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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Tuesday, April 24, 1979 - Vol. 21 N° 49

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions concernant le projet de loi no 125 - Loi sur l'aménagement et l'urbanisme


Journal des débats

 

Projet de loi no 12S

(Dix heures onze minutes)

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît! Reprise de la séance de la commission des affaires municipales pour l'étude du projet de loi no 125 et la présentation des mémoires.

Les membres de cette commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun).

M. Goldbloom: M. Caron (Verdun) est remplacé par M. Giasson (Montmagny-L'Islet).

Le Président (M. Laplante): M. Caron (Verdun) est remplacé par M. Giasson (Montmagny-L'Islet); M. Cordeau (Saint-Hyacinthe) remplacé par M. Goulet (Bellechasse); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau) remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee); M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Mercier (Berthier) remplacé par M. Rancourt (Saint-François); M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie) remplacé par M. Léonard (Laurentides-Labelle).

Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau (Verchères) remplacé par M. Gendron (Abitibi-Ouest); M. Fontaine (Nicolet-Yamaska) remplacé par M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle) remplacé par M. Tardif (Crémazie); M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), M. Vaugeois (Trois-Rivières).

Les groupes qui se feront entendre aujourd'hui sont: Le Conseil régional de développement Lanaudière. — Est-ce qu'il est ici? — Le Conseil de comté de Matapédia. Merci. Je demanderais aux membres d'adopter ce qui suit: Le Conseil municipal de la ville de Gaspé ne peut pas venir, alors on demande que son mémoire soit inscrit au journal des Débats.

Une Voix: Consentement.

M. Goldbloom: Nous n'y avons pas d'objection, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Consentement. (Voir annexe)

La Corporation du comté de Labelle.

Une Voix: Présent.

Le Président (M. Laplante): Merci. La ville de Laval. Merci. L'Union des producteurs agricoles.

Une Voix: Présent.

Le Président (M. Laplante): Merci. Les professeurs de l'Institut d'urbanisme de l'Université de Montréal. Ils ne sont pas encore arrivés. Merci. Oui, monsieur.

M. Gendron: Si vous le permettez, je voudrais faire une correction. M. Rancourt ne pourra pas être ici de la journée, de toute façon. Alors, si vous voulez remplacer M. Rancourt comme membre. Vous avez dit tantôt que M. Rancourt remplaçait...

Le Président (M. Laplante): M. Mercier (Berthier).

M. Gendron: Alors, à la place de M. Rancourt comme membre, vous allez mettre M. Gendron (Abitibi-Ouest), mais comme intervenant, à la place de M. Gendron, vous allez mettre M. Marquis (Matapédia).

Le Président (M. Laplante): Mais M. Gendron n'était pas intervenant non plus.

M. Gendron: M. Gendron était intervenant à la place de M. Mercier.

Le Président (M. Laplante): M. Lacoste (Sainte-Anne).

M. Gendron: Non, tel que je vous l'ai dit, M. le Président.

M. Chevrette: II était intervenant à la place de M. Charbonneau (Verchères).

M. Gendron: C'est cela.

M. Chevrette: Si j'ai bien compris.

M. Gendron: Vous avez bien compris.

Le Président (M. Laplante): D'accord. Je m'excuse. J'appelle maintenant le Conseil régional de développement de Lanaudière. Oui, monsieur.

M. Goldbloom: M. le Président, je ne retarderai les travaux de la commission que pour 60 secondes, mais je me dois de faire une mise au point. C'est la première occasion que j'ai de le faire. J'ai lu la transcription des débats du 11 avril, et je cite le ministre d'Etat à l'aménagement: "Plus tard il y a eu le projet de loi no 12 qui a été présenté par M. Goldbloom en 1976 et qui prévoyait que le gouvernement pouvait réunir dans une agglomération toutes les municipalités urbaines aux fins de préparer un schéma d'aménagement." (10 h 15) "Et M. le ministre continue un peu plus loin: II y avait un Québec urbain, un Québec rural". Je voudrais, M. le Président, citer l'article 2 du projet de loi no 12 de 1976 qui se lit comme suit: "La présente loi s'applique à toutes les municipalités locales régies par le Code municipal à tout territoire visé à l'article 27 dudit code et à toutes les municipalités régies par la Loi des cités et villes..."

Je termine là la citation et je veux simplement souligner, pour le journal des Débats, que le projet de loi no 12, en proposant la création d'un conseil d'agglomération, incluait là-dedans les munici-

palités régies par le Code municipal autant que les municipalités régies par la Loi des cités et villes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le député de D'Arcy McGee. J'appelle maintenant le Conseil régional de développement Lanaudière. Vous êtes là. Si vous voulez, monsieur, identifier votre groupe, vous identifier et les personnes qui vous accompagnent. Vous avez 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire et 40 autres minutes au cours desquelles les membres de cette commission vous poseront des questions. Vous pouvez commencer.

Conseil régional de développement de Lanaudière

M. Gaumond (Lionel): Lionel Gaumond, président du Conseil régional de développement. Je suis accompagné de M. Roch Malo, vice-président ex officio, et de M. Paulin Dumas, directeur général.

Le Conseil régional de développement Lanaudière a accepté d'assumer le mandat que lui a confié l'Office de planification et de développement du Québec le 23 janvier dernier afin d'apporter un avis éclairé aux autorités sur l'ensemble du projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme, l'appellation de la structure porteuse, les modalités générales de découpage et de représentativité politique au sein de la structure porteuse. Le Conseil régional de développement a formé une commission consultative composée d'élus de municipalités urbaines et rurales, de l'Union des producteurs agricoles et du conseil d'administration du CRD. A la suite des quatre rencontres publiques tenues par la commission, à la suite du rapport et des suggestions formulées par celle-ci aux administrateurs, le CRD a tenu deux assemblées au terme desquelles il a décidé du contenu du présent mémoire. Organisme issu du milieu, oeuvrant au développement et à l'aménagement régional en concertation avec les agents de la région, dont plus de 120 sont membres, le Conseil régional de développement transmet donc au ministre d'Etat à l'aménagement, aux membres de la commission parlementaire et à l'OPDQ ce qu'il croit être l'expression de la pensée de la région de Lanaudière sur le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme.

A toute personne désireuse de connaître les méthodes utilisées et le contexte dans lequel s'est déroulé l'opération, nous la référons au rapport qualitatif de la consultation effectué par le CRD sur le projet de loi, rapport qui sera déposé au vice-président-directeur général de l'OPDQ.

Principes, nécessité et urgence de l'aménagement. Nous nous déclarons en accord total avec le principe transcendant de législation sur l'aménagement et l'urbanisme et nous déclarons qu'il est d'une nécessité absolue de faire l'aménagement dans la région de Lanaudière et partout au Québec.

Les principes. Nous souscrivons d'emblée aux quatre principes déclarés par les ministres d'Etat à l'aménagement et des Affaires municipales comme étant ceux qui ont guidé l'élaboration du projet de loi 125, à savoir l'aménagement une responsabilité politique, la participation des citoyens à la prise de décision, l'aménagement une responsabilité conjointe et partagée entre les paliers de décision politique, et enfin responsabilité conjointe par le biais de l'harmonisation et non d'une hiérarchisation des décisions.

Avec le présent mémoire, nous aurons l'occasion de préciser comment, selon nous, ces principes sont respectés dans le projet de loi et comment leur application est parfois abusive et fautive.

Nous croyons pertinent de rappeler ici que les initiatives du CRD depuis près de dix ans ont toujours été inscrites dans la perspective de revalorisation du pouvoir municipal pour tous les dossiers ayant un impact sur l'aménagement et l'urbanisme. L'étroite collaboration des municipalités et du CRD en font preuve depuis l'étude et les mémoires sur les différents projets de loi de 1970 à nos jours, jusqu'à la concertation intermunicipale quant à l'implantation d'infrastructures ayant un impact permanent sur le territoire et aux travaux conjoints d'uniformisation de la réglementation d'urbanisme. Nous croyons donc que c'est aux administrateurs élus des municipalités à qui revient la responsabilité de faire l'aménagement et l'urbanisme.

Nécessité et urgence. L'amélioration de la qualité de vie des personnes et leur mieux-être collectif constituent l'objectif ultime de l'aménagement et de l'urbanisme. Chaque citoyen, qu'il soit administrateur ou administré, est de plus en plus conscient de la fragilité de l'environnement, de la rareté des ressources et de la nécessité de rationaliser leur utilisation en harmonie avec les intérêts collectifs et individuels des personnes.

Dans ce monde en pleine évolution où le caractère d'interrelation des situations, des problèmes et des solutions est à chaque jour de plus en plus évident et particulièrement dans le domaine des services essentiels dont ont besoin les communautés, nous sommes d'avis qu'il faut prendre les moyens pour utiliser le sol de meilleure façon pour éviter le gaspillage, pour servir les intérêts collectifs de la population vivant en communautés dites locales, mais vivant aussi en constante relation avec des collectivités plus grandes autour d'elles.

Au Québec trop peu de collectivités, jusqu'à maintenant, se sont donné et les outils et les mécanismes afin d'inscrire, dans la trajectoire de l'évolution de la vie collective et de l'utilisation des ressources physiques, cette volonté d'harmonie et les règles du jeu pour l'atteindre. Il ne s'agit plus de déplorer les situations anarchiques qui résultent d'une absence de planification, mais de se mettre à la tâche et d'agir maintenant. Il est grand temps.

Nous sommes donc convaincus qu'il faut faire l'aménagement et l'urbanisme, parce qu'il y a absolue nécessité et urgence. C'est ainsi que

l'article 2 du projet de loi doit se lire: Le conseil de comté doit adopter et non peut adopter. Un délai de réalisation du schéma devra être fixé, nous le suggérons, à trois ans à partir de la date de mise en vigueur de la loi. Par l'article 4, le ministre devra alors avoir le pouvoir d'ordonner la réalisation du schéma aux comtés qui n'assumeraient pas leurs obligations.

Contenu du schéma. Le contenu du schéma ne reflète qu'une approche théorique d'aménagiste. Il doit préciser ce sur quoi les municipalités auront à travailler ensemble en matière d'aménagement. Certains articles reflètent une intrusion directe dans le champ des responsabilités municipales.

Nous ne devons pas perdre de vue que ceux qui seront conviés à la table de planification et de concertation sont les représentants élus des municipalités locales, cités, villes et municipalités dites rurales. Ils sont en droit de connaître de façon précise ce sur quoi ils travailleront ensemble.

L'article 5 devrait donc préciser que le schéma doit comprendre entre autres l'identification de la localisation de toutes les utilités publiques à caractère intermunicipal et ce à la suite d'une entente liant les organismes d'utilités publiques: Hydro-Québec, Bell Canada, aux municipalités. Le transport interrégional, les stations, les circuits, les sites d'enfouissements sanitaires et de récupération et de transformation des ordures, certains types d'équipements de loisirs, les voies de circulation débouchant sur les territoires locaux voisins, l'identification de normes de lotissement en milieux non desservis par un réseau d'aqueduc et d'égout afin d'assurer l'uniformisation pour un ensemble de territoires, l'identification des zones agricoles permanentes, des arrondissements culturels, des territoires publics (terres de la couronne, parcs intermunicipaux, des zones de glissements de terrain, d'inondations impropres à la construction d'habitations ou d'autres types d'établissements.

Nous croyons par contre que les affectations du sol à l'intérieur du périmètre d'urbanisation ainsi que la densité d'occupation relèvent de la responsabilité de chaque municipalité, et le schéma ne doit pas intervenir dans ce champ spécifique.

A la limite, l'identification et la localisation de plusieurs équipements et infrastructures relèvent de chaque municipalité. En effet, la majorité de ces équipements est la propriété d'une municipalité et non de plusieurs. L'utilisation de ces équipements par d'autres est rendue accessible par la voie habituelle des achats de service. Le schéma aura à identifier et à localiser surtout les infrastructures et l'équipement acquis en copropriété.

Enfin, le schéma devra aussi refléter le résultat de la concertation intermunicipale quant aux zones d'occupation adjacente à deux territoires voisins afin d'assurer la compatibilité des occupations. Dans ce cas, l'autonomie absolue de chaque municipalité ne tient pas.

Le respect des droits des personnes à un environnement salubre et harmonieux prévaut sans aucun doute et exige la concertation intermunicipale. En corrélation avec ce que nous avons affirmé au début de ce chapitre, nous croyons important d'ajouter que chaque municipalité dans la réalisation de son plan d'urbanisme devra prendre l'initiative de former un comité d'utilité publique avec les organismes concernés afin de planifier le développement des réseaux, les corridors de passage des utilités et de les inscrire dans le plan (électricité, communications, gaz).

Les procédures de réalisation. Nous croyons qu'il y a une exagération considérable dans la multitude des étapes à franchir tant sur le plan de la consultation et des délais que sur le plan des exigences auxquelles sont soumises les municipalités. Nous adhérons d'emblée à l'obligation pour les municipalités de vraiment dialoguer avec leurs concitoyens, eux qui seront les premiers à vivre collectivement et individuellement selon les nouvelles règles du jeu que le schéma d'aménagement et le plan d'urbanisme local auront édictées.

Cependant, nous déclarons avec expérience qu'un véritable dialogue enrichissant a des chances d'éclairer les preneurs de décisions s'ils s'appuient d'abord et avant tout sur la crédibilité qu'accordent les citoyens à ceux qui sont élus, sur les objets concrets d'échanges, de dialogue, de consultation et de concertation déposés par les preneurs de décisions, avant décision, bien sûr, mais touchant le quotidien et le réel de la vie, sur une présentation simple, soignée et précise des objets de consultation, adressée à tous les citoyens concernés.

Nous souscrivons au principe que les élus sont là pour décider. Nous tenons donc pour acquis que ce sont eux qui décideront du schéma d'aménagement et du plan d'urbanisme. Nous croyons toutefois que le processus de participation des citoyens que propose le projet de loi est beaucoup trop lourd et occasionnera des délais au point de venir à bout de l'administrateur le plus patient.

L'article 24 est en fin d'étape tout à fait ridicule. Il nous est difficile de comprendre comment on peut proposer un référendum à valeur consultative après autant d'étapes de consultation. Nous aurions mieux compris si ce référendum avait été déclaré décisionnel.

Le processus de consultation. Nous croyons davantage à un processus de consultation dont les diverses phases pourraient être les suivantes: le citoyen est informé par écrit; une lettre est adressée à chaque numéro civique disant qu'un schéma est en préparation, expliquant la signification de l'acte qui se prépare, donnant une description globale de ce que ce schéma comprendra et expliquant sa portée légale. (10 h 30)

Le citoyen apprendra, par la même occasion, qu'il sera invité à participer à des assemblées publiques où il prendra connaissance du contenu du schéma que le comté devra adopter par la suite et où il formera ses questions, réactions, options et avis. A la suite de l'achèvement de la version

définitive du schéma par le comté, le citoyen recevrait un résumé du contenu accompagné d'une présentation graphique illustrant la portée du schéma sur le territoire. Nous soulignons ici que le contenu de cette version du schéma dont il est question réfère aux articles 22 et 23 et non à l'article 12. Une copie de la version complète et définitive, laquelle ferait l'objet d'assemblées publiques, et une copie des cartes seraient accessibles pour de la consultation dans chaque municipalité. Le citoyen participerait alors aux assemblées publiques, ajournées autant de fois selon les besoins. Le comté se garderait le privilège d'en limiter le nombre; ces assemblées publiques permettraient la discussion entre les élus, membres du comté, et les citoyens participants. Il ne s'agit pas du type d'audition publique où les commissaires n'émettent pas d'opinion.

A la suite de ces assemblées publiques, le comté adopterait la version définitive du schéma en tenant compte des avis. Un résumé du schéma adopté serait ensuite distribué à l'adresse de chaque numéro civique. Une copie complète du schéma adopté serait en permanence à la disposition de chaque citoyen, au secrétariat de chaque municipalité.

Le Président (M. Laplante): M. Gaumond, est-ce que je pourrais vous interrompre?

M. Gaumond: Oui.

Le Président (M. Laplante): Vous êtes rendu à la douzième page et vous en avez 30. Comme il ne vous reste que quatre minutes, je puis vous garantir que le ministre et l'Opposition ont lu le mémoire, ils ont pris des notes et je me demande s'il ne vous serait pas possible d'aller aux conclusions.

M. Chevrette: J'aurais une suggestion à vous faire.

M. Léonard: II y a des gens qui ne viennent pas.

M. Chevrette: On vient d'apprendre que la ville de Gaspé ne vient pas. On vient de l'inscrire au procès-verbal. C'est un excellent mémoire et je pense que cela vaut la peine de l'entendre. Je demande le consentement de la commission pour qu'on puisse l'entendre.

Le Président (M. Laplante): Si c'est la volonté des membres de la commission.

M. Goulet: Qu'on se limite à une heure par mémoire, en tout.

Le Président (M. Laplante): D'accord, monsieur, allez aux grandes lignes. Continuez.

M. Gaumond: Merci. Nous privilégions donc une étape de consultation au lieu de deux tel que prévu dans le projet de loi.

Le référendum. Nous sommes d'accord que le processus d'adoption du premier schéma laisse place à un référendum. Nous proposons donc que l'article 24 se lise comme suit: Après la consultation, 10% des personnes possédant le cens électoral par municipalité ou 500 personnes possédant le cens électoral par municipalité, la plus basse des éventualités prévalant dans au moins les deux tiers des municipalités du comté, peuvent demander la tenue d'un référendum avant l'adoption du premier schéma d'aménagement. Le référendum n'aura de valeur décisionnelle que si plus de 50% des personnes possédant le cens électoral participent au référendum, sinon le référendum n'aura qu'une valeur consultative.

A la suite de la réalisation d'une étape de consultation par voie d'assemblées publiques, le référendum, aux conditions précitées, prend une signification démocratique acceptable. La transmission par courrier de l'information et de la convocation devra tenir compte de l'adresse des citoyens villégiateurs qui, en dehors des périodes propices, sont absents de leur résidence secondaire.

L'adoption par règlement. Ces étapes franchies, le schéma est adopté par le comté. Nous ne sommes pas d'accord sur le vote des deux tiers des voix. La majorité simple suffit.

Les délais. Les 45 jours prévus à l'article 36 nous paraissent trop courts pour que le comté examine et approuve un plan ou un règlement municipal et émette un avis de conformité.

Page 15, les exigences. Nous reportons délibérément au chapitre V nos commentaires quant aux exigences imposées par le gouvernement et le ministre. Nous voulons ici mentionner que le projet de loi alourdit de façon indue les rapports entre les municipalités et le comté quand il va jusqu'à exiger que non seulement les modifications aux règlements de zonage, de lotissement et de construction doivent être approuvées par le comté, mais que les règlements d'emprunt ayant pour objet l'exécution de travaux publics doivent l'être aussi. Nous sommes d'avis que seul le plan d'urbanisme doit obtenir un avis de conformité. Quant aux. règlements de zonage, lotissement, construction et règlements d'emprunt, ils ne devraient qu'être déposés.

Page 16, la structure porteuse. Nous sommes convaincus que le type de palier de décision que propose le projet de loi en créant le conseil de comté est un outil disproportionné quant à la responsabilité qui lui incombe: l'aménagement du territoire. Le gouvernement du Québec doit annoncer ses couleurs quant aux véritables propositions de transfert de pouvoirs au profit des administrateurs locaux afin que nous puissions évaluer la pertinence du mécanisme proposé.

Page 17, le fonctionnement du comté doit être simple et relié directement aux pouvoirs qu'il aura pour réaliser le schéma et en supporter la légalité et l'autorité, pour déclarer la conformité des plans d'urbanisme locaux. Les pouvoirs d'application quotidienne du schéma doivent relever de chaque municipalité.

Cependant, M. le ministre, il nous apparaît d'une importance capitale que le gouvernement prenne immédiatement l'initiative d'exposer publiquement l'ensemble des pouvoirs et responsabilités qu'il entend décentraliser, c'est-à-dire qu'il entend transférer aux municipalités locales et de comtés. Nous sommes d'avis que les rédacteurs du projet de loi n'ont pas donné cette ampleur à la structure porteuse à partir du concept qu'ils se font de l'aménagement et de sa gestion, mais surtout à partir d'un ensemble de véritables pouvoirs transférés du gouvernement aux municipalités.

Les propos tenus à ce sujet depuis deux ans par différents ministres et la nature du nouveau conseil de comté et de son fonctionnement nous portent à croire qu'il s'agit là de la mise sur pied d'un mécanisme dont les fonctions qu'on lui réserve sont identifiées, mais non dévoilées. Le fascicule 5, réaménagement des pouvoirs, devrait être rendu public. Par contre, il faudra alors se demander si la délégation directe, telle que proposée par le présent projet de loi, sera acceptable aux yeux de la population et de la démocratie pour assurer de réels pouvoirs dont l'exercice aura des conséquences directes sur la taxation. Un maire ou un commissaire ne subit pas la défaite pour ses faits et gestes effectués dans le comté ou à la commission scolaire régionale, mais pour ses décisions à la municipalité et à la commission scolaire locale. La population ne l'élit qu'à un palier de décision: le local.

Page 19, au bas, le dernier paragraphe. La décentralisation suppose l'harmonie et le dialogue, mais dans le respect le plus total des pouvoirs de chacun. Nous reconnaissons que l'article 5, paragraphe g) réfère aux responsabilités du gouvernement et de ses ministères et, à ce titre, l'Etat doit se garder des pouvoirs, sans les étendre à tout le contenu du schéma.

Le financement. Que la réalisation du schéma et de son application soient effectuées selon une procédure allégée ou selon celle proposée par le projet de loi à plus forte raison. Nul doute que l'exercice de cette responsabilité nécessitera des déboursés considérables. Cette réalité doit être prise en considération avant toute mise en chantier des travaux d'aménagement. Sachant qu'un plan — le dernier paragraphe— d'urbanisme local en milieu rural coûte en moyenne $15 000 en services professionnels, nous imaginons bien l'ordre de grandeur des coûts d'un schéma d'aménagement intermunicipal incluant les services professionnels, les assemblées et le volume des écrits. Toute responsabilité nouvelle est conditionnée par des ressources financières adéquates.

Le territoire, page 22. Devant la multiplicité des limites administratives qu'adoptent les différentes institutions, nous croyons que cette question du territoire de comté est une question délicate et difficile. Nous identifierons donc quelques éléments qui devront, selon nous, être précisés afin de créer les conditions favorables à un processus décisionnel clair et à une décision relativement rapide.

A la page 23. Il faudra établir les règles par lesquelles le processus décisionnel s'exercera sur cette question. Qui initiera la discussion sur le découpage du territoire? Un comté seul, deux comtés en concertation, chacune des municipalités au sein de sa corporation? Par quels mécanismes les avis seront-ils acheminés au ministre? Ces questions sont restées sans réponse faute de temps prévu pour la consultation.

A la page 24, la représentativité politique. Selon nos propos tenus plus haut, nous croyons plus simple d'assurer la représentativité de chaque municipalité par une personne choisie par chaque municipalité. Cependant, si nous connaissions les pouvoirs que le gouvernement entend transférer — le fascicule 5 à venir — notre proposition pourrait être tout autre. Devant les propositions gouvernementales de décentralisation de véritables pouvoirs en faveur des municipalités, nous serions prêts à considérer la pertinence d'instaurer le suffrage universel pour l'élection d'administrateurs au sein des comtés.

L'harmonisation. A la page 26, l'appellation des structures. Enfin, la conclusion à la page 27. Tout au long de nos propos sur le projet de loi de l'aménagement et de l'urbanisme, nous sommes bien conscients d'avoir exprimé en même temps et nos convictions sur la nécessité et l'urgence de planifier l'aménagement des régions et de la nôtre en particulier, et nos malaises quant à la complexité du processus proposé, quant au dernier mot que l'Etat se garde, quant aux ambiguïtés et absence de précisions sur les pouvoirs à transférer, quant au palier décisionnel non élu, quant aux règles selon lesquelles le découpage et la représentativité seront fixés. Nous résumons donc notre participation à la consultation à laquelle le Conseil régional de développement s'est associé par la présentation des recommandations qui suivent.

Recommandations.

Premièrement, afin d'assurer que l'aménagement et l'urbanisme se fassent au Québec, la loi oblige la municipalité de comté à adopter un schéma d'aménagement et que le délai de la loi soit fixé à trois ans à partir de la date de mise en vigueur de la loi; afin d'identifier rapidement les intervenants qui devront travailler ensemble, la loi identifie clairement ce que doit comprendre le schéma; le gouvernement précise le contenu de la décentralisation de véritables pouvoirs qu'il entend transférer au profit des municipalités locales et de comté; que l'appellation du comté soit "municipalité de comté" et que celle-ci regroupe les municipalités rurales et les cités et villes; en fonction des responsabilités d'aménagement, que la municipalité de comté soit composée d'un élu local choisi par chaque municipalité; que le nombre des municipalités formant le territoire de la municipalité de comté soit fonction de ce sur quoi portera le schéma, de l'impact des travaux prévus au schéma dont les municipalités seront l'objet, et des activités socio-économiques prédominantes et communes à chacune d'elles;

que la consultation porte seulement sur le contenu de la version définitive du schéma que veut adopter le comté et que l'information et la convocation soient adressées à chaque numéro civique; que le référendum soit possible à la suite de la demande de 10% ou de 500 personnes par municipalité, la plus basse éventualité prévalant, et ce dans au moins les deux tiers des municipalités de comté; (10 h 45) que le référendum n'ait de valeur décisionnelle que si 50% des personnes possédant le cens électoral dans le comté participent au référendum; que la municipalité de comté adopte son schéma par le vote à majorité simple; que les procédures prévues entre les municipalités de comté et les municipalités membres soient réduites au maximum dans la perspective du respect des pouvoirs locaux et que l'autorité de la municipalité de comté porte surtout sur la légalité du schéma et la conformité obligatoire du plan d'urbanisme avec le schéma et que pour le reste des rapports entre les deux paliers les procédures soient celles favorisant la concertation et le consensus. que la loi prévoie que les municipalités et les municipalités de comté prennent l'initiative de travailler avec les organismes d'utilités publiques, électricité, gaz, communications, et que les ententes lient ceux-ci dans leurs travaux d'infrastructure et d'équipement; que le gouvernement et le ministre n'aient le pouvoir d'ordonnance et d'autorité susceptible d'exiger des modifications au schéma que sur les travaux d'équipement et d'infrastructure devant être réalisés par le gouvernement, ses ministères, mandataires et organismes publics; que le gouvernement précise les sources de financement selon une assiette fiscale permettant à la municipalité de comté d'assumer ses responsabilités en matière d'aménagement; enfin, que le gouvernement établisse avec les municipalités les règles selon lesquelles les consensus devront s'effectuer quant aux responsabilités et pouvoirs aux limites des territoires et aux modes de représentativité de la municipalité de comté avant d'agir selon les articles 142 et 144 du présent projet de loi no 125. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le ministre. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, dans un premier temps, je voudrais féliciter le CRD pour le magnifique mémoire qu'il nous a présenté. Je sais avec quel sérieux ce mémoire a été préparé et combien de consultations ont été faites à l'échelle du comté et même du comté agrandi, puisqu'on touche quelques comtés. Je voudrais souligner en particulier deux aspects qui retiennent mon attention. C'est tout l'apport positif que vous apportez quant aux éléments que vous suggérez d'ajouter au contenu du schéma d'aménagement et les remarques que vous faites concernant le référendum comme tel.

Je voudrais aussi vous remercier de l'appui que vous apportez au projet de loi no 125 et je me permettrai de vous citer, puisque à la page 4 de votre mémoire on peut lire ceci: Nous nous déclarons en accord total avec les principes transcendant la législation sur l'aménagement et l'urbanisme et nous déclarons qu'il est d'une nécessité absolue de faire l'aménagement dans la région de Lanaudière et partout au Québec, ce qui prouve que vous avez carrément épousé les principes de la loi 125.

M. le Président, je voudrais aussi me permettre certains commentaires puisque, à la suite d'allégations du CRD, je pense que certains points de vue méritent certaines précisions. Tout d'abord, au sujet du contenu du schéma. Quand le CRD de Lanaudière dit qu'à l'intérieur du périmètre d'urbanisation, en ce qui regarde les affectations des sols ainsi que la densité d'occupation... je pense que vous interprétez mal le projet de loi ou encore que vous avez un point de vue complètement différent de celui du législateur en ce sens que pour nous l'article 6 du projet de loi est un article à contenu facultatif. Autrement dit, la décision appartient aux élus municipaux qui siègent au conseil de comté d'inclure ou de ne pas inclure certains éléments. Vous semblez vouloir démontrer qu'il y a une obligation formelle.

Il y aurait peut-être lieu d'expliquer à ce moment qu'un schéma d'aménagement, tel qu'on le pense, nous... mais le plan d'urbanisme et le schéma, ce sont deux outils très interreliés et un comté peut décider d'élaborer un schéma d'aménagement très complet qui intégrerait tous les éléments des plans d'urbanisme des municipalités. A ce moment-là, les plans d'urbanisme pourraient être moins détaillés. Mais l'inverse est aussi vrai en ce sens que le schéma d'aménagement peut être beaucoup plus simple, il pourrait ne comprendre que des éléments essentiels; à ce moment-là, les plans d'urbanisme seraient beaucoup plus détaillés. Je ne sais pas si on a mal compris ou si j'ai mal interprété, mais il me semble qu'il y a une ambiguïté là-dessus.

Une Voix: ... Est-ce que je peux demander à M. Malo de répondre, s'il vous plaît?

M. Malo (Roch): En fait, notre réaction à cela, c'est que, quand dans une loi c'est marqué "peut" et qu'en même temps, un peu plus loin, vous touchez à l'autonomie des municipalités, elles vont se retrancher derrière cela pour que le "peut" ne se réalise pas. Prenez seulement l'article 5 et l'article 6, vous n'avez pas le droit de toucher à cela, on se retranche derrière le "peut" et cela n'entrera pas. En fait, on demande d'en ajouter dans l'article 5 pour ne pas mettre trop de "peut" et d'enlever la partie qui touche à l'autonomie de la municipalité quant à son urbanisme et à la densité de la population dans son périmètre; cela la touche au plus profond de ses fibres, c'est notre réaction. C'est pour cela qu'on a suggéré d'enle-

ver cela et d'en mettre plus dans l'article 5 et moins dans l'article 6.

M. Chevrette: Vous ne croyez pas qu'on peut le décider conjointement?

M. Malo: Notre perception, c'est que, quand vous dites qu'on peut le décider conjointement, effectivement, on ne le décide pas. Il n'y a pas longtemps, on était à la CRO et le président de la CRO nous disait: Partout où c'est marqué "peut", on n'a rien fait; quand c'est marqué "doit", on n'a pas le choix. C'est le président de la CRO qui nous disait cela.

M. Chevrette: Je comprends plus ce que vous voulez dire. Au sujet de l'obligation d'adopter un schéma d'aménagement dans un délai de trois ans, on en prend bonne note. Concernant les délais de présentation des orientations du gouvernement, vous manifestez une crainte; je me demande si vous n'allez pas jusqu'à penser que le gouvernement devrait bâtir un plan national global et, après cela, prendre les proportions par comté et dire: Cette portion de notre plan national s'en va dans chacun des comtés détaillés.

C'est peut-être une approche très pratique, mais on pense que c'est du cas par cas et qu'il y aura lieu, nécessairement, d'avoir énormément de concertation dans l'élaboration des plans, ce qui forcera les comtés à favoriser la concertation avec les ministères concernés dans leurs plans d'aménagement. J'espère que vous ne pensiez pas au plan global national.

M. Malo: En aucune façon. Ce à quoi on pensait, c'est à la lourdeur de la machine gouvernementale qui fait que ça prend plus de six mois pour qu'elle se retourne. Dans le fond, on parle des orientations de développement qui sont supposées venir, mais n'oubliez pas qu'en 1967 et en 1968, on nous parlait de cela. Le livre vient d'arriver dans notre région il y a quelques semaines, pour la grande région de Montréal, et on n'est pas encore capable de trouver ce qu'il y a pour Lanaudière là-dedans; on va être obligé de mettre pas mal de temps et de monde pour faire cela.

Quand vous nous dites dans un délai de six mois, un an ou un an et demi pour que dans trois ans vous soyez capables de faire votre schéma, on va vous avoir donné nos orientations par ministère, vous nous permettrez d'en douter.

M. Chevrette: Là-dessus, on ne vous obstine pas. Quant à la décentralisation, vous n'y faites non seulement allusion, vous l'affirmez. Il faut bien comprendre que le présent projet de loi ne parle pas de décentralisation, c'est un débat ultérieur et il y aura une vaste consultation sur le sujet comme tel; c'est tout simplement un commentaire que je voulais faire puisque vous voyez probablement très loin en tant que CRD. On doit vous dire que le présent projet de loi s'arrête à l'aménagement et ne va pas jusqu'à la décentralisation.

M. Malo: Est-ce qu'on peut faire un commentaire là-dessus?

M. Chevrette: On peut vous permettre cela.

M. Malo: C'est vrai qu'on a une réaction à cela; cela a été annoncé longtemps. On a eu de très fortes réactions à notre commission qui a circulé dans la région, il y a eu de fortes réactions dans certaines parties de la région pour dire: Ce n'est pas nécessaire de transformer la structure seulement pour faire l'aménagement. Ce n'est pas la majorité, mais il y a des gens qui ont réagi comme cela et qui ont dit: Le ministre pourrait bien décréter que tel groupe de municipalités va se mettre ensemble pour faire un schéma, comme ça s'est fait pour le réseau des eaux usées dans la région de Repen-tigny; à un moment donné, le ministre a décidé qu'il fallait qu'on se mette ensemble et qu'on travaille là-dessus et on a réussi à faire un plan directeur pour les eaux usées.

Il y a eu une réaction et on a dit: Ce n'est pas nécessaire de réformer la structure seulement pour l'aménagement. Si on change la structure, si on fait des nouveaux comtés, si on leur donne de la gueule, si vous voulez, et du corps, si on leur donne des ressources fiscales, c'est parce qu'on pense qu'à un moment donné il va y avoir autre chose qui va s'accrocher à cela. Pour décider de la qualité, de la force et de la forme de la structure, qui va être là, et comment il va être nommé, il faudrait peut-être aussi qu'on connaisse les pouvoirs et les obligations qu'ils vont avoir en même temps. C'est pour cela qu'on n'écarte pas la possibilité du suffrage universel. Même s'ils doivent administrer les hôpitaux, les CLSC et les services sociaux et enfin peut-être une partie de la voirie et une partie du domaine agricole, etc., peut-être que cela serait plus pertinent qu'ils soient élus directement. S'ils doivent administrer un budget qui dépasse l'ensemble du budget des municipalités locales peut-être que cela serait pertinent qu'ils soient élus aussi. En fait, on a la conviction que ces gens, quand ils sont par délégation, ils ne se font pas battre pour les gestes qu'ils posent dans la région, ils se font battre pour les gestes qu'ils posent chez eux. A ce moment, ils dépensent parce qu'ils ne se font pas battre parce qu'ils dépensent.

M. Chevrette: II y a également le financement. Vous rappelez que s'il y a certains pouvoirs, il faudrait qu'une aide financière s'y raccroche. Je dois vous dire que le discours du budget là-dessus prévoit déjà des sommes dès la première année. Je pense que c'est $2 100 000 pour l'aménagement et, comme on ne traite pas de décentralisation et de délégation de pouvoirs immédiats, on a toujours dit cependant que les pouvoirs seraient accompagnés éventuellement d'argent. On l'a prouvé même par le discours du budget. Il faut penser aussi à la réforme fiscale municipale qui va fournir une assiette un peu plus forte aux municipalités.

M. Malo: II est clair, dans ce qu'on a compris, que la réforme fiscale ne concerne pas le comté une seconde et ce n'est pas pour envoyer de l'argent au comté. C'est pour donner plus d'argent au niveau local.

M. Chevrette; C'est cela.

M. Malo: Dans notre esprit, il est clair aussi que si on refait les comtés, on leur donne une assiette fiscale. On ne demande pas de transférer de l'argent et de le donner aux municipalités et de le transférer, dans notre esprit.

M. Chevrette: Au sujet des conseils de comté renouvelés, vous dites que c'est un outil disproportionné.

M. Malo: Pardon?

M. Chevrette: Vous dites que, les conseils de comté, vous les considérez un peu comme un outil disproportionné. Il serait peut-être bon de préciser ici que l'objectif est de favoriser la concertation entre les municipalités, qu'il n'y a pas un document publié sur l'aménagement qui n'a pas traité de cela. Vous le reconnaissez vous-mêmes dans votre mémoire. Est-ce que vous pourriez détailler là-dessus?

M. Malo: Cela revient un peu à ce que je disais tout à l'heure. Seulement pour l'aménagement cela devient disproportionné. Si on veut donner d'autres pouvoirs ce n'est peut-être pas assez fort. Il faudrait peut-être en mettre plus et c'est là qu'on parle de l'élection au suffrage universel, possiblement.

M. Chevrette: Dans l'éventualité d'une décentralisation.

M. Malo: Dans l'éventualité d'une décentralisation.

M. Chevrette: Un dernier commentaire. Quant aux avis du conseil de comté, concernant les règlements d'urbanisme, les règlements d'emprunt, vous semblez interpréter comme si le conseil de comté a quasi un pouvoir de sanction sur les règlements d'emprunt. C'est uniquement un avis. Cela reste comme c'était. C'est la commission municipale qui adopte le règlement d'emprunt, qui se prononce sur le règlement d'emprunt. Le conseil de comté n'a qu'un avis à émettre.

M. Malo: Selon l'article 46, selon notre interprétation de l'article 46 tel qu'il est là, par exemple, la municipalité de Saint-Charles-Borromée veut refaire la rue Bousquet entre Visitation... On comprend le problème. C'est un bout de rue. Cela prend un règlement d'emprunt pour qu'il obtienne l'autorisation du conseil de comté, un avis. C'est une étape additionnelle. Il faut qu'il obtienne l'avis du conseil de comté.

M. Chevrette: Un avis de conformité, un avis technique.

M. Malo: Oui, mais le temps que cela prend pour faire cela, la municipalité de Saint-Charles fait son règlement. Il faut qu'elle l'envoie au conseil de comté. Le conseil de comté doit attendre sa prochaine réunion pour l'approuver. Ils font cela six fois par année. Disons qu'ils font ça tous les mois, ça fait un mois de plus s'ils l'ont envoyé le lendemain de la réunion et, supposons que pour une raison ou pour une autre, à Saint-Charles-Borromée, cela ne "file" pas avec le comté cette fois-là. Ils disent: On va te faire niaiser pendant deux mois et on va l'approuver juste un peu plus tard. Savez-vous qu'ils niaisent longtemps pour un bout de rue dans leur municipalité. Cela peut arriver. A un moment donné il dit: Le veux-tu ton règlement, tu vas accepter autre chose. C'est ce genre de tracasseries qui pourraient arriver et qu'on ne voudrait pas en s'appuyant sur l'article 46. (11 heures)

M. Chevrette: Non, mais l'optique, c'est uniquement un avis technique à donner et...

M. Malo: Je comprends, mais si cela prend trois mois pour qu'ils arrivent... la municipalité ne les a pas, parce qu'au ministère, au contentieux du ministère et à la commission municipale, l'avis n'y est pas, on n'approuve pas... et attendez. On est rendu à l'automne suivant et les travaux vont se faire le printemps suivant.

M. Chevrette: Dans un ordre d'idées différent, vous proposez une seule phase de consultations de la population. Vous ne craignez pas que les citoyens se retrouvent presque devant un fait accompli et que leur intérêt quant au schéma d'aménagement soit de beaucoup diminué?

M. Malo: Nous avons pensé qu'une bonne, c'était amplement suffisant. D'autant plus qu'il faut penser à ceux qui vont faire la "job". Si on veut que les élus — parce qu'on veut que ce soit un acte politique — fassent le tour des réunions et qu'ils soient présents aux réunions avec les citoyens pour discuter avec eux, ça implique une série de réunions, une affaire comme cela. Cela implique, par exemple, dans un comté comme n'importe quel des comtés de chez nous, celui qui en a le moins dans n'importe quelle des propositions les plus optimistes c'est douze ou treize municipalités et cela va jusqu'à une vingtaine. Si, dans chaque municipalité, il y a une réunion, cela en fait vingt et je suppose que dans certaines municipalités, il va avoir des ajournements. Cela va en faire trois ou quatre. Cela fait 25, 30 réunions. Si on veut que les administrateurs élus soient là, en même temps qu'ils vont faire leurs autres "jobs" au niveau local et au niveau du comté, cela fait des réunions pour les gens, aller les écouter. Il ne faut pas se leurrer non plus et finalement, on va avoir le même monde. Quand tu fais cela juste sur les orientations, après cela, il

faut que tu reviennes sur le détail. Tu es aussi bien de le faire sur le détail d'un coup sec et de tout y mettre. C'est notre point de vue.

M. Chevrette: D'accord. Dans votre mémoire, vous considérez la majorité simple pour l'adoption du schéma? Si on regarde cela théoriquement, à la limite, si cette suggestion était retenue, un schéma pourrait être adopté par le quart des membres. Comment pouvez-vous justifier une telle position?

M. Malo: S'il y a référendum.

M. Chevrette: Ce pourrait être le quart, quand même, Le schéma d'aménagement pourrait être adopté par le quart des membres.

M. Malo: Je pense que là tu nous as par les oreilles. Tu as raison quand tu dis une majorité simple. Quand on a discuté de ça, on ne s'est pas posé la question à savoir si ce ne pouvait pas être la majorité absolue et si la question avait été posée, je ne peux présumer de ce qui serait sorti de la réunion. On a voté la majorité simple, par rapport aux deux tiers, tout le monde pensant 50% par rapport aux deux tiers. Il y a quelque chose là: mon opinion personnelle de la majorité absolue, 50% des membres — là, c'est mon opinion personnelle, ce n'est pas l'opinion du CRD — je pense que cela aurait du bon sens. En fait, on a mis en balance les deux tiers avec les 50% et on pensait 50%. Mais on a accepté 50%, à condition qu'il y ait une possibilité de référendum, parce qu'il y avait aussi la discussion, la possibilité d'enlever complètement le référendum et on a préféré garder 50% et la possibilité de référendum présenté comme il est là, s'il y a plus que 50% des citoyens décisionnels, sinon... Parce que s'il y avait seulement 15% des gens qui se présentent au référendum et qu'ils votent, là on se pose la question sur la valeur du référendum et des hommes politiques avec la responsabilité qu'on va leur donner; il faut qu'ils l'assument.

M. Chevrette: ... vous soulevez deux questions précises, à savoir qui initiera les discussions sur le découpage du territoire et par quel mécanisme les avis seront acheminés au gouvernement. Vous les soulevez en termes d'interrogations, mais j'apprécierais que vous me donniez votre opinion. Comment voyez-vous cela, vous autres?

M. Malo: Si vous demandez au Conseil de comté de Joliette de se prononcer, le Conseil de comté de Joliette que vous connaissez aujourd'hui, et que vous les réunissez, il y a de fortes chances qu'étant en groupe ils n'essaieront pas d'en rejeter une demi-douzaine d'entre eux pour les faire passer dans un autre comté. Ils vont dire: On reste comme on est; on est bien comme cela; on est un groupe de "chums". Si vous réunissez les gens d'une autre façon, il y a des chances qu'ils répondent autrement, parce que finalement, les gros qui vont avoir à discuter de cela, ce sera les élus en place.

