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Présentation de mémoires sur le projet
de loi no 107
(Dix heures douze minutes)
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, mesdames et
messieurs! Reprise des travaux de la commission des affaires municipales afin
d'entendre les mémoires pour l'étude du projet de loi 107, Loi
instituant la Régie du logement, modifiant le Code civil et d'autres
dispositions législatives.
Membres de cette commission: MM. Brassard (Lac-Saint-Jean), Caron
(Verdun), Cordeau (Saint-Hyacinthe), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Gratton
(Gatineau) remplacé par Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Guay
(Taschereau), Mercier (Berthier), Ouellette (Beauce-Nord), Roy (Beauce-Sud),
Shaw (Pointe-Claire), Tardif (Crémazie).
Intervenants: MM. Alfred (Papineau), Charbon-neau (Verchères),
Fontaine (Nicolet-Yamaska), Goldbloom (D'Arcy McGee), Lacoste (Sainte-Anne),
Léonard (Laurentide-Labelle), Samson (Rouyn-Noranda), Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce remplacé par Lavoie (Laval), Vaugeois
(Trois-Rivières).
Les organismes qui se feront entendre aujourd'hui sont: Le Rassemblement
des citoyens de Montréal, no 18; Association des consommateurs du
Canada, (Québec) Inc., Comité des établissements humains,
16-M; Association de l'immeuble du Québec, 23-M; Groupement des
locataires du Québec métropolitain Inc., 27-M.
J'appelle immédiatement le Rassemblement des citoyens de
Montréal. Est-ce que les représentants du Rassemblement des
citoyens de Montréal sont ici? Il n'y a personne? Alors j'appelle
l'Association des consommateurs du Canada; vous êtes présent? Oui.
L'Association de l'immeuble du Québec? Oui. Groupement des locataires du
Québec métropolitain Inc., est là, ce qui veut dire que le
Rassemblement des citoyens de Montréal passera en dernier.
Depuis le début de la commission, il y a des règles du jeu
qui se sont établies: c'est qu'on vous demande de résumer le
mémoire que vous avez à l'intérieur de 20 minutes, pour
que les membres de cette commission puissent vous questionner pendant les 40
minutes qui peuvent rester après le résumé de votre
mémoire. Vous allez vous identifier, identifier l'organisme que vous
représentez et les personnes qui vous accompagnent. Merci, madame.
Section Montréal-Décarie de
I'ACC(Q)
Mme Delage (Niquette): M. le Président, je me
présente, mon nom est Niquette Delage. Je suis vice-présidente de
la section locale Montréal-Décarie de l'Association des
consommateurs du Canada (Québec) Inc.
A mes côtés se trouve Mme Lucille Brisebois qui est la
présidente de notre section locale. Toutes les deux nous faisons partie
de l'Associa- tion des consommateurs du Canada depuis une dizaine
d'années et nous oeuvrons au Québec.
Je veux tout simplement vous dire que cette association est
fondée depuis 1947 et qu'elle oeuvre au Québec également
depuis 1947. Elle ne compte que des bénévoles.
Au mois de mai 1978, lors d'une assemblée générale
annuelle de notre association, il a été résolu de confier
à un comité composé de bénévoles la
responsabilité d'étudier la Régie des loyers dans le but
de préparer un travail afin de se prononcer sur ce sujet. Nous avons
donc entrepris nos travaux comme comité au cours de l'été
et nous avons fait des recherches qui nous ont amenés à vous
présenter un mémoire. Nous sommes une association de
consommateurs et non pas une association de locataires, mais nous avons tout de
même un point de vue à faire valoir étant donné
surtout le fait que nos deux positions respectives, Mme Brisebois ayant
déjà été agent d'immeubles pendant 5 ans et
moi-même chroniqueuse de consommation, nous permettent de recevoir des
plaintes quotidiennement. Nous sommes donc, je le dis bien, dans la situation
de parler du problème du logement dans un sens bien précis, et
l'objet de notre mémoire a été de susciter une
réflexion. Nous avons eu une approche par succès et erreur
étant donné l'étendue du travail et nous avons surtout
cherché à expliquer les causes de certaines plaintes, notamment
au niveau des hausses de loyer dont nous sommes au courant et au niveau
également de certains problèmes qui existent entre les
propriétaires et les locataires.
Nous avons donc tenté de faire ressortir certains aspects des
questions qui nous intéressaient plus particulièrement et nous
avons voulu faire des suggestions concrètes pour corriger des
problèmes qui nous apparaissent être à l'origine ou le
résultat plutôt de certaines situations.
Nous sommes arrivés à la conclusion, d'abord parce que
nous avons eu l'occasion d'en parler avec des membres de notre association de
bénévoles et aussi parce que nous avons justement eu l'occasion
de consulter des personnes, nous sommes donc arrivés à la
conclusion qu'il est nécessaire d'avoir des contrôles.
Cependant dans notre démarche nous avons constaté une
chose, c'est qu'il ne semblait pas exister à l'heure actuelle une
situation de crise ou d'urgence qui justifierait le renforcement des
contrôles tels qu'on les propose. Nous avons donc fait état de
cette situation. Cependant, je vais laisser à ma collègue, Mme
Brisebois, le loisir de vous expliquer certaines choses à
l'intérieur de notre mémoire tout en vous demandant de retenir
que c'est bel et bien une réflexion à laquelle nous nous sommes
prêtés et dont nous voulons vous faire connaître les fruits
aujourd'hui.
Mme Brisebois.
Mme Brisebois (Lucille): Merci! M. le Président, M. le
ministre, messieurs de la commission,
notre comité de la Régie des loyers a fait cette
étude suite à une résolution acceptée à
l'unanimité par l'assemblée annuelle de mai 1978.
Nous avons décidé de ne pas faire de notre mémoire
une étude article...
Le Président (M. Laplante): Excusez, est-ce qu'il y aurait
possibilité soit d'approcher votre micro ou de parler plus fort?
Mme Brisebois: Parler plus fort, bon d'accord; je vous
remercie.
Nous avons décidé de ne pas faire de notre mémoire
une étude article par article, ce que nous laissons à d'autres,
mais de soumettre à l'attention de la commission parlementaire quelques
suggestions pertinentes à la situation présente dans le
Québec. Nous nous sommes demandés pourquoi, dans la ville de
Montréal particulièrement, les locataires tiennent tellement
à pouvoir compter sur la Régie des loyers. Nous avons
présentement 33 500 logements vacants dans la région
métropolitaine de Montréal.
Nous nous sommes également demandé comment nous pourrions
nous dégager un peu de cette réglementation de manière
à sauver des fonds publics, sans léser les droits des
Québécois et sans les laisser dans une situation aberrante.
Nous en sommes venus à la conclusion que la spéculation
sur les maisons d'appartement qui se fait aussi bien à Québec
qu'à Sorel, selon nos membres, et surtout dans la ville de
Montréal par des investissements étrangers est très
importante et est un élément qui fait hausser les prix des
logements de façon irrationnelle.
M. Henri Aubin, journaliste à la Gazette, a écrit un livre
à ce sujet. Ce livre s'intitule "Les vrais propriétaires de
Montréal" et illustre bien que des gens intéressés
à l'immobilier à Montréal ont convaincu les investisseurs
étrangers de spéculer sur les immeubles d'habitation au
Québec. Nous n'avons rien contre cela, mais, quand on investit à
un tel rythme dans des immeubles d'habitation pour les revendre
immédiatement avec des profits de dizaines de milliers de dollars, les
acheteurs haussent sans cesse les loyers de leurs locataires et ce sont les
locataires qui en subissent les conséquences. Le logement, c'est vital
pour les Québécois. On spécule sur les logements des gens
du Québec.
Comme agent immobilier, de 1973 à 1977, j'ai souvent
été invitée à visiter des groupes d'investisseurs
étrangers qui venaient à Montréal en vol nolisé et
qui recevaient les agents immobiliers représentant les courtiers de
Montréal pour leur faire part des inscriptions qu'ils avaient à
ce moment-là en leur possession. Je dois vous dire que j'avais
l'impression qu'on était en train de vendre le Québec, et j'en
suis sortie, d'ailleurs.
Dans le livre de M. Aubin, par exemple, aux pages 195 à 201, sont
listés les noms et adresses des grands immeubles de Montréal
appartenant à des intérêts étrangers. Ce livre de
445 pages nous met devant cette évidence que le dossier de la mainmise
étrangère sur l'une des plus grandes villes de l'Amérique
du Nord est stupéfiant. M. Aubry a rencontré dans les bureaux de
la Régie des loyers, à Montréal, un groupe de 48 personnes
qui habitent les logements d'un immeuble d'habitation et qui se plaignaient
d'avoir eu à se défendre contre une augmentation de 44% durant
deux années consécutives.
Mme France Eymard en était à sa deuxième visite
devant la régie et avait à se plaindre de son loyer qui
coûtait auparavant $157 par mois pour une pièce et demie et qui
avait été augmenté à $210 sans compter la taxe
d'eau. Les augmentations des loyers s'échelonnaient de 24% à 44%.
Un des locataires, au moment de son plaidoyer, a demandé: Je voudrais
savoir qui est le propriétaire de l'immeuble que j'habite. Le
préposé à l'administration ne répondit pas.
J'insiste, dit M. Berger, qui possède l'immeuble où j'habite?
C'est Trading Funds Establishment. Voulez-vous me dire qui est Trading Funds
Establishment? M. André Auclair, qui était l'administrateur de
cet immeuble, a répondu: Je ne le sais pas. Même lui, voyez-vous,
ne savait pas qui était son patron.
M. Auclair, par exemple, ne peut établir les politiques
d'ensemble. Il doit obéir à ses patrons, sinon il sera
congédié. M. Aubry continue et demande: Mais qui décide de
ces politiques et qui empoche les profits? Qui est responsable de l'expansion
brusque de Montréal? Bien sûr, la transformation de
Montréal dépasse largement ces changements affectant des
centaines d'autres immeubles d'habitation à Montréal. En fait,
elle touche tout ce qui est construit autour de nous et qui influence nos
activités. Par exemple, les autoroutes, les édifices à
bureaux, les usines, les centres, les projets domiciliaires aussi. Elle touche
également toutes les activités de spéculation, de
construction, de démolition, d'achats de terrains, de mises de fonds
pour les transactions immobilières et de fabrication de matériaux
de construction.
Donc, nous demandons que la spéculation par des
propriétaires étrangers soit freinée parce qu'elle cause
la hausse des prix qui sont inflationnistes et aussi parce que ces
poussées contribuent à déséquilibrer les budgets.
Il nous apparaît souhaitable qu'elle soit contenue. Comment? En
appliquant au secteur résidentiel la Loi des transferts de terrains
à tout propriétaire non-résident au Canada (Loi des
transferts de terrains, SQ 1976, c.23) et en décrétant que toute
propriété de non-résident qui en est le
propriétaire pendant moins de dix ans on n'est pas tellement
sévère, comme vous le voyez soit présumée
avoir été acquise à des fins de spéculation et
fasse l'objet d'une taxe de 33 1/3% du prix de vente, indépendamment de
l'impôt qu'il a à payer dans son année d'imposition.
Dans la loi en question, cette taxe est perçue au moment de
l'achat. C'est donc en assimilant la situation qui peut exister dans le secteur
résidentiel à celle qui existait lorsque des terrains
étaient achetés par des non-résidents au Canada à
des fins spéculatives, ce qui a amené le gouvernement provincial,
en 1976, à légiférer en pareille matière,
que l'on contrôlera les achats d'immeubles à des fins
purement spéculatives. D'ailleurs, M. Garon s'apprête à
déposer au cours de la prochaine session parlementaire un projet de loi
qui aura pour but d'interdire la vente de terres agricoles aux
non-résidents de la province. J'ai beaucoup vu cela, aussi.
Une autre de nos suggestions est que les logements dits du peuple, soit
les duplex, triplex et quadruplex habités par les propriétaires,
échappent au contrôle de la future régie du logement quant
à la fixation du loyer seulement, parce qu'il existe un type de relation
vraiment privilégié entre les propriétaires et leurs
locataires.
Deuxièmement, parce que les travaux qui s'y effectuent sont dans
la plupart des cas le fait des propriétaires eux-mêmes, et cela,
dans le simple but, tout à fait légitime d'ailleurs, de limiter
les coûts et, par voie de conséquence, les coûts des loyers.
La résultante de cette situation s'impose d'emblée; ces logements
sont conservés dans le meilleur état possible, sans subvention et
au prix le plus bas possible.
Troisièmement, parce qu'il existe un contrôle
véritable du loyer dans ces maisons. Comment cela? Tout simplement parce
que les propriétaires ne "courent pas après le trouble", comme on
le dit en québécois. Ils choisissent leurs locataires avec
lesquels ils entendent avoir d'excellentes relations et ce facteur de bon
voisinage les engage très souvent à accepter des locataires
à un prix moindre que celui qu'originalement ils avaient
fixé.
Il est un fait que le gouvernement ne devrait pas craindre d'admettre:
c'est que l'intervention de la loi dans de telles situations a nui aux
relations de bon voisinage et que des contrôles plus étroits
encore risquent de détériorer davantage. Le maintien en bon
état de ces logements étant le mot d'ordre en 1979 et pour les
années à venir, selon toutes les probabilités, le temps
est venu, d'après nous, pour l'autorité gouvernementale de
commencer à faire des distinctions de logements. Merci, je laisse le
soin à ma compagne de vous parler de notre mémoire plus
longuement, Mme Delage.
Mme Delage: II me reste peu de choses à vous dire, M. le
Président, sinon de vous parler d'autres petites recommandations que
nous avons faites notamment au sujet de la date de fin des loyers. Le 1er
juillet étant jour de fête et étant évidemment un
week-end où cela coûte beaucoup plus cher de
déménager, nous nous demandions s'il ne serait pas possible,
compte tenu d'un certain nombre de facteurs dont celui-là et aussi le
fait que les gens qui déménagent à ce moment vont
probablement du moins, c'est l'impression qu'on a tirée d'un
certain nombre de plaintes qu'on a eues éprouver des
difficultés à faire faire des travaux, étant donné
les vacances de la construction qui s'annoncent presque tout de suite, s'il n'y
aurait pas moyen de réviser cette date.
Nous avons fait des suggestions. Elles ne sont évidemment pas
exhaustives, mais uniquement pour aider les gens parce que, comme nous le
disions abondamment dans notre mémoire, ce qui nous intéresse
d'abord et avant tout, c'est la bonne santé économique des
citoyens. Comme Association de consommateurs et comme consommateurs
nous-mêmes, il nous importe de faire en sorte que les gens en aient pour
leur argent et qu'ils ne soient pas soumis à des hausses abusives au
point de vue de loyer ou à des prix qui sont nettement doublés
dans des cas comme ceux-là pour les déménagements.
Nous avons également demandé, étant donné
l'ampleur de la refonte de la loi que nous avions tout lieu de croire
qu'un appareil administratif considérable serait déployé
à partir du moment de l'adoption de la loi les services du soir
soient maintenus parce que les gens qui ont l'habitude d'y aller le soir en
profitent abondamment. Pour eux, cela veut dire avoir un accès facile
à une structure gouvernementale qu'autrement ils devraient consulter ou
auprès de laquelle ils devraient se rendre pendant le jour, ce qui veut
dire, pour eux, la perte d'une journée de salaire très
probablement.
Pour ce qui est du logement à loyer modique, nous avons
évidemment pris connaissance d'un certain nombre de documents qui nous
indiquent que c'est un logement qui coûte excessivement cher au
contribuable et alors nous nous sommes demandé s'il n'y avait pas lieu
de réviser un petit peu tout ce concept de manière, justement,
à rétablir un petit peu la bonne santé économique
des citoyens du Québec, parce que dans certains cas il y a probablement
des hausses artificielles du parc de logements, parce que des gens se
maintiennent dans ces logements alors, qu'en fait, ils ne devraient plus y
être. Nous avons donc demandé à ce que peut-être un
mécanisme soit prévu de façon à inciter les gens,
qui ne devraient avoir accès à ce type de logement, à le
quitter volontairement.
Ensuite, nous avons fait état du fait que nous étions bien
heureux de voir les maisons mobiles incluses dans la loi. Maintenant, il n'en
demeure pas moins et c'est ce par quoi nous terminons notre exposé,
qu'il s'agit là, tout de même, d'une situation incongrue. Voici
que l'on force des gens à être des locataires alors qu'en fait ils
ne le souhaitent pas nécessairement du fait que les
municipalités, traitant comme des parents pauvres les gens qui sont
propriétaires de maisons mobiles, les forcent à s'installer
à l'extérieur des frontières de la municipalité et
donc, d'avoir accès, dans la plupart des cas, à des parcs de
maisons mobiles dont ils louent les espaces. Dans les circonstances, nous nous
demandons s'il n'y aurait pas lieu de changer un petit peu notre perspective et
de permettre aux gens de jouir du droit de propriété amplement
comme n'importe quel propriétaire, de sa maison unifamiliale. (10 h
30)
C'est, dans l'ensemble, l'objet de notre travail. Comme je vous le dis,
nous n'avons pas voulu, les membres du comité et nous-mêmes, faire
un
travail juridique parce que c'est bel et bien une association de
consommateurs, de gens qui travaillent bénévolement; nous
n'avions pas les sous pour embaucher un avocat qui allait nous donner une
étude avec laquelle nous ne serions pas nécessairement d'accord
parce qu'elle ne correspondrait pas tout à fait à nos termes ou
quoi que ce soit. Nous voulions vraiment étudier les situations dont
nous avions personnellement eu connaissance et vous faire part de certaines
suggestions, compte tenu de ces situations dont nous avions fait l'étude
et pour lesquelles nous jugions qu'il y avait des correctifs ou des
améliorations à apporter. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Merci, mesdames. M. le
ministre.
M. Tardif: M. le Président, je remercie l'Association des
consommateurs du Canada, section Québec, de sa présentation.
On n'a pas donné d'indications quant au nombre de personnes qui
faisaient partie de cette association de consommateurs. Est-ce que vous pouvez
nous dire combien vous avez de membres en règle? Combien de gens
souscrivent? Vous dites: On est bénévole; est-ce qu'on paie une
cotisation?
Mme Delage: Voici ce qui se passe. Comme je l'ai mentionné
au début, l'Association des consommateurs du Canada existe dans la
province de Québec depuis 1947. A partir du moment où le
consommateur canadien, sous sa forme actuelle, a existé, on a
demandé aux gens de payer des cotisations de $8 pour devenir membres de
l'Association des consommateurs du Canada et, évidemment, lecteurs du
Consommateur canadien. En 1975, l'Association des consommateurs du Canada,
(Québec) s'est incorporée pour des raisons très
précises; on la sollicitait de toutes parts pour prendre part à
des activités publiques comme des salons agricoles et des choses de ce
genre. Etant donné qu'il s'agissait de bénévoles qui
dépendaient de subventions, on ne voulait pas engager la
responsabilité personnelle des bénévoles. Alors, il y a eu
une incorporation en vertu de la troisième partie de la Loi des
compagnies en 1975 et c'est alors devenu une association incorporée.
Il y a environ deux ans, l'association nationale a permis l'existence
d'un projet pilote au Québec en vertu duquel on demandait aux membres
qui étaient déjà là et qui avaient payé la
cotisation de $8 d'obtenir une carte de membre à $3 et,
évidemment, de solliciter l'adhésion de nouveaux membres qui eux,
paieraient $3, ce qui fait que Mme Brisebois et moi avons continué
d'être membres de l'Association des consommateurs du Canada en payant $8,
mais nous avons également payé $3 pour soutenir l'association au
Québec. Celle-ci a maintenant transformé le projet pilote en un
fait accompli, c'est-à-dire que pour faire partie de l'Association des
consommateurs du Québec c'est son nouveau nom depuis
février il faut maintenant payer $3, ce qui fait que nous avons
une situation un petit peu difficile en ce sens qu'il n'y a que 1000 personnes
qui ont payé $3 alors qu'il y en a 14 000 qui ont payé $8 et qui
ne sont pas incluses dans l'Association des consommateurs du Québec
telle qu'elle existe sous son nom à l'heure actuelle.
M. Tardif: Merci. Si je tente de résumer votre
mémoire, votre organisme est favorable à un contrôle des
loyers que je qualifierais de sélectif, c'est-à-dire qu'on est
d'accord pour qu'il y ait contrôle moyennant des taux de vacances
respectés ou atteints. On croit que les petits logements, duplex,
triplex et quadruplex occupés par les propriétaires, devraient
être exclus.
Donc, on veut soumettre les groupes et les étrangers; c'est, si
je comprends bien, le sens du mémoire. On est d'accord avec le principe
d'un contrôle, mais on dit: Si le taux de vacances est assez
élevé, il ne devrait pas y en avoir. S'il s'agit de petits
propriétaires habitant leurs locaux, il ne devrait pas y en avoir et
puis on devrait, peut-être, être plus exigeant envers les
propriétaires étrangers. Est-ce que cela résume
bien...
Mme Delage: Non, non.
M. Tardif: Alors d'accord, je vais vous laisser résumer
les trois points essentiels.
Mme Delage: Je voulais d'abord vous dire une chose, c'est que
nous avons présenté le mémoire au nom de notre section
locale Montréal-Décarie. C'est le comité à
l'intérieur de la section locale qui a préparé le travail
et la section locale endosse le mémoire. Alors donc, il faut faire cette
distinction très précise. Les sections locales ont une vie
autonome très précise au sein de l'association. Maintenant, Mme
Brisebois va vous préciser davantage notre pensée.
Mme Brisebois: Quand on parle du duplex où le
propriétaire habite, on ne parle que de la fixation du prix, parce que
les gens ont toujours besoin d'être sûrs de ne pas subir une
évasion, de ne pas être mis dehors par le propriétaire.
Nous n'allions pas jusque là. Cela se fait, vous savez.
M. Tardif: Remarquez que je comprends bien. Vous voudriez
soustraire les duplex, triplex et quadruplex uniquement en ce qui concerne la
fixation du loyer.
Mme Brisebois: La fixation du prix, parce que...
M. Tardif: Mais pour le reste, ils resteraient soumis quand
même. Pour le reste, j'entends...
Mme Brisebois: Oui, oui. Cela se fait comme cela dans l'Etat du
Massachusetts; ils font des distinctions de logement, eux.
M. Tardif: D'accord.
Mme Brisebois: La première pensée, si je peux vous
dire, M. le ministre, c'est que cette loi existe et est votée d'une
année à l'autre, depuis
presque la dernière guerre. Quand on a vu qu'elle était
votée permanente, maintenant, cela nous a un petit peu effrayés.
On se demande s'il va falloir avoir un contrôle comme cela ad vitam
aeternam. On a essayé de penser comment on pouvait en sortir un peu,
pour sauver des fonds, cela coûterait cher.
M. Tardif: On va essayer de cerner ce sur quoi votre
mémoire porte essentiellement. Donc, on dit: On est d'accord pour un
contrôle et cependant, pour les petits logements, petites unités
de logements, duplex, triplex et quadruplex, habités par le
propriétaire, on pense qu'il ne devrait pas être soumis à
un contrôle. Pourquoi?
Mme Brisebois: Parce que, comme on vous a dit, on pense qu'il y a
une relation de bon voisinage avec ces gens. Le propriétaire choisit son
locataire et puis pour avoir des relations de bon voisinage, parce que les
dépenses sont moindres, un propriétaire bien souvent fait ses
réparations lui-même. Je sais que, de toute façon, dans ces
duplex... Si vous me permettez, je vais vous donner un cas que je connais
très bien. La Régie n'arrive pas, de toute façon, à
être juste pour tout le monde, ni pour le propriétaire ni pour le
locataire. Vous allez avoir dans le même duplex deux propriétaires
d'une maison identique. Parce qu'en haut, son locataire n'est jamais parti, il
va avoir $180 et l'autre à côté a $250, vous savez. Il y a
une certaine irrégularité comme cela. C'était une
suggestion pour tenter que l'on s'en défasse un peu.
M. Tardif: Je me demandais si, par hasard, votre suggestion,
comme vous l'appelez, aurait pu être fondée sur une étude
empirique des hausses de loyers, dans les duplex, triplex et quadruplex, par
opposition aux grands immeubles. Est-ce que vous avez fait un relevé?
Est-ce que votre association, par exemple, a fait un relevé des demandes
d'augmentation de loyers dans les petites unités et dans les grandes,
pour dire: Bien, dans les petites ce n'est pas abusif. Est-ce que vous avez un
relevé?
Mme Brisebois: Réponds si tu as quelque chose.
Mme Delage: Non, on n'a pas poussé l'affaire aussi loin.
Je dois dire que les documents sur lesquels nous nous sommes fondés, ce
sont des documents publics et on ne faisait même pas cette distinction.
Comme on l'a mentionné au début, on est vraiment, vraiment dans
notre travail, parce qu'on a eu l'occasion de travailler avec d'autres gens.
Notamment des avocats qui vont régulièrement représenter
des locataires devant la Régie des loyers et puis aussi d'autres
personnes. On a constaté qu'il y avait des situations un peu difficiles
de ce côté. Et de l'avis même de certains juges de la
Régie des loyers, ils ont de la difficulté, à un moment
donné, à appliquer une règle qui soit uniforme. Ils ont
conscience, par moments, qu'il y a des situations qui mériteraient une
décision différente de celle qu'ils sont obligés de
rendre.
Alors c'est un petit peu compte tenu de tout ce contexte et
également d'expériences personnelles que nous avons
vécues, que nous avons décidé de cette approche dans le
mémoire. Nous avons, comme je vous ai dit, procédé par
erreur et succès, parce que nous avons eu différentes
façons de regarder le problème au cours des mois.
M. Tardif: Je posais la question, parce qu'il aurait pu se
produire que, par exemple, votre organisme aurait procédé
à une espèce de relevé ou de sondage auprès de ses
membres, selon qu'ils habitaient de petits ensembles ou de grands ensembles,
pour voir à quelles sortes d'augmentations ils auraient
été soumis. Si je vous pose la question, c'est que cela aurait
donné une espèce de fondement, disons empirique, à la
représentation, parce que, malheureusement, même si on peut
effectivement croire qu'il y a cette relation privilégiée,
parfois, dans de petits locaux d'habitation, entre un propriétaire et
son locataire, les données dont nous disposons à la Régie
des loyers, pour l'année 1977 dernière année
complète dont les statistiques ont été produites, celles
de 1978 ne sont pas disponibles... Je vais vous citer des chiffres et vous
pourrez les prendre en note. Dans les immeubles où il y a un logement
offert en location, la demande moyenne d'augmentation en 1977, dans tout le
Québec, a été de 27%; je dis bien dans les immeubles
où il n'y a qu'un seul logement: 27%. Dans les immeubles où il y
a deux et trois logements la demande moyenne d'augmentation au Québec en
1977 a été de 24,1%. Dans les immeubles de 4 à 20
logements: 21,4%. Dans les immeubles de 21 à 100 logements: 18,3% et
dans les immeubles de plus de 100 logements: 18,2%; pour une moyenne
québécoise, pour tous les types de logements, de 20,7%.
Vous voyez que la corrélation est parfaite, c'est-à-dire
qu'il y a une relation inversement proportionnelle entre la taille des
immeubles et le pourcentage d'augmentation demandé.
Mme Delage: Je comprends, mais vous distribuez les coûts
à partir du moment où vous avez un édifice à
plusieurs logements. Il faut savoir exactement pourquoi ces gens ont
demandé des augmentations de 27%; vous dites des édifices
à un logement, alors il faut étudier, évidemment, le
facteur de l'évaluation, le facteur de la taxation, le coût des
réparations, les coûts de remplacement, etc.
M. Tardif: Les mêmes facteurs jouent exactement pour tous
les types de logements.
Mme Delage: Je comprends, mais quand vous partagez les
dépenses entre plusieurs, ce n'est pas la même chose.
M. Tardif: C'est ça.
Mme Brisebois: II y a aussi la question de l'évaluation.
On a beaucoup de problèmes à Montréal,
particulièrement dans Notre-Dame-de-Grâce où
l'évaluation de nos propriétés a telle-
ment monté; cela joue encore. C'est bien entendu que le
propriétaire est motivé par toutes ces considérations,
mais on sait aussi que bientôt il y aura un rapport de votre
ministère. On l'attend.
M. Tardif: Je pense qu'il est important de faire état de
ces données pour démontrer que, précisément, c'est
peut-être dans les petits ensembles que les demandes sont les plus
fortes.
Deuxième point et je vais terminer là-dessus
vous dites: II ne devrait pas y avoir de contrôle pour les duplex,
triplex et quadruplex précisément de petits ensembles
à des fins de fixation du loyer, s'ils sont habités par le
propriétaire. Or, imaginons qu'un propriétaire habite son triplex
donc ce n'est pas contrôlé Tout à coup, il
déménage; là, ça redevient contrôlé
donc pendant un certain temps les prix sont contrôlés
Ensuite, il retourne dans son logement; on aurait ainsi des immeubles
qui seraient contrôlés, décontrôlés,
contrôlés et décontrôlés? Enfin, vous avez
examiné cette situation.
Mme Brisebois: II va en habiter seulement un à la
fois.
Mme Delage: Non, ce n'est pas ça. Je vous avoue que c'est
le genre de chose qui peut certainement se produire, mais, dans le texte de loi
que j'étudiais encore hier soir, les mêmes situations, au sujet
d'autres événements, pouvaient également se produire.
Finalement, on a prévu une situation et, advenant un changement de
situation, le décontrôle s'exercerait.
M. Tardif: Vous avez des exemples de cela, madame?
Mme Delage: Malheureusement, je ne l'ai pas en tête, mais
ça m'avait frappée; je vais essayer de vous le trouver.
M. Tardif: Je m'excuse et je vous remercie.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Merci, M. le Président. Je veux d'abord vous
féliciter pour votre mémoire qui semble tenir compte des deux
côtés de la médaille; on reçoit très rarement
un mémoire qui accepte l'idée qu'il y a les droits du locataire
et ceux du propriétaire et qu'il faut chercher un équilibre.
C'est très bien à cet égard. (10 h 45)
Je pense que je vais poursuivre un peu la ligne de pensée du
ministre. Vous avez divisé vos propriétaires en trois groupes,
les petits, les grands Québécois et les grands si vous voulez
étrangers. Cette question du comportement des trois, la comparaison
entre eux, c'est quelque chose qui m'intéresse énormément.
Vous avez un peu parlé du comportement des petits propriétaires
comparé avec celui des grands. Est-ce que vous avez quelques
informations sur le comporte- ment des propriétaires étrangers
par rapport aux propriétaires canadiens ou québécois? Par
exemple, pour moi on ne peut pas prendre pour acquis que si un
propriétaire habite la Floride et qu'il est propriétaire d'un
immeuble à Montréal que son comportement sera différent au
début inévitablement, simplement dû au fait qu'il n'habite
pas Montréal. Au contraire, je pense qu'il y a pas mal de
propriétaires québécois et canadiens maintenant qui sont
propriétaires d'immeubles en Floride et je ne suis pas certain que le
comportement envers le locataire en Floride soit très différent
que celui qu'il peut avoir envers le locataire à Montréal.
J'ai lu l'affaire de M. Aubin, dans les journaux parce que
c'était expliqué au complet. Il a beaucoup parlé du fait,
de la réalité de mainmise des étrangers sur nos logements,
mais il n'a pas parlé du tout, d'après moi, de cette question de
comportement.
Alors, vous dites que c'est la spéculation, je pense qu'on ne
peut pas prendre pour acquis que la spéculation dans les immeubles est
réservée aux étrangers et je pense qu'on ne peut pas
prendre même pour acquis que la spéculation dans les logements
mène inévitablement aux hausses de loyer. Dans tout ce domaine,
j'aimerais avoir vos commentaires simplement pour que nous puissions avoir une
meilleure idée de la nature des lois et des règlements qu'il faut
faire.
Mme Delage: C'est dans un contexte purement de spéculation
et là où cela existe, nous aimerions que ce soit freiné.
