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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Thursday, November 12, 2015 - Vol. 44 N° 127

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Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Féliciter Mme Marie-Ève Morin, nommée Agricultrice de passion par la Fédération des
agricultrices du Québec

M. Norbert Morin

Féliciter M. Gilles Gravel, lauréat du prix Reconnaissance Thérèse-Pagé

M. François Gendron

Féliciter Mme Marie Levasseur, joueuse de soccer, nommée recrue de l'année de
l'American Athletic Conference

Mme Véronyque Tremblay

Souligner la Journée de la gentillesse

M. Sébastien Schneeberger

Souligner la Journée mondiale du diabète

Mme Marie Montpetit

Féliciter des jeunes de la circonscription de Terrebonne pour leur engagement bénévole

M. Mathieu Traversy

Souligner le 30e anniversaire de la Maison des jeunes L'Initiative inc.

Mme Karine Vallières

Souligner la Journée de la gentillesse

Mme Francine Charbonneau

Souligner le 60e anniversaire des pompiers volontaires de Saint-Édouard

M. Stéphane Billette

Souligner le 35e anniversaire du Centre Info-Femmes

M. Maka Kotto

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 79 Loi donnant suite au rapport du comité indépendant L'Heureux-Dubé et
prévoyant les conditions de travail des membres de l'Assemblée
nationale à compter de la 42e législature

M. Jean-Marc Fournier

Mise aux voix

Projet de loi n° 78 Loi encadrant l'octroi des allocations de transition aux députés qui
démissionnent en cours de mandat

M. Jean-Marc Fournier

Mise aux voix

Projet de loi n° 74 Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines
dispositions du discours sur le budget du 26 mars 2015

M. Carlos J Leitão

Mise aux voix

Projet de loi n° 71 Loi portant sur le règlement de certains différends dans le secteur de
l'automobile de la région du Saguenay
Lac-Saint-Jean

M. Sam Hamad

Mise aux voix

Projet de loi n° 76 Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du transport collectif
dans la région métropolitaine de Montréal

M. Robert Poëti

Mise aux voix

Projet de loi n° 217 Loi concernant la continuation de La Mine Belleterre Québec Ltée
(libre de responsabilité personnelle) et de la Société Minière de
la Baie de Boston Ltée

Mise aux voix

Renvoi à la Commission des finances publiques

Mise aux voix

Projet de loi n° 214 Loi concernant la Ville de Drummondville 

Mise aux voix

Renvoi à la Commission de l'aménagement du territoire

Mise aux voix

Projet de loi n° 215 Loi concernant la Municipalité de Sainte-Anne-de-Sorel

Mise aux voix

Renvoi à la Commission de l'aménagement du territoire

Mise aux voix

Dépôt de documents

Réponse à une question inscrite au feuilleton

Dépôt de rapports de commissions

Consultations particulières sur le projet de loi n° 67 Loi visant principalement à améliorer l'encadrement de l'hébergement touristique

Questions et réponses orales

Projet de loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi
qu'à favoriser l'intégration en emploi

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

M. Dave Turcotte

M. Sam Hamad

M. Dave Turcotte

M. Sam Hamad

Services aux élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage

M. Alexandre Cloutier

M. François Blais

M. Alexandre Cloutier

M. François Blais

M. Alexandre Cloutier

M. François Blais

Négociation des conventions collectives dans la fonction publique

M. Gaétan Lelièvre

M. Martin Coiteux

M. Gaétan Lelièvre

M. Martin Coiteux

M. Gaétan Lelièvre

M. Martin Coiteux

Hausse de la taxe sur l'essence

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

Gestion des effluents d'eaux usées municipales

M. Mario Laframboise

M. Pierre Moreau

M. Mario Laframboise

M. Pierre Moreau

M. Mathieu Lemay

M. David Heurtel

Encadrement de l'abattage rituel des animaux

M. André Villeneuve

M. Pierre Paradis

Mme Agnès Maltais

M. Pierre Paradis

Mme Agnès Maltais

M. Pierre Paradis

Réforme du financement des élections municipales

M. Sylvain Gaudreault

M. Pierre Moreau

M. Sylvain Gaudreault

M. Pierre Moreau

M. Sylvain Gaudreault

Document déposé

M. Pierre Moreau

Accueil et intégration de réfugiés syriens

M. Jean-François Roberge

Mme Kathleen Weil

M. Jean-François Roberge

Mme Kathleen Weil

M. Jean-François Roberge

Mme Kathleen Weil

Restructuration des services de laboratoire des hôpitaux

M. Dave Turcotte

M. Gaétan Barrette

Motions sans préavis

Demander au gouvernement de s'engager à ne pas introduire de nouveaux péages sur les
infrastructures routières existantes au Québec

Mise aux voix

Souligner le 70e anniversaire de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation
et l'agriculture

Mme Christine St-Pierre

Mme Carole Poirier

M. Benoit Charette

Mme Françoise David

Mise aux voix

Réclamer la tenue d'une enquête sur l'attaque survenue le 29 octobre 2015 en Irak ayant
causé la mort de réfugiés iraniens et de soldats irakiens

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 51   Loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et
les amendes aux mineurs plus dissuasives 

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Mme Stéphanie Vallée

Mme Véronique Hivon

M. Simon Jolin-Barrette

Mise aux voix du rapport

Projet de loi n° 59   Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux
et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes

Reprise du débat sur l'adoption du principe

M. Sylvain Rochon

M. Dave Turcotte

Mme Diane Lamarre

M. Alain Therrien

Mme Carole Poirier

M. Éric Caire

M. Harold LeBel

Motion de report

M. Luc Fortin

M. Maka Kotto

Mme Stéphanie Vallée

Mme Diane Lamarre

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante et une minutes)

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, chers collègues, je vous souhaite une très belle journée. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Nous en sommes à la rubrique de la déclaration des députés, et je cède la parole à M. le député de Côte-du-Sud.

Féliciter Mme Marie-Ève Morin, nommée
Agricultrice de passion par la Fédération
des agricultrices du Québec

M. Norbert Morin

M. Morin : Merci, M. le Président. Aujourd'hui, j'ai l'immense plaisir de rendre hommage à une femme de Saint-André-de-Kamouraska, Mme Marie-Ève Morin, propriétaire de la Ferme des Trois Vents, qui s'est vu décerner le titre d'Agricultrice de passion lors de la Soirée Saturne de la Fédération des agricultrices du Québec, le 31 octobre dernier, à Victoriaville.

Mme Marie-Ève, je vous lève mon chapeau. Vous êtes le reflet de ce qu'est l'agriculture en Côte-du-Sud et, d'une main de maître, vous savez allier la vie familiale et celle de nombreuses tâches à la ferme. De par votre implication dans plusieurs sphères de votre communauté, vous faites rayonner le monde agricole et contribuez à améliorer sa compréhension auprès des gens.

Mme Morin, encore une fois, je vous félicite pour cet honneur mérité et je tiens à vous dire que vous êtes une femme et une maman inspirantes. Bravo!

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Côte-du-Sud. Je cède la parole maintenant à M. le député d'Abitibi-Ouest et vice-président de l'Assemblée nationale.

Féliciter M. Gilles Gravel, lauréat du
prix Reconnaissance Thérèse-Pagé

M. François Gendron

M. Gendron : M. le Président, en septembre dernier, la Commission des arts et de la culture de la ville d'Amos décernait le prix Thérèse-Pagé à M. Gilles Gravel afin de reconnaître sa très grande implication dans le milieu culturel amossois. Que l'on parle de la Commission des arts et de la culture, de la révision de la politique culturelle, du Vieux-Palais, de la Maison Hector-Authier, de La Société des arts Harricana, des fêtes du 100e d'Amos, du centre d'exposition, du festival des fêtes du 100e, du festival... autrement dit, qu'on parle de n'importe quoi dans la culture, M. Gravel est au courant, M. Gravel est derrière ça.

Et c'est un type immensément impliqué, avec des talents extraordinaires, au service des arts et de la culture. Reconnu comme un homme authentique et profondément humain, discret et dynamique, Gilles s'engage dans sa communauté sans compter les heures. Il a d'ailleurs accompli un travail colossal avec l'équipe responsable des décors lors de la fête du centième, qui a été un extraordinaire succès. Les valeurs qu'il porte font de lui un artiste extraordinaire. Je tiens à le féliciter et à remercier cet artiste généreux et accompli. Merci pour tout ce que tu as fait dans le domaine des arts.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député d'Abitibi-Ouest. Mme la députée de Chauveau, à vous la parole.

Féliciter Mme Marie Levasseur, joueuse
de soccer, nommée recrue de l'année
de l'American Athletic Conference

Mme Véronyque Tremblay

Mme Tremblay : Merci, M. le Président. Permettez-moi de souligner la récente nomination de Marie Levasseur, cette joueuse de soccer de Stoneham qui a accompli un exploit peu banal en étant nommée recrue de l'année de l'American Athletic Conference, dans le circuit universitaire américain, avec les Tigres de l'Université de Memphis. Étant à sa première année dans ce circuit, cette jeune femme de 18 ans n'est pas passée inaperçue. Marie a été choisie à l'unanimité sur l'équipe d'étoiles des recrues de l'année.

La joueuse s'est jointe à l'équipe de l'Université de Memphis en août dernier seulement. Cette athlète du comté de Chauveau a aussi représenté le Canada aux Jeux panaméricains de 2015. L'attaquante est dominante dans son sport depuis son tout jeune âge.

Je salue chaleureusement Marie Levasseur pour son travail acharné et sa détermination, un modèle à suivre et un bel exemple d'inspiration pour nos jeunes. Marie, ton succès rejaillit sur toute la région. Bravo et continue ton ascension vers les plus hauts sommets! Merci.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée de Chauveau. M. le député de Drummond—Bois-Francs, à vous la parole.

Souligner la Journée de la gentillesse

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Oui, merci, M. le Président. Alors, demain, 13 novembre, est la Journée de la gentillesse. La gentillesse nous met en contact avec ce qu'il y a de meilleur en nous, dans l'optique où tous les gestes comptent.

Aujourd'hui, j'ai fait distribuer à chaque député une carte de la Journée de la gentillesse confectionnée par l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées du Centre-du-Québec.

Ce fut pour moi une très grande joie de voir reconnaître l'an denier la démarche positive amorcée en 2011 par l'AQDR du Centre-du-Québec. Je rappelle que l'Assemblée nationale a accordé une reconnaissance officielle à la Journée de la gentillesse le 13 novembre 2014, après l'avoir soulignée en 2011, 2012 et 2013. Cette reconnaissance officielle est cependant incomplète, il reste un pas à franchir, celui d'inscrire cette journée au calendrier, ce qui implique que le mouvement de la gentillesse continue de se répandre. C'est pourquoi aujourd'hui j'invite tous mes collègues députés à en faire la promotion, car cela ne coûte rien. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Mme la députée de Crémazie, à vous la parole.

Souligner la Journée mondiale du diabète

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : M. le Président, j'ai le plaisir de m'adresser à vous et aux membres de cette Chambre afin de souligner la Journée mondiale du diabète qui aura lieu samedi prochain, le 14 novembre. Le 20 décembre 2006, l'Organisation des Nations unies a adopté une résolution faisant du 14 novembre la journée officielle du diabète, qui est, depuis, célébrée aux quatre coins du globe.

Au Québec, ce sont plus de 830 000 personnes qui vivent avec le diabète, et, parmi celles-ci, près de 250 000 ignorent toujours leur état. Le contrôle de cette maladie est complexe et exige des modifications importantes dans les habitudes de vie des personnes atteintes. Les symptômes sont parfois invisibles et ne se manifestent pas tous de la même manière ni avec la même intensité. La sensibilisation, la prévention et le suivi demeurent à ce jour la meilleure façon de dépister le diabète, de le traiter, de le contrôler. Jour après jour, Diabète Québec démystifie la maladie, offre de la formation sur le sujet, favorise la recherche de nouvelles solutions et soutient les personnes diabétiques ainsi que leur entourage. Je tiens donc aujourd'hui à souligner leurs efforts visant à mieux épauler les gens qui en sont atteints et leurs familles. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée de Crémazie. M. le député de Terrebonne, je vous cède la parole.

Féliciter des jeunes de la circonscription de
Terrebonne pour leur engagement bénévole

M. Mathieu Traversy

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Vous avez sûrement entendu à plusieurs reprises, comme moi, combien il est difficile de trouver des bénévoles aujourd'hui. Les gens ont de moins en moins de temps à accorder pour s'impliquer dans leur communauté, les nouvelles générations n'échappent pas à ce phénomène. Mais cependant je peux vous dire, M. le Président, qu'il y a de l'espoir. J'ai récemment eu la chance de rencontrer dans ma circonscription des jeunes d'une exemplarité exceptionnelle, des jeunes qui n'ont pas peur de donner de leur temps pour des causes qui leur tiennent à coeur. Et, à la lumière de cette implication remarquable, je me devais de vous le mentionner ici, en ce salon bleu.

Je voulais féliciter personnellement Mme Gabrielle Bleau-Côté pour son implication comme ambassadrice pour Opération Enfant Soleil. Bravo à Francis Archambault et les élèves de l'école secondaire l'Impact pour leur implication avec Le Club Optimiste de Lachenaie. Bravo également à Tommy Paulhus et tous les jeunes anges qui s'impliquent depuis deux ans au nom de la regrettée Marie-Anick Paulhus dans la lutte contre le cancer. Ces jeunes ambassadeurs de l'implication sociale sont remarquables, M. le Président. J'espère qu'ils seront l'exemple de plusieurs autres. Merci beaucoup de votre attention.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Terrebonne. Mme la députée de Richmond.

Souligner le 30e anniversaire de la Maison
des jeunes L'Initiative inc.

Mme Karine Vallières

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. J'ai eu le plaisir vendredi dernier de participer au souper du 30e anniversaire de la Maison des jeunes L'Initiative de Valcourt. Ce sont les jeunes qui, depuis un an, ont fait des tests de recettes, que ce soient des soupes, les entrées, les bouchées, etc., toujours avec comme thème les fruits et légumes, pour en arriver au festin de roi qu'on nous a servi, qu'on a dégusté ensemble.

La Maison des jeunes, vous le savez, dans chacune de nos circonscriptions, joue un rôle majeur au sein de la communauté, et cette fois-ci dans la communauté valcourtoise et la grande région. Les jeunes y sont généreux et disponibles et participent activement également à diverses activités dans la région.

En terminant, permettez-moi, M. le Président, de remercier la directrice générale, Mme Danielle-France Joubert, ainsi que les porte-parole de la Maison des jeunes de Valcourt, Mme Sylvie Lussier et M. Pierre Poirier, de même que toute l'équipe, parce que vous faites la différence. Alors, à vous toutes et tous, un bon 30e!

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée de Richmond. Mme la députée de Mille-Îles, à vous la parole.

Souligner la Journée de la gentillesse

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. Chaque année, le 13 novembre, se déroule la journée internationale de la gentillesse. Cette initiative, apparue au Japon dans les années 60, invite les personnes à prendre soin les uns des autres. Plus d'une vingtaine de pays soulignent maintenant cette journée. La journée internationale de la gentillesse sensibilise les gens à poser des gestes qui contribuent à maintenir un milieu de vie de bienveillance, sain, sécuritaire et accueillant.

Il y a cinq ans, au Québec, l'association québécoise de défense des droits des personnes retraités et préretraitées du Centre-du-Québec, l'AQDR, initiait ce mouvement, et je les en remercie bien sincèrement. Agir de manière respectueuse, bienveillante et courtoise contribue aussi à réduire grandement l'intimidation entre les personnes ainsi que la maltraitance envers les personnes aînées. C'est pourquoi j'invite la population du Québec à poser des gestes de gentillesse non seulement le 13 novembre, mais dans l'ensemble de leur quotidien. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée de Mille-Îles. M. le député de Huntingdon, je vous cède la parole.

Souligner le 60e anniversaire des pompiers
volontaires de Saint-Édouard

M. Stéphane Billette

M. Billette : Merci beaucoup, M. le Président. C'est avec une grande fierté que je tiens à souligner le travail essentiel et exceptionnel des pompiers volontaires de Saint-Édouard, qui soulignent cette année leur 60e anniversaire de fondation. Les pompiers volontaires sont sur le qui-vive en permanence. Ils font un travail vraiment remarquable dans des conditions difficiles. Ils s'impliquent et se dévouent parfois même au péril de leur propre vie pour protéger les citoyens de Saint-Édouard et de la région. Ils sont de véritables figures de bravoure. Ils ont toutes les raisons d'être fiers de leur engagement. Je tiens personnellement à les remercier, et chaleureusement, pour leur travail acharné, leur engagement et leur courage.

J'aimerais aussi prendre un moment afin d'honorer la mémoire de tous ceux qui ont soutenu ce service d'incendie au cours des 60 dernières années. Félicitations à chacun et chacune d'entre vous, et bon 60e anniversaire à tous les pompiers volontaires de Saint-Édouard! Merci, M. le Président.

• (9 h 50) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Huntingdon. Enfin, M. le député de Bourget, à vous la parole.

Souligner le 35e anniversaire du Centre Info-Femmes

M. Maka Kotto

M. Kotto : Merci, M. le Président. Je veux souligner aujourd'hui le 35e anniversaire du Centre Info-Femmes. Cet organisme a vu le jour grâce à l'initiative de citoyennes de la circonscription de Bourget — la mienne — désireuses d'aider et de travailler auprès d'autres femmes du quartier Mercier-Est. Bon an, mal an, elles ont implanté au coeur de leur communauté un ensemble de services et d'activités visant à favoriser pour ces femmes une plus grande autonomie personnelle, affective et économique.

Je tiens à saluer toute l'équipe de Mme Anick Charlebois, la coordonnatrice, les membres du conseil d'administration sous la présidence de Mme Johanne Voisine, et tous les autres bénévoles pour leur inlassable dévouement auprès de notre communauté et plus spécifiquement auprès des femmes de la circonscription de Bourget.

Nos chaleureuses félicitations et nos vifs remerciements au Centre Info-Femmes, en vous souhaitant, mesdames, un très beau 35e anniversaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Bourget. Question de règlement, M. le député de Drummond—Bois-Francs?

M. Schneeberger : ...précision. Étant donné qu'il y a grève aujourd'hui, les cartes ne pourront être distribuées à tous les députés, à moins que le bureau du président s'en charge ici, à même les pages. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, nous ferons les vérifications qui s'imposent et nous vous reviendrons avant la période de questions.

Alors, voilà qui met un terme à la rubrique Déclarations de députés. Je suspends les travaux de l'Assemblée quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 52)

(Reprise à 10 h 1)

Le Président : Mesdames messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir — je rattrape le temps perdu.

Alors, nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi — je pense que vous allez être occupé — M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Je vous demande d'appeler l'article a, M. le Président.

Projet de loi n° 79

Le Président : Alors, à l'article a du feuilleton, M. le leader du gouvernement et ministre responsable de l'Accès à l'information et de la Réforme des institutions démocratiques présente le projet de loi n° 79, Loi donnant suite au rapport du comité indépendant L'Heureux-Dubé et prévoyant les conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale à compter de la 42e législature. M. le ministre.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Merci, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale et diverses autres lois afin de prévoir les nouvelles conditions de travail des députés à compter de la 42e législature.

Le projet de loi modifie le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale en fixant à 2 % de l'indemnité totale du député le taux annuel d'accumulation de la rente. Aussi, il établit à 35 années le nombre maximal d'années de participation au régime de retraite et fixe l'âge maximal de participation au régime de retraite à la fin de l'année au cours de laquelle le député atteint l'âge de 71 ans.

Le projet de loi pose le principe selon lequel les dispositions des plans d'assurance dont bénéficient les députés doivent équivaloir, en termes de couverture et de partage du coût des primes entre les adhérents et l'État, à celles du régime d'assurance collective du personnel d'encadrement des secteurs public et parapublic.

Le projet de loi prévoit que le calcul de l'allocation de transition à un député sera fait selon le montant de l'indemnité annuelle du député au moment où son mandat prend fin. Aussi, le projet de loi précise que l'allocation de transition sera ajustée en tenant compte des revenus d'emploi, de service, d'entreprise, de retraite et de prestations d'assurance invalidité déclarés au Commissaire à l'éthique et à la déontologie de l'Assemblée nationale. De plus, le député devra rembourser le montant de l'allocation qu'il pourrait éventuellement recevoir en trop. Le projet de loi inclut également des dispositions permettant de ne pas verser l'allocation de transition ou, le cas échéant, d'en faire cesser le versement à un ancien député poursuivi pour une infraction pénale ou criminelle liée à l'exercice de ses fonctions. Le projet de loi prévoit en outre la possibilité, si l'ancien député est déclaré coupable, d'en exiger le remboursement.

Le projet de loi propose également des modifications précisant certaines modalités de remboursement des frais de logement auxquels ont droit les députés et les titulaires de fonctions parlementaires et les ministres.

Le projet de loi abolit les allocations de présence aux membres des commissions et sous-commissions de l'Assemblée nationale ainsi que les indemnités accordées aux présidents de séances de commissions parlementaires et aux membres réguliers du Bureau de l'Assemblée nationale. Le projet de loi accorde un montant forfaitaire de 250 $ aux présidents de séance des commissions parlementaires ainsi qu'aux membres réguliers et suppléants du Bureau de l'Assemblée nationale pour chaque jour de séance auquel ils sont présents.

Le projet de loi propose de faire correspondre le montant de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale au maximum de l'échelle de traitement du niveau 4 de la catégorie des premiers dirigeants, vice-présidents et membres d'un organisme ou d'une entreprise du gouvernement et de l'ajuster selon le pourcentage de majoration des échelles de traitement accordé à cette catégorie d'emploi. Il prévoit ainsi l'abolition de l'allocation de dépenses non imposable en l'intégrant à l'indemnité annuelle. De plus, le projet de loi propose de réduire les pourcentages d'indemnités additionnelles versées à certains titulaires de fonctions parlementaires, au premier ministre et aux autres ministres.

Le projet de loi prévoit la création d'un comité indépendant permanent ayant pour fonction de déterminer, à la fréquence et dans les délais prévus par la loi, l'opportunité d'examiner les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale et, le cas échéant, de procéder à cet examen et de formuler des recommandations. Le projet de loi propose que l'Assemblée nationale statue alors à ce sujet, et que les autorités concernées donnent suite au rapport.

Enfin, le projet de loi propose diverses dispositions transitoires et de concordance, notamment sur le plan réglementaire.

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition.

M. Drainville : On aimerait bien connaître quelle voie le leader entend emprunter pour faire cheminer ce projet de loi. Est-ce qu'il a l'intention de l'amener au Bureau de l'Assemblée nationale, au BAN, pour que les différents partis puissent en prendre connaissance? Est-ce que c'est la voie législative standard, habituelle, auquel cas il y aura sans doute de l'espace pour qu'on puisse discuter, éventuellement consulter? Il faut qu'il nous donne une idée, M. le Président, sur le chemin qu'il va prendre, là, pour faire avancer ce projet de loi, là, qui concerne la rémunération des députés de cette Chambre.

Le Président : M. le leader.

M. Fournier : ...habituel. C'est un projet de loi, donc on va le faire étudier par les commissions parlementaires. Il va y avoir un principe et il va même y avoir... je pensais que vous posiez la question sur les consultations. Je crois qu'on pourrait certainement entendre les autorités, là, les membres du comité, puis peut-être, s'il y a d'autres personnes qui doivent être entendues, on pourrait même se permettre d'entendre d'autres personnes pour qu'il y ait des délibérations sur le projet de loi comme n'importe quel autre projet de loi.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Président : Adopté. M. le leader.

M. Fournier : Je vous demanderais d'appeler l'article b, M. le Président.

Projet de loi n° 78

Le Président : Alors, à l'article b du feuilleton, M. le leader du gouvernement et ministre responsable de l'Accès à l'information et de la Réforme des institutions démocratiques présente le projet de loi n° 78, Loi encadrant l'octroi des allocations de transition aux députés qui démissionnent en cours de mandat.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale afin d'encadrer l'octroi des allocations de transition aux députés qui démissionnent en cours de mandat. Un député ne pourra recevoir une allocation de transition que si le Commissaire à l'éthique et à la déontologie estime que la démission est justifiée par des raisons familiales sérieuses ou un problème de santé important affectant un membre de la famille immédiate du député ou lui-même.

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition.

M. Drainville : Alors, M. le Président, on va évidemment prendre connaissance du projet de loi, mais, si on pense qu'il y a dans ce projet de loi ce qu'on pense qu'il y a dans ce projet de loi, c'est effectivement une très bonne nouvelle. Ça aura pris du temps, mais ils auront finalement compris que c'était une bonne idée d'aller de l'avant avec une proposition que le Parti québécois a faite il y a déjà plusieurs années de ça et qu'il a reprise dans plusieurs projets de loi. Donc, on va regarder avec beaucoup d'attention ce qu'ils nous proposent, mais, a priori, ils semblent finalement se rendre à nos arguments.

Le Président : M. le leader du deuxième groupe.

M. Bonnardel : Je suis content que le PQ se soit rallié à notre idée. Et je propose au gouvernement d'adopter cette loi le plus rapidement possible, un, deux, trois...

Le Président : Alors, inutile de penser que nous allons commencer le débat ici aujourd'hui. J'imagine que vous voudriez dire un mot, vous aussi, M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : ...des consultations.

Le Président : Oui.

M. Fournier : Je comprends qu'on n'en demande pas, mais, si jamais ils en demandent, on pourra en faire, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Bon, voilà. Alors, est-ce que le projet est adopté... la motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Président : L'Assemblée est saisie de ce projet de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Je vous demanderais d'appeler l'article c, M. le Président.

Projet de loi n° 74

Le Président : Alors, à l'article c du feuilleton, M. le ministre des Finances présente le projet de loi n° 74, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 26 mars 2015.

M. Carlos J Leitão

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi modifie ou édicte plusieurs dispositions législatives afin principalement de mettre en oeuvre certaines dispositions du discours sur le budget du 26 mars 2015. Il y a 15 paragraphes.

Alors, premièrement — j'avertis — premièrement, le projet de loi modifie la Loi sur le ministère des Finances afin de permettre au ministre des Finances de déterminer des cibles de résultats nets applicables à certaines sociétés d'État. Il prévoit également que les sociétés qui y sont assujetties doivent rendre compte de l'atteinte des cibles dans leur rapport annuel. De plus, il modifie la Loi sur l'administration publique afin de permettre au président du Conseil du trésor, en collaboration avec le ministre des Finances, d'élaborer et de proposer au Conseil du trésor des modalités de réduction des dépenses de certains organismes et fonds spéciaux dans le but d'assurer et de maintenir l'atteinte de l'équilibre budgétaire. Il propose également de prolonger, pour l'exercice débutant en 2015, l'interdiction de versement de toute forme de rémunération additionnelle fondée sur le rendement aux membres du personnel d'encadrement d'organismes publics visés.

• (10 h 10) •

Deuxièmement, le projet de loi modifie la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux afin d'abolir, à compter du 1er avril 2016, le Fonds de financement des établissements de santé et de services sociaux en raison de l'élimination progressive prévue de la contribution santé.

Troisièmement, dans le but de contrôler l'offre de jeux d'argent en ligne, le projet de loi modifie la Loi sur la protection du consommateur afin d'obliger les fournisseurs de services Internet à bloquer l'accès aux sites illégaux de jeux d'argent inscrits sur une liste établie par la Société des loteries du Québec. Il prévoit que la société fera rapport à la Régie des alcools, des courses et des jeux lorsqu'un fournisseur ne se conformera pas à la loi. La régie aura la responsabilité d'aviser le fournisseur de ce défaut. De plus, il accorde au président-directeur général de la société ou à la personne qu'il désigne des pouvoirs d'enquête afin de s'assurer du respect de la loi.

Quatrièmement, le projet de loi modifie la Loi sur les permis d'alcool afin de mettre en place un permis unique par établissement pour la vente d'alcool pour consommation sur place, par catégorie de permis. Il prévoit que les permis de brasserie et de taverne seront regroupés avec la catégorie des permis de bar. Il prévoit également qu'une seule licence d'exploitation d'appareils de loterie vidéo soit délivrée par établissement pour lequel le titulaire détient un permis de bar. Il modifie également la Loi sur la Société des loteries du Québec afin que le gouvernement approuve les critères socioéconomiques suivis par la société pour sélectionner les établissements où pourront être installés des appareils de loterie vidéo.

Cinquièmement, dans le but de simplifier les sanctions relatives à certaines infractions en matière de boissons alcooliques, le projet de loi ajoute à la Loi sur les permis d'alcool la possibilité pour la Régie des alcools, des courses et des jeux d'imposer des sanctions administratives pécuniaires au titulaire de permis. La régie pourra, pour certaines infractions, imposer cette sanction au lieu de révoquer ou de suspendre automatiquement le permis et, pour d'autres infractions, imposer une sanction pécuniaire en plus de suspendre le permis.

Sixièmement, le projet de loi modifie la Loi sur la Société des loteries du Québec et la Loi sur le ministère du Conseil exécutif afin de retirer le versement des contributions de la société au Fonds d'aide à l'action communautaire autonome.

Septièmement, le projet de loi modifie le Code de la sécurité routière et le Règlement sur l'immatriculation des véhicules routiers afin d'y prévoir la perception d'un droit à l'acquisition lors de l'immatriculation d'un véhicule routier muni d'un moteur de forte cylindrée. Il prévoit qu'une somme de 30 millions de dollars par année financière, provenant de la perception de ce nouveau droit d'acquisition et du droit additionnel annuel d'immatriculation de véhicules munis de forte cylindrée, sera versée au Fonds des réseaux de transport terrestre.

Huitièmement, le projet de loi propose d'abolir la Régie du cinéma et de transférer ses responsabilités au ministre de la Culture et des Communications. Il prévoit différentes mesures pour assurer la transition et la continuité des fonctions qui étaient dévolues à la régie dont le transfert au ministère de la Culture et des Communications des personnes désignées pour effectuer le classement des films et la création, au sein de ce ministère, d'un poste de directeur du classement sous l'autorité duquel agiront désormais ces personnes. Aussi, le projet de loi maintient le recours à l'encontre de diverses décisions, dont la possibilité de demander la révision d'une décision en matière de classement, notamment par les dispositions prévoyant la création d'un comité de révision de cette matière.

Neuvièmement, le projet de loi propose de remplacer le pouvoir de l'Autorité des marchés financiers d'établir, dans le Règlement sur les valeurs mobilières, des règles de déontologie particulières applicables aux membres de son personnel par une obligation que le code de déontologie des membres du personnel de l'autorité contienne des règles et des sanctions particulières lorsque ceux-ci effectuent des opérations sous les titres régis par la Loi sur les valeurs mobilières. Ces règles et sanctions particulières devront être transmises au ministre des Finances 30 jours avant leur adoption, et ce dernier pourra exiger que l'autorité y apporte des modifications.

Dixièmement, le projet de loi retire les références à la Loi sur l'impôt minier dans les dispositions relatives au volet gestion de l'activité minière du Fonds des ressources naturelles prévues à la Loi sur le ministère des Ressources naturelles et de la Faune étant donné le transfert de responsabilités relatives à la vérification de l'impôt minier à Revenu Québec.

Onzièmement, le projet de loi remplace le nom du Bureau de décision et de révision par «Tribunal administratif des marchés financiers». Aussi, le projet de loi prévoit que les membres du tribunal devront dorénavant prêter serment avant de commencer leurs fonctions.

Douzièmement, le projet de loi apporte des précisions à la notion de «dirigeant» prévue par les lois constitutives des fonds des travailleurs.

Treizièmement, le projet de loi propose de remplacer la Loi sur les dépôts et consignations par la Loi concernant les dépôts au Bureau général des dépôts pour le Québec afin d'harmoniser les dispositions législatives portant sur l'administration des dépôts et des consignations aux dispositions du nouveau Code de procédure civile, du Code civil du Québec et de la Loi sur l'administration financière ainsi qu'aux procédures administratives actuelles. La Loi concernant les dépôts au Bureau général de dépôts pour le Québec attribue au ministre de la Justice plus de responsabilités relativement aux dépôts judiciaires et précise les rôles du ministère des Finances et du Bureau général de dépôts pour le Québec.

Quatorzièmement, le projet de loi modifie la Loi sur l'administration fiscale et la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires afin d'adopter la procédure d'exécution des jugements du nouveau Code de procédure civile aux responsabilités de l'Agence du revenu du Québec prévues par ces lois.

Et, quinzièmement, le projet de loi modifie la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre afin d'augmenter les sommes portées au crédit du Fonds de développement et de reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre et de prévoir que la Commission des partenaires du marché du travail devra soumettre annuellement au ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale et au ministre des Finances un plan d'affectation des sommes virées à ce fonds ainsi qu'un rapport sur l'allocation de ces sommes. De plus, le projet de loi hausse le seuil d'assujettissement à cette loi aux entreprises ayant une masse salariale supérieure à 2 millions de dollars.

Enfin, le projet de loi comporte des dispositions de concordance et transitoires nécessaires pour son application.

Le Président : Bon, voilà tout un programme. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition.

M. Drainville : Alors, M. le Président, à première vue, là, il y a des éléments, dans ce projet de loi, qui n'ont absolument rien à voir avec le budget, à première vue. À première vue, c'est au moins un omnibus, sinon un autre mammouth. Puis on se souvient comment le dernier mammouth a fini, il a fini dans un bâillon, M. le Président. C'est très inhabituel, par exemple, qu'on touche des questions qui se rapportent à l'AMF dans un projet de loi qui met en oeuvre le budget, très inhabituel qu'on parle de l'AMF dans un projet de loi qui touche le budget. Alors, M. le Président, ça va prendre évidemment des consultations dont l'ampleur reste à discuter, mais ça va certainement prendre des consultations.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : J'opterais d'abord pour un briefing technique parce que l'AMF était dans le budget. Alors, il y a plein d'éléments... À première vue, je comprends, quand on écoute, ça peut être un peu long, là, mais, à première vue, vous avez cette réaction. Je vous offre aussi un briefing technique pour voir les éléments qui étaient avec le budget, et vous verrez par la suite qu'il s'agit de donner suite au budget.

Alors, pour le reste, je n'accepte pas vraiment, M. le Président, les commentaires du leader de l'opposition, mais ce sont les siens. En démocratie, je comprends qu'il peut les tenir, mais je ne les partage pas, absolument pas. Pour le reste, nous aurons des échanges, bien sûr.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Alors, c'est adopté. M. le leader.

M. Fournier : Je vous demanderais d'appeler l'article d, M. le Président.

Projet de loi n° 71

Le Président : Alors, à l'article d du feuilleton, M. le ministre du Travail, et de l'Emploi, et de la Solidarité sociale présente le projet de loi n° 71, Loi portant sur le règlement de certains différends dans le secteur de l'automobile de la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean. M. le ministre.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Merci, M. le Président. Ce projet de loi vise à mettre fin aux lock-out et aux grèves en cours dans le secteur de l'automobile au Saguenay—Lac-Saint-Jean et à mettre en place les mesures permanentes permettant le règlement des conflits qui opposent les employeurs et les salariés de ce secteur dans le renouvellement de leurs conventions collectives.

Le projet de loi prévoit une période finale de médiation concernant les modalités de retour au travail, de même que concernant le renouvellement des conventions collectives. Il fixe une date maximale de retour au travail et prévoit que, à défaut d'ententes dans les délais fixés, les différends sont déférés à l'arbitrage.

Le projet de loi impose également des obligations particulières aux salariés, aux employeurs et à leurs associations quant au retour au travail.

Enfin, le projet de loi détermine, en cas d'inexécution des obligations qu'il prévoit, des sanctions pénales.

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition.

M. Drainville : Merci, M. le Président. Nous souhaiterions la tenue de courtes consultations particulières sur ce projet de loi, M. le Président.

• (10 h 20) •

Le Président : M. le leader.

M. Fournier : Je crois savoir que les députés de la région sont déjà sensibilisés, et on aura des échanges sur la chose.

Mise aux voix

Le Président : M. le leader du gouvernement... Est-ce que c'est adopté? Oui, c'est adopté, la motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Le e, M. le Président.

Projet de loi n° 76

Le Président : Alors, l'article e du feuilleton, M. le ministre des Transports présente le projet de loi n° 76, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du transport collectif dans la région métropolitaine de Montréal. M. le ministre.

M. Robert Poëti

M. Poëti : Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de déposer le projet de loi n° 76, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du transport collectif dans la région métropolitaine de Montréal.

Ce projet de loi propose des changements dans l'organisation et la gouvernance du transport collectif dans la région métropolitaine de Montréal.

Le projet de loi institue, par l'édiction de deux nouvelles lois, l'Autorité régionale de transport métropolitain et le Réseau de transport métropolitain.

Le projet de loi confie à l'autorité la planification des services de transport collectif sur l'ensemble de son territoire, qui est constitué de ceux de la Communauté métropolitaine de Montréal, de la réserve indienne de Kahnawake et de la ville de Saint-Jérôme. Le projet de loi accorde de plus à l'autorité la compétence exclusive pour établir le cadre tarifaire du transport collectif applicable sur ce territoire et pour identifier les corridors routiers qui constituent le réseau artériel métropolitain sur lequel elle peut désigner des voies réservées. Le projet de loi assujettit par ailleurs à l'approbation de la Communauté métropolitaine de Montréal plusieurs décisions prises par l'autorité, notamment celles concernant l'adoption du plan stratégique de développement du transport collectif, le programme des immobilisations et la politique de financement.

Le projet de loi confie au réseau l'exploitation de services de transport collectif sur tout ou partie de son territoire qui correspond à celui de l'autorité. Il accorde au réseau la compétence exclusive pour la desserte du territoire par des services de transport collectif par trains de banlieue.

Le projet de loi prévoit de plus des règles concernant la composition des conseils d'administration de ces organismes, notamment la présence obligatoire au sein de ceux-ci de membres se qualifiant d'administrateurs indépendants au sens de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État. Il prévoit également diverses règles concernant le fonctionnement de ces organismes, entre autres qu'ils sont assujettis aux règles d'adjudication des contrats applicables aux sociétés de transport en commun.

Le projet de loi prévoit par ailleurs, en raison des missions confiées à chacun des nouveaux organismes, l'abolition de l'Agence métropolitaine de transport, la modification des fonctions exercées par la Communauté métropolitaine de Montréal et par les sociétés de transport en commun de la région et la cessation d'existence des conseils intermunicipaux de transport. Le projet de loi prévoit la constitution d'un comité de transition chargé de voir à l'implantation des nouveaux organismes et lui confère divers pouvoirs à cette fin.

Le projet de loi comporte enfin de nombreuses dispositions modificatives, diverses et transitoires nécessaires à l'institution de l'autorité et du réseau.

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition.

M. Drainville : M. le Président, des consultations particulières, n'est-ce pas, M. le ministre, M. le leader?

Le Président : M. le leader.

M. Fournier : N'est-ce pas, M. le Président?

Mise aux voix

Le Président : Alors, est-ce adopté? Adopté. M. le leader de l'opposition.

M. Drainville : M. le Président, pouvez-vous appeler l'article f du feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 217

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle demande ceci. À l'article f du feuilleton, j'ai reçu le rapport de la directrice de la législation concernant le projet de loi n° 217, Loi concernant la continuation de La Mine Belleterre Québec Ltée (libre de responsabilité personnelle) et de la Société Minière de la Baie de Boston Ltée. La directrice de la législation a constaté que les avis n'ont pas été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce rapport et vous avise que ce projet de loi ne pourra être présenté sans le consentement unanime de l'Assemblée.

Alors, ma première question : Est-ce que l'Assemblée consent, de façon unanime, à la présentation de ce projet de loi?

Une voix : ...

Le Président : M. le leader.

M. Fournier : Nous consentons, M. le Président.

Le Président : Bon, je constate qu'il y a un consentement. En conséquence, Mme la députée de Duplessis présente le projet de loi d'intérêt privé n° 217, Loi concernant la continuation de La Mine Belleterre Québec Ltée (libre de responsabilité personnelle) et de la Société Minière de la Baie de Boston Ltée.

Mise aux voix

L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix : ...

Le Président : Pas tout de suite. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Bien, si j'interviens, c'est parce qu'on l'a adopté, M. le Président.

