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Version finale

29th Legislature, 2nd Session
(February 23, 1971 au December 24, 1971)

Thursday, August 26, 1971 - Vol. 11 N° 78

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Projet de loi no 64 - Loi du syndicalisme agricole


Journal des débats

 

Commission permanente de l'Agriculture et de la Colonisation

Projet de loi no 64 Loi du syndicalisme agricole

Séance du jeudi 26 août 1971

(Dix heures treize minutes)

M. FRASER (président de la commission permanente de l'Agriculture et de la Colonisation): A l'ordre, messieurs! Nous sommes ici pour étudier le bill 64, la Loi du syndicalisme agricole, et je vais demander au ministre de parler le premier, s'il le veut.

M. TOUPIN: M. le Président, très rapidement, je voudrais simplement souligner l'importance de cette commission qui va porter sur le projet de loi no 64 et qui a pour effet de proposer une loi sur le syndicalisme agricole. Evidemment, nous sommes conscients que ce projet de loi n'est pas parfait en soi, qu'il n'est pas complet et c'est la raison pour laquelle nous avons tenu à consulter les principaux intéressés en ce qui a trait à ce projet de loi sur le syndicalisme agricole. Donc, c'est avec intérêt que nous entendrons tous ceux qui ont des opinions à émettre et que nous prendrons en considération tout ce qui sera dit pour, s'il y a lieu, faire des amendements ou réviser certains articles du projet de loi. J'espère que cette première séance sera de nature à éclairer tout le monde et à nous aider à mieux structurer nos projets de loi au gouvernement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Nicolet a quelques mots?

Commentaires de l'Opposition officielle

M. VINCENT: M. le Président, un peu plus que quelques mots. Je voudrais, d'abord, remercier le ministre et le gouvernement d'avoir permis à la commission parlementaire de siéger, et ça à la demande, je pense bien, de tous les députés de l'Assemblée nationale, afin d'étudier cet important projet de loi avant qu'il soit déféré de nouveau à l'Assemblée nationale pour la deuxième lecture.

Je voudrais remercier et souhaiter également la bienvenue à tous les corps intermédiaires qui sont ici représentés. C'est avec beaucoup d'intérêt que nous écouterons leurs propos. Nous pourrons également leur poser des questions qui nous serviront certainement dans ce travail de commission. Premièrement, M. le Président, je voudrais faire état des commentaires de l'Opposition officielle en ce qui concerne le syndicalisme agricole.

M. le Président, dans un monde où toutes les professions, où tous les groupes d'intérêts et tous les secteurs de l'activité économique sont fortement organisés, la classe agricole ne pourra survivre et prospérer que si elle est elle-même fortement organisée. Tel est l'argument de base que l'on invoquait déjà il y a quelques dizaines d'années pour convaincre les cultivateurs de se joindre à leur organisation professionnelle.

Valable dans ce temps-là, l'argument l'est doublement aujourd'hui puisque l'écart est plus grand qu'il ne l'a jamais été entre le niveau de vie du producteur agricole et celui des autres agents de l'économie. Si les cultivateurs n'arrivent pas à se donner les formes d'organisation les plus modernes et les plus efficaces, ils ne pourront jamais participer, comme les autres classes sociales, aux avantages du progrès technique et de la civilisation contemporaine.

Sans compter que dans le contexte actuel ils ne peuvent guère s'appuyer sur autre chose que leur propre force collective pour obtenir une plus juste répartition du revenu national, de quelle autre voix, de quelle autre influence disposent-ils auprès de l'opinion publique? Est-ce que les printcipaux organes de diffusion, comme les grands journaux, les postes de radio et de télévision ne sont pas fatalement concentrés dans les villes, dirigés par des citadins et imprégnés d'une mentalité urbaine. Comment s'étonner alors que les valeurs rurales soient constamment ignorées quand elles ne sont pas présentées comme des obstacles au progrès, des éléments folkloriques et réactionnaires?

On parle beaucoup, dans la presse écrite et parlée, de démocratie, de dialogue et de participation. Même le gouvernement actuel en parle beaucoup. Mais que fait-on pour accroître la participation des ruraux à la gestion des affaires publiques et même de leurs propres affaires? On ne cesse, au contraire, de réclamer la centralisation des lieux de décision dans tous les domaines. On ne cesse de répéter qu'il y a trop de municipalités rurales, trop de commissions scolaires rurales, trop de comtés ruraux. Les idées mises à la mode par les grands couturiers de l'opinion publique sont presque toujours hostiles au monde rural qu'elles présentent comme l'ultime survivance d'un passé révolu. J'estime que c'est là de la diffamation, peut-être inconsciente mais souverainement injuste.

Enfin, c'est probablement dans le secteur agricole que se sont produites, en ces dernières années, les transformations les plus radicales, les plus rapides et les plus profondes. C'est probablement là que la productivité, pour chaque unité de production ou de main-d'oeuvre, a le plus augmenté. Alors que le nombre de nos fermes diminue sans cesse, le volume de la production monte en flèche.

Dans quel autre secteur de l'économie s'est-on cru obligé d'imposer des quotas pour freiner la hausse de la production? Mais ceux qui accaparent les haut-parleurs sur la place publique ont bien d'autres soucis dans le moment que celui de montrer les progrès de notre vie rurale.

La fondation de l'UCC, il y a près d'un demi-siècle, était déjà un acheminement vers

des formes plus modernes de syndicalisme. C'était de l'organisation professionnelle, faite avec les moyens du temps et au prix d'efforts parfois héroïques, à cause de la dispersion des cultivateurs et du souci d'indépendance qui a toujours caractérisé, dans tous les pays, et pas seulement au Québec, la mentalité des propriétaires terriens.

En 1971, cependant, il est clair que l'organisation professionnelle ne suffit plus. Même dans les professions les mieux rémunérées, comme la médecine, on a senti le besoin de recourir à des formes plus agressives de syndicalisme. C'est ainsi qu'on a vu surgir à côté du Collège des médecins, des organismes nouveaux, comme la Fédération des spécialistes et celle des omnipraticiens, qui ont pris solidement en main les intérêts de leur profession. Que la même évolution se manifeste au sein de la classe agricole, il n'y a pas lieu de s'en étonner.

La Loi des marchés agricoles adoptée à la suite du rapport de la commission Héon et plusieurs fois modifiée par la suite, a été un grand pas dans la poursuite de cet objectif. Elle a permis d'expérimenter et de mettre au point, en milieu rural, des techniques nouvelles de négociation collective, de consultation par voie de référendum et même de retenue à la source. Ce n'était peut-être pas le remède-miracle que certains attendaient, mais c'était un outil nouveau et particulièrement puissant, dont les cultivateurs devaient apprendre à se servir, pour améliorer leur situation économique.

Ce qu'on entend aujourd'hui par syndicalisme agricole, c'est encore plus que cela. Il faut qu'une fois librement choisi par la majorité des producteurs agricoles, c'est-à-dire par voie de référendum, une association soit légalement reconnue et certifiée, non plus seulement comme une interlocutrice valable, mais comme l'unique interlocutrice dûment mandatée pour représenter les intérêts de ses membres et des syndicats ou fédérations qui lui sont affiliés.

Il faut de plus, que tous les producteurs qui profitent du travail de cette association accréditée soient tenus d'y contribuer financièrement, dans la mesure de leurs moyens, selon un principe largement reconnu dans les autres secteurs économiques ou professionnels.

Cela implique dans notre esprit une définition précise des termes "cultivateurs", "agriculteurs," "producteurs", etc., définition au sujet de laquelle le présent projet de loi est, à toutes fins utiles, muet. Il est, en effet, extrêmement important que l'on distingue les véritables agriculteurs, producteurs, cultivateurs, etc., de ceux qui pourraient, bona fide, déclarer qu'ils exercent telle profession. Enfin, on peut penser qu'en 1971 il n'est pas normal de faire du porte-à-porte pour recueillir les contributions des membres. Il faudrait donc, si tel est le voeu de cette majorité de véritables agriculteurs, créer un mode généralisé et aussi simple que possible de retenue à la source.

En d'autres termes, il faut que le secteur agricole, précisément parce qu'il est l'un des plus faibles de l'économie québécoise, dispose d'un syndicalisme pour le moins aussi puissant et aussi efficace que ceux dont profitent les autres éléments de notre société. Tel est l'objectif que l'on peut atteindre par une loi ou un code du syndicalisme agricole.

Sauf erreur, M. le Président, l'Union Nationale a été le premier parti politique à se prononcer pour le principe d'une telle mesure. A ses grandes assises de mars 1965, elle a, en effet, adopté unanimement la résolution suivante: " Que l'Union Nationale réclame l'adoption d'une loi de base reconnaissant véritablement le syndicalisme agricole, tenant compte de ses particularités et favorisant le développement d'une force syndicale véritable pour la classe agricole dans le Québec." La commission de l'économie rurale du congrès, devant qui cette résolution avait été d'abord soumise et discutée, y attachait une telle importance qu'elle n'a pas voulu en soumettre d'autre à l'Assemblée générale dans le domaine agricole afin de ne pas disperser l'attention des délégués.

C'est en cette même année 1965 que l'UCC a présenté au cabinet Lesage son premier projet relatif à une loi des syndicats agricoles, projet consigné à l'annexe 1 de son mémoire, pages 27 à 43 inclusivement. Cependant, sans renoncer pour l'avenir à l'adoption d'une loi semblable, l'UCC décidait, à son congrès annuel de 1966, de suspendre temporairement ses démarches à ce sujet et de réclamer plutôt divers amendements aux législations existantes afin de mieux préparer le terrain à l'avènement du syndicalisme agricole.

Voici le texte de cette résolution adoptée par l'UCC à son congrès de 1966: "Considérant l'évolution rapide du syndicalisme agricole à vocation générale et du syndicalisme spécialisé; "Considérant la nécessité d'assurer le fonctionnement efficace et le développement du syndicalisme agricole d'une part et la mise en marché ordonnée des produits de la ferme d'autre part. "Considérant l'urgence d'adapter les législations existantes à de tels besoins. "Le congrès général de l'UCC recommande que la Confédération de l'UCC adopte toutes les mesures voulues en vue de l'avancement du syndicalisme agricole dans le plus bref délai possible et, à cette fin, qu'elle fasse le nécessaire pour que tous les amendements qui s'imposent soient apportés aux législations existantes dès la prochaine session de l'Assemblée nationale du Québec, laissant en suspens pour la période que l'UCC jugera à propos le projet de législation spéciale de syndicalisme agricole".

Ayant été assermenté comme ministre de l'Agriculture à la suite des élections de 1966, conscient des engagements déjà pris par l'Union Nationale en ce qui concerne le principe du syndicalisme agricole, je voulus obtenir des précisions additionnelles sur les désirs de l'UCC.

Le 18 novembre 1966, j'adressais donc la lettre suivante à M. Lionel Sorel, alors président de l'organisme. Je cite cette lettre du 18 novembre. "Objet: Loi du syndicalisme agricole. "M. le Président, "Etant à établir notre programme d'action en relation avec un grand nombre de vos demandes, tant du point de vue législatif que des actes administratifs à poser, ou règlements et mesures à changer, nous avons cru déceler parmi les résolutions de votre dernier congrès quelques réticences à aller de l'avant en ce qui a trait à votre projet initial concernant le syndicalisme agricole. "Il me serait fort utile d'en connaître un peu plus à ce sujet et je vous saurais gré de me confirmer ou de m'infirmer l'interprétation que je fais de ladite résolution. Si cela vous agrée, vous pourriez me renseigner quant aux nouvelles stratégies ou à la nouvelle orientation que vous entendez mettre en oeuvre en regard de ce projet particulier"

Le 5 janvier 1967, je recevais la réponse suivante de M. Paul-Henri Lavoie, secrétaire général de l'UCC. "Re: Loi du syndicalisme agricole. "M. le ministre, "Pour faire suite à la lettre en date du 18 novembre 1966, sur le sujet précité, que vous faisiez parvenir à M. Lionel Sorel, président général de l'UCC, il est bien vrai que le dernier congrès général de l'UCC a adopté une attitude quelque peu différente de celle suivie au cours des derniers mois, relativement au projet de législation de véritable reconnaissance du syndicalisme agricole, ainsi qu'en fait foi la résolution en la matière adoptée à cette occasion, dont vous trouverez le texte ci-joint. "Afin de donner suite à cette décision du dernier congrès général de l'UCC, le conseil général et le comité exécutif de l'UCC ont convenu que le mémoire annuel de 1966 de l'UCC destiné au gouvernement de la province de Québec portera principalement sur les amendements qui doivent être apportés dans le plus bref délai aux législations existantes afin de permettre au syndicalisme agricole de continuer à exercer son action et de se développer sans trop de difficulté. "Comme ce mémoire sera soumis d'ici quelques semaines aux autorités concernées, vous posséderez alors, M. le ministre, toutes les informations nécessaires en vue de vous permettre d'adopter les mesures qui pourront s'imposer en tenant compte que les amendements nécessaires aux législations actuelles visent à faire face à des situations d'urgence, alors que le projet de législation spéciale du syndicalisme agricole demeure toujours au programme de l'UCC, même si sa réalisation peut être différée."

Comme question de fait, dans le mémoire subséquemment soumis au gouvernement du Québec on trouvait le passage suivant: "L'UCC a décidé de suspendre, du moins pour un certain temps, le projet de loi qu'elle présentait l'an dernier au conseil des ministres. Cela ne signifie pas qu'elle abandonne ses efforts en vue d'une meilleure reconnaissance du droit d'association en milieu agricole. "Devant les difficultés rencontrées par le projet de loi et devant l'évolution du syndicalisme agricole, nous sommes à réévaluer la situation et demandons plutôt que des amendements soient apportés à la Loi des syndicats professionnels et à la Loi des marchés agricoles."

M. le Président, cette prudence était sûrement bien inspirée. Il est clair en effet que l'avènement d'un nouveau concept de syndicalisme dans un monde agricole en pleine transformation nous obligeait à repenser bien des éléments des législations existantes. Ce n'est qu'à l'automne 1969 que l'UCC soumettait de nouveau au cabinet un projet de loi touchant le syndicalisme agricole.

Ce projet était intitulé "Loi constituant en corporation l'Union des producteurs agricoles du Québec." Le gouvernement du temps en approuva immédiatement le principe et chargea Me Marcel Trudeau d'en examiner les modalités et les implications diverses en étroite coopération avec les organismes intéressés.

Je sais que, dès le mois de novembre 1969, Me Trudeau a communiqué avec un certain nombre d'organismes à qui il a demandé leurs commentaires sur le projet de loi. Je sais qu'au début de 1970 il a reçu des mémoires, par exemple une lettre-mémoire de la Coopérative fédérée de Québec sur le sujet et des mémoires d'autres organismes qui sont ici ce matin. Il appartient au gouvernement actuel, au ministre actuel de dire ce qui s'est passé par la suite depuis ces mémoires qui ont été présentés à Me Marcel Trudeau qui avait été nommé par le gouvernement précédent.

Pour ce qui est de l'Opposition officielle, elle a reçu au début d'avril 1971 une délégation de l'UCC dirigée par M. Albert Allain, l'actuel président général de cet organisme. A la suite de l'entrevue, le cabinet de l'Opposition émettait un communiqué dont je détache les paragraphes suivants et je cite: "Les députés de l'Union nationale acceptent le principe du syndicalisme agricole et se proposent de le manifester publiquement lorsque le Parlement québécois sera saisi d'un projet de loi en ce sens. "C'est l'assurance qu'a obtenue aujourd'hui une délégation de l'Union catholique des cultivateurs qui avait sollicité, il y a quelque temps, une rencontre avec le caucus des parlementaires de l'Opposition officielle à l'Assemblée nationale. "Les députés de l'Opposition officielle ont également fait part de leur intention de proposer qu'un tel projet de loi, lorsqu'il sera soumis à l'Assemblée nationale, soit référé à une commission parlementaire afin d'obtenir que

tous les organismes impliqués puissent y présenter leurs commentaires". — Fin de la citation.

Si je rappelle tout cela, c'est pour montrer que, depuis ses assises de mars 1965, l'Union Nationale a toujours maintenu, en matière de syndicalisme agricole, une attitude constante et logique. Elle est pour le principe d'une évolution déjà amorcée par la Loi des marchés agricoles et ses divers amendements. Elle estime que la profession agricole, plus encore que toute autre profession, a besoin d'un syndicalisme fort, moderne et puissant. Elle tient cependant à ce que les modalités et les implications de cette réforme soient étudiées en étroite liaison avec les cultivateurs eux-mêmes et les divers groupements que concerne ce projet de loi.

Etant admis le principe d'un véritable syndicalisme agricole, quelle serait, dans le contexte de 1971, la meilleure façon de l'appliquer? Tel est le problème que nous entreprenons d'étudier ensemble devant la commission parlementaire de l'Agriculture.