Entre autres dans son volume, M. Aubin fait état justement de certaines
activités par des propriétaires étrangers. Nous disons
d'ailleurs très bien que la spéculation trotte dans la tête
de tout le monde tant des Canadiens que des étrangers. Alors,
évidemment, on n'est pas, comme on dit, naïf au point de croire que
cela se passe uniquement dans le cas des gens qui viennent de
l'extérieur.
Il n'en demeure pas moins que ce qui arrive... C'est pour cela que nous
avons fait la suggestion de la freiner là où il y a des reventes
de propriétés très rapidement, voyez-vous. C'est qu'il en
fait mention dans son volume, bien souvent les propriétés sont
achetées et revendues très rapidement après que l'on a
évidemment tiré tout ce qu'on pouvait de ces
propriétés. Ils les revendent à des prix beaucoup plus
élevés pour une raison très simple, c'est qu'ils sont
capables d'après les livres de montrer des augmentations de loyer assez
considérables si les gens ne prennent pas la peine d'assez se plaindre
à la régie. Il y a beaucoup de gens qui ne se plaignent pas
à la régie pour toutes sortes de raisons. Alors, les ventes
deviennent très avantageuses et cet argent n'est pas
nécessairement réinvesti ici.
Alors, c'est vraiment dans un contexte où il y a de la
spéculation pure et simple où on dit... Mais peut-être, je
pense, que c'est un fil de pensée qui existe à travers notre
province depuis un fort bout de temps et qui se précise de plus en plus.
Il faudrait que les Québécois profitent des...
M. Scowen: Alors, si je comprends votre commentaire.
Premièrement, vous me dites qu'on ne peut pas dire que pour les
locataires si le propriétaire est soit Québécois, soit
étranger il n'y a pas nécessairement mettons la question
de spéculation de côté en ce qui concerne la
résidence du propriétaire vous n'avez pas réalisé,
vous n'avez pas vu de différence de comportement entre les deux, en ce
qui concerne la résidence du propriétaire?
Mme Delage: C'est-à-dire qu'il y en a un qui est beaucoup
plus accessible que l'autre. Quand vous êtes obligés de...
M. Scowen: Est-ce que c'est bien ou est-ce que c'est accessible.
Est-ce que c'est bon d'être accessible ou non?
Mme Delage: A partir du moment où vous n'êtes pas
capable de savoir qui prend les décisions et que vous n'êtes pas
capable de faire valoir votre point de vue, ce qui était le cas de
différents locataires qui cherchaient à se faire expliquer des
hausses...
M. Scowen: Je veux poursuivre ce point-là. Si j'habite un
hôtel qui appartient à Hilton ou un hôtel qui appartient
à un propriétaire du village, je pense que c'est plutôt la
question de l'administration de l'hôtel, que la résidence du
patron, le fait que je ne connaisse pas le propriétaire. Je prends
l'exemple de l'hôtel mais je pense que cela va aussi pour un appartement.
Est-ce que vous avez vraiment remarqué une distinction entre
l'administration des appartements qui appartiennent aux étrangers et
l'administration des appartements qui appartiennent aux
Québécois?
Mme Delage: ...
Mme Brisebois: M. Golder qui parlait de son appartement disait
ouvertement que depuis que ces gens-là étaient là tout
était négligé dans la maison. Evidemment, ce n'est pas
tellement... On n'en veut pas du tout au fait que ces gens soient
étrangers mais c'est que, quand vous considérez que ces
gens-là, les Européens, aujourd'hui, ne peuvent plus investir en
Europe comme ils peuvent le faire ici... ils ne peuvent pas faire de l'argent
en Europe en investissant dans l'immeuble comme on peut en faire au
Québec. Ils n'en ont plus le droit maintenant. La Suisse ou le
Liechtenstein ne vendent plus de terrain parce que, à un moment
donné, un groupe italien a acheté une si grande étendue de
terrain que cela les a effrayés. Alors, quand ces gens arrivent ici pour
investir... on parle des plus gros de l'Europe; on parle des investisseurs du
Liechtenstein, on parle de ceux de la France; on parle des Rothschild; ce sont
des gens qui ont des fortunes immenses et il faut commencer à penser
à quel moment on va arrêter cette spéculation; j'en ai
été témoin tous les jours.
M. Scowen: Oui.
Mme Brisebois: II faut savoir à un moment donné...
Il faut commencer à y penser parce que cela fait bouger plus que
seulement l'immeuble.
M. Scowen: Je ne parle pas de la spéculation en soi; je
parle au nom des locataires et je vous demande...
Mme Brisebois: Les locataires se plaignent.
M. Scowen: Est-ce que vous pensez que c'est mieux pour les
locataires d'avoir un propriétaire qu'ils connaissent personnellement?
Est-ce qu'il y a quelque chose là-dedans?
Mme Delage: On ne l'a pas regardé dans ce sens et, comme
on l'a dit, on n'est pas là pour porter préjudice à qui
que ce soit. On est devant une situation de fait; ces logements coûtent
bien cher dans certains cas et les plaignants disent: On a supprimé des
services; l'état de détérioration des logements, du fait
que ces gens ne s'en occupent pas, qu'il n'y a pas moyen de les rejoindre ou
quoi que ce soit, est telle que nous sommes pénalisés. Quand nous
avons commencé à habiter ici, nous payions tant et, en fonction
de l'évaluation foncière, en fonction de la taxation, on devrait
normalement avoir des hausses de loyer justifiées, mais il y a beaucoup
de ces hausses de loyer qui ne sont pas justifiées. Quand ils cherchent
à avoir des réponses, ils n'en ont pas.
M. Scowen: Je vais passer la parole au député de
Saint-Hyacinthe, mais je veux simplement terminer en vous racontant une petite
histoire que cette conversation me rappelle. Daniel Latouche, devant la
commission Pépin-Robarts on parlait du Canada anglais et du
Canada français disait: Quand on va commencer à se
connaître davantage, ce n'est pas du tout certain qu'on va s'aimer
davantage.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci, M. le Président.
D'abord, je tiens à vous remercier pour votre participation
concrète à cette commission et, pour continuer dans la même
ligne de pensée que le député de
Notre-Dame-de-Grâce, vous avez parlé tantôt des hausses non
justifiées; par contre, ces locataires, est-ce qu'ils se sont
adressés à la commission des loyers dans le passé et
est-ce qu'ils ont obtenu les renseignements que le propriétaire doit
fournir pour justifier la hausse de son loyer? Quelles furent les
décisions de la régie en ce sens? Est-ce qu'elle a donné
satisfaction à ceux qui s'y sont adressés?
Mme Brisebois: Ils ne nous parlent pas de ce qui est finalement
arrivé.
Mme Delage: Oui, ils nous disent que les augmentations ont
été ramenées à 8%. Dans le cas de la dame dont
l'augmentation était de 44%, la régie a évidemment rendu
une décision et cela a été ramené à 8% dans
son cas.
M. Cordeau: Alors, ceux qui ont eu recours à la
régie ont eu satisfaction.
Mme Delage: Oui, certainement.
Mme Brisebois: Oui, c'est pour cela qu'on n'est pas contre la
régie.
M. Cordeau: Tantôt, vous avez mentionné, au
début de vos remarques, qu'à Montréal il y avait environ
3500 logis vacants.
Mme Brisebois: 33 500.
M. Cordeau: 33 500, oui. Maintenant, est-ce que vos recherches
ont été poussées assez loin pour nous dire dans quelles
catégories de logements vous pouvez cataloguer ces vacances?
Mme Brisebois: C'est du logement trop cher pour les gens qui
auraient besoin de changer de logement. Les gens, aujourd'hui, ne peuvent plus
se permettre ces logements parce que dans l'intervalle les coûts ont
beaucoup monté; on sait ce qui est arrivé à
Montréal. Il y a aussi des problèmes d'évaluation qui font
monter les coûts; il n'y a pas seulement le loyer. Quand le
propriétaire...
Mme Delage: Par contre, je crois que ce que vous avez en
tête, ce sont des catégories de logements...
M. Cordeau: Oui.
Mme Delage: ... à savoir, des trois et demi, des quatre et
demi dont les gens sont plus ou moins friands et qui sont...
M. Cordeau: D'ailleurs, vous avez répondu à une
partie de mon interrogation lorsque vous avez spécifié...
Mme Delage: Trop chers et pas assez grands. M. Cordeau:
... des logements dispendieux.
Mme Brisebois: C'est-à-dire dispendieux compte tenu des
moyens des gens. Il faut tenir compte du fait que le coût des aliments,
au mois de janvier, a augmenté de 3%. Que faites-vous? Tout le reste
augmente en conséquence. Finalement, vous êtes obligé de
couper quelque part. On ne devrait pas être obligé de couper ni
sur le logement, ni sur la nourriture.
M. Cordeau: Alors...
Mme Brisebois: C'est là mon point principal. On
spécule avec le logement des Québécois et je trouve cela
très dangereux. C'est une situation regrettable. Sur l'alimentation,
c'est la même chose.
Mme Delage: Ce qui n'empêche pas qu'il y a également
des propriétaires québécois qui spéculent aussi.
C'est bien évident. Mais on s'est attardé à cet aspect de
la question parce que dans certaines de nos sections locales, on nous a dit que
cette situation existait également et qu'il y avait là aussi
beaucoup de spéculation.
M. Cordeau: L'argent n'a pas de couleur... Mme Delage:
Voilà.
M. Cordeau: Vous comprenez. On peut déduire que, pour ceux
qui sont capables d'en payer le prix, il y a des logements disponibles.
C'est-à-dire que...
Mme Brisebois: Dans le moment, il y a 33 500 logements, il y a
des immeubles d'habitation, à Montréal, qui sont
complètement vides.
M. Cordeau: Le problème, c'est que c'est un manque de
logements pour des personnes à faible ou à moyen revenu.
Mme Brisebois: Pour des personnes à faible revenu, des
logements assez grands.
Mme Delage: ... loger dans des endroits qui ne seraient
peut-être pas maintenus comme ce serait souhaitable parce que c'est
considérer le logement à prix modique comme étant un
logement qui se détériore relativement vite.
M. Cordeau: Je crois qu'à l'intérieur de ce projet
de loi, il y aura des clauses pour rendre les logements plus salubres, ainsi de
suite, avec une certaine réglementation qui doit venir par la suite et
que le ministre nous a informés qu'il déposerait devant cette
commission avant l'étude de ce projet de loi article par article.
Mme Delage: Ce que nous faisions remarquer, aussi, c'est que dans
notre démarche, pour arriver, à un moment donné, à
se prononcer, on constatait d'abord ce fait qu'il y a un parc
résidentiel considérable disponible qui n'est pas utilisé
jusqu'à un certain point. On se disait: Normalement, des contrôles
existent quand il y a une situation de rareté ou quand il y a une
situation de surenchère ou de crise. Pourquoi semble-t-il y avoir un
renforcement des contrôles, alors qu'en principe, ils devraient
diminuer?
On en est venu à la conclusion que des contrôles
s'avéraient nécessaires malgré tout cela.
M. Cordeau: Ce qu'il faut, c'est peut-être une aide
gouvernementale ou des politiques afin d'insister sur la rénovation des
logis qui ne sont pas...
Mme Brisebois: ... de loyers.
Mme Delage: La Société centrale
d'hypothèques et de logement préconise cela.
M. Cordeau: ... qui ne sont pas habitables ou dont...
Mme Delage: C'est-à-dire que la rénovation, la
remise en état et la politique officielle de la Société
centrale d'hypothèques et de logement, d'après les documents que
nous avons, c'est justement de favoriser cela. C'est la même chose
à la Société d'habitation du Québec parce que nous
avons là une disponibilité dont il faut tirer parti.
M. Cordeau: Par contre, cela ne doit pas répondre d'une
façon efficace à la réalité parce qu'il y a un
manque flagrant de logis pour les personnes à faible revenu.
Mme Brisebois:... qu'il y a eu trop de maisons construites,
à un moment donné. C'est reconnu. Cela allait tellement bien avec
la Société centrale d'hypothèques et de logement, les
fonds étaient faciles. Il y a eu un moment où ils ont trop
construit et il y a eu un moment, aussi, où les coûts ont
augmenté au point que cela a fait augmenter le prix des loyers. Ces
logements ne sont plus d'un prix accessible et ne sont pas assez grands. Les
petits logements, aujourd'hui, ne sont pas convenables pour une famille.
Mme Delage: D'ailleurs, il y a une autre chose qu'on mentionne
dans le mémoire à la page 6, c'est que dans la région
métropolitaine de Montréal, par exemple, on a des soubresauts
continuellement. A un moment donné, en 1968, il y a eu une demande de
5000 logements. En 1973, 22 500, 4500 en 1977-1978. Vraiment, c'est très
difficile, à cause de cette instabilité, d'arrêter des
politiques à long terme. C'est pourquoi, tout en reconnaissant la
nécessité de maintenir des contrôles à certains
égards et d'inclure dans la loi des choses qui n'y étaient pas
auparavant et qui nécessitent vraiment d'y être, nous aimerions
bien qu'éventuellement, les contrôles diminuent en fonction des
situations nouvelles qui existent.
M. Cordeau: Est-ce que vous pouvez expliquer cette forte
diminution de 22 500 en 1973 à 4500 en 1977-1978? (11 heures)
Mme Brisebois: La demande... bien, c'est pour cela que justement,
on avait pris ces remarques d'une espèce de conférence qu'avait
donnée quelqu'un, un exposé de la société centrale,
et c'est là que ce n'est pas facile de prédire d'avance ce qui va
arriver d'une année à l'autre. Cela dépend de...
Mme Delage: C'est pour certains types de logements...
Mme Brisebois: ...
Mme Delage: C'est justement ce que vous disiez au point de
départ et...
Mme Brisebois: ...
Mme Delage: ... on fait le tour. On en est à boucler le
cercle et alors, vraiment, c'est cela. Il y a, en ce moment, une restriction du
côté, à tout le moins, de la Société centrale
d'hypothèques et de logement au sujet des constructions neuves, parce
qu'il y a trop de disponibilités, trop de logements disponibles. Ceux
qui répondent à des besoins précis doivent être
rénovés, remis en état, justement pour permettre aux gens
qui en ont besoin d'y avoir accès.
M. Cordeau: C'est-à-dire qu'on rencontre peut être
deux principes. Actuellement, il y a insuffisance du revenu d'une partie de la
population à payer un logis convenable et un autre, c'est que
l'incapacité du mécanisme du marché a fourni des loyers
qui répondent à la demande de la population.
Mme Delage: J'ai l'impression que cela a été un
manque de planification à un moment donné, c'est-à-dire
qu'on s'est lancé dans la construction de certains types de logements
pour répondre à des besoins qui étaient à la mode,
disons, à ce moment et que, par la suite, bien des gens se sont
désintéressés. Ils ont cherché à avoir
d'autres types de logements et, à ce moment, il y avait peut-être
moins de possibilités pour eux d'y avoir accès.
Le Président (M. Laplante): Le député
de...
M. Cordeau: Un instant, M. le Président. Le
Président (M. Laplante): Oui, d'accord.
M. Cordeau: Depuis le début de cette commission, on a
mentionné que l'augmentation des loyers soit à un taux fixe comme
dans plusieurs provinces. De cette politique d'un taux fixe, qu'en
pensez-vous?
Mme Brisebois: Je pense qu'un taux fixe ce serait peut-être
bien heureux pour le locataire, mais je ne sais pas, il faut penser... on n'est
pas maître, non plus, de la hausse des taxes et la hausse des
évaluations et tout cela. Vous pouvez vous empêtrer dans un
dilemme avec cela aussi, à un moment donné.
M. Cordeau: Mais avec le taux fixe, je crois que le
propriétaire pourrait...
Mme Delage: C'est-à-dire qu'il est déterminé
par la régie, compte tenu d'une foule de facteurs et si ma
mémoire est bonne, j'ai ici un document qui me dit qu'en principe, cela
doit être entre 8% et 10%. Disons, qu'on s'est fixé cela comme
barème: 8% et 10% et que pour 1977, je crois, c'était 9,1% qui
avait été accordé dans l'ensemble, compte tenu de toutes
les dépenses auxquelles les propriétaires avaient à faire
face et les choses de ce genre. Alors, le taux fixe, je pense qu'il existe
presque en principe ici. En pratique, on varie entre deux points.
M. Cordeau: Merci.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Très brièvement, M. le Président,
puisque le ministre a déjà traité abondamment de la
question, de la différence qu'on nous propose de faire entre un logement
dont le propriétaire est un occupant et un logement dont le
propriétaire n'est pas un occupant...
Sur la question de spéculation, le député de
Notre-Dame-de-Grâce en a parlé et je vous avoue que je ne vois pas
très bien en quoi, effectivement, les spéculateurs
étrangers sont plus vilains que des spéculateurs
québécois et pourquoi est-ce qu'il faut restreindre la
spéculation uniquement dans le cas des étrangers et qui sont des
étrangers en l'occurrence? Est-ce que ce sont des compagnies qui ne sont
pas incorporées au Québec? Est-ce qu'ailleurs au Canada, cela
devient des étrangers? Est-ce que les compagnies
fédérales, ce sont des étrangers? Enfin, bref, qui est
l'étranger et qui est le Québécois, en l'occurrence, et
pourquoi certaines compagnies québécoises seraient-elles, a
priori d'une meilleure nature que les compagnies étrangères dans
ce domaine? Je n'ai pas l'impression que...
Mme Brisebois: Les Québécois n'ont pas de
millions...
Mme Delage: On l'a bien dit: On est complètement conscient
du fait qu'il y a des spéculateurs québécois comme il y a
des spéculateurs étrangers. Je le répète encore une
fois, compte tenu de l'expérience vécue de Mme Brisebois en tant
qu'agent d'immeuble et également de certaines recherches qu'on a faites,
on a décidé de façon spécifique, et cela a
été volontaire, de s'attarder à cet aspect de la question.
Nous n'avons pas discuté du problème des gens qui sont des
propriétaires ici, parce qu'il y a une façon de les
contrôler. Il y a toujours des façons de les contrôler.
Là, ce qu'on voulait surtout, c'est et on le disait clairement
empêcher qu'il y ait des hausses de loyers abusives qui ne soient
justifiées, notamment, compte tenu du fait que beaucoup de gens ne se
plaignent pas à la Régie des loyers. On en est conscient.
M. Guay: Mais à ce moment, c'est une question qu'on a
posée à d'autres groupes et je vous la pose: II y a
essentiellement deux approches possibles, deux façons de concevoir le
fonctionnement de la Régie des loyers, si on se fie à
l'expérience qu'on a au Québec et à l'expérience
qui est en vigueur ailleurs, au Canada entre autres; ou bien c'est la
démarche qui a été suivie jusqu'à présent et
c'est la démarche qui est proposée, du moins dans le projet de
loi 107, tel qu'il est à l'heure actuelle c'est le locataire qui
a le fardeau de la démarche. S'il n'est pas content de l'augmentation
proposée, c'est lui qui a le fardeau d'aller à la régie.
Là vous dites: II y a beaucoup de locataires qui n'y vont pas et vous
avez tout à fait raison.
L'autre démarche: l'Ontario est un bon exemple de
ça le gouvernement de l'Ontario fixe un taux moyen annuel,
au-dessus de ce taux moyen mettons que c'est 6% tout
propriétaire qui veut une augmentation plus élevée doit
aller à la régie, ce qui n'empêche pas un locataire de
contester une augmentation en-deçà du taux moyen. Je vous pose la
question: Quant à vous, est-ce que je dois comprendre, d'après ce
que vous venez de me dire, que vous préféreriez que nous
adoptions l'approche ontarienne plutôt que l'approche qui a
traditionnellement été celle du Québec en la
matière?
Mme Delage: Cela dépend des circonstances et de la
situation qui existe en Ontario, avec laquelle je ne suis pas tellement
familière. Nous avons un document de l'Ontario, justement au sujet de
leur réforme; j'avoue que je l'ai lu et que je ne m'y suis pas
trouvée terriblement à l'aise. La seule chose, puisqu'on a
commencé à parler de la spéculation des étrangers
encore une fois si on a décidé de s'attarder
spécifiquement à cette question, c'est parce qu'on avait des
raisons de le faire c'est qu'on voudrait que ces gens restent
propriétaires et s'occupent des logements tout en traitant les
locataires actuels d'une façon valable et en ne cherchant pas uniquement
à tirer de ces propriétés des revenus qui,
éventuellement, vont sortir d'ici pour aller ailleurs, etc. Alors, c'est
vraiment dans une perspective de bonnes relations... Comment pourrais-je dire?
Si on a parlé d'imposer une taxe à ces gens au moment où
ils vendent alors que, en fait, dans les transferts de terrains la loi
adoptée en 1976 la taxe s'applique au moment de l'achat, c'est de
façon à les décourager de faire ce qu'ils font,
c'est-à-dire de faire de l'argent sur le dos des gens qui, dans beaucoup
de cas, ne se défendent pas.
M. Scowen: Est-ce que je pourrais poser une question sur le
même sujet? En ce qui concerne cette expression "spéculation",
je pose la question également au ministre, c'est simplement
à titre d'information est-ce qu'il existe une définition
de "spéculation" dans le domaine du logement? J'imagine que, en effet,
chaque vente ou achat d'un immeuble, une maison, un logement que vous n'habitez
pas vous-même est en effet de la spéculation; du moins en ai-je
l'impression. Si vous ne l'habitez pas vous-même, vous l'achetez et vous
la vendez pour faire des profits; je pense que c'est ça. Si ce n'est pas
ça, qu'est-ce que c'est la "spéculation" et est-ce qu'il existe,
à l'heure actuelle, des études qui démontrent les liens
entre la spéculation comme définie et la hausse des
loyers? Est-ce que la spéculation et la hausse des loyers sont
liées? Y a-t-il des études, quelle est la réalité
des liens entre les deux? Y a-t-il quelqu'un qui a les données sur ce
sujet?
Mme Brisebois: Ce qu'on nous dit à la Régie c'est
que, jusqu'à il y a quelques années, les gens
qui allaient là étaient plutôt des gens
défavorisés qui ne pouvaient pas vraiment payer et qui avaient
besoin d'aide, mais ceux qui y vont maintenant... vous avez une nouvelle classe
de gens qui vont à la régie et ce sont les gens qui habitent les
grands "buildings". Il y a spéculation, pour moi, quand une personne
achète un immeuble et le revend immédiatement pour faire un
profit, qui fait ça constamment. Il y a des courtiers qui le font
et...
M. Scowen: ...
Mme Brisebois: Une chose si vous me le permettez, monsieur. Moi,
ce qui m'a scandalisée c'est cette publicité qui dit aux gens, en
Italie, de venir spéculer spécialement dans la province de
Québec; on ne les invite pas au Canada, on les invite dans la province
de Québec.
M. Scowen: Mais si un immeuble de 100 logements est vendu et
revendu dix fois au cours d'une année, est-ce que ça veut dire
qu'il y aura une hausse de loyer?
Mme Brisebois: Cet homme vend parce qu'il fait un profit.
M. Scowen: Est-ce qu'il y a un lien? C'est une chose sur laquelle
on a des données n'est-ce pas?
Mme Brisebois: Oui, comment voulez-vous qu'il n'y ait pas un
lien? Le type qui l'achète ne va pas perdre, son investissement doit lui
rapporter. Alors, il faut que ça se...
M. Scowen: A-t-on des données qui démontrent que si
quelque chose est vendu toutes les semaines, pendant deux ans, les loyers vont
augmenter?
Mme Delage: Ce n'est pas comme cela que ça se passe.
M. Scowen: Je vous pose la question, je ne le sais pas.
Mme Delage: C'est une hypothèse que vous émettez.
Dans la réalité des faits... C'est hypothétique.
Mme Brisebois: Le loyer va augmenter une fois par année et
ce sera à tous les ans qu'on réglera la question du loyer. C'est
le dernier propriétaire qui va avoir le loisir d'augmenter le loyer de
44% ou 45%.
Mme Delage: Si on le laisse faire. Mme Brisebois: Si on le
laisse faire.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: En terminant, M. le Président, j'ai pris bonne
note de ce que vous dites au sujet de la difficulté de
déménager le 1er juillet. Comme c'est l'ancien gouvernement qui
avait fixé cette date, j'imagine qu'ils prenaient pour acquis qu'un jour
nous cesserions de fêter le 1er juillet.
Mme Brisebois: ... une erreur.
M. Guay: Peut-être qu'effectivement nous cesserons
bientôt de le fêter.
M. Cordeau: Cela va peut-être être la fête de
l'association, dans ce temps-là.
M. Guay: On verra. Quand vous parlez des HLM et que vous dites
que le revenu d'une personne qui habite dans les HLM peut augmenter et qu'il
faudrait trouver un moyen ce sont vos paroles de les inciter
à quitter les lieux, est-ce que c'est fondé sur des faits ou si
c'est une impression que vous avez que les revenus des gens dans les HLM ou du
moins de certaines personnes qui habitent dans les HLM augmentent?
Mme Brisebois: J'en ai discuté avec des architectes et
effectivement c'est ce qui arrive.
M. Guay: Avec des architectes?
Mme Brisebois: Oui, des architectes qui ont à construire
ces immeubles. Cela se produit beaucoup.
M. Guay: Est-ce que vous en avez discuté avec des offices
municipaux d'habitation qui ont la charge de les administrer? Parce que c'est
eux, au fond, qui savent quels sont les revenus des gens qui y habitent.
Mme Delage: Non. J'avoue que cet aspect de la question, je n'y ai
pas touché. Je vais dire une chose. Ce qu'on a constaté, c'est
que ces logements sont très coûteux, je veux dire au point de vue
de la construction, de l'entretien et tout cela. Ce que j'avais noté
dans le projet de loi, c'est qu'il était question, par exemple, qu'une
personne qui habite un HLM et qui, à un moment donné, subit une
baisse de revenu peut demander à son locateur d'être
relogée en fonction des revenus qu'elle a maintenant. Si, par la suite
je ne me souviens pas de l'article, malheureusement, c'est vers la fin
cette personne a une possibilité d'avoir de meilleurs revenus,
elle devra être relogée, encore une fois, selon ses revenus. Par
contre, on ne parle pas du tout et c'est ce que je souligne dans le
mémoire des gens dont les revenus montent de façon
constante et qui, dans beaucoup de cas, s'agrippent à ces logements et
empêchent des gens qui auraient besoin de les occuper, de s'y loger.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Rosemont, dernière question.
M. Paquette: J'aimerais vous remercier pour votre mémoire.
Je pense également qu'il faut faire des distinctions entre les classes
de logement. Je
pense que toutes les raisons que vous amenez pour faire une distinction
entre les petits logements occupés par leur propriétaire et les
autres sont justifiées, je pense, mais de là à dire qu'il
faudrait exempter ces logements d'un contrôle des loyers, c'est une autre
question. On pourrait peut-être modifier les procédures devant la
régie de façon à tenir compte des arguments que vous nous
amenez.
Je me base sur le fait suivant. Si on regarde les augmentations moyennes
demandées à la régie suivant l'âge de l'immeuble,
c'est une autre série de chiffres qui est intéressante. On
constate que, pour les logements construits avant 1949, l'augmentation moyenne
est de 24%. De 1940 à 1954, 21%. De 1955 à 1969, 20% et, pour les
logements construits après 1970, 17.3%. Autrement dit, plus le logement
est vieux, plus l'augmentation demandée est élevée. Je
pense que cela s'explique peut-être, en partie, par les coûts de
rénovation. On constate également qu'il y a une coïncidence
avec ce que vous constatez, c'est-à-dire le taux de vacance. C'est dans
les logements les plus vétustes que les taux de vacance sont les plus
faibles.
Mme Delage: C'est parce que les propriétaires les ont
abandonnés ou estiment que cela leur coûterait trop cher pour les
remettre à neuf. A ce moment-là, ils seraient obligés de
demander des loyers considérables.
M. Paquette: Vous ne pensez pas qu'il y a également le
phénomène que vous avez mentionné tantôt. Vous
constatez qu'il y a un taux de vacance relativement élevé mais je
pense que, suite à la discussion, vous devriez être prêts
à accepter que c'est dans certaines catégories de logement. Vous
l'avez dit vous-même.
Mme Delage: Oui. On le savait, au point de départ.
M. Paquette: Sur les logements les plus élevés et
qui sont également les plus récents. Si on relevait certaines
catégories d'immeubles de tout contrôle... (11 h 15)
Mme Delage: Pas de tout contrôle. On en avait
précisé un seul.
M. Paquette: Concernant le contrôle du loyer. Mme
Delage: Seulement la fixation du loyer.
M. Paquette: Oui. On aurait une tendance à la
réduction des écarts entre les catégories de logements.
Vous n'avez pas l'impression que, à un moment donné, si les
écarts devenaient trop faibles même les logements, où le
taux de vacance est élevé, auraient tendance à augmenter
légèrement, qu'il y aurait une augmentation qui s'alimenterait
d'elle-même?
Mme Brisebois: Pas d'après moi parce que, quand vous avez
un locataire, vous voulez le garder. Il y a toutes sortes de raisons pour
lesquelles vous pourriez mettre un locataire dehors. Un propriétaire,
dans la maison qu'il habite, ne met pas... Moi, j'aurais des raisons de mettre
les gens d'en haut dehors, je ne les enverrai pas parce que ces gens sont
là depuis longtemps et il y a quelque chose qui te dit que tu ne fais
pas ces choses.
Le Président (M. Laplante): Une question du
député de Saint-Hyacinthe.
M. Paquette: Seulement pour terminer. Est-ce que la suggestion
que je faisais de tenir compte de vos objections mais plutôt dans les
procédures devant la Régie des loyers, tout en disant: Tous les
logements vont être soumis au contrôle des loyers...
Mme Brisebois: C'était des suggestions, nous, on vous
laisse décider.
Mme Delage: ...
M. Paquette: Mais j'aimerais savoir ce que vous pensez; est-ce
que ce serait une solution intéressante?
Mme Delage: Ce serait peut-être une solution valable. A
part ça, il faut vous dire que parmi les gens que nous avons
consultés, il y en a qui n'avaient pas trouvé la vie si rose
à vivre avec le propriétaire.
M. Paquette: Oui, effectivement.
Mme Delage: Mais, dans l'ensemble, il y avait un consensus qui se
dégageait: règle générale, quand le
propriétaire est sur les lieux, les deux, et le locataire et le
propriétaire, déploient des efforts considérables pour
bien s'entendre, se partager un certain nombre de tâches et limiter le
plus possible les coûts pour le bien-être de chacun finalement.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe, une question très courte.
M. Cordeau: C'est seulement une demande de renseignement au
député de Rosemont. Les chiffres que vous avez mentionnés
sont-ils des pourcentages d'augmentations demandées ou obtenues à
la régie?
M. Paquette: Demandées par le locateur.
M. Cordeau: II y a une différence, il y a une très
grosse marge entre...
M. Paquette: Oui, il y a une grosse marge, mais celles
accordées par la régie sont évidemment dans la même
proportion, c'est-à-dire qu'elles sont plus élevées pour
les logements plus âgés et moins élevées pour les
logements plus neufs.
M. Cordeau: D'accord.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, mesdames Delage et...
M. le ministre, un dernier mot?
M. Tardif: Oui, M. le Président, je pense qu'on s'est
rendu compte, en examinant et en fouillant certaines questions, que ce
n'était pas si facile que ça de trouver des solutions.
Je voudrais m'inscrire, par exemple, en faux contre une affirmation qui
a été faite à l'effet que finalement il existerait,
à la Régie des loyers, un taux fixe variant entre 8% et 10%,
comme cela a été affirmé tantôt. Rien n'est moins
exact; il est évident que la méthode de fixation utilisée
par la régie n'a jamais fait l'objet d'une réglementation depuis
1951, mais il reste que la régie ne règle pas ça au pif et
qu'il y a une formule de calcul qui est utilisée.