Le Président : Oui, c'est adopté, mais là c'est à vous.

Renvoi à la Commission des finances publiques

M. Fournier : Merci. Oui, c'est bien. Maintenant qu'on est dans l'ordre, je peux donc faire la motion. Conformément au premier alinéa de l'article 267 du règlement, je fais motion afin que ce projet de loi soit déféré à la Commission des finances publiques et pour que le ministre des Finances en soit membre.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix : ...

Le Président : Adopté. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Bonnardel : M. le Président, je vous demande d'appeler l'article g, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 214

Le Président : Alors, à l'article g du feuilleton, j'ai reçu le rapport de la directrice de la législation sur le projet de loi n° 214, Loi concernant la Ville de Drummondville. La directrice de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Le rapport vient d'être déposé, là.

En conséquence, M. le député de Drummond—Bois-Francs présente le projet de loi d'intérêt privé n° 214, Loi concernant la Ville de Drummondville.

Mise aux voix

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : ...

Le Président : Adopté. M. le leader.

Renvoi à la Commission de l'aménagement du territoire

M. Fournier : Conformément au premier alinéa de l'article 267 de notre règlement, je fais motion afin que ce projet de loi soit déféré à la Commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire en soit membre.

Une voix : ...

Mise aux voix

Le Président : Est-il content? Oui. Alors, est-ce que la motion est adoptée?

Des voix : ...

Le Président : Donc, tout le monde est content. Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Drainville : Oui, M. le Président. Est-ce que vous pouvez appeler l'article h du feuilleton?

Projet de loi n° 215

Le Président : Alors, à l'article h du feuilleton, j'ai reçu le rapport de la directrice de la législation sur le projet de loi n° 215, Loi concernant la Municipalité de Sainte-Anne-de-Sorel. La directrice de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Et je dépose ce rapport.

En conséquence, M. le député de Richelieu présente le projet de loi d'intérêt privé n° 215, Loi concernant la Municipalité de Sainte-Anne-de-Sorel.

Mise aux voix

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : ...

Le Président : Adopté. M. le leader.

Renvoi à la Commission de l'aménagement du territoire

M. Fournier : Conformément au premier alinéa de l'article 267 — tout le monde le connaît maintenant — de notre règlement, je fais motion afin que ce projet de loi soit déféré à la Commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire reste heureux et en soit membre.

Le Président : Est-ce qu'il est toujours heureux?

Une voix : ...

Mise aux voix

Le Président : Oui. Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Président : Adopté.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le leader du gouvernement.

Réponse à une question inscrite au feuilleton

M. Fournier : Ah oui? Ah oui? J'imagine que c'est ça. Je dépose la réponse du gouvernement à la question inscrite au feuilleton le 29 octobre par le député de Granby.

Le Président : Ce document est déposé.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission de l'économie et du travail et député de Bertrand.

Consultations particulières sur le projet de loi n° 67

M. Cousineau : M. le Président, je dépose le rapport de la Commission de l'économie et du travail, qui, les 4, 5, 10 et 11 novembre 2015, a tenu des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 67, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement de l'hébergement touristique.

Le Président : Ce rapport est déposé.

Il n'y a pas de dépôt de pétitions.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une question de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes donc maintenant rendus à la période de questions et réponses orales. Je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

Projet de loi visant à permettre une meilleure
adéquation entre la formation et l'emploi ainsi
qu'à favoriser l'intégration en emploi

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Le gouvernement libéral multiplie les improvisations. Il y a quelques jours, c'était l'attribution sans condition, sans condition, de 1,3 milliard à Bombardier. Cette semaine, c'est l'inverse. Le premier ministre impose ses conditions abusives dans l'attribution de l'aide de dernier recours aux plus démunis. Deux poids, deux mesures.

Le premier ministre est en train de fabriquer une crise de toutes pièces à l'aide sociale. Le véritable remède contre l'exclusion, c'est l'éducation et le développement économique. Or, ce gouvernement n'a aucune stratégie économique. Sa stratégie, c'est de couper en éducation, couper dans les mesures d'employabilité. Il a déjà coupé des programmes qui visaient spécifiquement à sortir des jeunes de l'aide sociale comme Alternative jeunesse.

Au lieu d'imposer sa vision autoritaire, est-ce que le premier ministre devrait agir en chef d'État et rechercher le consensus en écoutant les citoyens? J'informe le premier ministre que nous déposerons une motion qui enjoint le gouvernement à tenir une consultation sur la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale avant de poursuivre le cheminement du projet de loi n° 70. J'invite le premier ministre à tenir cette consultation, à doter le Québec d'un plan d'ensemble contre la lutte pour l'exclusion sociale.

Est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il acceptera...

• (10 h 30) •

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : J'en serais fort surpris, M. le Président. Ce qu'on va faire plutôt, c'est aller de l'avant avec ce projet de loi là, qui va justement dans la direction du développement économique du Québec, également de la dignité, la dignité des jeunes, M. le Président. C'est important de le rappeler. Je suis certain que personne ici ne peut rester indifférent au fait, M. le Président, que 60 % des primodemandeurs, des gens qui demandent pour la première fois l'aide sociale, sont des gens de moins de 30 ans aptes au travail. Personne ne peut non plus rester insensible au fait que près de 40 % de ces gens qui demandent l'aide sociale pour la première fois viennent de familles elles-mêmes bénéficiaires de l'aide sociale depuis des années. Il n'y a personne qui veut, j'espère, que ces personnes restent là, tout le monde veut qu'elles progressent.

Et ce que nous faisons, M. le Président, c'est les aider, les accompagner pour qu'elles progressent en leur offrant, par exemple, M. le Président, un programme de formation de développement de leurs aptitudes professionnelles, leurs compétences professionnelles, de leurs habilités sociales ou les engageant dans un programme actif d'intégration à l'emploi avec une bonification, j'insiste, une bonification des primes qui étaient auparavant données dans ces circonstances, et même, certaines fois, 0 $ qui était donné, avec, maintenant, une prime de 130 $ pour l'accès à un de ces programmes de formation.

Alors, c'est, au contraire, M. le Président, une façon, pour nous, de réagir au défi démographique du Québec. Nous sommes une des grandes provinces du Canada qui voit sa population active diminuer. C'est un défi énorme qui nous condamne à une croissance économique faible au cours des prochaines années si nous ne réagissons pas par une meilleure adéquation formation-emploi, ce que mon collègue a également écrit dans son projet de loi, ce genre de mesure d'accès à l'emploi actif pour nos jeunes et d'autres mesures liées à l'immigration et la sélection, l'intégration des immigrants. On est exactement dans la bonne direction. Si on veut faire croître l'économie du Québec, il faut aller directement à la racine de nos problèmes, M. le Président, c'est ce que nous faisons.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : M. le Président, notre premier ministre est vraiment conceptuel, il est déconnecté de la réalité des familles. Comme député de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, il doit certainement savoir que le taux de chômage est deux fois plus élevé à Québec.

Alors, en vertu des dispositions de ce projet de loi, peut-il nous dire si nous pourrons couper les prestations d'aide sociale à une mère de famille de Chicoutimi qui refusera de venir travailler à Québec?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, M. le Président, je veux tout de suite rassurer mon collègue, il n'est pas question de déménager personne, il est question d'accompagner les gens et d'accompagner les jeunes. C'est quand même incroyable, M. le Président, de voir l'attitude de l'opposition dans un projet de loi qui fait partie d'une action qui est absolument essentielle. Ça fait des années que les gens disent : Il faut qu'on s'occupe de l'adéquation formation-emploi. Ça fait des années que les gens disent qu'il faut qu'on s'occupe de l'intégration des jeunes en emploi. Personne n'a eu le courage de le faire jusqu'à ce que nous arrivions au gouvernement, et nous allons le faire, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Saint-Jean.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Dignité des jeunes. C'est le gouvernement libéral qui coupe et qui a coupé des programmes d'aide et d'accompagnement pour les jeunes tels que le programme Alternative jeunesse, qui démontrait et qui a démontré des résultats. Est-ce que le ministre de la Solidarité sociale est vraiment à l'aise avec ce projet de loi là? Est-ce qu'il est à l'aise de sortir les familles des régions? Qu'est-ce qui arrivera aux enfants dans les écoles, ils vont aussi changer d'école? Est-ce que c'est un projet de loi du ministre de la Solidarité sociale ou c'est un ministre du président du Conseil du trésor?

Le Président : M. le ministre de l'Emploi.

M. Sam Hamad

M. Hamad : D'abord, M. le Président, on va corriger les faits, là. Une mère avec un enfant, elle a une contrainte temporaire et n'est pas appliquée à ce programme-là. Donc, ce cas-là est réglé.

Deuxièmement, deuxièmement, M. le Président, depuis deux jours, je les écoute, là, leur seul objectif, là, ils nous disent ici de ne pas toucher les gens, les jeunes. Ceux qui sont issus d'une famille à l'aide sociale, touchez-les pas, là. Les jeunes de 29 ans et moins qui arrivent à l'aide sociale, ils nous disent : Touchez-les pas. Dans le fond, ce que vous voulez faire, vous, les péquistes, là, c'est confiner les jeunes, notre plus grande richesse, à l'aide sociale. Ça, c'est votre plan de souveraineté. Ça, c'est votre...

Le Président : En terminant.

M. Hamad : ...plan économique.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! J'entends trop de bruit ici, là. La parole est au député de Saint-Jean pour une deuxième complémentaire... troisième.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : M. le Président, c'est le gouvernement libéral qui a coupé le programme Alternative jeunesse. C'est un programme qui a fait ses preuves. En ce moment, le projet de loi du ministre, c'est un projet de loi sans coeur, c'est un projet de loi inhumain. Ça ne se fait pas, au Québec, de mettre de côté nos jeunes, de faire en sorte que c'est un plan de l'austérité. Ce n'est pas un plan de solidarité, c'est un plan d'austérité. Donc, est-ce que le ministre de la Solidarité peut se lever et avoir encore un peu de poids dans ce Conseil des ministres?

Le Président : M. le ministre de l'Emploi.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Je n'en reviens pas.

Des voix : ...

Le Président : La question a été bien posée, dans l'ordre, je voudrais entendre la réponse ici.

M. Hamad : M. le Président, être inhumain, sans coeur, c'est laisser tomber nos jeunes dans la pauvreté. Ce que nous voulons faire, M. le Président, c'est donner des primes additionnelles, mieux qu'Alternative jeunesse, les accompagner pour gagner leur dignité, pour participer avec tous les citoyens. M. le Président, nous avons une société solidaire, généreuse, et on devrait s'occuper de nos jeunes, pas les confiner à l'aide sociale puis dire : Ce n'est pas bon. Voyons donc, M. le Président, où elle est, la raison? Où elle est, la raison, de laisser tomber nos jeunes dans la pauvreté puis dire : C'est inhumain? Ça, c'est inhumain. Ce qui est humain, M. le Président...

Le Président : En terminant.

M. Hamad : ...c'est aider tous nos jeunes à gagner leur dignité, avoir une job à la fin de la journée.

Le Président : Principale...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Principale, M. le député de Lac-Saint-Jean.

Services aux élèves handicapés ou en difficulté
d'adaptation ou d'apprentissage

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, là, ce qui est inhumain, là, c'est non seulement s'en prendre aux gens sur l'aide sociale, mais de s'en prendre en plus aux élèves qui sont handicapés. Juste à la commission scolaire de Laval, il y avait 82 élèves qui avaient le droit à des services et que, soudainement, du jour au lendemain, on rejette les services auxquels ils avaient droit.

J'ai posé la question au ministre, M. le Président, souvenez-vous, le ministre, il dit : Non, non, rien de nouveau. Pas de nouvelle là-dedans. Mais le ministre a oublié de dire quelque chose aux membres de cette Chambre, M. le Président, là, il a oublié de dire que les problèmes sont survenus depuis qu'ils ont tout centralisé à Québec, là. Mais surtout il a oublié de citer un document interne de son propre gouvernement, et je vais vous citer l'extrait qui dit que «la révision des modalités de financement des [élèves handicapés] permettrait [...] de limiter la croissance des coûts».

Alors là, M. le ministre, vous avez l'occasion, là : Allez-vous avoir l'honnêteté de dire aux membres de cette Assemblée que vous avez coupé dans les services offerts aux élèves en difficulté et que c'est une volonté de votre gouvernement?

Le Président : M. le ministre...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! J'ai... M. le député de...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Le ministre a la parole. M. le député de Lac-Saint-Jean, vous vous adressez à la présidence. M. le ministre, la même chose.

M. François Blais

M. Blais : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, je l'ai dit, je pense, en début de semaine, je le réitère, là, il n'y a pas de nouvelle. Il y a une révision, eh oui, les dossiers sont toujours révisés par le ministère. Ils étaient révisés quand le Parti québécois était là, ils continuent d'être révisés.

Les diagnostics ne sont jamais remis en question, hein? Ce qui est l'enjeu de cette révision-là, c'est de voir si le programme qui est proposé, là, convient bien, là, convient bien à la situation de l'enfant et aux normes que l'on s'est données. Ce n'est pas révisé par des gens qui ne connaissent pas la question comme moi ou encore comme mon vis-à-vis, c'est révisé par des psychologues, des orthopédagogues qui examinent si la demande qui est faite, hein, par la commission scolaire, c'est bien la bonne et si elle est acceptable. Et j'annonce à mon collègue que nous allons continuer à faire ces révisions-là. Elles se faisaient sous le Parti québécois et elles vont continuer. C'est une question de bonne gestion et d'avoir les bonnes approches cliniques avec nos jeunes.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean...

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, là...

Le Président : ...en n'oubliant pas de vous adresser à la présidence.

M. Cloutier : Oui, je vais parler à vous, là, M. le Président. Le ministre a beau parler tranquillement, a beau prétendre qu'il n'y a aucun problème à régler, a beau sortir ses tableaux, mais la réalité, elle... Les faits, ils sont têtus, M. le Président. Hier, la commission scolaire des Monts-et-Marées m'envoie un document. On démontre clairement, là, que, pendant les cinq dernières années, c'était à peu près du un pour un. Tu envoyais ton dossier de diagnostic, puis ensuite le ministère reconnaissait, effectivement, le handicap de l'élève. Mais, depuis que vous êtes là, là, depuis la dernière année, c'est un sur quatre...

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. François Blais

M. Blais : Écoutez, je ne peux pas commenter, là, aujourd'hui le cas particulier, je l'examinerai, là, avec plaisir. Je remercie mon collègue, je remercie mon collègue, là, que, quand je parle de... quand je présente les tableaux factuels que je présente, là, de ne pas ajouter un... au nom de ces tableaux-là, je lui en sais gré.

Je le rappelle, hein, on est dans un processus administratif tout à fait, tout à fait normal, hein, on doit réviser ces dossiers-là. Le but, ce n'est pas de faire des économies, puisqu'on a exactement le même budget pour cette clientèle-là que l'an dernier, mais de s'assurer que, du point de vue clinique tout d'abord, mais aussi du point de vue administratif, ce sont les bons plans d'intervention qui sont présentés par les commissions scolaires.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, est-ce que le ministre nie l'existence du document que j'ai cité? Est-ce qu'il nie la volonté de revoir le processus d'octroi des codes pour les élèves en difficulté? Est-ce que c'est un hasard que j'ai cinq commissions scolaires de cinq régions différentes qui me disent que, depuis qu'on applique des nouveaux critères, on vient couper dans la reconnaissance des élèves en difficulté? Est-ce qu'il me dit, finalement, que tous ceux et celles qui nous écrivent jour après jour pour exprimer qu'ils ont perdu des services, tout ça n'existe pas? Sur quelle planète habite le ministre?

• (10 h 40) •

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. François Blais

M. Blais : Sur la même que mon collègue, M. le Président, je vous rassure, parce que je sais que ça vous inquiète. Donc, pour l'essentiel de ce qui est dit, donc, je ne connais pas le document. Mon collègue va certainement le déposer, ça va me permettre de l'examiner. Ça m'intéresse toujours, mais, pour l'essentiel, il n'y a pas de politique visant à resserrer, restreindre, etc., mais il y a toujours la même politique, il y a toujours le même... Il faut bien expliquer qu'il y a en ce moment déjà un programme, hein, que les commissions scolaires connaissent très bien, et ce programme définit les normes auxquelles, hein, ils peuvent souscrire pour avoir des éléments supplémentaires. Ce programme-là n'a aucunement été changé, à ma connaissance. Je pourrai le vérifier, mais aucunement été changé, on applique les mêmes normes que sous le Parti québécois, à ma connaissance.

Le Président : Principale, M. le député de Gaspé.

Négociation des conventions collectives
dans la fonction publique

M. Gaétan Lelièvre

M. Lelièvre : M. le Président, les offres gouvernementales présentées à nos infirmières, à nos enseignants et aux employés de l'État représentent un réel appauvrissement. En offrant moins que l'indexation à ceux et celles qui soignent nos malades, qui enseignent à nos enfants, le gouvernement dévalorise leur profession. Pourtant, le premier ministre, alors qu'il était ministre de la Santé, a octroyé des augmentations de salaire de 40 % à ses collègues médecins, prétextant un rattrapage avec le reste du Canada. Ce qu'on offre aux employés de l'État, ce n'est pas de la compétitivité, mais de l'appauvrissement. Et ce qu'il offre à la collectivité québécoise, c'est la dévalorisation, carrément, du service public. Le président du Conseil du trésor nous dira probablement qu'il a bonifié ses premières offres, mais personne n'est dupe, il a seulement interchangé des années où il gèlera le salaire de nos infirmières, de nos enseignants et autres employés de l'État.

Est-ce que le président du Conseil du trésor souhaite l'appauvrissement de ceux et celles qui sont au service de tous les Québécois et toutes les Québécoises?

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : M. le Président, d'abord, j'aimerais saluer le député de Gaspé, qui est mon nouveau vis-à-vis de l'opposition officielle concernant les enjeux du Trésor.

Écoutez, je pense que l'opposition officielle n'a pas été attentive au geste extrêmement significatif qui a été posé la semaine dernière par le gouvernement. Par rapport à l'offre initiale, on a rajouté 1,7 milliard de dollars, ce qui est une quantité d'argent qui est considérable, compte tenu des difficultés budgétaires qu'on vit au Québec actuellement, 1,7 milliard de dollars à l'intérieur duquel on est capables de faire des choses aussi novatrices que moderniser nos échelles salariales, régler une bonne partie des problèmes d'équité dans les échelles salariales que nous avons. Et en plus, M. le Président, contrairement à ce que laisse entendre la question du député de Gaspé, le changement dans l'ordre de versement des paramètres, compte tenu du fait qu'il y a eu une augmentation qui a été versée en mars dernier, fait en sorte qu'il n'y a aucun gel de salaire au cours des cinq années visées par la convention collective. Alors, s'il vous plaît, je demanderais respectueusement à l'opposition officielle de s'informer.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Gaspé.

M. Gaétan Lelièvre

M. Lelièvre : M. le Président, 1,7 milliard, ça représente 3 $ de plus par employé de la fonction publique. Ce n'est pas avec ça qu'on va régler notre convention.

Il y a autre chose aussi qui ne fonctionne pas, c'est les offres qui sont dans les régimes de retraite. Le gouvernement a réussi à créer une vague de départs, en hausse de 25 %, notamment dans le domaine de la santé. C'est un bris de contrat que de couper la retraite de ceux et celles qui ont consacré leur vie professionnelle au service de la société. Est-ce que le président du Conseil du trésor peut renoncer à couper dans les régimes de retraite dûment négociés et surtout pleinement capitalisés?

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : M. le Président, je pense que les Québécois se souviendront que l'opposition officielle vient de dire que 1,7 milliard de dollars sortis de leurs poches, ce n'est rien, hein? Alors, ce n'est rien, 1,7 milliard qui sort des poches des Québécois. Alors, c'est ce que dit l'opposition officielle aujourd'hui.

Maintenant, en ce qui concerne la proposition que nous faisons, c'est une proposition qui permet notamment de faire avancer les jeunes dans le secteur public québécois. Un jeune qui va rentrer dans le secteur public québécois avec les offres qu'on va faire va avoir une meilleure perspective de carrière.

Et, oui, il faut s'assurer que le régime de retraite... non seulement il faut assurer sa pérennité, mais il faut assurer que le jeune qui rentre dans le secteur public...

Le Président : En terminant.

M. Coiteux : ...va avoir un coût abordable pour son régime de retraite. C'est exactement ce que nous...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Gaspé.

M. Gaétan Lelièvre

M. Lelièvre : M. le Président, parlons-en, des jeunes. Le président du Conseil du trésor ne pourrait faire mieux s'il voulait éloigner les jeunes diplômés compétents de la fonction publique, il coupe à l'entrée en ramenant des clauses orphelin et il coupe à la sortie en sabrant dans les régimes de retraite.

Va-t-il, oui on non, renoncer à ce recul inacceptable et injustifié? Aujourd'hui, partout à travers le Québec, il y a des travailleurs de l'État qui attendent votre réponse.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Des voix : ...

Le Président : S'il vous... Il n'y a qu'une personne ici qui a le droit de parole, c'est M. le président du Conseil du trésor.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : On notera la grande affinité entre le groupe de la seconde opposition et l'opposition officielle. Évidemment, on a noté qu'il y a eu un rapprochement très important au cours des derniers mois entre la deuxième opposition et la première opposition. D'ailleurs, le chef de la deuxième opposition demande à ceux de la première opposition de se joindre à lui parce que...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! C'est bruyant. Il n'y a qu'une personne ici qui a le droit de parole, c'est le président du Conseil du trésor.

M. Coiteux : M. le Président, dans ce rapprochement très marqué, que tout le monde remarque, donc, ils se sont joints dans la confusion, M. le Président, parce qu'il n'y a aucune clause orphelin dans la proposition. Au contraire, les nouvelles échelles salariales, nettement plus avantageuses pour 95 % des employés du secteur...

Le Président : En terminant.

M. Coiteux : ...public, s'adressent aux jeunes comme aux anciens, M. le Président.

Le Président : Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Hausse de la taxe sur l'essence

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, l'économie du Québec tourne au ralenti, la croissance économique au Québec est moins forte que chez nos voisins, et le résultat, c'est que, pour compenser, le gouvernement libéral, depuis son arrivée, a augmenté, en moyenne, les taxes des familles de 1 500 $ pour compenser sa mauvaise performance économique.

Et, après avoir pensé augmenter la TVQ puis avoir ensuite reculé, le ministre des Finances, maintenant, s'intéresse à la taxe sur l'essence. Il faut savoir, M. le Président, que la taxe sur l'essence est déjà 0,05 $ le litre plus élevée au Québec qu'en Ontario. Donc, soyons clairs, tout le monde ici est d'accord pour lutter contre les changements climatiques. D'ailleurs, c'est pour ça qu'on a une bourse du carbone. La bourse du carbone augmente déjà le prix de l'essence, mais là le premier ministre veut, en plus, ajouter une taxe sur l'essence.

Est-ce qu'il peut rassurer les Québécois ce matin puis s'engager à ne pas augmenter la taxe sur l'essence?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Il n'y a qu'une personne qui a le droit de parole ici, et c'est le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, je salue avec bonheur la première expression claire de la préoccupation de la deuxième opposition pour les changements climatiques. Je pense que ça mérite d'être noté. Et, comme il l'a dit, M. le Président, comme il l'a dit, la bourse du carbone... ou le marché du carbone, plutôt, est un outil très important, un des outils importants dans la lutte que nous poursuivons contre les changements climatiques.

Maintenant, s'il poursuit ses lectures... Je sens qu'il a commencé ses lectures sur les changements climatiques. S'il les poursuit, il constatera, M. le Président, que, partout dans le monde, ils s'accompagnent également de ce type de marché de carbone ou taxe sur le carbone, ce qu'on appelle l'écofiscalité, mot un peu compliqué, je le reconnais, cependant, qui comprend, d'une part, des modifications fiscales pour encourager les bons comportements sur l'environnement et d'autres pour les rendre moins attrayants. Et c'est ce que font tous les pays de la planète, et c'est ce que va étudier le Québec de plusieurs façons, M. le Président.

Maintenant, l'autre chose que fait constamment notre collègue de la deuxième opposition : il veut arrêter les débats avant même qu'ils commencent, il veut s'assurer que ce soit lui qui détermine les orientations budgétaires et fiscales. Comme les citoyens lui ont rappelé il y a quelques jours, c'est nous qui formons le gouvernement, c'est nous qui allons déposer les orientations fiscales et budgétaires, et il pourra les commenter par la suite.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe de l'opposition, en invitant votre collègue M. le député de La Peltrie à être un petit peu plus silencieux. M. le chef.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Les Québécois n'apprécient pas l'arrogance, M. le Président. Et tout le monde dans cette Chambre, là, est d'accord pour dire qu'il faut réduire les gaz à effet de serre au Québec, puis la bourse du carbone, c'est déjà de l'écofiscalité. Mais là ce qu'on veut savoir, c'est si le premier ministre veut rajouter par-dessus ça une autre taxe. Parce qu'il a beau essayer de se draper de vert, là, dans le fond, là, les gens ne sont pas dupes, il va toujours piger plus dans leurs poches. Donc, je répète ma question : Est-ce qu'il s'engage à ne pas augmenter la taxe sur l'essence?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, ce genre d'argument n'a pas fonctionné dans les élections partielles, il ne fonctionne pas plus aujourd'hui. Les Québécois et les Québécoises savent très bien que ce gouvernement a été élu avec un mandat précis et un engagement précis, celui d'abolir la taxe santé et donc de diminuer de façon importante le fardeau fiscal des Québécois, qui auront plus d'argent dans leurs poches, M. le Président.

Et nous le répétons avec fierté, cet engagement. Et, comme les médias ont rapporté récemment, M. le Président, le fait que nous avons déjà rempli plus de 50 % de nos engagements après moins de deux ans au gouvernement, nous allons continuer dans la même voie, et, oui, nous allons remplir notre engagement d'abolition de la taxe santé, et, oui, nous allons remplir notre engagement de baisser le fardeau fiscal des Québécois et de faire en sorte surtout, M. le Président, que le Québec demeure un leader sur le plan environnemental...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...et de la lutte aux changements climatiques.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, tout le monde qui nous écoute vient de noter qu'encore une fois le premier ministre ne répond pas à la question. Il nous dit qu'il veut baisser le fardeau fiscal, mais, depuis qu'il est là, il l'a augmenté de 1 500 $. 1 500 $ par famille, ce n'est quand même pas rien.

Est-ce qu'il peut reconnaître que, lorsqu'on augmente la taxe sur l'essence, on augmente le fardeau fiscal? On ne le diminue pas, on l'augmente. Donc, je répète ma question une dernière fois : Est-ce qu'il peut s'engager à ne pas augmenter la taxe sur l'essence?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, M. le Président, comme d'habitude, il manque la moitié de l'histoire parce que notre collègue devrait également dire aux Québécois que, lorsque le gouvernement du Québec, à travers leurs taxes et leurs impôts, subventionne à près de 8 000 $ l'achat d'un véhicule électrique, 4 000 $ l'achat d'un véhicule rechargeable et hybride, c'est un geste qui va dans l'autre direction, ce qui illustre tout à fait, M. le Président, ce que j'ai tenté de lui expliquer tantôt. C'est ce qu'on appelle l'écofiscalité, qui est beaucoup plus que l'essence, en passant, beaucoup plus large et beaucoup plus compliqué. On aura l'occasion d'avoir des débats ici là-dessus, d'ailleurs. Ça comprend également des mesures qui sont positives pour les contribuables, oui, le portefeuille. Quand tu reçois un chèque de 8 000 $, c'est bon pour ton portefeuille.

• (10 h 50) •

Le Président : Principale, M. le député de Groulx...

Une voix : ...

Le Président : De Blainville.

Gestion des effluents d'eaux usées municipales

M. Mario Laframboise

M. Laframboise : Blainville. M. le Président, j'ai vraiment été étonné hier, même déçu, d'apprendre que, les matières fécales, les condoms, les autres rejets qui viennent avec le déversement de 8 milliards... d'eaux usées dans le fleuve Saint-Laurent, en plus des autres débordements d'égouts qui souillent les cours d'eau du Québec chaque année en raison de stations d'épuration municipales désuètes ou mal adaptées, eh bien, le ministre des Affaires municipales s'en lave carrément les mains. Pour lui, c'est la responsabilité des municipalités. Qu'elles s'arrangent, qu'elles se dotent des infrastructures nécessaires. On est loin de l'autonomie municipale. Ça, c'est de l'abandon pur et simple, M. le Président.

Pendant qu'il impose des coupures récurrentes aux villes de 300 millions, les nouvelles exigences de gestion des effluents d'eaux usées coûteront 9,5 milliards aux municipalités au cours des prochaines années. Le ministre l'a échappé, hier. Je lui donne la chance de se reprendre aujourd'hui. Que fera-t-il pour rassurer les citoyens et les maires du Québec?

Le Président : M. le ministre des Affaires municipales.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : Bien, d'abord, une bonne façon de rassurer les maires du Québec, c'est d'assurer qu'il y ait un gouvernement libéral au Québec parce que c'est le seul gouvernement qui a signé non seulement deux pactes fiscaux avec les municipalités, mais qui a signé récemment un accord extraordinaire qui est un accord de partenariat, M. le Président, dans lequel on dit à tous les maires du Québec... Et d'ailleurs les maires du Québec le savent bien, le député de Blainville devrait le savoir, puisque 80 % des maires de l'Union des municipalités du Québec ont voté en faveur de l'accord, 75 % des maires de la fédération québécoise ont été d'accord, le maire de Montréal et le maire de Québec — là, je pense qu'on doit être rendu à peu près à 90 % de la population représentée par les maires — ont salué cet accord de partenariat. Pourquoi? Parce qu'il prévoit une prévisibilité, M. le Président, de financement des municipalités, des services qu'elles ont à offrir et des infrastructures, notamment en matière d'épuration des eaux.

Et d'ailleurs j'en profite pour le dire, parce qu'il semble, d'après la question, que ce soit le far west en matière d'épuration des eaux au Québec, 99 % des municipalités au Québec sont déjà raccordées à des systèmes d'épuration des eaux. Toutes les municipalités du Québec ont l'obligation...

Le Président : En terminant.

M. Moreau : ...de mettre en application le règlement sur l'évacuation des eaux usées des résidences...

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Blainville.

M. Mario Laframboise

M. Laframboise : M. le Président, le ministre le sait, 45 000 déversements annuellement. Je veux lui donner une chance. Il y a un programme actuel qui est de 550 millions. Les besoins d'investissement, on parle de 9,5 milliards, et ce, pendant qu'il a coupé de 300 millions dans les transferts aux villes.

Le ministre s'engage-t-il à négocier avec le nouveau gouvernement fédéral — et je lui donne une chance — pour que soit bonifiée l'aide d'Ottawa pour la gestion des eaux usées, et ce, dans l'entente Fonds Chantiers Canada-Québec qui se fait toujours attendre?

Le Président : M. le ministre des Affaires municipales.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : M. le Président, les négociations qui ont été les plus fructueuses avec le gouvernement fédéral, de tous les temps, je pense, ça a été les négociations qui ont été conduites par un gouvernement lorsque le leadership était assuré par le Parti libéral du Québec. Alors, on peut rassurer les municipalités sur cette question-là.

L'autre élément que la question soulève, c'est la mise en application du Règlement sur les ouvrages municipaux d'assainissement des eaux usées, qui prévoit qu'à l'horizon de 2021 toutes les municipalités du Québec, dans le faible pourcentage de ceux qui ne sont pas encore équipés de systèmes d'épuration, devront l'être et devront avoir des systèmes qui sont conformes.

Le Président : En terminant.

M. Moreau : En terminant, M. le Président, nous avons rehaussé le financement municipal pour les systèmes...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Terrebonne.

M. Lemay : De Masson.

Le Président : Masson, excusez.

M. Mathieu Lemay

M. Lemay : M. le Président, en trois semaines, le comité d'experts fédéral est arrivé avec des solutions concrètes, ce que le ministre de l'Environnement n'a pas été capable de faire en 18 mois.

Est-ce que le ministre reconnaît que son amateurisme entache aujourd'hui la réputation du Québec partout dans le monde et qu'il s'en va à Paris avec une carte d'affaires souillée comme pour le cafouillage des autorisations concernant Cacouna? Le ministre s'engage-t-il à déclencher une enquête administrative interne sur le «flushgate»?

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Dans le dossier dont on parle, il faut bien comprendre que la conclusion du gouvernement fédéral était la même que celle du gouvernement du Québec, c'est-à-dire qu'un déversement planifié, de loin, était la meilleure option par rapport à un déversement non planifié et que les conséquences dudit déversement non planifié sur l'environnement, elles, allaient être vraiment, véritablement, dévastatrices sur le fleuve. Alors, nous avons fait nos devoirs, encore une fois basés sur la science, le gouvernement fédéral est arrivé aux mêmes conclusions que nous, et, depuis qu'on parle de ce dossier-là ici, M. le Président — ça fait six semaines environ — personne, de l'autre côté, personne, quelque parti que ce soit...

Le Président : En terminant.

M. Heurtel : ...n'a proposé une alternative.

Le Président : Principale, M. le député de Berthier.

Encadrement de l'abattage rituel des animaux

M. André Villeneuve

M. Villeneuve : M. le Président, on étudie actuellement en commission parlementaire un projet de loi qui affirme que l'animal est un être sensible. Le ministre refuse d'écrire clairement dans le projet de loi qu'avant l'abattage d'un animal celui-ci soit insensibilisé. Nous avons proposé au ministre de fermer cette brèche. Tout le monde doit, de façon équitable et en tout respect de l'animal, s'assurer qu'il soit insensibilisé avant l'abattage. On ne pourrait s'y soustraire sous aucune raison, que ce soit le coût de production, la logistique ou l'abattage rituel. Le ministre ne veut pas le faire.

Pourquoi le ministre refuse-t-il d'éliminer la souffrance des animaux lors de l'abattage?

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi) : Oui, M. le Président. Le projet de loi que nous avons déposé et qui a été accueilli à l'unanimité des membres de cette Assemblée modifie le statut de l'animal. Au moment où nous nous parlons, parce que ça prend du temps en commission parlementaire — puis c'est le droit légitime des parlementaires de prendre du temps — l'animal est considéré comme un bien meuble. Tant et aussi longtemps que le projet de loi ne sera pas adopté, l'animal va continuer à être considéré comme un bien meuble, ce qui fait en sorte que le Québec, lorsqu'on le regarde de l'extérieur, est considéré comme le meilleur endroit sur la planète Terre pour élever des animaux dans des conditions qui sont inacceptables.

Sur le plan humain, c'est inacceptable. Sur le plan commercial, ça commence à porter atteinte à nos exportations parce que les consommateurs à travers le monde veulent s'approvisionner à partir d'une société où les animaux ne sont pas considérés comme des biens meubles et d'une société où les animaux sont traités convenablement. C'est ce que le projet de loi prévoit, et j'invite le député, s'il a une question additionnelle, à lire correctement devant l'Assemblée nationale l'article 12 dudit projet de loi qui traite de l'euthanasie...

Le Président : En terminant.

M. Paradis (Brome-Missisquoi) : ...et de l'abattage.

Le Président : Complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : La réalité, c'est que l'article 12 abaisse la norme générale de façon à ce que des pratiques inacceptables faisant souffrir l'animal restent permises. C'est ça, la vérité. Ces pratiques, on les retrouve, la plupart du temps, dans l'abattage rituel. Alors, pourquoi est-ce que le gouvernement libéral refuse de garantir qu'aucun animal ne soit abattu dans la souffrance? S'il croit à ce qu'il dit, qu'il l'écrive dans sa loi.

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi) : Oui. Une fois le statut de l'animal changé de bien meuble — c'était la situation sous le gouvernement du Parti québécois — à un être...

Une voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Paradis (Brome-Missisquoi) : Je m'excuse, M. le chef de l'opposition, mais c'est en français que je viens de vous le dire, là, sous le Parti québécois, c'était considéré...

Le Président : S'il vous plaît! On cesse de s'interpeller ici, M. le chef de l'opposition. M. le ministre de l'Agriculture, veuillez terminer, s'il vous plaît.

M. Paradis (Brome-Missisquoi) : Oui, M. le Président. Ça, c'est la partie civiliste du projet de loi. Il y a une partie common law. Dans la partie common law, les trois juridictions au Canada qui viennent en tête de liste lorsqu'on classe les juridictions, c'est respectivement le Manitoba, l'Ontario et la Colombie-Britannique. Ces provinces-là s'inspirent de la norme du règlement fédéral sur l'abattage, et c'est ce qui se passe à travers le pays, sauf la Colombie-Britannique, qui a fait un pas vers l'avant. Et ce que le Québec a fait avec l'article 12, c'est de s'inspirer de la meilleure législation au Canada, celle de la Colombie-Britannique.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : La réalité, c'est que l'article 12 abaisse la norme générale, il baisse les normes pour conserver l'abattage rituel, inacceptable dans certains cas. Ce que nous proposons et ce à quoi les Québécois s'attendent, c'est qu'un animal soit insensibilisé avant d'être abattu, qu'on élimine la douleur inutile. Aucune exception. L'abattage rituel doit inclure ça et doit respecter ça. C'est à ça que les Québécois s'attendent, alors pourquoi ne pas l'écrire clairement dans la loi?

Une voix : ...

Le Président : S'il vous plaît. M. le ministre de l'Agriculture.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi) : Oui. Lorsqu'elle fera une lecture à tête reposée et calmement, la députée va réaliser que c'est effectivement ce que l'on fait. Cet article 12 est...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Paradis (Brome-Missisquoi) : Écoutez, là, on a entendu en commission parlementaire 41 groupes de personnes intéressées. Et, à part la députée, qui s'est jointe — puis c'est son droit le plus strict — à la dernière minute en commission pour venir faire état de ses états d'âme, sans avoir entendu ces 41 groupes, est venue manifester...

Nous, ce qui nous intéresse, c'est que le Québec devienne la province où les animaux sont considérés comme des êtres sensibles, des êtres qui ont des impératifs biologiques et qu'on les traite correctement de façon à ce qu'on cesse d'être des derniers de classe...

Le Président : En terminant.

M. Paradis (Brome-Missisquoi) : ...derniers de classe que nous a valu le passage du Parti québécois à la tête du gouvernement.

Le Président : Principale, M. le député de Jonquière.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Gaudreault : Oui...

• (11 heures) •

Le Président : M. le député de Matane.

Réforme du financement des élections municipales

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : ...élus municipaux ont été élus comme députés fédéraux. Plusieurs élections partielles seront donc déclenchées dans ces municipalités.

Après des scandales de financement politique, entre autres à Laval, à Montréal, à Boisbriand, à Mascouche, notre gouvernement avait fait adopter la loi n° 26, qui instaurait un régime transitoire de financement politique municipal en vue des élections de 2013. Ce régime faisait passer les dons des particuliers de 1 000 $ à 300 $. Par la suite, nous avions proposé un régime permanent de financement avec le projet de loi n° 53, mais l'élection des libéraux et la nomination du ministre actuel a eu pour effet de tabletter le projet. Avec le projet de loi n° 53, on fixait les mêmes standards aux élus municipaux qu'aux députés en ramenant le seuil maximal des dons à 100 $.

Est-ce que le ministre des Affaires municipales va poursuivre notre travail afin de réduire à son maximum l'influence de l'argent sur nos élus et déposer un nouveau projet de loi sur le financement des élections municipales?

Le Président : M. le ministre des Affaires municipales.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : M. le Président, s'il y a une chose que je ne ferai pas, c'est de poursuivre leur travail aux affaires municipales, parce que, quand ils ont été là, ils ont démoli à peu près tout ce qui existait dans ce domaine-là, notamment en réduisant le financement... et c'est le député de Jonquière qui était là, qui a fait adopter un décret pour réduire le rehaussement du financement des infrastructures municipales dans les petites municipalités, alors qu'il est lui-même issu d'une région. Alors, la réponse à votre question, c'est... Est-ce que je vais continuer votre travail? Non, certainement pas.

