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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Wednesday, March 14, 1979 - Vol. 21 N° 11

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions concernant le projet de loi no 107 - Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

Présentation de mémoires sur le projet de loi no 107

(Dix heures douze minutes)

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, mesdames et messieurs! Reprise des travaux de la commission des affaires municipales afin d'entendre les mémoires pour l'étude du projet de loi 107, Loi instituant la Régie du logement, modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives.

Membres de cette commission: MM. Brassard (Lac-Saint-Jean), Caron (Verdun), Cordeau (Saint-Hyacinthe), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Gratton (Gatineau) remplacé par Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Guay (Taschereau), Mercier (Berthier), Ouellette (Beauce-Nord), Roy (Beauce-Sud), Shaw (Pointe-Claire), Tardif (Crémazie).

Intervenants: MM. Alfred (Papineau), Charbon-neau (Verchères), Fontaine (Nicolet-Yamaska), Goldbloom (D'Arcy McGee), Lacoste (Sainte-Anne), Léonard (Laurentide-Labelle), Samson (Rouyn-Noranda), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce remplacé par Lavoie (Laval), Vaugeois (Trois-Rivières).

Les organismes qui se feront entendre aujourd'hui sont: Le Rassemblement des citoyens de Montréal, no 18; Association des consommateurs du Canada, (Québec) Inc., Comité des établissements humains, 16-M; Association de l'immeuble du Québec, 23-M; Groupement des locataires du Québec métropolitain Inc., 27-M.

J'appelle immédiatement le Rassemblement des citoyens de Montréal. Est-ce que les représentants du Rassemblement des citoyens de Montréal sont ici? Il n'y a personne? Alors j'appelle l'Association des consommateurs du Canada; vous êtes présent? Oui. L'Association de l'immeuble du Québec? Oui. Groupement des locataires du Québec métropolitain Inc., est là, ce qui veut dire que le Rassemblement des citoyens de Montréal passera en dernier.

Depuis le début de la commission, il y a des règles du jeu qui se sont établies: c'est qu'on vous demande de résumer le mémoire que vous avez à l'intérieur de 20 minutes, pour que les membres de cette commission puissent vous questionner pendant les 40 minutes qui peuvent rester après le résumé de votre mémoire. Vous allez vous identifier, identifier l'organisme que vous représentez et les personnes qui vous accompagnent. Merci, madame.

Section Montréal-Décarie de I'ACC(Q)

Mme Delage (Niquette): M. le Président, je me présente, mon nom est Niquette Delage. Je suis vice-présidente de la section locale Montréal-Décarie de l'Association des consommateurs du Canada (Québec) Inc.

A mes côtés se trouve Mme Lucille Brisebois qui est la présidente de notre section locale. Toutes les deux nous faisons partie de l'Associa- tion des consommateurs du Canada depuis une dizaine d'années et nous oeuvrons au Québec.

Je veux tout simplement vous dire que cette association est fondée depuis 1947 et qu'elle oeuvre au Québec également depuis 1947. Elle ne compte que des bénévoles.

Au mois de mai 1978, lors d'une assemblée générale annuelle de notre association, il a été résolu de confier à un comité composé de bénévoles la responsabilité d'étudier la Régie des loyers dans le but de préparer un travail afin de se prononcer sur ce sujet. Nous avons donc entrepris nos travaux comme comité au cours de l'été et nous avons fait des recherches qui nous ont amenés à vous présenter un mémoire. Nous sommes une association de consommateurs et non pas une association de locataires, mais nous avons tout de même un point de vue à faire valoir étant donné surtout le fait que nos deux positions respectives, Mme Brisebois ayant déjà été agent d'immeubles pendant 5 ans et moi-même chroniqueuse de consommation, nous permettent de recevoir des plaintes quotidiennement. Nous sommes donc, je le dis bien, dans la situation de parler du problème du logement dans un sens bien précis, et l'objet de notre mémoire a été de susciter une réflexion. Nous avons eu une approche par succès et erreur étant donné l'étendue du travail et nous avons surtout cherché à expliquer les causes de certaines plaintes, notamment au niveau des hausses de loyer dont nous sommes au courant et au niveau également de certains problèmes qui existent entre les propriétaires et les locataires.

Nous avons donc tenté de faire ressortir certains aspects des questions qui nous intéressaient plus particulièrement et nous avons voulu faire des suggestions concrètes pour corriger des problèmes qui nous apparaissent être à l'origine ou le résultat plutôt de certaines situations.

Nous sommes arrivés à la conclusion, d'abord parce que nous avons eu l'occasion d'en parler avec des membres de notre association de bénévoles et aussi parce que nous avons justement eu l'occasion de consulter des personnes, nous sommes donc arrivés à la conclusion qu'il est nécessaire d'avoir des contrôles.

Cependant dans notre démarche nous avons constaté une chose, c'est qu'il ne semblait pas exister à l'heure actuelle une situation de crise ou d'urgence qui justifierait le renforcement des contrôles tels qu'on les propose. Nous avons donc fait état de cette situation. Cependant, je vais laisser à ma collègue, Mme Brisebois, le loisir de vous expliquer certaines choses à l'intérieur de notre mémoire tout en vous demandant de retenir que c'est bel et bien une réflexion à laquelle nous nous sommes prêtés et dont nous voulons vous faire connaître les fruits aujourd'hui.

Mme Brisebois.

Mme Brisebois (Lucille): Merci! M. le Président, M. le ministre, messieurs de la commission,

notre comité de la Régie des loyers a fait cette étude suite à une résolution acceptée à l'unanimité par l'assemblée annuelle de mai 1978.

Nous avons décidé de ne pas faire de notre mémoire une étude article...

Le Président (M. Laplante): Excusez, est-ce qu'il y aurait possibilité soit d'approcher votre micro ou de parler plus fort?

Mme Brisebois: Parler plus fort, bon d'accord; je vous remercie.

Nous avons décidé de ne pas faire de notre mémoire une étude article par article, ce que nous laissons à d'autres, mais de soumettre à l'attention de la commission parlementaire quelques suggestions pertinentes à la situation présente dans le Québec. Nous nous sommes demandés pourquoi, dans la ville de Montréal particulièrement, les locataires tiennent tellement à pouvoir compter sur la Régie des loyers. Nous avons présentement 33 500 logements vacants dans la région métropolitaine de Montréal.

Nous nous sommes également demandé comment nous pourrions nous dégager un peu de cette réglementation de manière à sauver des fonds publics, sans léser les droits des Québécois et sans les laisser dans une situation aberrante.

Nous en sommes venus à la conclusion que la spéculation sur les maisons d'appartement qui se fait aussi bien à Québec qu'à Sorel, selon nos membres, et surtout dans la ville de Montréal par des investissements étrangers est très importante et est un élément qui fait hausser les prix des logements de façon irrationnelle.

M. Henri Aubin, journaliste à la Gazette, a écrit un livre à ce sujet. Ce livre s'intitule "Les vrais propriétaires de Montréal" et illustre bien que des gens intéressés à l'immobilier à Montréal ont convaincu les investisseurs étrangers de spéculer sur les immeubles d'habitation au Québec. Nous n'avons rien contre cela, mais, quand on investit à un tel rythme dans des immeubles d'habitation pour les revendre immédiatement avec des profits de dizaines de milliers de dollars, les acheteurs haussent sans cesse les loyers de leurs locataires et ce sont les locataires qui en subissent les conséquences. Le logement, c'est vital pour les Québécois. On spécule sur les logements des gens du Québec.

Comme agent immobilier, de 1973 à 1977, j'ai souvent été invitée à visiter des groupes d'investisseurs étrangers qui venaient à Montréal en vol nolisé et qui recevaient les agents immobiliers représentant les courtiers de Montréal pour leur faire part des inscriptions qu'ils avaient à ce moment-là en leur possession. Je dois vous dire que j'avais l'impression qu'on était en train de vendre le Québec, et j'en suis sortie, d'ailleurs.

Dans le livre de M. Aubin, par exemple, aux pages 195 à 201, sont listés les noms et adresses des grands immeubles de Montréal appartenant à des intérêts étrangers. Ce livre de 445 pages nous met devant cette évidence que le dossier de la mainmise étrangère sur l'une des plus grandes villes de l'Amérique du Nord est stupéfiant. M. Aubry a rencontré dans les bureaux de la Régie des loyers, à Montréal, un groupe de 48 personnes qui habitent les logements d'un immeuble d'habitation et qui se plaignaient d'avoir eu à se défendre contre une augmentation de 44% durant deux années consécutives.

Mme France Eymard en était à sa deuxième visite devant la régie et avait à se plaindre de son loyer qui coûtait auparavant $157 par mois pour une pièce et demie et qui avait été augmenté à $210 sans compter la taxe d'eau. Les augmentations des loyers s'échelonnaient de 24% à 44%. Un des locataires, au moment de son plaidoyer, a demandé: Je voudrais savoir qui est le propriétaire de l'immeuble que j'habite. Le préposé à l'administration ne répondit pas. J'insiste, dit M. Berger, qui possède l'immeuble où j'habite? C'est Trading Funds Establishment. Voulez-vous me dire qui est Trading Funds Establishment? M. André Auclair, qui était l'administrateur de cet immeuble, a répondu: Je ne le sais pas. Même lui, voyez-vous, ne savait pas qui était son patron.

M. Auclair, par exemple, ne peut établir les politiques d'ensemble. Il doit obéir à ses patrons, sinon il sera congédié. M. Aubry continue et demande: Mais qui décide de ces politiques et qui empoche les profits? Qui est responsable de l'expansion brusque de Montréal? Bien sûr, la transformation de Montréal dépasse largement ces changements affectant des centaines d'autres immeubles d'habitation à Montréal. En fait, elle touche tout ce qui est construit autour de nous et qui influence nos activités. Par exemple, les autoroutes, les édifices à bureaux, les usines, les centres, les projets domiciliaires aussi. Elle touche également toutes les activités de spéculation, de construction, de démolition, d'achats de terrains, de mises de fonds pour les transactions immobilières et de fabrication de matériaux de construction.

Donc, nous demandons que la spéculation par des propriétaires étrangers soit freinée parce qu'elle cause la hausse des prix qui sont inflationnistes et aussi parce que ces poussées contribuent à déséquilibrer les budgets. Il nous apparaît souhaitable qu'elle soit contenue. Comment? En appliquant au secteur résidentiel la Loi des transferts de terrains à tout propriétaire non-résident au Canada (Loi des transferts de terrains, SQ 1976, c.23) et en décrétant que toute propriété de non-résident qui en est le propriétaire pendant moins de dix ans — on n'est pas tellement sévère, comme vous le voyez — soit présumée avoir été acquise à des fins de spéculation et fasse l'objet d'une taxe de 33 1/3% du prix de vente, indépendamment de l'impôt qu'il a à payer dans son année d'imposition.

Dans la loi en question, cette taxe est perçue au moment de l'achat. C'est donc en assimilant la situation qui peut exister dans le secteur résidentiel à celle qui existait lorsque des terrains étaient achetés par des non-résidents au Canada à des fins spéculatives, ce qui a amené le gouvernement provincial, en 1976, à légiférer en pareille matière,

que l'on contrôlera les achats d'immeubles à des fins purement spéculatives. D'ailleurs, M. Garon s'apprête à déposer au cours de la prochaine session parlementaire un projet de loi qui aura pour but d'interdire la vente de terres agricoles aux non-résidents de la province. J'ai beaucoup vu cela, aussi.

Une autre de nos suggestions est que les logements dits du peuple, soit les duplex, triplex et quadruplex habités par les propriétaires, échappent au contrôle de la future régie du logement quant à la fixation du loyer seulement, parce qu'il existe un type de relation vraiment privilégié entre les propriétaires et leurs locataires.

Deuxièmement, parce que les travaux qui s'y effectuent sont dans la plupart des cas le fait des propriétaires eux-mêmes, et cela, dans le simple but, tout à fait légitime d'ailleurs, de limiter les coûts et, par voie de conséquence, les coûts des loyers. La résultante de cette situation s'impose d'emblée; ces logements sont conservés dans le meilleur état possible, sans subvention et au prix le plus bas possible.

Troisièmement, parce qu'il existe un contrôle véritable du loyer dans ces maisons. Comment cela? Tout simplement parce que les propriétaires ne "courent pas après le trouble", comme on le dit en québécois. Ils choisissent leurs locataires avec lesquels ils entendent avoir d'excellentes relations et ce facteur de bon voisinage les engage très souvent à accepter des locataires à un prix moindre que celui qu'originalement ils avaient fixé.

Il est un fait que le gouvernement ne devrait pas craindre d'admettre: c'est que l'intervention de la loi dans de telles situations a nui aux relations de bon voisinage et que des contrôles plus étroits encore risquent de détériorer davantage. Le maintien en bon état de ces logements étant le mot d'ordre en 1979 et pour les années à venir, selon toutes les probabilités, le temps est venu, d'après nous, pour l'autorité gouvernementale de commencer à faire des distinctions de logements. Merci, je laisse le soin à ma compagne de vous parler de notre mémoire plus longuement, Mme Delage.

Mme Delage: II me reste peu de choses à vous dire, M. le Président, sinon de vous parler d'autres petites recommandations que nous avons faites notamment au sujet de la date de fin des loyers. Le 1er juillet étant jour de fête et étant évidemment un week-end où cela coûte beaucoup plus cher de déménager, nous nous demandions s'il ne serait pas possible, compte tenu d'un certain nombre de facteurs dont celui-là et aussi le fait que les gens qui déménagent à ce moment vont probablement — du moins, c'est l'impression qu'on a tirée d'un certain nombre de plaintes qu'on a eues — éprouver des difficultés à faire faire des travaux, étant donné les vacances de la construction qui s'annoncent presque tout de suite, s'il n'y aurait pas moyen de réviser cette date.

Nous avons fait des suggestions. Elles ne sont évidemment pas exhaustives, mais uniquement pour aider les gens parce que, comme nous le disions abondamment dans notre mémoire, ce qui nous intéresse d'abord et avant tout, c'est la bonne santé économique des citoyens. Comme Association de consommateurs et comme consommateurs nous-mêmes, il nous importe de faire en sorte que les gens en aient pour leur argent et qu'ils ne soient pas soumis à des hausses abusives au point de vue de loyer ou à des prix qui sont nettement doublés dans des cas comme ceux-là pour les déménagements.

Nous avons également demandé, étant donné l'ampleur de la refonte de la loi que — nous avions tout lieu de croire qu'un appareil administratif considérable serait déployé à partir du moment de l'adoption de la loi — les services du soir soient maintenus parce que les gens qui ont l'habitude d'y aller le soir en profitent abondamment. Pour eux, cela veut dire avoir un accès facile à une structure gouvernementale qu'autrement ils devraient consulter ou auprès de laquelle ils devraient se rendre pendant le jour, ce qui veut dire, pour eux, la perte d'une journée de salaire très probablement.

Pour ce qui est du logement à loyer modique, nous avons évidemment pris connaissance d'un certain nombre de documents qui nous indiquent que c'est un logement qui coûte excessivement cher au contribuable et alors nous nous sommes demandé s'il n'y avait pas lieu de réviser un petit peu tout ce concept de manière, justement, à rétablir un petit peu la bonne santé économique des citoyens du Québec, parce que dans certains cas il y a probablement des hausses artificielles du parc de logements, parce que des gens se maintiennent dans ces logements alors, qu'en fait, ils ne devraient plus y être. Nous avons donc demandé à ce que peut-être un mécanisme soit prévu de façon à inciter les gens, qui ne devraient avoir accès à ce type de logement, à le quitter volontairement.

Ensuite, nous avons fait état du fait que nous étions bien heureux de voir les maisons mobiles incluses dans la loi. Maintenant, il n'en demeure pas moins et c'est ce par quoi nous terminons notre exposé, qu'il s'agit là, tout de même, d'une situation incongrue. Voici que l'on force des gens à être des locataires alors qu'en fait ils ne le souhaitent pas nécessairement du fait que les municipalités, traitant comme des parents pauvres les gens qui sont propriétaires de maisons mobiles, les forcent à s'installer à l'extérieur des frontières de la municipalité et donc, d'avoir accès, dans la plupart des cas, à des parcs de maisons mobiles dont ils louent les espaces. Dans les circonstances, nous nous demandons s'il n'y aurait pas lieu de changer un petit peu notre perspective et de permettre aux gens de jouir du droit de propriété amplement comme n'importe quel propriétaire, de sa maison unifamiliale. (10 h 30)

C'est, dans l'ensemble, l'objet de notre travail. Comme je vous le dis, nous n'avons pas voulu, les membres du comité et nous-mêmes, faire un

travail juridique parce que c'est bel et bien une association de consommateurs, de gens qui travaillent bénévolement; nous n'avions pas les sous pour embaucher un avocat qui allait nous donner une étude avec laquelle nous ne serions pas nécessairement d'accord parce qu'elle ne correspondrait pas tout à fait à nos termes ou quoi que ce soit. Nous voulions vraiment étudier les situations dont nous avions personnellement eu connaissance et vous faire part de certaines suggestions, compte tenu de ces situations dont nous avions fait l'étude et pour lesquelles nous jugions qu'il y avait des correctifs ou des améliorations à apporter. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Merci, mesdames. M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, je remercie l'Association des consommateurs du Canada, section Québec, de sa présentation.

On n'a pas donné d'indications quant au nombre de personnes qui faisaient partie de cette association de consommateurs. Est-ce que vous pouvez nous dire combien vous avez de membres en règle? Combien de gens souscrivent? Vous dites: On est bénévole; est-ce qu'on paie une cotisation?

Mme Delage: Voici ce qui se passe. Comme je l'ai mentionné au début, l'Association des consommateurs du Canada existe dans la province de Québec depuis 1947. A partir du moment où le consommateur canadien, sous sa forme actuelle, a existé, on a demandé aux gens de payer des cotisations de $8 pour devenir membres de l'Association des consommateurs du Canada et, évidemment, lecteurs du Consommateur canadien. En 1975, l'Association des consommateurs du Canada, (Québec) s'est incorporée pour des raisons très précises; on la sollicitait de toutes parts pour prendre part à des activités publiques comme des salons agricoles et des choses de ce genre. Etant donné qu'il s'agissait de bénévoles qui dépendaient de subventions, on ne voulait pas engager la responsabilité personnelle des bénévoles. Alors, il y a eu une incorporation en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies en 1975 et c'est alors devenu une association incorporée.

Il y a environ deux ans, l'association nationale a permis l'existence d'un projet pilote au Québec en vertu duquel on demandait aux membres qui étaient déjà là et qui avaient payé la cotisation de $8 d'obtenir une carte de membre à $3 et, évidemment, de solliciter l'adhésion de nouveaux membres qui eux, paieraient $3, ce qui fait que Mme Brisebois et moi avons continué d'être membres de l'Association des consommateurs du Canada en payant $8, mais nous avons également payé $3 pour soutenir l'association au Québec. Celle-ci a maintenant transformé le projet pilote en un fait accompli, c'est-à-dire que pour faire partie de l'Association des consommateurs du Québec — c'est son nouveau nom depuis février — il faut maintenant payer $3, ce qui fait que nous avons une situation un petit peu difficile en ce sens qu'il n'y a que 1000 personnes qui ont payé $3 alors qu'il y en a 14 000 qui ont payé $8 et qui ne sont pas incluses dans l'Association des consommateurs du Québec telle qu'elle existe sous son nom à l'heure actuelle.

M. Tardif: Merci. Si je tente de résumer votre mémoire, votre organisme est favorable à un contrôle des loyers que je qualifierais de sélectif, c'est-à-dire qu'on est d'accord pour qu'il y ait contrôle moyennant des taux de vacances respectés ou atteints. On croit que les petits logements, duplex, triplex et quadruplex occupés par les propriétaires, devraient être exclus.

Donc, on veut soumettre les groupes et les étrangers; c'est, si je comprends bien, le sens du mémoire. On est d'accord avec le principe d'un contrôle, mais on dit: Si le taux de vacances est assez élevé, il ne devrait pas y en avoir. S'il s'agit de petits propriétaires habitant leurs locaux, il ne devrait pas y en avoir et puis on devrait, peut-être, être plus exigeant envers les propriétaires étrangers. Est-ce que cela résume bien...

Mme Delage: Non, non.

M. Tardif: Alors d'accord, je vais vous laisser résumer les trois points essentiels.

Mme Delage: Je voulais d'abord vous dire une chose, c'est que nous avons présenté le mémoire au nom de notre section locale Montréal-Décarie. C'est le comité à l'intérieur de la section locale qui a préparé le travail et la section locale endosse le mémoire. Alors donc, il faut faire cette distinction très précise. Les sections locales ont une vie autonome très précise au sein de l'association. Maintenant, Mme Brisebois va vous préciser davantage notre pensée.

Mme Brisebois: Quand on parle du duplex où le propriétaire habite, on ne parle que de la fixation du prix, parce que les gens ont toujours besoin d'être sûrs de ne pas subir une évasion, de ne pas être mis dehors par le propriétaire. Nous n'allions pas jusque là. Cela se fait, vous savez.

M. Tardif: Remarquez que je comprends bien. Vous voudriez soustraire les duplex, triplex et quadruplex uniquement en ce qui concerne la fixation du loyer.

Mme Brisebois: La fixation du prix, parce que...

M. Tardif: Mais pour le reste, ils resteraient soumis quand même. Pour le reste, j'entends...

Mme Brisebois: Oui, oui. Cela se fait comme cela dans l'Etat du Massachusetts; ils font des distinctions de logement, eux.

M. Tardif: D'accord.

Mme Brisebois: La première pensée, si je peux vous dire, M. le ministre, c'est que cette loi existe et est votée d'une année à l'autre, depuis

presque la dernière guerre. Quand on a vu qu'elle était votée permanente, maintenant, cela nous a un petit peu effrayés. On se demande s'il va falloir avoir un contrôle comme cela ad vitam aeternam. On a essayé de penser comment on pouvait en sortir un peu, pour sauver des fonds, cela coûterait cher.

M. Tardif: On va essayer de cerner ce sur quoi votre mémoire porte essentiellement. Donc, on dit: On est d'accord pour un contrôle et cependant, pour les petits logements, petites unités de logements, duplex, triplex et quadruplex, habités par le propriétaire, on pense qu'il ne devrait pas être soumis à un contrôle. Pourquoi?

Mme Brisebois: Parce que, comme on vous a dit, on pense qu'il y a une relation de bon voisinage avec ces gens. Le propriétaire choisit son locataire et puis pour avoir des relations de bon voisinage, parce que les dépenses sont moindres, un propriétaire bien souvent fait ses réparations lui-même. Je sais que, de toute façon, dans ces duplex... Si vous me permettez, je vais vous donner un cas que je connais très bien. La Régie n'arrive pas, de toute façon, à être juste pour tout le monde, ni pour le propriétaire ni pour le locataire. Vous allez avoir dans le même duplex deux propriétaires d'une maison identique. Parce qu'en haut, son locataire n'est jamais parti, il va avoir $180 et l'autre à côté a $250, vous savez. Il y a une certaine irrégularité comme cela. C'était une suggestion pour tenter que l'on s'en défasse un peu.

M. Tardif: Je me demandais si, par hasard, votre suggestion, comme vous l'appelez, aurait pu être fondée sur une étude empirique des hausses de loyers, dans les duplex, triplex et quadruplex, par opposition aux grands immeubles. Est-ce que vous avez fait un relevé? Est-ce que votre association, par exemple, a fait un relevé des demandes d'augmentation de loyers dans les petites unités et dans les grandes, pour dire: Bien, dans les petites ce n'est pas abusif. Est-ce que vous avez un relevé?

Mme Brisebois: Réponds si tu as quelque chose.

Mme Delage: Non, on n'a pas poussé l'affaire aussi loin. Je dois dire que les documents sur lesquels nous nous sommes fondés, ce sont des documents publics et on ne faisait même pas cette distinction. Comme on l'a mentionné au début, on est vraiment, vraiment dans notre travail, parce qu'on a eu l'occasion de travailler avec d'autres gens. Notamment des avocats qui vont régulièrement représenter des locataires devant la Régie des loyers et puis aussi d'autres personnes. On a constaté qu'il y avait des situations un peu difficiles de ce côté. Et de l'avis même de certains juges de la Régie des loyers, ils ont de la difficulté, à un moment donné, à appliquer une règle qui soit uniforme. Ils ont conscience, par moments, qu'il y a des situations qui mériteraient une décision différente de celle qu'ils sont obligés de rendre.

Alors c'est un petit peu compte tenu de tout ce contexte et également d'expériences personnelles que nous avons vécues, que nous avons décidé de cette approche dans le mémoire. Nous avons, comme je vous ai dit, procédé par erreur et succès, parce que nous avons eu différentes façons de regarder le problème au cours des mois.

M. Tardif: Je posais la question, parce qu'il aurait pu se produire que, par exemple, votre organisme aurait procédé à une espèce de relevé ou de sondage auprès de ses membres, selon qu'ils habitaient de petits ensembles ou de grands ensembles, pour voir à quelles sortes d'augmentations ils auraient été soumis. Si je vous pose la question, c'est que cela aurait donné une espèce de fondement, disons empirique, à la représentation, parce que, malheureusement, même si on peut effectivement croire qu'il y a cette relation privilégiée, parfois, dans de petits locaux d'habitation, entre un propriétaire et son locataire, les données dont nous disposons à la Régie des loyers, pour l'année 1977 — dernière année complète dont les statistiques ont été produites, celles de 1978 ne sont pas disponibles... Je vais vous citer des chiffres et vous pourrez les prendre en note. Dans les immeubles où il y a un logement offert en location, la demande moyenne d'augmentation en 1977, dans tout le Québec, a été de 27%; je dis bien dans les immeubles où il n'y a qu'un seul logement: 27%. Dans les immeubles où il y a deux et trois logements la demande moyenne d'augmentation au Québec en 1977 a été de 24,1%. Dans les immeubles de 4 à 20 logements: 21,4%. Dans les immeubles de 21 à 100 logements: 18,3% et dans les immeubles de plus de 100 logements: 18,2%; pour une moyenne québécoise, pour tous les types de logements, de 20,7%.

Vous voyez que la corrélation est parfaite, c'est-à-dire qu'il y a une relation inversement proportionnelle entre la taille des immeubles et le pourcentage d'augmentation demandé.

Mme Delage: Je comprends, mais vous distribuez les coûts à partir du moment où vous avez un édifice à plusieurs logements. Il faut savoir exactement pourquoi ces gens ont demandé des augmentations de 27%; vous dites des édifices à un logement, alors il faut étudier, évidemment, le facteur de l'évaluation, le facteur de la taxation, le coût des réparations, les coûts de remplacement, etc.

M. Tardif: Les mêmes facteurs jouent exactement pour tous les types de logements.

Mme Delage: Je comprends, mais quand vous partagez les dépenses entre plusieurs, ce n'est pas la même chose.

M. Tardif: C'est ça.

Mme Brisebois: II y a aussi la question de l'évaluation. On a beaucoup de problèmes à Montréal, particulièrement dans Notre-Dame-de-Grâce où l'évaluation de nos propriétés a telle-

ment monté; cela joue encore. C'est bien entendu que le propriétaire est motivé par toutes ces considérations, mais on sait aussi que bientôt il y aura un rapport de votre ministère. On l'attend.

M. Tardif: Je pense qu'il est important de faire état de ces données pour démontrer que, précisément, c'est peut-être dans les petits ensembles que les demandes sont les plus fortes.

Deuxième point — et je vais terminer là-dessus — vous dites: II ne devrait pas y avoir de contrôle pour les duplex, triplex et quadruplex — précisément de petits ensembles — à des fins de fixation du loyer, s'ils sont habités par le propriétaire. Or, imaginons qu'un propriétaire habite son triplex — donc ce n'est pas contrôlé — Tout à coup, il déménage; là, ça redevient contrôlé — donc pendant un certain temps les prix sont contrôlés — Ensuite, il retourne dans son logement; on aurait ainsi des immeubles qui seraient contrôlés, décontrôlés, contrôlés et décontrôlés? Enfin, vous avez examiné cette situation.

Mme Brisebois: II va en habiter seulement un à la fois.

Mme Delage: Non, ce n'est pas ça. Je vous avoue que c'est le genre de chose qui peut certainement se produire, mais, dans le texte de loi que j'étudiais encore hier soir, les mêmes situations, au sujet d'autres événements, pouvaient également se produire. Finalement, on a prévu une situation et, advenant un changement de situation, le décontrôle s'exercerait.

M. Tardif: Vous avez des exemples de cela, madame?

Mme Delage: Malheureusement, je ne l'ai pas en tête, mais ça m'avait frappée; je vais essayer de vous le trouver.

M. Tardif: Je m'excuse et je vous remercie.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Merci, M. le Président. Je veux d'abord vous féliciter pour votre mémoire qui semble tenir compte des deux côtés de la médaille; on reçoit très rarement un mémoire qui accepte l'idée qu'il y a les droits du locataire et ceux du propriétaire et qu'il faut chercher un équilibre. C'est très bien à cet égard. (10 h 45)

Je pense que je vais poursuivre un peu la ligne de pensée du ministre. Vous avez divisé vos propriétaires en trois groupes, les petits, les grands Québécois et les grands si vous voulez étrangers. Cette question du comportement des trois, la comparaison entre eux, c'est quelque chose qui m'intéresse énormément. Vous avez un peu parlé du comportement des petits propriétaires comparé avec celui des grands. Est-ce que vous avez quelques informations sur le comporte- ment des propriétaires étrangers par rapport aux propriétaires canadiens ou québécois? Par exemple, pour moi on ne peut pas prendre pour acquis que si un propriétaire habite la Floride et qu'il est propriétaire d'un immeuble à Montréal que son comportement sera différent au début inévitablement, simplement dû au fait qu'il n'habite pas Montréal. Au contraire, je pense qu'il y a pas mal de propriétaires québécois et canadiens maintenant qui sont propriétaires d'immeubles en Floride et je ne suis pas certain que le comportement envers le locataire en Floride soit très différent que celui qu'il peut avoir envers le locataire à Montréal.

J'ai lu l'affaire de M. Aubin, dans les journaux parce que c'était expliqué au complet. Il a beaucoup parlé du fait, de la réalité de mainmise des étrangers sur nos logements, mais il n'a pas parlé du tout, d'après moi, de cette question de comportement.

Alors, vous dites que c'est la spéculation, je pense qu'on ne peut pas prendre pour acquis que la spéculation dans les immeubles est réservée aux étrangers et je pense qu'on ne peut pas prendre même pour acquis que la spéculation dans les logements mène inévitablement aux hausses de loyer. Dans tout ce domaine, j'aimerais avoir vos commentaires simplement pour que nous puissions avoir une meilleure idée de la nature des lois et des règlements qu'il faut faire.