J'ai ici, pour l'année 1977, à partir de 16 000 cas de
fixation par ordinateur de demandes d'augmentations, une distribution de
fréquence qui varie de 0% à 28% d'augmentation. Donc on est loin
de dire: La régie accorde automatiquement entre 8% et 10%. Si on veut
juger le nombre par classe, on voit que, sur les 16 000 cas, il y en a à
peu près 3,5% qui ont obtenu entre 0% et 2% d'augmentation de loyer;
qu'entre 2% et 4%, il y a environ 3% des causes qui sont venues devant la
régie. En fait, la moyenne d'augmentation accordée c'est
vrai s'est située à 9,1%, ce qui est un peu moins que la
moitié de ce qui était demandé, parce que la moyenne des
augmentations demandées était de 20,7%. Donc, 9,1% avec ce qu'on
appelle en jargon statistique un écart type de 4,4%. Qu'est-ce qu'on
entend par écart type? Cela veut dire qu'il y a un peu plus des deux
tiers des cas, environ 68% des cas qui se situent à plus ou moins 4,4%
de cette moyenne; cela veut dire qu'à peu près 70% des
augmentations accordées se situaient entre 4,7% et 13,5%; c'est
ça l'écart par rapport à la moyenne. Ce n'est donc pas que
la régie a un jeu entre 8% et 10% et qu'elle donne 9% au pif comme
ça. Il n'y a donc pas de taux fixe; il y a des pourcentages
d'augmentations de 0%, de 1%, de 2%, de 3%, de 4% qui ont été
accordés; la distribution de fréquence nous donne cette allure et
il n'y a rien de moins faux et le propriétaire qui croirait que la
régie accorde à peu près cela, ce n'est pas exact du tout.
Chaque cas est étudié individuellement.
Mme Delage: Je suis entièrement d'accord avec vous.
C'était en réponse à une question du député
de Saint-Hyacinthe qui me demandait ce que je pensais du taux fixe. J'ai dit
que ce qu'on pouvait voir d'après les rapports, c'est qu'on
s'était maintenu autour de 9,1% et que ce à quoi on tendait, je
pense bien, c'était à circonscrire les augmentations dans une
variante entre 8% et 10% et que les faits étaient qu'on avait, pour
cette année-là, situé la moyenne à 9,1% mais pour
ce qui est de dire qu'elle était fixe, c'était loin de ma
pensée.
Le Président (M. Laplante): Sur cela, Mme Brisebois, Mme
Delage, les membres de cette commission vous remercient pour votre
mémoire.
Mme Brisebois: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le
Rassemblement des citoyens de Montréal.
M. Cordeau: M. le Président, j'aurais une question
à poser à M. le ministre en attendant que l'on change.
Le Président (M. Laplante): Oui.
M. Cordeau: M. le ministre nous mentionnait des statistiques qui
semblent très intéressantes; est-ce un document confidentiel ou
s'il serait possible que les membres de la commission en possèdent une
copie?
M. Tardif: Si le député de Saint-Hyacinthe est
intéressé par les écarts types et les sigmas, il me ferait
plaisir de les lui faire parvenir.
M. Cordeau: Non, mais c'est parce qu'à un moment
donné, vous nous donnez des moyennes de la régie, etc.; il semble
y avoir des renseignements assez valables parce que vous les mentionnez.
M. Tardif: Oui, d'accord.
M. Cordeau: Je pense qu'il serait peut-être, si
possible...
M. Tardif: Je vais justement tenter d'extraire de ces rapports
les tableaux qui pourraient être utiles et qui sont effectivement
utilisés.
M. Cordeau: Quelle est la source de ce document?
M. Tardif: C'est une étude statistique faite par la
Régie des loyers sur les causes qui ont été jugées
et entendues en 1977.
M. Cordeau: D'accord.
Le Président (M. Laplante): Bonjour messieurs.
Dès le début, si vous voulez identifier votre organisme,
vous-même et les personnes qui vous accompagnent, c'est que les
règles du jeu de la commission sont que vous ne lisiez pas au complet
votre mémoire mais que vous en donniez un résumé pour que
les membres de cette commission puissent vous poser le plus de questions
possible parce que chacun des partis a lu et noté les mémoires
à venir jusqu'aujourd'hui.
Vous avez en tout une heure pour faire cela mais la période pour
exposer votre mémoire ne doit pas dépasser 20 minutes. C'est le
no 18,
monsieur, Rassemblement des citoyens de Montréal. Monsieur, vous
pouvez commencer.
Rassemblement des citoyens de Montréal
M. Limonchik (Abe): Le RCM est très heureux de pouvoir
présenter son mémoire devant cette commission de
l'Assemblée nationale.
A ma gauche, M. Hubert Simard qui est le président de notre
commission du logement et aussi candidat du RCM dans les dernières
élections. A ma droite, M. Jacques Thibodeau qui s'occupe de la question
du logement, qui est aussi membre de l'exécutif et aussi candidat lors
des dernières élections.
Le Rassemblement des citoyens est le parti d'opposition à
Montréal.
Le Président (M. Laplante): Vous-même êtes
monsieur?
M. Limonchik: Abe Limonchik, le président du RCM.
Nous sommes constitués démocratiquement et nos membres
sont regroupés en assemblées représentatives dans les
différents districts de la ville.
Les principes sur lesquels nous nous appuyons pour fonder notre position
ont été adoptés en congrès par nos membres. Mais
c'est surtout de notre expérience que découle cette position.
C'est au contact de citoyens et de groupes populaires qui oeuvrent dans le
domaine du logement et dont bon nombre ont joint nos rangs que nous avons
formé notre jugement. C'est également au travers des luttes pour
la protection des droits des locataires auxquelles nous avons pris part ou que
nous avons lancées que nous avons été en mesure d'analyser
l'état actuel des droits des locataires. Nous avons lutté contre
les démolitions, contre les évictions par les
propriétaires ou par la ville de Montréal, nous avons combattu
les hausses de taxes, nous avons travaillé à l'organisation de
négociations collectives des baux, défendu les droits des
locataires de logements publics, dénoncé l'inaction municipale
devant la vague d'incendies criminels, lutté contre la
détérioration de l'environnement des locataires, etc.
Les droits des locataires, au sens large, sont depuis longtemps au coeur
de nos préoccupations et plus particulièrement les droits de ces
locataires qui n'ont pas d'autre choix, qui n'ont aucun contrôle sur leur
environnement et qui doivent se plier aux exigences du marché du
logement.
L'engagement du RCM dépasse de loin, maintenant, l'aspect social
du logement et l'aspect de la lutte. De par l'orientation du parti maintenant,
c'est tout l'aspect économique qui prend les devants. La question du
logement pour nous est un aspect très, très stratégique
dans toute la question économique, étant donné surtout la
position stratégique de Montréal dans l'économie du
Québec.
Finalement, l'aspect du logement pour nous va au coeur même d'un
projet de société que nous avançons. Par cela, on veut
dire que le RCM se préoccupe de ces formes de gestion du logement, de
ces formes de propriété. Le rôle des citoyens dans la
question du logement est l'élément essentiel de tout projet de
société que les Québécois et les Montréalais
vont développer. Je vous remercie et je donne la parole à Hubert
Simard maintenant.
M. Simard (Hubert): Alors, passons rapidement sur la
première page qui traite un peu des perspectives des contrôles des
loyers à travers le temps. Retenons, cependant, une couple de points,
principalement ceux qui ont trait aux mesures que nous reconnaissons comme
valables à travers la loi et que nous avons nous-mêmes
cherché à promouvoir dans notre programme depuis la formation du
parti. C'est le cas, principalement, des mesures portant sur la conservation
des logements, notamment le contrôle sur les transformations et sur les
démolitions de logements. Cette mesure a été d'ailleurs
inscrite récemment à la Charte de la ville de Montréal et
le principe en est généralisé par cette loi.
Malheureusement, on constate que cela arrive 20 ans trop tard et dans
une période de stagnation exceptionnelle sur le marché
immobilier. On ne peut pas en tenir rigueur au présent gouvernement. Il
y a déjà un très grand nombre de logements qui ont
été démolis.
Il y a également l'extension de la juridiction de la Loi aux
chambres et aux maisons mobiles, un projet de code d'habitabilité dont
on ne connaît pas encore le contenu et sur lequel on met des
réserves tant qu'on ne l'aura pas évalué de même que
certains recours et certaines règles de procédure qui comblent
les vides laissés par la loi précédente.
Cependant, sur l'ensemble et l'essentiel, c'est-à-dire le
contrôle des hausses de loyer et le droit au maintien dans les lieux,
nous trouvons que le projet de loi consacre le statu quo et nous voulons
dénoncer ce statu quo qui ne correspond pas à la situation, aux
besoins des locataires.
Un autre point que nous voudrions relever rapidement, c'est le
caractère confidentiel qui a été plus ou moins mis sur la
plupart des documents qui ont été préparés en
rapport avec le groupe de travail sur les questions qui concernent cette loi.
C'est une pratique qui a été à peu près
systématisée par le gouvernement fédéral dans le
domaine de l'habitation. On trouve vraiment déplorable que cela trouve
des échos à Québec; on s'attendait à une plus
grande transparence de ce point de vue.
Passons maintenant aux objectifs. On tient à faire part à
la population, à l'Assemblée nationale, qu'on s'oppose au projet
de loi autant sur le plan des objectifs et des principes que sur le plan
concret de l'efficacité de ce type de loi qui prolonge un peu le statu
quo. La fonction première de la régie est de favoriser la
conciliation entre locateurs et locataires, ce qui coïncide avec
l'objectif principal du présent projet de loi, c'est-à-dire
promouvoir une plus grande harmonie des relations entre les locateurs et leurs
locataires. On a
de la misère à imaginer qu'après plus de dix ans de
débat sur le droit au logement l'Etat ne soit pas prêt à
dépasser le cadre traditionnel et archaïque de l'absolutisme, de la
liberté contractuelle, avec son corollaire en termes d'interventions qui
se présente sous l'aspect de la conciliation et de l'harmonisation des
rapports. (11 h 30)
Ce n'est plus la peine de faire la démonstration que
l'égalité entre les parties qui permet de donner un libre
consentement au contrat, cette liberté n'existe pas, que le
marché de l'habitation n'est pas un marché de concurrence
parfaite, que le droit de propriété privée confère
au propriétaire un quasi-monopole sur le logement, que le logement,
finalement, est un bien essentiel qui permet de fonder un droit social. Le
rapport Legault a au moins retenu ce principe; le livre blanc le
reconnaît largement dans ses éléments.
La réponse traditionnelle qu'on a choisi de perpétuer se
situe au niveau des droits individuels. Parce qu'une partie se sent
lésée dans l'application du contrat, elle peut faire appel au
jugement désintéressé et impartial de l'Etat qui, par
ailleurs, détermine les conditions de ce contrat. C'est une façon
bien pratique pour nous, de la façon qu'on peut l'évaluer, de
faire abstraction de la dimension sociale du logement. Ce n'est pas parce qu'on
pratique la régulation des conflits ouverts que des individus ont
choisi, à leurs risques souvent, de porter en arbitrage, qu'on a atteint
une certaine justice sociale dans le domaine du logement.
C'est aussi incohérent, d'une certaine façon, dans la
mesure où le gouvernement se donne quelques éléments d'une
politique sociale de gestion du stock de logement. C'est ainsi que la
régie devra statuer sur l'opportunité de démolir un
logement, le subdiviser ou en changer la destination. Dans ces articles de loi,
on considère des éléments comme l'état du logement,
le préjudice causé au locataire, les besoins de logement dans les
environs, la possibilité de relogement des locataires, la
détérioration de l'apparence architecturale, etc., la
qualité de vie du voisinage.
Si on doit se donner des critères sociaux au point de vue de
gestion du stock de logement, n'est-il pas d'autant plus important de fixer les
critères sociaux d'accessibilité au logement dont un des
principaux éléments serait le contrôle des hausses de
loyer. Dans cette perspective, le Rassemblement des citoyens de Montréal
demande que le gouvernement du Québec s'engage dans une véritable
politique sociale du droit au logement et cesse la promotion d'une harmonie
illusoire, entre propriétaires et locataires, qui cache les
intérêts de l'exploitation immobilière.
Nous ne voulons pas caricaturer la situation en faisant de tout
propriétaire un exploiteur puisque bon nombre de petits
propriétaires ont le souci d'entretenir des relations justes avec leurs
locataires. Nous visons ceux qui font du logement une marchandise dont on doit
maximiser le rendement en "externalisant" les conséquences sociales.
Passons maintenant à l'efficacité du contrôle qu'on
évalue en fonction du contrôle actuel puisqu'on en prolonge
l'existence. Consubstantielle-ment avec la critique des objectifs du projet de
loi, on doit faire la critique de l'efficacité du système de
contrôle des hausses de loyers dont on nous propose d'assurer la
continuité. Citons les conclusions du rapport Godbout-Mathews
commandé par le groupe de travail. "La commission des loyers ne
réalise que partiellement ses objectifs, principalement parce qu'une
partie des locataires qui auraient besoin d'elle probablement une partie
importante des ménages à faible revenu ne l'utilise pas et
parce qu'elle n'atteint pas la plus grande partie des augmentations les plus
élevées."
Nous prenons note des résultats, mais quant à nous, nous
croyons que la commission des loyers a rempli son objectif qui est celui de
concilier les rapports entre locataires et propriétaires et non pas
d'éliminer les hausses abusives de loyer. Notons également
quelques chiffres pour se donner un ordre de grandeur. Si on fixe
arbitrairement les hausses abusives comme étant celles qui
dépassent 10% du loyer ce sont des chiffres qui datent de 1977
on constate que 85% de ces hausses ne seraient pas
contrôlées par la commission. Si elles étaient
contrôlées, l'augmentation moyenne passerait de 8% à 5.7%
et moins puisqu'une bonne partie des demandes inférieures à 10%
sont également réduites par la commission.
Cela ne tient pas compte, non plus, des augmentations qui surviennent
lors des changements de locataires. Tout indique que c'est l'occasion pour le
propriétaire de faire passer les plus fortes augmentations et de prendre
de l'avance sur le contrôle des loyers. Très peu de ces
augmentations sont contestées devant la commission.
On doit également se poser des questions sur l'efficacité
de l'administration de la loi par la commission elle-même. Des rapports
indiquent que les administrateurs accordent un pourcentage d'augmentation plus
élevé aux propriétaires que ne le permettrait
l'application de la formule qui est pourtant très
généreuse. Des chiffres à cet effet: on note une
différence de 10.4% dans ce qui est accordé par la commission et
la formule permettrait des hausses de 8.5% seulement. Pourtant, en principe,
cela devrait être l'inverse.
La formule ne tient pas compte de la diminution des services, des
factures gonflées, alors qu'elle intègre tout ce qui pourrait
justifier des augmentations. C'est l'indication, corroborée par un
certain nombre d'expériences, de témoignages, que la commission
est plus conciliante envers les propriétaires qu'envers les locataires.
La crédibilité de la commission est en jeu, et au-delà,
celle du gouvernement qui en répond. Certains raffinements dans la
réglementation et dans les recours de même qu'une politique
d'information permettront certainement de rejoindre une plus grande proportion
des hausses abusives, mais il est fort peu probable que cela modifie d'une
manière significative les recours à la régie.
Le contrôle des loyers. Nous croyons que seul l'Etat a la
capacité de corriger les imperfections structurelles du marché de
l'habitation et il doit s'engager dans cette direction s'il ne veut pas
contribuer à maintenir des privilèges de classe. Cette
intervention ne peut s'envisager de façon réaliste que dans une
politique d'ensemble. Quant à nous, nous croyons qu'il est
antiéconomique de faire supporter individuellement aux locataires le
fardeau de cette réforme. Bien des locataires sont prêts à
subir des hausses de loyer pour ne pas avoir à affronter leur
propriétaire ou encore à s'engager dans tout le processus de
contestation qui implique des démarches avec des frais et des pertes de
temps suffisamment élevés pour décourager un bon nombre de
locataires. Peu de locataires ont contesté une hausse de 10% quand ils
croyaient que la régie ne leur accorderait pas une diminution de moins
de 8%. Ce sont ces augmentations continues et cumulatives qui maintiennent les
loyers à des niveaux artificiellement élevés et qui
réduisent les possibilités de logement pour les ménages
à faibles revenus.
Le contrôle universel se justifie sur le plan économique.
Un simple calcul des coûts et des bénéfices des effets de
la répartition permet d'en faire la démonstration.
L'économiste Mathews donne un ordre de grandeur de l'épargne
potentielle que le contrôle pourrait apporter aux locataires à
partir d'hypothèses très modérées. En postulant une
baisse de 2% dans le taux d'augmentation, une baisse du tiers dans la
production de nouveaux logements avec une subvention compensatoire de $3000
l'unité de logement, en doublant le budget de fonctionnement du
contrôle et en retranchant les impôts que percevrait l'Etat sur les
gains des propriétaires, on constate qu'en dix ans l'absence de
contrôle coûterait $830 millions aux seuls locataires de la
région de Montréal alors qu'une politique de contrôle
soutenue par des subventions à une partie de la production nouvelle
coûterait quelque $250 millions. Il y aurait lieu de raffiner ce type
d'analyse, mais on fait en sorte que l'on refuse de s'engager dans cette
voie.
Quant à la dramatisation par l'agitation des spectres du
gigantisme bureaucratique, on constate qu'il y a un manque total de
données sur cette question et on se pose des questions, à savoir
que, si la régie devait être utilisée massivement par les
citoyens, il est très clair que dans le cadre actuel la régie
serait carrément débordée. La seule façon
d'envisager, sur le plan bureaucratique et administratif, une rationalisation
de cette question, c'est en regroupant les dossiers. Au travers d'une
démarche qui oblige l'ensemble des propriétaires à aller
devant la régie, on pourrait rationaliser par l'informatique en
étudiant une seule fois le dossier. Cela pourrait apporter de grandes
améliorations.
On relève aussi qu'en Ontario on a déjà un certain
système qui va plus ou moins dans ce sens. Comparativement au
Québec qui a 398 employés, l'Ontario avec 280 arrive à
appliquer une loi avec recours obligatoire des propriétaires devant la
régie pour une hausse allant au-delà d'un certain seuil.
En vertu de ce qui précède, nous demandons un
contrôle universel et obligatoire des hausses de loyer.
Passons au mode de fixation des loyers. Nous considérons que la
méthode actuelle de fixation des loyers est elle-même abusive
à plus d'un point de vue. On considère comme insoutenable le
postulat selon lequel toute méthode qui diminuerait la
rentabilité des immeubles actuels acculerait sûrement tous les
proriétaires à la faillite à plus ou moins long terme.
Le Président (M. Laplante): II vous reste quatre minutes.
Si vous pouviez soumettre vos résolutions, le secteur sur lequel vous
voulez insister en quatre minutes...
M. Simard: D'accord. En ce qui concerne les caractères
abusifs, il y a un point qu'on veut relever: c'est l'application de la formule
qui accorde en quelque sorte une rente aux propriétaires pour
mécanisme assez complexe de variations de la valeur suite à une
hausse du taux d'intérêt hypothécaire. Je considère
que c'est une rente que la régie a accordée de toute façon
avec des baisses de taux d'intérêt et même en l'absence de
hausses de taux d'intérêt. Alors, on demande qu'on élimine
les éléments abusifs au sein même de la formule de fixation
des loyers et qu'on pratique le partage des hausses de loyer.
Avec le système actuel on considère que le loyer de base
est un loyer juste, ce qui est loin d'être le cas. Alors, on demande que
la régie soit aussi investie des pouvoirs de reviser les loyers de base
et de les fixer en fonction des conditions de logement.
Quant au droit au maintien dans les lieux de la question du
privilège de reprise de possession pour les propriétaires, on
considère que c'est abusif également, qu'il n'y a aucun principe
de justice qui peut justifier le fait qu'une catégorie de citoyens a le
privilège de déloger d'autres citoyens et de s'approprier leur
logement. En conséquence, on demande l'abolition du privilège de
reprise de possession.
Finalement, on voudrait insister aussi sur la question de
négociation collective. On ne croit pas que c'est l'idéal que
l'Etat prenne en charge la fixation des loyers. On croit que le
règlement de la question du logement à long terme passe par une
implication massive des citoyens dans leur problème de logement et on
croit que cela doit être favorisé d'une certaine façon dans
le cadre de la législation. Le principe de négociation
collective, que bon nombre d'intervenants reconnaissent comme valable, n'est
applicable que dans la mesure où les locataires ont un certain pouvoir
de négociation. Pour garantir ce pouvoir d'une certaine façon,
nous voudrions que les locataires aient la possibilité d'exiger.
Nous demandons que la régie ait le pouvoir d'administrer des
immeubles, à la demande d'une majorité des locataires dans les
cas où les propriétaires ou une tierce personne pratique
l'intimidation, ou encore le harcèlement des locataires, ou encore qu'il
y ait refus d'entretenir les logements.
On connaît bon nombre de cas de propriétaires bon
nombre, c'est assez difficile à évaluer qui recherchent
systématiquement la démolition de leur logement et puis ainsi
tentent d'évincer, faire en sorte que les locataires dans une situation
qui n'est plus vivable, déménagent d'eux-mêmes. Alors, ce
recours-là permettrait aux locataires d'avoir certains pouvoirs de
négociation.
Finalement, terminons par une certaine mise en garde. Nous croyons que
dans une période de crise économique, de crise fiscale, où
le chômage et l'inflation se côtoient à des taux records,
où les gouvernements cherchent à couper sur les programmes
sociaux, sur les politiquesd'habitation qui sont compromises à plusieurs
points de vue, qu'on recule devant l'indexation du salaire minimum, nous
croyons qu'il est inacceptable que l'Etat tolère ces agents
économiques qui contrôlent l'accès à un bien
essentiel comme le logement, s'attribuent encore des rentes de rareté,
que ce même Etat indexe substantiellement les profits de ces agents tout
en transférant la totalité du fardeau sur les locataires
lorsqu'il exerce son contrôle.
Les travailleurs vont être d'autant plus exigeants dans leurs
revendications salariales que les classes possédantes se donnent les
moyens d'échapper à l'inflation par l'exploitation du
marché immobilier qui leur donne des droits sur une part grandissante
des revenus des travailleurs.
Quant aux autres qui vivent de revenus fixes, ou qui sont
dépendants des prestations de l'Etat, ils n'auront pas d'autre choix que
de protester et d'exiger des contrôles. La crédibilité de
l'Etat dans ses restrictions budgétaires, dans sa lutte contre les
hausses inflationnistes des prix et des salaires, passe par un contrôle
systématique et serré des hausses des loyers.
Le Président (M. Laplante): Merci, Monsieur. M. le
ministre. (11 h 45)
M. Tardif: M. le Président, je veux remercier les
représentants du RCM pour leur mémoire et constater avec une
certaine satisfaction que tout dans le projet de loi 107 n'est pas
rejeté par le RCM qui souligne évidemment une appréciation
du contrôle des démolitions du stock de logements, les mesures
pour préserver le stock de logements, l'extension de la juridiction de
la régie ou de sa compétence en matière de contrôle
des chambres et des terrains pour maisons mobiles. On aurait pu
également ajouter les HLM l'idée d'avoir un code
d'habitabilité visant à s'occuper de la qualité du
logement et le fait qu'on bouche quand même un certain nombre de trous
dans le décor.
Essentiellement, le RCM nous dit: Là où on
décroche, nous, c'est sur le contrôle des loyers, essentiellement.
J'aurai évidemment quelques questions à poser sur ce
contrôle que le RCM conçoit. Mais, avant d'en arriver là,
puisqu'on a passé rapidement sur le contrôle des
démolitions, puisqu'on était d'accord, j'aimerais avoir l'opinion
du RCM comme parti politique municipal sur cette question du contrôle des
démolitions, d'abord, tel qu'il existe à Montréal et tel
que la loi 107 le préconise. L'Union des municipalités du
Québec a fait des représentations, enfin on a vu des
communiqués de presse, son mémoire est arrivé, elle
viendra le défendre en temps et lieu. Elle s'interrogeait sur ce qu'elle
croyait être une diminution du pouvoir des municipalités, alors
qu'il n'en est rien puisqu'on donne aux municipalités un pouvoir
qu'elles n'ont jamais eu, celui de contrôler les démolitions;
avant cela, n'importe qui pouvait démolir.
Or, je ne vois pas comment on pourrait accuser le projet de loi 107 de
brimer un pouvoir municipal qu'on n'a jamais eu dans les faits et qu'on n'a
jamais exercé. Evidemment, on n'a pas le pouvoir de l'exercer.
Mais le problème qui se pose, c'est le suivant: A la suite des
amendements apportés à sa charte l'an dernier, la ville de
Montréal s'est vu confier le pouvoir de faire un règlement pour
contrôler les démolitions. Comme il y avait une espèce
d'organisme d'arbitrage, qui est une émanation en quelque sorte du
conseil ou une créature du conseil, qui pouvait siéger en appel,
il nous a semblé que c'était là que devait s'instruire ce
genre de cause. Etant donné que la décision de démolir ou
pas est une décision politique, il nous semblait que le lieu normal du
débat devait être la municipalité.
On a eu des représentations ici de la part de divers groupes qui
nous ont dit: Non, cela devrait être la régie essentiellement qui
s'occupe de cela. D'autres ont dit: II ne devrait pas y avoir de contrôle
du tout des démolitions. Enfin, on sait ce que vous pensez
là-dessus. Le projet de loi 107 prévoit que dans l'ensemble du
Québec les municipalités pourront établir une telle
réglementation et, par la suite, si elles ne le font pas, les causes
pourront être entendues à la régie. Si elles le font, il y
aura quand même un pouvoir d'appel à la régie.
J'aimerais avoir votre opinion sur cette structure et peut-être
sur le lieu d'exercice de ce contrôle du stock de logements.
M. Simard: Dans l'ensemble, je pense que la législation
sur le contrôle des démolitions est adéquate. Elle donne
des pouvoirs réels aux municipalités, pouvoirs qu'elles vont plus
ou moins exercer. Pour ce qui nous concerne, c'est la question, c'est le
problème.
Quant à savoir si cela doit être confié aux mains de
la régie ou de la municipalité, nous, on préconise une
décentralisation. Nous croyons que ce sont des questions qui doivent
être traitées à l'intérieur des cadres politiques
des municipalités et, même, nous voulons aller plus loin que cela,
nous voulons que ces pouvoirs soient largement décentralisés,
même au niveau des conseils de quartiers.
Notre programme va jusque-là. Nous croyons que les citoyens, dans
leur propre quartier, sont mieux en mesure d'évaluer
l'opportunité de démo-
lir et les coûts sociaux qui sont reliés à ces
questions.
Compte tenu également du contexte politique actuel, nous croyons
qu'il est sage d'avoir une clause qui permet un appel devant la régie
pour ces questions. Je pense que ça doit être... Etant
donné qu'il ne semble pas y avoir de véritable volonté
politique au niveau des dirigeants municipaux de s'impliquer sur ce plan, il y
a une certaine contrepartie qui est possible. Je crois que c'est tout à
fait valable dans la mesure où les citoyens peuvent se faire entendre
à plusieurs niveaux.
M. Tardif: Si je reviens maintenant à la partie
essentielle du rapport du RCM qui est celle du contrôle des loyers, en
fait, ma question est très générale: Quel type de
contrôle voyez-vous? On parle d'un contrôle universel, obligatoire,
sur quelle base va-t-on procéder à une vérification?
Devrait-on, selon votre hypothèse, procéder à une
vérification de tous les logements par mètre carré, par
superficie, par type de services, afficher un prix dans la porte de chaque
logement? Comment voyez-vous ça, un contrôle des loyers?
Voulez-vous nous expliquer ça, s'il vous plaît?
M. Simard: C'est une bonne question. Il y a autant de
contrôles de loyer qu'il y a de juridictions ou différents
organismes à travers le monde qui s'occupent de ces questions. C'est
très complexe, relié à des tas de facteurs
économiques.
Nous avons voulu émettre le principe du contrôle
obligatoire et universel dans le sens d'un droit social au logement qui vise
à contrôler l'exploitation de la rareté dans le logement,
exploitation tout à fait artificielle qui ne correspond pas à des
coûts économiques qui peuvent être associés au
logement. Et, compte tenu du caractère essentiel du bien lui-même,
nous croyons que ça doit aller dans ce sens-là.
Quant au détail même, on est à même de
constater qu'il y a des tas de contraintes administratives, économiques
qui font que le contrôle obligatoire et universel est
problématique. Nous visons à aller jusque là dans le long
terme. Nous croyons que ce n'est pas une panacée, que ça doit
être articulé avec des tas d'autres programmes de politique
d'habitation. Donc, c'est très complexe à ce
niveau-là.
On considère que toute mesure qui va au-delà du statu quo
actuel et qui permet au locataire d'être soulagé d'un certain
fardeau et qui améliore l'accessibilité des ménages
à faible revenu aux logements existants, auxquels de toute façon,
ils sont confinés, nous sommes prêts à aller dans ce sens.
Quant aux détails mêmes, est-ce que c'est le contrôle du
type de l'Ontario ou des mesures qui partent du contrôle du loyer de base
avec hausse fixe annuelle et différents recours des différentes
parties, je crois qu'il y a des tas de recherches à faire encore
là-dessus, d'expérimentation surtout, avant d'arriver à un
optimum de ce côté.
Le contrôle qui existe en Ontario nous semble un pas dans cette
voie. Tout dépend évidemment du fameux taux qui est fixé.
Encore là, nous croyons qu'il devrait être inférieur
à ce qui est pratiqué actuellement. On ne veut pas aller plus
loin dans les détails. Nous ne sommes pas en mesure de faire ce type de
compromis.
M. Tardif: Vous vous en êtes tenus au niveau des principes.
Bon!
II y a une chose que j'ai retenue de votre réponse. Vous dites:
Nous visons le long terme. J'ai bien compris ça? Oui?
M. Simard: Le court terme et le long terme également.
M. Tardif: Vous admettez que la situation est complexe. Il ne
faudrait pas qu'on change d'idée. On admet que la situation est
complexe, on admet qu'il y a un tas de recherches à faire et on pense
qu'à long terme on devrait parvenir à cet objectif qui est celui
qui est poursuivi là. Du moins c'est ce que j'ai compris. J'ai
noté l'expression, précisément, que vous n'aviez pas
précisément les données vous permettant d'affirmer qu'on
devrait procéder de telle manière, en disant: C'est complexe,
cela exige des travaux de recherches, cela exige... si j'ai bien compris...
M. Simard: Cela ne signifie pas qu'à court terme il n'y
ait pas de mesures...
M. Tardif: Je voudrais, avant d'élaborer sur cette
question de l'étalement dans le temps, essayer de vous faire... Il y a
un vote?
La question qui me vient à l'idée, avant de passer
à cette question de définition du long terme et comment y
parvenir, les mesures en attendant on pourrait fouiller cela il y
a une question qui me vient à l'esprit, c'est: Est-ce que je dois
comprendre, toujours au niveau des principes, sans entrer dans la statistique
et dans les chiffres, que pour vous un contrôle universel obligatoire
cela veut dire que les 900 000 logements de location au Québec sont
couverts par la loi, oui ou non?
M. Simard: C'est exact.
M. Tardif: Deuxièmement, cela veut dire que toute
variation dans les conditions du bail doit obligatoirement passer par la
régie dans les 900 000 cas.
M. Simard: On fait l'exception de la négociation
collective des baux, c'est-à-dire que nous croyons qu'il y a une
possibilité d'entente...
M. Tardif: D'accord, mais comme c'est inexistant
présentement, cela veut dire que toute modification des conditions du
bail devra passer par la régie à moins d'une négociation
collective. C'est cela? D'accord.
Troisièmement, est-ce que cela veut dire qu'avec un
contrôle obligatoire universel passant par la régie aucune entente
entre les parties ne sera permise? C'est-à-dire qu'un
propriétaire ne
pourrait pas s'entendre avec son locataire. Je m'en vais dans mon chalet
de vacances cet été et si je veux m'occuper de la maison, de
l'entretien, du gazon, aucune espèce d'entente ne sera permise. Tout
devra passer par la régie. Est-ce que c'est ce que cela veut dire?
