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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Tuesday, September 4, 1979 - Vol. 21 N° 171

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 107 - Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

Projet de loi no 107

(Dix heures douze minutes)

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des affaires municipales se réunit pour étudier article par article le projet de loi no 107, Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives.

Les membres de cette commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun). Est-ce que M. Caron sera ici, M. Scowen?

M. Scowen: J'attends M. Caron d'une minute à l'autre.

Le Président (M. Laplante): M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes) remplacé par M. Beauséjour (Iberville); M. Gratton (Gatineau). Est-ce que M. Gratton (Gatineau) sera remplacé?

M. Scowen: M. Gratton sera remplacé. Avez-vous M. Raynauld?

Le Président (M. Laplante): Je n'ai pas M. Raynauld.

M. Scowen: Alors, c'est M. Raynauld.

Le Président (M. Laplante): M. Gratton sera remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee).

M. Scowen: Non, M. Goldbloom en fait partie, je pense.

Le Président (M. Laplante): Oui, il était intervenant. Sera-t-il membre?

M. Scowen: Oui.

Le Président (M. Laplante): Ceux qui auront le droit de vote.

M. Scowen: M. Scowen et M. Caron. Les deux intervenants sont M. Raynauld et le Dr Goldbloom.

Le Président (M. Laplante): M. Gratton (Gatineau) remplacé par M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce); M. Guay (Taschereau), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie). Intervenants: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau (Verchères), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle), M. Samson (Rouyn-Noranda) et M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) remplacé par M. Raynauld (Outremont); M. Vaugeois (Trois-Rivières).

Maintenant, je voudrais une proposition pour nommer un rapporteur, s'il vous plaît.

M. Guay: Le député d'Iberville.

Le Président (M. Laplante): Le député d'Iberville? M. Beauséjour (Iberville), rapporteur. C'est accepté. M. le ministre, remarques préliminaires, s'il vous plaît. (10 h 15)

Remarques préliminaires

M. Guy Tardif

M. Tardif: M. le Président, il me fait plaisir de retrouver ici mes collègues de travail, membres de l'Opposition, pour reprendre le débat autour du projet de loi no 107 qui a été, comme chacun le sait, réimprimé, révisé, en essayant de tenir compte des représentations reçues en commission. Je pense notamment à des représentations du monde municipal, de l'Union des municipalités, de l'Union des conseils de comté en ce qui a trait, notamment, au contrôle du stock de logements.

Nous avons essayé également de tenir compte des représentations de diverses associations, notamment, de gens qui oeuvrent dans le domaine de l'exploitation, de la fabrication, de terrains, pour ce qui est des maisons mobiles et de divers autres groupements.

Il est bien évident que, ce faisant, nous n'avons pu tenir compte de toutes et chacune des représentations faites, attendu que les groupes — en tout cas ceux qui ont pris la peine de se présenter devant cette commission — représentaient des tendances pour le moins opposées. Cette opposition, qui reproduisait, en quelque sorte, l'opposition qu'il est de mise de trouver en régime parlementaire et qu'on retrouvait parmi les groupes, finalement, pouvait peut-être laisser croire que les gens, propriétaires et locataires, étaient vraiment dans une situation d'antagonisme à tout point de vue. Je pense qu'il y a lieu de dissiper, dès le départ, cette attitude, pour prendre acte du fait que, de façon générale, propriétaires et locataires s'entendent bien, ont des relations harmonieuses, n'ont pas recours à un tiers pour arbitrer leurs conflits et que, finalement, il se produit néanmoins des exceptions à cette règle générale — encore une fois, très générale — où des gens doivent s'adresser à quelqu'un d'autre. Nous avons voulu — et c'est là le but du projet de loi — essayer de minimiser, encore là, ce recours à un tiers pour juger, pour décider, en prenant le pari que des gens mieux informés pourraient régler eux-mêmes leurs litiges ou leur différends.

J'ai pris bonne note des représentations du député de Notre-Dame-de-Grâce, notamment, qui, après avoir reconnu l'évolution de la loi 107, depuis le livre blanc, de la première impression jusqu'à la réimpression, s'est mis à craindre — j'ai trouvé cette réaction intéressante — que, dans certains cas, le mieux étant l'ennemi du bien, une trop grande diffusion de l'information pouvait avoir l'effet contraire à celui recherché. C'est-à-dire que la généralisation d'une méthode

de fixation pouvait être l'équivalent de l'instauration d'un taux fixe et, selon ses propres mots, "éventuellement" d'un contrôle universel.

Donc, on parviendrait à un tel résultat sans l'avoir recherché. Je dois avouer que ces réflexions qui ne sont pas dénuées de bon sens, je pense, devront guider la régie dans le type d'approche qu'elle fera, dans le type de diffusion, de publicité, de commentaires qu'elle fera.

C'est un petit peu comme si, par analogie, toujours, M. le Président — si on me permet cette digression, parce qu'elle est importante, je pense — on renseignait très bien la femme — mariée ou pas, c'est son problème — qui veut utiliser une méthode anticonceptionnelle sur les avantages et les effets secondaires de telle pilule par rapport à telle autre. Est-ce à dire que nous devrions alors diffuser dans toutes les écoles où on retrouve des adolescentes une publicité abondante sur toutes les méthodes contraceptives? Enfin, l'analogie est peut-être complètement à côté, mais je pense qu'on pourrait se retrouver ou penser qu'il pourrait y avoir des effets secondaires aussi dommageables.

En temps et lieu, lorsque nous arriverons à ces articles, j'aurai l'occasion d'ajouter des commentaires et de dire comment certaines réflexions ont progressé au cours de l'été. Sans plus, je voudrais dire que j'aborde l'étude de ce projet de loi 107 avec la plus grande objectivité et le plus grand détachement qu'une période de réflexion et de vacances a pu nous apporter à tous.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Merci, M. le Président. Comme vous le savez, le Parti libéral a voté contre ce projet de loi, lors de l'étude en deuxième lecture, avant la fin de la session. Nous sommes encore contre, pour les raisons que nous avons soulevées et auxquelles le ministre a fait allusion ce matin. Nous sommes persuadés que, soit par accident, soit par dessein, le projet de loi implique un contrôle universel des loyers au Québec. C'est quelque chose qui, nous le croyons, sera désastreux, non seulement pour les propriétaires, mais également pour les locataires. Je suis content que le ministre ait accepté ce matin de dire au moins qu'il a pensé un peu à nos commentaires du mois de juin. J'attends avec un grand intérêt les changements qu'il va apporter aux articles qui sont, si vous voulez, les articles clés dans la question de la fixation du loyer. S'il me dit ce matin que ce n'est pas l'intention du gouvernement d'installer un système de contrôle universel des loyers au Québec, je pense que nous aurons déjà atteint une première étape qui est très importante. Je ne sais pas si je l'ai bien compris, en ce sens, mais si c'était l'objectif de ses commentaires tantôt, je veux dire que je suis très heureux.

