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Version finale

39th Legislature, 2nd Session
(February 23, 2011 au August 1, 2012)

Wednesday, October 19, 2011 - Vol. 42 N° 51

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante-six minutes)

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, chers collègues, bonjour. Bon matin. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Alors, nous allons procéder à ce qui est prévu, c'est-à-dire la déclaration des députés. Et je suis prêt à entendre la première déclaration d'aujourd'hui et je cède la parole à M. le député de Jacques-Cartier pour sa déclaration. À vous.

Féliciter les lauréats du Gala de
musique Teweikan organisé par
la Société de communication
Atikamekw-Montagnais inc.

M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Le 8 octobre dernier, il y avait un grand rendez-vous musical ici, à Québec: la Société de communication Atikamekw-Montagnais, la SOCAM, a organisé la première édition du Gala de musique Teweikan pour souligner les musiciens des premières nations du Québec.

Je veux féliciter les lauréats. Pour la meilleure chanson en langue autochtone, c'est Philippe McKenzie, d'Uashat-Maliotenam. Meilleure chanson, c'est Shauit, également d'Uashat-Maliotenam, qui chante le reggae innu, crois-le ou non. Le meilleur album, c'était Samian, le rappeur algonquin, pour son disque Face à la musique. Le Prix de la relève était pour une jeune Attikamek, Laura Niquay. L'ambassadeur pour l'industrie musicale autochtone au Québec, c'est l'incomparable Elisapie Isaac, de Salluit. Le choix de la radio, c'est le groupe musical cri CerAmony; hommage et reconnaissance, René Weizineau. Et le Coup de coeur a été donné à Denis Chachai.

Merci à Bernard Hervieux et toute l'équipe de la SOCAM pour cet événement pour mettre en évidence la musique autochtone au Québec.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député, de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Matapédia pour sa déclaration. À vous.

Féliciter Mme Ghislaine Boulianne-Paquet,
de la circonscription de Matapédia,
récipiendaire de la Médaille
de l'Assemblée nationale

Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: Merci, M. le Président. M. le Président, le 8 septembre dernier, j'ai remis la Médaille de l'Assemblée nationale à Mme Ghislaine Boulianne-Paquet pour sa grande contribution au développement sportif, social et disciplinaire des jeunes hockeyeuses et hockeyeurs de la Matapédia. Mme Boulianne-Paquet s'implique à l'association du hockey mineur depuis près de 30 ans. Elle est responsable du bingo hebdomadaire d'Amqui, qui est la principale source de financement du hockey dans la Matapédia. Elle trouve des commanditaires, fait la promotion et la publicité des tournois et championnats régionaux se déroulant dans la Matapédia. Jordan Caron, des Bruins de Boston, gagnant de la coupe Stanley en 2011, Sébastien Caron, ancien joueur des Ducks d'Anaheim, gagnant de la coupe Stanley en 2007, et Olivier Bellavance-Roy, repêché par les Oilers d'Edmonton en 2009, lui doivent une partie de leur succès. Je lui réitère donc toute mon admiration et mes plus sincères félicitations pour sa Médaille de l'Assemblée nationale du Québec. M. le Président, vous devez la comprendre, vous êtes un amateur de hockey. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci pour les deux hommages. Je vous cède la parole maintenant, M. le député de Montmagny-L'Islet, pour votre déclaration d'aujourd'hui. À vous.

Souligner le 30e anniversaire
de la maison de secours
La Frontière, de Montmagny

M. Norbert Morin

M. Morin: Merci, M. le Président. Ce matin, je désire souligner le 30e anniversaire de la maison de secours La Frontière, de Montmagny. Cet organisme a comme mission de venir en aide à des personnes en difficulté. Leurs précieuses interventions se traduisent par de l'hébergement, de la distribution de nourriture, des repas, de la relation d'aide, de la couture et plusieurs autres services complémentaires. Seulement pour l'année 2010-2011, l'organisme a accueilli près de 1 900 personnes, et a hébergé près de 200 personnes, et a donné près de 18 000 repas à des gens dans le besoin, en plus de distribuer près 3 500 repas à des différents comptoirs alimentaires. Bravo à tous les bénévoles et les collaborateurs, depuis 30 ans, qui se sont impliqués! Votre travail est primordial afin d'assurer la continuité des services que vous offrez. Je veux vous dire merci pour toute la population. Toutes mes félicitations!

**(9 h 50)**

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci pour votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de L'Assomption pour sa déclaration d'aujourd'hui. À vous, M. le député.

Rendre un hommage posthume
à l'écologiste Pierre Dansereau

M. Scott McKay

M. McKay: Merci, M. le Président. Vous savez, récemment le Québec et les écologistes du monde entier ont perdu un grand mentor, le philosophe et pionnier de l'écologie Pierre Dansereau. M. Dansereau était non seulement un chercheur accompli et un grand penseur, c'était surtout un sage qui a su voir, bien avant tout le monde, comment on pouvait appliquer les règles de l'écologie aux milieux de vie humains. Nous avons quand même eu de la chance parce que celui qui s'est mérité le surnom de «Père de l'écologie moderne» a mené une longue carrière qui lui a d'ailleurs permis de demeurer un militant actif jusqu'à un âge avancé. Pierre Dansereau est décédé à 99 ans. Il nous manque déjà, et je tenais à souligner devant cette Assemblée à quel point ce citoyen aura suscité une réflexion saine sur les relations entre les espèces vivantes de la planète. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le député, pour votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Deux-Montagnes pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député, à vous.

Féliciter trois citoyens de la
circonscription de Deux-Montagnes,
récipiendaires de l'Ordre de Saint-Eustache

M. Benoit Charette

M. Charette: Merci, M. le Président. Le 12 octobre dernier, la ville de Saint-Eustache a eu l'immense privilège de décerner la médaille de l'Ordre de Saint-Eustache à trois distingués membres de sa communauté. Il me fait aujourd'hui grand plaisir de vous les présenter.

M. Jacques Moisan. Bien qu'il se soit illustré dans le monde journalistique, tant au Québec qu'à l'international, tant à la radio qu'à la télévision, c'est toujours avec le même professionnalisme et la même éloquence que M. Moisan a répondu à l'appel des différents organismes locaux qui l'ont sollicité pour soutenir leur cause.

Mme Angèle Poulin. Dame dynamique et dévouée à la cause des femmes et des plus démunis, en reconnaissance pour sa très grande contribution à mettre en place plusieurs projets communautaires, la dame au chapeau est maintenant devenue grande citoyenne de Saint-Eustache.

Et enfin, à titre posthume, M. Gilles Boileau, pour son immense contribution à l'enrichissement du patrimoine et de l'histoire de notre région, pour ses recherches et ses publications pour que Saint-Eustache et sa région se souviennent.

Mes plus sincères félicitations aux trois récipiendaires. À mon tour de les remercier pour leur engagement dans notre collectivité.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député, de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député des Îles-de-la-Madeleine pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député des Îles, à vous la parole.

Souligner la campagne de sensibilisation de
Parents orphelins, l'association québécoise
des parents vivant un deuil périnatal

M. Germain Chevarie

M. Chevarie: M. le Président, la perte d'un bébé ou d'un enfant à venir est une épreuve très douloureuse pour les parents et leurs proches, et nous savons qu'il s'agit de l'un des deuils les plus difficiles à vivre. En juin 2008, Parents orphelins, l'association québécoise des parents vivant un deuil périnatal a vu le jour. Cette association mène en ce moment une campagne de sensibilisation afin de mieux faire connaître cette réalité et les ressources d'aide existantes. Parents orphelins offre également une gamme de services pour soutenir les parents en situation de deuil périnatal, comme des cafés-causeries, un centre de documentation, un accompagnement virtuel, un portail Internet et différentes activités. M. le Président, je tiens à témoigner de notre appui à cette association et à tous les parents endeuillés du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie de votre déclaration, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de Blainville pour sa déclaration du jour. M. le député de Blainville, à vous la parole.

Souligner le 30e anniversaire
de la Société de développement
économique Thérèse-De Blainville

M. Daniel Ratthé

M. Ratthé: M. le Président, c'est avec un vif plaisir que je tiens à souligner devant l'Assemblée nationale un événement marquant pour toute la MRC Thérèse-De Blainville. En effet, cette année, nous célébrons le 30e anniversaire d'existence de la SODET, la Société de développement économique Thérèse-De Blainville. Au fil des ans, cet organisme a su promouvoir la région en prospectant et en accueillant de nouveaux investisseurs, en épaulant de jeunes entrepreneurs, en soutenant les entreprises en économie sociale et en développement durable. Et la liste des réalisations serait très longue, M. le Président. Mais, surtout, la SODET a su encourager et stimuler une véritable culture entrepreneuriale dans notre communauté en plaçant les gens d'affaires au coeur de ses interventions. Ainsi, grâce à la contribution exceptionnelle de la SODET, la population de la MRC Thérèse-De Blainville se classe aujourd'hui parmi les plus actives et les plus prospères au Québec. Je voudrais remercier les membres du conseil d'administration et son président actuel, M. Stéphan Charron. Il me faut également porter à l'attention de tous l'apport remarquable de M. Charles Le Borgne, son dévoué directeur général depuis près de deux décennies. Je félicite la SODET, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le député, de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Jean-Lesage pour sa déclaration. À vous, M. le député.

Souligner le 30e anniversaire du
Club-FADOQ Beauport

M. André Drolet

M. Drolet: Merci, M. le Président. 2011 est une grande année pour le Club-FADOQ de Beauport car il célèbre sont 30e anniversaire. Depuis 30 ans, de nombreux bénévoles se sont succédé et ont épaulé ceux et celles qui ont présidé le club afin de faire du Club-FADOQ de Beauport un organisme dynamique et mobilisateur. C'est pour moi l'occasion de les remercier. M. le Président, le Club-FADOQ de Beauport est un club très actif car il regroupe plus de 500 membres actifs. Beaucoup d'entre eux se regroupent chaque semaine pour participer aux activités offertes par le club, telles que bingo, danse, pétanque, quilles, cartes et bien d'autres.

En terminant, je voudrais souligner l'excellent travail de Mme Gaëtane Lachance, présidente du club, et remercier tous ceux et celles qui l'appuient. Longue vie au Club-FADOQ de Beauport! Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, on vous remercie, M. le député, de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Joliette pour sa déclaration d'aujourd'hui. Mme la députée de Joliette, à vous.

Souligner la Semaine des familles d'accueil

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon: Merci, M. le Président. Alors, à titre de nouvelle porte-parole en matière de protection de la jeunesse, je tiens à souligner la semaine québécoise des familles d'accueil qui a cours cette semaine.

Bien sûr, on sait tous à quel point ces familles d'accueil sont précieuses, à quel point on en manque, d'ailleurs, au Québec, et je pense que c'est important de reconnaître publiquement tout l'apport qu'elles ont pour la société québécoise.

Le travail qui est le leur n'est pas facile. C'est beaucoup plus qu'un travail, c'est une vocation de venir en aide en accueillant chez elles des jeunes qui sont aux prises avec différentes difficultés dans leur milieu, des difficultés de comportement. Elles s'investissent avec un ou plusieurs enfants. Elles s'investissent de manière continue ou temporaire, avec les difficultés qui peuvent découler de tout ça. Elles doivent être en lien avec une foule de partenaires du réseau.

Alors, aujourd'hui, je veux leur rendre hommage. Je veux leur dire merci, au nom de l'Assemblée nationale, de tout ce qu'elles font. Et je veux leur dire qu'on est très conscients de la générosité et de l'engagement dont elles font preuve. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Bravo! On vous remercie, Mme la députée de Joliette, pour votre déclaration d'aujourd'hui. Et maintenant je cède la parole à M. le député d'Outremont pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député d'Outremont, à vous.

Féliciter Mme Léonie Couture,
lauréate du prix Thérèse-Daviau

M. Raymond Bachand

M. Bachand (Outremont): Merci, M. le Président. Première femme élue au conseil municipal de Montréal, Thérèse Daviau a consacré plus de 25 ans de sa vie à défendre les préoccupations de ses citoyens. Et, depuis 2004, Montréal honore la mémoire de cette pionnière du milieu municipal par le prix Thérèse-Daviau, désignant la personnalité citoyenne montréalaise de l'année, pour souligner l'apport exceptionnel d'une personne à l'amélioration de la qualité de vie de la communauté montréalaise.

À titre de ministre responsable de la région de Montréal, je tiens à transmettre, au nom des élus de l'Assemblée nationale, mes félicitations à la lauréate 2011, Mme Léonie Couture. Au cours des 30 dernières années, Mme Couture a travaillé sans relâche à l'avancement de la cause des femmes et à la lutte contre la violence qui leur est faite. Depuis 17 ans, son oeuvre se poursuit à travers La Rue des femmes, organisme qui donne une voix aux femmes qui vivent l'itinérance et de grandes difficultés, dont elle est la fondatrice et directrice générale. Par son engagement et son dévouement, Léonie Couture perpétue ainsi les idéaux d'entraide et de solidarité qui furent ceux de Thérèse Daviau tout au long de sa carrière. Félicitations, Mme Couture!

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député d'Outremont, pour votre déclaration.

Cette dernière déclaration met fin à la rubrique Déclarations des députés.

Nous allons suspendre les travaux pour quelques instants. Les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 9 h 58)

 

(Reprise à 10 h 11)

Le Président: Bonne journée. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre des Transports.

Entente entre la Régie de l'assurance
maladie et la Société de l'assurance
automobile, et avis de la CAI

M. Moreau: Oui, M. le Président. Alors, j'ai l'honneur de déposer une entente entre la Régie de l'assurance maladie du Québec et la Société de l'assurance automobile du Québec ainsi que l'avis favorable de la Commission d'accès à l'information.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre de l'Environnement et du Développement durable.

Rapport annuel du Comité consultatif
de l'environnement Kativik

M. Arcand: Merci, M. le Président. Permettez-moi de déposer le rapport annuel 2010-2011 du Comité consultatif de l'environnement Kativik.

Le Président: Le document est déposé. Mme la ministre de la Culture. Mme la ministre de la Culture.

Rapports annuels de Bibliothèque et Archives
nationales, et du Musée de la civilisation

Mme St-Pierre: Excusez-moi, M. le Président. Alors, permettez-moi de déposer le rapport annuel 2010-2011 de Bibliothèque et Archives nationales du Québec ainsi que le rapport annuel 2010-2011 du Musée de la civilisation.

Le Président: Le document est déposé. M. le leader du gouvernement.

Réponses à des pétitions

M. Fournier: M. le Président, permettez-moi de déposer les réponses du gouvernement aux pétitions présentées par le député de Terrebonne le 24 mai; la députée de Mirabel les 1er, 9 et 10 juin; les députés de Bertrand et de Mercier le 2 juin; la députée d'Iberville le 3 juin; les députés de Shefford et de Matane le 7 juin; et par le député de Chambly le 10 juin 2011.

Lettre du DGE accompagnée d'un rapport
de la Commission de la représentation
électorale intitulé La description des
125 nouvelles circonscriptions
électorales 
-- Étape 3: Décision
finale 
-- 12 octobre 2011

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. Pour ma part, je dépose une lettre que m'a adressée M. Jacques Drouin, Directeur général des élections du Québec et président de la Commission de représentation électorale, accompagnée du rapport intitulé La description des 125 nouvelles circonscriptions électorales -- Étape 3: Décision finale -- 12 octobre 2011.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt des pétitions, j'ai reçu une demande de M. le député de Mercier pour la présentation d'une pétition non conforme. Est-ce qu'il y a consentement pour recevoir et présenter cette pétition? Consentement? Consentement. Je vous écoute, M. le député de Mercier.

Exiger l'arrêt immédiat des activités de la
firme Gastem aux Îles-de-la-Madeleine
ainsi que la tenue d'audiences du BAPE

M. Khadir: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 487 pétitionnaires -- et j'en profite pour signaler la présence de trois citoyens et citoyennes des Îles-de-la-Madeleine avec nous aujourd'hui. Désignation: citoyennes et citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que l'implantation de l'industrie gazière s'applique mal à la rareté de [la] terre ferme aux Îles-de-la-Madeleine;

«Considérant que les conclusions du BAPE sur l'industrie des gaz de schiste ne s'appliquent pas aux gisements conventionnels de gaz naturel et que l'autre moratoire actuellement en vigueur dans le golfe -- l'évaluation environnementale stratégique 2 -- ne s'applique pas à la terre ferme non plus;

«Considérant que les techniques d'exploration, de production, de transformation et de transport du gaz naturel sont toutes à moderniser;

«Considérant que l'eau potable est de loin la ressource la plus précieuse des Îles-de-la-Madeleine et que les nappes phréatiques sont menacées par l'industrie gazière;

«Considérant que le projet présenté par Gastem aux Îles-de-la-Madeleine depuis 2008 n'apporte pas d'avantage significatif pour l'économie locale, ni n'améliore le bilan global d'émissions de gaz à effet de serre;

«Considérant qu'il est primordial de considérer l'ensemble des impacts environnementaux qu'aurait l'implantation de l'industrie gazière sur les générations futures;

«Considérant que le ministre de l'Environnement propose une étude du BAPE sur l'exploitation gazière [alors] que tous les risques sont inclus dans la phase d'exploration;

«Considérant que le gouvernement provincial donne tous les droits à Gastem sur le sous-sol des Îles-de-la-Madeleine sans se soucier de ses particularités géographiques, de l'opposition citoyenne et de la demande de moratoire de la municipalité des Îles;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, citoyens québécois, demandons l'arrêt immédiat des relevés et protections de Gastem en cours sur l'archipel et exigeons des audiences du BAPE sur l'exploration gazière par cette compagnie aux Îles-de-la-Madeleine.»

Je certifie, M. le Président, que l'extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période des questions et réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de Mme la ministre de la Culture et des Communications proposant que le projet de loi n° 82, Loi sur le patrimoine culturel, soit adopté.

Questions et réponses orales

Et nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales. Je cède la parole à Mme la chef de l'opposition. C'est à vous.

Tenue d'une enquête publique
sur l'industrie de la construction

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Hier, j'ai posé des questions au premier ministre concernant la tenue éventuelle d'une commission d'enquête sur l'industrie de la construction. Comme nous n'avons eu aucune réponse de sa part, je voudrais reposer aujourd'hui, le plus clairement possible, un certain nombre de questions au premier ministre. Il a d'ailleurs, hier, informé son caucus des orientations ou des décisions qu'il souhaitait prendre. Il me semble que la moindre des choses, ce serait d'en informer les membres de l'Assemblée nationale.

D'abord, est-ce que la commission d'enquête sera publique et transparente? Est-ce que les Québécois auront accès aux différents témoignages, tel que le stipule d'ailleurs l'article 18 de la Loi sur les commissions d'enquête, ou est-ce que tout se déroulera derrière des portes closes, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, M. le Président, j'espère que la chef de l'opposition officielle ne nous reproche pas d'avoir des discussions au caucus. Il me semble... En tout cas, c'est normal. Chez nous, on trouve ça normal.

Cela étant dit, M. le Président, je veux dire aux Québécois, à travers vous, une chose que tout le monde sait peut-être mais qu'il vaut la peine de rappeler sur ce débat. Peu importe la décision ou les décisions du gouvernement, peu importent les gestes que nous avons posés, peu importent les réponses que je donnerai aujourd'hui, la chef de l'opposition officielle va être contre. La chef de l'opposition officielle va dire que ce n'est pas assez bon. La chef de l'opposition officielle a une politique de terre brûlée et de destruction sur tout ce qui touche la politique. Je pense qu'il faut dire les choses comme elles sont, là, M. le Président, là. Alors, on ne s'attend pas à rien du côté de l'opposition officielle là-dessus. Ça va être ça, point à la ligne. Point à la ligne.

Cela étant dit, M. le Président, le gouvernement, la chef de l'opposition officielle dit qu'on ne donne pas de réponse? J'ai donné les réponses. J'ai dit que, dans notre réflexion, nous tenions compte du fait qu'on voulait protéger la preuve, la capacité de déposer des accusations et de protéger les témoins. Est-elle d'accord, oui ou non, avec ces principes? Elle a une occasion... je ne m'attends pas à grand-chose, mais elle a une occasion aujourd'hui de parler, de se prononcer sur des principes qui ont été clairement énoncés, et énoncés à plusieurs reprises. Il me semble que c'est simple. Le chef de la deuxième opposition, hier, a dit qu'il était d'accord avec ces principes-là. Est-ce que la chef de l'opposition officielle, elle, aujourd'hui, peut s'élever un petit peu et dire aux Québécois si elle est, oui ou non...

Le Président: En terminant.

M. Charest: ...d'accord avec ces principes?

Le Président: Première complémentaire, Mme la chef de l'opposition.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Une façon de s'élever, M. le Président, c'est de répondre aux questions que je pose au premier ministre. Je comprends qu'il refuse actuellement de s'engager à tenir une commission d'enquête publique et transparente. J'ai donc une deuxième question pour le premier ministre.

Est-ce que cette commission sera vraiment indépendante, c'est-à-dire à l'abri des intérêts du Parti libéral du Québec, avec des commissaires indépendants recommandés par des tiers, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, M. le Président, le gouvernement a demandé à M. Duchesneau de piloter une unité anticollusion au ministère des Transports. Le gouvernement, dans ce mandat, s'attendait à ce qu'il dépose un rapport, ce qu'il a fait. Il a témoigné en commission parlementaire. Et, dans la foulée de ce rapport et de ce témoignage, nous avons également annoncé notre réflexion sur la suite des choses.

Nous allons effectivement annoncer des gestes dans la foulée de cette réflexion quand nous aurons pris nos décisions, d'une part. Et on l'a fait après avoir écouté attentivement tous ceux et celles qui s'intéressaient à cette question-là. Et, dans la foulée de cette réflexion, on a énoncé...

Le Président: En terminant.

M. Charest: ...trois principes: protéger la preuve, la capacité de poursuivre et les témoins. Est-ce que la chef de l'opposition est d'accord?

Le Président: Deuxième complémentaire, Mme la chef de l'opposition.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, encore une fois, pas de réponse sur la question que j'ai posée au premier ministre, M. le Président. Je lui en pose une troisième.

La nature du mandat, est-ce que le premier ministre va chercher simplement à limiter les dégâts ou est-ce que ce sera un vrai mandat qui permettra de faire toute la lumière? Est-ce que le mandat sera le même que celui qui a été proposé à plusieurs reprises ici, à l'Assemblée nationale, par une motion et qui a reçu l'appui, le 21 septembre dernier, de tous les partis d'opposition?

**(10 h 20)**

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, je réitère que le gouvernement a posé un nombre très important de gestes. Il n'y a pas un gouvernement avant nous qui en aura fait autant pour contrer la collusion et la corruption.

Des voix: ...

M. Charest: Bien, c'est un fait. Malheureusement, l'opposition n'aime pas ça, entendre ça, parce que c'est la vérité, mais c'est ça.

Et la chef de l'opposition officielle est en train de nous faire la démonstration que, peu importe ce que le gouvernement ferait, elle va toujours être en désaccord. Mais elle pourrait au moins nous dire, parce que je lui demande pour la troisième fois -- il me semble que c'est simple, le chef de la deuxième opposition a été capable de se prononcer, pourquoi elle n'est pas capable, elle, de se prononcer: Est-elle favorable à ce qu'on protège la preuve, la capacité de déposer des accusations et de protéger les témoins?

Le Président: En terminant.

M. Charest: La question n'est pas compliquée. La réponse, c'est oui ou c'est non.

Le Président: Troisième complémentaire, Mme la chef de l'opposition.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, ma question sera toute simple, M. le Président. Il y a une loi sur les commissions d'enquête, est-ce que c'est cette loi qui va s'appliquer si le premier ministre décide enfin de faire une commission d'enquête publique sur l'industrie de la construction?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, le gouvernement s'est engagé, suite au rapport déposé par M. Duchesneau et à son témoignage, à cette réflexion dont je vous ai déjà amplement parlé. Ça s'inscrit dans la foulée et dans la logique de tout ce qu'on a entrepris avant également, incluant la mise sur pied de l'unité permanente anticollusion, qui a plus de 180 personnes qui travaillent pour elle, incluant un très grand nombre d'enquêteurs, incluant une vingtaine de procureurs qui travaillent également avec la commission, chacun dans son rôle.

Et là je reviens pour une quatrième fois avec la même question à la chef de l'opposition officielle, qui a l'occasion de faire sa job: Est-elle, oui ou non, favorable à la protection de la preuve...

Le Président: En terminant.

M. Charest: ...à la capacité de déposer des accusations et à la protection des témoins? La question, c'est: Oui ou non?

Le Président: En principale, M. le député de Chambly.

Mise sur pied d'une commission
d'enquête publique sur
l'industrie de la construction

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud: M. le Président, les propos du premier ministre ne tiennent pas la route au plan juridique, et il le sait fort bien. Tous les experts juridiques le disent, on peut très bien protéger la preuve, les témoins et le dépôt d'éventuelles accusations criminelles avec une commission d'enquête publique.

Et, M. le Président, je peux citer un de ces experts que le premier ministre a bien connu dans une autre vie, Me Bernard Roy, avocat émérite du Barreau, commissaire à la commission Poitras, à la commission Gomery, qui disait, le 29 septembre, dans La Presse: «...une commission d'enquête publique conventionnelle permet de [...] protéger les témoins et éviter l'interférence avec les enquêtes policières.» M. le Président, ça ne peut pas être plus clair. Est-ce que le premier ministre ne peut pas...