M. Simard: Je crois qu'il ne faut pas caricaturer non plus et
dire: Le contrôle doit couvrir tous les aspects de la vie des locataires
et des propriétaires. Je pense qu'à la pièce on peut voir
quel est le champ plus précisément. On peut commencer par un type
de contrôle du type de celui de l'Ontario qui est quand même assez
souple, qui permet des accommodements. Nous ne voulons pas
généraliser le principe du contrôle, en faire un absolu. On
ne croit pas dans le fait que l'Etat soit la réponse à tous les
problèmes sociaux. Je pense que dans les cas où il y a des points
qui mènent à des conflits, que ce soit en termes
d'intérêts ou des conflits ouverts, on croit qu'il devrait y avoir
un certain contrôle là-dessus.
M. Tardif: Loin de moi l'idée de vouloir caricaturer une
situation, mais je pense que la situation où un locataire demande
à son propriétaire: Voulez-vous s'il vous plaît
j'arrive changer les lits et l'armoire de cuisine? Je suis consentant
à payer $10 de plus par mois pour cela. Ce genre d'entente peut
être monnaie courante. Vous n'avez pas l'impression que si on soumet tout
cela... Je veux juste essayer de faire cerner les notions de contrôle
universel et obligatoire qui reviennent dans votre mémoire. Si cela veut
dire que toute modification au bail d'accord, c'est cela doit
obligatoirement passer par la régie, est-ce qu'on a une idée de
ce que cela représente? Est-ce à dire qu'on interdit toute
entente qui interviendrait entre les parties. C'est-à-dire que toute
entente devrait être sanctionnée par l'Etat. C'est cela ma
question finalement. (12 heures)
M. Limonchik: Je voudrais répondre là-dessus, si
vous le permettez. Le RCM est contre toute... ce n'est pas le gel qu'on
cherche, effectivement. Ce dont vous parlez, c'est d'un gel effectif, mais on
n'a pas pensé à des ententes entre personnes, ça brimerait
les libertés individuelles des gens. Forcément, on s'oppose
à ce type de situation.
Je voudrais revenir à la question que vous avez posée
tantôt sur la démolition M. le ministre. On parlait du contexte
politique de Montréal. Tout le monde sait très bien que les
démolitions ont atteint une ampleur telle que cela a miné la
santé économique de la ville de Montréal. Etant
donné le manque de volonté clairement exprimée sur la
question du logement, on félicite le gouvernement de l'initiative, dans
le domaine des démolitions, de son projet de loi. Cela nous donne un
coup de main jusqu'à ce que les citoyens de Montréal puissent
prendre leurs affaires en main.
M. Tardif: Merci beaucoup. J'aurais peut-être d'autres
questions, mais je veux laisser la chance à tout le monde. J'aurais
beaucoup de questions, mais je veux laisser la chance à tout le
monde.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Je veux également vous féliciter pour
votre mémoire et vous remercier, c'est très bien. Votre
première phrase dit que le rassemblement s'oppose au projet de loi 107.
Exactement comme l'union des maires et des municipalités du
Québec, vous êtes contre. Jusqu'à maintenant, c'est clair
qu'à peu près tout le monde est contre.
Je veux vous poser une question qui peut m'éclairer sur la
tournure des événements survenus depuis les deux dernières
années. Vous écrivez et vous dites clairement que vous êtes
contre le projet de loi autant sur le plan des objectifs et des principes que
sur le plan concret de l'efficacité. Alors, vous êtes contre.
A la page 5, je veux le lire, vous faites un peu l'histoire des
événements. Vous dites: Le présent gouvernement semble
vouloir faire du droit des locataires une de ses priorités. Le groupe de
travail a été formé, il a déposé son rapport
et le rapport demeure confidentiel. Le livre blanc a été
publié, et toute cette histoire. Si je comprends bien, le gouvernement,
avant d'arriver au pouvoir, avait une position assez favorable envers les
locataires. Le rapport encore confidentiel du groupe de travail a pris un peu
ses distances vis-à-vis de cette position. Le livre blanc a pris ses
distances vis-à-vis du rapport du groupe de travail et le projet de loi
a pris ses distances vis-à-vis du livre blanc.
Si je comprends, c'est non seulement ce que vous avez dit aujourd'hui,
mais ce sont un peu les déclarations d'autres qui sont venus ici. De
plus en plus, on s'éloigne des locataires. Parce que vous étiez
très impliqués, dans la grande ville de Montréal, dans le
déroulement de ces événements, je me demande si vous
pouvez m'éclairer un peu et m'expliquer ce qui est arrivé pour
persuader le gouvernement d'avoir la position de base qu'il avait il y a deux
ans.
M. Simard: Je ne suis pas en mesure de le faire, je ne suis pas
dans le secret du Cabinet des ministres. Je ne suis pas en mesure
d'évaluer la certaine autocensure qu'il y a eu sur un certain nombre de
mesures. Je ne suis pas en mesure de le faire.
M. Scowen: Pour moi, c'est très important, parce que, s'il
faut revenir aux principes de base, quelles sont les forces... est-ce que vous
êtes impliqués dans le projet du groupe de travail?
M. Simard: Nous ne sommes pas impliqués...
M. Scowen: Vous avez lu le rapport? M. Simard: Oui, nous
avons lu le rapport.
M. Scowen: Est-ce que le rapport de ce groupe de travail,
d'après vous, était satisfaisant?
M. Simard: II y avait effectivement des trous énormes,
enfin, comme toute analyse de cette question. C'est tellement complexe qu'il
faudrait l'étudier pendant des années et expérimenter des
tas de points. Mais nous retenons de ce rapport qu'il allait plus loin que la
présente loi sur un bon nombre de mesures et que ces mesures nous
semblaient plus satisfaisantes que ce qui est présenté.
M. Scowen: Est-ce que vous pensez que le rassemblement peut
appuyer un projet de loi basé plus ou moins sur le document du groupe de
travail?
M. Simard: Selon les différentes mesures...
M. Scowen: Est-ce que la première phrase de votre
mémoire sera différente?
M. Simard: II faudrait juger selon les différentes
mesures. Il y a bon nombre d'autres possibilités qui sont
impliquées. Certainement que notre soutien au projet de loi serait plus
consistant, dans le sens que plus il y a de mesures qui sont favorables aux
droits des locataires... Bien sûr, nous n'allons pas contre cela.
M Scowen: Si je comprends bien la liste des priorités que
vous avez, si je comprends bien votre point essentiel, c'est le contrôle
universel des loyers.
M. Simard: Obligatoire.
M. Scowen: Obligatoire et universel. Si cet aspect était
inclus dans le projet de loi, c'est quelque chose que vous pourriez appuyer en
général.
M. Simard: On soutiendrait certainement cet aspect.
M. Scowen: D'accord. Merci beaucoup.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci, M. le Président. Je tiens
également à vous remercier pour votre participation et vos
suggestions. Il y a un point en particulier que j'aimerais soulever. Est-ce que
le Rassemblement des citoyens de Montréal doit avoir des partisans ou
des membres, dans le centre-ville de Montréal?
M. Simard: On en a effectivement, oui.
M. Cordeau: Jeudi passé, nous avons entendu un
mémoire présenté par le Parti québécois du
centre-ville de Montréal. Et on ne critiquait pas le rapport. On a
appuyé le projet de loi 107. Je crois que dans le secteur, il y a
environ 90% de locataires.
M. Guay: Question de règlement. Le Parti
Québécois de Montréal-centre appuyait des grandes lignes
du projet de loi, mais faisait quelques suggestions constructives que d'autres
pourraient appeler critiques.
M. Cordeau: Je n'étais pas rendu là.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Bien sûr, qu'il appuyait le projet de loi.
M. Guay: Dans les grandes lignes, mais il faisait des critiques
en même temps.
M. Cordeau: Très réservées.
C'est pour vous dire que votre point de vue est tout à fait
différent que lorsque cela vient d'un parti politique ou d'une
association.
M. Simard: Je voudrais préciser qu'il n'y a pas de lien
entre le Parti québécois et le Rassemblement des citoyens de
Montréal.
M. Cordeau: Cela me rassure.
Je voudrais parler un peu sur la reprise de possession. Est-ce qu'il y a
des propriétaires dans votre parti politique?
M. Simard: II n'y a pas qu'eux. Une Voix: Absolument.
M. Cordeau: Est-ce que cela leur a été soumis?
Est-ce qu'ils sont d'accord?
M. Simard: Concernant la reprise de possession?
M. Cordeau: Est-ce que la position que vous avez prise dans votre
rapport "nous demandons l'abolition du privilège de reprise de
possession" a été aussi adoptée par les
propriétaires qui sont membres de votre parti politique?
M. Simard: On n'a pas de comité de propriétaires
à l'intérieur du RCM. Il y a un programme avec des principes
généraux et les gens sont libres d'y souscrire, qu'ils soient
propriétaires ou locataires.
M. Cordeau: II serait peut-être bon que vous ayez un
comité pour le recrutement des propriétaires, parce que cela
n'aurait peut-être pas passé.
M. Limonchik: Je voudrais faire des commentaires comme
président du parti là-dessus. Malheureusement, lors des
dernières élections, on a eu un appui plus fort dans des secteurs
de la ville qui comptent un plus grand nombre de propriétaires. C'est
assez clair. Nous avons des propriétaires, au sein du RCM, probablement
dans la
même proportion que la ville, un nombre qui pourrait osciller
autour de 10%. Nous avons même cinq candidats sur cinquante-quatre qui
sont des petits propriétaires.
M. Cordeau: Je suis tout à fait d'accord. C'est tout
à fait logique, d'ailleurs. Mais par contre, je trouve que la position
que vous prenez concernant l'abolition du privilège de reprise de
possession est tout à fait opposée au désir d'un citoyen
de devenir propriétaire d'une maison à deux logis et d'y loger sa
famille, parce qu'il a plusieurs enfants et qu'il trouve une maison à
deux logis et que six appartements, cela fait son affaire.
Par la position que vous prenez, vous allez empêcher
complètement un individu, qui veut devenir propriétaire d'un
duplex, d'habiter sa maison, parce que vous empêchez la reprise de
possession. S'il faut qu'il attende que les deux locataires meurent pour
prendre possession d'un de ses logis, le gars n'achètera jamais cette
propriété.
M. Simard: Si vous permettez, je peux répondre à
cela. Je pense qu'on sous-estime souvent l'initiative des agents
économiques de l'entreprise privée. Je suis sûr qu'avec un
règlement de ce type-là, il y aurait des ajustements qui se
feraient et l'adaptation serait très rapide. Il se développerait
tout simplement un marché, comme cela se fait actuellement dans une
large mesure, d'habitation: le logement occupé par le
propriétaire serait libéré et il y aurait aussi la
possibilité de... Le propriétaire a le privilège de
s'approprier les logements lorsqu'ils sont libérés par les
locataires et, quand on connaît le taux de roulement des locataires
à Montréal, cela se fait quand même assez rapidement. Il y
a également la troisième possibilité qui est de
négocier avec le locataire sur le droit d'occupation et de lui accorder
des compensations pour les problèmes qui lui sont causés. Je
pense qu'on sous-estime la capacité d'adaptation du marché de
l'habitation sur ce point-là et cela fait un peu un choc émotif
que d'entendre une telle proposition qui va à rencontre de nos coutumes
et de nos habitudes, mais je ne crois pas que cela ait un impact sur la petite
propriété.
M. Cordeau: Parfois, il y a des successions qui administrent
quatre ou cinq maisons de deux logements et, à un moment donné,
il faut que la succession se règle. En fin de compte, on décide
de vendre ces propriétés-là, mais l'acheteur
éventuel ne l'achètera pas s'il sait qu'il ne pourra pas prendre
possession d'un de ces logements. Pour le petit propriétaire
éventuel, c'est peut-être un inconvénient majeur et, de
toute façon, je m'oppose à cette décision aussi
draconnienne.
Bien sûr qu'il pourrait y avoir des modalités concernant la
prise de possession par les beaux-frères, belles-soeurs, etc.. Il
faudrait qu'il y ait une certaine limite à l'occupation des logements
par les membres de la famille du propriétaire, mais de là
à empêcher le propriétaire même de prendre possession
d'un des logements après l'acquisition d'une maison, je pense que vous
allez un peu loin. De toute façon.
Maintenant, je crois que le problème qu'il y a actuellement,
c'est le manque de disponibilité des loyers pour les personnes à
faible revenu ou à revenu moyen. Je pense que c'est là le dilemme
actuellement. Le problème majeur du projet de loi que nous
étudions actuellement c'est le manque de logements. Croyez-vous qu'il
serait à propos que le gouvernement élabore une politique afin de
venir en aide aux propriétaires concernant la rénovation?
Croyez-vous que les propriétaires doivent suivre des normes aussi
strictes, aujourd'hui, pour la rénovation? A un moment donné ils
ne les feront plus parce que les normes seront trop sévères. Des
normes moins sévères aideraient à la rénovation des
logements.
M. Simard: C'est sûr qu'il y a toutes sortes de politiques
d'habitation qu'il serait souhaitable de voir entrer en vigueur en fonction du
contrôle des loyers, mais il y a des mesures, comme l'allocation logement
que tous les adversaires du contrôle des loyers évoquent. Cela
serait un peu la panacée pour régler le problème des
ménages à faible revenu. Mais, si on regarde l'évaluation
qui a été faite dans le temps du rapport Legault
là-dessus, il y avait une espèce de projet qui avait
été mis de l'avant ou une ébauche prototype dans laquelle
on évaluait que, pour 12 000 personnes, cela coûterait, en tenant
compte de certaines hypothèses sur les loyers et sur les
caractéristiques des revenus des locataires, quelque chose comme $15
millions. (12 h 15)
On considère également et c'est toujours les
chiffres du rapport Legault qu'en 1971, il y avait 280 000
ménages qui avaient besoin d'une aide sur le plan du logement, si on
considère la norme de 25% du revenu alloué au loyer et que ce
nombre devait passer à 334 000 en 1981. Si on fait des extrapolations
pour quelque chose comme 300 000 personnes, on monte rapidement à
près de $500 millions, ce qui fait que ce n'est pas la panacée
pour régler cela.
Quant à d'autres questions sur la restauration des logements, on
peut sortir d'autres chiffres aussi si on considère que la
réglementation est un problème pour la rénovation du
logement. Il faut dire aussi qu'il y a un manque de réglementation ou
d'application de la réglementation qui est un problème pour les
ménages à faible revenu. D'après les chiffres que j'ai pu
consulter dernièrement d'une étude encore confidentielle de la
Société centrale d'hypothèques et de logement c'est
une étude interne les hausses de loyer, à la suite des
rénovations subventionnées, sont de l'ordre de 64%. On veut aider
les ménages à faible revenu par des politiques de restauration
uniquement en l'absence de contrôle de ces loyers, la CHL, en principe,
doit contrôler les loyers, une fois qu'ils ont été
subventionnés, mais ce contrôle n'est pas fait. Il s'ensuit une
exploitation de la rareté des logements restaurés qui est
faite.
C'est vrai, particulièrement pour Montréal, qui est dans
une situation... à cause de la structure de ces logements qui exigent
beaucoup de réparations. On considère que les études
faites par le Conseil économique du Canada démontrent que de 1961
à 1971, le rapport du loyer par pièce sur le revenu a
augmenté de 62% à Montréal comparativement à 14%
pour la moyenne des grandes villes canadiennes, ce qui fait que cela touche
particulièrement les locataires à faible revenu, les logements
à prix modique et les vieux logements. Ce sont les
caractéristiques d'une bonne partie des loyers à Montréal.
Il n'y a rien qui nous permette de croire que ces tendances se sont
résorbées de 1971 jusqu'à aujourd'hui. C'est pourquoi nous
demandons le contrôle obligatoire des loyers.
M. Cordeau: Je tiens à vous féliciter pour vos
sources de renseignements, puisque vous semblez posséder des rapports
que nous, membres de l'Assemblée nationale, ne possédons pas.
Maintenant, vous avez mentionné tantôt que, concernant les logis
rénovés subventionnés je ne sais pas si j'ai bien
saisi que le prix n'était pas fixé. Je pense que le prix
des logis subventionnés est fixé par l'organisme.
M. Simard: II est effectivement fixé, mais le
contrôle n'est pas fait, c'est-à-dire que les propriétaires
se moquent des prix fixés et fixent eux-même le prix du loyer.
C'est d'après une étude interne de la CHL qui relève ce
facteur, entre autres, de l'absence de véritable contrôle des
loyers subventionnés, comme responsable de la hausse.
M. Cordeau: Ils peuvent rénover, le prix est fixé,
et ensuite, il n'y a pas de contrôle concernant le prix exigé du
locataire.
M. Simard: C'est cela comme, d'ailleurs, dans les programmes de
construction de logements à dividendes limités qui
prévoyaient un certain contrôle des loyers. Ces contrôles
n'ont jamais été faits par la Société centrale.
M. Cordeau: Parce que, si je suis bien informé, le
propriétaire avant d'obtenir une subvention signe, bien sûr, une
entente dans laquelle il dit qu'il va se soumettre au prix fixé par la
régie, par l'organisme en conséquence, et ensuite de cela, le
prix est fixé. Il n'y a plus de contrôle après?
M. Simard: Les observations démontrent que l'entente n'est
pas respectée.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Rosemont.
M. Cordeau: J'aimerais entendre certaines explications du
ministre concernant ce manque de contrôle, parce que là, c'est
l'anarchie.
M. Tardif: C'est vrai, M. le Président...
M. Scowen: ... de la société.
M. Tardif: C'est vrai, M. le Président, que cette
société existe et c'est la raison pour laquelle j'ai
demandé aux gens de mon ministère et de la Société
d'habitation de me préparer un programme de restauration qui soit
beaucoup plus efficace au niveau du contrôle des loyers, d'une part, et,
d'autre part, qui soit accessible également aux locataires. Ce programme
est en préparation présentement. Mais c'est un fait que le
programme PAREL, Programme d'aide à la remise en état des
logements, produit ces effets secondaires qu'on a mentionnés.
M. Cordeau: Parce que si vous découvrez que le
propriétaire ne suit pas l'entente, je crois que vous êtes en
mesure d'exiger le remboursement complet du prêt.
M. Tardif: Oui, mais je voudrais faire remarquer qu'il s'agit
d'un programme fédéral et nous sommes en train de mettre au point
un programme québécois qui visera à contrer ces
effets.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Rosemont.
M. Scowen: Est-ce que le fédéral est conscient de
ce problème?
M. Tardif: II semble...
M. Scowen: Est-ce que vous avez attiré leur
attention...
M. Tardif: II semble en prendre conscience et des contacts ont
déjà été faits entre la Société
d'habitation et la Société centrale d'hypothèques et de
logement à ce sujet.
M. Scowen: Et ils ont refusé de faire les changements qui
s'imposent?
M. Tardif: Ils n'ont pas refusé de faire les changements.
Cependant, le contexte dans lequel nous sommes, celui de période
préélectorale sur le plan fédéral, fait que la
révision de ce programme est peut-être plus lente qu'on le
voudrait, mais c'est en marche.
M. Scowen: Je comprends avec difficulté que si vous voyez
un problème qui est causé par un programme
fédéral...
M. Tardif: Oui.
M. Scowen: ... plutôt que de demander au
fédéral de le régler...
M. Tardif: Oui.
M. Scowen: ... mettre sur pied un programme
québécois en parallèle ou en chevauchement pour
régler un problème qui pourrait être réglé
par le
gouvernement concerné... Est-ce que le fédéral a
refusé de faire les changements qui s'imposent?
M. Tardif: Ce n'est pas une question de refuser ou pas de faire
les changements qui s'imposent. Il y a plus que ça. Tout le programme,
selon nous, est à revoir, programme qui permettait des subventions
pouvant atteindre $6250 pour une rénovation de $10 000 avec une
possibilité d'emprunt à un taux préférentiel
d'intérêt par la suite, programme à frais partagés
entre Ottawa, Québec et les municipalités. Il y a
présentement également des municipalités qui acceptent le
programme, d'autres qui n'acceptent pas, qui ne veulent pas contribuer à
ce programme. C'est donc à l'ensemble du programme qu'il faut s'adresser
et non pas uniquement à cette modalité du contrôle des
loyers.
M. Scowen: Si ce n'est pas confidentiel, ça pourrait
être intéressant de voir la correspondance entre vous et le
fédéral en ce qui concerne ce problème et leurs efforts
pour le régler. Est-ce que ce serait possible?
M. Tardif: En temps et lieu, je déposerai les documents,
M. le Président, sur l'évolution du programme.
M. Cordeau: M. le Président...
M. Scowen: Je parle spécifiquement de la correspondance
qui se fait entre les deux dans ce domaine. Est-ce qu'il y a quelque chose de
confidentiel là-dedans?
M. Tardif: Pour l'instant, M. le Président, il s'agit pour
nous de nous assurer que, dans la révision d'un programme de
restauration, l'argent présentement investi par le fédéral
soit quand même accessible dans un programme qui soit plus adapté
à nos besoins, et c'est à ce niveau que portent les tractations
présentement.
M. Scowen: Mais, c'est simplement qu'il me semble que c'est
quelque chose qui est assez urgent et si on peut faire la lumière
là-dessus, c'est quelque chose qui pourrait être
réglé même avant l'élection, si on est prêt
à faire quelque chose tout de suite.
M. Tardif: Présentement, M. le Président, il
semblerait que la seule arme dont dispose la Société centrale
d'hypothèques et de logement face à un propriétaire qui ne
respecterait pas ses engagements serait, en quelque sorte, la reprise de
possession et, déjà, on voit que la société
centrale possède un parc immobilier au Québec d'à peu
près 21 000 logements sur un total de 25 000 au Canada. Elle tente
présentement de se départir de ce portefeuille. Elle met en vente
des ensembles immobiliers avec les effets que l'on sait. Le problème
reste entier de ce côté tant et aussi longtemps qu'on demeure
à l'intérieur du programme tel qu'il est formulé. Mais,
comme je dis, il nous semble important de réviser en entier ce programme
et, lorsqu'il sera prêt, il sera évidemment rendu public.
M. Scowen: M. le Président, je ne veux pas prolonger ce
débat longtemps, mais il y a un dernier point. Je pense que si je vous
comprends, il y a ce problème qui existe, c'est la faute du
fédéral. Vous êtes conscient, vous êtes en train de
mettre sur pied un correctif québécois, vous avez
suggéré que le fédéral le fasse lui-même,
mais à cause du fait qu'une élection s'en vient, il a
refusé de corriger la situation. Alors, je vous demande, M. le ministre
si c'est possible...
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît, je vais
être obligé de vous rappeler à l'ordre.
M. Scowen: ... que vous rendiez publique la correspondance pour
que tout le monde puisse savoir exactement ce qui se passe et puisse faire
pression sur le fédéral...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Tardif: Je n'ai pas dit qu'il y avait refus d'amender le
programme...
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, si vous me permettez... Le
Président (M. Laplante): Je voudrais qu'on continue à poser
des questions sur le mémoire, parce que cela tombe dans l'administration
où ces questions...
M. Cordeau: Je crois qu'on a sorti un chat du sac qui est
important, parce qu'il y a des locataires qui sont brimés et, s'il y a
une faute quelque part, il faut savoir où afin de rétablir une
situation normale. Je crois...
Le Président (M. Laplante): Je crois, M. le
député de Saint-Hyacinthe que le but de cette commission est
d'entendre les mémoires, de discuter des mémoires avec les
intervenants. J'ai laissé parler un certain temps là-dessus afin
d'interroger le ministre, mais on est rendu dans un processus de
décisions avec le ministre et je crois que ces questions appartiennent
soit à l'étude de la loi 107 ou pourraient être
posées à l'Assemblée nationale. J'aimerais qu'on retourne
à l'étude du projet.
M. Cordeau: J'aimerais mieux éclaircir cela ici
qu'éclaircir cela en haut. Cela va faire un autre projet de loi 116.
Le Président (M. Laplante): Vous allez avoir l'occasion
à l'étude article par article de la loi 107.
M. Cordeau: Je crois que le ministre n'est pas fautif non plus,
on ne blâme pas le ministre du tout. On essaie de corriger une situation
anormale.
Je crois que M. le ministre peut nous permettre cinq minutes encore sur
le même sujet. Je crois que vous n'avez pas objection à ce que le
point soit éclairci afin que justice soit établie.
Le Président (M. Laplante): Très bien, allez-y.
M. Cordeau: M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Rosemont sur une question de règlement.
M. Paquette: Simplement, M. le Président, je ne me
rappelle pas à quelle heure on termine et j'aimerais bien avoir mon
droit de parole, à un moment donné. Je ne m'oppose pas à
ce qu'on continue un peu là-dessus. C'est à une heure qu'on
termine? D'accord.
Le Président (M. Laplante): Le temps serait terminé
pour le groupe et ce serait...
M. Cordeau: C'est à une heure. Il nous reste deux
mémoires à entendre aujourd'hui.
M. Paquette: D'accord.
M. Cordeau: M. le Président, c'est un programme
fédéral à frais partagés, si je ne m'abuse, est-ce
que...
M. Guay: Vous ne vous abusez pas.
M. Cordeau: Partant de là, la Société
d'habitation du Québec a regard et les villes, dans des plans de
rénovation, font affaire avec la Société d'habitation du
Québec. Toutes les ententes sont signées en haut, mais c'est la
Société d'habitation du Québec qui a le contrôle des
ententes au point de vue de la rénovation. Je ne suis pas prêt
à blâmer d'un coup sec Ottawa simplement parce que c'est un
programme fédéral. C'est sous la surveillance de la
Société d'habitation du Québec. Je me demande si ce n'est
pas la Société d'habitation du Québec... Le
fédéral n'est là que pour fournir des fonds, mais par
contre ces programmes sont sous la surveillance de la Société
d'habitation du Québec. Je crois en toute logique que ce serait à
la Société d'habitation du Québec de voir à ce que
les propriétaires surveillent les normes...
M. Caron: M. le Président, on a dit qu'on irait
jusqu'à une heure, laissez le député de
Saint-Hyacinthe...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe, juste un moment. Je voudrais être... Ce ne sera pas
long, je vais vous donner la parole. Je vais vous donner la parole tout de
suite après, M. le député de Verdun.
M. Caron: De l'autre côté, ils auront leur tour tout
à l'heure.
Le Président (M. Laplante): Si les membres de cette
commission me disent: Oui, on peut s'étendre sur ce sujet-là, la
commission est maîtresse de ses travaux, mais il faudra le consentement
unanime des membres de cette commission. Est-ce qu'il y a consentement.
Une Voix: II y a consentement.
M. Guay: Oui, mais avec une limite de temps. Le
député de Notre-Dame-de-Grâce a posé des questions.
Le député de Saint-Hyacinthe vient de poser des questions, le
ministre pourrait au moins répondre et après cela on pourrait
peut-être revenir au mémoire du RCM.
M. Cordeau: Je veux seulement clarifier les
responsabilités de chaque palier de gouvernement dans cela.
Le Président (M. Laplante): D'accord, c'est le voeu de
tout le monde.
M. Tardif: M. le Président, nous avons soumis à la
Société centrale d'hypothèques et de logement un certain
nombre de propositions, en attendant la mise au point d'un programme qui, selon
nous, pourrait être mis en oeuvre et répondrait mieux aux besoins,
et, notamment, l'élément charnière de ces modifications
est la signature d'une entente entre le propriétaire et le locataire
quant aux rénovations effectuées et quant au pourcentage
d'augmentation de loyers suite à ces rénovations. C'est
l'élément manquant dans le programme existant que nous voulons
voir introduire entre autres. Des représentations ont été
faites à la Société centrale et nous attendons une
réponse. C'est tout ce que je puis dire pour l'instant.
M. Caron: M. le Président, comment sont les relations
entre la Société d'habitation et la Société
centrale? Est-ce que les relations entre les deux sont bonnes? (12 h 30)
M. Tardif: Ecoutez, on me dit que même sur ce sujet, ils se
sont parlé encore la semaine dernière, M. Brien, responsable de
la SCHL pour la région de Québec et M. Couture.
M. Caron: Les relations sont bonnes.
M. Cordeau: M. le ministre, est-ce que le programme que vous
voulez établir ou l'entente que vous voulez signer va contrôler
aussi les logis qui ont déjà été
rénovés et dont le prix a été fixé?
M. Guay: Là, je soulève une question de
règlement, parce que, d'un commun accord, on s'était entendu pour
expliciter davantage la question du programme actuel. On entre dans le
programme à venir, c'est une toute autre chose.
M. Cordeau: C'est pour corriger les
inégalités...
M. Guay: Non, on n'en sortira pas. M. Cordeau: ... du
programme actuel.
M. Guay: Les questions, jusqu'à maintenant, portaient
sur... est-ce que c'est la SCHL ou la SHQ, comment ça se fait?
Très bien. Si on veut savoir, à l'avance...
M. Cordeau: Non.
M. Guay:... quels sont les détails du programme de
rénovation à venir...
M. Cordeau: Je demande au ministre si cela va prévoir les
injustices qu'ont eu à subir certains locataires parce que le
propriétaire n'a pas respecté l'entente concernant le prix qui a
été fixé et là, c'est le locataire, pour les
logements qui ont été rénovés dans le
passé.
M. Tardif: M. le Président, la seule "participation" de la
Société d'habitation du Québec dans ce programme de
restauration est d'abord une contribution financière de $1250 par
unité de logement rénové à l'intérieur du
programme en question et deuxièmement, elle a trait à la
désignation des zones où ces programmes pourront s'appliquer. Par
exemple, on dit qu'une municipalité soumet un projet de
rénovation de quartier, on dit, à l'intérieur de ce
périmètre, le programme PAREL pourra s'appliquer, mais à
l'intérieur de ça, c'est uniquement le programme PAREL tel que
défini et préparé par la Société centrale
d'hypothèques et de logement.
M. Scowen: Un dernier point, vous avez fait
référence au fait que c'est une période
préélectorale à Ottawa et vous pensez, si je comprends
bien, que la réponse de la Société centrale tardera,
d'après vous, à cause du fait... c'est quoi exactement?
M. Tardif: Cela peut avoir un effet dans les deux sens, M. le
Président... Cela peut faire débloquer des choses, comme cela
peut les faire retarder. Je sais qu'il y a présentement, devant la
Chambre des Communes, un projet de loi visant à modifier la loi
nationale d'habitation. Sur cela aussi on peut se poser des questions, à
savoir si ce sera adopté ou non avant l'ajournement. Ce genre...
M. Scowen: Je n'ai pas compris exactement le sens de votre
référence à ce fait que c'est préélectoral,
je voulais simplement avoir...
M. Tardif: Entre autres, le ministre responsable de la SCHL a
d'autres activités, d'autres chats à fouetter
présentement.
M. Scowen: Cela veut dire que, probablement, ce sera
retardé à cause de ça.
M. Tardif: Je ne sais pas, on attend des réponses aux
propositions que nous avons faites pour ce qui concerne le programme de
restauration. Il me paraît que peut-être, effectivement, le
contexte dans lequel nous sommes pourrait amener des réponses plus
rapides, comme cela pourrait avoir l'effet contraire. Je le donne; à
vous d'apprécier.
M. Scowen: Ce n'est pas très clair.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Laplante): Je vous ferai remarquer que le
temps est largement dépassé si on veut aborder l'autre
groupe.
M. Paquette: J'espère que vous n'incluez pas cette
discussion dans le temps qu'on doit consacrer au mémoire.
Le Président (M. Laplante): Non, c'est un autre
mémoire.
M. Paquette: Tout en manifestant votre accord sur certaines
améliorations qu'apporte le projet de loi, vous le trouvez, si je
comprends bien, nettement insuffisant et pour cette raison, vous vous y
opposez. Vous nous faites cette recommandation principale, dans le but de le
rendre suffisant. Je pense que c'est justement le rôle de cette
commission de faire en sorte que ce projet de loi contrôle
adéquatement les hausses de loyer, en particulier les autres aspects du
contrôle du logement, particulièrement dans l'optique d'une
pénurie de logement pour les personnes à faible et moyen
revenus.