Mme Delage: C'est dans un contexte purement de spéculation et là où cela existe, nous aimerions que ce soit freiné. Entre autres dans son volume, M. Aubin fait état justement de certaines activités par des propriétaires étrangers. Nous disons d'ailleurs très bien que la spéculation trotte dans la tête de tout le monde tant des Canadiens que des étrangers. Alors, évidemment, on n'est pas, comme on dit, naïf au point de croire que cela se passe uniquement dans le cas des gens qui viennent de l'extérieur.

Il n'en demeure pas moins que ce qui arrive... C'est pour cela que nous avons fait la suggestion de la freiner là où il y a des reventes de propriétés très rapidement, voyez-vous. C'est qu'il en fait mention dans son volume, bien souvent les propriétés sont achetées et revendues très rapidement après que l'on a évidemment tiré tout ce qu'on pouvait de ces propriétés. Ils les revendent à des prix beaucoup plus élevés pour une raison très simple, c'est qu'ils sont capables d'après les livres de montrer des augmentations de loyer assez considérables si les gens ne prennent pas la peine d'assez se plaindre à la régie. Il y a beaucoup de gens qui ne se plaignent pas à la régie pour toutes sortes de raisons. Alors, les ventes deviennent très avantageuses et cet argent n'est pas nécessairement réinvesti ici.

Alors, c'est vraiment dans un contexte où il y a de la spéculation pure et simple où on dit... Mais peut-être, je pense, que c'est un fil de pensée qui existe à travers notre province depuis un fort bout de temps et qui se précise de plus en plus. Il faudrait que les Québécois profitent des...

M. Scowen: Alors, si je comprends votre commentaire. Premièrement, vous me dites qu'on ne peut pas dire que pour les locataires si le propriétaire est soit Québécois, soit étranger il n'y a pas nécessairement — mettons la question de spéculation de côté — en ce qui concerne la résidence du propriétaire vous n'avez pas réalisé, vous n'avez pas vu de différence de comportement entre les deux, en ce qui concerne la résidence du propriétaire?

Mme Delage: C'est-à-dire qu'il y en a un qui est beaucoup plus accessible que l'autre. Quand vous êtes obligés de...

M. Scowen: Est-ce que c'est bien ou est-ce que c'est accessible. Est-ce que c'est bon d'être accessible ou non?

Mme Delage: A partir du moment où vous n'êtes pas capable de savoir qui prend les décisions et que vous n'êtes pas capable de faire valoir votre point de vue, ce qui était le cas de différents locataires qui cherchaient à se faire expliquer des hausses...

M. Scowen: Je veux poursuivre ce point-là. Si j'habite un hôtel qui appartient à Hilton ou un hôtel qui appartient à un propriétaire du village, je pense que c'est plutôt la question de l'administration de l'hôtel, que la résidence du patron, le fait que je ne connaisse pas le propriétaire. Je prends l'exemple de l'hôtel mais je pense que cela va aussi pour un appartement. Est-ce que vous avez vraiment remarqué une distinction entre l'administration des appartements qui appartiennent aux étrangers et l'administration des appartements qui appartiennent aux Québécois?

Mme Delage: ...

Mme Brisebois: M. Golder qui parlait de son appartement disait ouvertement que depuis que ces gens-là étaient là tout était négligé dans la maison. Evidemment, ce n'est pas tellement... On n'en veut pas du tout au fait que ces gens soient étrangers mais c'est que, quand vous considérez que ces gens-là, les Européens, aujourd'hui, ne peuvent plus investir en Europe comme ils peuvent le faire ici... ils ne peuvent pas faire de l'argent en Europe en investissant dans l'immeuble comme on peut en faire au Québec. Ils n'en ont plus le droit maintenant. La Suisse ou le Liechtenstein ne vendent plus de terrain parce que, à un moment donné, un groupe italien a acheté une si grande étendue de terrain que cela les a effrayés. Alors, quand ces gens arrivent ici pour investir... on parle des plus gros de l'Europe; on parle des investisseurs du Liechtenstein, on parle de ceux de la France; on parle des Rothschild; ce sont des gens qui ont des fortunes immenses et il faut commencer à penser à quel moment on va arrêter cette spéculation; j'en ai été témoin tous les jours.

M. Scowen: Oui.

Mme Brisebois: II faut savoir à un moment donné... Il faut commencer à y penser parce que cela fait bouger plus que seulement l'immeuble.

M. Scowen: Je ne parle pas de la spéculation en soi; je parle au nom des locataires et je vous demande...

Mme Brisebois: Les locataires se plaignent.

M. Scowen: Est-ce que vous pensez que c'est mieux pour les locataires d'avoir un propriétaire qu'ils connaissent personnellement? Est-ce qu'il y a quelque chose là-dedans?

Mme Delage: On ne l'a pas regardé dans ce sens et, comme on l'a dit, on n'est pas là pour porter préjudice à qui que ce soit. On est devant une situation de fait; ces logements coûtent bien cher dans certains cas et les plaignants disent: On a supprimé des services; l'état de détérioration des logements, du fait que ces gens ne s'en occupent pas, qu'il n'y a pas moyen de les rejoindre ou quoi que ce soit, est telle que nous sommes pénalisés. Quand nous avons commencé à habiter ici, nous payions tant et, en fonction de l'évaluation foncière, en fonction de la taxation, on devrait normalement avoir des hausses de loyer justifiées, mais il y a beaucoup de ces hausses de loyer qui ne sont pas justifiées. Quand ils cherchent à avoir des réponses, ils n'en ont pas.

M. Scowen: Je vais passer la parole au député de Saint-Hyacinthe, mais je veux simplement terminer en vous racontant une petite histoire que cette conversation me rappelle. Daniel Latouche, devant la commission Pépin-Robarts — on parlait du Canada anglais et du Canada français — disait: Quand on va commencer à se connaître davantage, ce n'est pas du tout certain qu'on va s'aimer davantage.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci, M. le Président.

D'abord, je tiens à vous remercier pour votre participation concrète à cette commission et, pour continuer dans la même ligne de pensée que le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous avez parlé tantôt des hausses non justifiées; par contre, ces locataires, est-ce qu'ils se sont adressés à la commission des loyers dans le passé et est-ce qu'ils ont obtenu les renseignements que le propriétaire doit fournir pour justifier la hausse de son loyer? Quelles furent les décisions de la régie en ce sens? Est-ce qu'elle a donné satisfaction à ceux qui s'y sont adressés?

Mme Brisebois: Ils ne nous parlent pas de ce qui est finalement arrivé.

Mme Delage: Oui, ils nous disent que les augmentations ont été ramenées à 8%. Dans le cas de la dame dont l'augmentation était de 44%, la régie a évidemment rendu une décision et cela a été ramené à 8% dans son cas.

M. Cordeau: Alors, ceux qui ont eu recours à la régie ont eu satisfaction.

Mme Delage: Oui, certainement.

Mme Brisebois: Oui, c'est pour cela qu'on n'est pas contre la régie.

M. Cordeau: Tantôt, vous avez mentionné, au début de vos remarques, qu'à Montréal il y avait environ 3500 logis vacants.

Mme Brisebois: 33 500.

M. Cordeau: 33 500, oui. Maintenant, est-ce que vos recherches ont été poussées assez loin pour nous dire dans quelles catégories de logements vous pouvez cataloguer ces vacances?

Mme Brisebois: C'est du logement trop cher pour les gens qui auraient besoin de changer de logement. Les gens, aujourd'hui, ne peuvent plus se permettre ces logements parce que dans l'intervalle les coûts ont beaucoup monté; on sait ce qui est arrivé à Montréal. Il y a aussi des problèmes d'évaluation qui font monter les coûts; il n'y a pas seulement le loyer. Quand le propriétaire...

Mme Delage: Par contre, je crois que ce que vous avez en tête, ce sont des catégories de logements...

M. Cordeau: Oui.

Mme Delage: ... à savoir, des trois et demi, des quatre et demi dont les gens sont plus ou moins friands et qui sont...

M. Cordeau: D'ailleurs, vous avez répondu à une partie de mon interrogation lorsque vous avez spécifié...

Mme Delage: Trop chers et pas assez grands. M. Cordeau: ... des logements dispendieux.

Mme Brisebois: C'est-à-dire dispendieux compte tenu des moyens des gens. Il faut tenir compte du fait que le coût des aliments, au mois de janvier, a augmenté de 3%. Que faites-vous? Tout le reste augmente en conséquence. Finalement, vous êtes obligé de couper quelque part. On ne devrait pas être obligé de couper ni sur le logement, ni sur la nourriture.

M. Cordeau: Alors...

Mme Brisebois: C'est là mon point principal. On spécule avec le logement des Québécois et je trouve cela très dangereux. C'est une situation regrettable. Sur l'alimentation, c'est la même chose.

Mme Delage: Ce qui n'empêche pas qu'il y a également des propriétaires québécois qui spéculent aussi. C'est bien évident. Mais on s'est attardé à cet aspect de la question parce que dans certaines de nos sections locales, on nous a dit que cette situation existait également et qu'il y avait là aussi beaucoup de spéculation.

M. Cordeau: L'argent n'a pas de couleur... Mme Delage: Voilà.

M. Cordeau: Vous comprenez. On peut déduire que, pour ceux qui sont capables d'en payer le prix, il y a des logements disponibles. C'est-à-dire que...

Mme Brisebois: Dans le moment, il y a 33 500 logements, il y a des immeubles d'habitation, à Montréal, qui sont complètement vides.

M. Cordeau: Le problème, c'est que c'est un manque de logements pour des personnes à faible ou à moyen revenu.

Mme Brisebois: Pour des personnes à faible revenu, des logements assez grands.

Mme Delage: ... loger dans des endroits qui ne seraient peut-être pas maintenus comme ce serait souhaitable parce que c'est considérer le logement à prix modique comme étant un logement qui se détériore relativement vite.

M. Cordeau: Je crois qu'à l'intérieur de ce projet de loi, il y aura des clauses pour rendre les logements plus salubres, ainsi de suite, avec une certaine réglementation qui doit venir par la suite et que le ministre nous a informés qu'il déposerait devant cette commission avant l'étude de ce projet de loi article par article.

Mme Delage: Ce que nous faisions remarquer, aussi, c'est que dans notre démarche, pour arriver, à un moment donné, à se prononcer, on constatait d'abord ce fait qu'il y a un parc résidentiel considérable disponible qui n'est pas utilisé jusqu'à un certain point. On se disait: Normalement, des contrôles existent quand il y a une situation de rareté ou quand il y a une situation de surenchère ou de crise. Pourquoi semble-t-il y avoir un renforcement des contrôles, alors qu'en principe, ils devraient diminuer?

On en est venu à la conclusion que des contrôles s'avéraient nécessaires malgré tout cela.

M. Cordeau: Ce qu'il faut, c'est peut-être une aide gouvernementale ou des politiques afin d'insister sur la rénovation des logis qui ne sont pas...

Mme Brisebois: ... de loyers.

Mme Delage: La Société centrale d'hypothèques et de logement préconise cela.

M. Cordeau: ... qui ne sont pas habitables ou dont...

Mme Delage: C'est-à-dire que la rénovation, la remise en état et la politique officielle de la Société centrale d'hypothèques et de logement, d'après les documents que nous avons, c'est justement de favoriser cela. C'est la même chose à la Société d'habitation du Québec parce que nous avons là une disponibilité dont il faut tirer parti.

M. Cordeau: Par contre, cela ne doit pas répondre d'une façon efficace à la réalité parce qu'il y a un manque flagrant de logis pour les personnes à faible revenu.

Mme Brisebois:... qu'il y a eu trop de maisons construites, à un moment donné. C'est reconnu. Cela allait tellement bien avec la Société centrale d'hypothèques et de logement, les fonds étaient faciles. Il y a eu un moment où ils ont trop construit et il y a eu un moment, aussi, où les coûts ont augmenté au point que cela a fait augmenter le prix des loyers. Ces logements ne sont plus d'un prix accessible et ne sont pas assez grands. Les petits logements, aujourd'hui, ne sont pas convenables pour une famille.

Mme Delage: D'ailleurs, il y a une autre chose qu'on mentionne dans le mémoire à la page 6, c'est que dans la région métropolitaine de Montréal, par exemple, on a des soubresauts continuellement. A un moment donné, en 1968, il y a eu une demande de 5000 logements. En 1973, 22 500, 4500 en 1977-1978. Vraiment, c'est très difficile, à cause de cette instabilité, d'arrêter des politiques à long terme. C'est pourquoi, tout en reconnaissant la nécessité de maintenir des contrôles à certains égards et d'inclure dans la loi des choses qui n'y étaient pas auparavant et qui nécessitent vraiment d'y être, nous aimerions bien qu'éventuellement, les contrôles diminuent en fonction des situations nouvelles qui existent.

M. Cordeau: Est-ce que vous pouvez expliquer cette forte diminution de 22 500 en 1973 à 4500 en 1977-1978? (11 heures)

Mme Brisebois: La demande... bien, c'est pour cela que justement, on avait pris ces remarques d'une espèce de conférence qu'avait donnée quelqu'un, un exposé de la société centrale, et c'est là que ce n'est pas facile de prédire d'avance ce qui va arriver d'une année à l'autre. Cela dépend de...

Mme Delage: C'est pour certains types de logements...

Mme Brisebois: ...

Mme Delage: C'est justement ce que vous disiez au point de départ et...

Mme Brisebois: ...

Mme Delage: ... on fait le tour. On en est à boucler le cercle et alors, vraiment, c'est cela. Il y a, en ce moment, une restriction du côté, à tout le moins, de la Société centrale d'hypothèques et de logement au sujet des constructions neuves, parce qu'il y a trop de disponibilités, trop de logements disponibles. Ceux qui répondent à des besoins précis doivent être rénovés, remis en état, justement pour permettre aux gens qui en ont besoin d'y avoir accès.

M. Cordeau: C'est-à-dire qu'on rencontre peut être deux principes. Actuellement, il y a insuffisance du revenu d'une partie de la population à payer un logis convenable et un autre, c'est que l'incapacité du mécanisme du marché a fourni des loyers qui répondent à la demande de la population.

Mme Delage: J'ai l'impression que cela a été un manque de planification à un moment donné, c'est-à-dire qu'on s'est lancé dans la construction de certains types de logements pour répondre à des besoins qui étaient à la mode, disons, à ce moment et que, par la suite, bien des gens se sont désintéressés. Ils ont cherché à avoir d'autres types de logements et, à ce moment, il y avait peut-être moins de possibilités pour eux d'y avoir accès.

Le Président (M. Laplante): Le député de...

M. Cordeau: Un instant, M. le Président. Le Président (M. Laplante): Oui, d'accord.

M. Cordeau: Depuis le début de cette commission, on a mentionné que l'augmentation des loyers soit à un taux fixe comme dans plusieurs provinces. De cette politique d'un taux fixe, qu'en pensez-vous?

Mme Brisebois: Je pense qu'un taux fixe ce serait peut-être bien heureux pour le locataire, mais je ne sais pas, il faut penser... on n'est pas maître, non plus, de la hausse des taxes et la hausse des évaluations et tout cela. Vous pouvez vous empêtrer dans un dilemme avec cela aussi, à un moment donné.

M. Cordeau: Mais avec le taux fixe, je crois que le propriétaire pourrait...

Mme Delage: C'est-à-dire qu'il est déterminé par la régie, compte tenu d'une foule de facteurs et si ma mémoire est bonne, j'ai ici un document qui me dit qu'en principe, cela doit être entre 8% et 10%. Disons, qu'on s'est fixé cela comme barème: 8% et 10% et que pour 1977, je crois, c'était 9,1% qui avait été accordé dans l'ensemble, compte tenu de toutes les dépenses auxquelles les propriétaires avaient à faire face et les choses de ce genre. Alors, le taux fixe, je pense qu'il existe presque en principe ici. En pratique, on varie entre deux points.

M. Cordeau: Merci.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Taschereau.

M. Guay: Très brièvement, M. le Président, puisque le ministre a déjà traité abondamment de la question, de la différence qu'on nous propose de faire entre un logement dont le propriétaire est un occupant et un logement dont le propriétaire n'est pas un occupant...

Sur la question de spéculation, le député de Notre-Dame-de-Grâce en a parlé et je vous avoue que je ne vois pas très bien en quoi, effectivement, les spéculateurs étrangers sont plus vilains que des spéculateurs québécois et pourquoi est-ce qu'il faut restreindre la spéculation uniquement dans le cas des étrangers et qui sont des étrangers en l'occurrence? Est-ce que ce sont des compagnies qui ne sont pas incorporées au Québec? Est-ce qu'ailleurs au Canada, cela devient des étrangers? Est-ce que les compagnies fédérales, ce sont des étrangers? Enfin, bref, qui est l'étranger et qui est le Québécois, en l'occurrence, et pourquoi certaines compagnies québécoises seraient-elles, a priori d'une meilleure nature que les compagnies étrangères dans ce domaine? Je n'ai pas l'impression que...

Mme Brisebois: Les Québécois n'ont pas de millions...

Mme Delage: On l'a bien dit: On est complètement conscient du fait qu'il y a des spéculateurs québécois comme il y a des spéculateurs étrangers. Je le répète encore une fois, compte tenu de l'expérience vécue de Mme Brisebois en tant qu'agent d'immeuble et également de certaines recherches qu'on a faites, on a décidé de façon spécifique, et cela a été volontaire, de s'attarder à cet aspect de la question. Nous n'avons pas discuté du problème des gens qui sont des propriétaires ici, parce qu'il y a une façon de les contrôler. Il y a toujours des façons de les contrôler. Là, ce qu'on voulait surtout, c'est — et on le disait clairement — empêcher qu'il y ait des hausses de loyers abusives qui ne soient justifiées, notamment, compte tenu du fait que beaucoup de gens ne se plaignent pas à la Régie des loyers. On en est conscient.

M. Guay: Mais à ce moment, c'est une question qu'on a posée à d'autres groupes et je vous la pose: II y a essentiellement deux approches possibles, deux façons de concevoir le fonctionnement de la Régie des loyers, si on se fie à l'expérience qu'on a au Québec et à l'expérience qui est en vigueur ailleurs, au Canada entre autres; ou bien — c'est la démarche qui a été suivie jusqu'à présent et c'est la démarche qui est proposée, du moins dans le projet de loi 107, tel qu'il est à l'heure actuelle — c'est le locataire qui a le fardeau de la démarche. S'il n'est pas content de l'augmentation proposée, c'est lui qui a le fardeau d'aller à la régie. Là vous dites: II y a beaucoup de locataires qui n'y vont pas et vous avez tout à fait raison.

L'autre démarche: — l'Ontario est un bon exemple de ça — le gouvernement de l'Ontario fixe un taux moyen annuel, au-dessus de ce taux moyen — mettons que c'est 6% — tout propriétaire qui veut une augmentation plus élevée doit aller à la régie, ce qui n'empêche pas un locataire de contester une augmentation en-deçà du taux moyen. Je vous pose la question: Quant à vous, est-ce que je dois comprendre, d'après ce que vous venez de me dire, que vous préféreriez que nous adoptions l'approche ontarienne plutôt que l'approche qui a traditionnellement été celle du Québec en la matière?

Mme Delage: Cela dépend des circonstances et de la situation qui existe en Ontario, avec laquelle je ne suis pas tellement familière. Nous avons un document de l'Ontario, justement au sujet de leur réforme; j'avoue que je l'ai lu et que je ne m'y suis pas trouvée terriblement à l'aise. La seule chose, puisqu'on a commencé à parler de la spéculation des étrangers — encore une fois si on a décidé de s'attarder spécifiquement à cette question, c'est parce qu'on avait des raisons de le faire — c'est qu'on voudrait que ces gens restent propriétaires et s'occupent des logements tout en traitant les locataires actuels d'une façon valable et en ne cherchant pas uniquement à tirer de ces propriétés des revenus qui, éventuellement, vont sortir d'ici pour aller ailleurs, etc. Alors, c'est vraiment dans une perspective de bonnes relations... Comment pourrais-je dire? Si on a parlé d'imposer une taxe à ces gens au moment où ils vendent alors que, en fait, dans les transferts de terrains — la loi adoptée en 1976 — la taxe s'applique au moment de l'achat, c'est de façon à les décourager de faire ce qu'ils font, c'est-à-dire de faire de l'argent sur le dos des gens qui, dans beaucoup de cas, ne se défendent pas.

M. Scowen: Est-ce que je pourrais poser une question sur le même sujet? En ce qui concerne cette expression "spéculation", — je pose la question également au ministre, c'est simplement à titre d'information — est-ce qu'il existe une définition de "spéculation" dans le domaine du logement? J'imagine que, en effet, chaque vente ou achat d'un immeuble, une maison, un logement que vous n'habitez pas vous-même est en effet de la spéculation; du moins en ai-je l'impression. Si vous ne l'habitez pas vous-même, vous l'achetez et vous la vendez pour faire des profits; je pense que c'est ça. Si ce n'est pas ça, qu'est-ce que c'est la "spéculation" et est-ce qu'il existe, à l'heure actuelle, des études qui démontrent les liens entre la spéculation — comme définie — et la hausse des loyers? Est-ce que la spéculation et la hausse des loyers sont liées? Y a-t-il des études, quelle est la réalité des liens entre les deux? Y a-t-il quelqu'un qui a les données sur ce sujet?

Mme Brisebois: Ce qu'on nous dit à la Régie c'est que, jusqu'à il y a quelques années, les gens

qui allaient là étaient plutôt des gens défavorisés qui ne pouvaient pas vraiment payer et qui avaient besoin d'aide, mais ceux qui y vont maintenant... vous avez une nouvelle classe de gens qui vont à la régie et ce sont les gens qui habitent les grands "buildings". Il y a spéculation, pour moi, quand une personne achète un immeuble et le revend immédiatement pour faire un profit, qui fait ça constamment. Il y a des courtiers qui le font et...

M. Scowen: ...

Mme Brisebois: Une chose si vous me le permettez, monsieur. Moi, ce qui m'a scandalisée c'est cette publicité qui dit aux gens, en Italie, de venir spéculer spécialement dans la province de Québec; on ne les invite pas au Canada, on les invite dans la province de Québec.

M. Scowen: Mais si un immeuble de 100 logements est vendu et revendu dix fois au cours d'une année, est-ce que ça veut dire qu'il y aura une hausse de loyer?

Mme Brisebois: Cet homme vend parce qu'il fait un profit.

M. Scowen: Est-ce qu'il y a un lien? C'est une chose sur laquelle on a des données n'est-ce pas?

Mme Brisebois: Oui, comment voulez-vous qu'il n'y ait pas un lien? Le type qui l'achète ne va pas perdre, son investissement doit lui rapporter. Alors, il faut que ça se...

M. Scowen: A-t-on des données qui démontrent que si quelque chose est vendu toutes les semaines, pendant deux ans, les loyers vont augmenter?

Mme Delage: Ce n'est pas comme cela que ça se passe.

M. Scowen: Je vous pose la question, je ne le sais pas.

Mme Delage: C'est une hypothèse que vous émettez. Dans la réalité des faits... C'est hypothétique.

Mme Brisebois: Le loyer va augmenter une fois par année et ce sera à tous les ans qu'on réglera la question du loyer. C'est le dernier propriétaire qui va avoir le loisir d'augmenter le loyer de 44% ou 45%.

Mme Delage: Si on le laisse faire. Mme Brisebois: Si on le laisse faire.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Taschereau.

M. Guay: En terminant, M. le Président, j'ai pris bonne note de ce que vous dites au sujet de la difficulté de déménager le 1er juillet. Comme c'est l'ancien gouvernement qui avait fixé cette date, j'imagine qu'ils prenaient pour acquis qu'un jour nous cesserions de fêter le 1er juillet.

Mme Brisebois: ... une erreur.

M. Guay: Peut-être qu'effectivement nous cesserons bientôt de le fêter.

M. Cordeau: Cela va peut-être être la fête de l'association, dans ce temps-là.

M. Guay: On verra. Quand vous parlez des HLM et que vous dites que le revenu d'une personne qui habite dans les HLM peut augmenter et qu'il faudrait trouver un moyen — ce sont vos paroles — de les inciter à quitter les lieux, est-ce que c'est fondé sur des faits ou si c'est une impression que vous avez que les revenus des gens dans les HLM ou du moins de certaines personnes qui habitent dans les HLM augmentent?

Mme Brisebois: J'en ai discuté avec des architectes et effectivement c'est ce qui arrive.

M. Guay: Avec des architectes?

Mme Brisebois: Oui, des architectes qui ont à construire ces immeubles. Cela se produit beaucoup.

M. Guay: Est-ce que vous en avez discuté avec des offices municipaux d'habitation qui ont la charge de les administrer? Parce que c'est eux, au fond, qui savent quels sont les revenus des gens qui y habitent.

Mme Delage: Non. J'avoue que cet aspect de la question, je n'y ai pas touché. Je vais dire une chose. Ce qu'on a constaté, c'est que ces logements sont très coûteux, je veux dire au point de vue de la construction, de l'entretien et tout cela. Ce que j'avais noté dans le projet de loi, c'est qu'il était question, par exemple, qu'une personne qui habite un HLM et qui, à un moment donné, subit une baisse de revenu peut demander à son locateur d'être relogée en fonction des revenus qu'elle a maintenant. Si, par la suite — je ne me souviens pas de l'article, malheureusement, c'est vers la fin — cette personne a une possibilité d'avoir de meilleurs revenus, elle devra être relogée, encore une fois, selon ses revenus. Par contre, on ne parle pas du tout — et c'est ce que je souligne dans le mémoire — des gens dont les revenus montent de façon constante et qui, dans beaucoup de cas, s'agrippent à ces logements et empêchent des gens qui auraient besoin de les occuper, de s'y loger.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Rosemont, dernière question.

M. Paquette: J'aimerais vous remercier pour votre mémoire. Je pense également qu'il faut faire des distinctions entre les classes de logement. Je

pense que toutes les raisons que vous amenez pour faire une distinction entre les petits logements occupés par leur propriétaire et les autres sont justifiées, je pense, mais de là à dire qu'il faudrait exempter ces logements d'un contrôle des loyers, c'est une autre question. On pourrait peut-être modifier les procédures devant la régie de façon à tenir compte des arguments que vous nous amenez.

Je me base sur le fait suivant. Si on regarde les augmentations moyennes demandées à la régie suivant l'âge de l'immeuble, c'est une autre série de chiffres qui est intéressante. On constate que, pour les logements construits avant 1949, l'augmentation moyenne est de 24%. De 1940 à 1954, 21%. De 1955 à 1969, 20% et, pour les logements construits après 1970, 17.3%. Autrement dit, plus le logement est vieux, plus l'augmentation demandée est élevée. Je pense que cela s'explique peut-être, en partie, par les coûts de rénovation. On constate également qu'il y a une coïncidence avec ce que vous constatez, c'est-à-dire le taux de vacance. C'est dans les logements les plus vétustes que les taux de vacance sont les plus faibles.

Mme Delage: C'est parce que les propriétaires les ont abandonnés ou estiment que cela leur coûterait trop cher pour les remettre à neuf. A ce moment-là, ils seraient obligés de demander des loyers considérables.

M. Paquette: Vous ne pensez pas qu'il y a également le phénomène que vous avez mentionné tantôt. Vous constatez qu'il y a un taux de vacance relativement élevé mais je pense que, suite à la discussion, vous devriez être prêts à accepter que c'est dans certaines catégories de logement. Vous l'avez dit vous-même.

Mme Delage: Oui. On le savait, au point de départ.

M. Paquette: Sur les logements les plus élevés et qui sont également les plus récents. Si on relevait certaines catégories d'immeubles de tout contrôle... (11 h 15)

Mme Delage: Pas de tout contrôle. On en avait précisé un seul.

M. Paquette: Concernant le contrôle du loyer. Mme Delage: Seulement la fixation du loyer.

M. Paquette: Oui. On aurait une tendance à la réduction des écarts entre les catégories de logements. Vous n'avez pas l'impression que, à un moment donné, si les écarts devenaient trop faibles même les logements, où le taux de vacance est élevé, auraient tendance à augmenter légèrement, qu'il y aurait une augmentation qui s'alimenterait d'elle-même?

Mme Brisebois: Pas d'après moi parce que, quand vous avez un locataire, vous voulez le garder. Il y a toutes sortes de raisons pour lesquelles vous pourriez mettre un locataire dehors. Un propriétaire, dans la maison qu'il habite, ne met pas... Moi, j'aurais des raisons de mettre les gens d'en haut dehors, je ne les enverrai pas parce que ces gens sont là depuis longtemps et il y a quelque chose qui te dit que tu ne fais pas ces choses.

Le Président (M. Laplante): Une question du député de Saint-Hyacinthe.

M. Paquette: Seulement pour terminer. Est-ce que la suggestion que je faisais de tenir compte de vos objections mais plutôt dans les procédures devant la Régie des loyers, tout en disant: Tous les logements vont être soumis au contrôle des loyers...

Mme Brisebois: C'était des suggestions, nous, on vous laisse décider.

Mme Delage: ...

M. Paquette: Mais j'aimerais savoir ce que vous pensez; est-ce que ce serait une solution intéressante?

Mme Delage: Ce serait peut-être une solution valable. A part ça, il faut vous dire que parmi les gens que nous avons consultés, il y en a qui n'avaient pas trouvé la vie si rose à vivre avec le propriétaire.

M. Paquette: Oui, effectivement.

Mme Delage: Mais, dans l'ensemble, il y avait un consensus qui se dégageait: règle générale, quand le propriétaire est sur les lieux, les deux, et le locataire et le propriétaire, déploient des efforts considérables pour bien s'entendre, se partager un certain nombre de tâches et limiter le plus possible les coûts pour le bien-être de chacun finalement.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe, une question très courte.

M. Cordeau: C'est seulement une demande de renseignement au député de Rosemont. Les chiffres que vous avez mentionnés sont-ils des pourcentages d'augmentations demandées ou obtenues à la régie?

M. Paquette: Demandées par le locateur.

M. Cordeau: II y a une différence, il y a une très grosse marge entre...

M. Paquette: Oui, il y a une grosse marge, mais celles accordées par la régie sont évidemment dans la même proportion, c'est-à-dire qu'elles sont plus élevées pour les logements plus âgés et moins élevées pour les logements plus neufs.

M. Cordeau: D'accord.

Le Président (M. Laplante): Sur ce, mesdames Delage et... M. le ministre, un dernier mot?

M. Tardif: Oui, M. le Président, je pense qu'on s'est rendu compte, en examinant et en fouillant certaines questions, que ce n'était pas si facile que ça de trouver des solutions.

Je voudrais m'inscrire, par exemple, en faux contre une affirmation qui a été faite à l'effet que finalement il existerait, à la Régie des loyers, un taux fixe variant entre 8% et 10%, comme cela a été affirmé tantôt. Rien n'est moins exact; il est évident que la méthode de fixation utilisée par la régie n'a jamais fait l'objet d'une réglementation depuis 1951, mais il reste que la régie ne règle pas ça au pif et qu'il y a une formule de calcul qui est utilisée.