M. le Président, d'une façon très claire, on peut très bien, c'est on ne peut plus clair, à la fois protéger les témoins, les enquêtes policières et tenir une commission d'enquête publique. Cela étant établi, comment le premier ministre peut-il envisager un seul instant autre chose que les avis des experts juridiques du Québec et l'avis de 80 % de la population qui veut une commission d'enquête publique? Publique!

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Sans présumer de quoi que ce soit, le premier ministre disait tantôt que, lorsque des décisions seront prises, elles seront annoncées, je veux simplement dire à notre collègue que son collègue de Verchères disait, le 6 octobre dernier, qu'il reconnaissait qu'«une commission publique comporte des inconvénients. Elle risque notamment de "contaminer" la preuve obtenue de façon autonome par les policiers...»

Alors, à partir du moment où l'opposition, par son député, est au courant qu'il y a des inconvénients mais ferme les yeux sur les inconvénients, est-ce qu'on ne peut pas se dire pourquoi vous fermez les yeux sur les inconvénients? Est-ce que c'est pour des raisons partisanes? Est-ce que c'est pour permettre à la chef de l'opposition d'avoir une certaine viabilité politique, M. le Président? S'il y a des inconvénients que le député voit, peut-il en informer son caucus et lui dire quels sont les inconvénients qu'il voit? Est-ce qu'il sait si, par rapport aux trois problèmes identifiés par l'UPAC, est-ce que ces problèmes-là sont des faux problèmes ou des vrais problèmes? Là-dessus, silence radio, M. le Président. Silence radio!

Le Président: Première complémentaire, M. le député de Chambly. Et, M. le leader du gouvernement, si jamais vous répondez à la première complémentaire, vous vous adressez à la présidence.

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud: M. le Président, c'est aberrant d'entendre le ministre dire, par exemple, qu'une commission d'enquête publique, ça ne protège pas les témoins. Voyons! Une commission d'enquête publique, ça protège les témoins. Le premier ministre et le ministre sait très bien que le commissaire enquêteur, qu'un procureur ne mettront pas dans la boîte un témoin contre son gré; c'est élémentaire. À un moment donné, il faut faire confiance au commissaire enquêteur, il faut faire confiance au bon jugement des procureurs, M. le Président.

Le prétexte du premier ministre ne tient pas. Ça fait un siècle qu'on tient des commissions d'enquête publiques, il y en a eu une trentaine depuis 50 ans. Pourquoi ces réticences à une enquête publique réclamée par tous?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, j'ai l'impression qu'on se rapproche d'un certain consensus: faire confiance...

Des voix: ...

M. Fournier: Faire confiance aux procureurs, faire confiance aux policiers, faire confiance à nos institutions, s'assurer que l'on puisse amener les gens devant les tribunaux lorsqu'il y a lieu de le faire, après des enquêtes qui sont menées selon les règles usuelles mais avec même des moyens extraordinaires tels que ceux qui ont été donnés à l'UPAC.

Le député de Verchères a même contribué, il a dit qu'il est très heureux d'avoir contribué à ça. Lorsqu'on entend cela, lorsqu'on sait -- le député de Verchères pourra vous indiquer les inconvénients qu'il y a à certains niveaux -- lorsqu'on sait tout cela, la question qui était posée par le premier ministre, qui n'a pas eu de réponse: Est-ce que vous êtes d'accord avec le fait qu'il faut...

Le Président: En terminant.

M. Fournier: ...aider nos policiers à faire le travail, la couronne à faire son travail? La question est la suivante: Êtes-vous du côté...

Le Président: Deuxième complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud: M. le Président, je l'ai dit dans ma principale, tous les experts juridiques le disent, on peut très bien protéger la preuve, protéger les témoins et en même temps tenir une commission d'enquête publique, on peut très bien tenir une commission d'enquête publique et par la suite déposer des accusation criminelles. Il me semble que c'est on ne peut plus clair. Tous les experts le disent, M. le Président, et c'est comme ça qu'on fonctionne depuis un siècle.

Est-ce que le premier ministre pourrait utiliser le moyen qu'on utilise depuis un siècle, qu'on a utilisé 30 fois depuis 50 ans, la commission d'enquête publique? C'est ce que la population et tous les experts juridiques vous disent de faire.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, si d'aventure les experts juridiques ne disaient pas la même chose que le député, est-ce qu'il changerait de discours, M. le Président, si d'aventure ce n'était pas exact, ce qu'il disait? Une simple question, simple question que je lui pose.

Les Québécois souhaitent que les criminels soient condamnés et souhaitent pouvoir avoir de l'information. Faire condamner et faire savoir, M. le Président. Et c'est suite à ce que M. Duchesneau a dit, à son rapport, c'est ce que nous tentons de faire. Le ministre fera les annonces au moment où il aura des annonces à faire. Mais, de notre côté, ce qu'on veut s'assurer, c'est qu'il puisse y avoir des condamnations, qu'il puisse y avoir une capacité de savoir ce qui se passe. Et évidemment nous allons prendre les avis...

Le Président: En terminant.

M. Fournier: ...et des policiers et des procureurs, M. le Président.

Le Président: Principale, M. le député de Chambly.

Pertinence d'une enquête publique
sur l'industrie de la construction

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud: M. le Président, depuis deux ans, des juges comme le juge Gomery, des procureurs de la couronne et même d'éminents avocats qui ont travaillé pour des commissions d'enquête se sont tous prononcés pour une commission d'enquête publique.

Est-ce que tous ces juristes sont dans le champ, M. le Président? Est-ce que, s'il y avait un réel danger de nuire aux enquêtes policières ou de mal protéger des témoins, est-ce que tous ces juristes éminents se seraient prononcés pour une commission d'enquête publique? M. le Président, il me semble que poser la question, c'est y répondre, voyons donc!

M. le Président, une commission d'enquête publique n'empêche pas le dépôt, par la suite, d'accusations criminelles. Suite à la commission Malouf, Gérard Niding a été accusé d'abus de confiance. Suite à la CECO, de nombreux criminels ont été accusés et se sont retrouvés en prison. Et, suite à la commission Gomery, les Guité, les Breault, les Coffin se sont eux aussi retrouvés en prison. L'un n'empêche pas l'autre.

La population et tous les experts juridiques vous le disent, si vous voulez aller au fond des choses, c'est une commission d'enquête publique.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Il est facile de dire ici, M. le Président: Tout le monde dit ça. Pourtant, Me Cossette, Me Ruel, Me Cloutier et des gens qui ont collaboré à de nombreuses commissions ne disent pas ça, M. le Président, disent le contraire, disent les... En fait, ils disent ce que le député de Verchères disait: Il y a des inconvénients.

Il faut s'interroger à cela, M. le Président. Il faut réfléchir avec sérieux. Il faut se poser la question, et nous la reposons encore, il faut la poser, M. le Président: Est-ce que, du côté de l'opposition officielle, de pouvoir respecter les policiers, favoriser leur travail, les aider plutôt que leur nuire, s'assurer que les poursuites puissent être prises plutôt que d'ajouter des fardeaux supplémentaires à la couronne, est-ce que ça, ces éléments-là sont des questions qui les habitent ou, par partisanerie aveugle, ils se disent: On va faire de l'aveuglement volontaire sur les inconvénients qu'on voit parce qu'il faut sauver notre chef de l'opposition?

Le Président: Première complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud: M. le Président, est-ce que le ministre ne pense pas qu'un commissaire enquêteur ou un procureur ne s'assurerait pas que les travaux de la commission ne nuisent pas aux enquêtes policières? Il me semble que c'est l'évidence. Il le disait hier, le juge Gomery, quand il a présidé, il a fait attention à la preuve qu'il entendait pour ne pas que ça nuise aux enquêtes policières. À un moment donné, il faut faire confiance au commissaire enquêteur, il faut faire confiance aux procureurs.

Le premier ministre Bourassa disait: Une commission d'enquête -- quand il a créé la fameuse CECO -- une commission d'enquête, ça permet de compléter des preuves ou des éléments de doute qui pouvaient exister auparavant. Prenez donc exemple sur Robert Bourassa et déclenchez une commission d'enquête publique.

**(10 h 30)**

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Le collègue semble bien sûr de toute l'unanimité qui l'entoure. Je lui repose la question: S'il savait qu'il y a des risques et des inconvénients, est-ce qu'au moins il se poserait la question: Doit-on tenter de les diminuer?, ou s'il se convaincrait qu'il faut faire de l'aveuglement volontaire devant ces inconvénients et simplement foncer dans une direction qui peut être préjudiciable autant aux policiers, qu'à la couronne, qu'aux témoins? Une fois qu'on s'est dit ça, est-ce qu'il est capable de nous dire que, s'il avait devant lui la preuve que ce qu'il dit n'est pas exact, il changerait d'idée, oui ou non -- j'aimerais qu'il réponde à cette question-là -- ou si le dogmatisme de sa partisanerie...

Le Président: En terminant.

M. Fournier: ...l'aveugle à ce point?

Le Président: Deuxième complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud: M. le Président, ce que le gouvernement veut, c'est éviter que la lumière... que la vérité ressorte. M. le Président, est-ce que le premier ministre réalise que toute commission d'enquête privée, et non publique, serait immédiatement contestée devant les tribunaux parce que non conforme à notre charte, parce que non conforme à nos lois, parce que non conforme à cette grande règle de notre démocratie qui veut qu'au Québec la justice se déroule en public et qu'une commission d'enquête, ça se déroule en public?

Est-ce que le premier ministre réalise qu'une commission d'enquête privée, et non publique, ça ne se fait pas, c'est contraire aux règles fondamentales, ce serait un fiasco...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: De la part de quelqu'un qui n'est pas capable de nous dire si, avec des inconvénients, et qu'il connaissait les inconvénients, il ne changerait pas sa ligne directive, M. le Président, de nous dire qu'il y aura un problème juridique avec une solution non annoncée qu'il présume et qu'il invente de lui-même, je trouve ça assez particulier.

C'est assez simple, dans le fond. Les Québécois, ils veulent que les criminels soient condamnés puis ils veulent savoir ce qui se passe. Alors, nous, ce qu'on fait, c'est qu'on multiplie les moyens pour que la preuve soit acquise et qu'on puisse faire savoir ce qui se passe. N'essayez pas de nous faire dire d'autre chose et de nous faire dire qu'on ne veut pas que les gens le sachent puis qu'on cache des choses, il n'y a jamais eu autant de moyens pris pour que la preuve soit acquise, et...

Le Président: En terminant.

M. Fournier: ...sans mettre de bâtons dans les roues ni des policiers ni des procureurs. Si vous n'êtes pas avec les policiers et les...

Le Président: Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, là. À ma gauche, il y a une personne qui a le droit de parole ici, et c'est Mme la leader du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Verchères! Mme la leader du deuxième groupe d'opposition, c'est à vous.

Nature d'une éventuelle
commission d'enquête sur
l'industrie de la construction

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: M. le Président, ce matin, les intentions du premier ministre se précisent. Sa solution finale pour lutter contre la corruption dans l'industrie de la construction, c'est une parodie de commission d'enquête, derrière des portes fermées et sans pouvoir de contraindre les témoins. Ça, ça ne s'appelle pas une commission d'enquête, ça s'appelle une enquête. C'est le troisième acte d'une mauvaise pièce de théâtre. On a eu Marteau, on a eu l'UPAC, maintenant on a une commission occulte.

Voulez-vous bien me dire quelle sera la différence entre cette commission secrète et les enquêtes menées par l'UPAC? Est-ce que le premier ministre cherche en douce à destituer Robert Lafrenière pour ses mauvaises prestations dans les médias ou pour son mauvais rendement de l'UPAC?

Le Président: M. le ministre de la de la Sécurité publique.

M. Dutil: Monsieur...

Des voix: ...

Le Président: J'aimerais entendre la réponse. À ma droite, cette fois-ci.

M. Robert Dutil

M. Dutil: M. le Président, nos policiers et nos gens, à qui nous avons donné d'importants budgets pour faire les enquêtes, font leur travail et le font correctement, avec les contraintes que leur impose une société civile puis la Charte des droits et libertés. Ils ne peuvent pas faire n'importe quoi, ils doivent le faire dans le bon ordre, mais ils le font, et ils le font avec professionnalisme. Et ce que la députée de Lotbinière vient de faire, c'est une insulte, à toutes fins pratiques, pour notre système, notre système policier.

Qu'avons-nous fait, nous, pour augmenter la pression sur les criminels? Nous avons bâti une organisation qui s'appelle l'UPAC, une organisation inspirée des meilleures pratiques dans le monde, particulièrement New York, nous avons doté cet organisme-là de budgets qui sont le double de ceux qu'ils étaient auparavant, et non seulement le double pour quelques années, mais de façon permanente.

Alors, M. le Président, nous nous organisons de sorte que, comme le disait tout à l'heure le ministre de la Justice, que les criminels soient condamnés. Et il y a l'autre partie, qu'il faut faire savoir à la population ce qui se passe, qui est très importante, et pour laquelle le gouvernement est préoccupé, et qui devra se faire. Mais les deux morceaux sont importants. Il faut faire condamner, il faut faire savoir, et nous n'abandonnerons pas le morceau, comme le souhaiterait l'opposition, de faire...

Le Président: En terminant.

M. Dutil: ...condamner les criminels.

Le Président: Première complémentaire, Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: M. le Président, on reconnaît un arbre à ses fruits. Quels sont les résultats de l'UPAC? Il y a des limites à nous faire avaler des couleuvres. Où on s'en va avec toutes ces balivernes-là, à part d'endormir les militants du prochain conseil libéral? M. le Président, les Québécois ne se laisseront pas hypnotiser comme ça. Où s'en va le premier ministre avec ses balivernes?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Robert Dutil

M. Dutil: Là, vous comprenez, M. le Président, ce que nous demande la députée de Lotbinière. Elle nous demande, parce que les délais pour les accusations ne sont pas conformes à ce qu'elle s'attend, elle, sans tenir compte des contraintes dans lesquelles on vit dans une société, elle nous demande de blanchir les criminels en leur permettant de venir dire publiquement ce qu'ils ont commis et donc en s'épargnant des accusations ultérieures. C'est ça qu'elle nous demande. Et, M. le Président, c'est ce que nous ne ferons pas.

Nous tenons cette ligne-là depuis longtemps. Nous croyons à cette ligne-là. Le député de Verchères a mentionné du bout des lèvres, je l'ai bien compris, mais du bout des lèvres, qu'il y avait des inconvénients. Nous, là, on va tenir compte des inconvénients, M. le Président, puis on va trouver le moyen d'atteindre les deux objectifs...

Le Président: En terminant.

M. Dutil: ...faire savoir à la population ce qui se passe et faire condamner les criminels.

Le Président: Deuxième complémentaire, Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: M. le Président, dans le temps où les militants libéraux avaient le droit de contester leur chef, Claude Ryan, le père des valeurs libérales, celui qui a écrit le livre des valeurs libérales sur le site du Parti libéral, écrivait, dans Le Devoir, en 1975, considérant la commission Cliche: «Même le souci fort louable de ne pas ébranler les fondations du temple doit céder le pas, en ces matières, à la poursuite rigoureuse et indépendante de la vérité.»

Avec ce qu'on voit aujourd'hui, où sont maintenant les valeurs libérales?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Robert Dutil

M. Dutil: Alors, M. le Président, la députée de Lotbinière fait référence à Claude Ryan, qui a été chef du Parti libéral et qui a bien établi les valeurs. Les valeurs étaient connues, mais, si je pouvais suggérer à la députée de Lotbinière une petite lecture, il y a un texte d'une centaine de pages de M. Claude Ryan qui établit les valeurs libérales, qui est très important. Je ne suis pas sûr que dans l'ADQ on a ce même petit livre là et je ne suis pas sûr que dans l'ADQ on partage les mêmes valeurs. De toute façon, on ne sait plus très bien quelles valeurs ils partagent, on ne sait plus s'ils sont caquistes ou s'ils sont adéquistes et on ne sait pas très bien où ils s'en vont.

Alors, je suis très fier, M. le Président, d'avoir connu un homme comme Claude Ryan. Si je suis en politique aujourd'hui, c'est parce que Claude Ryan était là, que ça m'a attiré, et j'ai décidé à ce moment-là, il y a très longtemps, de me présenter.

Le Président: En terminant.

M. Dutil: Merci.

Le Président: Principale, M. le député de Verchères.

Propos du collecteur de fonds
Jean-Paul Boily sur le financement
du Parti libéral du Québec

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron: M. le Président, on vient d'avoir une révélation, là, du ministre de la Sécurité publique: ça ne sera pas en public. Et, ce qu'on comprend, on comprend très bien pourquoi ils ne veulent pas que ce soit en public, M. le Président, parce que ce que le collecteur de fonds Jean-Paul Boily a révélé à l'émission Larocque Lapierre, c'est que le parti au pouvoir a mis en place un système bien huilé de retour d'ascenseur pour financer sa caisse électorale. On a vu que, pour M. Boily, la routine habituelle, au fond, c'est: une place en garderie, un don; un contrat d'asphaltage, un don; une nomination, un don. Mais, pour que le système fonctionne, M. le Président, les collecteurs de fonds doivent savoir qui approcher. Ils doivent avoir en main la liste des personnes ayant bénéficié des largesses des ministères.

Le premier ministre peut-il nous dire quelles sont ces personnes chargées de fournir la liste des personnes à approcher aux collecteurs de fonds du Parti libéral?

**(10 h 40)**

Le Président: M. le ministre responsable des Institutions démocratiques.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: Alors, M. le Président, le député de Verchères fait des allusions quand il parle de liste qui serait disponible auprès des collecteurs de fonds libéraux. Ce que je veux indiquer, M. le Président, c'est que cette Assemblée nationale a adopté ici même à l'unanimité récemment encore trois lois qui viennent resserrer de façon considérable les règles de financement des partis politiques. Je veux rappeler que ça va même, en plus de la divulgation des noms, de la signature des gens qui reconnaissent que c'est eux-mêmes qui ont versé ces sommes, qu'il y a là-dedans quelque chose qui est assez nouveau, qui est très nouveau en fait, c'est vraiment quelque chose qui est assez unique au Canada, qui rend les entreprises qui seraient en infraction inhabiles, inhabiles même de pouvoir contribuer aux contrats publics. Alors, c'est des mesures qui sont très, très sévères. On l'a fait ensemble.

Et je pense, M. le Président, qu'il faut se rendre ici compte que le Directeur général des élections s'est vu donner aussi, par le projet de loi n° 118, des mesures exceptionnelles qui visent à s'assurer du respect de la loi. Alors, l'objectif que nous poursuivons, nous, nous croyons en ce travail du DGE et nous sommes persuadés qu'avec les outils dont il dispose il sera en mesure de s'assurer du respect de nos lois.

Le Président: Première complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron: M. le Président, on se demandait tous comment il se faisait que le financement du Parti libéral doublait littéralement au moment où il prenait le pouvoir. Bien, M. Boily nous a donné candidement la réponse, et ça, ce ne sont pas des suppositions, c'est M. Boily qui le disait directement à la télévision, comment ça fonctionnait.

Alors, je le redemande au premier ministre: Quelles sont les personnes qui fournissent la liste des personnes à approcher aux collecteurs de fonds du Parti libéral?

Le Président: M. le ministre responsable des Institutions démocratiques.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, je suis obligé de dire au député de Verchères que j'ai fait une courte recherche qui m'indique que le seul document écrit que j'ai trouvé là-dessus, sur le genre de système dont parle le député de Verchères, c'est quelque chose qui se passait dans le comté de Mégantic-Compton en 1998, où M. Roger Garant, qui était président du Parti québécois, demandait aux dirigeants d'une entreprise locale d'appuyer la campagne de financement du Parti québécois et qui nous disait... et qui disait... M. Garant y allait d'une méthode douteuse en rappelant aux dirigeants de son entreprise... que son emprise... son entreprise avait profité d'une relance grâce à l'aide du Fonds de solidarité FTQ, qui, selon lui, est davantage lié au Parti québécois. «Avons-nous besoin de rappeler que les dirigeants du fonds qui ont permis cet investissement ne sont pas apparentés au Parti libéral mais...

Le Président: En terminant.

M. Vallières: ...qu'ils ont plutôt des affinités avec le Parti québécois?» Citation de la lettre de M. Garant à l'époque. C'est la seule chose que j'ai trouvée qui référait à ce que vous dites.

Le Président: Deuxième complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron: M. le Président, le ministre de la Justice, tout à l'heure, nous parlait d'aveuglement volontaire. Manifestement, le ministre des Affaires intergouvernementales fait, lui aussi, preuve d'aveuglement volontaire, parce que, manifestement, il n'a pas entendu la déclaration de Jean-Paul Boily. Je lui fais une suggestion, M. le Président. M. Jean-Paul Boily a confirmé sa présence au congrès du Parti libéral en fin de semaine. Il y aura 1 h 30 min de discussions sur la commission d'enquête. Je l'invite à lui poser la question, à Jean-Paul Boily, sur comment ça fonctionne, le financement du Parti libéral!

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Bien, monsieur, ça ne fonctionne pas avec des listes, comme essaie de l'inventer le collègue de Verchères, d'une part. Et, d'autre part, ça ne fonctionne pas non plus comme l'associé de M. Accurso, qui collectait des fonds pour eux, le faisait, M. le Président, en comparant l'achat d'un billet dans la première classe ou la deuxième classe dans un avion pour avoir des rétributions. Ça, c'est le rapport Moisan qui établit que ce que vous décrivez, c'est la méthode du Parti québécois, votre méthode.

Le Président: Principale, M. le député de Gouin.

Financement du Parti libéral du Québec

M. Nicolas Girard

M. Girard: M. le Président, le militant et collecteur de fonds du Parti libéral Jean-Paul Boily a bien décrit le fonctionnement du système de financement de son parti. Je le cite: «Lorsqu'on a des activités de financement dans certains comtés, on sait qu'untel ou untel a eu un contrat, on va cogner à sa porte et on va lui dire: Écoute, toi, tu fais l'affaire, tu fais des choses, est-ce que tu ne peux pas nous aider au niveau politique?»

C'est exactement ce qui explique l'origine de l'affaire des garderies libérales. Rappelons que plus de 1 600 places ont été accordées pour 34 projets, en 2008, à des promoteurs qui ont contribué pour plus de 134 000 $ à la caisse du parti. Ce n'est pas tout. Nous avons également découvert qu'étrangement des promoteurs de garderies privées ayant obtenu des places à 7 $ ont versé, pour la première fois en 2008, 20 000 $ à la caisse du parti. Puisqu'il s'agissait de nouveaux contributeurs, cette liste n'existait pas.

Donc, qui a fourni la liste aux collecteurs de fonds, la liste de ceux qui avaient obtenu leurs permis en 2008 et qui ont contribué pour la première fois? Est-elle tombée du ciel par hasard?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, on a eu l'occasion de répondre à cette question, à savoir s'il y avait des listes. La réponse: Non, il n'y a pas de listes. Il n'y en a pas, de listes, M. le Président. Et toute la démonstration qu'on tente de faire en ce moment est plutôt une démonstration...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je veux entendre la réponse, hein? J'ai bien entendu la question, c'est maintenant le tour d'entendre la réponse.

M. Fournier: Ce que j'essaie de dire pour répondre à la question, c'est qu'il n'y en a pas, de listes comme celles qu'on prétend. Je comprends que, du côté de l'opposition, ils ont l'air à savoir de quoi ça a l'air, une liste. Pourquoi ils ont l'air à savoir ça? Parce que le DGE a fait une enquête, le rapport Moisan. Et M. Melançon, l'associé de M. Accurso, était collecteur de fonds. Et le rapport Moisan dit ceci: M. Melançon disait: Vous avez un contrat, donnez-moi de l'argent. Donnez-moi de l'argent, vous avez un contrat. Ça, c'était le système du Parti québécois, étudié par le rapport Moisan, mandat qui avait été donné par le DGE, M. le Président.

Qu'est-ce qu'on a fait, nous, M. le Président? Non seulement il n'y a pas de listes, il y a eu de nouvelles lois électorales qui donnent au DGE des capacités d'enquête qu'il n'a jamais eues, qui nous donnent des limites comme il n'y en a jamais eu, M. le Président. Ça, c'est ce que, nous, ce qu'on a fait. De notre côté: encadrer les mesures, s'assurer du financement correctement. De leur côté, ils ont le rapport Moisan, et des fautes...

Le Président: En terminant.

M. Fournier: ...qui ont été commises par eux.

Le Président: Première complémentaire, M. le député de Gouin.

M. Nicolas Girard

M. Girard: J'écoute... M. le Président, j'écoute la réponse du ministre, là, c'est comme Mme Post-it, là, ça n'existait pas.

Alors, en 2008, là, il y a eu des promoteurs de garderies qui ont obtenu des places à 7 $, qui, pour la première fois de leur vie, sont soudainement pris d'un élan de générosité pour le Parti libéral du Québec. Pour qu'ils puissent verser leurs dons en échange de places, il y a quelqu'un au gouvernement qui a transmis la liste.

