens qui nous adressent des demandes, mais, si, à terme, cet impact a des effets négatifs pour les travailleurs et les travailleuses, s'il vient les priver des droits puis, à la limite, d'un outil utile qu'est celui des régimes complémentaires de retraite des travailleurs et des travailleuses, est-ce que nous aurons correctement fait notre travail?

J'ai essayé de m'imposer un test, M. le Président, celui d'être capable de dessiner la plus grande zone de confort et celui d'avoir un projet de loi qui passe le test de la réalité. Et je pense y être arrivé, pas de façon parfaite, je le reconnais d'entrée de jeu. Mais y a-t-il d'autres solutions qui peuvent être regardées? Et, après avoir fait le tour de la question, après avoir discuté avec bien des gens, après avoir même tenté un rapprochement de dernière minute puis discuté avec des gens de l'Alliance des retraités, je me suis aperçu qu'il n'était pas possible d'aller plus loin. Et, donc, à un moment donné, le gouvernement doit avancer à cause des obligations que j'ai fixées tout à l'heure: le problème du revenu des retraites privées des Québécois qui stagne, l'instabilité juridique sur des ententes qui sont intervenues entre patrons et syndicats et bien d'autres éléments comme ceux-là. Choisir le statu quo n'était pas une option, et on l'a dit de façon très claire. Et, si nous sommes rendus aujourd'hui, c'est parce que le gouvernement a fait preuve d'une certaine détermination dans sa volonté d'agir, ce que les libéraux n'avaient pas été capables de faire à l'époque; ils avaient dû reculer puis reporter à plus tard le débat sur les régimes de retraite, et particulièrement sur l'utilisation des surplus en cours de régime.

Apparaît aussi, M. le Président, une autre question. Et c'est là que je vois que l'opposition libérale a choisi avant toute chose la vision partisane, politique, facile, à courte vue, avant de plaider l'intérêt public. Et je m'exprime de façon particulière sur un amendement, qui est contenu au rapport de la commission, qui nous a amenés à retirer ce qu'on appelait l'option 2. L'option 2 était une option par laquelle nous permettions à une entreprise de prendre un congé de cotisation de façon unilatérale en contrepartie d'une bonification au régime, pour faire en sorte que jamais le congé de cotisation ne se prenne ni sur la part de l'employé, ce qui est ici une évidence, mais non plus sur le rendement de la part de l'employé. Il y avait un mécanisme où on créditait, l'employeur devait créditer la caisse. Au-delà du montant auquel il veut la créditer ? qui est un autre débat ? il y avait un mécanisme là pour faire en sorte d'améliorer de façon considérable le statu quo, parce qu'en ce moment des employeurs prennent des congés de cotisation. Oubliez le projet de loi n° 102 puis tout ça, il s'en prend, là, puis parfois sans entente, sans aucune information préalable. Le projet de loi n° 102 vient régler ça. Puis il y avait une proposition qui était sur la table.

Les syndicats sont venus crier au hold-up puis ils sont venus nous dire: Ça n'a pas de bon sens parce que l'employeur, même s'il discute des conventions dans le cadre des négociations de conventions collectives du régime de retraite depuis des années... Prenons un exemple qui a été longtemps discuté, celui de la Société de transport de la communauté urbaine. Les syndicats ont postulé qu'un employeur, exemple, la Société de transport, aurait pu retirer du champ de la négociation de conventions collectives des dispositions sur le régime de retraite et se prévaloir de l'option 2, qui était celle au droit de congé unilatéral avec bonification du régime. Et c'est là qu'ils sont venus nous crier: Scandale! Hold-up! Et l'opposition a ajouté sa voix. L'opposition est venue nous dire qu'on était effrayants, a utilisé tous les qualificatifs, toutes les épithètes possible, M. le Président, puis s'est faite soudainement complice, du point de vue syndical, pour nous dire combien nous étions irresponsables de mettre une proposition comme celle-là. Moi, j'ai bien dit, quand je suis rentré en commission parlementaire, que je n'étais pas en religion, que j'étais prêt à écouter du monde, que j'étais prêt à avancer, puis que je ne cherchais pas la perfection immédiate, finale, puis la grande réponse pour régler tous les maux de ce monde. Je veux juste qu'on fasse un bout de chemin.

On retire la proposition. Mais l'impact, quel est-il, M. le Président? L'impact, il est clair, il est évident, c'est que le projet de loi n° 102, qui accordait une protection, en l'accordant, il fallait donc permettre le droit au congé unilatéral parce que des travailleurs qui ne sont pas syndiqués n'ont pas d'autres mécanismes. Je ne peux pas me syndiquer... Je ne peux pas imposer dans la loi n° 102 la syndicalisation aux entreprises. Je n'irai pas modifier le Code du travail, là, par le projet de loi n° 102. Donc, on est venu, avec l'opposition, qui était d'accord avec nous, retirer l'option 2, en nous disant quoi, M. le Président? En nous disant que l'information et la transparence, que plaide l'opposition sur bien des dossiers, vont permettre à des gens de s'organiser. Puis, si jamais il y a un employeur qui ne se comporte pas de façon correcte, bien il y aura une sanction, puis les travailleurs vont s'organiser, vont se faire entendre, parce qu'ils auront dorénavant accès à de l'information qu'on leur cachait, à laquelle ils n'ont pas accès aujourd'hui.

Et, à la limite, je sais aussi que les plus gros surplus sont essentiellement dans les entreprises où il y a des syndicats, donc l'impact était quelque peu minimal. Mais l'opposition, cherchant toutes sortes de causes, décide aujourd'hui de reprendre ce cheval de bataille, M. le Président, puis vient nous parler des travailleurs pas syndiqués, puis combien on est effrayants, puis ainsi de suite, alors que ce sont ces mêmes personnes qui ont réclamé le retrait de l'option 2. Le député de Verdun, M. le Président, aura à s'expliquer tout à l'heure, mais, quant à moi puis tous ceux qui l'ont compris, particulièrement la semaine dernière à la période de questions, il parle des deux côtés de la bouche, dépendant des gens qui sont dans les tribunes.

Puis, je mets en garde les gens qui sont aujourd'hui dans les tribunes, il y a des gens, ils vont dire ce qu'ils veulent entendre, puis la semaine prochaine ils disent d'autres choses, puis ils se contredisent, puis le chef de l'opposition vient plaider pour moins de réglementation, moins d'interventions dans les rapports entre l'État et les entreprises, plus de simplification, moins d'État, puis ainsi de suite. Ce sont ces mêmes personnes qui, aujourd'hui, réclament de nouvelles interventions de l'État.

La cohérence, M. le Président. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'actuel président du Parti libéral du Québec, mon ami, Marc-André Blanchard, qui est venu rappeler à un moment donné au chef de l'opposition qu'en termes de cohérence il avait encore un petit bout de chemin à faire. Donc, certaines mises en garde, M. le Président, c'est facile, quand on est dans l'opposition, de faire plaisir à tout le monde. Je le sais, je l'ai été. Mais je sais aujourd'hui aussi que le devoir puis la responsabilité exigent qu'on fasse un certain nombre de choix puis qu'on propose aux gens d'aller de l'avant puis qu'on propose des solutions les plus claires possible.

Donc, je viens apporter un éclairage supplémentaire sur la question des travailleurs non syndiqués, qui était l'option 2, qui a été rejetée, parce que tout le monde l'a réclamé. Et je pense que la proposition qui est sur la table, donc, nous amène à une zone de confiance plus grande, et, sans hésitation, M. le Président... Puis, je suis prêt, moi, à rencontrer les gens qui veulent me rencontrer, je mets au défi les gens de me faire la démonstration que les retraités québécois ne sont pas, au Canada, les gens qui ont le plus de protection.

Et je tiens à rappeler un certain nombre de choses, d'abord que la Loi sur les régimes complémentaires de retraite prévoit en ce moment, avant 102, un certain nombre de dispositions. D'abord ? je le rappelle ? en cours d'existence d'un régime, les rentes versées ne peuvent en aucun cas être réduites, même lorsqu'une caisse de retraite devient déficitaire. C'est un acquis important, et je n'ai jamais... il n'y a personne de cette Assemblée qui veut revenir sur cet acquis, il est fondamental, si ce n'est que pour la confiance des travailleurs qui voudraient créer un régime puis si ce n'est aussi que pour des retraités qui ont à planifier de quelle façon leur retraite va s'organiser.

C'est l'employeur, donc, qui, lui seul, assume la responsabilité d'éponger les déficits. Et l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite faisait d'ailleurs le rappel suivant sur cette question. On a tendance à oublier, disaient-ils, beaucoup ? puis on a tendance à oublier qu'à la fin des années soixante-dix il n'y avait aucune caisse en surplus ? ces états de fait puis que les employeurs ont souvent déboursé beaucoup d'argent pour couvrir des déficits dans ces années-là. Des retraités siègent aussi sur les comités de retraite, ils sont responsables de la bonne administration du régime, et, de plus, la loi, en ce moment, mentionne que tous les membres du comité de retraite doivent exercer leurs pouvoirs dans l'intérêt commun, en considérant leur intérêt au même titre que celui des autres participants.

Donc, 102 n'enlève aucun droit, M. le Président, aux retraités sur la question de l'utilisation des surplus en cours de régime. Le projet de loi n° 102 ne statue pas sur la propriété des excédents d'actif en cours d'existence du régime, il ne fait que préciser à quelles conditions un employeur peut clarifier son droit au congé de cotisation. Bien important à comprendre dans le débat, hein? L'option 1, là, l'utilisation des surplus sur entente, c'est uniquement utilisé si l'employeur veut être sûr de clarifier son droit. Le statu quo peut prévaloir. Nous venons tout simplement, par 102, préciser un mécanisme par lequel un employeur qui voudrait clarifier son droit doit passer. Mais je n'oblige aucun employeur ? puis ça, il faut que ce soit clair pour tout le monde ? à passer par ce chemin-là. Mais celui qui ne passe pas par ce chemin-là est passible, toutefois... il pourrait y avoir un certain nombre de recours qui pourraient s'adresser à son endroit.

n(16 h 20)n

Je voudrais rappeler un certain nombre de choses. Le mécanisme actuel fonctionne assez bien, il n'y a rien qui plaide pour une révision fondamentale des choses. Et je rappelle aussi que, sur la jurisprudence, il y a un certain nombre de faits évidents, puis que tous ceux et celles qui concluent très rapidement sur des solutions qui sont complexes, M. le Président, je m'en méfie. Puis, quand il y a des avis juridiques qui nous parlent avec une certitude de la question des surplus, je peux en enligner plein d'autres qui disent le contraire.

Alors, à ceux qui prétendent avoir la vérité ? puis je fais une mise en garde immédiatement pour le député de Verdun qui prendra la parole après moi ? je fais une mise en garde: Faisons attention sur le droit; ni lui ni moi ne sommes avocats. Nous allons tout simplement convenir qu'il y a un flou juridique en ce moment et qu'il y a, dans les faits, des interprétations juridiques qui nous viennent d'avocats tous compétents, formés et qui sont membres du Barreau. Je plaide donc pour le respect des ententes, je plaide donc pour la transparence.

Je tiens aussi... et je m'exprime en dernier lieu ? il me reste quelques instants ? sur une question importante: le projet de loi n° 102 ne s'oppose pas aussi, d'une certaine façon, aux revendications des retraités. J'entends bien des gens réclamer une indexation. Moi, M. le Président, je peux vous dire que, dans bien des cas, les revendications des retraités sont justifiées. On sait, par exemple, que de nombreux retraités qui ont pris leur retraite il y a plusieurs années reçoivent une petite rente et on sait aussi que, dans certains cas, il y a des régimes qui ne prévoient pas d'indexation alors qu'ils pourraient certainement prévoir des fonds ou différentes formules pour arriver à faire en sorte de bonifier les prestations des retraités.

Mais la question de fond qui se pose, c'est: Est-ce que le législateur, par une intervention, doit venir introduire de la rigidité dans l'administration des régimes, quitte parfois à faire en sorte de remettre, de façon fondamentale, les équilibres actuels des régimes complémentaires de retraite pour répondre à ces revendications qui, dépendant d'un régime ou de l'autre, sont toutes différentes? Les régimes de retraite, ce n'est pas homogène, là. Dépendant de la caractéristique des participants, dépendant de l'historique du régime, dépendant de toutes sortes de situations, de l'âge des employés qui sont dans l'entreprise, bon, en fonction d'un certain nombre de situations, chaque régime est bien différent, et je ne veux pas, moi, introduire une règle dans la loi qui prévoirait de façon automatique l'indexation, par exemple.

Peut-être que, dans certains cas, ce n'est pas l'indexation qu'il faudrait en priorité, c'est peut-être revaloriser des petites rentes. Est-ce qu'on peut donc, plutôt que de se substituer aux parties puis d'accorder des droits, comme on me le demande, aux retraités, que je ne donnerais pas aux travailleurs... Parce que les droits que les retraités demandent, on ne me dit pas de les accorder en même temps aux travailleurs non plus, là. Comment faire en sorte donc de faire avancer les choses?

Et je pense que, à partir de l'expérience des 10 dernières années, avec ce que nous avons appris du fonctionnement de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, nous sommes entièrement justifiés, dans le sens de l'intérêt public, de choisir avant tout le respect des ententes entre les parties et de choisir la grande transparence dans l'administration du régime. Concrètement, vous le savez, les retraités vont pouvoir nommer leurs représentants, pouvoir de recommandation au comité de retraite, obligation aussi que, sur chaque relevé annuel, il existe une association de retraités dans l'entreprise, qu'on puisse en faire mention sur le relevé annuel pour que des gens puissent s'organiser.

Et je pense que la sensibilisation qui a cours, le travail que fait l'Alliance des retraités puis tout le débat public qui entoure le projet de loi n° 102 vont amener des gens à être plus vigilants. Le bel exemple qu'on peut donner, c'est ce qui est arrivé à la Société de transport de la Communauté urbaine: les parties ont convenu de créer un fonds pour faire des ajustements aux prestations des retraités. Elles en ont convenu ensemble. Donc, ce n'est pas impossible, en définissant correctement la patinoire, en favorisant la transparence, d'en arriver à des ententes. Et c'est là où je conclus, M. le Président, je mets en garde ceux qui pensent qu'avec le projet de loi n° 102 on ne pourra plus rien faire pour les retraités. C'est une erreur et c'est profondément faux, et ceux qui l'affirment font tout simplement de la démagogie. Il est possible aujourd'hui pour du monde, comme le cas de la STCUM nous le montre bien, pour des gens d'en arriver à des ententes puis d'obtenir des bonifications, en sachant aussi que les syndiqués d'aujourd'hui sont les retraités de demain.

En somme, M. le Président, je présente un projet de loi qui passe le test de la réalité. Je pense avoir réuni l'ensemble des éléments pour définir la plus grande zone de confort possible. Le gouvernement va aller de l'avant avec ce projet de loi; je pense qu'il sert bien l'intérêt public. Je ne règle pas toutes les questions, mais certaines questions qui demeurent ouvertes l'étaient aussi avant le projet de loi n° 102, puis, au fur et à mesure que les choses vont aller, bien, peut-être qu'il sera possible de poursuivre ce débat. Mais, en ce moment, il y a un rendez-vous, nous sommes à un carrefour, puis ce n'est pas le gouvernement qui va reculer aujourd'hui. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le ministre de la Solidarité sociale et député de Gouin. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière de régimes de retraite, M. le député de Verdun. M. le député.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je suis sûr que ceux qui ont écouté avec attention les propos du ministre et député de Gouin ont perçu tout de suite la contradiction évidente qu'il y a dans ses propos. Premièrement, il s'est évertué à nous dire que la situation actuelle ne marche, somme toute, pas trop mal. Somme toute, à l'heure actuelle, lorsqu'on arrive à partager les excédents d'actif, il y a un équilibre qui, somme toute, est relativement acceptable. Mais, si c'est le cas, pourquoi venir briser ce qui fonctionne plus ou moins bien dans la situation actuelle en débalançant complètement l'équilibre qui existe au profit des employeurs et au profit des travailleurs syndiqués? C'est ce que vous faites avec votre projet de loi. Essentiellement, vous êtes en train de débalancer un équilibre.

Vous avez plaidé qu'un régime de retraite, M. le Président... Et je pense que, vous, qui êtes un notaire, vous devez le savoir, un régime de retraite, c'est d'abord et avant tout un contrat qui lie des parties. Mais, dans les parties qui sont présentes dans ce contrat, il n'y a pas simplement les travailleurs syndiqués et simplement les employeurs, il y a aussi ? et c'est important et c'est ce qu'on essaie, depuis le début... et le député de Gouin doit se le rappeler, je n'ai jamais divergé de cette ligne-là ? les retraités, il y a aussi les participants qui ne sont pas syndiqués, et le projet de loi, actuellement, vient débalancer complètement cet équilibre, vient permettre simplement et facilement aux employeurs, modulo une entente avec le syndicat, ce qui est banal parce que c'est purement le Code du travail, d'être en mesure, à ce moment-là, de prendre des congés de cotisation. Et, ne nous faisons pas d'illusion, lorsqu'on prend des congés de cotisation, ça équivaut simplement à s'approprier les excédents d'actif à l'intérieur du régime de rentes, et c'est ça, cet élément, qui débalance tout.

Mais ce qui est plus grave aussi... je suis sûr que le député de Gouin va comprendre. Et je ne voudrais pas faire avec lui d'analyse juridique, et, s'il est d'accord avec moi, qu'il le retire, cet article 146.7 qui dit aux gens: Si vous n'êtes pas syndiqué ou si vous n'êtes pas patron, c'est-à-dire employeur, vous êtes considéré comme ayant accepté l'entente qui a lieu. Autrement dit, les droits que vous aviez avant de pouvoir plaider devant les tribunaux, de pouvoir aller devant la justice, comme l'ont fait les travailleurs de Singer, comme le font actuellement les retraités d'Hydro-Québec... Ces gens-là plaident qu'ils ont des droits qui leur viennent à partir d'un certain nombre de principes et du concept qu'un régime de retraite, c'est d'abord et avant tout un contrat, mais maintenant, avec l'article que vous mettez de l'avant, M. le ministre, et que nous proposons actuellement, dans les amendements, de retirer, vous faites en sorte de dire: Implicitement, s'il y a eu une entente pour prendre un congé de cotisation, les personnes qui n'étaient pas présentes à l'entente sont présumées avoir accepté aussi cette entente-là; et c'est ce point-là, M. le Président, qui est extrêmement grave. C'est un peu comme si on considérait, par la loi... on est en train de formaliser actuellement dans la loi le fait que les retraités ou les participants qui ne sont pas les participants syndiqués sont plus ou moins des mineurs et qu'ils n'ont qu'à accepter ce qui a été décidé par d'autres; et ce point-là, M. le Président, est un point central.