Alors, si vous réunissez, par exemple, les gens du nord, de Saint-Gabriel à Rawdon, dans ce coin-là et que vous posez la question, ensemble, ils vont se regarder et ils vont dire: on ferait une bonne "gang". On pourrait faire un comté autour de Saint-Gabriel et on pourrait peut-être... Les autres rendus au rang Berthier pourraient faire un comté autour de Berthier et là, c'est l'option trois qui a des chances de sortir. Mais si vous réunissez le Conseil de comté de Berthier, du sud au nord, et Joliette, il y a des chances qu'ils disent: On est une "gang" de "chums" ensemble, on va rester comme on est là, cela va bien. Sauf que cela ne répond sûrement pas au découpage socio-économique. Il y a une tendance à vouloir le groupe qui va désirer se perpétuer.

M. Chevrette: Si je tire une conclusion des affirmations que vous faites, il ne faut pas partir des conseils de comté actuels pour amorcer le découpage.

M. Malo: C'est possible que dans certains endroits ce serait une bonne affaire parce que cela correspond à une réalité socio-économique. Dans notre coin, cela ne correspond pas du tout. Ce sont des bandes de terrains de 20 pieds de large et de 200 milles de long. Il faudrait peut-être repartir, chercher une formule pour réunir le monde et qu'ils se posent la question collectivement, ensemble. Ce n'est pas facile. C'est une grosse boîte à prendre avec des petits bras.

M. Chevrette: Mais quand vous avez posé deux questions, c'est demeuré interrogatif au niveau de la consultation. Comme bonhomme qui travaillez avec ces groupes régulièrement, selon votre opinion personnelle, qui devrait amorcer cela?

M. Malo: Nous allons nous en mêler sûrement. On pense que cela fait partie de notre "job" que de faire asseoir les gens ensemble pour qu'ils en parlent.

M. Chevrette: C'est ce que je voulais vous faire dire, mais cela m'a pris du temps.

M. Malo: II y a peut-être des indications qui devraient être données et il ne faudrait pas que cela parte seulement de nous.

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, je serai relativement bref. C'est un mémoire qui est étoffé, qui ne prend pas quatre chemins pour exprimer son avis sur une foule de choses et c'est justement à cause de la solidité du mémoire que je n'ai pas énormément de questions à poser, parce que les opinions sont assez claires là-dedans.

Je note plusieurs choses avec beaucoup d'intérêt. Je note votre souci de l'équilibre dans la logique entre les responsabilités que l'on confierait à l'organisme responsable de l'aménagement

et les pouvoirs actuels, les responsabilités actuelles des municipalités. Je pense que c'est important que nous gardions à l'esprit cette notion de juste équilibre entre les deux.

Je suis particulièrement frappé — et j'applaudis fortement — par votre recommandation pour que le référendum n'ait qu'une valeur consultative à moins que 50% des gens ne se déplacent pour s'occuper de leur affaire. C'est un principe que j'aurais voulu voir inscrit dans toute la procédure de tous les référendums, parce que l'on sait ce qui arrive: les gens qui sont relativement contents de ce qui est proposé ne se déplacent pas et ceux qui ne sont pas contents sortent et l'on a une participation de 20%, et 11% de la population bat une mesure qui est acceptable et même désirée par la majorité des gens. Je trouve que cette chose que vous soulignez a une grande importance.

Je note également votre insistance sur la nécessité de définir l'organisation future, l'organisation politique des instances que l'on va créer. Vous mentionnez avec beaucoup d'à propos la disproportion entre l'importance de la structure et la seule fonction d'aménagement quand on ne précise pas quelles seraient les autres fonctions. Si on ne les précise pas, si on ne les attribue pas de façon précise à cette instance de responsabilités, on doit présumer, la loi étant là, la Loi des cités et villes, le Code municipal, la future loi générale des municipalités, que ce sont les municipalités qui auront à assumer ces responsabilités. Tel est l'état actuel de nos statuts.

Je note enfin votre commentaire à la page 25 sur le zonage agricole et sur le fait que la zone permanente qui ne pourra faire l'objet de modification aura été déterminée avant la mise en marche du processus de détermination et d'adoption d'un schéma d'aménagement. Il me semble que nous avons besoin d'éclaircissements là-dessus de la part du gouvernement.

J'arrive enfin à une question que je voudrais vous poser. Elle a trait à la page 24, la représentativité politique. Vous recommandez que chaque municipalité soit représentée par une personne, mais j'aimerais comprendre comment vous établiriez un juste équilibre entre les municipalités, compte tenu du fait que dans beaucoup de régions il y a une ville populeuse qui domine par l'importance de sa population et par la force économique dont elle jouit et, par contre, dans le milieu rural, il y a un grand nombre de municipalités et si l'on donne à chacune une voix autour de la table...

Prenons le cas qui est devant nous. Pensez-vous que la ville de Joliette accepterait d'avoir un seul représentant et une seule voix à une table où il y aurait une voix pour Saint-Paul, une voix pour Saint-Charles-Borromée, une voix pour Saint-Pierre, une voix pour Crabtree? Je vois mal la ville de Joliette accepter de participer à l'exercice sous de telles conditions. Alors, quelle serait la pondération que vous apporteriez pour que l'harmonie puisse régner autour de cette table et que la justice soit atteinte?

M. Malo: On s'est posé la même question que vous. Ce sur quoi on s'est prononcé, c'est qu'on ne veut pas un conseil de comté avec 60 personnes autour de la table. Nous ne nous sommes pas prononcés sur le nombre de votes que chacune des personnes peut transporter. Là-dessus, on laisse, telle que présentée dans le projet de loi, la possibilité aux municipalités de s'entendre. Ce pourrait être un vote par 1000 personnes, un vote par 5000, un vote par 10 000. A eux de s'entendre. On garde cette option-là. On s'est prononcé sur le nombre de personnes parce qu'on ne veut pas d'un conseil avec 60 personnes. On a le modèle avec les commissions scolaires régionales. Elles n'ont même pas quorum. Le problème c'est de trouver quorum parce qu'il y a un désintéressement, il y a trop de monde autour de la table. Les gens ont l'impression qu'ils ne participent pas.

M. Dumas: II y a aussi la possibilité qui a été discutée lors des assemblées que, par rapport au pouvoir d'aménagement comme tel, ils accepteraient à la limite d'être un représentant par municipalité. Même les villes à l'intérieur du comté, pour l'exercice de l'adoption du...

M. Malo: Si ce n'est que sur l'aménagement, s'il y a d'autres pouvoirs, c'est autre chose.

M. Goldbloom: D'accord, je comprends cela, mais je me sens obligé de vous poser une question additionnelle. Vous invoquez l'espoir que les municipalités s'entendent sur une formule de pondération, mais qu'est-ce qui arriverait si elles ne s'entendaient pas? Comment pourrait-on arriver à un processus qui permettrait la prise d'une décision dans l'harmonie? Qui prendrait la décision? Qui établirait la formule si les municipalités ne s'entendaient pas spontanément?

M. Malo: Si les municipalités ne s'entendent pas, il n'y aura pas d'harmonie. Il va falloir qu'à un niveau supérieur, on impose une décision. Ce sera, on le présume, la responsabilité du ministre.

M. Goldbloom: Vous ne trouvez pas qu'il...

M. Malo: Si on ne s'entend pas. Si vous présumez qu'on ne s'entend pas.

M. Goldbloom: Oui, je ne présume pas que l'on ne s'entendra pas, mais je suis assez réaliste et j'ai assez d'expérience du milieu municipal pour croire que l'on n'arrivera pas à une entente dans tous les coins de la province. Vous ne trouvez pas qu'il serait préférable que la loi prévoie une formule et que tout le monde sache, au départ, quelle serait la formule suivant laquelle les municipalités devraient prendre leur décision?

M. Malo: Personnellement, je le ferais, mais au niveau de la table du conseil régional de développement, il y a des maires, il y a toute sorte de monde et on a dit: Non, on va laisser la chance

aux municipalités de s'entendre au moins là-dessus. Mais on ne voulait pas que les municipalités aient la possibilité de se retrouver 60 autour de la table. (11 h 15)

Le Président (M. Laplante): Le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Très brièvement, le CRD de Lanaudière nous a livré ce matin un des bons mémoires qu'il nous a été donné d'entendre depuis le début des audiences. Il y a de très bonnes suggestions, des suggestions réalistes. Vous dites être d'accord avec le principe, vous souscrivez d'emblée aux principes mêmes du projet de loi quant à la participation des citoyens à la prise de décisions et également en ce qui concerne le principe de la responsabilité des élus. Vous soulignez l'exagération considérable et multiple — c'est le terme que vous avez employé dans votre mémoire — quant aux étapes à franchir. Vous nous avez livré vos arguments là-dessus et vous nous dites également que le projet de loi alourdit considérablement les rapports entre les municipalités et les comtés.

Vous dites que vous êtes d'accord avec le principe de la participation des citoyens, d'abord la prise de décisions et deuxièmement un autre principe qui est la responsabilité des élus à décider. Vous dites: Les élus sont là pour décider.

Comment peut-on concilier le fait que vous suggérez, par exemple, de mettre le mot "doit" au lieu de "peut"? Vous suggérez de changer ce mot. Vous dites également dans votre mémoire: "Le pouvoir d'ordonnance du ministre sape l'esprit de décision à la base". Vous ne trouvez pas que cela va en contradiction avec les principes du projet de loi? Vous semblez dire que, du fait que le ministre peut tout simplement ordonner, cela sape l'esprit de décentralisation. Je parle toujours au niveau de l'aménagement, du schéma. Comment concilier ces propos? Vous êtes d'accord avec le principe et vous dites que le ministre peut renverser tout cela d'un geste de la main.

M. Malo: Justement, on dit qu'il ne devrait pas pouvoir renverser...

M. Goulet: II ne devrait pas...

M. Malo: ... tout cela, sauf ce qui concerne l'action gouvernementale. Théoriquement, dans le projet, le ministre peut le refuser, parce qu'il n'aime pas la densité dans tel ou tel coin. Il peut le faire. Cela ne veut pas dire qu'il a l'intention de le faire. Je connais assez M. le ministre, en tout cas, celui-là, pour penser qu'il ne le fera pas. Mais on ne veut pas que cela reste dans la loi, qu'il puisse le faire.

M. Goulet: Mais l'action gouvernementale en ce qui a trait aux travaux de voirie, aux services publics, l'Hydro-Québec, le gouvernement est en arrière de tout cela. Vous ne pensez pas qu'à un moment donné il va falloir que le ministre puisse prendre une décision quelconque. Au niveau de l'aménagement...

M. Malo: On accepte cela dans ces domaines-là.

M. Goulet: Vous acceptez cela dans ces domaines-là.

M. Malo: C'est clair, c'est ce qu'on a dit. On accepte que le ministre puisse le faire dans le cas, justement, de ce qui relève de l'Etat et des utilités publiques qui relèvent de l'Etat.

M. Goulet: Une dernière question. Je connais plus ou moins la région de Joliette. Vous avez certainement des municipalités... Oui, j'imagine. Vous avez certainement des municipalités agricoles dans votre comté. Avec tous ces principes, vous ne devez pas être d'accord que le projet de loi 90 soit venu avant le projet de loi 125?

M. Malo: On l'a dit.

M. Goulet: Vous l'avez dit, mais je voulais vous le faire dire en commission, parce que vous ne l'avez pas lu dans votre mémoire tout à l'heure. Vous l'avez passé...

M. Malo: Non, mais on ne l'a pas lu parce qu'on nous a demandé d'abréger. C'était clair, il n'y avait pas beaucoup d'explications sur la page et on avait... je pense qu'on est venu le dire en commission parlementaire à l'automne.

M. Goulet: M. le Président, une dernière question. Vous suggérez une personne élue pour chaque municipalité. Il reste que ce serait le maire ou que ce pourrait être une autre personne, une personne autre qu'un conseiller municipal, parce que lorsque vous dites "élu par chaque municipalité", vous voulez dire par chaque citoyen, parce que souvent lorsqu'on parle de municipalités, on parle du conseil municipal. Est-ce que vous voulez dire "élu par les citoyens d'une municipalité" ou "choisi par un conseil municipal"?

M. Malo: C'est sûrement choisi par le conseil municipal de la municipalité. On présume qu'ils ne choisiront pas le président du comité de citoyens. L'expérience montre que quand ils délèguent quelqu'un de la municipalité, d'habitude ils délèguent le maire ou un conseiller.

M. Goulet: Ce que je veux dire — et je termine là-dessus, M. le Président — cela pourrait être une autre personne qu'un maire ou un conseiller.

M. Malo: Théoriquement, mais cela ne nous est même pas venu à l'esprit que cela pourrait l'être, parce qu'on n'a...

M. Goulet: Une personne élue pour vous, c'est un maire ou un conseiller. D'accord, merci M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, je voudrais d'abord remercier le Conseil régional du développement de Lanaudière de l'excellent mémoire qu'il a...

M. Chevrette: ... déformation professionnelle.

M. Léonard:... préparé sur ce sujet. Il est particulièrement fouillé sur plusieurs aspects du projet de loi et je tiens encore une fois à vous remercier de tout ce travail, du travail de consultation que vous avez fait là-dessus.

Je voudrais aussi vous remercier de l'appui que vous apportez au projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme. Je pense que c'est important à un moment donné qu'il y ait des organismes comme ceux-ci qui se décident à donner un appui. A mon avis, je pense bien qu'il est pertinent.

Je voudrais apporter un certain nombre de commentaires sur ce qui a été dit ici ce matin, notamment quant à la structure. On a dit: c'est une structure très élaborée pour faire de l'aménagement. Je voudrais rappeler une chose: un pouvoir d'aménagement est un pouvoir très important. Il s'agit de la planification. L'aménagement étant l'organisation du territoire, il s'agit de la planification et, à mon avis, il n'est pas superflu de voir que ce soient des maires qui prennent les décisions autour de la table, lorsque ça les concerne de façon générale sur le territoire. D'autre part, il est important que les villes soient autour de la table. Donc, automatiquement il y a des gens et des élus responsables qui sont là. Cela amène une structure peut-être compliquée ou plus complexe, mais je ne pense pas qu'on puisse en faire l'économie. Je voudrais simplement dire que ce n'est quand même pas si compliqué que ça non plus que les maires soient autour de la table.

Quand on a fait le schéma d'aménagement de la CRO les maires y étaient et je pense bien qu'il ne s'agissait pas de déléguer non plus, soit à des fonctionnaires ou à des techniciens, l'exercice de cette fonction. Automatiquement, je pense qu'on s'en tient à un principe fondamental du projet de loi, qu'on en revient au principe que les décisions sont prises par des élus et qu'ils doivent aussi rendre compte de leurs décisions et qu'on est strictement au niveau politique.

Je voudrais aussi faire un commentaire sur le financement. Sur le plan du financement, il y a des sommes inscrites dans le budget présentement, le budget du Québec. Il s'agit de la confection, de l'élaboration d'un schéma d'aménagement. Je pense bien que cela ne se fait pas non plus dans une seule année, qu'il faut prendre le temps de faire le schéma d'aménagement, mais je crois aussi qu'il est prématuré de penser donner des sources autonomes de financement, en tout cas dans l'état actuel des choses, au conseil de comté pour l'élaboration du schéma d'aménagement. Je ne dis pas que ça ne viendra pas cependant, mais je crois que présentement, c'est une première étape. La loi sera votée ultérieurement et je pense bien que, pour la première année, on s'en tient à un mode de subvention non discrétionnaire, mais un mode de subvention qui va être rendu public ultérieurement.

En ce qui concerne l'avis du conseil de comté par rapport aux règlements d'emprunt, il me semble que, lorsqu'on fait des règlements d'emprunt, il s'agit habituellement, en tout cas, de travaux importants qui peuvent avoir des relations avec le schéma d'aménagement. Ce qui est demandé, c'est un avis du conseil de comté, ce n'est pas décisionnel parce que la décision reste toujours à la Commission des affaires municipales du Québec et ce n'est qu'un avis.

Je pense que si l'on veut que le schéma soit sérieux, qu'on en respecte la conformité, il est important que cet avis existe quelque part et qu'il soit émis par le conseil de comté.

D'autre part, dans votre mémoire vous émettez une réserve quant au pouvoir d'ordonnance du ministre, que l'on retrouve à l'article 28. Ce point a aussi été soulevé par le député de Bellechasse. J'aimerais vous préciser que le ministre ne peut demander des modifications au schéma que s'il ne respecte pas les orientations du gouvernement. C'est ce qui est dit à l'article 28. Je le lis: "Si le ministre estime que le schéma ne respecte pas les orientations du gouvernement, il peut demander au conseil de comté de le modifier". Donc, ce pouvoir ne porte pas sur tout le contenu du schéma.

Cette remarque m'amène à parler des règlements d'intervention du gouvernement. Avec la loi 125, l'Etat devra s'astreindre à des règles plus strictes d'intervention. Ainsi, lorsqu'un schéma est adopté par le comté, il lie le gouvernement et ses mandataires. C'est le sens de l'article 127. Si le gouvernement se trouve dans l'obligation d'intervenir, il doit en avertir le conseil de comté, négocier avec lui, justifier son action. Je vous pose une question: Ne croyez-vous pas que ces nouvelles règles constituent une nette amélioration par rapport à ce qui existe actuellement, alors que chaque agent du gouvernement peut procéder unilatéralement?

M. Malo: Sans aucun doute, et on est entièrement d'accord que ça lie le gouvernement. Ce sera peut-être emmerdant pour le gouvernement, mais si on veut que les citoyens d'une région assument la décision d'aménagement, il faut que ça lie le gouvernement et que le gouvernement accepte ce que les citoyens de la région veulent, à moins que ce soit pour un intérêt national et si ça fait une bataille politique, cela en fera une. Que vous acceptiez ce risque-là, ce sera très bénéfique pour la région. On est d'accord là-dessus.

M. Léonard: C'était la question que je voulais poser sur ce sujet, parce qu'à mon avis c'est très important. Ça reprend ce qu'on a dit antérieurement, notamment avec le député de Bellechasse. Merci.

Le Président (M. Laplante): MM. Gaumond,

Malo et Dumas, les membres de cette commission vous remercient pour votre participation.

M. Malo: Merci beaucoup.

Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le Conseil de comté de Matapédia. Messieurs, je vous prierais de vous présenter, de présenter votre organisme et les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît. Suivant les règles de cette commission, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et environ 40 minutes de questions. Allez-y monsieur.

Conseil de comté de Matapédia

M. Saint-Gelais (Robert): M. le Président, mon nom est Robert Saint-Gelais, préfet de comté de Matapédia. Les représentants du Conseil de comté de Matapédia sont: MM. Jean-Paul Simard préfet suppléant, Théodore Gagné, maire, Lucien Soucy, maire, Alfred Landry, maire, Gervais Paquet, secrétaire-trésorier, Benoît Bernier, ingénieur municipal, Jean-Pierre Morneau, agent d'information du comté.

Le Conseil de comté de Matapédia est heureux d'exprimer publiquement, par le biais du présent mémoire, ses réflexions sur le projet de loi 125, intitulé "Loi sur l'aménagement et l'urbanisme " présenté et déposé à l'Assemblée nationale du Québec par le ministre d'Etat à l'aménagement, M. Jacques Léonard, en décembre 1978.

Dans un premier temps nous ferons l'historique du Conseil de comté de Matapédia pour ensuite mieux connaître l'évolution de pensée des élus municipaux, jusqu'à l'expertise d'un projet de schéma d'aménagement que nous vivons intensément depuis quelques mois.

Comme vous pourrez le constater à la lecture de la conclusion, nous félicitons le présent gouvernement et en particulier le ministre responsable, M. Jacques Léonard, d'avoir enfin reconnu le comté municipal comme structure porteuse politique et administrative à développer.

Je laisse la parole à M. Simard.

M. Simard: M. le Président, l'historique. Le comté municipal de Matapédia a été créé par un arrêté en conseil datant de 1911. Il se compose de 24 municipalités et d'un groupe de territoires non organisés pour une population totalisant 18 000 habitants ou, si vous préférez, 75% de la population du comté municipal de Matapédia.

En consultant les archives, nous constatons que les principales activités, de la date d'incorporation jusque vers les années, cinquante, étaient l'organisation d'un réseau de communication entre les municipalités, le drainage des terres agricoles, la protection de la jeunesse, les ventes pour taxes.

En 1955 les maires en conseil, compte tenu du peu d'investissement du secteur privé dans la construction d'édifices à bureaux, décidèrent d'ériger leur propre palais de justice au coût de $150 000 dont le tiers fut subventionné par le gouvernement central en fonction du maintien du bureau d'enregistrement dans ledit palais de justice.

Au début des années soixante-dix, un secrétariat permanent fut implanté ayant pour mandat une gérance sur le palais de justice, l'administration des affaires courantes du comté et un droit de regard sur l'organisation en commun de divers services pour les municipalités composant ledit conseil de comté. (11 h 30)

Lorsque la réforme de l'évaluation foncière est apparue, nous étions alors prêts pour recevoir cette nouvelle responsabilité et c'est ainsi qu'est née, en décembre 1977, la direction de l'évaluation du Conseil de comté de Matapédia avec comme mandat principal la confection des rôles d'évaluation, nouvelle génération.

Antérieurement, à cette réforme, les maires en conseil, conscients de leurs responsabilités et devant l'inexistence de structures industrielles, ont voté les crédits pour structurer le développement socio-économique du comté. C'est ainsi qu'a pris forme la direction du développement avec comme mandat la recherche de solutions globales mettant fin définitivement à l'exode de notre population active vers des régions industrialisées.

Voilà, M. le ministre et messieurs les membres de l'Opposition, l'évolution qui nous a permis d'entreprendre l'automne dernier la confection de notre schéma d'aménagement. Il est à noter que jusque-là, le conseil de comté n'a bénéficié d'aucune aide financière gouvernementale et que les crédits nécessaires pour maintenir nos différents services provenaient essentiellement de la taxation foncière auprès de nos composantes.

C'est à ce titre que nous avons obtenu du ministre d'Etat responsable à l'aménagement, M. Jacques Léonard, une subvention nous permettant d'engager l'équipe technique requise pour élaborer notre propre schéma d'aménagement.

Expertise de premiers pas en matière d'aménagement de notre territoire. Gestion des déchets solides. Un premier dossier d'aménagement abordé par le conseil de comté a été celui de la gestion des déchets solides. Afin de ne pas allonger le présent mémoire, nous réduirons à sa plus simple expression l'expérience vécue.

Dans le plan directeur de la gestion des déchets solides du Service de Protection de l'environnement, la région administrative 01 dont fait partie le comté de Matapédia était contrainte de fermer tous les dépotoirs de son territoire et, en contrepartie, de créer un site d'enfouissement sanitaire pour les agglomérations de 2000 habitants et plus avec, comme contrainte, que toutes les municipalités sises dans un rayon de 30 kilomètres étaient obligées d'utiliser ledit site d'enfouissement. D'après notre budget pro forma, pour réaliser un tel projet, plus de $300 000 devaient être investis par les utilisateurs.

Les maires du comté, incluant ceux des deux villes du territoire, ont réagi vivement à cette ligne directrice centralisée et ont proposé dans un

mémoire présenté au ministre délégué à l'environnement, M. Marcel Léger, leur propre compromis concernant la gestion des déchets solides de notre région.

C'est ainsi que le ministre Léger, par le biais du directeur du Service de protection de l'environnement, a reconnu la maturité des maires en conseil et est maintenant disposé à recevoir notre propre réglementation concernant la gestion des déchets solides dans notre territoire.

Cette mesure permettra d'économiser l'investissement initial de $300 000 et maximisera l'utilisation de certains équipements en place. La somme ainsi économisée pourra alors être investie dans le développement de notre communauté.

Schéma directeur d'aménagement. Le 7 septembre 1978, le préfet du comté de Matapédia signait conjointement avec M. Marcel Pelletier, directeur général de l'Office de planification et de développement du Québec, un protocole d'entente concernant la confection d'un schéma directeur d'aménagement pour le territoire du comté municipal de la Matapédia. Les maires des villes d'Amqui et de Causapascal, M. Sylvio Bérubé et M. Yvon Desrosiers ont également signé ce protocole.

Cette entente a ceci de particulier: en plus de nous fournir l'aide financière requise pour le maintien d'une équipe chargée de participer à l'élaboration du schéma directeur d'aménagement, le cadre de l'équipe a été élargi pour permettre l'embauche d'un ingénieur civil. Ce professionnel agit comme soutien technique pour les municipalités du comté et nous pouvons vous confirmer ici que les résultats obtenus sont très positifs. Pensons seulement aux problèmes d'aqueduc et d'égout, voirie municipale, gestion des déchets, construction d'immeubles municipaux, etc.

En plus de rationaliser les dépenses plus haut mentionnées, l'ingénieur sera d'une utilité indispensable concernant l'identification des coûts ainsi que la localisation technique des équipements et des infrastructures que le comté considère essentiels et de caractère intermunicipal qui seront inclus à l'intérieur de notre schéma directeur d'aménagement.

Ressources en personnel technique. L'équipe technique se compose des éléments suivants: un ingénieur civil, un technicien en aménagement, un chargé de projet, un agent d'information, un secrétaire. Cette équipe technique est sous la responsabilité du comité administratif du conseil de comté.

Nous avons connu une certaine anxiété au cours du recrutement qui s'explique par le fait qu'il est parfois difficile d'intéresser une main-d'oeuvre qualifiée à venir travailler et s'établir dans une région périphérique comme la nôtre. Le recrutement accompli, l'équipe technique s'est mise au travail.

Elus municipaux versus l'équipe technique. Dans l'élaboration de notre avis d'opération, une règle de base a été omise et c'est la suivante: la vitesse de croisière dans l'élaboration du schéma directeur d'aménagement doit être proportionnelle à la capacité d'absorption des élus et malheureusement, c'est avec regret que nous avons dû freiner les travaux pour mieux analyser le travail accompli et réorganiser le tout selon nos objectifs et en fonction d'un leadership d'élus municipaux.

Consultation des municipalités de comté: A peine un mois après la réorganisation de nos structures, un plan de travail accompagné d'un échéancier a été adopté par le comité administratif et en second lieu par l'ensemble des maires du conseil de comté.

La consultation des municipalités locales sur le contenu du schéma directeur ainsi que sur la cueillette des données est maintenant amorcée et, au moment d'écrire les présentes lignes, le travail de consultation est actuellement terminé. C'est inscrit 30%, mais actuellement c'est complété.

Déjà nous voyons pointer à l'horizon les grandes orientations de l'aménagement de notre territoire de même que certains dossiers de décentralisation, tels la gestion des lots publics intramunicipaux, le drainage agricole (cours d'eau municipaux ou intermunicipaux) et la voirie d'été, prétextant une utilisation optimale des équipements servant au déneigement qui pourraient facilement et rationnellement être recyclés avec la main-d'oeuvre pour les travaux requis par la voirie d'été ou "petite voirie" et le drainage des terres agricoles (cours d'eaux municipaux et intermunicipaux).

Certes, nous pouvons noter une forme d'interrogation dépeignant le sentiment d'inquiétude dans l'ordre actuel de la fiscalité en fonction de ces pouvoirs nouveaux, mais après une certaine vulgarisation de la réforme proposée, nous voyons une lumière s'allumer.

Interrelation entre la voirie, agriculture, travaux municipaux: Pour les raisons énoncées au paragraphe précédent, nous, du Conseil de comté de Matapédia, croyons sincèrement qu'il y aurait une économie d'échelle à réaliser en retournant, au conseil de comté, l'élaboration et la responsabilité de même que la surveillance des travaux de voirie d'été ou petite voirie, drainage des terres agricoles et divers travaux déjà réalisés par les municipalités locales. Notons les principaux avantages d'une telle décentralisation: utilisation maximale des équipements existant; utilisation rationnelle de la main-d'oeuvre requise l'hiver pour le déneigement et conservée à l'emploi de la municipalité l'été souventefois juste pour des travaux de maintenance; diminution des coûts de réalisation de certains travaux; exécution plus expédi-tive des projets; motivation et identification des travaux par une communauté locale, d'où le sentiment d'appartenance; rationalisation des travaux en fonction des besoins des utilisateurs; achat de groupe permettant la négociation meilleure sur les prix tels que les huiles, gazoline, pièces d'entretien, achat d'équipements, assurances, etc.

Interrelation entre l'évaluation foncière et l'aménagement du territoire: Possédant notre propre service de l'évaluation foncière, plusieurs éléments permettront une utilisation maximale des

ressources humaines et physiques dans la réalisation de notre schéma directeur d'aménagement, tels: équipe multidisciplinaire; équipements à dessin servant à la fois à l'évaluation et à l'aménagement; cartes possédant la même échelle pour les matrices graphiques, périmètre d'urbanisation, plan d'affectation des sols, etc.; utilisation maximale des locaux; rationalisation dans les frais de déplacements (aménagement et évaluation); données socio-économiques servant à la fois à l'aménagement et à l'évaluation.

Approche pour la formation de la commission d'aménagement: La thèse qui avait été retenue jusqu'à tout dernièrement était l'unification des villes d'Amqui et de Causapscal au conseil de comté. C'était là l'essence même ou la volonté intégrale du projet de loi 125, à savoir intégrer les cités et villes au conseil de comté, communément appelé conseil de comté renouvelé.

La démarche proposée pour matérialiser ce rêve avant l'adoption du projet de loi 125 était la création de la commission d'aménagement, c'est-à-dire amener les maires des municipalités rurales et urbaines à travailler conjointement autour d'une même table. Concrètement, cela voulait signifier la présence de 26 maires du comté venant siéger à la commission d'aménagement.

Or, on en a beaucoup parlé. Des démarches ont même été faites entre des élus de chaque palier de gouvernement pour voir enfin la création de la commission, sans toutefois amener l'unanimité et son organisation.

Un des principaux problèmes rencontrés fut la question de la représentativité des municipalités rurales et urbaines. Les maires des deux villes surtout manifestaient une part très grande d'anxiété en rapport à la représentativité. Allait-on les noyer et les intégrer au conseil de comté? Allait-on anihiler l'existence des petites municipalités au profit des plus grandes? Telles étaient et demeurent toujours les interrogations des élus municipaux pour ce qui concerne la création de la commission d'aménagement.

De plus, théoriquement nous travaillions vers un échec inévitable dans le temps. Nous chevauchions littéralement les structures tant au niveau des municipalités urbaines qu'au niveau de l'organisme politique qu'est le conseil de comté. On maintenait d'une part les structures actuelles pour le conseil de comté (24 municipalités, comité administratif, etc.)

D'autre part, on jumelait ce corps politique à un niveau qui se voyait, cette fois, plus élargi. Résultat: les deux villes se sont à moult reprises désistées par peur d'assimilation au Conseil de comté.

Un constat important. Or, la création de la commission est indispensable pour l'évaluation des travaux d'aménagement au niveau de tout le comté et pour la consultation concernant l'organisation structurale du futur conseil de comté renouvelé.

Introduction de la nouvelle stratégie. Notre proposition est fort simple. Au lieu d'essayer d'intégrer les villes au conseil de comté par le biais de la commission d'aménagement, nous suggérons que la dite commission se crée de façon sectorielle. L'objectif qui nous a animés dans la planification et dans l'organisation de cette stratégie est d'une part la volonté de revaloriser les trois pôles existants dans le comté et, d'autre part, permettre que chacun des secteurs ait sa juste part dans l'élaboration du schéma d'aménagement.

Pour ce qui concerne le choix des membres de la commission, nous avons pensé qu'il serait pertinent de retrouver obligatoirement, siégeant à la commission, le maire de chacun des pôles, soit respectivement le maire de Sayabec, d'Amqui et de Causapscal. Pour ce qui est des deux autres représentants pour chaque secteur, ils seront choisis parmi les huit maires provenant des paroisses satellites de chaque pôle. Par conséquent, il y aura trois représentants par secteur, soit un total de neuf sièges plus celui d'un président préalablement choisi par les membres de la commission d'aménagement.

Ainsi, nous respecterons le rythme d'évolution de chacune des municipalités rurales et urbaines.

Le mandat de la commission ne sera pas décisionnel en termes de réglementation. Elle produira des avis politiques en matière d'aménagement et ce, au profit des deux paliers de gouvernement, soit les municipalités urbaines et le conseil de comté, d'où émaneront pour chaque gouvernement les réglementations pertinentes au schéma de sa municipalité, conformément au schéma du comté, puisque les grandes orientations en matière d'aménagement auront été préalablement débattues en commission et en séance du conseil. De plus, la commission d'aménagement se penchera sur l'organisation éventuelle du conseil de comté renouvelé et en particulier, sur les trois éléments suivants: territoire (son intégrité); la représentativité et la fiscalité.i

M. Saint-Gelais: Et c'est ainsi, messieurs, que si nous avons mis tant d'ardeur à décrire nos activités intermunicipales, c'est que nous voulions démontrer, hors de tout doute, qu'une corporation de comté qui s'en donne la peine peut être la structure porteuse politique et administrative recherchée par le présent gouvernement. C'est dans ce sens que nous, les élus du Conseil de comté de Matapédia, disons oui au projet de loi 125.

Recommandations et avis. Toutefois, nous aimerions procéder aux recommandations suivantes avant son adoption. Le Conseil de comté de Matapédia souhaite l'adoption du projet de loi 125 dans les meilleurs délais. Les maires en conseil veulent conserver l'intégrité de leur territoire. L'intégration des représentants des villes se fera d'abord sous le prétexte de l'aménagement du territoire, permettant l'ajustement des collaborations et provoquant par la suite une collaboration naturelle et spontanée. Que la délégation entre le gouvernement central et la municipalité ne soit pas qu'une expression décentralisée et que le gouvernement et le ministre se retirent davantage du projet de loi 125; que le financement des

conseils de comté soit ou bien statutaire ou autonome pour ne pas être à la merci des transferts discrétionnaires; que la rémunération des membres du conseil de comté soit établie en même temps que la sanction du projet de loi 125 par la troisième lecture; que le processus de consultation soit allégé afin d'activer le processus et d'atténuer les coûts. L'aménagement du territoire devra comprendre le zonage agricole des terres. Dans notre région, la loi du zonage agricole ne s'applique pas pour l'instant, loi 90. Nous voulons dire par là que le conseil de comté intégrera à l'intérieur de son schéma d'aménagement, suite à l'étude de la problématique, la réglementation requise afin de protéger notre potentiel en fonction des objectifs d'aménagement et de développement du conseil de comté.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Léonard: M. le Préfet, merci du mémoire que vous avez présenté à la commission et qui décrit l'expérience que vous avez vécue depuis plusieurs mois déjà et qui donne des résultats très positifs. Il me semble que votre mémoire a l'air riche d'une réalité vécue. (11 h 45)

Je voudrais faire quelques commentaires par rapport à ce que vous y dites. Votre mémoire fait d'abord connaître aux membres de cette commission l'une des quatre expériences pilotes qui ont été faites dans le Québec en ce qui concerne la préparation de schéma d'aménagement.

Il y a plusieurs aspects positifs qui se dégagent de votre démarche, notamment au niveau de la collaboration intermunicipale. Je pense que c'est le premier mémoire qui insiste autant sur cet aspect des choses. De plus, je pense que le conseil de comté en est un qui est reconnu comme étant très dynamique dans le Québec, en ce sens qu'il joue un rôle très actif dans la préparation de son schéma d'aménagement, donc, qui a des perspectives d'avenir quant à son territoire et qui joue ainsi un rôle très actif dans le soutien technique qu'il fournit aux municipalités du territoire. Vous avez bâti une équipe très compétente sur ce plan.

Une des constatations qu'il faut tirer de votre mémoire, c'est qu'une corporation de comté qui s'en donne la peine, peut devenir la structure porteuse d'aménagement du territoire, c'est ce que vous dites d'ailleurs en conclusion de votre mémoire.

Il convient aussi de souligner — je vous en remercie — votre accord avec le projet de loi 125. Vous en recommandez même l'adoption dans les meilleurs délais; c'est ce que nous souhaitons tous.

Je voudrais revenir sur le financement des comtés. Je vais dire une chose qui a peut-être déjà été dite il y a plusieurs jours, deux semaines, en ce qui concerne ce financement. Votre cinquième recommandation suggère que le financement des conseils de comté soit ou bien statutaire ou autonome pour ne pas être à la merci de transferts discrétionnaires. Je rappellerai ceci: Le budget du

Québec en 1979/80 indique que les conseils de comté seront financés au départ par un programme de $2 100 000. C'est inscrit aux crédits du ministère des Affaires municipales. D'autre part, tel qu'annoncé à la conférence Québec-municipalités et tel que réaffirmé dans le discours du budget, toute responsabilité nouvelle sera assortie d'une source de financement nouvelle. Je pense que c'est un engagement du gouvernement qui a d'ailleurs déjà été pris à la conférence Québec-municipalités du mois de juin dernier.

Pour ce qui est du financement à moyen et long termes des comtés renouvelés, le comité conjoint d'orientation sur l'aménagement et la décentralisation étudiera cette question et fera des propositions au gouvernement plus tard. Je vous invite même à lui présenter vos recommandations dans le cours de ses travaux.

Quant aux subventions versées aux comtés, elles ne seront pas discrétionnaires; je tiens à le dire. Lorsque le projet de loi sera adopté et que les comtés auront leurs lettres patentes, ils pourront se prévaloir de subventions qui seront versées selon des critères objectifs que nous sommes présentement à définir. Donc, il ne s'agit pas de subventions discrétionnaires.

Je voudrais maintenant vous poser quelques questions. Vous déclarez à la page 6 de votre mémoire que lors de l'élaboration de votre devis d'opération, vous aviez omis la règle de base suivante et je vous cite: "La vitesse de croisière dans l'élaboration du schéma directeur d'aménagement doit être proportionnelle à la capacité d'absorption des élus." Est-ce que vous pourriez m'expliquer ce que vous entendez par cette règle de base, ou, en d'autres termes, quelle place les élus doivent-ils occuper selon vous dans l'élaboration du schéma?

M. Saint-Gelais: M. Gagné va répondre à votre question.

M. Gagné: Pour répondre à cette question, on sait que, dans le comté de Matapédia, il y avait tellement de problèmes à résoudre, qu'il fallait absolument faire vite parce que tout notre monde s'en allait. Alors, nous avons mis une équipe technique en place. Un bon jour on s'est aperçu qu'on allait trop vite pour ce que les élus municipaux pouvaient assimiler. On perdait la suite des dossiers et à un moment donné on a été obligé de dire: II vaut mieux aller moins vite et aller sûrement avec la population, parce qu'on sait qu'un jour on aura à se présenter devant la population pour faire accepter ces règlements.

C'est pour ça qu'on dit ici aujourd'hui que parce que nous sommes dans une région — ce n'est pas pour déprécier les gens — où le degré d'instruction n'est pas trop avancé, on s'est rendu compte qu'on allait beaucoup trop vite pour ce qu'on pouvait assimiler.

M. Léonard: A votre avis, vous auriez été en difficulté pour expliciter tous les détails des composantes du schéma?

M. Gagné: C'est cela.

M. Léonard: Publiquement. D'autre part, vous avez constitué une équipe technique de cinq personnes, si je comprends. C'est quand même considérable. En plus de votre service d'évaluation foncière?

M. Gagné: Oui, monsieur.

M. Léonard: Est-ce que vous voyez des avantages à ce que le comté dispose d'un personnel permanent? Est-ce que vous pourriez détailler davantage là-dessus?

M. Paquet: Je suis secrétaire-trésorier et coordinateur du schéma. En fait, un des avantages majeurs d'avoir des permanents comme tels, c'est que cela va définitivement déteindre sur la qualité du travail qui va être produit. Ce ne seront pas des interventions ponctuelles. Ce sera un caractère de continuité comme tel. Une des caractéristiques de l'équipe que nous avons, quand on parle de mul-tidisciplinaire, nos employés qui travaillent au service de l'évaluation peuvent aussi bien, à ce moment, travailler au niveau du schéma d'aménagement, que ce soit à la confection de cartographies ou à l'échange de simples données socio-économiques comme telles. C'est dans ce sens qu'on a réussi à faire ce mariage qui s'avère quand même heureux.

M. Léonard: Vous faites un échange de personnel entre les deux équipes.

M. Paquet: De personnel et de matériel technique et de données.

M. Léonard: Est-ce que vous pourriez expliciter davantage le rôle des uns et des autres, celui des élus et celui de l'équipe technique? Je ne sais pas si quelqu'un...

M. Paquet: D'accord. Dans la première étape, d'abord, notre plan de travail comprend six étapes bien précises. Les premières étapes ou la première étape comme telle, s'appelle l'élaboration de la problématique préliminaire. Evidemment, le travail a commencé par une consultation des 26 municipalités incluant les deux villes du comté. Présentement, on est en train d'écrire cette problématique préliminaire et la commission d'aménagement va siéger pour prendre connaissance des grandes orientations comme telles.

Or, le travail technique dont on faisait un peu allusion tantôt, à une vitesse de croisière, c'est important maintenant que nous, en tant que conseil de comté, nous arrêtions pour pouvoir regarder ensemble la nature tout au moins le préliminaire de notre potentiel et de nos contraintes de comtés et c'est là qu'on est en train d'ajuster le rôle de l'équipe technique par rapport au rôle des élus comme tels. En fait, c'est une vulgarisation du plan de travail comme tel, pour une meilleure compréhension par l'élu municipal. C'est un éche- lon bien important que les maires autour de la table du conseil de comté puissent bien comprendre le processus global du schéma d'aménagement et il faut mettre le temps qu'il faut pour le vulgariser.

M. Léonard: Est-ce qu'il est arrivé souvent qu'il y a eu des éléments que vous aviez inscrits ou que vous aviez proposés qui ont été renversés ou rejetés par les élus?

M. Paquet: A l'heure actuelle, le travail de la commission s'est fait pour une grande partie par le comité administratif. Evidemment, c'est toute la couleur politique municipale qui est en train de prendre le dessus. Ce serait peut-être aux hommes politiques à répondre. Il y aurait peut-être des dossiers dans lesquels, nous, comme techniciens, aimerions plonger plus à l'intérieur. Par contre, on se rend compte que, sur le plan politique municipal, ce n'est peut-être par forcément les priorités des élus. C'est là qu'il faut, en tant que fonctionnaires, être assez adultes pour se retirer et présenter le dossier à nos élus.

M. Léonard: ...

Une Voix: Actuellement, dans le comté de Matapédia, on a formé un comité administratif depuis trois ans et on se réunit au moins une trentaine de fois par année. Même, depuis les Fêtes, cela doit faire tout près de cela, trente fois, qu'on se réunit. Les réunions sont assez longues, c'est-à-dire de 19 heures jusqu'à 23 heures, 23 h 30 des fois. On a pensé discuter pour pouvoir mettre ces cartes sur table et avec les cinq membres du comité administratif et le président comme préfet, cela donne pas mal de travail à nos gars qui travaillent dans la boîte en bas.