Alors, j'aimerais savoir, tout simplement, est-ce que c'est l'ex-ministre de la Famille, députée de Fabre, sa chef de cabinet, son personnel politique, ou toutes ces réponses?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Je vais le faire en réponse, évidemment, mais je vais vous rappeler ce qu'il m'est déjà arrivé de faire, M. le Président, vous parler de notre règlement et de l'article 77 qui nous dit que les questions ne peuvent être fondées sur des suppositions. Ce que nous assistons en ce moment, ce sont là des suppositions.

Par contre, voulons-nous parler... voulons-nous parler d'une situation qui a été étudiée, regardée? Parlons alors d'un mandat qui a été donné au commissaire Moisan, qui a fait un rapport, qui a étudié les choses. Il est arrivé à quoi? Il est arrivé, il a dit: Du côté du Parti libéral du Québec, on ne retrouve rien, mais, du côté du Parti québécois...

Des voix: ...

M. Fournier: Bien, écoutez, lisez le rapport Moisan: Du côté du Parti québécois, on dénote une technique qui devait... Je ne veux pas faire d'insinuation, mais qui devait découler d'une liste, peut-être. Mais je vous la laisse, votre liste... M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît...

M. Fournier: Je leur laisse à eux, la liste. Ce que je sais, par contre, M. le Président, c'est que, quand il y a eu une étude, ce qui est arrivé, c'est que...

Des voix: ...

Le Président: Deuxième complémentaire, M. le député de Gouin.

M. Nicolas Girard

M. Girard: M. le Président, hier, questionné sur l'affaire des garderies libérales et le rôle du député de LaFontaine, le ministre de la Justice nous a indiqué que la police a la possibilité d'enquêter sur tout. Ils ont le mandat de le faire, ils sont au courant des allégations, a-t-il dit.

En entendant les propos de son collègue ministre de la Justice, est-ce que la ministre de la Famille a immédiatement transmis à la police les rapports d'évaluation des projets de garderies attribuées en 2008, pour qu'elle puisse enquêter sur le rôle du député de LaFontaine dans l'affaire des garderies libérales, oui ou non?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: J'ai au moins un certain niveau de satisfaction: je m'aperçois que, lorsqu'on répond, on répond aux questions et on les écoute. Alors, ça, je suis au moins satisfait. Effectivement, hier, j'ai dit que l'UPAC pouvait faire les enquêtes, d'ailleurs avec des moyens qui n'ont jamais été...

Des voix: ...

M. Fournier: Pardon? Pardon?

Des voix: ...

M. Fournier: M. le Président, je veux juste savoir si c'est moi qui ai la parole ou d'autres. Le député de Richelieu souhaite intervenir...

Des voix: ...

M. Fournier: Alors, je vois que, lorsqu'on répond, on nous écoute. Il y a effectivement des pouvoirs extraordinaires qui ont été donnés à l'UPAC, l'UPAC, qui est en lien avec beaucoup d'organisations, dont le Revenu, ce qui n'est pas peu dire, M. le Président, pour faire des enquêtes. Ils ont des pouvoirs pour faire tout ce qu'ils veulent faire.

Alors, la réponse à notre collègue, c'est de lui dire ce que j'ai dit hier...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Fournier: Ils ont tous les moyens de poser les questions à tout le monde. Et on va leur faire confiance, sans les diriger.

Le Président: En terminant.

M. Fournier: Ils ont la discrétion et la liberté, et on ne peut pas intervenir.

Le Président: Mme la députée de Rosemont, en principale.

Arrêt d'un programme du Service
d'entretien Pro-Prêt inc., entreprise
d'insertion sociale dans le secteur
Rosemont
--La Petite-Patrie

Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Il y a quatre ans, une entreprise d'insertion et d'économie sociale de Rosemont--La Petite-Patrie a développé un projet novateur offrant à des femmes immigrantes sans emploi, en situation de pauvreté, l'apprentissage d'un métier et une francisation appliquée en milieu de travail. Grâce à ce programme, Pro-Prêt a réussi à intégrer en emploi, de façon durable et rapide, plus de 70 % des femmes accueillies. Ce programme a été un succès incontesté, reconnu par tous. Or, il a dû arrêter ses activités en juillet dernier faute de soutien financier de la part du gouvernement.

M. le Président, au surlendemain de la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté et au moment où se déroule à Montréal le Forum mondial de l'économie sociale et solidaire, que compte faire la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale pour permettre à Pro-Prêt de reprendre sa formation auprès de ces femmes immigrantes qui vivent aujourd'hui en marge, exclues du marché du travail?

**(10 h 50)**

Le Président: Mme la ministre de l'Emploi et de la sécurité sociale.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Et je remercie la députée de Rosemont de sa question.

Alors, évidemment, Emploi-Québec, le gouvernement et moi-même, on reconnaît le travail extraordinaire que fait cet organisme-là, M. le Président, pour les femmes immigrantes qui sont en difficulté d'exclusion ou d'intégration au marché du travail. Et évidemment cet organisme-là, M. le Président, reçoit annuellement, actuellement, 1,2 million de dollars d'aide et de contribution de la part du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Maintenant, il y a quatre ans, ils nous ont proposé un projet qui pouvait être subventionné à partir du budget d'initiatives locales, donc normalement un programme qui subventionne sur une période de trois ans, pour un montant de 75 000 $, entre 40 000 $ et 75 000 $. Ils ont été subventionnés trois ans, plus une extension d'une quatrième année, M. le Président. Mais aujourd'hui, évidemment, ce programme-là se terminait, selon les règles et les critères du programme. Mais je sais que la députée reçoit aujourd'hui cet organisme-là avec ma collègue de l'Immigration, et j'ai fait part à ma collègue de l'Immigration que nous allons les recevoir, et nous allons tenter de trouver une solution positive...

Le Président: En terminant.

Mme Boulet: ...à la résolution de cette problématique-là, M. le Président.

Le Président: Première complémentaire, Mme la députée de Rosemont.

Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin (Rosemont): M. le Président, je remercie la ministre de cette réponse. Je veux tout simplement souligner, M. le Président, que souvent des investissements se font au détriment de projets qui sont en place, qui ont déjà démontré leur pertinence et leur efficacité. C'est peu d'argent en effet, la ministre vient de le dire, et qui donne des résultats superperformants.

Alors, merci, Mme la ministre, de les recevoir avec la ministre de l'Immigration aujourd'hui pour trouver une solution pour Pro-Prêt, pour ce programme particulier concernant...

Le Président: Mme la ministre de la Solidarité sociale.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, M. le Président, je remercie la députée de Rosemont de sa très belle...

Des voix: ...

Mme Boulet: ...bien non, de sa belle collaboration, et ma collègue également de... ma collègue de l'Immigration. Et on a une très belle démonstration de comment on doit faire de la politique autrement.

Le Président: Je comprends qu'il n'y a pas une deuxième complémentaire. Principale, M. le député de Jonquière.

Plan d'action pour prévenir et
traiter la violence à l'école

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault: Oui. M. le Président, en réponse aux enseignants qui l'alertaient à propos de la violence qu'ils subissent, la ministre, hier, s'est justifiée en nous parlant du ministre de l'Éducation pour défendre son plan d'action sur la violence à l'école. Pourtant... Le ministre français de l'Éducation, oui. Pourtant, les enseignants du Québec, qui vivent cette réalité tous les jours, eux, nous disent et lui disent que son plan est un échec, que c'est une coquille vide. Même ses propres experts au ministère ou ailleurs lui disent que son plan est un échec.

Donc, M. le Président, la ministre semble complètement déconnectée de la réalité. Tous lui réclament de corriger son plan. La question est très, très simple, M. le Président: Au lieu de se décharger de sa responsabilité, quand la ministre va-t-elle passer à l'action pour proposer des mesures concrètes pour contrer la violence dans nos écoles?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je pense que le gouvernement du Québec est en appui aux professeurs québécois de plusieurs façons, notamment dans la lutte pour la violence à l'école, qui est un phénomène de société qui va demander l'intervention de tous.

Mais je veux aussi indiquer à mon collègue, qui était présent ce matin au lancement des 2es Rencontres interrégionales sur la persévérance et la réussite scolaires, le fait que cet appel à la mobilisation de tous doit être entendu aussi ici, à l'Assemblée nationale. Moi, je peux porter une part de la responsabilité, l'école doit faire partie de la solution, mais, si j'ai 900 personnes de l'autre côté de la rue qui sont réunies en se disant que ce qui se passe à l'école, c'est l'affaire de tous, ça doit aussi commencer ici, ça doit commencer de sa part. Donc, oui, c'est l'affaire de tous. Oui, on doit faire partie de la solution.

D'ailleurs, les choses s'améliorent à l'école, et ça me fait plaisir de vous confirmer que le taux de diplomation dans nos écoles québécoises est en augmentation. J'ai annoncé ce matin que, pour l'année 2010, le taux de diplomation est à 73,8 %, soit une augmentation de 7 % depuis 2002-2003.

Est-ce qu'on est en soutien à la réussite des enfants? Lutter contre la violence, est-ce qu'on est en soutien aux professeurs? La réponse, c'est oui.

Le Président: En terminant.

Mme Beauchamp: C'est indéniable, avec l'augmentation du taux de diplomation.

Le Président: Première complémentaire, M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault: Oui. M. le Président, écoutez, on parle ici, là, de la violence à l'école. On parle d'une violence qui se multiplie, on parle d'une violence qui est dénoncée par les professeurs, par des parents, par des élèves, on parle d'intimidation, de cyberintimidation.

Alors, la ministre peut-elle reconnaître que cette violence dans nos milieux scolaires nuit également à terme à la réussite de tous et de nos élèves? Ce qu'on lui demande ici, c'est de reconnaître que son plan est un échec, de passer à l'action, de proposer des mesures concrètes. Quand...

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: M. le Président, lors de la conférence d'ouverture que j'ai prononcée il y a quelques instants, lors de ces rencontres interrégionales sur la réussite scolaire, j'ai indiqué que je n'allais jamais porter de lunettes roses quand il était question des enjeux dans le milieu de l'éducation, mais je vais toujours refuser qu'on me fasse porter des lunettes noires et qu'on décrive notre réseau de l'éducation comme étant voué à l'échec. Ça, j'aurais toujours refusé, parce que j'ai la responsabilité de parler également de la valorisation de l'éducation dans notre société.

Est-ce qu'il faut agir? La réponse, c'est oui. Est-ce qu'il faut agir tout le monde ensemble? La réponse, c'est oui. Le meilleur exemple, c'est l'exemple qu'il nous donne. La cyberintimidation, parfois ça commence dans le sous-sol de la maison, devant l'ordinateur, dans le sous-sol de la maison. Ça se poursuit...

Le Président: En terminant.

Mme Beauchamp: ...dans le parc, ça se poursuit sur les BlackBerry. Et, oui, parfois ça se poursuit à l'école, l'école...

Le Président: Deuxième complémentaire, M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault: M. le Président, c'est tous les jours que nos enseignants doivent faire face à l'intimidation, la cyberintimidation, la violence. Ils manquent de moyens, ils manquent de ressources. Le cri qu'ils lancent à la ministre, c'est d'agir concrètement. Elle-même, au mois d'avril, disait que son plan n'était pas parfait, elle disait: Je suis d'accord avec ça. Elle dit: Est-ce qu'il peut être bonifié? Assurément.

On est rendus au mois d'octobre, quasiment au mois de novembre, on n'a toujours pas de plan d'action concret. Quand la ministre va agir? C'est simple, la question, M. le Président.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Juste vous dire, M. le Président, qu'à la demande notamment des porte-parole de syndicats d'enseignants nous n'avons pas déchiré le plan. À la demande de porte-parole de syndicats enseignants, nous avons confirmé la poursuite du plan d'action. Au moment où je vous parle, il y a plus de 6 millions de dollars consacrés à cela. Est-ce que le plan peut être bonifié? À l'évidence même. Moi, je veux bien bonifier le plan, j'ai demandé... bien ça fait plusieurs fois que je le répète, j'ai demandé qu'on me fasse des propositions.

Je vais vous donner un exemple d'une bonification au plan d'action. Les écoles, les directeurs d'école se plaignaient, sûrement à juste titre, qu'il y avait trop de temps lié à la bureaucratie, à remplir des statistiques. Et, parfois même, certains directeurs d'école ont avoué qu'ils avaient une résistance à le faire parce qu'ils avaient peur que ça nuise à la réputation...

Le Président: En terminant.

Mme Beauchamp: ...de l'école que de déclarer des gestes violents...

Le Président: En principale, M. le député de René-Lévesque.

Projet de service d'hémodialyse
dans la région de Baie-Comeau

M. Marjolain Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Mme Lise Poitras, de Forestville, est à bout de souffle. Elle doit se rendre au Saguenay trois fois par semaine pour recevoir des traitements d'hémodialyse. C'est près de 1 300 kilomètres par semaine. Il y a un projet de service d'hémodialyse à Baie-Comeau qui est sur la table depuis trois ans. Toutefois, le centre de santé de Manicouagan a besoin d'un budget de 500 000 $ du ministère de la Santé. Il y a urgence d'agir, il y a une quinzaine de patients qui ont la même situation que Mme Poitras.

M. le Président, si la santé n'a pas de prix, pourquoi, encore aujourd'hui, le service d'hémodialyse n'est pas opérationnel à Baie-Comeau?

Le Président: M. le ministre de la Santé.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc: M. le Président, je remercie le député de poser la question, parce que j'étais justement avec Daniel Côté et l'équipe de direction à Baie-Comeau il y a quelques semaines. J'ai fait le point et je vous assure que, depuis un an, je demande à ce qu'on me dépose ce projet car c'est nécessaire pour la population d'avoir de l'hémodialyse à Baie-Comeau. Une question de contexte particulier à l'endroit par rapport aux emplois, par rapport aux ressources, mais ce n'est pas une question d'argent venant du ministère. C'est un projet que j'appuie, ça fait longtemps que je veux l'annoncer, et je peux vous assurer que c'est inacceptable que quelqu'un fasse des centaines de kilomètres pour avoir de l'hémodialyse, et c'est un projet qu'on veut régler le plus tôt possible.

**(11 heures)**

Le Président: Principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Participation d'islamistes radicaux
à une conférence à Montréal

Mme Carole Poirier

Mme Poirier: Cette semaine doit se tenir à Montréal une conférence de l'Islamic Education and Research Academy avec pour conférenciers deux personnages aux opinions inacceptables. Comme d'autres avant eux, Hamza Tzortzis et Abdur Raheem Green viennent au Québec pour déverser leur flot de haine homophobe, antiféministe, antisémite et contre la liberté d'expression et tenter de présenter une image inacceptable de l'islam... une image acceptable de l'islam politique radical. Il n'y a pas de compromis possible avec de tels personnages. Pourtant, depuis plusieurs jours, ces deux individus sont entrés impunément au Canada, alors que l'Allemagne et les États-Unis leur ont signifié qu'ils n'étaient pas les bienvenus sur leur sol.

Le ministre de la Sécurité publique peut-il nous dire pourquoi le gouvernement du Québec n'a rien fait pour exiger que le gouvernement fédéral interdise l'entrée au pays de ces deux personnages? Va-t-il exiger...

Le Président: Mme la ministre de l'Immigration.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil: Oui. M. le Président, personnellement, nous, au gouvernement, on n'a pas de confirmation de la présence de ces personnes sur le sol québécois. Mais ce que je peux vous dire, c'est que ça fait plus d'une semaine que mon cabinet est en lien avec le cabinet de M. Kenney pour l'aviser de cette situation. Et, hier, à la demande de l'ADQ... L'ADQ a proposé une motion justement à cause de cette préoccupation, parce qu'on trouve intolérables des propos et la promotion de la violence contre les femmes. Et donc on a accepté de déposer cette motion conjointement. Il y aura une motion justement après la période de questions.

Alors, on est en action dans ce dossier. On a sensibilisé le gouvernement du Canada, on leur a parlé de nos préoccupations et, comme vous savez, ils ont... Moi, je ne peux pas vous dire des actions qu'ils ont prises, mais nous avons eu beaucoup d'écoute à cet égard, et je pense que vous avez des échanges à avoir avec l'ADQ concernant votre comportement hier par rapport à la motion.

Le Président: Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, s'il vous plaît! Parce que, tel qu'on l'a annoncé tantôt, nous allons procéder maintenant à la rubrique des votes reportés. Et je pense qu'on est prêts à procéder si on a le silence, parce que, là, on a fini la période des questions.

Alors, que les députés en faveur de la motion veuillent bien se lever.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, un instant...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, non, vous avez raison.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Il faut lire la motion, que je n'ai pas.

Des voix: ...

Votes reportés

Adoption du projet de loi n° 82

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de Mme la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine proposant que le projet de loi n° 82, Loi sur le patrimoine culturel, soit adopté.

Quels sont ceux qui sont favorables à l'adoption de ce projet de loi? Bonne idée, hein?

Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke), M. Fournier (Saint-Laurent), Mme Beauchamp (Bourassa-Sauvé), Mme Courchesne (Fabre), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Bachand (Outremont), M. Bolduc (Jean-Talon), Mme Blais (Saint-Henri--Sainte-Anne), M. Lessard (Frontenac), Mme Thériault (Anjou), M. Corbeil (Abitibi-Est), M. Auclair (Vimont), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Ménard (Laporte), Mme James (Nelligan), Mme Vien (Bellechasse), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Paquet (Laval-des-Rapides), M. MacMillan (Papineau), M. Moreau (Châteauguay), M. Arcand (Mont-Royal), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Boulet (Laviolette), M. Vallières (Richmond), M. Gignac (Marguerite-Bourgeoys), M. Simard (Dubuc), Mme St-Amand (Trois-Rivières), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Whissell (Argenteuil), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Gautrin (Verdun), Mme L'Écuyer (Pontiac), M. Bachand (Arthabaska), M. Bernard (Rouyn-Noranda--Témiscamingue), M. Bernier (Montmorency), M. Morin (Montmagny-L'Islet), M. Reid (Orford), M. Dubourg (Viau), Mme Gaudreault (Hull), Mme Gonthier (Mégantic-Compton), M. Ouellette (Chomedey), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), Mme Vallée (Gatineau), M. Billette (Huntingdon), M. Huot (Vanier), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Diamond (Maskinongé), M. D'Amour (Rivière-du-Loup), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Carrière (Chapleau), M. Lehouillier (Lévis), M. Mamelonet (Gaspé), M. Matte (Portneuf), M. Pigeon (Charlesbourg), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance--Viger).

Mme Marois (Charlevoix), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Maltais (Taschereau), Mme Malavoy (Taillon), M. Gaudreault (Jonquière), M. Lemay (Sainte-Marie--Saint-Jacques), M. Simard (Richelieu), Mme Doyer (Matapédia), M. Trottier (Roberval), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Villeneuve (Berthier), Mme Beaudoin (Mirabel), Mme Richard (Duplessis), M. Bergeron (Verchères), M. Leclair (Beauharnois), M. Pelletier (Rimouski), Mme Hivon (Joliette), M. Marceau (Rousseau), M. St-Arnaud (Chambly), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Girard (Gouin), M. Blanchet (Drummond), M. Bérubé (Matane), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Ferland (Ungava), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Ouellet (Vachon), M. Kotto (Bourget), Mme Richard (Marguerite-D'Youville), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ratthé (Blainville), M. Tremblay (Masson), M. Simard (Kamouraska-Témiscouata), M. Traversy (Terrebonne), M. Boucher (Johnson), M. Pelletier (Saint-Hyacinthe).

M. Deltell (Chauveau), Mme Roy (Lotbinière), M. Bonnardel (Shefford).

M. Khadir (Mercier), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Caire (La Peltrie), M. Aussant (Nicolet-Yamaska), M. Curzi (Borduas), Mme Beaudoin (Rosemont), Mme Lapointe (Crémazie), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Gauvreau (Groulx).

Le Vice-Président (M. Gendron): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever. Je n'en vois pas.

Y a-t-il des abstentions? Je n'en vois pas. M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour: 112

Contre: 0

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, en conséquence, le projet de loi n° 82, Loi sur le patrimoine culturel, est adopté.

Motions sans préavis

Nous en sommes maintenant à la rubrique des motions sans préavis. Et on inviterait celles et ceux qui ont à quitter ce forum de le faire rapidement dans le silence pour que nous puissions poursuivre nos travaux.

Alors, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant M. le député de Jonquière pour sa motion. Et je souhaiterais l'entendre. Alors, M. le député de Jonquière, à vous la parole.

Souligner la Semaine des
directions d'établissement scolaire

M. Gaudreault: Oui. Merci, M. le Président. D'abord, vous me permettrez de saluer la présence, dans nos tribunes, de M. Gaëtan Neault, le président de l'Association montréalaise des directions d'établissement, et également de Mme Danielle Boucher, la présidente de l'Association québécoise du personnel de direction des écoles. Alors...

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, on salue nos invités. Merci.

M. Gaudreault: Oui, merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport ainsi que le député de Mercier, la motion suivante: «Que l'Assemblée souligne la première édition de la semaine nationale des directions d'établissements scolaires publics québécois sous le thème Si vous saviez tout ce que la direction fait pour l'éducation;

«Qu'elle souligne l'importante contribution des directions et directions adjointes des écoles publiques primaires, secondaires, des centres de formation professionnelle et d'éducation [des] adultes, la qualité des services éducatifs offert dans leur établissement et le maintient d'un climat de travail propice aux apprentissages;

«Qu'enfin, elle souligne la rigueur et la compétence de ces leaders pédagogiques et le support qu'ils apportent aux personnels qui composent leur équipe, aux élèves, aux parents et la communauté.»

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gautrin: M. le Président, il y a consentement pour que nous adoptions cette motion sans débat.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

**(11 h 10)**

Le Vice-Président (M. Gendron): Adopté. Alors, toujours à la rubrique des motions sans préavis, je cède maintenant la parole à Mme la leader du deuxième groupe parlementaire. À vous.

Exiger du gouvernement fédéral
qu'il refuse l'entrée au Canada
d'Abdur Raheem Green et d'Hamza Tzortzis,
considérant leurs propos sur la
criminalisation de l'homosexualité
et sur la violence faite aux femmes

Mme Roy: ...consentement pour déposer la motion suivante, conjointement avec la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, le député de Deux-Montagnes, le député de Mercier, la députée de Rosemont, la députée de Crémazie, le député de Nicolet-Yamaska, le député de La Peltrie et le député des Chutes-de-la-Chaudière:

«Que l'Assemblée nationale du Québec exige du gouvernement fédéral qu'il refuse l'entrée au Québec d'Abdur Raheem Green et d'Hamza Tzortzis parce qu'ils font la promotion de la criminalisation de l'homosexualité et de la violence faite aux femmes;

«Que l'Assemblée nationale réitère que ces positions rétrogrades n'ont pas leur place dans une société démocratique et vont à l'encontre des valeurs fondamentales de la société québécoise soit l'égalité entre les hommes et les femmes et le respect de l'intégrité physique.»

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Gautrin: Elle sera adoptée...

Le Vice-Président (M. Gendron): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gautrin: Il y a consentement, elle sera adoptée sans débat, M. le Président.

Une voix: ...

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, il n'y a pas de... Alors, c'est de dire oui ou non. Alors, y a-t-il consentement à adopter cette motion sans débat?

Mme Roy: ...pour que cette proposition remplace celle qui a été faite par mon collègue le député de Verdun hier?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): ...un instant.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, un instant, là. Moi, je veux juste présider les débats. Alors, il n'y a pas de débat. Si vous avez une question précise de directive, je vais l'entendre, mais je ne veux pas de débat sur ce qu'on vient d'entendre. Il n'y a pas de consentement d'en débattre.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Je le sais. Alors, il faut que vous m'indiquiez c'est quoi, votre question, madame...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant! Mme la députée du deuxième groupe, à vous la parole.

Mme Roy: Il y a eu un consentement avec le parti au pouvoir, le Parti libéral, que cette motion remplace celle que mon collègue le député de Verdun a présentée sur le même sujet hier. Donc, je veux savoir si c'est toujours le même consentement.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant, un instant, là. Je suis en mesure de répondre à ça. On va faire l'autre étape après. On ne peut pas revenir sur une motion qui a été adoptée. La motion a été adoptée hier. Alors, une motion adoptée hier, c'est réglé.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, non, mais par rapport à la procédure de la présidence. La motion étant adoptée hier, moi, je ne peux pas revenir sur la motion adoptée hier -- je fais juste vous informer de ça -- selon le règlement qui nous régit.

Alors, oui, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bédard: Je le constate, M. le Président, il aurait été préférable, effectivement, que nous soyons conjoints sur cette motion. D'ailleurs, celle d'hier, nous y étions. Je suis un peu surpris, là, du ton et de la nature par rapport à un dossier pour lequel il y a unanimité en cette Chambre. Tout ce qui se passe ici est un peu dommage. Tout ce qu'on souhaite, c'est que la motion soit adoptée, et évidemment nous y apportons tout notre concours, et qu'elle se trouve au bon endroit pour éviter à ce que ces deux personnes foulent le sol québécois.

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, mais là... Moi, tout ce que j'ai entendu, c'est qu'il y a consentement qu'elle soit adoptée sans débat. Et je n'ai pas vu de gens qui s'y opposent, donc la motion est adoptée, et nous sommes ailleurs.

Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis qui sont présentées? M. le député de Nicolet-Yamaska, à vous la parole.

Féliciter le poète David Goudreault,
gagnant de la Coupe du
monde de slam de poésie

M. Aussant: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, le député de Borduas, le député de Bourget, le député des Chutes-de-la-Chaudière, la députée de Crémazie, le député de Groulx, le député de La Peltrie, le député de Mercier et la députée de Rosemont, la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale félicite le poète québécois David Goudreault, qui a remporté le 5 juin dernier à Paris la Coupe du monde de slam de poésie et qu'elle souligne le fait qu'il est le premier francophone à remporter ce titre.»

Et j'en profite pour souligner la présence de David Goudreault dans les tribunes, avec quelques membres de sa famille.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, l'Assemblée nationale et la présidence vous saluent, M.Goudreault, ainsi que les membres de votre famille. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion.

M. Gautrin: Il y a consentement, M. le Président, pour que nous l'adoptions sans débat.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, il y a consentement pour qu'on l'adopte sans débat. Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: ...

M. Gautrin: ...est-ce qu'il y a consentement de mon collègue? Alors, un bref débat de quelques minutes.

Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant. Parce qu'il faut toujours s'assurer que l'Assemblée nationale sait où nous en sommes et de quoi nous convenons. Alors, il y a consentement pour en débattre pendant quelques minutes. Et je cède bien sûr la parole à l'auteur de la motion pour en débattre. Alors, M. l'auteur... M. le député de Nicolet-Yamaska sur votre motion. À vous.

M. Jean-Martin Aussant

M. Aussant: Merci, M. le Président. C'est à Paris, en juin dernier, que le poète québécois David Goudreault, natif de Trois-Rivières, a remporté la Coupe du monde de slam de poésie devant les meilleurs slameurs de la planète, qui s'y exprimaient chacun dans leur langue. Il a réussi à accomplir cet exploit après seulement trois ans dans le milieu.

Le plus impressionnant, c'est que, pour David Goudreault, il s'agit pratiquement d'un passe-temps, puisqu'il est travailleur social de profession. Ses mots, parfaitement choisis et agencés, s'attaquent à des vérités que l'on préférerait parfois oublier, comme le suicide, ce mal qui est hélas trop souvent québécois et dont David parle dans son poème Meurtre de soi.

Ce qui frappe dès la première rencontre avec David Goudreault, c'est qu'à son talent inné et unique d'artiste s'ajoute une simplicité et une humilité qui devraient tous nous inspirer. Poursuivant sa vocation sociale, David se rendra d'ailleurs à Ivujivik, au Nunavut, la semaine prochaine pour y donner des ateliers de poésie et il se fera également l'ambassadeur de notre langue et de notre culture le printemps prochain, alors qu'il se rendra en Europe le temps de quelques conférences et ateliers. Et quel ambassadeur il sera! On peut en être certains. Même qu'un jour, pourquoi pas, il pourrait en être un en bonne et due forme.

Et, parlant de ce jour qui devra venir, je ne peux terminer ce bref hommage sans faire un clin d'oeil à une tournure de phrase de David Goudreault que j'aime tout particulièrement, lui qui, comme des millions de Québécois, rêve du jour où, sur nos plaques, sera inscrite une nouvelle devise qui dira Je me souverain. Merci et bravo à David Goudreault.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je cède maintenant la parole à Mme la ministre pour son intervention sur cette motion. Mme la ministre, à vous.

Mme Christine St-Pierre

Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. J'aimerais, moi aussi, ajouter mes félicitations à celles du député de Nicolet-Yamaska. Le slam est une forme de poésie extrêmement vivante qui suscite un engouement croissant, particulièrement chez les jeunes, qui trouvent dans cet art une façon de clamer ce qu'ils sont et de formuler leurs aspirations à l'aide de mots qui claquent comme des coups de marteau. L'ambition avouée des premiers slameurs était d'ailleurs de ramener la poésie sur la place publique en vue de renforcer la liberté de parole.

La performance de David Goudreault mérite notre admiration, puisqu'il affrontait 15 autres slameurs considérés comme les meilleurs dans leur pays d'origine, sans compter que c'est la première fois dans l'histoire de cet événement international qu'un Québécois décroche ce trophée très convoité. David Goudreault l'a remporté en finale devant les slameurs de Belgique, du Brésil, du Canada anglais, grâce à ses mots, grâce aussi à sa performance sur scène, ce qui compte beaucoup dans cette forme d'art où l'on n'a droit à aucun accessoire. Outre les mots, tout se joue sur la voix et la gestuelle.

On peut parier que le succès international de David Goudreault aura des retombées au Québec et que plusieurs poètes en herbe voudront pratiquer cet art oratoire éminemment démocratique. J'adresse donc de chaleureuses félicitations à David Goudreault pour le titre remporté mais aussi pour son apport à la vitalité et au rayonnement de la culture québécoise. Je termine en lui souhaitant beaucoup de succès dans tous ses projets et en l'encourageant à continuer à étonner les amateurs de poésie avec des mots qui sonnent et des images qui font mouche. Merci, M. le Président. Et bravo, David.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la ministre, de votre intervention. Et, toujours sur cette motion, je cède maintenant la parole à M. le député de Bourget. M. le député de Bourget, à vous.

M. Maka Kotto

M. Kotto: Merci, M. le Président. C'est avec un plaisir certain que je joins ma voix à celles de mes collègues pour féliciter M. David Goudreault, qui vient de donner ses lettres de noblesse au slam québécois avec ce prix remporté dans le cadre de la Coupe du monde de slam de poésie tenue cet été à Paris.

Nous le savons toutes et tous, le Québec est une nation riche, très riche de ses écrivains, dramaturges, chansonniers et poètes, qui ont participé par leur voix, leur plume et leur génie à l'édification du Québec moderne. Ainsi, l'arrivée du slam de poésie dans l'univers de la littérature ne pouvait nous échapper, et déjà cette forme nouvelle d'expression populaire, en marge, diront certains, vient révéler au monde des voix fortes et percutantes comme celle de David Goudreault.

Cette voix, et les mots qui la nourrissent, est celle d'un jeune poète qui, autant par sa vie personnelle que professionnelle, est déjà conscient des tournures imprévisibles du destin, comme celui que peut prendre le texte du slameur. Né à Trois-Rivières, lieu de naissance du poète Gérald Godin et du Festival international de poésie, David Goudreault vient nous confirmer que cette ville, comme l'avait proclamé Félix Leclerc, est indubitablement la capitale de la poésie du Québec. Merci et félicitations.

**(11 h 20)**

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci à chacun des intervenants. Ah! excusez. Alors, M. le député de Borduas, oui, oui. Je n'ai pas regardé. Alors, M. le député de Borduas, à vous la parole.

M. Pierre Curzi

M. Curzi: Merci, M. le Président. Je voulais, moi aussi, féliciter David Goudreault de ce prix remporté à la coupe de slam. Je veux lui dire que, grâce à cette initiative, ça a été l'occasion pour moi d'aller sur son site, davidgoudreault.org, et d'écouter certaines de ses créations. Et c'est fabuleux de voir qu'on peut unir comme cela à la fois la poésie et un certain exploit sportif, parce que c'est une coupe du monde, comme Robert Gravel l'avait fait pour l'improvisation avec la Ligue nationale.

Mais, au-delà de ça, juste le remercier parce qu'il fait entrer la poésie non seulement dans la jeunesse, non seulement il la fait rocker, mais il lui fait dire aussi... décrire les réalités sociales et les réalités politiques. Et faire de la poésie le coeur de nos vies, c'est, je pense, le but ultime d'une politique qui serait pleinement assumée. Merci beaucoup à vous.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, sans présomption, c'est clair que la motion est adoptée. Alors, la motion est adoptée. Je cède maintenant la parole à M. le ministre. M. le ministre.

Souligner la Semaine nationale
des institutions québécoises

M. Vallières: Alors, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Chicoutimi, le député de Shefford, le député de Nicolet-Yamaska, la députée de Rosemont, la députée de Crémazie, le député de Chutes-de-la-Chaudière et le député de La Peltrie:

«Que l'Assemblée nationale souligne la première édition de la Semaine nationale des institutions québécoises, initiée par l'Institut québécois d'affaires publiques, qui se déroulera du 16 au 22 octobre 2011 sous le thème Nos institutions garantes de notre pérennité;

«Que cette initiative permette de souligner le rôle important joué par nos institutions publiques québécoises tant au plan national que régional et local, ainsi que tout le travail accompli par chacune d'elles au profit de notre société;

«Qu'elle souligne l'apport essentiel des institutions sociales, économiques et culturelles québécoises au maintien et à la promotion des valeurs québécoises et qu'elle exprime sa reconnaissance aux personnes qui contribuent à l'essor de ces institutions.»

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le ministre. Est-ce que cette motion est adoptée... C'est-à-dire, est-ce qu'il y a débat sur cette motion, M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Gautrin: M. le Président, il y a, disons, acceptation pour qu'on puisse l'adopter sans débat.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, cette motion étant adoptée, ça met fin à la rubrique des motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

Et nous en sommes maintenant à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions. Et je cède la parole à M. le leader du gouvernement pour ses avis.

M. Gautrin: Je vous remercie. Je vous remercie, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 14, Loi sur la mise en valeur des ressources minérales dans le respect des principes du développement durable, aujourd'hui, après les affaires courantes, et ce, jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission de la santé et des services sociaux poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 16, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de santé et de services sociaux afin notamment de resserrer le processus de certification des résidences pour personnes âgées;

La Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 120...

J'ai oublié de signaler que la Commission de la santé, c'est aujourd'hui, après les affaires courantes, et ce, jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;

La Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 120, Loi concernant les campagnes à la direction des partis politiques, aujourd'hui, après les affaires courantes, et ce, jusqu'à 13 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May;

Et enfin que la Commission des finances publiques entreprendra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 23, Loi modifiant divers régimes de retraite du secteur public, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Il me fait plaisir de remettre une copie de cet avis à ce charmant page.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Alors, pour ma part, je vous avise que la Commission des finances publiques se réunira aujourd'hui, à la salle Louis-Joseph-Papineau, en séance publique, après les affaires courantes jusqu'à 13 h 15, afin de terminer ses auditions publiques dans le cadre du mandat d'initiative portant sur l'étude des mesures pour contrer la consommation du tabac de contrebande; en séance de travail également, de 13 h 15 à 14 h 15, afin de statuer sur les observations, conclusions et, s'il y a lieu, recommandations à la suite de ces auditions publiques.

Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 143 du règlement concernant l'horaire des travaux des commissions?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, il y a consentement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Avis de sanction du projet de loi n° 82

À la rubrique Renseignements sur les travaux de cette Assemblée, il n'y en a pas. Je vous avise cependant qu'il y aura sanction du projet de loi n° 82, Loi sur le patrimoine culturel -- qu'on a adopté tantôt -- à 15 h 30, au bureau du lieutenant-gouverneur.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant procéder aux affaires du jour. Et je cède à nouveau la parole à M. le leader adjoint du gouvernement. M. le leader adjoint.

M. Gautrin: M. le Président, nous avons avisé l'opposition qu'il y a quatre commissions parlementaires qui siègent actuellement, soit l'Agriculture, la Santé et les Services sociaux, les Institutions et les Finances publiques.

Conséquemment, je vous demande de suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures pour le débat, l'important débat présenté par la collègue de l'opposition, et de suspendre jusqu'à 15 heures.

Le Vice-Président (M. Gendron): Est-ce qu'il y a consentement pour adopter cette motion?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, il y a consentement.

Donc, nos travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures cet après-midi. Les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 11 h 26)

 

(Reprise à 15 h 2)

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, veuillez vous asseoir, chers collègues.

Affaires inscrites par les
députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée
exige le retrait de dispositions du
projet de loi fédéral C-10, dont
celles concernant le traitement
des jeunes contrevenants

Alors, à l'article 47 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, c'est Mme la députée de Joliette qui présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale exige le retrait des dispositions du projet de loi fédéral C-10 qui vont à l'encontre des intérêts du Québec et des valeurs québécoises en matière de justice, dont celles concernant le traitement des jeunes contrevenants.»

Conformément à ce qui a été énoncé par la présidence le 20 septembre dernier, la répartition des temps de parole, dans le cadre de ce débat restreint, s'effectuera comme suit -- on le fait davantage pour les gens qui écoutent le débat, pour suivre; vous, vous le savez tous, là: 10 minutes sont réservées à l'auteur de la motion pour sa réplique, 7 min 45 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, 10 minutes sont réservées aux députés indépendants, le reste du temps sera partagé également entre le groupe parlementaire formant le gouvernement et le groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans le cadre de tout ça, là, les temps non utilisés sont toujours répartis, mais il faut attendre vers la fin avant de les répartir, pour voir si effectivement ceux qui l'avaient vont l'utiliser.

Mis à part les consignes mentionnées, les interventions ne sont pas limitées, elles ne sont pas limitées dans le temps, il appartient à chaque parti politique de gérer sa banque de temps.

Je rappelle aux députés indépendants qui souhaiteraient intervenir au cours du débat qu'ils ont 10 minutes à partir de quelques secondes, là, que je vais me fermer, pour en aviser la présidence.

Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Joliette pour son intervention de départ. À vous, Mme la députée.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon: Merci beaucoup, M. le Président. Je suis très heureuse qu'on ait l'opportunité de débattre de cette motion que je présente concernant le projet de loi C-10, parce que c'est un projet de loi qui est fort important. C'est un débat fondamental et surtout qui est urgent. Et je suis bien consciente qu'aujourd'hui il y a un peu de circulation dans l'actualité politique, mais j'espère que ça ne fera pas en sorte que ce débat essentiel pour l'avenir du système de justice soit passé sous silence.

C'est un débat archi-important parce qu'effectivement les mesures qui sont annoncées dans le projet de loi omnibus fédéral, donc C-10, sont de nature à changer considérablement, pour ne pas dire du tout au tout, le visage de notre approche par rapport à la justice. Et, en plus... en plus du fond des choses, ce qui est particulièrement inquiétant, c'est la manière dont le gouvernement fédéral s'y prend en regroupant en un seul projet de loi omnibus neuf projets de loi distincts dans les objectifs et les finalités et les mesures, dont la plupart avaient d'ailleurs déjà été déposés, pour les regrouper en un seul et, en plus de cela, vouloir y aller à toute vapeur pour que ce soit adopté d'ici quelques semaines, alors que ce sont des mesures énormes qui vont, comme je vous le disais, potentiellement changer du tout au tout notre approche par rapport à la justice.

Donc, il y a un problème profond en ce qui concerne les mesures. Il y a un problème aussi de processus démocratique. Et je pense que c'est important, ici, comme Assemblée, qu'on ait l'opportunité de manifester haut et fort notre opposition à ce projet de loi là, et d'une manière unanime, je le souhaite bien sûr profondément. Quand il y a des événements comme celui de C-10 qui arrivent devant nous, je pense que c'est là que tout le sens de la collégialité, du consensus qui peut émerger de l'Assemblée nationale est important. Alors, j'invite tous les parlementaires, bien sûr, à écouter le débat, et avec la plus grande ouverture possible, pour qu'on puisse arriver à ce consensus.

C'est aussi aujourd'hui l'occasion pour le gouvernement de finalement... le gouvernement du Québec, de finalement se faire entendre sur cette question-là. Parce que je dois vous dire, M. le Président, qu'on a été plutôt surpris par le silence autant du ministre de la Justice, de la ministre déléguée aux Services sociaux, qui, on le sait, est directement interpellée en ce qui concerne le dossier des jeunes contrevenants, depuis le dépôt de ce projet de loi là fédéral, il y a maintenant un mois. On a été surpris parce que c'est pourtant des mesures qui, pour plusieurs, appellent une opposition bien sentie de la majorité des groupes qui travaillent dans ces domaines-là, et on n'a rien entendu publiquement de la part des ministres concernés. Et il a fallu notre intervention vendredi, à trois des collègues de l'opposition officielle, donc de moi à titre de porte-parole en matière de justice, de mon collègue député de Marie-Victorin, responsable des affaires intergouvernementales, et de mon collègue député de Verchères, en matière de sécurité publique, pour qu'on apprenne comme toute réponse que le gouvernement avait envoyé, dans sa poursuite, on le sait, du fédéralisme de correspondance qu'il affectionne particulièrement, une missive au ministre de la Justice fédéral pour, et dans des mots bien tièdes, demander que «ne soit adopté [le projet de loi] sans que vous n'ayez tenu compte des préoccupations de la société québécoise».

Donc, vous comprendrez qu'on est restés sur notre appétit, d'autant plus qu'on n'a pas du tout entendu le gouvernement prendre fait et cause pour le consensus qui émerge dans la société québécoise à ce jour. Et, voyez-vous, le conseiller spécial du ministre de la Justice a même dit: Bien, voyez-vous, on a écrit une lettre, on a fait valoir notre point, et nous n'avons rien à ajouter. Bien, j'espère qu'aujourd'hui ils vont avoir quelque chose à ajouter -- d'ailleurs, la présence du ministre, j'espère, en est une indication -- parce que, s'il y a un débat fondamental en ce moment pour l'avenir de la justice, c'est bien celui-là. Alors, on a hâte d'entendre le gouvernement. Et on s'attend à une défense pas mal plus vigoureuse que ce qui a pu être démontré à ce jour, je dirais, une défense tout court, en fait, parce que cette lettre-là ne nous apparaît pas être dans la bonne voie.

Donc, au-delà du changement d'attitude qu'on espère voir aujourd'hui de la part du gouvernement, on espère bien sûr le voir se tenir debout. Et surtout je l'inviterais à se positionner en leader au sein de la société québécoise pour montrer qu'il a bien entendu les messages qui lui ont été transmis et qu'il va prendre fait et cause de tous ces messages pour que les valeurs québécoises, les intérêts du Québec dans ce dossier-là soient clairement défendus et qu'on exige le retrait des dispositions, purement et simplement, parce qu'au Québec on a des modèles d'intervention qui sont spécifiques -- je vais y revenir un peu plus tard avec l'exemple concret des jeunes contrevenants -- mais on met aussi au coeur de notre modèle la réhabilitation et l'importance de la réinsertion sociale.

Et souvent on entend toutes sortes de choses sur ces valeurs-là, mais, M. le Président, je pense qu'on a l'occasion aujourd'hui de dire que, bien sûr, au Québec comme partout, on espère une plus grande sécurité, on espère une meilleure protection, on espère une baisse de la criminalité, tout le monde souhaite ça, mais le fait est que les mesures qui sont présentées dans le projet de loi C-10 sont des mesures qui vont probablement, très certainement, pour la majorité des mesures, nous amener tout à fait à l'encontre de ces objectifs-là de faire diminuer la criminalité. Ce sont des mesures idéologiques et rétrogrades, et il faut les dénoncer haut et fort, parce que la réhabilitation et la réinsertion, ça ne veut pas dire d'être doux avec le crime, ça veut dire qu'on veut se donner les meilleurs moyens pour arriver à faire diminuer la criminalité. Parce que c'est assez évident, quand on étudie, quand on regarde un peu la littérature scientifique, qu'une personne qui va être bien réinsérée dans sa communauté, qui va être réhabilitée va beaucoup moins récidiver qu'une personne qui est marginalisée, qui est mise en marge de la société par différents moyens.

**(15 h 10)**

Et on entend beaucoup parler des victimes dans ce débat-là. Mais les victimes, vous savez, M. le Président, elles veulent la même chose que vous et moi, elles veulent qu'il n'y ait pas de récidive. Elles veulent s'assurer que, quand quelqu'un va avoir purgé sa peine, il ne récidivera pas, qu'il ne présentera pas une menace à la société. Or, on voit de plus en plus, avec moult exemples sur lesquels je vais revenir, que les peines de prison minimales, que l'abolition des sursis, c'est autant de mesures appliquées à certains types d'infractions plus mineures, si vous voulez, qui ne font en sorte que d'augmenter, au bout du compte, les récidives et la criminalité. Donc, bien sûr, comme vous et moi, ce n'est pas ce que les victimes souhaitent. Et d'ailleurs, l'année dernière, lors de la présentation du projet de loi C-4 sur la question spécifiquement des jeunes contrevenants, le groupe Plaidoyer-Victimes avait émis des commentaires pour dire qu'il refusait que les victimes soient instrumentalisées dans ce débat-là, parce que les victimes, elles souhaitaient aussi d'abord et avant tout la réhabilitation et la réinsertion des contrevenants parce que c'est la meilleure manière d'assurer la sécurité à long terme, de manière continue et profonde dans la société.

Je vous dirais que, face à l'attitude du gouvernement fédéral, on est vraiment face à un exemple patent de dysfonctionnement majeur du fédéralisme canadien. Tout d'abord, on a devant nous un projet de loi qui a des mesures totalement inacceptables pour le Québec, qui ont été mises de l'avant sans aucune consultation, bien sûr, du Québec. Deuxièmement, on est face à un projet de loi qui va entraîner des coûts de centaines et de centaines de millions, qu'on évalue pour notre part à au moins 500 millions, et on pense que c'est conservateur, parce qu'à l'heure actuelle on ne réussit toujours pas à avoir l'ensemble des données. D'ailleurs, le directeur fédéral du budget pour la Chambre des communes a déposé des chiffres, mais il est incapable de déposer l'ensemble des chiffres parce qu'il n'a pas toute l'information et toute la collaboration du gouvernement.

Donc, des coûts astronomiques pour le Québec, et le fédéral dit: On va refiler la facture en entier pour tout ce qui concerne la surcharge que ça va créer pour les prisons, le nombre accru de prisons, parce qu'on parle même de nouvelles constructions de prisons, qui va être entraîné par les nouvelles mesures. Mais on ne pourra pas vous compenser, parce que, que voulez-vous, c'est ainsi fait. Alors, vous avez juridiction sur les peines de deux ans et moins via vos prisons, donc vous allez devoir assumer la totalité des coûts.

Et il est allé ajouter l'insulte à l'injure -- je parle ici du ministre Vic Toews, le ministre de la Sécurité publique fédéral -- en disant: Puis, vous savez quoi, si vous avez des problèmes à payer les centaines de millions supplémentaires, bien vous avez juste à couper dans vos dépenses en matière sociale, en éducation, en services sociaux, alors qu'on sait très bien qu'en coupant en matière sociale c'est la meilleure manière d'augmenter la criminalité. Alors, je pense qu'on est face à une attitude odieuse, et il faut la dénoncer haut et fort. Et ce n'est pas vrai qu'au Québec on va laisser quelque chose de la sorte se passer sous nos yeux sans qu'on ne parle d'une seule voix.

D'abord et avant tout, en ce qui me concerne, M. le Président, j'aimerais vous dire quelques mots sur les mesures en elles-mêmes. Je vais parler plus spécifiquement dans quelques minutes des jeunes contrevenants, parce que c'est quelque chose qui nous tient à coeur au Québec. Mais il y a d'autres mesures qui vont à l'encontre de nos valeurs, de nos intérêts. Et je pense ici notamment à la quasi-abolition des peines avec sursis. Alors, maintenant, on prévoit toute une série de nouvelles infractions pour lesquelles il n'y aura plus possibilité de sursis. Et je pense, par exemple, au vol de courrier ou au vol de bestiaux. Alors, je ne sais pas ce que vous en pensez, M. le Président, mais je ne suis pas certaine que, pour ce type d'infractions là, une peine de prison soit tout à fait adéquate.

Et souvent c'est vrai que les peines avec sursis, les peines dans la communauté n'ont pas bonne presse dans la communauté. Mais je pense que c'est important de rappeler c'est quoi, ces peines-là, et c'est quoi, les objectifs de ces peines-là. Et ce n'est pas vrai qu'une peine avec sursis va faire en sorte que vous allez être libre comme l'air. Au contraire, ça peut parfois même être beaucoup plus contraignant que d'autres formes de peines. Mais ce que ça fait, c'est que vous pouvez, par exemple, si vous avez un emploi, continuer à occuper votre emploi, mais en rentrant chez vous le soir, en étant monitoré, en ayant votre bracelet, en ayant un couvre-feu, en ne pouvant pas sortir les soirs et les fins de semaine. Mais ça fait en sorte que vous restez intégré dans votre communauté. Ça fait en sorte aussi que, si vous faites vivre une famille, votre famille ne tombe pas dans la pauvreté parce que vous êtes envoyé en prison. Donc, je pense qu'il faut être conscients que c'est beaucoup plus complexe que juste de dire: Ah! c'est doux... on est doux avec le crime parce que, dans certaines circonstances, il peut y avoir une peine purgée dans la communauté.

Alors, la quasi-abolition des peines avec sursis, non seulement ça va entraîner des coûts astronomiques, mais ça va aussi faire en sorte que ça va nuire aux objectifs de réhabilitation et de réinsertion. Parce que, je vous soumettrais bien humblement que, pour du vol de bétail, quand on est à une première infraction, je ne suis pas certaine que d'envoyer quelqu'un en prison va faire en sorte que cette personne-là va sortir plus réhabilitée et qu'elle va être un meilleur atout pour la société par la suite. Deuxième élément, c'est bien sûr aussi les peines minimales. Un virage important que l'on voit se dessiner, c'est de plus en plus de peines minimales. Et, si les peines minimales, dans certains cas, peuvent bien sûr avoir leur place, il faut être conscient que là on fait un virage du tout au tout et notamment pour tout ce qui a trait aux infractions liées aux drogues on arrive avec des peines minimales. Ce qui veut dire que, dans le concret, quelqu'un qui est pris en possession de six plants de marijuana va devoir avoir une peine minimale de prison -- encore une fois, même si c'est une première infraction, et tout ça.