Je ne voudrais pas, à cette étape-ci des procédures, orienter de quelque façon l'opinion de ceux qui sont venus nous aider dans cette grande entreprise. Nous sommes ici pour les entendre, non pour les endoctriner. La plus élémentaire sagesse nous commande de ne pas rendre jugement avant d'avoir entendu toute la preuve. Pour ma part, je suis extrêmement intéressé à connaître l'opinion des divers organismes concernés par le bill 64. Personne ne connaît mieux le problème que ceux qui le vivent tous les jours.

Je n'ajouterai donc pour le moment que deux remarques d'ordre général.

Premièrement, j'estime que les nouvelles structures dont nous rêvons pour la classe agricole seront valables dans la mesure où elles seront un facteur d'union et non de division.

L'un de nos premiers buts doit être, de toute évidence, d'unir davantage les cultivateurs eux-mêmes. On sait que, de nos jours, l'agriculture a tendance à se diversifier et à se spécialiser toujours davantage. Pour empêcher que ne se multiplient les cloisonnements au sein de la profession elle-même et pour grouper, sans les confondre, des types d'exploitation ou de commercialisation qui varient énormément suivant les productions ou les régions, il faudra viser à la souplesse plus qu'à l'uniformité. Par exemple, quelle place fera-t-on dans les nouvelles structures à nos coopératives agricoles?

De plus, l'agriculture ne peut pas s'isoler des autres secteurs de l'économie. Par exemple, si nous voulons inciter les consommateurs à acheter davantage des produits du Québec, comment se passer de la coopération des industries et des commerces qui forment le vaste secteur de l'alimentation? Il faut veiller à ne pas allumer des guerres stériles entre des groupes qui sont plutôt faits pour se compléter et s'entendre.

Or, la compréhension mutuelle n'est pas seulement une affaire de bonne volonté; c'est aussi une affaire de structures. Il y a des structures qui, précisément parce qu'elles ignorent les diversités naturelles et les autonomies légitimes, multiplient fatalement les situations de conflits. Par contre, il y en a d'autres qui sont génératrices de paix et d'union. Pour ces dernières, nous avons, dans l'Opposition officielle, un très net parti pris.

Ma seconde remarque découle un peu de la première. Je voudrais que les nouvelles structures soient au service de tous les cultivateurs, et pas seulement d'une aristocratie de privilégiés. On me comprendra mieux si l'on songe à ce qui se passe dans le domaine ouvrier. Après des dizaines et des dizaines d'années d'organisation syndicale, il y a encore plus de 50 p.c. de nos salariés qui ne sont pas syndiqués et qui ne bénéficient que très indirectement des avantages du syndicalisme. Je ne voudrais pas que la même situation se présente dans le domaine agricole.

Aux économiquement faibles, aux malchanceux, aux marginaux du monde ouvrier, le gouvernement offre tout de même une protection qui est celle du salaire minimum. Personne ne trouve à y redire. Or, on a actuellement tendance en certains milieux à dire au gouvernement qu'il ne doit plus aider les marginaux du monde agricole, qu'il doit plutôt les laisser tomber, les écarter de la route. Il faut tendre, bien sûr, à ce que tous les cultivateurs puissent vivre par eux-mêmes dans toute la mesure du possible. Mais si, en supprimant une foule de subventions qui permettaient à un certain nombre d'entre eux de joindre les deux bouts, on fabrique de nouvelles fournées de chômeurs et d'assistés sociaux, est-ce que ce sera vraiment un progrès?

L'agriculture a toujours été, partout dans le monde — qu'on regarde les statistiques de chacun des pays du monde — une occupation fortement subventionnée par les pouvoirs publics. Est-ce que les raisons qui ont amené cet état de choses ailleurs n'existent pas aussi au Québec?

Enfin, tel quel, ce projet de loi porte sur l'organisation de la profession agricole. Ce projet de loi répond-il aux voeux de la grande majorité des véritables agriculteurs? D'autre part, une fois dépassé ce stade de l'organisation proprement dite de la profession, le gouvernement entend-il procéder à un réaménagement des territoires agricoles ou plus explicitement à ce qu'on appelle, dans d'autres pays, une réforme agraire?

Nous serons heureux d'entendre les véritables agriculteurs nous dire si, au-delà des préoccupations actuelles, on leur a fait voir quelles seraient les conséquences d'un acte législatif qui consacre déjà dans les faits un contrôle de l'Etat sur l'économie rurale.

Sur toutes ces questions, je serais heureux, M. le Président, d'entendre les réactions des organismes que je remercie et qui ont bien voulu répondre à l'invitation de notre commission. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lotbinière.

Autres commentaires

M. BELAND: M. le Président, après une gestation de plusieurs années, nous avons vu naître, enfin, un bill qui s'appelle le bill 64. Je serai très bref dans mes observations, mais par contre je tiens à en donner quelques-unes.

Il est beau d'énoncer toute une kyrielle de principes, mais à un moment donné il faut passer à l'action. Donc, je me limiterai à quelques principes de base. L'intervention de l'Etat doit se limiter à unir légalement au sein d'une association ce groupe d'individus. L'Etat ne doit pas tout accaparer ou tout dominer. Le véritable rôle de l'Etat est de surveiller, stimuler le bon fonctionnement des activités décidées par les fermiers eux-mêmes. L'ordre sur le terrain économique est une économie au service des hommes à l'intérieur de sa profession. La mission du droit public est de servir le droit privé et non de l'absorber. L'Etat se doit de respecter les droits de l'ensemble des agriculteurs. Il s'agit d'imposer le respect de la nature particulière de chacune des professions. Jusqu'à ce jour, peu de possibilités de défendre leurs droits au même titre que les autres associations professionnelles ont été données aux agriculteurs.

Les cultivateurs ont parfois, d'une certaine façon, jusqu'à maintenant, subventionné les compagnies papetières, les grandes agences de mise en marché des produits agricoles au prix de milles sacrifices et avec la bénédiction des gouvernements passés. Il faut que cela cesse et cela presse. Mais nos cultivateurs du Québec ne sont pas prêts à accepter n'importe quoi et à n'importe quelles conditions. Les agriculteurs sont continuellement relégués au dernier rang. Par chance, nous avons affaire à une classe d'individus très patients, mais cette patience a une limite, et depuis un certain temps, cette limite est dépassée. Passons maintenant à l'action et écoutons les dignes représentants de nos agriculteurs. C'est à la suite de ces mémoires que nous pourrons, nous, du Ralliement crédi-tiste, prendre une position éclairée devant le présent bill. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, la commission s'est réunie ce matin pour étudier le bill 64, Loi du syndicalisme agricole. Quelques remarques au début. D'abord, le but de la commission est d'entendre, d'écouter les parties, les groupes concernés. Nous allons écouter les représentants de l'UCC et de tous les corps intermédiaires. Le but, surtout, est d'écouter avec objectivité les gens qui vivent le problème, les cultivateurs eux-mêmes, les représentants de l'UCC afin de rendre cette loi le plus efficace possible.

C'est-à-dire, que la Loi du syndicalisme agricole, ne règle rien en soi, dans la classe agricole, elle ne règlera pas les problèmes, mais c'est un outil qui permettra aux cultivateurs de revendiquer avec plus de force, d'avoir un syndicat le plus fort possible qui sera représentatif et qui pourra collaborer avec le ministère de l'Agriculture et de là élaborer des politiques, afin de régler tout le problème, c'est-à-dire pas à 100 p.c. — les problèmes ne sont jamais réglés à 100 p.c. — mais autant que possible, d'aider la classe agricole qui est une classe importante de la société québécoise, et qui, à venir jusqu'à présent, n'a pas tellement été choyée de la part des gouvernements.

C'est un outil de revendication, et il sera bon en soi pour autant que la loi aura de l'efficacité; Nous avons étudié le projet de loi assez sommairement, il y aura probablement des amendements qui seront apportés lorsque nous en discuterons en comité plénier, mais seulement la bonne façon de savoir quel est le moyen de rendre cette loi la plus efficace, cette loi la plus parfaite possible, pour qu'elle puisse aider la classe agricole, c'est d'écouter les gens qui sont avisés, les gens qui sont concernés, comme je le disais tantôt.

Alors, nous, de la commisssion parlementaire, allons écouter ces gens-là, nous pouvons prendre leur avis, prendre des notes et surtout essayer de rendre tout le mécanisme praticable pour les adhérents, ceux qui vont adhérer au syndicat, pour la cotisation... Enfin, il y a tout un mécanisme, un processus dans le projet de loi, qui probablement pourrait être amélioré.

Ce sont les quelques observations que j'avais à faire. Quant à moi, je suis prêt à passer à l'audition des gens qui sont appelés ici.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, nous avons, aujourd'hui, deux organismes, la Corporation des agronomes de la province de Québec, le président général M. Paul Morin et M. Théodore Mongeon, secrétaire général. Et aussi, l'Union catholique des cultivateurs, représentée par M. Allain, je vois qu'il est ici, M. Henri-Paul Proulx, secrétaire général et M. Roland Blais, conseiller juridique. J'invite M. Morin à s'adresser à la commission.

M. MORIN: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous avez un texte M. Morin?

M. MORIN: Je regrette beaucoup, la consultation avec nos membres a été plus lente que nous avions prévu et nous n'avons pas de texte disponible. Seulement, nous pourrions polycopier le texte que nous avons pour vous le distribuer à la prochaine séance du 2 septembre.

Est-ce que ça vous convient?

M. DEMERS: Il sera au journal des Débats.

Corporation des agronomes

M. MORIN: Alors la Corporation des agronomes de la province a été heureuse de se pencher sur le bill 64, et voici les réflexions que nous avons à vous soumettre. Cette motion que nous voulons faire au sujet du bill 64, M. le Président, se limitera à quelques commentaires. Les idées que nous émettrons sont le fruit d'un sondage auprès de nos directeurs qui représentent chacune des régions de notre province.

Nos agronomes ont pour mission de travailler à l'amélioration du sort de nos agriculteurs. Ils oeuvrent dans différents secteurs de l'agriculture dont celui de la commercialisation des produits agricoles. Devant la complexité grandissante de la mise en marché des produits, nous réalisons que nos agronomes doivent contribuer davantage à la solution des problèmes qu'on y affronte.

Nous reconnaissons l'importance et les principes généraux énoncés dans le bill 64 intitulé Loi du syndicalisme agricole. Cette loi, une fois appliquée, ne peut qu'avoir des effets bénéfiques sur notre agriculture. Nous attirons cependant l'attention de la commission sur le fait que les coopératives agricoles ont joué et continuent à jouer un rôle prépondérant dans le domaine de la commercialisation des produits agricoles. Il nous semble que la Loi du syndicalisme agricole devrait tenir compte davantage de ces faits et laisser aux coopératives une plus grande possibilité d'évoluer dans les cadres de cette loi.

Nous pourrions ainsi arriver beaucoup plus rapidement à des solutions valables en mettant à contribution et les coopératives et les syndicats. Tenant compte de l'éparpillement des producteurs à travers la province — producteurs s'adonnant à une même production — et de bien d'autres facteurs qu'il serait trop long d'énumérer ici, cette loi est difficile d'application. Il serait donc souhaitable qu'une campagne intense d'information soit lancée aux fins de s'assurer que tous les producteurs pourront, en connaissance de cause, prendre position quand il s'agira de se prévaloir de cette loi.

Un dernier commentaire a trait spécifiquement à la définition du terme "producteur agricole" qui nous semble trop général. Un volume minimum de production devrait être exigé pour rendre un producteur éligible à devenir membre d'un syndicat. Une étude plus approfondie du texte de loi nous inspirerait probablement d'autres remarques, mais nous devons nous limiter à ces quelques mots pour aujourd'hui. Si une autre entrevue vous apparaissait utile, nous serions prêts à faire travailler, plus en profondeur, un comité sur cette question.

Ce sont là les commentaires de la Corporation des agronomes de la province de Québec. Je vous remercie.

M. VINCENT: M. le Président, avant que M. Morin reprenne son siège, à la toute fin de ses remarques il a souligné un point très important, c'est-à-dire la définition du producteur agricole. Je pense bien que cette définition, je l'ai souligné tout à l'heure, pourra avoir une importance majeure dans l'application du présent projet de loi.

Est-ce que M. Morin pourrait nous dire, au nom de la Corporation des agronomes, quelle serait, selon eux, la définition la plus réaliste, dans un projet de loi d'une aussi grande importance, du producteur agricole, de l'agriculteur ou du cultivateur? On sait que dans différents projets de loi on a cherché une définition. On a établi une définition, à l'Office du crédit agricole, qui est la suivante: Toute personne est considérée comme agriculteur quand il est reconnu que c'est sa principale occupation et qu'elle en retire la majeure partie de son revenu. Cela, c'est à l'Office du crédit agricole.

On a dit, tout récemment, dans une loi du ministère des Affaires municipales que toute personne qui en retire au moins 25 p.c. de son revenu est considérée comme agriculteur pour fins d'évaluation foncière. Dans une autre législation qu'on a adoptée récemment, on parle, par exemple, d'un pomiculteur — cela va faire plaisir au président actuel de la commission — on a défini comme pomiculteur toute personne qui cultive des pommiers.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il s'enivre au cidre, lui?

M. VINCENT: Alors, ça, c'est vaste: Toute personne qui cultive des pommiers. A ce moment-là, le député de Sainte-Marie, qui a trois pommiers en arrière de sa maison, a été...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Deux.

M. VINCENT: ...deux pommiers, a été considéré comme pomiculteur. Il ne faudrait pas quand même que le député de Sainte-Marie devienne membre de l'UCC, parce qu'il a été considéré comme pomiculteur.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je regrette, M. le député, un de mes pommiers est mort au printemps. H ne m'en reste que deux.

M. VINCENT: Je pense, pour revenir aux choses sérieuses, non pas que ce n'était pas sérieux de parler du député de Sainte-Marie, mais nous aimerions avoir...

M. DEMERS: Comme ça, vos pommiers ne peuvent pas vivre avec vous.

M. VINCENT: Je pense bien que ceci devrait être un des rôles de la Corporation des agronomes, de nous aider à trouver une définition aussi fidèle que possible du mot ou du terme "agriculteur" ou "producteur".

M. MORIN: Je conçois bien, M. le député, que c'est la définition la plus difficile à donner, surtout dans différents secteurs de l'agriculture. Seulement, il nous est apparu, selon le texte du bill, que pour le mot "producteur" on donnait une définition beaucoup trop vaste. Il est défini comme ceci: "Une personne engagée dans la production d'un produit agricole sauf..." Il y a quelques exceptions, en somme, ceux qui ne mettent pas sur le marché de produits agricoles.

Pour nous, il nous semble qu'on englobe là toute une série de personnes qui peuvent être tout simplement des résidents sur des fermes, qui vendent peut-être le lait de deux vaches ou encore qui élèvent deux porcs ou deux truies et qui vont se classer comme producteurs agricoles. Elles n'ont pas la motivation, si vous voulez, du vrai producteur professionnel, qui doit être celui qui doit être considéré d'abord dans une loi comme celle-là.

Alors, j'accepterais facilement, nous pourrions consulter nos membres là-dessus, mais j'accepterais facilement, s'il y a moyen de l'établir, qu'on dise: Celui qui tire 25 p.c. de ses revenus de la ferme, pour l'application de cette loi. Pour l'application d'autres formules d'aide à l'agriculture, on est plus sévère, on applique à peu près les termes que le crédit agricole donne au mot "agriculteur" comme définition.

M. VINCENT: M. le Président, est-ce que M. Morin pourrait nous dire, d'ici la prochaine réunion de la commission parlementaire, s'il pourrait rencontrer les directeurs de la Corporation des agronomes? Vu qu'il a mentionné que les agronomes avaient une vaste expérience dans le monde agricole, et c'est vrai, vu qu'ils sont en contact régulier avec les agriculteurs, et c'est vrai, est-ce qu'il pourrait nous présenter, au nom de la Corporation des agronomes, une définition, la plus réaliste possible, appuyée par la corporation, du terme "agriculteur" ou "cultivateur"? Cela aiderait certainement le législateur pour l'avenir.

A ce moment-là, on pourrait faire, comme je le mentionnais tout à l'heure, un recensement de ce qui existe dans les lois actuelles et arriver à un terme plus réaliste que celui qui est dans le bill. Je pense bien que personne d'entre nous ne peut accepter qu'un tel projet de loi soit voté en troisième lecture par l'Assemblée nationale, avec une définition aussi vaste, aussi simpliste du mot "producteur".

Alors c'est la demande que je fais, si les membres de la commission l'acceptent, nous serions prêts à réentendre la corporation à la prochaine réunion de la commission, avec un document donnant le point de vue de la Corporation des agronomes.