Cependant, sur la question du financement, je comprends que le député de Jonquière a eu écho du travail que nous faisons, et, éventuellement, on va répondre à cette question par le dépôt d'un projet de loi. Mais, non, nous ne nous inspirerons jamais de ce qu'il a fait lorsqu'il était ministre à temps partiel des Affaires municipales, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui, M. le Président, si j'étais...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! D'un côté comme de l'autre, là. Il y a une personne qui a le droit de parole ici, c'est le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, puis je vais m'en servir pour dire que, si j'étais à la place du ministre, je me garderais une petite gêne, hein? C'est lui qui a dit qu'il n'avait pas de temps de s'occuper de l'habitation. Là, il se voit attribuer la Sécurité publique. Ça fait qu'il devrait faire attention un peu, parce que nous, quand on était là, de 2000 à 2014, on a fait le ménage que les libéraux ont refusé de faire : Laval, Montréal, Mascouche, une loi sur le financement municipal, des élections municipales, une loi pour suspendre les élus accusés de corruption, M. le Président.

Est-ce que le ministre va abaisser le financement des élections municipales à 100 $ par électeur?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le ministre des Affaires municipales.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : M. le Président, j'ai déjà dit du député de Jonquière qu'il avait été ministre à temps partiel. Je ne savais pas qu'il était député à temps partiel, il a manqué une bonne partie de hockey.

Je vais lui dire ce que nous avons fait depuis que nous sommes aux affaires. On a conclu deux pactes fiscaux; il n'a jamais été capable d'en faire signer un. On a lancé trois grands chantiers sur la gouvernance, et nous avons un accord de partenariat avec les municipalités. On est en train de réviser la loi sur Montréal. On est en train de réviser la loi sur Québec. On est en train de réviser l'ensemble des lois municipales, M. le Président. On a doté Montréal d'un inspecteur général. On a réglé le sous-financement des régimes de retraite municipaux. On a augmenté le financement des infrastructures, qu'il avait lui-même coupé. Alors, on n'a pas de leçons à recevoir d'un ministre à temps partiel à l'époque et d'un député qui semble manquer les travaux de l'Assemblée nationale, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Jonquière. M. le député.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : M. le Président, on parle de la lutte à la corruption. On parle de la démocratie, la confiance dans le monde municipal. Le ministre, par son inaction, il est en train de laisser voir que la corruption du temps de Jean Charest revient en force, M. le Président.

Alors, écoutez, c'est bien simple, là, ça ne prend pas de temps. Moi, je peux le déposer, ça m'a pris cinq minutes, là, le projet de loi n° 53, que j'ai déposé en novembre 2013, je le dépose ici. Le ministre a juste à le prendre, puis on va l'adopter avant Noël, il va être en application pour les élections partielles qui s'en viennent dans les municipalités.

Document déposé

Le Président : D'abord, est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du projet de loi... enfin, du document? Dépôt?

Des voix : ...

Le Président : Adopté. Ceci étant dit, là, on va commencer à cesser de s'imputer des motifs de part et d'autre, là, sur toutes sortes de choses. M. le ministre de...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît. S'il vous plaît! M. le ministre, c'est à vous la parole.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : Merci, M. le Président. Si on voulait tourner les coins ronds, on ferait exactement ce que le député de Jonquière nous demande, c'est-à-dire prendre son projet de loi puis l'adopter, parce que c'est un projet de loi qui est mal foutu. Et ce qu'on est en train de faire, M. le Président, c'est de regarder l'ensemble de ce qui se fait en matière d'élections municipales et de financement des élections municipales. Et, oui, on va corriger le tir dans ce domaine-là pour unifier ce qui se fait en matière de financement. Mais ce que nous ne ferons jamais, il me permet de le répéter, c'est de suivre son exemple de ce qui a été la plus grande démolition, notamment, des programmes d'infrastructure et de la démocratie dans le milieu municipal...

Le Président : En terminant.

M. Moreau : ...alors qu'ils étaient aux affaires de l'État. Ça, on ne fera pas ça.

Le Président : Principale, M. le député de Chambly.

Accueil et intégration de réfugiés syriens

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, en janvier prochain, la commission scolaire de Montréal accueillera une vague sans précédent de 2 000 jeunes réfugiés syriens. On est fiers de les accueillir, mais encore faut-il bien les intégrer. Ces jeunes méritent qu'on prenne enfin soin d'eux, qu'on leur offre toute l'aide possible, qu'on les accompagne dans leur parcours de vie puis qu'on les amène à la réussite scolaire.

Mais, dans tous les dossiers relatifs à l'éducation, le gouvernement libéral déçoit. On ne peut pas se permettre de laisser l'accueil et l'intégration tomber dans les craques comme ce qui se passe à peu près avec tout le reste en éducation. Le message qu'on reçoit sur le terrain, c'est que les commissions scolaires ne sont pas prêtes, les écoles ne sont pas prêtes. C'est mal parti.

Quel est le plan du gouvernement pour accueillir les jeunes réfugiés, les franciser, leur donner tous les services professionnels pour qu'ils puissent vraiment s'intégrer chez nous?

Le Président : Mme la ministre de l'Immigration.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : M. le Président, je remercie le député de Chambly parce que c'est une question très importante, c'est l'état de préparation de la société québécoise, l'état de préparation de nos institutions scolaires, hospitalières et les organismes communautaires.

Alors, face à la pire crise humanitaire depuis la Deuxième Guerre mondiale, moi, je vous dirais que les Québécois de partout au Québec se sentent très interpellés, et notre gouvernement aussi, et c'est pour ça qu'on a fait une annonce au mois de septembre pour accueillir 3 650 réfugiés syriens. Et, depuis cette annonce, évidemment, avec le gouvernement fédéral, nous avons accéléré... grâce à des gestes du gouvernement fédéral, nous avons accéléré le traitement des dossiers, et on attend... et on ne peut pas vous confirmer l'admission est quand, l'admission, mais il y aura plus d'admissions dans les prochaines semaines, prochains mois.

Maintenant, j'ai rencontré le ministre fédéral par rapport aux intentions du gouvernement fédéral. Je lui ai montré notre ouverture et notre volonté de travailler pour accueillir ces réfugiés syriens. Nous attendons... Et évidemment le ministre fédéral a accueilli notre offre avec beaucoup d'ouverture. Nous attendons évidemment...

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, je sais qu'on va les accueillir, on est bien empathiques, on veut les accueillir, mais est-ce qu'on va être capables de les scolariser, de les franciser, de les intégrer? C'est difficile à croire parce qu'en ce moment il n'y a même pas assez de personnel dans nos écoles pour s'occuper des élèves en difficulté, en ce moment, là. Pourquoi? Bien, parce que le gouvernement libéral vient de couper dans les professionnels qui aident les enfants en difficulté. Les jeunes syriens vont avoir besoin de professionnels.

Comment le ministre peut-il nous garantir que les écoles vont être prêtes?

Le Président : Mme la ministre de l'Immigration.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Oui. Alors, il faut comprendre qu'en matière d'immigration et surtout d'accueil et d'installation des réfugiés, dépendant des orientations du gouvernement fédéral évidemment, il y aura une entente, et, dans cette entente, évidemment, nous négocions les dépenses encourues qui seraient prévues. Et il y aurait un accord comme on a fait avec les Kosovars que les coûts additionnels qu'engendraient donc les volumes seraient assumés par le gouvernement fédéral, et le ministre s'est montré très ouvert.

Alors, pour l'instant, il n'y a pas de confirmation d'admission, hein, c'est important de le reconnaître, il n'y a pas de confirmation d'admission. Ce qui est important, c'est que le Québec s'occupe — évidemment, si c'est des réfugiés pris en charge par l'État — de l'admission...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, je n'ai pas de réponse aux questions, absolument pas. Je pose des questions claires sur l'intégration des jeunes dans nos écoles, on nous parle d'ententes. Mais on est dans le flou, sérieux. Le problème, c'est que le gouvernement a un manque de crédibilité en éducation. C'est peut-être pour ça que le ministre de l'Éducation ne se lève pas. Mais comment on va croire... quand le gouvernement nous dit qu'il est prêt à accueillir les jeunes Syriens quand, en ce moment, à Montréal, à Laval, les écoles débordent?

La question : Combien d'argent on va recevoir du fédéral pour nous aider?

• (11 h 10) •

Le Président : Mme la ministre de l'Immigration.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Comme j'ai eu l'occasion de dire, M. le Président, évidemment, j'attends la décision du gouvernement fédéral. Mais il faut savoir qu'évidemment, lorsque nous ciblons les volumes que nous pouvons admettre, c'est justement à la lumière de notre capacité d'accueil et d'intégration. La francisation est toujours au rendez-vous. Et il faut savoir qu'on vise aussi l'installation dans toutes les villes et régions du Québec, et je tiens à le souligner, c'est important. Pour tous les députés qui sont ici, en Chambre, les villes partout au Québec sont intéressées à accueillir et intégrer ces jeunes enfants, les enfants et les familles syriennes.

Le Président : En terminant.

Mme Weil : Mais nous n'en sommes pas rendus là, soyez patients. J'aurai des informations. Nous allons négocier...

Le Président : Principale, M. le député de Saint-Jean.

Restructuration des services de laboratoire des hôpitaux

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Dernièrement, la direction de l'Hôpital du Haut-Richelieu recevait une lettre du ministre de la Santé lui demandant de stopper immédiatement les travaux d'agrandissement. Pourquoi, M. le Président? Pour transférer plus de 70 % des analyses au laboratoire de l'Hôpital Charles-Le Moyne, et ce, malgré que notre nouveau laboratoire est presque prêt, et il devait ouvrir en février prochain. Ça aura pris 10 ans, cinq annonces de ministres pour obtenir l'agrandissement de notre hôpital au coût de 109 millions, mais ça aura pris seulement une lettre pour tout stopper.

Maintenant, le gouvernement va devoir payer des pénalités dues aux délais dans les travaux, payer pour transformer notre laboratoire, qui est presque prêt, en on ne sait pas trop quoi encore et, en plus, éventuellement payer pour agrandir le laboratoire de Charles-Le Moyne, à seulement 20 kilomètres. Même la ville de Saint-Jean-sur-Richelieu a adopté à l'unanimité une résolution demandant la reprise des travaux.

Quand le ministre va annoncer la reprise des travaux? On en a besoin maintenant.

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Alors, M. le Président, le député aborde un sujet qui a une certaine complexité. Je vais essayer de simplifier pour le bénéfice du député. Alors, M. le Président...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Barrette : C'est complexe, vous allez voir dans la réponse.

Des voix : ...

Le Président : Bien là, moi, je vais me citer moi-même et vous dire qu'on va manquer de temps pour une question additionnelle, ça m'apparaît assez clair. M. le ministre, à vous la parole.

M. Barrette : Comme l'histoire récente l'a démontré, M. le Président, le Parti québécois est peu enclin à s'occuper de la gestion efficace, notamment... pas simplement des finances publiques, mais particulièrement en santé. Ce n'est pas dans son ADN, M. le Président.

M. Drainville : ...

Le Président : M. le leader de l'opposition.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Drainville : M. le Président, il y a un député élu, dûment élu, en cette Chambre, qui se lève au nom de ses citoyens, qui pose une question légitime, d'intérêt public, puis on a droit au mépris puis à l'arrogance du ministre de la Santé. Ça peut-u finir par arrêter?

Le Président : M. le leader du gouvernement.

Des voix : ...

Le Président : Ça, on a déjà... Je voudrais vous rappeler qu'on a déjà pris des dispositions...

Des voix : ...

Le Président : Hé, hé! Monsieur. M. le député de Sanguinet. M. le député de Sanguinet. M. le député.

Des voix : ...

Le Président : O.K. On en a assez entendu. Voulez...

Des voix : ...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : M. le Président, cette semaine, on a assisté à des questions de l'opposition officielle qui ne sous-entendaient pas, qui disaient qu'on souhaitait des déversements et qu'on favorisait les gangs de rue. Je pense que, si vous commencez à regarder de votre côté pour prendre la parole, de façon correcte, sans des exagérations débordantes comme celles que vous avez, peut-être qu'on va être capables d'avoir des débats qui seront un peu plus élevés. Mais, franchement, vérifiez un peu votre ton et vos propos. C'est un peu exagéré, la façon dont vous traitez les collègues à l'Assemblée.

Le Président : M. le leader de l'opposition.

M. Drainville : S'il veut parler d'accumulations puis de débordements, là, on va en parler, d'accumulations puis de débordements. On en a ras le pompon du ton de ce ministre de la Santé, qui est méprisant...

Des voix : ...

Le Président : En derniers mots, M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : ...M. le Président, je pense qu'on devrait arrêter là. Je vous...

Des voix : ...

M. Fournier : J'aimerais vous citer ce que le leader de l'opposition disait le 15 septembre dernier : «Le problème, c'est qu'on finit parfois par enterrer notre fond, notre bon fond par un ton détestable, criard, trop partisan.» Peut-être que vous devriez vous relire et apprendre de ce que vous avez déjà...

Le Président : M. le ministre de la Santé, veuillez continuer votre réponse, s'il vous plaît.

M. Barrette : En tant qu'élu, dûment élu, pour représenter les intérêts de la population, M. le Président, je vous ferai remarquer que je félicitais le député de Saint-Jean pour aborder un sujet complexe que je vais essayer de simplifier. Je vais le faire quand même.

Alors, nous avons dans l'intérêt de gérer correctement les finances de l'État, nous, et il se trouve qu'il y a des économies à faire dans le système des laboratoires du Québec. Et, pour faire ces économies d'échelle là, il faut faire certaines restructurations. Et, quand le député se lève en insinuant ceci ou cela, il me met en cause, et, M. le Président, je prends ce moment pour l'informer correctement.

Le Président : En terminant.

M. Barrette : Les sommes d'argent qui ont été dépensées...

Le Président : Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, nous en sommes à la rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation de ces motions, je suis prêt à céder la parole à M. le député de Granby et leader de la deuxième opposition.

Demander au gouvernement de s'engager à ne
pas introduire de nouveaux péages sur les
infrastructures routières existantes au Québec

M. Bonnardel : M. le Président, je demande le consentement pour déposer la motion suivante conjointement avec la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de s'engager à ne pas introduire de nouveaux péages sur les infrastructures routières existantes au Québec.»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Nous proposons l'adoption sans débat, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Oui, M. le leader de la deuxième opposition.

M. Bonnardel : ...motion.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, le vote par appel nominal est demandé. Qu'on appelle les députés.

• (11 h 17 — 11 h 18) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion présentée par M. le leader de la deuxième opposition. Et je vais lire le texte de cette motion. J'espère de la lire en silence. M. le leader du gouvernement, alors, MM. les députés, je vous demanderais bien de cesser de vous interpeller de la sorte. Alors, je vais relire le texte de la motion sur laquelle nous allons nous prononcer :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de s'engager à ne pas introduire de nouveaux péages sur les infrastructures routières existantes au Québec.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe : M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), M. Lemay (Masson), Mme Lavallée (Repentigny), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Paradis (Lévis), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Jolin-Barrette (Borduas).

M. Fournier (Saint-Laurent), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Coiteux (Nelligan), M. Moreau (Châteauguay), Mme David (Outremont), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette (La Pinière), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M. Blais (Charlesbourg), Mme St-Pierre (Acadie), M. Reid (Orford), Mme Boulet (Laviolette), Mme Vallières (Richmond), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Girard (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Matte (Portneuf), M. Simard (Dubuc), M. Tanguay (LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Rousselle (Vimont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Fortin (Sherbrooke), M. Fortin (Pontiac), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Boucher (Ungava), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Auger (Champlain), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), Mme Montpetit (Crémazie), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau).

M. Péladeau (Saint-Jérôme), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Marceau (Rousseau), M. Therrien (Sanguinet), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre (Taillon), M. Traversy (Terrebonne), M. Lelièvre (Gaspé), M. Leclair (Beauharnois), M. Gaudreault (Jonquière), Mme Maltais (Taschereau), M. LeBel (Rimouski), Mme Hivon (Joliette), M. Lisée (Rosemont), M. Cousineau (Bertrand), M. Rochon (Richelieu), M. Villeneuve (Berthier), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Kotto (Bourget).

Mme David (Gouin), M. Khadir (Mercier), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), Mme Roy (Arthabaska).

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions?

Sinon, M. le secrétaire général, pour le résultat de ce vote.

Le Secrétaire : Pour :  103

                     Contre :               0

                     Abstentions :       0

• (11 h 20) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, la motion est adoptée.

Toujours à la rubrique des motions sans préavis, je cède la parole à Mme la ministre des Relations internationales.

Souligner le 70e anniversaire de l'Organisation des
Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture

Mme St-Pierre : Merci, M. le Président. M. le Président, je sollicite le consentement de l'Assemblée nationale pour débattre de la motion suivante conjointement avec la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, le député de Deux-Montagnes, la députée de Gouin et enfin la députée d'Arthabaska :

«Que l'Assemblée nationale souligne le 70e anniversaire de fondation de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et qu'elle rappelle que c'est à Québec, le 16 octobre 1945, que cette agence onusienne a vu le jour;

«Qu'elle salue le rôle central que la FAO a joué, au fil des décennies, face aux problèmes de la faim et de la malnutrition;

«Qu'elle souligne la coopération internationale que la FAO a suscitée autour de l'enjeu de la sécurité alimentaire;

«Qu'elle exprime sa reconnaissance aux générations d'experts et de chercheurs, dont plusieurs Québécois qui y ont oeuvré;

«Enfin, qu'elle souhaite tout le succès possible à la FAO dans le contexte des défis à venir, dont la résilience de l'agriculture mondiale face aux changements climatiques.»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Oui, M. le Président, il y a consentement pour un débat. Nous proposons environ deux minutes par intervenant, à commencer par notre ministre des Relations internationales, l'auteure de la motion, suivie de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, le député de Deux-Montagnes, la députée de Gouin et... c'est la liste des intervenants, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, je comprends qu'il y a consentement pour permettre des interventions de deux minutes chacune? Consentement? Alors, procédons. Mme la ministre des Relations internationales.

Mme Christine St-Pierre

Mme St-Pierre : Merci, M. le Président. J'invite donc cette Assemblée à souligner l'anniversaire de la fondation, à Québec, de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, communément appelée FAO. Il s'agit d'un moment important de l'histoire des relations internationales multilatérales puisque la FAO est la première des institutions spécialisées de l'ONU. Le Québec aura d'ailleurs l'honneur d'accueillir en fin de semaine le directeur général de la FAO pour commémorer la fondation de cette agence spécialisée de l'ONU.

La FAO a été créée pour lutter contre la faim et ainsi assurer la paix au lendemain de deux guerres mondiales. Au fil des décennies, ce mandat s'est incarné de manière différente en fonction des priorités et des besoins de différentes régions du monde. La FAO a organisé des campagnes contre la faim, défini des normes alimentaires et créé un programme de coopération technique pour une plus grande souplesse d'intervention dans des situations d'urgence. Elle a aussi organisé les journées mondiales de l'alimentation et constitué la source de statistiques agricoles la plus complète au monde. La FAO a organisé la première conférence mondiale exclusivement consacrée à la recherche de solutions aux problèmes mondiaux de nutrition dans le cadre de laquelle les gouvernements s'engageaient à éliminer ou réduire de manière substantielle, d'ici à la fin du dernier millénaire, l'inanition et la famine, la faim chronique, la sous-alimentation, notamment chez les enfants, les femmes et les personnes âgées.

Plus récemment, la Déclaration de Rome sur la nutrition consacrait le droit de chaque personne à l'accès à des aliments sûrs, nutritifs et en quantité suffisante. La sécurité alimentaire est au coeur du programme de développement des Nations unies pour l'après-2015. Alors qu'elle devrait être acquise, plusieurs régions du monde font face à une hausse des cas de faim et de malnutrition, et nous savons que les changements climatiques pourraient affecter durement différentes populations, particulièrement dans les pays du Sud, ce qui rend le mandat de la FAO toujours plus important et pertinent. Aussi, M. le Président, je propose donc que l'Assemblée nationale adopte cette motion à l'unanimité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la ministre des Relations internationales. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, à vous la parole.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Merci, M. le Président. C'est dans la ville de Québec, le 16 octobre 1945, que 42 pays ont créé l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, appelée communément par son acronyme en anglais FAO. La création de cet important organe a marqué une avancée importante dans la lutte contre la faim et la malnutrition, une lutte quotidienne pour des millions de femmes, d'hommes et d'enfants. En créant la FAO, le monde s'est doté d'un dispositif devant leur permettre d'affronter des problèmes majeurs que connaissent tous les pays et tous les peuples.

Chaque année, le 16 octobre, la FAO célèbre la Journée mondiale de l'alimentation, qui commémore la date de sa création en 1945. Cette année, nous célébrons en plus le 70e anniversaire de sa fondation.

Les défis de la FAO sont nombreux. Les importants déplacements de personnes, qu'ils soient réfugiés politiques ou climatiques, ont besoin de cette sécurité alimentaire. Ils ont besoin d'assurer ce premier besoin de subsistance. Le rôle et la mission de la FAO sont ainsi centraux face aux défis que vit la planète à l'heure actuelle. Je souhaite donc profiter de la tribune qui m'est accordée pour exprimer, au nom de ma formation politique, notre profonde reconnaissance aux générations de travailleurs, d'experts et de chercheurs qui y ont oeuvré, parmi lesquels plusieurs Québécois. Ces hommes et ces femmes ont contribué activement à améliorer le sort, par la sécurité alimentaire, de millions de personnes sur la planète. Nous leur devons gratitude. Je souhaite profondément que leur travail continue aussi activement. Leur activité est essentielle pour faire face aux défis d'aujourd'hui et de demain.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. M. le député de Deux-Montagnes.

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, M. le Président. Nous soulignons aujourd'hui les 70 ans d'existence de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, communément appelée la FAO. Je tiens à souligner surtout l'importance de son existence pour les 70 ans à venir et, pourquoi pas, les 70 années suivantes.

Éradiquer la faim et la malnutrition, éliminer la pauvreté, utiliser de manière durable la terre, l'eau, l'air et les ressources génétiques, voici les ambitieuses missions de cette organisation. Ça prend des rêveurs et de grands amoureux de l'humanité pour d'abord créer cette organisation, mais ensuite pour porter à bout de bras cette mission gigantesque tous les jours. 805 millions de personnes souffrent encore de faim chronique dans le monde. L'accroissement du secteur agricole, l'augmentation de la productivité mondiale, la répartition des ressources sont autant de chantiers colossaux auxquels s'attaquent tous les jours les gens de la FAO. Avec la croissance démographique à l'échelle mondiale et les changements climatiques, nous devons admettre que la FAO aura encore beaucoup de pain sur la planche... ou plutôt devra en mettre encore beaucoup sur la planche. De cette perspective, l'avenir du monde n'apparaît pas toujours radieux, mais les gens de la FAO sont des porteurs d'espoir. Mes collègues et moi avons beaucoup d'admiration pour ce que vous faites et pour l'immensité des objectifs que vous vous êtes fixés. Bravo!

Et un petit rappel historique. C'est à Lucien Borne, le maire de Québec entre 1938 et 1953, notamment, que l'on doit la présence de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture. Rappelons-nous que Lucien Borne avait de grandes ambitions pour Québec. Son objectif n'était rien de moins que d'attirer le siège social de l'Organisation des Nations unies dans la capitale. New York obtiendra le siège de l'ONU, mais Québec ne sera pas en reste. Dans la foulée de ses démarches, elle accueillera donc dès 1945 la FAO. Aujourd'hui, nous reconnaissons tous que c'est une réussite remarquable pour le Québec que de pouvoir compter sur cette organisation d'une importance capitale. Je crois qu'en cette Chambre nous devrions tous avoir cette même ambition pour le Québec et nourrir les plus grands rêves à l'image de bâtisseurs comme Lucien Borne, à l'image des bâtisseurs de la FAO.

En terminant, j'invite les gens de la ville de Québec à visiter la place publique et sa magnifique fontaine qui rendent hommage au 50e anniversaire de la FAO dans le Vieux-Québec. Le personnage central de la fontaine porte dans ses bras des produits alimentaires en provenance de tous les continents, à l'image de la mission essentielle de la FAO : que tous les êtres humains, donc, aient un accès régulier à une nourriture de bonne qualité. Elle est aussi le symbole de la fierté que Québec porte pour avoir été choisie comme la maison de cette institution essentielle.

À tous les acteurs qui s'impliquent au sein de cette organisation et qui contribuent à éradiquer la faim dans le monde, bravo! Merci. Et je nous souhaite encore plusieurs autres anniversaires de la FAO à souligner pour les décennies à venir. Merci.

• (11 h 30) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Deux-Montagnes. Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Alors, à l'instar de mes collègues, je veux, moi aussi, saluer les 70 ans de travail exceptionnel de la FAO. Et je suis d'accord avec tout ce qu'ils ont dit. Je ne le répéterai donc pas. Je vais ajouter mon petit grain de sel pour dire que malgré tout il est encore inadmissible qu'à l'échelle de la planète il y ait au moins 900 millions de personnes qui ne mangent pas à leur faim quotidiennement et il y en a beaucoup d'autres qui vivent dans des situations de grande pauvreté et de faim, de faim répétée, régulière et d'insécurité alimentaire. Je pense que ça, c'est très important de le dire. Et il y a des raisons à ça, je pense entre autres au phénomène de l'accaparement des terres agricoles, en particulier en Afrique, par des grandes entreprises multimillionnaires qui appauvrissent les paysans africains et les empêchent de cultiver des aliments propres à leur consommation quotidienne. Ça, ça fait partie des problèmes auxquels la FAO va devoir s'attaquer, elle le fait sans doute déjà, et ça va être très compliqué.

Je voudrais rappeler qu'ici même, ici même, au Québec, province, territoire riche d'un pays riche, il y a aujourd'hui, chez nous, des gens qui ne mangent pas à leur faim tous les jours — peut-être que, ça, il faudrait s'en rappeler aussi — des parents, des enfants, des jeunes, et que certains de nos quartiers dans les grandes villes sont des déserts alimentaires. Il faudrait rappeler que le prix des aliments augmente beaucoup plus vite que la rémunération. Heureusement, et ça, ça va dans le sens des efforts d'un grand organisme international, il y a aussi des projets locaux. Il y a aussi des Québécoises, des Québécois qui, au jour le jour, essaient de donner à leurs concitoyens plus de sécurité alimentaire, et là je pense aux cuisines collectives, une très belle idée héritée du Pérou en fait, je pense aux comptoirs alimentaires, je pense aux moissons, je pense aux épiceries coopératives. Bref, plein de projets qui existent, les jardins communautaires collectifs, parce que le problème de la sécurité alimentaire est un problème aussi chez nous.

J'aimerais dire, en terminant, qu'évidemment ce n'est certainement pas en diminuant les rémunérations, en additionnant les travaux précaires, les jobs précaires, ce n'est certainement pas en appauvrissant nos populations qu'on va s'assurer d'une bonne sécurité alimentaire pour les Québécoises et Québécois de tous les milieux sociaux et de toutes les régions. Je nous invite donc à travailler dans le sens de la FAE et d'assurer à l'ensemble de nos concitoyens une bonne sécurité alimentaire. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée de Gouin, pour cette intervention. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Adopté. Pour une autre motion sans préavis, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de Gouin, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de procéder à une commission parlementaire itinérante dans toutes les régions du Québec quant aux suites à donner à la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, instituée par la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale;

«Qu'elle demande au gouvernement d'attendre le dépôt de la prochaine Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale avant d'aller de l'avant avec le projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Saint-Jean. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Il n'y a pas de consentement.

Pour une autre motion sans préavis, M. le député de Mercier.

Réclamer la tenue d'une enquête sur l'attaque survenue
le 29 octobre 2015 en Irak ayant causé la mort de
réfugiés iraniens et de soldats irakiens

M. Khadir : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec la ministre des Relations internationales et la députée d'Hochelaga-Maisonneuve :

«Que l'Assemblée nationale déplore l'attaque qui a coûté la vie, le 29 octobre [...] en Irak, à plus d'une vingtaine de réfugiés iraniens et quelques soldats irakiens présents à l'intérieur ou à proximité d'un camp de réfugiés aux abords de l'aéroport de Bagdad;

«Que l'Assemblée nationale réclame la tenue d'une enquête sur ces événements et la traduction en justice des responsables.»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le député de Mercier, pour cette motion.

Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Nous proposons l'adoption sans débat, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : La motion est donc adoptée. Merci à vous, M. le député de Mercier. Y a-t-il d'autres motions sans préavis?

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, s'il n'y a pas d'autres motions sans préavis, nous allons passer aux avis touchant les travaux des commissions. Je cède la parole à M. le leader...

M. Sklavounos : Oui. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Juste un instant. M. le leader de la deuxième opposition.

M. Bonnardel : M. le Président, petite question sur l'avis touchant les travaux des commissions.

Ce matin, on apprend dans La Presse que la ministre de la Famille a cheminé pour ce qui est de son projet de loi, le projet de loi n° 27...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : ...règlement. C'est parce que...

M. Sklavounos : ...sur la rubrique Renseignements sur les travaux. Alors, c'est la seule question concernant notre procédure.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Oui. Voilà. Je pense que le leader adjoint a raison, d'autant plus que vous voulez poser une question sur les avis touchant les travaux des commissions. Je vais lui permettre de livrer ces avis-là, puis par la suite, à la bonne rubrique, je vous entendrai. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Oui. Merci, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la Commission des finances publiques entreprendra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 73, Loi concernant principalement la mise en oeuvre des recommandations du comité de retraite de certains régimes de retraite du secteur public, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 54, Loi visant l'amélioration de la situation juridique de l'animal, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;

La Commission de la santé et des services sociaux poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 44, Loi visant à renforcer la lutte contre le tabagisme, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, et de 15 heures à 18 heures, à la salle des Premier-Ministres, 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May;

La Commission de l'économie et du travail, quant à elle, poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 57, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite principalement quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées, le lundi 16 novembre 2015, de 14 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau; et finalement

Cette même commission entreprendra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 68, Loi donnant suite aux conclusions du Rapport du groupe spécial d'appel constitué en vertu de l'Accord sur le commerce intérieur concernant l'article 4.1 de la Loi sur les produits alimentaires, le mardi 17 novembre 2015, de 10 heures à midi, à la salle des Premiers-Ministres, 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May.

Merci, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le leader adjoint du gouvernement, pour ces avis.

Pour ma part, je vous avise que la Commission de la santé et des services sociaux se réunira en séance de travail aujourd'hui, de 13 heures à 13 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse de la pétition concernant la mise en place d'un service d'hémodialyse à l'Hôtel-Dieu de Gaspé.

Je vous avise également que la Commission des institutions se réunira en séance publique aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin d'entendre la Directrice des poursuites criminelles et pénales sur le plan de restructuration annoncé.

La Commission des relations avec les citoyens entreprendra pour sa part les consultations particulières dans le cadre du mandat d'initiative sur les conditions de vie des femmes autochtones en lien avec les agressions sexuelles et la violence conjugale le mardi 17 novembre 2015, de 9 heures à midi, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.

Enfin, la Commission des finances publiques poursuivra ses consultations particulières dans le cadre du mandat d'initiative sur le phénomène du recours aux paradis fiscaux le mardi 17 novembre 2015, de 10 heures à midi, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

À la rubrique maintenant des renseignements sur les travaux de l'Assemblée, M. le leader de la deuxième opposition.

M. Bonnardel : Oui, M. le Président. Une petite question. Le projet de loi n° 27 dort au feuilleton depuis le mois de février 2015, et la ministre de la Famille semble avoir cheminé sur les positions ou les amendements qu'elle amènera à l'adoption de principe, à l'étude détaillée de son projet de loi.

Ma question est fort simple, c'est : Est-ce que le gouvernement va nous déposer les amendements que la ministre semble avoir déjà préparés, selon le papier de Tommy Chouinard dans La Presse ce matin, pour qu'on soit capables de faire un boulot adéquat et que les oppositions nécessairement aient, donc, ces éléments pour faire cheminer le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Merci. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Oui. Alors, il me fait plaisir de répondre à la question du leader du deuxième groupe d'opposition. Ce que je peux vous dire, c'est que la ministre est en train de finaliser ses propositions d'amendement et, en temps et lieu, nous aviserons l'opposition, la deuxième opposition des projets, des amendements et de la suite dans ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Merci. M. le leader de la deuxième opposition.

M. Bonnardel : ...M. le Président. Est-ce que le leader... La ministre est en Chambre. Est-ce que vous pouvez nous confirmer qu'on aura ces amendements avant que le principe soit appelé? Ce serait vraiment intéressant pour être capables de faire nos travaux adéquatement.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Normalement, M. le Président, nous suivons la procédure parlementaire normale. À part de ça, je n'ai pas d'autre chose à ajouter à cette question-là.

• (11 h 40) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, je vous rappelle que, lors de l'interpellation prévue pour demain, vendredi le 13 novembre 2015, Mme la députée de Taillon s'adressera à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant : La volonté du ministre de la Santé et des Services sociaux de légaliser la facturation des frais accessoires aux patients.

Je vous avise de plus que l'interpellation prévue pour le vendredi 20 novembre 2015 portera sur le sujet suivant : L'éducation, une priorité absolue au Québec, où tous les enfants doivent être éduqués dans des conditions permettant leur plein développement. Mme la députée de Gouin s'adressera alors à M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

Affaires du jour

Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Pour la suite des choses, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vien : Bonjour, M. le Président. Alors, merci d'appeler l'article 19, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 51

Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Ouimet) : À l'article 19 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission des institutions sur le projet de loi n° 51, Loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives.

Je suis prêt à céder la parole et je la cède à Mme la ministre de la Justice et Procureur général.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, c'est avec plaisir évidemment que je participe à l'étape de la prise en considération du rapport de la Commission des institutions sur le projet de loi portant le numéro 51, Loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives, dont nous avons complété l'étude détaillée le 10 novembre dernier.

Les mesures qui sont proposées au projet de loi n° 51 font suite à de nombreuses demandes qui ont été reçues par le ministère de la Justice au cours des dernières années. En fait, le projet de loi n° 51, on peut le qualifier de projet de loi omnibus. Et, essentiellement, ces mesures visent à améliorer l'administration de la justice en rendant notre système plus efficace, plus efficient, en le modernisant mais aussi en l'adaptant aux nouvelles technologies, et le projet de loi vise également une mise à jour de certaines dispositions que l'on retrouvait dans un certain nombre de lois. Le projet de loi vise également à modifier le Code de procédure pénale, le Code des professions, la Loi d'interprétation, la Loi sur la justice administrative, la Loi concernant les partenariats en matière d'infrastructures de transport, la Loi sur la protection de la jeunesse, la Loi sur le recours collectif et la Loi sur les tribunaux judiciaires.

En ce qui concerne le Code de procédure pénale, M. le Président, je pense que cette disposition-là est la disposition sur laquelle les membres de la commission ont passé le plus grand temps. Les modifications qui sont apportées visent à hausser le montant des amendes maximales qu'un mineur peut être tenu de verser lorsqu'il contrevient à une loi de... et qui a des incitatifs pénaux, par exemple la Loi sur le tabac, par exemple la loi sur les... de transport, et visent à hausser les amendes mais visent également à hausser les amendes en vertu du Code de la sécurité routière et de la Loi sur les véhicules hors route. M. le Président, dans l'état actuel du droit et depuis 1984... 1987, pardon, les mineurs ne peuvent être condamnés à verser une amende de plus de 100 $. C'est l'amende maximale. Ces sommes-là avaient été fixées en 1984, donc il y a plus de 30 ans, et méritaient un ajustement puis méritaient également un ajustement important surtout en matière de sécurité routière, puisque les jeunes, les mineurs sont malheureusement, dans certains nombres d'infractions, surreprésentés.

Alors, on se rappellera, M. le Président, qu'en 2013 la table de la sécurité routière avait déposé un rapport fort étoffé et recommandait à la ministre de la Justice de revoir les amendes minimales imposées aux jeunes afin de lancer un message très clair que les infractions en matière de sécurité routière sont des infractions qui constituent bien souvent des enjeux d'importance capitale. On comprend, M. le Président, que conduire est un privilège, et, malheureusement, trop souvent, les jeunes font l'objet de reportages médiatiques qui sont parfois percutants. Rappelons-nous, à chaque printemps, malheureusement, combien avons-nous vu d'accidents de la route impliquant des jeunes conducteurs et impliquant aussi, bien souvent, des accidents qui causaient des lésions corporelles importantes qui handicapaient des jeunes pour le restant de leur vie, mais, encore plus grave, qui causaient la mort? Il est important de lancer un signal à l'effet que ce type de conduite automobile là n'est pas autorisé, n'est pas permis.

Oui, le Québec a fait de nombreuses campagnes publicitaires pour sensibiliser les jeunes à adopter une conduite responsable, ces campagnes-là ont fait du chemin, ont changé les mentalités et ont changé la perception des jeunes à l'égard de la gravité de ces infractions-là, mais, M. le Président, il n'en demeure pas moins que les jeunes sont surreprésentés.

On regardait les statistiques, M. le Président, et on en a fait état abondamment lors de l'étude, mais pour vous donner une idée ou une illustration : en matière de vitesse excessive, les jeunes sont quatre fois plus représentés dans le total des infractions que la totalité des conducteurs. Donc, les mineurs sont quatre fois plus représentés. En matière de «car surfing», par exemple, une infraction qui a été introduite en 2013, malheureusement, sur 55 infractions répertoriées, 34 de ces infractions-là ont été commises par des jeunes de moins de 18 ans. C'est percutant, je dois vous avouer. Comme mère d'adolescents, comme citoyenne, je suis interpellée et je pense que tout le monde ici, dans cette salle, tous partis politiques confondus, nous souhaitons que ces statistiques changent. On ne veut plus que nos jeunes fassent partie de statistiques. Et on souhaite mettre un terme à tout ça. Alors, évidemment, pour ce faire, nous avons proposé de hausser l'amende maximale, donc, pour permettre de lancer un signal bien clair : Non, une infraction de vitesse excessive n'est pas passible d'une maximale de 100 $ seulement. Nous avons, suite aux échanges en commission parlementaire, convenu que cette amende maximale là serait fixée à 750 $. Nous avions proposé 1 000 $, il y a eu plusieurs échanges, et je tiens à souligner les contributions puis les échanges fort intéressants de ma collègue la députée Joliette et surtout du député de Borduas, qui a introduit un amendement apportant cette modification à ce 750 $ là et qui a obtenu l'unanimité... en fait, presque l'unanimité — je vois le sourire de la collègue de Joliette — quant au montant qui devait être établi. Puis pourquoi 750 $? Puis je le dis à juste titre : les amendes, pour certains types d'infraction... les amendes pour majeurs étaient des amendes minimales de 1 000 $, et les amendes maximales étaient fixées à 3 000 $. Et ce que le député de Borduas a souligné, et à juste titre, c'était qu'il n'y avait pas de distinction entre l'amende aux mineurs et l'amende aux majeurs, effectivement.

Alors, il était important de marquer cette distinction-là entre une amende imposée à un mineur et une amende imposée à un majeur. Alors, je tiens à souligner la collaboration et la contribution du collègue en ce sens.

Et, vous savez, M. le Président, l'objectif du projet de loi est de rendre les amendes plus dissuasives, oui, plus dissuasives. Pourquoi? Pour changer le comportement, parce que ce que nous souhaitons, M. le Président, c'est qu'il n'y ait pas d'amende d'imposée pour nos jeunes conducteurs, que les jeunes conducteurs adoptent une conduite automobile responsable et surtout une conduite automobile respectueuse des règles établies.

Alors, il s'agit là de changements significatifs. Comme je le mentionnais, les amendes qui étaient en vigueur et qui sont toujours en vigueur ont été établies en 1984, nous avons eu plusieurs échanges quant aux changements survenus depuis cette période, mais le projet de loi ne vise pas exclusivement, non plus, à hausser les amendes aux mineurs, mais vise aussi à modifier d'autres dispositions, et, par exemple, au Code de procédure pénale, nous avons introduit des dispositions permettant de rendre applicable, à certaines conditions, la procédure d'instruction par défaut pour les poursuites pénales qu'un défendeur est réputé ne pas contester, ce que nous appelons communément le régime du «no contest», et ça, ce sera appliqué aux infractions qui sont constatées au moyen d'un système photographique automatisé, par exemple les photoradars.