Si le ministre me dit que ceci n'est pas l'objectif qu'il poursuit, il n'y a absolument qu'une chose, et on lui donne actuellement la possibilité de le faire dans les amendements que nous avons déposés, nous demandons: Retirons actuellement cet article 146.7. L'article 146.7, c'est celui qui, justement, vient dire aux groupes qui n'ont pas été consultés, qui n'ont pas été partie au contrat, qui n'ont pas été partie réellement à l'entente: Vous êtes considérés comme ayant accepté implicitement ce qui a été décidé par d'autres quant à l'utilisation des excédents d'actif. C'est ce point-là qui est central à l'heure actuelle, M. le Président.

n(16 h 30)n

L'autre question, et revenons maintenant... Il est important que le ministre le comprenne, à partir du moment... Et, je m'adresse aussi à tous les membres, ici, de cette Chambre, comprenez donc bien une chose: à partir du moment où on accepte qu'un régime de retraite, c'est d'abord et avant tout un contrat qui lie un certain nombre de parties. Lorsque arrive le moment de devoir changer un peu le contrat, parce que soit il y a plus d'argent que nécessaire pour assumer les obligations du contrat... ce qui, entre vous et moi, M. le Président, veut dire simplement que les retraités ont payé trop pour la retraite qu'ils reçoivent, c'est ça que ça veut dire, d'avoir un excédent d'actif, d'avoir un surplus dans un régime. Ça veut dire qu'on a trop payé pour ce que l'on va recevoir.

À ce moment-là, M. le Président, ce que nous suggérons ? et nous n'avons pas voulu, dans les amendements que nous avons déposés et sur lesquels le ministre s'est déjà prononcé en commission parlementaire en les rejetant mais que nous représentons ici, dans l'Assemblée, de manière que chacun des parlementaires ici ait la chance de pouvoir s'exprimer sur ces amendements ? c'est de dire, sans formaliser: Il existe déjà un mécanisme, dans la Loi sur les régimes de retraite, qui est l'assemblée annuelle à laquelle chacun des groupes va se prononcer pour choisir ses représentants sur le comité d'administration du fonds de retraite.

Si on en est arrivé à vouloir prendre un congé de cotisation, M. le Président, c'est-à-dire si on en est rendu à un niveau tel que le surplus entraîne une nécessité de devoir diminuer le surplus en prenant un congé de cotisation ou éventuellement en bonifiant les bénéfices du régime, dans ces conditions-là, soumettons-le à toutes les parties qui sont les parties au contrat, pas seulement les représentants du syndicat, pas seulement les travailleurs syndiqués; ils ne sont pas les seuls concernés.

Et, M. le Président, il me semble évident et simple, et on ne compliquerait pas du tout les régimes en disant, bon: Lorsqu'on en arrive à devoir utiliser éventuellement des congés de cotisation, qu'il y ait consensus, et ça se fait dans d'autres régimes. Le régime de Radio-Canada, qui dépend du fédéral, je le comprends, mais lorsqu'il s'est agi, par exemple, de pouvoir diminuer les surplus, il y a eu une proposition qui a été faite dans laquelle l'employeur prenait un certain congé de cotisation, dans laquelle, deuxièmement, les employés pouvaient avoir un certain congé de cotisation, mais aussi dans laquelle on revalorisait les rentes, et ça a été soumis à chacun des groupes. Chacun a eu la chance de s'exprimer, et on a eu à ce moment-là la possibilité d'arriver à un consensus. C'est ce qu'on recherche.

Et ne me dites pas, M. le Président, qu'on est en train de mettre, de formaliser dans la loi quelque chose qui est trop lourd, qui empêcherait de fonctionner, qui empêcherait réellement la situation de fonctionner. À partir du moment où vous voulez formaliser ce qui se passe, bon an mal an, dans les régimes de retraite, vous ne pouvez pas uniquement formaliser les droits de deux parties sans inclure les droits des deux autres parties. C'est ça, la question de fond.

Or ? le ministre l'a rappelé et je suis d'accord avec lui sur ce point-là ? la situation, en général, dans les régimes de retraite, fonctionne relativement bien sans la loi n° 102. Les gens finissent par s'entendre grosso modo et faire en sorte que, lorsqu'il y a un surplus, le bon sens prévaut. Mais, au lieu d'inclure dans la loi des mécanismes pour permettre à ce bon sens de continuer à prévaloir, on est en train de formaliser dans la loi les droits de deux des parties au contrat et on oublie à ce moment-là les droits de la troisième partie.

Vous comprenez facilement, M. le Président, vous n'avez pas besoin d'y penser longtemps, que, à partir du moment où vous avez formalisé les droits des deux autres parties alors qu'on était dans une situation qui était une situation juridique relativement floue ? et je suis sûr que les participants ministériels vont être d'accord avec cette question-là ? où, grosso modo, les gens finissaient par s'entendre, bien, on va dire, maintenant: Dorénavant, si vous êtes travailleurs syndiqués, il est clair que vous avez des droits quand on va discuter de l'utilisation des surplus actuariels en prenant des congés de cotisation. Si vous êtes un employeur, il est clair que vous avez des droits. Mais on ne formalise pas les droits de la troisième partie qui serait les travailleurs non syndiqués ni les droits des retraités. Vous êtes en train de débalancer complètement, M. le Président, les équilibres qui existaient à l'intérieur des régimes de retraire.

Et si aujourd'hui ? et c'est sur ça que je mets en garde les ministériels, je mets gravement en garde les ministériels ? il existe un relatif équilibre dans un certain nombre de régimes de retraite, quoiqu'on ait vu des situations abusives comme le cas de Singer ou le cas parfois que d'aucuns ont considéré comme abusif ? je ne voudrais pas rentrer dans le débat juridique ici ? dans la situation, par exemple, d'Hydro-Québec, si on a pu réellement avoir une relative entente entre les parties, on est en train de la débalancer complètement avec le projet de loi qui est devant nous, M. le Président. Et ça, c'est un point que je voudrais rappeler.

On s'est permis ? je ne voudrais pas jouer au jeu des citations, mais j'en ai un certain nombre ? on a dit: Le milieu où ça passe le test de la réalité. Le ministre se targue de dire: Je passe le test de la réalité. Je vais lui citer un certain nombre d'éléments qui lui démontrent qu'il ne passe pas à l'heure actuelle le test de la réalité, il ne satisfait pas actuellement les deux autres parties qui sont partie au contrat. Gérard Bérubé ? ça vient du Devoir: «André Boisclair a beau être ministre de la Solidarité sociale, il est devenu celui de la division sociale, ayant désormais tous les retraités à dos.» C'était Bérubé, le 19 août 2000.

M. le Président, si vous me permettez, je peux vous en citer un autre. Ça vient de Jean Perron, Jean Perron qui est le président de la Confédération nationale des cadres ? je me permettrai de vous rappeler que ce sont en général des gens qui ne sont pas syndiqués: «Il est clair que l'équité n'existe pas dans ce projet de loi. Les cadres sont également des participants actifs qui devraient avoir voix au chapitre, notamment quant au partage des surplus des caisses de retraite auxquelles ils ont largement contribué.» Ça, c'était Jean Perron.

«Le projet de loi actuel répond en partie aux inquiétudes des travailleurs. Cependant, il ne répond pas au désarroi des retraités. Nous demandons au ministre de revoir son projet de loi pour que les principes d'équité et de transparence soient pierre d'assise à tout changement de régime complémentaire de retraite.» Ça, c'était Roger Fraser de la FADOQ, M. le Président.

Je me permettrai aussi de lire: «Le projet de loi propose plusieurs modifications, mais il ne semble pas toutefois être dans l'intention du ministre, comme législateur et comme ministre de la Solidarité sociale, de manifester une solidarité à l'égard des retraités.» C'était M. Claude Bariteau de la Fédération québécoise des professeurs d'université.

Je me permettrai de signaler le texte de Mme Charbonneau, qui est la vice-présidente de la CSN: «C'est, à mon sens, odieux en démocratie que d'interdire à un groupe d'intéressés de s'adresser aux tribunaux s'ils estiment être injustement traités par les parties qui administrent en son nom le régime de retraite.» Elle faisait spécifiquement référence à l'heure actuelle à l'article 146.7. Et c'est cité de l'intervention de Mme Charbonneau en commission parlementaire, M. le Président.

Je pourrais continuer, si vous voulez, dans ce sens-là. «Les retraités et leurs familles ne pardonneront jamais au gouvernement et au ministre de la Solidarité publique de les avoir dépouillés de leurs pouvoirs et de leurs droits à une part équitable des surplus de leur caisse de retraite.» Ça, c'était l'Alliance des retraités, dans une lettre ouverte qu'elle avait adressée à chacun des parlementaires de cette Assemblée.

n(16 h 40)n

Parce que, M. le Président, il est important que l'on comprenne bien, alors, que la loi ? et le ministre l'a rappelé tout à l'heure ? a clairement établi qu'en fin de régime il y avait un droit pour les retraités aux excédents d'actif. Vous comprenez bien que, si, en fin de régime, vous avez un droit sur les excédents d'actif, vous ne pouvez pas non plus en cours de régime priver de droit de surveillance sur ces excédents d'actif. Pensez un peu, M. le Président. En l'an 2000, vous disposez des excédents d'actif au profit strictement des travailleurs syndiqués et des employeurs par des congés de cotisation. Et, si, en 2001 ou 2002, vous arrivez en terminaison de régime, il n'y aura plus d'excédents d'actif dans la caisse, actuellement, parce qu'ils auront été utilisés en cours de régime ? vous comprenez bien ? et, à ce moment-là, le droit qui est reconnu par la loi à un partage équitable des excédents d'actif en fin de régime devient purement virtuel si on n'a pu les utiliser complètement en cours de régime.

Vous comprenez bien la situation. Vous êtes en train de nous dire que, si jamais vous avez pu vous partager les excédents d'actif qu'il y avait dans la caisse de retraite, c'est virtuel de dire que, en fin de régime, lorsque le régime arrive à terme, à ce moment-là vous pourriez vous partager les excédents d'actif. Et c'est ça qui est dans la logique même. La logique même nous amène à dire: S'il y a, en fin de régime, un droit sur le partage équitable des excédents d'actif entre les parties au contrat, que ça soit les participants actifs syndiqués, les participants actifs non syndiqués, les employeurs, mais aussi les retraités, vous trouvez aussi logique de dire qu'il doit y avoir droit à un certain équilibre, à un droit de regard, à être consulté, à être partie dans l'utilisation, M. le Président, des excédents d'actif en cours de régime.

Et il y a une justice, M. le Président, sur laquelle je pense qu'il est important, réellement, de soulever et d'attirer l'attention. Et on l'oublie, on l'oublie facilement, on a tendance à reculer et à dire: Bon, bien, voici, les travailleurs, les syndicats... Et je dois le dire honnêtement, bien des fois, c'est vrai, il faut quand même le reconnaître, les syndicats ont pris à coeur aussi la défense des retraités. Je ne prétends pas, à l'heure actuelle, que le monde syndical ne prend pas toujours à coeur la défense des retraités, mais leurs premiers mandataires, les gens qui leur donnent leur premier mandat de négociation, ce sont les participants actifs, ce sont eux qui vont accepter ou non accepter une entente avec l'employeur.

Alors, si on est prêt à dire que, bon, la négociation quant à l'utilisation des suppléments d'actif peut se faire entre l'employeur et les syndiqués, au moment d'accepter, au moment où on arrive qu'il faut accepter une entente, voir ce qui est... que les autres parties au contrat qui sont directement concernées puissent être consultées, ça m'a l'air évident, et aient leur mot à dire et puissent réellement accepter ou refuser. C'est leur protection réelle de ce qui constitue pour beaucoup une grande partie de leurs économies. Parce que sachez, M. le Président, ça ne demande pas de grands calculs actuariels pour être conscient de ça, que les excédents d'actif dans les régimes de retraite sont en grande partie le résultat des bonifications des épargnes des participants retraités. C'est en partie le droit qu'ils demandent de pouvoir utiliser ce qui correspond à leurs épargnes pour pouvoir bonifier, en quelque sorte, les retraites qu'ils reçoivent.

Alors, M. le Président, on n'est pas en train, à l'heure actuelle, de modifier complètement la situation, on essaie simplement de dire: En stricte équité, il semble que les personnes, les personnes qui, elles aussi, ont contribué à l'établissement de ces surplus actuariels, puissent donner leur avis sur la manière qu'on les utilise. Et c'est ça, le fond du débat. Le fond du débat, il est là. Bien sûr, le ministre va dire: Ça ne passe pas le test de l'accord des autres parties. Voulez-vous bien me faire rire deux minutes! À partir du moment où vous avez déjà concédé à deux autres parties la pleine juridiction quant à l'utilisation des excédents d'actif, croyez-vous que c'est dans la nature des choses de vouloir partager ce droit avec d'autres? Bien sûr que non. À partir du moment où le gouvernement avait fait son lit, avait dit: Oui, je reconnais à ces deux parties là le droit de décider seules ce qui touche les quatre, il y a une certaine réticence de devoir partager, en quelque sorte, ce droit avec d'autres, avec les travailleurs retraités et avec les participants qui sont non syndiqués, M. le Président.

Mais, entre vous et moi, ça n'aurait pas posé grand difficultés, ça n'aurait pas sclérosé le fonctionnement des régimes de retraite. Ça n'aurait strictement fait que formaliser dans la loi ? faites bien attention ? ce qui, grosso modo, se passe dans la majeure partie des régimes de retraite qui ? et je crois que les ministériels vont être d'accord avec moi ? en quelque sorte, marchent relativement bien.

Alors, M. le Président, c'est assez malheureux que ce qu'il serait relativement simple d'inclure dans la loi en votant les amendements que j'ai proposés... Et vous allez avoir la chance de pouvoir vous exprimer sur ces amendements, parce que bientôt, lorsqu'on aura à prendre le vote sur le rapport de la commission, on aura aussi à se prononcer sur des amendements qui sont d'une simplicité, M. le Président, et qui disent ni plus ni moins que, lorsqu'on a une proposition quant à l'utilisation des excédents d'actif dans un régime de retraite, grosso modo, il faut avoir l'accord de tous ceux qui ont contribué à la constitution de ces surplus actuariels dans le régime de retraite. Et ce n'est pas la fin du monde, c'est banal. Ça peut fonctionner extrêmement facilement, ce n'est pas la panacée.

Le ministre a dit en cours de route ? et je voudrais le reprendre un peu parce qu'il ne faudrait quand même pas qu'on commence à trop charrier ici en disant qu'on est les meilleurs, etc. ? il dit: Oui, voici, les retraités vont être mieux traités qu'ils ne le sont partout au Canada. Premièrement, j'imagine qu'il sait que la loi ontarienne prévoit une certaine forme d'indexation des régimes de retraite. Dans la loi, dans la loi ontarienne. Je ne pense pas nécessairement qu'il faille aller jusque-là, mais, quand même, la loi... qu'on commence à dire qu'on a le meilleur régime, la loi en Ontario propose actuellement une indexation des pensions, M. le Président.

Il est important aussi de savoir que la Colombie-Britannique, le Nouveau-Brunswick et la Saskatchewan ont pour principe qu'on peut permettre des congés de cotisation seulement à la condition que le texte du régime en fasse mention spécifiquement. Si le texte du régime, autrement dit, si le contrat initial prévoit qu'on peut prendre des congés de cotisation, oui, bien sûr, dans les lois qui régissent les régimes complémentaires de retraite dans ces provinces-là, vous pouvez prendre des congés de cotisation. Mais seulement si le contrat initial qui a donc lié les parties... que toutes les parties au contrat le prévoyaient explicitement.

Il est clair, bien sûr, M. le Président, que l'Alberta se signale par rapport aux autres en présentant une situation légèrement différente. On pourrait dire même totalement différente, la position de l'Alberta dit: Voici, à moins que le régime prévoie spécifiquement qu'on ne peut pas prendre de congé de cotisation, vous pouvez prendre tous les congés de cotisation que vous voulez. C'est la situation en Alberta. Je ne ferai pas ici de débat à cet effet-là. Peut-être que le ministre est devenu un adepte des positions albertaines, je n'en suis pas, moi, personnellement.

Les autres provinces, j'ai fait la revue à l'heure actuelle de ce qui se passe, le Manitoba, Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse, l'Ontario ont une loi qui est assez semblable à la loi qui est la loi du Québec en ce qui touche les utilisations de congés de cotisation. Alors, M. le Président, il ne faut pas non plus essayer... Je ne veux pas plaider ici au martyr, je ne veux pas dire, à l'heure actuelle, que la situation est dramatique, mais il ne faut pas non plus charrier de l'autre côté et dire qu'avec la loi n° 102 ça va être la panacée universelle.

Par contre, dernier argument, je me dois aussi de répondre alors sur une chose qui devient assez virtuelle, c'est vrai, le ministre avait, à l'intérieur de son projet de loi, ce qu'il appelait la solution 2, dans l'article 146.5, la solution 2, sauf que le problème était où dans ce qu'on qualifiait de la solution 2? C'est qu'elle formalisait le droit à l'employeur de prendre des congés de cotisation sans réellement un accord non plus des parties. On se retrouvait exactement au départ, dans la même situation. Et, de surplus ? et il le connaît, il le connaît ? on se trouvait aussi ? je vous remercie, M. le Président, il me reste peu de temps, mais je vais quand même aller jusqu'au bout ? à ce moment-là avec la question qui était celle de l'article 146.7, c'est-à-dire que, lorsque vous prévoyez au droit à l'employeur de prendre un congé de cotisation en fonction de ce qu'il appelait la formule 2 dans l'article 146.5, les parties étaient considérées comme ayant accepté; 146.7 continuait de s'appliquer.

n(16 h 50)n

Et, ça, il le sait. Il sait à ce moment-là qu'on continuait à les prendre comme des enfants mineurs, qui, de surcroît, n'avaient même pas eu la chance de négocier. L'employeur disait: J'ai satisfait au 146.5, deuxième élément, deuxième formule, mais vous êtes tous considérés comme ayant accepté ce que je vous propose. Or, la question restait donc tout à fait ouverte. La même question restait ouverte à ce moment-là de dire la nécessaire acceptation, le principe de reconnaître les parties au contrat comme des éléments majeurs restait complètement une question qui devait encore être débattue.

Si on avait amendé, si on avait été prêt de dire: L'entente qui peut se faire dans 146.5, deuxième élément, si ceci était soumis à une forme d'acceptation ou de vérification de la part des parties, à savoir les quatre éléments... et je ne le répéterai jamais assez ? vous le savez, je suis un vieux professeur, il faut-u avoir répété les mêmes choses pour que les gens finissent par le comprendre ? il y a quatre parties au contrat: bien sûr, l'employeur, bien sûr, les travailleurs syndiqués, mais aussi, les retraités et les travailleurs non syndiqués. Si on avait permis la possibilité, à l'intérieur du contrat, de permettre une acceptation de ce qui a été proposé en fonction de ce nouveau mécanisme qui a été retiré depuis, il n'y aurait pas eu de problème. Mais le problème de fond restait, on ne consultait pas; on ne prenait pas l'avis des gens qui étaient en cause.

M. le Président, je vais terminer cette intervention en espérant ? en espérant ? et en faisant un plaidoyer à l'ensemble des parlementaires ministériels qui sont ici présents dans cette Chambre et en leur rappelant que on ne peut pas, on ne doit pas actuellement formaliser ce qui se passe dans les régimes de retraite qui sont, somme toute, des régimes privés. On ne peut pas garantir des droits à deux parties au contrat sans réellement garantir les droits de la troisième et de la quatrième parties. Le faire, c'est débalancer complètement l'équilibre, débalancer une situation qui fonctionne, somme toute, pas trop mal actuellement. Et vous êtes en train, par la loi... Et, si on passe la loi telle qu'elle est, sans accepter les amendements que je propose, M. le Président, on est en train de devoir débalancer complètement l'équilibre dans les régimes de retraite.

