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Projet de loi no 125
(Dix heures six minutes)
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît! Prenez vos places! M. le ministre! A l'ordre, s'il vous
plaît!
Reprise des travaux de la commission élue permanente des affaires
municipales pour l'audition des mémoires en vue de l'étude du
projet de loi no 125.
Sont membres de cette commission: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron
(Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe) remplacé par M. Goulet
(Bellechasse); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Gratton
(Gatineau)...
M. Goldbloom: Remplacé par Goldbloom (D'Arcy McGee).
Le Président (M. Laplante): ... remplacé par M.
Goldbloom (D'Arcy McGee); M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Chevrette
(Joliette-Montcalm); M. Mercier (Berthier) remplacé par M. Rancourt
(Saint-François); M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Shaw (Pointe-Claire),
M. Tardif (Crémazie) remplacé par M. Léonard
(Laurentides-Labelle); M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau (Verchères)
remplacé par M. Gendron (Abitibi-Ouest); M. Fontaine (Nicolet-Yamaska)
remplacé par M. Cordeau (Saint-Hyacinthe); M. Goldbloom (D'Arcy McGee)
remplacé par... Il n'y a personne aujourd'hui?
M. Goldbloom: Par M. Gratton (Gatineau).
Le Président (M. Laplante): ... par M. Gratton (Gatineau);
M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle)
remplacé par M. Tardif (Crémazie); M. Samson (Rouyn-Noranda), M.
Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Je fais l'appel des organismes qui seront entendus aujourd'hui. Conseil
régional des loisirs Saguenay-Lac-Saint-Jean, êtes-vous ici?
Merci. Municipalité du comté des Iles-de-la-Madeleine. Les
Iles-de-la-Madeleine?
M. Chevrette: Pas arrivés.
Le Président (M. Laplante): Pas encore arrivés.
Conseil régional de développement de
l'Abiti-bi-Témiscamingue? Etudiants de l'Institut d'urbanisme de
l'Université de Montréal? Merci.
J'appelle maintenant le Conseil régional des loisirs
Saguenay-Lac-Saint-Jean. Messieurs, si vous voulez identifier votre organisme,
vous identifier vous-même, ainsi que les personnes qui vous
accompagnent.
Je remarque que votre mémoire a seize pages. Ce sera difficile de
le lire en 20 minutes. Si vous étiez capable d'en faire un
résumé pour que les membres de cette commission puissent vous
poser le plus grand nombre de questions possible, parce que vous avez tout au
plus une heure pour le présenter. Bonne chance!
Conseil régional des loisirs du
Saguenay-Lac-Saint-Jean
M. Bussière (Jean-Paul): Merci. Je m'appelle Jean-Paul
Bussière, président du Conseil régional des loisirs du
Saguenay-Lac-Saint-Jean. A ma gauche, M. Michel Byette qui est le directeur
général du Conseil régional des loisirs et, à ma
droite, M. Camille Laforge qui est un permanent du Conseil régional des
loisirs et qui est l'auteur du mémoire qu'on vous présente.
J'essaierai de faire une synthèse du mémoire, mais, en
certaines circonstances, je me devrai de lire le texte parce que le texte sera
beaucoup plus compréhensible qu'une synthèse qui pourrait risquer
de vous mettre en difficulté.
M. le ministre, dans la première partie du mémoire, dans
le premier paragraphe, le Conseil régional des loisirs souscrit et
partage quand même votre point de vue sur l'importance et l'urgence de
procéder à une telle législation. Dans le deuxième
paragraphe, on vous donne un petit peu la raison d'être du Conseil
régional des loisirs, ce qui fait paraître un peu curieux qu'on
soit ici aujourd'hui. Justement, nous sommes un organisme régional de
consultation et de concertation en matière de loisir et la raison
d'être est tout particulièrement dans le domaine du plein air et
en relation très étroite avec l'aménagement du
territoire.
A la page 2, comme introduction, vous avez, dans le premier paragraphe,
l'historique, avec la venue de l'homme blanc qui, dans ses différentes
transformations, a posé des gestes dont les effets ont été
parfois positifs et parfois négatifs sur l'équilibre naturel;
cependant, dans le deuxième paragraphe, on dit que ces modifications au
milieu naturel ont tout de même été nécessaires pour
le développement social et économique de la région.
Dans le troisième paragraphe, on remarque que le
Saguenay-Lac-Saint-Jean constitue une excellente région, une des plus
belles au Québec c'est important de le dire en passant et
il ne faudrait quand même pas trop accuser nos pères d'avoir voulu
survivre et d'avoir construit un peu sans avoir pu, dans le temps, consulter
les fameux spécialistes en écologie.
Mais ce qui nous intrigue un peu dans le dernier paragraphe, c'est que,
quoique nos aïeux aient voulu survivre, aujourd'hui, il y a encore des
gens qui veulent survivre, et ce qui nous intrigue, c'est comment il se fait
qu'on est si pauvre en études écologiques et comment il se fait
que ces études écologiques soient aussi rares en tant que
consultation et concertation dans un projet d'exploitation du milieu
naturel.
A la page 3, vous avez un peu l'historique de ce qu'est le Conseil
régional des loisirs. Dans le
premier paragraphe, que vous avez ici, on lit l'objectif global. Le
Conseil régional des loisirs veut participer au développement du
loisir, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, en assistant les municipalités, les
commissions scolaires et les associations régionales dans leurs
démarches.
Cette phrase "d'action dans le milieu", exprime notre désir de
vouloir travailler avec chacune des instances du loisir régional, sans
en privilégier une, tout en les considérant comme une
série d'engrenages au service des citoyens.
Le paragraphe, ici, c'est qu'au-delà des structures, pour nous,
les citoyens constituent le point de mire de nos actions. Il y a deux points,
deux voies pour l'atteindre. Une des premières voies, c'est la suivante:
Ce sont les structures publiques qui encadrent sa vie quotidienne et
l'association bénévole qu'il a créée de par son
action en loisirs.
La seconde, ce sont les activités et ce, de façon
sectorielle dans lesquelles il joue un rôle d'organisateur ou de
participant. Cette ambivalence de notre action, à partir du citoyen, a
pour effet, selon nous, de mieux cerner la réalité vécue
quotidiennement où chacune de ces composantes vient en interaction.
Au niveau du principe d'intervention, nous en avons quatre. Le Conseil
régional des loisirs veut essayer, autant que possible, de
présenter une approche globale en matière de loisirs. Il veut,
dans un second temps, favoriser une structure souple et participative du
milieu. Dans un troisième temps, il veut permettre une
accessibilité à tous et, dans un quatrième temps, il veut
quand même en arriver à favoriser une pratique libre et
spontanée.
On vous donne ici les modes d'intervention. On dit que, pour le Conseil
régional des loisirs, toute l'action devrait se situer le plus
près du citoyen, dans ce qu'il y a de plus stable au niveau des
structures. Cette réflexion nous a donc portés à
privilégier la localité comme unité de base
d'intervention. La localité doit être ici comprise dans son sens
le plus large, c'est-à-dire la visualiser avec toutes ses composantes:
municipalités, commissions scolaires, commissions des loisirs ou
services des loisirs et citoyens organisés et non organisés.
Je vous fais grâce des paragraphes des pages 5 et 6 qui vous
donnent le fonctionnement des gens au Conseil régional des loisirs. A la
page 6, ce qui est le plus important pour nous, l'action en aménagement;
ce qui vous donne peut-être notre raison d'être ici. (10 h 15)
En tant que représentant de la population du
Saguenay-Lac-Saint-Jean en matière de loisirs et plus
particulièrement en plein air, le Conseil régional des loisirs
s'est déjà impliqué à différents niveaux:
Premièrement, au niveau local, auprès des municipalités
afin de les aider à planifier non seulement les ressources humaines,
mais également leur équipement et cela, selon leurs besoins;
deuxièmement, auprès de différents organismes locaux, afin
d'assurer une concertation avec les municipalités dans le
développement des services humains et physiques; troisièmement,
auprès d'agents de projets Canada au travail ou autres, afin d'assurer
une harmonisation des équipements mis en place.
Sur le plan régional, le Conseil régional des loisirs
participe ou a déjà participé à certains dossiers
majeurs, tels les monts Valin, la piste cyclable régionale, sentier des
Jésuites, certaines ZEC et autres. Aussi, ses services sont requis comme
consultant pour certains ministères et, dans certains cas, plus que pour
le Haut-Commissariat, comme le ministère du Tourisme, de la Chasse et de
la Pêche en ce qui a trait aux équipements avec rapprochement
touristique, le ministère des Terres et Forêts en ce qui a trait
à des études de terres publiques pour fins
récréatives et enfin, au ministère des Affaires
culturelles en ce qui a trait à l'animation, certains équipements
culturels. Actuellement, il travaille à une planification à court
terme, d'ici l'application de la loi 125, des équipements de plein air
dans la région 02.
Donc, notre préoccupation pour un aménagement
équilibré est constante et, même, s'accentuera avec notre
projet d'aménagement des équipements de plein air dans lequel
nous associons les conseils de comté et l'ensemble des organismes de la
région.
A la page 8, vous avez le coeur du problème: ce sont les
principes de base du projet de loi 125, les différents paliers de
décisions et, ensuite, vous avez aussi ces deux éléments.
Ce que je voudrais faire ici, je demanderais à M. Camille Laforge de
vous présenter lui-même son projet pour faire cette
synthèse.
M. Laforge (Camille): Pour ce qui concerne la
responsabilité politique que vous donnez aux élus en
matière d'aménagement, nous souscrivons entièrement
à cela, par contre, nous nous posons certaines questions sur la
polyvalence que doivent avoir ces surhommes. On a été heureux
d'apprendre que dans le récent budget, le gouvernement va apporter un
support financier pour que les municipalités puissent s'associer le
personnel technique nécessaire. On a peur que le développement
ait des grosses tendances économiques et que le côté social
soit mis de côté lors de planifications en aménagement du
territoire, dans le sens que les élus sont beaucoup plus habitués
à travailler en matière économique et les matières
sociales ne sont jamais apparues comme une priorité ou ont souvent
été mises de côté parce qu'il fallait régler
des problèmes économiques.
On dit que s'il y a du personnel technique un peu plus objectif, n'ayant
pas de responsabilité ou de décision à prendre, pour
équilibrer cette planification, il sera d'un soutien essentiel aux
élus municipaux.
Le point le plus important sur lequel on veut insister, c'est la
participation du citoyen; or, on remarque à ce sujet des lacunes
majeures dans le projet de loi. On mentionne que la partie d'information sur
les projets de planification est exsangue, dans le sens que vous allez diffuser
les propositions auprès de chaque contribuable.
Par contre, vous parlez de participation du citoyen en matière
d'aménagement et on dit que si vous ne mettez pas les mécanismes
de soutien à cette participation, on ne sent pas un désir profond
d'inciter le citoyen à participer à l'aménagement.
Les mécanismes qu'on propose pour soutenir cette participation,
c'est, entre autres, d'obliger... Vous dites, dans le projet de loi, que les
municipalités peuvent s'associer des commissions d'urbanisme, mais nous
insistons pour que le projet de loi demande aux municipalités de
s'associer obligatoirement des commissions d'urbanisme qui seraient
formées lors d'assemblées publiques de simples citoyens. Vous
allez demander à un citoyen, du jour au lendemain, de se prononcer sur
une démarche quand même très complexe, qui est celle de
l'aménagement, et vous allez lui demander, du jour au lendemain, de
donner un avis intelligent sur une planification.
Notre perception est que si le citoyen n'a pas eu la chance d'être
associé à l'ensemble des démarches amenant cette
planification, il ne pourra pas se prononcer d'une façon
éclairée sur cette planification.
Donc, en obligeant chacune des municipalités à mettre des
structures parallèles de représentation et de sensibilisation, on
donne des objectifs de sensibilisation à cette commission, dans le sens
qu'elle devra informer le citoyen de façon parallèle sur la
démarche en matière de planification, d'urbanisme ou
d'aménagement du territoire. Et de même, nous demandons que cette
même structure soit associée aux conseils de comté, donc
sur le même principe, par assemblée générale, de
faire élire un comité d'aménagement au niveau du conseil
de comté.
On dit que les consultations publiques devront être
appuyées de façon très massive par les mass media, parce
que le citoyen est difficile à motiver, à embarquer dans une
consultation, même si c'est de la plus haute importance. On l'a
vécu lors de la consultation en région sur le projet de loi
où très peu de personnes se sont intéressées
à la chose. On extrapole en disant: Ce sera la même chose lorsque
la planification ou les décisions vont se prendre au niveau de
l'aménagement du territoire. Il faudra donc appuyer fortement les
consultations publiques par les mass media. De même, sur la question du
référendum qui n'est que consultatif ou décisionnel, de
façon très sectorielle, au niveau des règlements de
zonage, on aimerait le voir s'élargir à d'autres champs que celui
du règlement de zonage. Qu'il demeure sectoriel, on n'a pas d'objection,
mais qu'il touche peut-être à d'autres questions que le
règlement de zonage.
On passe au niveau des paliers de décision. Comme vous avez pu le
constater dans notre première partie, on ne conteste pas que ce soit la
municipalité, c'est un peu le même partenaire que celui avec
lequel on travaille.
Concernant le comté, on est également d'accord, parce
qu'on dit que c'est une suite logique au fait de s'être associé
à la municipalité, dans un premier temps. Par contre, on
s'interroge sur l'efficacité des conseils de comté, dans le sens
que, présentement, la perception qu'on en a, c'est qu'il y a beaucoup
plus d'information que d'action qui se passe au niveau des comtés. On
s'interroge même tellement qu'on se dit que, cette perception-là,
on l'a sur les conseils de comté qu'on a chez nous et qu'on nous dit les
plus dynamiques au Québec. On imagine mal ce qui peut se passer dans les
autres conseils de comté. On se dit qu'avec la réforme que le
fascicule no 4 amène, on a un très grand espoir que cette
structure devienne des plus efficaces. Nous autres, dans notre intervention, on
a l'intention de nous y associer, et d'une façon très active.
Je vais essayer de retrouver, sans trop... Par contre, au niveau du
découpage du territoire, on mentionne qu'il serait intéressant de
confronter les deux gouvernements locaux qui sont la municipalité et les
commissions scolaires, non pas, comme certains peuvent le craindre, pour en
arriver à une seule structure gouvernementale au niveau local, mais
plutôt pour utiliser le rapport de force qui pourrait exister entre deux
gouvernements ayant le même territoire d'intervention. Pour nous, cela
nous apparaît comme un élément positif dans la
planification du développement du territoire.
Une autre lacune qu'on mentionne au niveau du projet de loi 125, c'est
que la loi 125 met carrément de côté le niveau
régional. Je ne parle pas de la petite région que
représente le conseil de comté, mais du niveau régional
que représente, entre autres, le Saguenay-Lac-Saint-Jean. Le
développement économique et le développement social,
à venir jusqu'à maintenant, se sont effectués, entre
autres, dans les régions fermées comme le
Saguenay-Lac-Saint-Jean, l'Abitibi, l'Est du Québec ou la
Côte-Nord où les gens ont dû s'associer au niveau de la
région pour faire leur développement. On perçoit mal
comment le projet de loi 125 peut mettre de côté aussi facilement
tout ce dynamisme. Les structures locales se sont donné des
représentants régionaux pour se donner plus de force
d'intervention, plus de services. Vous l'avez par les clubs sociaux, ou encore,
le conseil régional de développement, le conseil régional
des loisirs ou le conseil régional de la culture, où on a
essayé de donner davantage de services aux structures locales pour se
développer. Le projet de loi 125 met ce niveau d'intervention
carrément de côté.
A notre avis, ce n'est pas nécessairement d'en faire un autre
niveau décisionnel, parce qu'on est conscient de la lourdeur
administrative que cela pourrait apporter. Par contre, on aurait
souhaité voir apparaître des mécanismes concrets de
consultation ou de coordination au niveau régional. Quant au principe
présenté par la loi 125, qu'une municipalité influence une
autre municipalité dans son développement à
l'intérieur d'un même comté, on est assuré
qu'à l'intérieur de notre région, l'aménagement des
différents comtés va avoir un impact sur le comté qui est
à proximité ou qui est à l'intérieur de la
région. Donc, on demande de
prévoir de meilleurs mécanismes de coordination ou de
consultation entre les comtés.
Au niveau de l'intervention de l'Etat dans la loi 125, on s'imagine mal
comment le gouvernement va réussir à coordonner l'ensemble de ces
ministères, et même l'ensemble des différents services
à l'intérieur d'un même ministère pour se prononcer
sur le développement d'un comté dans le processus de
planification. Si vous réussissez à le faire, on prétend
que le Québec ne sera plus jamais le même, et si vous êtes
prêt à signer un tel contrat avec le milieu, cela me surprendrait
que le milieu ait des restrictions à cela. Donc, bravo, si vous avez le
goût de la faire. Cela sera très difficile, parce que même
à l'intérieur de différents services d'un même
ministère, souvent, la planification n'est pas complète.
En ce qui a trait à la concertation des choix et des moyens, il
est évident que cela prend d'excellents moyens au niveau des choix et
des moyens. Par contre, il devrait y avoir à certaines occasions,
lorsqu'il n'y a pas d'opposition ou qu'il n'y a pas de confrontation, une plus
grande souplesse au niveau des délais, parce que de 90 jours en 90
jours, on peut aller très loin dans le retour des décisions
à ce niveau.
Au niveau de la délimitation des conseils de comté, en
plus de ce qu'on a mentionné tantôt, la confrontation entre les
deux gouvernements locaux, on vous demande de tenir compte du
développement historique que les municipalités ou que le milieu a
eu, de même que les relations géographiques. Le
Saguenay-Lac-Saint-Jean est assez spécial au niveau de son bassin
hydrographique qui a eu une influence très marquée au niveau de
l'aménagement du territoire et on vous demande d'en tenir compte.
Souvent, un pont, c'est facile à traverser, mais dans les
mentalités, c'est différent. Donc, on vous demande de tenir
compte de ça, de même que de la complémentarité du
développement des municipalités en matière de services
qu'elles se sont donnés. Souvent, on a vu des municipalités ne
pas se donner des services parce que l'autre, à côté, les
avait, et si vous ne tenez pas compte de ça, vous allez mettre de
côté certains services auprès des citoyens. Je pense que je
suis allé pas mal loin. Je vais laisser mon président
conclure.
M. Bussière: Fais la conclusion.
M. Laforce: C'est tout simplement de dire qu'on s'associe
à vous et qu'on va continuer, comme on l'a mentionné
tantôt, à s'impliquer au niveau de l'aménagement du
territoire, entre autres, d'ici l'application ou la réalisation de
l'aménagement du territoire. On prévoit quand même des
délais assez longs avant de voir des réalisations
concrètes sur le terrain. On vous dit: Chez nous, on va s'en occuper en
matière d'équipement récréatif et on vous assure de
notre collaboration une fois le projet de loi adopté.
Le Président (M. Laplante): D'accord! Merci, messieurs.
Vous faites ça en vrais professionnels.
M. Bussière: Merci.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Merci, M. le Président. On me permettra
d'abord, M. le Président, de saluer mes concitoyens de la région.
Je le fais avec d'autant plus de plaisir que le siège social du Conseil
régional des loisirs se situe dans mon comté,
précisément à Alma. On a déjà
commencé à faire de la décentralisation.
Une Voix: Si peu!
M. Brassard: Oui. Si peu, en effet. Je voudrais d'abord vous
remercier, au nom de la commission, d'avoir bien voulu témoigner sur le
projet de loi no 125. Ce témoignage est d'autant plus
intéressant, je pense, parce que vous avez vécu des
expériences d'aménagement depuis que vous existez, dans le
domaine du loisir, bien sûr. (10 h 30)
On va s'entendre assez facilement sur l'urgence de procéder
à légiférer, comme vous le mentionnez dans votre
mémoire. C'est d'ailleurs une constante qui se dégage depuis
hier, depuis le début des travaux de cette commission. Tout le monde
convient qu'il était urgent de procéder à l'adoption d'une
loi en cette matière.
J'ai constaté également que vous éprouviez des
inquiétudes sur la santé morale et physique des surhommes que
sont les élus locaux. C'est un point intéressant. Je pense que
quand le ministre est venu faire sa tournée dans la région
je pense que cela a été le cas un peu partout ailleurs
c'est ressorti un peu partout, ce point, cet élément.
On se rend compte qu'on confie, par ce projet de loi, une tâche
assez considérable à des personnes qui en ont déjà
pas mal et qui ne sont pas à temps plein, qui ont d'autres besognes et
qui ont à gagner leur vie. C'est donc dire à ce moment-là
que cela devient important, les ressources techniques que vous voulez voir
accorder à ces conseils de comté, cela devient absolument
essentiel, si on ne veut pas que les élus locaux soient
surchargés.
Sur la concertation des ministères qui devient nécessaire
pour l'application de ce projet de loi, vous éprouvez là aussi
des inquiétudes sur la possibilité que les ministères en
arrivent à se concerter pour présenter aux conseils de
comté des documents indiquant leurs intentions et leurs orientations. Je
dois vous avouer que j'éprouve moi aussi les mêmes
inquiétudes et j'espère que les ministères vont
réussir à se concerter rapidement pour présenter en commun
aux conseils de comté leurs orientations et leurs intentions. Je le
souhaite vivement comme vous.
J'aurais quelques questions à vous poser à la suite de
votre mémoire, si vous me le permettez. Vous souhaitez la mise en place,
en parlant de participation des citoyens, au niveau du comté... D'abord,
au niveau de la municipalité, vous souhaitez que le comité
d'urbanisme devienne obliga-
toire, alors qu'il n'est que facultatif dans le projet de loi; vous
souhaitez également la mise en place de comités ou de commissions
d'aménagement de comté qui seraient constitués lors
d'assemblées publiques. J'aimerais que vous élaboriez votre
pensée là-dessus parce qu'il me semble, à vous entendre,
que vous mettiez un peu en doute la représentativité des
élus municipaux au conseil de comté. J'ai peut-être mal
interprété vos propos. Pourquoi cette mise en place d'un
comité d'aménagement? Votre intention, évidemment, c'est
d'accroître la participation des citoyens, mais j'aimerais que vous
essayiez de me démontrer l'utilité d'un tel comité
c'est intéressant comme idée mais démontrer
l'utilité d'un tel comité, étant donné que les
élus municipaux, les membres du conseil de comté sont quand
même des élus, donc aussi des représentants attitrés
de la population, pourquoi, à côté de cela, un
comité d'aménagement élu par des assemblées
publiques?
M. Laforge: Ce n'est aucunement par manque de confiance aux
élus; c'est plutôt pour apporter un éclairage nouveau tant
aux conseils de comté qu'aux citoyens dans le sens que, souvent, une
telle démarche va se faire à l'intérieur d'un conseil de
comté ou municipal de façon assez fermée sur le milieu,
s'il y a une commission parallèle qui essaie d'apporter des
éléments nouveaux. Comme je le mentionnais tantôt, le fait
que ces gens n'aient pas de décision à prendre leur amène
une façon de réfléchir différente qui peut
provoquer un éclairage nouveau. Le niveau consultatif n'est absolument
pas contesté, mais s'ils peuvent amener des éléments
nouveaux au conseil de comté ou au conseil municipal, c'est un premier
élément que nous trouvons important.
D'un autre côté, si la municipalité donne des
informations sur sa démarche ou sur les choix qu'elle fait, ils seront
sûrement de la couleur de la municipalité, tandis que, si un
comité consultatif en donne aux citoyens, encore là, nous pensons
que l'objectivité, du fait qu'ils n'ont pas de décision à
prendre, sera différente et l'information auprès de la population
sera de plus grande importance. Donc, il y aura deux niveaux d'information qui
arriveront dans le milieu et le citoyen pourra prendre la décision,
c'est-à-dire faire le choix de son information.
M. Brassard: Est-ce que vous supposez ou pouvez envisager
l'hypothèse que les informations transmises par ce comité
d'aménagement soient différentes de celles transmises par le
conseil de comté lors du processus de consultation?
M. Laforge: Du fait que ces personnes ne sont pas
impliquées au niveau de la prise de décision. C'est
différent d'avoir à faire des choix lorsque tu as le choix ultime
à poser, tandis que, si tu es là seulement comme critique de la
démarche, ta position ou l'information ou ton travail va être
différent. C'est dans ce sens, ce n'est absolument pas par manque de
confiance ou par peur que la municipalité ou que le conseil de
comté biaise l'information.
M. Byette (Michel): Bien entendu, le conseil de comté
on l'a mentionné aura besoin de se donner des techniciens.
Ces gens informeront, de façon particulière, les conseils de
comté dans leur prise de décision.
En proposant la mise en place de commissions d'urbanisme au sein des
municipalités ou de commissions d'aménagement au sein des
conseils de comté, c'est un exercice de démocratie un peu plus
amplifiée qui permettra aussi d'avoir, de la part des conseils de
comté, une vue encore plus près des besoins des citoyens, parce
qu'ils sont composés de différents citoyens, que ce soit du
milieu agricole, du milieu syndicaliste, du milieu de l'enseignement, du milieu
de la jeunesse, du milieu ouvrier ou patronal. Tout cet exercice, je pense,
éclairera davantage dans l'exercice de la prise de décision qui
nous apparaît quand même importante sur l'aménagement du
territoire, parce qu'elle a des retombées immédiates sur la
santé morale, physique et la vie des citoyens dans leur
quotidienneté. Je pense que c'est important de s'associer. Il y a des
expériences de commissions d'urbanisme vécues dans des
municipalités; une des municipalités de votre comté, par
exemple, Aima, a cette expérience et ça s'avère
extrêmement positif, dans le sens qu'elle permet aux élus
municipaux de s'associer dans la prise de décision des citoyens qui,
normalement, n'auraient pas la possibilité d'offrir cet
éclairage. Pour nous, ça amplifie et ça rassure, sur
l'ensemble du mécanisme de prise de décision.
M. Brassard: Sauf que, dans les cas de municipalités, pour
ce qui est de la commission d'urbanisme, c'est un organisme qui relève
directement de la municipalité. Il n'y a pas de possibilité qu'il
y ait conflit en ce qui a trait à la transmission d'information, tandis
que, dans la proposition que vous faites, ça demeure une
possibilité très réelle qu'il y ait des conflits en ce qui
a trait à l'information transmise entre le conseil de comté et ce
comité d'aménagement.
M. Laforge: Oui.
M. Brassard: Vous le jugez important; autrement dit, vous ne
jugez pas suffisant le processus de consultation de la population qui est
prévu par le projet de loi 125; les assemblées publiques, etc.,
vous jugez ça insuffisant?
