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Etude des crédits du ministère de
l'Agriculture
(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!
La commission de l'agriculture est réunie pour étudier les
crédits du ministère de l'Agriculture pour l'année
financière se terminant le 31 mars 1978. Les membres de la commission
pour ce matin sont: M. Baril (Arthabaska), M. Beausé-jour (Iberville),
M. Bordeleau (Abitibi-Est) qui remplace M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M.
Charbonneau (Verchères), M. Clair (Drummond), M. Cordeau
(Saint-Hyacinthe), M. Dubois (Huntingdon), M. Gagnon (Champlain), M. Garneau
(Jean-Talon), M. Garon (Lévis), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Mercier (Berthier), M.
Ouellette (Beauce-Nord), M. Picotte (Maskinongé), M. Rancourt
(Saint-François), M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Orford).
Il y aurait lieu de nommer un rapporteur; je suggérerais M. le
député de Beauce-Nord, M. Ouellette, Adopté?
M. Giasson: Adopté.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre, si vous voulez
présenter votre personnel et faire vos remarques
préliminaires.
Exposé général du ministre M.
Jean Garon
M. Garon: J'aimerais, au début, présenter à
la commission parlementaire M. Camille Julien, sous-ministre par
intérim, M. Yvan Jacques, sous-ministre adjoint à la
commercialisation, M. Jacques-Yves Therrien, à la recherche et à
l'enseignement, M. André Guimond, directeur des services financiers,
accompagné de M. Marcel-Miville-Dechêne et de M. Jean-Marc
Bélanger, M. Gilles Dulude, M. le docteur Bertrand Forest qui est
à l'enseignement à la recherche, et le directeur des services
économiques, M. Gaston Grammond.
De l'autre côté, vous avez...
M. Giasson: Ce ne sont pas les moindres.
M. Garon: Dans le personnel de mon cabinet, vous avez Me Firmin
Bematchez qui est chef de cabinet, M. Maurice Tremblay, dont on a parlé
en Chambre récemment, M. Vital Bouchard, économiste agronome, et
M. Simon Bégin qui est attaché de presse.
Le Président (M. Boucher): Vous pouvez faire des
commentaires généraux.
M. Garon: Je voudrais indiquer tout d'abord que depuis ma
nomination comme ministre de l'Agriculture, ce que j'ai essayé de faire
le plus possible remarquez qu'il en reste toujours quelque chose,
j'imagine c'est de ne pas politiser l'agriculture et de collaborer au
maximum de mes possibilités avec tous les députés qui font
leur travail qui est de représenter leur comté.
De là même façon, j'ai demandé à tout
le personnel de mon cabinet et aux fonctionnaires d'être très
réceptifs quand les députés ont besoin d'information ou
veulent avoir des renseignements sur différents programmes, parce qu'au
fond, souvent, ils constituent la chaîne de transmission entre le
ministère de l'Agriculture et les citoyens agriculteurs de leur
comté, qui ont des problèmes particuliers et qui, souvent, ont
besoin d'explications.
Evidemment, les bureaux locaux souvent peuvent jouer ce rôle.
J'espère qu'ils le jouent le plus possible, mais souvent les citoyens
préfèrent aller voir les députés.
J'ai pensé qu'au fond, vu que c'est peut-être la classe
sociale qui a été la plus charriée au cours des
dernières années, les cultivateurs n'avaient pas besoin de
politique partisane à ce moment-ci et qu'il était plus important
de régler le plus possible les problèmes économiques
auxquelles ils ont à faire face. C'est pour cela que, dans cette
perspective, j'ai toujours manifesté une grande attention aux
députés de l'Opposition, comme aux députés du Parti
québécois. Souvent ceux qui sont les plus dures, ce sont les
députés de notre propre parti. Ma porte est toujours ouverte aux
suggestions et à la collaboration de tous, à ce point de vue.
Je vais faire un bref tour d'horizon de différents
événements qui se sont produits depuis que j'ai été
nommé au ministère de l'Agriculture. Je me rappelle que, quand je
suis arrivé au ministère de l'Agriculture, le sous-ministre en
titre était arrivé avec un cahier qui était à peu
près trois fois gros comme celui-là; c'était le
résumé des dossiers. Il y avait deux pages pour chacun. Il
m'avait fait le résumé sommaire des problèmes, en passant
par la grève des vétérinaires, des problèmes dans
FEDCO, des problèmes dans les deux sortes de faits, etc. J'avais eu la
réaction de lui demander: Y a-t-il des secteurs qui fonctionnent un peu?
Il y a l'air d'avoir des problèmes un peu partout. Cela a
été un peu mon attitude d'essayer de les régler un par un,
tranquillement. J'ai constaté les libéraux ont dû le
constater quand ils étaient au pouvoir qu'il y a beaucoup de
monde quand les problèmes sont là, mais quand on règle un
problème, il y a moins de monde pour en parler. Durant la grève
des vétérinaires, par exemple, j'avais des appels
téléphoniques presque à tous les jours pour commenter la
grève. Le matin de la signature de la convention, j'avais invité
tous les journalistes c'est vrai que c'était peut-être un
peu une heure agricole, à 8 h 30 du matin et il y avait seulement
deux journalistes qui étaient là pour connaître les clauses
de la convention, au fond, et le règlement qui touchait les
vétérinaires.
Cela m'a appris que c'est plus facile, souvent, de parler des
problèmes que de parler des solutions.
Une deuxième chose. Je ne le fais pas par ordre chronologique,
mais tout simplement comme j'en ai pris note. Au sujet de la raffinerie
ce qui avait été commencé dans les dernières
années j'ai voulu modifier le conseil d'administration de la
raffinerie de sucre de Saint-Hilaire. De 1944 à 1970 ou 1971, le conseil
d'administration était formé exclusivement de politiciens;
habituellement, le ministre de l'Agriculture, comme président, et quatre
députés comme administrateurs. Cela avait été
change en 1971 alors qu'il y avait deux hauts fonctionnaires, le
député du comté et deux personnes qui venaient de
l'entreprise. J'ai préféré, cette année,
dépolitiser entièrement le conseil d'administration pour y nommer
seulement des personnes dont les qualités d'administrateurs ne faisaient
aucun doute. Vous avez actuellement comme président M. André
Marier, qui est bien connu comme haut fonctionnaire, comme administrateurs vous
avez M. Philippe Parizeau, qui est directeur général de
Québec-Lait et qui était autrefois à la coopérative
de Granby; M. Antoine Turmel, qui est directeur général de
Provigo; M. Roger Néron, qui est vice-président et directeur
général de Vachon, et, quatrièmement, M. Jean-Marc
Kirouac, qui est secrétaire général de l'UPA.
C'était, en fait, une première manifestation qui va suivre
dans d'autres choses également pour montrer que la façon de voir
les choses, au fond, c'était de mettre aux bons endroits des
administrateurs qualifiés. Dans le secteur de l'agriculture, je pense
que ce sont essentiellement des problèmes économiques. Trop
souvent, c'était vu comme des problèmes folkloriques.
En janvier, j'ai rencontré ce qui était fait pour
la première fois, à ce qu'on m'a dit les
représentants commerciaux, les attachés commerciaux des maisons
du Québec à l'étranger pour les sensibiliser à la
vente de produits agricoles du Québec qu'on a en surplus. Je pense, par
exemple, au sirop d'érable, au porc, qu'on vend déjà,
d'ailleurs, en 1976, pour au-dessus de $20 millions au Japon.
C'était pour sensibiliser les représentants des maisons du
Québec à l'étranger à la vente de produits
agricoles québécois. D'ailleurs, avant longtemps, il y aura
quelqu'un de préposé plus spécialement à cela pour
faire la promotion de produits agricoles québécois à
l'étranger dans les secteurs où on a des surplus, plutôt
que des secteurs où on est en déficit.
A la fin de mars, début d'avril, on a adopté à
l'Assemblée nationale, avec la collaboration de tous les membres de
l'Assemblée nationale, tant de l'Opposition officielle, de l'Union
Nationale que des représentants des créditistes,
l'assurance-récolte collective facultative, qui correspondait à
ce que souhaitaient plusieurs personnes, je pense, des deux côtés
de la Chambre, pour que les cultivateurs ne soient pas obligés
d'adhérer à un plan d'assurance-récolte, mais puissent y
adhérer librement. Mais encore là c'est une première
manifestation d'une façon de voir les choses, c'est-à- dire que
les cultivateurs seront assez adultes pour prendre des décisions, pas
besoin d'être guidés comme des enfants par la main
constamment.
Récemment, à la fin de mars, j'ai écrit à M.
Whelan. A la troisième semaine d'avril, j'ai écrit une lettre
à tous les représentants du Québec à Ottawa, pour
demander le contrôle des importations de la volaille, suite à des
représentations qui m'avaient été faites par la
Fédération des producteurs de volaille du Québec. J'ai
rendu publique cette lettre, sans tout le succès que j'en attendais,
à la fin d'avril, au début de mai.
Il y a seulement un journal qui l'a reproduite, le Soleil de
Québec, et j'ai déploré un peu cette situation; j'aurai
l'occasion de revenir un peu plus tard sur l'information dans le domaine
agricole qui, je trouve, n'est pas suffisante. Donc, c'était pour
répondre au voeu des fédérations des producteurs de
volaille, qui sont dans une situation difficile actuellement, puisqu'au cours
de l'année 1976 il y eut 54 millions de livres de volaille
importées au Canada. C'étaient 20 millions de livres
l'année précédente. Si l'on suit la tendance, le chiffre
d'importation pourra s'accroître jusqu'à 100 millions de livres en
1977, ce qui mettrait en péril la production, l'industrie avicole au
Québec, puisqu'au Québec c'est un des secteurs où on
produit plus que notre capacité de consommation.
Il pourrait s'en suivre des difficultés considérables pour
l'industrie avicole si les importations de volaille en provenance des
Etats-Unis n'étaient pas contrôlées par le gouvernement
d'Ottawa.
Ce sont des domaines où, encore, le Québec n'a pas de
pouvoir de contrôle sur les importations. Il y a eu aussi, il y a un peu
plus de 15 jours, la lettre de directives du ministre de l'Agriculture à
la Société québécoise d'initiatives
agroalimentaires, qui a été approuvée par le Conseil des
ministres et déposée en Chambre mercredi dernier. C'est une
lettre de directives qui avait pris du temps à être
adoptée. Les libéraux lorsqu'ils étaient au gouvernement
avaient trouvé difficile de choisir la formule pour la lettre de
directives. Nous avons travaillé là-dessus afin que cette
société, qui est excellente et peut jouer un rôle important
dans l'économie québécoise, puisse commencer à
fonctionner selon des directives qu'elle aurait reçues plutôt que
d'attendre indéfiniment ce que le gouvernement veut qu'elle fasse.
Il y a aussi des modifications dans certains programmes. Je dois vous
dire que le mois de novembre n'est pas le meilleur mois pour changer de
gouvernement puisque... On n'a pas beaucoup de temps pour améliorer les
programmes, tel que nous l'avions indiqué dans le programme politique.
En arrivant à la fin de novembre il y a les vacances des Fêtes, et
pendant 15 jours il n'y a pas beaucoup de monde au gouvernement. C'est
tellement vrai que j'ai été obligé de faire des
démarches assez importantes pour avoir la lumière dans le bureau.
Il n'y a pas de commutateur dans ces bâtisses. Les lumières se
fermaient automatiquement avec la noirceur. Elle ne s'allumaient pas non
plus.
La première journée des vacances où j'étais
au bureau afin de travailler tranquille, je me suis
aperçu qu'il commençait à faire noir. J'ai eu de la
difficulté et finalement j'ai eu de la lumière au 12e
étage du 200 Chemin Ste-Fov où c'était allumé pour
la période des vacances. J'ai donc pu travailler, approfondir les
dossiers et prendre connaissance d'autres dossiers.
Alors, immédiatement, il faut arriver pour le début de
mars avec les prévisions budgétaires, ce qui fait que la
période pour modifier les programmes est plus courte qu'on ne le
voudrait.
Disons qu'un programme a été modifié, le programme
des travaux mécanisés. Encore là, cela a été
pour donner aux cultivateurs le choix total. Les gens qui ont de la machinerie
capable de faire des travaux sont qualifiés; ils vont recevoir leur
certificat de qualification, qu'on appelait accréditation. Ainsi, il n'y
aura pas d'heures attribuées aux entrepreneurs, mais ceux qui feront le
choix, ce seront les cultivateurs. Je pense qu'ils sont assez adultes et assez
intelligents pour prendre le meilleur entrepreneur. Je suis certain que les
cultivateurs ne prendront pas le pire, mais le meilleur. A ce moment-là,
c'est la loi du marché qui va s'établir, c'est-à-dire que
ceux qui sont plus dynamiques, qui donnent un meilleur service normalement
auront les travaux et les cultivateurs ne passeront pas après la voirie,
ce qui était une lacune du système des heures,
c'est-à-dire qu'on m'a dit que les entrepreneurs avaient tendance
à travailler d'abord pour leurs contrats de la voirie et, quand ils
avaient le temps, ils faisaient leurs heures pour les cultivateurs. Alors, cela
a été une modification pour donner le choix entier aux
cultivateurs.
Il y a aussi une autre modification dans ce programme, c'est qu'il y a
eu, depuis le début du programme, depuis 1944, 18 millions d'heures
attribuées ou subventionnées par le gouvernement du
Québec. A ma grande surprise, quand j'ai demandé où cela
en était au point de vue du suivie de ces heures, il n'y avait aucun
suivi c'est-à-dire qu'on ne savait pas où ces heures avaient
été faites exactement; il y avait des entrepreneurs qui avaient
été subventionnés, point.
J'ai demandé qu'on passe un suivi et qu'il y ait une compilation
dans les bureaux régionaux pour qu'on ne fasse pas le même travail
deux fois, c'est-à-dire que, lorsqu'une terre est faite, elle est faite.
Si la butte est enlevée, elle ne repoussera pas normalement, parce qu'il
n'y a pas eu beaucoup d'éruptions volcaniques au Québec
jusqu'à maintenant. Ceci pour ne pas recommencer le travail. Si,
éventuellement, on a fait des travaux à certains endroits, cela
devra s'appliquer sur d'autres programmes plutôt que de recommencer
toujours les mêmes choses.
Pour 18 millions d'heures, si on calcule qu'il y a 60 000 fermes
à peu près dans le Québec, en moyenne, cela veut dire
qu'on arrive à 300 heures par ferme. C'est quasiment assez pour
bouleverser chacune des fermes du Québec.
Dans quelques jours, j'aurai également l'occasion d'annoncer
différentes modifications au programme de drainage souterrain pour
empêcher le retard sur la confection des plans. C'était une des
plaintes que j'avais le plus entendues lors de mes visites de régions
agricoles.
Aussi, la semaine dernière, on a mis sur pied un programme de
main-d'oeuvre agricole où, encore là, le cultivateur pourra
choisir la main-d'oeuvre parmi les assistés sociaux et les
chômeurs. Il y aura une subvention du gouvernement, dans les cas des
assistés sociaux, à 75% du salaire payé jusqu'à un
certain maximum, tandis que dans le cas des chômeurs, jusqu'à
50%.
J'ai aussi eu l'occasion de faire plusieurs interventions, la plupart
publiques, dans le but d'essayer d'atténuer peut-être les
divergences qu'il pouvait y avoir entre des groupes dans les plans conjoints,
entre les dissidents, entre des groupes qui faisaient partie des plans
conjoints pour essayer de...
M. Giasson: II paraît qu'il ne faut pas utiliser le terme
"dissident".
M. Garon: Des gens qui divergeaient d'opinion.
M. Giasson: "Réfractaire" serait déjà
suffisant.
M. Garon: ...les faire travailler davantage ensemble, dans le
domaine du bois, des oeufs, du lait, etc., pour essayer de les initier le plus
possible au secteur agricole. Il y a eu aussi, des rencontres avec des groupes
nouveaux qui veulent se constituer, par exemple chez les producteurs de porc,
de grain, etc. Enfin, il y a eu aussi, ce que j'avais annoncé au
début, la visite des différentes régions agricoles du
Québec. Il y a douze régions. Je pensais avoir terminé
pour Pâques, mais je m'aperçois que cela va être beau si
j'ai terminé au milieu de l'été, d'autant plus que je ne
pourrai pas prendre autant de vendredis que je le voulais. A ce moment, les
journées sont plus limitées. Quand même, six régions
sur douze ont été visitées jusqu'à maintenant et,
en fait, on voit que le point de vue des régions est différent.
Dans la même semaine, j'ai eu l'occasion de rencontrer des producteurs de
betteraves qui pensaient commencer leurs semences dans la fin de semaine qui
suivait, c'était le jeudi que je les ai rencontrés, je pense.
Ensuite, je suis descendu à Sainte-Anne-de-la-Pocatière où
il y avait deux à trois pouces de neige, le lendemain. Après
cela, à Rimouski, il y avait presque un pied de neige, et le samedi
j'étais en Gaspésie où il y avait une tempête de
neige.
C'est pour dire qu'au point de vue des régions agricoles du
Québec, au fond, quand certains parlent de la régionalisation,
que les programmes doivent être pensés plus en fonction des
régions, il y a peut-être là un bon point à
considérer parce qu'il y a vraiment des différences au point de
vue climatique dans les régions du Québec, et le climat est
peut-être le facteur qui influence le plus l'agriculture.
Enfin, ce que je voudrais dire, au fond, si on regarde la philosophie
d'approche qui a été la mienne jusqu'à maintenant, cela a
été d'abord, le
plus possible, que le cultivateur ait un choix entier face au programme
du gouvernement, mais que le gouvernement soit le moins directif possible,
qu'il y ait des mesures incitatives, mais le moins directeur possible. Qu'on
marche plutôt par convictions plutôt qu'imposer des choix aux
cultivateurs.
Deuxièmement, favoriser l'unité du monde agricole
plutôt que la division, ne pas utiliser la division; au contraire,
essayer de l'atténuer pour qu'il y ait la plus grande unité
possible dans le monde agricole parce qu'il y a assez de problèmes sans
qu'il y ait des divisions en surplus.
Troisièmement, l'écoute, le plus possible, des
régions, c'est-à-dire des représentants régionaux
parce que certaines régions ont des problèmes particuliers. J'ai
constaté que dans l'agriculture ce sera toujours un combat constant; il
y a des choses évidentes, mais qui ne sont peut-être pas aussi
évidentes pour quelqu'un qui n'est pas là-dedans d'une
façon régulière. Si vous parlez d'une usine de $5
millions, tout le monde est prêt à parler des heures. Mais, quand
vous êtes dans l'agriculture, les gens ne voient jamais en termes
d'industries de plusieurs millions, mais en termes de petites unités.
C'est un secteur dans lequel il va falloir, pour un ministre ou ceux qui y
travaillent, combattre plus fort pour se faire écouter. Pourtant, si on
regarde le secteur primaire, l'agriculture représente un tiers de la
valeur ajoutée de la production du secteur primaire, ce qui est
considérable. Des investissements en construction dans le secteur
primaire et en machinerie, en 1976, se sont élevés à $400
millions. La main-d'oeuvre agricole représente 78 000 travailleurs. La
valeur moyenne des fermes est de $90 000, ce qui est considérable, au
fond, comme secteur. Il faut dire que l'agriculture constitue la partie la plus
importante du secteur primaire.
Deuxièmement, si on regarde le secteur secondaire, encore
là les chiffres sont très élevés. Le chiffre
d'affaires de l'industrie des aliments et boissons au Québec atteint
$4,5 milliards, ce qui représente un cinquième ou 20% des
expéditions totales du secteur manufacturier. 10% de la main-d'oeuvre du
secteur manufacturier travaillent dans le secteur des aliments et boissons. Ce
qui fait au fond que, dans le secteur secondaire, c'est le plus important. J'ai
remarqué, souvent des gens, quand on leur mentionne ces chiffres,
demeurent surpris. On parle parfois d'une usine de $4 millions, $5 millions,
mais quand on parle seulement d'une usine du sirop d'érable, suivant les
années, c'est une usine qui représente de $25 millions à
$40 millions. On parle des oeufs, c'est une industrie qui représente
plus de $60 millions. Si on parle de la volaille, c'est une industrie qui
représente plus de $135 millions. Si on parle du porc, c'est une
industrie qui représente plus de $250 millions. Si on parle du lait,
c'est près de $700 millions. Cela veut dire que ce sont des chiffres
considérables. C'est sans doute le secteur économique, pas sans
doute, c'est le secteur économique le plus important.
C'est mal compris, je pense, encore et c'est une des tâches
à laquelle j'ai l'intention de m'attaquer. C'est d'indiquer que
l'agro-alimentaire peut être le secteur de développement
économique à la pointe du développement économique
au Québec. Si on regarde le secteur tertiaire, la valeur des ventes des
magasins d'alimentation représente $4 milliards. Le consommateur
dépense $1 sur $5 pour son alimentation. Si on regarde la
répartition du dollar dépensé par les consommateurs, c'est
25,4% qui va en amont, le secteur amont.
L'agriculture, les produits agricoles eux-mêmes, 15,5% et en aval
les produits alimentaires, les aliments et boissons, 59,1%. Ce sont des
chiffres très considérables.
Au sujet du budget de cette année, nous avions dit que nous
l'augmenterions. Le budget de 1976/77 était de $212,5 millions; en
1977/78 le budget va être de $239,8 millions, c'est-à-dire une
augmentation de $27,3 millions. Si on le regarde par rapport à l'argent
dépensé en 1976/77, qui était de $205 millions, cela
représente une augmentation de $34 millions. Où va aller cet
argent principalement? Il y a d'abord l'assurance-stabilisation, où deux
nouveaux programmes sont prévus. Si on regarde les chiffres du programme
qui couvre cet article, il semble y avoir une diminution à
l'assurance-stabilisation, ce qui n'est pas le cas.
Une Voix: C'est une erreur.
M. Garon: Non, ce n'est pas une erreur, c'est...
Une Voix: Programme 7.
M. Garon: En 1976/77, c'était $9 279 000, et en 1977/78,
c'est $8,5 millions. Cela semble une diminution, mais en réalité
ce n'est pas une diminution puisqu'en 1976/77, il y a eu seulement $1 million
de dépensé. C'est pour cela qu'au fond le programme 1976/77 a
été de $1 million pour le programme des veaux et vaches, car il
n'y avait pas eu d'autres programmes d'établis, tandis qu'avec $8,5
millions en 1977/78, on travaille actuellement sur l'établissement de
deux programmes pour les pommes de terre, les producteurs de pommes de terre et
les éleveurs de porcelets ou naisseurs de porcs. Pourquoi a-t-on pris
ces deux programmes? Comme je l'ai expliqué antérieurement, on
n'avait pas les crédits suffisants pour adopter tous les programmes en
même temps. Cela aurait coûté des sommes fantastiques, sans
doute, mais il s'agissait de prendre au fond comme c'est une loi
nouvelle, l'assurance-stabilisation, qui vise à éviter surtout
les fluctuations dans les prix, pour faire une moyenne pour les cultivateurs
les deux programmes qui connaissaient les plus graves variations,
c'est-à-dire où les prix aux producteurs fluctuaient le plus.
D'après les renseignements que j'ai obtenus au ministère, pour
les pommes de terre le prix varie considérablement, d'une année
à l'autre, et pour les éleveurs de porcelets, également,
il y avait des difficultés justement à cause des prix qui
n'étaient pas stables. Il m'a semblé que c'était le
meilleur endroit où appliquer le programme assurance-stabilisation et en
même temps
roder la mécanique d'une loi nouvelle qui commence à
s'appliquer, qui a commencé l'an dernier.
Le drainage souterrain est un point sur lequel il y a également
une augmentation des crédits qui est de $11 millions. L'objectif, cette
année, est de 80 millions de pieds de drain, par rapport à 57
millions l'an dernier. Il y avait 1100 milles de cours d'eau l'an dernier; on
vise au-dessus de 1200 milles de cours d'eau cette année, en 1977/78.
Pourquoi? Parce que le drainage représente une productivité
accrue de 20% à 40%, ce qui est reconnu par tous les experts de la
productivité du sol et veut dire, au fond, qu'une fois que le drainage
est fait, le cultivateur, avec les mêmes dépenses, le même
travail, voit sa productivité accrue de 20% à 40%.
Le lait à l'école est dans le programme: $2 millions.
J'aurais aimé avoir plus, mais en tout cas, cela commence par $2
millions. J'ai demandé les études qu'il y avait au
ministère là-dessus. Il y en avait une considérable qui
avait été faite au cours des années soixante, dans le
temps de M. Courcy, et qui faisait le résumé de toutes les
études qu'il y avait eues au Québec et ailleurs sur la
distribution de lait dans les écoles. Cela remontait avant 1880. Il y a
eu des études considérables qui ont été faites
là-dessus, mais peu de lait avait été distribué
dans les écoles. C'est un commencement, au fond, pour roder le
système dans mon esprit et accroître cette distribution à
l'avenir. Actuellement, il y a un comité qui travaille là-dessus,
et on voudrait commencer en septembre la distribution de lait dans les
écoles. On aura sans doute l'occasion au cours de l'étude des
crédits d'en parler davantage.
Il y a le programme de main-d'oeuvre agricole, dont j'ai parlé
tout à l'heure, également, qui représente $4 200 000, mais
qui est un programme dont les sommes pourront être accrues
normalement.
La construction de serres, à Saint-Hyacinthe, $1,5 millions pour
faire des recherches sur les céréales. Comme il y a de plus en
plus de producteurs qui font de l'auto-approvisionnement et qu'il faut trouver
de nouvelles variétés plus résistantes aux maladies et
mieux adaptées à notre climat, parce qu'il faut changer les types
de semences au cours des années pour qu'il n'y ait pas de contamination
ou de maladie dans les récoltes, ces serres permettaient de tripler la
rapidité des recherches faites à Saint-Hyacinthe à ce
point de vue. C'est la raison pour laquelle nous avons accepté
immédiatement de construire ces serres pour accroître les
recherches sur les céréales.
Le crédit agricole. On a eu des questions en Chambre
là-dessus. Il semble, quand on regarde les crédits, qu'il y a une
diminution en comparaison des chiffres du discours du budget. Encore
récemment, je demandais aux gens de l'Office du crédit agricole
de procéder le plus rapidement possible là-dedans. En
réalité, on voudrait que l'Office du crédit agricole fasse
jouer aux institutions financières privées un rôle dans le
financement à long terme des agriculteurs. C'est ce qui explique un peu
la diminution apparente, mais qui n'est pas réelle, de l'argent qui sera
prêté aux cultivateurs.
Un autre point. Je disais tantôt qu'il y avait eu un changement de
gouvernement au mois de novembre. Evidemment, plusieurs des programmes que vous
allez retrouver dans les crédits existaient avant et n'ont pas
été modifiés vraiment. Je compte commencer,
immédiatement après l'étude des crédits, dès
le mois de mai ou le mois de juin, la révision en profondeur des
programmes en tenant compte des régions pour savoir quel impact a chacun
des programmes dans différentes régions du Québec. Il
s'agira d'évaluer les objectifs de ces programmes quand ils ont
été établis, les moyens qui ont été
utilisés, les résultats obtenus et de voir si ces programmes sont
encore adaptés à la réalité d'aujourd'hui.
Evidemment, il y a une revue des programmes qui se fait chaque année,
mais je voudrais qu'on fasse en profondeur cette revue pour possiblement
établir de nouveaux programmes ou encore mieux adapter certains
programmes à la réalité régionale et à un
certain zonage des productions qui est commencé, mais qui devra suivre,
encore de façon plus intensive, le zonage des terres agricoles.
Il y a quelque chose que je voulais souligner; j'y ai fait allusion tout
à l'heure. Je souhaiterais qu'au Québec il y ait plus
d'informations sur l'agriculture et sur le secteur agro-alimentaire. Je pense,
par exemple, aux journaux de Montréal où il y a moins
d'informations sur le secteur agroalimentaire. Je souhaiterais, d'une
façon générale, qu'il y ait, tant dans les quotidiens du
Québec que dans les hebdomadaires qui reproduisent les
communiqués du ministère et qui informent les cultivateurs, de
même qu'à la radio et à la télévision,
beaucoup plus d'informations sur l'agriculture et sur le secteur
agro-alimentaire. Avec l'industrie et le commerce traditionnels, c'est facile
de faire des nouvelles, d'avoir des explications et des études, mais
dans le secteur agro-alimentaire, il n'y a pas toute l'information, à
mon avis, qu'il devrait y avoir. Je souhaiterais que ces organismes
d'information engagent plus de personnel je ne veux pas du tout
critiquer le personnel en place, qui est peu nombreux, d'ailleurs;le
personnel spécialisé est peu nombreux qualifié pour
pouvoir renseigner davantage la population et surtout pour que la population
connaisse davantage les possibilités de développement
économique que représente le secteur agro-alimentaire.
Je voudrais vous présenter le ministère; il y en a qui le
connaissent plus que d'autres. En fait, le ministère est divisé
en douze régions administratives, les régions 1, 2, 3
jusqu'à 12.
Il y a cinq laboratoires régionaux et 84 bureaux locaux dont un
certain nombre dépendent du bureau régional. Il y a une structure
particulière pour le génie, l'hydraulique qui couvre les cours
d'eau, le drainage souterrain, les travaux mécanisés. Cette
direction générale est divisée en six régions
administratives qui, parfois, sont les mêmes dans les régions
périphériques, mais qui, dans le centre du Québec, sont
différentes.
Un mot sur le budget lui-même. Il y a huit programmes, au fond, au
budget. Recherche et enseignement, en fait il y a beaucoup de recherches qui se
font dans le domaine agricole au Québec,
recherches dans le domaine animal, végétal, etc., des
subventions aux universités. Et il y a aussi l'enseignement:
l'enseignement agricole avec le ITA, l'Institut de technologie agricole,
l'enseignement aussi qui se donne dans des facultés, comme la
faculté d'agronomie, d'alimentation à l'Université Laval,
également au Collège Macdonald, attaché à McGill,
à l'Université de Montréal, à l'Université
du Québec.
Le financement agricole, deuxième programme, c'est ce qui est
couvert par le crédit agricole. C'est là qu'on retrouve cela.
Quand les gens du crédit agricole viendront, ou quand on sera rendu
à cette étape, je leur ai demandé de nous apporter un
ensemble des programmes qui dépendent du crédit agricole,
explicatifs, et aussi un tableau qui résume chacun des programmes. Cela
pourrait constituer un instrument de travail pour l'avenir également,
une bonne synthèse de ce que fait le crédit agricole au point de
vue du financement des agriculteurs.
L'aide à la production agricole. On y retrouve différents
programmes de subvention pour aider les cultivateurs, programme 3. Programme
4., la Régie d'assurance-récolte, c'est seulement
l'assurance-récolte qui est couverte par cette article. Programme 5, la
commercialisation agricole, différents services du ministère qui
aident à la commercialisation des produits agricoles, à la mise
en marché. Programme 6, la Régie des marchés agricoles du
Québec, qui est le tribunal quasi judiciaire qui administre un certain
nombre de lois, principalement la loi des marchés agricoles du
Québec. Programme 7, l'assurance-stabilisation des revenus agricoles,
qui est le secteur pour l'application de la Loi de l'assurance-stabilisation
des revenus qui est administré par la Commission
d'assurance-stabilisation des revenus. Et Programme 8, gestion interne et
soutien du ministère.
Vous remarquerez aussi la page de gauche qui suit chaque programme.
Chaque programme est divisé en trois grandes catégories.
Premièrement, le fonctionnement, les dépenses de fonctionnement,
les traitements des fonctionnaires, autres rémunérations qu'il
peut y avoir, les communications, les services, l'entretien, les loyers. Ce
sont les dépenses pour faire fonctionner le ministère.
Deuxièmement, les dépenses de capital,
d'équipement, d'immobilisation, qui sont faites par le ministère.
Troisièmement, les dépenses de transfert. On entend souvent une
critique vis-à-vis du ministère de l'Agriculture, qui n'est pas
exacte. Les gens pensent que tout l'argent est dépensé pour le
salaire des fonctionnaires, que peu d'argent va aux cultivateurs.
Si on regarde l'ensemble des chiffres, il y a 25,8% du budget de
l'Agriculture qui va à la rémunération des fonctionnaires,
traitements des fonctionnaires. Les dépenses de transfert,
c'est-à-dire l'argent qui est versé sous forme de subventions ou
autres aux cultivateurs, représentent 48,8%. Cela veut dire que
près de 50% du budget du mi- nistère sont distribués aux
cultivateurs sous une forme ou sous une autre.
Les projets pour l'avenir, j'en dirai un mot brièvement. Le
premier ministre a annoncé, dans le discours inaugural j'allais
dire le discours du Trône sans le Trône, ce n'est plus le discours
du Trône que la loi du zonage agricole, et je me reporte au texte,
pour vous montrer à quel point cette loi peut être urgente, au
texte de M. Drummond qui était le ministre de l'Agriculture l'an dernier
à ce temps-ci.
Le 27 mai 1976 il terminait ainsi sa présentation des
crédits: Je pense aussi au phénomène croissant de
spéculation qui rend pratiquement inaccessible à l'agriculture
une importante partie des sols à bon potentiel agricole. A l'appui de
cet énoncé, dans la seule région des basses terres du
Saint-Laurent et de l'Outaouais, un minimum de 839 105 acres de terre agricole,
soit 17,5% de l'ensemble des basses terres, sont sous spéculation
probable et sont la propriété de 27 687 non-producteurs
agricoles.
Je pourrais ajouter que sur ces 839 105 acres il y en a 509 000 qui sont
la propriété de non-résidents québécois. Ce
sont des chiffres de 1975. M. Drummond continue: Loin de se résorber, ce
mouvement spéculatif est à la hausse. En effet, depuis 1966
à 1970 la moyenne annuelle des superficies achetées par des
spéculateurs fut de 27 078 acres alors que de 1970 à 1975 cette
même moyenne passait à 52 353 acres.
Ce que M. Drummond disait en 1976 montre à quel point la loi du
zonage agricole est importante et qu'elle doit être adoptée le
plus rapidement possible. C'est un des projets auxquels le comité
permanent ministériel de l'aménagement travaille. M. Tardif en a
dit quelques mots récemment. Le ministère de l'Agriculture
travaille à la loi de l'utilisation du territoire agricole actuellement,
alors que le ministère des Affaires municipales travaille à la
loi de l'urbanisme puisqu'au fond ces deux choses vont de pair. Le
développement domiciliaire dans les villes, par exemple, vous avez
remarqué, à ce point de vue, il n'y a aucune divergence entre les
conceptions du ministre des Affaires municipales et moi-même puisque les
politiques des Affaires municipales tendent à densifier les villes
plutôt qu'à les étendre, avoir de politiques qui visent
à utiliser davantage le territoire qui est à l'intérieur
du périmètre des villes plutôt qu'à agrandir ce
périmètre. Dans certaines municipalités il y a entre 30%
et 50% du territoire intérieur des villes qui n'est pas
utilisé.
Ainsi on ne gaspillera pas des terres qui au Québec sont en
quantité très limitées. Les discussions au point de vue de
ces projets de loi se font au comité permanent ministériel de
l'aménagement et nous voudrions déposer cette loi le plus
rapidement possible au début de l'automne.
J'ai annoncé à différentes reprises qu'il y aura
d'ici un an les états généraux de l'agro-alimentaire. Je
n'ai pas mis de date et je ne veux pas qu'on procède trop rapidement non
plus, pour que les gens soient préparés à cette
réunion qui
regrouperait toutes les personnes intéressées dans
l'agro-alimentaire. Je pense aux producteurs agricoles d'abord, aux
transformateurs de produits agricoles et aux distributeurs, les agents de
distribution.
Je dois dire que dans mes rencontres je suis très satisfait de
l'approche qu'ont eue jusqu'à maintenant les agents de distribution. Je
pense aux chaînes de distribution qui peuvent donner un fier coup de main
dans le développement de l'agro-alimentaire au Québec. A ce point
de vue, jusqu'à maintenant, du moins verbalement, j'ai eu le sentiment
que ces gens étaient prêts à collaborer au maximum.
Je voudrais éventuellement qu'on regroupe un comité des
différents représentants de ces secteurs et qu'on fixe ensemble
le programme, que ce ne soit pas le ministère qui le fixe seul mais que
les producteurs des industries de transformation, qui représentent
environ 1300 entreprises au Québec, et les distributeurs de produits
alimentaires ensemble, dans un comité restreint, puissent
élaborer un peu quelle formule, quels sont les points qui devraient
être discutés au cours de ces états généraux
de l'agro-alimentaire dans le but du développement agro-alimentaire au
Québec.
L'objectif, comme je l'ai mentionné à plusieurs reprises,
c'est qu'autant que possible les cultivateurs du Québec nourrissent la
population du Québec, c'est-à-dire qu'on puisse produire tous les
aliments dont on a besoin au Québec et même en exporter dans
certains secteurs où on produira un pourcentage plus fort que notre
capacité de consommation.
Il y a également la politique d'achat que nous avons
mentionnée. J'ai obtenu qu'il y ait des représentants du
ministère de l'Agriculture au sein des groupes qui s'occupent de la
politique d'achat pour que le réseau institutionnel, c'est-à-dire
les écoles, les hôpitaux, les prisons utilisent davantage les
produits agricoles du Québec. Je sais que cela ne se fera pas en criant
ciseau, surtout dans les écoles où il y a des concessionnaires,
etc. Cela va prendre peut-être de la conviction au début. Cela ne
sera peut-être pas facile mais en tout cas l'objectif, c'est que ces
institutions utilisent les produits québécois, achètent
les produits québécois, ce qui représenterait quand
même des sommes assez considérables puisque les chiffres de 1975
étaient de $97 millions d'achat en aliments et produits agricoles dans
ces institutions parapubli-ques au Québec.
En fait, je vais terminer là-dessus. J'ai déjà pris
beaucoup plus de temps que je pensais et nous aurons l'occasion, au cours des
heures ou des journées qui vont suivre, de voir dans le détail
des éléments du budget et de répondre aux questions des
membres de la commission concernant les politiques du gouvernement ou du
ministère de l'Agriculture.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. Je
présume que le député de Montmagny-L'Islet a des
commentaires lui aussi au nom de l'Opposition.
Commentaires de l'Opposition M. Julien Giasson
M. Giasson: Oui, M. le Président, quelques commentaires
peut-être au moment de cette introduction. D'abord, il m'a fait plaisir
de connaître le nouveau personnel dont est entouré le ministre. Je
ne les connaissais pas tous. Il y avait des gens qui étaient
déjà en fonction au ministère de l'Agriculture lors de son
arrivée mais, par contre, de nouvelles figures sont venues s'y ajouter.
Je suis assuré que ces gens sont animés de la meilleure
volonté et vont vouloir et savoir guider le ministre, parfois, et le
soutenir dans tous les nombreux programmes qu'il désire instaurer en
agriculture au Québec, selon l'expression de volonté qu'il vient
de manifester.
Je remarque tout de même une chose, une constante. J'ai eu
l'occasion de voir arriver au poste plusieurs ministres de l'Agriculture au
Québec. Tous étaient animés des meilleures intentions. Ils
avaient ce désir véritable d'aider l'agriculteur, de lui
permettre d'accroître, développer sa production et d'avoir une
meilleure rentabilité dans l'exploitation des fermes qu'on a chez
nous.
Le ministre nous a indiqué très sommairement, et je le
comprends puisqu'il s'agit tout simplement d'une ouverture à
l'étude des crédits, les cheminements qu'il entendait suivre dans
différents secteurs de l'activité agricole et
particulièrement en ce qui a trait à la conduite de son
ministère. Cependant, je m'attendais peut-être à plus de
commentaires au plan pratique, c'est-à-dire en fonction des besoins
immédiats des agriculteurs du Québec dans chacune des
spécialités qui sont pratiquées chez nous.
J'aurais aimé beaucoup, entre autres, que le ministre nous
commente les politiques de soutien de revenu en agriculture. Qu'il les commente
davantage. Peut-être aura-t-il l'occasion de le faire lorsque nous
procéderons à l'étude des crédits programme par
programme. J'étais impatient de savoir quelle serait sa position comme
ministre de l'Agriculture du Québec à l'endroit des producteurs
laitiers. Nous savons tous qu'au Québec la production laitière
représente, et de loin, le grand secteur de production, tant par le
nombre de personnes impliquées que par le volume des produits que nous
avons dans cette activité agricole.
On se rappelle tous qu'au cours des récentes années nous
avions subi au Québec ce qui a été appelé à
l'époque la colère verte des cultivateurs. Qu'on se rappelle les
événements de 1974 lorsque la chute des prix du boeuf avait
provoqué des réactions en chaîne au Québec chez les
producteurs laitiers qui étaient durement touchés par ces prix du
boeuf soit dans la vente des veaux ou du bétail dont la production
laitière était terminée et qu'il fallait mettre sur le
marché.
A cette époque, nous avions vu les cultivateurs descendre dans la
rue, c'est le cas de le dire, parcourir les chemins ruraux du Québec et
venir protester avec vigueur.
M. Baril: Dans les villes aussi.
M. Giasson: Oui, mais plus particulièrement dans les
campagnes. Quelques-uns ont retrouvé le chemin des villes, mais
l'immense majorité se tenait dans les chemins de campagne. A ce que je
sache, il n'y a pas eu de marche sur la ville de Montréal, ni sur la
ville de Québec. On a distribué peut-être un petit peu de
lait dans les petites villes du Québec, je le concède. Ces gens
voulaient protester ainsi contre la diminution des prix du boeuf. Ce
n'était pas tellement sur le prix des produits laitiers qu'on
protestait; c'était sur les conséquences que cela apportait chez
les cultivateurs qui avaient connu une situation de prix beaucoup plus forte
lorsqu'ils avaient à vendre des bovins laitiers, que ce soient de jeunes
veaux ou encore des vaches laitières dont la période de
production était terminée.
On se rappelle également la réaction des cultivateurs au
cours de 1976 lorsque, par une décision du gouvernement
fédéral, les quotas de production ont été
diminués.