Donc, je pense que, comme société, il faut se poser la question: C'est quoi, l'objectif qui est poursuivi? Si c'est un objectif de vengeance, si c'est un objectif de mesures populistes, peut-être que le projet de loi est bien approprié, mais je pense qu'il faut être un petit peu plus intelligent que ça puis il faut essayer de voir, à long terme, quel visage on veut donner à notre société et quel espoir on veut avoir avec les gens qui commettent des infractions mais qui ont tout, s'ils sont bien suivis dans la communauté, pour s'en sortir.

Et, bien sûr, vous allez comprendre qu'un autre problème fondamental du projet de loi, c'est tout ce qui a trait aux dispositions sur les jeunes contrevenants. Et ça, c'est un non-sens encore plus grand, je pense, que ce que je vous ai énuméré précédemment. Parce que, voyez-vous, au Québec, on a réussi à mettre en place un modèle d'intervention spécifique, unique, qui d'ailleurs est étudié partout sur la planète parce qu'il a donné des résultats probants, et nous avons, en matière de délinquance juvénile, un des taux de criminalité et de récidive les plus bas en Amérique. Alors, ce n'est pas rien. Ce n'est pas juste des mesures qui vont à l'encontre de nos intérêts et de nos valeurs, mais ce sont des mesures qui vont à l'encontre de la logique même de la justice, parce que -- les résultats le montrent -- notre approche, elle, fonctionne.

Pourquoi elle fonctionne? Parce que, plutôt que de laisser un jeune à lui-même quand il est dans un centre jeunesse, quand il purge sa peine dans un centre jeunesse, il est suivi, il est suivi au quart de tour. Il est suivi pour qu'il comprenne bien ce qu'il a fait, pour qu'il comprenne bien les conséquences de ce qu'il a fait sur sa famille, sur la victime, sur la famille de sa victime. Il y a énormément de suivi psychosocial, et ça, c'est prouvé que c'est la clé quand on veut intervenir auprès des jeunes contrevenants. D'ailleurs, il y a l'État du Missouri qui s'est inspiré du modèle du Québec et qui aujourd'hui est l'État qui affiche les taux de criminalité juvénile les plus bas aux États-Unis.

Et puis, là, nous, on serait en train de changer ça parce que le gouvernement fédéral a décidé que l'objectif de réhabilitation, qui est au coeur de la Loi sur les jeunes contrevenants depuis 1908 -- ça n'a jamais été changé au fil du temps -- que, là, ça va être relégué au second plan et que, là, il va falloir tout axer sur l'acte, sur le geste qui est posé par le jeune, indépendamment de ses circonstances, indépendamment de ce qui a pu mener au geste puis indépendamment de sa situation. Ça, bien sûr, ça met de côté toutes les situations de jeunes, par exemple, aux prises avec des difficultés en santé mentale, les jeunes qui viennent de milieux avec violence, plus défavorisés, les jeunes qui viennent de milieux... des peuples autochtones, qui, on le sait, connaissent une criminalité plus élevée. Alors, plutôt que d'aller dans le sens du bon sens et de ce qui a fait ses preuves, on va à l'encontre de ça en proposant de ne plus mettre au coeur de la démarche la réhabilitation.

Donc, vous comprendrez que c'est un non-sens, et ça a d'ailleurs été dénoncé avec force à la fois par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qui est allée jusqu'à dire que les modifications non seulement vont nuire à la réhabilitation et à la réinsertion des adolescents contrevenants, mais qu'elles vont à l'encontre de la plupart des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations unies, que le Canada a pourtant ratifiée... Et en plus ils dénoncent, bien sûr, que toutes ces dispositions-là soient intégrées dans l'omnibus fédéral, faisant en sorte que les droits des adolescents sont confondus avec l'ensemble des autres mesures et qu'on n'est pas capables d'avoir un débat spécifique sur cet enjeu qui est pourtant fondamental.

**(15 h 20)**

Évidemment aussi, l'Association des centres jeunesse du Québec s'est élevée contre les nouvelles dispositions. Elle a d'ailleurs interpellé clairement le gouvernement du Québec pour qu'il prenne fait et cause avec elle, avec l'association et les autres groupes, pour défendre le point de vue du Québec et exiger le retrait des dispositions. Et il y a eu aussi, on l'a vu en début de semaine, des jeunes, des jeunes directement concernés, des jeunes de centres jeunesse à Montréal qui sont sortis pour dénoncer cette nouvelle approche qui est prônée par le fédéral, en disant que, pour eux, ça aurait été une catastrophe s'ils avaient eu des peines plus lourdes ou s'ils avaient dû aller purger une partie de leur peine en prison.

Alors, je vous cite quelques extraits de cette sortie-là. Un jeune, Georges, a dit que «s'il avait été emprisonné pour ses délits à 18 ans, il n'aurait pas connu le chemin de la réhabilitation et serait [assurément] retourné à la délinquance dès sa sortie de prison» parce que, la prison, c'est la meilleure école du crime pour un jeune. «Je suis contre la loi C-10 -- dit-il -- car, ici -- au centre -- j'ai appris à travailler sur moi-même, à connaître mes émotions et à [me] bâtir un avenir.»

Il y a un autre jeune qui a dit que, pour lui, c'était un non-sens, parce qu'il avait estimé qu'en étant au centre jeunesse il avait pu avoir une seconde chance. Il en était à sa première infraction, il a eu une peine à purger, bien sûr, au centre jeunesse, mais, pour lui, il a vu ça comme une seconde chance parce qu'il a compris toutes sortes de choses sur lui, sur son passé, sur le passé de violence de sa famille, qui fait en sorte qu'il se sent mieux outillé maintenant et qu'il est confiant qu'il ne retournera pas... qu'il ne récidivera pas et qu'il ne posera pas d'autre geste à caractère criminel.

Et, bien sûr, la directrice a dit: «...la société est mieux protégée si ces jeunes s'en sortent et [s'ils] mènent une vie normale par la suite.»

Évidemment, ça devrait aller de soi. Et il y a un autre... il y a une personne qui travaille là -- je termine sur ce point-là avec ça -- qui dit: «Un jeune peut avoir un accident de parcours très important. Je ne veux pas nier la gravité de certains crimes commis par des jeunes, mais il y a des éléments qui nous permettent de savoir qu'ils vont s'en sortir et qu'ils n'auront pas besoin d'aller 25 ans en prison pour autant», parce que ça serait pire.

En plus d'accueillir plus de jeunes contrevenants, le coordonnateur du centre sur la délinquance des jeunes estime que les centres jeunesse devront changer leur approche si C-10 est adopté: «On va devoir transformer nos centres en milieu carcéral et modifier notre façon de penser. Il faudra aussi assurer plus de sécurité parce que les jeunes pourraient poser des gestes violents s'ils savent qu'ils sont condamnés à la prison pour des années.

«Par ailleurs, ce dernier pense qu'en autorisant la publication du nom d'un adolescent délinquant dans les médias "les jeunes les plus criminalisés auraient tendance à se glorifier"» et non l'inverse. Et ça, c'est une autre mesure qui, bien sûr, n'a aucun sens dans le contexte actuel, dans le projet de loi fédéral.

Alors, je pense que vous aurez compris qu'en ce qui a trait aux jeunes contrevenants il y a un consensus, et c'est très important que le message et la voix du Québec soient portés haut et fort. Et, de manière globale, M. le Président, je vous dirais que la logique, la simple logique va à l'encontre de la philosophie générale de ce projet de loi omnibus. Et il y a eu plusieurs commentaires, Jean-Claude Hébert, à la suite du dépôt du projet de loi, qui a dit qu'il s'agissait de justice à l'aveugle. Ce n'est pas le dernier venu, quand même! Manon Cornellier, qui a écrit Où est la justice?, et Yves Boisvert qui a dit qu'on était en retard d'une révolution.

Et ce n'est pas pour rien, parce que, quand on regarde ce qui se fait ailleurs, quand on regarde, par exemple, au Royaume-Uni, on voit qu'ils sont complètement en train de revenir en arrière. Ils ont mis de l'avant des mesures très dures, comme on entend, «tough on crime», des peines minimales, des peines accrues, y compris pour les jeunes contrevenants, et ce qu'ils se sont rendu compte, c'est que, pendant 10 ans, le taux de récidive a augmenté, le taux de criminalité a augmenté substantiellement, et même que, lorsqu'il y a des peines de prison, ils constatent que la récidive dans l'année qui suit est de 50 % pour les adultes qui sont libérés, et que 75 % de ceux qui ont purgé une peine de prison vont récidiver dans les huit ans qui suivent leur sortie de prison, alors que c'est beaucoup moindre quand les peines ont été purgées dans la communauté.

Autre chose qu'on constate, c'est que la plupart, 65 % des criminels, avaient un problème de consommation de drogue ou d'alcool. Et c'est quelque chose dont parle beaucoup le livre vert du Royaume-Uni, en disant: Il faut avoir des mesures adaptées aux problématiques qui sont vécues, parce que, si tu ne traites pas le problème qui est en amont, le problème de consommation, le problème de consommation d'alcool ou de drogue, bien tu vas faire en sorte que, si tu envoies ta personne en prison, il va ressortir et il ne sera pas capable de se réinsérer parce qu'il n'aura pas eu le suivi psychosocial et médical nécessaire. Alors, on se rend compte qu'on est malheureusement à contre-courant.

Et c'est particulièrement incroyable de constater que, cette semaine, rien de moins que l'État du Texas est venu dire au gouvernement Harper qu'il faisait fausse route, avec des experts qui ont dit qu'à la lumière de ce qu'ils ont vécu au Texas, où ça a été la même chose... Évidemment, on connaît le Texas un peu, donc ils ne sont pas particulièrement enclins aux peines à purger dans la communauté. Mais ils sont en train de prendre le virage parce qu'ils se sont rendu compte que non seulement ça coûtait des fortunes, mais que c'était contre-productif. Donc, ils sont tout à fait en train de prendre le virage opposé à celui qu'ici le gouvernement Harper veut nous faire prendre. Ils expliquent que le taux de récidive après un emprisonnement est de 60 % après la sortie de prison, ce qui ressemble au Royaume-Uni, et que ça représente quatre fois le taux de ceux qui ont fait des programmes de traitement dans la communauté. Alors, je pense que, si c'est rendu que le Texas nous donne des leçons, on devrait peut-être s'ouvrir les yeux puis essayer d'exiger rapidement le retrait des dispositions du projet de loi C-10. Et ça, c'est sans compter tous les experts en criminologie, en droit criminel, en victimologie qui s'entendent pour dire que ce projet de loi est un net recul pour le Québec.

Alors, en terminant, M. le Président, j'aimerais vous dire que, moi, je crois fondamentalement que le droit criminel, les lois en matière criminelle sont intimement liés à ce qu'est un peuple, à ce qu'est une nation, parce que de... et très, très, très liés à nos valeurs comme nation. Et, vous savez, de décider ce qui est bien, ce qui est mal, comment on doit traiter un contrevenant, je pense que c'est intimement lié à ce qu'on a comme vision de la société. Évidemment, pour moi, c'est un élément fort pour militer pour la souveraineté du Québec, parce que, bien sincèrement, je vois mal comment une nation se fait dicter ses lois criminelles par une autre nation qui n'a pas nécessairement les mêmes valeurs. Mais, d'ici à ce que la souveraineté du Québec soit un fait, je pense que la moindre des choses, c'est que le gouvernement actuel se lève debout, parle haut et fort, défende les intérêts et la vision du Québec au nom de l'ensemble de la société québécoise, qu'il ne soit pas doux envers le gouvernement fédéral, qu'il exige le retrait des dispositions qui vont contre toute logique et contre nos intérêts. Et, en déposant cette motion aujourd'hui, je dois vous dire que c'est l'espoir qui m'habitait, c'est l'espoir qu'on puisse parler d'une seule voix, et j'espère que je ne serai pas déçue. Merci, M. le Président.

**(15 h 30)**

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Joliette, de votre intervention. Et, avant de céder la parole à M. le ministre de la Justice, j'indique que, les indépendants n'ayant pas signifié leur choix d'intervenir, ça veut dire que tout de suite vous pouvez compter cinq minutes à chacune des formations... c'est-à-dire opposition et gouvernement, qui s'additionnent dans votre banque. Alors, M. le ministre de la Justice, à vous la parole sur cette motion.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Alors, d'entrée de jeu, je tiens à remercier ma collègue de Joliette pour une initiative qui me permet aujourd'hui de faire le point sur un important dossier en matière de justice, le projet de loi fédéral C-10. J'essaierai de me souvenir, à la fin, de revenir sur les propos où il peut y avoir une confusion entre un gouvernement et une nation, étant entendu que le gouvernement fédéral ne représente pas la nation canadienne. Il est un gouvernement élu à une certaine période avec un certain nombre de suffrages, mais je ne pense pas qu'on puisse alors dire que, dans la gouverne, voilà toute une nation qui s'exprime. Parce qu'au contraire, d'ailleurs, tous les partis d'opposition ne partagent pas l'avis du gouvernement. On pourrait donc même prétendre que la nation canadienne, tant qu'à faire, est d'accord avec la nation québécoise. Bon. Ceci étant, j'avais dit que j'en parlerais à la fin, je me suis aperçu que j'en ai parlé au début.

Dès décembre 2010, M. le Président, j'ai interpellé mon homologue, M. Nicholson, sur les enjeux communs qui nous concernent, notamment -- c'est parce qu'il faut savoir que C-10, c'était C-4 avant -- notamment sur le projet de loi C-4 sur les jeunes contrevenants, à ce moment-là aussi sur d'autres sujets: l'importance de revoir et de moderniser certaines dispositions du Code criminel en matière de corruption, et aussi sur la nécessité que soient adoptées les mesures du projet de loi C-53 sur les mégaprocès. Je crois d'ailleurs que ce dernier sujet, le projet C-53, qui est par la suite devenu le projet de loi C-2, est un bon exemple des gestes que nous devons poser pour faire la promotion de nos valeurs. C-2, le projet de loi qui a introduit des mesures qui permettront d'accélérer et de simplifier la tenue des mégaprocès dans l'avenir, ce projet de loi, comme je l'avais indiqué au ministre Nicholson en mars, ce projet de loi sur les mégaprocès était -- est maintenant effectif -- essentiel et urgent.

Donc, à la rencontre que j'ai eue avec lui le 9 mars, je lui ai indiqué toute l'importance qu'il y avait derrière ce projet. Je lui ai dit à ce moment-là, M. le Président, que j'étais prêt à intervenir auprès des partis d'opposition pour nous assurer de l'adoption de ce projet de loi.

En juin, alors que tous les députés de la Chambre des communes souhaitaient procéder rapidement à l'adoption de ce projet de loi C-2, la députée du Parti vert, Mme Elizabeth May, avait des réticences. Devant ce fait, je n'ai pas hésité à me rendre à Ottawa, M. le Président, afin de rencontrer Mme May afin de lui expliquer l'importance pour le Québec de l'adoption de ce projet de loi pour la lutte au crime organisé. Cette démarche a porté fruit. Avant la fin du mois de juin, le projet de loi était adopté, M. le Président. On ne parle pas ici d'une démarche partisane mais d'une approche de collaboration dans la recherche de l'intérêt public.

C'est dans cette même optique que j'aborde la question de C-10, notamment, particulièrement, la question des jeunes contrevenants, avec le fédéral. Je vais passer sous silence d'autres éléments de C-10, parce qu'on parle surtout ici, en ce moment, et notre collègue l'a fait, des jeunes contrevenants, mais ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'autres éléments à dire sur le C-10. Mais consacrons-nous à cet élément, puisque c'est celui qui est devant nous en ce moment. Mais, je veux quand même le souligner, il y a d'autres questions bien importantes qui sont soulevées là-dedans.

D'abord, il faut dire que ma prédécesseure au ministère de la Justice avait déjà fait savoir au gouvernement fédéral que le Québec avait de grandes réticences devant les propositions du projet de loi C-4. Donc, c'est dans l'air depuis un bon bout de temps. Le gouvernement était minoritaire à l'époque, il ne pouvait pas l'avancer, mais nous avions déjà indiqué où nous logions. Une motion avait d'ailleurs été conjointement déposée à l'Assemblée nationale le 18 mai 2010.

Donc, l'Assemblée nationale s'est déjà exprimée sur la substance de ce que nous allons... sur laquelle nous allons encore nous exprimer aujourd'hui. J'ai donc rencontré M. Nicholson en mars dernier, en fait c'était le 9 mars, et à cette occasion j'ai pu réitérer les inquiétudes que nous entretenions et que nous entretenons toujours à l'égard des moyens utilisés par le gouvernement fédéral pour atteindre ses objectifs.

Tout d'abord, l'introduction des principes de dissuasion et de dénonciation à la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents, des notions qui sont issues des principes de droit criminel applicables aux adultes, compromet de manière importante le caractère distinct de la loi. La Cour suprême a d'ailleurs rappelé que l'omission de la dissuasion dans la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents n'était pas fortuite mais plutôt intentionnelle, fondée sur la reconnaissance du fait que la théorie de la dissuasion est controversée. C'était l'affaire B.W.P.

Je tiens à m'arrêter un instant là-dessus. Ce n'est pas comme si ce fait-là n'était pas connu. En fait, de ne pas dire, de ne pas parler de ces concepts, la cour l'avait déjà interprété comme ayant un sens. À partir du moment où on fait le contraire, forcément il y aura un nouveau sens de donné, et c'est ce que tous les intervenants viennent identifier.

Alors, parfois, on peut dire: Bien, ce sont les oppositions. Parfois, on peut dire: Ah! bien, ce sont les provinces. Parfois, on peut dire: Ah! bien, ce sont les avocats. Mais à un moment donné on dit: Coudon, il n'en reste plus beaucoup qui sont dans mon camp, parce que, dans ce cas-là, on peut même dire: Et aussi la Cour suprême, M. le Président. Le projet de loi relègue au second plan la réadaptation et la réinsertion des adolescents, alors que ces objectifs, privilégiés dans le modèle québécois, contribuent plus sûrement à assurer la protection durable du public. J'y reviendrai en conclusion.

Soulignons à grands traits le concept de protection durable du public, M. le Président. Sans diminuer la gravité des gestes que peuvent poser certains jeunes, il faut aussi, en tant que société, être conscients de l'importance d'assurer une protection à long terme de la population et non se limiter à une protection immédiate, à courte vue, j'oserais presque dire temporaire. Est-ce que la réadaptation... Et c'est ce que la réadaptation et la réinsertion permettent de réaliser.

En permettant la publication de l'identité du contrevenant, le projet de loi compromet également les possibilités de réinsertion de l'adolescent au terme de sa peine sans pour autant entraîner de bénéfice pour la sécurité du public.

Bref, nous croyons que toute modification à la loi actuelle devrait viser à accorder davantage de souplesse et à élargir l'éventail des moyens qui permettront aux intervenants et aux tribunaux d'appliquer pour chaque adolescent contrevenant la bonne mesure au bon moment, ce qui s'avère, à notre avis, être la meilleure stratégie pour s'attaquer au problème de la délinquance juvénile.

C'est d'ailleurs ce que le Québec a toujours prôné puisque cela lui permet d'afficher l'un des taux les plus faibles de criminalité juvénile en Amérique au cours des 25 dernières années. Ça ne veut pas dire qu'il n'y en a pas, M. le Président. Et je sais bien que le fait qu'il y en ait peut amener certains à dire: Vous niez qu'il y en ait. Non. La question est la suivante: Nous savons bien qu'il y en a. Nous sommes quand même capables de faire des comparaisons. On doit, de ces comparaisons, tirer quelques lignes, et les lignes que l'on peut tirer, les conclusions que l'on peut tirer, M. le Président, c'est que la pratique que nous avons développée va dans le sens d'une protection durable et non pas temporaire du public.

À la suite de la rencontre du 9 mars avec M. Nicholson, j'ai transmis à M. Nicholson ainsi qu'à tous mes homologues des autres provinces -- c'était en mars dernier -- des suggestions d'amendements législatifs qui permettraient au Québec de maintenir son approche. C'était le 14 mars dernier. On me dira: De la correspondance, M. le Président. Encore faut-il regarder ce qui est inclus dans la correspondance. Ce n'était pas qu'une lettre avec trois, quatre phrases, il y avait des libellés qui permettent, M. le Président, permettaient et permettent toujours, au gouvernement fédéral de pouvoir amender ses textes dans le sens que nous demandons.

Une approche, donc, était proposée qui nous assure une protection durable, une protection qui permet de réhabiliter un grand nombre de nos jeunes afin que, devenus adultes, ils soient des acteurs positifs de notre société. Cette approche, elle est partagée par tous les intervenants qui oeuvrent en matière de justice pénale pour adolescents au Québec. Ma collègue en a nommé quelques-uns tantôt, que ce soient l'Association des centres jeunesse, Barreau du Québec, la commission des droits de la personne et de la jeunesse, l'Association du Barreau canadien, tous dénoncent les mêmes mesures que le gouvernement fédéral souhaite introduire à la législation actuelle.

Toutefois, malgré nos représentations, nous n'avons pas été entendus, M. le Président. Les dispositions de C-4 sont essentiellement reprises par C-10. C'est pourquoi, le 30 septembre dernier, peu après le dépôt de C-10, je suis à nouveau intervenu auprès de M. Nicholson, lui exprimant ma déception. Je lui ai réitéré les motifs pour lesquels les propositions législatives contenues au projet de loi C-10 ne permettront plus d'assurer la réhabilitation des jeunes contrevenants et ainsi de favoriser la protection durable du public.

J'ai fait connaître cette position à tous mes homologues canadiens ainsi qu'aux partis d'opposition à Ottawa. Et je sais bien que ma collègue doit être au courant de ça puisqu'il y a une communauté d'esprit, pour ne pas dire un mariage, depuis si longtemps entre le Bloc québécois et le Parti québécois, et ils sont au courant de cela depuis le 30 septembre dernier. Alors, j'étais un peu étonné de constater l'étonnement, mais peut-être que les canaux de communication sont moins performants qu'ils ne l'étaient. Encore que j'en doute, mais quand même tout est possible. Tout est possible. Alors, les partis d'opposition en ont été au courant, mais, maintenant que tout cela est connu, notre collègue en sera sans doute heureuse.

Donc, l'idée était ici de non seulement aviser le gouvernement, de non seulement aviser les autres gouvernements des provinces, mais aussi des partis d'opposition qui sont, eux, les acteurs, dans ce Parlement fédéral, pour s'assurer qu'ils aient les informations justes de ce que nous proposons.

L'approche, donc, qui a fait ses preuves en matière de jeunes contrevenants est une approche qui fonctionne. Je suis déterminé à ce que nous puissions continuer d'avoir les plus bas taux de récidive en Amérique, et la collègue de Joliette nous offre aujourd'hui une possibilité de s'exprimer unanimement. Je la salue, et nous allons le faire certainement avec grand bonheur, parce que je crois que c'est le geste qui doit être posé.

**(15 h 40)**

Je veux, avant de revenir sur certains passages de certains groupes de notre société que je veux citer, je veux quand même relever fondamentalement... Si on avait à résumer ce que nous voulons dire, la question n'est pas simplement de faire ou d'avoir un discours politique ou une position politique qui veut donner l'impression d'être «tough on crime», s'exprimant comme, en disant: Je vais les mettre en prison. On peut bien, mais il se passe aussi dans la vie, surtout quand les contrevenants sont jeunes, M. le Président, un moment où on sort de prison. «Tough on crime», ce n'est pas juste de rentrer en prison, c'est de penser à l'individu qui commet le crime. Dans quel état sera-t-il lorsqu'il va sortir de prison? On ne peut pas s'aveugler, on ne peut pas dire: Je vais protéger le public, je vais les mettre en prison, et, quelques mois ou quelques années après, à la dure, qui retrouverons-nous?

La protection durable du public, c'est de se dire: Ceux qui font le crime peuvent-ils redevenir des acteurs de notre société? M. le Président, la réponse, c'est oui. La réponse, c'est qu'on ne peut économiser aucun geste pour aller dans ce sens-là, parce que l'aveuglement qui est de dire: Nous allons les mettre en prison, cela sera leur leçon... M. le Président, ils vont apprendre des leçons en prison, et la société sera pénalisée de ces leçons qu'ils auront apprises. Nous avons une leçon à retenir: ceux parmi les jeunes qui font des crimes, la réponse ne doit pas être temporaire, la réponse ne doit pas être l'aveuglement, nous devons nous assurer d'avoir la flexibilité nécessaire pour que nous puissions aborder, accorder, adopter la bonne mesure au bon moment, M. le Président. C'est ça, ce qui est devant nous.