M. Laforge: C'est ça, dans le sens qu'il n'y a pas de
soutien à la participation; on a beau le souhaiter, mais, lorsqu'on ne
fait pas en sorte que cette participation se réalise, c'est là
qu'on s'interroge.
M, Brassard: Toujours en ce qui a trait à la consultation
ou à la participation des citoyens, vous avez parlé tantôt
du référendum qui, dans le projet de loi 125, est consultatif,
alors que, dans le cas d'un référendum sur un règlement de
zonage, c'est décisionnel dans le Code municipal. Vous n'êtes pas
d'accord, en d'autres termes, avec un référendum consultatif sur
l'aménagement; est-ce le cas?
M. Laforge: On est d'accord sur le niveau décisionnel en
ce qui concerne l'aménagement, de façon globale, mais on dit
qu'il y aurait peut-être d'autres secteurs que le secteur du
règlement de zonage où on pourrait avoir une intervention
décisionnelle de la part du citoyen. On n'a pas été plus
loin, parce que c'est trop technique et notre champ d'intervention, c'est le
loisir, mais on vous dit qu'il y aurait peut-être des choses à
fouiller davantage là-dessus.
M. Brassard: Sur certains autres points ou
éléments...
M. Laforge: C'est ça.
M. Brassard: ... d'aménagement ou du projet du
schéma d'aménagement, il y aurait possibilité, selon vous,
que le référendum devienne décisionnel?
M. Laforge: C'est ça.
M. Brassard: Une dernière question, M. le
Président, relativement à la région administrative. C'est
vrai que dans le projet de loi, la région comme telle et les organismes
régionaux j'entends région administrative ne sont
pas présents dans le projet de loi. Vous souhaitez la présence de
la région et des organismes régionaux. Vous ne pensez pas que la
région administrative qui couvre un territoire quand même
considérable, si on prend le cas de la région 02, de Chibougamau
à La Baie et même plus loin, est un cadre adéquat pour
faire de l'aménagement dans le domaine du loisir. Est-ce que vous
considérez que c'est un cadre adéquat? Vous n'en êtes pas
arrivé à la remise en question, parce que je sais qu'il y a des
organismes dans la région qui remettent ce cadre en question, pour
fonctionner dans divers secteurs de la région administrative comme
telle. Je pense aux ateliers agrico-fores-tiers, je pense aux comités
intermunicipaux de loisir...
M. Byette: Qui favorisent la petite région.
M. Brassard: ... qui trouvent que c'est trop vaste pour
être le siège d'une action efficace.
M. Byette: Je pense qu'il va falloir avoir deux points à
notre réponse. Effectivement, la région est vaste et on ne croit
pas que c'est au niveau de cette région administrative que va se passer
directement l'action. Bien entendu, on privilégie davantage la petite
région où, efficacement, se produisent des choses, que ce soit en
matière de loisir, en matière d'aménagement, en
matière sociale, en matière économique, je pense que c'est
important. Sauf que ces gens sont interreliés, et je ne pense pas que
l'avoir public des citoyens leur permettrait de se donner, sur l'ensemble du
territoire, dans chacun des comtés, des infrastructures semblables, d'un
comté à l'autre, et qu'il devrait y exister encore des
équipements régio- naux et des jonctions entre les comtés
au niveau de l'équipement.
Par exemple, on pense aux pistes cyclables, aux sentiers de
randonnée de ski de fond, aux sentiers pédestres, aux bases de
plain air, on pense aux équipements culturels que ce soit des centres
d'exposition ou des salles de spectacles, on pense aux équipements
sportifs des arénas, avant que ça serve à des
émeutes, ou autres types d'équipement. Je pense qu'il y aura
besoin constamment d'une coordination au palier régional, afin que les
citoyens de l'ensemble d'une région ne dépassent pas leurs
possibilités à titre de groupement, pour se donner des
équipements qui pourraient normalement dépasser leurs
véritables besoins comme tels, mais qui ressentiraient quand même
leurs besoins. On est conscient de ça, on n'a jamais voulu que la
région devienne le centre de l'action; mais qu'il y existe une forme de
coordination à ce niveau nous apparaît essentiel. Je pense que M.
Laforge peut ajouter quelque chose.
M. Laforge: On en est tellement conscient que si vous avez lu le
document au complet que je vous ai remis on intervient par zones
dans la région, par territoires qui sont à peu près les
territoires des conseils de comté actuels. Donc, nous sentons aussi le
besoin de nous décentraliser et d'aller plus près du citoyen. Par
contre, les interrelations sont trop importantes au niveau régional pour
les mettre de côté complètement.
M. Brassard: Je vous remercie.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais très
sincèrement féliciter les responsables de ce mémoire.
Messieurs, vous avez senti vous-mêmes et vous l'avez exprimé au
début de votre présentation que des membres de cette commission
pourraient se poser des questions quant à la raison de votre
présence ici, quant à la raison pour laquelle vous avez voulu,
comme membres du conseil régional de loisirs, présenter un
mémoire sur ce projet de loi. Je pense que vous l'avez bien
expliqué et vous avez mis en relief, en l'expliquant, l'importance pour
tous les éléments, tous les intérêts d'une
société comme la nôtre, d'être
représentés autour d'une consultation et d'une prise de
décision, de l'importance de ce que nous trouvons dans ce projet de loi.
(10 h 45)
J'aimerais vous poser deux questions. La première est assez
simple. Vous avez exprimé une inquiétude à savoir que les
préoccupations d'ordre économique pourraient dominer les autres,
les vôtres et celles des gens qui s'inquiètent de la disparition
des espaces verts, etc. J'aimerais vous demander, en toute simplicité,
si vous ne croyez pas que le simple fait de l'existence d'un tel projet de loi
est, en bonne mesure, une réponse à cette inquiétude. Si
l'on
présente un tel projet de loi et j'en ai fait l'historique
hier, j'ai indiqué comment les gouvernements successifs ont
demandé des études et ont analysé les rapports, ont
rédigé des documents de travail et des projets de loi
n'est-ce pas pour justement assurer que le gaspillage de notre territoire, de
notre environnement, de nos ressources non renouvelables... N'est-ce pas cette
préoccupation qui a amené les ministres successifs, les
gouvernements successifs, à vouloir présenter un tel projet de
loi? Et n'êtes-vous donc pas rassurés, dans une certaine mesure,
que, véritablement, on va agir dans le bon sens?
M. Laforge: Oui. Mais, par contre, le projet de loi 125 ne
présente qu'un cadre de travail et les résultats, on va les
sentir lors de la planification en aménagement et en urbanisme. C'est
là qu'on va voir véritablement si le cadre qu'on a donné
va permettre l'équilibre entre le développement économique
et social.
On vous dit que c'est une inquiétude qu'on a, malgré le
cadre que l'on juge très important et que l'on juge très
efficace. Mais ce sont quand même des hommes qui vont intervenir à
l'intérieur du cadre et, à ce moment-là,
l'inquiétude reste.
M. Goldbloom: Et s'il n'y avait pas un tel cadre, les
interventions se feraient quand même avec les résultats que l'on
connaît.
M. Laforge: Oui. C'est pour cela que l'on vous dit qu'on est
très heureux et qu'on dit que c'est important et urgent de le faire.
M. Goldbloom: Ma deuxième question porte sur la page 15 de
votre mémoire. C'est simplement pour comprendre ce que vous voulez dire.
Vous parlez là d'un organisme que j'ai eu l'honneur de créer et
dont le succès continue de m'intéresser. A la fin de votre
premier alinéa, vous faites allusion au Conseil métropolitain du
Haut-Saguenay. Je cite votre mémoire: "De plus, la preuve est à
faire au Conseil métropolitain du Haut-Saguenay où le rural et
l'urbain sont à élaborer leur schéma d'aménagement
de façon commune, ayant compris l'importance de leur interrelation
malgré leur situation différente."
De la dernière partie de cette phrase, je tirerais une impression
plutôt positive de l'action de cet organisme. C'est simplement pour
m'assurer de ce que vous voulez dire quand vous écrivez: "De plus, la
preuve est à faire". Est-ce que cela veut dire que la preuve est encore
à faire et que vous avez toujours des doutes ou est-ce que le travail du
conseil métropolitain vous encourage justement par le consensus qui
semble vouloir se dégager entre le milieu rural et le milieu urbain?
M. Laforge: C'est parce que le consensus nous encourage et qu'il
y a déjà des actions entreprises en matière
d'aménagement du territoire, comme je vous le dis, malgré la
situation très différente que vivent le Conseil de comté
de Chicoutimi et le conseil métropolitain. On est encouragés par
cette situation.
M. Goldbloom: Je suis bien content. Merci beaucoup.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le
député de Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. Moi aussi, je veux
féliciter les membres de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. On
dit que ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement. Je pense
qu'ils nous ont démontré qu'ils possédaient très
bien leur dossier pour nous en faire ce résumé.
Je constate que vous êtes pour le principe également et que
vous avez tenu à souligner que vous aimeriez que le
référendum soit également décisionnel et non
seulement consultatif. Vous soulignez également qu'il pourrait y avoir
amélioration au niveau de la participation des citoyens.
Un point attire plus particulièrement mon attention, c'est que
vous dites que les conseils de comté, ce n'est pas nécessairement
la structure la plus efficace. Vous mettez en doute l'efficacité de
cette structure.
M. Laforge: Présentement.
M. Goulet: Présentement. Justement, avec le projet de loi
125, ne croyez-vous pas qu'elle puisse devenir beaucoup plus efficace? Je ne
vois pas pourquoi. En tout cas, je vous pose la question: Pourquoi une
commission d'urbanisme qui pourrait être parallèle à ce
conseil municipal? Vous dites là-dedans qu'elle pourrait être plus
représentative de la population je vais essayer de retrouver le
mot avec un rôle de sensibilisation et de
"représentativité" de la population. Est-ce que vous mettrez en
doute la représentativité des conseils de comté une fois
que ce projet de loi sera adopté? Non?
M. Laforge: Je vous fais la même réponse que j'ai
faite: aucunement. C'est pour cela que représentativité est entre
guillemets, dans le sens que c'est une représentativité
parallèle. Elle est secondaire. La véritable
représentativité, elle est au conseil de comté. On ne la
conteste aucunement.
M. Goulet: Au lieu d'être parallèle, ne
pourrait-elle pas être, si vous voulez, une aide simplement à
l'intérieur du conseil de comté, s'il juge bon d'avoir une
commission d'urbanisme, une aide, mais, de là à être
parallèle, c'est le mot "parallèle" que j'aimerais que vous
expliquiez davantage?
M. Laforge: Non, le lien que l'on y voit est le même que le
comité d'urbanisme ou la commission d'urbanisme au niveau municipal qui
est consultatif à l'intérieur du fonctionnement du conseil de
comté. C'est exactement le même rôle qu'on y voit. Lorsqu'on
disait "parallèle", c'était au niveau des informations, au niveau
de la perception. C'est une deuxième représentativité du
milieu...
M. Goulet: D'accord.
M. Laforge: ... mais qui n'est évidemment pas du
même ordre d'importance.
M. Goulet: Une autre question. Vous avez souligné,
à un moment donné, qu'au niveau de la consultation ou des
réunions d'information que vous avez faites sur le projet de loi 125, il
y a eu très peu d'intérêt des citoyens. Est-ce pour ce
projet de loi en particulier ou est-ce toujours comme cela dans votre
région, comme ailleurs? Pourquoi y a-t-il très peu de
participation?
M. Byette: Ce n'est sûrement pas comme cela dans notre
région, ce serait plutôt le contraire, les gens
s'intéressent de façon...
M. Goulet: Mais n'avez-vous pas souligné tout à
l'heure que, sur ce projet de loi, dans la consultation que vous avez faite,
vous avez eu très peu de participation? J'avais cru entendre cela. C'est
pour cela que je voulais vous le faire confirmer.
M. Byette: Effectivement. J'ai l'impression que le dossier de
l'aménagement du territoire devient très technique pour le
citoyen et l'intéresse, lorsque la décision qui est prise touche
son quotidien et que, de façon globale, son intérêt n'est
pas soutenu à ce niveau-là. Cette consultation qu'on fait
explique peut-être plus clairement pourquoi on voudrait qu'il y ait des
commissions d'urbanisme, des commissions d'aménagement, pour alimenter
constamment le citoyen dans sa réflexion vers une prise de
décision qu'il devra prendre dans un référendum
consultatif ou décisionnel. S'il n'y a pas cette alimentation du citoyen
dans sa réflexion personnelle, il risque que son intérêt
soit mitigé à moins qu'il soit très lourdement
hypothéqué ou intéressé par une décision qui
serait prise au niveau de l'aménagement du territoire.
L'intérêt devra être alimenté et soutenu comme tel.
C'est pour cela qu'on propose une commission d'urbanisme.
M. Goulet: Un dernier point, M. le Président. Vous avez
souligné que les élus sont habitués de travailler surtout
dans le domaine économique, mais moins dans le développement
social. Je présume que vous parliez des élus municipaux, parce
qu'au niveau du gouvernement, c'est le contraire, il a complètement
oublié l'économie depuis deux ans. Vous vouliez parler des
élus municipaux dans votre région, dans votre mémoire? Ah
bon! Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Léonard: Moi aussi, je vais vous féliciter de
l'excellent mémoire que vous avez présenté. Il y a tous
les éléments qui ont été soulevés notamment
par le député Jacques Brassard.
Je pense que j'aurais quelques remarques à faire au départ
ou, en tout cas, des questions à poser. Par rapport, par exemple,
à la commission ou au comité d'aménagement, au niveau du
comté; un comité, il n'y en a pas dans la loi. Dans la loi, c'est
un comité consultatif au niveau de la municipalité qu'il y a et
non pas au niveau du comté. Vous proposez une autre commission ou un
autre comité au niveau du comté. Ne craignez-vous pas qu'en
faisant, qu'en institutionnalisant une commission au niveau du comté,
vous allez renforcer le comté au détriment de la
municipalité? Vous oeuvrez dans le loisir. Il me semble que les loisirs,
c'est principalement au niveau local. C'est d'abord là que cela se
passe. Si on crée une commission, cela va amener des structures, cela va
amener du personnel. Il y en a au niveau de l'aménagement, il y aura des
ressources techniques pour le comté, mais, si tout cela est trop
renforcé, cela va jouer au détriment de l'autonomie des
municipalités et de l'autonomie locale. Est-ce que vous pourriez
développer cette idée, s'il vous plaît?
M. Laforce: C'est qu'on dit que le citoyen va pouvoir
également s'impliquer au niveau de la commision de l'urbanisme, au
niveau local. Celle-là, on ne la met pas de côté. Au
contraire, on dit qu'elle doit être obligatoire dans le texte de loi.
Vous dites qu'elle est facultative. On dit qu'elle doit être obligatoire,
de même qu'au niveau du conseil de comté. On ne voit pas de
surenchère _ou de débalancement du pouvoir par le fait d'ajouter
une commission au niveau du conseil de comté.
M. Léonard: Oui. Mais quand vous...
M. Laforge: Les problèmes sont différents. Ils sont
d'un autre ordre.
M. Léonard: Remarquez que la loi ne défend pas d'en
faire, mais l'institutionnaliser, il me semble que c'est un pas de plus. Si
vous souhaitez beaucoup de participation des citoyens en termes d'organisation
de loisirs, quant à leur impact sur l'aménagement, ne croyez-vous
pas que la participation va se faire surtout au niveau de la
municipalité locale?
M. Laforge: C'est parce que, comme on l'a mentionné
tantôt, il y a des équipements qui dépassent le niveau
local...
M. Léonard: Oui.
M. Laforge: ... et de beaucoup. On parle de centres de plein air.
On parlait aussi tantôt d'aré-na, ce qui est présentement,
dans la région, un problème énorme. Cela dépasse de
beaucoup le niveau local.
M. Léonard: Si...
M. Laforce: S'il n'y a pas un autre niveau qui
réfléchit sur cette situation, qui dira, par rapport à
l'ensemble des besoins: II faut la situer à un endroit, ce ne sera pas
nécessairement le premier qui y a pensé qui l'aura. C'est dans ce
sens.
M. Byette: Je pense qu'il y a des débuts, M. le ministre,
à ce niveau. Par exemple, il y a des commissions intermunicipales de
loisirs où il y a des comités qui travaillent au plan du conseil
de comté, au plan économique ou au plan social.
Présentement, ce n'est pas nécessairement
institutionnalisé, ou cela l'est dans certains cas, par exemple des
commissions intermunicipales de loisirs. Cela n'empêche pas pour autant
l'expression du citoyen dans sa localité, son expression de loisirs,
comme cela ne pourrait pas l'empêcher, au niveau de l'expression, quant
à l'aménagement du territoire, mais cela amplifie, quant à
I'interrelation qu'on veut, à partir du moment où on
privilégie ce qu'on appelle maintenant des conseils de comté.
Nous ne croyons pas que l'institutionnalisation va faire en sorte qu'elle va
empêcher l'expression du citoyen dans sa localité. Elle va
peut-être permettre davantage une collaboration plus étroite
à un autre niveau.
M. Léonard: J'ai deux autres questions. Vous posez la
question sur les régions administratives ou sur les grandes
régions, mais qu'on appelle les régions administratives par
rapport aux comtés. Je pense que, dans la région administrative,
comme on l'appelle, ce ne sont pas des institutions politiques. La plupart du
temps, elles furent et elles sont encore des instances de
déconcentration de ministères. Les citoyens ne s'identifient pas
nécessairement tellement à ces régions. Même, dans
votre texte, je relève l'expression "la région 02". Je ne sais
pas si cela dit beaucoup de choses à un citoyen. Vous n'êtes pas
les seuls à utiliser ces expressions "régions 04, 02". Il me
semble que, là-dessus, la question qu'il faut se poser, dans une
perspective éventuelle de décentralisation, c'est que les
pouvoirs ne sont pas décentralisés au niveau de la région,
puisqu'il n'y a pas d'élections à ce niveau, ils sont
décentralisés au niveau du comté. Donc, il y a même
des pouvoirs exercés au niveau de la région qui vont être
décentralisés au niveau du comté, avec un contrôle
politique. Je pense qu'il faut constater ceci.
Par ailleurs, et j'en viens à la question, quand vous parlez de
la coordination des ministères, je vous comprends quand vous dites que
le gouvernement va avoir de la difficulté à faire la coordination
des ministères. Ne croyez-vous pas que, dans le projet de loi, lorsqu'on
demande des avis aux comtés, cela donne la possibilité aux
comtés de faire la coordination de l'action des ministères dans
les régions? Le gouvernement, par l'article 11, va donner de
l'information, va produire un document synthèse aussi poussé que
possible, mais je pense bien que ce sera difficile d'aller très loin
je vais être d'accord avec vous et que le comté va
améliorer ce document dans son schéma d'aménagement, va
proposer une proposition préliminaire d'aménagement et
qu'à ce moment, la coordination devrait être faite en bonne partie
aussi par le comté? (11 heures)
M. Byette: Je crois que oui. Il y a bien des choses dans votre
question. Il nous apparaît important, par contre, de mentionner que la
région, que nous n'appelions pas administrative, que les fonctionnaires
appellent administrative mais que nous appelons normalement
"Saguenay-Lac-Saint-Jean-Chibougamau", a une entité et les gens qui y
vivent se sont donné, au cours des ans, des structures qui ne sont pas
des structures de ministères en région et, effectivement, il y a
une décentralisation ou une déconcentration des ministères
en région. Il y a, par contre, des citoyens qui se sont donné des
structures. Cela nous intéresse, dans un premier temps.
Dans un deuxième temps, la région comme la nôtre...
On ne croit pas que toutes les régions du Québec
délimitées administrativement soient des régions comme la
nôtre, on parle davantage des quatre régions-ressources,
Côte-Nord, Est du Québec, Abitibi-Témiscamingue,
Saguenay-Lac-Saint-Jean qui, géographiquement, historiquement, sont
très délimitées comme telles, elles ont une longue
tradition quand même d'interrelation entre comtés
présentement, entre municipalités.
Il y a aussi l'élément que l'avoir public des citoyens ne
pourra permettre à un conseil de comté de donner, quant à
l'aménagement du territoire, tous les équipements dont il aura
besoin pour satisfaire pleinement ses citoyens. Il devrait y exister encore ce
qu'on pourrait appeler des équipements régionaux qui devront
desservir, du moins, pas toute une région, peut-être deux
territoires de conseils de comté et des choses comme ça. Cela
exige, à notre point de vue, une coordination qui est loin de la
décision, mais une coordination au plan régional, afin de ne pas
risquer qu'une piste cyclable croise des sentiers de randonnée, ou des
choses semblables, ou qu'on voie la naissance d'équipement qui, à
la longue, deviendrait lourd à supporter pour les citoyens.
M. Léonard: Une dernière question, si vous me
permettez. Vous dites qu'il faut un très grand renouvellement du
fonctionnement des comtés. J'aimerais que vous nous expliquiez davantage
ce point.
M. Laforge; C'est que...
M. Léonard: Qu'entendez-vous par un "très grand
renouvellement"? Jusqu'où cela va-t-il? Comment cela se
présente-t-il?
M. Laforge: D'après nous, le renouvellement va se faire
surtout dans l'esprit des gens, dans l'esprit de collaboration qui doit exister
entre les municipalités. On aura beau avoir les plus grandes
réformes de ces structures, si les gens ne prennent pas conscience de
l'importance de la collaboration et de l'impact qu'aura leur décision
sur l'ensemble du territoire qu'ils desservent, ça ne sert à rien
de faire des règlements ou la plus belle réforme de cette
structure.
On dit au départ: II y a une nouvelle façon de penser, une
nouvelle façon de collaborer qui doit
s'inscrire et, évidemment, la réforme doit venir pour
cristalliser tout ça dans le fonctionnement. Dans les propositions du
fascicule 4, je pense, il y a une proposition de fonctionnement ou de renouveau
à l'intérieur des comtés. On dit qu'elle doit être
la plus institutionnelle possible, parce qu'on a un très grand espoir,
à savoir que cette structure amène des services intermunicipaux
de très grande importance dont les citoyens vont pouvoir
bénéficier. Notre espoir est très grand à ce
niveau.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, messieurs...
M. Léonard: Je voudrais remercier les gens de s'être
présentés ici...
Le Président (M. Laplante): Oui, excusez, M. le
ministre.
M. Léonard: ... et je suis très content des
échanges que nous venons d'avoir sur toutes ces questions. Cela a
été très instructif pour nous. J'espère qu'on va
pouvoir en tenir compte aussi ultérieurement. Merci.
M. Bussière: M. le Président, M. le ministre, M.
Brassard, vous nous avez sensibilisés à votre loi. On a voulu, ce
matin, vous sensibiliser un peu à nos interrogations sur cette loi.
Quant à moi, je voudrais vous remercier. Ce fut, en tant que Conseil
régional des loisirs du Saguenay-Lac-Saint-Jean un loisir de vous
rencontrer ce matin. On vous remercie de votre bienveillante attention. On vous
remercie de nous avoir écoutés. Quant à moi, ici, je
voudrais remercier très sincèrement et, en même temps,
c'est l'excuse de mon silence en tant que président, mes deux
compétences à la droite et à la gauche pour avoir pu vous
éclairer sur les différentes questions que vous avez
posées, parce que j'avoue, très honnêtement, que je
n'aurais pas été capable de fournir les réponses à
vos interrogations. Merci bien.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, MM. Byette,
Bussière et Laforge, les membres de cette commission vous remercient de
l'excellence de votre mémoire.
J'appelle maintenant la Municipalité du comté des
Iles-de-la-Madeleine.
M. Goldbloom: M. le Président...
Le Président (M. Laplante): Oui, M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Pourrais-je demander que le nom de M. Julien
Giasson, député de Montmagny-L'Islet, soit substitué
à celui de M. Michel Gratton, député de Gatineau?
Le Président (M. Laplante): Le changement est fait,
monsieur.
Messieurs, si vous voulez identifier votre organisme, vous identifier
vous-même et les personnes qui vous accompagnent. Les règles de
cette commission sont que vous avez 20 minutes pour présenter votre
mémoire; s'il est trop volumineux, essayez de le résumer dans ces
20 minutes et vous avez ensuite 40 minutes de questions qui sont
formulées par les membres de cette commission. Je vous remercie.
Municipalité du comté des
Iles-de-la-Madeleine
M. Carbonneau (Gilbert): Merci. M. le Président, M. le
ministre, Mme Leblanc, MM. les députés.
Le Président (M. Laplante): II a onze pages. Je pense que
vous êtes capables de tout le lire.
M. Carbonneau: On va le lire parce qu'il n'est pas tellement
long; d'une manière ou d'une autre, on a mis assez de travail dedans
pour le lire.
M. Giasson: Douze heures d'avion.
M. Carbonneau: Douze heures d'avion hier. Peut-être qu'il y
en a certains d'entre vous qui se posent des questions sur...
Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous pouvez vous
identifier et identifier le groupement que vous représentez ainsi que
les personnes qui vous accompagnent pour les fins du Journal des débats,
au début, s'il vous plaît.
M. Carbonneau: Mon nom est Gilbert Carbonneau, je suis maire de
la municipalité de l'île du Havre-Aubert et préfet du
comté des Iles-de-la-Madeleine.
M. Turbide: Jérôme Turbide, maire de
l'Etang-du-Nord.
Le Président (M. Laplante): Parlez plus fort s'il vous
plaît.
M. Delaney: Donald Delaney, maire suppléant de
Cap-aux-Meules.
M. Bureau: Jean Bureau, Service d'éducation des adultes
à la Commission scolaire des Iles.
M. Arseneau: Benoît Arseneau, maire de
Hâvre-aux-Maisons.
M. Chéron: M. Guy Chéron, fonctionnaire du conseil
de comté.
Une Voix: Péquiste.
M. Houle: M. Denis Houle, urbaniste au conseil de
comté.
Le Président (M. Laplante): Je vous remercie
messieurs.
Une Voix: II y en a seulement un de péquiste.
M. Carbonneau: Non, il n'y a pas seulement un péquiste; il
y en a un seul de déclaré. Au dernier voyage, il était de
l'Union Nationale.
Mme Leblanc-Bantey: Vous ne voulez pas que j'explicite.
M. Carbonneau: Au dernier voyage, il était de l'Union
Nationale; il a changé et il a eu une patinoire.
M. Marcoux: Au fédéral, comment est-ce?
M. Carbonneau: Au fédéral, je ne sais pas, on y
reviendra.
Une Voix: Est-ce qu'on pourrait reporter cela dans les 40
minutes?
M. Carbonneau: La première page peut vous faire poser
certaines questions; c'est le Ponchon. A l'intérieur de la
première page, vous avez un petit résumé de l'histoire du
Ponchon. Disons qu'on l'a vécue un peu hier. On est parti de chez nous
à sept heures hier matin et on est arrivé ici à
Québec à 20 heures. C'est presque aussi long qu'en Ponchon. On a
été obligé de traverser les trois provinces maritimes et
même si on avait voulu venir par le Québec, Québecair n'a
pas volé aux Iles-de-la-Madeleine hier.