C'est pourquoi je m'attendais à une réaction de notre
ministre de l'Agriculture, qui depuis quelques mois a été
très volubile à l'extérieur de l'Assemblée
nationale: il s'agit de se rappeler les nombreuses déclarations qu'il a
faites tant dans les régions qu'aux media d'information. Il a
indiqué son point de vue sur une foule de sujets qui touchent
l'agriculture, mais, ce matin, je pense que l'endroit aurait été
privilégié pour entendre le ministre de l'Agriculture nous dire
de quelle façon il entend compenser le manque à gagner des
producteurs laitiers du Québec face aux décisions qui ont
été prises par le gouvernement fédéral en cette
matière, particulièrement par la Commission canadienne du lait.
On se rappelle que, l'an dernier, le gouvernement, à la suite des
mesures de la Commission canadienne du lait et du gouvernement
fédéral, avait décidé d'intervenir à titre
de compensation partielle pour aider les producteurs laitiers au Québec.
Or, à ce que je sache, les modifications qui ont été
apportées à ces politiques laitières en 1977 ne permettent
pas aux producteurs laitiers du Québec de retrouver leur rythme de
croisière au point de vue de la production. Si on a consenti de
légères augmentations dans les volumes à être
produits pour le lait industriel au Canada, cela ne rattrape pas vraiment les
quotas, les contingentements que nous avions au cours de 1975. Je
présume que le ministre de l'Agriculture, qui déplorait si
amèrement la situation qui avait été faite aux producteurs
laitiers du Québec au cours de 1976, a certainement de bonnes mesures
à nous annoncer en matière de soutien du revenu des producteurs
laitiers au Québec je parle toujours des producteurs de lait
industriel puisque les politiques fédérales ne nous
permettent pas un retour à la situation qui prévalait en 1974
comme en 1975. J'attends une bonne nouvelle pour les cultivateurs et les
producteurs de lait de chez nous.
M. Garon: Vous trouvez que les politiques fédérales
ne sont pas bonnes?
M. Giasson: Elles ne sont pas bonnes, c'est vous qui l'avez
déclaré. C'est votre parti qui l'a déclaré au cours
des dernières années. Je n'invente rien. Rappelez-vous les
positions prises par votre collègue du comté de Saguenay au cours
des récentes années. Il serait intéressant que le ministre
actuel relise le journal des Débats et voie les positions soutenues par
le député de Saguenay qui était le porte-parole du Parti
québécois ou de l'Opposition officielle lors du mandat 1973-1976.
J'ai assisté à toutes les commissions parlementaires de
l'agriculture et je me souviens fort bien avec quelle véhémence
et avec quelle force le critique du Parti québécois à
l'époque s'était soulevé contre la faiblesse du ministre
de l'Agriculture du Québec de ne pas savoir convaincre son
collègue au ministère de l'Agriculture fédéral, M.
Whelan, de rétablir la situation dans l'industrie laitière,
surtout en ce qui a trait au lait industriel dont les grandes politiques
relèvent du gouvernement fédéral. Pour ce qui est du lait
nature, c'est le Québec qui oriente pas mal les décisions et les
politiques qui s'appliquent au Québec au point de vue du lait de
consommation.
Il s'agit de se rappeler les positions défendues. Ce n'est pas
moi qui l'invente; c'était la position officielle du Parti
québécois d'alors qui, aujourd'hui, a le pouvoir, a cette
capacité de décider de changer cette agriculture. On se souvient
très bien, au cours des dernières années, lorsqu'on
écoutait les représentants du Parti québécois, que
tout allait mal en agriculture.
J'ai entendu cela non seulement au niveau de la province, je l'ai
entendu des gens de chez nous, de mon comté, qui se disaient les
défenseurs de l'agriculture, à l'époque. De temps à
autre, je me demandais moi-même: Est-ce que vraiment cela va si mal que
cela? Est-ce que vraiment le ministre de l'Agriculture du Québec, au
cours de ces années, n'a pas eu de programme particulier pour aider
l'agriculture, pour soutenir, dans différentes productions, le prix des
produits agricoles, ou soutenir une partie du manque à gagner que nous
vivions dans certaines spécialités agricoles? C'est une
réalité qu'on ne peut pas oublier. C'étaient des
vérités fondamentales, à l'époque. Partant de ces
vérités fondamentales, nous nous attendons que le ministre de
l'agriculture va la transformer, cette agriculture, chez nous, lui redonner
cette efficacité, lui redonner cette rentabilité dont les adeptes
de son parti ont si amèrement déploré l'absence au cours
des années 1970 à 1976.
C'étaient des grandes vérités, on les
répétait avec force. Donc, il va falloir que cela change,
qu'enfin l'agriculture au Québec trouve la place qui doit être
sienne. Le ministre a indiqué tout à l'heure que, du
côté de l'industrie primaire, l'agriculture continuait de tenir
une place qui devait être privilégiée. C'est cela que nous
allons vivre au cours des mois à venir et des années qui vont
suivre.
Qu'est-ce que le ministre de l'Agriculture pense, par exemple, des
changements apportés à la politique laitière
fédérale? De cela, il n'en a pas soufflé mot. Je
présume qu'au cours de l'étude des crédits, on va savoir
sa pensée de ce côté, et surtout, de quelle façon il
entend compléter, par le
programme de soutien qu'il saura imaginer et mettre en place, le manque
à gagner que les nouvelles politiques du fédéral
n'apporteront pas aux producteurs laitiers chez nous.
J'aurais également aimé entendre le ministre de
l'Agriculture sur les améliorations notoires ou les nouveaux programmes
qu'il entend mettre immédiatement en place et en action à
l'endroit des producteurs de bovins de boucherie chez nous. S'il y a un secteur
de la production agricole, au Québec, qui a été
malmené depuis trois ans, entre autres, c'est bien le secteur du boeuf
de boucherie. Nous savons que nous avons au Québec des milliers de
fermes qui s'adonnent à cette spécialité agricole, qui ont
connu une situation que je qualifierais presque d'invivable au cours des
récentes années en dépit de programmes que l'ancien
gouvernement a voulu mettre sur pied, d'abord en tentant la première
expérience en matière de stabilisation de prix aux agriculteurs
dans le secteur de la production bovine, dans le boeuf de boucherie.
On sait que la structure des prix dans le marché libre, qui est
le nôtre, ne s'est pas améliorée en dépit du
programme de stabilisation qui a été instauré et qui a
commencé à donner un meilleur équilibre dans les
coûts d'opération des fermes d'élevage de bovins de
boucherie. Il s'agit d'un secteur où le Québec est largement
déficitaire, un secteur où on pourrait davantage combler des
besoins entre les volumes totaux de boeufs consommés au Québec et
la production que nos éleveurs de bovins font ici chez nous. Donc, c'est
un secteur où nous n'avons pas à dépendre des
marchés en dehors du Québec, loin de là, nous sommes
insuffisants en matière de production, il y a de la place, il y a
beaucoup de place, même, au Québec, dans cette production, pour
ceux qui voudraient s'adonner à la production des bovins de
boucherie.
Je sais que le ministre, au cours des prochaines heures, va nous
indiquer les programmes nouveaux qu'il va amener de ce côté, en
plus de l'amélioration qu'il va savoir apporter aux programmes
existants. C'est du pratique! Ce ne sont pas des états
généraux de l'agro-alimentaire qui vont contribuer dans l'avenir,
dans quelques années à venir, à les modifier. Cela
touchera immédiatement le gars qui est aux prises avec des
problèmes qu'il vit ce matin, qu'il vivait il y a un mois, il y a cinq
mois. C'est cela qui est important, c'est cela, au fond, que le cultivateur du
Québec attend. C'est également ce que les associations, les
différentes associations agricoles, à partir de l'UPA, attendent
dans l'immédiat de l'action gouvernementale, de l'action du ministre de
l'Agriculture: des correctifs immédiats, quittes à
reconnaître le bien-fondé de programmes futurs de projection sur
l'avenir, je le concède. Ce que nos cultivateurs recherchent dans
l'immédiat, ce sont des changements, des programmes nouveaux, des
politiques nouvelles qui vont leur permettre d'obtenir les solutions
immédiates aux problèmes vécus à l'instant
même.
J'avais pensé également que le ministre de l'Agriculture
nous orienterait vers ce que sera son action vis-à-vis des
problèmes vécus par les producteurs de porc. Je sais qu'il nous a
indiqué une volonté vis-à-vis d'une des petites
spécialités dans toute l'industrie porcine, soit celle qui touche
les éleveurs de porcelets ou les naisseurs de porc. Il nous a
indiqué, là encore, qu'un projet de stabilisation des prix, pour
cette catégorie de producteurs de porc, devrait être
instauré au cours de cette année financière. Nous aurons
certainement des questions à lui poser sur la structure nouvelle de ce
programme qui sera mis à la disposition des naisseurs de porc. Mais
qu'en est-il pour ce qui est des producteurs de porc qui font l'engraissement,
vis-à-vis des problèmes du coût des moulées,
vis-à-vis du problème que pose l'achat des grains? Je ne parlerai
pas de protéines, parce que, dans les ingrédients qui servent
à nourrir le porc, il entre très peu de protéines. Nous
parlerons de protéines à l'un des autres programmes agricoles au
Québec, une autre des spécialités agricoles au
Québec. Mais pour ce qui est des producteurs de porc, s'il est
fondé présentement au Québec qu'on veut mettre sur pied un
programme de stabilisation des prix aux naisseurs de porc, je ne conçois
pas qu'on puisse reconnaître la nécessité et le
bien-fondé de ce programme aux naisseurs, sans reconnaître qu'il
est aussi essentiel de mettre le même programme à la disposition
des engrais-seurs, de ceux qui font l'élevage pour la mise en
marché. Le ministre sait fort bien que, depuis environ deux ans, le prix
payé aux éleveurs de porcelets, aux naisseurs, est en fonction,
et de façon directe, du prix de vente au marché du porc
engraissé, du porc fini.
Si le prix du marché au porc engraissé vendu atteint tel
niveau, immédiatement un équilibre se fait dans le prix qu'on va
payer aux éleveurs de porcelet; c'est la structure qui s'est
créée au Québec, depuis environ deux ans. A ce que je
sache, cette structure n'a pas été modifiée. Au moment
où on discute les crédits de l'agriculture, c'est encore la
formule ou le système qui sert à déterminer le prix qui
sera payé aux producteurs de porcelets. S'il y a des changements,
j'aimerais qu'on m'en informe. Mais, récemment encore, j'ai
discuté avec des producteurs de porc, des gros producteurs de mon milieu
et on m'a indiqué qu'il n'y avait pas eu de modification dans
l'établissement du prix à payer aux éleveurs de porcelets,
que ce prix demeurait fonction du prix qu'on payait au marché d'abattage
du porc engraissé. Donc, si le ministre juge qu'il est important, qu'il
est urgent de mettre sur pied un programme de stabilisation pour les naisseurs
de porc, il va reconnaître automatiquement qu'en fonction du
système actuel il devra élargir ce programme de façon
à en faire profiter ou bénéficier ceux qui font
l'engraissement du porc.
Le ministre a fait allusion à la production de chair de volaille
ou de poulet à griller chez nous, en indiquant que le marché
américain, dans ses quantités d'exportations faites au Canada,
cause des préjudices. A ce sujet, tout le monde est d'accord. Plus nous
allons accepter ou subir l'entrée de poulet, que ce soit de poulet
à griller ou de gros coqs, venant du pays voisin, plus il est
sûr
que cela causera des problèmes. Mais au-delà de cela,
présentement, l'un des grands problèmes vécus par les
éleveurs de volaille ne réside pas uniquement dans
l'entrée de poulet américain sur le marché canadien. Nous
vivons, depuis quelques mois, depuis le mois de décembre entre autres,
une augmentation radicale et effrénée du prix des
protéines. Nous savons tous que, s'il est une moulée au
Québec qui nécessite une quantité de protéines
importante, c'est la moulée qui sert à l'alimentation des
volailles. Cela va jusqu'à 20% de teneur dans les moulées qui
servent à engraisser le poulet à griller, comme le gros coq.
Quand on parle de production de dinde, le volume de protéines peut aller
jusqu'à 30% dans la fabrication de ces moulées. Or, dans l'espace
de quelques mois, le prix des protéines a doublé et a
changé considérablement le coût de fabrication des
moulées dans cette spécialité particulière. Comme
cette protéine, au Québec, nous devons l'importer dans à
peu près la totalité des besoins que nous avons, le soya, c'est
bien dommage, le Québec en produit très peu, l'Ontario en produit
très peu et le garde pour la consommation domestique.
Je dis qu'au-delà des problèmes que nous vivons par
l'entrée du poulet venant des Etats-Unis, il va nous falloir, au
Québec, un programme particulier qui va voir à neutraliser les
conséquences de l'augmentation considérable du prix de la
protéine, tout au moins jusqu'au jour où le marché de
cette denrée qu'est la protéine sera rétabli à des
niveaux convenables. Comme je le disais, cela affecte davantage les producteurs
en aviculture à cause du volume de protéine qui entrent dans la
fabrication de ces moulées. J'attendrai également plus que les
réponses que le ministre m'a données en Chambre récemment,
rejetant la faute entièrement sur l'entrée du poulet
américain. Même si nous n'avions pas l'entrée de poulets
américains, si nous étions limités au contingentement des
produits en aviculture...
M. Garon: Des quotas.
M. Giasson: Des quotas, oui. C'est plus facile à dire et
tout le monde comprend cela, du moins en production. Même si nous
étions limités à cela, avec une entrée très
minime de poulets venant du pays voisin, nous aurions à vivre les
conséquences de l'augmentation radicale du coût de la
protéine. Je crois que devant des situations sur lesquelles nous n'avons
pas de contrôle, ici au Québec, parce que nous ne produisons pas
cette protéine, il va falloir instaurer un programme, au
ministère de l'Agriculture, pour combler les manques à gagner
pour les années où nous devrons subir des modifications de prix
très importantes.
Un autre secteur où nous sommes loin d'être autosuffisants,
au Québec, est celui de la production maraîchère. Là
encore je m'attendais que le ministre de l'Agriculture nous donne un
aperçu sur les programmes nouveaux qu'il entend instaurer afin d'aider
ceux qui s'adonnent à la production maraîchère chez nous de
manière, d'abord, à convaincre davantage de gens à
s'adonner à cette production. Je n'ai pas vu les chiffres, tout
ré- cemment, mais je pense que si nous produisons, au Québec
selon les derniers chiffres que j'ai vus 25% des produits
maraîchers qui se consomment au Québec, c'est déjà
beau. J'aurais également aimé entendre le ministre de
l'Agriculture nous répéter, ce qu'il a dit à maintes
occasions, que seule l'indépendance du Québec était la
véritable solution à tous les problèmes vécus par
les agriculteurs du Québec. J'ai remarqué que récemment il
s'est gardé de répéter cette grande vérité
que l'indépendance était la seule solution, la véritable
solution à tous les problèmes vécus au Québec. Je
sais qu'il ne le croit pas. Il le déclare, mais il ne le croit pas. Le
ministre est trop intelligent, il voit trop ce qui se passe dans le monde.
Lorsqu'il réalise qu'un pays aussi puissant que les Etats-Unis, qui a
son indépendance depuis fort longtemps, est obligé encore de
composer, est obligé de bâtir des programmes de soutien pour une
foule de spécialités agricoles aux Etats-Unis, lorsqu'on sait que
les Etats-Unis sont peut-être le pays qui consacre les sommes les plus
volumineuses au soutien de l'agriculture, le ministre est assez sérieux
pour savoir que l'indépendance n'est pas une panacée pour
l'agriculture. Cela peut contribuer, je le concède.
Des Voix: Ah! Ah!
M. Giasson: Oui, cela peut contribuer. Je ne nie pas la
vérité, cela peut contribuer dans des champs de production
où nous n'avons pas atteint l'autosuffisance, mais l'indépendance
ne viendra pas régler les problèmes du producteur laitier.
M. Baril: Une chance que vous vous...
M. Giasson: II ne faut pas se faire d'illusions! Quand nous
sommes dans une production largement excédentaire, le Québec
indépendant doit compter sur des marchés extérieurs pour
écouler ses surplus. Mais quand on compte sur des marchés
extérieurs, ce n'est pas l'indépendance.
M. Ouellette: Oh!
M. Giasson: Ou il va soutenir davantage par
l'indépendance...
M. Ouellette: Politique.
M. Giasson: Politique? C'est politique,
l'indépendance.
M. Ouellette: Oui, et cela peut être économique.
M. Giasson: II n'y a pas de gens qui ont parlé plus de ce
thème que les gens qu'on retrouve de ce côté-là de
la table. Quand cela fait son affaire, on en parle; quand on arrive dans la
réalité et les conséquences directes, on dit: Politique?
Il ne faut pas parler de cela.
M. Ouellette: Ce n'est pas ce qu'on dit. Les protéines que
nous utilisons pour la fabrication de moulées en agriculture, nous
allons les
chercher aux Etats-Unis. Les Etats-Unis sont un grand producteur de
protéines dans le monde. Non seulement ils alimentent les besoins du
pays chez eux, mais ils exportent beaucoup au Canada, ils exportent dans
d'autres pays. Ils ont même été, en deux occasions au cours
des récentes années, de gros exportateurs de protéines
pour les pays derrière le rideau de fer. Le marché russe est venu
acheter aux Etats-Unis, en deux années différentes, des
quantités énormes de protéines, à un point tel que
cela a déséquilibré toute la structure des prix de la
protéine en Amérique du Nord.
M. Giasson: Je pense que, oui, c'est politique, vous êtes
les premiers à le reconnaître, mais il faut replacer les choses
dans leur véritable dimension. Dans l'hypothèse d'une
indépendance, nous vivrons les mêmes problèmes que les pays
qui doivent écouler des excédents de production en agriculture
sur des marchés extérieurs. On devra payer un prix de soutien
à l'endroit de produits qu'on doit exporter. Il ne faut pas se raconter
d'histoires. Je pense qu'il faut voir les choses dans une dimension
véritable. C'est pourquoi le ministre s'est gardé, au cours des
récentes semaines, de trop mettre l'accent sur l'indépendance
comme étant la véritable panacée; il commence à
découvrir, à l'intérieur de son ministère
puis, il va découvrir encore beaucoup de choses que des solutions
faciles, des réponses à tous les problèmes, cela n'existe
pas, on n'a pas cela dans le revers du veston. Rien n'est facile en
agriculture. Quel que soit le statut politique qu'un pays ou qu'une province
peut se donner, l'agriculture ne comporte rien de facile et ce sera toujours
ainsi, parce que je ne connais pas de champ de production qui dépende
autant de conditions sur lesquelles l'homme n'a pas de contrôle
absolu.
Qu'on pense aux conditions climatiques. Il va toujours se produire, en
agriculture, des conditions climatiques que l'homme n'a pas prévues et
qu'il devra subir au fil des ans, au fur et à mesure que cela peut se
produire. C'est pourquoi je dis qu'en agriculture tous les pays du monde,
principalement les pays les plus industrialisés, auront à
concevoir, au fil du temps, selon l'évolution dans chacune des
productions, des programmes nouveaux pour tenter de compenser les changements
qui peuvent arriver constamment sans qu'on le veuille.
Donc, du côté de la production maraîchère
où nous sommes nettement insuffisants, quels sont les programmes que le
ministre entend instaurer à brève échéance afin de
rattraper graduellement cela ne peut pas se faire dans un an, je le
sais, nous avons tellement de retard dans ce secteur notre
capacité de nous autosuffire? Le ministre a fait allusion
également à notre dépendance en matière de
céréales. C'est vrai que le Québec traditionnellement a
toujours dû compter sur l'importation de ses céréales. Je
ne dis pas qu'on ne doit pas continuer à mener des recherches
c'est même nécessaire pour tenter dans la mesure du
possible de s'autosuffire, mais il reste qu'en dépit de tous ces efforts
et en dépit des années consacrées de ce côté,
nous devrons dépendre, si nous voulons maintenir et accroître nos
productions, de marchés que nous ne contrôlons pas à
l'intérieur du Québec. Il faudra avoir même des programmes
pour assurer un meilleur approvisionnement aux cultivateurs du Québec.
Tout à l'heure, lorsque le ministre a abordé le mandat, les
rôles ou les pouvoirs qu'on voulait confier à SOQUIA, je
m'attendais qu'il élabore davantage sur cela. Nous aurons l'occasion d'y
revenir lorsqu'on examinera plus en profondeur les champs d'activité
dont le ministre veut privilégier SOQUIA.
Il y a un autre phénomène qu'on vit au Québec,
cette année. Le ministre a fait largement état, avec beaucoup de
publicité, de la dépolitisation du conseil d'administration de la
raffinerie de sucre de Saint-Hilaire. Face à toute cette
publicité, on pouvait s'attendre que c'était un élan
nouveau que la production de betteraves allait connaître chez nous. Donc,
je m'attendais, devant ces changements si importants et la
dépolitisation de l'administration, à découvrir que la
production de betterave allait s'accroître, et de façon
très importante au Québec. J'ai dit: Devant ce renouveau que
connaît la raffinerie, les ensemencements au Québec vont augmenter
et peut-être doubler.
Or, selon les nouvelles que nous avons le ministre nous le dira
si nous sommes mal informés au lieu de s'accroître, la
production de betterave va décroître pour l'année 1977.
Cette production nous est propre et la province a investi beaucoup d'argent
pour la soutenir pendant les années où la raffinerie a connu des
déficits et on sait que ces années sont nombreuses depuis
l'existence de la raffinerie. Or, nous découvrons, selon les nouvelles
qui nous sont rapportées, que la production de betteraves au
Québec, en dépit des changements, des nouvelles
négociations qui se sont faites en 1977, au lieu de s'accroître,
va décliner de façon considérable.
On parle d'une diminution de 50% des ensemencements, en superficie. Ce
n'est peut-être pas vrai, le ministre va nous le dire au cours de
l'étude des crédits. Il va rétablir la
vérité et nous dire ce que seront les volumes ensemencés,
l'acrage ensemencé cette année, et nous indiquer de quelle
façon les changements qu'il a voulu apporter par un programme de
dépolitisation a pu contribuer à cette situation qu'on vivra en
matière de production.
Le ministre a indiqué également, au tout début de
son intervention, qu'il fallait dépolitiser l'agriculture et que
c'était très important. M. le Président,
sincèrement je crois qu'il faut dépolitiser l'agriculture parce
que, traditionnellement, elle a été trop politisée. C'est
peut-être ce qu'on peut reprocher le plus à ceux qui ont
dirigé les destinées du Québec, particulièrement
ceux du ministère de l'Agriculture, d'apporter trop souvent des
éléments politiques à l'intérieur. Chaque fois
qu'il se posait des actions qui avaient comme fin de vouloir aider
l'agriculteur, on a eu tendance à donner une dimension politique,
à vouloir mettre en évidence les bienfaits de tel gouvernement
qui se penchait sur le sort de l'agriculture.
Oui, j'admets qu'il faut dépolitiser dans la me-
sure du possible, mais tout en dépolitisant il ne faudrait pas
nier des réalités. Lorsqu'on sent que le cultivateur, quelle que
soit la spécialité dans laquelle il oeuvre, vit des
problèmes aigus et qu'on réalise qu'il n'y a pas d'autres
solutions que celles qui pourraient émarger ou venir d'une action
gouvernementale, alors il va falloir en parler, sur le plan politique, au
ministre de l'Agriculture comme au gouvernement qui dirigée les
destinées de notre province. On ne peut pas les accuser de vouloir
politiser l'agriculture quand on sent que l'action ne peut venir d'ailleurs que
du niveau gouvernemental.
C'est une réalité que le ministre connaît aussi bien
que moi. Mais le ministre des Finances est toujours à l'intérieur
du gouvernement, du même gouvernement que celui dans lequel vous oeuvrez.
C'est pour cela que j'ai dit au ministre de l'Agriculture que je n'avais pas
aimé qu'il ne fasse pas appel au premier ministre pour retenir le bras
du ministre des Finances qui, avec son couteau, est venu couper la bonne
nouvelle que les cultivateurs avaient apprise par le dépôt des
crédits en matière de crédits agricoles.
Le livre des crédits indiquait aux cultivateurs du Québec
qu'on mettrait des sommes additionnelles à la disposition du
crédit agricole par rapport à l'année
précédente. Le ministre des Finances, dans un geste personnel, et
devant l'incapacité du ministre de l'Agriculture de le convaincre de ne
pas toucher aux crédits réservés à l'Office du
crédit agricole, est venu amputer les crédits, annoncés
dans le livre bleu, de $15 millions.
Je sais que le ministre va nous dire que ces $15 millions, il les
affectera à un autre secteur de son ministère, je m'y attends,
pour que les chiffres ne soient pas déséquilibrés. Les $15
millions qu'on enlève au crédit agricole, on les affectera
à tel champ d'activités dans l'agriculture. On va demander
oui, mais cela regardait bien la nouvelle aux cultivateurs aux
institutions financières de venir combler le retrait des $15 millions
qui étaient prévus dans le livre bleu. Cela fera l'objet de nos
discussions au cours de l'étude des crédits.
On a dit également que les cultivateurs du Québec avaient
été une classe charriée. Il y a là un
élément de vérité encore. Je crois qu'une des
grandes faiblesses de l'agriculture au Québec est le manque
d'information et de compréhension de la part des autres milieux en
dehors de l'agriculture. Je crois que les consommateurs au Québec n'ont
jamais compris la dimension réelle des problèmes vécus
à différentes époques par les cultivateurs du
Québec. Il s'agit de discuter avec des gens qui ne sont pas en
agriculture, d'entendre les propos et commentaires qu'ils tiennent à
l'endroit des facilités ou du bonheur de l'homme des champs pour
constater qu'en dehors de l'agriculture il y a très peu de monde qui
connaisse la situation ou les problèmes vécus.
S'il y a eu charriage, il est venu des secteurs autres que l'agriculture
qui ont toujours prétendu que l'agriculture au Québec
bénéficiait d'avantages que les autres secteurs de
l'économie n'avaient pas. Quand on a avancé ces
prétentions, on ne connaissait pas vraiment ce qu'était
l'agriculture au Québec.
Celui qui s'est tenu près du cultivateur, qui a mis un peu la
main à ce secteur a pu à chaque année comprendre quels
étaient les problèmes vécus par les cultivateurs, quel que
soit le champ de production dans lequel il était.
Quand le ministre a parlé de donner l'information, oui il faut
donner de l'information aux cultivateurs, davantage peut-être. Il faut
mettre plus d'accent, quoique je trouve que le ministère de
l'Agriculture, dans le passé, n'a pas fait défaut de fournir de
l'information, non seulement l'information écrite qui doit être
publiée mais il a donné également beaucoup d'informations
par son équipe de fonctionnaires dans les régions.
Mais, s'il faut faire de l'information, il faut la faire
également vis-à-vis des autres classes de la
société québécoise. Il faut les amener à
découvrir davantage ce qu'est l'agriculture québécoise et
quels sont véritablement les problèmes que chaque
spécialité agricole vit chez nous. C'est là qu'il va
falloir faire porter notre information chez nous, peut-être davantage que
du côté du cultivateur lui-même.
Je ne voudrais pas prendre trop de temps puisque nous aurons l'occasion
de revenir et je voudrais laisser au représentant de l'Union Nationale
la possibilité de faire ses propres commentaires.
Du côté des programmes possibles de stabilisation du prix
des produits agricoles, après avoir entendu les propos ou les
commentaires tenus par le Parti québécois depuis environ deux ans
et particulièrement au cours de la dernière campagne, j'avais
compris qu'une volonté très ferme irait dans le sens de la mise
sur pied d'un programme de stabilisation dans toutes les productions, sauf
peut-être la production du lait industriel, étant donné la
présence très forte du gouvernement fédéral dans ce
champ d'activité. Mais tel n'apparaît pas être le cas.
Comme je l'ai indiqué, les producteurs de chair de volaille ne
bénéficieront pas, je crois, au cours de l'année 1977 d'un
programme de stabilisation. Les producteurs de porc n'auront pas ces avantages,
je parle des producteurs engraisseurs.
J'aimerais savoir du ministre les raisons pour lesquelles, devant les
situations vécues par ces deux spécialités, il ne croit
pas bon d'instaurer des programmes de stabilisation des prix. Je sais
également que son parti a soutenu très fortement le grand
principe mis de l'avant pas l'UPA, soit celui de structurer un programme de
prix pour toutes les productions agricoles de façon à mettre
à la disposition du cultivateur une parité de revenu avec celui
de l'ouvrier spécialisé au Québec. Je m'attendais que dans
ses propos d'ouverture le ministre nous donnerait de bonnes indications sur la
façon dont il entend procéder pour atteindre ce niveau ou cette
situation qui est recherchée par les cultivateurs et qui est fortement
soutenue par les associations agricoles, principalement par l'UPA. Là
encore, mystère. Le ministre n'a pas cru bon d'aborder cela. Sans doute
nous indiquera-t-il
un peu plus tard de quelle façon il entend concevoir, bâtir
et structurer un programme à l'endroit de chaque production, chaque
spécialité agricole qui va permettre à ceux qui pratiquent
ces spécialités d'atteindre cette parité de revenu avec
l'ouvrier spécialisé.
Le ministre a touché également d'autres secteurs. Je ne
ferai pas le tour d'horizon complet parce que nous pourrons, lorsque nous
allons procéder à l'intérieur des programmes, revenir sur
ces questions. Il a parlé de programmes de main-d'oeuvre agricole, de
ramener l'assisté social travailler sur des fermes. Le ministre a
dû sans doute examiner l'expérience que nous avons vécue
dans ce secteur d'activité. Puisque l'expérience, le moins que
l'on puisse dire, n'est pas concluante, il y a certainement des
éléments nouveaux qui vont être instaurés à
ce programme. Nous allons découvrir cela dans nos discussions.
Le ministre nous a dit qu'il a entrepris la visite des régions.
Là encore, j'aurais cru, suite à ces examens de situations
vécues dans chacune des régions agricoles du Québec, que
le ministre nous indiquerait une orientation qu'il voudrait donner selon les
régions. Compte tenu du climat qu'on retrouve dans chacune des
régions, compte tenu du type de sol que nous avons dans ces
régions, j'aurais pensé que le ministre nous indiquerait quelles
sont les vocations particulières qu'il veut donner à chacune des
régions en tenant compte des conditions du milieu. J'imagine que cela
viendra dans un prochain temps.
Par contre, il faut reconnaître que la volonté du ministre
de l'Agriculture d'instaurer un programme de stabilisation pour les producteurs
de pommes de terre est une excellente nouvelle. Il ne s'agit peut-être
pas d'une production aussi importante au Québec que d'autres que nous
connaissons mais, par contre, c'est un secteur où nous sommes encore
nettement insuffisants. Lorsqu'on regarde les volumes de consommation, il me
paraît qu'un bon programme de stabilisation des prix dans le secteur de
la pomme de terre est une innovation qui était nécessaire. Le
ministre peut être assuré que là-dessus, nous allons
l'appuyer avec force et vigueur puisque nous allons permettre à cette
spécialité de se développer. Un programme de stabilisation
bien conçu et qui serait nettement suffisant va permettre
d'accroître la production de la pomme de terre au Québec et nous
conduire graduellement, avec le temps, vers un programme d'autosuffisance.
Un autre secteur que le ministre n'a pas abordé, qui a fait
couler beaucoup d'encre et provoqué beaucoup de commentaires au cours
des dernières années est celui de l'inspection des viandes au
Québec. L'inspection des viandes, problème des petits abattoirs,
que de choses n'ont pas été dites à ce sujet! Or, à
son arrivée au ministère, le ministre a créé
beaucoup d'espoir. Il avait dans sa poche la solution définitive aux
problèmes de la vie des petits abattoirs chez nous. La recherche
particulière d'appliquer un programme d'inspection obligatoire des
viandes, la volonté d'avoir une formule qui fasse qu'une viande
"approuvée Québec" ait autant de mérite et de
qualité qu'une viande "inspectée Canada", le ministre n'a pas
abordé cela. C'étaient des mots d'ouverture mais, en cours de
route, le ministre sait fort bien que nous allons pénétrer
davantage ce champ d'activité.
Un autre secteur que le ministre a abordé sur lequel il n'a pas
détaillé tellement est celui des problèmes que nous vivons
malgré tout à l'intérieur de la Régie des
marchés agricoles, peut-être pas dans toutes les productions de
façon égale, mais dans certaines productions. Là encore il
va falloir examiner cette situation plus en profondeur. Il y a également
d'autres secteurs. Le programme du Parti québécois nous avait
indiqué une volonté très ferme de mettre sur pied
immédiatement un programme de commercialisation des grains de provende,
de capacité d'entreposage pour assurer les approvisionnements de
façon certaine, en tout temps, aux cultivateurs du Québec. Il ne
nous a pas indiqué à quel moment il va instaurer ce nouveau
système. Est-ce que ce sera le ministère qui va l'instaurer
lui-même? Est-ce un champ d'activité qu'il va vouloir confier
à SOQUIA? Là encore, lorsque nous allons examiner de plus
près le rôle que devra assumer SOQUIA chez nous, nous allons voir
de quelle façon ces programmes peuvent s'instaurer.
Enfin, M. le Président, je ne ferai pas le tour de tous les
éléments sur lesquels le ministre a parlé quelque peu;
nous y reviendrons au cours de l'étude des programmes. Je voudrais
permettre à mon collègue de l'Union Nationale, porte-parole de
son parti en matière agricole, de faire son exposé d'ouverture.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Huntingdon.
M. Claude Dubois
M. Dubois: Merci, M. le Président. J'aurais aussi quelques
remarques préliminaires et quelques suggestions à faire à
M. le ministre. J'espère que vous trouverez mes suggestions
constructives et que vous serez bien attentif à ces remarques.
Le ministère de l'Agriculture, et j'ajouterai
immédiatement de l'alimentation puisque dans le programme de
l'Union Nationale on mentionne qu'on devrait appeler ce ministère celui
de l'Agriculture et de l'Alimentation a un rôle des plus
importants à remplir et aussi un des plus complexes. Il n'y a pas de
domaine dans notre économie qui soit aussi imprévisible et
trompeur que la production agricole. Les experts les plus réputés
perdent souvent leur latin devant les incertitudes de la nature et aussi devant
les caprices et les contraintes de toutes sortes que connaissent nos
agriculteurs. Il n'en reste pas moins qu'un équilibre doit être
maintenu d'une façon aussi précise que possible entre la
production d'une part et la consommation, ainsi que la demande
extérieure d'autre part. Le ministère a cette
responsabilité mais il a aussi, en parallèle, le devoir de
respecter les individus ainsi que l'entrepreneur privé, base de toute
motivation et de toute forme de productivité. Les interventions
gouvernementales doivent
se faire d'une façon très respectueuse et
compréhensive vis-à-vis des professionnels agricoles.
J'en profite, à ce moment-ci, pour suggérer au ministre
que l'on veuille bien essayer de favoriser l'intégration dans les
organismes de notre ministère de producteurs agricoles, de gens du
milieu, des personnes ayant des connaissances pratiques. Présentement,
les gens les plus intéressés dans ce domaine n'ont même pas
voix au chapitre. Je trouve cette situation absolument inconcevable et
même révoltante. La compétence en agriculture ne s'acquiert
malheureusement pas entre quatre murs. A titre d'exemple frappant, je pourrais
citer le cas de plusieurs grosses corporations américaines qui ont
appris à leurs dépens et après des pertes
financières exorbitantes que l'agriculture, ce n'est pas l'affaire de
n'importe qui, que ce n'est pas de la production à la chaîne et
que les prévisions de récoltes ne se calculent pas sur un
"computer".
J'aimerais plutôt formuler un souhait et même demander au
ministre de freiner l'établissement des plans conjoints, de ne pas
sanctionner des plans qui ne reçoivent pas l'approbation de la
majorité en acres et en volume de production. Je suggérerais
aussi au ministre de bien vouloir reconnaître les
fédérations, les associations, les offices et les syndicats de
producteurs, tous à titre de corps représentatifs et autonomes
ayant un droit individuel de représentation.
J'aimerais maintenant passer de l'agriculture à
l'agro-alimentaire, un autre sujet des plus vitaux, sinon le plus vital puisque
les horizons dans ce domaine vont aussi loin que la tablette du consommateur le
plus éloigné du monde. La population mondiale, toujours
croissante, les pressions économiques, l'envahissement des terres
fertiles par la croissance des villes, la concurrence entre l'homme et l'animal
pour les protéines disponibles et la pollution des eaux sont tous des
facteurs sur lesquels il y a de quoi réfléchir. Incidemment,
à titre de Canadiens, à titre de citoyens d'un pays hautement
favorisé et techniquement très avancé, nous avons une
responsabilité vis-à-vis des peuples défavorisés du
globe, des peuples qui ont faim. Nous avons aussi à la portée de
la main un immense potentiel, un marché sans borne et des
opportunités comme peu de pays en ont. Les perspectives sont telles
qu'il n'y a plus de marge pour des erreurs. Il nous faut immédiatement
nous adapter et réagir aux caprices et aux tendances dans
l'alimentation.
Il nous faut ajuster notre système agroalimentaire en marge des
tendances à venir. Le choix des aliments par le consommateur sera
certainement influencé par les diverses contraintes économiques.
La capacité financière de chacun des consommateurs aura un effet
déterminant. Il est prévu qu'en 1983 un repas sur deux sera pris
à l'extérieur. On prévoit aussi qu'en 1990, 90% de tous
les repas servis seront des mets de commodité. Ces indications nous
laissent entrevoir des changements de mode de consommation auxquels le
Québec devra s'adapter à temps s'il veut préserver son
économie agricole et surtout l'améliorer.
En passant, j'aimerais mentionner que le
Québec accuse un retard important dans l'exploitation de
l'agro-alimentaire. Nous n'avons aucune usine de déshydratation. Je
voudrais faire remarquer que nous employons ici au Québec une
très grande quantité d'oignons déshydratés,
carottes et autres, enfin tout ce que l'on retrouve dans les soupes Lipton et
dans plusieurs autres produits en conserve. Nous avons une toute petite usine
de congélation, ici au Québec, qui ne suffit absolument pas aux
besoins. Si je touche au secteur des tomates, la mise en conserve au
Québec ne représente même pas 1% de notre besoin. Pourtant,
nous avons de très belles terres drainées et propices à
cette culture, surtout dans les régions au sud de Montréal.
J'en profite pour indiquer au ministre que toutes les conserveries de
tomates ont disparu en 1959, exactement un an après que la régie
sanctionnait le plan conjoint des producteurs de tomates mis sur pied par
l'Union catholique des cultivateurs, que l'on connaît aujourd'hui comme
l'UPA. En ce qui a trait aux choux-fleurs, brocolis, choux de Bruxelles,
rhubarbe, nous n'avons rien de "made in Québec" en ce qui a trait
à la congélation.
M. le ministre, pour faire suite aux voeux pieux du Parti
québécois, lequel préconisait un bel effort
d'autosuffisance, je crois que vous avez ici de quoi remplir quelques
promesses. L'autosuffi-sance, M. le ministre, pourrait se pratiquer dans
plusieurs autres domaines.
Remarquez bien que je ne vous dis pas qu'elle est toujours possible,
mais tout de même, je pourrais citer la pomme de terre, où on a
52% seulement d'autosuffisance; les fraises, 30%; la framboise, 30%; les
asperges, 10%; la laitue, 19% c'est un légume qui est assez
difficile quand même, hors saison les épinards, 14%; les
tomates fraîches et en conserves correspondent à 5,7% de notre
besoin ici au Québec. Il y a aussi certains légumes de sources
locales, seulement en saison, qui pourraient être cultivés en
serres, durant les périodes hors saison. Je ne manquerai pas de revenir
là-dessus, lors de l'étude des programmes.
Il y aurait de quoi vous entretenir longuement dans le domaine des
viandes et des céréales, mais je vais seulement m'arrêter
un instant sur les viandes rouges. Le ministère pourrait s'interroger
sur des moyens incitatifs à prendre pour que l'élevage du boeuf
progresse un peu plus rapidement ici au Québec. C'est peut-être
une préoccupation de votre ministère, présentement, mais
je veux seulement ajouter que nous avons importé, en 1975, plus de un
demi-milliard de livres de boeuf, ce qui représente à peu
près 80% de notre consommation.
Au sujet de la mise en marché, une fois de plus, nous tirons de
l'arrière. Et toujours dans le cadre de l'autosuffisance, la production
doit passer par cette étape. Le "merchandising" ce n'est pas pour nous
autres, il n'y a que les pomiculteurs qui ont su s'adapter aux besoins du
marché et de la concurrence. Je peux vous dire par expérience
personnelle que les courtiers de Londres n'ont aucun désir d'acheter les
oignons du Québec. Les
causes: mauvaise présentation du produit, qualité
inconstante, mauvais classement et mauvaise conservation. Les mêmes
qualificatifs s'appliquent à plusieurs de nos productions.
Ces lacunes dans notre service de mise en marché sont très
directement liées à notre manque d'usines de transformation. Il
n'existe présentement aucun débouché pour la production
maraîchère de deuxième et troisième classes. Par
conséquent, les producteurs n'ont d'autre choix que d'essayer de les
écouler sur les marchés de légumes frais, ce qui participe
automatiquement à créer une mauvaise réputation chez nos
producteurs et aussi à pousser le consommateur vers l'achat de produits
de meilleure qualité et de meilleure apparence. De là le
résultat que l'on connaît aujourd'hui, c'est-à-dire la
préférence qu'ils ont pour des produits ontariens et
américains. En plus de régler un problème aigu ici, nous
pourrions ouvrir un nouveau marché d'exportation si nous avions plus
d'usines de transformation.
M. le ministre, la majorité des entreprises dynamiques en
horticulture au Québec sont exploitées par des
indépendants. Ces indépendants forment ce qu'on appelle la
crème de nos producteurs. Ces gens doivent avoir les mêmes
privilèges que les sociétés ou les groupements ou les
coopératives. Ce sont ces agriculteurs qui paient les impôts, ce
sont ceux-là qui participent le plus avantageusement à notre
économie. Pour être plus précis, ils sont les plus
rentables pour le fisc.