Je prends votre première proposition concernant le contrôle
universel et obligatoire des hausses de loyer. Est-ce qu'un mode de
fonctionnement comme celui-ci vous apparaît entrer dans le cadre de cette
définition? C'est-à-dire que, dans la loi actuelle, le
propriétaire devrait envoyer un avis où il justifie ses hausses
de loyer, il y aurait ensuite un délai d'un mois, à la suite de
quoi, si le locataire n'a pas manifesté son accord à la hausse de
loyer, le propriétaire devrait soumettre sa demande à la
Régie des loyers. Est-ce que vous considérez qu'une telle
démarche constitue un contrôle universel obligatoire tel que vous
le souhaitez?
M. Thibodeau (Jacques): J'aimerais répondre à cette
question. Je pense que ce que le RCM a essayé de faire ressortir dans
son mémoire, c'est que, effectivement, le système actuel nous
semblait insuffisant, surtout dans la mesure où on peut constater qu'il
y a à peine 5% ou 6% des locataires qui se plaignent auprès de la
régie. Ce que nous constatons, dans les quartiers de Montréal,
c'est que cela ne concorde pas tellement avec la réalité
quotidienne.
Par ailleurs, nous sommes conscients aussi qu'on ne peut pas faire de
transformations nécessairement brutales du jour au lendemain. Nous
sommes partisans d'étapes qui nous mèneraient vers un
système meilleur.
En fait, ce que la proposition de contrôle universel obligatoire
des loyers amène de neuf par rapport au système actuel, je pense
que c'est d'abord et avant tout ce qu'on peut appeler le renversement du
fardeau de la preuve. C'est-à-dire qu'on peut penser que s'il y a si peu
de locataires qui se plaignent de leurs conditions de logement auprès de
la régie, c'est que l'effort de défense active qui leur est
demandé est un fardeau qui leur semble trop grand, dans un assez grand
nombre de cas, probablement.
Il est bien sûr qu'il ne s'agirait pas et je voudrais
rejoindre la préoccupation du ministre Tardif dans la dernière
question qu'on nous avait posée je ne pense pas, effectivement,
que l'Etat doive instaurer un système policier pour surveiller si,
effectivement, des ententes individuelles ont été signées
contre la loi. Ce n'est sûrement pas ce que le RCM désire, bien
sûr. Si les gens s'entendent, mon Dieu, à ce moment-là, il
n'y a pas de problème.
Mais, d'un autre côté, si le locataire part au tout
début de la négociation avec la certitude qu'il n'a qu'à
ne pas s'entendre, justement avec le propriétaire, pour que ce soit
à celui-ci d'aller faire les efforts nécessaires pour obtenir des
conditions qui le satisferont davantage, déjà, cela nous
semblerait au moins une transformation assez importante du rapport de force et
là, il serait intéressant de constater jusqu'à quel point
les ententes se feraient aussi facilement qu'actuellement.
M. Paquette: Dans cette hypothèse, vous contestez un
énoncé du livre blanc à l'effet qu'un tel système
nous mènerait à une bureaucratie extrêmement lourde, qu'il
faudrait augmenter considérablement le nombre de fonctionnaires de la
régie. Etes-vous en mesure d'évaluer à peu près le
pourcentage des causes qui seraient présentées à la
régie, dans un tel système? Etes-vous en mesure de le faire?
Sinon...
M. Thibodeau: Je ne sais pas si mes collègues sont en
mesure de le faire. Moi, je ne m'aventurerai pas à risquer un
pourcentage. Mais, d'un autre côté, que ce soit dans le
système qui est proposé par le gouvernement ou que ce soit dans
celui que nous proposons, si plus de locataires ont à être
protégés, on peut penser que, de toute façon, il risque
d'y avoir une augmentation de la bureaucratie. Si 20% ou 25% des locataires se
plaignent avec le système actuel, cela va transformer un peu le
système de la régie dans le sens de l'augmentation du nombre de
fonctionnaires aussi, je présume.
M. Paquette: Etant donné qu'il y a aussi
différentes...
M. Simard: Est-ce que je peux ajouter quelque chose
là-dessus?
M. Paquette: Oui.
M. Simard: Je pense que le problème, c'est que ni vous ni
moi ne pouvons, d'après ce que j'ai pu constater, se fonder sur des
études qui permettraient d'évaluer cet aspect administratif de la
question. Une chose est certaine, c'est que le fait que l'administration
actuelle soit restreinte, d'une certaine façon et si on regarde
les chiffres par rapport à l'Ontario, c'est déjà
passablement gonflé par rapport aux services qui sont donnés
comparativement à ce qui est donné en Ontario ce qu'on
peut dire, c'est que si les locataires et on semble vouloir, à
travers la loi, faire en sorte qu'il y ait plus de locataires qui y aient
accès, par une politique d'information et qu'ils défendent mieux
leurs intérêts dans ce cas, les recours à la
régie seront d'autant plus gonflés et d'autant plus
problématiques sur le plan de l'aspect administratif et
bureaucratique.
Ce qu'on dit, d'autre part, c'est qu'un recours obligatoire ferait en
sorte, par exemple, que dans le dossier d'un immeuble, quand il est
apporté devant la régie, à ce moment-là, il y
aurait une seule étude sur les coûts associés à cet
immeuble qui seraient répartis sur tous les logements au lieu de faire
en sorte, aujourd'hui, plus ou moins selon le bon vouloir des administrateurs
qui entendent un plus ou moins grand nombre de locataires dans un même
immeuble à la régie, que, souvent, les logements d'un même
immeuble passent plusieurs fois la même année devant la
régie. Ceci est un point de vue administratif vraiment peu
économique pour le moins.
Je pense qu'en examinant les questions comme l'informatisation du
traitement des données, il y a possibilité d'aller passablement
plus loin qu'actuellement en systématisant l'application de la formule.
D'après ce qu'on peut voir dans les données, il y a, je ne sais
pas dans quelle proportion, mais il y a un bon nombre d'administrateurs qui
fixent les loyers selon leur vouloir, sans s'en tenir à la formule.
M. Paquette: On pourrait espérer qu'en inversant la
démarche du côté du propriétaire, il y aurait une
certaine limitation des hausses abusives, et que cela pourrait entraîner
une acceptation tacite, même explicite, d'un plus grand nombre de
propriétaires, ce qui ferait que les causes ne se rendraient pas,
peut-être en majorité, devant la régie.
M. Limonchik: Et même envisager l'hypothèse, par le
renversement des rapports de force, qu'il y en aurait peut-être moins.
C'est peut-être pour cela qu'il y a moins de fonctionnaires en Ontario.
C'est peut-être cela...
M. Paquette: Oui, mais il faut dire qu'en Ontario, sauf erreur,
ils s'occupent uniquement du contrôle des loyers et non pas des autres
aspects en termes de rénovation, d'éviction. Ils s'occupent
seulement du contrôle des loyers en Ontario et cela, c'est difficile
à comparer.
M. Limonchik: Non, mais au niveau du loyer...
M. Paquette: Oui.
M. Limonchik: ... si on change le rapport de force,
peut-être que cela pourrait dissuader certains propriétaires
d'agir dans un sens par rapport à un autre. On pourrait donc envisager
même l'hypothèse d'une diminution des causes.
M. Paquette: En termes...
Le Président (M. Laplante): Est-ce encore une courte?
M. Paquette: J'en ai plusieurs.
Le Président (M. Laplante): C'est qu'on n'aura pas le
temps de les poser, il faut passer à l'autre absolument pour la
présentation de son mémoire, parce qu'il nous restera à
peu près 1 heure 15, 1 heure 30, ce qui convient pour deux
mémoires.
M. Paquette: Oui, je vais poser une autre question sur le
même sujet dans ce cas. Etant donné le fait qu'il y a beaucoup de
petits propriétaires qui habitent leur logement, qui sont souvent des
travailleurs qui n'ont pas nécessairement une instruction plus grande
que celle de leurs locataires, dans ces cas-là, dans certains cas, en
tout cas, on peut dire que le rapport de force est à peu près
égal dans les deux sens. Seriez-vous d'accord qu'on exclue les petits
immeubles où le propriétaire habite de cette inversion du fardeau
de la preuve ou pensez-vous que, même dans ces cas, on doive le
maintenir?
M. Simard: Je pense qu'il y a un certain... C'est une question
délicate, bien sûr, du fait que la situation économique des
petits propriétaires, comme on le dit souvent, n'est pas tellement plus
favorable que celle des locataires, mais quand on dit que le rapport de force
que vous semblez souligner est un peu lié au statut économique du
propriétaire et du locataire, je crois qu'il est plutôt lié
au mécanisme, à la structure du marché immobilier, ce qui
fait que le propriétaire est plus ou moins en situation de monopole et
que le locataire est tout à fait dépendant vis-à-vis du
marché, que ce soit le petit propriétaire ou le grand
propriétaire. (12 h 45)
D'autre part, quant à l'éliminer, le ministre soulignait,
au début, dans la matinée, qu'il y a une inversion, si on veut,
en termes de hausse, demander un rapport inversement proportionnel par rapport
à la dimension de l'immeuble et la hausse de loyer demandée. Les
études démontrent qu'effectivement, chez les petits
propriétaires, on est aussi exigeant, sinon plus, que dans le cas de la
grosse propriété.
Il y a le fait également... J'abrège. On me dit que,
souvent, il y a de meilleures relations entre locataires et
propriétaire, mais, inversement, il y a le fait aussi qu'étant
donné qu'ils sont présents jour après jour, il y a le
facteur d'intimidation qui joue énormément, du fait que
propriétaire-propriétaire, locataire-locataire sont côte
à côte. Ils ne sont pas...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Verdun.
M. Paquette: Une dernière question, si vous permettez.
Le Président (M. Laplante): Je n'ai à peu
près plus de temps, parce que le ministre veut faire sa réplique
dans tout cela. Je m'excuse, mais une petite vite.
M. Caron: J'aimerais demander à cet organisme s'il a des
chiffres, des statistiques pour voir dans quel pourcentage le
propriétaire abuse ou prend avantage du locataire. Est-ce que vous avez
des statistiques?
M. Simard: On a de bons indices, enfin, quelques indices, c'est
difficile à évaluer, mais on mentionnait l'étude de
Matthews sur les coûts-bénéfices, les effets de
répartition entre locataire et propriétaire, où, selon des
hypothèses très conservatrices, quant à la production des
logements, même qu'on disait que les locataires se faisaient retirer pour
dix ans, sur une période de dix ans, quelque chose comme $830 millions,
comparativement à $250 millions, qui impliqueraient la gestion du
contrôle. On sait aussi que si les contrôles étaient
appliqués systématiquement à toutes les hausses abusives,
dites de plus de 10%, l'augmentation moyenne passerait de 8% ou 9% à
5,7%. Donc, on a un bon nombre d'indices.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, pour le mot de
la fin.
M. Caron: Une petite minute, s'il vous plaît! Le
pourcentage, est-ce que ce serait 5%, 10%, 15%, 20%, 30% de
propriétaires?
M. Simard: Qui abusent?
M. Caron: Oui, ou qui prennent avantage.
M. Simard: Je n'ai pas idée de venir là-dessus.
Quant à nous, c'est plutôt le principe même qui permet au
propriétaire d'exploiter la rareté du logement. C'est bien
sûr qu'il y en a qui sont dans des situations où ils sont capables
de le faire, ou bien selon la situation du marché.
Le Président (M. Laplante): Merci. M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, une courte question. Est-ce
que je dois comprendre, à la suite des nombreuses
références qui ont été faites au système
ontarien, qu'on préconiserait au RCM finalement l'utilisation d'un taux
fixe?
M. Simard: Pour nous, c'est simplement une démonstration
qu'il y a possibilité d'aller à peu de
frais plus loin qu'avec le statu quo actuel. On pourrait critiquer
également le système tel qu'il est administré actuellement
en Ontario. Je ne pense pas qu'on ait à s'engager dans toutes sortes de
débats là-dessus.
M. Tardif: Vous êtes conscient qu'un taux fixe peut avoir
un effet inflationniste?
M. Simard: S'il est fixé à un taux très
élevé, comme en Colombie-Britannique, où on l'a
déjà fixé à 10,6%, c'est bien sûr que cela a
un effet inflationniste, mais il pourrait être fixé passablement
plus bas.
M. Tardif: Quand on sait que les taxes sont la principale
composante de l'augmentation et que les taxes en 1977 au Québec
représentaient, en fait, 24% de l'augmentation accordée, comme
poids, évidemment, l'idée d'un taux fixe qui serait
généralisé ne tiendrait pas compte des différences
d'augmentation de taxes. Je veux seulement vous donner une indication. Ici, en
1977, dans une municipalité au Québec, il y a eu une baisse de
taxe de 50%, et, dans une autre, une augmentation de 52%, et vous avez la gamme
de moins de 50% à plus de 52%, avec une moyenne d'augmentation...
M. Scowen: A moins 50%, je veux déménager tout de
suite.
M. Tardif: ... avec évidemment tout l'éventail. Un
taux fixe ne tiendrait pas compte, forcément, de ces disparités
dans le taux de taxation et pourrait donc entraîner des augmentations de
loyer, alors qu'elles ne sont pas justifiées, en tout cas, pour une
composante. Je prends celle-là, d'accord.
M. Simard: II y aurait possibilité de régionaliser
les taux par un traitement informatique, et tout.
M. Tardif: D'accord. Remarquez que le système actuel va
plus loin que cela. Non seulement il permet de régionaliser, mais il
permet d'individualiser. C'est aussi une donnée importante.
Je voudrais dire ceci: On a fait référence à un
document de travail qui a été fait à ma demande,
d'ailleurs. Des études ont été commandées, comme
celles de Mathews et Godbout, de l'INRS Urbanisation. Ce sont des documents de
travail, que le RCM, de toute évidence, a eu en sa possession et a en sa
possession, qui impliquaient quoi? Ils impliquaient, dans les faits, une
espèce de changement d'ordre structurel dans le mode non seulement de la
production, mais surtout de l'approbation et de la gestion du stock de
logements au Québec.
J'ai pris bonne note des remarques de M. Thibodeau qui dit: Nous, on ne
veut pas de transformations brutales. On conçoit qu'il est normal de
procéder par étapes. Alors, si on regarde la situation, il y a
quand même à peu près 2 millions de logements au
Québec. A peu près la moitié sont des logements de type
locatif. On constate que le secteur coopératif et le secteur public ne
gèrent ou, enfin, n'administrent qu'à peu près 4% ou 5% de
ces logements. On est bien conscient qu'on est loin encore de l'objectif qui
viserait à changer le mode d'approbation et de gestion de ces logements.
C'est peut-être sur d'autres leviers qu'il faut agir que strictement par
le biais d'une méthode de contrôle. C'est tout ce que je voulais
dire à ce stade-ci. On poursuit ces objectifs, mais je pense qu'il ne
faut pas demander à la loi 107 de faire autre chose que ce qu'elle
était destinée à faire, c'est-à-dire éviter
les abus.
Le Président (M. Laplante): Merci. Sur cela, M. Simard, M.
Thibodeau et M. Limonchik, les membres de cette commission vous remercient de
votre participation.
M. Scowen: Je veux simplement savoir si le rapport confidentiel
pourrait être disponible pour les députés.
M. Tardif: II n'a jamais été confidentiel. La
preuve, c'est que les groupes en présentent long.
M. Scowen: Voilà, bon! Est-ce qu'on peut en avoir une
copie?
M. Tardif: II n'a jamais été publié. C'est
un document de travail. Je vous ai remis hier l'étude de l'INRS
Urbanisation qui est un document de travail bourré de chiffres.
M. Scowen: Est-ce qu'on peut avoir l'autre? M. Tardif: On
pourra regarder cela.
Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant
l'Association de l'immeuble du Québec.
M. Limonchik: Avant de partir, je voudrais remercier le
président de la commission de nous avoir reçus ici.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur.
M. Cordeau: ... de logements de 21 000 sur 25 000 au Canada.
Serait-ce que le Québec aurait été favorisé par
Ottawa?
M. Tardif: Non, on parle de reprises de possession. Serait-ce
qu'il y a plus de mauvaises...
Le Président (M. Laplante): Voulez-vous laisser la place,
s'il vous plaît, pour qu'on puisse entendre l'Association de l'immeuble
du Québec?
Une Voix: Est-ce que ce serait possible d'avoir une idée
de l'horaire de la commission pour les groupes qui restent à
comparaître?
Le Président (M. Laplante): Les autres groupes vont
comparaître cet après-midi avant 18 heures.
Une Voix: Avant 18 heures?
Le Président (M. Laplante): Oui, madame.
Une Voix: Je vous remercie.
Le Président (M. Laplante): Pour celle qui me posait la
question tout à l'heure, on va ajourner à 13 heures sine die, ce
qui veut dire qu'après la période des questions de
l'Assemblée nationale vous reviendrez ici et c'est là qu'on
terminera les travaux.
Une Voix: Est-ce qu'on ne pourrait pas aller dîner
maintenant et commencer notre exposé après le dîner au lieu
de prendre dix minutes?
Le Président (M. Laplante): J'allais demander le
consentement des membres pour dépasser un petit peu, justement, pour ne
pas vous nuire dans votre exposé. Vous auriez le temps, si on consentait
à retarder de cinq ou six minutes, de...
M. Tardif: Faire votre exposé.
Le Président (M. Laplante): ... faire votre exposé.
Après cela, ce sera la période de questions.
Si vous voulez vous identifier et identifier le groupe que vous
représentez, s'il vous plaît! On demande ordinairement à
tous les groupes de synthétiser leurs mémoires pour les
présenter à l'intérieur de 20 minutes. S'il vous
plaît, messieurs!
Association de l'immeuble du Québec
M. Pilote (Philippe): Nous tenons tout d'abord à vous
remercier de bien vouloir nous entendre à propos du projet de loi 107.
J'aimerais me présenter, mon nom est Philippe Pilote, de Chicoutimi. Je
suis président de l'Association de l'immeuble du Québec. Nous
avons, à droite, notre relationniste, M. Henri Robert et M. Ronald
Mar-coux, vice-président et président du comité de
législation; nous avons M. Gaétan Marquis, le porte-parole du
groupe ainsi qu'administrateur et qui a fait partie du comité de
législation; à ma gauche, M. André Daoust, directeur
général de l'Association de l'immeuble du Québec.
Notre association est incorporée en vertu de la troisième
partie de la loi des compagnies. Elle regroupe toutes les chambres d'immeubles
à travers la province. Elle atteint cette année son 25e
anniversaire d'existence.
Dans le mémoire que nous avons l'honneur de vous soumettre, nous
avons la conviction de défendre avant tout les intérêts du
public locataire en même temps que ceux des membres de notre association.
Nous craignons que le projet de loi 107 n'aille à l'encontre des
objectifs du gouvernement en faveur des locataires. En effet, il contribuera
à brève échéance à une raréfaction
des logements sur le marché et à une décrépitude
accrue du parc résidentiel du Québec.
Il pourrait aggraver et malheureusement, le processus est
déjà commencé le marasme dans les mises en chantier
des habitations multiples et des opérations d'entretien, d'où un
chômage grandissant à une époque où la relance
économique est impérative. Sans entrer dans le détail des
complexités de la loi, nous sommes d'avis que le véritable
problème du logement réside dans l'incapacité d'une partie
de la population de payer des loyers suffisants. Une aide financière
à son intention s'impose. Des mesures coercitives et
antiéconomiques au détriment des propriétaires n'y
changeront rien.
De plus, le taux de vacance assez élevé actuellement ne
justifie nullement l'intervention généralisée d'une telle
régie. Sans nier les bonnes intentions du gouvernement à ce
sujet, nous avons cependant la conviction que le projet de loi passe à
côté du problème. En mettant l'entreprise privée en
difficulté, il ne défend aucunement le public. Il est souvent
contraire au respect de la libre entreprise, dont le gouvernement s'est maintes
fois fait le défenseur à propos des petites et moyennes
sociétés dont nos 5000 membres font d'ailleurs partie.
Je passe maintenant la parole à M. Gaétan Marquis, qui
analysera pour vous les détails de notre mémoire. M. Marquis.
M. Marquis (Gaétan): M. le Président, membres de la
commission.
L'objectif général d'une politique cohérente de
l'habitation, tel que défini par le groupe de travail dirigé par
M. Legault, avait donné comme définition ou comme objectif de
faire en sorte que tous les Québécois puissent disposer d'un
logement adéquat à un prix abordable et situé dans un
environnement favorable. La démarche que notre association entreprend
aujourd'hui est basée sur le principe que nous sommes entièrement
d'accord que tous ont droit à la santé, à
l'éducation, au logement et à la nourriture, et notre
démarche est peut-être la plus égoïste de toutes les
associations qui vont se présenter devant vous parce qu'on pari du
principe que si ces buts ne sont pas atteints, on va avoir un conflit de
classes, une lutte de classes continuelle et qu'on ne pourra pas atteindre la
paix sociale. On aimerait penser que le gouvernement va continuer à
vouloir laisser une prime à l'effort et à l'initiaive et on
voudrait pouvoir continuer à mériter un revenu dans la province
de Québec à la mesure de nos efforts.
Dans le livre blanc sur les relations entre locateurs et locataires, le
ministre des Affaires municipales voulait promouvoir une plus grande harmonie
dans les relations entre locateurs et locataires et aussi en visant à
assurer au locataire le droit au maintien dans les lieux. En vue de
réaliser ces objectifs, le gouvernement propose une loi qui modifie
certains articles du Code civil concernant le logement, en réglementant
la qualité, la conservation, la restauration du stock de logements et en
instituant la nouvelle Régie du logement. (13 heures)
On a discuté dans des mémoires précédents ou
à d'autres niveaux lorsqu'on a attaqué le problème du
logement à savoir si l'entreprise privée était à
même de relever le défi et de combler ou de fournir ce service. Je
me réfère encore une fois au rapport Legault qui disait en
introduction: "Jusqu'ici, l'entreprise privée à but lucratif est
apparue comme le principal intervenant dans l'exploitation des terrains et dans
la production et la gestion des logements. Dans le contexte économique
actuel, le groupe de travail sur l'habitation reconnaît l'importance de
ce rôle et la nécessité d'utiliser le dynamisme et le
savoir-faire propre à ce type d'entreprise. Il est normal que de tels
services appellent une juste rémunération, mais le gouvernement
doit veiller à enrayer les abus. Il devra, par ailleurs, s'assurer que
ses interventions n'éliminent pas les petits constructeurs et les petits
propriétaires."
Parmi les modalités d'application ou les différents
aspects de la loi, on aimerait vous formuler certaines inquiétudes,
entre autres en ce qui a trait à la conversion du stock de logements.
Vous allez donner à un administrateur une charge et une
responsabilité que nous ne lui envions pas, parce que vous allez lui
demander de juger, dans les cas de démolition, sur des critères
tels que l'état du logement, le préjudice causé aux
locataires, les besoins de logement dans les environs, la possibilité de
relogement des locataires, la détérioration de l'apparence
architecturale, la détérioration du caractère
esthétique, la détérioration de la qualité de vie
du voisinage, le coût de la restauration et tout autre critère
pertinent.
J'ai l'impression qu'il vous faudra un surhomme, plus le fait que tous
ces critères sont extrêmement subjectifs.
De plus, le projet de loi permet à tout intéressé
de s'objecter à une telle démolition ou de se présenter
devant le conseil municipal ou, éventuellement, devant la régie
en affirmant qu'il est intéressé à acquérir ledit
immeuble pour lui conserver son caractère locatif. On peut vous faire
part de certains cauchemars, de certaines organisations ou de certaines
personnes qui vont, tout simplement pour faire une entrave au changement de
vocation d'une propriété qui pourrait être
extrêmement désirable, empêcher ou retarder ce changement.
Lorsque, soixante jours plus tard, les gens se représenteront devant les
autorités compétentes pour juger de ce litige et qu'on sera
obligé de mentionner: Malheureusement, on n'a pas pu s'entendre, on
s'embarquera alors dans le processus qui arrivera à une décision
si, oui ou non, la nouvelle vocation est utile. A ce moment-là, le
propriétaire qui considérait cela aura non seulement perdu le
loyer, si jamais il l'avait conservé inhabité pendant ce temps,
mais aura possiblement un délai pour se prévaloir de son
financement pour faire la transformation, lequel pourra être
expiré, ou, pis encore il pourra avoir perdu son immeuble au
créancier hypothécaire ou aux autorités municipales.
Lorsqu'on parle et il semble que c'est là qu'est le
problème de transformation ou de conservation de loyers à
prix modique pour les familles à revenu moyen ou faible, nous nous
référons encore, ici, à la recommandation que formulait M.
Louis Pretty, de l'école d'architecture de l'université dans le
cadre du groupe de travail de l'habitation, qui disait: "L'un des moyens qui
permet de s'assurer que les logements existants demeurent accessibles à
la population du quartier est de faire en sorte que celle-ci en devienne
propriétaire." Il est recommandé qu'on encourage et qu'on aide
fortement les citoyens des quartiers populaires à acquérir et
à restaurer les logements existants sous forme de coopératives,
de corporations sans but lucratif ou en tant que petits
propriétaires.
L'intention ou la philosophie de notre mémoire vous allez
le réaliser à mesure qu'on va avancer n'est pas surtout de
dire: Votre loi nous plaît ou ne nous plaît pas, nous pensons que
si la proportion de 20% de propriétaires et de 80% de locataires
était inversée, le problème n'existerait même plus
à savoir s'il faut rétablir l'équilibre des forces.
D'ailleurs, le groupe de travail recommandait aussi qu'une subvention
correspondant au moins à 50% du coût des travaux admissibles de
restauration soit accordée au propriétaire et que des subventions
représentant 100% des coûts, mais ne dépassant pas $500 par
bâtiment démoli et déblayé, soient versées au
propriétaire et qu'une subvention équivalant à 100% de
l'évaluation municipale du bâtiment démoli soit
accordée au propriétaire en vue de la démolition et de la
reconstruction de logements. Il est évident que si on parle de
démolition, on ne parle pas de réduire le parc d'habitations,
mais plutôt une démolition dans le but si,
évidemment, le bâtiment en question n'est plus assujetti à
être rénové économiquement, si c'est plus
économique de faire de nouveaux logements sur ce site.
Il y a deux aspects de la loi qui nous inquiètent fortement: le
premier est l'interdiction de fractionner ou de vendre individuellement des
immeubles ayant déjà fait partie d'un ensemble. Disons que, tout
simplement, à titre de référence, je vais vous citer Mme
Claire McNicoll-Robert, directeur du module de géographie de l'UQAM, qui
a participé à l'achat d'une maison qu'on s'est subdivisée
entre plusieurs propriétaires. En parlant du cas de cette interdiction,
elle dit: "Pour avoir tenté de régler un problème
particulier, celui du projet Val-Martin, le gouvernement n'a réussi
qu'à décourager des citoyens qui, dans la limite de leurs moyens
souvent modestes, tenteraient de substituer une épargne au paiement du
loyer mensuel. Ce genre de législation pénalise le plus grand
nombre à cause des abus notoires de quelques-uns." Là on parle
d'immeubles existants. On pourrait de plus se représenter le
constructeur de duplex qui construit, pour une raison économique, six
immeubles adjacents et que, en attendant de trouver preneur ou
acquéreur, il loue. C'est la pratique, assez souvent, que le
constructeur de duplex loue le haut parce que, habituellement, il s'attend que
l'acquéreur veuille habiter le bas et se trouver un locataire. A ce
moment, dès qu'une
unité aura été louée, le constructeur en
question ne pourrait plus les vendre séparément, à moins
d'aller chercher la bénédiction de l'administrateur de la
Régie des loyers. A ce moment, l'administrateur, avant de décider
s'il lui laisse fractionner ou vendre ces immeubles séparément,
va, encore une fois, devoir prendre en considération l'effet de la vente
sur les locataires, le nombre de locataires qui pourraient être
évincés, l'individualisation des services, des accessoires et des
dépendances, les conditions de financement, le fait que l'immeuble a
été construit ou restauré dans le cadre d'un programme
gouvernemental, et tout autre critère pertinent.
L'autre aspect qui nous inquiète énormément, c'est
la continuation du moratoire sur la transformation d'immeubles existants en
condominiums. Encore une fois, j'aimerais vous citer Mme Florence Junca-Adenot,
vice-doyen de la faculté des sciences économiques de
l'Université du Québec, qui, dans un éditorial l'automne
dernier, sous le titre: "Le moratoire sur la transformation des immeubles
anciens en copropriétés: une loi aveugle", disait, entre autres,
qu'on ne pouvait nier une forme de propriété qui offre
l'avantage, pour une certaine partie de la population, d'accéder
à la propriété à des prix plus abordables qu'en
occupant une maison unifamiliale; l'avantage de rendre plus de gens
responsables du logement qu'ils occupent, parce que ce logement leur appartient
et qu'ils sont plus motivés à l'entretenir; l'avantage pour
l'individu de capitaliser ces sommes versées mensuellement en loyer;
l'avantage pour les copropriétaires d'organiser et de se doter de
services essentiels ou récréatifs en partageant les coûts
comme les plaisirs; l'avantage d'utiliser un espace ou une surface de terrain
moindre qu'une zone résidentielle pour bâtir des maisons
unifamiliales pour un plus grand nombre de propriétaires occupants;
cette augmentation de propriétaires permettant des économies aux
municipalités, et l'avantage de rentabiliser à moyen terme le
coût de construction et d'opération d'un immeuble
d'habitation.
Il faut permettre aux gens à faible revenu d'occuper des
logements convenables et de leur fournir ces logements en nombre suffisant.
Maintenir la quantité et la qualité du parc locatif est
intéressant, mais je pense que le gouvernement, plutôt que de
continuera fournir une béquille telle que la Régie des logements
devrait plutôt inciter les gens à devenir propriétaires de
leur logis, à contrôler leur destinée et à devenir
des gens vraiment intéressés et implantés et des citoyens
de première classe.
On croit que la copropriété est une forme d'occupation
très souhaitable et qu'elle devrait être permise à plus de
gens.
Il y a certaines modifications au Code civil qu'on croit
extrêmement préjudiciables. Je vais en souligner quelques-unes.
Entre autres, à l'avenir, le locateur devra remettre un écrit au
nouveau locataire lui disant l'ancien coût du loyer. Il est
évident que si le nouveau locataire n'est pas satisfait, il va se
présenter à la régie et on croit que les administrateurs
de la régie vont être des hommes éclairés et que la
justice sera rendue éventuellement.
On a peur que l'absence d'explications ou l'absence de services ou de
conditions qui avaient déterminé ce qu'était l'ancien
loyer fasse qu'il y ait un nombre extrêmement élevé de
locataires qui s'adressent à la régie pour des raisons du genre
et que, finalement, on se retrouve avec une bureaucratie encore plus haute.
Il y a un autre article qui nous inquiète
énormément. La nouvelle loi veut faciliter le dépôt
du loyer auprès de la régie. Cette clause, cette technique existe
déjà dans le Code civil alors qu'une personne qui se croit
lésée peut déposer son montant au lieu de se faire justice
elle-même. Du fait que cela devienne plus facile et plus
général, on va encore une fois vous faire part d'un cauchemar.
Certaines organisations militantes peuvent convaincre la totalité des
locataires d'un immeuble d'aller déposer leur loyer auprès de la
régie parce que la porte d'en avant grince et que lorsque,
éventuellement, le jugement sera rendu et que l'argent sera remis au
propriétaire, celui-ci sera peut-être devenu la
municipalité ou l'ancien créancier hypothécaire.
J'aimerais passer directement à nos recommandations.
Le Président (M. Laplante): II vous reste une minute pour
les faire, monsieur.
M. Marquis (Gaétan): Est-ce qu'on peut les reporter au
début de la prochaine période?
Le Président (M. Laplante): La prochaine période
sera pour les questions. Chacun des membres de cette commission, autant les
membres de l'Opposition que du parti ministériel, a lu le...
