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Projet de loi no 12S
(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît! Reprise de la séance de la commission des affaires
municipales pour l'étude du projet de loi no 125 et la
présentation des mémoires.
Les membres de cette commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M.
Caron (Verdun).
M. Goldbloom: M. Caron (Verdun) est remplacé par M.
Giasson (Montmagny-L'Islet).
Le Président (M. Laplante): M. Caron (Verdun) est
remplacé par M. Giasson (Montmagny-L'Islet); M. Cordeau
(Saint-Hyacinthe) remplacé par M. Goulet (Bellechasse); M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau) remplacé par M.
Goldbloom (D'Arcy McGee); M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Chevrette
(Joliette-Montcalm), M. Mercier (Berthier) remplacé par M. Rancourt
(Saint-François); M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Shaw (Pointe-Claire),
M. Tardif (Crémazie) remplacé par M. Léonard
(Laurentides-Labelle).
Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau
(Verchères) remplacé par M. Gendron (Abitibi-Ouest); M. Fontaine
(Nicolet-Yamaska) remplacé par M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Lacoste
(Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle) remplacé par M.
Tardif (Crémazie); M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Les groupes qui se feront entendre aujourd'hui sont: Le Conseil
régional de développement Lanaudière. Est-ce qu'il
est ici? Le Conseil de comté de Matapédia. Merci. Je
demanderais aux membres d'adopter ce qui suit: Le Conseil municipal de la ville
de Gaspé ne peut pas venir, alors on demande que son mémoire soit
inscrit au journal des Débats.
Une Voix: Consentement.
M. Goldbloom: Nous n'y avons pas d'objection, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Consentement. (Voir
annexe)
La Corporation du comté de Labelle.
Une Voix: Présent.
Le Président (M. Laplante): Merci. La ville de Laval.
Merci. L'Union des producteurs agricoles.
Une Voix: Présent.
Le Président (M. Laplante): Merci. Les professeurs de
l'Institut d'urbanisme de l'Université de Montréal. Ils ne sont
pas encore arrivés. Merci. Oui, monsieur.
M. Gendron: Si vous le permettez, je voudrais faire une
correction. M. Rancourt ne pourra pas être ici de la journée, de
toute façon. Alors, si vous voulez remplacer M. Rancourt comme membre.
Vous avez dit tantôt que M. Rancourt remplaçait...
Le Président (M. Laplante): M. Mercier (Berthier).
M. Gendron: Alors, à la place de M. Rancourt comme membre,
vous allez mettre M. Gendron (Abitibi-Ouest), mais comme intervenant, à
la place de M. Gendron, vous allez mettre M. Marquis (Matapédia).
Le Président (M. Laplante): Mais M. Gendron n'était
pas intervenant non plus.
M. Gendron: M. Gendron était intervenant à la place
de M. Mercier.
Le Président (M. Laplante): M. Lacoste (Sainte-Anne).
M. Gendron: Non, tel que je vous l'ai dit, M. le
Président.
M. Chevrette: II était intervenant à la place de M.
Charbonneau (Verchères).
M. Gendron: C'est cela.
M. Chevrette: Si j'ai bien compris.
M. Gendron: Vous avez bien compris.
Le Président (M. Laplante): D'accord. Je m'excuse.
J'appelle maintenant le Conseil régional de développement de
Lanaudière. Oui, monsieur.
M. Goldbloom: M. le Président, je ne retarderai les
travaux de la commission que pour 60 secondes, mais je me dois de faire une
mise au point. C'est la première occasion que j'ai de le faire. J'ai lu
la transcription des débats du 11 avril, et je cite le ministre d'Etat
à l'aménagement: "Plus tard il y a eu le projet de loi no 12 qui
a été présenté par M. Goldbloom en 1976 et qui
prévoyait que le gouvernement pouvait réunir dans une
agglomération toutes les municipalités urbaines aux fins de
préparer un schéma d'aménagement." (10 h 15) "Et M. le
ministre continue un peu plus loin: II y avait un Québec urbain, un
Québec rural". Je voudrais, M. le Président, citer l'article 2 du
projet de loi no 12 de 1976 qui se lit comme suit: "La présente loi
s'applique à toutes les municipalités locales régies par
le Code municipal à tout territoire visé à l'article 27
dudit code et à toutes les municipalités régies par la Loi
des cités et villes..."
Je termine là la citation et je veux simplement souligner, pour
le journal des Débats, que le projet de loi no 12, en proposant la
création d'un conseil d'agglomération, incluait là-dedans
les munici-
palités régies par le Code municipal autant que les
municipalités régies par la Loi des cités et villes.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le
député de D'Arcy McGee. J'appelle maintenant le Conseil
régional de développement Lanaudière. Vous êtes
là. Si vous voulez, monsieur, identifier votre groupe, vous identifier
et les personnes qui vous accompagnent. Vous avez 20 minutes pour faire la
présentation de votre mémoire et 40 autres minutes au cours
desquelles les membres de cette commission vous poseront des questions. Vous
pouvez commencer.
Conseil régional de développement de
Lanaudière
M. Gaumond (Lionel): Lionel Gaumond, président du Conseil
régional de développement. Je suis accompagné de M. Roch
Malo, vice-président ex officio, et de M. Paulin Dumas, directeur
général.
Le Conseil régional de développement Lanaudière a
accepté d'assumer le mandat que lui a confié l'Office de
planification et de développement du Québec le 23 janvier dernier
afin d'apporter un avis éclairé aux autorités sur
l'ensemble du projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
l'appellation de la structure porteuse, les modalités
générales de découpage et de
représentativité politique au sein de la structure porteuse. Le
Conseil régional de développement a formé une commission
consultative composée d'élus de municipalités urbaines et
rurales, de l'Union des producteurs agricoles et du conseil d'administration du
CRD. A la suite des quatre rencontres publiques tenues par la commission,
à la suite du rapport et des suggestions formulées par celle-ci
aux administrateurs, le CRD a tenu deux assemblées au terme desquelles
il a décidé du contenu du présent mémoire.
Organisme issu du milieu, oeuvrant au développement et à
l'aménagement régional en concertation avec les agents de la
région, dont plus de 120 sont membres, le Conseil régional de
développement transmet donc au ministre d'Etat à
l'aménagement, aux membres de la commission parlementaire et à
l'OPDQ ce qu'il croit être l'expression de la pensée de la
région de Lanaudière sur le projet de loi 125 sur
l'aménagement et l'urbanisme.
A toute personne désireuse de connaître les méthodes
utilisées et le contexte dans lequel s'est déroulé
l'opération, nous la référons au rapport qualitatif de la
consultation effectué par le CRD sur le projet de loi, rapport qui sera
déposé au vice-président-directeur général
de l'OPDQ.
Principes, nécessité et urgence de l'aménagement.
Nous nous déclarons en accord total avec le principe transcendant de
législation sur l'aménagement et l'urbanisme et nous
déclarons qu'il est d'une nécessité absolue de faire
l'aménagement dans la région de Lanaudière et partout au
Québec.
Les principes. Nous souscrivons d'emblée aux quatre principes
déclarés par les ministres d'Etat à l'aménagement
et des Affaires municipales comme étant ceux qui ont guidé
l'élaboration du projet de loi 125, à savoir l'aménagement
une responsabilité politique, la participation des citoyens à la
prise de décision, l'aménagement une responsabilité
conjointe et partagée entre les paliers de décision politique, et
enfin responsabilité conjointe par le biais de l'harmonisation et non
d'une hiérarchisation des décisions.
Avec le présent mémoire, nous aurons l'occasion de
préciser comment, selon nous, ces principes sont respectés dans
le projet de loi et comment leur application est parfois abusive et
fautive.
Nous croyons pertinent de rappeler ici que les initiatives du CRD depuis
près de dix ans ont toujours été inscrites dans la
perspective de revalorisation du pouvoir municipal pour tous les dossiers ayant
un impact sur l'aménagement et l'urbanisme. L'étroite
collaboration des municipalités et du CRD en font preuve depuis
l'étude et les mémoires sur les différents projets de loi
de 1970 à nos jours, jusqu'à la concertation intermunicipale
quant à l'implantation d'infrastructures ayant un impact permanent sur
le territoire et aux travaux conjoints d'uniformisation de la
réglementation d'urbanisme. Nous croyons donc que c'est aux
administrateurs élus des municipalités à qui revient la
responsabilité de faire l'aménagement et l'urbanisme.
Nécessité et urgence. L'amélioration de la
qualité de vie des personnes et leur mieux-être collectif
constituent l'objectif ultime de l'aménagement et de l'urbanisme. Chaque
citoyen, qu'il soit administrateur ou administré, est de plus en plus
conscient de la fragilité de l'environnement, de la rareté des
ressources et de la nécessité de rationaliser leur utilisation en
harmonie avec les intérêts collectifs et individuels des
personnes.
Dans ce monde en pleine évolution où le caractère
d'interrelation des situations, des problèmes et des solutions est
à chaque jour de plus en plus évident et particulièrement
dans le domaine des services essentiels dont ont besoin les communautés,
nous sommes d'avis qu'il faut prendre les moyens pour utiliser le sol de
meilleure façon pour éviter le gaspillage, pour servir les
intérêts collectifs de la population vivant en communautés
dites locales, mais vivant aussi en constante relation avec des
collectivités plus grandes autour d'elles.
Au Québec trop peu de collectivités, jusqu'à
maintenant, se sont donné et les outils et les mécanismes afin
d'inscrire, dans la trajectoire de l'évolution de la vie collective et
de l'utilisation des ressources physiques, cette volonté d'harmonie et
les règles du jeu pour l'atteindre. Il ne s'agit plus de déplorer
les situations anarchiques qui résultent d'une absence de planification,
mais de se mettre à la tâche et d'agir maintenant. Il est grand
temps.
Nous sommes donc convaincus qu'il faut faire l'aménagement et
l'urbanisme, parce qu'il y a absolue nécessité et urgence. C'est
ainsi que
l'article 2 du projet de loi doit se lire: Le conseil de comté
doit adopter et non peut adopter. Un délai de réalisation du
schéma devra être fixé, nous le suggérons, à
trois ans à partir de la date de mise en vigueur de la loi. Par
l'article 4, le ministre devra alors avoir le pouvoir d'ordonner la
réalisation du schéma aux comtés qui n'assumeraient pas
leurs obligations.
Contenu du schéma. Le contenu du schéma ne reflète
qu'une approche théorique d'aménagiste. Il doit préciser
ce sur quoi les municipalités auront à travailler ensemble en
matière d'aménagement. Certains articles reflètent une
intrusion directe dans le champ des responsabilités municipales.
Nous ne devons pas perdre de vue que ceux qui seront conviés
à la table de planification et de concertation sont les
représentants élus des municipalités locales,
cités, villes et municipalités dites rurales. Ils sont en droit
de connaître de façon précise ce sur quoi ils travailleront
ensemble.
L'article 5 devrait donc préciser que le schéma doit
comprendre entre autres l'identification de la localisation de toutes les
utilités publiques à caractère intermunicipal et ce
à la suite d'une entente liant les organismes d'utilités
publiques: Hydro-Québec, Bell Canada, aux municipalités. Le
transport interrégional, les stations, les circuits, les sites
d'enfouissements sanitaires et de récupération et de
transformation des ordures, certains types d'équipements de loisirs, les
voies de circulation débouchant sur les territoires locaux voisins,
l'identification de normes de lotissement en milieux non desservis par un
réseau d'aqueduc et d'égout afin d'assurer l'uniformisation pour
un ensemble de territoires, l'identification des zones agricoles permanentes,
des arrondissements culturels, des territoires publics (terres de la couronne,
parcs intermunicipaux, des zones de glissements de terrain, d'inondations
impropres à la construction d'habitations ou d'autres types
d'établissements.
Nous croyons par contre que les affectations du sol à
l'intérieur du périmètre d'urbanisation ainsi que la
densité d'occupation relèvent de la responsabilité de
chaque municipalité, et le schéma ne doit pas intervenir dans ce
champ spécifique.
A la limite, l'identification et la localisation de plusieurs
équipements et infrastructures relèvent de chaque
municipalité. En effet, la majorité de ces équipements est
la propriété d'une municipalité et non de plusieurs.
L'utilisation de ces équipements par d'autres est rendue accessible par
la voie habituelle des achats de service. Le schéma aura à
identifier et à localiser surtout les infrastructures et
l'équipement acquis en copropriété.
Enfin, le schéma devra aussi refléter le résultat
de la concertation intermunicipale quant aux zones d'occupation adjacente
à deux territoires voisins afin d'assurer la compatibilité des
occupations. Dans ce cas, l'autonomie absolue de chaque municipalité ne
tient pas.
Le respect des droits des personnes à un environnement salubre et
harmonieux prévaut sans aucun doute et exige la concertation
intermunicipale. En corrélation avec ce que nous avons affirmé au
début de ce chapitre, nous croyons important d'ajouter que chaque
municipalité dans la réalisation de son plan d'urbanisme devra
prendre l'initiative de former un comité d'utilité publique avec
les organismes concernés afin de planifier le développement des
réseaux, les corridors de passage des utilités et de les inscrire
dans le plan (électricité, communications, gaz).
Les procédures de réalisation. Nous croyons qu'il y a une
exagération considérable dans la multitude des étapes
à franchir tant sur le plan de la consultation et des délais que
sur le plan des exigences auxquelles sont soumises les municipalités.
Nous adhérons d'emblée à l'obligation pour les
municipalités de vraiment dialoguer avec leurs concitoyens, eux qui
seront les premiers à vivre collectivement et individuellement selon les
nouvelles règles du jeu que le schéma d'aménagement et le
plan d'urbanisme local auront édictées.
Cependant, nous déclarons avec expérience qu'un
véritable dialogue enrichissant a des chances d'éclairer les
preneurs de décisions s'ils s'appuient d'abord et avant tout sur la
crédibilité qu'accordent les citoyens à ceux qui sont
élus, sur les objets concrets d'échanges, de dialogue, de
consultation et de concertation déposés par les preneurs de
décisions, avant décision, bien sûr, mais touchant le
quotidien et le réel de la vie, sur une présentation simple,
soignée et précise des objets de consultation, adressée
à tous les citoyens concernés.
Nous souscrivons au principe que les élus sont là pour
décider. Nous tenons donc pour acquis que ce sont eux qui
décideront du schéma d'aménagement et du plan d'urbanisme.
Nous croyons toutefois que le processus de participation des citoyens que
propose le projet de loi est beaucoup trop lourd et occasionnera des
délais au point de venir à bout de l'administrateur le plus
patient.
L'article 24 est en fin d'étape tout à fait ridicule. Il
nous est difficile de comprendre comment on peut proposer un
référendum à valeur consultative après autant
d'étapes de consultation. Nous aurions mieux compris si ce
référendum avait été déclaré
décisionnel.
Le processus de consultation. Nous croyons davantage à un
processus de consultation dont les diverses phases pourraient être les
suivantes: le citoyen est informé par écrit; une lettre est
adressée à chaque numéro civique disant qu'un
schéma est en préparation, expliquant la signification de l'acte
qui se prépare, donnant une description globale de ce que ce
schéma comprendra et expliquant sa portée légale. (10 h
30)
Le citoyen apprendra, par la même occasion, qu'il sera
invité à participer à des assemblées publiques
où il prendra connaissance du contenu du schéma que le
comté devra adopter par la suite et où il formera ses questions,
réactions, options et avis. A la suite de l'achèvement de la
version
définitive du schéma par le comté, le citoyen
recevrait un résumé du contenu accompagné d'une
présentation graphique illustrant la portée du schéma sur
le territoire. Nous soulignons ici que le contenu de cette version du
schéma dont il est question réfère aux articles 22 et 23
et non à l'article 12. Une copie de la version complète et
définitive, laquelle ferait l'objet d'assemblées publiques, et
une copie des cartes seraient accessibles pour de la consultation dans chaque
municipalité. Le citoyen participerait alors aux assemblées
publiques, ajournées autant de fois selon les besoins. Le comté
se garderait le privilège d'en limiter le nombre; ces assemblées
publiques permettraient la discussion entre les élus, membres du
comté, et les citoyens participants. Il ne s'agit pas du type d'audition
publique où les commissaires n'émettent pas d'opinion.
A la suite de ces assemblées publiques, le comté
adopterait la version définitive du schéma en tenant compte des
avis. Un résumé du schéma adopté serait ensuite
distribué à l'adresse de chaque numéro civique. Une copie
complète du schéma adopté serait en permanence à la
disposition de chaque citoyen, au secrétariat de chaque
municipalité.
Le Président (M. Laplante): M. Gaumond, est-ce que je
pourrais vous interrompre?
M. Gaumond: Oui.
Le Président (M. Laplante): Vous êtes rendu à
la douzième page et vous en avez 30. Comme il ne vous reste que quatre
minutes, je puis vous garantir que le ministre et l'Opposition ont lu le
mémoire, ils ont pris des notes et je me demande s'il ne vous serait pas
possible d'aller aux conclusions.
M. Chevrette: J'aurais une suggestion à vous faire.
M. Léonard: II y a des gens qui ne viennent pas.
M. Chevrette: On vient d'apprendre que la ville de Gaspé
ne vient pas. On vient de l'inscrire au procès-verbal. C'est un
excellent mémoire et je pense que cela vaut la peine de l'entendre. Je
demande le consentement de la commission pour qu'on puisse l'entendre.
Le Président (M. Laplante): Si c'est la volonté des
membres de la commission.
M. Goulet: Qu'on se limite à une heure par mémoire,
en tout.
Le Président (M. Laplante): D'accord, monsieur, allez aux
grandes lignes. Continuez.
M. Gaumond: Merci. Nous privilégions donc une étape
de consultation au lieu de deux tel que prévu dans le projet de loi.
Le référendum. Nous sommes d'accord que le processus
d'adoption du premier schéma laisse place à un
référendum. Nous proposons donc que l'article 24 se lise comme
suit: Après la consultation, 10% des personnes possédant le cens
électoral par municipalité ou 500 personnes possédant le
cens électoral par municipalité, la plus basse des
éventualités prévalant dans au moins les deux tiers des
municipalités du comté, peuvent demander la tenue d'un
référendum avant l'adoption du premier schéma
d'aménagement. Le référendum n'aura de valeur
décisionnelle que si plus de 50% des personnes possédant le cens
électoral participent au référendum, sinon le
référendum n'aura qu'une valeur consultative.
A la suite de la réalisation d'une étape de consultation
par voie d'assemblées publiques, le référendum, aux
conditions précitées, prend une signification démocratique
acceptable. La transmission par courrier de l'information et de la convocation
devra tenir compte de l'adresse des citoyens villégiateurs qui, en
dehors des périodes propices, sont absents de leur résidence
secondaire.
L'adoption par règlement. Ces étapes franchies, le
schéma est adopté par le comté. Nous ne sommes pas
d'accord sur le vote des deux tiers des voix. La majorité simple
suffit.
Les délais. Les 45 jours prévus à l'article 36 nous
paraissent trop courts pour que le comté examine et approuve un plan ou
un règlement municipal et émette un avis de
conformité.
Page 15, les exigences. Nous reportons délibérément
au chapitre V nos commentaires quant aux exigences imposées par le
gouvernement et le ministre. Nous voulons ici mentionner que le projet de loi
alourdit de façon indue les rapports entre les municipalités et
le comté quand il va jusqu'à exiger que non seulement les
modifications aux règlements de zonage, de lotissement et de
construction doivent être approuvées par le comté, mais que
les règlements d'emprunt ayant pour objet l'exécution de travaux
publics doivent l'être aussi. Nous sommes d'avis que seul le plan
d'urbanisme doit obtenir un avis de conformité. Quant aux.
règlements de zonage, lotissement, construction et règlements
d'emprunt, ils ne devraient qu'être déposés.
Page 16, la structure porteuse. Nous sommes convaincus que le type de
palier de décision que propose le projet de loi en créant le
conseil de comté est un outil disproportionné quant à la
responsabilité qui lui incombe: l'aménagement du territoire. Le
gouvernement du Québec doit annoncer ses couleurs quant aux
véritables propositions de transfert de pouvoirs au profit des
administrateurs locaux afin que nous puissions évaluer la pertinence du
mécanisme proposé.
Page 17, le fonctionnement du comté doit être simple et
relié directement aux pouvoirs qu'il aura pour réaliser le
schéma et en supporter la légalité et l'autorité,
pour déclarer la conformité des plans d'urbanisme locaux. Les
pouvoirs d'application quotidienne du schéma doivent relever de chaque
municipalité.
Cependant, M. le ministre, il nous apparaît d'une importance
capitale que le gouvernement prenne immédiatement l'initiative d'exposer
publiquement l'ensemble des pouvoirs et responsabilités qu'il entend
décentraliser, c'est-à-dire qu'il entend transférer aux
municipalités locales et de comtés. Nous sommes d'avis que les
rédacteurs du projet de loi n'ont pas donné cette ampleur
à la structure porteuse à partir du concept qu'ils se font de
l'aménagement et de sa gestion, mais surtout à partir d'un
ensemble de véritables pouvoirs transférés du gouvernement
aux municipalités.
Les propos tenus à ce sujet depuis deux ans par différents
ministres et la nature du nouveau conseil de comté et de son
fonctionnement nous portent à croire qu'il s'agit là de la mise
sur pied d'un mécanisme dont les fonctions qu'on lui réserve sont
identifiées, mais non dévoilées. Le fascicule 5,
réaménagement des pouvoirs, devrait être rendu public. Par
contre, il faudra alors se demander si la délégation directe,
telle que proposée par le présent projet de loi, sera acceptable
aux yeux de la population et de la démocratie pour assurer de
réels pouvoirs dont l'exercice aura des conséquences directes sur
la taxation. Un maire ou un commissaire ne subit pas la défaite pour ses
faits et gestes effectués dans le comté ou à la commission
scolaire régionale, mais pour ses décisions à la
municipalité et à la commission scolaire locale. La population ne
l'élit qu'à un palier de décision: le local.
Page 19, au bas, le dernier paragraphe. La décentralisation
suppose l'harmonie et le dialogue, mais dans le respect le plus total des
pouvoirs de chacun. Nous reconnaissons que l'article 5, paragraphe g)
réfère aux responsabilités du gouvernement et de ses
ministères et, à ce titre, l'Etat doit se garder des pouvoirs,
sans les étendre à tout le contenu du schéma.
Le financement. Que la réalisation du schéma et de son
application soient effectuées selon une procédure
allégée ou selon celle proposée par le projet de loi
à plus forte raison. Nul doute que l'exercice de cette
responsabilité nécessitera des déboursés
considérables. Cette réalité doit être prise en
considération avant toute mise en chantier des travaux
d'aménagement. Sachant qu'un plan le dernier paragraphe
d'urbanisme local en milieu rural coûte en moyenne $15 000 en services
professionnels, nous imaginons bien l'ordre de grandeur des coûts d'un
schéma d'aménagement intermunicipal incluant les services
professionnels, les assemblées et le volume des écrits. Toute
responsabilité nouvelle est conditionnée par des ressources
financières adéquates.
Le territoire, page 22. Devant la multiplicité des limites
administratives qu'adoptent les différentes institutions, nous croyons
que cette question du territoire de comté est une question
délicate et difficile. Nous identifierons donc quelques
éléments qui devront, selon nous, être
précisés afin de créer les conditions favorables à
un processus décisionnel clair et à une décision
relativement rapide.
A la page 23. Il faudra établir les règles par lesquelles
le processus décisionnel s'exercera sur cette question. Qui initiera la
discussion sur le découpage du territoire? Un comté seul, deux
comtés en concertation, chacune des municipalités au sein de sa
corporation? Par quels mécanismes les avis seront-ils acheminés
au ministre? Ces questions sont restées sans réponse faute de
temps prévu pour la consultation.
A la page 24, la représentativité politique. Selon nos
propos tenus plus haut, nous croyons plus simple d'assurer la
représentativité de chaque municipalité par une personne
choisie par chaque municipalité. Cependant, si nous connaissions les
pouvoirs que le gouvernement entend transférer le fascicule 5
à venir notre proposition pourrait être tout autre. Devant
les propositions gouvernementales de décentralisation de
véritables pouvoirs en faveur des municipalités, nous serions
prêts à considérer la pertinence d'instaurer le suffrage
universel pour l'élection d'administrateurs au sein des
comtés.
L'harmonisation. A la page 26, l'appellation des structures. Enfin, la
conclusion à la page 27. Tout au long de nos propos sur le projet de loi
de l'aménagement et de l'urbanisme, nous sommes bien conscients d'avoir
exprimé en même temps et nos convictions sur la
nécessité et l'urgence de planifier l'aménagement des
régions et de la nôtre en particulier, et nos malaises quant
à la complexité du processus proposé, quant au dernier mot
que l'Etat se garde, quant aux ambiguïtés et absence de
précisions sur les pouvoirs à transférer, quant au palier
décisionnel non élu, quant aux règles selon lesquelles le
découpage et la représentativité seront fixés. Nous
résumons donc notre participation à la consultation à
laquelle le Conseil régional de développement s'est
associé par la présentation des recommandations qui suivent.
Recommandations.
Premièrement, afin d'assurer que l'aménagement et
l'urbanisme se fassent au Québec, la loi oblige la municipalité
de comté à adopter un schéma d'aménagement et que
le délai de la loi soit fixé à trois ans à partir
de la date de mise en vigueur de la loi; afin d'identifier rapidement les
intervenants qui devront travailler ensemble, la loi identifie clairement ce
que doit comprendre le schéma; le gouvernement précise le contenu
de la décentralisation de véritables pouvoirs qu'il entend
transférer au profit des municipalités locales et de
comté; que l'appellation du comté soit "municipalité de
comté" et que celle-ci regroupe les municipalités rurales et les
cités et villes; en fonction des responsabilités
d'aménagement, que la municipalité de comté soit
composée d'un élu local choisi par chaque municipalité;
que le nombre des municipalités formant le territoire de la
municipalité de comté soit fonction de ce sur quoi portera le
schéma, de l'impact des travaux prévus au schéma dont les
municipalités seront l'objet, et des activités
socio-économiques prédominantes et communes à chacune
d'elles;
que la consultation porte seulement sur le contenu de la version
définitive du schéma que veut adopter le comté et que
l'information et la convocation soient adressées à chaque
numéro civique; que le référendum soit possible à
la suite de la demande de 10% ou de 500 personnes par municipalité, la
plus basse éventualité prévalant, et ce dans au moins les
deux tiers des municipalités de comté; (10 h 45) que le
référendum n'ait de valeur décisionnelle que si 50% des
personnes possédant le cens électoral dans le comté
participent au référendum; que la municipalité de
comté adopte son schéma par le vote à majorité
simple; que les procédures prévues entre les municipalités
de comté et les municipalités membres soient réduites au
maximum dans la perspective du respect des pouvoirs locaux et que
l'autorité de la municipalité de comté porte surtout sur
la légalité du schéma et la conformité obligatoire
du plan d'urbanisme avec le schéma et que pour le reste des rapports
entre les deux paliers les procédures soient celles favorisant la
concertation et le consensus. que la loi prévoie que les
municipalités et les municipalités de comté prennent
l'initiative de travailler avec les organismes d'utilités publiques,
électricité, gaz, communications, et que les ententes lient
ceux-ci dans leurs travaux d'infrastructure et d'équipement; que le
gouvernement et le ministre n'aient le pouvoir d'ordonnance et
d'autorité susceptible d'exiger des modifications au schéma que
sur les travaux d'équipement et d'infrastructure devant être
réalisés par le gouvernement, ses ministères, mandataires
et organismes publics; que le gouvernement précise les sources de
financement selon une assiette fiscale permettant à la
municipalité de comté d'assumer ses responsabilités en
matière d'aménagement; enfin, que le gouvernement
établisse avec les municipalités les règles selon
lesquelles les consensus devront s'effectuer quant aux responsabilités
et pouvoirs aux limites des territoires et aux modes de
représentativité de la municipalité de comté avant
d'agir selon les articles 142 et 144 du présent projet de loi no 125.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le
ministre. M. le député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. le Président, dans un premier temps, je
voudrais féliciter le CRD pour le magnifique mémoire qu'il nous a
présenté. Je sais avec quel sérieux ce mémoire a
été préparé et combien de consultations ont
été faites à l'échelle du comté et
même du comté agrandi, puisqu'on touche quelques comtés. Je
voudrais souligner en particulier deux aspects qui retiennent mon attention.
C'est tout l'apport positif que vous apportez quant aux éléments
que vous suggérez d'ajouter au contenu du schéma
d'aménagement et les remarques que vous faites concernant le
référendum comme tel.
Je voudrais aussi vous remercier de l'appui que vous apportez au projet
de loi no 125 et je me permettrai de vous citer, puisque à la page 4 de
votre mémoire on peut lire ceci: Nous nous déclarons en accord
total avec les principes transcendant la législation sur
l'aménagement et l'urbanisme et nous déclarons qu'il est d'une
nécessité absolue de faire l'aménagement dans la
région de Lanaudière et partout au Québec, ce qui prouve
que vous avez carrément épousé les principes de la loi
125.
M. le Président, je voudrais aussi me permettre certains
commentaires puisque, à la suite d'allégations du CRD, je pense
que certains points de vue méritent certaines précisions. Tout
d'abord, au sujet du contenu du schéma. Quand le CRD de
Lanaudière dit qu'à l'intérieur du périmètre
d'urbanisation, en ce qui regarde les affectations des sols ainsi que la
densité d'occupation... je pense que vous interprétez mal le
projet de loi ou encore que vous avez un point de vue complètement
différent de celui du législateur en ce sens que pour nous
l'article 6 du projet de loi est un article à contenu facultatif.
Autrement dit, la décision appartient aux élus municipaux qui
siègent au conseil de comté d'inclure ou de ne pas inclure
certains éléments. Vous semblez vouloir démontrer qu'il y
a une obligation formelle.
Il y aurait peut-être lieu d'expliquer à ce moment qu'un
schéma d'aménagement, tel qu'on le pense, nous... mais le plan
d'urbanisme et le schéma, ce sont deux outils très
interreliés et un comté peut décider d'élaborer un
schéma d'aménagement très complet qui intégrerait
tous les éléments des plans d'urbanisme des municipalités.
A ce moment-là, les plans d'urbanisme pourraient être moins
détaillés. Mais l'inverse est aussi vrai en ce sens que le
schéma d'aménagement peut être beaucoup plus simple, il
pourrait ne comprendre que des éléments essentiels; à ce
moment-là, les plans d'urbanisme seraient beaucoup plus
détaillés. Je ne sais pas si on a mal compris ou si j'ai mal
interprété, mais il me semble qu'il y a une ambiguïté
là-dessus.
Une Voix: ... Est-ce que je peux demander à M. Malo de
répondre, s'il vous plaît?
M. Malo (Roch): En fait, notre réaction à cela,
c'est que, quand dans une loi c'est marqué "peut" et qu'en même
temps, un peu plus loin, vous touchez à l'autonomie des
municipalités, elles vont se retrancher derrière cela pour que le
"peut" ne se réalise pas. Prenez seulement l'article 5 et l'article 6,
vous n'avez pas le droit de toucher à cela, on se retranche
derrière le "peut" et cela n'entrera pas. En fait, on demande d'en
ajouter dans l'article 5 pour ne pas mettre trop de "peut" et d'enlever la
partie qui touche à l'autonomie de la municipalité quant à
son urbanisme et à la densité de la population dans son
périmètre; cela la touche au plus profond de ses fibres, c'est
notre réaction. C'est pour cela qu'on a suggéré
d'enle-
ver cela et d'en mettre plus dans l'article 5 et moins dans l'article
6.
M. Chevrette: Vous ne croyez pas qu'on peut le décider
conjointement?
M. Malo: Notre perception, c'est que, quand vous dites qu'on peut
le décider conjointement, effectivement, on ne le décide pas. Il
n'y a pas longtemps, on était à la CRO et le président de
la CRO nous disait: Partout où c'est marqué "peut", on n'a rien
fait; quand c'est marqué "doit", on n'a pas le choix. C'est le
président de la CRO qui nous disait cela.
M. Chevrette: Je comprends plus ce que vous voulez dire. Au sujet
de l'obligation d'adopter un schéma d'aménagement dans un
délai de trois ans, on en prend bonne note. Concernant les délais
de présentation des orientations du gouvernement, vous manifestez une
crainte; je me demande si vous n'allez pas jusqu'à penser que le
gouvernement devrait bâtir un plan national global et, après cela,
prendre les proportions par comté et dire: Cette portion de notre plan
national s'en va dans chacun des comtés détaillés.
C'est peut-être une approche très pratique, mais on pense
que c'est du cas par cas et qu'il y aura lieu, nécessairement, d'avoir
énormément de concertation dans l'élaboration des plans,
ce qui forcera les comtés à favoriser la concertation avec les
ministères concernés dans leurs plans d'aménagement.
J'espère que vous ne pensiez pas au plan global national.
M. Malo: En aucune façon. Ce à quoi on pensait,
c'est à la lourdeur de la machine gouvernementale qui fait que ça
prend plus de six mois pour qu'elle se retourne. Dans le fond, on parle des
orientations de développement qui sont supposées venir, mais
n'oubliez pas qu'en 1967 et en 1968, on nous parlait de cela. Le livre vient
d'arriver dans notre région il y a quelques semaines, pour la grande
région de Montréal, et on n'est pas encore capable de trouver ce
qu'il y a pour Lanaudière là-dedans; on va être
obligé de mettre pas mal de temps et de monde pour faire cela.
Quand vous nous dites dans un délai de six mois, un an ou un an
et demi pour que dans trois ans vous soyez capables de faire votre
schéma, on va vous avoir donné nos orientations par
ministère, vous nous permettrez d'en douter.
M. Chevrette: Là-dessus, on ne vous obstine pas. Quant
à la décentralisation, vous n'y faites non seulement allusion,
vous l'affirmez. Il faut bien comprendre que le présent projet de loi ne
parle pas de décentralisation, c'est un débat ultérieur et
il y aura une vaste consultation sur le sujet comme tel; c'est tout simplement
un commentaire que je voulais faire puisque vous voyez probablement très
loin en tant que CRD. On doit vous dire que le présent projet de loi
s'arrête à l'aménagement et ne va pas jusqu'à la
décentralisation.
M. Malo: Est-ce qu'on peut faire un commentaire
là-dessus?
M. Chevrette: On peut vous permettre cela.
M. Malo: C'est vrai qu'on a une réaction à cela;
cela a été annoncé longtemps. On a eu de très
fortes réactions à notre commission qui a circulé dans la
région, il y a eu de fortes réactions dans certaines parties de
la région pour dire: Ce n'est pas nécessaire de transformer la
structure seulement pour faire l'aménagement. Ce n'est pas la
majorité, mais il y a des gens qui ont réagi comme cela et qui
ont dit: Le ministre pourrait bien décréter que tel groupe de
municipalités va se mettre ensemble pour faire un schéma, comme
ça s'est fait pour le réseau des eaux usées dans la
région de Repen-tigny; à un moment donné, le ministre a
décidé qu'il fallait qu'on se mette ensemble et qu'on travaille
là-dessus et on a réussi à faire un plan directeur pour
les eaux usées.
Il y a eu une réaction et on a dit: Ce n'est pas
nécessaire de réformer la structure seulement pour
l'aménagement. Si on change la structure, si on fait des nouveaux
comtés, si on leur donne de la gueule, si vous voulez, et du corps, si
on leur donne des ressources fiscales, c'est parce qu'on pense qu'à un
moment donné il va y avoir autre chose qui va s'accrocher à cela.
Pour décider de la qualité, de la force et de la forme de la
structure, qui va être là, et comment il va être
nommé, il faudrait peut-être aussi qu'on connaisse les pouvoirs et
les obligations qu'ils vont avoir en même temps. C'est pour cela qu'on
n'écarte pas la possibilité du suffrage universel. Même
s'ils doivent administrer les hôpitaux, les CLSC et les services sociaux
et enfin peut-être une partie de la voirie et une partie du domaine
agricole, etc., peut-être que cela serait plus pertinent qu'ils soient
élus directement. S'ils doivent administrer un budget qui dépasse
l'ensemble du budget des municipalités locales peut-être que cela
serait pertinent qu'ils soient élus aussi. En fait, on a la conviction
que ces gens, quand ils sont par délégation, ils ne se font pas
battre pour les gestes qu'ils posent dans la région, ils se font battre
pour les gestes qu'ils posent chez eux. A ce moment, ils dépensent parce
qu'ils ne se font pas battre parce qu'ils dépensent.
M. Chevrette: II y a également le financement. Vous
rappelez que s'il y a certains pouvoirs, il faudrait qu'une aide
financière s'y raccroche. Je dois vous dire que le discours du budget
là-dessus prévoit déjà des sommes dès la
première année. Je pense que c'est $2 100 000 pour
l'aménagement et, comme on ne traite pas de décentralisation et
de délégation de pouvoirs immédiats, on a toujours dit
cependant que les pouvoirs seraient accompagnés éventuellement
d'argent. On l'a prouvé même par le discours du budget. Il faut
penser aussi à la réforme fiscale municipale qui va fournir une
assiette un peu plus forte aux municipalités.
M. Malo: II est clair, dans ce qu'on a compris, que la
réforme fiscale ne concerne pas le comté une seconde et ce n'est
pas pour envoyer de l'argent au comté. C'est pour donner plus d'argent
au niveau local.
M. Chevrette; C'est cela.
M. Malo: Dans notre esprit, il est clair aussi que si on refait
les comtés, on leur donne une assiette fiscale. On ne demande pas de
transférer de l'argent et de le donner aux municipalités et de le
transférer, dans notre esprit.
M. Chevrette: Au sujet des conseils de comté
renouvelés, vous dites que c'est un outil disproportionné.
M. Malo: Pardon?
M. Chevrette: Vous dites que, les conseils de comté, vous
les considérez un peu comme un outil disproportionné. Il serait
peut-être bon de préciser ici que l'objectif est de favoriser la
concertation entre les municipalités, qu'il n'y a pas un document
publié sur l'aménagement qui n'a pas traité de cela. Vous
le reconnaissez vous-mêmes dans votre mémoire. Est-ce que vous
pourriez détailler là-dessus?
M. Malo: Cela revient un peu à ce que je disais tout
à l'heure. Seulement pour l'aménagement cela devient
disproportionné. Si on veut donner d'autres pouvoirs ce n'est
peut-être pas assez fort. Il faudrait peut-être en mettre plus et
c'est là qu'on parle de l'élection au suffrage universel,
possiblement.
M. Chevrette: Dans l'éventualité d'une
décentralisation.
M. Malo: Dans l'éventualité d'une
décentralisation.
M. Chevrette: Un dernier commentaire. Quant aux avis du conseil
de comté, concernant les règlements d'urbanisme, les
règlements d'emprunt, vous semblez interpréter comme si le
conseil de comté a quasi un pouvoir de sanction sur les
règlements d'emprunt. C'est uniquement un avis. Cela reste comme
c'était. C'est la commission municipale qui adopte le règlement
d'emprunt, qui se prononce sur le règlement d'emprunt. Le conseil de
comté n'a qu'un avis à émettre.
M. Malo: Selon l'article 46, selon notre interprétation de
l'article 46 tel qu'il est là, par exemple, la municipalité de
Saint-Charles-Borromée veut refaire la rue Bousquet entre Visitation...
On comprend le problème. C'est un bout de rue. Cela prend un
règlement d'emprunt pour qu'il obtienne l'autorisation du conseil de
comté, un avis. C'est une étape additionnelle. Il faut qu'il
obtienne l'avis du conseil de comté.
M. Chevrette: Un avis de conformité, un avis
technique.
M. Malo: Oui, mais le temps que cela prend pour faire cela, la
municipalité de Saint-Charles fait son règlement. Il faut qu'elle
l'envoie au conseil de comté. Le conseil de comté doit attendre
sa prochaine réunion pour l'approuver. Ils font cela six fois par
année. Disons qu'ils font ça tous les mois, ça fait un
mois de plus s'ils l'ont envoyé le lendemain de la réunion et,
supposons que pour une raison ou pour une autre, à
Saint-Charles-Borromée, cela ne "file" pas avec le comté cette
fois-là. Ils disent: On va te faire niaiser pendant deux mois et on va
l'approuver juste un peu plus tard. Savez-vous qu'ils niaisent longtemps pour
un bout de rue dans leur municipalité. Cela peut arriver. A un moment
donné il dit: Le veux-tu ton règlement, tu vas accepter autre
chose. C'est ce genre de tracasseries qui pourraient arriver et qu'on ne
voudrait pas en s'appuyant sur l'article 46. (11 heures)
M. Chevrette: Non, mais l'optique, c'est uniquement un avis
technique à donner et...
M. Malo: Je comprends, mais si cela prend trois mois pour qu'ils
arrivent... la municipalité ne les a pas, parce qu'au ministère,
au contentieux du ministère et à la commission municipale, l'avis
n'y est pas, on n'approuve pas... et attendez. On est rendu à l'automne
suivant et les travaux vont se faire le printemps suivant.
M. Chevrette: Dans un ordre d'idées différent, vous
proposez une seule phase de consultations de la population. Vous ne craignez
pas que les citoyens se retrouvent presque devant un fait accompli et que leur
intérêt quant au schéma d'aménagement soit de
beaucoup diminué?
M. Malo: Nous avons pensé qu'une bonne, c'était
amplement suffisant. D'autant plus qu'il faut penser à ceux qui vont
faire la "job". Si on veut que les élus parce qu'on veut que ce
soit un acte politique fassent le tour des réunions et qu'ils
soient présents aux réunions avec les citoyens pour discuter avec
eux, ça implique une série de réunions, une affaire comme
cela. Cela implique, par exemple, dans un comté comme n'importe quel des
comtés de chez nous, celui qui en a le moins dans n'importe quelle des
propositions les plus optimistes c'est douze ou treize municipalités et
cela va jusqu'à une vingtaine. Si, dans chaque municipalité, il y
a une réunion, cela en fait vingt et je suppose que dans certaines
municipalités, il va avoir des ajournements. Cela va en faire trois ou
quatre. Cela fait 25, 30 réunions. Si on veut que les administrateurs
élus soient là, en même temps qu'ils vont faire leurs
autres "jobs" au niveau local et au niveau du comté, cela fait des
réunions pour les gens, aller les écouter. Il ne faut pas se
leurrer non plus et finalement, on va avoir le même monde. Quand tu fais
cela juste sur les orientations, après cela, il
faut que tu reviennes sur le détail. Tu es aussi bien de le faire
sur le détail d'un coup sec et de tout y mettre. C'est notre point de
vue.
M. Chevrette: D'accord. Dans votre mémoire, vous
considérez la majorité simple pour l'adoption du schéma?
Si on regarde cela théoriquement, à la limite, si cette
suggestion était retenue, un schéma pourrait être
adopté par le quart des membres. Comment pouvez-vous justifier une telle
position?
M. Malo: S'il y a référendum.
M. Chevrette: Ce pourrait être le quart, quand même,
Le schéma d'aménagement pourrait être adopté par le
quart des membres.
M. Malo: Je pense que là tu nous as par les oreilles. Tu
as raison quand tu dis une majorité simple. Quand on a discuté de
ça, on ne s'est pas posé la question à savoir si ce ne
pouvait pas être la majorité absolue et si la question avait
été posée, je ne peux présumer de ce qui serait
sorti de la réunion. On a voté la majorité simple, par
rapport aux deux tiers, tout le monde pensant 50% par rapport aux deux tiers.
Il y a quelque chose là: mon opinion personnelle de la majorité
absolue, 50% des membres là, c'est mon opinion personnelle, ce
n'est pas l'opinion du CRD je pense que cela aurait du bon sens. En
fait, on a mis en balance les deux tiers avec les 50% et on pensait 50%. Mais
on a accepté 50%, à condition qu'il y ait une possibilité
de référendum, parce qu'il y avait aussi la discussion, la
possibilité d'enlever complètement le référendum et
on a préféré garder 50% et la possibilité de
référendum présenté comme il est là, s'il y
a plus que 50% des citoyens décisionnels, sinon... Parce que s'il y
avait seulement 15% des gens qui se présentent au
référendum et qu'ils votent, là on se pose la question sur
la valeur du référendum et des hommes politiques avec la
responsabilité qu'on va leur donner; il faut qu'ils l'assument.
M. Chevrette: ... vous soulevez deux questions précises,
à savoir qui initiera les discussions sur le découpage du
territoire et par quel mécanisme les avis seront acheminés au
gouvernement. Vous les soulevez en termes d'interrogations, mais
j'apprécierais que vous me donniez votre opinion. Comment voyez-vous
cela, vous autres?
M. Malo: Si vous demandez au Conseil de comté de Joliette
de se prononcer, le Conseil de comté de Joliette que vous connaissez
aujourd'hui, et que vous les réunissez, il y a de fortes chances
qu'étant en groupe ils n'essaieront pas d'en rejeter une demi-douzaine
d'entre eux pour les faire passer dans un autre comté. Ils vont dire: On
reste comme on est; on est bien comme cela; on est un groupe de "chums". Si
vous réunissez les gens d'une autre façon, il y a des chances
qu'ils répondent autrement, parce que finalement, les gros qui vont
avoir à discuter de cela, ce sera les élus en place.