• (11 h 50) •

Alors, le système «no contest» permet une simplification de l'administration de ces dossiers-là et permet également de réduire le volume des dossiers qui sont présentés devant la Cour du Québec et qui sont présentés devant un juge. Alors, maintenant, il sera possible que les dossiers pour les infractions constatées au moyen d'un système de photoradars puissent faire l'objet de cette procédure d'instruction, qui est connue, qui est déjà applicable en certaines conditions.

Il est également proposé, M. le Président, de prévoir des mesures pour améliorer la gestion des instances en matière pénale, pour faciliter la présentation de la preuve, pour également permettre la tenue d'une conférence préparatoire et que soit désigné un juge responsable de l'instance. C'est une procédure qui existait en vertu du Code criminel, notre Code de procédure pénale ne le prévoyait pas, c'était demandé, alors c'est une procédure qui sera maintenant disponible, qui permettra de mieux préparer les enjeux, les dossiers importants notamment qui soulèvent des questions de droit complexes, des questions de droit constitutionnel.

En matière de protection de la jeunesse, les modifications qui ont été adoptées étaient de permettre et de confier à la Société québécoise d'information juridique, la SOQUIJ, le pouvoir de caviarder les décisions qui sont rendues par la Cour du Québec en matière de protection de la jeunesse, et ça permettra d'accorder un accès plus rapide aux décisions, parce qu'il y avait actuellement un délai de traitement entre le moment où la décision était rendue, le caviardage qui était fait au greffe et à la cour et, par la suite, la publication des jugements. Alors, la situation que nous connaissons actuellement impliquait que nos décisions, les décisions de la Cour du Québec, en matière de Tribunal de la jeunesse n'étaient pas disponibles rapidement. Et, vous savez, M. le Président, l'importance qui est accordée à la diffusion d'une information juridique qui est quand même actuelle et d'actualité. Alors, je tiens à remercier la SOQUIJ, qui collaborera et qui contribuera à caviarder et à rendre accessibles les décisions évidemment tout en conservant le caractère confidentiel qui est essentiel aux décisions de la chambre de la jeunesse.

Pour ce qui est, M. le Président, de la Loi sur le recours collectif, alors il est permis au fonds d'aide d'assumer ses frais de fonctionnement à partir de son fonds. Alors, comme il s'agit d'une disposition qui est quand même importante, c'est un changement important dans la façon dont le financement des activités du fonds se fera, il y aura un rapport de mise en oeuvre qui sera soumis aux membres de cette Assemblée et qui permettra de voir l'évolution, dans le temps, de la disposition.

Pour ce qui est de la Loi sur les tribunaux judiciaires, bien évidemment nous proposons, et nous en avions parlé auparavant, de permettre à la Cour d'appel de tenir occasionnellement des séances dans d'autres villes que les villes de Montréal, les villes de Québec, et ça évidemment, c'est pour permettre de favoriser le rapprochement de la cour avec les justiciables, avec les procureurs, qui sont partout sur le territoire du Québec, et ça permet, M. le Président, que des dossiers d'actualité, des dossiers d'envergure puissent être entendus là où les faits du litige ont pris naissance, là où il y a un intérêt collectif de pouvoir participer, de pouvoir être présent et d'entendre les représentations. Alors, c'est une volonté, c'est une proposition qui nous a été soumise, M. le Président, par la Cour d'appel, c'est une proposition, à mon avis, qui est fort intéressante et qui permettra à la cour d'être présente partout sur le territoire. Le projet de loi propose de faire passer de trois ans à quatre ans la durée de la période d'évaluation du Comité de la rémunération des juges et de définir la période d'évaluation, d'allonger de quatre ans la durée du mandat des membres d'un comité. Alors, tout ça semble bien théorique, mais ces modifications-là, M. le Président, permettront, oui, des économies de temps, des économies d'énergie, permettront aussi d'adapter les travaux du Comité de rémunération des juges à la réalité et permettront de répondre à des critiques qui ont été formulées au cours des dernières années.

Il est proposé également, dans les dispositions concernant le Comité sur la rémunération des juges, d'adapter les noms des associations de juges qui sont représentées au sein du Conseil de la magistrature. Alors, certains amendements sont également apportés, en considération de tout ça, à la composition du Conseil de la magistrature.

Pour ce qui est de la justice administrative, qui n'est pas en reste dans ces modifications qui ont été proposées, M. le Président, il y a des modifications qui sont apportées au Code des professions et à la Loi sur la justice administrative pour permettre que les présidents des conseils de discipline des ordres professionnels soient assujettis à la compétence du Conseil de la justice administrative, et en ce qui concerne évidemment l'application de leurs règles de déontologie. C'est une mesure qui permet de mieux rassurer les citoyens quant à la confiance qu'ils doivent avoir envers les présidents des conseils de discipline et envers surtout le système de justice disciplinaire. C'est également une demande qui émanait du milieu des ordres professionnels et du public, surtout.

M. le Président, énormément de modifications techniques. Et je tiens à remercier tous les collègues de l'Assemblée nationale qui ont participé aux travaux relatifs au projet de loi n° 51. Vous savez, M. le Président, nous avons siégé de nombreuses heures, nous avons eu plusieurs séances de commission. J'en profite pour souligner et pour remercier notre ex-collègue Stéphane Bédard, qui a commencé, qui avait amorcé les travaux avec nous... et jusqu'à la toute dernière minute, jusqu'à la veille de son départ. Et je tiens aussi à saluer et à remercier mon vis-à-vis, la députée de Joliette; le député de Borduas évidemment; le député de Jean-Talon; le député d'Ungava; le député de Saint-François; le député de La Prairie; le député de Montmorency; le député de LaFontaine, et je ne saurais oublier, M. le Président, notre président, le député de Chomedey, qui a présidé nos travaux. Les différents commentaires qui ont été formulés par les collègues, par les groupes qui se sont présentés en commission parlementaire nous ont certainement permis de bonifier le projet de loi. Et ça me permet également de remercier les intervenants qui ont participé aux consultations et qui ont également déposé des mémoires, parce que certains groupes ne se sont pas présentés en consultations mais ont tenu à nous faire part de leurs réflexions et à faire part de commentaires par le dépôt de mémoires. Alors, je tiens à les remercier. Et j'aimerais aussi remercier, M. le Président, la vingtaine de juristes du ministère de la Justice et d'autres ministères qui ont contribué, oui, à la rédaction du projet de loi mais qui ont surtout participé à nos travaux. Alors, à tous les jours, la salle était bondée de juristes, parce que, et je vous l'ai mentionné, on a touché, on est venus modifier de nombreuses lois. Alors, plusieurs d'entre eux ont été en commission parlementaire, ont permis de répondre aux questions pointues, aux questions techniques des collègues, et je tiens vraiment à les remercier. Et ces échanges-là et leur présence nous ont permis, oui, de répondre à des questions plus pointues mais nous ont permis, comme je l'ai mentionné, de bonifier les différentes dispositions législatives, notamment la Loi sur la justice administrative et également les aspects du Fonds d'aide aux recours collectifs.

Alors, vous savez, M. le Président, il y a eu plusieurs échanges. Je suis persuadée des effets positifs que pourront avoir les dispositions qui ont été présentées et qui ont été adoptées en commission parlementaire et je suis persuadée qu'il permettra, oui, de rendre l'administration de la justice plus efficace mais qu'il permettra aussi de répondre à une problématique que l'on retrouvait au Québec : une surreprésentation des jeunes parmi les infractions de la sécurité routière, au Code de la sécurité routière et à la Loi sur les véhicules hors route. Et je suis persuadée, M. le Président, que ce projet de loi aura l'effet dissuasif qui est escompté et permettra de lancer le signal aux jeunes, permettra un changement d'attitude, et surtout permettra aux jeunes d'adopter un comportement routier qui est conforme à nos règles, et permettra de lancer ce message que les infractions graves qui ont été modifiées et dont les amendes ont été haussées substantiellement, au cours des dernières années, pour les majeurs... bien, que ces infractions sont tout aussi graves lorsqu'elles sont commises par des jeunes et peuvent être tout aussi mortelles, malheureusement.

Alors, sur ce, M. le Président, je vous remercie. Et, encore une fois, je tiens à remercier les collègues qui ont participé à nos travaux.

• (12 heures) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la ministre de la Justice. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Oui, merci, M. le Président. Alors, à mon tour, au nom de l'opposition officielle, de prendre la parole à cette étape de la prise en considération du rapport de nos travaux en commission parlementaire sur le projet de loi n° 51. Comme la ministre l'a mentionné, en fait, je suis arrivée un peu au pied levé dans l'étude détaillée, à cette étape de l'étude détaillée, alors que déjà plusieurs heures, plusieurs journées y avaient été consacrées, alors que mon ex-collègue, l'ex-député de Chicoutimi, Stéphane Bédard y siégeait déjà depuis un moment avec beaucoup d'assiduité et de rigueur, comme à son habitude. Et bien sûr je veux en profiter pour le remercier du travail qu'il a fait dans le cadre de ce projet-là, mais aussi dans le cadre plus général des enjeux qui touchent la justice au Québec. Parce que vous savez sans doute, M. le Président, que, là, il a été porte-parole en justice pour quelques mois mais qu'il l'a été pendant de nombreuses années auparavant, donc dans les premières années où il siégeait au Parlement, et c'étaient toujours des questions qui lui importaient beaucoup. Donc, je veux le remercier. Et c'est moi, donc, qui ai hérité de la suite des choses, et je suis arrivée alors que les travaux étaient bien amorcés.

La ministre a fait un survol des différentes mesures qui sont comprises dans ce projet de loi. Je serai assez brève à ce stade-ci, M. le Président. Simplement dire qu'en ce qui concerne la question du rehaussement des amendes, qui sont rehaussées, dans le cas du Code de la sécurité routière, jusqu'à 10 fois, donc on passe d'amendes de 100 $ à... bien, en fait, sept fois et demie avec l'amendement qui a été adopté, à 750 $ et, dans le cas du code pénal, de 100 $ à 500 $, on nous a plaidé la nécessité d'augmenter les amendes d'une manière très, très importante pour faire en sorte de changer les comportements des jeunes. Et, bien entendu, M. le Président, je pense qu'ici tout le monde, dans cette Chambre, partage l'objectif de voir les infractions routières diminuer, surtout les infractions très graves qui peuvent être commises par des jeunes. On pense aux grands excès de vitesse. On pense à la conduite dangereuse. On pense aussi au surf de véhicule. Ce sont des statistiques que la ministre nous a répétées abondamment, qui sont effectivement très, très préoccupantes, et il faut travailler très fort pour modifier ces comportements.

Le problème que nous avons vécu en commission parlementaire et qui a suscité beaucoup de questionnements et de débats, généralement dans la bonne humeur, M. le Président, c'est le fait qu'on ne nous a pas produit d'étude, de documentation, de données qui prouvaient que c'était en augmentant les amendes qu'on allait justement arriver à changer ces comportements, par rapport, par exemple, à d'autres mesures, par rapport à des campagnes de sensibilisation, par rapport à des mesures de prévention, par rapport à un rehaussement de la surveillance policière. Donc, tout ça ne nous a pas été démontré, et, au contraire, comme on l'a dit abondamment à la ministre, il y a des dizaines d'études qui établissent plutôt l'absence de corrélation entre l'augmentation des amendes et l'aspect dissuasif pour changer un comportement.

Donc, nous, en fait, on ne demandait qu'à être convaincus, mais malheureusement, malgré des heures de discussion, on ne nous a soumis aucune étude, aucune donnée. Essentiellement, on nous a référés à une seule étude, qui était une thèse, un mémoire de maîtrise, mais qui ne disait pas non plus... qui, en fait, confirmait que les amendes, le rehaussement des amendes n'a pas un lien direct, une corrélation avec la diminution des comportements en eux-mêmes. Alors, on est restés, bien sûr, sur notre appétit. Comme je vous le dis, on aurait bien aimé être convaincus, mais on n'a pas pu l'être, ni non plus sur la justesse du quantum du rehaussement des amendes. Finalement, il y a un amendement proposé par mon collègue de Borduas qui a été accepté, mais on n'a pas eu non plus de justification sur pourquoi augmenter à 1 000 $ plutôt qu'à 300 $, 500 $, 800 $. Et ça, je pense que c'est quand même un problème important sur lequel il va falloir se pencher. Quand on change des amendes, ce serait important de pouvoir avoir un justificatif très clair.

Donc, de ce fait-là, on n'a pas pu adhérer à ce changement-là qui comporte aussi... Comme les organismes de justice alternative sont venus en... l'ont dit dans leur mémoire, comme aussi la commission des droits l'a soulevé, comme le Barreau du Québec l'a soulevé, non seulement il y a le problème de ne pas avoir de base scientifique, de données formelles pour appuyer ce changement-là, mais il y a aussi tout le fait que la philosophie que nous avons au Québec pour la justice pour les mineurs est une philosophie d'abord de prévention et de réhabilitation et aussi de différenciation dans le traitement. Donc, malheureusement, nous n'avons pas eu de réponse satisfaisante par rapport à ces enjeux que nous avons soulevés mais, bien sûr, qu'avant nous, lors des auditions, le Barreau, la Commission des droits et le Regroupement des organismes de justice alternative avaient soulevés.

Par ailleurs, comme la ministre l'a mentionné, il y a plusieurs autres mesures dans le projet de loi, qui est vraiment un projet de loi omnibus. Et, à voir le nombre de juristes qui se succédaient, on pouvait voir à quel point ça nécessitait des expertises variées. Donc, on est passés de la justice pénale à la réforme du Code de procédure civile, à la justice administrative, jusqu'aux lois professionnelles. Alors, ça a suscité beaucoup de nos compétences.

Mais il y a des correctifs intéressants qui sont apportés à des problèmes réels ainsi que des avancées, notamment en matière d'accessibilité à la justice, comme la ministre le mentionnait, parce que la Cour d'appel va pouvoir siéger en dehors de Montréal et Québec. Aussi, on est venu clarifier certaines choses pour les fonds qui concernent les recours collectifs et donc le Fonds d'aide aux recours collectifs, avec un travail qui a été fait, encore une fois, par mon ex-collègue de Chicoutimi pour amener des amendements. Même chose pour la Loi sur les tribunaux judiciaires, je pense que c'était une bonne idée de faire passer... Même si ça peut paraître très technique, comme certaines mesures de ce projet de loi là, c'était une bonne idée de faire passer de trois ans à quatre ans la durée, donc, des mandats de... qui visent à faire les recommandations sur les conditions de rémunération des juges. Je pense qu'à cet égard-là on va pouvoir avoir certains gains économiques mais aussi d'efficacité. Parce que ces démarches-là se refaisaient très, très souvent quand on était aux trois ans. Là, au moins, on gagne un an. Nous, on serait allés, personnellement, jusqu'à cinq ans, ce qui était une possibilité qui était prévue dans le jugement de la Cour suprême à l'époque, mais on comprend qu'en allant à quatre ans c'est déjà une avancée.

Et bien sûr, en terminant, quelques mots sur le fait que désormais les présidents des conseils de discipline des ordres professionnels vont être assujettis à la compétence du Conseil de la justice administrative, ce qui va faire en sorte qu'ils vont pouvoir être sanctionnés et que des recommandations pourront être faites au gouvernement, qui pourront aller jusqu'à la destitution, donc, de ces présidents-là. Et bien sûr ça fait suite à déjà des réformes qui ont été faites notamment sous notre gouvernement, de venir instituer le Bureau des présidents pour rendre le tout beaucoup plus solide, beaucoup plus formel, beaucoup mieux organisé, pour éviter, par exemple, des cas comme on a vus dans le passé, de plaintes qui n'étaient pas traitées pendant des années. Alors, on vient remédier à cette situation-là et on vient prévoir un processus clair, disciplinaire, sous le couvert de la responsabilité du Conseil de la justice administrative.

Ceci dit, comme je l'ai fait lors de nos travaux, j'invite la ministre à se pencher plus généralement sur le mandat qui devrait être dévolu au Conseil de la justice administrative, à savoir qu'il y a beaucoup d'organismes quasi judiciaires, de tribunaux administratifs qui ne sont pas assujettis, qui donc sont laissés à un processus très, très informel, qui relève, de ce qu'on a appris, du Secrétariat aux emplois supérieurs, à certains égards et, à d'autres égards, qui est beaucoup plus flou. Et donc, puisqu'on fait une avancée importante pour ce qui concerne les présidents des conseils de discipline, je pense que la réflexion s'impose pour l'ensemble des domaines.

Sur ce, M. le Président, je veux aussi remercier toute l'équipe du ministère de la Justice qui nous a accompagnés, qui a bien travaillé aussi parfois pour répondre à plusieurs questions que nous avions, pour répondre à nos demandes d'amendement, la ministre, bien entendu, et toute son équipe du cabinet, mon collègue de Chicoutimi qui a commencé le travail et qui a donné, je pense, les bonnes orientations, mon collègue de Borduas, avec qui on a eu une très bonne collaboration, comme avec l'ensemble des députés de la commission, mon recherchiste, Étienne Pomerleau-Landry, et tout le personnel de la commission. Merci beaucoup, M. le Président.

• (12 h 10) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée de Joliette, pour cette intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de Borduas.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir sur la prise en considération du rapport de la Commission des institutions sur le projet de loi n° 51, projet de loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives.

Donc, je pense que mes deux précédentes collègues l'ont mentionné, c'est un projet de loi omnibus, M. le Président. Il y avait une multitude de sujets à l'intérieur de ce projet de loi, la majorité des propositions législatives étant des propositions qui visent à améliorer l'administration du système de justice, et c'est pour ça, pour cette raison que nous avons appuyé, en partie, ce projet de loi. Mais il y a certains articles du projet de loi, certaines dispositions, par contre, avec lesquelles nous étions davantage en désaccord, M. le Président, et nous avons tenté, par nos questions, par nos propositions d'amendement, de bonifier le projet de loi.

D'entrée de jeu, M. le Président, commençons par le début, par l'article 1, 3 et 18, relativement à la hausse de la limite maximale des amendes pour les mineurs. Donc, vous savez, M. le Président, que, depuis 1987, cette amende maximale là, pour les individus âgés de moins de 18 ans, était fixée à 100 $ par infraction. Peu importe le type d'infraction que vous commettiez, qu'elle se retrouve dans une loi statutaire ou au Code de la sécurité routière, donc c'était administré par le Code de procédure pénale. Ça a été les articles, M. le Président, sur lesquels il y a eu le plus de débats, parce qu'il faut dire qu'à la fois la Commission des droits de la personne, à la fois le Barreau, à la fois le regroupement de justice alternative, qui sont venus nous nous rencontrer, nous ont mentionné que la dissuasion n'était pas nécessairement au niveau du montant de la peine pour les mineurs.

Partant de cette prémisse-là, M. le Président, nous devions être convaincus par la partie ministérielle que la hausse à 1 000 $ allait changer les comportements. Ce que j'ai exprimé et ce que de nombreuses études également disent, c'est que, lorsqu'on veut changer un comportement, M. le Président, c'est véritablement la chance d'être pris qui change les comportements. Bien entendu, il y a un aspect dissuasif dans le montant de l'amende, mais est-ce que ça a un impact sur le comportement de l'adolescent qui réalise cette infraction-là? Et je vais être très clair, M. le Président : Il n'y a personne qui souhaite que les adolescents, que les individus âgés de moins de 18 ans commettent des infractions. C'est important d'avoir le système le plus sécuritaire possible sur nos routes, notamment, M. le Président, lorsqu'on vise le Code de la sécurité routière ou la Loi sur les véhicules hors route. Il faut assurer par tous les moyens que, comme société, on exprime notre désapprobation par rapport à certains comportements routiers répréhensibles. Et c'est d'ailleurs ce que la table de sécurité routière recommandait, d'illustrer le comportement hautement répréhensible de certaines infractions au Code de la sécurité routière.

Mais la difficulté, M. le Président, c'est : Comment fait-on pour traduire cela dans nos lois et dans nos règlements? La peine proposée de 1 000 $ par le gouvernement n'était pas fondée, M. le Président, sur la littérature scientifique approfondie, M. le Président. On nous a soumis une étude, et il y avait d'autres études, M. le Président, qui disaient le contraire également. Donc, à défaut d'être convaincus, nous avons proposé un amendement qui diminuait le montant de l'amende maximale, notamment parce qu'on se retrouvait dans une situation où un mineur pourrait recevoir, en cas d'infraction, la même amende qu'un majeur. Donc, à ce moment-là, il y avait une problématique au niveau de la distinction et de la différenciation entre les mineurs et les majeurs lorsqu'ils commettent une infraction.

Pourquoi 750 $, M. le Président, pourquoi 1 000 $? Je vous pose la question. À défaut de pouvoir justifier le montant de 1 000 $ sur une assise précise et d'avoir les données factuelles, j'ai suggéré, M. le Président, que l'on diminue l'amende à 750 $. Ça aurait pu être 500 $, M. le Président, cependant l'amendement de ma collègue de Joliette avait été battu.

Ceci étant dit, je pense que nous avions besoin d'actualiser le montant de 100 $, qui était le même depuis 1987. L'actualisation, en dollars d'aujourd'hui, aurait été d'environ 235 $. À 750 $, je pense que c'est un message très clair, bien que l'argumentaire au soutien d'une telle amende n'est pas extrêmement présent dans le cadre de l'étude de ce projet de loi. Ceci étant dit, M. le Président, c'est un message clair qui va faire partie d'un ensemble de choses. Je vous parlais tout à l'heure des campagnes de prévention, de la dissuasion, de l'éducation. Donc, il faut mettre tout ça ensemble pour éviter que des comportements routiers répréhensibles se produisent.

Par ailleurs, M. le Président, dans le projet de loi, on a traité de l'instruction de la procédure par défaut, donc la procédure de non-contestation. Donc, ça a été introduit notamment, M. le Président, pour les péages routiers, les photoradars, donc de façon à optimiser le Code de sécurité routière... le Code de procédure pénale, pardon. Également, au niveau du juge responsable de l'instance en matière pénale, M. le Président, c'est une chose qui se faisait déjà au niveau civil, et je pense que, pour l'efficacité du système de justice, ça constitue une avancée.

Dans les modifications que nous avons effectuées également au Code de procédure pénale, M. le Président, il y a eu les modifications au télémandat, et, sur cette modification-là, j'ai émis des réserves, M. le Président. Parce que le principe de base pour obtenir un mandat de perquisition, M. le Président, c'est de s'adresser au juge dans son bureau ou en salle de cour de façon verbale et de lui soumettre une déclaration assermentée de la part du policier qui fait la demande de perquisition. Dans le cadre de notre droit actuel, encore aujourd'hui, parce que le projet de loi n'est pas adopté, M. le Président, la demande de télémandat se faisait par voie téléphonique, mais par un moyen de télécommunications, mais généralement ça se faisait par voie téléphonique, à distance, et le juge devait... le juge de paix ou le juge Cour du Québec devait retranscrire les motifs ou enregistrer par le biais d'un enregistrement mécanique. On nous a dit, M. le Président, que la demande venait justement de la Cour du Québec d'offrir des moyens technologiques alternatifs. Et, dans le libellé du projet de loi, on utilise «tout autre moyen de télécommunication». Ça ouvre la porte, M. le Président, à demander des télémandats par le biais de textos, par le biais de FaceTime, par le biais de Skype.

On est à une époque, M. le Président, où il faut intégrer les technologies de l'information et les technologies de communication dans le travail des policiers, dans le travail du système de justice. Cependant, ça m'apparaît un peu préoccupant de ne pas cerner et de ne pas indiquer clairement quels sont les moyens de télécommunications que l'on vise, parce que, si on vise précisément le courriel et le télécopieur, M. le Président, on aurait dû le mentionner pour s'assurer que les mandats de perquisition qui vont être délivrés, bien, vont l'être faits en fonction des règles claires qui vont être prévues au Code de procédure pénale. Et là-dessus, M. le Président, j'ai émis un bémol en commission parlementaire parce qu'on contrevient au principe de base de demander verbalement des explications au policier. Bien entendu, le juge pourrait le faire par voie téléphonique, mais, lorsqu'on voulait rendre la vie plus facile à la cour... d'avoir une demande écrite, on n'impose pas non plus, M. le Président, d'avoir un contact téléphonique. Donc, je pense qu'on aurait dû faire l'exercice, en touchant à cet article-là, de moderniser l'ensemble des dispositions du Code de procédure pénale relativement à la technologie de l'information, et ça aurait été pertinent de baliser davantage les technologies que nous pouvons utiliser.

Aussi, M. le Président, nous avons eu la loi concernant... enfin, nous avons adopté des modifications concernant la loi concernant les infrastructures de transport, et, dans le cadre de cette modification-là, la disposition législative modifiant cette loi ne vise qu'un seul partenaire, une infrastructure de partenariat public-privé. Et, je l'ai déjà dit dans cette Assemblée, M. le Président, lorsqu'on modifie une loi qui ne touche qu'un seul individu corporatif, je me questionne toujours, M. le Président, d'autant plus que le raisonnement à la base de la modification qui est proposée dans le projet de loi, c'est, M. le Président, d'indiquer et de permettre qu'une personne désignée par le ministre maintenant pourra autoriser les constats d'infraction. La formulation actuelle, c'était «un employé du partenaire». Donc, concrètement, M. le Président, lorsqu'on a soumissionné pour obtenir le contrat, les règles du jeu, c'était : C'est un employé du partenaire. On nous indique que l'expertise ne se retrouve pas à l'intérieur du partenaire mais chez les sous-traitants. Est-ce que c'est le rôle de l'État d'accommoder un partenaire commercial par des règles législatives? Je soumets la question, M. le Président, à l'Assemblée.

Pour la Loi sur la protection de la jeunesse, M. le Président, les changements apportés... notamment au niveau de confier à la Société québécoise d'information juridique la responsabilité de caviarder les décisions rendues par la Cour du Québec, c'est une bonne mesure, c'est une mesure d'efficacité.

• (12 h 20) •

Au niveau de la Loi sur les recours collectifs, M. le Président, il y a un changement de fonctionnement. On va permettre d'utiliser le fonds de roulement du Fonds d'aide au recours collectif pour payer ses dépenses courantes, pour payer la liste d'épicerie. Et je sais que ça préoccupait mon ancien collègue de Chicoutimi et je pense que, tous ensemble, on a réussi à faire progresser la disposition législative proposée, notamment en instaurant un processus de reddition de comptes devant l'Assemblée nationale, de dire : Vous voulez utiliser les fonds qui sont à l'intérieur du fonds de roulement, du fonds d'opération pour payer vos dépenses courantes, soit, mais ça prend un processus de reddition de comptes pour s'assurer que la mission du fonds va être maintenue.

Et je pense qu'avec l'amendement qui a été adopté par la commission, M. le Président, bien, le travail va être fait, parce qu'au bout de trois années, eh bien, il y a un rapport qui va devoir être soumis par le fonds et qui devra être étudié par une commission parlementaire de l'Assemblée nationale, la commission parlementaire pertinente. Et ça, c'est fondamental, M. le Président. Parce que l'un de nos rôles, ici, M. le Président, c'est d'assurer le contrôle de l'action gouvernementale. Et je pense que, si nous avions davantage de processus, dans nos lois, qui nous permettraient d'avoir une reddition de comptes, ça permettrait peut-être d'éviter certains dérapages de l'administration de certains gouvernements, M. le Président.

Également, la Loi sur les tribunaux judiciaires a été modifiée, notamment sur le fait que la Cour d'appel puisse siéger en dehors des districts de Montréal et de Québec, ce qui est une bonne chose, dans un souci d'accessibilité à la justice, M. le Président. On le sait à quel point, pour les justiciables, parfois le fait de s'adresser aux tribunaux, ça peut être un fardeau incroyable pour eux, notamment au niveau des distances, au niveau des frais d'avocat, au niveau des procédures. Le système de justice a besoin d'être démocratisé, M. le Président, a besoin aussi d'être allégé. Et on a surtout besoin que les gens qui se sentent lésés et qui veulent s'adresser aux tribunaux pour obtenir réparation puissent le faire sans avoir à laisser leur chemise, M. le Président. Et cette mesure-là de la Cour d'appel va permettre à la cour d'aller siéger dans les différents districts pour se rapprocher des gens et pour diminuer les coûts, dans un souci d'économie, de la justice.

Également, M. le Président, on fait passer de trois à quatre ans le Comité sur la rémunération des juges, dans un souci notamment d'économie au niveau du comité qui se réunissait à chaque trois ans. On comprend l'économie, M. le Président. Cependant, lors de l'étude détaillée, on nous a indiqué que la conférence des juges avait transmis ses préoccupations au ministère, et nous aurions apprécié recevoir cette correspondance, puisque nous ne les avons pas entendus en commission. Et je pense que ça s'inscrit un peu dans le cadre du fonctionnement des travaux. Notamment hier, vous avez eu l'occasion de le constater, M. le Président, on nous demande de voter sur un principe sans avoir les amendements qui modifieront la législation. Donc, je pense que c'est important pour les parlementaires, M. le Président, lorsqu'on demande leur concours, d'avoir toute l'information nécessaire afin de bien évaluer la pertinence d'une modification législative.

Également, M. le Président, au niveau du Code des professions, la Loi sur la justice administrative, mais, avec le Bureau des présidents, il y a des nouvelles dispositions qui vont s'instaurer, et on va les soumettre à la compétence du Conseil de la justice administrative. Il y a quand même un bémol, M. le Président. On se retrouve dans un système bicéphale où les membres des ordres professionnels qui vont siéger sur le comité de discipline ne seront pas régis par le même code de déontologie, ils seront jugés par leurs pairs, notamment par le biais d'un comité du conseil d'administration de l'ordre professionnel. Il va falloir y repenser, M. le Président, parce que ça peut être préoccupant. Parce que, bien que ces membres-là agissent à titre bénévole, et qu'ils n'ont pas... et que ça ne constitue pas leur emploi à temps plein, et que c'est volontaire, et que ce sont des membres d'un ordre professionnel qui s'investissent parce qu'ils croient à l'intérieur de leur ordre professionnel et dans la défense de l'intérêt du public, M. le Président, il y a une question de justice naturelle à être jugé par celui qui vous nomme sur ce comité, dans l'éventualité où il y a une plainte contre vous, une plainte de nature déontologique. Donc, peut-être devrons-nous repenser ce système-là pour les membres du conseil... pour les membres siégeant sur les conseils de discipline.

Également, M. le Président, la ministre a introduit une disposition relativement au Code civil... au nouveau Code de procédure civile du Québec notamment relativement à l'exemption des frais d'audience, en lien avec la décision récente de la Cour suprême du Canada. Nous appuyons cette exemption qui pourra être demandée par les justiciables qui se retrouveraient dans une situation où ils ne pourraient rencontrer les frais d'audience. Nous devrons peut-être avoir un questionnement, M. le Président, aussi en lien avec l'accessibilité à la justice, sur les frais qui seront imposés aux justiciables pour avoir accès aux tribunaux. On vient cerner une mesure relativement aux journées d'audience, qu'en est-il des autres frais? Ça sera peut-être, éventuellement, abordé dans l'actualité, M. le Président, parce que je pense que c'est un sujet auquel on doit s'adresser.

Vous me permettrez, M. le Président, de remercier la ministre pour sa collaboration, de remercier la collègue de Joliette ainsi que l'ancien député de Chicoutimi, qui, jusqu'à la toute fin, a défendu bec et ongles ses positions et qui était un homme d'une grande expérience parlementaire et où on apprend beaucoup à le regarder travailler, et j'en suis désolé, qu'il soit parti. Également, je tiens à remercier les gens du cabinet de la ministre, les gens du ministère de la Justice qui ont contribué aux travaux, ainsi que les autres collègues parlementaires et les gens de l'Assemblée qui nous permettent de réaliser nos travaux. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Borduas. Y a-t-il d'autres intervenants sur la prise en considération de ce rapport?

Mise aux voix du rapport

Sinon — donnez-moi deux petites secondes — le rapport de la Commission des institutions portant sur le projet de loi n° 51, Loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Adopté. Pour la suite des choses, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vien : Merci, M. le Président. Veuillez, s'il vous plaît, appeler l'article 5.

Projet de loi n° 59

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, à l'article 5 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 11 novembre 2015 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Y a-t-il des interventions? M. le député de Richelieu, je vous cède la parole.

M. Sylvain Rochon

M. Rochon : Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, le projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes, cette loi-là, ce projet de loi là est la réponse du gouvernement libéral à plusieurs événements qui ont défrayé la manchette depuis son arrivée au pouvoir. On se rappellera de l'affaire Charkaoui et de la présence sur le territoire québécois d'imams tenant un discours dit haineux.

Or, cette réponse, M. le Président, elle est bien imparfaite, elle est bien maladroite. Et ce n'est pas que moi ou que ma formation politique qui le pensons, c'est l'opinion d'une panoplie d'analystes, d'experts, d'organismes, des analystes, des experts, des organismes qui ont décrié le projet de loi. Ils perçoivent l'accroissement des pouvoirs de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et son tribunal comme s'inscrivant dans une opération de censure, un tribunal administratif, là, du mauvais goût.

• (12 h 30) •

Les représentants des Juristes pour la défense de l'égalité et des libertés fondamentales, Julius Grey et Julie Latour, expriment leur vive inquiétude, leur vive inquiétude à l'égard du projet de loi anti-discours haineux. Ces juristes qui sont spécialisés en droit constitutionnel et en droit public ont voulu dissuader la ministre de la Justice d'inscrire dans la législation québécoise, y compris la Charte des droits et libertés de la personne, des dispositions contre les discours haineux ou incitant à la violence. Le Code criminel canadien réprime déjà les discours haineux, ont rappelé les représentants des Juristes pour la défense de l'égalité et des libertés fondamentales, au nombre desquels on retrouve aussi Pierre Brun, Marie Laure Leclercq, Denis L'Anglais, Guy Tremblay, Daniel Turp.

«Le projet de loi n° 59[, il] confère à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse un pouvoir d'enquête sur les discours haineux ou incitant à la violence ciblant un groupe de personnes comme les femmes, les homosexuels, les minorités visibles, les groupes religieux, les communautés ethniques, ou encore les militants d'un parti politique, bref, tout groupe formé de personnes protégées par l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne. Ces mesures sont...» Et là je cite Les Juristes pour la défense de l'égalité et des libertés fondamentales : «"Ces mesures sont "totalement inconciliables avec les assises d'une société libre et démocratique"...»

«L'ancienne bâtonnière du Barreau de Montréal, Julie Latour, reproche à la ministre [de la Justice] d'avoir "recours à un canon législatif pour tuer une mouche hypothétique".» «D'avoir "recours — je reprends ça parce que l'image est intéressante — à un canon législatif pour tuer une mouche hypothétique".»

«Mme Latour se questionne par ailleurs sur l'impact financier d'une brigade d'enquête à la commission [...] "en cette époque — note-t-elle avec justesse — d'austérité économique, étatique, où d'importants programmes sociaux sont supprimés ou [bien] significativement réduits".» À l'heure actuelle, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse ne peut intervenir que si la personne visée par des propos haineux porte plainte. Là, ça changerait.

«Loin — M. le Président — de "favoriser le vivre-ensemble et la cohésion sociale", comme le prétend le gouvernement libéral, le projet de loi n° 59 créerait — selon M. Grey et Mme Latour — un "climat social de suspicion aux effets délétères[...].

«"On l'aurait adoptée — disent-ils — cette loi-là, en 1947 ou [en] 1948 quand on a découvert le réseau d'espionnage soviétique. On aurait adopté une loi identique. Les Américains l'ont fait avec le maccarthysme, et ce que ça a donné était terrible", souligne [M. Grey,] ardent défenseur des libertés individuelles, [...]dans un entretien avec Le Devoir.

«La liberté d'expression[, c'est] à la fois la plus célébrée et la plus honnie des libertés fondamentales, poursuit Mme Latour, appelant dans la foulée à limiter les exceptions à des "cas extrêmes et bien circonscrits". "C'est pour dire des choses qui dérangent la société, qui sont à l'encontre des idées reçues que l'on a besoin de la protection constitutionnelle", [note]-t-elle.»

Est-ce que c'est vraiment utile, M. le Président, de créer une infraction pénale calquée sur une infraction criminelle déjà existante? En tout temps, la commission pourra désormais demander au tribunal une ordonnance de cessation afin d'empêcher la diffusion de propos jugés haineux. La Cour supérieure ne pouvait-elle pas déjà intervenir pour faire cesser des propos dits haineux? En quoi accorder plus de pouvoirs au tribunal de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse est-il judicieux? La question se pose. Pourquoi créer une liste de la honte? Lorsque le tribunal conclura qu'une personne a enfreint ces interdictions, le nom de cette dernière sera inscrit pour une durée déterminée par le tribunal sur une liste tenue par elle sur Internet. C'est ça, la liste de la honte. Quel est le but de cette liste? Quelles informations va-t-on retrouver sur cette liste? S'il est judicieux de procéder ainsi pour des personnes condamnées par un tribunal administratif, pourquoi ne pas faire de même avec les personnes condamnées en vertu du Code criminel? D'où vient cette idée de liste de la honte toujours rejetée au Québec dans le passé?

Des représentants de la communauté LGBT ont reproché à la ministre de la Justice de rater la cible avec le projet de loi n° 59. «La titulaire de la Chaire de recherche sur l'homophobie de l'Université de Montréal, Line Chamberland, a soutenu que le caractère répressif du projet de loi visant à lutter contre les discours haineux nuirait à la lutte contre l'homophobie, la lesbophobie, la biphobie [ou] la transphobie. "Il nous semble nécessaire d'insister sur l'efficacité plus grande d'une approche préventive plutôt que répressive", a-t-elle déclaré[...].

«L'adoption du projet de loi n° 59 pourrait en effet entraîner des effets pernicieux dans la lutte contre l"'homophobie au quotidien", a poursuivi la représentante du Conseil québécois LGBT et de la Coalition des familles LGBT, Mona Greenbaum. La plus large part de l'homophobie observée au Québec — insultes, moqueries, commentaires dévalorisants, mises à l'écart — ne tombent pas dans la définition de "discours haineux", a-t-elle souligné. "Un amalgame qui confondrait les actes homophobes avec les discours haineux risque même d'accentuer la tendance à nier le caractère homophobe de tels propos puisque, dira-t-on, ils ne relèvent pas du registre de la haine. Ainsi, l'homophobie au quotidien [...] pourrait s'en trouver banalisé", a averti Mme Greenbaum, appelant à son tour la ministre [...] à miser sur "l'éducation et le dialogue autour de la différence".

«Après avoir rappelé la présence de protection contre la propagande haineuse et les crimes haineux, ou l'incitation à la violence dans le Code criminel, Mme Greenbaum a dit craindre "des glissements de sens favorisés par la polysémie du terme ΄homophobie΄, des glissements qui viendraient justifier l'introduction de limites à l'exercice de la liberté d'expression au nom de la lutte contre l'homophobie".»

Je vais vous parler de quelqu'un d'autre maintenant que vous avez bien connu. «L'ancienne élue libérale Fatima Houda-Pepin juge que le gouvernement favorise les intégristes avec le projet de loi n° 59 qui les aidera à stigmatiser les critiques de leurs pratiques rigoristes.

«"Je suis estomaquée" — ce sont ses mots — a lancé [Mme] Houda-Pepin à l'issue de sa comparution en commission parlementaire au sujet du projet de loi n° 59 qui vise notamment — rappelons-le — à lutter contre le discours haineux et que défend la ministre de la Justice[...]. "C'est une revendication des intégristes depuis longtemps", estime l'ancienne députée de La Pinière.

«Grâce au projet de loi n° 59, un groupe religieux, et non plus seulement une personne croyante, pourrait se dire la cible d'un discours haineux alors qu'il ne s'agirait que de critiques découlant d'un exercice légitime de la liberté d'expression», craint Fatima Houda-Pepin.»

Je reprends, parce que c'est un avis important. «Grâce au projet de loi n° 59, un groupe religieux, et non plus seulement une personne croyante, pourrait se dire la cible d'un discours haineux alors qu'il ne s'agirait que de critiques découlant d'un exercice démocratique de la liberté d'expression...» Fatima Houda-Pepin. «Avec une telle loi — souligne-t-elle — [j'aurais pu être] condamnée — c'est elle qui parle, là — pour islamophobie quand [j'ai] combattu en 2005 les imams qui voulaient imposer la charia au Canada...» Laissons Mme Houda-Pepin.