Et, M. le Président, ceci, d'après moi, est quelque chose de relativement grave. C'est quelque chose qui va faire en sorte que employeurs et syndiqués vont pouvoir, puisque, maintenant, on leur garantit... Ce qui était plus ou moins clair, qui était même loin d'être clair... Et je ne voudrais pas faire ici l'exégèse du jugement Singer, mais d'aucuns pouvaient prétendre que le jugement Singer les empêchait de faire, de prendre des congés de cotisation sans avoir consulté, sans qu'il y ait un consensus quant à la manière dont on utilisait les surplus. Et je crois que c'est une lecture que l'on peut faire à l'heure actuelle du jugement Singer. Mais je ne veux pas qu'on rentre dans le débat, actuellement, d'analyse de jurisprudence.

M. le Président, ceci va disparaître. Ceci va disparaître parce que la loi va clairement dire: Vous pouvez prendre des congés de cotisation. Vous pouvez commencer actuellement à utiliser le surplus des caisses de retraite uniquement à partir du moment où vous avez un accord de la partie syndicale. Si vous n'avez pas de syndicat, vous pouvez le faire facilement, ad libitum, sans même d'accord de personne, et, si vous avez un syndicat, avec l'accord du syndicat, mais sans l'accord des autres personnes qui sont concernées par la constitution même du surplus, à savoir les retraités et à savoir les participants qui sont non syndiqués.

Et je dois me permettre de vous dire: Je pense, je n'accepte pas ça et je trouve qu'il y a là réellement quelque chose de fondamentalement inéquitable envers une partie importante des gens qui ont contribué aux caisses de retraite. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, j'attire l'attention de nos participants qui sont ici avec nous cet après-midi que le règlement interdit d'applaudir quelque intervention que vous jugez à propos. Alors, je vous demande votre collaboration. Merci beaucoup.

Nous poursuivons le débat sur la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, et je reconnais le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi et de travail. M. le député de Mont-Royal, vous avez la parole.

M. André Tranchemontagne

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. À mon tour, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 102, le projet de loi sur les régimes complémentaires de retraite en entreprise privée.

Tout d'abord, j'aimerais souligner que je suis très heureux d'avoir entendu le ministre, un peu plus tôt, parler que 90 % du projet de loi avait été approuvé unanimement. C'est donc dire que l'opposition libérale était d'accord avec 90 % du projet de loi. Et, si on parle qu'on était d'accord avec 90 % du projet de loi, c'est donc dire, M. le Président, que nous avons travaillé d'une façon positive et constructive avec le gouvernement du Parti québécois pour essayer d'apporter des amendements au projet de loi et d'arriver à un nouveau projet de loi, le projet de loi n° 102, qui, comme on vous disait tantôt, gouverne les régimes complémentaires de retraite.

Ce avec quoi on n'est pas d'accord, nous, au Parti libéral, c'est qu'un régime de retraite complémentaire, c'est une entente entre quatre parties, et ces quatre parties sont, là, parties prenantes au contrat. Ce contrat-là comprend l'employeur évidemment, qui verse des contributions, l'employé, qui verse aussi ses contributions ? l'employé peut être soit syndiqué ou non syndiqué ? et finalement aussi les retraités. Comme vous savez, les retraités, c'étaient des employés hier. C'est donc des gens qui ont travaillé à l'entreprise et qui ont aussi contribué à ce régime de pension. Et, très souvent, ils ont contribué sur une base assez longue que finalement aujourd'hui, quand on regarde les régimes de retraite privés, on se rend compte que presque 50 % des actifs des fonds privés complémentaires de retraite ont été contribués par les retraités d'aujourd'hui.

Ce qu'il ne faut pas oublier, aussi, c'est que les employés d'aujourd'hui seront également des retraités demain. Alors donc, il faut essayer d'amener, je pense, le plus d'équité possible dans un projet de loi. Et le projet de loi n° 102, malheureusement, quand il donne à seulement deux des quatre parties la possibilité de s'asseoir et de bénéficier ou d'utiliser les surplus, bien, à mon sens, c'est inéquitable, c'est inéquitable à l'égard des deux autres parties qui sont également parties prenantes à ce contrat-là. Alors, ça, c'est ce contre quoi on s'élève, M. le Président.

Vous savez, un régime de retraite complémentaire, c'est une forme de revenu, c'est ce qu'on appelle un revenu différé, c'est-à-dire que l'employeur accepte de vous verser un certain montant dans un fonds de retraite pour qu'un jour vous puissiez avoir une retraite qui est décente. Et c'est donc dire que le fonds de retraite, cet actif-là appartient aux employés qui y contribuent présentement, mais aussi appartient à ceux qui y ont contribué hier. Et j'aimerais vous citer mon exemple. Moi, j'ai travaillé pour une entreprise privée, je suis un de ceux qui sont visés, je suis retraité d'une entreprise privée, et, heureusement, mon entreprise offrait un régime complémentaire de retraite. J'y ai contribué pendant 30 ans, alors je peux vous dire donc que je suis partie prenante à ce régime de retraite là, probablement plus que mon successeur qui y a contribué seulement depuis quatre ans. Alors, si jamais il y avait un congé qui se donnait, je m'objecterais, dans le fond, à ce que ce congé... que je n'aie pas, moi, de bénéfices.

Alors, c'est important de comprendre que, quand une entreprise décide, avec un syndicat, de prendre un congé de cotisations, l'entreprise y voit un bénéfice. Son bénéfice, c'est qu'elle ne contribue plus au régime de pension, donc elle peut avoir des profits plus élevés. L'employé qui ne contribue pas non plus, c'est équivalent très souvent à une augmentation de salaire. Alors, si ces deux groupes de personnes-là, l'employeur et l'employé syndiqué, peuvent bénéficier d'un bénéfice tangible, immédiat, aujourd'hui, pourquoi alors l'employé qui est non syndiqué et le retraité, l'employé d'hier, si vous voulez, ne pourraient pas aussi y trouver leur bénéfice?

n(17 heures)n

Alors, c'est ce qu'on dit, nous, au Parti libéral, nous trouvons absolument inéquitable que la loi n° 102 oblige seulement deux des quatre parties à s'entendre et de laisser de côté les employés non syndiqués ainsi que les retraités.

Vous savez, M. le Président, le Parti libéral n'est pas le seul à penser de cette façon-là. Laissez-moi vous citer quelques personnes. D'abord, le premier, c'est M. Jean-Marc Legendre, qui est actuaire-conseil pour le groupe Optimum. Et voici ce que M. Legendre dit: «Pour les retraités, on devrait certainement les faire représenter au sein des comités de retraite, du moins à titre d'observateurs ? et ce qui est important, c'est ce qui suit ? et prévoir un mécanisme d'ajustement minimal de leur rente lorsque les autres parties au contrat ? à savoir l'employeur et les employés syndiqués ? utilisent les surplus soit pour améliorer leurs bénéfices ou pour se donner un congé de contribution.» Et il continue un peu plus loin en disant: «Si les employés non syndiqués ? maintenant, il parle des employés non syndiqués ? sont ignorés dans le processus de partage des surplus, il devrait y avoir aussi une règle minimale de distribution à appliquer pour ceux-ci.» Alors donc, M. Legendre, qui est un actuaire-conseil, reconnaît dans ce texte-là que les deux autres groupes qui ne sont pas partie à la loi n° 102 devraient être parties à la loi n° 102, devraient aussi avoir leur mot à dire dans l'utilisation des surplus des régimes de retraite complémentaires.

J'aimerais vous citer une autre personne, M. Yves Prud'Homme, de la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec. Voici ce qu'il dit: «Sans les surplus, la rente des retraités ne serait pas indexée. Mais, lorsqu'il y a des surplus, les rentes des retraités ne sont indexées que partiellement ? et ça, c'est vrai ? et elles le sont de façon ponctuelle, suivant des évaluations actuarielles. Il est évident que le projet de loi aura des effets néfastes sur ces pratiques de revalorisation au détriment du niveau de vie des retraités.»

D'ailleurs, le ministre reconnaissait lui-même que le niveau de vie des retraités au Québec souffre depuis de nombreuses années. Alors donc, M. le Président, pourquoi, à ce moment-là, on ne ferait pas cet amendement que nous proposons, de telle sorte qu'on inclue dans la loi les quatre parties prenantes au contrat, à savoir non seulement l'employeur, non seulement les employés syndiqués, mais également les employés non syndiqués ainsi que les retraités?

Tantôt, on vous a dit que la loi reconnaissait, par exemple, qu'en terminaison d'un régime, c'est-à-dire quand on a arrêté de contribuer au régime... En terminaison de régime, le député de Laporte avait décidé que, s'il y avait excédents dans le régime, une partie des sommes, donc, appartient aux retraités, c'est-à-dire que les sommes n'appartiennent pas toutes à ce moment-là à l'employé actif actuellement mais appartiennent aussi aux retraités. C'est donc de reconnaître que l'actif du fonds de pension en question appartient à deux personnes, c'est-à-dire la personne qui est là présentement, qui s'adonne, par pur hasard, à être employé actif présentement, mais aussi l'employé qui était là hier et qui est aujourd'hui un retraité.

Alors, la question que je pose au ministre, dans le fond, c'est: Si la loi est capable de reconnaître en fin de régime la valeur de l'actif du retraité, pourquoi, si on parle de la situation en cours de régime, et s'il y a surplus, et s'il y a besoin ou nécessité de disposer de ces surplus-là, à ce moment-là, cette loi n° 102 ne reconnaîtrait pas en cours de régime, de la même façon que l'autre loi reconnaît en fin de régime, la contribution des retraités d'aujourd'hui, qui sont, encore une fois, les employés d'hier de même que les employés non syndiqués?

Alors, M. le Président, j'aimerais peut-être, en terminant, vous dire que, nous, ce qu'on demande, au Parti libéral, c'est bien simple, c'est qu'il y ait consensus entre les quatre parties prenantes au contrat, c'est-à-dire l'employeur, les employés syndiqués, les employés non syndiqués et les retraités, alors qu'il y ait donc entente, consensus entre ces parties de la façon dont on devra disposer de ces surplus. Tantôt, le ministre nous disait que l'expérience n'a pas défavorisé une partie en faveur des autres, et je reconnais les chiffres qu'il donnait. Alors, à ce moment-là, ma question, c'est: Pourquoi, à ce moment-là, ne pas formaliser dans la loi justement cette réalité qu'on a vécue au Québec et éviter ainsi les abus? Parce que, quels que soient les chiffres que le ministre donne, il arrive qu'il y ait des abus. Et la loi serait là pour éviter des abus et faire en sorte que les quatre parties prenantes au contrat partagent les surplus. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Mont-Royal. Je vais reconnaître un prochain intervenant. Il s'agit du leader adjoint de l'opposition officielle et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'industrie et de commerce. Je voudrais, au nom des membres de cette Assemblée, lui souhaiter un bon anniversaire de naissance aujourd'hui. Bonne fête! Et je vous cède la parole.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président. Je ne m'y attendais pas. Mais c'est vrai que vous avez une mémoire extraordinaire pour les anniversaires. Je crois savoir que, dans votre propre comté, à chaque année, vous téléphonez personnellement à des milliers et des milliers de vos électeurs. Alors, je pense que c'est tout à votre honneur. Je vous remercie encore une fois de l'avoir souligné.

M. le Président, au nom de l'opposition justement, il me fait plaisir, à mon tour, de prononcer quelques mots sur le projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, Bill 102, An Act to amend the Supplemental Pension Plans Act.

M. le Président, il y a très peu de sujets qui, à leur face même, paraissent, pour le grand public, plus arides qu'un débat en Chambre qui porte sur les régimes complémentaires de retraite, des discussions sur les actuaires, sur les analyses. Mais, en arrière de ces considérations plutôt sèches, en arrière de ces termes qui invitent les gens à «zapper» et trouver un autre sujet à la télé, je dois dire qu'il y a une chose qu'il ne faut jamais oublier: il s'agit de personnes, de retraités, d'individus, de nos voisins, de nos familles qui sont en arrière de ces analyses et de ces chiffres-là.

Et c'est pour cette raison-là que, dans un premier temps, je tiens à souligner le travail de mon collègue le député de Verdun qui, dans ce dossier, n'a jamais perdu de vue le fait qu'il ne s'agit pas d'un débat entre experts, pas d'une discussion entre actuaires, pas d'une analyse de la part de fonctionnaires ou d'autres bureaucrates, il s'agit d'abord et avant tout d'une question d'équité, d'une question de savoir comment on va traiter les gens qui, tout en travaillant, ont mis de côté une partie de leurs revenus pour pouvoir les récupérer un jour.

Je dois dire, M. le Président, parce que c'est encore une fois à l'image de mon collègue le député de Verdun, qu'il n'a pas pris une attitude péremptoire dans le dossier, qu'il n'a jamais dit: J'ai la réponse, je sais que c'est ça et que ce n'est rien d'autre. Depuis le début, il parle de faire des arbitrages, il cherche des manières autres que la confrontation pour résorber les différends entre les deux formations politiques là-dedans, précisément parce qu'il pense à tous ces gens-là qui, pendant leur carrière, ont payé. C'est leur argent, M. le Président, et le député de Verdun ne l'a jamais oublié dans toutes ses analyses et ses interventions.

Il y a une autre constante dans ce dossier-là ? parce qu'il y a beaucoup de gens qui représentent les groupes de retraités qui sont venus nous rencontrer dans nos bureaux de comté ? c'est le fait que le ministre responsable de ce dossier, le député de Gouin, fait preuve d'une obstination caractérielle depuis le début dans ce dossier. Il ne veut rien savoir. Une fois que lui, du haut de son savoir, s'est prononcé sur un dossier, tu n'as plus le droit de le mettre en doute.

Il a sorti, à mon point de vue, un des pires arguments que je n'ai jamais entendus en près de... maintenant, ça va faire sept ans dans cette Chambre. J'ai entendu le député de Gouin cet après-midi dire: Bien, je me suis entendu avec l'opposition sur 85 % du projet de loi. Comme si ça voulait dire que le reste, ça allait de soi, c'était bon, ou encore qu'il s'agit ici, en Chambre, d'une sorte de négociation: Bien, je t'ai donné quelque chose, puis il faut que tu me laisses tranquille pour l'autre 15 %. C'est un argument d'une faiblesse incroyable. À notre sens, ça témoigne du point auquel le ministre responsable a de la difficulté à maîtriser ce sujet très complexe, ce sujet qui touche les gens dans leur vie. Ce n'est pas nous qui le disons seulement, M. le Président, les groupes qui sont venus nous voir dans nos bureaux de comté nous le disaient tout le temps: Mais il ne comprend rien là-dedans.

n(17 h 10)n

Alors, avec une position prise d'avance, il se cantonne là-dedans, il l'a mémorisée; on l'a vu encore aujourd'hui, en Chambre. Le chef de l'opposition lui a posé une question très claire. Il n'a pas répondu du tout, il est allé complètement à côté. Mais il reste avec une position qu'il connaît. Du moment que c'est du par coeur et qu'il peut le répéter avec un peu d'effet de toge pour la Chambre, comme il a fait cet après-midi, bien, lui, il est content de lui-même, il est fier de lui-même puis il est convaincu que ça doit être bon, ça doit être vrai, ce qu'il vient de dire.

C'est pour ça que, nous, on est si fiers de notre collègue le député de Verdun. Lui, M. le Président, n'a jamais pris pour acquis qu'il connaissait la réponse ou qu'il n'y avait qu'une seule réponse. Il a cherché à trouver un consensus, il a cherché à comprendre les arguments de l'autre côté, il a parlé de mode alternatif de résolution des différends, il a parlé notamment de trouver des mécanismes d'arbitrage avec certains sujets spécifiques qui seraient discutés.

Mais, à la fin de la journée, M. le Président, il ne faut jamais perdre de vue que, lorsqu'on parle de ces sommes-là, de ces surplus actuariels, des sommes qui sont dans les pensions de retraite, et tout ça, que ce soit à la fin du régime ou en cours de régime, c'est de l'argent que des gens qui ont travaillé ont versé de leur poche. Ça a fructifié peut-être plus vite certaines années que certains actuaires ont pu prévoir. Tant mieux pour eux autres. C'est leur argent. Ce n'est pas l'argent de quelqu'un d'autre, c'est à eux autres, cet argent-là, puis ils y ont droit. On parle d'un devoir de fiduciaire.

Le mot anglais en dit long. Le mot anglais pour fiduciaire, c'est «trustee», «trust», la confiance. O.K., je vous fais confiance, je vous accorde une partie de mes émoluments, de mon salaire, de mon traitement. Je vous dis: Vous le gardez pour moi. Je vous fais confiance. Quand viendra le temps, pour moi, d'arrêter de travailler, on va faire des calculs, combien de cela je peux toucher moi-même.

Vous savez, il y a des gens très influents dans notre société ? très influents ? qui ont fait des fortunes en achetant des compagnies puis en pillant dans les fonds de retraite des employés. C'est, à mon sens, honteux. Ça ne devrait pas exister, et cette Assemblée nationale ne devrait jamais être complice dans un tel geste. C'est pour ça que, nous, du côté de l'opposition officielle, on fait appel au gouvernement et notamment au député de Gouin. On lui demande d'oublier sa personne, on lui demande d'oublier son orgueil personnel, on lui demande d'oublier son ego et de réfléchir aux gens qui sont en haut, ici, aujourd'hui, de ne pas croire qu'il a la réponse toute faite parce que c'est la première qu'il a donnée et qu'il ne changera pas d'idée.

On a bien vu cet après-midi que même le premier ministre est en train de le désavouer, là. Le premier ministre, interpellé à répétition par le chef de l'opposition, est resté cloué dans son siège; lui, il ne voulait pas s'associer à ça. Puis, si j'étais le député de Gouin, je prendrais une leçon là-dedans, parce que, nous, on connaît les réactions du P.M.; on les voit tous les jours. Le député de Gouin est assis en arrière, mais, nous, on voit qu'est-ce qui se passe, sa réaction. C'est une des seules choses qu'on a de plus, M. le Président, du fait d'être élus: on voit un petit peu plus que ce qui se passe à la télé. Puis je vais vous dire une chose: Le premier ministre du Québec était extrêmement mal à l'aise aujourd'hui. Il était mal à l'aise avec les questions du chef de l'opposition parce qu'il savait que le chef de l'opposition avait raison et il était également mal à l'aise avec les non-réponses, les évasions du député de Gouin parce qu'il savait par ailleurs que le député de Gouin était en train de passer à côté.

M. le Président, il y a des questions de base dans notre société. Il faut être juste. Lorsqu'on évoque l'intention du législateur, on parle de la volonté des 125 élus qui sont présents ici. On cherche tous à ce qu'il y ait des principes qui nous guident, des principes de justesse, «fairness». Est-ce que c'est juste, l'intervention législative qu'on est en train de faire? Est-ce que ça porte ombrage à certains? Il y a effectivement des arbitrages qui doivent se faire tous les jours, et c'est pour ça qu'un Parlement existe. C'est ici que ça se discute.