Alors, si vous réunissez, par exemple, les gens du nord, de
Saint-Gabriel à Rawdon, dans ce coin-là et que vous posez la
question, ensemble, ils vont se regarder et ils vont dire: on ferait une bonne
"gang". On pourrait faire un comté autour de Saint-Gabriel et on
pourrait peut-être... Les autres rendus au rang Berthier pourraient faire
un comté autour de Berthier et là, c'est l'option trois qui a des
chances de sortir. Mais si vous réunissez le Conseil de comté de
Berthier, du sud au nord, et Joliette, il y a des chances qu'ils disent: On est
une "gang" de "chums" ensemble, on va rester comme on est là, cela va
bien. Sauf que cela ne répond sûrement pas au découpage
socio-économique. Il y a une tendance à vouloir le groupe qui va
désirer se perpétuer.
M. Chevrette: Si je tire une conclusion des affirmations que vous
faites, il ne faut pas partir des conseils de comté actuels pour amorcer
le découpage.
M. Malo: C'est possible que dans certains endroits ce serait une
bonne affaire parce que cela correspond à une réalité
socio-économique. Dans notre coin, cela ne correspond pas du tout. Ce
sont des bandes de terrains de 20 pieds de large et de 200 milles de long. Il
faudrait peut-être repartir, chercher une formule pour réunir le
monde et qu'ils se posent la question collectivement, ensemble. Ce n'est pas
facile. C'est une grosse boîte à prendre avec des petits bras.
M. Chevrette: Mais quand vous avez posé deux questions,
c'est demeuré interrogatif au niveau de la consultation. Comme bonhomme
qui travaillez avec ces groupes régulièrement, selon votre
opinion personnelle, qui devrait amorcer cela?
M. Malo: Nous allons nous en mêler sûrement. On pense
que cela fait partie de notre "job" que de faire asseoir les gens ensemble pour
qu'ils en parlent.
M. Chevrette: C'est ce que je voulais vous faire dire, mais cela
m'a pris du temps.
M. Malo: II y a peut-être des indications qui devraient
être données et il ne faudrait pas que cela parte seulement de
nous.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, je serai relativement bref.
C'est un mémoire qui est étoffé, qui ne prend pas quatre
chemins pour exprimer son avis sur une foule de choses et c'est justement
à cause de la solidité du mémoire que je n'ai pas
énormément de questions à poser, parce que les opinions
sont assez claires là-dedans.
Je note plusieurs choses avec beaucoup d'intérêt. Je note
votre souci de l'équilibre dans la logique entre les
responsabilités que l'on confierait à l'organisme responsable de
l'aménagement
et les pouvoirs actuels, les responsabilités actuelles des
municipalités. Je pense que c'est important que nous gardions à
l'esprit cette notion de juste équilibre entre les deux.
Je suis particulièrement frappé et j'applaudis
fortement par votre recommandation pour que le référendum
n'ait qu'une valeur consultative à moins que 50% des gens ne se
déplacent pour s'occuper de leur affaire. C'est un principe que j'aurais
voulu voir inscrit dans toute la procédure de tous les
référendums, parce que l'on sait ce qui arrive: les gens qui sont
relativement contents de ce qui est proposé ne se déplacent pas
et ceux qui ne sont pas contents sortent et l'on a une participation de 20%, et
11% de la population bat une mesure qui est acceptable et même
désirée par la majorité des gens. Je trouve que cette
chose que vous soulignez a une grande importance.
Je note également votre insistance sur la nécessité
de définir l'organisation future, l'organisation politique des instances
que l'on va créer. Vous mentionnez avec beaucoup d'à propos la
disproportion entre l'importance de la structure et la seule fonction
d'aménagement quand on ne précise pas quelles seraient les autres
fonctions. Si on ne les précise pas, si on ne les attribue pas de
façon précise à cette instance de responsabilités,
on doit présumer, la loi étant là, la Loi des cités
et villes, le Code municipal, la future loi générale des
municipalités, que ce sont les municipalités qui auront à
assumer ces responsabilités. Tel est l'état actuel de nos
statuts.
Je note enfin votre commentaire à la page 25 sur le zonage
agricole et sur le fait que la zone permanente qui ne pourra faire l'objet de
modification aura été déterminée avant la mise en
marche du processus de détermination et d'adoption d'un schéma
d'aménagement. Il me semble que nous avons besoin
d'éclaircissements là-dessus de la part du gouvernement.
J'arrive enfin à une question que je voudrais vous poser. Elle a
trait à la page 24, la représentativité politique. Vous
recommandez que chaque municipalité soit représentée par
une personne, mais j'aimerais comprendre comment vous établiriez un
juste équilibre entre les municipalités, compte tenu du fait que
dans beaucoup de régions il y a une ville populeuse qui domine par
l'importance de sa population et par la force économique dont elle jouit
et, par contre, dans le milieu rural, il y a un grand nombre de
municipalités et si l'on donne à chacune une voix autour de la
table...
Prenons le cas qui est devant nous. Pensez-vous que la ville de Joliette
accepterait d'avoir un seul représentant et une seule voix à une
table où il y aurait une voix pour Saint-Paul, une voix pour
Saint-Charles-Borromée, une voix pour Saint-Pierre, une voix pour
Crabtree? Je vois mal la ville de Joliette accepter de participer à
l'exercice sous de telles conditions. Alors, quelle serait la
pondération que vous apporteriez pour que l'harmonie puisse
régner autour de cette table et que la justice soit atteinte?
M. Malo: On s'est posé la même question que vous. Ce
sur quoi on s'est prononcé, c'est qu'on ne veut pas un conseil de
comté avec 60 personnes autour de la table. Nous ne nous sommes pas
prononcés sur le nombre de votes que chacune des personnes peut
transporter. Là-dessus, on laisse, telle que présentée
dans le projet de loi, la possibilité aux municipalités de
s'entendre. Ce pourrait être un vote par 1000 personnes, un vote par
5000, un vote par 10 000. A eux de s'entendre. On garde cette option-là.
On s'est prononcé sur le nombre de personnes parce qu'on ne veut pas
d'un conseil avec 60 personnes. On a le modèle avec les commissions
scolaires régionales. Elles n'ont même pas quorum. Le
problème c'est de trouver quorum parce qu'il y a un
désintéressement, il y a trop de monde autour de la table. Les
gens ont l'impression qu'ils ne participent pas.
M. Dumas: II y a aussi la possibilité qui a
été discutée lors des assemblées que, par rapport
au pouvoir d'aménagement comme tel, ils accepteraient à la limite
d'être un représentant par municipalité. Même les
villes à l'intérieur du comté, pour l'exercice de
l'adoption du...
M. Malo: Si ce n'est que sur l'aménagement, s'il y a
d'autres pouvoirs, c'est autre chose.
M. Goldbloom: D'accord, je comprends cela, mais je me sens
obligé de vous poser une question additionnelle. Vous invoquez l'espoir
que les municipalités s'entendent sur une formule de pondération,
mais qu'est-ce qui arriverait si elles ne s'entendaient pas? Comment
pourrait-on arriver à un processus qui permettrait la prise d'une
décision dans l'harmonie? Qui prendrait la décision? Qui
établirait la formule si les municipalités ne s'entendaient pas
spontanément?
M. Malo: Si les municipalités ne s'entendent pas, il n'y
aura pas d'harmonie. Il va falloir qu'à un niveau supérieur, on
impose une décision. Ce sera, on le présume, la
responsabilité du ministre.
M. Goldbloom: Vous ne trouvez pas qu'il...
M. Malo: Si on ne s'entend pas. Si vous présumez qu'on ne
s'entend pas.
M. Goldbloom: Oui, je ne présume pas que l'on ne
s'entendra pas, mais je suis assez réaliste et j'ai assez
d'expérience du milieu municipal pour croire que l'on n'arrivera pas
à une entente dans tous les coins de la province. Vous ne trouvez pas
qu'il serait préférable que la loi prévoie une formule et
que tout le monde sache, au départ, quelle serait la formule suivant
laquelle les municipalités devraient prendre leur décision?
M. Malo: Personnellement, je le ferais, mais au niveau de la
table du conseil régional de développement, il y a des maires, il
y a toute sorte de monde et on a dit: Non, on va laisser la chance
aux municipalités de s'entendre au moins là-dessus. Mais
on ne voulait pas que les municipalités aient la possibilité de
se retrouver 60 autour de la table. (11 h 15)
Le Président (M. Laplante): Le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. Très
brièvement, le CRD de Lanaudière nous a livré ce matin un
des bons mémoires qu'il nous a été donné d'entendre
depuis le début des audiences. Il y a de très bonnes suggestions,
des suggestions réalistes. Vous dites être d'accord avec le
principe, vous souscrivez d'emblée aux principes mêmes du projet
de loi quant à la participation des citoyens à la prise de
décisions et également en ce qui concerne le principe de la
responsabilité des élus. Vous soulignez l'exagération
considérable et multiple c'est le terme que vous avez
employé dans votre mémoire quant aux étapes
à franchir. Vous nous avez livré vos arguments là-dessus
et vous nous dites également que le projet de loi alourdit
considérablement les rapports entre les municipalités et les
comtés.
Vous dites que vous êtes d'accord avec le principe de la
participation des citoyens, d'abord la prise de décisions et
deuxièmement un autre principe qui est la responsabilité des
élus à décider. Vous dites: Les élus sont là
pour décider.
Comment peut-on concilier le fait que vous suggérez, par exemple,
de mettre le mot "doit" au lieu de "peut"? Vous suggérez de changer ce
mot. Vous dites également dans votre mémoire: "Le pouvoir
d'ordonnance du ministre sape l'esprit de décision à la base".
Vous ne trouvez pas que cela va en contradiction avec les principes du projet
de loi? Vous semblez dire que, du fait que le ministre peut tout simplement
ordonner, cela sape l'esprit de décentralisation. Je parle toujours au
niveau de l'aménagement, du schéma. Comment concilier ces propos?
Vous êtes d'accord avec le principe et vous dites que le ministre peut
renverser tout cela d'un geste de la main.
M. Malo: Justement, on dit qu'il ne devrait pas pouvoir
renverser...
M. Goulet: II ne devrait pas...
M. Malo: ... tout cela, sauf ce qui concerne l'action
gouvernementale. Théoriquement, dans le projet, le ministre peut le
refuser, parce qu'il n'aime pas la densité dans tel ou tel coin. Il peut
le faire. Cela ne veut pas dire qu'il a l'intention de le faire. Je connais
assez M. le ministre, en tout cas, celui-là, pour penser qu'il ne le
fera pas. Mais on ne veut pas que cela reste dans la loi, qu'il puisse le
faire.
M. Goulet: Mais l'action gouvernementale en ce qui a trait aux
travaux de voirie, aux services publics, l'Hydro-Québec, le gouvernement
est en arrière de tout cela. Vous ne pensez pas qu'à un moment
donné il va falloir que le ministre puisse prendre une décision
quelconque. Au niveau de l'aménagement...
M. Malo: On accepte cela dans ces domaines-là.
M. Goulet: Vous acceptez cela dans ces domaines-là.
M. Malo: C'est clair, c'est ce qu'on a dit. On accepte que le
ministre puisse le faire dans le cas, justement, de ce qui relève de
l'Etat et des utilités publiques qui relèvent de l'Etat.
M. Goulet: Une dernière question. Je connais plus ou moins
la région de Joliette. Vous avez certainement des
municipalités... Oui, j'imagine. Vous avez certainement des
municipalités agricoles dans votre comté. Avec tous ces
principes, vous ne devez pas être d'accord que le projet de loi 90 soit
venu avant le projet de loi 125?
M. Malo: On l'a dit.
M. Goulet: Vous l'avez dit, mais je voulais vous le faire dire en
commission, parce que vous ne l'avez pas lu dans votre mémoire tout
à l'heure. Vous l'avez passé...
M. Malo: Non, mais on ne l'a pas lu parce qu'on nous a
demandé d'abréger. C'était clair, il n'y avait pas
beaucoup d'explications sur la page et on avait... je pense qu'on est venu le
dire en commission parlementaire à l'automne.
M. Goulet: M. le Président, une dernière question.
Vous suggérez une personne élue pour chaque municipalité.
Il reste que ce serait le maire ou que ce pourrait être une autre
personne, une personne autre qu'un conseiller municipal, parce que lorsque vous
dites "élu par chaque municipalité", vous voulez dire par chaque
citoyen, parce que souvent lorsqu'on parle de municipalités, on parle du
conseil municipal. Est-ce que vous voulez dire "élu par les citoyens
d'une municipalité" ou "choisi par un conseil municipal"?
M. Malo: C'est sûrement choisi par le conseil municipal de
la municipalité. On présume qu'ils ne choisiront pas le
président du comité de citoyens. L'expérience montre que
quand ils délèguent quelqu'un de la municipalité,
d'habitude ils délèguent le maire ou un conseiller.
M. Goulet: Ce que je veux dire et je termine
là-dessus, M. le Président cela pourrait être une
autre personne qu'un maire ou un conseiller.
M. Malo: Théoriquement, mais cela ne nous est même
pas venu à l'esprit que cela pourrait l'être, parce qu'on
n'a...
M. Goulet: Une personne élue pour vous, c'est un maire ou
un conseiller. D'accord, merci M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, je voudrais d'abord
remercier le Conseil régional du développement de
Lanaudière de l'excellent mémoire qu'il a...
M. Chevrette: ... déformation professionnelle.
M. Léonard:... préparé sur ce sujet. Il est
particulièrement fouillé sur plusieurs aspects du projet de loi
et je tiens encore une fois à vous remercier de tout ce travail, du
travail de consultation que vous avez fait là-dessus.
Je voudrais aussi vous remercier de l'appui que vous apportez au projet
de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme. Je pense que c'est
important à un moment donné qu'il y ait des organismes comme
ceux-ci qui se décident à donner un appui. A mon avis, je pense
bien qu'il est pertinent.
Je voudrais apporter un certain nombre de commentaires sur ce qui a
été dit ici ce matin, notamment quant à la structure. On a
dit: c'est une structure très élaborée pour faire de
l'aménagement. Je voudrais rappeler une chose: un pouvoir
d'aménagement est un pouvoir très important. Il s'agit de la
planification. L'aménagement étant l'organisation du territoire,
il s'agit de la planification et, à mon avis, il n'est pas superflu de
voir que ce soient des maires qui prennent les décisions autour de la
table, lorsque ça les concerne de façon générale
sur le territoire. D'autre part, il est important que les villes soient autour
de la table. Donc, automatiquement il y a des gens et des élus
responsables qui sont là. Cela amène une structure
peut-être compliquée ou plus complexe, mais je ne pense pas qu'on
puisse en faire l'économie. Je voudrais simplement dire que ce n'est
quand même pas si compliqué que ça non plus que les maires
soient autour de la table.
Quand on a fait le schéma d'aménagement de la CRO les
maires y étaient et je pense bien qu'il ne s'agissait pas de
déléguer non plus, soit à des fonctionnaires ou à
des techniciens, l'exercice de cette fonction. Automatiquement, je pense qu'on
s'en tient à un principe fondamental du projet de loi, qu'on en revient
au principe que les décisions sont prises par des élus et qu'ils
doivent aussi rendre compte de leurs décisions et qu'on est strictement
au niveau politique.
Je voudrais aussi faire un commentaire sur le financement. Sur le plan
du financement, il y a des sommes inscrites dans le budget présentement,
le budget du Québec. Il s'agit de la confection, de l'élaboration
d'un schéma d'aménagement. Je pense bien que cela ne se fait pas
non plus dans une seule année, qu'il faut prendre le temps de faire le
schéma d'aménagement, mais je crois aussi qu'il est
prématuré de penser donner des sources autonomes de financement,
en tout cas dans l'état actuel des choses, au conseil de comté
pour l'élaboration du schéma d'aménagement. Je ne dis pas
que ça ne viendra pas cependant, mais je crois que présentement,
c'est une première étape. La loi sera votée
ultérieurement et je pense bien que, pour la première
année, on s'en tient à un mode de subvention non
discrétionnaire, mais un mode de subvention qui va être rendu
public ultérieurement.
En ce qui concerne l'avis du conseil de comté par rapport aux
règlements d'emprunt, il me semble que, lorsqu'on fait des
règlements d'emprunt, il s'agit habituellement, en tout cas, de travaux
importants qui peuvent avoir des relations avec le schéma
d'aménagement. Ce qui est demandé, c'est un avis du conseil de
comté, ce n'est pas décisionnel parce que la décision
reste toujours à la Commission des affaires municipales du Québec
et ce n'est qu'un avis.
Je pense que si l'on veut que le schéma soit sérieux,
qu'on en respecte la conformité, il est important que cet avis existe
quelque part et qu'il soit émis par le conseil de comté.
D'autre part, dans votre mémoire vous émettez une
réserve quant au pouvoir d'ordonnance du ministre, que l'on retrouve
à l'article 28. Ce point a aussi été soulevé par le
député de Bellechasse. J'aimerais vous préciser que le
ministre ne peut demander des modifications au schéma que s'il ne
respecte pas les orientations du gouvernement. C'est ce qui est dit à
l'article 28. Je le lis: "Si le ministre estime que le schéma ne
respecte pas les orientations du gouvernement, il peut demander au conseil de
comté de le modifier". Donc, ce pouvoir ne porte pas sur tout le contenu
du schéma.
Cette remarque m'amène à parler des règlements
d'intervention du gouvernement. Avec la loi 125, l'Etat devra s'astreindre
à des règles plus strictes d'intervention. Ainsi, lorsqu'un
schéma est adopté par le comté, il lie le gouvernement et
ses mandataires. C'est le sens de l'article 127. Si le gouvernement se trouve
dans l'obligation d'intervenir, il doit en avertir le conseil de comté,
négocier avec lui, justifier son action. Je vous pose une question: Ne
croyez-vous pas que ces nouvelles règles constituent une nette
amélioration par rapport à ce qui existe actuellement, alors que
chaque agent du gouvernement peut procéder unilatéralement?
M. Malo: Sans aucun doute, et on est entièrement d'accord
que ça lie le gouvernement. Ce sera peut-être emmerdant pour le
gouvernement, mais si on veut que les citoyens d'une région assument la
décision d'aménagement, il faut que ça lie le gouvernement
et que le gouvernement accepte ce que les citoyens de la région veulent,
à moins que ce soit pour un intérêt national et si
ça fait une bataille politique, cela en fera une. Que vous acceptiez ce
risque-là, ce sera très bénéfique pour la
région. On est d'accord là-dessus.
M. Léonard: C'était la question que je voulais
poser sur ce sujet, parce qu'à mon avis c'est très important.
Ça reprend ce qu'on a dit antérieurement, notamment avec le
député de Bellechasse. Merci.
Le Président (M. Laplante): MM. Gaumond,
Malo et Dumas, les membres de cette commission vous remercient pour
votre participation.
M. Malo: Merci beaucoup.
Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le
Conseil de comté de Matapédia. Messieurs, je vous prierais de
vous présenter, de présenter votre organisme et les personnes qui
vous accompagnent, s'il vous plaît. Suivant les règles de cette
commission, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et
environ 40 minutes de questions. Allez-y monsieur.
Conseil de comté de Matapédia
M. Saint-Gelais (Robert): M. le Président, mon nom est
Robert Saint-Gelais, préfet de comté de Matapédia. Les
représentants du Conseil de comté de Matapédia sont: MM.
Jean-Paul Simard préfet suppléant, Théodore Gagné,
maire, Lucien Soucy, maire, Alfred Landry, maire, Gervais Paquet,
secrétaire-trésorier, Benoît Bernier, ingénieur
municipal, Jean-Pierre Morneau, agent d'information du comté.
Le Conseil de comté de Matapédia est heureux d'exprimer
publiquement, par le biais du présent mémoire, ses
réflexions sur le projet de loi 125, intitulé "Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme " présenté et
déposé à l'Assemblée nationale du Québec par
le ministre d'Etat à l'aménagement, M. Jacques Léonard, en
décembre 1978.
Dans un premier temps nous ferons l'historique du Conseil de
comté de Matapédia pour ensuite mieux connaître
l'évolution de pensée des élus municipaux, jusqu'à
l'expertise d'un projet de schéma d'aménagement que nous vivons
intensément depuis quelques mois.
Comme vous pourrez le constater à la lecture de la conclusion,
nous félicitons le présent gouvernement et en particulier le
ministre responsable, M. Jacques Léonard, d'avoir enfin reconnu le
comté municipal comme structure porteuse politique et administrative
à développer.
Je laisse la parole à M. Simard.
M. Simard: M. le Président, l'historique. Le comté
municipal de Matapédia a été créé par un
arrêté en conseil datant de 1911. Il se compose de 24
municipalités et d'un groupe de territoires non organisés pour
une population totalisant 18 000 habitants ou, si vous préférez,
75% de la population du comté municipal de Matapédia.
En consultant les archives, nous constatons que les principales
activités, de la date d'incorporation jusque vers les années,
cinquante, étaient l'organisation d'un réseau de communication
entre les municipalités, le drainage des terres agricoles, la protection
de la jeunesse, les ventes pour taxes.
En 1955 les maires en conseil, compte tenu du peu d'investissement du
secteur privé dans la construction d'édifices à bureaux,
décidèrent d'ériger leur propre palais de justice au
coût de $150 000 dont le tiers fut subventionné par le
gouvernement central en fonction du maintien du bureau d'enregistrement dans
ledit palais de justice.
Au début des années soixante-dix, un secrétariat
permanent fut implanté ayant pour mandat une gérance sur le
palais de justice, l'administration des affaires courantes du comté et
un droit de regard sur l'organisation en commun de divers services pour les
municipalités composant ledit conseil de comté. (11 h 30)
Lorsque la réforme de l'évaluation foncière est
apparue, nous étions alors prêts pour recevoir cette nouvelle
responsabilité et c'est ainsi qu'est née, en décembre
1977, la direction de l'évaluation du Conseil de comté de
Matapédia avec comme mandat principal la confection des rôles
d'évaluation, nouvelle génération.
Antérieurement, à cette réforme, les maires en
conseil, conscients de leurs responsabilités et devant l'inexistence de
structures industrielles, ont voté les crédits pour structurer le
développement socio-économique du comté. C'est ainsi qu'a
pris forme la direction du développement avec comme mandat la recherche
de solutions globales mettant fin définitivement à l'exode de
notre population active vers des régions industrialisées.
Voilà, M. le ministre et messieurs les membres de l'Opposition,
l'évolution qui nous a permis d'entreprendre l'automne dernier la
confection de notre schéma d'aménagement. Il est à noter
que jusque-là, le conseil de comté n'a
bénéficié d'aucune aide financière gouvernementale
et que les crédits nécessaires pour maintenir nos
différents services provenaient essentiellement de la taxation
foncière auprès de nos composantes.
C'est à ce titre que nous avons obtenu du ministre d'Etat
responsable à l'aménagement, M. Jacques Léonard, une
subvention nous permettant d'engager l'équipe technique requise pour
élaborer notre propre schéma d'aménagement.
Expertise de premiers pas en matière d'aménagement de
notre territoire. Gestion des déchets solides. Un premier dossier
d'aménagement abordé par le conseil de comté a
été celui de la gestion des déchets solides. Afin de ne
pas allonger le présent mémoire, nous réduirons à
sa plus simple expression l'expérience vécue.
Dans le plan directeur de la gestion des déchets solides du
Service de Protection de l'environnement, la région administrative 01
dont fait partie le comté de Matapédia était contrainte de
fermer tous les dépotoirs de son territoire et, en contrepartie, de
créer un site d'enfouissement sanitaire pour les agglomérations
de 2000 habitants et plus avec, comme contrainte, que toutes les
municipalités sises dans un rayon de 30 kilomètres étaient
obligées d'utiliser ledit site d'enfouissement. D'après notre
budget pro forma, pour réaliser un tel projet, plus de $300 000 devaient
être investis par les utilisateurs.
Les maires du comté, incluant ceux des deux villes du territoire,
ont réagi vivement à cette ligne directrice centralisée et
ont proposé dans un
mémoire présenté au ministre
délégué à l'environnement, M. Marcel Léger,
leur propre compromis concernant la gestion des déchets solides de notre
région.
C'est ainsi que le ministre Léger, par le biais du directeur du
Service de protection de l'environnement, a reconnu la maturité des
maires en conseil et est maintenant disposé à recevoir notre
propre réglementation concernant la gestion des déchets solides
dans notre territoire.
Cette mesure permettra d'économiser l'investissement initial de
$300 000 et maximisera l'utilisation de certains équipements en place.
La somme ainsi économisée pourra alors être investie dans
le développement de notre communauté.
Schéma directeur d'aménagement. Le 7 septembre 1978, le
préfet du comté de Matapédia signait conjointement avec M.
Marcel Pelletier, directeur général de l'Office de planification
et de développement du Québec, un protocole d'entente concernant
la confection d'un schéma directeur d'aménagement pour le
territoire du comté municipal de la Matapédia. Les maires des
villes d'Amqui et de Causapascal, M. Sylvio Bérubé et M. Yvon
Desrosiers ont également signé ce protocole.
Cette entente a ceci de particulier: en plus de nous fournir l'aide
financière requise pour le maintien d'une équipe chargée
de participer à l'élaboration du schéma directeur
d'aménagement, le cadre de l'équipe a été
élargi pour permettre l'embauche d'un ingénieur civil. Ce
professionnel agit comme soutien technique pour les municipalités du
comté et nous pouvons vous confirmer ici que les résultats
obtenus sont très positifs. Pensons seulement aux problèmes
d'aqueduc et d'égout, voirie municipale, gestion des déchets,
construction d'immeubles municipaux, etc.
En plus de rationaliser les dépenses plus haut
mentionnées, l'ingénieur sera d'une utilité indispensable
concernant l'identification des coûts ainsi que la localisation technique
des équipements et des infrastructures que le comté
considère essentiels et de caractère intermunicipal qui seront
inclus à l'intérieur de notre schéma directeur
d'aménagement.
Ressources en personnel technique. L'équipe technique se compose
des éléments suivants: un ingénieur civil, un technicien
en aménagement, un chargé de projet, un agent d'information, un
secrétaire. Cette équipe technique est sous la
responsabilité du comité administratif du conseil de
comté.
Nous avons connu une certaine anxiété au cours du
recrutement qui s'explique par le fait qu'il est parfois difficile
d'intéresser une main-d'oeuvre qualifiée à venir
travailler et s'établir dans une région
périphérique comme la nôtre. Le recrutement accompli,
l'équipe technique s'est mise au travail.
Elus municipaux versus l'équipe technique. Dans
l'élaboration de notre avis d'opération, une règle de base
a été omise et c'est la suivante: la vitesse de croisière
dans l'élaboration du schéma directeur d'aménagement doit
être proportionnelle à la capacité d'absorption des
élus et malheureusement, c'est avec regret que nous avons dû
freiner les travaux pour mieux analyser le travail accompli et
réorganiser le tout selon nos objectifs et en fonction d'un leadership
d'élus municipaux.
Consultation des municipalités de comté: A peine un mois
après la réorganisation de nos structures, un plan de travail
accompagné d'un échéancier a été
adopté par le comité administratif et en second lieu par
l'ensemble des maires du conseil de comté.
La consultation des municipalités locales sur le contenu du
schéma directeur ainsi que sur la cueillette des données est
maintenant amorcée et, au moment d'écrire les présentes
lignes, le travail de consultation est actuellement terminé. C'est
inscrit 30%, mais actuellement c'est complété.
Déjà nous voyons pointer à l'horizon les grandes
orientations de l'aménagement de notre territoire de même que
certains dossiers de décentralisation, tels la gestion des lots publics
intramunicipaux, le drainage agricole (cours d'eau municipaux ou
intermunicipaux) et la voirie d'été, prétextant une
utilisation optimale des équipements servant au déneigement qui
pourraient facilement et rationnellement être recyclés avec la
main-d'oeuvre pour les travaux requis par la voirie d'été ou
"petite voirie" et le drainage des terres agricoles (cours d'eaux municipaux et
intermunicipaux).
Certes, nous pouvons noter une forme d'interrogation dépeignant
le sentiment d'inquiétude dans l'ordre actuel de la fiscalité en
fonction de ces pouvoirs nouveaux, mais après une certaine vulgarisation
de la réforme proposée, nous voyons une lumière
s'allumer.
Interrelation entre la voirie, agriculture, travaux municipaux: Pour les
raisons énoncées au paragraphe précédent, nous, du
Conseil de comté de Matapédia, croyons sincèrement qu'il y
aurait une économie d'échelle à réaliser en
retournant, au conseil de comté, l'élaboration et la
responsabilité de même que la surveillance des travaux de voirie
d'été ou petite voirie, drainage des terres agricoles et divers
travaux déjà réalisés par les municipalités
locales. Notons les principaux avantages d'une telle décentralisation:
utilisation maximale des équipements existant; utilisation rationnelle
de la main-d'oeuvre requise l'hiver pour le déneigement et
conservée à l'emploi de la municipalité
l'été souventefois juste pour des travaux de maintenance;
diminution des coûts de réalisation de certains travaux;
exécution plus expédi-tive des projets; motivation et
identification des travaux par une communauté locale, d'où le
sentiment d'appartenance; rationalisation des travaux en fonction des besoins
des utilisateurs; achat de groupe permettant la négociation meilleure
sur les prix tels que les huiles, gazoline, pièces d'entretien, achat
d'équipements, assurances, etc.
Interrelation entre l'évaluation foncière et
l'aménagement du territoire: Possédant notre propre service de
l'évaluation foncière, plusieurs éléments
permettront une utilisation maximale des
ressources humaines et physiques dans la réalisation de notre
schéma directeur d'aménagement, tels: équipe
multidisciplinaire; équipements à dessin servant à la fois
à l'évaluation et à l'aménagement; cartes
possédant la même échelle pour les matrices graphiques,
périmètre d'urbanisation, plan d'affectation des sols, etc.;
utilisation maximale des locaux; rationalisation dans les frais de
déplacements (aménagement et évaluation); données
socio-économiques servant à la fois à l'aménagement
et à l'évaluation.
Approche pour la formation de la commission d'aménagement: La
thèse qui avait été retenue jusqu'à tout
dernièrement était l'unification des villes d'Amqui et de
Causapscal au conseil de comté. C'était là l'essence
même ou la volonté intégrale du projet de loi 125, à
savoir intégrer les cités et villes au conseil de comté,
communément appelé conseil de comté renouvelé.
La démarche proposée pour matérialiser ce
rêve avant l'adoption du projet de loi 125 était la
création de la commission d'aménagement, c'est-à-dire
amener les maires des municipalités rurales et urbaines à
travailler conjointement autour d'une même table. Concrètement,
cela voulait signifier la présence de 26 maires du comté venant
siéger à la commission d'aménagement.
Or, on en a beaucoup parlé. Des démarches ont même
été faites entre des élus de chaque palier de gouvernement
pour voir enfin la création de la commission, sans toutefois amener
l'unanimité et son organisation.
Un des principaux problèmes rencontrés fut la question de
la représentativité des municipalités rurales et urbaines.
Les maires des deux villes surtout manifestaient une part très grande
d'anxiété en rapport à la représentativité.
Allait-on les noyer et les intégrer au conseil de comté?
Allait-on anihiler l'existence des petites municipalités au profit des
plus grandes? Telles étaient et demeurent toujours les interrogations
des élus municipaux pour ce qui concerne la création de la
commission d'aménagement.
De plus, théoriquement nous travaillions vers un échec
inévitable dans le temps. Nous chevauchions littéralement les
structures tant au niveau des municipalités urbaines qu'au niveau de
l'organisme politique qu'est le conseil de comté. On maintenait d'une
part les structures actuelles pour le conseil de comté (24
municipalités, comité administratif, etc.)
D'autre part, on jumelait ce corps politique à un niveau qui se
voyait, cette fois, plus élargi. Résultat: les deux villes se
sont à moult reprises désistées par peur d'assimilation au
Conseil de comté.
Un constat important. Or, la création de la commission est
indispensable pour l'évaluation des travaux d'aménagement au
niveau de tout le comté et pour la consultation concernant
l'organisation structurale du futur conseil de comté
renouvelé.
Introduction de la nouvelle stratégie. Notre proposition est fort
simple. Au lieu d'essayer d'intégrer les villes au conseil de
comté par le biais de la commission d'aménagement, nous
suggérons que la dite commission se crée de façon
sectorielle. L'objectif qui nous a animés dans la planification et dans
l'organisation de cette stratégie est d'une part la volonté de
revaloriser les trois pôles existants dans le comté et, d'autre
part, permettre que chacun des secteurs ait sa juste part dans
l'élaboration du schéma d'aménagement.
Pour ce qui concerne le choix des membres de la commission, nous avons
pensé qu'il serait pertinent de retrouver obligatoirement,
siégeant à la commission, le maire de chacun des pôles,
soit respectivement le maire de Sayabec, d'Amqui et de Causapscal. Pour ce qui
est des deux autres représentants pour chaque secteur, ils seront
choisis parmi les huit maires provenant des paroisses satellites de chaque
pôle. Par conséquent, il y aura trois représentants par
secteur, soit un total de neuf sièges plus celui d'un président
préalablement choisi par les membres de la commission
d'aménagement.
Ainsi, nous respecterons le rythme d'évolution de chacune des
municipalités rurales et urbaines.
Le mandat de la commission ne sera pas décisionnel en termes de
réglementation. Elle produira des avis politiques en matière
d'aménagement et ce, au profit des deux paliers de gouvernement, soit
les municipalités urbaines et le conseil de comté, d'où
émaneront pour chaque gouvernement les réglementations
pertinentes au schéma de sa municipalité, conformément au
schéma du comté, puisque les grandes orientations en
matière d'aménagement auront été
préalablement débattues en commission et en séance du
conseil. De plus, la commission d'aménagement se penchera sur
l'organisation éventuelle du conseil de comté renouvelé et
en particulier, sur les trois éléments suivants: territoire (son
intégrité); la représentativité et la
fiscalité.i
M. Saint-Gelais: Et c'est ainsi, messieurs, que si nous avons mis
tant d'ardeur à décrire nos activités intermunicipales,
c'est que nous voulions démontrer, hors de tout doute, qu'une
corporation de comté qui s'en donne la peine peut être la
structure porteuse politique et administrative recherchée par le
présent gouvernement. C'est dans ce sens que nous, les élus du
Conseil de comté de Matapédia, disons oui au projet de loi
125.
Recommandations et avis. Toutefois, nous aimerions procéder aux
recommandations suivantes avant son adoption. Le Conseil de comté de
Matapédia souhaite l'adoption du projet de loi 125 dans les meilleurs
délais. Les maires en conseil veulent conserver
l'intégrité de leur territoire. L'intégration des
représentants des villes se fera d'abord sous le prétexte de
l'aménagement du territoire, permettant l'ajustement des collaborations
et provoquant par la suite une collaboration naturelle et spontanée. Que
la délégation entre le gouvernement central et la
municipalité ne soit pas qu'une expression décentralisée
et que le gouvernement et le ministre se retirent davantage du projet de loi
125; que le financement des
conseils de comté soit ou bien statutaire ou autonome pour ne pas
être à la merci des transferts discrétionnaires; que la
rémunération des membres du conseil de comté soit
établie en même temps que la sanction du projet de loi 125 par la
troisième lecture; que le processus de consultation soit
allégé afin d'activer le processus et d'atténuer les
coûts. L'aménagement du territoire devra comprendre le zonage
agricole des terres. Dans notre région, la loi du zonage agricole ne
s'applique pas pour l'instant, loi 90. Nous voulons dire par là que le
conseil de comté intégrera à l'intérieur de son
schéma d'aménagement, suite à l'étude de la
problématique, la réglementation requise afin de protéger
notre potentiel en fonction des objectifs d'aménagement et de
développement du conseil de comté.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Préfet, merci du mémoire
que vous avez présenté à la commission et qui
décrit l'expérience que vous avez vécue depuis plusieurs
mois déjà et qui donne des résultats très positifs.
Il me semble que votre mémoire a l'air riche d'une réalité
vécue. (11 h 45)
Je voudrais faire quelques commentaires par rapport à ce que vous
y dites. Votre mémoire fait d'abord connaître aux membres de cette
commission l'une des quatre expériences pilotes qui ont
été faites dans le Québec en ce qui concerne la
préparation de schéma d'aménagement.
Il y a plusieurs aspects positifs qui se dégagent de votre
démarche, notamment au niveau de la collaboration intermunicipale. Je
pense que c'est le premier mémoire qui insiste autant sur cet aspect des
choses. De plus, je pense que le conseil de comté en est un qui est
reconnu comme étant très dynamique dans le Québec, en ce
sens qu'il joue un rôle très actif dans la préparation de
son schéma d'aménagement, donc, qui a des perspectives d'avenir
quant à son territoire et qui joue ainsi un rôle très actif
dans le soutien technique qu'il fournit aux municipalités du territoire.
Vous avez bâti une équipe très compétente sur ce
plan.
Une des constatations qu'il faut tirer de votre mémoire, c'est
qu'une corporation de comté qui s'en donne la peine, peut devenir la
structure porteuse d'aménagement du territoire, c'est ce que vous dites
d'ailleurs en conclusion de votre mémoire.
Il convient aussi de souligner je vous en remercie votre
accord avec le projet de loi 125. Vous en recommandez même l'adoption
dans les meilleurs délais; c'est ce que nous souhaitons tous.
Je voudrais revenir sur le financement des comtés. Je vais dire
une chose qui a peut-être déjà été dite il y
a plusieurs jours, deux semaines, en ce qui concerne ce financement. Votre
cinquième recommandation suggère que le financement des conseils
de comté soit ou bien statutaire ou autonome pour ne pas être
à la merci de transferts discrétionnaires. Je rappellerai ceci:
Le budget du
Québec en 1979/80 indique que les conseils de comté seront
financés au départ par un programme de $2 100 000. C'est inscrit
aux crédits du ministère des Affaires municipales. D'autre part,
tel qu'annoncé à la conférence
Québec-municipalités et tel que réaffirmé dans le
discours du budget, toute responsabilité nouvelle sera assortie d'une
source de financement nouvelle. Je pense que c'est un engagement du
gouvernement qui a d'ailleurs déjà été pris
à la conférence Québec-municipalités du mois de
juin dernier.
Pour ce qui est du financement à moyen et long termes des
comtés renouvelés, le comité conjoint d'orientation sur
l'aménagement et la décentralisation étudiera cette
question et fera des propositions au gouvernement plus tard. Je vous invite
même à lui présenter vos recommandations dans le cours de
ses travaux.
Quant aux subventions versées aux comtés, elles ne seront
pas discrétionnaires; je tiens à le dire. Lorsque le projet de
loi sera adopté et que les comtés auront leurs lettres patentes,
ils pourront se prévaloir de subventions qui seront versées selon
des critères objectifs que nous sommes présentement à
définir. Donc, il ne s'agit pas de subventions
discrétionnaires.
Je voudrais maintenant vous poser quelques questions. Vous
déclarez à la page 6 de votre mémoire que lors de
l'élaboration de votre devis d'opération, vous aviez omis la
règle de base suivante et je vous cite: "La vitesse de croisière
dans l'élaboration du schéma directeur d'aménagement doit
être proportionnelle à la capacité d'absorption des
élus." Est-ce que vous pourriez m'expliquer ce que vous entendez par
cette règle de base, ou, en d'autres termes, quelle place les
élus doivent-ils occuper selon vous dans l'élaboration du
schéma?
M. Saint-Gelais: M. Gagné va répondre à
votre question.
M. Gagné: Pour répondre à cette question, on
sait que, dans le comté de Matapédia, il y avait tellement de
problèmes à résoudre, qu'il fallait absolument faire vite
parce que tout notre monde s'en allait. Alors, nous avons mis une équipe
technique en place. Un bon jour on s'est aperçu qu'on allait trop vite
pour ce que les élus municipaux pouvaient assimiler. On perdait la suite
des dossiers et à un moment donné on a été
obligé de dire: II vaut mieux aller moins vite et aller sûrement
avec la population, parce qu'on sait qu'un jour on aura à se
présenter devant la population pour faire accepter ces
règlements.
C'est pour ça qu'on dit ici aujourd'hui que parce que nous sommes
dans une région ce n'est pas pour déprécier les
gens où le degré d'instruction n'est pas trop
avancé, on s'est rendu compte qu'on allait beaucoup trop vite pour ce
qu'on pouvait assimiler.
M. Léonard: A votre avis, vous auriez été en
difficulté pour expliciter tous les détails des composantes du
schéma?
M. Gagné: C'est cela.
M. Léonard: Publiquement. D'autre part, vous avez
constitué une équipe technique de cinq personnes, si je
comprends. C'est quand même considérable. En plus de votre service
d'évaluation foncière?
M. Gagné: Oui, monsieur.
M. Léonard: Est-ce que vous voyez des avantages à
ce que le comté dispose d'un personnel permanent? Est-ce que vous
pourriez détailler davantage là-dessus?
M. Paquet: Je suis secrétaire-trésorier et
coordinateur du schéma. En fait, un des avantages majeurs d'avoir des
permanents comme tels, c'est que cela va définitivement déteindre
sur la qualité du travail qui va être produit. Ce ne seront pas
des interventions ponctuelles. Ce sera un caractère de continuité
comme tel. Une des caractéristiques de l'équipe que nous avons,
quand on parle de mul-tidisciplinaire, nos employés qui travaillent au
service de l'évaluation peuvent aussi bien, à ce moment,
travailler au niveau du schéma d'aménagement, que ce soit
à la confection de cartographies ou à l'échange de simples
données socio-économiques comme telles. C'est dans ce sens qu'on
a réussi à faire ce mariage qui s'avère quand même
heureux.
M. Léonard: Vous faites un échange de personnel
entre les deux équipes.
M. Paquet: De personnel et de matériel technique et de
données.
M. Léonard: Est-ce que vous pourriez expliciter davantage
le rôle des uns et des autres, celui des élus et celui de
l'équipe technique? Je ne sais pas si quelqu'un...
M. Paquet: D'accord. Dans la première étape,
d'abord, notre plan de travail comprend six étapes bien précises.
Les premières étapes ou la première étape comme
telle, s'appelle l'élaboration de la problématique
préliminaire. Evidemment, le travail a commencé par une
consultation des 26 municipalités incluant les deux villes du
comté. Présentement, on est en train d'écrire cette
problématique préliminaire et la commission d'aménagement
va siéger pour prendre connaissance des grandes orientations comme
telles.
Or, le travail technique dont on faisait un peu allusion tantôt,
à une vitesse de croisière, c'est important maintenant que nous,
en tant que conseil de comté, nous arrêtions pour pouvoir regarder
ensemble la nature tout au moins le préliminaire de notre potentiel et
de nos contraintes de comtés et c'est là qu'on est en train
d'ajuster le rôle de l'équipe technique par rapport au rôle
des élus comme tels. En fait, c'est une vulgarisation du plan de travail
comme tel, pour une meilleure compréhension par l'élu municipal.
C'est un éche- lon bien important que les maires autour de la table du
conseil de comté puissent bien comprendre le processus global du
schéma d'aménagement et il faut mettre le temps qu'il faut pour
le vulgariser.
M. Léonard: Est-ce qu'il est arrivé souvent qu'il y
a eu des éléments que vous aviez inscrits ou que vous aviez
proposés qui ont été renversés ou rejetés
par les élus?
M. Paquet: A l'heure actuelle, le travail de la commission s'est
fait pour une grande partie par le comité administratif. Evidemment,
c'est toute la couleur politique municipale qui est en train de prendre le
dessus. Ce serait peut-être aux hommes politiques à
répondre. Il y aurait peut-être des dossiers dans lesquels, nous,
comme techniciens, aimerions plonger plus à l'intérieur. Par
contre, on se rend compte que, sur le plan politique municipal, ce n'est
peut-être par forcément les priorités des élus.
C'est là qu'il faut, en tant que fonctionnaires, être assez
adultes pour se retirer et présenter le dossier à nos
élus.
M. Léonard: ...
Une Voix: Actuellement, dans le comté de Matapédia,
on a formé un comité administratif depuis trois ans et on se
réunit au moins une trentaine de fois par année. Même,
depuis les Fêtes, cela doit faire tout près de cela, trente fois,
qu'on se réunit. Les réunions sont assez longues,
c'est-à-dire de 19 heures jusqu'à 23 heures, 23 h 30 des fois. On
a pensé discuter pour pouvoir mettre ces cartes sur table et avec les
cinq membres du comité administratif et le président comme
préfet, cela donne pas mal de travail à nos gars qui travaillent
dans la boîte en bas.