Il y a deux ou trois éléments généraux que je veux soulever avant qu'on commence l'étude article par article. Premièrement, je pense que le ministre essayait d'être très habile dans la présentation de ce projet de loi en deuxième lecture, mais je ne suis pas persuadé que c'était justifiable. Comme vous le savez, et comme il l'a souligné le 22 juin dans son discours, la question du contrôle des loyers, les relations entre locateurs et locataires, c'est une question qui soulève beaucoup de controverses. On l'a vu pendant l'audition des mémoires qui a eu lieu, si je me rappelle bien, aux mois de mars et d'avril. C'est sûr que ces auditions ont été faites de bonne foi et que le ministre a écouté ces mémoires attentivement, parce que, comme nous l'avons dit dans notre discours, il y avait des changements importants. Quand même, il y avait des changements profonds, non seulement dans les détails de la réimpression du projet de loi 107, mais également dans la philosophie de base. C'est mon opinion.

Cette question est, bien sûr, liée à la question du contrôle des loyers, à laquelle j'ai fait allusion tantôt, mais cela paraissait un peu dans les autres articles aussi. Je pense que, même si c'était habile sur le plan politique de présenter un tel projet de loi à peine douze heures avant la fin de la session, avec très peu de publicité, et de faire adopter cette réimpression majeure d'un projet de loi important dans une période de douze heures, c'est plus difficile à justifier devant le public qui, si j'ose dire, n'a également pas étudié beaucoup ce projet de loi compliqué durant l'été, tenant compte des autres exigences qui s'imposent un peu pour tout le monde durant l'été.

Nous nous trouvons aujourd'hui devant un projet de loi que je peux qualifier presque de nouveau, dont l'opinion publique n'a pas saisi l'importance. C'est un peu comme si on recommençait aujourd'hui le débat en profondeur sur ce projet de loi. J'espère que durant cette étude article par article, le public aura l'occasion au moins d'agir d'une façon responsable et assez répandue pour que nous puissions mieux comprendre son attitude devant ce projet de loi tel que présenté de nouveau au mois de juin.

Deuxième point: là, je veux parler un peu des questions de fond, parce que le ministre, dans son discours, a soulevé des questions de fond. Je pense que c'est important qu'en cours de route, durant l'étude de chaque article, nous nous en tenions à une base philosophique, si vous voulez, du principe, en ce qui concerne les relations entre les locateurs et les locataires.

Je veux dire d'abord que je crois fortement que le ministre et moi, du moins, ne sommes pas très éloignés l'un de l'autre en ce qui concerne le rôle de l'Etat et de l'entreprise privée, le secteur privé, le jeu du marché dans ce domaine. Comme l'a dit M. Ryan dans son discours de deuxième lecture, il n'a pas de débat doctrinal pur à faire sur cette question. Nous essayons de trouver un équilibre qui soit rationnel, réaliste et acceptable.

Le Parti libéral, comme vous le savez, était déjà beaucoup et profondément impliqué dans la recherche d'un équilibre relativement au contrôle des loyers. Mais je veux souligner, d'une façon

aussi forte que possible, qu'au fond le Parti libéral est convaincu que la base de l'action dans le marché du logement au Québec doit être le secteur privé. Je cite encore M. Ryan, parce que je pense qu'il a exprimé cette opinion très clairement en deuxième lecture: "II nous semble important que tout ce qui touche la construction et la question de logements destinés à l'habitation demeure, dans toute la mesure possible, dans le secteur privé". Je pense que c'est assez clair. Il a répété plus tard: "Nous croyons que le secteur du logement doit demeurer prioritairement du domaine privé".

J'ai dit que je croyais que le ministre et moi, ainsi que le parti, ne sommes pas très éloignés l'un de l'autre en ce qui concerne cette question.

En ce qui concerne le Parti québécois et le gouvernement, je dis franchement que je n'en suis pas aussi persuadé. Je ne suis pas certain que les principes de base du Parti québécois sont de nature à dire: Ecoutez, nous croyons que le secteur du logement doit demeurer prioritairement du domaine privé. (10 h 30)

Je ne vois pas une telle déclaration dans le programme officiel du parti, et je pense que je n'exagère pas quand je dis que c'est une expression, une déclaration qui sera difficile à faire adopter au sein du gouvernement. Je soulève cette question parce que je répète, pour tous ceux qui peuvent l'entendre, que le Parti québécois est fortement attaché à l'idée que, autant que possible, le marché doit jouer un rôle dans le domaine de l'habitation. Nous croyons, dans une large mesure, que les gens jouissent d'une certaine mobilité d'action dans le domaine du logement, qu'il existe des possibilités de déménager, de changer les relations avec leur propriétaire et de faire toute une gamme d'actions dans le secteur privé que les locataires, comme les propriétaires, veulent retenir.

Nous croyons aussi que c'est essentiel, en réalité, que le secteur privé joue un rôle important dans l'habitation parce qu'aujourd'hui, si mes chiffres sont corrects, 80% de notre stock de logements appartiennent au secteur privé. Nous avons besoin de construire au moins pour $1 milliard de logements par année et ce n'est sûrement pas le moment de suggérer que le gouvernement, soit celui du Québec, soit celui du Canada, commence à nationaliser le logement. Je pense que le ministre et moi sommes bien d'accord là-dessus, il faut respecter la grande responsabilité du secteur privé.

Quel est le rôle du gouvernement là-dedans? Le ministre, dans son discours, a cité deux éléments, et je pense que nous sommes entièrement d'accord sur l'un d'eux, du moins. Il disait: Nous cherchons un équilibre entre les deux forces en jeu, les locateurs et les locataires, pour qu'une ne soit pas indûment plus forte que l'autre. On cherche, si vous voulez, à maintenir le marché, non pas à lui nuire, mais à créer un équilibre. Je pense que c'est cet aspect de la question, c'est cet objectif qui va nous guider dans l'étude article par article, et quand nous poserons des questions, ce sera très souvent dans le désir de savoir si le ministre a vraiment étudié en profondeur les conséquences pour les deux parties, pour être bien sûr que cet équilibre soit mieux servi par le nouveau projet de loi.

Comme nous l'avons dit en deuxième lecture, nous sommes persuadés que, dans ce sens, le ministre a joué un rôle très responsable, et il y a des améliorations dans ce projet de loi en ce qui concerne ce critère d'équilibre.