J'ai ici, pour l'année 1977, à partir de 16 000 cas de fixation par ordinateur de demandes d'augmentations, une distribution de fréquence qui varie de 0% à 28% d'augmentation. Donc on est loin de dire: La régie accorde automatiquement entre 8% et 10%. Si on veut juger le nombre par classe, on voit que, sur les 16 000 cas, il y en a à peu près 3,5% qui ont obtenu entre 0% et 2% d'augmentation de loyer; qu'entre 2% et 4%, il y a environ 3% des causes qui sont venues devant la régie. En fait, la moyenne d'augmentation accordée — c'est vrai — s'est située à 9,1%, ce qui est un peu moins que la moitié de ce qui était demandé, parce que la moyenne des augmentations demandées était de 20,7%. Donc, 9,1% avec ce qu'on appelle en jargon statistique un écart type de 4,4%. Qu'est-ce qu'on entend par écart type? Cela veut dire qu'il y a un peu plus des deux tiers des cas, environ 68% des cas qui se situent à plus ou moins 4,4% de cette moyenne; cela veut dire qu'à peu près 70% des augmentations accordées se situaient entre 4,7% et 13,5%; c'est ça l'écart par rapport à la moyenne. Ce n'est donc pas que la régie a un jeu entre 8% et 10% et qu'elle donne 9% au pif comme ça. Il n'y a donc pas de taux fixe; il y a des pourcentages d'augmentations de 0%, de 1%, de 2%, de 3%, de 4% qui ont été accordés; la distribution de fréquence nous donne cette allure et il n'y a rien de moins faux et le propriétaire qui croirait que la régie accorde à peu près cela, ce n'est pas exact du tout. Chaque cas est étudié individuellement.

Mme Delage: Je suis entièrement d'accord avec vous. C'était en réponse à une question du député de Saint-Hyacinthe qui me demandait ce que je pensais du taux fixe. J'ai dit que ce qu'on pouvait voir d'après les rapports, c'est qu'on s'était maintenu autour de 9,1% et que ce à quoi on tendait, je pense bien, c'était à circonscrire les augmentations dans une variante entre 8% et 10% et que les faits étaient qu'on avait, pour cette année-là, situé la moyenne à 9,1% mais pour ce qui est de dire qu'elle était fixe, c'était loin de ma pensée.

Le Président (M. Laplante): Sur cela, Mme Brisebois, Mme Delage, les membres de cette commission vous remercient pour votre mémoire.

Mme Brisebois: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le Rassemblement des citoyens de Montréal.

M. Cordeau: M. le Président, j'aurais une question à poser à M. le ministre en attendant que l'on change.

Le Président (M. Laplante): Oui.

M. Cordeau: M. le ministre nous mentionnait des statistiques qui semblent très intéressantes; est-ce un document confidentiel ou s'il serait possible que les membres de la commission en possèdent une copie?

M. Tardif: Si le député de Saint-Hyacinthe est intéressé par les écarts types et les sigmas, il me ferait plaisir de les lui faire parvenir.

M. Cordeau: Non, mais c'est parce qu'à un moment donné, vous nous donnez des moyennes de la régie, etc.; il semble y avoir des renseignements assez valables parce que vous les mentionnez.

M. Tardif: Oui, d'accord.

M. Cordeau: Je pense qu'il serait peut-être, si possible...

M. Tardif: Je vais justement tenter d'extraire de ces rapports les tableaux qui pourraient être utiles et qui sont effectivement utilisés.

M. Cordeau: Quelle est la source de ce document?

M. Tardif: C'est une étude statistique faite par la Régie des loyers sur les causes qui ont été jugées et entendues en 1977.

M. Cordeau: D'accord.

Le Président (M. Laplante): Bonjour messieurs.

Dès le début, si vous voulez identifier votre organisme, vous-même et les personnes qui vous accompagnent, c'est que les règles du jeu de la commission sont que vous ne lisiez pas au complet votre mémoire mais que vous en donniez un résumé pour que les membres de cette commission puissent vous poser le plus de questions possible parce que chacun des partis a lu et noté les mémoires à venir jusqu'aujourd'hui.

Vous avez en tout une heure pour faire cela mais la période pour exposer votre mémoire ne doit pas dépasser 20 minutes. C'est le no 18,

monsieur, Rassemblement des citoyens de Montréal. Monsieur, vous pouvez commencer.

Rassemblement des citoyens de Montréal

M. Limonchik (Abe): Le RCM est très heureux de pouvoir présenter son mémoire devant cette commission de l'Assemblée nationale.

A ma gauche, M. Hubert Simard qui est le président de notre commission du logement et aussi candidat du RCM dans les dernières élections. A ma droite, M. Jacques Thibodeau qui s'occupe de la question du logement, qui est aussi membre de l'exécutif et aussi candidat lors des dernières élections.

Le Rassemblement des citoyens est le parti d'opposition à Montréal.

Le Président (M. Laplante): Vous-même êtes monsieur?

M. Limonchik: Abe Limonchik, le président du RCM.

Nous sommes constitués démocratiquement et nos membres sont regroupés en assemblées représentatives dans les différents districts de la ville.

Les principes sur lesquels nous nous appuyons pour fonder notre position ont été adoptés en congrès par nos membres. Mais c'est surtout de notre expérience que découle cette position. C'est au contact de citoyens et de groupes populaires qui oeuvrent dans le domaine du logement et dont bon nombre ont joint nos rangs que nous avons formé notre jugement. C'est également au travers des luttes pour la protection des droits des locataires auxquelles nous avons pris part ou que nous avons lancées que nous avons été en mesure d'analyser l'état actuel des droits des locataires. Nous avons lutté contre les démolitions, contre les évictions par les propriétaires ou par la ville de Montréal, nous avons combattu les hausses de taxes, nous avons travaillé à l'organisation de négociations collectives des baux, défendu les droits des locataires de logements publics, dénoncé l'inaction municipale devant la vague d'incendies criminels, lutté contre la détérioration de l'environnement des locataires, etc.

Les droits des locataires, au sens large, sont depuis longtemps au coeur de nos préoccupations et plus particulièrement les droits de ces locataires qui n'ont pas d'autre choix, qui n'ont aucun contrôle sur leur environnement et qui doivent se plier aux exigences du marché du logement.

L'engagement du RCM dépasse de loin, maintenant, l'aspect social du logement et l'aspect de la lutte. De par l'orientation du parti maintenant, c'est tout l'aspect économique qui prend les devants. La question du logement pour nous est un aspect très, très stratégique dans toute la question économique, étant donné surtout la position stratégique de Montréal dans l'économie du Québec.

Finalement, l'aspect du logement pour nous va au coeur même d'un projet de société que nous avançons. Par cela, on veut dire que le RCM se préoccupe de ces formes de gestion du logement, de ces formes de propriété. Le rôle des citoyens dans la question du logement est l'élément essentiel de tout projet de société que les Québécois et les Montréalais vont développer. Je vous remercie et je donne la parole à Hubert Simard maintenant.

M. Simard (Hubert): Alors, passons rapidement sur la première page qui traite un peu des perspectives des contrôles des loyers à travers le temps. Retenons, cependant, une couple de points, principalement ceux qui ont trait aux mesures que nous reconnaissons comme valables à travers la loi et que nous avons nous-mêmes cherché à promouvoir dans notre programme depuis la formation du parti. C'est le cas, principalement, des mesures portant sur la conservation des logements, notamment le contrôle sur les transformations et sur les démolitions de logements. Cette mesure a été d'ailleurs inscrite récemment à la Charte de la ville de Montréal et le principe en est généralisé par cette loi.

Malheureusement, on constate que cela arrive 20 ans trop tard et dans une période de stagnation exceptionnelle sur le marché immobilier. On ne peut pas en tenir rigueur au présent gouvernement. Il y a déjà un très grand nombre de logements qui ont été démolis.

Il y a également l'extension de la juridiction de la Loi aux chambres et aux maisons mobiles, un projet de code d'habitabilité dont on ne connaît pas encore le contenu et sur lequel on met des réserves tant qu'on ne l'aura pas évalué de même que certains recours et certaines règles de procédure qui comblent les vides laissés par la loi précédente.

Cependant, sur l'ensemble et l'essentiel, c'est-à-dire le contrôle des hausses de loyer et le droit au maintien dans les lieux, nous trouvons que le projet de loi consacre le statu quo et nous voulons dénoncer ce statu quo qui ne correspond pas à la situation, aux besoins des locataires.

Un autre point que nous voudrions relever rapidement, c'est le caractère confidentiel qui a été plus ou moins mis sur la plupart des documents qui ont été préparés en rapport avec le groupe de travail sur les questions qui concernent cette loi. C'est une pratique qui a été à peu près systématisée par le gouvernement fédéral dans le domaine de l'habitation. On trouve vraiment déplorable que cela trouve des échos à Québec; on s'attendait à une plus grande transparence de ce point de vue.

Passons maintenant aux objectifs. On tient à faire part à la population, à l'Assemblée nationale, qu'on s'oppose au projet de loi autant sur le plan des objectifs et des principes que sur le plan concret de l'efficacité de ce type de loi qui prolonge un peu le statu quo. La fonction première de la régie est de favoriser la conciliation entre locateurs et locataires, ce qui coïncide avec l'objectif principal du présent projet de loi, c'est-à-dire promouvoir une plus grande harmonie des relations entre les locateurs et leurs locataires. On a

de la misère à imaginer qu'après plus de dix ans de débat sur le droit au logement l'Etat ne soit pas prêt à dépasser le cadre traditionnel et archaïque de l'absolutisme, de la liberté contractuelle, avec son corollaire en termes d'interventions qui se présente sous l'aspect de la conciliation et de l'harmonisation des rapports. (11 h 30)

Ce n'est plus la peine de faire la démonstration que l'égalité entre les parties qui permet de donner un libre consentement au contrat, cette liberté n'existe pas, que le marché de l'habitation n'est pas un marché de concurrence parfaite, que le droit de propriété privée confère au propriétaire un quasi-monopole sur le logement, que le logement, finalement, est un bien essentiel qui permet de fonder un droit social. Le rapport Legault a au moins retenu ce principe; le livre blanc le reconnaît largement dans ses éléments.

La réponse traditionnelle qu'on a choisi de perpétuer se situe au niveau des droits individuels. Parce qu'une partie se sent lésée dans l'application du contrat, elle peut faire appel au jugement désintéressé et impartial de l'Etat qui, par ailleurs, détermine les conditions de ce contrat. C'est une façon bien pratique pour nous, de la façon qu'on peut l'évaluer, de faire abstraction de la dimension sociale du logement. Ce n'est pas parce qu'on pratique la régulation des conflits ouverts que des individus ont choisi, à leurs risques souvent, de porter en arbitrage, qu'on a atteint une certaine justice sociale dans le domaine du logement.

C'est aussi incohérent, d'une certaine façon, dans la mesure où le gouvernement se donne quelques éléments d'une politique sociale de gestion du stock de logement. C'est ainsi que la régie devra statuer sur l'opportunité de démolir un logement, le subdiviser ou en changer la destination. Dans ces articles de loi, on considère des éléments comme l'état du logement, le préjudice causé au locataire, les besoins de logement dans les environs, la possibilité de relogement des locataires, la détérioration de l'apparence architecturale, etc., la qualité de vie du voisinage.

Si on doit se donner des critères sociaux au point de vue de gestion du stock de logement, n'est-il pas d'autant plus important de fixer les critères sociaux d'accessibilité au logement dont un des principaux éléments serait le contrôle des hausses de loyer. Dans cette perspective, le Rassemblement des citoyens de Montréal demande que le gouvernement du Québec s'engage dans une véritable politique sociale du droit au logement et cesse la promotion d'une harmonie illusoire, entre propriétaires et locataires, qui cache les intérêts de l'exploitation immobilière.

Nous ne voulons pas caricaturer la situation en faisant de tout propriétaire un exploiteur puisque bon nombre de petits propriétaires ont le souci d'entretenir des relations justes avec leurs locataires. Nous visons ceux qui font du logement une marchandise dont on doit maximiser le rendement en "externalisant" les conséquences sociales.

Passons maintenant à l'efficacité du contrôle qu'on évalue en fonction du contrôle actuel puisqu'on en prolonge l'existence. Consubstantielle-ment avec la critique des objectifs du projet de loi, on doit faire la critique de l'efficacité du système de contrôle des hausses de loyers dont on nous propose d'assurer la continuité. Citons les conclusions du rapport Godbout-Mathews commandé par le groupe de travail. "La commission des loyers ne réalise que partiellement ses objectifs, principalement parce qu'une partie des locataires qui auraient besoin d'elle — probablement une partie importante des ménages à faible revenu — ne l'utilise pas et parce qu'elle n'atteint pas la plus grande partie des augmentations les plus élevées."

Nous prenons note des résultats, mais quant à nous, nous croyons que la commission des loyers a rempli son objectif qui est celui de concilier les rapports entre locataires et propriétaires et non pas d'éliminer les hausses abusives de loyer. Notons également quelques chiffres pour se donner un ordre de grandeur. Si on fixe arbitrairement les hausses abusives comme étant celles qui dépassent 10% du loyer — ce sont des chiffres qui datent de 1977 — on constate que 85% de ces hausses ne seraient pas contrôlées par la commission. Si elles étaient contrôlées, l'augmentation moyenne passerait de 8% à 5.7% et moins puisqu'une bonne partie des demandes inférieures à 10% sont également réduites par la commission.

Cela ne tient pas compte, non plus, des augmentations qui surviennent lors des changements de locataires. Tout indique que c'est l'occasion pour le propriétaire de faire passer les plus fortes augmentations et de prendre de l'avance sur le contrôle des loyers. Très peu de ces augmentations sont contestées devant la commission.

On doit également se poser des questions sur l'efficacité de l'administration de la loi par la commission elle-même. Des rapports indiquent que les administrateurs accordent un pourcentage d'augmentation plus élevé aux propriétaires que ne le permettrait l'application de la formule qui est pourtant très généreuse. Des chiffres à cet effet: on note une différence de 10.4% dans ce qui est accordé par la commission et la formule permettrait des hausses de 8.5% seulement. Pourtant, en principe, cela devrait être l'inverse.

La formule ne tient pas compte de la diminution des services, des factures gonflées, alors qu'elle intègre tout ce qui pourrait justifier des augmentations. C'est l'indication, corroborée par un certain nombre d'expériences, de témoignages, que la commission est plus conciliante envers les propriétaires qu'envers les locataires. La crédibilité de la commission est en jeu, et au-delà, celle du gouvernement qui en répond. Certains raffinements dans la réglementation et dans les recours de même qu'une politique d'information permettront certainement de rejoindre une plus grande proportion des hausses abusives, mais il est fort peu probable que cela modifie d'une manière significative les recours à la régie.

Le contrôle des loyers. Nous croyons que seul l'Etat a la capacité de corriger les imperfections structurelles du marché de l'habitation et il doit s'engager dans cette direction s'il ne veut pas contribuer à maintenir des privilèges de classe. Cette intervention ne peut s'envisager de façon réaliste que dans une politique d'ensemble. Quant à nous, nous croyons qu'il est antiéconomique de faire supporter individuellement aux locataires le fardeau de cette réforme. Bien des locataires sont prêts à subir des hausses de loyer pour ne pas avoir à affronter leur propriétaire ou encore à s'engager dans tout le processus de contestation qui implique des démarches avec des frais et des pertes de temps suffisamment élevés pour décourager un bon nombre de locataires. Peu de locataires ont contesté une hausse de 10% quand ils croyaient que la régie ne leur accorderait pas une diminution de moins de 8%. Ce sont ces augmentations continues et cumulatives qui maintiennent les loyers à des niveaux artificiellement élevés et qui réduisent les possibilités de logement pour les ménages à faibles revenus.

Le contrôle universel se justifie sur le plan économique. Un simple calcul des coûts et des bénéfices des effets de la répartition permet d'en faire la démonstration. L'économiste Mathews donne un ordre de grandeur de l'épargne potentielle que le contrôle pourrait apporter aux locataires à partir d'hypothèses très modérées. En postulant une baisse de 2% dans le taux d'augmentation, une baisse du tiers dans la production de nouveaux logements avec une subvention compensatoire de $3000 l'unité de logement, en doublant le budget de fonctionnement du contrôle et en retranchant les impôts que percevrait l'Etat sur les gains des propriétaires, on constate qu'en dix ans l'absence de contrôle coûterait $830 millions aux seuls locataires de la région de Montréal alors qu'une politique de contrôle soutenue par des subventions à une partie de la production nouvelle coûterait quelque $250 millions. Il y aurait lieu de raffiner ce type d'analyse, mais on fait en sorte que l'on refuse de s'engager dans cette voie.

Quant à la dramatisation par l'agitation des spectres du gigantisme bureaucratique, on constate qu'il y a un manque total de données sur cette question et on se pose des questions, à savoir que, si la régie devait être utilisée massivement par les citoyens, il est très clair que dans le cadre actuel la régie serait carrément débordée. La seule façon d'envisager, sur le plan bureaucratique et administratif, une rationalisation de cette question, c'est en regroupant les dossiers. Au travers d'une démarche qui oblige l'ensemble des propriétaires à aller devant la régie, on pourrait rationaliser par l'informatique en étudiant une seule fois le dossier. Cela pourrait apporter de grandes améliorations.

On relève aussi qu'en Ontario on a déjà un certain système qui va plus ou moins dans ce sens. Comparativement au Québec qui a 398 employés, l'Ontario avec 280 arrive à appliquer une loi avec recours obligatoire des propriétaires devant la régie pour une hausse allant au-delà d'un certain seuil.

En vertu de ce qui précède, nous demandons un contrôle universel et obligatoire des hausses de loyer.

Passons au mode de fixation des loyers. Nous considérons que la méthode actuelle de fixation des loyers est elle-même abusive à plus d'un point de vue. On considère comme insoutenable le postulat selon lequel toute méthode qui diminuerait la rentabilité des immeubles actuels acculerait sûrement tous les proriétaires à la faillite à plus ou moins long terme.

Le Président (M. Laplante): II vous reste quatre minutes. Si vous pouviez soumettre vos résolutions, le secteur sur lequel vous voulez insister en quatre minutes...

M. Simard: D'accord. En ce qui concerne les caractères abusifs, il y a un point qu'on veut relever: c'est l'application de la formule qui accorde en quelque sorte une rente aux propriétaires pour mécanisme assez complexe de variations de la valeur suite à une hausse du taux d'intérêt hypothécaire. Je considère que c'est une rente que la régie a accordée de toute façon avec des baisses de taux d'intérêt et même en l'absence de hausses de taux d'intérêt. Alors, on demande qu'on élimine les éléments abusifs au sein même de la formule de fixation des loyers et qu'on pratique le partage des hausses de loyer.

Avec le système actuel on considère que le loyer de base est un loyer juste, ce qui est loin d'être le cas. Alors, on demande que la régie soit aussi investie des pouvoirs de reviser les loyers de base et de les fixer en fonction des conditions de logement.

Quant au droit au maintien dans les lieux de la question du privilège de reprise de possession pour les propriétaires, on considère que c'est abusif également, qu'il n'y a aucun principe de justice qui peut justifier le fait qu'une catégorie de citoyens a le privilège de déloger d'autres citoyens et de s'approprier leur logement. En conséquence, on demande l'abolition du privilège de reprise de possession.

Finalement, on voudrait insister aussi sur la question de négociation collective. On ne croit pas que c'est l'idéal que l'Etat prenne en charge la fixation des loyers. On croit que le règlement de la question du logement à long terme passe par une implication massive des citoyens dans leur problème de logement et on croit que cela doit être favorisé d'une certaine façon dans le cadre de la législation. Le principe de négociation collective, que bon nombre d'intervenants reconnaissent comme valable, n'est applicable que dans la mesure où les locataires ont un certain pouvoir de négociation. Pour garantir ce pouvoir d'une certaine façon, nous voudrions que les locataires aient la possibilité d'exiger.

Nous demandons que la régie ait le pouvoir d'administrer des immeubles, à la demande d'une majorité des locataires dans les cas où les propriétaires ou une tierce personne pratique l'intimidation, ou encore le harcèlement des locataires, ou encore qu'il y ait refus d'entretenir les logements.

On connaît bon nombre de cas de propriétaires — bon nombre, c'est assez difficile à évaluer — qui recherchent systématiquement la démolition de leur logement et puis ainsi tentent d'évincer, faire en sorte que les locataires dans une situation qui n'est plus vivable, déménagent d'eux-mêmes. Alors, ce recours-là permettrait aux locataires d'avoir certains pouvoirs de négociation.

Finalement, terminons par une certaine mise en garde. Nous croyons que dans une période de crise économique, de crise fiscale, où le chômage et l'inflation se côtoient à des taux records, où les gouvernements cherchent à couper sur les programmes sociaux, sur les politiquesd'habitation qui sont compromises à plusieurs points de vue, qu'on recule devant l'indexation du salaire minimum, nous croyons qu'il est inacceptable que l'Etat tolère ces agents économiques qui contrôlent l'accès à un bien essentiel comme le logement, s'attribuent encore des rentes de rareté, que ce même Etat indexe substantiellement les profits de ces agents tout en transférant la totalité du fardeau sur les locataires lorsqu'il exerce son contrôle.

Les travailleurs vont être d'autant plus exigeants dans leurs revendications salariales que les classes possédantes se donnent les moyens d'échapper à l'inflation par l'exploitation du marché immobilier qui leur donne des droits sur une part grandissante des revenus des travailleurs.

Quant aux autres qui vivent de revenus fixes, ou qui sont dépendants des prestations de l'Etat, ils n'auront pas d'autre choix que de protester et d'exiger des contrôles. La crédibilité de l'Etat dans ses restrictions budgétaires, dans sa lutte contre les hausses inflationnistes des prix et des salaires, passe par un contrôle systématique et serré des hausses des loyers.

Le Président (M. Laplante): Merci, Monsieur. M. le ministre. (11 h 45)

M. Tardif: M. le Président, je veux remercier les représentants du RCM pour leur mémoire et constater avec une certaine satisfaction que tout dans le projet de loi 107 n'est pas rejeté par le RCM qui souligne évidemment une appréciation du contrôle des démolitions du stock de logements, les mesures pour préserver le stock de logements, l'extension de la juridiction de la régie ou de sa compétence en matière de contrôle des chambres et des terrains pour maisons mobiles. — On aurait pu également ajouter les HLM — l'idée d'avoir un code d'habitabilité visant à s'occuper de la qualité du logement et le fait qu'on bouche quand même un certain nombre de trous dans le décor.

Essentiellement, le RCM nous dit: Là où on décroche, nous, c'est sur le contrôle des loyers, essentiellement. J'aurai évidemment quelques questions à poser sur ce contrôle que le RCM conçoit. Mais, avant d'en arriver là, puisqu'on a passé rapidement sur le contrôle des démolitions, puisqu'on était d'accord, j'aimerais avoir l'opinion du RCM comme parti politique municipal sur cette question du contrôle des démolitions, d'abord, tel qu'il existe à Montréal et tel que la loi 107 le préconise. L'Union des municipalités du Québec a fait des représentations, enfin on a vu des communiqués de presse, son mémoire est arrivé, elle viendra le défendre en temps et lieu. Elle s'interrogeait sur ce qu'elle croyait être une diminution du pouvoir des municipalités, alors qu'il n'en est rien puisqu'on donne aux municipalités un pouvoir qu'elles n'ont jamais eu, celui de contrôler les démolitions; avant cela, n'importe qui pouvait démolir.

Or, je ne vois pas comment on pourrait accuser le projet de loi 107 de brimer un pouvoir municipal qu'on n'a jamais eu dans les faits et qu'on n'a jamais exercé. Evidemment, on n'a pas le pouvoir de l'exercer.

Mais le problème qui se pose, c'est le suivant: A la suite des amendements apportés à sa charte l'an dernier, la ville de Montréal s'est vu confier le pouvoir de faire un règlement pour contrôler les démolitions. Comme il y avait une espèce d'organisme d'arbitrage, qui est une émanation en quelque sorte du conseil ou une créature du conseil, qui pouvait siéger en appel, il nous a semblé que c'était là que devait s'instruire ce genre de cause. Etant donné que la décision de démolir ou pas est une décision politique, il nous semblait que le lieu normal du débat devait être la municipalité.

On a eu des représentations ici de la part de divers groupes qui nous ont dit: Non, cela devrait être la régie essentiellement qui s'occupe de cela. D'autres ont dit: II ne devrait pas y avoir de contrôle du tout des démolitions. Enfin, on sait ce que vous pensez là-dessus. Le projet de loi 107 prévoit que dans l'ensemble du Québec les municipalités pourront établir une telle réglementation et, par la suite, si elles ne le font pas, les causes pourront être entendues à la régie. Si elles le font, il y aura quand même un pouvoir d'appel à la régie.

J'aimerais avoir votre opinion sur cette structure et peut-être sur le lieu d'exercice de ce contrôle du stock de logements.

M. Simard: Dans l'ensemble, je pense que la législation sur le contrôle des démolitions est adéquate. Elle donne des pouvoirs réels aux municipalités, pouvoirs qu'elles vont plus ou moins exercer. Pour ce qui nous concerne, c'est la question, c'est le problème.

Quant à savoir si cela doit être confié aux mains de la régie ou de la municipalité, nous, on préconise une décentralisation. Nous croyons que ce sont des questions qui doivent être traitées à l'intérieur des cadres politiques des municipalités et, même, nous voulons aller plus loin que cela, nous voulons que ces pouvoirs soient largement décentralisés, même au niveau des conseils de quartiers.

Notre programme va jusque-là. Nous croyons que les citoyens, dans leur propre quartier, sont mieux en mesure d'évaluer l'opportunité de démo-

lir et les coûts sociaux qui sont reliés à ces questions.

Compte tenu également du contexte politique actuel, nous croyons qu'il est sage d'avoir une clause qui permet un appel devant la régie pour ces questions. Je pense que ça doit être... Etant donné qu'il ne semble pas y avoir de véritable volonté politique au niveau des dirigeants municipaux de s'impliquer sur ce plan, il y a une certaine contrepartie qui est possible. Je crois que c'est tout à fait valable dans la mesure où les citoyens peuvent se faire entendre à plusieurs niveaux.

M. Tardif: Si je reviens maintenant à la partie essentielle du rapport du RCM qui est celle du contrôle des loyers, en fait, ma question est très générale: Quel type de contrôle voyez-vous? On parle d'un contrôle universel, obligatoire, sur quelle base va-t-on procéder à une vérification? Devrait-on, selon votre hypothèse, procéder à une vérification de tous les logements par mètre carré, par superficie, par type de services, afficher un prix dans la porte de chaque logement? Comment voyez-vous ça, un contrôle des loyers? Voulez-vous nous expliquer ça, s'il vous plaît?

M. Simard: C'est une bonne question. Il y a autant de contrôles de loyer qu'il y a de juridictions ou différents organismes à travers le monde qui s'occupent de ces questions. C'est très complexe, relié à des tas de facteurs économiques.

Nous avons voulu émettre le principe du contrôle obligatoire et universel dans le sens d'un droit social au logement qui vise à contrôler l'exploitation de la rareté dans le logement, exploitation tout à fait artificielle qui ne correspond pas à des coûts économiques qui peuvent être associés au logement. Et, compte tenu du caractère essentiel du bien lui-même, nous croyons que ça doit aller dans ce sens-là.

Quant au détail même, on est à même de constater qu'il y a des tas de contraintes administratives, économiques qui font que le contrôle obligatoire et universel est problématique. Nous visons à aller jusque là dans le long terme. Nous croyons que ce n'est pas une panacée, que ça doit être articulé avec des tas d'autres programmes de politique d'habitation. Donc, c'est très complexe à ce niveau-là.

On considère que toute mesure qui va au-delà du statu quo actuel et qui permet au locataire d'être soulagé d'un certain fardeau et qui améliore l'accessibilité des ménages à faible revenu aux logements existants, auxquels de toute façon, ils sont confinés, nous sommes prêts à aller dans ce sens. Quant aux détails mêmes, est-ce que c'est le contrôle du type de l'Ontario ou des mesures qui partent du contrôle du loyer de base avec hausse fixe annuelle et différents recours des différentes parties, je crois qu'il y a des tas de recherches à faire encore là-dessus, d'expérimentation surtout, avant d'arriver à un optimum de ce côté.

Le contrôle qui existe en Ontario nous semble un pas dans cette voie. Tout dépend évidemment du fameux taux qui est fixé. Encore là, nous croyons qu'il devrait être inférieur à ce qui est pratiqué actuellement. On ne veut pas aller plus loin dans les détails. Nous ne sommes pas en mesure de faire ce type de compromis.

M. Tardif: Vous vous en êtes tenus au niveau des principes. Bon!

II y a une chose que j'ai retenue de votre réponse. Vous dites: Nous visons le long terme. J'ai bien compris ça? Oui?

M. Simard: Le court terme et le long terme également.

M. Tardif: Vous admettez que la situation est complexe. Il ne faudrait pas qu'on change d'idée. On admet que la situation est complexe, on admet qu'il y a un tas de recherches à faire et on pense qu'à long terme on devrait parvenir à cet objectif qui est celui qui est poursuivi là. Du moins c'est ce que j'ai compris. J'ai noté l'expression, précisément, que vous n'aviez pas précisément les données vous permettant d'affirmer qu'on devrait procéder de telle manière, en disant: C'est complexe, cela exige des travaux de recherches, cela exige... si j'ai bien compris...

M. Simard: Cela ne signifie pas qu'à court terme il n'y ait pas de mesures...

M. Tardif: Je voudrais, avant d'élaborer sur cette question de l'étalement dans le temps, essayer de vous faire... Il y a un vote?

La question qui me vient à l'idée, avant de passer à cette question de définition du long terme et comment y parvenir, les mesures en attendant — on pourrait fouiller cela — il y a une question qui me vient à l'esprit, c'est: Est-ce que je dois comprendre, toujours au niveau des principes, sans entrer dans la statistique et dans les chiffres, que pour vous un contrôle universel obligatoire cela veut dire que les 900 000 logements de location au Québec sont couverts par la loi, oui ou non?

M. Simard: C'est exact.

M. Tardif: Deuxièmement, cela veut dire que toute variation dans les conditions du bail doit obligatoirement passer par la régie dans les 900 000 cas.

M. Simard: On fait l'exception de la négociation collective des baux, c'est-à-dire que nous croyons qu'il y a une possibilité d'entente...

M. Tardif: D'accord, mais comme c'est inexistant présentement, cela veut dire que toute modification des conditions du bail devra passer par la régie à moins d'une négociation collective. C'est cela? D'accord.

Troisièmement, est-ce que cela veut dire qu'avec un contrôle obligatoire universel passant par la régie aucune entente entre les parties ne sera permise? C'est-à-dire qu'un propriétaire ne

pourrait pas s'entendre avec son locataire. Je m'en vais dans mon chalet de vacances cet été et si je veux m'occuper de la maison, de l'entretien, du gazon, aucune espèce d'entente ne sera permise. Tout devra passer par la régie. Est-ce que c'est ce que cela veut dire?

