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Version finale

29th Legislature, 3rd Session
(March 7, 1972 au March 14, 1973)

Thursday, May 4, 1972 - Vol. 12 N° 16

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Projet de loi no 64 — Loi du syndicalisme agricole


Journal des débats

 

Commission permanente de l'Agriculture et de la Colonisation

Projet de loi no 64 Loi du syndicalisme agricole

Séance du jeudi 4 mai 1972

(Dix heures onze minutes)

M. GIASSON (président de la commission-permanente de l'agriculture et de la colonisation): A l'ordre, messieurs!

Selon une motion de la Chambre, la commission parlementaire de l'agriculture se réunit ce matin pour revoir certains articles du projet de loi no 64 intitulé: Loi du syndicalisme agricole.

Selon une récente coutume, il est de mise qu'à chaque réunion d'une commission parlementaire un rapporteur soit désigné et accepté par les membres d'une commission. On m'a fait une suggestion avant l'ouverture de la séance pour désigner M. Marcel Ostiguy, député de Rouville, qui pourrait agir comme rapporteur de cette commission. Est-ce qu'il y a consensus des membres de la commission pour accepter M. Ostiguy, le roi du cidre?

M. VINCENT: Sans aucune qualification ou sans aucun qualificatif, nous acceptons.

M. BELAND: A la condition que ce ne soit pas cidre.

M. DEMERS: Le rois des rapporteurs.

M. HARDY: Si j'étais membre de la commission je m'abstiendrais, mais je ne le suis pas.

M. LE PRESIDENT: Avec l'autorisation de tous les membres, si vous avez un commentaire valable, nous pourrions l'entendre.

M. TOUPIN: M. le Président, cela ne me fait rien qu'on ne lui donne pas ce qualificatif compte tenu qu'il a les qualifications.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est parfait. Pour autant que ce n'est pas le député des Iles-de-la-Madeleine, je n'ai pas d'objection.

M. LACROIX: La suggestion vient de vous, elle n'est pas si mauvaise.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, je pense que nous pourrions entendre immédiatement le ministre de l'Agriculture. A ce qu'on me dit, il désire soumettre de légers amendements à la commission de l'Agriculture.

M. le ministre.

Modifications au projet de loi

M. TOUPIN: M. le Président, nous avons déjà discuté du projet de loi à plusieurs reprises, une fois notamment à la commission parlementaire. Certains avaient fait quelques restrictions et nous nous étions laissés en disant qu'à la troisième lecture les uns et les autres pourraient, s'ils le désiraient, faire des amendements s'ils jugeaient à propos d'en faire..

Nous avons étudié plus en profondeur le bill 64 et nous avons convenu, quant à nous du gouvernement, de proposer à la commission parlementaire trois amendements dont deux nous apparaissent plutôt mineurs et un autre qui a un caractère un peu plus important parce qu'il affecte, au fond, l'essence même de la loi telle que présentée originellement.

Le premier amendement qu'on apporterait serait celui de changer le titre de la loi. Je ne sais pas si nous pouvons appeler ça un amendement. Mais plutôt que de l'appeler la Loi du syndicalisme agricole cette loi porterait le nom: Loi des producteurs agricoles.

On se réfère pour cette appellation à presque tous les projets de loi des corporations professionnelles, comme par exemple la Loi du Barreau, la Loi du Collège des médecins, etc. Or, on a convenu de lui donner le nom de loi des producteurs agricoles.

Le deuxième amendement qu'on apporte se trouverait à l'article 15...

M. VINCENT: A l'article 14.

M. TOUPIN: A l'article 14 plutôt. Nous avions prévu dans le projet de loi originel ou original que tout référendum exige au moins 60 p.c. des producteurs qui se prévalent de leur droit de vote et que, sur les 60 p.c. il y en ait au moins 60 p.c. qui votent en faveur, c'est-à-dire qui votent oui. Ce pourcentage de 60 p.c. a été changé pour le pourcentage des deux tiers, c'est-à-dire qu'avec l'amendement que nous apportons, deux tiers des agriculteurs devront se prévaloir de leur droit de voté et, sur les deux tiers qui s'en prévaudront, il faudra deux autres tiers de oui pour que le référendum ait une valeur positive à l'égard de la loi.

Le troisième consiste à prolonger d'une année la durée de l'accréditation ou la durée de l'application de loi en ce qui a trait aux articles 8 et 9, c'est-à-dire la retenue syndicale obligatoire. Dans le projet de loi original, on avait parlé de deux années, on le prolonge d'une année.

Alors, M. le Président, comme je vous le mentionnais, il y a deux amendements que nous proposons, qui sont des amendements mineurs, soit celui du changement de nom et celui de la prolongation d'une année, et il y a celui qui a trait au référendum et au pourcentage qui touche les articles 14 et 15. Les raisons qui nous ont motivés à apporter cet amendement à ces deux articles-là sont les suivantes: c'est qu'en appliquant les 2/3 — 2/3 et en présumant que les agriculteurs s'en tiendront au niveau du vote seulement 2/3 — 2/3, ça donnerait à peu près 44 p.c. de oui en faveur de la loi. Nous

présumons qu'on va voter à 70 p.c. ou 72 p.c. et encore là, on n'arrivera pas à atteindre 50 p.c. de oui.

La seule raison qui nous amenés à apporter cet amendement, c'est une raison de représentativité qui se rapproche le plus possible du 50 p.c. de ceux qui approuveront le projet de loi et notamment les sections VIII et IX ayant droit à la retenue syndicale obligatoire.

Alors, voilà, M. le Président, ce sont les amendements que j'avais à proposer au bill 64.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. le ministre. L'honorable député de Nicolet.

M. VINCENT: M. le Président, en ce qui nous concerne, nous n'avons pris connaissance des amendements qu'il y a à peine cinq minutes, seulement avant que le ministre ne fasse son intervention. Vous comprendrez qu'il est assez difficile, à quelques minutes d'avis, de se prononcer de la façon la plus éclairée possible sur ces quatre amendements et j'aurais aimé, d'ailleurs je pense que je vais le suggérer à la fin, qu'après une courte discussion ce matin, nous puissions ajourner la commission afin de revenir et poser certaines questions concernant ces amendements.

Je remarque d'abord que le ministre mentionne que ce sont des amendements dont deux sont mineurs et deux autres majeurs. Eh bien, moi je considère que les autres amendements sont majeurs. D'abord le premier amendement change le titre de la loi. Le ministre dit : Est-ce qu'on peut appeler cela un amendement? Cela en est certainement un. Il y a au moins trois ans que l'on parle de la Loi du syndicalisme agricole et aujourd'hui, â quelques minutes d'avis, on nous arrive avec un amendement qui changerait le titre et qui nous amènerait la Loi des producteurs agricoles. La Loi des producteurs agricoles, est-ce que c'est mieux que ce soit ainsi pour se conformer à la nouvelle appellation de l'Union des producteurs agricoles? Je ne le sais pas. J'aimerais entendre, si cela était possible, les représentants de la classe agricole. Est-ce que cela signifie qu'il y aura une autre loi qui viendra amender la loi de mise en marché? Nous ne le savons pas non plus mais cela je reviendrai là-dessus. En ce qui concerne les articles 14, 15 et 16, cela devient sérieux.

A l'article 14 on dit qu'au moins les deux tiers des producteurs doivent se prévaloir de leur droit de vote. Tout de suite, je pourrais dire: Si on exigeait la même chose dans la région de Montréal pour l'élection d'un député, il n'y en aurait pas un qui serait élu, parce que les deux tiers... Pardon?

M. FRASER: Les cultivateurs s'intéressent aux affaires qui les concernent.

M. VINCENT: Non, mais je me pose simplement la question. On vient de lire l'amendement, on vient de lire les amendements.

Les deux tiers, cela veut dire que, hypothéti-quement, s'il y avait 60,000 producteurs agricoles au Québec, on exige qu'il y en ait au moins 40,000 qui se rendent voter, avant de commencer à faire le décompte. A l'article 15, on exige qu'il y ait au moins les deux tiers de ces 40,000 qui disent oui, pour que le syndicalisme agricole ou la cotisation devienne obligatoire, pour qu'on puisse prélever à la source la cotisation de $15. Il est bien clair que le bill 64 a comme principal objectif — en mettant de côté ce qu'on donne à l'organisation qui devra être accréditée, pouvoirs, devoirs et le reste — en dehors de cela, de permettre à la profession agricole de ne plus avoir à revenir chaque année faire du porte-à-porte, pour recueillir les cotisations des agriculteurs. C'est bien clair. Depuis 50 ans, les agriculteurs ou les organisations professionnelles des agriculteurs sont obligés, chaque année, de faire du porte-à-porte et dire: Est-ce que vous renouvelez votre contribution cette année? Même si on est certain que c'est oui, on est obligé d'aller chercher la contribution. Donc, c'est un financement qu'on veut assurer à l'organisation professionnelle agricole, en lui donnant certains devoirs et certains pouvoirs. Par ce financement, avec les articles 14, 15 et 16, en augmentant les critères ou les obligations pour la tenue du référendum, si le référendum était négatif, il faut hypothétique-ment y penser, parce que ça fait tellement longtemps qu'on en parle, je ne veux pas être prophète de malheur, mais avec ces nouvelles normes, il y a de grosses possibilités que le référendum soit négatif. On prévoit tout de suite à l'article 16 que si le référendum est négatif, ce n'est plus deux ans, c'est trois ans que la profession devra attendre pour reprendre le référendum.

Cela voudrait dire que, si le référendum se tient en juillet, en août ou en septembre, et que le référendum était négatif à cause de différents problèmes, n'oublions pas qu'un référendum au sujet du bill 64 ou de l'organisation professionnelle, quand les gens arriveront pour voter, ils ne voteront pas seulement pour l'objectif de la loi, ils voteront pour toutes sortes de raisons.

C'est bien dommage, mais c'est comme dans une élection. Ils vont voter pour toutes sortes de raisons parce qu'un tel, à telle réunion, n'a pas été élu président, il n'a pas été nommé secrétaire ou encore, il y a eu un petit problème municipal, provincial ou fédéral.

Si le référendum est négatif, on dit à l'article 16: Pendant trois ans, on sera encore dans l'obligation de faire du porte-à-porte et de ramasser des contributions de porte-à-porte. A ce moment-là, que va-t-il arriver? M. le Président, je vais terminer là-dessus, ce sont de nouveaux amendements d'importance majeure. On a entendu pendant trois ou quatre réunions les représentants des agriculteurs sur d'autres critères que ceux-là, c'est bien dommage, mais je pense qu'il va falloir entendre â nouveau les représentants des producteurs, les représentants

des coopératives, les représentants des organisations agricoles sur ces questions-là pour voir s'il est possible de tenir un référendum.

Deuxièmement, si le référendum était négatif, qu'on attende trois ans et que va t-il arriver? C'est pour ça que je vais demander qu'on ajourne là-dessus pour qu'on puisse y penser, pour qu'on puisse regarder ça. Et je vais profiter, encore une fois, de cette circonstance parce qu'en regardant ça, je me demande si nous ne serions pas mieux de revenir à une proposition que j'ai faite en septembre 1971.

Depuis ce temps-là, j'ai eu l'occasion d'en parler avec plusieurs agriculteurs dans différents coins de la province, et je voudrais qu'on comprenne la suggestion, je voudrais qu'on l'analyse sérieusement, non pas dans l'esprit que le référendum va être affirmatif mais dans un esprit objectif: quand le référendum aura eu lieu, c'est trois ans qu'il va falloir attendre.

Et si les agriculteurs sont obligés de continuer à faire du porte-à-porte, la profession agricole va s'en aller vous savez où. Il n'y en aura plus d'organisation agricole parce que ce n'est plus la mode en 1972, comme je l'ai dit au mois de septembre 1971. C'est pour ça que je reviens à la proposition d'origine que j'ai faite.

Elle était la suivante: Avant d'accepter ces amendements, qu'on regarde bien sérieusement cette proposition; pourquoi ne pas analyser et demander aux représentants des agriculteurs de nous dire ce qu'ils en pensent, publiquement, officiellement et non seulement officieusement. Qu'on prenne le bill 64 et qu'on dise ceci: A compter du 1er juin 1972, toute personne qui expédie ou qui vend pour plus de $1,000 de produits agricoles par année, est cotisable à la source pour un montant de $15. Le 1er juin 1972, tout le monde sera inclus dans la loi, cotisable à la source pour un montant de $15. Au même moment, qu'on dise que les fédérations pourront fournir jusqu'à 20 p.c. de leur contribution à l'organisation accréditée.

Deuxièmement, qu'on donne trois mois à toute personne qui ne veut pour aucune considération être cotisée à la source; qu'on lui donne trois mois pour se désengager mais elle devra le faire par une lettre écrite de sa main, signée devant témoin et qui parviendra à une personne désignée, disant: Pour telle et telle raison, je ne veux pour aucune considération être cotisé à la source. Signé: Clément Vincent; témoin: Omet Dionne. A ce moment-là, cette personne-là s'est désengagée; on lui donne trois mois pour le faire.