M. MORIN: Si c'est le désir de la commission, M. le Président, nous sommes prêts à nous mettre à la tâche, pour essayer de trouver une formule.

DES VOIX: Très bien.

M. VAILLANCOURT: M. le Président, est-ce que le député de Nicolet pourrait nous dire quelle est sa définition pour un agriculteur?

M. VINCENT: Bien, M. le Président, j'ai eu l'occasion, à différentes reprises, en Chambre récemment, de mentionner qu'il y avait des définitions; d'ailleurs je l'ai fait valoir quand il s'est agi des pomiculteurs, pour l'évaluation municipale. A ce moment-là, j'ai félicité le ministre des Affaires municipales d'avoir trouvé une définition beaucoup plus logique que les définitions qu'on utilise normalement. Quand il a dit que tout agriculteur, pour être exempt de l'impôt foncier, devait au moins avoir 25 p.c. de son revenu provenant de l'agriculture.

A ce moment-là, je me suis demandé, même si c'était un pas en avant, si c'était suffisant, parce qu'à l'Office du crédit agricole on dit qu'un agriculteur ou un producteur doit être une personne dont la principale occupation est l'agriculture et qui en retire la majeure partie de son revenu, c'est-à-dire 50 p.c. et plus.

Aujourd'hui, nous sommes justement à poser la question à ceux qui peuvent nous renseigner, à ceux qui travaillent continuellement avec les agriculteurs. Je pense bien que ça aiderait tous les membres de la commission à se faire une idée sur la définition contenue dans ce projet de loi d'avoir un tel document, une telle étude de la Corporation des agronomes.

M. DEMERS: M. le Président, est-ce que M. Morin peut nous dire quelles sont, d'après l'énoncé qu'il vient de formuler dans son mémoire, les principales difficultés qui découleront de l'application du bill 64? Si j'ai bien compris, M. Morin aurait dit que le bill tel que conçu était d'application très difficile.

M. MORIN: Bien, les difficultés que nous voyons, c'est de regrouper, si vous voulez, les producteurs qui sont éparpillés sur un très grand territoire. Il s'agit de syndicaliser une série de producteurs et il faut aller les chercher dans toute la province. Alors, j'ai l'impression que cette loi, à mesure qu'elle sera connue et rendue plus facile d'application, va contribuer énormément à un certain zonage des productions agricoles parce que les producteurs vont chercher à rassembler les productions dans un secteur donné, pour autant que la mentalité sera prête à accepter ces directives.

C'est pour cela que nous parlons d'une campagne d'information qui préparerait nos producteurs agricoles à accepter cette loi-là et, surtout, à en connaître les implications pour s'en prévaloir à juste titre.

M. VINCENT: M. le Président, est-ce qu'il y a en a d'autres?

M. BELAND: M. le Président, j'aurais également une question à poser à M. Morin. Comme corporation des agronomes, est-ce que, à un

moment donné, vous avez présenté ou suggéré un projet de loi à un gouvernement antérieur? Savez-vous s'il y a eu quelque chose de préparé spécifiquement pour venir à donner naissance à un bill?

M. MORIN: C'est la première représentation que nous faisons à un gouvernement. La seule chose que nous avons faite dans le passé a été de préparer un mémoire assez volumineux pour la commission royale d'enquête sur l'agriculture. On avait incorporé dans ce mémoire quelques données sur la formule de mise en marché des produits agricoles. Nous avions situé le problème et nous avions pris position sur cette question.

M. BELAND: Merci.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, je pense que nous sommes à l'un des articles les plus importants du projet de loi, à savoir la définition dans la loi du mot "producteur". Quels seront les producteurs qui seront touchés par la loi et ceux qui ne le seront pas? Ce problème se vit dans le monde syndical dans toutes les sphères, dans les syndicats industriels, que ce soit à l'Hydro-Québec ou dans d'autres compagnies. C'est toujours un problème, quand un groupe d'employés est certifié, de définir quels sont ceux qui font partie de l'unité de négociation, par exemple — je parle d'un syndicat autre que celui du projet de loi — et quels sont ceux qui ne sont pas inclus dans l'unité de négociation. Souvent, nous sommes obligés de nous asseoir à une table durant des jours pour savoir si untel est inclus ou est exclu.

Alors, le même problème probablement va se poser dans ce cas-ci. J'ai une question à poser au ministre, tout simplement une question d'information. Quand on dit ici, à la définition du mot "producteur": "une personne engagée dans la production d'un produit agricole sauf" — et, là, vous avez les exceptions — à mon sens, cela voudrait dire qu'une personne qui cultiverait un produit pour une valeur de $200 par année, par exemple, serait obligée d'adhérer au syndicat et deviendrait un producteur au sens de la loi, c'est-à-dire tel que c'est défini ici.

Est-ce que c'est votre interprétation, M. le ministre? Un type qui produirait pour $200 de produits qu'il serait obligé de vendre sur les marchés deviendrait un producteur au sens de la loi et il aurait le droit d'adhérer au syndicat dont parle cette loi-là? Trouvez-vous qu'il y a un déséquilibre, c'est-à-dire qu'il peut y avoir des cultivateurs qui produisent pour $2,000 ou $3,000 de produits X, et l'autre qui va produire pour $200 est inclus dans la loi également? Même moi, si je vends les pommes de mes trois pommiers, je peux faire partie...

M. VINCENT: M. le Président, c'est deux, il y en a un de mort au printemps.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'ai oublié de vous dire que j'en ai planté un autre.

DES VOIX: Ah! Ah! Ah!

M. VINCENT: Il n'a pas produit cette année.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pour revenir aux choses sérieuses, je voudrais tout de même avoir l'avis du ministre sur la façon dont il interprète la définition du mot "producteur". Pour moi c'est très ambigu.

M. TOUPIN: Cela parait peut-être ambigu au premier abord, mais dans notre esprit c'est assez clair. Un producteur est celui qui met en marché un produit; c'est la définition qu'on donne au mot "producteur". D'ailleurs, c'est la définition que vous retrouvez dans la Loi de la mise en marché et c'est cette définition-là précisément qui nous permet d'atteindre tous les producteurs agricoles. La confusion règne peut-être quant à la définition d'un agriculteur par rapport à un producteur. Il peut y avoir là confusion, mais il reste que tous ceux qui mettent en marché un produit donné sont des producteurs agricoles, même s'ils en mettent seulement pour $200 ou $300. Ce sont des producteurs agricoles. Ce ne sont peut-être pas des fermiers à temps plein, ce ne sont peut-être pas des agriculteurs à temps plein qui tirent de là la totalité de leur revenu, mais ce sont des individus qui mettent en marché un produit et qui se trouvent, par conséquent, dans l'agriculture.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre me permettrait de lui demander une précision à ce sujet-là? Lorsque le ministre dit que tout producteur est celui qui met en marché un produit, il comprendra avec moi qu'il n'a rien inventé. Alors, il reste à savoir, dans le cas spécifique du syndicalisme agricole, quelle est exactement la définition que l'on devra donner au terme producteur pour que ce producteur, c'est-à-dire celui qui met en marché un produit agricole, en mette suffisamment en marché pour être considéré comme un producteur agricole pouvant être accrédité en vertu du projet de loi que nous avons devant nous. Le terme général de producteur, tel qu'on le retrouve dans le texte de loi, est évidemment très vaste et s'applique à tout genre de production agricole, commerciale, industrielle, etc. Au moment où nous étudions cette loi, il est extrêmement important — je ne demande pas au ministre de nous répondre tout de suite — qu'on spécifie en somme quantitativement ce qu'est un producteur dans le cas spécifique de l'agriculture en fonction de ces gens qui pourront être accrédités par la loi du syndicalisme agricole.

M. DEMERS: Si je peux compléter à l'aide

du dictionnaire, on définit le producteur comme celui ou celle qui crée par son travail des produits agricoles ou industriels. On ne parle pas du tout de la mise en marché.

M. TOUPIN: On ne parle pas non plus de la quantité, on ne parle pas non plus du nombre de produits, etc.

M. DEMERS: C'est assez compliqué aujourd'hui. S'ils étaient des dieux, ceux qui savent définir...

UNE VOIX: Cela peut être important pour d'autres.

M. TOUPIN: C'est justement pour cela que je trouve vos questions bizarres.

M. VINCENT: M. le Président, ce sont les réponses du ministre qui sont bizarres. Je pourrais bien retourner ceci au ministre que, pour obtenir une carte de charpentier-menuisier, on pourrait bien dire: Toute personne qui sait tenir un marteau, clouer un clou et scier une planche. Même si je sais tenir un marteau, clouer un clou et scier une planche, même faire un peu de travail de charpenterie, cela ne signifie pas que je sois charpentier-menuisier.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, on s'éloigne un peu du sujet.

M. TOUPIN: Les comparaisons nous paraissent boiteuses.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, si vous me le permettez, j'avais commencé à poser une question au ministre. Je ne lui demande pas ce matin de nous donner une définition précise du mot "producteur". J'insiste simplement sur l'importance qu'il y a de définir de façon précise le mot "producteur" en fonction de la quantité de production parce qu'à ce moment-là n'importe qui, comme on le disait tout à l'heure en faisant des blagues, a un pommier ou deux pommiers pourrait être un producteur au sens de la loi.

Mais la question que j'aimerais poser au ministre à la suite des observations qu'a faites M. Morin est la suivante — M. Morin a souligné les difficultés que pourra poser l'application de cette loi en regard des organismes coopératifs: Quel est l'avis du ministre à ce sujet-là? A-t-il conçu un mécanisme de conciliation entre les exigences des organismes coopératifs et la présente loi?

M. TOUPIN: Je pense qu'il ne faut pas non plus mêler les cartes. Un producteur, par rapport à une institution ou à une organisation de producteurs, ce n'est pas tout à fait pareil. Les agriculteurs ont à leur disposition une loi ou des lois qui leur permettent de se former en coopératives pour transformer leurs produits et les mettre en marché, les entreposer, etc. Dans l'activité commerciale du produit, il y a ce qu'on appelle l'activité primaire et l'activité secondaire. On parle du primaire et là, on entre dans le secondaire, dans la transformation. Il y a une loi qui existe là-dessus.

A côté de ça, les agriculteurs peuvent bien se donner une organisation professionnelle, une organisation de profession. C'est ce que vise le projet de loi: une organisation de profession. Donc, il n'est pas nécessaire que nous retrouvions dans ce projet de loi la coopération comme telle. C'est le même agriculteur au fond qui se retrouve, et dans son association professionnelle, et dans son association coopérative.

L'une a une fin précise qui est de regrouper les professionnels et l'autre a une autre fin qui est de prendre les agriculteurs, de leur demander de participer économiquement à la mise en place d'une institution et, par l'intermédiaire de cette institution, de transformer le produit. Donc, il devient extrêmement difficile, voire même impossible de retrouver partout, et la coopération, et le syndicalisme agricole et les plans conjoints dans un même projet de loi.

La Loi de mise en marché a également, elle aussi, une fonction bien précise. Elle donne aux agriculteurs l'occasion de mettre en place des plans conjoints, des organismes de mise en marché dans le but de négocier leurs produits, de mettre en marché sous mille et une forme leurs produits. Et la Loi de mise en marché n'a rien à voir, ou a peu près, dans ce projet de loi-ci, sauf qu'on peut se servir de cette loi comme d'un mécanisme de collection d'une cotisation — c'est ce qui est prévu dans cette loi — sauf également qu'on peut se servir du même organisme qui administre la Loi de mise en marché pour administrer cette Loi du syndicalisme agricole.

Or, il ne faut pas mêler ces lois. Ce sont au fond des lois qui sont différentes, qui sont à la disposition des agriculteurs, qui poursuivent des fins un peu particulières chacune dans son champ d'action, mais qui au fond poursuivent une fin ultime qui est le mieux-être des agriculteurs.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie le ministre des explications qu'il nous donne et que nous avions conçues nous-même, mais c'est parce que M. Morin — et je reviens maintenant à M. Morin pour l'interroger — a évoqué les difficultés que causerait l'application de la loi dans ce domaine de l'organisation coopérative que j'ai posé cette question au ministre. M. Morin, mon collègue, le député de Saint-Maurice, vous a déjà posé la question mais j'y reviens. Quelles sont ces difficultés que vous voyez? Est-ce que vous pensez que les gens qui sont groupés dans des organismes dits coopératifs auraient des réticences, selon vous, à accepter d'entrer dans ce programme de syndicalisme, dans cette organisation de syndicalisme agricole?

M. MORIN: D'après la consultation que nous avons faite auprès de certaines adeptes des coopératives, il leur semble que la voie pour continuer à exploiter leurs organismes commerciaux ou de transformation n'est pas assez tracée dans ce bill du syndicalisme agricole. Ils ne voient pas comment ils vont pas à travers s'il y a d'un côté des syndicats qui travaillent suivant leurs directives et qui peuvent, à un moment donné, annihiler les efforts que font les coopératives pour améliorer la mise en marché des produits agricoles.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. Morin, est-ce que cela voudrait dire, à la suite des consultations que vous avez poursuivies, que les cultivateurs réunis dans des organismes coopératifs considèrent qu'ils sont suffisamment outillés, du fait de l'existence des coopératives auxquelles ils appartiennent, et qu'ils n'auraient, de ce fait, pas besoin d'un autre organisme pour poursuivre leur activité?

M. MORIN: Je n'irais pas jusque là. D'ailleurs, nous avons admis que le bill était nécessaire et bien fondé et que les principes énoncés étaient valables. Tout simplement, nous voulons que les coopératives puissent avoir une certaine liberté d'action à travers les applications de ce bill. Je ne connais pas toutes les coopératives qui existent en matière de transformation ou de mise en marché des produits agricoles, mais je pense qu'un très grand nombre sont en bonne voie de fonctionnement et sont en mesure de continuer à travailler pour l'amélioration de la commercialisation des produits. C'est surtout ce que nous visons dans ce bill.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Morin, une dernière question. En ce qui concerne le problème du référendum, est-ce que vous avez eu l'occasion de consulter les cultivateurs au sujet de cet article 11 de la loi sur les référendums?

M. MORIN: Sur la question des référendums, nous n'avons pas eu de consultation avec des producteurs ou des cultivateurs. Seulement, nous avons eu certains commentaires de nos sections, c'est-à-dire des directeurs de nos sections locales. Ils ont trouvé que cette question de référendum n'était pas assez claire et que la clause de 60 p.c. des votants avec une majorité absolue de 50 p.c. de ces 60 p.c. n'était pas assez précise pour qu'on puisse s'orienter d'une façon absolument positivé dans l'application de cette loi. Quelques-uns ont même suggéré un pourcentage plus élevé de votation obligatoire. Mais, je pense que ce n'est pas facile d'application.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, M. Morin.

M. MORIN: Moi, je laisserais 60 p.c. pour le vote obligatoire.

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Morin, vous disiez tantôt que vous aimeriez que les coopératives jouent un plus grand rôle à l'intérieur de ce projet de loi. Pourriez-vous expliciter davantage et nous dire par quel mécanisme, de quelle façon vous verriez les coopératives jouer un plus grand rôle que celui qu'elles jouent actuellement?

M. MORIN: C'est qu'il peut y avoir une espèce de comité, une espèce de haut palier de direction de la commercialisation où seraient représentés par des officiers supérieurs les syndicats ou la confédération des syndicats en même temps que, par nos officiers, les organismes coopératifs. Les deux pourraient, en même temps, tracer la voie et essayer de ne pas annihiler, si vous voulez, les immenses capitaux qui sont actuellement investis dans les coopératives et qui doivent, tout de même, garder leur rentabilité dans la mesure du possible.

Je pense que c'est une question d'approche de l'étude des problèmes et de bonne volonté de la part de tout le monde pour arriver à travailler dans le même sens.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci bien.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Maurice?

M. DEMERS: Je n'ai pas de question, je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Le député de Nicolet.

M. VINCENT: M. Morin, on a parlé tout à l'heure de la définition du mot: "producteur". Je n'y reviens pas. Vous allez nous préparer quelque chose pour la prochaine réunion?

M. MORIN: Je n'ai pas eu d'ordre de la commission de préparer ça.

M. VINCENT: Je pense bien que c'est unanime de la part des membres de la commission que vous nous prépariez quelque chose à ce sujet-là.