Sur le deuxième point que le ministre a soulevé comme une question de principe de base, nous avons au moins des questions, sinon des réserves. C'est cette question difficile du droit de logement. Le ministre disait que tous les citoyens du Québec avaient le droit au logement. C'est très simple à dire, nous sommes parfaitement d'accord et nous pouvons aller très vite pour dire que tous les Québécois ont non seulement le droit au logement, mais que tous les Québécois sont logés. Il va de soi que si un Québécois se trouve sans logement le 15 février 1980, il va mourir. C'est clair que nous avons fait en sorte, comme les gens de la ville de New York, comme les gens de presque toutes les autres villes, provinces et Etats en Amérique du Nord, que les gens soient logés. C'est une façon très simpliste de voir la chose, mais je pense qu'il ne faut pas perdre de vue ce fait qui est que tout le monde a le droit au logement et que tout le monde est en effet logé.

Le ministre est allé plus loin — et je suis d'accord — il a dit: Ce n'est pas suffisant de garantir le droit de logement, il faut, de plus, garantir un logement — si je nie rappelle bien — d'une qualité acceptable et convenable sur le plan de la location géographique.

Je pense qu'on peut être d'accord en principe, mais on peut commencer à se poser des questions — ce que le ministre accepte facilement — que quand vous commencez à jumeler la qualité de logement avec les humains de tous les niveaux de salaires, de tous les niveaux d'endroits géographiques, vous êtes dans un problème fort complexe. Finalement! le ministre est obligé d'accepter qu'il faut lier le coût de ces logements avec leur condition; on n'en est pas encore à pouvoir installer tout le monde dans la même qualité de logement et la question du prix devient très importante.

La grande faiblesse de l'analyse du ministre, en deuxième lecture, c'est qu'il disait qu'il fallait contrôler la condition et la qualité de logement, qu'il fallait contrôler les hausses de prix. Je pense que c'est quand il disait qu'il ne faut pas contrôler les prix de logement mais les hausses, qu'il se trouvait dans la plus grande contradiction dans son analyse de droit au logement.

Il est clair qu'aujourd'hui nous avons 750 000 baux au Québec et que quelques-uns de ces baux sont à des prix totalement injustifiés, trop élevés. Nous avons entendu plusieurs locataires parler des profits excessifs que faisaient les propriétaires. Il est certain qu'entre les 750 000 il existe un certain pourcentage de propriétaires qui font des

profits plus que substantiels. Il faut également accepter qu'il y en a qui font des pertes, pour toutes sortes de raisons, parce qu'ils sont amis des locataires, à cause de leur propre faiblesse d'administration, etc. Vous avez toute une gamme probablement de profits de moins 75% à plus 75%, et le ministre a décidé de contrôler la qualité, l'habitabilité du logement et il veut que les logements, pour tenir compte du droit de logement, soient construits dans les endroits où les gens en ont besoin, mais le principe du contrôle du loyer est basé sur les hausses. Les hausses de loyer basées sur quoi? Sur le loyer actuel. Qu'il soit énormément rentable, qu'il soit presque sur le bord de la faillite, à n'importe quel niveau, on va contrôler les hausses.

Le ministre, s'il voulait être consistant, je crois, aurait du dire: On va contrôler les prix des loyers, on va essayer d'établir et de déterminer le prix justifiable pour tous les niveaux et qualités de loyers.

La grande contradiction dans sa déclaration, c'est qu'il existe aujourd'hui un droit de loyer. Je ne veux pas aller plus loin, dans mes commentaires préliminaires, mais je pense que si vous faites suite à cette brève analyse, vous verrez que c'est impossible, aujourd'hui, que l'Etat prenne en charge la fixation du prix des loyers, qu'il est essentiel, si on veut réellement mettre quelque chose de concret dans cette déclaration qu'une personne a non seulement droit au logement, mais qu'elle a droit au logement à un prix justifiable et d'une qualité acceptable. On est obligé d'aller dans cette direction.

Nous, nous sommes contre, parce que c'est aller vers une nationalisation du logement qui n'est absolument pas pratiquable et nous croyons qu'en dépit de ses faiblesses, dans les cas individuels, cet équilibre entre la qualité et le prix des logements doit être réalisé et peut être réalisé avec le moins possible d'injustice pour tout le monde si on accepte de laisser jouer en grande partie le marché libre.

Je sais que c'est quelque chose qui ne fait pas plaisir aux personnes qui ont d'autres tendances à la base, mais quand vous voyez que ce n'est pas le marché qui va établir les prix, que c'est finalement les fonctionnaires avec des formules et des formulaires, quand vous voyez la diversité des loyers, la diversité des propriétaires, la diversité des locataires, vous voyez que, finalement, comme dans le cas de l'alimentation, comme dans le cas de beaucoup de choses que l'Etat a essayé de contrôler par les années passées, c'est probablement la solution la moins pire que de laisser jouer le marché.

Je vais probablement faire allusion lors de l'étude article par article au fait que, personnellement, j'ai été impliqué dans l'effort fait en vue de contrôler passablement tous les prix au Canada pendant un an et demi. J'ai vécu des expériences. J'ai vu de proche les distorsions créées par les efforts des fonctionnaires en vue d'établir des prix justifiés. J'ai vu les problèmes que cela a causé non seulement aux propriétaires de compagnies, mais aussi aux consommateurs. J'ai vu la grande déception des consommateurs envers ce système de contrôle. J'ai vu que cette déception ne retombait pas surtout sur les compagnies, mais sur le gouvernement qui essayait de les contrôler. J'ai vu ie bureaucratie que cela a créé. M. Pépin avait promis de contrôler les prix au Canada avec 200 personnes et, finalement, on en était rendu, si je me rappelle bien, à plus de 1000 personnes. Dieu merci, on a arrêté, parce qu'on aurait été 4000 ou 5000, si on avait essayé vraiment d'aller en profondeur. C'est quelque chose qui dans notre marché d'aujourd'hui n'est pas rentable, n'est pas possible.

Je sais, M. le Président, que vous me faites signe que c'est le moment d'arrêter, mais je pense que cette attitude de base selon laquelle le marché est quelque chose qui doit jouer, qu'on veut équilibrer le marché, qu'on est contre la bureaucratisation du contrôle des loyers et des relations entre les deux parties, sauf dans le cas où c'est clairement indiqué qu'un meilleur équilibre s'impose, je pense que ce sont des questions qui vont nous guider tout au long de notre étude article par article, et je voulais souligner ce point au début.