Sur les 60,000 agriculteurs, s'il y en a 10 p.c. qui se désengagent, je calcule que c'est à peu près le nombre maximum qui va le faire. Maintenant, dans la même loi, qu'on dise: Si une personne ou un agriculteur s'est désengagé, il pourra se rengager à n'importe quel moment et, lorsqu'il sera rengagé, c'est final, il demeure dans l'association tant et aussi longtemps qu'il sera agriculteur.

Chaque nouvel agriculteur qui arrive sur le marché est engagé. Par exemple, je sais que dans ma paroisse, sur 96 agriculteurs il y en a dix ou douze qui se sont désengagés.

Je peux faire mon recrutement parmi les dix ou douze et éviter de faire du recrutement chaque année parmi les quatre-vingt-seize. Et si parmi les dix ou douze qui se sont désengagés, je réussis à en rengager trois, quatre ou cinq la première année, en leur expliquant la procédure, en leur disant ce qu'ils recevront, cela permettra, sur une période maximale de deux ou trois ans, de voir presque la totalité des agriculteurs du Québec participer à l'organisation, suivant le titre de la nouvelle loi des producteurs agricoles.

C'est une suggestion qui, à mon sens, mérite d'être analysée. C'est un format qui a été essayé dans d'autres régions du Canada et du monde et, à ce moment-là, il y a eu quelques désengagements et on a permis le réengagement. Prenons un exemple: Que ce soit l'UPA ou un autre organisme qui n'a pas besoin de référendum pour se faire reconnaître. La Régie des marchés agricoles du Québec les reconnaît parce que, d'après elle, ils sont représentatifs du milieu rural. Ils sont reconnus. Par la suite, un responsable est désigné pour que tout le monde soit engagé. On ne définit pas le terme agriculteur ou producteur. On dit que toute personne qui vend $1,000 ou plus de produits agricoles est engagée et qu'elle a trois mois pour s'en aller — si elle veut s'en aller — mais avec des critères elle peut se réengager. L'UPA ou un autre organisme sait qui s'est désengagé et peut faire son recrutement. Et même plus, ce qui peut arriver, c'est qu'à l'intérieur des cadres d'une organisation professionnelle... Je prends ma paroisse comme exemple, sur 96 agriculteurs il y en a trois ou quatre malcommodes qui ne veulent pas pour aucune considération et qui s'abstiennent; on les laisse de côté. Autrement, on va avoir à faire face à ces nouveaux amendements. Je le dis en toute sincérité, je n'ai pas d'objection à ce qu'il y ait 70 p.c. ou 75 p.c. des agriculteurs qui votent, je le préférerais. Mais les députés sont au courant de ce qui se passe quand il y a un vote. Il y a toutes sortes de raisons pour lesquelles les gens ne votent pas. Prenons les élections provinciales: dans certains comtés, on vote à 45 p.c, à 50 p.c, à 55 p.c, à 60 p.c. et souvent, le type qui est élu à 40 p.c, 42 p.c., 45 p.c. du vote.

M. FRASER: Cela n'arrive pas dans les comtés ruraux.

M. VINCENT: Non, pas dans les comtés ruraux, mais dans certains comtés. Dans les comtés ruraux, c'est 80 p.c. du vote.

M. VEILLEUX: J'aurais une question à poser.

M. VINCENT: Excusez, je termine là-dessus en disant que, si on considère que ces nouveaux

amendements doivent empêcher ou rendre à peu près impossible une réponse affirmative au référendum, n'oubliez pas que l'amendement à l'article 16 dit qu'il faudra attendre trois ans, qu'il n'y aura pas d'organisation pendant trois ans pour que ce soit cotisable à la source... Pardon?

M. TOUPIN: Cela va.

M. VINCENT: Que, pendant trois ans, l'organisation de l'UCC sera obligée de faire du porte-à-porte. Je termine là-dessus en demandant sérieusement, sans partisanerie politique, non, farce à part, sans partisanerie politique...

M. LACROIX: C'est votre meilleure ce matin.

M. OSTIGUY: Dix heures trente, c'est l'heure.

M. VINCENT: Sans partisanerie politique, si on arrive au mois de septembre et si le référendum est négatif comme il a été négatif en Ontario, et pendant quatre ans ils devront continuer à faire ce qu'ils faisaient. Je vous demande ce qu'on va faire, nous, les députés. On va dire: II va falloir trouver une autre formule. Mais la loi va dire: Pour trois ans, rien à faire, on les laisse faire.

M. HARDY: On est mieux qu'en Ontario. M. VINCENT: Pardon?

M. HARDY: On est mieux que l'Ontario, trois ans au lieu de quatre.

M. VINCENT: Oui, mais on a déjà l'expérience de l'Ontario, pourquoi la subir ici?

M. VAILLANCOURT: C'est pour ça qu'on a mis trois ans.

M. VINCENT: Oui, mais trois ans...

M. LACROIX: Vous présumez que les cultivateurs ne sont pas intéressés.

M. VINCENT: Non, non, je ne présume pas, je fais simplement constater que si, hypothéti-quement le référendum était négatif, tout le monde était d'accord au mois de septembre l'an dernier qu'il fallait cesser d'exiger que les agriculteurs aillent faire du porte-à-porte pour recueillir les contributions. Dans ma paroisse de Sainte-Perpétue, c'est automatique, il y en a 85 ou 82 qui paient tout de suite; quand on va les voir, ils paient. Il y en a sept, huit, dix...

M. LACROIX: Ils sont de l'Union nationale.

M. VINCENT: ... qui ne paient pas, ils ne veulent pas payer. Mais, à un moment donné, qu'il arrive un référendum pour toutes sortes de raisons, le gars peut aussi bien aller voter négativement parce que le président de l'UCC, quand il a marié sa fille, ne l'a pas invité aux noces. Cela, ce sont des choses qui arrivent; ce n'est pas la majorité, mais un petit pourcentage, ça arrive.

M. HARDY: Les cultivateurs sont plus intelligents que ça.

M. VINCENT: Non, ce n'est pas une question d'intelligence, ces choses-là arrivent.

M. HARDY: En tant que fils de cultivateur, je m'inscris en faux contre les paroles du député de Nicolet. Les cultivateurs sont plus intelligents que ça.

M. VINCENT: La majorité, oui, mais c'est parce qu'ils sont intelligents.

M. DEMERS: C'est parce qu'ils sont intelligents qu'ils font ça.

M. VINCENT: M. le Président, je termine là-dessus. Après avoir entendu les députés qui font partie de la commission, et même ceux qui ne font pas partie de la commission, je demanderais, pour notre part, qu'on ajourne le travail de cette commission, qu'on revienne demain ou mardi, s'il le faut, qu'on ait au moins une séance pour entendre les gens de l'extérieur et qu'on prenne le temps, — chaque formation politique, chaque député — d'analyser sérieusement les implications de ces amendements. Je vous demanderais aussi d'analyser —je ne l'ai pas écrite, je ne l'ai pas mise sur papier — ma suggestion, qui pourrait quand même être joliment intéressante, si elle était acceptée par tout le monde. A ce moment-là, je pense qu'on organiserait une profession agricole sur une base bien réaliste et cela permettrait, avec les contributions des fédérations, avec les contributions des agriculteurs, de financer une organisation professionnelle. Merci, M. le Président.

M. VEILLEUX: J'aurais une question à poser au député de Nicolet...

M. VINCENT: Oui, excusez.

M. VEILLEUX: ... sur son intervention. Lorsque vous parlez de désengagement et d'engagement nouveau, à ce moment-là, l'engagement serait permanent.

Pourquoi une permanence après un deuxième engagement plutôt qu'au premier ou vice versa?

Pourquoi, dans votre esprit, si une personne s'est déjà engagée, qu'elle se désengage puis qu'elle se rengage, est-ce permanent et final, sans appel?

M. DEMERS: C'est comme dans le syndicat des professeurs à Saint-Jean.

M. VINCENT: Pour répondre au député de Saint-Jean...

M. VEILLEUX: On peut parler de ça au député de Saint-Maurice parce qu'il y a différents facteurs qui peuvent affecter à un certain moment. Et je suis content que le député de Saint-Maurice soulève le point, même si ce n'est pas du syndicalisme ici. La même chose peut se produire parce qu'un membre de l'association pose un geste dans le cadre de ses devoirs et de ses prérogatives, par exemple, en tant que membre de l'Assemblée nationale et, à un certain moment on le foute tout simplement à la porte parce qu'il a porté un jugement qu'il devait porter à ce moment-là.

Mais pourquoi, une deuxième fois, dans l'esprit du député de Nicolet, un engagement permanent?

M. VINCENT: M. le Président, pour répondre au député de Saint-Jean — je considère sa question plus que pertinente, elle va éclairer davantage cette suggestion que je fais — savoir pourquoi le désengagement et le réengagement d'une façon permanente, c'est que, dans la suggestion que je fais, il y aurait une loi de passée qui engagerait tout le monde sans exception, tout ceux qui vendent $1,000 et plus de produits agricoles. Sans référendum, tout le monde serait engagé; mais pour éviter le référendum, on dirait: dans les trois mois qui suivent le 1er juin 1972, on permet, vu qu'il n'y a pas de référendum à un agriculteur de se désengager par une lettre signée de sa main, devant témoin, pour lui laisser une certaine liberté vu qu'il n'y a pas de référendum. Mais, pour ne pas avoir à revenir sur cette question tous les ans, on dit dans la loi, que, lorsque cet agriculteur qui s'était désengagé se sera réengagé... Supposons, par exemple qu'un membre de l'association va le voir et lui dit: Ecoutez, M. Veilleux, vous vous êtes désengagé pour quelles raisons? Vous allez lui donner les raisons. Et là, je vais essayer de vous convaincre. Vous dites: C'est sensé, d'accord, je vais me rengager; $15 par année, ça vaut la peine d'aider mon syndicat ou ma profession. Là, M. Veilleux se rengage et, alors il ne faudrait pas que, l'année suivante vous vous désengagiez à nouveau pour avoir à vous rengager.

Ce sera, autrement dit, la liberté au début, pour éviter le référendum. Mais si M. Veilleux se rengage, il est alors engagé d'une façon permanente, comme si on avait eu un référendum.

M. VEILLEUX: Vous n'avez pas peur de l'obligation provoquée par une loi, c'est-à-dire l'obligation pour tous les agriculteurs du Québec de faire partie d'une association qui fait qu'au départ on enlève toute liberté à l'ensemble de la classe agricole de choisir l'association. Avec le projet de loi du ministre de l'Agriculture, présentement, il y a quand même une liberté qui est laissée à des groupes d'individus, par des rencontres personnelles avec les agriculteurs du Québec, de fonder une association et c'est celui des deux ou des trois qui a 50 p.c. plus un qui nécessairement a le plus de chances de représenter la classe agricole. Si, au départ, vous obligez tous les agriculteurs à appartenir à telle association, vous choisissez alors, au nom des agriculteurs, cette association. Vous enlevez leur liberté.

M. VINCENT: Simplement, on ne les oblige pas â appartenir à telle association. On les oblige, par une loi, à payer une contribution à la source de $15...

M. VEILLEUX: A qui?

M. VINCENT: ... à une association qui sera accréditée par la Régie des marchés. Cela peut être cette année, l'UPA, ça peut être dans trois ans, une autre association, mais le montant de $15 à la source est retenu et sera versé à une association éventuellement accréditée par la Régie des marchés agricoles.

N'oublions pas une chose que j'ai oublié de mentionner tout à l'heure, quand on parle des deux tiers au lieu de 60-60, pour la Loi des marchés agricoles, ce n'est pas cela, c'est 50 p.c. puis les deux tiers. Ce n'est pas 2/3 — 2/3, c'est 50 p.c. puis les deux tiers. 50 p.c. qui doivent voter et les deux tiers de ceux qui votent doivent voter oui. Mais je laisse cela vaguement comme cela et, si la commission accepte tout à l'heure, j'aimerais qu'on revienne, au moins pour une demi-journée, entendre les représentants des agriculteurs, et qu'on regarde la suggestion. On peut faire cela mardi, mercredi ou jeudi prochain.

M. VEILLEUX: Mais avec le deux tiers, je crois que l'association qui recevrait le vote des deux tiers tel que mentionné dans les amendements ici, ferait que l'association pourrait partir sur une base beaucoup plus solide que si on se contente d'un pourcentage beaucoup moindre ou peut-être par la démission ou le désengagement de quelques individus. Cela peut faire tomber l'association ou pas. Il y a ça aussi qu'il faut prendre en considération.

M. LE PRESIDENT: Avant de procéder aux commentaires des critiques agricoles, aux représentants des deux autres partis de l'Opposition, je donne la parole au ministre de l'Agriculture qui aurait quelques commentaires au sujet des propos du député de Nicolet.

M. TOUPIN: M. le Président, la proposition que fait le député de Nicolet à matin est, je dois l'avouer, un peu plus précise qu'elle ne l'était au moment où il en a fait mention, lors des premières réunions de la commission parlementaire pour le bill 64. La suggestion qu'il fait est un tout autre processus, est une nouvelle

méthode d'approche tout autre pour doter l'agriculture ou les agriculteurs d'une association professionnelle. On pourrait conclure, par exemple, si cette suggestion était agréée et appliquée, que si la majorité des producteurs après six ou sept mois décident de se désolidariser ou décident d'informer l'association qui aurait été accréditée de ne plus retenir leur cotisation syndicale, on débouche sur un cul-de-sac.