Le Barreau du Québec, maintenant. Il «a recensé "plusieurs risques importants" de voir le projet de loi antidiscours haineux échouer au test des tribunaux.

«Le document entre en collision avec l'article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés, où les "libertés fondamentales" de conscience, de religion, d'opinion et d'expression [...] sont énoncées. "Il faut reconnaître qu'il s'agit d'une limite au droit à la liberté d'expression", a affirmé sans ambages la présidente du comité des droits de la personne du Barreau du Québec [...] lors de son passage à l'Assemblée nationale...» C'est une opinion qui compte.

«L'ordre professionnel est tombé [littéralement] à bras raccourcis sur la proposition, incluse dans le projet de loi n° 59, de constituer une "liste publique" puis d'y inscrire le nom des personnes ayant été reconnues coupables d'avoir tenu ou diffusé un discours haineux contre un groupe de personnes protégé par l'article 10 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne — femmes, homosexuels, minorités visibles, groupes religieux, etc. — par le Tribunal des droits de la personne. "La liste va trop loin. [...]C'est démesuré", [a-t-elle] soutenu[...]. En allant de l'avant, le gouvernement libéral "bafouerait le droit à la vie privée".»

• (12 h 40) •

Un autre avis : «Le projet de loi n° 59 part d'une intention louable — écrit Pierre Trudel, professeur au Centre de recherche en droit public de la Faculté de droit de l'Université de Montréal : il propose un mécanisme afin d'identifier et [de] pourchasser ceux qui répandent des propos haineux ou incitant à la violence. Mais il institue une inquisition nouveau genre faisant fi des exigences de la liberté d'expression.

«Tout le monde convient — poursuit M. Trudel — que les propos qui incitent à détester ou à poser des gestes violents sont à proscrire. Déjà, des dispositions du code [...] permettent d'accuser devant les tribunaux ceux qui répandent de tels propos.

«[...]La loi proposée interdit de tenir publiquement un discours haineux ou incitant à la violence contre un groupe présentant une caractéristique commune à l'égard de laquelle on ne peut faire de discrimination, soit la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge, sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un moyen pour pallier ce handicap.

«[...]Les tribunaux ont pourtant rappelé — insiste Pierre Trudel — que la liberté d'expression ne protège pas que les propos servant des "fins légitimes d'information du public".

«Même le mauvais goût est protégé.»

«Le projet de loi 59 propose d'ajouter [...] un mécanisme de plaintes. Toute personne — c'est M. Trudel, là, qui poursuit — aura le droit de déposer des plaintes auprès de la Commission des droits de la personne sur n'importe quels propos, discours, émissions de télé, caricatures ou images qui lui semblent visés par la loi.

«Il est même possible de dénoncer des propos sur le point d'être tenus ou diffusés, donc qui ne sont même pas encore connus!

«La seule timide concession à la liberté d'expression du projet n° 59 est une mention précisant que "ces interdictions n'ont pas pour objet de limiter la diffusion du discours aux fins d'information légitime du public". Où sont donc passés les "Je suis Charlie"?

«[...]Même le propos marginal, contraire aux vues de la majorité, déplaisant, stupide ou de mauvais goût est protégé par la liberté d'expression, pas seulement ce qui est "légitime".

«C'est d'ailleurs pour protéger les discours marginaux qu'on a besoin de la liberté d'expression, pas pour protéger ce qui fait l'unanimité!

«Il y a dans la société québécoise des gens qui sont persuadés — c'est toujours Pierre Trudel qui parle — que le propos qui critique une religion, les homosexuels, les femmes est un propos automatiquement haineux. En somme, plusieurs confondent le propos "illégitime" — certes — avec le propos haineux. Le projet de loi n° 59 leur ouvre un bureau des plaintes», observe le professeur Trudel.

«Bien sûr, les tribunaux ont distingué entre le propos qui incite vraiment une personne à haïr ou à se livrer à de la violence et les propos détestables qui n'ont pas de chances d'avoir de tels effets. Mais la distinction est ténue.

«En ouvrant la porte à cette "chasse" à tout propos qui déplaît, le projet de loi n° 59 fait fi des conditions concrètes de l'exercice de la liberté d'expression.

«Il forcera tous ceux qui s'expriment à se demander à chaque fois si quelqu'un quelque part ne va pas trouver que leurs mots, leurs blagues, leur photo ou leur caricature semblent "haineux"», conclut Pierre Trudel.

Prenons la partie deux du projet de loi, rapidement, je vois que le temps s'écoule, qui contient des modifications de lois déjà existantes afin de mieux protéger les personnes. De nouveaux pouvoirs d'enquête et de sanction pour le ministre de l'Éducation, à la suite d'un «comportement pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou morale des [élèves]». Cette mesure s'appliquerait tant dans le domaine de l'enseignement public que dans celui de l'enseignement privé, et tant aux ordres d'enseignements primaire et secondaire que collégial.

Le nouveau pouvoir d'enquête du ministre de l'Éducation, est-ce qu'il change vraiment quelque chose à la situation actuelle? Je vous le demande, M. le Président. Les lois donnaient déjà des pouvoirs d'enquête au ministre de l'Éducation. Dernier exemple en date, là, l'enquête suite à la fouille à nu de la jeune fille dans une école secondaire de Québec. Ceci dit, est-ce que ces modifications auraient permis au ministre d'enquêter dans le cas Charkaoui? Rien n'est moins sûr.

Qu'est-ce, par ailleurs, que la sécurité morale? Comment définit-on ce concept? Il y a plein de questions qui se posent, M. le Président. «Le projet de loi libéral — écrit Yves Boisvert dans La Presse — [...] n'est pas seulement inutile, il risque d'être absolument néfaste.

«Celui qui l'a le mieux démontré n'est pas Julius Gray mais l'imam Salam Elmenyawi. "Vous pouvez m'insulter, moi, mais n'insultez pas ma religion", a dit le représentant du Conseil musulman de Montréal en commission parlementaire[...]. L'homme réclame qu'on rende illégal [le fait] de se moquer des religions.

«Qu'est-ce qu'une insulte, au fait? Une moquerie?

«Si tel était le cas, il faudrait sans doute construire de nouvelles prisons pour loger les humoristes — écrit Boisvert — ou tous ceux qui, convaincus de la supériorité de leur religion, ou athées, attaquent celle des autres», suggère-t-il.

Tiens, je vais continuer... je vais conclure avec ces quelques lignes de Denise Bombardier : «La liberté d'expression si vantée [...] qu'elle est brandie comme l'étendard de nos valeurs démocratiques, se voit fragilisée par ce fumeux projet de loi n° 59. En fait, dans le contexte occidental actuel, c'est à la défense de la liberté d'expression qu'il faut se consacrer.

«L'exagération, la caricature, l'outrance verbale, la grossièreté, l'obscénité, ces formes peu recommandables de l'expression humaine doivent avoir droit de citer — que cela plaise ou non.

«C'est par la pédagogie à travers la transmission de la culture et de la lutte contre les préjugés que l'on améliorera le climat social et que l'on élèvera les débats sur des thèmes délicats et explosifs par ailleurs.

«Nos lois protègent contre les propos haineux et l'appel à la violence. Le projet de loi n° 59 veut plutôt distraire ou faire silence sur le fait que le terme "islamophobie" dont usent les libéraux à l'endroit des gens qui critiquent le radicalisme islamique est une prise de position pour enfermer la parole libre.» Fin de la citation. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Richelieu, pour cette intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de Saint-Jean.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci beaucoup, M. le Président. J'ai l'occasion aujourd'hui, comme un certain grand nombre de mes collègues, de m'exprimer sur le projet de loi n° 59. Le projet de loi n° 59, comme vous l'avez mentionné précédemment, c'est la Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Vous savez, le projet de loi n° 59 est une réponse, hein, du gouvernement libéral à plusieurs événements ayant défrayé la manchette depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement libéral actuel, c'est-à-dire avril 2014, dont l'affaire Charkaoui, et la présence sur le territoire québécois d'imams tenant un discours dit haineux. Les consultations ont eu lieu au mois d'août et de septembre. Plusieurs groupes ont été entendus, 35 plus particulièrement. Bien entendu, comme parlementaires, vous savez, M. le Président, nous avons la responsabilité, ou même, je pourrais dire, le devoir d'entendre les groupes lorsqu'il y a un projet de loi.

Je pourrais faire une parenthèse, M. le Président, et vous allez me le permettre, quand on parle de consultations, de rappeler ma déception, de la part du gouvernement, de ne pas avoir accepté la motion que j'ai présentée précédemment, aujourd'hui, pour que le gouvernement tienne une véritable consultation partout dans les régions du Québec, une commission parlementaire itinérante dans toutes les régions du Québec sur la stratégie d'action de lutte à la pauvreté avant l'adoption du projet de loi n° 70 déposé par le ministre de la Solidarité sociale.

Dans ce cas-ci, pourquoi nous demandions une consultation dans toutes les régions? Bien, c'est pour justement entendre les gens dans leurs régions qui vivent une problématique et qui ont des préoccupations sur la question de la pauvreté, qui vivent la pauvreté, des groupes qui aident en pauvreté. Ça, c'est une chose. Quand on est en commission parlementaire et qu'on rencontre des groupes sur un projet de loi, dans ce cas-ci, le projet de loi n° 59, bien, c'est pour entendre leurs opinions sur le projet de loi, mais aussi ce qui est dans le projet de loi, ce qui n'est pas dans le projet de loi ou ce qui est dans le projet de loi et qui ne devrait pas être dans le projet de loi. Donc, c'est le travail que nous devons faire comme parlementaires.

Et, avec toute l'expérience que vous avez, je sais que vous avez plusieurs mandats, je pourrais dire, derrière la cravate, donc vous avez cette habitude du travail rigoureux. Et là ça, c'est tous les partis politiques confondus, nous devons avoir cette rigueur d'entendre les groupes.

Ces groupes travaillent fort, souvent ont peu de ressources, connaissent le projet de loi. Après l'existence du projet de loi, le projet de loi est déposé, ils ont peu de temps pour lire le projet de loi, de peaufiner une réflexion. Ils écrivent un mémoire, souvent, certains, comme je l'ai dit, ont peu de ressources, donc peu de personnes pour rédiger un tel mémoire. Et là on leur demande, on leur dit : Bon. Bien — ça va de soi, un mémoire, bien entendu — quel amendement vous proposez, comment vous voudriez changer ça? Et ils ne connaissent peut-être pas autant les règles ou les habitudes du Parlement et du parlementarisme et comment on modifie un projet de loi.

• (12 h 50) •

Donc, moi, je crois qu'il est toujours à propos de souligner les efforts des gens qui se présentent en commission parlementaire, qu'ils soient pour ou qu'ils soient contre un projet de loi. Qu'ils soient pour ou qu'ils soient contre la position de nos partis politiques, ces gens-là mettent des énergies, mettent des efforts, investissent du temps pour faire ce travail-là. Donc, on doit les remercier, 35 groupes donc, facilement des centaines de personnes derrière ce travail-là, qui nous ont permis justement, justement de voir plusieurs lacunes, plusieurs bémols ou plusieurs éléments du projet de loi où nous pouvons dénoncer ce projet de loi là, et j'aurai l'occasion d'en parler dans mon intervention, M. le Président.

On peut vraiment dire que le projet de loi est deux parties complètement différentes. La première partie, selon nous, consiste en la création d'une loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence, dans laquelle on retrouve notamment la création d'une infraction pénale calquée sur l'interdiction au Code criminel relativement à la tenue et à la diffusion de discours haineux ou incitant à la violence; l'attribution à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse de pouvoir enquêter, dans le cas d'un discours haineux ou incitant à la violence tenu publiquement, tant à l'égard d'un groupe que d'un individu, et basé sur un motif de discrimination interdit à l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne; l'attribution au Tribunal des droits de la personne du pouvoir de déterminer le montant des sanctions civiles, pécuniaires que devront payer les personnes ayant tenu ou diffusé des discours haineux ou incitant à la violence, de même que la durée de leur inscription sur une liste diffusée sur le site Internet de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse; l'instauration, par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, d'une liste publique des personnes sanctionnées par le travail des droits de la personne, pour avoir tenu ou diffusé des propos haineux ou incitant à la violence; l'attribution au Tribunal des droits de la personne du pouvoir de délivrer des ordonnances pour faire cesser les discours haineux ou incitant à la violence; la modification de la Charte des droits et libertés de la personne afin d'introduire la diffusion des discours haineux et d'y conformer les nouveaux pouvoirs de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et du tribunal de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Donc, c'est ce qu'on retrouve, selon nous, dans la première partie du projet de loi, qui... bon, on a eu plusieurs débats là-dessus, vous le savez, M. le Président, sur le fait que c'est deux projets de loi en un. Je pourrais dire la même chose pour... ça semble être une tentation ou, du moins, une mode de la part du gouvernement actuel de déposer des projets de loi qui incluent ou qui pourraient inclure plusieurs projets de loi dans un projet de loi. Je pourrais encore reprendre l'exemple du projet de loi n° 70. Je pourrais reprendre une multitude de projets de loi, le projet de loi n° 20, que nous avons débattu dans les derniers jours, justement, on le voyait, deux projets de loi, puis même peut-être plusieurs projets de loi en un. Est-ce que c'est pour sauver du temps? Est-ce que c'est pour plein de raisons? Je ne le connais pas, je ne connais pas les motifs du gouvernement, mais force est de constater que ça fait en sorte...

Quand je parlais tantôt, M. le Président, des groupes, des gens qui se déplacent pour venir ici en commission parlementaire, ça complexifie leur travail, parce que, dans certains cas, c'est des groupes qui ont une position ou une orientation sur une partie d'un projet de loi et peut-être pas sur l'autre, et là ça les oblige d'avoir une position, une réflexion sur tout ça. Mais, au-delà de ça, je pense que, avec le travail parlementaire, comme vous le savez, comment ça se passe, dans certains cas, ça éloigne un consensus possible ou plus rapide sur certains éléments du projet de loi. Je ne parle pas de ce projet de loi là actuellement, mais je parle dans l'ensemble, là, de cette façon de faire d'inclure, un peu comme le gouvernement Harper faisait au gouvernement fédéral, donc des projets de loi dits mammouth ou petit mammouth, comme on a vu ici, à Québec, que mon collègue de Rousseau utilisait comme expression, qui fait sourire, mais qui démontre, hein, une belle image de cette tendance de la part du gouvernement de mettre plusieurs projets de loi en un.

Donc, M. le Président, dans la première partie, plusieurs enjeux, plusieurs questions se posent, que nous avons eues lors de notre réflexion, comme parti politique, pour le Parti québécois, mais aussi à la lecture et à l'audition des gens qui sont venus ici en commission parlementaire à l'Assemblée nationale, dans la première partie.

Est-ce la création d'un tribunal d'idées? Plusieurs de mes collègues ont posé cette question. La question demeure. Nous devons réfléchir à cette question. Quels intervenants perçoivent l'accroissement... Quelques intervenants — pardon, M. le Président, j'ai eu quelques interventions aujourd'hui, donc mélangé intervention et intervenant — perçoivent l'accroissement des pouvoirs de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et du tribunal de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse comme la création de deux instances dites de censure, entre guillemets, un tribunal administratif du bon goût.

Donc, la question se pose, M. le Président : Est-ce la création d'un tribunal d'idées? Est-ce que nous allons pouvoir continuer de donner une opinion? Bon. Des fois, on peut dire : Je partage cette opinion, des fois je ne la partage pas, mais, à un moment donné, c'est aussi très subjectif, l'opinion ou les opinions des gens.

Est-ce véritablement utile de créer une infraction pénale calquée sur une infraction criminelle déjà existante? Encore là, la question se pose. En tout temps, la commission pourra désormais demander au tribunal de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse une ordonnance de cessation afin d'empêcher la diffusion des propos jugés haineux. Or, jusqu'à maintenant, le pouvoir de cesser de faire ou de ne pas faire était l'apanage de la Cour supérieure. De plus, la Cour supérieure ne pouvait-elle pas déjà intervenir pour faire cesser des propos dits haineux? Encore là, la question se pose. Il y a des instances qui existent déjà, ils ont des mandats, ils ont des pouvoirs. Est-ce qu'ils peuvent le faire en fonction de ces mandats, de ces pouvoirs en vertu des lois qui nous régissent déjà actuellement? La question se pose.

En quoi accorder plus de pouvoirs au tribunal de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse est-il judicieux? Encore là, M. le Président, la question se pose. Pourquoi créer une liste de la honte? Ça, c'est une question qui se pose. Dans la revue de presse, on le voit, c'est mentionné. Tantôt, j'en parlerai, de la revue de presse. C'est une question que plusieurs personnes se posent.

Lorsque le tribunal conclura qu'une personne a enfreint ces interdictions, le nom de cette dernière sera inscrit pour une durée déterminée par le tribunal sur une liste tenue par la commission et accessible sur Internet. Quel but servira cette liste? Quelle information retrouveront-on sur cette liste? S'il est judicieux de procéder ainsi pour des personnes condamnées par un tribunal administratif, pourquoi ne pas faire de même avec les personnes condamnées en vertu du Code criminel? La question se pose, M. le...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Je dois vous interrompre, compte tenu de l'heure, M. le député de Saint-Jean, en vous posant la question : Avez-vous l'intention de compléter votre intervention à la reprise des travaux? La réponse, c'est oui.

Alors, je vais suspendre les travaux, et nous serons de retour à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 1)

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Bon après-midi, chers collègues. Veuillez vous asseoir.

Alors, l'Assemblée poursuit le débat ajourné le 11 novembre 2015 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Au moment de la suspension des travaux, la parole était au député de Saint-Jean, et il lui reste environ 7 min 32 s. M. le député, à vous la parole.

M. Turcotte : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, avant la pause de l'heure du dîner, j'avais tracé un portrait. Si vous vous souvenez bien, j'avais mentionné, à ce moment, que le projet de loi n° 59, à notre lecture, était formé de deux projets de loi ou du moins deux parties très distinctes qui étaient regroupées ensemble pour faire un projet de loi. J'avais dressé un portrait de la première partie et énuméré quelques questionnements, quelques réflexions sur la première partie.

Donc, je pourrais poursuivre pour la deuxième partie du projet de loi, qui contient des modifications de lois déjà existantes afin de mieux protéger les personnes. Donc, un bref résumé de la deuxième partie du projet de loi, notre lecture.

Donc, la question du mariage forcé : donc, une nouvelle autorisation par un juge dans le cas de mariages visant des personnes âgées de 16 ou 17 ans, et ce, que l'union ait été contractée au Québec ou ailleurs.

La question de l'ordonnance de protection : donc, en termes d'ordonnance de protection, la création d'un pouvoir d'ordonnance civile de protection qui peut être demandée lorsqu'une personne croit que sa vie, sa santé ou sa sécurité est menacée.

L'aspect sur la DPJ, donc la protection de la jeunesse : une modification à la Loi sur la protection de la jeunesse, notamment par l'ajout à la liste d'exemples de mauvais traitements psychologiques, la notion de contrôle excessif auprès des enfants; une modification à la Loi sur la protection de la jeunesse pour préciser qu'aucune considération, qu'elle soit d'ordre idéologique — on peut aussi se questionner sur l'aspect, peut-être, religieux ou autre, y compris celle qui serait basée sur une conception de l'honneur — ne peut justifier que la sécurité ou le développement d'un enfant soit compromis.

Et l'aspect aussi de la sécurité dans les écoles : de nouveaux pouvoirs d'enquête et de sanction pour le ministre de l'Éducation à la suite d'un comportement pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou morale des élèves. Cette mesure s'appliquerait tant dans le domaine de l'enseignement public que dans celui de l'enseignement privé et tant aux ordres d'enseignement primaire et secondaire que collégial.

Donc, avec ce portrait-là, on voit un peu la différence par rapport à la première partie du projet de loi, mais, encore là, M. le Président, plusieurs questions, ou des questionnements, ou des enjeux qui peuvent nous interpeller suite... comme je vous ai longuement présenté, mais je trouvais quand même important... des groupes et des citoyens qui se sont exprimés ici, à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire.

Donc, pour la deuxième partie, le rapport d'experts sur Lev Tahor recommande que la Loi sur l'instruction publique soit modifiée pour donner d'autres moyens au ministère de l'Éducation et aux commissions scolaires que celui de faire un signalement à la DPJ pour faire appliquer l'obligation de scolarisation des enfants du Québec, ce qu'on ne retrouve pas dans le projet de loi.

Par ailleurs, sans être nuisibles, les modifications à la Loi sur la protection de la jeunesse seront-elles vraiment utiles? Donc, c'est une question qui demeure, M. le Président. La jurisprudence et le sens commun ne dictent pas déjà que le contrôle excessif des parents sur son enfant est une forme de maltraitance? Il en va de même pour les traditions culturelles qui ne sauraient justifier un mauvais traitement, ce qu'un rapport a d'ailleurs déjà confirmé en juillet dans ladite affaire.

Le nouveau pouvoir d'enquête du ministre de l'Éducation change vraiment quelque chose à la situation actuelle. Donc, c'est une question, là : Est-ce que ce nouveau pouvoir là va vraiment pouvoir permettre au ministre de l'Éducation de changer quelque chose concrètement? Les lois donnaient déjà des pouvoirs d'enquête au ministre de l'Éducation. Dernier exemple en date, l'enquête suite à la fouille à nu de la jeune fille dans l'école secondaire de Québec. Ceci dit, est-ce que ces modifications auraient permis au ministre... d'enquêtes dans le cas de Charkaoui? Rien n'est moins sûr. Donc, encore là, une fois, la question demeure.

Qu'est-ce que la sécurité morale? Une autre bonne question. Comment définit-on ce concept? Le concept devrait être précisé, particulièrement parce qu'il s'applique dans un contexte éducatif et que les institutions — cégeps, écoles secondaires — doivent assurer cette sécurité morale sous peine d'être sanctionnées par le ministre. Encore là, M. le Président, beaucoup de questions, des craintes aussi, hein, de la part de plusieurs, sur ces aspects, donc sur la possibilité de liberté.

Je vois le temps filer, je vois le temps passer rapidement, M. le Président. J'aurais aimé, pour terminer mon intervention, démontrer... je vous ai parlé précédemment de toutes les inquiétudes des gens ou des citoyens, puis on peut le voir dans la revue de presse, ne serait-ce que par les titres de quelques articles : un article du Devoir du 17 août, Discours haineux — Des juristes s'allient contre un «canon législatif»;Le Devoir du lendemain, 18 août, Discours haineux — La ministre de la Justice se défend de vouloir établir la censure;Journal de Québec, 18 août, Une loi inutile et néfaste, selon Me Julius Grey; Le Devoir, 19 août, Discourshaineux — La mauvaise loi, un texte de Josée Boileau; toujours Le Devoir, 19 août, Le projet de loi de la ministre de la Justice rate la cible, fait valoir la communauté LGBT; Journal de Québec, Denise Bombardier, La loi comme bâillon.

Donc, je pourrais vous mentionner plusieurs de ces articles, mais, M. le Président, je vois le temps terminé, mais je crois que c'est important, avant d'adopter ce projet de loi, de poser plusieurs questions, d'obtenir des réponses, parce que c'est un projet de loi qui a un impact significatif sur la liberté de parole, la liberté d'expression, sur notre liberté individuelle comme citoyens aussi. Et, dans ce genre de questions, je crois que nous devons faire un travail rigoureux comme parlementaires, c'est l'habitude de l'ensemble du Parlement, c'est ce que nous allons poursuivre à faire. Merci, M. le Président.

• (15 h 10) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député d'Iberville, pour cette intervention... Saint-Jean, désolé. M. le député de Saint-Jean. Je suis prêt à céder la parole à un prochain intervenant, et je reconnais Mme la députée de Taillon.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence — dans un premier temps — et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Alors, comme mes collègues ont pu l'exprimer, nous devons constater que ce projet de loi comporte deux idées, deux interventions particulières, qui nécessitent des interventions particulières, et il aurait été plus facile de discuter de chacune de ces deux idées de façon distincte, de ces deux enjeux, parce que, quand on est rendu à faire un projet de loi, c'est parce que ça correspond à un enjeu de la société, à un besoin de la société. Et, clairement, les évènements qui ont frappé le Québec, le Canada et un peu partout dans le monde récemment nous amènent à devoir nous pencher au niveau législatif sur ces actions qui ont eu lieu, les conséquences qu'elles ont eues et la meilleure façon de les prévenir et de les contrôler.        

Donc, la motion de scission qui a été déposée par ma collègue la députée de Taschereau aurait été bienvenue dans un contexte comme celui-là. Et, pour avoir vécu une situation similaire avec le projet de loi n° 20, qui devait porter sur l'amélioration de l'accès pour les médecins de famille et les médecins spécialistes et dans lequel on a introduit un élément qui diminue l'accès au niveau de la fécondation in vitro, ça devient très difficile de pouvoir soutenir correctement les travaux d'un projet de loi quand il comporte des idées distinctes, alors que de traiter une chose à la fois, c'est beaucoup plus facile de faire des consensus et de faire avancer nos travaux législatifs en commun.

Je reprendrais une citation de la députée de Taschereau, qui a été impliquée particulièrement sur le projet de loi n° 59 et qui disait... qui était citée dans Le Journal de Québec, où on disait : «Les partis d'opposition estiment que le texte de loi de la ministre de la Justice se trompe de cible. "Il ne répond pas aux attentes qu'avaient les Québécois [...] de protéger les jeunes des fondamentalismes religieux qui les entraînent vers la radicalisation"...» Et c'est ça qu'est la principale préoccupation dont on a été témoins dans l'actualité au Québec, c'est-à-dire que les adolescents, les jeunes adultes, à une période de leur vie où ils sont particulièrement influençables, sont sensibles à des éléments d'influence qui conduisent à la radicalisation et à des gestes qu'ils n'auraient probablement pas posés dans d'autres circonstances. Et c'est ça qui est l'objet de notre législation dans la perspective d'en diminuer... d'éliminer, en fait, cette situation-là.

Mais, bien sûr, diminuer... éviter la radicalisation, en fait, ça doit aussi être pris en considération avec le respect et la protection de la liberté d'expression. Et, dans un autre contexte, celui de l'attentat de Charlie Hebdo, on a bien vu comment, à travers la planète, la protection de cette liberté d'expression était précieuse dans les valeurs de justice, d'équité et, je vous dirais, d'équilibre dans les sociétés. Et, pour avoir été dans des pays d'après-guerre — je suis allée à 15 occasions dans des missions en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo — je peux témoigner des conséquences de bris. Lorsqu'on brime la liberté d'expression des gens, on vient vraiment interférer avec la justice et avec des valeurs fondamentales des droits et libertés d'une société. Donc, le grand défi de cette loi, c'est de trouver une façon de prévenir le radicalisme tout en s'assurant que nous allons protéger la liberté d'expression.

Qu'est-ce que c'est, la radicalisation? Le ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, en France, a publié, en 2015, un document pour la prévention de la radicalisation des jeunes. Moi, en Montérégie, j'ai été très touchée par, entre autres, l'attentat à Saint-Jean-sur-Richelieu, l'adjuvant Patrice Vincent qui est décédé. Lorsque je suis allée au salon funéraire, j'ai constaté qu'il était cousin de deux de mes voisins. Et donc on voit comment ça nous rejoint tous dans des situations qu'on pense tout à fait sécuritaires dans notre contexte de vie. Et, dans le cas de ce jeune Martin Couture-Rouleau, on a bien vu comment le père avait été conscient du processus de radicalisation auquel sont fils a été exposé et qu'il avait donné l'alerte, qu'il avait essayé de tenter... que des gens viennent aider, l'aider, lui, et aider son fils, et que ça n'avait pas fonctionné. Alors, il faut trouver des mécanismes pour éviter cette radicalisation chez nos jeunes.

Et, pour savoir ce qu'on veut éviter, bien il faut le définir, et donc le ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche a développé une brochure qui vise un peu à prévenir et il précise en quelques mots la radicalisation. Il peut y avoir plusieurs définitions, mais je trouvais que celle qui était présentée ici était intéressante : «La radicalisation, c'est l'action de rendre plus intransigeant le discours ou l'action. [...]La radicalisation relève d'un processus "d'emprise mentale" — "d'emprise mentale" — qui trouve sa source dans l'environnement de l'individu, le plus souvent aujourd'hui par le biais de l'exposition à des contenus extrémistes diffusés sur Internet.» L'emprise mentale se caractérise par «une rupture avec les modalités antérieures de comportements, jugements, valeurs, sociabilités individuelles, familiales et collectives». L'emprise mentale se caractérise aussi par «l'acceptation par une personne que sa personnalité et sa vie affective, cognitive, relationnelle, morale et sociale soient modelées par des suggestions, injonctions, idées, valeurs, doctrines imposées par un tiers». Et finalement l'emprise mentale se caractérise par «l'adhésion et l'allégeance inconditionnelle, affective, comportementale, intellectuelle, morale et sociale à une personne ou à un groupe[...]. Dans les cas les plus extrêmes, ce processus peut entraîner une attitude susceptible de conduire jusqu'à l'extrémisme et au terrorisme.» Alors, c'est ça, donc, qu'on vise à vraiment contraindre, à éliminer par le projet de loi n° 59.

Et on vise à trouver cette façon d'éviter ce radicalisme tout en protégeant, comme je l'ai dit plus tôt, la liberté d'expression. Alors, c'est un peu dans cet esprit que le projet de loi n° 59 a dû être regardé par mes collègues de tous partis. Et effectivement ce qu'on doit constater, c'est que les gens qui se portent à la défense de la liberté d'expression ont manifesté énormément d'inquiétude, de préoccupations. Nous avons quelques experts, des juristes qui sont reconnus pour leur analyse, pour leur réflexion en profondeur de la protection de la liberté d'expression, et leur avis publié dans Le Devoir du 17 août, lorsque le projet de loi a été déposé, est très intéressant et apporte un éclairage sur la menace que comporte le projet de loi n° 59 sur la liberté d'expression. Alors, je vous lis un extrait : «Le projet de loi n° 59 confère à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse un pouvoir d'enquête sur les discours haineux ou incitant à la violence ciblant un groupe de personnes comme les femmes, les homosexuels, les minorités visibles, les groupes religieux, les communautés ethniques, ou encore les militants d'un parti politique, bref tout groupe formé de personnes protégées par l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne.

«Ces mesures sont "totalement inconciliables avec les assises d'une société libre et démocratique", selon Les Juristes pour la défense de l'égalité et des libertés fondamentales.»

Je vous donne le nom des personnes parce que ce sont des gens qui sont connus et qui sont réputés : Julius Grey, Julie Latour, ancienne bâtonnière au Barreau — si on poursuit — Pierre Brun, Marie Laure Leclercq, Denis L'Anglais, Guy Tremblay et Daniel Turp, donc des gens qui ont une analyse profonde et réfléchie, qui ont consacré leur vie, dans le fond, à l'étude des droits de la personne et qui nous disent : Attention! L'intention est probablement bonne, mais, dans les faits, la façon dont c'est libellé, la façon dont le projet de loi est rédigé, on va trop loin et on cause un préjudice à la liberté d'expression.

«L'ancienne bâtonnière du Barreau de Montréal Julie Latour reproche à la ministre Vallée d'avoir "recours à un canon législatif pour tuer une mouche hypothétique". À l'heure actuelle, la [commission des droits de la personne et de la jeunesse] peut intervenir seulement si la personne visée par des propos haineux porte plainte.

«Mme Latour se questionne sur l'impact financier d'une brigade d'enquête à la CDPDJ "en cette époque d'austérité économique étatique, où d'importants programmes sociaux sont supprimés ou significativement réduits".»

• (15 h 20) •

Donc, on se rend compte qu'il y a des éléments qui débordent peut-être la volonté initiale à l'intérieur du projet de loi n° 59, et notre objectif, c'est d'essayer de bonifier les projets de loi qui nous sont déposés pour faire en sorte que l'esprit, la volonté première, qui est très souvent légitime, se retrouve avec la bonne dose. Comme pharmacienne, j'aime bien parler de la dose parce que le poison est dans la dose.

Il y a eu des réactions dans les médias au dépôt de ce projet de loi, donc des réactions plutôt... plutôt unanimes mais qui allaient dans le sens d'un questionnement important, en particulier sur la première partie du projet de loi. Et j'insiste là-dessus parce que, dans la deuxième partie, il y avait beaucoup plus de consensus, mais, parce qu'on a fusionné les deux thèmes, bien on se retrouve à avoir un projet de loi qui, dans son ensemble, est critiqué négativement, alors qu'il y a des éléments positifs qu'on peut ressortir. Pierre Trudel dit : Le projet de loi n° 59 : une très grave menace à la liberté d'expression. Dans Le Devoir, Josée Boileau dit : La mauvaise loi. Lise Ravary, Alerte (encore) à la liberté d'expression. Dans The Gazette, Editorial : Québec's hate speech bill is problematic. Denise Bombardier, La loi comme bâillon. Et Mathieu Bock-Côté, Peut-on critiquer les religions, les tourner en ridicule, les conspuer? Alors, on sent une certaine préoccupation dans beaucoup de journaux, de médias qui sont sensibles à la protection de la liberté d'expression. Alors, en quoi est-ce que la liberté d'expression est menacée? Et quels sont peut-être, dans la partie I, les éléments qui sont les plus susceptibles de poser problème?

Alors, la partie I consiste en la création de la loi qui concerne la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence. Or, le projet de loi ne contient aucune mesure pour lutter contre la radicalisation qui, on l'a vu tantôt dans la définition que j'ai donnée, conduit à ces actions. Pourtant, c'est à ce problème que les Québécois veulent qu'on s'attaque.

Le projet de loi crée une infraction pénale pour la tenue et la diffusion de discours haineux ou incitant à la violence. Pourtant, le Code criminel contient déjà trois articles, les articles 318, 319 et 320, qui permettent de nous défendre face à des discours haineux ou des appels à la violence.

Le projet de loi attribue à la commission des droits de la personne et de la jeunesse des pouvoirs d'enquête dans le cas de discours haineux ou incitant à la violence tenu publiquement tant à l'égard d'un groupe que d'un individu et basé sur un motif de discrimination interdit à l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne. Donc, c'est pourtant interdit à la charte, et on attribue à la commission des droits de la personne et de la jeunesse ce type de pouvoir.

Le problème, c'est qu'une poursuite en fonction du Code criminel oblige le plaignant à faire la preuve de la culpabilité de l'accusé hors de tout doute raisonnable, alors que la Commission des droits de la personne et de la jeunesse n'utilise pas la règle du doute raisonnable. L'autre grave problème est que la commission des droits de la personne et de la jeunesse a de très longs délais d'attente pour remettre ses jugements. Alors, prenons comme exemple que... On comprend que l'accusation va être plus facile mais que, si une personne est sous enquête, bien elle va devoir attendre jusqu'à deux ans avant d'être sanctionnée ou d'être lavée de tout soupçon, de toute accusation. Alors, qu'est-ce qui va arriver à un travailleur, si on prend, par exemple, un enseignant, un professeur, qui serait accusé de discours haineux ou de discours incitant à la violence? Bien, les commissions scolaires nous ont dit qu'elles devraient le suspendre en attendant. Donc, on suspendrait un professeur pendant une durée de deux ans sur une accusation qui n'a pas encore été démontrée. Tant que le tribunal de la commission des droits de la personne et de la jeunesse n'aurait pas rendu sa décision, ce professeur se verrait suspendu.

Une autre préoccupation, c'est que le projet de loi attribue au Tribunal des droits de la personne le pouvoir de déterminer le montant des sanctions civiles pécuniaires que devront payer les personnes ayant tenu ou diffusé des discours haineux ou incitant à la violence de même que la durée de leur inscription sur une liste diffusée sur le site Internet de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Alors, il est donc prévu de créer une liste publique des personnes sanctionnées par le Tribunal des droits de la personne pour avoir tenu ou diffusé des propos haineux ou incitant à la violence. On ne publie pas la liste, actuellement, des délinquants sexuels, mais on pourrait publier une liste de personnes qui ont tenu des discours haineux, des discours incitant à la violence.

Même si cette publication-là est temporaire, on se rend compte que, maintenant, avec les captures d'écran, tout ça peut circuler sur les médias sociaux, et ce genre de liste, on a toujours été... Justement à cause de la protection des libertés et des droits de la personne, on a toujours été très réticents à mettre ce genre de liste, à les rendre publiques.

Mais je vous dirais qu'où je m'étonne aussi c'est qu'on ait prévu des sanctions pécuniaires. On peut bien s'en rendre compte dans le cas de Saint-Jean-sur-Richelieu, dans le cas d'Ottawa, dans le cas de Charlie Hebdo... Moi, quand j'étais présidente de l'Ordre des pharmaciens, les sanctions, elles devaient avoir un caractère exemplaire et dissuasif. Pour que ça ait une portée, il faut que la sanction ait un caractère dissuasif, mais, quand on parle de radicalisation, quand on voit un peu l'emprise mentale qui est faite sur ces gens, est-ce qu'on pense sérieusement qu'une sanction monétaire peut avoir un rôle dissuasif? Est-ce qu'on pense qu'une sanction monétaire peut avoir un rôle préventif significatif chez quelqu'un s'il a déjà été soumis à une forme de radicalisation? La réponse est clairement non. Alors, les personnes qui avaient été radicalisées ont été prêtes à donner leur vie, ont été prêtes à mourir pour la cause qui les a amenés à se radicaliser. Alors, il n'y a aucune sanction monétaire qui aurait un effet dissuasif significatif, et malheureusement, dans ce type de situation, ce n'est pas l'argent qui va donner des garanties pour la protection des citoyens.

Alors, pour la partie II, et je voudrais vraiment en parler, parce qu'il y avait beaucoup d'éléments avec lesquels on est d'accord dans la partie II, donc la partie II qui encadre le mariage forcé, en fait, qui interdit... demande qu'une nouvelle autorisation par un juge soit confirmée dans les cas de mariage visant des personnes âgées de 16 ou 17 ans et qu'il faut que l'union soit contractée au Québec, et ce, que l'union ait été contractée au Québec ou ailleurs. Alors, ça, on est tout à fait d'accord avec ça.

Une ordonnance de protection. La création d'un pouvoir d'ordonnance civile de protection qui peut être demandée lorsqu'une personne croit que sa vie, sa santé ou sa sécurité est menacée.

Des implications au niveau de la direction de la protection de la jeunesse, qui vont viser à une modification à la Loi sur la protection de la jeunesse, notamment par l'ajout à la liste des exemples de mauvais traitement psychologiques de la notion de contrôle excessif auprès des enfants, et ça, je pense que c'est très important.

Une modification à la Loi sur la protection de la jeunesse pour préciser qu'aucune considération, qu'elle soit d'ordre idéologique ou autre, y compris celles qui seraient basées sur une conception de l'honneur, ne peut justifier que la sécurité ou le développement d'un enfant soit compromis.

Finalement, au niveau de la sécurité dans les écoles, là, on peut se questionner, parce qu'on prévoit la sécurité morale, mais ce concept devrait vraiment être redéfini, parce que c'est un concept très abstrait. Et comment des directeurs de cégep ou d'écoles secondaires vont définir, vont appliquer le principe de sécurité morale des élèves ou sécurité physique des élèves?

Alors, je veux terminer en parlant en quelques secondes des recommandations du Parti québécois. On veut une prévention et un soutien lors de la détection. La prévention, c'est par l'observateur de l'intégrisme religieux. C'est une logique de prévention, d'identifier, de documenter les manifestations d'intégrisme religieux au Québec, de fournir des informations justes et objectives sur ce phénomène. Et deuxième moyen : des actions, donner des outils aux municipalités, aux institutions comme les cégeps et les écoles pour agir quand des agents de radicalisation sont sur leur territoire. Je vous remercie, M. le Président.

• (15 h 30) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée de Taillon pour cette intervention. Je suis prêt à céder la parole à un prochain intervenant. Et je cède la parole à M. le député de Sanguinet.