M. Simard: Je crois qu'il ne faut pas caricaturer non plus et dire: Le contrôle doit couvrir tous les aspects de la vie des locataires et des propriétaires. Je pense qu'à la pièce on peut voir quel est le champ plus précisément. On peut commencer par un type de contrôle du type de celui de l'Ontario qui est quand même assez souple, qui permet des accommodements. Nous ne voulons pas généraliser le principe du contrôle, en faire un absolu. On ne croit pas dans le fait que l'Etat soit la réponse à tous les problèmes sociaux. Je pense que dans les cas où il y a des points qui mènent à des conflits, que ce soit en termes d'intérêts ou des conflits ouverts, on croit qu'il devrait y avoir un certain contrôle là-dessus.

M. Tardif: Loin de moi l'idée de vouloir caricaturer une situation, mais je pense que la situation où un locataire demande à son propriétaire: Voulez-vous s'il vous plaît — j'arrive — changer les lits et l'armoire de cuisine? Je suis consentant à payer $10 de plus par mois pour cela. Ce genre d'entente peut être monnaie courante. Vous n'avez pas l'impression que si on soumet tout cela... Je veux juste essayer de faire cerner les notions de contrôle universel et obligatoire qui reviennent dans votre mémoire. Si cela veut dire que toute modification au bail — d'accord, c'est cela — doit obligatoirement passer par la régie, est-ce qu'on a une idée de ce que cela représente? Est-ce à dire qu'on interdit toute entente qui interviendrait entre les parties. C'est-à-dire que toute entente devrait être sanctionnée par l'Etat. C'est cela ma question finalement. (12 heures)

M. Limonchik: Je voudrais répondre là-dessus, si vous le permettez. Le RCM est contre toute... ce n'est pas le gel qu'on cherche, effectivement. Ce dont vous parlez, c'est d'un gel effectif, mais on n'a pas pensé à des ententes entre personnes, ça brimerait les libertés individuelles des gens. Forcément, on s'oppose à ce type de situation.

Je voudrais revenir à la question que vous avez posée tantôt sur la démolition M. le ministre. On parlait du contexte politique de Montréal. Tout le monde sait très bien que les démolitions ont atteint une ampleur telle que cela a miné la santé économique de la ville de Montréal. Etant donné le manque de volonté clairement exprimée sur la question du logement, on félicite le gouvernement de l'initiative, dans le domaine des démolitions, de son projet de loi. Cela nous donne un coup de main jusqu'à ce que les citoyens de Montréal puissent prendre leurs affaires en main.

M. Tardif: Merci beaucoup. J'aurais peut-être d'autres questions, mais je veux laisser la chance à tout le monde. J'aurais beaucoup de questions, mais je veux laisser la chance à tout le monde.

Le Président (M. Laplante): Le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je veux également vous féliciter pour votre mémoire et vous remercier, c'est très bien. Votre première phrase dit que le rassemblement s'oppose au projet de loi 107. Exactement comme l'union des maires et des municipalités du Québec, vous êtes contre. Jusqu'à maintenant, c'est clair qu'à peu près tout le monde est contre.

Je veux vous poser une question qui peut m'éclairer sur la tournure des événements survenus depuis les deux dernières années. Vous écrivez et vous dites clairement que vous êtes contre le projet de loi autant sur le plan des objectifs et des principes que sur le plan concret de l'efficacité. Alors, vous êtes contre.

A la page 5, je veux le lire, vous faites un peu l'histoire des événements. Vous dites: Le présent gouvernement semble vouloir faire du droit des locataires une de ses priorités. Le groupe de travail a été formé, il a déposé son rapport et le rapport demeure confidentiel. Le livre blanc a été publié, et toute cette histoire. Si je comprends bien, le gouvernement, avant d'arriver au pouvoir, avait une position assez favorable envers les locataires. Le rapport encore confidentiel du groupe de travail a pris un peu ses distances vis-à-vis de cette position. Le livre blanc a pris ses distances vis-à-vis du rapport du groupe de travail et le projet de loi a pris ses distances vis-à-vis du livre blanc.

Si je comprends, c'est non seulement ce que vous avez dit aujourd'hui, mais ce sont un peu les déclarations d'autres qui sont venus ici. De plus en plus, on s'éloigne des locataires. Parce que vous étiez très impliqués, dans la grande ville de Montréal, dans le déroulement de ces événements, je me demande si vous pouvez m'éclairer un peu et m'expliquer ce qui est arrivé pour persuader le gouvernement d'avoir la position de base qu'il avait il y a deux ans.

M. Simard: Je ne suis pas en mesure de le faire, je ne suis pas dans le secret du Cabinet des ministres. Je ne suis pas en mesure d'évaluer la certaine autocensure qu'il y a eu sur un certain nombre de mesures. Je ne suis pas en mesure de le faire.

M. Scowen: Pour moi, c'est très important, parce que, s'il faut revenir aux principes de base, quelles sont les forces... est-ce que vous êtes impliqués dans le projet du groupe de travail?

M. Simard: Nous ne sommes pas impliqués...

M. Scowen: Vous avez lu le rapport? M. Simard: Oui, nous avons lu le rapport.

M. Scowen: Est-ce que le rapport de ce groupe de travail, d'après vous, était satisfaisant?

M. Simard: II y avait effectivement des trous énormes, enfin, comme toute analyse de cette question. C'est tellement complexe qu'il faudrait l'étudier pendant des années et expérimenter des tas de points. Mais nous retenons de ce rapport qu'il allait plus loin que la présente loi sur un bon nombre de mesures et que ces mesures nous semblaient plus satisfaisantes que ce qui est présenté.

M. Scowen: Est-ce que vous pensez que le rassemblement peut appuyer un projet de loi basé plus ou moins sur le document du groupe de travail?

M. Simard: Selon les différentes mesures...

M. Scowen: Est-ce que la première phrase de votre mémoire sera différente?

M. Simard: II faudrait juger selon les différentes mesures. Il y a bon nombre d'autres possibilités qui sont impliquées. Certainement que notre soutien au projet de loi serait plus consistant, dans le sens que plus il y a de mesures qui sont favorables aux droits des locataires... Bien sûr, nous n'allons pas contre cela.

M Scowen: Si je comprends bien la liste des priorités que vous avez, si je comprends bien votre point essentiel, c'est le contrôle universel des loyers.

M. Simard: Obligatoire.

M. Scowen: Obligatoire et universel. Si cet aspect était inclus dans le projet de loi, c'est quelque chose que vous pourriez appuyer en général.

M. Simard: On soutiendrait certainement cet aspect.

M. Scowen: D'accord. Merci beaucoup.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci, M. le Président. Je tiens également à vous remercier pour votre participation et vos suggestions. Il y a un point en particulier que j'aimerais soulever. Est-ce que le Rassemblement des citoyens de Montréal doit avoir des partisans ou des membres, dans le centre-ville de Montréal?

M. Simard: On en a effectivement, oui.

M. Cordeau: Jeudi passé, nous avons entendu un mémoire présenté par le Parti québécois du centre-ville de Montréal. Et on ne critiquait pas le rapport. On a appuyé le projet de loi 107. Je crois que dans le secteur, il y a environ 90% de locataires.

M. Guay: Question de règlement. Le Parti Québécois de Montréal-centre appuyait des grandes lignes du projet de loi, mais faisait quelques suggestions constructives que d'autres pourraient appeler critiques.

M. Cordeau: Je n'étais pas rendu là.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Bien sûr, qu'il appuyait le projet de loi.

M. Guay: Dans les grandes lignes, mais il faisait des critiques en même temps.

M. Cordeau: Très réservées.

C'est pour vous dire que votre point de vue est tout à fait différent que lorsque cela vient d'un parti politique ou d'une association.

M. Simard: Je voudrais préciser qu'il n'y a pas de lien entre le Parti québécois et le Rassemblement des citoyens de Montréal.

M. Cordeau: Cela me rassure.

Je voudrais parler un peu sur la reprise de possession. Est-ce qu'il y a des propriétaires dans votre parti politique?

M. Simard: II n'y a pas qu'eux. Une Voix: Absolument.

M. Cordeau: Est-ce que cela leur a été soumis? Est-ce qu'ils sont d'accord?

M. Simard: Concernant la reprise de possession?

M. Cordeau: Est-ce que la position que vous avez prise dans votre rapport "nous demandons l'abolition du privilège de reprise de possession" a été aussi adoptée par les propriétaires qui sont membres de votre parti politique?

M. Simard: On n'a pas de comité de propriétaires à l'intérieur du RCM. Il y a un programme avec des principes généraux et les gens sont libres d'y souscrire, qu'ils soient propriétaires ou locataires.

M. Cordeau: II serait peut-être bon que vous ayez un comité pour le recrutement des propriétaires, parce que cela n'aurait peut-être pas passé.

M. Limonchik: Je voudrais faire des commentaires comme président du parti là-dessus. Malheureusement, lors des dernières élections, on a eu un appui plus fort dans des secteurs de la ville qui comptent un plus grand nombre de propriétaires. C'est assez clair. Nous avons des propriétaires, au sein du RCM, probablement dans la

même proportion que la ville, un nombre qui pourrait osciller autour de 10%. Nous avons même cinq candidats sur cinquante-quatre qui sont des petits propriétaires.

M. Cordeau: Je suis tout à fait d'accord. C'est tout à fait logique, d'ailleurs. Mais par contre, je trouve que la position que vous prenez concernant l'abolition du privilège de reprise de possession est tout à fait opposée au désir d'un citoyen de devenir propriétaire d'une maison à deux logis et d'y loger sa famille, parce qu'il a plusieurs enfants et qu'il trouve une maison à deux logis et que six appartements, cela fait son affaire.

Par la position que vous prenez, vous allez empêcher complètement un individu, qui veut devenir propriétaire d'un duplex, d'habiter sa maison, parce que vous empêchez la reprise de possession. S'il faut qu'il attende que les deux locataires meurent pour prendre possession d'un de ses logis, le gars n'achètera jamais cette propriété.

M. Simard: Si vous permettez, je peux répondre à cela. Je pense qu'on sous-estime souvent l'initiative des agents économiques de l'entreprise privée. Je suis sûr qu'avec un règlement de ce type-là, il y aurait des ajustements qui se feraient et l'adaptation serait très rapide. Il se développerait tout simplement un marché, comme cela se fait actuellement dans une large mesure, d'habitation: le logement occupé par le propriétaire serait libéré et il y aurait aussi la possibilité de... Le propriétaire a le privilège de s'approprier les logements lorsqu'ils sont libérés par les locataires et, quand on connaît le taux de roulement des locataires à Montréal, cela se fait quand même assez rapidement. Il y a également la troisième possibilité qui est de négocier avec le locataire sur le droit d'occupation et de lui accorder des compensations pour les problèmes qui lui sont causés. Je pense qu'on sous-estime la capacité d'adaptation du marché de l'habitation sur ce point-là et cela fait un peu un choc émotif que d'entendre une telle proposition qui va à rencontre de nos coutumes et de nos habitudes, mais je ne crois pas que cela ait un impact sur la petite propriété.

M. Cordeau: Parfois, il y a des successions qui administrent quatre ou cinq maisons de deux logements et, à un moment donné, il faut que la succession se règle. En fin de compte, on décide de vendre ces propriétés-là, mais l'acheteur éventuel ne l'achètera pas s'il sait qu'il ne pourra pas prendre possession d'un de ces logements. Pour le petit propriétaire éventuel, c'est peut-être un inconvénient majeur et, de toute façon, je m'oppose à cette décision aussi draconnienne.

Bien sûr qu'il pourrait y avoir des modalités concernant la prise de possession par les beaux-frères, belles-soeurs, etc.. Il faudrait qu'il y ait une certaine limite à l'occupation des logements par les membres de la famille du propriétaire, mais de là à empêcher le propriétaire même de prendre possession d'un des logements après l'acquisition d'une maison, je pense que vous allez un peu loin. De toute façon.

Maintenant, je crois que le problème qu'il y a actuellement, c'est le manque de disponibilité des loyers pour les personnes à faible revenu ou à revenu moyen. Je pense que c'est là le dilemme actuellement. Le problème majeur du projet de loi que nous étudions actuellement c'est le manque de logements. Croyez-vous qu'il serait à propos que le gouvernement élabore une politique afin de venir en aide aux propriétaires concernant la rénovation? Croyez-vous que les propriétaires doivent suivre des normes aussi strictes, aujourd'hui, pour la rénovation? A un moment donné ils ne les feront plus parce que les normes seront trop sévères. Des normes moins sévères aideraient à la rénovation des logements.

M. Simard: C'est sûr qu'il y a toutes sortes de politiques d'habitation qu'il serait souhaitable de voir entrer en vigueur en fonction du contrôle des loyers, mais il y a des mesures, comme l'allocation logement que tous les adversaires du contrôle des loyers évoquent. Cela serait un peu la panacée pour régler le problème des ménages à faible revenu. Mais, si on regarde l'évaluation qui a été faite dans le temps du rapport Legault là-dessus, il y avait une espèce de projet qui avait été mis de l'avant ou une ébauche prototype dans laquelle on évaluait que, pour 12 000 personnes, cela coûterait, en tenant compte de certaines hypothèses sur les loyers et sur les caractéristiques des revenus des locataires, quelque chose comme $15 millions. (12 h 15)

On considère également — et c'est toujours les chiffres du rapport Legault — qu'en 1971, il y avait 280 000 ménages qui avaient besoin d'une aide sur le plan du logement, si on considère la norme de 25% du revenu alloué au loyer et que ce nombre devait passer à 334 000 en 1981. Si on fait des extrapolations pour quelque chose comme 300 000 personnes, on monte rapidement à près de $500 millions, ce qui fait que ce n'est pas la panacée pour régler cela.

Quant à d'autres questions sur la restauration des logements, on peut sortir d'autres chiffres aussi si on considère que la réglementation est un problème pour la rénovation du logement. Il faut dire aussi qu'il y a un manque de réglementation ou d'application de la réglementation qui est un problème pour les ménages à faible revenu. D'après les chiffres que j'ai pu consulter dernièrement d'une étude encore confidentielle de la Société centrale d'hypothèques et de logement — c'est une étude interne — les hausses de loyer, à la suite des rénovations subventionnées, sont de l'ordre de 64%. On veut aider les ménages à faible revenu par des politiques de restauration uniquement en l'absence de contrôle de ces loyers, la CHL, en principe, doit contrôler les loyers, une fois qu'ils ont été subventionnés, mais ce contrôle n'est pas fait. Il s'ensuit une exploitation de la rareté des logements restaurés qui est faite.

C'est vrai, particulièrement pour Montréal, qui est dans une situation... à cause de la structure de ces logements qui exigent beaucoup de réparations. On considère que les études faites par le Conseil économique du Canada démontrent que de 1961 à 1971, le rapport du loyer par pièce sur le revenu a augmenté de 62% à Montréal comparativement à 14% pour la moyenne des grandes villes canadiennes, ce qui fait que cela touche particulièrement les locataires à faible revenu, les logements à prix modique et les vieux logements. Ce sont les caractéristiques d'une bonne partie des loyers à Montréal. Il n'y a rien qui nous permette de croire que ces tendances se sont résorbées de 1971 jusqu'à aujourd'hui. C'est pourquoi nous demandons le contrôle obligatoire des loyers.

M. Cordeau: Je tiens à vous féliciter pour vos sources de renseignements, puisque vous semblez posséder des rapports que nous, membres de l'Assemblée nationale, ne possédons pas. Maintenant, vous avez mentionné tantôt que, concernant les logis rénovés subventionnés — je ne sais pas si j'ai bien saisi — que le prix n'était pas fixé. Je pense que le prix des logis subventionnés est fixé par l'organisme.

M. Simard: II est effectivement fixé, mais le contrôle n'est pas fait, c'est-à-dire que les propriétaires se moquent des prix fixés et fixent eux-même le prix du loyer. C'est d'après une étude interne de la CHL qui relève ce facteur, entre autres, de l'absence de véritable contrôle des loyers subventionnés, comme responsable de la hausse.

M. Cordeau: Ils peuvent rénover, le prix est fixé, et ensuite, il n'y a pas de contrôle concernant le prix exigé du locataire.

M. Simard: C'est cela comme, d'ailleurs, dans les programmes de construction de logements à dividendes limités qui prévoyaient un certain contrôle des loyers. Ces contrôles n'ont jamais été faits par la Société centrale.

M. Cordeau: Parce que, si je suis bien informé, le propriétaire avant d'obtenir une subvention signe, bien sûr, une entente dans laquelle il dit qu'il va se soumettre au prix fixé par la régie, par l'organisme en conséquence, et ensuite de cela, le prix est fixé. Il n'y a plus de contrôle après?

M. Simard: Les observations démontrent que l'entente n'est pas respectée.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Rosemont.

M. Cordeau: J'aimerais entendre certaines explications du ministre concernant ce manque de contrôle, parce que là, c'est l'anarchie.

M. Tardif: C'est vrai, M. le Président...

M. Scowen: ... de la société.

M. Tardif: C'est vrai, M. le Président, que cette société existe et c'est la raison pour laquelle j'ai demandé aux gens de mon ministère et de la Société d'habitation de me préparer un programme de restauration qui soit beaucoup plus efficace au niveau du contrôle des loyers, d'une part, et, d'autre part, qui soit accessible également aux locataires. Ce programme est en préparation présentement. Mais c'est un fait que le programme PAREL, Programme d'aide à la remise en état des logements, produit ces effets secondaires qu'on a mentionnés.

M. Cordeau: Parce que si vous découvrez que le propriétaire ne suit pas l'entente, je crois que vous êtes en mesure d'exiger le remboursement complet du prêt.

M. Tardif: Oui, mais je voudrais faire remarquer qu'il s'agit d'un programme fédéral et nous sommes en train de mettre au point un programme québécois qui visera à contrer ces effets.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Rosemont.

M. Scowen: Est-ce que le fédéral est conscient de ce problème?

M. Tardif: II semble...

M. Scowen: Est-ce que vous avez attiré leur attention...

M. Tardif: II semble en prendre conscience et des contacts ont déjà été faits entre la Société d'habitation et la Société centrale d'hypothèques et de logement à ce sujet.

M. Scowen: Et ils ont refusé de faire les changements qui s'imposent?

M. Tardif: Ils n'ont pas refusé de faire les changements. Cependant, le contexte dans lequel nous sommes, celui de période préélectorale sur le plan fédéral, fait que la révision de ce programme est peut-être plus lente qu'on le voudrait, mais c'est en marche.

M. Scowen: Je comprends avec difficulté que si vous voyez un problème qui est causé par un programme fédéral...

M. Tardif: Oui.

M. Scowen: ... plutôt que de demander au fédéral de le régler...

M. Tardif: Oui.

M. Scowen: ... mettre sur pied un programme québécois en parallèle ou en chevauchement pour régler un problème qui pourrait être réglé par le

gouvernement concerné... Est-ce que le fédéral a refusé de faire les changements qui s'imposent?

M. Tardif: Ce n'est pas une question de refuser ou pas de faire les changements qui s'imposent. Il y a plus que ça. Tout le programme, selon nous, est à revoir, programme qui permettait des subventions pouvant atteindre $6250 pour une rénovation de $10 000 avec une possibilité d'emprunt à un taux préférentiel d'intérêt par la suite, programme à frais partagés entre Ottawa, Québec et les municipalités. Il y a présentement également des municipalités qui acceptent le programme, d'autres qui n'acceptent pas, qui ne veulent pas contribuer à ce programme. C'est donc à l'ensemble du programme qu'il faut s'adresser et non pas uniquement à cette modalité du contrôle des loyers.

M. Scowen: Si ce n'est pas confidentiel, ça pourrait être intéressant de voir la correspondance entre vous et le fédéral en ce qui concerne ce problème et leurs efforts pour le régler. Est-ce que ce serait possible?

M. Tardif: En temps et lieu, je déposerai les documents, M. le Président, sur l'évolution du programme.

M. Cordeau: M. le Président...

M. Scowen: Je parle spécifiquement de la correspondance qui se fait entre les deux dans ce domaine. Est-ce qu'il y a quelque chose de confidentiel là-dedans?

M. Tardif: Pour l'instant, M. le Président, il s'agit pour nous de nous assurer que, dans la révision d'un programme de restauration, l'argent présentement investi par le fédéral soit quand même accessible dans un programme qui soit plus adapté à nos besoins, et c'est à ce niveau que portent les tractations présentement.

M. Scowen: Mais, c'est simplement qu'il me semble que c'est quelque chose qui est assez urgent et si on peut faire la lumière là-dessus, c'est quelque chose qui pourrait être réglé même avant l'élection, si on est prêt à faire quelque chose tout de suite.

M. Tardif: Présentement, M. le Président, il semblerait que la seule arme dont dispose la Société centrale d'hypothèques et de logement face à un propriétaire qui ne respecterait pas ses engagements serait, en quelque sorte, la reprise de possession et, déjà, on voit que la société centrale possède un parc immobilier au Québec d'à peu près 21 000 logements sur un total de 25 000 au Canada. Elle tente présentement de se départir de ce portefeuille. Elle met en vente des ensembles immobiliers avec les effets que l'on sait. Le problème reste entier de ce côté tant et aussi longtemps qu'on demeure à l'intérieur du programme tel qu'il est formulé. Mais, comme je dis, il nous semble important de réviser en entier ce programme et, lorsqu'il sera prêt, il sera évidemment rendu public.

M. Scowen: M. le Président, je ne veux pas prolonger ce débat longtemps, mais il y a un dernier point. Je pense que si je vous comprends, il y a ce problème qui existe, c'est la faute du fédéral. Vous êtes conscient, vous êtes en train de mettre sur pied un correctif québécois, vous avez suggéré que le fédéral le fasse lui-même, mais à cause du fait qu'une élection s'en vient, il a refusé de corriger la situation. Alors, je vous demande, M. le ministre si c'est possible...

Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît, je vais être obligé de vous rappeler à l'ordre.

M. Scowen: ... que vous rendiez publique la correspondance pour que tout le monde puisse savoir exactement ce qui se passe et puisse faire pression sur le fédéral...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Tardif: Je n'ai pas dit qu'il y avait refus d'amender le programme...

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, si vous me permettez... Le Président (M. Laplante): Je voudrais qu'on continue à poser des questions sur le mémoire, parce que cela tombe dans l'administration où ces questions...

M. Cordeau: Je crois qu'on a sorti un chat du sac qui est important, parce qu'il y a des locataires qui sont brimés et, s'il y a une faute quelque part, il faut savoir où afin de rétablir une situation normale. Je crois...

Le Président (M. Laplante): Je crois, M. le député de Saint-Hyacinthe que le but de cette commission est d'entendre les mémoires, de discuter des mémoires avec les intervenants. J'ai laissé parler un certain temps là-dessus afin d'interroger le ministre, mais on est rendu dans un processus de décisions avec le ministre et je crois que ces questions appartiennent soit à l'étude de la loi 107 ou pourraient être posées à l'Assemblée nationale. J'aimerais qu'on retourne à l'étude du projet.

M. Cordeau: J'aimerais mieux éclaircir cela ici qu'éclaircir cela en haut. Cela va faire un autre projet de loi 116.

Le Président (M. Laplante): Vous allez avoir l'occasion à l'étude article par article de la loi 107.

M. Cordeau: Je crois que le ministre n'est pas fautif non plus, on ne blâme pas le ministre du tout. On essaie de corriger une situation anormale.

Je crois que M. le ministre peut nous permettre cinq minutes encore sur le même sujet. Je crois que vous n'avez pas objection à ce que le point soit éclairci afin que justice soit établie.

Le Président (M. Laplante): Très bien, allez-y. M. Cordeau: M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Rosemont sur une question de règlement.

M. Paquette: Simplement, M. le Président, je ne me rappelle pas à quelle heure on termine et j'aimerais bien avoir mon droit de parole, à un moment donné. Je ne m'oppose pas à ce qu'on continue un peu là-dessus. C'est à une heure qu'on termine? D'accord.

Le Président (M. Laplante): Le temps serait terminé pour le groupe et ce serait...

M. Cordeau: C'est à une heure. Il nous reste deux mémoires à entendre aujourd'hui.

M. Paquette: D'accord.

M. Cordeau: M. le Président, c'est un programme fédéral à frais partagés, si je ne m'abuse, est-ce que...

M. Guay: Vous ne vous abusez pas.

M. Cordeau: Partant de là, la Société d'habitation du Québec a regard et les villes, dans des plans de rénovation, font affaire avec la Société d'habitation du Québec. Toutes les ententes sont signées en haut, mais c'est la Société d'habitation du Québec qui a le contrôle des ententes au point de vue de la rénovation. Je ne suis pas prêt à blâmer d'un coup sec Ottawa simplement parce que c'est un programme fédéral. C'est sous la surveillance de la Société d'habitation du Québec. Je me demande si ce n'est pas la Société d'habitation du Québec... Le fédéral n'est là que pour fournir des fonds, mais par contre ces programmes sont sous la surveillance de la Société d'habitation du Québec. Je crois en toute logique que ce serait à la Société d'habitation du Québec de voir à ce que les propriétaires surveillent les normes...

M. Caron: M. le Président, on a dit qu'on irait jusqu'à une heure, laissez le député de Saint-Hyacinthe...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe, juste un moment. Je voudrais être... Ce ne sera pas long, je vais vous donner la parole. Je vais vous donner la parole tout de suite après, M. le député de Verdun.

M. Caron: De l'autre côté, ils auront leur tour tout à l'heure.

Le Président (M. Laplante): Si les membres de cette commission me disent: Oui, on peut s'étendre sur ce sujet-là, la commission est maîtresse de ses travaux, mais il faudra le consentement unanime des membres de cette commission. Est-ce qu'il y a consentement.

Une Voix: II y a consentement.

M. Guay: Oui, mais avec une limite de temps. Le député de Notre-Dame-de-Grâce a posé des questions. Le député de Saint-Hyacinthe vient de poser des questions, le ministre pourrait au moins répondre et après cela on pourrait peut-être revenir au mémoire du RCM.

M. Cordeau: Je veux seulement clarifier les responsabilités de chaque palier de gouvernement dans cela.

Le Président (M. Laplante): D'accord, c'est le voeu de tout le monde.

M. Tardif: M. le Président, nous avons soumis à la Société centrale d'hypothèques et de logement un certain nombre de propositions, en attendant la mise au point d'un programme qui, selon nous, pourrait être mis en oeuvre et répondrait mieux aux besoins, et, notamment, l'élément charnière de ces modifications est la signature d'une entente entre le propriétaire et le locataire quant aux rénovations effectuées et quant au pourcentage d'augmentation de loyers suite à ces rénovations. C'est l'élément manquant dans le programme existant que nous voulons voir introduire entre autres. Des représentations ont été faites à la Société centrale et nous attendons une réponse. C'est tout ce que je puis dire pour l'instant.

M. Caron: M. le Président, comment sont les relations entre la Société d'habitation et la Société centrale? Est-ce que les relations entre les deux sont bonnes? (12 h 30)

M. Tardif: Ecoutez, on me dit que même sur ce sujet, ils se sont parlé encore la semaine dernière, M. Brien, responsable de la SCHL pour la région de Québec et M. Couture.

M. Caron: Les relations sont bonnes.

M. Cordeau: M. le ministre, est-ce que le programme que vous voulez établir ou l'entente que vous voulez signer va contrôler aussi les logis qui ont déjà été rénovés et dont le prix a été fixé?

M. Guay: Là, je soulève une question de règlement, parce que, d'un commun accord, on s'était entendu pour expliciter davantage la question du programme actuel. On entre dans le programme à venir, c'est une toute autre chose.

M. Cordeau: C'est pour corriger les inégalités...

M. Guay: Non, on n'en sortira pas. M. Cordeau: ... du programme actuel.

M. Guay: Les questions, jusqu'à maintenant, portaient sur... est-ce que c'est la SCHL ou la SHQ, comment ça se fait? Très bien. Si on veut savoir, à l'avance...

M. Cordeau: Non.

M. Guay:... quels sont les détails du programme de rénovation à venir...

M. Cordeau: Je demande au ministre si cela va prévoir les injustices qu'ont eu à subir certains locataires parce que le propriétaire n'a pas respecté l'entente concernant le prix qui a été fixé et là, c'est le locataire, pour les logements qui ont été rénovés dans le passé.

M. Tardif: M. le Président, la seule "participation" de la Société d'habitation du Québec dans ce programme de restauration est d'abord une contribution financière de $1250 par unité de logement rénové à l'intérieur du programme en question et deuxièmement, elle a trait à la désignation des zones où ces programmes pourront s'appliquer. Par exemple, on dit qu'une municipalité soumet un projet de rénovation de quartier, on dit, à l'intérieur de ce périmètre, le programme PAREL pourra s'appliquer, mais à l'intérieur de ça, c'est uniquement le programme PAREL tel que défini et préparé par la Société centrale d'hypothèques et de logement.

M. Scowen: Un dernier point, vous avez fait référence au fait que c'est une période préélectorale à Ottawa et vous pensez, si je comprends bien, que la réponse de la Société centrale tardera, d'après vous, à cause du fait... c'est quoi exactement?

M. Tardif: Cela peut avoir un effet dans les deux sens, M. le Président... Cela peut faire débloquer des choses, comme cela peut les faire retarder. Je sais qu'il y a présentement, devant la Chambre des Communes, un projet de loi visant à modifier la loi nationale d'habitation. Sur cela aussi on peut se poser des questions, à savoir si ce sera adopté ou non avant l'ajournement. Ce genre...

M. Scowen: Je n'ai pas compris exactement le sens de votre référence à ce fait que c'est préélectoral, je voulais simplement avoir...

M. Tardif: Entre autres, le ministre responsable de la SCHL a d'autres activités, d'autres chats à fouetter présentement.

M. Scowen: Cela veut dire que, probablement, ce sera retardé à cause de ça.

M. Tardif: Je ne sais pas, on attend des réponses aux propositions que nous avons faites pour ce qui concerne le programme de restauration. Il me paraît que peut-être, effectivement, le contexte dans lequel nous sommes pourrait amener des réponses plus rapides, comme cela pourrait avoir l'effet contraire. Je le donne; à vous d'apprécier.

M. Scowen: Ce n'est pas très clair.

Le Président (M. Laplante): Le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Je vous ferai remarquer que le temps est largement dépassé si on veut aborder l'autre groupe.

M. Paquette: J'espère que vous n'incluez pas cette discussion dans le temps qu'on doit consacrer au mémoire.

Le Président (M. Laplante): Non, c'est un autre mémoire.

M. Paquette: Tout en manifestant votre accord sur certaines améliorations qu'apporte le projet de loi, vous le trouvez, si je comprends bien, nettement insuffisant et pour cette raison, vous vous y opposez. Vous nous faites cette recommandation principale, dans le but de le rendre suffisant. Je pense que c'est justement le rôle de cette commission de faire en sorte que ce projet de loi contrôle adéquatement les hausses de loyer, en particulier les autres aspects du contrôle du logement, particulièrement dans l'optique d'une pénurie de logement pour les personnes à faible et moyen revenus.