Je déplore fortement que plusieurs politiques socialistes du
ministère de l'Agriculture soient préjudiciables au
développement de ce que vous appelez, au ministère, les
individualistes. Certaines subventions sur des équipements,
l'entreposage, le séchage, l'emballage et la mise en marché de
légumes ne sont pas disponibles pour eux. Une telle
ségrégation n'est pas conciliable avec notre désir
d'autosuffisance et notre démocratie.
M. le ministre, je n'ai que quelques remarques additionnelles que je
crois utiles. Je voudrais dire qu'à mon sens il serait inutile de tenter
d'augmenter la population active agricole au Québec, mais plutôt
de s'efforcer constamment de conserver nos meilleurs éléments, en
dirigeant nos politiques agricoles vers ces gens. Les agriculteurs doivent
être sur le même palier que les industriels. Les qualités et
la compétence n'en sont pas moindres. La colonisation, c'est chose du
passé. La rentabilité, la productivité et
l'efficacité font partie du vocabulaire de tous les jours. Le fermier
est un gestionnaire indispensable.
Afin de s'assurer d'une relève mieux préparée et
encore plus dynamique, il serait impératif que l'enseignement agricole
soit repensé et qu'il soit en concordance avec la future technologie.
Par respect pour eux et pour mieux les désigner, j'aimerais
suggérer au ministre que, par définition, l'UPA puisse
s'interpréter l'Union des professionnels agricoles. Etant donné
que j'aurai, tout au long de l'examen des crédits, le loisir
d'intervenir sur différents sujets, et entre autres, sur un qui
représente 40% de nos revenus agricoles au Québec, je dois dire,
l'industrie laitière, je conclus immédiatement.
M. le ministre, vous qui assumez la tutelle de l'agriculture dans notre
belle province, située dans un Canada dont nous sommes tous orgueilleux
d'en être les citoyens, il vous incombe le devoir d'adapter vos
politiques ministérielles aux exigences de demain, d'être le
promoteur dynamique auquel les producteurs sont en droit de s'attendre et de
permettre aux professionnels agricoles de continuer à jouer le
rôle prépondérant qui leur revient dans notre
société. Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre, vous avez droit
de réplique.
Réplique du ministre
M. Garon: Je serai bref parce qu'on aura l'occasion, j'imagine,
de voir en détail les points soulevés par les critiques agricoles
tant du Parti libéral que de l'Union Nationale. J'aimerais
peut-être commencer par les remarques qu'a faites le député
de Huntingdon.
D'abord, il soulignait que le programme de l'Union Nationale parlait
d'un ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Dans les faits,
l'orientation que nous avons prise, et qui était déjà
prise, d'ailleurs, par le ministère avant qu'on arrive, c'est que le
ministère devienne, de plus en plus, le ministère de
l'agriculture et de l'alimentation sans que le nom soit mentionné
formellement. Au fond, quand on parle du développement agroalimentaire,
dans les faits, le ministère devient et deviendra de plus en plus
rapidement le ministère de l'agriculture et de l'alimentation.
Deuxièmement, vous avez parlé des gens du milieu qui n'ont
pas leur mot à dire dans le ministère. Je ne voudrais pas porter
de jugement sur le passé, mais je peux dire que d'une façon
générale les fonctionnaires du ministère sont
préoccupés du développement de l'agriculture. Ils sont
aussi préoccupés des problèmes des cultivateurs. Je fais
actuellement des visites régionales. D'ailleurs, à plusieurs
reprises, à différents endroits où je suis allé, on
m'a dit que j'étais le premier ministre de l'Agriculture qui allait
visiter les différents secteurs du ministère de l'Agriculture.
J'ai été, par exemple, au Centre d'insémination
artificielle de Saint-Hyacinthe, où on m'a dit que j'étais le
premier ministre de l'Agriculture qui allait là. Dans différentes
régions, on m'a dit que cela faisait huit ans, dix ans ou douze ans
qu'on n'avait pas vu un ministre de l'Agriculture dans la région visiter
les gens du ministère de l'Agriculture.
Je pense avoir indiqué de façon très marquée
ma préoccupation d'être le plus près possible des gens du
milieu. J'ai aussi indiqué, d'une façon générale,
que je souhaitais que les cultivateurs soient reçus, aux
différents paliers du ministère de l'Agriculture, par les
fonctionnaires de la même façon que s'ils recevaient leur propre
père qui aurait des problèmes, c'est-à-dire avec le plus
de cordialité possible, d'être les plus recevants possible pour
les cultivateurs qui viennent demander des informations, chercher des formules
ou se faire expliquer des programmes.
Vous avez également parlé des plans
conjoints. Le principe est clair, je l'ai mentionné à
quelques reprises. Cela n'a peut-être pas eu la diffusion que j'aurais
souhaitée, mais je pense que le principe des plans conjoints est
inattaquable. Les producteurs ont le droit de se regrouper pour négocier
leurs prix ou pour discuter la mise en marché de leurs produits. Les
ouvriers ont le droit de se réunir pour négocier leurs conditions
de travail avec les entreprises; de la même façon, les producteurs
le peuvent, eux qui sont isolés, qui sont seuls, surtout quand on tient
compte qu'un petit surplus de production peut faire s'écrouler les prix
très facilement. 5% de surplus de production peuvent jeter les prix
agricoles à terre. Les producteurs agricoles doivent avoir la
possibilité de se grouper pour négocier leurs prix et
négocier la mise en marché.
Quand j'ai vu les attaques faites à Ottawa quand on a
discuté le bill C-42, j'ai été estomaqué. Les
arguments qu'on a employés contre les plans conjoints ont
été ceux qu'on employait en 1870, en 1880 et 1890 contre les
syndicats ouvriers alors qu'on disait que former un syndicat dans le temps,
à la fin du XIXe siècle c'était une entrave au_
commerce.
Et c'est là-dessus que les premiers syndicats ont
été dissous, parce que les tribunaux considéraient
à ce moment qu'ils constituaient une entrave au commerce. Je pense
qu'aujourd'hui il n'y a plus personne qui met en doute le pouvoir ou le droit
des ouvriers de se regrouper pour négocier leur salaire. Surtout dans
des périodes où il y a le plus de chômage, on verrait des
diminutions de salaire considérables et des crises de même nature
que celle que je n'ai pas connues, mais que d'autres ont connues, dans les
années trente, si les ouvriers n'avaient pas la possibilité de se
grouper en syndicat.
De la même façon je pense que les producteurs ont le droit
de se regrouper en plans conjoints. Je pense par ailleurs qu'il faut autant que
possible qu'il y ait plus d'unité dans ces plans conjoints et que les
modalités d'application des plans conjoints doivent varier d'un type de
production à l'autre, puisque la mise en marché varie d'un
produit à l'autre, n'est pas la même. Souvent des producteurs qui
n'ont pas plusieurs clients évidemment quand vous vendez vos
produits agricoles sur le bord de la route il y a plusieurs clients, exemple le
blé-d'Inde qui d'une façon générale sont
souvent en face d'un, deux ou trois acheteurs ont le droit de se regrouper pour
pouvoir obtenir le meilleur prix possible, ce qui ne veut pas dire qu'un plan
conjoint doit amener des rivalités entre des groupes de producteurs.
Il y a des ajustements à faire. Il faut dire que, dans toutes ces
associations qui groupent des personnes, il y a toujours des divergences. Les
plans conjoints ne sont pas différents des autres, il y a toujours des
divergences, mais je pense qu'en soi le principe des plans conjoints est bon.
Il s'agit d'adopter les modalités d'application les plus conformes
à la mise en marché des différents types de
production.
Vous avez parlé d'ajuster notre système agroalimentaire en
fonction des tendances futures.
C'est exactement ce que nous voulons faire. Je suis très
conscient de ce que vous disiez. Par exemple, de plus en plus de personnes
prennent leurs repas à l'extérieur, de plus en plus de personnes
vont acheter des repas préparés à l'avance, parce que de
plus en plus aujourd'hui, les deux conjoints d'un ménage travaillent et
ont tendance à moins préparer de repas à la maison
qu'auparavant, achetant des mets préparés à l'avance.
C'est un peu dans cette perspective que j'ai parlé d'états
généraux de l'agro-alimentaire pour pouvoir, en fonction des
besoins du marché, orienter les types de production, c'est-à-dire
que les gens se rencontrent pour pouvoir faire la jonction entre eux. C'est un
peu dans ce but que j'ai parlé d'états généraux de
l'agro-alimentaire, parce que le marché est une réalité,
ce n'est pas une vue de l'esprit. C'est une réalité. Le
marché demande telle chose, pour telle et telle raison à un
moment donné, alors il faut qu'à ce moment-là les
entreprises de transformation et les producteurs agricoles tiennent compte de
ces besoins du marché dans leur production.
Ce que vous disiez sur les soupes, les usines de déshydratation,
nous sommes conscients de cela; il y a des études qui se font
là-dessus au ministère. Quand vous parlez de manque de
suffisance, d'autosuffisance qui est très limitée dans les
productions maraîchères, je pense qu'une des façons de les
développer va être justement de protéger les terres noires
de votre région, de la région de Montréal, qui sont les
meilleures terres pour la production maraîchère. La loi du zonage
agricole va arriver à point pour protéger ces terres plutôt
que de les empaqueter pour les exporter aux Etats-Unis pour remplir des pots de
fleurs. Dans un programme vous avez parlé aussi de l'importation de
boeuf au Québec, disant que 80% de notre consommation est
importée.
Il y a des études qui se font actuellement pour des programmes de
veau et de boeuf, pour développer ces productions. Plutôt que les
cultivateurs vendent leur veau à 50, 60 ou 70 livres, il faut augmenter
le poids du veau qui est vendu. D'ailleurs j'assistais, avec le sous-ministre
M. Jacques, à l'inauguration, vendredi dernier, de Provi-Viande, qui est
une division de Provigo.
Justement le ministère a fait se joindre des producteurs
agricoles dans un programme qui commence pour élever des veaux
jusqu'à 200 ou 250 livres pour fournir Provi-Viande. Je pense qu'il faut
développer cette formule, alors qu'il y a des entreprises de
transformation qui ont besoin d'un certain type de produits. Il faut avoir des
programmes qui correspondent aux besoins du marché. L'entreprise qui se
développe au Québec pourra, avec des programmes du
ministère adaptés aux besoins, fournir davantage ces
marchés.
Les pomiculteurs; on fait des travaux actuellement assez importants pour
que cela soit mieux adapté, la culture de la pomme. Les
variétés de pommiers qu'on a au Québec ne semblent pas
être tout à fait adaptées aux besoins actuels du
marché. Evidemment, la pomme Mclntosh est peut-être la meilleure
pour faire du jus de pomme, mais pour vendre sur le marché à
l'état nature comme une pomme fraîche, il y a des
variétés aujourd'hui
qui sont plus en demande par le consommateur, qui se gardent mieux, qui
ont une meilleure présentation et qui sont meilleures pour la
conservation et qui ont moins de blessures durant la manutention.
Je suis convaincu également, comme vous le dites, que les
produits doivent être mieux mis en marché. Nous voulons aussi
travailler davantage dans le domaine de l'horticulture. C'est un des secteurs
dans lesquels nous sommes le moins autosuffisants. Par ailleurs, j'ai
été étonné quand vous avez dit que les politiques
du ministère de l'Agriculture étaient des politiques socialistes.
Je pense, comme le disait le député de Montmagny-L'Islet, qu'il y
a de la place pour subventionner davantage l'agriculture. Une des choses que je
voudrais qu'on étudie au ministère immédiatement, ce sont
des points de comparaison entre différentes provinces et les Etats
américains pour voir jusqu'à quel point ils soutiennent
l'agriculture.
Mon impression, d'après des lectures que j'ai faites, c'est que
les Etats-Unis, particulièrement, subventionnent beaucoup plus
l'agriculture qu'on ne le fait ici. C'est une intuition basée sur des
lectures, mais j'aimerais que l'on fasse plus systématiquement cette
étude au ministère pour les raisons que mentionnait le
député de Montmagny-L'Islet. Les gens pensent souvent que
l'agriculteur est un gars qui reçoit constamment de l'argent du
gouvernement. Dans le fond, dans tous les pays du monde, l'agriculture est
subventionnée. On n'a pas le choix.
S'il y a un pays qui aide son agriculture, qui veut la développer
et qui s'en sert comme d'une arme commerciale c'est son arme la plus
importante c'est les Etats-Unis; l'Europe aussi, mais les Etats-Unis
s'en servent. Je lisais dernièrement des articles là-dessus. On
pense, par exemple, que les armements militaires sont un atout très
important pour le commerce américain, mais il semble, au contraire, que
l'alimentation est l'atout le plus important des Américains.
Plusieurs experts je pense, par exemple à des travaux qui
se font à Harvard actuellement prévoient dans un certain
nombre d'années une crise de l'alimentation et qu'on ne parlera plus de
pétrodollars, mais d'agrodollars. On fait énormément de
recherches aux Etat-Unis actuellement pour voir les types de viandes ayant le
meilleur taux de conversion pour orienter le marché quand arrivera cette
crise ou encore on veut la prévenir vers des types de
viandes qui ont un taux de conversion supérieur. Quand on parle du
lapin, par exemple, deux livres de nourriture font une livre de viande de
lapin. Je pense que c'est deux livres et demie ou deux livres trois quarts pour
un poulet.
M. Giasson: Vous n'avez pas la conversion des protéines
végétales qu'il faut pour faire des protéines de
chair.
M. Garon: Je ne le sais pas par coeur, mais je sais que le lapin,
c'est le plus faible et, ensuite, le poulet, tandis que le boeuf, c'est
beaucoup plus élevé. Tout le monde s'attend qu'à l'avenir,
à cause de ce manque de nourriture qu'on pressent dans le monde, le
boeuf deviendra de plus en plus un produit de luxe comme le homard, question de
quantité et des exigences de ce produit sur la nature, le besoin en
alimentation.
Au point de vue de l'enseignement, je pense que l'enseignement agricole
doit être également repensé. D'autant plus que j'ai
rencontré le ministre de l'Education à ce sujet et nous voulons
former un comité conjoint, ministère de l'Education et
ministère de l'Agriculture, pour réévaluer l'enseignement
agricole, surtout au niveau des CEGEP et probablement au niveau secondaire
également.
Je dois dire que c'est un secteur où il y a différentes
opinions. Les opinions sont partagées, mais je pense qu'après les
essais qui ont été faits jusqu'à maintenant, avec la
réforme de l'Education dans les années 1960, il est temps de
réévaluer tout le système actuel d'enseignement agricole
pour l'adapter aux besoins actuels.
Je voudrais dire également un mot de ce que disait le
député de Montmagny-L'Islet dans ses commentaires. Evidemment, on
a parlé de beaucoup de choses, on a couvert la plupart des points. Il y
en avait d'autres. Je n'ai pas la prétention évidemment et le
gouvernement actuel non plus de régler tous les problèmes
agricoles dans quelques mois. Je pense bien que si on avait cette
prétention, on serait vraiment prétentieux. Il a parlé de
subventions ou de prix dans le domaine du lait. On aura sûrement
l'occasion d'en parler mais disons que c'est un secteur où je
préfère attendre les débats qui se font actuellement sur
l'unification des deux laits. Car il est possible que, dans cette perspective
de l'unification des deux laits, il y ait de l'argent à mettre, par le
gouvernement là-dedans, pour bonifier toute l'industrie laitière
et la penser en termes d'industrie et la développer. Il sera toujours
temps pour le gouvernement d'intervenir puisqu'à ce moment-ci il y a un
développement qui se fait beaucoup plus rapidement vers une certaine
unification des deux sortes de laits au Québec.
Quant à la politique fédérale, je ne sais pas si
c'est dû à l'attitude du ministère et du ministre de
l'Agriculture lors des récentes négociations au cours de la
première période de l'année 1977, mais disons que la
politique laitière, sans être parfaite, et elle est loin de
l'être, s'est améliorée.
Ce que je trouve de plus déplorable dans la politique
laitière fédérale qui touche le lait industriel, c'est que
c'est une politique à trop court terme. C'est une politique sur un an.
Cela n'a pas de bon sens d'avoir des politiques à si court terme dans
des productions qui représentent des investissements si forts par les
producteurs agricoles. Cette politique devrait être à plus long
terme.
Je ne parlerai pas des différentes questions qui ont
été touchées par tous les articles car nous aurons
l'occasion d'y revenir au cours de l'étude en particulier des
crédits. Je voudrais dire un mot sur la volaille. Il est d'abord
important qu'il y ait un contrôle des importations. Dans tout cela, il y
a des questions de priorité. Je pense que la priorité, à
l'heure actuelle, c'est vraiment le contrôle des importations.
M. Giasson: Le plan national de mise en marché.
M. Garon: Oui, le plan national de mise en marché. Je dois
dire, d'ailleurs, que j'avais donné mon accord de principe, dès
le 15 décembre, lors de la conférence des ministres de
l'Agriculture, à Ottawa, où j'avais signifié à M.
Whelan que nous étions, en principe, d'accord. Evidemment, il y avait
certaines conditions.
M. Giasson: ...la thèse fédéraliste, cela a
dû être dur.
M. Garon: Non, ce n'est pas que c'était difficile. La
thèse fédéraliste a prouvé, encore une fois,
qu'elle ne s'appliquait pas très bien, parce qu'au Québec il y a
unanimité à peu près sur le contrôle des
importations américaines. C'est le fédéral qui ne le fait
pas.
M. Giasson: Sur la thèse fédéraliste?
M. Garon: Dans la situation actuelle, on n'a pas le choix. C'est
pour cela, d'ailleurs, que je n'ai jamais dit que l'indépendance
réglerait tous nos problèmes. Mais ce que j'ai dit, par exemple,
c'est que l'indépendance nous donnerait les moyens de régler nos
problèmes, c'est-à-dire qu'elle nous donnerait le pouvoir de
contrôler nos importations.
M. Giasson: L'émission à Télé-4, le
dimanche soir, à 11 heures.
M. Garon: Non et on mentionne que, au fond, sur le plan national,
ce que nous voulons, c'est le contrôle des importations
américaines. Maintenant, à cause de l'accord du GATT, il doit y
avoir un plan de gestion interne au pays pour qu'on puisse faire le
contrôle des importations. Ce qui est grave par exemple là-dedans,
c'est que plus le gouvernement fédéral retarde à
contrôler les importations, vu que dans les conditions du GATT on tient
compte du niveau des importations des cinq dernières années, plus
on retarde et plus le niveau des importations américaines est
élevé, plus le quota des importations des Etats-Unis sera
élevé. Plus le gouvernement fédéral retarde, plus
il pénalise au fond les producteurs canadiens tant de l'Ontario que du
Québec, qui sont les plus gros producteurs de volaille.
La raffinerie. Je dois dire que j'étais très fier du
conseil d'administration. Je m'attendais à ce que les
négociations se fassent d'une façon plus souple. J'ai
été un peu déçu de la façon dont les
négociations se sont faites parce qu'il était question et il est
encore question de moderniser la raffinerie. Pour que le gouvernement songe
à investir des sommes pour la modernisation de la raffinerie, il faut
d'abord que les producteurs de la betterave à sucre se montrent
intéressés par la production de la betterave. Je dois dire que
j'ai obtenu que la raffinerie reste ouverte cette année puisque le
Conseil du trésor avait recommandé la fermeture de la raffinerie,
et j'ai obtenu qu'elle reste ouverte pour qu'on pense à des programmes
de diversification de la raffinerie. Je pense qu'un des gros problèmes
de la raffinerie c'est qu'elle fonctionne 100 jours par année alors que
les salaires sont payés sur douze mois. Il y a un problème de
rentabilité. C'est dans cette perspective que nous avons conçu un
conseil d'administration de cette qualité pour qu'on puisse trouver des
diversifications de production pour les 200 ou 250 jours qui restent. Il semble
qu'il y ait différentes possibilités pour diversifier la
production de la raffinerie et il est bon qu'on étudie les
possibilités de diversification avant de faire un programme de
modernisation de la raffinerie sans savoir quelle va être la
diversification qui va survenir à la raffinerie. L'étendue de
l'application, c'est vrai qu'on avait dans le programme une étendue
d'application du programme de la stabilisation mais on n'avait pas dit qu'on
appliquerait à toutes les productions l'assurance-stabilisation d'un
coup sec. Je pense bien qu'il n'y a aucun gouvernement qui, dans le temps de le
dire, dans une couple de mois, peut étendre l'application de
l'assurance-stabilisation à toutes les productions. On a voulu prendre,
au fond, deux types de production qui étaient les plus importantes
à ce moment-ci par la fluctuation dans les prix et la
vulnérabilité des producteurs à cause de ces
fluctuations.
Evidemment, on va étudier immédiatement la
possibilité d'étendre encore l'assurance-stabilisation à
d'autres types de production pour l'an prochain. Dans le cadre des programmes,
vous avez aussi parlé qu'il n'y aurait pas de programme nouveau dans
bien des secteurs et c'est un fait. Je mentionnais dans le discours
d'ouverture, au fond, que dans deux mois on ne peut pas réviser et
implanter toutes sortes de programmes. Il y a des programmes que j'aurais voulu
réviser plus rapidement mais à cause des délais
d'implantation je me suis aperçu, par exemple, qu'une machine
gouvernementale fonctionne à un rythme plus lent parce qu'il y a un tas
de dédales j'ai été six ans dans l'entreprise
privée et je n'étais pas habitué à tous ces
dédales.
M. Garneau: C'est pour cela que je vous ai dit au début
qu'il était plus facile de parler des problèmes que des
solutions.
M. Giasson: C'est vrai. Il commence à les
découvrir. C'est déjà beaucoup.
M. Caron: II y a beaucoup de programmes que nous voulons
retoucher, refaire et penser mais c'est lourd une machine gouvernementale.
Dans deux mois, ce n'était pas possible de faire beaucoup plus
que ce qu'on a fait. Même qu'il y a des programmes, à certains
moments, pour lesquels les hauts fonctionnaires me disaient: Vous allez trop
vite, vous allez briser vos objectifs si vous allez aussi vite que vous voulez
y aller. J'ai modéré un peu pour ne pas changer les programmes
trop rapidement. D'ailleurs, je me rappelle un gouvernement, dont on disait, au
début des années 1960, qu'il avait changé beaucoup de
choses rapidement et que la population ne
comprenait pas tous les changements. Je me suis rappelé cette
expérience et je me suis dit: C'est peut-être mieux d'y aller plus
lentement et d'expliquer davantage nos programmes pour qu'ils soient en plus
adaptés aux besoins de la population. Consulter plus aussi les gens. Des
programmes sur papier, on peut en faire pas mal dans une journée, mais
pas des programmes qui sont axés sur les besoins de la population. Je
pense, par exemple, au domaine de la pomme. On a un programme gouvernemental et
les gens qui forment le comité consultent actuellement les producteurs
justement pour ajuster leur programme avec les besoins des producteurs. Je
préfère qu'on travaille de cette façon, en collaboration
avec les producteurs, en les consultant pour avoir des programmes qui vont
correspondre davantage à leurs besoins.
Vous parliez aussi des régions, des types de production
privilégiés. Il y a du travail là-dessus qui s'est fait au
ministère, qui se fait encore. Je pense qu'il faudrait commencer d'abord
par le zonage des terres. Je ne veux pas dire qu'il n'y a pas un certain type
de production dont on ne sait pas qu'il devrait être
privilégié dans un tel secteur, mais que le zonage des terres va
permettre de savoir exactement les quantités d'acres dont on peut
disposer pour adapter davantage, après cela, les types de production en
fonction des disponibilités qu'on a au point de vue des terres.
Je vous remercie d'être d'accord pour l'assurance-stabilisation
des pommes de terre.
Les petits abattoirs, disons qu'il y a... Je me suis aperçu que
les gens qui veulent conserver les petits abattoirs, ne sont pas toujours ceux
qui veulent les garder ouverts, mais là-dessus, quelle que soit la
façon dont j'ai abordé le problème, quelle que soit la
solution apportée, je vous assure que la solution va être
critiquée. Ce que j'ai pensé, par ailleurs, c'est que dans un
domaine on n'implante pas une industrie d'abattage par une loi, d'un coup sec,
"bang". Je pense que là-dedans, il va falloir y aller progressivement,
qu'il y aura des étapes et qu'il devrait y avoir aussi, plutôt
qu'une loi uniquement ou des règlements qui vont dire: Vous fermez, puis
vous ne fermez pas immédiatement, il devrait y avoir, dis-je, des
étapes pour que les gens aient le temps de se regrouper, de se
moderniser. Il y en a qui vont le faire plus vite que d'autres. Il y en a
d'autres qui vont être appelés à le faire plus rapidement
qu'ils ne le pensaient à cause de la compétition que va apporter
ceux qui vont s'être modernisés immédiatement. Je pense
qu'il faut faire une distinction là-dedans c'est le mandat que
j'ai eu du Conseil des ministres entre le détail et le gros.
C'est-à-dire qu'il y a des gens qui sont proches de leur abatteur, qui
sont des genres d'inspecteurs eux-mêmes quand ils achètent
eux-mêmes, qui connaissent quasiment le nom de la vache, qui savent que
si c'est Rita qui se fait tuer, c'est Rita qu'ils vont manger cet hiver. Par
ailleurs, il faut protéger beaucoup plus, je pense, les gens qui mangent
dans les restaurants, dans des hôtels, dans des hôpitaux, des
écoles, qui ne savent pas d'où provient la viande exactement. Il
va falloir distinguer maintenant...
M. Giasson: ...que la loi n'est pas aussi aveugle que la
vache.
M. Garon: Je pense qu'il va falloir distinguer et je souhaite
pouvoir déposer un projet d'amendement à la loi actuelle qui va
couvrir tout le secteur, par exemple, le secteur des viandes impropres
également, qui va permettre aussi l'inspection des viandes de
façon rotative. Cela prend des amendements à la loi. Je souhaite
également pouvoir déposer les règlements en même
temps que la loi pour qu'on ait une vue générale du
système.
Il y a également les incitatifs financiers d'indemnisation pour
ceux qui se retireront ou de subventions à ceux qui se moderniseront. Je
souhaite pouvoir déposer tout cela en même temps pour qu'on ait
une vue globale comment on veut aborder la modernisation du secteur de
l'abattage et de la préparation des viandes au Québec, de
même que le secteur des viandes impropres.
C'est vrai qu'il y avait un article du programme du Parti
québécois concernant les grains de provende. J'ai demandé
à quelqu'un d'examiner cela et il m'a fait un premier rapport
préliminaire là-dessus. Je veux former éventuellement,
très rapidement, un comité qui va étudier ce secteur des
grains de provende, pour, peut-être dans l'année 1978, en arriver
à réaliser ce point de programme, à avoir ce qu'on
appelait une régie des grains de provende au Québec. Je veux
qu'on étudie ce secteur avec les gens concernés par la
commercialisation des grains de provende. Est-ce que ce sera SOQUIA ou une
régie? Je pense qu'il est trop tôt pour le mentionner
actuellement. J'ai eu l'étude préliminaire, le comité va
être formé et on va travailler là-dessus pour pouvoir
procéder le plus rapidement possible là-dedans.
C'est un peu ce que je voulais dire en réponse aux discours des
deux critiques agricoles tant de l'Opposition officielle que de l'Union
Nationale.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jean-Talon.
Raffinerie de sucre du Québec
M. Garneau: M. le Président, juste trois petits points de
nature assez générale qui toucheront la raffinerie, les
changements aux programmes et le zonage des terres. Je ne veux pas entrer dans
tous les détails, mais en parler d'une façon
générale, quitte à y revenir plus en détail.
Dans le cas de la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire, il y a la
recommandation du Conseil du trésor dont le ministre parlait
suggérant la fermeture de la raffinerie, chose à laquelle je
m'opposerais avec beaucoup de force. Je crois qu'il est bon de souligner que la
raffinerie qui a été formée vers les années
quarante...
M. Garon: En 1943.
M. Garneau: ... en 1943, avait pendant des années
accumulé des déficits. Même un prêt qui avait
été consenti dans le temps avait été perdu dans les
dédales de la comptabilité et puis, à un moment
donné, il a été retrouvé.
M. Garon: Cela avait été une avance.
M. Garneau: II s'agissait d'une avance qui avait
été faite, mais ce qui est surprenant dans ce cas et ceci
m'inciterait à suggérer au ministre de se débattre pour ne
pas en arriver à la fermeture de la raffinerie c'est que, dans
une ou deux années de ce qu'on pourrait appeler de vaches grasses, les
profits ont été suffisants pour combler tous les déficits
accumulés...
M. Garon: Des trente dernières années.
M. Garneau: ... des 30 dernières années et aussi
dégager un "cash flow" qui, même, laissait prévoir des
améliorations et une modernisation de l'équipement. Il y avait
déjà eu, à la fin de 1975 ou au début de 1976, si
ma mémoire m'est fidèle, un mémoire présenté
par le conseil d'administration de la raffinerie de sucre, suggérant une
modernisation des équipements pour améliorer la
productivité et rendre, je crois, cette entreprise plus rentable. C'est
évident que, si la raffinerie devait fermer ses portes, c'est toute une
production qui risquerait de disparaître, avec les avantages que cela
représente en termes d'approvisionnement pour le Québec dans au
moins une ou deux catégories de sucre. Je ne crois pas que ce soit
nécessaire d'aller dans tous les raffinages et tous les types de
spécialisations, mais au moins d'avoir une production qui soit un
débouché pour les producteurs agricoles et aussi pour
l'approvisionnement des marchés québécois. Je trouve que
ce serait dommage de vouloir fermer cette entreprise.
J'aurajs aimé entendre davantage le ministre parler sur le projet
d'intéressement, si on peut me passer ce mot, des producteurs agricoles.
Au cours des années où j'ai eu à discuter ce
problème de la raffinerie, cela a toujours été la grande
question de savoir, au début, quel genre de prix les producteurs
auraient, compte tenu de la teneur en sucre de la betterave et qui varie
d'année en année et du prix du sucre sur les marchés. Il
me semble qu'une formule d'intéressement ou de participation des
producteurs à la raffinerie, soit une formule de base coopérative
ou de participation aux profits avec un prix-plancher, aurait peut-être
permis de donner plus d'assurance à ces producteurs.
Il semble que les consultations n'ont pas donné ce qui
était espéré de ce côté ou que les
prix-plancher n'étaient pas suffisants. Je voudrais suggérer au
ministre, avant d'acquiescer à la fermeture de cette raffinerie, de
faire une bataille de tous les instants. Je pense que, de ce côté,
il pourra compter sur l'appui de l'Opposition libérale et, j'imagine,
des autres aussi, puisque je crois que c'est une industrie qu'il nous faut
garder, quand on sait, par exemple, les efforts que certains autres pays ont
dû faire pour se doter de ce genre de production qui, sous certains
égards, constitue une denrée essentielle.
Pour ce qui est des changements rapides dans les programmes, même
s'il y a beaucoup d'ambitions dans la tête d'un nouveau ministre de
l'Agriculture, je suis content d'entendre qu'il veut procéder selon les
recommandations de certains de ses fonctionnaires. Un des problèmes
qu'on a constatés moi, je l'ai constaté, comme membre d'un
gouvernement, dans le passé, en causant avec les cultivateurs a
souvent été les changements qui se produisent trop rapidement.
Une production agricole, cela ne se bâtit pas dans l'espace de cinq ou
six mois; souvent, on lance les cultivateurs dans de nouveaux projets et, au
bout de deux ou trois ans, on les leur retire d'une façon souvent trop
subite, de telle sorte que les gens qui ont investi des sommes d'argent,
comptant sur une aide gouvernementale pour stabiliser les prix ou encore les
coûts de production, se retrouvent Gros-Jean comme devant, du jour au
lendemain. Par la suite, il est toujours extrêmement difficile de
convaincre ces cultivateurs de réembarquer et de collaborer avec le
gouvernement dans de nouvelles productions.
Je pense, par exemple, aux efforts qui avaient été faits
par des producteurs québécois dans la production du lin, un
certain temps, où des investissements avaient été faits.
En tout cas, je sais que dans la région d'où je viens il y avait
eu des investissements de faits et, finalement, le programme a disparu. La
reconversion de l'activité agricole est toujours extrêmement
difficile. Là-dessus, je crois qu'il vaut mieux procéder par
évolution et surtout s'assurer que les cultivateurs, qui se sont
adonnés à un type de production qui a été, pendant
un certain temps, encouragé par le gouvernement, les agronomes, etc., ne
soient pas trop déçus par la rapidité de la coupure des
programmes; sans cela, ils ne veulent plus rembarquer. Ils disent: Ils nous
charrient comme si on était capable de produire une vache
laitière en l'espace de six mois ou encore se lancer dans la production
du boeuf de boucherie. Du jour au lendemain, tout cela tombe. Je pense que
c'est important de procéder avec prudence et surtout d'avoir cette
consultation avec les producteurs.
Finalement, c'est le zonage des terres agricoles que je voudrais
aborder. Tout à l'heure, le ministre a mentionné que le prix
moyen des fermes était de $90 000. Si on prend en considération
le prix des fermes dans les basses terres et dans la région
périphérique de l'Outaouais et de Montréal, de
Saint-Hyacinthe, de Beloeil, en fait, les meilleures terres agricoles du
Québec, je suis convaincu que la moyenne passe peut-être à
$150 000, $200 000 et $300 000. Dans cette opération de zonage agricole,
je suis bien d'accord avec le principe, l'ancien gouvernement l'était
aussi, mais une des difficultés qu'il nous faut considérer est de
procéder d'une façon telle qu'il ne soit pas une spoliation pure
et simple des producteurs parce que, dans bien des cas, il s'agit de fermes de
producteurs agricoles qui ont, au cours de leur vie, au cours d'une ou deux
générations de producteurs sur la même ferme familiale,
accumulé tous les avoirs; cela constitue, en quelque sorte, le capital
gagné par deux ou trois générations de travailleurs
agricoles. Cela constitue, dans bien des cas, le fonds de retraite de ces
producteurs. Il ne faudrait pas que, par une loi qui arrive subito presto, sans
mode de compensations, des producteurs
agricoles qui, de bonne foi, ont fonctionné dans cette industrie
se voient enlever, du jour au lendemain, tous les avantages que pourrait
constituer la vente à des fins non agricoles.
Si la société québécoise entend et je
crois qu'elle doit le faire protéger les terres agricoles, il ne
faudrait pas que cela se fasse sur le dos de 10 000 à 15 000
producteurs. Si on veut conserver les terres agricoles dans les basses terres
du Saint-Laurent, dans la région de Montréal, en particulier, de
l'Outaouais, si on veut les protéger pour satisfaire aux exigences de la
population québécoise pour l'avenir, je crois que le coût
doit être porté par l'ensemble de la population et non pas
uniquement par les personnes dont le hasard des circonstances fait qu'elles
sont propriétaires de tel ou tel espace agricole à un moment
où le gouvernement décide d'intervenir.
J'aurais aimé aussi savoir du ministre si, dans la politique de
zonage agricole que le gouvernement envisage, il procédera par la base
de la fiscalité ou par la base du gel des terres contre une certaine
compensation. Est-ce que ce zonage des terres agricoles va s'incorporer
à un programme de zonage plus considérable qui serait
relié à des fonctions municipales?
Je sais qu'un des débats qui ont eu lieu dans le passé a
été l'approche qu'on pourrait qualifier du MAQ contre celle de la
taxation et qui serait peut-être celle que caressaient certains
fonctionnaires du ministère des Finances. Le ministre des Finances, lors
de l'étude des crédits de son ministère, parlant des
projets de son groupe de recherche économique et fiscale, a
mentionné cet aspect comme étant un des projets auxquels le
groupe travaillait. J'aimerais savoir si le ministre est en mesure de le faire;
s'il ne l'est pas, peut-être pourra-t-il au cours des prochaines semaines
le mentionner, si les crédits s'échelonnent sur une
période un peu plus longue. J'aimerais connaître du ministre
laquelle des orientations il favorise et comment il envisage cette question de
compensation aux propriétaires fonciers agricoles qui seraient
situés dans les zones de zonage, comment il envisage la compensation.
Est-ce qu'il entend adopter les formules qui ont été suivies dans
l'Etat de New York ou dans d'autres Etats américains, mais en
particulier l'Etat de New York, où on a procédé à
une forme de rachat, de socialisation si on peut dire, sans que ce soit la
vraie signification du terme? La socialisation du sol agricole, en ce sens
qu'il est maintenu pour des fonctions agricoles. Ce sont les trois points, M.
le Président, que je voulais souligner à l'ouverture de
l'étude de ces crédits.
M. Garon: Je voudrais dire un mot sur la raffinerie. Moi je n'ai
pas l'intention d'accrocher mon nom à la fermeture de la raffinerie,
j'aimerais mieux accrocher mon nom à sa modernisation. C'est dans cette
perspective qu'on a voulu travailler pour plutôt la moderniser. Mais
avant de la moderniser, il faut savoir dans quel domaine on veut la moderniser.
Je pense à un exemple. La raffinerie de sucre, apparemment les
séchoirs, en tout cas les gros barils qui tournent seront en acier doux.
Mais on ne peut moderniser avant de savoir vers quoi on veut diversifier. Par
exemple il est question du petit lait, faire des sous-produits avec le petit
lait. Ce procédé pour sécher le petit lait exige des
aciers inoxydables parce que cela attaque l'acier, cela pourrait attaquer
l'acier. C'est pour cela qu'il est important de savoir dans quelle direction on
veut la moderniser, avant de décider de quelle façon la
moderniser.
M. Garneau: J'aurais une question d'information.
M. Garon: Oui.
M. Garneau: Pendant un certain temps, il y avait eu des
études de faites sur la possibilité d'importer de la canne
à sucre et de la transformer durant les périodes où il n'y
a plus de betterave.
M. Garon: Oui.
M. Garneau: Est-ce qu'il s'agit là d'une étude qui
n'a pas été concluante du tout et que...
M. Garon: Non c'est la localisation.
C'est la localisation, il aurait fallu la transporter. C'est parce que
ce n'est pas un port en eau profonde. Sur le Richelieu cela a un tirant d'eau
qui n'est pas suffisant. Pour faire monter les bateaux là, alors...
C'est cela. Je lisais des articles récemment dans Fortune, qui
disaient que le prix du sucre d'ici 1980 ne sera peut-être pas
très élevé. Mais, d'après les prévisions des
experts, c'est qu'après 1980 le prix du sucre sera beaucoup plus
élevé, en tout cas plus élevé. Si on regarde les
pays sous-développés, les différents types de produits qui
étaient très bon marché auparavant deviennent beaucoup
plus cher. Parce que les pays sous-développés ne veulent plus
laisser aller leurs produits à bon marché, on peut s'attendre que
le sucre soit un des aliments qui vont augmenter de prix. D'après les
lectures que j'ai faites très récemment sur le sucre, c'est un
secteur où ce n'est qu'une partie de la production mondiale de sucre qui
va sur le marché international.
On parle de 5%, 6%. Le marché libre est d'environ 14%, le reste
ce sont toutes des ententes bilatérales entre les pays producteurs et
les pays acheteurs.
C'est cette partie du sucre qui fait osciller le prix à la baisse
ou à la hausse. D'après les prévisions que je voyais dans
ces études qui étaient assez fouillées, on estimait que
d'ici deux ou trois ans le prix du sucre augmenterait beaucoup plus sur le
marché international.
Je pense qu'il ne faudrait pas laisser aller un secteur où on a
le "know how". C'est ce qui est le plus long à acquérir, et nous
l'avons. C'est là-dessus que travaille le conseil d'administration, pour
voir les possibilités de diversification. On a commandé des
études aux gens de la raffinerie pour voir les différentes
possibilités. La décision c'est que la raffinerie continue et que
l'on cherche les possibilités au cours de cette année, à
savoir
comment la diversifier pour pouvoir, quand nous aurons
déterminé les modalités de diversification, faire les
investissements dans cette direction.
M. Giasson: Dans ce secteur vous avez fait allusion à
l'attitude du Conseil du trésor. Est-ce que le conseil aurait
posé des conditions? Par exemple: Si vous n'atteignez pas tel volume il
faudra déboucher sur une décision de fermeture?
M. Garon: Non. Cela n'a pas été retenu.
M. Giasson: Avec la province, cela n'a pas été
retenu.
M. Garon: II y en a plusieurs recommandations du Conseil du
trésor qui sont modifiées en cours de route. M. Garneau doit le
savoir.
M. Giasson: Vous avez fait allusion à une transformation
possible, à une nouvelle utilisation de l'équipement en supposant
qu'il aurait été de nature à répondre aux exigences
du produit nouveau, à la transformation du petit lait.
Présentement il s'agit d'un secteur qui est presque entièrement
entre les mains de la coopération agricole. Vous auriez pu
procéder par des ententes soit avec Granby, soit avec la
Fédérée pour amener le petit lait à la raffinerie
de Saint-Hilaire pour une nouvelle transformation.
M. Garon: C'est un des éléments
étudiés par le conseil d'administration, l'utilisation du petit
lait mais il n'y a pas seulement l'équipement, mais aussi la
main-d'oeuvre, ses lots, ses approches, ses terrains.
M. Giasson: Dans le secteur laitier à l'heure actuelle au
Québec c'est presque la coopération sous contrôle...
M. Garon: Dans le secteur du lait industriel c'est 85%
coopératif. Déjà dans cette région, dans un rayon
relativement restreint, on l'utilise pour faire d'autres produits vendus dans
les pâtisseries ou ailleurs. En Europe c'est...
M. Giasson: Présentement, il n'y a aucune transformation
du petit lait dans les usines laitières que nous avons au
Québec?
M. Garon: C'est rejeté et cela crée des
problèmes de production. On pourrait donc résoudre deux
problèmes, soit donner une valeur ajoutée au produit et en plus
éviter les problèmes d'environnement.
Le Président (M. Boucher): Sur le même sujet, M. le
député de Saint-François.
M. Rancourt: J'aimerais savoir si c'était possible
actuellement pour le sucre d'identifier au niveau du détail le sucre
produit ici au Québec, même si je sais qu'il y a un contrat qui
lie notre production à des grandes firmes sucrières?
M. Garon: Le sucre produit actuellement est un sucre roux,
c'est-à-dire qu'on ne fait pas le dernier raffinage. C'est donc un sucre
brut qui est vendu à contrat à une compagnie qui se nomme Redpath
qui fait le dernier raffinage. Pourquoi?