M. Alain Therrien

M. Therrien : Merci, M. le Président. Écoutez, ça me fait plaisir, aujourd'hui, d'intervenir sur le projet de loi n° 59, la Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes. Vous savez, depuis que le Parti libéral a été élu en 2014, on a parlé et on demandait beaucoup à ce gouvernement de prendre position pour justement faire en sorte que la radicalisation n'atteigne pas notre coin de pays, si on veut, ou notre pays. On entendait beaucoup parler de l'État islamique, leurs interventions avec Internet. Ils sont extrêmement efficaces là-dessus, mais, règle générale, ça ne touchait pas trop notre vie à nous.

Par contre, il y a deux éléments importants qui sont arrivés récemment, qui nous ont fait réfléchir. D'abord, les jeunes qui ont quitté le Québec pour aller se battre auprès des gens de l'État islamique, donc ça a causé des problèmes évidemment chez l'entourage de ces jeunes-là qui partaient, qui quittaient. Alors donc, on a parlé, à ce moment-là, de l'affaire Charkaoui, dire : Est-ce qu'il y a des façons de limiter ou d'empêcher... on devrait être capables d'empêcher ce genre de phénomène là. Mais il y a aussi les deux assassinats qui ont eu lieu, un à Saint-Jean et un à Ottawa, qui sont attribuables justement à ce courant de pensée, de radicalisation, qui font en sorte, là, que des cellules dormantes peuvent se réveiller et peuvent intervenir et menacer notre confort, notre sécurité.

Si vous me permettez, M. le Président, je vais juste vous ouvrir une parenthèse sur ce qui est arrivé à Saint-Jean-sur-Richelieu. L'assassin a été tué par les autorités juste à côté de la terre de mon beau-père. Quand on parle qu'on est touchés par ce phénomène-là, écoutez, ce n'est pas des blagues, là : sur le bord de la terre de mon beau-père, il y avait quelqu'un qui a été tué, suite à un acte de terrorisme. Et la veille — je ne veux pas faire pleurer personne ici, là, mais c'est quand même un fait — la veille, mes enfants étaient sur cette terre-là.

Alors, voyez-vous, quand on dit que ça nous touche personnellement, bien, c'est ce qu'on vit. Et la responsabilité d'un gouvernement, c'est justement de veiller au bien-être de ses citoyens, et je suis convaincu que, dans les actions du gouvernement, j'espère que... je suis convaincu que c'est ce qu'ils pensent quand ils font des interventions. Alors, on peut dire que ce projet de loi est une réponse à, justement, ce phénomène-là, qui est très inquiétant. Et, comme je vous le dis, ces phénomènes-là, qui sont quand même assez circonscrits dans l'histoire et sur le territoire, bien, il faut faire en sorte que ça n'apparaisse plus jamais. Et donc c'est pour cette raison-là que le Parti libéral a mis sur pied ce projet de loi, dans le but avoué de faire en sorte de cesser la radicalisation, de cesser d'encourager la radicalisation avec des discours haineux qui peuvent justement nous amener à réaliser ce que tout le monde considère comme étant épouvantable comme geste : du terrorisme.

Alors donc, le projet de loi a été présenté le 10 juin, et il y a eu des consultations particulières qui ont débuté le 17 août. Plus d'une trentaine de groupes et personnes ont été entendus, entre autres l'ancienne députée de La Pinière, Mme Fatima Houda-Pepin, qui est considérée, M. le Président — vous la connaissez bien — comme une experte dans le domaine. Alors donc, on a été choyés d'entendre, justement, son point de vue sur ce sujet et des solutions qu'elle considère comme étant les bonnes. Il y a Djemila Benhabib, une ancienne candidate péquiste...

Pourquoi je parle de ces femmes-là? Bien, c'est des femmes politiques qui ont été, tour à tour, là, impliquées dans des campagnes électorales et qui ont été sur la scène politique de deux différents partis, des deux partis qui sont représentés par le plus grand nombre de députés ici. Et donc, ça, c'est un exemple, à quelque part, que ça touche bien des gens, et la position de ces deux femmes-là était, je vous dirais, pas mal similaire.

Alors, voyez-vous, au départ, ce que je pourrais considérer comme étant problématique dans le projet de loi, M. le Président, c'est ce que le Parti libéral utilise beaucoup depuis un an et demi, c'est qu'on arrive avec deux éléments dans un même projet de loi qui ne sont pas nécessairement reliés, qui ne sont pas nécessairement indépendants... pardon, dépendants. Et donc, à ce moment-là, on se dit : Bien, pourquoi ne pas avoir fait deux projets de loi? Ça aurait été une solution où est-ce qu'on aurait pu justement arriver avec une meilleure réflexion, une meilleure analyse, et de prendre position plus facilement si ça avait été deux projets de loi qui auraient été distincts.

Pourquoi on parle de ça ici? Bien, parce que le projet de loi regroupe deux parties. La deuxième partie est moins problématique pour notre groupe. C'est sûr qu'il y aurait amélioration, mais je pense qu'on pourrait s'asseoir, discuter, travailler sur ce projet de loi et arriver à quelque chose qui pourrait être intéressant.

 Par contre, la première partie, qui est la création d'une nouvelle loi, la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence, là on a un gros problème. Et donc, si on avait divisé ce projet de loi en deux projets de loi distincts, on aurait pu, voyez-vous, s'asseoir et dire : Bien, le deuxième projet de loi, qui est la partie II de cette loi-là, bien, je pense qu'il y aurait quelque chose à faire avec.

Par contre, la première partie, il est évident qu'on pourrait dire qu'on doit, comme certains groupes l'ont mentionné, retourner à la planche à dessin et recommencer au complet. Et c'est notre position, on considère que ce projet de loi là, bien, en tout cas, la première partie, là, est extrêmement problématique, et je vais y revenir plus tard, mais beaucoup de gens qui ont critiqué le projet de loi dans son ensemble, oui, ont critiqué la première partie du projet de loi. Alors donc, moi, je vous le dis, une façon qui devient de plus en plus usuelle, pour le Parti libéral, d'arriver avec un projet de loi qui est composé, si on veut, là, de deux piliers qui devraient être séparés afin d'avoir un meilleur travail législatif d'accompli...

Autre chose, à peu près tout le monde mentionne que la première partie cause de gros problèmes, et même la ministre qui chapeaute ce projet de loi a mentionné qu'elle arriverait avec du changement, avec beaucoup de changements, puis c'est correct, on est là pour ça, on est là pour améliorer les projet de lois. Mais là, quand on parle d'améliorations de projets de loi, là, pour nous, la partie I, là, c'est vraiment, là, une amélioration costaude du projet de loi. Pas d'amendement encore. On ne sait pas où est-ce qu'on s'en va avec ça. Et là on parle du principe du projet de loi, mais, pour l'instant, on n'est pas capables de savoir vers où on s'en va; inquiétant. Inquiétant, M. le Président.

Alors, on veut adopter le principe, on nous dit qu'il y aura plusieurs amendements, et les gens disent : Allez donc refaire votre travail au complet. Puis là on se dit : Bien, vous allez voter là-dessus. Bien, nous, on a un problème, parce qu'on aurait aimé, d'abord, voir les amendements ou, en tout cas, je ne vous dis pas qu'on devrait toujours avoir les amendements de tous les projets de loi quand on adopte le principe, ce n'est pas ça que je vous dis, M. le Président, je vous regarde avec votre oeil, et sûrement que vous avez pensé à ça, ce n'est pas usuel de faire ça, mais par contre, dans ce cas-là, je pense qu'il aurait été approprié, considérant la vaste critique généralisée de cette partie-là, d'arriver et dire : Bien, voici, si on veut arriver à réfléchir au principe, bien, moi, je vous propose... en tout cas, pas nécessairement... pas tous les amendements, mais en avoir une bonne partie pour qu'on puisse avoir une idée beaucoup moins floue de savoir où est-ce qu'on s'en va. Autrement dit, M. le Président, de ne pas demander un chèque en blanc à l'Assemblée nationale, parce que c'est ce qu'on semble demander.

Vous savez, quand j'ai travaillé sur le projet de loi n° 3, j'avais demandé des chiffres justement pour savoir c'était quoi, le déficit des régimes de retraite, et on m'avait dit à l'époque : Vous les aurez en temps opportun. J'ai fait une même demande pour le projet de loi n° 58 par rapport au gain potentiel de 20 millions sur la fusion de la CARRA et de la RRQ, et le ministre m'avait dit à l'époque : Vous verrez ça en temps opportun. Alors, voyez-vous, des chèques en blanc, disons que le gouvernement, ce n'est pas le premier qu'il demande. Alors, nous, on se soulève contre ça. On dit : Est-ce qu'on peut avoir une plus grande idée, une idée plus claire de ce qui est sur la table?

Ce qui est inquiétant aussi, je vous dirais, M. le Président, en tout respect, c'est que les gens qui vont écrire les amendements sont ceux qui ont écrit le projet de loi. Ça, ça devient problématique. Là, on se dit : Écoutez, ce travail-là, qui a été pas mal un travail brouillon, bien, on se dit que c'est les gens qui ont écrit ce projet de loi là, qui vont écrire les amendements. Là, voyez-vous, on a une inquiétude supplémentaire. En plus d'être flou, on nous dit que l'équipe qui viendra rédiger les amendements, c'est l'équipe qui a rédigé le flou artistique autour de ce projet de loi là. Alors, c'est très inquiétant.

Évidemment, ce projet de loi là vient entraver la liberté individuelle, un pan de la liberté individuelle, la liberté de parole, la liberté d'expression, M. le Président. Et ça aussi, c'est problématique. Voyez-vous, on s'est battus pour cette liberté, ce qui me permet, aujourd'hui, de parler, et, de l'autre côté aussi, d'exprimer leur position, leurs idées. Bien, en quelque part, ce projet de loi limite la liberté d'expression et c'est pour cette raison-là qu'il faut être encore plus attentif et plus respectueux de ce qu'on entend autour du projet de loi.

• (15 h 40) •

Vous ne pouvez pas arriver et toucher la liberté d'expression. En faisant ça, vous soulevez un tollé, ça ne fonctionne pas. Ça prend un consensus, et malheureusement, avec les gens qui sont intervenus en commission, il y a un consensus contre le projet de loi. Alors, les gens s'entendent pour dire que le projet de loi n'a pas de bon sens. Ce n'est pas le genre de consensus qu'on voudrait pour venir abimer la liberté d'expression, M. le Président.

Alors donc, j'en appelle à la réflexion du ministre et de son équipe pour dire : Écoutez, avant de commencer à jouer les deux mains dans la liberté d'expression, peut-on arriver à avoir un consensus social qui nous permettra justement de justifier, au départ, l'action entreprise par ce gouvernement, qui est juste, mais aussi son efficacité? Je vous rappelle que ce projet de loi là vise à éliminer les discours haineux pour éviter la radicalisation. Alors, je vous ai dit au départ : Un des problèmes qu'on a, le flou artistique.

Deuxième problème qu'on a, c'est : Est-ce que le projet de loi atteint son but ou est-ce qu'il escamote tout simplement la liberté individuelle sans atteindre son but? On peut se poser cette question-là. Alors donc, il faut se dire : Est-ce que le jeu en vaut la chandelle? Est-ce qu'on va arriver puis qu'on va intervenir dans la liberté d'expression pour rien? Alors, ça aussi, c'est une réflexion qu'on doit se faire.

Alors donc, dans la partie I, on parle de la création d'une infraction pénale calquée sur le Code criminel relativement à la tenue et la diffusion de discours haineux ou incitant à la violence. Qu'est-ce qu'un discours haineux, M. le Président? C'est quoi? Vous savez, on est... La politique, la sociologie qui embrasse cette analyse-là est faite de concepts. Les concepts, en sciences humaines — et je vois le ministre de l'Éducation, je suis convaincu, grand philosophe qu'il est, il va être d'accord avec moi — sont flous.

Un concept, on a une idée, mais de là à arriver et prendre cette idée-là et de la mettre dans le concret, de l'analyser dans le concret, il y a des étapes à franchir; je suis convaincu qu'il est d'accord avec moi, il y a des étapes. Et toute cette étape-là, on appelle ça l'opérationnalisation. De dire : On part d'un concept discours haineux... On sait c'est quoi, un discours haineux, hein, on sait ce que ça veut dire en gros, mais, quand vient le temps de l'opérationnaliser puis dire : O.K., comment on fait pour identifier un discours haineux... Est-ce que vous avez un discours haineux quand vous me parlez? Est-ce que moi, j'en ai un? Comment on fait pour l'identifier? Quel indicateur on utilise? Et ça, c'est un aspect, une réflexion qu'on a, en sciences humaines, et qu'on se doit de garder quand vient le temps d'analyser des problèmes qui sont liés justement aux sciences humaines. Alors, moi, je vous dirais, d'identifier le discours haineux, je vais y revenir tantôt, de définir correctement ce discours haineux avant de s'y attaquer, moi, je pense que c'est une étape qui n'a pas été nécessairement bien franchie.

L'attribution au comité des droits de la personne de pouvoir d'enquête sur la dénonciation anonyme dans le cas de discours haineux ou incitant à la violence tenus publiquement, écoutez, ça aussi, ça pose problème. C'est que les gens vont juger si un discours était haineux au départ, donc les gens vont juger de ce que c'est. Mais, s'il est mal défini au départ, si le concept est mal défini, comment voulez-vous que les gens comprennent c'est quoi, un discours haineux, selon le propre de la loi?

Alors, en plus d'avoir des législateurs qui semblent avoir de la difficulté à saisir ce qu'est un discours haineux, on va dire à la population : Bien, nous, on ne l'a pas tellement bien défini dans le projet de loi, mais vous, là, vous allez être garants, justement, de l'application de ce projet de loi puis de la réalisation du projet de loi à l'intérieur des plaintes que vous allez faire à la commission. Imagine où est-ce qu'on s'en va avec ça!

Alors donc, le problème devient de plus en plus important. Le Tribunal des droits de la personne a la responsabilité de juger les causes concernant la tenue des discours haineux qui lui... qui est soumise par la commission, pardon. Alors, encore là, on donne un pouvoir au tribunal, un pouvoir important, et la personne qui fera le discours ou qui sera accusée de discours haineux devra se défendre par rapport au fait qu'il a été étiqueté dans l'hypothèse d'avoir un discours haineux. Alors, il doit se défendre de ça.

L'instauration par la CDPDJ d'une liste publique des personnes sanctionnées par le Tribunal des droits de la personne pour avoir tenu ou diffusé des propos haineux ou incitant à la violence. Là, il va y avoir une liste publique, M. le Président, une liste noire des propos haineux. Avez-vous pensé à ça, M. le Président? Une liste noire des propos haineux. Juste de réfléchir à ça, tu n'as pas besoin de faire plus de commentaires.

L'attribution... Bien non, mais, écoutez, ça n'a pas de bon sens. On s'entend là-dessus.

L'attribution au Tribunal des droits de la personne des pouvoirs de délivrer des ordonnances pour faire cesser les discours haineux ou incitant à la violence. Finalement, modification de la Charte des droits et libertés de la personne afin d'interdire la diffusion de discours haineux et d'y confirmer les nouveaux pouvoirs de la commission et du tribunal.

Là, je vous parle maintenant des gens qui se sont soulevés contre. Je ne ferai pas la nomenclature puis une liste exhaustive parce que je serais encore ici dans un mois. Moi, ce que vais faire avec vous, je vais illustrer ce qui a été dit, dans les journaux, de gens puis qui sont compétents dans le domaine ou qui ont... si on veut, qui relèvent d'une certaine crédibilité journalistique pour justement vous montrer qu'il n'y a pas de consensus... bien, en tout cas, comme je vous dis, en faveur du projet de loi, mais il y a un consensus contre le projet de loi.

Tantôt, je vous parlais de définition de «discours haineux». Alors — je vais mettre mes lunettes, M. le Président, c'est l'âge : Mathieu Bock-Côté, dans son article du 23 août, il parle de discours haineux : «On est en droit de se demander comment ce projet de loi aussi funeste que délirant est arrivé dans les mains de la ministre.» Ça, O.K.

Ensuite, il dit : «Chose certaine, le projet de loi 59, avec ou sans les enragés qui veulent le radicaliser, est liberticide. Il permettra à n'importe qui se sentant un peu offusqué de porter plainte au nom d'une communauté qui se dira victimisée. Et n'importe quel propos un peu hors-norme pourra se faire classer comme discours haineux.»

Problème initial, vous avez un concept mal identifié, une opérationnalisation inexistante, des indicateurs qui auraient permis justement d'ancrer le jugement de l'individu qui va juger du propos haineux, qui auraient permis justement d'avoir une identification claire de la bibitte qu'on veut trouver.

Il dit : «De peur de se faire épingler par les commissaires [...] et de se retrouver sur la liste officielle des délinquants idéologiques, chacun se tiendra coi.»

Ensuite, Lise Ravary, dans l'article du 19 août : Alerte — encore — à la liberté d'expression : «Mais comment faire la différence entre [...] haine et la dissidence? Un groupe pro-vie qui manifeste contre l'avortement est-il haineux, [M. le Président]? [...]Que dire d'un journal ou d'un site Web réputé pour ses dénonciations des dérives islamiques? Pourrait-on rendre illégal de publier une caricature jugée "blasphématoire" de Mahomet? Que penser de l'Église catholique qui prêche que l'homosexualité est interdite par la Bible? Au cachot, tous?»

Voyez-vous, encore une fois, définition problématique, et on s'entend sur le fait qu'on ne s'entend pas.

Ensuite, je vais plus loin, Josée Boileau, Discours haineux. Et mauvaise foi. «Pour les groupes — de juristes, de transgenres, d'aide aux hommes violents — qui défilent présentement en commission parlementaire, cet arrière-fond rend tout le débat assez mêlant. De quoi est-il question au juste? Eux voient bien que la définition de discours haineux est si floue que la loi en deviendra inapplicable ou qu'elle ouvre la porte aux abus.»

Vous voulez que je continue, M. le Président? Je vais continuer, j'en ai d'autres. Richard Martineau : Parlons encore du projet de loi 59. Le 24 août : «Selon quels critères? J'aimerais que la commission des droits de la personne du Québec réponde à quelques questions.

«Qu'est-ce qui constitue un discours haineux, [M. le Président]?

«La critique d'une religion est-elle un discours haineux?

«Quels seront les critères utilisés par la commission pour affirmer que tel ou tel discours est effectivement haineux?»

Quand je parle de critères et quand il parle de critères, il parle d'indicateurs que j'ai mentionnés tantôt, qui est...

Et je suis content de voir le ministre de l'Éducation parce que je suis convaincu qu'il va être d'accord avec ça : quand on parle de critères, on parle d'indicateurs qui font en sorte de pouvoir identifier un concept dans la réalité, on passe de l'abstrait au concret. Bien là, dans ce cas-là, ici, on aimerait ça y arriver, on n'y arrive pas.

On va continuer. C'est flou, le projet de loi. En voulez-vous des exemples?

Autre chose, Marco Bélair-Cirino : «L'adoption du projet de loi 59 pourrait...»

Et je n'ai plus grand temps, hein? Bon. Écoutez, il ne me reste plus de temps. Malheureusement, j'aurais continué comme ça. Ce qu'il faut retenir dans mon intervention, mes chers collègues et M. le Président, c'est que ce projet de loi là est bâclé, il faut retourner à la planche à dessin. Merci.

• (15 h 50) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Merci à vous, M. le député de Sanguinet, pour cette intervention. Je cède la parole au prochain intervenant, et je reconnais Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour d'intervenir sur le projet de loi que l'on nomme 59 entre nous, mais qui vient nous parler de la notion de discours haineux, alors, c'est la Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Alors, M. le Président, on se rappellera qu'on a souhaité la scission de ce projet de loi il y a bientôt une semaine. Malheureusement, le gouvernement a décidé d'aller de l'avant avec un projet de loi qui est, finalement, deux, deux projets de loi. Alors, puisque le gouvernement ne s'est pas rendu à nos arguments, eh bien, aujourd'hui vous me permettrez de revenir pour faire une démonstration que ce projet de loi là ne répondra pas à des situations très précises, M. le Président.

Alors, dans un premier temps, je nous rappellerai qu'en 2011 on a eu des échanges, en cette Chambre, avec la ministre de l'Immigration de l'époque, qui est encore la même ministre de l'Immigration, et vers laquelle j'adressais une question, M. le Président, à l'effet que des islamistes radicaux venaient donner une conférence à Montréal. Alors, je vous lis le propos que je tenais à cette époque, le 19 octobre 2011, et je me cite — je ne sais pas si on peut dire ça, mais en tout cas — alors : «Cette semaine, doit se tenir à Montréal une conférence de l'Islamic Education and Research Academy avec pour conférenciers deux personnages aux opinions inacceptables. Comme d'autres avant eux, Hamza Tzortzis et Abdurraheem Green viennent au Québec pour déverser leur flot de haine homophobe, antiféministe, antisémite et contre la liberté d'expression et tenter de présenter une image inacceptable de l'islam... une image acceptable de l'islam politique radical. Il n'y a pas de compromis possible avec de tels personnages. Pourtant, depuis plusieurs jours, ces deux individus sont entrés impunément au Canada, alors que l'Allemagne et les États-Unis leur ont signifié qu'ils n'étaient pas les bienvenus sur leurs sols.»

La question était : «Le ministre de la Sécurité publique peut-il nous dire pourquoi le gouvernement du Québec n'a rien fait pour exiger [du] gouvernement fédéral [qu'il lui] interdise l'entrée au pays [des] deux personnages?»

Et c'est la ministre de l'Immigration qui avait répondu à cette question-là et qui était même intervenue. Elle est intervenue elle-même. Alors, pas eu besoin d'une loi, là, pour prendre son téléphone... Et, je me rappelle, c'était à l'Université Concordia, elle avait pris son téléphone, et l'Université Concordia a finalement empêché la tenue de l'événement, qui s'est tenu ailleurs, mais dans un édifice appartenant à la communauté islamique. Alors, est-ce que le projet de loi va empêcher de faire ça? Non, pas du tout, M. le Président.

D'ailleurs, cet été, on se rappellera qu'on a eu une vague, qui s'appelait la vague Roosh V. Alors, M. Roosh V est venu... voulait venir tenir des conférences ici, à Montréal, au Québec, et cet homme a des propos antiféministes d'une vulgarité — je vais le dire comme ça, M. le Président — incroyable. Eh bien, durant l'été, on est intervenus pour dire : Est-ce que la ministre de la Justice, la ministre qui est aussi ministre de la Condition féminine, peut intervenir pour, justement, faire un peu comme l'avait fait sa collègue au préalable, intervenir pour qu'il n'y ait pas d'espace pour cette personne-là pour venir tenir ce genre de propos totalement disgracieux, entre autres, envers les femmes? Et, à ma grande surprise, la ministre de la Justice a utilisé, justement, cette intervention que j'avais faite pour justifier son projet de loi. Cependant, dans le projet de loi, il n'y a rien qui lui permettrait d'agir, actuellement, en fonction de ça.

De plus, M. le Président, eh bien, imaginez-vous donc que notre ami Tariq Ramadan s'en vient lundi prochain à Montréal. Ça, c'est celui, hein... Tariq Ramadan, c'est celui qui est venu dire qu'on devrait mettre un moratoire sur la lapidation des femmes, un moratoire. On devrait prendre un petit break là-dessus, finalement, hein, on devrait se dire que, la lapidation, là, on peut prendre un break là-dessus. C'est ce qu'il est venu dire à Montréal il y a quelques années, cet homme-là. Et lui, il s'en vient faire une conférence à Montréal, à l'Église unie St-James, sur la rue Sainte-Catherine Ouest, il va être là lundi le 23 novembre. Est-ce qu'on fait quelque chose? Est-ce que la loi nous permet de faire quelque chose? Non, la loi ne nous permet pas d'intervenir parce que, pour constater le discours haineux, il faut être sur place, il faut le dénoncer. Nous, ce qu'on veut, c'est l'empêcher de tenir un discours haineux, et la loi ne prévoit pas ça, pas du tout. Et les Tariq Ramadan de ce monde, qui ont des propos que personne ne veut entendre, bien il finit par mobiliser des jeunes particulièrement et des jeunes qui se radicalisent, M. le Président, parce que c'est ça, c'est de ça dont on parle. Et ça, ça ne nous empêche pas de le faire, malheureusement.

Alors, M. le Président, dans mon comté, mardi passé, Nadia El-Mabrouk, professeure titulaire en informatique à l'Université de Montréal, elle a fait une étude exhaustive des manuels du cours Éthique et culture religieuse. Le ministre de l'Éducation est là, alors ça va être intéressant qu'il écoute ça.

Alors, l'analyse de cette chercheuse, qui est très critique du cours d'éthique et culture religieuse, nous dit que le cours fait la promotion d'une version wahhabite de l'islam. Ce n'est quand même pas rien, là. Alors, c'est une version radicale de l'islam qui est enseignée à nos enfants dans le cadre du cours d'étude des cultures religieuses, c'est son analyse.

Ce qu'elle nous dit, c'est que les concepteurs du cours sont... le cours a été conçu par le comité catholique. Avez-vous entendu, M. le Président? Le comité catholique. Il me semble qu'on avait réglé ça, là, cette affaire-là, là, nos écoles étaient laïques, hein, nos écoles sont laïques. On a même eu une modification constitutionnelle pour faire en sorte que plus jamais un anglophone ne puisse pas aller à une école en lien avec sa religion parce qu'il est protestant versus un catholique qui était anglophone, on a tout réglé ça, 1997, si je me rappelle, modification constitutionnelle qu'on a obtenue, et je peux vous dire que d'autres provinces nous envient beaucoup. Bien, dans ce cours-là, imaginez-vous donc qu'il est conçu par un comité catholique à l'intérieur du ministère de l'Éducation. Je pensais qu'on avait réglé ça, cette affaire-là, mais non, il y a encore un comité comme ça.

• (16 heures) •

Et ce qu'elle nous dit, c'est que les religions autres que chrétiennes sont présentées de manière folklorisante, stéréotypée et incomplète. C'est une conférence qu'elle a donnée la semaine passée dans le cadre du Festival du monde arabe. Elle nous dit que l'islam du cours est islamique, on confond même les deux termes dans le manuel. Ce n'est pas à peu près, là. Je ne sais pas ce qu'on enseigne, là, finalement. Le danger, c'est que le cours, sous le couvert de la tolérance, de l'acceptation de la diversité, ait l'effet exactement contraire et va venir polariser parce qu'il met l'accent sur les différentes façons de vivre dans chaque religion, les moeurs, les pratiques et les cultures.

Le cours devrait être l'histoire des religions. Moi, c'est la compréhension que j'en avais. On devait, dans ce cours-là, apprendre les différences entre les religions mais par leur histoire, pour pouvoir documenter quelles sont ces religions-là, et ce n'est pas du tout de ça dont on parle. On parle plutôt de culture religieuse.

Le cours, en popularisant une version radicale de l'islam, n'encourage pas la tolérance, il incite à la radicalisation. Et il y avait beaucoup de gens de la communauté musulmane hier qui étaient présents, qui étaient présents à cette activité-là, et ce sont des gens de la communauté qui s'opposent au cours d'ECR tel qu'enseigné. Il me semble que ça devrait dire quelque chose, ça, M. le Président, ça devrait dire quelque chose, là. Et j'espère que le ministre a entendu, et qu'il enverra une petite note à son ministère, qui regardera, justement, le contenu du cours éthique et culture religieuse version wahhabite.

C'est inquiétant. C'est inquiétant parce que, moi, dans mon comté, M. le Président, là, il y a le cégep de Maisonneuve, entre autres, et on a vécu toute la saga du cégep Maisonneuve avec M. Charkaoui. Alors, M. Charkaoui, là, c'est celui qui est venu aussi en commission parlementaire, hein, et ce qui est très drôle avec M. Charkaoui... Ce n'est pas drôle, finalement, c'est qu'il est même venu dire que le projet de loi n'était pas bon. Alors, si Fatima Houda-Pepin vient dire que ce projet de loi là n'est pas bon pas puis qu'Adil Charkaoui vient dire que ce projet de loi là n'est pas bon, il me semble que ça me sonnerait une petite cloche avec le gouvernement. Ils ne sont pas du tout sur les mêmes lignes de pensée puis ils ne défendent absolument pas la même chose. Mais, malheureusement, là, le gouvernement a décidé d'aller de l'avant avec ce projet de loi là.

M. Charkaoui, quand il est venu en commission... Et je vous rapporte l'article de Marco Bélair-Cirino, du Devoir du 16 septembre, nous dit :«Le porte-parole du Collectif québécois contre l'islamophobie a appelé la ministre de la Justice — je ne dirai pas le nom — à "abandonner" le projet de loi antidiscours de haine. À ses yeux, celui-ci ne contribuerait pas à "résorber" ou à "réduire" l'islamophobie, au contraire. Le projet de loi n° 59 "cible implicitement toute une communauté" en établissant une "corrélation problématique entre l'islamophobie et la radicalisation", a-t-il déploré.» C'est quand même assez différent.

Puis là je vous lis ce que Fatima Houda-Pepin a dit. Alors, c'est un article de Robert Dutrisac dans Le Devoir du 15 septembre qui s'intitule Projet de loi n° 59 — Le gouvernement du premier ministre — je vais le dire comme ça — donne des armes aux intégristes, croit Houda-Pepin. «L'ancienne élue libérale Fatima Houda-Pepin juge que le gouvernement Couillard favorise — ah! excusez, excusez, le gouvernement du premier ministre — les intégristes avec le projet de loi n° 59 qui les aidera à stigmatiser les critiques de leur pratique rigoriste.»

Ça, votre ancienne collègue libérale, M. le Président, et elle dit : «"Je suis estomaquée", [...]à l'issue de sa...» Bon, je la cite : «"Je suis estomaquée", a lancé Fatima Houda-Pepin à l'issue de sa comparution en commission parlementaire au sujet du projet de loi n° 59, qui vise, notamment, à lutter contre le discours haineux et que défend la ministre de la Justice. "C'est une revendication des intégristes depuis longtemps", estime l'ancienne députée de La Pinière. Grâce au projet de loi n° 59, un groupe religieux, et non plus seulement une personne croyante, pourrait se dire la cible d'un discours haineux.»

Et ça, on l'a entendu parce que M. Salam Elmenyawi, qui a fait la manchette à plusieurs reprises, quand il est venu, bien, c'est justement de ça qu'il est venu parler. Et Gérard Bouchard, dans un texte de La Presse du 16 septembre, un texte d'opinion qui s'intitule Les accommodements déraisonnables et, en sous-titre, S'il est permis de ridiculiser les convictions d'un agnostique, pourquoi celles d'un croyant devraient-elles être exemptées? — et on se rappellera que M. Bouchard est l'auteur, avec M. Taylor, d'un rapport volumineux qui a été tabletté : «Récemment, Salam Elmenyawi est intervenu à Québec, devant la commission parlementaire sur le projet de loi n° 59 visant à combattre les propos haineux. À cette occasion, le leader musulman — il est président du Conseil musulman de Montréal — a réclamé un amendement au projet de loi pour que, à l'avenir, il soit formellement interdit de se moquer de l'islam.»

Il n'a pas dit «de se moquer des religions», «de se moquer de l'islam». Ça ne nous fait pas penser à certaines caricatures? Ça ne nous fait pas penser à ce qui s'est passé à Charlie Hebdo? Nous étions dans la rue en début d'année avec une petite affiche qu'on disait : Je suis Charlie. Nous étions tous là parce que nous croyons à liberté d'expression, parce que nous croyons fondamentalement à cette liberté importante que nous avons, et cet homme est venu dire en commission parlementaire qu'il soit formellement interdit de se moquer de l'islam.

Ma mère a une expression qui dit : Si tu ne vaux pas une risée, tu ne vaux pas grand-chose, et je pense qu'elle a pas mal raison, elle a pas mal raison. Si on n'est plus capable, dans notre société, de se moquer ou de parler contre quelque chose, on appelle plus ça de la liberté d'expression, on appelle ça du radicalisme. Et on le voit dans plusieurs pays, on le voit avec l'EI, le groupe qui se dit un État islamiste. On le voit, c'est ce qu'ils essaient de faire. Ils essaient de faire en sorte de faire taire les gens, de les empêcher de parler. Alors, M. le Président, que cet homme-là, dans nos murs, ici, à l'Assemblée nationale, il peut venir tenir ce type de discours, c'est assez incroyable. C'est comme s'il s'était trompé de société. Le Québec des années 60 a changé. Le petit catéchisme, là, il n'est plus là, là. La doctrine qui a fait qu'on s'est épanouis au Québec, qu'on est passés au travers de ça... On ne veut pas retourner à ça. On ne veut pas retourner à l'époque où tout était péché dans notre société. On ne veut pas retourner à ça, et le projet de loi n° 59 ne vient pas régler les problèmes, ne vient pas donner le cadre nécessaire, ce n'est pas la bonne réponse.

Alors, M. le Président, même Gérard Bouchard le nomme dans son texte, il dit : «Il fut un temps au Québec où il en était ainsi. La religion catholique était intouchable.» Et on a tous des images, là, on voit tous des images nous passer, là. Quand les curés se mêlaient de la chambre à coucher, il y a-tu une chose qu'on peut dénoncer aujourd'hui, c'est bien ça, le curé qui se mêlait de savoir combien d'enfants une famille aurait, avec des femmes qui étaient malades et qui mouraient en couches parce que le curé, tout ce qu'il voulait, c'est plus de paroissiens pour justifier d'avoir encore plus son église? Et on a formé nombre, nombre, nombre de villages parce que, justement, des curés ne s'occupaient pas de la santé des femmes, ils s'occupaient d'avoir des populations pour, justement, cela.

Alors, M. le Président, on ne veut pas retourner là, on ne veut surtout pas retourner là. Et, d'ailleurs, M. Bouchard termine cette phrase-là en disant : «La religion catholique était intouchable. C'était avant que notre société n'accède pleinement au respect des différences, au respect des droits de chacun.» Parce que c'est ce qu'on a fait et c'est ce qu'on s'est donné ici comme société, le respect des droits de chacun, le respect des différences. Nous acceptons les différences, mais ce que l'on n'accepte pas, M. le Président, c'est les propos... des propos antiféministes, on n'accepte pas les propos radicaux. Ce n'est pas ça, notre société. Ce n'est pas ça, le Québec.

Alors, M. le Président, je ne peux pas vous dire plus, je peux juste dénoncer ce que le gouvernement essaie de faire par ce projet de loi là. Il n'atteint pas sa cible, il n'atteint pas la cible nécessaire. Tariq Ramadan va être encore là dans un an même avec ce projet de loi là. Tariq Ramadan va encore venir nous dire que la lapidation des femmes, ce n'est pas si grave finalement, on peut mettre un petit moratoire là-dessus, on peut se donner une pause. Non, M. le Président, on n'en veut plus, de ces gens-là, on ne veut plus de ces radicaux-là qui viennent nous tenir des discours haineux, mais ce n'est pas le projet de loi n° 59 qui va nous le permettre. Merci, M. le Président.

 (16 h 10)

• (16 h 10) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, pour cette intervention. Je cède la parole maintenant à notre prochain intervenant, qui sera le député de La Peltrie. M. le député.

M. Éric Caire

M. Caire : Merci, M. le Président. À mon tour d'intervenir sur l'adoption de principe du projet de loi n° 59, M. le Président. Je le fais avec un peu de tristesse, M. le Président, parce que je constate encore une fois que le gouvernement du Parti libéral, dans son malaise à défendre l'identité québécoise, à défendre nos valeurs, rate une fois de plus la cible.

Vous savez, M. le Président, pour régler un problème, encore faut-il l'admettre, encore faut-il le nommer. Et, si ce projet de loi a une lacune majeure, c'est en ce qu'il est incapable de nommer le problème qui est à son origine. M. le Président, nous avons vécu au Québec des événements extrêmement malheureux qui découlent d'une montée de la radicalisation de l'islam radical, il me semble que ce n'est pas compliqué, là, l'islam radical. Et, M. le Président, ce problème-là, il n'est pas propre au Québec, hein, on le vit à travers la planète. On n'est pas les seuls à être confrontés à cette situation-là, ça se passe dans plusieurs pays, ça se passe aussi ailleurs dans notre pays, j'en veux pour preuve les tristes événements à Ottawa qui découlent de quoi? Qui découlent d'une montée de l'islam radical. Alors, c'est ça, le problème. C'est ça, le coeur du problème. C'est à ça qu'on doit s'attaquer, M. le Président.

Et, malheureusement, le gouvernement, dans sa volonté à peine avouée de ne pas admettre le problème ou de trouver toutes sortes d'autres ramifications, de faire ce que le premier ministre a appelé dans d'autres circonstances des amalgames, accouche du projet de loi n° 59, qui est tout sauf une réponse au problème que nous vivons au Québec par rapport à la montée de l'islam radical, et donc c'est un projet de loi qui n'atteint pas sa cible. Ça a été dit, ça a été répété, et je vais le répéter encore parce que c'est une réalité, c'est un fait.

Ce projet de loi là, M. le Président, c'est une volonté du gouvernement d'éviter de parler du coeur du problème. On dépose une législation en disant : Bon, bien, on va s'attaquer, là, à un problème qu'on vit au Québec, le discours haineux. Ah oui? Au Québec, M. le Président, on vivait de graves problèmes de discours haineux? Bon. Et, comprenez-moi bien, d'aucune façon ni moi ni tout autre collègue de l'Assemblée nationale n'encourageons, n'approuvons les discours haineux, nous les dénonçons avec toute la vigueur nécessaire. Mais le coeur du débat, c'est la montée de l'islam radical, et j'aurais tellement souhaité, M. le Président, j'aurais tellement souhaité voir un député du Parti libéral se lever en Chambre et dire ces mots très simples : Au Québec, nous vivons un problème dû à la montée de l'islam radical. Je ne l'ai pas entendu et, malheureusement, je suis de plus en plus convaincu que je ne l'entendrai jamais.

Alors, évidemment, M. le Président, on est incapable de nommer le problème, par quel miracle pourrait-on y apporter une solution? C'est bizarre parce que, dans le même projet de loi n° 59, il y a un problème qu'on est capable de nommer très précisément, en ce qui a trait au mariage forcé, que nous dénonçons unanimement. Personne, personne, personne dans cette Assemblée ne peut, ni de près ni de loin, approuver de quelque façon que ce soit cette pratique condamnable. C'est bien dit, et bizarrement, M. le Président, ce même projet de loi répond parfaitement à cette problématique-là, on la nomme et on règle le problème. Et c'est d'autant plus dommage, M. le Président, que c'est la preuve que, quand le gouvernement admet, nomme un problème, il est capable d'y apporter une solution efficace. Mais, parce qu'il est incapable d'aller au bout de sa logique, parce qu'il est incapable de faire le pas supplémentaire nécessaire et de nommer le problème que tous les Québécois connaissent, tous les Québécois connaissent parfaitement, bien, le premier volet du projet de loi, qui traite des discours haineux, rate lamentablement sa cible, ne réglera pas le problème et ne sera en rien une barrière entre les Québécois, notre mode de vie, notre culture, notre conviction quant à l'égalité entre les hommes et les femmes, conviction inébranlable, ne sera en rien un rempart entre ça, ces principes, ces droit fondamentaux qui sont tellement chers à notre population, ne sera pas une barrière entre ça et la montée de l'islam radical. En aucun temps, ce projet de loi là ne va adresser ce problème-là.

Vous savez, M. le Président, on a, malheureusement, associé toutes sortes de concepts qui ont amené à ce projet de loi là, dont, entre autres, le fait de dénoncer l'islam radical comme étant de l'islamophobie. Je vous avoue que ça prend une contorsion intellectuelle assez exceptionnelle pour en arriver à mélanger les deux, donc la haine du musulman... parce qu'on dénonce l'islam radical, on prêche la haine de la foi musulmane, ce qui n'a rien à voir, rien à voir. Nous acceptons d'emblée que la très grande majorité des musulmans sont des citoyens honorables qui pratiquent une foi honorable. Malheureusement, malheureusement, pour eux comme pour nous, il y a en leur sein des gens radicaux qui, eux, poussent les concepts très loin, trop loin, qui se radicalisent et qui amènent un problème très certain, très certain par rapport à nos valeurs, à notre mode de vie, à notre conception de l'égalité entre les hommes et les femmes, à notre conception de la démocratie, à notre conception de la liberté d'expression. Parce que je vais revenir là-dessus, M. le Président, mais, malheureusement, en ratant sa cible, ce projet de loi là cause des dommages collatéraux, notamment à la liberté d'expression.