Je prends votre première proposition concernant le contrôle universel et obligatoire des hausses de loyer. Est-ce qu'un mode de fonctionnement comme celui-ci vous apparaît entrer dans le cadre de cette définition? C'est-à-dire que, dans la loi actuelle, le propriétaire devrait envoyer un avis où il justifie ses hausses de loyer, il y aurait ensuite un délai d'un mois, à la suite de quoi, si le locataire n'a pas manifesté son accord à la hausse de loyer, le propriétaire devrait soumettre sa demande à la Régie des loyers. Est-ce que vous considérez qu'une telle démarche constitue un contrôle universel obligatoire tel que vous le souhaitez?

M. Thibodeau (Jacques): J'aimerais répondre à cette question. Je pense que ce que le RCM a essayé de faire ressortir dans son mémoire, c'est que, effectivement, le système actuel nous semblait insuffisant, surtout dans la mesure où on peut constater qu'il y a à peine 5% ou 6% des locataires qui se plaignent auprès de la régie. Ce que nous constatons, dans les quartiers de Montréal, c'est que cela ne concorde pas tellement avec la réalité quotidienne.

Par ailleurs, nous sommes conscients aussi qu'on ne peut pas faire de transformations nécessairement brutales du jour au lendemain. Nous

sommes partisans d'étapes qui nous mèneraient vers un système meilleur.

En fait, ce que la proposition de contrôle universel obligatoire des loyers amène de neuf par rapport au système actuel, je pense que c'est d'abord et avant tout ce qu'on peut appeler le renversement du fardeau de la preuve. C'est-à-dire qu'on peut penser que s'il y a si peu de locataires qui se plaignent de leurs conditions de logement auprès de la régie, c'est que l'effort de défense active qui leur est demandé est un fardeau qui leur semble trop grand, dans un assez grand nombre de cas, probablement.

Il est bien sûr qu'il ne s'agirait pas — et je voudrais rejoindre la préoccupation du ministre Tardif dans la dernière question qu'on nous avait posée — je ne pense pas, effectivement, que l'Etat doive instaurer un système policier pour surveiller si, effectivement, des ententes individuelles ont été signées contre la loi. Ce n'est sûrement pas ce que le RCM désire, bien sûr. Si les gens s'entendent, mon Dieu, à ce moment-là, il n'y a pas de problème.

Mais, d'un autre côté, si le locataire part au tout début de la négociation avec la certitude qu'il n'a qu'à ne pas s'entendre, justement avec le propriétaire, pour que ce soit à celui-ci d'aller faire les efforts nécessaires pour obtenir des conditions qui le satisferont davantage, déjà, cela nous semblerait au moins une transformation assez importante du rapport de force et là, il serait intéressant de constater jusqu'à quel point les ententes se feraient aussi facilement qu'actuellement.

M. Paquette: Dans cette hypothèse, vous contestez un énoncé du livre blanc à l'effet qu'un tel système nous mènerait à une bureaucratie extrêmement lourde, qu'il faudrait augmenter considérablement le nombre de fonctionnaires de la régie. Etes-vous en mesure d'évaluer à peu près le pourcentage des causes qui seraient présentées à la régie, dans un tel système? Etes-vous en mesure de le faire? Sinon...

M. Thibodeau: Je ne sais pas si mes collègues sont en mesure de le faire. Moi, je ne m'aventurerai pas à risquer un pourcentage. Mais, d'un autre côté, que ce soit dans le système qui est proposé par le gouvernement ou que ce soit dans celui que nous proposons, si plus de locataires ont à être protégés, on peut penser que, de toute façon, il risque d'y avoir une augmentation de la bureaucratie. Si 20% ou 25% des locataires se plaignent avec le système actuel, cela va transformer un peu le système de la régie dans le sens de l'augmentation du nombre de fonctionnaires aussi, je présume.

M. Paquette: Etant donné qu'il y a aussi différentes...

M. Simard: Est-ce que je peux ajouter quelque chose là-dessus?

M. Paquette: Oui.

M. Simard: Je pense que le problème, c'est que ni vous ni moi ne pouvons, d'après ce que j'ai pu constater, se fonder sur des études qui permettraient d'évaluer cet aspect administratif de la question. Une chose est certaine, c'est que le fait que l'administration actuelle soit restreinte, d'une certaine façon — et si on regarde les chiffres par rapport à l'Ontario, c'est déjà passablement gonflé par rapport aux services qui sont donnés comparativement à ce qui est donné en Ontario — ce qu'on peut dire, c'est que si les locataires — et on semble vouloir, à travers la loi, faire en sorte qu'il y ait plus de locataires qui y aient accès, par une politique d'information et qu'ils défendent mieux leurs intérêts — dans ce cas, les recours à la régie seront d'autant plus gonflés et d'autant plus problématiques sur le plan de l'aspect administratif et bureaucratique.

Ce qu'on dit, d'autre part, c'est qu'un recours obligatoire ferait en sorte, par exemple, que dans le dossier d'un immeuble, quand il est apporté devant la régie, à ce moment-là, il y aurait une seule étude sur les coûts associés à cet immeuble qui seraient répartis sur tous les logements au lieu de faire en sorte, aujourd'hui, plus ou moins selon le bon vouloir des administrateurs qui entendent un plus ou moins grand nombre de locataires dans un même immeuble à la régie, que, souvent, les logements d'un même immeuble passent plusieurs fois la même année devant la régie. Ceci est un point de vue administratif vraiment peu économique pour le moins.

Je pense qu'en examinant les questions comme l'informatisation du traitement des données, il y a possibilité d'aller passablement plus loin qu'actuellement en systématisant l'application de la formule. D'après ce qu'on peut voir dans les données, il y a, je ne sais pas dans quelle proportion, mais il y a un bon nombre d'administrateurs qui fixent les loyers selon leur vouloir, sans s'en tenir à la formule.

M. Paquette: On pourrait espérer qu'en inversant la démarche du côté du propriétaire, il y aurait une certaine limitation des hausses abusives, et que cela pourrait entraîner une acceptation tacite, même explicite, d'un plus grand nombre de propriétaires, ce qui ferait que les causes ne se rendraient pas, peut-être en majorité, devant la régie.

M. Limonchik: Et même envisager l'hypothèse, par le renversement des rapports de force, qu'il y en aurait peut-être moins. C'est peut-être pour cela qu'il y a moins de fonctionnaires en Ontario. C'est peut-être cela...

M. Paquette: Oui, mais il faut dire qu'en Ontario, sauf erreur, ils s'occupent uniquement du contrôle des loyers et non pas des autres aspects en termes de rénovation, d'éviction. Ils s'occupent seulement du contrôle des loyers en Ontario et cela, c'est difficile à comparer.

M. Limonchik: Non, mais au niveau du loyer...

M. Paquette: Oui.

M. Limonchik: ... si on change le rapport de force, peut-être que cela pourrait dissuader certains propriétaires d'agir dans un sens par rapport à un autre. On pourrait donc envisager même l'hypothèse d'une diminution des causes.

M. Paquette: En termes...

Le Président (M. Laplante): Est-ce encore une courte?

M. Paquette: J'en ai plusieurs.

Le Président (M. Laplante): C'est qu'on n'aura pas le temps de les poser, il faut passer à l'autre absolument pour la présentation de son mémoire, parce qu'il nous restera à peu près 1 heure 15, 1 heure 30, ce qui convient pour deux mémoires.

M. Paquette: Oui, je vais poser une autre question sur le même sujet dans ce cas. Etant donné le fait qu'il y a beaucoup de petits propriétaires qui habitent leur logement, qui sont souvent des travailleurs qui n'ont pas nécessairement une instruction plus grande que celle de leurs locataires, dans ces cas-là, dans certains cas, en tout cas, on peut dire que le rapport de force est à peu près égal dans les deux sens. Seriez-vous d'accord qu'on exclue les petits immeubles où le propriétaire habite de cette inversion du fardeau de la preuve ou pensez-vous que, même dans ces cas, on doive le maintenir?

M. Simard: Je pense qu'il y a un certain... C'est une question délicate, bien sûr, du fait que la situation économique des petits propriétaires, comme on le dit souvent, n'est pas tellement plus favorable que celle des locataires, mais quand on dit que le rapport de force que vous semblez souligner est un peu lié au statut économique du propriétaire et du locataire, je crois qu'il est plutôt lié au mécanisme, à la structure du marché immobilier, ce qui fait que le propriétaire est plus ou moins en situation de monopole et que le locataire est tout à fait dépendant vis-à-vis du marché, que ce soit le petit propriétaire ou le grand propriétaire. (12 h 45)

D'autre part, quant à l'éliminer, le ministre soulignait, au début, dans la matinée, qu'il y a une inversion, si on veut, en termes de hausse, demander un rapport inversement proportionnel par rapport à la dimension de l'immeuble et la hausse de loyer demandée. Les études démontrent qu'effectivement, chez les petits propriétaires, on est aussi exigeant, sinon plus, que dans le cas de la grosse propriété.

Il y a le fait également... J'abrège. On me dit que, souvent, il y a de meilleures relations entre locataires et propriétaire, mais, inversement, il y a le fait aussi qu'étant donné qu'ils sont présents jour après jour, il y a le facteur d'intimidation qui joue énormément, du fait que propriétaire-propriétaire, locataire-locataire sont côte à côte. Ils ne sont pas...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Verdun.

M. Paquette: Une dernière question, si vous permettez.

Le Président (M. Laplante): Je n'ai à peu près plus de temps, parce que le ministre veut faire sa réplique dans tout cela. Je m'excuse, mais une petite vite.

M. Caron: J'aimerais demander à cet organisme s'il a des chiffres, des statistiques pour voir dans quel pourcentage le propriétaire abuse ou prend avantage du locataire. Est-ce que vous avez des statistiques?

M. Simard: On a de bons indices, enfin, quelques indices, c'est difficile à évaluer, mais on mentionnait l'étude de Matthews sur les coûts-bénéfices, les effets de répartition entre locataire et propriétaire, où, selon des hypothèses très conservatrices, quant à la production des logements, même qu'on disait que les locataires se faisaient retirer pour dix ans, sur une période de dix ans, quelque chose comme $830 millions, comparativement à $250 millions, qui impliqueraient la gestion du contrôle. On sait aussi que si les contrôles étaient appliqués systématiquement à toutes les hausses abusives, dites de plus de 10%, l'augmentation moyenne passerait de 8% ou 9% à 5,7%. Donc, on a un bon nombre d'indices.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, pour le mot de la fin.

M. Caron: Une petite minute, s'il vous plaît! Le pourcentage, est-ce que ce serait 5%, 10%, 15%, 20%, 30% de propriétaires?

M. Simard: Qui abusent?

M. Caron: Oui, ou qui prennent avantage.

M. Simard: Je n'ai pas idée de venir là-dessus. Quant à nous, c'est plutôt le principe même qui permet au propriétaire d'exploiter la rareté du logement. C'est bien sûr qu'il y en a qui sont dans des situations où ils sont capables de le faire, ou bien selon la situation du marché.

Le Président (M. Laplante): Merci. M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, une courte question. Est-ce que je dois comprendre, à la suite des nombreuses références qui ont été faites au système ontarien, qu'on préconiserait au RCM finalement l'utilisation d'un taux fixe?

M. Simard: Pour nous, c'est simplement une démonstration qu'il y a possibilité d'aller à peu de

frais plus loin qu'avec le statu quo actuel. On pourrait critiquer également le système tel qu'il est administré actuellement en Ontario. Je ne pense pas qu'on ait à s'engager dans toutes sortes de débats là-dessus.

M. Tardif: Vous êtes conscient qu'un taux fixe peut avoir un effet inflationniste?

M. Simard: S'il est fixé à un taux très élevé, comme en Colombie-Britannique, où on l'a déjà fixé à 10,6%, c'est bien sûr que cela a un effet inflationniste, mais il pourrait être fixé passablement plus bas.

M. Tardif: Quand on sait que les taxes sont la principale composante de l'augmentation et que les taxes en 1977 au Québec représentaient, en fait, 24% de l'augmentation accordée, comme poids, évidemment, l'idée d'un taux fixe qui serait généralisé ne tiendrait pas compte des différences d'augmentation de taxes. Je veux seulement vous donner une indication. Ici, en 1977, dans une municipalité au Québec, il y a eu une baisse de taxe de 50%, et, dans une autre, une augmentation de 52%, et vous avez la gamme de moins de 50% à plus de 52%, avec une moyenne d'augmentation...

M. Scowen: A moins 50%, je veux déménager tout de suite.

M. Tardif: ... avec évidemment tout l'éventail. Un taux fixe ne tiendrait pas compte, forcément, de ces disparités dans le taux de taxation et pourrait donc entraîner des augmentations de loyer, alors qu'elles ne sont pas justifiées, en tout cas, pour une composante. Je prends celle-là, d'accord.

M. Simard: II y aurait possibilité de régionaliser les taux par un traitement informatique, et tout.

M. Tardif: D'accord. Remarquez que le système actuel va plus loin que cela. Non seulement il permet de régionaliser, mais il permet d'individualiser. C'est aussi une donnée importante.

Je voudrais dire ceci: On a fait référence à un document de travail qui a été fait à ma demande, d'ailleurs. Des études ont été commandées, comme celles de Mathews et Godbout, de l'INRS Urbanisation. Ce sont des documents de travail, que le RCM, de toute évidence, a eu en sa possession et a en sa possession, qui impliquaient quoi? Ils impliquaient, dans les faits, une espèce de changement d'ordre structurel dans le mode non seulement de la production, mais surtout de l'approbation et de la gestion du stock de logements au Québec.

J'ai pris bonne note des remarques de M. Thibodeau qui dit: Nous, on ne veut pas de transformations brutales. On conçoit qu'il est normal de procéder par étapes. Alors, si on regarde la situation, il y a quand même à peu près 2 millions de logements au Québec. A peu près la moitié sont des logements de type locatif. On constate que le secteur coopératif et le secteur public ne gèrent ou, enfin, n'administrent qu'à peu près 4% ou 5% de ces logements. On est bien conscient qu'on est loin encore de l'objectif qui viserait à changer le mode d'approbation et de gestion de ces logements. C'est peut-être sur d'autres leviers qu'il faut agir que strictement par le biais d'une méthode de contrôle. C'est tout ce que je voulais dire à ce stade-ci. On poursuit ces objectifs, mais je pense qu'il ne faut pas demander à la loi 107 de faire autre chose que ce qu'elle était destinée à faire, c'est-à-dire éviter les abus.

Le Président (M. Laplante): Merci. Sur cela, M. Simard, M. Thibodeau et M. Limonchik, les membres de cette commission vous remercient de votre participation.

M. Scowen: Je veux simplement savoir si le rapport confidentiel pourrait être disponible pour les députés.

M. Tardif: II n'a jamais été confidentiel. La preuve, c'est que les groupes en présentent long.

M. Scowen: Voilà, bon! Est-ce qu'on peut en avoir une copie?

M. Tardif: II n'a jamais été publié. C'est un document de travail. Je vous ai remis hier l'étude de l'INRS Urbanisation qui est un document de travail bourré de chiffres.

M. Scowen: Est-ce qu'on peut avoir l'autre? M. Tardif: On pourra regarder cela.

Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant l'Association de l'immeuble du Québec.

M. Limonchik: Avant de partir, je voudrais remercier le président de la commission de nous avoir reçus ici.

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur.

M. Cordeau: ... de logements de 21 000 sur 25 000 au Canada. Serait-ce que le Québec aurait été favorisé par Ottawa?

M. Tardif: Non, on parle de reprises de possession. Serait-ce qu'il y a plus de mauvaises...

Le Président (M. Laplante): Voulez-vous laisser la place, s'il vous plaît, pour qu'on puisse entendre l'Association de l'immeuble du Québec?

Une Voix: Est-ce que ce serait possible d'avoir une idée de l'horaire de la commission pour les groupes qui restent à comparaître?

Le Président (M. Laplante): Les autres groupes vont comparaître cet après-midi avant 18 heures.

Une Voix: Avant 18 heures?

Le Président (M. Laplante): Oui, madame.

Une Voix: Je vous remercie.

Le Président (M. Laplante): Pour celle qui me posait la question tout à l'heure, on va ajourner à 13 heures sine die, ce qui veut dire qu'après la période des questions de l'Assemblée nationale vous reviendrez ici et c'est là qu'on terminera les travaux.

Une Voix: Est-ce qu'on ne pourrait pas aller dîner maintenant et commencer notre exposé après le dîner au lieu de prendre dix minutes?

Le Président (M. Laplante): J'allais demander le consentement des membres pour dépasser un petit peu, justement, pour ne pas vous nuire dans votre exposé. Vous auriez le temps, si on consentait à retarder de cinq ou six minutes, de...

M. Tardif: Faire votre exposé.

Le Président (M. Laplante): ... faire votre exposé. Après cela, ce sera la période de questions.

Si vous voulez vous identifier et identifier le groupe que vous représentez, s'il vous plaît! On demande ordinairement à tous les groupes de synthétiser leurs mémoires pour les présenter à l'intérieur de 20 minutes. S'il vous plaît, messieurs!

Association de l'immeuble du Québec

M. Pilote (Philippe): Nous tenons tout d'abord à vous remercier de bien vouloir nous entendre à propos du projet de loi 107. J'aimerais me présenter, mon nom est Philippe Pilote, de Chicoutimi. Je suis président de l'Association de l'immeuble du Québec. Nous avons, à droite, notre relationniste, M. Henri Robert et M. Ronald Mar-coux, vice-président et président du comité de législation; nous avons M. Gaétan Marquis, le porte-parole du groupe ainsi qu'administrateur et qui a fait partie du comité de législation; à ma gauche, M. André Daoust, directeur général de l'Association de l'immeuble du Québec.

Notre association est incorporée en vertu de la troisième partie de la loi des compagnies. Elle regroupe toutes les chambres d'immeubles à travers la province. Elle atteint cette année son 25e anniversaire d'existence.

Dans le mémoire que nous avons l'honneur de vous soumettre, nous avons la conviction de défendre avant tout les intérêts du public locataire en même temps que ceux des membres de notre association. Nous craignons que le projet de loi 107 n'aille à l'encontre des objectifs du gouvernement en faveur des locataires. En effet, il contribuera à brève échéance à une raréfaction des logements sur le marché et à une décrépitude accrue du parc résidentiel du Québec.

Il pourrait aggraver — et malheureusement, le processus est déjà commencé — le marasme dans les mises en chantier des habitations multiples et des opérations d'entretien, d'où un chômage grandissant à une époque où la relance économique est impérative. Sans entrer dans le détail des complexités de la loi, nous sommes d'avis que le véritable problème du logement réside dans l'incapacité d'une partie de la population de payer des loyers suffisants. Une aide financière à son intention s'impose. Des mesures coercitives et antiéconomiques au détriment des propriétaires n'y changeront rien.

De plus, le taux de vacance assez élevé actuellement ne justifie nullement l'intervention généralisée d'une telle régie. Sans nier les bonnes intentions du gouvernement à ce sujet, nous avons cependant la conviction que le projet de loi passe à côté du problème. En mettant l'entreprise privée en difficulté, il ne défend aucunement le public. Il est souvent contraire au respect de la libre entreprise, dont le gouvernement s'est maintes fois fait le défenseur à propos des petites et moyennes sociétés dont nos 5000 membres font d'ailleurs partie.

Je passe maintenant la parole à M. Gaétan Marquis, qui analysera pour vous les détails de notre mémoire. M. Marquis.

M. Marquis (Gaétan): M. le Président, membres de la commission.

L'objectif général d'une politique cohérente de l'habitation, tel que défini par le groupe de travail dirigé par M. Legault, avait donné comme définition ou comme objectif de faire en sorte que tous les Québécois puissent disposer d'un logement adéquat à un prix abordable et situé dans un environnement favorable. La démarche que notre association entreprend aujourd'hui est basée sur le principe que nous sommes entièrement d'accord que tous ont droit à la santé, à l'éducation, au logement et à la nourriture, et notre démarche est peut-être la plus égoïste de toutes les associations qui vont se présenter devant vous parce qu'on pari du principe que si ces buts ne sont pas atteints, on va avoir un conflit de classes, une lutte de classes continuelle et qu'on ne pourra pas atteindre la paix sociale. On aimerait penser que le gouvernement va continuer à vouloir laisser une prime à l'effort et à l'initiaive et on voudrait pouvoir continuer à mériter un revenu dans la province de Québec à la mesure de nos efforts.

Dans le livre blanc sur les relations entre locateurs et locataires, le ministre des Affaires municipales voulait promouvoir une plus grande harmonie dans les relations entre locateurs et locataires et aussi en visant à assurer au locataire le droit au maintien dans les lieux. En vue de réaliser ces objectifs, le gouvernement propose une loi qui modifie certains articles du Code civil concernant le logement, en réglementant la qualité, la conservation, la restauration du stock de logements et en instituant la nouvelle Régie du logement. (13 heures)

On a discuté dans des mémoires précédents ou à d'autres niveaux lorsqu'on a attaqué le problème du logement à savoir si l'entreprise privée était à même de relever le défi et de combler ou de fournir ce service. Je me réfère encore une fois au rapport Legault qui disait en introduction: "Jusqu'ici, l'entreprise privée à but lucratif est apparue comme le principal intervenant dans l'exploitation des terrains et dans la production et la gestion des logements. Dans le contexte économique actuel, le groupe de travail sur l'habitation reconnaît l'importance de ce rôle et la nécessité d'utiliser le dynamisme et le savoir-faire propre à ce type d'entreprise. Il est normal que de tels services appellent une juste rémunération, mais le gouvernement doit veiller à enrayer les abus. Il devra, par ailleurs, s'assurer que ses interventions n'éliminent pas les petits constructeurs et les petits propriétaires."

Parmi les modalités d'application ou les différents aspects de la loi, on aimerait vous formuler certaines inquiétudes, entre autres en ce qui a trait à la conversion du stock de logements. Vous allez donner à un administrateur une charge et une responsabilité que nous ne lui envions pas, parce que vous allez lui demander de juger, dans les cas de démolition, sur des critères tels que l'état du logement, le préjudice causé aux locataires, les besoins de logement dans les environs, la possibilité de relogement des locataires, la détérioration de l'apparence architecturale, la détérioration du caractère esthétique, la détérioration de la qualité de vie du voisinage, le coût de la restauration et tout autre critère pertinent.

J'ai l'impression qu'il vous faudra un surhomme, plus le fait que tous ces critères sont extrêmement subjectifs.

De plus, le projet de loi permet à tout intéressé de s'objecter à une telle démolition ou de se présenter devant le conseil municipal ou, éventuellement, devant la régie en affirmant qu'il est intéressé à acquérir ledit immeuble pour lui conserver son caractère locatif. On peut vous faire part de certains cauchemars, de certaines organisations ou de certaines personnes qui vont, tout simplement pour faire une entrave au changement de vocation d'une propriété qui pourrait être extrêmement désirable, empêcher ou retarder ce changement. Lorsque, soixante jours plus tard, les gens se représenteront devant les autorités compétentes pour juger de ce litige et qu'on sera obligé de mentionner: Malheureusement, on n'a pas pu s'entendre, on s'embarquera alors dans le processus qui arrivera à une décision si, oui ou non, la nouvelle vocation est utile. A ce moment-là, le propriétaire qui considérait cela aura non seulement perdu le loyer, si jamais il l'avait conservé inhabité pendant ce temps, mais aura possiblement un délai pour se prévaloir de son financement pour faire la transformation, lequel pourra être expiré, ou, pis encore il pourra avoir perdu son immeuble au créancier hypothécaire ou aux autorités municipales.

Lorsqu'on parle — et il semble que c'est là qu'est le problème — de transformation ou de conservation de loyers à prix modique pour les familles à revenu moyen ou faible, nous nous référons encore, ici, à la recommandation que formulait M. Louis Pretty, de l'école d'architecture de l'université dans le cadre du groupe de travail de l'habitation, qui disait: "L'un des moyens qui permet de s'assurer que les logements existants demeurent accessibles à la population du quartier est de faire en sorte que celle-ci en devienne propriétaire." Il est recommandé qu'on encourage et qu'on aide fortement les citoyens des quartiers populaires à acquérir et à restaurer les logements existants sous forme de coopératives, de corporations sans but lucratif ou en tant que petits propriétaires.

L'intention ou la philosophie de notre mémoire — vous allez le réaliser à mesure qu'on va avancer— n'est pas surtout de dire: Votre loi nous plaît ou ne nous plaît pas, nous pensons que si la proportion de 20% de propriétaires et de 80% de locataires était inversée, le problème n'existerait même plus à savoir s'il faut rétablir l'équilibre des forces. D'ailleurs, le groupe de travail recommandait aussi qu'une subvention correspondant au moins à 50% du coût des travaux admissibles de restauration soit accordée au propriétaire et que des subventions représentant 100% des coûts, mais ne dépassant pas $500 par bâtiment démoli et déblayé, soient versées au propriétaire et qu'une subvention équivalant à 100% de l'évaluation municipale du bâtiment démoli soit accordée au propriétaire en vue de la démolition et de la reconstruction de logements. Il est évident que si on parle de démolition, on ne parle pas de réduire le parc d'habitations, mais plutôt une démolition dans le but — si, évidemment, le bâtiment en question n'est plus assujetti à être rénové économiquement, si c'est plus économique — de faire de nouveaux logements sur ce site.

Il y a deux aspects de la loi qui nous inquiètent fortement: le premier est l'interdiction de fractionner ou de vendre individuellement des immeubles ayant déjà fait partie d'un ensemble. Disons que, tout simplement, à titre de référence, je vais vous citer Mme Claire McNicoll-Robert, directeur du module de géographie de l'UQAM, qui a participé à l'achat d'une maison qu'on s'est subdivisée entre plusieurs propriétaires. En parlant du cas de cette interdiction, elle dit: "Pour avoir tenté de régler un problème particulier, celui du projet Val-Martin, le gouvernement n'a réussi qu'à décourager des citoyens qui, dans la limite de leurs moyens souvent modestes, tenteraient de substituer une épargne au paiement du loyer mensuel. Ce genre de législation pénalise le plus grand nombre à cause des abus notoires de quelques-uns." Là on parle d'immeubles existants. On pourrait de plus se représenter le constructeur de duplex qui construit, pour une raison économique, six immeubles adjacents et que, en attendant de trouver preneur ou acquéreur, il loue. C'est la pratique, assez souvent, que le constructeur de duplex loue le haut parce que, habituellement, il s'attend que l'acquéreur veuille habiter le bas et se trouver un locataire. A ce moment, dès qu'une

unité aura été louée, le constructeur en question ne pourrait plus les vendre séparément, à moins d'aller chercher la bénédiction de l'administrateur de la Régie des loyers. A ce moment, l'administrateur, avant de décider s'il lui laisse fractionner ou vendre ces immeubles séparément, va, encore une fois, devoir prendre en considération l'effet de la vente sur les locataires, le nombre de locataires qui pourraient être évincés, l'individualisation des services, des accessoires et des dépendances, les conditions de financement, le fait que l'immeuble a été construit ou restauré dans le cadre d'un programme gouvernemental, et tout autre critère pertinent.

L'autre aspect qui nous inquiète énormément, c'est la continuation du moratoire sur la transformation d'immeubles existants en condominiums. Encore une fois, j'aimerais vous citer Mme Florence Junca-Adenot, vice-doyen de la faculté des sciences économiques de l'Université du Québec, qui, dans un éditorial l'automne dernier, sous le titre: "Le moratoire sur la transformation des immeubles anciens en copropriétés: une loi aveugle", disait, entre autres, qu'on ne pouvait nier une forme de propriété qui offre l'avantage, pour une certaine partie de la population, d'accéder à la propriété à des prix plus abordables qu'en occupant une maison unifamiliale; l'avantage de rendre plus de gens responsables du logement qu'ils occupent, parce que ce logement leur appartient et qu'ils sont plus motivés à l'entretenir; l'avantage pour l'individu de capitaliser ces sommes versées mensuellement en loyer; l'avantage pour les copropriétaires d'organiser et de se doter de services essentiels ou récréatifs en partageant les coûts comme les plaisirs; l'avantage d'utiliser un espace ou une surface de terrain moindre qu'une zone résidentielle pour bâtir des maisons unifamiliales pour un plus grand nombre de propriétaires occupants; cette augmentation de propriétaires permettant des économies aux municipalités, et l'avantage de rentabiliser à moyen terme le coût de construction et d'opération d'un immeuble d'habitation.

Il faut permettre aux gens à faible revenu d'occuper des logements convenables et de leur fournir ces logements en nombre suffisant. Maintenir la quantité et la qualité du parc locatif est intéressant, mais je pense que le gouvernement, plutôt que de continuera fournir une béquille telle que la Régie des logements devrait plutôt inciter les gens à devenir propriétaires de leur logis, à contrôler leur destinée et à devenir des gens vraiment intéressés et implantés et des citoyens de première classe.

On croit que la copropriété est une forme d'occupation très souhaitable et qu'elle devrait être permise à plus de gens.

Il y a certaines modifications au Code civil qu'on croit extrêmement préjudiciables. Je vais en souligner quelques-unes. Entre autres, à l'avenir, le locateur devra remettre un écrit au nouveau locataire lui disant l'ancien coût du loyer. Il est évident que si le nouveau locataire n'est pas satisfait, il va se présenter à la régie et on croit que les administrateurs de la régie vont être des hommes éclairés et que la justice sera rendue éventuellement.

On a peur que l'absence d'explications ou l'absence de services ou de conditions qui avaient déterminé ce qu'était l'ancien loyer fasse qu'il y ait un nombre extrêmement élevé de locataires qui s'adressent à la régie pour des raisons du genre et que, finalement, on se retrouve avec une bureaucratie encore plus haute.

Il y a un autre article qui nous inquiète énormément. La nouvelle loi veut faciliter le dépôt du loyer auprès de la régie. Cette clause, cette technique existe déjà dans le Code civil alors qu'une personne qui se croit lésée peut déposer son montant au lieu de se faire justice elle-même. Du fait que cela devienne plus facile et plus général, on va encore une fois vous faire part d'un cauchemar. Certaines organisations militantes peuvent convaincre la totalité des locataires d'un immeuble d'aller déposer leur loyer auprès de la régie parce que la porte d'en avant grince et que lorsque, éventuellement, le jugement sera rendu et que l'argent sera remis au propriétaire, celui-ci sera peut-être devenu la municipalité ou l'ancien créancier hypothécaire.

J'aimerais passer directement à nos recommandations.

Le Président (M. Laplante): II vous reste une minute pour les faire, monsieur.

M. Marquis (Gaétan): Est-ce qu'on peut les reporter au début de la prochaine période?

Le Président (M. Laplante): La prochaine période sera pour les questions. Chacun des membres de cette commission, autant les membres de l'Opposition que du parti ministériel, a lu le...