M. Gagné: Là-dessus, il faut même ajouter que c'est vrai pour répondre à la question de M. le ministre. C'est déjà arrivé qu'on a renversé la question de la technique. Sans trop s'avancer, on pourrait dire qu'on en était déjà au développement pendant qu'on n'avait pas encore commencé à faire notre schéma d'aménagement. On a dit: Ce n'est pas le temps de parler de l'industrie; c'est le schéma d'abord. Il fallait voir si le plan d'ensemble... mais je dois vous dire en passant que nous avons une équipe formidable, on s'entend très bien, on sait où on va et pas de problèmes...

M. Léonard: Vous vous êtes donné plusieurs services par l'intermédiaire du conseil de comté. Ce sont les municipalités qui ont fait cela durant les mois qui ont précédé, peut-être même avant que vous ne commenciez cette opération. Alors, si je comprends, c'est de cette façon qu'il y a des membres de votre équipe technique, notamment l'ingénieur civil, je ne sais pas lequel — il n'est peut-être pas ici — en tout cas vous fournissez des services ou du travail pour les municipalités du comté. Alors quels sont les services que le conseil de comté offre aux municipalités actuellement et

comment réagissent les municipalités face à cette situation?

M. Bernier (Benoît): D'abord un premier aspect de la question, les services offerts ont trait à toutes les responsabilités des municipalités, tout l'aspect technique de la responsabilité, c'est-à-dire l'alimentation en eaux potables, les eaux usées, la gestion des déchets solides, la voirie, même les équipements de loisirs. A un moment donné on a travaillé pour une municipalité sur le système de glace artificielle dans une municipalité. Ce sont tous les services en fait dont une municipalité a besoin au niveau du génie municipal. Pour le deuxième aspect, les municipalités dans lesquelles on a travaillé semblent très intéressées au service et même des questions pour lesquelles ils n'auraient pas fait appel à une firme d'ingénieurs-conseils parce que cela aurait été trop dispendieux et le service étant disponible il y a une communication qui s'établit entre les municipalités et le service de génie municipal. Cela devient un peu un service pour chacune des municipalités plus qu'uniquement un service de comté.

M. Léonard: J'ai aussi une autre question en ce qui concerne le schéma lui-même et les informations gouvernementales. Vous avez eu besoin d'un certain nombre d'informations de la part du gouvernement et des ministères. J'aimerais vous demander comment vous avez procédé pour avoir cette information et quelles suggestions vous pourriez nous faire pour améliorer les contacts entre le comté et les organismes gouvernementaux.

M. Saint-Gelais:... demander aux fonctionnaires.

M. Paquet: Trêve de plaisanterie on pourrait commencer en disant: Si les ministères en région avaient les portes ouvertes comme les gens de l'OPDQ l'ont, je pense que ce serait peut-être beaucoup plus facile, mais il ne faut jamais être négatif non plus. Nous avons procédé par une résolution du comité administratif demandant à l'OPDQ en région, par le biais de la conférence administrative, de nous procurer les intentions d'aménagement et de développement des ministères en région. Cela a été acquiescé d'une façon, quand même, assez rapide auprès de la mission d'aménagement de la conférence administrative. S'il y avait une suggestion à faire, peut-être, je le dis en tant que secrétaire du conseil de comté, sans vouloir m'immiscer non plus, j'aimerais, lorsque siège cette mission d'aménagement, à la conférence administrative, peut-être être invité pour préciser davantage le sens de nos demandes et qu'il y ait une compréhension plus cohérente.

M. Léonard: Une dernière question, si vous le permettez, M. le Président. Vous nous parlez d'un problème qui concerne le site d'enfouissement sanitaire dans le comté et vous avez eu, à ce moment-là, des négociations avec les services de protection de l'environnement dans le but de trouver un compromis. Dans quelle mesure le fait que vous soyez constitué en comté et que vous collaboriez avec les villes vous a-t-il permis de trouver ce compromis? Est-ce que cela a été déterminant? Dans quelle mesure cela a-t-il été déterminant?

M. Saint-Gelais: M. Gagné.

M. Gagné: Je pense que, pour ne pas répéter, tout le monde est au courant de la loi et des règlements surtout sur l'enfouissement. Dans notre région, il y a deux petites villes — je les appelle les petites mini — qui dépassent un peu plus 2000 de population. Avec la réglementation de la loi de l'enfouissement, ces deux villes étaient obligées d'aller dans des enfouissements régionaux, et moi, voisin d'une grande ville, j'étais obligé de me soumettre et tous les petits villages aux alentours, parce qu'on parlait d'un périmètre de 30 milles autour d'un dépotoir régional. Devant cette situation, on s'est réuni avec les maires des deux villes autour d'une même table. Nous avons regardé la réglementation du ministère. On a dit: Dans notre région ce n'est pas notre priorité. On a dit: Oui aux règlements. On va arrêter de faire brûler, on va arrêter de faire des dépotoirs, mais à des taux comme ceux-là... on estimait à $300 000 pour enfouir les déchets solides pour une population de 18 000 habitants chez nous. Alors, on a fait une proposition au ministère de l'environnement. Cela a été assez lourd, mais on a été ferme. (12 heures)

On a dit: Nous sommes à construire un schéma d'aménagement, on a trop de chemin à faire. Tout est à refaire chez nous, on n'ira pas mettre $300 000 dans des déchets solides.

Dans nos municipalités, nous avons toujours une personne supplémentaire qu'on est obligé de garder l'été pour réparer. On a de l'équipement, on s'est dit: Pourquoi pas, chez nous, on n'irait pas avec notre "back-hoe", le lundi matin, faire une tranchée, prendre nos déchets et les enterrer, deux municipalités ensemble, pour éliminer les coûts? Alors, là-dessus, on était tous d'accord. C'est là-dessus qu'on a réussi à le faire accepter du gouvernement, et on le remercie aujourd'hui d'avoir enfin compris les besoins d'une région.

Je suis sûr que vous aussi aujourd'hui vous allez comprendre qu'une région comme la nôtre ne peut se permettre de bâtir à partir de lois gouvernementales qui s'appliqueraient à toutes les régions du Québec. Les régions ne se ressemblent pas les unes des autres et il est bien important que des schémas d'aménagement doivent se construire sue le champ avec nos propres techniciens. Nous autres, les élus, on leur dit: C'est ça que tu va faire et c'est comme ça qu'on va se bâtir.

Le Président (M. Laplante): Merci monsieur. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Merci, M. le Président. M. le préfet, messieurs, j'ai lu et écouté votre mémoire avec beaucoup d'intérêt, justement parce que

l'historique que vous faites de vos actions dans ce domaine est frappant, et j'ai beaucoup apprécié le soin que vous avez pris en rédigeant votre mémoire de cette façon.

Il y a deux questions que j'aimerais vous poser. A la première page du mémoire, dans l'introduction, vous offrez des félicitations au ministre qui est assis devant moi ici et vous dites qu'il a enfin reconnu le comté municipal comme structure porteuse politique et administrative à développer. Mais quand j'arrive à la page 13, je trouve parmi les recommandations celle qui se lit comme suit: "Les maires en conseil veulent conserver l'intégrité de leur territoire ".

J'aimerais savoir si vous voyez la reconnaissance du comté municipal comme étant la reconnaissance strictement de ce qui existe ou, si en faisant cette remarque très obligeante à l'égard du ministre, vous avec tenu compte de cette idée qui semble être dans l'air, que les limites des comtés municipaux seraient modifiées radicalement. Ac-cepteriez-vous une modification des frontières de votre comté municipal?

M. Simard: Actuellement le comté de Matapédia est formé de 24 municipalités rurales et on veut englober naturellement dans le schéma ou dans la commission d'aménagement les deux villes de Causapscal et Amqui. C'est pourquoi on dit que l'on veut que le comté de Matapédia reste tel quel. On veut absolument — les élus municipaux désirent — que ne s'agrandisse pas le comté tel quel.

M. Goldbloom: Je vous remercie de cette précision.

A mon tour j'amerais faire, pendant quelques secondes, un peu d'historique. Quand j'ai déposé en 1976 le projet de loi no 12, j'ai été invité — pour ne pas dire convoqué — à une réunion des préfets du Québec et j'y ai rencontré tous les préfets. Ils étaient presque tous là, et ils m'ont dit: "Ecoutez, ce que vous proposez dans le projet de loi no 12, la constitution de conseils d'agglomération où les villes siégeraient avec les municipalités rurales intéressées par le développement de cette agglomération et l'aménagement de son territoire, ce n'est pas une chose qui nous est acceptable. Il y a des structures qui existent qui s'appellent conseils de comtés et qui existent depuis plus de cent ans et vous seriez mieux inspiré de vous servir de ce qui existe, d'inviter les municipalités régies par la Loi des cités et villes à trouver une formule de collaboration avec les conseils de comté existants. Travaillez comme cela; ce sera, en quelque sorte — c'est l'opinion que j'ai retirée des interventions des préfets — un sine qua non pour que fonctionne l'application de votre projet de loi, de votre éventuelle loi.

Il me semble que c'est une question d'une importance fondamentale parce que, pour que l'application de l'éventuelle loi soit un succès, les participants au niveau local devront être heureux, devront être contents de travailler à l'intérieur de la structure qui sera définie. C'est pour cette raison que je tenais à vous poser d'abord cette question. Votre réponse a été claire.

Ma deuxième questionn en est en quelque sorte un corollaire. Vous mentionnez à la page 11 une idée qui pourrait, à votre point de vue, résoudre un certain problème de méfiance de la part des villes qui sont comprises dans le territoire de votre comté. Vous suggérez que les maires de Sayabec, Amqui et Causapscal siègent d'office et que, dans chacun des trois secteurs, deux représentants, deux maires de municipalités régies par le Code municipal sièqent également et qu'un conseil de neuf membres soit ainsi constitué. Je voulais vous demander tout simplement — peut-être que vous l'avez mentionné et que je l'ai manqué en vous écoutant — les maires d'Amqui, de Causapscal et de Sayabec ont-ils été consultés? Les conseils municipaux? Lestroispopulationsurbaines? Les trois villes seraient-elles consentantes?

M. Paquet: D'abord, il faudrait peut-être préciser que, dans les trois secteurs proposés, il y a deux municipalités qui sont régies par la Loi des cités et villes, soit Amqui et Causapscal, Sayabec étant une municipalité rurale. Donc, pour Sayabec, il n'y a pas de problème, dans le sens que c'est une décision qui provient du conseil de comté, donc que le maire a participé comme tel.

Maintenant, pour ce qui a trait à l'approche des deux villes, on peut préciser un peu la nature de l'approche. Il y a eu des discussions par le biais du comité administratif du conseil de comté et les maires des deux villes, les deux maires comme tels avec le résultat qu'à la dernière séance régulière du mois d'avril, la ville d'Amqui, soit la ville la plus populeuse, celle qui se situe au chef-lieu, a endossé, a passé la résolution pour faire partie de la commission d'aménagement, alors que la deuxième ville, malgré qu'on ait: écrit qu'elle ne siégerait pas, va siéger à la commission d'aménagement, mais pas à titre officiel. En tout cas, pour faire un constat bien pro forma, le maire préfère consulter davantage ses conseillers sur les objectifs comme tels de la commission. On a fait, par exemple, un test, il y a deux semaines. Dans la vallée, on parle beaucoup de papeterie — je pense que je vais faire sourire le député Marquis — les deux maires des villes de Causapscal et d'Amqui, conjointement avec le préfet du comté, on rédigé un mémoire qui a été présenté au premier ministre de la province de Québec, M. René Lévesque. Donc, on peut à ce moment, parler de commission d'aménagement, parce que ceux que nous qualifions les trois grands du comté, soit le préfet et les deux maires des villes, les trois grands se sont assis à la même table et se sont concertés sur l'objectif, c'est-à-dire le but comme tel du développement économique et les objectifs du schéma.

M. Goldbloom: Une dernière question, M. le Président et je retourne à l'historique que je faisais. Il est évident que les villes ne veulent pas se faire imposer des décisions par les municipalités rurales et que les municipalités rurales ne veulent pas non plus se faire imposer des décisions par les villes.

De la discussion que j'ai eue avec les préfets est sortie une suggestion que les intéressés puissent s'asseoir autour d'une table et que quel que soit le nombre de porte-parole du côté urbain, du côté rural, il y ait une égalité de poids entre les deux et qu'advenant une divergence de vues irréductible, l'impossibilité de s'entendre sur quelque chose, un organisme comme la Commission municipale du Québec soit appelé à siéger comme arbitre et trancher la question. J'aimerais savoir si vous avez une réaction à cette notion?

M. Paquet: Est-ce que vous préférez une réaction technique ou politique?

M. Goldbloom: Je serais intéressé par les deux, certainement. C'est plutôt une question politique, je pense, parce qu'il y va de l'intérêt des municipalités de ne pas se faire imposer des choses par un autre ordre de municipalités.

M. Gagné: Bon, je pense que chez nous, il n'y a pas de problème à savoir de se faire dicter des règles de conduite ou d'embarquer sur le terrain d'un autre. Il s'agit là d'un schéma d'aménagement, d'une discipline d'avenir, avec lequel chacune des municipalités va conserver son autonomie. Cela est clair dans notre esprit, c'est simplement une question de confiance et de dialogue. Chez nous, nous avons subi toutes les tortures. Vous avez connu le temps du BAEQ et ce qu'on avait dit des gens de la région. C'est nous qui avons payé la note. Certains en ont profité, mais nous avons payé la note. Alors, on a compris qu'aujourd'hui, il ne fallait pas se fier sur d'autres, il fallait commencer à se faire confiance nous-mêmes. Cette confiance-là règne dans la vallée. Donnons-nous encore six mois à travailler ensemble dans le milieu rural et urbain dans notre région et le portrait va être changé de beaucoup.

M. Goldbloom: Merci beaucoup, j'ai bien aimé votre mémoire et j'ai bien aimé la présentation que vous en avez faite.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Bellechasse... Oui, monsieur.

M. Simard: J'aurais une information à donner. Tout à l'heure j'ai répondu à M. Goldbloom concernant l'intégration de notre territoire, c'est strictement au point de vue municipal qu'on désire garder le territoire tel quel.

M. Goulet: Très brièvement, M. le Président, je félicite aussi le conseil de comté d'Amqui parce que ce qu'on a vu dans ce mémoire-là, c'est du vécu et du concret. C'est réaliste, surtout lorsqu'on nous parle d'aménagement au niveau des sites d'enfouissement sanitaire, je pense qu'il faut vivre dans un comté rural pour savoir que ce qu'on nous propose et ce qu'on veut, ce n'est pas tout à fait la même chose, ou ce qu'on peut faire.

J'aimerais savoir la moyenne de la population de vos municipalités, outre les deux villes d'Amqui et Causapscal, est-ce que les autres paroisses se ressemblent? Quelle est la moyenne de population des autres municipalités?

M. Paquet: Dans le comté globalement, il y a une population de 24 000, 25%, soit 6000 qui proviennent des cités et villes et 18 000 qui proviennent des municipalités rurales. Dans les 18 000 c'est réparti à ce moment-là en 24 municipalités. Il y a au moins 12 municipalités de moins de 1000 habitants. On a des municipalités de 500, 600, 700, 800 et 900 habitants.

M. Goulet: Ce qui veut dire que, sauf Cau-capscal et Amqui, la représentativité, au niveau d'un conseil de comté, les autres ce serait à peu près égal, je veux dire, un représentant par municipalité, ce serait...

M. Paquet: II y a quatre municipalités, en y incluant peut-être le village de Sayabec comme tel, plus la municipalité du village de Lac-au-Saumon qui se situe entre deux secteurs, qui chevauche un peu.

M. Goulet: Vous avez une expérience au niveau de la décentralisation, même si on parle d'aménagement de territoire, mais on l'a souligné dans le mémoire. L'équipe technique qui travaille pour le conseil de comté, pour les municipalités, est payée de quelle façon? Quelle proportion des municipalités contribuent? Seulement lorsqu'elles s'en servent ou par le biais de leur conseil de comté? Comment cela fonctionne-t-il au niveau du financement de cette équipe?

M. Paquet: Est-ce que vous parlez au sens large?

M. Goulet: L'équipe technique.

M. Paquet: Au sens large évaluation aménagement ou aménagement tout simplement?

M. Goulet: Vous avez une équipe technique actuellement qui est embauchée. Un ingénieur, tout ce monde-là, les cinq. La plupart des municipalités se sont prévalues des services de cette équipe-là pour un aréna, pour un réseau d'aqueduc et d'égout, etc. Comment cette équipe est-elle payée? Ce ne peut pas être du bénévolat justement; les maires font du bénévolat, mais pas les techniciens. (12 h 15)

M. Paquet: M. le maire dit de ne pas donner le tuyau. Tout simplement, on a mentionné dans le mémoire, au début, que présentement il y a un protocole d'entente entre l'Office de planification et de développement du Québec et les conseils de comté. Evidemment, on a une subvention conditionnelle à la réalisation d'un schéma qui s'étend sur deux exercices financiers. Donc, lorsque les municipalités font appel à l'équipe technique, il n'est pas question de répartition versus les municipalités, parce que c'est déjà payé par les impôts des citoyens de la province. Maintenant, la condi-

tion pour qu'une municipalité ait accès aux services techniques, c'est que la demande soit faite auprès des élus, c'est-à-dire soit à la commission ou au comité administratif. Ce n'est pas moi en tant que fonctionnaire ou d'ingénieur en tant que fonctionnaire qui va décider d'oeuvrer dans une municipalité. Ce sont des hommes politiques qui vont nous donner le mandat d'y aller.

M. Goulet: Cela répond très bien à ma question. J'avais hâte de voir comment c'était financé, parce que cela ne règle pas le problème de toute façon.

Changement de propos, une déclaration qui a été faite par le ministre des Affaires municipales et le ministre d'Etat à l'environnement — je me réfère au journal La Presse, un article du journal La Presse du 19 mars — où on dit que, dans nos petites municipalités, c'est fini le bénévolat des maires; ce sera des maires à temps plein. Alors, les municipalités de 800, 600 à 1200, 1300 habitants, qu'est-ce que représenterait pour vous le salaire d'un maire à temps plein, suite à l'adoption du projet de loi sur l'aménagement du territoire?

M. Simard: II n'y a absolument aucune municipalité qui peut se permettre cela.

M. Goulet: Vous n'avez pas peur, à ce moment... si vous me le permettez, M. le Président, je lis ici: "L'heure du travail bénévole et de la générosité publique tire à sa fin dans le monde munir cipal. Avec l'adoption prochaine d'une loi — et je cite toujours l'article du journal La Presse — nationale d'aménagement du territoire, la création d'une centaine de communautés régionales, les fonctions d'un maire deviendraient une occupation à temps plein ou presque et ceci dans les petites municipalités". On continue: "II est clair, a dit le ministre Léonard, qu'une approche vers la décentralisation" et ainsi suite. Bon, vous n'avez pas peur et ce n'est pas mon idée que vous disiez oui ou non. Je veux tout simplement savoir... Vous n'avez pas peur que, si on en venait à une telle chose, on veuille à un moment donné forcer indirectement la fusion des municipalités quand on arrive avec des choses comme cela. Si vous dites non, il n'y a aucun danger ou...

M. Simard: Cela pourrait peut-être en venir comme cela a fait avec les commissions scolaires, nos régionales.

M. Goulet: J'ai deux autres petites questions, M. le Président. A la page 13, votre recommandation d), vous dites — je vais essayer de vous le citer par coeur — on veut, une fois que la loi 125 sera votée, que le ministre puisse se retirer graduellement. Pouvez-vous expliquer là-dessus?

M. Simard: Lorsqu'on parle du retrait du ministre comme tel, cela concerne peut-être plus l'article 28. Les différends qu'il pourrait y avoir entre les municipalités, c'est-à-dire entre le schéma du comté... Vous savez que chaque local devra, par le biais de son plan d'urbanisme, s'aligner sur le schéma d'aménagement. Il est évident qu'à un moment donné, s'il y a conflit entre le local et le conseil de comté, il ne devrait pas y en avoir, mais s'il y en a, il va falloir trouver un mécanisme pour trouver des compromis. Ce qu'on dit c'est qu'on ne voudrait pas — j'essaie de bien refléter l'image des hommes politiques — à un moment donné, c'est que le gouvernement soit tenté de venir régler nos problèmes chez nous.

S'il faut mettre à ce moment trois, quatre, cinq ou même six mois — comme disait M. Gagné tout à l'heure — supplémentaires pour travailler sur un dossier, on le mettra, parce qu'on est tout le temps fidèle à l'axiome de base qu'on a fixé, donc la vitesse de croisière doit être proportionnelle à la capacité d'absorption des élus... l'aménagement, étant une chose politique.

M. Goulet: M. le Président, une dernière remarque. Je suis extrêmement heureux de lire les pages 7 et 8 du mémoire présenté par le gens de la Matapédia et cela a peut-être l'air drôle que je dise cela, mais quand même, il y a environ un mois, j'étais conférencier à un déjeuner-causerie et je tenais à peu près les mêmes propos. Je ne veux pas dire que vous avez copié et je ne voudrais pas que vous m'accusiez d'avoir copié votre mémoire. Je sais que c'est ni l'un, ni l'autre. Mais à ce moment, après mon intervention, je me demandais si je n'avais pas rêvé. Là, je vois des gens qui sont dans le milieu à coeur de jour qui nous arrivent avec des propos à peu près semblables à ceux que j'avais tenus et je vous félicite. Personnellement, à mon niveau moral, cela me remonte, parce que je vois que je n'étais pas le seul à penser comme cela. Je me réfère aux suggestions de décentralisation. Je sais que le projet de loi où nous travaillons actuellement est au niveau surtout de l'aménagement du territoire mais, au niveau de décentralisation, vous avez des suggestions concrètes aux pages 7 et 8 et je vous en félicite. Je vois que le comté de Matapédia ressemble énormément au comté de Bellechasse.

Le Président (M. Laplante): Merci. M. le député de Matapédia.

M. Marquis: Merci, M. le Président, des quelques minutes qui restent, comme d'habitude, aux députés d'arrière-ban.

Je voudrais, à titre de député de Matapédia, souhaiter la bienvenue à mon tour à la délégation du conseil de comté. Comme vous l'avez vu, je pense, messieurs de la commission, M. le Président, on a des gens dynamiques dans le comté de Matapédia et le député n'est pas toujours tout seul à travailler, il y a quantité de gens de bonne volonté qui sont derrière lui, qui oeuvrent dans leur domaine respectif.

Je voudrais juste, en 30 secondes, saluer également une délégation de la ville de Mont-Joli, de mon comté, qui est ici parce qu'elle a des problèmes à régler probablement et parce qu'elle est intéressée aussi à l'aménagement.

Là-dessus, j'aurais une première question. Dans votre mémoire, vous mentionnez que vous avez mené des consultations jusqu'à maintenant auprès des municipalités, auprès des élus municipaux, et je pense que c'est terminé à 100%. Est-ce que vous prévoyez, par la suite, à une étape ou l'autre, consulter également les citoyens dans l'élaboration de votre schéma d'aménagement et, si oui, à quelle étape prévoyez-vous le faire?

M. Paquet: En fait, on va peut-être reprendre une recommandation que l'on retrouve à la fin du mémoire. Nous disons que dans le projet de loi 125 on a mis beaucoup d'emphase sur la consultation du citoyen; d'abord, on les consulte sur leurs intentions préliminaires et après on revient devant nos citoyens pour les consulter sur leurs intentions définitives. Nous disons, concernant la gestion, pour alléger et rendre plus expéditif le processus, qu'il devrait y avoir seulement une consultation des municipalités et par consultation on précise que ce n'est pas ce qu'on a fait lors de la cueillette des données comme telle, mais la consultation viendrait après l'étape de l'identification des grandes orientations par la commission d'aménagement. A la suite de l'étude de la problématique du comté la problématique serait amenée devant la commission d'aménagement. On définirait bien les principes de l'aménagement, les objectifs. On passerait par toute la gamme de la formulation des possibilités, ou des priorités, ou des avenues. Lorsqu'on aurait identifié les grandes intentions d'aménagement, c'est à ce moment-là qu'on consulterait les conseils municipaux et les citoyens en fonction du mécanisme prévu au projet de loi 125.

M. Marquis: Au sujet de la consultation des citoyens, est-ce que cela va être directement le conseil de comté qui va faire la tournée des 24 ou 26 municipalités ou allez-vous utiliser les élus municipaux comme délégués dans cette consultation?

M. Paquet: Avant de répondre à cette question, il faudrait préciser qu'hebdomadairement, quand même, nos citoyens sont tenus au courant du développement du schéma par le biais de l'agent d'information qui a une chronique hebdomadaire dans le journal "L'Avant-poste de la vallée". En termes de consultation, on va s'aligner sur le projet de loi 125, à l'article 14, je crois, et ce sera la commission, par le biais du préfet, qui présidera la consultation dans les municipalités et auprès des citoyens.

M. Marquis: Vous venez de mentionner que le moyen d'informer les citoyens, c'est une chronique hebdomadaire dans "L'Avant-poste". Est-ce que vous avez un autre moyen également de communication, sinon avec la population en général, du moins avec les organismes du comté?

M. Paquet: A l'heure actuelle est rédigé un mémoire mensuel qui est acheminé aux municipalités et auprès des différents organismes socio- économiques du comté. Dans l'élaboration, dans le plan de travail qui a été accepté au niveau du comité administratif, avant de se présenter — on pourrait appeler cela une espèce de comité consultatif où le cadre serait élargi à la fois aux élus, aux organismes socio-économiques et aux hommes d'affaires — lorsqu'il y aura identification des grandes intentions et lorsqu'il y aura consultation des citoyens, une étape est prévue pour consulter spécifiquement les organismes socio-économiques, ceux qu'on retrouve plus fréquemment, je pense aux serres de la vallée, ces choses-là.

M. Marquis: Je pense que vous n'avez pas compris ma question. A part l'information... c'est-à-dire "L'Avant-poste" — je ne sais pas si je me suis trompé tantôt — est-ce que vous n'avez pas un bulletin d'information tout récent, qui est expédié à un certain nombre de personnes?

M. Paquet: Je pensais avoir répondu à cela. Je vous remercie de faire le rappel, M. Marquis. Il y a un bulletin mensuel qui décrit les étapes du schéma d'aménagement qui est adressé, en plus des conseils municipaux, à tous les présidents, à tous les organismes socio-économiques du comté et même à l'extérieur du comté.

M. Marquis: A la page 10 de votre mémoire vous mentionnez qu'un des principaux problèmes rencontrés par votre conseil fut la question de la représentativité des municipalités urbaines et rurales. Maintenant, vous avez parlé tantôt d'une espèce de dissidence de la ville de Causapscal —et c'était dans les journaux de fin de semaine — est-ce que le fait que le maire de Causapscal refuse de siéger à la commission d'urbanisme ou accepte d'y siéger d'une façon officieuse, peut ralentir le travail qui sera fait à cette commission-là ou si cela ne vous crée pas un certain problème?

M. Paquet: Je serais tenté de répondre qu'avant de se marier il faut se fréquenter. J'ai précisé tout à l'heure que l'approche avait été faite strictement au niveau des maires des municipalités en fonction du fait que le conseil de comté est composé de maires. Alors la même approche a été suivie auprès des villes.

En ce qui a trait à Causapscal, je pense qu'il va falloir aller plus loin. Evidemment il y a tout un contexte qui entoure la personnalité comme telle —on peut quand même y faire allusion — mais il va falloir une approche auprès des conseillers et je pense que maintenant, considérant ce qu'on a vu dans les journaux de fin de semaine, il y a certains membres du conseil qui vont être offusqués de ne pas pouvoir participer au travail de planification dans le comté. Je suis convaincu que celui qui s'est chargé de faire écrire ces choses-là va devoir répondre à de sérieuses questions.

M. Marquis: Une dernière question, M. le Président, si vous le permettez, concernant la représentativité du futur conseil de comté renou-

velé, il y a des suggestions dans le projet de loi. Est-ce que vous avez eu l'occasion d'en discuter ou d'analyser cela, par exemple, dans le cas concret de Matapédia avec deux petites villes. Avez-vous pris position et pourriez-vous éclairer les membres de la commission là-dessus? Cela pourrait évidemment servir au ministre et un peu à tout le monde, ce sujet-là.

M. Paquet: En fait, ça ne pose pas tellement un problème de par le contexte de population de comté. La ville la plus populeuse a 3900 habitants. Donc, à ce moment-là, c'est le principe d'un homme, un vote au départ, plus un vote par 1000 de population. Par exemple, la ville d'Amqui aurait un représentant qui serait le maire ou le maire suppléant si le maire en est incapable et la ville disposerait à ce moment-là de quatre votes.

M. Marquis: Donc, vous y allez vers la représentativité d'un homme qui serait le maire ou un adjoint, mais qui, lui, serait porteur de trois ou quatre votes plutôt que d'y aller avec quatre représentants de la ville d'Amqui. Est-ce que vous avez fait un choix ou est-ce que vous avez une recommandation à nous faire dans ce sens-là?

M. Paquet: En fait, je vais préférer faire répondre les hommes politiques, mais si on appliquait dans Matapédia ce que nous venons de dire, ça supposerait qu'il y ait 35 personnes autour de la table de concertation du conseil de comté. Alors, est-ce que les maires préféreraient travailler à 26 personnes ou à 35, je pense que la question leur appartient.

M. Gagné: On a parlé tout à l'heure de trois pôles d'importance dans la région. C'est bien important que ces trois secteurs de développement aient leur part égale. C'est notre objectif. On se doit de les desservir tous les trois sur un pied d'égalité en fonction de leur potentiel de développement. Cela est primordial.

M. Marquis: A moins que M. le Président nous permette...

M. Paquet: M. le Président, nous permettriez-vous une question ou une précision?

Le Président (M. Laplante): Une précision.

M. Paquet: Si j'ai bien compris la question de M. Marquis, on parle de représentativité au niveau de ce qu'on pourrait appeler un conseil de comté renouvelé, alors que nous, à l'heure actuelle, on travaille beaucoup au niveau de la commission d'aménagement qui comprend dix personnes. Le mandat de la commission, entre autres, c'est la gestion des déchets solides à l'heure actuelle, le schéma d'aménagement — on a les deux pieds dedans — et le troisième défi sera celui du conseil de comté renouvelé. En fait, ça reprend peut-être la farce que j'ai voulu faire tout à l'heure en disant qu'avant de se marier on va se fréquenter un peu.

M. Marquis: Alors au nom du ministre, s'il me le permet, je voudrais vous remercier de votre présence ici, de la qualité de votre mémoire et également des éclaircissements et des lumières que vous avez apportés à tous les membres de la commission. Bon voyage de retour.

Le Président (M. Laplante): Sur ce, messieurs les préfets, messieurs les maires, les membres de cette commission vous remercient de votre participation et les travaux sont ajournés sine die, ce qui veut dire, pour les gens qui sont dans la salle, que nous reviendrons ici vers 15 h 15, 15 h 30.

Fin de la séance à 12 h 30

Reprise de la séance à 15 h 30

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît! Nous sommes de nouveau réunis pour recevoir les mémoires aux fins d'étude du projet de loi no 125.

Sont membres de cette commission: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun) remplacé par M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe) remplacé Dar M. Goulet (Bellechasse); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau) remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie) remplacé par M. Léonard (Laurentides-Labelle).

Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau (Verchères) remplacé par M. Marquis (Matapédia); M. Fontaine (Nicolet-Yamaska) remplacé par M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle) remplacé par M. Tardif (Crémazie); M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), M. Vaugeois (Trois-Rivières).

Nous étions rendus à la Corporation du comté de Labelle. Avant de l'appeler, je voudrais m'as-surer que la ville de Laval est ici. Merci. L'Union des producteurs agricoles est ici encore. Merci monsieur. Les professeurs de l'Institut d'urbanisme de l'Université de Montréal. Est-ce que les professeurs d'urbanisme de l'Université de Montréal sont ici? Dans ce cas, je fais appel à la Corporation du comté de Labelle. Monsieur, si vous voulez vous identifier, identifier les personnes qui vous accompagnent et l'organisme que vous représentez, s'il vous plaît.

Corporation du comté de Labelle

M. Robidoux (Benoit): Benoît Robidoux, préfet du comté de Labelle, M. Yvan Deslauriers, notre secrétaire-trésorier, ainsi que M. Jean-Pierre Saint-Amour, coordonnateur de notre schéma d'aménagement. Nous représentons le comté de Labelle. Nous avons aussi déposé, à titre d'information, deux fascicules sur le travail de notre

schéma d'aménagement, le un et le deux. Je demanderais à mon secrétaire de lire notre mémoire.

M. Deslauriers (Yvan): Permettez-moi de lire, au nom du préfet, la lettre de présentation de ce mémoire. Mesdames, messieurs, il me fait plaisir de vous présenter le mémoire de la corporation du comté de Labelle au sujet du projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme. Vous noterez que ce mémoire a été adopté par résolution de notre conseil le 14 mars dernier. Il témoigne, en quelque sorte, de notre expérience en matière d'aménagement. En effet, 14 de nos 26 municipalités ont déjà adopté une réglementation sérieuse en matière de zonage, construction, lotissement et installations septiques alors que les autres ont manifesté l'intention de suivre l'exemple. De plus, notre conseil de comté a commencé en juin 1978, avec une aide de l'OPDQ, l'élaboration d'un schéma d'aménagement du territoire. Enfin, dès 1975, une résolution du conseil demandait au gouvernement que l'aménagement relève des comtés. Les perspectives ouvertes avec ce projet de loi répondent donc à notre attente en nous permettant de mieux assumer nos responsabilités en cette matière.

En vous remerciant de l'attention que vous accorderez à ce mémoire, je vous prie d'accepter, mesdames et messieurs de la commission parlementaire, l'expression de mes sentiments distingués, Benoît Robidoux, préfet du comté de Labelle.

Au bas, le texte de la résolution: II est proposé à l'unanimité et résolu d'accepter avec la modification apportée lors de cette présente session le mémoire étudié et rédigé par le comité administratif et la commission d'aménagement portant sur le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme et, de plus, le reconnaît comme étant l'avis de la corporation du comté de Labelle qui devra être présenté à la commission parlementaire sur ledit projet de loi no 125. C'est adopté.

A la page suivante, on vous transmet la composition du conseil du comté de Labelle et celui de la Commission d'aménagement. Voici le texte du mémoire. La corporation du comté de Labelle a été créée par une loi de 1916 qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1918. Le territoire du comté de Labelle couvre une superficie de 1 700 000 acres. Il est situé dans les Laurentides de l'ouest du Québec et il est partagé entre les régions administratives de l'Outaouais 07 et de Montréal 06. Le comté regroupe 26 municipalités rurales, 22 000 habitants soumis au Code municipal. La ville de Mont-Laurier, 9000 habitants, est incluse à l'intérieur des limites géographiques du comté. Elle est d'ailleurs le chef-lieu et le centre principal d'activités urbaines.

Le conseil de comté de Labelle a commencé en juin 1978, avec une aide financière de l'Office de planification et de développement du Québec, l'élaboration d'un schéma d'aménagement pour le comté. Le conseil a créé à cet effet une commission d'aménagement composée de sept membres dont un représentant de la ville de Mont-Laurier.

Dans le cadre de la loi actuelle, la commission d'aménagement voit dans le schéma un outil de travail au service des municipalités et du gouvernement. Il se veut donc un instrument de planification pour harmoniser les interventions dans notre territoire et nous permettre de mieux prendre en main le contrôle de l'utilisation de ce territoire.

Ce projet-pilote permet graduellement aux membres de la commission et du conseil de mieux saisir l'intérêt, de susciter un esprit de collaboration dans les décisions individuelles et collectives qui affectent notre avenir.

En outre, nous devons souligner depuis quelques années la sensibilisation croissante de nos municipalités à se doter de réglementations adéquates en matière d'aménagement. A ce jour, 15 des 27 municipalités ont adopté une réglementation vraiment sérieuse de zonage, de lotissement, de construction et d'installations septiques. Cinq autres étudient présentement un projet de règlement et cinq municipalités ont déjà demandé une aide technique pour suivre le même exemple.

Le conseil de comté s'est d'ailleurs prévalu des dispositions récentes édictées dans l'article 392h du Code municipal pour offrir une aide technique qui ne peut satisfaire la demande, vu les moyens limités.

Enfin, le conseil a adopté, lors de sa réunion du 14 mars 1979, une réglementation de lotissement applicable dans les territoires non organisés.

Cette expérience du schéma et de la réglementation municipale nous a permis progressivement de comprendre les implications et la nécessité de réaliser la planification et l'aménagement du territoire. Elle nous a aussi montré les déficiences des lois actuelles.

Le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme, présenté par le gouvernement du Québec en décembre dernier, intervient à un moment déterminant où nous assumons vraiment nos responsabilités municipales.

C'est pourquoi nous estimons être non seulement de notre intérêt mais aussi de notre devoir de soumettre au gouvernement quelques commentaires pertinents à ce projet de loi autant en ce qui concerne ses principes et ses orientations qu'en ce qui traite des modalités bien précises de contenu au niveau réglementaire.

Les principes du projet de loi 125. Les documents d'accompagnement du projet de loi 125 présentent la décentralisation en fonction d'une perspective communautaire nouvelle.

Le fascicule 3 portant sur l'aménagement et l'urbanisme propose quatre principes majeurs. Premier principe: l'aménagement est d'abord une responsabilité politique. Deuxième principe: des pouvoirs partagés respectant les domaines propres d'intervention. Troisième principe: une concertation des choix et des actions des trois paliers de gouvernement. Quatrième principe: une participation plus active des citoyens à la prise de décisions et à la gestion de l'aménagement.

Nous acceptons globalement ces quatre principes dans cette mesure où ils consacrent l'autonomie administrative des municipalités locales et des corporations de comté.

Il est évident que le renforcement du rôle des conseils de comté suscite des méfiances bien légitimes dans Labelle, comme ailleurs au Québec. Nous croyons, cependant, qu'il est possible d'établir un climat de travail apte, d'une part, à valoriser le dynamisme des municipalités locales et à respecter l'intégrité de ces municipalités et, d'autre part, à créer un esprit de collaboration qui favorise le progrès de notre région.

Il s'agit d'un défi d'envergure et nous sommes conscients des difficultés qui se dessinent sur la route, mais nous estimons être prêts à le relever.

La réalisation de cette décentralisation ne peut être que progressive si on veut permettre à tous les intéressés de s'adapter à l'évolution et aux responsabilités. L'aménagement du territoire constitue un champ d'activité tout indiqué pour amorcer cette décentralisation. D'autres pourront venir lorsque nous serons prêts.

Nous voulons cependant, soulever une préoccupation majeure des autorités locales: le financement des conseils de comté. Actuellement, les comtés lèvent une taxe foncière pour défrayer leurs dépenses, ce qui entre en concurrence avec le champ fiscal des municipalités.

Les coûts croissants de l'administration des conseils de comté, notamment au titre de l'évaluation foncière, ont atteint un plafond tel que nous ne pouvons plus demander un effort fiscal supplémentaire des municipalités locales et des contribuables.

Or, la participation des villes, l'augmentation des assemblées du conseil et l'élaboration du schéma sont des activités qui augmenteront considérablement le budget du comté. Nous demandons donc au gouvernement du Québec de veiller à confier des sources de revenus autonomes aux conseils de comté de manière que, dès l'émission des lettres patentes créant les comtés renouvelés, nous ne soyons pas obligés de refiler la note aux municipalités. Si tel était le cas, la réforme prévue serait compromise et vouée à l'échec, et nous serions les premiers à la rejeter.

Il est opportun de formuler au gouvernement une deuxième mise en garde quant au rôle du conseil de comté. En effet, le comté ne doit pas être ni devenir un instrument du gouvernement pour mieux centraliser ou imposer des lignes de conduite aux municipalités.

La décentralisation exige trois conditions essentielles: la possession de pouvoirs véritables, un certain pourcentage d'autofinancement et une représentation élue.

Nous insistons pour que ces conditions soient maintenues ou assurées.

Les orientations du projet de loi 125. Le projet de loi 125 prévoit la création de conseils de comté renouvelés par le biais de lettres patentes et ensuite, s'ils le désirent, ces comtés peuvent amorcer l'élaboration d'un schéma d'aménagement.

Cette procédure nous semble appropriée puisqu'il nous reviendra (conseil de comté actuel et ville de Mont-Laurier) d'établir nous-mêmes les modalités de participation ou de fonctionnement du nouveau comté.

En règle générale, les procédures de création et de fonctionnement des conseils de comté nous semblent équitables et raisonnables parce qu'adaptées aux besoins particuliers de chaque région et dans cette mesure elles peuvent respecter l'appartenance actuelle des régions. Ainsi, en ce qui concerne la délimitation du comté renouvelé, il appartiendra à chaque municipalité périphérique de déterminer dans quel comté elle sera.

Il en va de même pour l'élaboration du schéma et des documents d'urbanisme du comté et des municipalités, d'autant plus qu'ils reconnaissent la nécessité d'une plus grande participation de la population. Toutefois, nous considérons que les modalités de consultation obligatoire sont exagérées. Elles devraient donc être allégées.

Nous demandons cependant au gouvernement d'exercer avec beaucoup de prudence et de diplomatie les pouvoirs qu'il s'est réservé quant à la création des conseils de comté renouvelés et aux procédures d'élaboration et de mise en oeuvre des documents d'aménagement et d'urbanisme. En effet, à la lecture du texte, le projet de loi nous semble donner au gouvernement plus de pouvoirs que ne lui en confère le Code municipal actuel. Bien que l'aménagement soit d'abord considéré comme une responsabilité politique, il ne faudra pas qu'il ouvre la porte à des abus préjudiciables aux intérêts locaux et régionaux en prétextant un intérêt national bien relatif.

Nous exprimons des réserves sur cette autorité finale. Nous suggérons qu'on puisse être soumis à des possibilités d'appel qui tiennent mieux compte de la volonté locale et régionale.

Nous voulons enfin insister sur l'importance de veiller à l'application des réglementations municipales et de comté. Le projet de loi 125 est muet sur ce sujet pourtant capital. La plupart des municipalités rurales ne peuvent se payer les services d'un inspecteur à plein temps, il en va de même du conseil de comté. Il faudra que le gouvernement assume une part de ses responsabilités en cette matière, notamment en accordant une assistance aux municipalités, mais aussi en augmentant les effectifs des services de protection de l'environnement dans notre région. Nous avons présentement un seul inspecteur des services de protection de l'environnement pour 27 municipalités. Malgré sa grande compétence, il ne peut faire de miracles.

En cette matière d'application des règlements, comme en celle du financement de l'élaboration des documents, nous ne demandons pas de généreuses subventions gouvernementales, mais la capacité, tant au niveau du comté que des municipalités, de pouvoir assumer nos juridictions.

M. Saint-Amour: Troisième partie, commentaires sur le contenu du projet de loi 125. On l'a divisée en deux parties, en commençant par la fin du projet de loi.

Le territoire des corporations de comté. On voudrait ajouter au texte actuel de l'article 142 celui qui est indiqué ici: "Toute corporation de comté doit, dans les dix mois de l'entrée en vigueur de la loi, présenter au gouvernement une requête en vue d'obtenir les lettres patentes lui permettant de modifier ses frontières internes, pour fins d'aménagement du territoire".