Donc, M. le Président, la ligne de défense, c'est de dire que ceux qui dénoncent cette montée du radicalisme sont des islamophobes. C'est triste. C'est triste parce que ça fait en sorte, M. le Président, que, le problème qui existe vraiment, on ne s'y adresse pas. Et je dirais même qu'on évite d'y toucher avec une perche de 10 pieds, et ça donne le projet de loi n° 59.

Or, si on regarde de plus près le projet de loi n° 59, l'article 2, qui interdit de diffuser ou la propagation de discours haineux, m'apparaît être une espèce de filet. Vous savez, là, les pêcheurs de haute mer, là, qui déploient des kilomètres de filets, là, pour ratisser le fond des océans puis qui se disent : Bon, bien, on finira bien par pogner notre cible, puis qu'importe si, à travers ça, on met quelques espèces en péril, bien, le projet de loi n° 59, c'est le même principe. On ratisse tellement large, tellement large que, pour peut-être — je dis bien peut-être — l'appliquer à certaines situations où ce sera pertinent, on va causer tellement plus de situations où ça ne l'est pas du tout. Non seulement ce n'est pas pertinent, mais où, à mon humble avis, M. le Président, et de l'avis de plusieurs experts qui ont été cités par d'autres collègues en cette Chambre, va être dommageable.

• (16 h 20) •

D'abord, le discours haineux n'est pas balisé. Et, de notre avis, le principal problème, ce sont les prêches qui amènent la radicalisation, qui contribuent à la radicalisation. Or, ça, on ne retrouve pas ça dans le projet de loi. Or, qu'est-ce qu'un discours haineux? Bien, on va demander à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse de devenir le tribunal inquisiteur qui va être chargé, là, dans sa sainte inquisition de la rectitude politique, de nous amener vers la lumière. Soit dit en passant, même la Commission des droits de la personne a dit : Écoutez, ce mandat-là, on ne le veut pas, là, ça nous tente plus ou moins. Mais ce n'est pas grave, qu'à cela ne tienne, on va leur demander quand même.

Donc là, il va falloir établir une jurisprudence, il va falloir... Et on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs, M. le Président, là, on risque de se retrouver dans des situations qui n'ont rien à voir avec le vrai problème et on va mettre la Commission des droits de la personne dans cette situation-là. C'est, à mon avis, extrêmement triste, on aurait dû, de la part du gouvernement, resserrer cette définition-là et ne pas avoir peur de nommer les choses, hein? La raison fondamentale pour laquelle ce projet de loi là est devenu nécessaire, ce n'est pas, à tout vent, une propagation des discours haineux sur tous les sujets et tous les thèmes de tous les éléments de la société, ce n'est pas ça qui nous a amenés là, mais l'article 2 évite le sujet fondamental.

M. le Président, un autre problème avec le projet de loi, à mon avis, l'article 17, alinéa 3°. M. le Président, vous me permettrez, pour le bien des collègues, qu'ils sachent exactement de quoi on parle, de vous lire l'article qui dit : «Tenir à jour une liste des personnes qui ont fait l'objet d'une décision du tribunal concluant qu'elles ont enfreint une interdiction prévue à l'article 2 — vous savez, cet article extrêmement flou, là, c'est basé là-dessus, la liste est basée sur cet article — et la rendre disponible sur son site Internet.»

Donc, M. le Président, non seulement la sainte inquisition va-t-elle se déployer, mais ceux qui auront été jugés hérétiques seront exposés sur la place publique. M. le Président, c'est une première. Puis pourtant, personnellement, je n'ai pas de problème à ce que ceux qui commettent des actes criminels soient connus publiquement, au contraire, au contraire. Mais pourquoi juste ceux-là juste dans ce contexte-là, hein? Vous savez, il a déjà été question de registre des pédophiles, registre des criminels récidivistes, etc., puis ça a toujours été balayé du revers de la main pour toutes sortes de raisons, bonnes ou mauvaises. C'est correct, c'est un débat qui en vaut un autre. Mais, dans ce cas-ci, là, là c'est très important que la sainte inquisition puisse nous donner les résultats obtenus.

M. le Président, pourquoi pas les organismes? Là, on parle des individus, pourquoi pas les organismes? Pourquoi, encore une fois, ne pas nommer les choses, les organisations? Et pourquoi les lieux où ces organisations-là sévissent seront-ils amnistiés? Parce que, vous savez, M. le Président, on a demandé au gouvernement... ma collègue de Montarville a demandé au gouvernement : Quand il sera établi qu'un lieu sert d'endroit pour tenir des prêches qui nous amènent à la radicalisation... Ces lieux-là sont généralement considérés comme des lieux de culte et, donc, bénéficient d'exemption de taxes, de crédits d'impôt. Donc, M. le Président, on se trouve à financer des centres de recrutement pour les groupes radicaux qui sévissent sur notre territoire, ce qui m'apparaît être une idée, à la limite, douteuse. Je veux dire, dans une société, là, quand tu finances à même tes taxes ceux qui viennent, excusez l'expression, mais faire le trouble chez vous, ce n'est plus de la générosité, c'est de la naïveté dangereuse.

Bien, M. le Président, non seulement est-ce qu'on n'identifiera pas ces groupes-là, on va se contenter des individus — et encore ceux-là seulement, pas les autres — non seulement on n'identifiera pas ces groupes-là, non seulement on ne pourra pas leur coller cette étiquette d'organisation radicale néfaste pour notre société, dangereuse pour nos valeurs communes, mais en plus on ne s'attaquera pas au problème qui veut que nous sommes, à même les deniers publics, à l'heure où on coupe dans des services en éducation, en santé, M. le Président, on a vu ça... on ne s'attaquera pas au fait qu'on va financer généreusement, parce qu'on est des gens très, très, très ouverts, ces organisations-là.

Donc, encore une fois, M. le Président, le fait de ne pas être capable de nommer un problème nous amène vers des dérives qui vont jusqu'à financer des organisations qui vont prêcher le radicalisme. Ça, le terrain d'atterrissage, c'est ça, là, cru. La vérité crue, là, c'est ça. On peut, l'autre bord, dire : Non, non, non, ça n'a pas d'allure, voyons donc, c'est... Mais oui, M. le Président, c'est ça qui se passe. Et combien de fois s'est-on fait dire : Allez à tel, et tel, et tel endroit, puis écoutez ce qui se dit, écoutez ce qui se prêche, écoutez à quel point c'est une négation violente de nos valeurs, de notre société, de notre mode de vie, de notre démocratie, c'est à faire froid dans le dos. Et ces mêmes personnes-là, quand elles ont fini de faire ça, vont aller demander leur crédit de taxe et d'impôt, tout ça à même nos deniers publics. C'est merveilleux, nous sommes une société très ouverte.

Je disais, M. le Président... En fait, je reprenais en ce sens-là des propos qui ont été tenus par d'autres collègues, que cette loi, telle qu'appliquée, est une atteinte à la liberté d'expression. Et je me souviens, ma collègue de Montarville avait fait quelques propositions à cette Chambre pour contrer les prêches radicaux, ceux qui se servent de leur tribune pour favoriser la radicalisation, qui ont amené de nos jeunes à quitter le pays — on le sait, on connaît l'histoire — et à s'en aller vers d'autres contrées où notre mode de vie n'est pas bien vu — je vais le dire de cette façon-là pour rester poli — et le leader du gouvernement s'était levé à ce moment-là, déchirant sa chemise comme lui seul sait le faire, pour dire à quel point ce que ma collègue proposait était épouvantable pour la liberté d'expression, à quel point c'était une attaque à cette liberté de parole si chère à notre coeur. Mais ce que nous ne savions pas, c'est que ce que ma collègue proposait était à des kilomètres de ce que la ministre propose. Et le leader nous avait dit : J'ai bien plus confiance en la ministre pour protéger notre liberté d'expression que la députée de Montarville. Or, tout le monde est venu dire que c'est une attaque directe, une attaque frontale à la liberté d'expression. Et, M. le Président, quand plusieurs représentants de l'islam, les Charkaoui de ce monde — pas l'islam qu'on apprécie, celui qu'on apprécie moins — quand les imams viennent ici pour dire : La loi ne va pas assez loin, on devrait même interdire de rire de la religion, je dis : Voyons donc, sur qu'elle planète... bien, en fait, dans quel pays pensent-ils vivre?

Alors, ça, c'est peut-être le plus bel exemple à quel point ce projet de loi est néfaste pour la liberté d'expression, parce que la ministre est incapable de nommer le véritable problème, parce que la ministre ne veut pas s'attaquer au véritable problème, aux prêches radicaux, à ceux qui font du recrutement ici pour les mouvements islamistes radicaux. Parce qu'on veut éviter ça, parce qu'avec toutes sortes de contorsions on en arrive à faire toutes sortes d'amalgames qui n'ont aucun lien entre eux, bien, en plus de continuer à financer ces mouvements-là, en plus de ne pas être capable de mettre les étiquettes sur les bonnes personnes puis de s'attaquer aux individus avec la liste en question, en plus de ces nouveaux pouvoirs inquisiteurs qu'on va donner, on s'attaque à la liberté d'expression. On va créer une espèce de tribunal de la rectitude politique — du moins, en tout cas, on peut le craindre — tout ça, parce qu'on est incapable de nommer un problème très simple qui, je le répète, M. le Président, est la montée de l'islam radical. Merci, M. le Président.

• (16 h 30) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de La Peltrie, pour cette intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de Rimouski. À vous la parole.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Bon. Merci, M. le Président. Moi, ce projet de loi, j'ai suivi ça un peu, et ce qui m'a surtout inquiété, c'est tout ce qui peut toucher à la liberté d'expression. Je vais vous dire pourquoi. Puis je suis content que le député de Rivière-du-Loup soit là, parce qu'il me connaît depuis longtemps, ça fait que ça ne le surprendra pas, ce que je vais dire, mais je suis un activiste.

Avant d'être député, avant d'être en politique, moi, j'étais un militant des groupes communautaires. Le député de Rivière-du-Loup se rappelle de moi, j'ai assez manifesté devant les bureaux de son ancien patron, mais ça faisait partie de moi. Puis, quand le premier ministre aujourd'hui nous dit... a dit récemment à Saint-Georges de Beauce que le gouvernement modifiera le projet de loi sur la lutte contre les discours haineux pour dissiper les critiques qui redoutent les entraves à la liberté d'expression, il limitera sa portée aux appels directs à la violence. En tout cas, bref, il y avait un engagement, on n'a pas vu d'amendement qui va vers ça, mais, pour moi, ça me touche, là. Quand je regarde des titres qui disent : La loi comme bâillon, Alerte à la liberté d'expression, je ne peux pas faire autrement qu'être inquiet. Puis, dans le mémoire des juristes, on peut lire qu'est-ce que c'est, la liberté d'expression. Ça inclut la liberté de s'exprimer, de publier, d'informer, de manifester, de débattre, qui est absolument fondamentale dans toute société prétendant protéger les droits de l'homme. Sans liberté d'expression, il ne peut y avoir de liberté d'opinion. C'est assez fort.

Dans le même mémoire, on dit : «Une société libre et démocratique comme la nôtre doit nécessairement faire preuve d'un haut degré de tolérance pour l'expression de pensées, d'opinions, d'attitudes ou d'actions qui non seulement ne font pas l'unanimité ou ne rallient pas les vues de la majorité des citoyens, mais encore peuvent être dérangeantes, choquantes ou même blessantes pour certaines personnes ou certains groupes. La liberté d'expression ne doit pas être couchée dans le lit de Procustedu "political correctness".»

Ça, moi, ça vient me chercher, parce que, comme je l'expliquais, dans ma vie, j'ai repensé à tout ça, toutes les manifs que j'ai pu faire puis les chansons à répondre que j'ai inventées pour dénoncer certaines personnes, ce n'était pas toujours... quand je repense à ça, ce n'était pas toujours très gentil, mais ça passait le message. Je me souviens, à l'école polyvalente, j'étais jeune, là, puis on avait occupé l'école parce qu'il y avait un élève qui avait été comme molesté. Le directeur, il s'appelait Pigeon, ça fait qu'imaginez-vous qu'on a pu en dire sur les pigeons, puis ce n'était pas très... puis c'était une petite école, puis on était jeunes, mais il y avait des pigeons partout dans l'école, puis c'était la grosse manif, les jeunes, on courait partout, les parents n'étaient pas contents, mais on avait appris à se mobiliser, puis à manifester, puis à donner notre opinion — liberté d'expression. Quelques années après, au cégep, même chose, on occupe le cégep. Et là le directeur s'appelait Boucher. Pauvre gars. Tu sais, c'était : Il est bouché des deux bouts; le boucher du cégep, tout est sorti, là, sur le boucher. Puis ce n'était pas un méchant gars, il était fin, le directeur, mais on a tout passé les chansons à répondre, on tapait du pied dans les corridors. Le boucher est passé par là, je vais vous dire, bon, bref, mais c'était la liberté d'expression. Il y avait plein de monde, tous les collègues à l'école, du cégep, on était là, on se mobilisait, on faisait valoir notre opinion.

À un autre moment donné, là j'étais dans des groupes communautaires, puis on essayait de lutter contre toutes les réformes d'assurance chômage. Tu sais, ça fait longtemps qu'on parle de la réforme de l'assurance chômage. Puis là le gouvernement, à l'époque, venait piger dans la poche des travailleurs. On ne trouvait pas ça correct, on voulait se mobiliser, puis on voulait montrer que ça avait un impact sur la pauvreté, ça appauvrissait les gens. Ça fait que ce qu'on faisait, c'est qu'on envoyait des tranches de baloné dans des enveloppes à Ottawa, ça fait qu'il y avait plein de tranches de baloné qui devaient arriver à Ottawa qui ne devaient plus trop sentir bon entre Rimouski, Rivière-du-Loup puis Ottawa. Des manifestations, des façons de faire, c'était ma vie, c'est ce que je faisais avec des groupes communautaires à l'époque. À un autre moment donné, c'est la reine d'Angleterre qui passe à Rivière-du-Loup, ça fait que, imaginez-vous, il fallait faire l'accueil à la reine d'Angleterre. Ça fait que, ça aussi, pauvre Elizabeth, elle est passée par là, je veux dire, ce n'était pas évident, dans les rues de Rivière-du-Loup, tellement que j'ai été comme fiché à l'époque, puis, quand la reine est passée, on m'a gentiment demandé de me retirer un peu de la ville pour laisser la parade se faire correctement. On l'a fait. Mais ça fait partie de la liberté d'expression.

À un autre moment donné — le député de Rivière-du-Loup peut s'en souvenir — on a même occupé un bureau de poste. Le gouvernement du fédéral... Victor Lévy-Beaulieu l'avait même sorti dans un de ses téléromans, le fédéral avait comme décidé de fermer les bureaux de poste en milieu rural. On ne voulait pas que ça se passe comme ça. Et, pendant presque un mois, un mois et demi, si ce n'est pas plus, on avait occupé le bureau de poste... dans le temps des fêtes. Je pense que je n'ai jamais goûté un meilleur ragoût de boulettes qu'à ce moment-là, parce que les gens nous amenaient des ragoûts de boulettes. J'ai été enchaîné avec Victor-Lévy Beaulieu pendant quasiment une journée de temps. Je vais vous dire, ce n'est pas rien. Puis on avait occupé le bureau de poste, il y avait plein de tracteurs tout le tour, puis on criait des noms contre le gouvernement, puis, bon, ils l'ont fermé pareil, le bureau de poste, mais, au moins, on a... Puis, je vais dire, ce qu'on a dit sur le gouvernement, ce n'était pas toujours fin, fin, mais on faisait ce qu'on avait à faire, puis on se mobilisait.

Les boubous macoutes. Ce matin, notre chef parlait de la réforme que le gouvernement veut prendre au niveau de l'aide sociale et a rappelé avec justesse l'époque des boubous macoutes. Ça aussi, je me souviens des boubous macoutes. Ça, les chansons à répondre sur les boubous macoutes, vous pouvez deviner qu'il y en avait toutes sortes de formules, puis il y en avait. Puis je suis pas pire dans les chansons à répondre, je tape bien du pied. Puis on l'avait pas mal, mais ce n'était pas toujours gentil, mais il fallait réagir. Et je suis certain qu'il y a bien des groupes communautaires aujourd'hui qui sont en train de préparer leurs chansons à répondre pour résister, puis, pauvre ministre de l'Emploi, probablement que son nom va circuler dans certaines chansons à répondre, puis, bon, il va falloir qu'il toffe ça. Mais ce n'est pas méchant, ce n'est pas contre lui, mais c'est pour revendiquer puis montrer ce qu'on a à faire puis montrer ce qu'on a comme dans le coeur comme propositions, que c'est ça, la liberté d'expression.

Puis ça, je me souviens aussi, très jeune, je crois, c'était en 1972, 1973, 1974, après la crise d'Octobre, il y avait un disque qui circulait qui s'appelait Chants et poèmes de la résistance. Peut-être que vous vous rappelez de ça, M. le Président. Jacques Michel était là-dedans, Raymond Lévesque, et il y avait des passages sur le Québec, territoire occupé, tu entends l'armée de Wolfe. Ce disque-là, on pouvait juste l'acheter par... il était comme interdit au Québec. Puis ça, j'étais jeune, j'avais peut-être une douzaine d'années, et mon père, il avait réussi à le trouver, le disque, puis il le cachait presque parce que c'était quasiment dangereux d'avoir ça, mais c'était quoi? Moi j'ai appris mon histoire par ce disque-là, je vais vous dire. C'était ça. Mais c'étaient des chansons québécoises qui revendiquaient, c'était Raymond Lévesque qui envoyait promener à coups de ta-bar-ma-chin, qui envoyait promener les curés puis les... Mais c'était le temps, c'était ça qu'il fallait faire, il fallait s'émanciper. Et, ce disque, là, je pense qu'il a influencé le reste de ma vie. Mais c'est ça, prendre la parole, parler fort. Brûler en effigie... je ne sais pas si quelqu'un ici a déjà fait ça, brûler du monde en effigie. Moi, je l'ai déjà fait. Dans une manif, on avait des... Tu sais, les boubous macoutes, vous vous rappelez, ça fessait fort, et, à un moment donné, il y avait des bâtons, puis ça faisait partie de la game, c'était comme ça qu'on pouvait mobiliser puis qu'on revendiquait. J'avais les cheveux un peu plus longs, la barbe plus longue, mais je pense que j'avais le coeur à la bonne place, puis le coeur, il reste encore à la bonne place. Je manque de cheveux, mais le coeur est encore là. Mais il n'y avait rien de méchant.

Moi, je l'ai rencontré, le premier ministre Bourassa, c'était un chic type. Il était venu nous rencontrer à Rivière-du-Loup dans les groupes communautaires, puis c'était un chic type, et il comprenait, mais ça ne nous empêchait pas de le dénoncer puis de lui crier toutes sortes de noms quand on prenait la rue, mais c'est ça, c'est ça, la démocratie, puis, au Québec, c'est comme ça que ça fonctionne.

Je parlais du député de Rivière-du-Loup. Bien, le député de Rivière-du-Loup a travaillé comme attaché politique de l'ancien député de Rivière-du-Loup qui s'appelait Albert Côté à l'époque... bien, il s'appelle encore Albert Côté, mais c'était le député. Et, lui aussi, on ne l'a pas manqué, mais ce n'était rien contre lui, c'était un bon monsieur, mais on le faisait parce qu'on voulait revendiquer et ça n'allait pas bien. Le chômage montait à Rivière-du-Loup, il manquait d'emplois, les gens avaient de la misère à arriver. Tu sais, des fois, il faut que ça sorte, puis on le sortait à notre façon. Puis on n'était pas méchants, on était jeunes, on revendiquait, puis on avait des idées, puis on le faisait à notre façon. Je me rappelle des groupes de femmes aussi à Rivière-du-Loup. Il y avait des groupes de femmes et très... à notre théâtre — puis ma collègue, elle doit le savoir, elle aussi. Mais, quand tu sais faire du théâtre puis tu sais organiser un peu ce qu'on appelle l'éducation populaire, là, il y a des beaux flashs des fois qui peuvent t'arriver, et c'est sympathique, puis en même temps ça permet de donner ton opinion sur la vie, sur ce que tu vois dans ta communauté, ce que tu veux revendiquer.

• (16 h 40) •

Puis je reviens deux secondes sur 1970, l'après-1970. À un moment donné, j'étais au cégep, il y avait des macarons — je me souviendrai toujours — Libérez les prisonniers politiques. C'est là que je me suis aperçu — il était pas mal plus tard — qu'il y avait encore des gars du FLQ en prison puis il y avait un mouvement pour libérer, mais c'était au Québec. Je n'en revenais pas, libérer des prisonniers. Il y avait des prisonniers politiques au Québec. C'étaient des prisonniers politiques, ces gars-là, puis on avait un mouvement d'étudiants pour pousser pour libérer ces gens-là, puis on l'a fait. On l'a fait par des macarons, par des affiches puis on se mobilisait puis on se servait de la liberté d'expression, qui est si importante que les juristes nous disent que... qui est important.

Comme député maintenant, je fais moins de manifs... pas mal moins de manifs, mais, pour moi, la liberté d'expression restera toujours quelque chose qu'il faut chérir. Cet été, il y a quelques mois, cet été, il y a un chanteur qui est venu à Rimouski, un chanteur de rap, puis, dans ses propos, c'était très dégradant au niveau de la femme, de la condition féminine. C'était sa... au niveau du viol, ça comme laissait entrevoir que ce n'était pas grave. C'étaient des propos pas acceptables, à mon avis, qu'il fallait dénoncer. Je l'ai fait, j'ai dénoncé publiquement, j'ai émis un communiqué, j'ai pris la parole, j'ai dénoncé les propos de la chanson. Je n'ai jamais dénoncé le chanteur lui-même, je ne le connaissais pas, mais, les propos, je ne pouvais pas les accepter, je les ai dénoncés, mais je n'ai jamais dit qu'il n'avait pas le droit de les dire. Je les ai dénoncés, je trouve que ce n'est pas acceptable, mais... puis j'ai demandé à la population de réfléchir à tout ça puis j'ai soutenu les groupes de femmes qui se sont mobilisés sur les médias sociaux, qui ont... Je les ai soutenus, j'ai fait mon rôle de député. Puis j'ai donné mon point de vue, je ne me suis jamais gêné, je ne me suis pas caché, mais je n'ai jamais dit qu'il n'avait pas le droit de le faire.

Puis, l'autre élément, moi, quand j'ai été élu à Rimouski, la première chose que j'ai sentie, parce que ça faisait une vingtaine d'années que j'étais dans les cabinets à Québec, la première chose que j'ai sentie, c'est la radio de Rimouski, qui est beaucoup plus... qu'à Québec. Je vais le dire comme ça. Mais, à Québec, je n'ai jamais pris la rue pour dire que les radios n'avaient pas le droit d'exister. Puis ce qu'ils disaient, ça ne faisait pas mon affaire, mais, des fois, quand ça ne fait pas mon affaire, je la ferme, c'est tout, tu sais, je passe à autre chose, tu sais, je ne fais pas de scandale avec ça. Mais pour moi c'était important. Quand ça s'est mobilisé, tu sais, «liberté, je crie ton nom», j'étais d'accord avec ça, tu sais. Je n'étais pas d'accord avec ce qui se disait, mais j'étais d'accord qu'il y avait une liberté d'opinion.

Depuis 2006 — j'ai été directeur de cabinet au bureau du whip, là, maintenant, je suis whip en chef — j'en ai vu aussi ici, les manifestations des gens, les carrés rouges dans les estrades, les Femen, qui sont venues. J'en ai vu plein, là, de manifestations de toutes sortes d'opinions...

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...oui.

Mme Vien : ...un peu plus de 13 minutes que le député de Rimouski... on le trouve bien sympathique, très franchement, c'est vrai, mais on a de la difficulté de plus en plus à voir le lien entre ses propos et le projet de loi n° 59. Je soulèverais la question de la pertinence. Les Femen ici, c'était quand même quelque chose qui était un peu frappant, d'autres événements. Je lui demanderais respectueusement de se coller au 59.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, sincèrement, je l'ai entendu, et effectivement un député a toujours le droit, là, de prendre beaucoup d'exemples pour illustrer son propos. Si on a quelques phrases sur le principe... et j'entends votre appel au règlement et je souhaiterais qu'effectivement vous reveniez un peu, mais il n'y a pas de reproche là-dedans, si ce n'est que de dire qu'on peut illustrer par toutes sortes d'exemples... et, là-dessus, je vous suis très bien, vous avez l'air à tenir à la liberté d'expression, et j'ai très bien compris que c'est un point fort du projet de loi. Ça, je n'en disconviens pas. Mais il me semble que, votre point, vous l'avez bien marqué, mais je ne veux pas intervenir dans le débat. Je ne peux pas intervenir dans le débat, le président ne peut pas intervenir dans le débat. Si c'est possible d'arriver à d'autres éléments du projet de loi, si vous le désirez... Non, non, mais, si vous le désirez, vous pouvez continuer pour le vrai, parce qu'elle dit ce qui est... J'ai entendu.

Alors, faites attention, parce que le principe de... Là, on est sur le principe du projet de loi, et vous l'avez bien illustré sur un des éléments très importants qui est dans le projet de loi, sans intervenir sur le débat. Alors, veuillez poursuivre mais en faisant attention.

Mme Maltais : ...bien votre appel à l'attention, mais je veux juste vous dire qu'il arrive régulièrement que nous prenions un point d'un projet de loi et que nous décidions d'y aller profondément. C'est ce que fait mon collègue de façon très pertinente, en rappelant l'importance de la liberté d'expression.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Vous avez raison que cette situation-là est arrivée souvent, sur le principe d'un projet de loi, dans un discours de 20 minutes, et c'est un peu pour ça d'ailleurs que nos travaux sont télédiffusés. Il appartient aux gens de juger. Puis là il y a des gens qui vont l'avoir écouté puis ils porteront un jugement.

M. LeBel : Oui, mais, je vais vous dire, à Rimouski, comme député, je vais souvent dans... Puis, il n'y a pas longtemps, il y a eu un mouvement, là, pour la lutte à la pauvreté, et je veux juste... Je parle à ces gens-là, à ces gens-là qui se mobilisent pour lutter contre les préjugés, qui se mobilisent pour dire qu'ils ont besoin d'emplois puis qui le font à leur façon, par des pièces de théâtre, par la rue, quand ils prennent la rue. Moi, je vais leur dire que ça, ça me... je chéris ça, c'est important qu'ils puissent faire ça. Et, quand les juristes nous disent qu'on touche à la liberté d'expression, quand je vois des petites alertes encore à la liberté d'expression, je m'excuse, là, mais ça vient me chercher, parce que c'était ça que je faisais puis c'est ça que... Le Québec, on s'est mobilisés, on a évolué à cause de ce monde-là, qui sont capables de se parler, puis de parler fort, puis de dénoncer, puis on a besoin de ça. Des fois, ça ne fait pas notre affaire.

Il y a une certaine époque, j'avais monté le projet de lutte à la pauvreté, la loi contre la pauvreté et l'exclusion. Je vais vous dire, il y en a eu, là, des manifestations, il y en a qui sont venus dans mon bureau, qui se sont enchaîné en disant : On ne peut plus vivre la pauvreté. J'ai tout vu ça, mais on a toujours respecté ça, ça prend ça. Et, le projet de loi, je m'excuse, mais les juristes... puis là, tu sais, Julius Grey, puis j'en nomme, ce n'est pas n'importe qui, là, qui viennent nous dire qu'il y a un danger de brimer la liberté d'expression. Même le premier ministre l'a dit : Il faudrait amener des amendements pour dissiper les critiques qui redoutent des entraves à la liberté d'expression. C'est le premier ministre lui-même qui le dit. Il y a quand même quelque chose. Il n'y a pas d'amendement qui est prévu. Mais lui-même convient qu'il y a des entraves possibles à la liberté d'expression. Bref, pour moi, partout, nos jeunes qui sont dans les écoles... C'est pour ça que, quand j'ai parlé... à l'école secondaire, il faut que nos jeunes dans nos écoles puissent savoir que c'est possible de se mobiliser, c'est possible de critiquer ou de dénoncer ceux qui sont au-dessus de nous autres, qui décident pour nous autres, là, c'est possible de le faire même quand tu as 12 ans, même quand tu as 14 ans, 15 ans, c'est possible, ça fait partie de nos gènes, comme Québécois, de dénoncer.

Un jour, j'ai vu des gens piétiner le drapeau du Québec, je ne sais pas s'il y a encore... le monde voit ça, à Sault-Sainte-Marie, ils piétinaient le drapeau du Québec. J'étais choqué, c'était violent, mais c'était ça. Puis ils le faisaient, parce qu'ils ont fait partie... ces gens-là, ils avaient un message à passer, puis ils l'ont passé.

Bref, la liberté d'expression, c'est important, et je trouve que ce projet de loi vient mettre en danger ce droit-là, que tout le monde doit avoir.

Est-ce que je peux amener une motion, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Vous avez 20 minutes, vous pouvez en faire ce que vous voulez, et la présidence va décider si vous avez le droit ou pas le droit. Allez.

Motion de report

M. LeBel : ...motion de report de l'adoption du principe de la Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes. Conformément aux dispositions de l'article 240 de notre règlement :

Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot «maintenant» et en ajoutant, à la fin, «dans deux semaines».

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, juste une seconde. Bien là, je vais indiquer que, oui, lorsque la présidence reçoit une motion de report, il faut qu'elle porte un jugement sur sa recevabilité. Et certains peuvent prétendre qu'il y a lieu de plaider sur la recevabilité. Moi, il me semble que c'est très clair, oui, lors de l'adoption du principe d'un projet de loi, mais moi, je suis ouvert si vous voulez plaider sur la recevabilité avant de statuer sur effectivement la motion de report. Oui.

Mme Vien : M. le Président, compte tenu de ce qui vient d'être déposé, auriez-vous l'obligeance de nous permettre d'avoir une courte suspension, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui. Bien, c'est ce que j'aurais indiqué. Normalement, on dit «elle m'apparaît recevable», on la reçoit, puis on suspend, parce qu'il va falloir faire une répartition du temps et ça pourrait appeler une décision du leader pour ce qui la regarde.

Alors, les travaux sont suspendus quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 50)

(Reprise à 16 h 52)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, la présidence va statuer : Oui, la motion de M. le député de Rimouski est une motion recevable en vertu de l'article 240, comme il l'a mentionné, du règlement.

Et cette motion fait l'objet, pour ceux qui écoutent, d'un débat restreint de deux heures. Et il appartient à la présidence à ce moment-ci d'informer la répartition des temps de parole pour le débat restreint. Il s'effectuera comme suit : 56 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 33 minutes sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 23 min 30 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, et sept minutes sont allouées aux députés indépendants, sous réserve d'un maximum de deux minutes pour la députée d'Arthabaska. Les temps non utilisés peuvent être redistribués. Vous êtes habitués à ça.

Alors, je cède la parole à celui qui la demande et je reconnais M. le député de Sherbrooke pour intervenir sur la motion de report.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui?

Mme Maltais : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : On va vous le dire dans une seconde; non, nous ne l'avons pas au moment où vous le demandez. Alors, les travaux sont suspendus quelques instants, parce que nous n'avons pas quorum.

(Suspension de la séance à 16 h 53)

(Reprise à 16 h 54)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, comme nous avons quorum, nous allons poursuivre, et je cède la parole à M. le député de Sherbrooke pour son intervention sur la motion de report. À vous la parole, M. le député.

M. Luc Fortin

M. Fortin (Sherbrooke) : Merci, M. le Président. Je veux intervenir évidemment sur cette motion de report, qui vient de nous être présentée par le collègue député de Rimouski, qui nous demande en fait de reporter dans deux semaines l'adoption du principe du projet de loi n° 59.

Évidemment, l'exercice parlementaire auquel nous convie l'opposition officielle présentement suscite quelques questions. Tout d'abord, la première question, c'est : Comment peut-on vouloir retarder le processus législatif lorsqu'il s'agit de légiférer en matière de protection des personnes? Il faut retourner un petit peu en arrière, M. le Président...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...motif?

Mme Maltais : ...de retarder le processus législatif.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui, O.K.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui, mais ça, très respectueusement, un parlementaire a le droit de prétendre que ça peut être pour retarder. Moi, je ne porte pas de jugement. Mais vous aurez l'occasion, dans la poursuite du deux heures sur la motion de report, d'indiquer les arguments pour lesquels vous la soutenez, la motion de report. Donc, veuillez poursuivre, je veux vous entendre.

M. Fortin (Sherbrooke) : Merci, M. le Président. Alors ce que je disais, c'est qu'on doit retourner un petit peu en arrière.

Rappelons-nous que le projet de loi n° 59 découle des mesures du plan d'action en matière de lutte à la radicalisation présenté par le gouvernement le 10 juin dernier. Ce plan d'action répond à un triste phénomène, lequel s'étend partout dans le monde et auquel le Québec n'échappe pas. Souvenons-nous des tristes événements survenus en octobre 2014, il y a de ça un an, à Saint-Jean-sur-Richelieu puis à Ottawa. Nous avions tous été ébranlés devant des gestes aussi tragiques motivés par la violence et la haine. Nous nous souvenons également du départ de certains jeunes Québécois et Québécoises pour rejoindre des groupes terroristes en Syrie et en Irak, qui, là encore, ont démontré l'urgence d'agir à l'encontre de la radicalisation.

L'intitulé du plan d'action gouvernemental rejoint bien les assises du projet de loi n° 59 : agir, prévenir, détecter et vivre ensemble. Ce plan d'action gouvernemental contient une foule de mesures mobilisant tous les acteurs concernés et qui ont tous un rôle à jouer pour en arriver aux résultats recherchés. En plus d'impliquer directement neuf ministères au sein d'un comité interministériel, plusieurs autres organismes et acteurs concernés sont invités à jouer un rôle. Tel que le mentionne le plan d'action, l'action publique à l'égard de la radicalisation nécessite une volonté ferme de collaboration, de coopération et de concertation entre les gouvernements fédéral, provincial et municipal et même avec les acteurs gouvernementaux d'autres États. Cette volonté, M. le Président, nous l'avons, et, cette volonté, ma collègue ministre de la Justice et ministre responsable de la Condition féminine l'a clairement démontrée en déposant le projet de loi n° 59, lequel vise à appliquer les mesures prévues au plan de lutte à la radicalisation et qui relève de son ministère.

L'opposition ne semble pas partager cette même volonté de collaboration que partage actuellement l'ensemble des acteurs concernés de la société québécoise. Au contraire, M. le Président, l'opposition tente de freiner les actions gouvernementales en matière de lutte à la radicalisation. Je me souviens pourtant, lors des malheureux événements survenus l'an dernier et dont j'ai parlé un peu plus tôt, d'avoir entendu l'opposition crier haut et fort qu'il y avait urgence d'agir pour contrer la radicalisation, mais, quand vient le temps de légiférer, M. le Président, l'opposition ne voit plus cette urgence d'agir. L'opposition souhaite plutôt reporter les actions du gouvernement. Je m'explique mal, M. le Président, comment on peut vouloir retarder l'adoption de mesures lorsqu'il s'agit d'offrir aux Québécois et aux Québécoises un Québec inclusif, sécuritaire, égalitaire et respectueux des droits et libertés de chacun. Comment peut-on vouloir empêcher le gouvernement d'assurer la sécurité de la population québécoise et de favoriser le mieux-vivre ensemble? Les questions demeurent. L'opposition rate l'occasion de démontrer sa capacité de travailler en collaboration sur un enjeu sérieux et préoccupant que nous ne pouvons mettre de côté, mais, plutôt que de collaborer, la seule chose qu'on nous propose aujourd'hui, c'est de repousser les débats, retarder, entre autres, la protection des personnes à l'égard des discours haineux et ceux incitant à la violence. Ma collègue a eu l'occasion de s'exprimer à plusieurs reprises sur ces notions. La propagation de discours de telle nature peut constituer une réelle menace. Nous en avons été témoins. Il importe de se doter de moyens pour renforcer la protection des personnes qui en sont la cible et pour sanctionner la diffusion de tels propos.

La liberté d'expression est une valeur fondamentale dans une société libre et démocratique comme la société québécoise, mais cette même société libre et démocratique ne peut non plus cautionner la libre circulation de propos haineux ou incitant à la violence dans l'espace public. Ce n'est pas ça, M. le Président, la liberté d'expression. Il est de notre responsabilité de faire la part entre la liberté d'expression des uns et la limite à ne pas franchir lorsque des propos encourageant la haine et la violence à l'égard d'individus... Ce que propose l'opposition, c'est également de reporter un projet de loi qui vise à protéger les mineurs contre les mariages forcés et à prévenir les crimes basés sur une conception de l'honneur.

L'opposition ne juge pas important de légiférer rapidement afin de protéger les personnes vulnérables en leur donnant la possibilité d'obtenir des ordonnances de protection, car c'est aussi ce que prévoit le projet de loi n° 59, notamment en implantant un outil de protection immédiate pour des personnes dont la sécurité pourrait être menacée et en protégeant mieux les élèves dans les établissements d'enseignement subventionnés.

• (17 heures) •

Toutes les mesures prévues au projet de loi n° 59 visent non pas à brimer les droits de quiconque, bien au contraire, elles visent à les protéger, protéger les personnes contre des comportements, gestes, discours qui comportent des risques pour la sécurité et la santé des personnes. Le projet de loi, tout comme l'ensemble du plan d'action gouvernemental en matière de lutte à la radicalisation, vise à protéger l'ensemble de la société québécoise de comportements ou de discours qui portent atteinte à l'ordre public, aux droits fondamentaux, aux lois, aux règlements, à la sécurité ou à l'intégrité des personnes.

Ce que nous souhaitons, M. le Président, c'est que nous puissions continuer de vivre dans un Québec inclusif qui se distingue par le respect des différences et de la diversité en conjuguant cette ouverture avec l'expression forte de l'identité de notre belle terre d'accueil, et ce, en toute sécurité et en tout respect des droits et libertés de chacun. Pour cela, il faut agir, prévenir, détecter pour ainsi mieux vivre ensemble. Et, pour faire ça, M. le Président, bien, il faut poursuivre le projet de loi... l'étude du projet de loi n° 59. Il ne faut pas repousser ça dans deux semaines. On doit poser des gestes le plus rapidement possible, et c'est pourquoi, M. le Président, je vais voter contre la motion de report présentée par le collègue de Rimouski, et j'incite les députés de la Chambre à faire de même, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, M. le député de Sherbrooke, de votre intervention. Et je cède la parole à Mme la leader adjointe... Oui?

Mme Maltais : ...revenir tout de suite, c'est mon collègue de Bourget qui va intervenir, mais j'aimerais avoir des informations sur la répartition du temps, puisque, selon nos informations, la CAQ, la deuxième opposition, n'interviendra pas dans ce débat-là. Alors, peut-être qu'on pourrait déjà avoir une idée, à tout le moins, de ce que sera le temps?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui. Dans la même proportion, là. Disons que, rapidement, ça va être 10, 12 minutes au groupe formant l'opposition officielle, ça va être 15, 20 minutes au gouvernement, puisqu'ils avaient 23, mais on va vous indiquer... Mais en gros, là, c'est juste une approximation pour tout de suite. Et la question se posait.

Je suis prêt à entendre le prochain intervenant ou la prochaine intervenante. Et je reconnais M. le député de Bourget. M. le député de Bourget, à vous la parole, en sachant que vous avez un temps de votre banque. Vous pouvez parler tant que je ne vous indique pas que vous n'avez plus de temps dans la banque qui est impartie soit au gouvernement soit à l'opposition officielle. Allez.

M. Maka Kotto

M. Kotto : Merci, M. le Président. Autour du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes, nous avons reçu en commission parlementaire une trentaine de groupes et de personnes. Et, du côté de l'opposition, nous avons fait notre travail. Nous les avons entendus mais surtout écoutés. Et c'est consensuel, l'écoute est la qualité première d'une ou d'un élu. Et c'est l'écoute qui est censée définir notre attitude dans le cadre de nos travaux parlementaires. Et, si nous nous référons aux exégètes, la différence entre entendre et écouter est la même que celle entre voir et regarder. En effet, dans «entendre» et «voir», on évoque la perception auditive ou visuelle, c'est-à-dire la capacité physique à capter un signal. Or, quand on écoute ou regarde, on y ajoute la capacité cognitive à discerner le contenu du signal entendu, c'est-à-dire interpréter l'information perçue au niveau cérébral. Et, pour écouter ou regarder, notre cerveau devra fournir un effort supplémentaire pour décoder l'information reçue et ainsi l'interpréter. Écouter demande donc une attitude active, alors qu'entendre est plutôt un phénomène passif, voire subi.