M. Marquis (Gaétan): Cela va. Au niveau des recommandations, il est évident que notre première recommandation serait l'abolition pure et simple ou un décontrôle progressif, suivant les normes que nous citons dans le rapport. Dans nos recommandations concrètes, ce serait d'aider par une allocation sociale ou une subvention toute personne dont le revenu est si bas qu'il ne lui permet pas de se payer un logement; d'encourager par des mesures incitatives la construction, la conservation, la restauration du "stock" de logements, permettre de faciliter le plus tôt possible l'accès à la copropriété, même dans les immeubles existants, et favoriser l'achat d'immeubles locatifs par des individus, des corporations sans but lucratif et des coopératives; enfin, d'adopter une loi qui, d'une façon souple et sommaire, permette vraiment aux locateurs et aux locataires, d'abord de négocier un véritable contrat de location et ensuite de se parler et de s'entendre et s'ils ont des difficultés, de s'en référer à un tribunal objectif. (13 h 15)

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur, de votre coopération, mais soyez certain, lorsque

la période de questions commencera, cet après-midi, que vous allez revenir automatiquement à votre mémoire et à vos conclusions.

Sur ce, les travaux sont ajournés sine die, en attendant l'ordre de l'Assemblée nationale, cet après-midi, pour se réunir à nouveau, ici, dans la même salle.

M. Marquis (Gaétan): Avez-vous une idée de l'heure?

Le Président (M. Laplante): Cela peut aller vers quatre heures et quinze minutes, à peu près.

M. Marquis (Gaétan): Merci. Fin de la séance à 13 h 16

Reprise de la séance à 16 h 35

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît, mesdames et messieurs. A l'ordre, s'il vous plaît. M. le député de Taschereau, on commence.

La commission des affaires municipales se réunit pour recevoir les mémoires en vue de l'étude du projet de loi no 107, Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives.

Les membres de cette commission: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes); M. Gratton (Gatineau) remplacé par M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce); M. Guay (Taschereau), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Roy (Beauce-Sud), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie). Intervenants: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau (Verchères), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Gold-bloom (D'Arcy McGee), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle), M. Samson (Rouyn-Noranda); M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) remplacé par M. Lavoie (Laval); M. Vau-geois (Trois-Rivières). Au moment où nous nous sommes quittés ce midi, nous étions avec l'Association de l'immeuble du Québec et, M. le ministre, vous étiez prêt à commencer la période des questions. M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, j'ai lu attentivement le mémoire de l'Association de l'immeuble du Québec. Je puis assurer les représentants de cet organisme, même s'ils n'ont eu, comme les autres, qu'une vingtaine de minutes pour faire leur présentation, que j'ai parcouru, et annoté ce mémoire en me posant, évidemment, au cours de la lecture, un certain nombre de questions, notamment lorsqu'on affirme que le contrôle des loyers, tel que présenté dans la loi 107, va conduire à une raréfaction du nombre de mises en chantier et de logements, forcément, et à une certaine décrépitude du stock de logements existant.

La question, en fait, que je pose, c'est sur quoi s'appuie cette affirmation. Est-ce qu'elle est basée — on fait parfois un lien, mais ce n'est pas très clair — sur ce qu'on évoque à la page 23 de votre mémoire, soit des contrôles qui auraient existé ailleurs? Est-ce que c'est là-dessus essentiellement que vous vous fondez?

M. Marquis (Gaétan): Nous en sommes arrivés à cette conclusion à la suite de nombreuses lectures sur les expériences de la Suède, de New York, de Paris et aussi à la lumière des rapports du groupe de travail, du groupe Legault, qui arrivait, dans ses remarques d'ouverture du mémoire, exactement à ces conclusions.

M. Tardif: Ces nombreuses lectures, vous les avez lues dans le texte ou vous ont été rapportées par d'autres?

M. Marquis (Gaétan): Vous voulez dire dans le texte du rapport Legault?

M. Tardif: Non, les nombreuses lectures sur les contrôles des loyers en France, en Suède, en Angleterre, en Autriche, que vous citez page 23...

M. Marquis (Gaétan): Oui.

M. Tardif: A quelle étude exactement vous référez-vous?

M. Marquis (Gaétan): Vous avez la bibliographie complète dans les dernières sept ou huit pages du mémoire. Disons que, en particulier, je vous référerais à la publication de l'Institut Fraser: "Rent control, a popular paradox" et je vous référerais à M. Selesnik: "Rent control, a case for".

M. Tardif: D'accord, je voulais m'assurer que les références que vous faites aux situations étrangères proviennent de cette source qu'est le rapport du Fraser Institute.

M. Marquis (Gaétan): Oui.

M. Tardif: Très bien. Or, effectivement ce rapport du Fraser Institute est un recueil de textes, ce qu'on appelle en anglais un "reader", une collection de textes qui fait état de contrôles de loyers, tels qu'ils ont existé dans les différents pays mentionnés.

Dans le cas de la France, on s'appuie sur la situation du logement telle qu'elle existait au lendemain de la guerre, en 1946, où le ratio loyer-revenu était de 1,7%. A toutes fins utiles c'est un gel des loyers et les loyers étaient gratuits.

On cite également un rapport de M. Hayek, prix Nobel dit-on, mais qui aurait écrit sur la situation du gel des loyers — parce que c'était un gel qui existait à ce moment-là — en Autriche, en 1929, en pleine crise économique. On admettra que ce n'est pas très récent comme étude.

Une Voix: ...

M. Tardif: Un instant, j'y arrive, M. le Président.

On cite également dans cette étude l'étude de Milton Friedman et de George Stigler, écrite en 1946, sur la situation aux Etats-Unis et l'étude de Bertrand de Jouvenel, en France, en 1948, etc., et évidemment l'étude sur la situation en Angleterre, article écrit par Frank Paish en 1952.

On constate, outre le fait que ces documents datent, qu'il s'agit de contrôles qui étaient véritablement, à toutes fins utiles, des gels des loyers; ce qui n'est évidemment pas le cas — je vous inviterais à assister aux présentations des autres groupes qui vont venir après vous — vous devez vous rendre compte que, dans le projet de loi 107, il n'est pas question d'un gel des loyers.

M. Marquis (Gaétan): On en est conscient, M. le ministre.

M. Tardif: De sorte que lorsqu'on compare la situation décrite dans le rapport du Fraser Institute, qui est un recueil d'articles, avec ce qui est prévu dans la loi no 107, on ne compare pas des choses pareilles.

Le deuxième élément de la question, en fait, c'est plutôt sous forme de question. Qu'est-ce que vous diriez s'il vous était démontré, comme le soutiennent d'autres économistes et notamment Mathews que vous avez cité à un moment donné, qui a été évoqué dans certaines des études, que le contrôle souple des loyers, au contraire, favorise l'offre nouvelle de logements plutôt que de la défavoriser? Qu'est-ce que vous répondriez à cela?

M. Marquis (Gaétan): C'est la première fois que cela nous est mentionné et je ne vois pas logiquement comment cela pourrait la favoriser, mais si cela a été mentionné, c'est possible.

M. Tardif: Vous n'avez pas l'impression que justement — pour employer un de vos arguments dans le rapport — à un moment donné le contrôle des loyers peut amener une certaine immobilité des locataires et qu'à ce moment-là les nouveaux ménages devront forcément peut-être s'adresser au stock neuf de logements et qu'il pourrait y avoir une incitation à produire ce stock neuf? Surtout que le stock neuf n'est pas contrôlé pendant cinq ans. C'est une hypothèse.

M. Marquis (Gaétan): II reste qu'il y a une grosse différence de coût à ce moment-là entre le stock neuf et le stock existant, mais c'est possible.

M. Tardif: C'est une hypothèse.

M. Marquis (Gaétan): C'est une hypothèse.

M. Tardif: D'accord, j'ai pris note d'un certain nombre de points comme cela dans votre rapport. Je ne veux pas évidemment monopoliser tout le temps de la commission, voulant laisser aux autres membres le soin de poser des questions, mais il y a des affirmations que je ne peux m'empêcher de relever. Par exemple lorsqu'on dit qu'un propriétaire, un promoteur, un développeur ne pourra plus bâtir des duplex en série, par exemple, 7 ou 8 duplex, parce qu'il ne pourra plus les vendre par la suite.

Si vous lisez l'article 38 ce n'est pas cela qui est dit. Pardon!

M. Marquis (Gaétan): Les vendre individuellement.

M. Tardif: Oui, c'est faux ce que vous avez affirmé là.

M. Marquis (Gaétan): A moins qu'il demande l'approbation de...

M. Tardif: Absolument pas, vous avez lu l'article 38?

M. Marquis (Gaétan): Oui, cela dit... M. Tardif: Qu'est-ce qu'il dit l'article 38?

M. Marquis (Gaétan): Pour 12 et plus, s'il y a un certain nombre de services en commun. Entre autres, ce qui nous semble général et dangereux, c'est si cela fait partie d'une même unité administrative. A ce moment-là, dès qu'ils ont appartenu au même propriétaire, ils font partie d'une même unité administrative. Alors, pour les fractionner ou les vendre individuellement il va falloir aller demander la bénédiction de l'administrateur des loyers.

M. Tardif: On parle d'édifices qui sont dotés de services en commun, c'est bien cela, "si certains d'entre eux...", parce que c'est cumulatif cela. Si ces immeubles... pardon!

M. Marquis (Gaétan): Situé à proximité.

M. Tardif: C'est cela. Si ces immeubles sont administrés de façon commune par une même personne ou par des personnes liées au sens de la loi sur les impôts, etc., et si certains d'entre eux ont en commun un accessoire, une dépendance ou, à l'exclusion d'un mur mitoyen, une partie de la charpente. On parle donc d'édifices qui sont liés structurellement, pas d'édifices qui peuvent être autonomes. Votre personne qui bâtit une série de duplex les uns à côté des autres pourrait très bien les vendre, peu importe le nombre d'entre eux, à partir du moment où ces immeubles ont été construits et conçus de façon autonome. (16 h 45)

La restriction ne vise pas du tout ce que vous mentionnez, elle vise les édifices qui ont en commun une structure: par exemple, un toit unique qui couvre quatre logements, qui n'a pas de mur mitoyen ou de coupe-feu. Ceci est interdit pour des raisons que je n'ai pas besoin de vous démontrer, à vous qui êtes dans l'immeuble.

Ce n'est pas du tout aussi restrictif que votre texte le laissait voir. Vous parlez de la copropriété, et nous aussi ce point nous fatigue. J'ai évidem-

ment lu votre référence à l'article de Mme Junca-Adenot de l'UQAM, moi aussi je l'ai lu à l'époque où il a paru. Quand on parle de loi veugle, je me serais peut-être attendu, d'experts en immeuble comme vous, que vous nous éclairiez.

Vous avez mentionné beaucoup d'avantages de la copropriété. Vous êtes au courant qu'il y a présentement des poursuites devant les tribunaux pour la plupart des transformations qui ont eu lieu en 1974 et 1975, jusqu'à ce que le moratoire soit imposé? D'après vous, combien y en a-t-il de ces causes pendantes devant les tribunaux présentement?

M. Marquis (Gaétan): Je sais qu'il y en a quelques-unes, je ne suis pas au courant du nombre exact. Je pense quand même que s'il y a eu des abus, ou les raisons pour lesquelles ces causes ont été amenées, il reste que, foncièrement, c'est un mode d'occupation qui est désirable.

M. Tardif: On est d'accord sur le principe. Si je vous disais que ce nombre de causes pendantes devant les tribunaux atteindrait, selon les renseignements que nous possédons, à peu près une vente sur deux, que diriez-vous?

M. Marquis (Gaétan): II y a un problème si, effectivement, c'est cela.

M. Tardif: Remarquez, on est tout à fait d'accord sur le principe de permettre l'appropriation de leur logement par les gens qui sont là. On est aussi d'accord qu'il y a beaucoup de problèmes. Là-dessus, des groupes comme vous qui avez une expérience dans l'immeuble peuvent avoir des choses à dire; si vous avez des suggestions ou des solutions, j'aimerais les connaître. Il faudrait que ce soit clair en partant.

Dernière question. Vous vous opposez à l'article 1651.2 qui vise à demander aux propriétaires de communiquer aux nouveaux locataires, l'ancien loyer. Pourquoi?

M. Marquis (Gaétan): La raison est bien simple; c'est que vous demandez à quelqu'un de mettre un montant, sans aucune explication. Prenez la situation théorique, par exemple, où vous êtes propriétaire d'un duplex ou d'un quadruplex ou de quelque chose comme cela. Vous avez quelqu'un qui a des moyens restreints; peut-être tout simplement par charité ou par humanité, vous ne l'augmentez pas durant un bout de temps. A un moment donné, la personne décède ou s'en va dans un foyer pour personnes âgées. Vous n'aviez jamais fait de redécoration ou de ménage dans l'appartement. Le monsieur surveillait la bâtisse pendant que vous étiez à votre chalet d'été ou quoi que ce soit. Evidemment, lorsque vous allez vous retrouver devant l'administrateur des loyers et que vous lui aurez expliqué tout cela, il est probable — parce qu'on pense encore que le système peut être juste et équitable — qu'il va vous accorder le loyer que vous avez demandé.

Mais il reste que cela va occasionner un surcroît, de demandes à la régie, qui dans la majorité des cas ne sont probablement pas justifiées.

M. Tardif: Je voudrais poser la question. L'article du projet de loi 107 qui fait référence à cette obligation de dévoiler l'ancien loyer, c'est 1651.2, je crois. "Le locateur doit, lors de la conclusion du bail, remettre à tout nouveau locataire un écrit indiquant le loyer payé par le locataie précédent et tout autre renseignement relatif au bail du locataire précédent prescrit par règlement, en la forme qui y est indiquée." Est-ce que vous aimez mieux cette formule ou la formule du projet de loi ontarien qui est présentement devant la Législature? C'est le projet de loi 163, article 33 qui dit ceci — je vais le lire dans le texte; évidemment, c'est en anglais, c'est normal — "Every landlord shall maintain and keep available for examination at reasonable hours his schedule containing a brief description of each rental unit located in the residential complex of which he is a landlord, showing opposite thereto the current rent being charged per unit and the immediately preceding rent that was charged for the unit and, in addition, where there is more than one unit in the complex, shall post up conspicuously and maintain posted a notice advising tenants, former tenants, prospective tenants and other persons having and interest in the matter of the existence of the schedule and when and where it may be examined."

M. Marquis (Gaétan): Ce n'était assurément pas à cet article qu'on se référait. On se référait à l'article 1651.2. Maintenant, l'article 1651.2, vu que c'est un texte de loi plutôt qu'un outil pratique, on a été obligé de présumer que ce serait sur l'éventuelle formule obligatoire pour offrir le renouvellement ou la prolongation d'un bail où, encore une fois, on présume qu'il y aura un endroit pour inscrire "loyer précédent... Est-ce que sur cette formule on aura la chance d'expliciter quels étaient les services qui n'étaient pas donnés à l'autre locataire et auxquels on est en droit de s'attendre aujourd'hui? On est dans la même noirceur.

M. Tardif: Si je comprends bien, vous voudriez que, sur un formulaire quelconque, soit la formule de bail type, il y ait un espace qui dise: L'ancien loyer était de tant, mais voici quelles étaient les conditions; lorsque j'allais à mon chalet l'été, le locataire surveillait l'immeuble. Vous voulez que des conditions apparaissent?

M. Marquis (Gaétan): Ce que je disais, c'est que ces conditions ne seront pas explicitées et que le fait qu'il va y avoir tout simplement un chiffre absolu, unique, va faire que ce sera impossible sur cette formule d'expliquer les conditions exactes relatives à ce montant de loyer vis-à-vis du nouveau loyer demandé ou des considérations personnelles, des considérations charitables ou quoi que ce soit, si elles peuvent exister. On continue à supposer que, lorsque la décision de

l'administrateur va être rendue, elle va être juste, autant pour le propriétaire que pour le locataire, mais que cela va créer un surcroît de demandes parce que les gens ne voient pas la logique entre l'ancien loyer; si, par exemple, quelqu'un est demeuré dedans dix ans sans demander de peinture, que cela valait X et que là, cela vaut X plus 1 ou X plus 2 lorsque le nouveau locataire entre dans le logis.

M. Tardif: Merci.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Premièrement, je vous remercie de votre mémoire, M. Daoust et vous tous. C'est un mémoire sérieux et important, je pense. Deux petits points. D'abord, en ce qui concerne l'article 38, je pense qu'il faut admettre, M. le ministre, que ce groupe-ci n'est pas le premier à ne pas bien comprendre le sens de cet article. La semaine passée, vous avez même dit que vous n'étiez pas complètement satisfait de tous les mots et que vous aviez peut-être l'idée de le modifier. Je pense que vous l'avez un peu mieux exprimé aujourd'hui, mais il reste quand même que pas mal de gens viennent devant nous avec des questions.

Je voulais simplement vous faire un deuxième commentaire, M. le ministre, relativement à votre dernière conversation avec M. Marquis. Sur le plan personnel, je suis en faveur de cette idée de rendre public le loyer de chaque appartement. D'après l'expérience que j'ai vécue dans mon comté et les commentaires de M. Marquis, je pense qu'il faut admettre que cela va probablement ajouter au coût du loyer pour pas mal de monde. Les deux premiers cas que j'ai connus dans ce domaine, ce n'était pas un loyer plus élevé que la normale qui était en cause; c'était un spécial qui avait été accordé à deux vieilles dames qui habitaient l'appartement depuis longtemps. Les propriétaires auront probablement tendance à dire, maintenant que c'est très difficile d'expliquer à tout le monde pourquoi ces loyers sont moins élevés que les autres: "No more special". Tout sera réglé au même niveau. Il faut peut-être y penser un peu. Je ne sais pas si c'est quelque chose qui sera important, mais c'est un aspect à ne pas négliger. Ce sont souvent des spéciaux qui sont faits pour les gens qui sont moins en moyen, les personnes qui sont là depuis longtemps.

Je veux poser surtout deux questions qui relèvent de votre compétence spéciale, je vais me restreindre à deux. La première, c'est peut-être un peu compliqué à demander et j'espère que je peux l'expliquer. C'est à la page 24, au premier paragraphe: "Si l'objectif est de permettre à chaque individu de se procurer un logement adéquat, répondant à ses besoins, il s'agit d'allouer à cet individu les ressources nécessaires... La solution ici est d'accorder au locataire dont le revenu est insuffisant une subvention." C'est la solution qui a été proposée par la plupart des groupements de propriétaires pour aider les personnes à faible revenu.

Mais il y a deux critiques qui sont souvent faites à l'égard de cette solution. La première, par les économistes, c'est que, quand vous ajoutez au revenu des personnes à faible revenu, vous avez comme conséquence que le loyer pour ces personnes a tendance à augmenter. Le fait que le propriétaire sache que cette personne a maintenant les moyens de payer un taux plus élevé a pour résultat de faire hausser le loyer. Peut-être pourrais-je avoir vos commentaires sur ce point et sur un deuxième qui touche la même situation; c'est que c'est souvent le problème, non seulement de la demande pour les logements, mais de l'offre. Moi, j'ai l'impression suivante — je vous pose la question parce que vous êtes dans ce domaine — au sujet de l'offre réelle pour une personne. Je ne parle pas de l'offre globale pour tous les appartements; on peut parler d'un taux d'occupation de 99%, mais c'est possible que, dans quelques endroits ou dans quelques catégories de logements, il y ait beaucoup moins de disponibilité. Alors, comment prévoyez-vous régler les problèmes où le marché ne fonctionne pas dans un quartier, dans une classe de logements, à moins que vous n'ayez, par un moyen ou un autre, une façon de régler les distinctions, les divergences qui vont arriver par une tierce partie?

Ces deux questions, pour moi, sont un peu liées; la première, la question de faiblesse du fonctionnement du marché et, la deuxième, la tendance, pour les propriétaires, à hausser les loyers.

M. Marquis (Gaétan): En ce qui concerne votre première question, c'est une question qui revient régulièrement avec les économistes; le problème de logements n'est habituellement pas une situation de marché, c'est une situation de pauvreté; il y en a qui ne peuvent pas se permettre un logement convenant à leurs besoins.

S'il y a quelque chose dans le mécanisme qui fait que le propriétaire est placé dans une position où il peut abuser, selon les moyens de la personne qui occupe le logis, je dis: "Great", Régie des loyers et même encore plus forte qu'aujourd'hui. Je n'ai pas d'exemple concret, mais je doute que cela puisse exister. D'un autre côté, si certaines personnes ou certaines catégories de personnes n'ont pas les moyens de se payer un logis convenable dans la situation ou la conjoncture actuelle, ce serait pour le moins injuste qu'il y ait une catégorie de citoyens — qui sont aussi citoyens à part entière — qui soit obligée de les subventionner — nommément, dans ce cas-ci, les propriétaires — en ne pouvant obtenir les augmentations justes pour compenser les augmentations dans leurs dépenses et dans leur coût de fonctionnement.

Votre deuxième question concerne certains arrondissements où, par exemple, le marché privé ne serait pas attiré à aller construire de nouveaux logements. Il est assez simple d'y répondre. Il peut y avoir toutes sortes de stimulants à la construction, mais on ne règle pas le problème de la couche sociale qui ne peut pas se permettre la nouvelle construction. Si vous me demandez si j'ai une solution miracle, malheureusement non.

M. Scowen: A moins que le secteur privé s'engage à toujours maintenir dans chaque catégorie d'habitation un stock de logements qui soit plus élevé que la demande de 3% ou 4%, pour moi il me semble essentiel que l'Etat intervienne dans une situation de besoin qui est aussi fondamentale, où les gens ont vraiment la nécessité d'avoir quelque chose qui corresponde à leurs moyens. (17 heures)

M. Marquis (Gaétan): A ce moment, vous allez encore vous retrouver avec de la construction neuve et puis si vous faites du logement social, vous allez rencontrer, encore une fois, deux problèmes. Le premier, c'est que les logements gouvernementaux coûtent, n'importe où, entre 20% et 50% de plus que ceux construits par l'industrie privée. Le deuxième, c'est qu'encore une fois vous allez vous retrouver avec des logements neufs.

M. Tardif: Est-ce que vous pourriez nous dire où vous prenez ces chiffres, monsieur, entre 20% et 50%?

M. Marquis (Gaétan): Je n'ai pas les chiffres exacts, j'hésite toujours à garrocher des choses comme celle-là. Il reste que, en se basant sur des constructions récentes de HLM ou de logements sociaux où les coûts de construction par appartement sont allés tout près de $30 000, même quelquefois un peu plus que $30 000 par logis, l'entreprise privée est encore capable de produire des logis suivant l'arrondissement et suivant la méthode de construction et la densité du terrain, n'importe où, de $15 000 à $25 000 par logis.

M. Tardif: Ecoutez, je ne veux pas prendre sur le temps de parole du député de Notre-Dame-de-Grâce, mais à qualité égale, un édifice de huit étages avec des ascenseurs, des services, etc., vous allez en appel d'offres, dans un cas comme dans l'autre, si vous avez des normes de résistance au feu et autres identiques, vous n'aurez pas des prix tellement différents. Cela m'apparaît un peu gratuit de lancer cela: des coûts supérieurs de 20% à 50%. J'aimerais cela, si on avait une étude comparée...

M. Scowen: Je pense que vous m'avez dit, pendant une question avec débat, au mois de novembre ou octobre, que vous aviez trouvé que, jusqu'à cette date, il y avait un écart de 15% ou 20% du coût de construction dans ce domaine entre le secteur privé et le gouvernement.

M. Tardif: C'est un fait, à partir du moment où on n'inclut pas les normes plus rigides qui peuvent exister là-dedans. Tout le monde, le député de Notre-Dame-de-Grâce le premier, blâmerait le gouvernement si jamais un foyer de personnes âgées passait au feu parce qu'il n'a pas de résistance suffisante des matériaux, alors qu'on n'a pas les mêmes exigences vis-à-vis de l'entreprise privée.

M. Marquis (Gaétan): Peut-être seulement pour finir là-dessus, je m'excuse si j'ai garroché cela sans avoir les chiffres exacts pour le prouver, alors on va l'effacer. L'autre problème...

M. Paquette: M. le Président, seulement une petite remarque là-dessus. Je me rappelle que dans l'étude du professeur Mathews qui était annexée au rapport Legault, on prédisait, pour 1980, que l'entreprise privée ne pourrait pas construire de nouveaux logements moyens à un coût inférieur à $28 000. Effectivement, j'ai l'exemple d'un projet qui voulait se faire dans mon comté, par l'entreprise privée, où on nous donnait exactement le coût de $28 000, en 1979. Je pense qu'au niveau de la SHQ le coût moyen est autour de $28 000 également.

M. Marquis (Gaétan): Le coût maximum? M. Paquette: Le coût moyen.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Très brièvement, je veux retourner à ma première question, parce que je n'ai pas bien compris. D'après vous, est-ce que c'est inévitable qu'une subvention aux personnes à faibles revenus, pour les fins de logement, soit accompagnée d'une hausse de loyer, comme prétendent les économistes qui ont étudié cette question?

M. Marquis (Gaétan): Vous me demandez une opinion?

M. Scowen: Ou si vous avez des connaissances précises, des expériences, je ne sais pas.

M. Marquis (Gaétan): Je ne...

M. Scowen: Si vous n'avez qu'une opinion, j'espère que vous vouliez dire que ce n'est qu'une opinion. Je pensais que peut-être un de votre groupe avait une expérience vécue qui pouvait nous aider.

M. Marquis (Gaétan): Non, nous n'avons rien.

M. Scowen: Parce que moi, j'ai des opinions déjà.

M. Marquis (Gaétan): Nous n'avons rien de concret à cet effet.

M. Scowen: Non? Je vais vous poser une dernière question. C'est une chose sur laquelle, j'espère, vous avez une expérience. C'est la spéculation. Ce matin, on a entendu beaucoup parlé de la spéculation comme étant quelque chose de mauvais, quelque chose qui n'était pas défini. C'est quelque chose qui, semble-t-il, est toujours accompagné par une hausse de loyer. Cela veut

dire qu'en général, si un immeuble résidentiel est tenu par le même propriétaire durant trois ans, à titre d'exemple, et un autre immeuble résidentiel est vendu, pendant cette période de trois ans, deux ou trois fois, à la fin de ces trois ans, c'est probable que les loyers dans le deuxième cas seront plus élevés que ceux dans le premier. En d'autres mots, les liens directs entre la vente et le rachat d'un immeuble, et le loyer pour les personnes qui l'habitent. Alors, votre groupe fait partie de chaque incident de spéculation, en effet, chaque vente et achat. Est-ce que vous avez des données? Est-ce que vous avez des opinions, en ce cas, sur cette réclamation?

M. Marquis (Gaétan): II faudrait peut-être retourner aux définitions originales. Le dictionnaire définit spéculation comme étant l'achat d'un bien pour revendre à court terme et à profit. On aimerait penser que les gens, les propriétaires immobiliers, dans la majorité des cas, ne sont pas des spéculateurs, mais plutôt des investisseurs, ce qui est quand même une position ou un emploi honorable et, dans le système économique où l'on vit, c'est encore permis et honorable. Je verrais comme spéculation la personne qui achèterait, par exemple, un bloc de terrains, aujourd'hui, et qui le revendrait en dedans de six mois sans avoir rien fait, avec un profit de X, Y ou Z. Par contre, la personne ou l'entreprise qui prendrait le même terrain, qui le subdiviserait, qui y mettrait des services, qui lui donnerait une valeur économique ou quelque chose comme cela, cette personne a droit à un revenu et cela ne s'appelle pas de la spéculation. Cela, c'est juste au point de vue de la définition.

Maintenant, lorsqu'un immeuble, une propriété à revenus change de main, il est possible que, lors des renouvellements de baux, le nouveau propriétaire soit appelé à justifier son augmentation auprès de la Régie des loyers. Lorsque la Régie des loyers va lui accorder son augmentation, elle va le faire en se basant sur l'augmentation des taxes, des assurances, du chauffage et des frais d'entretien, par rapport à l'année précédente. Il y a ensuite un pourcentage préétabli pour l'incidence du coût de l'argent ou la plus-value de la propriété ou quelque chose comme cela.

Alors, la Régie des loyers ne tiendra absolument pas compte du fait que la personne ait volé l'immeuble ou qu'elle ait fixé dix fois trop haut le prix du loyer. Alors, je doute que le fait qu'un immeuble change de main à plusieurs reprises ait une poussée verticale ascendante sur les coûts des loyers.

M. Scowen: Simplement, en terminant, je vous pose la question, non seulement parce que je suis pour ou contre la spéculation; on cherche ici les moyens d'éviter les hausses de loyer et, si on faisait un travail énorme pour mettre fin à la spéculation et que, dix jours après, on voyait que cela n'a rien à faire avec la hausse de loyer, cela serait une perte de temps pour le gouvernement; mais je veux l'éviter, c'est tout. Bon, je vous remercie.

Le Président (M. Laplante): Le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Etant donné le temps, nous allons faire vite. Je voudrais revenir à la page 4 de votre mémoire, concernant la Régie du logement. C'est concernant l'impartialité de la régie, étant donné que vous mentionnez qu'elle administre, juge et élabore la réglementation; plus loin, vous dites: "... mais qu'un tribunal devienne simultanément un organisme administratif et un organisme consultatif est un précédent dangereux. L'objectivité et l'impartialité des jugements rendus par cette régie nous laissent dans le doute." Voudriez-vous expliciter votre pensée concernant cet aspect de votre mémoire?

M. Marquis (Gaétan): Je pense bien que c'est clair: les tribunaux appliquent des lois qui ont été votées par le gouvernement. Il est évident que les lois de la Régie des loyers vont être votées par le gouvernement, mais comme le livre blanc et le projet de loi le disent bien, les règlements vont être élaborés sous les directives ou les recommandations de la Régie des loyers. Alors, ces gens vont être pris pour juger quelque chose qu'eux-mêmes ont édicté. Intentionnellement, ce matin, j'ai glissé sur cela, parce que je pense que c'est quelque chose qui va probablement être pris ou discuté par des gens probablement beaucoup plus compétents que nous en la matière. Je vois le Barreau s'élever contre cela. Alors, c'est pour cela qu'on le mentionne, mais ce n'est pas notre compétence ou notre plus gros problème.

Le Président (M. Laplante): Autres questions, monsieur?

M. Cordeau: A l'article 1651.2, moi aussi je vois là quelques dangers parce qu'un propriétaire pourrait avoir gardé dans son immeuble ses parents, son père et sa mère, ainsi de suite, des gens à qui il a consenti un loyer plus bas pour toutes sortes de considérations. Alors, il va arriver certainement que plusieurs cas seront portés devant la régie concernant cet article.

Maintenant, vous avez parlé de taux de vacance. Dans quelle catégorie de logements, à votre point de vue, les taux de vacance se situent-ils?

M. Marquis (Gaétan): Voici, les taux de vacance que l'on connaît, qui sont acceptés, qui sont utilisés habituellement, nous sont donnés par la Société centrale d'hypothèques et de logement. Les taux auxquels on se réfère sont les taux d'octobre 1978 tels que donnés par M. Pierre Brien dans son allocution devant le congrès de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec le 23 novembre.

