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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Wednesday, April 25, 1979 - Vol. 21 N° 51

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions concernant le projet de loi no 125 - Loi sur l'aménagement et l'urbanisme


Journal des débats

 

Projet de loi no 125

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, messieurs! La commission des affaires municipales se réunit afin de recevoir les mémoires pour l'étude du -projet de loi 125. Les membres de cette commission sont: MM. Brassard (Lac-Saint-Jean), Caron (Verdun) remplacé par Giasson (Montmagny-L'Islet); Cordeau (Saint-Hyacinthe) remplacé par Goulet (Bellechasse); de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Gratton (Gatineau) remplacé par Goldbloom (D'Arcy McGee); Guay (Taschereau) remplacé par Chevrette (Joliette-Montcalm); Mercier (Berthier), Ouellette (Beauce-Nord), Shaw (Pointe-Claire), Tardif (Crémazie) remplacé par Léonard (Laurentides-Labelle).

Les intervenants sont: MM. Alfred (Papineau), Charbonneau (Verchères) remplacé par Marquis (Matapédia); Fontaine (Nicolet-Yamaska) remplacé par Cordeau (Saint-Hyacinthe); Lacoste (Sainte-Anne), Léonard (Laurentides-Labelle) remplacé par Tardif (Crémazie); Samson (Rouyn-Noranda), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Vaugeois (Trois-Rivières).

M. Goldbloom: M. le Président, je pense que mon nom paraissait comme intervenant; pourriez-vous inscrire à sa place celui de M. Caron, député de Verdun?

Le Président (M. Laplante): M. Caron (Verdun) remplace M. Goldbloom (D'Arcy McGee) comme intervenant.

Y a-t-il d'autres changements?

Les mémoires qui seront entendus aujourd'hui, les organismes convoqués: l'Union des conseils de comté et des municipalités locales du Québec, — il me semble avoir vu le plus petit d'entre eux... Il est là, bonjour — le Conseil régional de développement de l'Est du Québec, la Conférence municipale de l'Est du Québec — ils sont arrivés — le groupe d'étudiants de l'Université de Montréal — merci — Bell Canada et Télébec Ltée — merci — II y a juste le Conseil régional de développement de l'Est du Québec qui n'est pas ici.

M. Léonard: Je les ai vus au Parlementaire ce matin.

M. Chevrette: Ils sont en train de prendre un café.

Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant l'Union des conseils de comté et des municipalités locales du Québec. Monsieur, je pense que vous avez l'habitude des commissions parlementaires. Vous identifiez votre groupe aux fins du journal des Débats, ainsi que vous-même et les personnes qui vous accompagnent. Je vous de- manderais d'essayer de vous limiter à 20 minutes pour la lecture de votre mémoire.

Union des conseils de comté et des municipalités locales du Québec

M. Moreau (Jean-Marie): Merci, M. le Président, mon nom est Jean-Marie Moreau, je suis accompagné ce matin de M. Eugène Letendre, qui est vice-président de l'union, de Me André Nadeau et de M. Elias Houde, qui est directeur de l'exécutif de l'Union des conseils de comté du Québec.

Sans plus tarder, M. le Président, j'aimerais vous remercier pour commencer de nous permettre d'exprimer notre opinion au nom des municipalités rurales du Québec en ce qui concerne la loi 125 sur l'aménagement du territoire.

Contrairement aux projets antérieurs de 1972 et 1976 portant sur les mêmes sujets, le projet de loi no 125 veut charger les conseils de comté de l'application des règles d'aménagement du territoire québécois à l'exclusion des territoires regroupés en communautés urbaines et régionales existantes.

Pour réaliser les fins d'aménagement, le projet de loi prévoit la participation des municipalités régies par la Loi des cités et villes aux conseils de comté. Depuis plusieurs années, l'union était favorable à une telle politique et l'a demandée dans divers mémoires au gouvernement. Nous ne pouvons que souscrire à ce principe, M. le Président.

Il faudrait bien se rendre compte qu'il s'agit de l'aménagement du territoire et que ce dernier se trouve en très grande partie à l'intérieur des municipalités régies par le Code municipal et que la législation doit être orientée en respectant les droits traditionnels de ces municipalités.

Des consultations ont été faites auprès des préfets de comté réunis en assemblée spéciale à Québec le 10 mars 1979 et, à partir de ces discussions et suggestions, nous avons préparé le présent mémoire.

Suivant cette législation, si elle était acceptée telle que présentée, il existerait deux sortes de conseils de comté, soit celui qui existe actuellement et le nouveau créé seulement aux fins de l'aménagement du territoire. Le milieu rural est un peu perplexe devant le projet de loi et il s'interroge sur le sort futur des conseils de comté actuels. Une confusion certaine découlerait de ces nouvelles structures. Ce ne serait donc pas le comté actuel qui procéderait au schéma d'aménagement. (10 h 15)

Ce n'est pas aux comtés actuels que le projet fait référence. Cependant, le projet actuel va continuer d'exister avec les mêmes pouvoirs qu'actuellement. Alors, que vient faire le conseil de comté actuel dans le cadre de cette loi? La création des nouveaux conseils de comté par l'émission de lettres patentes peut créer de la confusion et même des injustices si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle.

D'après l'article 142, le gouvernement peut, par lettre patente, modifier le territoire des conseils de comtés, défini à l'article 13 de la loi de la division territoriale, Statuts refondus, 1964. Le gouvernement peut aussi, par lettres patentes, créer de nouvelles corporations de comté et définir leur territoire. Le gouvernement peut, en tout temps, modifier les lettres patentes délivrées en vertu du présent article. Le gouvernement a le pouvoir absolu et quel sera le recours des municipalités qui seront impliquées dans ces nouvelles structures et qui seront obligées de faire partie du nouveau conseil de comté dont les limites seront très différentes des limites actuelles? Le gouvernement n'a-t-il pas un pouvoir trop grand?

Nous croyons que cette réforme doit essentiellement partir des 71 comtés actuels, afin de ne pas heurter inutilement les traditions d'une part et, d'autre part, respecter l'appartenance psychologique, prendre le temps de bien faire.

Le financement. Cette législation va apporter des responsabilités nouvelles aux conseils de comté et, nécessairement, des obligations financières très onéreuses. Les coûts croissants de l'administration des conseils de comté, notamment au titre de l'évaluation foncière, ont atteint un plafond tel, que nous ne pouvons plus demander un apport fiscal supplémentaire aux municipalités locales et aux contribuables, parce que l'écart entre le coût actuel et les coûts antérieurs est énorme.

La participation des villes, l'augmentation du nombre des assemblées de conseil, l'élaboration du schéma, sont des activités qui augmenteront considérablement les budgets des comtés. Quelles seront les nouvelles ressources financières? La réforme de la fiscalité municipale apportera-t-elle une solution? A ce moment, nous ignorons le contenu du discours du budget, mais aujourd'hui, on le connaît, M. le Président. Mais il avait été — c'est $2,5 millions — formellement entendu que la réforme fiscale donnant des revenus accrus aux municipalités serait pour les obligations et responsabilités existantes au moment de la réforme et non pour des responsabilités futures.

L'Etat, s'il donne suite à son projet de décentralisation et confie à l'organisme régional, par le biais des gouvernements locaux, des responsabilités additionnelles, devrait, par la même occasion, transférer les moyens financiers correspondants et, évidemment, par le biais des gouvernements locaux.

Nous nous interrogeons sérieusement sur la question et prions le gouvernement de faire connaître le mode de financement de cette nouvelle politique, afin de rassurer les représentants du monde municipal, face à cette législation, car l'expérience de la responsabilité et de la confection des rôles d'évaluation, au point de vue financier, rend les maires un peu méfiants.

La consultation. Nous sommes d'avis que le processus de consultation obligatoire mentionné au projet de loi est exagéré. Les délais sont trop longs. Il y aurait lieu de simplifier cette procédure tout en laissant aux intéressés le droit de se faire entendre dans des délais raisonnables. A force de trop consulter, il pourrait être quasi impossible d'atteindre les buts visés et n'importe quelle association ou groupement adverse pourrait freiner la bonne marche du projet pour des motifs futiles et cela pourrait augmenter les coûts.

Paradoxalement, on constate que jamais les citoyens ne peuvent agir avec autorité. Ils sont informés, mais nul n'est tenu de tenir compte de leur avis. Même le référendum prévu à l'article 24, n'a qu'une valeur consultative, M. le Président. Cela prête à réflexion et peut ressembler à une quelconque approbation, par avance, des décisions virtuellement déjà prises.

Le projet de loi no 125 et la loi 90 sur le zonage agricole. Enfin, il est impératif d'harmoniser l'aménagement du territoire avec le zonage agricole. Ces deux politiques doivent définitivement aller de pair. Il serait opportun que le ministre Léonard dépose le texte des modifications qui seront apportées au projet de loi pour tenir compte des principes contenus au titre traitant de l'harmonisation des deux lois.

Sans vouloir commenter ce projet de loi, article par article, nous voudrions faire certaines suggestions afin de le rendre plus acceptable à nos membres.

Article 142. Etant donné les remarques faites dans l'introduction concernant la propriété du territoire, nous suggérons que l'article 142 soit remplacé par le suivant: "Que chaque corporation de comté actuelle soit seule habilitée à demander les lettres patentes, avec pouvoir de modifier ses limites internes pour fins d'aménagement du territoire et d'établir les modes et critères de représentativité des villes à ces fins y compris, si nécessaire, la possibilité d'accorder au comté et aux villes un droit de veto."

La plus grande proportion de l'espace à aménager, M. le Président, réside sous la juridiction des municipalités rurales. Ce sont elles qui devraient avoir le droit exclusif de l'aménagement tout en tenant compte de l'harmonisation essentielle avec les tissus urbains.

Il ne faudrait pas que les villes profitent — cela, c'est sans préjudice, M. le Président, à nos amis des villes — de la loi pour se créer des conseils de comté à leur goût incluant seulement quelques municipalités limitrophes à leur ville et abandonnant les autres à leur sort. C'est une crainte bien légitime et c'est la raison de cette demande de modification.

Ici, je n'ai qu'à citer le mémoire de la ville de Granby pour affirmer que c'est comme cela que cela se passerait dans plusieurs endroits au Québec. Ce serait là précisément contraire à l'esprit de ce projet de loi.

L'élaboration du schéma. Nous suggérons que l'article 9 soit modifié en remplaçant "aux frais de" par "par le" et que l'article 10 soit amendé en biffant "ou de l'entrée en vigueur d'une ordonnance du ministre prévue à l'article 4."

Il y aura trop de paperasse aux frais des municipalités locales pour le compte du conseil de comté.

Les articles 12 et 13 pourraient demeurer tels quels. Quant aux autres articles, ils devraient contenir les principes suivants:

II y aurait lieu de procéder par avis publics affichés selon les exigences du Code municipal. Cet avis contiendrait les buts visés par le conseil, avec indication que les documents sont disponibles au bureau du secrétaire-trésorier et qu'une assemblée publique sera tenue à une date déterminée avec délais raisonnables et que toutes les personnes ayant des objections ou désirant des informations supplémentaires devront se présenter et le conseil, après cette assemblée, sera en mesure de prendre position pour l'adoption d'un schéma d'aménagement.

Le comté, après avoir adopté son règlement, avec ou sans amendements, publie un avis dans un journal que le règlement est disponible au bureau de chaque municipalité et qu'il prendra effet à une date déterminée et que les électeurs ont, pendant ce délai, le droit de faire toutes les représentations qu'ils désirent.

Pour ce qui concerne le pouvoir d'emprunt, les articles 46 et 69 du projet de loi interdisent aux corporations locales d'emprunter pour fins de travaux publics sans qu'un avis du conseil de comté ne soit soumis à la commission municipale.

Ces articles devraient être restreints et précisés, car ils sont trop contraignants inutilement.

Cela ne devrait être qu'un certificat et non un avis émanant du comté dans le sens que les travaux projetés ne sont pas contraires au schéma d'aménagement et au projet. De la sorte, le conseil de comté n'a pas à intervenir, ni à donner d'opinion, lorsque cela ne le concerne pas.

En d'autres mots, les travaux ne pourraient être bloqués que s'ils sont contraires au schéma.

Par exemple, nous ne voyons pas pourquoi il faudrait l'opinion d'une municipalité membre du nouveau comté située à plusieurs milles de la municipalité concernée, lorsqu'elle désire emprunter pour asphalter une rue ou autres travaux publics du même genre. C'est de l'ingérence inutile.

Pouvoirs et obligations du gouvernement. L'intervention du gouvernement ne devrait se faire que pour des motifs et intérêts nationaux.

Le gouvernement et toutes les sociétés d'Etat et de la couronne devraient être aussi liés par le schéma préparé par les comtés.

Nous suggérons, pour ce qui concerne l'adoption du schéma, que l'article 25 soit modifié, afin que le règlement ne soit adopté que par la majorité simple des membres présents au conseil, si nous voulons réellement parvenir à des résultats positifs.

Nous nous interrogeons sur la nécessité d'avoir un délai aussi long que 90 jours à l'article 27.

Ce projet de loi devrait comporter deux étapes distinctes: dans une première étape, à partir des 71 comtés actuels, chacun de ces comtés devrait obligatoirement, dans un délai déterminé, demander des lettres patentes pour les comtés renouvelés et le droit de modifier leurs frontières internes, de façon à inclure les villes à l'intérieur de leurs limites. Ils seraient les seuls habilités à le faire.

Dans une seconde étape, un processus d'aménagement plus avancé pourrait être élaboré conjointement avec les villes et, le cas échéant, avec les comtés voisins, le tout tendant vers le but final d'un aménagement mieux orienté, sauvegardant la qualité de vie.

Les effets de l'entrée en vigueur du schéma. Ce projet de loi vise-t-il un schéma d'aménagement ou un plan d'urbanisme? Et nous posons la question. Nous sommes en droit de nous poser la question, en analysant les articles 33 et suivants. En ce qui concerne le contrôle intérimaire, cette section est un gel qui peut causer de nombreux embarras aux administrateurs municipaux.

Dans le cas des municipalités qui n'ont aucun règlement de zonage, d'urbanisme ou de construction, les conseils de comté pourraient y suppléer avantageusement pendant la période transitoire de mise en place. Ici, c'est l'application de l'article 58 qui s'impose. Le plan d'urbanisme d'une municipalité — le titre de ce chapitre devrait se lire: Le schéma et le plan d'urbanisme d'une municipalité, ce qui concorderait davantage au contenu des articles 79 et suivants et ferait le pendant du schéma de comté. Le plan dont il est question à cet article du projet de loi s'apparente plus à un schéma directeur des équipements qu'à un plan d'urbanisme.

La zone d'intervention spéciale. Ce chapitre devrait prévoir la possibilité d'une indemnité et comprendre un article semblable à l'article 43 de la Loi sur les biens culturels. Je cite l'article 43: "Toute personne peut obtenir du ministre une indemnité pour les dommages qu'elle subit en raison de l'application des articles 41 et 42. A défaut d'entente entre les parties, l'indemnité prévue au présent article est déterminée par la Régie des services publics à la requête du ministre ou de la personne intéressée, conformément aux articles 780 et 785 du Code de procédure civile. Nulle indemnité ne doit cependant être versée à une corporation dont plus de la moitié des dépenses de fonctionnement sont défrayées à même les deniers publics."

Le territoire des corporations de comté. Nous suggérons que l'article 142 se lise comme suit: "Toute corporation de comté doit, dans les 18 mois de l'entrée en vigueur de la loi, présenter au gouvernement une requête en vue d'obtenir des lettres patentes lui permettant de modifier ses frontières internes pour fins d'aménagement de territoire."

Organisation et fonctionnement des corporations de comté. L'article 159 devrait se lire comme suit: "Le conseil d'une corporation de comté créé par lettres patentes se compose du maire de chaque municipalité qui en fait partie. L'administrateur d'une municipalité constituée en vertu de la Loi de l'organisation municipale de certains territoires fait également partie du conseil de la corporation de comté, mais ne peut être élu à titre de préfet."

L'article 160 se lirait comme suit: "Chaque municipalité est représentée au conseil de comté par son maire. Un droit de véto est cependant accordé au représentant d'une municipalité régie par la Loi des cités et villes et au préfet de comté, ce dernier agissant à la majorité simple des maires des municipalités régies par le Code municipal, siégeant au conseil de comté."

Dispositions générales. L'article 208 du projet de loi nous laisse perplexes. Il est écrit que le titre II de la loi a préséance sur toute disposition. Il faudrait dire: La présente loi a préséance sur tout. C'est là une condition essentielle à l'harmonisation du présent projet de loi et de la loi 90 sur le zonage agricole.

Les paragraphes b) et d) devraient être biffés, sinon l'esprit même de ce projet de loi souffrira d'un accroc impensable. Veut-on que les villes soient intégrées aux comtés ou non?

Quant à l'article 209, il devrait être réécrit, car il n'est pas clair et porte à confusion. Tel que rédigé, nous sommes sous l'impression que le territoire actuel des municipalités de comté serait modifié non seulement pour l'aménagement du territoire, mais pour toute autre fin. Veut-on, par cet article, faire disparaître les municipalités actuelles de comté? (10 h 30)

On est en droit de se poser la question, car il semble se dégager de ce projet de loi une certaine continuité de pensée que nous avons vécue il y a quelques années. Avec ce projet de loi, il existerait de nouveaux conseils de comté, créés par lettres patentes, qui feraient disparaître les anciens. Ne serait-ce pas là la réalisation d'un rêve de certains fonctionnaires?

Nous nous interrogeons sérieusement.

Les articles 216 et 217. Toutes les dispositions devraient plutôt se retrouver à l'annexe "A".

Toutes les dispositions de la Loi des cités et villes et du Code municipal ayant trait à l'urbanisme devraient être retirées de ces deux lois pour faire partie intégrante du projet de loi.

Voici certains exemples: l'article 393a du Code municipal au complet, article traitant des subdivisions et resubdivisions, l'article 400 traitant des cartes, plans ou arpentage de la municipalité.

Il serait important d'ajouter au projet de loi un chapitre sur les officiers dont le comté aura besoin pour exercer ses nouveaux pouvoirs, semblable à ce que prévoit la Loi sur l'évaluation foncière.

En conclusion, M. le Président, notre union souhaite l'adoption d'une loi en aménagement du territoire et urbanisme. Elle est heureuse de constater que le gouvernement a enfin reconnu le comté municipal comme une structure politique administrative. Elle suggère que la décentralisation soit gouvernée plus tard par une législation plus appropriée et spécifiquement étudiée dans cette perspective car "qui trop embrasse, mal étreint".

En voulant réaliser d'un seul coup l'aménagement et la décentralisation, le risque est bien grand de manquer l'un et l'autre. Nous vous soumettons ces remarques en toute objectivité, escomptant que le gouvernement en tiendra compte. La devise de notre union "Unis pour servir" sera mise à l'épreuve dans l'application du projet de loi. Nous sommes disposés à collaborer avec le gouvernement en informant nos membres dont certains sont méfiants pour avoir vécu dans le passé des tentatives d'assimilation de la part du gouvernement.

Nous insistons donc fermement pour que le caractère rural des municipalités soit sauvegardé; que le phénomène d'urbanisation ne fasse pas table rase de nos valeurs et n'évolue pas plus vite que ne peut l'absorber la population.

Que la consultation, sans aller jusqu'à retarder indûment le processus, soit assez bonne pour que la population chemine vraiment avec les élus.

Nous apprécions grandement la bonne collaboration du ministre Jacques Léonard avec notre union, sa participation à l'assemblée d'information aux préfets et la collaboration des officiers de son ministère.

M. le Président, au nom de l'Union des conseils de comté du Québec, je vous remercie de nous avoir entendus et voilà notre manifeste.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le Président. M. le ministre.

M. Léonard: M. le président de l'Union des conseils de comté, je remercie les dirigeants de l'Union des conseils de comté du Québec pour la présentation de leur mémoire et, en particulier, je voudrais saluer leur président, M. Moreau, pour l'intensité et la qualité du travail qu'il a fait au sein de son union depuis déjà plusieurs années. Je salue aussi ceux qui l'accompagnent.

Depuis la conférence Québec-municipalités, nous avons longuement, au sein du comité technique des fonctionnaires et au sein du comité d'orientation politique, discuté d'aménagement et d'urbanisme.

Mon collègue, M. Tardif, qui est à mes côtés, et moi-même, avons pris le temps — je pense qu'il fallait — avec les représentants de votre union et ceux de l'Union des municipalités, de discuter des principes de base du projet de loi 125.

Il nous paraissait indécent de préparer un projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme sans s'associer avec nos partenaires municipaux pour définir les grands paramètres de ce projet. C'est ce que nous avons fait ensemble.

Nous avions aussi convenu, au mois de décembre 1978, de déposer un projet de loi afin d'amorcer une discussion publique sur l'aménagement et l'urbanisme de façon à bonifier le projet qui serait mis sur la table.

Durant la tournée que j'ai effectuée dans les régions du Québec, dans toutes les régions du Québec au cours, notamment, des mois de février et mars, j'ai rencontré beaucoup de gens de votre union qui m'ont exposé leur opinion. J'ai assisté aussi à votre journée d'étude du 10 mars avec mes principaux fonctionnaires et, là aussi, nous avons écouté les expressions d'opinions qui ont été formulées.

II me semble, en entendant vos propos, qu'on peut dire que le projet de loi 125 reflète, de façon générale, les principes de base sur lesquels nous nous étions entendus avant le dépôt du projet de loi.

Je remarque aussi que vous êtes d'accord avec le principe de la cohabitation au sein d'une structure intermunicipale, des municipalités régies par la Loi des cités et villes et celles régies par le Code municipal. Ce sont là des consensus qui me réjouissent et je pense que la persévérance de M. Moreau et de ses collaborateurs dans leur travail y est pour beaucoup à la tête de ces consensus.

Je voudrais d'abord formuler quelques commentaires généraux avant d'aborder de façon plus détaillée vos réactions sur les articles du projet de loi qui traitent plus spécialement d'aménagement et d'urbanisme.

Sur le financement, vous vous interrogez sur les conséquences financières de l'élaboration des schémas et des plans d'urbanisme. Je rappellerai que M. Parizeau, dans le discours du budget prononcé il y a maintenant un mois, a fourni un certain nombre d'éléments à ce sujet. "Quant aux conseils de comté renouvelés — je cite — tels que définis dans le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme, ils seront constitués de représentants des municipalités membres. Pour les fins de cette loi, ils seront financés au départ par un programme d'aide. Ce programme est mis au point au nom du principe déjà énoncé que toute responsabilité nouvelle sera assortie d'une source de financement. Ce programme couvrira les dépenses raisonnables entraînées par l'élaboration et la mise en application d'un schéma d'aménagement ainsi que les frais de fonctionnement du conseil de comté pour l'exercice de cette fonction. "En conséquence, pour l'année financière 1979/80, une somme de $2 100 000 a été prévue au budget et pour ce qui est du financement à moyen et long termes des comtés renouvelés, le comité conjoint d'orientation sur l'aménagement et la décentralisation étudiera cette question et fera des propositions au gouvernement." Fin de la citation.

Sur l'harmonisation de la loi 125 et de la loi 90, vous demandez que les modifications soient déposées le plus rapidement possible. Je vous signale que les éléments d'une harmonisation ont déjà fait l'objet d'un accord de principe au sein du Conseil des ministres et que cet accord s'est traduit dans le document que nous avons rendu public le 21 décembre dernier en même temps que le dépôt du projet de loi.

Essentiellement, ce document affirmait l'absolue nécessité de protéger de façon permanente notre territoire agricole québécois et il était reconnu que les élus locaux devaient avoir la responsabilité d'aménager leur territoire. A la suite de la présentation des mémoires de tous les intervenants de cette commission parlementaire, les modifications juridiques seront alors déposées. A l'époque, ce document était justement déposé pour fins de consultation.

Quant au pouvoir du gouvernement, vous indi- quez que celui-ci ne devrait se faire que pour des motifs et intérêts nationaux. En pratique, je pense que c'est ce qui va se passer. Vous comprendrez qu'il est difficile de préciser dans un projet de loi tout ce qui devrait être les atouts ou tout ce qui devrait être les intérêts nationaux du gouvernement. L'important, c'est que le gouvernement suive des règles claires et connues publiquement d'avance de façon à ce que ses partenaires municipaux sachent à quoi s'en tenir.

Je vous rappelle aussi que le gouvernement et ses mandataires se trouveront liés par le schéma d'aménagement, selon l'article 127, ce qui évitera aussi les interventions discrétionnaires sur le territoire comme cela se fait maintenant ou comme cela peut se faire maintenant.

Vous demandez de reconnaître la possibilité d'indemnité si le gouvernement, pour des motifs d'intérêts nationaux, décrète une zone d'intervention spéciale. C'est une question que nous allons examiner.

Vous êtes d'accord aussi en très grande partie avec les dispositions du projet de loi 125 concernant les instruments de planification, particulièrement en ce qui a trait au contenu obligatoire et facultatif du schéma d'aménagement, au contenu obligatoire et facultatif du plan d'urbanisme et au contenu des programmes particuliers d'aménagement ainsi qu'aux différents règlements d'urbanisme.

Votre mémoire admet également la nécessité d'un contrôle intérimaire tant au moment de l'élaboration d'un schéma d'aménagement que d'un plan d'urbanisme. Vous admettez également la nécessité d'une consultation. La préparation d'une proposition préliminaire par le conseil de comté et la soumission de cette proposition aux municipalités membres du conseil rencontrent aussi votre assentiment. En ce qui a trait à la consultation des citoyens, vous reconnaissez le droit aux intéressés de se faire entendre dans les délais raisonnables.