Un dernier mot, M. le Président. C'est l'autre côté de la médaille et je veux le répéter. Nous sommes persuadés que l'effort du ministre était un effort sérieux et responsable. Nous avons des indications, surtout ce matin, selon lesquelles il ne veut pas lui non plus bureaucratiser, nationaliser la fixation du prix des loyers. Nous avons dit et nous répétons que le projet de loi apporte beaucoup d'améliorations par rapport à la première impression et à la situation actuelle. Nous avons l'intention de collaborer étroitement et de travailler ensemble ici dans les jours qui suivent pour développer un projet de loi afin que la loi soit la meilleure possible pour les deux côtés. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Fabien Cordeau

M. Cordeau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir ce matin d'être membre de cette commission pour étudier le projet de loi que nous avons à étudier. Nous aussi de l'Union Nationale nous sommes exprimés en deuxième lecture et nous avons voté contre ce projet de loi. Je n'ai pas l'intention ce matin de refaire le discours de deuxième lecture, par contre, j'aimerais apporter quelques observations sur ce projet de loi. (10 h 45)

Une des craintes de l'Union Nationale, c'est que dans ce projet de loi les droits des locataires sont clairement exprimés. Par contre, on semble avoir oublié ou négligé de parler un peu plus des droits des propriétaires. On explique clairement, dans la réglementation qui nous a été remise, les détails concernant la façon dont le loyer doit être fixé, les conditions de logement salubre, ainsi de

suite; par contre, on n'a pas encore d'indication concernant les recours que les propriétaires peuvent avoir contre des locataires négligents.

Un autre point de vue des préoccupations de l'Union Nationale, que nous avons souligné, c'est qu'actuellement on se plaint que le nombre de Québécois qui sont propriétaires de petites habitations de deux ou de quatre logements n'est pas très élevé. Nous avons peur qu'avec toutes les obligations qui sont créées aux propriétaires, ces obligations, par elles-mêmes, fassent peur à ceux qui ont l'intention de s'acheter de petites propriétés afin de se créer un fonds de pension pour plus tard.

Nous reconnaissons, par contre, qu'il y a eu du chemin de fait entre le dépôt du premier livre blanc, le premier projet de loi, et sa réimpression. Ici, M. le Président, j'aimerais demander au ministre s'il a l'intention de proposer d'autres amendements. Si oui, je lui demande de nous les distribuer, car il est toujours plus facile d'avoir les amendements en notre possession un peu à l'avance que de les avoir au fur et à mesure que l'on étudie le projet de loi article par article.

L'une des craintes que nous avons aussi mentionnées, c'est la bureaucratie qui est de plus en plus forte concernant l'état de vie des Québécois. Nous espérons que ce projet de loi n'augmentera pas encore les pouvoirs de la bureaucratie, mais qu'au contraire cette possibilité d'aider les citoyens s'accroîtra et bonifiera ce projet de loi.

Voilà, M. le Président, les quelques remarques que j'avais à faire au tout début. Nous venons ici avec un esprit ouvert. Nous connaissons aussi l'ouverture d'esprit du ministre. Il l'a démontré dans d'autres projets de loi et il nous fera plaisir de l'aider à bonifier ce projet de loi.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député de Taschereau.

M. Richard Guay

M. Guay: M. le Président, je voudrais simplement relever un certain nombre des arguments qui ont été évoqués par le député de Notre-Dame-de-Grâce tantôt. Parce que si j'ai bien compris le député de Notre-Dame-de-Grâce, au fond, même la loi actuelle, votée il y a fort longtemps, mais modifiée en cours de route et finalement modifiée l'avant-dernière fois par le gouvernement libéral, même cette loi ne serait pas un mécanisme satisfaisant. Si j'ai bien saisi son raisonnement, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes s'il n'y avait aucune espèce de régie des loyers ou aucune espèce de contrôle des loyers au Québec et qu'on laissait ce qu'il a appelé le marché libre jouer.

Cela implique que le logement est un bien commercial comme tous les autres, comme les pots de beurre de pinottes si chers à son chef ou n'importe quelle autre chose qui est dans le commerce courant et qui fait l'objet de la loi de l'offre et de la demande. Je m'insurge, pour ma part, contre cette approche des choses parce que le logement, c'est beaucoup plus que cela, c'est également un droit social et ce n'est pas simplement un investissement fait par un certain nombre de gens en vue d'une rentabilité sur le capital.

Le député de Notre-Dame-de-Grâce a accusé le gouvernement de vouloir instaurer le contrôle universel des loyers. Il a fait un plaidoyer éloquent en faveur de l'entreprise privée dans le domaine du logement, mettant en cause la volonté, de ce côté-ci de la table, de voir se perpétuer la possession, dans les mains privées, du stock du logement au Québec. Ce me semble assez curieux comme raisonnement. D'abord, personne, de ce côté-ci de la table, n'a jamais mis en cause le contrôle du stock du logement par les particuliers. Nous constatons, comme l'a fait le député de Notre-Dame-de-Grâce que, contrairement aux chiffres qu'il a cités, non pas 80% mais 97%ou 98% des logements au Québec sont dans les mains des particuliers. C'est un fait. On n'a pas à porter de jugement sur ce fait: on le constate tout simplement. Je veux bien croire qu'à tout bout de champ le Parti libéral sent le besoin de rappeler sa tendance idéologique et de se rappeler à l'idéologie de l'entreprise privée, mais nous ne croyons pas, de ce côté-ci, qu'il soit nécessaire à tout bout de champ de faire une profession de foi idéologique pour assurer ses arrières, et en particulier dans le domaine du logement.

Pourtant, puisqu'il nous accuse de vouloir instaurer un contrôle universel du logement, le député de Notre-Dame-de-Grâce sera sans doute heureux de prendre connaissance d'un commentaire au sujet de la nouvelle version du projet de loi no 107 qui vient d'un organisme qu'il connaît sans doute bien puisque cet organisme partage, à toute épreuve, l'idéologie de l'entreprise privée du député de Notre-Dame-de-Grâce. Il s'agit de la Chambre de commerce de la province de Québec, un organisme peu suspect d'être outre mesure sympathique au gouvernement actuel, même si les rapports entre cet organisme et le gouvernement sont cordiaux, on ne peut pas dire qu'on est tout à fait sur la même longueur d'ondes idéologiques; effectivement, cet organisme est davantage sur la même longueur d'ondes idéologiques que le Parti libéral.

Dans son commentaire de la nouvelle version du projet de loi no 107, on lit — je n'ai pas d'explications additionnelles et j'imagine que du côté libéral on saura où aller trouver ces explications, à la chambre de commerce même —: Comparé à sa version première, ce projet de loi représente un gain important: La disparition de dispositions relatives au contrôle des logements. En d'autres mots, la Chambre de commerce de la province de Québec, elle, constate que la nouvelle version fait disparaître le contrôle des logements ou le contrôle des loyers alors que le député de Notre-Dame-de-Grâce continue à perpétuer ce mythe suivant lequel le projet de loi no 107 voudrait instaurer un contrôle universel des loyers. Cela s'accompagne d'un autre mythe qu'il répand et que je trouve extrêmement regrettable, et je

l'inviterais à faire preuve de plus de prudence dans son vocabulaire lorsqu'il parle de la nationalisation du logement. Il s'agit là d'une expression qui, si je ne connaissais pas mieux le député de Notre-Dame-de-Grâce, me paraîtrait démagogique. Il est bien évident que le projet de loi no 107 ne vise pas à nationaliser quoi que ce soit; il vise, par contre, à établir un rapport entre le locataire et le propriétaire faisant en sorte que ceux parmi les locataires dans notre société qui sont le plus souvent victimes d'une certaine catégorie de propriétaires qui appliquent intégralement le credo de l'entreprise privée si cher à nos amis d'en face, puissent avoir un recours en justice de manière à pouvoir se protéger contre les hausses indues de loyer. Cela me paraît une chose éminemment normale et éminemment civilisée en 1979.