Mais, une fois mis devant la preuve, une fois qu'une possibilité de régler les différends qui est souple, flexible et qui tient compte des objections de l'autre côté, une fois que, ça, c'est sur la table, pourquoi est-ce que le député de Gouin s'entête? Comment ça se fait qu'il réussit à se convaincre que, puisque c'est sa position, c'est non seulement la meilleure, mais c'est la seule, qu'il ne faut pas écouter les gens qui sont ici avec nous aujourd'hui, qu'il ne faut pas écouter les autres experts qui sont venus témoigner en commission parlementaire? Lui, il possède la vérité, la réponse. Nous, on ne le croit pas.

On croit que le député de Gouin, comme tout autre député ici, essaie de faire son travail le mieux qu'il peut, mais il ne faut pas qu'il laisse son orgueil s'ingérer dans son droit premier qui est de légiférer dans l'intérêt du public en étant juste, en étant correct avec les gens qui nous ont mis ici. Et c'est ce qu'on le convie à faire, de respecter les gens qui ont payé dans ces fonds de retraite, de reconnaître le fait que c'est leur argent, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Chomedey. Alors, nous poursuivons le débat sur le rapport de la commission des affaires sociales portant sur le projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Et je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le vice-président de la commission des finances publiques et porte-parole de l'opposition officielle en matière de services sociaux et de la protection de l'Office des handicapés. La parole est à vous, M. le député de Nelligan.

M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je n'étais pas debout tout de suite parce que j'ai pensé qu'au moins un député du côté ministériel se lèverait pendant ce débat pour protéger les retraités, mais ils ne se sont pas levés cet après-midi. Ils sont sous la tutelle du ministre, un peu comme nous avons vu cet après-midi: on n'en a pas vu un se lever pour protéger les contribuables, se lever pour protéger les municipalités. Non, ils suivent la ligne de parti aveuglément.

Aujourd'hui, nous sommes en train de discuter, comme le député de Chomedey a juste mentionné, comment on peut protéger nos retraités. La loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, Bill 102, an Act to amend the Supplemental Pension Plans Act, c'est une loi tellement importante. Et, comme mon collègue a déjà mentionné, je voudrais aussi féliciter l'excellent travail du député de Verdun, le porte-parole dans le dossier, parce que lui a compris toutes les nuances, tous les diktats de cette loi. Je ne suis pas un comptable et je ne comprends pas tous les articles de loi, mais lui a trouvé ça. Ils ont voté pour les articles qui sont corrects; le ministre a dit 80 % ou 85 %. Nous avons appuyé, mais nous avons trouvé des graves problèmes dans le projet de loi. Et nous sommes en train, j'espère, de convaincre le gouvernement de ne pas juste continuer dans sa tyrannie de la majorité, mais de nous écouter, écouter ceux et celles qui essaient de convaincre le gouvernement qu'il est en train de faire une erreur. Changez la loi, respectez les retraités.

Mais il y a une tendance que je vois dans le projet de loi n° 102, qui m'inquiète beaucoup. Ce gouvernement pense toujours qu'il sait mieux comment on peut dépenser notre propre argent. Je suis tanné de ça, M. le Président. Je suis tanné que le gouvernement soit en train de dire qu'il peut décider, ou il peut passer une loi, ou quelqu'un d'autre peut décider comment dépenser notre argent. Il y a un exemple, là, de nos taxes, il y a des exemples de toutes les infrastructures du gouvernement. C'est un principe assez simple: si c'est mon argent, je voudrais avoir un mot à dire comment c'est utilisé.

Mais le problème avec la loi n° 102, c'est qu'il y a quatre parties: les employeurs, les employés actifs syndicalisés, les employés non syndiqués et aussi les retraités. Et deux de ces parties sont mises de côté. Il me semble que tu n'as pas besoin d'être un comptable pour comprendre que c'est injuste. Ce n'est pas juste d'exclure deux des quatre parties.

n(17 h 20)n

Et, M. le Président, comme nous avons déjà entendu, nous avons appris qu'il y a, à cause de ça, une forte possibilité qu'il puisse y avoir des décisions de non indexer les régimes de retraite. Pourquoi c'est important? Avec ce gouvernement, nous avons vu les changements de règles, mi-chemin, une après l'autre, et c'est important d'avoir l'indexation du régime. Juste un bon exemple: le programme du régime d'assurance médicaments. C'est eux autres qui ont tous critiqué le Parti libéral quand il a créé le programme qui charge 2 $, maximum 100 $, le programme d'assurance médicaments. Eux autres ont commencé un programme: ça coûte 175 $, 20 % des coûts des médicaments; maintenant, ils ont doublé ? doublé ? cette prime à 350 $. Nous avons moins d'argent dans nos poches, M. le Président, et c'est pourquoi nous avons besoin d'une possibilité de faire l'indexation du régime de retraite.

Mr. Speaker, this Bill 102, a Supplemental Pensions Act changes is a fundamental problem because it leaves out two of the partners ? two of the partners ? and the Government has decided it sets up a system that it can exclude people who contributed to the plan. It seems to be nonsensical to me, Mr. Speaker.

This is a Government that has continually changed the rules midway. These people have contributed to their pension plans. But, yet, this Government has decided to come up with a new system that totally unbalances the current system. And, Mr. Speaker, there's a serious problem. There's a serious problem: If you're not at the table deciding how your money is going to be spent, your interest won't be looked after.

Et, M. le Président, le député de Verdun a proposé plusieurs mécanismes pour assurer que ceux et celles qui sont exclus par le projet de loi puissent être inclus, mais le gouvernement a décidé que ce n'est pas important pour eux. Je pense qu'on peut facilement, M. le Président, trouver une solution qui peut assurer que les quatre parties sont partie de leurs décisions. J'ai tellement peur que les groupes, s'ils sont oubliés dans la loi, ils vont être oubliés dans les décisions du régime de retraite.

C'est injuste, M. le Président, que les employés syndiqués et les employeurs peuvent décider les décisions d'utilisation des surplus dans les régimes de retraite sans avoir la participation des retraités. M. le Président, c'est complètement injuste de mettre de côté une partie de la population.

Et, M. le Président, nous avons déjà vu plusieurs exemples des réactions: La révolte des retraités. Je ne cite pas tous les articles: «Piger dans les surplus, c'est une opération indécente.» Une opération indécente, M. le Président.

M. le Président, il me semble que, avec une bonne séance de travail, on peut régler cette question. Mais le gouvernement a décidé qu'ils ont un monopole sur la vérité. Et j'ai mentionné, M. le Président, que les personnes qui ont contribué dans un régime de retraite ont le droit de décider qu'est-ce qui se passe avec ce régime de retraite et ses surplus. Ce n'est pas un principe plus compliqué que ça, M. le Président.

People have continued to contribute to their supplementary pension plans. All their working life, they have contributed. They expect to have a good pension plan once they've been retired. It was a part of the social contract, that I recall when I was growing up, that people really believed in. It is that: All our life, we are going to work hard, we're going to build our society and we're going to put away a little bit of money in collaboration and cooperation with our employees or whatever program; and, whence we retire, we'll be looked after. But this Government has done everything in its power to take away the resources, take away the seniors' and the retired peoples' opportunity to live a good life.

An example, and I'm not just talking against this Government, a clear example is the prescription program in which this Government has severely hurt the ability of seniors to have access to prescription drugs. This is a Government that is now hitting the most vulnerable, those that are sick, up to $1100 for prescription drugs. No wonder people are wanting to have access to how their pension plans will be protected. And it seems to me one of the ways to do it, Mr. Speaker, is to make sure that, when decisions come to the table, they can protect the surpluses of those pension plans. Obviously, if people aren't receiving a pension plan, maybe they have a different perspective of how to use those surpluses. Maybe they have a legitimate perspective. But it seems to me that you need all four partners at the table. The concept is quite simple.

J'espère que quelques députés ministériels vont se lever bientôt pour protéger les retraités. Si vous êtes tous bâillonnés, je pense que vos commettants et vos comtés vont comprendre ça assez bientôt.

Une voix: Oui, à la prochaine élection.

M. Williams: Oui, c'est ça que j'ai entendu. Si la ligne de parti est plus importante pour vous que vos retraités dans vos comtés, c'est vous qui allez vivre avec les conséquences. J'espère que vous allez avoir le courage de parler dans votre caucus. Vous n'avez pas besoin de faire ça devant nous, mais en privé si vous voulez. Mais je pense que vos commettants vont être assez fiers de vous si vous avez le courage de vous lever et dire: Oui, vous avez raison, l'opposition officielle, particulièrement le député de Verdun, vous avez raison, c'est injuste de ne pas avoir les quatre parties à la table décisionnelle.

J'espère que vous allez avoir le courage de rencontrer ceux et celles dans votre comté qui ont écrit les lettres à vous. J'espère que vous allez avoir le courage de dire: Ce ministre, son ego est moins important que les personnes retraitées. C'est un principe bien simple qu'on demande aujourd'hui: assurer que ceux et celles qui ont participé dans le régime de retraite aient un mot à dire sur l'utilisation des surplus. Je pense que c'est assez simple. J'espère que ce gouvernement va comprendre. J'espère que les députés ministériels vont se lever aujourd'hui et protéger les retraités du Québec. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Nelligan. Nous en sommes toujours sur le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Je vais reconnaître une prochaine intervenante, elle est la porte-parole officielle de l'opposition en matière de revenu et députée de Beauce-Sud. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Alors, merci, M. le Président. Encore une fois, je constate, comme mon collègue le député de Nelligan, qu'il n'y a pas de député du côté ministériel intéressé à se prononcer sur cette question. Eh bien, moi, par solidarité pour les gens qui sont dans les tribunes, en haut, il me fait plaisir aujourd'hui d'intervenir et de démontrer ma solidarité envers les retraités du Québec.

Alors, ce projet de loi, M. le Président, le projet de loi n° 102, vise à modifier, on le sait, les paramètres de la Loi sur les régimes complémentaires, et cette loi s'applique aux régimes de retraite privés, ceux que plusieurs entreprises et groupes de travailleurs ont mis sur pied pour améliorer leurs revenus de retraite. Au Québec, on parle de 625 000 travailleurs qui seront touchés par ce projet de loi. C'est beaucoup de gens, ça, M. le Président.

Le projet de loi tente, entre autres, de baliser la façon dont l'employeur et le syndicat peuvent disposer des excédents d'actif générés par une caisse de retraite. Dans sa version initiale, M. le Président, le projet de loi permettait aux employeurs, en respectant certaines modalités, de prendre de façon unilatérale des congés de cotisation. Mais, dans sa version modifiée, il prévoit que les surplus devront être utilisés d'un commun accord entre la partie patronale et la partie syndicale, excluant du même coup du processus décisionnel les cadres, c'est-à-dire les employés qui sont non syndiqués, et les bénéficiaires, c'est-à-dire les employés retraités.

Et que fait, M. le Président, le Parti québécois dans ce projet de loi? Eh bien, il empêche ou plutôt il bâillonne deux des quatre groupes qui sont partie au contrat dans la gestion des surplus d'une caisse de retraite, soit les employés non syndiqués et les employés retraités. Pourtant, M. le Président, la loi actuelle, celle qui prévaut actuellement, là, elle prévoit que les excédents doivent être partagés suite à une entente intervenue entre toutes les parties. Et toutes les parties, ça signifie l'employeur, les travailleurs syndiqués, les travailleurs non syndiqués et les retraités. Alors là on voit un recul, par rapport à ce que le gouvernement propose, par rapport à ce qui existe actuellement, du moins sur ce plan-là.

La loi reconnaît donc qu'une partie des sommes qui constituent un régime de retraite appartiennent aux retraités. Malheureusement, le ministre de la Solidarité sociale, le député de Gouin, refuse d'appliquer ce principe dans son projet de loi et s'obstine à mettre en place une mécanique qui exclura du processus décisionnel les employés retraités, c'est-à-dire les employés non syndiqués. Nous, au Parti libéral du Québec, nous sommes contre cet état de fait.

n(17 h 30)n

Je vais ajouter, M. le Président, que ce projet de loi, en plus de bâillonner deux des quatres groupes au contrat, il introduit dans sa version révisée des dispositions particulièrement insidieuses. Alors, selon les dispositions du ministre de la Solidarité sociale, les retraités seront considérés comme un sous-groupe de la partie syndicale. Par conséquent, ce que ça veut dire: si le syndicat devait s'entendre avec la partie patronale sur l'usage des surplus en ne tenant pas compte des revendications des retraités, eh bien, il sera tout simplement impossible à ces derniers de contester légalement devant les tribunaux l'entente qui aura été conclue entre le syndicat et l'employeur parce que le syndicat aura été réputé avoir parlé en leur nom. Alors, ça, ça s'appelle une mesure très insidieuse, M. le Président.

Légalement, un syndicat n'est tenu de rendre des comptes qu'à ses membres. Or, les retraités n'entrent pas dans cette catégorie, puisqu'ils ne paient plus de cotisations. Par conséquent, il y a tout lieu de craindre que les intérêts des syndicats et des employeurs ne convergeront pas nécessairement toujours dans la même direction que celle souhaitée par les retraités.

Et quelle est la position des retraités dans tout ça? Eh bien, ils revendiquent tout simplement le droit de participer à l'utilisation des surplus, un droit que je considère tout à fait légitime. Est-ce que c'est surprenant? Doit-on s'en surprendre? Ils demandent aussi que leur soit laissé un droit de recours ou un droit à l'arbitrage afin de contester des décisions qui pourraient leur porter préjudice.

Alors, M. le Président, ce projet de loi a connu deux versions depuis qu'il a été déposé. La première qu'on a connue a soulevé un tollé de protestations de la part des organisations syndicales et des associations aussi qui représentaient les retraités. Cette version-là permettait aux employeurs de s'emparer des surplus actuariels des caisses de retraite en prenant des congés de cotisation. Eh bien, devant la colère du monde syndical, le ministre a fait marche arrière. Il a soumis l'utilisation des surplus à l'assentiment des syndicats, mais il a laissé pour compte les retraités qui, eux aussi, par leurs cotisations passées, ont pourtant contribué à l'accumulation des surplus.

Le ministre de la Solidarité sociale a donc déposé des amendements à son projet de loi, le 2 juin dernier, qui touchent particulièrement l'article 85. Ces amendements astreignent désormais la prise d'un congé de cotisation à même le surplus actuariel à l'assentiment des syndicats, mettant ainsi fin à la prise de congé de cotisation de façon unilatérale par les employeurs. Dans tous les régimes privés de retraite, l'employeur devra, pour clarifier son droit de prendre un congé de cotisation, s'entendre d'abord avec les syndicats. Il y a là une amélioration sensible, il faut le dire, mais les retraités sont encore laissés pour compte, puisqu'ils ne font pas partie de l'entente. Pourtant, en commission parlementaire, le ministre insistait fortement sur un certain nombre de questions, dont la nécessité que toutes les parties s'entendent. La réalité, aujourd'hui, c'est que les parties ne sont pas deux, mais quatre, c'est-à-dire l'employeur, les participants actifs, les travailleurs non syndiqués ainsi que ? et numériquement ils deviennent, dans beaucoup de régimes privés de retraite, de plus en plus nombreux ? les retraités.

Face à ce projet de loi et suite à l'écoute des personnes qui sont intervenues en commission parlementaire, le caucus du Parti libéral du Québec s'est clairement prononcé contre le projet de loi n° 102, contre le principe. Les dispositions maintenant entourant l'utilisation des surplus sont inacceptables dans la mesure où elles favorisent indûment deux des quatre parties au contrat, c'est-à-dire les employeurs et les employés actifs. M. le Président, nous, au Parti libéral du Québec, nous croyons qu'un régime de retraite, c'est d'abord un contrat qui crée une fiducie et qui implique quatre parties, et non deux comme l'établit le projet de loi n° 102. Ces parties sont, bien entendu, l'employeur, les employés syndiqués, les employés non syndiqués, comme les cadres, et les bénéficiaires ou, si vous voulez, les retraités.

Nous croyons donc qu'il y a un déséquilibre à l'intérieur du projet de loi quant à l'utilisation des excédents d'actif en cours d'exercice. Il y aurait lieu d'avoir une approche beaucoup plus équilibrée, puisqu'une caisse de retraite constitue une entente entre quatre parties. Il est donc inéquitable d'exclure deux parties de la négociation. On ne peut pas, à deux, décider comment on utilise les choses pour les quatre. Il est donc injuste, injuste, M. le Président, que les employés syndiqués et l'employeur se partagent à eux seuls la part de surplus équitable des retraités. C'est comme si vous, M. le Président, aviez acheté un billet de Loto-Québec avec trois autres de vos collègues et qu'au moment du partage vous décidiez qu'il y en a seulement deux qui vont en profiter. Vous auriez raison de dire que c'est injuste, surtout si vous ne faites pas partie des deux qui vont bénéficier de la caisse, du magot.

Alors, M. le Président, quand on parle de caisse de retraite, il s'agit souvent d'un salaire qui est différé. Les cotisations passées au régime de retraite faisaient partie de la rémunération globale des retraités actuels. Les retraités, M. le Président, ont construit leur sécurité financière en se constituant des caisses de retraite. Les sommes qui y sont contenues représentent bien souvent l'épargne de toute une vie et leur seule sécurité financière. Cette sécurité, malheureusement, risque d'être compromise, puisque le projet de loi n° 102 les prive d'un droit qui leur revient, c'est-à-dire être considérés comme une partie au contrat afin d'être consultés sur l'utilisation des surplus.

L'adoption du projet de loi n° 102 risque d'avoir pour conséquence directe la non-indexation des rentes de retraite de milliers de retraités. Ainsi, au fil des années, ces derniers perdront progressivement leur pouvoir d'achat et s'appauvriront. M. le Président, les retraités sont des citoyens qui ont contribué pendant de nombreuses années au développement de notre société. La collectivité leur est largement redevable, et il n'est pas acceptable de leur réserver un tel traitement. Encore une fois, M. le Président, le Parti québécois nous démontre son peu d'intérêt pour le citoyen et pour l'équité, et c'est pourquoi, M. le Président, je voterai contre le projet de loi n° 102. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de...

Une voix: Beauce-Sud.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...Beauce-Sud. Est-ce qu'il y a un prochain intervenant? Mme la députée de Chauveau...

Des voix: Vanier.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, Vanier, je m'excuse. Je vous cède la parole, Mme la députée.

Mme Diane Barbeau

Mme Barbeau: Ha, ha, ha! Vous m'avez déménagée, hein? Merci, M. le Président.

Il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur le projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. D'entrée de jeu, M. le Président, j'aimerais rappeler qu'un des principaux objectifs du projet de loi n° 102 est de renforcer la confiance tant des participants que des employeurs envers les régimes complémentaires de retraite. Entre autres choses, le but de cette opération est de rendre la mise en place de régimes complémentaires de retraite plus attrayante, et ce, afin que de plus en plus d'employeurs acceptent d'y participer.

Nous avons, M. le Président, cette obligation envers la jeune génération qui, vous l'admettrez, n'a pas toujours la chance de bénéficier des mêmes avantages que la génération qui la précède. Il faut d'abord savoir qu'il s'agit de régimes complémentaires de retraite privés. En ce sens, il n'appartient pas au gouvernement d'en décider les moindres détails. Cependant, pour assurer la crédibilité de ces régimes, le gouvernement souhaite, par les modifications apportées à cette loi, adapter ces régimes aux nouvelles réalités du marché du travail. On sait, aujourd'hui, que les jeunes changent fréquemment d'emploi, puis présentement ils sont perdants quand ils font les transferts de leurs fonds. Alors, il faut les moderniser.