On peut faire du dogme, on peut faire de la politique idéologique, à un moment donné il faut aussi être pragmatique, il faut regarder les faits. Je ne le fais pas avec hargne, je ne le fais pas avec violence verbale. Je crois que, lorsqu'on a à régler nos rapports entre Parlements... Je ne souhaiterais pas qu'un autre Parlement traite nos juridictions avec hargne et violence. Cela ne signifie pas qu'on est silencieux, nous devons adopter le bon ton, le faire unanimement, le faire à répétition, le faire dans plusieurs forums. Lorsque je suis allé voir Mme May, M. le Président, je ne suis pas allé dans une commission parlementaire, je suis allé dans le couloir en arrière, puis je lui ai expliqué qu'est-ce qu'on avait... Il n'y a pas d'espace prohibé, il n'y a pas d'espace à rejeter, que ce soient les scènes officielles ou les corridors; si on peut convaincre et faire gagner le point de nos valeurs, M. le Président, il ne faut pas reculer devant les opportunités qui sont devant nous.

L'Association des centres jeunesse, j'en prends quelques petits éléments, parce que je sais que ma collègue l'a fait, je veux quand même m'arrêter quelques instants pour rappeler, dans cette allocution que je fais, l'accompagnement que nous avons. Selon l'Association des centres jeunesse, et je prends un extrait: «La volonté du gouvernement fédéral [...] constitue, selon [cette association], un recul net concernant la réadaptation et la réinsertion sociale des adolescents.»

Je lis un extrait de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, M. le Président. «"Ces modifications vont nuire à la réhabilitation et à la réinsertion sociale des adolescents contrevenants et vont à l'encontre de la plupart des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations unies que le Canada a pourtant ratifiée", a fait savoir [...] madame Sylvie Godin, vice-présidente de la commission, responsable du mandat jeunesse.

«"Un tel projet de loi omnibus témoigne du peu de respect accordé aux droits des enfants", a déclaré madame Godin.»

Le Barreau canadien, de son côté, disait: «Dans l'ensemble, le projet de loi ferait en sorte qu'un plus grand nombre d'adolescents soient emprisonnés, et qu'ils le soient pour des périodes plus longues. Il s'éloignerait du modèle de justice pour les adolescents axé sur la réparation et la réadaptation, en faveur d'un modèle plus punitif. Nous considérons qu'une telle évolution est à la fois inutile et contraire à une saine politique publique fondée sur des données bien établies des sciences sociales.»

Le Barreau du Québec: «La réadaptation et la réinsertion sociale deviennent des modalités alors qu'actuellement elles sont considérées comme des principes importants et guidant les décisions prises en vertu de la loi. La Cour suprême du Canada a reconnu l'importance de la déclaration de principes en indiquant qu'elle devait recevoir la force généralement attribuée aux dispositions de fond. Ainsi, en apportant un changement à cette déclaration, il est à craindre un glissement vers les principes de droit criminel applicables aux adultes. Le Barreau du Québec rappelle son appui à la spécificité du droit pénal applicable aux jeunes qui doit cibler la réadaptation comme moyen de protéger le public à long terme. La modification proposée omet de reprendre la notion de "protection durable du public".»

Ma collègue a cité des éléments venant... ou des avis venant des États-Unis. Parfois, certains prétendent que la gouverne fédérale, en ce moment, serait inspirée d'une idéologie, disons, de droite américaine. Je vous cite un extrait d'un reportage à CBC News pas plus tard que le 17 octobre, il y a deux jours. Je vous cite un extrait: «"Republican governors -- Republican governors -- and state legislators in such states of Texas, South Carolina, and Ohio are repealing mandatory minimum sentences, increasing opportunities for effective community supervision, and funding drug treatment because they know it will improve public safety and reduce taxpayer costs", said Tracy Velázquez, executive director of the Washington-based Justice Policy Institute. If passed, C-10 will take Canadian justice policies 180 -- 180 -- degrees in the wrong direction, and Canadian citizens will bear the costs.»

M. le Président, il y a beaucoup de monde au Canada, au Québec et aux États-Unis qui regarde la direction qui est prise en ce moment. Le débat que nous avons aujourd'hui nous permet de signaler au législateur fédéral, soit-il du côté du gouvernement et des oppositions, que le chemin qui est proposé par le gouvernement fédéral n'est pas le bon chemin, c'est un chemin qui doit changer de direction. Nous leur demandons de le faire par la motion que nous allons adopter, la motion qui a été proposée par notre collègue de Joliette, à laquelle j'apporte mon concours avec grand bonheur. Je la salue.

Dans nos travaux, M. le Président, à l'occasion, nous avons une pointe d'échange vigoureux parfois, que nous avons, mais ce salon et cette Assemblée doivent aussi nous permettre de saluer les collaborations, le travail qui est fait ici, et je salue notre collègue de Joliette, qui a posé le bon geste, un geste qui va dans le sens de ceux que nous avons posés jusqu'ici et qui nous donne, je crois, comme vision d'avenir, comme projet d'avenir, à très court terme, l'idée de poser d'autres gestes, M. le Président, pour s'assurer que ce nous promouvons comme valeurs, que les choix qui ont été faits, qui sont les bons choix, restent les bons choix que nous allons offrir à notre société, qui demande, elle, une protection durable, et qui le mérite. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député... excusez, M. le ministre de la Justice, pour votre intervention. Et, pour la poursuite du débat, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, en autant que je vois quelqu'un qui le sollicite. Alors, M. le député de Marie-Victorin, à vous la parole.

M. Bernard Drainville

M. Drainville: Merci, M. le Président. Je salue les collègues ici réunis. Je salue, bien entendu, ma collègue la députée de Joliette, qui a mis de l'avant cette motion. Je salue également le chef de la deuxième opposition.

Alors, M. le Président, la motion qui est devant nous nous donne effectivement l'occasion de se réunir tous ensemble, au-delà des lignes partisanes, et de partager ensemble, je dirais, une conception de la société québécoise, de la nation québécoise. Puis j'irais plus loin que ça, M. le Président, je dirais que c'est une occasion également de réaffirmer notre foi en la nature humaine, réaffirmer l'idée que l'erreur commise ne doit pas nous condamner pour le reste de notre vie.

Et je veux reprendre là où l'a laissé ma collègue de Joliette, quand elle citait les jeunes qui se sont présentés en conférence de presse cette semaine, les jeunes qui purgent des peines au Centre jeunesse de Montréal et qui disaient: Vous savez, si on m'avait envoyé en prison, ce serait terminé pour moi, alors que le fait d'avoir pu me retrouver dans un centre jeunesse avec des adultes formés, des professionnels qui connaissent leur métier et qui sont prêts à m'aider à changer, c'est ça qui m'a permis d'abord de comprendre pourquoi je suis tombé dans la criminalité, puis de commencer à voir le chemin que je pourrais prendre pour revenir... pour revenir... ou pour redevenir une personne qui a le goût de vivre, qui a le goût d'être heureuse, qui a le goût de contribuer à la société, qui a le goût de payer des impôts, qui a le goût d'élever des enfants.

**(15 h 50)**

Comme le disait un document que je lisais tout à l'heure en me préparant, plutôt que d'être quelqu'un qui profite du système, je veux être quelqu'un qui donne au système. C'est ça que les jeunes sont venus dire cette semaine, M. le Président. Et, dans le fond, ce qu'ils nous disaient, c'est: Ne nous enlevez pas l'espoir, ne nous condamnez pas à la prison, ne nous condamnez pas à un avenir noir, obscur.

C'est formidable, M. le Président, quand on prend le temps de lire un peu sur ce sujet-là. Écoutez, quand on lit, par exemple, que, dans la vaste majorité des cas -- ça, c'est cité de l'exemple texan -- dans la vaste majorité des cas, les personnes qui sont emprisonnées sont des personnes qui ont un problème de consommation soit de drogue ou d'alcool, pensez-vous, M. le Président, qu'en mettant davantage de jeunes ou même d'adultes en prison... pensez-vous qu'on va régler leurs problèmes de consommation, M. le Président? Pensez-vous que c'est une bonne façon de s'attaquer à la racine du mal, à la cause du problème que de les envoyer en dedans avec du monde, dans certains cas, qui n'ont plus rien à perdre, qui ont renoncé justement à se guérir de ce mal intérieur qui est le leur, qui sont, dans certains cas, de très grands consommateurs? On connaît le problème de consommation dans les prisons. Pensez-vous que c'est une bonne idée d'envoyer quelqu'un qui a un problème de consommation avec d'autres consommateurs sans lui donner accès aux soins, aux services professionnels, humains dont il aurait besoin pour s'en sortir?

Posez la question, M. le Président, c'est évident, la réponse est évidente. Puis c'est pour ça que, de notre côté en tout cas -- puis j'étais plutôt heureux d'entendre le ministre de la Justice dire que, pour l'essentiel, il était d'accord avec ce que ma collègue de Joliette avait présenté comme argumentaire -- c'est pour ça qu'on est tellement choqués par ce projet de loi C-10, M. le Président, parce qu'on nous impose quelque chose dont on ne veut pas, on nous impose un modèle qui ne fonctionne pas. Puis, pour des raisons idéologiques, pour une espèce d'obstination rétrograde, puis complètement étriquée, puis très, très étroite, on nous arrive avec des mesures qui n'ont pas de bon sens, qui ne fonctionneront pas puis qui vont nous coûter une fortune, M. le Président.

Sur le plan de notre capacité de sortir notamment les jeunes du crime, on commet une erreur parce qu'on renonce à un système qui, comme la députée de Joliette l'a dit, fonctionne bien. Il faut le dire puis le redire, là. Il faut se le dire entre nous autres, là. Le taux de criminalité chez les jeunes est le plus bas, au Québec. Il est plus bas que partout ailleurs en Amérique. C'est formidable, ça, M. le Président. C'est une maudite bonne affaire. On devrait être fiers de ça. On devrait être fiers du fait qu'on a inventé un modèle qui donne une chance aux enfants de se reprendre puis de se remettre sur le droit chemin.

Alors, C-10 s'attaque à ce modèle-là, il véhicule des valeurs qui sont contraires à ce que nous sommes, puis en plus ça va coûter une fortune. C'est quand même le bout du bout! Un système qui ne marche pas, à des coûts largement supérieurs à un système qui marche, voulez-vous bien m'expliquer la logique qu'il y a derrière ça? Puis je vous souhaite bonne chance. En tout respect pour l'honorable député que vous êtes et pour lequel j'ai beaucoup d'estime, je vous souhaite bonne chance, parce qu'il n'y en a pas, de logique. Vous ne la trouverez pas, M. le Président, la logique là-dedans. Il n'y en a pas, de logique. Tout ce qu'il y a, c'est une espèce de vision complètement dépassée, très dogmatique comme quoi, si tu fesses, puis tu fesses, puis tu fesses sur quelqu'un, à un moment donné, il va finir par changer puis par, comment dire... il va finir par voir la lumière puis par devenir une meilleure personne.

M. le Président, moi, je pense que, dans certains cas, oui, il faut punir. Mais, avant d'aller à la punition, je pense qu'il faut essayer le réhabilitation. Je pense qu'il faut donner une chance à la personne de se reprendre en main. Puis, dans bien des cas, ce projet de loi là va justement mener la personne directement à la prison, sans lui donner la chance de se reprendre en main.

Écoutez, c'est quand même incroyable, M. le Président. Ils vont essentiellement mettre fin au sursis pour le voleur de bétail. Écoutez, moi, là, qui ai été élevé sur une terre, là, me faire dire, là, qu'un voleur de vache n'aura pas le droit de s'expliquer puis d'expliquer au juge: Écoutez, j'ai fait une erreur, j'étais parti sur la bum, puis à un moment donné, je ne sais pas quoi, tu sais, je ne sais pas ce qui m'est arrivé, j'ai trop consommé peut-être ce soir-là, puis donnez-moi une chance, M. le juge, donnez-moi une chance... Tu sais, le fond est bon. J'ai commis une erreur, mais donnez-moi une chance, puis je vais me reprendre. Mais là, avec le projet de loi C-10, là, le bon voleur de vache, là, celui qui a... tu sais, il a traversé la clôture électrique, lui là, là, il est parti sur la brosse un soir puis là il s'en va direct en prison parce que M. Harper a décidé que c'était un méchant, c'était un monsieur, un garçon qui est fini, lui là, là. Lui, il est condamné, là. C'est un criminel, là, toi, là, tu sais.

Moi, je peux vous dire une chose, M. le Président: Si tu l'envoies en dedans, tu vas en faire un criminel pur et dur. Ça, je suis pas mal sûr de ça. La meilleure école du crime, M. le Président, ce n'est pas les rues, ce n'est pas les quartiers, ce n'est pas les campagnes; c'est les prisons. Envoies-en en prison puis tu vas en avoir, des criminels, en masse.

Puis c'est exactement ce que les Texans sont venus dire à M. Harper. C'est quand même quelque chose. Puis Mme la députée de Joliette l'a bien dit, là, je veux dire, les Texans, là, ils sont les experts en matière d'emprisonnement pur et dur, là. Tu sais, c'est l'État, probablement, où il y a le plus de... En tout cas, c'est certainement un des États où il y a le plus de condamnés à mort chaque année. Il y en a encore... je pense que c'est 600, là, qui doivent passer par la peine de mort dans les prochaines années. C'est un État qui, pendant des années, sous la gouverne, entre autres, de M. Bush, a préconisé une approche extrêmement répressive où on disait: Tu commets un crime, tu t'en vas en dedans, mon ami, c'est terminé pour la vie. Tu sais, je veux dire, on renonce, là, on renonce à te réintégrer puis à faire de toi un citoyen honnête.

Mais là savez-vous quoi, M. le Président? Ils sont en train de réaliser qu'ils ont commis une erreur, et là ils sont en train de... Écoutez, ils découvrent le système que, nous, on a découvert déjà depuis longtemps, et là ils découvrent, M. le Président, que ça coûte beaucoup moins cher de donner des traitements plutôt que d'emprisonner et ça donne de bien meilleurs résultats. En d'autres mots, la population est davantage en sécurité, notamment parce qu'il y a moins de récidives quand tu traites quelqu'un puis tu l'aides plutôt que de l'envoyer en dedans puis de le voir récidiver. C'est quoi, la citation, là? C'est quoi, le pourcentage? Je pense que c'est 60 %, 60 % qui récidivent une fois qu'ils sont sortis de prison, alors que c'est 15 %, le taux de récidives, si tu as eu droit à un traitement dans la communauté, un traitement de six mois, six mois dans la communauté.

Alors, on en a, des cas, M. le Président. Je veux dire, la preuve, elle est faite. La preuve est faite que notre système fonctionne beaucoup mieux que ce qui se fait ailleurs. On ne dit pas, M. le Président, que le système est parfait. On ne dit pas qu'il ne faut pas en faire davantage pour lutter contre la criminalité.

Puis il y a des éléments de C-10 avec lesquels on est d'accord. C'est vrai, M. le Président, que les personnes qui s'attaquent aux enfants devraient être davantage punies. Oui, on est d'accord avec ça, parce que ce sont les plus faibles et les plus vulnérables de notre société. Alors, les mesures pour donner des sanctions plus dures pour ceux et celles qui commettent des crimes sexuels envers nos enfants, on est d'accord avec ça, M. le Président. Puis d'ailleurs c'est un des problèmes de ce projet de loi là: il y avait des bonnes mesures qu'ils auraient pu mettre à part dans un projet de loi séparé, puis on aurait été à l'aise avec ça, nous, M. le Président. Mais là ils prennent quelques bonnes mesures, ils les mêlent avec beaucoup, beaucoup de mauvaises mesures, ce qui fait qu'au net C-10 est un mauvais projet de loi.

**(16 heures)**

Et, M. le Président, j'ai entendu tout à l'heure, enfin il y a un instant, là, l'allocution de notre ministre de la Justice. Bon, il nous dit à sa façon très coulante et d'une façon très enrobée qu'il est, pour l'essentiel, d'accord avec nous. Mais l'avez-vous entendu, là, hausser le ton un petit peu puis dire: On va mener une bonne bagarre, là, pour dire au gouvernement conservateur qu'ils font fausse route? L'avez-vous entendu dire, là: Écoutez, je suis d'accord avec vous, je suis content de voir que l'opposition est prête à se joindre à nous, puis, tous ensemble, là, les élus du Québec, les élus de l'Assemblée nationale, on va mener une bonne bataille pour défendre nos valeurs, pour défendre un système qui fonctionne bien puis pour protéger nos jeunes? Avez-vous entendu ça? Moi, je ne l'ai pas entendu.

Remarquez qu'ils ont autre chose à faire ces temps-ci. Puis ça, c'est ça, le drame aussi, c'est qu'ils sont tellement pris dans leurs histoires qu'à un moment donné ils n'ont plus le temps de s'occuper du reste. Moi, je pense que les problèmes de corruption, hein -- c'est comme ça que ça s'appelle -- les problèmes d'éthique, et tout ça, finissent par prendre tellement de temps ministériel, ils sont tellement préoccupés par ça, ils passent tellement de temps à discuter puis à essayer de se sortir de ce bourbier-là qu'ils n'ont pas le temps de s'occuper du reste.

Moi, j'aurais bien aimé, M. le Président, j'aurais bien aimé que le ministre nous fasse signe puis nous dise: Bon, bien, écoutez, on est capables de s'unir autour de ça, là, on va mener une bonne bataille puis on va la faire tout le monde ensemble.

Parce que là, M. le Président, là, ce n'est pas juste que le gouvernement conservateur fait des mauvais choix, c'est aussi qu'il s'apprête à nous pelleter, à nous refiler la facture de ces mauvais choix là. Quand on dit, M. le Président, là, que les évaluations préliminaires tendent à démontrer que l'augmentation des coûts carcéraux qui vont découler de l'adoption de C-10, si jamais le projet de loi est adopté -- puis, avec la majorité conservatrice, on se doute bien que les chances sont fortes que ça arrive -- alors les coûts, M. le Président, qui vont découler de ça, juste pour le Québec et les Québécois, ça risque d'être, au bas mot, un demi-milliard, 500 millions, M. le Président. On a-tu les moyens de mettre 500 millions dans des coûts carcéraux plus élevés, dans la construction de nouvelles prisons parce que celles qu'on a sont déjà surpeuplées?

Puis, soit dit en passant, M. le Président, je pense, c'est important de le dire, là, quand le gouvernement abolit pratiquement le sursis, c'est-à-dire, donc, le droit pour un juge de dire: Écoute, je te condamne à la prison, mais je sursois à l'emprisonnement, donc je te laisse purger ta peine dans la communauté, bien, quand on décide ça comme gouvernement, là, quand M. Harper et son groupe décident de faire ça, là, ils s'apprêtent, dans le fond, à pénaliser qui? Ils s'apprêtent à pénaliser d'abord et avant tout les provinces, M. le Président, parce que les sursis, de façon générale, concernent des crimes punissables de deux ans et moins de prison, donc ce sont des crimes qui, de façon générale, sont purgés dans les systèmes carcéraux des provinces. Ça fait que, s'il y a moins de sursis, il va y avoir plus de prisonniers, de détenus dans nos prisons au Québec. C'est mathématique: si tu baisses les sursis, tu augmentes les détenus, le nombre de détenus, et tu augmentes les coûts liés à ça, 500 à 600 millions minimum, M. le Président. Or...

Ça, c'est fascinant, ça. Ça, c'est fascinant, ça. Alors, le bon ministre Vic Toews, ministre de la Sécurité publique pour M. Harper, à qui on pose la question: Aïe! tu t'apprêtes à nous imposer un projet de loi qui va nous coûter une fortune, tu vas au moins nous dédommager, s'il te plaît, hein -- on est polis, on dit «s'il te plaît». Et lui de nous répondre: Ce n'est pas mon problème. Ce n'est pas mon problème. On a augmenté les transferts pour la santé et l'éducation, ces dernières années; vous prendrez l'argent là-dedans. Non, mais il l'a-tu, l'affaire, M. le Président? C'est exactement ce qu'ils nous ont répondu: Vous prendrez l'argent dans les écoles et les hôpitaux puis vous vous construirez des nouvelles prisons, qu'on va remplir avec notre projet de loi C-10.

M. le Président, vous en avez vu d'autres, mais je ne suis pas sûr que des projets de loi aussi mauvais, je ne suis pas sûr que vous en avez vu tant que ça. Parce que, sincèrement, celui-là, là, il est mauvais pas à peu près. Il est mauvais sur le plan des valeurs, il est mauvais sur le plan de la facture, il est mauvais sur le plan des résultats, il est mauvais sur pas mal tout, à part les petites exceptions dont je vous ai parlé tout à l'heure. Alors, qu'est-ce qu'on fait, M. le Président? Est-ce qu'on se laisse faire? Est-ce qu'on se laisse faire ou bien, comme Québécois, on réagit?

Puis là j'ai le chef de la deuxième opposition qui m'a généreusement laissé parler avant lui, moi, je vais l'écouter avec beaucoup, beaucoup d'attention parce que j'espère... Il est un ancien journaliste comme moi. C'est un homme que je respecte, j'ai de l'estime pour lui. J'espère que le chef de la deuxième opposition va se joindre à ce consensus québécois, là, qu'on sent émerger dans cette Chambre, là. J'espère qu'il va répondre positivement à notre appel. J'espère qu'il va reconnaître la valeur de nos arguments, qui sont probablement les siens parce que c'est un homme de bon sens. On ne s'entend pas sur tout, mais, je dirais, le fond est bon, M. le Président, le fond est bon. Alors, j'ai confiance, moi, que le chef de l'ADQ va se lever puis va nous dire: Je me rallie, moi aussi, à cette position-là, puis on va, tous ensemble, mener cette bataille-là parce qu'effectivement il y a pas mal plus de mauvais qu'il y a de bon dans ce projet de loi là.

Alors, c'est là qu'on est rendus, M. le Président. Le projet de loi n'est pas encore adopté à Ottawa, on espère que... Les députés NPD, qui ont été élus massivement lors de la dernière élection fédérale, on espère qu'ils vont porter les valeurs québécoises dans ce combat-là. On espère. On sait qu'il y a, dans la députation néo-démocrate, des partisans du «tough on crime», là. Puis, nous, on n'est pas «mous on crime», là, nous, là, on est juste «intelligents on crime». C'est ça, là, c'est ça, la différence, là. Alors, on espère que les députés du Québec qui siègent au Parlement fédéral vont se faire le relais, justement, du consensus québécois puis qu'il va y avoir, donc, une bataille en règle contre l'adoption de ce projet de loi là, d'autant plus que M. Harper a l'air décidé à l'adopter à toute vapeur, M. le Président. C'est ce que je lisais dans les journaux ce matin.

Ça, ce n'est jamais une bonne chose, M. le Président. Quand vous avez un projet de loi qui ratisse aussi large que celui-là puis que vous êtes dans une démarche de le faire adopter rapidement, moi, je trouve que c'est une manifestation de mauvaise volonté, de mauvaise foi, je dirais, puis c'est une façon... C'est comme s'ils voulaient échapper au débat démocratique. Moi, je pense qu'ils sentent qu'au Québec ça ne passe pas, cette histoire-là, M. le Président. Je pense qu'ils le sentent, qu'au Québec ça ne passe pas. Puis là ils savent qu'au Québec, là, il y a une couple de Québécois, M. le Président, vous avez dû les entendre, là, qui commencent à se poser des questions sur ce qui se passe avec le gouvernement Harper, qui regardent, là.

Ils ont rebaptisé les forces armées «forces royales», ils accrochent des portraits de la reine un peu partout, ils ont décidé d'aller de l'avant avec le financement du lien entre Terre-Neuve et le Labrador. Tu sais, les gestes, les politiques, les décisions qui vont à l'encontre des intérêts et des valeurs du Québec s'accumulent, là, s'accumulent. Ça s'additionne, là, depuis qu'ils ont été élus. Et puis, moi, j'ai l'impression qu'ils sentent que, sur cette question-là, sur C-10, ils sentent qu'il ne faudrait pas que ça traîne trop longtemps parce qu'ils pourraient effectivement se retrouver avec une opinion publique québécoise non seulement très, très, très opposée, mais peut-être éventuellement assez choquée, assez choquée. Puis c'est peut-être pour ça, M. le Président. Je formule une hypothèse, hein, dans le fond, je formule une hypothèse. Parce que tu te poses la question: C'est quoi, l'urgence? Pourquoi est-ce qu'ils tiennent à faire adopter ce projet de loi là à toute vapeur? Qu'est-ce qui presse tant? Pourquoi est-ce qu'on ne prend pas le temps de le faire, le débat, correctement?

Alors, c'est là qu'on en est, M. le Président. Nous autres, de notre côté, on a les idées claires, M. le Président, le Parti québécois a les idées claires là-dessus. On va mener notre bataille, on va défendre notre modèle. On en est fiers, c'est une très grande source de fierté. On n'en parle jamais, de ça, M. le Président. Quand on lit les manchettes ces temps-ci, on a parfois l'impression que tout va mal au Québec. Pourtant, il y a des choses extraordinaires qui se font au Québec. C'est une force exceptionnelle de la société québécoise qu'on ait réussi à créer une société qui est plus sécuritaire qu'ailleurs, où il y a un taux de criminalité plus bas qu'ailleurs.