M. VINCENT: M. le Président, est-ce que vous me permettrez tout de suite, j'ai parlé toujours de trois mois. Après cela il n'est plus question...

M. TOUPIN: Evidemment que la période soit de trois, de six ou de huit mois, au cours de cette période-là les agriculteurs peuvent se désengager et, s'ils se désengagent majoritairement, on débouche sur un cul-de-sac.

Au fond ce que le député de Nicolet propose, c'est un référendum à rebours, c'est un référendum à l'envers. Il impose la loi et il dit aux gars: Etes-vous d'accord ou pas? Si vous êtes d'accord ne parlez pas. Si vous n'êtes pas d'accord dites-le. Si vous le dites, dites-le à telle association que nous avons accréditée. Oui, l'association que la loi...

M. VINCENT: Une personne désignée.

M. TOUPIN: ... ou à une personne désignée.

M. VINCENT: Parce que l'association est éventuellement désignée par la Régie des marchés agricoles.

M. TOUPIN: Prenons la Régie des marchés agricoles du Québec qui, elle, serait désignée pour recevoir les noms de ceux qui décideraient de se désengager. Or, c'est purement et simplement un référendum à rebours, à l'envers et qui débouche sur un cul-de-sac. Il ne peut pas déboucher ailleurs que cela, si vous poussez jusqu'au bout ce raisonnement-là. Je pense que les formules que nous avons utilisées partout pour des consultations populaires n'ont jamais été des formules à l'envers, ont toujours été des formules à l'endroit.

On ne leur demande pas d'être négatifs lorsqu'on propose quelque chose à des gens, on leur demande d'être positifs. On ne leur dit pas: Dites-nous non. On leur demande de dire oui et on leur demande en même temps de dire non s'ils ne sont pas d'accord, mais c'est un non positif, parce que ça leur donne l'occasion de se prononcer pour un oui ou pour un non, alors que, dans la proposition faite, ça nous apparaît être purement et simplement une acceptation négative de la part de l'agriculteur. Si les non sont majoritaires, on débouche sur un cul-de-sac et on ne sait plus vraiment où la loi va déboucher. Cela veut dire qu'il faudrait prévoir un autre délai pour permettre encore une fois aux agriculteurs de se prononcer jusqu'à ce que la personne désignée ou l'institution désignée aura constaté qu'après le délai prévu, la majorité des agriculteurs sont d'accord. Il faudrait prévoir un ensemble de délais si on ne veut pas déboucher sur un cul-de-sac. Si vous prévoyez un ensemble de délais, ça devient presque plus ou moins l'anarchie. Comment l'association qui sera accréditée va arriver, elle, à maintenir une cotisation auprès de celui qui a décidé de rester engagé? L'autre, il s'est désengagé, mais il a été vu et il s'est rengagé. Un autre s'est désengagé de nouveau pendant ce temps-là, il faut aller le rengager et cela, toujours dans des périodes de trois ou quatre mois.

M. VINCENT: Ce n'est pas cela.

M. TOUPIN: Alors, c'est une véritable toile d'araignée, on va se prendre là-dedans et on ne saura vraiment pas comment s'en sortir. C'est un référendum à rebours que le député de Nicolet propose. Lorsqu'il a fait cette première proposition, j'avais été fortement réticent, pas tellement pour les raisons que je viens de mentionner, mais parce que je n'avais pas saisi le fond de sa proposition. Ce matin, il l'a donnée un peu plus clairement — d'ailleurs, j'en avais entendu parler un peu avant aujourd'hui — et ça m'a permis de regarder comment le problème se posait de ce côté. Tous ses articles du bill 64 sont acceptés en principe, sauf trois. L'article 4 en particulier, parce que l'article 16 devra être modifié un peu aussi. Les modifications à apporter à l'article 16 ne sont pas complètes. Il y a trois ou quatre articles où l'on demande d'apporter des amendements et certaines précisions. Alors, on est d'accord sur tous les autres articles, sauf ces quelques articles dont deux sont de nature plus ou moins technique. L'essentiel, c'est le référendum 66 p.c-66 p.c. J'ai dit tantôt pourquoi on avait proposé les 66 p.c-66 p.c. et j'y tiens. Nous avons prévu dans le projet de loi une consultation populaire positive. Nous avons défini un agriculteur. Tous ceux qui vendent pour plus de $1,000 seront sur les listes. Les dernières statistiques fédérales — je ne sais pas si elles sont officielles, mais elles sont tout au moins officieuses — disont que...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous m'excuserez, M. le ministre, à propos d'une question de règlement, j'aurais une simple suggestion. Est-ce qu'il n'aurait pas été mieux d'entendre les représentants des autres partis, pour donner notre opinion sur les amendements apportés par le ministre et, après cela, faire vos commentaires ou vos observations?

M. TOUPIN: Si j'ai demandé au président de me laisser la parole, c'est que, au sujet de la suggestion qu'a faite le député de Nicolet — ça fait deux fois qu'il y revient — je voulais tout de suite, avant que les autres ne se prononcent,

donner mon point de vue, pour que vous ayez l'occasion d'analyser les deux aspects de la question.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): D'accord.

M. TOUPIN: Alors, ce que nous proposons, c'est beaucoup plus positif, nous définissons le producteur et nous faisons une consultation véritable.

Elle n'est pas à rebours, elle est claire, comme on le fait pour un plan conjoint, comme on le fait pour toute autre organisation qui désire se faire accréditer pour telle ou telle fin, et c'est une consultation positive.

Le nombre des agriculteurs, d'après la liste officieuse du gouvernement fédéral, pour $50 et plus, serait d'environ 60,300 ou 60,500 pour l'année 1971. Si nous prenons le critère de $1,000, nous ramenons ce nombre à environ 54,000 ou 55,000. Supposons un maximum de 55,000. On présume que ça va diminuer un peu avec les nouvelles statistiques fédérales que nous venons de connaître. Peut-être arriverons-nous à 52,000 ou 53,000, ce qui va faire qu'à peu près 30,000 à 35,000 producteurs seront appelés à voter, à se prononcer.

Evidemment, nous avons une bonne majorité, c'est 66 p.c. Sur ce pourcentage de 66 p.c, ça va donner à peu près 43 p.c. ou 44 p.c. des agriculteurs qui auront dit oui. Là, nous aurons une consultation qui sera représentative à presque 6 p.c. de la majorité absolue, qui est de 50 p.c. Il ne faut pas oublier que cette loi n'est pas une loi de mise en marché, n'est pas une loi de commercialisation des produits agricoles. C'est une loi d'organisation professionnelle, c'est une loi qui dote la profession d'un mécanisme nouveau pour le prélèvement obligatoire de la cotisation.

Il nous apparaît logique, il nous apparaît normal que nous étendions le plus possible la consultation en vue d'être assurés que la majorité des producteurs, ou tout au moins un nombre se rapprochant le plus possible de la majorité, donnent leur appui au projet de loi. Il est clair, il est précis. Il y a un référendum, le référendum passe, l'affaire est dans le sac, tout le monde doit être cotisé.

Cela, c'est clair, c'est précis dans notre esprit. Le référendum ne passe pas, il y a un délai prévu pour recommencer le référendum. On a prévu trois ans. Idéalement, c'eût été peut-être un an ou deux ans, mais si une consultation, après un an, n'a pas réussi, est-ce qu'elle réussira plus après un an? Est-ce qu'elle réussira plus après deux ans?

Nous avons donné tout le délai qu'il faut pour donner l'occasion à l'association accréditée de repenser ses formules, de repenser ses méthodes et de consulter à nouveau. Il ne faut pas oublier non plus que ces trois ans s'appliquent également de l'autre côté. Une fois que le référendum est accepté, si une autre association veut se faire accréditer, elle ne pourra pas le faire à l'intérieur d'un autre délai que celui prévu dans la loi, c'est-à-dire trois ans.

Donc, l'association accréditée aura trois ans pour son accréditation, elle pourra prélever pendant trois années, en toute sécurité, les cotisations syndicales de ses membres et ainsi elle pourra administrer convenablement l'association professionnelle. Je ne pense pas, M. le Président, que nous devrions retourner encore une fois au début, consulter à nouveau, reprendre au fond tout le processus, parce que les agriculteurs ont eu l'occasion de faire valoir leur point de vue.

Le secteur coopératif a eu l'occasion de faire valoir son point de vue, les producteurs maraf-chers sont venus, l'Association des épiciers en gros est venue ou tout au moins l'Association des meuniers est venue, etc. Nous avons entendu les parties et je ne pense pas que ce soit nécessaire que nous les entendions à nouveau.

Ce qui est important pour nous de la commission, ce matin, c'est que nous dotions dans le plus bref délai les agriculteurs d'une loi.

Elle comporte certaines exigences et certaines restrictions mais elle comporte aussi des avantages sérieux et des avantages certains dont une couple que j'aimerais mentionner.

C'est que nous créons tout au moins, dans le secteur agricole, une seule organisation. Nous favorisons une seule association par le projet de loi 64. C'est un point d'acquis qui est extrêmement important. Un deuxième point, c'est que nous avons tenté de joindre à l'association professionnelle toutes les organisations de mise en marché afin qu'il y ait là une collaboration de tous les producteurs, en ce qui a trait à presque toutes les activités de l'agriculture: la mise en marché, la défense des intérêts généraux de la profession.

M. le Président, à venir jusqu'à maintenant, nous avons atteint des stades, nous avons gagné des points sur lesquels tout le monde était d'accord et je ne verrais pas pourquoi on prendrait toute cette discussion.

M. VINCENT: Non, M. le Président...

M. TOUPIN: Je ne vois pas pourquoi nous reviendrions encore...

M. VINCENT: ... sur ça seulement.

M. TOUPIN: ... sur toute la question des fédérations spécialisées, sur toute la question des prélevés au plan conjoint, sur la différence qu'il y a entre un système de commercialisation et le bill 64...

M. VINCENT: Sur les quatre amendements seulement.

M. TOUPIN: ... nous allons déborder, si nous recommençons le processus. Le député de Nicolet a assez d'expérience au niveau des commissions parlementaires pour savoir que

nous allons assurément déborder le cadre des amendements et que nous allons presque automatiquement retomber dans toute la question du bill 64, repartir à zéro, retarder son adoption de deux, trois, quatre ou cinq mois, peut-être même d'un an.

Personnellement, je préférerais qu'on adopte la loi dans le plus bref délai et qu'on tente l'expérience avec cette loi-là. Toutes les lois sont perfectibles; aucune d'entre elles n'est parfaite. Si le référendum passe, nous sommes tous convaincus que nous aurons au moins presque 50 p.c. d'appui des agriculteurs et après — une loi, c'est toujours révisé au gouvernement — ce n'est pas impossible de repenser une loi et d'y apporter des amendements. Combien de fois avons-nous apporté des amendements à la Loi de mise en marché en vue...

M. VINCENT: Le bill 48, c'est ce qu'on a fait.

M. TOUPIN: ... Le bill 48 vient d'être adopté.

M. VINCENT: Oui.

M. TOUPIN: Je soutiens et j'ai toujours soutenu que si le bill 48 portait préjudice aux agriculteurs on l'amenderait.

M. VINCENT: Quand?

M. TOUPIN: Attendez...

M. VINCENT: Quand le mal sera fait.

M. TOUPIN: ... qu'on ait au moins des résultats concrets du bill 48. Actuellement, vous parlez tout au moins dans le vide et vous parlez...

M. VINCENT: Je ne parle pas dans le vide.

M. TOUPIN: ... dans le cadre des hypothèses.

M. VINCENT: Ce ne sont pas des hypothèses non plus.

M. TOUPIN: II n'y a aucun compte de taxes qui a été envoyé à quelque agriculteur du Québec que ce soit en vertu du bill 48. Si le bill 48 est néfaste aux agriculteurs, le premier ministre l'a dit et je me suis engagé personnellement, il y aura une révision du bill 48. Il n'a jamais été question, dans le bill 48, que les agriculteurs soient pénalisés, pas plus qu'il n'est question dans le bill 64 qu'on pénalise les agriculteurs. On met des mécanismes à leur disposition. Nous tentons de respecter dans ça des principes fondamentaux de liberté d'une profession à se prononcer sur le paiement d'une cotisation obligatoire.

Nous reconnaissons tout de suite dans la loi l'accréditation d'une association qui est capable de faire la preuve de sa représentativité au niveau de l'accréditation. Même si on avait fait seulement ce pas-là au cours des années passées, peut-être serions-nous maintenant rendus plus loin. Mais, pour le moment, même si on franchissait seulement ce pas déjà nous aurions un bon bout de fait.

Je suis convaincu que la loi telle que nous la présentons, si nous sommes d'accord pour en faire l'expérience, il deviendra très facile, par la suite, si elle s'applique, si les agriculteurs sont d'accord, tant mieux, nous aurons réglé le problème que nous voulons tous régler. Si on n'arrive pas avec ce mécanisme-là, nous ferons comme nous avons fait pour la loi de mise en marché, nous la regarderons à nouveau à la lumière de l'expérience vécue et nous verrons à l'ajuster aux besoins des agriculteurs tout comme nous faisons pour les autres lois.