M. Gagné: Là-dessus, il faut même ajouter que
c'est vrai pour répondre à la question de M. le ministre. C'est
déjà arrivé qu'on a renversé la question de la
technique. Sans trop s'avancer, on pourrait dire qu'on en était
déjà au développement pendant qu'on n'avait pas encore
commencé à faire notre schéma d'aménagement. On a
dit: Ce n'est pas le temps de parler de l'industrie; c'est le schéma
d'abord. Il fallait voir si le plan d'ensemble... mais je dois vous dire en
passant que nous avons une équipe formidable, on s'entend très
bien, on sait où on va et pas de problèmes...
M. Léonard: Vous vous êtes donné plusieurs
services par l'intermédiaire du conseil de comté. Ce sont les
municipalités qui ont fait cela durant les mois qui ont
précédé, peut-être même avant que vous ne
commenciez cette opération. Alors, si je comprends, c'est de cette
façon qu'il y a des membres de votre équipe technique, notamment
l'ingénieur civil, je ne sais pas lequel il n'est peut-être
pas ici en tout cas vous fournissez des services ou du travail pour les
municipalités du comté. Alors quels sont les services que le
conseil de comté offre aux municipalités actuellement et
comment réagissent les municipalités face à cette
situation?
M. Bernier (Benoît): D'abord un premier aspect de la
question, les services offerts ont trait à toutes les
responsabilités des municipalités, tout l'aspect technique de la
responsabilité, c'est-à-dire l'alimentation en eaux potables, les
eaux usées, la gestion des déchets solides, la voirie, même
les équipements de loisirs. A un moment donné on a
travaillé pour une municipalité sur le système de glace
artificielle dans une municipalité. Ce sont tous les services en fait
dont une municipalité a besoin au niveau du génie municipal. Pour
le deuxième aspect, les municipalités dans lesquelles on a
travaillé semblent très intéressées au service et
même des questions pour lesquelles ils n'auraient pas fait appel à
une firme d'ingénieurs-conseils parce que cela aurait été
trop dispendieux et le service étant disponible il y a une communication
qui s'établit entre les municipalités et le service de
génie municipal. Cela devient un peu un service pour chacune des
municipalités plus qu'uniquement un service de comté.
M. Léonard: J'ai aussi une autre question en ce qui
concerne le schéma lui-même et les informations gouvernementales.
Vous avez eu besoin d'un certain nombre d'informations de la part du
gouvernement et des ministères. J'aimerais vous demander comment vous
avez procédé pour avoir cette information et quelles suggestions
vous pourriez nous faire pour améliorer les contacts entre le
comté et les organismes gouvernementaux.
M. Saint-Gelais:... demander aux fonctionnaires.
M. Paquet: Trêve de plaisanterie on pourrait commencer en
disant: Si les ministères en région avaient les portes ouvertes
comme les gens de l'OPDQ l'ont, je pense que ce serait peut-être beaucoup
plus facile, mais il ne faut jamais être négatif non plus. Nous
avons procédé par une résolution du comité
administratif demandant à l'OPDQ en région, par le biais de la
conférence administrative, de nous procurer les intentions
d'aménagement et de développement des ministères en
région. Cela a été acquiescé d'une façon,
quand même, assez rapide auprès de la mission d'aménagement
de la conférence administrative. S'il y avait une suggestion à
faire, peut-être, je le dis en tant que secrétaire du conseil de
comté, sans vouloir m'immiscer non plus, j'aimerais, lorsque
siège cette mission d'aménagement, à la conférence
administrative, peut-être être invité pour préciser
davantage le sens de nos demandes et qu'il y ait une compréhension plus
cohérente.
M. Léonard: Une dernière question, si vous le
permettez, M. le Président. Vous nous parlez d'un problème qui
concerne le site d'enfouissement sanitaire dans le comté et vous avez
eu, à ce moment-là, des négociations avec les services de
protection de l'environnement dans le but de trouver un compromis. Dans quelle
mesure le fait que vous soyez constitué en comté et que vous
collaboriez avec les villes vous a-t-il permis de trouver ce compromis? Est-ce
que cela a été déterminant? Dans quelle mesure cela a-t-il
été déterminant?
M. Saint-Gelais: M. Gagné.
M. Gagné: Je pense que, pour ne pas répéter,
tout le monde est au courant de la loi et des règlements surtout sur
l'enfouissement. Dans notre région, il y a deux petites villes je
les appelle les petites mini qui dépassent un peu plus 2000 de
population. Avec la réglementation de la loi de l'enfouissement, ces
deux villes étaient obligées d'aller dans des enfouissements
régionaux, et moi, voisin d'une grande ville, j'étais
obligé de me soumettre et tous les petits villages aux alentours, parce
qu'on parlait d'un périmètre de 30 milles autour d'un
dépotoir régional. Devant cette situation, on s'est réuni
avec les maires des deux villes autour d'une même table. Nous avons
regardé la réglementation du ministère. On a dit: Dans
notre région ce n'est pas notre priorité. On a dit: Oui aux
règlements. On va arrêter de faire brûler, on va
arrêter de faire des dépotoirs, mais à des taux comme
ceux-là... on estimait à $300 000 pour enfouir les déchets
solides pour une population de 18 000 habitants chez nous. Alors, on a fait une
proposition au ministère de l'environnement. Cela a été
assez lourd, mais on a été ferme. (12 heures)
On a dit: Nous sommes à construire un schéma
d'aménagement, on a trop de chemin à faire. Tout est à
refaire chez nous, on n'ira pas mettre $300 000 dans des déchets
solides.
Dans nos municipalités, nous avons toujours une personne
supplémentaire qu'on est obligé de garder l'été
pour réparer. On a de l'équipement, on s'est dit: Pourquoi pas,
chez nous, on n'irait pas avec notre "back-hoe", le lundi matin, faire une
tranchée, prendre nos déchets et les enterrer, deux
municipalités ensemble, pour éliminer les coûts? Alors,
là-dessus, on était tous d'accord. C'est là-dessus qu'on a
réussi à le faire accepter du gouvernement, et on le remercie
aujourd'hui d'avoir enfin compris les besoins d'une région.
Je suis sûr que vous aussi aujourd'hui vous allez comprendre
qu'une région comme la nôtre ne peut se permettre de bâtir
à partir de lois gouvernementales qui s'appliqueraient à toutes
les régions du Québec. Les régions ne se ressemblent pas
les unes des autres et il est bien important que des schémas
d'aménagement doivent se construire sue le champ avec nos propres
techniciens. Nous autres, les élus, on leur dit: C'est ça que tu
va faire et c'est comme ça qu'on va se bâtir.
Le Président (M. Laplante): Merci monsieur. M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Merci, M. le Président. M. le préfet,
messieurs, j'ai lu et écouté votre mémoire avec beaucoup
d'intérêt, justement parce que
l'historique que vous faites de vos actions dans ce domaine est
frappant, et j'ai beaucoup apprécié le soin que vous avez pris en
rédigeant votre mémoire de cette façon.
Il y a deux questions que j'aimerais vous poser. A la première
page du mémoire, dans l'introduction, vous offrez des
félicitations au ministre qui est assis devant moi ici et vous dites
qu'il a enfin reconnu le comté municipal comme structure porteuse
politique et administrative à développer. Mais quand j'arrive
à la page 13, je trouve parmi les recommandations celle qui se lit comme
suit: "Les maires en conseil veulent conserver l'intégrité de
leur territoire ".
J'aimerais savoir si vous voyez la reconnaissance du comté
municipal comme étant la reconnaissance strictement de ce qui existe ou,
si en faisant cette remarque très obligeante à l'égard du
ministre, vous avec tenu compte de cette idée qui semble être dans
l'air, que les limites des comtés municipaux seraient modifiées
radicalement. Ac-cepteriez-vous une modification des frontières de votre
comté municipal?
M. Simard: Actuellement le comté de Matapédia est
formé de 24 municipalités rurales et on veut englober
naturellement dans le schéma ou dans la commission d'aménagement
les deux villes de Causapscal et Amqui. C'est pourquoi on dit que l'on veut que
le comté de Matapédia reste tel quel. On veut absolument
les élus municipaux désirent que ne s'agrandisse pas le
comté tel quel.
M. Goldbloom: Je vous remercie de cette précision.
A mon tour j'amerais faire, pendant quelques secondes, un peu
d'historique. Quand j'ai déposé en 1976 le projet de loi no 12,
j'ai été invité pour ne pas dire convoqué
à une réunion des préfets du Québec et j'y
ai rencontré tous les préfets. Ils étaient presque tous
là, et ils m'ont dit: "Ecoutez, ce que vous proposez dans le projet de
loi no 12, la constitution de conseils d'agglomération où les
villes siégeraient avec les municipalités rurales
intéressées par le développement de cette
agglomération et l'aménagement de son territoire, ce n'est pas
une chose qui nous est acceptable. Il y a des structures qui existent qui
s'appellent conseils de comtés et qui existent depuis plus de cent ans
et vous seriez mieux inspiré de vous servir de ce qui existe, d'inviter
les municipalités régies par la Loi des cités et villes
à trouver une formule de collaboration avec les conseils de comté
existants. Travaillez comme cela; ce sera, en quelque sorte c'est
l'opinion que j'ai retirée des interventions des préfets
un sine qua non pour que fonctionne l'application de votre projet de loi, de
votre éventuelle loi.
Il me semble que c'est une question d'une importance fondamentale parce
que, pour que l'application de l'éventuelle loi soit un succès,
les participants au niveau local devront être heureux, devront être
contents de travailler à l'intérieur de la structure qui sera
définie. C'est pour cette raison que je tenais à vous poser
d'abord cette question. Votre réponse a été claire.
Ma deuxième questionn en est en quelque sorte un corollaire. Vous
mentionnez à la page 11 une idée qui pourrait, à votre
point de vue, résoudre un certain problème de méfiance de
la part des villes qui sont comprises dans le territoire de votre comté.
Vous suggérez que les maires de Sayabec, Amqui et Causapscal
siègent d'office et que, dans chacun des trois secteurs, deux
représentants, deux maires de municipalités régies par le
Code municipal sièqent également et qu'un conseil de neuf membres
soit ainsi constitué. Je voulais vous demander tout simplement
peut-être que vous l'avez mentionné et que je l'ai manqué
en vous écoutant les maires d'Amqui, de Causapscal et de Sayabec
ont-ils été consultés? Les conseils municipaux?
Lestroispopulationsurbaines? Les trois villes seraient-elles consentantes?
M. Paquet: D'abord, il faudrait peut-être préciser
que, dans les trois secteurs proposés, il y a deux municipalités
qui sont régies par la Loi des cités et villes, soit Amqui et
Causapscal, Sayabec étant une municipalité rurale. Donc, pour
Sayabec, il n'y a pas de problème, dans le sens que c'est une
décision qui provient du conseil de comté, donc que le maire a
participé comme tel.
Maintenant, pour ce qui a trait à l'approche des deux villes, on
peut préciser un peu la nature de l'approche. Il y a eu des discussions
par le biais du comité administratif du conseil de comté et les
maires des deux villes, les deux maires comme tels avec le résultat
qu'à la dernière séance régulière du mois
d'avril, la ville d'Amqui, soit la ville la plus populeuse, celle qui se situe
au chef-lieu, a endossé, a passé la résolution pour faire
partie de la commission d'aménagement, alors que la deuxième
ville, malgré qu'on ait: écrit qu'elle ne siégerait pas,
va siéger à la commission d'aménagement, mais pas à
titre officiel. En tout cas, pour faire un constat bien pro forma, le maire
préfère consulter davantage ses conseillers sur les objectifs
comme tels de la commission. On a fait, par exemple, un test, il y a deux
semaines. Dans la vallée, on parle beaucoup de papeterie je pense
que je vais faire sourire le député Marquis les deux
maires des villes de Causapscal et d'Amqui, conjointement avec le préfet
du comté, on rédigé un mémoire qui a
été présenté au premier ministre de la province de
Québec, M. René Lévesque. Donc, on peut à ce
moment, parler de commission d'aménagement, parce que ceux que nous
qualifions les trois grands du comté, soit le préfet et les deux
maires des villes, les trois grands se sont assis à la même table
et se sont concertés sur l'objectif, c'est-à-dire le but comme
tel du développement économique et les objectifs du
schéma.
M. Goldbloom: Une dernière question, M. le
Président et je retourne à l'historique que je faisais. Il est
évident que les villes ne veulent pas se faire imposer des
décisions par les municipalités rurales et que les
municipalités rurales ne veulent pas non plus se faire imposer des
décisions par les villes.
De la discussion que j'ai eue avec les préfets est sortie une
suggestion que les intéressés puissent s'asseoir autour d'une
table et que quel que soit le nombre de porte-parole du côté
urbain, du côté rural, il y ait une égalité de poids
entre les deux et qu'advenant une divergence de vues irréductible,
l'impossibilité de s'entendre sur quelque chose, un organisme comme la
Commission municipale du Québec soit appelé à
siéger comme arbitre et trancher la question. J'aimerais savoir si vous
avez une réaction à cette notion?
M. Paquet: Est-ce que vous préférez une
réaction technique ou politique?
M. Goldbloom: Je serais intéressé par les deux,
certainement. C'est plutôt une question politique, je pense, parce qu'il
y va de l'intérêt des municipalités de ne pas se faire
imposer des choses par un autre ordre de municipalités.
M. Gagné: Bon, je pense que chez nous, il n'y a pas de
problème à savoir de se faire dicter des règles de
conduite ou d'embarquer sur le terrain d'un autre. Il s'agit là d'un
schéma d'aménagement, d'une discipline d'avenir, avec lequel
chacune des municipalités va conserver son autonomie. Cela est clair
dans notre esprit, c'est simplement une question de confiance et de dialogue.
Chez nous, nous avons subi toutes les tortures. Vous avez connu le temps du
BAEQ et ce qu'on avait dit des gens de la région. C'est nous qui avons
payé la note. Certains en ont profité, mais nous avons
payé la note. Alors, on a compris qu'aujourd'hui, il ne fallait pas se
fier sur d'autres, il fallait commencer à se faire confiance
nous-mêmes. Cette confiance-là règne dans la vallée.
Donnons-nous encore six mois à travailler ensemble dans le milieu rural
et urbain dans notre région et le portrait va être changé
de beaucoup.
M. Goldbloom: Merci beaucoup, j'ai bien aimé votre
mémoire et j'ai bien aimé la présentation que vous en avez
faite.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Bellechasse... Oui, monsieur.
M. Simard: J'aurais une information à donner. Tout
à l'heure j'ai répondu à M. Goldbloom concernant
l'intégration de notre territoire, c'est strictement au point de vue
municipal qu'on désire garder le territoire tel quel.
M. Goulet: Très brièvement, M. le Président,
je félicite aussi le conseil de comté d'Amqui parce que ce qu'on
a vu dans ce mémoire-là, c'est du vécu et du concret.
C'est réaliste, surtout lorsqu'on nous parle d'aménagement au
niveau des sites d'enfouissement sanitaire, je pense qu'il faut vivre dans un
comté rural pour savoir que ce qu'on nous propose et ce qu'on veut, ce
n'est pas tout à fait la même chose, ou ce qu'on peut faire.
J'aimerais savoir la moyenne de la population de vos
municipalités, outre les deux villes d'Amqui et Causapscal, est-ce que
les autres paroisses se ressemblent? Quelle est la moyenne de population des
autres municipalités?
M. Paquet: Dans le comté globalement, il y a une
population de 24 000, 25%, soit 6000 qui proviennent des cités et villes
et 18 000 qui proviennent des municipalités rurales. Dans les 18 000
c'est réparti à ce moment-là en 24 municipalités.
Il y a au moins 12 municipalités de moins de 1000 habitants. On a des
municipalités de 500, 600, 700, 800 et 900 habitants.
M. Goulet: Ce qui veut dire que, sauf Cau-capscal et Amqui, la
représentativité, au niveau d'un conseil de comté, les
autres ce serait à peu près égal, je veux dire, un
représentant par municipalité, ce serait...
M. Paquet: II y a quatre municipalités, en y incluant
peut-être le village de Sayabec comme tel, plus la municipalité du
village de Lac-au-Saumon qui se situe entre deux secteurs, qui chevauche un
peu.
M. Goulet: Vous avez une expérience au niveau de la
décentralisation, même si on parle d'aménagement de
territoire, mais on l'a souligné dans le mémoire. L'équipe
technique qui travaille pour le conseil de comté, pour les
municipalités, est payée de quelle façon? Quelle
proportion des municipalités contribuent? Seulement lorsqu'elles s'en
servent ou par le biais de leur conseil de comté? Comment cela
fonctionne-t-il au niveau du financement de cette équipe?
M. Paquet: Est-ce que vous parlez au sens large?
M. Goulet: L'équipe technique.
M. Paquet: Au sens large évaluation aménagement ou
aménagement tout simplement?
M. Goulet: Vous avez une équipe technique actuellement qui
est embauchée. Un ingénieur, tout ce monde-là, les cinq.
La plupart des municipalités se sont prévalues des services de
cette équipe-là pour un aréna, pour un réseau
d'aqueduc et d'égout, etc. Comment cette équipe est-elle
payée? Ce ne peut pas être du bénévolat justement;
les maires font du bénévolat, mais pas les techniciens. (12 h
15)
M. Paquet: M. le maire dit de ne pas donner le tuyau. Tout
simplement, on a mentionné dans le mémoire, au début, que
présentement il y a un protocole d'entente entre l'Office de
planification et de développement du Québec et les conseils de
comté. Evidemment, on a une subvention conditionnelle à la
réalisation d'un schéma qui s'étend sur deux exercices
financiers. Donc, lorsque les municipalités font appel à
l'équipe technique, il n'est pas question de répartition versus
les municipalités, parce que c'est déjà payé par
les impôts des citoyens de la province. Maintenant, la condi-
tion pour qu'une municipalité ait accès aux services
techniques, c'est que la demande soit faite auprès des élus,
c'est-à-dire soit à la commission ou au comité
administratif. Ce n'est pas moi en tant que fonctionnaire ou d'ingénieur
en tant que fonctionnaire qui va décider d'oeuvrer dans une
municipalité. Ce sont des hommes politiques qui vont nous donner le
mandat d'y aller.
M. Goulet: Cela répond très bien à ma
question. J'avais hâte de voir comment c'était financé,
parce que cela ne règle pas le problème de toute
façon.
Changement de propos, une déclaration qui a été
faite par le ministre des Affaires municipales et le ministre d'Etat à
l'environnement je me réfère au journal La Presse, un
article du journal La Presse du 19 mars où on dit que, dans nos
petites municipalités, c'est fini le bénévolat des maires;
ce sera des maires à temps plein. Alors, les municipalités de
800, 600 à 1200, 1300 habitants, qu'est-ce que représenterait
pour vous le salaire d'un maire à temps plein, suite à l'adoption
du projet de loi sur l'aménagement du territoire?
M. Simard: II n'y a absolument aucune municipalité qui
peut se permettre cela.
M. Goulet: Vous n'avez pas peur, à ce moment... si vous me
le permettez, M. le Président, je lis ici: "L'heure du travail
bénévole et de la générosité publique tire
à sa fin dans le monde munir cipal. Avec l'adoption prochaine d'une loi
et je cite toujours l'article du journal La Presse nationale
d'aménagement du territoire, la création d'une centaine de
communautés régionales, les fonctions d'un maire deviendraient
une occupation à temps plein ou presque et ceci dans les petites
municipalités". On continue: "II est clair, a dit le ministre
Léonard, qu'une approche vers la décentralisation" et ainsi
suite. Bon, vous n'avez pas peur et ce n'est pas mon idée que vous
disiez oui ou non. Je veux tout simplement savoir... Vous n'avez pas peur que,
si on en venait à une telle chose, on veuille à un moment
donné forcer indirectement la fusion des municipalités quand on
arrive avec des choses comme cela. Si vous dites non, il n'y a aucun danger
ou...
M. Simard: Cela pourrait peut-être en venir comme cela a
fait avec les commissions scolaires, nos régionales.
M. Goulet: J'ai deux autres petites questions, M. le
Président. A la page 13, votre recommandation d), vous dites je
vais essayer de vous le citer par coeur on veut, une fois que la loi 125
sera votée, que le ministre puisse se retirer graduellement. Pouvez-vous
expliquer là-dessus?
M. Simard: Lorsqu'on parle du retrait du ministre comme tel, cela
concerne peut-être plus l'article 28. Les différends qu'il
pourrait y avoir entre les municipalités, c'est-à-dire entre le
schéma du comté... Vous savez que chaque local devra, par le
biais de son plan d'urbanisme, s'aligner sur le schéma
d'aménagement. Il est évident qu'à un moment donné,
s'il y a conflit entre le local et le conseil de comté, il ne devrait
pas y en avoir, mais s'il y en a, il va falloir trouver un mécanisme
pour trouver des compromis. Ce qu'on dit c'est qu'on ne voudrait pas
j'essaie de bien refléter l'image des hommes politiques à
un moment donné, c'est que le gouvernement soit tenté de venir
régler nos problèmes chez nous.
S'il faut mettre à ce moment trois, quatre, cinq ou même
six mois comme disait M. Gagné tout à l'heure
supplémentaires pour travailler sur un dossier, on le mettra, parce
qu'on est tout le temps fidèle à l'axiome de base qu'on a
fixé, donc la vitesse de croisière doit être
proportionnelle à la capacité d'absorption des élus...
l'aménagement, étant une chose politique.
M. Goulet: M. le Président, une dernière remarque.
Je suis extrêmement heureux de lire les pages 7 et 8 du mémoire
présenté par le gens de la Matapédia et cela a
peut-être l'air drôle que je dise cela, mais quand même, il y
a environ un mois, j'étais conférencier à un
déjeuner-causerie et je tenais à peu près les mêmes
propos. Je ne veux pas dire que vous avez copié et je ne voudrais pas
que vous m'accusiez d'avoir copié votre mémoire. Je sais que
c'est ni l'un, ni l'autre. Mais à ce moment, après mon
intervention, je me demandais si je n'avais pas rêvé. Là,
je vois des gens qui sont dans le milieu à coeur de jour qui nous
arrivent avec des propos à peu près semblables à ceux que
j'avais tenus et je vous félicite. Personnellement, à mon niveau
moral, cela me remonte, parce que je vois que je n'étais pas le seul
à penser comme cela. Je me réfère aux suggestions de
décentralisation. Je sais que le projet de loi où nous
travaillons actuellement est au niveau surtout de l'aménagement du
territoire mais, au niveau de décentralisation, vous avez des
suggestions concrètes aux pages 7 et 8 et je vous en félicite. Je
vois que le comté de Matapédia ressemble énormément
au comté de Bellechasse.
Le Président (M. Laplante): Merci. M. le
député de Matapédia.
M. Marquis: Merci, M. le Président, des quelques minutes
qui restent, comme d'habitude, aux députés
d'arrière-ban.
Je voudrais, à titre de député de Matapédia,
souhaiter la bienvenue à mon tour à la délégation
du conseil de comté. Comme vous l'avez vu, je pense, messieurs de la
commission, M. le Président, on a des gens dynamiques dans le
comté de Matapédia et le député n'est pas toujours
tout seul à travailler, il y a quantité de gens de bonne
volonté qui sont derrière lui, qui oeuvrent dans leur domaine
respectif.
Je voudrais juste, en 30 secondes, saluer également une
délégation de la ville de Mont-Joli, de mon comté, qui est
ici parce qu'elle a des problèmes à régler probablement et
parce qu'elle est intéressée aussi à
l'aménagement.
Là-dessus, j'aurais une première question. Dans votre
mémoire, vous mentionnez que vous avez mené des consultations
jusqu'à maintenant auprès des municipalités, auprès
des élus municipaux, et je pense que c'est terminé à 100%.
Est-ce que vous prévoyez, par la suite, à une étape ou
l'autre, consulter également les citoyens dans l'élaboration de
votre schéma d'aménagement et, si oui, à quelle
étape prévoyez-vous le faire?
M. Paquet: En fait, on va peut-être reprendre une
recommandation que l'on retrouve à la fin du mémoire. Nous disons
que dans le projet de loi 125 on a mis beaucoup d'emphase sur la consultation
du citoyen; d'abord, on les consulte sur leurs intentions préliminaires
et après on revient devant nos citoyens pour les consulter sur leurs
intentions définitives. Nous disons, concernant la gestion, pour
alléger et rendre plus expéditif le processus, qu'il devrait y
avoir seulement une consultation des municipalités et par consultation
on précise que ce n'est pas ce qu'on a fait lors de la cueillette des
données comme telle, mais la consultation viendrait après
l'étape de l'identification des grandes orientations par la commission
d'aménagement. A la suite de l'étude de la problématique
du comté la problématique serait amenée devant la
commission d'aménagement. On définirait bien les principes de
l'aménagement, les objectifs. On passerait par toute la gamme de la
formulation des possibilités, ou des priorités, ou des avenues.
Lorsqu'on aurait identifié les grandes intentions d'aménagement,
c'est à ce moment-là qu'on consulterait les conseils municipaux
et les citoyens en fonction du mécanisme prévu au projet de loi
125.
M. Marquis: Au sujet de la consultation des citoyens, est-ce que
cela va être directement le conseil de comté qui va faire la
tournée des 24 ou 26 municipalités ou allez-vous utiliser les
élus municipaux comme délégués dans cette
consultation?
M. Paquet: Avant de répondre à cette question, il
faudrait préciser qu'hebdomadairement, quand même, nos citoyens
sont tenus au courant du développement du schéma par le biais de
l'agent d'information qui a une chronique hebdomadaire dans le journal
"L'Avant-poste de la vallée". En termes de consultation, on va s'aligner
sur le projet de loi 125, à l'article 14, je crois, et ce sera la
commission, par le biais du préfet, qui présidera la consultation
dans les municipalités et auprès des citoyens.
M. Marquis: Vous venez de mentionner que le moyen d'informer les
citoyens, c'est une chronique hebdomadaire dans "L'Avant-poste". Est-ce que
vous avez un autre moyen également de communication, sinon avec la
population en général, du moins avec les organismes du
comté?
M. Paquet: A l'heure actuelle est rédigé un
mémoire mensuel qui est acheminé aux municipalités et
auprès des différents organismes socio- économiques du
comté. Dans l'élaboration, dans le plan de travail qui a
été accepté au niveau du comité administratif,
avant de se présenter on pourrait appeler cela une espèce
de comité consultatif où le cadre serait élargi à
la fois aux élus, aux organismes socio-économiques et aux hommes
d'affaires lorsqu'il y aura identification des grandes intentions et
lorsqu'il y aura consultation des citoyens, une étape est prévue
pour consulter spécifiquement les organismes socio-économiques,
ceux qu'on retrouve plus fréquemment, je pense aux serres de la
vallée, ces choses-là.
M. Marquis: Je pense que vous n'avez pas compris ma question. A
part l'information... c'est-à-dire "L'Avant-poste" je ne sais pas
si je me suis trompé tantôt est-ce que vous n'avez pas un
bulletin d'information tout récent, qui est expédié
à un certain nombre de personnes?
M. Paquet: Je pensais avoir répondu à cela. Je vous
remercie de faire le rappel, M. Marquis. Il y a un bulletin mensuel qui
décrit les étapes du schéma d'aménagement qui est
adressé, en plus des conseils municipaux, à tous les
présidents, à tous les organismes socio-économiques du
comté et même à l'extérieur du comté.
M. Marquis: A la page 10 de votre mémoire vous mentionnez
qu'un des principaux problèmes rencontrés par votre conseil fut
la question de la représentativité des municipalités
urbaines et rurales. Maintenant, vous avez parlé tantôt d'une
espèce de dissidence de la ville de Causapscal et c'était
dans les journaux de fin de semaine est-ce que le fait que le maire de
Causapscal refuse de siéger à la commission d'urbanisme ou
accepte d'y siéger d'une façon officieuse, peut ralentir le
travail qui sera fait à cette commission-là ou si cela ne vous
crée pas un certain problème?
M. Paquet: Je serais tenté de répondre qu'avant de
se marier il faut se fréquenter. J'ai précisé tout
à l'heure que l'approche avait été faite strictement au
niveau des maires des municipalités en fonction du fait que le conseil
de comté est composé de maires. Alors la même approche a
été suivie auprès des villes.
En ce qui a trait à Causapscal, je pense qu'il va falloir aller
plus loin. Evidemment il y a tout un contexte qui entoure la
personnalité comme telle on peut quand même y faire allusion
mais il va falloir une approche auprès des conseillers et je
pense que maintenant, considérant ce qu'on a vu dans les journaux de fin
de semaine, il y a certains membres du conseil qui vont être
offusqués de ne pas pouvoir participer au travail de planification dans
le comté. Je suis convaincu que celui qui s'est chargé de faire
écrire ces choses-là va devoir répondre à de
sérieuses questions.
M. Marquis: Une dernière question, M. le Président,
si vous le permettez, concernant la représentativité du futur
conseil de comté renou-
velé, il y a des suggestions dans le projet de loi. Est-ce que
vous avez eu l'occasion d'en discuter ou d'analyser cela, par exemple, dans le
cas concret de Matapédia avec deux petites villes. Avez-vous pris
position et pourriez-vous éclairer les membres de la commission
là-dessus? Cela pourrait évidemment servir au ministre et un peu
à tout le monde, ce sujet-là.
M. Paquet: En fait, ça ne pose pas tellement un
problème de par le contexte de population de comté. La ville la
plus populeuse a 3900 habitants. Donc, à ce moment-là, c'est le
principe d'un homme, un vote au départ, plus un vote par 1000 de
population. Par exemple, la ville d'Amqui aurait un représentant qui
serait le maire ou le maire suppléant si le maire en est incapable et la
ville disposerait à ce moment-là de quatre votes.
M. Marquis: Donc, vous y allez vers la
représentativité d'un homme qui serait le maire ou un adjoint,
mais qui, lui, serait porteur de trois ou quatre votes plutôt que d'y
aller avec quatre représentants de la ville d'Amqui. Est-ce que vous
avez fait un choix ou est-ce que vous avez une recommandation à nous
faire dans ce sens-là?
M. Paquet: En fait, je vais préférer faire
répondre les hommes politiques, mais si on appliquait dans
Matapédia ce que nous venons de dire, ça supposerait qu'il y ait
35 personnes autour de la table de concertation du conseil de comté.
Alors, est-ce que les maires préféreraient travailler à 26
personnes ou à 35, je pense que la question leur appartient.
M. Gagné: On a parlé tout à l'heure de trois
pôles d'importance dans la région. C'est bien important que ces
trois secteurs de développement aient leur part égale. C'est
notre objectif. On se doit de les desservir tous les trois sur un pied
d'égalité en fonction de leur potentiel de développement.
Cela est primordial.
M. Marquis: A moins que M. le Président nous
permette...
M. Paquet: M. le Président, nous permettriez-vous une
question ou une précision?
Le Président (M. Laplante): Une précision.
M. Paquet: Si j'ai bien compris la question de M. Marquis, on
parle de représentativité au niveau de ce qu'on pourrait appeler
un conseil de comté renouvelé, alors que nous, à l'heure
actuelle, on travaille beaucoup au niveau de la commission d'aménagement
qui comprend dix personnes. Le mandat de la commission, entre autres, c'est la
gestion des déchets solides à l'heure actuelle, le schéma
d'aménagement on a les deux pieds dedans et le
troisième défi sera celui du conseil de comté
renouvelé. En fait, ça reprend peut-être la farce que j'ai
voulu faire tout à l'heure en disant qu'avant de se marier on va se
fréquenter un peu.
M. Marquis: Alors au nom du ministre, s'il me le permet, je
voudrais vous remercier de votre présence ici, de la qualité de
votre mémoire et également des éclaircissements et des
lumières que vous avez apportés à tous les membres de la
commission. Bon voyage de retour.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, messieurs les
préfets, messieurs les maires, les membres de cette commission vous
remercient de votre participation et les travaux sont ajournés sine die,
ce qui veut dire, pour les gens qui sont dans la salle, que nous reviendrons
ici vers 15 h 15, 15 h 30.
Fin de la séance à 12 h 30
Reprise de la séance à 15 h 30
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît! Nous sommes de nouveau réunis pour recevoir les
mémoires aux fins d'étude du projet de loi no 125.
Sont membres de cette commission: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron
(Verdun) remplacé par M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Cordeau
(Saint-Hyacinthe) remplacé Dar M. Goulet (Bellechasse); M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau) remplacé par M.
Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Chevrette
(Joliette-Montcalm), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Shaw
(Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie) remplacé par M.
Léonard (Laurentides-Labelle).
Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau
(Verchères) remplacé par M. Marquis (Matapédia); M.
Fontaine (Nicolet-Yamaska) remplacé par M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M.
Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle) remplacé
par M. Tardif (Crémazie); M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Nous étions rendus à la Corporation du comté de
Labelle. Avant de l'appeler, je voudrais m'as-surer que la ville de Laval est
ici. Merci. L'Union des producteurs agricoles est ici encore. Merci monsieur.
Les professeurs de l'Institut d'urbanisme de l'Université de
Montréal. Est-ce que les professeurs d'urbanisme de l'Université
de Montréal sont ici? Dans ce cas, je fais appel à la Corporation
du comté de Labelle. Monsieur, si vous voulez vous identifier,
identifier les personnes qui vous accompagnent et l'organisme que vous
représentez, s'il vous plaît.
Corporation du comté de Labelle
M. Robidoux (Benoit): Benoît Robidoux, préfet du
comté de Labelle, M. Yvan Deslauriers, notre
secrétaire-trésorier, ainsi que M. Jean-Pierre Saint-Amour,
coordonnateur de notre schéma d'aménagement. Nous
représentons le comté de Labelle. Nous avons aussi
déposé, à titre d'information, deux fascicules sur le
travail de notre
schéma d'aménagement, le un et le deux. Je demanderais
à mon secrétaire de lire notre mémoire.
M. Deslauriers (Yvan): Permettez-moi de lire, au nom du
préfet, la lettre de présentation de ce mémoire. Mesdames,
messieurs, il me fait plaisir de vous présenter le mémoire de la
corporation du comté de Labelle au sujet du projet de loi 125 sur
l'aménagement et l'urbanisme. Vous noterez que ce mémoire a
été adopté par résolution de notre conseil le 14
mars dernier. Il témoigne, en quelque sorte, de notre expérience
en matière d'aménagement. En effet, 14 de nos 26
municipalités ont déjà adopté une
réglementation sérieuse en matière de zonage,
construction, lotissement et installations septiques alors que les autres ont
manifesté l'intention de suivre l'exemple. De plus, notre conseil de
comté a commencé en juin 1978, avec une aide de l'OPDQ,
l'élaboration d'un schéma d'aménagement du territoire.
Enfin, dès 1975, une résolution du conseil demandait au
gouvernement que l'aménagement relève des comtés. Les
perspectives ouvertes avec ce projet de loi répondent donc à
notre attente en nous permettant de mieux assumer nos responsabilités en
cette matière.
En vous remerciant de l'attention que vous accorderez à ce
mémoire, je vous prie d'accepter, mesdames et messieurs de la commission
parlementaire, l'expression de mes sentiments distingués, Benoît
Robidoux, préfet du comté de Labelle.
Au bas, le texte de la résolution: II est proposé à
l'unanimité et résolu d'accepter avec la modification
apportée lors de cette présente session le mémoire
étudié et rédigé par le comité administratif
et la commission d'aménagement portant sur le projet de loi 125 sur
l'aménagement et l'urbanisme et, de plus, le reconnaît comme
étant l'avis de la corporation du comté de Labelle qui devra
être présenté à la commission parlementaire sur
ledit projet de loi no 125. C'est adopté.
A la page suivante, on vous transmet la composition du conseil du
comté de Labelle et celui de la Commission d'aménagement. Voici
le texte du mémoire. La corporation du comté de Labelle a
été créée par une loi de 1916 qui est entrée
en vigueur le 1er janvier 1918. Le territoire du comté de Labelle couvre
une superficie de 1 700 000 acres. Il est situé dans les Laurentides de
l'ouest du Québec et il est partagé entre les régions
administratives de l'Outaouais 07 et de Montréal 06. Le comté
regroupe 26 municipalités rurales, 22 000 habitants soumis au Code
municipal. La ville de Mont-Laurier, 9000 habitants, est incluse à
l'intérieur des limites géographiques du comté. Elle est
d'ailleurs le chef-lieu et le centre principal d'activités urbaines.
Le conseil de comté de Labelle a commencé en juin 1978,
avec une aide financière de l'Office de planification et de
développement du Québec, l'élaboration d'un schéma
d'aménagement pour le comté. Le conseil a créé
à cet effet une commission d'aménagement composée de sept
membres dont un représentant de la ville de Mont-Laurier.
Dans le cadre de la loi actuelle, la commission d'aménagement
voit dans le schéma un outil de travail au service des
municipalités et du gouvernement. Il se veut donc un instrument de
planification pour harmoniser les interventions dans notre territoire et nous
permettre de mieux prendre en main le contrôle de l'utilisation de ce
territoire.
Ce projet-pilote permet graduellement aux membres de la commission et du
conseil de mieux saisir l'intérêt, de susciter un esprit de
collaboration dans les décisions individuelles et collectives qui
affectent notre avenir.
En outre, nous devons souligner depuis quelques années la
sensibilisation croissante de nos municipalités à se doter de
réglementations adéquates en matière d'aménagement.
A ce jour, 15 des 27 municipalités ont adopté une
réglementation vraiment sérieuse de zonage, de lotissement, de
construction et d'installations septiques. Cinq autres étudient
présentement un projet de règlement et cinq municipalités
ont déjà demandé une aide technique pour suivre le
même exemple.
Le conseil de comté s'est d'ailleurs prévalu des
dispositions récentes édictées dans l'article 392h du Code
municipal pour offrir une aide technique qui ne peut satisfaire la demande, vu
les moyens limités.
Enfin, le conseil a adopté, lors de sa réunion du 14 mars
1979, une réglementation de lotissement applicable dans les territoires
non organisés.
Cette expérience du schéma et de la réglementation
municipale nous a permis progressivement de comprendre les implications et la
nécessité de réaliser la planification et
l'aménagement du territoire. Elle nous a aussi montré les
déficiences des lois actuelles.
Le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme,
présenté par le gouvernement du Québec en décembre
dernier, intervient à un moment déterminant où nous
assumons vraiment nos responsabilités municipales.
C'est pourquoi nous estimons être non seulement de notre
intérêt mais aussi de notre devoir de soumettre au gouvernement
quelques commentaires pertinents à ce projet de loi autant en ce qui
concerne ses principes et ses orientations qu'en ce qui traite des
modalités bien précises de contenu au niveau
réglementaire.
Les principes du projet de loi 125. Les documents d'accompagnement du
projet de loi 125 présentent la décentralisation en fonction
d'une perspective communautaire nouvelle.
Le fascicule 3 portant sur l'aménagement et l'urbanisme propose
quatre principes majeurs. Premier principe: l'aménagement est d'abord
une responsabilité politique. Deuxième principe: des pouvoirs
partagés respectant les domaines propres d'intervention.
Troisième principe: une concertation des choix et des actions des trois
paliers de gouvernement. Quatrième principe: une participation plus
active des citoyens à la prise de décisions et à la
gestion de l'aménagement.
Nous acceptons globalement ces quatre principes dans cette mesure
où ils consacrent l'autonomie administrative des municipalités
locales et des corporations de comté.
Il est évident que le renforcement du rôle des conseils de
comté suscite des méfiances bien légitimes dans Labelle,
comme ailleurs au Québec. Nous croyons, cependant, qu'il est possible
d'établir un climat de travail apte, d'une part, à valoriser le
dynamisme des municipalités locales et à respecter
l'intégrité de ces municipalités et, d'autre part,
à créer un esprit de collaboration qui favorise le progrès
de notre région.
Il s'agit d'un défi d'envergure et nous sommes conscients des
difficultés qui se dessinent sur la route, mais nous estimons être
prêts à le relever.
La réalisation de cette décentralisation ne peut
être que progressive si on veut permettre à tous les
intéressés de s'adapter à l'évolution et aux
responsabilités. L'aménagement du territoire constitue un champ
d'activité tout indiqué pour amorcer cette
décentralisation. D'autres pourront venir lorsque nous serons
prêts.
Nous voulons cependant, soulever une préoccupation majeure des
autorités locales: le financement des conseils de comté.
Actuellement, les comtés lèvent une taxe foncière pour
défrayer leurs dépenses, ce qui entre en concurrence avec le
champ fiscal des municipalités.
Les coûts croissants de l'administration des conseils de
comté, notamment au titre de l'évaluation foncière, ont
atteint un plafond tel que nous ne pouvons plus demander un effort fiscal
supplémentaire des municipalités locales et des
contribuables.
Or, la participation des villes, l'augmentation des assemblées du
conseil et l'élaboration du schéma sont des activités qui
augmenteront considérablement le budget du comté. Nous demandons
donc au gouvernement du Québec de veiller à confier des sources
de revenus autonomes aux conseils de comté de manière que,
dès l'émission des lettres patentes créant les
comtés renouvelés, nous ne soyons pas obligés de refiler
la note aux municipalités. Si tel était le cas, la réforme
prévue serait compromise et vouée à l'échec, et
nous serions les premiers à la rejeter.
Il est opportun de formuler au gouvernement une deuxième mise en
garde quant au rôle du conseil de comté. En effet, le comté
ne doit pas être ni devenir un instrument du gouvernement pour mieux
centraliser ou imposer des lignes de conduite aux municipalités.
La décentralisation exige trois conditions essentielles: la
possession de pouvoirs véritables, un certain pourcentage
d'autofinancement et une représentation élue.
Nous insistons pour que ces conditions soient maintenues ou
assurées.
Les orientations du projet de loi 125. Le projet de loi 125
prévoit la création de conseils de comté renouvelés
par le biais de lettres patentes et ensuite, s'ils le désirent, ces
comtés peuvent amorcer l'élaboration d'un schéma
d'aménagement.
Cette procédure nous semble appropriée puisqu'il nous
reviendra (conseil de comté actuel et ville de Mont-Laurier)
d'établir nous-mêmes les modalités de participation ou de
fonctionnement du nouveau comté.
En règle générale, les procédures de
création et de fonctionnement des conseils de comté nous semblent
équitables et raisonnables parce qu'adaptées aux besoins
particuliers de chaque région et dans cette mesure elles peuvent
respecter l'appartenance actuelle des régions. Ainsi, en ce qui concerne
la délimitation du comté renouvelé, il appartiendra
à chaque municipalité périphérique de
déterminer dans quel comté elle sera.
Il en va de même pour l'élaboration du schéma et des
documents d'urbanisme du comté et des municipalités, d'autant
plus qu'ils reconnaissent la nécessité d'une plus grande
participation de la population. Toutefois, nous considérons que les
modalités de consultation obligatoire sont exagérées.
Elles devraient donc être allégées.
Nous demandons cependant au gouvernement d'exercer avec beaucoup de
prudence et de diplomatie les pouvoirs qu'il s'est réservé quant
à la création des conseils de comté renouvelés et
aux procédures d'élaboration et de mise en oeuvre des documents
d'aménagement et d'urbanisme. En effet, à la lecture du texte, le
projet de loi nous semble donner au gouvernement plus de pouvoirs que ne lui en
confère le Code municipal actuel. Bien que l'aménagement soit
d'abord considéré comme une responsabilité politique, il
ne faudra pas qu'il ouvre la porte à des abus préjudiciables aux
intérêts locaux et régionaux en prétextant un
intérêt national bien relatif.
Nous exprimons des réserves sur cette autorité finale.
Nous suggérons qu'on puisse être soumis à des
possibilités d'appel qui tiennent mieux compte de la volonté
locale et régionale.
Nous voulons enfin insister sur l'importance de veiller à
l'application des réglementations municipales et de comté. Le
projet de loi 125 est muet sur ce sujet pourtant capital. La plupart des
municipalités rurales ne peuvent se payer les services d'un inspecteur
à plein temps, il en va de même du conseil de comté. Il
faudra que le gouvernement assume une part de ses responsabilités en
cette matière, notamment en accordant une assistance aux
municipalités, mais aussi en augmentant les effectifs des services de
protection de l'environnement dans notre région. Nous avons
présentement un seul inspecteur des services de protection de
l'environnement pour 27 municipalités. Malgré sa grande
compétence, il ne peut faire de miracles.
En cette matière d'application des règlements, comme en
celle du financement de l'élaboration des documents, nous ne demandons
pas de généreuses subventions gouvernementales, mais la
capacité, tant au niveau du comté que des municipalités,
de pouvoir assumer nos juridictions.
M. Saint-Amour: Troisième partie, commentaires sur le
contenu du projet de loi 125. On l'a divisée en deux parties, en
commençant par la fin du projet de loi.
Le territoire des corporations de comté. On voudrait ajouter au
texte actuel de l'article 142 celui qui est indiqué ici: "Toute
corporation de comté doit, dans les dix mois de l'entrée en
vigueur de la loi, présenter au gouvernement une requête en vue
d'obtenir les lettres patentes lui permettant de modifier ses frontières
internes, pour fins d'aménagement du territoire".