Le gouvernement souhaite aussi simplifier l'administration de ces régimes et, finalement, lever les incertitudes juridiques qui entourent la question de l'utilisation des excédents d'actif ou les surplus. Je vous rappelle que ces incertitudes nuisent grandement à la mise en place de nouveaux régimes complémentaires de retraite. Dorénavant, pour clarifier son droit à prendre congé de cotisation, l'employeur devra s'entendre avec les syndicats et avec toutes les parties avec lesquelles il est lié par entente écrite.

n(17 h 40)n

Dans bon nombre de régimes, la question des excédents d'actif est réglée par une entente négociée par l'employeur et le syndicat. Nous savons que l'expérience des 15 dernières années nous indique que 60 % des surplus utilisés l'ont été pour améliorer les droits des travailleurs et des retraités. Selon les chiffres de la Régie des rentes du Québec, environ 3,6 milliards de dollars de surplus ont été utilisés pour améliorer les droits des participants actifs et retraités, et 2,4 milliards de dollars en congé de cotisation patronale.

La pratique des dernières années renforce notre conviction que les ententes négociées sur l'utilisation des surplus actuariels respectent le principe d'équité entre toutes et tous. Le projet de loi n° 102 renforce aussi le droit reconnu aux retraités. L'assemblée annuelle des régimes de retraite demeure l'élément central et incontournable de la vie démocratique. Les retraités présents à l'assemblée auront dorénavant droit de désigner deux membres pour siéger au comité de retraite. De plus, afin d'aider les retraités à s'organiser, le relevé annuel devra obligatoirement inclure de l'information sur l'association des retraités de l'entreprise. Les comités de retraite auront aussi le pouvoir de faire des recommandations sur l'utilisation des surplus.

J'aimerais rappeler que la commission parlementaire nous a permis de bonifier de beaucoup le projet de loi. D'ailleurs, la députée de Beauce-Sud l'a dit tout à l'heure, il y a eu deux versions. C'est parce que le ministre a fait preuve d'une grande ouverture et a fait beaucoup de changements au projet de loi en commission parlementaire, avec l'accord de l'opposition officielle en grande ou, je dirais, majeure partie, que, aujourd'hui, cette même opposition officielle soumet des propositions d'amendement qui sont dénoncées autant par les représentants des syndicats que par ceux du patronat.

Tous les députés de cette Chambre, comme moi, reçoivent des doléances de citoyens dans leur bureau de comté ? au téléphone, par courrier, par courriel ? dont les doléances des retraités. Souvent, ces personnes vivent une certaine détresse quant à leur situation économique. Lors des audiences en commission parlementaire, plusieurs associations de retraités nous ont démontré, nous l'ont prouvé par des chiffres, que des retraités se retrouvent en situation de pauvreté. Cela les a amenés à revendiquer un amendement au projet de loi qui aurait eu pour effet de leur garantir une augmentation de leurs revenus de retraite.

J'ai personnellement aussi rencontré les représentants de ces associations. Je comprends leurs préoccupations et je pense qu'il faut trouver des solutions. Mais je continue de croire que l'amélioration de ces conditions économiques des retraités ou des futurs retraités ne passe pas par une rigidité plus grande des régimes complémentaires de retraite, dont cette présente loi est l'objet. Cependant, le débat sur la situation économique des retraités n'en est pas moins important pour autant. La pauvreté, qu'elle soit vécue par les retraités, les jeunes ou les gens de tous les âges, est préoccupante et doit faire l'objet d'un large débat de société, comme le revendiquent actuellement de nombreuses organisations communautaires.

Alors, en conclusion, j'ai la conviction que le gouvernement fait le bon choix en choisissant le respect des ententes négociées et en favorisant la transparence, et c'est pourquoi je vais voter pour, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci à l'adjointe parlementaire du ministre de la Solidarité sociale pour son intervention, et je reconnais maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'environnement et député d'Orford. M. le député d'Orford, la parole est à vous.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Je veux d'abord saluer les centaines de gens qui sont passés ici, depuis quelques jours, pour venir nous parler, comme le disait si bien la députée, soit dans nos bureaux, soit ici, à l'Assemblée nationale, du problème avec le projet de loi n° 102 et de ce qu'ils ressentent très fortement, ces gens-là. Alors, un, je veux les remercier d'être ici et de faire valoir leur point de vue. En démocratie, on peut toujours se plaindre que les choses ne vont pas à notre façon, mais on se plaint déjà un peu moins quand on y participe pleinement et qu'on essaie de faire avancer le débat. C'est tout à votre honneur d'avoir été ici pendant tout le débat et c'est aussi à votre honneur que le Parlement des aînés, qui a siégé ici il y a quelque temps et qu'un bon nombre d'entre nous sommes venus saluer, les aînés, ait aussi débattu de ce projet-là. Et on a vite réalisé qu'il était loin de faire l'assentiment de l'ensemble des retraités du Québec.

Il ne faudra jamais perdre de vue, dans ce débat-là, que les gens dont nous parlons maintenant, ce sont des gens qui ont bâti le Québec jour après jour, qui ont fondé des familles et qui ont été capables de mettre un petit pécule de côté. D'ailleurs, à la réunion des aînés, ici, le président, qui a parlé de ce projet de loi là, qui a défendu le projet de loi avec vigueur, le ministre du Revenu, pendant le Sommet des aînés, il disait que, lui, son propre fonds de pension, il était de 12 000 $ par année, qu'il n'avait pas été indexé depuis 1983.

Le ministre, à un moment donné, sûrement dans un égarement, aurait dit que c'étaient des riches rentiers qui se plaignaient un peu de ce projet de loi. Je mets le ministre en garde. Ce n'est pas des riches rentiers qui ont des problèmes avec le projet de loi, c'est l'ensemble des retraités du Québec qui ont des problèmes avec ce projet de loi là.

Quand vous gagnez 12 000 $, que vous êtes à votre retraite avec votre charmante épouse, bien, avec 12 000 $, c'est 1 000 $ par mois, ça. Une fois que vous avez payé le loyer, il n'en reste pas beaucoup finalement pour votre retraite, surtout si vous voyez cette inflation mois après mois. Vous vous demandez comment vous allez éventuellement rencontrer les deux bouts.

Aujourd'hui, quand le chef de l'opposition a posé des questions sur le projet de loi, j'aurais aimé que le premier ministre, qui était là, se lève et prenne la défense de son projet de loi n° 102. Peut-être que nous, de l'opposition, il y a des aspects qu'on aurait mieux compris, peut-être que l'âge aidant du premier ministre nous aurait aussi éclairés sur certains aspects du projet. Les centaines de gens qui étaient ici auraient probablement compris certains aspects du projet de loi n° 102. Eh bien, non.

J'ai rarement vu ça, d'ailleurs, M. le Président, dans ce Parlement, alors que l'enceinte est pleine d'une clientèle spécifique, qu'une question... On a donné l'occasion au premier ministre de se lever, de défendre son projet de loi, de se battre pour son projet de loi. Il est resté confortablement assis, à deux occasions, et a délégué finalement son ministre à l'arrière pour répondre à la question. Ça m'a fait mal, moi, au nom des gens âgés, de voir ça. Ça m'a fait mal, au nom des gens retraités, de voir ça. Il y aura une autre période de questions demain. Peut-être que le premier ministre pourrait se reprendre. Il pourrait se lever, faire une déclaration au début et nous expliquer les aspects du projet de loi n° 102 dont les retraités ne sont pas d'accord avec.

Je veux revenir sur le Parlement des sages. C'était une première, à ce qu'on prétend, au monde. C'est extraordinaire, ce qui s'est passé ici. D'ailleurs, la dame qui était à mon bureau, je ne la connais pas, elle m'a laissé une belle petite note. Quand je suis arrivé de vacances, il y a une semaine maintenant, j'ai ouvert mon bureau et puis il y avait une belle petite note de cette dame, qui a été ici pendant deux jours, me disant qu'elle avait bien aimé son expérience et qu'elle avait trouvé que mon bureau était bien propre. Je la remercie, d'ailleurs.

M. le Président, ces gens-là, ils ont réfléchi sur certains projets de loi. Entre autres, la ministre de l'Environnement, qui était une dame du comté d'Orford, m'avait appelé pour qu'on parle d'environnement. Je lui avais indiqué un peu ce que le gouvernement devrait faire, ce que, si nous avions été là, nous aurions fait, bien sûr, et comment elle devrait débattre de son projet de loi. Mais, au moment où ils ont débattu du fonds de pension, du projet de loi n° 102 ? et vous vous en souvenez, M. le Président, vous avez même salué ma présence dans le milieu ? j'étais ici, je les ai écoutés. Et là on sentait que ce n'était rien d'artificiel. On ne parlait pas soudainement d'un sujet qu'on connaissait un peu moins. Là, je vous garantis que ces gens-là, ils y sont allés avec force et vigueur. Là, on avait l'impression que, eux, ils n'étaient pas d'accord avec le projet de loi n° 102.

Je veux saluer, bien sûr ? tout le monde l'a fait, même le gouvernement l'a fait tantôt ? la participation extraordinaire du député de Verdun. Je veux rappeler aux gens qui nous écoutent que le député de Verdun, il est un professeur de mathématiques dans les plus hauts niveaux à l'université. Il enseigne, croyez-le ou non, aux gens qui font les savants calculs de fonds de pension, ceux qu'on appelle des actuaires. Alors, lui, il leur enseigne, imaginez-vous donc, aux actuaires, il leur enseigne, aux grands mathématiciens de ce bas monde. Puis ce même député de Verdun, il est celui qui a mené la bataille. Il doit comprendre ça, des fonds de pension, lui, parce que c'est un peu technique, un fonds de pension. Il doit comprendre ça.

Le ministre aurait eu avantage à écouter un peu plus. J'avoue qu'il a écouté un peu. Il a pris certains aspects des amendements. Il faut dire que c'est compliqué, faire face à notre député de Verdun. À un moment donné, on finit par comprendre, avec le temps. Mais il n'a pas tout compris, M. le Président. Et, moi, je suis convaincu que, si la commission parlementaire avait duré un peu plus longtemps, probablement que le ministre se serait rendu aux arguments du député de Verdun. Malheureusement, ce n'est pas là qu'on est rendu.

n(17 h 50)n

Moi, je veux dire aux gens qui sont ici ce soir, la dernière chose que je voudrais qu'il m'arrive quand je vais arriver à ma pension... Et tantôt je me suis peigné avant de passer à la télévision. Certains charmants confrères à moi m'ont fait remarquer qu'il me manquait des cheveux, à moi aussi, puis que la pension n'était peut-être pas si loin que ça finalement. La dernière chose que je voudrais qu'il m'arrive quand je vais arriver à ma pension, ça serait d'avoir du trouble avec le système de santé puis d'avoir du trouble avec mon fonds de pension.

Bien, vous autres, vous êtes privilégiés, vous êtes franchement privilégiés, parce que vous allez avoir les deux. Vous avez certainement du trouble avec le système hospitalier, ça ne peut pas être pire que ça. Je ne vous conterai pas ce soir, parce qu'il ne me reste pas grand temps, l'histoire de ma belle-mère, 87 ans, qui a été trois jours dans une salle d'urgence, qui a voulu prendre une douche avec ma femme qui était là pour l'aider un peu, et on lui a dit: Non, ici, il y a trop de monde dans la salle d'urgence. C'est une salle d'urgence de 20 personnes, ils étaient 60. Elle a dormi sur un grabat pendant trois jours. Et, quand ma femme a demandé pour qu'elle puisse avoir ? mon épouse ? une douche, on a dit: Non, on ne peut pas commencer ça dans les salles d'urgence, ça n'aura pas d'allure.

Alors, première affaire qu'on ne veut pas qu'il nous arrive à notre retraite, c'est d'avoir des problèmes avec notre système de santé. Et puis la deuxième, c'est, quand on prend notre retraite puis qu'on a mis un pécule de côté, tout ça, que tout le monde puisse patauger là-dedans puis prendre plein de décisions, et puis que, nous, on ne soit pas là, sur ce tribunal où vont se prendre ces décisions. Ce n'est pas correct. À sa face même, ce n'est pas correct.

Alors, encore une fois, pauvres vous qui avez pris votre retraite il y a quelques années, un, vous allez avoir des problèmes avec le système hospitalier, et puis, deux, bien il y a des gens qui jouent là-dedans. Et les chiffres sont assez probants, hein? Je regardais les chiffres, là, depuis 1984, il y a eu des omissions de paiement de fonds de pension, de cotisations pour 2,4 milliards. C'est pas mal d'argent, ça, là. Imaginez-vous mon président, tantôt, avec son 12 000 $ par année, quand on lui lance ça par la tête, des 2,4 milliards. Et puis on prétend qu'il y aura 4 milliards de surplus dans les coffres, et puis ça, bien vous n'aurez pas grand-chose à dire à ces surplus-là. Il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans.

Et puis ce qui vous chicote, les retraités ? et on le comprend, de notre côté ? c'est que le projet de loi n° 102 porte sur l'utilisation des surplus des caisses de retraite. Vous vous interrogez à savoir à qui ils appartiennent et qui peut prétendre les utiliser. Doivent-ils être redistribués aux contribuables que vous êtes ou sont-ils propriété de l'employeur qui peut ainsi se donner des congés de cotisation? C'est la grande question.

Eh bien, la jurisprudence, les juges ? notre président est un avocat, il sait de quoi je parle ? ont statué là-dessus, M. le Président, ils ont déjà clairement établi qu'un régime de retraite est un contrat entre tous les participants, qu'ils soient actifs ou inactifs. Alors, M. le Président, c'est clair, la Cour d'appel du Québec a déjà clairement établi qu'un régime de retraite est un contrat entre tous les participants, qu'ils soient actifs ou inactifs.

Alors, le président me dit que j'ai terminé. J'aurais aimé continuer, M. le Président, c'est un projet de loi tellement important, qui change la vie de plusieurs personnes qui sont âgées et à la retraite. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Orford. Nous poursuivons le débat, et je reconnais Mme la présidente de la commission de l'éducation et porte-parole des aînés et du Protecteur du citoyen et député de Mégantic-Compton. Mme la députée, je vous écoute.

Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. La semaine dernière, en tant que porte-parole pour les aînés, je demandais le consentement de cette Chambre pour déposer la motion sans préavis suivante, et je vous la répète, M. le Président:

«Que l'Assemblée nationale réclame du gouvernement une politique équitable pour les participants retraités en matière de régimes complémentaires de retraite en ce qui a trait à l'utilisation des excédents d'actifs en prévoyant, pour chaque régime, un mécanisme permettant aux retraités de se prononcer sur cette question, tel que le préconisait le Parlement des sages.» Fin de la citation.

Cette motion, M. le Président, que le Parlement des sages votait le 12 septembre dernier à la quasi-unanimité, demande au gouvernement de prendre en compte les aspirations et les revendications des retraités et des aînés en ce qui a trait à l'utilisation des excédents d'actif en matière de régimes complémentaires de retraite.

Malheureusement, M. le Président, dû à l'intransigeance du gouvernement, ce dernier a refusé de discuter de cette motion. Vous comprendrez certainement, M. le Président, à la lecture de cette motion, que les parlementaires membres du Parlement des sages ont pris une position à l'opposé du projet de loi n° 102 sur les régimes complémentaires de retraite que le gouvernement a vainement tenté de faire adopter la session dernière.

Le projet de loi n° 102 tente, entre autres, de baliser la façon dont l'employeur et les syndicats peuvent disposer des excédents d'actifs générés par une caisse de retraite. Dans sa version initiale, le projet de loi n° 102 permettait aux employeurs, en respectant certaines modalités, de prendre, de façon unilatérale, des congés de cotisation. Dans sa version modifiée, il prévoit que les surplus devront être utilisés d'un commun accord entre la partie patronale et la partie syndicale, excluant ainsi le processus décisionnel des retraités.

M. le Président, ces dispositions qui permettent à l'employeur, avec l'assentiment de chaque syndicat accrédité, de prendre un congé de cotisation, et ce, sans tenir véritablement compte de l'opinion des retraités, font l'objet de vives protestations de l'ensemble des associations de retraités du Québec.

M. le Président, les retraités et les aînés ont répété, à maintes reprises, au premier ministre et au ministre de la Solidarité sociale qu'ils n'accepteront jamais une loi qui les éliminerait du processus décisionnel concernant l'utilisation de leur part des excédents d'actifs de leur caisse de retraite et qui, de surcroît, les lierait, le cas échéant, à des ententes auxquelles ils n'ont pas consenti.

Malheureusement, M. le Président, le ministre de la Solidarité sociale s'obstine toujours à mettre en place une mécanique qui exclura les retraités du processus décisionnel. Le ministre de la Solidarité sociale continue donc, avec l'arrogance qu'on lui connaît, de faire fausse route avec son projet de loi diviseur.

M. le Président, c'est donc dans un esprit d'équité et de respect que le Parti libéral du Québec, grâce au bon travail de mon collègue de Verdun, a déposé des amendements allant dans le sens de la motion adoptée par le Parlement des sages. Le gouvernement péquiste, en rejetant nos modifications, en commission plénière, a clairement démontré qu'il ne partageait pas ces principes de justice et d'équité envers les retraités et les aînés du Québec.

Au moment où la population vieillissante du Québec est en pleine croissance, au moment où nos retraités vivent plus longtemps et ont été amenés, à la suite de compressions de personnel, à prendre leur retraite à un âge relativement jeune, au moment où les revenus de retraite vont prendre une importance accrue dans l'ensemble de la population québécoise, il est de toute importance de tenter au maximum de protéger le pouvoir d'achat de ces revenus de retraite.

Le projet de loi n° 102, M. le Président, rate donc une belle occasion de clarifier, dans un monde vieillissant où l'importance de la retraite va grandissante, les droits des retraités et des aînés.

Je continue, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la députée de Mégantic-Compton...

Est-ce qu'il y a consentement pour permettre... Il n'y a pas de consentement. Donc, vous prévenir, au prochain moment où on appellera le projet de loi n° 102, quant au rapport de la commission des affaires sociales, qu'il vous restera cinq minutes de temps de parole.

Alors, ceci met fin à la séance d'aujourd'hui, aux affaires du jour.

Nous allons entreprendre maintenant cinq débats de fin de séance.

Merci de votre demi-intervention. Alors, il est proposé d'ajourner le débat. Est-ce que cette motion d'ajournement du débat est adoptée? Adopté.

Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys a fait une proposition d'ajourner le débat à cette phase-ci de l'assemblée.

Débats de fin de séance

Alors, nous en sommes maintenant aux débats de fin de séance; il y en a cinq. Nous allons commencer avec le premier.

Financement des centres jeunesse du Québec

Alors, un premier débat de fin de séance. C'est un débat, à la demande du député de Nelligan, suite à une question qu'il a posée au ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux concernant les compressions budgétaires dans les centres jeunesse du Québec.

Alors, les débats de fin de séance, c'est cinq minutes à celui qui demande le débat, cinq minutes au ministre qui répond à la question de débat de fin de séance et un droit de réplique de deux minutes.

Alors, est-ce que M. le ministre délégué...

M. Baril (Berthier): Je suis là, M. le Président.

n(18 heures)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député de Nelligan, je vous cède la parole.