Mme Leblanc-Bantey: ...
M. Carbonneau: Peut-être. Tout cela pour vous dire que le
territoire ou le comté des Iles-de-la-Madeleine, même s'il est
très petit, est tout de même considérable parce qu'il
comprend, à notre point de vue, tout le golfe Saint-Laurent ou, en tout
cas, une bonne partie.
Avant de commencer la lecture du mémoire, je voudrais tout de
même souligner l'effort qui a été fait par les membres du
Conseil de comté des Iles-de-la-Madeleine, parce que ce mémoire a
été préparé par les membres du conseil de
comté, les maires, au cours de cinq ou six réunions
spéciales qui ont été tenues sur l'étude du projet
de loi 125. Inutile de vous dire que pour nous, cela a été
extrêmement difficile parce qu'on n'est pas habitués à
prendre un projet de loi et à essayer d'en sortir exactement tous les
points qui peuvent être favorables ou défavorables.
Dans les parties favorables, vous vous apercevez que ce n'est
peut-être pas long. On se dit que d'une manière ou d'une autre, le
gouvernement est là pour s'encenser et qu'il va savoir le faire
lui-même. Donc, on a surtout touché les points qui, à notre
point de vue, demandaient modification.
M. Goulet: II va y avoir de la bataille ce matin.
M. Chevrette: On va vous apprendre à compter surtout que
vos chiffres sont faux.
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Carbonneau: On y va?
Le Président (M. Laplante): Allez-y monsieur.
M. Chevrette: Pour l'Union Nationale, cela va...
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît, cela
allait bien, il faut continuer.
Mme Leblanc-Bantey: ...
Le Président (M. Laplante): M. le maire...
M. Carbonneau: Ce bref mémoire, présenté par
le Conseil de comté des Iles-de-la-Madeleine, fait le point sur le
projet de loi 125 tel que perçu par les Madelinots. Nous tenterons
d'abord de souligner les grandes lignes de force du projet, c'est-à-dire
ses éléments positifs ainsi que ses faiblesses ou
éléments négatifs. Subséquemment, nous
évoquerons une façon spontanée d'aménager, celle
des Madelinots, pour esquisser ensuite, à larges traits,
l'expérience du PAIM, soit le Plan d'aménagement des
Iles-de-la-Madeleine, en cours depuis plus d'un an. Enfin, le Conseil de
comté des Iles-de-la-Madeleine exposera ses recommandations; celles-ci
viseront à promouvoir, sur le plan de l'aménagement et de
l'occupation des sols, la plus grande cohérence possible qui tienne
compte à la fois du contexte unique des îles et de
l'expérience qui s'y déroule actuellement.
Ce qu'on pense de la loi 125. Ce qu'on en retient principalement. Des
principes séduisants. Le principe même de l'aménagement du
territoire prôné par le gouvernement du Québec est
partagé par les Madelinots.
Une législation d'ensemble dans ce domaine s'avérait de
plus en plus nécessaire. Dans ses intentions, le projet de loi
prévoit une certaine décentralisation des pouvoirs en faveur des
communautés régionales et locales, au lieu de tout concentrer au
niveau national, et c'est fort louable.
Enfin, nous sommes très favorables au transfert des
responsabilités de l'aménagement territorial du niveau
technocratique au niveau politique.
Un cadre de travail à taille humaine. L'étendue du
territoire d'un conseil de comté semble tenir compte du sentiment
d'appartenance de la population à un contexte géographique
beaucoup moins vague et arbitraire qu'auparavant les fameuses
régions administratives . D'autre part, le schéma
d'aménagement peut s'avérer un outil de travail permettant
l'intégration des diverses composantes de l'aménagement du
milieu. Finalement, il peut permettre d'analyser conjointement les champs
d'intérêts qui touchent plusieurs municipalités à la
fois.
On voit d'un bon oeil aussi que la corporation d'un comté, la
municipalité ainsi que tout intéressé puissent avoir un
recours possible devant la Cour supérieure, laquelle peut exercer des
ordonnances et sanctions.
Ce qu'on rejette. La hiérarchie des pouvoirs est
camouflée. Les grands objectifs à la base de
l'élaboration du projet de loi 125 prévoyaient une
décentralisation effective des pouvoirs en matière
d'aménagement. On remarque cependant qu'une fois traduits sous la forme
d'un texte de loi, ces grands principes ne sont plus respectés. On
prétend décentraliser, mais on ne fait que confirmer la
primauté du gouvernement sur les municipalités, en passant par
les conseils de comté. Le gouvernement du Québec accorde certains
pouvoirs à ces deux niveaux, mais il peut les désavouer à
volonté, quand bon lui semble; soit par avis de conformité, zone
d'intervention spéciale, etc.
Le même raisonnement est applicable au conseil de comté par
rapport aux municipalités. Règle générale, en
effet, les plans d'urbanisme ne doivent être confectionnés qu'une
fois le schéma d'aménagement terminé et doivent se
conformer aux orientations de ce dernier, au risque d'être
désavoués.
Aménager à la mode 125, ça nous complique la vie.
Les étapes prévues dans l'application du projet de loi 125 sont
compliquées et correspondent plus ou moins aux habitudes des instances
régionales et locales plus à l'aise dans l'analyse et le
règlement d'un problème à la fois. De plus, les Madelinots
ont un rythme de vie sans commune mesure avec l'ébauche
d'échéancier proposé dans le projet de loi. On n'aime pas
la bousculade, on prend le temps de vivre pour éviter le stress qui
semble animer les promoteurs du projet.
Un mépris du contexte local. A plusieurs égards, le
travail déjà amorcé aux Iles-de-la-Madeleine en
matière d'aménagement, depuis un an et demi, se situe à
l'extérieur des modalités du projet de loi 125. Nous sommes
d'accord avec les grands objectifs d'aménagement, mais nous
désirons également y inclure nos objectifs de
développement. Le projet de loi est muet sur ce dernier point.
De plus, la vocation actuelle du territoire des îles est
laissée pour compte. Allons-nous être condamnés à
appliquer l'article 5c du projet de loi qui traite des périmètres
d'urbanisation? Jusqu'à maintenant les Madelinots ont appliqué
leurs propres critères quant à l'orientation et la localisation
des maisons. Le "disséminement" de l'habitat sur notre territoire, qui
correspond à notre façon d'être et qui contribue, dans une
large mesure, au cachet particulier des îles, s'oppose à
l'obligation de dresser des périmètres d'urbanisation.
Voudrait-on nous périmétriser?
Un mode de financement laissé à l'arbitraire. Seul
l'article 207 du projet de loi 125 traite du financement du schéma
d'aménagement, des plans d'urbanisme et des règlements municipaux
en ce qui concerne leur élaboration et leur mise en application.
Toutefois, il est plus que vague, en stipulant que le ministre peut accorder
une aide financière à ces fins. Cela laisse sous-entendre
également qu'on peut la refuser, si tel est son bon désir.
Une question de formalité: la participation de la population. Les
déclarations du ministre prônant une participation active de la
population à l'aménagement de son territoire sont
escamotées dans le texte de loi. En effet, le projet de loi ne
prévoit que des audiences publiques et des référendums
pour consulter la population. Toutefois, comme le conseil de comté et
les conseils municipaux ne sont aucunement liés par les opinions
émises lors de ces audiences et référendums, on peut
affirmer qu'il s'agit bien plus de formalités que de consultation
effective.
Il y a un tas de questions qui nous tracassent aussi. Nous avons besoin
de réfléchir davantage sur l'organisation et le fonctionnement
des corporations de comté et des corporations municipales. Sur ces
points, le texte de loi nous inquiète. Pourquoi le préfet doit-il
être choisi parmi les membres? Pourrait-il être élu au
suffrage universel et être à un poste à temps plein?
Pourquoi est-il élu pour un mandat de quatre ans, alors que les maires
des îles sont élus, certains pour deux ans, d'autres pour trois
ans et quelques-uns pour quatre ans? Pourquoi n'est-il rééligible
que pour un second mandat? (11 h 15)
La question d'être en poste à temps plein se pose
également pour les maires avec rémunération
appropriée. Pourquoi le tiers des membres présents qui
représente au moins la moitié des voix représente-t-il le
quorum du conseil de comté, peut-il représenter le quorum du
conseil de comté? Il y aurait des petits maires et des gros maires.
Et le fédéral là-dedans? Comme la province de
Québec n'était pas encore souveraine aux dernières
nouvelles, nous nous demandons ce que deviendra le schéma
d'aménagement et les plans d'urbanisme, face à une intervention
du gouvernement fédéral aux Iles-de-la-Madeleine. Qui aurait la
priorité? On sait pertinemment qu'Ottawa détient également
des responsabilités qui ont des répercussions sur
l'aménagement du territoire. Soit dit en passant, dans notre travail
présent, on a eu la collaboration du fédéral dans notre
préparation d'un plan d'aménagement.
Une Voix: ...
M. Carbonneau: Probablement. Une façon spontanée
d'aménager. Nous voudrions dire à qui veut bien l'entendre
qu'avant d'être une volonté technocratique ou une volonté
politique, l'aménagement est avant tout une expérience humaine.
Avant d'être une question de pouvoir d'élus, aménager est
une façon d'être, une façon de s'exprimer, une façon
de vivre. Avant le dépôt du projet de loi 125, avant
l'expérience du PAIM aux Iles-de-la-Madeleine, avant le plan
d'aménagement des municipalités par la firme Saint-Pierre, avant
la création de l'OPDQ à Québec et dans les régions,
avant les incursions cavalières du BAEQ dans notre archipel, les
Madelinots étaient. Ils étaient. Ils étaient des
Madelinots, avec tout ce que cela veut dire. Ils avaient réussi à
se trouver, au large, hors de portée des menaces et des
hostilités de la grande terre, un espace vital. Un petit territoire,
à peine émergé et tout fragile, mais un territoire qui
pourrait bien finir par leur appartenir à force de
persévérance. C'est alors qu'ils ont relevé le défi
de s'y établir et d'y rester, contre vents et marées. Ils ont
même poussé l'acharnement jusqu'à payer à des
étrangers, qui réclamaient le droit de les
déposséder, les terres qu'ils avaient déjà acquises
au prix fort de leur détermination.
Cernés de toute part par la mer, ils ont connu les limites
spatiales de ce territoire et s'en sont accommodés. Ils l'ont
occupé selon des règles à eux, qui ressemblaient
étrangement aux règles d'occupation et d'utilisation de la mer
tout autour, qui s'inspiraient aussi de la couleur du temps qu'il fait et qui
ne va pas nécessairement durer, des règles du jeu qui
s'inspiraient enfin des caprices du vent qui tourne et du va-et-vient, sur la
côte, des vagues et des marées.
Les ententes tacites, les conventions informelles qui ont toujours
régi la vie des Madelinots, nous les appellerons la "loi des
îles".
La loi des îles n'est écrite nulle part, sinon dans le
coeur de chacun des Madelinots dignes de ce nom. Notre intention n'est pas de
la divulguer, encore moins de venir vous l'imposer chez vous, les gens "d'en
dehors". Nous savons trop ce que c'est que de se faire envahir et imposer la
loi des autres, que ça nous "fitte" ou que ça ne nous "fitte"
pas.
Ne pleure pas Denise!
Nous voulons cependant vous faire comprendre que ce qui peut
répondre aux besoins de l'ensemble du Québec ne nous convient pas
automatiquement; le plus souvent, ça nous bouscule drôlement.
Comment pouvons-nous nous harmoniser avec un continent dont nous sommes
complètement détachés, avec lequel nous avons bien peu de
choses en commun, un pied dans le Québec, l'autre dans les Maritimes et
le derrière dans le golfe? La seule façon, c'est de vivre en
harmonie les uns par rapport aux autres, croyons-nous, c'est de continuer
à être chacun ce que nous sommes et de s'entendre
là-dessus.
Quant à nous, nous sommes bien dans notre peau et avec notre
façon de vivre. Nos problèmes, nous avons développé
des façons à nous de les régler. Il faut se rappeler qu'il
n'y a pas si longtemps, nous étions laissés complètement
à nous-mêmes et nous avons passé à travers, encore
là à notre façon. Nous sommes 14 000 sur quelques
hauts-fonds et, malgré le peu d'espace dont nous disposons, nous ne nous
sentons pas limités, si ce n'est lorsque de nouvelles façons de
faire nous sont imposées. Les façons de faire que nous avons
développées, en raison de notre façon d'être et du
contexte dans lequel nous vivons, nous ont jusqu'à maintenant assez bien
servi, et notre intention est de continuer à vivre ce qui est encore
vivable et de s'ajuster quand c'est nécessaire.
Cela veut dire que notre liberté et notre autonomie individuelle
soient sauvegardées. Nous avons déjà nos propres
contraintes à assumer: limites territoriales, appartenance à une
lignée, à un canton, à un métier
prédominant, à une histoire.
Que nos libertés individuelles soient le moins possible
limitées dans des réglementations ou des restrictions. Notre
proximité les uns par rapport aux autres nous a appris à vivre
ensemble et à respecter certaines balises.
Que notre volonté soit faite sur la terre comme sur la mer. Nous
avons appris à nous comporter sur la terre un peu comme sur la mer. La
disposition de nos maisons est là pour le rappeler. Notre sens aigu de
la propriété ne se traduit pas par des interdictions quant
à la circulation et l'utilisation des ressources terrestres. Les fruits
de la terre, comme les fruits de la mer, appartiennent avant tout à
celui qui va les ramasser. Cela ne veut pas dire, cependant, qu'on peut aller
jusqu'à piller les uns les autres. Le champ de patates à Untel
c'est le champ de patates à tout le monde. Tu ne vas pas jeter tes cages
sur le fond de pêche d'un autre. Qu'on ne vienne pas nous dire quoi faire
chez nous. Nous vivons très près de la nature et nous sommes
déjà soumis à ses lois. C'est d'abord la
température qui nous dicte notre façon de faire la pêche,
comme le reste.
Ensuite, c'est notre expérience qui nous apporte nos
connaissances. Si tu n'as jamais été aux glaces, tu ne peux pas
savoir.
L'expérience du PAIM. Il y a donc un projet de loi 125. Il y a
aussi et surtout la loi des îles. Et il y a également, par
ailleurs, l'expérience du PAIM, le plan d'aménagement des
Iles-de-la-Madeleine. Comme pour les glaces, on peut dire: "Si tu n'as pas fait
du PAIM, tu ne peux pas savoir."
Ce n'est pas une histoire facile à raconter. En gros, ce qu'on
peut dire, c'est que la loi du PAIM ressemble bien plus à la loi des
îles qu'à la loi 125. C'est bien plus proche d'une aventure
humaine que d'un exercice technique.
Comment tout cela nous est arrivé, comment cela s'est
développé, où en sommes-nous actuellement, qu'est-ce qui
va advenir du PAIM avec la loi 125? Si on pouvait arriver à faire le
tour de ces questions ensemble, il nous semble que cela serait à notre
avantage commun.
Comment le PAIM nous est arrivé. C'est M. Jacques Léonard,
le ministre d'Etat à l'aménagement, qui, en août 1977, a
pris l'initiative de proposer au conseil de comté des
Iles-de-la-Madeleine d'élaborer le schéma d'aménagement de
notre territoire. Il nous assurait du support d'une équipe technique
regroupant des fonctionnaires des divers ministères
intéressés. Il nous octroyait également une subvention qui
allait permettre d'engager un agent d'aménagement.
Nous avons dit oui à cette proposition et nous avons, en
même temps, senti le besoin de prendre dès ce moment l'initiative
de toute la poursuite de la démarche. C'était pour nous la base
de tout. Si on relevait le défi de faire notre plan à notre
mesure, le plan des îles avec la population des îles, et non pas le
plan des fonctionnaires à la manière des fonctionnaires, il
fallait se "gréyer" d'un bon équipage d'animateurs madelinots. En
même temps que nous avons dit oui au ministre Léonard, nous avions
recours à un programme qui nous permettait d'engager notre équipe
d'anima-
teurs. Nous étions bien déterminés à ne pas
nous laisser impressionner par le groupe technique des fonctionnaires. Ce n'est
pas eux qui allaient nous faire la loi. On n'a pas encore changé
d'idée là-dessus.
Comment le PAIM a levé. La priorité du conseil de
comté a été de rejoindre la population des îles pour
que le plan soit vraiment son plan à elle. La manoeuvre s'est
avérée fort délicate. Il y avait dans les parages des
récifs qui avaient pour nom BAEQ et rapport Saint-Pierre. Les gens nous
disaient: II ne faudrait surtout pas que cela revienne au même et qu'on
se retrouve avec encore plus de fonctionnaires qui font plus de
règlements et plus de paperasse.
Toujours est-il que les organismes socio-économiques des
îles et les représentants des municipalités ont
répondu à notre appel. Des comités de travail ont
été organisés sur les questions qui nous
préoccupaient le plus à ce moment-là: le sel, les
pêches, le tourisme, l'agriculture.
Chaque groupe de travail choisit ses objectifs et ses moyens. C'est
lui-même qui détermine son cheminement et qui élabore sa
stratégie d'intervention.
La synthèse et l'harmonisation entre les divers secteurs n'a pas
encore causé de problèmes majeurs. Nous sommes en train
actuellement de chercher à préciser les mécanismes
d'interaction des divers secteurs entre eux, de même que l'addition de
nouveaux secteurs d'intervention.
Nous progressons à notre rythme et toujours dans le même
sens. C'est dans cette optique qu'une entente est intervenue entre le conseil
de comté et la commission scolaire des îles, service de
l'éducation des adultes.
L'apport des ressources de l'éducation des adultes comme soutien
à l'entreprise du PAIM consiste à favoriser, par un ensemble de
moyens, l'élargissement de la participation populaire au choix des
options d'aménagement.
Soit dit en passant, cela pourrait aussi s'appliquer aux CLSC avec leur
programme d'action communautaire. C'est quelque chose qu'ils pourraient faire
qui pourrait être plus valable, je ne dirai pas que ce qu'ils font, mais
que ce qu'ils ne font pas.
Où en sommes-nous actuellement? Par rapport au sel, nous estimons
avoir fait des pas de géant. Il y a un an, le sel, c'était
SOQUEM-LOUVEM. Maintenant, le sel, c'est Grosse-Ile, les pêcheurs, les
capitaines de pêche, le Comité d'environnement des Iles, la
Chambre de commerce, la Coopérative de transport maritime et les maires
qui, regroupés dans un comité de travail, rencontrent
régulièrement les représentants du comité technique
interministériel sur le complexe minéralo-portuaire.
Nous participons actuellement à l'étude de l'impact
socio-économique de ce projet. Nous ne sommes pas contre le
développement du sel. Nous sommes contre un développement du sel
qui ne tiendrait pas compte de notre manière de vivre. Nous sommes
contre un développement du sel qui ne tiendrait pas compte de notre
cadre de vie. Le sel, oui, mais pas à n'importe quel prix et surtout pas
au prix de la pêche.
Dans le domaine des pêches, nous avons constitué une
équipe de travail très dynamique qui était sous la
présidence du maire de Havre-aux-Maisons, M. Arseneau, et qui est en
voie de se donner une structure permanente de concertation. Cette équipe
regroupe les représentants des pêcheurs, tant côtiers et
hauturiers, des producteurs, tant du secteur privé que du secteur
coopératif et des travailleurs d'usine, de même que des
représentants du conseil de comté.
Par delà de nombreux problèmes ad hoc estimés
urgents par le milieu et qui auraient été réglés
tout autrement sans l'intervention du comité des pêches, tels les
congélateurs à plaque, l'approvisionnement en glace, la
boëtte, les subventions au maquereau, l'émission de permis de
pêche, le stationnement dans le parc industriel, etc., le module
Pêches a présenté, lors du minisommet des pêches
à Gaspé, un mémoire qui dégageait les grandes
orientations du développement des pêches que l'ensemble des
intervenants madelinots souhaite voir appliquer. Le module Pêches a
également présenté au Comité des centres de
pêches (fédéral-provincial) les éléments
fondamentaux d'une politique améliorée de l'aménagement
portuaire des îles. Nous allons aborder l'étude des stocks de
poisson (quantité, évolution, politique de gestion) avec les
ministères concernés. Nous devons également nous pencher
sur le dossier de la déconcentration des services administratifs vers
Gaspé.
Nous pensons que, là aussi, dans le domaine des pêches,
nous naviguons sur le bon cap.
L'afflux massif des touristes au cours des dernières
années, même s'il a été souhaité, n'a pas
été sans nous causer bien des problèmes. La Commission de
développement touristique, qui a pris la relève de la Chambre de
commerce, a accompli un travail remarquable dans l'organisation de notre
structure d'accueil. Formation d'une équipe de guides, kiosque
d'accueil, parcs de camping, projet de base de plein air, projet de parc de
conservation et de plage municipale, ce sont des actions parmi bien d'autres
auxquelles concourent tant les représentants de l'Association des
hôteliers que ceux de la Chambre de commerce, ceux des centres
d'artisanat, ceux du conseil de comté et ce, dans l'esprit d'une
véritable association touristique régionale.
Notre Commission de développement touristique représente
pour nous l'association touristique régionale. C'est l'instrument
privilégié de promotion de notre produit touristique
madelinot.
Comment s'y prendre pour opérer une véritable relance de
l'agriculture aux îles? Le problème est de taille. Le ministre de
l'Agriculture et l'UPA des îles ont uni leurs efforts pour doter le
milieu d'un instrument qui se veut le moteur du développement et
l'aménagement agricole, l'Agro-Coop des Iles. Un plan quinquennal
devrait être mis au point incessamment, mais on cherche également
à mettre au point un plan de protection du territoire agricole.
Nous ne pouvons pas passer sous silence l'étude globale sur les
transports entreprise par le ministère des Transports du Québec.
Le conseil de comté participe directement à l'élaboration
de cette étude par le biais d'un de ses membres. Le comité sur la
gestion des déchets solides, qui regroupe des représentants des
municipalités de même que des représentants du
Comité environnement des îles, est en train d'élaborer des
solutions qui vont tenir compte des impératifs de la préservation
de l'environnement et des spécificités des îles. Ce
même comité va éventuellement devenir le module
Environnement de la commission d'aménagement et s'occupera tout
spécialement de la protection des dunes. Le conseil de comté a
également su décider du choix de l'emplacement d'un
équipement collectif de loisir tel que la piscine. Le gouvernement n'y a
pas donné suite. Le conseil de comté, de concert avec le
ministère des Affaires culturelles, s'est enfin doté des services
d'un agent de développement culturel.
En même temps que nous mettions en place des outils de travail
pour les problèmes que nous estimons concerner toutes les îles,
problèmes de développement qui ont un impact sur
l'aménagement, nous avons aussi été appelés par les
municipalités à leur fournir de l'aide pour la confection de leur
plan d'occupation des sols.
Il s'agit là, pour nous, d'une démarche qui va de pair
avec la démarche d'ensemble. Nous sommes d'avis qu'il est primordial que
les plans sectoriels d'ensemble et le plan de chacune des municipalités
puissent vraiment s'harmoniser tout au long du processus d'aménagement.
C'est ainsi, pensons-nous, qu'au coeur d'un échange permanent, l'on a
plus de chances de respecter les points de vue de chacun et de susciter des
adhésions plus consenties. Nous allons même jusqu'à dire
que l'avis de conformité doit venir d'en bas, c'est-à-dire de la
municipalité, et non pas d'en haut, du conseil de comté.
C'est ça qui est le pari de base de notre démarche: un
plan d'aménagement d'ensemble qui va viser à promouvoir les
particularités de chacune des municipalités.
Que va devenir le PAIM avec le projet de loi 125? Tout cela ne se fait
pas sans heurts ni peines. Nous trimons dur souvent. Des fois, c'est la
tempête qui éclate. "Quand le nordêt nous frappe en pleine
face, faut savoir se mettre à l'abri". (11 h 30)
Ce qui nous inquiète surtout, c'est qu'un jour, on se
réveille avec une fusion municipale. Si le PAIM ou une loi pouvait nous
mener là, on dit non tout de suite. Nous ne sommes pas d'accord pour le
gouvernement régional. Le pouvoir municipal, faut pas que ça
disparaisse. Au contraire, il faut que le PAIM permette à chaque
municipalité de développer son caractère particulier.
Or, quand on prend connaissance de la loi 125, on devient terriblement
inquiet. On a presque le goût de dire qu'on ne veut rien savoir, parce
qu'on a l'impression que la loi 125 favorise le gouvernement au
détriment du conseil de comté et le conseil de comté au
détriment des municipalités. Nous ne sommes pas d'accord
là-dessus. Si c'est vraiment cela, alors, ce serait vraiment dommage. Ou
bien nous aurions mal compris le ministre dans notre affaire, ou bien, alors,
ce sont les fonctionnaires qui ont rédigé la loi qui ont mal
compris le ministre. Pourriez-vous éclairer nos lanternes?
Quelques recommandations, à notre point de vue, sont capitales.
Le conseil de comté des Iles-de-la-Madeleine recommande au ministre:
1-De préciser comment la loi va pouvoir respecter la façon toute
particulière d'aménager l'entreprise aux îles et que nous
entendons poursuivre. 2-Que l'aide financière qu'il entend apporter pour
l'élaboration et la mise en application du schéma, des plans et
des règlements soit clairement définie dans la loi en attendant
une révision de la fiscalité des municipalités de
comté face à cette nouvelle responsabilité. 3-Que
l'approche d'aménagement en milieu rural cesse d'être
conditionnée par un cadre de référence urbanistique,
lequel convient bien davantage à un milieu urbain ou à un
rnilieu.de ville. Des centre-ville aux Iles-de-la-Madeleine, on n'a pas besoin
de cela. 4- En conséquence, que le terme de plan d'urbanisme soit banni
du projet de loi et soit remplacé par plan d'occupation des sols. 5-Que
le seul pouvoir concédé au ministre en matière
d'aménagement du territoire soit de décréter des zones
d'intervention spéciale dans les seuls cas où le conseil de
comté et/ou les municipalités auraient refusé de modifier
leur schéma ou leurs plans à sa demande. 6- Que la
réglementation des municipalités continue à se faire par
le moyen d'avis publics comme cela a toujours été, et non pas par
la voie de la Gazette officielle. Toutes les fois qu'il va falloir que les
municipalités aillent à la Gazette officielle, cela va
coûter cher. 7- Que les municipalités conservent un droit de veto
en ce qui concerne l'élaboration et l'application d'une partie ou de la
totalité du schéma d'aménagement en
référence à leur propre territoire. 8- D'accorder à
l'intérieur d'une municipalité une valeur décisionnelle
aux référendums sur la mise en application du schéma, des
plans, des règlements si une proportion suffisante de la population le
demande. 9- Que chaque municipalité conserve son entière
autonomie en ce qui concerne l'élaboration et la réalisation de
son plan d'occupation des sols. 10-Que tout règlement d'emprunt d'une
municipalité ayant pour objet l'exécution de travaux publics,
lorsqu'il est transmis au ministre et à la Commission municipale du
Québec, pour approbation, ne soit pas accompagné d'un avis du
conseil de comté. 11- De proposer enfin un processus de prise en charge
progressive par le conseil de comté de certains pouvoirs
spécifiques que les municipali-
tés pourraient lui déléguer et ce, dans un
échéancier à être déterminé.