Quand une loi n'est pas conforme aux intérêts d'un groupe, lorsqu'elle est appliquée pour une première fois, on l'amende très souvent. Nous amendons des lois au cours de toutes les sessions. Le délai de trois ans peut bien être amendé l'an prochain si toutefois nous faisons face à un échec à un certain moment. Il n'y a rien d'impossible. Il y a des hypothèses que nous pouvons envisager dans cette perspective. Je suis ouvert à n'importe quelle hypothèse. Ce qui est important pour moi, pour le moment, c'est que cette loi soit à la disposition des agriculteurs. Cela fait dix ans que l'on en parle, dix ans qu'on demande cette loi. Cela fait longtemps qu'on dit que c'est dépassé de faire du recrutement de porte-à-porte. Le député de Nicolet ne nous apprend rien lorsqu'il nous dit cela. Cela fait longtemps qu'on le dit partout. Nous faisons un effort louable, sérieux, objectif, pour doter la profession d'une loi que, au premier abord, je ne considère pas parfaite bien sûr pas plus que les autres lois mais qui m'apparaît être suffisamment bien structurée, suffisamment conforme à l'ensemble des intérêts des agriculteurs pour que nous puissions arrêter, pour le moment, de discuter autour de tout cela et de tenter l'expérience de cette loi. Et par la suite, ouvrir la porte à des amendements s'il y a lieu et entendre à nouveau les parties s'il y a lieu au niveau d'amendements possibles, futurs, non seulement dans l'application de cette loi mais dans ses modalités et dans ses possibilités d'application plus concrète, conforme à des besoins plus réels qu'on aura identifiés davantage au cours de l'expérience de l'application de cette loi.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lotbinière.

M. BELAND: M. le Président, l'honorable ministre, dans un exposé assez long auquel il avait droit d'ailleurs est en train de nous convaincre que justement l'automobile de modèle assez simple et qu'il a agencée, eh bien, il a

oublié des éléments importants. Il a oublié d'installer à l'intérieur au moins un moteur approprié. Il a oublié une foule de choses. Il a oublié que cette automobile devait rouler sur les chemins tortueux du Québec et, justement, cela ne colle pas à la réalité et il est en train de nous l'affirmer.

M. le Président, quelques amendements nous sont apportés à brûle-pourpoint. J'en ai pris connaissance seulement ce matin après qu'ils furent déposés ici à cette table. Je ne sais pas si d'autres en ont pris connaissance avant mais il reste que nous devons immédiatement analyser les conséquences des changements qu'il a apportés dans ce "melting-pot" qu'il avait déjà agencé antérieurement et nous devons immédiatement prendre position.

Premièrement, quant à la Loi du syndicalisme agricole, le ministre vient de prouver qu'il ne croyait pas à cette loi, puisque justement, il change l'en-tête et dit: La Loi des producteurs agricoles. Il aurait été mieux, à mon sens, pour que cela corresponde exactement à la loi même qu'il avait agencée d'intituler cela tout simplement : Loi pour enlever les pouvoirs des producteurs agricoles.

Cela aurait â peu près collé à la réalité non pas des besoins des agriculteurs mais du bill qui avait été agencé. Donc, la loi des producteurs agricoles, c'est ce qu'on nous amène pour remplacer la Loi du syndicalisme agricole.

M. le Président, je ne peux faire autrement que de me rappeler — je l'avais noté pour tâcher de le signaler d'une façon très exacte et ces paroles étaient très justes, très raisonnables — ce que le président de l'UCC du temps, M. Alain, disait lors de la première commission parlementaire.

M. VINCENT: Du temps, oui... M.HARDY: Du temps.

M. BELAND: Du temps, oui, parce qu'aujourd'hui c'est l'UPA. Je m'excuse, mais je m'aperçois que l'honorable vice-président de notre Chambre ne lit pas les journaux.

M. VINCENT: C'est tout nouveau, c'est de vendredi.

M. HARDY: Je m'excuse, j'ai entendu tout ça à la radio vendredi soir dernier, le rapport du congrès.

M. VEILLEUX: Je suis en train de le lire.

M. BELAND: Ah bon! A ce moment-là, M. Allain disait dans ces termes, lors de la séance de la première commission parlementaire: "Le niveau provincial de la structure du syndicalisme agricole se doit d'obtenir une loi faite sur mesure — pas copier autre chose — une loi faite sur mesure, une loi adaptée aux besoins de la classe agricole." Que devons-nous penser à la suite de cette observation courte, simple, mais qui relatait les faits réels? Je pense qu'il voulait tout simplement dire, comme il l'a relaté plus loin dans son exposé, que trop de pouvoirs étaient laissés entre les mains de la Régie des marchés agricoles. Automatiquement, par l'adoption de la loi originale, telle que présentée, c'est bien clair qu'après avoir accepté leur association accréditée, les cultivateurs avaient à peu près tous les droits mais n'avaient aucun pouvoir. Je me demande ce que l'honorable ministre ferait dans son automobile si, au bas d'une côte très abrupte, il s'apercevait tout à coup qu'il n'y a pas de moteur à l'intérieur.

M. DEMERS: II blâmerait son chauffeur.

M. BELAND : Oui, certainement son chauffeur, mais probablement qu'il essaierait au moins de réfléchir. Tout à l'heure, il nous a apporté des observations assez curieuses quand même. A la suite de questions que j'avais moi-même posées, que d'autres personnes à cette table avaient posées lors de l'étude en commission parlementaire en 1971, il a été dit que les cultivateurs avaient officiellement demandé l'accréditation de leur association ou, enfin, une loi reconnaissant leur profession ou le syndicalisme agricole ou quelque chose comme ça. Ils ont demandé cela. Cela a été dit déjà en 1965 et c'est au journal des Débats. Or, tout à l'heure, vous disiez que cela faisait dix ans que vous le demandiez vous-même.

Je me demande jusqu'à quel point l'honorable ministre est sérieux. Est-ce qu'il veut, une fois pour toutes, l'accréditation de cette profession de quelque façon? Est-ce qu'il le veut réellement? Par un détour bien agencé, par de la belle acrobatie sur patins à roulettes, il nous amène quelques amendements. "L'article 14 est remplacé par le suivant, etc." "L'article 15 est remplacé par le suivant, etc." En ce qui me concerne, la suggestion de l'honorable député de Nicolet est parfaitement claire. Je l'endosse dans cet objectif précis que nous devons aujourd'hui reporter la discussion à une autre séance, peut-être dans une semaine; je désirerais même, si possible, que ce soit en dedans d'une semaine, au maximum mardi ou mercredi prochain. J'irais jusque là, avant de revenir, pour tâcher, entre-temps de mesurer l'ampleur et les conséquences de ces amendements. Pour ma part, j'ai travaillé â l'intérieur de certains mécanismes, de plans conjoints, à l'UCC du temps.

Si l'on accepte le vote tel que suggéré â l'intérieur du référendum, si l'on accepte tel quel, à ce moment-là, il faut se rappeler une chose, une seule, on n'a pas besoin d'en retenir quinze, une seule, à savoir, lorsqu'arrive le temps de voter un plan conjoint pour une catégorie de producteurs donnés ou une spécialité donnée, qu'est-ce qui se passe? Il y a un lessivage de cerveau qui se fait dans notre milieu rural à différents paliers. Lorsqu'on dit, par exemple, 66 et 2/3 et une deuxième fois 66 et

2/3, parce que c'est à peu près ça, si on met ensemble les articles 14 et 15 tels que stipulés, ça veut dire que si on met de côté le vote qui est pris dans les autres syndicats des autres associations, alors que l'on constate que dans une assemblée donnée où le vote doit avoir lieu durant la veillée ou à la fin de la veillée, on chauffe à blanc les gars, on les pompe le plus possible. Ceux qui ont du travail à faire le lendemain matin, ou pour une raison quelconque sont plus ou moins intéressés, s'en vont vers les 10 et 11 heures. Ensuite, on continue à chauffer à blanc, on retarde le vote. Alors, il reste seulement trois ou quatre gars qui votent. Il va rester 50 gars au maximum sur une assemblée de 300.

M. LACROIX: Oui, mais ça ne se passe pas comme ça.

M. BELAND: Laissez-moi m'expliquer.

M. DEMERS: A Donnacona, il y en avait 32.

M. BELAND: Le député des Iles-de-la-Madeleine n'a pas de conseil à me donner parce que dans son comté, il n'y a pas tellement de culture.

M. HARDY: M. le Président, je demanderais aux députés de garder le silence le plus parfait possible, parce que, moi, j'essaie de suivre la pensée du député de Lotbinière et j'avoue que j'ai beaucoup de difficultés. Alors je demanderais à mes collègues de m'aider.

M. BELAND: Vous avez beaucoup de difficultés, M. le député, c'est parce que justement il y en a plusieurs qui piaillent, quand ils ne hurlent pas, autour de cette table.

M. DEMERS: Pour suivre l'idée, ça prend toute une voiture.

M. BELAND: Certainement pas la voiture du ministre Toupin par son bill.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! La parole est au député de Lotbinière.

M. BELAND: J'étais à dire que justement à l'intérieur d'une telle assemblée, s'il reste cinquante personnes à voter sur un total de 300, cela fait quel pourcentage lorsque 50 p.c. votent majoritairement? Quel pourcentage cela fait-il sur l'ensemble de la soirée? Et là, on va créer un carcan bien spécial à l'intérieur duquel les agriculteurs seront obligés de se conformer en vue d'être acceptés pour tâcher de parvenir à l'accréditation de leur association. On impose aux agriculteurs ce que l'on n'impose pas et que l'on n'a jamais imposé à d'autres associations professionnelles. Donc immédiatement cet article-là, pour ma part, n'est pas acceptable. J'ai dit cet article-là. Je sais que le député de

Saint-Jean a travaillé activement parmi les syndicats, mais je sais également qu'aujourd'hui par la position qu'il a prise en Chambre au sujet du bill 19...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: II a fait son devoir et vous n'avez pas à le juger.

M. VEILLEUX: Essayez donc de tenir des propos compréhensibles, cohérents.

M. BELAND: A ce moment-là, ne m'interpellez pas.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. DEMERS: Il va falloir que le président se serve de sa masse.

M. BELAND: Oui, je pense que le président devra se servir de la masse tantôt.

M. DEMERS: Cela va dépendre où il va frapper.

M. BELAND: Peut-être, parce que s'il s'en prend au comté de Saint-Maurice, il peut en frapper plusieurs.

M. DEMERS: Oui, monsieur.

M. BELAND: M. le Président, les changements à être apportés à l'article 16, je les lis textuellement: L'article 16 est modifié en remplaçant, dans la sixième ligne, les mots "après l'expiration de deux années" par les mots "après l'expiration de trois années".

C'est entendu qu'il faut regarder ces quelques phrases à l'intérieur du contexte même dans lequel il est, mais il faut aussi se rendre compte à ce moment-là que peu importe ce qui peut être agencé à cet article précis, ou à ces quelques petites modifications, l'on constate une anomalie majeure, de prime abord, c'est que le principe même qui existe à l'intérieur de l'article 16, c'est là qu'il faut se rappeler que le ministre a pris soin à l'intérieur d'autres articles de faire en sorte que ce soit la Régie des marchés agricoles qui approuve ou qui décide intégralement quand, justement et effectivement après deux années — il a mis après trois années — il y aura possibilité de reprendre le référendum.

Or, à ce moment-là, on y voit une anomalie de départ. Si, par exemple, les agriculteurs ou les producteurs agricoles ou l'UPA — appelez cela comme vous voulez — ne sont pas assez intelligents pour décider de cet article eux-mêmes, je pense que l'honorable ministre fait preuve d'un manque de confiance flagrant en obligeant alors la régie à décider pour les agriculteurs. C'est à l'article 16.

M. TOUPIN: Je voudrais sur un point de règlement apporter une précision, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Vous pourriez la faire immédiatement ou peut-être attendre...

D'accord, à condition que ce soit très très court.

M. TOUPIN: Ce n'est pas la Régie des marchés agricoles du Québec qui va décider quand aura lieu le nouveau référendum...

M. BELAND: Mais c'est écrit à l'article 16.

M. TOUPIN: Non, c'est l'association qui va le décider dans les cadres de la loi. La loi prévoit trois ans. Après trois ans, si l'association accréditée veut redemander la tenue d'un référendum, la régie doit le tenir. C'est là une tout autre version de la loi.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lotbinière.

M. BELAND: Merci, M. le Président. Nous reviendrons sur ces quelques observations de l'honorable ministre en temps et lieu en en mesurant entretemps les implications globales. Or, M. le Président, le 23 décembre, précisément, par ruse, l'honorable ministre ou son gouvernement nous ont empêchés de parler de façon suffisante sur le bill 64. Ils ont agi par troc et, en même temps, il y a eu une espèce d'agencement qui a fait que l'on a adopté le bill 48, pour revenir sur le bill 64 à temps en vue de l'adopter avant la période des Fêtes.