Quand cela a été changé en 1972, c'était
moins coûteux de procéder comme cela. Deuxièmement, la
partie la plus désuète de la raffinerie, c'était justement
l'endroit où l'on devait faire la dernière partie du raffinage.
Cela aurait été l'une des parties de la raffinerie qu'il aurait
fallu vraiment moderniser.
M. Garneau: La question que posait le député de
Saint-François, si je comprends bien: Quel est le pourcentage de la
production de la raffinerie par rapport au marché
québécois?
M. Garon: Trois ou quatre pour cent, quatre à cinq pour
cent peut-être. Il y avait un contrat de cinq ans. Il reste deux ans
à courir. Il y a trois ans courus sur le contrat avec Redpath et il
reste deux ans à courir sur le contrat.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Huntingdon.
M. Dubois: M. le ministre, au sujet toujours de la raffinerie, si
elle fermait, je pense que ce serait dommageable pour bien d'autres producteurs
dans certains milieux, parce que j'imagine que les fermes productrices de
betterave, ce sont des fermes qui pourraient aussi produire des légumes.
Alors, si ces gens s'en vont vers une production insuffisante, il y aura un
problème majeur chez certains producteurs et cela pourrait nuire
à la rentabilité de ceux-là. Je pense que, par ricochet,
il y aurait une perte financière même au niveau des
rentrées d'impôts qui pourrait être aussi importante que ce
que vous perdez présentement avec la raffinerie.
Alors, je pense que cela devrait être aussi évalué,
l'impact de la fermeture vis-à-vis des producteurs. Dans quelles
productions vont-ils se lancer après? Parce que c'est une terre tout
à fait spéciale pour la production de la betterave qui peut aussi
être adaptée aux légumes.
M. Garon: Tous les efforts sont faits actuellement pour
rentabiliser la raffinerie en diversifiant sa production. Il y a des betteraves
pour cent jours. Il s'agit de trouver une utiliation pour la raffinerie pour
200 jours additionnels.
M. Dubois: II y a des pertes présentement. Même s'il
y en avait un peu plus, ce n'est pas grave. Il y a beaucoup de compagnies
d'Etat qui perdent présentement. Même s'il y en a une de plus, ce
n'est pas grave.
M. Garon: II faut dire que l'équipement de la raffinerie
est assez vieux. C'était de l'équipement usagé qui a
été acheté en 1944 et, donc, de l'équipement qui a
plus de 30 ans. Si la raffinerie doit continuer, il faut aussi penser à
la moderniser,
c'est-à-dire qu'il y a de l'équipement qui a besoin
d'être réparé souvent. A ce moment-là, il faut
penser à avoir de l'équipement neuf pour la raffinerie. Doit-on
en même temps l'agrandir, doit-on la diversifier? C'est ce qui est
à l'étude actuellement pour essayer d'en faire une entreprise
rentable.
M. Dubois: Si on ne peut pas produire plus de 200 000 tonnes
annuellement, est-ce parce que les betteraves gèleraient à
l'automne, à un moment donné?
M. Garon: C'est-à-dire qu'à ce moment-là
cela va nécessiter des investissements beaucoup plus
élevés. Actuellement, la capacité est de 1600 tonnes par
jour. Si vous voulez monter la capacité à 3200, les
investissements sont beaucoup plus lourds. Alors, si vous ne faites que
remplacer l'équipement actuel, cela vous coûterait environ $10
millions. Si vous voulez doubler la capacité, vous tombez dans $25
millions ou $30 millions.
M. Dubois: Je me pose la question: Est-ce que la betterave se
conserve plus que tant de mois?
M. Garon: Non, c'est-à-dire qu'il y a une certaine
conservation à l'automne. On la fait en insufflant de l'air en dessous
des tas de betterave de façon que la plante continue à respirer,
de façon qu'il n'y ait pas de pourriture et que la plante se conserve.
Il faut le plus possible abaisser la température. S'il y a danger qu'il
y ait échauffement, on insuffle de l'air sous les tas de betterave.
Maintenant, cela a quand même des limites, la conservation.
L'idéal, c'est évidemment de passer la betterave dans le temps le
plus restreint possible.
On parle d'une campagne de 100 jours, mais si on avait une usine qui
avait une capacité de production additionnelle et qui pouvait faire une
campagne de 70 jours, ce serait préférable parce que vous avez
plus de chances de conserver, en termes de pourcentage de sucre. Alors, il y a
des pertes qui sont encourues tout le temps que vous gardez votre betterave
à l'entreposage.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Champlain.
M. Gagnon: On dit qu'on fait une production de sucre d'environ 4%
de notre besoin de consommation, si j'ai bien compris. Au commencement de cette
usine de raffinerie, c'était un peu un laboratoire pour savoir si on
pouvait produire du sucre au Québec et le produire
économiquement. Est-ce qu'actuellement la conclusion est que 4% c'est
à peu près le maximum qu'on peut obtenir, ou est-ce qu'il ne
serait pas rentable d'augmenter cette production au Québec?
M. Garon: En fait, si on regarde cela sur le plan canadien, par
exemple, vous avez environ 88% du sucre qui est importé et 12% du sucre
qui est produit au Canada. Ici, il y avait environ 6000 à 7000 acres de
betteraves, dans l'Ouest il y a environ 80 000 acres. Maintenant, eux sont dans
un marché plus captif que le nôtre, alors ils ont un prix un peu
supérieur à ce que nous pouvons obtenir.
Maintenant, pourquoi cela? Evidemment, si on importe 88%, c'est parce
que cela a été rentable de le faire. Il y a eu des moments, et
encore jusqu'à très récemment, où le sucre de canne
des autres pays coûtait relativement moins aux consommateurs. Alors, cela
a été strictement économique. Maintenant, il y a plus que
cela aussi, lorsque vous vous assoyez autour d'une table avec d'autres pays, si
vous voulez vendre de l'aluminium, des fois, il faut que vous achetiez d'autres
choses. Alors, si tu veux vendre de l'aluminium, si tu veux vendre du papier,
ils disent: Achetez notre sucre!
Quand la raffinerie a été créée, en 1943,
c'est évident qu'on était en temps de guerre, puis c'était
une protection, jusqu'à un certain point, mais c'était plus que
cela. La betterave sucrière comme telle est une culture
améliorante. S'il n'y avait pas eu la betterave sucrière dans la
région de Montréal?... Cela a été la même
chose dans le nord de la France. Si on va en France, cela a été
la même chose. C'est une culture qui a énormément
amélioré les sols, et si on fait du maïs aujourd'hui c'est
peut-être parce qu'on a eu de la betterave sucrière. Je pense que
la contribution économique de la betterave à sucre a
été beaucoup plus en termes de retombées
économiques de l'agronomie qu'en termes d'autosuffisance en sucre.
Maintenant, ce qui aurait peut-être pu être plus
intéressant, par exemple, aurait été d'avoir une
production suffisante pour un marché captif, c'est-à-dire qu'une
entreprise quelconque je ne voudrais pas en nommer
québécoise qui aurait voulu s'approvisionner en entier du produit
sortant de la raffinerie aurait pu avoir un contrat à long terme et
dire: On achète tout le sucre qui sort de là. Vachon, disons, en
utilise 35 000 000 de livres par année, c'est à peu près
la production de la raffinerie quand elle fait 6 a 7 milliards de livres.
M. Gagnon: Ce qui veut dire que ce n'est pas
nécessairement la non-rentabilité comme les ententes qu'on peut
avoir en ce qui concerne l'échange international.
M. Garon: A $15 les cent livres, au prix où il faut payer
le producteur, quand même, parce que le producteur a des coûts et
c'est vrai, ce sont des coûts réels, c'est évident
qu'à $15, la raffinerie va faire des déficits. Ce n'est pas
rentable.
M. Gagnon: Combien de producteurs, environ, retirent un salaire
convenable de la production de la betterave ici, au Québec?
M. Garon: L'année passée, il y en avait 420. M.
Gagnon: 420.
M. Garon: Autour de 420.
Quand la raffinerie a offert $2.50 aux producteurs, ils sont venus
à mon bureau me rencontrer pour dire que c'était le prix que la
raffinerie offrait, disant: Tenant compte du marché, tenant compte
des prévisions du prix, tout cela, il semble que $22.50 est un
prix qui a du bon sens. Le syndicat des producteurs est venu me voir et j'ai
voulu qu'on distingue entre les deux, la raffinerie et le ministère. Ils
ont dit: Est-ce que le ministère peut faire quelque chose à ce
sujet? Les économistes du ministère ont travaillé aux
coûts de production. Si on avait eu la loi de l'assurance-stabilisation
des revenus, qui est le programme le plus généreux, la loi la
plus généreuse qui existe administrée par le
ministère de l'Agriculture, les calculs qu'on a faits arrivaient
à $22.06. Cela veut dire qu'à $22.50 c'était plus haut
qu'un prix d'assurance-stabilisation. J'ai même offert au Syndicat des
producteurs de betteraves que les économistes du ministère et les
économistes de l'UPA, ensemble, regardent les coûts de production,
s'ils doutaient des chiffres du ministère, et le Syndicat des
producteurs de betteraves a refusé.
Au fond, ce qu'ils voyaient un peu, je pense, ils disaient: II y a un
montant d'accumulé là, qui sont les profits de 1974. On aimerait
bien toucher une part des profits de 1974. C'est un peu là-dessus que se
faisait le débat. Il semble que le prix de $22.50 tenait compte de la
réalité. Maintenant, on offrait plus, s'il y avait des profits
à la raffinerie, parce qu'il y en a qui pensaient que le prix du sucre
serait très élevé, dans l'année qui s'en vient. On
offrait de diviser les profits, s'il y en avait, à 50/50. Ils ont
préféré, à ce moment, discuter. J'ai dit: Discutez
avec la raffinerie des modalités différentes. Ils ont
discuté avec le conseil d'administration, le directeur
général qui est en communication avec le conseil d'administration
et ils ont décidé de fixer les prix différemment, tenant
compte des variations dans le prix du sucre. C'est-à-dire que, si le
prix du sucre l'an prochain était $15, ils retireraient moins de $22.50,
selon leur choix, soit $21.06, à $15, et cela monte. Je pense que c'est
à $18 qu'ils dépasseraient les $22.50. A $17, je pense que cela
faisait $22.34 ou $22.36. Il y avait des producteurs qui anticipaient que le
prix du sucre serait très élevé. Au conseil
d'administration, il y a des gars qui connaissent cela pas mal le sucre. Quand
on parle de Roger Néron, de Vachon, ils en achètent, du sucre,
pas mal. Il y a des gens qui achètent pas mal de sucre, et
d'après leur estimation le prix du sucre ne devrait pas dépasser
vraiment $18 les 100 livres l'an prochain, d'après les estimations du
marché international.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Puisque nous sommes sur le dossier de la raffinerie,
on pourrait peut-être passer à travers, nous n'aurions pas
à y revenir.
Il y a tout de même un phénomène qui est difficile
à comprendre. J'aimerais indiquer que les producteurs dans leurs
négociations ont tenté de décrocher le gros lot, comme on
dit, en faisant valoir leur droit de toucher une partie des profits
réalisés au cours de deux années d'exploitation.
Une Voix: Trois.
M. Giasson: Trois. Mais tout de même, cette année,
il y a combien de producteurs qui ont ensemencé de la betterave? On est
rendu au 10 mai, l'ensemencement est fini, la date limite pour ensemencer la
betterave est passée déjà.
M. Garon: En 1976, mais cette année...
M. Giasson: En 1977, pour avoir un meilleur visage de
l'exploitation.
M. Garon: Je sais que c'est moins.
M. Giasson: Vous n'avez pas le volume d'acres
ensemencées?
M. Garon: Je n'ai pas les derniers chiffres, malheureusement. On
peut vous les avoir. On pourrait les avoir.
C'est peut-être autour de 5000 acres. L'année passée
c'était 6700, c'est peut-être moins de 5000 acres. C'est ce que je
pense.
Ce qui est arrivé, c'est qu'il y a eu ces négociations
jusqu'à la fin, puis les gars avaient des décisions à
prendre, il y en a d'autres qui ont laissé tomber et...
M. Giasson: L'ensemencement, à un moment donné, est
passé...
M. Garon: ...qui ont produit autre chose. Mais quand même,
il faut admettre que l'offre qui avait été faite était de
$22.50, plus le partage des profits à 50-50.
M. Giasson: Si vous comparez cela...
M. Garon: Puis $22.50 c'était plus que ce que
l'assurance-statilisation aurait donné. L'assurance-stabilisation aurait
donné $22.06; $22.06, c'était égal au coût en
argent, plus la dépréciation, plus une rémunération
de l'avoir net, plus 100% du revenu d'un ouvrier spécialisé,
d'accord? C'était $22.06. Ce qui avait été offert,
c'était $22.50, d'accord?
Maintenant, là où on ne s'entendait pas avec les
producteurs c'est que l'assurance-stabilisation prenait comme moyenne vingt
tonnes à l'acre, tandis que... Parce que les modèles
économétriques qui sont utilisés par
l'assurance-stabilisation sont des modèles où on prend une
moyenne qui est un petit peu plus élevée que la petite moyenne.
Autrement, l'assurance-stabilisation devient quoi? Cela devient un
encouragement à la non-productivité. Ce n'est pas pour cela
qu'elle a été créée. Elle a été
créée quand même pour donner un revenu assuré aux
producteurs mais également pour que ce soit un encouragement à la
productivité. Parce qu'eux calculaient en fonction de 17,5 tonnes ou
17,7 tonnes à peu près. A ce moment, $22.50, d'après eux,
ce n'était pas tout à fait suffisant. Il faut dire que 80% de la
production, dans les années passées, venaient de gens qui
faisaient 20 tonnes et plus. C'était réaliste notre affaire.
C'était vraiment réaliste, plus une participation à 50-50
des profits.
Maintenant, il semble que la formule ne leur a peut-être pas plu.
L'autre formule précédente, c'était une formule je
le sais, c'est moi qui l'ai implantée croissante suivant le prix
du sucre.
M. Giasson: Comparez, les conditions que vous avez
proposées, $22.50 la tonne au départ, plus un partage à
50-50 s'il y a des excédents de prix...
M. Garon: 50-50 s'il y avait des profits, oui.
M. Giasson: ...aux conditions faites à ces mêmes
producteurs l'an dernier. Donnez-nous la situation de l'an dernier.
M. Garon: L'année passée, ils ont eu $21.65.
M. Giasson: Et ils n'ont eu aucune participation dans des
excédents possibles?
M. Garon: Non, parce qu'il y a eu...
M. Giasson: Le prix du sucre a été trop bas.
M. Garon: ...déficit l'année passée.
M. Giasson: Le prix du sucre a fait en sorte que la raffinerie
n'a pas eu d'excédents?
M. Garon: Oui, il y a eu un déficit. Ce n'était
vraiment pas un mauvais contrat.
M. Giasson: C'est ce que je m'explique difficilement. Si les
producteurs, dans une spécialité donnée, sont en mesure
d'aller chercher un rendement net, à l'acre, tout aussi bon que dans
n'importe quelle autre production agricole, je ne m'explique pas que des gens
raisonnables et intelligents disent non. Il y a un secteur où cela
dépasse tout entendement. Tout d'abord, le rendement moyen de la culture
de la betterave, en bénéfices nets, se compare avec toute autre
production, maïs fourrager, maïs-grain.
M. Garon: Excepté que les producteurs de betterave, en
général, ce sont les meilleurs producteurs de la province de
Québec.
M. Giasson: Au point de vue du rendement...
M. Garon: Ce sont des gens qui sont bons en tout.
M. Giasson: ...à l'acre, cela se compare à toute
autre culture?
M. Garon: Oui. La moyenne est à peu près à
17,5, 18. Aux Etats-Unis, elle est peut-être de 21, mais il faut tenir
compte de la Californie où elle est de 27 et où les conditions
climatiques sont complètement différentes des nôtres. Si on
regarde les rendements au Québec présentement en betterave
sucrière, ils sont plus élevés que ceux de l'Ouest. On est
bon, nos gars sont bons!
M. Giasson: De toute façon, est-ce qu'on peut nous
produire les chiffres, le nombre de producteurs qui ont ensemencé cette
année, le volume d'acres par producteur? Cela pourrait être
disponible à très brève échéance, parce que
les ensemencements sont terminés.
M. Garon: Oui.
M. Giasson: En dépit des conditions que vous avez
posées, qui sont supérieures à celles de l'an dernier,
est-il possible de croire que, si vous aviez proposé un prix
faisons une hypothèse de $24 la tonne, cela aurait
été un facteur qui les aurait encouragés davantage ou si
on aurait eu le même blocage, comme attitude, de la part des
producteurs?
M. Garon: Ceux qui décident de produire le décident
quasiment un an d'avance. Ils font les engraissements de terrain en
conséquence.
Beaucoup de rumeurs ont circulé, parmi les producteurs, à
un moment donné, à savoir que si la production de betterave
à sucre n'était pas assez forte, par exemple, que la raffinerie
ne l'achèterait pas, qu'ils feraient mieux de ne pas produire cette
année. Moi je dis aux gens de la raffinerie de démentir cela.
Mais il y a eu beaucoup de rumeurs qui ont circulé, de sorte que les
gens étaient indécis. Ils se disaient: Tout à coup elle
décide de ne pas acheter notre production? Il y en a qui ont
décidé de diversifier immédiatement, d'après les
renseignements qu'on a eus. Ils ont dit: Au lieu de mettre 100 acres, on va
mettre 20 acres en blé, 80 en betteraves, etc.
Nous avons fait certains sondages auprès de producteurs qu'on
connaissait. Un bel après-midi de sondages. Les gens qui, quand
même, avaient un rendement de 20 tonnes ont dit: $22.50, c'est
raisonnable. Cela reste encore une culture qui est rémunératrice
pour nous.
Le Président (M. Boucher): C'est l'heure de l'ajournement.
Il reste le député de Champlain et le député de
Huntingdon qui ont demandé la parole, donc je retiens leurs noms pour la
séance qui va suivre probablement cet après-midi. Nous devons
ajourner sine die.
M. Giasson: Très bien, M. le Président. (Suspension
de la séance à 13 h 2)
Reprise de la séance à 16 h 34
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, mesdames et
messieurs!
Reprise des travaux de la commission de l'agriculture sur les
crédits de l'année financière se terminant le 31 mars
1978. Les membres de cette commission sont M. Baril (Arthabaska), M.
Beauséjour (Iberville), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), remplacé
par M. Bordeleau (Abitibi), M. Charbonneau (Verchères), M. Clair
(Drummond), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Dubois (Huntingdon), M. Gagnon
(Champlain), M. Garneau (Jean-Talon), M. Garon (Lévis), M. Giasson
(Montmagny-L'Islet), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M.
Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Picotte (Maskinongé),
M. Rancourt (Saint-François), M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt
(Orford). M. le député de Champlain.
M. Gagnon: La question que je voulais poser est toujours en
rapport avec la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire. On a dit que le
coût de production était de $22.06 la tonne, c'est cela? Le
coût de production négocié, n'est-ce pas ce que nous avons
dit cet avant-midi?
Une Voix: Pouvez-vous répondre là-dessus? M.
Garon: Pardon?
M. Gagnon: On n'a pas dit cet avant-midi que le coût de
production était de $22.06?
M. Garon: C'est plus que le coût de production, cela.
M. Gagnon: ... et qu'on avait négocié...
M. Garon: 100% du revenu de l'ouvrier
spécialisé.
M. Gagnon: Avec 100% du revenu de l'ouvrier
spécialisé. Par contre, on considère que le rendement,
pour atteindre ce coût de production, devrait être de... Est-ce 20
tonnes l'acre?
M. Garon: Oui.
M. Gagnon: On a dit aussi que le rendement moyen, actuellement,
était de 17,5 tonnes et que nos producteurs de betteraves étaient
parmi les meilleurs. Est-ce que le coût de production à $22.06
avec un rendement de 20 tonnes est réaliste à ce
moment-là?
M. Garon: En fait, l'assurance-stabilisation peut être une
bonne ou une mauvaise mesure. Si c'est une mesure qui a pour but de ne pas
encourager la productivité, cela peut être mauvais, au fond,
tandis que le taux moyen, d'après tous ceux qui travaillent
là-dedans, devrait être un peu plus haut que la moyenne pour
créer une incitation à l'augmentation de la
productivité.
M. Gagnon: Vous permettrez, M. le ministre. parce que j'ai eu
l'occasion déjà de négocier des coûts de production.
Si sur 400 producteurs de betterave qu'on considère parmi les meilleurs,
ce qu'on a dit cet avant-midi, on arrive avec une différence de 2,5
tonnes à l'acre, c'est-à-dire que l'idéal à
atteindre serait de 20 tonnes pour le coût de production, à ce
moment-là, est-ce assez réaliste? C'est entendu que la
stabilisation du revenu ne doit pas encourager le producteur à
être inefficace. Je suis d'accord mais il faut tout de même avoir
des normes qu'on peut atteindre. Si on calcule le coût de production sur
un rendement pratiquement impossible que seulement une minorité de
producteurs peuvent atteindre, à ce moment c'est peut-être pour
cela qu'on a perdu un certain nombre de producteurs cette année.
M. Garon: Les rapports que j'ai eus ne sont pas conformes
à cette idée. Ce qu'ils disaient, c'est que, d'après les
sondages qu'on a faits 70% à 75%, j'ai passé un
après-midi au téléphone avec M. Jacques du
ministère et on a obtenu différents renseignements des
producteurs et ceux qui font au-dessus de 20 tonnes l'acre trouvaient cela
très bien, ce qui est assez considérable quand même. Il y a
un certain nombre de producteurs qui font, apparemment, onze, douze, treize,
quatorze tonnes à l'acre. Evidemment, ce n'est pas payant, parce que les
rendements ne sont pas assez élevés.
Maintenant, il y a des éléments qui font que certaines
personnes, certains producteurs n'ont pu produire. Il y a d'autres
éléments. Un des éléments, par exemple, cela a
été on ne l'a pas mentionné ce matin la
possibilité de grève des employés de l'usine. Il y a eu un
climat d'incertitude concernant l'usine. Sera-t-elle modernisée, est-ce
qu'elle ne le sera pas, est-ce qu'elle va être fermée, etc.? Un
climat d'incertitude. Ce qui est arrivé, c'est que les gens me disaient:
S'il n'y a pas assez de production, on pourrait fermer. Si des employés
font une grève aussi dure que l'année dernière ou que
l'année précédente au sujet des négociations,
qu'arrivera-t-il? Ce climat d'incertitude a fait que les gens ont dit: Je vais
en mettre moins en betteraves que j'ai l'habitude d'en mettre, et certains
autres ont dit: Je n'en mettrai pas du tout.
Les négociations qui se font dans ce secteur, à mon avis,
sont un modèle de négociations absurdes. Parce qu'on
négocie la veille, sinon trois jours après le jour où on
aurait dû semer. Cela n'a aucun bon sens. Ces questions devraient
être réglées bien avant cela, parce qu'apparemment, ce
qu'on m'a dit, c'est que cela fait 30 ans que c'est comme cela. On
négocie les prix le jour où on devrait semer, ou deux ou trois
jours après le jour où on aurait dû semer. Cela ne marche
pas. J'ai constaté aussi en rencontrant les producteurs que parce que
c'est une entreprise gouvernementale, on s'attend que cette entreprise ne se
comporte pas comme une entreprise qui recherche une certaine
rentabilité, mais qu'elle est là simplement pour distribuer de
l'argent. J'ai eu nettement ce sentiment. Je pense que c'est un mauvais
sentiment parce que si au fond on se comporte vis-à-vis de toutes les
entreprises d'Etat comme vis-à-vis
d'entreprises qui n'ont aucun critère de rentabilité
à observer, il n'y en aura pas une entreprise d'Etat.
M. Gagnon: Je voudrais attirer votre attention, M. le ministre,
sur le fait qu'actuellement chaque secteur spécialisé en
agriculture est assez bien structuré. A l'intérieur des
spécialités agricoles on a des économistes, on a ce qu'il
faut pour en arriver à déterminer nos coûts de production.
Or, on voit que la moyenne d'âge du producteur agricole augmente. On sait
aussi que la relève est difficile en agriculture.
J'aimerais qu'on en vienne dans l'avenir à pouvoir
négocier des coûts de production à l'intérieur de
chaque spécialité, qui répondraient à des normes un
peu plus acceptables pour le producteur. Cela ne veut pas dire,
évidemment, de ne pas favoriser un maximum de rendement, mais, si on
exige, par exemple, des rendements tels que seulement une faible proportion des
producteurs peuvent les atteindre, on n'encourage pas en fait la relève
en agriculture. C'est sur cela que je voudrais attirer votre attention.
M. Garon: Dans certains cas, comme dans le boeuf, je pense que
c'est 90% du revenu de l'ouvrier spécialisé, tandis qu'à
$22.06, cela arrivait à 100% du revenu de l'ouvrier
spécialisé. D'ailleurs, je n'ai pas eu l'impression que
c'était un point contesté quand j'ai rencontré les
producteurs. Je leur ai offert une discussion entre les économistes du
ministère et les économistes de l'UPA pour voir si le coût
de production était correct. Je voulais qu'il y ait une discussion
là-dessus et cela a été refusé
immédiatement. Il ne semble pas y avoir eu de discussion vraiment
là-dessus.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Huntingdon.
M. Dubois: J'aurais plusieurs questions à poser au
ministre.
Le Président (M. Laplante): Après, M. le
député de Beauce.
M. Dubois: Premièrement, j'aimerais mentionner au ministre
que l'entreprise privée n'aurait jamais investi dans une raffinerie. En
tout cas, à mon sens, l'entreprise privée n'aurait pas investi
dans la raffinerie de Saint-Hilaire. Je pense qu'au ministère on ne
devrait pas chercher la rentabilité, puisque, si cela avait
été intéressant au niveau de la rentabilité,
l'industrie privée serait rentrée là-dedans. Je pense
qu'on devrait l'oublier un peu, la rentabilité, et puis ouvrir des
champs de production pour les jardiniers.
M. Garon: Si l'entreprise d'Etat ne cherche pas la
rentabilité par ailleurs, après cela on va dire: Ce n'est bon
à rien, les entreprises d'Etat, parce que ce n'est pas rentable; c'est
mieux l'entreprise privée.
M. Dubois: II y a un commencement. Elle n'a jamais
été bien loin encore; on est au même point qu'au
début ou à peu près. Je pense qu'il faudrait lui donner la
chance encore, quitte à changer...
M. Garon: Moi, je suis d'accord qu'on la rentabilise en la
diversifiant. Un des problèmes, c'est de payer des salaires à
l'année pour un travail qui dure 100 jours. Il s'agit de la diversifier
en trouvant une autre utilisation pour compléter le reste de
l'année.
M. Dubois: Le premier ministre a déjà
mentionné que l'état de l'usine était lamentable. A ce
moment, il a mentionné qu'il faudrait faire quelque chose pour
l'améliorer. C'était tout de même dans les vues de votre
parti de la laisser vivante.
M. Garon: C'est aussi dans mes vues.
M. Dubois: C'était dans vos vues, il n'y a pas tellement
longtemps, de la fermer aussi.
M. Garon: Non, jamais.
M. Dubois: Bien, ce n'était pas loin, en tout cas.
M. Garon: Jamais cela n'a été dans mes vues de la
fermer.
M. Dubois: Ce n'était pas loin de vos vues parce que vous
avez dit: On la ferme ou on la laisse ouverte. Vous avez mentionné ces
mots.
M. Garon: Non, j'ai dit, à un moment donné: Si les
producteurs ne sont pas intéressés à produire de la
betterave, cela ne donne rien de garder l'usine ouverte.
M. Dubois: Cela dépend pas mal du ministère de
transiger un prix avant le jour des semences aussi.
M. Garon: Le conseil d'administration a été
formé pour trouver une possibilité de diversifier la production
de la raffinerie pour la rendre rentable. C'était cela, c'est
là-dessus que j'ai travaillé constamment.
M. Dubois: Mais cela aurait été au conseil
d'administration de s'asseoir avec l'Association des producteurs avant le jour
des semences pour régler le problème du prix.
M. Garon: Ils l'ont fait par l'intermédiaire de leur
directeur général.
M. Dubois: Ils l'ont fait, mais ils l'ont fait la journée
des semences, quand sont commencées les semences.
M. Garon: Non, cela a commencé un mois avant cela.
M. Dubois: Bien, écoutez!
M. Garon: Non, non, c'était commencé.
M. Dubois: Ecoutez! La journée où vous avez eu une
rencontre avec l'association, il y avait des gens qui hersaient dans les
champs, à Saint-Hyacinthe.
M. Garon: Quand ils sont venus me voir, la raffinerie leur avait
dit: Nous autres, le prix maximum qu'on peut offrir, sur une base rationnelle,
c'est ce prix-là, $22.50 plus le partage des profits. Si le
ministère veut, par un programme particulier, vous donner plus, c'est
une autre affaire. Ils ont dit: Nous autres, au point de vue de l'entreprise,
on ne peut pas vous donner plus que $22.50 parce qu'on a des critères
dans l'administration d'une entreprise.
M. Dubois: Cela prend une vingtaine de tonnes à l'acre
pour que ce soit rentable. Pour celui qui en a quinze, ce n'est pas rentable
à ce prix-là.
M. Garon: C'est moins payant.
M. Dubois: Ce n'est pas moins payant, ce n'est pas rentable.
Présentement, à quinze tonnes l'acre, ce n'est pas payant, alors
personne n'en fait. Il faut viser vingt tonnes et ce ne sont pas toutes les
terres qui vont avoir vingt tonnes. C'est selon le climat, la qualité du
terrain et les engrais. En tout cas, un paquet de choses.
M. Garon: Oui, mais d'un autre côté, si la Loi de
l'assurance-stabilisation travaille au-dessous ou même au niveau des
moyennes de production, elle ne fonctionnera pas longtemps. Ce qui va arriver,
c'est qu'à un moment donné cela va tellement démotiver les
gens dans la production qu'au lieu d'être une incitation à la
productivité...
M. Dubois: En dehors de la loi de la stabilisation, le
cultivateur qui n'a pas d'assurance sur sa récolte, par exemple, et qui
a seulement quinze tonnes, ce n'est pas intéressant. Il est mieux de ne
pas en produire, de produire autre chose. Il ne fait pas de dollars nets au
bout de l'année avec quinze tonnes, cela lui prend vingt tonnes. Ce sont
les cinq dernières tonnes qui font son profit net.
M. Garon: Mais il me semble qu'une bonne partie des producteurs
font au-delà de vingt tonnes. Entre vingt et trente tonnes. On dit qu'on
va au moins jusqu'à trente tonnes.
M. Dubois: Mais quand vous prenez les moyennes annuelles, cela ne
va pas à vingt tonnes, cela va à quinze tonnes, à peu
près, la moyenne dans le Québec.
M. Garon: Non, non, ce n'est plus cela.
M. Dubois: En 1975 ou 1976, je ne sais pas quelle année,
c'était quinze tonnes, en moyenne. Il y a des années plus
basses.
M. Garon: Regardez la moyenne des sept ou huit dernières
années, elle se situe autour de 17,5, 17,7.
M. Dubois: II y a des comtés qui sont à 11,
d'autres comtés sont à 20.
M. Garon: Oui, mais si on fait une moyenne, il faut faire une
moyenne.
M. Dubois: Oui, d'accord.
M. Garon: II peut y avoir des petits producteurs. Les 80% du
volume qui rentre viennent de producteurs qui font vingt tonnes et plus
à l'acre.
M. Dubois: D'accord, ce sont de gros producteurs
spécialisés.
M. Garon: Exactement. Les petits...
M. Dubois: Oui, mais il faut qu'ils aient de la belle
température, il faut qu'ils aient tout pour eux pour faire vingt tonnes
en moyenne.
M. Garon: Non, un producteur qui a le moindrement de bon sens,
vingt tonnes, il atteint cela assez facilement.
M. Dubois: Les chiffres qui ont été publiés,
en tout cas, sont proches des vingt tonnes.
M. Garon: On pourra les sortir.
M. Dubois: J'aimerais qu'on les ait. J'aurais d'autres questions
à poser au sujet de dépôts de documents, mais je peux
attendre que monsieur ait posé sa question.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: J'aimerais avoir une directive, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Oui.
M. Roy: On m'informe qu'il y a eu une entente, ce matin, à
l'effet qu'on discute de la question de la raffinerie de sucre avant de
reprendre les débats généraux de l'agriculture. Il y a
peut-être des représentants de la raffinerie qui, aussitôt
que ce travail sera terminé, pourront être
libérés.
D'un autre côté, j'aimerais, aussitôt que cette
discussion sera terminée, revenir sur les commentaires
généraux puisque je n'ai pas eu l'occasion de le faire ce matin,
étant donné que j'étais en commission parlementaire des
affaires municipales, qui a siégé pour la dernière
fois.
Le Président (M. Laplante): Je vous comprends, M. le
député de Beauce-Sud. Ce matin ce n'est pas moi qui
présidais mais, après discussion avec le président qui m'a
précédé, on parlait sur les
généralités encore. Tant que le débat de fond ne
sera pas fini, on ne commencera aucun programme. Cela vous permet de poser des
questions générales et, après cela, on commencera un
programme lorsque les membres seront prêts à
aborder les programmes. M. le député de Beauce-Sud c'est
à vous la parole.
M. Roy: Est-ce que je peux faire mes commentaires
généraux à ce moment-ci?
Le Président (M. Laplante): Faites vos commentaires, M. le
député de Beauce-Sud.
M. Roy: Je vous remercie, M. le Président, je ne voudrais
pas brimer les droits de mes collègues de revenir sur cette question de
raffinerie de sucre puisqu'il y a une couple de dossiers à ce sujet qui
m'intéressent également. M. le Président, comme je viens
de vous le dire, je n'ai pas pu assister ce matin à l'ouverture de
l'étude des crédits du ministère de l'Agriculture, parce
que je devais assister à la dernière séance de la
commission parlementaire des affaires municipales dont je suis également
membre.
Quand même, j'en ai profité ce midi pour jeter un coup
d'oeil sur les propos que le ministre de l'Agriculture a tenus ce matin. Je
dois dire, M. le Président, à prime abord, que j'ai
été passablement déçu. J'ai été
passablement déçu de constater qu'il n'y a à peu
près rien de nouveau au ministère de l'Agriculture, pas
d'intention véritable d'apporter des solutions et des remèdes aux
nombreux problèmes que connaît la classe agricole ou le monde
rural à l'heure actuelle.
L'année dernière, au cours de cette même
séance de commission parlementaire, j'avais été
extrêmement sévère à l'endroit du ministre de
l'Agriculture, étant donné que cela faisait six ans qu'on
examinait ces crédits et que nous nous retrouvions à peu
près toujours dans la même situation. Cette année nous
avons un nouveau ministre. Evidemment, je ne peux pas le tenir responsable de
la situation qu'il a retrouvée, lorsqu'il a pris la direction de son
ministère, mais quand même il devrait y avoir à ce
moment-ci une intention véritable, des indications véritables de
redressement et de correctifs qui devraient être apportés dans ce
secteur.
Le ministre a parlé de la convocation d'un sommet agricole
à l'automne, les états généraux de
l'agriculture...
M. Garon: L'agro-alimentaire.
M. Roy: L'agro-alimentaire, et j'ai vu cela dans la transcription
du journal des Débats. C'est une mesure à laquelle je souscris,
mais je pense qu'il y a une chose qu'il est essentiel, au préalable, de
bien établir.
Attendre à l'automne et reporter tous les problèmes de
l'agriculture à ce sommet agroalimentaire, des discussions et des
orientations qui seront prises et adoptées, qui se continueront
probablement pendant quelques semaines et qui arriveront peut-être trop
tard pour orienter de façon sensible les politiques du ministère
de l'Agriculture pour l'an prochain de façon qu'on se retrouvera
toujours dans la même situation de tâtonnement, c'est le terme
qu'il faut employer, et avec les mêmes problèmes.
Je pense qu'il y a un problème qui est préalable, M. le
Président, un problème de base et de fond dans le secteur
agricole. Il y aurait lieu de réunir les quatre principaux agents de
l'activité agricole et de créer une chambre agricole le plus
rapidement possible. Parmi les membres de cette chambre agricole il devrait
évidemment y avoir une place pour le syndicalisme agricole et ses
représentants, pour les représentants du monde de la
coopération, les représentants des groupements et associations
concernés et aussi les représentants du monde de l'industrie de
transformation et de mise en marché.
Nous avons l'impression, lorsqu'on rencontre les agriculteurs, les
différents groupements du monde agricole, qu'il y a une division
à l'intérieur de ce monde qui cause des problèmes
extrêmement sérieux, qui entraîne des pertes de temps et qui
coûte des sommes fabuleuses aux agriculteurs. Qu'il suffise de regarder
les problèmes qui sont suscités entre le syndicalisme et le
coopératisme. Je pense qu'il faut appeler les choses par leur nom. Je ne
mets pas de nom, je ne blâme personne parce que chacun de son
côté essaie d'apporter des solutions et de véritables
réponses au problème de l'agriculture.
Au niveau des groupements et associations c'est la même chose. On
a l'impression que le syndicalisme, je dis bien, lutte contre la
coopération, que la coopération a peur du syndicalisme, que les
groupements et associations ont peur des deux, que les deux premiers ont peur
des autres et que le monde de l'industrie de transformation et de mise en
marché se sent un peu coincé dans tout cela, de sorte que
personne ne s'y retrouve.
Cela prend peut-être un peu de courage, M. le Président,
pour dire ces choses car il y en a qui n'aimeront peut-être pas les
propos que je tiens. Je pense que si l'on veut corriger un problème, si
l'on veut corriger un mal, il faut aller à la source du mal et regarder
exactement où en sont les causes et quelles sont les causes.
Je pense que tout ce monde aurait intérêt, surtout pour la
classe agricole, le milieu rural et la nation québécoise toute
entière, de faire en sorte que ces gens puissent se retrouver à
un moment donné assis autour d'une même table et qu'on se rende
compte, et que l'on réalise qu'ils ont chacun leur place et leur
rôle à jouer, un rôle bien déterminé.
Ils peuvent très bien se compléter les uns les autres, au
lieu d'essayer de se supplanter les uns les autres. C'est tellement vrai, ce
que je viens de dire, qu'il y a de plus en plus de groupements de producteurs
qui s'inscrivent comme des producteurs dissidents. Dans tous les domaines: les
oeufs, le porc, le bois et dans d'autres domaines, on se retrouve avec des
groupes de producteurs dissidents. Quand il y a des groupes de producteurs
dissidents, c'est parce qu'il y a des problèmes. Si des gens sont
obligés de se former des associations nouvelles à
côté des associations et des groupements existants, c'est parce
que justement ils ne trouvent pas dans ces groupements et associations
réponse à leurs problèmes. Ils ne voient pas de solution
dans ces associations et
dans ces groupements, peut-être à tort, peut-être
à raison; je ne veux pas porter d'accusation, mais je dis tout
simplement que ce sont des faits qui existent, il va falloir que cette question
se vide, à un moment donné. C'est pour cette raison que la
création d'une chambre agricole pourrait permettre sûrement
d'asseoir autour d'une même table des personnes pour qu'on cesse de se
regarder de travers comme des concurrents de part et d'autre, mais qu'on se
voie plutôt comme des collaborateurs désireux de travailler dans
l'intérêt d'une classe qu'ils ont, chacun de leur
côté, à représenter d'une façon bien
précise. Je pense que cela devrait être le commencement d'une
nouvelle orientation du ministère de l'Agriculture et des politiques
agricoles au Québec.
Ceci dit, j'aimerais aborder le problème des agriculteurs
eux-mêmes. Les agriculteurs ont de plus en plus de problèmes. Il
semble que la devise qu'on leur a demandé d'adopter soit celle-ci: La
prospérité par l'endettement. On se gargarise un peu partout des
sommes fabuleuses qui sont consenties au niveau du crédit agricole. On
dit: Cela va bien dans l'agriculture; on a prêté tant de capitaux.
Par contre, lorsqu'on rencontre des agriculteurs individuellement, on se rend
compte qu'ils sont "poignés" on peut l'écrire entre
guillemets pour les fins du journal des Débats pour de bon parce
qu'ils sont devenus en quelque sorte des esclaves.
Je vais prendre les propos qu'un agriculteur me livrait, il n'y a pas
tellement longtemps. Il me dit: Avec l'organisation que je suis obligé
de maintenir pour avoir une certaine rentabilité, je n'ai pas le droit
d'avoir un jour de congé, je n'ai pas le droit d'avoir même la
grippe, parce que je n'ai pas le droit d'être malade. C'est un peu vrai
que les agriculteurs du Québec sont surchargés à l'heure
actuelle et sont conditionnés par le système à un point
tel qu'ils doivent travailler comme à peu près pas une autre
classe de la société n'est prise pour le faire. Cela
m'apparaît tout à fait anormal, parce que la santé est une
chose, à un moment donné, qui quitte les individus.
Combien nombreux sont les agriculteurs qui vont rencontrer leur
député, leur président de syndicat, qui vont aux bureaux
de l'UPA ou lorsqu'on les rencontre à l'occasion de colloques ou
à l'occasion de congrès, ils nous disent qu'après 50 ans,
après 55 ans, ils ne sont plus capables de tenir. On assiste toujours au
fameux phénomène des ventes à l'encan qui se multiplient
dans tout le Québec. Le plus tragique dans tout cela, M. le
Président, c'est qu'on constate qu'il était pratiquement devenu
impossible pour un jeune de commencer dans l'agriculture.