M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai insisté pour avoir un débat de fin de séance parce que j'étais complètement, complètement insatisfait par la cassette que le ministre a sortie quand je l'ai questionné sur la problématique dans nos centres jeunesse. Avant la période de questions, j'avais déposé un rapport qui a flotté dans son ministère pour au moins quatre mois, qui était un cri d'alarme des centres jeunesse. Ils ont dit qu'ils ne pouvaient pas vivre avec les contraintes budgétaires qui existent maintenant et la loi n° 107. Les centres jeunesse, M. le Président, sont ceux et celles qui travaillent avec nos jeunes et les familles en difficulté. C'est ceux et celles qui placent nos jeunes quand il y a besoin d'hébergement d'urgence. C'est ceux et celles qui donnent le «counseling», qui travaillent avec nos jeunes délinquants, qui travaillent avec les familles en stress, en détresse et les jeunes à risque.

M. le Président, ce n'est pas un groupe qui sort souvent en public, mais, en juin, ils ont préparé un document qui a un titre: Plan de survie. Plan de survie, c'est une question de survie pour les centres, parce que, avec la loi n° 107, la loi antiservices, balancer les livres, c'est plus important que de donner les services à nos jeunes. Pendant quatre mois, le document a flotté au ministère, et finalement quelqu'un a décidé qu'il doit agir, il ne peut pas vivre avec ça comme un document qu'il laisse sans réponse. Et, finalement, nous avons eu le document et nous avons décidé que c'est assez important de rendre ça public.

Mais le ministre a finalement dit que c'est la faute des gestionnaires. Comme d'habitude, ce gouvernement, c'est toujours la faute des autres. Ce n'est jamais lui qui a tort, est responsable. Il a dit: C'est la faute des gestionnaires. Mauvaise gestion. Voyons donc! pas de mauvaise gestion. Ce gouvernement a coupé les centres jeunesse de 60 millions de dollars pendant les derniers cinq ans. Il y a un budget maintenant à 650 millions à peu près. Ils ont coupé 60 millions. Ils n'ont pas retourné le 60 millions. Je sais que le ministère a préparé des notes pour le ministre, mais ils ont, maximum, reçu un autre 24 millions. Mais les centres jeunesse disent... ils ont sonné un cri d'alarme, et on manque 24 millions maintenant, monsieur, minimum 24 millions avec les services directs.

Qu'est-ce que ça veut dire? Parce que c'est difficile de comprendre peut-être des millions, M. le Président. S'il y a une ordonnance du tribunal qui dit qu'on doit placer un jeune et s'ils n'ont pas assez d'argent dans le budget, les centres jeunesse vont avoir le choix d'être en outrage de l'ordonnance du tribunal ou la loi n° 107, antiservices. Qu'est-ce qu'ils vont faire? Dans cette documentation que j'ai reçue, la moitié des problèmes sont juste là. Qu'est-ce qu'ils vont faire, en janvier, une fois qu'ils n'auront pas de budget? Qu'est-ce qu'ils vont dire? Les jeunes n'ont pas le droit d'avoir un problème. Les familles n'ont pas le droit d'être en risque ou en difficulté.

Quel type de gouvernement est-ce que nous avons devant nous? N'oubliez pas, c'est le même gouvernement ? et je vois le ministre de l'Éducation aujourd'hui devant nous ? qui a coupé 25 % de nos travailleurs sociaux de nos écoles, 25 %. Et je sais que, dans le rapport Lebon, le premier rapport Lebon, c'est chiffré, et ils ont demandé de ne pas mettre ça aussi clair que ça. Mais venez dans nos écoles. Ils ne sont pas là, pas de services de prévention, pas d'appui dans les familles. Et les centres jeunesse disent qu'il y a une lacune incroyable, les problèmes de leurs services. Qu'est-ce que le ministre dit? C'est la faute des gestionnaires. Est-ce qu'il va blâmer les jeunes bientôt? J'espère que non.

C'est pourquoi j'ai insisté pour retourner ici, en Chambre, et demander tout de suite au ministre: Est-ce qu'il peut agir? Est-ce qu'il peut répondre tout de suite? Est-ce qu'il peut soustraire les centres jeunesse de la loi n° 107 ou est-ce qu'il va coincer les centres jeunesse de choisir entre respecter une ordonnance d'un tribunal ou la loi n° 107? Est-ce que lui comprend la situation? Eux autres, et je peux citer région, après région, après région, ils disent: Ça ne marche pas. Est-ce que c'est juste lui qui a le monopole sur la vérité ou est-ce que c'est les 16 centres jeunesse? Moi, si je gage, si je mets ma confiance, je vais toujours mettre ma confiance plus dans les centres jeunesse, et avec les travailleurs et travailleuses qui font un travail exceptionnel, que dans les paroles du ministre. Je trouve ça complètement inacceptable que le ministre ait blâmé les travailleurs et travailleuses sociaux dans ce dossier, et leurs administrateurs. C'est le gouvernement qui a coupé plus que 60 millions dans les centres jeunesse. J'espère qu'il va corriger ça tout de suite avant même la fin de semaine. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je cède la parole maintenant à M. le ministre délégué à la Santé, aux Services sociaux et responsable de la Protection de la jeunesse. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur cette interpellation, d'abord pour rappeler ce que le gouvernement du Québec a fait depuis deux ans: nous avons pris le taureau par les cornes.

Encore une fois, M. le Président, le député de Nelligan est plus Jos-connaissant dans les débats de fin de séance qu'aux périodes de questions, parce que, s'il y avait autant de conviction qui l'habitait lors de la dernière période de questions à laquelle il m'a posé une question sur les centres jeunesse, je conviens, qui est importante, il serait revenu en deuxième additionnelle, en troisième additionnelle puis en quatrième additionnelle. Mais qu'est-ce qu'il a fait? Il s'est écrasé.

Alors, M. le Président, je suis heureux d'intervenir sur le sujet parce que je suis fier de dire, et je vais répéter, qu'effectivement on a relancé l'espoir dans le réseau des centres jeunesse, on a relancé l'espoir auprès des jeunes en difficulté, tout particulièrement dans les deux dernières années. Et l'investissement que le gouvernement du Québec a fait, particulièrement auprès des centres jeunesse, se chiffre à près de 70 millions de dollars en deux ans si on calcule à la fois l'argent récurrent, 31 millions de dollars, et l'argent non récurrent qui a été injecté, au-delà de 35 millions qui ont été injectés justement pour éliminer les déficits.

M. le Président, on a décidé de s'attaquer aux problèmes en ce qui concerne la protection de la jeunesse avec des objectifs très précis, en mesurant l'efficacité des chantiers que nous mettons en place, et nous avons décidé aussi de résoudre des problèmes structurels qui vont nous permettre effectivement et qui nous permettent déjà de constater des changements importants. Particulièrement au niveau des listes d'attente, jamais en 20 ans, depuis, dans le fond, l'avènement de la nouvelle Loi sur la protection de la jeunesse qui avait été votée par le gouvernement progressiste de René Lévesque en 1977, on n'a pu constater, maintenant depuis 20 ans, de listes d'attente aussi basses en protection de la jeunesse.

On a investi, M. le Président, d'une façon très importante dans un chantier national de formation qui répond aux attentes de l'ensemble des intervenants et des intervenantes du réseau de la protection de la jeunesse pour soutenir davantage leurs connaissances, leur développement d'expertise au niveau de l'abus, négligence, au niveau des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie et de détresse psychologique.

Nous avons, il y a quelques mois, réinjecté 5 millions d'argent neuf auprès des familles d'accueil pour renforcir, supporter, encadrer le travail extraordinaire que font les familles d'accueil au Québec.

On a injecté aussi de l'argent, M. le Président, pour intégrer davantage les approches des centres jeunesse et des CLSC au Québec, pour ne pas que le jeune en difficulté soit victime d'un match de ping-pong entre une institution et une autre.

D'autres investissements importants, M. le Président. On a annoncé, dans les suites du Sommet québécois sur la jeunesse, un chantier fort important qui va nous permettre d'agir d'une façon extrêmement ciblée auprès des familles les plus défavorisées du Québec, et le programme va commencer à partir du mois d'avril de 2001. Alors, un programme extrêmement ciblé, un programme d'avant-garde qui va permettre d'intervenir plus tôt, d'une façon plus intense, d'intervenir mieux auprès de 3 000 familles, auprès de 3 000 nourrissons. Nous allons les accompagner avec une équipe de spécialistes, soit de la naissance jusqu'à l'entrée à l'école, pour permettre, dans le fond, d'agir d'une façon préventive auprès des familles les plus en difficulté au Québec. Je suis fier de ce programme-là, M. le Président, parce que c'est un des grands engagements du Sommet, qui sera en marche, en route dès le mois d'avril prochain, et c'est un programme exclusif en Amérique du Nord.

D'autre part, M. le Président, si on regarde, dans le fond, ce qu'on a fait depuis deux ans, on a fait quand même des efforts importants. Le rattrapage a été important, mais on veut faire plus. Donc, dans les prochaines semaines, je serai en mesure, à la suite du travail qu'effectue actuellement André Lebon, de prendre une décision importante pour soulager le travail des intervenants, ce qu'on appelle le nombre de cas par intervenant, pour être en mesure de livrer un meilleur projet clinique, de livrer un projet clinique plus efficace, un projet clinique qui est en mesure de répondre, dans le fond, aux aspirations des jeunes en difficulté.

Je n'ai pas le temps de continuer, M. le Président, parce que je pourrais parler aussi de ce qu'on a fait d'une façon admirable et extraordinaire, plusieurs millions d'investissements pour venir en aide aux jeunes aux prises avec des problèmes de toxicomanie dure, projets que nous avons lancés avec Portage, les maisons Jean Lapointe, entre autres, alors qui permettent, dans le fond, d'enlever de la pression sur le réseau.

Donc, encore une fois, nous allons continuer dans ce sens-là, nous allons continuer d'investir. Et je réitère mon engagement auprès des centres jeunesse du Québec.n(18 h 10)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Alors, votre droit de réplique, M. le député de Nelligan, deux minutes. La parole est à vous.

M. Russell Williams (réplique)

M. Williams: Oui, encore une fois, comme le réseau dit: Un bon gars, mais il ne peut pas livrer la marchandise. S'il veut avoir une complémentaire, la prochaine fois, qu'il donne une réponse à nos jeunes.

J'ai demandé une question pour nos centres jeunesse. Il manque 24 millions de dollars. Et une crise s'en vient à cause de vous et à cause de la loi n° 107. Je vois toute une différence entre l'année passée et aujourd'hui.

Quand il veut plier devant les compagnies de tabac avec la loi n° 444, il dit: Pas de sanctions pour un an. Aucun problème, ils ont fait des arrangements pour ça. Quel ministre supposé en charge de la Santé! Mais, quand il y a la loi n° 107 qui met en crise nos centres jeunesse, il dit qu'il doit appliquer la loi n° 107 à la lettre. Quelle incohérence de ce gouvernement.

Les listes d'attente ? il est bien fier de ça ? sont pires depuis que, lui, a commencé dans le dossier, sont pires maintenant qu'avant. Les listes d'attente d'application des mesures, son expert Lebon dit que c'était 524 en avril; maintenant, c'est 546. Quelle efficacité! Ils sont en train de monter la liste des jeunes en attente de l'application des mesures.

Il y a une crise, il y a une crise qui s'en vient. La loi n° 107 n'est pas applicable dans les centres jeunesse. Il y a les ordonnances qui viennent des tribunaux. Ils disent qu'on doit placer nos jeunes. Comprenez-vous ça, là? Et il n'a pas le droit de dire: On ne peut pas écouter les tribunaux. Mais vous mettez nos centres jeunesse, nos travailleurs dans une place inacceptable et nos jeunes dans une place inacceptable. Ils vont choisir d'être en outrage au tribunal pour la loi n° 107. C'est inacceptable de faire ça comme ça.

Avec ses bonnes paroles, ce n'est pas assez bon. Vous avez besoin d'agir tout de suite, maintenant, M. le Président. Là, la prochaine fois, mets ta cassette préparée par le ministère à côté...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure.

M. Williams: ...pour répondre à la question et répondre à nos jeunes qui sont en difficulté et aux familles qui sont en difficulté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Merci, c'est fini. Merci, c'est terminé.

Instauration d'une nouvelle forme
de bulletin scolaire

Alors, nous poursuivons un autre débat de fin de séance à la demande de M. le député de Kamouraska-Témiscouata, sur une question qu'il posait au ministre de l'Éducation concernant l'évaluation des élèves prévue dans sa réforme scolaire. Alors, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, je vous cède la parole. M. le député, la parole est à vous.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, merci, M. le Président. La question a été posée la semaine dernière et était relative au bulletin que les parents recevront dans les prochaines semaines, suite à la nouvelle réforme de l'éducation qui est mise en place. Et la question était bien simple. C'est qu'on a entendu à plusieurs reprises mentionner, de la part du ministre, qu'il voulait avoir des bulletins simples, clairs et précis. Et ça, c'était son voeu personnel, à lui.

D'un autre côté, quand on lui donne les exemples de ce qui a été envoyé par son propre ministère, son propre sous-ministre, qui a pris des exemples de bulletins, qui les a retransmis, ces exemples-là, dans toutes les commissions scolaires au Québec, on se rend compte que ce n'est pas du tout clair, simple et précis.

L'autre élément, il nous dit: Oui, mais, vous savez, vous devez connaître la loi, c'est sous la responsabilité de chacune des commissions scolaires, des écoles, quelle sera la forme du bulletin comme telle. Mais, à ce moment-là, si c'est la responsabilité de l'école, comment lui peut dire qu'il veut des bulletins clairs, simples et précis et quel va être l'impact de ça? À un moment donné, il faudrait savoir c'est la responsabilité de qui. Quand c'est des bonnes nouvelles, c'est lui qui les annonce. Aussitôt que c'est des mauvaises nouvelles, là c'est la responsabilité des autres. Et souvent on voit apparaître son attaché de presse dans le décor, qui, lui, vient réexpliquer ce que ça voulait dire, et tout ça.

Mais, M. le Président, je vais vous en donner, quelques exemples, de ce qu'on retrouve dans les bulletins que les parents recevront, des exemples qu'ils pourraient recevoir des bulletins des enfants de première année. Et vous me direz, M. le Président, si ça correspond, ce que je vais vous dire, aux exemples de clarté, de simplicité que le ministre dit vouloir avoir dans les bulletins.

Au niveau des compétences d'ordre méthodologique, qu'est-ce que ça veut dire, pour un enfant de première année, qu'il a un A, un B, un C ou un D au fait qu'on évalue l'efficacité de l'utilisation de la technologie comme outil méthodologique? Première année.

Qu'est-ce que ça veut dire, comment un parent doit recevoir cette information-là quand on lui dit, dans le bulletin de son enfant, que son jeune, en première année, a un A, un B, un C ou un D, si l'enfant apprécie son cheminement au regard de son identité personnelle? Première année.

Qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président, au niveau de l'apprentissage du français langue d'enseignement, si un parent d'un enfant de première année voit dans son bulletin que son jeune porte un jugement esthétique sur les pratiques et les produits culturels liés à la langue? Comment on doit comprendre ça quand on est parent et que notre enfant a une bonne ou une mauvaise note à ce niveau-là?

Qu'est-ce qu'on doit comprendre quand un enfant a une bonne ou une mauvaise note au fait qu'il intègre ses acquis culturels dans ses expériences de lecture, d'écriture et de communication orale? Est-ce que c'est simple, clair et précis, comme le veut le ministre? Je ne suis pas tout à fait sûr.

Qu'est-ce que ça veut dire qu'il construit du sens en cours de lecture à l'aide de stratégies appropriées? En première année ? en première année ? M. le Président. Qu'est-ce que ça veut dire? Est-ce que c'est simple, clair et précis? Encore une fois, je ne pense pas. Au niveau de l'écriture, qu'il révise ses textes à différents moments en recourant à des stratégies efficaces? En première année, M. le Président. Je ne suis pas sûr que les parents trouvent ça clair et précis. Au niveau de la communication orale, qu'il prépare sa participation à la situation de communication en recourant à des stratégies pertinentes, est-ce que c'est clair, simple et précis? Je ne suis vraiment pas convaincu.

Et je vais vous donner deux exemples, en terminant, qui dépassent, je dirais, presque l'entendement. C'est au niveau d'actualiser des concepts et des procédures mathématiques. Comment un parent d'un enfant de première année doit recevoir le fait que son jeune intègre de façon stratégique des concepts et des procédures mathématiques dans un contexte dérivé? En première année, M. le Président. Si, ça, c'est simple, clair et précis, le ministre, là, on lui a demandé la dernière fois et je lui redemande une autre fois, au lieu de partir en disant n'importe quoi, qu'il nous prouve que c'est simple, clair et précis et qu'il nous dise dans ses propres mots ce que ça veut dire. Il en a, des enfants. Qu'il nous dise ce que ça veut dire, lui, que son enfant intègre de façon stratégique des concepts, des procédures mathématiques dans un contexte dérivé.

Donc, je pense que c'est loin d'être clair, c'est loin d'être précis. Et d'ailleurs il n'y a même pas encore de politique d'évaluation qui est sortie du ministère de l'Éducation. On est en pleine réforme, on ne sait pas encore comment on va évaluer les jeunes. Toute une réforme! Et on vient nous dire que c'est planifié dans les moindres détails et que ça va bien. Quand on voit les bulletins qui sont comme ça, les prochains qui vont décrocher, M. le Président, ça ne sera pas juste les enfants, ça va être aussi les parents. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Alors, je cède maintenant la parole au ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, vous allez d'abord me permettre de saluer spécialement mon collègue de Kamouraska-Témiscouata qui intervient probablement pour la dernière fois comme critique de l'Éducation. On lui a donc assigné d'autres fonctions. Je vais lui souhaiter bonne chance dans ses nouvelles fonctions.

M. le Président, dans la tournée que je viens de faire des différentes régions du Québec, j'ai visité plus d'une quarantaine d'écoles et j'ai vu partout de l'enthousiasme de la part des directions, de la part des enseignants, de la part des parents concernant la réforme qu'on est en train de mettre en place partout au Québec. Oui, je sens un consensus très solide derrière cette réforme qui a été préparée par plus de 400 enseignants et enseignantes professionnels, une réforme où on va revenir aux matières essentielles, où on va avoir aussi un meilleur suivi de chaque élève.

Et, oui, M. le Président, certains parents ont abordé la question des bulletins parce que, oui, il y a des questions. Lorsqu'on fait des changements, il y a toujours des questions qui se posent. Mais je pense qu'il faut mettre les choses très claires. On ne transformera pas de façon radicale les bulletins. Ce qu'on veut faire, c'est bonifier les bulletins, les enrichir par rapport à ce qui existe actuellement et continuer finalement à renseigner les parents de manière claire, compréhensible ? et j'insiste là-dessus ? sur l'évolution, donc, de chaque enfant, sur son niveau de maîtrise des apprentissages.