Vous proposez un certain nombre de réaménagements techniques sur des points du titre I du projet de loi. J'aimerais vous poser quelques questions à cet effet, si vous me le permettez. Vous souscrivez, par exemple, à l'article 3 du projet de loi qui donne aux conseils de comté le pouvoir d'élaborer un schéma d'aménagement. Par contre, vous ne voulez pas que le ministre responsable de la loi ait un pouvoir d'ordonnance à cet effet. Advenant qu'un certain nombre de comtés se refusent à élaborer un schéma d'aménagement, ne croyez-vous pas que le ministre, pour un certain nombre de raisons, se doit d'amener les comtés à se préoccuper de l'aménagement de leur territoire?

M. Moreau: D'ailleurs, notre mémoire sur cette question est assez clair. On dit, nous autres, au lieu que ce soit un pouvoir discrétionnaire du comté ou du ministre, que le comté ou les comtés qu'on connaît déjà, qui ne sont pas nécessairement des comtés renouvelés, aient l'obligation, après un certain délai, de procéder à un schéma

d'aménagement et de demander leurs lettres patentes; qu'ils aient l'obligation. Tout ce qui est municipal aujourd'hui devrait, après un certain temps — on dit 18 mois dans notre mémoire, cela peut être douze mois, cela peut être 20 mois, mais cela ne devrait pas excéder 20 mois — toutes les municipalités, tous les gouvernements régionaux, tous les conseils de comté devraient avoir l'obligation de demander au gouvernement leurs lettres patentes.

On enlève, à ce moment, l'odieux au ministre d'avoir à émettre des ordonnances et à s'ingérer dans les affaires locales et régionales. Vous l'avez dans la loi, on a l'obligation. Remarquez bien qu'en ce qui nous concerne on n'a pas peur de soumettre cela à nos municipalités, soit que les comtés aient l'obligation de le faire après un délai qui serait déterminé dans la loi.

M. Léonard: Vous pensez qu'on doive mettre cette obligation?

M. Moreau: Oui.

M. Léonard: Cela va être plus efficace que de prendre une attitude permissive sur ce plan.

M. Moreau: Evidemment plus efficace. Pour citer l'exemple de la Loi sur l'évaluation foncière, toutes les municipalités, tous les conseils de comté avaient l'obligation de procéder à l'évaluation foncière à partir des nouvelles dispositions de la loi 50; cela s'est fait et personne n'a récriminé. C'est bien sûr qu'à un moment donné, quand dans la loi 125 on va dire aux municipalités de comté: Vous avez l'obligation après dix, douze ou vingt mois de demander vos lettres patentes et le schéma d'aménagement, je ne dis pas qu'il n'y en a pas qui ne seront pas malheureux, mais ils vont l'être pareil le jour où le ministre va le leur demander, parce que ceux-là ne veulent rien faire. D'ailleurs, je pense que la meilleure façon c'est que dans la loi, déjà, si on veut faire vraiment de l'aménagement au Québec, on le mette et qu'on dise: Vous avez l'obligation d'en faire. C'est ce que nous croyons. On peut bien ne pas être d'accord ou être d'accord, mais je pense que, si on veut vraiment donner le coup d'envoi, il va falloir que la loi soit coercitive.

M. Tardif: Si vous me permettez, M. le Président, c'est immédiatement rattaché à cela. On me permettra aussi, sans faire de présentation aussi longue que celle de mon collègue, de féliciter l'Union des conseils de comté pour sa participation, non seulement ce matin, mais aux travaux préparatoires. Comme ministre des Affaires municipales, on comprendra que ce qui m'intéresse entre autres ici, c'est de m'assurer de bien percevoir les besoins du monde municipal et surtout de les concilier ou de tenter de tout faire pour les concilier dans la mesure où ces besoins pourraient s'exprimer différemment, selon les groupes en présence.

Relié à cette question précise, vous semblez nous dire: II faudrait avoir quelque chose comme la Loi de l'évaluation foncière — si j'ai bien compris — qui dit — là, c'était cinq ans le délai — une municipalité peut commencer à confectionner son rôle d'évaluation et demander au ministre responsable de l'application de la Loi de l'évaluation foncière l'émission d'une ordonnance décrétant que son premier rôle entrera en vigueur telle date. Cela pourrait être quelque chose de cette nature, si j'ai bien compris?

M. Moreau: Oui. Evidemment, j'ai cité l'exemple de la loi 50 sur l'évaluation foncière. Cela ne veut pas dire que le délai serait de cinq ans, je pense que cinq ans c'est pas mal loin pour faire de l'aménagement, mais cela pourrait être un mécanisme comme celui-là. (10 h 45)

M. Tardif: Cependant, dans le cas de la Loi de l'évaluation foncière, le délai est de cinq ans, c'est-à-dire que le rôle devra être terminé avant telle date. Enfin, je ne connais pas de cas en matière d'évaluation où il y avait urgence à intervenir, alors que dans le cas de la confection d'un schéma d'aménagement, il se pourrait que, justement, une implantation industrielle majeure ou autre raison, puisse rendre impérieux de procéder plus rapidement avec un schéma... Est-ce qu'il ne serait pas bon aussi, au cours de cette période-là, de dire: La municipalité ou le comté pourra commencer avant l'échéance de la confection de son schéma? On pourrait aussi lui enjoindre de le faire pour des raisons, disons, particulières à cette région.

M. Moreau: Remarquez bien que je ne veux pas essayer d'établir moi-même les délais. Ce sera la responsabilité du gouvernement d'établir quel délai on devrait prendre. Il est bien entendu qu'il ne faudrait pas que cela porte sur un échéancier de cinq ans. Dans notre mémoire, on dit 18 mois. Ce peut être moins que 18 mois. Maintenant, dans les cas où il y a urgence, je suis persuadé que les positions vont se prendre très rapidement. Le jour où la loi sera sanctionnée, M. le Président, et qu'on va dire que les municipalités et les conseils de comté ont l'obligation de demander leurs lettres patentes dans douze mois, soyez assuré que toutes les municipalités qui sont à l'intérieur des limites de ces comtés vont s'asseoir à la table et commencer à discuter tout de suite. Elles n'ont pas le choix. Cela n'exclut pas, à ce moment-là... Dans les cas d'évaluation foncière, on a eu l'aide du gouvernement pour élaborer des choses. Pour quelles raisons on ne l'aurait pas dans cela? C'est bien essentiel.

Une Voix; Ce sont des motifs nationaux qui interviennent.

M. Moreau: Alors, s'il y a des motifs nationaux qui interviennent, on est d'accord. On vient de dire que, pour des motifs nationaux, le gouvernement a son pouvoir. On ne lui enlève pas son pouvoir.

M. Léonard: D'accord. Je voudrais vous poser une deuxième question sur le contrôle intérimaire. L'introduction du contrôle intérimaire, je pense, s'avère un outil intéressant autant pour les comtés que pour les municipalités durant la phase d'élaboration du schéma et des plans d'urbanisme. Vous proposez que les conseils de comté puissent exercer un tel contrôle auprès des municipalités dépourvues d'un règlement de zonage dans le domaine de la construction. Quels pourraient être les avantages pour les municipalités et les conseils de comté d'une telle suppléance? Afin de minimiser les embarras aux administrateurs municipaux qu'un tel gel pourrait causer dans certains cas, voyez-vous un certain nombre de modalités à inclure dans le projet de loi sur cette question?

M. Moreau: M. le Président, nous nous sommes posé la question à maintes reprises et à un moment donné, on a été pris avec un dilemme. Mais l'article 58 — si vous prenez l'article 58 du projet de loi — je pense qu'il répond à tout cela. Il n'y a pas de problème. L'article 58 dit ceci: "Le conseil de comté peut adopter un règlement de contrôle intérimaire. Ce règlement s'applique à chacune des municipalités du comté et demeure en vigueur sur le territoire d'une municipalité jusqu'à la date de la délivrance du dernier certificat de conformité à l'égard d'un plan d'urbanisme et des règlements de zonage de lotissement de construction de cette municipalité".

Je pense qu'à ce moment-là, il n'y a pas de problème. Je n'en vois pas. C'est un mécanisme qui serait utilisé, l'article 58.

M. Léonard: L'article 25 du projet de loi prévoit que l'adoption du schéma sera aux deux tiers des membres présents au conseil. Vous nous suggérez que le règlement soit adopté par la majorité simple des membres présents au conseil. Est-ce que vous pourriez nous expliquer pourquoi? Parce que cela pourrait faire peu de monde pour adopter le schéma d'aménagement.

M. Moreau: Cela s'est vu dans les gouvernements locaux. Cela se voit aussi dans le gouvernement du Québec et dans tous les gouvernements du monde qu'à un moment donné, par des procédés d'abstention, on puisse bloquer des choses assez longtemps.

M. Léonard: Si...

M. Moreau: M. le Président, nous pensons... Remarquez bien que c'est encore une suggestion. On ne veut pas arriver et dire qu'on tranche la question. Mais on dit: Si, à un moment donné, il y a un schéma d'aménagement qui se discute au niveau des municipalités, le nouveau comté est structuré, tout est là, tous les maires sont là autour de la table, et qu'on veuille procéder à l'adoption du schéma, il y a des abstentions voulues, des gens qui tombent malades régulièrement quand il s'agit de discuter du schéma d'aménagement, je pense qu'à ce moment-là, M. le Président, le fait que le schéma d'aménagement soit adopté par les membres présents à la majorité simple, cela oblige tout le monde, sauf les gens qui sont vraiment malades, à assister à l'assemblée de conseil de comté, quand il s'agira d'adopter le schéma d'aménagement.

M. Léonard: D'un autre côté, M. le Président, si les gens sont tellement peu d'accord et ne se présentent pas pour accepter un schéma d'aménagement, qui est un geste très important, ne pensez-vous pas finalement qu'il serait inapplicable par la suite?

M. Moreau: Moi, M. le Président, j'ai bien l'impression — remarquez bien, je ne veux pas défendre cela outre mesure, cette suggestion — que quand on en sera au schéma d'aménagement, si on prévoit — je ne voudrais pas anticiper pour le questionnaire à venir — si on parle de droit de veto ou d'autres choses comme cela, je suis persuadé que les gens, quand on en sera au schéma d'aménagement, vont avoir négocié assez longtemps que l'adoption du schéma d'aménagement ne sera pas spécialement difficile.

M. Léonard: Une autre question: Un des principes sous-jacents au présent projet de loi repose sur la nécessité d'une participation des citoyens dans l'aménagement. Bon. Il y a à cet effet une procédure de consultation prévue à différents moments lors de l'élaboration des schémas et des plans d'urbanisme et ce processus de consultation — avez-vous écrit — vous paraît exagéré. Vous proposez de nous en tenir aux dispositions actuelles du Code municipal. Pourriez-vous nous dire pourquoi?

M. Moreau: C'est une suggestion... D'ailleurs, si on réfère aux périodes de consultation qui sont prévues dans le projet de loi, cela demeure toujours de la consultation et même au niveau du référendum. C'est un référendum qui est seulement consultatif et qui peut aussi... Après que tout cela aura été adopté, le ministre peut arriver, intervenir et dire: Je ne suis pas d'accord avec cela. Très bien. Nous croyons que les périodes de consultation sont certainement exagérées et qu'il y a moyen... D'ailleurs, un schéma d'aménagement, ce n'est pas une chose qu'on détermine dans l'espace de deux jours. Un vrai schéma d'aménagement dans un comté cela prend au moins un an. On peut dire que c'est un minimum, un an, à élaborer. Alors, il est bien entendu que durant ces périodes où toutes les municipalités qui vont faire partie du nouveau conseil de comté on va avoir amplement l'occasion de consulter et par les voies du Code municipal, on peut les améliorer aussi, je n'ai pas d'objection, je pense que... c'est beaucoup plus décisionnel qu'une consultation ou même un référendum consultatif. On va l'avoir le référendum encore, les municipalités ont l'obligation d'en tenir des référendums, si on n'amende pas la Loi des référendums.

M. Léonard: Sur...

Le Président (M. Laplante): Je vais vous permettre une autre question mais je voudrais que l'Opposition ait son privilège aussi.

M. Léonard: Oui, on a une heure et demie, je pense.

Le Président (M. Laplante): Non, continuons donc.

M. Léonard: Pour bien comprendre le sens de vos interventions parce que vous en avez fait plusieurs à l'égard de la structure du territoire et des modes de fonctionnement du conseil de comté, vous êtes partisan depuis de nombreuses années de la présence, au sein d'un organisme intermunicipal, des municipalités du Code municipal et de celles régies par la Loi des cités et villes. Vous n'avez pas d'objection sur le principe mais vous vous interrogez sur les modalités. Vous proposez que la réforme actuelle se fasse à partir des comtés actuels. Qu'est-ce que cela signifie, à partir des comtés actuels? Il s'agit, je suppose, des 71 comtés actuels?

M. Moreau: Oui, cela veut dire...

M. Léonard: ... plus les deux qui sont inopérants? Disons 71 comtés.

M. Moreau: M. le Président, quand nous mentionnons les comtés actuels, on n'a pas à l'esprit que tout cela c'est pris dans le ciment, mais on va partir sur des choses qu'on connaît. On ne mettra pas la hache dans des structures qui sont vieilles de cent... qui remontent à 1845. On va partir des choses qu'on connaît. On dit: A supposer qu'il y ait un délai de 12 mois ou de 18 mois pour que les conseils de comté actuels demandent leurs lettres patentes, il est bien entendu que toutes les municipalités qui sont à l'intérieur de ces conseils de comté sont d'anciennes municipalités rurales qui ont été détachées du conseil de comté. C'est pour cela qu'on dit à ce moment-là qu'il est important que les conseils de comté puissent modifier leurs frontières internes pour permettre aux villes, durant les 18 mois avant la demande de...

M. Léonard: Dès qu'on est d'accord avec le principe, soit que les villes en font partie, cela me paraît évident, mais est-ce que vous êtes aussi d'accord qu'on puisse modifier les délimitations géographiques externes?

M. Moreau: J'y arrive, M. le Président. Après avoir fait cela, il est bien entendu que les gens vont s'asseoir ensemble; les villes qui vont se sentir à l'intérieur d'un conseil de comté vont s'asseoir ensemble et vont discuter. Je n'ai pas d'objection si on tient pour acquis que, quand la loi sera sanctionnée, on va dire: Les 71 comtés qui existent vont avoir l'obligation de demander leurs lettres patentes dans une période donnée. Il est bien entendu que les gens, les maires, les municipalités qui sont à l'intérieur vont en discuter, vont négocier. Si jamais il n'y a pas entente, qu'on veuille modifier les frontières et que les comtés, volontairement, quand ils vont demander leurs lettres patentes, soient d'accord pour les modifier, on n'a pas d'objection.

M. Léonard: Les villes aussi pourraient demander l'émission de lettres patentes.

M. Moreau: Pourquoi pas? A ce moment-là, on ne tient pas compte des conseils de comté qui existent. Il va falloir que certaines villes demandent des lettres patentes puisque les 71 conseils de comté du Québec, M. le Président, ne couvrent pas l'entité du territoire québécois. Il y a des endroits où il y aura uniquement des villes dans les conseils de comté. On est d'accord avec cela.

Le Président (M. Lapiante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Moreau: On dit ici, à la page 10, M. le Président: Dans une seconde étape, un processus d'aménagement plus avancé pourrait être élaboré conjointement avec les villes et, le cas échéant, avec les comtés voisins. — C'est assez clair, cela. On n'a pas d'objection à cela — le tout tendant vers le but final d'un aménagement mieux orienté, sauvegardant la qualité de la vie. On ne s'oppose pas à ce qu'il se fasse des négociations entre différents comtés. Ce qu'on ne veut pas, c'est qu'on soit laissé pour compte avec des mémoires comme celui-là.

J'ai annoté le mémoire de Granby d'un bout à l'autre. Il y a des choses qui sont... Ce n'est pas entièrement mauvais mais, quand on fait la description du futur comté de Granby, on ne daigne même pas prononcer le nom des municipalités rurales, M. le président, et cela on ne l'admet pas. Comprenez-vous? Qu'on prenne la meilleure loi... A mon sens, le projet de loi est de grande valeur et s'impose, mais si on veut jouer à cela, par exemple, c'est dangereux. Cela a été essayé dans le passé et on l'a refusé, on n'en a pas voulu, et on n'en voudra pas plus dans l'avenir. On ne daigne même pas prononcer le nom. On dit: II faudrait changer tout cela, politiquement, géographiquement, tout sortir ce qu'il y a là, on va conduire et ce sera la ville qui aura le vote prépondérant. Si on faisait cela aujourd'hui, si on était d'accord avec cela, on se ferait mettre au pilori tout de suite en sortant d'ici par nos gens.

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, il me semble que c'est fort probablement le plus important mémoire que nous aurons à examiner et, si les ministres n'ont pas épuisé leurs questions et si vous êtes prêt à nous accorder un peu plus de souplesse quant à l'emploi du temps, je suis prêt à attendre.

M. Chevrette: Cela ne me dérange pas, M. le Président... un Instant, s'il vous plaît!

Le Président (M. Laplante): M. le député de Bellechasse, partagez-vous la même opinion?

M. Goulet: J'ai exactement la même attitude que le député de D'Arcy McGee parce que je pense que les gens...

M. Chevrette: En étant bien conscient, M. le Président, qu'on est responsable de faire passer tout le monde.

Le Président (M. Laplante): Oui, on va aller jusqu'à 11 h 15.

M. Chevrette: II faut absolument qu'il y en ait deux cet avant-midi si on veut passer les deux autres cet après-midi; il faut être conscient de cela.

Le Président (M. Laplante): On est pleinement conscient de cela, c'est pour cela qu'on va aller jusqu'à 11 h 15 avec l'Union des municipalités.

M. Goulet: Je comprends, mais l'Union des conseils de comté, je pense que c'est assez important.

M. Chevrette: Je n'ai rien contre cela, mais je tiens à dire qu'on est responsable et, à part cela, c'est une entente.

M. Tardif: M. le Président, puisqu'on est limité dans le temps...

M. Léonard: Dans ce cas-là, je vais continuer en posant juste une question. Les articles 142 et suivants indiquent que le gouvernement peut émettre des lettres patentes. Vous demandez que seuls les comtés actuels soient habilités à demander ces lettres patentes. Pourquoi seulement "seuls ces comtés"? Vous en avez parlé un peu mais j'aimerais que vous explicitiez parce que, quand même, à l'heure actuelle, il se pourrait qu'il y ait des villes importantes; est-ce qu'elles ne pourraient pas demander ces lettres patentes elles aussi?

M. Moreau: M. le Président, je ne suis pas délégué pour parler au nom des villes du Québec. Je suis délégué pour parler au nom des conseils de comté. C'est de là que je tiens mes pouvoirs de représentation. (11 heures)

Cependant, je pourrais peut-être — je ne veux pas répondre pour les villes, je pense bien qu'elles vont avoir l'occasion de répondre à cela — mais si on tient pour acquis qu'on part avec les conseils de comté existants pour en faire de nouveaux conseils de comté, il est entendu que, dans ces limites, cela sera le conseil de comté qui va faire sa demande conjointement avec les villes qui seront à l'intérieur, ou les villes qui auront négocié avant de faire la demande. Cela n'est pas que le conseil de comté. Le conseil de comté fait cela au nom de toutes les municipalités, dans le conseil de comté, les municipalités rurales aussi. Si on veut sauvegarder le droit des villes de se créer des comtés on va aussi sauvegarder le droit des municipalités rurales et locales de se faire des comtés. Cela peut être une municipalité rurale locale qui demande un comté. Est-ce qu'on va permettre ou quelle garantie vont avoir — quand on va permettre aux villes qui sont à l'intérieur des conseils de comté, quand on va permettre à la municipalité locale régie par le Code municipal aussi, parce qu'on va avoir la contrepartie, car on va demander à la municipalité locale aussi de demander un comté, si elle veut en demander — les municipalités et le gouvernement du Québec après que tout cela aura pris forme, que cela représentera vraiment quelque chose de fonctionnel au Québec? Je me pose la question.

C'est à partir de cet argument qu'on dit: Dans ce qu'on connaît, ce sera les comtés qui vont demander de concert avec la ville, parce que quand on va demander les lettres patentes, il va être bien entendu que les villes à l'intérieur de ce périmètre vont être aussi consentantes. Si elles ne le sont pas, on va négocier avec des comtés voisins. On le dit à l'article 2, page 10: "Dans une seconde étape", cela sera cela. Est-ce qu'on va permettre à tout le monde de demander des lettres patentes ou s'il y aura des gens... Je vois que dans des municipalités ou dans les régions où il n'y a pas de comté, il est bien d'accord qu'il va falloir que quelqu'un le demande. Mais où on a déjà quelque chose, déjà un noyau, on va procéder par le comté et les municipalités qui seront à l'intérieur du comté vont décider de leurs frontières, leurs limites, leur périmètre. Je n'ai pas d'objection à cela.

M. Tardif: M. le Président, je vais essayer de reprendre une des affirmations du mémoire au tout début qui me semble assez centrale par rapport à un certain nombre de questions qui ont été posées. Votre mémoire pose la question et parle d'une possibilité de confusion: Existera-t-il ou n'existera-t-il pas un ou deux conseils de comté? Je pense que, véritablement, si on regarde certaines des questions qui ont été posées quant à la composition — parce que c'est relié — si vous dites: Ce sont les conseils de comté actuels qui peuvent demander l'émission de lettres patentes, c'est une chose. Ces conseils de comté actuels ont, en vertu du Code municipal, une compétence très bien définie dans la loi, mais dès lors qu'il s'agit de l'application de la loi 125 il y a d'autres partenaires. A partir du moment où il y a ces autres partenaires qui sont présents autour d'une même table, votre question c'est: Est-ce qu'il s'agit véritablement de deux conseils de comté ou pas? C'est cela?

M. Moreau: Oui.

M. Tardif: Bon.

M. Moreau: Remarquez bien qu'on n'est pas en faveur de deux conseils de comté. On est bien d'accord que, quand les conseils de comté auront demandé leurs lettres patentes, les conseils de comté actuels, il ne faudrait pas qu'il y ait deux conseils de comté. Il faudrait qu'il n'y en ait qu'un. La loi actuelle, sous sa forme actuelle, nous fait peur là-dessus. Il faudrait qu'il n'y ait qu'un seul conseil de comté. A l'intérieur de ce conseil de comté qu'il y ait, évidemment, des municipalités qui vont être régies par le Code municipal et d'autres qui vont être régies par la Loi des cités et villes, mais que pour fins d'aménagement — et on le dit dans notre mémoire aussi — tous les règlements qui sont à l'intérieur de la Loi des cités et villes et ceux qui sont à l'intérieur du Code municipal devraient être retirés pour être codifiés dans un seul règlement.

M. Tardif: Donc, vous proposez une structure unique, une entité corporative unique, non pas deux entités corporatives distinctes. Dès lors qu'on suppose une seule entité corporative, cela suppose évidemment que les partenaires de cette entité corporative puissent y fonctionner, se sentir à l'aise. Si on est en face d'un groupe déjà constitué, qui s'appelle le conseil de comté actuel avec ses compétences et de nouveaux partenaires, des règles de fonctionnement propres à cette structure unique devront tenir compte de cette réalité.

M. Moreau: Evidemment, pour fins d'aménagement. D'ailleurs, le rôle du conseil de comté renouvelé est particulièrement de dresser un schéma d'aménagement et de le faire respecter par les municipalités locales, peu importe si elles sont régies par le Code municipal ou si elles sont régies par la Loi des cités et villes, c'est ce qu'on veut. A ce moment-là, le conseil de comté va jouer le rôle qu'il doit jouer, celui de coordonnateur qui va harmoniser les différentes règles du schéma.

M. Tardif: D'accord. Deuxième question. Relié à cela, il y a la question du droit de veto, que vous soulevez dans votre mémoire, qui pourra être donné soit au préfet, soit au représentant... Enfin, ce n'est pas très clair dans mon esprit. C'est seulement le préfet qui, au nom du monde rural, aurait un droit de veto pour tout ce monde-là et pour celui des cités et villes présentes. Pouvez-vous parler davantage de la nature de ce veto? Pourrait-il être renversé? Un vote être repris? Est-ce uniquement le préfet? C'est chacun des membres qui l'exerce. Est-ce qu'un vote des deux tiers pourrait l'annuler? Cela porterait sur quoi véritablement, ce veto?

M. Moreau: Pour cette question, j'aimerais demander à M. Elias Houde, préfet du comté de Saguenay, de Chicoutimi, de vous donner ce que nous croyons être la meilleure façon de régler les cas difficiles à l'intérieur du fonctionnement d'un comté. Je vais demander à M. Houde de vous donner...

M. Tardif: D'un conseil de comté ou d'un conseil métropolitain?

M. Moreau: D'un conseil de comté, M. le Président.

M. Houde (Elias): Je me doutais que la question viendrait de cette façon. Concernant le droit de veto, nous disons, en principe, que les conseils de comté devraient demander obligatoirement des lettres patentes pour faire un nouveau comté, surtout pour fins d'aménagement de territoire. Or, dans ces lettres patentes, nous voudrions qu'il y ait une prévision pour que dans certains cas — nous ne disons pas partout — parce qu'il y a des comtés où, par exemple, on mentionne souvent le cas du comté de Bellechasse, entre autres, il y a douze municipalités à peu près de même grosseur, à peu près, comme population, où il n'y a pas de grande ville. Cela ne crée pas de problème. Dans plusieurs comtés de la province, cela crée des problèmes et nous n'avons pas trouvé de formule qui donnerait une représentation équitable au monde rural outre celui d'un droit de veto; non pas dans le sens d'un droit de veto qui va paralyser ou qui va brimer des droits, ce n'est pas cela. C'est à la suite de l'expérience que nous avons vécue — M. le ministre, vous êtes au courant — à Chicoutimi avec le conseil métropolitain où le gouvernement, par la loi 98, a accordé un droit de veto à la ville de Chicoutimi et à la ville de Jonquière. La ville de La Baie, qui fait partie du métropolitain également, n'a pas ce droit de veto, ni de conseil de comté.