M. MORIN: Nous sommes prêts à faire une tentative.

M. VINCENT: Oui, à titre de suggestion, soumettre à la commission... Donc, partant de la définition, si on peut trouver une bonne définition du terme "cultivateur" ou "producteur", par la suite, en vertu du bill 64, il faudra fabriquer des listes de producteurs, ou de cultivateurs, et cela, dans tous les territoires, toutes les régions de la province. D'après votre expérience, M. Morin, et l'expérience de vos membres également, qui sont en contact direct avec les agriculteurs, est-ce que cette fabrication

de listes peut se faire facilement? C'est ma question première. Et, deuxièmement, combien de temps, d'après votre expérience, et l'expérience de vos collègues, faudra-t-il, pour qu'une liste complète soit préparée, remise à qui de droit, pour, par la suite, procéder au référendum, tel que stipulé dans la législation?

M. MORIN: Je ne vous dis pas que c'est facile de faire des listes de producteurs. J'y ai déjà participé et je sais ce que cela veut dire. Il y a tellement d'évolution dans cette question de productions agricoles.

Un agriculteur est aujourd'hui dans le domaine de la production et il peut en sortir six mois après. Il faut donc tenir ces listes à jour, continuellement, pour ne pas commettre d'injustice. Je dirais que c'est un projet de très grande envergure qui peut nécessiter au moins un an de travail, pour faire quelque chose de valable.

Maintenant, dans certains territoires, je sais qu'il y a des fiches d'information qui ont été faites pour chacun des cultivateurs. Ces fiches d'information nécessairement sont d'un caractère confidentiel, mais je pense qu'il y aura possibilité à un moment donné d'extraire simplement le nom du producteur, son adresse et la production principale qu'il produit. Alors peut-être qu'avec ces fiches-là, là où elles sont disponibles, nous pourrions hâter un peu la compilation de listes de producteurs.

M. VINCENT: M. le Président, M. Morin mentionne qu'il peut prendre un an avant de dresser la liste la plus complète possible...

M. MORIN: Moi, je ne la ferai pas. Je vous donne un aperçu.

M. VINCENT: Non, mais je pense que c'est important, parce qu'en définitive, si le projet de loi est voté à l'Assemblée nationale en troisième lecture, au mois de novembre ou décembre, qu'il y ait une période d'un an avant que la liste soit complète, qu'il y ait une période pour permettre d'ajouter ou de retrancher de la liste, ça veut dire que le référendum ou la demande d'accréditation ne peut pas se compléter avant l'année 1973, au cours de l'été 1973. C'est important de donner un outil, mais il faut quand même que ce soit important de savoir à quel moment cet outil sera disponible pour l'association qui veut se faire accréditer ou pour les cultivateurs qui veulent se faire représenter.

Donc, là-dessus, je reviendrai avec d'autres organismes.

M. Morin, vous êtes d'accord qu'il y ait une seule association d'accréditée tel que le veut la loi.

M. MORIN: A condition qu'il y ait une espèce de conseil général des deux organismes qui puissent se consulter continuellement.

M. VINCENT: Maintenant, est-ce que votre corporation a regardé le problème des cotisations syndicales? Dans la législation actuelle, on parle de deux référendums ou d'un bulletin de vote à deux volets. On demande à l'agriculteur de se prononcer sur le même bulletin de vote pour l'accréditation d'une association. Sur le même bulletin de vote on lui demande de se prononcer sur la cotisation syndicale prélevée à la source.

Donc, un référendum, un bulletin de vote à deux volets, c'est un des premiers objectifs de la loi. Par la suite, si l'association qui aura été accréditée par référendum, à qui on aura consenti encore par le même référendum sur le même bulletin de vote une cotisation syndicale prélevée à la source, est-ce que la troisième formule, qui dit dans la loi que, lorsque l'association accréditée voudra augmenter sa contribution ou sa cotisation de $2 ou de $5 par année, doit être soumise de nouveau à un référendum?

Est-ce qu'à ce moment-là on a eu le temps de regarder ces implications, de regarder ce rouage qui peut à un moment donné devenir très pénible? Parce que si le gouvernement actuel retournait en élection à chaque fois qu'il augmente les taxes, il y en aurait eu des élections.

M. MORIN: C'est là qu'est venue notre suggestion de lancer une campagne intense d'information, pour que les gens sachent à quoi ils s'engagent et connaissent le rouage de toute cette organisation. Et je pense que la question du bulletin, avec deux questions à répondre, peut créer passablement de confusion et la compilation deviendra très difficile à faire.

M. VINCENT: Maintenant, M. le Président, j'ai terminé en ce qui concerne M. Morin. Je voudrais poser cette question-ci au ministre. On sait que Me Marcel Trudeau a été nommé pour faire un travail en novembre 1969. Il a écrit, je pense que c'est à la fin de novembre, à tous les organismes intéressés à la Loi du syndicalisme agricole. Il a reçu des réponses, il a reçu des mémoires, il a rencontré les associations, du moins jusqu'au 12 mars 1970. Par la suite bien...

M. TOUPIN: Il y a eu un premier mandat qui fut confié...

M. VINCENT: Non, spécifiquement pour la Loi du syndicalisme agricole. M. Trudeau a été nommé en novembre 1969. Il a communiqué avec les organismes concerné à la fin de novembre ou début de décembre 1969; il a reçu des mémoires. Il a rencontré les organismes concernés. Est-ce que le ministre pourrait nous faire l'historique du travail qui s'est déroulé depuis ce moment-là? Quelles ont été les associations qui ont présenté des mémoires, quels ont été les groupements qui furent entendus par la personne nommée pour faire ce travail?

Je crois bien, en définitive, que le bill 64 est le résultat de ce travail, mais quelles ont été les grandes lignes de ce travail qui a été fait depuis le mois de novembre 1969 jusqu'à ce jour? Je pense qu'il serait important de savoir quels ont été les organismes consultés, les mémoires qui ont été présentés. Le ministre doit certainement avoir un rapport là-dessus.

M. TOUPIN: Je savais que Me Trudeau avait reçu, bien sûr, des mémoires et qu'il avait consulté des organismes. Il y en a une dizaine qui ont soumis des mémoires. Seule l'UCC a soumis des idées verbalement. Evidemment, je ne peux pas dire le nom de chaque association, quoique je pourrais, sans doute, les dénombrer les unes après les autres parce que nous avons ces mémoires au ministère. C'est à la suite de ces mémoires et à partir sans doute aussi de ces mémoires que le projet de loi a commencé à prendre forme pour en arriver à être ce qu'il est aujourd'hui et, par la suite, à être soumis à l'Assemblée nationale en première lecture.

M. VINCENT: M. le Président, je pense que, si nous pouvions nous adresser à chacun de ces organismes, nous pourrions avoir les mémoires. Mais y aurait-il possibilité, à la prochaine séance de la commission, que le ministre nous apporte la liste des organismes qui ont sonmis des mémoires à Me Marcel Trudeau, chargé par l'Etat du Québec, d'étudier le projet de l'union des producteurs agricoles du Québec à ce moment-là, et la copie des mémoires?

M. TOUPIN: Oui, je ne pense pas qu'il y ait d'inconvénient à ce que ces mémoires soient connus, de même que le nom des organismes et les textes.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il est donc acquis que nous aurons les textes de ces mémoires à la prochaine séance?

M. TOUPIN: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.

M. TOUPIN: Tout ce que nous possédons, nous l'apporterons.

M. VINCENT: Si j'ai bien compris le ministre, l'UCC n'a pas soumis de mémoire.

M. TOUPIN: Oui, j'ai dit que l'UCC avait soumis un mémoire et qu'en plus elle avait fait des représentations verbales.

M. VINCENT: A quelle date l'UCC a-t-elle soumis son mémoire?

M. TOUPIN: C'était plus qu'un mémoire; c'était une esquisse de projet de loi.

M. VINCENT: Oui, d'accord, au mois d'octobre; mais à la suite de l'esquisse du projet de loi soumise au conseil des ministres au mois d'octobre 1969 ou au début de novembre 1969, est-ce qu'il y a eu un mémoire écrit déposé par l'UCC?

M. TOUPIN: Non, seulement celui-là, cette esquisse de projet de loi.

M. VINCENT: Est-ce que nous pourrions avoir également, en plus des mémoires, les dates des rencontres avec les principaux organismes?

M. TOUPIN: Oui, nous vous donnerons la liste et les dates des rencontres et nous apporterons également le mémoire de chacun des organismes présentés.

M. VINCENT: Voici, M. le Président, pourquoi je soulève ce point. J'ai ici, par exemple, la lettre-mémoire de la Coopérative fédérée de Québec concernant le syndicalisme agricole obligatoire. M. Pigeon, qui signe la lettre-mémoire, répond à une invitation de Me Marcel Trudeau qu'il a reçue par lettre le 24 novembre 1969, et il soumet cette lettre-mémoire le 15 janvier 1970. Probablement que, pour les autres, c'est la même chose.

Il y a eu également une rencontre avec la Coopérative fédérée ou avec des représentants de la coopérative pour des explications. En définitive, ce sont tous ces détails que nous aimerions connaître. Quand on parle d'information — M. Morin en a parlé tout à l'heure — il faut être de bon compte. J'ai revu le mémoire de la Coopérative fédérée après que le bill 64 eut été présenté en première lecture.

J'ai revu le mémoire de la Coopérative fédérée qui a paru dans le journal La terre de chez nous et qui parlait encore de l'Union des producteurs agricoles. Il y a quand même une évolution. Il y a quand même quelque chose qui a existé entre la présentation de l'esquisse du projet de loi de l'Union des producteurs agricoles, au mois d'octobre ou novembre 1969, et aujourd'hui, le 26 août 1971.

Donc, il y a eu une évolution et, si on veut renseigner d'une façon juste et équitable toute la population, il faudrait quand même donner cette évolution et non pas se reporter continuellement aux premières esquisses de projet de loi de l'Union des producteurs agricoles qui ont été présentées au mois d'octobre 1969. Ce n'est plus la même chose du tout. Il ne faut pas non plus se reporter au projet de loi qui avait été présenté par le gouvernement Lesage, en 1965. Ce n'est plus la même chose du tout.

Alors, si on veut informer, comme le disait M. Morin, tous les agriculteurs, tous les corps intéressés, il faut faire cette évolution, il faut la mettre sur papier et, à ce moment-là, peut-être qu'on pourra cerner certains problèmes d'information qui se répandent présentement à travers la province, alors que les gens considèrent encore que c'est la première esquisse de projet de loi de l'Union des producteurs agricoles.

M. LE PRESIDENT: Maintenant, nous allons entendre les représentants de l'UCC. J'invite...

M. BELAND: M. le Président, j'aurais une dernière question à poser à M. Morin. Compte tenu de votre expérience agronomique et également avec les agriculteurs, est-ce que vous auriez préféré un projet de loi qui aurait reconnu chaque section spécialisée de l'agriculture ou si c'est préférable d'avoir, toujours selon vous, un projet de loi qui reconnaît la profession dans son ensemble?

M. MORIN: Je pense qu'un projet de loi qui aurait reconnu chaque secteur de l'agriculture aurait été extrêmement complexe à bâtir et à appliquer. J'aime mieux un projet de loi de nature générale et qui, tout de même, tient compte de certaines contingences dans son application. Il doit y avoir moyen de modifier ou d'améliorer ce projet de loi pour que chacun y trouve sa route et puisse travailler dans le même sens pour le bien-être de l'agriculture.

M. BELAND: Donc, si je tiens compte de vos observations, vous préférez que ce soit ainsi, quitte à y revenir dans X mois, pour corriger des petites anomalies vis-à-vis de chaque section spécialisée, étant donné que d'une section spécialisée à l'autre il peut y avoir parfois une très grande différence.

M. MORIN: C'est mon impression. M. BELAND: D'accord. Merci.

M. LE PRESIDENT: J'invite maintenant M. Allain, le président de l'UCC, à venir faire ses représentations aux membres de la commission.

Union catholique des cultivateurs

M. ALLAIN: M. le Président, nous avons un texte. Je ne sais pas s'il vous a été remis. Oui.

M. le Président, messieurs les membres de la commission, nous voulons tout d'abord vous remercier de l'occasion que vous nous fournissez de donner nos points de vue sur la Loi du syndicalisme agricole récemment adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale. L'Union catholique des cultivateurs est en effet particulièrement intéressée et impliquée par ce projet de loi. Aussi, osons-nous espérer que vous accorderez votre meilleure attention à nos représentations.

Comme vous le savez certainement, l'UCC regroupe actuellement la grande majorité, presque la totalité des syndicats et fédérations de syndicats de producteurs agricoles du Québec. Elle est composée d'une part de seize fédérations régionales de syndicats d'exploitants agricoles qui recouvrent tout le territoire agricole du Québec. Elle comprend d'autre part huit fédérations spécialisées de producteurs agricoles qui ont pour fonction ou objectif d'administrer des plans conjoints de mise en marché. Ces fédérations couvrent elles-mêmes tout le territoire de la province pour la production qui les concerne.

Ce sont la Fédération des producteurs de lait industriel, la Fédération des producteurs de lait de consommation, la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation, la Fédération des producteurs de chair de volailles, la Fédération des producteurs de bois, la Fédération des producteurs de porcs, la Fédération des producteurs de sucre et sirop d'érable et la Fédération des producteurs de pommes de terre. L'UCC affilie en outre une fédération de travailleurs forestiers.

L'UCC, permettez-nous aussi de le signaler, existe au Québec depuis une cinquantaine d'années. Elle a graduellement défini les structures syndicales que les cultivateurs ont voulu se donner jusqu'au modèle que nous venons tout juste de décrire très sommairement. Elle a toujours regroupé une très forte proportion des cultivateurs du Québec et le nombre de ses adhérents, par la seule voie des syndicats généraux, a varié au cours des années récentes entre 55,000 et 38,000 cultivateurs. Elle est, pour le moment, la seule organisation susceptible d'obtenir l'accréditation prévue dans le projet de loi qui est devant vous. A cause de cette expérience unique que l'UCC a du syndicalisme agricole, nous sommes également à votre disposition pour fournir toute information qui pourrait être utile sur les applications possibles de la loi.

Ceci dit, nous voulons maintenant vous formuler nos points de vue, le plus brièvement possible, d'abord sur les éléments essentiels ou les principes généraux de la loi, ensuite sur quelques conditions qu'elle impose, dans sa forme actuelle pour s'en prévaloir.

Les principes généraux de la loi. La Loi du syndicalisme agricole, telle que proposée par le ministre de l'Agriculture et adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale, prévoit essentiellement l'accréditation d'une association agricole provinciale de caractère syndical — incorporée en vertu de la Loi des syndicats professionnels — comme représentant ou porte-parole officiel des cultivateurs du Québec. Elle prévoit en outre la possibilité pour l'association accréditée de prélever à la source des cotisations auprès des producteurs et des contributions auprès des fédérations pour assurer son financement.

Or, cela répond bien aux attentes et aux véritables besoins du milieu agricole. Bien sûr, le syndicalisme agricole existe depuis longtemps, et il est reconnu dans les faits. Il était cependant nécessaire, pour assurer son fonctionnement adéquat, qu'il ait une voie d'accréditation officielle et qu'il puisse disposer d'un mode de financement plus moderne. La loi proposée y pourvoit, du moins dans ces objectifs.

La Loi du syndicalisme agricole est une loi

de portée générale. Elle n'impose aux cultivateurs aucune organisation en particulier. Elle leur permet de faire accréditer l'association qui leur convient, pourvu bien sûr qu'elle soit de caractère syndical ou regroupe des fédérations de syndicats de producteurs agricoles. En cela, elle respecte le droit normal des cultivateurs de se donner des structures syndicales de leur choix et d'y adhérer. Ce caractère de la loi doit évidemment être sauvegardé.

Dans sa forme actuelle, l'application de la Loi du syndicalisme agricole est placée sous la surveillance et le contrôle, quant à certains aspects, de la Régie des marchés agricoles. Cela apparaît évidemment assez curieux à première vue. Il faut cependant comprendre que les structures syndicales que les cultivateurs du Québec ont voulu se donner depuis 15 ans incluent des syndicats et fédérations de syndicats qui ont pour fonction d'administrer des plans conjoints de producteurs pour la mise en marché des produits agricoles, lesquels plans conjoints existent sous l'empire de la Loi des marchés agricoles qui est elle-même administrée par la Régie des marchés agricoles. Force nous est bien d'admettre le bien-fondé du rôle général qui est accordé à la Régie des marchés agricoles par la loi. N'empêche cependant que les responsabilités qui lui sont confiées sont sur certains points trop larges, ce sur quoi nous reviendrons.

Quelques conditions d'application de la loi. Si l'UCC est entièrement d'accord sur les principes généraux de la loi soumise à votre étude, messieurs les membres de la commission, elle n'accepte cependant pas toutes les conditions qui y sont posées pour son application concrète. Nous voulons soulever à ce sujet deux questions: celle des référendums et celle de la tenue d'assemblées générales de l'association accréditée à la demande d'une minorité de producteurs.