A ce moment-là M. Brien avait mentionné que les vacances qui, jusqu'à récente date, se situaient presque en totalité dans les immeubles neufs ou les immeubles disponibles pour habitation dans les six derniers mois, que ce phénomène, dis-je, se résorbait, avec les pratiques agressives, dans une situation de marché, des propriétaires des nou-

veaux immeubles ou des créanciers hypothécaires qui ont repris ces immeubles — parce que c'est un phénomène qui sera courant — qui offraient des téléviseurs, trois ou quatre mois gratuits, des choses du genre. Ces mêmes gens avaient commencé à sortir des immeubles les locataires un peu plus âgés, occupant des logements à loyer un peu plus modique, de sorte qu'on commençait à retrouver des logements vides dans ces immeubles.

Le Président (M. Laplante): Vu que le temps est terminé, est-ce que vous pourriez répondre à sa question directe, soit les taux qu'il peut y avoir, d'après vous?

M. Marquis (Gaétan): Les taux?

Le Président (M. Laplante): Oui, c'est ce qu'il vous demandait si on savait dans quels immeubles cela se situait.

M. Cordeau: Dans quelle catégorie.

M. Marquis (Gaétan): Dans quelle catégorie. Alors, cela s'en vient, cela commence à être autant dans les immeubles âgés que dans les immeubles neufs.

M. Cordeau: Etant donné que vous travaillez dans l'immeuble, croyez-vous que le montant qui est accordé par le ministère des Affaires sociales, $85 par mois, à ceux qui sont "sur le bien-être", est suffisant pour avoir un logis habitable, décent, aujourd'hui?

M. Marquis (Gaétan): Vous me demandez quelque chose de subjectif sans le qualifier. Si vous me dites $85, je dis non, et à plus forte raison si vous parlez d'une mère avec six enfants. Ce serait juste une opinion.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la fin.

M. Cordeau: Non, mais pour le loyer.

M. Tardif: M. le Président, évidemment, il y aurait encore beaucoup de questions qu'on pourrait poser aux représentants de l'Association de l'immeuble du Québec. Encore une fois, je peux les assurer que leur mémoire a été lu attentivement et que si jamais ils avaient des suggestions quant à la façon de permettre, par exemple, la copropriété en en évitant les dangers, en ne voyant pas que ce qu'on a qualifié comme étant les avantages de cette formule, il nous fera toujours plaisir de recevoir ces représentations.

Alors je n'ai pas d'autres questions et je remercie les représentants.

M. Cordeau: Merci.

Le Président (M. Laplante): Merci, MM. Pilote, Robert, Marcoux, Marquis, Daoust pour votre présentation. J'appelle maintenant le groupe de locataires du Québec métropolitain incorporé. (17 h 15)

Veuillez identifier votre groupe, s'il vous plaît, et identifier les personnes qui vous accompagnent.

Groupement de locataires du Quebec métropolitain Inc.

Mme Grondin (Solange): Ce sont deux personnes qui représentent le Groupement des locataires, Lise Nadeau, Solange Grondin. Christian Simard représente le Comité de citoyens de Saint-Gabriel, et Mario Devin représente le Centre de références, section chambreurs.

Le Président (M. Laplante): Les travaux de la commission se terminent à 18 heures. Si vous ne voulez pas être obligés de revenir, si vous êtes capables de synthétiser le plus possible votre mémoire, étant donné que tous l'ont déjà lu, ils ont beaucoup de notes devant eux, on pourra avoir une période de questions plus longue.

M. Scowen: ... à 18 h 15.

M. Tardif: Si la commission est d'accord pour donner l'heure complète, jusqu'à 18 h 15...

M. Cordeau: Oui, d'accord.

Mme Grondin: Avant de commencer, voici un résumé de notre mémoire. Nos trois groupes tiennent à préciser aux membres de cette commission de même qu'à ses participants les motifs qui nous ont incités à nous présenter à cette commission. Le but premier de notre présence est de dénoncer le projet de loi 107 dont le contenu "statuquoïste" maintient dans les mêmes situations d'injustice et d'exploitation la majorité des travailleurs locataires, chômeurs, petits salariés, assistés sociaux. Le second est de faire connaître, encore une fois, nos revendications appuyées par quinze ans de pratique auprès des locataires et chambreurs à faible ou moyen revenu.

Pour nous, le logement est un droit social non reconnu et qui ne pourra jamais l'être tant et aussi longtemps qu'il appartiendra au libre marché d'en faire sa marchandise. L'Etat a un rôle primordial à jouer pour que ce droit soit reconnu, et nous ne trouvons, dans le projet de loi 107, aucune volonté réelle politique du gouvernement actuel, au niveau du contrôle des loyers, de lever les contraintes économiques qui empêchent la reconnaissance de ce droit.

Nous présenterons notre résumé de la manière suivante: le Groupement des locataires abordera les trois premiers chapitres du mémoire, à savoir le contrôle des loyers, le maintien dans les lieux et la qualité de logement. M. Mario Devin, représentant du Centre de références, section chambreurs, traitera spécifiquement de la question des chambreurs en regard avec ce que propose le projet de loi 107. Quant à M. Christian

Simard, représentant du Comité de citoyens de Saint-Gabriel, il abordera le chapitre du projet de loi 107 qui traite de la conservation du stock de logements locatifs. Chaque intervenant fera une brève description de la situation actuelle. Nous prendrons un peu plus de temps sur ce que propose le projet de loi 107, sur chaque thème, et nous énoncerons quelques-unes des revendications que nous trouvons fondamentales pour la reconnaissance du droit au logement.

Etant donné l'ampleur des questions soulevées par le projet de loi 107, étant donné également le volume de notre mémoire et le traitement complémentaire que chaque groupe en a fait, nous trouvons fondamental que chacun des représentants puisse se faire entendre. Nous ferons tout notre possible pour faire ce résumé dans le délai de vingt minutes prévu, mais il se peut que nous dépassions ce temps de quelques minutes.

On y va pour le contrôle des loyers. Pour nous, au Groupement des locataires, le contrôle des loyers est l'élément-clé du droit au logement. Toutes les autres composantes du droit au logement, la qualité, le droit au maintien dans les lieux, sont reliées au contrôle des loyers. Il y a énormément de problèmes au niveau du coût des logements, c'est trop cher. Il y en a qui se plaisent à dire, pour minimiser le problème au niveau des coûts du logement, que la situation des ménages locataires qui doivent consacrer une part importante de leurs revenus pour se loger est marginale.

Si on se réfère aux données statistiques de la SCHL, en 1974, on s'aperçoit que dans la région de Québec, 70% des ménages locataires avaient un revenu inférieur à $10 000 et devaient consacrer plus de 25% de leurs revenus pour se loger. La situation est — on le comprendra — encore plus critique au niveau des familles dont les revenus sont inférieurs à $5000 puisque 90% de ces familles doivent affecter plus de 25% de leurs revenus pour se loger. Une étude commanditée par le comité Legault, en 1975, confirmait également la gravité de la situation au niveau du coût du logement. Cette étude affirmait, en effet, que 40% des ménages locataires dans les régions urbaines de la province de Québec ne peuvent subir aucune hausse de loyer sans devoir couper sur d'autres besoins essentiels tels que la nourriture ou le vêtement.

On pense que depuis 1975, la situation, au niveau du coût élevé des logements, ne s'est sûrement pas améliorée. Ainsi, on pense qu'il y a une crise économique, actuellement, dont les locataires subissent aussi le contrepoids. On veut essayer de voir ce que propose le projet de loi 107 là-dessus. On référerait peut-être les membres de cette commission à la page 7. Avant d'arriver à ce que propose le projet de loi, on illustre, dans notre mémoire, en pages 3, 4 et 5, des cas concrets. Dans ces cas concrets, on peut remarquer qu'on a un cas sur les représailles; pour nous ce ne sont pas des cas isolés, la majorité des locataires qui contestent les hausses de loyers sont victimes de représailles. Ensuite on a des cas où les locataires trouvent inconcevable qu'on ne tienne pas compte de la qualité des loyers, quand vient le temps de la fixation. Il y en a d'autres qui trouvent tout à fait ridicule de payer parfois $60 de plus qu'un autre qui loue un logement du même type et de la même grandeur situé dans un même immeuble. En tout cas, ce sont des situations qui sont généralisées et il y en a qui trouvent... En tout cas, ça revient, au dernier exemple, à parler de la remise en cause du loyer de base. On pourra peut-être y revenir pendant la période de questions, mais on tenait à le souligner.

Donc, ce que propose le projet de loi 107 en matière de contrôle: Le projet de loi 107 nous propose un statu quo au niveau du champ d'application. Statu quo veut dire qu'on maintient l'exclusion des immeubles neufs de la juridiction de la régie en matière de contrôle. Pourtant, lorsqu'il était dans l'Opposition, le Parti québécois, par la voix de ses représentants parlementaires, appuyait la revendication des associations de locataires visant à abolir une telle exclusion. On se souvient, entre autres, que, en 1974, le député Burns accusait le gouvernement en place d'encourager la fraude et la mauvaise administration des constructeurs en mettant de l'avant l'exclusion des immeubles neufs du contrôle des loyers. Cette accusation du député Burns était et est encore bien fondée pourtant, puisque les propriétaires d'immeubles neufs profitent de cette exclusion de la régie pour louer à des prix relativement bas, la première année et ce, on le devine, pour obtenir un taux d'acquisition maximum, pour ensuite hausser substantiellement leurs loyers dans les quatre années qui suivent. Ce sont donc les locataires qui font les frais d'une soi-disant politique gouvernementale visant à stimuler la construction, sans parler de l'effet d'entraînement sur le marché des hausses excessives de loyers que l'on retrouve au niveau des immeubles neufs.

Le projet de loi 107 nous propose également un statu quo au niveau du processus de contestation des hausses, puisque l'article 1658.6 prévoit que c'est au locataire que revient la charge de s'adresser à la régie pour obtenir une fixation de loyer, tout comme c'est le cas actuellement. Encore là, le Parti québécois semble avoir modifié ses positions depuis qu'il est au pouvoir puisque, auparavant, il se disait favorable à un renversement du processus, c'est-à-dire que le propriétaire soit obligé de s'adresser à la régie pour obtenir une hausse de loyer. Pourtant les représailles et menaces de toutes sortes dont sont victimes les locataires qui osent contester une hausse de loyer devant la régie n'ont pas diminué depuis le 15 novembre 1976.

Ce qu'il y a de plus fondamental aussi en matière de contrôle des loyers, c'est la méthode et les critères de fixation utilisés. Selon l'article 86 du projet de loi 107, le gouvernement peut établir ces critères et cette méthode par règlement. Le défaut, par le gouvernement, de faire connaître un tel règlement en même temps que le projet de loi 107 visait peut-être à éviter un débat de fond sur le contrôle des loyers en commission parlementaire. Pour le groupement des locataires, malgré l'ab-

sence d'un tel règlement, la position de l'actuel gouvernement est très claire puisqu'elle a été définie dans le livre blanc sur les relations locateurs-locataires publié en 1978.

Encore là, le gouvernement entend maintenir le statu quo par rapport à la situation actuelle. Le statu quo signifie que les locataires, comme c'est le cas actuellement, devront subir toutes les hausses des coûts de fonctionnement d'un immeuble, hausses réelles et hausses fictives, puisque rien ne nous permet d'espérer que la nouvelle régie exercera une vérification plus stricte des factures du propriétaire. Le statu quo signifie également que l'indexation du revenu net constituera, tout comme présentement, un élément important de la hausse fixée par la Régie des loyers. Le statu quo signifie que l'on refuse de tenir compte, lors de la fixation par la régie, de la qualité des logements et de tout autre élément soumis par les locataires, tels les hausses antérieures, les coûts de réparations, les améliorations faites par le locataire. Le statu quo, ça veut dire, finalement, que le gouvernement refuse d'adopter une méthode de contrôle permettant la révision d'un loyer de base d'un logement.

Et le gouvernement prétend faire avaler cette grosse pilule, un statu quo que l'on nous vend pour être une grande réforme, aux locataires en y ajoutant un enrobage que l'on appelle "l'information". En effet, selon un communiqué de presse qui a accompagné le dépôt du projet de loi 107, le gouvernement entend obliger les propriétaires à utiliser un avis d'augmentation type dans lequel on retrouverait les motifs de la hausse. Ainsi, mieux informés, les locataires seraient plus en mesure de négocier les hausses de loyer avec leur propriétaire. C'est là le pari du gouvernement et on va même plus loin, on espère même qu'avec cette information sur les motifs des hausses, moins de locataires vont recourir à la régie. C'est à se demander si le gouvernement ne vise pas tout simplement par cette mesure à diminuer le pourcentage de locataires qui contestent à la régie, pourcentage qui est déjà très faible.

Obliger les propriétaires à dévoiler les motifs de la hausse des loyers demandée, avec chiffres à l'appui, il s'agit là, d'une mesure d'informations élémentaires pour les locataires. Prétendre que cette mesure va permettre aux locataires de négocier réellement avec les propriétaires, c'est de l'utopie, pour ne pas dire de la démagogie. En quoi cette information peut-elle modifier fondamentalement le rapport de force entre propriétaires et locataires, en matière de hausses de loyers, rapport de force qui se traduit ainsi: le propriétaire peut obliger l'augmentation qu'il veut, 10%, 20%, 50% ou plus. Le locataire peut l'accepter ou déménager s'il ne peut ou ne veut prendre le risque d'aller à la régie.

Prenons un exemple concret: un propriétaire indique sur son avis d'augmentation qu'il a subi une hausse du coût de chauffage de $200 par année. Le locataire, dans une tentative de négociations, affirme de son côté qu'il a dû débourser cette même somme pour couvrir les frais de médicaments pour sa famille, le coût d'achat de chaufferettes et l'augmentation de ses frais d'électricité, compte tenu du manque d'isolation de son immeuble. Est-ce que le locataire a le pouvoir de faire modifier la hausse demandée, compte tenu de ses déboursés à lui? Non, le propriétaire n'est sûrement pas obligé d'en tenir compte. Il pourra même dire à son locateur: La régie non plus n'en tiendra pas compte. Donc, sur quoi se fonde le pari du gouvernement, en misant sur l'information pour régler les hausses des loyers? Serait-ce sur le sens de la justice et l'esprit humanitaire des propriétaires?

Compte tenu de ce qui précède, il va sans dire que le regroupement des locataires rejette carrément la position et les mesures préconisées par le gouvernement en matière de contrôle des loyers. Pour assurer aux locataires un loyer juste et raisonnable, nous exigeons que le projet de loi 107 soit modifié, de façon à instaurer un contrôle universel, incluant les immeubles neufs et les maisons de chambres, un contrôle sur toute hausse des loyers par un renversement du processus, c'est-à-dire que les propriétaires soient tenus d'assumer les hausses à la régie. Un contrôle également qui viserait à remettre en cause les loyers de base, en fonction de la qualité des logements et cela, sur demande des locataires. On propose également des changements à la méthode de contrôle des loyers, que l'on inscrive des critères qui sont reliés à la qualité des logements, que l'on inscrive des critères qui sont reliés aux augmentations antérieures subies par les locataires, aux réparations effectuées par lui, que l'on instaure au niveau de la méthode, un partage des coûts d'opération entre propriétaires et locataires et que l'on abolisse l'indexation du revenu net.

Maintenant, en ce qui concerne le maintien dans les lieux — on va parler un petit peu de la reprise de possession. La revendication du groupement concernant la reprise de possession est la même que celle du Front commun des associations de locataires, de même que du RCM qui sont passés avec nous ce matin. On demande que soit aboli le privilège du propriétaire de reprendre possession d'un logement pour lui-même ou pour sa famille. Cette revendication est appuyée sur deux choses. D'abord, on considère que le droit à la reprise de possession est réellement un privilège que l'on accorde au propriétaire, privilège qui n'a pas de raison d'être et qui compromet chaque année le droit au maintien dans les lieux de milliers de locataires. Un propriétaire et les membres de sa famille ont, bien sûr, le droit à un logement. Cependant, il n'y a aucune raison valable pour que ce droit soit plus important, donc, passe avant celui du droit au logement d'un locataire qui habite déjà les lieux.

On considère aussi qu'à partir du moment où un propriétaire décide de mettre ses logements en location, il ne devrait pas avoir le droit, par la suite, d'en reprendre possession en évinçant le locataire et ce, en utilisant son droit de propriété. Notons qu'actuellement c'est à cause de ce droit

de propriété que la loi reconnaît au propriétaire le droit de reprendre possession des logements.

Pour ce qui est de la famille du propriétaire, la justification de la loi actuelle est encore moins claire, puisque la famille du propriétaire ne possède pas ce droit de propriété.

Le deuxième motif sur lequel s'élabore notre position, c'est qu'en permettant les reprises de possession, on considère que le gouvernement... C'est une ouverture que crée le gouvernement aux représailles, parce que les propriétaires... C'est maintenant connu, quand ils veulent hausser les loyers et qu'ils ont de la difficulté, qu'ils ne sont pas capables d'évincer un locataire parce qu'il remplit toutes ses obligations correctement, ils s'organisent pour reprendre posssession du logement et cela se fait assez bien. C'est tout ce que nous avons à dire: (17 h 30)

Concernant les évictions, la position du groupement est qu'aucun motif d'éviction ne soit reconnu dans la loi. Quand on regarde le livre blanc, on se rend compte que le gouvernement actuel disait vouloir limiter les motifs d'éviction. On se rend compte, dans le projet de loi 107, qu'au lieu de les diminuer, on a fusionné tous les motifs actuels pour les ramener à un seul, c'est-à-dire le préjudice sérieux, et c'est le motif le plus souvent utilisé, à part le non-paiement de loyer; actuellement, on utilise le préjudice sérieux. Donc, tous les motifs sont fusionnés là-dedans. On maintient également le statu quo au niveau de l'éviction pour le non-paiement de loyer. Pour le non-paiement de loyer, nous trouvons inconcevable que pour des gens qui sont en situation économique constante, cela va toujours mal et cela empire; on considère inconcevable qu'il n'y ait pas de politique qui soit prise pour éviter le moyen de l'éviction du locataire, parce qu'on pense que cela ne change strictement rien de le mettre sur le banc de neige ou dans la rue. S'il n'a pas les moyens de payer là, il n'aura pas davantage les moyens de payer ailleurs. C'est ce que nous avons à dire là-dessus.

Maintenant, au chapitre de la qualité, je pense qu'on va être obligé de faire cela très vite. Actuellement, plusieurs groupes l'ont souligné, c'est l'anarchie totale au niveau de la qualité. Les villes n'ont pas la volonté politique de faire adopter les règlements qu'ils ont. On prend, en particulier, Québec ou Montréal — le RCM en a fait mention — ils ont, eux, des règlements qui ne sont pas du tout adoptés. D'autre part, les recours des locataires pour faire reconnaître le droit des logements de bonne qualité, cela ne vaut quasiment rien. Le projet de loi 107, là-dedans, maintient la majorité des recours, sauf que la retenue de loyer, maintenant, au lieu de s'exercer en Cour provinciale va s'exercer à la Régie du logement. Le nouveau recours, c'est le dépôt de loyer qui demanderait réellement à être renforcé. Ce qui va rendre encore très difficile l'application des quelques recours assez miteux qu'ont les locataires, là-dessus, c'est le code d'habitabilité. Nous n'avons pas la référence au code là-dedans, et tout dépend quel nombre définira ce qu'est un local qui est habitable par rapport à celui qui ne l'est pas. On se rend compte aussi qu'il faudrait absolument qu'il y ait des recours efficaces pour que les logements soient bien entretenus. Parce que des logements, quand ce n'est pas entretenu, on en vient à cautionner à plus ou moins long terme des démolitions. On trouve qu'il y a eu suffisamment de ravages à Québec et à Montréal, dans les grands centres urbains. Par rapport à cela, nous avions quelques revendications. On en a à plusieurs pages, mais je veux en "principaliser" quelques-unes. On pourra y revenir au niveau de la période des questions.

On demande que le code d'habitabilité définisse des normes minimales sur la qualité des logements, un degré de chauffage minimum, l'isolation et l'entretien des maisons, équipements et services obligatoires dans les logements, normes de sécurité. On demande qu'aucune augmentation de loyer ne soit permise pour les améliorations qui visent à rendre le logement conforme aux normes d'habitabilité, telles que définies par le groupement. On demande, dans le cas où un local est déclaré impropre à l'habitation par la Régie du logement, que cette institution soit tenue de prendre les mesures nécessaires pour que le logement ne soit pas reloué, à moins que, par la suite, il soit rénové selon les exigences du code d'habitabilité et ce, sans augmentation de loyer. Au niveau des réparations urgentes, ce que l'on demande, ce sont des recours rapides et efficaces. On demande que des fonds publics soient disponibles sur demande aux locataires qui sont contraints de faire effectuer des réparations urgentes ou de faire établir un service de façon urgente. On demande que le gouvernement soit tenu de récupérer ces sommes auprès des propriétaires. Ce sont les mêmes positions que le front commun là-dessus, parce que c'est vraiment un problème au niveau des réparations urgentes. On demande aussi, concernant le dépôt de loyer, on est très heureux de trouver cette mesure dans la loi, parce que cela confère la connaissance légale à une pratique existante. En effet, plusieurs locataires, comme moyen de pression, se refusent à payer leur loyer, tant que le propriétaire ne s'est pas conformé à ses obligations ou à ses promesses. Cependant, cette pratique plaçait les locataires dans de drôles de situations. Cela les rendait passibles d'éviction, cela les rendait passibles du droit de saisir en jugement. Donc, on trouve que c'est un acquis élémentaire de le retrouver dans le texte de loi.

Cependant, pour nous, le dépôt demande à être renforcé; on demande que seule l'exécution de l'obligation en nature justifie la remise du dépôt au locateur. On demande que la régie du logement soit tenue de se prononcer sur le litige un certain temps après le dépôt du loyer par le locataire. On demande que l'exécution en nature forcée de l'obligation fasse l'objet d'une ordonnance immédiate suite à cette audition sous peine d'outrage au tribunal tel que défini par l'article 81.11 du projet de loi no 107 et ce, que l'obligation

mette ou non en danger la santé et la sécurité des occupants. Il va sans dire qu'on développe plus la qualité dans notre mémoire mais on y reviendra lors des questions. Maintenant, je passe la parole à Mario Devin qui va parler de la question des chambreurs.

M. Devin (Mario): Pour décrire la situation que...

Le Président (M. Laplante): II faudra le faire assez vite parce que vous êtes rendus à 25 minutes actuellement.

M. Devin: J'essaie. Pour décrire brièvement la situation des chambreurs, je vous réfère au chapitre 4 du mémoire, aux pages 30 à 34. Je veux tout simplement dire qu'ils sont parmi les locataires les plus mal pris du Québec actuellement. Au minimum, ils sont 230 000, à peu près 40% de la population, formés de gens âgés, d'assistés sociaux, de chômeurs, de petits salariés et d'étudiants. Cette population survit avec des revenus qui varient entre $200 et $400 par mois; elle doit donc consacrer entre 23% et 40%, sinon plus actuellement, de ses revenus pour habiter une chambre, dans la majorité des cas au centre-ville de Montréal, de Québec ou d'autres villes, très souvent inhabitable. Le prix des chambres dans le centre-ville de Québec se situe entre $80 et $140 par mois, soit une moyenne de $100. Cette population, en raison de ses faibles revenus, est captive de ce mode d'habitation; elle n'a pas les moyens de vivre ailleurs, sinon dans les pires taudis.

Plusieurs propriétaires de maisons de chambres profitent de l'état de dépendance de ces gens, dépendances socio-économique, psychologique, physique, situation de solitude, ignorance et incapacité de se défendre, pour les exploiter et réaliser des profits très exagérés à leurs dépens. C'est la situation où nous a menés jusqu'à maintenant le libre marché dans le domaine très lucratif du commerce des chambres. Le gouvernement est au courant de cette situation, si je me réfère au rapport du groupe de travail qu'il a lui-même mis sur pied.

Dans le projet de loi no 107, nous considérons qu'il n'y a rien pour changer quoi que ce soit à cette situation. Le fait, pour les chambreurs habitant un local où plus de trois chambres sont mises en location, d'être sous la juridiction de la régie — et cela depuis l'année dernière — et d'avoir les recours prévus par le projet de loi no 107 ne changera pas la situation d'exploitation et d'injustice qu'ils vivent tout comme les autres locataires du Québec. En cela nous sommes d'accord avec ce que vient d'affirmer Solange Grondin. De plus, cela laisse une grande partie des chambreurs sans protection légale, ceux qui habitent un local où moins de deux chambres sont mises en location.

De toute façon, ce que nous retrouvons dans le projet de loi no 107 est une nette régression par rapport au livre blanc lui-même qui disait, à la page 24, concernant le contrôle du prix des chambres: "Dans le cas des chambres, il faudra d'abord établir le prix de départ, ce qui est une étape préliminaire, après laquelle les hausses de loyer seront calculées en fonction de la hausse des coûts d'opération selon un principe similaire à celui étudié pour les logements. "La loi prévoira donc au départ un contrôle obligatoire du prix par la fixation, suite à une inspection de la qualité et des services, d'un prix maximal de location pour chaque chambre. Ce type de contrôle apparaît en effet mieux adapté au dénuement et à la dépendance d'une bonne partie des chambreurs, gens âgés, mères célibataires, assistés sociaux, face à leurs locateurs et à la nature particulière de ce type d'habitation."

Quant à nous, pour raccourcir, nous voulons mentionner deux revendications qui, nous le pensons, pourraient améliorer sensiblement la situation des chambreurs. Compte tenu des coûts prohibitifs des chambres, de la qualité et des services offerts ainsi que de la capacité de payer des locataires obligés d'utiliser ce mode d'habitation, compte tenu de la grande variation du coût des chambres pour des services équivalents, nous demandons que l'Etat, par la loi, oblige tous les locateurs de chambres sans exception à enregistrer les chambres qu'ils louent ou offrent en location. Deuxièmement, qu'une inspection systématique des chambres soit faite suite à cet enregistrement et que les faits consignés servent à remettre en cause le prix de base des chambres sans avoir pour effet d'augmenter le prix d'aucune chambre; qu'une méthode de fixation du loyer de base des chambres soit élaborée et rendue publique.

Une autre revendication et je termine là-dessus, compte tenu que les locataires de chambres subissent des hausses de loyer abusives, parfois même plus d'une fois par année, compte tenu que ces hausses se font de façon très aléatoire suivant le changement de locataire ou l'augmentation des prestations d'aide sociale, nous demandons que dans le cas des chambres, comme dans le cas de l'ensemble des logements locatifs, la hausse ne soit consentie qu'une seule fois par année, qu'il y ait ou non changement de locataire durant l'année, et que le locateur soit tenu de soumettre toute hausse à la régie. Je termine là-dessus, il y aura d'autres revendications que vous pourrez trouver dans le chapitre concernant les chambres dans le mémoire.

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur.

M. Simard (Christian): M. le Président, cinq minutes seulement.

Le Président (M. Laplante): Je vais vous avertir d'une chose, c'est que ce sera votre choix à vous. Ce ne sera pas le choix de la commission. C'est que vos mémoires ont été lus de part et d'autre ici avec toutes les notes qu'ils contenaient. Vous avez le choix entre vouloir vous faire questionner sur tout le travail que vous avez fait ou en faire seulement une lecture, point, pas de questions après. Je ne crois pas que vous sortiriez satisfaits,

à ce moment. Là c'est vous qui allez faire le choix. Si vous voulez parler, parlez jusqu'à 18 h 15, il n'y aura plus de questions à 18 h 15. Ce sera juste une présentation.

M. Simard: J'avais un résumé écrit, mais je vais le faire oralement plus court encore. C'est simplement au niveau de la conservation du stock des logements. Nous vivons dans des logements des quartiers populaires. Je parle pour le Comité de citoyens de Saint-Gabriel et on connaît la situation, la détérioration. On est assez déçu de voir dans un chapitre nouveau de la loi une disposition nouvelle qui ne se retrouvait dans aucune loi sur la conservation du stock des logements. Finalement, au bout du compte, on se retrouve avec le statu quo déguisé sous une allure de réforme. Là-dessus, je vais m'expliquer. Je pense que le gouvernement dit dans l'article 27, au début, que nul ne peut démolir ou changer de destination, subdiviser un logement. Ensuite, on précise des cas où, par exemple, les municipalités ont à gérer cela. On sait que les municipalités sont souvent juge et partie parce que finalement elles sont souvent promoteurs de projets d'ensemble et provoquent les démolitions. Comment une municipalité pourra ne pas accorder un permis à quelqu'un qu'elle aura attiré?

D'accord, il y aura l'appel possible à la régie, mais en fait, là aussi les critères, la pondération des critères n'est pas expliquée. On parle de critères comme besoin de logements, préjudices causés aux locataires, possibilité de relogement, détérioration de l'apparence architecturale. Finalement, cela me fait penser à un disque, à une annonce de la compagnie Ketel sur les produits, les disques. Il y a plusieurs artistes de différentes catégories, Pauline Julien avec Dona Summers et finalement on met "and many more". "Many more" ici, c'est tout autre critère pertinent. Finalement, ce qui arrive avec des choses comme cela, c'est qu'on va se retrouver sans aucune contrainte réelle. C'est toujours laissé à la discrétion d'administrateurs ou de la ville, selon que la ville a des règlements ou pas. Il y a aussi des places où cela aurait pu paraître contraignant. Le propriétaire est obligé de demander l'autorisation à la régie. Mais il peut la demander avant même d'acquérir un immeuble et la recevoir avant même d'acquérir un immeuble selon l'article 28.

Je pense qu'au lieu de nuire ou d'empêcher les démolitions ou les subdivisions de logements ou leur changement de destination, de mesures comme celles-là les encouragent presque, leur donnent un cadre légal. On dit aussi: Finalement, le projet de loi est "statuquoïste" dans ces cas. C'est extrêmement décevant pour nous de retrouver des choses comme cela malgré de beaux énoncés de principe. Au niveau des revendications que nous mettons de l'avant — pour terminer là-dessus — nous demandons que les différents organismes d'Etat soient soumis aux mêmes règlements et lois que tout autre propriétaire. Là-dessus, par exemple, on dit encore à l'article 27... Le gouvernement est un gros promoteur lui- même, on sait que c'est la colline parlementaire et la ville de Québec également. Finalement, si la ville est aussi soumise, comme je vous le disais tantôt, que c'est elle qui fait sa propre réglementation, nous, sur la rue Saint-Gabriel, avec des choses comme cela, il pourrait toujours arriver finalement que ce soit démoli. Face à ces cas concrets — on a plusieurs cas concrets chez nous de détérioration et d'abandon de logement — on ne voit pas comment la loi pourra empêcher cette détérioration qui conduit toujours aux mêmes résultats, c'est-à-dire aux abandons ou aux démolitions et, quand il y a des rénovations, il n'y a pas de véritable contrôle. Là-dessus, il n'y a pas de chapitre sur la prévention au niveau de la conservation du stock. Finalement, on se retrouve avec exactement la même chose. (17 h 45)

Nous réclamons qu'aucune démolition de logements ou d'immeubles ne soit permise à moins qu'il ne soit prouvé que le coût de la démolition et de la reconstruction des logements est moins élevé que celui de la rénovation. Je pense qu'une mise en preuve comme celle-là peut limiter.