Dans un comté où il y a une grosse ville, deux ou trois villes qui vont avoir la plus grande partie de la population, contre une population rurale représentée par de petites municipalités qui ne feront pas le poids au point de vue de la population, comment ces personnes pourront-elles se faire entendre autour de la table où il y aura plusieurs représentants et, majoritairement, venant des villes? Nous n'avons rien contre, mais nous nous demandons de quelle façon nous en sortir. Si le gouvernement en a une meilleure, on serait bien prêt à l'étudier. La seule façon que nous avons trouvée pour que la partie rurale puisse se faire entendre vraiment, pour qu'elle puisse participer d'une façon positive et être reconnue, faire reconnaître ses points de vue, il faut absolument qu'il y ait un droit de veto qui soit également donné aux maires de chacune des villes, lorsqu'il y a une ville ou plusieurs villes, et qu'il y ait également un droit de veto accordé aux préfets de comté au nom des municipalités rurales; non pas encore pour brimer ou retarder les travaux, mais je vous dis, à la suite de l'expérience que nous avons vécue dans la région de Chicoutimi, que cela fait drôlement du bien et amène à se mettre à la table et à discuter.

M. Tardif: Je m'excuse, M. le Président, mais j'essaie de comprendre. J'imagine un comté renouvelé, j'imagine un comté qui a eu ses lettres patentes, j'imagine un comté qui regroupe à la fois le monde rural et le monde urbain. Vous dites qu'il devrait y avoir un droit de veto accordé au préfet

de comté au nom du monde rural. Le préfet de ce nouveau comté renouvelé et regroupé en un monde rural et urbain serait par définition, puisqu'on a parlé d'un organisme d'entité corporative unique, le préfet de tout le monde, pas juste celui du monde rural, mais celui de tout le monde, rural et urbain. Comment pourrait-il, à ce moment, avec son nouveau chapeau de préfet de tout le comté rural et urbain, exercer un tel droit de veto? Pour moi, ce n'est pas bien clair dans mon esprit.

M. Houde: M. le ministre, voici. Par exemple, le président du conseil métropolitain de Chicoutimi est le maire de la ville de Jonquière et il a le droit de veto, je ne vois pas quelle différence il y a. Le préfet de comté va siéger au nouveau conseil de comté, qu'il soit président ou pas, cela ne change rien, il aura droit de veto comme les maires des villes ont un droit de veto. Je ne vois pas de complication.

M. Moreau: Ce qui serait peut-être difficile, ce serait ceci: Supposons que vous avez un comté renouvelé où il y a trois villes et quinze municipalités rurales et que tout le monde a un droit de veto, cela va faire des vetos pas mal. Tandis que si on dit: Les villes, qu'il y en ait trois, quatre ou cinq, ont le droit de veto et les municipalités rurales l'ont par le biais du préfet qui a un droit de veto, cela règle le problème. Remarquez bien que cela élimine certains dangers. Je tiens pour acquis qu'il y a quinze municipalités rurales, le droit de veto du préfet devrait se prendre à la majorité simple des quinze municipalités qu'il y a là. Cela oblige les gens à s'asseoir ensemble et à négocier.

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Tardif: ... collègue de l'Opposition, quitte à revenir tantôt, j'aurais beaucoup d'autres questions.

M. Goldbloom: M. le Président, je pense qu'il y a effectivement une divergence de vues assez fondamentale qui vient d'être exposée. Dans l'esprit du ministre des Affaires municipales, le comté renouvelé qui serait créé aux fins de l'application de l'éventuelle loi sur l'aménagement du territoire, ce comté renouvelé serait unique et à l'intérieur de ce comté les divers membres perdraient dans une certaine mesure leur identité propre, telle que nous connaissons aujourd'hui cette identité. Ce que l'Union des conseils de comté est en train de nous dire, c'est que le milieu rural ne veut pas perdre son identité propre à l'intérieur d'un nouveau comté renouvelé.

Je pense que c'est le noeud de la discussion. J'ai deux choses à ajouter à cet égard. Il me semble que ce mémoire met encore une fois en relief un certain mystère qui entoure le projet de loi. Je ne le dis pas méchamment, mais je le dis de façon à amener le gouvernement à faire la lumière sur ses intentions.

L'Union des conseils de comté nous dit: Nous ne devrions pas nous retrouver après l'adoption de cette éventuelle loi avec deux sortes de conseils de comté, avec deux sortes d'organismes. Justement, dans les discussions que j'ai eues avec l'Union des conseils de comté dans le passé autour de cette question de l'aménagement du territoire, le principe que vous avez toujours défendu, M. Moreau, c'est que l'on n'avait pas besoin de créer de nouveaux organismes pour faire l'aménagement du territoire; les conseils de comté existent et, si l'on peut trouver un mécanisme pour leur permettre de collaborer avec le milieu urbain, avec les municipalités régies par la Loi des cités et villes pour que soit réussi en collaboration l'aménagement du territoire, la confection des schémas nécessaires, ce serait l'idéal. (11 h 15)

Alors, le mystère est le suivant, je l'ai déjà exposé et je l'expose encore une fois: Parlons-nous, en examinant le projet de loi no 125, de l'aménagement du territoire seulement ou parlons-nous de quelque chose qui pourrait aller jusqu'à la constitution de gouvernements régionaux au Québec avec non seulement la responsabilité de l'aménagement du territoire, mais également d'autres responsabilités? On a parlé, dans certains documents publiés par le parti politique qui constitue aujourd'hui le gouvernement, de l'attribution à des municipalités, c'est-à-dire des entités municipales renouvelées, de la responsabilité des écoles, des hôpitaux, des services sociaux et ainsi de suite. De deux choses l'une, ou bien on parle de quelque chose qui est plus large, ou bien on parle seulement de l'aménagement du territoire.

L'attitude que non seulement l'Opposition, mais l'opinion publique va prendre à l'égard de ce projet de loi découlera de la dissipation de ce mystère. De quoi parlons-nous? Est-ce de l'aménagement du territoire seulement ou est-ce d'une entreprise plus vaste, d'une structure que l'on va ériger aujourd'hui pour les fins de l'aménagement du territoire et à laquelle nous allons ajouter demain d'autres responsabilités? Qui va les assumer, compte tenu du fait que dans le milieu rural les maires et les conseillers ne sont pas à temps complet, que les municipalités rurales n'ont pas le fonctionnarisme qui leur permettrait d'assumer un grand éventail de responsabilités?

Si la réponse est: Non, dans le projet de loi no 125, on ne parle que de l'aménagement du territoire, il faudra quand même poser la question corollaire: Va-t-on parler de ces autres choses dans un autre temps et va-t-on, dans cet autre temps, ériger d'autres structures et créer d'autres organismes à ces fins-là? M. le Président, il me semblait essentiel de mettre cela de nouveau sur la table.

M. Moreau, dans votre mémoire, en exposant votre point de vue et en insistant encore une fois, comme vous l'avez toujours fait depuis le début de l'histoire de l'Union des conseils de comté et de votre mandat comme président, pour que les conseils de comté actuels soient chargés des responsabilités qu'il faut assumer au nom du milieu rural et des municipalités locales, vous devez faire

face à certaines objections, comme la suivante: La définition d'un conseil de comté actuel peut ne pas correspondre convenablement à la définition d'un territoire qui constituerait une entité socio-économique et qui se prêterait convenablement à la préparation d'un schéma d'aménagement. Vous donnez, à mon sens, une réponse partielle, un début de réponse dans le mémoire, là où vous parlez de concertation entre comtés voisins. Croyez-vous effectivement que dans certains cas il faudra amener deux conseils de comté, ou plus, à s'asseoir ensemble avec les villes intéressées de façon à pouvoir préparer un schéma convenable sur un territoire logique?

M. Moreau: Merci, M. le Président. On est entièrement avec ça, vous le voyez à la page 10, au paragraphe 2. Dans une seconde étape, supposons que les conseils de comté qu'on connaît actuellement soient autorisés, aient l'obligation de demander leurs lettres patentes. Il est bien entendu que dans une seconde étape un processus d'aménagement plus avancé pourrait être élaboré conjointement avec les villes et, le cas échéant, avec des comtés voisins. On est d'accord avec cela.

Je ne veux pas citer de noms de comtés dans la province de Québec, mais il y a certainement des comtés qui ne le sont pas et qui, à mon sens, devraient être redivisés. A ce moment-là, si cela fait l'objet d'un consensus entre les différents comtés impliqués, on n'a pas d'objection, je vais vous citer un exemple et je vais vous le nommer celui-là. Il y a un mois, sur invitation, j'étais dans le comté de Bonaventure qui est un comté que vous connaissez très bien, qui a 100 milles ou 125 milles de long. On a souvent entendu dire que le comté de Bonaventure devrait être scindé. Les gens qui étaient là ont dit: Nous autres, nous sommes d'accord à ce qu'il soit comme cela. On est heureux comme cela.

A ce moment-là, on ne peut tout de même pas forcer des gens à vivre ensemble s'ils ne veulent pas vivre ensemble et forcer les gens à se séparer s'ils veulent rester ensemble, mais que cela se décide au niveau des comtés. Je ne voudrais pas que le gouvernement, sur le coin de la table, aille trancher la carte du Québec. Je m'oppose à cela.

M. Goldbloom: M. Moreau...

M. Moreau: La préparation du schéma, M. le Président, va nous le dire. Elle va nous le dire, la préparation du schéma.

Je voudrais aussi répondre à ce que M. Goldbloom disait tout à l'heure quand il parlait du mystère. C'est pour cela qu'on dit, à la page 15, qu'on suggère que cela se fasse en deux étapes. Qu'on parle d'aménagement, qu'on l'établisse comme le dernier du Québec, ce que sera l'échiquier du Québec après que les schémas d'aménagement seront faits, et ensuite on parlera de décentralisation. On n'a pas d'objection à discuter des problèmes de décentralisation et de structures régionales, mais il va falloir, avant cela, qu'on sache exactement ce que sera l'échiquier sur lequel cela va se faire. C'est cela qui est important à notre avis et non seulement pour les 71 comtés qui existent, M. le Président, mais également pour les municipalités où il n'y a plus de comtés. Je regarde la rive sud, la rive sud de Montréal. Il n'y a plus de conseils de comté là. Il va falloir qu'il y en ait. Il va y avoir des conseils de comté qui seront uniquement des villes, régis par la Loi des cités et villes. Cela, à notre avis, va faire partie de la période de gestation d'ici 20 mois ou 24 mois.

M. Goldbloom: M. Moreau, il est évident — et vous le reconnaissez — que ni les municipalités rurales, ni les villes ne peuvent faire un travail d'aménagement de territoire, de préparation de schémas d'aménagement en vase clos. Il faudra que les deux milieux se rencontrent et travaillent ensemble.

Dans votre mémoire, vous faites certaines recommandations quant aux modalités d'application de la loi et quant à la façon dont les villes pourraient être invitées et amenées à faire partie de cette oeuvre indispensable. Mais, d'après vos recommandations, il n'y aurait pas de coercition qui serait prévue. Que feriez-vous dans le cas où une ou des villes n'accepterait pas de collaborer? Comment ce noeud gordien pourrait-il être tranché?

M. Moreau: Remarquez bien que je ne voudrais pas me prononcer pour tout ce qui va se passer d'ici 18 mois, quand la loi sera sanctionnée. Même si ce ne sont pas les conseils de comté actuels, c'en sera d'autres. Il va y avoir aussi des refus, des gens qui sont d'accord et d'autres qui ne sont pas d'accord. Il y a des choses qui seront volontaires. Il y en a d'autres où le problème sera réglé par la force des choses, parce que je n'ai pas l'impression que toutes les municipalités du Québec vont se mettre d'accord. En supposant qu'on fasse table rase de toutes les structures qui existent et qu'on fasse comme la ville de Granby en établissant des périmètres de nouveaux comtés cela ne veut pas dire que tout ce monde-là sera d'accord. Les gens ne seront pas plus d'accord quand on va tailler dans le vif qu'ils seront d'accord avec les conseils de comté actuels. Je pense que cela doit faire l'objet de négociations et d'ententes entre les différentes municipalités. D'ailleurs, la sanction de la loi va nécessairement obliger les gens à s'asseoir ensemble.

Ce que nous avons demandé, depuis dix ans, c'est la cohabitation, c'est la collaboration des villes comme du monde rural à la préparation de l'aménagement du Québec. C'est toujours cela qu'on a demandé, mais, tout en sauvegardant notre statut rural.

Ce que représente le monde rural au Québec, cela a une valeur sociale très importante, comme ce que les villes représentent. Même au sein des nouveaux conseils de comté, on voudrait que ces valeurs soient préservées. C'est dans ce sens-là qu'on veut que l'identité du monde rural soit bien établie et qu'on parte sur le bon pied avec une loi qui se tient debout, que ce soit protégé.

M. Goldbloom: M. le Président, il ne me reste que deux questions. La première porte sur la page 12 du mémoire, M. Moreau, et sur votre recommandation quant à une nouvelle rédaction de l'article 160. Vous recommandez qu'un droit de veto soit accordé au préfet de comté au nom du milieu rural et que, du côté urbain, un droit de veto existe également.

J'ai eu une certaine idée de la réponse de l'Union des conseils de comté à la question que je vais poser par ce que M. Houde a dit il y a quelques minutes. Mais, à part l'appel à la bonne volonté, à part la pression que l'on sentirait de part et d'autre à revenir à la table pour rediscuter de la question litigieuse, il me semble que l'on pourrait, malgré tout cela, se trouver dans une impasse, à un moment donné, dans un comté donné.

Comment verriez-vous l'établissement d'un mécanisme pour briser l'impasse dans l'intérêt du bien commun?

M. Moreau: Voici, M. le Président. Il est bien entendu que le droit de veto, comme M. Houde l'a expliqué tout à l'heure, ne sera pas nécessairement utilisé outre mesure, je ne le pense pas. Le droit de veto est dans le sens de permettre aux municipalités en présence de s'asseoir à la même table, de discuter et de négocier.

Evidemment, cela peut conduire aussi à une impasse, à supposer que les négociations n'aboutissent pas. Il est bien entendu qu'après une période de deux ou trois mois on établit un échéancier, et même cela devrait être dans la loi, après deux mois de négociation, si les municipalités en présence ne se sont pas entendues, c'est le ministre, le gouvernement, qui prendra les décisions. Il faut tout de même que cela débouche quelque part. A ce moment-là, c'est l'autorité supérieure, c'est l'Etat, c'est le Conseil des ministres, ou le ministre...

M. Goldbloom: Ou la Commission municipale du Québec?

M. Moreau: Ou la Commission municipale.

M. Goldbloom: Ma dernière question est fort simple. M. Moreau, je ne vous invite pas à vous prononcer sur les aimables personnes que j'ai devant moi, mais seulement sur leurs fonctions. A l'avis de l'Union des conseils de comté du Québec, quel ministre devrait être chargé de l'application de cette loi?

M. Léonard: On peut s'en aller.

M. Tardif: Est-ce que vous voulez qu'on se retire?

M. Moreau: Je serais bien embêté de répondre à cela présentement.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Bellechasse.

M. Moreau: De toute façon, M. le Président, si, à un moment donné, on applique la loi, je fais confiance au gouvernement, il va trouver quelqu'un pour la mettre en valeur.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Très rapidement parce que je sais que nous sommes pressés par le temps. Je pensais qu'à la dernière question de mon collègue M. Goldbloom, vous alliez répondre le ministre de l'Agriculture, parce qu'au niveau de l'aménagement du territoire c'est lui qui a fait les premiers pas.

M. Moreau: Vous permettez que je réponde tout de suite à cela, M. le Président?

M. Chevrette: Ce serait bon, il a peur de la réponse.

M. Goulet: Non, absolument pas. Allez-y.

M. Moreau: M. le Président, pour ce qui concerne la loi 90, je pense bien que l'Union des conseils de comté était d'accord avec les principes de la loi. Sur son application, elle était moins d'accord. On a ouï-dire qu'à un moment donné l'UPA a dit que les conseils de comté n'avaient jamais protégé le territoire agricole — ils n'avaient pas le pouvoir de le protéger non plus. Il faudrait établir cela — et que ce n'était pas une priorité pour nous. D'ailleurs, l'aménagement, c'est toute une priorité, aussi bien du territoire agricole que du reste du territoire du Québec. (11 h 30)

C'est particulièrement dans les municipalités rurales que se font l'aménagement et l'agriculture. Peut-être que si les municipalités du Québec, M. le Président, avaient été plus impliquées dans l'application de la loi 90, on n'aurait pas le fouillis qu'on a présentement. La commission ne répond même pas aux lettres.

M. Goulet: M. le Président, très brièvement, comme je vous l'ai dit... d'abord, félicitations pour votre mémoire. Il suscite beaucoup d'intérêt. On s'aperçoit que c'est vous qui allez vivre avec cette loi-là. La preuve: la quantité de questions que les membres de la commission ont à vous poser. Je retiens que vous préférez une sorte de conseil de comté; vous préféreriez même la forme actuelle, les 71 comtés. Vous avez dit également que vous prévoyez des obligations financières très onéreuses quant à l'application de cette loi-là. Vous avez souligné, de façon non équivoque également, que l'aménagement devait être une exclusivité des municipalités.

Il y a un point que j'aimerais que vous touchiez tout à l'heure, peut-être en quelques secondes. Vous dites: Le processus de consultation sera très lourd et ce sera à peu près impossible d'atteindre les buts visés. Vous avez cru bon de sou-

ligner cela dans votre mémoire. J'aimerais que vous explicitiez davantage là-dessus.

Il y a une chose aussi que vous auriez avantage à expliquer. Je pensais que j'étais le seul à ne pas avoir compris, mais je pense que les membres de la commission ont tous posé des questions sur votre droit de veto. Je me pose la question. Je l'ai entendu également à voix basse. Concernant ce que votre collègue, à votre droite, a expliqué, qu'est-ce qui arrive si le préfet de comté est le maire d'une ville? Cela peut arriver. Dans mon esprit, ce n'est pas clair. Il y a eu des questions. Je ne dis pas que la formule, la suggestion n'est pas bonne, mais, en tout cas, elle n'a pas été comprise, pour ma part et d'après ce que j'ai entendu autour de la table. Vous aimeriez répondre tout de suite à cela?

M. Moreau: Oui.

M. Goulet: D'accord. J'aurai une autre question aussi.

M. Moreau: M. le Président, la suggestion qui est faite dans notre mémoire dans le sens que le préfet du comté renouvelé ait le droit de veto pour les municipalités rurales, cela veut dire aussi que le préfet de comté ne peut être qu'un maire rural.

M. Goulet: Ah bon!

M. Moreau: Pour les fins d'aménagement, on part des structures existantes.

M. Goulet: Cela ne peut être personne d'autre qu'un maire rural. D'accord.

M. Moreau: D'ailleurs, le préfet du comté préside des assemblées. Il n'a pas un vote prépondérant. On ne demande pas un vote prépondérant, nous autres.

M. Goulet: D'accord.

M. Moreau: On dit: Sauf pour les questions — le droit de veto — où il représente les municipalités rurales et, au lieu de donner un droit de veto à toutes les municipalités rurales, parce qu'on tient pour acquis que dans un conseil de comté renouvelé il va y avoir beaucoup plus de municipalités rurales que de municipalités urbaines... Evidemment, si on donnait à toutes ces municipalités le droit de veto, on pourrait se trouver devant des dilemmes assez durs à résoudre, alors que par la majorité simple le préfet du comté appose son droit de veto. C'est notre suggestion.

M. Goulet: En tant que représentant d'un comté rural, je comprends très bien ce que vous voulez dire, mais, si on veut amener les villes à la même table que les municipalités rurales et qu'on part avec le préjugé que le préfet de comté sera obligatoirement le maire d'une municipalité rurale, je me demande si les villes seront d'accord avec cela. En tout cas!

M. Moreau: Pour les fins d'aménagement.

M. Goulet: Dans mon comté, il n'y a pas de villes, mais j'imagine que, si on voulait amener le maire d'une ville à discuter à un conseil de comté avec des municipalités rurales et qu'on lui dise en partant: Le préfet, il faut que ce soit le maire d'une municipalité, il dirait: Vous ne pensez pas que cela pourrait être l'un ou l'autre? Je ne vois pas pourquoi...

M. Moreau: M. le Président, on part de structures qui existent déjà où il y a un préfet.

M. Goulet: D'accord, vous gardez le même. M. Moreau: Cela reste comme cela. M. Goulet: D'accord.

M. Moreau: A ce moment-là, le préfet du comté renouvelé, pour les fins d'aménagement, a un droit de veto.

M. Goulet: D'accord.

M. Moreau: Pour le reste, c'est un maire comme les autres. Les villes ont leur droit de veto aussi.

M. Goulet: M. le Président, une dernière courte question. M. Moreau, changeant complètement de sujet, s'il y a divergence au niveau des municipalités du conseil de comté, qui devrait être l'arbitre au-dessus de tout cela? Est-ce que ce devrait être le ministre? Est-ce que ce devrait être une commission? Vous autres, est-ce que vous vous êtes prononcés là-dessus?

M. Moreau: Remarquez bien que je ne voudrais pas me prononcer pour l'ensemble des municipalités du Québec, mais je crois, M. le Président, que, une fois que les municipalités, peu importe qu'elles soient urbaines ou rurales, ont exercé leur droit de veto — après le droit de veto, ça ne finit pas là — elles auront l'obligation de s'asseoir et de discuter des problèmes évidemment, de négocier. Mais si la négociation aboutit à une impasse, après un délai qui devrait être dans la loi, à mon sens, à ce moment-là, soit le Conseil des ministres ou le ministre qui sera à l'aménagement ou aux Affaires municipales pourra déterminer ou trancher la question ou la Commission municipale.

M. Goulet: A ce moment-là, est-ce qu'un référendum devrait être consultatif ou décisionnel?

M. Moreau: Le référendum, en ce qui concerne...

M. Goulet: Sur l'aménagement du territoire, bien sûr.

M. Moreau: Quand on parle de l'aménagement du territoire, qu'on parle de référendum,

nous, on dit qu'avec les dispositions actuelles, c'est un référendum qui est décisionnel.

M. Goulet: Qui est décisionnel?

M. Moreau: En vertu du Code municipal, il est décisionnel, le référendum.

M. Goulet: Mais dans le projet de loi, il est considéré comme consultatif.

M. Moreau: Dans le projet de loi, il est consultatif.

M. Goulet: Vous n'êtes pas d'accord avec ça.

M. Moreau: On trouve que... Un référendum, à mon avis, si les gens qui participent, qui votent à un référendum... Il va falloir déterminer dans le projet de loi si ce sont les mêmes dispositions du référendum qu'au niveau du Code municipal, c'est-à-dire en nombre et en valeur. On ne l'a pas spécifié dans le projet de loi. Est-ce que c'est un vote universel? Je ne sais pas. Cela ne peut être autrement que consultatif si c'est un vote universel.

M. Goulet: Merci, M. Moreau.

Le Président (M. Laplante): Le mot de la fin, M. le ministre d'Etat à l'aménagement.

M. Léonard: M. le Président, je pense que nous sommes obligés de conclure là-dessus, sur les nouvelles corporations de comté. Je pense bien qu'il y aura encore des choses à étudier là-dedans. Je pense qu'on va tenir compte de vos remarques de ce matin sur ces corporations de comté.

Je dirais cependant que la population va être consultée sur toutes ces questions parce que ce sera elle qui aura à vivre avec ces élus municipaux sur des nouveaux territoires et avec ces institutions. Il y a aussi le fait de la grande diversité des situations dans l'ensemble du Québec, donc, les formules et les modes de représentation vont devoir différer d'une région à l'autre ou d'un comté à l'autre. En tout cas, il y a quand même une chose qui devrait être sûre, c'est qu'il ne devrait pas être question qu'un groupe ait prédominance par rapport à d'autres. Je pense qu'il faut que chacun se trouve bien respecté à l'intérieur d'une nouvelle structure comme celle-là.

Depuis le début du travail du comité d'orientation, il y a eu des pas importants qui ont été franchis, je pense bien, depuis presque un an maintenant, et c'est comme ça qu'on est arrivé au dépôt du projet de loi no 125. A la lumière de la présentation de votre mémoire, de votre exposé et des réponses à nos questions, je constate qu'il est possible qu'il reste des positions divergentes avec l'Union des municipalités du Québec que nous entendrons demain.

Nous sommes disposés, mon collègue, M. Tardif, et moi-même, à tenir une réunion du comité d'orientation pour permettre aux deux unions de concilier leurs deux positions avant la rédaction finale du projet de loi. Nous ferons la même proposition demain à l'Union des municipalités du Québec qui viendra ici.

Je vous remercie beaucoup de votre attention.

Le Président (M. Laplante): Merci, Messieurs; les membres de cette commission vous remercient pour la participation que vous avez bien voulu accorder à cette commission.

M. Moreau: Si vous me permettez juste un petit mot, M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Très court, parce qu'on est déjà très en retard.

M. Moreau: Très court, oui. D'ailleurs, on vous remercie de nous avoir entendus et on est encore disponibles pour offrir au gouvernement notre collaboration tant et aussi longtemps que le monde rural et les municipalités rurales seront bien identifiés dans les nouveaux conseils de comté et dans le sens de protéger le monde rural et aussi de garder l'identité du monde urbain. On ne veut pas dominer qui que ce soit.

Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. Moreau: Merci beaucoup.

Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le Conseil régional de développement de l'Est du Québec et la Conférence municipale de l'Est du Québec.

Je crois qu'il y a deux oganismes représentés dans ce mémoire. J'aimerais avoir votre collaboration pour que chacun puisse parler environ une dizaine de minutes, pour un total d'environ vingt minutes pour la présentation du mémoire. Si vous voulez identifier vos organismes, vous identifier et identifier les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît!