Un secteur d'activité économique qui ne permet pas
l'arrivée de nouveaux membres est un secteur qui est déjà
sclérosé, qui est cancérisé et qui est voué
à l'extinction complète. Une ferme rentable, au Québec,
est une ferme dont la valeur se situe entre $60 000 et $75 000, voire
même $100 000 pour être prétendument rentable. Il y a des
jeunes qui finissent dans les écoles polyvalentes ou dans les instituts
de technologie agricole et qui désirent se lancer dans l'agriculture,
avec des dettes d'étude comme tous les autres jeunes qui sortent des
études. Ils n'ont pas les garanties suffisantes pour offrir la marge de
sécurité aux institutions financières qui doivent, en
vertu de la sécurité et en vertu de leurs propres
règlements, garantir les prêts qu'elles font. Ces
sociétés disent à l'agriculteur: Ta mise de fonds n'est
pas suffisante. Ou encore, si la mise de fonds est suffisante, on lui dit: Ton
entreprise n'est pas rentable. J'ai eu des dizaines de cas de personnes qui
sont venues, de mon comté, des comtés de ma région, me
rencontrer à mon bureau de comté pour me soumettre des cas et
leurs problèmes, et j'ai été en mesure de vérifier
les faits que je viens de citer.
Alors, si on n'a pas de politique d'établissement agricole, et il
ne semble pas y en avoir de véritable, au moins de réaliste,
capable de comprendre la situation dans laquelle se trouvent nos futurs
agriculteurs du Québec, M. le Président, on sera obligé
d'ici à dix ans, au Québec, de faire ce que d'autres pays ont
fait: une réforme agraire. Il va peut-être falloir y penser
sérieusement. L'ancien ministre de l'Agriculture m'a déjà
dit qu'il commençait à y penser. Alors, je pense qu'avant de
procéder à une réforme agraire, on serait peut-être
mieux de regarder quels sont les moyens à prendre pour faire en sorte
que dans l'agriculture il puisse y avoir une relève, il puisse y avoir
des débutants, de façon que la génération actuelle
puisse trouver des remplaçants pour demain. Tantôt, ce n'est pas
des dizaines et des dizaines de millions qu'il faudra investir dans le secteur,
on sera aux prises avec les problèmes de l'environnement, ce seront des
milliards qu'il faudra investir dans le secteur agro-alimentaire parce qu'il
sera trop tard. Alors, je le dis à l'intention du ministre et de ses
collaborateurs.
M. le Président, j'ai participé, en étroite
collaboration avec mon collègue de l'Opposition dans le temps,
l'honorable député de Saguenay, M. Lucien Lessard, à des
débats pour tâcher de forcer le gouvernement à prendre
certaines orientations en ce qui a trait à l'approvisionnement en
protéines pour les agriculteurs. On sait que les grains de provende,
actuellement, sont $2 les 100 livres de plus qu'ils étaient l'an dernier
à pareille date. J'ai fait des vérifications. On parle de $9.25,
de $9.50, de $9.75 les 100 livres, alors que l'an dernier on nous parlait de
$7.50, de $7.75, donc $2 de plus. Je voudrais savoir si le nouveau ministre du
gouvernement a l'intention de doter le Québec d'un office des grains de
provende on pourra peut-être lui donner un autre nom, le nom a peu
d'importance d'un organisme gouvernemental qui aurait le pouvoir de
négocier les conditions d'achat, de prix et de livraison des grains de
provende pour alimenter les agriculteurs québécois.
C'est le problème no 1, c'est un problème majeur. Qu'on
soit demain dans un Québec indépendant, dans une constitution
renouvelée, dans une souveraineté-association ou dans un statut
d'Etat associé, cela a peu d'importance. On ne changera pas la
réalité des choses, le Québec devra continuer à
s'alimenter en grains de provende, que ce
soit des provinces de l'Ouest, que ce soit des autres pays exportateurs
de grains de provende dans le monde. On n'est pas autosuffisant dans ce
secteur, on ne sera pas autosuffisant l'an prochain et on ne sera pas
autosuffisant non plus dans dix ans. Cela fait que le gouvernement du
Québec devra, d'une manière ou d'une autre, même si c'est
le statu quo qui prévaut sur le plan constitutionnel, ce que je
n'approuverais pas, en venir effectivement à doter le Québec d'un
organisme qui aurait les pouvoirs de négocier.
C'est sérieux, je le dis à l'intention de mes honorables
collègues qui siègent peut-être à une commission
parlementaire pour la première fois, les pays qui achètent des
grains de provende de la Commission canadienne du blé du gouvernement
fédéral achètent à meilleur marché que le
Québec pour s'approvisionner. Ces choses ont été
prouvées. Cela peut encore être prouvé. On sait très
bien qu'il y a trois catégories de prix au niveau des grains de provende
qui sont mis en marché par la Commission canadienne du blé. Vous
avez le prix des provinces productrices. Vous avez le prix des marchés
internationaux. Vous avez le prix de l'Est.
Le Québec est concerné et c'est décidé en
vertu de la IIIe section des négociations qui concernent les provinces
de l'Est. C'est un peu absurde, un peu ridicule. Je pourrais citer des chiffres
qui l'ont été à cette commission parlementaire par mon
collègue du Saguenay, collège, membre du Conseil des ministres,
de l'actuel ministre de l'Agriculture. Il a cité des chiffres ici en
commission parlementaire, l'an dernier, il y a deux ans. Ceci a
également fait l'objet de motions spéciales, même de
motions de blâme à l'Assemblée nationale à l'endroit
de l'ancien gouvernement, parce qu'effectivement les agriculteurs du
Québec avaient de la difficulté à s'approvisionner au
niveau des grains de provende.
M. le Président, il y a bien d'autres articles que nous pourrions
aborder lors de l'étude de ces crédits. Je pourrai revenir de
façon beaucoup plus explicite lors de l'étude programme par
programme, à chacun des éléments des différents
programmes du ministère. J'aimerais peut-être revenir sur le sujet
qui était en discussion au moment où vous m'avez donné la
parole, M. le Président, soit la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire.
J'aurais deux questions à poser à l'honorable ministre
là-dessus. Puisqu'il a parlé, tout à l'heure, du soutien
des prix vis-à-vis des producteurs de betteraves à sucre par
l'entremise de l'office de stabilisation des prix, j'aimerais savoir si c'est
une décision qui est définitive, M. le Président, si c'est
la commission de stabilisation des prix des produits agricoles qui va voir,
à un moment donné, à garantir des prix minimums aux
producteurs de betteraves. Deuxièmement, j'aimerais savoir si la
raffinerie de Saint-Hilaire a raffiné quelques milliers de livres du
sirop d'érable qui avait été entreposé à la
suite du programme conjoint entre le fédéral et le provincial,
qui avait permis de cueillir toute la récolte de sucre et de sirop
d'érable qui était demeurée invendue chez les producteurs
et dont certaines productions dataient de trois ans.
Est-ce que le ministre est en mesure de me donner des chiffres
là-dessus?
M. Garon: Au sujet de la première question, ce n'est pas
comme cela que le problème s'est posé. La raffinerie offrait
$22.50 la tonne, plus un partage de 50-50 des bénéfices entre la
raffinerie et les producteurs. Dans les négociations, la raffinerie
avait dit au syndicat des producteurs que c'était le maximum où
elle pouvait aller. Elle considérait cela raisonnable, tenant compte du
marché, des prix du sucre anticipés, etc., $22.50 la tonne, plus
50-50 des bénéfices.
Maintenant, s'il y a autre chose, s'il doit y avoir un
supplément, il faudrait peut-être aller voir au ministère
de l'Agriculture. Tenant compte de l'état des négociations, j'ai
demandé immédiatement aux gens du ministère de calculer
les coûts de production, comme si on pensait en termes de stabilisation
des revenus. Le calcul de ces coûts de production est arrivé
à ce que je disais, ce matin, et dont on a parlé tout à
l'heure, de $22.06 la tonne avec une moyenne de 20 tonnes à l'acre et
avec 100% du revenu d'un ouvrier spécialisé. Il n'était
pas question de plus que cela, comme la raffinerie offrait un prix plus
élevé que ce qu'avait donné l'assurance-stabilisation des
revenus. Moi, ce que j'ai offert au syndicat, à ce moment, c'est que les
économistes de l'UPA et les économistes du ministère
discutent ensemble à savoir s'il y avait des accords au point de vue des
techniques parce qu'il y a une formule assez complexe pour un
ajustement et s'il y avait des désaccords. Le syndicat a refusé.
Il a dit qu'il n'était pas intéressé à discuter sur
cette base. Il été surtout intéressé à
parler des quelques millions qu'il avait dans le fonds de réserve de la
raffinerie et qui résultaient d'un prix très élevé
qu'il y avait eu au cours des années, principalement en 1974 et aussi en
1975.
Les producteurs disaient à ce moment: II y a tant de millions qui
ont été faits en surplus, on aurait dû les avoir dans le
temps, mais on a dit que certaines personnes avaient mentionné que ce
serait là pour plus tard. En fait, ces fonds se trouvent à
éponger les déficits qui arrivent depuis la date où les
prix ont été aussi élevés, à cause de
circonstances exceptionnelles dans le marché international du sucre.
M. Roy: Pour ce qui a trait aux 20 tonnes l'acre,
évidemment, si on prend un tonnage qui est supérieur à la
production moyenne pour fixer des prix de revient, je pense qu'on prend tout
simplement une mauvaise formule. Cela a été cité tout
à l'heure par mes collègues qui sont concernés directement
par ce problème, puisqu'ils ont des producteurs dans leurs comtés
respectifs. Il n'y a pas de mise en marché au niveau de la betterave,
puisque la raffinerie de sucre s'occupe d'absorber toute cette récolte
en vue de la transformation ici même au Québec, donc il n'y a
aucun problème de mise en marché qui se pose. Pour quelle raison,
au niveau du ministère de l'Agriculture, ne fait-on pas en sorte de
garantir des prix puisque c'est
un domaine où on est assuré d'avance de
l'écoulement de toute la production minimants pour s'assurer
justement que le producteur puisse être assuré d'une
rentabilité à partir d'une production moyenne? Il est
évident que, s'il a une mauvaise récolte à cause de
phénomènes surnaturels cela fait l'objet de politiques ou
de mesure particulières... Pardon?
M. Giasson: Des phénomènes surnaturels? M.
Garon: Des phénomènes surnaturels!
M. Roy: Non, des phénomènes, autrement dit, qui
échappent à leur contrôle. Je m'excuse du lapsus, M. le
Président. Ce sont des phénomènes qui échappent au
contrôle des producteurs eux-mêmes et des dirigeants de la
betteraverie. C'est ce que j'ai voulu dire. Je m'excuse du lapsus. Dans le feu
de la discussion, parfois, ce sont des choses qui arrivent.
Je m'étonne un peu puisque ce serait un secteur où le
gouvernement pourrait agir de façon bien réaliste. D'un autre
côté, étant donné, selon le rapport qui a
été publié sur la raffinerie, que cette raffinerie ne
serait pas en production à 100% de sa capacité, j'aimerais
d'abord savoir si c'est exact. Si c'est exact, raison de plus pour inciter les
producteurs à produire davantage. Effectivement, la baisse de production
affecte directement la rentabilité de l'usine. L'argent qu'on veut
économiser à un endroit, on est obligé de l'investir
ailleurs. On est obligé d'investir des sommes d'argent presque
identiques, alors qu'on n'a aucune production pour se reprendre. Autrement dit,
ce sont des dépenses qui constituent de pures pertes.
J'aimerais savoir du ministre s'il est exact que l'usine ne peut
produire à pleine capacité parce qu'il y a un manque
d'approvisionnement.
M. Garon: II semble que les approvisionnements, cette
année, seront plus faibles que l'année dernière.
D'ailleurs, si vous regardez la courbe de production de la raffinerie d'une
année à l'autre, les variations sont considérables. La
plus grosse année, par exemple c'est malheureux
c'était 80 millions de tonnes.
M. Giasson: Moins que cela.
M. Garon: Non, non. Le plus gros prix.
M. Giasson: Le prix?
M. Garon: L'année où le prix était le plus
élevé, c'est ce qu'on a eu; il y a eu 81 000 tonnes,
l'année où le prix a été le plus
élevé.
M. Giasson: Pas 80 millions?
M. Garon: 81 000 tonnes. La production a varié, je pense,
entre 60 000 tonnes et 200 000 tonnes. Il y a des variations
considérables d'une année à l'autre. Je pense que c'est
une lacune. Il devrait sans doute y avoir des formules différentes
pensées pour qu'il y ait un approvisionnement plus stable. Cela n'a pas
de bon sens, au fond. Vous savez, il y a des habitudes là-dedans. J'ai
rencontré des producteurs et j'ai eu le sentiment très net que,
du fait que c'était une entreprise d'Etat, le comportement
n'était pas le même que si cela avait été une
entreprise privée. On sentait qu'on pouvait demander plus à une
entreprise d'Etat qu'on demanderait à une entreprise privée, sans
tenir compte du marché, de la réalité économique,
au fond. Cela a été très clair au cours des discussions.
Moi, cela m'a paru très clair.
D'autres étaient présents; on a invité les
députés des comtés concernés. Il y a trente ans
d'habitudes où la politique intervenait. Moins au cours des
dernières années, mais il y a des habitudes qui ne se
déracinent pas d'un coup sec. Depuis 1944 je le disais ce matin
jusqu'à 1971, c'était un conseil d'administration
formé uniquement de politiciens. Depuis 1971, il y avait le
député du comté, deux hauts fonctionnaires et deux
personnes qui venaient du secteur de l'entreprise privée.
C'est déjà une amélioration. Les gens qui
négocient dans ce secteur sont habitués à en parler bien
plus en termes de politique. La réponse, on a l'impression un peu que le
conseil d'administration c'est un pion par rapport au ministre de
l'Agriculture. Moi, je dis que cela doit changer. C'est une entreprise qui doit
marcher comme une entreprise, autrement il n'a pas besoin de conseil
d'administration. Il n'a besoin que d'un directeur général qui
dépend directement du ministre. Pourquoi un conseil d'administration
s'il n'administre rien?
C'est ce que moi j'ai voulu changer, pour que ce soit un conseil
d'administration qui administre réellement comme une entreprise, puis
cherche à rentabiliser l'entreprise. Pas cette année d'un coup
sec, mais en diversifiant la production et en trouvant de nouvelles formes. Il
y a quelques années, je peux parler du sirop d'érable, cela s'est
fait, M. Jacques vous étiez là à ce moment-là ou
vers ce temps, il y avait des surplus de sirop d'érable au Québec
qui ont été transformés en sucre, vous pouvez
peut-être en dire un mot.
Il y en a une partie qui a été transformée en
sucre, une autre grosse partie a été décolorée et a
été vendue pour aller dans la crème glacée. En ce
qui a trait à la transformation en sucre, on a eu des problèmes,
pas parce qu'on ne pouvait pas le faire à l'usine, mais il y a des
éléments étrangers, des corps chimiques étrangers
qu'on retrouve dans le sirop d'étable et qu'on ne retrouve pas dans le
sucre venant de la betterave sucrière et de la canne à sucre. La
compagnie avec laquelle nous avions un contrat était assez
réticente à ce qu'on mélange à un très haut
niveau le sucre provenant du sirop d'érable.
Evidemment, cet année-là on ne l'a pas fait parce que
c'était très rentable de faire du sucre avec le sirop
d'érable, c'est parce qu'il y avait un surplus, puis on avait une
étude de mise en marché qui était en marche et on ne
voulait quand
même pas que les producteurs soient pénalisés.
C'était surtout le C et le D qui restaient, alors on l'a retiré
de la circulation, de façon que les transformateurs puissent payer les
producteurs, de façon que les producteurs puissent entailler à
nouveau l'année suivante. La preuve, c'est que l'année
dernière, il n'est pas resté une livre de sirop d'érable.
Tout a été vendu, et je ne crois pas qu'on ait de problème
de vente cette année.
M. Roy: Cette année, en ce qui a trait au sirop
d'érable, je ne pense pas, même si la récolte a
été abondante, mais il y a...
M. Garon: ...la mise en marché qu'on a faite, la
création de l'Institut international de l'érable, les promotions
qui ont été faites et tous ces nouveaux marchés qui ont
été ouverts ont bonifié passablement le marché. A
cette période il y avait un problème, puis parce qu'il n'y avait
pas d'organismes à ce moment-là gouvernementaux, un
ministère comme tel ne pouvant pas intervenir, la raffinerie est
intervenue pour faire l'opération.
M. Roy: Sur la question de la raffinerie de sucre, le ministre a
abordé un sujet tout à l'heure, il dit que c'est une entreprise
d'Etat. J'aimerais poser une question, faire une parenthèse en passant:
Si on songe, au ministère de l'Agriculture, à modifier le statut
de l'entreprise, est-ce que la formule coopérative ou une formule qui
pourrait être mixte, société d'Etat, société
coopérative, ne serait pas une réponse qui permettrait
d'intéresser davantage les producteurs, de rentabiliser l'entreprise, de
motiver tout le monde, en quelque sorte, pour qu'on développe davantage
cette raffinerie que nous avons au Québec?
M. Garon: II nous dit que, je ne sais pas si vous avez entendu,
mais un haut fonctionnaire du ministère dit qu'elle a déjà
été offerte aux producteurs pour $1 et ils n'étaient pas
intéressés.
M. Garon: Moi, quand ils sont venus au ministère, je leur
ai dit: Etes-vous intéressés à l'acheter? On n'a pas
parlé de prix, cela ne les intéresse pas, ils n'étaient
pas vraiment intéressés à cela. En tout cas il y a
différentes formules qui sont regardées actuellement et je pense
à des formules dans la perspective de diversification.
On disait ce matin, en plus du sucre, dans les 200 jours qui restent
où elle ne travaille pas, peut-être le petit lait. Il pourrait
peut-être y avoir des associations avec d'autres entreprises.
Actuellement, je peux dire que toutes les formules sont ouvertes pour
l'année qui vient afin de pouvoir la rentabiliser, diversifier la
production et la formule de propriété aussi. Toutes les formules
sont ouvertes à ce point de vue.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Verchères.
M. Picotte: ... des producteurs semblent pas mal brillants.
M. Charbonneau: Je suis assez impliqué par la raffinerie
de sucre parce qu'elle est située dans mon comté et j'ai
été un de ceux qui...
Le Président (M. Laplante): ... vocation agricole, c'est
bien.
M. Charbonneau: ... à la différence près, je
ne suis pas au conseil d'administration, je ne tenais pas à y être
contrairement au député précédent. Mais en parlant
de garanties que le député de Beauce-Sud mentionnait pour les
producteurs, j'étais présent lors de l'acceptation, il faut bien
le dire, à contre-coeur par les producteurs agricoles des
dernières offres de la raffinerie, un samedi après-midi. A cette
occasion plusieurs producteurs m'ont signalé qu'eux seraient
intéressés, surtout pour les jeunes producteurs qui ont à
investir beaucoup d'argent pour de la machinerie dispendieuse. Ils seraient
intéressés à avoir des garanties à long terme,
c'est-à-dire se voir offrir des contrats à long terme qui leur
permettraient d'avoir des contrats pour les cinq prochaines années. Cela
donnerait la chance aux jeunes producteurs agricoles d'investir suffisamment
d'argent dans de la machinerie dispendieuse et avoir les garanties que ces
investissements ne seront pas sujets à toutes sortes d'imprévus
compte tenu de la fluctuation que connaît la raffinerie à chaque
année.
C'était la première remarque que je voulais faire. Je ne
sais pas si le ministre veut faire un commentaire à ce sujet.
M. Garon: Je dis une chose, on parle de diversifier tout cela,
mais il va falloir que les producteurs nous disent aussi s'ils sont
intéressés à produire du sucre de betterave. Je ne sais
pas quels seront les niveaux de production cette année. Apparemment elle
sera beaucoup plus faible. Il faudra que l'on sache d'une façon claire
si c'est une production qu'ils sont intéressés de faire ou s'ils
sont intéressés à faire autre chose et avoir une
sécurité d'approvisionnement.
Je pense que cette raffinerie ne peut être un yo-yo au point de
vue des courbes de production. Cela n'a pas de bon sens. Il va falloir
s'aligner à un moment donné et dire: C'est cela ou ce n'est pas
cela. Si ce n'est pas cela, parfait, on fera autre chose.
M. Charbonneau: Je pense que les producteurs sérieux sont
intéressés, je vous le signale, à avoir suffisamment de
garanties, d'une part, pour pouvoir en donner, d'autre part. Si vous voulez
parler de yo-yo on pourrait vous en parler dans le comté de
Verchères.
M. Picotte: II a un beau yo-yo entre les mains.
M. Charbonneau: Nous aussi.
M. Picotte: Je comprends.
M. Charbonneau: II y a un autre problème que
je signale pour les députés qui sont
intéressés au problème de la raffinerie. A ce sujet, cela
a été signalé plusieurs fois tantôt, par le ministre
également, on n'a pas tenu compte d'une certaine réalité.
Je pense qu'il y a eu des problèmes de mauvaise information.
M. Garon: II y a eu bien des rumeurs.
M. Charbonneau: Pas mal de rumeurs et je tiens à le dire,
malheureusement l'ancien député, qui était au conseil
d'administration, a fait croire aux producteurs que le fonds de réserve
de $8 millions ou $10 millions était un pot dans lequel on pouvait piger
facilement et qui était accessible aux producteurs n'importe quand. Ce
qu'on n'a pas dit aux producteurs, c'est que sur ces $8 millions il y avait $2
millions, selon les informations qui ont été transmises par le
nouveau conseil d'administration, qui étaient un prêt du
gouvernement et $6 millions qui étaient un surplus accumulé
pendant les deux années où il y a eu des profits. Ces surplus
étaient diminués d'autant par le $1,2 million de perte des deux
dernières années et on voulait se garder des portes de sortie si
éventuellement des projets de modernisation étaient
possibles.
Toute la question de la raffinerie, c'est pour les producteurs de
garantir suffisamment une production importante; par ailleurs, qu'on ait au
Québec une raffinerie qui soit capable d'usiner une production
concurentielle. La raffinerie de sucre de Saint-Hilaire a une production
maximale je crois de 150 000 tonnes par année ou à peu
près, on me corrigera, alors qu'elle devrait être doublée.
Pour qu'elle soit doublée il faut tout un plan de modernisation, mais,
pour que la modernisation s'effectue, je pense qu'il va falloir que l'on donne
des garanties et au gouvernement et un peu tout le monde d'impliqué dans
l'opération.
Finalement si on met de l'argent, si l'ensemble des citoyens du
Québec est prêt à investir des fonds dans un plan de
modernisation, ce ne seraient pas des fonds qui vont nous amener à subir
à chaque année encore une fois des déficits. Par ailleurs,
je voudrais demander au ministre, parce que je n'étais pas ici
malheureusement ce matin, s'il a été question du contrat
signé avec le Red-path? A ce sujet, est-ce que des députés
ont demandé des explications quant aux raisons qui ont motivé que
le contrat soit renouvelé à la vapeur dans la semaine
d'intérim qui a suivi le 15 novembre? Je voudrais savoir à quelle
date exactement a été renouvelé le contrat. D'après
mes informations cela s'est fait durant la période d'intérim?
M. Giasson: Un contrat de cinq ans.
M. Roy: Est-ce que le député serait d'accord pour
que le contrat soit déposé?
M. Charbonneau: Oui, je serais d'accord, je ne demande pas
mieux.
M. Giasson: Je pense qu'on peut obtenir la réponse
immédiatement. Il s'agissait d'un contrat de cinq ans signé avec
la compagnie Redpath?
M. Charbonneau: C'était un renouvellement, en tout
cas.
M. Giasson: Oui, mais le contrat de cinq ans arrivait à
échéance à quelle date?
M. Picotte: II y en a un qui l'a mentionné ce matin
d'ailleurs.
M. Garon: Selon les informations que j'ai eues, c'est un contrat
de cinq ans et il restait deux ans à courir. Maintenant, l'information
verbale que j'ai eue quand je m'en suis informé...
M. Picotte: C'est ce que vous avez mentionné ce matin.
M. Garon: Ce sont les informations que j'ai demandées et
que j'ai eues à ce moment.
M. Charbonneau: Selon les informations que j'ai eues, c'est qu'il
y aurait eu intérêt pour le nouveau gouvernement, à
condition qu'il ait eu la possibilité de le faire, de regarder de
près le contrat et de voir si éventuellement il n'y aurait pas eu
des clauses qui auraient eu avantage à être
renégociées. On a passé beaucoup de temps avec les
producteurs à négocier et à tirer "la cenne" d'un bord et
de l'autre, mais on s'est peut-être dépêché un peu
trop.
Le Président (M. Laplante): II pourrait être
déposé. Le député de Verchères serait-il
consentant à un dépôt pour qu'on ait la réponse?
M. Charbonneau: Oui. Le dépôt nous donnerait la
date.
Le Président (M. Laplante): La date et les conditions du
contrat.
M. Giasson: Quels sont les facteurs qui interviennent pour
déterminer le prix du sucre à être payé par la
raffinerie à la Redpath?
M. Roy: Dépôt.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous auriez
d'autres questions à ce moment-ci?
M. Charbonneau: II y a une autre chose...
M. Garon: Le contrat dont vous parlez entre la raffinerie et
Redpath?
M. Charbonneau: Exactement, c'est cela. Je voulais terminer en
disant que c'est assez délicat de discuter, autant pour le
député de Verchères, pour le député de
Saint-Hyacinthe, avec lequel on a travaillé en étroite
collaboration, que pour les autres députés. Du moment qu'il y a
un nouveau conseil d'administration, on considère que les
députés sont des représentants des citoyens, des
producteurs et des employés, mais ne sont plus des agents
privilégiés de négociation. Ce qui a rendu la tâche
assez délicate pour certains députés
tant du gouvernement que de l'Opposition, surtout de l'Union Nationale,
c'est que, comme le ministre l'a indiqué tout à l'heure, on a
été embarqué dans un bateau où on avait affaire
à des mentalités. On était habitué de traiter avec
les députés et on aurait aimé, dans bien des cas, que ce
soient les députés qui règlent les problèmes alors
qu'il y avait un autre conseil d'administration dont le mandat était
clair et qui ne permettait pas aux députés je pense que
c'est une bonne chose d'intervenir indûment. Le
député de Saint-Hyacinthe et moi-même avons un peu agi dans
ce sens comme des négociateurs ou des médiateurs, mais
c'était le maximum qu'on pouvait nous demander dans les circonstances
actuelles.
Le Président (M. Laplante): On va procéder
par...
M. Garon: Concernant le renouvellement du contrat, M. Jacques qui
est ici a le contrat dans ses mains et nous donne l'information. "La
présente convention aura une durée de cinq ans à compter
du 1er octobre 1976. A son expiration elle se renouvellera automatiquement pour
une durée supplémentaire de cinq ans sauf avis contraire
donné au moins neuf jours avant le jour du renouvellement. Cependant,
l'une ou l'autre partie pourra mettre fin prématurément à
la convention après trois campagnes complètes de production
pourvu qu'un préavis ou qu'un avis écrit à cet effet ait
été donné à l'autre partie avant le 31 janvier
précédant la troisième campagne. La présente
convention annule et remplace celle signée en date du 6 juin 1973. Fait
double à Montréal, le 26 novembre 1976".
M. Charbonneau: Le 26 novembre.
M. Garon: Mais là ce n'est pas tout à fait
l'information que j'avais eue.
M. Roy: A quelle date le ministre a-t-il été
assermenté?
M. Garon: Je pense que c'est cela le 26 novembre.
M. Cordeau: II faudrait connaître la convention de 1973
pour connaître les termes.
M. Roy: On parle du 26 novembre ici dans le document.
M. Cordeau: Cela, c'est un renouvellement de la convention qui a
été signée en 1973.
M. Garon: Mais même dans l'ancienne convention, si je peux
me souvenir, il y avait une clause similaire à celle-là et on
pouvait, au bout de trois ans...
M. Charbonneau: C'est qui les signataires? Cela ne donne rien;
cela donne les durées de la convention.
M. Giasson: L'administration de la raffinerie et les
représentants...
M. Charbonneau: Quels sont les signataires de cette entente? On
ne connaît pas les termes de l'entente.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Excusez-moi, M. le Président.
M. Charbonneau: La raffinerie de sucre de Québec; Comtrad
Limited qui est l'acheteur et les Sucres Redpath Ltée, l'intervenant.
Après cela, je crois qu'ils ont créé une autre corporation
qui s'appelle Comtrad Limited en ce qui a trait au sucre.
M. Garon: C'est le directeur général qui a
signé, mais, d'habitude, quand le directeur général signe,
c'est parce qu'il y a eu un entérinement par le conseil.
M. Roy: II doit y avoir un arrêté en conseil.
M. Charbonneau: Le conseil d'administration n'était pas
changé à ce moment-là.
Quels étaient les membres du conseil d'administration au moment
où le directeur général était mandaté pour
renouveler l'entente?
M. Garon: II y avait le sous-ministre en titre de l'Agriculture
qui était président du conseil, M. Gaétan Lussier.
M. Charbonneau: Qui est parti à Ottawa.
M. Garon: II y avait Georges-Etienne Turcotte qui était le
directeur général de la Coopérative
fédérée.
M. Charbonneau: II n'était pas
décédé?
M. Garon: Je ne sais pas s'il était
décédé à ce moment-là, mais vous me demandez
les gens qui étaient membres du conseil. Il y a M. Pietro Guerci qui est
sous-ministre adjoint aux Finances; il y a M. Benoît Beauregard et il y
avait le député de Verchères du temps. C'était le
conseil d'administration.
M. Roy: La résolution qui autorisait les signataires
devrait être jointe aux documents, si on se réfère aux
habitudes que les notaires ont au moment où des contrats sont
signés. J'aimerais avoir la lecture de la résolution, M. le
Président.
M. Charbonneau: La question que je peux me poser, M. le
Président, c'est quels sont les motifs qui étaient à ce
point urgents pour qu'on renouvelle l'entente avec la Redpath avant que le
nouveau ministre prenne le temps de prendre connaissance de ses dossiers et
prenne au moins le temps de s'asseoir dans son fauteuil dans son
ministère? A première vue, j'ai l'impression qu'on a
passé un sapin au nouveau ministre.
Le Président (M. Laplante): A ce moment-ci, je ne sais pas
si le ministre peut faire des suggestions parce qu'il y a plusieurs questions
que vous posez ici auxquelles il ne peut pas répondre. Je ne sais pas
s'il y a une suggestion que vous pourriez faire pour apporter un
éclaircissement nouveau à la commission dans les jours qui vont
venir.
M. Garon: Les faits sont connus. Le député de
Verchères a demandé le dépôt du contrat à
Red-path et à la raffinerie de sucre. On voit que cela a
été signé le 26 novembre 1976. Est-ce que la
résolution est attachée au...
Le Président (M. Laplante): Si je comprends la question du
député de Verchères, il voudrait savoir pourquoi ce
contrat a été signé.
M. Charbonneau: Oui, je voulais savoir, d'abord, à quelle
date. Je pense que la date nous donne des indications intéressantes.
Maintenant, quelles sont les raisons qui motivaient qu'une signature
hâtive se fasse à cette date? Le ministre pourrait peut-être
nous informer. Est-ce qu'au moment de son assermentation on lui a
annoncé puisqu'il semble aussi surpris que nous que le
contrat venait juste d'être signé et qu'il n'avait plus rien
à dire finalement?
M. Garon: Je ne sais pas si on peut tenter de répondre. Il
y a ici une clause qui dit: "L'une ou l'autre partie pourra mettre fin
prématurément à la convention après trois campagnes
complètes de production, pourvu qu'un avis écrit à cet
effet ait été donné". S'il y a eu un avis écrit
donné comme quoi l'autre partie mettait fin au contrat, il fallait qu'il
y ait une renégociation à ce moment-là.
M. Roy: II faudrait savoir qui a donné l'avis, si c'est le
ministère qui l'a donné.
M. Garon: Je m'excuse. Nous tentons strictement, à la
lumière des documents que nous avons, de répondre le mieux
possible. Maintenant, si nous n'avons pas toutes les informations, nous
tenterons de les avoir et nous tenterons de vous donner une réponse.
Présentement, on tente de vous donner les réponses à la
lumière des documents que nous avons.
M. Roy: Si c'est possible, M. le Président, qu'on nous
remette d'abord une copie du contrat, tel que cela a été
demandé par le député, la résolution qui doit
l'accompagner et aussi la lettre de désistement, s'il y en a eu une,
parce que le contrat original avait été signé en 1973 et
c'était pour cinq ans avec une possibilité de désistement
après trois ans.
M. Garon: Cinq ans avec une possibilité de
désistement. Après trois ans, on fera ce qu'on voudra dans ce
contrat. Cela veut dire qu'il a été renouvelé, mais pour
cinq ans, pas pour deux ans.
M. Roy: Le contrat a été signé pour cinq
ans, mais l'une ou l'autre des deux parties pouvait, autrement dit, amener une
réouverture du contrat après trois ans. J'aimerais savoir si
c'est la raffinerie qui a procédé ou si c'est la compagnie qui a
été concernée. Je pense que cela peut faire beaucoup de
lumière à cette table.
M. Charbonneau: On pourrait peut-être ajouter, si le
député de Beauce-Sud est d'accord, à cette liste de
questions, la copie d'une résolution du Conseil d'administration
mandatant le directeur général de signer cette entente. Egalement
la liste des membres du Conseil d'administration, la date de la signature. Il y
en a certains qui vont dire qu'ils ont démissionné, mais il
faudrait peut-être savoir à quelle date ils ont
démissionné.
M. Roy: J'étais présent à la réunion.
La date, les personnes qui étaient présentes à la
réunion, les membres du conseil qui étaient présents
à ce moment.
M. Charbonneau: Qui étaient en titre également.
M. Roy: On pourrait, peut-être, M. le Président,
reporter les autres questions que nous pourrions avoir après le
dépôt du document?
Le Président (M. Laplante): A votre guise. Je sais qu'il y
a d'autres questions. Le député de L'Islet, auriez-vous une
question sur le même sujet?
M. Giasson: Oui.
Le Président (M. Laplante): Allez-y.
M. Giasson: M. le Président, on a fait largement
état de la générosité de la raffinerie de sucre
envers les producteurs, leur suggérant un prix qui dépassait le
coût de production. Coût de production calculé de
manière à permettre aux producteurs de betteraves d'atteindre une
situation de revenus comparable à celle de l'ouvrier
spécialisé. J'accepte le principe tel que déclaré,
mais j'aimerais connaître les critères en vertu desquels on a
procédé au calcul de ces coûts de production et de
rentabilité qui permettaient aux producteurs d'atteindre
l'équivalent du revenu d'un ouvrier spécialisé. Tout
à l'heure, le ministre a dit que c'était technique, mais cela ne
peut pas être technique.
M. Garon: On l'a dite la formule ce matin. En fait, ce sont les
mêmes critères qu'on a utilisés pour le calcul des
coûts de toutes les autres productions qui ont fait l'objet de
négociations, au comité technique, entre l'UPA et le
ministère de l'Agriculture du Québec. Maintenant, si vous voulez
des détails, nous apporterons les coûts de production, nous
pourrons vous les donner en détail. Mais nous pourrions peut-être
répéter ce qui a été dit, c'est qu'à 20
tonnes de rendement, à $22.06 ou $22.10, c'était
équivalent au coût en ar-
gent, plus la dépréciation, plus une
rémunération de l'avoir net, et 100% du revenu d'un ouvrier
spécialisé. Il est évident que quand on parle de 100% du
revenu d'un ouvrier spécialisé, c'est en tenant compte de la
portion du temps qu'un producteur va rattacher à la betterave
sucrière, parce que rares sont les producteurs qui ne font que cette
culture. Souvent, ils en ont d'autres, cela peut même être des
producteurs laitiers. Si vous voulez plus de détails, on peut même
déposer, si vous le désirez, les coûts de production. On
les a. ,
M. Giasson: Mais la grande vérité de base, tous les
coûts se calculent à l'acrage.
M. Garon: Pardon? M. Giasson: A l'acrage.
M. Garon: C'est calculé globalement. Vous pouvez bien le
mettre à l'acre, si vous le voulez, ou à la tonne après,
mais on essaie de calculer les coûts.
M. Charbonneau: Est-ce que le député de
Montmagny-L'Islet permettrait une question additionnelle qui pourrait
compléter sa question à lui? Lors de la rencontre suivante, vous
nous aviez expliqué des choses que je n'avais pas trop comprises
à ce moment. Les producteurs, eux, calculaient que leur coût de
production, compte tenu de leur rendement à l'acre moyen, pour les
dernières années, c'était de 17 tonnes, je pense, ou 17
1/2, était de $23.95 et le ministère avait calculé $22.06.
Vous disiez qu'il était impossible...
M. Garon: Cela ne donne rien de discuter beaucoup de cela. J'ai
offert aux producteurs que les économistes de l'UPA et ceux du
ministère discutent cela ensemble et cela a été
refusé. Je pense bien qu'on s'obstinerait seulement sur des coûts
de production, alors qu'ils n'ont pas voulu que leur expert discute avec
l'expert du ministère, là-dessus, en économique. On ne
s'en va nulle part en parlant de cela.
M. Charbonneau: Je suis d'accord qu'ils ont refusé,
j'étais là quand ils ont refusé. A Saint-Hyacinthe
aussi.
M. Giasson: Que les producteurs de betteraves aient refusé
des calculs établis par les économistes de l'UPA ou des gens
spécialisés à l'UPA, cela me surprend quelque peu.
J'ai déjà pris connaissance d'évaluations de
coût de production telles qu'établies par les fonctionnaires du
ministère, l'équipe de spécialistes du ministère,
coûts qui étaient souvent contestés par l'équipe de
l'UPA. Je pense au coût de production dans l'industrie du porc. Je pense
au coût de production dans l'industrie laitière. Je pense au
coût de production dans la chair de volaille et il y avait de longs
débats soutenus par l'UPA mettant en doute la justesse des coûts
de production et de véritable rentabilité établie,
déterminée par le ministère de l'Agriculture.
M. Charbonneau: Je pense que le député de
Saint-Hyacinthe pourrait témoigner, il était présent lors
de cette réunion.
Le Président (M. Laplante): Avez-vous d'autres
questions?
M. Giasson: J'aimerais avoir des commentaires
là-dessus.
M. Garon: C'est vrai que, quand vous amenez à la
même table deux parties, au début cela peut arriver qu'il y ait eu
des divergences. Mais, après négociation, dans l'ensemble de tous
les coûts de production qui ont été négociés,
je peux vous dire qu'on est venu à une entente. Ce qui a
été fait à propos de la betterave sucrière, c'est
qu'on a quand même revérifié avec l'économiste qui
s'occupe plus particulièrement de cela à l'UPA. Puis on peut lui
faire dire, il a convenu avec nous que les méthodes qui avaient
été utilisées pour la betterave sucrière
étaient exactement les mêmes qui ont été
utilisées pour les autres productions. Maintenant, qu'il y ait une
petite divergence, un moment donné, cela peut arriver, mais dans
l'ensemble on peut dire qu'on est quand même venu à une entente
sur tous les coûts de production. Il y a eu des divergences au
début de la négociation, d'accord, mais après cela s'est
pas mal aplani. Je pense qu'il y a une confiance mutuelle qui s'est
établie entre les officiers du ministère et les gens de l'UPA.
Nous pourrions vous le faire dire par les gens mêmes de l'UPA.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Champlain, sur le même sujet.
M. Gagnon: C'est juste pour me faire expliquer deux chiffres
qu'on a donnés tantôt. On a dit que la plus basse production avait
été de 80 000 tonnes et que la plus haute, 200 000 tonnes
environ. Ce que je voudrais savoir...
M. Garon: C'est approximatif.
M. Gagnon: En fait, c'est juste pour me donner une idée;
en acres annuellement, est-ce qu'il y a une aussi grosse variation en acres? Je
veux dire, une année, par exemple, est-ce qu'on va semer 500 acres, puis
l'année suivante 1000, puis l'année suivante, 200 acres? Est-ce
qu'on montre un intérêt dans la quantité d'acres
semées assez constant?
Le Président (M. Laplante): Vous pouvez continuer, le
député de Champlain.
M. Gagnon: Ma question était pour savoir si on
démontrait un intérêt à peu près constant
dans la production de la betterave. On nous donne des chiffres de
récolte par année en milliers de tonnes, mais je voudrais savoir
en acres semées par année, est-ce qu'on a un intérêt
à peu près constant? Est-ce que les mêmes producteurs se
retrouvent à peu près avec la même surface semée,
par année? Est-ce qu'il y a une augmentation ou une diminution?
M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata): On pourrait
passer un commanditaire.
M. Gagnon: A l'ordre, M. le Président!
M. Garon: Pour analyser d'une façon adéquate ce
genre de chiffres, cela dépend si vous voulez regarder les chiffres sur
trois, quatre ou cinq ans ou si vous voulez les regarder sur une période
plus longue. Si vous les regardez sur une période plus longue, nous ne
les avons pas tous sous la main ici. De mémoire, l'acrage était
beaucoup plus... Je parle d'il y a dix ans.
M. Gagnon: Donnez-nous les trois ou quatre dernières
années pour voir s'il y a une tendance, s'il y a un
intérêt.
M. Garon: Parce que l'acrage, cela ne veut rien dire. L'acrage
peut avoir diminué, mais les rendements ont tellement augmenté.
La moyenne était d'environ douze à treize tonnes, avant;
aujourd'hui, la moyenne est rendue à peu près de 18 000
tonnes.
M. Gagnon: Oui, je suis d'accord.
M. Garon: Ce qui est arrivé, c'est que le nombre de
producteurs a beaucoup diminué; le nombre de producteurs était
d'environ 950 ou 975 et il est tombé à peu près à
320. Maintenant, en termes d'acrage, la moyenne de 1969 à 1973
était de 7600 acres; en 1974, de 5700; en 1975, de 8027; en 1976, de
6800, et cette année, il semble que ce sera autour de 4500.
M. Gagnon: Vous avez parlé de coût de production. Le
ministère finit toujours par s'entendre avec l'UPA pour
déterminer les coûts de production. Ce qui me surprend un peu,
c'est qu'en ce qui concerne le coût de production de la betterave, vous
offrez même plus que le coût de production qui a été
déterminé, mais dans les autres productions, quand on finissait
par s'entendre avec le ministère et qu'on avait fait admettre les
coûts de production de l'UPA, c'était assez rare qu'on
était payé à 100%, je veux dire qu'on négociait sur
100%.
Sur le coût de production tel que déterminé
actuellement, j'ai des doutes. C'est peut-être de cela que vient un
certain manque d'intérêt pour la culture de la betterave, cette
année.