M. Marquis (Gaétan): Cela va. Au niveau des
recommandations, il est évident que notre première recommandation
serait l'abolition pure et simple ou un décontrôle progressif,
suivant les normes que nous citons dans le rapport. Dans nos recommandations
concrètes, ce serait d'aider par une allocation sociale ou une
subvention toute personne dont le revenu est si bas qu'il ne lui permet pas de
se payer un logement; d'encourager par des mesures incitatives la construction,
la conservation, la restauration du "stock" de logements, permettre de
faciliter le plus tôt possible l'accès à la
copropriété, même dans les immeubles existants, et
favoriser l'achat d'immeubles locatifs par des individus, des corporations sans
but lucratif et des coopératives; enfin, d'adopter une loi qui, d'une
façon souple et sommaire, permette vraiment aux locateurs et aux
locataires, d'abord de négocier un véritable contrat de location
et ensuite de se parler et de s'entendre et s'ils ont des difficultés,
de s'en référer à un tribunal objectif. (13 h 15)
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur, de votre
coopération, mais soyez certain, lorsque
la période de questions commencera, cet après-midi, que
vous allez revenir automatiquement à votre mémoire et à
vos conclusions.
Sur ce, les travaux sont ajournés sine die, en attendant l'ordre
de l'Assemblée nationale, cet après-midi, pour se réunir
à nouveau, ici, dans la même salle.
M. Marquis (Gaétan): Avez-vous une idée de
l'heure?
Le Président (M. Laplante): Cela peut aller vers quatre
heures et quinze minutes, à peu près.
M. Marquis (Gaétan): Merci. Fin de la séance
à 13 h 16
Reprise de la séance à 16 h 35
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît, mesdames et messieurs. A l'ordre, s'il vous plaît. M. le
député de Taschereau, on commence.
La commission des affaires municipales se réunit pour recevoir
les mémoires en vue de l'étude du projet de loi no 107, Loi
instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres
dispositions législatives.
Les membres de cette commission: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron
(Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes); M.
Gratton (Gatineau) remplacé par M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce);
M. Guay (Taschereau), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Roy
(Beauce-Sud), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie).
Intervenants: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau (Verchères), M.
Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Gold-bloom (D'Arcy McGee), M. Lacoste
(Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle), M. Samson
(Rouyn-Noranda); M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) remplacé par M.
Lavoie (Laval); M. Vau-geois (Trois-Rivières). Au moment où nous
nous sommes quittés ce midi, nous étions avec l'Association de
l'immeuble du Québec et, M. le ministre, vous étiez prêt
à commencer la période des questions. M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, j'ai lu attentivement le
mémoire de l'Association de l'immeuble du Québec. Je puis assurer
les représentants de cet organisme, même s'ils n'ont eu, comme les
autres, qu'une vingtaine de minutes pour faire leur présentation, que
j'ai parcouru, et annoté ce mémoire en me posant,
évidemment, au cours de la lecture, un certain nombre de questions,
notamment lorsqu'on affirme que le contrôle des loyers, tel que
présenté dans la loi 107, va conduire à une
raréfaction du nombre de mises en chantier et de logements,
forcément, et à une certaine décrépitude du stock
de logements existant.
La question, en fait, que je pose, c'est sur quoi s'appuie cette
affirmation. Est-ce qu'elle est basée on fait parfois un lien,
mais ce n'est pas très clair sur ce qu'on évoque à
la page 23 de votre mémoire, soit des contrôles qui auraient
existé ailleurs? Est-ce que c'est là-dessus essentiellement que
vous vous fondez?
M. Marquis (Gaétan): Nous en sommes arrivés
à cette conclusion à la suite de nombreuses lectures sur les
expériences de la Suède, de New York, de Paris et aussi à
la lumière des rapports du groupe de travail, du groupe Legault, qui
arrivait, dans ses remarques d'ouverture du mémoire, exactement à
ces conclusions.
M. Tardif: Ces nombreuses lectures, vous les avez lues dans le
texte ou vous ont été rapportées par d'autres?
M. Marquis (Gaétan): Vous voulez dire dans le texte du
rapport Legault?
M. Tardif: Non, les nombreuses lectures sur les contrôles
des loyers en France, en Suède, en Angleterre, en Autriche, que vous
citez page 23...
M. Marquis (Gaétan): Oui.
M. Tardif: A quelle étude exactement vous
référez-vous?
M. Marquis (Gaétan): Vous avez la bibliographie
complète dans les dernières sept ou huit pages du mémoire.
Disons que, en particulier, je vous référerais à la
publication de l'Institut Fraser: "Rent control, a popular paradox" et je vous
référerais à M. Selesnik: "Rent control, a case for".
M. Tardif: D'accord, je voulais m'assurer que les
références que vous faites aux situations
étrangères proviennent de cette source qu'est le rapport du
Fraser Institute.
M. Marquis (Gaétan): Oui.
M. Tardif: Très bien. Or, effectivement ce rapport du
Fraser Institute est un recueil de textes, ce qu'on appelle en anglais un
"reader", une collection de textes qui fait état de contrôles de
loyers, tels qu'ils ont existé dans les différents pays
mentionnés.
Dans le cas de la France, on s'appuie sur la situation du logement telle
qu'elle existait au lendemain de la guerre, en 1946, où le ratio
loyer-revenu était de 1,7%. A toutes fins utiles c'est un gel des loyers
et les loyers étaient gratuits.
On cite également un rapport de M. Hayek, prix Nobel dit-on, mais
qui aurait écrit sur la situation du gel des loyers parce que
c'était un gel qui existait à ce moment-là en
Autriche, en 1929, en pleine crise économique. On admettra que ce n'est
pas très récent comme étude.
Une Voix: ...
M. Tardif: Un instant, j'y arrive, M. le Président.
On cite également dans cette étude l'étude de
Milton Friedman et de George Stigler, écrite en 1946, sur la situation
aux Etats-Unis et l'étude de Bertrand de Jouvenel, en France, en 1948,
etc., et évidemment l'étude sur la situation en Angleterre,
article écrit par Frank Paish en 1952.
On constate, outre le fait que ces documents datent, qu'il s'agit de
contrôles qui étaient véritablement, à toutes fins
utiles, des gels des loyers; ce qui n'est évidemment pas le cas
je vous inviterais à assister aux présentations des autres
groupes qui vont venir après vous vous devez vous rendre compte
que, dans le projet de loi 107, il n'est pas question d'un gel des loyers.
M. Marquis (Gaétan): On en est conscient, M. le
ministre.
M. Tardif: De sorte que lorsqu'on compare la situation
décrite dans le rapport du Fraser Institute, qui est un recueil
d'articles, avec ce qui est prévu dans la loi no 107, on ne compare pas
des choses pareilles.
Le deuxième élément de la question, en fait, c'est
plutôt sous forme de question. Qu'est-ce que vous diriez s'il vous
était démontré, comme le soutiennent d'autres
économistes et notamment Mathews que vous avez cité à un
moment donné, qui a été évoqué dans
certaines des études, que le contrôle souple des loyers, au
contraire, favorise l'offre nouvelle de logements plutôt que de la
défavoriser? Qu'est-ce que vous répondriez à cela?
M. Marquis (Gaétan): C'est la première fois que
cela nous est mentionné et je ne vois pas logiquement comment cela
pourrait la favoriser, mais si cela a été mentionné, c'est
possible.
M. Tardif: Vous n'avez pas l'impression que justement pour
employer un de vos arguments dans le rapport à un moment
donné le contrôle des loyers peut amener une certaine
immobilité des locataires et qu'à ce moment-là les
nouveaux ménages devront forcément peut-être s'adresser au
stock neuf de logements et qu'il pourrait y avoir une incitation à
produire ce stock neuf? Surtout que le stock neuf n'est pas
contrôlé pendant cinq ans. C'est une hypothèse.
M. Marquis (Gaétan): II reste qu'il y a une grosse
différence de coût à ce moment-là entre le stock
neuf et le stock existant, mais c'est possible.
M. Tardif: C'est une hypothèse.
M. Marquis (Gaétan): C'est une hypothèse.
M. Tardif: D'accord, j'ai pris note d'un certain nombre de points
comme cela dans votre rapport. Je ne veux pas évidemment monopoliser
tout le temps de la commission, voulant laisser aux autres membres le soin de
poser des questions, mais il y a des affirmations que je ne peux
m'empêcher de relever. Par exemple lorsqu'on dit qu'un
propriétaire, un promoteur, un développeur ne pourra plus
bâtir des duplex en série, par exemple, 7 ou 8 duplex, parce qu'il
ne pourra plus les vendre par la suite.
Si vous lisez l'article 38 ce n'est pas cela qui est dit. Pardon!
M. Marquis (Gaétan): Les vendre individuellement.
M. Tardif: Oui, c'est faux ce que vous avez affirmé
là.
M. Marquis (Gaétan): A moins qu'il demande l'approbation
de...
M. Tardif: Absolument pas, vous avez lu l'article 38?
M. Marquis (Gaétan): Oui, cela dit... M. Tardif:
Qu'est-ce qu'il dit l'article 38?
M. Marquis (Gaétan): Pour 12 et plus, s'il y a un certain
nombre de services en commun. Entre autres, ce qui nous semble
général et dangereux, c'est si cela fait partie d'une même
unité administrative. A ce moment-là, dès qu'ils ont
appartenu au même propriétaire, ils font partie d'une même
unité administrative. Alors, pour les fractionner ou les vendre
individuellement il va falloir aller demander la bénédiction de
l'administrateur des loyers.
M. Tardif: On parle d'édifices qui sont dotés de
services en commun, c'est bien cela, "si certains d'entre eux...", parce que
c'est cumulatif cela. Si ces immeubles... pardon!
M. Marquis (Gaétan): Situé à
proximité.
M. Tardif: C'est cela. Si ces immeubles sont administrés
de façon commune par une même personne ou par des personnes
liées au sens de la loi sur les impôts, etc., et si certains
d'entre eux ont en commun un accessoire, une dépendance ou, à
l'exclusion d'un mur mitoyen, une partie de la charpente. On parle donc
d'édifices qui sont liés structurellement, pas d'édifices
qui peuvent être autonomes. Votre personne qui bâtit une
série de duplex les uns à côté des autres pourrait
très bien les vendre, peu importe le nombre d'entre eux, à partir
du moment où ces immeubles ont été construits et
conçus de façon autonome. (16 h 45)
La restriction ne vise pas du tout ce que vous mentionnez, elle vise les
édifices qui ont en commun une structure: par exemple, un toit unique
qui couvre quatre logements, qui n'a pas de mur mitoyen ou de coupe-feu. Ceci
est interdit pour des raisons que je n'ai pas besoin de vous démontrer,
à vous qui êtes dans l'immeuble.
Ce n'est pas du tout aussi restrictif que votre texte le laissait voir.
Vous parlez de la copropriété, et nous aussi ce point nous
fatigue. J'ai évidem-
ment lu votre référence à l'article de Mme
Junca-Adenot de l'UQAM, moi aussi je l'ai lu à l'époque où
il a paru. Quand on parle de loi veugle, je me serais peut-être attendu,
d'experts en immeuble comme vous, que vous nous éclairiez.
Vous avez mentionné beaucoup d'avantages de la
copropriété. Vous êtes au courant qu'il y a
présentement des poursuites devant les tribunaux pour la plupart des
transformations qui ont eu lieu en 1974 et 1975, jusqu'à ce que le
moratoire soit imposé? D'après vous, combien y en a-t-il de ces
causes pendantes devant les tribunaux présentement?
M. Marquis (Gaétan): Je sais qu'il y en a quelques-unes,
je ne suis pas au courant du nombre exact. Je pense quand même que s'il y
a eu des abus, ou les raisons pour lesquelles ces causes ont été
amenées, il reste que, foncièrement, c'est un mode d'occupation
qui est désirable.
M. Tardif: On est d'accord sur le principe. Si je vous disais que
ce nombre de causes pendantes devant les tribunaux atteindrait, selon les
renseignements que nous possédons, à peu près une vente
sur deux, que diriez-vous?
M. Marquis (Gaétan): II y a un problème si,
effectivement, c'est cela.
M. Tardif: Remarquez, on est tout à fait d'accord sur le
principe de permettre l'appropriation de leur logement par les gens qui sont
là. On est aussi d'accord qu'il y a beaucoup de problèmes.
Là-dessus, des groupes comme vous qui avez une expérience dans
l'immeuble peuvent avoir des choses à dire; si vous avez des suggestions
ou des solutions, j'aimerais les connaître. Il faudrait que ce soit clair
en partant.
Dernière question. Vous vous opposez à l'article 1651.2
qui vise à demander aux propriétaires de communiquer aux nouveaux
locataires, l'ancien loyer. Pourquoi?
M. Marquis (Gaétan): La raison est bien simple; c'est que
vous demandez à quelqu'un de mettre un montant, sans aucune explication.
Prenez la situation théorique, par exemple, où vous êtes
propriétaire d'un duplex ou d'un quadruplex ou de quelque chose comme
cela. Vous avez quelqu'un qui a des moyens restreints; peut-être tout
simplement par charité ou par humanité, vous ne l'augmentez pas
durant un bout de temps. A un moment donné, la personne
décède ou s'en va dans un foyer pour personnes
âgées. Vous n'aviez jamais fait de redécoration ou de
ménage dans l'appartement. Le monsieur surveillait la bâtisse
pendant que vous étiez à votre chalet d'été ou quoi
que ce soit. Evidemment, lorsque vous allez vous retrouver devant
l'administrateur des loyers et que vous lui aurez expliqué tout cela, il
est probable parce qu'on pense encore que le système peut
être juste et équitable qu'il va vous accorder le loyer que
vous avez demandé.
Mais il reste que cela va occasionner un surcroît, de demandes
à la régie, qui dans la majorité des cas ne sont
probablement pas justifiées.
M. Tardif: Je voudrais poser la question. L'article du projet de
loi 107 qui fait référence à cette obligation de
dévoiler l'ancien loyer, c'est 1651.2, je crois. "Le locateur doit, lors
de la conclusion du bail, remettre à tout nouveau locataire un
écrit indiquant le loyer payé par le locataie
précédent et tout autre renseignement relatif au bail du
locataire précédent prescrit par règlement, en la forme
qui y est indiquée." Est-ce que vous aimez mieux cette formule ou la
formule du projet de loi ontarien qui est présentement devant la
Législature? C'est le projet de loi 163, article 33 qui dit ceci
je vais le lire dans le texte; évidemment, c'est en anglais, c'est
normal "Every landlord shall maintain and keep available for examination
at reasonable hours his schedule containing a brief description of each rental
unit located in the residential complex of which he is a landlord, showing
opposite thereto the current rent being charged per unit and the immediately
preceding rent that was charged for the unit and, in addition, where there is
more than one unit in the complex, shall post up conspicuously and maintain
posted a notice advising tenants, former tenants, prospective tenants and other
persons having and interest in the matter of the existence of the schedule and
when and where it may be examined."
M. Marquis (Gaétan): Ce n'était assurément
pas à cet article qu'on se référait. On se
référait à l'article 1651.2. Maintenant, l'article 1651.2,
vu que c'est un texte de loi plutôt qu'un outil pratique, on a
été obligé de présumer que ce serait sur
l'éventuelle formule obligatoire pour offrir le renouvellement ou la
prolongation d'un bail où, encore une fois, on présume qu'il y
aura un endroit pour inscrire "loyer précédent... Est-ce que sur
cette formule on aura la chance d'expliciter quels étaient les services
qui n'étaient pas donnés à l'autre locataire et auxquels
on est en droit de s'attendre aujourd'hui? On est dans la même
noirceur.
M. Tardif: Si je comprends bien, vous voudriez que, sur un
formulaire quelconque, soit la formule de bail type, il y ait un espace qui
dise: L'ancien loyer était de tant, mais voici quelles étaient
les conditions; lorsque j'allais à mon chalet l'été, le
locataire surveillait l'immeuble. Vous voulez que des conditions
apparaissent?
M. Marquis (Gaétan): Ce que je disais, c'est que ces
conditions ne seront pas explicitées et que le fait qu'il va y avoir
tout simplement un chiffre absolu, unique, va faire que ce sera impossible sur
cette formule d'expliquer les conditions exactes relatives à ce montant
de loyer vis-à-vis du nouveau loyer demandé ou des
considérations personnelles, des considérations charitables ou
quoi que ce soit, si elles peuvent exister. On continue à supposer que,
lorsque la décision de
l'administrateur va être rendue, elle va être juste, autant
pour le propriétaire que pour le locataire, mais que cela va
créer un surcroît de demandes parce que les gens ne voient pas la
logique entre l'ancien loyer; si, par exemple, quelqu'un est demeuré
dedans dix ans sans demander de peinture, que cela valait X et que là,
cela vaut X plus 1 ou X plus 2 lorsque le nouveau locataire entre dans le
logis.
M. Tardif: Merci.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Premièrement, je vous remercie de votre
mémoire, M. Daoust et vous tous. C'est un mémoire sérieux
et important, je pense. Deux petits points. D'abord, en ce qui concerne
l'article 38, je pense qu'il faut admettre, M. le ministre, que ce groupe-ci
n'est pas le premier à ne pas bien comprendre le sens de cet article. La
semaine passée, vous avez même dit que vous n'étiez pas
complètement satisfait de tous les mots et que vous aviez
peut-être l'idée de le modifier. Je pense que vous l'avez un peu
mieux exprimé aujourd'hui, mais il reste quand même que pas mal de
gens viennent devant nous avec des questions.
Je voulais simplement vous faire un deuxième commentaire, M. le
ministre, relativement à votre dernière conversation avec M.
Marquis. Sur le plan personnel, je suis en faveur de cette idée de
rendre public le loyer de chaque appartement. D'après
l'expérience que j'ai vécue dans mon comté et les
commentaires de M. Marquis, je pense qu'il faut admettre que cela va
probablement ajouter au coût du loyer pour pas mal de monde. Les deux
premiers cas que j'ai connus dans ce domaine, ce n'était pas un loyer
plus élevé que la normale qui était en cause;
c'était un spécial qui avait été accordé
à deux vieilles dames qui habitaient l'appartement depuis longtemps. Les
propriétaires auront probablement tendance à dire, maintenant que
c'est très difficile d'expliquer à tout le monde pourquoi ces
loyers sont moins élevés que les autres: "No more special". Tout
sera réglé au même niveau. Il faut peut-être y penser
un peu. Je ne sais pas si c'est quelque chose qui sera important, mais c'est un
aspect à ne pas négliger. Ce sont souvent des spéciaux qui
sont faits pour les gens qui sont moins en moyen, les personnes qui sont
là depuis longtemps.
Je veux poser surtout deux questions qui relèvent de votre
compétence spéciale, je vais me restreindre à deux. La
première, c'est peut-être un peu compliqué à
demander et j'espère que je peux l'expliquer. C'est à la page 24,
au premier paragraphe: "Si l'objectif est de permettre à chaque individu
de se procurer un logement adéquat, répondant à ses
besoins, il s'agit d'allouer à cet individu les ressources
nécessaires... La solution ici est d'accorder au locataire dont le
revenu est insuffisant une subvention." C'est la solution qui a
été proposée par la plupart des groupements de
propriétaires pour aider les personnes à faible revenu.
Mais il y a deux critiques qui sont souvent faites à
l'égard de cette solution. La première, par les
économistes, c'est que, quand vous ajoutez au revenu des personnes
à faible revenu, vous avez comme conséquence que le loyer pour
ces personnes a tendance à augmenter. Le fait que le propriétaire
sache que cette personne a maintenant les moyens de payer un taux plus
élevé a pour résultat de faire hausser le loyer.
Peut-être pourrais-je avoir vos commentaires sur ce point et sur un
deuxième qui touche la même situation; c'est que c'est souvent le
problème, non seulement de la demande pour les logements, mais de
l'offre. Moi, j'ai l'impression suivante je vous pose la question parce
que vous êtes dans ce domaine au sujet de l'offre réelle
pour une personne. Je ne parle pas de l'offre globale pour tous les
appartements; on peut parler d'un taux d'occupation de 99%, mais c'est possible
que, dans quelques endroits ou dans quelques catégories de logements, il
y ait beaucoup moins de disponibilité. Alors, comment
prévoyez-vous régler les problèmes où le
marché ne fonctionne pas dans un quartier, dans une classe de logements,
à moins que vous n'ayez, par un moyen ou un autre, une façon de
régler les distinctions, les divergences qui vont arriver par une tierce
partie?
Ces deux questions, pour moi, sont un peu liées; la
première, la question de faiblesse du fonctionnement du marché
et, la deuxième, la tendance, pour les propriétaires, à
hausser les loyers.
M. Marquis (Gaétan): En ce qui concerne votre
première question, c'est une question qui revient
régulièrement avec les économistes; le problème de
logements n'est habituellement pas une situation de marché, c'est une
situation de pauvreté; il y en a qui ne peuvent pas se permettre un
logement convenant à leurs besoins.
S'il y a quelque chose dans le mécanisme qui fait que le
propriétaire est placé dans une position où il peut
abuser, selon les moyens de la personne qui occupe le logis, je dis: "Great",
Régie des loyers et même encore plus forte qu'aujourd'hui. Je n'ai
pas d'exemple concret, mais je doute que cela puisse exister. D'un autre
côté, si certaines personnes ou certaines catégories de
personnes n'ont pas les moyens de se payer un logis convenable dans la
situation ou la conjoncture actuelle, ce serait pour le moins injuste qu'il y
ait une catégorie de citoyens qui sont aussi citoyens à
part entière qui soit obligée de les subventionner
nommément, dans ce cas-ci, les propriétaires en ne pouvant
obtenir les augmentations justes pour compenser les augmentations dans leurs
dépenses et dans leur coût de fonctionnement.
Votre deuxième question concerne certains arrondissements
où, par exemple, le marché privé ne serait pas
attiré à aller construire de nouveaux logements. Il est assez
simple d'y répondre. Il peut y avoir toutes sortes de stimulants
à la construction, mais on ne règle pas le problème de la
couche sociale qui ne peut pas se permettre la nouvelle construction. Si vous
me demandez si j'ai une solution miracle, malheureusement non.
M. Scowen: A moins que le secteur privé s'engage à
toujours maintenir dans chaque catégorie d'habitation un stock de
logements qui soit plus élevé que la demande de 3% ou 4%, pour
moi il me semble essentiel que l'Etat intervienne dans une situation de besoin
qui est aussi fondamentale, où les gens ont vraiment la
nécessité d'avoir quelque chose qui corresponde à leurs
moyens. (17 heures)
M. Marquis (Gaétan): A ce moment, vous allez encore vous
retrouver avec de la construction neuve et puis si vous faites du logement
social, vous allez rencontrer, encore une fois, deux problèmes. Le
premier, c'est que les logements gouvernementaux coûtent, n'importe
où, entre 20% et 50% de plus que ceux construits par l'industrie
privée. Le deuxième, c'est qu'encore une fois vous allez vous
retrouver avec des logements neufs.
M. Tardif: Est-ce que vous pourriez nous dire où vous
prenez ces chiffres, monsieur, entre 20% et 50%?
M. Marquis (Gaétan): Je n'ai pas les chiffres exacts,
j'hésite toujours à garrocher des choses comme celle-là.
Il reste que, en se basant sur des constructions récentes de HLM ou de
logements sociaux où les coûts de construction par appartement
sont allés tout près de $30 000, même quelquefois un peu
plus que $30 000 par logis, l'entreprise privée est encore capable de
produire des logis suivant l'arrondissement et suivant la méthode de
construction et la densité du terrain, n'importe où, de $15 000
à $25 000 par logis.
M. Tardif: Ecoutez, je ne veux pas prendre sur le temps de parole
du député de Notre-Dame-de-Grâce, mais à
qualité égale, un édifice de huit étages avec des
ascenseurs, des services, etc., vous allez en appel d'offres, dans un cas comme
dans l'autre, si vous avez des normes de résistance au feu et autres
identiques, vous n'aurez pas des prix tellement différents. Cela
m'apparaît un peu gratuit de lancer cela: des coûts
supérieurs de 20% à 50%. J'aimerais cela, si on avait une
étude comparée...
M. Scowen: Je pense que vous m'avez dit, pendant une question
avec débat, au mois de novembre ou octobre, que vous aviez trouvé
que, jusqu'à cette date, il y avait un écart de 15% ou 20% du
coût de construction dans ce domaine entre le secteur privé et le
gouvernement.
M. Tardif: C'est un fait, à partir du moment où on
n'inclut pas les normes plus rigides qui peuvent exister là-dedans. Tout
le monde, le député de Notre-Dame-de-Grâce le premier,
blâmerait le gouvernement si jamais un foyer de personnes
âgées passait au feu parce qu'il n'a pas de résistance
suffisante des matériaux, alors qu'on n'a pas les mêmes exigences
vis-à-vis de l'entreprise privée.
M. Marquis (Gaétan): Peut-être seulement pour finir
là-dessus, je m'excuse si j'ai garroché cela sans avoir les
chiffres exacts pour le prouver, alors on va l'effacer. L'autre
problème...
M. Paquette: M. le Président, seulement une petite
remarque là-dessus. Je me rappelle que dans l'étude du professeur
Mathews qui était annexée au rapport Legault, on
prédisait, pour 1980, que l'entreprise privée ne pourrait pas
construire de nouveaux logements moyens à un coût inférieur
à $28 000. Effectivement, j'ai l'exemple d'un projet qui voulait se
faire dans mon comté, par l'entreprise privée, où on nous
donnait exactement le coût de $28 000, en 1979. Je pense qu'au niveau de
la SHQ le coût moyen est autour de $28 000 également.
M. Marquis (Gaétan): Le coût maximum? M.
Paquette: Le coût moyen.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Très brièvement, je veux retourner
à ma première question, parce que je n'ai pas bien compris.
D'après vous, est-ce que c'est inévitable qu'une subvention aux
personnes à faibles revenus, pour les fins de logement, soit
accompagnée d'une hausse de loyer, comme prétendent les
économistes qui ont étudié cette question?
M. Marquis (Gaétan): Vous me demandez une opinion?
M. Scowen: Ou si vous avez des connaissances précises, des
expériences, je ne sais pas.
M. Marquis (Gaétan): Je ne...
M. Scowen: Si vous n'avez qu'une opinion, j'espère que
vous vouliez dire que ce n'est qu'une opinion. Je pensais que peut-être
un de votre groupe avait une expérience vécue qui pouvait nous
aider.
M. Marquis (Gaétan): Non, nous n'avons rien.
M. Scowen: Parce que moi, j'ai des opinions
déjà.
M. Marquis (Gaétan): Nous n'avons rien de concret à
cet effet.
M. Scowen: Non? Je vais vous poser une dernière question.
C'est une chose sur laquelle, j'espère, vous avez une expérience.
C'est la spéculation. Ce matin, on a entendu beaucoup parlé de la
spéculation comme étant quelque chose de mauvais, quelque chose
qui n'était pas défini. C'est quelque chose qui, semble-t-il, est
toujours accompagné par une hausse de loyer. Cela veut
dire qu'en général, si un immeuble résidentiel est
tenu par le même propriétaire durant trois ans, à titre
d'exemple, et un autre immeuble résidentiel est vendu, pendant cette
période de trois ans, deux ou trois fois, à la fin de ces trois
ans, c'est probable que les loyers dans le deuxième cas seront plus
élevés que ceux dans le premier. En d'autres mots, les liens
directs entre la vente et le rachat d'un immeuble, et le loyer pour les
personnes qui l'habitent. Alors, votre groupe fait partie de chaque incident de
spéculation, en effet, chaque vente et achat. Est-ce que vous avez des
données? Est-ce que vous avez des opinions, en ce cas, sur cette
réclamation?
M. Marquis (Gaétan): II faudrait peut-être retourner
aux définitions originales. Le dictionnaire définit
spéculation comme étant l'achat d'un bien pour revendre à
court terme et à profit. On aimerait penser que les gens, les
propriétaires immobiliers, dans la majorité des cas, ne sont pas
des spéculateurs, mais plutôt des investisseurs, ce qui est quand
même une position ou un emploi honorable et, dans le système
économique où l'on vit, c'est encore permis et honorable. Je
verrais comme spéculation la personne qui achèterait, par
exemple, un bloc de terrains, aujourd'hui, et qui le revendrait en dedans de
six mois sans avoir rien fait, avec un profit de X, Y ou Z. Par contre, la
personne ou l'entreprise qui prendrait le même terrain, qui le
subdiviserait, qui y mettrait des services, qui lui donnerait une valeur
économique ou quelque chose comme cela, cette personne a droit à
un revenu et cela ne s'appelle pas de la spéculation. Cela, c'est juste
au point de vue de la définition.
Maintenant, lorsqu'un immeuble, une propriété à
revenus change de main, il est possible que, lors des renouvellements de baux,
le nouveau propriétaire soit appelé à justifier son
augmentation auprès de la Régie des loyers. Lorsque la
Régie des loyers va lui accorder son augmentation, elle va le faire en
se basant sur l'augmentation des taxes, des assurances, du chauffage et des
frais d'entretien, par rapport à l'année
précédente. Il y a ensuite un pourcentage préétabli
pour l'incidence du coût de l'argent ou la plus-value de la
propriété ou quelque chose comme cela.
Alors, la Régie des loyers ne tiendra absolument pas compte du
fait que la personne ait volé l'immeuble ou qu'elle ait fixé dix
fois trop haut le prix du loyer. Alors, je doute que le fait qu'un immeuble
change de main à plusieurs reprises ait une poussée verticale
ascendante sur les coûts des loyers.
M. Scowen: Simplement, en terminant, je vous pose la question,
non seulement parce que je suis pour ou contre la spéculation; on
cherche ici les moyens d'éviter les hausses de loyer et, si on faisait
un travail énorme pour mettre fin à la spéculation et que,
dix jours après, on voyait que cela n'a rien à faire avec la
hausse de loyer, cela serait une perte de temps pour le gouvernement; mais je
veux l'éviter, c'est tout. Bon, je vous remercie.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Etant donné le temps, nous allons faire vite.
Je voudrais revenir à la page 4 de votre mémoire, concernant la
Régie du logement. C'est concernant l'impartialité de la
régie, étant donné que vous mentionnez qu'elle administre,
juge et élabore la réglementation; plus loin, vous dites: "...
mais qu'un tribunal devienne simultanément un organisme administratif et
un organisme consultatif est un précédent dangereux.
L'objectivité et l'impartialité des jugements rendus par cette
régie nous laissent dans le doute." Voudriez-vous expliciter votre
pensée concernant cet aspect de votre mémoire?
M. Marquis (Gaétan): Je pense bien que c'est clair: les
tribunaux appliquent des lois qui ont été votées par le
gouvernement. Il est évident que les lois de la Régie des loyers
vont être votées par le gouvernement, mais comme le livre blanc et
le projet de loi le disent bien, les règlements vont être
élaborés sous les directives ou les recommandations de la
Régie des loyers. Alors, ces gens vont être pris pour juger
quelque chose qu'eux-mêmes ont édicté. Intentionnellement,
ce matin, j'ai glissé sur cela, parce que je pense que c'est quelque
chose qui va probablement être pris ou discuté par des gens
probablement beaucoup plus compétents que nous en la matière. Je
vois le Barreau s'élever contre cela. Alors, c'est pour cela qu'on le
mentionne, mais ce n'est pas notre compétence ou notre plus gros
problème.
Le Président (M. Laplante): Autres questions,
monsieur?
M. Cordeau: A l'article 1651.2, moi aussi je vois là
quelques dangers parce qu'un propriétaire pourrait avoir gardé
dans son immeuble ses parents, son père et sa mère, ainsi de
suite, des gens à qui il a consenti un loyer plus bas pour toutes sortes
de considérations. Alors, il va arriver certainement que plusieurs cas
seront portés devant la régie concernant cet article.
Maintenant, vous avez parlé de taux de vacance. Dans quelle
catégorie de logements, à votre point de vue, les taux de vacance
se situent-ils?
M. Marquis (Gaétan): Voici, les taux de vacance que l'on
connaît, qui sont acceptés, qui sont utilisés
habituellement, nous sont donnés par la Société centrale
d'hypothèques et de logement. Les taux auxquels on se
réfère sont les taux d'octobre 1978 tels que donnés par M.
Pierre Brien dans son allocution devant le congrès de l'Association
provinciale des constructeurs d'habitations du Québec le 23
novembre.