Conseil régional de développement

de l'Est du Québec et Conférence

municipale de l'Est du Québec

M. Lachance: Jocelyn Lachance, président du CRD; à ma droite, Rosaire Ouellet, président de la COMEQ; Pierre Jobin, directeur général du CRD; Laurent D'Amboise, directeur général de la COMEQ. Pour ce qui concerne le temps limite, on s'est arrangé pour se refiler la parole pendant les vingt minutes; alors, ce ne sera peut-être pas dix-dix exactement, mais ça va faire vingt.

Le Président (M. Laplante): Vous avez dit Laurent D'Amboise?

M. Lachance: C'est cela.

Le Président (M. Laplante): Vous pouvez y aller.

M. Lachance: Dans un premier temps, je vais expliquer pourquoi il y a deux oganismes qui présentent le même mémoire. Les deux organismes, en l'occurrence, sont le Conseil régional de développement de l'Est du Québec et la Conférence municipale de l'Est du Québec. On est d'une région où il y a des organismes spéciaux. On a demandé au CRD de faire une consultation et on s'est associé en régions; à cet organisme siègent déjà des cités et villes et des municipalités rurales. On a fait la consultation ensemble.

Ce qui est à noter dans le mémoire, c'est que, compte tenu du peu de temps qu'on avait pour consulter, cela ne correspond pas exactement à la compilation de la consultation écrite et cela n'a été accepté que par les exécutifs des deux organismes en question.

Le CRD, je pense que tout le monde sait un peu ce que c'est. Le Conseil régional de développement regroupe autant des organismes syndicaux, patronaux que coopératifs, ainsi que la société nationale de l'Est et les conseils spécialisés tels que la culture, le loisir, la forêt, l'environnement, les communications, l'aménagement intégré et la conférence municipale. Je laisse le soin à M. Ouellet de présenter la COMEQ, son organisme.

M. Ouellet (Rosaire): M. le Président, messieurs les membres de la commission, la Conférence municipale de l'Est du Québec est un organisme tout neuf qui a été créé en 1971. Elle regroupe les administrateurs urbains et ruraux dans un but bien précis, celui d'étudier les problèmes municipaux dans notre région et, ensemble, de trouver des solutions. La conférence est un peu l'organisme qui a été à l'avant-garde des nouveaux conseils de comté renouvelés dont on parle actuellement parce que déjà, dans l'Est du Québec, les ruraux et le monde urbain ont appris à travailler ensemble. Cela peut donner l'exemple d'un mode de fonctionnement des futurs conseils de comté.

M. Lachance: Le mode de consultation qu'on a eu dans l'Est a été de deux façons; la première a été une espèce d'enquête distribuée à 1000 groupes ou organismes dont les 200 municipalités, d'une part. D'autre part, on a fait quatre assemblées générales dans le secteur. La raison pour laquelle on est en commission parlementaire est simple, c'est qu'on se situe entre les organismes locaux et les organismes panquébécois, comme celui que vous avez entendu avant nous.

Nous allons présenter un peu l'Est du Québec tant au niveau du territoire qu'au niveau de la population. Compte tenu du portrait de l'Est du Québec, la façon dont on a analysé le projet de loi est plus en fonction du développement de l'Est que de l'aménagement comme tel, étant donné qu'on est une région assez spéciale. (11 h 45)

Voici la façon dont on présente cette région, habituellement: c'est grand comme la Suisse, 16 000 milles carrés, 200 municipalités, 315 000 habitants. On a été une région pilote d'à peu près 315 000 habitants. On a été aussi une région analysée de toutes les façons, ou à peu près, et le résultat des analyses a rarement fait notre affaire. Or, le revenu personnel par habitant dans notre région est d'environ 65% de la moyenne du Québec. Le taux de chômage oscille entre 15% et 25%. De toute façon, il est toujours le double de celui du Québec, malgré un taux d'activité inférieur de 10% à la moyenne et un pourcentage de travail extra-régional de 4% à 5%.

La population diminue et vieillit, compte tenu du bilan migratoire annuel de 5000 personnes, surtout les jeunes. C'est dans ce contexte qu'on a voulu analyser le projet de loi et dans un contexte aussi de prise en main de la région par la population; pour ne citer que quelques exemples de cette prise en main, Cabano, Esprit-Saint, Le Jal, les groupements forestiers, etc. On est même le territoire où il y a trois projets pilotes d'aménagement entrepris par des conseils de comté, les Iles-de-la-Madeleine, le comté Matapédia et la Trans-Continentale par le biais d'une coopérative de développement. Le portrait semble complet.

Quand on parle de développement, je pense que c'est assez clair. Ce qui est important de souligner, c'est la réaction première qu'on a eue face au projet de loi. On s'est dit: Quelle que soit la valeur des schémas de développement, quelle que soit la valeur des plans d'urbanisme, on n'a aucune garantie que le développement de l'est va se faire par le biais de cette loi.

M. Ouellet (Rosaire): A la page 22, le projet de loi 125 et la réforme municipale, un des principes qui sous-tend le projet de loi 125, c'est que l'aménagement est d'abord une responsabilité politique qui relève des élus municipaux réunis par scrutin direct dans une structure intermunicipale. Mais on se pose la question suivante: Est-ce qu'il s'agit réellement de la réforme municipale fondamentale dont on parle depuis nombre d'années? Pour nous, les municipalités, on trouve que la présente loi n'apporte pas de mandat nouveau en ce qui concerne spécifiquement le mandat des personnes impliquées dans le monde municipal.

Remarquez bien qu'on voulait aborder le sujet du financement plus en profondeur parce qu'au moment où on a écrit le texte l'honorable Parizeau n'avait pas établi les règles du jeu au niveau financier. Maintenant, on sait à quoi s'attendre et, considérant le financement, on croit que les prévisions financières ne sont pas réalistes concernant l'importance de l'aménagement dans le territoire québécois. On croit que le ministre des Finances devra certainement ouvrir les cordons de la bourse un petit peu plus qu'il ne le fait présentement, compte tenu de l'importance de l'aménagement.

M. Lachance; Autre point à souligner. Le ministre Léonard nous avait habitués au terme "décentralisation" et quand on a vu un projet de loi sur l'aménagement, on a tout de suite essayé de faire le rapport entre les deux. On a beaucoup de difficulté. Cela ne ressemble en rien à un projet

qui pousse à la décentralisation. La question qu'on se pose, par contre, c'est la suivante: Le secrétariat à la décentralisation et à l'aménagement a publié le fascicule 6 sur le territoire des nouveaux comtés. Le problème, c'est que le 5 sur les pouvoirs de ces structures n'est pas encore publié. Or, on trouve un petit peu difficile, sans connaître les pouvoirs d'une structure, de délimiter à la fois le territoire et le mode de représentation des gens qui y siègent.

Les questions qu'on nous a posées pour ce qui concerne les modalités d'application peuvent se résumer un peu comme suit: A quel comté renouvelé la municipalité sera-t-elle rattachée, compte tenu qu'on ne connaît pas les pouvoirs? A combien de votes aura-t-elle droit, en comparaison des autres? Le conseil de comté va-t-il nous forcer à englober certains éléments dans notre plan d'urbanisme? Qui va payer la note? De sorte que les gens se prononcent beaucoup plus sur un principe que sur des modalités d'application avec tout ce que cela comporte de biaisage ou de fausse interprétation.

Pour ce qui concerne nos disparités régionales, encore une fois, si on regarde les pouvoirs décrits dans la loi que les conseils de comté auraient, cela ne changera pas grand chose chez nous, puisque les grands axes routiers sont déjà établis. Les aéroports et les ports, même s'ils sont de juridiction fédérale, je ne pense pas qu'il y en ait beaucoup plus qu'il y en a présentement; ils ne changeront pas de place, si on fait exception de Sept-lles. Les grands parcs industriels, encore là, on ne les multipliera pas à outrance. Les parcs de récréation et de conservation sont à peu près tous là aussi, de sorte qu'on ne voit pas vraiment ce que cela pourrait apporter de nouveau.

Pour ce qui concerne les investissements publics, compte tenu qu'on baisse de population, je ne pense pas qu'il y en ait de nouveaux non plus. On a plus tendance à fermer les écoles qu'à en ouvrir d'autres.

Au niveau des recommandations que le CRD et que la COMEQ font, nous croyons que la loi devrait prévoir une consultation obligatoire et systématique de divers organismes de planification et de consultation avant la préparation du schéma pour qu'ils indiquent leurs prévisions et orientations, d'une part. Nous croyons également qu'on devrait d'autre part les consulter sur la version préliminaire du schéma et rendre compte de cette consultation lors des assemblées publiques prévues par le projet de loi. Parmi les organismes à être consultés, mentionnons les commissions scolaires, la conférence administrative régionale, les conseils régionaux de la santé et des services sociaux, les groupements forestiers ou l'équivalent, les conseils régionaux de développement et organismes spécialisés. Il faudrait aussi inclure les comtés adjacents.

En ce qui concerne le territoire, ce que nous proposons, cela ressemble un petit peu à ce que j'ai entendu de nos prédécesseurs: Qu'on prenne les conseils de comté existants et qu'on y ajoute les cités et villes adjacentes. Au niveau de la représentation, ce que nous proposons, c'est de donner deux fois plus de votes qu'il y a de municipalités. Chaque municipalité aurait droit à au moins un vote et le restant des votes serait réparti au prorata de la population. Si, dans ces deux cas, au bout de trois mois, il n'y a pas eu contestation, cela s'applique — contestation ni sur le territoire, ni sur le mode de représentation — le conseil de comté a ses lettres patentes. S'il y a contestation, ce qui est prévu dans la loi s'applique.

Au niveau de la présentation des schémas: Encore une fois, on demande qu'il y ait consultation des organismes régionaux. Là où on s'oppose, c'est au niveau de toutes les interventions possibles et imaginables du gouvernement, à peu près à toutes les étapes du projet de loi. Ce que nous retenons, ce serait uniquement ceci: La zone d'intervention spéciale suffirait pour couvrir les cas d'urgence ou d'importance nationale. Quant à ce qui n'est pas urgent ou important, il est difficile d'admettre qu'on passe par-dessus un vote aux deux tiers des autorités essentiellement responsables. M. Ouellet.

M. Ouellet (Rosaire): A la page 38, sur l'urbanisme, on comprend bien que cette phase est très importante dans l'application de la loi actuelle. On dit que l'urbanisme est une pratique de planification qu'ont adoptée beaucoup de centres urbains du Québec. En milieu rural, cependant, la dispersion de l'habitat et le mode d'occupation du sol rendaient ce besoin moins évident. L'adoption du projet de loi amènerait, cependant, à moyen terme toutes les municipalités du Québec à se doter de leurs plans d'urbanisme et de règlement de zonage, de lotissement et de construction. On peut, toutefois, se poser de nombreuses questions sur les prescriptions contenues dans le projet de loi à ce chapitre. La plus importante, c'est la valeur même d'un plan d'urbanisme conforme à l'article 78, c'est-à-dire les grandes orientations d'aménagement de la municipalité, les grandes affectations du sol et les densités de son occupation.

Selon les experts que nous avons consultés, il s'agit d'un travail de quelques heures pour un technicien en urbanisme, sans plus, d'autant plus que le schéma fournit déjà les grandes indications. Mais on peut se demander ce que cela donne de plus en pratique pour ordonner l'aménagement du territoire municipal. Il n'en va pas de même, cependant, des règlements de zonage, de lotissement de construction, qui eux, permettent d'invervenir directement.

On peut toutefois se demander si tout cet appareillage est bien nécessaire dans toutes les municipalités. En effet, une municipalité en croissance d'un comté qui n'est pas engagé dans la confection d'un schéma ne serait pas tenue d'avoir un plan et des règlements alors qu'une très petite localité éloignée serait tenue d'en avoir dans le comté voisin où il y a un schéma. Encore, ce n'est pas tout d'avoir des plans, des règlements, mais il faut être en mesure de les appliquer.

Nous recommandons que le rythme selon lequel les municipalités devront se donner des plans, des règlements d'urbanisme soit laissé à la

discrétion de chacun des conseils de comtés renouvelés.

M. Lachance: Sur la participation de la population, on en profite pour féliciter le ministre de l'intérêt qu'il y apporte. Cependant, nous suggérons qu'encore une fois, les organismes régionaux soient intimement liés à l'information. On suggère aussi de se servir de Communication Québec comme ressource technique et on espère que, d'autre part, la régionalisation de Radio-Québec et l'établissement d'une politique plus active de soutien aux media communautaires permettront une meilleure diffusion du débat au sein de toute la collectivité.

En ce qui concerne les décisions — tout le bout du référendum — on comprend mal qu'un référendum demandé par 10% de la population d'un comté ne soit que consultatif. C'est la raison pour laquelle on suggère tout simplement de sauter l'article sur le référendum, parce que ce n'est pas sérieux.

En conclusion, on aimerait attirer votre attention sur deux points. Le premier, lequel des deux ministres va être responsable de cette loi? Le deuxième, c'est qu'une fois réglée cette première question, nous serons en mesure, enfin, de connaître l'interlocuteur à qui nous adresser pour nous assurer que le premier paragraphe de l'article 184 s'applique effectivement dans la liste du Québec. Merci.

Le Président (M. Laplante): C'est tout? Merci, messieurs de votre coopération. M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, je remercie le Conseil régional du développement de l'Est du Québec et de la Conférence municipale de l'Est du Québec du mémoire qu'ils ont préparé conjointement. Je pense que c'est de bon augure et cela fait longtemps qu'ils ont des préoccupations en aménagement, en urbanisme.

J'ai remarqué dans votre mémoire que le projet de loi 125, par son approche intermunicipale d'aménagement, sa perspective de décentralisation, son parti pris — la participation des citoyens — correspond aux efforts que vous avez faits depuis plusieurs années et à certaines expériences en cours que vous connaissez. Je pense ici aux travaux qui sont faits aux Iles-de-la-Madeleine, au Conseil de comté de la Matapédia et à une autre coopérative: la Transcontinentale.

Nous sommes évidemment très heureux de cette correspondance de pensées. Par ailleurs, je note que vos commentaires sur le projet de loi 125 sont très souvent formulés en fonction du développement régional, ce qui est compréhensible pour un organisme comme le vôtre, mais ce qui m'amène aussi à apporter une première série de précisions. Je commenterai également plus tard d'autres questions soulevées dans votre mémoire.

Votre mémoire laisse entendre que le projet de loi 125 devrait répondre à la fois aux questions d'aménagement et de développement régional. Pour ma part, je crois que l'aménagement est, pour une collectivité, une façon d'organiser et d'agencer son milieu de vie, de le planifier en terme territorial. C'est une responsabilité qui revient d'une façon particulière au pouvoir public et spécialement aux instances municipales.

Quant au développement, il est la résultante d'une foule d'acteurs privés, publics, coopératifs et ne peut découler d'une loi, à mon sens. Dans le projet de loi 125, le gouvernement s'en tient à l'aménagement.

L'une des recommandations de votre mémoire est que le gouvernement n'intervienne dans ce processus d'aménagement que par le biais des articles sur les zones d'intervention spéciale, en particulier 134 et 141. Nous sommes d'avis, quant à nous, que le gouvernement doit s'engager à discuter avec les instances municipales tous les projets d'aménagement, qu'ils soient gouvernementaux ou municipaux et réserver les interventions spéciales à quelques rares cas, à des exceptions. (12 heures)

C'est dans cette discussion entre paliers politiques, ayant chacun leurs responsabilités propres en matière d'aménagement, que se retrouve l'esprit du projet de loi 125. C'est aussi l'un des traits qui le distingue des tentatives antérieures de législation en matière d'aménagement et de recours aux lois spéciales que les gouvernements antérieurs ont utilisé souvent.

Autre chose: vous recommandez à la page 37 de votre mémoire que le gouvernement accorde à chaque comté une subvention fixe de $1 million et une subvention supplémentaire de $100 per capita pour qu'il puisse s'attaquer à la réalisation des priorités du schéma. Compte tenu des précisions apportées sur l'objectif de la loi, vous comprendrez que l'aide financière prévue dans le projet de loi vise l'élaboration du schéma et non la réalisation des projets que le schéma pourrait identifier. D'ailleurs, s'il devait y avoir éventuellement des ressources financières pour des investissements découlant du schéma, il serait préférable que ce soit par un réaménagement de la fiscalité, c'est-à-dire par des ressources autonomes des municipalités, plutôt que par des subventions plus ou moins arbitraires ou discrétionnaires.

Par ailleurs, pour ce qui est de l'appui financier du gouvernement aux travaux d'aménagement, vous savez maintenant que le dernier budget a prévu $2 100 000 pour aider les comtés qui se prévaudront de la loi 125.

A la page 33 de votre mémoire, vous mettez en doute la concordance entre les limites des comtés renouvelés et les zones d'étude utilisées par l'OPDQ pour tracer les orientations du développement régional. Je veux préciser que les zones d'étude en question n'ont aucune valeur statistique et n'ont pas de rapport direct avec l'éventuelle définition des comtés renouvelés.

Vous faites également état, à la page 28, d'un manque de précision sur certaines modalités d'application du projet de loi: A quel comté renouvelé ma municipalité sera-t-elle rattachée — je vous cite: — A combien de votes aura-t-elle droit en

comparaison des autres? Le conseil de comté va-t-il nous forcer à englober certains éléments dans notre plan d'urbanisme? Qui va payer la confection du schéma et la révision de notre plan d'urbanisme?

Nous n'avons pas voulu fixer l'ensemble de ces modalités parce que nous voulons laisser jouer justement les dynamismes locaux et la consultation. Ces modalités seront adaptées aux besoins ou aux particularités du milieu. D'ailleurs, vous faites des suggestions dans votre mémoire à la suite de cela.

Je voudrais poser une première question à M. le président de la Conférence des maires de l'Est du Québec. La conférence oeuvre depuis déjà plusieurs années au niveau intermunicipal. Compte tenu de votre expérience dans ce domaine, comment réagissez-vous par rapport au projet de loi 125 dont l'un des objectifs est justement cette collaboration intermunicipale en matière d'aménagement?

M. Ouellet (Rosaire): M. le ministre, il me fait plaisir de vous dire que depuis le temps qu'on travaille ensemble, depuis le temps qu'on fait des représentations auprès des ministères concernés, actuellement, dans l'est du Québec, nous réagissons favorablement au projet de loi 125. Pour nous, c'est un projet de loi qui est essentiel et qui doit devenir loi le plus vite possible, pour nous permettre justement de jouer le rôle le plus efficace possible au niveau de notre région. Lorsque je vous dis cela, je ne vous parle pas seulement de l'aménagement, mais j'ai toujours aussi l'idée du développement. Peu importe les conceptions de chacun, pour nous, il reste une chose certaine, c'est que le développement découle forcément, doit faire partie intégrante de l'aménagement du territoire. A la lumière des expériences que nous avons vécues dans l'est du Québec, nous pouvons vous dire, M. le ministre, que la loi, chez nous, a été étudiée et acceptée d'une façon très favorable.

M. Léonard: D'après votre expérience, en coopération ou en collaboration intermunicipale, il est possible de penser qu'on va arriver à fabriquer, à élaborer des schémas d'aménagement dans l'est?

M. Ouellet (Rosaire): Si je me fie à l'expérience que nous avons vécue dans notre région, sans prêter l'oreille à d'autres mémoires qui proviennent d'autres régions, si je regarde le portrait chez nous, dans notre région, je crois sincèrement que nous aurons la possibilité de mettre en pratique, dans un court temps, la loi 125. Chez nous, les gens sont prêts. On a déjà fait l'expérience de travailler en commun, l'urbain et le rural, et je crois sincèrement, sans être trop optimiste, que nous sommes prêts à passer à l'action et démontrer aux gens que dans l'Est, on est peut-être à l'avant-garde des autres régions.

M. Léonard: Vous parlez beaucoup, dans le mémoire — ma question s'adresse à vous deux — de développement, d'aménagement. Est-ce que vous feriez une distinction entre les deux?

M. Ouellet (Rosaire): On a essayé. Pour ma part, personnellement, j'ai essayé de demander à votre bureau de me faire la distinction entre l'aménagement et le développement et je n'ai rien reçu — cela fait un mois et demi que je l'ai demandé...

M. Léonard: Vous comprendrez que...

M. Ouellet (Rosaire): Les craintes que nous avons, pour reprendre un petit peu ce que vous avez dit au début, c'est évident que ce qui nous préoccupe, c'est le développement. Si on continue à évoluer ou à ne pas évoluer au même rythme qu'on fait présentement, quel que soit le schéma, il n'y aura plus de monde. Les gens s'en vont; il n'y a pas de développement, il n'y a pas d'argent. Alors, à quoi cela va nous servir d'avoir des beaux schémas d'aménagement s'il n'y a plus personne. On a l'expérience du BAEQ aussi, dans lequel on parlait d'aménagement et les résolutions du BAEQ qui ont été retenues ou qui ont fait le plus les manchettes, ce n'était pas de l'aménagement. Les gens chez nous appellent cela du déménagement. Alors, les craintes qu'on vous exprime dans le mémoire, c'est cela. S'il n'y a rien à côté, nulle part, pour assurer un développement, à quoi cela sert de faire des schémas d'aménagement?

M. Léonard: Vous faites état d'interventions gouvernementales qui n'auraient pas été conformes à un aménagement harmonieux. Croyez-vous que les dispositions de la loi 125, relatives à l'information et à la concertation entre différents paliers politiques, notamment à l'article 11, peuvent limiter des gestes gouvernementaux préjudiciables à l'aménagement?

M. Ouellet (Rosaire): II est apparu à ce chapitre que... comme on le mentionne plus loin, de ce que j'ai retenu de vos remarques tantôt, dans le mémoire, il est question de limiter les interventions du gouvernement ou du ministre. Ce n'est pas en termes de discussions ou de négociations; c'est vraiment en termes de modifications d'un schéma déjà adopté. Mais il nous est apparu dans les réunions, c'est ressorti aussi, qu'il y avait une assez longue période et assez de discussions justement des intentions de l'Etat et de ses agences aussi — ce qui comprend les sociétés d'Etat — pour qu'on puisse calibrer un schéma en fonction de ce qui est prévisible, en tout cas, pour une période de cinq ans, puisque les schémas sont conçus pour devoir s'appliquer cinq ans.

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Léonard: M. le Président, avec votre permission, étant donné que je dois aller au Conseil des ministres, où des dossiers reliés aux activités du ministère m'attendent, je voudrais, évidemment, remercier les intervenants et la COMEQ en particulier, de son mémoire. Cet organisme qui

présente la particularité unique de regrouper autour d'une même table, à la fois des représentants du monde rural et urbain, a peut-être été à l'avant-garde, ainsi que l'a dit M. Ouellet, d'une certaine formule de concertation entre les deux secteurs. Cependant, les intervenants précédents ont évoqué un certain nombre de questions, relativement à l'existence d'un ou deux conseils de comté de droit de veto du préfet. Est-ce que, concrètement, à la COMEQ, on a ressenti le besoin, même si le champ de compétence de la COMEQ n'était pas d'avoir un pouvoir de réglementation et d'exercer, finalement, toutes les compétences qui sont dans la loi, comme c'est le cas pour les conseils de comté, est-ce qu'on a, donc, éprouvé le besoin d'établir des règles de fonctionnement de représentation proportionnelle ou pondérée de droit de veto et autres dans ces assises où il y avait finalement des gens représentant des blocs assez différents, en tout cas, quant à leur taille?

M. Ouellet (Rosaire): M. le ministre, je suis bien heureux que vous me posiez cette question, parce que je fus réellement interloqué tout à l'heure lorsque j'ai entendu dire par un de mes collègues municipaux, entre autres, que le futur préfet devait être forcément d'une municipalité rurale. Je me suis dit: Ou il n'a réellement pas fonctionné à l'intérieur d'un organisme reliant l'urbain et le rural, ou il préconise une autre forme de démocratie. A la conférence municipale, il y a déjà quelques années que nous travaillons ensemble et nous nous sommes rendu compte que les maires ruraux et les maires urbains sont capables de s'entendre au niveau d'une table de concertation sans avoir à recourir à des droits de veto. En ce qui concerne l'importance de la représentation rurale ou urbaine, on s'en est toujours tenu à un homme, un vote. A l'heure actuelle, je peux vous assurer qu'il n'y a jamais eu de divergence d'opinions tellement flagrante qu'on en vienne aux poings lors d'une discussion autour de la même table. Alors, dans l'examen de la loi, à mon point de vue, on essaie de trop entrer en profondeur dans les discussions, dans des processus de discussions qui demandent des contrôles au niveau de la représentation et du vote.

M. le ministre, je peux vous dire sincèrement que dans la région de l'Est du Québec, compte tenu de l'expérience que nous avons vécue, nous faisons confiance à la démocratie municipale et nous considérons que les maires urbains et les maires ruraux sont d'égal à égal et qu'on peut très bien s'entendre autour de la même table dans un processus démocratique en se respectant l'un et l'autre.

Je crois que la loi 125 devrait être conforme à ce principe, le respect mutuel des deux représentations dans un bloc homogène.

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Merci, M. le Président. Messieurs, votre mémoire est — je ne veux pas utiliser un mot désobligeant, ce n'est pas mon intention du tout — long par comparaison avec d'autres documents que nous avons reçus. Mais, en le lisant attentivement, on trouve là-dedans la mise en évidence de certaines considérations qui me semblent très importantes.

Une des questions que le ministre d'Etat à l'aménagement vous a posées a retenu mon attention aussi. En lisant votre document et notamment aux pages 19 et 20 je note que vous faites allusion à la vocation de développement que vous voudriez donner non seulement à vos deux organismes, mais également à la région comme telle. Vous insistez sur la nécessité d'agir de façon à créer des emplois, à faire créer des emplois par ceux qui pourraient investir et à faire fructifier les ressources qui existent dans la région.