A l'article 144d, je voudrais voir ajouter, si possible, "ou permettre au conseil de déterminer lui-même les pouvoirs qu'il délègue à ce comité administratif". Pour l'organisation et le fonctionnement des corporations de comté, à l'article 162, le préfet devrait être élu par le vote de la majorité des voix du conseil de comté.

A l'article 165, on se demande ce qui arrive si le préfet, pendant son mandat, n'est plus maire de sa municipalité. Il faudrait prévoir que le terme du préfet se termine dès qu'il n'est plus maire de sa municipalité ou qu'un vote des deux tiers des membres du conseil lui retire sa confiance.

Pour ce qui a trait au schéma de comté, pour le contenu à l'article 5, on aimerait lire: "Les grandes orientations de l'aménagement du territoire, de même que les objectifs retenus par le schéma". Si c'était rédigé ainsi, il serait beaucoup plus simple d'établir la conformité entre les documents municipaux et le schéma de comté, ce qui éviterait des discussions inutiles.

A l'article 6, ajouter un paragraphe j) qui se lirait: Les sites d'intérêt naturel et culturel à protéger. Aussi, ajouter après l'article 6, un article qui pourrait se lire comme suit: Un schéma d'aménagement peut comprendre toute autre disposition pertinente relative à l'aménagement, mais ces dernières ne sont pas cependant obligatoires pour les municipalités. Un tel article aurait pour effet de bien établir la cohérence des éléments d'un schéma d'aménagement, sans pour autant lier les municipalités. Cela pourrait d'ailleurs faciliter le travail des municipalités lorsqu'elles élaboreront leurs propres documents d'urbanisme.

Comme nous interprétons les articles 5 et 6 comme suit: le 5, ce serait le schéma d'aménagement, doit comprendre ces éléments et ils seront obligatoires pour les municipalités, alors que pour nous, le schéma peut comprendre ces éléments, mais s'ils sont inclus, ils seront obligatoires pour les municipalités.

L'article supplémentaire que nous proposons établirait un complément approprié. Pour ce qui a trait à l'élaboration du schéma, à l'article 13, on aimerait lire: La proposition préliminaire est soumise pour avis au conseil de chacune des municipalités du comté. Une municipalité qui soumet un avis doit le produire avant la date de l'assemblée prévue à l'article 18. Cela évite des retards indus et permet de mieux tenir compte de l'ensemble des commentaires formulés dans cette municipalité.

A l'article 14, on aimerait voir ajouter: Le conseil peut également confier au comité consultatif d'urbanisme de comté ce travail d'élaboration et de consultation. Une telle possibilité permettrait à d'autres personnes que les maires de participer à ce travail.

Evidemment, dans le restant du projet de loi, certains autres articles devront être modifiés pour assurer la concordance. A l'article 24, on demande de prévoir une période de temps pour la tenue de ce référendum de même que les échéanciers.

Aux articles 33 et suivants, ce serait bon de lire: Aux objectifs et aux orientations, plutôt que seulement "aux objectifs". Cette terminologie est uniformisée dans tout le projet de loi. Cela éviterait des problèmes d'interprétation lors de l'application de la loi par la suite.

Pour ce qui a trait au contrôle intérimaire, on demande à l'article 63, que le délai prévu soit réduit, parce qu'on le considère trop long.

A l'article 65, avant de rendre sa décision, on demande que le ministre prenne avis auprès de la commission nationale de l'aménagement.

A l'article 67, ajouter: Sur demande d'un conseil de comté à l'effet qu'un tel plan de lotissement a été enregistré, la commission nationale de l'aménagement demande la correction des livres du ministère concerné.

Les règlements d'urbanisme des territoires non-organisés, les plans et règlements d'urbanisme, on n'avait pas de commentaires particuliers. Elaboration, adoption et entrée en vigueur du plan d'urbanisme. Vu les longs délais exigés dans les articles 99, 100 et 101, il y aurait lieu qu'une réglementation et un contrôle existent dans les municipalités durant cette période.

Les effets de l'article 111 n'étant que de 120 jours, ce délai est nettement insuffisant et on risque de se retrouver avec des problèmes créés par des propriétaires qui agiront à la hâte pour éviter le nouveau règlement.

Pour le règlement de lotissement, on demande de prévoir à l'article 114 que le gouvernement ou un conseil de comté peut établir pour la totalité ou une partie de son territoire des normes minimales obligatoires en matière de lotissement.

En matière de construction, prévoir à l'article 115 que le gouvernement ou un conseil de comté peut établir pour la totalité ou une partie de son territoire des normes minimales en matière de construction.

A l'article 115, on croit qu'il y aurait lieu d'ajouter un paragraphe f) qui dirait: Interdire l'émission d'un permis de construction pendant l'hiver si une telle construction exige la mise en place d'une installation septique et aussi définir cette période d'hiver.

Règlements intermunicipaux. On demandait d'ajouter une section d'un article après l'article 115 en indiquant que deux ou plusieurs municipalités peuvent conclure une entente pour élaborer un plan et des règlements d'urbanisme intermunicipaux. Elles établissent à cet effet un comité consultatif conjoint. Les dispositions de la présente loi s'appliquent à ces municipalités en les considérant comme une seule.

Cinquième partie, le comité consultatif d'urbanisme. Article 126. Prévoir qu'un conseil de comté peut établir un tel comité consultatif pour l'élaboration de son schéma et la consultation pertinente pour aider à l'application du contrôle inté-

rimaire ou étudier les documents soumis pas les municipalités et pour étudier les sujets relatifs aux territoires non organisés. On demande aussi d'ajouter après l'article 126 la possibilité pour deux ou plusieurs municipalités d'établir un comité consultatif intermunicipal d'urbanisme.

Pouvoirs et obligations du gouvernement. Prévoir qu'une ordonnance du ministre ou qu'une intervention gouvernementale ne peut être imposée si elle va à rencontre d'un schéma de comté et si la population d'un comté s'y oppose par référendum lorsque la majorité des électeurs inscrits s'est prononcée, évidemment à moins qu'il y ait une loi spéciale.

Huitième partie, dispositions générales, transitoires et finales. Il sera aussi opportun de prévoir les possibilités suivantes dans ce projet de loi. Une municipalité peut déléguer au conseil de comté ses pouvoirs d'application de ses réglementations. Inversement, le conseil de comté peut déléguer aux municipalités ses pouvoirs d'application de ses réglementations. Une corporation de comté aussi peut offrir aux municipalités une aide technique pour l'élaboration et l'application de ces documents d'urbanisme. L'article 392h du Code municipal permet cet aspect, mais l'article 216b du projet de loi 125 l'abroge. Il suffirait donc d'enlever cet article 216b du projet de loi et d'intégrer l'article 392h du Code municipal au projet de loi. Je voudrais mentionner que l'article 392h a été ajouté au Code municipal par le projet de loi 55 en 1977.

On demanderait aussi de modifier l'article 806 du Code municipal, pour prolonger la période de trois mois jusqu'à un an en ce qui a trait à la prescription des règlements des municipalités.

Je demanderais aussi de modifier les modalités des ventes pour taxe faites en vertu du Code municipal puisque les procédures actuelles encouragent indûment le morcellement excessif des terres.

On voudrait aussi prévoir la possibilité d'établir des ententes intermunicipales entre villes et comtés pour l'exercice en commun de pouvoirs municipaux. L'article 412a du Code municipal pourrait être modifié en conséquence.

On suggérerait enfin au gouvernement de ne pas se fier aux montants accordés aux conseils de comté comme norme de subvention aux comtés pour l'élaboration de leur schéma.

M. Deslauriers: A titre de conclusion, nous ne pouvons prétendre, dans ce bref mémoire, faire l'unanimité de toutes nos municipalités non plus qu'indiquer toutes les modifications que nous jugeons pertinentes dans ce projet de loi, notamment en raison de sa complexité et de ses implications. Nous croyons néanmoins qu'il s'agit d'un projet de loi passablement adapté aux nécessités et aux préoccupations de l'aménagement du territoire en milieu rural.

Il pourra d'ailleurs, à la lumière des expériences qui seront vécues, être modifié par la suite. Nous demandons cependant au gouvernement de porter attention aux commentaires que nous avons formulés et aux suggestions d'améliorations que nous avons proposées.

Pour ce qui concerne l'élaboration du schéma actuel du comté de Labelle, il nous sera possible de poursuivre les travaux selon les indications de la loi 125 et cela sans difficulté majeure à condition toutefois que le gouvernement émette rapidement les lettres patentes pour le comté renouvelé de Labelle. Ce dernier pourrait conserver l'appellation de Corporation du comté de Labelle et garder Mont-Laurier comme chef-lieu.

Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, M. le Préfet, il faut dire que je suis particulièrement heureux de ce mémoire qui vient d'un conseil de comté que je connais bien et avec qui j'ai eu l'occasion de travailler plusieurs fois et depuis longtemps.

J'ai eu l'occasion de rencontrer le conseil de comté de Labelle au cours des derniers mois et de prendre connaissance graduellement du travail qu'il a accompli dans la réalisation de son schéma d'aménagement. Je dirais que le cheminement que vous avez entrepris m'apparaît particulièrement intéressant et ce, à de nombreux égards. Vous êtes d'accord, je pense, c'est dit aussi à la fin, avec les principes que nous avons énoncés et qui sous-tendent le projet de loi 125 dans la mesure où ils consacrent l'autonomie administrative des municipalités locales et des corporations de comté. Le projet de loi no 125, à mon avis et selon, je pense, celui de mes collègues, répond à vos attentes dans ce domaine. Il est intéressant aussi de constater, vous en avez fait la démonstration, qu'il est possible d'établir un climat de travail apte, d'une part, à valoriser le dynamisme des municipalités et, d'autre part, à créer un esprit de collaboration qui favorise le progrès des régions et spécialement des petites régions d'appartenance.

Je suis très heureux de vous entendre dire qu'il vous sera possible de poursuivre vos travaux sans difficulté majeure selon les indications de la loi 125. Je ferai remarquer que ces travaux ont commencé avant la loi 125, particulièrement au cours du printemps dernier, alors que le projet de loi no 125 a été déposé le 21 décembre dernier. Vous concluez, d'ailleurs, sur le fait qu'il s'agit d'un projet de loi passablement adapté aux nécessités et aux préoccupations d'aménagement en milieu rural.

Votre mémoire nous amène une série de commentaires judicieux, mais certains d'entre eux méritent qu'on s'y arrête afin de fournir certaines informations supplémentaires. Le premier élément, c'est le financement. D'autres mémoires ont soulevé la même question quant au financement des conseils de comté et on vient de reprendre les précisions qui ont déjà été exposées à la commission à ce sujet. Encore une fois, le budget du Québec en 1979/80 indique aux crédits du ministère des Affaires municipales que les conseils de comté seront financés au départ, je dis bien au

départ, par un programme d'aide de l'ordre $2 100 000 et, tel qu'annoncé à la Conférence Québec-municipalités de juin dernier et réaffirmé dans le discours du budget, toute responsabilité nouvelle sera assortie d'une source de financement.

Pour ce qui est du financement à moyen et à long terme, le Comité conjoint d'orientation sur l'aménagement et la décentralisation étudiera cette question et fera des propositions au gouvernement. Je vous invite aussi à lui présenter des recommandations. Lorsque le projet de loi sera adopté et que les comtés auront leurs lettres patentes, les comtés pourront aussi se prévaloir de subventions qui seront versées selon des critères objectifs que nous sommes à définir présentement, mais ces subventions n'auront pas de caractère discrétionnaire. (16 heures)

J'ai relevé à la page 5 de votre mémoire certaines inquiétudes quant au pouvoir du gouvernement en ce qui concerne la création des conseils de comté et des procédures d'élaboration et de mise en oeuvre des documents d'aménagement et, d'autre part, à la page 11, élément 4.1, vous suggérez que le gouvernement ne puisse rien imposer si cela va à l'encontre du schéma de comté ou si, encore, la population s'y oppose par référendum. C'est une remarque judicieuse que vous faites; en tout cas, nous en tenons compte.

D'autre part, les avis de conformité prévus dans le projet de loi ne sont pas fournis par le gouvernement mais par un organisme indépendant, la Commission nationale d'aménagement. Celle-ci peut être appelée à donner des avis de conformité aux objectifs d'un schéma d'aménagement et des plans d'urbanisme d'une municipalité ou encore, d'une intervention envisagée par le gouvernement. Cet avis est de nature technique. Il ne s'agit pas pour la commission de juger de la pertinence des actes posés par le comté ou les municipalités. Ce n'est que par exception que les mécanismes d'appel prévus dans le projet de loi sont utilisés. Il faut distinguer, je pense, entre le régime général et le régime particulier. C'est au gouvernement, c'est-à-dire au Conseil des ministres, que reviennent l'arbitrage et la décision finale en cas de divergence aussi bien entre les instances décentralisées et les agents du gouvernement.

Le projet de loi n'est pas un instrument pour imposer des lignes de conduite. Les décisions sont prises par des hommes politiques du niveau local et il n'y aura pas d'ingérence du gouvernement. Des mécanismes d'appel jouent lorsqu'il peut y avoir conflit et c'est alors qu'existe la procédure d'arbitrage.

En ce qui concerne le contrôle intérimaire, vous dites à la page 10, élément 2.1, qu'avec les longs délais exigés dans les articles 99, 100 et 101, il y aurait lieu qu'une réglementation ou un contrôle existe dans la municipalité durant cette période pour éviter des problèmes de développement. Ce contrôle existe en vertu des articles 56 et 107 à moins que le comté ne se dote lui-même d'un règlement de contrôle intérimaire tel que prévu à l'article 58.

L'article 56 indique qu'un règlement de contrôle intérimaire existera sur le territoire du comté depuis l'entrée en vigueur d'une résolution à l'effet de réaliser un schéma jusqu'à la délivrance du dernier certificat de conformité à l'égard du plan et des règlements d'urbanisme d'une municipalité.

Pour sa part, l'article 107 indique que si un comté n'a pas entrepris un schéma et qu'une municipalité désire se doter d'un plan et de règlements d'urbanisme, les dispositions de contrôle intérimaire des articles 56 à 70 s'appliquent, en les adaptant, aux municipalités.

En résumé, un contrôle intérimaire existe justement pour prévenir les problèmes que vous soulevez. Pour ce qui concerne la consultation, à la page 5 de votre mémoire, vous dites que les modalités de consultation obligatoire sont exagérées et qu'elles devraient être allégées. Je pense que le projet de loi 125 se présente de façon à permettre une consultation des citoyens tout au long de la démarche prévue et nous croyons que la population possède le droit d'être informée et de participer activement au processus d'aménagement de son milieu de vie. Je pense que c'est aussi une position que vous adoptez; seulement vous dites: C'est un peu lourd. Certains mémoires nous ont d'ailleurs suggéré de pousser davantage cet aspect afin d'assurer une participation effective des citoyens dans la confection du schéma et des documents d'urbanisme et le projet de loi expose, lui, un cadre de consultation qui peut être adapté selon les besoins du milieu.

C'étaient là les commentaires que je voulais faire par rapport à ce que vous avez dit dans votre mémoire qui était, par ailleurs, très fouillé. Je pense que nous reconnaissons tout le travail pratique et l'expérience que vous avez prise à confectionner votre schéma et là-dessus, je pense bien que tous les membres de la commission vont prendre connaissance des documents que vous leur avez distribués et qui constituent, en tout cas, vos démarches dans ce domaine.

Maintenant, j'aimerais vous poser un certain nombre de questions de différents ordres, d'ordre politique d'abord. Vous indiquez dans votre mémoire que le projet pilote que vous avez entrepris sur le territoire du conseil de comté a suscité un esprit de collaboration entre les municipalités du comté. Je pense qu'on peut présumer qu'il y avait aussi auparavant une collaboration mais j'aimerais cependant vous poser la question suivante: La préparation du schéma a-t-elle contribué à l'améliorer et de quelle manière? Pour-riez-vous préciser là-dessus ou pensez-vous que le dynamisme du conseil de comtés se répercute aussi sur les municipalités?

M. Robidoux:... règlement dans les municipalités. C'est cela qu'on a dit aux conseils de comté de vouloir préparer le schéma et en même temps, aussi, de fournir de l'aide technique. La preuve aujourd'hui, on a quinze municipalités qui ont adopté des règlements sérieux de zonage, de

lotissement des lacs, parce que notre comté est assez touristique et cela a été bien important. Aujourd'hui, le reste des municipalités, on a à faire la préparation des règlements tout en travaillant notre schéma. Les demandes sont là sur la table. Tout ce qui nous manque, c'est le temps de leur aider à finir cela. La collaboration avec les municipalités est excellente au point de vue de schémas d'aménagement. Au début, c'était très difficile de faire accepter des lotissements de terrains de 40 000 pieds carrés et après les expériences vécues, aujourd'hui, les municipalités qui ont adopté des règlements à 25 000 pieds se trouvent mal à l'aise vis-à-vis des autres. Il faut qu'elles amendent leurs règlements pour 40 000 pieds. On voit la conscience qui peut se développer dans nos municipalités en travaillant ensemble. Elles voient qu'un schéma et des règlements sont essentiels dans nos municipalités.

M. Léonard: D'après vous, la confection du schéma, ou, en tout cas, des travaux sur l'aménagement, ont plutôt amélioré l'esprit de collaboration!

M. Robidoux-: II y avait déjà un début qui était commencé. Ge n'est pas pour vanter le comté de Labelle, mais on est assez dynamique. Cela a amélioré depuis le mois de juin l'an dernier encore d'au moins 50% la situation dans notre comté en travaillant sur un shéma d'aménagement et une conscience de comté. Ce qu'on a réussi aussi, c'est de pouvoir travailler avec une ville à l'intérieur de notre comté. La ville est consciente que si nos municipalités se développement harmonieusement et avec de bons règlements, la ville va en profiter en même temps que nos municipalités.

M. Léonard: Vous dites aussi, à la page 5, que les modalités de consultation obligatoires sont exagérées et qu'on devrait alléger tout cela. Pour votre part, je pense que vous avez axé, jusque-là, l'information et la consultation sur les municipalités et les groupes sectoriels. Pouvez-vous nous parler des résultats que vous avez obtenus jusqu'à maintenant par rapport à la consultation?

M. Robidoux: Au sujet de la consultation, au point de vue municipal, la rencontre avec les modalités qui a été faite avec notre coordonnateur et des membres de la commission d'aménagement a été excellente. Les rencontres sectorielles avec certains ministères et fonctionnaires, et aussi les personnes responsables dans les municipalités, si on parle de voirie, les inspecteurs municipaux, je pense que cela a aussi été fructueux. C'est Jean-Pierre ici qui a piloté quatorze ou quinze rencontres sectorielles, plus les 26 rencontres avec les municipalités. On a pu recueillir pas mal de données, les besoins des municipalités aussi pour les intégrer au schéma.

M. Saint-Amour: Je peux peut-être résumer la démarche qu'on a faite de ce côté-là. Au niveau de la commission d'aménagement, au tout début, en novembre, avant que le premier fascicule soit rendu public, on a d'abord publié un questionnaire-sondage dans les deux journaux qui couvrent le comté. Evidemment, cela rejoignait la grande majorité des ménages. Il y avait 14 000 exemplaires. On demandait aux gens de nous donner leur opinion sur les services d'utilité publique qui étaient disponibles dans leur municipalité et un peu leur opinion aussi sur ce qu'ils pouvaient concevoir pour l'avenir. On a eu la somme phénoménale de 86 réponses, sur une possibilité de 14 000. A ce niveau-là, c'était peut-être plus de l'information qu'on voulait diffuser, montrer aux gens les préoccupations d'un schéma d'aménagement, que d'obtenir des réponses. Ensuite, la commission d'aménagement m'a demandé de faire une tournée et j'ai rencontré chacun des conseils des 27 municipalités, incluant Mont-Laurier, pour leur demander ce qui existait dans leur municipalité, quels étaient les problèmes qui existaient chez eux et la manière dont ils voyaient les solutions à apporter à ces problèmes. Ensuite, la commission d'aménagement a convoqué une série de rencontres sectorielles. En agriculture, par exemple, en forêt, en conservation de la faune, en villégiature, on a invité des personnes qui étaient actives ou représentatives dans le milieu pour leur demander leur opinion sur les problèmes qui existaient sur les options de solutions qui pouvaient exister pour remédier à ces problèmes.

Ensuite, la commission d'aménagement a rendu publics ses fascicules, ses documents de travail. Elle les a rendus publics "at large", si on peut dire. Ils ont été imprimés en 2000 copies qu'on a envoyées au bureau de chacune des municipalités et, en même temps, on a fait une certaine publicité dans les media d'information. Ce qui fait que tous les citoyens qui sont intéressés à obtenir copie des documents de travail, du progrès des travaux de la commission d'aménagement, n'ont qu'à se présenter au bureau de leur municipalité pour s'informer et savoir exactement ce qui se fait au niveau de la commission d'aménagement.

M. Léonard: Vous parlez des documents que vous avez déposés?

M. Saint-Amour: Les deux fascicules que vous avez...

M. Léonard: Plus la brochure que vous avez donnée? Les 2000 copies, c'est...

M. Saint-Amour: C'est le fascicule que vous avez entre les mains présentement.

M. Léonard: Alors, est-ce que vous avez eu des commentaires par rapport à ces fascicules-là maintenant?

M. Saint-Amour: Jusqu'à maintenant, on a eu assez peu de commentaires. Même lors de notre congrès municipal il y a deux semaines, on a posé la question aux gens. C'étaient surtout des élus

municipaux qui assistaient au congrès municipal. On a eu un atelier sur le schéma d'aménagement et on s'est aperçu que la grande majorité des gens ne le lisent pas, et ce sont des élus municipaux, ce qui est assez surprenant. Au niveau de l'information, il y a encore du travail à faire de ce côté-là.

Vous mentionniez tout à l'heure qu'on trouve exagéré l'information que vous demandez dans votre projet de loi; premièrement il faut estimer le coût que cela peut impliquer. On a fait une estimation et cela nous coûterait à peu près $35 000 juste pour la publication des documents d'information et l'envoi aux contribuables. A cela, il faut ajouter évidemment la tournée des membres de la commission d'aménagement dans chacune des municipalités, à deux occasions.

Il y a aussi notre bulletin municipal qu'on publie depuis l'été dernier qui est envoyé à tous les élus des municipalités, aux fonctionnaires des municipalités, qui sert, en fin de compte, d'instrument de communication entre le conseil de comté et les municipalités.

M. Léonard: Mais vous dites que vous vous êtes rendu compte au cours du congrès du conseil de comté que des gens, des élus ne l'avaient pas lu. Est-ce que cela tient, au fond, au sujet lui-même ou à la façon dont cela a été présenté? Est-ce que vous avez des recommandations à faire pour, disons, rendre l'information plus efficace?

M. Saint-Amour: C'est un sujet qui a été porté, par exemple, à l'attention de la commission d'aménagement assez récemment et on se pose de sérieuses questions sur la méthode qu'on a adoptée. On a quand même essayé d'être le plus large possible, d'atteindre le plus de gens possible. Il semble que l'intérêt... Il y a un certain intérêt. Ceux qui le disent, ceux qui sont intéressés par le domaine sont pas mal satisfaits de ce qui se fait. Il va quand même falloir pousser plus loin que cela. La commission d'aménagement a même l'intention, dans les prochaines semaines, sinon dans les prochains mois, de faire d'abord une tournée d'information dans un certain nombre de municipalités pour présenter le contenu des documents de travail qui ont été rendus publics. La consultation publique aura lieu par la suite lorsque les lettres patentes auront été émises pour les nouveaux comtés.

M. Léonard: Dans le mémoire, on propose de fournir une aide technique aux municipalités. Je pense que c'est une de vos suggestions importantes. Est-ce que vraiment une des constatations que vous faites est qu'il faut vraiment aider les municipalités ou les petites municipalités à amorcer tout le processus de l'aménagement?

M. Robidoux: Quand on dit une aide technique aux municipalités, c'est pour l'aménagement, mais cela va plus loin que cela aussi. C'est comme le comté de Matapédia qui, un matin, a offert l'aide technique d'un ingénieur. C'est cela qu'on peut viser au niveau du conseil de comté. Si on parle de l'évaluation, comme nous donnons l'évaluation à des firmes, si on avait un technicien en évaluation au sein du comté, il pourrait aider les municipalités, les secrétaires-trésoriers à faire le suivi de notre évaluation.

M. Léonard: Ce que vous proposez finalement, c'est que ce soit des gens qui soient à l'emploi du conseil de comté plutôt que des firmes de consultants.

M. Robidoux: C'est cela. Oui, seulement on peut avoir... Des firmes de consultants, on n'en veut pas. Seulement on peut avoir des personnes au niveau du comté. Notre but, c'est d'avoir des personnes ressources au niveau du conseil de comté pour aider nos municipalités. Vous savez que les petites municipalités de 700 ou 800 personnes ne peuvent pas toujours se payer un ingénieur, un conseiller juridique ou quelqu'un d'autre. Quand le comté pourra donner ces services-là, les gens seront plus sensibilisés et plus de choses se feront dans nos municipalités. C'est moins coûteux aussi si chacune des municipalités fait appel à des consultants de ce genre-là.

Il y a deux ans, on a demandé à toutes les municipalités d'envoyer au conseil de comté leurs règlements qui sont préparés par des avocats, etc. Si on prend, par exemple, le règlement qu'on a fait adopter pour les roulottes, la taxation des roulottes, la municipalité a engagé un avocat pour le faire. Elle l'a envoyé au comté et d'autres municipalités s'en sont servi. C'est de l'argent qu'on épargne aux municipalités dans ce sens-là. (16 h 15)

Quand on dit aussi fournir de l'aide technique, s'il y a deux, trois ou quatre municipalités qui veulent travailler sur leurs règlements dans leur municipalité au point de vue urbanisme ou plan directeur, à ce moment, on pourrait leur fournir de l'aide technique aussi pour rassembler deux ou trois municipalités qui pourraient travailler ensemble au lieu de s'engager des personnes différentes et ainsi de suite.

M. Léonard: C'est dans le même sens ou c'est peut-être un peu différent mais vous voulez introduire dans la loi la dimension intermunicipale en ce qui concerne l'aménagement. Je pense que vous y voyez un certain nombre d'avantages, c'est-à-dire que pour vous, si je comprends, la réglementation est exportable d'une municipalité à l'autre et elles peuvent le faire conjointement.

M. Robidoux: Cela fait plusieurs années qu'on parle de fusion de municipalités. On a encore des municipalités de village et de campagne. A ce moment, au lieu de les fusionner, si on pouvait préparer nos règlements de zonage, de lotissement et d'urbanisme les deux municipalités ensemble, l'inspecteur pourrait servir pour les deux municipalités au point de vue de règlements de zonage et d'aménagement, cela deviendrait seulement une municipalité. Mais pour les autres

organisations, elles pourraient être indépendantes quand même sans avoir une fusion.

M. Léonard: II y a une chose aussi, en ce sens, le fonctionnement du conseil de comté depuis que vous avez commencé à faire de l'aménagement est-ce que cela s'est modifié?

M. Robidoux: Entre les municipalités?

M. Léonard: Au conseil du comté, entre les municipalités, mais je dirais aussi les attitudes des municipalités par rapport au conseil de comté?

M. Robidoux: Cela s'est modifié, je pense qu'on peut pressentir que les municipalités sont prudentes quand elles voient le projet de loi no 125 et quand un comté prend trop de dynamisme; à ce moment, elles ont peut-être peur à leur autonomie municipale. Il faut être prudent, il faut les rencontrer et discuter avec elles. Parce qu'il n'y a personne qui veut perdre son autonomie. C'est pour cela qu'on dit que le projet de loi, à notre sens, est bon, parce que le comté va travailler sur l'aménagement, mais ce sont les municipalités qui vont décider à l'intérieur d'un schéma de comté, ce sont elles qui vont déterminer leur réglementation dans chacune de leur municipalité.

M. Léonard: Vous indiquez dans votre mémoire que les conseils de comté actuels demandent l'émission de lettres patentes dans un délai minimum de 18 mois. Est-ce qu'il est réaliste que ce soit seulement les conseils de comté actuels qui demandent des lettres patentes.

M. Robidoux: Réaliste. A notre point de vue, il nous semble que oui. On prêche toujours pour sa paroisse, parce que les villes vont le faire, elles vont s'organiser avec leurs lettres patentes. Mais qu'est-ce qu'on veut dire par-là, surtout c'est que s'il n'y a pas cela dans la loi une obligation... On dit bien que le conseil de comté va faire son schéma d'aménagement et par la suite les municipalités vont avoir 18 mois pour se conformer. Pourquoi le conseil de comté après l'adoption de la loi 125 lui aussi n'aurait pas 18 mois pour se conformer à l'élaboration de son schéma?

Si on prend des comtés qui se touchent, qui sont contigus, le comté de Labelle, qu'il reste comme il est là ou qu'il change ses limites et que l'autre comté voisin ne demande pas ses lettres patentes mais les municipalités qui vont être laissées pour compte, qui ne veulent pas rester dans le comté de Labelle, que feront-elles dans ce temps, entre les deux? C'est pour cela qu'il va falloir que les lettres patentes soient demandées pas mal partout dans la province, parce qu'il y a des municipalités, si elles veulent changer de comté, si on en a dans notre comté de Labelle, trois, quatre ou cinq et si le comté voisin ne demande pas ses lettres patentes, ces municipalités vont être gérées par qui? Qui va s'en occuper? Au point de vue schéma, elles ne pourront pas faire de préparation de schéma; au point de vue évaluation, si elles sont encore avec nous, qu'est-ce qu'on va faire avec elles? C'est une chose qui n'est pas dite dans la loi.

M. Léonard: Par rapport aussi à ce mécanisme de délimitation de territoire, vous parlez de frontières internes d'une part et vous dites: II faudra modifier les frontières internes et vous dites d'autre part qu'il appartiendra aux municipalités périphériques de choisir leur comté. Est-ce que vous pourriez expliciter davantage sur le rapport de ces deux limites internes, externes et le mécanisme que vous voyez là-dedans?

M. Robidoux: Si on veut être sérieux, quand on parle de nos frontières internes, on sait bien que la ville de Mont-Laurier ne peut pas sortir du comté de Labelle. Ce sont nos frontières internes dans les municipalités. Elles sont réellement internes. Si on prend les municipalités qui sont en périphérie, à ce moment, peut-être y a-t-il des avantages pour quelques-unes ou deux de vouloir changer de comté. C'est pour cela surtout qu'on dit: Les frontières internes.

M. Léonard: Une dernière question seulement, M. le Président, est-ce que vous pensez que la délimitation des régions administratives va influer sur les discussions ou les négociations qu'il pourrait y avoir quant au territoire?

M. Robidoux: Je ne connais pas toutes les régions administratives de la province mais je connais la mienne chez nous. Dans notre comté, on est dans deux régions: la région 07 et la région 06. S'il n'y a pas quelque chose de réellement défini, c'est que notre comté va être morcelé. Je suis certain que le comté Labelle actuel voudrait rester ensemble. Si ce n'est pas déterminé, la région administrative, l'influence des nouveaux comtés renouvelés, il va se faire une publicité pour la partie sud du comté, ils vont vouloir changer de comté par rapport aux régions actuelles. Cela fait à peu près six ans qu'on travaille pour que les limites administratives des régions changent et il n'y a jamais rien eu de fait là-dessus. Quand même vous diriez, M. le ministre, que les régions vont changer selon les nouveaux comtés renouvelés, je pense que les gens de la municipalité ne le croiront pas. Moi-même, dans ma municipalité, chez nous, si je dis: Est-ce qu'on reste dans le comté Labelle actuel et je prends l'ensemble de la population de l'Annonciation, les gens vont vouloir s'en aller dans un autre comté pour appartenir à la région 06. Je ne pourrai rien faire là-dessus. Ce serait dommage, le comté Labelle travaille très bien ensemble mais si les régions ne sont pas... S'il n'y a pas quelque chose pour garantir aux gens que les régions vont être changées à leur avantage — parce que c'est toujours à notre avantage quand on veut faire changer une région — vous connaissez les contraintes que nous avons pour aller dans l'Outaouais, ce n'est pas parce qu'on ne les aime pas, mais ce n'est pas

raisonnable qu'on aille dans un secteur où on n'a aucune affinité. Cela va influencer beaucoup. Je ne sais pas si vous pourriez faire quelque chose pour être très clair, pour nous aider dans le comté.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Merci, M. le Président. Je voudrais également remercier et féliciter les membres de la Corporation du comté de Labelle de l'excellent mémoire qu'ils nous présentent. Tout à l'heure, lors de propos tenus par M. Saint-Amour, qui faisaient état d'une volonté de faire beaucoup d'information à l'intérieur de cette opération nouvelle, il a semblé découvrir qu'il y avait peut-être un genre d'indifférence à toute l'information qu'on a voulu produire. Faut-il en déduire, à partir de cette première expérience que vous avez connue, que la population en général ou les contribuables ne sont pas soucieux de s'impliquer directement dans cette opération d'aménagement? Serait-ce que ces gens auraient une attitude de s'en remettre aux élus et dire: Voici, nous avons dans nos municipalités des gens qui sont en poste, qui ont été élus, qui oeuvrent également au niveau de la corporation de comté et nous faisons entièrement confiance à ces gens dans l'élaboration d'un schéma d'aménagement et de tout ce qui pourrait suivre par après dans la mise en place de cet aménagement. Qu'avez-vous découvert vis-à-vis des contribuables et de la population?

M. Saint-Amour: Je ne crois pas que ce soit parce que les gens veulent laisser les décisions à leurs élus. C'est parce qu'il manque, de notre part, je pense qu'il faut aller plus loin. Il faut d'abord les informer et il faut les amener à prendre conscience de ce que peut être un schéma d'aménagement. Il faut même, je crois, dans un certain sens, prendre une attitude provocatrice. Ayant travaillé au niveau des municipalités en matière de zonage, entre autres, je me suis aperçu que quand les gens sentent que c'est une mesure, que ce sont des éléments qui vont influencer leur milieu de vie, ils embarquent et ils sont prêts à donner leur opinion et ce, même quand les municipalités arrivent avec des réglementations extrêmement sévères. Cela me permet d'ouvrir une parenthèse: II y a une municipalité de notre comté qui a adopté un règlement de zonage agricole presque aussi sévère que le projet de loi no 90, six mois avant que le projet de loi no 90 soit déposé. Quand c'est arrivé dans la municipalité et que les gens ont eu l'information avant, ils se sont informés et le règlement entre en vigueur dans la municipalité. Il faut en arriver d'abord à un type de présentation et, ensuite, arriver avec un peu de provocation. Quand les gens vont être conscients de ce que peut être un schéma d'aménagement, ils vont embarquer. Mais il ne faut pas aller trop vite non plus, il faut aller au rythme où les gens peuvent prendre cette information.

M. Giasson: Dans votre mémoire, vous faites état également d'une aide financière et peut-être technique que vous avez obtenue de l'OPDQ. Cette aide était de quel ordre, en juin 1978, au moment où vous avez débuté des travaux sur un schéma d'aménagement par la création d'une commission d'aménagement?

M. Robidoux: La subvention, l'aide financière qu'on a eue, était de $60 000 pour une année.

M. Giasson: Est-ce qu'à cette aide financière s'ajoutait également un appui technique? Non.

L'opération technique, vous l'avez bâtie, vous vous l'êtes donnée à partir de l'aide financière de l'OPDQ.

M. Robidoux: C'est cela, on s'est donné l'aide technique à même le financement. Il y a des recherches...

M. Giasson: Cela a permis une équipe de combien de personnes pour partir les travaux?

M. Robidoux: On a engagé un coordonnateur, un cartographe, une secrétaire plus neuf bénévoles qui travaillent sur le schéma d'aménagement.

M. Giasson: Neuf bénévoles?

M. Robidoux: Ceux qui travaillent à la commission.

M. Giasson: Qui se réunissent assez régulièrement, assez fréquemment?

M. Robidoux: Au minimum une fois par semaine. Parfois, deux ou trois fois par semaine quand il y a des rencontres sectorielles ou des rencontres avec les municipalités.

M. Giasson: Au moment où les membres de la Commission d'aménagement se rendent dans les municipalités, est-ce qu'ils tentent de rencontrer la population ou si c'est limité à l'équipe municipale?

M. Robidoux: Lors de la première approche qu'on a faite, on a rencontré les conseillers municipaux. On a eu, après cela, des rencontres sectorielles avec différents ministères et les personnes responsables dans les municipalités comme dans les domaines des loisirs, de l'éducation ou du transport. Les rencontres avec toute la population sont prévues pour l'automne. On a un plan de travail qu'on respecte religieusement. Ces étapes vont à l'automne. C'est pour cela qu'on dit qu'en fait de réponse de la population, on n'en a pas eu tellement. Je pense qu'avec toute la publicité qui se fait dans les journaux, avec les fascicules qu'on a distribués, probablement que lors de la consultation à l'automne les gens vont répondre plus.

M. Giasson: Vous signalez dans votre mémoire que les approches en matière de consultation devraient être allégées. Qu'est-ce que vous craignez, au fond?

M. Robidoux: C'est de la manière dont c'est présenté. On craint que ce soit très dispendieux pour les réponses qu'on va recevoir.

M. Giasson: Ce sont les coûts que représenterait une consultation trop vaste.

M. Robidoux: Ce n'est pas parce qu'on a peur de la consultation, c'est à cause du coût que cela va demander et le travail de compilation, recevoir tout cela. Si les gens répondaient tous, ce serait très intéressant, mais c'est difficile. Par expérience, dans une municipalité, on a fait de la consultation. On a fait une assemblée spéciale pour leur dire: On fait une fête champêtre à l'Annonciation. Il y a à peu près 20 000 personnes qui passent la fin de semaine. On envoie une lettre à tous les contribuables leur disant: On a une soirée d'information, venez nous rencontrer pour nous dire ce que vous voulez qu'on change, qu'on améliore ou qu'on fasse. Vous aurez à peu près sept ou huit personnes qui viendront. Quand cela va bien, les gens ne se dérangent pas trop. Si on leur disait: On va augmenter vos taxes de 100%, ils viendraient.

M. Giasson: Dans le contexte présent, vous travaillez avec les représentants des municipalités. Avez-vous l'impression que ces municipalités souhaitent la conservation de l'intégrité du territoire de la corporation de comté telle que vous la connaissez ou si elles accepteraient assez bien que la nouvelle corporation renouvelée épouse des limites géographiques ou territoriales différentes de celles que vous connaissez?

M. Robidoux: Actuellement, ce n'est pas une question de comté, c'est plutôt une question de régions administratives.

M. Giasson: De régions administratives? M. Robidoux: Oui.

M. Giasson: C'est ce qui fait l'objet des préoccupations des représentants des municipalités chez vous?

M. Robidoux: Oui, c'est le seul point pour délimiter le futur comté.

M. Giasson: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Très brièvement, M. le Président, parce que l'honorable ministre a posé plusieurs questions. Vous nous avez dit, au début, que vous étiez d'accord avec ce projet de loi, que vous étiez d'accord avec les principes du projet de loi, que vous acceptez cela à 100%. Vous avez dit aussi que, s'il fallait que cela coûte $0.01 de plus au contribuable, vous ne seriez plus d'accord. Je parle par le biais des taxes municipales. Est-ce bien votre façon de penser? Non?

M. Robidoux: Le monde municipal est toujours prêt à faire un effort fiscal mais, quand on a de nouvelles charges, on devrait avoir de nouveaux moyens de taxation. A ce moment-là, la taxation sur les immeubles est assez saturée. Même si les municipalités ont reçu la taxe scolaire, cela ne veut pas dire que nous serons bien gras et que nous pourrons faire des dépenses. Si on a de nouveaux pouvoirs et l'aménagement d'un territoire, c'est à l'avantage de la province et des taxes pourront être perçues. Au lieu d'être taxé sur l'immeuble, ce pourrait être un autre genre de taxe qui pourrait être redistribué aux conseils de comté pour faire respecter les règlements après que les schémas auront été adoptés. (16 h 30)

M. Goulet: Sur un autre point. Dans votre comté, si je comprends bien il y a une ville d'environ 9000 à 10 000 habitants et le reste ce sont de petites municipalités d'une moyenne de 1000 habitants, de 800 à 1200 environ. Relativement à la représentativité au sein du conseil de comté, est-ce que vous avez prévu une formule? Par exemple, est-ce que la ville de Mont-Laurier accepte d'y aller avec un représentant, ou avez-vous une formule?

M. Robidoux: On n'a pas voulu prévoir cela parce que dans la loi 125 je n'ai jamais rien vu sur la manière dont les comtés vont être représentés. Les nouveaux comtés vont se définir et c'est à ce moment qu'on va étudier comment la ville de Mont-Laurier sera représentée dans le nouveau comté renouvelé.

M. Goulet: Mais au niveau des représentants, d'après vous, cela serait qui, les maires, les élus ou une personne déléguée par une municipalité?

M. Robidoux: Je pense que le projet de loi est politique, cela va être les maires, il n'y a pas autre chose.

M. Goulet: Les maires. D'accord...

M. Robidoux: Parce qu'on a des comptes à rendre à la population à toutes les élections.

M. Goulet: II y a un autre point que vous soulignez. Vous dites que vous avez des doutes quant au droit de veto ou aux pouvoirs que se garde le ministre ou le gouvernement. A part les zones d'intervention spéciale, s'il y a divergence à un moment donné, qui doit régler cela? Est-ce que cela doit être un tribunal, une commission ou le ministre, d'après vous? Qui devrait être le dernier à se prononcer là-dessus?

M. Robidoux: II pourrait y avoir une commission, mais en dernier lieu cela sera toujours le ministre. On dit que, s'il y a un référendum et que la population ne veut pas de changement, si le gouvernement provincial, par le biais de son ministère, veut nous imposer quelque chose dans notre comté, il passera une loi spéciale. C'est ce qu'on dit.

M. Goulet: Le référendum devrait-il être consultatif ou décisionnel?

M. Robidoux: Dans le projet de loi, il est consultatif et il va rester consultatif, selon notre idée.

M. Goulet: Selon votre idée! Je suis content d'entendre cela parce que je pense que, sauf erreur, vous êtes le premier groupe sur vingt ou vingt-cinq qui dit que le référendum devrait être consultatif au lieu de décisionnel. Or, c'est un son de cloche. C'est pour cela que je voulais vous le faire dire, parce que vous êtes le premier groupe, sauf erreur, qui adopte cette position. M. le Président, j'ai terminé pour ce qui est des questions.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le député. M. le ministre, le mot de la fin?

M. Léonard: Je peux en poser deux ou trois? Vous proposez la formation d'une commission consultative d'aménagement au niveau du comté. Le projet de loi propose un comité consultatif au niveau de la municipalité. J'aimerais que vous expliquiez pourquoi et je dirais, au départ: Est-ce que vous ne croyez pas que cela serait donner trop d'éléments au comté de façon qu'il encadre trop fortement des municipalités? Vous ne pensez pas que c'est donner trop de force au comté?