Quand on nous dit, au nom d'une idéologie donnée, l'idéologie de l'entreprise privée sans restrictions, qui, soit dit en passant, fait ressembler étrangement le député de Notre-Dame-de-Grâce au nouveau premier ministre du Canada qui faisait un discours à peu près dans le même sens à Vancouver il y a quelques jours, quand on nous fait un discours en disant qu'il faut que ce soit l'entreprise privée, l'entreprise privée et pas d'autres que l'entreprise privée, je dis qu'on ne tient pas compte de la réalité et qu'on cherche beaucoup plus à faire entrer la réalité à l'intérieur d'une idéologie donnée. Finalement, contrairement à ce qu'on peut penser bien souvent, le Parti libéral, dans ce domaine, manifeste un corridor idéologique qui me paraît assez étroit.

De ce côté-ci de la table, je pense que nous cherchons un empirisme de bon aloi de manière à chercher à concilier tous les intérêts en cause, mais surtout de manière à ne pas faire en sorte que ceux qui ont un besoin particulier d'être protégés par des organismes qui relèvent de l'Etat, que ceux-là soient protégés par ces organismes-là, parce qu'en définitive, si ce n'est pas le gouvernement, si ce n'est pas l'Etat qui voit à ceux de la société qui sont les plus démunis, ce n'est sûrement pas la Chambre de commerce de la province de Québec, ni les intérêts privés si chers à nos amis d'en face. Il y a du côté libéral, en ce qui a trait à ce projet de loi comme ce qui a trait à bien d'autres choses, une espèce de fétichisme. Le Parti libéral m'apparaît avoir un double fétichisme en ces années-ci, le fétichisme de l'entreprise privée appliquée à toutes les sauces, de la même façon qu'on a le fétichisme du fédéralisme appliqué à toutes les sauces.

J'ai entendu récemment — et je fais le parallèle, parce que je le trouve intéressant — le chef du Parti libéral, l'autre jour... C'est une parenthèse très brève, M. le Président, avant qu'on ne soulève une question de règlement, parce que le parallèle me paraît intéressant. Récemment le chef du Parti libéral faisait une déclaration, enfin plusieurs déclarations, au sujet des richesses naturelles, dont il concevait qu'on pouvait en placer une partie sous le contrôle du gouvernement fédéral, c'est-à-dire céder un droit provincial au gouvernement fédéral et il disait: Sans quoi le fédéralisme ne veut plus rien dire. Mon Dieu, à supposer qu'il ne veuille plus rien dire dans ce domaine-là, est-ce que c'est une si grande catastrophe que cela ou est-ce qu'il faut déformer la réalité pour faire en sorte que le fédéralisme veuille dire quelque chose? C'est un peu la même chose dans ce cas-ci. De fétichisme en fétichisme, on a le fédéralisme d'une part et l'entreprise privée de l'autre.

Malgré l'évidence que remettre les logements locatifs dans les mains du marché libre à l'heure actuelle aurait un effet inflationniste effrayant pour ceux parmi les Québécois qui ont le moins les moyens de payer des loyers élevés, malgré cette évidence, on vient nous servir, en 1979, un argument, c'est-à-dire qu'il faut absolument, au nom de l'idéologie de l'entreprise privée, au nom de cette espèce de fétichisme de l'entreprise privée, tout remettre dans les mains de l'entreprise privée, comme s'il n'y avait que l'entreprise privée. Il y a bien autre chose que cela dans la société et en partie dans la société québécoise. Je pense notamment aux coopératives, qui ont fait leurs preuves dans d'autres domaines jusqu'à maintenant, qu'il faut chercher à promouvoir au maximum, parce qu'il s'agirait d'une forme de propriété qui n'est pas dans les mains de l'entreprise privée, qui est dans les mains de certains éléments de la collectivité. C'est une chose que le député de Notre-Dame-de-Grâce a bien omise dans sa déclaration. Pourtant, c'est une chose extrêmement importante, parce que cette espèce de fétichisme de l'entreprise privée que charrient les libéraux, on oublie constamment que tant que cela va bien, tant que les choses sont rentables, il faut tout laisser à l'entreprise privée, mais le jour où cela marche mal, le jour où cela devient non rentable, là l'Etat devient le sauveur de l'entreprise privée. Ce qui ne marche pas, on le cède à l'Etat et après cela, on a sans doute quelques députés de l'Opposition, dans l'Union Nationale, notamment, qui viennent nous dire: Les organismes d'Etat, cela ne marche pas.

C'est bien sûr que dans la mesure où on confine l'Etat uniquement aux choses non rentables et qu'on confine l'entreprise privée dans les choses qui sont rentables, comme par hasard l'entreprise privée s'en trouve grandie et comme par hasard les organismes d'Etat s'en trouvent diminués. Seulement, il faut aussi faire la part des choses. L'Etat québécois n'est pas là seulement pour dépanner l'entreprise privée lorsque celle-ci est en difficulté. L'Etat québécois, au chapitre du logement, en particulier, devrait faire en sorte — il y a des programmes qui ont été instaurés à ce chapitre-là — de promouvoir davantage, comme c'est déjà commencé, la formule coopérative de logements qui est une formule qui a fait ses preuves ailleurs et comme on a une longue tradition de coopératisme au Québec, il me semble qu'on a là une autre forme de propriété qui est une propriété d'Etat, qui n'est pas nationalisée, mais qui n'est pas non plus la propriété de quelques spéculateurs qui veulent se servir d'un bien social comme le logement pour faire de la spéculation foncière.

II me semblait, M. le Président, que ces choses méritaient d'être dites parce que dans la mesure où on veut nous accuser de nationaliser le logement on fait preuve, hélas! de démagogie; dans la mesure où on veut nous accuser d'instaurer un contrôle universel des logements, on dit des choses qui ne sont pas exactes; et dans la mesure où on voudrait jouer le marché libre, je pense, M. le Président, que non seulement dans ce cas-là on va à rencontre des lois antérieures adoptées par le Parti libéral, mais on va à rencontre de la logique même des choses, parce que le marché libre sans frein, dans le domaine du logement, c'est la catastrophe pour ceux qui parmi les Québécois sont les plus démunis et que l'Etat a comme vocation première de protéger.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le député de Taschereau. M. le ministre. M. le député de D'Arcy McGee. (11 heures)

M. Victor Goldbloom

M. Goldbloom: J'aimerais à mon tour, en enchaînant avec les commentaires de mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, dire quelques mots en guise de remarques préliminaires sur ce projet de loi. Je voudrais répondre, dans une certaine mesure, au député de Taschereau sans pour autant lui répondre, c'est-à-dire sans le suivre pas à pas sur le chemin qu'il a choisi et surtout en laissant passer d'un côté ou de l'autre ses quelques flèches au lieu de placer mon bouclier devant chacune.