M. VINCENT: Le bill 48, ce n'est pas les deux tiers, c'est le bill 64?

M. BELAND: Est-ce que l'honorable député de Nicolet a l'intention de me poser une question?

M. VINCENT: Non... non, pas tout à fait.

M. BELAND: Alors, M. le Président, je continue? Parce que, si je me rappelle bien, il y a quelques instants...

M. VINCENT: Je m'excuse auprès du député de Lotbinière, j'ai fait une erreur. Je pensais que le bill 48, c'étaient les deux tiers du bill 64.

M. VAILLANCOURT: Si je comprends bien le député, il fait opposition à la motion d'amendement du député de Nicolet?

M. BELAND: Pour ce qui est du bill 48, c'est une loi inacceptable et d'ailleurs...

M. DEMERS: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Sur une question de règlement?

M. DEMERS: Oui, parce que le bill 48, c'est une autre chicane.

UNE VOIX: II est jugé.

M. BELAND: M. le Président, l'honorable député de Nicolet a fait une légère mention du bill 48, j'avais droit autant que lui et autant que d'autres autour de cette table d'en parler quelques instants. Par contre, je me conformerai aux directives de votre honorable présidence et je ne reviendrai que sur le bill 64.

Ceci dit, M. le Président, je demande tout simplement que nous puissions ajourner nos débats aujourd'hui après avoir entendu les autres députés à cette table qui voudront exprimer leur opinion. Je demande que nous ajournions nos débats à quelques jours ou à demain ou au moment où l'honorable ministre le décidera, mais à l'intérieur d'une semaine au maximum, afin que d'ici là nous puissions mesurer jusqu'à quel point ces articles peuvent être néfastes ou encore peuvent apporter des changements plus ou moins majeurs au bill 64 ou à la Loi des producteurs agricoles, tel que vient de le dire l'honorable ministre, parce que les agriculteurs veulent une loi de reconnaissance professionnelle. Je le dis textuellement comme cela, ça peut être dans une phraséologie légèrement différente mais ce qu'ils veulent, c'est justement être sur le même palier que les autres professionnels. Si les agriculteurs représentent tout un état de vie, je pense qu'à ce moment-là il faut que le gouvernement cesse de les laisser de côté. D'ailleurs — et cela concerne les suites et le début du bill 64 — lorsque l'on voit qu'il y a environ — et c'est textuel, c'était dans un journal il y a quelques jours— 25,000 agriculteurs sur 70,000 au Québec qui sont obligés d'avoir recours à l'aide sociale.

Cela veut dire qu'ils ne sont pas en mesure, présentement — et ils n'ont pas les outils nécessaires — de se défendre correctement, de se défendre de la façon la plus complète possible, de se défendre et se faire entendre et qu'il y ait une suite logique de la part d'un gouvernement. Si le gouvernement, qui se dit responsable, est véritablement responsable, à l'intérieur d'une semaine, une loi très simple sera agencée et non un "melting pot" qui permettra à l'association accréditée non pas d'avoir des droits, mais également des pouvoirs. Je limite là, M. le Président, mes observations, parce que je vois, depuis quelques instants, que le ministre prend quelques notes. Alors, est-ce qu'il va prendre en considération les observations que j'ai faites ou non? Il reste qu'à l'intérieur de sa loi, il y a plusieurs anomalies qu'il ne sert à rien de relater ici, mais je n'en mentionne qu'une en terminant. Lorsqu'il y aura un différend à régler, l'on verra la Régie des marchés agricoles, en dépit de toute la bonne volonté de ses membres être en même temps l'accusé et le juge dans une même cause et elle seule pourra réviser sa position, après avoir entendu la partie ou les parties. Cela est

dans le bill 64. M. le Président, je pense que, même si des honorables députés à cette table vous demandent de me ramener à l'ordre, vous ne le pouvez pas. C'est drôlement vrai qu'il y a plusieurs anomalies semblables et c'est ce qui fait que les producteurs agricoles qui se spécialisent, qui veulent vivre de l'agriculture au Québec, sont inquiets présentement. Ils ont raison de l'être. D'abord, parce que le bill ne correspond pas à la réalité, le bill n'est pas réaliste, ne correspond pas aux besoins réels et, surtout, enlève tous les pouvoirs qui restaient entre les mains de cette association. Il ne correspond pas à cette loi tant attendue de la part des agriculteurs du Québec. Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, pour les amendements que le ministre nous a apportés ce matin, je ne me rallie pas à la suggestion qu'ont faite le député de Nicolet et le député de Lotbinière à savoir qu'on devrait ajourner et reporter à plus tard l'étude de ces amendements. Je pense que c'est clair. Quant à moi, je suis prêt à me prononcer sur ces amendements, immédiatement. Enfin, on est pour ou on est contre une chose, c'est blanc ou noir.

M. BELAND: Est-ce que l'honorable député me permet une question? Très courte.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Très courte, oui.

M. BELAND: Est-ce que vous avez pris connaissance des amendements, avant ce matin?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non. J'ai pris connaissance des amendements, environ vingt minutes avant de venir à la commission.

J'ai pris les moyens pour le savoir. Vous n'aviez qu'à en faire autant.

M.HARDY: C'est un député débrouillard. M. DEMERS: II y aura toujours des espions.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Voici, les amendements que nous propose...

M. BELAND: Parti libéral, Parti québécois.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je vous ai laissé parler tantôt sans rien comprendre alors. Voulez-vous me laisser parler? Comme d'habitude, j'ai assisté à un spectacle des "Ice Follies", de patinage de fantaisie, vous ne vous êtes prononcés sur rien et moi je voudrais me prononcer sur quelque chose. S'il vous plaît, laissez-moi faire.

M. BELAND: Allez-y!

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Les amendements que nous propose le ministre, à mon sens, il y en a deux qui sont majeurs. Il y a l'amendement à l'article 14 et il y a l'amendement à l'article 16. L'article 15, disons que c'est un article de concordance, c'est normal.

A la commission parlementaire des 15, 16 et 17 février, lorsque nous avons discuté du projet de loi, article par article — je pense que moi-même, au nom de mon parti, j'avais pris position sur le pourcentage qu'on exigeait, 60 p.c. - 60 p.c. pour que l'association accréditée puisse percevoir les cotisations à la source — à ce moment-là j'avais dit qu'on était contre cette formule. Aujourd'hui, pour des raisons que vous connaissez, je suis encore contre, parce qu'au lieu d'exiger 60 p.c, on exige les deux tiers, ce qui veut dire 66 2/3 p.c.

On avait dit dans le temps qu'il n'était même pas nécessaire de faire un référendum ; je continue à défendre cette position.

J'ai toujours trouvé que c'était un peu curieux de demander à une association de donner une preuve de représentativité, c'est-à-dire 50 p.c. plus 1 et ensuite, de demander à 40 p.c. de ces gens-là qu'ils se prononcent pour ou contre la cotisation, ce qui, à mon sens, est contradictoire et paradoxal.

Je reste sur mes positions. Je continue à dire que le référendum pour la cotisation obligatoire aurait dû être enlevé dans la loi. Si l'on arrive avec un pourcentage qui est augmenté de 6.6 p.c., vous comprendrez que je suis doublement contre.

Maintenant, à l'article 16, vous proposez un amendement: "après l'expiration de deux années" serait remplacé par les mots "après l'expiration de trois années". Pour résumer, l'article 16 dit ceci: "Si une association accréditée, à l'occasion d'un référendum, n'a pas été investie du pouvoir de prélever une cotisation, il n'y aurait pas d'autre référendum avant deux ans. Et là, vous prolongez ça d'une autre année. Cela veut dire que si 66. 6 p.c. des producteurs ne se prononcent pas, ne votent pas à l'occasion du référendum sur la cotisation, le projet de loi tombe à l'eau pour trois ans au lieu de deux ans. C'est un recul. Deux ans, disons que nous étions contre, mais je suis encore doublement contre pour trois ans.

Vous avez ici l'article qui change tout simplement le titre de la loi. Je n'aurais pas eu tellement d'objection à cela, excepté que je me demande pourquoi changer la loi qui est intitulée Loi du syndicalisme agricole pour le titre de Loi des producteurs agricoles. La loi de quoi? Loi qui vient faire quoi chez les producteurs agricoles?

Je dois dire au ministre que je constate qu'on a probablement peur des mots. On doit appeler un chat un chat, on ne doit pas jouer avec les mots. C'est la Loi du syndicalisme agricole et je comprends qu'il y a des gens qui sont allergiques à ce mot-là, je comprends qu'il y a des gens qui n'aiment pas ça, qui aiment mieux Loi des producteurs agricoles. Cela ne

change absolument rien au principe, cela ne change absolument rien au mécanisme de la loi, mais je présume qu'on a eu peur des mots "Loi du syndicalisme agricole" et que, pour atténuer un peu le fait, on a changé ça pour Loi des producteurs agricoles.

Remarquez bien que j'aurais mieux aimé l'autre titre de la loi, mais étant donné que ça ne change rien au principe de la loi, disons que je ne ferai pas une grosse lutte là-dessus.

M. le Président, lorsqu'on a présenté le bill 64 qui était demandé depuis longtemps par des organismes, entre autres l'UCC, par des cultivateurs qui demandaient depuis des années le syndicalisme agricole... A un moment donné, le ministre nous a présenté en Chambre la Loi du syndicalisme agricole, le bill 64.

A ce moment-là, nous nous sommes demandé quelle position nous devrions prendre. Nous avons dit: Nous allons approuver la loi et les cultivateurs décideront s'ils la veulent ou non, s'ils l'acceptent ou non. C'est pour ça que nous parlions d'une représentativité de 50 p.c, que nous ne voulions pas de référendum pour l'accréditation, que nous ne voulions pas de référendum pour la cotisation, que nous voulions, par comparaison — ce n'est pas du syndicalisme ouvrier — qu'on fonctionne de la même manière que dans tous les autres secteurs. Même dans le secteur de la Fonction publique, on a fonctionné comme ça.

Dès qu'on a eu 50 p.c. plus 1, les fonctionnaires publics ont eu l'accréditation et ont été représentés par une centrale qu'on appelle la CSN. Je pense qu'il y a nettement un recul et je voudrais que "le ministre me comprenne bien; j'ai des doutes, je présume que le gouvernement, que le cabinet a pris les moyens pour torpiller la loi. En somme, on veut sauver le chou et la chèvre.

On dit d'une part: II y a des pressions pour donner une loi du syndicalisme agricole, on va leur en donner une. Par contre, ceux qui sont contre disent: On va en mettre le mécanisme tellement difficile qu'en somme elle ne sera pas appliquée. Et c'est ça les 66 p.c.

Si l'association donne une preuve de représentativité, si elle est accréditée et si 66 p.c. des cultivateurs ne se prononcent pas, en somme, ça ne donne rien de donner l'accréditation. Parce que le but de la loi, c'est une reconnaissance légale, c'est une accréditation avec un droit de percevoir à la source les cotisations, ce qui ne se faisait pas antérieurement.

Le député de Nicolet en a parlé dans ses observations et je suis entièrement d'accord avec lui. En 1972, il n'est plus temps de faire du porte-à-porte pour aller solliciter les gens et aller percevoir des cotisations. On va donner la loi; il semble que l'association concernée soit capable de donner une preuve de représentativité, donc on va l'accréditer. Par contre, on va arriver au référendum et je pense que, là, la loi va tomber parce que 66 p.c. c'est un vote massif en toute occasion, que ce soit une élection municipale, provinciale ou fédérale. Revenez en arrière et pensez à toutes les élections, que ce soit au niveau scolaire, lorsque 66 p.c. des électeurs se prononcent, on dit que c'est un vote massif, en moyenne.

M. HARDY: Non, non.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pour moi, le ministre a subi des pressions, le ministre a été mis en minorité avec sa loi, probablement au conseil des ministres, et on en a compliqué le mécanisme pour que la loi ne s'applique pas. C'est ce que je pense; avec les amendements que nous apporte le ministre ce matin, c'est ce que je prévois.

En somme, on est pour la loi ou on est contre. Je continue à dire que c'est un mécanisme compliqué pour rien et je continue à garder la même attitude que j'avais lorsque la commission a siégé les 15,16 et 17 février: il ne devrait pas y avoir de référendum pour la cotisation. Si 50 p.c. plus 1 des cultivateurs ont une carte de membre de l'UCC, ça veut dire qu'ils veulent payer une cotisation et qu'ils sont pour. A ce moment-là, ils ont la majorité, comme dans tous les autres secteurs.

Je n'ai jamais vu faire autant de politique sur une classe de la société. On boulange toutes sortes d'affaires, on essaie de mêler le mécanisme. Le député de Nicolet nous arrive avec une formule sur laquelle je ne suis pas d'accord, mais pas d'accord du tout; c'est une formule compliquée de désengagement, de réengagement. Est-ce qu'on la veut la loi ou si on ne la veut pas? Si on la veut, il y a 50 p.c. des cultivateurs qui sont pour, qu'on la leur donne et qu'on leur donne la cotisation obligatoire. Pourquoi faire une exception pour un groupe, quand on ne le fait pas pour les autres? Cela ne se fait pas dans d'autres secteurs. On a lutté contre ce référendum à 60 p.c. - 60 p.c. et ce matin, on nous arrive avec 66 p.c.