M. Saint-Amour: On a demandé pour trois raisons le maintien ou la création d'une commission d'urbanisme ou d'aménagement de comté. La première des choses, c'est au niveau de l'élaboration du schéma d'aménagement. Présentement, la commission d'aménagement est composée de sept membres. Il y a deux maires qui sont représentés à cet organisme dont le préfet, trois conseillers municipaux et deux personnes qui ne sont pas élues. Ces personnes ont été nommées par le conseil de comté en consultation des maires qui venaient de chacun des secteurs, parce que c'est une représentation par secteur. L'un des sept membres est nommé par résolution de la ville de Mont-Laurier. Si on demande un comité de maires ou un conseil de l'élaboration du schéma, il faut qu'il y ait des personnes vraiment intéressées, ce qui n'est pas toujours le cas chez l'ensemble des maires.

Ensuite, au niveau de la commission d'aménagement, il va falloir éventuellement, pour l'application de la réglementation intérimaire, les avis à fournir... cela pourrait être la commission d'urbanisme créée par le conseil de comté qui donne son avis au conseil sur la pertinence de différents sujets ou de différents travaux qui lui sont soumis.

La troisième des choses, c'est que le conseil de comté demeure responsable de la gestion, de l'administration des territoires non organisés là où il n'y a pas de municipalité. Il va falloir aussi adopter et appliquer des règlements. C'est cette commission d'urbanisme de comté qui serait chargée de l'application de la réglementation dans les territoires non organisés en collaboration avec un inspecteur évidemment.

M. Léonard: Au cours de l'élaboration du schéma, vous avez demandé différentes informations des ministères, un peu dans le sens de l'article 11, même avant que ce soit rendu public, que le projet soit déposé. Est-ce que vous pourriez nous parler de cette expérience? Est-ce que cela a été satisfaisant? Quels sont les problèmes auxquels vous avez fait face?

M. Saint-Amour: Le gouvernement a créé, lorsque le conseil de comté a obtenu la subvention gouvernementale, un comité technique à l'intérieur de la conférence administrative régionale de l'Outaouais. Première lacune, et majeure, c'est que le conseil de comté de Labelle, le territoire de la corporation de comté appartient à deux régions administratives. Quand on obtenait les informations de Hull, c'est bien de valeur mais on n'avait rien de l'autre partie qui appartient aux Laurentides. Quand on les obtenait des Laurentides, il fallait avoir l'équivalent de l'autre côté. On a été obligé chaque fois de cogner à deux portes différentes, Montréal, Québec ou Hull.

Ensuite, le rôle du comité technique a été d'abord et avant tout un rôle de boîte à lettres. On demandait un document, on s'informait aux bureaux des différents ministères et si le document était disponible, on l'avait. Sinon, on ne l'avait pas. Même, au niveau de la problématique ou des documents d'élaboration du schéma d'aménagement (région administrative de l'Outaouais), l'OPDQ a refusé de nous donner les documents en question. Ensuite, dans certains ministères, il y a des documents qui nous ont été carrément refusés.

Par contre, dans la majorité des ministères, on a eu une très bonne collaboration et il faut le souligner. Mais dans certains ministères, cela a été plus difficile.

M. Léonard: Une dernière question. Est-ce que vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Robidoux: Ce n'était pas une question concernant notre mémoire, mais une question de privilège, M. le Président, si vous le permettez. Ce matin, M. Goldbloom a dit qu'au bill 12 les conseils de comté s'y étaient opposés farouchement, parce qu'on ne voulait pas travailler avec les villes. J'ai travaillé à cette époque, j'étais préfet à l'Union des conseils de comté. Je pense que ce n'était pas tout à fait ça. C'est qu'avec le bill 12, une ville pouvait prendre sept ou huit municipalités et se former une agglomération et à ce moment-là, les autres municipalités étaient laissées de côté. C'est pour ça qu'on s'est opposé au bill 12, à l'époque parce qu'il n'était pas conforme et on disait qu'il y avait des structures actuelles... mais je pense que les municipalités rurales sont prêtes à travailler avec les villes. On peut le trouver dans plusieurs régions.

M. Léonard: Une dernière question qui me semble importante, il y a eu toute une animation faite à partir du Conseil régional de développement des Laurentides au sujet de règlements

d'urbanisme, etc. J'aimerais que vous expliquiez pour les gens de la commission, pourquoi, selon vous, à un moment donné, les municipalités ont senti le besoin d'avoir ces règlements, pas nécessairement des plans d'urbanisme, mais cette réglementation en termes d'urbanisme.

C'est un peu surprenant que cela arrive tout à coup, comme ça, et que cela se soit passé dans le territoire.

M. Robidoux: Notre région a été sensibilisée par un CRD, le CRDL Laurentides et M. Tony LeSauteur. Il y a eu un colloque à Saint-Donat et on a commencé à parler d'aménagement et de protection de l'environnement, surtout des lacs et des cours d'eau. De là, le CRD a travaillé à la préparation de règlements pour les municipalités et avec les municipalités. Les premières rencontres qu'on a eues avec une dizaine de municipalités, d'organismes du CRDL, on a présenté des diapositives qui ont montré comment l'environnement, le bord des lacs pouvaient se polluer, se détériorer. On a demandé aux municipalités si on était prêt à adopter des règlements de zonage pour l'installation de fosses septiques, pour les puits, ainsi de suite, où il n'y a pas de système, de 40 000 pieds carrés. La réunion a duré à peu près deux ou trois heures, deux heures et demie à peu près et à la fin, tous les maires qui étaient présents ont dit: Ils sont fous. C'est impossible, quand il y avait dans ce temps, des terrains d'à peu près 10 000 pieds carrés.

Aujourd'hui, nos quinze municipalités ont presque toutes des terrains en bordure des lacs et des cours d'eau à 40 000 pieds carrés. Je pense que c'est très intéressant et ceux qui avaient des règlements à adopter à 25 000 pieds, les ont changés pour 40 000 pieds dernièrement.

M. Léonard: Au fond, c'est une certaine conception du développement qui s'est modifiée. Cette réunion a servi de déclencheur.

M. Robidoux: C'est ça. Cela a été l'éveil pour les gens. C'est beau d'avoir une maison ou un chalet au bord d'un lac ou d'un cours d'eau, mais si on n'est pas conscient de protéger l'environnement, c'est que nos valeurs tombent à rien et surtout pour nos régions qui sont touristiques, à ce moment-là, on a un intérêt à les sauvegarder. C'est avec un schéma d'aménagement, parce que malheureusement, il y a peut-être quelques municipalités, s'il n'y a pas un schéma de comté, qui n'adopteront pas de règlement et elles vont laisser se polluer leurs lacs et leurs cours d'eau qui vont se déverser dans d'autres municipalités qui, depuis quelques années, travaillent à la protection de leur environnement.

M. Léonard: Ce que vous me dites, c'est que ça doit couvrir l'ensemble du territoire, un ensemble.

M. Robidoux: La preuve, c'est qu'on a adopté un règlement pour des territoires non organisés, parce qu'ils n'ont pas de municipalité, ils n'ont pas la possibilité d'adopter de règlement, c'est le rôle du Conseil de comté et à l'assemblée du 14 mars, on a adopté un règlement pour les territoires non organisés.

M. Léonard: Je veux remercier et féliciter le Conseil de comté de Labelle pour tout le travail qui a été fait là. Je pense que c'est très instructif et très encourageant. C'est le signe que l'aménagement n'est pas mort au Québec, que ça peut justement devenir un sujet d'intérêt.

Une Voix: Cela part. M. Léonard: Cela part.

Le Président (M. Laplante): Sur ce, messieurs, les membres de cette commission vous remercient pour votre participation.

M. Robidoux: On vous remercie de nous avoir entendus.

Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant les représentants de ville de Laval à présenter leur mémoire. M. le maire, veuillez identifier le groupe que vous représentez et les membres qui vous accompagnent s'il vous plaît. Ordinairement, nous allouons 20 minutes pour la lecture du mémoire, le reste du temps, 40 minutes, est consacré à la période des questions des membres de la commission. Mais vous pouvez prendre un peu plus de temps, parce que nous sommes en avance sur un mémoire.

Ville de Laval

M. Paiement (Lucien): A la table, ici, m'accompagnent de façon directe les fonctionnaires de la ville de Laval, M. le gérant, Marc Perron, M. Gaston Chapleau, directeur des recherches et statistiques et M. Claude Langlois, assistant-gérant au module planification et développement. Je suis également accompagné des membres du comité exécutif et du conseil de la ville de Laval.

Le Président (M. Laplante): Pourriez-vous vous identifier, pour les fins du journal des Débats?

M. Paiement: Mon nom à moi?

Le Président (M. Laplante): Oui monsieur.

M. Paiement: Dr Lucien Paiement.

Le Président (M. Laplante): Merci. Vous pouvez commencer.

M. Paiement: M. le Président de la commission parlementaire, M. le ministre d'Etat à l'aménagement, MM. les membres de la commission parlementaire.

En nous présentant devant cette commission parlementaire, nous nous interrogeons à savoir si

nous devons nous féliciter de l'intérêt que porte l'actuel gouvernement au monde municipal ou si nous devons nous inquiéter ou même nous plaindre d'une sollicitude un peu trop dérangeante. Nous avons déjà eu l'occasion d'exprimer notre point de vue, soit en commission parlementaire, soit sur la place publique, sur différents projets de loi récents d'incidence municipale et qui, pour nous, à ville de Laval, avaient pour effet d'alourdir et même de compliquer les mécanismes bureaucratiques, sans pour autant les rendre plus efficaces, et dont la principale conséquence semblait être de remettre en cause les objectifs que poursuit la ville de Laval et pour lesquels les Lavallois ont dépensé tant d'énergie et consenti tant d'efforts fiscaux depuis 1965.

A Laval, nous avons en effet le sentiment de vivre à la mauvaise époque devant toutes ces mesures récentes conçues, quant à nous, pour des institutions dépassées. Nous ne voudrions pas parler de bâtons dans les roues ou de course à obstacles, mais, après lecture, force nous est de constater que le projet de loi 125 s'inscrit dans une lignée de mesures inadaptées à nos besoins, conçues pour un autre monde et dont l'impact probable pour ville de Laval sera, encore une fois, de ralentir le processus législatif et d'augmenter les frais d'administration que les Lavallois devront acquitter.

Nous reconnaissons, cependant, que le ministre d'Etat à l'aménagement a favorisé la mise en place d'un mécanisme de consultation et d'échange sur le contenu du présent projet par la création d'un comité conjoint et nous l'en remercions. Nous reconnaissons également que les échanges et la communication entre Laval et le ministère d'Etat à l'aménagement ont été sereins et corrects.

Le principe de l'aménagement. N'allez pas croire que nous sommes contre le principe de l'aménagement du territoire. Au contraire, nous avons la ferme conviction que c'est là la seule manière d'utiliser rationnellement, et de façon rentable pour la société, une ressource naturelle qui, autrement, risquerait d'être gaspillée irrémédiablement. C'est d'ailleurs la foi en ce principe d'aménagement rationnel qui a été à l'origine de ville de Laval et qui a inspiré, depuis, sa politique de développement. Si nous faisons abstraction du cas de la ville de Laval, la réflexion qui nous vient à l'esprit devant le présent projet de loi tient plutôt d'une certaine déception. (16 h 45)

Depuis le temps qu'on parle d'urbanisme et d'aménagement au Québec, les villes ont eu amplement le temps d'adopter et de mettre en vigueur dans leurs limites des plans directeurs d'urbanisme, de règlement de zonage, de lotissement ou de construction. Au rythme accéléré qu'a connu la construction domiciliaire durant les deux dernières décades, elles ont même eu le temps de réaliser en grande partie ces plans directeurs. Trop peu, trop tard, dira-t-on.

Cette loi arrive en effet au moment où la stagnation économique a mis un frein à l'urbani- sation et alors que la Loi sur la protection du territoire agricole a tracé une limite à l'éparpillement urbain et fixé de façon presque définitive l'utilisation agricole d'une large portion du territoire rural. Dans de telles circonstances, son utilité paraît donc viser une clientèle restreinte soit, à peu de choses près, celle des municipalités rurales et des endroits de villégiature.

L'aménagement volontaire. En somme, les terres agricoles étant protégées et les villes ayant cessé de se développer à un rythme effarant, il n'y a plus d'urgence, quant à nous, à adopter une loi sur l'aménagement et l'urbanisme. C'est sans doute ce qui explique le contraste entre la philosophie sereine et dégagée du projet de loi 125 et le caractère centralisateur et astreignant de la Loi sur la protection du territoire agricole. Deux processus fort différents et même contradictoires pour réaliser un même objectif d'utilisation optimale du territoire québécois!

On pourrait croire, maintenant que les municipalités se sont vu retirer le pouvoir de développer et de gérer le territoire agricole et que la plupart des villes ont leur plan directeur, que le Québec peut accepter de procéder par voie démocratique. En effet, on a choisi cette fois la voie de la consultation populaire et même de la surconsultation populaire. On a choisi aussi la voie de la consultation intermunicipale, puisque l'application des règles d'aménagement relèvera principalement des conseils de comté.

Cette démarche, fort soucieuse de l'opinion des citoyens, leur accorde cependant peu de confiance au moment des décisions, puisque les référendums n'auront qu'un caractère consultatif. Au contraire, on est extrêmement respectueux de l'autonomie municipale au point que les résultats attendus pourront sans doute se comparer à ceux d'une certaine loi des fusions volontaires, du moins en ce qui concerne l'aménagement à l'extérieur du milieu urbanisé.

L'option régionale d'aménagement. Dans ce projet de loi, l'Etat semble avoir également renoncé pour lui-même à la planification ou à un aménagement rationnel au niveau de la province pour se décharger de cette responsabilité sur des organismes mal définis, à caractère plus ou moins régional, qu'on appelle les corporations de comté mais dont on sait que les limites seront modifiées.

Pour des raisons de taille, de configuration territoriale, de population ou de zones d'influence, la corporation de comté sur laquelle le gouvernement fonde son option d'aménagement ne semble pas, en effet, devoir être celle que nous connaissons présentement et il semblerait que la nouvelle structure régionale résultera d'ententes intermunicipales sur la base d'affinités, de complémentarité ou d'autres critères à déterminer. Pour notre part, nous demeurons sceptiques quant à la probabilité plus ou moins élevée d'ententes intermunicipales de ce genre pouvant établir des structures d'intervention adaptées aux régions ou aux territoires régionaux à aménager. A moins que le gouvernement ne décide d'autorité des limites des nouveaux comtés, l'application de cette nouvelle loi,

quant à l'objectif régional qu'elle poursuit, risque donc des délais passablement longs.

Le mariage rural-urbain. La conception que l'on se fait de l'aménagement régional ne tolère pas d'enclaves urbaines et l'on s'attend que les cités et villes réintègrent les structures de comté, actuelles ou renouvelées, pour les questions d'aménagement du territoire.

Sur le plan de la logique, il nous paraît, en effet, souhaitable que toutes les institutions faisant partie d'un territoire donné participent à son aménagement tant pour le choix des équipements régionaux et de leurs implantations que pour le partage des coûts. Il serait bon, cependant, qu'on approfondisse les raisons historiques qui ont amené cette scission entre le monde rural et le monde urbain.

Les causes de cette scission demeurent peut-être d'actualité. Les besoins des populations citadines et campagnardes sont fort différents, tant au point de vue du niveau de la quantité que de la qualité des services. Il se pourrait bien que l'explication de la séparation actuelle du monde rural et urbain se retrouve dans des questions de partage de coûts pour des services non désirés par la population rurale. Ces raisons historiques seront aussi valables lorsqu'on aura reconstitué les structures de comté et pourraient devenir des pierres d'achoppement pour le fonctionnement de ces institutions régionales.

Les pouvoirs des comtés renouvelés: Les pouvoirs dévolus aux futures corporations de comté sont fort limités puisqu'ils se résument à l'adoption, à la révision et à la modification d'un schéma d'aménagement en plus des pouvoirs qu'elles possèdent déjà en vertu du Code municipal. La réalisation du schéma d'aménagement dépendra donc de la bonne volonté des municipalités constituantes du comté. Il se pourrait bien qu'un schéma d'aménagement ne puisse jamais être mis en vigueur faute du vote affirmatif des deux tiers des voix des membres présents au conseil de comté. En effet, en vertu du projet soumis, le ministre peut ordonner la préparation d'un schéma, mais il ne peut en ordonner l'application.

Le mode de représentation au conseil de comté: Les dispositions du projet de loi actuel reflètent l'intention du gouvernement de baser la représentation sur le seul critère de la population. Même s'il s'agit d'une représentation indirecte, on a jugé important d'accorder plus de poids à une municipalité plus populeuse, soit par l'attribution de votes additionnels, soit par l'augmentation du nombre de représentants.

Dans un tel système, une municipalité seule ou un nombre restreint de municipalités peuvent décider de l'adoption du schéma d'aménagement ou de son rejet si elles possèdent le nombre de voix suffisant. Il peut s'agir de municipalités urbaines nullement affectées par le choix ou le lieu d'implantation d'équipements nécessaires mais peu désirables ou, au contraire, désireuses de s'approprier les équipements les plus susceptibles de favoriser leurs intérêts.

Est-ce qu'une représentation destinée à être toujours minoritaire devra contribuer pour des équipements qu'elle n'aura pas souhaités et qui ne lui serviront que très peu ou pas du tout? Dans un contexte mixte, rural-urbain, il est fort probable que le milieu rural sera condamné à tolérer et à payer des équipements qui lui auront été imposés par les citadins.

En aménagement régional, il nous semble que plusieurs critères devront être pris en considération tels que les usagers des services régionaux, les contribuables régionaux, la valeur foncière des immeubles, bâtis ou non, affectés par le zonage, le territoire vierge convoité pour le développement. En d'autres termes, la représentation pourrait résulter d'une combinaison de ces facteurs de façon à tenir compte de tous les actifs apportés à la communauté régionale et à réduire la possibilité de municipalités appelées à être toujours majoritaires au conseil de comté.

Le présent projet de loi nous paraît devoir engendrer de très longues discussions avant que l'on puisse s'entendre sur un mode équitable de représentations. A moins, encore une fois, que le gouvernement n'agisse d'autorité pour fixer le mode de représentation aux futurs conseils de comté, nous sommes prêts à parier qu'il s'écoulera encore beaucoup de temps avant que les conseils de comté ne puissent fonctionner normalement.

La double allégeance: Quel que soit le mode de représentation retenu, il reste que ceux qui siégeront au conseil de comté auront à trancher le dilemme d'une double allégeance au comté et à la municipalité qu'ils représenteront. Or, dans de telles circonstances, l'on sait fort bien que la fidélité va aux électeurs et même si l'on prétend que ces individus siégeront au conseil de comté en tant qu'individus plutôt que comme représentants d'une municipalité, l'on peut présumer que l'intérêt de la communauté régionale sera vu à travers l'intérêt de la communauté locale, du quartier ou du parti municipal représenté. Voilà donc un autre écueil à surmonter dans le cheminement vers l'adoption d'un schéma d'aménagement de comté.

Le partage des coûts: La création de structures régionales, l'embauche de personnel permanent au secrétariat des corporations de comtés pour la surveillance de l'application des schémas d'aménagement, l'engagement de personnel professionnel ou le recours à des services professionnels pour la préparation et la révision de ces schémas d'aménagement engendreront des coûts que les municipalités devront se partager.

Sur quelle base devra se faire ce partage? La population, l'évaluation foncière, la superficie? Voilà un autre problème qui n'est pas résolu dans le projet de loi no 125 et qui devra être étudié sérieusement avant que l'on procède à l'application de tels schémas d'aménagement de comté.

L'autonomie municipale: II est bien évident, à la lecture de ce projet de loi, que le gouvernement recherche l'appui des municipalités et que, pour les amener à accepter l'idée d'aménagement régional, il a choisi de respecter, dans la plus large

mesure possible, leur autonomie. De ce point de vue, il s'agit d'un tour de force remarquable. L'aménagement, ayant été jusqu'à ce jour une compétence municipale, il fallait retrancher de cette compétence le strict minimum requis pour l'application des équipements régionaux en territoire urbanisé, politique des petits pas qui laisse encore des cloutes sur l'avenir des schémas d'aménagement régionaux.

Les leçons de l'histoire: L'histoire démontre, M. le Président, que des plans d'urbanisme ou des schémas d'aménagement, au niveau d'une région, peuvent rarement être réalisés lorsque les organismes qui les ont élaborés n'ont pas le pouvoir de les mettre en vigueur ou de les imposer aux municipalités concernées.

L'exemple le plus patent est sans doute celui de la Communauté urbaine de Montréal qui, après dix ans d'existence, n'a pas réussi à mettre en vigueur un plan d'aménagement pourtant terminé depuis cinq ans. La Communauté urbaine de Québec a vécu une expérience identique et, dans ce cas, le gouvernement a récemment cru nécessaire, comme mesure correctrice, de lui transférer les pouvoirs détenus par ses municipalités constituantes au chapitre de l'aménagement et de l'urbanisme, à tel point qu'elle possède dorénavant le pouvoir d'émettre les permis de construction, d'approuver les plans directeurs, les règlements de zonage, de construction et de lotissement de ses municipalités et même de les préparer si ceux qu'elles ont adoptés ou préparés ne lui' conviennent pas.

Plus loin, dans l'histoire municipale, on peut citer l'exemple de la défunte corporation interurbaine de l'Ile Jésus, qui n'a jamais pu mettre en vigueur un plan directeur du réseau routier de l'Ile Jésus.

A l'encontre de ces exemples, on voudra sans doute nous citer le cas de la Communauté régionale de l'Outaouais qui, en quelque cinq ans, a réussi à adapter un schéma d'aménagement.

Cette expérience nous paraît peu concluante cependant, en raison du poids des interventions fédérales dans la région et du besoin d'harmoniser le développement.

L'exemple de ville de Laval: M. le Président, la ville de Laval possède un schéma d'aménagement depuis 1970. Elle est et sera encore probablement, pendant plusieurs années, le seul comté de la province à se développer selon les orientations d'un schéma d'aménagement de comté. Elle a donc une bonne longueur d'avance sur les autres comtés et vous lui pardonnerez sans doute de trouver que le Québec retarde.

Le cheminement qu'elle a suivi pour atteindre ce résultat est fort différent de celui que vous proposez dans le projet de loi no 125. Ceux qui ont suscité sa création appartiennent à la génération qui a provoqué la révolution tranquille. Ils avaient vécu l'inertie du monde municipal face à un développement urbain désordonné et avaient connu l'impuissance des corporations métropolitaines à remédier à la conurbation. Ils avaient pu observer l'étroitesse du cadre municipal pour régler les pro- blèmes d'aménagement territorial. Ils avaient vu la hausse de l'endettement municipal et les dépenses d'administration. Ils avaient pu apprécier le coût du dédoublement de structures au niveau municipal et régional. Ils avaient constaté l'insuffisance des services dans les petites municipalités et mesuré le caractère onéreux pour les contribuables de la multiplication d'organismes municipaux inadéquats. Les protagonistes de ville de Laval n'étaient pas pour autant antidémocrates.

Le réalisme leur inspirait cependant que la démocratie doit pouvoir se concilier avec les raisons d'économie et d'efficacité. Ils avaient surtout à l'esprit que les institutions démocratiques existent pour la population, non pour les élus, et qu'elles doivent se transformer pour convenir à une société dynamique, faute de quoi elles deviennent des carcans asphyxiants pour les villes. (17 heures)

Les Lavallois vivent aujourd'hui dans une ville structurée et dynamique dont ils sont fiers et pour laquelle ils ont développé un fort sentiment d'appartenance. Ils jouissent de services adéquats à des coûts avantageusement comparables à ceux d'autres municipalités au point qu'ils deviennent un objet de convoitise pour des voisins qui ploient sous le fardeau fiscal.

Cette situation privilégiée pourrait devenir normale pour toutes les municipalités si les mesures correctives apportées pour l'Ile-Jésus étaient appliquées à l'échelle de la province.

Autonomie et municipalités régionales. La raison d'autonomie constamment invoquée par le monde municipal à l'encontre des interventions gouvernementales est certes un argument de poids dont le gouvernement a raison de tenir compte. Cet argument perd toutefois de sa valeur si les municipalités se retrouvent dans une situation telle que des contraintes physiques ou financières ou de simples jeux politiques les empêchent de jouir de cette autonomie, d'utiliser des pouvoirs devenus purement théoriques. Il nous paraîtrait avisé de procéder immédiatement à des changements de limite, à des regroupements ou à des fusions pour préserver toute sa valeur positive et dynamique à la notion d'autonomie plutôt que de procéder à une érosion graduelle des pouvoirs municipaux en faveur des corporations de comté ou des communautés urbaines.

La ville de Laval, première ville régionale, jouit, sous cet angle, de son entière autonomie et ne devrait pas avoir à craindre l'empiètement sous l'empire du projet de loi 125 puisqu'elle constitue une ville-comté. Des problèmes d'un autre ordre peuvent cependant lui être créés si cette loi devait lui être appliquée telle quelle.

La ville-comté de Laval et ses plans d'urbanisme. Le titre I du projet de loi 125 qui fixe les règles de l'aménagement et de l'urbanisme prévoit, au chapitre I, que chaque comté pourra se doter d'un schéma d'aménagement dont il fixera le contenu obligatoire et facultatif. Il prévoit également une procédure de consultation populaire pour la proposition préliminaire d'aménagement et pour la version définitive et possiblement la

tenue d'un référendum. Toute cette procédure longue et coûteuse est assortie de délais, d'avis aux municipalités faisant partie du comté et aux personnes inscrites sur la liste électorale ainsi que de résumés du schéma d'aménagement.

Dans les dix-huit mois de l'entrée en vigueur du schéma d'aménagement, la ville peut, selon les dispositions du chapitre III, adopter un plan d'urbanisme dont le contenu obligatoire et facultatif est stipulé aux articles 80 et 81 du projet de loi. Ce plan d'urbanisme entre également en vigueur après autant de consultations populaires, d'avis et de délais. La procédure de modification prévue pour le schéma d'aménagement et le plan d'urbanisme suit la même démarche. D'autre part, le projet de loi oblige à une révision du schéma d'aménagement et du plan d'urbanisme après cinq ans, de sorte que la ville de Laval serait en constante élaboration de schémas d'aménagement et de plans directeurs et serait tenue de "s'aviser" comme ville ou comme comté.

De plus, le premier magistrat agirait tantôt comme préfet, tantôt comme maire. L'aspect aberrant d'une telle situation est assez évident pour que nous n'ayons pas à expliciter davantage. Ces dispositions démontrent bien, toutefois, que la ville de Laval est un cas unique dans la province et qu'il y aurait peut-être lieu de l'exclure de la portée de cette loi, à moins qu'on y ajoute des dispositions spéciales l'exemptant d'une partie de cette procédure.

Les pouvoirs particuliers de la ville de Laval en matière d'urbanisme. En vertu de l'article 34 de sa charte, tel que modifié par l'article 4 du chapitre 93 des lois de 1969, la ville de Laval possède des pouvoirs spécifiques en matière d'urbanisme qui diffèrent des règles établies par la Loi des cités et villes. Il s'agit d'une procédure sommaire qui n'enlève pas pour autant le droit de représentation des citoyens et qui s'explique par le contexte historique du milieu lavallois.

Comme on le sait, Laval résulte de la fusion de 14 municipalités qui possédaient des schémas directeurs d'aménagement et des règlements de zonage particuliers. L'utilisation du sol de ces exvilles ne constituait pas un continuum urbain harmonieux. Ainsi, les dispositions de la charte ont été conçues pour favoriser l'unification de l'aménagement au niveau de l'Ile-Jésus. Laval a élaboré son schéma directeur d'aménagement et son règlement de zonage dans le même esprit, suivant une philosophie de réglementation dite restrictive, en vue de faciliter l'intégration sur le plan physique des 14 noyaux urbanisés du territoire.

Toute la réglementation subséquente a été composée en tenant compte des procédures que prévoit la charte, procédures qui demeurent à ce jour. Selon la charte de Laval, une modification de zonage n'est pas sujette à la consultation populaire non plus qu'à la procédure d'enregistrement. C'est le ministre des Affaires municipales qui approuve les règlements de zonage ou, lorsqu'il le juge à propos, commande à la Commission municipale de tenir une audience publique lorsque des citoyens en font la demande, et il décide ensuite d'approuver, de refuser ou d'amender les règlements, suivant le rapport que lui transmet la Commission municipale.

Il s'agit donc d'une procédure allégée, expédi-tive, économique et pourtant démocratique qui découle de la philosophie qui a inspiré la création de la ville de Laval et qui a conditionné son développement depuis.

Position de la ville de Laval: Les commentaires qui ont précédé, M. le Président, n'avaient pas pour but de demander au gouvernement de retirer son projet de loi, mais d'attirer son attention sur une démarche qui semble répéter l'expérience qu'a connue le Québec des années 50 et qui n'a guère produit de résultats concrets quant aux problèmes de restructuration municipale.

Notre position vis-à-vis de ce projet de loi ne se veut pas négative cependant et si l'on tient à ce que Laval renonce à ses pouvoirs spéciaux, nous aimerions que l'on en tienne compte dans l'élaboration des dispositions de la nouvelle loi devant s'appliquer à ses contribuables.

L'objectif de la ville de Laval est d'éviter des procédures longues et coûteuses sans brimer le droit des citoyens à la consultation et de favoriser l'intérêt collectif en donnant droit de représentation au plus grand nombre d'individus possible dans chaque secteur constituant une entité urbaine organique.

La proposition de Laval vise à créer par un règlement, une grille territoriale qui servirait, pour les fins de votation, dans les cas de changement de zonage et d'amendement aux règlements de lotissement. Cette grille serait constituée des unités de voisinage et aires d'aménagement qui composent le schéma directeur et ferait partie intégrante de ce schéma. Ces portions de territoires qui seraient les secteurs ou unités de votation pour Laval seraient appelées aires d'aménagement. Ces aires d'aménagement seraient de deux natures, soit: les aires unifonctionnelles, tels que les parcs industriels, les parcs régionaux, le centre-ville, des aires polyvalentes qui correspondraient aux véritables unités de voisinage, c'est-à-dire la plus petite cellule urbaine équilibrée en termes socio-économiques et en termes d'équipement et d'infrastructures.

Les recommandations: Plus spécifiquement, nous recommanderions les modalités d'application suivantes: 1. Laval constituerait un comté au titre du projet de loi no 125, s'agissant cependant d'un comté formé d'une seule ville, le territoire de cette ville ainsi que le conseil municipal et les modalités de représentation prévues pour cette municipalité s'appliqueraient au comté de sorte que le maire, le conseil municipal et le comité exécutif auraient les pouvoirs et les responsabilités accordés respectivement dans le projet de loi 125 au préfet, au conseil de comté et au comité administratif. De même, le greffier ou tout autre officier désigné à cette fin par le conseil de la ville assumerait les fonctions attribuées au secrétaire-trésorier. 2. Le comté ville de Laval aurait en matière d'aménagement, la responsabilité de préparer un schéma d'aménagement et non un plan d'urbanis-

me. Par conséquent, le chapitre 1 du titre 1 du projet de loi proposé en première lecture s'appliquerait à Laval plutôt que le chapitre 3, sauf les nuances suivantes: a) L'article 81 concernant la possibilité de préparer un programme particulier d'aménagement s'appliquerait également à titre de contenu facultatif du schéma en remplacement de l'alinéa g de l'article 6, non applicable à Laval. b) Laval ayant déjà un schéma directeur d'aménagement et étant le seul comté dans cette situation, il lui serait loisible de reprendre entièrement son schéma selon la procédure définie au chapitre 1 du projet de loi ou de faire une révision au sens des articles 47 et suivants en y intégrant au minimum le contenu obligatoire de l'article 5. c) Quant à la conformité des règlements au schéma, c'est la procédure de conformité prévue aux articles 99 à 104 qui s'appliquerait, en l'adaptant, et non celle des articles 36 à 46. Les articles 33 et 34 s'appliqueraient en les adaptant, quant à la préparation des règlements d'urbanisme. 3. Afin de tenir compte de la taille des contraintes physiques résultant de la fusion de quatorze municipalités et de l'étendue du territoire du comté de la ville de Laval, il lui serait loisible de subdiviser son territoire en secteurs de planification. Ces secteurs de planification constitueraient des unités d'aménagement devant servir à des fins de consultation des citoyens. Des programmes particuliers d'aménagement tels que définis à l'article 81 pourraient être établis sur la base de ces secteurs de planification. Bien que des programmes particuliers d'aménagement puissent se faire sur des aires plus restreintes, ces secteurs de planification pourraient également servir d'assises à la mise sur pied de comités consultatifs d'urbanisme.

L'article 11 du projet de loi no 125 s'appliquerait au comté de la ville de Laval, mais il serait ajusté pour tenir compte de la procédure au paragraphe 23 de l'article 51a de la Loi des cités et villes, tel que modifié par l'article 12 de la charte de la ville de Laval. C'est le comité exécutif qui approuve un projet de règlement de sorte que l'article 111 pourrait servir pour le cas de la ville de Laval de la manière suivante: Lorsque le comité exécutif approuve un projet d'amendement ou un projet de règlement en vue de modifier un règlement de zonage ou de construction, aucun plan de construction ne peut être approuvé, ni aucun permis accordé pour l'exécution de travax qui, advenant l'adoption du règlement de modification, seront prohibés dans la zone concernée. Le présent article 16 cesse d'être applicable aux travaux en question si un règlement de modification n'est pas adopté et mis en vigueur dans les 180 jours de la date de résolution du comité exécutif.

Cinquième recommandation. La procédure de modification, d'abrogation d'un règlement de zonage et de lotissement suivrait la procédure prévue au projet de loi no 125. Cette procédure ne s'appliquerait qu'aux cas prévus aux articles 110 et 113 du projet de loi 125 avec les réserves suivantes: a)l'assemblée publique prévue aux articles 117, 118 et suivants se déroulerait non sur la base de toute la municipalité mais sur la base d'une ou de plusieurs aires d'aménagement; b) l'assemblée publique serait en outre tenue par un ou plusieurs membres du conseil de ville et non, comme l'indique l'article 118, par le conseil et présidé par le maire; c)la procédure d'enregistrement et le droit de vote sur le règlement s'appliquerait à toutes les personnes habiles à voter de l'aire d'aménagement concernée et rien qu'à elles. Par ailleurs, il n'y aurait plus d'approbation de règlements par le ministre, ni d'éventuelle enquête de la Commission municipale.

De plus, la réserve faite à l'égard du territoire de Laval-sur-le-lac à l'article 35 de la charte de la ville de Laval n'aurait plus sa raison d'être.

Dans cette perspective, les articles suivants du projet de loi 125 devraient être amendés: a) l'article 5, pour y prévoir l'obligation par la ville de Laval d'inclure dans le contenu de son schéma d'aménagement un plan montrant les aires d'aménagement aux fins de votation sur les règlements devant faire l'objet d'une approbation en conformité avec les articles 116 à 125; b)l'alinéa b) de l'article 109, qui prévoit qu'un règlement de zonage peut contenir des dispositions selon lesquelles les zones peuvent être divisées en secteurs à des fins de votation selon les articles 117 à 125. Cet article devrait être amendé pour la ville de Laval en remplaçant les mots: "la zone dans le secteur de manière que chacun de ces secteurs" par les mots: "la ville en aires d'aménagement de manière que chacune de ces aires"; c) les alinéas a), b), et c) de l'article 124. Les alinéas a) et b) devraient être modifiés pour référer aux aires d'aménagement et l'alinéa c) devrait être éliminé puisqu'il ne serait pas question de faire voter les personnes d'une aire d'aménagement voisine; d)l'alinéa d) de l'article 124; il faudrait prévoir spécifiquement que, lorsqu'un référendum est requis, les personnes habilitées à voter sont celles comprises dans l'aire d'aménagement.

Sixième recommandation. Le comté de la ville de Laval aurait le pouvoir d'adopter et de gérer un règlement de zonage agricole conformément à la déclaration d'harmonisation de la loi de la protection des sols agricoles et du projet de loi 125.

Sept. Ces modalités d'application seraient traduites en termes législatifs et s'appliqueraient au comté de la ville de Laval dès l'adoption du projet de loi 125. A cet effet, il faudrait modifier le projet de loi pour y ajouter les dispositions particulières qui définiraient les modalités d'application des dispositions de la loi au comté ville de Laval. (17 h 15)

Les autres chapitres, sections et dispositions du projet de loi 125 seraient applicables au comté ville de Laval en les adaptant.

Voilà, M. le Président, les commentaires et remarques que nous avons cru devoir vous adres-

ser au sujet du projet de loi 125. Au nom de mes collègues du comité exécutif et du conseil, je vous remercie ainsi que tous les membres de cette commission d'avoir eu l'amabilité de nous écouter.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le maire.

M. Paiement: Je voudrais simplement ajouter que le mémoire que nous venons de présenter vise uniquement à traduire une expérience vécue, passée depuis plusieurs années et peu importe la littérature ou les termes choisis, j'aimerais bien que personne, d'un côté de la table comme de l'autre, n'y trouve quelque allusion politique de quelque nature que ce soit.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le maire. M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'accueillir ici mes voisins parce que quand je regarde par la fenêtre chez nous, ce que je vois, c'est Laval et quand je me rends chez moi ou que je pars de chez moi, je passe presque toujours par Laval. Le pont qui me mène chez moi appartient à la ville de Laval et est entretenu par la ville de Laval. Nous sommes nettement des voisins qui pratiquons le bon voisinage qui est tout à fait à la mode à Laval.

Le mémoire de la ville de Laval, pour lequel je la remercie, se divise assez clairement en deux parties. Une première partie dont on pourrait dire qu'elle est discursive et qui alimentera sûrement nos réflexions. Il est sûr que nous voudrons tenir compte de l'expérience de Laval dans le domaine de l'aménagement et les réflexions que vous nous présentez à ce sujet-là vont sûrement alimenter les nôtres.

Pour ma part, j'aimerais plutôt vous poser quelques questions sur la deuxième partie de votre mémoire, là où l'on trouve des recommandations portant sur divers aspects du projet de loi 125.

Vos recommandations s'inscrivent dans la ligne de travail que les deux unions, l'Union des municipalités et l'Union des conseils de comté ont fourni au niveau du comité d'orientation qui a été mis sur pied pour établir un dialogue entre les élus municipaux et le gouvernement du Québec sur ce projet de loi.

Par ailleurs, je crois que votre mémoire réflète l'esprit de collaboration qui a existé entre vos représentants et les fonctionnaires, les collaborateurs du ministre. M. le maire a fait allusion à cette collaboration qui a déjà existé, qui se poursuit et se poursuivra sûrement.

Je note que certaines de vos recommandations demandent de considérer Laval comme un comté au titre du projet de loi 125. C'est une recommandation à laquelle nous sommes tout à fait ouverts. Vous recommandez que la ville de Laval puisse élaborer un schéma d'aménagement plutôt qu'un plan d'urbanisme. Vous recomman- dez que le territoire de la ville soit subdivisé en aires d'aménagement aux fins de la consultation des citoyens. C'est sur ces aspects-là de vos recommandations que vont porter mes questions.

Vous proposez que les programmes particuliers d'aménagement remplacent le plan d'urbanisme dans le cas de Laval. D'autre part, votre mémoire propose de diviser la ville en aires d'aménagement pour les fins de votation dans le cas de changement de zonage et d'amendements aux règlements de lotissement. Par ailleurs, on trouve également dans votre mémoire d'autres expressions comme celle de "secteur d'aménagement".

La première question que je veux vous poser a trois aspects. Le premier: quelles sont les caractéristiques des aires d'aménagement dont vous parlez, caractéristiques en terme de population, de superficie, de type d'activités et qu'est-ce qui distingue ces aires d'aménagement des secteurs d'aménagement dont vous parlez ailleurs?

M. Paiement: Les aires d'aménagement pour nous constituent deux sortes... Je vais me retrouver à la page 20. Il y a deux sortes d'aires d'aménagement. Il y a les aires unifonctionnelles qui peuvent être le parc industriel, par exemple, qui a une fonction très particulière, une fonctin unique, des parcs régionaux, le centre-ville comme tel ou un secteur fondamentalement commercial et qui a une fonction essentiellement commerciale, où on n'y trouve que du commerce. Nous classons ces aires d'aménagement comme des aires unifonctionnelles, c'est-à-dire qui n'ont pas les caractéristiques des aires polyvalentes qui constituent la deuxième catégorie, c'est-à-dire des cellules socio-économiques, des unités de voisinage suffisamment élaborées où le citoyen peut y trouver un sentiment d'appartenance facile, y trouver toute la gratification qu'il est en droit de rechercher en tant que citoyen, y trouver les services dont il a besoin quotidiennement — je pense au petit dépanneur, je pense à la pharmacie, les petits commerces qu'on utilise régulièrement — et une cellule suffisamment bien structurée sur le plan culturel, sur le plan social, sur le plan communautaire pour qu'il ait, dans une grande ville, vraiment l'impression de vivre dans une cellule qui lui appartient et qui lui est propre. Nous pensons que ce sont d'abord ces gens-là qui doivent intervenir au niveau du vote, au niveau du référendum ou du changement de zonage ou de toute modification dans l'aire, parce que cela les touche directement.

Nous avons vécu, à la ville de Laval, un certain nombre d'expériences et vous êtes nos voisins, vous en savez sans doute quelque chose. Laval-sur-le-lac et Saint-François, deux ex-municipalités à 28 milles de distance, avec des préoccupations fort diverses, bien sûr, n'ont pas les mêmes préoccupations et les mêmes intérêts face à toute modification de zonage ou d'aménagement du territoire. On a vécu presque des guerres de cessation il y a une dizaine d'années où tous les démagogues se faisaient un malin plaisir de

répéter: Duvernay ne paiera pas pour Chomedey et c'était presque la guerre entre les deux. Lorsqu'on voulait faire un projet qui avait du sens à Duvernay, les gens de Chomedey venaient le bloquer et vice versa. Donc, à cause d'une caractéristique historique à la ville de Laval et à cause du fait que la grande ville ou la métropole ou la mégalopole conduit très rapidement à l'anonymat, nous croyons que, dans l'édification d'une ville, des aires d'aménagement polyvalentes, suffisamment restreintes, correspondent davantage, sur le plan humain, aux besoins du citoyen.

M. de Bellefeuille: Mais comment s'établit le rapport entre les aires et les secteurs de planification?

M. Paiement: Les secteurs de planification sont beaucoup plus larges. A titre d'exemple, nous estimons, de façon approximative, à environ une trentaine d'aires d'aménagement alors que les secteurs sont d'environ une douzaine. Ceci correspond à des limites territoriales, à une population beaucoup plus large, à des limites géographiques, que ce soit des autoroutes, par exemple, des voies ferrées, des secteurs qui, à cause des contraintes physiques du milieu, nous incitent à les traiter de façon un peu différente, tout simplement. C'est à cela que ça correspond.

M. de Bellefeuille: Vous faites allusion, dans une note, au bas de la page 20, à un plan d'ensemble de votre structure organisationnelle qu'à partir de douze secteurs d'aménagement, 30 unités de voisinage ont été délimitées. Est-ce que c'est, grosso modo, ce que vous avez à l'esprit dans votre mémoire à propos de ces aires et de ces secteurs?