Merci.
Le Président (M. Laplante): Merci. M. le ministre.
M. Léonard: M. le préfet, MM. les maires, je vous
remercie de votre mémoire. Je pense que cela donne un compte rendu de ce
qui a été fait aux îles jusqu'ici quant au schéma
d'aménagement, je dirais même, un schéma de
développement, puisque, d'après ce que je vois, il ne s'agit pas
d'aménagement, dans plusieurs de ces considérations, mais
plutôt de développement, ce qui est un peu différent quand
même.
Je voudrais faire quelques commentaires sur votre mémoire avant
de poser quelques questions. Il y a un des points qui est remarquable dans
votre mémoire et que j'aimerais vous voir élaborer. Cela consiste
à affirmer, évidemment, que les Iles-de-la-Madeleine ont
plusieurs particularités. Cela semble évident à beaucoup
de gens. Vous dites aussi que le projet de loi ne respecte pas la façon
particulière d'aménager aux Iles-de-la-Madeleine. Pourtant, il me
semble que la loi là-dessus est peu contraignante. Il y a des
éléments obligatoires au schéma, bien sûr, et des
éléments facultatifs. De la même façon aussi, au
niveau des municipalités, vous avez une partie obligatoire et une partie
facultative. C'est à vous à décider comment vous allez
faire votre schéma, vos plans d'urbanisme. Sur ce plan, les
périmètres d'urbanisation, il y en a dans des milieux
urbanisés dans le Québec.
La loi est faite pour tout le Québec, mais il y a aussi des
règles minimales de lotissement que vous pouvez adopter et qui font
qu'à ce moment-là, c'est absolument flexible. Si vous n'avez pas
de périmètre d'urbanisation, il n'y en a pas, c'est tout. Donc,
il me semble que la loi, là-dessus, est très flexible et
très peu contraignante. Par ailleurs, il y a quand même des
villages, parce qu'en termes de réseaux de services publics, je pense
qu'il y a des considérations à tenir sur ce plan.
Il en est aussi de même, il me semble, sur le processus de
consultation. La loi expose une démarche minimale. Le principe de la
consultation ou de la participation des citoyens, il me semble, doit être
acquis, je crois. En ce qui concerne le processus de consultation
lui-même, je pense qu'on peut en discuter. Il y a eu des suggestions qui
nous ont été faites ici; vous pouvez nous en faire. La loi donne
un processus minimal ou devrait viser à donner un processus minimal.
C'est libre aux municipalités d'aller plus loin, ou aux comtés
d'aller plus loin, c'est votre choix. Vous pouvez aller beaucoup plus loin, si
vous voulez favoriser davantage la participation. Il n'y a rien qui
empêche d'aller au-delà, je pense.
En ce qui concerne le financement des comtés municipaux, vous
demandez que l'aide financière soit clairement définie,
même dans la loi, et que l'élaboration et la mise en application
du schéma, des plans et règlements soient financées, en
tout cas, qu'il y ait une politique de la fiscalité des
municipalités de comté. Je rappellerai d'abord que, dans le
budget de cette année, il y a une somme de $2 100 000 qui a
été prévue au budget des Affaires municipales, que nous
avons déclaré, à la conférence
Québec-municipalités du mois de juin dernier, qu'il n'y aurait
pas de nouvelles responsabilités sans de nouvelles sources de
financement et, dans le discours du dernier budget, nous avons pensé que
le comité conjoint sur l'aménagement et la
décentralisation pourrait étudier cette question et qu'il pourra
faire des recommandations, de la même façon qu'il y a eu un
comité conjoint municipalités-Québec sur la réforme
de la fiscalité. Il me semble que c'est un sujet qui va devenir
d'actualité. Nous prenons bonne note de vos recommandations
là-dessus.
Je dirai aussi, en ce qui concerne les subventions qui seront
versées, qu'elles ne le seront pas de façon
discrétionnaire. Il y aura un programme auquel les comtés auront
accès lorsqu'ils auront commencé leur schéma
d'aménagement. Ce ne sera donc pas discrétionnaire.
Vous recommandez, d'une part, que l'approche de l'aménagement en
milieu rural cesse d'être conditionnée, comme vous dites, par un
cadre de référence urbanistique. Là, ça
dépend ce qu'on entend par le mot "urbanisme"; quand vous appelez
ça un plan d'occupation des sols, je pense que c'est une question de
vocabulaire. L'urbanisme, on peut en faire de différentes façons.
Au-delà des mots, je crois qu'il faut viser la réalité. Il
s'agit de décider de l'occupation, de l'utilisation du sol; si vous
préférez employer les mots "occupation des sols", c'est une
chose; vous pouvez le faire aussi.
En termes d'urbanisme, cependant, lorsque vous êtes à
l'intérieur d'un village et que vous édictez des normes, des
règlements, il me semble que cela fait référence à
ce qu'on appelle habituellement urbanisme, mais on ne se chicanera pas sur les
mots sur ce plan.
Le contenu, cependant, du schéma et des documents d'urbanisme,
à mon sens je reviens là-dessus est très
souple, en ce sens qu'il permet des approches sectorielles qui sont adaptables
partout, qu'il permet aussi d'avoir des secteurs, en termes territoriaux, sur
lesquels votre plan est plus avancé, plus précisé
qu'ailleurs. Donc, c'est nouveau dans la loi, par rapport à ce qu'il y
avait dans le Code municipal et la Loi des cités et villes. Cela vous
donne plus de liberté et plus de flexibilité à
l'intérieur même de votre plan d'urbanisme.
Sur l'avis de conformité, il me semble qu'il y a un
éclaircissement qui apparaît nécessaire, à la suite
de ce que vous dites dans votre mémoire aux pages 1 et 2. D'une part,
vous dites qu'il est possible d'avoir un recours devant la Cour
supérieure et, d'autre part, que le gouvernement accorde certains
pouvoirs, mais peut aussi les désavouer par l'intermédiaire de
l'avis de conformité, par des zones d'interventions spéciales,
etc.
D'abord, ce n'est pas le gouvernement qui fournit les avis de
conformité, mais bien un organisme indépendant, soit la
Commission nationale de l'aménagement. Celle-ci ne fournira qu'un
avis
de conformité technique et juridique et, sur les documents
d'aménagement et d'urbanisme, je l'ai répété
à plusieurs occasions, nous faisons bien attention pour que les
décisions restent toujours aux élus; c'est un des principes
fondamentaux de la loi qu'en tout temps, toutes les décisions soient
prises par les élus.
Quant à la commission, il ne s'agit pas pour elle de juger de la
pertinence des actes posés par les comtés et les
municipalités, ces décisions ne sont pas du tout de nature
politique, mais elles sont exclusivement techniques ou dictées par les
services professionnels.
J'aimerais vous poser une première question concernant vos
relations avec l'Etat, puisque cela, je pense, a été une
expérience pour bien des gens aux Iles. Vous avez eu, les
différents comités sectoriels, des relations fréquentes,
avec des organismes gouvernementaux, soit pour les pêches, les mines,
l'agriculture, etc. On aimerait bien que vous nous parliez de ces relations,
comment elles ont été entreprises, comment elles se sont
déroulées, quel résultat vous avez obtenu dans chacun de
ces secteurs, si vous êtes satisfaits, globalement, de votre
expérience, jusqu'à ce jour, maintenant que des relations
constantes ont été développées avec l'Etat ou les
différents ministères.
M. Carbonneau: Dans certains domaines, avec certains
ministères... on va prendre un exemple au niveau de l'aménagement
de la mine de sel. Le comité interministériel
présidé par le sous-ministre des Richesses naturelles vient
régulièrement aux Iles-de-la-Madeleine, à la demande de
notre comité, aux dates fixées par notre comité, pour
faire rapport de l'étape des travaux. Cela a été dur, au
départ, pour le sous-ministre et les fonctionnaires, d'accepter de venir
siéger à une table du conseil de comté qui regroupait non
seulement les maires, mais aussi d'autres intervenants, des pêcheurs et
d'autres. La même chose s'est produite dans d'autres domaines. Dans le
domaine de la pêche, le Comité des centres de pêche
fédéral-provincial est venu l'automne dernier. Il doit revenir la
semaine prochaine pour faire rapport de sa politique d'aménagement
portuaire, parce que l'aménagement d'un territoire, c'est aussi
et surtout pour nous l'aménagement portuaire de ports de
pêche.
On lui demande de tenir compte de nos revendications et que sa politique
soit celle que les pêcheurs souhaitent, et non pas la politique que
souhaiteraient les fonctionnaires.
Cependant, on s'aperçoit que chez les fonctionnaires, cela
crée une très grande réticence. Le ministère des
Transports fait présentement une étude sur tout le
problème des transports aux Iles-de-la-Madeleine. Au comité de
gestion, une étude a été donnée à une firme,
actuellement, ce sont les fonctionnaires qui reçoivent le rapport
d'étapes, qui l'épluche et qui donne les recommandations. On a
fait accepter par le ministère des Transports qu'un Madelinot
siège au comité de gestion relativement à cette
étude parce que, après tout, cette étude est faite pour
les Madelinots, elle n'est pas faite pour les fonctionnaires. Cela a
été accepté après maintes et maintes
démarches; mais de leur part, c'est un pas énorme. J'ai dit aux
fonctionnaires: Sur cinq, il y a un Madelinot; normalement, sur cinq, on
devrait être quatre Madelinots et tu devrais être tout seul. Le
gars n'en revient pas, mais c'est ainsi que ça devrait fonctionner. Dans
tous les domaines d'aménagement du territoire, c'est à la
population locale à s'aménager et à prévoir son
développement, non pas aux fonctionnaires.
Il y a une petite réticence, mais elle n'est pas
généralisée de la part des fonctionnaires.
M. Léonard: Si je comprends bien, après un an et
demi, la situation s'est quand même améliorée par rapport
à ce qu'elle était.
M. Carbonneau: Oui, énormément.
M. Léonard: Une deuxième question que je voudrais
faire porter sur la structure. Vous avez mis en place une structure qui
comporte plusieurs comités, des comités pour différents
secteurs de développement. J'aimerais que vous nous parliez du
rôle de ces comités et du rôle que jouent les élus
municipaux et les préfets par rapport à tous ces
comités.
M. Carbonneau: Dans tous ces comités, tous les élus
municipaux s'y retrouvent. Si vous remarquez, dans tous les domaines,
pêche, mine de sel, agriculture, ainsi de suite, les élus se
retrouvent dans tous ces comités.
M. Léonard: II y en a au moins un, c'est ce que vous
voulez dire.
M. Carbonneau: II y en a au moins un. M. Léonard:
C'est un maire. M. Carbonneau: C'est un maire. M. Léonard:
Un des maires.
M. Carbonneau: Dans certains cas, il peut y avoir quelques maires
et quelques conseillers municipaux. On a intégré les conseillers
municipaux à cette opération; on en retrouve dans tous les
comités. La raison pour laquelle on a créé des
comités de travail de cette façon... vous avez dit tout à
l'heure que vous n'étiez pas d'accord que développement et
aménagement allaient de pair. On regrette, mais pour nous, on ne peut
pas aménager si on n'a pas une vision sur le développement... (11
h 45)
M. Léonard: D'accord.
M. Carbonneau: ... et si on a une vision sur le
développement, c'est-à-dire qu'il faut s'en préoccuper, il
ne faut pas laisser les développeurs nous imposer leurs
développements, mais on pense, à titre d'élus, que c'est
à nous à prévoir le déve-
loppement. Donc, on aménage notre territoire en fonction du
développement qu'on veut bien lui apporter.
M. Léonard: Je ne dis pas que ça ne va pas
ensemble, je dis qu'il y a une distinction à apporter par rapport
à l'organisation du territoire, le développement peut être
autre chose aussi.
M. Carbonneau: Le projet de loi est muet là-dessus.
M. Léonard: On parle uniquement d'aménagement, mais
c'est bien sûr que ça prend une perspective sur le
développement pour arriver à l'aménagement.
Vous parlez aussi, sur cette question de structures, de
l'élection du préfet au suffrage universel. Pourquoi?
M. Carbonneau: Là-dessus on a posé une question, si
vous l'avez remarqué. Ce n'est pas une position du conseil de
comté, parce qu'on n'est pas d'accord chez nous.
M. Léonard: Vous êtes d'accord, mais...
M. Carbonneau: Certains maires disent, oui, d'autres maires
disent, non; certains maires disent, il doit être un homme à temps
plein nommé par le conseil de comté...
M. Léonard: Ah oui, pas par le gouvernement, je pense
bien!
M. Carbonneau: ... donc, c'est tout simplement une question qu'on
pose. Il y a toutes sortes d'hypothèses.
M. Léonard: Quels sont les arguments des deux groupes,
pourriez-vous nous les résumer très brièvement?
M. Carbonneau: Benoît, tu es en faveur, vas-y.
M. Arseneau (Benoît): Disons que je vois le préfet
nommé par les maires; s'il y a un changement d'apporté là,
je vois le premier ministre de la province de Québec choisi à
l'intérieur des députés et non au suffrage universel. Si
on va au suffrage universel pour le premier ministre de la province de
Québec, on ne peut pas l'appliquer chez nous, dans notre milieu, mais,
par contre, on devrait pouvoir continuer de choisir notre préfet
à l'intérieur, on ne peut pas siéger à deux pour le
même comté ou la même municipalité...
M. Léonard: Votre préfet est d'accord avec vous
là-dessus?
M. Arseneau: Pas tout à fait.
M. Léonard: Vous parlez aussi de la participation active
des citoyens dans vos comités sectoriels. Comment avez-vous
procédé pour met- tre sur pied des comités et comment
avez-vous intéressé les citoyens à y participer? Est-ce
que vos résultats, jusqu'ici, sont positifs?
M. Carbonneau: Ce n'est pas seulement se faire des accroires, ce
n'est pas facile. Quand on veut avoir des pêcheurs dans un domaine, on
demande à l'Association des pêcheurs-propriétaires des
îles de nous en déléguer un, deux ou trois,
dépendant du nombre de personnes qu'on a choisi. Malheureusement, c'est
souvent les mêmes personnes qui se retrouvent sur plusieurs
comités et elles deviennent débordées. Mais on fait
toujours appel aux groupements existants. A défaut de groupements
existants, à ce moment, on va chercher des élus municipaux ou
conseillers. Ce n'est pas facile, il est inutile de se leurrer et de se faire
des accroires, une telle opération est bien difficile. Cependant, la
réponse qu'on a eue de tous les intervenants aux îles est assez
bonne.
Dans la mine de sel, on a des pêcheurs qui siègent
là, on a des gens de Grosse Ile qui sont directement impliqués,
on a des gens de l'environnement, des gens de la chambre de commerce, des gens
du conseil de comté. On essaie de prendre, dans les différents
secteurs, les principaux intéressés.
Dans le domaine des pêches, on dit: C'est principalement aux
pêcheurs à régler ça. C'est pour ça que notre
commission, module ou comité pêche regroupe des pêcheurs,
des propriétaires d'usine, des travailleurs d'usine et des élus
à côté. Il n'y a pas des intervenants ici et là qui
vont régler le problème des pêches, c'est principalement
les gens de la pêche.
M. Léonard: Mais vous avez tenu des assemblées
d'information, de consultation, vous avez tenu des assemblées ou
si...
M. Carbonneau: Non, c'est uniquement au niveau travail technique
que ça se fait, au niveau des comités...
M. Léonard: Donc, c'est par différents milieux de
travail que vous avez procédé; les comités ont
procédé selon différents milieux de travail; les uns les
pêcheurs, les autres les agriculteurs je ne sais pas si vous en
avez beaucoup, mais en tout cas...
M. Carbonneau: Chaque comité a tracé lui-même
son programme de travail et a réglé lui-même ses
interventions dans le milieu. Il y avait un groupe d'animateurs à notre
service à ce moment.
M. Léonard: Une dernière question: Comment
envisagez-vous le partage des tâches entre les élus et les gens
qui vous fournissent des données techniques et professionnelles? Vous
parliez tout à l'heure des fonctionnaires qui sont, eux, soit des
techniciens, soit des professionnels; comment voyez-vous le partage des
tâches entre les deux? Je sais que c'est une question difficile, parce
que la décision se prend sur des données techniques.
II reste que, parfois, les données techniques commandent
pratiquement la décision.
M. Carbonneau: Le problème majeur pour un conseil
municipal ou un conseil de comté vis-à-vis de ses fonctionnaires,
c'est la même chose que pour le gouvernement vis-à-vis de ses
fonctionnaires. Pour nous, le problème principal, c'est la
non-disponibilité des maires, du fait que les maires sont des
élus qui ne sont pas à temps plein à leur travail. Donc,
ils doivent donner de leur argent, de leur temps pour une cause à
laquelle ils croient, mais à un moment donné, ils sont
surchargés. Au lieu d'avoir 25 techniciens dans un conseil de
comté, on pense qu'on serait mieux d'avoir un certain pourcentage des
maires à temps plein, parce qu'on aurait réellement l'opinion de
la population.
Les fonctionnaires ont dit qu'ils vont amener l'opinion de la population
et j'ai l'impression qu'ils sont sincères lorsqu'ils disent ça.
Mais ce n'est pas la même chose, parce qu'ils ne passent pas au batte
à tous les deux, trois ou quatre ans.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Merci, M. le Président. M. le préfet,
MM. les maires, messieurs, ce n'est pas pour vous lancer des fleurs, mais, en
toute sincérité, je vous dis que votre mémoire aura
sûrement été un des plus stimulants que nous aurons
reçus pendant cette série d'auditions publiques de la commission
parlementaire. Evidemment, aussi, le franc-parler avec lequel vous l'avez
défendu nous aura stimulé et aura contribué aux
débats que nous, les députés, devront poursuivre
après la fin de ces auditions pour arriver, espérons-le, à
un consensus, une unanimité, si possible, sur l'éventuel texte
définitif du projet de loi.
Vous avez exprimé des inquiétudes et je dois vous dire que
vous n'êtes pas les seuls à les avoir, ces inquiétudes.
Quand vous dites, par exemple, à la page 2 de votre mémoire: "Les
grands objectifs à la base de l'élaboration du projet de loi no
125 prévoyaient une décentralisation effective des pouvoirs en
matière d'aménagement. On remarque cependant qu'une fois traduits
sous la forme d'un texte de loi, ces grands principes ne sont plus
respectés. On prétend décentraliser, mais on ne fait que
confirmer la primauté du gouvernement sur les municipalités, en
passant par les conseils de comté."
Ensuite, à la page 10, vous n'y allez pas avec le dos de la
cuillère, vous dites: "Or, quand on prend connaissance de la loi 125, on
devient terriblement inquiet. On a presque le goût de dire qu'on ne veut
rien savoir, parce qu'on a l'impression que le projet de loi 125 favorise le
gouvernement au détriment du conseil de comté et le conseil de
comté au détriment de la municipalité."
M. le préfet, il va sans dire que le ministre ne partage pas
parfaitement l'avis que vous exprimez. Il lui incombera de nous convaincre ou
bien que vous n'avez pas raison ou bien que la loi doit, pour des raisons qu'il
va exposer au cours du débat, demeurer dans sa rédaction
actuelle. Peut-être, c'est ce que j'espère, le débat que
nous poursuivrons nous amènera-t-il justement à un consensus avec
des modalités parce que nous sommes tous d'accord sur le
principe, sur l'objectif qui seront plus conformes à cette
idée, cette philosophie qui a été exprimée avant le
dépôt du projet de loi.
Un deuxième commentaire: je vous remercie d'avoir soulevé
la question du mot urbanisme. Il est vrai que dans son origine
sémantique, c'est un mot qui a ses racines dans le latin et le mot latin
veut dire carrément la ville; pas l'ensemble du territoire, la ville.
Quand on dit aujourd'hui urbanisme, cependant, la tradition récente veut
quand même que, dans ce mot "urbanisme", on englobe l'affectation du sol,
l'aménagement. D'autres mots peuvent être utilisés: la
protection, l'occupation, (celui que vous avez choisi), l'utilisation, la
vocation, mais ce qui est important, c'est que nous fassions la distinction
entre urbanisme et urbanisation, et que nous pensions à cette autre
partie importante de notre territoire, cette partie qui risque d'être
grugée par l'urbanisation.
Enfin, j'ai une question à vous poser, qui a trait à votre
recommandation qu'il y ait un veto municipal, que là où les
intérêts d'une municipalité sont en jeu, sont
affectés par ce qui est proposé dans un schéma
d'aménagement, elle ait un droit de veto sur ce qui la concerne
directement.
Nous avons déjà entendu des villes, par exemple,
réclamer un droit de veto. C'était le cas hier de la ville de
Granby, qui a été la première à présenter un
mémoire devant cette commission. La ville de Granby a
réclamé un droit de veto en ce qui la concerne, mais à
titre de principale municipalité de son territoire. La ville de Granby
n'a pas suggéré que les autres municipalités puissent
avoir également un droit de veto.
Vous recommandez que toutes les municipalités aient ce droit. Je
voudrais vous demander ceci: il y a quand même, sur un territoire
donné, administré par plusieurs municipalités, un certain
besoin de concordance, un certain besoin de franc-jeu entre les
municipalités: il ne faut pas qu'une municipalité permette des
choses qui seraient totalement inacceptables sur le territoire de la
municipalité voisine, et surtout en matière d'aménagement,
de construction, de lotissement. Ne voyez-vous pas, dans ce genre de
considération, un rôle important et indispensable pour le conseil
de comté?
M. Carbonneau: Pour revenir au droit de veto que vous
mentionniez, au contraire, je pense qu'au lieu de donner un droit de veto aux
grosses municipalités, on devrait le donner aux petites, parce que ce
sont les grosses qui vont écraser les petites. Il faut l'admettre. S'il
faut choisir un groupe qui aurait un droit de veto, je le donnerais aux petits
au lieu de le donner aux gros.
Cependant, notre principe est que l'aménagement ne doit pas
imposer, c'est-à-dire que ce doit être voulu. On a dit et
cela a été dans nos discussions, peut-être qu'on n'a pas pu
le faire
ressortir dans notre mémoire qu'un droit de veto d'une
municipalité devra être confirmé par la population de la
municipalité lors d'un référendum. C'est-à-dire
qu'on donne un droit de veto au conseil municipal donné, à
l'entité municipale qui administre la municipalité, qui s'appelle
conseil, mais il devra se faire supporter par sa population, dans un
référendum, à ce moment-là. C'est ce qu'on disait.
On ne l'a pas traduit ici, mais c'est ce qu'on disait. C'est pour ne pas avoir
un groupe, un conseil qui, à ce moment-là, pour des raisons
politiques, qui ne sont pas des raisons d'aménagement comme telles,
dirait: Moi, je bloque cela parce que j'ai mon droit de veto. Je m'en sers. A
ce moment-là, il serait obligé d'aller à sa population et
de justifier automatiquement, lors d'un référendum, l'utilisation
de son veto.
M. Goldbloom: Cela m'amène à vous poser une autre
question. Qu'est-ce qui arrive après l'exercice du veto? Que devient le
schéma d'aménagement?
M. Carbonneau: Confirmé, à ce moment-là, par
une population. Si une population d'un territoire donné ne veut pas que
telle réglementation existe, c'est inutile de l'avoir, parce qu'on va
être obligé d'engager toutes les polices du Québec pour la
faire respecter et d'avoir tous les tribunaux pour la faire respecter. On ne
peut pas en imposer comme cela. Il faut que la population soit d'accord. C'est
cela, notre principe. Nous disons: Au lieu de venir d'en haut, cela vient d'en
bas, de la population. C'est elle... (12 heures)
M. Goldbloom: M. Carbonneau, j'aimerais quand même vous
poser un problème pratique, un problème qui s'est
déjà présenté à plusieurs endroits au
Québec. Le territoire des Iles-de-la-Madeleine est bien défini.
Il n'y a pas de choix, on doit traiter ce territoire comme unité.
Ailleurs, dans la province, on peut dire: II y a un autre territoire voisin
où l'on peut faire des choses, aménager quelque chose, mais, aux
îles, il faut aménager dans le territoire des îles.
Si chacune des municipalités refuse d'avoir un dépotoir
dans son territoire pour recevoir les déchets et si ce veto de
chacune...
M. Carbonneau: C'est cela, aux îles, à l'heure
actuelle, c'est le problème. Face à cela, il faut faire quelque
chose. Qu'est-ce qu'il faut faire? Il faut s'asseoir autour d'une table et
trouver une solution. Il n'y a pas cinquante manières. Ce n'est pas en
imposant à une municipalité un dépotoir qu'on règle
le problème. Imposer à une population de recevoir les
déchets de tous les autres, vous n'aimeriez pas qu'on aille
déposer tous nos déchets chez vous. Pourquoi pourrions-nous nous
permettre, parce qu'on est le conseil de comté, de lui donner tout cela?
On n'est pas d'accord. Qu'on s'asseoit autour de la table et qu'on travaille.
Aux Iles-de-la-Madeleine, avec la loi de l'environnement, je ne sais pas trop
quel règlement a été mis en vigueur l'année
passée, on est dans le pétrin. On nous dit: Vous allez avoir des
lieux d'enfouissement sanitaire, un pour les Iles-de-la-Madeleine. Nous disons:
Sur un lieu d'enfouissement aux Iles-de-la-Madeleine, on n'est pas d'accord. M.
le ministre, c'est regrettable, on n'est pas d'accord. Le règlement est
là et on nous l'impose. Ce n'est pas une manière de faire, c'est
de se mettre autour de la table, d'en discuter. La semaine prochaine, le
directeur de je ne sais pas quoi, d'un des services de l'environnement viendra
aux îles pour en discuter. C'est la seule manière qu'on va le
régler, ce n'est pas en l'imposant. L'aménagement, c'est
exactement la même chose.