A ce moment-là M. Brien avait mentionné que les vacances
qui, jusqu'à récente date, se situaient presque en
totalité dans les immeubles neufs ou les immeubles disponibles pour
habitation dans les six derniers mois, que ce phénomène, dis-je,
se résorbait, avec les pratiques agressives, dans une situation de
marché, des propriétaires des nou-
veaux immeubles ou des créanciers hypothécaires qui ont
repris ces immeubles parce que c'est un phénomène qui sera
courant qui offraient des téléviseurs, trois ou quatre
mois gratuits, des choses du genre. Ces mêmes gens avaient
commencé à sortir des immeubles les locataires un peu plus
âgés, occupant des logements à loyer un peu plus modique,
de sorte qu'on commençait à retrouver des logements vides dans
ces immeubles.
Le Président (M. Laplante): Vu que le temps est
terminé, est-ce que vous pourriez répondre à sa question
directe, soit les taux qu'il peut y avoir, d'après vous?
M. Marquis (Gaétan): Les taux?
Le Président (M. Laplante): Oui, c'est ce qu'il vous
demandait si on savait dans quels immeubles cela se situait.
M. Cordeau: Dans quelle catégorie.
M. Marquis (Gaétan): Dans quelle catégorie. Alors,
cela s'en vient, cela commence à être autant dans les immeubles
âgés que dans les immeubles neufs.
M. Cordeau: Etant donné que vous travaillez dans
l'immeuble, croyez-vous que le montant qui est accordé par le
ministère des Affaires sociales, $85 par mois, à ceux qui sont
"sur le bien-être", est suffisant pour avoir un logis habitable,
décent, aujourd'hui?
M. Marquis (Gaétan): Vous me demandez quelque chose de
subjectif sans le qualifier. Si vous me dites $85, je dis non, et à plus
forte raison si vous parlez d'une mère avec six enfants. Ce serait juste
une opinion.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la
fin.
M. Cordeau: Non, mais pour le loyer.
M. Tardif: M. le Président, évidemment, il y aurait
encore beaucoup de questions qu'on pourrait poser aux représentants de
l'Association de l'immeuble du Québec. Encore une fois, je peux les
assurer que leur mémoire a été lu attentivement et que si
jamais ils avaient des suggestions quant à la façon de permettre,
par exemple, la copropriété en en évitant les dangers, en
ne voyant pas que ce qu'on a qualifié comme étant les avantages
de cette formule, il nous fera toujours plaisir de recevoir ces
représentations.
Alors je n'ai pas d'autres questions et je remercie les
représentants.
M. Cordeau: Merci.
Le Président (M. Laplante): Merci, MM. Pilote, Robert,
Marcoux, Marquis, Daoust pour votre présentation. J'appelle maintenant
le groupe de locataires du Québec métropolitain incorporé.
(17 h 15)
Veuillez identifier votre groupe, s'il vous plaît, et identifier
les personnes qui vous accompagnent.
Groupement de locataires du Quebec
métropolitain Inc.
Mme Grondin (Solange): Ce sont deux personnes qui
représentent le Groupement des locataires, Lise Nadeau, Solange Grondin.
Christian Simard représente le Comité de citoyens de
Saint-Gabriel, et Mario Devin représente le Centre de
références, section chambreurs.
Le Président (M. Laplante): Les travaux de la commission
se terminent à 18 heures. Si vous ne voulez pas être
obligés de revenir, si vous êtes capables de synthétiser le
plus possible votre mémoire, étant donné que tous l'ont
déjà lu, ils ont beaucoup de notes devant eux, on pourra avoir
une période de questions plus longue.
M. Scowen: ... à 18 h 15.
M. Tardif: Si la commission est d'accord pour donner l'heure
complète, jusqu'à 18 h 15...
M. Cordeau: Oui, d'accord.
Mme Grondin: Avant de commencer, voici un résumé de
notre mémoire. Nos trois groupes tiennent à préciser aux
membres de cette commission de même qu'à ses participants les
motifs qui nous ont incités à nous présenter à
cette commission. Le but premier de notre présence est de
dénoncer le projet de loi 107 dont le contenu "statuquoïste"
maintient dans les mêmes situations d'injustice et d'exploitation la
majorité des travailleurs locataires, chômeurs, petits
salariés, assistés sociaux. Le second est de faire
connaître, encore une fois, nos revendications appuyées par quinze
ans de pratique auprès des locataires et chambreurs à faible ou
moyen revenu.
Pour nous, le logement est un droit social non reconnu et qui ne pourra
jamais l'être tant et aussi longtemps qu'il appartiendra au libre
marché d'en faire sa marchandise. L'Etat a un rôle primordial
à jouer pour que ce droit soit reconnu, et nous ne trouvons, dans le
projet de loi 107, aucune volonté réelle politique du
gouvernement actuel, au niveau du contrôle des loyers, de lever les
contraintes économiques qui empêchent la reconnaissance de ce
droit.
Nous présenterons notre résumé de la manière
suivante: le Groupement des locataires abordera les trois premiers chapitres du
mémoire, à savoir le contrôle des loyers, le maintien dans
les lieux et la qualité de logement. M. Mario Devin, représentant
du Centre de références, section chambreurs, traitera
spécifiquement de la question des chambreurs en regard avec ce que
propose le projet de loi 107. Quant à M. Christian
Simard, représentant du Comité de citoyens de
Saint-Gabriel, il abordera le chapitre du projet de loi 107 qui traite de la
conservation du stock de logements locatifs. Chaque intervenant fera une
brève description de la situation actuelle. Nous prendrons un peu plus
de temps sur ce que propose le projet de loi 107, sur chaque thème, et
nous énoncerons quelques-unes des revendications que nous trouvons
fondamentales pour la reconnaissance du droit au logement.
Etant donné l'ampleur des questions soulevées par le
projet de loi 107, étant donné également le volume de
notre mémoire et le traitement complémentaire que chaque groupe
en a fait, nous trouvons fondamental que chacun des représentants puisse
se faire entendre. Nous ferons tout notre possible pour faire ce
résumé dans le délai de vingt minutes prévu, mais
il se peut que nous dépassions ce temps de quelques minutes.
On y va pour le contrôle des loyers. Pour nous, au Groupement des
locataires, le contrôle des loyers est l'élément-clé
du droit au logement. Toutes les autres composantes du droit au logement, la
qualité, le droit au maintien dans les lieux, sont reliées au
contrôle des loyers. Il y a énormément de problèmes
au niveau du coût des logements, c'est trop cher. Il y en a qui se
plaisent à dire, pour minimiser le problème au niveau des
coûts du logement, que la situation des ménages locataires qui
doivent consacrer une part importante de leurs revenus pour se loger est
marginale.
Si on se réfère aux données statistiques de la
SCHL, en 1974, on s'aperçoit que dans la région de Québec,
70% des ménages locataires avaient un revenu inférieur à
$10 000 et devaient consacrer plus de 25% de leurs revenus pour se loger. La
situation est on le comprendra encore plus critique au niveau des
familles dont les revenus sont inférieurs à $5000 puisque 90% de
ces familles doivent affecter plus de 25% de leurs revenus pour se loger. Une
étude commanditée par le comité Legault, en 1975,
confirmait également la gravité de la situation au niveau du
coût du logement. Cette étude affirmait, en effet, que 40% des
ménages locataires dans les régions urbaines de la province de
Québec ne peuvent subir aucune hausse de loyer sans devoir couper sur
d'autres besoins essentiels tels que la nourriture ou le vêtement.
On pense que depuis 1975, la situation, au niveau du coût
élevé des logements, ne s'est sûrement pas
améliorée. Ainsi, on pense qu'il y a une crise économique,
actuellement, dont les locataires subissent aussi le contrepoids. On veut
essayer de voir ce que propose le projet de loi 107 là-dessus. On
référerait peut-être les membres de cette commission
à la page 7. Avant d'arriver à ce que propose le projet de loi,
on illustre, dans notre mémoire, en pages 3, 4 et 5, des cas concrets.
Dans ces cas concrets, on peut remarquer qu'on a un cas sur les
représailles; pour nous ce ne sont pas des cas isolés, la
majorité des locataires qui contestent les hausses de loyers sont
victimes de représailles. Ensuite on a des cas où les locataires
trouvent inconcevable qu'on ne tienne pas compte de la qualité des
loyers, quand vient le temps de la fixation. Il y en a d'autres qui trouvent
tout à fait ridicule de payer parfois $60 de plus qu'un autre qui loue
un logement du même type et de la même grandeur situé dans
un même immeuble. En tout cas, ce sont des situations qui sont
généralisées et il y en a qui trouvent... En tout cas,
ça revient, au dernier exemple, à parler de la remise en cause du
loyer de base. On pourra peut-être y revenir pendant la période de
questions, mais on tenait à le souligner.
Donc, ce que propose le projet de loi 107 en matière de
contrôle: Le projet de loi 107 nous propose un statu quo au niveau du
champ d'application. Statu quo veut dire qu'on maintient l'exclusion des
immeubles neufs de la juridiction de la régie en matière de
contrôle. Pourtant, lorsqu'il était dans l'Opposition, le Parti
québécois, par la voix de ses représentants
parlementaires, appuyait la revendication des associations de locataires visant
à abolir une telle exclusion. On se souvient, entre autres, que, en
1974, le député Burns accusait le gouvernement en place
d'encourager la fraude et la mauvaise administration des constructeurs en
mettant de l'avant l'exclusion des immeubles neufs du contrôle des
loyers. Cette accusation du député Burns était et est
encore bien fondée pourtant, puisque les propriétaires
d'immeubles neufs profitent de cette exclusion de la régie pour louer
à des prix relativement bas, la première année et ce, on
le devine, pour obtenir un taux d'acquisition maximum, pour ensuite hausser
substantiellement leurs loyers dans les quatre années qui suivent. Ce
sont donc les locataires qui font les frais d'une soi-disant politique
gouvernementale visant à stimuler la construction, sans parler de
l'effet d'entraînement sur le marché des hausses excessives de
loyers que l'on retrouve au niveau des immeubles neufs.
Le projet de loi 107 nous propose également un statu quo au
niveau du processus de contestation des hausses, puisque l'article 1658.6
prévoit que c'est au locataire que revient la charge de s'adresser
à la régie pour obtenir une fixation de loyer, tout comme c'est
le cas actuellement. Encore là, le Parti québécois semble
avoir modifié ses positions depuis qu'il est au pouvoir puisque,
auparavant, il se disait favorable à un renversement du processus,
c'est-à-dire que le propriétaire soit obligé de s'adresser
à la régie pour obtenir une hausse de loyer. Pourtant les
représailles et menaces de toutes sortes dont sont victimes les
locataires qui osent contester une hausse de loyer devant la régie n'ont
pas diminué depuis le 15 novembre 1976.
Ce qu'il y a de plus fondamental aussi en matière de
contrôle des loyers, c'est la méthode et les critères de
fixation utilisés. Selon l'article 86 du projet de loi 107, le
gouvernement peut établir ces critères et cette méthode
par règlement. Le défaut, par le gouvernement, de faire
connaître un tel règlement en même temps que le projet de
loi 107 visait peut-être à éviter un débat de fond
sur le contrôle des loyers en commission parlementaire. Pour le
groupement des locataires, malgré l'ab-
sence d'un tel règlement, la position de l'actuel gouvernement
est très claire puisqu'elle a été définie dans le
livre blanc sur les relations locateurs-locataires publié en 1978.
Encore là, le gouvernement entend maintenir le statu quo par
rapport à la situation actuelle. Le statu quo signifie que les
locataires, comme c'est le cas actuellement, devront subir toutes les hausses
des coûts de fonctionnement d'un immeuble, hausses réelles et
hausses fictives, puisque rien ne nous permet d'espérer que la nouvelle
régie exercera une vérification plus stricte des factures du
propriétaire. Le statu quo signifie également que l'indexation du
revenu net constituera, tout comme présentement, un
élément important de la hausse fixée par la Régie
des loyers. Le statu quo signifie que l'on refuse de tenir compte, lors de la
fixation par la régie, de la qualité des logements et de tout
autre élément soumis par les locataires, tels les hausses
antérieures, les coûts de réparations, les
améliorations faites par le locataire. Le statu quo, ça veut
dire, finalement, que le gouvernement refuse d'adopter une méthode de
contrôle permettant la révision d'un loyer de base d'un
logement.
Et le gouvernement prétend faire avaler cette grosse pilule, un
statu quo que l'on nous vend pour être une grande réforme, aux
locataires en y ajoutant un enrobage que l'on appelle "l'information". En
effet, selon un communiqué de presse qui a accompagné le
dépôt du projet de loi 107, le gouvernement entend obliger les
propriétaires à utiliser un avis d'augmentation type dans lequel
on retrouverait les motifs de la hausse. Ainsi, mieux informés, les
locataires seraient plus en mesure de négocier les hausses de loyer avec
leur propriétaire. C'est là le pari du gouvernement et on va
même plus loin, on espère même qu'avec cette information sur
les motifs des hausses, moins de locataires vont recourir à la
régie. C'est à se demander si le gouvernement ne vise pas tout
simplement par cette mesure à diminuer le pourcentage de locataires qui
contestent à la régie, pourcentage qui est déjà
très faible.
Obliger les propriétaires à dévoiler les motifs de
la hausse des loyers demandée, avec chiffres à l'appui, il s'agit
là, d'une mesure d'informations élémentaires pour les
locataires. Prétendre que cette mesure va permettre aux locataires de
négocier réellement avec les propriétaires, c'est de
l'utopie, pour ne pas dire de la démagogie. En quoi cette information
peut-elle modifier fondamentalement le rapport de force entre
propriétaires et locataires, en matière de hausses de loyers,
rapport de force qui se traduit ainsi: le propriétaire peut obliger
l'augmentation qu'il veut, 10%, 20%, 50% ou plus. Le locataire peut l'accepter
ou déménager s'il ne peut ou ne veut prendre le risque d'aller
à la régie.
Prenons un exemple concret: un propriétaire indique sur son avis
d'augmentation qu'il a subi une hausse du coût de chauffage de $200 par
année. Le locataire, dans une tentative de négociations, affirme
de son côté qu'il a dû débourser cette même
somme pour couvrir les frais de médicaments pour sa famille, le
coût d'achat de chaufferettes et l'augmentation de ses frais
d'électricité, compte tenu du manque d'isolation de son immeuble.
Est-ce que le locataire a le pouvoir de faire modifier la hausse
demandée, compte tenu de ses déboursés à lui? Non,
le propriétaire n'est sûrement pas obligé d'en tenir
compte. Il pourra même dire à son locateur: La régie non
plus n'en tiendra pas compte. Donc, sur quoi se fonde le pari du gouvernement,
en misant sur l'information pour régler les hausses des loyers?
Serait-ce sur le sens de la justice et l'esprit humanitaire des
propriétaires?
Compte tenu de ce qui précède, il va sans dire que le
regroupement des locataires rejette carrément la position et les mesures
préconisées par le gouvernement en matière de
contrôle des loyers. Pour assurer aux locataires un loyer juste et
raisonnable, nous exigeons que le projet de loi 107 soit modifié, de
façon à instaurer un contrôle universel, incluant les
immeubles neufs et les maisons de chambres, un contrôle sur toute hausse
des loyers par un renversement du processus, c'est-à-dire que les
propriétaires soient tenus d'assumer les hausses à la
régie. Un contrôle également qui viserait à remettre
en cause les loyers de base, en fonction de la qualité des logements et
cela, sur demande des locataires. On propose également des changements
à la méthode de contrôle des loyers, que l'on inscrive des
critères qui sont reliés à la qualité des
logements, que l'on inscrive des critères qui sont reliés aux
augmentations antérieures subies par les locataires, aux
réparations effectuées par lui, que l'on instaure au niveau de la
méthode, un partage des coûts d'opération entre
propriétaires et locataires et que l'on abolisse l'indexation du revenu
net.
Maintenant, en ce qui concerne le maintien dans les lieux on va
parler un petit peu de la reprise de possession. La revendication du groupement
concernant la reprise de possession est la même que celle du Front commun
des associations de locataires, de même que du RCM qui sont passés
avec nous ce matin. On demande que soit aboli le privilège du
propriétaire de reprendre possession d'un logement pour lui-même
ou pour sa famille. Cette revendication est appuyée sur deux choses.
D'abord, on considère que le droit à la reprise de possession est
réellement un privilège que l'on accorde au propriétaire,
privilège qui n'a pas de raison d'être et qui compromet chaque
année le droit au maintien dans les lieux de milliers de locataires. Un
propriétaire et les membres de sa famille ont, bien sûr, le droit
à un logement. Cependant, il n'y a aucune raison valable pour que ce
droit soit plus important, donc, passe avant celui du droit au logement d'un
locataire qui habite déjà les lieux.
On considère aussi qu'à partir du moment où un
propriétaire décide de mettre ses logements en location, il ne
devrait pas avoir le droit, par la suite, d'en reprendre possession en
évinçant le locataire et ce, en utilisant son droit de
propriété. Notons qu'actuellement c'est à cause de ce
droit
de propriété que la loi reconnaît au
propriétaire le droit de reprendre possession des logements.
Pour ce qui est de la famille du propriétaire, la justification
de la loi actuelle est encore moins claire, puisque la famille du
propriétaire ne possède pas ce droit de
propriété.
Le deuxième motif sur lequel s'élabore notre position,
c'est qu'en permettant les reprises de possession, on considère que le
gouvernement... C'est une ouverture que crée le gouvernement aux
représailles, parce que les propriétaires... C'est maintenant
connu, quand ils veulent hausser les loyers et qu'ils ont de la
difficulté, qu'ils ne sont pas capables d'évincer un locataire
parce qu'il remplit toutes ses obligations correctement, ils s'organisent pour
reprendre posssession du logement et cela se fait assez bien. C'est tout ce que
nous avons à dire: (17 h 30)
Concernant les évictions, la position du groupement est qu'aucun
motif d'éviction ne soit reconnu dans la loi. Quand on regarde le livre
blanc, on se rend compte que le gouvernement actuel disait vouloir limiter les
motifs d'éviction. On se rend compte, dans le projet de loi 107, qu'au
lieu de les diminuer, on a fusionné tous les motifs actuels pour les
ramener à un seul, c'est-à-dire le préjudice
sérieux, et c'est le motif le plus souvent utilisé, à part
le non-paiement de loyer; actuellement, on utilise le préjudice
sérieux. Donc, tous les motifs sont fusionnés là-dedans.
On maintient également le statu quo au niveau de l'éviction pour
le non-paiement de loyer. Pour le non-paiement de loyer, nous trouvons
inconcevable que pour des gens qui sont en situation économique
constante, cela va toujours mal et cela empire; on considère
inconcevable qu'il n'y ait pas de politique qui soit prise pour éviter
le moyen de l'éviction du locataire, parce qu'on pense que cela ne
change strictement rien de le mettre sur le banc de neige ou dans la rue. S'il
n'a pas les moyens de payer là, il n'aura pas davantage les moyens de
payer ailleurs. C'est ce que nous avons à dire là-dessus.
Maintenant, au chapitre de la qualité, je pense qu'on va
être obligé de faire cela très vite. Actuellement,
plusieurs groupes l'ont souligné, c'est l'anarchie totale au niveau de
la qualité. Les villes n'ont pas la volonté politique de faire
adopter les règlements qu'ils ont. On prend, en particulier,
Québec ou Montréal le RCM en a fait mention ils
ont, eux, des règlements qui ne sont pas du tout adoptés. D'autre
part, les recours des locataires pour faire reconnaître le droit des
logements de bonne qualité, cela ne vaut quasiment rien. Le projet de
loi 107, là-dedans, maintient la majorité des recours, sauf que
la retenue de loyer, maintenant, au lieu de s'exercer en Cour provinciale va
s'exercer à la Régie du logement. Le nouveau recours, c'est le
dépôt de loyer qui demanderait réellement à
être renforcé. Ce qui va rendre encore très difficile
l'application des quelques recours assez miteux qu'ont les locataires,
là-dessus, c'est le code d'habitabilité. Nous n'avons pas la
référence au code là-dedans, et tout dépend quel
nombre définira ce qu'est un local qui est habitable par rapport
à celui qui ne l'est pas. On se rend compte aussi qu'il faudrait
absolument qu'il y ait des recours efficaces pour que les logements soient bien
entretenus. Parce que des logements, quand ce n'est pas entretenu, on en vient
à cautionner à plus ou moins long terme des démolitions.
On trouve qu'il y a eu suffisamment de ravages à Québec et
à Montréal, dans les grands centres urbains. Par rapport à
cela, nous avions quelques revendications. On en a à plusieurs pages,
mais je veux en "principaliser" quelques-unes. On pourra y revenir au niveau de
la période des questions.
On demande que le code d'habitabilité définisse des normes
minimales sur la qualité des logements, un degré de chauffage
minimum, l'isolation et l'entretien des maisons, équipements et services
obligatoires dans les logements, normes de sécurité. On demande
qu'aucune augmentation de loyer ne soit permise pour les améliorations
qui visent à rendre le logement conforme aux normes
d'habitabilité, telles que définies par le groupement. On
demande, dans le cas où un local est déclaré impropre
à l'habitation par la Régie du logement, que cette institution
soit tenue de prendre les mesures nécessaires pour que le logement ne
soit pas reloué, à moins que, par la suite, il soit
rénové selon les exigences du code d'habitabilité et ce,
sans augmentation de loyer. Au niveau des réparations urgentes, ce que
l'on demande, ce sont des recours rapides et efficaces. On demande que des
fonds publics soient disponibles sur demande aux locataires qui sont contraints
de faire effectuer des réparations urgentes ou de faire établir
un service de façon urgente. On demande que le gouvernement soit tenu de
récupérer ces sommes auprès des propriétaires. Ce
sont les mêmes positions que le front commun là-dessus, parce que
c'est vraiment un problème au niveau des réparations urgentes. On
demande aussi, concernant le dépôt de loyer, on est très
heureux de trouver cette mesure dans la loi, parce que cela confère la
connaissance légale à une pratique existante. En effet, plusieurs
locataires, comme moyen de pression, se refusent à payer leur loyer,
tant que le propriétaire ne s'est pas conformé à ses
obligations ou à ses promesses. Cependant, cette pratique plaçait
les locataires dans de drôles de situations. Cela les rendait passibles
d'éviction, cela les rendait passibles du droit de saisir en jugement.
Donc, on trouve que c'est un acquis élémentaire de le retrouver
dans le texte de loi.
Cependant, pour nous, le dépôt demande à être
renforcé; on demande que seule l'exécution de l'obligation en
nature justifie la remise du dépôt au locateur. On demande que la
régie du logement soit tenue de se prononcer sur le litige un certain
temps après le dépôt du loyer par le locataire. On demande
que l'exécution en nature forcée de l'obligation fasse l'objet
d'une ordonnance immédiate suite à cette audition sous peine
d'outrage au tribunal tel que défini par l'article 81.11 du projet de
loi no 107 et ce, que l'obligation
mette ou non en danger la santé et la sécurité des
occupants. Il va sans dire qu'on développe plus la qualité dans
notre mémoire mais on y reviendra lors des questions. Maintenant, je
passe la parole à Mario Devin qui va parler de la question des
chambreurs.
M. Devin (Mario): Pour décrire la situation que...
Le Président (M. Laplante): II faudra le faire assez vite
parce que vous êtes rendus à 25 minutes actuellement.
M. Devin: J'essaie. Pour décrire brièvement la
situation des chambreurs, je vous réfère au chapitre 4 du
mémoire, aux pages 30 à 34. Je veux tout simplement dire qu'ils
sont parmi les locataires les plus mal pris du Québec actuellement. Au
minimum, ils sont 230 000, à peu près 40% de la population,
formés de gens âgés, d'assistés sociaux, de
chômeurs, de petits salariés et d'étudiants. Cette
population survit avec des revenus qui varient entre $200 et $400 par mois;
elle doit donc consacrer entre 23% et 40%, sinon plus actuellement, de ses
revenus pour habiter une chambre, dans la majorité des cas au
centre-ville de Montréal, de Québec ou d'autres villes,
très souvent inhabitable. Le prix des chambres dans le centre-ville de
Québec se situe entre $80 et $140 par mois, soit une moyenne de $100.
Cette population, en raison de ses faibles revenus, est captive de ce mode
d'habitation; elle n'a pas les moyens de vivre ailleurs, sinon dans les pires
taudis.
Plusieurs propriétaires de maisons de chambres profitent de
l'état de dépendance de ces gens, dépendances
socio-économique, psychologique, physique, situation de solitude,
ignorance et incapacité de se défendre, pour les exploiter et
réaliser des profits très exagérés à leurs
dépens. C'est la situation où nous a menés jusqu'à
maintenant le libre marché dans le domaine très lucratif du
commerce des chambres. Le gouvernement est au courant de cette situation, si je
me réfère au rapport du groupe de travail qu'il a lui-même
mis sur pied.
Dans le projet de loi no 107, nous considérons qu'il n'y a rien
pour changer quoi que ce soit à cette situation. Le fait, pour les
chambreurs habitant un local où plus de trois chambres sont mises en
location, d'être sous la juridiction de la régie et cela
depuis l'année dernière et d'avoir les recours
prévus par le projet de loi no 107 ne changera pas la situation
d'exploitation et d'injustice qu'ils vivent tout comme les autres locataires du
Québec. En cela nous sommes d'accord avec ce que vient d'affirmer
Solange Grondin. De plus, cela laisse une grande partie des chambreurs sans
protection légale, ceux qui habitent un local où moins de deux
chambres sont mises en location.
De toute façon, ce que nous retrouvons dans le projet de loi no
107 est une nette régression par rapport au livre blanc lui-même
qui disait, à la page 24, concernant le contrôle du prix des
chambres: "Dans le cas des chambres, il faudra d'abord établir le prix
de départ, ce qui est une étape préliminaire, après
laquelle les hausses de loyer seront calculées en fonction de la hausse
des coûts d'opération selon un principe similaire à celui
étudié pour les logements. "La loi prévoira donc au
départ un contrôle obligatoire du prix par la fixation, suite
à une inspection de la qualité et des services, d'un prix maximal
de location pour chaque chambre. Ce type de contrôle apparaît en
effet mieux adapté au dénuement et à la dépendance
d'une bonne partie des chambreurs, gens âgés, mères
célibataires, assistés sociaux, face à leurs locateurs et
à la nature particulière de ce type d'habitation."
Quant à nous, pour raccourcir, nous voulons mentionner deux
revendications qui, nous le pensons, pourraient améliorer sensiblement
la situation des chambreurs. Compte tenu des coûts prohibitifs des
chambres, de la qualité et des services offerts ainsi que de la
capacité de payer des locataires obligés d'utiliser ce mode
d'habitation, compte tenu de la grande variation du coût des chambres
pour des services équivalents, nous demandons que l'Etat, par la loi,
oblige tous les locateurs de chambres sans exception à enregistrer les
chambres qu'ils louent ou offrent en location. Deuxièmement, qu'une
inspection systématique des chambres soit faite suite à cet
enregistrement et que les faits consignés servent à remettre en
cause le prix de base des chambres sans avoir pour effet d'augmenter le prix
d'aucune chambre; qu'une méthode de fixation du loyer de base des
chambres soit élaborée et rendue publique.
Une autre revendication et je termine là-dessus, compte tenu que
les locataires de chambres subissent des hausses de loyer abusives, parfois
même plus d'une fois par année, compte tenu que ces hausses se
font de façon très aléatoire suivant le changement de
locataire ou l'augmentation des prestations d'aide sociale, nous demandons que
dans le cas des chambres, comme dans le cas de l'ensemble des logements
locatifs, la hausse ne soit consentie qu'une seule fois par année, qu'il
y ait ou non changement de locataire durant l'année, et que le locateur
soit tenu de soumettre toute hausse à la régie. Je termine
là-dessus, il y aura d'autres revendications que vous pourrez trouver
dans le chapitre concernant les chambres dans le mémoire.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur.
M. Simard (Christian): M. le Président, cinq minutes
seulement.
Le Président (M. Laplante): Je vais vous avertir d'une
chose, c'est que ce sera votre choix à vous. Ce ne sera pas le choix de
la commission. C'est que vos mémoires ont été lus de part
et d'autre ici avec toutes les notes qu'ils contenaient. Vous avez le choix
entre vouloir vous faire questionner sur tout le travail que vous avez fait ou
en faire seulement une lecture, point, pas de questions après. Je ne
crois pas que vous sortiriez satisfaits,
à ce moment. Là c'est vous qui allez faire le choix. Si
vous voulez parler, parlez jusqu'à 18 h 15, il n'y aura plus de
questions à 18 h 15. Ce sera juste une présentation.
M. Simard: J'avais un résumé écrit, mais je
vais le faire oralement plus court encore. C'est simplement au niveau de la
conservation du stock des logements. Nous vivons dans des logements des
quartiers populaires. Je parle pour le Comité de citoyens de
Saint-Gabriel et on connaît la situation, la détérioration.
On est assez déçu de voir dans un chapitre nouveau de la loi une
disposition nouvelle qui ne se retrouvait dans aucune loi sur la conservation
du stock des logements. Finalement, au bout du compte, on se retrouve avec le
statu quo déguisé sous une allure de réforme.
Là-dessus, je vais m'expliquer. Je pense que le gouvernement dit dans
l'article 27, au début, que nul ne peut démolir ou changer de
destination, subdiviser un logement. Ensuite, on précise des cas
où, par exemple, les municipalités ont à gérer
cela. On sait que les municipalités sont souvent juge et partie parce
que finalement elles sont souvent promoteurs de projets d'ensemble et
provoquent les démolitions. Comment une municipalité pourra ne
pas accorder un permis à quelqu'un qu'elle aura attiré?
D'accord, il y aura l'appel possible à la régie, mais en
fait, là aussi les critères, la pondération des
critères n'est pas expliquée. On parle de critères comme
besoin de logements, préjudices causés aux locataires,
possibilité de relogement, détérioration de l'apparence
architecturale. Finalement, cela me fait penser à un disque, à
une annonce de la compagnie Ketel sur les produits, les disques. Il y a
plusieurs artistes de différentes catégories, Pauline Julien avec
Dona Summers et finalement on met "and many more". "Many more" ici, c'est tout
autre critère pertinent. Finalement, ce qui arrive avec des choses comme
cela, c'est qu'on va se retrouver sans aucune contrainte réelle. C'est
toujours laissé à la discrétion d'administrateurs ou de la
ville, selon que la ville a des règlements ou pas. Il y a aussi des
places où cela aurait pu paraître contraignant. Le
propriétaire est obligé de demander l'autorisation à la
régie. Mais il peut la demander avant même d'acquérir un
immeuble et la recevoir avant même d'acquérir un immeuble selon
l'article 28.
Je pense qu'au lieu de nuire ou d'empêcher les démolitions
ou les subdivisions de logements ou leur changement de destination, de mesures
comme celles-là les encouragent presque, leur donnent un cadre
légal. On dit aussi: Finalement, le projet de loi est
"statuquoïste" dans ces cas. C'est extrêmement décevant pour
nous de retrouver des choses comme cela malgré de beaux
énoncés de principe. Au niveau des revendications que nous
mettons de l'avant pour terminer là-dessus nous demandons
que les différents organismes d'Etat soient soumis aux mêmes
règlements et lois que tout autre propriétaire. Là-dessus,
par exemple, on dit encore à l'article 27... Le gouvernement est un gros
promoteur lui- même, on sait que c'est la colline parlementaire et la
ville de Québec également. Finalement, si la ville est aussi
soumise, comme je vous le disais tantôt, que c'est elle qui fait sa
propre réglementation, nous, sur la rue Saint-Gabriel, avec des choses
comme cela, il pourrait toujours arriver finalement que ce soit démoli.
Face à ces cas concrets on a plusieurs cas concrets chez nous de
détérioration et d'abandon de logement on ne voit pas
comment la loi pourra empêcher cette détérioration qui
conduit toujours aux mêmes résultats, c'est-à-dire aux
abandons ou aux démolitions et, quand il y a des rénovations, il
n'y a pas de véritable contrôle. Là-dessus, il n'y a pas de
chapitre sur la prévention au niveau de la conservation du stock.