M. Paiement: C'est ce que nous avons à l'esprit et ce processus est déjà passablement avancé à la ville de Laval. Le grand plan d'ensemble de la ville de Laval, la grande orientation est une centralisation des grands services administratifs. On va penser à la trésorerie, à l'évaluation, à des choses comme cela; centralisation des grands services administratifs et décentralisation des services quotidiens auxquels le public a affaire régulièrement. C'est un peu divisé...

M. de Bellefeuille: Bon! Les programmes particuliers d'aménagement doivent-ils être élaborés au niveau de l'aire d'aménagement ou à un niveau plus vaste que celui-là?

M. Paiement: Cela dépend des projets avancés. Il se peut qu'un projet ait une préoccupation beaucoup plus large qu'une aire d'aménagement qui devrait toucher le secteur. On peut parler, par exemple, d'un boulevard ou d'un grand projet, comme une espèce de centre culturel important; ça déborde largement et les besoins, et les capacités, et l'intérêt d'une aire d'aménagement. A ce moment-là, nous agissons au niveau du secteur.

M. de Bellefeuille: S'il y a consultation, elle se fait selon la nature du projet?

M. Paiement: Si un projet est de nature à toucher un ensemble d'aires d'aménagement, si, dans un secteur, vous avez huit aires d'aménagement et que le projet est de nature à toucher les huit aires d'aménagement, à ce moment-là, c'est le secteur qui a droit à une intervention.

M. de Bellefeuille: L'article 81 donne la liste de ce qu'un programme d'aménagement peut comprendre. Est-ce que ces dispositions vous semblent satisfaisantes aux fins d'élaborer les programmes particuliers d'aménagement?

M. Paiement: C'est la partie facultative du plan et ça peut certainement avoir une concordance très proche de la proposition qui est faite là.

M. de Bellefeuille: A l'heure actuelle, vous êtes en train de procéder à la structuration d'un centre-ville. Cette fonction, géographiquement, correspond à une aire d'aménagement délimitée, mais il est bien sûr que son intérêt dépasse beaucoup les seuls habitants de cette aire. Dans quelle mesure est-ce que la consultation dans un cas comme ça s'étend à d'autres aires?

M. Paiement: De par notre charte, nous avons l'obligation de nous adresser à tous les électeurs et d'ailleurs un certain nombre d'électeurs ont déjà demandé un référendum cette semaine, et vous le savez. C'est déjà prévu dans notre charte.

M. de Bellefeuille: Etes-vous satisfait de cette disposition de votre charte?

M. Paiement: On passe un peu à côté. On pourrait discuter assez longuement là-dessus. Que 500 personnes sur une population de 260 000 puissent exiger un référendum qui nous coûterait $1 million — ce sont les calculs que nous avons faits cette semaine — il me semble qu'il y a une espèce de disproportion, mais je pense que c'est une autre discussion.

M. de Bellefeuille: Je suis tout à fait d'accord avec vous, M. le maire, que c'est une toute autre discussion, mais le principe en jeu, c'est de savoir si vous êtes d'accord que toute la population soit consultée dans un domaine comme celui-là.

M. Paiement: Nous sommes d'accord que la population soit consultée au niveau des règlements d'emprunt où les deniers publics sont impliqués et où la vie du citoyen est également touchée. Mais, lorsque dans une aire unifonctionnelle il n'y a pas d'investissement ni de dépense additionnelle et que c'est un aménagement que nous voulons le plus rationnel, je pense que tous les citoyens devraient intervenir, mais... (17 h 30)

M. Léonard: Mais au point de vue aménagement, si on consulte, si en règle générale, on a comme principe de consulter la population sur les questions d'aménagement, est-ce que vous ne reconnaîtriez pas que la structuration d'un centre-ville, c'est une question parmi d'autres qui intéresse tout le monde?

M. Paiement: C'est sûr que cela intéresse tout le monde. Lorsque Place Ville-Marie s'est bâtie, à Montréal, c'est sûr que cela intéressait tous les Montréalais, mais est-ce que tous les Montréalais devaient aller voter pour savoir si Place Ville-Marie se bâtirait sur Dorchester ou sur Sainte-Catherine? On peut s'interroger. Si la démocratie va à ce point-là, elle coûterait d'abord très cher au niveau et de l'information et de tous les véhicules, etc. Mais c'est sûr qu'il y a un intérêt. Cependant il y a une partie de la responsabilité qui doit être, à mon sens, laissée aux administrateurs en place. C'est comme à la ville de Québec, quand l'hôtel Hilton, en face, s'est bâti, est-ce que tous les citoyens de Québec ont été consultés pour savoir s'il se bâtirait là ou sur l'autre coin de rue.

M. de Bellefeuille: Cela n'aurait peut-être pas été une mauvaise affaire!

M. Paiement: Le danger là-dedans, c'est qu'à un moment donné, on risque de ne rien faire. Voyez-vous, ce n'est pas la question de brimer des droits, loin de là. La préoccupation des administrateurs municipaux est d'essayer de créer un milieu de vie le plus équilibré possible, le plus humain possible, le plus agréable possible et le moins coûteux possible. C'est cela que nous pensons. S'il y a d'autres objectifs que ceux-là, on pourrait en discuter.

M. de Bellefeuille: Je vous remercie, M. le maire.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Merci, M. le Président. M. le maire, nous avons eu l'occasion au cours des derniers mois d'échanger avec vous, puisque vous étiez venu devant une autre commission parlementaire, commission pour laquelle vous aviez eu l'occasion de nous faire connaître le cheminement que votre ville avait poursuivi en matière d'aménagement, de plan d'urbanisme, etc.

Je n'avais pas tellement de questions, mais j'aimerais savoir — justement, suite à votre présence devant la commission parlementaire de l'agriculture — si vous avez débouché sur l'aménagement d'une zone permanente protégée en agriculture, c'est-à-dire protection du territoire agricole?

M. Paiement: M. le Président, je ne sais pas si je peux parler au nom de toute la ville de Laval...

Le Président (M. Laplante): S'il y a des questions auxquelles vous ne pouvez pas répondre, vous ne répondez pas.

M. Paiement: Messieurs, nous avons tenu plusieurs séances avec les représentants du ministère de l'Agriculture, nous avons préparé des plans, nous avons eu une consultation publique où il s'est présenté environ 600 personnes. Le tout s'est fait dans un ordre et un décorum, je dirais, exemplaire. Nous avons inscrit chaque intervenant. Nous avons tenu compte des interventions de chacun. Nous les avons transposées dans un mémoire et sur un plan et nous nous apprêtons, le comité exécutif de la ville, à approuver une proposition à ce stade-ci qui tenait compte de tous les éléments prévus dans la loi et nous le présentons le 10 mai à la commission du zonage agricole.

Je peux vous dire que toute la démarche s'est faite de façon harmonieuse, sans heurts. On sait qu'au départ on avait prévu pour Laval un partage de 55% de son territoire agricole sans dévoiler les conclusions de la commission. Nous envisageons maintenir plus ou moins environ 30% du territoire agricole de notre ville, ce qui, à notre avis, répond largement aux objectifs du gouvernement, aux politiques du gouvernement, sans toutefois, contrecarrer les besoins de développement à Laval; et on pense qu'il y a un mariage le plus harmonieux possible à l'horizon.

M. Giasson: Ce qui signifie, M. le maire, que la demande expresse que vous aviez formulée à ce moment, à savoir que le ministère de l'Agriculture et surtout la commission de protection puisse, le plus rapidement possible, examiner la situation particulière qui était la vôtre, cela s'est concrétisé.

M. Paiement: Je dois vous dire, monsieur, qu'à l'occasion le maire de Laval ne mâche pas ses mots. Quand la ville de Laval n'est pas satisfaite, ce n'est pas l'opinion du maire qui est exprimée, mais c'est l'opinion du conseil, des fonctionnaires et des citoyens. Mais, quand cela va bien, cela me fait plaisir de le dire aussi. Dans ce cas, cela va bien.

M. Chevrette: Vous êtes satisfaits, j'espère?

M. Giasson: Quand cela va bien, tout le monde est heureux.

M. Chevrette: Nous aussi. M. Fontaine: ... la réponse...

M. Chevrette: II dit que cela va bien. J'espère que vous ne souhaitez pas que cela aille mal?

M. Fontaine: Non.

M. Paiement: On s'entend bien. Nous nous présentons le 10 en commission, mais nous n'avons pas rencontré de fins de non-recevoir. Nous avons eu des échanges qui ont été corrects. Je serais surpris qu'on se prenne aux cheveux à la

commission. Notre dossier est assez bien articulé et je me fie à la compétence de la commission.

M. Giasson: Si j'ai bien compris, vous aviez, dans votre schéma d'aménagement du territoire de la ville de Laval, réservé environ 30% du territoire à des fins agricoles.

M. Paiement: Vous voulez dire antérieurement au dépôt de la loi 90?

M. Giasson: Oui, c'est cela.

M. Paiement: Nous avions une proportion qui jouait entre 20% et 30%. C'était plus près de 20% que de 30%. Alors, il y a peut-être 10% de plus qui s'en vont, mais...

M. Chevrette: ... la négociation...

M. Giasson: Mais, effectivement, quand il y aura entente entre la commission et la ville, la zone permanente va se situer en superficie dans un volume d'ancrage beaucoup plus grand que celui que vous aviez prévu dans votre schéma. Vous êtes devant une zone provisoire proposée par la loi 90.

M. Paiement: Bien sûr que dans notre schéma original... la zone agricole va être plus large, et de beaucoup.

M. Giasson: Ce qui sera la zone permanente par rapport à la zone provisoire que vous connaissez par le dépôt de la loi 90?

M. Paiement: Ce qui, selon la loi, semble-t-il, sera une zone permanente. Sensiblement, 30% du territoire de Laval demeurera agricole.

M. Giasson: J'aurais une autre question. Dans votre mémoire, au début, je crois, je ne sais pas si vous êtes sérieux quand vous dites que vous ne voyez pas de nécessité immédiate de procéder à une loi de l'aménagement du territoire et vous portez ce jugement pour l'ensemble du Québec. Est-ce que vous étiez vraiment sérieux quand vous avez déclaré cela?

M. Paiement: Voici!

M. de Beliefeuille: ... de l'Opposition...

M. Giasson: Non, mais...

M. Paiement: Pour moi, vous êtes tous à la même table, messieurs.

M. Chevrette: ...

M. Giasson: Vous autres, est-ce que vous avez compris?

M. Chevrette: Cela fait longtemps qu'on l'a compris.

M. Paiement: Si on est sérieux, on essaie de regarder cela le plus objectivement possible. C'est un secret de polichinelle que le développement agressif et même effarant que les villes, et particulièrement les villes de banlieue, ont connu depuis 1950-1955... ce développement a commencé, au départ, en doigts de gant, "fingers development"; à un moment donné, il a été envahissant et — je le reconnais en certaines circonstances — est fort désordonné. Cette période est beaucoup plus stable maintenant et on ne connaîtra pas dans les années à venir une telle agressivité de développement. On pense même que Montréal, qui a exporté sa population et son économie pendant plusieurs années, fait des efforts, encouragés par le gouvernement, pour rapatrier et son économie et sa population.

A Laval, nous ne prévoyons pas — et je ne pense pas dans le Québec non plus — une expansion domiciliaire importante comme celle qu'on a connue dans les années passées, d'une part. La plupart des villes qui avaient à se développer, au fond, se sont développées, ont connu des développements extrêmement importants. Donc, avec des plans plus ou moins bien faits, mais c'est fait. C'est une réalité, c'est là, on ne la changera pas. Voilà.

L'autre élément, le zonage agricole et la loi 90 c'est de l'aménagement du territoire, c'est de décréter qu'est-ce qui va arriver là. Partant de là, le développement domiciliaire urbain se fait de façon beaucoup moins rapide et avec la loi 90, il est encore extrêmement plus limité. Ce qui fait que la loi 125 aurait été, à mon sens, beaucoup plus bienvenue il y a dix ans, qu'aujourd'hui.

Quand je dis que le Québec est en retard, c'est ce que je veux dire. On est drôlement en retard parce qu'on arrive un peu comme les pompiers quand le feu est éteint.

Le Président (M. Laplante): Avez-vous d'autres questions, M. le député?

M. Giasson: Oui, M. le Président. Evidemment, vous voyez cela avec des yeux de Lavallois qui a pris une bonne mesure d'avance pour l'ensemble du Québec par rapport à d'autres régions, mais il reste, je pense, qu'au-delà de tout ça, l'aménagement d'un territoire dépasse largement les besoins d'urbanisation. Vous reconnaissez que dans un milieu autre que le milieu urbain l'aménagement est un ensemble d'opérations à mener qui ne touchent pas uniquement le développement de la construction domiciliaire. C'est beaucoup plus large que ça. C'est pour cela que je vous posais la question à savoir si vous étiez vraiment sérieux quand vous lanciez une telle affirmation...

M. Paiement: Oui, mais écoutez...

M. Giasson:... que ce n'était pas nécessaire à ce moment-ci.

M. Paiement: ... un instant! Je ne suis pas en train de vous dire qu'il ne faut pas une loi

d'aménagement au Québec. Ce n'est pas ce que je veux dire ici, au contraire, on pense que c'est fondamental qu'il y ait une loi. On parle sur les modalités de la loi. Bien sûr en ayant une optique et un petit penchant pour la ville de Laval, c'est assez clair. Nous sommes ici d'ailleurs pour dire ce que nous, à la ville de Laval, on pense...

M. Giasson: Je pense que je vous comprends bien, maintenant.

M. Paiement: Je pense que vous êtes de ce côté-là pour essayer d'évaluer ce qui se passe dans l'ensemble du Québec. Nous venons vous dire que notre petite expérience à la ville de Laval a été ainsi. On dit: la loi, dans le moment, dans ses modalités strictes nous gêne et nous embarrasse, il faut donc la modifier quelque peu. Il faut l'accommoder à une réalité qui est la deuxième ville du Québec. C'est tellement vrai que cette loi-là, on ne l'a pas appliquée à Québec, ni à Montréal, parce que c'étaient deux grandes villes. Montréal est la première, Québec est la troisième, nous sommes la deuxième. C'est ce que j'essaie de vous dire.

C'est sûr qu'il va se faire encore du développement domiciliaire et plus il s'en fera, plus on aura besoin de routes, de transports publics, etc. L'économie c'est un ensemble de choses. Ce n'est pas un élément qui fonctionne. Un en attire un autre et ainsi de suite.

Je ne peux pas tirer une conclusion et vous dire: On n'a pas besoin de la loi 125, il faut tout effacer ça. Ce n'est pas ce que je m'en viens vous dire. Je viens vous dire que dans ses modalités à la ville de Laval, elle nous embarrasse. Maintenant, j'ai reconnu au départ qu'on a eu un comité consultatif de discussion qui a été positif, des fonctionnaires du ministère et on pense arriver, si le gouvernement le veut bien, à un accommodement qui ne serait peut-être pas la loi dans son intégralité, mais qui pourrait nous permettre d'être un peu plus à l'aise ou de pas avoir une camisole de force.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Très brièvement, M. le Président, parce que le mémoire de la ville de Laval est très explicite.

M. le maire, vous avez parlé au niveau des modalités d'application de ce projet de loi-là, mais, en deux mots, j'aimerais que vous me répondiez par oui ou non: Quant à vous, comme maire de la ville de Laval, vous auriez aimé mieux que cette loi-là ne touche absolument pas la ville de Laval, qu'elle en soit exclue complètement? Elle vous nuit plus qu'elle vous aide? (17 h 45)

M. Paiement: Je pense qu'on a essayé de le dire. On l'a dit à l'occasion, de façon plus calme, de façon moins calme. Mais c'est sûr que la ville de Laval aurait souhaité et on est très prétentieux, peut-être, chez nous, on pensait qu'on était assez grand garçon et qu'on savait où est-ce qu'on s'en allait. On aurait aimé être exclu de la loi 125, comme on aurait aimé être exclu de la loi 90 et un certain nombre d'autres lois, parce que nous étions suffisamment avancés. C'est cela que j'essayais de dire. Quand je vous dis que je ne m'en viens pas faire de la politique, je ne m'en viens pas faire de la politique, mais je vous dis qu'il faut regarder la réalité lavalloise...

M. Chevrette: ... les vanités de Laval...

Une Voix: Doublée d'une association avec une couple de villes.

M. Giasson: Vous avez beaucoup d'autodétermination.

M. Paiement: On ne sait jamais, cela peut être contagieux.

M. Chevrette: Je m'en rends compte...

M. Paiement: Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question?

M. Goulet: M. le Président, je voulais que M. le maire nous le dise bien clairement, Laval est une ville bien organisée; c'est la deuxième ville en importance au Québec et je pense qu'une ville comme cela devrait être exclue complètement de ces projets de lois. Je le pense sincèrement.

M. Paiement: C'est notre premier souhait, monsieur. Mais on dit en toute alternative, si on ne peut pas être exclu, on propose des amendements. Alors, on ne peut pas être plus gentilhommes et proposer des compromis comme ceux-là.

Le Président (M. Laplante): D'autres questions, M. le député de Bellechasse?

M. Goulet: Non, M. le Président. Cela résume très bien et je remercie les gens...

Le Président (M. Laplante): Conclusion, M. le ministre.

M. Léonard: M. le maire, je vous remercie de votre mémoire. Je voudrais aussi vous remercier et vous féliciter des travaux, des rencontres que nous avons tenues. Nous nous sommes rencontrés une première fois le 3 février de façon à harmoniser un peu votre situation par rapport à celle de la loi 125, voir comment on pouvait ajuster tout cela. C'est à la suite de cette rencontre du 3 février qu'a été formé un comité technique qui a travaillé sur des modifications possibles. Il y en a un certain nombre qui se retrouvent dans votre mémoire présentement. Cela va bien comme travail, à mon avis. Cela se présente bien et c'est dans ce sens qu'il s'agit de continuer. La loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme est une loi générale qui normalement devrait trouver une certaine inspiration soit dans des lois particuliè-

res, mais elle-même doit refléter ce que nous pensons quant à l'aménagement. J'ai eu l'occasion, lorsque je vous ai rencontré, d'exposer les quatre principes qui la sous-tendaient et qui demeurent, quelle que soit la réalité particulière de différents morceaux de territoires au Québec. Je ne voudrais pas prolonger indûment; je voudrais simplement vous poser une question qui me tenait à coeur ici. Par rapport aux modifications des règlements de zonage, dans la loi, l'article 111, les modifications de règlements de zonage font l'objet d'un avis de motion du conseil municipal. Ce que vous proposez, c'est que pour les modifications, il y ait une approbation du comité exécutif à tout projet de règlement ou de modification au règlement de zonage. Est-ce que vous pourriez m'expliquer pourquoi?

M. Paiement: Le pourquoi est que la charte de la ville de Laval prévoit que tous les règlements doivent faire l'objet d'abord d'une résolution du comité exécutif et c'est le comité exécutif qui, par la charte de la ville de Laval, soumet au conseil, ou propose, ou suggère au conseil l'adoption de tels règlements. Alors, c'est pour suivre une procédure établie à Laval depuis sa création en 1965.

M. Léonard: II y a un processus de consultation dans votre charte par rapport à des modifications?

M. Paiement: Non, pas un processus de consultation. Je vous dis que le comité exécutif, lorsqu'il s'agit d'un amendement au zonage, doit sur rapport, bien sûr, des services étudier la question et se prononcer. Le comité exécutif se prononce, décide qu'il est opportun ou non de changer le zonage. Partant de là, un avis de motion est donné au conseil en séance publique et, à une séance ultérieure, le conseil décide d'approuver le règlement.

M. Léonard: Seulement une autre petite question. Lorsqu'il est question de modifications, à un moment donné, vous tenez un registre pour permettre la tenue d'un référendum. Est-ce que vous tiendrez ce registre dans chacune des aires ou est-ce qu'il doit être tenu seulement à l'hôtel de ville de Laval?

M. Paiement: Je dois vous dire que dans le moment, la charte de la ville de Laval, nous ne tenons pas de registre pour le zonage.

M. Léonard: Non, mais...

M. Paiement: Nous tenons un registre strictement pour des règlements d'emprunt. Les règlements d'emprunt qui touchent l'ensemble de la collectivité. Un règlement d'emprunt pour faire des travaux d'égout, d'aqueduc, de pavage, nous n'avons pas d'assemblée d'électeurs, donc, pas de registre. Nous aurons un registre pour des projets payés par l'ensemble de la ville et qui touchent l'ensemble de la ville. C'est la seule circonstance où nous avons un registre. Exemple: le règlement du Carré Laval, c'est un règlement touchant l'ensemble, payé par l'ensemble, donc, il y a un registre. Ce sont les seules circonstances.

M. Léonard: Cela resterait tel quel...

M. Paiement: Dans la proposition que nous vous faisons, les aires d'aménagement, nous devrions avoir un registre par aire d'aménagement lorsque nous faisons des modifications.

M. Léonard: Qui serait tenu durant deux jours. M. Paiement: Qui serait tenu selon...

M. Léonard: Je pense que c'est la proposition qui...

M. Paiement:... les termes. Je pense que c'est 10% — les termes de la loi —.

M. Léonard: Oui. Je vous remercie, M. le maire.

Le Président (M. Laplante): Messieurs, les membres de cette commission vous remercient pour votre participation. Les travaux seront suspendus pour reprendre à 20 heures.

Suspension de la séance à 17 h 52

Reprise de la séance à 20 heures 10

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît! Reprise de la commission élue permanente des affaires municipales pour recevoir des mémoires sur l'étude du projet de loi no 125.

J'appelle maintenant l'Union des producteurs agricoles. Je vois qu'ils sont rendus. Je vous demanderais d'identifier votre organisme, monsieur, de vous identifier et d'identifier les personnes qui vous accompagnent s'il vous plaît!

Union des producteurs agricoles

M. Couture (Paul): M. le Président, mon nom est Paul Couture, je représente l'UPA. A ma droite, M. Maurice Mercier, qui est secrétaire général adjoint à l'UPA et M. Mario Dumais, économiste à l'UPA. Nous vous remercions de nous recevoir pour entendre notre mémoire et si vous permettez, M. le Président, je demanderais à M. Dumais de lire le mémoire.

M. Dumais (Mario): L'Union des producteurs agricoles tient à exprimer, à l'occasion qui lui est fournie par cette commission parlementaire, son point de vue sur le projet de loi 125 et sur le document d'harmonisation de cette loi avec la Loi sur la protection du territoire agricole qui a été déposée à l'Assemblée nationale en décembre

1978. Compte tenu du rôle qui découle de la nature de notre organisme, vous comprendrez certainement que c'est surtout le document d'harmonisation qui retiendra notre attention.

Le projet de loi 125: Nous partageons l'idée que l'aménagement doit respecter les quatre principes qui sous-tendent le projet de loi 125, à savoir que: l'aménagement est une responsabilité politique et doit être confié à des institutions politiques; les citoyens eux-mêmes doivent participer à la prise de décision et à la gestion de l'aménagement; l'aménagement n'est pas une responsabilité exclusive de l'Etat mais une responsabilité conjointe des municipalités, des comtés municipaux renouvelés et du gouvernement québécois; les paliers de décisions ayant une responsabilité conjointe, des mécanismes d'harmonisation des décisions sont prévus.

Les notes explicatives du projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme qui émanent du secrétariat à l'aménagement, précisent que: "L'innovation principale du projet de loi consiste non seulement à donner aux conseils de comté le pouvoir d'adopter un schéma d'aménagement, mais à conférer à celui-ci un statut prépondérant par rapport aux plans d'urbanisme et aux règlements de zonage et de lotissement des municipalités membres du comté de même qu'un effet contraignant envers les interventions des agents de l'Etat".

L'introduction du schéma d'aménagement comme instrument de planification et le statut qui lui est dévolu, qui visent à faire en sorte que les municipalités coordonnent leur développement en vue d'en arriver à une rationalisation intermunicipale de leurs interventions, sont pour nous un pas en avant que nous supportons.

Somme toute, sans entrer dans plus de détails, nous sommes globalement d'accord avec le projet de loi 125 dans sa formulation actuelle. Cependant, nous nous interrogeons sur les coûts qu'impliquera l'implantation de cette loi, en particulier pour les agriculteurs, de même que sur le poids politique qu'auront dorénavant les municpa-lités rurales au sein des conseils de comté renouvelés. De plus, nous attachons la plus grande importance à ce que soit introduit dans ce projet de loi des précisions garantissant aux agriculteurs la liberté d'opérer en zone agricole leurs entreprises dans la mesure où ils se conforment à des normes réalistes.

A cet effet, nous demandons, en ce qui concerne la construction, la transformation et l'agrandissement des bâtiments d'élevage situés dans une zone agricole définie en vertu de la Loi sur la protection du territoire agricole, que les règlements municipaux de zonage et de construction ainsi que les normes minimales contenus dans les schémas d'aménagement sur ce sujet, ne puissent contenir d'exigences additionnelles à celles suggérées par les Services de protection de l'environnement en ce qui a trait au site de construction, à l'entreposage et l'épandage des fumiers.

Le document d'harmonisation du projet de loi 125 et de la loi 90: Le document d'harmonisation propose de confier aux conseils de comté renouvelés, où les cités et les villes jouiront dans la majeure partie des cas d'un poids prépondérant, le rôle que jouaient les municipalités et une partie des tâches qu'accomplissait la Commission de protection du territoire agricole en vertu de la loi 90.

Les conseils de comté pourraient adopter un règlement de zonage délimitant la zone agricole et définissant les usages autorisés.

Pour la discussion en vue de la délimitation de la zone agricole permanente, l'interlocuteur de la Commission de protection du territoire agricole serait le conseil de comté plutôt que la municipalité. Dans le cas d'un conseil de comté situé en dehors de la région agricole désignée, le règlement de zonage serait adopté conformément à la procédure prévue pour l'adoption d'un schéma d'aménagement. (20 h 15)

En région agrigole désignée, le règlement de zonage agricole entrerait en vigueur au moment de son adoption par le conseil de comté à moins d'objection de la Commission de protection du territoire agricole. En cas de désaccord, le gouvernement trancherait. Le document d'harmonisation ne précise pas si les usages autorisés en vertu du règlement de zonage agricole seraient ceux prévus à la loi 90 ou s'ils pourraient varier d'un conseil de comté à un autre. Les demandes de permis pour les usages autorisés en vertu du règlement devraient obtenir la sanction de trois organismes, soit la municipalité, le conseil de comté, la Commission de protection du territoire agricole. Le rôle de la Commission de protection du territoire agricole deviendrait dorénavant un rôle de surveillance générale et les conseils de comté assureraient la responsabilité directe du maintien de leur patrimoine agricole. Nous avons exprimé dans la première partie de ce mémoire notre accord sur le projet de loi 125, mais nous tenons à inscrire notre désaccord avec le document d'harmonisation, ceci parce que les autorités municipales au sein des conseils de ville ou au sein des conseils de comté ne sont pas, selon nous, l'autorité appropriée pour assumer la responsabilité de la protection du territoire agricole; en effet, permettre que les dispositions des règlements de zonage agricole varient d'un comté à l'autre nous semble inacceptable. La Commission de protection du territoire agricole à un rôle de désaveu et de surveillance est susceptible de dévaloriser cet organisme, parce que la participation des agriculteurs à des assemblées publiques en vue de délimiter le territoire agricole sera bien plus grande et bien plus fructueuse si ces assemblées se tiennent dans les municipalités plutôt qu'au niveau des conseils de comté. De plus, ajouter un autre palier aux deux que doivent déjà franchir les demandes d'inclusion, d'exclusion et d'autorisation alourdirait encore les procédures. Enfin, la modification des mécanismes mis en place pour protéger le territoire agricole est prématurée au moment où l'expérimentation de leur

application est à peine amorcée. Nous avions compris, lors du débat qui a entouré l'adoption de la loi 90, que le gouvernement considérait maintenant l'agriculture comme une industrie stratégique, ce qu'elle est, et que la tâche d'assurer la sécurité de l'approvisionnement alimentaire de la population, et pour ce faire, d'assurer la protection du territoire agricole, était élevée au rang de mission nationale. Nous avions, quant à nous, demandé et obtenu que les critères devant guider l'intervention en matière de protection des sols ne varient pas d'une région à l'autre et que la tâche d'assurer l'application de ces critères relève d'un organisme unique pour l'ensemble du Québec. Ceci correspondait, d'ailleurs, au point de vue de certaines autorités régionales ou municipales. Lors du débat entourant la quantité de sols arables à protéger dans la région de l'Outaouais, la commission régionale de l'Outaouais, chargée d'élaborer un schéma d'aménagement pour cette région, indiquait qu'à son avis, la protection des sols pour fins agricoles n'était pas en fonction municipale ou régionale, mais bien gouvernementale. D'autre part, l'intervention du président de l'Union des conseils de comté en commission parlementaire sur la loi 90, selon qui la protection des terres arables n'était pas une priorité, ne nous incite pas à voir d'un bon oeil l'accroissement du rôle des conseils de comté même renouvelés en cette matière.

Précisons que ce n'est pas un reproche que nous faisons au monde municipal de ne pas accorder une haute priorité à cette question. C'est tout simplement une constatation. Nous savons par combien d'autres sujets leur attention est sollicitée.

La planification à l'échelle régionale par un schéma d'aménagement des interventions municipales en vue d'orienter le développement des voies de communication, d'implanter les réseaux d'utilité publique, de localiser les périmètres d'urbanisation, de coordonner la création et l'agrandissement des parcs industriels, est susceptible d'amoindrir le coût des infrastructures. Cependant, la protection du territoire agricole relève d'un autre type de préoccupation. Il s'agit de préserver la base essentielle au maintien et au développement d'une industrie agro-alimentaire dynamique, soit les terres arables. Pour ce faire, il faut procéder à l'inventaire, lot par lot, des terres arables qui doivent être protégées. Les conseils municipaux et les producteurs agricoles qui habitent une municipalité connaissent normalement les sols de leur territoire, mais beaucoup moins ceux des autres municipalités. C'est, par conséquent, dans le cadre local que la Commission de protection du territoire agricole est le plus susceptible de trouver les interlocuteurs compétents en vue de remplir sa mission de protéger les sols par la délimitation d'une zone agricole permanente. Selon nous, il est possible d'harmoniser l'implantation du projet de loi 125 et de la loi 90 sans modifier cette dernière.

Nous demandons que l'application de la Loi sur la protection du territoire agricole soit immé- diatement étendue à l'ensemble du territoire et que l'on accélère la délimitation des zones agricoles permanentes. Si cette délimitation n'était pas terminée au moment où un conseil de comté manifestait par une résolution adoptée en vertu de la loi 125 son désir d'élaborer un schéma d'aménagement, nous proposons l'adoption de la procédure suivante: Dans la région agricole désignée, si la zone agricole permanente est déjà délimitée dans les municipalités qui composent le conseil de comté, il suffira que celui-ci en tienne compte dans son schéma. Si la zone agricole permanente n'est pas délimitée dans certaines ou dans toutes les municipalités du comté, au moment de la réception de la résolution du conseil de comté manifestant son désir d'élaborer un schéma, la Commission de protection du territoire agricole devra faire immédiatement parvenir son avis à toutes les municipalités, si ce n'est déjà fait, de telle sorte que la zone agricole soit délimitée au plus tard dans les six mois.

Dans ce cas, le conseil de comté pourra intervenir dans le processus de délimitation de la zone permanente comme personne intéressée suivant les mécanismes prévus à la loi 90. Le schéma d'aménagement ne pourra entrer en vigueur avant que ne soit délimitée la zone agricole permanente.

En dehors de la région agricole désignée, au moment de la réception de la résolution du conseil de comté manifestant son désir d'élaborer un schéma, le ministère de l'Agriculture du Québec devra déposer son plan provisoire dans un délai de trois mois et l'avis de la Commission de protection du territoire agricole devra accompagner ces plans de telle sorte que six mois après le dépôt des plans provisoires la zone agricole permanente ait été délimitée. Le schéma ne pourra être adopté qu'après ces délais.

Quant à l'administration du zonage agricole après la délimitation de la zone, elle pourrait s'effectuer conformément aux dispositions de la loi 90.

Conclusion. Les lois sont des instruments puissants qui influencent plusieurs mécanismes délicats de la vie sociale. La Loi sur la protection du territoire agricole est une loi complexe dont l'adoption a touché une des fibres les plus sensibles de l'ensemble de la population rurale, soit la propriété foncière et l'usage qui peut en être fait. Il n'est, par conséquent, pas étonnant que des démagogues misent sur la difficulté pour chaque agriculteur d'assimiler les dispositions complexes de cette loi et aient entrepris de sillonner la campagne en agitant une kyrielle de Bonhommes Sept Heures et de croque-mitaines du type: On vous a dépouillés de la propriété de vos terres, vous devrez dorénavant obtenir la permission d'un fonctionnaire bureaucrate pour planter un arbre. Le gouvernement va vous dire quoi semer sur vos terres, le communisme s'est emparé du Québec, etc.

D'autre part, les services municipaux et certaines catégories de professionnels, notaires, arpenteurs, etc., ont eux-mêmes beaucoup de difficulté

à assimiler tous les aspects de cette loi et l'on voit souvent l'un ou l'autre de ces intervenants indiquer à un agriculteur qu'il ne peut faire ce que la loi l'autorise en réalité à accomplir.

Il n'est pas facile de faire en sorte que tous et chacun des agriculteurs connaissent les dispositions de la loi. En conséquence, l'UPA consacre beaucoup d'efforts à informer ses membres au moyen de documents écrits et audio-visuels et d'assemblées d'information et d'éducation à tous les niveaux de sa structure, syndicats de base, fédérations régionales, confédérations. De plus, elle mobilise les agriculteurs en vue de susciter leur participation dans les municipalités, lors des assemblées publiques, lorsque cela engage le processus de délimitation de la zone agricole permanente. Ce travail donne des fruits. Les agriculteurs, avides d'information à ce sujet, participent en grand nombre à ces activités et ils commencent à assimiler les dispositions de la Loi sur la protection du territoire agricole. En conséquence, ils constituent un auditoire de moins en moins attentif aux propos des démagogues. De grâce, qu'on ne vienne pas si tôt bouleverser la situation, annuler le travail entrepris et nous obliger à tout recommencer.

Autant une intervention en vue de protéger le territoire agricole était urgente et nécessaire, autant il serait inopportun de venir chambarder à ce moment-ci les mécanismes mis en place à cette fin. C'est le bon sens qui nous le dit.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous lisez vos principales recommandations?

M. Dutnais: Oui, je pense qu'il n'est pas nécessaire qu'on les relise parce qu'elles sont intégralement développées dans le mémoire. C'est plutôt un instrument de travail que ce résumé des recommandations à la fin. On les retrouve intégralement dans le texte.

Le Président (M. Laplante): Merci de votre coopération. M. le ministre.

M. Chevrette: On s'en servira pour ceux qui décrient la loi 90.

M. Léonard: M. le Président, M. le Président de l'Union des producteurs agricoles, je vous remercie de votre texte et je vous félicite aussi du sérieux qu'il y a dedans. Je voudrais faire un certain nombre de commentaires de façon assez élaborée par rapport à une proposition qui était importante lorsque nous avons déposé le projet de loi — il était aussi important de déposer un texte sur l'harmonisation — pour faire l'objet de la consultation.

Je suis d'abord heureux de constater que l'UPA donne son accord aux quatre principes qui sous-tendent le projet de loi 125 et qu'elle est aussi globalement d'accord sur le projet de loi. Ces principes, tels que vous les énoncez vous-mêmes, sont les suivants: l'aménagement c'est une responsabilité politique et il doit être confié à des institutions politiques; les citoyens eux-mêmes doivent participer à la prise de décisions et à la gestion de l'aménagement; l'aménagement n'est pas une responsabilité exclusive de l'Etat, mais une responsabilité conjointe des municipalités, des comtés municipaux renouvelés et du gouvernement québécois; enfin, des paliers de décision ayant une responsabilité conjointe, des mécanismes d'harmonisation des décisions sont prévus.

De même, je constate que l'UPA appuie de façon ferme l'introduction des schémas d'aménagement comme instrument de planification des municipalités aux fins de coordonner leur développement. Par ailleurs, vous reconnaissez aussi que la planification, par un schéma d'aménagement, en vue d'orienter le développement des voies de communication, d'implanter des réseaux d'utilité publique, de coordonner la création et l'agrandissement des parcs industriels, de localiser les périmètres d'urbanisation, est susceptible d'amoindrir le coût des infrastructures.

Pour ce qui nous concerne, nous en sommes évidemment aussi convaincus. Cet accord de votre part ne nous surprend pas puisqu'au cours de ma tournée j'avais commencé à le percevoir auprès de vos représentants dans différentes régions du Québec.

L'Union des producteurs agricoles a cependant quelques réserves sur les propositions gouvernementales d'harmonisation. Il m'apparaît à ce moment-ci important de bien situer le document sur l'harmonisation de la loi 90 et du projet de loi 125 afin de discuter des réserves formulées à l'égard de cette proposition.

Il y a deux principes que le gouvernement poursuit dans ce domaine: d'abord, assurer par le projet de loi 125 que les élus locaux, municipalités et comtés municipaux renouvelés, assumeront les responsabilités de l'aménagement de leur territoire d'abord au niveau municipal et, ensuite, à une table de concertation intermunicipale correspondant à la petite région d'appartenance.

A cette fin, le gouvernement, ses mandataires et ministères seront liés par les schémas d'aménagement d'après le texte de l'article 127.

Ensuite, assurer par la loi 90 la permanence pour l'immédiat et pour l'avenir de la protection du territoire agricole de façon à garantir le maintien et le développement d'une industrie agroalimentaire dynamique pour le Québec.

C'est pourquoi la Commission de protection du territoire agricole du Québec et le gouvernement sont les garants de cette permanence. Ces deux objectifs ont fait l'objet de discussions approfondies au comité ministériel permanent de l'aménagement du territoire et, ensuite, au Conseil des ministres.

La loi 90 devait cheminer rapidement. Elle était urgente. Elle gelait le territoire de bon nombre de municipalités. Il fallait donc éviter la spéculation et engager le processus de négociation de la zone agricole permanente.

Le projet de loi 125, quant à lui, n'a pas d'effets immédiats sur le territoire et, comme il

repose sur la responsabilité des élus locaux, le gouvernement a d'abord voulu procéder à une longue consultation avant de l'adopter. Il fallait donc discuter avec les unions de comté et l'Union des municipalités du Québec des grands paramètres du projet. C'est pourquoi le projet de loi 125 a été déposé avant Noël de façon à amorcer un débat public. Il n'était donc pas possible de déposer un texte d'harmonisation tant que la loi 90 n'était pas établie dans sa version finale et que les principes du projet de loi 125 n'avaient pas été fixés. (20 h 30)

Maintenant, qu'est-ce que dit le texte d'harmonisation? Essentiellement, qu'un conseil de comté renouvelé peut préparer un règlement de zonage agricole à l'intérieur d'une région désignée ou en dehors d'une région désignée. La préparation de ce règlement de même que l'administration de ce règlement sont sous la surveillance de la Commission de protection du territoire agricole. Si le conseil de comté renouvelé est à l'intérieur d'une région désignée, le contenu du règlement et son aire d'application entrent en vigueur à moins que la Commission de protection du territoire agricole ne s'y oppose. Le conseil de comté renouvelé a un droit d'appel au gouvernement. De toute façon, dans la loi 90, n'oublions pas que, selon l'article 50, c'est le gouvernement qui approuve le décret de la zone permanente avec l'avis de la Commission de protection du territoire agricole dans les cas où il n'y a pas accord avec les municipalités. Donc, toutes les garanties de la loi 90 sont respectées.

Si le conseil de comté renouvelé se trouve à l'extérieur d'une région désignée, et qu'il décide de préparer un règlement de zonage agricole, le ministre de l'Agriculture doit lui faire parvenir une proposition de zone agricole à la lumière des intérêts qu'il juge nécessaire de protéger pour les fins de la protection du territoire agricole. Le projet de règlement est ensuite soumis à la Commission de protection du territoire agricole du Québec pour savoir s'il respecte les critères nationaux que s'est donné la commission. La commission peut alors le désavouer et là aussi cependant le comté peut faire appel au gouvernement. Dans la préparation de ce règlement, ce sont les règles de consultation du projet de loi 125 qui s'appliquent de façon que les citoyens participent à la définition des territoires et du contenu du règlement. Le conseil de comté renouvelé gère le règlement et copies de tout permis, cependant, sont envoyées systématiquement à la commission. En somme, les objectifs de la loi 90 sont sauvegardés et les objectifs du projet de loi 125 le sont aussi.

Je voudrais maintenant bien saisir le sens de votre proposition d'harmonisation car vous indiquez à la page 11 de votre mémoire être en désaccord avec le document d'harmonisation que nous avons déposé, en décembre 1978. Je constate, en vous écoutant, que le conseil de comté renouvelé aurait ou non un rôle à jouer pour la délimitation du territoire de la zone agricole à protéger suivant qu'il se situe à l'intérieur d'une zone désignée ou non. Je dois comprendre que vous n'acceptez pas que le conseil de comté renouvelé élabore un règlement de zonage agricole s'il n'a pas commencé son processus d'élaboration du schéma d'aménagement. D'autre part, vous acceptez que le schéma d'aménagement comprenne la localisation des périmètres d'urbanisation. Donc, vous êtes d'accord que ce sujet soit discuté à une table intermunicipale, puisque cela fait partie du contenu obligatoire du schéma à l'article 5. Par ailleurs, le territoire agricole n'est-il pas, d'une certaine façon, l'envers d'un périmètre d'urbanisation? Et si la table intermunicipale est compétente en ce domaine, pourquoi ne le serait-elle pas, d'une certaine façon, dans le domaine agricole?

Vous demandez aussi que l'on étende l'application de la loi 90 à l'ensemble du territoire agricole québécois et que l'on accélère la délimitation des zones agricoles permanentes. Effectivement, l'article 22 de la loi 90 indique bien que le gouvernement peut intervenir par décret pour étendre le territoire permanent. Je ne peux donc, quant à moi, donner une réponse immédiate à cette question. J'aurai l'occasion d'en discuter avec mon collègue, M. Garon, et mes autres collègues au COMPA, au Comité permanent d'aménagement et au conseil des ministres, lorsque le ministre de l'Agriculture fera des propositions à ce sujet. Cela lui appartient de les acheminer.

Enfin, je voudrais conclure rapidement en vous indiquant qu'il est important de considérer, je pense, l'évolution rapide des mentalités, il me semble, à l'égard du patrimoine agricole. Il y a quelques années, en effet, le patrimoine agricole n'était pas une valeur très importante au sein de la collectivité québécoise. Je pense que c'était regrettable, mais il fallait le constater. Avec la loi 90 et le projet de loi 125, elle est devenue très importante. Les mentalités, à mon sens, évoluent donc très rapidement là-dessus. Le récent débat que nous avons connu y a contribué. C'est devenu une mission nationale dont chaque Québécois, y compris les dirigeants municipaux, je pense, sont de plus en plus conscients.

Maintenant, par rapport à ces commentaires, par rapport à votre texte, j'aimerais vous poser un certain nombre de questions sur tout ce document d'harmonisation et aussi sur la loi d'aménagement. L'une de celles-ci pourrait se libeller ainsi: Les critères nationaux de la Commission de protection du territoire agricole garantissent la permanence de la protection du territoire agricole. Mais est-ce que la nature des problèmes agricoles ne peut pas varier d'un endroit à l'autre, étant donné les particularités physiques et géographiques du territoire et, dans ces cas, comment pourrait-on introduire ces particularités?