Il est évident que la poursuite d'un objectif de développement peut venir en conflit avec l'objectif de protection qui est un élément important de ce que nous appelons l'aménagement du territoire. Vous le reconnaissez également dans votre mémoire, parce que vous dites à un endroit que je n'identifie pas précisément — mais peu importe — que l'on a dans le passé, et dans un passé malheureusement trop récent, massacré des sites exceptionnels sur votre territoire. (12 h 15)

Je vous remercie d'avoir souligné ce conflit qui existe entre ces diverses préoccupations et je pense que c'est important que vous nous ayez dit que vous êtes conscients de la nécessité de protéger et qu'en même temps, vous êtes en perte de population, donc en perte de développement, d'investissements, de possibilités de faire fonctionner la région et de garder les jeunes, notamment, dans la région avec des activités et des emplois intéressants.

C'est dans ce sens que j'attache une grande importance à votre mémoire. Puisque vous avez, et dans le texte et dans vos réponses aux questions du ministre, explicité votre point de vue, je n'ai pas d'autres questions à poser sur cet aspect.

Les questions que j'aimerais vous poser sont peut-être des questions de détails. Je commence par la fin de votre mémoire, à la toute dernière page, vous posez une question que j'ai posée à l'Union des conseils de comté: Qui sera le ministre responsable? Inutile de poser deux fois la même question, on aura deux fois la même réponse. Mais ce qui me laisse un petit peu perplexe c'est votre allusion au premier alinéa de l'article 184 du projet de loi. Cet alinéa se lit comme suit: "La commission a son siège social à l'endroit déterminé par le gouvernement. Un avis de l'établissement ou de tout changement de siège social est publié dans la Gazette officielle du Québec".

Je comprends que le territoire est vaste et que la localisation d'un siège social peut être une question de grande importance. J'aimerais que vous m'expliquiez un peu ce qu'il y a derrière cette recommandation qui semble avoir une importance majeure, parmi vos préoccupations à l'égard de ce projet de loi.

M. Lachance: Si le site du siège social de la commission était dans l'Est, ce serait un des éléments ou un élément ou le seul élément du projet de loi qui ferait qu'il y a une volonté de développement.

M. Goldbloom: Compte tenu de l'importance du territoire, par rapport à la population qui est plutôt clairsemée, serait-il, à votre avis, désirable que cet article 184 soit interprété d'une façon assez souple pour permettre qu'il y ait des endroits secondaires par rapport à un siège social?

M. Lachance: C'est exactement cela, que les gens ne soient pas obligés de faire des pèlerinages, encore une fois, à Québec.

M. Goldbloom: Merci, c'est très clair.

Vous recommandez que l'article 24 du projet de loi soit biffé. C'est l'article qui porte sur le référendum qui a un caractère consultatif dans la rédaction actuelle du projet de loi. Si ce référendum avait un caractère décisionnel, de-manderiez-vous toujours que l'article 24 soit biffé?

M. Lachance: C'est cela, d'une part, ou le référendum demandé par la population est décisionnel, où on en est, ou on dit que le référendum peut être demandé par les gens, éventuellement par le conseil de comté, à ce moment, qu'il soit consultatif, on trouve cela parfait. Mais ce qu'on dit c'est que si 10% de la population prennent la peine de faire tout ce qui est relié à une demande de référendum et qu'ils le font, évidemment, sans l'aide financière de l'Etat, cela devrait être assez sérieux. Si le référendum va à l'encontre d'une décision du conseil de comté, il faut qu'on en tienne compte. Si on n'en tient pas compte, on l'enlève carrément et on se dit: il y a assez de consultation avant, qu'on n'a pas besoin de cela ou on se dit: On le laisse là, mais qu'il soit décisionnel.

M. Goldbloom: Ma dernière question porte sur votre recommandation que des sommes importantes soient accordées aux nouveaux conseils de comté par rapport à l'aménagement du territoire. Vous suggérez, à la page 37, que ce soit $1 million par conseil de comté et $100 per capita, ce qui donne une somme de $71 millions pour les conseils de comté et $600 millions pour la population du Québec, une somme totale de $671 millions. Il me semble que c'est beaucoup pour la confection des schémas et que c'est fort peu pour la réalisation des choses qui découleraient de la confection des schémas.

Je ne veux pas du tout vous mettre dans une position délicate, mais j'aimerais vous inviter à expliciter davantage ce que vous visiez en calculant cette somme-là. Qu'est-ce que vous vouliez réussir au juste?

M. Jobin (Pierre): De fait, ce n'est pas pour préparer un schéma d'aménagement. On pourrait, en attendant la réforme de la fiscalité municipale, puisqu'au moment de la rédaction et de l'approbation par le conseil exécutif, il n'y avait pas autre chose que des rumeurs qui circulaient, accorder à chaque comté qui aura complété son schéma et les règlements afférents à cette somme pour qu'il puisse s'attaquer à la réalisation des priorités du schéma. On a compris, dans le projet de loi, que le schéma couvrait une période de cinq ans; donc, il faut diviser la somme que vous avez mentionnée par cinq et, à ce moment-là, cela paraît beaucoup moins ambitieux de s'attaquer à des programmes d'infrastructures routières, d'aqueduc, d'égouts, d'habitation, etc.

M. Goldbloom: Merci beaucoup.

Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. M. Ouellet, qui êtes le président de la COMEQ, vous avez dit tout à l'heure que chez vous, vous étiez avant-gar-distes, que les ruraux et les gens des municipalités, les gens des villes, ont déjà appris à travailler ensemble. Est-ce que la ville de Rimouski fait partie de la COMEQ?

M. Ouellet (Rosaire): Oui monsieur.

M. Goulet: Et cela va bien.

M. Ouellet (Rosaire): Cela va assez bien.

M. Goulet: Lorsqu'il y a une réunion, j'arrive, par exemple, avec le maire d'Esprit-Saint... Je ne sais pas si cela existe encore.

M. Ouellet (Rosaire): Oui, cela existe.

M. Goulet: Depuis un bout de temps on parlait de...

M. Lachance: ... M. Jobin: Oui...

M. Goulet: Le maire d'Esprit-Saint ou d'une petite municipalité et le maire de Rimouski, à la même table, ils n'ont droit qu'à un vote chacun. Vous êtes d'accord sur ce principe. Vous ne prévoyez pas, par exemple, que Rimouski pourrait, sans avoir un vote par 1000 habitants, mais comparativement, dans le cas présent, peut-être un petit village de 400 ou 500 habitants, comparativement à une ville qui en a 35 000, dans votre région... Un maire, un vote.

M. Ouellet (Rosaire): M. le député, ma réponse a été une réponse à celle du ministre des Affaires municipales qui me demandait de quelle façon on fonctionnait à la conférence municipale. Je lui ai répondu justement sur la façon dont on fonctionnait au niveau de la votation à notre table, sauf que le mémoire dit ceci: Nous nous proposons, afin de faciliter la démocratie et de

reconnaître, quand même, l'importance des populations, que dans un conseil de comté renouvelé, il y ait le double des municipalités faisant partie de ce comté, que chaque municipalité ait une voix de représentation et que la moitié soit répartie à même la population, au prorata de la population. Pour vous donner un exemple plus explicite, si vous avez dans un conseil de comté renouvelé 20 municipalités, il y aura forcément 40 votes, un vote par municipalité et 20 votes pourront être partagés à partir de l'importance de la population des villes et des municipalités.

M. Goulet: C'est assez important, parce que dans mon comté, je n'ai pas ce problème, mais chez vous, vous l'avez. Dans la suggestion que vous faites, est-ce que vous pourriez me donner un exemple concret? Chez vous, pour le comté de Rimouski, je ne sais pas quelles paroisses sont touchées par le conseil de comté, mais prenons l'exemple précis du comté de Rimouski; une petite municipalité, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, pourrait avoir un vote, combien Rimouski en aurait-il? Dans le cas présent, est-ce que vous avez fait des calculs?

M. Ouellet (Rosaire): Personnellement, je n'en ai pas fait, parce que je ne fais pas partie du conseil de comté de Rimouski. Mais quand même, on pourrait dire que, sur 26 municipalités rurales et urbaines, si je ne me trompe pas, il y aurait 52 représentations et sur celles-ci, chaque municipalité posséderait son vote et que la ville de Rimouski, de par la population aurait au prorata de sa population deux ou trois votes, selon...

M. Marcoux: Treize votes de plus, cela fait... on en aurait 14 sur 52.

M. Ouellet (Rosaire): De manière à ce que la ville de Rimouski, en aucun moment, ne puisse contrôler la table de concertation.

M. Goulet: Peut-être pas la ville de Rimouski, mais si dans votre cas — je ne connais pas la limite du conseil de comté — Mont-Joli tombait en même temps que Rimouski. Ces deux villes pourraient faire balancer ou, en tout cas, un très, très fort pourcentage seulement de ces deux villes, faire balancer le comté.

M. Ouellet (Rosaire): Non plus, parce que si vous tenez toujours compte de la représentation au niveau du 20-20, parce qu'on parle de 20 ou de 26-26, il reste toujours que la question population vient contrebalancer...

M. Goulet: Vous soutenez que les villes — par exemple, avec une disproportion, telle que vous connaissez chez vous — sont intéressées à travailler au niveau de la table et dire: D'accord, un maire, un vote, à peu près. Vous soutenez cela. Vous avez fait des expériences et cela va bien.

M. Ouellet (Rosaire): Vous me posez une question piège, mais il reste une chose certaine: au niveau actuel de la conférence municipale, nous travaillons un maire, un vote. Dans un processus de conseils de comté renouvelé, il faudrait établir, quand même, une procédure de votation plus équitable, de façon à tenir compte des populations concernées. La proposition que l'ont fait dans le présent mémoire tient compte, justement, de cette particularité.

M. Goulet: Une dernière question aux messieurs du CRD. Est-ce que je me trompe si je dis que cette loi vous a déçus, que ce n'est pas du tout la loi que vous attendiez? Vous attendiez une toute autre loi, d'après ce qu'on avait vu dans les journaux depuis un an, une véritable loi sur la décentralisation et on vous a amené une loi sur l'aménagement. Est-ce que cela résume très bien votre mémoire et votre façon de penser, si j'ai dit cela de cette façon?

M. Ouellet (Rosaire): Si on ne va pas au-delà du texte, en ce qui nous concerne, dans l'Est, encore une fois, on ne parle pas pour le Québec, ce n'est vraiment pas de la décentralisation. Sauf que, comme je l'ai dit tout à l'heure, les premières fois qu'on en a entendu parler cela s'appelait décentralisation; là, c'est rendu aménagement.

Ce que j'attends avec impatience, c'est le fascicule 5. Qu'est-ce qu'il va y avoir là-dedans? A ce moment, peut-être que la question qu'on aura à se poser sera: Est-ce que les territoires qu'on s'est délimités avant de connaître les pouvoirs correspondent ou sont-ils bien délimités en fonction des pouvoirs qu'on aura?

M. Goulet: J'aurais une très courte question à M. Ouellet. Dans ce comté, M. le Président, on touche vraiment des grosses municipalités, une grosse avec des petites, mais très petites. Croyez-vous que des municipalités — j'en ai parlé tout à l'heure — comme Saint-Esprit auraient le moyen de se payer un maire à temps plein ou ne sentiraient-elles pas le besoin de s'affilier avec d'autres?

M. Ouellet (Rosaire): Actuellement, la réponse va être simple; c'est non. Il n'y a aucune municipalité, sauf la ville de Rimouski et les entités urbaines qui peuvent se payer un maire à temps plein.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Rimouski.

Je vous ferai remarquer que c'est une entente qu'il y a eu au début de la commission...

M. Marcoux: II y a un consentement.

Le Président (M. Laplante): Chaque député où sa région est concernée a le droit de venir parler à la commission. Merci de votre coopération, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Oui, M. le Président.

M. Chevrette: J'ai remarqué que ces gens ont fait 200 milles... on vous donne la parole.

Le Président (M. Laplante): Vous perdez du temps.

M. Goulet: Non, absolument pas, M. le Président.

M. Marcoux: M. le Président, je voulais vous remercier de la...

M. Goulet: II y a des humoristes autour de la table. Alors à un moment donné, on pensait que...

M. Chevrette: C'est mieux que des visages de mi-carême.

M. Marcoux: Je voudrais vous remercier de la présentation de votre mémoire, d'autant plus que, comme l'a souligné le ministre, votre mémoire tient compte de trois préoccupations très présentes dans la région depuis longtemps, soit l'approche intermunicipale, la décentralisation et la participation des citoyens. (12 h 30)

Avant de poser des questions, je voudrais d'abord faire une remarque. J'ai vu une chose un peu bizarre à la fin de votre mémoire. D'une part, vous dites, à la page 29 que la loi 125 dans votre région ne sera probablement plus très utile, parce que les grands emplacements ou les grands problèmes d'aménagement, là où il faut situer les phares, les routes, etc. sont assez déterminés. D'autre part, vous demandez qu'on mette le siège social de la future commission nationale d'aménagement dans la région. Je pense qu'on peut difficilement soutenir les deux à la fois. Si la loi n'est pas plus utile que cela dans la région, par rapport à ce qui est déjà fait et, en même temps, dire que ce serait important, que ce serait prioritaire de situer le siège social de cette commission nationale à cet endroit, c'est un paradoxe. Ceci est un commentaire.

Une première question maintenant. J'en aurai quelques-unes. Dans votre mémoire, vous dites que vous avez fait une consultation et que votre mémoire ne peut pas tenir compte de la consultation, compte tenu des délais. J'aimerais savoir quels sont les résultats importants de la consultation que vous avez tenue et dont vous n'avez pu tenir compte, dans une certaine mesure, pour votre mémoire? Les grandes lignes de cela.

M. Jobin: On n'a pas pu en tenir compte parce que certains éléments de la consultation se faisaient sous forme écrite et ils n'étaient pas encore entrés à ce moment-là. L'aspect qui me semble le moins conforme à ce qui est mentionné comme prise de position dans le document, c'est la question de forcer les municipalités urbaines à faire partie du conseil de comté d'une part, et, d'autre part, c'est...

M. Marcoux: ...

M. Jobin: Là-dedans on est plus permissifs en ce sens que la recommandation qui est faite, c'est le territoire actuel du conseil de comté en embarquant les municipalités urbaines et s'il n'y a pas de contestation dans trois mois, c'est beau; s'il y en a, on part en revirant.

M. Marcoux: D'accord.

M. Jobin: En tout cas, les résultats de la consultation sont plus contraignants que cela. D'autre part, c'est sur le pouvoir du ministre d'imposer des choses. Je ne retrouve pas directement cela...

M. Marcoux: Mais quand vous dites que les résultats sont plus contraignants, cela veut dire que dans les résultats du questionnaire, du sondage, c'est automatique.

M. Jobin: Oui.

M. Marcoux: Les villes feraient partie de... D'accord.

M. Jobin: Elles seraient forcées, oui. L'autre est sur le pouvoir du ministre d'émettre des ordonnances pour faire changer les schémas d'aménagement. C'est beaucoup plus largement oui dans les résultats de la consultation que dans notre mémoire.

M. Marcoux: Je suis heureux de la réponse et je suis content d'avoir posé la question, parce que dans la lecture du questionnaire que les membres de la commission n'ont pas, mais que j'ai, je me serais attendu à des réponses inverses, parce que tel que les questions étaient formulées, par exemple, croyez-vous que la loi devrait forcer les municipalités urbaines à participer au conseil de comté, l'aspect forcé, la charge affective du mot et la question précédente...

M. Jobin: Mais il y avait deux questions là-dessus. Il y avait deux questions sur cette donnée et la réponse n'a pas été la même aux deux questions. D'ailleurs, en assemblée, c'était de toute beauté de voir cela.

M. Marcoux: II y avait une autre question aussi: Croyez-vous que la loi devrait forcer les conseils de comté à consulter la population au sujet de versions préliminaires et définitives de schémas d'aménagement? Quand on dit le mot "forcer", la charge affective de cela, on aurait pu facilement susciter des réponses très négatives aux deux aspects. Vous semblez indiquer que cela n'a pas suscité de réponses négatives. C'est important de préciser cela. Est-ce qu'il y a d'autres éléments importants qui se sont dégagés?

M. Jobin: Cela me semble les deux qui sont le plus en contradiction avec le mémoire comme tel.

M. Marcoux: J'ai une autre question concernant le découpage territorial. J'ai été étonné de

lire que la recommandation des gens de la région soit de proposer le statu quo du découpage territorial en incluant les villes. Je vois le maire de Mont-Joli qui assiste avec son gérant municipal, je vois le maire de Price qui est proche et qui s'entend bien avec Mont-Joli et j'ai d'autres exemples. J'ai l'impression que... Cela m'a vraiment surpris. Je voudrais que vous explicitiez pour savoir si le résultat du sondage ou de la consultation est vraiment... Est-ce qu'il y a des cas particuliers en somme? Est-ce que c'est majoritaire, unanime, ou tout cela? Je voudrais que vous précisiez dans quelle mesure le découpage territorial actuel fait l'unanimité ou pas.

M. Jobin: Je ne pense pas qu'on puisse dire qu'il fait l'unanimité et, là-dessus, on n'a pas eu de facilité à obtenir des réponses claires, soit parce qu'on s'adressait dans un questionnaire écrit à des organismes chez eux et ils indiquaient qu'ils prendraient un mélange de deux et de trois ensemble, soit que dans des assemblées publiques c'était compliqué, finalement, de s'entendre sur cette chose-là.

Comme il y avait beaucoup d'autres aspects sur lesquels on voulait consulter, on remettait le problème en disant: Ils seront bien assez grands pour se chicaner ensemble après. Il n'y a pas eu d'unanimité et de recherches longues là-dessus, au moment où la consultation s'est faite, mais il faut comprendre que ça fait déjà un petit bout de temps et depuis ce temps-là les gens se sont téléphoné et se sont rencontrés. Une consultation comme celle-là a parti quelque chose et l'information qui a été donnée, la venue du ministre...

Le Président (M. Laplante): M. Ouellet, est-ce que vous pourriez...

M. Ouellet (Rosaire): Je vais vous dire sincèrement, suite à la rédaction du rapport, que je me réservais certaines remarques sur la répartition du territoire. Dans l'optique de la consultation, il a été bien mentionné que les nouveaux conseils de comté devaient respecter la volonté du citoyen d'appartenir à sa région d'appartenance, à son territoire propre. Dans toutes les réunions que nous avons tenues, nous avons constaté qu'il y avait réellement cette volonté, que les gens voulaient avoir la possibilité d'avoir leur conseil de comté correspondant à leur région d'appartenance.

M. Marcoux: Ce qui pourrait vouloir dire un redécoupage.

M. Ouellet (Rosaire): Un redécoupage du territoire dans certains cas très précis où l'on voit une volonté commune des gens d'aller vers ce point.

M. Marcoux: Concernant le...

M. Lachance: J'aimerais ajouter quelque chose là-dessus, peut-être, pour finir le tableau.

L'objectif de cette recommandation dans le mémoire, c'est de faire discuter les gens autour de quelque chose qu'ils connaissent, qui existe et de ne pas entamer une discussion pour savoir quel territoire on pourrait prendre, mais de dire si celui-là fait, on le prend, s'il ne fait pas à ce moment on discutera. Je pense que ce qui est sous-entendu, c'est ça. Prenons ce qui est présentement et dans beaucoup de cas, ça marche. Et si ça ne marche pas, il y a trois mois pour dire: Non, ça ne marche pas.

M. Marcoux; D'accord. Comme il faut être assez bref, j'en avais sept ou huit et je dois me résumer. Cela précise je pense un aspect de votre mémoire qui est important. Quant au mode de représentation, je pense que la suggestion que vous faites — la plupart des autres mémoires n'ont pas abordé cette question-là comme ça et c'est une des suggestions originales et intéressantes de votre mémoire — est une responsabilité à examiner pour résoudre ce fameux conflit de la représentation. Ce que vous proposez: Une municipalité un vote, est-ce à l'extrême, seulement la proportionnalité? je pense que ce que vous proposez, ce pourrait être une formule. Le ministre l'a toujours dit, chaque comté va trouver lors de la demande de lettres patentes, la formule qui lui convient, mais il y a quand même là une hypothèse intéressante pour réconcilier rural-urbain avec un équilibre entre les deux.

Je ne demande pas de commentaires, si on avait plus de temps j'en demanderais, mais peut-être ceci: Comment êtes-vous arrivés ou quels sont les facteurs qui jouent en faveur de cette suggestion? Pouvez-vous expliquer les motifs ou comment vous en êtes arrivés à faire cette proposition que je trouve particulièrement intéressante?

M. Jobin: Dans la consultation — Rosaire le mentionnait tantôt — il y a eu des indications claires que les municipalités urbaines ne tenaient pas à se faire noyer. On l'a dit de façon assez claire pour que tout le monde comprenne, mais par ailleurs, elles étaient prêtes à comprendre que, pour collaborer avec leurs voisines, il fallait qu'elles acceptent de ne pas peser d'un poids trop catastrophique si on voulait que quelque chose se commence. A partir de ça il y a moyen d'envisager 58 formules, mais compte tenu que le projet de loi — et là-dessus il est bien difficile de penser autrement — prévoyait déjà un représentant par municipalité, il s'agit d'essayer de tenir compte aussi de la nécessité de la proportionnalité. Si on additionne les deux, c'est un "guess" intellectuel de tomber sur cette formule.

M. Marcoux: D'accord.

Le Président (M. Laplante): Une dernière question, M. le député de Rimouski, s'il vous plaît!

M. Marcoux: On va essayer de choisir celle qu'on trouve la plus juteuse et la plus importante. Il y en aurait plusieurs autres intéressantes. Je vais

en proposer une à deux volets. Elle pourrait être à cinq volets pour passer les cinq questions, mais à deux volets, même si on ne regarde pas...

Le Président (M. Laplante): II a appris vite son métier.

M. Marcoux: Le premier volet, entre la décentralisation — vous êtes favorables à la décentralisation — on peut contester certains points de vue de cette interprétation de la loi que vous faites, versus le zonage agricole. Cela m'apparaît imprécis, ce que vous dites sur cela. Vous semblez dire: on est pour les deux. On est un peu pour la façon dont l'harmonisation est proposée; par contre, la loi de protection... cela n'apparaît pas clair, la façon dont vous prévoyez l'ajustement. Quelles seraient les étapes et comment voyez-vous concrètement que la conciliation pourrait se faire entre les deux et, question additionnelle, comment voyez-vous le rôle des CRD à l'avenir, par rapport à la redéfinition que cela suppose du territoire québécois et des modes de consultation?

M. Lachance: Pour ce qui concerne la première question, la position est claire au niveau de CRD, si on se réfère au mémoire qu'on a présenté lors du projet de loi 90, si je ne m'abuse. La façon dont nous voyions le zonage agricole, on s'est dit: on n'est pas dans la zone verte, sauf qu'on est la région la plus rurale du Québec. Le processus était tout simplement de prendre ce qui existe présentement au ministère de l'Agriculture. Le zonage n'est pas à peu près, il est fait, il a même été fait deux fois et trois fois. On a des cartes et on ne sait plus quoi en faire. Alors, on en prend une et on dit: c'est celle-là. Ce zonage devient automatique, accepté — dans le temps, c'étaient les municipalités — éventuellement par le conseil de comté, si on tient compte de celle-là, jusqu'au moment où il arrive quelque chose qui fait que cela ne marche plus. La Commission de protection des terres agricoles n'est là qu'en cas de, ce n'est qu'un tribunal d'appel. On s'organise chez nous et si on se chicane et qu'il n'y y plus personne, on tient nos positions, là on remonte. Mais on remonte juste dans ce cas. C'est assez clair comme position; elle n'a pas changé, c'est encore cela.

M. Marcoux: En somme, cela veut dire que vous êtes d'accord avec les détails du projet de loi d'harmonisation, avec son esprit ou l'initiative, et le point de départ est le conseil de comté. Il y a un projet proposé et s'il y a désaccord, la commission comme tribunal d'appel. Mais pour l'application par la suite...

Le Président (M. Laplante): Très court, monsieur, parce que je ne voudrais pas abuser de l'Opposition qui a de la bonne volonté...

M. Marcoux: Le deuxième volet, par exemple...

M. Jobin: Je vais essayer d'être bref. Il y a déjà l'OPDQ qui s'interroge et nous interroge dans un document de consultation qui est produit sur les orientations du développement de l'Est du Québec sur des questions comme celles-là. Il y a également, je présume, le ministre qui doit se pencher sur la question sur laquelle nous avons eu l'occasion de discuter quelque peu lors de sa visite à Rimouski en février. Notre association québécoise des CRD se penche également là-dessus. Notre réflexion n'est pas terminée, mais le projet de loi 125 ne... En tout cas, jusqu'à maintenant, ce ne sont pas tous les CRD qui se sont longuement consacrés aux questions qui sont traitées dans les schémas d'aménagement, de la façon dont c'est traité.

Le Président (M. Laplante): Sur ce, le mot de la fin, M. le ministre.

M. Léonard: Je veux simplement remercier les gens de l'Est du Québec qui se sont déplacés pour ce mémoire, pour la qualité des réponses, parce qu'on a pu apprécier aussi l'expérience municipale de M. Ouellet. Merci beaucoup.

Le Président (M. Laplante): MM. les membres de cette commission, on vous remercie de votre coopération et les travaux sont ajournés sine die, ce qui veut dire qu'on se retrouvera vers environ 16 h 15.

Suspension de la séance à 12 h 45

Reprise de la séance à 16 h 19

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, messieurs! Nous reprenons l'étude du projet de loi no 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

Les membres de la commission sont: MM. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun) remplacé par M. Giasson (Montmagny-L'Islet); M. Cordeau (Saint-Hyacinthe) remplacé par M. Goulet (Bellechasse); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau) remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee); M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Chevrette (Joliette-Montcalm); M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie) remplacé par M. Léonard (Laurentides-Labelle).

Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau (Verchères) remplacé par M. Marquis (Matapédia); M. Fontaine (Nicolet-Yamaska) remplacé par M. Cordeau (Saint-Hyacinthe); M. Goldbloom (D'Arcy McGee) remplacé par M. Caron (Verdun); M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle) remplacé par M. Tardif (Crémazie); M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Sco-wen (Notre-Dame-de-Grâce).