A l'article 144d, je voudrais voir ajouter, si possible, "ou permettre
au conseil de déterminer lui-même les pouvoirs qu'il
délègue à ce comité administratif". Pour
l'organisation et le fonctionnement des corporations de comté, à
l'article 162, le préfet devrait être élu par le vote de la
majorité des voix du conseil de comté.
A l'article 165, on se demande ce qui arrive si le préfet,
pendant son mandat, n'est plus maire de sa municipalité. Il faudrait
prévoir que le terme du préfet se termine dès qu'il n'est
plus maire de sa municipalité ou qu'un vote des deux tiers des membres
du conseil lui retire sa confiance.
Pour ce qui a trait au schéma de comté, pour le contenu
à l'article 5, on aimerait lire: "Les grandes orientations de
l'aménagement du territoire, de même que les objectifs retenus par
le schéma". Si c'était rédigé ainsi, il serait
beaucoup plus simple d'établir la conformité entre les documents
municipaux et le schéma de comté, ce qui éviterait des
discussions inutiles.
A l'article 6, ajouter un paragraphe j) qui se lirait: Les sites
d'intérêt naturel et culturel à protéger. Aussi,
ajouter après l'article 6, un article qui pourrait se lire comme suit:
Un schéma d'aménagement peut comprendre toute autre disposition
pertinente relative à l'aménagement, mais ces dernières ne
sont pas cependant obligatoires pour les municipalités. Un tel article
aurait pour effet de bien établir la cohérence des
éléments d'un schéma d'aménagement, sans pour
autant lier les municipalités. Cela pourrait d'ailleurs faciliter le
travail des municipalités lorsqu'elles élaboreront leurs propres
documents d'urbanisme.
Comme nous interprétons les articles 5 et 6 comme suit: le 5, ce
serait le schéma d'aménagement, doit comprendre ces
éléments et ils seront obligatoires pour les
municipalités, alors que pour nous, le schéma peut comprendre ces
éléments, mais s'ils sont inclus, ils seront obligatoires pour
les municipalités.
L'article supplémentaire que nous proposons établirait un
complément approprié. Pour ce qui a trait à
l'élaboration du schéma, à l'article 13, on aimerait lire:
La proposition préliminaire est soumise pour avis au conseil de chacune
des municipalités du comté. Une municipalité qui soumet un
avis doit le produire avant la date de l'assemblée prévue
à l'article 18. Cela évite des retards indus et permet de mieux
tenir compte de l'ensemble des commentaires formulés dans cette
municipalité.
A l'article 14, on aimerait voir ajouter: Le conseil peut
également confier au comité consultatif d'urbanisme de
comté ce travail d'élaboration et de consultation. Une telle
possibilité permettrait à d'autres personnes que les maires de
participer à ce travail.
Evidemment, dans le restant du projet de loi, certains autres articles
devront être modifiés pour assurer la concordance. A l'article 24,
on demande de prévoir une période de temps pour la tenue de ce
référendum de même que les échéanciers.
Aux articles 33 et suivants, ce serait bon de lire: Aux objectifs et aux
orientations, plutôt que seulement "aux objectifs". Cette terminologie
est uniformisée dans tout le projet de loi. Cela éviterait des
problèmes d'interprétation lors de l'application de la loi par la
suite.
Pour ce qui a trait au contrôle intérimaire, on demande
à l'article 63, que le délai prévu soit réduit,
parce qu'on le considère trop long.
A l'article 65, avant de rendre sa décision, on demande que le
ministre prenne avis auprès de la commission nationale de
l'aménagement.
A l'article 67, ajouter: Sur demande d'un conseil de comté
à l'effet qu'un tel plan de lotissement a été
enregistré, la commission nationale de l'aménagement demande la
correction des livres du ministère concerné.
Les règlements d'urbanisme des territoires non-organisés,
les plans et règlements d'urbanisme, on n'avait pas de commentaires
particuliers. Elaboration, adoption et entrée en vigueur du plan
d'urbanisme. Vu les longs délais exigés dans les articles 99, 100
et 101, il y aurait lieu qu'une réglementation et un contrôle
existent dans les municipalités durant cette période.
Les effets de l'article 111 n'étant que de 120 jours, ce
délai est nettement insuffisant et on risque de se retrouver avec des
problèmes créés par des propriétaires qui agiront
à la hâte pour éviter le nouveau règlement.
Pour le règlement de lotissement, on demande de prévoir
à l'article 114 que le gouvernement ou un conseil de comté peut
établir pour la totalité ou une partie de son territoire des
normes minimales obligatoires en matière de lotissement.
En matière de construction, prévoir à l'article 115
que le gouvernement ou un conseil de comté peut établir pour la
totalité ou une partie de son territoire des normes minimales en
matière de construction.
A l'article 115, on croit qu'il y aurait lieu d'ajouter un paragraphe f)
qui dirait: Interdire l'émission d'un permis de construction pendant
l'hiver si une telle construction exige la mise en place d'une installation
septique et aussi définir cette période d'hiver.
Règlements intermunicipaux. On demandait d'ajouter une section
d'un article après l'article 115 en indiquant que deux ou plusieurs
municipalités peuvent conclure une entente pour élaborer un plan
et des règlements d'urbanisme intermunicipaux. Elles établissent
à cet effet un comité consultatif conjoint. Les dispositions de
la présente loi s'appliquent à ces municipalités en les
considérant comme une seule.
Cinquième partie, le comité consultatif d'urbanisme.
Article 126. Prévoir qu'un conseil de comté peut établir
un tel comité consultatif pour l'élaboration de son schéma
et la consultation pertinente pour aider à l'application du
contrôle inté-
rimaire ou étudier les documents soumis pas les
municipalités et pour étudier les sujets relatifs aux territoires
non organisés. On demande aussi d'ajouter après l'article 126 la
possibilité pour deux ou plusieurs municipalités d'établir
un comité consultatif intermunicipal d'urbanisme.
Pouvoirs et obligations du gouvernement. Prévoir qu'une
ordonnance du ministre ou qu'une intervention gouvernementale ne peut
être imposée si elle va à rencontre d'un schéma de
comté et si la population d'un comté s'y oppose par
référendum lorsque la majorité des électeurs
inscrits s'est prononcée, évidemment à moins qu'il y ait
une loi spéciale.
Huitième partie, dispositions générales,
transitoires et finales. Il sera aussi opportun de prévoir les
possibilités suivantes dans ce projet de loi. Une municipalité
peut déléguer au conseil de comté ses pouvoirs
d'application de ses réglementations. Inversement, le conseil de
comté peut déléguer aux municipalités ses pouvoirs
d'application de ses réglementations. Une corporation de comté
aussi peut offrir aux municipalités une aide technique pour
l'élaboration et l'application de ces documents d'urbanisme. L'article
392h du Code municipal permet cet aspect, mais l'article 216b du projet de loi
125 l'abroge. Il suffirait donc d'enlever cet article 216b du projet de loi et
d'intégrer l'article 392h du Code municipal au projet de loi. Je
voudrais mentionner que l'article 392h a été ajouté au
Code municipal par le projet de loi 55 en 1977.
On demanderait aussi de modifier l'article 806 du Code municipal, pour
prolonger la période de trois mois jusqu'à un an en ce qui a
trait à la prescription des règlements des
municipalités.
Je demanderais aussi de modifier les modalités des ventes pour
taxe faites en vertu du Code municipal puisque les procédures actuelles
encouragent indûment le morcellement excessif des terres.
On voudrait aussi prévoir la possibilité d'établir
des ententes intermunicipales entre villes et comtés pour l'exercice en
commun de pouvoirs municipaux. L'article 412a du Code municipal pourrait
être modifié en conséquence.
On suggérerait enfin au gouvernement de ne pas se fier aux
montants accordés aux conseils de comté comme norme de subvention
aux comtés pour l'élaboration de leur schéma.
M. Deslauriers: A titre de conclusion, nous ne pouvons
prétendre, dans ce bref mémoire, faire l'unanimité de
toutes nos municipalités non plus qu'indiquer toutes les modifications
que nous jugeons pertinentes dans ce projet de loi, notamment en raison de sa
complexité et de ses implications. Nous croyons néanmoins qu'il
s'agit d'un projet de loi passablement adapté aux
nécessités et aux préoccupations de l'aménagement
du territoire en milieu rural.
Il pourra d'ailleurs, à la lumière des expériences
qui seront vécues, être modifié par la suite. Nous
demandons cependant au gouvernement de porter attention aux commentaires que
nous avons formulés et aux suggestions d'améliorations que nous
avons proposées.
Pour ce qui concerne l'élaboration du schéma actuel du
comté de Labelle, il nous sera possible de poursuivre les travaux selon
les indications de la loi 125 et cela sans difficulté majeure à
condition toutefois que le gouvernement émette rapidement les lettres
patentes pour le comté renouvelé de Labelle. Ce dernier pourrait
conserver l'appellation de Corporation du comté de Labelle et garder
Mont-Laurier comme chef-lieu.
Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. le
ministre.
M. Léonard: M. le Président, M. le Préfet,
il faut dire que je suis particulièrement heureux de ce mémoire
qui vient d'un conseil de comté que je connais bien et avec qui j'ai eu
l'occasion de travailler plusieurs fois et depuis longtemps.
J'ai eu l'occasion de rencontrer le conseil de comté de Labelle
au cours des derniers mois et de prendre connaissance graduellement du travail
qu'il a accompli dans la réalisation de son schéma
d'aménagement. Je dirais que le cheminement que vous avez entrepris
m'apparaît particulièrement intéressant et ce, à de
nombreux égards. Vous êtes d'accord, je pense, c'est dit aussi
à la fin, avec les principes que nous avons énoncés et qui
sous-tendent le projet de loi 125 dans la mesure où ils consacrent
l'autonomie administrative des municipalités locales et des corporations
de comté. Le projet de loi no 125, à mon avis et selon, je pense,
celui de mes collègues, répond à vos attentes dans ce
domaine. Il est intéressant aussi de constater, vous en avez fait la
démonstration, qu'il est possible d'établir un climat de travail
apte, d'une part, à valoriser le dynamisme des municipalités et,
d'autre part, à créer un esprit de collaboration qui favorise le
progrès des régions et spécialement des petites
régions d'appartenance.
Je suis très heureux de vous entendre dire qu'il vous sera
possible de poursuivre vos travaux sans difficulté majeure selon les
indications de la loi 125. Je ferai remarquer que ces travaux ont
commencé avant la loi 125, particulièrement au cours du printemps
dernier, alors que le projet de loi no 125 a été
déposé le 21 décembre dernier. Vous concluez, d'ailleurs,
sur le fait qu'il s'agit d'un projet de loi passablement adapté aux
nécessités et aux préoccupations d'aménagement en
milieu rural.
Votre mémoire nous amène une série de commentaires
judicieux, mais certains d'entre eux méritent qu'on s'y arrête
afin de fournir certaines informations supplémentaires. Le premier
élément, c'est le financement. D'autres mémoires ont
soulevé la même question quant au financement des conseils de
comté et on vient de reprendre les précisions qui ont
déjà été exposées à la commission
à ce sujet. Encore une fois, le budget du Québec en 1979/80
indique aux crédits du ministère des Affaires municipales que les
conseils de comté seront financés au départ, je dis bien
au
départ, par un programme d'aide de l'ordre $2 100 000 et, tel
qu'annoncé à la Conférence
Québec-municipalités de juin dernier et réaffirmé
dans le discours du budget, toute responsabilité nouvelle sera assortie
d'une source de financement.
Pour ce qui est du financement à moyen et à long terme, le
Comité conjoint d'orientation sur l'aménagement et la
décentralisation étudiera cette question et fera des propositions
au gouvernement. Je vous invite aussi à lui présenter des
recommandations. Lorsque le projet de loi sera adopté et que les
comtés auront leurs lettres patentes, les comtés pourront aussi
se prévaloir de subventions qui seront versées selon des
critères objectifs que nous sommes à définir
présentement, mais ces subventions n'auront pas de caractère
discrétionnaire. (16 heures)
J'ai relevé à la page 5 de votre mémoire certaines
inquiétudes quant au pouvoir du gouvernement en ce qui concerne la
création des conseils de comté et des procédures
d'élaboration et de mise en oeuvre des documents d'aménagement
et, d'autre part, à la page 11, élément 4.1, vous
suggérez que le gouvernement ne puisse rien imposer si cela va à
l'encontre du schéma de comté ou si, encore, la population s'y
oppose par référendum. C'est une remarque judicieuse que vous
faites; en tout cas, nous en tenons compte.
D'autre part, les avis de conformité prévus dans le projet
de loi ne sont pas fournis par le gouvernement mais par un organisme
indépendant, la Commission nationale d'aménagement. Celle-ci peut
être appelée à donner des avis de conformité aux
objectifs d'un schéma d'aménagement et des plans d'urbanisme
d'une municipalité ou encore, d'une intervention envisagée par le
gouvernement. Cet avis est de nature technique. Il ne s'agit pas pour la
commission de juger de la pertinence des actes posés par le comté
ou les municipalités. Ce n'est que par exception que les
mécanismes d'appel prévus dans le projet de loi sont
utilisés. Il faut distinguer, je pense, entre le régime
général et le régime particulier. C'est au gouvernement,
c'est-à-dire au Conseil des ministres, que reviennent l'arbitrage et la
décision finale en cas de divergence aussi bien entre les instances
décentralisées et les agents du gouvernement.
Le projet de loi n'est pas un instrument pour imposer des lignes de
conduite. Les décisions sont prises par des hommes politiques du niveau
local et il n'y aura pas d'ingérence du gouvernement. Des
mécanismes d'appel jouent lorsqu'il peut y avoir conflit et c'est alors
qu'existe la procédure d'arbitrage.
En ce qui concerne le contrôle intérimaire, vous dites
à la page 10, élément 2.1, qu'avec les longs délais
exigés dans les articles 99, 100 et 101, il y aurait lieu qu'une
réglementation ou un contrôle existe dans la municipalité
durant cette période pour éviter des problèmes de
développement. Ce contrôle existe en vertu des articles 56 et 107
à moins que le comté ne se dote lui-même d'un
règlement de contrôle intérimaire tel que prévu
à l'article 58.
L'article 56 indique qu'un règlement de contrôle
intérimaire existera sur le territoire du comté depuis
l'entrée en vigueur d'une résolution à l'effet de
réaliser un schéma jusqu'à la délivrance du dernier
certificat de conformité à l'égard du plan et des
règlements d'urbanisme d'une municipalité.
Pour sa part, l'article 107 indique que si un comté n'a pas
entrepris un schéma et qu'une municipalité désire se doter
d'un plan et de règlements d'urbanisme, les dispositions de
contrôle intérimaire des articles 56 à 70 s'appliquent, en
les adaptant, aux municipalités.
En résumé, un contrôle intérimaire existe
justement pour prévenir les problèmes que vous soulevez. Pour ce
qui concerne la consultation, à la page 5 de votre mémoire, vous
dites que les modalités de consultation obligatoire sont
exagérées et qu'elles devraient être
allégées. Je pense que le projet de loi 125 se présente de
façon à permettre une consultation des citoyens tout au long de
la démarche prévue et nous croyons que la population
possède le droit d'être informée et de participer
activement au processus d'aménagement de son milieu de vie. Je pense que
c'est aussi une position que vous adoptez; seulement vous dites: C'est un peu
lourd. Certains mémoires nous ont d'ailleurs suggéré de
pousser davantage cet aspect afin d'assurer une participation effective des
citoyens dans la confection du schéma et des documents d'urbanisme et le
projet de loi expose, lui, un cadre de consultation qui peut être
adapté selon les besoins du milieu.
C'étaient là les commentaires que je voulais faire par
rapport à ce que vous avez dit dans votre mémoire qui
était, par ailleurs, très fouillé. Je pense que nous
reconnaissons tout le travail pratique et l'expérience que vous avez
prise à confectionner votre schéma et là-dessus, je pense
bien que tous les membres de la commission vont prendre connaissance des
documents que vous leur avez distribués et qui constituent, en tout cas,
vos démarches dans ce domaine.
Maintenant, j'aimerais vous poser un certain nombre de questions de
différents ordres, d'ordre politique d'abord. Vous indiquez dans votre
mémoire que le projet pilote que vous avez entrepris sur le territoire
du conseil de comté a suscité un esprit de collaboration entre
les municipalités du comté. Je pense qu'on peut présumer
qu'il y avait aussi auparavant une collaboration mais j'aimerais cependant vous
poser la question suivante: La préparation du schéma a-t-elle
contribué à l'améliorer et de quelle manière?
Pour-riez-vous préciser là-dessus ou pensez-vous que le dynamisme
du conseil de comtés se répercute aussi sur les
municipalités?
M. Robidoux:... règlement dans les municipalités.
C'est cela qu'on a dit aux conseils de comté de vouloir préparer
le schéma et en même temps, aussi, de fournir de l'aide technique.
La preuve aujourd'hui, on a quinze municipalités qui ont adopté
des règlements sérieux de zonage, de
lotissement des lacs, parce que notre comté est assez touristique
et cela a été bien important. Aujourd'hui, le reste des
municipalités, on a à faire la préparation des
règlements tout en travaillant notre schéma. Les demandes sont
là sur la table. Tout ce qui nous manque, c'est le temps de leur aider
à finir cela. La collaboration avec les municipalités est
excellente au point de vue de schémas d'aménagement. Au
début, c'était très difficile de faire accepter des
lotissements de terrains de 40 000 pieds carrés et après les
expériences vécues, aujourd'hui, les municipalités qui ont
adopté des règlements à 25 000 pieds se trouvent mal
à l'aise vis-à-vis des autres. Il faut qu'elles amendent leurs
règlements pour 40 000 pieds. On voit la conscience qui peut se
développer dans nos municipalités en travaillant ensemble. Elles
voient qu'un schéma et des règlements sont essentiels dans nos
municipalités.
M. Léonard: D'après vous, la confection du
schéma, ou, en tout cas, des travaux sur l'aménagement, ont
plutôt amélioré l'esprit de collaboration!
M. Robidoux-: II y avait déjà un début qui
était commencé. Ge n'est pas pour vanter le comté de
Labelle, mais on est assez dynamique. Cela a amélioré depuis le
mois de juin l'an dernier encore d'au moins 50% la situation dans notre
comté en travaillant sur un shéma d'aménagement et une
conscience de comté. Ce qu'on a réussi aussi, c'est de pouvoir
travailler avec une ville à l'intérieur de notre comté. La
ville est consciente que si nos municipalités se développement
harmonieusement et avec de bons règlements, la ville va en profiter en
même temps que nos municipalités.
M. Léonard: Vous dites aussi, à la page 5, que les
modalités de consultation obligatoires sont exagérées et
qu'on devrait alléger tout cela. Pour votre part, je pense que vous avez
axé, jusque-là, l'information et la consultation sur les
municipalités et les groupes sectoriels. Pouvez-vous nous parler des
résultats que vous avez obtenus jusqu'à maintenant par rapport
à la consultation?
M. Robidoux: Au sujet de la consultation, au point de vue
municipal, la rencontre avec les modalités qui a été faite
avec notre coordonnateur et des membres de la commission d'aménagement a
été excellente. Les rencontres sectorielles avec certains
ministères et fonctionnaires, et aussi les personnes responsables dans
les municipalités, si on parle de voirie, les inspecteurs municipaux, je
pense que cela a aussi été fructueux. C'est Jean-Pierre ici qui a
piloté quatorze ou quinze rencontres sectorielles, plus les 26
rencontres avec les municipalités. On a pu recueillir pas mal de
données, les besoins des municipalités aussi pour les
intégrer au schéma.
M. Saint-Amour: Je peux peut-être résumer la
démarche qu'on a faite de ce côté-là. Au niveau de
la commission d'aménagement, au tout début, en novembre, avant
que le premier fascicule soit rendu public, on a d'abord publié un
questionnaire-sondage dans les deux journaux qui couvrent le comté.
Evidemment, cela rejoignait la grande majorité des ménages. Il y
avait 14 000 exemplaires. On demandait aux gens de nous donner leur opinion sur
les services d'utilité publique qui étaient disponibles dans leur
municipalité et un peu leur opinion aussi sur ce qu'ils pouvaient
concevoir pour l'avenir. On a eu la somme phénoménale de 86
réponses, sur une possibilité de 14 000. A ce niveau-là,
c'était peut-être plus de l'information qu'on voulait diffuser,
montrer aux gens les préoccupations d'un schéma
d'aménagement, que d'obtenir des réponses. Ensuite, la commission
d'aménagement m'a demandé de faire une tournée et j'ai
rencontré chacun des conseils des 27 municipalités, incluant
Mont-Laurier, pour leur demander ce qui existait dans leur municipalité,
quels étaient les problèmes qui existaient chez eux et la
manière dont ils voyaient les solutions à apporter à ces
problèmes. Ensuite, la commission d'aménagement a convoqué
une série de rencontres sectorielles. En agriculture, par exemple, en
forêt, en conservation de la faune, en villégiature, on a
invité des personnes qui étaient actives ou
représentatives dans le milieu pour leur demander leur opinion sur les
problèmes qui existaient sur les options de solutions qui pouvaient
exister pour remédier à ces problèmes.
Ensuite, la commission d'aménagement a rendu publics ses
fascicules, ses documents de travail. Elle les a rendus publics "at large", si
on peut dire. Ils ont été imprimés en 2000 copies qu'on a
envoyées au bureau de chacune des municipalités et, en même
temps, on a fait une certaine publicité dans les media d'information. Ce
qui fait que tous les citoyens qui sont intéressés à
obtenir copie des documents de travail, du progrès des travaux de la
commission d'aménagement, n'ont qu'à se présenter au
bureau de leur municipalité pour s'informer et savoir exactement ce qui
se fait au niveau de la commission d'aménagement.
M. Léonard: Vous parlez des documents que vous avez
déposés?
M. Saint-Amour: Les deux fascicules que vous avez...
M. Léonard: Plus la brochure que vous avez donnée?
Les 2000 copies, c'est...
M. Saint-Amour: C'est le fascicule que vous avez entre les mains
présentement.
M. Léonard: Alors, est-ce que vous avez eu des
commentaires par rapport à ces fascicules-là maintenant?
M. Saint-Amour: Jusqu'à maintenant, on a eu assez peu de
commentaires. Même lors de notre congrès municipal il y a deux
semaines, on a posé la question aux gens. C'étaient surtout des
élus
municipaux qui assistaient au congrès municipal. On a eu un
atelier sur le schéma d'aménagement et on s'est aperçu que
la grande majorité des gens ne le lisent pas, et ce sont des élus
municipaux, ce qui est assez surprenant. Au niveau de l'information, il y a
encore du travail à faire de ce côté-là.
Vous mentionniez tout à l'heure qu'on trouve
exagéré l'information que vous demandez dans votre projet de loi;
premièrement il faut estimer le coût que cela peut impliquer. On a
fait une estimation et cela nous coûterait à peu près $35
000 juste pour la publication des documents d'information et l'envoi aux
contribuables. A cela, il faut ajouter évidemment la tournée des
membres de la commission d'aménagement dans chacune des
municipalités, à deux occasions.
Il y a aussi notre bulletin municipal qu'on publie depuis
l'été dernier qui est envoyé à tous les élus
des municipalités, aux fonctionnaires des municipalités, qui
sert, en fin de compte, d'instrument de communication entre le conseil de
comté et les municipalités.
M. Léonard: Mais vous dites que vous vous êtes rendu
compte au cours du congrès du conseil de comté que des gens, des
élus ne l'avaient pas lu. Est-ce que cela tient, au fond, au sujet
lui-même ou à la façon dont cela a été
présenté? Est-ce que vous avez des recommandations à faire
pour, disons, rendre l'information plus efficace?
M. Saint-Amour: C'est un sujet qui a été
porté, par exemple, à l'attention de la commission
d'aménagement assez récemment et on se pose de sérieuses
questions sur la méthode qu'on a adoptée. On a quand même
essayé d'être le plus large possible, d'atteindre le plus de gens
possible. Il semble que l'intérêt... Il y a un certain
intérêt. Ceux qui le disent, ceux qui sont
intéressés par le domaine sont pas mal satisfaits de ce qui se
fait. Il va quand même falloir pousser plus loin que cela. La commission
d'aménagement a même l'intention, dans les prochaines semaines,
sinon dans les prochains mois, de faire d'abord une tournée
d'information dans un certain nombre de municipalités pour
présenter le contenu des documents de travail qui ont été
rendus publics. La consultation publique aura lieu par la suite lorsque les
lettres patentes auront été émises pour les nouveaux
comtés.
M. Léonard: Dans le mémoire, on propose de fournir
une aide technique aux municipalités. Je pense que c'est une de vos
suggestions importantes. Est-ce que vraiment une des constatations que vous
faites est qu'il faut vraiment aider les municipalités ou les petites
municipalités à amorcer tout le processus de
l'aménagement?
M. Robidoux: Quand on dit une aide technique aux
municipalités, c'est pour l'aménagement, mais cela va plus loin
que cela aussi. C'est comme le comté de Matapédia qui, un matin,
a offert l'aide technique d'un ingénieur. C'est cela qu'on peut viser au
niveau du conseil de comté. Si on parle de l'évaluation, comme
nous donnons l'évaluation à des firmes, si on avait un technicien
en évaluation au sein du comté, il pourrait aider les
municipalités, les secrétaires-trésoriers à faire
le suivi de notre évaluation.
M. Léonard: Ce que vous proposez finalement, c'est que ce
soit des gens qui soient à l'emploi du conseil de comté
plutôt que des firmes de consultants.
M. Robidoux: C'est cela. Oui, seulement on peut avoir... Des
firmes de consultants, on n'en veut pas. Seulement on peut avoir des personnes
au niveau du comté. Notre but, c'est d'avoir des personnes ressources au
niveau du conseil de comté pour aider nos municipalités. Vous
savez que les petites municipalités de 700 ou 800 personnes ne peuvent
pas toujours se payer un ingénieur, un conseiller juridique ou quelqu'un
d'autre. Quand le comté pourra donner ces services-là, les gens
seront plus sensibilisés et plus de choses se feront dans nos
municipalités. C'est moins coûteux aussi si chacune des
municipalités fait appel à des consultants de ce
genre-là.
Il y a deux ans, on a demandé à toutes les
municipalités d'envoyer au conseil de comté leurs
règlements qui sont préparés par des avocats, etc. Si on
prend, par exemple, le règlement qu'on a fait adopter pour les
roulottes, la taxation des roulottes, la municipalité a engagé un
avocat pour le faire. Elle l'a envoyé au comté et d'autres
municipalités s'en sont servi. C'est de l'argent qu'on épargne
aux municipalités dans ce sens-là. (16 h 15)
Quand on dit aussi fournir de l'aide technique, s'il y a deux, trois ou
quatre municipalités qui veulent travailler sur leurs règlements
dans leur municipalité au point de vue urbanisme ou plan directeur,
à ce moment, on pourrait leur fournir de l'aide technique aussi pour
rassembler deux ou trois municipalités qui pourraient travailler
ensemble au lieu de s'engager des personnes différentes et ainsi de
suite.
M. Léonard: C'est dans le même sens ou c'est
peut-être un peu différent mais vous voulez introduire dans la loi
la dimension intermunicipale en ce qui concerne l'aménagement. Je pense
que vous y voyez un certain nombre d'avantages, c'est-à-dire que pour
vous, si je comprends, la réglementation est exportable d'une
municipalité à l'autre et elles peuvent le faire
conjointement.
M. Robidoux: Cela fait plusieurs années qu'on parle de
fusion de municipalités. On a encore des municipalités de village
et de campagne. A ce moment, au lieu de les fusionner, si on pouvait
préparer nos règlements de zonage, de lotissement et d'urbanisme
les deux municipalités ensemble, l'inspecteur pourrait servir pour les
deux municipalités au point de vue de règlements de zonage et
d'aménagement, cela deviendrait seulement une municipalité. Mais
pour les autres
organisations, elles pourraient être indépendantes quand
même sans avoir une fusion.
M. Léonard: II y a une chose aussi, en ce sens, le
fonctionnement du conseil de comté depuis que vous avez commencé
à faire de l'aménagement est-ce que cela s'est
modifié?
M. Robidoux: Entre les municipalités?
M. Léonard: Au conseil du comté, entre les
municipalités, mais je dirais aussi les attitudes des
municipalités par rapport au conseil de comté?
M. Robidoux: Cela s'est modifié, je pense qu'on peut
pressentir que les municipalités sont prudentes quand elles voient le
projet de loi no 125 et quand un comté prend trop de dynamisme; à
ce moment, elles ont peut-être peur à leur autonomie municipale.
Il faut être prudent, il faut les rencontrer et discuter avec elles.
Parce qu'il n'y a personne qui veut perdre son autonomie. C'est pour cela qu'on
dit que le projet de loi, à notre sens, est bon, parce que le
comté va travailler sur l'aménagement, mais ce sont les
municipalités qui vont décider à l'intérieur d'un
schéma de comté, ce sont elles qui vont déterminer leur
réglementation dans chacune de leur municipalité.
M. Léonard: Vous indiquez dans votre mémoire que
les conseils de comté actuels demandent l'émission de lettres
patentes dans un délai minimum de 18 mois. Est-ce qu'il est
réaliste que ce soit seulement les conseils de comté actuels qui
demandent des lettres patentes.
M. Robidoux: Réaliste. A notre point de vue, il nous
semble que oui. On prêche toujours pour sa paroisse, parce que les villes
vont le faire, elles vont s'organiser avec leurs lettres patentes. Mais
qu'est-ce qu'on veut dire par-là, surtout c'est que s'il n'y a pas cela
dans la loi une obligation... On dit bien que le conseil de comté va
faire son schéma d'aménagement et par la suite les
municipalités vont avoir 18 mois pour se conformer. Pourquoi le conseil
de comté après l'adoption de la loi 125 lui aussi n'aurait pas 18
mois pour se conformer à l'élaboration de son schéma?
Si on prend des comtés qui se touchent, qui sont contigus, le
comté de Labelle, qu'il reste comme il est là ou qu'il change ses
limites et que l'autre comté voisin ne demande pas ses lettres patentes
mais les municipalités qui vont être laissées pour compte,
qui ne veulent pas rester dans le comté de Labelle, que feront-elles
dans ce temps, entre les deux? C'est pour cela qu'il va falloir que les lettres
patentes soient demandées pas mal partout dans la province, parce qu'il
y a des municipalités, si elles veulent changer de comté, si on
en a dans notre comté de Labelle, trois, quatre ou cinq et si le
comté voisin ne demande pas ses lettres patentes, ces
municipalités vont être gérées par qui? Qui va s'en
occuper? Au point de vue schéma, elles ne pourront pas faire de
préparation de schéma; au point de vue évaluation, si
elles sont encore avec nous, qu'est-ce qu'on va faire avec elles? C'est une
chose qui n'est pas dite dans la loi.
M. Léonard: Par rapport aussi à ce mécanisme
de délimitation de territoire, vous parlez de frontières internes
d'une part et vous dites: II faudra modifier les frontières internes et
vous dites d'autre part qu'il appartiendra aux municipalités
périphériques de choisir leur comté. Est-ce que vous
pourriez expliciter davantage sur le rapport de ces deux limites internes,
externes et le mécanisme que vous voyez là-dedans?
M. Robidoux: Si on veut être sérieux, quand on parle
de nos frontières internes, on sait bien que la ville de Mont-Laurier ne
peut pas sortir du comté de Labelle. Ce sont nos frontières
internes dans les municipalités. Elles sont réellement internes.
Si on prend les municipalités qui sont en périphérie,
à ce moment, peut-être y a-t-il des avantages pour quelques-unes
ou deux de vouloir changer de comté. C'est pour cela surtout qu'on dit:
Les frontières internes.
M. Léonard: Une dernière question seulement, M. le
Président, est-ce que vous pensez que la délimitation des
régions administratives va influer sur les discussions ou les
négociations qu'il pourrait y avoir quant au territoire?
M. Robidoux: Je ne connais pas toutes les régions
administratives de la province mais je connais la mienne chez nous. Dans notre
comté, on est dans deux régions: la région 07 et la
région 06. S'il n'y a pas quelque chose de réellement
défini, c'est que notre comté va être morcelé. Je
suis certain que le comté Labelle actuel voudrait rester ensemble. Si ce
n'est pas déterminé, la région administrative, l'influence
des nouveaux comtés renouvelés, il va se faire une
publicité pour la partie sud du comté, ils vont vouloir changer
de comté par rapport aux régions actuelles. Cela fait à
peu près six ans qu'on travaille pour que les limites administratives
des régions changent et il n'y a jamais rien eu de fait
là-dessus. Quand même vous diriez, M. le ministre, que les
régions vont changer selon les nouveaux comtés renouvelés,
je pense que les gens de la municipalité ne le croiront pas.
Moi-même, dans ma municipalité, chez nous, si je dis: Est-ce qu'on
reste dans le comté Labelle actuel et je prends l'ensemble de la
population de l'Annonciation, les gens vont vouloir s'en aller dans un autre
comté pour appartenir à la région 06. Je ne pourrai rien
faire là-dessus. Ce serait dommage, le comté Labelle travaille
très bien ensemble mais si les régions ne sont pas... S'il n'y a
pas quelque chose pour garantir aux gens que les régions vont être
changées à leur avantage parce que c'est toujours à
notre avantage quand on veut faire changer une région vous
connaissez les contraintes que nous avons pour aller dans l'Outaouais, ce n'est
pas parce qu'on ne les aime pas, mais ce n'est pas
raisonnable qu'on aille dans un secteur où on n'a aucune
affinité. Cela va influencer beaucoup. Je ne sais pas si vous pourriez
faire quelque chose pour être très clair, pour nous aider dans le
comté.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Merci, M. le Président. Je voudrais
également remercier et féliciter les membres de la Corporation du
comté de Labelle de l'excellent mémoire qu'ils nous
présentent. Tout à l'heure, lors de propos tenus par M.
Saint-Amour, qui faisaient état d'une volonté de faire beaucoup
d'information à l'intérieur de cette opération nouvelle,
il a semblé découvrir qu'il y avait peut-être un genre
d'indifférence à toute l'information qu'on a voulu produire.
Faut-il en déduire, à partir de cette première
expérience que vous avez connue, que la population en
général ou les contribuables ne sont pas soucieux de s'impliquer
directement dans cette opération d'aménagement? Serait-ce que ces
gens auraient une attitude de s'en remettre aux élus et dire: Voici,
nous avons dans nos municipalités des gens qui sont en poste, qui ont
été élus, qui oeuvrent également au niveau de la
corporation de comté et nous faisons entièrement confiance
à ces gens dans l'élaboration d'un schéma
d'aménagement et de tout ce qui pourrait suivre par après dans la
mise en place de cet aménagement. Qu'avez-vous découvert
vis-à-vis des contribuables et de la population?
M. Saint-Amour: Je ne crois pas que ce soit parce que les gens
veulent laisser les décisions à leurs élus. C'est parce
qu'il manque, de notre part, je pense qu'il faut aller plus loin. Il faut
d'abord les informer et il faut les amener à prendre conscience de ce
que peut être un schéma d'aménagement. Il faut même,
je crois, dans un certain sens, prendre une attitude provocatrice. Ayant
travaillé au niveau des municipalités en matière de
zonage, entre autres, je me suis aperçu que quand les gens sentent que
c'est une mesure, que ce sont des éléments qui vont influencer
leur milieu de vie, ils embarquent et ils sont prêts à donner leur
opinion et ce, même quand les municipalités arrivent avec des
réglementations extrêmement sévères. Cela me permet
d'ouvrir une parenthèse: II y a une municipalité de notre
comté qui a adopté un règlement de zonage agricole presque
aussi sévère que le projet de loi no 90, six mois avant que le
projet de loi no 90 soit déposé. Quand c'est arrivé dans
la municipalité et que les gens ont eu l'information avant, ils se sont
informés et le règlement entre en vigueur dans la
municipalité. Il faut en arriver d'abord à un type de
présentation et, ensuite, arriver avec un peu de provocation. Quand les
gens vont être conscients de ce que peut être un schéma
d'aménagement, ils vont embarquer. Mais il ne faut pas aller trop vite
non plus, il faut aller au rythme où les gens peuvent prendre cette
information.
M. Giasson: Dans votre mémoire, vous faites état
également d'une aide financière et peut-être technique que
vous avez obtenue de l'OPDQ. Cette aide était de quel ordre, en juin
1978, au moment où vous avez débuté des travaux sur un
schéma d'aménagement par la création d'une commission
d'aménagement?
M. Robidoux: La subvention, l'aide financière qu'on a eue,
était de $60 000 pour une année.
M. Giasson: Est-ce qu'à cette aide financière
s'ajoutait également un appui technique? Non.
L'opération technique, vous l'avez bâtie, vous vous
l'êtes donnée à partir de l'aide financière de
l'OPDQ.
M. Robidoux: C'est cela, on s'est donné l'aide technique
à même le financement. Il y a des recherches...
M. Giasson: Cela a permis une équipe de combien de
personnes pour partir les travaux?
M. Robidoux: On a engagé un coordonnateur, un cartographe,
une secrétaire plus neuf bénévoles qui travaillent sur le
schéma d'aménagement.
M. Giasson: Neuf bénévoles?
M. Robidoux: Ceux qui travaillent à la commission.
M. Giasson: Qui se réunissent assez
régulièrement, assez fréquemment?
M. Robidoux: Au minimum une fois par semaine. Parfois, deux ou
trois fois par semaine quand il y a des rencontres sectorielles ou des
rencontres avec les municipalités.
M. Giasson: Au moment où les membres de la Commission
d'aménagement se rendent dans les municipalités, est-ce qu'ils
tentent de rencontrer la population ou si c'est limité à
l'équipe municipale?
M. Robidoux: Lors de la première approche qu'on a faite,
on a rencontré les conseillers municipaux. On a eu, après cela,
des rencontres sectorielles avec différents ministères et les
personnes responsables dans les municipalités comme dans les domaines
des loisirs, de l'éducation ou du transport. Les rencontres avec toute
la population sont prévues pour l'automne. On a un plan de travail qu'on
respecte religieusement. Ces étapes vont à l'automne. C'est pour
cela qu'on dit qu'en fait de réponse de la population, on n'en a pas eu
tellement. Je pense qu'avec toute la publicité qui se fait dans les
journaux, avec les fascicules qu'on a distribués, probablement que lors
de la consultation à l'automne les gens vont répondre plus.
M. Giasson: Vous signalez dans votre mémoire que les
approches en matière de consultation devraient être
allégées. Qu'est-ce que vous craignez, au fond?
M. Robidoux: C'est de la manière dont c'est
présenté. On craint que ce soit très dispendieux pour les
réponses qu'on va recevoir.
M. Giasson: Ce sont les coûts que représenterait une
consultation trop vaste.
M. Robidoux: Ce n'est pas parce qu'on a peur de la consultation,
c'est à cause du coût que cela va demander et le travail de
compilation, recevoir tout cela. Si les gens répondaient tous, ce serait
très intéressant, mais c'est difficile. Par expérience,
dans une municipalité, on a fait de la consultation. On a fait une
assemblée spéciale pour leur dire: On fait une fête
champêtre à l'Annonciation. Il y a à peu près 20 000
personnes qui passent la fin de semaine. On envoie une lettre à tous les
contribuables leur disant: On a une soirée d'information, venez nous
rencontrer pour nous dire ce que vous voulez qu'on change, qu'on
améliore ou qu'on fasse. Vous aurez à peu près sept ou
huit personnes qui viendront. Quand cela va bien, les gens ne se
dérangent pas trop. Si on leur disait: On va augmenter vos taxes de
100%, ils viendraient.
M. Giasson: Dans le contexte présent, vous travaillez avec
les représentants des municipalités. Avez-vous l'impression que
ces municipalités souhaitent la conservation de
l'intégrité du territoire de la corporation de comté telle
que vous la connaissez ou si elles accepteraient assez bien que la nouvelle
corporation renouvelée épouse des limites géographiques ou
territoriales différentes de celles que vous connaissez?
M. Robidoux: Actuellement, ce n'est pas une question de
comté, c'est plutôt une question de régions
administratives.
M. Giasson: De régions administratives? M. Robidoux:
Oui.
M. Giasson: C'est ce qui fait l'objet des préoccupations
des représentants des municipalités chez vous?
M. Robidoux: Oui, c'est le seul point pour délimiter le
futur comté.
M. Giasson: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Très brièvement, M. le Président,
parce que l'honorable ministre a posé plusieurs questions. Vous nous
avez dit, au début, que vous étiez d'accord avec ce projet de
loi, que vous étiez d'accord avec les principes du projet de loi, que
vous acceptez cela à 100%. Vous avez dit aussi que, s'il fallait que
cela coûte $0.01 de plus au contribuable, vous ne seriez plus d'accord.
Je parle par le biais des taxes municipales. Est-ce bien votre façon de
penser? Non?
M. Robidoux: Le monde municipal est toujours prêt à
faire un effort fiscal mais, quand on a de nouvelles charges, on devrait avoir
de nouveaux moyens de taxation. A ce moment-là, la taxation sur les
immeubles est assez saturée. Même si les municipalités ont
reçu la taxe scolaire, cela ne veut pas dire que nous serons bien gras
et que nous pourrons faire des dépenses. Si on a de nouveaux pouvoirs et
l'aménagement d'un territoire, c'est à l'avantage de la province
et des taxes pourront être perçues. Au lieu d'être
taxé sur l'immeuble, ce pourrait être un autre genre de taxe qui
pourrait être redistribué aux conseils de comté pour faire
respecter les règlements après que les schémas auront
été adoptés. (16 h 30)
M. Goulet: Sur un autre point. Dans votre comté, si je
comprends bien il y a une ville d'environ 9000 à 10 000 habitants et le
reste ce sont de petites municipalités d'une moyenne de 1000 habitants,
de 800 à 1200 environ. Relativement à la
représentativité au sein du conseil de comté, est-ce que
vous avez prévu une formule? Par exemple, est-ce que la ville de
Mont-Laurier accepte d'y aller avec un représentant, ou avez-vous une
formule?
M. Robidoux: On n'a pas voulu prévoir cela parce que dans
la loi 125 je n'ai jamais rien vu sur la manière dont les comtés
vont être représentés. Les nouveaux comtés vont se
définir et c'est à ce moment qu'on va étudier comment la
ville de Mont-Laurier sera représentée dans le nouveau
comté renouvelé.
M. Goulet: Mais au niveau des représentants,
d'après vous, cela serait qui, les maires, les élus ou une
personne déléguée par une municipalité?
M. Robidoux: Je pense que le projet de loi est politique, cela va
être les maires, il n'y a pas autre chose.
M. Goulet: Les maires. D'accord...
M. Robidoux: Parce qu'on a des comptes à rendre à
la population à toutes les élections.
M. Goulet: II y a un autre point que vous soulignez. Vous dites
que vous avez des doutes quant au droit de veto ou aux pouvoirs que se garde le
ministre ou le gouvernement. A part les zones d'intervention spéciale,
s'il y a divergence à un moment donné, qui doit régler
cela? Est-ce que cela doit être un tribunal, une commission ou le
ministre, d'après vous? Qui devrait être le dernier à se
prononcer là-dessus?
M. Robidoux: II pourrait y avoir une commission, mais en dernier
lieu cela sera toujours le ministre. On dit que, s'il y a un
référendum et que la population ne veut pas de changement, si le
gouvernement provincial, par le biais de son ministère, veut nous
imposer quelque chose dans notre comté, il passera une loi
spéciale. C'est ce qu'on dit.
M. Goulet: Le référendum devrait-il être
consultatif ou décisionnel?
M. Robidoux: Dans le projet de loi, il est consultatif et il va
rester consultatif, selon notre idée.
M. Goulet: Selon votre idée! Je suis content d'entendre
cela parce que je pense que, sauf erreur, vous êtes le premier groupe sur
vingt ou vingt-cinq qui dit que le référendum devrait être
consultatif au lieu de décisionnel. Or, c'est un son de cloche. C'est
pour cela que je voulais vous le faire dire, parce que vous êtes le
premier groupe, sauf erreur, qui adopte cette position. M. le Président,
j'ai terminé pour ce qui est des questions.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le
député. M. le ministre, le mot de la fin?
M. Léonard: Je peux en poser deux ou trois? Vous proposez
la formation d'une commission consultative d'aménagement au niveau du
comté. Le projet de loi propose un comité consultatif au niveau
de la municipalité. J'aimerais que vous expliquiez pourquoi et je
dirais, au départ: Est-ce que vous ne croyez pas que cela serait donner
trop d'éléments au comté de façon qu'il encadre
trop fortement des municipalités? Vous ne pensez pas que c'est donner
trop de force au comté?
M. Saint-Amour: On a demandé pour trois raisons le
maintien ou la création d'une commission d'urbanisme ou
d'aménagement de comté. La première des choses, c'est au
niveau de l'élaboration du schéma d'aménagement.