M. Couture (Paul): De prime abord, comme vous le dites, il y a des particularités géographiques. Le rôle de la Loi sur la protection du territoire est de protéger les sols agricoles. Mais je pense qu'à partir de là ce n'est pas une décision

qui est immuable, il y a des considérations que la commission doit regarder. Je m'en venais sur la route ce matin et à un moment donné une route coupe une terre en deux. Il reste 1000 pieds ou 500 pieds de terrain qui n'est pas cultivé parce qu'il n'y a aucun accès de l'autre côté de la route. Tu te dis: Comment utilise-t-on ce terrain? Il y a des possibilités et je vois mal la commission ne pas tenir compte de ces réalités. Mais je trouverais valable — c'est dans les mentalités — parce que ce que vous dites... il y a un passé auquel on n'a pas attaché beaucoup de valeur, et on le voit; on n'a qu'à regarder la façon dont nos routes sont faites. On voit une route qui passe à cinq ou six arpents du bout de la terre d'un bonhomme. On se dit: Pourquoi passe-t-elle à six arpents? Pourquoi ne passe-t-elle pas au bout de la terre? On a coupé les choses comme cela.

Donc, il y a des bandes de terre qui restent et je ne vois pas comment la commission ne pourrait pas considérer ces réalités. Je pense que cela peut donner une réponse à cela. Mais le souci qu'on a à ce sujet... d'abord, on sait comme il a été difficile de passer une loi sur la protection des sols. Même dans les mentalités, il y a une évolution. Mais on ne peut pas courir le risque à ce moment de délaisser certaines priorités qui sont dans la loi sur la protection des sols pour une autre loi qui pourrait être prioritaire sur l'autre et qui serait entre les mains de gens qui ont d'autres préoccupations, sans les minimiser. Mais c'est normal.

M. Léonard: Je pense qu'il y a un certain nombre d'appréhensions dans ce que vous dites. La question que je vous posais, finalement... il y a des critères nationaux. Les critères nationaux pourraient être appliqués à travers tout le Québec. Mais au-delà de cela, il y a des particularités physiques, géographiques. Est-ce qu'on ne peut pas — au-delà des critères nationaux — en tenir compte au moyen, par exemple, d'un règlement de zonage agricole? C'est cela la question. Au fond, au lieu d'avoir des appréhensions, cela risque même de consolider votre approche.

M. Dumais: M. le ministre, quand on regarde la loi 90 et le rôle administratif qui est dévolu à la Commission de protection du territoire agricole, fatalement, cela ne mène qu'à des applications souples de critères qui eux-mêmes, dans la loi 90, le sont. Il n'y a pas de critères absolus dans la loi 90. Par ailleurs, lorsqu'on regarde la loi 90, qu'est-ce qu'on constate? Elle interdit de faire toute une série de choses en zone agricole à moins d'obtenir une permission de la Commission de protection du territoire agricole.

Or, nous estimons que les demandes d'autorisation permettent une souplesse considérable dans l'application des critères de la loi 90 qui n'ont rien de mécanique. C'est bien évident que les critères définis dans la loi 90 ne mènent pas à la même attitude vis-à-vis des demandes d'autorisation, suivant qu'il s'agit d'une demande d'autorisation pour une terre située près de Montréal ou située en Gaspésie. Or, nous estimons qu'il y a déjà à ce niveau un élément de souplesse avec lequel l'agriculture peut fort bien vivre.

D'autre part, ce que l'on craint, ce serait une souplesse qui émanerait de préoccupations provenant d'autres considérations que l'intérêt du développement de l'agriculture. On estime que la Commission de protection du territoire agricole est là pour penser essentiellement agriculture. Tandis qu'avec un conseil de comté, surtout les conseils de comté renouvelés, surtout avec, éventuellement, le vote pondéré pour tenir compte des populations, il serait tout à fait humain — encore une fois, cela n'est pas un blâme que je leur fais — que le développement de l'agriculture et la pérennité de l'usage agricole des terres arables ne soient pas leur préoccupation première. On craindrait que d'introduire la souplesse de ce côté, ce soit une souplesse qui ne tienne peut-être pas suffisamment compte des préoccupations agricoles, alors qu'elle est déjà là.

M. Léonard: La Commission de protection du territoire agricole a toujours son rôle de surveillance, donc peut toujours vérifier que les critères nationaux sont bien appliqués. Quand vous parlez des éléments de souplesse ou même peut-être de renforcement qu'un conseil de comté peut apporter, il me semble qu'à ce moment on peut donner une certaine latitude à un conseil de comté. C'est le sens de la proposition.

M. Couture (Paul): Oui, mais notre approche a été à l'envers de celui-là. On est ici, je pense bien, pour donner notre approche. Notre préoccupation a été d'abord de protéger le territoire agricole et ensuite avoir assez de souplesse. Je pense qu'on est conscient qu'on n'empêchera pas, et c'est normal, que des villages ou des villes se développent. Mais cela va planifier le développement à partir d'une protection, mais avec des considérations pour certains développements.

M. Léonard: Une deuxième question, si vous permettez. Vous affirmez que la Commission de protection du territoire agricole est plus susceptible de trouver des interlocuteurs compétents au niveau des municipalités. Je crois que cela ressort de votre texte. Ne pensez-vous pas que le conseil de comté renouvelé étant composé d'élus locaux répond à vos critères de compétence?

M. Couture (Paul): Qn peut bien vous dire que vous vous faites des peurs, cela se peut. Mais avec les peurs qu'on a, c'est qu'on pense qu'une municipalité est quand même plus proche que le conseil renouvelé, qui va être la représentation qui va quand même être changée dans des milieux. Il y a des régions où cela ne posera pas de problème, parce que là on a la mentalité rurale. Quand on parle de villes de 3000 ou 4000 âmes, c'est quand même un milieu. Mais quand vous arrivez où il y a une participation d'une ville beaucoup plus considérable, la préoccupation ne sera pas la même que celle du milieu concerné. Un exemple de cela, qu'on a une préoccupation

très grande, c'est au niveau des règlements de construction, d'élevage et le reste. Une porcherie ne sera pas vue de la même manière par des urbains que par des gens qui sont dans le milieu et qui sont producteurs agricoles. Cela ne sera pas tout à fait la même chose. Ou bien on va rendre tout le monde bien objectif. Mais avant qu'on ait rendu tout le monde objectif, on a certaines précautions à prendre.

M. Léonard: Au fond, finalement, votre appréhension s'exerce envers des maires plutôt urbains, à l'heure actuelle.

M. Couture (Paul): Disons que j'aurais pu être maire; que j'aie à administrer une municipalité, ma préoccupation serait la municipalité, cela ne serait pas la protection du sol agricole. Je pense que cela ne serait pas ma première préoccupation, parce que je suis élu pour cela. On s'est donné un "motto" qui est plus général que cela et un objectif qui est beaucoup plus grand. C'est là que je vois la différence.

M. Léonard: C'est ce que vous dites. Vous dites qu'au niveau municipal ils sont compétents cependant. C'est ce que vous disiez tout à l'heure. Alors, au niveau du conseil du comté, ce sont encore les mêmes maires. (20 h 45)

M. Couture (Paul): II y a des nuances quand même.

M. Léonard: C'est quoi, ces nuances?

M. Couture (Paul): Quand on arrive au niveau d'une municipalité rurale, je pense qu'on a des gens qui peuvent être plus proches des préoccupations agricoles qu'au niveau d'une municipalité regroupée, où il y aura une plus grande majorité de maires qui seront des urbains.

M. Dumais: Si je pouvais ajouter une petite chose, M. le ministre. Il est peut-être important de souligner que, dans notre mémoire, lorsqu'on parle, à ce niveau, de la compétence et de la préoccupation, c'est essentiellement dans l'analyse du potentiel agricole du sol d'un territoire. Lorsqu'on dit qu'au niveau du conseil de comté, les gens sont peut-être un peu moins compétents pour ça, qu'est-ce qu'on veut dire? On veut dire, par exemple, que le maire de la municipalité X est beaucoup moins susceptible de connaître la nature du sol de la municipalité Y sur laquelle il va avoir à se prononcer au sein du conseil de comté. Tandis que le maire, dans sa municipalité, et les producteurs agricoles dans leur municipalité, connaissent bien leurs sols, connaissent bien leurs territoires agricoles. Donc, ils en sont près et c'est de ça qu'émane la compétence qu'on voit au niveau local. C'est dans la connaissance de la qualité du territoire.

M. Léonard: Dans les coins ruraux, c'est quand même tous ces maires qui composent les conseils de comté. D'autre part, à l'heure actuelle, compte tenu de l'augmentation des coûts du service public, il me semble que la plupart des maires urbains tentent, à l'heure actuelle, de garder leur développement à l'intérieur de leur périmètre d'urbanisation. Même présentement, ils n'ont pas du tout envie d'étaler leur développement. Je pense que c'est une des tendances, de sorte que ça peut jouer aussi à l'inverse, l'attitude d'un maire urbain conscient des coûts du développement. Je dis ça comme commentaire.

M. Couture (Paul): Je suis d'accord quand on dit les maires conscients, mais c'est quantifiable, la conscience, à ce niveau. Notre préoccupation aussi, je pense, vis-à-vis de la loi 90 et des responsabilités qu'on donne aux conseils de comté renouvelés, dans plusieurs municipalités, c'est que ce n'est plus vrai que le conseil municipal est formé d'agriculteurs. Parce que, de plus en plus, l'implantation de zones résidentielles et le reste fait qu'on a beaucoup moins de municipalités où les élus sont des agriculteurs ou des gens qui sont proches de l'agriculture.

M. Léonard: Une troisième question. Vous dites que la participation des agriculteurs à des assemblées publiques en vue de délimiter le territoire agricole sera bien plus grande si ces assemblées se tiennent dans les municipalités plutôt qu'au niveau des conseils de comté. Ce sont de telles assemblées locales qui sont prévues durant l'élaboration du schéma d'aménagement. En effet, l'article 18 de la loi indique qu'une assemblée doit être tenue dans chacune des municipalités d'un groupe de municipalités dont la population totale représente au moins les deux tiers de la population du comté. Est-ce que ce n'est pas suffisant?

M. Couture (Paul): Ce qu'on pense, c'est qu'au niveau de la municipalité, s'il y a un problème donné, la participation est plus facile, parce que la participation... On travaille dans des organismes et ce n'est pas toujours facile de susciter la participation, à moins que ce ne soit un problème grave. Comme c'est plus proche, que les gens sont préoccupés, on pense que la participation sera meilleure.

M. Léonard: Si on fait une consultation sur un schéma d'aménagement ou un règlement de zonage agricole, ce seront les cultivateurs qui seront intéressés, donc ils vont venir. Au niveau local, lorsqu'on va consulter sur le règlement du zonage agricole...

M. Couture (Paul): Oui, mais quand...

M. Léonard: Un règlement de zonage agricole, c'est ça, une proposition d'harmonisation...

M. Couture (Paul): Oui, mais quand vous êtes rendu au niveau d'un conseil de comté renouvelé, c'est une dimension qui est beaucoup plus...

M. Léonard: ... au niveau de la municipalité locale, la consultation?

M. Couture (Paul): C'est ce qu'on demande.

M. Léonard: Dans la proposition d'harmonisation?

M. Chevrette: C'est l'arbitrage qui relève du conseil...

M. Léonard: C'est l'arbitrage.

M. Mercier (Maurice): M. le ministre, je pense que c'est là qu'on a émis plusieurs critères qui faisaient qu'on voulait garder ce qu'on a dans la loi 90, dans le fond.

M. Léonard: Nous aussi, on veut vous le garder.

M. Mercier (Maurice): Admettons avec vous que vous essayez de nous faire accepter l'autre côté et que vous n'avez peut-être pas tort. Par ailleurs, mettez-vous de notre côté et regardez-nous; on a même accepté un processus sur lequel on était déjà réticent au départ dans la loi 90.

Quand on a demandé une loi 90, on était plus sévère pour pouvoir s'immiscer à l'intérieur de cette façon de fixer la zone agricole. A partir de là, il reste que ce qu'on dit à notre point de vue, c'est que la commission, au bout, il faut lui maintenir son statut actuel et c'est le conseil de comté qui doit, lui, prendre le chemin de la loi 90 et non la commission qui est obligée de prendre le chemin de la loi 125. C'est cela notre... Je comprends qu'on puisse facilement prendre l'aspect contraire.

M. Léonard: C'est M. le vice-présient. Une Voix: M. Mercier.

M. Léonard: M. Mercier, vous avez fait une affirmation qui, il me semble, est inexacte.

M. Mercier (Maurice): Peut-être.

M. Léonard: Bien amicalement. Quand vous dites: On veut garder ce qu'on a, la proposition d'harmonisation ne vise pas à abolir la loi 90, pas du tout. C'est juste une question d'harmonisation entre deux lois qui sont aussi nécessaires l'une que l'autre.

M. Mercier (Maurice): Mais c'est qu'elle vise quand même à changer le processus de décision de la commission. Cela va jusque-là. Est-ce qu'on peut aller jusque-là? C'est comme cela qu'on l'interprète.

M. Léonard: La commission garde toujours son rôle de surveillance par rapport à la protection du territoire agricole. Il est là.

M. Mercier (Maurice): C'est très général dans le sens que vous le dites là. Mais elle a un pouvoir de décision plus grand, d'une autre manière, que celui que vous exposez.

M. Léonard: D'accord. Est-ce que vous aviez autre chose à ajouter?

M. Couture (Paul): Non, mais c'était une question de préoccupation. Lorsqu'on a demandé la loi 90, on avait demandé qu'elle soit administrée sous l'autorité du ministère de l'Agriculture pour ces raisons. C'était notre préoccupation. Mais il n'y a rien aujourd'hui qui nous a sécurisés davantage. La situation n'a pas tellement changé. Si on dit qu'après avoir fonctionné qu'il y aura des habitudes créées et qu'il y aura une autorité peut-être qu'on pourra se donner...

Mais, à l'heure actuelle, on a la même préoccupation. C'est cela qu'on essaie de vous faire connaître.

M. Léonard: Une dernière question, si vous le permettez, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Oui, d'accord.

M. Léonard: Dans le même ordre d'idée, l'élaboration du plan d'urbanisme requiert la tenue d'assemblées publiques dans la municipalité concernée. Comme le plan doit comporter les grandes affectations du sol, à l'intérieur du territoire de la municipalité locale, j'entends bien, est-ce qu'il n'y a pas là matière à satisfaire les agriculteurs? Encore une fois, je rappelle qu'il ne s'agit pas de faire disparaître la loi 90. Ce n'est pas cela. Je pense que le gouvernement l'a présentée et, comme vous l'avez dit, cela a été une loi dure à obtenir pour vous, mais je pense que ce gouvernement a eu le courage de la présenter, de l'adopter. Au fond, il ne s'agit pas du tout de la faire disparaître. Il s'agit d'harmoniser deux lois qu'on dit tout aussi nécessaires.

Quand on va discuter des grandes affectations du sol sur le territoire d'une municipalité locale agricole, il me semble qu'automatiquement on va discuter du territoire agricole selon l'aire de protection du territoire agricole, la permanence...

M. Couture (Paul): Lorsque vous dites que cela va se discuter au niveau de la municipalité, c'est ce qu'on demande que cela se discute au niveau de la municipalité.

M. Léonard: Le processus de consultation dit cela, dans la proposition d'harmonisation...

M. Couture (Paul): Mais selon ma compréhension, il ne dit pas seulement cela. Les parties qui disent comme nous autres, nous sommes d'accord avec elles. C'est sur l'autre partie que nous sommes moins d'accord.

On disait tout à l'heure que le gouvernement a passé la loi 90. C'est vrai. Mais on sait qu'il y a

quand même eu un genre de petit frottement, de conflit, avec les conseils de comté qui sentaient leur autorité un peu minimisée sur cette préoccupation.

Mais nous autres, ce qu'on craint un peu, c'est que, par la loi 125, on mette un peu d'huile là-dessus, parce qu'on redonne certains pouvoirs, certains rôles, aux conseils de comté. Mais notre inquiétude reste la même jusqu'à ce qu'on n'ait pas démontré le contraire. C'est l'état d'esprit dans lequel on est. On est dans la même situation.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Merci, M le Président. Essentiellement votre mémoire, si on le résumait, donnerait l'image suivante. Oui, au principe de la loi 125. Non au document d'harmonisation, dans sa forme, tel que présenté.

M. Couture (Paul): II dit cela.

M. Giasson: Je vous avouerai, M. le Président, que je suis un peu surpris — le terme est exact — de l'attitude qu'a le ministre d'Etat à l'aménagement. Je me souviens fort bien des positions très fermes défendues par le ministre de l'Agriculture lors du débat sur la loi 90. A de nombreuses questions qui avaient été posées au ministre de l'Agriculture sur la possibilité d'une présence des conseils de comté ou de certains pouvoirs consultatifs ou de recommandations qui auraient pu être donnés à des conseils de comté, le ministre de l'Agriculture a été absolument ferme: II n'en était aucunement question, parce qu'il croyait que le conseil de comté, dans sa constitution même, n'était pas l'organisme vraiment gardien de l'application d'une politique de protection du territoire agricole, pour des raisons, je pense, que tout le monde reconnaît; c'est que, pour un conseil de comté, les soucis, les préoccupations ne peuvent pas porter, a priori, sur la protection des sols arables, parce qu'il y a beaucoup d'autres secteurs qui touchent l'administration d'une corporation de comté.

Pour ma part, je comprenais assez bien le ministre de l'Agriculture. D'ailleurs, dans les propositions d'amendements que j'avais présentées à la commission, je voyais ou je voulais une présence agricole très marquée chez l'équipe ou chez l'organisme qui aurait à examiner ce que devrait être le zonage ou le territoire permanent agricole à être soumis à la Commission de protection du territoire agricole. Je le voyais sur le plan des régions avec une représentation qui laisserait place à un représentant de l'Union des municipalités, à un représentant des conseils de comté, deux personnes nommées par le ministre de l'Agriculture et deux personnes désignées par l'UPA. Cela m'apparaissait être une représentation ou la constitution d'un comité régional, d'une commission régionale à l'intérieur de laquelle le souci de la protection du territoire agricole serait vraiment la priorité, mais on sait que ces proposi- tions d'amendements ou ces recommandations n'avaient pas été agréées au moment du débat sur la loi 90.

Mais là, je sens que la préoccupation fondamentale du ministre d'Etat à l'aménagement n'est pas celle qu'on sentait chez le ministre de l'Agriculture lors du débat sur la loi 90. Je crois comprendre les gens de l'UPA — je le dis, parce que c'est la réalité — c'est qu'ils connaissent fort bien le milieu agricole. Ils peuvent évaluer le souci ou la préoccupation des membres d'un conseil municipal dans une municipalité rurale qui pourraient beaucoup plus facilement attacher une importance ou une préoccupation constante à des politiques de protection du territoire agricole que ne pourraient le faire même des représentants élus au conseil de comté qui émane des municipalités qui le composent.

Ce que vous craignez, sans doute — j'ai pu le découvrir — c'est que les pouvoirs nouveaux qu'on donnerait à des conseils de comté à l'intérieur d'un schéma d'aménagement où on leur donne une place dans la définition d'une zone agricole permenante, ce que vous craignez, c'est que les pouvoirs qu'on donne à ces conseils de comté renouvelés soient tels que le droit de veto, si on me permet ce terme, qu'a la Commission de protection du territoire agricole vis-à-vis des recommandations venant des municipalités, tel que prévu dans la loi 90, ce droit de veto qu'a la Commission de protection du territoire agricole vis-à-vis de toute une série de demandes qui lui seront transmises, parce qu'avec le temps, cela va venir très nombreux, ce que vous craignez, c'est que les pouvoirs qu'on donnerait aux conseils de comté renouvelés dans la loi 125, diminuent ces pouvoirs que vous voulez fondamentaux entre les mains de la Commission de protection du territoire agricole. Est-ce que j'ai bien saisi votre sujet de préoccupation?

M. Couture (Paul): C'est exactement notre pensée. On dit que la préoccupation, présentement, de la loi 90 et de la commission, c'est de préserver le sol agricole. On ne dit pas que c'est gelé définitivement là, mais c'est sa préoccupation et, à l'intérieur de cela, on voit — les conseils de comté, s'ils en ont besoin, ils font la demande à la commission — qu'on ne subordonne pas la protection des sols agricoles aux conseils de comté, ce sont les conseils de comté qui sont subordonnés à la Commission de protection des terres agricoles. (21 heures)

M. Giasson: J'aurais une autre question que j'aimerais vous poser. Dans plusieurs conseils de comté renouvelés qui seront constitués de représentants ou d'élus venant de municipalités qui sont d'abord agricoles, dont la vocation première est l'agriculture, vous ne croyez pas que le danger serait moins grand à ce moment-là, que le conseil de comté ait des pouvoirs, à l'intérieur de son schéma d'aménagement, de déterminer une zone agricole permanente ou d'accepter les modifica-

tions à une zone agricole permanente désignée lorsqu'il y a des besoins particuliers qui se produisent dans le cours du temps, que, dans d'autres conseils de comté où peu de municipalités vraiment rurales sont présentes, c'est-à-dire des municipalités à vocation mi-rurale, mi-urbaine, ou qui vivent des développements autres que l'agriculture?

M. Couture (Paul): II ne peut pas y avoir deux systèmes.

M. Giasson: Non.

M. Couture (Paul): C'est ça...

M. Giasson: Tu es pris avec les deux types de conseils de comté en matière de représentation d'intérêts de l'agriculture.

M. Couture (Paul): C'est ça. Il faut opter pour un et nous, on se pense plus en sécurité en optant pour la formule qu'on préconise et qui laisse quand même une responsabilité aux conseils de comté et aux municipalités de se développer à l'intérieur de ça.

M. Giasson: Maintenant, M. le Président, vous avez fait des recommandations répétées à la fin de votre mémoire sur ce que devrait être la priorité en matière de zonage, de zones permanentes dans les régions où il y a un zonage provisoire, comme dans les régions où le zonage provisoire n'a pas été décrété. J'aimerais savoir du ministre quelle est son opinion vis-à-vis de ces recommandations.

M. Léonard: Ces recommandations seront étudiées. Nous allons en tenir compte lorsque nous allons revoir le projet de loi, après les auditions de la commission.

M. Giasson: Vous n'êtes pas fixés sur les délais qui sont proposés par les représentants de l'Union des producteurs?

M. Chevrette: On est à se faire influencer présentement.

M. Léonard: Nous sommes à entendre des mémoires sur les principes du projet de loi. Ce n'est pas le moment de prendre des positions...

M. Goulet: On n'est pas d'accord.

M. Chevrette: Cela ne dit pas ça, M. le député de Bellechasse.

M. Léonard: On demande des explications sur le mémoire de l'Union des producteurs agricoles.

M. Chevrette: A ce compte-là, on aurait pu demander si M. Biron était d'accord avec 116. Vous auriez répondu quoi...

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Giasson: M. le Président, même si le...

M. Goulet: Si on est moins d'accord, s'il n'est pas d'accord...

M. Chevrette: Le paradis...

Le Président (M. Laplante): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Monsieur...

M. Giasson: Même si le ministre responsable de la loi ne peut pas émettre d'opinion sur les recommandations des représentants des producteurs, je déclare que ces recommandations m'apparaissent vraiment fondées et correspondent à un sujet de préoccupation de la part des gens de l'UPA dont le ministre doit tenir compte.

M. Léonard: C'est votre opinion.

M. Giasson: J'invite le ministre à la considérer très favorablement.

M. Léonard: Merci de votre invitation. M. Giasson: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Pas de question.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je voudrais penser tout haut un peu avec M. Couture. Il me semble, M. Couture, que les lois 90 et 125 sont vraiment complémentaires, qu'elles se complètent l'une l'autre. Si on pense à l'histoire de la loi 90, on se souviendra que ça faisait une bonne dizaine d'années que beaucoup d'éléments dans la population du Québec attendaient du gouvernement du Québec une intervention de cette nature. C'était une loi qui s'était fait attendre pendant longtemps et, d'ailleurs, quand elle a été finalement adoptée, M. Drummond, l'ancien ministre de l'Agriculture sous le gouvernement précédent, a fait l'éloge de la loi et a dit que son seul regret, c'était qu'il n'ait pas pu lui-même présenter une loi semblable à l'Assemblée nationale.

Bon! Tout ceci non pas pour faire de la partisanerie, mais pour dire que c'est une loi qui était attendue et qui correspondait à la volonté de la population. Mais la protection du territoire agricole, c'est un domaine éminemment difficile. Vous le savez encore mieux que moi, parce qu'il s'agissait de prendre le risque de déplaire à pas mal de monde et il n'y a pas d'autorité au Québec qui était capable de courir ce risque, sauf l'Etat du Québec. C'est pourquoi il fallait que le gouvernement intervienne d'une façon centrale, je ne dis pas centralisante puisqu'il n'y avait rien avant, donc, il n'y avait rien à centraliser, mais c'était quand même une intervention centrale, c'est l'Etat du Québec qui intervenait pour protéger, une fois

pour toutes, le territoire agricole. Cela reposait quand même sur une volonté populaire très répandue et qui s'était considérablement exprimée au cours des années.

La loi 125 arrive et part de la même hypothèse, soit celle que la protection du territoire agricole est voulue par la population du Québec. Si c'est voulu par la population du Québec, fatalement, cela va être voulu par les élus locaux, cela va être voulu par les élus municipaux, par les élus à l'échelle des conseils de comté. Il va peut-être y avoir un moment d'adaptation et c'est peut-être pour prévoir ce moment d'adaptation que la loi 90 est venue avant la loi 125. Il y a un moment d'adaptation à faire. Si on n'arrive pas à faire cette adaptation et à s'assurer que les élus locaux correspondront à la volonté populaire par le moyen des schémas d'aménagement et des autres moyens prévus par la loi 125, la loi 90 va demeurer un édifice extrêmement fragile parce que ça voudra dire, à ce moment-là, que la loi 90 ne reposait pas véritablement sur une volonté réelle sur le plan local et sur le plan des petites régions.

Il me semble que c'est cela le pari. Si, effectivement, la loi 90 correspond à la volonté de la population du Québec, la loi 125 apporte l'étape suivante: cette volonté va se traduire non pas au niveau de l'Etat central, qui était le seul à pouvoir faire la première intervention, mais au niveau local et au niveau des petites régions, là où les gens vont intervenir eux-mêmes à l'échelle de leur municipalité, à l'échelle de leur petite région pour correspondre à cette volonté populaire. Au fond, on ne court à peu près pas de risque...

Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît...

M. de Bellefeuille: Je termine, M. le Président. On ne court à peu près pas de risque puisque, comme le ministre l'a déjà dit à plusieurs reprises, la Commission de protection du territoire agricole conserve son rôle. Elle pourra toujours s'assurer que les grands objectifs ne sont pas trahis. Il semble, M. Couture, que c'est comme ça qu'il faut voir cela, comme deux mesures complémentaires. Si la loi 125 ne tient pas debout, la loi 90 non plus n'avait pas de base dans la population. Je suis convaincu que la base dans la population, elle est là, que la loi 90 va tenir et que la loi 125 va lui apporter son complément.

M. Couture (Paul): Juste un mot, M. le Président, pour réfléchir tout haut avec M. de Belle-feuille. Vous parlez de la complémentarité. Notre suggestion, c'est seulement de lui faire jouer son rôle de complémentarité, selon notre compréhension, parce qu'on veut réellement qu'elle soit complémentaire. Notre suggestion d'harmonisation nous assure qu'elle va jouer son rôle de complémentarité; c'est là qu'est notre préoccupation. Comme vous le dites, la difficulté qu'on a, c'est que les esprits n'étaient pas prêts; dans dix ans, peut-être qu'on raisonnera autrement, mais dans l'immédiat je pense que pour notre protection il faut faire ces réserves.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la fin.

M. Léonard: II y a une chose qui a été dite et que je voudrais relever. La Commission de protection du territoire agricole n'est subordonnée en aucune façon aux conseils de comté. Cela a été dit par M. Couture tout à l'heure. Cette commission garde toujours un droit de désaveu et c'est seulement vis-à-vis du Conseil des ministres qu'il peut y avoir un débat. Je tiens à relever cela parce que, dans la proposition d'harmonisation, la commission n'est pas subordonnée aux conseils de comté.

Je dirais à part cela que dans mon esprit comme dans l'esprit de mes collègues nous avons tenu à adopter cette Loi sur la protection des territoires agricoles, nous y avons travaillé au-delà de deux ans et on est arrivé à l'adopter avant Noël dernier et ce n'est pas pour démolir ce qu'on vient de faire. On a à coeur la pérennité du territoire agricole. Cependant, ce n'est pas sur la planète Mars, il y a des gens qui y vivent et il s'agit d'harmoniser cela avec la loi 125 qui porte sur l'aménagement et l'urbanisme.

Je vous remercie beaucoup.

M. Chevrette: M. le Président! Le Président (M. Laplante): Oui?

M. Chevrette: Je ne vous poserai pas une question de privilège parce qu'on n'a pas le droit ici.

Le Président (M. Laplante): Non.

M. Chevrette: Je voudrais inviter M. Mercier qui est de ma région à venir me rencontrer, parce qu'il y a un bout que je voudrais comprendre et comme on est limité dans le temps, je ne peux malheureusement pas vous questionner. Mais j'aurais également une clarification à vous demander sur un point; peut-être que par la suite on pourra mieux se comprendre, parce qu'on est ici vraiment pour se laisser influencer.

Le Président (M. Laplante): MM. Mercier, Dumais et Couture, les membres de cette commission vous remercient de votre participation. Merci messieurs.

J'appelle maintenant les professeurs de l'Institut d'urbanisme de l'Université de Montréal. Si vous voulez identifier votre groupe, monsieur, vous identifier et identifier la personne qui vous accompagne, s'il vous plaît.

Professeurs de l'Institut d'urbanisme de l'Université de Montréal

M. McNeil (Jean): M. le Président, le mémoire que nous allons présenter a été rédigé par un groupe de professeurs de l'Institut d'urbanisme de l'Université de Montréal et du Centre de recherches en droit public de la même université. Ces

professeurs sont Marie-Odile Trépanier, Réjane Charles, Aurèle Cardinal, Michel Gariépy et Jean McNeil.

Nous sommes deux à venir discuter avec vous de ce mémoire. A mes côtés, Mme Réjane Charles et je suis Jean McNeil.

Je voudrais préciser immédiatement que les opinions exprimées dans ce mémoire n'engagent en aucun cas les institutions auxquelles nous appartenons. Nous le faisons à titre tout à fait personnel.

Compte tenu du temps limité qu'il nous reste, parce que je comprends que la commission doit cesser ses travaux à 10 heures, je me permettrai d'apporter simplement un certain nombre de précisions quant aux opinions et recommandations exprimées dans le mémoire concernant notamment les mécanismes prévus par le projet de loi et je laisserai, par la suite, à Mme Réjane Charles le soin de faire de même en ce qui concerne les instruments et documents d'aménagement et d'urbanisme également prévus par cette loi.

Sur le plan des mécanismes, nous voudrions d'abord faire valoir que nous sommes inquiets quant aux possibilités réelles que se donnera le gouvernement pour coordonner ses programmes et ses projets en matière d'équipements et d'infrastructure dans les divers comtés. Nous pensons que l'article 11 dans ce sens n'est pas assez fort, que le projet de loi ne précise pas les manières ou la façon avec lesquelles les gouvernements ou le gouvernement provincial va effectivement réussir à produire les documents synthèses dont la livraison est prévue aux articles 11 et 21 du projet de loi.

Par conséquent, nous recommandons que cet article 11 soit amendé de manière à rendre obligatoire et dans un délai spécifié la production des documents synthèses de même que les documents relatifs aux équipements, tel que prévu par la loi.

En deuxième lieu, en ce qui concerne les relations entre le gouvernement, d'une part, et le schéma de comté, ou les plans d'urbanisme, ou les règlements, d'autre part, nous pensons qu'il y a un besoin important de clarifier la portée de l'article 127 par lequel le gouvernement et ses mandataires sont "liés" — et je mets ce terme entre guillemets — par les schémas, plans et règlements adoptés. Il semble, d'après nous que le terme "liés" a fort peu de portée juridique. On ne sait pas à partir de quel principe le mot "liés" pourrait s'appliquer surtout si on tient compte des articles suivants, 128 à 134, si je ne m'abuse, qui donnent au gouvernement des pouvoirs extrêmement importants de modification du schéma lorsque ses interventions dans le milieu urbain ou régional ne sont pas conformes aux objectifs du schéma. Nous voulons, en même temps, que dans l'article 127, le terme "liés" soit précisé et que la portée de cet article soit précisée par rapport aux autres articles de lois qui donnent aux ministères et aux organismes des pouvoirs de décision en matière d'équipement. (21 h 15)

Nous pensons que pour donner à cet article une signification minimale, il importerait que le gouvernement traduise, en termes de programmation budgétaire, les actions prévues au schéma. Je n'ai pas le temps d'élaborer là-dessus, mais on pourrait éventuellement en discuter.

Concernant les relations entre le gouvernement et les documents d'urbanisme, nous pensons, enfin, nous recommandons la suppression pure et simple des articles 130 à 133 qui, à notre avis, font double emploi avec les articles 134 et 135, notamment les alinéas c) et d) qui sont consacrés aux zones d'intervention spéciale. Enfin, et troisièmement, nous pensons qu'il serait important d'examiner la possibilité d'élargir le mandat et la composition de la Commission nationale d'aménagement pour lui faire jouer un rôle important en matière d'arbitrage en ce qui concerne les relations entre les actions du gouvernement et les schémas d'aménagement et les plans d'urbanisme.

Nous pensons, en outre, que cette commission devrait comporter au moins un représentant qualifié à l'aménagement. Nous suggérons, par exemple, qu'à l'image de la commission de l'environnement ontarienne, que cette commission puisse éventuellement arbitrer certains conflits en matière d'aménagement, quels que soient les niveaux impliqués. Elle pourrait ainsi soumettre des propositions de règlement de ces conflits en fonction de critères définis et laisserait un délai, par exemple, de 30 jours, à l'autorité provinciale pour approuver ou rejeter ses suggestions.

Enfin, et quatrièmement, un peu de manière incidente, nous pensons qu'il serait opportun de substituer au terme "objectifs" prévus dans l'action de conformité de la commission, terme beaucoup trop vague, par le terme "contenu" ou par le terme "principe". Ce terme revenant dans plusieurs articles, notamment 1 a, 33, 34, 52, 53 et 204, si je n'ai rien oublié.

Finalement, concernant la participation des citoyens, nous aimerions recommander un allégement de la procédure de participation en limitant la consultation proprement dite au stade de la version préliminaire et en élargissant les possibilités de choix et de discussion, en offrant à la population une documentation étoffée, non seulement sur les options retenues, au moment de la version préliminaire, mais également sur l'ensemble des options étudiées.

Bien sûr, ces recommandations mériteraient d'être étoffées et discutées davantage, mais peut-être que la discussion nous permettra davantage de le faire.

Je cède la parole à Mme Réjane Charles.

Mme Charles (Réjane): Ce projet de loi 125 a surtout été présenté comme un projet de loi sur la décentralisation et la participation. Il a apporté un certain nombre d'innovations par rapport aux autres projets de loi en aménagement et en urbanisme, mais il s'agit là essentiellement de structures et de procédures. Par contre, c'est aussi une loi d'aménagement et d'urbanisme et

c'est à la qualité des documents et aussi au type d'instruments opérationnels et à leurs caractéristiques innovatrices que peut se révéler l'importance accordée par le gouvernement à l'aménagement lui-même et également, que va être testée réellement la volonté du gouvernement de donner dans un cadre de décentralisation, la possibilité aux autorités locales, de contrôler leur territoire.

Or, si sur les premiers points, décentralisation et participation, il y a un effort effectif, quelles que soient les réserves que nous avons déjà faites dans d'autres mémoires, on peut dire qu'en ce qui concerne les documents et les instruments d'urbanisme, il y a beaucoup de déception et même un recul extrêmement net par rapport aux autres projets de loi. Aussi bien en ce qui concerne la qualité des documents, telle qu'elle est perçue à travers le projet de loi, qu'en ce qui concerne le type d'instruments et les nouveautés qui n'ont pas été intégrées dans ces types d'instruments.

En ce qui concerne la qualité des documents, il est extrêmement banal de dire que l'aménagement est une matière très complexe et qu'il faut apporter une attention spéciale à la confection des documents, au raffinement des instruments et on constate, en lisant ce projet de loi, qu'il y a vraiment une sous-estimation assez grande de cette complexité, une sous-estimation qui transparaît sur deux points, aussi bien au niveau de la formation professionnelle pour la confection des documents et le contrôle de l'aménagement et également au niveau de la recherche.

On peut faire un parallèle très rapide — je vais être aussi brève que possible — avec l'ancienne loi 12. Dans l'ancienne loi 12, en ce qui concerne le personnel, elle reconnaissait la nécessité d'un directeur d'urbanisme, selon l'article 21, et dans une série d'autres articles, 46, 49 et 51, elle donnait un certain nombre de pouvoirs, soit pour délivrer des certificats, soit pour vérifier une conformité ou délivrer même des permis pendant la période préparatoire du règlement intérimaire.

Or, dans la loi 125, tous ces rôles, grosso modo, sont attribués au secrétaire-trésorier, dont on ne conteste pas la capacité administrative, mais qui, manifestement, n'a pas la compétence spécialisée en ce domaine. C'est lui qui transmet les résumés de schémas et de plans, les articles 32 et 96, qui délivre des permis, qui délivre des certificats de conformité. Seul l'article 57, pour une fonction très limitée, fait appel à un fonctionnaire spécialisé pour délivrer des permis dans des cas spécifiques et pendant la période préparatoire du règlement de contrôle intérimaire.

On a l'impression qu'à travers le projet de loi, tous les problèmes d'évaluation de conformité de contrôle deviennent des opérations strictement administratives, presque de routine administrative, ne demandent pas une connaissance spécifique du domaine. On croit un petit peu rêver en voyant cela et on a l'impression quand même qu'on retourne à une période d'amateurisme dans le domaine de l'urbanisme qui semblait quand même dépassée.

Très brièvement, en ce qui concerne la recher- che, on ne retrouve pas non plus les articles 5 et 6 de la loi 12, concernant les programmes de recherche, les subventions et les bourses d'étude. On sait pourtant combien les décisions en aménagement marquent le citoyen dans sa vie quotidienne. On sait aussi l'insuffisance de la recherche québécoise en ce domaine et l'envahissement de certaines importations étrangères d'études mal adaptées ou mises sans discernement au Québec. Evidemment, nous insistons sur ces deux domaines qui nous semblent avoir été absolument évacués dans le nouveau projet de loi pour demander un petit peu de penser aux problèmes que les connaissances en matière d'urbanisme ne sont pas nécessairement des connaissances infuses par toutes ces personnes et qu'on ne peut plus se livrer aux délices de l'improvisation dans ce domaine.

Donc, nos recommandations portent évidemment sur la reconnaissance d'un personnel qualifié essentiellement aux conseils de comté, pour les schémas, notamment aux articles 32, 57, 76 et 96 et également pour certaines municipalités importantes, soit par leur seuil de population, soit par un taux d'urbanisation assez élevé, et également, au niveau de la recherche, on demanderait une attention un peu spéciale.

En ce qui concerne la qualité des documents, on pourrait faire beaucoup de commentaires également au niveau des schémas et des plans, tels qu'ils sont présentés. Très brièvement d'abord, on peut dire que la dimension temporelle a été complètement évacuée, ce qui est tout de même très curieux quand on aborde l'aménagement ou la planification. Il n'y a, en ce qui concerne les schémas et plans, pas d'échéanciers obligatoires qui sont prévus. On voit une espèce de laxisme quant à la fixation des priorités qui est pourtant très inhérente au processus de planification.

Pour prendre quelques exemples, à l'article 5f, on parle d'un échéancier de réalisation d'équipements, s'il y a lieu. A l'article 5g, une simple identification de localisation d'équipements, sans échéancier. Par contre, à l'article 8a et à l'article 83, on demande une estimation et, en plus, à l'article 83, une évaluation des coûts. Comment peut-on faire sérieusement une estimation et encore plus une évaluation qui devient plus précise des coûts sans échéancier, sans évaluation dans le temps?

Je suppose que les taux d'actualisation, cela existe et je ne vois vraiment pas, si des documents doivent accompagner un plan ou un schéma, comment ils peuvent être pris sérieusement, s'il n'y a pas des priorités, des échéanciers dans le temps, avec des estimations en fonction des périodes prévues.

Encore une autre dimension temporelle qui est ignorée, c'est l'ignorance toujours par rapport à la loi 12, qui le prévoyait dans son article 74, aux paragraphes r) et s), des zones d'aménagement différé et des zones d'urbanisation prioritaire.

Nous avons entendu parler longuement de la Loi sur la protection d'un territoire agricole, qu'indirectement, le périmètre d'urbanisation est

fixé par la commission. Mais il n'empêche qu'à l'intérieur de ce périmètre, la municipalité peut avoir des priorités dans le temps à fixer. Elle peut avoir des zones qu'elle veut développer de façon prioritaire, pour un certain nombre de raisons, de coûts d'ailleurs, peut-être, et on ne lui donne pas cette possibilité de créer deux types de zones.

D'ailleurs, on voit très bien, par d'autres dispositions de ce projet de loi, que l'approche est extrêmement statique et non pas dynamique, puisqu'on évacue cette période de temps. On voit par exemple qu'on incorpore, au niveau du plan, à l'article 81, un programme particulier d'aménagement. Cela est assez aberrant d'incorporer un programme particulier d'aménagement au niveau du plan, étant donné que la réalisation de ce programme ne se fera pas immédiatement. Fixer, figer dans un plan, dès son élaboration, un programme particulier paraît un peu aberrant. Qu'on fixe au niveau d'un plan les zones qui bénéficieront de ce programme, mais ce programme particulier devrait pouvoir davantage être fixé au niveau, par exemple, du zonage et non pas figé déjà dans un plan.

De même, les articles 112 et 114 constituent une approche extrêmement fragmentaire de l'aménagement et non pas une vue d'ensemble du territoire et de son développement entre les différentes zones.

Une autre critique qu'on pourrait également attribuer au plan, c'est une conception qui est certainement aussi dépassée. En dehors de la dimension temporelle qui manque, on sent que le plan est défini en termes très vagues. On lui assigne des fonctions très vagues, comme de grandes affectations ou des orientations. Ou bien c'est un catalogue d'équipements, c'est-à-dire qui doit énumérer les équipements prévus, ou bien on parle même de normes générales dans un plan. Est-ce que ces normes tombent du ciel? Est-ce que ce sont des normes quasi universelles ou est-ce qu'on se réfugie dans des normes qui sont une facilité sécurisante? On sait très bien que les normes n'ont pas de valeur en elles-mêmes mais qu'elles sont la transposition d'un certain nombre de choix et, dans le plan, ce qui est extrêmement important quand même de voir, c'est comment on a abouti à ces choix. C'est cela qui est le plus important et sur quoi on s'appuie pour déterminer ces normes.