M. le Président, je dois à mon tour reconnaître la bonne volonté et l'ouverture d'esprit manifestées par le ministre entre les deux versions du projet de loi. Le ministre a certainement écouté ceux qui ont eu des commentaires à formuler et a adapté son projet de loi à certaines de ces observations. Mais, sans verser dans l'exagération, sans fournir un portrait très simple en blanc et noir de cette question qui nous divise dans une certaine mesure, je voudrais quand même mettre en relief certaines divergences de vue et, comme l'a dit mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, de philosophie entre les deux côtés de cette table.

M. le Président, c'est un peu l'expression pratique de la vieille question philosophique et pédiatrique, si vous voulez: L'enfant naît-il instinctivement bon ou instinctivement mauvais? Donc, doit-on se fier surtout aux bons instincts de l'être humain et mettre un minimum de contraintes sur son comportement économique, son comportement à l'endroit de ses semblables ou doit-on insister davantage sur ses mauvais instincts et croire que, pour chaque sphère d'activités où l'on peut rencontrer des abus, il faut imposer des contraintes sévères et assez élaborées parce que, s'il n'y a pas de contrainte du tout, la majorité des transactions aura lieu d'une façon abusive.

Je pose la question de cette façon, M. le Président, parce que, quand on fait face à un problème, on doit chercher à le résoudre en fonction du but ultime que l'on vise. Il me semble que l'on doit, devant ce problème qui est très réel, se demander: l'idéal serait-il que le système administratif couronné d'un tribunal des loyers soit un élément permanent de notre société ou pourrions-nous concevoir une situation où les abus absolument exorbitants se trouveraient devant les tribunaux que nous connaissons, les tribunaux généraux, et, en règle ordinaire, que les transactions se fassent en toute liberté? Le ministre nous dit: Le gouvernement ne veut pas généraliser à toutes les transactions cette notion de l'adjudication des loyers par un tribunal.

L'Opposition répond: De notre côté, en termes pratiques et en termes de 1979, nous ne proposons pas l'abolition de tout le régime non plus, mais entre les deux il y a une marge considérable; il y a deux tendances dont l'une va dans un sens et l'autre dans l'autre sens et entre les deux il reste un écart assez important.

Le député de Taschereau a parlé de fétichisme et a dit: Le Parti libéral souffre d'un fétichisme en ce qui concerne l'entreprise privée et le jeu du marché. Non, M. le Président, je n'irais pas jusque-là. C'est après tout un gouvernement libéral qui, pendant six ou sept ans, a renouvelé ce même projet de loi d'année en année. Nous aurions pu l'abolir si notre fétichisme avait été aussi prononcé et aussi absolu que cela. Je ne crois pas, M. le Président, même si je peux nourrir dans mon for intérieur l'idéal qu'un jour nous soyons en mesure de libérer le marché du logement locatif, que nous puissions aujourd'hui soumettre la société et l'économie du Québec à un tel chambardement et il est certain que si le chemin n'était pas très bien, très soigneusement préparé, si l'éducation des propriétaires et des locataires n'avait pas été faite soigneusement auparavant, nous serions condamnés à traverser une période assez difficile dont certains propriétaires auraient profité pour imposer des abus.

Mais, M. le Président, dans ce régime qui existe et que le gouvernement veut ajuster, il y a plus que cela. Il ne s'agit pas seulement de protéger des locataires contre des abus. Il faut reconnaître que l'on a d'autres effets, d'autres influences sur le marché du logement, sur l'activité économique qui entoure la production, le maintien et l'entretien des unités de logement. M. le Président, je suis certain que le ministre reconnaît que la protection contre les abus peut également avoir l'effet de "désincitation" en ce qui concerne l'entretien des logements et en ce qui concerne la construction de nouveaux logements et qu'il faut être prudent et ajuster délicatement le mécanisme de contrôle si l'on veut protéger les locataires les plus démunis contre des abus de la part des propriétaires; mais en même temps il faut protéger l'ensemble des locataires contre un rétrécissement du marché du logement, contre une diminution du nombre de logements salubres et bien entretenus disponibles parce que chaque année il y a un pourcentage — le ministre a sûrement les chiffres — de locataires qui changent de logement et qui changent, soit parce que leur condition économique a connu une amélioration, soit parce

que les conditions de location et d'habitation sont devenues insupportables.

C'est surtout dans cette deuxième catégorie qu'il faut assurer une protection, parce qu'il ne s'agit pas là d'une transaction entre propriétaire et locataire qui continuent d'avoir une relation déjà établie, mais à un chiffre présumément plus élevé. C'est le départ d'un locataire d'une unité de logement et c'est le lancement de ce locataire sur le marché où il doit pouvoir trouver un logement décent, surtout si le logement qu'il quitte ne l'a pas été. Tout cela est impliqué dans ce dont nous parlons aujourd'hui.

M. le Président, nous avons, au cours des dernières années, parlé de plusieurs aspects de ce problème complexe. Je pense que tous les députés de l'Assemblée nationale ont toujours été d'accord qu'une des protections qu'il fallait accorder aux locataires était la définition de ce qu'un bail doit contenir. Cette honnêteté intellectuelle qui n'était pas de rigueur, qui n'était pas généralisée avant l'établissement par l'Etat de balises à cet égard, de critères à cet égard obligerait cette intervention; mais une intervention pour rendre clair le contenu d'un bail tout importante qu'elle soit, ne va pas aussi loin que l'introduction, dans l'économique du logement, de ces mécanismes de contrôle et d'adjudication que nous connaissons depuis un certain temps.

M. le Président, il y a un autre facteur qui a été souligné par mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, c'est la bureaucratisation grandissante d'un domaine où ce n'est pas l'Etat qui fait en sorte que la production d'unités de logement est stimulée. Il faut que des gens trouvent dans leur intérêt, l'investissement nécessaire; autrement, M. le Président, le seul constructeur au Québec sera la Société d'habitation du Québec avec l'aide des offices municipaux d'habitation. Tel n'est sûrement pas l'objectif du gouvernement et si tel n'est pas son objectif, il faut que le gouvernement, en pensant au locataire, pense en même temps à l'éventuel constructeur, non seulement au propriétaire d'aujourd'hui qui offre sur le marché, en location, des unités, mais aussi à celui qui, dans des conditions de marché intéressantes, fera un investissement et fera construire des unités de logement et ainsi, fera diminuer à la longue les loyers, en moyenne. Si nous avions continué de connaître les taux d'inoccupation que nous avions il y a quatre ou cinq ans, nous n'aurions pas eu d'élasticité du tout dans le marché. (11 h 15)

II n'y aurait pas eu d'incitation aux propriétaires et aux éventuels constructeurs — je m'excuse, je veux me limiter aux propriétaires — de baisser leurs échelles de loyer ou de restreindre leurs augmentations.