M. Garon: Pour ce qui est des négociations, il faut dire
et expliquer ce qui s'est passé concrètement. Il y avait une
négociation entre le syndicat des producteurs de betteraves et la
raffinerie de sucre représentée par son directeur
général qui, lui, représentait le conseil
d'administration. La raffinerie a offert $22.50 et le partage des
bénéfices 50-50 en cours de négociation. A un moment
donné, on a dit: C'est le maximum qu'on peut faire sur une base
d'entreprise normale. Même normale, entendons-nous, il y avait des
déficits de prévus à ce niveau et des déficits
assez considérables selon la quantité produite.
On a dit, à ce moment-là: Nous autres, on ne va pas plus
loin que cela. Cela n'a pas de bon sens d'aller plus loin que cela. S'il y a
quelque chose à ajouter, ce sera au ministère en vertu de ses
programmes ou quelque chose comme cela. Le syndicat des producteurs de
betterave est venu au ministère de l'Agriculture. Là, on les a
rencontrés. On a discuté, d'ailleurs, si ma mémoire est
bonne, pendant cinq heures. C'est une des journées où j'ai
manqué la période des questions. Cela a commencé à
deux heures et a fini à sept heures et quart.
J'avais d'ailleurs les députés des comtés pour
assister à la discussion, le député de Verchères,
M. Charbonneau, et le député de Saint-Hyacinthe également,
pour voir si c'était une entreprise qui se faisait de bonne foi. Ayant
été informé qu'on devait se rencontrer, j'avais
demandé peut-être dix jours ou quinze jours auparavant, non plus
longtemps que cela auparavant, aux économistes du ministère de
préparer des chiffres pour voir quel serait le taux qui serait
payé si la betterave à sucre entrait dans un programme
d'assurance-stabilisation des revenus des producteurs. Quand j'ai parlé
avec les fonctionnaires qui ont fait des cours, ils m'ont dit qu'ils
étaient arrivés à $22.06 pour un rendement de vingt tonnes
à l'acre, qui était un peu supérieur à la moyenne,
mais que, par ailleurs, l'assurance-stabilisation ne pouvait pas être
toujours sous la moyenne. Autrement, ce serait démotiver les producteurs
d'avoir des incitatifs, au fond, à la moyenne, plutôt qu'à
l'amélioration du rendement.
D'ailleurs, dans le boeuf de boucherie, ce n'était pas à
100% du revenu de l'ouvrier spécialisé qu'on avait fait des
points de comparaison, mais c'était à 90%. Evidemment,
j'étais conscient que c'étaient des chiffres
préparés par le ministère de l'Agriculture, seul. J'ai
offert, à ce moment-là, aux gens il y avait les
représentants de l'UPA régionale et les représentants du
syndicat des producteurs de betteraves à sucre de discuter avec
leurs économistes, les économistes de l'UPA, si les chiffres
étaient mis en doute. Je voulais qu'on discute ensemble les coûts
de production et les $22.06 auxquels les gens du ministère arrivaient.
Cela a été rejeté immédiatement. Il n'y a pas eu
vraiment de discussions là-dessus. Il était clair, je pense, que
le syndicat n'était pas intéressé à cela. Moi, j'ai
eu l'impression que ces chiffres, à ce moment-là, c'était
peut-être proche de la réalité, en tout cas, s'ils ne
couvraient pas la réalité entièrement. C'est le sentiment
bien net que j'ai eu. Comme je le disais tantôt, au cours des
discussions, le sentiment très net que j'ai eu également, c'est
que le syndicat voulait toucher une partie des sommes qui étaient
gardées comme fonds de réserve à la raffinerie, argent qui
provenait des surplus de fonctionnement des années 1974 et 1975.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-François sur le même sujet.
M. Rancourt: M. le Président, sur le même sujet,
oui. La plupart des questions ont été posées
par le député de Verchères, mais j'avais
peut-être une suggestion à faire. En même temps que le
dépôt des contrats, je demande si c'est possible que le directeur
général de la raffinerie, M. Touchette, vienne ici à la
rencontre.
Le Président (M. Laplante): Je crois, à ce
moment-là, que cela prend... Etant nouveau venu dans ce genre de cadre,
si je me fie à ce qui s'est fait avant dans les commissions
parlementaires, il faut qu'une motion soit présentée pour
demander à ce monsieur de venir se présenter à la
commission parlementaire.
M. Roy: M. le Président, sur le point de règlement
que vous avez soulevé, je pense qu'une tradition a été
établie, sans formalisme et sans formalités, lors de
l'étude des crédits. Lorsque c'est le désir des membres de
la commission, sans qu'il soit nécessaire de faire une motion, puis de
la débattre, de consentement unanime, on le demande justement.
Le Président (M. Laplante): Je serais très heureux
que cela se passe comme cela, M. le député de Beauce-Sud.
M. Giasson: Effectivement, M. le Président,
l'expérience nous révèle qu'au besoin, des
représentants de différentes sociétés
gouvernementales sont venus devant des commissions parlementaires qui
étudiaient les crédits de ministères. J'ai à
l'esprit les gens du crédit agricole, les gens de REXFOR. Même la
Société d'habitation du Québec est venue, SOQUIP, SOQUEM,
SOQUIA. Au besoin, je présume que l'on pourrait les avoir.
Le Président (M. Laplante): Avant d'en faire une
discussion, est-ce que ce serait le consentement unanime de la commission de le
demander?
M. Roy: Oui.
M. Garon: Quand un fonctionnaire parle, c'est comme si
c'était le ministre qui parlait. C'est le nom du ministre qui est mis
tout le temps.
M. Giasson: En présumant que le directeur de la raffinerie
vienne devant la commission, au lieu de répondre lui-même au
micro, il pourrait se produire qu'il souffle une réponse au ministre, ce
qui arrive très souvent, et le ministre est maître de sa
réponse.
M. Roy: On pourrait laisser au ministre toute latitude.
M. Giasson: Si on a le dépôt de tous les documents
demandés, cela me satisferait. Par contre, si on veut aller plus loin,
si on veut demander au directeur de la raffinerie si, lui-même, a subi
des pressions de qui que ce soit, si on lui a forcé la main pour poser
tel geste, cela pourrait aller plus loin que le dépôt de
documents.
M. Charbonneau: Moi, j'avais compris que la demande du
député de Saint-François visait un peu à faire
comparaître le directeur général à son propre chef.
On aurait pu lui poser des questions et il aurait répondu pour informer
la commission. Cela n'aurait pas été le ministre qui aurait
répondu par personne interposée. Sinon, je pense que l'objection
du ministre est compréhensible. Je suis intéressé à
poser des questions directement au directeur de la raffinerie et non pas au
ministre par personne interposée. Je peux très bien le faire dans
le corridor et le ministre aura tout simplement à faire des appels
téléphoniques et s'informer des réponses.
Ce que nous voulons, c'est avoir des explications sur les raisons...
M. Giasson: Si vous me permettez, je pense que la réserve
du ministre sur ce point est juste. Au journal des Débats, les
réponses qui seront données par le directeur seront inscrites au
nom du ministre et je crois que le ministre doit avoir le contrôle des
réponses qu'il donne devant la commission. C'est un principe, pour moi,
intouchable.
M. Charbonneau: D'accord, mais peut-être que le
député de Montmagny-L'Islet ou le député de
Beauce-Sud pourraient nous éclairer. Je faisais partie de la commission
parlementaire de la justice. C'est vrai qu'on avait une motion en Chambre qui
nous donnait un mandat spécial. Mais est-ce qu'une commission
parlementaire comme la nôtre, qui étudie des crédits, a
besoin d'une motion spéciale pour faire entendre des témoins sur
des points particuliers et si ces témoins parlent pour
eux-mêmes?
M. Roy: Sur un point de règlement.
Le Président (M. Laplante): Je voudrais agir en Salomon un
peu. Il est 5 h 50. On va probablement suspendre jusqu'à 20 heures. Cela
donnera le temps au ministre de réfléchir, de s'informer
où il faut, si c'est bon de faire ces choses, pour ne pas prendre le
ministre dans un piège. A 20 heures il pourrait peut-être nous
donner une réponse.
M. Roy: ...
M. Giasson: C'est pas l'homme à se faire prendre, M. le
Président.
M. Roy: M. le Président.
M. Garon: Je me sens mal à l'aise.
Le Président (M. Laplante): Je le sens mal à l'aise
de répondre à des questions.
M. Garon: II n'est pas question d'entrer dans un piège. Ce
n'est pas cela, l'affaire. Il y a des questions d'intention, des questions...
Je vois un peu le genre de questions qui se posent, un peu comme à une
commission d'enquête où c'est moi qui répondrais sur des
sujets que je ne connais pas.
M. Charbonneau: C'est exactement ce qui se passe.
M. Garon: Je n'étais pas présent.
M. Roy: M. le Président, sur ce point, j'aimerais
peut-être apporter un peu, je ne dirais pas de lumière, je n'ose
pas employer le terme, mais lorsqu'on étudie les crédits du
ministère de l'Agriculture, habituellement, on passe la loi du
crédit agricole, les crédits affectés au crédit
agricole, et le président de l'Office du crédit agricole se
présente devant la commission.
C'est la même chose pour la Régie de
l'assurance-récolte. C'est la même chose pour les
différents organismes paragouvernementaux. Ces gens viennent devant la
commission. Nous leur posons des questions, ils répondent au ministre et
celui-ci transmet la réponse devant la commission ou le ministre les
laisse répondre eux-mêmes, comme ce fut le cas tout à
l'heure, et les propos qui sont tenus par les fonctionnaires sont
enregistrés au nom du ministre.
C'est pour ce qui a trait à l'étude d'une commission qui
étudie les crédits. Dans une commission parlementaire qui est
mandatée pour recevoir les auditions publiques, c'est
différent.
M. Garon: Mais là il y a une différence
fondamentale quand même, c'est qu'il s'agit d'une corporation qui vit par
elle-même, qui ne fait pas partie des crédits du ministère.
Un directeur général qui dépend d'un conseil
d'administration, les questions qu'on veut lui poser, dans bien des cas,
relèvent plus d'une enquête que de l'information. Tandis que,
quand l'Office du crédit agricole vient ici, évidemment ce sont
des questions techniques. Le haut fonctionnaire va répondre sur des
questions techniques et c'est le ministre qui va répondre le plus
souvent aux questions politiques. Mais les questions qu'on veut poser dans ce
cas-là ne sont pas de cette nature.
M. Roy: Je pense que cette année on est en face d'un fait.
L'an dernier, lorsqu'on a interrogé la personne responsable de la
raffinerie de sucre de Saint-Hilaire, c'était justement le
député qui faisait partie du conseil d'administration qui a
fourni à la commission toutes les réponses. On ne les a pas
toutes vérifiées, mais il a fourni toutes les réponses aux
questions que les membres de la commission ont eu le loisir de poser. C'est
peut-être la raison pour laquelle il y avait quelqu'un qui
siégeait au conseil d'administration de façon que quelqu'un soit
responsable devant le gouvernement, devant l'Assemblée nationale de
cette société qui est quand même propriété de
l'Etat.
M. Garon: Oui.
M. Giasson: M. le Président, je veux soulever un point de
règlement. Je n'ai aucunement objection à entendre les membres du
conseil d'administration de la raffinerie de Saint-Hilaire. Cependant, la
tradition et l'usage aux commissions parlemen- taires sont de ne pas faire
comparaître de témoins. Jamais, dans l'histoire des commissions
parlementaires convoquées pour faire l'étude des crédits,
on a accepté de faire comparaître des témoins. Si vraiment
on veut questionner ou entendre les membres du conseil d'administration de la
raffinerie, qu'on propose la tenue d'une commission parlementaire
affectée à ces fins. Cela s'est déjà produit, je
pense, pour la Régie de l'assurance-récolte, où les
fonctionnaires attachés à la régie sont venus à la
commission parlementaire de l'agriculture et ont tenu un long débat et
répondu à toutes les questions des députés mais il
ne s'agissait pas de l'étude des crédits du ministère de
l'Agriculture. C'était une commission parlementaire du ministère
mais affectée à un domaine particulier qui était celui de
la révision de la Loi de l'assurance-récolte ici au
Québec.
M. Cordeau: M. le Président, je voudrais peut-être
vous rappeler que c'est un peu prématuré étant
donné que le nouveau conseil d'administration vient d'entrer en fonction
avec un mandat bien précis. Il n'est pas tellement au courant des
antécédents des autres conseils d'administration.
M. Garon: On parle plus du passé de la raffinerie à
ce moment-là et le nouveau conseil d'administration ne peut pas
répondre pour le passé.
Le nouveau conseil d'administration ne peut pas répondre pour le
passé. Le nouveau conseil d'administration, je préfère
qu'il garde ses énergies pour diversifier la production...
M. Charbonneau: On peut peut-être... M. Garon: ...
et rentabiliser la raffinerie.
M. Charbonneau: Une fois qu'on aura eu les réponses avec
les documents dont on a demandé la production, j'ai l'impression que le
ministre sera le premier qui pourra prendre les mesures qui s'imposent s'il y a
eu des choses qui ne devaient pas se produire de la façon dont elles se
sont produites.
Le Président (M. Laplante): Vu qu'il n'y a pas de
consensus actuellement, on va continuer le débat.
Le député de Saint-Hyacinthe, sur le même sujet.
M. Cordeau: M. le Président, tantôt le ministre nous
a informés que les producteurs, lors de la rencontre, avaient
refusé l'offre du coût à la tonne de $22.06 tel que
proposé par le ministère. C'est vrai, j'étais là et
ils ont refusé le calcul, peut-être pour certaines raisons parce
que cette journée-là, aussi, ils voulaient absolument avoir une
réponse du ministre concernant la production parce qu'ils croyaient
pouvoir ensemencer le lendemain matin, mais ils ont définitivement
refusé cette offre. Maintenant, pour mon information personnelle,
étant donné qu'on a tellement parlé de cette
raffinerie
aujourd'hui et qu'on parle d'un surplus accumulé, serait-il
possible, M. le ministre, de faire connaître à la commission les
déficits et surplus depuis le début de l'exploitation?
M. Garon: Certainement.
M. Cordeau: Alors, on aura des chiffres et si quelqu'un nous dit
qu'il y a un surplus accumulé, s'il y a un déficit aussi, la
commission sera au courant...
M. Garon: Oui.
M. Cordeau: ... de l'état financier de cette raffinerie
depuis ses débuts.
M. Charbonneau: D'ailleurs, lorsqu'on a participé à
la rencontre, le député de Saint-Hyacinthe et moi, le ministre
nous a indiqué, avant et pendant la rencontre, qu'il était
disposé à donner tout l'éclairage, et le nouveau conseil
d'administration nous a indiqué que, pour que les producteurs
comprennent la situation, il était bien conscient qu'il faut...
Le Président (M. Laplante): II faudrait pour le bon ordre,
que les questions s'adressent au président et que le ministre
réponde parce que actuellement, vous vous trouvez à prendre la
place du ministre dans les réponses. J'aimerais bien que ce soit lui qui
réponde parce que vous ne parlez pas en son nom. M. le ministre,
avez-vous une réponse à donner au député de
Saint-Hyacinthe?
M. Garon: Quelle était la question?
M. Cordeau: C'était au sujet des surplus et
déficits de l'exploitation.
M. Garon: Ah oui! J'ai dit oui qu'on en avait pris note et qu'on
aurait les données. J'ai répondu à cela.
Le Président (M. Laplante): M. le député
d'Huntingdon sur le même sujet.
M. Dubois: J'abonderais dans le sens du député de
Verchères en vue de sécuriser les producteurs, étant
donné que l'outillage de la betterave à sucre coûte
très cher et que l'outillage pour entretenir la betterave à sucre
coûte aussi très cher. Je ne pense pas que nos jeunes producteurs
puissent entrer dans cette ligne de production, s'ils ne sont pas
sécurisés avec un contrat d'au moins cinq ans. Je crois que c'est
impossible. Si on veut laisser cette industrie vivante, avoir des producteurs,
je pense qu'il va falloir penser dans ce sens, absolument.
J'ai plusieurs autres questions. Je pense que dans cinq ou six minutes,
je peux clarifier tout cela. Au niveau du nouveau bureau de direction, M. le
ministre, il y a un monsieur Néron, de Va-chon, n'est-ce pas? M.
Néron, enfin la compagnie Vachon achète son sucre de Redpath.
Redpath achète le sucre de la raffinerie.
M. Garon: Etes-vous certain qu'il achète de Redpath?
M. Dubois: Bien...
M. Garon: J'ai plutôt l'impression qu'il achète sur
le marché international.
M. Dubois: J'ai ouï-dire que du sucre en provenance de la
raffinerie est acheté par la compagnie Vachon. Est-ce vrai ou non? Je ne
le sais pas du tout.
M. Garon: Vous avez ouï-dire. Ce serait important de
vérifier ces choses avant de les affirmer.
M. Dubois: Si c'est un fait, il peut y avoir des conflits
d'intérêts.
M. Garon: Oui, mais ce serait peut-être bon de
vérifier. Je pense que M. Néron occupe un poste important; il est
au conseil d'administration de SOQUIA. C'est une personne que j'ai choisie
personnellement pour deux raisons. Une des premières raisons, c'est
qu'il est normalement dans une entreprise qui achète beaucoup de sucre;
donc, il connaît ce marché. Deuxièmement, il est au conseil
d'administration de SOQUIA, il peut faire le pont avec SOQUIA. Je n'aimerais
pas que sur des ouï-dire...
M. Dubois: Mais, enfin, vous pouvez répondre à
cette question, j'imagine.
Le Président (M. Laplante): Avant de suspendre, j'aimerais
faire remarquer au député de Huntingdon qu'il n'est à peu
près pas possible pour le ministre de répondre à une
question administrative. Ils ont un conseil d'administration à
l'intérieur et il n'y a aucun budget qui est attribué
actuellement à la raffinerie de Saint-Hilaire. C'est assez difficile de
trouver des réponses à l'intérieur de cela.
Sur cela, nous suspendons nos travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures)
Reprise de la séance à 20 h 13
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, messieurs!
Reprise des travaux de la commission parlementaire de l'agriculture pour
l'étude des crédits se terminant en mars 1978.
La parole était au député de Huntingdon.
M. Dubois: M. le Président, la formulation de ma
dernière question, vous ne l'avez peut-être pas
appréciée, je vais la formuler de nouveau à M. le
ministre. J'aimerais lui demander s'il a fait faire par son ministère
une vérification des conflits d'intérêts qui pourraient
exister dans l'administration présente.
M. Garon: Non, parce que c'est un problème qui n'a jamais
été soulevé. Je n'ai jamais eu l'impression qu'on achetait
du sucre de la raffinerie. Au contraire, je dirais même que, quand le
contrat a été négocié avec Redpath, il y a trois
ans, ce que j'ai appris, c'est que quelques jours avant la signature du
contrat, les gens qui avaient négocié, en dernier ressort,
avaient demandé à Vachon, avec un délai de 24 heures ou de
48 heures, s'il était intéressé à acheter, de sorte
que Vachon, dans un délai aussi court ne pouvait pas acheter le sucre.
On peut vérifier, mais je n'ai pas l'impression...
J'ai l'impression que si on veut nommer à un conseil
d'administration d'une raffinerie, des gens qui connaissent le sucre, il y a
bien des chances qu'ils en achètent. Autrement, ils ne connaîtront
pas cela.
M. Vaillancourt (Orford): Y en a-t-il qui ne connaissent pas le
sucre?
Une Voix: Les diabétiques.
M. Garon: Maintenant, la production de la raffinerie n'est pas
assez élevée pour...
M. Dubois: Quand on parle de millions, c'est quand même
assez intéressant.
M. Garon: Pour fournir même ces entreprises.
M. Dubois: D'accord, mais il reste quand même que le volume
est de plusieurs millions. Je pense que pour une entreprise gouvernementale,
normalement, il est logique qu'au bureau d'administration on puisse
vérifier s'il y aurait conflit d'intérêts. Je pense que
cela va de soi. Ce n'est pas une question que je vous pose. Je ne vais pas plus
loin.
M. Garon: Je peux prendre avis, oui.
M. Dubois: II ne me reste que trois petites notes, puis ce sera
terminé, en ce qui me concerne.
J'aimerais que le nombre des employés permanents nous soit
donné. Le nombre des employés permanents.
M. Garon: 90.
M. Dubois: 90. C'est réglé. M. Garon:
Environ.
M. Dubois: Et puis j'aimerais aussi avoir la liste des
producteurs de 1976.
M. Garon: Pardon?
M. Dubois: Le dépôt de la liste des producteurs pour
1976?
M. Garon: La liste des producteurs pour 1976. 310.
M. Dubois: Le dépôt de la liste, est-ce que je peux
l'avoir?
M. Garon: Non, excusez, je vous donne le nombre.
M. Dubois: Oui, mais le dépôt de la liste des
producteurs.
M. Garon: Pardon, oui, d'accord. M. Ouellet: ... envoyer
une lettre.
M. Dubois: Non, je suis prêt à attendre une semaine,
si vous voulez. J'aimerais savoir aussi s'il y a eu une étude, à
ce jour, assez approfondie sur les investissements qui seraient
nécessaires pour améliorer la production. Est-ce que cela a
été fait à ce jour? Cela ne veut pas dire que c'est ce qui
sera retenu, mais est-ce qu'il y a tout de même quelque chose de
fait?
M. Garon: Des études ont été faites avec
différentes hypothèses. Une raffinerie, par exemple, qui
raffinerait telle quantité ou telle autre, qui serait située
où elle l'est actuellement et qui ferait de la canne à sucre en
même temps que de la betterave, différentes
possibilités.
M. Dubois: Pouvez-vous nous donner une idée
là-dessus? Pour doubler la production actuelle, cela coûterait
tant d'investissement.
M. Garon: Non, c'est plus complexe que cela. Il y a des
hypothèses multiples. Ce peut être doubler la production seulement
avec de la betterave, ce peut être doubler la production par une partie
de betterave et une partie de canne à sucre qui pourrait être
importée. Il y a différentes hypothèses
là-dessus.
M. Dubois: Basé sur les études actuellement faites,
peut-être que vous pourriez nous donner plus tard, quand vous aurez les
renseignements, les montants à investir pour améliorer la
situation, doubler la production ou changer...
M. Garon: Oui, mais je pense qu'on entre dans des dossiers qui
sont des rapports de travail, des dossiers de travail; ce ne sont pas vraiment
des documents publics. Là, on parle de dossiers de
travail qui ont été faits selon différentes
hypothèses.
M. Dubois: Ce que je veux dire, disons qu'on aurait le
désir de doubler la production actuelle, la capacité de
production actuelle, cela peut entrer dans une ligne d'investissement de X
millions ou X centaines de milliers de dollars, je ne sais pas.
M. Garon: Doubler la production.
Le Président (M. Laplante): Le ministre dit qu'il n'y a
pas de dossier de préparé actuellement sur les investissements,
il y a seulement un document de travail.
M. Garon: Non, non, il y a un dossier qui analyse
différentes hypothèses. Ce sont des études, des
séries de chiffres avec différentes hypothèses de
production, différents types de possibilités.
Moi, je n'ai pas l'impression que c'est d'ordre public de
présenter cela, parce que cela pourrait prêter à confusion
beaucoup plus que de donner des renseignements dans l'état actuel des
études.
M. Duvois: Disons que sans demander plusieurs hypothèses,
sur une hypothèse, l'hypothèse de doubler la production, s'il y a
une étude de faite à ce jour?
M. Garon: Oui, oui...
M. Dubois: C'est seulement dans ce sens-là.
M. Garon: Doubler la production, encore là il y a
différentes hypothèses.
M. Dubois: Est-ce que c'est rentable de la doubler, si cela
améliore, si cela baisse le prix coûtant par tonne de sucre ou par
livre?
M. Garon: Le problème n'est pas là. Le
problème c'est le prix du marché.
M. Dubois: Si on double la production, peut-être que cela
peut diminuer le prix, le coût de fabrication aussi? Possiblement, je ne
le sais pas, je vous pose la question.
M. Garon: Non, non, cela peut baisser le coût de production
possiblement, mais...
M. Cordeau: Là-dessus il y a une chose évidente,
les employés ne seront pas payés à ne rien faire.
M. Garon: Non, non, le montant d'investissement peut être
de $40 millions, ce n'est plus la même patente.
M. Dubois: Je trouve que le nombre de permanents est tout de
même pas mal fabuleux pour une exploitation de 100 jours par
année.
M. Garon: Ce n'est pas nous qui les avons engagés.
M. Dubois: Non, bien écoutez, c'est vous autres qui
l'administrez présentement.
Une Voix: Les Syndicats... M. Caron: Non, non, ...
M. Dubois: Alors, cela complète mes questions.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Maskinongé.
M. Picotte: M. le Président, vu le raffinement de
l'Opposition, je suis heureux de passer aux questions d'ordre
général dans d'autres domaines. Vous auriez en date du milieu
d'avril...
M. Garon: On est aussi bien de vider la raffinerie. Le
député de Champlain a dit de vider la question.
M. Picotte: M. le ministre vous pouvez la vider mais de
grâce ne la liquidez pas.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Champlain.
M. Gagnon: Je pense que j'ai eu ma réponse, on a
parlé beaucoup de possibilités d'agir.
Le Président (M. Laplante): Dans ce cas on va passer au
député de Maskinongé.
M. Gagnon: Rien que vérifier, est-ce qu'on peut
diversifier la production avec la raffinerie uniquement dans le sucre? On a
parlé de lait, on a parlé de canne à sucre, mais est-ce
qu'il y a d'autres sources d'étudiées, est-ce qu'il y aurait
possibilité de faire autre chose que du sucre dans la période
où elle ne travaille pas pour le sucre?
M. Gagnon: Oui, mais tout cela fait que l'équipement est
différent selon les différentes solutions aussi.
M. Gagnon: Est-ce qu'il y a un comité d'étude,
est-ce qu'il y a quelqu'un actuellement qui étudie les
possibilités de cette raffinerie?
M. Garon: Oui, oui, c'est le conseil d'administration qui demande
aux gens de la raffinerie de vérifier certaines hypothèses. Il y
en a déjà eu de faites dans le passé également.
C'est ce que répondait le député de Huntingdon
tantôt. Il y a déjà eu différentes
hypothèses, mais il s'agit de trouver à ce moment-ci les
hypothèses opérationnelles pas seulement les hypothèses
théoriques, pas dire: on pourrait diversifier là là ou
là, mais, concrètement, dire: On s'oriente, mettons, dans tel
domaine, cela signifie quoi?
Est-ce qu'on a des clients pour cela? Ce que vous demandez, c'est s'il
est possible de diversifier la production de la raffinerie et de la rendre
rentable pas dans 20 ans, mais tout de suite.
M. Gagnon: Oui.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Montmagny-L'Islet, sur le sucre?
M. Giasson: Oui, sur la raffinerie. M. le ministre, les membres
de la commission, avant l'heure du repas, avaient manifesté le
désir d'entendre tout au moins le directeur de la raffinerie de
Saint-Hilaire. Est-ce que vous avez réfléchi à cette
situation à l'heure du souper, de façon à convoquer une
commission parlementaire de l'agriculture aux fins d'entendre de façon
spécifique soit le directeur de la raffinerie ou les membres du conseil
d'administration, de la compagnie?
M. Garon: Non, je pense qu'il n'y a pas d'utilité à
cela, d'autant plus que le directeur général est redevable au
conseil d'administration qui vient d'être nommé dans le but de
diversifier la production, de rentabiliser, comme on le disait, la raffinerie.
Ce sont des gens assez occupés. Je ne voudrais pas les faire parader ici
pendant des jours, alors que je pense qu'ils ont autre chose à faire de
plus important à ce moment-ci.
Je pense qu'on a actuellement les contrats; c'était le principal
point. On va produire les contrats demandés. Partant de là, s'il
y a d'autres questions posées d'ici à la fin de la commission
parlementaire ou encore en Chambre... D'autres questions pourront être
posées s'il y a d'autres éléments qui sont
nécessaires.
M. Giasson: Donc, M. le Président, on peut compter sur le
dépôt prochain des documents qui ont été requis au
cours du débat touchant la raffinerie de sucre, soit le
dépôt de la convention intervenue, celle présentement en
vigueur, ainsi qu'une copie de celle qui a été remplacée,
des extraits du livre des minutes du conseil d'administration pour voir de
quelle façon s'est décidée cette renégociation d'un
nouveau contrat après une période de trois ans. Enfin, on pourra
avoir, je présume, le dépôt également du plan de
base en vertu duquel on a établi les coûts de production, surtout
qu'on a déterminé quel était le prix de revient de la
production de betteraves, de façon à atteindre cet objectif
recherché de donner à une des spécialités agricoles
au Québec l'équivalent de revenu sur une base comparative avec
l'ouvrier spécialisé.
Est-ce qu'on peut conclure que ces documents... On avait demandé
également... Oui, M. le Président.
Même si cela n'a pas été déposé, j'ai
bien l'impression qu'il s'agit d'un document public. C'est un document
préparé par les fonctionnaires du ministère de
l'Agriculture. J'ai bien l'impression qu'une fois que ces documents sont
complétés, le plan doit être connu des producteurs
agricoles du Québec. Je ne verrais pas l'objection qu'on mettrait
à déposer de tels documents. Cela ne nuit en rien à
quiconque, maintenant que c'est connu de la part des producteurs
concernés.
M. Garon: Bien, c'est connu, le chiffre est connu. Les
composantes ne sont pas connues parce qu'on n'a pas voulu en discuter.
M. Giasson: Les composantes ne sont pas connues des producteurs,
tout au moins par leur association? L'UPA doit au moins connaître les
composantes.
M. Garon: Non, ce n'est pas cela que je veux dire. Je veux dire
la façon interne dont on a calculé. Vous en avez discuté?
On a eu un comité technique là-dessus.
M. Giasson: Je demanderais le dépôt, d'abord, du
document qui nous fournit la statistique sur le nombre de producteurs cette
année, l'acrage en ensemencement cette année, plus les documents
qui nous donnent les critères sur lesquels les calculs ont
été bâtis.
M. Garon: En ce qui a trait à l'acrage, nous pouvons
répondre immédiatement. Cela va se situer autour de 4000 à
4500 acres.
M. Giasson: J'aimerais avoir des chiffres précis.
M. Garon: Nous n'aurons pas les chiffres précis. Il faut
attendre que l'on mesure les champs pour vraiment avoir les chiffres
précis. On y va par la vente des graines de semence. Ce sont des
estimations et il y a souvent des inventaires qui peuvent ou ne peuvent pas
rester au niveau de la ferme. Actuellement, avant le mois de juin, cela va
être difficile de vous répondre d'une façon exacte.
M. Giasson: D'ailleurs, la base de la vente des graines de
semence ne peut pas traduire exactement les ensemencements qui ont
été faits. Il est possible que les cultivateurs aient
changé leur programme de culture, se soient procuré des graines
de semence et décident de la conserver et de ne pas ensemencer. C'est
toujours possible.
M. Garon: C'est pour cela que je ne peux pas savoir les chiffres
exacts à ce moment-ci.
M. Giasson: En tout cas, dès que cela sera possible
d'avoir ces chiffres. Merci.
Le Président (M. Laplante): Y a-t-il d'autres questions
sur la raffinerie? Le député de Verchères.
M. Charbonneau: L'autre question, peut-être la
dernière. Il a été question, lors des négociations
avec les producteurs, et cela a été l'un des
éléments qui ont peut-être amené les producteurs
à réfléchir un peu plus vers la fin, qu'il y avait
d'autres projets de raffinerie dans une autre région du Québec.
Ce projet est-il considéré sérieusement par le
ministère de l'Agriculture? Si oui, est-ce qu'il pourrait
éventuellement mettre en danger l'existence ou la survie de la
raffinerie de sucre dans la région de Saint-Hilaire-Saint-Hyacinthe?
M. Garon: II y a un autre groupe qui veut me présenter un
projet de raffinerie qui n'est pas dans la région de Montréal. Je
ne l'ai pas encore reçu et, comme tout autre projet qui est
présenté au ministère, il va être
étudié sérieusement comme n'importe quel autre projet.
Tous les projets présentés par les producteurs sont
étudiés sérieusement.
M. Giasson: Est-ce qu'il s'agit d'un projet pour la région
de Portneuf-Champlain?
M. Garon: Cela pourrait être dans ce coin. M. Giasson:
D'accord.
M. Charbonneau: Est-ce qu'éventuellement ce serait le
mandat du conseil d'administration de la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire
d'étudier tout l'ensemble du dossier ou simplement... En fait, c'est la
Raffinerie de sucre du Québec, qui est située à
Saint-Hilaire. Est-ce que le mandat du conseil actuel pourrait également
englober l'étude d'autres projets de raffinerie qui pourraient
être aussi des raffineries de sucre du Québec? Parce que ce n'est
pas la raffinerie de Saint-Hilaire, c'est la Raffinerie de sucre du
Québec.
M. Garon: On ne peut pas discuter des hypothèses à
ce moment-ci mais, tout simplement, il y a des gens qui m'ont parlé qui
voudraient me présenter un projet pour une raffinerie dans une autre
région du Québec. C'est tout, il n'y a rien de plus. A partir de
ce moment, je ne peux pas modifier...
M. Charbonneau: ... pour les agriculteurs de la région
mont Saint-Hilaire, Saint-Hyacinthe, ce coin-là, doit se sentir
particulièrement menacé.
M. Garon: II n'y a pas d'autre projet actuellement. Il y a des
gens qui ont dit qu'ils voulaient en déposer un.
M. Charbonneau: II n'y en a pas encore.
M. Garon: II n'y en a pas encore, on n'en a pas reçu
encore. Il y a des gens qui m'ont avisé qu'ils voulaient en
déposer un.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Maskinongé.
M. Picotte: Mais, s'il y en avait un de député, qui
prendrait la décision à un moment donné de ce
côté-là?
M. Garon: Non. On va étudier...
M. Picotte: Est-ce que ce serait le conseil d'administration, le
ministère ou le ministre?
M. Garon: Non. Le conseil d'administration va faire un rapport
sur les façons de diversifier la raffinerie et de la rentabiliser, et il
va soumettre un rapport au ministre. C'est le mandat qu'il a d'ici la fin de
l'année 1977. C'est le mandat que le conseil d'administation a et, si
entre-temps, par exemple, on reçoit un autre groupe
intéressé à la raffinerie, on va étudier
également le rapport de ce groupe.
M. Picotte: La décision serait rendue par qui?
Sûrement par le conseil d'administration parce que vous avez
parlé, à un moment donné, de dépolitiser ses
décisions.
M. Garon: C'est moi qui ai donné le mandat de faire...
M. Picotte: D'accord!
M. Garon: ... un rapport sur la diversification et la
rentabilisation de la raffinerie. Alors, il va me soumettre ce rapport d'ici la
fin de l'année.
M. Picotte: Oui, de celle qui existe présentement. Mais,
s'il y avait d'autres propositions?
M. Garon: S'il y a d'autres projets, on va les étudier au
ministère en tenant compte de tous les éléments.
M. Picotte: Et la décision appartiendra à qui?
M. Garon: J'ai l'impression qu'à ce moment je devrai
acheminer cela à qui de droit.
M. Picotte: Cela répond à ma question.
Le Président (M. Laplante): C'est tout sur le sujet de la
raffinerie?
M. Garon: Non, pas nécessairement. Ce pourrait être
au comité ministériel permanent du développement
économique, par exemple.
M. Cordeau: Peut-être qu'on pourrait y revenir lorsqu'on
aura le dépôt des documents sur la raffinerie, plus tard.
M. Garon: Mais on n'a pas les documents.
Le Président (M. Laplante): Quand vous aurez les
documents, d'accord, on verra. Si on est rendu à ce programme, on y
reviendra. M. le député de Maskinongé, vous vouliez
changer de sujet?
M. Picotte: Merci, M. le Président.
M. Garon: Je voudrais dire un mot avant de terminer.
M. Picotte: Vous ne voulez pas que je change de sujet?
M. Garon: Je voulais dire tout simplement que, par ailleurs, il
ne faut pas partir de là pour susciter aussi des craintes inutiles. Vous
savez, dans les tournées que je fais, parmi les gens que je rencontre,
il y a plusieurs personnes qui me parlent des projets qu'ils veulent soumettre,
etc.
Cela ne veut pas dire, parce qu'il y a des gens qui disent qu'ils
veulent soumettre un projet, que les fondations sont en train de
s'écrouler. On est loin de cela. Il ne faudrait pas, non plus, par bonne
volonté, énerver le monde pour rien. Je pense qu'il faut laisser
les choses où elles sont. Il est question, à ce moment-ci, de
diversifier la production de la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire et de
rentabiliser la raffinerie. C'est de cela qu'il est question. Ne parlons pas
d'hypothèses éventuelles.
M. Charbonneau: Pour ajouter à cela, M. le
Président, pour les producteurs, malgré tout, j'ai l'impression
que ces rumeurs qui circulent déjà depuis quelques années,
parce que dans la région on m'a dit que cela faisait longtemps qu'on en
entendait parler...
M. Garon: Même le député de Montmagny-L'Islet
semble en avoir entendu parler. Alors, il était proche du
ministère de l'Agriculture ou il était loin quand il en a entendu
parler.
M. Giasson: Effectivement, M. le ministre, j'ai entendu parler de
ce projet, non pas ici à Québec au ministère, mais dans
mon comté. Il y avait une équipe de promoteurs.
M. Picotte: Là je vous déclare hors du sujet.
Le Président (M. Laplante): Voulez-vous continuer dans la
betterave à sucre?
M. Giasson: M. le ministre est venu dans mon champ de
privilège de député.
Une Voix: Son champ de betteraves.
M. Giasson: Des gens ont prétendu que la saison de
végétation dans la région de Portneuf était
nettement comparable à celle de la vallée du Richelieu et il
croyait à cela dur comme fer. J'ai dit: Vous irez voir.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Maskinongé.
M. Charbonneau: Pour terminer l'explication que l'intervention du
député de Montmagny-L'Islet je ne veux pas le blâmer
a coupée, je voudrais dire par votre entremise au ministre que,
si j'ai amené ce point sur la table, c'est pour indiquer que cela a
été peut-être un des éléments qui a fait
réfléchir plus sérieusement les producteurs dans notre
région aux dernières offres de la raffinerie, parce qu'ils se
sont dit: Si jamais il y avait des projets concurrentiels sérieux
ailleurs... tant mieux s'ils ne sont pas encore concrétisés pour
nous autres. On a notre région à défendre.
M. Picotte: On était dans les betteraves, M. le
Président, pour autant qu'on n'était pas dans les patates.
Une Voix: II n'y a pas de problème. M. Picotte:
Cela viendra bien.
Le Président (M. Laplante): Allez-y dans les patates.
M. Picotte: Cela viendra. Le député de
Saint-Hyacinthe a des intentions spéciales pour ce soir.
M. Cordeau: C'est une culture aussi et cela relève du
ministère de l'Agriculture.
M. Picotte: M. le Président concernant un autre domaine
encore d'ordre général, je sais que le 23 avril, du moins si j'ai
bien lu le Soleil de Québec, le ministre de l'Agriculture a
déclaré qu'à la suite de sa nomination et après une
réflexion bien précise du côté de l'agriculture, il
s'était fait un modèle de l'agriculture québécoise
en la basant sur le modèle suisse. Est-ce que je pourrais savoir quelles
sont les idées ou quels sont les prérequis qui l'ont mené
à cette idée de vouloir faire de l'agriculture
québécoise un modèle, sinon parfait, du moins quasi
parfait de la Suisse?
M. Garon: J'ai lu cet article. Ce que j'ai mentionné tout
simplement... J'ai lu l'article de M. Wampach dans le Soleil. La citation est
exacte, mais je pense que M. Wampach, qui, apparemment, enseigne
l'économie, devrait suivre encore des cours.
M. Picotte: Vous enseignez à la même place que lui,
je suppose, au même endroit, non?
M. Garon: Ou, au moins, il n'a pas compris ce que j'ai dit tout
simplement. Ce n'est pas compliqué. Ce que j'ai dit, à ce moment,
c'est qu'on pouvait considérer, par exemple, deux façons de
produire dans le domaine agricole. Il y avait les Américains qui avaient
des terres à perte de vue et pouvaient les exploiter d'une certaine
façon. Avec la machinerie et en ayant des terres en grande
quantité, ils peuvent se permettre même quasiment d'en
dépenser. J'ai dit: Par ailleurs, il y a d'autres pays où les
terres sont plus limitées, comme la Suisse où on utilise au
maximum chaque parcelle. Dans cet esprit, au Québec, on n'est pas aux
Etats-Unis; on est plutôt comme en Suisse, c'est-à-dire que nos
terres sont rares et qu'il faut les utiliser au maximum. J'ai parlé
aussi d'augmentation de la productivité ou de la production des sols,
par exemple. En passant, la main-d'oeuvre va avoir une plus grande
productivité quand le sol va être plus productif, parce que ce
n'est pas en opposition; au contraire, l'un ne va pas sans l'autre. La
main-d'oeuvre va être plus productive sur le sol quand le sol va
être plus productif. Si le sol est drainé... C'est pour cela que
je m'inscris en faux contre cet article.
M. Picotte: Etes-vous contre votre déclaration ou contre
l'article?
Zonage agricole
M. Garon: Contre l'article. Je ne change pas un iota à ma
déclaration. Si, à ce moment, parce que le sol est drainé,
il donne un rendement de
40% plus élevé, l'an prochain le producteur agricole, avec
le même travail, va être productif dans un bien plus grand
pourcentage. Quand le monsieur dit, à un moment donné, qu'au
Québec les terres ne sont pas rares vous voyez cela dans
l'avant-dernière colonne je pense qu'il faudrait qu'il revoie ses
statistiques. Les terres, au contraire, sont très rares au Québec
et toutes les études qui ont été faites en vue du zonage
ou de l'utilisation du territoire agricole démontrent que les terres
sont en quantité très limitée au Québec. Il faut
deux acres par personne pour nourrir la population, puis on en a 1,1.