D'abord, les référendums. Dans sa forme actuelle, la loi prévoit la tenue de trois types de référendums pour son application: un premier pour vérifier la représentativité avant que la Régie des marchés agricoles n'accorde l'accréditation à une association qui en fait la demande; un second avant d'accorder à une association accréditée le pouvoir de prélever des cotisations et contributions à la source; et un dernier référendum pour modifier les maximums (en pratique les montants) de cotisations et de contributions.

Cela, vous vous en doutez bien, nous apparaît beaucoup trop onéreux, trop coûteux et est susceptible d'alourdir le fonctionnement du syndicalisme agricole au point de le compromettre et ne respecte pas la responsabilité de la classe agricole du Québec.

Nous croyons en effet que la classe agricole du Québec est assez responsable pour se prévaloir d'une telle loi syndicale sans avoir à se référer sur autant de points à des vérifications par voie de référendum populaire, mais en utilisant les mécanismes démocratiques normaux relatifs à l'adhésion des individus à une association et à la délégation de responsabilités et de pouvoirs des membres à leurs dirigeants aux différents niveaux. D'ailleurs, des exigences aussi lourdes ne sont posées à aucune autre organisation syndicale de notre société. C'est pourquoi nous croyons tout à fait inopportun qu'un référendum doive être tenu pour accorder l'accréditation.

La Régie des marchés agricoles pourrait être chargée de donner cette accrédication après examen des règlements d'une association qui en fait la demande et appréciation de son caractère représentatif d'après le nombre de ses adhérents. De même nous n'acceptons pas que l'augmentation des cotisations et contributions ne soit pas la responsabilité des délégués et des membres aux assemblées générales de l'association accréditée. C'est là le seul mécanisme susceptible d'assurer en cette matière des décisions suffisamment rapides et éclairées et le seul mécanisme qui garantisse en même temps le sérieux des délégations de responsabilités des membres d'une association envers leurs dirigeants.

Quant au référendum aux fins de vérifier si les producteurs agricoles veulent accorder à leur association le pouvoir de prélever des cotisations et contributions à la source — soit l'application des section VIIl et IX de la loi — nous l'acceptons étant donné qu'il s'agit d'un pouvoir qui ne va pas de soi avec l'adhésion à une association. Au sujet des référendums, si nous n'acceptons que celui qui concerne le pouvoir de prélever des cotisations et des contributions, nous acceptons encore moins que deux référendums soient tenus dans un même bulletin de vote tel que cela est prévu à l'article 13 du projet de loi. Une telle procédure a déjà été expérimentée et elle a produit des résultats contradictoires entre eux. Un référendum populaire, pour qu'il soit significatif, doit être formulé le plus simplement possible et fourni l'occasion aux individus qui y prennent part de faire des choix clairs. Autrement divers biais s'y introduisent et peuvent influencer sensiblement le résultat.

Au sujet du référendum sur le pouvoir de prélever des cotisations et des contributions — application des section VIIl et IX— la loi exige, pour que ce référendum soit concluant, que 60 p.c. au moins des producteurs qui ont droit de vote se prononcent effectivement et que 60 p.c. de ces derniers se prononcent favorablement à l'exercice de ce pouvoir. Nous ne voyons aucunement pourquoi l'on exige que plus de 50 p.c. des producteurs exercent leur droit de vote et que plus de la majorité votent favorablement pour que le référendum soit concluant. De même, la loi exige un délai de deux ans avant qu'une association accréditée qui n'a pas été investie du pouvoir de prélever des cotisations et des contributions à la source lors d'un référendum puisse demander un nou-

veau référendum. Nous ne voyons pas pourquoi on impose ce délai et pourquoi on ne laisse pas cette question au jugement de l'association.

Pour pallier ces diverses anomalies, nous proposons que les articles 7 et 8, les articles de la section IV et l'article 35 soient modifiés dans le sens suivant :

D'abord, l'accréditation d'une association devrait être accordée par la Régie des marchés agricoles après vérification de ses règlements et appréciation de son caractère représentatif de tous les producteurs agricoles du Québec.

Dans le cas où les éléments fournis à la régie pour fonder son jugement sur la représentativité de l'association qui demande l'accréditation ne lui paraîtraient pas suffisants, celle-ci pourrait être accordée sous condition que l'association obtienne le nombre de votes requis lors du référendum portant sur le pouvoir de prélever des cotisations et contributions, (l'application des sections VIIl et IX de la loi). Il est, en effet, bien évident que les producteurs qui acceptent de donner à une association le pouvoir de prélever des cotisations et contributions à la source acceptent a fortiori d'être représentés par cette association.

Le pouvoir d'appliquer les sections VIIl et IX de la loi devrait être accordé à une association accréditée à la suite d'un référendum où au moins 50 p.c. des producteurs se seraient prononcés et où la majorité absolue de tous ceux qui auraient exercé leur droit de vote se serait montrée favorable à l'application des pouvoirs prévus dans ces sections.

L'article 16 de la loi, prévoyant un délai de deux ans pour la reprise d'un référendum sur l'application des sections VIIl et IX, devrait être, selon nous, supprimé.

Enfin, si nous acceptons que la loi prévoie des maximums de cotisation et de contribution pour la période de départ, l'augmentation des montants de cotisation et de contribution au-delà de ces maximums devrait être décidée par un vote favorable des deux tiers des délégués présents à une assemblée générale de l'association accréditée. Dans le cas de la cotisation, le règlement de l'association des producteurs pourrait être ratifié par la Régie des marchés agricoles. Dans le cas de la contribution des fédérations, elle pourrait faire l'objet d'un règlement de la régie elle-même.

La tenue des assemblées générales. Un seul autre point sur lequel nous voulons proposer ici une modification à la loi concerne le droit qu'elle accorde à l'article 6, paragraphe d) "à 5 p.c. des producteurs membres de syndicats ou de syndicats spécialisés affiliés à des fédérations ou des fédérations spécialisées qui adhèrent à l'association d'obtenir la tenue d'une assemblée générale spéciale de l'association." Nous respectons le droit d'une minorité suffisamment importante de faire valoir ses points de vue jusqu'au niveau de l'assemblée générale de l'association. Nous croyons que le chiffre de 5 p.c. des membres est trop bas et qu'il pourrait permettre à un groupe dissident relativement petit d'entraver la bonne marche de l'association par des recours constants à l'assemblée générale. Aussi, demandons-nous que ce chiffre soit porté à 10 p.c. De même, nous souhaitons que cet article soit formulé de manière qu'il soit évident qu'il s'agit bien de 10 p.c. de tous les membres adhérents à l'association par l'intermédiaire soit des fédérations ou des fédérations spécialisées et non pas uniquement 10 p.c. des membres d'une fédération ou fédération spécialisée.

Voilà, M. le Président et MM. les membres, les commentaires et suggestions que nous voulions vous faire en regard de la Loi du syndicalisme agricole. Nous nous en sommes tenus à faire des commentaires généraux et à indiquer le sens des amendements que nous voulons voir apporter à la loi. Nous sommes à votre disposition, nos conseillers juridiques en particulier, si vous vouliez obtenir une formulation plus technique de nos propositions. Nous espérons, de toute façon, que vous les accueillerez favorablement. Merci, M. le Président, merci, MM. les membres.

M. LE PRESIDENT: Merci M. Allain. Est-ce qu'il y a des questions? Le député de Nicolet.

M. VINCENT: M. le Président, une première question que j'aurais à poser au président général de l'UCC, M. Allain, est la suivante, un peu la même que j'ai posée à M. Morin, président de la Corporation des agronomes: Premièrement, est-ce qu'il accepte la définition telle qu'écrite dans le bill 64 du mot "producteur" et quelle serait, selon lui, la meilleure définition pour toucher le producteur ou le cultivateur du Québec?

M. ALLAIN : La réponse, M. le Président, est oui, nous l'acceptons telle quelle, non pas que nous soyons prêts à défendre qu'elle est la réponse absolue à toutes les questions qu'on se pose autour de la définition de producteur, mais l'expérience nous a démontré, par la Loi des marchés agricoles, qu'il fallait vivre avec la formulation la plus simple possible et la plus fonctionnelle possible.

De là à prétendre qu'elle peut satisfaire à toutes les questions qui se posent, nous n'avons pas cette prétention-là. Mais, dans les circonstances, nous n'en voyons pas de meilleure. Nous admettons très bien que ce point-là, en particulier, pourrait être l'objet de nombreuses discussions. Mais, quand on cherche peut-être à le préciser plus en termes de volume de production ou autre chose, là, on commence, ou on pose l'obligation de créer une ligne de démarcation entre tel producteur et tel autre. Alors, au point de vue de l'application d'une loi, je pense que ça deviendrait pratiquement intenable, quand il y a surtout, comme ici, le cas de la cotisation à la source.

M. VINCENT: M. le Président, M. Allain est président d'un organisme réellement important et il ne croit pas qu'il soit possible de définir mieux que dans la législation actuelle le mot "producteur". Le président général de l'UCC admettra quand même que tous les autres organismes ou représentants des groupes ou des professions ont quand même été en mesure de définir ce qu'étaient un menuisier-charpentier, un dentiste, un avocat ou un chauffeur de camion. Et quand on arrive au terme "agriculteur" ou "producteur", on demeure toujours dans le vague. Et ceci amène une question sérieuse.

J'ai rencontré, hier, un industriel qui a quand même à son emploi 250 personnes; il est membre de l'UCC et il est considéré comme producteur parce qu'il a une petite ferme qu'il cultive. Il vend un peu de grain, il a des animaux de boucherie, mais il est considéré comme producteur. Il a droit au chapitre autant que l'autre qui en fait sa principale occupation. Il a également droit, dans certains cas, à des subventions gouvernementales, telles les subventions gouvernementales fédérales de $1.25 les cent livres pour le lait. A ce moment-là il est considéré comme un producteur, comme un agriculteur, comme un producteur laitier. Mais il reste quand même que c'est un industriel qui emploi 250 personnes dans une usine de meubles.

M. ALLAIN: Ecoutez, je ne dis pas que c'est forcément, absolument la meilleure, mais je serais porté à croire que c'est la plus utile dans les circonstances à moins que quelqu'un en trouve une autre. Le problème que vous soulevez, on ne nie pas qu'il existe. Mais que voulez-vous, jusqu'à maintenant, on a dû vivre avec lui.

M. VINCENT: Que penserait l'UCC d'une définition telle que celle qui a été apportée par le ministre des Affaires municipales dans sa législation sur l'évaluation foncière? On dit, dans cette définition: Cultivateur ou producteur est la personne physique qui retire au moins 25 p.c. de son revenu global de l'agriculture. Qu'est-ce qu'il pense de cette définition? Qu'est-ce qu'il pense de la définition, deuxièmement, de l'Office du crédit agricole: Un cultivateur ou un producteur est celui dont la principale occupation est l'agriculture et qui en tire la majeure partie de son revenu? Est-ce que l'une ou l'autre de ces deux définitions ne serait pas plus réaliste?

M. ALLAIN: A priori, M. le Président, je n'en suis pas persuadé. Cela soulève en particulier un problème que vous avez vous-même mentionné à savoir celui des marginaux. Supposons qu'il y ait une définition qui établisse que seront rejoints par cette loi-ci seulement ceux qui retirent 25 p.c. ou 50 p.c. de leurs revenus de la vente des produits agricoles. A ce mo- ment-là, vous allez sectionner une réalité, un monde agricole où vous avez une série d'individus, certains vendant très peu, d'autres vendant beaucoup. Vous allez automatiquement les sectionner. Et, une certaine partie d'entre eux ne seront pas rejoints par cette loi-ci et ce seront forcément les marginaux, le problème que vous-même avez soulevé.

La meilleure façon, si on veut que le sort des marginaux soit considéré dans la discussion des politiques agricoles, c'est qu'ils appartiennent à la loi, qu'ils soient protégés par la loi. Pourrait se poser le problème, à savoir s'il y aurait une injustice à leur endroit; eh bien, ici, il s'agit' d'une cotisation de $15 et, pour ce montant-là, l'association sera tenue de respecter autant le sort de ceux-là que le sort des plus gros. Je pense que là on peut y trouver un avantage en réponse à un problème que vous avez vous-même posé.

Est-ce qu'il peut y avoir, par contre, à l'autre extrême, des gens qui sont, selon la loi, des producteurs agricoles mais qui effectivement ont d'autres activités?

Bien là, je pense que la loi y pourvoit par une disposition, pour qu'il y ait possibilité d'exemption. Je ne sais pas si c'est l'article 46 ou l'article 50. Cela permettrait sans doute de disposer de certains cas où des gens ne voudraient pas, pour des raisons que la loi explique ici, être sous la juridiction de la présente loi. Mais, encore une fois, on pense qu'il faut être pratique dans les circonstances et qu'à vouloir préciser énormément on se compliquerait l'existence.

M. VINCENT: M. le Président, nous reviendrons sur cette question. J'avais également d'autres questions à poser à M. Allain. Il mentionne la Régie des marchés agricoles; il dit par exemple à la page 3, paragraphe 7: "Cela apparaît évidemment assez curieux à première vue". Il continue: "N'empêche cependant que les responsabilités qui lui sont confiées sont sur certains points trop larges, ce sur quoi nous reviendrons".

Quelles sont ces responsabilités? Il soulignait, à ce moment-là, seulement les responsabilités confiées à la régie pour pouvoir accréditer une association, par voie de référendum.

M. ALLAIN: Ce n'est pas forcément celles-là, disons d'une façon globale...

M. VINCENT: J'aimerais qu'on explique plus cette réticence à voir la Régie des marchés agricoles faire un travail assez complet en ce qui concerne la Loi du syndicalisme agricole.

M. ALLAIN: D'accord. M. le Président, nous admettons que le législateur va pourvoir à une disposition à savoir que quelqu'un et sous sa surveillance, au nom du gouvernement, va exercer la surveillance de la loi. Cela, d'une façon générale, nous l'admettons. La Loi des

syndicats professionnels, c'était le Secrétaire de la province — je ne sais pas si son titre est changé maintenant — ici ce serait la régie. Maintenant, on fait une première distinction. En ce qui concerne la surveillance par la régie des actions qui vont intervenir entre l'association accréditée et les fédérations spécialisées, nous reconnaissons qu'à ce poste-là la régie exerce une surveillance, parce que les fédérations spécialisées administrent des plans conjoints et, de ce fait, émanent dans une certaine mesure de la Loi des marchés agricoles.

Alors, qu'à ce chapitre-là, à ce poste-là, la régie ait des droits de surveillance plus poussée, nous convenons que c'est normal, que c'est défendable. Cependant, pour prendre un exemple, quand il s'agit de l'augmentation de la cotisation où quand il s'agit tout simplement de l'autre section de la loi, le syndicalisme général, où il est question de la cotisation individuelle, nous ne trouvons aucun précédent dans l'histoire du syndicalisme où on subordonne l'exercice, par exemple, du droit de se cotiser à une régie. Alors, nous estimons, en particulier dans ce cas-là, que comme dans tous les autres syndicats le syndicalisme agricole pourrait, par le truchement de ses assemblées générales et en particulier de l'assemblée générale dite congrès général, disposer de cette question de cotisation, comme il faisait par le passé, sauf que ça pourrait être soumis pour ratification. Alors là on limite effectivement les pouvoirs de la régie, parce que selon la loi elle devrait faire tenir un référendum.

Nous croyons que ce n'est pas fondé et nous ne voyons aucun précédent qui autoriserait dans une certaine mesure à nous imposer une telle discipline, une telle rigueur. Alors c'est un peu comme ça qu'on se situe par rapport aux pouvoirs de la régie.

M.VINCENT: M. le Président, avant de poser des questions sur les ou le référendum, est-ce que le président général de l'UCC pourrait nous dire d'après lui, avec ses conseillers, combien de temps devrait s'écouler entre le vote en troisième lecture de cette loi et la fabrication des listes de producteurs, dans tout le territoire de la province pour pouvoir procéder à un référendum?

M. Morin nous a mentionné que cela pouvait prendre un an, d'autres nous ont dit que ce ne serait peut-être même pas suffisant. M. Allain pourrait-il nous dire combien il faut de temps pour fabriquer cette liste de producteurs?

M. ALLAIN: Il est clair, M. le Président, que fabriquer une liste à la satisfaction de tout le monde...

M. VINCENT: Avec tous les délais...

M. ALLAIN: ...c'est un défi en soi. La loi ne nous attribue pas cette fonction-là, elle l'attribue à la régie. Les seules expériences dont on dispose, ce sont celles des plans conjoints. A ce moment-là, on pourrait peut-être référer au temps qu'il a fallu mettre pour faire la liste des producteurs de lait industriel, celle des producteurs de lait nature, celle des autres producteurs.