Cela dit, avec la détermination affichée du gouvernement libéral d'aller de l'avant avec son incompréhensible projet de loi quant à son volet 1, notamment contre des discours haineux, avec cette volonté ici exprimée de pousser pour l'adoption du principe du projet de loi n° 59, déposé, je le rappelle, dans la foulée d'évènements très médiatisés, pensons aux propos de certains religieux radicaux. Malgré les critiques acerbes du monde juridique mais aussi d'anciens députés libéraux qui ont siégé avec nous ici, dans cette enceinte, force est de constater qu'au volet 1 de ce projet de loi rien n'a changé, ce qui nous permet de penser que la ministre de la Justice n'a manifestement pas écouté.

Bon nombre de groupes sont venus, bon nombre de personnes se sont déplacées pour venir lui dire respectueusement de refaire ses devoirs lors des auditions publiques tenues au cours des mois d'août et septembre derniers.

À l'évidence, M. le Président, la ministre de la Justice n'a pas écouté l'ancienne bâtonnière du Barreau de Montréal, Me Julie Latour, lorsque celle-ci lui reprochait, et je la cite, «d'avoir recours à un canon législatif pour tuer une mouche hypothétique». Fin de la citation.

À l'évidence, M. le Président, la ministre de la Justice n'a pas écouté l'avocat Julius Grey, également un des juristes pour la défense de l'égalité et des libertés fondamentales, qui convenait que cette loi était inutile et néfaste pour la liberté d'expression et qui a dit en commission parlementaire, je le cite : Si cette loi avait été adoptée en 1955, elle aurait été utilisée contre les Témoins de Jéhovah, contre les communistes et les homosexuels. Ardent défenseur des libertés individuelles, Me Grey avait également souligné qu'il n'hésiterait pas à défendre un citoyen qui pourrait se sentir lésé par cette loi, si celle-ci était adoptée.

À l'évidence, M. le Président, la ministre de la Justice n'a pas écouté Mme Fatima Houda-Pepin, qui a siégé dans cette Chambre pendant 20 ans, de 1994 à 2014, elle qui fut également vice-présidente de notre Assemblée et la première femme musulmane à être élue dans ce Parlement le 12 septembre 1994. Elle nous confia, le 14 septembre dernier, en marge de son témoignage en commission parlementaire, et je la cite : «Avec son projet de loi n° 59, le gouvernement [libéral] protège les islamistes radicaux au lieu de protéger la société contre eux.» Je parle du gouvernement libéral, mais elle nommait le premier ministre. Pour Mme Houda-Pepin, on en convient tous, une voix éclairée et éclairante en matière de questions religieuses, le projet de loi n° 59 ne règle aucun problème, et, au contraire, elle disait craindre les dérives auxquelles s'expose la société québécoise en limitant la liberté d'expression avec ce projet de loi.

Je me permets de rappeler à votre mémoire, M. le Président, un extrait de son témoignage en commission parlementaire le 14 septembre 2015 : «Si le projet de loi n° 59 venait à être adopté tel quel, tel que libellé, on bâillonnerait la liberté d'expression, la liberté d'opinion, le droit à la dissidence et à la critique, y compris le droit de critiquer les religions, qui ne saurait être assimilé à un crime raciste. Je dois vous dire, M. le Président — c'est elle qui parle — que je suis une personne qui a un immense respect pour les religions. Je suis très à l'aise dans toutes les maisons de Dieu. Je n'ai pas de problème avec Dieu. J'ai juste un problème avec ceux qui se prennent pour Dieu. Ça fait une différence.»

• (17 h 10) •

Se disant estomaquée, M. le Président, et jugeant ce projet de loi dangereux, elle a dénoncé, dans une lettre ouverte, le fait que le Québec soit devenu le paradis de l'islamisme radical et que les leaders islamistes radicaux y trouvaient des protections juridiques supplémentaires avec l'adoption d'une telle loi.

À l'évidence, M. le Président, la ministre de la Justice n'a pas écouté une autre sévère critique, qui venait de M. Claude Trudel, qui fut député libéral de Bourget de 1985 à 1989 et un proche collaborateur de MM. Paul Gérin-Lajoie et feu Robert Bourassa. Dans un article paru le 22 septembre dernier, celui-ci invitait le gouvernement à retirer immédiatement le projet de loi n° 59, un projet qui, selon lui, n'aurait jamais dû voir le jour et qui est proprement irréformable.

«Je n'ai que faire — disait-il — d'un projet liberticide qui constitue une forme inacceptable de censure, [...]et offre aux radicaux de tout acabit [...] la possibilité de faire taire tous ceux qui ne sont pas d'accord avec leurs vues et osent le faire savoir.»

«Je ne peux imaginer mon Québec d'aujourd'hui aux prises avec une police des idées. Je [n']ai pas servi pendant [...] 50 ans pour le voir reculer de 70 ans.» L'ancien député du Parti libéral du Québec concluait en invitant le premier ministre et la ministre de la Justice à avoir le courage de reconnaître qu'ils se sont trompés et qu'ils devaient retirer cette mauvaise solution à un problème délicat.

M. le Président, il s'agit en effet d'un problème délicat, un problème qui exige une rigueur de tous les instants. C'est pour cela que, par la voix de ma collègue de Taschereau, nous avons proposé la mise en place d'un observateur sur l'intégrisme religieux, qui aiderait justement à mieux documenter, à comprendre en profondeur, à mieux prévenir ce phénomène, notamment la radicalisation de nos jeunes. Nous l'avons dit et répété, il faut que le gouvernement agisse, qu'il agisse en prévention, et les intervenants de tous les horizons doivent être outillés pour y faire face. Ma collègue de Taschereau et plusieurs autres observateurs l'ont répété ad nauseam : Il n'est pas question, avec un tel projet de loi, d'instaurer un tribunal des idées.

Le professeur de droit Pierre Trudel a même parlé d'inquisition 2.0, M. le Président. Il en a parlé pour décrire ce projet de loi qui a, pour sa part, une intention louable, mais qui institue une inquisition nouveau genre, faisant fi des exigences de la liberté d'expression. Pour cet expert, le projet de loi n° 59 est une grave menace à la liberté d'expression. «En clair — dit-il — la loi propose d'instituer un mécanisme afin de dénoncer et de faire investiguer sur les propos que tiennent les gens et même des propos qu'on leur prête l'intention de tenir! On est [...] dans le plus déplorable procès d'intention.»

«Le problème — conclut-il — avec les dispositions [...] destinées à lutter contre la haine, c'est l'absence de souci de distinguer entre le propos désagréable — comme l'évoquait mon collègue tantôt — voire méprisant et le discours qui vise effectivement à provoquer la haine, celui qui est effectivement dangereux.» Et c'est l'un des irritants, M. le Président, de ce projet de loi qui, justement, ne définit pas clairement ce qu'est un discours haineux.

M. le Président, parmi les groupes qui sont venus exprimer leur avis sur ce projet de loi — et nous les en remercions tous, au passage, s'il y en a qui nous écoutent à cette heure-ci — plusieurs ont émis de grandes réserves. Je pense aux Juristes pour la défense de l'égalité et des libertés fondamentales, tel que souligné plus tôt, à la chaire de recherche contre l'homophobie, GRIS-Québec et le Conseil québécois LGBT, à la Table ronde du Mois de l'histoire des Noirs, à l'Association canadienne des libertés civiles, à l'association des Nord-Africains pour la laïcité et au Centre consultatif des relations juives et israéliennes.

M. le Président, à l'évidence, la ministre de la Justice n'a pas écouté le Centre consultatif des relations juives et israéliennes qui, le 20 août dernier, a souligné, par la voix de M. Luciano Del Negro, le vice-président de cet organisme, que, bien que ce soit à l'honneur du gouvernement de tenter de protéger les membres les plus vulnérables de la société contre les messages de haine, il est nécessaire de veiller à ce que la législation trouve un juste équilibre entre la liberté d'expression et la protection contre la haine.

«Faisant partie d'un groupe qui, historiquement et aujourd'hui encore, est la cible fréquente de crimes motivés par la haine — a mentionné M. Del Negro — nous sommes sensibles à la question et nous nous opposons catégoriquement aux discours haineux sous toutes leurs formes. Une législation de ce genre comporte cependant le risque inhérent d'être détournée pour réduire au silence toute critique et étouffer le droit légitime d'expression.

«Dans notre société démocratique — poursuit-il — la liberté d'expression est un droit fondamental inaliénable pour tous [les] citoyens. Le projet de loi n° 59 — dit-il — tel que présenté, aurait un impact aussi négatif qu'involontaire sur la liberté d'expression, voire un effet de censure. En effet, étant donné l'absence d'équité procédurale et de lourdes conséquences punitives pour les personnes jugées coupables par le Tribunal des droits de la personne, il est à craindre qu'un climat d'autocensure s'instaure au Québec. De plus, l'absence de règles et de directives claires offertes par la loi au tribunal révèle une lacune évidente en matière de justice procédurale.»

Il poursuit : «...il nous paraît périlleux de se servir du droit civil pour accomplir ce qui est traité de façon adéquate par le droit criminel. Le projet de loi n'établit pas un juste équilibre entre la garantie de la liberté d'expression et la protection contre la haine et ne met pas en place les garanties procédurales nécessaires pour assurer le respect des droits et libertés des citoyens. Dans sa forme actuelle, le projet de loi risque de créer un climat d'autocensure indésirable et incompatible avec les droits et libertés fondamentaux. Nous estimons donc que le projet de loi n° 59 doit être revu de fond en comble et amendé en profondeur et faire ensuite l'objet de nouvelles consultations et auditions publiques présidées par cette même commission.» Fin de la citation.

À l'évidence, M. le Président, la ministre de la Justice n'a pas écouté l'Association québécoise des Nords-Africains pour la laïcité qui, le 22 août dernier, ont soutenu que, face aux discours haineux et aux discours incitant à la violence, une action ferme est certes nécessaire, notamment en raison de la montée fulgurante du groupe terroriste qualifié par les médias et les politiques occidentaux d'État islamique, en raison de la divulgation très facile du discours islamiste radical et du discours haineux sur le cyberespace, mais également par des prédicateurs islamistes qui prônent le djihad armé ici même, dans nos écoles, dans des mosquées, dans des centres communautaires du Québec et dans des espaces apprenants mobiles.

«Malgré cela — a souligné leur porte-parole, M. Ferid Chikhi — nous nous inquiétons pour la liberté d'expression au Québec. Notre crainte — dit-il — provient du flou qui règne autour de la notion de ce qu'est un discours haineux.»

«En ce moment précis de la vie politique — poursuit-il — culturelle et sociale du Québec, une autre question nécessite une réponse claire et sans ambiguïté : Dans un tel contexte, quelles solutions les élus et les gouvernants du Québec pourraient-ils mettre en oeuvre pour amener toute la société d'accueil à éviter les amalgames entre la majorité des musulmans comme partie citoyenne bien intégrée à la société québécoise et refuser que la minorité des islamistes la représente et impose ses visions, ses concepts et ses pratiques idéologiques?»

«...nous doutons — concluait-il — que ce soit le bon cheminement pour faciliter aux Québécois de diverses origines et notamment ceux de culture et de culte musulman une intégration et/ou une inclusion diligente et bénéfique aussi bien pour eux que pour la société d'accueil.» Fin de la citation.

À l'évidence, M. le Président, la ministre de la Justice n'a pas non plus écouté les inquiétudes de la communauté LGBT qui disait qu'avec l'adoption de ce projet de loi n° 59 on pourrait être amenés dans un piège d'effets pernicieux dans la lutte contre l'homophobie. La titulaire de la Chaire de recherche sur l'homophobie de l'Université du Québec à Montréal, Mme Line Chamberland, en commission parlementaire, a d'ailleurs soutenu que le caractère répressif du projet de loi nuirait à la lutte contre l'homophobie, la lesbophobie, la biphobie et la transphobie. À l'instar du Conseil québécois LGBT et de l'organisme GRIS-Québec, Mme Chamberland a appelé la ministre de la Justice à miser plus sur l'éducation et le dialogue que sur la répression.

M. le Président, à l'évidence, la ministre de la Justice n'a pas non plus écouté la Table ronde du Mois de l'histoire des Noirs qui, représentant un groupe minoritaire, est sérieusement concernée par les dérives possibles d'un tel projet de loi. En commission parlementaire, M. Michael Farkas, le président de la table, se disait sérieusement concerné, et je le cite : «...nous avons écouté souvent la haine provenant des paroles ou des adjectifs négatifs et abaissants qui étaient [attirés] envers les Noirs, alors, sans compter les pertes de vie encourues dues à la stigmatisation qui était collée carrément à notre peau, si je [puis] ainsi dire, nous rangeant à un rang inférieur que les autres êtres humains. Alors, dans ce contexte-là, nous sommes privilégiés, malgré nous, d'avoir développé une expertise sur [le] comment [réagir] en contrôlant nos pulsions à l'égard des mots ou des gestes violents qui ont marqué des milliers de Noirs au cours de leur vie». Je sais de quoi il parle, M. le Président, mais je ne vais pas m'étaler là-dessus.

M. Farkas avait par ailleurs mentionné avec justesse qu'il est important que le projet de loi reflète la réalité, qu'il soit transparent, correct et inclusif. Aussi, pour la Table ronde du Mois de l'histoire des Noirs, les valeurs fondamentales sur lesquelles le Québec est bâti restent des incontournables pour l'avancement de leurs connaissances en territoire québécois. «Égalité, [liberté], inclusion sont des atouts qu'il faut mettre de l'avant dans tous les secteurs, et tous les paliers institutionnels, communautaires et privés doivent faire avancer cette cause pour le bien commun des prochaines générations», de conclure M. Farkas.

M. le Président, la question qui me turlupine depuis que nous nous sommes retrouvés ici pour une adoption anticipée, je dirais, je reviendrai là-dessus, c'est : Pourquoi la ministre n'a-t-elle pas écouté tous ces groupes et ces personnes que je viens de citer? Ou, pour le dire comme on le fait communément, qu'est-ce que la ministre n'a pas compris dans le message des juristes, des groupes, des organismes que j'ai cités? Qu'est-ce qu'elle a fait des nombreux commentaires des gens entendus pendant la commission parlementaire? Cela nous apparaît comme, en tout respect, une carence de respect envers tous ces personnes, groupes et associations qui, en grande partie, ont jugé que ce projet de loi introduit des mesures très attentatoires aux droits et libertés. À l'évidence, M. le Président, la ministre de la Justice n'est pas dans une disposition consensuelle et elle rate complètement la cible.

Nous avons eu un espoir en lisant l'article de Mme Jocelyne Richer dans La Presse du 23 septembre dernier, qui nous informait que le gouvernement allait refaire ses devoirs et présenter une nouvelle mouture de son projet de loi n° 59, un espoir qui avait d'ailleurs pris sa source à la fin du mois d'août, au mois d'août dernier, alors que le premier ministre lui-même, au terme d'une réunion de son caucus, disait que le projet de loi sera revu et amendé et qu'il n'était pas dans l'intention de son gouvernement de brimer la liberté d'expression.

Espoir également généré par la ministre de la Culture et des Communications qui, dans la dernière édition du magazine Le 30, un magazine publié par la Fédération professionnelle des journalistes du Québec... À la question de savoir si le projet de loi n° 59 était une menace contre la liberté d'expression, ce qui inquiète plusieurs journalistes, la ministre répondait ceci, et je la cite : «C'est un projet de loi qui a été demandé, attendu, avec toutes les ramifications qui peuvent être dangereuses, dans un sens comme dans l'autre. On a les forces en présence que sont la liberté d'expression versus l'encadrement qui est prôné à cause d'évènements qui ont pu se produire et qui sont inquiétants. La liberté d'expression — poursuit-elle — c'est quelque chose de très important. J'étais à Paris quand Charlie Hebdo est arrivé, j'ai vécu ça avec énormément d'émotion comme tout le monde, on a tous été Charlie et on se dit que ça n'a pas de bon sens. Je pense que le gouvernement est tout à fait dans cette mouvance-là. Les gens sont venus s'exprimer sur le projet de loi, et heureusement on a la démocratie et les commissions parlementaires, les gens doivent venir dire ce qu'ils pensent, et après les commentaires doivent être pris en compte — c'est important, ça, M. le Président. On n'est pas dans ce cas de figure actuellement. La liberté d'expression — poursuit-elle — doit être protégée mais tout en se préservant, comme société, du pôle extrêmement radical supposé des propos haineux.» Fin de la citation.

• (17 h 30) •

Est-ce que les commentaires des gens dont parle la ministre ont été pris en compte? Non, M. le Président, il semble que nous ayons encore aujourd'hui le projet de loi n° 59 tel qu'il fut déposé le 10 juin 2015. Nous nous serions attendus, compte tenu des critiques parfois virulentes notamment d'éminents juristes, qu'à défaut d'abandonner le projet de loi des amendements soient apportés et soumis à la connaissance des parlementaires avant d'entamer cette étape de l'adoption du principe.

Aussi, M. le Président, et cela est fondamental, comme plusieurs l'ont d'ailleurs souligné avec justesse et sagesse, c'est par l'éducation que nous pouvons changer les mentalités, non par des lois qui transforment des organismes comme la commission des droits de la personne, de la jeunesse en police d'opinions au Québec, non. Et, comme je l'ai dit en cette Chambre le 1er octobre dernier, nous nous devons de travailler en profondeur pour nous attaquer aux véritables causes de ce qui pourrait amener une frange de la population sur les chemins du racisme et de la xénophobie.

 M. le Président, ça passe par l'éducation, l'éducation à la maison, l'éducation à l'école, ça passe par l'éducation de masse. Il faudrait, en toute objectivité et rigueur, interroger les médias, les archétypes qui y sont véhiculés, les modèles de référence, les modèles d'identification, parce que ce sont là des éléments fondamentaux qui viennent construire la personnalité psychique collective et qui conditionnent le comportement de vous, de moi vis-à-vis de l'autre, vis-à-vis de l'altérité. Vote-t-on des lois pour favoriser le rapprochement des citoyens, le vivre-ensemble, ou pour renforcer les uns les autres dans les murs de leurs préjugés?

M. le Président, je terminerai en rappelant ce que l'un de mes modèles d'identification avait dit : «L'éducation est l'arme la plus puissante qu'on puisse utiliser pour changer le monde.» C'est Nelson Mandela qui le disait, et nous connaissons tous son parcours. Nous savons ce à travers quoi il est passé et ce à travers quoi son pays a failli passer, n'eut été de son attitude noble, incarnée, son attitude empreinte de sagesse. Alors, je me fie à son propos nous indiquant le chemin, celui de l'éducation, et j'espère que cette pensée inspirera l'ensemble de mes collègues du gouvernement.

M. le Président, l'occasion est belle pour amener la ministre de la Justice... la ramener plutôt à la table de dessin. Nous serons là pour la soutenir parce que c'est sans aucune partisanerie que nous proposons aujourd'hui le report de l'adoption du principe. Nous nous devons collectivement, pour aujourd'hui et demain, de travailler avec rigueur et dans la bonne entente. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de Bourget, pour votre intervention. Je suis prêt à entendre le prochain intervenant ou la prochaine intervenante. Je reconnais Mme la ministre. Alors, Mme la ministre, à vous.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Eh! ce qu'on entend, c'est ce qu'on a entendu depuis quelques jours, lorsque les collègues ont pris parole de l'autre côté de cette Chambre. Manifestement, et avec respect, je ne peux souscrire à l'argument soulevé par le collègue que tout ce battage se fait sans partisanerie. Permettez-moi... Aujourd'hui, on présente... On se lève parce que la députée de Taschereau a déposé une motion de report prétextant qu'il était impératif d'avoir en main les amendements avant de poursuivre l'étude et le principe du projet de loi. Avec respect, M. le Président, il n'y a aucune obligation réglementaire de déposer les amendements préalablement au fait de s'asseoir et d'entreprendre l'étude article par article, et le dépôt d'amendements se fait lors de l'étude article par article. Je tiens à vous rassurer, je tiens à rassurer les collègues de l'autre côté de la Chambre, le principe du projet de loi n° 59 ne change pas.

Quel est notre objectif, M. le Président, avec le projet de loi n° 59? Je l'ai mentionné la semaine dernière, je vais le réitérer, je vais le répéter, le projet de loi n° 59 vise à protéger les personnes qui, dans une société, peuvent être des personnes plus vulnérables en raison de leur caractéristique particulière, caractéristique qui est protégée par notre Charte des droits et libertés de la personne. Et de quelle façon le projet de loi n° 59 vient-il protéger ces personnes-là? De différentes façons.

Dans un premier temps, le projet de loi n° 59 vient prévoir des balises aux discours haineux, aux discours qui incitent à la violence et vient interdire la tenue de tels discours dans la sphère publique. Le discours haineux puis le discours qui incite à la violence, M. le Président, là, c'est une notion qui est connue, qui est définie par la jurisprudence. Ce n'est pas une... Nous n'arrivons pas avec une notion qui n'a pas fait l'objet de littérature, qui n'a pas fait l'objet d'échange. Au contraire, l'arrêt Whatcott, et on en a parlé abondamment, est venu définir de façon très claire ce qui constitue du discours haineux.

Puis je pense qu'il est important de porter à l'attention des parlementaires ici, en cette Chambre, M. le Président, surtout ce qui n'est pas du discours haineux. Là, de l'autre côté, on prétend que le projet de loi n° 59 va venir empêcher, par exemple, quelqu'un de se moquer d'une religion. Ce n'est pas le cas. Ce n'est vraiment pas le cas. Ça ne viendra pas empêcher quelqu'un de critiquer une idée politique. Ce n'est vraiment pas le cas. Le projet de loi n° 59 justement protège cette liberté d'expression qui nous est chère et apporte des limites lorsque le discours incite à la haine envers une personne de façon telle que ce discours-là porte atteinte et risque de placer cette personne dans une situation où elle pourrait potentiellement être mise en danger. Lorsque des gens disent et prétendent que quelqu'un, un individu, en raison de sa race, en raison de sa religion, en raison de son orientation sexuelle, est un déchet de la société — je m'excuse, mais il y a de tels propos — et que cette personne-là ne mérite pas d'être, d'exister, c'est fort. C'est à ça qu'on s'attaque, M. le Président. Lorsque l'on incite à la violence physique, à ce que des actes criminels soient portés à l'encontre d'une personne, à l'encontre d'une femme, par exemple, c'est ce qui est limité par le projet de loi n° 59. Le fait de ne pas être en accord avec une religion et de le dire haut et fort, il n'y a pas de problème. Ce qui est protégé, M. le Président, ce n'est pas la religion, c'est la personne qui exerce une croyance religieuse, et c'est ça que le projet de loi n° 59 prévoit, c'est cette protection, c'est ces dispositions qui permettent de protéger des individus à l'encontre d'un tel discours. Mais il prévoit également d'autres choses.

• (17 h 40) •

Le projet de loi n° 59 prévoit également des dispositions pour venir encadrer davantage et soutenir davantage les intervenants des centres jeunesse, notamment lorsqu'il est question de violences qui sont basées sur une conception de l'honneur. Alors, le projet de loi prévoit d'insérer ces notions-là aux dispositions de la Loi sur la protection de la jeunesse, prévoit d'insérer les notions de contrôle excessif dans la Loi sur la protection de la jeunesse, prévoit un encadrement plus strict du consentement et une validation du consentement d'un mineur préalablement au mariage, validation qui se fera par un juge, par un juge de la Cour supérieure, pour s'assurer que le consentement, il est réel, pour éviter ce que l'on connaît comme étant des mariages forcés.

Le projet de loi n° 59 prévoit la mise en place d'ordonnances civiles de protection, M. le Président, des ordonnances civiles de protection pour venir protéger, par exemple, une personne aînée contre des menaces d'un membre de la famille, pour permettre de protéger une femme victime de violence conjugale, pour permettre de protéger une personne qui, plus vulnérable, ferait l'objet de harcèlement de la part d'un tiers. Le projet de loi n° 59 prévoit tout ça, M. le Président. Il prévoit des mesures de protection. Et ces mesures de protection là sont importantes, elles sont essentielles, elles ont été demandées.

J'entends de l'autre côté nous dire que le projet de loi n° 59 ne répond à rien. Mais c'est faux. Lorsque l'on regarde... Parce qu'on a cité abondamment des extraits de mémoire, mais on peut citer un extrait de mémoire et dénaturer une section. Est-ce que des groupes nous ont suggéré des bonifications au projet de loi? Certainement. Mais c'est ça, le principe parlementaire, M. le Président. Notre principe parlementaire prévoit une étape de... un dépôt d'un projet de loi, des consultations, consultations où des groupes... Et on a eu quand même une large consultation où les groupes ont défilé, nous ont fait part de leurs commentaires, nous ont fait part de leurs suggestions. Nous avons été à l'écoute. Et, par la suite, M. le Président, nous aurons des échanges, et je l'espère, lors du processus d'étude détaillée du projet de loi. À ce moment-là, on pourra échanger, on pourra avoir des échanges sur les différents amendements qui pourraient être apportés. Mais je vous le dis d'entrée de jeu, puis je l'ai mentionné, oui, il y aura des amendements, mais pas des amendements qui verront à dénaturer le principe de protection des personnes.

M. le Président, on a fait nos choux gras, de l'autre côté de la Chambre, en citant, par exemple, le Barreau. J'aimerais justement, un petit peu question de recadrer un peu le débat et permettre aux collègues qui n'ont pas participé à ces consultations de prendre connaissance d'un extrait du mémoire que le Barreau du Québec nous a soumis... «D'emblée, le Barreau est favorable à ce que le législateur impose des limites aux discours haineux ou incitant à la violence en tant qu'actes discriminatoires et que la commission des droits de la personne et de la jeunesse ait un contrôle sur ces dossiers. Nous soulignons qu'un régime administratif éviterait le recours automatique au droit criminel tout en favorisant le respect des droits et libertés de la personne et en garantissant le respect des libertés civiles de tous.

«[...]Le Barreau du Québec appuie de manière générale les nouveaux pouvoirs octroyés à la commission des droits de la personne et de la jeunesse afin de lutter contre les discours haineux ou incitant à la violence par des moyens de prévention et de sanction dans le cadre d'un régime de droit civil plutôt que de droit criminel.

 «[...]Le projet de loi constitue une étape importante d'un plan d'action gouvernemental visant à lutter contre la radicalisation menant à la violence et à renforcer le vivre-ensemble. Le Barreau du Québec partage les objectifs de la ministre de la Justice et salue tous les efforts en ce sens.»

C'était important que mes collègues l'entendent parce qu'ils n'étaient pas... et n'ont pas tous eu la chance de lire le mémoire, d'entendre les commentaires.

Citons la commission des droits de la personne et de la jeunesse : «Les graves atteintes aux droits et libertés causées par les discours haineux ou incitant à la violence, et leurs effets préjudiciables majeurs tant pour les victimes, les groupes visés que pour la société dans son ensemble, justifient un encadrement législatif, selon la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qui rappelle du même souffle l'importance de protéger la liberté d'expression.»

La Fondation Émergence, on l'a abondamment citée, mais la Fondation Émergence indique ce qui suit : «...la Fondation Émergence salue la volonté du gouvernement d'apporter un élément de soutien au discours haineux par une loi concernant la prévention et la lutte contre [les] discours haineux et [les] discours incitant à la violence. Les communautés LGBT et les personnes LGBT sont parmi les premières victimes de tels discours et seraient donc parmi les premières personnes à bénéficier directement d'une telle loi.

« Enfin, élevée au rang des droits fondamentaux, la protection individuelle contre les discours haineux est, pour nos communautés LGBT et nos personnes LGBT, un levier supplémentaire pour leur intégration sociale et leur pleine participation à l'avancement de [la] société.»

Le Conseil du statut de la femme, M. le Président, le Conseil du statut de la femme : «La liberté d'expression se porte bien au Québec, très bien, [même], elle n'est aucunement menacée. Mais, à la faveur de la montée des médias sociaux, le dénigrement des groupes identifiables est bien présent. Nous tenons à rappeler aujourd'hui que le Conseil du statut de la femme et plusieurs voix dans le mouvement des femmes demandent depuis des années un outil juridique [et de] droit civil pour répondre à cette violence verbale misogyne.

«[...]Le conseil désire un autre outil juridique pour interdire les propos haineux à l'égard des femmes, pour punir les auteurs afin de permettre aux femmes d'exercer réellement leur liberté d'expression.

«[...]Au Québec, des groupes de femmes ne pourraient pas intenter d'action civile pour des propos haineux, misogynes, discriminatoires ou offensants à l'égard [de groupes] des femmes. La victime doit être identifiée ou identifiable et le préjudice doit être individualisé. Au Québec, des groupes de femmes ne pourraient pas intenter d'action au civil pour des propos misogynes contre un blogueur ou toute autre personne qui tient publiquement un tel discours, à moins que les noms de ces femmes aient été clairement mentionnés. Le discours misogyne porte atteinte au droit à l'égalité des femmes garanti par les chartes; les propos discriminatoires, sexistes, misogynes sont des formes de violence puisqu'ils portent atteinte à l'intégrité physique et psychologique des femmes et qu'ils sont posés dans un contexte de domination.»

M. le Président, il y a quand même plusieurs groupes qui se sont manifestés pour indiquer le besoin d'encadrer le discours haineux et le discours incitant à la violence. Et, M. le Président, je vous dirais que ce qui est prévu, c'est une mesure extrêmement rigoureuse, c'est une mesure qui permet d'équilibrer le droit à la liberté d'expression et la protection des personnes, la protection des groupes contre des propos haineux et misogynes... et violents, pardon.

M. le Président, je tiens à vous revenir et peut-être à préciser ce qu'est un discours haineux, peut-être aussi, encore une fois, pour les collègues parlementaires qui n'ont pas eu le loisir de lire des passages de l'affaire Whatcott, parce que, ça aussi... Lorsqu'on ne comprend pas ou lorsqu'on ne connaît pas un concept, il est possible de se laisser emporter dans une vague d'interprétations, et c'est normal, c'est humain.

Dans l'affaire Whatcott ... Plusieurs extraits de l'affaire Whatcott ont été cités, mais la Cour suprême nous enseigne et nous dit ce qui suit, en parlant du discours haineux : Il s'agit de «mots qui exposent un groupe ciblé à la détestation», qui tend à «inspirer, d'une manière qui excède le simple dédain ou l'aversion, l'inimitié et une malice extrême envers le groupe. Les messages diffamatoires cherchent à insulter, à déconsidérer ou à dénigrer la personne ou le groupe ciblé pour le rendre illégitime, dangereux, ignoble ou inacceptable aux yeux du destinataire. Les messages qui exposent des groupes vulnérables à la détestation et la diffamation vont bien plus loin que simplement discréditer, humilier ou offenser les victimes.»

Il s'agit de «types de propos les plus extrêmes susceptibles d'inciter ou d'inspirer à l'égard des groupes protégés un traitement discriminatoire pour un motif interdit.

«[...]Les dispositions législatives interdisant les propos haineux ne visent pas à décourager l'expression d'idées répugnantes ou offensantes. Par exemple, elles n'interdisent pas les propos dans lesquels on débat de l'opportunité de restreindre ou non les droits des groupes vulnérables dans la société. Elles visent seulement à restreindre le recours à des propos qui les exposent à la haine dans le cadre d'un tel débat. Elles ne visent pas les idées, mais leur mode d'expression en public et l'effet que peut produire ce mode d'expression.

• (17 h 50) •

«[...]des propos visant un groupe protégé à des fins satiriques ou dans le cadre d'un reportage portant sur les propos haineux tenus par quelqu'un d'autre ne constitueraient probablement pas un discours haineux. Les déclarations tenues en privé ne tomberaient pas non plus sous le coup de dispositions interdisant la publication, l'affichage ou la diffusion [de ces] propos[...]. Il y aurait également lieu de se demander si [on] est en présence d'une seule remarque qui transgresse la disposition prohibitive, ou d'attaques réitérées ou multiples aux fins de dénigrer le groupe.

«[...]Ainsi sont écartés les propos qui, bien que répugnants et offensants, n'incitent pas à l'exécration, au dénigrement et au rejet qui risquent d'emporter la discrimination et d'autres effets préjudiciables.

«[...]De même, l'interdiction n'empêche pas de tenir des propos haineux contre une personne sur le fondement de ses caractéristiques personnelles uniques; elle ne vise que les propos haineux fondés sur des caractéristiques communes à un groupe de personnes et qui ont été reconnues comme un motif de distinction illicite aux termes d'une loi.

«[...]Il n'existera un lien rationnel entre l'interdiction visant les propos haineux et l'objectif visé que si cette interdiction ne vaut que pour les propos tenus en public qui visent un groupe protégé ou une personne au motif qu'elle fait partie de ce groupe.»

Sont également écartés les discours qui ne font que ridiculiser, rabaisser ou porter par ailleurs atteinte à la dignité des groupes protégés.

«...il importe peu que l'écrit ou le discours en cause soit ou non motivé par des considérations religieuses. Si, lorsqu'on la considère de façon objective, la publication véhicule des propos qui exposent ou qui sont susceptibles d'exposer le groupe vulnérable à la détestation et à la diffamation, l'expression religieuse tombe alors sous le coup de l'interdiction prévue par la loi.»

Encore une fois, donc, un résumé de ce que constituent des propos jugés haineux : dépeindre comme une menace qui pourrait compromettre la sécurité et le bien-être d'autrui en citant des sources respectées — dans le dossier de l'affaire Whatcott, on citait la Bible — pour légitimiser des généralisations négatives en employant des illustrations diffamantes et dénigrantes afin de créer un climat de haine, les dépeindre comme des dépendants sexuels dégoûtants ou sales en les comparant à des pédophiles qui ont traditionnellement fait l'objet de l'opprobre public, dépeindre les gens comme des êtres impurs, dépossédés d'un appétit et de comportements déréglés, et des agresseurs d'enfants ou des prédateurs, soutenir que le droit civil devrait être discriminatoire à leur égard.

Dans l'affaire Whatcott, ces types de propos ont été considérés comme étant des propos jugés haineux. Par contre, dans l'affaire Whatcott n'a pas été jugé comme étant un propos haineux : dire que l'homosexualité ne devrait pas être légale en Saskatchewan. Ça, ce n'était pas un propos haineux.

Donc, l'opinion, le discours d'opinion, la dissidence, ça ne constitue pas du discours haineux, M. le Président, et on doit le répéter parce que, depuis des semaines, les membres de l'opposition prétendent que ridiculiser une religion tomberait sous le coup du discours haineux, critiquer la charia constituerait du discours haineux. Tel n'est pas le cas, M. le Président, tel n'est pas le cas. Et je comprends que nous aurons certainement, certainement de longs échanges et des échanges intéressants, ma collègue et moi, mais je vous... et j'incite les collègues de cette Assemblée à rejeter la motion qui est présentée par la députée de Taschereau parce qu'elle ne fait que reporter... Reporter à deux semaines, M. le Président, pour les gens qui nous écoutent, c'est reporter en pleine session intensive, c'est perdre deux semaines de précieux temps pour échanger et pour permettre à la députée, en temps opportun, de prendre connaissance d'amendements qui, je suis persuadée, sauront répondre à bien des commentaires qui nous ont été formulés.

Je relisais tout à l'heure le mémoire de Me Latour et le mémoire de Me Grey, deux éminents juristes, et leur mémoire nous fait état d'un certain nombre de recommandations qui sont fort intéressantes, et je rappellerai aux membres de cette Assemblée que Me Grey, en septembre dernier, peu de temps après sa comparution en commission parlementaire, a affirmé que la liberté d'expression comportait des limites. Il l'a affirmé alors qu'il commentait un autre dossier qui était pendant devant la commission des droits de la personne et de la jeunesse. Je crois qu'il représentait un humoriste fort connu, et il l'a mentionné, ça, Me Grey, il l'a reconnu, que la liberté d'expression comportait des limites.

La limite qui est prévue au projet de loi n° 59, c'est une limite qui est tout à fait, tout à fait acceptable dans une société libre et démocratique. C'est une limite qui permet la protection de citoyens et de citoyennes à l'encontre de discours haineux, à l'encontre de discours incitant à la violence, et il est de notre responsabilité comme législateurs d'y voir et d'y veiller. En confiant à la Commission des droits de la personne ce rôle d'arbitre afin de déterminer si la plainte est fondée ou non, nous avons un juste équilibre, puisque la commission des droits de la personne et de la jeunesse est l'organisme chargé de veiller au respect des droits et libertés au Québec, et la liberté d'expression en fait partie, M. le Président.

Alors, M. le Président, j'implore que nous puissions procéder dans nos travaux, permettre d'avancer, de continuer d'échanger. J'ai hâte de retrouver la collègue de Taschereau en commission parlementaire. J'ai hâte de pouvoir échanger avec elle. Je suis persuadée qu'elle saura nous aider à bonifier le projet de loi, j'en suis certaine. Il suffit d'avoir un peu de bonne volonté et un peu de patience. Mais, M. le Président, je demanderais simplement à nos collègues de rejeter la motion qui a été présentée dans cette affaire. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui. Là, j'ai un problème : il ne reste pas beaucoup de temps avant de suspendre.

Mme Maltais : ...ça à mardi, vu qu'il reste une minute, pour ne pas interrompre, là.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, c'est ce que je veux valider là. Il reste deux minutes.

Mme Maltais : ...la prochaine oratrice, tout simplement.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Parce que le temps qu'il nous reste ne permet pas au prochain orateur de finir le temps qui lui est imparti. Alors, il reste deux minutes à peine.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ça ne me dérange pas. Mais je veux savoir si on peut suspendre, compte tenu de l'heure, ou si on continue en sachant qu'il reste deux minutes.

Mme Vien : Bien, M. le Président, il reste deux minutes. Je ne vois pas pourquoi on arrêterait à ce moment-ci, là, effectivement, là.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, c'est parce qu'elle a plus de temps que ça. Allez, prenez vos deux minutes. Il vous restera du temps dans votre banque. Poursuivez.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je souhaite intervenir, là, dans cette demande de report pour le dépôt des amendements.

J'ai bien écouté attentivement la ministre de la Justice avec sa présentation et je l'entends quand elle nous dit que ce qu'elle pense et ce qu'elle veut, je pense qu'il y a beaucoup de choses avec lesquelles on est d'accord, mais il semble, de toute évidence, que, dans la rédaction des documents, dans la rédaction du projet de loi, bien, ça n'a pas donné cette assurance-là, qu'il y a des écarts, qu'il y a des ouvertures qui risquent de porter atteinte à la liberté d'expression.

Et j'ai entendu la ministre dire : Deux semaines. Bien, écoutez, moi, deux semaines pour s'assurer qu'on ne portera pas atteinte à la liberté d'expression des Québécois, ça me semble être un bon investissement. Mais je ne suis pas une spécialiste pour le juger, sauf que, quand j'ai des juristes de la trempe de Julius Grey, de Me Latour, de Daniel Turp, de Pierre Brun, de Marie Laure Leclercq, de Denis L'Anglais, de Guy Tremblay, qui, unanimement, disent : Attention! Il y a vraiment... la liberté d'expression est compromise dans le projet de loi, je me dis : Bien, retravaillons nos choses.

Et, en ce qui concerne les amendements, je vous dirais que je suis devenue presque une spécialiste des amendements. Alors, j'ai pu expérimenter, dans le projet de loi n° 10 et dans le projet de loi n° 20, une multitude d'amendements. Et les amendements, quand on ne les voit pas au bon moment, ils nous donnent des surprises, ils nous réservent des surprises.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je m'excuse, Mme la députée de Taillon. Compte tenu de l'heure, là — moi, il est six heures — je dois suspendre.

Ajournement

Alors, en conséquence, les travaux sont ajournés à mardi 17 novembre 2015, à 13 h 40. Les travaux sont ajournés.

(Fin de la séance à 18 heures)