M. le Président, je dois dire au ministre que je suis contre ses amendements. Je suis contre l'amendement à l'article 16, parce que, si l'association a subit un échec dans son référendum, au lieu de pouvoir se reprendre dans deux ans, ce sera dans trois ans. Je soupçonne encore qu'on a pris tous les moyens pour torpiller la loi et je pense que c'est ce qui a apporté un retard à l'Assemblée nationale. Au mois de décembre, d'accord, tous les partis de l'Opposition ont dit au ministre: Si vous voulez adopter votre loi en deuxième lecture, en troisième lecture, nous nous sommes entendus pour faire des discours de deux, trois minutes. Le ministre a accepté, on l'a adopté en deuxième lecture en l'espace de vingt minutes, un peu à la vapeur, le soir — il était autour de onze heures — parce qu'on pensait que le ministre voulait l'adoption de la loi avant les Fêtes.

Puis, elle a été remise après les Fêtes et, aujourd'hui, on est encore en commission parlementaire avec des amendements pour compli-

quer la loi, pour la rendre encore plus difficile et pour, à mon sens, l'empêcher d'être appliquée. C'est ce que je pense. M. le ministre, vous m'excuserez d'être franc, mais je pense qu'on a voulu saboter la loi, qu'on a voulu la torpiller; et vous avez exactement le moyen. Le ministre dira: J'ai voulu la donner aux cultivateurs, mais ils n'ont pas voulu la prendre. Je pense qu'on essaie de jouer entre les deux, de s'en laver les mains et de s'en tirer le mieux possible.

C'est cela la loi à mon sens. M. le Président, je suis contre ces amendements, ils n'ont pas de sens, ils sont ridicules parce qu'à 60 p.c-60 p.c., c'était déjà ridicule. C'était déjà ridicule d'exiger cela mais 50 p.c. plus 1 des cultivateurs, cela n'était pas ridicule parce que c'était démocratique. On sait que, lorsqu'il y aura la moitié des producteurs agricoles qui se sera prononcée pour l'accréditation, ils auront la cotisation obligatoire. Il n'y a rien de plus sensé que cela.

M. FRASER: Les deux tiers, c'est quoi?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela ne se discute pas, c'est la logique même. Cela se fait partout. On le fait dans le bill 64, on crée un précédent, une exception comme si ces gens étaient plus fous que les autres.

M. LACROIX: Non, non... mais dans vos syndicats, vous n'êtes pas démocratiques.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est cela qu'on fait. Cela devient un peu drôle de voir les gens parler de la classe agricole. Il ne faudrait pas faire cela, il faudrait les désengager.

M. LACROIX: Non, non.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Laissez-moi parler, M. le député des Iles-de-la-Madeleine! Il faudrait mettre telle restriction comme si c'étaient des gens qui ne sont pas capables de prendre leurs responsabilités.

M. LACROIX: Vous n'avez jamais respecté les cultivateurs.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela me met le feu vous savez où quand on joue avec des gens comme cela. On dit: On vous donne la loi et on la veut ou on dit: Vous n'aurez pas de loi. Soyez donc franc, c'est oui ou non! Vous n'en voulez pas de loi.

M. FRASER: Les deux tiers, c'est quoi?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On a travaillé des jours et des jours sur une loi comme cela et, encore, on demande de remettre cela à une semaine.

M. LACROIX: C'est de la démagogie. Vous n'avez pas confiance aux cultivateurs.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pourquoi une semaine? Le député de Nicolet et le député de Lotbinière sont pour ou contre. C'est clair, vous n'avez qu'à lire le texte. On n'a pas besoin de penser deux minutes. Nos positions étaient prises lorsque la commission a siégé. Nous avons les mêmes positions aujourd'hui.

M. FRASER: Cela dépend des cas...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne patine pas, c'est la loi. C'est ma prise de position. Et qu'on arrête de jouer avec cela et que le gouvernement leur dise qu'ils n'auront pas de loi au lieu de la saboter. C'est du travail pour rien, de la perte pour l'Assemblée nationale et on fait perdre le temps des députés et des gens qui viennent ici. On se moque d'eux presque, avec votre "flasage" au travers d'une loi.

M. LACROIX: C'est de la démagogie facile!

M. FRASER: On passe une loi pour les cultivateurs, pas pour les chefs syndicaux.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est tout pour mes observations.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Maurice.

M. DEMERS: M. le Président, je vais essayer de faire autant de démagogie que celui qui m'a précédé. Cela sera compliqué.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous appelez cela de la démagogie? J'appelle cela de l'esprit pratique...

M. LACROIX: ... l'anarchie des syndicats.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... et avoir les deux pieds à terre.

M. DEMERS: J'aimerais avoir la parole. Je vois qu'aujourd'hui le député de Sainte-Marie...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous appelez cela de la démagogie...

M. DEMERS: ...a bien plus le sens de la défense de l'agriculteur qu'il l'avait la semaine dernière lorsqu'il a voté pour l'augmentation du taux d'intérêt à l'Office du crédit agricole.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est une autre chose.

M. DEMERS: C'en est une. Cela fait partie de l'ensemble. M. le Président, je voudrais faire les remarques suivantes et dire que la proposition faite par le député de Nicolet — si l'UCC, les représentants de la classe agricole prévoient qu'il y aura un danger avec un référendum pour l'efficacité et l'application de la loi — c'est un exutoire sérieux qui leur permettra d'appliquer la loi et de la vivre. Je crois que, dans cette

situation qui est faite par les amendements suggérés par le ministre de l'Agriculture, "Référendum visé par la présente loi soit considéré comme valable par la régie, au moins les deux tiers des producteurs doivent se prévaloir de leur droit de vote": 2/3-2/3. Avec l'article 15, on sera trois ans sans entendre parler de rien. Si les cultivateurs et les représentants de la classe agricole qui sont les seuls concernés dans le projet de loi trouvent que la proposition faite par le député de Nicolet est sensée, on devrait le savoir d'eux afin que nous puissions l'envisager sérieusement. Je comprends tantôt que le ministre de l'Agriculture a émis des idées pour mettre en contradiction la proposition, les idées émises par le député de Nicolet, les idées qui étaient un peu abracadabrantes, pour faire valoir son argument. Mais je me demande pourquoi le ministre de l'Agriculture ne regarde pas objectivement la proposition qui est faite par le député de Nicolet.

Si cette proposition a du sens comme il l'a dit au début, lorsqu'il a dit: Je la comprends mieux, qu'il mette donc ses technocrates à l'étude de cette proposition, et après l'approbation des représentants de la classe agricole, qu'on en vienne à l'accepter ou à la rejeter, mais qu'on l'ait étudiée sérieusement. En fin de compte, comme c'est une loi pour les agriculteurs, si cette proposition leur plaît, je voudrais qu'ils nous le disent afin que nous puissions y travailler. Si elle ne leur plaît pas, s'ils aiment mieux les articles 14, 15 et 16 amendés, comme le propose le ministre, nous voterons dans le sens de nos objectifs. Le gouvernement aura donné la loi qu'il veut donner aux agriculteurs.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que le député me permet une question?

M. DEMERS: Oui, deux, trois.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que le député a lu les déclarations des représentants de l'UCC lorsqu'on a siégé en commission? Il n'a pas besoin de leur demander s'ils sont contre la loi; je vais vous dire, moi, qu'ils sont contre elle, tout de suite — je ne le leur ai pas demandé, à part ça — sinon ils vont renier tout ce qu'ils ont dit en commission. Inutile qu'ils siègent, je n'ai pas besoin de demander à M. Allain s'il est pour ou contre, je le sais. C'est logique, c'est un raisonnement logique.

M. DEMERS: Les amendements du ministre, actuellement, quant à nous, nous ne les avons pas reçus cette nuit par des voies détournées, nous les avons eus deux minutes avant d'entrer dans cette salle.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): II disait qu'il était contre 60 p.c, il est certainement contre l'article aussi.

M. DEMERS: Je voudrais que les représen- tants de la classe agricole nous disent si ça fait leur affaire, ces amendements-là, ou s'ils aiment mieux entre les deux, la suggestion proposée par le député de Nicolet. C'est tout ce que je veux savoir. Je comprends que vous, dans votre parti, vous avez la connaissance de l'absolu, vous en jouissez complètement. C'est facile pour vous de jeter des affaires en l'air, vous ne ferez jamais partie d'un gouvernement. Nous allons succéder à ces gens-là, c'est pour ça que nous voulons vivre avec une loi qui va se tenir.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce que vous venez de dire, c'est évident.

M. DEMERS: M. le Président, qu'on enlève la blague que je viens de faire, même si elle est vraie, mais je voudrais que les membres de l'UCC — on pourrait vous en conter d'autres — se prononcent sur la suggestion. Et pour ce faire, qu'on ajourne notre débat. J'ai entendu dire tantôt que le ministre de l'Agriculture voulait exiger le vote. Qu'il vote! Nous, nous allons soutenir notre position, elle est claire, elle est définie. On a été pour le syndicalisme agricole, on le maintient et on est contre l'amendement tel que présenté par le ministre de l'Agriculture. On trouve que c'est un bâillon, c'est pire que toutes les situations actuellement envisagées pour la classe agricole.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Retardez donc ça aux prochaines élections.

M. LE PRESIDENT: II semble bien qu'il n'y ait pas d'autres opinants sur les amendements proposés par le ministre.

M. TOUPIN: Je voudrais seulement, M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Un instant, je crois que...

M. HARDY: Si les membres de la commission sont prêts à voter immédiatement, quant à moi, je ne veux pas retarder le vote. Je veux tellement que le bill 64 soit adopté, je ne veux rien faire pour le retarder.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que le député de Huntingdon désire prendre la parole?

M. FRASER: Oui. Je suis en faveur des amendements, je vais vous dire pourquoi. La situation change continuellement dans les affaires, ce n'est pas la même chose aujourd'hui qu'il y a deux ans, ou l'an passé. On a vu que les chefs syndicaux ont abusé de leur pouvoir, que c'étaient en fait des déclarations qui ne reflétaient pas la pensée de plusieurs de leurs membres. Ils se prononcent sur toutes sortes d'affaires. Sur le problème du pourcentage 66 p.c. — 66 p.c, on a vu les syndicats se livrer aussi à des abus flagrants dans ce domaine,

quand on a voté pour la grève dans la construction, par exemple, l'année passée. A Sept-Iles, il y avait 200 ou 300 membres dans...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que vous me permettez une question? Avez-vous peur que les cultivateurs se mettent en grève?

M. FRASER: Non, non, mais je parle des abus des chefs syndicaux. C'est pourquoi on veut que si les chefs syndicaux disent quelque chose, que ce soit le voeu de la majorité des membres. C'est pourquoi on a demandé un pourcentage de 66 p.c. — 66 p.c. On veut s'assurer que, si les cultivateurs votent pour ou contre cette union et les cotisations, ce soit toujours la majorité de chaque groupe. Les deux tiers, ça arrive à 44 p.c, 45 p.c. et ce n'est pas tout à fait assez encore. Je ne crois pas personnellement que l'UPA aura des problèmes sérieux pour convaincre les cultivateurs des mérites d'une telle association. Si les années passées ont fait la preuve que ça apporterait des résultats pour les membres de l'association, je demande au chef de l'UPA de ne pas induire les membres en erreur en prêchant que la loi va résoudre tous les problèmes agricoles. Loin de là, c'est seulement le commencement, mais je pense que cette loi est bonne et nécessaire.

M. LE PRESIDENT: Le ministre de l'Agriculture.

M. TOUPIN: M. le Président, je voudrais rapidement, avant de prendre le vote, probablement que le président demandera le vote...

M. VINCENT: M. le Président, sur une question de privilège ou une question de règlement, le ministre s'imagine présentement qu'il utilise son droit de réplique...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. VINCENT: ... et par la suite, personne d'autre ne pourra plus parler.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Il est certain que le ministre ne peut pas présumer de la décision du président.

L'honorable ministre de l'Agriculture.

M. TOUPIN: Ce sera une de mes dernières interventions. A la suite des interventions du député de Lotbinière et du représentant du Parti québécois, le député de Sainte-Marie, je voudrais simplement apporter quelques précisions. Il est toujours facile de dire des agriculteurs beaucoup de choses. Depuis que je suis à l'Assemblée nationale, je pense que les discours les plus décousus y ont été faits sur l'agriculture, que les discours contenant un fond véritablement valable, on ne les a pas retrouvés dans les débats traitant de l'agriculture. On a trouvé surtout des discours qui traitaient de tout et de rien et qui traitaient les agriculteurs de n'importe quoi...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous faites allusion à quel discours? J'aimerais bien que vous le disiez.

M. TOUPIN: Je ne fais allusion à aucun discours, je dis que depuis...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si c'est le discours sur le bill 4, j'ai dit la même chose que dans votre livre blanc, j'espère que vous allez m'appuyer.

M. TOUPIN : J'ai dit que depuis que nous sommes à l'Assemblée nationale...

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est la même chose. Vous avez fait un discours très intéressant, ç'a paru, lisez le journal des débats.