M. Picotte: Est-ce que les terres sont rares parce qu'il n'y a
pas de zonage agricole présentement?
M. Garon: De toute façon, elles sont rares.
M. Picotte: Elles sont rares, même s'il y a du zonage.
M. Garon: C'est-à-dire que, s'il y a du zonage, on va en
garder plus pour la production agricole. La quantité de nos sols,
actuellement, est très limitée; on a un territoire arable qui
n'est pas considérable. La terre n'est pas rare, mais la bonne terre est
rare.
M. Giasson: Surtout, elle n'est pas entièrement
utilisée.
Le Président (M. Laplante): C'est un peu comme les
députés!
M. Picotte: Vous voulez dire que les meilleurs ont
été défaits.
Le Président (M. Laplante): Je n'ai pas dit cela, j'ai dit
que c'était un peu comme les députés.
M. Giasson: Vous violez le règlement, M. le
Président. Effectivement, au Québec, on dit que la terre est
rare. Le bon sol arable est assez rare au Québec; c'est une bande assez
étroite en bordure du Saint-Laurent ou dans les bassins de
rivières les plus au sud. Par contre, est-ce que le ministre est
conscient que, même en dehors de la région de Montréal,
nous avons un grand nombre de fermes, qui ont été acquises, ces
dernières années, par des gens qui ne sont pas des professionnels
de l'agriculture, qui sont sous-exploitées? Même des sols
agricoles d'une très grande richesse pour la culture ont subi la
plantation; des fermes entières ont été plantées,
et cela pas tellement loin de Québec, des fermes dans la région
où vivait, où vit encore le ministre de l'Agriculture. Je
pourrais aller lui montrer des fermes d'un sol très riche, d'une
très belle qualité de terre, des paroisses en bordure du
Saint-Laurent où des gens de la ville ont fait l'acquisition de ces
fermes pour les planter en résineux. Si le sol est rare, je pense qu'on
ne l'utilise pas au maximum.
M. Garon: C'est exact.
M. Picotte: Compliments de la maison. Avec le commanditaire de
tantôt, quand vous avez rencontré votre verre d'eau.
Le Président (M. Laplante): Vous avez fini,' monsieur?
M. Picotte: Oui.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-Hyacinthe. Vous avez changé d'idée? Le député
de Champlain.
M. Gagnon: Je n'ai pas levé la main.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Verchères.
M. Vaillancourt (Orford): Est-ce qu'on est encore sur la
discussion générale?
Le Président (M. Laplante): Générale.
M. Vaillancourt (Orford): J'aurais une petite question à
poser au ministre.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Verchères. Excusez, le député de Verchères. On
reviendra après.
M. Vaillancourt (Orford): Toujours dans le
général.
Le Président (M. Laplante): Toujours dans le
général.
M. Charbonneau: Moi aussi. En fait, le général,
tantôt, était assez particulier, c'était la raffinerie.
Puisque le député de...
M. Picotte: Maskinongé.
M. Charbonneau: ... Maskinongé... Je m'excuse.
M. Picotte: Le plus beau poisson de la province, non pas le
député!
M. Charbonneau: Ne m'ouvrez pas la porte!
M. Picotte: Je prendrai du Vita Grow, si vous m'ouvrez la
porte.
M. Charbonneau: C'est ce qu'ils ont fait dans mon comté et
cela les a payés.
M. Giasson: Parole de Charbonneau!
M. Charbonneau: C'est ce qu'il leur fallait. Vous aviez
commencé à parler de l'utilisation des sols arables. Je voulais
demander au ministre, finalement, quant aux intentions indiquées dans le
message inaugural du premier ministre, dans quel délai il prévoit
éventuellement pouvoir apporter à la discussion toute la question
de la protection des sols arables et l'utilisation, d'une part? Deu-
xièmement, je voudrais profiter de l'occasion pour signaler au
ministre que dans notre région, dans la vallée du Richelieu en
particulier, il y a déjà des municipalités qui tentent,
actuellement, de prendre leurs responsabilités dans plusieurs secteurs.
Elles ont à faire face à des difficultés
considérables.
Je pense qu'il y aurait avantage à ce que le ministère de
l'Agriculture apporte un soutien logistique à ces municipalités
qui, actuellement, prennent des mesures parfois énergiques pour
protéger les sols arables; qu'on leur fournisse, au ministère, le
soutien logistique, surtout si on connaît déjà un peu les
grandes orientations avec lesquelles on veut arriver au niveau de l'ensemble du
Québec.
Ces gens actuellement sont assez dépourvus et ont à faire
face à des assauts considérables de spéculateurs. Dans
bien des cas malheureusement, les premiers spéculateurs ce sont les
agriculteurs eux-mêmes, les vieux agriculteurs qui, de bonne foi, ont
toujours pensé que leur fonds de retraite ce serait leur fonds de terre.
Aujourd'hui ils se rendent compte qu'on ne peut peut-être plus se
permettre, au Québec, de bâtir et de développer nos centres
urbains dans notre jardin. On l'a dit tantôt, notre jardin, il est
limité, potentiellement limité. Je voulais savoir du ministre
s'il y avait des indications un peu précises quant aux orientations qui
étaient contenues dans le message inaugural et, deuxièmement,
s'il y a des possibilités, déjà dans l'immédiat, de
fournir certaines aides techniques rapidement, dans des municipalités
comme la paroisse de Saint-Charles-sur-Richelieu, d'autres paroisses. Le
comté de Verchères est peut-être un des comtés, je
l'ai dit dans mon discours en Chambre, atteints par la fièvre
spéculative puis actuellement c'est dramatique.
M. Garon: Je pense que le problème dans les cas de
municipalités qui veulent faire un zonage, ce n'est pas un
problème technique, c'est un problème de volonté de le
faire ou non. Le problème vient de ce qu'on veut en faire ou on ne veut
pas en faire. Je pense que c'est cela essentiellement. Deuxièmement, au
point de vue de la loi du zonage agricole, actuellement on travaille de
façon assez intensive là-dessus, depuis un certain temps, et on
avait comme objectif, on l'a toujours, de la déposer au début de
l'automne. Est-ce que ce sera en septembre ou en octobre? C'est assez difficile
à dire, mais c'était l'objectif, et c'est toujours
l'objectif.
M. Vaillancourt (Orford): Etes-vous à rebâtir la loi
du zonage agricole qui était prête sous l'ancien gouvernement?
M. Garon: Oui, la même loi que l'ancien gouvernement n'a
pas voulu adopter.
Le Président (M. Laplante): Sur le même sujet,
allez-y.
M. Charbonneau: M. le Président, je n'avais pas
terminé...
M. Garon: ... déposé.
M. Picotte: Etant donné que...
M. Garon: Je suis en train de le modifier, oui.
M. Picotte: Etant donné que le député de
Verchères a ouvert la porte, j'aimerais savoir quels sont les grands
principes qui vous animent concernant la loi du zonage agricole. Quels sont les
principes de base auxquels vous voulez vous référer puis asseoir
votre politique future?
M. Garon: Non, je ne veux pas parler de cela à ce
moment-ci, parce que je suis en train de travailler à des projets de
loi. A cause des implications au point de vue de la spéculation, je
pense que ce serait irresponsable de ma part d'entrer dans les détails
du projet de loi. Cela pourrait entraîner des mouvements de
spéculation et je ne veux pas...
M. Vaillancourt (Orford): Est-ce que les agriculteurs qui vont
faire partie du zonage agricole vont être dédommagés par le
gouvernement, étant donné que cela va diminuer la valeur de leur
ferme, qui ne pourra pas être mise en vente pour les
développements domiciliaires ou autres?
M. Garon: Je ne peux pas répondre à cela
immédiatement.
M. Vaillancourt (Orford): Vous n'êtes pas rendu là
encore.
M. Garon: Oh oui! Ces éléments-là sont
envisagés.
M. Picotte: Vous avez des idées nébuleuses à
ce sujet.
M. Garon: Non, pas nébuleuse, très
concrètes, mais c'est tout simplement que je ne voudrais pas en parler
parce que ce serait contre l'intérêt public, je pense, d'en parler
à ce moment-ci. De la même façon, un ministre des Finances
ne commence pas à parler de son budget, la veille ou l'avant veille,
même pas à ses amis, même pas à sa femme. Il pourrait
y avoir des fuites et on a déjà parlé de fuites possibles,
je me rappelle à Ottawa, il y a quelques années. Ce n'est pas
possible de faire cela pour un ministre des Finances; de la même
façon pour nous, dans un cas qui implique, qui pourrait impliquer des
transactions financières, de la spéculation, des mouvements non
pas de bourse, mais de valeurs immobilières. Je pense que je n'ai pas le
choix, je ne peux pas parler de cette question.
M. Picotte: Oui, vous faites bien, n'en parlez pas à votre
femme de zonage.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Je ne voudrais pas amener le ministre à
parler de ses intentions parce que je
suis d'accord avec lui, cela pourrait amener des mouvements, mais je
voudrais simplement lui signaler, quant à sa volonté versus le
soutien de la justice dont je parlais tantôt, que le problème
actuel c'est que plusieurs municipalités arrivent avec des plans de
zonage, notamment agricole, mais il n'y en a pas deux qui se ressemblent et
dans bien des cas on peut se demander s'ils sont d'égale valeur. Est-ce
qu'il n'y aurait pas lieu pour le ministère de l'Agriculture de fournir
une espèce de soutien technique qui ferait que dans certains cas les
municipalités ne commettraient pas des erreurs qui aggraveraient ou
rendraient plus difficile éventuellement l'adoption ou le consensus
nécessaire autour de ces projets?
Il ne s'agit pas de mettre en doute dans certains coins la
volonté des gens de vouloir l'adopter, mais plutôt la
difficulté... Dans mon comté, actuellement, je pense qu'il y a
trois ou quatre municipalités qui ont adopté récemment, au
cours des dernières semaines, des plans de protection des sols arables.
Il n'y en a pas deux qui se ressemblent. Dans certains cas on va très
loin, on se demande même si parfois on ne va pas trop loin, et, dans
d'autres cas, ce sont peut-être des questions inverses qui pourraient se
poser. C'est pour cela que je me demande si, compte tenu du fait que le
ministère connaît un peu les orientations dans lesquelles il veut
se diriger, il ne pourrait pas fournir à ces municipalités un
certain soutien, sans nécessairement uniformiser parce qu'on laisse
à chaque municipalité le soin d'aménager son milieu.
Malgré tout, il y aurait peut-être lieu d'éviter
à des municipalités, de faire certaines erreurs qui pourraient
éventuellement avoir des répercussions assez importantes sur le
terrain et dans le milieu au plan du climat social que cela peut créer
parce qu'on sait que ce genre de choses amène les gens à utiliser
cela à des fins plus ou moins avouables.
M. Garon: D'abord, dans l'état actuel de la
législation le zonage est une responsabilité du ministre des
Affaires municipales. Le ministre de l'Agriculture n'a rien à voir au
zonage à l'heure actuelle parce qu'il n'y a pas de loi qui lui permette
d'intervenir dans ce secteur. Vous savez qu'en vertu du Code municipal et de la
Loi des cités et villes les règlements de zonage dépendent
de ces lois qui relèvent de l'administration des affaires municipales,
pour une part.
Deuxièmement, il est évident, à l'heure actuelle,
que la loi devient nécessaire. Souvent si une loi a pour objectif de
représenter la morale ou la conception des choses, des citoyens à
l'heure que l'on vit ou si elle doit devancer les citoyens de cinq, dix quinze
ou vingt ans pour les éduquer. Ce que vous m'indiquez actuellement
touche au fond certaines municipalités et il n'y a pas seulement
celles-là. Celles-là sont couvertes par les journaux. Je ne sais
pas si c'est parce que les relations du député de
Verchères sont meilleures avec la presse ou bien s'il y a beaucoup de
journalistes qui demeurent dans le coin.
M. Charbonneau: C'est parce que les problèmes dans la
vallée du Richelieu sont criants.
M. Garon: II y a un règlement de zonage agricole qui a
été adopté dans une municipalité de mon
comté, Saint-Nicolas, et il n'y a eu aucune nouvelle dans les
journaux.
M. Charbonneau: Oui, mais il n'y avait pas de danger
d'assimilation comme dans le comté de Verchères, on est
près de Montréal.
M. Garon: S'il y a quelque chose, cela se développe plus
rapidement dans ce coin-là.
M. Charbonneau: Vous viendrez faire un tour par chez nous, vous
allez voir que cela se développe vite.
M. Garon: Tout ce qui n'est pas couvert par l'aqueduc a
été zoné à l'ouest comme territoire agricole. Je
pense à plusieurs municipalités qui, actuellement, veulent garder
leur caractère rural. Ce peut être aussi pour des fins agricoles.
On peut le garder pour plusieurs raisons.
Pour nous, le but n'est pas de garder un caractère
champêtre pour des citadins qui, une fois rendus, veulent empêcher
les autres d'y venir pour garder une vue sur les vaches du voisin en attendant
de lui faire cacher son tas de fumier ou de le faire parfumer parce que cela
ennuie le nez délicat des citadins. Cela, par des règlements
d'environnement. Je pense que les fins pour lesquelles le ministère de
l'Agriculture travaille sur une législation du territoire agricole,
c'est pour que les terres qui ont une vocation agricole, les sols arables du
Québec, soient utilisés pour des fins agricoles.
M. Vaillancourt (Orford): L'environnement, cela relève
aussi du ministère des Affaires municipales.
M. Garon: Non, du ministre de l'environnement.
Le Président (M. Laplante): Le député
d'Orford.
M. Charbonneau: M. le Président, juste pour terminer. En
fait, je suis d'accord avec ce que le ministre indique, mais je voudrais lui
signaler que c'est justement pour permettre à ces municipalités
de faire, même si cela relève actuellement des Affaires
municipales, des zonages dans le domaine agricole. Je ne parle pas du zonage
des centres urbains, mais, lorsqu'on a des paroisses agricoles, c'est pour
permettre qu'effectivement les zonages soient opérationnels sur le plan
agricole, qu'on ait des résultats et qu'on protège vraiment non
seulement l'agriculture, mais l'ensemble des consommateurs
québécois. En effet, lorsqu'on parle de zonage pour l'ensemble du
Québec ou n'importe où au Québec, on parle pour l'ensemble
des Québécois. On a un jardin qui appartient à tout le
monde. On vit avec ce jardin; ce ne sont pas seulement les agriculteurs qui
vivent du jardin. Dans ce sens, je trouverais important que l'on évite
que certaines municipalités ne fassent des erreurs, parce que l'on ne
leur a pas donné un
support logistique qu'on pourrait leur donner même avant qu'une
législation soit présentée. Même si cela
relève en principe d'un autre ministère, l'Agriculture pourrait
certainement fournir des conseillers à ces municipalités pour
voir si effectivement, en rapport avec les objectifs de l'agriculture et avec
la protection des sols arables c'est efficace, ce que l'on a
présenté comme règlements. C'est dans ce sens que je
voulais faire l'intervention.
M. Garon: Je pense que vous trouveriez cela
incompréhensible si, à un moment donné, le ministre des
Affaires municipales s'en allait dans une région et disait aux gens de
cette région: Vous allez faire du boeuf au lieu du veau ou des carottes
au lieu des oignons. On trouverait cela un peu curieux. De la même
façon, à ce moment-ci de la législation, c'est un domaine
qui regarde le ministre des Affaires municipales. Si les municipalités
vont voir le ministre des Affaires municipales et veulent être
conseillées sur ce plan-là, il peut y avoir... Les relations
entre le ministre des Affaires municipales et moi sont excellentes. On se
rencontre au comité ministériel permanent de l'aménagement
et le travail que l'on fait à ce moment-ci va dans le même sens.
Les deux ministères vont actuellement dans le même sens,
c'est-à-dire qu'eux travaillent à densifier les villes, parce que
c'est cela qui coûte meilleur marché, et nous on veut utiliser le
maximum de territoire pour les fins de l'agriculture.
M. Charbonneau: Ce que vous dites en fait, c'est qu'actuellement
vous conseillez aux municipalités qui ont l'intention de le faire dans
les prochaines semaines ou qui sont déjà aux prises avec des
problèmes de zonage de s'adresser au ministère des Affaires
municipales pour obtenir des conseils techniques dans le domaine agricole.
M. Garon: Non, dans le domaine du zonage.
M. Charbonneau: Oui, dans le domaine du zonage, mais cela a des
répercussions sur toute la question agricole. C'est dans ce sens que je
pense qu'il aurait été intéressant que le ministère
de l'Agriculture envisage de fournir un certain soutien logistique. En fait, le
message étant passé, vous pourrez peut-être y
réfléchir.
Le Président (M. Laplante): M. le député
d'Orford.
M. Vaillancourt (Orford): Je suis arrivé un peu en retard.
Je ne sais pas si le ministre dans son exposé
général...
Le Président (M. Laplante): II a parlé de
raffinerie surtout.
M. Vaillancourt (Orford): S'il a parlé de raffinerie, on
va donc lui poser des questions dans un autre domaine.
M. Giasson: On est sur le zonage.
M. Vaillancourt (Orford): Dans la presse...
Le Président (M. Laplante): M. le député
d'Orford, est-ce que vous sortez du zonage?
M. Vaillancourt (Orford): Oui. Je reviens sur la politique
générale.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Montmagny-L'Islet aurait une question. Je vous redonnerai la parole
après cela.
M. Giasson: Sur le zonage des terres agricoles, je n'ai pas
compris les motifs invoqués tout à l'heure par le ministre, nous
disant qu'il ne pouvait pas élaborer davantage le grand plan de zonage
agricole au Québec et de protection des terres arables chez nous,
lorsqu'il a donné comme argumentation que cela pouvait déclencher
un mouvement de spéculation. Or, à partir du moment où le
ministre a indiqué une volonté ferme de procéder à
un programme de zonage agricole, je ne peux concevoir que des
spéculateurs se mettent à acheter du sol ou décident d'en
acheter lorsqu'ils peuvent fort bien se douter que, dès la mise en
application d'une telle politique, il y aura des gels de sols quelque part au
Québec, selon les zones.
Je pense qu'on ne peut pas faire un zonage dans tout le territoire sans
déterminer des zones qui ont une vocation plus particulière par
rapport à d'autres. Il y aura sans doute des zones exclusives, des zones
privilégiées, des zones polyvalentes, je ne sais pas, mais il
serait bon d'entendre le ministre là-dessus.
Celui qui veut spéculer, à partir du moment où il
connaît la volonté ferme d'un gouvernement d'arriver à un
programme de zonage qui va geler certaines terres agricoles au Québec,
qui va geler également le prix de ces terres, je ne peux pas voir de
quelle façon un mouvement de spéculation peut partir vers la
hausse. La seule possibilité de spéculation viendrait de gens qui
ont acquis des terres agricoles au cours des récentes années
à des prix fort intéressants pour le gars qui a vendu, et qui
voudraient profiter de l'ignorance de certains citoyens québécois
qui n'auraient pas entendu parler d'un zonage possible dans les terres
agricoles et qui pourraient mordre à l'hameçon d'un
spéculateur qui a acquis des sols depuis quelques années ou
récemment. Mais, le Québécois le moindrement
informé ne peut pas jouer dans un programme de spéculation parce
qu'il sait bien que ce ne sera pas de l'expansion en matière de
facilité de commercialisation des fermes, cela va être des
restrictions qui vont découler d'une politique de zonage. Il me semble
qu'on peut aborder ces questions. Le danger de spéculation est à
peu près disparu à partir du moment où on connaît la
décision ferme d'un gouvernement d'aller dans ce secteur.
M. Garon: Vous vous rappelez sûrement, M. le
Président, qu'il y a quelques années, des promoteurs vendaient
des terres en Floride qu'on pouvait voir juste à marée basse. Les
gens achetaient.
Apparemment, on a déjà vendu le pont de Québec deux
fois pour le fer. Il y a eu énormément de choses comme cela. Les
lois de la protection des consommateurs sont là pour protéger les
gens contre ceux qui se font un métier, au fond, de faire du commerce.
Je pense que les gens qui ont souvent le plus la capacité de le faire
sont justement des spéculateurs qui font miroiter les avantages sur la
réalité. Je pense que dans cette affaire, il faut être
très prudents. On n'est jamais assez prudent.
Vous dites qu'on en a parlé. C'est vrai qu'on parle du zonage
depuis des années au Québec, à tel point que des
journalistes, des fois, nous demandent si on est sérieux, cette fois-ci,
quand on en parle. Ils disent: Cela fait plusieurs années que les
ministres de l'Agriculture parlent de cela. Le problème, c'est que le
Conseil des ministres n'est pas du même avis. Je pense que le discours
inaugural du premier ministre l'a indiqué de façon claire. Il a
indiqué également, à l'assemblée annuelle de la
coopérative fédérée, que lorsque le ministre de
l'Agriculture présentera une loi sur le zonage il pourra compter sur
tout le cabinet derrière lui. Mais, malgré cela, je vois que
lorsque vous avez des contacts avec les journalistes, par exemple, plusieurs
disent...
M. Vaillancourt (Orford): II n'a pas eu encore tout le cabinet
dernière lui.
M. Garon: Comment cela?
M. Vaillancourt (Orford): ... pour permettre de présenter.
Il n'y a pas eu d'unanimité au cabinet encore, dans ce domaine?
M. Garon: C'est-à-dire que le projet de loi n'est pas
rendu là.
M. Vaillancourt (Orford): Parce que le projet de loi n'est pas
encore prêt, vous dites.
M. Picotte: II faut déterminer votre projet de loi avant
de le présenter au cabinet.
M. Garon: II est en période de gestation.
M. Vaillancourt (Orford): Mais, ordinairement, après que
le Conseil des ministres a pris une décision à
l'unanimité, la préparation d'un projet de loi...
M. Garon: Ce n'est pas trop long. Les légistes le
préparent et il est prêt à être déposé.
C'est ce qu'ils font actuellement.
M. Vaillancourt (Orford): C'est parce qu'il n'y a pas eu
l'unanimité encore.
M. Garon: Ah non! Il y a eu unanimité. M. Guy Tardif en a
parlé, le ministre des Affaires municipales. J'en ai parlé
également. Le ministre de l'Agriculture s'occupe de préparer un
projet de loi sur le zonage agricole, de la même façon que le
ministre des Affaires municipales s'occupe de préparer un projet de loi
sur l'urbanisme et il y a unanimité sur les principes, il n'y a pas de
problème. C'est actuellement en élaboration.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Huntingdon, sur le même sujet.
M. Dubois: M. le Président, je veux demander au
ministre...
M. Garon: Vous voyez que c'est tellement vrai que les
députés demandent à l'avoir au plus vite.
M. Vaillancourt (Orford): Est-ce que M. le ministre...
M. Garon: Dans cette partie, les députés ne sont
pas au courant.
M. Vaillancourt (Orford): Je connais cela.
M. Dubois: M. le ministre, est-ce que le zonage relève de
votre ministère ou des Affaires municipales?
M. Garon: Le zonage actuellement... M. Dubois: Le zonage
agricole. M. Garon: Actuellement?
M. Dubois: Si on veut conserver nos terres fertiles, cela
relève de votre ministère ou du ministère des Affaires
municipales?
M. Garon: A l'heure actuelle? M. Dubois: A l'heure
actuelle.
M. Garon: Actuellement, les territoires municipaux, les
municipalités dépendent, sont régies soit par la Loi des
cités et villes, soit par le Code municipal et ce sont ces lois qui
permettent aux municipalités d'adopter des règlements de zonage.
C'est en vertu de ces lois, que des règlements de zonage peuvent
être adoptés.
M. Dubois: S'il y a un règlement de zonage agricole, il va
être effectué par le ministère des Affaires municipales et
non par le ministère de l'Agriculture.
M. Garon: Non, par la municipalité.
M. Dubois: Oui, mais je veux dire les lois qui vont régir
l'administration, en fait, il va y avoir quelqu'un qui va administrer et qui va
décider quelles terres sont fertiles pour une région
donnée, et quelles terres ne sont pas fertiles ou pas aptes à la
culture. A ce moment, j'imagine que logiquement ce devrait être les
conseils de comté qui seraient habilités à décider
quelles terres sont fertiles pour l'agriculture, quelles terres ne le sont
pas.
M. Garon: Plus tard ou actuellement?
M. Dubois: Plus tard, il faut que cela vienne un jour, parce que
cela fait huit ans que vous en parlez.
M. Garon: Dans l'état actuel des lois, je vous dis
actuellement qu'on travaille à une loi nouvelle sur le zonage agricole,
l'utilisation du territoire agricole. Par ailleurs, si actuellement des
municipalités veulent zoner leur territoire, elles ont des pouvoirs de
zonage, actuellement.
M. Dubois: Cela existe.
M. Garon: Cela existe dans la législation actuelle.
M. Dubois: Elles ne peuvent tout de même pas arrêter
des mutations, si on veut. Présentement, une municipalité ne peut
pas arrêter des mutations, changements de propriétaire. Je peux
aller acheter une ferme, n'importe où, même si je ne cultive pas
cette ferme. Il n'y a personne qui m'empêche de l'acheter,
présentement, il n'y a pas de loi.
M. Garon: Les municipalités, actuellement, les mutations,
elles doivent tenir compte de ce qui existe. L'achat, ce n'est pas un
problème.
M. Dubois: Une mutation, c'est un changement de
propriétaire.
M. Garon: Les municipalités, actuellement, ont le pouvoir
de dire: Zone résidentielle, zone commerciale, zone industrielle. Elles
pourraient déclarer aussi que tel territoire est une zone agricole.
M. Dubois: D'accord mais cela change.
M. Vaillancourt (Orford): C'est une réglementation.
Une Voix: Pour l'enregistrement, on a de la misère.
Le Président (M. Laplante): Pour vous faire comprendre,
vous allez vous identifier. Un par un.
M. Garon: II faudrait adopter un règlement à cet
effet.
M. Dubois: Cela n'implique pas que l'acheteur éventuel
doive cultiver la ferme. On protège une zone qui va demeurer agricole,
d'accord, mais, si on veut que cette terre soit cultivée, la mutation
peut se faire à n'importe quelle personne. Elle peut se faire à
un avocat, à un professeur, à n'importe qui, qui va acheter la
ferme pour s'en faire un camp d'été si on veut.
M. Garon: Même dans une perspective de zonage agricole,
obliger quelqu'un à cultiver une terre? On peut peut-être mettre
des incitations, des pénalités si la terre n'est pas
cultivée, mais on n'est pas en Russie. Vous-même vous parliez de
mesures socialistes, ce matin. On n'est pas rendu à les obliger à
cultiver.
M. Dubois: Vous parlez de loi pour protéger... Vous parlez
de loi. Ce n'est pas moi qui l'amène, c'est vous. Vous parlez de loi
pour protéger les régions fertiles, il faut tout de même en
faire quelque chose de ces régions. Si vous laissez des terres
abandonnées pendant 20 ans, elles ne seront plus cultivables
après. Alors, il nous faut tout de même arriver avec une politique
qui tient.
Le Président (M. Laplante): Le député
d'Arthabaska, sur le même sujet.
M. Baril: Tout à l'heure, le député de
Montmagny-L'Islet disait que si une personne connaissait la volonté
ferme d'un gouvernement de déposer une loi de zonage, cela
empêchait la spéculation foncière. L'ancien gouvernement,
de fait, l'a dit à maintes reprises et je ne doute pas de la
volonté que le ministre avait dans le temps, de la faire voter cette
fameuse loi. Mais elle n'est pas votée encore, et la spéculation,
il y en a toujours eu et il y en a encore dans le moment. Même si le
gouvernement actuel a une très bonne intention de la présenter,
il s'en fait encore de la spéculation.
L'ancien ministre Toupin avait pris la peine, il y a quelques
années, d'aller devant la Chambre de commerce, je pense, de
Montréal pour avertir les gens: La fameuse loi, on va la voter, en
voulant dire: Dépêchez-vous, vous en avez des terres à
acheter, achetez-les, parce que tout à l'heure il va être trop
tard, je vais la voter. Ce n'est pas la place, selon moi, pour aller annoncer
aux gens qu'on voterait une loi.
M. Picotte: C'est votre interprétation.
M. Baril: C'est mon interprétation, mais tout ceci pour
dire que ce n'est pas seulement la volonté ferme d'un gouvernement qui
va empêcher la spéculation.
Le Président (M. Laplante): Une réponse à
l'intervention du député d'Arthabaska. Le député de
Maskinongé, vous en avez, vous passez votre tour ou quoi.
M. Garon: Ce n'était pas une question, mais une
constatation.
M. Picotte: Cela n'en mérite pas. M. le Président,
à un moment donné le 14 février 1976, à une
journée nationale du Parti québécois il n'est pas
interdit de parler de cela, j'espère? à Sainte-Croix de
Lotbinière, il y avait une proposition de faite par les militants disant
que les terres propices à l'agriculture devraient être
classées en zone d'utilisation soit comme des terres exclusives, soit
comme des terres prioritaires, ou, en troisième lieu, comme
polyvalentes.
Indépendamment du Conseil des ministres et indépendamment
du ministre, j'aimerais savoir ce que l'actuel député de
Lévis pense de cette suggestion. Quelles seraient, selon lui, ses
priorités?
Je vous demande une réponse comme député.
Le Président (M. Laplante): Le député est
libre de répondre.
M. Garon: Je pense que ce sont des propositions
intéressantes.
M. Picotte: Mais vous n'avez pas de classement précis
quant à vous, selon votre opinion? Vous n'avez aucune idée
là-dessus.
M. Garon: J'ai des idées.
M. Picotte: Quelles sont-elles?
M. Garon: II est trop tôt pour les annoncer.
M. Giasson: La transparence!
Le Président (M. Laplante): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: On a indiqué, depuis quelques moments
déjà...
M. Garon: Le ministre me dit de taire ce que le
député aurait envie de dire.
M. Picotte: Vous êtes comme le boeuf qui était
aveugle, il ne veut pas que l'autre soit sourd-muet.
M. Garon: Au point de vue de la qualité de la viande.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: On a fait état, il y a quelques moments, de la
volonté d'une politique de zonage au temps de l'ancien gouvernement.
C'est une réalité au Québec, je pense, dont personne ne
peut mettre en doute les besoins. Cependant, j'aimerais savoir du ministre
à quel moment cette fameuse loi de zonage sur laquelle il est un
peu cacho-tier présentement pour ce qui est de nous en faire
connaître les modalités il entend la déposer devant
l'Assemblée nationale.
M. Garon: Cela a été annoncé dans le
discours inaugural: au cours de la présente session. Normalement, cela
veut dire d'ici au 31 mars. Nous espérons pouvoir être en mesure
de le faire au cours de l'automne.
M. Picotte: L'automne 1977?
M. Garon: Evidemment, vous connaissez, dans le
gouvernement...
Une Voix: ... une lenteur.
M. Garon: Non, c'est plus lent parce qu'il y a plus de
consultations, il y a plus d'organismes.
M. Picotte: II y a plus de comités.
M. Garon: Pour une meilleure coordination. Si on regarde, par
exemple, les comités ministériels permanents de
l'aménagement et si on veut faire quelque chose qui se tient, au lieu
d'avoir des rivalités entre les municipalités, le
ministère des Affaires municipales et celui de l'Agriculture, si tout
cela peut marcher de façon coordonnée avec l'aménagement,
c'est pour le mieux. A ce moment, cela prend des consultations, cela prend des
délais plus longs. Il y a des études considérables
à faire là-dessus. On s'est fixé un objectif. Dans
d'autres domaines, je me suis fixé des objectifs, puis des fois ce n'est
pas aussi rapide qu'on pense que cela va être. Disons qu'on s'est
fixé comme objectif l'automne.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Champlain, sur le même sujet.
M. Gagnon: Oui. Je pense que le député de
Maskinongé tantôt voulait parler de la vocation des sols. Est-ce
qu'actuellement, au ministère de l'Agriculture, on connaît
je sais qu'il y a des études qui ont été faites depuis
longtemps la vocation assez précise des différentes
régions de la province, la vocation des sols? Puis est-ce
qu'éventuellement, dans une loi de zonage, on pourrait faire en sorte
que la vocation de chaque région agricole puisse être
développée, c'est-à-dire qu'on pourrait spécialiser
un peu les vocations des régions agricoles?
M. Garon: II y a actuellement une étude de la
régionalisation des productions qui se fait au ministère. Vous
savez, ce ne sont pas des blocs ou un jeu de Monopoly, on peut déplacer
les blocs comme on veut, ou comme un général d'armée
déplace ses bateaux à la veille de la guerre. Actuellement, ce
sont des gens qui sont dans des productions données dans
différentes régions, et même si on dit que dans certaines
régions les productions idéales sont telle chose, telle chose, on
ne transforme pas cela du jour au lendemain. Cela pouvait se faire en Russie
quand Staline a décidé de tuer tous les koulaks qui lui
résistaient, mais je pense qu'ici on ne pratique pas cette façon
de penser. Quand on parle de régionalisation éventuellement quand
les études du ministère seront terminées, il faudra
procéder par conviction, par incitation.
Ce sont des choses qui se font lentement.
M. Gagnon: C'est ce que je voulais dire. A ce moment-là,
cela veut dire qu'on peut procéder par incitation, dans certaines
régions, pour essayer de favoriser certaines cultures ou un certain
élevage. C'est dans ce sens. Ne pas obliger les gens à aller
là-dedans, mais, par des programmes de financement ou des choses
semblables, on peut avoir des incitations.
M. Garon: En consultation avec les producteurs. Il y a des choses
qui sont faites dans ce domaine. L'autoapprovisionnement, par exemple, en
maïs-grain dans la région de Saint-Hyacinthe ou autour de
Montréal, cela ne date pas de 25 ans et de 50 ans; c'est assez
récent. Au fond, cela fait cinq ans que cela se fait. Donc, c'est un
zonage de production dans une région, parce qu'à un moment
donné le ministère de l'Agriculture avait trouvé que
c'était bon de le faire. Cela s'est fait graduellement et cela s'est
fait quand même assez rapidement. Je pense que cela doit se faire en
consultation entre le ministère, les organismes agricoles et les
cultivateurs eux-mêmes par concertation, par conviction.
M. Gagnon: II reste qu'au départ il faut connaître
un peu la vocation des régions pour savoir quelle production peut
réussir le mieux dans les différentes régions.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-François, même sujet.
M. Rancourt: Sur le même sujet. Est-ce que les cartes
pédologiques qui ont été faites par le ministère de
l'Agriculture ont été transmises au ministre de
l'aménagement du territoire et aux Affaires municipales?
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, avez-vous
compris la question du député de Saint-François?
Voulez-vous répéter votre question?
M. Rancourt: J'aimerais savoir si les cartes pédologiques,
qui ont été faites par le ministère de l'Agriculture, ont
été transmises au ministre de l'aménagement du territoire
et aux Affaires municipales.
M. Garon: Non. Pédologiques? L'analyse des sols, vous
voulez dire?
M. Rancourt: Non, la carte qui est faite au ministère de
l'Agriculture, avec tout l'inventaire des sols au Québec.
M. Garon: On a la carte d'inventaire qui est publique. Vous
pouvez en acheter.
M. Rancourt: Oui, d'accord.
M. Garon: Pas le ministère de l'aménagement comme
tel, parce que c'est quelques fonctionnaires, mais l'OPDQ s'en est servi
abondamment. Le ministère des Affaires municipales aussi peut s'en
servir, s'il le veut. C'est public, c'est connu. Mais on parle de potentiel
biophysique, à ce moment-là.
M. Rancourt: Bien sûr. Cela fait partie d'un inventaire des
sols arables. Si on veut conserver nos sols arables, il faut utiliser ces
cartes.
M. Garon: Oui.
Le Président (M. Laplante): Y a-t-il d'autres questions
sur le zonage? Le député d'Orford.
Agriculture et indépendance
M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, sur un autre
sujet, un sujet plutôt général, parce que je pense qu'on
n'est pas encore au premier programme. Cela fait suite un peu à une
entrevue que le ministre avait donnée au début de janvier
à un journaliste de la Presse, disant que la seule façon de
rendre rentable l'agriculture au Québec, c'était la
séparation du Québec...
M. Garon: Avez-vous le texte exact, là. Passez-moi donc le
texte.
M. Vaillancourt (Orford): ... d'avec le reste du Canada.
J'aimerais savoir du ministre de quelle façon il procéderait pour
rendre plus rentable l'agriculture d'un Québec séparé que
s'il est avec le reste du Canada.
M. Garon: Avez-vous le texte?
M. Vaillancourt (Orford): Je n'ai pas le texte.
M. Picotte: Vous pouvez le lire.
M. Garon: Non, non. Je ne l'ai jamais dit dans les termes que
vous venez d'utiliser. J'ai dit que l'indépendance donnerait au
Québec...
M. Picotte: M. le Président, question de règlement.
Permettriez-vous à mon collègue de lire le texte? Même s'il
ne peut pas le donner, il peut le lire.
Le Président (M. Laplante): Je pense que votre
collègue est assez grand pour me le demander.
M. Vaillancourt (Orford): Vous avez dit: L'indépendance
profiterait particulièrement aux agriculteurs.
M. Garon: Oui.
M. Vaillancourt (Orford): "S'il y a une catégorie de
Québécois dont il est certain qu'ils tireraient des avantages
considérables de l'indépendance du Québec, ce sont les
agriculteurs." Ce que j'aimerais savoir du ministre, c'est de quelle
manière il peut rendre l'agriculture plus rentable qu'elle ne l'est
actuellement en séparant le Québec du reste du Canada.
M. Garon: Je vais vous dire quelque chose.
M. Charbonneau: Vous avez de la misère à
comprendre.
Le Président (M. Laplante): A l'ordre! A l'ordre, s'il
vous plaît, M. le député de Verchères!
M. Picotte: J'espère qu'il n'y a qu'un ministre.
M. Vaillancourt (Orford): Je ne suis peut-être pas le seul
qui ne comprend pas cela.
M. Garon: Les plus anciens indépendantistes l'admettaient.
Gérard Filion l'admettait, qui a été longtemps dans l'UCC,
qui a fait, d'ailleurs, sa thèse de maîtrise en administration sur
le retour à la terre. Il affirmait, à Rimouski, dans une
conférence, en 1962 ou 1963: Je dois admettre que les cultivateurs en
profiteraient, de l'indépendance. Pourquoi au fond? C'est parce que
l'indépendance donnerait le contrôle des importations et des
exportations. Le malaise de l'agriculture au Québec, depuis des
années, a été le dumping des produits, parce que, pour des
raisons climatiques, on est quelques semaines en retard sur les autres. Le
dumping, c'est ce dont on se plaint.
Depuis que je suis petit gars que j'entends parler des problèmes
du dumping des produits étrangers. Actuellement, regardez de quoi on se
plaint: de l'importation de volaille américaine, qu'on ne contrôle
pas. Regardons dans les différents types de production...
M. Vaillancourt (Orford): Quelles sont les denrées
où on est déficitaire?
M. Garon: Ce serait plus simple de nommer celles qu'on produit
pour notre consommation. Dans ce cas il n'y en aurait pas beaucoup à
nommer, il y aurait le lait qu'on produit en excédent, le poulet,
actuellement le porc.
M. Vaillancourt (Orford): II y a le lait, le porc, le poulet.
M. Garon: Les oignons, les carottes et je pense que c'est
à peu près terminé.
M. Vaillancourt (Orford): Cela en fait cinq. M. Garon:
Cela n'en fait pas beaucoup.
M. Vaillancourt (Orford): Vous dites l'excédent de la
production?
M. Garon: Non, le porc c'est à peu près
équivalent. La volaille, c'est seulement à peu près...
M. Vaillancourt (Orford): Disons qu'il y a environ...
M. Garon: Les oignons, c'est à peu près 100% de
notre consommation, c'est à peu près équivalent; les
carottes, 30% d'excédent; le lait, 45% d'excédent.
M. Cordeau: ... avec le lait qu'on va faire faire du dumping
à quelque part. Alors cela veut dire...
M. Garon: Vous savez que M. Whelan m'a posé la même
question, le 15 décembre, quand je l'ai rencontré, la veille de
la conférence des ministres de l'Agriculture. Il m'a demandé la
même chose. Il m'a dit, avec l'air narquois, avec un sou- rire: Advenant
la souveraineté du Québec, qu'est-ce que vous allez faire avec
les surplus de lait, puisque vous produisez 145% de votre consommation au
Québec? Alors, je me suis retourné vers M. Whelan et je lui ai
dit: Vous savez, après la souveraineté du Québec,
qu'est-ce que l'Ontario va faire avec ses usines d'automobiles? Il y a 17 ou 19
usines d'automobiles en Ontario, et dans le Québec il n'y en a qu'une,
alors qu'est-ce que vous allez faire avec vos usines d'automobiles si le
Québec n'achète pas d'automobiles de chez vous?
Je lui ai dit que dans une automobile il y avait pas mal de livres de
beurre qui rentraient, qu'on pourrait peut-être bien faire un
échange des automobiles contre des produits laitiers, mais que cela ne
représenterait peut-être pas autant d'automobiles qu'il pensait,
nos 45% d'excédent de produits laitiers. Il a replongé le nez
dans sa soupe et n'a plus reparlé de cette question.
Le ministre d'Etat au développement économique, Bernard
Landry, a déclaré à Toronto, que dans une perspective
d'association économique quand on parle d'association
économique, il peut être question de libre échange, c'est
un secteur protégé il déclarait à Toronto
c'est un territoire de l'Ontario s'il y a un secteur que le
Québec voudrait protéger, dans la perspective d'association
économique, ce serait l'agriculture, dans un Québec
associé économiquement avec le Canada. Je pense que tout le monde
va être d'accord avec cela.
Un des gros problèmes, notre problème, c'est qu'une grosse
partie de l'agriculture, les lois agricoles sont dirigées à
partir d'Ottawa. A Ottawa, l'agriculture a toujours été
pensée plus en fonction de l'Ouest qu'en fonction du Québec. On a
bien voulu nous laisser temporairement le lait, mais l'an passé, on
n'était pas certain si on a voulu nous laisser le lait. A la veille des
élections, on nous a donné un peu pour le lait. Le
député de Montmagny-L'Islet sait, quand il parle d'un plan de
stabilisation des revenus dans le domaine du lait industriel, que le
fédéral, en fait, attend l'occasion, pour sortir du lait, que le
Québec lui donne l'occasion de sortir, pour sortir lui-même de ses
subventions. Evidemment, il a fait un petit effort, à la veille des
élections. J'espère qu'il n'y aura pas d'élections
fédérales avant le mois d'avril de l'an prochain, pour que les
producteurs laitiers du Québec aient encore plus de pouvoir de
marchandage au mois d'avril prochain.