Moi, j'ai habité deux ans au Mexique, M. le Président -- je vais conclure là-dessus. J'ai habité deux ans au Mexique. J'ai vécu dans un pays où il y avait un taux de criminalité très élevé, où on était confrontés chaque jour à des menaces d'enlèvement puis à toutes sortes d'agressions puis de crimes, de crimes. Puis, je vais vous dire, quand je suis revenu au Québec, je me suis dit: C'est vraiment extraordinaire qu'on ait réussi, au Québec, à se donner cette société-là, une société qui est beaucoup plus sécuritaire qu'ailleurs. Et il faut la chérir, M. le Président, cette société-là. Il faut chérir cette force-là que nous avons puis il faut travailler pour la consolider, pour la renforcer. Puis ce que fait M. Harper actuellement, avec des valeurs venues d'ailleurs, ce qu'il fait, c'est qu'il s'attaque à ça, il s'attaque, en quelque part, à notre âme, M. le Président. Puis, nous, on ne le laissera pas faire. On va continuer à mener notre bagarre. Puis on espère que tous les élus de l'Assemblée nationale vont faire front commun là-dessus puis qu'on va mener ensemble cette belle bataille pour préserver nos valeurs, notre système, une force de caractère, quelque chose de beau dans notre société. Merci. Merci, M. le Président.

**(16 h 10)**

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député, de votre intervention. Et, pour la poursuite du débat, je cède la parole au prochain intervenant. Je reconnais maintenant Mme la députée de Trois-Rivières pour son intervention. À vous la parole.

Mme Danielle St-Amand

Mme St-Amand: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, je m'adresse à vous aujourd'hui dans le cadre de la motion de ma collègue députée de Joliette qui demande que «l'Assemblée nationale exige le retrait des dispositions du projet de loi fédéral C-10 qui vont à l'encontre des intérêts du Québec et des valeurs québécoises en matière de justice, dont celles concernant le traitement des jeunes contrevenants».

Il m'apparaît important de vous mentionner que j'ai un très, très grand intérêt à intervenir à ce moment-ci, puisque, dans ma première carrière, j'ai d'abord été éducatrice auprès d'adolescents ayant des troubles de comportement graves, des jeunes adolescents délinquants, et ce, pendant une quinzaine d'années, en milieu scolaire mais particulièrement dans les centres jeunesse et en centre d'accueil.

Alors, vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, que le projet de loi C-10 vise à serrer la vis aux adolescents qui ont commis des crimes graves. Il permettrait notamment aux procureurs de la couronne de demander des peines d'adultes pour les jeunes contrevenants déclarés coupables des dits crimes. Ce projet vise aussi à lever l'interdit de publication dans les médias qui permet de protéger l'identité des délinquants de moins de 18 ans ainsi que celle de leurs familles.

M. le Président, l'adoption de cette loi risque de nuire à la réinsertion sociale de nos jeunes et surtout à l'occasion pour eux de profiter d'une deuxième chance dans la vie. Vous savez que les mesures de détention prévues dans cette loi ne démontrent pas, d'un point de vue scientifique, qu'elles vont réduire les récidives, bien au contraire. De plus, M. le Président, l'approche québécoise, grandement reconnue, a toujours misé sur la réadaptation et le support à la réinsertion des jeunes délinquants. Et cette approche qui caractérise les interventions qui se font chez nous démontre, depuis très, très longtemps, que c'est au Québec que le taux de récidive est le plus bas dans tout le Canada. Le modèle québécois de justice pour les adolescents a largement fait ses preuves. Ce n'est pas en mettant plus de jeunes derrière les barreaux ou en leur imposant des peines applicables aux adultes que l'on pourra répondre à leurs besoins, d'autant plus que le défi de santé mentale particulièrement est de plus en plus présent et préoccupant chez nos jeunes. Ils ont besoin d'aide.

Les centres de réadaptation, que ce soit en garde ouverte ou fermée, ne sont pas des milieux de retrait de la société pour un jeune, mais ils sont aussi des milieux de traitement, de relation d'aide, au coeur desquels diverses approches thérapeutiques viennent en aide aux adolescents, tout en tenant compte de leur milieu de vie et en ayant pour objectif ultime la réinsertion sociale. C'est de tout le système familial que nos intervenants tiennent compte quand ils interviennent avec eux. C'est aussi une approche qui est centrée sur le lien et la relation avec l'intervenant qu'il réussit à développer avec ce jeune qui est un gage de succès pour sa réadaptation.

En choisissant de faciliter et de prôner le recours à la garde fermée sur de plus longues périodes et aussi en prison, nous risquons, M. le Président, de cristalliser les comportements des jeunes et ainsi de susciter l'échec d'une éventuelle réhabilitation. D'ailleurs, M. le Président, les centres jeunesse estiment que, dans ce contexte, la réinsertion des jeunes contrevenants deviendrait nettement plus difficile.

En plus de tous ces arguments, on ne peut ignorer le risque de débordement de nos institutions, tant dans les centres jeunesse que dans les prisons. Imaginez, M. le Président, un jeune de 17 ans qui, pour un délit qu'il a commis, se voit imposer une sentence de 10 ans. Il ferait sa première année dans un centre d'accueil fermé, un de nos centres jeunesse, et par la suite il ferait le reste de sa sentence dans un pénitencier. Aurait-il envie de s'investir dans un programme de rééducation? Quelle lumière au bout du tunnel pourrait-il entrevoir avec sa vision d'adolescent? Et ce, M. le Président, sans compter la contamination qu'il ferait au reste du groupe avec lequel il serait intégré. Il n'aura aucun intérêt à se conformer aux règles et aux normes de l'institution.

Et par la suite, M. le Président, rendu en prison, quelles seront nos chances de rééduquer ce jeune? Y a-t-il une forme de réhabilitation qui pourra lui donner de l'espoir en une vie meilleure? Non. Nous l'aurons plutôt inscrit à l'école de la criminalité. En lui permettant de côtoyer des criminels endurcis, il apprendra lui-même à être un vrai criminel. La députée de Joliette en a parlé tantôt, ce type de loi très répressive avait aussi été mise en place il y a quelques années au Texas. Effectivement, en ce moment, ils se sont rendus compte qu'en plus de surpeupler leurs institutions, ils avaient erré. Ainsi, présentement, ils reviennent à des mesures de réadaptation.

Vous savez, M. le Président, les gestes de délinquance chez les adolescents sont souvent des actes irréfléchis et spontanés dont ils n'ont pas pris la mesure des impacts. La directrice des services spécialisés et des services aux jeunes contrevenants au Centre jeunesse de Montréal, Mme Michèle Goyette, mentionnait en début de semaine que, «lors des programmes de réadaptation, il est chaque jour question des victimes et du tort causé par les contrevenants. Cette démarche est importante, souligne-t-elle, et n'entre pas en contradiction avec l'intérêt des victimes. À long terme, la société est mieux protégée si ces jeunes s'en sortent et mènent une vie normale par la suite», affirmait Mme Goyette.

Alors, vous savez, M. le Président, l'Association des centres jeunesse du Québec, c'est une référence en la matière, critique aussi cette initiative parce que, tout comme vous et moi, ils ont à coeur le bien de nos jeunes délinquants, qui bien souvent vivent des souffrances et des détresses personnelles pour lesquelles ils ont besoin de ressources et d'aide. Dans la même foulée que mon collègue ministre de la Justice, je crois très sincèrement que le projet de loi C-10 reléguerait au second plan les principes fondamentaux de la réadaptation et de la réinsertion sociale des adolescents qui sont privilégiés par le modèle québécois, et ce, parce qu'ils assurent entre autres une protection durable de la société.

Je dois vous dire, M. le Président, que j'ai été extrêmement surprise, tout à l'heure, d'entendre le député de Marie-Victorin demander au ministre de la Justice de hausser le ton. J'ai été fort surprise, M. le Président, parce que vous savez qu'on parle de rééducation, on parle de jeunes qui sont agressifs, on parle ici de jeunes chez qui on veut diminuer l'agressivité. Alors, quand le député de Marie-Victorin demande au gouvernement d'être plus agressif, je suis franchement déçue, surprise de ses propos qui dénotent, bien honnêtement, un manque de connaissance de la réadaptation. Je suis cependant très contente de l'entendre dire qu'il y a de très belles choses au Québec. Il nous l'a dit, après son retour du Mexique, qu'il y a une société dans laquelle il fait bon vivre, une société qui est sécuritaire. Alors, j'espère bien que, dans les prochains jours, ce seront les mêmes propos qu'il tiendra aussi.

Alors, en plus de ne pas améliorer les chances de réadaptation de nos jeunes, M. le Président, l'adoption de la loi C-10 risque de faire déborder les centres jeunesse qui fonctionnent déjà à plein régime, et qui va engendrer évidemment beaucoup de coûts. Qu'est-ce que nous voulons, M. le Président, comme société? Que nos jeunes, qui sont l'avenir de demain, puissent devenir des criminels? Est-ce que nous voulons augmenter les chances de les maintenir dans la criminalité ou leur assurer l'aide thérapeutique dont ils ont besoin? C'est une question de société importante, M. le Président.

Alors, en terminant, vous me permettrez de saluer chaleureusement mes anciens collègues du Pavillon Bourgeois de Trois-Rivières et de souligner le travail exceptionnel de l'équipe de M. Serge Bisaillon, qui est le directeur général des centres jeunesse de la Mauricie et du Centre-du-Québec. Ces gens-là font un travail colossal, jour après jour, afin d'aider nos jeunes à aspirer à une vie meilleure. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de Trois-Rivières. Je reconnais maintenant M. le chef du deuxième groupe parlementaire, en lui indiquant que vous avez 7 min 42 s maximum. À vous.

M. Gérard Deltell

M. Deltell: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait extrêmement plaisir de prendre la parole au nom de notre formation politique sur ce dossier-là. Vous savez, M. le Président, quand il est question de justice, on dit souvent: Il faut qu'il y ait justice et qu'il y ait apparence de justice parce qu'il faut que les citoyens se sentent en confiance avec le système judiciaire. Et ça, c'est l'élément qui doit nous guider pour que les gens puissent se sentir à l'aise avec les décisions et à l'aise aussi avec le système dans lequel on vit.

À quoi sommes-nous confrontés, aujourd'hui, dans ce débat-là? Nous sommes confrontés avec un projet de loi qui est discuté actuellement au Parlement fédéral, qui est le projet de loi C-10 et qui est une espèce de rassemblement de neuf projets de loi distincts qui ont été débattus en d'autres temps par la Chambre des communes. En fait, il y a eu 58 jours de débat, 295 témoins et 123 heures de débats parlementaires au fédéral concernant ce projet de loi là.

**(16 h 20)**

Il faut savoir aussi, M. le Président, que, dans les matières de justice, toute action d'un gouvernement doit être motivée par la protection du public. Et la lutte à la criminalité passe par un juste équilibre entre l'aspect punitif des sanctions qui sont imposées aux criminels et l'aspect aussi réhabilitation pour réinsérer les repentis dans notre société. Donc, c'est cette espèce d'équilibre qui doit toujours être maintenu entre le fait qu'il y a des criminels qui doivent être punis, mais il y a des gens qui, après leur punition, doivent réintégrer la société et contribuer à la richesse et au bonheur de la société. L'aspect punitif ne va donc pas à l'encontre de l'aspect de réhabilitation. Au contraire, il faut le voir comme étant un élément qui se conjugue l'un avec l'autre. Et c'est ça qui doit guider notre action et nos pensées lorsqu'il est question de projets de loi qui sont débattus à l'Assemblée nationale ou encore dans d'autres Parlements, qui ont un impact sur notre vie ici, au Québec.

Alors donc, je le disais tout à l'heure, c'est neuf mesures différentes qui sont proposées dans le projet de loi C-10. Certaines de ces mesures ont déjà amené beaucoup de débats, comme par exemple le droit des victimes de participer aux audiences de libération conditionnelle qui tiendraient compte de la responsabilisation et de la gestion des cas des détenus. En fait, ce que l'on veut, M. le Président, c'est permettre aux victimes d'avoir une voix au chapitre concernant la réhabilitation.

Et je pense qu'il faut être complètement aveugle ou sourd pour ne pas entendre l'appel que les citoyens nous lancent, de ces victimes d'actes criminels qui s'estiment être trop souvent, à juste titre d'ailleurs, les premières victimes du système judiciaire parce qu'elles ne sont pas tenues en compte lorsque vient le temps de gérer les cas de réhabilitation. Ce projet de loi, le projet de loi C-110, permet cette mesure-là, une mesure avec laquelle nous sommes d'accord puisque, entre autres, nous l'avions nous-mêmes proposée dans notre programme électoral. Et ça permet, donc, de rétablir cet équilibre-là entre le droit du public à une justice pleine et entière et surtout le fait que les victimes se sentent prises en compte lors des événements plutôt que d'être perpétuellement oubliées et mises de côté. On a tous été scandalisés par des crimes odieux qui ont été commis par certains individus et de voir que ces gens-là -- ceux qui ont commis le crime -- parfois étaient des récidivistes et qu'ils n'avaient pas été attentifs aux appels lancés par les victimes précédentes. Ce projet de loi permet justement de corriger cette situation.

D'autres points aussi, comme par exemple des peines plus lourdes pour les infractions sexuelles contre les enfants ou encore des peines plus lourdes pour la production et la possession de drogues illicites à des fins de trafic... Et c'est toujours bien important de mentionner ce dernier élément-là, «à des fins de trafic», puisqu'on sait que, le trafic, on n'a pas besoin d'avoir une énorme production pour être un criminel, parce qu'on sait qu'avec une petite production on est capable d'aller dans l'école d'à côté puis d'aller contaminer les enfants. Donc, c'est important de prendre ceci en compte.

Maintenant, M. le Président, ce qui nous amène à cette proposition de l'opposition officielle, à cette motion de l'opposition officielle, c'est concernant la question de la jeunesse. Il faut bien mettre en perspective la réalité telle qu'elle est. Le projet de loi C-10 concerne les cas de crime grave, soit les personnes qui sont accusées d'assassinat, les personnes qui sont accusées de tentative de meurtre ou encore d'agression sexuelle violente. Ce sont, donc, les crimes les plus graves, et ça ne concerne que 3 % des personnes qui sont directement touchées par la protection de la jeunesse. C'est quand même petit en termes de nombre, mais c'est extrêmement lourd en termes d'impact que ça peut avoir sur la société.

Et on sait aussi, M. le Président, qu'au Québec nous avons une expérience et une expertise qui est reconnue partout à travers le monde et qui a porté ses fruits. Nous avons d'ailleurs adopté une motion à l'unanimité, à l'Assemblée nationale, le 18 mai 2010, à cet effet. On reconnaît qu'au Québec nous avons le taux le plus bas de criminalité concernant les jeunes délinquants. On reconnaît aussi que, même si le système n'est pas parfait, il porte en lui l'apanage de réussites qui méritent d'être appréciées et qui d'ailleurs sont reconnues mondialement. Donc, nous estimons que, dans le cas présent, ce à quoi on assiste, c'est que, oui, il faut respecter cet équilibre entre les citoyens, qu'ils se sentent bien pris en compte, entre le fait que les victimes d'actes criminels soient bien prises en compte, mais aussi, concernant la jeunesse, qu'au Québec on a cette expertise qui mérite d'être appréciée et qui est reconnue.

M. le Président, le temps file. Il y a un mot que je veux mentionner, sans nécessairement m'empaler sur la place publique là-dessus, mais j'ai un malaise quand, dans quelque débat que ce soit, on parle des valeurs québécoises. M. le Président, je vous le dis comme je le pense: Qui sommes-nous pour définir quelles sont les valeurs québécoises? Une fois qu'on définit les valeurs québécoises, si on n'y adhère pas, ça veut-u dire qu'on n'est pas un vrai Québécois, qu'on n'est pas un bon Québécois, qu'on est un demi-Québécois? On peut être d'accord avec des lois, avec des règles, avec des structures, ça va, mais les valeurs québécoises, je trouve ça beaucoup trop précieux pour qu'on puisse les définir ici, à l'Assemblée nationale. Les valeurs québécoises appartiennent aux Québécois, et ce n'est pas aux partis politiques, à l'Assemblée nationale ou à quelque Parlement que ce soit, de les définir. Et je tiens à vous rappeler, M. le Président, qu'aux élections fédérales le Bloc québécois se faisait le propagandiste, étant le seul, disait-il, défenseur des valeurs québécoises, et le résultat a été particulièrement virulent à leur endroit.

Donc, M. le Président, je ne suis pas à l'aise, comme parlementaire, comme citoyen, que, moi, ici, à l'Assemblée, je puisse définir quelles sont les valeurs québécoises. Laissons les Québécois définir chacun, dans toute leur texture et dans toute leur richesse, dans toutes leurs particularités, les valeurs québécoises. Nous, ici, définissons les cadres légaux; c'est notre travail et c'est ce qu'on fait.

Ainsi donc, M. le Président, je propose l'amendement suivant à la motion, et au débat qui nous intéresse, et qui va se lire comme suit:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement fédéral de prendre en compte l'expérience du Québec en matière de traitement de jeunes contrevenants dans le cadre du projet de loi C-10.» Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député du deuxième groupe. Je voudrais juste vérifier tout de suite si... Bon, alors, j'ai l'indication que l'amendement ne fera pas partie de la motion, puisque seul l'auteur peut indiquer s'il y souscrit ou pas, et elle vient de m'indiquer... Mais elle va le faire officiellement, là. Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon: Je ne suis pas en accord avec l'amendement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie. Donc, l'amendement ne fait pas partie de la motion. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. Alors, je reconnais maintenant Mme la députée de Gatineau.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): À votre formation politique, il reste 19 minutes. Vous n'êtes pas obligée de les prendre.

Mme Vallée: Pardon?

Le Vice-Président (M. Gendron): Je veux juste rappeler qu'à votre formation politique il reste 19 minutes avant le droit de réplique protégé.

Mme Vallée: Parfait. Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir de prendre parole cet après-midi, M. le Président, sur la motion déposée par notre collègue de Joliette. Je dois vous dire que, pour une fois, on a des débats qui rallient l'ensemble des parlementaires autour d'un thème qui est très important. Et la motion qui est devant nous vise d'abord à demander au gouvernement fédéral le retrait d'un certain nombre de dispositions qui sont à l'intérieur du projet de loi C-10 puis qui vont à l'encontre de nos valeurs.

Moi, M. le Président, contrairement à mon collègue chef du deuxième groupe d'opposition, je n'ai pas de problème avec le libellé comme tel, je n'ai pas de problème avec la question de valeurs québécoises. Bien honnêtement, je pense qu'on peut être fédéraliste convaincu comme je le suis et avoir des valeurs québécoises. Je pense que ce n'est pas dangereux d'avoir des valeurs québécoises, de les véhiculer tout en étant fédéraliste. Ça, soyez assuré, M. le Président, de ma conviction profonde pour le fédéralisme. Et je ne ferai pas de notre débat non plus un débat où on va tenter, là, d'embarquer sur la question nationale; tel n'est pas l'objectif, les enjeux sont beaucoup trop importants aujourd'hui.

D'abord, le projet de loi C-10, je pense que c'est un petit peu important de le recadrer, parce que ce n'est pas un projet qui vise uniquement les jeunes contrevenants, quand même c'est un projet qui est relativement volumineux, C-10. C'est un projet de loi qui regroupe un certain nombre de mesures. Puis il y a des mesures dans ça, M. le Président, qui, dans le fond, viennent chercher le consensus aussi des membres de cette Chambre. Ce n'est pas C-10 qui est problématique, mais c'est un certain nombre de mesures. Et on ne peut laisser passer un projet de loi lorsqu'à l'intérieur de ce projet de loi là il y a des éléments qui sont fondamentalement en opposition avec les valeurs des Québécois et des Québécoises et notre façon d'aborder certaines problématiques.

Alors, le projet de loi C-10, Mme la Présidente -- je vous salue, par ailleurs -- touche la protection du public contre les jeunes contrevenants. Petit aparté, je reviendrai sur la qualification des jeunes contrevenants comme telle. Parce qu'en 2003 on a modifié la loi pour la qualifier de loi sur la justice pénale pour adolescents parce que stigmatiser un jeune, l'étiqueter de contrevenant dès une première infraction, ce n'est pas nécessairement dans son intérêt et dans l'intérêt de sa réintégration.

**(16 h 30)**

Dans un deuxième temps, le projet de loi C-10 prévoit la meilleure protection des enfants et des adolescents contre les prédateurs sexuels. Bon. Il n'y a pas grand Québécois, je crois, Mme la Présidente, qui sont contre une protection accrue des enfants et des adolescents. Maintenant, est-ce qu'on doit nécessairement tout mettre dans le même projet de loi et passer ça à la sauvette? Je ne crois pas. On prévoit l'alourdissement des peines sanctionnant des infractions graves liées aux drogues. Encore là, on n'est pas contre des sanctions plus graves pour des crimes graves rattachés notamment aux milieux criminalisés, aux milieux du crime organisé. Ceci étant dit, serait-il possible de faire la part des choses et de ne pas tout mettre dans le même panier?

Dans un autre élément, on abolit les peines avec sursis en cas de crime grave contre les biens ou autre. Bon. Il y a certains éléments dont notre collègue de Joliette a fait part dans la qualification de la preuve. La détermination de la preuve, Mme la Présidente, c'est une étape qui est subjective. Et, comme certains critiques le mentionnaient lors du dépôt du projet de loi C-10, le juge doit prendre en considération un certain nombre de choses, et de le diriger directement vers une peine d'emprisonnement, ce n'est pas nécessairement dans le meilleur intérêt de la justice et dans le meilleur intérêt de la société.

Il y a des dispositions qui visent à accroître la responsabilité des délinquants. Il y a la question de l'abolition du pardon en cas de crime grave. Il y a des critères supplémentaires pour le transfert international des délinquants canadiens. Il y a l'aide aux victimes du terrorisme et la protection de ressortissants étrangers vulnérables contre le trafic, la maltraitance et l'exploitation. Ça, c'est un sujet que j'ai abordé à l'intérieur de l'association des parlementaires de la francophonie, de l'APF, dans le cadre des travaux du réseau des femmes. On n'est pas contre ça. Mais, encore là, la problématique qui est devant nous, Mme la Présidente, c'est que le gouvernement fédéral a fait un beau grand ragoût de mesures législatives, et il y a des ingrédients, dans le ragoût, avec lesquels on est allergiques, tout simplement. Et on aimerait pouvoir répartir les choses, pouvoir traiter les sujets individuellement, de sorte qu'on puisse vraiment aborder la question de façon sérieuse.

Tout à l'heure, je vous parlais de la loi sur la justice pénale pour adolescents. Cette loi-là, ça ne fait pas tellement longtemps, Mme la Présidente, quelle est en vigueur. Elle a été adoptée en 2003, et c'est une loi qui a fait ses preuves. En 2011, huit ans plus tard, on est capables de dire de façon très claire, et ça, tous les intervenants le reconnaissent, que la loi sur la justice pénale pour adolescents est venue changer de façon significative la situation et a permis de mettre de l'avant des mesures d'intervention qui vont permettre une justice réparatrice, qui va permettre de sanctionner les crimes graves. Parce qu'on laisse sous-entendre, par le dépôt au projet de loi C-10, que les jeunes qui commettent un crime grave ne sont pas suffisamment punis. Et ça, c'est complètement faux, parce que les jeunes qui commettent des crimes graves, à l'intérieur de la loi sur la justice pénale pour adolescents, sont punis sévèrement.

Il y a un cas qui est extrêmement, extrêmement malheureux, qui a été fort publicisé, qui a été jugé d'ailleurs en vertu de la loi sur la justice pénale pour adolescents. C'est le cas d'un jeune qui a été poignardé à mort par un jeune de 17 ans. Et le contrevenant, celui qui a poignardé le jeune homme, a été puni, a dû purger une peine d'emprisonnement à perpétuité. C'est grave. L'emprisonnement à perpétuité, c'est grave. Le crime commis était très grave. Et cette mesure-là, cette sanction-là a été donnée dans le cadre de la loi actuelle sur la justice pénale pour adolescents. Donc, lorsque des crimes graves sont commis, Mme la Présidente, on applique des sanctions qui sont sévères, et la loi permet, par contre, permet la réhabilitation des jeunes parce que, vous savez, cette loi-là s'applique à des jeunes adolescents, à des enfants, finalement, de 12 à 17 ans.

À 12 ans, à 13 ans, à 14 ans, à 15 ans, à 16 ans, à 17 ans, on n'a pas la maturité d'un adulte. Les jeunes qui font l'objet de poursuites, dans le cadre de cette loi-là ou de mesures dans le cadre de cette loi-là, bien souvent ont eu un cheminement extrêmement difficile. Plusieurs jeunes qui font l'objet d'accusations de crimes relativement graves ont une histoire très triste derrière eux.

L'objectif de la loi, comme l'ont dit si bien plusieurs intervenants cet après-midi, l'objectif de la loi, Mme la Présidente, c'est de permettre aussi la réhabilitation, la réinsertion sociale de ces jeunes-là. Parce qu'à 12 ans on a toute notre vie devant nous, à 13 ans aussi, ce n'est pas le temps d'appliquer à des jeunes des petites mesures qui sont contenues à l'intérieur d'une petite boîte. Et ça paraît... À prime abord, on peut... ça peut paraître intéressant d'être très sévère, de punir un jeune et de lui dire: Là, tu ne referas pas ça, mais de punir un jeune de façon aussi sévère va tout simplement le remettre, plus souvent qu'autrement, dans le mauvais chemin plutôt que dans le droit chemin.