M. Goldbloom: Je pense que M. Arseneau veut ajouter un mot.
M. Arseneau: Je pense qu'aux îles, la première
affaire qu'on a faite a été de faire sauter le dictionnaire
Larousse et on parle tous le même langage chez nous. Quand le
gouvernement ou les fonctionnaires veulent nous imposer, comme on parle, des
fameux déchets, notre problème on veut le régler nous
autres mêmes dans notre milieu. Ce qui prouve que les fonctionnaires et
le gouvernement ne sont pas capables de le régler, c'est que, quand ils
viennent vivre aux Iles-de-la-Madeleine, cela leur prend une prime
d'éloignement, comme ils l'appellent et, nous autres, on n'a pas de
cela. On vit aux îles avec les moyens qu'on a et on va vivre avec nos
déchets où on veut les mettre.
M. Goldbloom: J'aimerais poser une dernière question, je
la pose avec le sourire. Vous avez insisté sur l'importance de donner un
veto aux municipalités et vous avez dit, en réponse, à ma
première question que, s'il faut choisir entre donner le droit de veto
à la grande ville et le donner à la petite municipalité,
ce serait à la petite municipalité qu'il faudrait le donner.
J'aimerais vous demander, parmi les municipalités des
Iles-de-la-Madeleine, laquelle est la grosse méchante.
M. Carbonneau: Elle est à l'autre bout, c'est
Cap-aux-Meules. Méchante, entendons-nous, mais elle nous prend tous nos
projets. C'est elle qui est au centre et, parce qu'elle est au centre, on lui
donne tout. Tu sais ce que je veux dire. C'est là qu'on veut
décentraliser. On charrie peut-être un peu, mais, dans chaque
territoire, il y en a toujours une qui gruge les autres. Là, on parle de
territoires éloignés. Allez à Montréal, si vous
avez un droit de veto et que vous le donnez à la ville de
Montréal au lieu de le donner à une ville de banlieue, qu'est-ce
que cela donne?
M. Arseneau: Avec le plan d'aménagement qu'on a appris
à construire chez nous, qu'on a appris à bâtir de nos
mains, on va éviter ces problèmes-là. Il n'y aura pas de
municipalités qui vont gruger les autres. On prend une décision
à un moment donné et on en vient à un consensus. Notre
décision, c'est toujours un consensus, mais, des fois, il est dur. Des
fois, cela prend du temps à prendre notre décision, mais, quand
elle
est prise, on sait où on va, comme avec notre mémoire, ce
matin, on sait où on va.
M. Goldbloom: Je vous en remercie. C'est un mémoire qui
vraiment nous amène à penser d'une façon fraîche
à ce projet de loi. J'espère que, de votre côté,
vous trouvez qu'il a valu la peine de faire le long voyage. Je vous assure que,
de notre côté; il a valu la peine de vous écouter.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. MM. les Madelinots,
votre mémoire m'a d'autant plus intéressé que le
comté que je représente est constitué de petites
municipalités également. Vous avez souligné, à un
moment donné, votre inquiétude. Vous avez dit que vous aviez peur
que ce projet de loi puisse un jour forcer indirectement la fusion municipale.
Qu'est-ce qui vous laisse voir cela dans le projet de loi?
M. Carbonneau: C'est le pouvoir du comté d'imposer
à la municipalité, je ne sais pas à quel article... A un
moment donné, si la municipalité n'est pas conforme au
schéma, le comté l'impose à la municipalité locale.
On dit que c'est un pouvoir qu'on donne. Mieux que cela, on dit même que
pour des emprunts, la municipalité locale qui voudrait avoir une piscine
ou quelque chose comme cela, il faudrait que son règlement
reçoive un avis du conseil de comté. C'est un début. Je
pense qu'on se rappelle les commissions scolaires qui se sont laissées
faire et qui ont disparu, pour un grand nombre. Réellement, on ne
voudrait pas que la même chose se produise. Il y a quelques articles dans
le projet de loi qui ne sont probablement pas volontaires de la part du
ministre ou de la part des fonctionnaires, mais si on laisse un, deux ou trois
points passer, quand on va se réveiller, il va être trop tard. Ce
sera uniquement des conseils de comté, et les municipalités:
Bonjour la visite.
M. Goulet: J'abonde dans le même sens que vous, même
hier, lors des propos préliminaires, je l'ai souligné. Si vous
voulez, parce que le temps nous presse, nous allons aller à la page 10
de votre mémoire, à la recommandation numéro 5. Vous
dites: "Que le seul pouvoir concédé au ministre en matière
d'aménagement du territoire soit de décréter des zones
d'intervention spéciale dans les seuls cas où le conseil de
comté et ou les municipalités auraient refusé de modifier
leur schéma ou plans à sa demande". Egalement, vous avez
souligné que le référendum devrait être
décisionnel. Maintenant, vous comprenez que dans certains domaines, le
ministre veut avoir son droit de veto. Lorsque vous parlez de zones
d'intervention spéciale, par exemple, chez vous, aux
Iles-de-la-Madeleine, cela peut être dans quel domaine?
M. Carbonneau: Cela peut être pour une mine de sel.
M. Goulet: Quelque chose comme cela ou des services...
M. Carbonneau: Cela peut être pour une route. Cela peut
être pour une ligne électrique. A notre point de vue, c'est
uniquement là qu'on dit que si un projet gouvernemental ou même
privé n'a pas été accepté par le milieu, on pense
sincèrement que cela ne devrait pas être imposé. Il reste
qu'il y a des impératifs, à un moment donné, qui sont
nationaux au lieu d'être locaux. Donc, il faut que le gouvernement se
garde une marge de manoeuvre. C'est la seule marge qu'on lui laisse, pas
d'autres. Il n'a pas d'affaire à dire: Je prévois de faire telle
ou telle chose dans cinq ans ou dans dix ans et modifiez votre schéma en
conséquence. Il n'a pas d'affaire à faire cela. Quand il voudra
intervenir, il fera une zone d'intervention spéciale.
M. Goulet: Au niveau des zones d'intervention spéciale,
hier soir, nous avons terminé la soirée sur ce point
précis. Si le ministre, justement, a un droit de veto sur les zones
d'intervention spéciale, est-ce que vous croyez qu'il devrait quand
même consulter la population ou s'il devrait dire tout de suite que c'est
un choix politique et: Voici, il y a une ligne de l'Hydro-Québec qui
passe aux Iles-de-la-Madeleine, elle va passer à tel endroit?
M. Carbonneau: On a bien dit: Si la municipalité ou le
conseil de comté n'a pas accepté sa recommandation. Donc, cela
veut dire qu'il faut qu'il les consulte. C'est le minimum. Le conseil de
comté, ou la municipalité, va être obligé d'aller
consulter sa population pour dire non à tel ministère. On ne veut
pas que tu interviennes dans notre territoire, on ne veut pas modifier notre
schéma. A ce moment, il faudra que la municipalité ou le conseil
de comté ait l'appui de la population, parce que le gouvernement s'en
vient avec un droit d'intervention.
M. Goulet: Si c'est un service public, c'est une décision
au niveau national, une décision politique que le gouvernement ou le
ministère en place prend. On prend l'exemple d'une ligne de
l'Hydro-Québec ou d'une autoroute ou de tout autre service public. Hier,
on parlait de gaz naturel. Je présume que ce n'est pas pour tout de
suite aux Iles-de-la-Madeleine. Quand le ministère a
décidé d'y aller avec ce service public, pourquoi devriez-vous
aller consulter au niveau de la population, de la base? A ce moment, si le
conseil de comté, les élus disent: Ecoute, on n'est pas pour
cela. Le ministre dit: II faut qu'on le passe, c'est une décision et on
y va quand même. Pourquoi perdre tant de temps pour consulter la
base?
M. Carbonneau: L'aménagement, c'est la base. Il faut
absolument retourner chez les citoyens. C'est la base de l'aménagement
du territoire. Un conseil de comté qui dirait non à une
volonté d'intervention d'un ministère, sans consulter les
citoyens, il n'a peut-être pas non plus réellement la vue des
citoyens. Donc, on dit: Va
consulter tes citoyens. Pour nous autres, tout l'aménagement du
territoire est basé sur les citoyens.
M. Goulet: Une dernière question, M. le Président.
Je reviens sur la question du député de D'Arcy McGee. Je l'avais
également soulignée aux deux mêmes pages. Vous avez
commencé la lecture de votre mémoire en disant: Nous sommes pour
le principe du projet de loi no 125. Moi, je veux vous demander si vous
êtes pour le principe d'un projet de loi sur l'aménagement du
territoire ou des sols, appelez ça comme vous voudrez, vous êtes
pour le principe d'un projet de loi d'aménagement du territoire, mais
est-ce que vous êtes pour le principe du projet de loi no 125. Je
m'explique, M. le Président, parce que, dans votre mémoire, vous
dites que l'élaboration du projet de loi devrait prévoir une
décentralisation effective et que celui-ci ne respecte pas ce grand
principe. Ce sont des mots que l'on trouve dans votre mémoire. Vous
allez plus loin en disant: Nous avons l'impression que ce projet de loi
défavorise le conseil de comté et la municipalité.
A la suite de tels propos, je veux savoir... Je suis d'accord que vous
êtes pour le principe d'un projet de loi sur la décentralisation,
mais êtes-vous pour le principe de ce projet de loi tel qu'on le retrouve
devant nous? Il y a une très grande différence.
M. Carbonneau: C'est presque une question de politicien.
Mme Leblanc-Bantey : II va falloir que tu apprennes à y
répondre, Gilbert.
M. Goulet: Juste une petite réponse, oui ou non.
M. Carbonneau: II y a des bonnes choses dans ce projet de loi
pour nous. Il y a d'autres choses qu'on dit qui doivent être
modifiées. Maintenant, est-ce que cela veut dire qu'il faut modifier de
1 à 100? Non, ce n'est pas ça qu'on prévoit. Il y a
certaines modifications à y apporter, qu'on pense qui sont essentielles
et qu'on pense qui sont peut-être primordiales. Cela dépend
à quel point de vue on l'entend de l'autre côté.
M. Goulet: Oui, je comprends qu'il y a de bonnes choses dans le
projet de loi, vous en avez fait état tout à l'heure. Il y a des
choses moins bonnes, mais je vais reprendre, si vous voulez bien, le texte tel
que je le retrouve devant moi, où l'on dit: On remarque cependant qu'une
fois traduits sous la forme d'un texte de loi ce sont ces mots-là
qui sont très importants dans votre texte ces grands principes ne
sont plus respectes. Là, on ne parle pas des modalités. Vous
dites: Ces grands principes ne sont plus respectés. Je parle au niveau
des principes.
M. Carbonneau: Le niveau du principe, c'est qu'on se base un peu
sur tout le cheminement que le ministre d'Etat à l'aménagement a
fait dans ce dossier, où il disait que, jusqu'à un certain point
ce qu'on a compris, nous c'était le citoyen qui primait
dans l'aménagement du territoire. Lorsqu'on regarde les articles, il
faudrait qu'ils soient modifiés dans le sens de donner la
primauté au citoyen et non pas, premièrement, à l'Etat,
ensuite au conseil de comté, ensuite à la municipalité. On
dit: C'est l'inverse. C'est le citoyen, sur la municipalité, sur le
conseil de comté et le gouvernement en bas. On met le gouvernement en
bas, au lieu de le mettre en haut...
M. Goulet: M. le Président, je vous remercie et je
remercie également les gens des Iles-de-la-Madeleine.
Le Président (M. Laplante): Mme le député
des Iles-de-la-Madeleine.
Mme Leblanc-Bantey: Je pense que si mes collègues
n'étaient pas convaincus de la mentalité particulière des
Madelinots, vous avez fait un bon effort pour le définir ce matin.
J'ajouterai que le ministre venant d'une région de montagnes où,
eux aussi, ils se définissent comme des gens assez autonomistes, c'est
peut-être pour ça qu'il a prêté une oreille
très gentille à vos revendications depuis bientôt deux ans.
Je me dis finalement, que, si, de toutes les régions du Québec,
la Beauce, les Laurentides, les Iles-de-la-Madeleine, Hull, tous les gens ont
cette mentalité, c'est à espérer que, quand ce sera le
temps pour les Québécois de répondre "oui" à leur
autonomie et à leur souveraineté, tout le monde va dire oui en se
disant: Ensuite, on pourra rediviser le Québec à notre
mesure.
Je vais vous poser une première question. J'espère que
Gilbert ne trouvera pas que c'est une question de politicien. Il faut dire que,
d'habitude, il se débrouille très bien pour y répondre.
Dans votre dernière recommandation, vous proposez que le conseil de
comté prenne en charge progressivement certains pouvoirs
spécifiques que la municipalité pourrait lui confier, et, d'autre
part j'étais très heureuse de vous l'entendre dire
vous parlez de respecter aussi l'autonomie des municipalités et je suis
bien placée pour savoir qu'à cause de l'expérience que
vous faites depuis un bout de temps, les municipalités des îles en
particulier tenaient énormément à ce que le pouvoir de
comté ne vienne pas gruger justement leur pouvoir de
municipalité.
Vous parlez d'autonomie des municipalités et vous parlez de
confier certains pouvoirs au conseil de comté. Est-ce que vous pourriez
nous donner des exemples précis de ces pouvoirs que vous aimeriez voir
confier au conseil de comté?
M. Carbonneau: C'est-à-dire qu'on n'a pas
spécifié c'est volontaire, si on ne l'a pas
spécifié ce sera à l'ensemble des
municipalités du comté de décider lesquels et non pas au
préfet à dire: Tel secteur devrait être du ressort du
conseil de comté. Ce sera aux municipalités à les
décider
et on pense que, dans l'aménagement, il y a peut-être
certaines... La loi en prévoira certainement un certain nombre, mais il
y en a aussi qui ne sont peut-être pas prévues dans la loi, et
peut-être qu'une modification au Code municipal permettrait que certains
services puissent devenir communs ou que certains secteurs d'intervention
municipaux soient administrés par une municipalité, mais
Benoît me dit: Pas trop vite! Cela veut dire que c'est uniquement lorsque
les municipalités locales voudront et non pas à la demande du
conseil de comté ou à l'impulsion du gouvernement. Ce sera aux
municipalités locales à décider elles-mêmes. (12 h
15)
Mme Leblanc-Bantey: Vous n'avez pas d'exemples précis.
M. Carbonneau: Pas d'exemples précis à l'heure
actuelle parce qu'à l'heure actuelle, on veut rehausser le prestige des
municipalités locales, premièrement.
M. Arseneau: II vaut mieux qu'une municipalité soit
pénalisée par elle-même et soit privée de services
pendant un an, même si les autres l'ont, jusqu'au jour où elle va
venir à comprendre qu'elle en a besoin; elle ira trouver qui de droit
pour accepter le service. On ne doit pas l'imposer.
Mme Leblanc-Bantey: Une vraie réponse de politicien.
Une Voix: D'accord.
Mme Leblanc-Bantey: Je n'ai pas terminé, ce ne sera pas
long, cependant.
D'autre part, vous parlez, à un moment donné, d'un droit
de veto que les municipalités pourraient avoir et, dans un contexte plus
précis qui est celui des îles, vous avez parlé du
développement de l'agriculture, d'un plan d'occupation des sols, etc.
Vous parlez aussi de la loi des îles que je connais fort bien; quant
à l'éparpillement des maisons sur le territoire, quant à
la liberté qu'ont eue les Madelinots d'aménager leur territoire
comme bon leur semblait, individuellement pour chaque Made-linot... Nous sommes
en train, avec votre collaboration et le gouvernement, d'essayer de remettre
l'agriculture sur pied aux Iles-de-la-Madeleine, de faire
énormément d'efforts dans ce sens. Comment peut-on concilier
cette loi des îles, parce que je me pose la question souvent et je sais
que vous vous la posez, cette liberté totale des gens de
s'établir un peu partout où ils veulent et la
nécessité de faire un zonage agricole, par exemple, sans
justement déranger cette loi des îles et cette maxime "Que notre
volonté soit faite sur la terre comme au ciel", ou "comme sur la mer"?
Avez-vous trouvé la réponse à cette question?
M. Carbonneau: Je pense que le principe est que le temps arrange
bien des choses. On est contre le fait d'imposer une réglementation qui
indispose le citoyen. On pense que, si on la discute avec les citoyens,
à force de la discuter, elle va être acceptée par eux et,
à ce moment-là, on va pouvoir la rendre réglementaire et
officielle par un conseil municipal local ou un conseil de comté. Mais
elle sera acceptée parce que le citoyen va avoir l'impression de l'avoir
bâtie lui-même, cette réglementation; il n'aura pas
l'impression qu'elle lui a été imposée par sa
municipalité locale, par son conseil de comté ou par le
gouvernement. C'est plus difficile à ce moment-là; cela peut
retarder certains développements, mais c'est peut-être mieux de
les retarder un petit peu et de les réussir que de les imposer et de les
manquer.
Mme Leblanc-Bantey: Autrement dit, on n'est pas
député...
M. Carbonneau: On n'est pas vite aux îles, on prend notre
temps.
Mme Leblanc-Bantey: On prend notre temps, mais je ne sais pas si
vous me permettez. Je suis bien placée pour savoir qu'on n'est pas
député, sauf quand on entend des choses et qu'on aimerait que
ça se fasse vite.
M. Carbonneau: C'est le gouvernement qui n'est pas vite.
Mme Leblanc-Bantey: Je ne sais pas si les Madelinots auront la
patience d'attendre, finalement, de payer leurs légumes et leur viande
moins cher. Peut-être que, si on se fie à ce raisonnement, on
pourra attendre encore de nombreuses années, même si, sur le plan
des principes, je suis parfaitement d'accord avec vous.
Ma dernière question est la suivante: Vous semblez mettre
l'accent sur la participation des élus dans votre structure et dans
votre démarche et je crois que vous avez vraiment essayé de le
faire depuis que le PAIM est en fonction aux îles. Peut-être
davantage pour le bénéfice de mes collègues que pour le
mien, est-ce que vous pourriez nous expliquer la collaboration intermunicipale
qui a existé au sein du conseil de comté depuis un an et demi, si
vous en êtes satisfaits? Peut-être, pour concrétiser
davantage, vous pourriez vous servir d'un exemple très chaud,
très émotif, très douloureux, mais qui reste
néanmoins un exemple de démarche qui peut être très
valable, l'exemple de la piscine.
M. Carbonneau: Cela nous donne l'occasion d'en parler. C'est vrai
que cela a été une concertation, à ce moment-là, au
niveau d'un conseil de comté. Pour vous résumer le
problème en deux mots: II y avait un projet de piscine aux îles
qui dormait sur des tablettes depuis une dizaine d'années. Le
Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports a dit
à la municipalité qui avait ce projet, en l'occurrence
Havre-aux-Maisons: Avant de vous octroyer les fonds nécessaires pour la
construction de votre piscine, on veut que vous ayez une approbation du conseil
de comté. Havre-
aux-Maisons arrive au conseil de comté; un autre maire surgit et
dit: La polyvalente a déjà eu un projet de piscine; on va
demander à la polyvalente de nous apporter son dossier. On s'est
chicanés et cela a été une vraie bonne chicane pendant six
à neuf mois, pour finalement accoucher d'une recommandation au
gouvernement, recommandation qui a fait mal, qui a blessé la
municipalité qui avait un projet depuis dix ans et qui n'a pas pu le
voir mener à bonne fin par une décision d'un conseil de
comté. Cela a blessé cette municipalité et le maire aussi,
et c'est compréhensible. Maintenant, ce qui est beaucoup plus
douloureux, c'est que cela fait presque un an qu'on a envoyé une
recommandation au gouvernement, en disant: A ce moment-là, la piscine,
nous voulons la localiser à la polyvalente et il semblerait que, au
ministère de l'Education, on réponde aujourd'hui qu'on n'a pas
les fonds nécessaires.
Si on décentralise les pouvoirs, il faut les décentraliser
totalement, pas seulement nous faire faire le mauvais partage des choses, comme
une décision qui est peut-être, jusqu'à un certain point,
politique, d'un choix d'un équipement collectif et rendu à
l'autre bout, on n'a plus d'argent.
Mme Leblanc-Bantey: II faudrait peut-être spécifier
que quand la démarche a été commencée,
c'était le Haut-Commissariat. Le Haut-Commissariat, lui, avait les
sommes nécessaires, mais entre le temps où les Madelinots se sont
décidés et le temps où on avait les sommes, finalement il
était trop tard, sauf que, au ministère de l'Education, ça
s'adresse à la commission scolaire.
M. Carbonneau: Le budget du Québec a augmenté cette
année. Pour l'amour de Dieu, ce serait une affaire d'à peu
près...
Mme Leblanc-Bantey: Le dossier n'est pas fermé, mais pour
être honnête et très cohérent, Gilbert, je pense
qu'il est important de spécifier qu'il y a eu aussi un changement de
ministère dans le dossier.
M. Carbonneau: Le Haut-Commissariat, c'est le ministère de
l'Education, que je sache. Il ne faut pas couper les cheveux en quatre.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la
fin.
M. Léonard: Je suis très heureux des
échanges qu'il y a eus. Je relève aussi ce qu'a dit le
député de D'Arcy McGee, savoir que c'était un
mémoire très stimulant pour nous. Effectivement, c'en est un.
Je dirais qu'il y a eu plusieurs points de soulevés. L'un des
points que j'aimerais relever ici, en conclusion, c'est lorsque vous dites que
c'est le gouvernement qui impose sa volonté au comté et le
comté aux municipalités; à mon sens, c'est l'inverse.
Effectivement, c'est l'inverse, si on lit le projet de loi.
La municipalité conserve tous ses pouvoirs d'urbanisme, conserve
tous les pouvoirs de réglementation. Je crois que c'est
particulièrement important parce que c'est là le plan
opérationnel. Je pense que c'est la municipalité aussi qui garde
le contact avec le citoyen, dans la mesure où ce contact existe, qu'il y
a des assemblées publiques, la municipalité a le grand
rôle.
Le comté fait de la coordination, jusqu'à un certain point
et je pense qu'il est important aussi qu'il amorce une réflexion sur
l'ensemble de son avenir et de son aménagement, cela me paraît
important.
Quant à l'action du gouvernement, je pense qu'il faut distinguer,
dans le projet de loi, entre le régime particulier et le régime
général. Les pouvoirs ordinaires, lorsque tout va bien, du
gouvernement sont très minces. C'est le comté qui fait
l'aménagement, c'est la municipalité qui le fait et ce n'est que
dans des circonstances précises que le gouvernement peut intervenir dans
le schéma. Il me semble qu'on ne peut pas, dans une loi qui touche tout
le Québec, dire ou réserver au gouvernement seulement la
possibilité de décréter des zones d'intervention
spéciale, parce que c'est pour des objets très spécifiques
et sur des territoires très délimités.
Lorsque l'Hydro-Québec va devoir passer une ligne de transmission
électrique à la grandeur du Québec, je pense qu'on ne peut
pas le faire par zones d'intervention spéciale, il faut respecter les
objectifs nationaux, en termes d'aménagement. Il y en a des objectifs
nationaux et il va continuer à y en avoir, dans un pays il y a un
gouvernement. Il faut l'admettre. A cet égard, il faut bien distinguer
entre le régime particulier et le régime
général.
Je pense bien que le schéma, au niveau du comté, va
fournir un cadre de réflexion qui n'existait pas avant. Avant, le
gouvernement faisait tout ce qu'il voulait sur le territoire, n'importe quoi,
n'importe quand.
M. Carbonneau: II va continuer.
M. Léonard: Non, tout est fait selon un processus et c'est
bien évident. Je pense qu'il faut lire le projet de loi correctement,
ça me paraît nécessaire.
Je dirai aussi, quant à votre expérience sur le plan de
l'aménagement, que cela a été bénéfique;
tout à l'heure vous avez dit que vos relations avec les fonctionnaires
se sont améliorées, ils vous donnent plus d'information, ils vous
insèrent dans leur processus de décision, quand cela les concerne
et même ils vous en permettent davantage. En tout cas, vous avez admis
que la situation s'était grandement améliorée, et je pense
que c'est un acquis positif.
Je trouve que, dans l'ensemble, ce qui a été fait a
été une expérience positive. Il s'agit de poursuivre votre
réflexion, de poursuivre votre expérience et votre dossier va
s'enrichir. Si je comprends bien le mémoire, vous dites: II y a eu
toutes sortes d'études faites par toutes sortes d'organismes
extérieurs; aujourd'hui, c'est vous-mêmes qui les faites ces
études, et c'est là un
avantage. J'espère bien que les citoyens vont être, de plus
en plus, mis dans le coup dans ce contexte.
Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Laplante): Messieurs, les membres de
cette commission vous remercient très sincèrement pour votre
participation.
M. Carbonneau: Merci M. le Président et merci aux membres
d'avoir bien voulu nous écouter.
Le Président (M. Laplante): J'appelle le Conseil
régional du développement de l'Abitibi-Témiscamingue.
Si vous voulez identifier votre organisme, vous identifier
vous-même. Je vous demanderais votre coopération pour essayer de
résumer votre mémoire, étant donné qu'il est assez
épais, dans les vingt minutes qui vont suivre et la période des
questions se fera cet après-midi si vous pouvez revenir. D'accord?
Conseil régional de développement de
l'Abitibi-Témiscamingue
M. Roy (Hervé): D'accord, M. le Président, merci.
Conseil régional de développement de
l'Abitibi-Témiscamingue. Mon nom est Hervé Roy. Je vais laisser
de côté l'introduction du mémoire comme tel et je vais
passer tout de suite à la qualification des répondants. Je
voudrais préciser que ce mémoire est une synthèse d'une
consultation effectuée à la suite d'un colloque tenu le 20
février qui regroupait tous les corps socio-économiques de la
région d'Abitibi-Témiscamingue et, d'autre part, suite à
un questionnaire que nous avons acheminé à toutes les
municipalités et commissions scolaires de la région.
Ce questionnaire qu'on retrouve en annexe porte principalement sur le
principe du projet de loi 125, sur les modalités de ce projet de loi,
à savoir le nom, la nouvelle entité juridique, le
découpage des nouvelles entités, le nom des nouveaux territoires,
les modalités de représentation et les pouvoirs de ces nouvelles
entités.
On peut mentionner que les questions posées dans ce questionnaire
demandaient une réponse négative ou affirmative, mais laissaient
la place pour tout autre commentaire.
Je passe maintenant au traitement des résultats; je pense que
compte tenu de la structure même du questionnaire, le résultat est
assez facile à trouver.
L'intérêt des municipalités et des commissions
scolaires là-dedans, on peut mentionner que les municipalités ont
répondu à ce questionnaire dans une proportion d'environ 65% ou
70%, ce qui est peut-être différent du mémoire que vous
avez, parce qu'on a reçu, par la suite, d'autres questionnaires. Un fait
à noter, c'est que les municipalités urbaines ont répondu
dans une proportion de 96%. Les commissions scolaires, quant à elles,
ont répondu dans une proportion semblable, puisque onze sur douze ont
répondu.