Présentement, la commission d'aménagement est composée de
sept membres. Il y a deux maires qui sont représentés à
cet organisme dont le préfet, trois conseillers municipaux et deux
personnes qui ne sont pas élues. Ces personnes ont été
nommées par le conseil de comté en consultation des maires qui
venaient de chacun des secteurs, parce que c'est une représentation par
secteur. L'un des sept membres est nommé par résolution de la
ville de Mont-Laurier. Si on demande un comité de maires ou un conseil
de l'élaboration du schéma, il faut qu'il y ait des personnes
vraiment intéressées, ce qui n'est pas toujours le cas chez
l'ensemble des maires.
Ensuite, au niveau de la commission d'aménagement, il va falloir
éventuellement, pour l'application de la réglementation
intérimaire, les avis à fournir... cela pourrait être la
commission d'urbanisme créée par le conseil de comté qui
donne son avis au conseil sur la pertinence de différents sujets ou de
différents travaux qui lui sont soumis.
La troisième des choses, c'est que le conseil de comté
demeure responsable de la gestion, de l'administration des territoires non
organisés là où il n'y a pas de municipalité. Il va
falloir aussi adopter et appliquer des règlements. C'est cette
commission d'urbanisme de comté qui serait chargée de
l'application de la réglementation dans les territoires non
organisés en collaboration avec un inspecteur évidemment.
M. Léonard: Au cours de l'élaboration du
schéma, vous avez demandé différentes informations des
ministères, un peu dans le sens de l'article 11, même avant que ce
soit rendu public, que le projet soit déposé. Est-ce que vous
pourriez nous parler de cette expérience? Est-ce que cela a
été satisfaisant? Quels sont les problèmes auxquels vous
avez fait face?
M. Saint-Amour: Le gouvernement a créé, lorsque le
conseil de comté a obtenu la subvention gouvernementale, un
comité technique à l'intérieur de la conférence
administrative régionale de l'Outaouais. Première lacune, et
majeure, c'est que le conseil de comté de Labelle, le territoire de la
corporation de comté appartient à deux régions
administratives. Quand on obtenait les informations de Hull, c'est bien de
valeur mais on n'avait rien de l'autre partie qui appartient aux Laurentides.
Quand on les obtenait des Laurentides, il fallait avoir l'équivalent de
l'autre côté. On a été obligé chaque fois de
cogner à deux portes différentes, Montréal, Québec
ou Hull.
Ensuite, le rôle du comité technique a été
d'abord et avant tout un rôle de boîte à lettres. On
demandait un document, on s'informait aux bureaux des différents
ministères et si le document était disponible, on l'avait. Sinon,
on ne l'avait pas. Même, au niveau de la problématique ou des
documents d'élaboration du schéma d'aménagement
(région administrative de l'Outaouais), l'OPDQ a refusé de nous
donner les documents en question. Ensuite, dans certains ministères, il
y a des documents qui nous ont été carrément
refusés.
Par contre, dans la majorité des ministères, on a eu une
très bonne collaboration et il faut le souligner. Mais dans certains
ministères, cela a été plus difficile.
M. Léonard: Une dernière question. Est-ce que vous
vouliez ajouter quelque chose?
M. Robidoux: Ce n'était pas une question concernant notre
mémoire, mais une question de privilège, M. le Président,
si vous le permettez. Ce matin, M. Goldbloom a dit qu'au bill 12 les conseils
de comté s'y étaient opposés farouchement, parce qu'on ne
voulait pas travailler avec les villes. J'ai travaillé à cette
époque, j'étais préfet à l'Union des conseils de
comté. Je pense que ce n'était pas tout à fait ça.
C'est qu'avec le bill 12, une ville pouvait prendre sept ou huit
municipalités et se former une agglomération et à ce
moment-là, les autres municipalités étaient
laissées de côté. C'est pour ça qu'on s'est
opposé au bill 12, à l'époque parce qu'il n'était
pas conforme et on disait qu'il y avait des structures actuelles... mais je
pense que les municipalités rurales sont prêtes à
travailler avec les villes. On peut le trouver dans plusieurs
régions.
M. Léonard: Une dernière question qui me semble
importante, il y a eu toute une animation faite à partir du Conseil
régional de développement des Laurentides au sujet de
règlements
d'urbanisme, etc. J'aimerais que vous expliquiez pour les gens de la
commission, pourquoi, selon vous, à un moment donné, les
municipalités ont senti le besoin d'avoir ces règlements, pas
nécessairement des plans d'urbanisme, mais cette réglementation
en termes d'urbanisme.
C'est un peu surprenant que cela arrive tout à coup, comme
ça, et que cela se soit passé dans le territoire.
M. Robidoux: Notre région a été
sensibilisée par un CRD, le CRDL Laurentides et M. Tony LeSauteur. Il y
a eu un colloque à Saint-Donat et on a commencé à parler
d'aménagement et de protection de l'environnement, surtout des lacs et
des cours d'eau. De là, le CRD a travaillé à la
préparation de règlements pour les municipalités et avec
les municipalités. Les premières rencontres qu'on a eues avec une
dizaine de municipalités, d'organismes du CRDL, on a
présenté des diapositives qui ont montré comment
l'environnement, le bord des lacs pouvaient se polluer, se
détériorer. On a demandé aux municipalités si on
était prêt à adopter des règlements de zonage pour
l'installation de fosses septiques, pour les puits, ainsi de suite, où
il n'y a pas de système, de 40 000 pieds carrés. La
réunion a duré à peu près deux ou trois heures,
deux heures et demie à peu près et à la fin, tous les
maires qui étaient présents ont dit: Ils sont fous. C'est
impossible, quand il y avait dans ce temps, des terrains d'à peu
près 10 000 pieds carrés.
Aujourd'hui, nos quinze municipalités ont presque toutes des
terrains en bordure des lacs et des cours d'eau à 40 000 pieds
carrés. Je pense que c'est très intéressant et ceux qui
avaient des règlements à adopter à 25 000 pieds, les ont
changés pour 40 000 pieds dernièrement.
M. Léonard: Au fond, c'est une certaine conception du
développement qui s'est modifiée. Cette réunion a servi de
déclencheur.
M. Robidoux: C'est ça. Cela a été
l'éveil pour les gens. C'est beau d'avoir une maison ou un chalet au
bord d'un lac ou d'un cours d'eau, mais si on n'est pas conscient de
protéger l'environnement, c'est que nos valeurs tombent à rien et
surtout pour nos régions qui sont touristiques, à ce
moment-là, on a un intérêt à les sauvegarder. C'est
avec un schéma d'aménagement, parce que malheureusement, il y a
peut-être quelques municipalités, s'il n'y a pas un schéma
de comté, qui n'adopteront pas de règlement et elles vont laisser
se polluer leurs lacs et leurs cours d'eau qui vont se déverser dans
d'autres municipalités qui, depuis quelques années, travaillent
à la protection de leur environnement.
M. Léonard: Ce que vous me dites, c'est que ça doit
couvrir l'ensemble du territoire, un ensemble.
M. Robidoux: La preuve, c'est qu'on a adopté un
règlement pour des territoires non organisés, parce qu'ils n'ont
pas de municipalité, ils n'ont pas la possibilité d'adopter de
règlement, c'est le rôle du Conseil de comté et à
l'assemblée du 14 mars, on a adopté un règlement pour les
territoires non organisés.
M. Léonard: Je veux remercier et féliciter le
Conseil de comté de Labelle pour tout le travail qui a été
fait là. Je pense que c'est très instructif et très
encourageant. C'est le signe que l'aménagement n'est pas mort au
Québec, que ça peut justement devenir un sujet
d'intérêt.
Une Voix: Cela part. M. Léonard: Cela part.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, messieurs, les membres
de cette commission vous remercient pour votre participation.
M. Robidoux: On vous remercie de nous avoir entendus.
Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant les
représentants de ville de Laval à présenter leur
mémoire. M. le maire, veuillez identifier le groupe que vous
représentez et les membres qui vous accompagnent s'il vous plaît.
Ordinairement, nous allouons 20 minutes pour la lecture du mémoire, le
reste du temps, 40 minutes, est consacré à la période des
questions des membres de la commission. Mais vous pouvez prendre un peu plus de
temps, parce que nous sommes en avance sur un mémoire.
Ville de Laval
M. Paiement (Lucien): A la table, ici, m'accompagnent de
façon directe les fonctionnaires de la ville de Laval, M. le
gérant, Marc Perron, M. Gaston Chapleau, directeur des recherches et
statistiques et M. Claude Langlois, assistant-gérant au module
planification et développement. Je suis également
accompagné des membres du comité exécutif et du conseil de
la ville de Laval.
Le Président (M. Laplante): Pourriez-vous vous identifier,
pour les fins du journal des Débats?
M. Paiement: Mon nom à moi?
Le Président (M. Laplante): Oui monsieur.
M. Paiement: Dr Lucien Paiement.
Le Président (M. Laplante): Merci. Vous pouvez
commencer.
M. Paiement: M. le Président de la commission
parlementaire, M. le ministre d'Etat à l'aménagement, MM. les
membres de la commission parlementaire.
En nous présentant devant cette commission parlementaire, nous
nous interrogeons à savoir si
nous devons nous féliciter de l'intérêt que porte
l'actuel gouvernement au monde municipal ou si nous devons nous
inquiéter ou même nous plaindre d'une sollicitude un peu trop
dérangeante. Nous avons déjà eu l'occasion d'exprimer
notre point de vue, soit en commission parlementaire, soit sur la place
publique, sur différents projets de loi récents d'incidence
municipale et qui, pour nous, à ville de Laval, avaient pour effet
d'alourdir et même de compliquer les mécanismes bureaucratiques,
sans pour autant les rendre plus efficaces, et dont la principale
conséquence semblait être de remettre en cause les objectifs que
poursuit la ville de Laval et pour lesquels les Lavallois ont
dépensé tant d'énergie et consenti tant d'efforts fiscaux
depuis 1965.
A Laval, nous avons en effet le sentiment de vivre à la mauvaise
époque devant toutes ces mesures récentes conçues, quant
à nous, pour des institutions dépassées. Nous ne voudrions
pas parler de bâtons dans les roues ou de course à obstacles,
mais, après lecture, force nous est de constater que le projet de loi
125 s'inscrit dans une lignée de mesures inadaptées à nos
besoins, conçues pour un autre monde et dont l'impact probable pour
ville de Laval sera, encore une fois, de ralentir le processus
législatif et d'augmenter les frais d'administration que les Lavallois
devront acquitter.
Nous reconnaissons, cependant, que le ministre d'Etat à
l'aménagement a favorisé la mise en place d'un mécanisme
de consultation et d'échange sur le contenu du présent projet par
la création d'un comité conjoint et nous l'en remercions. Nous
reconnaissons également que les échanges et la communication
entre Laval et le ministère d'Etat à l'aménagement ont
été sereins et corrects.
Le principe de l'aménagement. N'allez pas croire que nous sommes
contre le principe de l'aménagement du territoire. Au contraire, nous
avons la ferme conviction que c'est là la seule manière
d'utiliser rationnellement, et de façon rentable pour la
société, une ressource naturelle qui, autrement, risquerait
d'être gaspillée irrémédiablement. C'est d'ailleurs
la foi en ce principe d'aménagement rationnel qui a été
à l'origine de ville de Laval et qui a inspiré, depuis, sa
politique de développement. Si nous faisons abstraction du cas de la
ville de Laval, la réflexion qui nous vient à l'esprit devant le
présent projet de loi tient plutôt d'une certaine
déception. (16 h 45)
Depuis le temps qu'on parle d'urbanisme et d'aménagement au
Québec, les villes ont eu amplement le temps d'adopter et de mettre en
vigueur dans leurs limites des plans directeurs d'urbanisme, de
règlement de zonage, de lotissement ou de construction. Au rythme
accéléré qu'a connu la construction domiciliaire durant
les deux dernières décades, elles ont même eu le temps de
réaliser en grande partie ces plans directeurs. Trop peu, trop tard,
dira-t-on.
Cette loi arrive en effet au moment où la stagnation
économique a mis un frein à l'urbani- sation et alors que la Loi
sur la protection du territoire agricole a tracé une limite à
l'éparpillement urbain et fixé de façon presque
définitive l'utilisation agricole d'une large portion du territoire
rural. Dans de telles circonstances, son utilité paraît donc viser
une clientèle restreinte soit, à peu de choses près, celle
des municipalités rurales et des endroits de villégiature.
L'aménagement volontaire. En somme, les terres agricoles
étant protégées et les villes ayant cessé de se
développer à un rythme effarant, il n'y a plus d'urgence, quant
à nous, à adopter une loi sur l'aménagement et
l'urbanisme. C'est sans doute ce qui explique le contraste entre la philosophie
sereine et dégagée du projet de loi 125 et le caractère
centralisateur et astreignant de la Loi sur la protection du territoire
agricole. Deux processus fort différents et même contradictoires
pour réaliser un même objectif d'utilisation optimale du
territoire québécois!
On pourrait croire, maintenant que les municipalités se sont vu
retirer le pouvoir de développer et de gérer le territoire
agricole et que la plupart des villes ont leur plan directeur, que le
Québec peut accepter de procéder par voie démocratique. En
effet, on a choisi cette fois la voie de la consultation populaire et
même de la surconsultation populaire. On a choisi aussi la voie de la
consultation intermunicipale, puisque l'application des règles
d'aménagement relèvera principalement des conseils de
comté.
Cette démarche, fort soucieuse de l'opinion des citoyens, leur
accorde cependant peu de confiance au moment des décisions, puisque les
référendums n'auront qu'un caractère consultatif. Au
contraire, on est extrêmement respectueux de l'autonomie municipale au
point que les résultats attendus pourront sans doute se comparer
à ceux d'une certaine loi des fusions volontaires, du moins en ce qui
concerne l'aménagement à l'extérieur du milieu
urbanisé.
L'option régionale d'aménagement. Dans ce projet de loi,
l'Etat semble avoir également renoncé pour lui-même
à la planification ou à un aménagement rationnel au niveau
de la province pour se décharger de cette responsabilité sur des
organismes mal définis, à caractère plus ou moins
régional, qu'on appelle les corporations de comté mais dont on
sait que les limites seront modifiées.
Pour des raisons de taille, de configuration territoriale, de population
ou de zones d'influence, la corporation de comté sur laquelle le
gouvernement fonde son option d'aménagement ne semble pas, en effet,
devoir être celle que nous connaissons présentement et il
semblerait que la nouvelle structure régionale résultera
d'ententes intermunicipales sur la base d'affinités, de
complémentarité ou d'autres critères à
déterminer. Pour notre part, nous demeurons sceptiques quant à la
probabilité plus ou moins élevée d'ententes
intermunicipales de ce genre pouvant établir des structures
d'intervention adaptées aux régions ou aux territoires
régionaux à aménager. A moins que le gouvernement ne
décide d'autorité des limites des nouveaux comtés,
l'application de cette nouvelle loi,
quant à l'objectif régional qu'elle poursuit, risque donc
des délais passablement longs.
Le mariage rural-urbain. La conception que l'on se fait de
l'aménagement régional ne tolère pas d'enclaves urbaines
et l'on s'attend que les cités et villes réintègrent les
structures de comté, actuelles ou renouvelées, pour les questions
d'aménagement du territoire.
Sur le plan de la logique, il nous paraît, en effet, souhaitable
que toutes les institutions faisant partie d'un territoire donné
participent à son aménagement tant pour le choix des
équipements régionaux et de leurs implantations que pour le
partage des coûts. Il serait bon, cependant, qu'on approfondisse les
raisons historiques qui ont amené cette scission entre le monde rural et
le monde urbain.
Les causes de cette scission demeurent peut-être
d'actualité. Les besoins des populations citadines et campagnardes sont
fort différents, tant au point de vue du niveau de la quantité
que de la qualité des services. Il se pourrait bien que l'explication de
la séparation actuelle du monde rural et urbain se retrouve dans des
questions de partage de coûts pour des services non désirés
par la population rurale. Ces raisons historiques seront aussi valables
lorsqu'on aura reconstitué les structures de comté et pourraient
devenir des pierres d'achoppement pour le fonctionnement de ces institutions
régionales.
Les pouvoirs des comtés renouvelés: Les pouvoirs
dévolus aux futures corporations de comté sont fort
limités puisqu'ils se résument à l'adoption, à la
révision et à la modification d'un schéma
d'aménagement en plus des pouvoirs qu'elles possèdent
déjà en vertu du Code municipal. La réalisation du
schéma d'aménagement dépendra donc de la bonne
volonté des municipalités constituantes du comté. Il se
pourrait bien qu'un schéma d'aménagement ne puisse jamais
être mis en vigueur faute du vote affirmatif des deux tiers des voix des
membres présents au conseil de comté. En effet, en vertu du
projet soumis, le ministre peut ordonner la préparation d'un
schéma, mais il ne peut en ordonner l'application.
Le mode de représentation au conseil de comté: Les
dispositions du projet de loi actuel reflètent l'intention du
gouvernement de baser la représentation sur le seul critère de la
population. Même s'il s'agit d'une représentation indirecte, on a
jugé important d'accorder plus de poids à une municipalité
plus populeuse, soit par l'attribution de votes additionnels, soit par
l'augmentation du nombre de représentants.
Dans un tel système, une municipalité seule ou un nombre
restreint de municipalités peuvent décider de l'adoption du
schéma d'aménagement ou de son rejet si elles possèdent le
nombre de voix suffisant. Il peut s'agir de municipalités urbaines
nullement affectées par le choix ou le lieu d'implantation
d'équipements nécessaires mais peu désirables ou, au
contraire, désireuses de s'approprier les équipements les plus
susceptibles de favoriser leurs intérêts.
Est-ce qu'une représentation destinée à être
toujours minoritaire devra contribuer pour des équipements qu'elle
n'aura pas souhaités et qui ne lui serviront que très peu ou pas
du tout? Dans un contexte mixte, rural-urbain, il est fort probable que le
milieu rural sera condamné à tolérer et à payer des
équipements qui lui auront été imposés par les
citadins.
En aménagement régional, il nous semble que plusieurs
critères devront être pris en considération tels que les
usagers des services régionaux, les contribuables régionaux, la
valeur foncière des immeubles, bâtis ou non, affectés par
le zonage, le territoire vierge convoité pour le développement.
En d'autres termes, la représentation pourrait résulter d'une
combinaison de ces facteurs de façon à tenir compte de tous les
actifs apportés à la communauté régionale et
à réduire la possibilité de municipalités
appelées à être toujours majoritaires au conseil de
comté.
Le présent projet de loi nous paraît devoir engendrer de
très longues discussions avant que l'on puisse s'entendre sur un mode
équitable de représentations. A moins, encore une fois, que le
gouvernement n'agisse d'autorité pour fixer le mode de
représentation aux futurs conseils de comté, nous sommes
prêts à parier qu'il s'écoulera encore beaucoup de temps
avant que les conseils de comté ne puissent fonctionner normalement.
La double allégeance: Quel que soit le mode de
représentation retenu, il reste que ceux qui siégeront au conseil
de comté auront à trancher le dilemme d'une double
allégeance au comté et à la municipalité qu'ils
représenteront. Or, dans de telles circonstances, l'on sait fort bien
que la fidélité va aux électeurs et même si l'on
prétend que ces individus siégeront au conseil de comté en
tant qu'individus plutôt que comme représentants d'une
municipalité, l'on peut présumer que l'intérêt de la
communauté régionale sera vu à travers
l'intérêt de la communauté locale, du quartier ou du parti
municipal représenté. Voilà donc un autre écueil
à surmonter dans le cheminement vers l'adoption d'un schéma
d'aménagement de comté.
Le partage des coûts: La création de structures
régionales, l'embauche de personnel permanent au secrétariat des
corporations de comtés pour la surveillance de l'application des
schémas d'aménagement, l'engagement de personnel professionnel ou
le recours à des services professionnels pour la préparation et
la révision de ces schémas d'aménagement engendreront des
coûts que les municipalités devront se partager.
Sur quelle base devra se faire ce partage? La population,
l'évaluation foncière, la superficie? Voilà un autre
problème qui n'est pas résolu dans le projet de loi no 125 et qui
devra être étudié sérieusement avant que l'on
procède à l'application de tels schémas
d'aménagement de comté.
L'autonomie municipale: II est bien évident, à la lecture
de ce projet de loi, que le gouvernement recherche l'appui des
municipalités et que, pour les amener à accepter l'idée
d'aménagement régional, il a choisi de respecter, dans la plus
large
mesure possible, leur autonomie. De ce point de vue, il s'agit d'un tour
de force remarquable. L'aménagement, ayant été
jusqu'à ce jour une compétence municipale, il fallait retrancher
de cette compétence le strict minimum requis pour l'application des
équipements régionaux en territoire urbanisé, politique
des petits pas qui laisse encore des cloutes sur l'avenir des schémas
d'aménagement régionaux.
Les leçons de l'histoire: L'histoire démontre, M. le
Président, que des plans d'urbanisme ou des schémas
d'aménagement, au niveau d'une région, peuvent rarement
être réalisés lorsque les organismes qui les ont
élaborés n'ont pas le pouvoir de les mettre en vigueur ou de les
imposer aux municipalités concernées.
L'exemple le plus patent est sans doute celui de la Communauté
urbaine de Montréal qui, après dix ans d'existence, n'a pas
réussi à mettre en vigueur un plan d'aménagement pourtant
terminé depuis cinq ans. La Communauté urbaine de Québec a
vécu une expérience identique et, dans ce cas, le gouvernement a
récemment cru nécessaire, comme mesure correctrice, de lui
transférer les pouvoirs détenus par ses municipalités
constituantes au chapitre de l'aménagement et de l'urbanisme, à
tel point qu'elle possède dorénavant le pouvoir d'émettre
les permis de construction, d'approuver les plans directeurs, les
règlements de zonage, de construction et de lotissement de ses
municipalités et même de les préparer si ceux qu'elles ont
adoptés ou préparés ne lui' conviennent pas.
Plus loin, dans l'histoire municipale, on peut citer l'exemple de la
défunte corporation interurbaine de l'Ile Jésus, qui n'a jamais
pu mettre en vigueur un plan directeur du réseau routier de l'Ile
Jésus.
A l'encontre de ces exemples, on voudra sans doute nous citer le cas de
la Communauté régionale de l'Outaouais qui, en quelque cinq ans,
a réussi à adapter un schéma d'aménagement.
Cette expérience nous paraît peu concluante cependant, en
raison du poids des interventions fédérales dans la région
et du besoin d'harmoniser le développement.
L'exemple de ville de Laval: M. le Président, la ville de Laval
possède un schéma d'aménagement depuis 1970. Elle est et
sera encore probablement, pendant plusieurs années, le seul comté
de la province à se développer selon les orientations d'un
schéma d'aménagement de comté. Elle a donc une bonne
longueur d'avance sur les autres comtés et vous lui pardonnerez sans
doute de trouver que le Québec retarde.
Le cheminement qu'elle a suivi pour atteindre ce résultat est
fort différent de celui que vous proposez dans le projet de loi no 125.
Ceux qui ont suscité sa création appartiennent à la
génération qui a provoqué la révolution tranquille.
Ils avaient vécu l'inertie du monde municipal face à un
développement urbain désordonné et avaient connu
l'impuissance des corporations métropolitaines à remédier
à la conurbation. Ils avaient pu observer l'étroitesse du cadre
municipal pour régler les pro- blèmes d'aménagement
territorial. Ils avaient vu la hausse de l'endettement municipal et les
dépenses d'administration. Ils avaient pu apprécier le coût
du dédoublement de structures au niveau municipal et régional.
Ils avaient constaté l'insuffisance des services dans les petites
municipalités et mesuré le caractère onéreux pour
les contribuables de la multiplication d'organismes municipaux
inadéquats. Les protagonistes de ville de Laval n'étaient pas
pour autant antidémocrates.
Le réalisme leur inspirait cependant que la démocratie
doit pouvoir se concilier avec les raisons d'économie et
d'efficacité. Ils avaient surtout à l'esprit que les institutions
démocratiques existent pour la population, non pour les élus, et
qu'elles doivent se transformer pour convenir à une
société dynamique, faute de quoi elles deviennent des carcans
asphyxiants pour les villes. (17 heures)
Les Lavallois vivent aujourd'hui dans une ville structurée et
dynamique dont ils sont fiers et pour laquelle ils ont développé
un fort sentiment d'appartenance. Ils jouissent de services adéquats
à des coûts avantageusement comparables à ceux d'autres
municipalités au point qu'ils deviennent un objet de convoitise pour des
voisins qui ploient sous le fardeau fiscal.
Cette situation privilégiée pourrait devenir normale pour
toutes les municipalités si les mesures correctives apportées
pour l'Ile-Jésus étaient appliquées à
l'échelle de la province.
Autonomie et municipalités régionales. La raison
d'autonomie constamment invoquée par le monde municipal à
l'encontre des interventions gouvernementales est certes un argument de poids
dont le gouvernement a raison de tenir compte. Cet argument perd toutefois de
sa valeur si les municipalités se retrouvent dans une situation telle
que des contraintes physiques ou financières ou de simples jeux
politiques les empêchent de jouir de cette autonomie, d'utiliser des
pouvoirs devenus purement théoriques. Il nous paraîtrait
avisé de procéder immédiatement à des changements
de limite, à des regroupements ou à des fusions pour
préserver toute sa valeur positive et dynamique à la notion
d'autonomie plutôt que de procéder à une érosion
graduelle des pouvoirs municipaux en faveur des corporations de comté ou
des communautés urbaines.
La ville de Laval, première ville régionale, jouit, sous
cet angle, de son entière autonomie et ne devrait pas avoir à
craindre l'empiètement sous l'empire du projet de loi 125 puisqu'elle
constitue une ville-comté. Des problèmes d'un autre ordre peuvent
cependant lui être créés si cette loi devait lui être
appliquée telle quelle.
La ville-comté de Laval et ses plans d'urbanisme. Le titre I du
projet de loi 125 qui fixe les règles de l'aménagement et de
l'urbanisme prévoit, au chapitre I, que chaque comté pourra se
doter d'un schéma d'aménagement dont il fixera le contenu
obligatoire et facultatif. Il prévoit également une
procédure de consultation populaire pour la proposition
préliminaire d'aménagement et pour la version définitive
et possiblement la
tenue d'un référendum. Toute cette procédure longue
et coûteuse est assortie de délais, d'avis aux
municipalités faisant partie du comté et aux personnes inscrites
sur la liste électorale ainsi que de résumés du
schéma d'aménagement.
Dans les dix-huit mois de l'entrée en vigueur du schéma
d'aménagement, la ville peut, selon les dispositions du chapitre III,
adopter un plan d'urbanisme dont le contenu obligatoire et facultatif est
stipulé aux articles 80 et 81 du projet de loi. Ce plan d'urbanisme
entre également en vigueur après autant de consultations
populaires, d'avis et de délais. La procédure de modification
prévue pour le schéma d'aménagement et le plan d'urbanisme
suit la même démarche. D'autre part, le projet de loi oblige
à une révision du schéma d'aménagement et du plan
d'urbanisme après cinq ans, de sorte que la ville de Laval serait en
constante élaboration de schémas d'aménagement et de plans
directeurs et serait tenue de "s'aviser" comme ville ou comme comté.
De plus, le premier magistrat agirait tantôt comme préfet,
tantôt comme maire. L'aspect aberrant d'une telle situation est assez
évident pour que nous n'ayons pas à expliciter davantage. Ces
dispositions démontrent bien, toutefois, que la ville de Laval est un
cas unique dans la province et qu'il y aurait peut-être lieu de l'exclure
de la portée de cette loi, à moins qu'on y ajoute des
dispositions spéciales l'exemptant d'une partie de cette
procédure.
Les pouvoirs particuliers de la ville de Laval en matière
d'urbanisme. En vertu de l'article 34 de sa charte, tel que modifié par
l'article 4 du chapitre 93 des lois de 1969, la ville de Laval possède
des pouvoirs spécifiques en matière d'urbanisme qui
diffèrent des règles établies par la Loi des cités
et villes. Il s'agit d'une procédure sommaire qui n'enlève pas
pour autant le droit de représentation des citoyens et qui s'explique
par le contexte historique du milieu lavallois.
Comme on le sait, Laval résulte de la fusion de 14
municipalités qui possédaient des schémas directeurs
d'aménagement et des règlements de zonage particuliers.
L'utilisation du sol de ces exvilles ne constituait pas un continuum urbain
harmonieux. Ainsi, les dispositions de la charte ont été
conçues pour favoriser l'unification de l'aménagement au niveau
de l'Ile-Jésus. Laval a élaboré son schéma
directeur d'aménagement et son règlement de zonage dans le
même esprit, suivant une philosophie de réglementation dite
restrictive, en vue de faciliter l'intégration sur le plan physique des
14 noyaux urbanisés du territoire.
Toute la réglementation subséquente a été
composée en tenant compte des procédures que prévoit la
charte, procédures qui demeurent à ce jour. Selon la charte de
Laval, une modification de zonage n'est pas sujette à la consultation
populaire non plus qu'à la procédure d'enregistrement. C'est le
ministre des Affaires municipales qui approuve les règlements de zonage
ou, lorsqu'il le juge à propos, commande à la Commission
municipale de tenir une audience publique lorsque des citoyens en font la
demande, et il décide ensuite d'approuver, de refuser ou d'amender les
règlements, suivant le rapport que lui transmet la Commission
municipale.
Il s'agit donc d'une procédure allégée,
expédi-tive, économique et pourtant démocratique qui
découle de la philosophie qui a inspiré la création de la
ville de Laval et qui a conditionné son développement depuis.
Position de la ville de Laval: Les commentaires qui ont
précédé, M. le Président, n'avaient pas pour but de
demander au gouvernement de retirer son projet de loi, mais d'attirer son
attention sur une démarche qui semble répéter
l'expérience qu'a connue le Québec des années 50 et qui
n'a guère produit de résultats concrets quant aux
problèmes de restructuration municipale.
Notre position vis-à-vis de ce projet de loi ne se veut pas
négative cependant et si l'on tient à ce que Laval renonce
à ses pouvoirs spéciaux, nous aimerions que l'on en tienne compte
dans l'élaboration des dispositions de la nouvelle loi devant
s'appliquer à ses contribuables.
L'objectif de la ville de Laval est d'éviter des
procédures longues et coûteuses sans brimer le droit des citoyens
à la consultation et de favoriser l'intérêt collectif en
donnant droit de représentation au plus grand nombre d'individus
possible dans chaque secteur constituant une entité urbaine
organique.
La proposition de Laval vise à créer par un
règlement, une grille territoriale qui servirait, pour les fins de
votation, dans les cas de changement de zonage et d'amendement aux
règlements de lotissement. Cette grille serait constituée des
unités de voisinage et aires d'aménagement qui composent le
schéma directeur et ferait partie intégrante de ce schéma.
Ces portions de territoires qui seraient les secteurs ou unités de
votation pour Laval seraient appelées aires d'aménagement. Ces
aires d'aménagement seraient de deux natures, soit: les aires
unifonctionnelles, tels que les parcs industriels, les parcs régionaux,
le centre-ville, des aires polyvalentes qui correspondraient aux
véritables unités de voisinage, c'est-à-dire la plus
petite cellule urbaine équilibrée en termes
socio-économiques et en termes d'équipement et
d'infrastructures.
Les recommandations: Plus spécifiquement, nous recommanderions
les modalités d'application suivantes: 1. Laval constituerait un
comté au titre du projet de loi no 125, s'agissant cependant d'un
comté formé d'une seule ville, le territoire de cette ville ainsi
que le conseil municipal et les modalités de représentation
prévues pour cette municipalité s'appliqueraient au comté
de sorte que le maire, le conseil municipal et le comité exécutif
auraient les pouvoirs et les responsabilités accordés
respectivement dans le projet de loi 125 au préfet, au conseil de
comté et au comité administratif. De même, le greffier ou
tout autre officier désigné à cette fin par le conseil de
la ville assumerait les fonctions attribuées au
secrétaire-trésorier. 2. Le comté ville de Laval aurait en
matière d'aménagement, la responsabilité de
préparer un schéma d'aménagement et non un plan
d'urbanis-
me. Par conséquent, le chapitre 1 du titre 1 du projet de loi
proposé en première lecture s'appliquerait à Laval
plutôt que le chapitre 3, sauf les nuances suivantes: a) L'article 81
concernant la possibilité de préparer un programme particulier
d'aménagement s'appliquerait également à titre de contenu
facultatif du schéma en remplacement de l'alinéa g de l'article
6, non applicable à Laval. b) Laval ayant déjà un
schéma directeur d'aménagement et étant le seul
comté dans cette situation, il lui serait loisible de reprendre
entièrement son schéma selon la procédure définie
au chapitre 1 du projet de loi ou de faire une révision au sens des
articles 47 et suivants en y intégrant au minimum le contenu obligatoire
de l'article 5. c) Quant à la conformité des règlements au
schéma, c'est la procédure de conformité prévue aux
articles 99 à 104 qui s'appliquerait, en l'adaptant, et non celle des
articles 36 à 46. Les articles 33 et 34 s'appliqueraient en les
adaptant, quant à la préparation des règlements
d'urbanisme. 3. Afin de tenir compte de la taille des contraintes physiques
résultant de la fusion de quatorze municipalités et de
l'étendue du territoire du comté de la ville de Laval, il lui
serait loisible de subdiviser son territoire en secteurs de planification. Ces
secteurs de planification constitueraient des unités
d'aménagement devant servir à des fins de consultation des
citoyens. Des programmes particuliers d'aménagement tels que
définis à l'article 81 pourraient être établis sur
la base de ces secteurs de planification. Bien que des programmes particuliers
d'aménagement puissent se faire sur des aires plus restreintes, ces
secteurs de planification pourraient également servir d'assises à
la mise sur pied de comités consultatifs d'urbanisme.
L'article 11 du projet de loi no 125 s'appliquerait au comté de
la ville de Laval, mais il serait ajusté pour tenir compte de la
procédure au paragraphe 23 de l'article 51a de la Loi des cités
et villes, tel que modifié par l'article 12 de la charte de la ville de
Laval. C'est le comité exécutif qui approuve un projet de
règlement de sorte que l'article 111 pourrait servir pour le cas de la
ville de Laval de la manière suivante: Lorsque le comité
exécutif approuve un projet d'amendement ou un projet de
règlement en vue de modifier un règlement de zonage ou de
construction, aucun plan de construction ne peut être approuvé, ni
aucun permis accordé pour l'exécution de travax qui, advenant
l'adoption du règlement de modification, seront prohibés dans la
zone concernée. Le présent article 16 cesse d'être
applicable aux travaux en question si un règlement de modification n'est
pas adopté et mis en vigueur dans les 180 jours de la date de
résolution du comité exécutif.
Cinquième recommandation. La procédure de modification,
d'abrogation d'un règlement de zonage et de lotissement suivrait la
procédure prévue au projet de loi no 125. Cette procédure
ne s'appliquerait qu'aux cas prévus aux articles 110 et 113 du projet de
loi 125 avec les réserves suivantes: a)l'assemblée publique
prévue aux articles 117, 118 et suivants se déroulerait non sur
la base de toute la municipalité mais sur la base d'une ou de plusieurs
aires d'aménagement; b) l'assemblée publique serait en outre
tenue par un ou plusieurs membres du conseil de ville et non, comme l'indique
l'article 118, par le conseil et présidé par le maire; c)la
procédure d'enregistrement et le droit de vote sur le règlement
s'appliquerait à toutes les personnes habiles à voter de l'aire
d'aménagement concernée et rien qu'à elles. Par ailleurs,
il n'y aurait plus d'approbation de règlements par le ministre, ni
d'éventuelle enquête de la Commission municipale.
De plus, la réserve faite à l'égard du territoire
de Laval-sur-le-lac à l'article 35 de la charte de la ville de Laval
n'aurait plus sa raison d'être.
Dans cette perspective, les articles suivants du projet de loi 125
devraient être amendés: a) l'article 5, pour y prévoir
l'obligation par la ville de Laval d'inclure dans le contenu de son
schéma d'aménagement un plan montrant les aires
d'aménagement aux fins de votation sur les règlements devant
faire l'objet d'une approbation en conformité avec les articles 116
à 125; b)l'alinéa b) de l'article 109, qui prévoit qu'un
règlement de zonage peut contenir des dispositions selon lesquelles les
zones peuvent être divisées en secteurs à des fins de
votation selon les articles 117 à 125. Cet article devrait être
amendé pour la ville de Laval en remplaçant les mots: "la zone
dans le secteur de manière que chacun de ces secteurs" par les mots: "la
ville en aires d'aménagement de manière que chacune de ces
aires"; c) les alinéas a), b), et c) de l'article 124. Les
alinéas a) et b) devraient être modifiés pour
référer aux aires d'aménagement et l'alinéa c)
devrait être éliminé puisqu'il ne serait pas question de
faire voter les personnes d'une aire d'aménagement voisine;
d)l'alinéa d) de l'article 124; il faudrait prévoir
spécifiquement que, lorsqu'un référendum est requis, les
personnes habilitées à voter sont celles comprises dans l'aire
d'aménagement.
Sixième recommandation. Le comté de la ville de Laval
aurait le pouvoir d'adopter et de gérer un règlement de zonage
agricole conformément à la déclaration d'harmonisation de
la loi de la protection des sols agricoles et du projet de loi 125.
Sept. Ces modalités d'application seraient traduites en termes
législatifs et s'appliqueraient au comté de la ville de Laval
dès l'adoption du projet de loi 125. A cet effet, il faudrait modifier
le projet de loi pour y ajouter les dispositions particulières qui
définiraient les modalités d'application des dispositions de la
loi au comté ville de Laval. (17 h 15)
Les autres chapitres, sections et dispositions du projet de loi 125
seraient applicables au comté ville de Laval en les adaptant.
Voilà, M. le Président, les commentaires et remarques que
nous avons cru devoir vous adres-
ser au sujet du projet de loi 125. Au nom de mes collègues du
comité exécutif et du conseil, je vous remercie ainsi que tous
les membres de cette commission d'avoir eu l'amabilité de nous
écouter.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le maire.
M. Paiement: Je voudrais simplement ajouter que le mémoire
que nous venons de présenter vise uniquement à traduire une
expérience vécue, passée depuis plusieurs années et
peu importe la littérature ou les termes choisis, j'aimerais bien que
personne, d'un côté de la table comme de l'autre, n'y trouve
quelque allusion politique de quelque nature que ce soit.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le maire. M. le
député de Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Il me fait
plaisir d'accueillir ici mes voisins parce que quand je regarde par la
fenêtre chez nous, ce que je vois, c'est Laval et quand je me rends chez
moi ou que je pars de chez moi, je passe presque toujours par Laval. Le pont
qui me mène chez moi appartient à la ville de Laval et est
entretenu par la ville de Laval. Nous sommes nettement des voisins qui
pratiquons le bon voisinage qui est tout à fait à la mode
à Laval.
Le mémoire de la ville de Laval, pour lequel je la remercie, se
divise assez clairement en deux parties. Une première partie dont on
pourrait dire qu'elle est discursive et qui alimentera sûrement nos
réflexions. Il est sûr que nous voudrons tenir compte de
l'expérience de Laval dans le domaine de l'aménagement et les
réflexions que vous nous présentez à ce sujet-là
vont sûrement alimenter les nôtres.
Pour ma part, j'aimerais plutôt vous poser quelques questions sur
la deuxième partie de votre mémoire, là où l'on
trouve des recommandations portant sur divers aspects du projet de loi 125.
Vos recommandations s'inscrivent dans la ligne de travail que les deux
unions, l'Union des municipalités et l'Union des conseils de
comté ont fourni au niveau du comité d'orientation qui a
été mis sur pied pour établir un dialogue entre les
élus municipaux et le gouvernement du Québec sur ce projet de
loi.
Par ailleurs, je crois que votre mémoire réflète
l'esprit de collaboration qui a existé entre vos représentants et
les fonctionnaires, les collaborateurs du ministre. M. le maire a fait allusion
à cette collaboration qui a déjà existé, qui se
poursuit et se poursuivra sûrement.
Je note que certaines de vos recommandations demandent de
considérer Laval comme un comté au titre du projet de loi 125.
C'est une recommandation à laquelle nous sommes tout à fait
ouverts. Vous recommandez que la ville de Laval puisse élaborer un
schéma d'aménagement plutôt qu'un plan d'urbanisme. Vous
recomman- dez que le territoire de la ville soit subdivisé en aires
d'aménagement aux fins de la consultation des citoyens. C'est sur ces
aspects-là de vos recommandations que vont porter mes questions.
Vous proposez que les programmes particuliers d'aménagement
remplacent le plan d'urbanisme dans le cas de Laval. D'autre part, votre
mémoire propose de diviser la ville en aires d'aménagement pour
les fins de votation dans le cas de changement de zonage et d'amendements aux
règlements de lotissement. Par ailleurs, on trouve également dans
votre mémoire d'autres expressions comme celle de "secteur
d'aménagement".
La première question que je veux vous poser a trois aspects. Le
premier: quelles sont les caractéristiques des aires
d'aménagement dont vous parlez, caractéristiques en terme de
population, de superficie, de type d'activités et qu'est-ce qui
distingue ces aires d'aménagement des secteurs d'aménagement dont
vous parlez ailleurs?
M. Paiement: Les aires d'aménagement pour nous constituent
deux sortes... Je vais me retrouver à la page 20. Il y a deux sortes
d'aires d'aménagement. Il y a les aires unifonctionnelles qui peuvent
être le parc industriel, par exemple, qui a une fonction très
particulière, une fonctin unique, des parcs régionaux, le
centre-ville comme tel ou un secteur fondamentalement commercial et qui a une
fonction essentiellement commerciale, où on n'y trouve que du commerce.
Nous classons ces aires d'aménagement comme des aires unifonctionnelles,
c'est-à-dire qui n'ont pas les caractéristiques des aires
polyvalentes qui constituent la deuxième catégorie,
c'est-à-dire des cellules socio-économiques, des unités de
voisinage suffisamment élaborées où le citoyen peut y
trouver un sentiment d'appartenance facile, y trouver toute la gratification
qu'il est en droit de rechercher en tant que citoyen, y trouver les services
dont il a besoin quotidiennement je pense au petit dépanneur, je
pense à la pharmacie, les petits commerces qu'on utilise
régulièrement et une cellule suffisamment bien
structurée sur le plan culturel, sur le plan social, sur le plan
communautaire pour qu'il ait, dans une grande ville, vraiment l'impression de
vivre dans une cellule qui lui appartient et qui lui est propre. Nous pensons
que ce sont d'abord ces gens-là qui doivent intervenir au niveau du
vote, au niveau du référendum ou du changement de zonage ou de
toute modification dans l'aire, parce que cela les touche directement.
Nous avons vécu, à la ville de Laval, un certain nombre
d'expériences et vous êtes nos voisins, vous en savez sans doute
quelque chose. Laval-sur-le-lac et Saint-François, deux
ex-municipalités à 28 milles de distance, avec des
préoccupations fort diverses, bien sûr, n'ont pas les mêmes
préoccupations et les mêmes intérêts face à
toute modification de zonage ou d'aménagement du territoire. On a
vécu presque des guerres de cessation il y a une dizaine d'années
où tous les démagogues se faisaient un malin plaisir de
répéter: Duvernay ne paiera pas pour Chomedey et
c'était presque la guerre entre les deux. Lorsqu'on voulait faire un
projet qui avait du sens à Duvernay, les gens de Chomedey venaient le
bloquer et vice versa. Donc, à cause d'une caractéristique
historique à la ville de Laval et à cause du fait que la grande
ville ou la métropole ou la mégalopole conduit très
rapidement à l'anonymat, nous croyons que, dans l'édification
d'une ville, des aires d'aménagement polyvalentes, suffisamment
restreintes, correspondent davantage, sur le plan humain, aux besoins du
citoyen.
M. de Bellefeuille: Mais comment s'établit le rapport
entre les aires et les secteurs de planification?
M. Paiement: Les secteurs de planification sont beaucoup plus
larges. A titre d'exemple, nous estimons, de façon approximative,
à environ une trentaine d'aires d'aménagement alors que les
secteurs sont d'environ une douzaine. Ceci correspond à des limites
territoriales, à une population beaucoup plus large, à des
limites géographiques, que ce soit des autoroutes, par exemple, des
voies ferrées, des secteurs qui, à cause des contraintes
physiques du milieu, nous incitent à les traiter de façon un peu
différente, tout simplement. C'est à cela que ça
correspond.
M. de Bellefeuille: Vous faites allusion, dans une note, au bas
de la page 20, à un plan d'ensemble de votre structure organisationnelle
qu'à partir de douze secteurs d'aménagement, 30 unités de
voisinage ont été délimitées. Est-ce que c'est,
grosso modo, ce que vous avez à l'esprit dans votre mémoire
à propos de ces aires et de ces secteurs?