M. Gendron: ... M. Charbonneau (Verchères) comme intervenant remplacé par M. Gendron (Abitibi-Ouest).

Le Président (M. Marcoux): M. Charbonneau (Verchères) remplacé par M. Gendron (Abitibi-Ouest).

Nous entendrons d'ici la fin de notre séance un groupe d'étudiants de l'Université du Québec à Montréal, Bell Canada et Télébec Ltée. J'inviterais le groupe d'étudiants de l'Université de Montréal à se présenter. Si vous pouvez nous présenter vos collègues. Vous êtes monsieur?

Etudiants de l'Université du Québec à Montréal

M. Vachon (Bernard): Bernard Vachon, je suis professeur d'aménagement du territoire; le travail qui va vous être présenté a été préparé par les étudiants dans le cadre de mon cours. Si vous le permettez, autant de donner la parole aux étudiants qui vont eux-mêmes présenter le mémoire, j'aimerais prendre quelques minutes de votre attention pour remercier tout d'abord les membres qui ont permis au groupe d'étudiants de présenter un mémoire qui leur tient à coeur, sur lequel, cependant, ils n'ont pu, malheureusement, compte tenu des événements à l'UQAM, accorder autant de temps qu'ils auraient voulu. J'aimerais aussi préciser dans quel contexte le mémoire a été présenté.

Le Président (M. Marcoux): Oui, allez-y.

M. Vachon: Le projet de loi 125 est un projet de loi qui, en quelque sorte, fait suite et complète la première loi sur l'aménagement du territoire, la loi 90. La loi 90 est particulièrement concernée par les terres arables et nous considérons que le projet de loi 125 aurait avantage à considérer aussi des espaces particuliers en milieu de montagnes, en milieu de plateaux au Québec et particulièrement dans les régions des Laurentides et des Cantons de l'Est qui, compte tenu de leurs conditions biophysiques particulières, devraient recevoir une attention spéciale dans les démarches d'aménagement.

C'est donc dans ce contexte que le travail des étudiants a été préparé et ce sont ces principaux éléments qui seront mis en évidence cet après-midi et qui, nous l'espérons, pourront être suivis d'approches d'aménagement spécifiques, qui prendraient la forme de directives spécifiques aux municipalités concernées par ces milieux naturels. Encore une fois, vous excuserez le texte que vous avez reçu, qui présente davantage la forme d'un document préparatoire, d'un document de travail que d'une réflexion complète et ceci est attribua-ble essentiellement à la suspension des activités scolaires à l'UQAM depuis le 6 mars dernier. Alors, sans plus tarder je cède la parole aux étudiants.

Le Président (M. Marcoux): Avant de nous présenter vos collègues, est-ce qu'on peut savoir si vous êtes chargé de cours?

M. Vachon: Non, je suis professeur régulier.

Le Président (M. Marcoux): Si vous pouvez vous présenter et présenter vos collègues. Vous avez une quinzaine de minutes pour présenter votre mémoire. Ensuite, il y aura des échanges avec les députés.

Mme Boily: Dominique Boily, étudiante. M. Beaulieu: André Beaulieu, étudiant. Mme Roy (Sylvie): Sylvie Roy, étudiante.

Mme Gouin: Suzanne Gouin, étudiante.

M. Beaulieu: Le mémoire s'intitule "Pour un développement ordonné en milieu de montagne au Québec".

Tout d'abord, un petit préambule. La loi-cadre sur l'aménagement du territoire et l'urbanisme, désirée depuis quelques années, ne peut que nous réjouir et nous en félicitons sincèrement les gens qui y travaillent, notamment, M. le ministre Léonard et ses collègues du cabinet.

Par ailleurs, une loi qui veut couvrir l'ensemble du territoire par le truchement de l'organisation administrative des comtés et des municipalités ne peut être, selon nous, généraliste car le territoire, lui, n'est pas homogène. Le Québec est, en effet, constitué de régions différentes que l'on distingue selon deux niveaux: le niveau biophysique et le niveau socio-économique.

Tout d'abord, un petit rappel de la situation de l'aménagement du territoire au Québec. On sait que les terres agricoles protégées par la loi 90 sur le zonage agricole couvrent le territoire, en majorité, de la plaine du Saint-Laurent. Les communautés urbaines possèdent ou posséderont leur propre schéma de développement. Donc, la plaine du Saint-Laurent, la vallée de l'Outaouais et les communautés urbaines constituent les lieux privilégiés d'intervention d'une politique d'aménagement du territoire. Ce qui veut dire que, pour tout le territoire non concerné, à savoir: les Laurentides, l'Abitibi-Témiscamingue, le Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, la Gaspésie et les Appalaches, l'adoption d'un schéma de développement est laissée au libre choix des municipalités, ce qui a causé trop souvent un développement anarchique dans plusieurs régions. C'est dans ce sens que le projet de loi 125, qui vise un processus planifié du développement, prend toute son importance.

Mais nous croyons que les milieux de montagne devraient faire l'objet d'une approche spécifique d'aménagement compte tenu de ses caractéristiques biophysiques qui en font un milieu fragile et de son potentiel socio-économique particulier. Le milieu de montagne au Québec renferme peu de terres arables au potentiel agricole, mais sa superficie et les richesses qu'il contient sont immenses. Cependant, ces milliers d'acres supportent, en différents points, des zones très urbanisées. Cette urbanisation s'est répartie inégalement sur le territoire et est souvent concentrée dans des régions cibles. Le phénomène gagne en importance avec l'étalement physique qui le caractérise, le caractère irréversible qu'il possède, sans compter les conséquences souvent incompatibles avec le milieu où il s'inscrit.

Description du milieu de montagne au Québec. L'aspect biophysique. Le territoire en montagne se distingue par la présence d'un milieu naturel qui lui est spécifique, c'est-à-dire un milieu fragile, composé d'un vaste réseau hydrographique, de pentes fréquentes et d'intensité variée et de sols même de faible épaisseur et souvent absent en surface.

La population concernée par ces milieux est de deux types, soit, en premier lieu, la population résidente dont les activités sont les suivantes: agro-forestières et reliées au tourisme et, en second lieu, la population flottante composée de touristes villégiateurs et de touristes passagers provenant d'un large rayon autour des zones rurales elles-mêmes.

Les activités engendrées par ces deux types de population sont d'ordre primaire, c'est-à-dire activités agro-forestières linéaires, d'ordre secondaire, forestières et alimentaires, et d'ordre tertiaire, c'est-à-dire récréo-touristiques. En fait, tout le secteur tertiaire profite des retombées économiques du tourisme.

Des liens importants d'interdépendance sont donc établis entre certaines régions du milieu de montagne et les grands centres d'activités regroupés le long de l'axe du Saint-Laurent. Les ressources naturelles ont d'abord donné lieu aux activités primaires traditionnelles puis ont constitué des attraits importants pour des populations de plus en plus éloignées. Ces attraits se traduisent sous forme de demandes d'activités à caractère récréo-touristique se manifestant par deux formes principales d'occupation du sol: l'accaparement individuel, appelé aussi villégiature en chalet, et le tourisme de masse qui se manifeste par les activités de plein air.

Ces liens ont donné lieu à des forces de développement qui se traduisent par une urbanisation sectorielle du milieu et une pression démographique sur celui-ci. Cette urbanisation souvent non contrôlée conduit à une transformation du tissu rural existant, ce qui n'est pas sans affecter la structure socio-économique. Une des manifestations de l'urbanisation, le "mitage", met ainsi en péril l'identité des communautés existantes face à une modification de leur milieu d'appartenance. Une des principales conséquences du "mitage" constitue la dégradation du milieu physique, l'impact écologique, l'impact physico-spatial ou visuel. Les deux perspectives de développement sont donc, premièrement, d'exploiter les ressources du milieu pour répondre à la demande d'activités et de développements et, deuxièmement, de sauvegarder une partie du territoire pour en garantir l'accès au plus grand nombre et la survie d'un milieu fragile. L'élément de base du milieu de montagne est incontestablement la nature elle-même. Elle représente un potentiel de développement orienté principalement sur les activités récréo-touristiques et le secteur primaire.

Ce milieu naturel renferme notre plus vaste réserve de ressources, l'eau douce, le bois, l'espace et la faune. Elle constitue donc une richesse collective, c'est pourquoi il serait impérieux de prévoir une exploitation planifiée et des accès contrôlés à ces richesses.

Mme Boily: J'ajouterai ici en guise de conclusion que l'enjeu socio-économique fait de ces régions un élément primordial pour la qualité de vie des Québécois en assurant l'accès à cette réserve naturelle dans les années à venir, un potentiel d'activités à exercer et des attraits à exploiter convenablement. Tout cela justifie l'intervention de l'Etat, étant donné le caractère souvent public du fond de terre et/ou l'élément en jeu, soit le milieu naturel lui-même, et/ou l'impuissance des municipalités à réagir. Donc, l'accessibilité aux ressources du milieu devrait ainsi tenir compte du milieu lui-même, c'est-à-dire de son degré de fragilité, de son potentiel et des seuils d'accueil qui y correspondent.

Pour faire suite, on a formulé une série de recommandations qui sauront, je l'espère, rejoindre vos préoccupations en la matière. (16 h 30)

Mme Roy: Ce seront les recommandations maintenant.

Que le ministère de l'aménagement par le truchement de la loi 125 reconnaisse, du fait de leurs caractéristiques biophysiques qui en font des milieux fragiles, les régions de montagne comme devant faire l'objet d'une approche d'aménagement spécifique.

Que le ministère de l'aménagement reconnaisse les normes des services de protection de l'environnement comme un règlement officiel à s'inspirer dans les schémas régionaux et municipaux en tant que normes minimales.

Devant la précision des moyens proposés par la loi 125, face au développement futur de ces régions, la participation des citoyens devient l'élément clef du succès, quant au choix et aux modalités du développement futur.

Les citoyens, résidents permanents et villégiateurs, devraient pouvoir intervenir au niveau municipal, en tant qu'organisme local ou comité de citoyens pour être en mesure de participer à l'élaboration des objectifs du développement de la région d'appartenance. Conséquemment, une plus grande sensibilisation des gens est essentielle quant aux particularités de ces milieux, tant au niveau physique que biologique, aux choix des orientations des développements, c'est-à-dire aux scénarios et aux conséquences à court, moyen et long termes.

Ceci devrait être inclus dans le cadre d'un vaste programme d'éducation populaire, soit à l'école, par les média d'information, par les associations locales concernées et également, de concert avec les ministères concernés.

Suite à cette sensibilisation, les petites municipalités devraient avoir en main les outils nécessaires, soit les personnes-ressources choisies par elles-mêmes et un schéma d'aménagement pour satisfaire cette volonté collective de planifier leur territoire. Il appartient à l'Etat de fournir une aide technique et financière dans la logique de l'adoption d'une loi sur l'aménagement du territoire.

Une loi cadre sur l'aménagement et l'urbanisme devrait non seulement inciter les intervenants à se doter d'outils de planification, mais aussi à préciser la nature des dessous de l'aménagement et définir des types de milieu et des approches spécifiques.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je voudrais, dans un premier temps, vous remercier, vous, ainsi que votre professeur, d'avoir quand même pensé à présenter un mémoire concernant une loi très importante au niveau du Québec.

Un premier commentaire, en termes d'appréciation. Vous mentionnez que c'était surtout la plaine du Saint-Laurent ou par la Loi de protection des sols arables qu'on pouvait éventuellement en arriver à une certaine formule d'aménagement. Vous disiez dans votre mémoire: mais pour ce qui est du reste, à l'extérieur de la plaine du Saint-Laurent, vous avez semblé attacher une très grande importance à un milieu spécifique à aménager qui est, comme vous le qualifiez, un territoire en milieu de montagnes.

Je voudrais poser quelques questions sur votre mémoire. A un moment donné, vous mentionnez qu'il est très important d'accorder à la participation des citoyens, pour ce qui est de l'aménagement de leur milieu, beaucoup de consultation, beaucoup de préoccupation, afin que ce soit le milieu qui se définisse ou qui définisse son propre aménagement. Est-ce que vous croyez, suite à l'analyse que vous avez sûrement faite du projet de loi 125 concernant l'aménagement, que les diverses dispositions du présent projet de loi rencontrent vos objectifs, en tout cas, de consultation et d'assurance, et que le milieu pourra donner son point de vue?

M. Beaulieu: Ce n'est pas la préoccupation principale de notre mémoire. On en a quand même tenu compte, parce que c'est un point important. Personnellement — je ne pourrai pas parler au nom du groupe — je trouve que ce qui a été prévu dans la loi comme mécanisme démocratique pour la participation des citoyens, cela semblait valable, très valable.

M. Gendron: Alors, cela rencontre passablement vos objectifs, tout en reconnaissant — comme vous l'avez mentionné comme préalable — que cela ne fait pas l'objet fondamental de l'analyse de votre mémoire, mais vous reconnaissez là des mécanismes valables de consultation.

J'aimerais également poser une autre question un peu dans le même sens. A un moment donné, dans votre mémoire, vous avez mentionné que l'Etat se devrait d'avoir une attitude passablement interventionniste pour le territoire spécial que vous avez analysé qui s'appelle celui en milieu de montagne et j'aimerais que vous puissiez nous donner votre interprétation sur la conciliation de cette affirmation, c'est-à-dire d'avoir une attitude passablement interventionniste pour un secteur spécifique que vous identifiez et qui s'appelle celui du milieu de montagne versus l'autre affirmation où vous prétendez qu'il appartient énormément aux citoyens de se définir eux-mêmes quant à leurs préoccupations en aménagement.

Comment faites-vous le lien entre les deux?

M. Beaulieu: II faut faire attention aux termes utilisés, parce que c'est très important de dire les choses comme elles sont. Premièrement, quand on demande au gouvernement de préciser la nature des études d'aménagement, c'est de fournir aux gens impliqués dans les régions un guide pour mieux se diriger et mieux comprendre leur milieu et mettre sur pied des critères qui puissent, sans pondérer des choses, au moins sensibiliser les gens à leur milieu, à l'identité de leur milieu et non pas l'identité sociale seulement, mais le niveau identification par rapport à leur milieu naturel, c'est-à-dire qu'un milieu naturel en montagne, ce n'est pas un milieu naturel qu'on retrouve en plaine. Pourquoi? Parce que les contraintes physiques qu'on y retrouve demandent une plus grande gentillesse envers l'aménagement et des précautions à prendre.

Ce qu'il faut, c'est sensibiliser les gens pour qu'ils se rendent compte de cela. Leur milieu est différent d'ailleurs. En fin de compte, qu'on aille n'importe où au Québec, on a chaque fois des contraintes différentes et comme on l'a dit tantôt, le Québec n'est pas formé d'une immense région homogène, mais plutôt de différentes petites régions plus ou moins grandes, plus ou moins variées, selon différents critères. A chaque fois, il faut essayer de tenir compte de ces critères pour que les richesses qui ont attiré les gens sur place ne soient pas le résultat... qu'à la fin, si cela se dégrade, les gens n'y aillent plus.

M. Gendron: Vous ne croyez pas que dans le cas des différences régionales qui peuvent être observables dans l'ensemble du Québec ou les différences qu'on va appeler de municipalités regroupées, qu'à ce moment, il n'appartiendrait pas davantage au milieu de les définir, de les cerner et de déterminer éventuellement dans les schémas d'aménagement certaines dispositions qui permettraient de conserver leur cachet? Ou encore, est-ce qu'il n'est pas plus logique de dire qu'il est normal que cette sensibilisation, de ces besoins spécifiques à des régions du Québec, deviennent la préoccupation des gens du milieu plutôt que de l'Etat? A partir du moment où ce ne sont pas des préoccupations à caractère national — à un moment donné, on peut avoir un objectif de protéger l'ensemble de nos sols arables et après cela avoir à réaliser cet objectif dans une loi cadre — il y a quand même une certaine souplesse au niveau des particularités des régions. Je voudrais que vous vérifiiez si vous pensez qu'à un moment donné, cela ne devrait pas être, en termes de sensibilisation, une responsabilité qui est dévolue aux différents milieux du Québec plutôt qu'une responsabilité nationale.

M. Beaulieu: Ce que vous dites n'entre pas en contradiction avec le contenu du mémoire. Ce qu'il faut retenir, c'est précisément l'importance pour une meilleure gouverne et une meilleure information des agents interventionnistes et particulièrement la population qu'on désire consulter et d'en faire des agents intervenants par le processus de participation, que ces gens soient guidés dans les suggestions et les recommandations qu'ils vont faire.

Prenons un exemple bien précis: l'automne dernier, avec un groupe d'étudiants, on a passé six jours dans la région de Saint-Jovite, une région que le ministre connaît très bien. Il avait, d'ailleurs, été invité un soir et, malheureusement, compte tenu d'une réunion inattendue, a dû s'absenter...

M. Gendron: Vous faites bien de nous déclarer cela ici.

M. Vachon: ... faites une réunion inattendue... on ne comprend pas trop...

M. Beaulieu: Suite à ces six jours passés dans une région de montagne, avec des caractéristiques biophysiques particulières, les étudiants ont fait des recherches, ont produit des documents sur lesquels ils ont travaillé durant toute la session ensuite et, en décembre, donc trois mois après, il y a eu une convocation de la population d'Huber-deau, municipalité de la région sur laquelle on s'était attardé davantage et là, il y a eu une présentation des conclusions des recherches qui ont été faites et une présentation des normes visant à la protection du milieu naturel. Cela a été étonnant, et pour les étudiants cela a été très révélateur, de voir à quel point, après avoir été informé de la fragilité du milieu et de la nécessité d'adopter des normes de développement très rigoureuses, la population était prête à faire des concessions en termes de développement. Autrement dit, des lots de 15 000 ou 20 000 milles carrés qu'on ne voulait pas dépasser, il y a à peine deux ou trois ans, on était prêt, après l'information, à accepter des ceintures vertes autour des lacs et là où il y avait des pentes élevées.

En fait, ce sur quoi le document attire l'attention, c'est sur les régions de montagne qui sont des régions fragiles. Compte tenu de cette situation, il devrait y avoir des incitations, voire des batteries d'information, dans la loi ou parallèles à la loi pour qu'il y ait en milieu de montagne, dans ces municipalités, dans ces conseils de comté, une approche d'aménagement particulière, axée sur la conservation, la protection tant du milieu que du potentiel en fonction de la satisfaction des besoins socio-économiques futurs.

M. Gendron: Merci. J'ai une autre question. Dans votre mémoire, vous n'abordez pas tellement les responsabilités que les nouveaux conseils de comté renouvelés exerceront en matière d'aménagement du territoire. J'aimerais que vous puissiez me donner votre point de vue. Que pourrait être, selon vous, le rôle joué par cet organisme que nous, dans le mémoire, nous appelons conseil de comté renouvelé? Est-ce que vous croyez qu'il aura les éléments ou est-il normal de lui confier cette responsabilité de voir à l'aménagement de son territoire?

M. Vachon: En fait, je pense que vous soulevez une question très brûlante quant aux rôles, aux responsabilités du conseil de comté et quant à la deuxième dimension du conseil de comté, qui a d'ailleurs été soulevée avec pertinence ce matin, à savoir les critères qui vont déterminer la délimitation de ces nouveaux conseils de comté. Donc, théoriquement et compte tenu des expériences étrangères — personnellement, j'ai étudié en Angleterre — il y a une pratique qui tend, ou tout au moins un principe, à intégrer dans une même unité d'aménagement le milieu rural et le milieu urbain.

Théoriquement, on est favorable à une telle approche. Dans la pratique, c'est évident qu'il y a des problèmes sérieux qui vont se poser, mais, pour répondre plus directement à votre question, il apparaît assez souhaitable qu'un organisme, une autorité sous-régionale possède enfin une autorité, une responsabilité en matière d'aménagement et que cet aménagement, après toute l'information nécessaire à une meilleure compréhension de la situation, réponde véritablement aux aspirations et aux besoins d'une population qui sera démocratiquement et honnêtement consultée et que les consultations recueillies soient prises en considération dans l'élaboration des documents finaux.

M. Grendron: Pour ma part, je vous remercie.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Merci, M. le Président. Je voudrais dire d'abord que je trouve que la préparation et la présentation de ce mémoire constituent une belle initiative et j'espère qu'elle sera imitée par d'autres.

Je reconnais que c'est plus facile pour les étudiants de Laval que pour ceux des six autres universités parce que les premiers n'ont pas de voyage à faire, de frais de voyage à encourir, mais je trouve que c'est une excellente chose que le travail qui aboutit à la rédaction d'un tel document soit mis à l'épreuve devant une commission parlementaire parce qu'après tout il y a des préoccupations qui peuvent être théoriques — je n'utilise pas ce mot dans un sens désobligeant — d'un côté, et pratique en vertu d'une expérience vécue de l'autre côté. Je trouve que c'est une excellente chose que nous ayons l'occasion de vous rencontrer comme cela et de discuter de votre mémoire.

J'aimerais, entre parenthèses, demander — je comprends les difficultés techniques auxquelles vous avez dû faire face — si vous avez des copies du texte dont vous avez fait lecture, qui a été un peu plus élaboré que celui que nous avions reçu auparavant. Nous l'aurons, évidemment, dans le journal des Débats, donc ce n'est pas un problème majeur. (16 h 45)

Quant à mes questions sur la substance de votre document, elles portent sur les activités que vous énumérez et qui sont engendrées par les types de population que l'on rencontre dans le milieu que vous avez décrit. Vous mentionnez, par exemple, les activités primaires dans le domaine agro-forestier et dans le domaine minier. Je présume que la mention de ces activités implique que, dans votre esprit, leur poursuite devra être soumise à l'application de l'éventuelle loi sur l'aménagement, et que l'on devrait respecter ce qui aurait été décidé comme schéma d'aménagement avant d'entreprendre des activités de quelque nature que ce soit. Est-ce que j'ai raison de faire cette interprétation de votre mémoire?

M. Gendron: Tout à fait.

M. Goldbloom: J'aimerais vous amener à élaborer un peu la façon dont vous concevez l'application de la loi. Prenons un exemple: On a un schéma d'aménagement et sur ce schéma, on indique de façon cartographique que certains territoires sont réservés à certaines activités et que certaines activités, pour regarder l'autre côté de la médaille, seraient, en principe, défendues sur certaines parcelles de territoires. Que feriez-vous avec, par exemple, l'exploration minière? Exige-riez-vous que tout le processus qui aurait mené à la décision, à la confection d'un schéma d'aménagement soit refait avant de permettre que l'exploration minière ne se fasse dans une zone réservée, disons à l'activité touristique ou à l'habitation ou à la conservation d'un secteur forestier, par exemple?

M. Vachon: Je peux peut-être répondre, cependant, je ne voudrais pas disserter tellement sur cette question qui, vous le comprendrez, de par la teneur de notre mémoire, constitue une dimension qui n'a pas été tellement fouillée et qui demeure un élément marginal par rapport aux forces de développement qui sont déjà en cours et qui consomment annuellement des quantités d'acres de terrains en bordure des lacs, en milieu montagneux, dans les Cantons de l'Est et dans les Laurentides.

Le but, l'objectif premier du mémoire, c'était précisément d'attirer l'attention sur la pertinence, la nécessité d'adopter des mesures, des normes susceptibles éventuellement, sans nier le développement, mais éviter de compromettre la qualité et le potentiel de ces régions.

On sait que le type d'activités des zones minières est extrêmement destructeur au niveau de l'environnement, tant pour la qualité des eaux — puisqu'on fait une très grande consommation d'eau — que pour le milieu forestier comme tel. Il y aurait peut-être lieu aussi — mais j'ai l'impression que cela concerne davantage le ministère ou le futur ministère de l'environnement — de voir à ce qu'il y ait des études d'inventaires qui soient faites et qu'il y ait des mesures qui soient prises pour éviter des abus lorsque ce n'est pas nécessaire. Une activité minière, somme toute, c'est assez concentré dans l'espace. Il n'est pas certain que l'on doive, à chaque occasion, détruire des quantités de terrains, de forêts, pour l'implantation de réseaux routiers ou des activités minières et paraminières.

M. Goldbloom: Je ne voudrais pas insister, puisque vous m'indiquez que c'est un aspect qui n'a pas été approfondi dans le travail de préparation du mémoire; donc je me contenterai de renouveler mes félicitations pour la qualité de ce travail et remercier notamment les étudiants d'avoir voulu prendre l'initiative de venir présenter et défendre leur mémoire devant cette commission parlementaire.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Je veux également féliciter ces étudiants pour la préparation et la présentation de ce mémoire. Je suis convaincu que votre professeur va vous donner une note "minimale" pour votre examen de fin d'année, c'est déjà acquis. J'aurais maintenant une question.

Nous avons actuellement au Québec une loi sur la protection du territoire agricole, des sols arables. Cela a été la première loi votée. Certains nous disent: Cette loi 125 que nous étudions présentement aurait dû être le premier projet de loi déposé plutôt que le projet de loi no 90. Le ministre qui défendait le projet de loi 90 nous disait et a dit à toute la population du Québec: Ce qui compte d'abord, c'est de protéger les sols agricoles en voulant dire: Ensuite on verra pour le reste, c'est moins important. Vous nous dites aujourd'hui qu'en montagne... Je vais essayer de citer le ministre le plus fidèlement possible. Il disait: Ecoutez, il y a tellement de petits coins dans les montagnes et sur les bord des lacs, qu'il y a moyen de se construire, c'est beau des arbres, voulant dire par là: Protégeons nos territoires agricoles d'abord et pour le reste il y a de la place en quantité. Vous nous dites: Au niveau des montagnes, pour éviter de compromettre le potentiel de ces régions, au niveau de l'eau, de l'approvisionnement en eau potable, au niveau de la forêt ou des autres richesses naturelles — le député de D'Arcy McGee a parlé des mines — au niveau de toutes les autres richesses naturelles et du tourisme qui est une industrie assez importante au Québec, est-ce que vous voulez dire que c'était une façon de se débarrasser d'un problème et de le mettre sur le dos d'un autre ministre ou d'autres personnes et qu'on aurait dû étudier de façon plus globale l'aménagement du territoire au niveau de la province? Est-ce que c'est ce que vous voulez toucher dans votre mémoire?