C'est quand les logements se font rares que les propriétaires ont l'avantage du marché. Donc, afin d'éviter des abus que même cette loi ne réussira pas à éliminer complètement — le passage d'argent en-dessous de la table, par exemple — la loi peut-elle, tout en rendant très claire l'illégalité d'une telle transaction et tout en pré- voyant des pénalités pour celui qui est pris en flagrant délit... mais quand il y a rétrécissement du marché du logement, quand il y a pénurie de logements disponibles, quand les gens qui ont quitté un logement insalubre et un propriétaire intraitable ne trouvent pas sur le marché quelque chose de convenable et deviennent désespérés, non seulement ils finissent en désespoir par payer des sommes additionnelles qui ne sont ni prévues ni acceptées dans le cadre de la loi, mais ils se gardent bien d'être les délateurs de ceux qui ont exigé de tels paiements.

M. ie Président, j'ai voulu mettre en relief la complexité de toute cette question. J'ai voulu y apporter des nuances. A ma connaissance, le fétichisme est normalement dénué de nuances. Il y a des nuances à apporter à ces considérations.

Je voudrais offrir une dernière réaction aux paroles prononcées par le député de Taschereau. Il a dit, en quelque sorte, qu'il ne faut pas traiter le logement comme simple bien commercial. Je suis d'accord avec lui. Ce n'est pas un simple bien commercial. C'est quand même un bien commercial. Il fait l'objet de transactions commerciales, donc c'est un bien commercial.

Au risque de scandaliser le député, je lui dirai que les soins d'un médecin sont également des biens commerciaux. Il y a un marché là-dedans. Il n'y a pas de monopole, dans plusieurs domaines de la médecine. Il y a des gens qui choisissent d'aiier voir, par exemple, un optométriste au lieu d'aller voir un ophtalmologue. Il y a des gens qui choisissent d'aller voir un psychologue, au lieu d'aller voir un psychiatre. C'est depuis des années et des années que je dis que si les membres de ma profession avaient consacré plus d'efforts à la qualité de leurs services, en termes de leur disponibilité, certaines professions paramédicales n'auraient pas pris naissance et n'auraient pas pris l'expansion que l'on connaît. Il y a un aspect commercial même à ce genre de transaction.

La musique est un bien commercial. On peut choisir d'aller au concert ou de ne pas aller au concert. On peut choisir d'aller au concert donné par l'Orchestre symphonique ou d'aller à un concert donné par un groupe qui n'a pas les mêmes titres de noblesse, si je peux m'exprimer de cette façon. Il faut savoir commercialiser la musique classique si l'on veut s'attirer une clientèle.

M. le Président, j'ai fait la démonstration qu'il y a des éléments de marché dans tout cela. Le fait de dire que le droit devrait exister, pour tous les citoyens, à un logement salubre, un logement d'une qualité convenable, ce n'est pas une façon de mettre de côté les aspects commerciaux qui existent, et avec la complexité de ce marché, M. le Président, vous comprendrez pourquoi nous ne serons pas parfaitement d'accord avec le gouvernement sur tous les aspects et tous les détails de ce projet de loi. Ce n'est pas une façon de s'élever contre le principe du droit à un logement salubre. Ce n'est pas une façon de s'élever contre le principe de la protection contre les abus. Mais, M. le Président, si nous voulons protéger les Québé-

cois, protégeons tous les Québécois et protégeons l'intérêt collectif des Québécois; parce que le marché du logement constitue un intérêt fondamental qui relève du bien commun de tous les Québécois.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le député de D'Arcy McGee.

M. le ministre, des commentaires?

M. Scowen: M. le Président, je veux brièvement rétablir certains faits, parce que...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-G race...

M. Scowen: ... et j'ai...

Le Président (M. Laplante): ... je connais très bien votre intelligence, votre façon d'être capable de répondre au député de Taschereau, mais je préférerais, à ce moment-ci, que vous en profitiez... A l'étude article par article, vous aurez la chance, à ce moment-là, de répondre. Actuellement, je ne voudrais pas commettre d'accroc. Votre temps est épuisé et si je recommençais un autre tour de table, je ne crois pas que ce serait juste pour les autres membres de la commission qui s'abstiennent actuellement de parler et de répondre à certains commentaires qui auraient pu être faits.

Je vous prierais d'attendre à l'étude article par article pour formuler vos réponses.

M. Scowen: M. le Président, d'abord, je comprends très bien que j'aurai l'occasion de répondre, au député de Taschereau et ce n'était pas mon intention. Je voulais simplement rétablir un seul fait, une déclaration qu'il a faite, qui n'est évidemment pas correcte, et, deuxièmement, j'avais une demande d'information à formuler au ministre. Si je peux le faire maintenant, ça relève de... Est-ce que vous me permettez...

Le Président (M. Laplante): Est-ce une directive que vous voulez, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce?

M. Scowen: Non, je veux demander au ministre de nous fournir quelques informations qui, je pense, peuvent nous aider. C'est quelque chose qu'il peut nous fournir demain ou après-demain, mais je pense que ça pourrait être utile pour tout le monde. Je voulais poser cette question.

Le Président (M. Laplante): Posez la question.

M. Scowen: Est-ce que vous me permettez aussi de corriger...

Le Président (M. Laplante): Non, pas l'autre. Je préférerais, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce... Vous n'avez pas relevé le fait au moment où le député de Taschereau a parlé. Je ne voudrais pas...

M. Scowen: Si je comprends bien, M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Si je comprends bien... Je sais que vous êtes capable, à l'intérieur de nos règlements actuellement, de formuler les réponses que vous auriez formulées ou de corriger des énoncés qui auraient pu être faits autour de la table qui vous paraissent insatisfaisants ou incorrects.

M. Scowen: Bon, très bien! La demande que je voulais faire au ministre, c'est que nous parlons énormément de la structure de la nouvelle régie, et je pense que ça pourrait aider tout le monde si on avait certaines données sur le fonctionnement de la commission actuelle. Je vais vous donner les détails que j'aimerais avoir. J'imagine qu'ils sont disponibles. C'est une question sur les années précédentes, 1979 à ce jour, 1978, 1977 et, si possible, 1976 — ce n'est pas essentiel — les détails suivants: premièrement, le coût de fonctionnement global de la régie actuellement. Deuxièmement, le nombre d'administrateurs et de commissaires parce qu'il y a des administrateurs et des commissaires — je pense qu'il y a les deux niveaux — et le nombre du personnel pour chaque année. Finalement, le nombre de cas qui ont été entendus chaque année, en conciliation, par les administrateurs, si vous voulez, et, également, en appel.