Ce n'est pas pour rien que les associations sont sorties en masse pour dénoncer, finalement, le projet de loi C-10. Les associations comme les centres jeunesse, qui travaillent de près avec les jeunes, qui y mettent coeur, énergie, sont sorties et ont dénoncé le projet de loi C-10. Le Barreau du Québec a dénoncé le projet de loi C-10. Le Barreau canadien, l'Association du Barreau canadien avait dénoncé l'ancien projet de loi C-4, parce que C-10 a regroupé des projets de loi qui étaient en suspens, qui avaient été laissés en suspens avant les élections fédérales, et l'Association du Barreau canadien a également indiqué que des mesures contenues dans l'ancien projet de loi C-4 étaient tout... n'avaient pas leur place, puis c'était plus préoccupant que d'autre chose que de penser qu'un jour on était pour laisser moins de place à l'évaluation subjective de la sentence à être donnée à un jeune par un juge. Très important de permettre au juge d'évaluer l'ensemble de la situation d'un jeune qui fait face à la justice. Pour certains, il s'agit d'une première infraction. Pour plusieurs jeunes, il n'y en aura pas, de récidive. Le seul fait de s'être fait pincer, ça va les... disons, on va leur faire assez peur, ça va leur donner une bonne trouille. Pourquoi? Bien, parce que tout le processus de la peine, de détermination de la peine qui est inclus dans la loi sur la justice pénale pour adolescents prévoit un certain nombre de mesures, et puis, même si la peine en soi n'est pas nécessairement sévère, le processus derrière la détermination de la peine est suffisant pour donner la trouille.

Alors, il est important de rappeler justement les principes sur lesquels repose le modèle québécois d'intervention en matière de délinquance juvénile. Il y a des valeurs particulières. Premièrement, l'adolescent, c'est un individu en développement qui n'a pas atteint sa pleine maturité et qui a des besoins différents des besoins des adultes. Donc, évidemment, lorsqu'on détermine la peine, lorsqu'on détermine l'intervention qu'on doit avoir face à cet adolescent-là, on tient compte de sa maturité. Il faut tenir compte aussi des caractéristiques particulières et de la situation de chaque adolescent pour s'assurer d'offrir le bon service au bon moment, et ça, c'est important.

Ma collègue de Trois-Rivières mentionnait tout à l'heure que plusieurs jeunes faisaient face à des problèmes de santé mentale. Bien, il est important d'en tenir compte lorsqu'on fait une intervention dans le cadre de la Loi sur la justice pénale pour adolescents. On ne peut pas traiter un jeune souffrant d'un problème de schizophrénie de la même façon qu'on traiterait un jeune qui n'a aucune problématique de santé mentale. L'intervention doit être réalisée avec célérité, parce qu'évidemment, comme je vous disais, la notion de temps, lorsqu'on a 12 ans, lorsqu'on a 13 ans, ce n'est pas la même que la notion de temps pour un adulte, et il y a des changements qui se produisent très, très, très rapidement à l'adolescence. Je suis bien placée pour vous parler, j'en ai un à la maison.

**(16 h 40)**

Il y a également la participation des parents dans tout le processus. Et la participation des parents est fondamentale, et on la souhaite. Malheureusement, il y a des situations où le parent n'est pas présent, parce que, comme je vous le disais, il y a des enfants qui ont une histoire... il y a des jeunes qui ont une histoire extrêmement compliquée. Mais la participation des parents dans tout le processus va venir parfois définir quelle mesure sera prise pour réparer la perte ou pour réparer le préjudice subi par la victime.

Et évidemment on se préoccupe des victimes. Ce n'est pas parce qu'on prend des mesures appropriées à un jeune, parce qu'on fait du sur-mesure avec un jeune qu'on met de côté la victime, qu'on met de côté tout ce qu'une victime a pu subir, toute la... parfois l'atteinte à la vie privée, lorsqu'un jeune entre dans une résidence, et il vole, il fouille, et commet toutes sortes de méfaits. Alors, on tente de concilier tous ces éléments-là et de faire en sorte que justice soit rendue. Et ça, eh bien, ça a fait ses preuves. Et il y a eu, dans certaines régions du Québec, des processus de médiation qui ont été mis en place, sous la loi sur la justice pénale pour adolescents, pour permettre à des jeunes de rencontrer les victimes, de s'excuser, d'échanger avec vous.

Et je pense qu'il serait important, Mme la Présidente, peut-être, de vous citer un témoignage d'un jeune. Et ça, ça provient du bilan des directeurs de la protection de la jeunesse, directeurs provinciaux. On a reçu ça hier ici, à l'Assemblée nationale. Je trouve tellement que ça tombe pile, compte tenu de la motion de cet après-midi. Et ça relate un petit peu l'intervention qui a été faite dans le cadre d'un jeune garçon, Mathieu, qui avait commis un vol par infraction dans un domicile. Puis on sait que c'est préoccupant, hein, les vols par infraction. Il y a des vols par effraction qui comportent de la violence également, et on est tous interpellés par ça. Et ces jeunes... ces victimes-là et le jeune Mathieu ont procédé à un processus d'évaluation puis...

Mme la Présidente, juste vous lire le... vous citer le passage du témoignage de Mathieu. Mathieu dit: «Les personnes nous ont demandé de leur écrire une lettre pour leur parler de nous. Elles voulaient qu'on parle de nos buts, de nos rêves, de ce qu'on aimait faire comme activités. Moi, c'est la première fois que quelqu'un me demandait mes qualités et c'est quoi, mes rêves. Souvent, je me fais taper sur la tête. C'est pour ça que j'ai dit oui tout de suite quand elles me l'ont demandé.»

Quand je disais qu'il y a des jeunes qui vivent des situations dramatiques, bien Mathieu, lui, sa situation dramatique, entre autres, c'était qu'aucun adulte ne s'était intéressé à lui. Et puis Mathieu, dans le cadre du processus de détermination de la peine, du processus d'évaluation de son dossier, s'est rendu compte qu'il était quelqu'un, malgré qu'il avait commis un délit.

C'est probablement toutes ces mesures-là qui font en sorte qu'au Québec le taux de criminalité chez les jeunes a quand même baissé. Il y a eu vraiment des résultats significatifs de notre... face à notre façon de faire. Le Québec est un modèle, sur la scène internationale, lorsque vient le temps d'intervenir auprès des jeunes qui commettent des infractions.

Donc, Mme la Présidente, ce que nous propose le projet de loi C-10 va venir complètement chambouler notre façon de faire, va venir mettre de côté des mesures qui ont fait leurs preuves, qui font leurs preuves et va venir complètement défaire cette possibilité-là de réintégration à la société.

Et finalement je ne crois pas que les objectifs, bien louables, visés par le gouvernement fédéral dans le dépôt de la loi C-10 vont être atteints avec les moyens qui sont contenus au projet de loi. Alors, comme je disais, il y a des objectifs louables dans C-10, mais les moyens utilisés, eux, surtout lorsqu'on regarde la question des jeunes, sont utopiques puis ne permettront pas de faire en sorte que les jeunes réintègrent la société québécoise, et deviennent des acteurs importants de cette société-là, et mettent en valeur tout leur plein potentiel. Au Québec, on souhaite enrichir le Québec de sa relève. Ce n'est pas avec C-10 qu'on va réussir à le faire, Mme la Présidente. Je vous remercie.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Gatineau. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Aussant: Oui, Mme la Présidente, en fait, je savais qu'on avait droit à 10 minutes dans le débat. Ce que je ne savais pas, c'est qu'il fallait le signifier dans les 15 premières minutes de la période, ce que je n'ai pas fait parce que je l'ignorais. Donc, je demande le consentement de la Chambre...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Vous souhaitez prendre la parole par consentement?

M. Aussant: S'il y a consentement des collègues.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est ça. Est-ce qu'il y a consentement pour permettre à M. le député de Nicolet-Yamaska de prendre la parole pour un maximum d'une dizaine de minutes?

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): La réponse est non. Alors, je n'ai pas la permission, M. le député, il n'y a pas de consentement.

Monsieur le...

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Excusez-moi. Pardon?

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): De toute façon, il n'y a pas de consentement. Il n'y a pas de consentement pour...

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je sais, mais il n'y a pas de consentement pour permettre à M. le député de Nicolet-Yamaska de prendre la parole dans le contexte actuel.

M. Gautrin: ...qui a été posée, c'était: Y a-t-il consentement pour qu'il prenne 10 minutes? On a réparti le temps actuellement entre... et, nous, nous avons des orateurs qui veulent prendre le temps. S'il veut prendre une petite partie...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): D'accord. D'accord. D'accord, M. le leader du gouvernement. Ce que je veux savoir: Est-ce que vous pouvez lui permettre... Il reste à peu près une... Deux minutes, deux minutes à peu près? Est-ce qu'on peut lui accorder deux minutes pour qu'il puisse intervenir, bien qu'il n'ait pas respecté la directive qui lui a été annoncée au début? Ça va? Deux minutes. Alors, allez-y, M. le député de Nicolet-Yamaska. Je comprends qu'il y a consentement des deux côtés de la Chambre.

M. Jean-Martin Aussant

M. Aussant: Merci, chers collègues, de votre consentement. Et je vais être très bref, en fait, Mme la Présidente. Je voulais juste signifier que ce dont on discute aujourd'hui, ça illustre, encore une fois, que la question fondamentale là-dedans, c'est: Est-ce qu'on ne devrait pas choisir nous-mêmes toutes les lois qui nous régissent, en tant que citoyens, ou est-ce qu'on devrait continuer de se les faire imposer par un Parlement qui n'est pas le nôtre, qui est élu aux trois quarts par des gens qui ne vivent même pas au Québec, qui ne viennent jamais au Québec et qui ne connaissent pas le Québec, et un Parlement auquel on envoie 50 milliards d'impôt chaque année, qui nous impose toutes nos lois et qui signe en notre nom tous nos traités? Et les exemples sont tout à fait actuels.

Sur le plan légal, on voit très bien que cette loi-là ne fait pas l'affaire des Québécois à peu près... de façon unanime, même, dans cette Chambre, mais on va continuer à se les faire imposer tant qu'on est une simple province du Canada.

Sur le plan des impôts, la nouvelle est sortie aujourd'hui, on n'aura pas une cenne, pas un sou du contrat de la Davie, pour les contrats du chantier naval. Ça s'en va à Halifax et Vancouver. Donc, sur les 33 milliards qu'on va payer là-dessus, il y en a six, sept, de ces milliards-là, qui viennent du Québec, qui vont aller ailleurs qu'au Québec. Sur les 10 milliards d'aide à l'auto, en Ontario, il y en a deux à peu près qui venaient du Québec. Quand il y a des crédits d'impôt pour les sables bitumineux, c'est des impôts qui viennent du Québec. Donc, sur le plan des impôts, on se fait aussi avoir dans cette fédération-là.

Et, sur le plan des traités internationaux il y a un autre exemple très actuel. C'est l'accord de libre-échange Canada-Europe, dans le cadre duquel le Canada est en train de négocier un accord dont on n'a pas le contenu, en tant que simple province, et qui va nous être imposé quand l'accord va être conclu. Donc, les citoyens du Québec vont se voir imposer un accord auquel ils n'auront pas participé dans les négociations et dont le contenu va être secret jusqu'à la toute fin.

Et je voudrais souligner la contradiction dans ce que le député de Chauveau a dit précédemment, aussi, que: Qui étions-nous ici pour déterminer les valeurs des Québécois?, que c'était aux Québécois de déterminer eux-mêmes de leurs valeurs. Bien, justement, c'est ça, la souveraineté, que les Québécois décident d'eux-mêmes des lois qui vont les régir et non qu'ils continuent à se les faire imposer par le Parlement canadien, qui n'est pas le leur. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, M. le député de Nicolet-Yamaska. Il reste quelques fractions de seconde, de part et d'autre. Donc, je pense que vous voulez vous rendre à votre réplique, madame...

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Il reste, je pense, 52 secondes. Vous voulez les utiliser?

Une voix: ...

**(16 h 50)**

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): 52 secondes, moins d'une minute. Alors, allez-y, M. le leader adjoint.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vais brièvement les utiliser pour signaler à la députée de Joliette que notre formation politique va voter en faveur, à l'heure actuelle, de la proposition qui est devant nous actuellement. Je rappellerai un élément important des raisons pour lesquelles on va voter en faveur de ce projet de loi, et ça a été bien rappelé par mes collègues et par le ministre, à l'heure actuelle. C'est: d'avoir un plancher minimal pour les peines actuellement remet complètement en question la répartition des pouvoirs entre le juridique, le législatif et l'exécutif. Et ça débalance totalement cette répartition des pouvoirs sur lesquels notre démocratie est basée, Mme la Présidente, et, à l'heure actuelle, ça remet en question les fondements mêmes de la démocratie. Ce bill doit être rejeté, à l'heure actuelle, simplement pour cette raison et pour toutes les autres raisons.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie. Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je reconnais maintenant Mme la députée de Joliette pour sa réplique de 10 minutes. Mme la députée.

Mme Véronique Hivon (réplique)

Mme Hivon: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bien, dans un premier temps, j'aimerais faire quelques commentaires à la suite de l'intervention du député de Chauveau, chef de la deuxième opposition officielle. Je dois marquer mon étonnement et, bien sûr, ma déception, parce que je conçois qu'à la suite de ses propos nous n'aurons malheureusement pas l'unanimité. Et j'avais exprimé dès le départ que je souhaitais que l'Assemblée nationale, pour un dossier aussi important, puisse vraiment parler d'une seule voix face au gouvernement fédéral.

Et je voudrais quand même ramener certaines choses dans leur perspective, parce que je pense que, dans un dossier comme celui-là, il ne faut pas être idéologue, il faut être pédagogue. Et, quand on s'arrête aux vrais fondements des mesures, on se rend compte qu'elles vont clairement donner l'inverse de ce qu'on veut, c'est-à-dire plus de protection, plus de sécurité et une diminution du taux de criminalité.

Et je veux dire qu'en matière de jeunes contrevenants les peines pour adultes dans les crimes violents, c'est déjà possible. Mais là ce qui est absolument inacceptable. qui est en train d'être fait avec le projet de loi C-10, c'est que le coeur de la philosophie en matière de traitement de la délinquance juvénile, la justice pénale pour adolescents, c'est que, là, on fait passer le principe de la réhabilitation, l'objectif de la réhabilitation en deuxième pour maintenant s'arrêter à l'acte posé un peu de manière désincarnée. Donc, ça va faire en sorte que les jeunes qui sont dans des situations plus problématiques, historique de violence dans leur famille, historique de problèmes sociaux, des jeunes qui ont des problèmes de santé mentale, des jeunes qui viennent de communautés plus à risque, comme les jeunes autochtones, ne pourront pas bénéficier de ce regard global, parce qu'en ce moment, au Québec, on a réussi à avoir une approche originale qui fait en sorte qu'on regarde le jeune dans sa globalité. On regarde tous les aspects de sa vie pour voir c'est quoi, la peine qui est la plus adéquate. Et là, avec les modifications de C-10, si je peux encore convaincre mon collègue -- j'espère que je vais pouvoir -- avec les modifications de C-10, la réhabilitation n'est plus l'objectif-phare, c'est vraiment la punition à partir de l'acte. Et vous allez comprendre avec moi qu'un jeune qui a été victime de violence toute sa vie et qui fait des voies de fait sur son père ou sa mère n'est pas dans la même situation qu'un jeune qui, à la sortie d'un bar, gratuitement va aller fesser, agresser un autre jeune.

Alors, c'est fondamental dans l'approche. Et j'aurais pensé que les témoignages de jeunes qui vivent ça au quotidien, qui ont eu un... qui ont commis une infraction criminelle et qui disent à quel point le fait d'être en centre jeunesse au quotidien fait en sorte qu'ils sont convaincus qu'ils ne récidiveront pas parce qu'ils ont le suivi... Que ce soit en matière de toxicomanie, que ce soit en matière de problèmes sociaux, que ce soit en matière de problèmes de violence, de comportement agressif, il y a un suivi archiserré, et là les gens des centres jeunesses eux-mêmes nous disent qu'ils vont avoir de la difficulté à conserver une telle approche.

Alors, je trouve ça vraiment dommage. Puis, de manière globale, sur la philosophie de cette loi-là, bien, c'est la même chose. On peut être idéologue, on peut vouloir être populiste, mais, bien franchement, moi, j'aime mieux qu'on ait les bonnes mesures pour que la criminalité baisse.

Puis, ce n'est pas des farces, quand c'est rendu que le Texas met en garde le gouvernement Harper parce qu'il dit qu'il est dans la mauvaise route, parce qu'ils ont emprunté cette route-là, et tout ce que ça a fait, c'est augmenter le taux de criminalité, augmenter les gens dans les prisons, augmenter les coûts mais augmenter la récidive en plus, je veux dire, c'est un non-sens de dire: On va s'embarquer dans cette voie-là sans y regarder d'un peu plus près.

Même chose en Angleterre, un historique de plus de 10 ans où ils ont décidé d'être plus durs, «tough on crime», puis ça a donné l'effet complètement inverse. Maintenant, leurs prisons explosent de gens, le taux de criminalité n'a pas baissé, les récidives ont augmenté, alors que, quand les peines pour certains crimes bien déterminés... On s'entend que la prison est nécessaire pour plusieurs crimes, mais là on parle de crimes qui souvent sont pour des sentences de six mois, de un an. Donc, on les fait purger dans la communauté. Ça permet de rester intégré. Ça permet un meilleur suivi social. Ça permet des meilleurs traitements quand on a un problème de drogue, de toxicomanie, d'alcoolisme.

Alors, quand c'est rendu qu'on a ces exemples-là de gens qui ont emprunté la voie que le gouvernement Harper veut emprunter en ce moment puis qui disent: Ne faites pas ça, parce que, nous, on voudrait revenir en arrière, et c'est justement ce qu'on fait... Le Texas est rendu qu'il veut mettre de l'avant les peines dans la communauté pour une foule d'infractions et précisément pour celles, notamment, qui ont un lien avec la consommation de drogues, parce que 65 % des criminels ont, dans les mois qui ont précédé le crime, la perpétration du crime, consommé. Donc, il y a un problème là. Et d'ailleurs, de plus en plus, on met en place des tribunaux spécialisés pour s'attaquer à ces problèmes-là, pour que les juges aient toutes les données en main.

Puis là on va aller complètement mettre ça de côté. Ça n'a aucun sens. Ça n'a aucun sens, d'un point de vue logique, et puis j'espère que le député de... le chef de la deuxième opposition va revoir sa position à la lumière de ces gens-là qui...

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Deltell: ...règlement. Je n'ai pas le règlement... Je n'ai pas le numéro du règlement sous les yeux, mais je tiens quand même à dire à ma collègue, pour qui j'ai beaucoup de respect, qu'elle me prête des intentions que je n'ai pas.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Si vous faites allusion...

M. Deltell: Et j'aimerais quand même...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Un instant, M. le leader. Adressez-vous à la présidence. C'est une question...

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adressez-vous à la présidence et expliquez-moi c'est quoi, le problème que vous voulez soulever.

M. Deltell: Le règlement dit qu'un député ne peut pas prêter des intentions à un autre député. J'estime que la députée me prête actuellement des intentions que je n'ai pas. Et elle ne cesse de répéter dans son argumentaire... Ça fait quatre fois qu'elle m'interpelle directement en disant que le député de Chauveau... en parlant directement de la question de protection de la jeunesse.

Mme la Présidente, j'ai dit que j'étais d'accord là-dessus. Et c'est justement pour cibler davantage notre action, pour parler d'une seule voix que nous avons déposé la motion d'amendement qui portait là-dessus. Si la députée de l'opposition n'a pas voulu accepter, c'est son droit absolu. Mais elle ne peut pas me prêter des...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): J'ai compris quel est l'objet. Très bien. Alors, M. le député... M. le chef du deuxième groupe d'opposition, si c'est la compréhension que vous avez, en vertu de l'article 212, vous pouvez intervenir à la fin de l'intervention de Mme la députée.

Par contre, j'en profite pour vous inviter, Mme la députée de Joliette, d'être prudente, pour ne pas soulever le genre d'interprétation... Allez-y, vous avez la parole.

Mme Hivon: Alors, je vais poursuivre sur les questions des valeurs québécoises, parce que je pense qu'effectivement la réhabilitation, c'est quelque chose qui fait consensus au Québec. Et pourquoi je suis en mesure de vous dire ça, Mme la Présidente? C'est que, quand il y a des sondages d'opinion, c'est constant, clairement, les Québécois n'ont pas les mêmes attitudes, par rapport à la nécessaire réhabilitation, que le reste des Canadiens. Donc, je pense que tout à fait... Et, comme le dit ma collègue de Gatineau, oui, je pense qu'on peut parler de valeurs québécoises dans ce cas-ci.

Et surtout je voudrais dire que non seulement ça va à l'encontre de nos modèles d'intervention, des valeurs qu'on préconise, non seulement ce n'est pas logique, d'un point de vue de volonté de faire diminuer la criminalité et de mieux protéger le public, les exemples nous le montrent abondamment, non seulement c'est une injure, parce qu'on vient nous dire en plus que c'est le Québec qui va devoir éponger la facture d'au moins 500 millions de dollars que ça va représenter d'augmentation dans nos prisons, mais en plus, pour les victimes...

Oui, il y a quelques mesures. C'est ce qui fait d'ailleurs qu'on dit «les dispositions» dans le libellé de notre motion. Parce que, c'est malheureux, ils sont venus mélanger neuf projets de loi ensemble, alors qu'on aurait pu les étudier séparément. Et il y a certaines mesures, comme celle qui permet un plus grand rôle des victimes en matière de libération, du processus de libération conditionnelle, qui sont les bienvenues. Mais on aurait pu aller beaucoup plus loin pour les victimes. Il n'y a rien pour augmenter le soutien aux victimes là-dedans. Il n'y a rien qui augmente les sommes qui sont données aux victimes. Il n'y a rien non plus qui fait une place plus importante à la justice réparatrice, la justice qui fait en sorte que le contrevenant doit venir réparer le tort et qu'il ait une sanction justement en lien avec le tort qu'il a causé à la victime. Ça, c'est une orientation que, nous, on a mise de l'avant dans notre programme, adopté au printemps, parce qu'on croit profondément au rôle accru des victimes et à la justice réparatrice.

Alors, c'est bien beau de se draper, comme le gouvernement fédéral le fait, dans la défense des victimes, il n'y a rien de concret pour les victimes. Et, au bout du compte, les victimes, comme vous et moi, vont payer cher le prix d'avoir des mesures qui ne fonctionnent pas et qui vont faire augmenter le taux de criminalité plutôt que de le faire baisser.

Et, en terminant, oui, je l'ai dit dans mon intervention, j'estime que les lois criminelles sont une excellente raison pour devenir souverain parce qu'elles sont collées sur les valeurs d'un peuple. Et ce qui est bon, pas bon, la manière dont on veut traiter nos contrevenants, ça devrait revenir aux Québécois.

Mais, ceci étant dit, je note l'ouverture du gouvernement qui dit qu'il appuie notre motion, qu'il va voter en faveur et qu'il veut se battre. Et c'est certain qu'on va être tout à fait dans un mode de collaboration avec le gouvernement pour que des gestes forts soient posés pour que le gouvernement fédéral recule sur ce projet-là qui est non seulement à l'encontre de nos valeurs, mais illogique. Merci, Mme la Présidente.

**(17 heures)**

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Joliette et porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice.

Alors, je comprends que le point est clos, M. le chef du deuxième groupe d'opposition, ou vous souhaitez vous prévaloir toujours de l'article 212? Si c'est le cas, des explications très brèves, parce que j'ai compris de votre première intervention que vous avez déjà avancé dans l'argumentation. Ça va, vous êtes satisfait? Parfait.

Alors donc, merci, Mme la députée. Je vais maintenant mettre aux voix la motion de Mme la députée de Joliette, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige le retrait des dispositions du projet de loi fédéral C-10 qui vont à l'encontre des intérêts du Québec et des valeurs québécoises en matière de justice, dont celles concernant le traitement des jeunes contrevenants.»

Cette motion est-elle adoptée?

M. Gautrin: Mme la Présidente, je crois que l'opposition voudrait un vote par appel nominal, si j'ai bien compris. Et je voudrais, à ce moment-là, me prévaloir de l'article...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Attendez un instant, je voudrais vérifier. Est-ce que vous souhaitez un vote par appel nominal? D'accord. Alors, allez-y.

M. Gautrin: Mme la Présidente, compte tenu de ce que je savais déjà, je voudrais utiliser l'article, me prévaloir de l'article 233 pour reporter ce vote après la période des affaires courantes, jeudi le 30 octobre... le 20 octobre, excusez-moi, 2011.

Vote reporté

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien, M. le leader du gouvernement. Donc, conformément à la demande du leader du gouvernement, le vote sur la motion de Mme la députée de Joliette sera tenu à la période des affaires courantes de demain. Alors, la suite des choses, M. le leader du gouvernement.

Ajournement

M. Gautrin: Mme la Présidente, compte tenu de l'importance de cette motion qu'on vient de voter, je fais motion pour ajourner nos travaux à jeudi le 20 octobre, à 9 h 45.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors donc, nous ajournons le... Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. D'accord.

Alors, j'ajourne nos travaux à demain, 9 h 45.

(Fin de la séance à 17 h 3)