M. Vachon: Non. J'aurais aimé répondre...

M. Goulet: A ce moment-là, est-ce qu'on étudiait le problème d'une fausse manière? On ne s'y prenait pas de la bonne façon ou dites-vous que c'est correct d'avoir procédé comme cela?

M. Vachon: Moi, je trouve que c'est correct.

M. Goulet: Parfait, cela répond à ma question. C'est ce que je voulais savoir. Sur environ 30 mémoires, il y en a environ 29 qui nous ont dit — c'est-à-dire que vous êtes le deuxième — La loi 125 aurait dû venir avant; on a mis la charrue avant les boeufs. Je voulais savoir votre opinion là-dessus. Vous dites non...

M. Vachon: Si vous permettez, je vais quand même préciser. L'expérience des années passées a démontré qu'il aurait été difficile, sinon téméraire, pour un gouvernement d'essayer de faire passer une loi-cadre d'aménagement du territoire global. Personnellement, je crois qu'il a été très habile de scinder les deux milieux, le milieu rural et le milieu...

M. Goulet: Je m'excuse de vous interrompre, mais, si j'ai dit global, je voulais dire d'abord. Je m'excuse, il y a une très grande différence. Pas global, mais plutôt d'abord. C'est bon de faire...

M. Vachon: D'accord. Je pense que...

M. Goulet: Pour faire plaisir au ministre, je ne veux pas vous vendre une idée, je veux plutôt en acheter une. Comprenez-vous? Nous sommes acheteurs. Le ministre a peut-être tout cela et tout est normal, quoiqu'il ne réponde pas à nos questions, mais quand même je veux acheter votre idée si vous pouvez me la vendre.

M. Chevrette: Vous avez une formation de vendeur?

M. Vachon: Si vous me laissez parler, je vais essayer de vous la vendre, peut-être. En fait, ce que je crois qui s'est passé, parce qu'il y a une question stratégique dans la mesure où il était très difficile de faire voter une loi d'aménagement en milieu urbain qui allait devoir impliquer les franges rurales où les opérations spéculatives sont en cours... Ayant réglé dans un premier temps la question des opérations spéculatives au moyen d'une loi sur la protection des terres agricoles, il apparaissait beaucoup plus simple, beaucoup plus facile de faire voter une loi sur l'aménagement du territoire concernant particulièrement les zones urbaines et le reste du territoire, où de toute façon les opérations spéculatives sont minimes puisque la vallée de l'Outaouais et les basses terres du Saint-Laurent étaient exclues.

Je voudrais aussi préciser qu'à la rigueur, si j'avais cru plus tôt, que vous poseriez une question dans ce sens, qu'à la rigueur, on aurait pu morceler, à l'infini, une loi d'aménagement du territoire, en faire une loi spécifique pour les terres arables, en faire une autre pour les zones urbaines et périurbaines, en faire une autre pour les milieux de montagne. Mais je crois que deux pour le Québec, c'est amplement suffisant pour l'instant, mais étant donné le caractère hétérogène biophysique des caractéristiques extrêmement importan- tes, il nous a semblé qu'à l'intérieur d'une même loi d'aménagement du territoire, à l'intérieur de la loi 125, des distinctions pourraient être faites en ce qui concerne les milieux de montagne au-delà, par exemple, d'une certaine courbe de niveau de 500 ou 600 pieds, que des directives spécifiques soient faites en accord avec le ministère de l'environnement en vue, précisément, de sensibiliser les milieux, les conseils de comté, les municipalités et ensuite, ultérieurement, la population consultée, pour que l'aménagement dans ces milieux tienne compte de ces particularités régionales regroupées sous l'expression générale — on y est revenu à plusieurs reprises — la fragilité naturelle de ces milieux, d'une part et d'autre part, le potentiel social et culturel de ces milieux.

On dit souvent que les Laurentides, les Cantons de l'Est sont les jardins de Montréal. On vit dans une société industrielle — je n'ai pas à vous le répéter — et ce n'est pas demain qu'on va retourner à une société rurale bucolique.

Il faut protéger ces milieux; ce sont des réserves importantes. Si on permet le développement comme cela s'est fait au cours des dernières années, en contrôlant essentiellement la dimension des terrains, la hauteur des haies, la hauteur des maisons, le nombre d'étages, ce sont des normes de zonage en milieu urbain. Dans le milieu de montagne, il faut avoir autre chose. Il m'ap-paraît qu'une loi véritablement concernée par un aménagement rationnel de l'espace québécois doit faire une distinction entre milieu urbain, milieu de plaine et milieu de montagne.

M. Goulet: Dernière question, est-ce que c'est possible de construire, en assez grande quantité, dans ces milieux, avec des schémas d'aménagement, se basant sur des schémas d'aménagement et sans compromettre... est-ce que c'est possible de construire et de construire dans ces jardins, comme vous les appelez, si nous avons de bons schémas d'aménagement pour protéger et éviter de compromettre le potentiel de ces régions?

M. Vachon: II y a une contrainte fondamentale; c'est la faible épaisseur des couches meubles qui empêchent à des coûts raisonnables l'installation des infrastructures de base, c'est-à-dire le système d'égout et le système d'aqueduc. A partir du moment où chaque logement ou chaque construction doit avoir sa fausse septique et son puits, c'est évident que les densités sont limitées. Une chose à laquelle on peut penser, c'est que traditionnellement au Québec, dans ces milieux, on a construit des maisons unifamiliales, mais rien n'empêcherait sur des superficies passablement grandes, avec des espaces communautaires et ainsi de suite, qu'on puisse construire d'autres types d'habitations.

On peut imaginer des habitations avec des services collectifs, des services communautaires. On vit encore avec ces habitudes des années cinquante, où chaque famille devait avoir sa maison unifamiliale et son chalet. Mais c'est devenu inabordable pour la grande majorité des

travailleurs au Québec. Alors, il y a peut-être des incitations à faire pour qu'on ait un style de développement différent dans ces milieux.

Ensuite, il y a toutes les questions d'affichage, la publicité dans ces milieux qui devrait être en conformité avec la beauté des espaces. Je me permets simplement de rappeler un exemple qui s'est produit il y a quelques années en Angleterre alors qu'une chaîne d'hôtels avait proposé la construction d'un gros complexe hôtelier dans une vallée du Yorkshire. Cela devait produire beaucoup d'emplois dans une région où le taux de chômage était très élevé et finalement, en dernière analyse, le contrat a été refusé, le permis a été refusé, uniquement à cause de l'impact esthétique que cette construction allait produire dans le paysage.

M. Léonard: C'est à mon tour de vous féliciter, de vous remercier de votre mémoire, de vous être donné la peine de le constituer, malgré les événements que vous vivez, comme vous le disiez, depuis le 6 mars dernier. (17 heures)

Je voudrais simplement, si j'en ai encore le temps, poser une ou deux questions. Une des choses que vous avez relevées, c'est le phénomène du "mitage" en milieu de montagne, je pense que c'est vrai que cela a touché le nord des Laurentides en particulier et, dans une moindre mesure, aussi les Cantons de l'Est. Qu'est-ce que vous proposez à l'heure actuelle? Je vous pose cette question en termes de contenu d'aménagement, mais je pense que ce serait intéressant. Vous y avez sûrement réfléchi parce que vous avez parlé de ce phénomène. Que proposez-vous à la place? Pensez-vous qu'il faut faire des fenêtres ou condenser l'habitation, même en milieu de montagne, et pas juste en milieu urbain?

M. Vachon: Bon! On en est conscient, c'est la faiblesse de notre rapport, du rapport des étudiants dans la mesure où il y a des énoncés de principe qui sont faits, qui ne sont pas suivis par des propositions d'aménagement spécifique.

Pour répondre à votre question, il y a évidemment des solutions qui peuvent être avancées. Le "mitage", c'est un problème sérieux dans la mesure où ça compromet non seulement le tissu socio-économique, mais aussi le milieu naturel, les paysages, etc.

Quelles modalités d'organisation spatiale proposer dans de tels milieux? On pourrait en discuter longuement, mais je me reporte encore une fois aux recommandations qui ont été retenues par les étudiants et qui vont faire l'objet d'un document présenté sous peu au conseil municipal de Brébeuf. Ce qui a été retenu, ce sont des ceintures bleues autour des lacs et des cours d'eau où l'occupation est la plus limitée possible, compte tenu, d'une part, de la fragilité de ces espaces, et, d'autre part, de la qualité de ces milieux pour des activités récréatives de plein air de masse.

M. Léonard: Est-ce que vous allez proposer des normes minimales de lotissement?

M. Vachon: C'est ça. La contrainte qu'on rencontre toujours, c'est le droit de propriété, la propriété privée de ces lots. Or, il y a une possibilité qui est entrevue. Lorsqu'il est prouvé que les milieux sont fragiles, on peut étendre la dimension des lots jusqu'à 15 ou 20 acres de terrain. Ce serait souhaitable d'avoir une loi qui clarifie toutes ces situations comme ça existe, par exemple, en France, avec des ZAB, des ZUP, etc., qui permettent de geler tout au moins temporairement les zones.

La seule prérogative qu'on a au Québec, c'est de dire: Oui, vous avez le droit de construire — parce qu'on ne peut empêcher personne de construire — mais dans la mesure où vous possédez 20 acres de terrain par permis de construire. Pourquoi? Parce qu'on considère que le milieu est fragile et qu'une occupation trop grande de terrain et des passages trop fréquents pourraient entraîner la détérioration.

M. Léonard: Cela comprend alors même les normes minimales ou les règlements de zonage des municipalités à l'heure actuelle; de ce point-là, ça tend vers des terrains, des lotissements de 40 000 pieds carrés et c'est nettement insuffisant à votre idée?

M. Vachon: 40 000 pieds carrés, ce n'est pas suffisant; 40 000 pieds carrés c'est environ un arpent. Ce qui a été proposé dans le cas de Bréfeuf, c'est dix fois plus. Dans une autre municipalité pour laquelle j'ai travaillé et où la population a été consultée aussi, c'est de l'ordre de dix arpents et on est parvenu à supprimer de cette façon-là à peu près 70% du territoire en se basant essentiellement sur l'identification des degrés de pente et l'épaisseur des matériaux meubles. Dans la mesure où toute installation sur des pentes de plus de 30 degrés pose des problèmes d'érosion importants, on peut, de par la législation actuelle, supprimer ou prohiber toute forme de développement.

C'est donc par une analyse assez précise du milieu qu'on peut y arriver. C'est pour ça — je vous donne des exemples — ceci est pour confirmer la nécessité, l'importance d'adopter une approche d'aménagement spécifique dans ces milieux. Et s'il n'y a pas d'incitation, de directives particulières de la part d'un futur ministère d'aménagement aux municipalités et aux conseils de comté concernés, ils vont suivre la pratique courante qui se fait en milieu de plaine. Or, le milieu de plaine, vous le savez, convient à des types de développement qui ne compromettent pas les milieux, comme c'est le cas dans ces régions.

M. Léonard: Une autre question, si vous me permettez. Vous proposez, si je comprends, que l'Etat, quand même, ait une attitude assez interventionniste en fixant des normes minimales.

Comment conciliez-vous cela avec le désir que les citoyens aient la responsabilité en aménagement?

M. Vachon: Une attitude interventionniste... l'Etat, de plus en plus, intervient dans toutes sortes de domaines sur le plan social, éducatif et ainsi de suite. Dans la mesure où on considère qu'un milieu naturel, un milieu rural est non seulement un potentiel économique actuel, mais un potentiel, une ressource sociale et culturelle pour le futur, je pense que l'Etat peut en tirer sa justification. Les preuves qu'ont tenté d'élaborer les opposants au projet de loi 90, qui est devenu la loi 90, se sont effondrées vis-à-vis les arguments invoqués par le ministre Garon. En grande partie — je ne dis pas que tout est clair, tout est net aujourd'hui — mais il demeure que les objections qu'on avait contre cette loi, compte tenu des objectifs qui ont supporté cette loi, c'est-à-dire, d'une part, la protection des sols agricoles, d'un point de vue économique, mais aussi les avantages que cela représente pour une meilleure planification future. Ce n'est pas pris dans le béton et peut-être que dans dix ans, on va être très heureux d'avoir contraint les forces de développement à l'intérieur d'une ceinture verte que représente cette loi ou ces terres protégées. Ce sont des ceintures vertes; on serait bien content de pouvoir mieux planifier en cédant des terres, comme cela se fait couramment en Allemagne et en Angleterre actuellement.

Alors, c'est dans le même sens que le gouvernement peut entrevoir une approche avec des normes qui peuvent apparaître contraignantes, mais qui, en fait, auraient pour seule fonction de mieux protéger le milieu naturel dans lequel les gens vivent. Vous avez sans doute rencontré — moi-même, je demeure dans les Laurentides et j'ai plusieurs voisins, plusieurs personnes que je rencontre et ils me disent: II y a dix ans, j'ai acheté 15 000 ou 20 000 pieds carrés; si j'avais prévu à ce moment, si j'avais acheté 40 000, 60 000 ou 100 000, j'en serais mieux aujourd'hui. Pour moi, c'est une planification qui est non seulement à caractère social, encore une fois, mais beaucoup plus axée sur les impératifs biophysiques.

M. Léonard: Je voudrais juste apporter une précision, en terminant. Peut-être qu'on n'a pas beaucoup de temps? Vous pouvez remercier.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie au nom de tous les membres de la commission d'être venus présenter votre mémoire. J'inviterais maintenant la Société Bell Canada et Télébec Ltée à venir nous présenter leur mémoire. Quand vous serez prêts, veuillez vous identifier et identifier vos collègues...

Bell Canada et Télébec Ltée

M. Paquin: M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés, je me présente. Mon nom est Pierre Paquin. Je suis avocat, attaché au contentieux de Bell Canada. Je suis accompagné, aujourd'hui, des représentants de Bell Canada que je vais tout de suite vous présenter.

De gauche à droite: M. Noël Sarrazin, chef de secteur, administration et droits de passage, M. Gilles Bélanger, ingénieur, chef divisionnaire, service des lignes dans la région de Québec, M. François Desrosiers, chef divisionnaire-adjoint, méthodes administratives de la région de Québec et M. Hubert Leroux, notaire.

Nous avons aussi été mandatés pour représenter Télébec Ltée qui est co-signataire du mémoire qui est devant vous.

Le présent mémoire est soumis à la commission permanente des affaires municipales par Bell Canada et sa filiale québécoise, Télébec Ltée. Bell Canada et Télébec Ltée ont pris connaissance du projet de loi no 125 et se réjouissent de l'occasion qui leur est fournie de faire connaître leurs commentaires sur cet important projet de loi. Nous reconnaissons que ce projet, comme toute loi de grande importance, est susceptible de contenir des lacunes qu'il pourra être opportun de combler ultérieurement. Nous aimerions souligner que déjà dans son état actuel ce projet nous paraît constituer un énorme pas en avant dans la recherche d'une utilisation toujours plus rationnelle du territoire sous juridiction québécoise.

Bell Canada et Télébec désirent coopérer pleinement pour que cet objectif soit atteint et il nous paraît même que cette coopération est essentielle à la réussite de l'entreprise, vu l'importance considérable des télécommunications pour le développement d'un territoire. En retour, nous croyons qu'un développement du territoire soigneusement planifié ne peut qu'aider Bell Canada et Télébec à mieux planifier le développement de leurs entreprises respectives et ainsi à mieux rendre les divers services que la population attend d'elles. C'est dans cet esprit que nous soumettons le présent mémoire, lequel portera principalement sur les sujets suivants: premièrement, communications constantes entre les planificateurs municipaux d'une part et les organismes ou entreprises d'utilité publique d'autre part; deuxièmement, localisation et obtention des servitudes d'utilité publique; en dernier lieu, le contrôle intérimaire et son application aux entreprises d'utilité publique.

Tout d'abord, les communications constantes entre les planificateurs municipaux et les organismes et entreprises d'utilité publique. L'utilité de ces communications nous paraît évidente pour diverses raisons dont la principale réside dans l'interaction qui selon nous doit exister entre ces deux groupes. Nous croyons en effet que le développement rationnel d'un territoire dépend, dans une bonne mesure, de la présence d'un réseau de services d'utilité publique approprié et que réciproquement une soigneuse planification de ces réseaux est facilitée par l'existence d'un plan d'aménagement de tels territoires. Nous reconnaissons également que le processus décisionnel utilisé tant par les planificateurs municipaux que par les entreprises d'utilité publique est généra-

lement similaire en ce sens que diverses étapes doivent être franchies allant progressivement de l'ébauche initiale jusqu'au projet détaillé définitif.

Or, chacune de ces étapes est l'occasion de procéder à des révisions et à l'étude de données de plus en plus détaillées afin d'incorporer ces nouveaux apports au projet élaboré. Vu l'interaction mentionnée ci-dessus, nous voyons mal comment chaque partie pourrait travailler en vase clos et espérer en même temps en arriver au résultat désiré.

Nous croyons donc que de constantes communications entre les planificateurs municipaux et les organismes et entreprises d'utilité publique constitueront un apport de première importance et c'est pourquoi une partie de nos recommandations visent à rendre ces communications obligatoires et ordonnées.

Dans cette optique, nous recommandons en premier lieu qu'une copie des documents dont il est fait mention dans certains articles du projet de loi soit obligatoirement expédiée non seulement aux destinataires indiqués dans ces articles, mais également aux entreprises exploitant des réseaux d'utilité publique dans le comté ou la municipalité, selon le cas. Il s'agit ici d'avis, de décrets, d'ordonnances, de propositions d'aménagement, et ainsi de suite. La liste des articles pertinents est contenu à l'annexe 1.

Dans la même optique, nous recommandons également la mise en place d'un mécanisme de consultation approprié entre les planificateurs municipaux et les entreprises d'utilité publique. Ce mécanisme pourrait prendre la forme indiquée aux annexes 2 et 3 du présent mémoire. (17 h 15)

Le deuxième volet de notre mémoire traite de la localisation et de l'obtention des servitudes d'utilité publique. L'article 112 portant sur le règlement de lotissement permet aux municipalités, et je cite, "d'exiger comme condition préalable à l'approbation d'un plan de subdivision que le plan indique l'emplacement des servitudes existantes ou requises pour le passage des installations de transport d'énergie et de transmission des communications à l'usage des lots apparaissant sur le plan".

Il nous paraît que ce texte implique la tenue de consultations avec les organismes ou entreprises d'utilité publique, mais cela n'est pas indiqué clairement. Nous prétendons donc que la nécessité de telles consultations devrait être clairement explicitée dans le texte et nous recommandons par conséquent un amendement en ce sens, et je vous réfère ici à l'annexe 4.

D'autre part, tel que rédigé ce même paragraphe i) de l'article 112 nous paraît indûment restrictif quant à l'étendue des servitudes qui y sont indiquées. Celles-ci, en effet, y sont restreintes aux seules installations de transport d'énergie et de communications et je cite, "à l'usage des lots apparaissant sur le plan". De fait, la structure érigée par les entreprises de télécommunication, pour ne mentionner que celles-là, supportent non seulement les fils et accessoires desservant les lots où ils sont érigés, mais sont également susceptibles de supporter les câbles et accessoires desservant des lots situés beaucoup plus loin. Les servitudes requises doivent donc permettre de telles installations et c'est pourquoi nous recommandons que la restriction soulignée ci-dessus soit enlevée.

Cette recommandation et également reflétée a l'annexe 4. Nous profitons de l'occasion pour souligner que, s'il mentionne certaines servitudes d'utilité publique, l'article 112, paragraphe i), reste néanmoins muet quant à leur mode d'acquisition.

Or, les servitudes de passage qu'obtiennent diverses entreprises d'utilité publique, y inclus Bell-Canada et Télébec Ltée, sont encore aujourd'hui négociées de façon conventionnelle et requièrent donc la préparation d'un acte de servitude, sa signature ainsi que toutes les formalités de l'enregistrement.

Nous alléguons que ce processus de plus en plus coûteux à administrer est entièrement désuet et constitue un anachronisme à notre époque, alors que seulement une infime partie des propriétés ne requiert pas les services de l'électricité et du téléphone, pour ne mentionner que ceux-là.

Le caractère d'utilité publique de ces servitudes me paraît donc évident et nous croyons que l'occasion serait bien choisie pour prévoir que les servitudes dont parle l'article 112, paragraphe i), soient des servitudes établies par la loi et ayant pour objet l'utilité publique, le tout au sens des articles 506 et 507 du Code civil.

En conséquence de tout ce qui précède sur ce deuxième volet de notre mémoire, nous recommandons que l'article 112, paragraphe i), soit mofidié tel qu'indiqué à l'annexe no 4.

En dernier lieu, notre mémoire traite du contrôle intérimaire. Sous leurs formes actuelles, les articles 56, 114 et 138 semblent viser les services d'utilité publique au même titre que toute autre construction.

Or, il s'agit souvent de construction d'un type très particulier, ainsi les tours à micro-ondes, les lignes de distribution locale, les lignes interurbaines, et ainsi de suite. De plus, ces articles du projet de loi ne tiennent aucun compte des conséquences que peut entraîner pour la communauté un retard à ériger ces constructions.

Or, la période de gel prescrite peut s'étendre sur une longue période, excédant même dix-huit mois en certains cas. D'autre part, au sujet de l'article 56, il est vrai que les articles 57 et 58 prévoient des mécanismes susceptibles d'en tempérer la rigueur.

Nous croyons, cependant, que ces mécanismes sont insuffisants et de nature à entraîner des délais et des coûts appréciables à nos entreprises de services publics. Pour toutes ces raisons il nous paraît donc que les services d'utilité publique devraient être soustraits à l'application de ces mesures de contrôle et nous recommandons que les articles 56, 114 et 138 soient modifiés en conséquence. Nous vous référons à ce sujet aux annexes 5, 6, et 7.

Ceci complète la présentation du mémoire de Bell Canada et de Télébec Ltée. Mais en terminant,

je voudrais cependant ajouter que ce mémoire, présenté par nos deux entreprises, a également été examiné par l'Association des compagnies de téléphone du Québec, une association regroupant 24 des principales compagnies de téléphone du Québec, autres que Bell Canada.

Or, nous sommes informés, nous venons d'être informés que le mémoire a été approuvé sans réserve par cet organisme. Je pensais que ce fait était à être signalé. Il nous fera maintenant plaisir de répondre aux questions que vous pourriez avoir.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, c'est le deuxième groupe à défiler devant nous en ce qui regarde les entreprises d'utilité publique. Mais je crois que, dans un premier temps, je vais me permettre certains commentaires et j'aurai 3 ou 4 questions.

Bell Canada nous souligne à juste titre l'importance des compagnies d'utilité publique dans l'aménagement, dans le développement et à l'inverse, d'autre part, il faut bien dire qu'un bon aménagement du territoire est aussi nécessaire à une saine gestion des entreprises d'utilité publique. Autrement dit, un ne va pas sans l'autre.

Il m'apparaît, en tout cas, que la loi 125 reconnaît assez explicitement cette importance, en faisant de l'identification, de la localisation et de la séquence de mise en place des réseaux d'utilité publique un élément constitutif du schéma d'aménagement, si on réfère à l'article 6d, en particulier, en ce qui regarde le schéma d'aménagement et du plan d'urbanisme à l'article 81e, pour montrer que la loi 125 y touche expressément.

Cela implique évidemment, comme vous le disiez, une certaine forme de collaboration et j'ajouterais que cela implique une forme de collaboration soutenue de tous les niveaux entre les responsables de l'aménagement du territoire et les entreprises d'utilité publique. Sinon, je ne vois pas comment on pourrait procéder pour un aménagement cohérent.

Je reconnais, par exemple, et je l'admets, que vos recommandations sont assez précises en ce sens. Vous y allez avec une précision, je dirais même avec une aptitude à la législation sans doute due à votre formation de droit.

Vous craignez des effets du contrôle intérimaire. Cela nous apparaît pourtant une mesure qui vise à faciliter l'élaboration du schéma d'aménagement en évitant que se prennent à contretemps des décisions d'aménagement qui ne cadreraient pas avec les objectifs du schéma, comme tel.

Selon les recherches effectuées, c'est une mesure assez coutumière. Un peu partout où on a fait de l'aménagement du territoire à travers le monde, on procède toujours par un contrôle intérimaire du territoire pour permettre ensuite l'élaboration. J'aurai une question là-dessus tantôt. Je disais que c'est une mesure coutumière qu'on retrouve un peu partout. Encore faut-il qu'il existe certaines modalités qui, par exemple, comme l'adoption par le conseil de comté du règlement de contrôle intérimaire, en restreignent, cependant, le caractère absolu.

Je crois que là-dessus, encore une fois, la loi 125 donne une certaine latitude d'action et ne fixe pas dans le ciment des règles auxquelles on ne pourrait apporter une certaine flexibilité en temps et lieu.

La première question que je voudrais vous poser est la suivante: Vous soulignez l'importance d'une information mutuelle entre les responsables de l'aménagement et les entreprises d'utilité publique. Quoique votre mémoire est beaucoup plus axé — je me permets de vous le dire en passant — sur les besoins d'information pour la compagnie d'utilité publique. Mais vous soulignez quand même l'importance d'avoir une information mutuelle. Vous proposez à cette fin un certain nombre d'amendements qui visent à renseigner les entreprises d'utilité publique à chaque étape de planification prévue à vos projets de loi.

Pouvez-vous nous exposer comment vous-même vous y prenez pour informer les organismes publics responsables de l'aménagement du territoire en ce qui regarde votre propre planification et comment vous entendez agir avec les conseils de comté? Vous avez sans doute évalué cela?