Il est peut-être intéressant de noter aussi que les
municipalités rurales ont répondu dans un pourcentage beaucoup
plus faible et ceci, quant à nous, dépendrait peut-être du
délai assez court accordé pour répondre au questionnaire,
d'une part, et à l'aspect technique du projet de loi 125. Les
municipalités rurales n'ont peut-être pas le personnel
suffisamment qualifié pour répondre dans un laps de temps
raisonnable.
Cela peut aussi dépendre de notre impossibilité de pallier
à cela et des retards flagrants dans l'acheminement du courrier. Les
municipalités urbaines, pour des raisons tout à fait contraires,
ont pu répondre dans une proportion très
élevée.
Je passerai maintenant aux cinq chapitres. Le premier est sur le
principe du projet de loi 125. Là-dessus, on peut dire que
l'unanimité des répondants existe sur le principe de ce projet de
loi. Toutefois, on peut noter certaines hésitations, qui tiennent aux
craintes des administrateurs municipaux, que cette loi fasse perdre aux
municipalités une certaine autonomie venant du fait que l'arbitraire
sera fait par un gouvernement supérieur. L'application de cette loi
donnera lieu à une très grande lourdeur administrative et le
processus de consultation serait assez difficile, selon eux également.
On précise, on le revoit assez souvent, que ce serait le prélude
à un gouvernement régional. (12 h 30)
Dans cette dernière optique, ce qu'on craint le plus est la
prépondérance du milieu urbain sur le milieu rural. Toutefois, on
dit que les aspects positifs semblent l'emporter. Là-dessus, les
répondants concluent à une nécessité d'un
réaménagement au niveau de l'aménagement du territoire en
général.
Je ne sais pas si je vais trop vite.
M. Léonard: Ça va. On écoute bien.
M. Roy: Au deuxième chapitre, c'est le nom de la nouvelle
entité juridique. Là-dessus les répondants sont loin de
faire l'unanimité, parce que, d'une part, on retrouve les tenants du
statu quo qui conservent l'appellation de conseil de comté. On retrouve
cela surtout au niveau des municipalités rurales.
D'autre part, toutes les municipalités urbaines vont tendre vers
le nom "municipalité de comté". Je pense que cela était
assez évident, même au colloque, à Amos. On l'avait vu
à ce moment-là.
Et là, on énumère une série de noms qui sont
suggérés par les répondants, dont ceux qui reviennent le
plus sont: corporation intermunicipale, conseil intermunicipal et commission
régionale d'aménagement.
On peut noter également que les commissions scolaires y vont,
pour l'appellation de municipalité de comté. Là-dessus,
peut-être qu'il serait bon de préciser le fait de changer, de
faire une nouvelle appellation au niveau des comtés, c'est
peut-être mieux de changer complètement de nom. De ce fait, cela
enlève toute ambiguïté au niveau des pouvoirs, structures,
etc.
Nous, on précise que cette appellation a un mérite,
lorsqu'on parle de la commission régionale
d'aménagement, comme l'a suggéré la ville d'Amos,
et comme certains mémoires, au niveau des municipalités du
Québec l'avaient suggéré aussi, on dit qu'elle a le
mérite, à notre avis, d'une part, de mieux situer la
portée du projet de loi 125, qui vise uniquement l'aménagement du
territoire. D'autre part, elle dissipe les craintes qu'auraient les
municipalités, tant urbaines que rurales, de perdre leur autonomie dans
le champ de leur compétence.
En définitive, on perçoit que les municipalités
veulent se donner les mécanismes pour l'aménagement du
territoire, à cause des impératifs en ce domaine, mais que cela
s'arrête là.
Le découpage du territoire de la nouvelle entité
juridique, chapitre 3. On dit que les répondants ont vite saisi que les
discussions sur l'aménagement du territoire devaient se dérouler
dans des conditions acceptables, c'est-à-dire à partir d'un
territoire à échelle humaine et comprenant un certain nombre de
partenaires avec lesquels ils partagent des caractéristiques
socio-économiques.
C'est dans cette optique que, dans une proportion de 62%, les
municipalités d'Abitibi-Témiscamingue ont conclu qu'il devrait y
avoir au moins cinq entités et plus.
Là, on note également que les municipalités
urbaines, à ce chapitre, font l'unanimité en ce qui concerne le
changement total.
Chez les municipalités rurales, quant à elles, il y en a
12% sur l'ensemble qui désirent trois comtés, c'est-à-dire
que l'ensemble désire conserver le statu quo, mais 12% désirent
qu'il y ait au moins trois comtés. Cela veut dire que c'est dans une
proportion d'environ 75% qui veulent une modification au statut actuel.
Cette première constatation en dégage une seconde,
à savoir que les municipalités urbaines veulent avoir leur mot
à dire dans l'aménagement, qu'elles sont prêtes à
partager cette table de discussion avec les municipalités rurales, mais
dans une optique totalement renouvelée.
Quant à nous, on suggérait que, pour la restructuration de
ces comtés renouvelés, on ait au moins une ville, une
municipalité urbaine d'importance rattachée à chacun des
comtés. En supposant qu'il y en ait cinq, par exemple La Sarre avec une
partie du secteur de la région, Amos, Val-d'Or, etc., on dit: Une ville
à moins de cinquante milles ou une heure d'auto à peu
près.
Au chapitre V, le nom d'un nouveau territoire. A ce chapitre-là,
la majorité semble opter pour la désignation selon les bassins
hydrographiques, c'est suivi des noms d'origine historique et
amérindienne, des cantons les plus connus et des ressources les plus
caractéristiques sur ce territoire.
Les répondants semblent donc privilégier l'appellation
neutre bien caractéristique de leur secteur et ce n'est donc plus en
termes de particularités rurales ou urbaines que s'engagerait
l'aménagement, mais selon les secteurs d'appartenance dont le nom serait
calqué sur ceux déjà adoptés au niveau scolaire,
par exemple Harricana, La Vérendrye, etc.
Au chapitre V, les modalités de représentation de cette
nouvelle entité juridique. Les tendances exprimées par les
répondants en ce qui a trait à la représentation au sein
des nouvelles entités juridiques créées montrent un
clivage très net entre les municipalités urbaines et rurales.
Les municipalités urbaines, c'est bien entendu, désirent
avoir une espèce de représentation qui serait au prorata de leur
population, tandis que les municipalités rurales désirent avoir
un représentant par municipalité. La crainte des
municipalités rurales, à ce moment-ci, c'est de se faire bouffer
par l'urbain.
On remarque que les commissions scolaires, comme la plupart des
municipalités urbaines, optent pour une représentation
pondérée par l'importance de la population.
Les pouvoirs de ces nouvelles entités juridiques.
L'unanimité ou, en tout cas, la grosse majorité veut qu'on
s'occupe d'aménagement, point, avant d'aller vers tout autre pouvoir qui
pourrait être cédé à ces nouveaux conseils de
comté. Evidemment, les répondants qui voudraient avoir certains
pouvoirs, ce sont les municipalités urbaines encore cette fois-ci.
Les commissions scolaires, quant à elles, désirent
également qu'on s'en tienne uniquement à l'aménagement du
territoire.
Si vous me permettez, la conclusion, je vais la lire
intégralement, M. le Président. De l'analyse globale des
réponses reçues, deux aspects se dégagent, à
savoir, d'une part, la presque unanimité des répondants sur
l'acceptation du principe du projet de loi touchant l'aménagement du
territoire et l'urbanisme et, d'autre part, des divergences de vues sur les
modalités d'application de ce projet de loi.
En particulier, mentionnons que l'esprit qui préside au choix du
nom de la nouvelle entité juridique n'est pas le même pour les
municipalités rurales et urbaines. Mais, à notre avis, le
rapprochement pourrait être possible autour de l'appellation "commission
régionale d'aménagement".
Par ailleurs, malgré un certain statu quo qui persiste, les
répondants désirent une modification profonde des territoires
municipaux, pour rendre l'aménagement plus conforme aux besoins des
citoyens. Ils pourraient d'ailleurs difficilement être consultés
pour des plans d'aménagement trop éloignés. C'est pourquoi
près de 75% désirent au moins cinq territoires
d'aménagement, ce qui signifie le morcellement du grand conseil de
comté de l'Abitibi.
Quant au nom de ces territoires municipaux, on s'entend assez bien sur
les appellations originales, distinctes des noms actuels des conseils de
comté ou de municipalité. On retient surtout les bassins
hydrographiques, les noms d'origine amérindienne ou historique et de
certaines caractéristiques socio-économiques. Une réserve
de noms existe donc. On en a une quinzaine, je pense, dans le
mémoire.
Pour ce qui est de la représentation, il est évident que
chacun veut y avoir sa place. Ce sont les proportions qui sont loin
d'être déterminées. Un processus de consultation assez
lourd est
donc prévisible. Tout dépendra de la volonté des
participants de se donner une structure vraiment fonctionnelle.
Enfin, il semble qu'un assez large consensus se dégage quant aux
pouvoirs à accorder à cette nouvelle entité. On veut
parler d'abord d'aménagement.
Le Conseil régional de développement de
l'Abitibi-Témiscamingue considère qu'une étape très
importante vient d'être franchie par cette consultation auprès des
municipalités et des commissions scolaires. Il est conscient, toutefois,
que la masse des citoyens aura un grand rôle à jouer dans la
seconde étape, une fois le projet de loi accepté. Il
espère que les instruments nécessaires lui seront fournis pour
mener à bien la consultation qui s'imposera à ce
moment-là. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. Oui,
monsieur.
M. Goulet: Vous avez eu un consensus pour qu'on termine, parce
que nous avons un caucus, mais, compte tenu que ce monsieur vient de l'Abitibi,
quant à moi, je n'aurai qu'une question. Si les autres membres de la
commission sont prêts à compléter, de façon qu'on
puisse terminer ce mémoire et qu'on permette à ce monsieur de
retourner chez lui, sans le garder ici pour la fin de l'après-midi,
j'offre ma collaboration, même s'il y a eu consensus tout à
l'heure pour qu'on termine immédiatement après la lecture du
mémoire.
Le Président (M. Laplante): Les membres sont maîtres
de leurs travaux, M. le député.
M. Goulet: En tout cas, je fais l'offre à la
commission.
Le Président (M. Laplante): II y a consentement? M. le
ministre.
M. Chevrette: II y a une collaboration.
Le Président (M. Laplante): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Dans un premier temps, je m'en voudrais de ne pas
remercier le Conseil régional de développement de
l'Abitibi-Témiscaminque d'être venu exprimer son point de vue sur
le projet de loi 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Je pense que
le Conseil régional de développement continue, encore là,
d'oeuvrer comme étant un organisme qui se préoccupe de tous les
différents projets de loi qui concernent le développement et
l'aménagement de la région.
Comme premier commentaire, j'aimerais quand même souligner que le
Conseil régional de développement de
l'Abitibi-Témiscaminque, par son "membership" et sa participation,
demeure un interlocuteur valable pour traiter et discuter d'un tel projet,
comme la loi 125 dans le cadre de l'aménagement. Egalement, il est
peut-être bon de signaler aux autres collègues de la commission
que le Conseil régional de développement de
l'Abitibi-Témiscaminque a procédé pour rédiger son
mémoire d'une façon qui m'apparaît épouser les
principes de base de la loi sur l'aménagement, à savoir que cette
loi tienne compte davantage du milieu et des préoccupations du milieu.
Le CRDAT a cru bon d'abord d'organiser un colloque où au-delà
d'une centaine d'intervenants sont venus participer avec
énormément d'intérêt... Pardon?
M. Roy: 150.
M. Gendron: 150... et de dynamisme tout au cours d'une
journée, en présence de M. le ministre, Jacques Léonard,
qu'on remercie d'ailleurs. A la suite de ce colloque, le CRDAT a cru bon
d'être le meneur de jeu pour une consultation régionale au niveau
des principes intervenants. Je pense que c'est déjà mettre en
pratique certains principes que l'on retrouve à l'intérieur de la
loi. En gros, je pense que le mémoire exprime d'abord son accord
général sur la nécessité de se préoccuper de
l'aménagement et sur la plupart des principes que l'on retrouve à
l'intérieur du projet de loi. Bien sûr, il était normal
qu'un tel mémoire soulève certaines interrogations,
soulève certaines inquiétudes. A ma connaissance, elles se
manifestent particulièrement à trois niveaux, à savoir
l'autonomie municipale, la lourdeur administrative et la
prépondérance des milieux urbains.
On mentionne, à un moment donné, que l'autonomie des
municipalités n'est pas menacée, puisque l'aménagement au
niveau du comté n'était assuré par personne dans le
passé et que selon les principes qui guident le projet de loi,
dorénavant, ce sont ces mêmes municipalités qui se
retrouveront au niveau du comté pour penser et concevoir
l'aménagement du territoire.
Pour ce qui est de la lourdeur administrative comme telle, je ne pense
pas que cela puisse apparaître comme un danger imminent, puisque la
décentralisation et la concertation impliquent certaines règles,
certains délais, qui sont peut-être préférables aux
décisions centralisées et des décisions qui sont toujours
prises comme dans le passé à énormément de distance
des milieux de vie. Je pense qu'il est peut-être préférable
de souffrir quelques délais, quelques lenteurs administratives, mais au
moins, avoir l'occasion et la chance d'être consultés.
Pour ce qui est de la prépondérance des milieux urbains,
je pense que c'est important que ce soit signalé dans votre
mémoire, compte tenu de la configuration de
l'Abitibi-Témiscamingue où nous sommes peu nombreux et
dispersés dans un immense territoire. Il n'y a pas beaucoup de villes
à très grande densité de population.
L'Abitibi-Témiscamingue est surtout composée d'une multitude de
petits villages. Le mémoire demande de tenir compte de cette
particularité qui s'appelle: étendue très vaste et faible
densité de population.
J'aurais quelques questions à poser sur le mémoire comme
tel. A la page 14 de votre mémoire, vous mentionnez que les
répondants ont
vite saisi que les discussions sur l'aménagement du territoire
devraient se dérouler dans des conditions acceptables,
c'est-à-dire à partir d'un territoire à échelle
humaine et comprenant un certain nombre de partenaires avec lesquels ils
partagent des caractéristiques socio-économiques communes.
J'aimerais que vous puissiez peut-être nous donner ou nous
indiquer quels seraient, d'après vous, les critères à
retenir pour définir une petite région d'appartenance dans une
région comme la nôtre? Quels seraient, en gros, les
critères qu'il y aurait lieu de ceinturer, de retenir plus
spécifiquement au niveau des questions d'appartenance? (12 h 45)
M. Roy: Je pense que, à ce moment-là, ce à
quoi il faudrait peut-être penser, c'est qu'une ville... Par exemple,
dans le Conseil de comté d'Abitibi à l'heure actuelle, qui
comprend La Sarre, Amos et Val-d'Or, je ne pense pas qu'Amos ait la même
vocation socio-économique que Val-d'Or. C'est dans ce sens qu'on dit
d'essayer de regrouper les villes avec des municipalités rurales
à vocation socio-économique à peu près semblable.
Je pense, par exemple, à Val-d'Or, Malartic, les petits villages
alentour de Val-d'Or ont tous, en fait, une vocation minière et
forestière également. Tandis qu'à Amos, par exemple, c'est
beaucoup plus forestier et agricole, de même qu'à La Sarre.
Rouyn-Noranda est un peu aussi dans le même sens. On retrouve un petit
peu d'agriculture alentour de Rouyn, mais c'est beaucoup plus une vocation
minière qui existe là qu'une vocation agricole.
Si on se transpose au Témiscaminque, à ce
moment-là, il n'y a pas beaucoup de population et on veut signifier
aussi que le Témiscaminque puisse avoir vraiment son entité
propre, parce qu'au Témiscamingue, c'est l'agriculture d'abord et un peu
de foresterie, mais c'est presque uniquement de l'agriculture. Je ne sais pas
si je réponds à la question...
M. Gendron: Oui, mais ça signifierait, en tout cas, que
quand vous parlez d'une division avec ce qu'on peut appeler des territoires
à dimension ou à échelle davantage humaine, ce serait
peut-être tenir compte de ce qu'on discute parfois, je pense, chez nous,
les affinités plus particulières des populations non pas par les
zones de concentration, mais par les vocations de base ou par le type de
vocation économique qui, même à l'intérieur de la
région, peuvent quand même avoir des nuances à faire, de la
diversification du genre que vous mentionnez pour certaines villes comme Amos,
par rapport à des différences qu'on ne retrouve pas au
Témiscamingue. C'est dans ce sens-là que vous parlez à
échelle plus humaine.
M. Roy: Oui, mais je pense qu'en parlant d'une appartenance
socio-économique, on rejoint une appartenance... Il y a quand
même... Cela se fait à l'heure actuelle. Par exemple, il y a des
gens qui vont à Amos, leur lieu d'appartenance, c'est Amos; il y en a
d'autres, c'est Val-d'Or. Cela se fait déjà à l'heure
actuelle. Je pense peut-être qu'en prenant ce qui existe à l'heure
actuelle, on n'a aucun problème et nos divisions seraient faites. Par
exemple, je ne sais pas, mais Lebel-sur-Qué-villon, on le mentionne
là-dedans, et les villes au nord du 49e parallèle veulent faire
partie d'une entité différente et c'est logique aussi, parce que
ce sont des villes à peu près à même vocation
socio-économique et ce sont des villes nouvelles, etc.
M. Gendron: J'aurais peut-être une autre question. Je
connais et vous connaissez toute l'importance pour nous dans la région
des territoires non organisés. On a quand même plusieurs
territoires actuellement qui ne sont pas municipalisés. Est-ce que vous
croyez que la loi 125 sur l'aménagement du territoire pourrait
contribuer à ce que ces territoires non organisés soient mieux
représentés et, également, eux aussi, impliqués
dans l'aménagement de tout le territoire de
l'Abitibi-Témiscamingue?
M. Roy: Je pense je réponds personnellement
que le projet de loi 125 aiderait en tout cas à regrouper ces gens,
à avoir de meilleures structures pour s'organiser et peut-être les
inciterait aussi à aller davantage vers la municipalisation. Je pense
que la municipalisation, c'est souhaitable dans notre région en tout
cas. D'ailleurs, il y a un processus qui s'amorce à l'heure actuelle; de
plus en plus, les petites municipalités qui sont
représentées par des comités de citoyens se forment en
municipalité. Je pense que le projet de loi 125 pourrait aider ces
municipalités à avoir de meilleures structures et à
s'organiser un peu mieux qu'elles s'organisent présentement.
M. Gendron: M. le Président, pour permettre quand
même de rentrer dans le temps, je vais conclure. Merci.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le
député. M. le député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, si notre collègue de
Bellechasse veut poser ses questions maintenant pour nous quitter, je n'y aurai
pas d'objection.
M. Goulet: Vous n'avez pas de questions? M. Goldbloom:
J'en aurais une. M. Goulet: Allez-y.
M. Goldbloom: Je voudrais d'abord remercier M. Roy de la
présentation de ce mémoire. C'est un reflet du milieu, d'un
milieu que je connais assez bien, pour l'avoir visité très
souvent. Ma seule question je ne voudrais pas que vous preniez le fait
que je n'en pose qu'une seule comme un manque d'intérêt dans le
mémoire, c'est plutôt la contrainte imposée par le temps
qui limite nos questions j'aimerais attirer votre attention sur la
page 13 de votre mémoire. Dans le dernier alinéa, à
la deuxième phrase, vous dites: "D'autre part, elle dissipe les craintes
qu'auraient les municipalités, tant urbaines que rurales, de perdre leur
autonomie dans le champ de leur compétence". Quand j'examine le contenu
de cette partie de votre mémoire, je constate que ce dont vous parlez,
c'est d'une appellation; ce n'est pas de la structure de l'organisme qui serait
chargé de la préparation ou de l'application du schéma
d'aménagement. Dans l'alinéa précédent, vous dites
ce qui suit: "L'une de ces appellations semble avoir acquis au niveau de
l'ensemble des municipalités urbaines du Québec une certaine
unanimité, soit "commission régionale d'aménagement",
comme le suggérait la ville d'Amos." Est-ce que je dois bien comprendre
que c'est une question d'ordre psychologique?
M. Roy: Oui, je crois que c'est plus une question d'ordre
psychologique, parce que les municipalités rurales, lorsqu'on dit cela,
s'imaginent que l'appellation même de l'entité pourrait laisser
présager des pertes de pouvoirs. Je pense que c'est plus psychologique
qu'autre chose, mais il reste que c'est, à notre avis, très
important, parce que parfois la psychologie joue sur bien des points. Mais
c'est effectivement ce qu'on veut dire, c'est que les municipalités, par
le nom de ces entités, ont vraiment peur d'être
intégrées dans une structure qui ne leur convienne pas. Exemple,
les municipalités de comté, le conseil de comté, etc. La
preuve, c'est que les municipalités rurales veulent conserver le statu
quo là-dessus, elles veulent conserver l'appellation de conseil de
comté. Les municipalités urbaines voudraient que ça
s'appelle municipalités de comté.
Je pense que ça traduit bien ce qu'elles ressentent.
M. Goldbloom: Je vous remercie de cet éclaircissement. Si
nous avions davantage de temps, j'aimerais vous poser des questions sur les
rapports entre le milieu urbain et le milieu rural, dans la région de
l'Abitibi-Témiscamingue, mais je préfère céder la
parole au député de Bellechasse.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le
député de Bellechasse.
M. Goulet: Très brièvement, moi aussi, M. le
Président. Je voudrais permettre au ministre d'intervenir ou de
conclure.
Au niveau de votre sondage, il y a seulement 12% des
municipalités rurales qui ont participé, comparativement à
tout près de 100% des municipalités urbaines; 97%, je crois.
Est-ce que c'est parce qu'elles ne sont pas organisées pour
participer à de tels sondages?
M. Roy: C'est assez difficile à évaluer, mais,
comme on le précise dans ce mémoire, on pense qu'il y a
différents facteurs qui ont fait que les municipalités rurales
ont répondu en moins grand nombre.
Premièrement, il y a le facteur que ces municipalités ne
possèdent pas toujours les ressources humaines suffisamment
compétentes, compte tenu du délai qu'on leur donnait: trois
semaines, pour répondre à ce questionnaire. Elles ne
possèdent pas toujours les personnes compétentes pour être
capables d'analyser un projet de loi qui est quand même assez
technique.
On attribue cela également au retard dans le courrier, parce
qu'on avait alors de gros problèmes; on en a encore, mais c'est un peu
moins pire. A ce moment, il y avait d'énormes problèmes au niveau
du courrier; des gens recevaient leur courrier trois semaines plus tard ou un
mois, ça nous arrivait chez nous aussi. La preuve de ça,
d'ailleurs, c'est que j'ai remis ce matin, à M. Léonard ainsi
qu'à quelques autres personnes, d'autres questionnaires qu'on a
reçus plus tard; c'est cinq ou six questionnaires provenant de
municipalités rurales qui sont arrivés par la suite. On
présume que si le courrier avait fonctionné d'une façon
adéquate et qu'on avait eu un laps de temps raisonnable, l'ensemble des
gens aurait répondu.
M. Goulet: C'est la faute du fédéral.
M. Roy: Encore là, c'est ce qu'on présume, on ne
pourrait pas affirmer ça d'une façon catégorique.
M. Goulet: Une dernière question, M. le Président.
On vous a dit de façon non équivoque dans ce questionnaire que le
projet de loi sur l'aménagement du territoire devrait s'en tenir
exclusivement à l'aménagement du territoire et vous avez
même souligné que vous aviez peur, des gens vous ont
souligné le fait qu'on avait peur que ce soit le prélude à
un gouvernement régional. Pou-vez-vous expliquer en quelques mots ce qui
se passe? Vous pensez que c'est une façon détournée d'en
venir à un gouvernement régional?
M. Roy: En fait... M. Goulet: Non, non.
M. Roy: Je pense que les gens pensent ça, ils ont
peut-être raison de le penser aussi, parce que si dans ces nouvelles
entités créées, avec des pouvoirs d'aménagement et
avec d'autres pouvoirs X, cela peut être tous les pouvoirs d'un
gouvernement central, cela veut dire ce que cela veut dire, les gens se disent:
En supposant que le référendum passe, que les gens votent oui, tu
te ramasses avec un gouvernement central et d'autres petits gouvernements.
C'est ainsi que je l'interprète.
M. Goulet: On est tellement habitué de voir trois niveaux
de gouvernement que si le référendum passe, ça va en
prendre quand même trois, c'est ce que vous vouliez dire, non?
M. Roy: Je ne dis pas nécessairement que ça en
prendra trois, mais...
M. Goulet: Non, c'est seulement en guise de boutade, M. le
Président.
M. Roy: Je pense que c'est là l'appréhension des
gens.
M. Goulet: M. le Président, je remercie M. Roy et je vous
offre...
Le Président (M. Laplante): Merci. M. le ministre.
M. Léonard: Je remercie M. Roy et je remercie aussi le
Conseil régional de développement de
l'Abitibi-Témiscamingue de s'être donné la peine de
constituer ce mémoire. C'est tout le travail qu'il s'est donné,
il a organisé une journée, il a organisé un questionnaire
et des assemblées pour discuter de la loi 125; je pense que cela a
été un sujet fort discuté dans la région, avec les
efforts que vous y avez mis.
Je voudrais poser une question en ce qui concerne les rapports urbains
et ruraux. Il me semble, d'après le questionnaire, qu'on continue de
maintenir cette distinction en termes d'aménagement entre le milieu
urbain et le milieu rural.
Est-ce que vous croyez qu'il y a moyen d'atténuer cette
distinction? Est-ce que vous croyez que les deux milieux peuvent travailler
ensemble et graduellement s'intégrer et devenir complémentaires
l'un de l'autre, au fur et à mesure qu'on va réfléchir sur
l'aménagement? En d'autres termes, est-ce que vous croyez qu'il y a
tellement de difficulté qu'ils travaillent ensemble à se
renouveler, par rapport à la région, dans
l'Abitibi-Témiscamingue?
M. Roy: Moi, je pense qu'il y a la possibilité de les
faire travailler ensemble, à condition que les deux soient sur un pied
d'égalité, c'est-à-dire qu'ils se parlent d'égal
à égal. J'ai eu l'occasion personnellement de jaser avec
plusieurs représentants de municipalités rurales et c'est ce
qu'ils nous disent: Nous sommes prêts à embarquer là-dedans
à 100%, mais, à la condition de jaser d'égal à
égal et d'être capables de faire valoir nos points de vue autant
que les municipalités urbaines.
M. Léonard: Si je vous comprends, vous pensez qu'à
la table du comté renouvelé, il se maintiendrait ou il ne se
maintiendrait pas une distinction entre le rural et l'urbain?