Que le propriétaire soit obligé de reconstruire un immeuble répondant aux mêmes caractéristiques que l'ancien quant au nombre de pièces par logement et au prix du loyer. Lors de la location du nouvel immeuble, que la priorité soit donnée aux locataires de l'immeuble démoli — ceux qui y étaient avant — parce que, souvent, on démolit des immeubles qui sont encore habités.

Dans le cas de la rénovation, que la rénovation n'entraîne aucune hausse de loyer. Dans les deux cas — les cas de démolition et de rénovation — que, durant la période nécessaire aux travaux, les locataires soient relogés par le propriétaire sans augmentation du coût du loyer.

Nous réclamons également qu'aucune subdivision de logement ne soit permise. Le nombre de logements répondant aux besoins des familles est déjà assez restreint.

Par rapport au changement de destination, nous réclamons qu'aucun logement existant ne puisse servir à d'autres fins qu'à celles de l'habitation. Nous considérons que la fermeture d'un logement ou d'un immeuble est un changement de destination et qu'elle ne doit pas être permise. En plus de diminuer le nombre de logements, la fermeture d'un logement ou d'un immeuble constitue un danger réel pour le voisinage. Le projet de loi 107 ne répond aux besoins que d'une minorité de la population, les propriétaires locateurs, dans ce cas-là, parce qu'il ne légifère pas d'une manière efficace. Nos revendications visent au contraire à faire respecter et à garantir les droits de la majorité locataire.

Pour terminer, en rapport avec ce que le RCM a dit ce matin dans son mémoire, je veux dire que, souvent, il n'y a pas de contrôle. Il y a eu un débat sur les 64% accordés en hausse de loyers. Je pense que le chapitre de la conservation du stock de logements est aussi lié au contrôle et que si la SCHL permet 64%, c'est curieux qu'au niveau de la rénovation la régie accepte cela intégralement

à cause de la masse des factures et du système de calcul des loyers effectué actuellement. Je pense que le gouvernement établissait dans le livre blanc de bons principes. Finalement, cela a accouché d'une souris, c'est-à-dire le statu quo.

Le Président (M. Laplante): Est-ce terminé?

M. Simard: Oui.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, j'ai entendu ces revendications puisque, selon les termes mêmes du dernier intervenant, on parlait de revendications ou d'exigences. Je comprends les objectifs poursuivis. Evidemment, la question que je me pose, c'est: On est partis — quoiqu'on le retrouve plutôt en conclusion, j'ai l'impression qu'on le retrouve aussi dans l'introduction — du fait que le principe du droit au logement est absolument inconciliable avec le droit à la propriété. Est-ce exact? Pour vous, c'est inconciliable. C'est cela?

Mme Grondin: Oui, c'est très clair.

M. Tardif: En conséquence, on réclame un gel obligatoire et universel des loyers.

Mme Grondin: Non, on ne demande pas un gel des loyers. On demande, étant donné que le logement est un bien essentiel, de meilleurs contrôles par l'Etat, comme cela se fait pour la santé, comme cela se fait pour l'éducation.

M. Tardif: Est-ce à dire à ce moment-là, quand on parle d'un meilleur contrôle, c'est-à-dire celui qui serait effectué par l'Etat, qui serait selon les termes qu'on retrouve dans vos documents, universel et obligatoire, qu'il n'y aurait absolument de place pour aucune entente entre les parties? Est-ce ce que cela veut dire?

Mme Nadeau: Oui. Au niveau du contrôle des loyers, c'est très clair, oui.

M. Tardif: Aucune entente? Mme Nadeau: Aucune entente.

M. Tardif: II n'est donc pas question de la possibilité pour deux personnes responsables, adultes et mûres, de s'entendre sur des services donnés moyennant un prix X.

Mme Nadeau: Non, parce qu'on considère que ce n'est pas une question de maturité, c'est la question de pouvoir négocier. Si les locataires pouvaient négocier, on pourrait parler de négociation, mais, quand il n'y a pas de pouvoir, on ne peut pas parler de négociation.

M. Tardif: Et vous croyez que l'arbitrage par un tiers, fonctionnaire, juge, assesseur, appelons-le comme on voudra, sera préférable à ce que les parties pourraient finalement décider de négocier entre elles.

Mme Nadeau: Pas de façon inconditionnelle. Cela dépendrait essentiellement de la méthode de contrôle des loyers.

M. Tardif: Au sujet de la reprise de possession, est-ce que vous avez fait le parallèle entre l'article 1659 qui prévoit cela et les articles 1657.2 et 1657.3 qui visent à assurer aux personnes qui cohabitent avec un locataire de pouvoir continuer ou de succéder, en quelque sorte, au bail? Ne trouvez-vous pas que cela fait le pendant de l'article 1659 sur la reprise de possession?

Mme Grondin: Quels articles?

M. Tardif: Les articles 1657.2 et 1657.3 permettent, en quelque sorte, la continuation du bail en faveur des personnes qui cohabitent — d'accord? — avec le locataire. Elles peuvent continuer de demeurer dans les lieux. Ne trouvez-vous pas que cela fait, en quelque sorte, le pendant de la reprise de possession par le propriétaire?

Mme Grondin: Non. M. Tardif: Du tout?

Mme Grondin: Non, ce n'est pas de cette façon que je l'interprète. Au niveau de l'article 1657.3...

M. Tardif: Oui.

Mme Grondin: ... d'abord on est très content de voir cela parce que, ce qui se passe en réalité, ce sont souvent des personnes qui sont dans des situations de divorce, de séparation et tout cela. Quand c'était le mari, l'époux ou, en tout cas, le conjoint, qu'il n'y avait qu'un signataire du bail, il arrivait que, s'il quittait, sa famille était mise dehors. Mais il n'y a pas de lien à établir entre cet article et la reprise de possession. Cela donne droit, quand il y a le départ d'un conjoint, à la personne qui reste là de continuer à y demeurer. Elle succède aux obligations qui découlent du bail. C'est strictement cela que cela lui donne. Cela n'est pas une question de reprise de possession.

M. Tardif: Disons que cela peut être l'équivalent, s'il s'agit de personnes ayant une relation, disons, de conjoints, peu importe le statut légal de cette relation, de permettre aux enfants ou aux parents qui pourraient cohabiter de continuer d'habiter les lieux, c'est-à-dire à peu près le même monde en faveur duquel la reprise de possession pourrait s'effectuer par un propriétaire. On est d'accord là-dessus?

Mme Nadeau: Dans ce cas-là, il n'y a personne de délogé pour loger quelqu'un d'autre. D'accord?

M. Tardif: D'accord, sauf qu'il y a une espèce de parallélisme qui peut être fait entre ces deux articles.

Sur la question de la qualité des logements, vous dites que le projet de loi parle d'un code d'habitabilité et, soit dit en passant, comme je l'ai dit dans d'autres interventions, c'est mon intention de le déposer avant que le projet de loi soit adopté, lors de l'étude article par article. Il est présentement en voie de préparation. La raison, c'est que cela aurait été, en quelque sorte, un peu préjuger des mémoires et des représentations qui nous auraient été faites que d'avoir déjà préparé ce règlement sans avoir tenu compte des suggestions et des recommandations formulées.

Il y a la question de l'application de ce code d'habitabilité et du contrôle de la qualité et de la conservation du stock par les municipalités. Là encore des choix ont été faits, c'est vrai. Je ne sais pas si vous étiez là ce matin lorsque les gens du RCM sont venus. Le choix a été, puisque les mesures de conservation du stock, c'est-à-dire de non-démolition, sont finalement des décisions, des gestes politiques, de faire en sorte que ces gestes se situent au palier de gouvernement ou d'administration qui est le plus près des gens. Le forum normal, la tribune, où devraient se faire les pressions pour et contre les démolitions devrait être la salle du conseil et non pas une quelconque officine gouvernementale. C'est évidemment un choix politique qui a été fait avec une possibilité de recours à la régie. Est-ce que je dois comprendre que ce principe de démocratie locale vous ne l'admettez pas et que vous croyez que, justement, un organisme extérieur au milieu est mieux placé pour décider de l'opportunité de démolir ou pas un immeuble?

M. Simard: Si c'était une véritable démocratisation, je ne dis pas, mais vous l'encadrez tellement que, finalement, ce sont un petit peu les mêmes critères que pour la régie du logement elle-même.

M. Tardif: Qu'est-ce que vous voulez dire par encadrer?

M. Simard: En ce sens que, dans les articles 102 et 103, vous prévoyez les critères sur lesquels la ville devra accepter ou pas le permis de démolition à un éventuel demandeur. Où je me pose des questions, à un moment donné, c'est justement si ce n'est pas une partie extérieure. La Régie du logement est peut-être une partie extérieure, mais les gens peuvent auditionner, donc, recréer un peu le milieu, si vous voulez. Mais au niveau des procédures d'une ville, justement parce que les villes ne sont pas trop habituées à une démocratie de participation, à un moment donné, le poids entre le Hilton et les résidents du quartier Saint-Jean-Baptiste, pour donner un exemple, n'est pas nécessairement égal aux yeux d'une municipalité, parce que l'un crée de l'emploi et l'autre, c'est de l'habitation pas payante en taxes. Ce qui arrive, c'est trop tentant pour les municipalités d'avoir des procédures un peu fumeuses ou pas tellement publiques et de s'organiser pour émettre le permis. C'est à ce moment-là que les critères... M. le ministre, vous m'avez posé une question.

M. Tardif: Oui.

M. Simard: Finalement, au niveau de la municipalité, elle peut souvent passer cela par en dessous. C'est bien clair, à un moment donné, qu'elle peut passer cela par en dessous.

M. Tardif: J'écoutais, mais je voulais avoir exactement la référence à l'article 29. Vous présumez que les critères énoncés dans cet article, c'est-à-dire qu'avant de se prononcer sur une demande visée dans les articles 27 ou 28, la régie doit considérer l'état du logement — évidemment, si c'est la municipalité qui a adopté un règlement, c'est elle qui devra le faire — le préjudice causé au locataire, les besoins de logement dans les environs, la possibilité de relogement des locataires, la détérioration de l'apparence architecturale, du caractère esthétique ou de la qualité de vie du voisinage, le coût de la restauration et tout autre critère pertinent.

Vous présumez que tous ces critères seront des critères additionnels pour démolir alors qu'ils ont été mis là précisément pour être des critères additionnels pour refuser la démolition. En vertu de quoi pouvez-vous présumer que ce seront des critères pour faciliter les démolitions? C'est ce que j'aimerais savoir.

M. Simard: Je trouve que la pondération n'est pas expliquée; elle permet tout le temps de contourner. La loi permet, à un moment donné, que les mots "tout autre critère pertinent" ne servent pas nécessairement, parce que ce n'est pas précisé, la ville ou la régie du logement; ces critères peuvent jouer des deux bords.

Une Voix: D'accord.

M. Simard: D'accord? Comme la pondération n'est pas vraiment expliquée et qu'on ouvre énormément la porte avec "tout autre critère pertinent", je me demande jusqu'à quel point, par exemple, la stimulation économique d'une ville ou la revalorisation de son assiette foncière par un projet en hauteur d'édifice à bureaux, cela ne serait pas pertinent. Vous avez eu un mémoire, la semaine passée, je pense, du Comité de citoyens de Saint-Sauveur, qui reprenait ces arguments, c'est-à-dire ces critères un par un, et qui disait finalement que cela veut tout dire et rien dire.

M. Tardif: Je comprendrais votre interprétation si la section II, en haut de la page, était coiffée du titre: Dispositions particulières à la conservation et à la démolition des logements. D'accord? A ce moment-là, on dirait: Ces critères doivent être interprétés comme devant faciliter les démolitions. Mais tout le sens de la section II est: Dispositions

particulières à la conservation des logements. Ce sont des raisons pour conserver des logements. Evidemment, on n'avait pas la prétention, dans un projet de loi, de pouvoir les énumérer de façon exhaustive.

M. Simard: D'accord, mais à propos d'un titre, à un moment donné, on a travaillé aussi avec des coopératives et on a eu des programmes d'aide au logement coopératif, qui sont censés créer 30 000 unités de logement, c'est de vos vis-à-vis d'Ottawa, le titre était là; tout est en fonction de cela, mais ils sont à peu près inapplicables pour les coopératives. Finalement, au niveau du logement coopératif, ce peut être la mort du développement coopératif. A ce moment-là, le titre de cette section ne m'impressionne pas beaucoup. Ce sont les possibilités de s'en servir. J'ai l'impression qu'un propriétaire qui veut vraiment démolir, qui veut vraiment subdiviser, va lire cela et se frotter les mains en disant: Ils m'ont laissé des trous et je vais m'en servir.

M. Tardif: D'accord, sauf que vous êtes conscient que, jusqu'à maintenant, aucune disposition n'existait comme telle, si ce n'est dans la charte de Montréal, depuis tout récemment, alors qu'on lui a donné le pouvoir de contrôler les démolitions, il y a quelques mois de cela, et qu'elle a effectivement adopté un règlement de sorte qu'on part d'une situation où il n'y avait rien et on permet maintenant aux municipalités de contrôler les démolitions sur leur territoire.

M. Simard: C'est d'autant plus frustrant qu'il n'y avait rien et qu'on n'a que cela maintenant.

M. Tardif: Bon, je pense que je vais passer, pour l'instant.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Premièrement, je vous remercie pour vos trois mémoires. En effet, ils sont assez différents et assez importants. Il y a de la matière dans chacun. (18 heures)

J'aimerais prendre le temps qui m'est alloué en vous demandant — et je ne sais pas exactement à qui j'adresse la question, vous pouvez décider — de me parler un peu du rôle que vous prévoyez pour l'entreprise privée, pour le système capitaliste, si vous voulez, dans le domaine de l'habitation au Québec. Quand vous parlez de cela, parlez-nous un peu de la question de la construction des nouveaux logements. Même si on empêche la démolition de tous les logements, il faut quand même que nous construisions 40 000 ou 50 000 — le nombre n'a pas été précisé — mais à peu près 50 000 logements par année. Est-ce que, dans le cadre de votre explication, ces 50 000 logements doivent être construits par le secteur privé et quels sont les critères, les incitations, les bénéfices qu'on doit permettre pour cette construction? De plus qui va décider et comment va-t-on décider jusqu'à quel point ces bénéfices seront reçus? En effet, parlez-moi un peu de votre perspective du rôle de l'entreprise privée dans le domaine de l'habitation au Québec et surtout en ce qui concerne la construction des nouveaux bâtiments.

Mme Grondin: Lise Nadeau va le prendre.

Mme Nadeau: Oui. En fait, probablement que l'entreprise privée serait encore mieux placée que nous pour décrire son rôle, mais ce qu'on peut vous dire là-dessus, si on observe actuellement le marché, son rôle est nécessairement déterminant, c'est-à-dire que c'est à elle que revient le choix, par exemple, au niveau de la construction, de décider quand construire, où construire, comment construire et quel type de logements construire. C'est son rôle actuellement. Nous, devant cela, on dit: Compte tenu que le logement est un bien essentiel, ce n'est pas possible de lui laisser cela indéfiniment entre les mains — parce que la preuve se fait de plus en plus — le type de logements qu'elle construit ne peut pas répondre aux besoins des gens. On ne peut pas demander à l'entreprise privée de faire moins de bénéfices pour satisfaire aux besoins des gens. Ce n'est pas le rôle de l'entreprise privée de répondre aux besoins des gens. Son rôle est de faire des profits. C'est à partir de cela que nous disons que l'Etat doit intervenir. Là, on parle au niveau du contrôle des loyers et des aspects qui touchent le projet de loi 107, mais il est évident que l'Etat va devoir intervenir beaucoup plus massivement, même au niveau de la construction, parce qu'on ne peut pas laisser l'entreprise privée répondre à un besoin comme le logement.

M. Scowen: Vous avez proposé ici dans vos mémoires un système assez global de contrôle de tout ce qui touche l'habitation, le droit de fixer les loyers, le droit de maintien dans les lieux et ainsi de suite. Tout cela a été approuvé et est devenu loi. Si l'entreprise privée disait: Ecoute, c'est très bien, on n'est pas contre, mais, personnellement, nous ne nous intéressons pas à la construction de nouveaux bâtiments sur la base de cette nouvelle loi, que prévoyez-vous comme suite? Est-ce l'Etat qui doit entreprendre la construction de ces 50 000 logements par année ou doit-on changer la loi pour que cela puisse donner une incitation à l'entreprise privée? Quelle est l'étape? Avec ce système assez global, assez compréhensif, on voit qu'il n'y a pas beaucoup d'incitation à la construction.

Mme Nadeau: Pour vous répondre, je pourrais peut-être prendre seulement comme premier exemple la question des immeubles neufs. C'est justement une mesure dans le projet de loi 107 qui existait avant, soi-disant pour promouvoir la construction de logements. Nous disons finalement que cela n'a aucune justification à ce niveau-là, parce qu'il s'agit que les règles du jeu soient

établies par le gouvernement et, à ce moment-là, s'il était clair que les immeubles neufs, par exemple, étaient couverts, la première année, les propriétaires seraient obligés de louer à leur vrai prix au lieu de jouer avec les locataires qui entrent dans leurs immeubles. D'une part, on se dit que c'est à l'Etat d'établir les règles du jeu.

Deuxièmement, vous demandez quels effets cela aurait sur la construction. Nous autres, on dit que c'est la même chose qu'on nous ressert du côté des locataires quand on parle du contrôle des loyers, parce que les gens ne sont pas capables de payer. On nous dit: Le contrôle des loyers, cela ne peut pas régler la capacité de payer du monde. Il doit y avoir des politiques de revenu à côté, parce que le contrôle des loyers, c'est censé être strictement sur le prix des loyers.

Mais, d'autre part, on dit que c'est la même chose. Si on instaure un contrôle des loyers qui protège vraiment les locataires et que, supposément, l'entreprise privée en subit les préjudices, si l'Etat veut maintenir les privilèges de l'entreprise privée à ce niveau, il fera les programmes qui s'imposent. Ce n'est pas à nous à lui suggérer des programmes pour protéger ses intérêts.

M. Scowen: Probablement que je n'ai pas bien exprimé la question. Je vais la poser d'une autre façon. Vous avez vos revendications; elles sont acceptées; elles deviennent la loi. Vous voyez que l'autre côté, qui a aussi sa liberté, ne construit pas. A ce moment, est-ce que vous pensez que le mieux à faire est de commencer à négocier — vous autres, par exemple, si vous avez le droit de le faire — avec l'entreprise privée pour peut-être changer toutes ces propositions qui sont maintenant devenues la loi, pour faire les compromis, ou est-ce que ce sont des choses de base qui ne doivent pas être compromises ou changées? Est-ce à l'Etat, si l'entreprise privée n'accepte pas toutes ces revendications, de construire les 50 000 par année? Vous voyez-vous dans un système de négociation, vous autres, avec l'entreprise privée dans le domaine de ces revendications, ou est-ce que vous préférez qu'elles soient acceptées à 100% et que l'Etat en subisse les conséquences?

Mme Nadeau: Je ne vois pas très bien comment on pourrait négocier cela avec l'entreprise privée. Les revendications qu'on a là ne sont pas dans ses intérêts.

M. Simard: On en est tellement loin que c'est une discussion un peu théorique. Ce n'est pas cela qui nous est présenté, c'est le moins qu'on puisse dire. A ce moment-là, ce seraient soit des règles du jeu pour l'entreprise privée ou soit un autre type de développement dans ce cas-là. A un moment donné, pour la santé, quand c'était privé, plus, en tout cas, on a trouvé des moyens. Ce n'est pas à nous de les trouver. On nous propose un projet de loi assez "statuquoïste". Je pense que c'est une discussion qui pourrait se poursuivre encore à cette commission.

M. Scowen: Je vous remercie. Il ne reste que cinq minutes, je vais laisser la parole au député de Saint-Hyacinthe. Merci.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci de votre participation. Au tout début, je pourrais dire, comme membre d'un parti de l'Opposition: Bravo pour votre mémoire; vous tapez sur le gouvernement et allez-y. Par contre, je dois peut-être vous dire franchement qu'à plusieurs points de vue, vous allez passablement loin.

Une Voix: Pas mal loin.

M. Cordeau: Passablement loin. J'aimerais avoir quelques explications. Lorsque vous dites, dans votre mémoire, que c'est un droit au logement, d'accord. Par contre, vous considérez qu'à un moment donné, si la personne n'a pas les moyens de payer, elle pourrait rester dans son logis indéfiniment, parce qu'elle n'a pas les moyens financiers et qu'elle a le droit au logement. Qui, croyez-vous, à ce moment-là, va payer le propriétaire?

Mme Grondin: A ce sujet, qu'est-ce qu'on dit? C'est qu'on trouve inadmissible — cela est arrivé, dans notre mémoire, d'ailleurs, on le souligne... Ce n'est pas seulement un cas; de plus en plus, cela arrive. En 1977, une famille de trois enfants s'est retrouvée trois fois dans la rue parce qu'elle n'avait pas les revenus suffisants et ne trouvait pas de logement qui corresponde à sa capacité de payer. Ce qu'on dit, c'est qu'il faut faire quelque chose au niveau du contrôle des loyers et il faut faire quelque chose au niveau plus global, qui est au niveau des politiques d'ensemble de revenu, parce qu'on trouve inconcevable que, dans une société dite civilisée, il y ait des gens qui se retrouvent dans la rue ou sur le banc de neige parce qu'ils ne sont pas capables de payer. Il y en a de plus en plus et ce ne sont pas tous des gens qui ne savent pas gérer leurs choses. Les ADDS, les associations pour la défense des droits sociaux — d'ailleurs on a une lettre et on regrette de n'avoir pu la faire photocopier — le ministère des Affaires municipales leur alloue $85 pour une famille à ce sujet. C'est tout à fait utopique. Il faut faire quelque chose.

M. Cordeau: Je suis tout à fait d'accord avec vous que le montant qui est accordé pour le loyer de base pour ceux qui bénéficient de l'aide sociale n'est plus adéquat en 1979. J'ai une autre question. Vous avez dit tantôt que le propriétaire qui rénoverait, qui voudrait rendre son logis habitable, c'est-à-dire suivant le code d'habitabilité, n'aurait droit, lui non plus à aucune augmentation.

C'est entendu que si le ministre accepte dans son projet de loi une telle suggestion, il n'y a pas un propriétaire qui pourrait rénover sans augmen-

ter son loyer convenablement, avec une directive de la régie, parce qu'à ce moment-là le logement va aller en ruines et le type va le vendre pour ne pas faire de rénovations, s'il le fait. Le type ne fabrique pas les piastres, le propriétaire n'a pas de machine à piastres pour payer les rénovations. Je pense que, de ce côté, ce serait peut-être bon, aussi, de votre part, d'étudier de nouveau le problème. Je crois que c'est une demande qui n'a pas de sens.

Mme Grondin: On peut répondre à cela. M. Cordeau: Oui?

Mme Grondin: Depuis le début, vos interventions nous disent: Vos affaires n'ont pas de sens, vous allez trop loin, tout cela. Malheureusement, on n'a peut-être pas assez de temps pour expliquer. Dans ce cas précis des rénovations, on a parlé des rénovations pour rendre un logement conforme à un code d'habitabilité, pour qu'un logement soit habitable. Nous disons: Si quelqu'un a mis sur le marché un logement qui était de très mauvaise qualité, qui était inhabitable, et qu'il louait cela $150, s'il est obligé d'investir pour le réparer, c'est bien de valeur, mais cela ne doit pas s'ajouter au loyer. Avec la méthode actuelle et celle qui va être maintenue, même si le logement est déjà trop cher par rapport à sa qualité si le propriétaire pose deux vis de plus, cela se traduit par des augmentations. C'est cela qui est inadmissible. Nous disons: Si le logement est loué à tel prix, il doit être loué habitable; quand il ne l'est pas et que le propriétaire fait des rénovations, cela ne doit pas augmenter le loyer.

M. Cordeau: Je parle des rénovations de $4000 à $5000 par logis, à un moment donné, à l'extérieur; je ne parle pas d'une rénovation, planter deux clous et trois vis.

Mme Grondin: Encore là, sur les rénovations... M. Cordeau: De ce côté, il...

Mme Grondin: ... quel que soit le montant, si c'est pour le rendre habitable, quand il l'a loué ce logement devait être habitable.

M. Cordeau: Je vous remercie. Il faut aller vite, le temps manque. Concernant les chambres, est-ce que le stock de chambres est suffisant dans le Québec métropolitain? Vous dites que c'est onéreux. Est-ce dû à un manque de chambres?

M. Devin: II n'y a jamais eu de contrôle; c'est très difficile de situer le stock de chambres actuellement. On a l'impression que le stock de chambres grandit dans les banlieues, dans les logements ou dans les maisons unifamiliales, les gens peuvent se permettre de louer une chambre ou deux durant une année, mais ce stock diminue dans le centre-ville. Les chambres en banlieue sont évidemment plus chères que celles qui exis- tent dans le centre-ville actuellement. Je ne crois pas, je ne peux pas affirmer que c'est à cause d'une pénurie du nombre de chambres. De toute façon, au niveau de l'accroissement du nombre de chambres, ce n'est pas de la construction neuve dans les quartiers comme les nôtres, au centre-ville, dans Saint-Roch; ce sont les plus vieilles maisons qui sont près d'être démolies, qu'un propriétaire transforme en chambres. S'il a trois logements qu'il loue à $100 par mois; s'il peut faire dix chambres et les louer $100 par mois, il maximise son profit. Alors, il n'y a pas de construction neuve, mais c'est difficile de situer le stock de chambres exactement.

M. Cordeau: Une dernière observation. Je suis tout à fait d'accord avec vous que le prix des chambres devrait être fixé par la régie, comme pour les hôtels, et que le prix de la chambre devrait être affiché dans les chambres pour un contrôle un peu plus humain, peut-être. J'aurais d'autres questions mais, étant donné que M. le député de Taschereau, qui est près de vous, a des questions, je vais lui laisser la parole.

M. Guay: J'ai une ou deux questions. Je trouve un peu dommage que le bout du mémoire, ou le mémoire de M. Devin, ou le chapitre du Centre de références, section chambreurs, ait été en quelque sorte pris en sandwich comme il l'a été. Je pense qu'il aurait pu faire l'objet d'un mémoire distinct, étant donné l'expérience réelle et, dans certains cas, dramatique de la situation des chambreurs dans Saint-Roch. On aurait eu facilement de quoi en parler pendant une bonne heure.

Mme Grondin: C'est ce qu'on avait demandé aussi. On avait demandé trois heures à M. Pouliot pour que chaque groupe puisse intervenir au niveau du fond de chaque partie du mémoire.

M. Guay: A ce moment-là, il s'agissait de faire trois mémoires distincts, cela aurait été simple.

Mme Grondin: On avait pris les informations avant et on a été incapable de savoir les règles du jeu, ici, à l'intérieur. (18 h 15)

M. Guay: Bon, en tout cas. Dans le cas des chambres, effectivement, comme le mentionnait le député de Saint-Hyacinthe, c'est une hypothèse intéressante. Je me demandais si, du côté du Centre de références, section chambreurs, on avait regardé cette hypothèse. Il existe, soit dans les lois, soit dans les règlements — il faudrait vérifier — du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche tout ce qui concerne les chambres d'hôtel. Evidemment, il y a un parallèle avec des réserves à faire, puisque les chambres d'hôtel, par définition, servent un soir, ou enfin, plusieurs soirs, mais toujours en fonction d'une location d'une période de 24 heures, ce qui n'est pas le cas pour une chambre qui constitue en quelque sorte le logis. Même à cela, il y a des... Est-ce que vous

avez pu regarder les textes de lois tels qu'ils sont, et en êtes-vous arrivés à une forme d'adaptation qui pourrait être incluse dans le projet de loi 107 et qui pourrait donner précisément aux chambreurs de Saint-Roch ou d'ailleurs la protection à laquelle ils ont droit et qu'ils n'ont manifestement pas à l'heure actuelle?

M. Devin: On pourrait peut-être tout simplement faire une remarque sur votre première observation pour dire qu'on est ici avec d'autres groupes parce qu'évidemment, on considère que le problème des locataires de chambres est grave et sérieux. Ce ne sont pas les seules gens qui sont en logement actuellement au Québec qui ont des problèmes graves et sérieux. C'est pour cela que, comme on était d'accord avec les revendications concernant les autres locataires, nous avons tenu à faire une démarche commune. Ce que nous avons regardé concernant les chambres d'une manière plus spécifique, ce n'est pas encore très précis comment pourrait s'élaborer une méthode pour fixer le prix des chambres. Je n'ai pas encore de suggestion très précise à faire là-dessus, mais je pense que je peux tout simplement vous ramener à la revendication no 2 concernant une inspection obligatoire par la régie du stock des chambres, une fixation selon les critères du prix, selon les critères de qualité. Il faudrait que ces critères, évidemment, accordent plus de points à une douche qu'à une télévision ou à un tapis.

Il faudrait que ce soit fait selon des besoins essentiels et que les hausses de loyers soient...

M. Scowen: Excusez-moi. Une question de règlement. C'est simplement pour vous dire, M. le Président, que moi j'ai un engagement à 18 h 30. J'avais prévu qu'on terminerait à 18 heures. Je pense que je dois demander avant 18 h 20, de mettre fin, s'il y a consentement, parce qu'il faut vraiment que je parte dans dix minutes.

Le Président (M. Laplante): Je vous remercie.

M. Guay: On pourra s'en parler privément dans ce cas, parce que l'Opposition officielle nous fait faux bond.

M. Scowen: Oui, je serais heureux moi aussi de vous parler. C'est simplement que...

Le Président (M. Laplante): II me reste à...

M. Guay: Pouvez-vous, si vous me permettez, est-ce que cela vous serait possible, quand même, fouiller cela un peu plus pour que, à très court terme, on puisse en reparler ensemble.

Le Président (M. Laplante): Mesdames et messieurs Nadeau, Simard, Devin, Grondin, les membres de cette commission vous remercient pour l'effort que vous avez fait dans votre mémoire.

Maintenant, avant d'ajourner les travaux, j'aimerais vous donner la liste de ceux qui seront appelés demain. L'Union des municipalités du Québec, no 29, l'Office municipal de l'habitation de Montréal, no 25, l'Association des propriétaires d'immeubles de la Communauté urbaine de Montréal Inc., no 13, Mme Léon N. P. Gagnon, à titre personnel, no 20, l'Association des commerçants de maisons mobiles et terrains du Québec inc., no 28, Structure métropolitaine du Canada Ltée, no 26. Sur ce, les travaux sont ajournés à demain, 10 heures, même endroit.

Fin de la séance à 18 h 20

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