M. Paquin: II y a plusieurs volets dans votre question. Vous indiquez en premier lieu que cette coopération dont on parle serait plus tournée de la municipalité vers nous, plutôt que le contraire.

En effet, à la lecture du mémoire, c'est peut-être l'impression que cela fournit car beaucoup plus d'articles y sont énumérés dans lesquels nous allons recevoir des choses. Une fois cette constatation faite, je crois en toute sincérité que le jeu se fait vraiment des deux côtés.

Si on regarde à l'annexe 1 toute cette série d'articles, on va constater une chose. On va constater que des compagnies d'utilité publique sont, à toutes fins utiles — lorsqu'il s'agit d'envoyer des avis, des communications de toutes sortes — considérées comme un membre ordinaire du public, comme M. X tandis que ces entreprises ont, au contraire, une implication beaucoup plus grande, beaucoup plus immédiate dans ce qui va se faire dans le territoire.

Par conséquent, non seulement cela, mais il y a un tas de choses qu'on pourrait trouver en fouillant la Gazette officielle continuellement pour trouver ce qui peut se passer dans toutes les municipalités concernées. On peut faire ce travail. Evidemment, il y a risque qu'on en manque, qu'il y en ait qui nous échappent. Il y a des questions de délai. Il y a donc une efficacité qui serait certainement diminuée si nous devions procéder de cette façon. Il y a d'autres documents mentionnés dans cette fin d'article de l'annexe 1 qui ne sont pas publiés dans la Gazette officielle non plus. Je pense aux articles 15, 20, 26, 31, 49, 87, 95. Il y en a sans doute d'autres. Ils ne sont pas publiés. Il s'agit, par exemple, de la proposition préliminaire d'aménagement; on n'a pas publié cela.

Du point de vue efficacité, si on veut coopérer, on peut le faire d'une façon efficace et on croit que cette fin d'article est vraiment axée sur l'efficacité.

Pour terminer sur cet aspect de la question, vous remarquerez qu'à nos annexes 2 et 3 nous suggérons que les autorités municipales, celles chargées d'élaborer le schéma et celles chargées d'élaborer le plan directeur au niveau local, nous suggérons que ces gens soient tenus de convoquer à une même assemblée toutes les utilités.

Evidemment, c'est un texte qui est court, mais c'est un texte qui est par contre lourd de conséquences. On dit même que ces assemblées peuvent être ajournées autant de fois que nécessaire, que le processus va se répéter au moment d'une modification du projet. Alors, pendant ces réunions auxquelles assistent les autorités municipales et toutes les utilités concernées, il y a une montagne d'information qui peut être transmise, de part et d'autre, et dans ce sens, je crois que les gens des municipalités tireraient eux aussi profit de certains renseignements que nous pourrions leur fournir.

Je demanderais à M. Bélanger de poursuivre sur cet aspect.

M. Bélanger: On a fait le commentaire: Est-ce qu'il y a de la planification qui se fait? De quelle façon est-ce que c'est fait actuellement et de quelle façon prévoyez-vous que cela pourra se faire à l'intérieur des conseils de comté?

La planification se fait, évidemment. C'est plus ou moins élaboré selon les secteurs, et les informations qu'on peut obtenir de ces secteurs. Ce n'est pas fait nécessairement de façon formelle mais de façon différente d'un groupe à l'autre. C'est fait avec les organismes publics: voirie, travaux publics, avec les autres compagnies et les autres utilités publiques, l'Hydro-Québec, etc., gaz naturel. C'est fait avec les municipalités aussi. (17 h 30)

II y a des comités de planification dans certaines municipalités. Je pense surtout à des secteurs très urbanisés autour de Montréal, Laval, Québec, où il y a des réunions structurées périodiques — normalement, c'est tous les deux mois — où on échange de l'information. Toutes les parties échangent, pas seulement les télécommunications, les transporteurs de pouvoir, etc., pour essayer de déterminer ou de savoir de quelle façon le territoire va être développé.

Chez nous, ce qui nous importe beaucoup, c'est d'avoir une bonne utilisation de notre réseau. C'est un réseau qui est dispendieux, le réseau de télécommunication, et sa bonne utilisation permet d'offrir à nos clients, ceux qui demandent le service, le service à des taux réduits. Un développement qui se fait de façon éparpillée, morcelée, mal planifiée nous amène à établir un réseau qui va durer peut-être deux, trois fois le temps économique. Ce qu'on aimerait avoir — et il semble que le projet de loi 125 soit une très bonne approche pour aider aux communications que nous demandons — c'est obtenir l'information de sorte qu'on installe un réseau qui va être utilisé de façon très économique et le client va en bénéficier. A travers les conseils de comté, ce qu'on demande, c'est d'avoir ce genre de réunion planifiée qui va permettre d'échanger l'information sachant que le conseil de comté va avoir les outils pour faire son développement tel que la formule le requiert.

M. Chevrette: Vous me pardonnerez mon ignorance, mais j'avais l'impression — et je l'ai toujours jusqu'à preuve du contraire, à moins que vous me disiez le contraire — qu'une compagnie d'utilité publique — et j'y crois encore profondément — qu'une compagnie comme Bell Canada avait beaucoup plus d'expertise et d'expérience au niveau de la planification et de l'aménagement que peuvent en avoir les municipalités. Je regarde un comté comme le mien, je ne sais pas si j'ai trois ou quatre municipalités qui ont des plans vraiment établis de zonage. Cela s'est développé d'une façon tout à fait incohérente, comme vous le disiez dans une partie de votre réponse tantôt; treize projets domiciliaires dans une petite municipalité de 1200 âmes, cela va tout croche, tout de travers. Mais vous autres, pour avoir communiqué à quelques reprises, pour connaître vos desseins concernant le réaménagement des réseaux téléphoniques dans certaines municipalités... Pour vous en nommer une partie, cela va peut-être vous faire sourire, mais le nord du comté de Montcalm, cela doit vous dire quelque chose... J'ai la forte impression que vous savez où vous allez et que vous seriez d'une plus grande utilité au conseil de comté que lui pourrait l'être pour vous.

M. Bélanger: Nous savons où nous allons où c'est développé. Où ce n'est pas développé...

M. Chevrette: Je me suis essayé.

M. Bélanger: ... c'est vraiment le conseil de comté qui peut déterminer où la construction va se faire. Nous avons, pour citer un exemple, des entrepreneurs qui nous indiquent qu'ils vont construire 500 habitations à un endroit donné. Nous établissons le réseau pour les 500 habitations qui vont être construites dans une période de trois ou cinq ans. Le constructeur en construit 20, il s'aperçoit que cela ne se vend pas beaucoup. Il cesse de construire et va 50 milles plus loin. Notre réseau est en place. C'est ce que je veux dire par une bonne utilisation du réseau. C'est vrai que l'information étant là on peut planifier assez bien, mais, s'il n'y a pas d'information, on va au pif, on va à la va-comme-je-te-pousse.

M. Chevrette: Vous avez remarqué qu'à l'article 11 l'Hydro-Québec a une certaine obligation de transmettre des renseignements aux conseils de comté. En ce qui vous concerne, il n'y a pas d'article spécifique. On cherche la collaboration mutuelle pour un meilleur aménagement, mais est-ce que vous avez imaginé une façon de procéder, vous-mêmes, à part les réunions de collaboration

dont vous me parlez? Est-ce que vous avez imaginé un processus qui pourrait faciliter les échanges?

M. Bélanger: Quand les plans d'implantation, la conception des plans d'implantation... Actuellement, nous demandons des permis de passage le long des voies. C'est un moyen d'échange formel. On l'a fait continuellement. L'Hydro-Québec le fait aussi.

M. Chevrette: Vous vous adaptez beaucoup aux tracés de l'Hydro-Québec, dans les milieux ruraux en particulier.

M. Bélanger: Voyez-vous, nous travaillons conjointement surtout. Il n'y a pas de doute qu'on ne veut pas mettre deux structures pour desservir le même client et on essaie de part et d'autre, des fois c'est Bell Canada, des fois c'est Hydro-Québec, d'établir notre réseau, nos structures, au même endroit autant que possible. Des fois l'alimentation ne se trouve pas dans la même direction, la sous-station peut être complètement à l'opposé de la ville et notre centre de communication à l'autre extrémité; alors là il est possible qu'on ait une certaine difficulté. Mais, en principe, nous ne voulons pas avoir deux structures établies pour desservir le même client. Il arrive que l'abonné ait besoin des services en même temps. Cela arrive souvent. Alors, on se comprend assez bien là-dessus.

M. Chevrette: Dans le processus de consultation comme tel, l'intervention d'une tierce partie, comme la régie des services publics, même si Bell Canada n'y est pas assujettie, comment voyez-vous cela? Comment verriez-vous cela?

M. Paquin: C'est une question vraiment sur laquelle on n'a pas réfléchi dans la préparation de ce mémoire. C'est une question sur laquelle on peut réfléchir et vous faire connaître nos vues ultérieurement, mais c'est tout ce que je peux vous répondre là-dessus.

M. Chevrette: Je vous invite, en tout cas pour la première partie, à le faire.

M. Paquin: D'accord.

M. Chevrette: Le projet de loi sera sans doute réétudié à la suite des mémoires. Si vous pouviez nous envoyer cela, ce serait intéressant.

M. Paquin: Pour continuer sur les éléments de réponses qui ont été donnés jusqu'à maintenant, je ne sais pas si j'ai bien saisi votre question à un moment donné. Je me demande si vous voulez savoir ce qu'on entrevoit comme mécanisme de consultation, si on oublie votre invitation quant au rôle de la régie. Si j'ai bien compris votre question, vous nous demandez si on avait pensé à un mécanisme précis au moyen duquel on aiderait ou on transmettrait des renseignements.

Je pense que la réponse est non, on n'a pas pensé à un mécanisme précis à l'heure actuelle. Ce mécanisme peut sans doute se développer à l'usage et être bien variable d'un endroit à un autre, d'une région à une autre, suivant le développement qui peut survenir dans une région. Il est entendu que mettre partout le même mécanisme serait du gaspillage et il y aurait lieu d'être flexible dans la façon de le faire. Il y aurait aussi sans doute une partie d'essais et erreurs dans cela.

Je pense à un exemple, à une chose que nous pouvons fournir comme renseignement. Je pense à une municipalité, par exemple, qui voudrait faire le développement d'un parc industriel. Cette municipalité pourrait être intéressée à savoir que telle partie de son territoire est desservie par une centrale qui dispose d'équipement ultra-avancé, tandis qu'une autre partie de son territoire n'est pas encore rendue à ce niveau-là. C'est peut-être un type de donnée qui ne paraît pas en regardant le territoire, mais qui peut l'intéresser grandement. Les poteaux, c'est visible à l'oeil, mais il y a des renseignements comme cela que nous serions en mesure de fournir et qui pourraient être très utiles. Alors, ce processus de rencontres, je pense que c'est difficile de déterminer de façon rigide comment cela devrait se faire. On verra.

M. Chevrette: Vous avez des sous-postes ou des sous-centres un peu partout et je pense qu'il serait assez facile à vos sous-bureaux d'obtenir le dépôt du plan provisoire et de faire en sorte que vous puissiez au besoin corriger les anomalies qui sautent aux yeux, celles qui sont flagrantes. Cela peut vous permettre aussi de convoquer le type de réunion dont vous parliez au début et qu'il y ait des échanges. Si ce n'est pas au niveau des municipalités, même si vous dites au niveau des municipalités, pour certaines municipalités cela va s'imposer, mais au niveau du conseil de comté, vu que la cohérence du développement se fait d'une municipalité à l'autre, cela peut sûrement être une approche assez valable par l'intermédiaire de vos sous-bureaux. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, c'est un mémoire qui est explicite et qui présente avec beaucoup de précision le point de vue de la compagnie — des compagnies, parce qu'il y en a deux — sur ce projet de loi.

Je suis frappé par les modifications que vous proposez aux articles 56, 114 et 138. Je note que vous voulez que vos interventions soient assimilées en ce qui concerne les articles 56 et 114, aux activités agricoles sur des terres en culture, sur certaines constructions qui seraient interdites ailleurs que sur des terres en culture où les activités agricoles les exigeraient.

II me semble qu'il y a quand même une différence assez marquée entre la poursuite d'activités agricoles sur des terres déjà en culture de toute façon et le genre d'intervention dont une

compagnie de téléphone devrait ou voudrait se rendre responsable à un moment donné. Vous avez sûrement suivi de près et avec grand intérêt les conflits qui ont eu lieu entre l'Hydro-Québec et des citoyens et organismes dans divers coins de la province au sujet des projets de tracés. Il me semble donc que, même si pour des raisons que j'ignore vous avez semblé échapper à beaucoup de ces difficultés, le problème se pose de la même façon, sur le plan théorique.

Vous avez dit aussi, avec raison, que tout délai peut être coûteux, tout délai risque véritablement d'être coûteux à la compagnie, donc aux abonnés. Mais il est également vrai que si nous n'exigions pas de l'Hydro-Québec, par exemple, le dépôt d'études d'impact sur l'environnement et si nous n'exigions pas de l'Hydro-Québec les délais requis pour la poursuite des études, la rédaction des rapports et l'approbation, l'acceptation des cas rapports, nous épargnerions à cette institution, à l'Hydro, des sommes importantes. Je reconnais tout cela.

Il va pourtant sans dire que nous nous sommes sentis obligés, d'un côté comme de l'autre de cette table ou de cette Assemblée nationale, d'imposer ce genre d'exigence. C'est pour cette raison que j'hésite devant vos recommandations, quant à ces trois articles, et j'aimerais que vous tentiez de me convaincre...

M. Paquin: On veut tenter. Evidemment, votre première remarque à l'effet que nous tentons d'assimiler les réseaux de télécommunication aux activités agricoles...

M. Goldbloom: Dans les mots seulement.

M. Paquin: Oui, c'est cela. On reconnaît évidemment que nos services peuvent être bénéfiques à l'agriculture, mais la similitude peut s'arrêter là. Pour ce qui est de la comparaison que vous établissez entre les activités de l'Hydro-Québec et les nôtres — évidemment ce serait intéressant qu'il y ait ici des gens de l'Hydro-Québec pour commenter également — j'offrirais le commentaire suivant: il y a une différence fondamentale entre l'Hydro-Québec et les sociétés de télécommunication, quant à la nature des réseaux implantés. Par exemple, les réseaux de transport de l'Hydro-Québec, ce qui nous vient de la Manicoua-gan et de la baie James, etc., cela vient sur des emprises très larges où il y a un déboisement important. On y construit là des tours impressionnantes qui transportent également du courant à un voltage très élevé. Il s'agit là d'un type de construction qui ne ressemble en rien au type de construction que nous faisons. (17 h 45)

Même une ligne interurbaine de téléphone ou de télécommunication, cela reste un câble d'une grosseur variable qui peut être enfoui même. Il y en a plein qui traversent des territoires agricoles justement, sous le sol. On ne peut pas pousser trop loin une comparaison entre les structures de l'Hydro-Québec nécessaires pour l'électricité et les structures requises pour les télécommunications. Il peut y avoir une ressemblance lorsqu'il s'agit de construire des édifices, des bureaux, des postes de transformation, là il y a une construction d'importance localisée à un endroit, mais pour ce qui s'appelle les lignes, vraiment, je crois qu'il y a une différence considérable.

M. Goldbloom: Un dernier commentaire, M. le Président: je lis l'article...

M. Paquin: Me permettriez-vous de compléter avec quelques mots?

M. Goldbloom: Certainement.

M. Paquin: Je fais aussi la réflexion suivante. Il est possible que les rédacteurs du projet de loi ou les concepteurs du projet de loi aient voulu aller jusqu'à un point et il se peut que leurs paroles ou leurs écrits aient dépassé leur pensée. Cela se peut aussi. En lisant ce texte, et je n'essaie pas ici d'être brillant et de patiner et de faire des choses semblables, mais simplement de dire que tel que je lis ce texte, il me semble — c'est mon opinion — que cela inclut l'interdiction de planter des poteaux de téléphone pour desservir une résidence. Je suis sûr que ce n'est pas cela que les rédacteurs ont pensé et ont voulu, mais lorsqu'on lit, à l'article 56, qu'est interdite quelque nouvelle utilisation du sol, pour nous, la construction d'un poteau, c'est un immeuble, c'est une construction, c'est une nouvelle utilisation du sol qui pour nous est interdite. Je douterais que les concepteurs du projet aient voulu cela, mais c'est comme cela que c'est écrit et on peut faire oeuvre utile en le soulevant.

Egalement, à ce même article 56b... Excusez-moi, je référais plutôt à l'article 57. L'article 57 vient tempérer l'article 56 et cet article 57 prévoit que des permis peuvent être délivrés si certaines conditions existent et trois conditions sont notées. Une des conditions c'est que le terrain — c'est la condition 57a — sur lequel doit être érigée la construction projetée, y compris ses dépendances, forme un ou plusieurs lots distincts sur le plan. Pour nous, cette disposition peut vouloir dire que, pour placer un poteau sur un terrain, il faudrait faire lotir pour donner un numéro de lot à ce bout de terrain de un pied par un pied sur lequel serait placé le poteau. Cela me paraît probablement dépasser ce qui était envisagé. C'est dans ce sens que notre recommandation de soustraire les compagnies d'utilité publique de l'application de ces articles est vaste. Evidemment, elle est peut-être plus vaste que nécessaire, peut-être qu'il y aurait lieu de trouver un aménagement. Je sais que dans le cas des sols agricoles une question semblable s'est posée. Je sais que des efforts ont été faits. Me Leroux qui est assis à notre table a participé sérieusement à ces efforts. Je sais qu'il y a quelque chose qui est en marche. Peut-être que c'est une autre voie qui pourrait être empruntée.

M. Goldbloonr M. le Président, il ne nous reste que très peu de temps; je poserai une dernière question. Je lis l'article 114. J'y vois qu'une municipalité pourrait, par règlement de son conseil, prévoir qu'aucun permis de construction ne sera accordé dans tout ou partie de son territoire, à moins que... et le reste.

Je vous demande simplement ceci: Vous n'avez pas confiance que vous pourrez, advenant une divergence de vue, convaincre le conseil municipal de ne pas empêcher la réalisation de ce qui serait demandé par les éventuels usagers qui, eux, exerceraient de leur côté également, des pressions sur le conseil municipal?

M. Bélanger: II peut arriver qu'on ait à desservir un client qui n'est pas dans ce comté par exemple et la préoccupation ne serait pas à la bonne place. Le client pourrait faire une plainte à son conseil de comté et il va se faire dire: c'est l'autre qui le dessert.

Il n'y a rien qui garantit là-dedans qu'on va répondre exactement à ce qu'on vient de mentionner. C'est pour cela.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Bellechasse, très rapidement.

M. Goulet: M. le Président, vous parlez, vous souhaitez une bonne entente, un service mutuel, des consultations entre les parties, si on peut employer le terme de "gentleman's agreement". Mais vous aimeriez — et vous le soulignez très clairement à l'annexe 2 ou 3 — que le projet de loi oblige les municipalités à vous informer, à vous consulter d'abord, avant de faire quoi que ce soit en aménagement. Est-ce que j'ai raison? Vous aimeriez que la loi oblige les municipalités...

M. Paquin: Oui, c'est certainement...

M. Goulet: ... à vous consulter et à vous informer. Non? Monsieur fait signe.

M. Paquin: C'est certainement un des objectifs importants de notre mémoire.

M. Goulet: Mais j'appuie sur le mot oblige... M. Paquin: Oui, oblige.

M. Desrosiers: Mais on a apporté juste une précision. On a parlé tantôt d'unidirectionnel dans le texte de l'annexe 2 et 3, on dit bien... je lis un passage à l'annexe 2: "exploitant les utilités publiques dans le comté aux fins de leur fournir des informations et de solliciter la représentation de ceux-ci quant à toute question relative au sujet visé, aux articles 5 et 6." Donc, c'est un échange entre les utilités publiques et l'organisme, soit le conseil de comté dans le cas du schéma, soit la municipalité dans le cas du plan d'urbanisme. Nous n'avons pas élaboré, comme le disait Me Paquin tantôt, sur les modalités de types d'échanges qui seraient faits officiels, parce que nous sommes en train d'y réfléchir selon ce qui sera adopté dans le projet de loi. Mais nous serons prêts à échanger avec eux, on le fait, d'ailleurs, avec beaucoup d'organismes actuellement, avec Montréal où on a des échanges continuels de documents et d'information.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Léonard: Je voudrais d'abord relever ce que vous pensez qui a dépassé notre pensée dans le texte, en ce qui concerne le contrôle intérimaire. Vous réduisez l'emprise d'un poteau à pas grand-chose: un pied par un pied, alors qu'en fait, c'est beaucoup plus grand que cela. Je vais vous citer l'exemple qu'on retrouve couramment en territoire agricole lorsque vous plantez des poteaux en plein milieu des champs et je peux vous dire que cela cause des problèmes pour longtemps. J'en ai sur ma ferme de cela. Alors, on ne viendra pas me faire... Alors, là-dessus, ce serait peut-être bon qu'on regarde cela avant de changer la loi. Cela n'a pas dépassé notre pensée jusqu'ici.

J'aurais une question à vous poser. Vous demandez que les servitudes apparaissant sur un plan de subdivision ne soient pas restreintes aux seuls lots inclus dans le plan, mais tiennent compte aussi des futurs développements. Vous demandez également que ces servitudes aient un caractère légal. J'aimerais savoir quels sont les avantages pour vous et pour les utilisateurs, à votre point de vue?

M. Paquin: La formule qui est proposée nous amènerait à devoir prendre des servitudes selon les vieilles méthodes. On le dit succintement dans la présentation du mémoire; c'est une méthode qui coûte cher, on a fait une espèce de calcul pour illustrer notre pensée; on a pris un cas type. Je devrais laisser M. Bélanger élaborer là-dessus.

M. Bélanger: Pour obtenir une servitude de façon automatique, sans que ce soient des servitudes partout autour des lots, ce serait le dixième du coût qu'on a à payer présentement, pour obtenir une servitude par voie légale, avec la paperasse et les délais que cela implique. C'est simplement pour cela. C'est dans un but d'efficacité.

M. Léonard: D'accord, mais si vous faites cela, est-ce que cela n'aurait pas comme conséquence de figer le développement hypothétique du terrain? Parce que vous allez avoir vos servitudes d'une certaine façon. Mais cela va quadriller les terrains...

M. Bélanger: On nous demande de les avoir. Alors, on va les avoir.

M. Léonard: Vous demandez pour des futurs développements. Ce n'est pas rendu là. Les plans de municipalités ne sont pas rendus là. Il n'y a pas de subdivisions. C'est cela?

M. Paquin: C'est peut-être nous qui avons dépassé notre pensée à ce moment-là.

M. Léonard: Ah bon!

M. Paquin: Si c'est ce que vous percevez comme message, non. La seule chose à laquelle on a pensé pour bien répondre à votre question, il ne s'agit pas de prendre un terrain et de l'hypothéquer de tout un lot de câbles et d'équipements pour desservir toutes les régions à venir, mais cela réfère plutôt à une situation beaucoup plus simple. Prenons un terrain domiciliaire régulier de 60 pieds par 90 pieds et supposons que la ligne de télécommunication serait posée le long de la ligne de lot, en arrière. Le texte tel que proposé voudrait que la servitude soit telle que les équipements placés là puissent desservir ce lot-là et, on va plus loin, on dit: Les lots indiqués sur le plan. Mais un câble de communication, un plan de subdivision, cela peut couvrir dix lots, cela peut en couvrir 50, cela peut en couvrir 200. Le câble de télécommunication passe là-dedans, mais il vient de quelque part et il continue plus loin.

Il se peut qu'avec les années, par exemple, il se produise un développement quelques milles plus loin. Il se peut que le câble déjà en place sur ce terrain ne soit pas suffisant pour desservir les nouvelles propriétés. Tel que rédigé, nous croyons qu'il nous aurait été impossible d'ajouter un nouveau câble sur ce poteau existant pour aller desservir les terrains situés plus loin. Le but de notre modification est uniquement de permettre l'ajout de ce câble.

Si on regarde dans son ensemble la modification que nous suggérons également, c'est que ceci se ferait avec le propriétaire du terrain et les compagnies d'utilité qui, ensemble, détermineraient où se situerait l'emprise, par exemple cinq pieds en arrière du terrain comme c'est souvent le cas et on dirait: C'est là que vont passer les structures. Cela se ferait comme cela. Il y aurait cette partie-là du terrain seulement qui serait touchée. Au lieu de le faire avec la vieille méthode, on le ferait avec une méthode qui réduirait les coûts dans une proportion de dix à un.

M. Léonard: Une toute dernière question, puisqu'on doit aller voter. Est-ce que vous faites une différence pour les servitudes légales entre territoire urbain et territoire rural? Vous demandez les servitudes légales, je pense, partout.

M. Paquin: C'est-à-dire que cet article 112i permet aux municipalités — permet seulement aux municipalités — d'avoir cette exigence. Il peut y avoir des municipalités qui n'adopteront pas de résolution, de règlement. Je ne me souviens pas, à cet effet-là, alors il n'y aura rien d'applicable dans ces municipalités. Pour celles qui l'appliqueront, le projet de loi tel que prévu, que ce soit à la campagne ou à la ville, dit que le plan de subdivision devra prévoir l'emprise des servitudes. Alors, que ce soit à la ville ou à la campagne, cela va s'appliquer.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie. Monsieur, on s'excuse, parce que nous devons aller voter.

Avant d'ajourner nos travaux à demain 10 heures, je voudrais donner les numéros des mémoires pour demain. Ce sont les numéros 3, 38, 8,10, 34, 36 et 16. Demain, il y aura sept mémoires à entendre.

La commission des affaires municipales ajourne ses travaux à demain 10 heures.

Fin de la séance à 18 heures

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