Indéfiniment?
M. Roy: En fait, c'est là le litige au niveau de la
représentation. Les municipalités rurales désirent un
représentant par municipalité et par ville, tandis que les villes
désirent avoir plus qu'un représentant, compte tenu de leur
population. En fait, c'est là le litige. Si on arrive à faire une
espèce de consensus comme au niveau du mode de représentation, je
pense qu'après cela, il n'y a pas de problème pour faire
travailler les municipalités rurales et urbaines ensemble.
M. Léonard: C'est de partir alors?
M. Roy: C'est de partir, et je pense que c'est cela qui va
être le plus difficile. D'ailleurs, on le mentionne là-dedans,
c'est qu'il va y avoir une période assez lourde. (13 heures)
M. Léonard: Je vous remercie encore une fois de votre
travail et de vous être présentés ici. Bonnes
Pâques!
Le Président (M. Laplante): Au nom des membres de cette
commission, je vous remercie en premier lieu de votre coopération et de
la présentation de votre mémoire. Merci, messieurs.
Les travaux sont ajournés sine die. Cela veut dire que, cet
après-midi, après la période des questions, nous nous
retrouverons, sur l'ordre de l'Assemblée nationale, au même
endroit, vers 16 h 15.
Il reste encore un mémoire. Il reste les universitaires.
M. Roy: M. le Président, je tiens à remercier M. le
ministre et MM. les membres de cette commission de m'avoir
écouté.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. Roy. Les travaux
sont ajournés sine die.
Fin de la séance à 13 h 1
Reprise de la séance à 16 h 55
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, messieurs!
La commission élue permanente des affaires municipales se
réunit cet après-midi pour entendre les mémoires pour
l'étude du projet de loi no 125.
Les membres de cette commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M.
Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe) remplacé par M. Goulet
(Bellechasse); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau), M.
Guay (Taschereau) remplacé par M. Chevrette (Joliette-Montcalm); M.
Mercier (Berthier) remplacé par M. Rancourt (Saint-François); M.
Ouellette (Beauce-Nord), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie)
remplacé par M. Léonard (Laurentides-Labelle).
Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau
(Verchères) remplacé par M. Gendron (Abitibi-Ouest); M. Fontaine
(Nicolet-Yamaska) remplacé par M. Cordeau (Saint-Hyacinthe); M.
Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard
(Laurentides-Labelle) remplacé par M. Tardif (Crémazie); M.
Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), M. Vaugeois
(Trois-Rivières).
Nous étions rendus au groupe d'étudiants de l'Institut
d'urbanisme de l'Université de Montréal,
que j'appelle. S'il vous plaît, veuillez identifier votre groupe,
vous identifier et identifier les personnes qui vous accompagnent. Vous avez un
mémoire qui est assez volumineux. Je vous demanderais, s'il y avait
possibilité, parce que vous avez vingt minutes pour présenter un
mémoire et quarante minutes de questions, d'essayer de faire une
synthèse de votre mémoire dans les vingt minutes qui vont suivre.
Merci.
Groupe d'étudiants de l'Institut d'urbanisme de
l'Université de Montréal
M. Beaudet (Gérard): Je suis Gérard Beaudet,
Georges Ollomo-Mezui, Suzanne Hénault, Alain Morissette, Huguette
Béland m'accompagnent. Je voudrais spécifier qu'on parle en notre
nom à nous et non pas au nom de l'Institut d'urbanisme ou au nom des
étudiants de l'Institut d'urbanisme.
Je voudrais aussi mentionner que notre mémoire s'inscrit dans le
sillage d'une étude du projet de décentralisation proposé
par le gouvernement québécois et qui fait suite au colloque qui
avait été organisé, entre autres, par l'Institut
d'urbanisme au mois de février. On a profité du fait que le
ministre Léonard nous avait invités à présenter des
mémoires pour justement nous présenter ici.
Notre objectif, c'est d'apporter quelques réflexions qui, nous
l'espérons, seront utiles au débat. Il reste aux membres de la
commission de juger de la pertinence de nos remarques ou de nos propositions.
Je pense qu'on peut mentionner ici que notre approche est sensiblement
différente de l'approche de la plupart des participants du fait qu'on
n'est pas impliqués de la même façon et aussi directement,
ce qui entraîne une certaine allure qu'a prise notre mémoire.
Ce qui nous semblait intéressant, à prime abord, c'est que
le projet de loi 125 fait partie d'un ensemble de mesures qui visent à
toucher les multiples aspects de l'aménagement du territoire.
Mentionnons, entre autres, la Loi sur la protection du territoire agricole, la
Loi sur la protection de l'environnement ou les ententes signées entre
le ministère des Affaires culturelles et, entre autres, la
municipalité de Laprairie et de Montréal pour la gestion du
patrimoine immobilier. Aussi, ces diverses mesures contribueront-elles à
rationaliser l'aménagement du territoire, préoccupation qui sera
renforcée par le projet de loi 125. Il serait donc superflu de vouloir
nier le lien unissant ces mesures. D'ailleurs, la proposition d'harmonisation
de la Loi sur la protection du territoire agricole et de la loi sur
l'aménagement du territoire déposée à
l'Assemblée nationale le 21 décembre 1978 est garante de cette
volonté.
Il serait intéressant de mentionner... Ne serait-ce que par le
fait de cette volonté politique de faire de l'aménagement du
territoire une préoccupation majeure, il conviendrait de
reconnaître la responsabilité de l'actuel gouvernement face aux
citoyens. Cette initiative est d'autant plus méritoire qu'elle s'inscrit
dans une optique de décentralisation. Toutefois, seule une analyse des
réalisations législatives permet de déceler si cette
volonté se concrétise ou demeure au niveau des intentions. Aussi,
est-ce ce que nous avons voulu évaluer par l'étude du projet de
loi 125.
Le cheminement est composé de quatre étapes: La
première, on a rappelé brièvement le contexte de la
décentralisation par rapport au phénomène de la
centralisation qu'ont connu la plupart des pays occidentaux, sinon la
majorité des pays, à un moment donné, et la
réaction qui est justement une espèce de volonté de
redescendre les pouvoirs au niveau des régions ou des populations,
c'est-à-dire vers la base.
On va laisser tomber la série des principes et des objectifs de
la décentralisation comme telle, sauf que ce qu'il nous
intéressait de mentionner, c'était la division qu'avait faite le
gouvernement de sa proposition de la décentralisation en six points
particuliers qui ont été ou qui seront le sujet de fascicules
présentés pour la discussion dont la fiscalité, la
démocratie, l'assise territoriale, les pouvoirs, l'organisation
politique et, finalement, l'aménagement et l'urbanisme, auxquels se
rattache justement le projet de loi 125. (17 heures)
Pour ce qui est de l'aménagement et de l'urbanisme, on peut
mentionner le fait qu'à la différence des dimensions
énoncées précédemment, l'aménagement et
l'urbanisme ne sont pas considérés comme une mesure additionnelle
favorisant une éventuelle décentralisation. Comme en fait foi cet
extrait tiré du numéro d'octobre 1978 de la revue
Municipalité, l'aménagement est considéré en tant
que fonction, cette dernière devant être prioritairement
redistribuée. En effet, on peut y lire: "Le ministre convenant que la
décentralisation forme un dossier complexe a annoncé que, pour
l'instant, on en a extrait certaines fonctions telles l'éducation et la
santé, présentement assumées par l'Etat, et qu'on a
plutôt décidé d'aborder son étude en accordant la
priorité à l'aménagement."
A priori, ceci nous apparaît être une réduction qui
aura des conséquences déplorables sur l'orientation même de
la loi 125. Dans l'entrée en matière de notre mémoire, on
avait souligné justement que, dû aux différents textes de
présentation du projet de loi et de la décentralisation, on
pouvait s'attendre que ce projet de loi aille beaucoup plus loin que les
mesures précédemment annoncées qui ont toujours
été remisées sur les tablettes pour différentes
raisons.
La section 3 de notre mémoire est une analyse qui nous a permis
une certaine confirmation d'une impression que le projet de loi n'allait
peut-être pas aussi loin qu'on pouvait s'y attendre à la suite de
la présentation, entre autres, des fascicules ou des textes qui sont
inclus notamment dans les numéros de la revue Municipalité.
On peut remarquer que le projet de loi s'inscrit naturellement dans tout
ce contexte et, ce qui est important à souligner, c'est que, pour nous,
on vise davantage à considérer le projet de loi par rapport
à la décentralisation que par rapport à son contenu, bien
qu'on ait apporté des commentaires
sur beaucoup d'aspects du contenu qui nous semblaient des
déficiences qui nuiraient, entre autres, à l'application du
projet de loi comme tel.
Dans un premier temps, je vais apporter les remarques qu'on a
pensé présenter justement sur ces points du contenu qui nous
semblaient déficients ou, dans d'autres cas, ce sont des aspects qui
n'étaient pas suffisamment clairs, à notre avis.
Pour ce faire, on a pris les différents intervenants, dans une
première étape et au premier stade, on traite de l'Etat. Ce qui
nous semblait intéressant, c'est qu'aux paragraphes a) et b) de
l'article 11, on stipulait que le gouvernement doit fournir au comté un
document synthèse décrivant les grandes orientations qu'il entend
poursuivre. Ce document devrait permettre au comté de tenir compte de
ces orientations dans la réalisation de son schéma. Toutefois, il
nous semble qu'il y a déjà une première lacune à
cet endroit. C'est l'absence de délai, d'autant plus qu'on connaît
la lourdeur de l'appareil bureaucratique et de certains ministères, qui
sont plus gros que d'autres, à apporter l'information et on croyait que
sans spécifier les délais, c'est le comté qui serait
pénalisé pour les difficultés d'aller chercher
l'information.
Ce qui nous semblait un point encore plus important, c'est que le
ministre au colloque a soulevé l'hypothèse qu'il serait
très difficile, au niveau du gouvernement, de faire la synthèse
des actions entreprises par les différents ministères. On se
demandait si justement ce ne serait pas une charge beaucoup trop lourde que
d'imposer cette synthèse au niveau du comté d'autant plus que ce
matin, le ministre a souligné le fait que les documents de
synthèse ne pourraient pas être très précis, dans un
premier temps, et ne pourraient pas être reliés entre eux en ce
qui concerne les différents ministères. On se demandait justement
jusqu'à quel point cela va permettre au comté de vraiment savoir
où il s'en va.
Une autre chose aussi, ce n'est pas spécifié dans le
projet de loi que les comtés doivent essayer de se concerter à un
niveau suprarégional. Naturellement, on pourra toujours nous dire qu'il
n'y a rien qui les empêche de le faire mais on se demande encore
là, justement, avec le traitement qui va être imposé face
aux documents du gouvernement, jusqu'à quel point cette synthèse
va pouvoir être réalisable au niveau du comté et va pouvoir
amener une concertation suprarégionale.
A l'article 21, il semble y avoir un certain vice de procédure
car, étant donné toutes les périodes de temps
nécessaires à la réalisation du schéma
d'aménagement et la mise en place des structures du comté, de la
délimitation des territoires, on peut facilement penser que la
première ébauche du premier schéma ne sera pas
réalisée avant deux ans peut-être. Etant donné que
le gouvernement donne ces documents et se retire en quelque sorte du jeu par la
suite et laisse à la région le soin de traiter ces documents, on
peut craindre qu'au bout de deux ans, il y ait énormément de
choses qui aient changé au niveau du gouvernement, ne serait-ce que
parce qu'une élection aurait eu lieu entre-temps et que tout aurait
été chambardé. Encore là, le comté serait
drôlement pénalisé parce que les ministères qui ont
prévu une série d'actions pourraient changer d'idée du
jour au lendemain sans qu'obligation leur soit faite d'en subir les
conséquences.
Il y avait l'article 127 qui était très intéressant
parce que le gouvernement se lie. Encore là, les articles 131 et 135
permettent au gouvernement de se délier de ses obligations
stipulées à l'article 127. Les différentes personnes qui
sont venues nous rencontrer, entre autres au colloque et à l'Institut
d'urbanisme, nous ont expliqué que, politiquement, il y a une certaine
rentabilité à respecter.
On ne peut pas se mettre à dos des régions en changeant
continuellement ses priorités ou en se déliant pour des
intérêts nationaux, mais on peut se demander dans quelle mesure,
sur une période assez longue, il ne sera pas possible, sans trop
amoindrir la rentabilité politique du geste, de changer et de
décréter des intérêts nationaux, pour de multiples
raisons, parce qu'un intérêt national, c'est très vaste.
Pour l'instant, ça peut être l'Hydro-Québec, mais, dans dix
ou quinze ans, je pense qu'on pourrait avoir l'exemple de l'énergie
nucléaire, et on pourrait éventuellement décréter
ça d'intérêt national et le poursuivre en passant
par-dessus les régions assez facilement.
Ensuite, il y a la question de l'intervention de l'Etat, qui se fait
ponctuellement en de nombreuses étapes et non pas de façon
continue. On croit que ça peut alourdir énormément le
processus et que ça peut nuire de façon assez importante à
la réalisation du premier schéma entre autres. D'ailleurs, ce qui
découle de l'analyse de ces divers points, c'est qu'on pourrait
très bien concevoir qu'un gouvernement puisse très bien devenir,
dans le respect intégral de la loi, l'unique artisan de
l'aménagement.
Au niveau du conseil de comté, il y a la question des
délais et des coûts qui nous semble importante, mais, dans la
mesure où on accepte le principe de participation et de consultation des
citoyens, je pense qu'on peut difficilement éviter ces coûts.
Comme le ministre nous l'a souligné, au colloque qui s'est tenu en
février, le coût de la non-planification est de beaucoup
supérieur au coût de la planification, on doit donc accepter les
coûts qui découlent d'une volonté de participation.
Par contre, il y a le problème, au niveau des prévisions
des comtés et des municipalités, de l'actualisation des
coûts, qui n'est pas mentionnée dans le texte de loi. On pourrait
se demander jusqu'à quel point on ne pourrait pas, face à la
population, jouer avec le fait que, dans cinq ans, si on ne tient pas compte de
l'actualisation des coûts, on pourrait facilement doubler le montant d'un
projet, sans être obligé de le mentionner à la population,
parce qu'il n'y a rien, dans le texte de loi, qui stipule qu'on doive en tenir
compte.
Il y a aussi le niveau de l'information. On se demandait la pertinence
d'envoyer des résumés surtout au niveau du schéma
d'aménagé-
ment à chaque citoyen. On se demandait si ce ne serait pas
plus réaliste d'essayer d'impliquer entre autres les media
d'information, pour qu'on transmette ces schémas et qu'on les explique
en profondeur. On se demandait si ce ne serait pas mieux de faire parvenir des
copies intégrales du schéma aux organismes qui s'impliquent, qui
sont intéressés à apporter des points de vue sur les
schémas, au lieu d'envoyer un résumé, parce qu'on sait
jusqu'à quel point ça peut être compliqué de
comprendre un schéma d'aménagement. Alors on se demande
jusqu'à quel point un résumé du schéma ne serait
pas tellement dilué qu'il y aurait très peu
d'intérêt pour un citoyen de le consulter et d'essayer de voir ce
qui en est au niveau d'une région.
Je pense qu'on s'attendrait aussi à une meilleure distinction
entre les termes concertation, conciliation et conformité. Il me semble
qu'on trimbale ces trois termes continuellement, tout le long du projet de loi,
sans vraiment spécifier les nuances de ces termes qui peuvent
être, à notre avis, drôlement importantes. Quand on s'en va
au niveau d'une assemblée politique et qu'on informe la population,
qu'on demande son avis, et qu'on n'est pas du tout obligé de tenir
compte de ce que la population apporte comme point de vue, il nous semble que
c'est une participation qui est réduite à un niveau de
consultation. Il me semble qu'on devrait essayer de préciser
jusqu'à quel point on veut une participation réelle des
citoyens.
Il y avait aussi un point qui nous semblait important; c'est qu'au
niveau des règlements de contrôle intérimaire qui sont
proposés au moment où un comté ou une municipalité
prévoit établir un schéma, on a un certain droit d'appel
qu'on peut loger auprès du ministre, justement pour combattre ce qui est
avancé. On se demandait jusqu'à quel point on ne pourrait pas
étendre ce droit d'appel à l'ensemble des décisions
unilatérales qui sont prises. On jugeait que le droit de veto
proposé, entre autres hier et aujourd'hui, est beaucoup trop restrictif
et beaucoup trop dangereux face à une concertation; on
préférait un droit d'appel qui pourrait être logé
selon certains mécanismes, qui empêcherait qu'on passe son temps
à faire des pèlerinages pour des droits d'appels, mais qui serait
beaucoup plus malléable qu'un droit de veto.
Il y avait aussi, aux articles 83 et 97, une contradiction assez
importante puisqu'à l'article 83, on lit: "La municipalité est
liée par les propositions qu'elle apporte de réalisations
futures." A l'article 97, on dit qu'il n'y a rien qui l'oblige à
respecter ce qu'elle avance. On se demandait pourquoi cette contradiction entre
ces deux articles. A l'article 91, on se demande quelle est la pertinence de
donner à une municipalité la possibilité d'exclure
certaines parties de son territoire, au moment de la consultation populaire. On
se demandait si cela ne serait pas entraîner une certaine forme de
ségrégation, éventuellement.
En ce qui concerne le rôle du ministre, on trouvait qu'il
était peut-être beaucoup trop important, notamment dans la
possibilité qu'il avait de fournir de l'argent aux régions en vue
de la réalisation d'un schéma d'aménagement. On se
demandait pourquoi on laissait cela à la discrétion du ministre,
bien que le ministre l'a lui-même affirmé ce matin, il y aurait
des mécanismes pour que chaque région y ait accès. On se
demande pourquoi, dans le texte de loi, dans ce cas-là, on
prévoit que le ministre peut accepter ou refuser un montant à une
région qui désire réaliser un schéma.
En ce qui concerne les ministères et les sociétés
d'Etat, on déplorait le fait qu'ils ne soient pas liés à
leur premier document synthèse et qu'ils ne soient pas liés au
schéma d'aménagement comme tel. On se demandait, à ce
moment-là, si ce ne serait pas valable, là aussi, d'introduire un
droit d'appel pour que les régions puissent se prémunir contre
une intervention unilatérale d'un ministère ou d'une
société d'Etat.
En ce qui concerne la commission nationale d'aménagement, il y a
le problème de la nomination des cinq membres, puisque dans l'article
175, il nous semble qu'on ne fait mention que de quatre membres, le
président et le vice-président nommés par le gouvernement,
et deux autres nommés après consultation des groupements les plus
représentatifs des municipalités. On a perdu le cinquième
membre. On se demande si c'est une mauvaise lecture ou... (17 h 15)
Quand la commission nationale de l'aménagement doit se prononcer
sur la conformité, on a soulevé le fait, au colloque, de juger de
la conformité d'objectifs. C'est très difficile, beaucoup plus
que de juger de la conformité entre deux schémas. On croit que de
juger de la conformité d'objectifs, cela suppose nécessairement
un jugement de valeur qu'on voulait éloigner de cette commission.
En ce qui a trait aux instruments d'application qui sont les plans
d'urbanisme, schémas d'aménagement, etc., on déplore
notamment le fait que le facteur de recherche n'est pas du tout
mentionné dans l'article de loi. Ce qu'on a pu constater, face au
schéma d'aménagement et au plan d'urbanisme, c'est que souvent,
cela concrétise des situations déjà existantes, mais cela
a beaucoup de difficulté à orienter l'aménagement. On
pourrait toujours dire que c'est par manque de volonté politique de les
appliquer, mais il y a certaines analyses, entre autres celle de Mme Charles de
l'Institut d'urbanisme, qui montrent que ce sont peut-être les
instruments comme tels qui ne sont pas tout à fait pertinents. On
déplore justement le fait qu'il n'y ait pas vraiment de volonté
de chercher de nouveaux instruments pour orienter l'aménagement.
Par contre, on trouve que la subdivision du contenu des schémas
et plans obligatoire et optionnelle constitue une stratégie des plus
intéressantes puisqu'on facilite l'accès de toutes les instances
locales à ces instruments.
Malgré toutes ces lacunes-là, il me semble qu'il y a un
problème qui réside justement en amont du projet de loi
lui-même, c'est au moment
où on a considéré l'aménagement comme une
fonction et, par le biais du projet de loi, on a eu tendance à la
réduire aux instruments d'aménagement et d'urbanisme et au
processus d'élaboration des schémas et des plans. Il me semble
que c'est une réduction qui est drôlement importante, ce qui fait
notamment que, selon nous, le titre du projet de loi est un peu gonflé
par rapport au projet de loi, au même titre que la loi 90 pourrait
difficilement être une loi de l'agriculture. De fait, on l'a
appelée une Loi sur la protection du territoire agricole. Il me semble
que la loi n'est pas vraiment une loi de l'aménagement au sens large,
mais c'est une loi des moyens et des instruments en vue de rationaliser
l'aménagement. Il me semble que le titre est particulièrement
faux par rapport au contenu du projet de loi.
Cela nous a amenés justement à remonter au niveau de la
décentralisation et à considérer ce qu'on avait fait en
considérant l'aménagement. Il y a une citation de Jacques Grand'
Maison qui résume assez bien notre point de vue, c'est que "le moyen a
mangé les objectifs".
On a spécifié dans les différents textes de
présentation que l'aménagement et le développement
étaient des choses nécessairement liées sans toutefois
chercher les liens qui devaient être établis entre
"aménagement" et "développement". Je pense que les
représentants des Iles-de-la-Madeleine, ce matin, ont très bien
démontré que, si une région a une volonté ferme
d'orienter son aménagement, elle doit nécessairement tenir compte
du développement. Ce qu'on se demande, c'est jusqu'à quel point
ce sera possible dans l'ensemble des régions du Québec.
On constate, dans les régions périphériques
où on voit très peu d'intérêt du secteur
privé dans notre économie, où on les laisse un peu
à l'abandon, ces régions-là doivent se prendre en main et
se battre à peu près contre tout le monde pour contrôler
leur développement. A ce moment-là, pour orienter
l'aménagement, elles passent nécessairement par le
développement.
Par contre, les régions périphériques aux
communautés urbaines risquent d'avoir de gros problèmes, puisque
le développement n'est pas entre les mains des mêmes instances que
l'aménagement. A ce moment-là, on réalise que les
municipalités et les régions ont conservé leurs pouvoirs
en matière d'aménagement, mais on se demande jusqu'à quel
point ces pouvoirs permettent effectivement d'orienter l'aménagement,
parce que, dans le contexte actuel, l'aménagement est beaucoup plus une
spécialisation des équipements propices et nécessaires au
développement, lequel développement est partiellement
orienté par l'Etat, mais surtout orienté par le secteur
privé.
On se demande jusqu'à quel point il ne serait pas propice de
relativiser le projet de loi par rapport à l'aménagement dans son
sens le plus large et d'introduire une structure de concertation et de
définition des politiques de développement, de la même
façon qu'on essaie d'établir une structure de concertation des
politiques d'aménagement pour justement permettre aux régions de
prendre les deux aspects de la réalité en main, et non pas, par
le biais de l'aménagement, d'être à la merci du
développement, donc à agir sur une spécialisation qui ne
veut pas dire grand-chose.
Ce qui nous fait vouloir qu'on installe une structure de concertation,
c'est qu'on considère dans le projet de loi que les organismes
régionaux tels les CRD, sont particulièrement ignorés dans
le projet de loi. On peut toujours les considérer, on peut toujours leur
faire appel au moment de la réalisation des schémas, mais on
pense que, dans les régions où l'économie est
particulièrement forte, notamment autour de Montréal, il va
être très difficile d'agir sur le développement par le
biais de ces organismes qui ont surtout des pouvoirs dans les régions
périphériques où le secteur privé à une
échelle plutôt nationale est particulièrement absent.
Le Président (M. Laplante): C'est votre conclusion,
monsieur?
M. Beaudet: Oui.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le
ministre.
M. Léonard: Je voudrais vous remercier, au départ,
d'avoir étudié ce projet de loi. Vous vous êtes
donné la peine de rédiger un mémoire et je pense
qu'il est substantiel et de le résumer. Je vous félicite
pour la motivation que vous manifestez envers l'aménagement et
l'urbanisme, parce que c'est un débat public, à l'heure actuelle,
qui est important pour le Québec, pour vous aussi, et surtout pour les
jeunes, parce que, quand on parle de l'aménagement, on traite du long
terme, finalement, du moyen et du long terme. Je vous sais gré aussi de
l'avoir inscrit dans l'ensemble des politiques gouvernementales ou des
politiques que nous étudions, même si elles ne sont pas
définies comme telles encore. Il reste que, pour nous, la
décentralisation est une perspective que nous envisageons. Le projet de
loi s'inscrit là-dedans.
A la lecture de votre mémoire, il semble que vous en arriviez
à la conclusion que, parce qu'il s'attache uniquement à
l'aménagement, le projet de loi 125 en arrive presque à une
contradiction avec les projets de politique de décentralisation du
gouvernement. Cette impression, selon vous, à ce que j'en ai compris,
nous semble confirmée par le fait que le ministre s'accorde trop de
pouvoirs d'intervention contre lesquels les municipalités et les
comtés n'ont que peu de recours. D'autre part, selon les distinctions
que vous faites entre "aménagement" et "développement", les
comtés ne seraient responsables que de l'élément spatial
de l'aménagement, puisqu'ils ne sont d'aucune façon maîtres
de leur développement, ce qui irait donc à l'encontre de
l'idée de décentralisation.
J'aimerais donc revenir sur quelques principes là-dessus et
quelques points importants de la
loi pour éclaircir les malentendus et resituer, à mon
avis, la loi dans un contexte plus positif.
A la page 20 de votre mémoire, vous dites qu'un gouvernement
pourrait très bien devenir, dans le respect intégral de la loi,
l'unique artisan de l'aménagement. Cela me paraît quand même
fort comme affirmation. A la lumière d'un rappel historique, je voudrais
vous montrer que la loi 125 ne se situe pas du tout dans cet ordre
d'idées. L'avant-projet de loi 72, qui a été
présenté à l'époque par le ministre Tessier,
à la suite du rapport de la Commission provinciale d'urbanisme en 1968,
repose sur les points suivants: Le premier point, c'est que l'Etat
établit un plan de développement social, économique et
culturel affectant l'ensemble de son territoire; deuxième point, l'Etat
prépare ensuite des plans régionaux d'aménagement pour
chacune des régions du Québec; troisième point, l'Etat
prépare un règlement de lotissement applicable à toutes
les municipalités du Québec. Il y a une petite différence
entre les deux lois.