M. Paiement: C'est ce que nous avons à l'esprit et ce
processus est déjà passablement avancé à la ville
de Laval. Le grand plan d'ensemble de la ville de Laval, la grande orientation
est une centralisation des grands services administratifs. On va penser
à la trésorerie, à l'évaluation, à des
choses comme cela; centralisation des grands services administratifs et
décentralisation des services quotidiens auxquels le public a affaire
régulièrement. C'est un peu divisé...
M. de Bellefeuille: Bon! Les programmes particuliers
d'aménagement doivent-ils être élaborés au niveau de
l'aire d'aménagement ou à un niveau plus vaste que
celui-là?
M. Paiement: Cela dépend des projets avancés. Il se
peut qu'un projet ait une préoccupation beaucoup plus large qu'une aire
d'aménagement qui devrait toucher le secteur. On peut parler, par
exemple, d'un boulevard ou d'un grand projet, comme une espèce de centre
culturel important; ça déborde largement et les besoins, et les
capacités, et l'intérêt d'une aire d'aménagement. A
ce moment-là, nous agissons au niveau du secteur.
M. de Bellefeuille: S'il y a consultation, elle se fait selon la
nature du projet?
M. Paiement: Si un projet est de nature à toucher un
ensemble d'aires d'aménagement, si, dans un secteur, vous avez huit
aires d'aménagement et que le projet est de nature à toucher les
huit aires d'aménagement, à ce moment-là, c'est le secteur
qui a droit à une intervention.
M. de Bellefeuille: L'article 81 donne la liste de ce qu'un
programme d'aménagement peut comprendre. Est-ce que ces dispositions
vous semblent satisfaisantes aux fins d'élaborer les programmes
particuliers d'aménagement?
M. Paiement: C'est la partie facultative du plan et ça
peut certainement avoir une concordance très proche de la proposition
qui est faite là.
M. de Bellefeuille: A l'heure actuelle, vous êtes en train
de procéder à la structuration d'un centre-ville. Cette fonction,
géographiquement, correspond à une aire d'aménagement
délimitée, mais il est bien sûr que son
intérêt dépasse beaucoup les seuls habitants de cette aire.
Dans quelle mesure est-ce que la consultation dans un cas comme ça
s'étend à d'autres aires?
M. Paiement: De par notre charte, nous avons l'obligation de nous
adresser à tous les électeurs et d'ailleurs un certain nombre
d'électeurs ont déjà demandé un
référendum cette semaine, et vous le savez. C'est
déjà prévu dans notre charte.
M. de Bellefeuille: Etes-vous satisfait de cette disposition de
votre charte?
M. Paiement: On passe un peu à côté. On
pourrait discuter assez longuement là-dessus. Que 500 personnes sur une
population de 260 000 puissent exiger un référendum qui nous
coûterait $1 million ce sont les calculs que nous avons faits
cette semaine il me semble qu'il y a une espèce de disproportion,
mais je pense que c'est une autre discussion.
M. de Bellefeuille: Je suis tout à fait d'accord avec
vous, M. le maire, que c'est une toute autre discussion, mais le principe en
jeu, c'est de savoir si vous êtes d'accord que toute la population soit
consultée dans un domaine comme celui-là.
M. Paiement: Nous sommes d'accord que la population soit
consultée au niveau des règlements d'emprunt où les
deniers publics sont impliqués et où la vie du citoyen est
également touchée. Mais, lorsque dans une aire unifonctionnelle
il n'y a pas d'investissement ni de dépense additionnelle et que c'est
un aménagement que nous voulons le plus rationnel, je pense que tous les
citoyens devraient intervenir, mais... (17 h 30)
M. Léonard: Mais au point de vue aménagement, si on
consulte, si en règle générale, on a comme principe de
consulter la population sur les questions d'aménagement, est-ce que vous
ne reconnaîtriez pas que la structuration d'un centre-ville, c'est une
question parmi d'autres qui intéresse tout le monde?
M. Paiement: C'est sûr que cela intéresse tout le
monde. Lorsque Place Ville-Marie s'est bâtie, à Montréal,
c'est sûr que cela intéressait tous les Montréalais, mais
est-ce que tous les Montréalais devaient aller voter pour savoir si
Place Ville-Marie se bâtirait sur Dorchester ou sur Sainte-Catherine? On
peut s'interroger. Si la démocratie va à ce point-là, elle
coûterait d'abord très cher au niveau et de l'information et de
tous les véhicules, etc. Mais c'est sûr qu'il y a un
intérêt. Cependant il y a une partie de la responsabilité
qui doit être, à mon sens, laissée aux administrateurs en
place. C'est comme à la ville de Québec, quand l'hôtel
Hilton, en face, s'est bâti, est-ce que tous les citoyens de
Québec ont été consultés pour savoir s'il se
bâtirait là ou sur l'autre coin de rue.
M. de Bellefeuille: Cela n'aurait peut-être pas
été une mauvaise affaire!
M. Paiement: Le danger là-dedans, c'est qu'à un
moment donné, on risque de ne rien faire. Voyez-vous, ce n'est pas la
question de brimer des droits, loin de là. La préoccupation des
administrateurs municipaux est d'essayer de créer un milieu de vie le
plus équilibré possible, le plus humain possible, le plus
agréable possible et le moins coûteux possible. C'est cela que
nous pensons. S'il y a d'autres objectifs que ceux-là, on pourrait en
discuter.
M. de Bellefeuille: Je vous remercie, M. le maire.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Merci, M. le Président. M. le maire, nous
avons eu l'occasion au cours des derniers mois d'échanger avec vous,
puisque vous étiez venu devant une autre commission parlementaire,
commission pour laquelle vous aviez eu l'occasion de nous faire connaître
le cheminement que votre ville avait poursuivi en matière
d'aménagement, de plan d'urbanisme, etc.
Je n'avais pas tellement de questions, mais j'aimerais savoir
justement, suite à votre présence devant la commission
parlementaire de l'agriculture si vous avez débouché sur
l'aménagement d'une zone permanente protégée en
agriculture, c'est-à-dire protection du territoire agricole?
M. Paiement: M. le Président, je ne sais pas si je peux
parler au nom de toute la ville de Laval...
Le Président (M. Laplante): S'il y a des questions
auxquelles vous ne pouvez pas répondre, vous ne répondez pas.
M. Paiement: Messieurs, nous avons tenu plusieurs séances
avec les représentants du ministère de l'Agriculture, nous avons
préparé des plans, nous avons eu une consultation publique
où il s'est présenté environ 600 personnes. Le tout s'est
fait dans un ordre et un décorum, je dirais, exemplaire. Nous avons
inscrit chaque intervenant. Nous avons tenu compte des interventions de chacun.
Nous les avons transposées dans un mémoire et sur un plan et nous
nous apprêtons, le comité exécutif de la ville, à
approuver une proposition à ce stade-ci qui tenait compte de tous les
éléments prévus dans la loi et nous le présentons
le 10 mai à la commission du zonage agricole.
Je peux vous dire que toute la démarche s'est faite de
façon harmonieuse, sans heurts. On sait qu'au départ on avait
prévu pour Laval un partage de 55% de son territoire agricole sans
dévoiler les conclusions de la commission. Nous envisageons maintenir
plus ou moins environ 30% du territoire agricole de notre ville, ce qui,
à notre avis, répond largement aux objectifs du gouvernement, aux
politiques du gouvernement, sans toutefois, contrecarrer les besoins de
développement à Laval; et on pense qu'il y a un mariage le plus
harmonieux possible à l'horizon.
M. Giasson: Ce qui signifie, M. le maire, que la demande expresse
que vous aviez formulée à ce moment, à savoir que le
ministère de l'Agriculture et surtout la commission de protection
puisse, le plus rapidement possible, examiner la situation particulière
qui était la vôtre, cela s'est concrétisé.
M. Paiement: Je dois vous dire, monsieur, qu'à l'occasion
le maire de Laval ne mâche pas ses mots. Quand la ville de Laval n'est
pas satisfaite, ce n'est pas l'opinion du maire qui est exprimée, mais
c'est l'opinion du conseil, des fonctionnaires et des citoyens. Mais, quand
cela va bien, cela me fait plaisir de le dire aussi. Dans ce cas, cela va
bien.
M. Chevrette: Vous êtes satisfaits, j'espère?
M. Giasson: Quand cela va bien, tout le monde est heureux.
M. Chevrette: Nous aussi. M. Fontaine: ... la
réponse...
M. Chevrette: II dit que cela va bien. J'espère que vous
ne souhaitez pas que cela aille mal?
M. Fontaine: Non.
M. Paiement: On s'entend bien. Nous nous présentons le 10
en commission, mais nous n'avons pas rencontré de fins de non-recevoir.
Nous avons eu des échanges qui ont été corrects. Je serais
surpris qu'on se prenne aux cheveux à la
commission. Notre dossier est assez bien articulé et je me fie
à la compétence de la commission.
M. Giasson: Si j'ai bien compris, vous aviez, dans votre
schéma d'aménagement du territoire de la ville de Laval,
réservé environ 30% du territoire à des fins
agricoles.
M. Paiement: Vous voulez dire antérieurement au
dépôt de la loi 90?
M. Giasson: Oui, c'est cela.
M. Paiement: Nous avions une proportion qui jouait entre 20% et
30%. C'était plus près de 20% que de 30%. Alors, il y a
peut-être 10% de plus qui s'en vont, mais...
M. Chevrette: ... la négociation...
M. Giasson: Mais, effectivement, quand il y aura entente entre la
commission et la ville, la zone permanente va se situer en superficie dans un
volume d'ancrage beaucoup plus grand que celui que vous aviez prévu dans
votre schéma. Vous êtes devant une zone provisoire proposée
par la loi 90.
M. Paiement: Bien sûr que dans notre schéma
original... la zone agricole va être plus large, et de beaucoup.
M. Giasson: Ce qui sera la zone permanente par rapport à
la zone provisoire que vous connaissez par le dépôt de la loi
90?
M. Paiement: Ce qui, selon la loi, semble-t-il, sera une zone
permanente. Sensiblement, 30% du territoire de Laval demeurera agricole.
M. Giasson: J'aurais une autre question. Dans votre
mémoire, au début, je crois, je ne sais pas si vous êtes
sérieux quand vous dites que vous ne voyez pas de
nécessité immédiate de procéder à une loi de
l'aménagement du territoire et vous portez ce jugement pour l'ensemble
du Québec. Est-ce que vous étiez vraiment sérieux quand
vous avez déclaré cela?
M. Paiement: Voici!
M. de Beliefeuille: ... de l'Opposition...
M. Giasson: Non, mais...
M. Paiement: Pour moi, vous êtes tous à la
même table, messieurs.
M. Chevrette: ...
M. Giasson: Vous autres, est-ce que vous avez compris?
M. Chevrette: Cela fait longtemps qu'on l'a compris.
M. Paiement: Si on est sérieux, on essaie de regarder cela
le plus objectivement possible. C'est un secret de polichinelle que le
développement agressif et même effarant que les villes, et
particulièrement les villes de banlieue, ont connu depuis 1950-1955...
ce développement a commencé, au départ, en doigts de gant,
"fingers development"; à un moment donné, il a été
envahissant et je le reconnais en certaines circonstances est
fort désordonné. Cette période est beaucoup plus stable
maintenant et on ne connaîtra pas dans les années à venir
une telle agressivité de développement. On pense même que
Montréal, qui a exporté sa population et son économie
pendant plusieurs années, fait des efforts, encouragés par le
gouvernement, pour rapatrier et son économie et sa population.
A Laval, nous ne prévoyons pas et je ne pense pas dans le
Québec non plus une expansion domiciliaire importante comme celle
qu'on a connue dans les années passées, d'une part. La plupart
des villes qui avaient à se développer, au fond, se sont
développées, ont connu des développements
extrêmement importants. Donc, avec des plans plus ou moins bien faits,
mais c'est fait. C'est une réalité, c'est là, on ne la
changera pas. Voilà.
L'autre élément, le zonage agricole et la loi 90 c'est de
l'aménagement du territoire, c'est de décréter qu'est-ce
qui va arriver là. Partant de là, le développement
domiciliaire urbain se fait de façon beaucoup moins rapide et avec la
loi 90, il est encore extrêmement plus limité. Ce qui fait que la
loi 125 aurait été, à mon sens, beaucoup plus bienvenue il
y a dix ans, qu'aujourd'hui.
Quand je dis que le Québec est en retard, c'est ce que je veux
dire. On est drôlement en retard parce qu'on arrive un peu comme les
pompiers quand le feu est éteint.
Le Président (M. Laplante): Avez-vous d'autres questions,
M. le député?
M. Giasson: Oui, M. le Président. Evidemment, vous voyez
cela avec des yeux de Lavallois qui a pris une bonne mesure d'avance pour
l'ensemble du Québec par rapport à d'autres régions, mais
il reste, je pense, qu'au-delà de tout ça, l'aménagement
d'un territoire dépasse largement les besoins d'urbanisation. Vous
reconnaissez que dans un milieu autre que le milieu urbain l'aménagement
est un ensemble d'opérations à mener qui ne touchent pas
uniquement le développement de la construction domiciliaire. C'est
beaucoup plus large que ça. C'est pour cela que je vous posais la
question à savoir si vous étiez vraiment sérieux quand
vous lanciez une telle affirmation...
M. Paiement: Oui, mais écoutez...
M. Giasson:... que ce n'était pas nécessaire
à ce moment-ci.
M. Paiement: ... un instant! Je ne suis pas en train de vous dire
qu'il ne faut pas une loi
d'aménagement au Québec. Ce n'est pas ce que je veux dire
ici, au contraire, on pense que c'est fondamental qu'il y ait une loi. On parle
sur les modalités de la loi. Bien sûr en ayant une optique et un
petit penchant pour la ville de Laval, c'est assez clair. Nous sommes ici
d'ailleurs pour dire ce que nous, à la ville de Laval, on pense...
M. Giasson: Je pense que je vous comprends bien, maintenant.
M. Paiement: Je pense que vous êtes de ce
côté-là pour essayer d'évaluer ce qui se passe dans
l'ensemble du Québec. Nous venons vous dire que notre petite
expérience à la ville de Laval a été ainsi. On dit:
la loi, dans le moment, dans ses modalités strictes nous gêne et
nous embarrasse, il faut donc la modifier quelque peu. Il faut l'accommoder
à une réalité qui est la deuxième ville du
Québec. C'est tellement vrai que cette loi-là, on ne l'a pas
appliquée à Québec, ni à Montréal, parce que
c'étaient deux grandes villes. Montréal est la première,
Québec est la troisième, nous sommes la deuxième. C'est ce
que j'essaie de vous dire.
C'est sûr qu'il va se faire encore du développement
domiciliaire et plus il s'en fera, plus on aura besoin de routes, de transports
publics, etc. L'économie c'est un ensemble de choses. Ce n'est pas un
élément qui fonctionne. Un en attire un autre et ainsi de
suite.
Je ne peux pas tirer une conclusion et vous dire: On n'a pas besoin de
la loi 125, il faut tout effacer ça. Ce n'est pas ce que je m'en viens
vous dire. Je viens vous dire que dans ses modalités à la ville
de Laval, elle nous embarrasse. Maintenant, j'ai reconnu au départ qu'on
a eu un comité consultatif de discussion qui a été
positif, des fonctionnaires du ministère et on pense arriver, si le
gouvernement le veut bien, à un accommodement qui ne serait
peut-être pas la loi dans son intégralité, mais qui
pourrait nous permettre d'être un peu plus à l'aise ou de pas
avoir une camisole de force.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Très brièvement, M. le Président,
parce que le mémoire de la ville de Laval est très explicite.
M. le maire, vous avez parlé au niveau des modalités
d'application de ce projet de loi-là, mais, en deux mots, j'aimerais que
vous me répondiez par oui ou non: Quant à vous, comme maire de la
ville de Laval, vous auriez aimé mieux que cette loi-là ne touche
absolument pas la ville de Laval, qu'elle en soit exclue complètement?
Elle vous nuit plus qu'elle vous aide? (17 h 45)
M. Paiement: Je pense qu'on a essayé de le dire. On l'a
dit à l'occasion, de façon plus calme, de façon moins
calme. Mais c'est sûr que la ville de Laval aurait souhaité et on
est très prétentieux, peut-être, chez nous, on pensait
qu'on était assez grand garçon et qu'on savait où est-ce
qu'on s'en allait. On aurait aimé être exclu de la loi 125, comme
on aurait aimé être exclu de la loi 90 et un certain nombre
d'autres lois, parce que nous étions suffisamment avancés. C'est
cela que j'essayais de dire. Quand je vous dis que je ne m'en viens pas faire
de la politique, je ne m'en viens pas faire de la politique, mais je vous dis
qu'il faut regarder la réalité lavalloise...
M. Chevrette: ... les vanités de Laval...
Une Voix: Doublée d'une association avec une couple de
villes.
M. Giasson: Vous avez beaucoup d'autodétermination.
M. Paiement: On ne sait jamais, cela peut être
contagieux.
M. Chevrette: Je m'en rends compte...
M. Paiement: Je ne sais pas si j'ai répondu à votre
question?
M. Goulet: M. le Président, je voulais que M. le maire
nous le dise bien clairement, Laval est une ville bien organisée; c'est
la deuxième ville en importance au Québec et je pense qu'une
ville comme cela devrait être exclue complètement de ces projets
de lois. Je le pense sincèrement.
M. Paiement: C'est notre premier souhait, monsieur. Mais on dit
en toute alternative, si on ne peut pas être exclu, on propose des
amendements. Alors, on ne peut pas être plus gentilhommes et proposer des
compromis comme ceux-là.
Le Président (M. Laplante): D'autres questions, M. le
député de Bellechasse?
M. Goulet: Non, M. le Président. Cela résume
très bien et je remercie les gens...
Le Président (M. Laplante): Conclusion, M. le
ministre.
M. Léonard: M. le maire, je vous remercie de votre
mémoire. Je voudrais aussi vous remercier et vous féliciter des
travaux, des rencontres que nous avons tenues. Nous nous sommes
rencontrés une première fois le 3 février de façon
à harmoniser un peu votre situation par rapport à celle de la loi
125, voir comment on pouvait ajuster tout cela. C'est à la suite de
cette rencontre du 3 février qu'a été formé un
comité technique qui a travaillé sur des modifications possibles.
Il y en a un certain nombre qui se retrouvent dans votre mémoire
présentement. Cela va bien comme travail, à mon avis. Cela se
présente bien et c'est dans ce sens qu'il s'agit de continuer. La loi
125 sur l'aménagement et l'urbanisme est une loi générale
qui normalement devrait trouver une certaine inspiration soit dans des lois
particuliè-
res, mais elle-même doit refléter ce que nous pensons quant
à l'aménagement. J'ai eu l'occasion, lorsque je vous ai
rencontré, d'exposer les quatre principes qui la sous-tendaient et qui
demeurent, quelle que soit la réalité particulière de
différents morceaux de territoires au Québec. Je ne voudrais pas
prolonger indûment; je voudrais simplement vous poser une question qui me
tenait à coeur ici. Par rapport aux modifications des règlements
de zonage, dans la loi, l'article 111, les modifications de règlements
de zonage font l'objet d'un avis de motion du conseil municipal. Ce que vous
proposez, c'est que pour les modifications, il y ait une approbation du
comité exécutif à tout projet de règlement ou de
modification au règlement de zonage. Est-ce que vous pourriez
m'expliquer pourquoi?
M. Paiement: Le pourquoi est que la charte de la ville de Laval
prévoit que tous les règlements doivent faire l'objet d'abord
d'une résolution du comité exécutif et c'est le
comité exécutif qui, par la charte de la ville de Laval, soumet
au conseil, ou propose, ou suggère au conseil l'adoption de tels
règlements. Alors, c'est pour suivre une procédure établie
à Laval depuis sa création en 1965.
M. Léonard: II y a un processus de consultation dans votre
charte par rapport à des modifications?
M. Paiement: Non, pas un processus de consultation. Je vous dis
que le comité exécutif, lorsqu'il s'agit d'un amendement au
zonage, doit sur rapport, bien sûr, des services étudier la
question et se prononcer. Le comité exécutif se prononce,
décide qu'il est opportun ou non de changer le zonage. Partant de
là, un avis de motion est donné au conseil en séance
publique et, à une séance ultérieure, le conseil
décide d'approuver le règlement.
M. Léonard: Seulement une autre petite question. Lorsqu'il
est question de modifications, à un moment donné, vous tenez un
registre pour permettre la tenue d'un référendum. Est-ce que vous
tiendrez ce registre dans chacune des aires ou est-ce qu'il doit être
tenu seulement à l'hôtel de ville de Laval?
M. Paiement: Je dois vous dire que dans le moment, la charte de
la ville de Laval, nous ne tenons pas de registre pour le zonage.
M. Léonard: Non, mais...
M. Paiement: Nous tenons un registre strictement pour des
règlements d'emprunt. Les règlements d'emprunt qui touchent
l'ensemble de la collectivité. Un règlement d'emprunt pour faire
des travaux d'égout, d'aqueduc, de pavage, nous n'avons pas
d'assemblée d'électeurs, donc, pas de registre. Nous aurons un
registre pour des projets payés par l'ensemble de la ville et qui
touchent l'ensemble de la ville. C'est la seule circonstance où nous
avons un registre. Exemple: le règlement du Carré Laval, c'est un
règlement touchant l'ensemble, payé par l'ensemble, donc, il y a
un registre. Ce sont les seules circonstances.
M. Léonard: Cela resterait tel quel...
M. Paiement: Dans la proposition que nous vous faisons, les aires
d'aménagement, nous devrions avoir un registre par aire
d'aménagement lorsque nous faisons des modifications.
M. Léonard: Qui serait tenu durant deux jours. M.
Paiement: Qui serait tenu selon...
M. Léonard: Je pense que c'est la proposition qui...
M. Paiement:... les termes. Je pense que c'est 10% les
termes de la loi .
M. Léonard: Oui. Je vous remercie, M. le maire.
Le Président (M. Laplante): Messieurs, les membres de
cette commission vous remercient pour votre participation. Les travaux seront
suspendus pour reprendre à 20 heures.
Suspension de la séance à 17 h 52
Reprise de la séance à 20 heures 10
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît! Reprise de la commission élue permanente des affaires
municipales pour recevoir des mémoires sur l'étude du projet de
loi no 125.
J'appelle maintenant l'Union des producteurs agricoles. Je vois qu'ils
sont rendus. Je vous demanderais d'identifier votre organisme, monsieur, de
vous identifier et d'identifier les personnes qui vous accompagnent s'il vous
plaît!
Union des producteurs agricoles
M. Couture (Paul): M. le Président, mon nom est Paul
Couture, je représente l'UPA. A ma droite, M. Maurice Mercier, qui est
secrétaire général adjoint à l'UPA et M. Mario
Dumais, économiste à l'UPA. Nous vous remercions de nous recevoir
pour entendre notre mémoire et si vous permettez, M. le
Président, je demanderais à M. Dumais de lire le
mémoire.
M. Dumais (Mario): L'Union des producteurs agricoles tient
à exprimer, à l'occasion qui lui est fournie par cette commission
parlementaire, son point de vue sur le projet de loi 125 et sur le document
d'harmonisation de cette loi avec la Loi sur la protection du territoire
agricole qui a été déposée à
l'Assemblée nationale en décembre
1978. Compte tenu du rôle qui découle de la nature de notre
organisme, vous comprendrez certainement que c'est surtout le document
d'harmonisation qui retiendra notre attention.
Le projet de loi 125: Nous partageons l'idée que
l'aménagement doit respecter les quatre principes qui sous-tendent le
projet de loi 125, à savoir que: l'aménagement est une
responsabilité politique et doit être confié à des
institutions politiques; les citoyens eux-mêmes doivent participer
à la prise de décision et à la gestion de
l'aménagement; l'aménagement n'est pas une responsabilité
exclusive de l'Etat mais une responsabilité conjointe des
municipalités, des comtés municipaux renouvelés et du
gouvernement québécois; les paliers de décisions ayant une
responsabilité conjointe, des mécanismes d'harmonisation des
décisions sont prévus.
Les notes explicatives du projet de loi 125 sur l'aménagement et
l'urbanisme qui émanent du secrétariat à
l'aménagement, précisent que: "L'innovation principale du projet
de loi consiste non seulement à donner aux conseils de comté le
pouvoir d'adopter un schéma d'aménagement, mais à
conférer à celui-ci un statut prépondérant par
rapport aux plans d'urbanisme et aux règlements de zonage et de
lotissement des municipalités membres du comté de même
qu'un effet contraignant envers les interventions des agents de l'Etat".
L'introduction du schéma d'aménagement comme instrument de
planification et le statut qui lui est dévolu, qui visent à faire
en sorte que les municipalités coordonnent leur développement en
vue d'en arriver à une rationalisation intermunicipale de leurs
interventions, sont pour nous un pas en avant que nous supportons.
Somme toute, sans entrer dans plus de détails, nous sommes
globalement d'accord avec le projet de loi 125 dans sa formulation actuelle.
Cependant, nous nous interrogeons sur les coûts qu'impliquera
l'implantation de cette loi, en particulier pour les agriculteurs, de
même que sur le poids politique qu'auront dorénavant les
municpa-lités rurales au sein des conseils de comté
renouvelés. De plus, nous attachons la plus grande importance à
ce que soit introduit dans ce projet de loi des précisions garantissant
aux agriculteurs la liberté d'opérer en zone agricole leurs
entreprises dans la mesure où ils se conforment à des normes
réalistes.
A cet effet, nous demandons, en ce qui concerne la construction, la
transformation et l'agrandissement des bâtiments d'élevage
situés dans une zone agricole définie en vertu de la Loi sur la
protection du territoire agricole, que les règlements municipaux de
zonage et de construction ainsi que les normes minimales contenus dans les
schémas d'aménagement sur ce sujet, ne puissent contenir
d'exigences additionnelles à celles suggérées par les
Services de protection de l'environnement en ce qui a trait au site de
construction, à l'entreposage et l'épandage des fumiers.
Le document d'harmonisation du projet de loi 125 et de la loi 90: Le
document d'harmonisation propose de confier aux conseils de comté
renouvelés, où les cités et les villes jouiront dans la
majeure partie des cas d'un poids prépondérant, le rôle que
jouaient les municipalités et une partie des tâches
qu'accomplissait la Commission de protection du territoire agricole en vertu de
la loi 90.
Les conseils de comté pourraient adopter un règlement de
zonage délimitant la zone agricole et définissant les usages
autorisés.
Pour la discussion en vue de la délimitation de la zone agricole
permanente, l'interlocuteur de la Commission de protection du territoire
agricole serait le conseil de comté plutôt que la
municipalité. Dans le cas d'un conseil de comté situé en
dehors de la région agricole désignée, le règlement
de zonage serait adopté conformément à la procédure
prévue pour l'adoption d'un schéma d'aménagement. (20 h
15)
En région agrigole désignée, le règlement de
zonage agricole entrerait en vigueur au moment de son adoption par le conseil
de comté à moins d'objection de la Commission de protection du
territoire agricole. En cas de désaccord, le gouvernement trancherait.
Le document d'harmonisation ne précise pas si les usages
autorisés en vertu du règlement de zonage agricole seraient ceux
prévus à la loi 90 ou s'ils pourraient varier d'un conseil de
comté à un autre. Les demandes de permis pour les usages
autorisés en vertu du règlement devraient obtenir la sanction de
trois organismes, soit la municipalité, le conseil de comté, la
Commission de protection du territoire agricole. Le rôle de la Commission
de protection du territoire agricole deviendrait dorénavant un
rôle de surveillance générale et les conseils de
comté assureraient la responsabilité directe du maintien de leur
patrimoine agricole. Nous avons exprimé dans la première partie
de ce mémoire notre accord sur le projet de loi 125, mais nous tenons
à inscrire notre désaccord avec le document d'harmonisation, ceci
parce que les autorités municipales au sein des conseils de ville ou au
sein des conseils de comté ne sont pas, selon nous, l'autorité
appropriée pour assumer la responsabilité de la protection du
territoire agricole; en effet, permettre que les dispositions des
règlements de zonage agricole varient d'un comté à l'autre
nous semble inacceptable. La Commission de protection du territoire agricole
à un rôle de désaveu et de surveillance est susceptible de
dévaloriser cet organisme, parce que la participation des agriculteurs
à des assemblées publiques en vue de délimiter le
territoire agricole sera bien plus grande et bien plus fructueuse si ces
assemblées se tiennent dans les municipalités plutôt qu'au
niveau des conseils de comté. De plus, ajouter un autre palier aux deux
que doivent déjà franchir les demandes d'inclusion, d'exclusion
et d'autorisation alourdirait encore les procédures. Enfin, la
modification des mécanismes mis en place pour protéger le
territoire agricole est prématurée au moment où
l'expérimentation de leur
application est à peine amorcée. Nous avions compris, lors
du débat qui a entouré l'adoption de la loi 90, que le
gouvernement considérait maintenant l'agriculture comme une industrie
stratégique, ce qu'elle est, et que la tâche d'assurer la
sécurité de l'approvisionnement alimentaire de la population, et
pour ce faire, d'assurer la protection du territoire agricole, était
élevée au rang de mission nationale. Nous avions, quant à
nous, demandé et obtenu que les critères devant guider
l'intervention en matière de protection des sols ne varient pas d'une
région à l'autre et que la tâche d'assurer l'application de
ces critères relève d'un organisme unique pour l'ensemble du
Québec. Ceci correspondait, d'ailleurs, au point de vue de certaines
autorités régionales ou municipales. Lors du débat
entourant la quantité de sols arables à protéger dans la
région de l'Outaouais, la commission régionale de l'Outaouais,
chargée d'élaborer un schéma d'aménagement pour
cette région, indiquait qu'à son avis, la protection des sols
pour fins agricoles n'était pas en fonction municipale ou
régionale, mais bien gouvernementale. D'autre part, l'intervention du
président de l'Union des conseils de comté en commission
parlementaire sur la loi 90, selon qui la protection des terres arables
n'était pas une priorité, ne nous incite pas à voir d'un
bon oeil l'accroissement du rôle des conseils de comté même
renouvelés en cette matière.
Précisons que ce n'est pas un reproche que nous faisons au monde
municipal de ne pas accorder une haute priorité à cette question.
C'est tout simplement une constatation. Nous savons par combien d'autres sujets
leur attention est sollicitée.
La planification à l'échelle régionale par un
schéma d'aménagement des interventions municipales en vue
d'orienter le développement des voies de communication, d'implanter les
réseaux d'utilité publique, de localiser les
périmètres d'urbanisation, de coordonner la création et
l'agrandissement des parcs industriels, est susceptible d'amoindrir le
coût des infrastructures. Cependant, la protection du territoire agricole
relève d'un autre type de préoccupation. Il s'agit de
préserver la base essentielle au maintien et au développement
d'une industrie agro-alimentaire dynamique, soit les terres arables. Pour ce
faire, il faut procéder à l'inventaire, lot par lot, des terres
arables qui doivent être protégées. Les conseils municipaux
et les producteurs agricoles qui habitent une municipalité connaissent
normalement les sols de leur territoire, mais beaucoup moins ceux des autres
municipalités. C'est, par conséquent, dans le cadre local que la
Commission de protection du territoire agricole est le plus susceptible de
trouver les interlocuteurs compétents en vue de remplir sa mission de
protéger les sols par la délimitation d'une zone agricole
permanente. Selon nous, il est possible d'harmoniser l'implantation du projet
de loi 125 et de la loi 90 sans modifier cette dernière.
Nous demandons que l'application de la Loi sur la protection du
territoire agricole soit immé- diatement étendue à
l'ensemble du territoire et que l'on accélère la
délimitation des zones agricoles permanentes. Si cette
délimitation n'était pas terminée au moment où un
conseil de comté manifestait par une résolution adoptée en
vertu de la loi 125 son désir d'élaborer un schéma
d'aménagement, nous proposons l'adoption de la procédure
suivante: Dans la région agricole désignée, si la zone
agricole permanente est déjà délimitée dans les
municipalités qui composent le conseil de comté, il suffira que
celui-ci en tienne compte dans son schéma. Si la zone agricole
permanente n'est pas délimitée dans certaines ou dans toutes les
municipalités du comté, au moment de la réception de la
résolution du conseil de comté manifestant son désir
d'élaborer un schéma, la Commission de protection du territoire
agricole devra faire immédiatement parvenir son avis à toutes les
municipalités, si ce n'est déjà fait, de telle sorte que
la zone agricole soit délimitée au plus tard dans les six
mois.
Dans ce cas, le conseil de comté pourra intervenir dans le
processus de délimitation de la zone permanente comme personne
intéressée suivant les mécanismes prévus à
la loi 90. Le schéma d'aménagement ne pourra entrer en vigueur
avant que ne soit délimitée la zone agricole permanente.
En dehors de la région agricole désignée, au moment
de la réception de la résolution du conseil de comté
manifestant son désir d'élaborer un schéma, le
ministère de l'Agriculture du Québec devra déposer son
plan provisoire dans un délai de trois mois et l'avis de la Commission
de protection du territoire agricole devra accompagner ces plans de telle sorte
que six mois après le dépôt des plans provisoires la zone
agricole permanente ait été délimitée. Le
schéma ne pourra être adopté qu'après ces
délais.
Quant à l'administration du zonage agricole après la
délimitation de la zone, elle pourrait s'effectuer conformément
aux dispositions de la loi 90.
Conclusion. Les lois sont des instruments puissants qui influencent
plusieurs mécanismes délicats de la vie sociale. La Loi sur la
protection du territoire agricole est une loi complexe dont l'adoption a
touché une des fibres les plus sensibles de l'ensemble de la population
rurale, soit la propriété foncière et l'usage qui peut en
être fait. Il n'est, par conséquent, pas étonnant que des
démagogues misent sur la difficulté pour chaque agriculteur
d'assimiler les dispositions complexes de cette loi et aient entrepris de
sillonner la campagne en agitant une kyrielle de Bonhommes Sept Heures et de
croque-mitaines du type: On vous a dépouillés de la
propriété de vos terres, vous devrez dorénavant obtenir la
permission d'un fonctionnaire bureaucrate pour planter un arbre. Le
gouvernement va vous dire quoi semer sur vos terres, le communisme s'est
emparé du Québec, etc.
D'autre part, les services municipaux et certaines catégories de
professionnels, notaires, arpenteurs, etc., ont eux-mêmes beaucoup de
difficulté
à assimiler tous les aspects de cette loi et l'on voit souvent
l'un ou l'autre de ces intervenants indiquer à un agriculteur qu'il ne
peut faire ce que la loi l'autorise en réalité à
accomplir.
Il n'est pas facile de faire en sorte que tous et chacun des
agriculteurs connaissent les dispositions de la loi. En conséquence,
l'UPA consacre beaucoup d'efforts à informer ses membres au moyen de
documents écrits et audio-visuels et d'assemblées d'information
et d'éducation à tous les niveaux de sa structure, syndicats de
base, fédérations régionales,
confédérations. De plus, elle mobilise les agriculteurs en vue de
susciter leur participation dans les municipalités, lors des
assemblées publiques, lorsque cela engage le processus de
délimitation de la zone agricole permanente. Ce travail donne des
fruits. Les agriculteurs, avides d'information à ce sujet, participent
en grand nombre à ces activités et ils commencent à
assimiler les dispositions de la Loi sur la protection du territoire agricole.
En conséquence, ils constituent un auditoire de moins en moins attentif
aux propos des démagogues. De grâce, qu'on ne vienne pas si
tôt bouleverser la situation, annuler le travail entrepris et nous
obliger à tout recommencer.
Autant une intervention en vue de protéger le territoire agricole
était urgente et nécessaire, autant il serait inopportun de venir
chambarder à ce moment-ci les mécanismes mis en place à
cette fin. C'est le bon sens qui nous le dit.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous lisez vos
principales recommandations?
M. Dutnais: Oui, je pense qu'il n'est pas nécessaire qu'on
les relise parce qu'elles sont intégralement développées
dans le mémoire. C'est plutôt un instrument de travail que ce
résumé des recommandations à la fin. On les retrouve
intégralement dans le texte.
Le Président (M. Laplante): Merci de votre
coopération. M. le ministre.
M. Chevrette: On s'en servira pour ceux qui décrient la
loi 90.
M. Léonard: M. le Président, M. le Président
de l'Union des producteurs agricoles, je vous remercie de votre texte et je
vous félicite aussi du sérieux qu'il y a dedans. Je voudrais
faire un certain nombre de commentaires de façon assez
élaborée par rapport à une proposition qui était
importante lorsque nous avons déposé le projet de loi il
était aussi important de déposer un texte sur l'harmonisation
pour faire l'objet de la consultation.
Je suis d'abord heureux de constater que l'UPA donne son accord aux
quatre principes qui sous-tendent le projet de loi 125 et qu'elle est aussi
globalement d'accord sur le projet de loi. Ces principes, tels que vous les
énoncez vous-mêmes, sont les suivants: l'aménagement c'est
une responsabilité politique et il doit être confié
à des institutions politiques; les citoyens eux-mêmes doivent
participer à la prise de décisions et à la gestion de
l'aménagement; l'aménagement n'est pas une responsabilité
exclusive de l'Etat, mais une responsabilité conjointe des
municipalités, des comtés municipaux renouvelés et du
gouvernement québécois; enfin, des paliers de décision
ayant une responsabilité conjointe, des mécanismes
d'harmonisation des décisions sont prévus.
De même, je constate que l'UPA appuie de façon ferme
l'introduction des schémas d'aménagement comme instrument de
planification des municipalités aux fins de coordonner leur
développement. Par ailleurs, vous reconnaissez aussi que la
planification, par un schéma d'aménagement, en vue d'orienter le
développement des voies de communication, d'implanter des réseaux
d'utilité publique, de coordonner la création et l'agrandissement
des parcs industriels, de localiser les périmètres
d'urbanisation, est susceptible d'amoindrir le coût des
infrastructures.
Pour ce qui nous concerne, nous en sommes évidemment aussi
convaincus. Cet accord de votre part ne nous surprend pas puisqu'au cours de ma
tournée j'avais commencé à le percevoir auprès de
vos représentants dans différentes régions du
Québec.
L'Union des producteurs agricoles a cependant quelques réserves
sur les propositions gouvernementales d'harmonisation. Il m'apparaît
à ce moment-ci important de bien situer le document sur l'harmonisation
de la loi 90 et du projet de loi 125 afin de discuter des réserves
formulées à l'égard de cette proposition.
Il y a deux principes que le gouvernement poursuit dans ce domaine:
d'abord, assurer par le projet de loi 125 que les élus locaux,
municipalités et comtés municipaux renouvelés, assumeront
les responsabilités de l'aménagement de leur territoire d'abord
au niveau municipal et, ensuite, à une table de concertation
intermunicipale correspondant à la petite région
d'appartenance.
A cette fin, le gouvernement, ses mandataires et ministères
seront liés par les schémas d'aménagement d'après
le texte de l'article 127.
Ensuite, assurer par la loi 90 la permanence pour l'immédiat et
pour l'avenir de la protection du territoire agricole de façon à
garantir le maintien et le développement d'une industrie agroalimentaire
dynamique pour le Québec.
C'est pourquoi la Commission de protection du territoire agricole du
Québec et le gouvernement sont les garants de cette permanence. Ces deux
objectifs ont fait l'objet de discussions approfondies au comité
ministériel permanent de l'aménagement du territoire et, ensuite,
au Conseil des ministres.
La loi 90 devait cheminer rapidement. Elle était urgente. Elle
gelait le territoire de bon nombre de municipalités. Il fallait donc
éviter la spéculation et engager le processus de
négociation de la zone agricole permanente.
Le projet de loi 125, quant à lui, n'a pas d'effets
immédiats sur le territoire et, comme il
repose sur la responsabilité des élus locaux, le
gouvernement a d'abord voulu procéder à une longue consultation
avant de l'adopter. Il fallait donc discuter avec les unions de comté et
l'Union des municipalités du Québec des grands paramètres
du projet. C'est pourquoi le projet de loi 125 a été
déposé avant Noël de façon à amorcer un
débat public. Il n'était donc pas possible de déposer un
texte d'harmonisation tant que la loi 90 n'était pas établie dans
sa version finale et que les principes du projet de loi 125 n'avaient pas
été fixés. (20 h 30)
Maintenant, qu'est-ce que dit le texte d'harmonisation? Essentiellement,
qu'un conseil de comté renouvelé peut préparer un
règlement de zonage agricole à l'intérieur d'une
région désignée ou en dehors d'une région
désignée. La préparation de ce règlement de
même que l'administration de ce règlement sont sous la
surveillance de la Commission de protection du territoire agricole. Si le
conseil de comté renouvelé est à l'intérieur d'une
région désignée, le contenu du règlement et son
aire d'application entrent en vigueur à moins que la Commission de
protection du territoire agricole ne s'y oppose. Le conseil de comté
renouvelé a un droit d'appel au gouvernement. De toute façon,
dans la loi 90, n'oublions pas que, selon l'article 50, c'est le gouvernement
qui approuve le décret de la zone permanente avec l'avis de la
Commission de protection du territoire agricole dans les cas où il n'y a
pas accord avec les municipalités. Donc, toutes les garanties de la loi
90 sont respectées.
Si le conseil de comté renouvelé se trouve à
l'extérieur d'une région désignée, et qu'il
décide de préparer un règlement de zonage agricole, le
ministre de l'Agriculture doit lui faire parvenir une proposition de zone
agricole à la lumière des intérêts qu'il juge
nécessaire de protéger pour les fins de la protection du
territoire agricole. Le projet de règlement est ensuite soumis à
la Commission de protection du territoire agricole du Québec pour savoir
s'il respecte les critères nationaux que s'est donné la
commission. La commission peut alors le désavouer et là aussi
cependant le comté peut faire appel au gouvernement. Dans la
préparation de ce règlement, ce sont les règles de
consultation du projet de loi 125 qui s'appliquent de façon que les
citoyens participent à la définition des territoires et du
contenu du règlement. Le conseil de comté renouvelé
gère le règlement et copies de tout permis, cependant, sont
envoyées systématiquement à la commission. En somme, les
objectifs de la loi 90 sont sauvegardés et les objectifs du projet de
loi 125 le sont aussi.
Je voudrais maintenant bien saisir le sens de votre proposition
d'harmonisation car vous indiquez à la page 11 de votre mémoire
être en désaccord avec le document d'harmonisation que nous avons
déposé, en décembre 1978. Je constate, en vous
écoutant, que le conseil de comté renouvelé aurait ou non
un rôle à jouer pour la délimitation du territoire de la
zone agricole à protéger suivant qu'il se situe à
l'intérieur d'une zone désignée ou non. Je dois comprendre
que vous n'acceptez pas que le conseil de comté renouvelé
élabore un règlement de zonage agricole s'il n'a pas
commencé son processus d'élaboration du schéma
d'aménagement. D'autre part, vous acceptez que le schéma
d'aménagement comprenne la localisation des périmètres
d'urbanisation. Donc, vous êtes d'accord que ce sujet soit discuté
à une table intermunicipale, puisque cela fait partie du contenu
obligatoire du schéma à l'article 5. Par ailleurs, le territoire
agricole n'est-il pas, d'une certaine façon, l'envers d'un
périmètre d'urbanisation? Et si la table intermunicipale est
compétente en ce domaine, pourquoi ne le serait-elle pas, d'une certaine
façon, dans le domaine agricole?
Vous demandez aussi que l'on étende l'application de la loi 90
à l'ensemble du territoire agricole québécois et que l'on
accélère la délimitation des zones agricoles permanentes.
Effectivement, l'article 22 de la loi 90 indique bien que le gouvernement peut
intervenir par décret pour étendre le territoire permanent. Je ne
peux donc, quant à moi, donner une réponse immédiate
à cette question. J'aurai l'occasion d'en discuter avec mon
collègue, M. Garon, et mes autres collègues au COMPA, au
Comité permanent d'aménagement et au conseil des ministres,
lorsque le ministre de l'Agriculture fera des propositions à ce sujet.
Cela lui appartient de les acheminer.
Enfin, je voudrais conclure rapidement en vous indiquant qu'il est
important de considérer, je pense, l'évolution rapide des
mentalités, il me semble, à l'égard du patrimoine
agricole. Il y a quelques années, en effet, le patrimoine agricole
n'était pas une valeur très importante au sein de la
collectivité québécoise. Je pense que c'était
regrettable, mais il fallait le constater. Avec la loi 90 et le projet de loi
125, elle est devenue très importante. Les mentalités, à
mon sens, évoluent donc très rapidement là-dessus. Le
récent débat que nous avons connu y a contribué. C'est
devenu une mission nationale dont chaque Québécois, y compris les
dirigeants municipaux, je pense, sont de plus en plus conscients.