Et je rappellerai au député de Kamouraska-Témiscouata que la loi a été changée en 1997 ici, à l'Assemblée nationale. Et, oui, c'est bien clair, c'est chaque école qui est maintenant responsable de préparer chaque bulletin. Mais, selon le régime pédagogique, on doit absolument continuer à avoir quatre bulletins par année. Mais ce qu'on veut, c'est que ces bulletins soient bonifiés, qu'on n'ait pas seulement des notes. On va continuer d'avoir des notes ou des cotes, mais on va aussi leur demander d'évaluer, à savoir: Est-ce que l'enfant a des bonnes méthodes de travail? Est-ce qu'il peut résoudre des problèmes? Comment il évolue dans sa façon de s'exprimer correctement, dans son comportement en groupe, dans ses apprentissages pour bien maîtriser les technologies de l'information, etc.? Donc, c'est ce qu'on appelle le bulletin enrichi, qui est sous la responsabilité de chaque école.

n(18 h 20)n

Le député de Kamouraska-Témiscouata nous donne des exemples. Ce n'est pas des modèles, c'est des exemples. Chaque école est responsable de préparer son bulletin. Il y a 3 000 écoles. Donc, théoriquement, il pourrait y avoir 3 000 sortes de bulletins. Et le député de Kamouraska-Témiscouata est un petit peu insultant pour les enseignants qui ont préparé le bulletin dans une des écoles, il se moque un peu d'eux autres en disant: Comment vous voulez qu'un enfant de première année comprenne des mots compliqués comme ça? Il a juste oublié une chose, M. le Président, c'est que c'est probablement les parents, qui ne sont plus en première année, qui sont capables de comprendre ces bulletins.

Et ce qu'il est important de rappeler, M. le Président, ce que je souhaite d'ailleurs, ce que j'ai mentionné à toutes les commissions scolaires, c'est que je souhaite quand même que les parents continuent à avoir des rencontres constructives avec les enseignants. Il n'y a rien pour remplacer ces rencontres. Et, moi, j'ai confiance, contrairement au député de Kamouraska-Témiscouata, que les enseignants... Plutôt que de les insulter comme il l'a fait tantôt en riant un peu des propositions qu'ils ont faites, des propositions qui doivent être bonifiées, il devrait plutôt travailler, comme on le fait, à valoriser la réussite dans nos écoles et en faire un objectif que tout le monde partage.

Lors de ma tournée, j'ai visité une petite école primaire, l'école primaire Saint-Louis, qui est dans le comté du député de Kamouraska-Témiscouata, qui est à Saint-Joseph-de-Kamouraska, et j'invite le député de Kamouraska-Témiscouata à aller visiter les écoles dans son propre comté. Il verrait des directeurs enthousiastes, des enseignants, enseignantes enthousiastes, des parents enthousiastes qui appuient la réforme. Et je l'invite à appuyer la réforme, parce que ça va être important pour avoir plus d'enfants qui réussissent au Québec, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de Kamouraska-Témiscouata pour son droit de réplique n'excédant pas deux minutes. M. le député, la parole est à vous.

M. Claude Béchard (réplique)

M. Béchard: Oui, M. le Président. Je remercie le ministre pour ses bons voeux. Je sens dans sa voix une pointe d'envie. On sait qu'il aime à répéter qu'il n'est pas venu en politique pour aller en éducation mais plutôt dans un dossier économique. Donc, j'ai senti une pointe d'envie dans sa voix, sans doute que lui a bien hâte aussi au prochain remaniement.

M. le Président, je voulais vous dire que je trouve assez particulier que le ministre de l'Éducation, qui lui-même est parent ? ses enfants vont à l'école, l'école privée ou l'école publique, la réforme s'applique partout ? n'ait pas été capable de nous dire ce que ça voulait dire clairement, les propos que je lui ai mentionnés. Et là il dit: Le député de Kamouraska-Témiscouata veut insulter les enseignants puis les enfants de première année. Mais lui-même, en tant que ministre de l'Éducation, n'est pas capable de donner la définition de ses propres mots qu'il y aura dans ses propres bulletins. Et là je ne suis pas le seul à dire que ce n'est pas simple. La présidente de la Fédération des syndicats de l'enseignement l'a dit, que la politique d'évaluation n'est pas prête et qu'elle veut des choses simples, claires et précises. Il n'est pas capable d'en donner. La Fédération des comités de parents dit la même chose: Un bulletin catalogue, ça ne sert à rien aux parents, ils ne sont pas capables de comprendre.

Mais ce que les parents doivent comprendre aujourd'hui suite à l'intervention du ministre... Moi, j'ai un message pour vous, les parents du Québec: Rassurez-vous, vous ne serez pas les seuls à ne pas comprendre les bulletins. Puis ce n'est pas une question d'insulter personne. Le ministre de l'Éducation lui-même ne les comprend pas, ses propres bulletins, il ne comprend pas qu'est-ce qu'il va y avoir d'écrit là-dedans. Et, quand il dit que ce n'est pas la responsabilité de son ministère, je m'excuse, c'est son propre sous-ministre qui envoie ça comme exemple partout dans les écoles au Québec, pour dire: Voici la marche à suivre. Son propre sous-ministre. Et le ministre lui-même ne la comprend pas.

En ce qui a trait aux écoles de mon comté, j'ose espérer qu'il va porter autant d'attention aux commissions scolaires de mon comté, même si je suis porte-parole en matière d'éducation. Et, qu'il ne s'inquiète pas, l'école qu'il est allé visiter, j'étais allé la visiter bien avant lui. M. le Président, merci beaucoup, et j'espère que les bulletins seront clairs, précis et que le ministre pourra les comprendre enfin.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ceci met fin à ce débat de fin de séance.

Effets d'éventuelles fusions municipales
sur les comptes de taxes

Un débat de fin de séance a été demandé cet après-midi, dans les délais prescrits par le règlement, par M. le député de Limoilou suite à des questions qu'il a posées à la ministre des Affaires municipales concernant les hausses de taxes municipales suite aux fusions forcées. Et je cède la parole à M. le député de Limoilou et porte-parole de l'opposition en matière de capitale.

M. Michel Després

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président, de me donner le droit de parole, parce qu'effectivement j'ai demandé d'avoir un débat de fin de séance. Mais je vous rappellerais que cet après-midi ma question, au fond, s'adressait au ministre responsable de la Capitale. Il était où, le ministre de la Capitale, cet après-midi? Il était en Chambre. Aucun problème, il était présent, il était assis à sa banquette. Je me suis adressé à lui pourquoi? Parce qu'il avait fait, avec ses collègues députés ministériels, le 5 octobre dernier, une conférence de presse. Sur quel dossier? Le rapport Jean-Louis Lapointe qui a été déposé à la ministre.

Le mandataire que la ministre a nommé ? il est arrivé quoi? ? il ne s'est pas levé, M. le Président, il est resté assis sur sa banquette. C'est à lui que je voulais m'adresser, parce que la ministre l'avait mandaté cette journée-là pour être le porte-parole de sa région. Elle avait déjà nommé le ministre, hein, président du Comité de la capitale en matière des regroupements municipaux pour consulter ses collègues. Elle l'avait nommé. Le rapport a été déposé. Il a fait une conférence de presse. Parce que les députés ministériels de la capitale, avec le ministre de la Capitale, ont fait une conférence de presse le 5 octobre dernier, M. le Président, ils ont fait une conférence de presse.

Puis c'est un rapport qui est lourd de conséquences pour les citoyens de la capitale, M. le Président, parce que sept fois, des pages 20 à 23, Mme la ministre, on parle d'augmentation de taxes. Et là les députés ministériels, ils ont voulu rassurer les citoyens de la région de Québec, et là le ministre de la Capitale était présent. Conférence de presse le 5 octobre, il est assis en avant, il prend la parole. Là, il veut rassurer tout le monde puis il dit clairement que, si les fusions entraînent un compte de taxes... Parce que, je vous rappelle, on en parle, des pages 20 à 23, sept fois, Mme la ministre. Je sais que vous lisez vos documents, vous l'avez lu. Ça, je suis sûr de ça.

Ce dont je ne suis pas sûr, c'est que je me demande si le ministre de la Capitale, lui, il l'a lu, par exemple. Parce qu'il a pris un engagement avec les députés ministériels. Il a dit quoi, M. le Président? Je le cite, que, si les fusions municipales entraînent une hausse du compte de taxes, ne serait-ce que dans une seule ville de l'agglomération de la région de Québec, ils retireront leur appui au rapport Lapointe, donc retirer l'appui à la ministre. Et là je cite encore le ministre de la Capitale: «Il n'y aura pas de perdants. La condition sine qua non: qu'il n'y ait pas d'augmentation de taxes dans les villes de la région.» Et ça, ça inclut ceux qui ont un compte de taxes le plus bas dans la région: la ville de Sainte-Foy, qui est dans le comté du député de Louis-Hébert, ministre responsable de la Capitale, la ville de Sillery, la ville de Cap-Rouge, la ville de Saint-Augustin.

Mais la journée même le président du caucus du Parti québécois, le député d'Abitibi-Ouest, lui, il est venu contredire le ministre de la Capitale puis les députés ministériels, il est venu dire: «Il n'est pas possible de donner des garanties qu'il n'y aura pas de hausse de taxes pour personne. Je connais assez les affaires municipales.» Moi, je ne le sais pas, M. le Président, s'il connaît ça, mais, lui, il est venu dire, comme président des députés ministériels, ici, du gouvernement: Écoutez, là, on ne commencera pas à prendre des engagements comme ceux-là, ce n'est pas possible de garantir ça.

Écoutez encore, ce n'est pas fini, hein? Je vous le dis, M. le Président, même le premier ministre, la semaine dernière, en Chambre, il a dit que c'était une question d'équité puis que ceux qui, présentement, sont mieux traités en termes de fardeau fiscal... sont moins traités en termes de fardeau fiscal vont bien sûr participer davantage.

C'est clair, les députés ministériels, le ministre responsable de la Capitale sont venus prendre un engagement pour essayer de rassurer la population. Puis, si on fait un gel du compte de taxes, on va le faire de quelle façon, M. le Président? Le ministre le dit: Ils vont verser une subvention à cette nouvelle municipalité. Pendant combien de temps? À quels coûts? Je ne le sais pas. Donc, c'est un gel de taxes qui sera un gel de taxes illusoire, un gel de taxes qui n'en est pas un, parce qu'on versera une subvention à cette nouvelle municipalité pour maintenir le gel du compte de taxes. Et jamais, M. le Président, je le répète, jamais les députés ministériels de la région de Québec, le ministre responsable de la Capitale n'ont parlé, à la dernière campagne électorale, qu'ils feraient une réforme du monde municipal comme celle-là.

n(18 h 30)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Limoilou. Alors, sur cette question, Mme la ministre des Affaires municipales, je vous cède la parole.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. C'est toujours avec étonnement que j'entends le député de Limoilou se lever en Chambre, et avec une suprême indifférence à l'égard de la population de la ville de Québec, qui est une partie importante de sa circonscription de Limoilou, une indifférence totale à l'égard du sort de ses contribuables citoyens.

Rapidement, M. le Président, simplement vous dire que c'est aussi le député de Limoilou qui réclame des référendums municipaux décisionnels. Quand vous pensez que l'opposition libérale à Québec voudrait nous voir créer un nouveau droit constitutionnel, un droit contraire au droit canadien, contraire au droit québécois et qui voudrait faire subordonner l'Assemblée nationale à ces référendums décisionnels municipaux... Ça n'existe nulle part, n'est-ce pas, au Canada, et, comme on a pu le constater la semaine passée, eux voudraient que cela n'existe qu'ici.

Je voudrais rappeler les décisions clairement exprimées par les cours, notamment, récemment, la Cour supérieure, le 29 août dernier, qui disait ceci: «Il relève de la compétence exclusive de l'Assemblée nationale d'adopter des lois pour ériger des territoires en municipalités, constituer des conseils régionaux, statuer sur leur composition et les pouvoirs qui leur sont conférés.» Nos recueils annuels de lois témoignent depuis toujours de l'exercice de cette compétence.

M. le Président, c'est comme si finalement le choix qui est fait, c'est le choix du statu quo, parce que l'idée, c'est de donner aux villes qui ne veulent pas de regroupement le droit d'imposer leur choix à celles qui en veulent, puisque dans le fond c'est un droit de veto pour maintenir le statu quo qu'on leur donne, c'est un droit de veto pour geler les iniquités qu'on leur donne. En fait, c'est le parti pris de l'opposition libérale, c'est un parti pris en faveur de la paralysie. Ce n'est pas de la démocratie, sous l'apparence de la démocratie. En fait, c'est une apparence seulement, parce que dans le fond c'est la paralysie, parce que l'idée finalement ? c'est rétrograde, comme combat ? c'est de dire à celles qui ne veulent pas: Je vous donne le droit d'imposer votre choix. C'est ça.

Alors, écoutez, je crois qu'il y a bien des raisons pour lesquelles il peut y avoir des hausses de taxes, indépendamment des regroupements, et je le comprends très bien, le député d'Abitibi-Ouest, qui a dit qu'il peut y avoir des hausses de taxes cette année. Je vous en donne quelques-unes, raisons, M. le Président: le coût du pétrole. Quand on pense que 80 % d'augmentation du coût du diesel... bien, ça, ça peut en être un, facteur. Il peut y avoir également la hausse des taux d'intérêt. Ça va bien, croisons-nous les doigts pour que ça continue, mais il n'est pas évident... on n'a pas un contrôle sur les taux d'intérêt. Même le Canada n'en a pas par rapport aux États-Unis; une municipalité, encore moins. Et les coûts des soumissions publiques évidemment, parce que, à l'inverse, quand tout va bien, on sait que les contrats qu'on prévoit donner à coûts moindres voient leurs coûts augmenter parce qu'il y a finalement moins de concurrence, étant donné qu'il y a plus de contrats qui se donnent, etc.

Le nouveau Programme d'infrastructure, on a signé, Canada-Québec, 1,5 milliard sur six ans. Les municipalités qui vont vouloir y participer... je pense, par exemple, à tout ce qui pourrait être dépollution de la rivière Saint-Charles. Est-ce que les municipalités vont se croiser les bras pendant toutes ces années, comme le souhaite l'opposition, qui voudrait les mettre en tutelle, finalement, en leur disant: Non, ne faites pas de nouveaux projets, nous, on ne veut pas?

Alors, vous voyez, M. le Président, ce que l'on dit, je le répète, je l'ai dit en Chambre cet après-midi, c'est bien simple, c'est qu'on travaille, mes collègues et moi, pour qu'il n'y ait pas de hausse globale du fardeau fiscal et bien mieux que ça... Et je pense que le député de Limoilou, prématurément, crie au loup, justement, puis au pire, puis il va être bien surpris quand on va pouvoir, au moment où il y aura des choix qui se feront... Là, on fait énormément de simulations, et il voudrait qu'on les dépose avant même que les orientations soient prises. Alors, quand les orientations seront prises, je dois vous dire que ça va faire bien plaisir aux gens de Québec, parce que les conditions sont réunies justement pour qu'on puisse, grâce à tous ces programmes d'aide au regroupement, grâce aux gains enregistrés par les municipalités avec le pacte fiscal signé il y a deux semaines maintenant, grâce aussi aux dispositions prévues dans la loi pour intégrer à coût nul les conventions collectives, puis grâce aux économies que les regroupements vont permettre, je pense que cela va réjouir les contribuables citoyens de Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. En vertu de votre droit de réplique, deux minutes, M. le député de Limoilou.

M. Michel Després (réplique)

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. Je peux vous dire, je vais vous rappeler encore ma déception, ma déception parce que ce sont des députés ministériels de la région de Québec. Je m'étais adressé au ministre responsable de la Capitale. Il était là, bien présent, ici, en Chambre. C'est la ministre des Affaires municipales qui répond, mais elle ne m'a pas répondu quand je lui ai dit que sept fois dans le document Lapointe, sept fois, on rappelait qu'il y aurait des comptes de taxes... on est à la page 20: «L'harmonisation de la structure fiscale et la mise en commun des dépenses découlant des regroupements sont susceptibles d'engendrer des fluctuations non négligeables des comptes de taxes», M. le Président. À la page 21: «Il est irréaliste d'escompter qu'aucun des contribuables des anciennes municipalités n'ait à subir une hausse de taxes nette.» Voyez-vous?

Et l'engagement que le ministre est venu prendre en conférence de presse avec ses collègues, c'est qu'il n'y aurait pas d'augmentation du compte de taxes. Et, en même temps, on a adopté des lois à la dernière session, M. le Président, des lois qui viennent garantir des emplois pour tout le monde, qui viennent maintenir les conditions de travail. Il va arriver quoi, M. le Président, lorsqu'on va fusionner les syndicats, les conventions collectives d'un corps d'emploi à l'autre? On ne négociera sûrement pas les conventions collectives à la baisse. Les conventions collectives seront à la hausse, M. le Président.

Et je vais vous dire, la ministre ? on l'a vu en Chambre, hein ? ils en ont, des études, elle en a, des scénarios, bien, qu'elle les dépose, les scénarios. Ce que les citoyens demandent justement, c'est le droit à l'information, c'est le droit à la consultation, c'est le droit de choisir sa ville, Mme la ministre, c'est le droit de choisir les services qu'on veut avoir, c'est le droit de choisir son milieu de vie, c'est le droit de choisir sa qualité de vie. C'est ça que le citoyen veut. Et, si on est si sûr que ça, bien, on a juste à consulter cette population-là, M. le Président, et on verra bien ce que la population, les citoyens du Québec décideront.

Conséquences des projets de fusions municipales

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Limoilou. Nous avons également, suite à la période de questions, une demande de débat de fin de séance de la part du député de Hull à une question qu'il posait à la ministre des Affaires municipales concernant les coûts pour les citoyens de la structure municipale. M. le député de Hull, je vous cède la parole.

M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Nous assistons, depuis maintenant plusieurs mois, mais particulièrement depuis la réouverture de la session, à un spectacle malheureux de la part du gouvernement, un spectacle où on a décidé de se taire, de ne nous donner aucune réponse et de cacher des choses.

On est dans une réforme municipale. Un bien grand mot, «réforme». Habituellement, le mot «réforme» devrait être synonyme de bonne nouvelle, de transformation pour les citoyens, de transformation pour le mieux. Qu'est-ce qu'on a, M. le Président, devant nous? Est-ce qu'on a une transformation pour le mieux? Bien, il faut se la poser, la question. Parce que le citoyen a été ignoré, ignoré de toutes les préoccupations gouvernementales. J'entendais la ministre, encore une fois, nous parler du fait que nous souhaitions violer le droit international. M. le Président, la question, ça revient aux citoyens: Est-ce que c'est dans l'intérêt des citoyens de faire en sorte qu'il va y avoir des fusions forcées partout sur le territoire? La réponse, c'est non, M. le Président. Non seulement que la réponse, c'est non, mais le gouvernement n'a pas le mandat de faire ce qu'il est en train de faire. Nulle part il avait affiché ses couleurs, nulle part il avait dit que les citoyens étaient pour être bafoués dans leur droit le plus démocratique de s'exprimer sur où ils souhaitent vivre. Ça prend combien de temps à un citoyen, M. le Président, pour choisir sa maison, son quartier, sa ville? Est-ce que c'est quelque chose que tu décides dans une soirée? Bien non. Ça prend des mois de planification. On choisit ça parce que c'est une étape importante d'un choix de couple, d'un choix de famille, pour nos enfants. Et ce gouvernement, par un trait de crayon, va effacer ce choix.

n(18 h 40)n

Et ce qui est encore plus important, M. le Président, c'est qu'il a refusé de nous dévoiler les études qu'il a, les études qu'il a et qui prouvent que le compte de taxes va augmenter. Pourquoi je dis ça, M. le Président? Est-ce que j'invente ça? La réponse, c'est non. Parce que la réponse vient du gouvernement lui-même qui nous a dit: Faites-vous en pas, nous savons que les taxes vont augmenter, mais nous allons prendre 225 millions de vos taxes pour éponger l'augmentation de taxes suite à la folie des structures péquiste.