Finalement, on se retrouve avec exactement la même chose. (17 h 45)
Nous réclamons qu'aucune démolition de logements ou
d'immeubles ne soit permise à moins qu'il ne soit prouvé que le
coût de la démolition et de la reconstruction des logements est
moins élevé que celui de la rénovation. Je pense qu'une
mise en preuve comme celle-là peut limiter.
Que le propriétaire soit obligé de reconstruire un
immeuble répondant aux mêmes caractéristiques que l'ancien
quant au nombre de pièces par logement et au prix du loyer. Lors de la
location du nouvel immeuble, que la priorité soit donnée aux
locataires de l'immeuble démoli ceux qui y étaient avant
parce que, souvent, on démolit des immeubles qui sont encore
habités.
Dans le cas de la rénovation, que la rénovation
n'entraîne aucune hausse de loyer. Dans les deux cas les cas de
démolition et de rénovation que, durant la période
nécessaire aux travaux, les locataires soient relogés par le
propriétaire sans augmentation du coût du loyer.
Nous réclamons également qu'aucune subdivision de logement
ne soit permise. Le nombre de logements répondant aux besoins des
familles est déjà assez restreint.
Par rapport au changement de destination, nous réclamons qu'aucun
logement existant ne puisse servir à d'autres fins qu'à celles de
l'habitation. Nous considérons que la fermeture d'un logement ou d'un
immeuble est un changement de destination et qu'elle ne doit pas être
permise. En plus de diminuer le nombre de logements, la fermeture d'un logement
ou d'un immeuble constitue un danger réel pour le voisinage. Le projet
de loi 107 ne répond aux besoins que d'une minorité de la
population, les propriétaires locateurs, dans ce cas-là, parce
qu'il ne légifère pas d'une manière efficace. Nos
revendications visent au contraire à faire respecter et à
garantir les droits de la majorité locataire.
Pour terminer, en rapport avec ce que le RCM a dit ce matin dans son
mémoire, je veux dire que, souvent, il n'y a pas de contrôle. Il y
a eu un débat sur les 64% accordés en hausse de loyers. Je pense
que le chapitre de la conservation du stock de logements est aussi lié
au contrôle et que si la SCHL permet 64%, c'est curieux qu'au niveau de
la rénovation la régie accepte cela intégralement
à cause de la masse des factures et du système de calcul
des loyers effectué actuellement. Je pense que le gouvernement
établissait dans le livre blanc de bons principes. Finalement, cela a
accouché d'une souris, c'est-à-dire le statu quo.
Le Président (M. Laplante): Est-ce terminé?
M. Simard: Oui.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, j'ai entendu ces
revendications puisque, selon les termes mêmes du dernier intervenant, on
parlait de revendications ou d'exigences. Je comprends les objectifs
poursuivis. Evidemment, la question que je me pose, c'est: On est partis
quoiqu'on le retrouve plutôt en conclusion, j'ai l'impression qu'on le
retrouve aussi dans l'introduction du fait que le principe du droit au
logement est absolument inconciliable avec le droit à la
propriété. Est-ce exact? Pour vous, c'est inconciliable. C'est
cela?
Mme Grondin: Oui, c'est très clair.
M. Tardif: En conséquence, on réclame un gel
obligatoire et universel des loyers.
Mme Grondin: Non, on ne demande pas un gel des loyers. On
demande, étant donné que le logement est un bien essentiel, de
meilleurs contrôles par l'Etat, comme cela se fait pour la santé,
comme cela se fait pour l'éducation.
M. Tardif: Est-ce à dire à ce moment-là,
quand on parle d'un meilleur contrôle, c'est-à-dire celui qui
serait effectué par l'Etat, qui serait selon les termes qu'on retrouve
dans vos documents, universel et obligatoire, qu'il n'y aurait absolument de
place pour aucune entente entre les parties? Est-ce ce que cela veut dire?
Mme Nadeau: Oui. Au niveau du contrôle des loyers, c'est
très clair, oui.
M. Tardif: Aucune entente? Mme Nadeau: Aucune entente.
M. Tardif: II n'est donc pas question de la possibilité
pour deux personnes responsables, adultes et mûres, de s'entendre sur des
services donnés moyennant un prix X.
Mme Nadeau: Non, parce qu'on considère que ce n'est pas
une question de maturité, c'est la question de pouvoir négocier.
Si les locataires pouvaient négocier, on pourrait parler de
négociation, mais, quand il n'y a pas de pouvoir, on ne peut pas parler
de négociation.
M. Tardif: Et vous croyez que l'arbitrage par un tiers,
fonctionnaire, juge, assesseur, appelons-le comme on voudra, sera
préférable à ce que les parties pourraient finalement
décider de négocier entre elles.
Mme Nadeau: Pas de façon inconditionnelle. Cela
dépendrait essentiellement de la méthode de contrôle des
loyers.
M. Tardif: Au sujet de la reprise de possession, est-ce que vous
avez fait le parallèle entre l'article 1659 qui prévoit cela et
les articles 1657.2 et 1657.3 qui visent à assurer aux personnes qui
cohabitent avec un locataire de pouvoir continuer ou de succéder, en
quelque sorte, au bail? Ne trouvez-vous pas que cela fait le pendant de
l'article 1659 sur la reprise de possession?
Mme Grondin: Quels articles?
M. Tardif: Les articles 1657.2 et 1657.3 permettent, en quelque
sorte, la continuation du bail en faveur des personnes qui cohabitent
d'accord? avec le locataire. Elles peuvent continuer de demeurer dans
les lieux. Ne trouvez-vous pas que cela fait, en quelque sorte, le pendant de
la reprise de possession par le propriétaire?
Mme Grondin: Non. M. Tardif: Du tout?
Mme Grondin: Non, ce n'est pas de cette façon que je
l'interprète. Au niveau de l'article 1657.3...
M. Tardif: Oui.
Mme Grondin: ... d'abord on est très content de voir cela
parce que, ce qui se passe en réalité, ce sont souvent des
personnes qui sont dans des situations de divorce, de séparation et tout
cela. Quand c'était le mari, l'époux ou, en tout cas, le
conjoint, qu'il n'y avait qu'un signataire du bail, il arrivait que, s'il
quittait, sa famille était mise dehors. Mais il n'y a pas de lien
à établir entre cet article et la reprise de possession. Cela
donne droit, quand il y a le départ d'un conjoint, à la personne
qui reste là de continuer à y demeurer. Elle succède aux
obligations qui découlent du bail. C'est strictement cela que cela lui
donne. Cela n'est pas une question de reprise de possession.
M. Tardif: Disons que cela peut être l'équivalent,
s'il s'agit de personnes ayant une relation, disons, de conjoints, peu importe
le statut légal de cette relation, de permettre aux enfants ou aux
parents qui pourraient cohabiter de continuer d'habiter les lieux,
c'est-à-dire à peu près le même monde en faveur
duquel la reprise de possession pourrait s'effectuer par un
propriétaire. On est d'accord là-dessus?
Mme Nadeau: Dans ce cas-là, il n'y a personne de
délogé pour loger quelqu'un d'autre. D'accord?
M. Tardif: D'accord, sauf qu'il y a une espèce de
parallélisme qui peut être fait entre ces deux articles.
Sur la question de la qualité des logements, vous dites que le
projet de loi parle d'un code d'habitabilité et, soit dit en passant,
comme je l'ai dit dans d'autres interventions, c'est mon intention de le
déposer avant que le projet de loi soit adopté, lors de
l'étude article par article. Il est présentement en voie de
préparation. La raison, c'est que cela aurait été, en
quelque sorte, un peu préjuger des mémoires et des
représentations qui nous auraient été faites que d'avoir
déjà préparé ce règlement sans avoir tenu
compte des suggestions et des recommandations formulées.
Il y a la question de l'application de ce code d'habitabilité et
du contrôle de la qualité et de la conservation du stock par les
municipalités. Là encore des choix ont été faits,
c'est vrai. Je ne sais pas si vous étiez là ce matin lorsque les
gens du RCM sont venus. Le choix a été, puisque les mesures de
conservation du stock, c'est-à-dire de non-démolition, sont
finalement des décisions, des gestes politiques, de faire en sorte que
ces gestes se situent au palier de gouvernement ou d'administration qui est le
plus près des gens. Le forum normal, la tribune, où devraient se
faire les pressions pour et contre les démolitions devrait être la
salle du conseil et non pas une quelconque officine gouvernementale. C'est
évidemment un choix politique qui a été fait avec une
possibilité de recours à la régie. Est-ce que je dois
comprendre que ce principe de démocratie locale vous ne l'admettez pas
et que vous croyez que, justement, un organisme extérieur au milieu est
mieux placé pour décider de l'opportunité de
démolir ou pas un immeuble?
M. Simard: Si c'était une véritable
démocratisation, je ne dis pas, mais vous l'encadrez tellement que,
finalement, ce sont un petit peu les mêmes critères que pour la
régie du logement elle-même.
M. Tardif: Qu'est-ce que vous voulez dire par encadrer?
M. Simard: En ce sens que, dans les articles 102 et 103, vous
prévoyez les critères sur lesquels la ville devra accepter ou pas
le permis de démolition à un éventuel demandeur. Où
je me pose des questions, à un moment donné, c'est justement si
ce n'est pas une partie extérieure. La Régie du logement est
peut-être une partie extérieure, mais les gens peuvent
auditionner, donc, recréer un peu le milieu, si vous voulez. Mais au
niveau des procédures d'une ville, justement parce que les villes ne
sont pas trop habituées à une démocratie de participation,
à un moment donné, le poids entre le Hilton et les
résidents du quartier Saint-Jean-Baptiste, pour donner un exemple, n'est
pas nécessairement égal aux yeux d'une municipalité, parce
que l'un crée de l'emploi et l'autre, c'est de l'habitation pas payante
en taxes. Ce qui arrive, c'est trop tentant pour les municipalités
d'avoir des procédures un peu fumeuses ou pas tellement publiques et de
s'organiser pour émettre le permis. C'est à ce moment-là
que les critères... M. le ministre, vous m'avez posé une
question.
M. Tardif: Oui.
M. Simard: Finalement, au niveau de la municipalité, elle
peut souvent passer cela par en dessous. C'est bien clair, à un moment
donné, qu'elle peut passer cela par en dessous.
M. Tardif: J'écoutais, mais je voulais avoir exactement la
référence à l'article 29. Vous présumez que les
critères énoncés dans cet article, c'est-à-dire
qu'avant de se prononcer sur une demande visée dans les articles 27 ou
28, la régie doit considérer l'état du logement
évidemment, si c'est la municipalité qui a adopté un
règlement, c'est elle qui devra le faire le préjudice
causé au locataire, les besoins de logement dans les environs, la
possibilité de relogement des locataires, la détérioration
de l'apparence architecturale, du caractère esthétique ou de la
qualité de vie du voisinage, le coût de la restauration et tout
autre critère pertinent.
Vous présumez que tous ces critères seront des
critères additionnels pour démolir alors qu'ils ont
été mis là précisément pour être des
critères additionnels pour refuser la démolition. En vertu de
quoi pouvez-vous présumer que ce seront des critères pour
faciliter les démolitions? C'est ce que j'aimerais savoir.
M. Simard: Je trouve que la pondération n'est pas
expliquée; elle permet tout le temps de contourner. La loi permet,
à un moment donné, que les mots "tout autre critère
pertinent" ne servent pas nécessairement, parce que ce n'est pas
précisé, la ville ou la régie du logement; ces
critères peuvent jouer des deux bords.
Une Voix: D'accord.
M. Simard: D'accord? Comme la pondération n'est pas
vraiment expliquée et qu'on ouvre énormément la porte avec
"tout autre critère pertinent", je me demande jusqu'à quel point,
par exemple, la stimulation économique d'une ville ou la revalorisation
de son assiette foncière par un projet en hauteur d'édifice
à bureaux, cela ne serait pas pertinent. Vous avez eu un mémoire,
la semaine passée, je pense, du Comité de citoyens de
Saint-Sauveur, qui reprenait ces arguments, c'est-à-dire ces
critères un par un, et qui disait finalement que cela veut tout dire et
rien dire.
M. Tardif: Je comprendrais votre interprétation si la
section II, en haut de la page, était coiffée du titre:
Dispositions particulières à la conservation et à la
démolition des logements. D'accord? A ce moment-là, on dirait:
Ces critères doivent être interprétés comme devant
faciliter les démolitions. Mais tout le sens de la section II est:
Dispositions
particulières à la conservation des logements. Ce sont des
raisons pour conserver des logements. Evidemment, on n'avait pas la
prétention, dans un projet de loi, de pouvoir les énumérer
de façon exhaustive.
M. Simard: D'accord, mais à propos d'un titre, à un
moment donné, on a travaillé aussi avec des coopératives
et on a eu des programmes d'aide au logement coopératif, qui sont
censés créer 30 000 unités de logement, c'est de vos
vis-à-vis d'Ottawa, le titre était là; tout est en
fonction de cela, mais ils sont à peu près inapplicables pour les
coopératives. Finalement, au niveau du logement coopératif, ce
peut être la mort du développement coopératif. A ce
moment-là, le titre de cette section ne m'impressionne pas beaucoup. Ce
sont les possibilités de s'en servir. J'ai l'impression qu'un
propriétaire qui veut vraiment démolir, qui veut vraiment
subdiviser, va lire cela et se frotter les mains en disant: Ils m'ont
laissé des trous et je vais m'en servir.
M. Tardif: D'accord, sauf que vous êtes conscient que,
jusqu'à maintenant, aucune disposition n'existait comme telle, si ce
n'est dans la charte de Montréal, depuis tout récemment, alors
qu'on lui a donné le pouvoir de contrôler les démolitions,
il y a quelques mois de cela, et qu'elle a effectivement adopté un
règlement de sorte qu'on part d'une situation où il n'y avait
rien et on permet maintenant aux municipalités de contrôler les
démolitions sur leur territoire.
M. Simard: C'est d'autant plus frustrant qu'il n'y avait rien et
qu'on n'a que cela maintenant.
M. Tardif: Bon, je pense que je vais passer, pour l'instant.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Premièrement, je vous remercie pour vos trois
mémoires. En effet, ils sont assez différents et assez
importants. Il y a de la matière dans chacun. (18 heures)
J'aimerais prendre le temps qui m'est alloué en vous demandant
et je ne sais pas exactement à qui j'adresse la question, vous
pouvez décider de me parler un peu du rôle que vous
prévoyez pour l'entreprise privée, pour le système
capitaliste, si vous voulez, dans le domaine de l'habitation au Québec.
Quand vous parlez de cela, parlez-nous un peu de la question de la construction
des nouveaux logements. Même si on empêche la démolition de
tous les logements, il faut quand même que nous construisions 40 000 ou
50 000 le nombre n'a pas été précisé
mais à peu près 50 000 logements par année. Est-ce que,
dans le cadre de votre explication, ces 50 000 logements doivent être
construits par le secteur privé et quels sont les critères, les
incitations, les bénéfices qu'on doit permettre pour cette
construction? De plus qui va décider et comment va-t-on décider
jusqu'à quel point ces bénéfices seront reçus? En
effet, parlez-moi un peu de votre perspective du rôle de l'entreprise
privée dans le domaine de l'habitation au Québec et surtout en ce
qui concerne la construction des nouveaux bâtiments.
Mme Grondin: Lise Nadeau va le prendre.
Mme Nadeau: Oui. En fait, probablement que l'entreprise
privée serait encore mieux placée que nous pour décrire
son rôle, mais ce qu'on peut vous dire là-dessus, si on observe
actuellement le marché, son rôle est nécessairement
déterminant, c'est-à-dire que c'est à elle que revient le
choix, par exemple, au niveau de la construction, de décider quand
construire, où construire, comment construire et quel type de logements
construire. C'est son rôle actuellement. Nous, devant cela, on dit:
Compte tenu que le logement est un bien essentiel, ce n'est pas possible de lui
laisser cela indéfiniment entre les mains parce que la preuve se
fait de plus en plus le type de logements qu'elle construit ne peut pas
répondre aux besoins des gens. On ne peut pas demander à
l'entreprise privée de faire moins de bénéfices pour
satisfaire aux besoins des gens. Ce n'est pas le rôle de l'entreprise
privée de répondre aux besoins des gens. Son rôle est de
faire des profits. C'est à partir de cela que nous disons que l'Etat
doit intervenir. Là, on parle au niveau du contrôle des loyers et
des aspects qui touchent le projet de loi 107, mais il est évident que
l'Etat va devoir intervenir beaucoup plus massivement, même au niveau de
la construction, parce qu'on ne peut pas laisser l'entreprise privée
répondre à un besoin comme le logement.
M. Scowen: Vous avez proposé ici dans vos mémoires
un système assez global de contrôle de tout ce qui touche
l'habitation, le droit de fixer les loyers, le droit de maintien dans les lieux
et ainsi de suite. Tout cela a été approuvé et est devenu
loi. Si l'entreprise privée disait: Ecoute, c'est très bien, on
n'est pas contre, mais, personnellement, nous ne nous intéressons pas
à la construction de nouveaux bâtiments sur la base de cette
nouvelle loi, que prévoyez-vous comme suite? Est-ce l'Etat qui doit
entreprendre la construction de ces 50 000 logements par année ou
doit-on changer la loi pour que cela puisse donner une incitation à
l'entreprise privée? Quelle est l'étape? Avec ce système
assez global, assez compréhensif, on voit qu'il n'y a pas beaucoup
d'incitation à la construction.
Mme Nadeau: Pour vous répondre, je pourrais
peut-être prendre seulement comme premier exemple la question des
immeubles neufs. C'est justement une mesure dans le projet de loi 107 qui
existait avant, soi-disant pour promouvoir la construction de logements. Nous
disons finalement que cela n'a aucune justification à ce
niveau-là, parce qu'il s'agit que les règles du jeu soient
établies par le gouvernement et, à ce moment-là,
s'il était clair que les immeubles neufs, par exemple, étaient
couverts, la première année, les propriétaires seraient
obligés de louer à leur vrai prix au lieu de jouer avec les
locataires qui entrent dans leurs immeubles. D'une part, on se dit que c'est
à l'Etat d'établir les règles du jeu.
Deuxièmement, vous demandez quels effets cela aurait sur la
construction. Nous autres, on dit que c'est la même chose qu'on nous
ressert du côté des locataires quand on parle du contrôle
des loyers, parce que les gens ne sont pas capables de payer. On nous dit: Le
contrôle des loyers, cela ne peut pas régler la capacité de
payer du monde. Il doit y avoir des politiques de revenu à
côté, parce que le contrôle des loyers, c'est censé
être strictement sur le prix des loyers.
Mais, d'autre part, on dit que c'est la même chose. Si on instaure
un contrôle des loyers qui protège vraiment les locataires et que,
supposément, l'entreprise privée en subit les préjudices,
si l'Etat veut maintenir les privilèges de l'entreprise privée
à ce niveau, il fera les programmes qui s'imposent. Ce n'est pas
à nous à lui suggérer des programmes pour protéger
ses intérêts.
M. Scowen: Probablement que je n'ai pas bien exprimé la
question. Je vais la poser d'une autre façon. Vous avez vos
revendications; elles sont acceptées; elles deviennent la loi. Vous
voyez que l'autre côté, qui a aussi sa liberté, ne
construit pas. A ce moment, est-ce que vous pensez que le mieux à faire
est de commencer à négocier vous autres, par exemple, si
vous avez le droit de le faire avec l'entreprise privée pour
peut-être changer toutes ces propositions qui sont maintenant devenues la
loi, pour faire les compromis, ou est-ce que ce sont des choses de base qui ne
doivent pas être compromises ou changées? Est-ce à l'Etat,
si l'entreprise privée n'accepte pas toutes ces revendications, de
construire les 50 000 par année? Vous voyez-vous dans un système
de négociation, vous autres, avec l'entreprise privée dans le
domaine de ces revendications, ou est-ce que vous préférez
qu'elles soient acceptées à 100% et que l'Etat en subisse les
conséquences?
Mme Nadeau: Je ne vois pas très bien comment on pourrait
négocier cela avec l'entreprise privée. Les revendications qu'on
a là ne sont pas dans ses intérêts.
M. Simard: On en est tellement loin que c'est une discussion un
peu théorique. Ce n'est pas cela qui nous est présenté,
c'est le moins qu'on puisse dire. A ce moment-là, ce seraient soit des
règles du jeu pour l'entreprise privée ou soit un autre type de
développement dans ce cas-là. A un moment donné, pour la
santé, quand c'était privé, plus, en tout cas, on a
trouvé des moyens. Ce n'est pas à nous de les trouver. On nous
propose un projet de loi assez "statuquoïste". Je pense que c'est une
discussion qui pourrait se poursuivre encore à cette commission.
M. Scowen: Je vous remercie. Il ne reste que cinq minutes, je
vais laisser la parole au député de Saint-Hyacinthe. Merci.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci de votre participation. Au tout début,
je pourrais dire, comme membre d'un parti de l'Opposition: Bravo pour votre
mémoire; vous tapez sur le gouvernement et allez-y. Par contre, je dois
peut-être vous dire franchement qu'à plusieurs points de vue, vous
allez passablement loin.
Une Voix: Pas mal loin.
M. Cordeau: Passablement loin. J'aimerais avoir quelques
explications. Lorsque vous dites, dans votre mémoire, que c'est un droit
au logement, d'accord. Par contre, vous considérez qu'à un moment
donné, si la personne n'a pas les moyens de payer, elle pourrait rester
dans son logis indéfiniment, parce qu'elle n'a pas les moyens financiers
et qu'elle a le droit au logement. Qui, croyez-vous, à ce
moment-là, va payer le propriétaire?
Mme Grondin: A ce sujet, qu'est-ce qu'on dit? C'est qu'on trouve
inadmissible cela est arrivé, dans notre mémoire,
d'ailleurs, on le souligne... Ce n'est pas seulement un cas; de plus en plus,
cela arrive. En 1977, une famille de trois enfants s'est retrouvée trois
fois dans la rue parce qu'elle n'avait pas les revenus suffisants et ne
trouvait pas de logement qui corresponde à sa capacité de payer.
Ce qu'on dit, c'est qu'il faut faire quelque chose au niveau du contrôle
des loyers et il faut faire quelque chose au niveau plus global, qui est au
niveau des politiques d'ensemble de revenu, parce qu'on trouve inconcevable
que, dans une société dite civilisée, il y ait des gens
qui se retrouvent dans la rue ou sur le banc de neige parce qu'ils ne sont pas
capables de payer. Il y en a de plus en plus et ce ne sont pas tous des gens
qui ne savent pas gérer leurs choses. Les ADDS, les associations pour la
défense des droits sociaux d'ailleurs on a une lettre et on
regrette de n'avoir pu la faire photocopier le ministère des
Affaires municipales leur alloue $85 pour une famille à ce sujet. C'est
tout à fait utopique. Il faut faire quelque chose.
M. Cordeau: Je suis tout à fait d'accord avec vous que le
montant qui est accordé pour le loyer de base pour ceux qui
bénéficient de l'aide sociale n'est plus adéquat en 1979.
J'ai une autre question. Vous avez dit tantôt que le propriétaire
qui rénoverait, qui voudrait rendre son logis habitable,
c'est-à-dire suivant le code d'habitabilité, n'aurait droit, lui
non plus à aucune augmentation.
C'est entendu que si le ministre accepte dans son projet de loi une
telle suggestion, il n'y a pas un propriétaire qui pourrait
rénover sans augmen-
ter son loyer convenablement, avec une directive de la régie,
parce qu'à ce moment-là le logement va aller en ruines et le type
va le vendre pour ne pas faire de rénovations, s'il le fait. Le type ne
fabrique pas les piastres, le propriétaire n'a pas de machine à
piastres pour payer les rénovations. Je pense que, de ce
côté, ce serait peut-être bon, aussi, de votre part,
d'étudier de nouveau le problème. Je crois que c'est une demande
qui n'a pas de sens.
Mme Grondin: On peut répondre à cela. M.
Cordeau: Oui?
Mme Grondin: Depuis le début, vos interventions nous
disent: Vos affaires n'ont pas de sens, vous allez trop loin, tout cela.
Malheureusement, on n'a peut-être pas assez de temps pour expliquer. Dans
ce cas précis des rénovations, on a parlé des
rénovations pour rendre un logement conforme à un code
d'habitabilité, pour qu'un logement soit habitable. Nous disons: Si
quelqu'un a mis sur le marché un logement qui était de
très mauvaise qualité, qui était inhabitable, et qu'il
louait cela $150, s'il est obligé d'investir pour le réparer,
c'est bien de valeur, mais cela ne doit pas s'ajouter au loyer. Avec la
méthode actuelle et celle qui va être maintenue, même si le
logement est déjà trop cher par rapport à sa
qualité si le propriétaire pose deux vis de plus, cela se traduit
par des augmentations. C'est cela qui est inadmissible. Nous disons: Si le
logement est loué à tel prix, il doit être loué
habitable; quand il ne l'est pas et que le propriétaire fait des
rénovations, cela ne doit pas augmenter le loyer.
M. Cordeau: Je parle des rénovations de $4000 à
$5000 par logis, à un moment donné, à l'extérieur;
je ne parle pas d'une rénovation, planter deux clous et trois vis.
Mme Grondin: Encore là, sur les rénovations...
M. Cordeau: De ce côté, il...
Mme Grondin: ... quel que soit le montant, si c'est pour le
rendre habitable, quand il l'a loué ce logement devait être
habitable.
M. Cordeau: Je vous remercie. Il faut aller vite, le temps
manque. Concernant les chambres, est-ce que le stock de chambres est suffisant
dans le Québec métropolitain? Vous dites que c'est
onéreux. Est-ce dû à un manque de chambres?
M. Devin: II n'y a jamais eu de contrôle; c'est très
difficile de situer le stock de chambres actuellement. On a l'impression que le
stock de chambres grandit dans les banlieues, dans les logements ou dans les
maisons unifamiliales, les gens peuvent se permettre de louer une chambre ou
deux durant une année, mais ce stock diminue dans le centre-ville. Les
chambres en banlieue sont évidemment plus chères que celles qui
exis- tent dans le centre-ville actuellement. Je ne crois pas, je ne peux pas
affirmer que c'est à cause d'une pénurie du nombre de chambres.
De toute façon, au niveau de l'accroissement du nombre de chambres, ce
n'est pas de la construction neuve dans les quartiers comme les nôtres,
au centre-ville, dans Saint-Roch; ce sont les plus vieilles maisons qui sont
près d'être démolies, qu'un propriétaire transforme
en chambres. S'il a trois logements qu'il loue à $100 par mois; s'il
peut faire dix chambres et les louer $100 par mois, il maximise son profit.
Alors, il n'y a pas de construction neuve, mais c'est difficile de situer le
stock de chambres exactement.
M. Cordeau: Une dernière observation. Je suis tout
à fait d'accord avec vous que le prix des chambres devrait être
fixé par la régie, comme pour les hôtels, et que le prix de
la chambre devrait être affiché dans les chambres pour un
contrôle un peu plus humain, peut-être. J'aurais d'autres questions
mais, étant donné que M. le député de Taschereau,
qui est près de vous, a des questions, je vais lui laisser la
parole.
M. Guay: J'ai une ou deux questions. Je trouve un peu dommage que
le bout du mémoire, ou le mémoire de M. Devin, ou le chapitre du
Centre de références, section chambreurs, ait été
en quelque sorte pris en sandwich comme il l'a été. Je pense
qu'il aurait pu faire l'objet d'un mémoire distinct, étant
donné l'expérience réelle et, dans certains cas,
dramatique de la situation des chambreurs dans Saint-Roch. On aurait eu
facilement de quoi en parler pendant une bonne heure.
Mme Grondin: C'est ce qu'on avait demandé aussi. On avait
demandé trois heures à M. Pouliot pour que chaque groupe puisse
intervenir au niveau du fond de chaque partie du mémoire.
M. Guay: A ce moment-là, il s'agissait de faire trois
mémoires distincts, cela aurait été simple.
Mme Grondin: On avait pris les informations avant et on a
été incapable de savoir les règles du jeu, ici, à
l'intérieur. (18 h 15)
M. Guay: Bon, en tout cas. Dans le cas des chambres,
effectivement, comme le mentionnait le député de Saint-Hyacinthe,
c'est une hypothèse intéressante. Je me demandais si, du
côté du Centre de références, section chambreurs, on
avait regardé cette hypothèse. Il existe, soit dans les lois,
soit dans les règlements il faudrait vérifier du
ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche tout ce qui
concerne les chambres d'hôtel. Evidemment, il y a un parallèle
avec des réserves à faire, puisque les chambres d'hôtel,
par définition, servent un soir, ou enfin, plusieurs soirs, mais
toujours en fonction d'une location d'une période de 24 heures, ce qui
n'est pas le cas pour une chambre qui constitue en quelque sorte le logis.
Même à cela, il y a des... Est-ce que vous
avez pu regarder les textes de lois tels qu'ils sont, et en
êtes-vous arrivés à une forme d'adaptation qui pourrait
être incluse dans le projet de loi 107 et qui pourrait donner
précisément aux chambreurs de Saint-Roch ou d'ailleurs la
protection à laquelle ils ont droit et qu'ils n'ont manifestement pas
à l'heure actuelle?
M. Devin: On pourrait peut-être tout simplement faire une
remarque sur votre première observation pour dire qu'on est ici avec
d'autres groupes parce qu'évidemment, on considère que le
problème des locataires de chambres est grave et sérieux. Ce ne
sont pas les seules gens qui sont en logement actuellement au Québec qui
ont des problèmes graves et sérieux. C'est pour cela que, comme
on était d'accord avec les revendications concernant les autres
locataires, nous avons tenu à faire une démarche commune. Ce que
nous avons regardé concernant les chambres d'une manière plus
spécifique, ce n'est pas encore très précis comment
pourrait s'élaborer une méthode pour fixer le prix des chambres.
Je n'ai pas encore de suggestion très précise à faire
là-dessus, mais je pense que je peux tout simplement vous ramener
à la revendication no 2 concernant une inspection obligatoire par la
régie du stock des chambres, une fixation selon les critères du
prix, selon les critères de qualité. Il faudrait que ces
critères, évidemment, accordent plus de points à une
douche qu'à une télévision ou à un tapis.
Il faudrait que ce soit fait selon des besoins essentiels et que les
hausses de loyers soient...
M. Scowen: Excusez-moi. Une question de règlement. C'est
simplement pour vous dire, M. le Président, que moi j'ai un engagement
à 18 h 30. J'avais prévu qu'on terminerait à 18 heures. Je
pense que je dois demander avant 18 h 20, de mettre fin, s'il y a consentement,
parce qu'il faut vraiment que je parte dans dix minutes.
Le Président (M. Laplante): Je vous remercie.
M. Guay: On pourra s'en parler privément dans ce cas,
parce que l'Opposition officielle nous fait faux bond.
M. Scowen: Oui, je serais heureux moi aussi de vous parler. C'est
simplement que...
Le Président (M. Laplante): II me reste à...
M. Guay: Pouvez-vous, si vous me permettez, est-ce que cela vous
serait possible, quand même, fouiller cela un peu plus pour que, à
très court terme, on puisse en reparler ensemble.
Le Président (M. Laplante): Mesdames et messieurs Nadeau,
Simard, Devin, Grondin, les membres de cette commission vous remercient pour
l'effort que vous avez fait dans votre mémoire.
Maintenant, avant d'ajourner les travaux, j'aimerais vous donner la
liste de ceux qui seront appelés demain. L'Union des
municipalités du Québec, no 29, l'Office municipal de
l'habitation de Montréal, no 25, l'Association des propriétaires
d'immeubles de la Communauté urbaine de Montréal Inc., no 13, Mme
Léon N. P. Gagnon, à titre personnel, no 20, l'Association des
commerçants de maisons mobiles et terrains du Québec inc., no 28,
Structure métropolitaine du Canada Ltée, no 26. Sur ce, les
travaux sont ajournés à demain, 10 heures, même
endroit.
Fin de la séance à 18 h 20