M. TOUPIN: On se permet, M. le Président, de dire à peu près n'importe quoi sur l'agriculture selon les projets de loi que nous présentons.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Là, je suis d'accord.

M. TOUPIN: Si nous sommes aux lois du crédit agricole, on accuse le gouvernement et le ministre de l'Agriculture de vouloir d'une part mettre trop de crédits à la disposition des agriculteurs et de les endetter; d'autre part, on leur propose d'ouvrir les portes du crédit. Si on essaie de toucher à une loi pour tenter de l'améliorer, on crie immédiatement que les agriculteurs seront pénalisés, que les agriculteurs ont déjà des problèmes, que les agriculteurs sont les plus mal foutus de la société, que les agriculteurs sont accrochés, au bien-être social, etc., etc.

M. le Président, je pense que ça fait assez longtemps qu'on fait des discours décousus sur les agriculteurs, il est temps une fois pour toutes qu'on vote des lois et qu'on dote la profession de mécanismes dont jouissent les autres professions au Québec. Nous proposons une loi dans cette perspective; on peut être pour et on peut être contre, mais une chose est évidente, M. le Président, et personne ne peut le nier, c'est que nous sommes le premier gouvernement à avoir eu le courage de préparer un projet de loi concernant la profession agricole. C'est un fait acquis, et nous sommes le premier gouvernement à parvenir à le rendre en troisième lecture. Or, aujourd'hui, en commission, on demande encore d'en retarder l'adoption. C'est ça qu'on fait. On veut encore nous amener à deux, trois, quatre, cinq ou six mois avant d'arriver à préciser un projet de loi le moindrement valable pour les agriculteurs. C'est ça qu'on cherche à faire. Après cela, on sera toujours bien placé pour dire: Le gouvernement

vous l'a promis, le gouvernement a viré de bord, le gouvernement n'a pas voulu vous doter de cette loi-là. Aujourd'hui, on dit: On "magane" la loi, on met dedans des mécanismes qui ne permettront pas son application.

On présuppose, on est dans des hypothèses. Qu'on tente l'application de la loi. D y a eu des expériences sur des plans conjoints qui ont donné des votes plus substantiels que ceux qui sont exigés dans la loi et les plans conjoints ont passé.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que vous me permettez une question?

M. TOUPIN: Ils ont été accrédités, ces plans conjoints, et aujourd'hui ils fonctionnent.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, sur les plans conjoints, est-ce que vous me permettez une question, M. le ministre?

M. LE PRESIDENT: Tout à l'heure, je ne l'avais pas permis, pas plus maintenant. Le règlement prévoit qu'au stade des débats où nous sommes, vous posiez des questions uniquement si vous avez l'assentiment de...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est une question d'information que je voulais poser.

M. TOUPIN: Nous proposons un projet de loi, M. le Président, je l'ai dit au début, ce n'est rien de complet et de parfait. L'idéal eût été peut-être de faire, comme nous pourrions peut-être faire dans l'avenir pour les autres professions qui désirent des lois semblables, et de dire: On vote une loi et on décrète une cotisation obligatoire. Nous voulons, dans le cadre de cette loi, respecter la liberté des gens de se prononcer et nous mettons en place des mécanismes qui le permettent. C'est simplement l'objectif que nous poursuivons. Mais pour nous, ce qui est important, c'est que les agriculteurs aient une loi. Maintenant qu'ils auront la loi, une fois qu'elle sera votée, on l'utilisera dans la mesure où ce sera possible de l'utiliser. Si cette loi-là se révèle, comme certains le croient, inapplicable, cela s'amende, des lois, comme on les amende partout. La loi de mise en marché, je l'ai dit tantôt, cela fait quatre, cinq fois qu'on l'amende en vue de l'ajuster aux besoins des agriculteurs. Nous aurons à l'amender probablement encore avant longtemps pour l'ajuster aux besoins de l'ensemble de l'agriculture. C'est normal, c'est dans l'évolution de l'économie agricole et c'est dans l'évolution de l'économie des lois générales d'un gouvernement. Je me dis donc que s'opposer à cette loi, c'est encore une fois empêcher les agriculteurs de se procurer ou tout au moins d'avoir à leur disposition un mécanisme valable et qui va leur donner tout au moins la chance de se grouper une bonne fois dans une organisation reconnue par un gouvernement qui est le seul, à venir jusqu'à maintenant, à avoir eu le courage d'apporter des lois tout au moins valables pour le secteur agricole. Voter contre cette loi-là, M. le Président, je le soutiens encore une fois, c'est voter contre l'organisation professionnelle des agriculteurs.

M. BELAND: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Nicolet.

M. VINCENT: M. le Président, je voudrais encore une fois que tous ceux qui ont eu l'occasion d'entendre le ministre de l'Agriculture constatent jusqu'à quel point il manque de sérieux. Tous les partis politiques en Chambre ont voté pour le principe du projet de loi. Tous les partis politiques ont voté en sa faveur. Quand le ministre parle de voter contre le projet de loi, c'est faux. Aucun député de l'Assemblée nationale n'a voté contre le projet de loi.

M. TOUPIN: Ils voteront.

M. VINCENT: Nous en sommes présentement au stade de la commission parlementaire avant la troisième lecture et nous en sommes aux articles du projet de loi. A ce moment-là, c'est notre devoir de voir à ce que cette loi que le ministre dit avoir eu le courage de présenter... Hello, le courage! N'importe quel gouvernement dans le passé aurait pu passer une loi semblable, avec des limites aussi clairement inscrites. Cela aurait été facile, M. le Président.

Deuxièmement, le ministre dit que nous voulons retarder l'adoption de la loi de cinq à six mois; il accuse les partis de l'Opposition de retarder l'adoption de la loi de cinq à six mois. Est-ce que les gens réalisent qu'au mois de septembre 1971, nous étions ici en commission parlementaire pour discuter de ce projet de loi? Est-ce que les gens réalisent qu'avant l'ajournement de Noël, nous étions à l'Assemblée nationale et nous avons parlé quelques instants sur le projet de loi en se limitant à un seul participant pour chaque parti de l'Opposition?

M. BELAND: C'est le député de Rouville qui a empêché qu'on passe la troisième lecture.

M. VINCENT: Est-ce que les gens se rendent compte que les 15, 16 et 17 février...

M. OSTIGUY: Vous nous reprochez de ne pas parler quand on veut parler.

M. VINCENT: ... aujourd'hui, nous sommes le 4 mai 1972. Les 15, 16 et 17 février, ça fait quand même deux mois et demi que le projet de loi a été adopté dans le Salon rouge autrefois du Conseil législatif, par tous les députés de tous les partis politiques, sans exception.

M. HARDY: C'est un mauvais présage.

M. VINCENT: Deux mois et demi depuis, sans que le ministre puisse nous faire connaître qu'il avait en réserve, dans sa manche, de nouveaux amendements qu'il nous a présentés ce matin, à dix heures cinq. Nous sommes â midi moins quart, il nous dit qu'on veut retarder, si on parle, si on se prononce contre, de cinq à six mois. Est-ce que c'étaient les intentions du ministre les 15, 16 et 17 février? Qu'il nous le dise clairement! Est-ce que c'était la goutte d'eau chinoise? On commence tranquillement, une goutte, deux gouttes, trois gouttes et quand on est rendu â la millième ou à la millionième goutte, je ne sais pas, je n'ai jamais subi le supplice, le type est fini.

M. HARDY: Ce n'est pas chinois, c'est japonais.

M. VINCENT: N'oubliez pas une chose, aujourd'hui on est le 4 mai 1972, est-ce qu'on va attendre encore deux mois et se faire accuser que c'est nous qui retardons la loi? Est-ce qu'il y a d'autres amendements qui viendront en troisième lecture à l'Assemblée nationale?

M. HARDY: On ne peut plus.

M. VINCENT: Oui. Pour autant que les amendements sont suggérés par écrit avant au président, en troisième lecture. Ce sont toutes des questions qu'on se pose. C'est pour ça que c'est bien beau d'avoir le courage de présenter un projet de loi, mais n'importe quel gouvernement au monde peut présenter des projets de loi qui sont inopérants, irréalistes, et qui ne sont pas conformes aux objectifs de la profession. C'est tellement vrai, M. le Président, que si on avait apporté seulement les amendements à l'article 14: 66 2/3 p.c, les amendements à l'article 15, 66 2/3 p.c, qu'on n'avait pas touché à l'article 16, on aurait dit que le gouvernement est parfaitement convaincu que la loi va être votée par référendum. Tellement peu convaincu, on va avoir la paix. On va augmenter ça à 66 2/3 p.c. de participants, 66 2/3 p.c. du vote après on aura la paix, pas pour deux ans, pour trois ans. Cela permettra au gouvernement actuel de retourner en élection et faire exactement ce que le ministre de l'Agriculture vient de faire.

Nous, nous en avons eu du courage. Il a dit vendredi dernier: Nommez-moi un ministre de l'Agriculture qui, depuis la Confédération, a réglé des problèmes au Québec? Pas un. Moi, je les ai tous réglés. Il n'en a pas réglé un.

M. HARDY: C'est vrai.

M. VINCENT: Pas un. C'est le même ministre de l'Agriculture qui vient de nous parler. Nous avons eu du courage, ça fait dix ans que nous en parlons. Les gens s'en souviendront, quand l'UCC est revenue au conseil des ministres en 1969 — pour des raisons que j'ai expliquées l'autre jour, on a retardé en 1966, en 1967, en 1968 jusqu'au mois d'octobre 1969 — on a demandé à un avocat, prioritairement, de s'occuper de cette loi.

Il fallait quand même trouver une formule pour la présenter devant l'Assemblée nationale. Quelle a été cette formule? On l'a étudiée, on l'a amendée, on a apporté des suggestions. Je félicite le ministre malgré tout, parce que des suggestions qui ont été apportées, il y en a plusieurs qu'il a acceptées. On a enlevé au moins deux référendums de la loi, ce qui était ridicule. On les a enlevés ces deux référendums. On est arrivé avec un troisième référendum. A force de discussions, de pourparlers, on s'est entendu, on a dit: 60 p.c-60 p.c., c'est difficile dans certains cas; dans d'autres cas, il y a seulement 18,000 ou 20,000 cultivateurs qui peuvent se prononcer pour la loi, mais on va l'accepter.

Tout le monde avait ça dans l'idée jusqu'à 10 h 5 ce matin — à l'exception peut-être de quelques-uns — c'était le bill 64. Encore hier en Chambre, on a demandé s'il y aurait des amendements. On a dit oui, mais des amendements mineurs. Ce ne sont plus des amendements mineurs, ce sont des amendements majeurs.

Au lieu de dire: Essayez donc de vous pendre avec une corde, on dit: Pendez-vous avec une chaîne. Cela fait un peu plus mal. Là, je ne voudrais pas, M. le Président, parler plus longtemps là-dessus, j'y reviendrai, l'occasion va se présenter. Mais en dernier ressort, ce n'est pas une question de jours présentement et je répète que depuis le mois de septembre l'an dernier — ce n'est pas la responsabilité, ce n'est pas la faute du député de Sainte-Marie, ni du député de Lotbinière, ni du député de Saint-Maurice, ni des autres députés — depuis le 2 septembre 1971, nous voulons connaître — et nous avons tous voté pour le principe de la loi — les mécanismes qui vont permettre la tenue d'un référendum. Et de cette façon-là — n'y pensez pas — il n'y en aura pas de référendum au mois de juin. Nous avons 45 jours de crédits à discuter, ça va aller au 9 juin avant que nous ayons terminé la discussion des crédits. Avant que cette loi-là ne soit sanctionnée, ça va aller à quand? Le ministre a déclaré à Trois-Rivières il y a un mois et demi: II ne reste que la troisième lecture, ça va prendre à peu près une demi-heure.

Il y a un mois et demi de cela. Il a déclaré vendredi: Dans quatre ou cinq jours, ça va être adopté. Si le 9 juin on a terminé les crédits ou que la loi est votée, si elle est sanctionnée, le référendum va avoir lieu quand? Au mois de septembre, octobre, novembre? Et là, le ministre va accuser les partis de l'Opposition, les députés péquistes, les députés créditistes, les députés uniquistes d'avoir retardé la loi. Cela n'a aucun sens.

La seule chose que je veux demander — et là, c'est la première fois que l'Opposition demande, pour des raisons majeures, de retarder au moins pour une semaine, mais un maximum d'une semaine — nous sommes aujourd'hui le 4 mai, qu'on retarde jusqu'à jeudi prochain. Entre-temps, mardi, mercredi, jeudi prochains, nous viendrons ici en commission prendre le vote.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que vous me permettez une question sur votre amendement?

M. VINCENT: Oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Lorsque vous parlez de retarder d'une semaine, est-ce parce que vous n'êtes pas prêt à prendre position présentement?

M. VINCENT: On est contre ça, on voudrait...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Alors, pourquoi retarder d'une semaine?

M. VINCENT: M. le Président, même si le député de Sainte-Marie le sait très bien, même s'il vote contre...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, d'accord.

M. VINCENT: Supposons que les députés de Sainte-Marie, de Lotbinière, de Saint-Maurice et de Nicolet votent contre, à midi moins deux minutes, le gouvernement a sa majorité, la loi va être acceptée.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, et dans une semaine, qu'est-ce qui va arriver?