Donc, en ce qui concerne les plans, en dehors de la dimension temporelle qu'on demanderait de rétablir selon les échéanciers obligatoires approximatifs et la programmation budgétaire plurian-nuelle et de l'intégration des zones à urbaniser en priorité, les zones d'aménagement différé, on demanderait aussi des schémas et des plans plus élaborés qui comprendraient pas seulement un catalogue d'équipements et une évaluation purement comptable des coûts — déjà, on a fait des réserves sur la possibilité d'évaluer de façon relativement précise ces coûts — il faudrait que ces plans soient accompagnés de documents justificatifs comprenant des études de rentabilité sociale et économique, de type analyse coûts- bénéfices, coûts d'opportunité, entre autres. Il faudrait des analyses également sur la rétroaction positive ou négative des différentes composantes d'un plan; parce qu'un plan est toujours un ensemble, on ne peut pas simplement considérer que c'est un ajustement d'équipements. Chaque équipement réagit sur l'autre et a des incidences différentes selon qu'on choisit tel type d'utilisation du sol ou tel équipement.

Enfin, il y a aussi certaines inquiétudes dans la confrontation de ce projet de loi avec la loi 69 sur l'environnement. On s'aperçoit qu'il y a une série d'études d'impacts qui sont déjà faites, indépendamment de l'aménagement, et qui auront une répercussion assez importante sur le schéma. Il y a là certainement une espèce d'harmonisation à prévoir pour que le schéma et le plan prennent une signification beaucoup plus concrète. Voilà très brièvement sur les plans.

Le dernier point que je voulais soulever, c'est au niveau des instruments plus opérationnels. Pour ne pas alourdir cette séance, je me limiterai essentiellement au zonage comme instrument opérationnel. Là également, comme pour le plan, on a l'impression que le zonage, tel qu'il est présenté à travers le projet, est aussi un instrument d'un autre âge, un peu démodé, disons une version américaine des années 20 qui vous propose un zonage uniforme alors qu'au Québec il y a toute une pratique assez riche dont le projet ne semble pas du tout avoir tenu compte. C'est peut-être cela qui semble assez grave. On sait également que partout ailleurs sur le continent, on multiplie les formules d'assouplissement à ce sujet-là et il ne semble pas que le projet de loi ait retenu ces formules d'assouplissement.

Très brièvement, il y a quatre points que je vais résumer. Il y a le problème des plans d'ensemble, les différentes formulations de densité, une rigidité rédactionnelle sur certains articles et le problème des droits acquis. (21 h 30)

En ce qui concerne les plans d'ensemble, on sait qu'au Québec, plusieurs villes ont déjà recours à cette technique, mais qu'elle est très hypothéquée par des contestations judiciaires. Or, c'est une des rares possibilités de pouvoir améliorer des utilisations du sol de façon beaucoup moins uniforme et de restaurer une qualité de vie qui est souvent médiocre avec le zonage traditionnel. C'est-à-dire une opération d'ensemble qui permet des usages diversifiés des équipements intégrés, subordonnée, évidemment, à une procédure d'approbation spécifique laissant un peu plus de discrétion à la municipalité, laquelle peut poser des conditions.

Je pense que le refus justement de reconnaître le plan d'ensemble dans ce projet de loi est assez étonnant quand le gouvernement affirme qu'il veut amorcer une certaine décentralisation. S'il n'accorde pas une certaine possibilité à la municipalité, justement, de contrôler son territoire autrement que par un zonage très traditionnel, il semble qu'il manque de confiance dans la municipalité pour contrôler son territoire. D'ailleurs, si on

refuse ces plans d'ensemble sous le prétexte que ce serait donner trop de discrétion à la municipalité, il ne faut absolument pas se faire d'illusions, car la pratique du zonage révèle que la municipalité essaie de contourner cela, soit par la multiplicité des amendements, soit par une permissivité dans certaines zones qui est pratiquement un non-contrôle et qui permet au promoteur de faire à peu près tout ce qu'il veut.

En ce qui concerne également les densités, il ne semble pas que l'article 109e reconnaisse réellement la possibilité de spécifier une densité par zone, du moins tel qu'il est rédigé. Cela semble très aléatoire. Or, il semblerait très bon de permettre, justement pour ces plans d'ensemble, que la municipalité puisse fixer une densité par zone, quitte à pouvoir, lorsque les réalisations de la zone sont partielles, appliquer au projet la densité qui est fixée.

On est un peu étonné aussi de voir que des formules très répandues, que le projet n'interdit pas formellement, mais auxquelles il pourrait inciter les municipalités à recourir, comme l'indice d'utilisation du sol, ne soient pas indiquées dans le projet pour inciter les municipalités à perfectionner les formules de densité qui intègrent une série de composantes physiques du sol, que ce soient les espaces viables, les espaces récréatifs ou les espaces libres et qui augmentent très nettement la qualité de l'ensemble.

Deux dernières choses que je voudrais préciser, c'est que, tel que rédigé, l'article 109 oblige la municipalité à préciser tous les usages permis ou prohibés. Les paragraphes c) et d) de l'article 109 obligent la municipalité à spécifier les constructions ou les usages qui son prohibés, alors que dans les autres projets de loi, on avait changé la rédaction en mettant "spécifier pour chaque zone les constructions et usages autorisés ou les constructions ou usages qui sont prohibés ", ce qui permettait à la municipalité de préciser l'un ou l'autre ou de préciser uniquement les usages qui seraient spécifiquement autorisés.

Enfin, en ce qui concerne les droits acquis, on sait que ceux-ci posent beaucoup de problèmes, notamment dans les centre-ville quand il y a un certain nombre de modifications à faire. La charte de Montréal, dans son article 524, permet de modifier les usages existants, moyennant une certaine indemnisation. Le projet de loi ne semble pas avoir reconnu cette formule qui pourrait parfois servir les municipalités. L'argument qui est souvent invoqué pour contrer cette disposition est le manque de disponibilités financières. Mais on voit que l'article 115b de ce projet de loi, qui permet l'octroi de certificats ou permis de construction subordonnés à des tarifs liés au nombre de logements, pourrait très bien être modifié par une autre disposition liant le tarif non pas au nombre de logements, mais à la valeur du site qui pourrait augmenter les disponibilités des municipalités et permettre, donc, d'indemniser en cas d'atteinte aux droits acquis.

Je m'arrête là, j'ai encore beaucoup de choses à dire mais...

Le Président (M. Laplante): Madame, il reste peu de temps pour poser des questions; je vous remercie de votre collaboration.

M. le député de Beauce-Nord.

M. Ouellette: Je vous remercie, Mme Charles et M. McNeil, pour le travail que vous avez mis dans la rédaction de ce mémoire, mémoire que j'ai lu avec d'autant plus d'intérêt que tout ce qui s'appelle urbanisme et développement rationnel m'intéresse depuis longtemps.

J'aimerais vous faire part d'un certain nombre de commentaires que ce mémoire fait surgir dans mon esprit. D'abord, vous reconnaissez l'importance du geste gouvernemental de proposer une loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Tel que vous le mentionnez, par ce projet de loi, le gouvernement a voulu reconnaître que l'aménagement du territoire qui sert de cadre de vie à la population ne peut être laissé à l'initiative incontrôlée des multiples agents qui interviennent sur le territoire. Tout comme vous, nous souhaitons que ce projet de loi se traduise par un mieux-être collectif.

Votre mémoire comporte des suggestions intéressantes et rejoignent celles d'autres organismes quant aux instruments de planification, particulièrement en ce qui a trait à la formule des plans d'ensemble et aux programmes particuliers d'aménagement. Ces propositions feront l'objet d'une étude sérieuse de notre part. Votre mémoire émet également certaines critiques vis-à-vis de ce projet de loi. Il s'agit d'ailleurs d'un des buts de cette commission parlementaire d'être à l'écoute de toutes les suggestions pouvant améliorer le présent projet de loi. En somme, nous sommes là, justement, pour en prendre bonne part.

Je me dois toutefois de corriger un certain nombre de vos affirmations, en tout cas à la lumière de ce que j'ai pu comprendre des intentions de ce projet de loi. Lorsque vous mentionnez, par exemple, que le projet de loi ne comporte qu'une perspective critique de l'urbain, d'une part, nous croyons qu'une telle perspective ne devrait pas être un élément légal, et, d'autre part, elle pourrait très bien se traduire dans un document ayant trait aux orientations gouvernementales. C'est à l'article 11 qu'on retrouve le dépôt de documents au moment de l'aménagement du schéma, de même que les plans d'urbanisme.

Je crois qu'on ne devrait pas essayer de traduire des cas particuliers dans une loi à caractère général, mais plutôt essayer de les appliquer dans les schémas d'aménagement qui, eux, s'orientent directement vers les schémas régionaux.

Ensuite, vous affirmez que le projet de loi maintient des pouvoirs centralisés d'interventions en matière de développement. Il me semble que vous vous refusez à reconnaître tout le processus de négociation institutionnelle que permettent les articles 11, 21, 28 et 130, ainsi que la nécessité d'une conformité qui doit exister entre les différents paliers et cela dans les deux sens. En d'autres termes, on retrouve tout au long du projet de loi nombre de consultations, de dialogues dans les deux sens ce qui, à mon sens, me fait croire

que, loin de centraliser l'intervention vers le gouvernement, on laisse plutôt le soin aux élus municipaux et régionaux le soin, justement, d'établir les schémas et les plans directeurs d'urbanisme.

Vous accordez au ministre responsable de la loi un rôle d'arbitre politique autoritaire et discrétionnaire. D'une part, le ministre n'a aucunement un tel rôle dans la loi. En cas de conflit, bien sûr, il revient au Conseil des ministres de trancher tout litige. D'autre part, il importe de bien distinguer ce qui est du régime normal et ce qui est du régime d'exception, par exemple, aux articles 4 et 7, ou encore nécessite une zone d'intervention spéciale.

Vous déplorez également l'absence de mécanisme institutionnalisé de rencontres entre les fonctionnaires provinciaux et les conseils de comté. Il ne s'agit pas d'un oubli, mais bien d'un principe sous-jacent au projet de loi qui privilégie le politique plutôt que le fonctionnarisme. Nous avons voulu que les élus locaux, régionaux et provinciaux se parlent d'égal à égal, en autant que ce soit possible, plutôt que de laisser aux technocrates le soin de régler les problèmes qui nous apparaissent comme étant de niveau politique.

Une dernière remarque, elle a trait à votre proposition d'inclure une programmation des investissements publics en conformité avec le contenu des schémas et des plans qui lieraient le gouvernement, ses ministères, ses mandataires, les organismes publics et les municipalités. Il me semble qu'une telle proposition, en plus de méconnaître le droit démocratique des élus locaux de décider de l'affectation de leurs ressources nie également à l'Assemblée nationale le droit de voter des budgets.

En somme, si on rencontrait exactement ce que vous demandez, on risquerait de fixer dans le temps, dans un temps de X années, l'affectation des budgets qui relèvent, nous semble-t-il, de la responsabilité des élus. Il ne s'agit pas de faire un bilan pro forma de développement qui aurait pour mission de lier ou d'attacher carrément les mains des élus à venir.

Suite à cela, j'aurais une couple de questions à vous poser. D'abord, vous indiquez dans votre mémoire que le projet de loi "dichotomise" le couple aménagement-développement — on retrouve cela à la page 2 — plutôt que de l'articuler sur une base locale et régionale. Pouvez-vous préciser votre pensée et quels sont les éléments, selon vous, qui auraient dû être ajoutés au projet de loi pour éviter cette dichotomie.

M. McNeil: ... d'entendre vos commentaires. Votre intervention est assez riche. D'une part, vous dites qu'on ne peut pas traduire dans une disposition légale des perspectives critiques de l'urbain. Je suis tout à fait d'accord avec vous, sauf qu'une disposition légale ou un projet de loi traduit néanmoins de la part d'un organisme comme le gouvernement, une certaine problématique, donc une certaine appréhension des problèmes à résoudre et cette appréhension des problèmes conduit à un certain nombre de solutions qui, elles-mêmes peuvent être formulées sous la forme de dispositions légales, le cas échéant.

Il est bien clair qu'à notre avis la problématique essentielle qui semble alimenter la réflexion qui a conduit au dépôt de ce projet de loi consiste bien davantage à tenter une certaine rationalisation des équipements publics en matière urbaine et régionale qu'à répondre aux préoccupations du développement et des problèmes de développement que connaissent actuellement au Québec et, d'ailleurs, dans d'autres régions du monde, les grandes villes.

Nous avons fait référence, dans ce paragraphe, au fait que ce n'est pas à ce moment, malgré les dispositions que contiennent les chartes de la CUM et de la CUQ ou de la commission régionale de l'Outaouais, concernant la confection de plans d'urbanisme ou de schémas d'aménagement, ce n'est pas de cette façon, encore, que les problèmes d'environnement, que les problèmes de logement des défavorisés, que les problèmes de transport ont pu être réglés dans la grande agglomération de Montréal.

Il est clair que ce n'est pas vers la solution de ces problèmes majeurs de notre société, ce n'est pas vers une transformation éventuelle des rapports sociaux à l'intérieur des grandes unités urbaines que le projet de loi voulait apporter solution. C'est dans ce sens que nous déplorons, quant à nous, que la notion d'urbanisme qui est véhiculée par le projet de loi laisse totalement de côté ce genre de préoccupation sociale extrêmement importante et, à mon avis, centrale, à qui s'occupe d'urbanisme. C'est une position un peu religieuse, mais c'est un commentaire général qu'il m'apparaissait important de formuler. Il est clair que le gouvernement a pris une avenue pour développer, au fond, l'intervention d'aménagement. Il aurait pu en prendre d'autres.

En ce qui concerne le maintien des pouvoirs centralisés, effectivement — on revient, au fond, à cette dichotomie entre aménagement et développement — ce projet de loi ne donne aucun pouvoir nouveau, ni aux municipalités...

Le Président (M. Laplante): Je ne voudrais pas être impoli avec vous. S'il y avait possibilité de répondre aux questions, parce que l'Opposition voudrait poser des questions également, pour essayer de finir autour de 22 heures.

M. McNeil: Je reviens donc immédiatement à votre question. D'ailleurs, je l'entretenais indirectement. Ce projet de loi ne donne aucun pouvoir nouveau, ni aux municipalités, ni aux comtés concernant le choix et la programmation des équipements qui restent, au fond, de l'autorité des différents ministères provinciaux, ou des sociétés d'Etat, ou des organismes parapublics qui y sont concernés et, par conséquent, n'enlève, non plus, aucun pouvoir à ces organismes. Dans ce sens, nous croyons que la centralisation des décisions de développement en matière d'équipement et d'infrastructures provinciale ou interrégionale reste au niveau du gouvernement et le comté n'a pas plus d'autorité, ou de responsabilité, ou de pouvoir là-dedans, qu'il n'en a actuellement. (21 h 45)

Ce problème, par conséquent, soulève le véritable problème de la décentralisation. Celui, au fond, de laisser aux unités constituantes sur le plan régional un certain nombre d'outils ou de pouvoirs de décision concernant, d'accord avec les autorités provinciales ou en négociation avec elles, la possibilité de négocier avec le provincial sur une certaine base les différentes priorités, les différentes programmations nationales en matière d'équipement et d'aménagement.

Je pense que ceci reflète tout simplement, et c'est dans ce sens-là que je voulais répondre à votre question... Tabler sur la stratégie d'une concertation intermunicipale qui donne matière à un certain nombre d'équipements me paraît tout à fait souhaitable et louable. On a délimité au fond un nombre de, je ne sais pas, 90 comtés, regroupant 1500 ou 1600 municipalités et le gouvernement se retrouve devant 90 interlocuteurs au lieu de se retrouver devant 1500. C'est déjà une amélioration notable. Mais, entre ce palier de comté et le palier provincial, on peut imaginer des paliers régionaux à partir desquels pourrait s'effectuer, effectivement, une négociation sur la base du développement, donc, des priorités de développement et des orientations de développement des régions, donc, une véritable décentralisation des pouvoirs.

Il est clair, si vous voulez, que le gouvernement maintient tous ses pouvoirs en matière de développement. Il dit finalement aux municipalités et aux comtés: Voici ce que j'ai l'intention de faire dans vos comtés. Arrangez-vous pour placer les meubles comme cela vous intéresse, mais, quant à la définition des meubles, cela reste encore ma propre responsabilité.

Comment arriver à éliminer cette dichotomie? Je pense que c'est en associant, probablement pas au niveau du comté, ce serait trop petit, mais à un niveau régional, quelque part, une certaine décentralisation des pouvoirs en matière de développement. On pose, à ce moment-là, tout le problème du développement régional, tout le problème de la confection d'un plan de développement au niveau national et tout le problème de la planification interrégionale. Ce problème est complètement laissé de côté par le projet de loi, mais c'est dans ce sens que nous pouvons parler d'une dichotomie entre les préoccupations d'aménagement au sens très physique et spatial du terme par rapport aux préoccupations de développement qui demeurent essentiellement celles du niveau provincial, et je ne parle pas du fédéral.

M. Ouellette: Je vous dis que votre deuxième réponse me chicote un peu parce que le gouvernement soumet un projet de loi qui s'appelle la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Pour bien des gens, ce titre se traduit par la loi de la décentralisation administrative, alors qu'il n'en est rien. Vous nous proposez, enfin, vous spéculez, vous dites que tôt ou tard il faudra créer un palier régional regroupant un certain nombre de comtés. Cela prendra peut-être une autre loi.

M. McNeil: Si on veut décentraliser.

M. Ouellette: Justement, cela me fait peur parce que cela prendra peut-être une nouvelle loi pour créer ce palier régional et à ce moment-là j'aurais peur qu'on ne l'appelle la loi de la centralisation.

M. McNeil: Vous avez raison.

M. Ouellette: Cela irait contre nos objectifs.

M. McNeil: D'ailleurs, je vous dirai bien franchement que la dynamique qui est créée par la concertation intermunicipale nous a amenés nous-mêmes d'ailleurs dans notre mémoire à dire au fond: Est-ce que cette concertation peut rester sur une base coopérative et volontaire? Est-ce que le comté renouvelé dont on ignore encore s'il aura d'autres pouvoirs a effectivement, à l'heure actuelle, les pouvoirs nécessaires pour effectuer cette concertation intermunicipale? Est-ce qu'il n'est pas trop faible pour accomplir cette mission? A ce moment-là, il est possible que, vendant ce projet dans le cadre d'une certaine autonomie municipale, on en arrive éventuellement à déplacer certains pouvoirs des municipalités vers les comtés. Ce n'est pas impossible.

M. Ouellette: D'accord, mais pas plus le Code municipal et la Loi des cités et villes n'interdisent la coopération intermunicipale, pas plus la loi 125 n'interdira la coopération entre les conseils de comté renouvelés. Il restera à voir si cela fonctionnera exactement dans ce sens-là. Sinon, il faudra peut-être un jour penser à des modifications à la loi ou à une loi nouvelle.

Mais pour répondre à votre première question, celle qui touche la perspective de critique de l'urbain, je comprends très bien le souci que vous mettez, mais vous admettez quand même qu'à l'article 11 on parle de documents qui seront déposés par l'Etat au moment de la confection du schéma d'aménagement et des plans directeurs d'urbanisme. Est-ce que, selon vous, il est possible qu'à ce niveau, on réussisse à répondre à vos désirs, c'est-à-dire que le gouvernement puisse faire connaître de façon précise ses intentions plutôt que de les mettre dans une loi à portée générale qui aurait pour effet, par exemple, de prévoir des choses pour la Gaspésie, mais qui seraient applicables à la ville de Montréal, alors que les problèmes ne sont absolument pas les mêmes. Vous ne croyez pas qu'il est plus sage...

M. McNeil: Vous touchez, à mon avis, deux problèmes différents. Il y a les problèmes urbains graves stricto sensu qui vont appeler des solutions nouvelles et le problème de la coordination des actions ministérielles.

En matière de décentralisation, là, il n'y a pas grand-chose, en ce sens que le document synthèse est préparé au niveau provincial. Il est ensuite donné aux comtés, en disant: Ecoutez, voici ce

dont vous devez tenir compte dans l'élaboration de votre schéma. Les grandes stratégies et les grandes problématiques qui sous-tendent la programmation des équipements et donc, les interventions de l'Etat, pourraient fort bien, effectivement, tenir compte de différentes problématiques de développement de l'urbain. C'est bien possible, rien n'empêche le gouvernement de le faire. Il n'y a, non plus, aucune indication que le gouvernement s'oriente dans ce sens-là encore. Du moins, pas dans ce projet de loi-là. En fait, il s'appelle projet de loi de l'aménagement et de l'urbanisme...

Le Président (M. Laplante):...

M. McNeil:... pour moi, cela a un certain sens.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: J'aurais une question, M. le Président. Elle a trait un peu à la perception que vous avez du nouveau conseil de comté renouvelé. Cela vous apparaît dans sa constitution quelque chose d'un peu obscur. Est-ce que vous pourriez préciser davantage là-dessus?

M. McNeil: C'est-à-dire que c'est basé sur un organisme qui existe déjà. On nous annonce l'intention du gouvernement de reformuler ou de renouveler ces comtés. Est-ce que le gouvernement entend donner d'autres pouvoirs à ces corporations de comtés, renouvelées ou pas? Je ne sais pas, il n'y a pas de précision dans ce sens-là dans le projet de loi. Dans ce sens-là, ça nous paraît obscur, on ne sait pas très bien de quelle bebite il s'agit puisqu'elle n'est pas définie dans le projet de loi comme tel. C'est tout ce qu'on voulait dire finalement. On se pose des questions, c'est tout.

M. Giasson: II vous apparaît quelque peu obscur, parce que pour l'instant, le projet de loi lui voue un rôle d'aménagiste...

M. McNeil: De concertation intermunicipale.

M. Giasson: ... c'est-à-dire d'être responsable de l'élaboration d'un plan d'aménagement.

M. McNeil: C'est cela.

M. Giasson: Pour vous, ça s'arrête là.

M. McNeil: Pour l'instant, oui, et sans aucun autre pouvoir, que je sache.

M. Giasson: Vous auriez aimé voir quels pouvoirs additionnels dans les pouvoirs importants, sans vous étendre trop?

M. McNeil: J'avoue que sur ce plan-là, je n'ai pas d'indications précises. Je ne sais pas, je pense qu'il faut voir les choses fonctionner. Je pense cependant que dans plusieurs cas, il y aura des problèmes assez importants de concertation intermunicipale. Il va y avoir des intérêts contradictoires qui vont jouer. Dans quelle mesure est-ce qu'il y aura les motivations nécessaires pour que cette concertation ait lieu? Je n'en sais rien. Tout ce que je sais c'est qu'il y a une réforme de la fiscalité municipale qui vient d'être annoncée dans le dernier budget de notre ministre des Finances et qui, au fond, délimite de façon assez étroite, assez ferme, les possibilités de développement des budgets au niveau des municipalités. Il y a un effort de rationalisation des dépenses dans ce sens-là comme ailleurs.

Dans quelle mesure est-ce que des péréquations fiscales ou du troc entre municipalités — troc, usine d'un côté, parc de l'autre, je ne sais pas — des mécanismes soit monétaires, fiscalement, ou d'échances de bons procédés sur le plan des équipements ou des services, est-ce que le comté va réussir à mettre en place pour effectivement réussir à faire en sorte qu'un assez large consensus puisse s'établir sur une option donnée d'aménagement? Il est évident qu'au niveau des équipements intermunicipaux au niveau de comtés, ceux qui polluent, on voudra toujours — chaque municipalité voudra — que ce soit dans le terrain du voisin. Celles qui rapportent des ressources fiscales, voudront les avoir pour elles. Bon! Il va y avoir forcément une négociation qui va devoir avoir lieu. Est-ce que ça va fonctionner comme une négociation patronale-ouvrière, qu'on va finir par s'entendre sur quelque chose qui a de l'allure? Possible, mais est-ce qu'il n'y aura pas des blocages importants qui vont se manifester à un moment donné? Est-ce qu'il n'y a pas le risque qu'à un moment donné il y ait une coalition des deux tiers des votes dans un cas, et que le troisième tiers, finalement, mange, paie au fond, soit l'espèce de minorité qui subit des contrecoups de l'accord majoritaire? C'est le jeu de la démocratie, finalement.

Je ne sais pas si je dois donner des pouvoirs nouveaux aux comtés. Mais si j'avais à en donner plus, ce seraient vraisemblablement des pouvoirs qui viennent d'en haut, quant à moi, mais pas d'en bas. C'est juste une option personnelle. Qui viennent d'en haut, je veux dire, en termes de développement.

Le Président (M. Laplante): Le député de Bellechasse.

M. Goulet: Très brièvement, M. le Président — l'heure avance — j'avais une série de questions. Je me limiterai à une. Le député de Beauce-Nord, au nom du gouvernement, a dit: Le gouvernement veut négocier, veut parler d'égal à égal avec les conseils de comté. Vous dites: Non, loin de là, cela va ressembler à une rencontre entre une souris et un éléphant. C'est le terme que Mme Charles a employé. Est-ce que vous pourriez nous donner des indications pourquoi vous n'êtes pas d'accord avec ce qu'a dit le député de Beauce-Nord sur ce point précis?

M. de Belleval: ... c'est du côté de la souris.

M. McNeil: Essayons de visualiser un peu comment les choses vont se passer. Vous avez un document synthèse qui va être produit, enfin des orientations d'interventions du gouvernement dans le comté qui vont être produites et qui vont l'être, j'imagine, en fonction d'une certaine perspective ou d'un certain programme ou d'un certain plan de développement pour l'ensemble du pays. Alors, on va arriver avec des documents assez étoffés, on va dire: Voici ce que nous avons l'intention de faire dans votre comté, compte tenu de tout le reste. Alors, le comté se retrouve devant cela. Quelle marge de négociation y a-t-il vis-à-vis de cela, finalement? Pas grand-chose. La loi lui dit: Ecoute, tu prends cela, tu es obligé d'en tenir compte dans ton schéma, tu fais ton schéma et tu le renvoies en haut et là, il y a quelqu'un qui va vérifier si le schéma que tu as fait est bien conforme aux orientations et aux intentions du gouvernement. C'est cela que la loi dit, finalement. Je ne dis pas qu'il n'y aura pas de négociations, qu'il n'y aura pas de discussions. Mais finalement, on n'a pas deux parties égales dans le débat. C'est clair pour moi.

M. Goulet: Mais s'il y a divergence, le ministre à un moment donné ou le cabinet des ministres devra trancher, mais vous n'êtes pas pour cela. Qui devrait la trancher, la question? Qui devrait agir comme arbitre?

M. McNeil: Dans la structure actuelle, il est clair que ce ne peut pas être autre chose qu'une structure politique gouvernementale actuellement. Eventuellement, dans un projet de société que je pourrais moi-même imaginer, je souhaiterais une certaine décentralisation des pouvoirs, une certaine participation de la base aux grandes décisions nationales et, par conséquent, il faudrait peut-être trouver un endroit où il y aurait des négociations et des concertations qui puissent avoir lieu. Mais il reste que, malgré tout, il faut quand même admettre que les décisions, en matière d'équipement, qui ont des impacts sur la fiscalité de l'ensemble des Québécois vont devoir être prises au niveau du Conseil des ministres, parce que ce sont les ministres qui sont responsables de la chose.

Ce que je dis, c'est que toute la concertation se fait à un seul niveau. Il manque un palier intermédiaire quelque part.

M. Goulet: J'aurais d'autres questions, M. le Président. En tout cas, il est 22 heures...

Le Président (M. Laplante): Merci de votre coopération...

M. Goulet: Si vous permettez... Que ce soit le ministre, un député, ou un maire, à un moment donné, il faut qu'il en appelle au peuple au bout de deux ou quatre ans. Vous ne pensez pas qu'il faut que la base participe à ce moment, dire si elle d'avis avec le ministre ou le gouvernement ou les gouvernements, quel que soit le niveau? Le processus démocratique des élections, l'appel au peuple, est-ce que vous croyez à cela à 100%, pour la participation de la base? Parce que vous dites que la base ne participe pas aux décisions nationales. Elle participe à un moment donné, et si elle n'y participe assez, elle va le faire savoir au gouvernement ou aux élus.

M. McNeil: Je vais vous répondre d'une autre façon. Un vote à tous les quatre ans, sur l'ensemble des politiques gouvernementales, ce n'est pas cela qui va guider le gouvernement pour savoir si les problèmes de la population sont respectés. Ceci finalement ne veut pas dire non plus que je ne crois pas aux mécanismes des élections.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la fin.

M. Léonard: J'aimerais vous faire deux commentaires. Nous avons entendu des réflexions assez élaborées sur le projet de loi 125. Je crois que c'est un effort de législation sur l'aménagement et l'urbanisme. Il faut reconnaître que jusqu'ici, on n'a pas réussi à passer un projet de loi et sur ce plan, c'est quand même une amélioration. On pourrait faire un projet par cela. Il reste que quand je pense aux petites municipalités qu'on rencontre sur le territoire québécois qui n'ont même pas de règlement de zonage, de réglementation, je veux bien aller au maximum, mais je dirais qu'on essaie d'être pratique aussi sur ce plan. (22 heures)

II faut constater qu'en 1975 il n'y avait que le tiers des municipalités du Québec qui avaient un plan directeur d'urbanisme et, encore, celles qui en avaient ne l'appliquaient pas toujours. Ce que cela a visé, c'est au moins d'avoir une loi plus pratique et d'essayer d'avoir un minimum au moins pour commencer.

Je tiens aussi à rétablir une chose que j'ai rétablie assez souvent au cours des dernières semaines: Le projet sur l'aménagement, le projet 125, n'est pas un projet sur la décentralisation. C'est dans une perspective de décentralisation, mais ce n'est pas un projet de loi sur la décentralisation. Cela viendra après, c'est un autre débat, c'est autre chose, mais il y a une perspective de décentralisation dans le projet de loi.

Par exemple, j'en viens à ma question, vous affirmez que le projet de loi entérine la primauté des décisions centralisées de l'Etat, mais quand même, il y a des éléments du projet de loi qui font que l'Etat dorénavant s'astreint à un certain processus. Les articles 11, 21, 28, 127, 126, etc., sont des choses qui n'existent pas présentement. Si on les met, c'est au moins une amélioration. Je le considère, mais, enfin, chacun peut garder ses opinions là-dessus ou peut rester sur son "quant à soi", comme on dit.

Je voudrais aussi apporter un autre élément. Vous dites que le présent projet de loi entérine également la primauté des décisions du capital

privé sur les décisions des citoyens dans le façonnement de nos villes. J'aimerais que vous nous indiquiez à quels éléments et à quels principes du projet de loi vous faites référence quand vous nous dites cela.

M. McNeil: Je ne réfère pas au projet de loi. Je réfère toujours à la problématique générale. Je dis qu'actuellement, dans le système économique dans lequel nous vivons, les motivations, les décisions de développement qui ne viennent pas de l'Etat viennent du secteur privé et le façonnement de nos villes, à l'heure actuelle, demeurera, et ce n'est pas le projet de loi qui va y changer quoi que ce soit — je le regrette, mais c'est une opinion tout à fait personnelle — il ne changera rien au fait que nos villes vont continuer à se développer en fonction d'une croissance industrielle pour l'emploi et d'une promotion immobilière et tout cela, basé sur la recherche du profit.

Or, personnellement, je crois que la recherche du profit n'est pas ou n'est plus une base acceptable comme principe de base des décisions d'investissement du secteur privé et même du secteur public qui accompagne ces investissements dans un milieu urbain.

M. Léonard: C'est une motivation qui proviendrait d'où et qui serait quoi?

M. McNeil: C'est une motivation qui devrait être basée davantage sur le respect des besoins fondamentaux des citoyens, comme le logement, motivation qui...

M. Léonard: ... qui se retrouverait au niveau urbain, au niveau des villes ou des communautés de base. C'est cela?

M. McNeil: Oui.

M. Léonard: Tout ce qui va nous amener à renforcer la vie de la communauté de base devrait nous...

M. McNeil: Autrement dit, les communautés de base devraient pouvoir avoir un contrôle beaucoup plus serré sur les décisions qui se prennent dans le cadre de leur territoire plutôt que d'avoir des possibilités d'intervention et de développement dans ces...

M. Giasson: ... quand même, en dépit de vos considérations.

Le Président (M. Laplante): II n'y aura pas de consentement.

M. Léonard: II n'y aura pas de consentement? En tout cas, je vous remercie beaucoup. On pourrait continuer...

Le Président (M. Laplante): Mesdames et messieurs, les membres de cette commission vous remercient de votre participation. Avant d'ajourner...

M. Fontaine: Si M. le ministre...

M. Giasson: II ne faudrait pas que cela dépasse minuit, cependant.

Le Président (M. Laplante): Merci. Avant d'ajourner les travaux, je vais vous donner les organismes qui seront entendus demain: l'Union des conseils de comté des municipalités locales du Québec, mémoire no 37; le Conseil régional de développement de l'Est du Québec, la Conférence municipale de l'Est du Québec, mémoire no 28; un groupe d'étudiants de l'Université du Québec à Montréal, no 21; Bell-Canada et Telbec Limitée, mémoire no 30.

Les travaux sont ajournés à demain, 10 heures.

Une Voix: Quatre mémoires. Fin de la séance à 22 h 5

ANNEXE

Mémoire sur le projet de loi 125

portant sur l'aménagement et l'urbanisme

adressé à la commission parlementaire

par la ville de Gaspé

Gaspé, le 29 mars 1979

Aux membres de la Commission Parlementaire siégeant sur le projet de loi numéro 125. Messieurs,

La Ville de Gaspé a jugé bon de présenter aux membres de cette Commission, certaines représentations suite à la publication du projet de loi numéro 125, à cause du caractère particulier de la Ville de Gaspé et surtout à cause de l'impact que la nouvelle loi sur l'aménagement du territoire et sur l'urbanisme aura sur des villes, telle que la nôtre.

Nous aimerions, dans un premier temps, faire un bref historique de la situation de la Ville de Gaspé, dans un deuxième temps, vous faire part de sa structure actuelle et de son fonctionnement et finalement, vous faire part, en troisième lieu, des solutions que nous proposons et de l'amendement que nous proposons à la loi.

Tout d'abord, nous devons vous informer que onze (11) des municipalités qui composent, à l'heure actuelle, la Ville de Gaspé, étaient incluses dans l'ancienne structure du comté de Gaspé-Est qui se décrivent comme suit: (1964-SRQ, chapitre 5). 1- Le district électoral de Gaspé-Sud, moins les villes de Chandler et Gaspé. 2- Dans le district électoral de Gaspé-Nord, les seigneuries de Grande-Vallée, des Monts et de l'Anse de l'Etang, des Cantons de Blanchet, de Beaujeu, Cloridorme.

Evidemment, l'ancienne Corporation Municipale de Gaspé était excluse de cette Corporation du Conseil de Comté de Gaspé-Est, vu que cette ville était régie par la Loi des Cités et Villes.

Le 17 juillet 1970, le Gouvernement Provincial adoptait le Bill 29, créant le Parc Forillon. Par ce Bill, on a établi que les municipalités comprises dans les nouvelles villes de Gaspé et Percé se voyaient, en vertu de l'article 10 de cette loi, interdire toute construction, reconstruction, transformation, addition ou implantation nouvelle de bâtiments, sauf pour fin agricole et ce, jusqu'au 30 juin 1971. De plus, à cette même date, la confection de tout plan de division ou de subdivision de terrain était interdite dans ce territoire de même que la modification ou l'annulation du livre de renvoi d'une subdivision.

Le 19 décembre 1970, la Législature Provinciale adoptait le Bill 67 et créait une nouvelle structure qui s'appelait la Ville de Gaspé.

Cette nouvelle structure regroupait les municipalités mentionnées à l'article 2 de cette loi et permettez-moi de vous les répéter ici: il s'agissait des municipalités de Baie de Gaspé-Sud, Grande-Grève, Haldimand, l'Anse-aux-Griffons, Rivière-au-Renard, St-Alban de Cap-des-Rosiers, St-Majorique, York, la municipalité de la paroisse de St-Maurice, la municipalité des cantons de Baie de Gaspé-Nord et de Douglas et la Ville de Gaspé. Par la création de cette nouvelle structure, d'un territoire d'une superficie de 938.875 kilomètres carrés, le Gouvernement créait la nouvelle Ville de Gaspé.

A l'article 19 de ce même Bill 67, le Gouvernement forçait la municipalité à adopter, dans les 24 mois suivant la date fixée à l'article 18, la confection d'un plan directeur de tous les territoires de la municipalité et de rendre ce plan obligatoire. Le règlement à cet effet, ou tout règlement le modifiant, ne requérait que la seule approbation de la Commission Municipale.

La Ville de Gaspé n'a adopté son plan directeur du territoire qu'au cours de l'année 1976. A la suite de l'adoption de ce plan directeur, évidemment, la Ville créa une Commission d'Urbanisme et procéda à l'aménagement de tout son territoire.

Par la création de la nouvelle Ville de Gaspé, le Gouvernement imposait aux citoyens une structure de fonctionnement nouvelle. Celle-ci fut difficilement acceptée et, par la force des choses, les citoyens durent apprendre à fonctionner avec cette structure.

Conformément à l'article 19, dont je vous parlais précédemment, la Ville s'est dotée d'un plan directeur et a aménagé son territoire de la façon suivante: l'ancienne Corporation Municipale de Gaspé était et est devenue un centre de services pour le territoire de la nouvelle ville. D'ailleurs, le Gouvernement lui-même lui a reconnu ce titre en la désignant capitale des pêches.

Rivière-au-Renard, l'une des plus importantes municipalités dans la nouvelle structure de la Ville de Gaspé, est devenue le centre de pêche le plus important au Québec. D'ailleurs, le Ministère de l'Industrie et du Commerce y a construit un parc industriel de pêche qui fait l'orgueil de nos citoyens.

Par la création du Parc Forillon par le Bill 29, le Gouvernement Fédéral a instauré un parc national qui touche les anciennes municipalités de l'Anse-aux-Griffons, Cap-des-Rosiers et Baie de Gaspé-Nord. Il y a eu l'implantation d'infrastructures dans ce parc national qui sont d'une importance considérable et l'aménagement de tout ce territoire est irrévocable à notre avis.

La vocation et l'utilisation de notre territoire ont été fixées par les autorités gouvernementales en fonction de deux sources de revenus déterminées par des études innombrables et une réalité actuelle: les pêches et le tourisme.

Ce que nous déplorons, à ce stade-ci, c'est que la loi sur l'aménagement du territoire n'ait pas été en vigueur en 1970. Ceci aura peut-être permis à notre population, à ce moment-là, de déterminer elle-même la vocation et l'utilisation de son territoire. Après avoir vécu l'imposition de structures, nous comprenons très bien que plusieurs municipalités désirent elles-mêmes fixer la vocation de leur territoire; d'ailleurs, le Gouvernement abonde en ce sens et nous sommes pleinement d'accord avec la loi sur l'aménagement du territoire car il faut que ce soit les citoyens qui décident de quelle façon ils doivent aménager leur territoire et non pas que l'aménagement de celui-ci soit déterminé par quelques fonctionnaires à Québec ou à Rimouski. A cet égard, nous réitérons encore notre appui à l'adoption de la loi 125.

Cependant, vu que la vocation de notre territoire a été déterminée, que nous avons appris, par la force des choses, à vivre avec cet aménagement, que nous nous sommes donnés la structure administrative pour vivre en fonction de cet aménagement et en fonction des besoins de notre population, nous ne serions pas prêts à être intégrés dans une nouvelle structure administrative qui alourdirait notre fonctionnement.

Pendant plusieurs années, nous nous sommes bâti une organisation administrative tenant compte du territoire et des problèmes que nous avions et nous ne voudrions pas être intégrés dans une nouvelle structure qui s'appellerait Conseil de Comté.

Ce n'est pas que nous ne désirons pas travailler avec nos collègues des villes voisines dans le but d'aménager notre territoire, mais vu que le nôtre est actuellement aménagé en fonction des critères que je vous ai établis précédemment et que nous avons une structure de fonctionnement que nous avons dû perfectionner et qui nous a demandé des efforts considérables, nous ne voyons pas comment nous pourrions nous intégrer dans une seconde structure et fonctionner convenablement.

Nous sommes pleinement d'accord avec les principes émis dans le projet de loi 125, mais cependant, nous considérons que le territoire que nous avons actuellement à desservir est géographiquement grand, accapare toutes nos énergies et nous force à concentrer nos efforts dans ce territoire.

Nous anticipons des responsabilités qui devront être dévolues au Conseil de Comté à la suite de l'adoption de la loi sur l'aménagement du territoire et nous croyons que pour prendre nos responsabilités présentes et futures, la structure que nous possédons actuellement est la seule structure à l'intérieur de laquelle nous pourrions fonctionner convenablement.

Nous constatons que cette structure a, à l'heure actuelle, des lacunes relativement à la représentation de la population au sein du Conseil de Ville de Gaspé et nous faisons, auprès de d'autres autorités gouvernementales, des pressions afin que les principes établis par le gouvernement, relativement à la démocratie municipale, soient respectés et mis en application dans notre milieu.

Nous tenons simplement à faire part aux législateurs que l'étendue de notre territoire, la structure de fonctionnement que nous possédons actuellement, ne peuvent être modifiées et forcer la Ville de Gaspé à s'intégrer dans une autre structure qui amènerait la population de notre ville à traverser une période très difficile et nous croyons que nous avons eu notre part de problèmes. Nous vous faisons, tout simplement part que la population a difficilement accepté la fusion de la Ville de Gaspé et ce n'est qu'après de multiples années que nous en sommes venus à l'accepter de façon relative. Si le Gouvernement devait intégrer la Ville de Gaspé dans une super-structure qui s'appellerait Conseil de Comté, il faudrait alors songer sérieusement à faire en sorte que la Ville de Gaspé soit défusionnée afin que toutes et chacune des anciennes municipalités s'intègrent, par la suite, dans un Conseil de Comté dont le territoire devrait être déterminé par ses composantes.

Evidemment, si nous parlions de défusion de la Ville il faudrait alors tenir compte des règlements qui sont en application et qui touchent l'ensemble des électeurs et il faudrait trouver des modes pour que la pension alimentaire, après le divorce, soit payée par quelqu'un. Le Conseil Municipal ne se sent pas la force d'entreprendre ce travail de Titan et se demande qui paierait la note.

En guise de conclusion, nous aimerions, tout simplement, soumettre que l'article 142 du projet de loi 125 devrait être modifié afin d'y ajouter le paragraphe 4 qui devrait se lire comme suit: "le Gouvernement peut décréter certaines corporations locales fusionnées, corporations de comté".

C'est le but visé par la Ville de Gaspé de se faire reconnaître comme corporation de comté afin d'assurer le mieux-être de ses citoyens et afin de rendre la plus effective possible, la structure actuellement existante, laquelle structure fut imposée à ses citoyens et avec qui ceux-ci, par la force des choses, ont dû apprendre à vivre.

Cette fusion fut difficile, mais les années nous ont forcément appris à vivre avec elle et il ne faudrait pas que les citoyens de ce secteur du Québec aient à traverser une décennie aussi ardue que la dernière.

ROBERT PIDGEON, Maire, Ville de Gaspé.

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