On pourrait peut-être référer aussi au degré de satisfaction des parties, suite à la construction de ces listes-là, et se faire une idée sur le temps requis. Il est clair que c'est un défi, on le reconnaît. Nous, cela ne fera certainement pas notre affaire que cela s'étende sur un an. Nous serions extrêmement malheureux s'il fallait que la régie prenne un an pour faire les listes. Nous serions extrêmement malheureux.

Nous croyons qu'il faudrait nécessairement que le travail soit accéléré, qu'ils disposent des effectifs nécessaires, ce qui ne devrait pas empêcher les vérifications nécessaires, aussi.

M. VINCENT: Est-ce que je pourrais faire une parenthèse et demander au ministre, qui a présenté le projet de loi, combien de temps il croit qu'il faille pour fabriquer une telle liste?

M. TOUPIN: Vous y tenez énormément?

M. VINCENT: Tout cela est préliminaire... Pardon?

M. TOUPIN: Vous tenez énormément à ce que l'on définisse le temps en termes de jours et de mois?

M. VINCENT: Bien, tout cela est préliminaire à la tenue d'un référendum et rien ne sert d'adopter une belle loi...

M. TOUPIN: Je ne pense pas...

M. VINCENT: ...si, par la suite, il faut attendre un an, un an et demi ou deux ans avant que la liste soit prête.

M. TOUPIN: ...qu'il faille attacher autant d'importance à cet aspect de la question. Evidemment, dresser des listes, ce n'est pas toujours facile, et c'est peut-être plus difficile dans le secteur agricole que dans les autres secteurs.

Tout ce que je puis dire, c'est que telle que je connais la Régie des marchés agricoles du Québec, elle prendra le temps qu'il faudra pour dresser des listes qui soient le plus conformes possible à la réalité.

M. VINCENT: Je n'ai pas terminé, M. le Président.

M. DEMERS: Cela ne donne pas le délai.

M. VINCENT: Cela ne donne certainement pas le délai. Je pense bien que l'UCC, la coopérative et les autres organismes qui sont ici, si, par la suite de l'adoption de la législation, on

leur apporte ce problème de fabrication de listes et qu'il faille attendre un an, un an et demi ou deux ans et qu'on leur dise: La législation, vous l'avez, mais il faut fabriquer les listes, à ce moment-là, cela enlève tout ce qui est dans la législation, parce que, avant de procéder à un référendum, c'est la fabrication des listes.

M. TOUPIN: Le député de Nicolet comprendra bien qu'entre deux ans et une période normale, il y a quand même de la place pour des gens sérieux qui s'attellent à la tâche et qui tentent de bâtir une liste qui soit le plus conforme possible à la réalité. Je pense qu'il y a une différence entre l'excès de deux ans et la possibilité d'un mois.

M. DEMERS: Vous n'auriez pas le moyen, dans les bureaux régionaux des agronomes, de faire l'inventaire? Il me semble qu'ils les ont sur place. Cela ne devrait pas être aussi compliqué que cela.

M. TOUPIN: Déjà le député de Saint-Maurice nous met sur la voie possible d'un instrument technique.

M. DEMERS: Il me semble que, dans les bureaux régionaux de chaque district, il y aurait moyen, il doit y avoir un inventaire à jour des possibilités agricoles de la région, et cela devrait pouvoir se sortir dans un délai assez raisonnable, il me semble. Je ne vois pas de problème à confectionner une liste.

M. TOUPIN: Moi non plus.

M. DEMERS: Prenez les cultivateurs de la région de la Mauricie. Si l'on n'a pas les effectifs au bureau de Saint-Louis-de-France, qu'on le ferme, cela ne sert à rien d'en avoir un. Cela devrait être comme cela un peu partout dans la province.

M. TOUPIN: Je suis entièrement d'accord avec le député de Saint-Maurice là-dessus. Je pense que nous avons le même point de vue.

M. DEMERS: Il y aurait un sujet que je voudrais...

M. VINCENT: Pour ce qui concerne les listes, d'accord, il n'y a pas de problème pour autant que le travail est commencé. Est-ce que le ministre peut nous dire si le travail est commencé? Je voudrais simplement souligner ceci au président de l'UCC...

M. VAILLANCOURT: La loi n'est pas passée.

M. VINCENT: Non, la loi n'est pas passée, mais est-ce que le travail préliminaire est commencé? N'oubliez pas qu'on a adopté une loi pour légaliser la vente du cidre au mois de décembre l'an dernier; il y aura un an bientôt et il n'y a pas encore de permis d'émis.

UNE VOIX: Personne n'en veut.

M. VINCENT: Je ne sais pas quand les permis seront émis. On se promène à travers la province en disant qu'on a la plus belle loi sur le cidre, sur la vente et la fabrication. On n'a pas encore de permis d'émis. Cela c'est un problème. On peut bien avoir une loi du syndicalisme agricole dans les statuts, il n'y a pas de liste, pas de référendum, pas d'accréditation. L'UCC et les autres organismes peuvent se promener pendant des années et des années, on va leur chanter qu'il y a une belle loi, mais il n'y aura pas de référendum, il n'y aura pas de vote. On aide continuellement le député de Rouville et son cidre...

M. OSTIGUY: C'est un peu en dehors du sujet...

M. VINCENT: Egalement... M. DEMERS: C'est enivrant...

M. VINCENT: C'est enivrant, peut-être en dehors du sujet, mais c'est un exemple de la difficulté qu'il y a quelquefois à adopter une loi et, par la suite, à l'appliquer.

C'est pour ça que je mentionnais qu'il faut quand même avoir un mécanisme souple qui va permettre, en donnant la loi d'espérer que dans les six mois suivants une suite logique lui soit donnée et non pas faire comme pour le cidre, attendre un an, deux ans pour émettre un permis. Il n'y a pas encore un seul permis.

M. OSTIGUY: Vous avez fait attendre les cultivateurs 30 ans.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. VINCENT: M. le Président, une autre question au président général de l'UCC. Au paragraphe 11, page 6 de son mémoire, je crois que le président général de l'UCC souligne quelque chose de très important, et comme le président général de l'UCC a la parole facile, je vais lui donner l'occasion d'expliciter davantage ce qu'il mentionne là, soit le fameux bulletin de vote à deux volets. Je pense bien que le président général de l'UCC souligne un problème encore très important de la loi actuelle. Deuxièmement, dans le même paragraphe 11...

M. DEMERS: Quelle page?

M. VINCENT: Page 6. Au sujet des référendums, concernant le prélevé des cotisations, on demande deux votes sur le même bulletin et, en plus de cela, il souligne qu'il faut que le choix se fasse d'une façon claire et précise sur la

question posée. Il y a des expériences dans d'autres endroits qui ont permis justement de mêler les questions. Je pense bien que le président général de l'UCC devrait expliquer davantage ce paragraphe il pourra nous éclairer et apporter d'autres arguments également. Je sais qu'il en a dans son sac des arguments.

M. ALLAIN: M. le Président, voici le raisonnement que nous avons fait en regard de l'article 13 de la loi qui prévoit effectivement les moyens d'obtenir l'accréditation, d'une part, et le droit de cotiser à la source.

La façon dont est rédigé l'article nous laisse perplexe en ce sens qu'on s'attend à être mis en présence d'un vote avec un bulletin, deux questions. Au départ, cela nous pose un problème.

Pour ce qui est de l'accréditation, nous sommes d'opinion qu'il est possible d'en disposer de façon beaucoup plus simple. La régie pourrait, à la demande de l'association qui vise l'accréditation, faire l'examen de sa représentativité de la façon qu'elle l'entendra. Si la régie vient à la conclusion que, devant la preuve qui lui est faite, l'organisation qui demande l'accréditation est effectivement représentative des cultivateurs, des producteurs, à ce moment-là, elle pourrait décerner l'accréditation.

Le premier problème serait réglé. Je vais signaler tout de suite qu'au sujet de l'accréditation, il y a un autre raisonnement qui est tenu chez les producteurs, chez les membres. C'est le suivant: c'est qu'au fond, quand on lit la loi, l'accréditation en tant que telle ne change pas beaucoup le statut que l'UCC a déjà. C'est que déjà on lui permet de présenter des mémoires, on l'écoute, elle fait des représentations. Elle a une reconnaissance, si vous voulez, de facto.

A cause de ça surtout, mais acceptant que l'économie de la loi veut qu'il y en ait une, on dit: Au moins, simplifiez la formule et soumettez-nous au test de la représentativité en faisant des vérifications d'usage.

Cependant, il peut arriver que l'organisation qui fait la demande ne démontre pas à la satisfaction de la régie sa représentativité. Si tel était le cas, on dit: Bien, à ce moment-là, référez le tout à un référendum qui est expliqué ici, à b) de l'article 13, et qui donne le pouvoir de cotiser à la source. Soumettez l'organisation à ce référendum-là, et, si l'organisation obtient la majorité requise, automatiquement, cela tiendra lieu d'accréditation.

Donc, deux possibilités d'être accrédité: une première en faisant la preuve devant la régie à sa satisfaction. Si ça ne fonctionne pas, eh bien, que la régie réfère le tout à un référendum. De cette façon, on aurait disposé d'un article qui, actuellement, nous place, nous, dans une situation très ambiguë.

M. VINCNET: M. le Président, également je voudrais que M. Allain — d'ailleurs, je connais assez son opinion là-dessus — explique un peu plus la question du maximum de cotisation, le fait qu'on revienne en référendum pour le . maximum des cotisations. Je pense que c'est un autre secteur très important dans la loi que, si un référendum était favorable à une contribution à la source, on accepte le montant de $15. Mais si l'assemblée générale, par le choix de ses délégués — vous proposez les deux tiers de ses délégués — vote une augmentation de $2 de cotisation annuelle, à ce moment, la loi vous obligerait, si elle était votée comme telle, à retourner en référendum devant tous les producteurs de la province pour faire accepter les $2 additionnels. Je pense que c'est un point très important dans la loi actuelle. J'aimerais que le président général de l'UCC s'explique davantage avant que nous nous prononcions sur cet article de la loi.

M. ALLAIN: M. le Président, les principes mis à part — je les ai soulevés tout à l'heure — considérant que c'était un droit excessif qu'on accordait à la régie de contenir comme elle l'entendrait ce pouvoir de cotiser, il y a certainement dans cette disposition un élément qui nous conduirait vers une bureaucratie excessive. S'il fallait, chaque fois qu'on veut modifier le montant de la cotisation, bâtir une liste de producteurs, tenir un référendum, on pense que ce serait excessif comme volume de travail. C'est une raison bien pratique. Cela nous exposerait à beaucoup de perte de temps.

L'expérience de l'augmentation d'une cotisation, nous l'avons acquise à travers les années et ça reste dans le syndicalisme une opération très fragile. Assez récemment, il y a une couple d'années, je pense, nous sommes passés de $10 à $15. Avant d'en disposer, cette question a été débattue dans toutes les régions pendant une année dans des journées d'études et des rencontres et, finalement, dans les congrès régionaux. La même question est revenue au congrès général et, de mémoire, cela a pris une demi-journée pour en disposer au vote.

La question de la cotisation reste quelque chose d'important, mais nous estimons que les délégués aux différents paliers sont en mesure d'en disposer et ils ont les assemblées générales et les règles des assemblées générales pour le faire. L'expérience prouve qu'ils ont été capables d'en disposer et jamais à la légère. Alors, pour cette raison, nous estimons qu'il est pensable qu'on continue de procéder de cette façon-là.

Par mesure de précaution, nous proposons même les deux tiers pour rassurer le législateur et nous acceptons aussi qu'une décision du congrès général ou de l'assemblée générale soit référée à la régie pour fins de ratification. Tout cela, naturellement, pour éviter un référendum à chaque fois.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Dans le même ordre d'idées, est-ce que je pourrais poser une question?

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Dans tous les syndicats, naturellement, il y a une cotisation et la cotisation est toujours décidée par les membres en assemblée générale. Je suis entièrement d'accord sur les arguments du président de l'UCC. Je ne verrais pas pourquoi on ferait une exception pour le syndicalisme agricole. Je suis d'accord aussi quand on dit que cela serait très onéreux et qu'on s'embarquerait dans un processus de référendums qui arriveraient fréquemment pour décider si on diminue la cotisation ou si on l'augmente. Il est rare qu'on la diminue dans les syndicats, mais il reste une chose. Dans tous les syndicats où j'ai milité, il n'est pas obligatoire que les deux tiers des membres assistent à l'assemblée pour décider d'une cotisation, mais il est obligatoire que les deux tiers des membres qui sont présents votent pour une cotisation pour autant que les membres sont convoqués soit par écrit ou par des convocations, en somme, qui sont légales.

Il y a un certain quorum à observer, cela est aussi décidé par un syndicat. Cela prend 10 p.c, 15 p.c. ou 20 p.c. des membres. Il faut que les deux tiers soient d'accord, mais on n'exige même pas la présence des deux tiers des membres. Cela fait au-delà de vingt ans que je milite dans le syndicalisme et je n'ai jamais vu un syndicat faire un référendum pour augmenter la cotisation. Cela s'est toujours fait en assemblée. Je suis entièrement d'accord avec l'UCC quand elle demande que le problème de la cotisation soit décidé en assemblée générale, mais je serais d'accord que ce soit toujours accepté à la condition qu'il y ait les deux tiers des membres présents qui soient pour si c'est pour demander une augmentation. Je ne verrais pas pourquoi il y aurait une exception pour vous quand on ne le fait pas ailleurs. Cela créerait des problèmes. Je suis d'accord sur ce que vous dites là-dessus.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. VINCENT: J'aurais également une question à poser à M. Allain.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Maurice.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que je peux continuer à poser mes questions ou si... Je disais que c'était dans les cotisations...

M. DEMERS: Qui va poser les questions?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Sur les cotisations, j'aurais seulement une autre remarque. Dans le premier mémoire que vous aviez présenté aux députés — je l'ai reçu, mais je ne me souviens pas de la date, c'est daté du 26 août 1971... ce n'est pas celui-là, c'est l'autre, mais en tout cas — on disait: "Enfin, l'UCC, en dehors du mode de perception de la cotisation syndicale, reconnaît qu'il peut y avoir deux genres de cotisation syndicale: une cotisation annuelle fixe ou une cotisation à l'unité de produit variable selon le volume de la production".

Est-ce que vous avez rejeté complètement cette possibilité d'une cotisation variable suivant le volume de production ou si...?

M. ALLAIN: Oui, la question est importante. En fait, on ne l'a pas retenue. Est-ce que nous le regretterons plus tard? Je ne le sais pas. En tout cas, le raisonnement est le suivant: Du point de vue des apports d'argent, il y a deux sources. Il y a celle venant des membres individuels, spécifiée dans la loi, de $15. Elle est fixe, elle resterait telle quelle.

Il y a une autre source d'apports d'argent, qui est celle des fédérations spécialisées. Celle-là, effectivement, va être variable parce que, selon le volume de production d'une fédération, il y a plus ou moins de prélevé. Donc, réflexion faite, cette deuxième source d'apports a pour effet d'équilibrer en quelque sorte la participation financière des individus, des producteurs à l'organisation, compte tenu que, d'abord il y en a une qui est fixe pour tout le monde, pas de différence, mais que l'autre est forcément variable parce qu'ils payent en fonction du volume de production.

On pense que ça fait quand même un équilibre entre le petit producteur et le plus gros quant à sa participation financière à la vie de l'organisation. Réflexion faite, on a dit: On va vivre avec ça.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'aurais d'autres questions, mais c'est dans un autre ordre d'idées. Alors, si vous voulez y aller...

M. DEMERS: M. le Président, est-ce que M. Allain pourrait me dire à qui sera chargé la cotisation dans les cas d'intégration verticale où il y a une participation de compagnies et où le cultivateur ou le producteur, tel que défini ici, si on prend au pied de la lettre la définition du producteur? En fait, la compagnie est souvent propriétaire et des animaux et des aliments qui nourrissent ces animaux. Est-ce qu'on enverra la cotisation, la demande de la retenue syndicale à la compagnie ou à l'individu qui est payé au prorata des productions qu'il fait?

M. ALLAIN: Je ne suis pas persuadé que je répondrai à votre satisfaction mais il reste que...

M. DEMERS: Je voudrais avoir votre opinion. Vous avez peut-être un problème?

M. ALLAIN: Oui, et il est assez compliqué mais nous pensons que le producteur qui travaille à contrat au fond, qui a un contrat

avec un intégrateur, au sens de la loi, est couvert, parce qu'il loue des moyens de production: terrains, bâtiments et autre matériel. Il est couvert, il est également dans la Loi des marchés agricoles. Le problème qui peut surgir est celui de l'intégrateur, qui est à la fois un producteur, un transformateur et possiblement une personne qui est dans le commerce. Si on comprend bien la loi, dans la mesure où on la comprend bien, on croit qu'il y a une disposition qui permettrait à cette personne-là, au cas où elle ne voudrait pas être cotisée, d'en appeler à la régie et la régie pourrait statuer sur son cas et tout simplement l'exempter.