M. Picotte: Où va-t-on prendre les grains de provende?
M. Garon: Justement, j'en ai parlé ce matin, parce qu'il y
en a d'autres qui en ont parlé. Dans notre programme, il y avait la
création d'une régie des grains de provende. Actuellement, j'ai
demandé un rapport à quelqu'un et il y a un comité qui se
formera avant longtemps, justement, dans le sens dont parlait le
député de Beauce-Sud, pour penser en termes d'achat de nos grains
de provende. Il y a différentes façons.
Le Canada en vend, les Etats-Unis en vendent, l'Argentine en vend. Il y
a plusieurs vendeurs de grains de provende. On pourra peut-être obtenir
des meilleurs prix que ceux que nous avons actuellement. C'est une chose
à discuter. C'était dans notre programme. On travaillera
là-dessus. J'aimerais que l'on puisse adopter quelque chose en 1978 ou
1979 là-dessus, le plus rapidement possible en tout cas, dans une
perspective d'être le plus autonome possible sur le plan alimentaire et
agricole au Québec. En faisant cela on fait exactement ce que tous les
pays du monde occidental essaient de faire actuellement.
Tout le monde se rend compte, devant la pression démographique,
l'extension des villes, la croissance de la population, que les villes ont
tendance à gruger du territoire rural. Je regarde les études qui
se font à Harvard, par exemple. J'ai reçu récemment des
études sur les aspects alimentaires dans le monde et il y a à peu
près unanimité des experts là-dessus pour prévoir
une crise alimentaire dans un nombre X d'années. On pense que la
population mondiale sera doublée dans les 30 prochaines
années.
On voit des territoires où on est surexploité. En
Haïti dernièrement, on a vu qu'on s'en va vers une érosion
du sol parce qu'on a abattu trop de forêts. On voit des
sécheresses un peu partout, dans des pays qui avant étaient des
pays agricoles, parce qu'on a trop abattu d'arbres.
Selon les experts des grandes universités américaines il y
aura une crise de l'alimentation avant longtemps. Quand on parle de
protéger l'agriculture c'est un peu comme protéger les
océans de la pollution. Quand les océans sont pollués
c'est la fin. Protéger l'agriculture on n'a pas le choix. Quand on aura
mis de l'asphalte sur toutes les terres arables du Québec, il poussera
peut-être des fleurs de macadam. Cela ne nourrit pas beaucoup son
homme.
M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, je pense que le
ministre ne répond pas tellement à ma question. Dans la province
de Québec, on produit je ne sais combien de centaines de denrées,
il y en a plusieurs. Vous nous dites qu'il y a cinq produits qui sont
excédentaires pour la consommation du Québec. Pour rendre
l'agriculture plus rentable avec un Québec séparé, si nous
avons seulement cinq produits Québec souverain, si vous voulez
qu'est-ce que cela peut apporter de plus à l'agriculteur si nous
avons seulement un surplus de production sur cinq denrées? Il y a tout
le reste de la gamme qui permet aux cultivateurs de produire et rendre
l'agriculture rentable. Ce n'est pas l'option souveraine, mais plutôt de
bonnes politiques de l'agriculture pour favoriser les agriculteurs à
produire plus dans les denrées où on est déficitaire.
M. Garon: Non, je ne pense pas. Ce que l'on subit, c'est le
dumping des produits étrangers. C'est aussi à cause du climat un
peu en retard sur l'Ontario et les Etats-Unis...
M. Vaillancourt (Orford): Je suis d'accord.
M. Garon: On achète les primeurs importées au lieu
de les avoir de la production locale...
M. Vaillancourt (Orford): Mais avec la souveraineté ou la
séparation le climat sera le même.
M. Garon: Non, mais elle nous permet le contrôle des
frontières. C'est cela que cela nous permet, le contrôle des
importations.
M. Vaillancourt (Orford): C'est parce que j'aimerais avoir votre
philosophie là-dessus. Vous en avez tellement parlé dans le
passé et plusieurs cultivateurs croient un peu qu'avec un Québec
souverain ou séparé leurs revenus augmenteraient. Je n'y crois
pas, mais j'aimerais avoir votre opinion et celle des spécialistes de
votre ministère. Eux sont au courant si un Québec souverain ou
séparé pourrait donner des bénéfices additionnels
à l'agriculture au Québec.
M. Garon: Le problème c'est le contrôle des
importations.
M. Vaillancourt (Orford): II y a seulement cinq ou dix
denrées excédentaires. Qu'est-ce que vient faire le
contrôle des importations pour rendre rentable l'agriculture, pour la
rendre plus florissante qu'en ce moment?
M. Garon: A cause du dumping des produits ou encore les primeurs
qui arrivent avant le temps. Bloquez seulement l'entrée des primeurs de
trois semaines au Québec, c'est un petit exemple, trois semaines...
M. Vaillancourt (Orford): C'est un exemple que je veux.
M. Garon: Un exemple concret: Bloquez l'entrée des
primeurs de trois semaines au Québec, à ce moment-là c'est
le cultivateur québécois qui les vendra au prix des primeurs.
Actuellement vous les payez aux produits étrangers. Ce n'est qu'un
exemple.
M. Giasson: C'est le consommateur qui le paiera.
M. Garon: Non, il ne le paiera pas. Il le paye actuellement, mais
aux pays étrangers. Alors il le paiera aux producteurs locaux.
M. Giasson: M. le ministre, vous savez très bien le climat
qui est le nôtre au Québec par rapport au climat de provinces et
de pays voisins. Si vous laissez un libre marché, cet état de
libre marché, si vous ne bloquez pas les frontières par des taxes
spéciales, cela profite aux consommateurs québécois.
M. Garon: L'agriculture ne fonctionne nulle part dans un libre
marché.
M. Giasson: Je vous dis cela en dehors des thèses que vous
avez soutenues. Oui.
M. Garon: Non, parce que vous disiez vous-même ce matin que
l'agriculture est plus subventionnée aux Etats-Unis.
M. Giasson: Elle est subventionnée aux Etats-Unis parce
qu'il s'agit d'une activité économique et humaine qui
dépend de facteurs qui sont hors du contrôle de l'homme.
M. Garon: Ce n'est plus un libre marché.
M. Giasson: C'est pour cela que les gouvernements des pays
occidentaux doivent soutenir l'agriculture de façon variée ou
différente d'une année à l'autre, mais cet état de
dépendance de l'homme vis-à-vis de situations qu'il ne
contrôle pas, c'est la raison pour laquelle les gouvernements doivent
certaines années soutenir de façon plus marquée des
productions agricoles données. Et on ne changera pas cela tant que
l'homme n'aura pas ce pouvoir de contrôler les
éléments.
Le Président (M. Laplante): Savez-vous, M. le
député de Montmagny-L'Islet, que vous étiez le
quatrième sur ma liste? Je vais passer au député de
Huntingdon sur le même sujet.
Une Voix: Ah! je pensais que vous étiez en train de dire
qu'il était en train de me convaincre.
M. Vaillancourt (Orford): M. le ministre, je vais finir
là-dessus. Je veux dire au ministre que sa philosophie de
souveraineté ou de séparation ne rendra pas beaucoup plus
rentable l'agriculture, ne favorisera pas plus l'agriculture que cela ne la
favorise actuellement. C'est par des politiques incitatives, par des budgets
additionnels...
M. Charbonneau: Voulez-vous me dire ce que vous avez fait pendant
six ans si vous étiez aussi bons que cela?
M. Vaillancourt (Orford): ... avec l'augmentation du
drainage.
M. Picotte: Vous êtes donc bien ignorant. M.
Vaillancourt (Orford): C'est surtout...
M. Charbonneau: Vous aviez le fédéralisme pendant
six ans, qu'avez-vous fait?
Une Voix: Vous n'êtes pas sorti. Vous vous êtes
occupé seulement des crimes crapuleux, d'après ce que je peux
voir. Comme journaliste, vous n'êtes pas sorti tellement souvent.
Le Président (M. Laplante): J'ai votre nom sur la liste,
vous parlerez tout à l'heure.
M. Picotte: Vous êtes donc bien ignorant, allez vous
recycler. Cela presse.
M. Charbonneau: J'ai l'impression que c'est vous qui avez besoin
de recyclage, cher monsieur et cher député.
M. Picotte: J'ai l'impression que vous avez besoin de Vita Grow
et cela presse. Allez donc vous recycler. Vous viendrez à mon bureau, je
vous renseignerai. Venez au 233 demain matin, je vais vous renseigner parce que
vous manquez de renseignements.
M. Charbonneau: Vous êtes à peu près aussi
stupide que vous l'êtes en Chambre.
M. Picotte: Venez à 233 demain matin, je vais vous
renseigner parce que vous manquez de renseignements.
M. Charbonneau: Je n'en ai pas besoin. Je pense qu'on peut vous
laisser avec vos "folleries", M. le député de Maskinongé.
On va s'en passer.
M. Picotte: Je vais le laisser faire. Il est vidé
déjà.
Le Président (M. Laplante): Le député
d'Orford.
M. Vaillancourt (Orford): Je vais terminer. Comme conclusion,
disons que ce que je viens de dire termine un peu ce que je voulais savoir du
ministre, à savoir que la séparation ou la souveraineté
n'apportera rien d'additionnel aux cultivateurs du Québec.
M. Garon: Vous n'avez qu'à demander aux cultivateurs si le
contrôle des importations par le Québec ne leur serait pas
bénéfique. Depuis que je suis petit gars, j'entends parler du
dumping des produits.
M. Vaillancourt (Orford): II y en a dans tous les pays.
M. Garon: Je comprends mais si on voulait le contrôler.
M. Vaillancourt (Orford): Même dans des petits pays comme
la Suède, il y en a.
M. Garon: En Amérique du Nord, le pays qui en souffre le
plus, c'est le Québec. Actuellement, je pense que dans n'importe quel
parti politique on a toujours dit que l'agriculture, au ministère
fédéral, a toujours été pensée en fonction
de l'Ouest. D'ailleurs, j'aurai l'occasion de démontrer par des
études économiques bientôt à quel point les
politiques fédérales ont été pensées en
fonction des fermiers de l'Ouest. Ce qu'on a donné, au fond, aux
cultivateurs du Québec, à Ottawa, ce sont des grenailles, des
miettes de la table comparativement à ce qu'on a donné aux
fermiers de l'Ouest. Alors qu'on les pénalisait pour ne pas produire du
lait on parlait de $8.60 on payait les producteurs de l'Ouest
pour ne pas produire. Toutes les politiques à Ottawa ont
été pensées en fonction des besoins de l'Ouest. Et cela
les cultivateurs le savent, on n'a pas besoin de leur faire des dessins. Ils le
vivent de père en fils depuis 150 ans.
M. Vaillancourt (Orford): Cela, c'était vrai avant que la
politique laitière existe au Québec, c'est-à-dire au
Canada.
M. Garon: L'an passé, c'était vrai.
M. Vaillancourt (Orford): Je ne parle pas de l'an passé.
Je dis que c'était vrai ce que vous dites là en ce qui concerne
la politique fédérale qui favorisait beaucoup plus l'Ouest avant
qu'il y ait les plans conjoints ou le contrôle du lait industriel.
M. Garon: Ils ont fait un peu...
M. Vaillancourt (Orford): Aujourd'hui, cela a
amélioré la situation.
M. Garon: ... pour l'agriculture du Québec ce qu'ils ont
fait pour le textile du Québec au fédéral. C'était
une monnaie d'échange pour la vente du blé de l'Ouest.
M. Picotte: A part Tricofil.
M. Garon: Tricofil est arrivé après.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Huntingdon.
M. Dubois: M. le Président, toujours à
l'intérieur d'une indépendance ou d'une souveraineté, ne
trouvez-vous pas, M. le ministre, que des pressions économiques seraient
plus fortes vers le Québec indépendant que vers l'ensemble du
Canada? Chose certaine, le "lobbying" à Washington existerait quand
même dans un Québec séparé, cela c'est
sûr.
Comme on le fait aujourd'hui. Un Québec de 6 millions de
personnes aurait plus de difficultés à combattre les pressions
économiques que le Canada dans son entier, c'est mon opinion.
M. Garon: Mais, actuellement, par exemple, il y a des distorsions
économiques créées par le gouvernement
fédéral. Je vais vous donner un exemple: une poche de patates du
Nouveau-Brunswick, à Montréal, coûte meilleur marché
qu'une poche de patates venant de l'île d'Orléans à
Montréal, avec les politiques des Maritimes Freight Tax du gouvernement
d'Ottawa où on subventionne le transport des Maritimes. A ce moment, qui
paie? Essayez, demain matin, de développer la culture des pommes de
terre dans le Bas-du-Fleuve. A cause des coûts de transport
établis de façon artificielle par le gouvernement
fédéral qui souvent permet des coûts de transport en bas du
coût de production, c'est le cultivateur québécois qui
paie. C'est un des éléments. Quand aussi on a des surplus de
production de maïs au Québec, à certaines périodes,
il subventionne le transport du maïs de l'Ontario vers le Québec.
Vous en avez des politiques de distorsion économique. A un moment
donné, ce sera le temps du référendum et on va parler de
ces affaires, mais vous allez voir la quantité de politiques
néfastes qui ont été établies par le gouvernement
fédéral.
M. Dubois: Vous amenez une culture, les patates du
Nouveau-Brunswick vers le Québec. Remarquez bien qu'on vend beaucoup au
Nouveau-Brunswick et dans les Maritimes. Il y a un libre échange qui se
fait là. Il reste que vous avez mentionné le lait, tout à
l'heure, à 145%; c'est arrivé une année, en 1975, à
cause d'une récolte extraordinaire de foin et de nourriture pour
animaux. En fait, cela a été la raison d'une autosuffisance
très haute.
Une Voix: C'est une raison.
M. Dubois: C'est une raison ou la raison majeure. Quand vous
parlez du plan conjoint canadien pour le poulet, l'Ontario et les autres
provinces canadiennes sont dans le même pétrin que le
Québec présentement. Ce n'est pas un problème particulier
au Québec au niveau du poulet à griller; c'est celui de toutes
les provinces canadiennes.
M. Garon: Oui, mais l'excès de production de toutes les
provinces n'est pas le même, quand même.
M. Dubois: Non, mais il reste quand même que l'Ontario et
le Québec sont les deux gros producteurs.
M. Garon: Les gros producteurs, c'est-à-dire que le
Québec et l'Ontario produisent les mêmes quantités,
excepté que l'Ontario est plus populeux. Donc, en fait, la
capacité de production du Québec est plus forte en tenant compte
de la population.
M. Dubois: J'ai bien l'impression que, si les pressions
étaient beaucoup plus fortes des provinces productrices vers le ministre
fédéral de l'Agriculture pour arriver à sanctionner un
plan conjoint national, cela se ferait plus rapidement. D'un côté,
vous avez les pressions des provinces et vous avez aussi les pressions des
consommateurs, de l'autre côté, qui vont payer le poulet cinq ou
six cents de plus, peut-être. Vis-à-vis de cela, le ministre est
pris entre deux barrières. Il y a la pression des consommateurs et la
pression des provinces. C'est une chose inévitable, je pense. Le
ministre ne peut pas trancher la question lui-même; cela se fera à
l'intérieur du cabinet des ministres. Vous avez deux sons de cloche.
M. Garon: Oui, mais je vais vous dire une affaire. Je pense que
le consommateur serait prêt à payer à cinq cents de plus la
livre pour le poulet.
M. Dubois: II s'agit de le lui faire comprendre, c'est tout.
M. Garon: Ils paient combien pour un frigidaire actuellement pour
qu'on l'achète de l'Ontario? Le consommateur québécois
paie de 20% à 25% de douane pour qu'on l'achète de l'Ontario.
Cela veut peut-être dire $100 ou $125 de plus pour avoir l'avantage
insigne d'acheter un réfrigérateur
ou une cuisinière électrique de l'Ontario, plutôt
que de l'acheter directement des Etats-Unis. Regardez le nombre de produits sur
lesquels on paie des douanes pour protéger l'industrie
manufacturière de l'Ontario. Au fond, le consommateur paie. Personne ne
dit un mot. Personne n'est scandalisé de cela. Quand c'est le
cultivateur, cela devient une affaire épouvantable. Là-dessus, je
vais me battre à mort pour que les cultivateurs aient le droit de
négocier leurs prix en commun. Ils sont libres. S'ils veulent le faire,
d'accord. S'ils ne veulent pas le faire, ils ont le droit, mais je pense qu'ils
ont le droit de négocier leurs prix collectivement s'ils veulent le
faire.
Une Voix: Par des plans conjoints.
M. Garon: Par des plans conjoints, oui, qui doivent avoir
différentes modalités selon les types de productions. S'ils ne
veulent pas le faire, libre à eux, mais je pense qu'ils ont le droit de
le faire, de la même façon qu'un ouvrier a le droit de s'associer
en syndicat pour négocier ses salaires. De la même façon
que des parlementaires, par exemple, vont faire des revendications ensemble,
n'importe quel groupe de la société va se rassembler pour faire
des revendications. Je pense que les cultivateurs ont ce droit.
M. Dubois: M. le ministre, dans vos réponses, vous
mentionnez souvent qu'il y a une partie minime des produits où on a des
problèmes, mais, quand même, il faut toujours mentionner qu'on a
aussi des produits où on n'a pas de problèmes.
M. Charbonneau: Lesquels?
M. Dubois: Dans l'agriculture au complet, je ne sais pas si tu
connais cela, mais il y en a beaucoup. Je voudrais tout simplement mentionner,
M. le ministre qu'il y a un outil dont le Québec ne se sert pas et dont
l'Ontario se sert, c'est l'inspection rigide. Il y a des normes d'inspection
plus sévères que fait le gouvernement fédéral et
ils s'en servent. Le jardinier québécois qui voudrait aller sur
le marché de Toronto ne pourrait pas vendre ses légumes, tandis
que le contraire se fait ici. Enfin, cela n'a pas tellement été
pratiqué par le Québec, une rigidité d'inspection aussi
forte qu'en Ontario.
Vous avez des preuves, en tout cas, chez les jardiniers maraîchers
qui essaient de vendre sur le marché de Toronto. S'ils en ont en
abondance là-bas, il n'entre pas de produits du Québec,
impossible, mais, le contraire, on le sent ici à Montréal lorsque
nous avons des entrées de tomates quand nous en avons ici en pleine
production. Cela entre à pleins camions sur le marché de
Montréal. Cela se fait pour la laitue, cela se fait pour les oignons et
cela se fait pour les carottes.
Essayez de faire le contraire sur les marchés de Toronto, vous
allez voir que ce n'est pas tout à fait pareil.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Champlain, même sujet.
M. Gagnon: Pour ceux qui se posent des questions, à savoir
si l'indépendance ou le contrôle des frontières aiderait
l'agriculture québécoise, je pense qu'ils n'ont pas eu l'occasion
de négocier. Lorsqu'on a eu l'occasion de négocier, sur le plan
national, pour certains produits agricoles, on s'est rendu compte qu'il faut
absolument, si on veut protéger l'agriculture de type familial au
Québec, il faut absolument que le Québec ait le contrôle
des frontières le plus vite possible. Quand vous avez une production qui
est en difficulté, comme j'ai vécu personnellement des
expériences, une production en difficulté qui amène la fin
des producteurs à plus ou moins court terme, et qu'on essaie de faire
relever les prix au moins au coût de production et qu'il vous arrive des
chars de produits à prix de dumping sur le marché du
Québec, là on s'aperçoit que le Québec a besoin du
contrôle des frontières. Quand vous avez eu l'occasion de
négocier des choses semblables, vous ne vous posez pas de question.
Quand on dit aussi que le libre échange profite au consommateur,
c'est une autre fausseté qu'on répand, à mon point de vue.
Le libre échange profite au consommateur un certain temps, tant qu'on
favorise le dumping, et tant qu'il y a des producteurs ici qui continuent
d'exister. Mais à la minute où, par le dumping, on fera mourir
certaines spécialités agricoles du Québec, je pense
qu'après cela c'est le consommateur qui va payer. Des exemples, on en a
tous les jours. C'était cela que je voulais dire.
Le Président (M. Laplante): C'est votre réplique.
Maintenant on va faire plaisir au ministre, programme 1, élément
1. Vous avez une question. Excusez, si vous voulez, le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: M. le Président, est-ce qu'on pourra, à
l'intérieur des programmes, même si ce n'est pas directement dans
le programme, si ce n'est pas couvert, si quelqu'un a des questions...
Le Président (M. Laplante): Je voudrais vous avertir tout
de suite, M. le député de Saint-Hyacinthe. Là on commence
programme par programme, il faudra s'en tenir au programme en s'en allant.
D'accord?
M. Cordeau: C'est d'accord.
Le Président (M. Laplante): On commence les programmes. Si
vous aviez des questions générales, allez-y.
M. Vaillancourt (Orford): Je pense qu'on les retrouve dans les
programmes, les questions.
M. Giasson: M. le Président, il faudrait tout de
même s'entendre. Je pense que lorsqu'on va aborder l'étude d'un
programme et qu'à l'intérieur de ce programme on retrouve des
secteurs où on voudrait faire préciser la pensée du
ministre, on pourra revenir. Il faut se comprendre, ce ne seront
pas uniquement des discussions sur l'élément même
à l'intérieur du programme, il y aura également une
discussion générale au début d'un programme pour les
secteurs que le programme touche.
Le Président (M. Laplante): Pleinement d'accord. M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: M. le Président, je ne sais pas si cela touche
le programme, mais de toute façon si je suis hors du sujet, vous me
rappellerez à l'ordre. J'aimerais poser une question au ministre
concernant l'assurance-santé des animaux via les producteurs et surtout
via l'entente des médecins vétérinaires qui a eu lieu
dernièrement?
M. Charbonneau: Question de règlement, M. le
Président. Je pense qu'on a décidé de commencer programme
par programme.
M. Picotte: Non, non.
Le Président (M. Laplante): C'est dans le programme 3.
Dans le programme 3 vous allez le voir.
M. Picotte: C'est ce que je vous demandais.
Le Président (M. Laplante): Oui, vous allez pouvoir la
poser. C'est votre droit sacré.
M. Picotte: Merci.
Recherche et enseignement agricoles
Le Président (M. Laplante): Programme 1,
élément 1 sur la recherche et enseignement. M...
M. Giasson: Peut-être que M. le ministre aurait une
entrée en matière.
Le Président (M. Lapiante): Est-ce que... il ne l'a pas
fait...
M. Giasson: M. le Président, puisque nous abordons le
programme 1...
M. Garon: Je peux vous en faire une si vous voulez. En
voulez-vous une?
M. Picotte: A la demande générale, on en veut une.
Peut-être qu'après ce que le ministre va dire, on n'aura plus de
questions à poser.
M. Giasson: ... l'adoption du programme 1. M. le
Président, j'aimerais entendre le ministre sur les programmes de
recherches de son ministère, quels sont les secteurs
privilégiés et, dans un deuxième temps, l'enseignement
agricole, sa pensée sur le rapatriement de tous les secteurs de
l'enseignement professionnel agricole au Québec. Le rapatriement de son
ministère.
M. Garon: A cela, je vous ai dit ce matin qu'il y aurait un
comité entre le ministère de l'Education et le ministère
de l'Agriculture.
M. Giasson: La pensée du ministre, au-delà du
comité. C'est cela qui est intéressant de connaître, ce
soir.
M. Picotte: Là, je suppose que c'est le
député qui défend au ministre de parler.
M. Garon: Non, j'ai des idées là-dessus. Nous
sommes à la veille de former un comité avec le ministère
de l'Education, alors que le ministère de l'Agriculture a
étudié les différents aspects, évalué ce qui
s'est fait dans les années passées. Je n'aimerais pas, alors que
le comité conjoint des deux ministères étudierait ces
questions, faire de grandes déclarations où j'indiquerais que
j'ai pris position, avant de voir l'analyse qu'ils vont faire, l'étude
qu'ils vont faire, du rendement que cela a donné, la situation actuelle.
Je préfère, à ce moment, garder ma liberté plus
complète en laissant l'étude se faire. Tout ce que je peux dire,
à ce moment-ci, c'est que, s'il n'y avait pas eu
énormément de critiques, je n'aurais pas demandé qu'une
étude de l'enseignement agricole soit effectuée.
M. Giasson: M. le Président, je connais
l'expérience vécue lors des échanges qui se sont produits
dans le passé entre les deux ministères, le ministère de
l'Education et le ministère de l'Agriculture. Il me paraît qu'il
vaudrait mieux que le ministre de l'Agriculture prenne position
immédiatement et défende cette position parce que je crois
un peu deviner laquelle serait de ce côté de façon
très vive et très forte. J'ai pu voir, au cours des
récentes années, toute la question de l'enseignement agricole, la
manière dont elle a été traitée par les approches
des deux ministères. Nous avons senti que, plus des comités de
travail duraient et fonctionnaient, moins nous avions la certitude que le
ministère de l'Agriculture pourrait garder une primauté sur ce
qui est l'enseignement agricole professionnel. J'invite le ministre à
beaucoup de vigueur de ce côté, même s'il s'en remet
à l'étude de ce fameux comité, parce qu'il pourra se faire
passer un petit Québec par le ministère de l'Education. On
connaît l'emprise que ce ministère a eu sur le dossier de
l'enseignement agricole voulant, coûte que coûte, le
récupérer entièrement sous la responsabilité du
ministère de l'Education et l'intégrer, en dépit de tous
les avis, de toutes les expériences passées. Il voulait
absolument intégrer l'enseignement professionnel agricole au
système des commissions scolaires polyvalentes avec l'équipement
qu'il y a à l'intérieur de ces polyvalentes qui veulent donner
l'option d'enseignement professionnel agricole. Je le vois tout le
scénario qui s'est joué. Il ne s'agit pas pour le ministre de
l'Agriculture de conserver cet enseignement à l'intérieur de son
ministère pour le plaisir de le conserver. C'est parce qu'au plan
pratique, logique c'est le ministère de l'Agriculture qui, à mon
sens, devrait posséder entièrement le contrôle absolu de
l'enseignement agricole au Québec.
M. Garon: Non, dans le sens que vous dites, je pense qu'il n'y a
pas d'erreur là-dessus. Je ne
voudrais pas qu'on parle en termes, souvent comme les gens, de
bâtisses ou d'équipement, des choses comme cela, mais en termes de
contenu d'enseignement. Cela me paraît clair que tout cela doit
être fait...
M. Giasson: L'équipe professorale aussi.
M. Garon: Oui, l'équipe professorale, qui devrait
être familière avec nos climats et nos productions. Cela devrait
être sous l'autorité du ministère de l'Agriculture. Cela me
paraît clair. D'ailleurs, apparemment, d'après les renseignements
que j'ai eus, il n'y a pas beaucoup de pays dans le monde où cela ne
relève pas du ministère de l'Agriculture, l'enseignement
agricole. Mais je pense qu'à ce point de vue il peut avoir
différentes modalités. Ces modalités peuvent prendre
plusieurs formes. Je ne voudrais pas préjuger de ce que va discuter le
comité. Cela peut être le contenu des programmes qui va être
déterminé au ministère de l'Agriculture, la
responsabilité qui va être au MAQ. Cela peut être aussi un
enseignement dans des sections à part, dans des écoles. Cela peut
prendre plusieurs formes. Cela peut être aussi des cours d'agriculture
qui sont pris à certains endroits alors que d'autres cours, qui sont,
par exemple, le français, l'histoire, les mathématiques, sont
pris en commun avec d'autres étudiants. Je pense que toutes les options
doivent être envisagées.
Il me paraît clair actuellement qu'il y a une insatisfaction
généralisée face à l'enseignement agricole au
Québec. Je ne parle pas des instituts de technologie agricole; je parle
au niveau des CEGEP ou au niveau secondaire. Je n'ai pas entendu beaucoup de
commentaires favorables; tous les commentaires que j'ai entendus sur
l'enseignement agricole tel qu'il existe actuellement au Québec ont
été des commentaires défavorables.
M. Giasson: Si j'invite le ministre à beaucoup de
vigilance, c'est qu'il est un peu coincé lui-même entre deux
options. Lorsqu'on examine la volonté des militants du Parti
québécois réunis en congrès à Sainte-Croix,
qui ont pris des positions assez nettes sur ce que devrait être
l'enseignement agricole au Québec et qu'on compare cela avec la position
du parti dans son ensemble, telle qu'elle paraît dans le programme du
parti, vous avez une discordance énorme.
M. Garon: Laquelle?
M. Giasson: Le programme du Parti québécois veut
que l'enseignement agricole soit intégré au réseau
d'enseignement public existant au Québec alors que les militants
réunis à Sainte-Croix ont mis beaucoup d'emphase sur un
rattachement, un rapprochement de l'enseignement professionnel à
l'intérieur du ministère de l'Agriculture. Relisez cela et vous
allez voir. Le ministre est pris entre ces deux options. Si l'option
générale du parti est intégrée davantage au secteur
des commissions scolaires et de l'enseignement public au Québec, cela
nous indique que la pensée de gens venant de l'éducation a
orienté le programme du parti de ce côté alors que, d'un
autre côté, les militants, connaissant davantage le
problème agricole et les questions de formation professionnelle, ont
pris une autre position à Sainte-Croix. C'est pour cela que j'invite le
ministre à beaucoup de vigilance.
M. Garon: Non. J'en ai tellement, de vigilance, que c'est un des
points inscrits à la réunion du Parti québécois qui
va avoir lieu d'ici à la fin de mai; l'enseignement agricole est un des
points qui vont être traités en atelier, l'atelier de
l'agriculture. Un des éléments majeurs qui font que la situation
est telle quelle, c'est que l'Union des producteurs agricoles elle-même
avait préconisé cette position, à savoir que ce soit
intégré à l'enseignement public tel que c'est
actuellement. Je pense que c'est un fait qui a influencé beaucoup les
événements. C'est pour cela que je dis qu'il y a plusieurs
formules possibles. La position de l'UPA était de ne pas faire de
l'agriculteur un étudiant différent des autres, qu'il ait la
même formation, etc.
Par ailleurs, je pense qu'il y a plusieurs formules possibles. Je pense
important... C'est un peu comme les grandes écoles à 4000
étudiants, le monde n'aime pas cela. L'enseignement agricole tel qu'il
est actuellement ne semble pas satisfaire grand-monde. Que l'ensemble de la
population, en même temps, ait tort, c'est parce qu'il doit y avoir des
lacunes quelque part. Il faut étudier cela. Il doit y avoir une plus
grande coordination par le ministère de l'Agriculture, je pense que
c'est évident, que ce soit au point de vue des stages, de la recherche,
de l'expérience à acquérir. Il y a des fils de
cultivateurs, mais il y a bien d'autres personnes que des fils de cultivateurs
qui veulent devenir producteurs agricoles. Je pense qu'il doit y avoir une plus
grande intégration entre les programmes du ministère et
l'enseignement pour le meilleur développement de la relève
agricole, relève qui ne peut plus être comme auparavant.
Aujourd'hui, quelqu'un qui s'établit sur une ferme doit
être un peu comptable, capable de faire des investissements, être
planificateur; il doit avoir une foule de qualités. Au fond, c'est un
petit entrepreneur, c'est un petit homme d'affaires, un cultivateur, et, dans
certains cas, un gros homme d'affaires quand on parle d'investissements de $200
000, $300 000 et $400 000. Il doit être préparé à
cela tandis que les CEGEP, d'une façon générale,
préparent bien plus des gens qui vont aller à l'université
ou qui vont avoir un coffre à outils qui va peut-être coûter
$150 ou $200. Il est évident que cela ne peut pas être exactement
la même formation. Les techniques, dans le domaine agricole, aujourd'hui,
ont évolué considérablement. A ce point de vue, je suis de
votre avis. Il faut étudier cela dans l'ensemble, dans une perspective
de modernisation de l'agriculture au Québec et de la relève de
l'agriculture.
Pourquoi ne formerait-on pas tout de suite des cultivateurs modernes,
des cultivateurs qui ont été entraînés à une
agriculture moderne et qui sdnt préparés à
s'établir sur une ferme immédia-
tement et à fonctionner, plutôt que d'avoir eu un tas de
cours théoriques qui font partie de la culture générale?
La culture, on dit que c'est ce qu'on se rappellequand on atout oublié.
Un cultivateur, par ailleurs, a besoin de se rappeler un paquet de choses quand
il rentre sur sa terre et qu'il commence à exploiter sa ferme. Alors,
cela prend des cours qui vont être plus adaptés, je pense, aux
producteurs agricoles, puis je pense que c'est de là que vient le
mécontentement.
Il y a aussi un autre problème qu'on m'a mentionné
à plusieurs reprises et cela me tracasse. On m'a dit souvent que les
orienteurs dans les écoles décourageaient les étudiants en
agriculture. On leur disait que c'était un métier de
crève-faim, que ce n'était pas un domaine intéressant.
J'ai entendu énormément de commentaires à ce sujet et je
pense que cela aussi, c'est néfaste, si cela se pratique de façon
aussi courante qu'on me l'a dit.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-Hyacinthe, sur le même sujet.
M. Cordeau: Premièrement.
Le Président (M. Laplante): Non, sur le sujet des
écoles, de l'enseignement.
M. Cordeau: Bien, c'est la recherche agricole.
Le Président (M. Laplante): On y reviendra. M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Une question additionnelle, M. le Président.
Le ministre a parlé tantôt de faire des agriculteurs modernes,
concernant les options agricoles qui existent dans nos écoles. Il en
existe dans la région no 4 et dans la région voisine,
précisément à Joliette et à la polyvalente Des
Cascades à Louiseville. Mais est-ce que le ministre est au courant que,
dans tout le système d'éducation présentement, les vrais
parents pauvres de toute la polyvalente, c'est l'option agricole
présentement? C'est l'endroit où l'on ne peut avoir à peu
près pas de matériaux pour utiliser son temps et c'est l'endroit
où les étudiants peuvent aller un petit peu dépenser leur
temps ou perdre du temps.
Alors, ce n'est pas étonnant, à un moment donné,
que les conseillers pédagogiques ou d'autres personnes, les conseillers
en orientation disent aux étudiants: Si tu t'en vas là, tu vas
perdre du temps, parce que nos polyvalentes sont sous-alimentées et ne
peuvent pas donner l'enseignement adéquat, parce qu'elles sont
directement régies par le ministère de l'Education qui,
avouons-le, peu importe l'époque, a quand même des programmes des
plus restreints de ce côté. Il ne semble pas y avoir de
collaboration entre le ministère de l'Agriculture, qui directement est
capable de fournir l'information, de fournir les données
nécessaires pour former des agriculteurs modernes, et le
ministère de l'Education qui, trop souvent, renferme des rêveurs
modernes.
Alors, est-ce que le ministre est au courant de cela? Justement,
à Sainte-Croix de Lotbinière, la journée nationale de
l'agriculture, entre autres un nommé Rioux a fait des propositions du
côté du Parti québécois, à l'effet qu'il
faudrait absolument que le ministre songe même si cela demande une
guerre épouvantable avec le ministre de l'Education, je sais qu'à
l'intérieur vous pourrez quand même vous entendre facilement
à rapatrier complètement l'enseignement agricole au
ministère de l'Agriculture, pour que cela soit adéquat. Comme
cela on ne découragerait pas les étudiants et on pourrait
espérer une meilleure agriculture dans l'avenir.
Je viens de renchérir sur ce que mon collègue, le
député d'à côté, a mentionné
tantôt et je pense que c'est important.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président...
Le Président (M. Laplante): Sur le même sujet.
M. Giasson: ... au fond, cette différence fondamentale
qu'on peut retrouver entre les deux types d'enseignement, soit ce qui est
donné au niveau du secteur public de l'éducation et
l'expérience vécue dans d'autres écoles beaucoup plus
spécialisées qui se limitent à donner l'enseignement
agricole, plus les éléments de formation générale,
nous la retrouvons dans les témoignages que peuvent nous donner les
étudiants qui ont pris leurs connaissances agricoles au niveau du
secteur public de l'éducation, quand on les fait jaser et qu'on y va
plus en profondeur, et les témoignages qu'on obtient des
étudiants qui sont passés par des écoles plus
spécialisées dans l'enseignement agricole.
Faites parler des jeunes qui viennent des deux réseaux et vous
découvrirez, de l'aveu même de ces jeunes, que vous retrouvez
véritablement une âme agricole, de la part de toute
l'équipe qui travaille dans les écoles plus
spécialisées qui étaient autrefois sous le contrôle
du ministère de l'Agriculture. On ne retrouve pas cela dans ces grandes
polyvalentes et même au niveau des CEGEP, ces grosses boîtes
où tout est impersonnel, numéroté. Vous ne retrouvez pas
cette pensée, ce comportement, cette âme agricole, surtout, compte
tenu des commentaires que le ministre a tenus tout à l'heure à
l'effet que l'agriculture de nos jours était devenue une industrie:
Qu'on le veuille ou pas, c'est devenu une industrie. Un cultivateur moderne
progressiste, c'est un homme d'affaires. Il doit posséder un bagage de
connaissance dans bien des secteurs. Il doit posséder une
expérience pratique prise au moment de ses études avec des gens
qui l'ont, cette pratique, ce qui est difficile à trouver dans les
polyvalentes ou dans les CEGEP.
Quand on semble mettre l'accent là-dessus, c'est une bataille qui
n'apparaît pas aux yeux du public mais qui est là. On l'a sentie
au cours des dernières années. C'est pourquoi je dis au ministre
de l'Agriculture: si sa pensée est faite de ce côté-
là, il va falloir qu'il la défende. Quelle que soit
l'emprise que le ministère de l'Education voudrait mettre pour
contrôler totalement, dans le réseau public ou de l'Education,
l'enseignement agricole, c'est un secteur où le ministre, pour utiliser
un propos qu'il employait cet après-midi, un secteur où il ne
devrait pas accrocher son nom s'il fallait perdre au ministère de
l'Agriculture le contrôle de l'enseignement professionnel, pas plus que
la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Verchères, même sujet.
M. Charbonneau: Oui, mais rapidement M. le Président. Je
ne voudrais pas m'éterniser sur les commentaires qui ont
été faits. Juste peut-être pour rappeler aux
collègues d'en face qu'on essaie d'utiliser le programme du Parti
québécois pour le mettre en contradiction alors qu'à mon
sens on démontre simplement que des militants du Parti
québécois sont capables d'évolution entre un programme qui
a été conçu en 1974-1975 et un colloque organisé en
1976. Cela prouve que les gens ont réfléchi un peu. Je trouve
cela un peu bassement partisan, à une commission parlementaire,
où on tentait de faire du travail sérieux...
M. Giasson: Vous déclarez, M. le député de
Verchères, que les positions nettes prises par les militants du Parti
ont complètement changé aujourd'hui.
M. Charbonneau: Non, d'ailleurs si vous lisez ce qui est inscrit
ici si vous voulez prendre le programme, on le prendra clairement
c'est marqué "développer l'enseignement agricole dans le
système d'enseignement public." Cela ne veut pas dire
nécessairement dans le réseau public. C'est dans un
système pas privé. C'est cela d'une part.
Deuxièmement, le colloque qui a été organisé
montre très bien que les membres du Parti québécois sont
capables d'évolution. Si vous voulez charrier sur cela, on va charrier
longtemps.
M. Giasson: Ce n'est pas de vouloir charrier.
M. Charbonneau: C'est la seule remarque que je voulais faire.
M. Giasson: Ce n'est pas du charriage, M. le ministre, mais une
réalité fondamentale que j'ai attaquée. Je regrette que le
député de Verchères ait pris la mouche comme cela.
M. Charbonneau: Les remarques que vous avez faites, je pense,
étaient fondées. La plupart des membres de cette commission sont
d'accord sur les remarques que vous avez faites, le ministre le premier. Mais
lorsque vous tentez d'utiliser le programme du Parti québécois
pour essayer de...
M. Giasson: Vous avez mal interprété ma
pensée quand vous évoquez la partisanerie. Je n'ai même pas
cela à l'esprit.
M. Charbonneau: Tant mieux.
M. Picotte: II n'a même pas parlé de cela, il a dit
que c'était de la basse partisanerie.
M. Garon: Non, le programme est correct, il s'agit
d'établir les modalités d'application.
M. Picotte: C'est du réel et c'est écrit,
d'ailleurs. Il n'y a pas de bassesse là-dedans.
M. Garon: C'est un principe, que ce soit dans les écoles
publiques d'agriculture.
Le Président (M. Laplante): M. le député
d'Arthabaska, même sujet.
M. Baril: En parlant d'enseignement agricole, il y a quand
même, actuellement, dans nos CEGEP un secteur qu'on appelle la
technologie agricole où se donne un enseignement adéquat, et les
personnes qui sortent de là sont très bien formées. Cela
coûte énormément cher au gouvernement de maintenir ce
programme actuel. Dans mon comté, il y a le CEGEP de Victoriaville qui a
un département d'enseignement agricole. En parlant avec les directeurs,
on s'aperçoit que c'est un enseignement très dispendieux pour le
gouvernement, même s'il y a une bonne collaboration de la part des
agriculteurs qui acceptent, durant l'été, un stagiaire pour le
perfectionner davantage.
C'est beau de parler d'enseignement, mais en agriculture comme dans bien
d'autres choses, si on étudie uniquement dans des livres, quand on vient
pour le mettre en application ce n'est pas la même chose. Quand on
s'aperçoit de l'efficacité de l'enseignement du CEGEP de
Victoriaville, en tout cas, je suis prêt à dire que c'est un bon
départ. Cela vient tout de même de l'enseignement public.
Le Président (M. Laplante): Avec le consentement unanime
des membres, nous ajournons nos travaux à demain, dix heures
précises. Je vous remercie. Demain, vous allez avoir un nouveau
président.
(Fin de la séance à 22 h 2)