On va bien se comprendre, M. le Président. On a une situation actuelle au Québec. Vous payez x montant de taxes. Avec la réforme de la ministre et du gouvernement Bouchard, ça va être ce montant de taxes plus 225 millions pour que les taxes n'augmentent pas. On va prendre de l'argent qu'on aurait pu mettre en santé, qu'on aurait pu mettre en éducation, qu'on aurait pu mettre dans les soins à domicile, qu'on aurait pu mettre dans nos écoles, puis on va aller éponger une augmentation de taxes, parce que le gouvernement décide ainsi. Comme choix gouvernementaux, on repassera.

On est, les Québécois, les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord. Est-ce que ce 225 millions qui vient de vos poches, suite à votre travail à tous les jours, 40 heures-semaine ? et vous travaillez fort pour ça, puis je prends vos taxes dans vos poches ? est-ce que je vais améliorer mes services? Non. Ça va venir simplement éponger l'augmentation de taxes conséquemment à la réorganisation municipale de la ministre. Est-ce que vous trouvez que c'est un choix logique de société, M. le Président? On va prendre 225 millions de vos poches pour aller compenser le fait que les taxes vont augmenter parce qu'on est en train d'avoir des plus grosses structures, parce que tout le monde garde sa job, parce que tout le monde va augmenter de salaire, parce que tout le monde y trouve son compte, sauf le simple citoyen.

M. le Président, c'est dommage que ce gouvernement n'ait pas le courage de déposer les études. Nous le savons qu'ils les ont. La ministre s'est levée pour nous dire qu'elle les avait. Mais jamais elle ne souhaite les déposer. Je vous pose une question: Pensez-vous vraiment, si ça prouvait que les taxes étaient pour baisser, que ce gouvernement les cacherait, ces études? La réponse, M. le Président, c'est non. Tellement non qu'on va prendre 225 millions de dollars que vous avez travaillé dur pour avoir pour compenser la folie des structures. Les citoyens du Québec, M. le Président, méritent mieux que ça.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Hull. Alors, Mme la ministre des Affaires municipales, je vous cède la parole.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Oui, M. le Président. Il y a tellement d'énormités dans ce que dit le député de Hull qu'il est difficile, en le peu de temps que j'ai, d'y répondre toutes. D'abord, c'est faux quand il dit que jamais je ne souhaite, comme ministre, déposer les études. Au contraire, on a à maintes reprises affirmé, et nous le ferons, que, lorsque les orientations du gouvernement seront retenues, justement, en regard des rapports qui nous sont transmis sur les grandes régions métropolitaines de Montréal, Québec et Hull, nous allons aussi déposer les études.

Il faut être bien clair là-dessus. Ce n'est pas un droit international, là, comme l'a prétendu... C'est de la création, l'invention d'un nouveau droit constitutionnel qui est tout à fait contraire au droit canadien puis au droit québécois. Alors, pourquoi, M. le Président, ces regroupements eurent lieu en Ontario, dans le Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, partout, avec, si vous voulez, le même droit, qui est très simplement celui d'arbitrer le bien commun, ici, à l'Assemblée nationale?

Je voudrais citer un prédécesseur, le ministre des Affaires municipales du gouvernement libéral, M. Ryan, qui écrivait, il y a quelques mois maintenant, et je cite: «La méthode incitative a malheureusement fait la preuve de ses limites. Les choses évoluent désormais trop vite pour que le Québec puisse s'en remettre entièrement autant à la bonne volonté des intéressés pour ramener le nombre des municipalités à un niveau plus réaliste.»

M. le Président, pour une majorité des citoyens, cela fait des décennies qu'ils attendent enfin un gouvernement qui ait le courage de procéder à ces réorganisations. Quand je vous disais qu'on a le même niveau de municipalités en l'an 2000 qu'on avait au recensement de 1951, ça signifie, 50 ans plus tard, organisé pareil. Trouvez-moi des paroisses diocésaines qui sont organisées comme on l'était. Les caisses populaires, les entreprises, les commissions scolaires, M. le Président, il y en avait 1 500 il y a 50 ans, il en reste 72, parce que les choses ont évolué, les choses ont changé. Et ce sur quoi on travaille présentement, c'est de garder le sentiment d'appartenance proche des citoyens et de faire en sorte qu'il y ait des services de proximité, mais cependant en s'assurant que les municipalités arrêtent de se concurrencer entre elles au niveau des grands enjeux stratégiques que sont le développement économique et le développement social.

Nos objectifs sont clairs, je les reprends: unité de commandement en matière de développement économique, ressources accrues en matière de développement social, équité fiscale et imputabilité démocratique directe. Imaginez que, pendant les dernières décennies, c'est par centaines et par centaines que des régies et des ententes intermunicipales sont venues alourdir le processus démocratique. Le citoyen ne se retrouve plus là-dedans, M. le Président, parce que les régies et les ententes intermunicipales, il n'y a pas de reddition de comptes directe, il n'y a pas d'imputabilité, il ne peut pas le décider.

Je voudrais simplement vous citer, M. le Président, le journal Le Droit, c'est un quotidien qui entre dans les foyers que représente le député de Hull. Vous savez, ça, ça ne trompe pas. Puis, remarquez, M. le Président, que, à part l'opposition libérale, à peu près sur l'ensemble du territoire les gens savent qu'il faut avoir le courage d'agir maintenant. J'entendais l'éditorialiste de La Presse, M. Dubuc, reprendre ces propos-là, samedi dernier, à la radio. Mais je voudrais juste vous lire un extrait, très court, de l'éditorial du journal Le Droit, qui dit ceci: «Il va falloir que quelqu'un quelque part se lève pour faire comprendre une fois pour toutes à la gent politique outaouaise que notre région a tout à gagner à former un tout homogène, une entité politique solide, une force économique intégrée, car, au fond, un modèle à deux pôles n'a d'autre objectif que de sauver la face des politiciens en place. C'est une solution de compromis qui ne vise rien d'autre que la paix politique au détriment de l'avenir de la région. C'est pourquoi nous demeurons convaincus que la solution proposée par Antoine Grégoire, qui était le mandataire du gouvernement, avec quelques ajustements mineurs, est la seule qui porte en soi les germes du développement futur de l'Outaouais.»

Alors, M. le Président, pour créer de la richesse, pour créer de l'emploi, pour créer de l'équité et pour créer également des ressources culturelles, sociales, M. le Président, ce n'est pas vrai qu'on peut ne pas s'occuper du sort de ses voisins. Ce n'est pas vrai, M. le Président, pas à l'époque où nous vivons. Alors, c'est bien évident que nous avons un mandat très clair, celui qui nous a été donné par le rapport de la Commission nationale sur les finances publiques et la fiscalité locale, dont le rapport a été rendu public.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre.

Mme Harel: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de votre droit de réplique, M. le député de Hull, pour un temps maximum de deux minutes.

M. Roch Cholette (réplique)

M. Cholette: Merci, M. le Président. Les gens qui nous écoutent doivent se dire: De quelle planète la ministre sort-elle? Elle a commencé à parler d'il y a, mon Dieu! 35 ans, ensuite elle nous a cité un quotidien ontarien pour justifier une décision qui est propre à elle. Je reviens avec la question que je lui posais tantôt, la question fondamentale: le gouvernement est en train de prendre 225 millions de dollars de vos impôts pour subventionner la hausse des coûts reliée aux fusions forcées.

M. le Président, on n'est pas contre les fusions, nous autres, mais on est contre le fait qu'on impose des fusions. Si le gouvernement est convaincu qu'il a raison puis que c'est une bonne affaire qu'on se regroupe, qu'il le soumette à la population. Pourtant, ils aiment ça, des référendums, eux autres, d'habitude. Puis c'est drôle que, dans le monde municipal, ils décident de cacher les études puis de ne pas consulter la population. Puis c'est drôle que les mandataires, c'est drôle, ils finissent tous par dire à peu près la même chose, ce que la ministre souhaitait. Puis c'est drôle qu'ils sont tellement incapables de dire que ça va être avantageux pour le simple citoyen qu'ils sont obligés de prendre 225 millions de dollars de vos impôts, durement gagnés, pour subventionner la folie des structures péquiste. Plutôt que de subventionner des lits pour les malades, des places en garderie, des écoles, plutôt que d'aider les plus démunis avec cet argent-là, on va subventionner la folie des structures parce que le gouvernement ne veut pas perdre la face dans une réforme improvisée.

M. le Président, les Québécois n'en ont pas demandé, de cette réforme-là. Les Québécois sont capables de se prendre en main, régler les problèmes qui existent, notamment dans les villes-centres. Mais on n'a pas besoin de gaspiller 225 millions de dollars pour régler la folie des structures du Parti québécois. Et, nous, jamais on ne va accepter que des fusions se fassent sur le dos des citoyens. Oui aux fusions, mais non aux fusions forcées, M. le Président.

n(18 h 50)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Ceci met fin à ce débat de fin de séance.

Coûts de la gestion du programme
d'allocations familiales

Un troisième débat de fin de séance a été demandé par M. le député de Notre-Dame-de-Grâce suite à une question qu'il a posée aujourd'hui à la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance concernant les coûts exorbitants de la gestion du régime d'allocations familiales. M. le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enfance et de famille, je vous cède la parole. M. le député de NDG.

M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. M. le Président, il y a quand même des choses qui sont vérifiables dans la vie. Il y a des faits. Et, moi, je veux vous parler des faits.

Il y a trois ans, le gouvernement du Québec investissait à peu près 800 millions de dollars en aide gouvernementale aux enfants du Québec soit par le biais des allocations familiales ou par le biais du barème de l'aide sociale destinée aux enfants. Ça a touché, il y a trois ans, au-delà de 900 000 familles québécoises, et le coût de gestion de ce programme était de 6 290 000 $. 800 millions d'aide, 910 000 familles, coût de gestion: 6,2 millions.

Aujourd'hui, l'aide gouvernementale, par le biais des allocations familiales, représente 611 millions de dollars. Ça touche moins de 600 000 familles québécoises, c'est-à-dire tout près de 200 millions de dollars de moins en argent donné, 300 000 familles de moins touchées, et les coûts ont grimpé ? «grimpé», ce n'est pas le bon mot, M. le Président ? les coûts ont fléché d'une façon faramineuse, de 6,2 millions à 16,6 millions de dollars.

M. le Président, cet après-midi, en période de questions, la ministre a dit, en réponse à ma question, que mon point de départ de 6,2 millions de dollars était inexact. Elle a dit, et je peux la citer: «Je veux quand même dire que les chiffres ? je la cite au texte ? que vous m'apportez, qui sont de 1997-1998, qui étaient de 6 millions, qui étaient partagés avec Emploi, Solidarité et nous, sont des chiffres pour sept mois, donc ce n'est pas toute l'année financière.»

M. le Président, la ministre a dit, cet après-midi, une énormité en période de questions, encore une fois. Parce que, plus tôt aujourd'hui, lors d'une séance de vérification des engagements financiers de son ministère, Mme Lise Maltais, représentante de la Régie des rentes du Québec, a dit ceci, à l'égard des coûts de 1997-1998, en réponse à une question que je lui ai posée... Elle a dit, oui, effectivement, qu'il y avait les deux ministères impliqués. Elle a dit: «Pour ce qui est du ministère de la Famille, on avait sept mois d'opération, oui, alors que le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, cinq mois pour l'ancien programme.» Mais ce que la ministre a oublié de dire cet après-midi, l'énormité qu'elle a dite, c'est que le total des deux programmes est de 6,2 millions pareil. Mme Maltais, de la Régie des rentes, confirme, elle dit, et je la cite au texte, M. le Président, en réponse à une question ? ma question: «Pour l'année 1997-1998, ça peut résumer un peu les écarts budgétaires.»«Qui sont de quoi?», je lui demande. «Qui sont 4 millions au point de départ, qui était l'ancien programme, pour se rendre à 6 270 000 $, avec une transition des deux programmes.» Je lui répète la question, M. le Président: «Alors, le total pour 1997-1998 était de?» Réponse de Mme Maltais: «6 270 000 $.» C'est ça que la représentante de la Régie des rentes du Québec nous a dit ce matin.

Alors, qui dit vrai? Est-ce que c'est la Régie des rentes du Québec, qui est gestionnaire du programme, qui facture le ministère, ou est-ce que c'est la ministre? La ministre fait signe que non, c'est inexact. M. le Président, je fais plus confiance à la fonctionnaire de la Régie des rentes du Québec que je le fais à la ministre déléguée. La fonctionnaire sait de quoi elle parle, M. le Président, et c'est très clair, elle dit: Le point de départ est 6,2 millions de dollars. Mais, peu importe le point de départ, M. le Président, ce qui est clair, c'est qu'il y a tout près de 200 millions de dollars de moins aux familles québécoises, 300 000 familles de moins touchées, et ça coûte 16,6 millions de dollars, c'est-à-dire tout près de trois fois le coût des programmes originaux. Et c'est une honte, M. le Président, pour une administration qui se dit efficiente et efficace.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, je vais céder la parole maintenant à Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Merci, M. le Président. Quand on regarde les choses d'une façon isolée, on a le genre de conclusion que le député de Notre-Dame-de-Grâce fait aujourd'hui. Alors, M. le Président, il m'importe tout d'abord de rappeler le contexte et les raisons ayant motivé le gouvernement du Québec à modifier le Régime québécois d'allocations familiales à l'automne de 1997. Nous avons alors remplacé les programmes existants, comme l'allocation familiale universelle de 131 $ par année par enfant et le «bébé bonus», par un régime d'allocations familiales plus équitable. En effet, le nouveau Régime vise à couvrir les besoins essentiels des familles à plus faibles revenus et monoparentales, et l'aide varie en fonction du revenu familial, du nombre d'enfants et de la situation familiale.

Alors, le passage d'un régime universel à un tel régime basé sur le revenu familial et la situation familiale implique nécessairement un changement dans le processus administratif et complexifie quelque peu les tâches, en plus de nécessiter un échange accru d'informations entre les partenaires gouvernementaux. En effet, il nous faut maintenant trouver l'information exacte quant au revenu familial et la situation familiale des Québécoises et des Québécois, qu'elle soit monoparentale ou biparentale. Par la suite, il nous faut analyser le tout et en tirer les conclusions en ce qui a trait au montant de la prestation qui sera versée à la famille selon la nouvelle grille en vigueur.

De plus, je tiens à souligner que le chiffre de 6 millions de dollars avancé par le député de Notre-Dame-de-Grâce au sujet des coûts administratifs pour l'année 1997-1998, soit la première année d'implantation du nouveau programme, ne touche que sept mois de l'année. Il y aurait donc lieu de l'annualiser pour pouvoir le comparer à ceux des années subséquentes, sur 12 mois.

M. le Président, il ne faut pas oublier que c'est encore le gouvernement fédéral qui gère l'admissibilité des familles québécoises au Régime d'allocations familiales. Alors, en conséquence, les augmentations pour les années subséquentes sont principalement liées à la préparation de notre système informatique en vue de la récupération par le Québec de la gestion et l'admissibilité au programme d'allocations familiales à l'automne 2001, ce qui rendra le système beaucoup plus efficace.

En effet, et pour ne donner qu'un exemple, lorsque le gouvernement du Québec est informé par une famille québécoise d'un changement à sa situation, il doit transmettre ces informations au gouvernement fédéral, qui les traite et nous renvoie ensuite sa décision quant à l'admissibilité de cette famille. Il est évident que cette façon de procéder est trop lourde et complexe et fait en sorte que ceux qui décident de l'admissibilité des familles au programme sont trop loin des citoyens.

De plus, cette façon de faire augmente la marge d'erreur, car la prestation fiscale canadienne pour enfants fonctionne selon des grilles différentes des nôtres. Alors, nous croyons que c'est le gouvernement du Québec qui est le mieux placé pour gérer cet aspect du programme, et c'est pourquoi nous investissons des sommes, pour être prêts à recevoir les gestions de l'admissibilité au programme dans les plus brefs délais, M. le Président.

De plus, le député de Notre-Dame-de-Grâce prétend que notre clientèle est composée de seulement 600 000 familles québécoises. Il oublie, un peu rapidement d'ailleurs, que notre clientèle est, au contraire, composée de près de 1 million de familles québécoises, car évidemment une famille peut être qualifiée une année et ne plus l'être l'année suivante. Cet état de fait nous force à revoir à chaque année le changement aux revenus de toutes ces familles et à leur situation et, bien sûr, à répondre aux questions de ces citoyens et citoyennes, que ce soit par téléphone ou par écrit.

Alors, en terminant, M. le Président, le pourcentage des coûts globaux ? j'aimerais que le député m'écoute ? du ministère de la Famille et de l'Enfance en regard de son budget total n'a que peu augmenté, passant de 2,2 % en 1998 à 2,3 % aujourd'hui. Alors, encore une fois, il faut se garder d'analyser de façon isolée une seule mesure de la politique familiale, mais il faut au contraire la regarder dans son ensemble, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant, pour son droit de réplique, la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député, la parole est à vous.

M. Russell Copeman (réplique)

M. Copeman: M. le Président, merci. Je ne peux qu'imaginer que la ministre vient de répéter la même information erronée. Il y a quelques instants, elle vient d'induire la Chambre et toute la population du Québec en erreur, et c'est tellement clair, M. le Président, que les fonctionnaires à la Régie des rentes du Québec nous ont répondu ce matin que le 6,2 millions de dollars, le point de départ pour le coût, était le coût annuel. Je répète la phrase. Mme Lise Maltais, de la Régie des rentes du Québec...

Une voix: ...

n(19 heures)n

M. Copeman: J'ai posé la question: Alors, le total pour 1997-1998 était de... La réponse: 6,2 millions. On ne peut pas annualiser, il est déjà annuel. M. le Président, il y a une expression en anglais: «The Minister is not letting the facts get in the way of any of her arguments.» Elle est complètement hors de la traque en ce qui concerne les coûts, et c'est éhonté de voir une ministre se présenter en Chambre et répéter la même erreur, même quand elle sait que ce n'est pas vrai, selon la Régie des rentes du Québec.

M. le Président, ce qui est important, c'est qu'il y a trois ans la somme était d'à peu près 800 millions de dollars pour 910 000 familles, et ça a coûté 6,2 millions à administrer; là, aujourd'hui, la somme est rendue à 611 millions de dollars, ça touche 594 000 familles, 300 000 de moins, et ça coûte 16 millions de dollars à gérer.

Si la ministre prétend que le gouvernement du Québec, du Parti québécois, est mieux placé pour gérer le programme, avec des données comme ça, avec trois fois le coût d'il y a trois ans, moins d'argent et moins de familles, si c'est ça d'être mieux placé, M. le Président, le Québec est vraiment dans le trouble.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Ceci met fin à ce débat de fin de séance et, conformément au règlement, j'ajourne les travaux de cette Assemblée à demain, mercredi le 25 octobre à 10 heures. Bonne soirée à vous tous.

(Fin de la séance à 19 h 2)

Ajournement



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