Maintenant, par rapport à ces commentaires, par rapport à
votre texte, j'aimerais vous poser un certain nombre de questions sur tout ce
document d'harmonisation et aussi sur la loi d'aménagement. L'une de
celles-ci pourrait se libeller ainsi: Les critères nationaux de la
Commission de protection du territoire agricole garantissent la permanence de
la protection du territoire agricole. Mais est-ce que la nature des
problèmes agricoles ne peut pas varier d'un endroit à l'autre,
étant donné les particularités physiques et
géographiques du territoire et, dans ces cas, comment pourrait-on
introduire ces particularités?
M. Couture (Paul): De prime abord, comme vous le dites, il y a
des particularités géographiques. Le rôle de la Loi sur la
protection du territoire est de protéger les sols agricoles. Mais je
pense qu'à partir de là ce n'est pas une décision
qui est immuable, il y a des considérations que la commission
doit regarder. Je m'en venais sur la route ce matin et à un moment
donné une route coupe une terre en deux. Il reste 1000 pieds ou 500
pieds de terrain qui n'est pas cultivé parce qu'il n'y a aucun
accès de l'autre côté de la route. Tu te dis: Comment
utilise-t-on ce terrain? Il y a des possibilités et je vois mal la
commission ne pas tenir compte de ces réalités. Mais je
trouverais valable c'est dans les mentalités parce que ce
que vous dites... il y a un passé auquel on n'a pas attaché
beaucoup de valeur, et on le voit; on n'a qu'à regarder la façon
dont nos routes sont faites. On voit une route qui passe à cinq ou six
arpents du bout de la terre d'un bonhomme. On se dit: Pourquoi passe-t-elle
à six arpents? Pourquoi ne passe-t-elle pas au bout de la terre? On a
coupé les choses comme cela.
Donc, il y a des bandes de terre qui restent et je ne vois pas comment
la commission ne pourrait pas considérer ces réalités. Je
pense que cela peut donner une réponse à cela. Mais le souci
qu'on a à ce sujet... d'abord, on sait comme il a été
difficile de passer une loi sur la protection des sols. Même dans les
mentalités, il y a une évolution. Mais on ne peut pas courir le
risque à ce moment de délaisser certaines priorités qui
sont dans la loi sur la protection des sols pour une autre loi qui pourrait
être prioritaire sur l'autre et qui serait entre les mains de gens qui
ont d'autres préoccupations, sans les minimiser. Mais c'est normal.
M. Léonard: Je pense qu'il y a un certain nombre
d'appréhensions dans ce que vous dites. La question que je vous posais,
finalement... il y a des critères nationaux. Les critères
nationaux pourraient être appliqués à travers tout le
Québec. Mais au-delà de cela, il y a des particularités
physiques, géographiques. Est-ce qu'on ne peut pas au-delà
des critères nationaux en tenir compte au moyen, par exemple,
d'un règlement de zonage agricole? C'est cela la question. Au fond, au
lieu d'avoir des appréhensions, cela risque même de consolider
votre approche.
M. Dumais: M. le ministre, quand on regarde la loi 90 et le
rôle administratif qui est dévolu à la Commission de
protection du territoire agricole, fatalement, cela ne mène qu'à
des applications souples de critères qui eux-mêmes, dans la loi
90, le sont. Il n'y a pas de critères absolus dans la loi 90. Par
ailleurs, lorsqu'on regarde la loi 90, qu'est-ce qu'on constate? Elle interdit
de faire toute une série de choses en zone agricole à moins
d'obtenir une permission de la Commission de protection du territoire
agricole.
Or, nous estimons que les demandes d'autorisation permettent une
souplesse considérable dans l'application des critères de la loi
90 qui n'ont rien de mécanique. C'est bien évident que les
critères définis dans la loi 90 ne mènent pas à la
même attitude vis-à-vis des demandes d'autorisation, suivant qu'il
s'agit d'une demande d'autorisation pour une terre située près de
Montréal ou située en Gaspésie. Or, nous estimons qu'il y
a déjà à ce niveau un élément de souplesse
avec lequel l'agriculture peut fort bien vivre.
D'autre part, ce que l'on craint, ce serait une souplesse qui
émanerait de préoccupations provenant d'autres
considérations que l'intérêt du développement de
l'agriculture. On estime que la Commission de protection du territoire agricole
est là pour penser essentiellement agriculture. Tandis qu'avec un
conseil de comté, surtout les conseils de comté
renouvelés, surtout avec, éventuellement, le vote
pondéré pour tenir compte des populations, il serait tout
à fait humain encore une fois, cela n'est pas un blâme que
je leur fais que le développement de l'agriculture et la
pérennité de l'usage agricole des terres arables ne soient pas
leur préoccupation première. On craindrait que d'introduire la
souplesse de ce côté, ce soit une souplesse qui ne tienne
peut-être pas suffisamment compte des préoccupations agricoles,
alors qu'elle est déjà là.
M. Léonard: La Commission de protection du territoire
agricole a toujours son rôle de surveillance, donc peut toujours
vérifier que les critères nationaux sont bien appliqués.
Quand vous parlez des éléments de souplesse ou même
peut-être de renforcement qu'un conseil de comté peut apporter, il
me semble qu'à ce moment on peut donner une certaine latitude à
un conseil de comté. C'est le sens de la proposition.
M. Couture (Paul): Oui, mais notre approche a été
à l'envers de celui-là. On est ici, je pense bien, pour donner
notre approche. Notre préoccupation a été d'abord de
protéger le territoire agricole et ensuite avoir assez de souplesse. Je
pense qu'on est conscient qu'on n'empêchera pas, et c'est normal, que des
villages ou des villes se développent. Mais cela va planifier le
développement à partir d'une protection, mais avec des
considérations pour certains développements.
M. Léonard: Une deuxième question, si vous
permettez. Vous affirmez que la Commission de protection du territoire agricole
est plus susceptible de trouver des interlocuteurs compétents au niveau
des municipalités. Je crois que cela ressort de votre texte. Ne
pensez-vous pas que le conseil de comté renouvelé étant
composé d'élus locaux répond à vos critères
de compétence?
M. Couture (Paul): Qn peut bien vous dire que vous vous faites
des peurs, cela se peut. Mais avec les peurs qu'on a, c'est qu'on pense qu'une
municipalité est quand même plus proche que le conseil
renouvelé, qui va être la représentation qui va quand
même être changée dans des milieux. Il y a des
régions où cela ne posera pas de problème, parce que
là on a la mentalité rurale. Quand on parle de villes de 3000 ou
4000 âmes, c'est quand même un milieu. Mais quand vous arrivez
où il y a une participation d'une ville beaucoup plus
considérable, la préoccupation ne sera pas la même que
celle du milieu concerné. Un exemple de cela, qu'on a une
préoccupation
très grande, c'est au niveau des règlements de
construction, d'élevage et le reste. Une porcherie ne sera pas vue de la
même manière par des urbains que par des gens qui sont dans le
milieu et qui sont producteurs agricoles. Cela ne sera pas tout à fait
la même chose. Ou bien on va rendre tout le monde bien objectif. Mais
avant qu'on ait rendu tout le monde objectif, on a certaines précautions
à prendre.
M. Léonard: Au fond, finalement, votre appréhension
s'exerce envers des maires plutôt urbains, à l'heure actuelle.
M. Couture (Paul): Disons que j'aurais pu être maire; que
j'aie à administrer une municipalité, ma préoccupation
serait la municipalité, cela ne serait pas la protection du sol
agricole. Je pense que cela ne serait pas ma première
préoccupation, parce que je suis élu pour cela. On s'est
donné un "motto" qui est plus général que cela et un
objectif qui est beaucoup plus grand. C'est là que je vois la
différence.
M. Léonard: C'est ce que vous dites. Vous dites qu'au
niveau municipal ils sont compétents cependant. C'est ce que vous disiez
tout à l'heure. Alors, au niveau du conseil du comté, ce sont
encore les mêmes maires. (20 h 45)
M. Couture (Paul): II y a des nuances quand même.
M. Léonard: C'est quoi, ces nuances?
M. Couture (Paul): Quand on arrive au niveau d'une
municipalité rurale, je pense qu'on a des gens qui peuvent être
plus proches des préoccupations agricoles qu'au niveau d'une
municipalité regroupée, où il y aura une plus grande
majorité de maires qui seront des urbains.
M. Dumais: Si je pouvais ajouter une petite chose, M. le
ministre. Il est peut-être important de souligner que, dans notre
mémoire, lorsqu'on parle, à ce niveau, de la compétence et
de la préoccupation, c'est essentiellement dans l'analyse du potentiel
agricole du sol d'un territoire. Lorsqu'on dit qu'au niveau du conseil de
comté, les gens sont peut-être un peu moins compétents pour
ça, qu'est-ce qu'on veut dire? On veut dire, par exemple, que le maire
de la municipalité X est beaucoup moins susceptible de connaître
la nature du sol de la municipalité Y sur laquelle il va avoir à
se prononcer au sein du conseil de comté. Tandis que le maire, dans sa
municipalité, et les producteurs agricoles dans leur
municipalité, connaissent bien leurs sols, connaissent bien leurs
territoires agricoles. Donc, ils en sont près et c'est de ça
qu'émane la compétence qu'on voit au niveau local. C'est dans la
connaissance de la qualité du territoire.
M. Léonard: Dans les coins ruraux, c'est quand même
tous ces maires qui composent les conseils de comté. D'autre part,
à l'heure actuelle, compte tenu de l'augmentation des coûts du
service public, il me semble que la plupart des maires urbains tentent,
à l'heure actuelle, de garder leur développement à
l'intérieur de leur périmètre d'urbanisation. Même
présentement, ils n'ont pas du tout envie d'étaler leur
développement. Je pense que c'est une des tendances, de sorte que
ça peut jouer aussi à l'inverse, l'attitude d'un maire urbain
conscient des coûts du développement. Je dis ça comme
commentaire.
M. Couture (Paul): Je suis d'accord quand on dit les maires
conscients, mais c'est quantifiable, la conscience, à ce niveau. Notre
préoccupation aussi, je pense, vis-à-vis de la loi 90 et des
responsabilités qu'on donne aux conseils de comté
renouvelés, dans plusieurs municipalités, c'est que ce n'est plus
vrai que le conseil municipal est formé d'agriculteurs. Parce que, de
plus en plus, l'implantation de zones résidentielles et le reste fait
qu'on a beaucoup moins de municipalités où les élus sont
des agriculteurs ou des gens qui sont proches de l'agriculture.
M. Léonard: Une troisième question. Vous dites que
la participation des agriculteurs à des assemblées publiques en
vue de délimiter le territoire agricole sera bien plus grande si ces
assemblées se tiennent dans les municipalités plutôt qu'au
niveau des conseils de comté. Ce sont de telles assemblées
locales qui sont prévues durant l'élaboration du schéma
d'aménagement. En effet, l'article 18 de la loi indique qu'une
assemblée doit être tenue dans chacune des municipalités
d'un groupe de municipalités dont la population totale représente
au moins les deux tiers de la population du comté. Est-ce que ce n'est
pas suffisant?
M. Couture (Paul): Ce qu'on pense, c'est qu'au niveau de la
municipalité, s'il y a un problème donné, la participation
est plus facile, parce que la participation... On travaille dans des organismes
et ce n'est pas toujours facile de susciter la participation, à moins
que ce ne soit un problème grave. Comme c'est plus proche, que les gens
sont préoccupés, on pense que la participation sera
meilleure.
M. Léonard: Si on fait une consultation sur un
schéma d'aménagement ou un règlement de zonage agricole,
ce seront les cultivateurs qui seront intéressés, donc ils vont
venir. Au niveau local, lorsqu'on va consulter sur le règlement du
zonage agricole...
M. Couture (Paul): Oui, mais quand...
M. Léonard: Un règlement de zonage agricole, c'est
ça, une proposition d'harmonisation...
M. Couture (Paul): Oui, mais quand vous êtes rendu au
niveau d'un conseil de comté renouvelé, c'est une dimension qui
est beaucoup plus...
M. Léonard: ... au niveau de la municipalité
locale, la consultation?
M. Couture (Paul): C'est ce qu'on demande.
M. Léonard: Dans la proposition d'harmonisation?
M. Chevrette: C'est l'arbitrage qui relève du
conseil...
M. Léonard: C'est l'arbitrage.
M. Mercier (Maurice): M. le ministre, je pense que c'est
là qu'on a émis plusieurs critères qui faisaient qu'on
voulait garder ce qu'on a dans la loi 90, dans le fond.
M. Léonard: Nous aussi, on veut vous le garder.
M. Mercier (Maurice): Admettons avec vous que vous essayez de
nous faire accepter l'autre côté et que vous n'avez
peut-être pas tort. Par ailleurs, mettez-vous de notre côté
et regardez-nous; on a même accepté un processus sur lequel on
était déjà réticent au départ dans la loi
90.
Quand on a demandé une loi 90, on était plus
sévère pour pouvoir s'immiscer à l'intérieur de
cette façon de fixer la zone agricole. A partir de là, il reste
que ce qu'on dit à notre point de vue, c'est que la commission, au bout,
il faut lui maintenir son statut actuel et c'est le conseil de comté qui
doit, lui, prendre le chemin de la loi 90 et non la commission qui est
obligée de prendre le chemin de la loi 125. C'est cela notre... Je
comprends qu'on puisse facilement prendre l'aspect contraire.
M. Léonard: C'est M. le vice-présient. Une Voix:
M. Mercier.
M. Léonard: M. Mercier, vous avez fait une affirmation
qui, il me semble, est inexacte.
M. Mercier (Maurice): Peut-être.
M. Léonard: Bien amicalement. Quand vous dites: On veut
garder ce qu'on a, la proposition d'harmonisation ne vise pas à abolir
la loi 90, pas du tout. C'est juste une question d'harmonisation entre deux
lois qui sont aussi nécessaires l'une que l'autre.
M. Mercier (Maurice): Mais c'est qu'elle vise quand même
à changer le processus de décision de la commission. Cela va
jusque-là. Est-ce qu'on peut aller jusque-là? C'est comme cela
qu'on l'interprète.
M. Léonard: La commission garde toujours son rôle de
surveillance par rapport à la protection du territoire agricole. Il est
là.
M. Mercier (Maurice): C'est très général
dans le sens que vous le dites là. Mais elle a un pouvoir de
décision plus grand, d'une autre manière, que celui que vous
exposez.
M. Léonard: D'accord. Est-ce que vous aviez autre chose
à ajouter?
M. Couture (Paul): Non, mais c'était une question de
préoccupation. Lorsqu'on a demandé la loi 90, on avait
demandé qu'elle soit administrée sous l'autorité du
ministère de l'Agriculture pour ces raisons. C'était notre
préoccupation. Mais il n'y a rien aujourd'hui qui nous a
sécurisés davantage. La situation n'a pas tellement
changé. Si on dit qu'après avoir fonctionné qu'il y aura
des habitudes créées et qu'il y aura une autorité
peut-être qu'on pourra se donner...
Mais, à l'heure actuelle, on a la même
préoccupation. C'est cela qu'on essaie de vous faire
connaître.
M. Léonard: Une dernière question, si vous le
permettez, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Oui, d'accord.
M. Léonard: Dans le même ordre d'idée,
l'élaboration du plan d'urbanisme requiert la tenue d'assemblées
publiques dans la municipalité concernée. Comme le plan doit
comporter les grandes affectations du sol, à l'intérieur du
territoire de la municipalité locale, j'entends bien, est-ce qu'il n'y a
pas là matière à satisfaire les agriculteurs? Encore une
fois, je rappelle qu'il ne s'agit pas de faire disparaître la loi 90. Ce
n'est pas cela. Je pense que le gouvernement l'a présentée et,
comme vous l'avez dit, cela a été une loi dure à obtenir
pour vous, mais je pense que ce gouvernement a eu le courage de la
présenter, de l'adopter. Au fond, il ne s'agit pas du tout de la faire
disparaître. Il s'agit d'harmoniser deux lois qu'on dit tout aussi
nécessaires.
Quand on va discuter des grandes affectations du sol sur le territoire
d'une municipalité locale agricole, il me semble qu'automatiquement on
va discuter du territoire agricole selon l'aire de protection du territoire
agricole, la permanence...
M. Couture (Paul): Lorsque vous dites que cela va se discuter au
niveau de la municipalité, c'est ce qu'on demande que cela se discute au
niveau de la municipalité.
M. Léonard: Le processus de consultation dit cela, dans la
proposition d'harmonisation...
M. Couture (Paul): Mais selon ma compréhension, il ne dit
pas seulement cela. Les parties qui disent comme nous autres, nous sommes
d'accord avec elles. C'est sur l'autre partie que nous sommes moins
d'accord.
On disait tout à l'heure que le gouvernement a passé la
loi 90. C'est vrai. Mais on sait qu'il y a
quand même eu un genre de petit frottement, de conflit, avec les
conseils de comté qui sentaient leur autorité un peu
minimisée sur cette préoccupation.
Mais nous autres, ce qu'on craint un peu, c'est que, par la loi 125, on
mette un peu d'huile là-dessus, parce qu'on redonne certains pouvoirs,
certains rôles, aux conseils de comté. Mais notre
inquiétude reste la même jusqu'à ce qu'on n'ait pas
démontré le contraire. C'est l'état d'esprit dans lequel
on est. On est dans la même situation.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Merci, M le Président. Essentiellement votre
mémoire, si on le résumait, donnerait l'image suivante. Oui, au
principe de la loi 125. Non au document d'harmonisation, dans sa forme, tel que
présenté.
M. Couture (Paul): II dit cela.
M. Giasson: Je vous avouerai, M. le Président, que je suis
un peu surpris le terme est exact de l'attitude qu'a le ministre
d'Etat à l'aménagement. Je me souviens fort bien des positions
très fermes défendues par le ministre de l'Agriculture lors du
débat sur la loi 90. A de nombreuses questions qui avaient
été posées au ministre de l'Agriculture sur la
possibilité d'une présence des conseils de comté ou de
certains pouvoirs consultatifs ou de recommandations qui auraient pu être
donnés à des conseils de comté, le ministre de
l'Agriculture a été absolument ferme: II n'en était
aucunement question, parce qu'il croyait que le conseil de comté, dans
sa constitution même, n'était pas l'organisme vraiment gardien de
l'application d'une politique de protection du territoire agricole, pour des
raisons, je pense, que tout le monde reconnaît; c'est que, pour un
conseil de comté, les soucis, les préoccupations ne peuvent pas
porter, a priori, sur la protection des sols arables, parce qu'il y a beaucoup
d'autres secteurs qui touchent l'administration d'une corporation de
comté.
Pour ma part, je comprenais assez bien le ministre de l'Agriculture.
D'ailleurs, dans les propositions d'amendements que j'avais
présentées à la commission, je voyais ou je voulais une
présence agricole très marquée chez l'équipe ou
chez l'organisme qui aurait à examiner ce que devrait être le
zonage ou le territoire permanent agricole à être soumis à
la Commission de protection du territoire agricole. Je le voyais sur le plan
des régions avec une représentation qui laisserait place à
un représentant de l'Union des municipalités, à un
représentant des conseils de comté, deux personnes nommées
par le ministre de l'Agriculture et deux personnes désignées par
l'UPA. Cela m'apparaissait être une représentation ou la
constitution d'un comité régional, d'une commission
régionale à l'intérieur de laquelle le souci de la
protection du territoire agricole serait vraiment la priorité, mais on
sait que ces proposi- tions d'amendements ou ces recommandations n'avaient pas
été agréées au moment du débat sur la loi
90.
Mais là, je sens que la préoccupation fondamentale du
ministre d'Etat à l'aménagement n'est pas celle qu'on sentait
chez le ministre de l'Agriculture lors du débat sur la loi 90. Je crois
comprendre les gens de l'UPA je le dis, parce que c'est la
réalité c'est qu'ils connaissent fort bien le milieu
agricole. Ils peuvent évaluer le souci ou la préoccupation des
membres d'un conseil municipal dans une municipalité rurale qui
pourraient beaucoup plus facilement attacher une importance ou une
préoccupation constante à des politiques de protection du
territoire agricole que ne pourraient le faire même des
représentants élus au conseil de comté qui émane
des municipalités qui le composent.
Ce que vous craignez, sans doute j'ai pu le découvrir
c'est que les pouvoirs nouveaux qu'on donnerait à des conseils de
comté à l'intérieur d'un schéma
d'aménagement où on leur donne une place dans la
définition d'une zone agricole permenante, ce que vous craignez, c'est
que les pouvoirs qu'on donne à ces conseils de comté
renouvelés soient tels que le droit de veto, si on me permet ce terme,
qu'a la Commission de protection du territoire agricole vis-à-vis des
recommandations venant des municipalités, tel que prévu dans la
loi 90, ce droit de veto qu'a la Commission de protection du territoire
agricole vis-à-vis de toute une série de demandes qui lui seront
transmises, parce qu'avec le temps, cela va venir très nombreux, ce que
vous craignez, c'est que les pouvoirs qu'on donnerait aux conseils de
comté renouvelés dans la loi 125, diminuent ces pouvoirs que vous
voulez fondamentaux entre les mains de la Commission de protection du
territoire agricole. Est-ce que j'ai bien saisi votre sujet de
préoccupation?
M. Couture (Paul): C'est exactement notre pensée. On dit
que la préoccupation, présentement, de la loi 90 et de la
commission, c'est de préserver le sol agricole. On ne dit pas que c'est
gelé définitivement là, mais c'est sa préoccupation
et, à l'intérieur de cela, on voit les conseils de
comté, s'ils en ont besoin, ils font la demande à la commission
qu'on ne subordonne pas la protection des sols agricoles aux conseils de
comté, ce sont les conseils de comté qui sont subordonnés
à la Commission de protection des terres agricoles. (21 heures)
M. Giasson: J'aurais une autre question que j'aimerais vous
poser. Dans plusieurs conseils de comté renouvelés qui seront
constitués de représentants ou d'élus venant de
municipalités qui sont d'abord agricoles, dont la vocation
première est l'agriculture, vous ne croyez pas que le danger serait
moins grand à ce moment-là, que le conseil de comté ait
des pouvoirs, à l'intérieur de son schéma
d'aménagement, de déterminer une zone agricole permanente ou
d'accepter les modifica-
tions à une zone agricole permanente désignée
lorsqu'il y a des besoins particuliers qui se produisent dans le cours du
temps, que, dans d'autres conseils de comté où peu de
municipalités vraiment rurales sont présentes,
c'est-à-dire des municipalités à vocation mi-rurale,
mi-urbaine, ou qui vivent des développements autres que
l'agriculture?
M. Couture (Paul): II ne peut pas y avoir deux
systèmes.
M. Giasson: Non.
M. Couture (Paul): C'est ça...
M. Giasson: Tu es pris avec les deux types de conseils de
comté en matière de représentation d'intérêts
de l'agriculture.
M. Couture (Paul): C'est ça. Il faut opter pour un et
nous, on se pense plus en sécurité en optant pour la formule
qu'on préconise et qui laisse quand même une responsabilité
aux conseils de comté et aux municipalités de se
développer à l'intérieur de ça.
M. Giasson: Maintenant, M. le Président, vous avez fait
des recommandations répétées à la fin de votre
mémoire sur ce que devrait être la priorité en
matière de zonage, de zones permanentes dans les régions
où il y a un zonage provisoire, comme dans les régions où
le zonage provisoire n'a pas été décrété.
J'aimerais savoir du ministre quelle est son opinion vis-à-vis de ces
recommandations.
M. Léonard: Ces recommandations seront
étudiées. Nous allons en tenir compte lorsque nous allons revoir
le projet de loi, après les auditions de la commission.
M. Giasson: Vous n'êtes pas fixés sur les
délais qui sont proposés par les représentants de l'Union
des producteurs?
M. Chevrette: On est à se faire influencer
présentement.
M. Léonard: Nous sommes à entendre des
mémoires sur les principes du projet de loi. Ce n'est pas le moment de
prendre des positions...
M. Goulet: On n'est pas d'accord.
M. Chevrette: Cela ne dit pas ça, M. le
député de Bellechasse.
M. Léonard: On demande des explications sur le
mémoire de l'Union des producteurs agricoles.
M. Chevrette: A ce compte-là, on aurait pu demander si M.
Biron était d'accord avec 116. Vous auriez répondu quoi...
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Giasson: M. le Président, même si le...
M. Goulet: Si on est moins d'accord, s'il n'est pas
d'accord...
M. Chevrette: Le paradis...
Le Président (M. Laplante): A l'ordre! A l'ordre, s'il
vous plaît! Monsieur...
M. Giasson: Même si le ministre responsable de la loi ne
peut pas émettre d'opinion sur les recommandations des
représentants des producteurs, je déclare que ces recommandations
m'apparaissent vraiment fondées et correspondent à un sujet de
préoccupation de la part des gens de l'UPA dont le ministre doit tenir
compte.
M. Léonard: C'est votre opinion.
M. Giasson: J'invite le ministre à la considérer
très favorablement.
M. Léonard: Merci de votre invitation. M. Giasson: Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Pas de question.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: M. le Président, je voudrais penser
tout haut un peu avec M. Couture. Il me semble, M. Couture, que les lois 90 et
125 sont vraiment complémentaires, qu'elles se complètent l'une
l'autre. Si on pense à l'histoire de la loi 90, on se souviendra que
ça faisait une bonne dizaine d'années que beaucoup
d'éléments dans la population du Québec attendaient du
gouvernement du Québec une intervention de cette nature. C'était
une loi qui s'était fait attendre pendant longtemps et, d'ailleurs,
quand elle a été finalement adoptée, M. Drummond, l'ancien
ministre de l'Agriculture sous le gouvernement précédent, a fait
l'éloge de la loi et a dit que son seul regret, c'était qu'il
n'ait pas pu lui-même présenter une loi semblable à
l'Assemblée nationale.
Bon! Tout ceci non pas pour faire de la partisanerie, mais pour dire que
c'est une loi qui était attendue et qui correspondait à la
volonté de la population. Mais la protection du territoire agricole,
c'est un domaine éminemment difficile. Vous le savez encore mieux que
moi, parce qu'il s'agissait de prendre le risque de déplaire à
pas mal de monde et il n'y a pas d'autorité au Québec qui
était capable de courir ce risque, sauf l'Etat du Québec. C'est
pourquoi il fallait que le gouvernement intervienne d'une façon
centrale, je ne dis pas centralisante puisqu'il n'y avait rien avant, donc, il
n'y avait rien à centraliser, mais c'était quand même une
intervention centrale, c'est l'Etat du Québec qui intervenait pour
protéger, une fois
pour toutes, le territoire agricole. Cela reposait quand même sur
une volonté populaire très répandue et qui s'était
considérablement exprimée au cours des années.
La loi 125 arrive et part de la même hypothèse, soit celle
que la protection du territoire agricole est voulue par la population du
Québec. Si c'est voulu par la population du Québec, fatalement,
cela va être voulu par les élus locaux, cela va être voulu
par les élus municipaux, par les élus à l'échelle
des conseils de comté. Il va peut-être y avoir un moment
d'adaptation et c'est peut-être pour prévoir ce moment
d'adaptation que la loi 90 est venue avant la loi 125. Il y a un moment
d'adaptation à faire. Si on n'arrive pas à faire cette adaptation
et à s'assurer que les élus locaux correspondront à la
volonté populaire par le moyen des schémas d'aménagement
et des autres moyens prévus par la loi 125, la loi 90 va demeurer un
édifice extrêmement fragile parce que ça voudra dire,
à ce moment-là, que la loi 90 ne reposait pas
véritablement sur une volonté réelle sur le plan local et
sur le plan des petites régions.
Il me semble que c'est cela le pari. Si, effectivement, la loi 90
correspond à la volonté de la population du Québec, la loi
125 apporte l'étape suivante: cette volonté va se traduire non
pas au niveau de l'Etat central, qui était le seul à pouvoir
faire la première intervention, mais au niveau local et au niveau des
petites régions, là où les gens vont intervenir
eux-mêmes à l'échelle de leur municipalité, à
l'échelle de leur petite région pour correspondre à cette
volonté populaire. Au fond, on ne court à peu près pas de
risque...
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît...
M. de Bellefeuille: Je termine, M. le Président. On ne
court à peu près pas de risque puisque, comme le ministre l'a
déjà dit à plusieurs reprises, la Commission de protection
du territoire agricole conserve son rôle. Elle pourra toujours s'assurer
que les grands objectifs ne sont pas trahis. Il semble, M. Couture, que c'est
comme ça qu'il faut voir cela, comme deux mesures
complémentaires. Si la loi 125 ne tient pas debout, la loi 90 non plus
n'avait pas de base dans la population. Je suis convaincu que la base dans la
population, elle est là, que la loi 90 va tenir et que la loi 125 va lui
apporter son complément.
M. Couture (Paul): Juste un mot, M. le Président, pour
réfléchir tout haut avec M. de Belle-feuille. Vous parlez de la
complémentarité. Notre suggestion, c'est seulement de lui faire
jouer son rôle de complémentarité, selon notre
compréhension, parce qu'on veut réellement qu'elle soit
complémentaire. Notre suggestion d'harmonisation nous assure qu'elle va
jouer son rôle de complémentarité; c'est là qu'est
notre préoccupation. Comme vous le dites, la difficulté qu'on a,
c'est que les esprits n'étaient pas prêts; dans dix ans,
peut-être qu'on raisonnera autrement, mais dans l'immédiat je
pense que pour notre protection il faut faire ces réserves.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la
fin.
M. Léonard: II y a une chose qui a été dite
et que je voudrais relever. La Commission de protection du territoire agricole
n'est subordonnée en aucune façon aux conseils de comté.
Cela a été dit par M. Couture tout à l'heure. Cette
commission garde toujours un droit de désaveu et c'est seulement
vis-à-vis du Conseil des ministres qu'il peut y avoir un débat.
Je tiens à relever cela parce que, dans la proposition d'harmonisation,
la commission n'est pas subordonnée aux conseils de comté.
Je dirais à part cela que dans mon esprit comme dans l'esprit de
mes collègues nous avons tenu à adopter cette Loi sur la
protection des territoires agricoles, nous y avons travaillé
au-delà de deux ans et on est arrivé à l'adopter avant
Noël dernier et ce n'est pas pour démolir ce qu'on vient de faire.
On a à coeur la pérennité du territoire agricole.
Cependant, ce n'est pas sur la planète Mars, il y a des gens qui y
vivent et il s'agit d'harmoniser cela avec la loi 125 qui porte sur
l'aménagement et l'urbanisme.
Je vous remercie beaucoup.
M. Chevrette: M. le Président! Le Président (M.
Laplante): Oui?
M. Chevrette: Je ne vous poserai pas une question de
privilège parce qu'on n'a pas le droit ici.
Le Président (M. Laplante): Non.
M. Chevrette: Je voudrais inviter M. Mercier qui est de ma
région à venir me rencontrer, parce qu'il y a un bout que je
voudrais comprendre et comme on est limité dans le temps, je ne peux
malheureusement pas vous questionner. Mais j'aurais également une
clarification à vous demander sur un point; peut-être que par la
suite on pourra mieux se comprendre, parce qu'on est ici vraiment pour se
laisser influencer.
Le Président (M. Laplante): MM. Mercier, Dumais et
Couture, les membres de cette commission vous remercient de votre
participation. Merci messieurs.
J'appelle maintenant les professeurs de l'Institut d'urbanisme de
l'Université de Montréal. Si vous voulez identifier votre groupe,
monsieur, vous identifier et identifier la personne qui vous accompagne, s'il
vous plaît.
Professeurs de l'Institut d'urbanisme de
l'Université de Montréal
M. McNeil (Jean): M. le Président, le mémoire que
nous allons présenter a été rédigé par un
groupe de professeurs de l'Institut d'urbanisme de l'Université de
Montréal et du Centre de recherches en droit public de la même
université. Ces
professeurs sont Marie-Odile Trépanier, Réjane Charles,
Aurèle Cardinal, Michel Gariépy et Jean McNeil.
Nous sommes deux à venir discuter avec vous de ce mémoire.
A mes côtés, Mme Réjane Charles et je suis Jean McNeil.
Je voudrais préciser immédiatement que les opinions
exprimées dans ce mémoire n'engagent en aucun cas les
institutions auxquelles nous appartenons. Nous le faisons à titre tout
à fait personnel.
Compte tenu du temps limité qu'il nous reste, parce que je
comprends que la commission doit cesser ses travaux à 10 heures, je me
permettrai d'apporter simplement un certain nombre de précisions quant
aux opinions et recommandations exprimées dans le mémoire
concernant notamment les mécanismes prévus par le projet de loi
et je laisserai, par la suite, à Mme Réjane Charles le soin de
faire de même en ce qui concerne les instruments et documents
d'aménagement et d'urbanisme également prévus par cette
loi.
Sur le plan des mécanismes, nous voudrions d'abord faire valoir
que nous sommes inquiets quant aux possibilités réelles que se
donnera le gouvernement pour coordonner ses programmes et ses projets en
matière d'équipements et d'infrastructure dans les divers
comtés. Nous pensons que l'article 11 dans ce sens n'est pas assez fort,
que le projet de loi ne précise pas les manières ou la
façon avec lesquelles les gouvernements ou le gouvernement provincial va
effectivement réussir à produire les documents synthèses
dont la livraison est prévue aux articles 11 et 21 du projet de loi.
Par conséquent, nous recommandons que cet article 11 soit
amendé de manière à rendre obligatoire et dans un
délai spécifié la production des documents
synthèses de même que les documents relatifs aux
équipements, tel que prévu par la loi.
En deuxième lieu, en ce qui concerne les relations entre le
gouvernement, d'une part, et le schéma de comté, ou les plans
d'urbanisme, ou les règlements, d'autre part, nous pensons qu'il y a un
besoin important de clarifier la portée de l'article 127 par lequel le
gouvernement et ses mandataires sont "liés" et je mets ce terme
entre guillemets par les schémas, plans et règlements
adoptés. Il semble, d'après nous que le terme "liés" a
fort peu de portée juridique. On ne sait pas à partir de quel
principe le mot "liés" pourrait s'appliquer surtout si on tient compte
des articles suivants, 128 à 134, si je ne m'abuse, qui donnent au
gouvernement des pouvoirs extrêmement importants de modification du
schéma lorsque ses interventions dans le milieu urbain ou
régional ne sont pas conformes aux objectifs du schéma. Nous
voulons, en même temps, que dans l'article 127, le terme "liés"
soit précisé et que la portée de cet article soit
précisée par rapport aux autres articles de lois qui donnent aux
ministères et aux organismes des pouvoirs de décision en
matière d'équipement. (21 h 15)
Nous pensons que pour donner à cet article une signification
minimale, il importerait que le gouvernement traduise, en termes de
programmation budgétaire, les actions prévues au schéma.
Je n'ai pas le temps d'élaborer là-dessus, mais on pourrait
éventuellement en discuter.
Concernant les relations entre le gouvernement et les documents
d'urbanisme, nous pensons, enfin, nous recommandons la suppression pure et
simple des articles 130 à 133 qui, à notre avis, font double
emploi avec les articles 134 et 135, notamment les alinéas c) et d) qui
sont consacrés aux zones d'intervention spéciale. Enfin, et
troisièmement, nous pensons qu'il serait important d'examiner la
possibilité d'élargir le mandat et la composition de la
Commission nationale d'aménagement pour lui faire jouer un rôle
important en matière d'arbitrage en ce qui concerne les relations entre
les actions du gouvernement et les schémas d'aménagement et les
plans d'urbanisme.
Nous pensons, en outre, que cette commission devrait comporter au moins
un représentant qualifié à l'aménagement. Nous
suggérons, par exemple, qu'à l'image de la commission de
l'environnement ontarienne, que cette commission puisse éventuellement
arbitrer certains conflits en matière d'aménagement, quels que
soient les niveaux impliqués. Elle pourrait ainsi soumettre des
propositions de règlement de ces conflits en fonction de critères
définis et laisserait un délai, par exemple, de 30 jours,
à l'autorité provinciale pour approuver ou rejeter ses
suggestions.
Enfin, et quatrièmement, un peu de manière incidente, nous
pensons qu'il serait opportun de substituer au terme "objectifs" prévus
dans l'action de conformité de la commission, terme beaucoup trop vague,
par le terme "contenu" ou par le terme "principe". Ce terme revenant dans
plusieurs articles, notamment 1 a, 33, 34, 52, 53 et 204, si je n'ai rien
oublié.
Finalement, concernant la participation des citoyens, nous aimerions
recommander un allégement de la procédure de participation en
limitant la consultation proprement dite au stade de la version
préliminaire et en élargissant les possibilités de choix
et de discussion, en offrant à la population une documentation
étoffée, non seulement sur les options retenues, au moment de la
version préliminaire, mais également sur l'ensemble des options
étudiées.
Bien sûr, ces recommandations mériteraient d'être
étoffées et discutées davantage, mais peut-être que
la discussion nous permettra davantage de le faire.
Je cède la parole à Mme Réjane Charles.
Mme Charles (Réjane): Ce projet de loi 125 a surtout
été présenté comme un projet de loi sur la
décentralisation et la participation. Il a apporté un certain
nombre d'innovations par rapport aux autres projets de loi en
aménagement et en urbanisme, mais il s'agit là essentiellement de
structures et de procédures. Par contre, c'est aussi une loi
d'aménagement et d'urbanisme et
c'est à la qualité des documents et aussi au type
d'instruments opérationnels et à leurs caractéristiques
innovatrices que peut se révéler l'importance accordée par
le gouvernement à l'aménagement lui-même et
également, que va être testée réellement la
volonté du gouvernement de donner dans un cadre de
décentralisation, la possibilité aux autorités locales, de
contrôler leur territoire.
Or, si sur les premiers points, décentralisation et
participation, il y a un effort effectif, quelles que soient les
réserves que nous avons déjà faites dans d'autres
mémoires, on peut dire qu'en ce qui concerne les documents et les
instruments d'urbanisme, il y a beaucoup de déception et même un
recul extrêmement net par rapport aux autres projets de loi. Aussi bien
en ce qui concerne la qualité des documents, telle qu'elle est
perçue à travers le projet de loi, qu'en ce qui concerne le type
d'instruments et les nouveautés qui n'ont pas été
intégrées dans ces types d'instruments.
En ce qui concerne la qualité des documents, il est
extrêmement banal de dire que l'aménagement est une matière
très complexe et qu'il faut apporter une attention spéciale
à la confection des documents, au raffinement des instruments et on
constate, en lisant ce projet de loi, qu'il y a vraiment une sous-estimation
assez grande de cette complexité, une sous-estimation qui
transparaît sur deux points, aussi bien au niveau de la formation
professionnelle pour la confection des documents et le contrôle de
l'aménagement et également au niveau de la recherche.
On peut faire un parallèle très rapide je vais
être aussi brève que possible avec l'ancienne loi 12. Dans
l'ancienne loi 12, en ce qui concerne le personnel, elle reconnaissait la
nécessité d'un directeur d'urbanisme, selon l'article 21, et dans
une série d'autres articles, 46, 49 et 51, elle donnait un certain
nombre de pouvoirs, soit pour délivrer des certificats, soit pour
vérifier une conformité ou délivrer même des permis
pendant la période préparatoire du règlement
intérimaire.
Or, dans la loi 125, tous ces rôles, grosso modo, sont
attribués au secrétaire-trésorier, dont on ne conteste pas
la capacité administrative, mais qui, manifestement, n'a pas la
compétence spécialisée en ce domaine. C'est lui qui
transmet les résumés de schémas et de plans, les articles
32 et 96, qui délivre des permis, qui délivre des certificats de
conformité. Seul l'article 57, pour une fonction très
limitée, fait appel à un fonctionnaire spécialisé
pour délivrer des permis dans des cas spécifiques et pendant la
période préparatoire du règlement de contrôle
intérimaire.
On a l'impression qu'à travers le projet de loi, tous les
problèmes d'évaluation de conformité de contrôle
deviennent des opérations strictement administratives, presque de
routine administrative, ne demandent pas une connaissance spécifique du
domaine. On croit un petit peu rêver en voyant cela et on a l'impression
quand même qu'on retourne à une période d'amateurisme dans
le domaine de l'urbanisme qui semblait quand même
dépassée.
Très brièvement, en ce qui concerne la recher- che, on ne
retrouve pas non plus les articles 5 et 6 de la loi 12, concernant les
programmes de recherche, les subventions et les bourses d'étude. On sait
pourtant combien les décisions en aménagement marquent le citoyen
dans sa vie quotidienne. On sait aussi l'insuffisance de la recherche
québécoise en ce domaine et l'envahissement de certaines
importations étrangères d'études mal adaptées ou
mises sans discernement au Québec. Evidemment, nous insistons sur ces
deux domaines qui nous semblent avoir été absolument
évacués dans le nouveau projet de loi pour demander un petit peu
de penser aux problèmes que les connaissances en matière
d'urbanisme ne sont pas nécessairement des connaissances infuses par
toutes ces personnes et qu'on ne peut plus se livrer aux délices de
l'improvisation dans ce domaine.
Donc, nos recommandations portent évidemment sur la
reconnaissance d'un personnel qualifié essentiellement aux conseils de
comté, pour les schémas, notamment aux articles 32, 57, 76 et 96
et également pour certaines municipalités importantes, soit par
leur seuil de population, soit par un taux d'urbanisation assez
élevé, et également, au niveau de la recherche, on
demanderait une attention un peu spéciale.
En ce qui concerne la qualité des documents, on pourrait faire
beaucoup de commentaires également au niveau des schémas et des
plans, tels qu'ils sont présentés. Très brièvement
d'abord, on peut dire que la dimension temporelle a été
complètement évacuée, ce qui est tout de même
très curieux quand on aborde l'aménagement ou la planification.
Il n'y a, en ce qui concerne les schémas et plans, pas
d'échéanciers obligatoires qui sont prévus. On voit une
espèce de laxisme quant à la fixation des priorités qui
est pourtant très inhérente au processus de planification.
Pour prendre quelques exemples, à l'article 5f, on parle d'un
échéancier de réalisation d'équipements, s'il y a
lieu. A l'article 5g, une simple identification de localisation
d'équipements, sans échéancier. Par contre, à
l'article 8a et à l'article 83, on demande une estimation et, en plus,
à l'article 83, une évaluation des coûts. Comment peut-on
faire sérieusement une estimation et encore plus une évaluation
qui devient plus précise des coûts sans échéancier,
sans évaluation dans le temps?
Je suppose que les taux d'actualisation, cela existe et je ne vois
vraiment pas, si des documents doivent accompagner un plan ou un schéma,
comment ils peuvent être pris sérieusement, s'il n'y a pas des
priorités, des échéanciers dans le temps, avec des
estimations en fonction des périodes prévues.
Encore une autre dimension temporelle qui est ignorée, c'est
l'ignorance toujours par rapport à la loi 12, qui le prévoyait
dans son article 74, aux paragraphes r) et s), des zones d'aménagement
différé et des zones d'urbanisation prioritaire.
Nous avons entendu parler longuement de la Loi sur la protection d'un
territoire agricole, qu'indirectement, le périmètre
d'urbanisation est
fixé par la commission. Mais il n'empêche qu'à
l'intérieur de ce périmètre, la municipalité peut
avoir des priorités dans le temps à fixer. Elle peut avoir des
zones qu'elle veut développer de façon prioritaire, pour un
certain nombre de raisons, de coûts d'ailleurs, peut-être, et on ne
lui donne pas cette possibilité de créer deux types de zones.
D'ailleurs, on voit très bien, par d'autres dispositions de ce
projet de loi, que l'approche est extrêmement statique et non pas
dynamique, puisqu'on évacue cette période de temps. On voit par
exemple qu'on incorpore, au niveau du plan, à l'article 81, un programme
particulier d'aménagement. Cela est assez aberrant d'incorporer un
programme particulier d'aménagement au niveau du plan, étant
donné que la réalisation de ce programme ne se fera pas
immédiatement. Fixer, figer dans un plan, dès son
élaboration, un programme particulier paraît un peu aberrant.
Qu'on fixe au niveau d'un plan les zones qui bénéficieront de ce
programme, mais ce programme particulier devrait pouvoir davantage être
fixé au niveau, par exemple, du zonage et non pas figé
déjà dans un plan.
De même, les articles 112 et 114 constituent une approche
extrêmement fragmentaire de l'aménagement et non pas une vue
d'ensemble du territoire et de son développement entre les
différentes zones.
Une autre critique qu'on pourrait également attribuer au plan,
c'est une conception qui est certainement aussi dépassée. En
dehors de la dimension temporelle qui manque, on sent que le plan est
défini en termes très vagues. On lui assigne des fonctions
très vagues, comme de grandes affectations ou des orientations. Ou bien
c'est un catalogue d'équipements, c'est-à-dire qui doit
énumérer les équipements prévus, ou bien on parle
même de normes générales dans un plan. Est-ce que ces
normes tombent du ciel? Est-ce que ce sont des normes quasi universelles ou
est-ce qu'on se réfugie dans des normes qui sont une facilité
sécurisante? On sait très bien que les normes n'ont pas de valeur
en elles-mêmes mais qu'elles sont la transposition d'un certain nombre de
choix et, dans le plan, ce qui est extrêmement important quand même
de voir, c'est comment on a abouti à ces choix. C'est cela qui est le
plus important et sur quoi on s'appuie pour déterminer ces normes.