Il s'agissait, à ce moment-là, d'une approche qu'on
pourrait qualifier de centralisatrice, je pense, pas mal plus que celle qu'il y
a dans le projet de loi no 125. Là-dessus, il me semble que les
approches sont vraiment... On pourrait les comparer et faire un bon
parallèle et ce serait, sur le plan de la décentralisation,
à l'avantage du projet de loi no 125.
Plus tard, il y a eu le projet de loi no 12, qui a été
présenté par M. Goldbloom en 1976 et qui prévoyait que le
gouvernement pouvait réunir dans une agglomération toutes les
municipalités urbaines, aux fins de préparer un schéma
d'aménagement. Chaque municipalité agglomérée
devait ensuite, obligatoirement, préparer un plan directeur, un
règlement de zonage et de lotissement et le Québec se trouvait,
à ce moment-là aussi, divisé en deux. Il y avait un
Québec urbain, un Québec rural. Remarquez que, sur le plan... Il
y avait une obligation d'en arriver à un plan d'urbanisme et donc, je
pense qu'il y avait une volonté de doter les municipalités de
plans d'urbanisme, mais, en même temps, on ne touchait pas au
Québec rural. Je pense que c'est une autre approche qu'on peut discuter.
De toute façon, ça n'a pas été plus loin.
Mais, pour ma part, la réalisation de la décentralisation
peut difficilement découler d'un projet de loi. Ce n'est pas dans un
projet de loi qu'on va trouver la décentralisation. Elle va plutôt
être l'objet d'un long processus entraînant un changement dans les
mentalités et dans les habitudes et c'est pourquoi, dans cette
perspective, le gouvernement s'est limité d'abord au domaine de
l'aménagement. Selon le projet de loi no 125, les municipalités
ont ainsi la possibilité de se regrouper en régions
d'appartenance et de s'habituer à fonctionner ensemble, rural et urbain
réunis, ce qui me paraît bien important.
Il apparaît donc clairement, à mon avis, que
l'aménagement sera basé sur la recherche de consensus entre les
divers intervenants, entre les trois paliers aussi de décisions
politiques. Dans notre système, les règles du jeu
privilégient les initiatives du secteur privé. Les pouvoirs
publics doivent cependant pouvoir orienter les politiques de
développement et, je le pense aussi, donner des orientations à
l'aménagement. Vous admettez d'ailleurs, à la page 19 de votre
mémoire, ce rôle important de l'Etat.
L'organisation du territoire et la rationalisation des actions vont
s'élaborer et se gérer sur la base des régions
d'appartenance par la collaboration de trois paliers de gouvernement; au niveau
du schéma, vous les retrouvez inscrites dans ce schéma.
Le gouvernement devra donc, se plier au régime de
négociation institutionnelle qui est indiqué dans la loi, ce qui
n'existe pas du tout à l'heure actuelle, ce qui n'était pas, en
tout cas, dans le premier projet de loi de 1972 où, vraiment,
c'était l'inverse; c'était le plan national, le plan
régional et les règlements municipaux. Je pense qu'on a fait un
grand bout de chemin depuis ce temps-là.
Ce qu'il faut considérer et qui est très important, je
pense, c'est que l'Etat québécois et ses agents, ses mandataires
ne pourront plus procéder unilatéralement. Ils devront faire
connaître leurs intentions aux comtés et aux municipalités;
c'est le sens de l'article 11. Ils devront fournir leurs documents de
planification et de programmation, c'est le sens de l'article 21. Même si
ces documents de synthèse, au départ, ne sont pas précis,
il reste que c'est quand même une nouveauté que de demander au
gouvernement de produire des documents synthèses. Ils vont les
préciser, par la suite. Mais c'est une obligation que se fait le
gouvernement par rapport au schéma d'aménagement, à
l'opération d'aménagement d'un comté. Cela me paraît
bien important. Il met ses cartes sur la table.
Je pense que c'est vrai que ce sera difficile pour le gouvernement de
faire ça, mais il y a aussi un mérite à le faire. Lorsque
le schéma est adopté par le comté, il lie le gouvernement
et ses mandataires et, lorsqu'il est accepté aussi par le ministre,
quant aux orientations du gouvernement, il lie le gouvernement et ses
mandataires. Si le gouvernement se trouve dans l'obligation d'intervenir
après cette approbation, il doit d'abord en demander avis au
comté et faire intervenir la notion de zone d'intervention
spéciale. (17 h 30)
Encore là, on se trouve presque dans le régime particulier
alors qu'un régime général est que le gouvernement fait
connaître ses intentions, dépose ses documents de planification.
Si, entretemps, il doit quand même intervenir, il peut le faire
d'après les articles 128 et suivants ou la zone d'intervention
spéciale. C'est quand même limité, cela devient le
régime particulier.
A chaque décision qui concerne le territoire du comté, le
gouvernement doit avertir le conseil de comté, négocier avec lui,
justifier son action, ce qui ne se produisait pas du tout jusqu'à
maintenant. C'est une amélioration sur la situation actuelle.
De plus, les municipalités et les citoyens participent aux
processus de décision par les multiples modalités de consultation
qu'il y a dans la loi; donc, les intervenants au niveau de la population
viennent s'exprimer aussi et vont s'exprimer aussi sur les orientations du
document synthèse proposé par le gouvernement qui va se retrouver
au niveau de la proposition préliminaire d'aménagement. Il y a
quand même là une grande ouverture sur ce plan.
L'Etat entend donc astreindre ses organismes et ses agents à des
règles plus strictes d'intervention, de consultation et de
coopération avec les instances décentralisées. Il me
semble que c'est une conclusion qu'on peut tirer à la lecture du projet
de loi. Evidemment, c'est rédigé en termes juridiques et peut
être que cela n'apparaît pas dans le cadre même du projet de
loi. Il reste aussi que derrière les articulations du projet de loi, il
y a tout un processus de négociation qui se produit. Lorsqu'il y a un
débat entre le comté et un ministre qui veut réaliser un
projet, il va se transporter sur la place publique. Cela va donc devenir un
débat politique. A ce moment-là, ce ne sont pas des choses qu'on
inscrit dans une loi, mais il reste qu'à l'intérieur des
délais, le débat va devenir politique et chacun aura à
défendre son dossier.
Une dernière précision aussi en ce qui concerne la
Commission nationale d'aménagement. Je pense qu'il y a une petite erreur
d'appréciation à rectifier; à la page 25 de votre
mémoire, vous dites qu'à part les quatre membres nommés
par le gouvernement, on ne fait pas mention du cinquième. L'article 175
dit bien que les cinq membres sont nommés par le gouvernement et que
deux d'entre eux le seront après consultation avec les
municipalités et les comtés.
La commission a un rôle de gardien neutre du bon fonctionnement de
la loi et des relations entre les diverses instances de gouvernement; c'est un
registraire. Mais, en plus, elle peut être appelée à donner
des avis qui sont les avis de conformité aux objectifs d'un
schéma d'aménagement et des plans d'urbanisme d'une
municipalité ou encore d'une intervention envisagée par le
gouvernement. La commission ne peut cependant pas se prononcer sur
l'opportunité ou les motifs d'un geste d'aménagement. Comme vous
le suggérez, cela donne un peu l'impression que c'est cela que la
commission fait. Non, la commission n'a pas de rôle décisionnel.
Elle ne peut pas juger de l'opportunité d'un geste. Tout ce qu'elle a
à faire, c'est de se prononcer sur la conformité des documents
d'aménagement ou des gestes d'aménagement, mais une
conformité de type technique.
Quant au droit d'appel dans ces conditions, il me semble qu'on n'exerce
pas de droit d'appel vis-à-vis d'une commission comme celle-là,
parce que toutes les décisions, finalement, vont se prendre au niveau
politique; on change de palier politique.
C'est encore aussi à l'Etat que revient l'arbitrage de la
décision finale en cas de divergences aussi bien entre les instances
décentralisées entre elles et les agents du gouvernement. L'Etat
va donc continuer à assumer ses responsabilités et je pense que
tout le monde va reconnaître qu'il faut qu'elle le fasse.
J'aurais peut-être une ou deux questions à poser en
définitive. Vous faites souvent référence aux notions
d'aménagement et de développement. Est-ce que vous pourriez me
préciser, selon vous, comment vous situer ces termes l'un par rapport
à l'autre entre aménagement et développement? Par exemple,
est-ce que, selon vous, un aménagement mal planifié peut
hypothéquer les chances de développement?
M. Beaudet: Je pense que c'est difficile de répondre
exhaustivement à cette question dans le contexte actuel sauf que je
pense que ce qu'on peut admettre, c'est que dans le système dans lequel
on vit, l'aménagement est beaucoup plus une suite des décisions
de développement. On peut difficilement orienter le développement
par un aménagement actuellement.
Je pense qu'on avait une image ça vaut ce que ça
vaut mais pour nous, l'aménagement, dans le contexte actuel,
c'est un peu une remorque qui est attachée à une voiture et la
voiture était, en quelque sorte, le développement. A ce
moment-là, il nous semblait que même si on donnait toute la
latitude aux régions de se promener en arrière dans la remorque,
il restait que la remorque devait suivre l'automobile et on voyait la
pertinence d'asseoir les régions au moins sur la banquette
arrière de l'automobile, plutôt que de les laisser dans la
remorque. Il me semblait que c'était une image qui montrait assez bien
le contexte actuel.
Naturellement, on admet que le secteur privé a une importance
primordiale et qu'on peut difficilement orienter tout à fait le
développement du secteur privé, mais on sait que le gouvernement
tente d'inciter le secteur privé dans certaines directions et on croyait
que les régions pourraient se prononcer beaucoup plus sur les politiques
nationales de développement qu'elles ne le font actuellement. On sait
que les programmes OSE sont là pour aider le développement, mais
les politiques nationales sont déterminées au niveau du
gouvernement, et si notre image correspond un peu à la
réalité, la remorque doit suivre; même si on agrandit un
peu la remorque et on se promène dedans, c'est quand même assez
limité.
M. Léonard: Est-ce que, selon vous, l'aménagement,
c'est spacial?
M. Beaudet: Pour nous, dans le contexte, d'après la loi,
l'aménagement se réduit à une spacialisation de
l'équipement, parce que, pour nous, la loi n'est pas une loi de
l'aménagement au sens large, mais une loi de schéma
d'aménagement, donc de spacialisation d'équipement au niveau
d'une région ou au niveau municipal. Il y a une différence entre
l'aménagement, au sens large, et l'aménagement découlant
du contenu de la loi.
M. Léonard: Quand on inscrit, en premier lieu, dans les
schémas d'aménagement les orientations générales
d'aménagement, il me semble que ça traduit les perspectives de
développement.
M. Beaudet: Cela les traduit, ça les spécialise,
mais ça les oriente difficilement. Une région pourrait
difficilement, par des choix d'aménagement, orienter les politiques
nationales d'aménagement, je pense.
M. Léonard: Dans la mesure où l'aménagement
est l'organisation du territoire, il me semble que ça doit traduire
justement les perspectives de développement.
M. Beaudet: Cela les traduit, mais ça ne les oriente pas.
Je pense qu'on a l'exemple des Iles-de-la-Madeleine et du comté de
Matapédia, où on nous a dit que ces régions ont
été conscientes que pour pouvoir réaliser un schéma
d'aménagement qui avait une chance d'être effectif et non pas de
rester sur les tablettes, on a été obligé de repousser
l'étape de réalisation d'un schéma d'aménagement et
de commencer par essayer d'organiser le développement, dans un premier
temps, pour les mettre en relation. C'est ce qui se fait dans les
régions périphériques, justement parce que ces
régions sont négligées au niveau du développement.
Mais on se demande, par contre, jusqu'à quel point dans les
régions, notamment les régions autour de Montréal, on va
pouvoir agir sur ces développements et sur l'aménagement pour que
les deux fonctionnent. Jusqu'à quel point on ne sera pas à la
merci du développement tel que décrété par le
secteur privé et incité vers certaines orientations par
l'Etat.
M. Léonard: Est-ce qu'on peut considérer que le
développement résulte de l'action conjuguée de plusieurs
agents, de multiples agents comme les grandes entreprises, les petits
entrepreneurs privés, l'Etat, les sociétés d'Etat, les
municipalités, etc.? En termes de développement, il y a toutes
sortes de gestes qu'ils posent qui ont une grande connotation de
développement. Alors que l'aménagement, lui, va venir
préciser des règles et des modalités qui doivent suivre
les différentes interventions institutionnelles ou privées et qui
permettent d'inscrire, d'une façon cohérente, sur le territoire
le point de chute des activités de développement, et physiquement
aussi. Il me semble que quand on parle d'aménagement, on parle aussi de
territoire. Là, il me semble qu'il faut absolument parler de
spacialisation un de ces jours, si on parle d'aménagement.
M. Beaudet: Oui, mais il nous semble que c'est limité de
considérer que la décentralisation peut être satisfaisante
si des régions peuvent localiser les retombées du
développement.
M. Léonard: Oui, mais là je parle
d'aménagement et non de décentralisation. Je pense que quand
même...
M. Beaudet: II reste que la décentralisation, pour
être effective, devrait inclure le développement, sinon dans les
régions, on risque que la manoeuvre soit très étroite,
puisqu'on ne peut pas orienter le développement par
l'aménagement.
M. Léonard: Je suis d'accord avec vous, la
décentralisation, c'est beaucoup plus vaste.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, d'abord, j'aimerais
féliciter le groupe de travail pour la qualité du mémoire
qui est présenté à la commission. C'est assez significatif
de constater qu'une des conclusions à laquelle votre groupe de travail
en arrive touche de très près les appréhensions qui sont
formulées par plusieurs connaisseurs en la matière et qui sont
résumées dans un article signé Jean-Pierre Bonhomme, dans
le journal La Presse de ce matin, et dont vous avez peut-être pris
connaissance.
Vous dites, à la page 40, que vous croyez que "l'actuel projet de
loi a sa place à la condition qu'il devienne une composante d'une
législation plus vaste de développement". Vous me permettrez de
citer l'article de M. Bonhomme et vous pourrez ensuite me dire dans quelle
mesure vous êtes d'accord avec ce qu'il y énonce.
J'insiste tout de suite, M. le Président, pour dire que je ne
fais pas miennes ces observations, je les cite pour les besoins de la
discussion publique que le ministre souhaite. Jean-Pierre Bonhomme, ça
ne vous impressionne pas?
Une Voix: C'est un bon petit homme. M. Gratton: Bon!
M. Chevrette: C'est parce que je veux vous suivre, mon cher, ne
partez pas pour la gloire. Il reste...
M. Gratton: Laissez-moi finir, je commence. M. Léonard:
II faudrait lire tout l'article.
M. Chevrette: Ce n'est pas bon, cela sécrète de
l'adrénaline et c'est toxique, un gars qui...
M. Gratton: Alors, M. le Président, je cite donc une
partie de cet article qui s'intitule: "Léonard fait-il fausse route"?
"Tout en sachant qu'il n'est pas de bon ton, par les temps qui courent, de
paraître contester le pouvoir municipal, surtout celui qui se remet pieds
et poings liés entre les mains des promoteurs immobiliers et
étrangers, il reste des questions qu'il est nécessaire de poser
avant l'adoption de la loi. Est-il juste de dire, comme les auteurs du projet
le prétendent, qu'il est plus politique de faire de l'aménagement
et de l'urbanisme une affaire municipale plutôt qu'une affaire d'Etat? Ne
serait-il pas plus juste de dire, à ce titre, que l'aménagement
territorial, au contrai-
re, est en réalité une responsabilité politique
centrale au niveau de l'organisme souverain en la matière? Chez nous, la
souveraineté en matière municipale et urbaine, on le sait,
réside clairement au niveau de l'Etat québécois. On ne
voit pas comment il pourrait paraître sage de céder cette charge
à d'autres. "Cette responsabilité générale de
l'Etat n'était-elle pas justement de proposer à l'ensemble des
citoyens québécois un plan d'aménagement de l'ensemble de
la vallée du Saint-Laurent où l'on aurait prévu les
principaux axes de développement? Il se trouve plusieurs observateurs
sérieux qui le croient. Ces gens qui ne sont pas nécessairement
d'éventuels despotes, spécialistes de l'aménagement et de
l'urbanisme ou non, estiment que l'Etat québécois devrait avoir
une vue d'ensemble de l'orientation du développement territorial, avoir
un plan qu'ils devraient prendre le risque de proposer à tous justement
pour éviter l'arbitraire des jeux de coulisse locaux. Le projet de loi
actuel, lorsqu'il parle des interventions du gouvernement, ne précise
pas si elles viendront d'une planification consciente ou si elles
découleront comme maintenant des simples ambitions des ingénieurs
de la voirie et des autres promoteurs".
Un peu plus loin, on signale: "C'est le Québec lui-même,
dans son ensemble et hors de tout doute, qui est une région
d'aménagement".
Messieurs, est-ce que quelqu'un parmi vous aimerait commenter cette
notion?
M. Chevrette: Est-ce que c'est l'article qui commence par "Le
projet de loi fait plaisir aux maires"?
M. Gratton: Oui. Vous n'avez pas saisi le sens de ma question
encore, je pense. On est tous d'accord, le projet de loi fait plaisir aux
maires, d'autant plus que le ministre leur a promis une augmentation de
salaire. On a réglé ça à la satisfaction du
député de Joliette. Pourriez-vous réagir à
cette...
M. Morissette: Nous ne sommes pas ici pour nous mêler de
vos chicanes. Il y a eu, depuis plusieurs années M.
Léonard le disait tantôt un paquet de projets de loi visant
l'aménagement et l'urbanisme du territoire et il y a aussi eu plusieurs
plans sectoriels au niveau du développement, au niveau de
l'aménagement, qu'on pense au BAEQ, qu'on pense à un paquet de
projets dans ce sens-là.
Pour nous, ce qu'on voulait essayer de faire ressortir par notre
mémoire, c'est que le monsieur a peut-être partiellement raison de
voir un plan d'ensemble au niveau du Québec. Personnellement je
suis ici pour donner mon opinion je ne crois vraiment pas que ce soit
possible actuellement, dans le contexte, de prendre le Québec avec une
multitude de petits schémas d'aménagement, comme on a
essayé de faire, par le biais de l'OPDQ, depuis plusieurs années.
Mais c'est beaucoup plus, comme le disaient les gens des
Iles-de-la-Madeleine ce matin, de penser à une approche au niveau
de l'aménagement et du développement, qui vont de pair, de toute
façon, à partir et des régions et du gouvernement. (17 h
45)
Autant le gouvernement a des priorités en matière
nationale et internationale, autant les régions connaissent leur milieu
de vie et autant les gens du milieu, que ce soit les maires, que ce soit les
préfets ou que ce soit nous autres, nous sommes près des gens et
nous sommes directement en contact avec eux d'une façon quotidienne. A
ce moment-là, je pense qu'il y a une possibilité qui ne ressort
pas très bien dans le projet de loi, qui ne ressort même pas du
tout. Il y aurait une possibilité de faire une approche, au niveau de
l'aménagement et de l'urbanisme, à partir des régions et
du gouvernement qui pourraient s'associer à travers des tables de
concertation, ou à travers les orientations du gouvernement, ou à
travers les orientations des régions. Il y aurait une formule dans ce
sens-là. Mais je ne pense pas que ce soit possible d'établir une
série de petits schémas dans l'ensemble du Québec, du
style de ceux du BAEQ, et d'arriver à quelque chose. A mon sens, il ne
faut pas prendre le plan d'aménagement comme une fin en soi, mais bien
comme un moyen. C'est comme cela que je le vois.
M. Gratton: Si j'ai bien compris le sens de votre mémoire,
c'est que vous souhaiteriez voir l'Etat informer de façon plus
complète les régions ou l'appareil qui finira par élaborer
les schémas d'aménagement régionaux de ses orientations et
de ses options. Quand vous parlez de la nécessité d'accompagner
la loi sur l'aménagement et l'urbanisme d'une loi sur le
développement, j'ai compris que c'est ce à quoi vous visiez.
M. Beaudet: Si c'est cela qui ressort de notre mémoire,
c'est qu'on s'est mal exprimé. Mais il semble que ce qu'on a dit et ce
qu'on voulait dire, c'est qu'on ne veut pas une loi sur le
développement, ce qui est tout à fait utopique dans notre
système. On ne peut quand même pas obliger le secteur privé
à se conformer à ce que l'Etat déciderait, sinon, il n'y a
plus de secteur privé. Mais c'est bien un mécanisme de
concertation.
Ce qui est important pour nous autres, c'est de constater que,
jusqu'à maintenant, on a toujours fonctionné dans une structure
verticale où tout part d'en haut et descend. Dans le système
constitutionnel dans lequel on est placé, on ne peut pas penser à
une fédération de régions, mais on pourrait penser
à rendre oblique cette hiérarchie qui est actuellement verticale,
par le biais de tables de concertation.
C'est-à-dire que des représentants des régions qui
formeraient une espèce de noyau supraré-gional et des
représentants de l'Etat se concertent, tant au niveau de
l'aménagement que du développement, pour orienter les politiques
et ensuite, une fois que les régions ont participé à
l'orientation des politiques d'aménagement et de déve-
ioppement, qu'elles redescendent chez elles et il est peu probable
qu'elles contrediront ce qui a été décidé à
ce niveau-là. Et l'Etat aurait été obligé de tenir
compte, en partant, des volontés politiques des régions en
matière d'aménagement et de développement.
Ce n'est pas du tout centralisateur, ce n'est pas sur le plan de type
fédération, parce que c'est utopique dans le système, mais
on a rendu au moins oblique un système qui est beaucoup trop vertical
actuellement, mais on l'a rendu oblique en V pour aller chercher
l'aménagement et le développement. La conclusion de notre
mémoire, c'est cela.
Quand je parlais tout à l'heure d'asseoir le bonhomme qui est
dans la remorque sur le siège arrière, c'est cela, on ne peut pas
l'asseoir à la place du conducteur, mais on peut au moins l'asseoir en
arrière pour décider de l'itinéraire à deux. C'est
le sens de notre mémoire.
M. Gratton: Concrètement, cela se traduirait comment?
M. Morissette: En fait, cela peut se traduire
concrètement. Ce matin, je ne sais pas si vous avez assisté
à la présentation des Madelinots. Ce que les gouvernements
provinciaux vous connaissez le contexte avec M. Trudeau et les autres
choses reprochent maintenant au fédéral au niveau des
ingérances du fédéral dans les provinces, nous autres, on
est tenté de reprocher la même chose au niveau du gouvernement
provincial par rapport aux régions. Que ce soit n'importe quel
gouvernement provincial, c'est la même chose.
A ce moment-là, ce qu'on essaie de dire par cela, ce n'est pas le
fait que ce soit une structure horizontale et que ce soit le gouvernement qui
fasse le projet de loi, c'est que tout simplement l'approche qui est vue
à l'intérieur de cela part d'en haut au lieu de partir d'en bas.
Ce que les Madelinots voulaient dire ce matin, c'est qu'ils voulaient
développer selon leurs moyens et selon leurs priorités, on dit
exactement la même chose, mais en d'autres mots.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que... M. Chevrette:
II reste une question.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous avez fini
votre intervention, monsieur? On peut revenir après le vote.
M. Gratton: Je n'ai pas fini, M. le Président, mais je ne
ferai pas revenir ces gens-là demain matin tout simplement pour me
satisfaire.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous auriez une
question rapide, monsieur?
M. Chevrette: Veux-tu demander de retarder le vote?
Le Président (M. Laplante): Allez-y.
M. de Bellefeuille: Est-ce que je pourrais vous en poser une
vraiment rapide?
Le Président (M. Laplante): Non, mais on va la laisser au
député de Bellechasse. Je crois
M. Goulet: J'avais plusieurs questions, M. le Président,
mais j'aimerais savoir si ces étudiants ont fait des études quant
à l'application de cette loi et à son implication essentiellement
au niveau rural, dans des comtés où il n'y a pas de
municipalités de plus de 3000 habitants. Avez-vous fait de la recherche?
Est-ce la même implication, par exemple, au niveau de Longueuil et des
paroisses avoisinantes, etc.? En tout cas, je sais que le temps nous presse,
mais...
M. Gaudet: Ce ne sont pas les mêmes implications dans la
mesure où les contenus des schémas et des plans varient selon
justement la densité de population ou le degré d'urbanisation. Il
y a seulement une chose qu'on a soulevée dans notre mémoire,
c'est la répartition des votes, on se demande jusqu'à quel point
on ne nuira pas à la volonté d'harmonisation du rural et de
l'urbain par une pondération des votes par le biais de la
quantité de population dans les milieux. On se demandait jusqu'à
quel point cela ne pourrait pas nuire et je pense que, ce matin, le même
problème a été soulevé.
M. Goulet: M. le Président, j'avais d'autres questions,
mais je pourrai les voir en particulier tout à l'heure.
Le Président (M. Laplante): Vu que nous ne pourrons pas
revenir après le vote, il faudrait que ce soit très vite parce
qu'on nous attend.
M. de Bellefeuille: M. le Président, ce sera très
rapide. Je voudrais vous demander une définition brève, simple et
spontanée de l'urbanisme.
M. Morissette: C'est un rire unanime.
M. de Bellefeuille: Pardon?
M. Morissette: Vous avez eu un rire unanime.
M. Ollomo-Mezui: Nous-mêmes, après deux ans à
l'institut d'urbanisme, nous n'arrivons même pas à définir
ce qu'est l'urbanisme.
M. de Bellefeuille: Est-ce que c'est limité à
l'urbain?
M. Morissette: Non. Je pense que l'urbanisme mais
là, M. le président nous demande de faire vite ce qu'on
peut dire, en ce qui me regarde, c'est que ce n'est pas limité
uniquement à l'urbain, c'est limité à l'ensemble d'un
territoire.
M. de Bellefeuille: Merci.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Léonard: Je voulais vous remercier d'être venus.
Je voudrais seulement qu'on s'entende pour faire confiance à la table
qui va discuter d'aménagement. Je suis sûr qu'elle va
déborder, qu'elle va discuter de développement pour revenir
à l'aménagement. Je pense que les élus municipaux sont
capables de faire cela. Je leur fais assez confiance pour cela. Je vous
remercie beaucoup.
Le Président (M. Laplante): Messieurs, les membres de
cette commission vous remercient. Avant d'ajourner les travaux, je voudrais
nom- mer les groupes que nous entendrons demain à 10 heures: Le Conseil
régional de développement des Laurentides, numéro 12;
Comité de citoyens de Saint-Jean-de-Matha, numéro 19; Conseil
régional de culture de l'Outaouais, numéro 35; l'Association des
architectes paysagers du Québec, numéro 25; la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, numéro 31; la Commission scolaire de
Saint-Jérôme, numéro 22. Sur ce, les travaux de la
commission sont ajournés à demain, 10 heures.
Fin de la séance à 17 h 53