M. VINCENT: La loi va être acceptée. On a été contre et ça va donner quoi?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Et dans une semaine...

M. VINCENT: C'est bien beau de dire: Nous sommes contre, nous sommes contre! Mais ça va donner quoi?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... si on a le même vote...

M. VINCENT: Le Parti québécois est contre n'importe quoi. Lévesque est contre les $100 par semaine, Burns est pour...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, une question de règlement. Si le député embarque sur mon parti, je vais embarquer sur le sien et on va charrier en maudit! Avez-vous compris là? Qu'il nous "sacre" la paix avec ça et qu'il parle du projet de loi.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Est-ce que le député de Nicolet...

M. VINCENT: M. le Président, je reviens au projet de loi. C'est la seule chose que je demande. Il est midi moins cinq minutes, que le ministre nous dise mardi prochain, ou même demain après-midi. Je suis certain que lui-même aimerait rencontrer les associations. J'ai eu l'occasion de rencontrer des représentants de l'UCC en Gaspésie en fin de semaine et je leur ai fait ma proposition. Ils ont dit: Cela a bien plus de bons sens que si on nous arrive avec de nouveaux amendements qui limitent encore le référendum, qui donnent encore des restrictions qui vont nous empêcher de donner un résultat. J'ai rencontré des représentants des agriculteurs de Trois-Rivières, de Hull, de Sherbrooke; je leur en ai parlé; j'en ai discuté avec eux et ils sont beaucoup plus intéressés qu'on se l'imagine à des suggestions constructives qui peuvent amener une solution.

Parce que le ministre a toujours pour son dire — et ça, c'est fausser le rôle d'un législateur — à chaque fois qu'il présente un projet de loi: Cela va être amendé, ça va être amendé.

Voyons! On présente un projet de loi parce qu'on croit qu'il est le meilleur, parce qu'on croit que ce projet de loi est quand même le projet qui se tient le mieux. Il ne faut pas dire: Ecoutez, on le présente, mais je vous préviens tout de suite qu'il sera amendé. Voyez-vous ça? Un ministre de l'Agriculture qui revient avant trois ans — c'est bien inscrit dans la loi — pour amender le projet de loi, alors qu'il a dit, dans la loi, que d'ici trois ans, il n'y a plus de référendum qui se tienne. C'est fini pour trois ans, on retourne à la mitaine, on revient au boggie, on retourne au Ford à pédales, pas de moteur du tout. C'est le problème à l'heure actuelle.

Je fais une demande très logique. La proposition que j'ai faite s'analyse. D'accord, j'en conviens, cette proposition doit être travaillée, elle doit être rodée, ajustée à un mécanisme quelconque, mais je pense que ça vaut la peine qu'on la regarde. Et, à ce moment-là, je vais la répéter très brièvement et je cesse: A compter du 1er juin 1972, toute personne qui vend pour plus de $1,000 annuellement de produits agricoles est cotisable à la source pour un montant de $15. Ce sera décidé par l'assemblée générale, par la suite. Dans les trois mois, une personne qui, pour des raisons personnelles, ne veut pas être cotisée peut, dans une lettre signée devant témoin, se désengager. Les autres paient leur contribution.

Le ministre a dit, tout à l'heure: Tous les six, sept mois. Non, non, les autres paieront leurs contributions, ils restent engagés, ils ont la cotisation obligatoire. Par la suite, si une personne désengagée désire se rengager, pas deux fois, trois fois, quatre fois, comme disait le ministre tout à l'heure, mais désire se rengager, elle le peut et, à ce moment-là, cela sera final, elle est rengagée. Les nouveaux

agriculteurs sont automatiquement inclus pour la cotisation obligatoire, plus les 20 p.c. qu'on va chercher dans les fédérations. A ce moment-là, cela ne désorganise pas l'UPA, cela ne désorganise pas l'UCC, c'est une tout autre affaire. C'est la Régie des marchés agricoles, et je félicite le ministre. Nous avons obtenu que ce soit la Régie des marchés agricoles qui accrédite une association qui représente les agriculteurs du Québec. Cela est à part. Mais cet argent ira à un organisme ou à une personne qui remettra les cotisations à l'organisation qui sera accréditée éventuellement par la Régie des marchés agricoles.

Je termine, M. le Président, en demandant à tous les membres de la commission que nous puissions ajourner la discussion et revenir. C'est la première fois que les députés de l'Opposition le demandent. Parce que, même si nous votons dans cinq minutes, nous voterons contre et cela va donner quoi? Le vice-président de la Chambre le dit avec raison: Nous ne pouvons quand même pas revenir avec bien des amendements. D y a seulement un amendement général qui peut être accepté et qui est soumis devant le président. Ma suggestion ne change pas l'économie du bill mais elle change les mécanismes à l'intérieur du bill. Cela demanderait qu'un ou deux avocats et spécialistes s'assoient à une table et puissent insérer dans une loi la proposition que je fais. Si elle n'a pas de bon sens, si elle est ridicule, si elle ne tient pas debout, si personne n'en veut, tant pis. J'ai eu l'occasion cependant de rencontrer certaines personnes. Encore la semaine dernière, j'ai dfné avec un type assez important de la Coopérative fédérée du Québec et ce dernier trouve que cela a du sens. J'ai eu l'occasion de rencontrer d'autres membres du syndicat de l'UCC et ils ont pour leur dire: Je me demande si nous ne serions pas mieux avec cela qu'avec la nouvelle formule qu'on a eue dans le bill 64; or, c'est encore pire avec la formule d'aujourd'hui. C'est la seule demande que je fais avant de procéder au vote, parce qu'à ce moment-là nous allons tous voter contre. Mais avant de voter contre, regardons autre chose. Cela fait tellement longtemps que le ministre retarde l'affaire, depuis le mois de septembre l'an dernier que nous regardons cela, qu'on le retarde encore de trois ou quatre jours et qu'on revienne en commission. A ce moment-là, on prendra le vote et le ministre aura eu le temps de rencontrer les organisations agricoles et de voir exactement ce qui en est. Que l'on ne fasse pas ce que l'on a fait avec d'autres lois pour dire: Cela sera dur mais on reviendra avec des amendements. Je vous remercie, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: J'accepterai un dernier commentaire de la part du député de Lotbinière.

M. BELAND: M. le Président, c'est justement à la suite d'accusations gratuites que je tiens à rectifier certains faits. Nous avons voté en faveur du principe en deuxième lecture. D'ailleurs, en deuxième lecture, c'est seulement sur le principe d'un bill que nous avons à nous prononcer. Ce n'est pas sur les amendements ou sur les articles à l'intérieur de la loi.

Deuxièmement, une autre accusation gratuite, c'est que, dernièrement, nous nous serions prononcés contre la possibilité d'emprunt pour les agriculteurs. Ceci est archi-faux. Si nous avons voté contre le bill 4 et le bill 5, c'est qu'il y avait à l'intérieur cette clause qui portait de $15,000 à $25,000, etc. les possibilités d'emprunt pour les agriculteurs, mais il y avait également une autre chose camouflée et le ministre a agi par ruse. A ce moment-là, qu'est-ce qu'il a fait, en ce qui concerne les intérêts? Lorsque les agriculteurs verront demain matin qu'ils seront obligés de payer non seulement les 2 1/2 p.c. d'intérêt sur les prêts contractés mais qu'ils seront obligés...

M. DEMERS: Est-ce que nous parlons du crédit agricole ou si nous parlons de la loi?

M. BELAND: Je rectifie des faits. Les agriculteurs vont constater que, si seulement c'était 3 p.c. d'augmentation sur un prêt de $15,000, cela coûterait $450 de plus par année. C'est ce que vont voir les agriculteurs.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'invite le député de Lotbinière à revenir au projet de loi 64.

M. BELAND: Très bien! Je reviens, mais il y avait des faits à rectifier.

UNE VOIX: II est passé par le bois.

M. BELAND: Est-ce que je dois recommencer? J'espère que non. On nous dit également qu'il y a des situations ambiguës ou qu'on essaie de créer. Mais, justement, le bill 64 en est une situation ambiguë. H y a plusieurs principes à l'intérieur qui se confrontent. A ce moment-là on explique une face de la médaille et on prend bien soin de ne pas expliquer à fond l'autre face. C'est entendu que nous ne pouvons pas apporter des amendements qui nécessitent un budget supplémentaire. C'est entendu, on le sait. Mais combien l'application dans deux ans ou dans trois ans du bill 64 va-t-elle apporter de nécessités pour l'engagement d'inspecteurs, de vérificateurs de toutes sortes chez la classe agricole et également chez tous les commerçants qui vont acheter des produits agricoles?

M. TOUPIN: Vous le demanderez aux agriculteurs, ce sont eux qui vont l'administrer.

M. BELAND: II y a également cette autre chose, finie la retenue à la mitaine. Je pense que les cultivateurs sont écoeurés de recueillir à la mitaine la cotisation et il est temps qu'il y ait

un mécanisme adaptable aux besoins, adaptable en 1972 pour pouvoir recueillir cette cotisation et qu'on ne soit pas comme en l'an 1900 pour l'agriculture alors que le ministre lui-même ou d'autres ministres de son cabinet essaient de faire en sorte que dans l'industrie, eux, ils soient à peu près comme en l'an 1980 et ceci en 1972. A ce moment-là je pense que c'est placer nettement les agriculteurs sur tous les paliers, sur un pied d'égalité nettement inférieur à toutes les autres professions. C'est tout, M. le Président.

M. DEMERS: C'était bien bon!

M. LE PRESIDENT: Messieurs, nous avons devant la commission deux motions identiques de demande d'ajournement, l'une provenant du député de Nicolet, l'autre du député de Lotbinière. Si les membres de la commission n'ont pas d'autres commentaires à faire, j'appelle immédiatement le vote sur la motion d'ajournement des travaux de la commission.

Quels sont ceux qui sont pour l'ajournement des travaux de la commission à plus tard?

M. VINCENT: Limité à une semaine.

M. LE PRESIDENT: Ceux qui sont contre l'ajournement des travaux?

M. DEMERS: Je pense que nous sommes battus.

M. LE PRESIDENT: L'amendement est rejeté.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce qu'on siège cet après-midi?

M. VINCENT: Bien non!

UNE VOIX: Est-ce qu'il y a vote sur les amendements?

M. LE PRESIDENT: Est-ce que la présidence peut tenir pour acquis que le vote serait le même pour les amendements proposés par le ministre de l'Agriculture?

M. VINCENT: On ne peut pas siéger cet après-midi, on vient de voter contre.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce n'est pas ce que je dis, est-ce qu'on suspend les débats à cet après-midi ou si on ajourne?

M. VINCENT: II est midi et cinq.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Votre motion était pour ajourner pour une semaine. Je parle de l'ajournement d'aujourd'hui.

M. VINCENT: Ajourner pour un maximum d'une semaine, qu'on cesse les discussions et qu'on ajourne pour le maximum d'une semaine, au gré du ministre. Il aurait pu dire qu'on suspend le débat jusqu'à ce soir.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On a voté contre l'ajourenement d'une semaine mais on peut être en faveur de suspendre les débats jusqu'à cet après-midi.

M. VINCENT: sur un point de règlement, pour être bien clair...

M. LE PRESIDENT: Est-ce que tous les membres attitrés de la commission de l'agriculture serait prêts à se prononcer face aux amendements proposés par le ministre de l'Agriculture?

M. BELAND: Etant donné les circonstances, nous sommes prêts.

M. VINCENT: M. le Président, étant donné que le député de Sainte-Marie a voté contre l'ajournement, qu'on cesse les discussions pour un maximum d'une semaine, ç'aurait pu être remis à ce soir à huit heures. A ce moment-là, la commission ne veut pas ajourner. En ce qui nous concerne, nous sommes prêts à nous prononcer, nous votons contre les amendements.

M. BELAND: C'est aussi simple que ça. L'honorable ministre a pris du 23 décembre au 4 mai pour agencer quatre amendements. Nous demandons une semaine au maximum pour regarder et scruter cela de près.

M. HARDY: C'est décidé!

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela ne changera rien, le ministre ne peut rien changer à ça. Il n'est pas tout seul.

M. LE PRESIDENT: Je dois tenir pour acquis que le même vote prévaut sur les amendements.

M. VINCENT: Exactement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si on ajourne à une semaine, il va nous arriver avec soixante-dix...

M. VINCENT: Pas une semaine.

M. LE PRESIDENT: J'appelle le vote sur les amendements déposés par le ministre de l'Agriculture et de la Colonisation. Quels sont ceux qui sont en faveur des amendements du ministre de l'Agriculture?

M. DEMERS: Ceux qui sont en faveur.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ceux qui sont en faveur des amendements.

M. LE PRESIDENT: En faveur des amendements du ministre? Quels sont ceux qui sont contre les amendements du ministre? Les amendements sont acceptés.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On le savait.

M. VINCENT: Oui, c'est pour ça.

M. LE PRESIDENT: La commission ajourne ses travaux et le rapporteur fera son rapport à la Chambre.

(Fin de la séance à 12 h 9)

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