Donc, en ce qui concerne les plans, en dehors de la dimension temporelle
qu'on demanderait de rétablir selon les échéanciers
obligatoires approximatifs et la programmation budgétaire plurian-nuelle
et de l'intégration des zones à urbaniser en priorité, les
zones d'aménagement différé, on demanderait aussi des
schémas et des plans plus élaborés qui comprendraient pas
seulement un catalogue d'équipements et une évaluation purement
comptable des coûts déjà, on a fait des
réserves sur la possibilité d'évaluer de façon
relativement précise ces coûts il faudrait que ces plans
soient accompagnés de documents justificatifs comprenant des
études de rentabilité sociale et économique, de type
analyse coûts- bénéfices, coûts d'opportunité,
entre autres. Il faudrait des analyses également sur la
rétroaction positive ou négative des différentes
composantes d'un plan; parce qu'un plan est toujours un ensemble, on ne peut
pas simplement considérer que c'est un ajustement d'équipements.
Chaque équipement réagit sur l'autre et a des incidences
différentes selon qu'on choisit tel type d'utilisation du sol ou tel
équipement.
Enfin, il y a aussi certaines inquiétudes dans la confrontation
de ce projet de loi avec la loi 69 sur l'environnement. On s'aperçoit
qu'il y a une série d'études d'impacts qui sont
déjà faites, indépendamment de l'aménagement, et
qui auront une répercussion assez importante sur le schéma. Il y
a là certainement une espèce d'harmonisation à
prévoir pour que le schéma et le plan prennent une signification
beaucoup plus concrète. Voilà très brièvement sur
les plans.
Le dernier point que je voulais soulever, c'est au niveau des
instruments plus opérationnels. Pour ne pas alourdir cette
séance, je me limiterai essentiellement au zonage comme instrument
opérationnel. Là également, comme pour le plan, on a
l'impression que le zonage, tel qu'il est présenté à
travers le projet, est aussi un instrument d'un autre âge, un peu
démodé, disons une version américaine des années 20
qui vous propose un zonage uniforme alors qu'au Québec il y a toute une
pratique assez riche dont le projet ne semble pas du tout avoir tenu compte.
C'est peut-être cela qui semble assez grave. On sait également que
partout ailleurs sur le continent, on multiplie les formules d'assouplissement
à ce sujet-là et il ne semble pas que le projet de loi ait retenu
ces formules d'assouplissement.
Très brièvement, il y a quatre points que je vais
résumer. Il y a le problème des plans d'ensemble, les
différentes formulations de densité, une rigidité
rédactionnelle sur certains articles et le problème des droits
acquis. (21 h 30)
En ce qui concerne les plans d'ensemble, on sait qu'au Québec,
plusieurs villes ont déjà recours à cette technique, mais
qu'elle est très hypothéquée par des contestations
judiciaires. Or, c'est une des rares possibilités de pouvoir
améliorer des utilisations du sol de façon beaucoup moins
uniforme et de restaurer une qualité de vie qui est souvent
médiocre avec le zonage traditionnel. C'est-à-dire une
opération d'ensemble qui permet des usages diversifiés des
équipements intégrés, subordonnée,
évidemment, à une procédure d'approbation
spécifique laissant un peu plus de discrétion à la
municipalité, laquelle peut poser des conditions.
Je pense que le refus justement de reconnaître le plan d'ensemble
dans ce projet de loi est assez étonnant quand le gouvernement affirme
qu'il veut amorcer une certaine décentralisation. S'il n'accorde pas une
certaine possibilité à la municipalité, justement, de
contrôler son territoire autrement que par un zonage très
traditionnel, il semble qu'il manque de confiance dans la municipalité
pour contrôler son territoire. D'ailleurs, si on
refuse ces plans d'ensemble sous le prétexte que ce serait donner
trop de discrétion à la municipalité, il ne faut
absolument pas se faire d'illusions, car la pratique du zonage
révèle que la municipalité essaie de contourner cela, soit
par la multiplicité des amendements, soit par une permissivité
dans certaines zones qui est pratiquement un non-contrôle et qui permet
au promoteur de faire à peu près tout ce qu'il veut.
En ce qui concerne également les densités, il ne semble
pas que l'article 109e reconnaisse réellement la possibilité de
spécifier une densité par zone, du moins tel qu'il est
rédigé. Cela semble très aléatoire. Or, il
semblerait très bon de permettre, justement pour ces plans d'ensemble,
que la municipalité puisse fixer une densité par zone, quitte
à pouvoir, lorsque les réalisations de la zone sont partielles,
appliquer au projet la densité qui est fixée.
On est un peu étonné aussi de voir que des formules
très répandues, que le projet n'interdit pas formellement, mais
auxquelles il pourrait inciter les municipalités à recourir,
comme l'indice d'utilisation du sol, ne soient pas indiquées dans le
projet pour inciter les municipalités à perfectionner les
formules de densité qui intègrent une série de composantes
physiques du sol, que ce soient les espaces viables, les espaces
récréatifs ou les espaces libres et qui augmentent très
nettement la qualité de l'ensemble.
Deux dernières choses que je voudrais préciser, c'est que,
tel que rédigé, l'article 109 oblige la municipalité
à préciser tous les usages permis ou prohibés. Les
paragraphes c) et d) de l'article 109 obligent la municipalité à
spécifier les constructions ou les usages qui son prohibés, alors
que dans les autres projets de loi, on avait changé la rédaction
en mettant "spécifier pour chaque zone les constructions et usages
autorisés ou les constructions ou usages qui sont prohibés ", ce
qui permettait à la municipalité de préciser l'un ou
l'autre ou de préciser uniquement les usages qui seraient
spécifiquement autorisés.
Enfin, en ce qui concerne les droits acquis, on sait que ceux-ci posent
beaucoup de problèmes, notamment dans les centre-ville quand il y a un
certain nombre de modifications à faire. La charte de Montréal,
dans son article 524, permet de modifier les usages existants, moyennant une
certaine indemnisation. Le projet de loi ne semble pas avoir reconnu cette
formule qui pourrait parfois servir les municipalités. L'argument qui
est souvent invoqué pour contrer cette disposition est le manque de
disponibilités financières. Mais on voit que l'article 115b de ce
projet de loi, qui permet l'octroi de certificats ou permis de construction
subordonnés à des tarifs liés au nombre de logements,
pourrait très bien être modifié par une autre disposition
liant le tarif non pas au nombre de logements, mais à la valeur du site
qui pourrait augmenter les disponibilités des municipalités et
permettre, donc, d'indemniser en cas d'atteinte aux droits acquis.
Je m'arrête là, j'ai encore beaucoup de choses à
dire mais...
Le Président (M. Laplante): Madame, il reste peu de temps
pour poser des questions; je vous remercie de votre collaboration.
M. le député de Beauce-Nord.
M. Ouellette: Je vous remercie, Mme Charles et M. McNeil, pour le
travail que vous avez mis dans la rédaction de ce mémoire,
mémoire que j'ai lu avec d'autant plus d'intérêt que tout
ce qui s'appelle urbanisme et développement rationnel m'intéresse
depuis longtemps.
J'aimerais vous faire part d'un certain nombre de commentaires que ce
mémoire fait surgir dans mon esprit. D'abord, vous reconnaissez
l'importance du geste gouvernemental de proposer une loi sur
l'aménagement et l'urbanisme. Tel que vous le mentionnez, par ce projet
de loi, le gouvernement a voulu reconnaître que l'aménagement du
territoire qui sert de cadre de vie à la population ne peut être
laissé à l'initiative incontrôlée des multiples
agents qui interviennent sur le territoire. Tout comme vous, nous souhaitons
que ce projet de loi se traduise par un mieux-être collectif.
Votre mémoire comporte des suggestions intéressantes et
rejoignent celles d'autres organismes quant aux instruments de planification,
particulièrement en ce qui a trait à la formule des plans
d'ensemble et aux programmes particuliers d'aménagement. Ces
propositions feront l'objet d'une étude sérieuse de notre part.
Votre mémoire émet également certaines critiques
vis-à-vis de ce projet de loi. Il s'agit d'ailleurs d'un des buts de
cette commission parlementaire d'être à l'écoute de toutes
les suggestions pouvant améliorer le présent projet de loi. En
somme, nous sommes là, justement, pour en prendre bonne part.
Je me dois toutefois de corriger un certain nombre de vos affirmations,
en tout cas à la lumière de ce que j'ai pu comprendre des
intentions de ce projet de loi. Lorsque vous mentionnez, par exemple, que le
projet de loi ne comporte qu'une perspective critique de l'urbain, d'une part,
nous croyons qu'une telle perspective ne devrait pas être un
élément légal, et, d'autre part, elle pourrait très
bien se traduire dans un document ayant trait aux orientations
gouvernementales. C'est à l'article 11 qu'on retrouve le
dépôt de documents au moment de l'aménagement du
schéma, de même que les plans d'urbanisme.
Je crois qu'on ne devrait pas essayer de traduire des cas particuliers
dans une loi à caractère général, mais plutôt
essayer de les appliquer dans les schémas d'aménagement qui, eux,
s'orientent directement vers les schémas régionaux.
Ensuite, vous affirmez que le projet de loi maintient des pouvoirs
centralisés d'interventions en matière de développement.
Il me semble que vous vous refusez à reconnaître tout le processus
de négociation institutionnelle que permettent les articles 11, 21, 28
et 130, ainsi que la nécessité d'une conformité qui doit
exister entre les différents paliers et cela dans les deux sens. En
d'autres termes, on retrouve tout au long du projet de loi nombre de
consultations, de dialogues dans les deux sens ce qui, à mon sens, me
fait croire
que, loin de centraliser l'intervention vers le gouvernement, on laisse
plutôt le soin aux élus municipaux et régionaux le soin,
justement, d'établir les schémas et les plans directeurs
d'urbanisme.
Vous accordez au ministre responsable de la loi un rôle d'arbitre
politique autoritaire et discrétionnaire. D'une part, le ministre n'a
aucunement un tel rôle dans la loi. En cas de conflit, bien sûr, il
revient au Conseil des ministres de trancher tout litige. D'autre part, il
importe de bien distinguer ce qui est du régime normal et ce qui est du
régime d'exception, par exemple, aux articles 4 et 7, ou encore
nécessite une zone d'intervention spéciale.
Vous déplorez également l'absence de mécanisme
institutionnalisé de rencontres entre les fonctionnaires provinciaux et
les conseils de comté. Il ne s'agit pas d'un oubli, mais bien d'un
principe sous-jacent au projet de loi qui privilégie le politique
plutôt que le fonctionnarisme. Nous avons voulu que les élus
locaux, régionaux et provinciaux se parlent d'égal à
égal, en autant que ce soit possible, plutôt que de laisser aux
technocrates le soin de régler les problèmes qui nous
apparaissent comme étant de niveau politique.
Une dernière remarque, elle a trait à votre proposition
d'inclure une programmation des investissements publics en conformité
avec le contenu des schémas et des plans qui lieraient le gouvernement,
ses ministères, ses mandataires, les organismes publics et les
municipalités. Il me semble qu'une telle proposition, en plus de
méconnaître le droit démocratique des élus locaux de
décider de l'affectation de leurs ressources nie également
à l'Assemblée nationale le droit de voter des budgets.
En somme, si on rencontrait exactement ce que vous demandez, on
risquerait de fixer dans le temps, dans un temps de X années,
l'affectation des budgets qui relèvent, nous semble-t-il, de la
responsabilité des élus. Il ne s'agit pas de faire un bilan pro
forma de développement qui aurait pour mission de lier ou d'attacher
carrément les mains des élus à venir.
Suite à cela, j'aurais une couple de questions à vous
poser. D'abord, vous indiquez dans votre mémoire que le projet de loi
"dichotomise" le couple aménagement-développement on
retrouve cela à la page 2 plutôt que de l'articuler sur une
base locale et régionale. Pouvez-vous préciser votre
pensée et quels sont les éléments, selon vous, qui
auraient dû être ajoutés au projet de loi pour éviter
cette dichotomie.
M. McNeil: ... d'entendre vos commentaires. Votre intervention
est assez riche. D'une part, vous dites qu'on ne peut pas traduire dans une
disposition légale des perspectives critiques de l'urbain. Je suis tout
à fait d'accord avec vous, sauf qu'une disposition légale ou un
projet de loi traduit néanmoins de la part d'un organisme comme le
gouvernement, une certaine problématique, donc une certaine
appréhension des problèmes à résoudre et cette
appréhension des problèmes conduit à un certain nombre de
solutions qui, elles-mêmes peuvent être formulées sous la
forme de dispositions légales, le cas échéant.
Il est bien clair qu'à notre avis la problématique
essentielle qui semble alimenter la réflexion qui a conduit au
dépôt de ce projet de loi consiste bien davantage à tenter
une certaine rationalisation des équipements publics en matière
urbaine et régionale qu'à répondre aux
préoccupations du développement et des problèmes de
développement que connaissent actuellement au Québec et,
d'ailleurs, dans d'autres régions du monde, les grandes villes.
Nous avons fait référence, dans ce paragraphe, au fait que
ce n'est pas à ce moment, malgré les dispositions que contiennent
les chartes de la CUM et de la CUQ ou de la commission régionale de
l'Outaouais, concernant la confection de plans d'urbanisme ou de schémas
d'aménagement, ce n'est pas de cette façon, encore, que les
problèmes d'environnement, que les problèmes de logement des
défavorisés, que les problèmes de transport ont pu
être réglés dans la grande agglomération de
Montréal.
Il est clair que ce n'est pas vers la solution de ces problèmes
majeurs de notre société, ce n'est pas vers une transformation
éventuelle des rapports sociaux à l'intérieur des grandes
unités urbaines que le projet de loi voulait apporter solution. C'est
dans ce sens que nous déplorons, quant à nous, que la notion
d'urbanisme qui est véhiculée par le projet de loi laisse
totalement de côté ce genre de préoccupation sociale
extrêmement importante et, à mon avis, centrale, à qui
s'occupe d'urbanisme. C'est une position un peu religieuse, mais c'est un
commentaire général qu'il m'apparaissait important de formuler.
Il est clair que le gouvernement a pris une avenue pour développer, au
fond, l'intervention d'aménagement. Il aurait pu en prendre
d'autres.
En ce qui concerne le maintien des pouvoirs centralisés,
effectivement on revient, au fond, à cette dichotomie entre
aménagement et développement ce projet de loi ne donne
aucun pouvoir nouveau, ni aux municipalités...
Le Président (M. Laplante): Je ne voudrais pas être
impoli avec vous. S'il y avait possibilité de répondre aux
questions, parce que l'Opposition voudrait poser des questions
également, pour essayer de finir autour de 22 heures.
M. McNeil: Je reviens donc immédiatement à votre
question. D'ailleurs, je l'entretenais indirectement. Ce projet de loi ne donne
aucun pouvoir nouveau, ni aux municipalités, ni aux comtés
concernant le choix et la programmation des équipements qui restent, au
fond, de l'autorité des différents ministères provinciaux,
ou des sociétés d'Etat, ou des organismes parapublics qui y sont
concernés et, par conséquent, n'enlève, non plus, aucun
pouvoir à ces organismes. Dans ce sens, nous croyons que la
centralisation des décisions de développement en matière
d'équipement et d'infrastructures provinciale ou interrégionale
reste au niveau du gouvernement et le comté n'a pas plus
d'autorité, ou de responsabilité, ou de pouvoir là-dedans,
qu'il n'en a actuellement. (21 h 45)
Ce problème, par conséquent, soulève le
véritable problème de la décentralisation. Celui, au fond,
de laisser aux unités constituantes sur le plan régional un
certain nombre d'outils ou de pouvoirs de décision concernant, d'accord
avec les autorités provinciales ou en négociation avec elles, la
possibilité de négocier avec le provincial sur une certaine base
les différentes priorités, les différentes programmations
nationales en matière d'équipement et d'aménagement.
Je pense que ceci reflète tout simplement, et c'est dans ce
sens-là que je voulais répondre à votre question... Tabler
sur la stratégie d'une concertation intermunicipale qui donne
matière à un certain nombre d'équipements me paraît
tout à fait souhaitable et louable. On a délimité au fond
un nombre de, je ne sais pas, 90 comtés, regroupant 1500 ou 1600
municipalités et le gouvernement se retrouve devant 90 interlocuteurs au
lieu de se retrouver devant 1500. C'est déjà une
amélioration notable. Mais, entre ce palier de comté et le palier
provincial, on peut imaginer des paliers régionaux à partir
desquels pourrait s'effectuer, effectivement, une négociation sur la
base du développement, donc, des priorités de
développement et des orientations de développement des
régions, donc, une véritable décentralisation des
pouvoirs.
Il est clair, si vous voulez, que le gouvernement maintient tous ses
pouvoirs en matière de développement. Il dit finalement aux
municipalités et aux comtés: Voici ce que j'ai l'intention de
faire dans vos comtés. Arrangez-vous pour placer les meubles comme cela
vous intéresse, mais, quant à la définition des meubles,
cela reste encore ma propre responsabilité.
Comment arriver à éliminer cette dichotomie? Je pense que
c'est en associant, probablement pas au niveau du comté, ce serait trop
petit, mais à un niveau régional, quelque part, une certaine
décentralisation des pouvoirs en matière de développement.
On pose, à ce moment-là, tout le problème du
développement régional, tout le problème de la confection
d'un plan de développement au niveau national et tout le problème
de la planification interrégionale. Ce problème est
complètement laissé de côté par le projet de loi,
mais c'est dans ce sens que nous pouvons parler d'une dichotomie entre les
préoccupations d'aménagement au sens très physique et
spatial du terme par rapport aux préoccupations de développement
qui demeurent essentiellement celles du niveau provincial, et je ne parle pas
du fédéral.
M. Ouellette: Je vous dis que votre deuxième
réponse me chicote un peu parce que le gouvernement soumet un projet de
loi qui s'appelle la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Pour bien des
gens, ce titre se traduit par la loi de la décentralisation
administrative, alors qu'il n'en est rien. Vous nous proposez, enfin, vous
spéculez, vous dites que tôt ou tard il faudra créer un
palier régional regroupant un certain nombre de comtés. Cela
prendra peut-être une autre loi.
M. McNeil: Si on veut décentraliser.
M. Ouellette: Justement, cela me fait peur parce que cela prendra
peut-être une nouvelle loi pour créer ce palier régional et
à ce moment-là j'aurais peur qu'on ne l'appelle la loi de la
centralisation.
M. McNeil: Vous avez raison.
M. Ouellette: Cela irait contre nos objectifs.
M. McNeil: D'ailleurs, je vous dirai bien franchement que la
dynamique qui est créée par la concertation intermunicipale nous
a amenés nous-mêmes d'ailleurs dans notre mémoire à
dire au fond: Est-ce que cette concertation peut rester sur une base
coopérative et volontaire? Est-ce que le comté renouvelé
dont on ignore encore s'il aura d'autres pouvoirs a effectivement, à
l'heure actuelle, les pouvoirs nécessaires pour effectuer cette
concertation intermunicipale? Est-ce qu'il n'est pas trop faible pour accomplir
cette mission? A ce moment-là, il est possible que, vendant ce projet
dans le cadre d'une certaine autonomie municipale, on en arrive
éventuellement à déplacer certains pouvoirs des
municipalités vers les comtés. Ce n'est pas impossible.
M. Ouellette: D'accord, mais pas plus le Code municipal et la Loi
des cités et villes n'interdisent la coopération intermunicipale,
pas plus la loi 125 n'interdira la coopération entre les conseils de
comté renouvelés. Il restera à voir si cela fonctionnera
exactement dans ce sens-là. Sinon, il faudra peut-être un jour
penser à des modifications à la loi ou à une loi
nouvelle.
Mais pour répondre à votre première question, celle
qui touche la perspective de critique de l'urbain, je comprends très
bien le souci que vous mettez, mais vous admettez quand même qu'à
l'article 11 on parle de documents qui seront déposés par l'Etat
au moment de la confection du schéma d'aménagement et des plans
directeurs d'urbanisme. Est-ce que, selon vous, il est possible qu'à ce
niveau, on réussisse à répondre à vos
désirs, c'est-à-dire que le gouvernement puisse faire
connaître de façon précise ses intentions plutôt que
de les mettre dans une loi à portée générale qui
aurait pour effet, par exemple, de prévoir des choses pour la
Gaspésie, mais qui seraient applicables à la ville de
Montréal, alors que les problèmes ne sont absolument pas les
mêmes. Vous ne croyez pas qu'il est plus sage...
M. McNeil: Vous touchez, à mon avis, deux problèmes
différents. Il y a les problèmes urbains graves stricto sensu qui
vont appeler des solutions nouvelles et le problème de la coordination
des actions ministérielles.
En matière de décentralisation, là, il n'y a pas
grand-chose, en ce sens que le document synthèse est
préparé au niveau provincial. Il est ensuite donné aux
comtés, en disant: Ecoutez, voici ce
dont vous devez tenir compte dans l'élaboration de votre
schéma. Les grandes stratégies et les grandes
problématiques qui sous-tendent la programmation des équipements
et donc, les interventions de l'Etat, pourraient fort bien, effectivement,
tenir compte de différentes problématiques de
développement de l'urbain. C'est bien possible, rien n'empêche le
gouvernement de le faire. Il n'y a, non plus, aucune indication que le
gouvernement s'oriente dans ce sens-là encore. Du moins, pas dans ce
projet de loi-là. En fait, il s'appelle projet de loi de
l'aménagement et de l'urbanisme...
Le Président (M. Laplante):...
M. McNeil:... pour moi, cela a un certain sens.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: J'aurais une question, M. le Président. Elle a
trait un peu à la perception que vous avez du nouveau conseil de
comté renouvelé. Cela vous apparaît dans sa constitution
quelque chose d'un peu obscur. Est-ce que vous pourriez préciser
davantage là-dessus?
M. McNeil: C'est-à-dire que c'est basé sur un
organisme qui existe déjà. On nous annonce l'intention du
gouvernement de reformuler ou de renouveler ces comtés. Est-ce que le
gouvernement entend donner d'autres pouvoirs à ces corporations de
comtés, renouvelées ou pas? Je ne sais pas, il n'y a pas de
précision dans ce sens-là dans le projet de loi. Dans ce
sens-là, ça nous paraît obscur, on ne sait pas très
bien de quelle bebite il s'agit puisqu'elle n'est pas définie dans le
projet de loi comme tel. C'est tout ce qu'on voulait dire finalement. On se
pose des questions, c'est tout.
M. Giasson: II vous apparaît quelque peu obscur, parce que
pour l'instant, le projet de loi lui voue un rôle
d'aménagiste...
M. McNeil: De concertation intermunicipale.
M. Giasson: ... c'est-à-dire d'être responsable de
l'élaboration d'un plan d'aménagement.
M. McNeil: C'est cela.
M. Giasson: Pour vous, ça s'arrête là.
M. McNeil: Pour l'instant, oui, et sans aucun autre pouvoir, que
je sache.
M. Giasson: Vous auriez aimé voir quels pouvoirs
additionnels dans les pouvoirs importants, sans vous étendre trop?
M. McNeil: J'avoue que sur ce plan-là, je n'ai pas
d'indications précises. Je ne sais pas, je pense qu'il faut voir les
choses fonctionner. Je pense cependant que dans plusieurs cas, il y aura des
problèmes assez importants de concertation intermunicipale. Il va y
avoir des intérêts contradictoires qui vont jouer. Dans quelle
mesure est-ce qu'il y aura les motivations nécessaires pour que cette
concertation ait lieu? Je n'en sais rien. Tout ce que je sais c'est qu'il y a
une réforme de la fiscalité municipale qui vient d'être
annoncée dans le dernier budget de notre ministre des Finances et qui,
au fond, délimite de façon assez étroite, assez ferme, les
possibilités de développement des budgets au niveau des
municipalités. Il y a un effort de rationalisation des dépenses
dans ce sens-là comme ailleurs.
Dans quelle mesure est-ce que des péréquations fiscales ou
du troc entre municipalités troc, usine d'un côté,
parc de l'autre, je ne sais pas des mécanismes soit
monétaires, fiscalement, ou d'échances de bons
procédés sur le plan des équipements ou des services,
est-ce que le comté va réussir à mettre en place pour
effectivement réussir à faire en sorte qu'un assez large
consensus puisse s'établir sur une option donnée
d'aménagement? Il est évident qu'au niveau des équipements
intermunicipaux au niveau de comtés, ceux qui polluent, on voudra
toujours chaque municipalité voudra que ce soit dans le
terrain du voisin. Celles qui rapportent des ressources fiscales, voudront les
avoir pour elles. Bon! Il va y avoir forcément une négociation
qui va devoir avoir lieu. Est-ce que ça va fonctionner comme une
négociation patronale-ouvrière, qu'on va finir par s'entendre sur
quelque chose qui a de l'allure? Possible, mais est-ce qu'il n'y aura pas des
blocages importants qui vont se manifester à un moment donné?
Est-ce qu'il n'y a pas le risque qu'à un moment donné il y ait
une coalition des deux tiers des votes dans un cas, et que le troisième
tiers, finalement, mange, paie au fond, soit l'espèce de minorité
qui subit des contrecoups de l'accord majoritaire? C'est le jeu de la
démocratie, finalement.
Je ne sais pas si je dois donner des pouvoirs nouveaux aux
comtés. Mais si j'avais à en donner plus, ce seraient
vraisemblablement des pouvoirs qui viennent d'en haut, quant à moi, mais
pas d'en bas. C'est juste une option personnelle. Qui viennent d'en haut, je
veux dire, en termes de développement.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Très brièvement, M. le Président
l'heure avance j'avais une série de questions. Je me
limiterai à une. Le député de Beauce-Nord, au nom du
gouvernement, a dit: Le gouvernement veut négocier, veut parler
d'égal à égal avec les conseils de comté. Vous
dites: Non, loin de là, cela va ressembler à une rencontre entre
une souris et un éléphant. C'est le terme que Mme Charles a
employé. Est-ce que vous pourriez nous donner des indications pourquoi
vous n'êtes pas d'accord avec ce qu'a dit le député de
Beauce-Nord sur ce point précis?
M. de Belleval: ... c'est du côté de la souris.
M. McNeil: Essayons de visualiser un peu comment les choses vont
se passer. Vous avez un document synthèse qui va être produit,
enfin des orientations d'interventions du gouvernement dans le comté qui
vont être produites et qui vont l'être, j'imagine, en fonction
d'une certaine perspective ou d'un certain programme ou d'un certain plan de
développement pour l'ensemble du pays. Alors, on va arriver avec des
documents assez étoffés, on va dire: Voici ce que nous avons
l'intention de faire dans votre comté, compte tenu de tout le reste.
Alors, le comté se retrouve devant cela. Quelle marge de
négociation y a-t-il vis-à-vis de cela, finalement? Pas
grand-chose. La loi lui dit: Ecoute, tu prends cela, tu es obligé d'en
tenir compte dans ton schéma, tu fais ton schéma et tu le
renvoies en haut et là, il y a quelqu'un qui va vérifier si le
schéma que tu as fait est bien conforme aux orientations et aux
intentions du gouvernement. C'est cela que la loi dit, finalement. Je ne dis
pas qu'il n'y aura pas de négociations, qu'il n'y aura pas de
discussions. Mais finalement, on n'a pas deux parties égales dans le
débat. C'est clair pour moi.
M. Goulet: Mais s'il y a divergence, le ministre à un
moment donné ou le cabinet des ministres devra trancher, mais vous
n'êtes pas pour cela. Qui devrait la trancher, la question? Qui devrait
agir comme arbitre?
M. McNeil: Dans la structure actuelle, il est clair que ce ne
peut pas être autre chose qu'une structure politique gouvernementale
actuellement. Eventuellement, dans un projet de société que je
pourrais moi-même imaginer, je souhaiterais une certaine
décentralisation des pouvoirs, une certaine participation de la base aux
grandes décisions nationales et, par conséquent, il faudrait
peut-être trouver un endroit où il y aurait des
négociations et des concertations qui puissent avoir lieu. Mais il reste
que, malgré tout, il faut quand même admettre que les
décisions, en matière d'équipement, qui ont des impacts
sur la fiscalité de l'ensemble des Québécois vont devoir
être prises au niveau du Conseil des ministres, parce que ce sont les
ministres qui sont responsables de la chose.
Ce que je dis, c'est que toute la concertation se fait à un seul
niveau. Il manque un palier intermédiaire quelque part.
M. Goulet: J'aurais d'autres questions, M. le Président.
En tout cas, il est 22 heures...
Le Président (M. Laplante): Merci de votre
coopération...
M. Goulet: Si vous permettez... Que ce soit le ministre, un
député, ou un maire, à un moment donné, il faut
qu'il en appelle au peuple au bout de deux ou quatre ans. Vous ne pensez pas
qu'il faut que la base participe à ce moment, dire si elle d'avis avec
le ministre ou le gouvernement ou les gouvernements, quel que soit le niveau?
Le processus démocratique des élections, l'appel au peuple,
est-ce que vous croyez à cela à 100%, pour la participation de la
base? Parce que vous dites que la base ne participe pas aux décisions
nationales. Elle participe à un moment donné, et si elle n'y
participe assez, elle va le faire savoir au gouvernement ou aux
élus.
M. McNeil: Je vais vous répondre d'une autre façon.
Un vote à tous les quatre ans, sur l'ensemble des politiques
gouvernementales, ce n'est pas cela qui va guider le gouvernement pour savoir
si les problèmes de la population sont respectés. Ceci finalement
ne veut pas dire non plus que je ne crois pas aux mécanismes des
élections.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la
fin.
M. Léonard: J'aimerais vous faire deux commentaires. Nous
avons entendu des réflexions assez élaborées sur le projet
de loi 125. Je crois que c'est un effort de législation sur
l'aménagement et l'urbanisme. Il faut reconnaître que jusqu'ici,
on n'a pas réussi à passer un projet de loi et sur ce plan, c'est
quand même une amélioration. On pourrait faire un projet par cela.
Il reste que quand je pense aux petites municipalités qu'on rencontre
sur le territoire québécois qui n'ont même pas de
règlement de zonage, de réglementation, je veux bien aller au
maximum, mais je dirais qu'on essaie d'être pratique aussi sur ce plan.
(22 heures)
II faut constater qu'en 1975 il n'y avait que le tiers des
municipalités du Québec qui avaient un plan directeur d'urbanisme
et, encore, celles qui en avaient ne l'appliquaient pas toujours. Ce que cela a
visé, c'est au moins d'avoir une loi plus pratique et d'essayer d'avoir
un minimum au moins pour commencer.
Je tiens aussi à rétablir une chose que j'ai
rétablie assez souvent au cours des dernières semaines: Le projet
sur l'aménagement, le projet 125, n'est pas un projet sur la
décentralisation. C'est dans une perspective de décentralisation,
mais ce n'est pas un projet de loi sur la décentralisation. Cela viendra
après, c'est un autre débat, c'est autre chose, mais il y a une
perspective de décentralisation dans le projet de loi.
Par exemple, j'en viens à ma question, vous affirmez que le
projet de loi entérine la primauté des décisions
centralisées de l'Etat, mais quand même, il y a des
éléments du projet de loi qui font que l'Etat dorénavant
s'astreint à un certain processus. Les articles 11, 21, 28, 127, 126,
etc., sont des choses qui n'existent pas présentement. Si on les met,
c'est au moins une amélioration. Je le considère, mais, enfin,
chacun peut garder ses opinions là-dessus ou peut rester sur son "quant
à soi", comme on dit.
Je voudrais aussi apporter un autre élément. Vous dites
que le présent projet de loi entérine également la
primauté des décisions du capital
privé sur les décisions des citoyens dans le
façonnement de nos villes. J'aimerais que vous nous indiquiez à
quels éléments et à quels principes du projet de loi vous
faites référence quand vous nous dites cela.
M. McNeil: Je ne réfère pas au projet de loi. Je
réfère toujours à la problématique
générale. Je dis qu'actuellement, dans le système
économique dans lequel nous vivons, les motivations, les
décisions de développement qui ne viennent pas de l'Etat viennent
du secteur privé et le façonnement de nos villes, à
l'heure actuelle, demeurera, et ce n'est pas le projet de loi qui va y changer
quoi que ce soit je le regrette, mais c'est une opinion tout à
fait personnelle il ne changera rien au fait que nos villes vont
continuer à se développer en fonction d'une croissance
industrielle pour l'emploi et d'une promotion immobilière et tout cela,
basé sur la recherche du profit.
Or, personnellement, je crois que la recherche du profit n'est pas ou
n'est plus une base acceptable comme principe de base des décisions
d'investissement du secteur privé et même du secteur public qui
accompagne ces investissements dans un milieu urbain.
M. Léonard: C'est une motivation qui proviendrait
d'où et qui serait quoi?
M. McNeil: C'est une motivation qui devrait être
basée davantage sur le respect des besoins fondamentaux des citoyens,
comme le logement, motivation qui...
M. Léonard: ... qui se retrouverait au niveau urbain, au
niveau des villes ou des communautés de base. C'est cela?
M. McNeil: Oui.
M. Léonard: Tout ce qui va nous amener à renforcer
la vie de la communauté de base devrait nous...
M. McNeil: Autrement dit, les communautés de base
devraient pouvoir avoir un contrôle beaucoup plus serré sur les
décisions qui se prennent dans le cadre de leur territoire plutôt
que d'avoir des possibilités d'intervention et de développement
dans ces...
M. Giasson: ... quand même, en dépit de vos
considérations.
Le Président (M. Laplante): II n'y aura pas de
consentement.
M. Léonard: II n'y aura pas de consentement? En tout cas,
je vous remercie beaucoup. On pourrait continuer...
Le Président (M. Laplante): Mesdames et messieurs, les
membres de cette commission vous remercient de votre participation. Avant
d'ajourner...
M. Fontaine: Si M. le ministre...
M. Giasson: II ne faudrait pas que cela dépasse minuit,
cependant.
Le Président (M. Laplante): Merci. Avant d'ajourner les
travaux, je vais vous donner les organismes qui seront entendus demain: l'Union
des conseils de comté des municipalités locales du Québec,
mémoire no 37; le Conseil régional de développement de
l'Est du Québec, la Conférence municipale de l'Est du
Québec, mémoire no 28; un groupe d'étudiants de
l'Université du Québec à Montréal, no 21;
Bell-Canada et Telbec Limitée, mémoire no 30.
Les travaux sont ajournés à demain, 10 heures.
Une Voix: Quatre mémoires. Fin de la séance
à 22 h 5
ANNEXE
Mémoire sur le projet de loi 125
portant sur l'aménagement et
l'urbanisme
adressé à la commission
parlementaire
par la ville de Gaspé
Gaspé, le 29 mars 1979
Aux membres de la Commission Parlementaire siégeant sur le projet
de loi numéro 125. Messieurs,
La Ville de Gaspé a jugé bon de présenter aux
membres de cette Commission, certaines représentations suite à la
publication du projet de loi numéro 125, à cause du
caractère particulier de la Ville de Gaspé et surtout à
cause de l'impact que la nouvelle loi sur l'aménagement du territoire et
sur l'urbanisme aura sur des villes, telle que la nôtre.
Nous aimerions, dans un premier temps, faire un bref historique de la
situation de la Ville de Gaspé, dans un deuxième temps, vous
faire part de sa structure actuelle et de son fonctionnement et finalement,
vous faire part, en troisième lieu, des solutions que nous proposons et
de l'amendement que nous proposons à la loi.
Tout d'abord, nous devons vous informer que onze (11) des
municipalités qui composent, à l'heure actuelle, la Ville de
Gaspé, étaient incluses dans l'ancienne structure du comté
de Gaspé-Est qui se décrivent comme suit: (1964-SRQ, chapitre 5).
1- Le district électoral de Gaspé-Sud, moins les villes de
Chandler et Gaspé. 2- Dans le district électoral de
Gaspé-Nord, les seigneuries de Grande-Vallée, des Monts et de
l'Anse de l'Etang, des Cantons de Blanchet, de Beaujeu, Cloridorme.
Evidemment, l'ancienne Corporation Municipale de Gaspé
était excluse de cette Corporation du Conseil de Comté de
Gaspé-Est, vu que cette ville était régie par la Loi des
Cités et Villes.
Le 17 juillet 1970, le Gouvernement Provincial adoptait le Bill 29,
créant le Parc Forillon. Par ce Bill, on a établi que les
municipalités comprises dans les nouvelles villes de Gaspé et
Percé se voyaient, en vertu de l'article 10 de cette loi, interdire
toute construction, reconstruction, transformation, addition ou implantation
nouvelle de bâtiments, sauf pour fin agricole et ce, jusqu'au 30 juin
1971. De plus, à cette même date, la confection de tout plan de
division ou de subdivision de terrain était interdite dans ce territoire
de même que la modification ou l'annulation du livre de renvoi d'une
subdivision.
Le 19 décembre 1970, la Législature Provinciale adoptait
le Bill 67 et créait une nouvelle structure qui s'appelait la Ville de
Gaspé.
Cette nouvelle structure regroupait les municipalités
mentionnées à l'article 2 de cette loi et permettez-moi de vous
les répéter ici: il s'agissait des municipalités de Baie
de Gaspé-Sud, Grande-Grève, Haldimand, l'Anse-aux-Griffons,
Rivière-au-Renard, St-Alban de Cap-des-Rosiers, St-Majorique, York, la
municipalité de la paroisse de St-Maurice, la municipalité des
cantons de Baie de Gaspé-Nord et de Douglas et la Ville de Gaspé.
Par la création de cette nouvelle structure, d'un territoire d'une
superficie de 938.875 kilomètres carrés, le Gouvernement
créait la nouvelle Ville de Gaspé.
A l'article 19 de ce même Bill 67, le Gouvernement forçait
la municipalité à adopter, dans les 24 mois suivant la date
fixée à l'article 18, la confection d'un plan directeur de tous
les territoires de la municipalité et de rendre ce plan obligatoire. Le
règlement à cet effet, ou tout règlement le modifiant, ne
requérait que la seule approbation de la Commission Municipale.
La Ville de Gaspé n'a adopté son plan directeur du
territoire qu'au cours de l'année 1976. A la suite de l'adoption de ce
plan directeur, évidemment, la Ville créa une Commission
d'Urbanisme et procéda à l'aménagement de tout son
territoire.
Par la création de la nouvelle Ville de Gaspé, le
Gouvernement imposait aux citoyens une structure de fonctionnement nouvelle.
Celle-ci fut difficilement acceptée et, par la force des choses, les
citoyens durent apprendre à fonctionner avec cette structure.
Conformément à l'article 19, dont je vous parlais
précédemment, la Ville s'est dotée d'un plan directeur et
a aménagé son territoire de la façon suivante: l'ancienne
Corporation Municipale de Gaspé était et est devenue un centre de
services pour le territoire de la nouvelle ville. D'ailleurs, le Gouvernement
lui-même lui a reconnu ce titre en la désignant capitale des
pêches.
Rivière-au-Renard, l'une des plus importantes
municipalités dans la nouvelle structure de la Ville de Gaspé,
est devenue le centre de pêche le plus important au Québec.
D'ailleurs, le Ministère de l'Industrie et du Commerce y a construit un
parc industriel de pêche qui fait l'orgueil de nos citoyens.
Par la création du Parc Forillon par le Bill 29, le Gouvernement
Fédéral a instauré un parc national qui touche les
anciennes municipalités de l'Anse-aux-Griffons, Cap-des-Rosiers et Baie
de Gaspé-Nord. Il y a eu l'implantation d'infrastructures dans ce parc
national qui sont d'une importance considérable et l'aménagement
de tout ce territoire est irrévocable à notre avis.
La vocation et l'utilisation de notre territoire ont été
fixées par les autorités gouvernementales en fonction de deux
sources de revenus déterminées par des études innombrables
et une réalité actuelle: les pêches et le tourisme.
Ce que nous déplorons, à ce stade-ci, c'est que la loi sur
l'aménagement du territoire n'ait pas été en vigueur en
1970. Ceci aura peut-être permis à notre population, à ce
moment-là, de déterminer elle-même la vocation et
l'utilisation de son territoire. Après avoir vécu l'imposition de
structures, nous comprenons très bien que plusieurs municipalités
désirent elles-mêmes fixer la vocation de leur territoire;
d'ailleurs, le Gouvernement abonde en ce sens et nous sommes pleinement
d'accord avec la loi sur l'aménagement du territoire car il faut que ce
soit les citoyens qui décident de quelle façon ils doivent
aménager leur territoire et non pas que l'aménagement de celui-ci
soit déterminé par quelques fonctionnaires à Québec
ou à Rimouski. A cet égard, nous réitérons encore
notre appui à l'adoption de la loi 125.
Cependant, vu que la vocation de notre territoire a été
déterminée, que nous avons appris, par la force des choses,
à vivre avec cet aménagement, que nous nous sommes donnés
la structure administrative pour vivre en fonction de cet aménagement et
en fonction des besoins de notre population, nous ne serions pas prêts
à être intégrés dans une nouvelle structure
administrative qui alourdirait notre fonctionnement.
Pendant plusieurs années, nous nous sommes bâti une
organisation administrative tenant compte du territoire et des problèmes
que nous avions et nous ne voudrions pas être intégrés dans
une nouvelle structure qui s'appellerait Conseil de Comté.
Ce n'est pas que nous ne désirons pas travailler avec nos
collègues des villes voisines dans le but d'aménager notre
territoire, mais vu que le nôtre est actuellement aménagé
en fonction des critères que je vous ai établis
précédemment et que nous avons une structure de fonctionnement
que nous avons dû perfectionner et qui nous a demandé des efforts
considérables, nous ne voyons pas comment nous pourrions nous
intégrer dans une seconde structure et fonctionner convenablement.
Nous sommes pleinement d'accord avec les principes émis dans le
projet de loi 125, mais cependant, nous considérons que le territoire
que nous avons actuellement à desservir est géographiquement
grand, accapare toutes nos énergies et nous force à concentrer
nos efforts dans ce territoire.
Nous anticipons des responsabilités qui devront être
dévolues au Conseil de Comté à la suite de l'adoption de
la loi sur l'aménagement du territoire et nous croyons que pour prendre
nos responsabilités présentes et futures, la structure que nous
possédons actuellement est la seule structure à
l'intérieur de laquelle nous pourrions fonctionner convenablement.
Nous constatons que cette structure a, à l'heure actuelle, des
lacunes relativement à la représentation de la population au sein
du Conseil de Ville de Gaspé et nous faisons, auprès de d'autres
autorités gouvernementales, des pressions afin que les principes
établis par le gouvernement, relativement à la démocratie
municipale, soient respectés et mis en application dans notre
milieu.
Nous tenons simplement à faire part aux législateurs que
l'étendue de notre territoire, la structure de fonctionnement que nous
possédons actuellement, ne peuvent être modifiées et forcer
la Ville de Gaspé à s'intégrer dans une autre structure
qui amènerait la population de notre ville à traverser une
période très difficile et nous croyons que nous avons eu notre
part de problèmes. Nous vous faisons, tout simplement part que la
population a difficilement accepté la fusion de la Ville de Gaspé
et ce n'est qu'après de multiples années que nous en sommes venus
à l'accepter de façon relative. Si le Gouvernement devait
intégrer la Ville de Gaspé dans une super-structure qui
s'appellerait Conseil de Comté, il faudrait alors songer
sérieusement à faire en sorte que la Ville de Gaspé soit
défusionnée afin que toutes et chacune des anciennes
municipalités s'intègrent, par la suite, dans un Conseil de
Comté dont le territoire devrait être déterminé par
ses composantes.
Evidemment, si nous parlions de défusion de la Ville il faudrait
alors tenir compte des règlements qui sont en application et qui
touchent l'ensemble des électeurs et il faudrait trouver des modes pour
que la pension alimentaire, après le divorce, soit payée par
quelqu'un. Le Conseil Municipal ne se sent pas la force d'entreprendre ce
travail de Titan et se demande qui paierait la note.
En guise de conclusion, nous aimerions, tout simplement, soumettre que
l'article 142 du projet de loi 125 devrait être modifié afin d'y
ajouter le paragraphe 4 qui devrait se lire comme suit: "le Gouvernement peut
décréter certaines corporations locales fusionnées,
corporations de comté".
C'est le but visé par la Ville de Gaspé de se faire
reconnaître comme corporation de comté afin d'assurer le
mieux-être de ses citoyens et afin de rendre la plus effective possible,
la structure actuellement existante, laquelle structure fut imposée
à ses citoyens et avec qui ceux-ci, par la force des choses, ont
dû apprendre à vivre.
Cette fusion fut difficile, mais les années nous ont
forcément appris à vivre avec elle et il ne faudrait pas que les
citoyens de ce secteur du Québec aient à traverser une
décennie aussi ardue que la dernière.
ROBERT PIDGEON, Maire, Ville de Gaspé.