A nos yeux, ça nous apparaît une soupape de sécurité moyenne ou raisonnable dans les circonstances.

M. DEMERS: Vous exempteriez l'intégrateur?

M. ALLAIN: Pas nous.

M. DEMERS: Non, mais la loi.

M. ALLAIN: La loi, on pense...

M. DEMERS: On vous demande votre opinion.

M. ALLAIN: Oui, nous sommes bien d'avis que si une personne est engagée et dans la production et dans la transformation et dans la mise en marché du produit, et que, dans son opinion, elle ne doit pas être cotisée, eh bien, qu'elle en soit exemptée à titre individuel; c'est raisonnable qu'elle le soit. Exemple, quelqu'un qui fait, je ne sais pas, moi, disons 150,000 livres de volaille, qui a des abattoirs, qui fait de la mise en marché, c'est clair que s'il le demande, à ce moment-là, je ne crois pas que nous y ferons objection.

M. DEMERS: Au sujet des référendums, M. Allain. Lorsqu'une association reçoit une accréditation, est-ce que vous êtes d'avis, vous ou les conseillers du ministère ou tous ceux qui ont élaboré la loi, qu'automatiquement cela donne droit au privilège de prélever une cotisation?

M. ALLAIN: Je ne saisis pas bien la question, M. le Président;

M. DEMERS: Lorsque, par exemple, un syndicat reçoit une accréditation, est-ce qu'automatiquement il a le pouvoir de percevoir une cotisation, légalement, au point de vue syndical?

M. ALLAIN: Dites-vous dans notre opinion à nous?

M. DEMERS: Je demande si les fonctionnaires du ministère ici, les conseillers juridiques et vous, êtes d'avis que le syndicat a le pouvoir automatiquement de percevoir une Cotisation parce qu'il a reçu une accréditation?

M. ALLAIN: Non. Nous ne soutenons pas cette thèse-là.

M. DEMERS : Je demande ça aux conseillers juridiques.

M. TOUPIN: C'est que l'accréditation, comme telle, ...

M. DEMERS: Ne donne pas le pouvoir de la cotisation.

M. TOUPIN: ... ne donne pas le droit de prélever obligatoirement une cotisation.

M. DEMERS: D'après la loi du code du travail.

M. TOUPIN: C'est ça!

M. DEMERS: Même dans la Loi des marchés agricoles.

M. TOUPIN: Pour être bien clair, l'accréditation seule, telle qu'elle est définie dans le projet de loi actuel, ne donne pas le droit de percevoir, ou l'obligation pour un producteur de payer une cotisation.

M. DEMERS: Pourquoi ne l'intégreriez-vous pas pour faire disparaître un référendum?

M. TOUPIN: Elle ne donne pas ce droit pour le moment.

M. DEMERS: Pourquoi ne compléteriez-vous pas la loi en ce sens que l'accréditation donnerait automatiquement le droit de faire une perception? Cela enlèverait sur le bulletin une autre question. Cela prend un référendum double, et c'est là que l'embêtement est allé, tantôt. C'est une suggestion que je fais.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose sur la...

M. DEMERS: Allez donc! Vous avez connu ça!

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... l'opinion du ministre. Dès que...

M. DEMERS: Parlez plus fort il va vous comprendre.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'aimerais qu'il m'écoute.

M. DEMERS: Ah! il va vous entendre.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Voici, je ne suis pas tout à fait d'accord. Peut-être que j'ai

mal compris vos explications. Quand un syndicat est accrédité, c'est parce qu'il a la majorité des membres, soit 50 p.c. et plus, et l'accréditation donne automatiquement le droit au syndicat de prélever des cotisations. Cela n'oblige pas tous les membres. Il y a des formules, la formule Rand etc., les ateliers fermés.

M. DEMERS: Cela, c'est dans le code du travail.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui.

M. DEMERS: Mais ici, il y a une distinction.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je parle du monde syndical. Je ne parle pas du projet de loi parce que le projet de loi, tel qu'il est fait actuellement, ne crée pas l'obligation de payer des cotisations. Mais je parle des syndicats, le code du travail...

M. DEMERS: La formule Rand.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, selon la formule Rand, tout le monde est obligé de payer, même s'il n'adhère pas au syndicat. Mais dès que vous êtes accrédité, c'est parce que vous avez la majorité des membres de la manufacture X qui ont signé des cartes, et automatiquement ça donne le droit au syndicat de prélever des cotisations à la source. Votre confrère de droite a de l'expérience là-dedans et je pense qu'il va dire encore la même chose que moi.

M. DEMERS: On n'aurait qu'à l'ajouter à la loi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si on peut amender la loi dans ce sens...

M. DEMERS: C'est une suggestion que je fais, je me demande si elle est applicable. Je ne suis pas un spécialiste dans cette affaire.

M. TOUPIN: Il n'est même pas nécessaire, d'ailleurs, qu'un syndicat soit accrédité pour prélever une cotisation. La Loi des syndicats professionnels lui donne ce droit d'exiger une cotisation.

M. DEMERS: Je comprends.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Un autre nécanisme.

M. TOUPIN: L'accrédition vient simplement confirmer une sorte de caractère représentatif d'une association. En vertu de ce caractère représentatif, elle peut cotiser, comme elle pouvait le faire avant qu'elle soit accréditée. Reste, après, ce qu'on appelle communément la formule Rand, c'est-à-dire l'obligation pour tout producteur de payer. Cela, c'est une troisième étape qui est prévue dans le projet de loi, bien sûr, mais qui n'est pas nécessairement inhérente à la notion d'accréditation.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Il y a aussi la formule de l'atelier fermé; il faut que l'employé fasse partie du syndicat pour travailler. Alors, si on faisait ça ici, celui qui ne voudrait pas payer serait obligé de vendre sa terre, puis d'aller travailler ailleurs.

M. DEMERS: Cela serait assez fort. Vous devriez essayer de proposer ça.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne le propose pas; ça n'aurait pas de sens dans la loi actuelle.

M. BELAND: M. le Président, j'aurais une question également à poser à M. Allain. Etant donné qu'à mon sens — je pense que vous devez avoir à peu près la même opinion que moi — toutes les méthodes de mise en marché, retenues de cotisations de différentes façons doivent faire suite à un pouvoir de décision venant des membres, est-ce que le présent projet de loi n'accorderait pas un peu trop de pouvoirs de décision à la régie?

M. ALLAIN: Oui, c'est ce que j'ai tenté d'exposer tout à l'heure pour ce qui est de la volonté des membres de se cotiser. L'expérience du syndicalisme tout court nous démontre qu'on a laissé cette chose-là au jugement des personnes concernées. Elles ont, pour en disposer, les moyens habituels, celui de l'assemblée générale de leur organisation, et elles disposent finalement de cette question-là au vote, de la majorité ou, disons, des deux tiers.

Alors, cette chose-là étant normale, étant reconnue des gens, on ne voit pas pourquoi on insérerait dans cette loi un précédent. On n'en voit pas la nécessité et on se demande même quelle implication cela aurait sur le syndicalisme tout court. Pour cette raison-là, on dit: Laissons cette responsabilité-là aux membres et puisque, auparavant, dans de tels cas, on soumettait la chose au Secrétaire de la province pour fins de ratification, à l'avenir, puisque c'est la régie qui a cette responsabilité, nous soumettrons cette décision-là pour ratification à la régie. Autrement dit, on demande le statu quo dans cette question de cotisation concernant les membres.

M. BELAND: On peut prendre également tout l'ensemble sous un autre angle. Est-ce que vous prétendez, présentement, avec ce bill, qu'il reste suffisamment de choses à être décidées par les agriculteurs pour qu'il vaille la peine, réellement, de l'étudier?

M. ALLAIN: A partir des pouvoirs que la loi accorde?

M. BELAND: Je vais reformuler ma ques-

tion. D'après votre étude du bill, est-ce qu'il reste suffisamment de pouvoirs de décision aux agriculteurs pour qu'il vaille la peine d'accepter le bill ou tel ou tel article dans le bill?

M. ALLAIN : Nous pensons que oui. Même si, au chapitre des pouvoirs, il n'y a pas de choses extraordinaires, au fond, et que déjà on remplit certaines fonctions, je pense que les deux différences sont qu'ici, par un texte de loi, le législateur dit: J'autorise une association accréditée, une seule, à parler pour et au nom des agriculteurs, pour autant qu'elle soit majoritaire et qu'elle ait rempli un certain nombre de conditions. Cela est nouveau.

L'autre: Je lui permets aussi de prélever une cotisation à la source, pour autant qu'un certain nombre de conditions sont remplies. Je pense que c'est nouveau. Il y a beaucoup d'autres tâches qui sont possibles par cette loi-ci et qui étaient possibles par la Loi des syndicats professionnels. Autrement dit, des représentations on en a toujours fait; voir à l'organisation du milieu agricole, on l'a toujours fait. Voir à fournir l'information, on l'a toujours fait dans une certaine mesure. Assurer la coordination entre les fédérations spécialisées, on le fait déjà, le texte le confirme.

La réponse est oui. Le texte de loi est un cadre général qui précise des fonctions qu'on remplissait déjà, qui les confirme et qui ajoute certaines précisions, notamment au chapitre de la représentativité et au chapitre du droit de cotiser à la source.

M. BELAND: Sous un autre angle, je vais vous poser une autre question: Etant donné que cela a donné suite à une espèce de petite mésentente, depuis combien d'années la Confédération de l'UCC a-t-elle demandé une loi pour reconnaître la profession?

M. ALLAIN: Ma mémoire peut faire défaut, c'est en 1965. L'historique a été fait ce matin par l'un de vos collègues et je pense qu'il est exact. Il est clair qu'il y a eu beaucoup de tâtonnements et de recherches. Au premier abord, ce qu'on a défendu ne semblait pas être admissible. On a cru bon de continuer nos recherches pour trouver une formule. En cours de route, la province de l'Ontario a, elle aussi, fait un essai et cela nous a quelque peu aidés pour préciser ce que pourrait être une loi pour le Québec.

Néanmoins, la demande que nous avons faite n'est pas celle que l'on retrouve ici. La demande que nous avons finalement formulée était celle de reconnaître, en corporation, une organisation agricole. Or, cette proposition-ci est différente. On nous a exposé que ce cadre permettait plus de libertés, respectait mieux la dimension syndicale, etc. Nous l'avons accepté. Là-dessus, nous n'avons pas été chatouilleux et nous avons cru que cela pouvait correspondre, en acceptant les quelques amendements que nous vous suggérons, aux besoins du milieu agricole actuel.

M. BELAND: Une dernière question: Est-ce que d'après vous, compte tenu de votre assez vaste expérience du domaine agricole, il est plus important de reconnaître le syndicat des agriculteurs ou la profession des agriculteurs?

M. ALLAIN: Franchement, en soi, je n'ai pas de commentaire à faire. Ecoutez, pour simplifier les choses, on dit: Partons de réalités, partons de ce qui existe. Au bout de 47 ans d'histoire et d'expériences, les cultivateurs du Québec ont fabriqué de leurs mains et de leur intelligence un modèle donné. Ce qu'il s'agit de faire, c'est de le compléter. Là, on tient beaucoup plus compte de l'expérience des aînés, de leur apport et des structures qui se sont modelées avec le temps, avec les difficultés, avec les frictions, etc. Alors, on est rendu à un point donné et notre tendance est de demander aux législateurs: Confirmez donc ce qui existe, ce qui a été fait avec les mains, l'intelligence des hommes, et ajoutez-y des points essentiels pour que cela fonctionne mieux. On essaie de simplifier la chose, parce que, si vous nous posez le problème de profession, il est fort probable qu'on va retomber dans une discussion qui sera très théorique, je le crains du moins. A moins que je ne saisisse pas bien le point.

M. BELAND: C'est tout simplement ceci: dans d'autres domaines, il existe la reconnaissance de la profession et, dans d'autres domaines également, il existe la reconnaissance du syndicat X, etc. Il y a donc quand même une nuance très forte entre les deux. C'était pour avoir tout simplement votre idée au sujet des deux allées et pour savoir dans laquelle il était préférable de s'aventurer pour les agriculteurs. C'était tout simplement dans ce sens-là.

M. ALLAIN: On pense bien que l'avenir aussi, avec un moyen comme celui-là, qui peut être modifié, amélioré, va façonner, aider à façonner, avec d'autres influences, remarquez bien, un type de professionnel. Mais je pense qu'on est mieux de laisser faire la vie de tous les jours, les épreuves de tous les jours et, au bout de la route, probablement, il y aura un professionnel peut-être plus caractérisé qu'il ne l'est à l'heure actuelle. Mais on aime autant travailler avec des réalités et voir à les façonner en cours de route que de dire: Le professionnel de l'agriculture, c'est quelque chose de très théorique, il rentre dans telle définition et, en dehors de cela, il n'y a pas de salut. On pense que ce serait une voie qui serait pleine d'embûches et de difficultés.

M. BELAND: Alors, c'est tout pour mes observations, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Nicolet.

M. VINCENT: M. le Président, j'aimerais poser une question au président général de l'UCC. En vertu des plans conjoints, quel est le barème ou le pourcentage de votes requis pour qu'un plan conjoint soit voté, accepté?

M. ALLAIN: 50 p.c. des producteurs sur la liste...

M. VINCENT: ... des producteurs...

M. ALLAIN: ... et les 2/3 favorables. Est-ce que c'est ça?

M. VINCENT: Oui, c'est ça. Le président général de l'UCC, dans son mémoire, page 7, article 13, paragraphe b), fait une suggestion pour changer les pourcentages qui sont indiqués dans le bill. Est-ce que le président général de l'UCC peut nous dire pourquoi il ne s'est pas basé — je pose simplement la question — sur les mêmes pourcentages qu'on demande pour le vote d'un plan conjoint?

M. ALLAIN: Quelques arguments, d'abord pour ce qui est du nombre des producteurs inscrits sur la liste. Premier point d'appui: ce qui prévaut dans le cas des plans conjoints. Dans le cas des plans conjoints, on demande que 50 p.c. se prononcent. Pourquoi une différence? C'est une première question.

Une deuxième: Dans le cas de l'Ontario, quand le gouvernement de l'Ontario a offert à ses producteurs agricoles une loi d'organisation générale de l'agriculture, il n'y avait pas de pourcentage requis. Mais ça, c'est en Ontario, c 'est dans une province, tenons-nous-en, si vous voulez, à ce qui existe dans le cas des plans conjoints, 50 p.c. seulement sont requis et ça, c'est la pratique ici au Québec.

Maintenant, quant à savoir si le nombre de ceux qui se prononcent favorablement doit être de 66, de 60 ou de 50 p.c. plus 1, ici nous nous basons sur les exigences habituelles faites au syndicalisme. Si nous allons dans une usine ou dans un chantier, les exigences posées à l'association qui voudrait être accréditée, c'est de recruter au moins 50 p.c. plus 1 des travailleurs et d'en faire la preuve.

Alors, on se sert de cet autre raisonnement pour justifier le deuxième pourcentage. Relativement au premier, je pense qu'il faut dire aussi, on l'a relaté d'ailleurs au début, que faire une liste reste quand même un défi en soi et que la régie, à moins de mettre beaucoup de temps, probablement retiendra des noms qui ne sont pas forcément ceux des producteurs en permanence et on s'attend à être mis en présence d'une liste très volumineuse. Cela, on n'en serait pas prévenu et on se dit: Obliger un très fort pourcentage de votes dans une liste qui vaudra peut-être ce qu'elle vaudra, eh bien, pourquoi? D'autant plus qu'il y a des risques plus grands, là, d'exiger 60 p.c. au lieu de 50 p.c. C'est un argument en rapport avec le premier pourcentage, celui du nombre de votes à exiger par rapport à la liste.

M. VINCENT: M. le Président, je suis content d'entendre le président général de l'UCC qui nous a même donné, avant même que la liste ne soit fabriquée, certains doutes sur la validité ou sur la confection parfaite de la liste. Le ministre tout à l'heure nous disait que ce n'était pas un problème fabriquer une liste. D'après moi, c'est un problème.

M. ALLAIN: Bien, selon la façon dont on la fabrique, ce n'est pas un problème, je ne sais pas.

M. VINCENT: Il faut qu'elle soit bien faite.

M. ALLAIN: Ecoutez, il y a des recours possibles au plan conjoint pour certaines productions, mais il y a effectivement des productions qui, je pense, poseront des problèmes d'identification.

M. VINCENT: Maintenant, M. le Président, une liste parfaite, la définition la plus parfaite possible du mot "producteur", les délais normaux les plus courts, tout ça prévu, combien peut-il en coûter à l'organisation professionnelle de l'UCC, pour organiser un tel référendum et pour faire la publicité autour d'un tel référendum, sans compter l'argent que le ministère ou le gouvernement devra dépenser pour l'organisation d'un référendum?

M. ALLAIN: M. le Président, je n'ai pas d'idée arrêtée sur le sujet. D'abord, l'organisation n'est pas riche. A cause de cela, elle ne pourra pas dépenser beaucoup d'argent. Ce qui arrive dans de telles circonstances, c'est qu'au lieu de faire autre chose on fait cela. Alors, au lieu de discuter d'aménagement, de discuter de consolidation des fermes, de tenir des réunions d'information sur d'autres sujets, on devra faire cela. Ce qui arrive dans la vie d'une organisation quand un problème comme celui-là se pose, c'est qu'elle doit arrêter un travail régulier pour faire un travail particulier. Je pense que c'est un peu comme cela que le problème va se poser chez nous. Selon, naturellement, les conditions plus ou moins difficiles qui nous seront posées, cela prendra plus ou moins de temps, plus ou moins d'efforts et, pendant qu'on fera cela, on ne s'occupera pas directement des problèmes agricoles. Je pense que c'est un peu comme cela que je perçois la situation à compter du moment où on nous mettra en face d'un référendum.

M. VINCENT: M. le Président, dans l'opinion de l'UCC, par la voix de son président, si la loi était votée en troisième lecture en novembre

ou en décembre, quelle serait la limite idéale pour que le référendum soit tenu?

M. ALLAIN: M. le Président, je pense qu'à la fin de l'année 1971 ou début de l'année 1972 l'organisation serait certainement prête à se consulter elle-même.

M. VINCENT: Fin de l'année 1971! Il faut, quand même être réaliste. Nous retournons en session le 26 octobre. Je pense qu'il y a également d'autres ministres qui ont quelques lois à présenter. Cela veut dire que la Loi du syndicalisme agricole pourrait être votée en deuxième lecture au mois de novembre ou de décembre et être sanctionnée à la fin de décembre. A ce moment-là, c'est la fin de l'année 1971. Quel serait, d'après vous, le délai réaliste pour que le référendum soit tenu, les listes fabriquées et la loi en vigueur?

M. ALLAIN: M. le Président, je réponds à partir de notre perception à nous de ce qui serait raisonnable. J'exprime simplement que le législateur et ensuite la régie, quant à nous, répondraient favorablement à notre attente en disposant de cette question à la fin de 1971 ou au début de 1972. Vous savez qu'attendre, pour nous, c'est une habitude qu'on a de la difficulté à adopter. Attendre et attendre!

M. VINCENT: C'est probablement la raison pour laquelle j'en arrive à la page 8 de votre mémoire au sous-paragraphe c, où vous vous opposez à l'article 16 de la loi qui prévoit un délai de deux ans pour la reprise d'un référendum. Vous mentionnez vous-même qu'il est très difficile de faire une liste, une révision de liste et que cela coûte assez cher. A ce moment-là, vous êtes dans l'obligation de faire seulement cela et de laisser de côté l'aménagement rural, l'aménagement agricole, d'autres travaux.

Advenant que le vote ne soit pas favorable, si la loi ne prévoit pas un délai de deux ans — je pose tout simplement la question, je ne me prononce pas sur cette question de deux ans — comment peut-on imaginer qu'à tous les six mois ou à chaque année il y ait des référendums et que l'UCC concentre tous ses efforts sur ces questions de référendums, dépense de l'argent? Le gouvernement également?

A ce moment-là, on ne ferait pas d'autres travaux qui sont attendus par les cultivateurs. Est-ce que cette objection à l'article 16 dans votre mémoire est un sine qua non? Est-ce que c'est réellement très sérieux? Je sais que c'est sérieux mais est-ce que c'est plus que sérieux?

M. ALLAIN: M. le Président, on y attache une certaine importance parce que c'est quand même un corset. Si notre information est juste, on n'a pas cru bon de prendre de telles mesures vis-à-vis des autres organisations qui se servent du syndicalisme. En disant deux ans, il se peut très bien qu'avant la période de deux ans ce soit pratique, ce soit raisonnable de faire un nouveau référendum.

Je fais une hypothèse, c'est qu'il y a un échec, pour une raison ou pour une autre qui ne me vient pas à l'idée dans le moment, et...

M. VINCENT: On a eu un échec pour la mise en marché du porc.

M. ALLAIN: C'est un cas, et peut-être la liste était-elle discutable, dans mon hypothèse à moi. Ou bien, est-ce que certaines précautions n'ont pas été prises, que quelque chose de technique a fait défaut et que, sur le fond, le référendum aurait dû être gagné? Il se peut qu'avec des mesures additionnelles minimes on reprenne la question dans les six mois et qu'on en dispose au lieu d'attendre deux ans.

Ensuite, dire deux ans ou dire un an, certains de nos membres nous ont dit: C'est nous obliger vis-à-vis de l'adversaire — quoique ce soient des arguments secondaires, je pense — à dire quand on reviendra.

M. VINCENT: Donc, M. le Président, en définitive l'UCC tiendrait à ce que cet article 16 soit biffé de la loi.

M. ALLAIN: Oui, on n'en voit pas l'utilité et on ne pense pas non plus qu'une organisation qui se veut responsable fera exprès de créer une diversion vis-à-vis de la régie pour avoir référendum sur référemdum parce qu'il lui en coûterait si elle n'est pas sérieuse avec elle-même. On ne pense pas qu'il y ait de préjudices possibles vis-à-vis de la régie. Une telle entreprise, avant de l'envisager, il faut bien y penser. On ne pense pas qu'à partir de nous ou de tout autre groupe dans le futur il y ait un recours exagéré au référendum. On ne va pas au référendum pour rien ou s'il n'y a pas de chances raisonnables de succès.

Par contre, il se peut, pour des raisons techniques, à première vue, secondaires, qu'un référendum soit manqué. Alors, pourquoi ne pas faciliter une reprise si on peut faire échec à certains obstacles dans un temps plutôt court?

M. VINCENT: M. le Président, je voudrais terminer en mentionnant le paragraphe d) de l'article 13 de votre mémoire qui est très sérieux et dont, à mon sens, la commission parlementaire devra tenir compte très sérieusement avant de voter la loi. Egalement, je crois que le paragraphe 14 est très à point. A ce moment-ci, je n'ai pas l'intention d'en dire plus mais, si le président général de l'UCC a d'autres commentaires à faire sur ces deux paragraphes... Je pense qu'ils sont très bien formulés et qu'il faudra nécessairement que le législateur accepte d'en analyser les implications qui sont justes.

M. ALLAIN: M. le Président, autant nous sommes d'accord avec le principe qui émane de cette loi, autant nous serions extrêmement

malheureux, comme organisation, s'il n'y avait pas des amendements qui, au fond, je pense, ne modifient pas le fond de la loi, mais qui la rendent pratique, qui la rendent fonctionnelle qui ne nous plongent pas dans des difficultés majeures soit pour l'obtention, soit pour l'utilisation de la loi. Il ne nous vient pas à l'idée que le législateur veuille nous donner une loi qu'il serait difficile à administrer. On lui prête l'autre intention, celle de nous donner une loi fonctionnelle et pratique. Les amendements que nous proposons sont dans ce sens.

M. VINCENT: M. le Président, je termime immédiatement en remerciant le président général de l'UCC. Comme d'autres mémoires nous seront présentés soit par la Coopérative fédérée ou par d'autres organismes, je pense bien que la direction de l'UCC va se tenir à la disposition de la commission au cas où nous aurions à revenir sur des questions particulières.

M. ALLAIN: Oui, M. le Président.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): A l'article 14, M. Allain, seriez-vous d'accord que le pourcentage exigé, qui est de 60 p.c. soit réduit?

M. ALLAIN: Oui, oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous êtes d'accord pour qu'il soit réduit à 50 p.c. plus 1, c'est-à-dire à la majorité simple? A l'article 14.

M. ALLAIN: L'article 14 de la loi ou du mémoire?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): De la loi. M. ALLAIN: De la loi. La réponse est oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je pense que ce serait normal. Quand vous examinez la loi dans son ensemble et tout le processus de référendum, si c'est appliqué, je pense que vous allez être obligés de tripler vos cotisations pour que les membres puissent absorber toutes les dépenses que cela va occasionner.

M. ALLAIN: C'est clair.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): A ce moment-là, ils ne seront peut-être pas intéressés à adhérer au syndicat. Pour ma part, j'aurai une foule d'amendements à proposer quand cela va arriver en comité plénier à l'Assemblée nationale.

Maintenant, juste quelques questions, ce sont surtout des statistiques. Peut-être que vous ne pourrez pas me donner une réponse précise, mais, actuellement, combien y a-t-il de membres dans l'UCC?

M. ALLAIN: Le dernier recrutement rapportait environ 39,000 membres. Je ne peux pas le dire exactement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On sait qu'en vertu de la loi presque tous les travailleurs forestiers ont été exclus.

M. ALLAIN: Oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): D'après vous, quel est, à peu près, le nombre de membres qui vont être exclus de la loi parce qu'actuellement les travailleurs forestiers sont inclus dans ce chiffre de 39,000, n'est-ce pas?

M. ALLAIN: Je pense que, théoriquement, c'est 5,000 ou 6,000 membres, sauf qu'il faut mettre des nuances ici aussi. Je m'excuse, mais il arrive ceci dans certaines régions, Rimouski, en particulier, a un apport à l'UCC par le truchement de membres forestiers.

Or, ces mêmes personnes sont propriétaires de lots boisés. Alors, au point de vue comptable, en supposant qu'on en fasse la déduction, parce qu'ils seront travailleurs forestiers, il n'est pas impossible qu'ils réapparaissent quand même sur les listes, parce qu'ils sont aussi propriétaires de boisés de ferme. Alors, cela c'est très relatif, les chiffres relatifs aux travailleurs forestiers, sauf que certains d'entre eux sont devenus des professionnels de la forêt et sont typiquement des ouvriers forestiers.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci. Maintenant, à combien évaluez-vous le nombre de producteurs qui seraient habilités à voter selon la définition du mot "producteur" qu'on donne dans la loi ici? Avez-vous fait des recherches là-dessus, quel en est le nombre approximatif?

M. ALLAIN: Les statistiques — les dernières que j'ai vues — rapportaient 72,000. C'était selon le recensement fédéral. Maintenant, il est fort probable que ce ne soit plus valable et que ça diminue au rythme de 3,000 à 4,000 par année. Alors, il faudrait savoir de quand date le chiffre de 72,000, il remonte à quelques années.

M. VINCENT: Oui, mais, M. le Président, quant à ses 72,000 du recensement fédéral, à ce moment-là, on employait la définition de toute personne qui vend plus de $50 de produits agricoles dans un an?

M. ALLAIN: C'est ça.

M. VINCENT: Alors, le député de Sainte-Marie est inclus là-dedans.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, je vends pour $2.75 à peu près de pommes par année.

M. DEMERS: Vous êtes un bon producteur.

M. ALLAIN: Je pourrais peut-être vous donner une autre référence; les producteurs qui sont régis par les plans conjoints. A l'heure actuelle, on estime que le lait industriel a 35,000 producteurs, le lait nature, 5,700. Ce

sont là des productions majeures. Quand vous prenez trois autres productions qui sont très importantes, le porc, la volaille et les oeufs, vous avez là un certain nombre de producteurs qui ne font que ces productions spécialisées, ils sont très peu nombreux et vous en trouverez beaucoup qui sont aussi à la fois producteurs laitiers.

Alors, passé le cap de 50,000, je pense que le nombre de cultivateurs de bonne foi, disons de l'agriculture, est certainement très faible.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Maintenant, une dernière question. On sait que l'UCC avait dernièrement, c'est-à-dire au printemps je crois, commencé des négociations avec la Quebec Farmers Association — vous excuserez ma prononciation anglaise — mais où en sont rendues les négociations avec cet organisme? Est-ce que ç'a abouti à quelque chose?

M. ALLAIN: Pas actuellement. Cela fait plusieurs années qu'il y a eu des rencontres avec les parties et depuis plusieurs années, les uns et les autres ont cherché des moyens de travailleur ensemble dans une même organisation. Actuellement ils se voient, mais ils ne sont pas dans une même organisation.

Avant la présentation de la loi, je pense, il y a eu une rencontre à la demande des fermiers de langue anglaise et nous avons examiné diverses possibilités de travailler ensemble. A l'issue des discussions, nous leur avons offert de formuler eux-mêmes divers choix possibles. Ils nous ont remis un document; le document en question, nous l'avons examiné au dernier conseil général de l'UCC. Ils seraient portés à choisir la formule de l'intégration, mais ils réclameraient en contre partie certains privilèges quant à la représentation. Une première analyse nous porte à conclure sommairement — pas définitivement — que l'intégration est certainement une voie possible. Mais des privilèges quant à la représentation, notre organisation n'a jamais été habituée à de telles choses.

Néanmoins, les cultivateurs de langue anglaise ont accédé à des postes de direction déjà, soit un précédent dans le cas du porc, il y a aussi des précédents dans le cas des fédérations régionales. Nous sommes portés à croire que s'il y avait intégration, les cultivateurs de langue anglaise pourraient accéder aux postes de direction.

Il y a possiblement une autre voie pour un fonctionnement qui soit pratique, c'est que le groupe constitue une organisation plus autonome. Cela aurait probablement certains avantages et peut-être aussi certains inconvénients. En tout cas, à l'heure actuelle on cherche quel serait le meilleur moyen d'assurer aux cultivateurs de langue anglaise la représentation et surtout — c'est important — les services.

Nous devons les rencontrer demain à nouveau au collège Macdonald et continuer les discussions relativement à cette question-là.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Maintenant, une autre question très courte. Actuellement, je crois que les membres de l'UCC paient $15 par année.

M. ALLAIN: Actuellement, c'est $15.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Advenant l'application de la Loi du syndicalisme agricole, avez-vous envisagé la possibilité de diminuer cette cotisation?

M. ALLAIN: Je ne crois pas.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous n'êtes pas obligé d'ouvrir votre jeu.

M. ALLAIN: Je vais vous répondre, vous me posez la question. La cotisation de $15 a été décidée par suite de consultations dans le champ et suite à un vote à l'assemblée où il y avait trois chiffres de mis de l'avant: $12, $15 et $20.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est l'assemblée...

M. ALLAIN: Oui, la majorité des voix a décidé les $15 et cela remonte à deux ans.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci.

M. LE PRESIDENT: Alors, c'est tout pour les questions, messieurs?

M. VINCENT: C'est tout pour M. Allain; est-ce que l'on pourrait poser des questions au ministre?

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. VINCENT: Quelles sont les associations ou groupements qui doivent présenter des mémoires au cours de la prochaine réunion?

Mémoires à venir

M. TOUPIN: La Compagnie du marché central métropolitain, le Conseil de l'alimentation du Québec, la Coopérative fédérée du Québec, l'Association professionnelle des meuniers du Québec et l'Association des jardiniers maraî-chers.

M. VINCENT: On n'a pas de mémoire du Quebec Farmers Association? On en a justement parlé, il y aura une rencontre éventuelle demain avec l'UCC. Il n'y en a pas, ils n'ont pas donné d'avis...

M. DEMERS: Cela viendra peut-être après. M. VINCENT: Il y en aura peut-être après.

M. CROISETIERE: Peut-être après la rencontre.

M. LE PRESIDENT: Nous vous remercions beaucoup, M. Allain, pour votre gentillesse répondant à toutes nos questions.

M. BELAND: M. le Président, jusqu'à quelle date limite allez-vous accepter, par exemple, que quelqu'un ou qu'une association quelconque vienne présenter un mémoire?

M. LE PRESIDENT: Bien, si la demande est adressée au ministre, sans doute que ce sera ajouté à la liste et nous les entendrons.

M. BELAND: Mais au sujet de la date limite, la semaine prochaine ou...

M. TOUPIN: Bien, nous avons une autre séance qui est prévue pour le 2 septembre, jeudi prochain, à dix heures. A la suite de cette deuxième réunion de la commission, si nous jugeons à propos de réunir la commission une troisième fois, nous verrons à ce moment-là.

M. BELAND: D'accord.

M. VINCENT: La commission est maître de son destin.

M. DEMERS: Maîtresse! M. VINCENT: Maîtresse. M. TOUPIN: C'est ça.

M. VINCENT: Il n'y a pas de date limite. Toute personne, tout organisme qui veut soumettre un mémoire est le bienvenu.

M. LE PRESIDENT: La commission ajourne ses travaux à jeudi prochain.

M. DEMERS: A quelle heure, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: A dix heures, le matin.

(Fin de la séance: 12 h 58)

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