Je pense qu'avec ces détails pour cette année-ci ou pour les six premiers mois et les années précédentes, ça peut nous donner une perspective, pour tous les députés, des activités et on pourrait essayer de vous poser des questions pour comprendre jusquà quel point les coûts et le nombre de personnes, le nombre de cas, etc., seront changés. Si vous pouviez nous donner cela en cours de route, je l'apprécierais.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le député. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Pour ajouter à la question du député, pourrait-on savoir, aussi, le nombre de cas qui ont été soumis à la régie durant ces années?

M. Tardif: M. le Président, il me fera plaisir de transmettre aux membres de cette commission des renseignements aussi exacts que possible aussitôt que nous les aurons. Simplement pour donner une idée, peut-être, ou des ordres de grandeur, je donne en chiffres arrondis les dernières données que je possède sur la régie. Son budget actuel est de l'ordre de $5,9 millions. Le nombre de commissaires, actuellement, est de 14. Le nombre d'administrateurs — je vous donne cela en plus ou moins — est de 70. Je tiens à préciser que ces administrateurs et commissaires, pour la quasi-totalité, sont des gens ad hoc qui ont leur pratique privée et qui entendent des causes, qui

ont été nommés par l'ancien gouvernement et qui sont encore là.

Deuxièmement, quant au personnel de la commission, plus ou moins 300. Là aussi je voudrais préciser qu'il s'agit maintenant de membres de la fonction publique, ce qui n'était pas le cas jusqu'au 1er janvier 1977 alors que ces gens étaient engagés et renvoyés selon le bon plaisir.

Finalement, le nombre de causes, l'année dernière — encore une fois, de mémoire, on vous donnera tout cela autant que possible — c'est plus ou moins 60 000. Quant au nombre de causes portées en appel, c'est 16 2/3%, 10 000.

C'est à peu près, en autant que ma mémoire est bonne et qu'on peut avoir quelques données ici, l'ordre de grandeur des affaires dont est saisi cet organisme et du personnel requis pour s'en occuper.

M. Scowen: On a dit que le nombre de causes devant la régie a diminué durant les dernières années. Est-ce que c'est vrai?

M. Tardif: M. le Président, il y a eu des hauts et des bas, selon évidemment les lois. A la suite de certains amendements apportés par un des ministres de la Justice du temps, M. Jérôme Choquette, il y avait eu quand même passablement d'affaires portées devant la régie; subséquemment, à la suite d'autres amendements, très peu de causes ont été portées puisque, finalement, le tout était arrivé assez tard avec très peu de publicité. Je donne des ordres de grandeur, uniquement pour donner une idée. On apportera toutes ces données dès qu'elles seront disponibles, peut-être aujourd'hui, peut-être demain.

M. Scowen: Je vous remercie, parfait.

Le Président (M. Laplante): Avez-vous d'autres commentaires, M. le ministre, avant d'appeler l'article 1?

M. Guy Tardif

M. Tardif: Oui, il y a eu des questions posées par des membres de l'Opposition. D'abord, il y a le député de Saint-Hyacinthe qui a demandé s'il y avait des amendements. Oui, on ne peut pas étudier une loi, même si officiellement, le dernier numéro qui apparaît, c'est 141 quant au nombre d'articles, on sait pertinemment que les articles 1650 à 1665 sont très substantiels et comportent des 1), 2), 3), 4) et des a), b), c), d) énormément, de sorte qu'à une loi de 200 articles, il y aura à peu près 20 ou 25 papillons, mais de nature technique, à la suite d'une relecture faite par les juristes. Donc, il n'y a pas d'amendements de fond là-dessus. On les a faits dans la réimpression, et c'est l'avantage, justement, d'avoir un texte réimprimé pour les députés.

C'est pour cela que ie m'explique mal les remarques du député de Notre-Dame-de Grâce qui dit: On a eu une nouvelle loi, dit-il, et on n'a eu que douze heures pour l'étudier, dans le brouhaha de fin de session. (11 h 30)

M. le Président, vraiment, je comprends que, dans le cas du député de Notre-Dame-de-Grâce, qui s'est joint à l'Assemblée nationale après les autres, il n'a pas suivi révolution, le cheminement de ce dossier de la loi 107, depuis la parution du livre blanc jusqu'en décembre 1977, le dépôt de cette loi, en première lecture, en décembre 1978, et cette loi réimprimée. Mais il n'a vraiment pas raison de dire qu'une nouvelle loi a été déposée à la veille de l'ajournement. En fait, il y a un changement majeur dans cette loi réimprimée et c'est non pas l'inversion du fardeau de la démarche, mais le partage du fardeau de la démarche.

Je pense que c'est peut-être, de tous les amendements apportés, celui qui porte plus sur une question de fond, mais qui, encore là, découle de représentations reçues en commission. C'est pour ça qu'on a tenu une commission que le député de Notre-Dame-de-Grâce a d'ailleurs suivie assidûment. Alors, je ne crois pas qu'il soit juste de dire qu'il y a eu bousculade à la veille de l'ajournement de la session.

Je pense que le député de Taschereau a, à juste titre, remis un certain nombre de choses en place. Il est bien évident que l'on peut, au nom de la libre entreprise, prôner la liberté contractuelle absolue entre les parties, tout comme on a eu des groupes, en commission parlementaire, qui sont venus nous demander rien de moins que le contrôle universel, obligatoire des loyers au Québec. La loi 107 a rejeté ces deux attitudes extrêmes et a décidé de déterminer un certain nombre de règles du jeu et de laisser les parties s'entendre sur les autres.

Evidemment, le député de Notre-Dame-de-Grâce dit: La méthode de fixation, telle qu'elle a été présentée et distribuée aux membres de cette commission, va produire, avoir le même effet que s'il s'agissait d'un taux fixe et, en conséquence, va nous conduire, à dessein ou de façon inconsciente, non voulue, à un régime universel obligatoire de contrôle des loyers.

Or, je voudrais souligner la loi de l'Ontario, pour le bénéfice de cette commission, loi que la Législature ontarienne a adoptée le 21 juin, juste avant l'ajournement, ce que nous n'avons pas fait, nous. Leur loi 163 décrète, à l'article 125, rien de moins — encore une fois, je ne pense pas qu'on puisse parler du gouvernement de l'Ontario comme étant des plus progressistes sur le plan de spectres politiques — que: "Unless otherwise authorized under this Act, no landlord shall increase the rent charged for rental units by more than 6% of the last rent that was charged for an equivalent rental period". Donc, qu'a-t-on fait en Ontario? On a non seulement établi un système absolu, généralisé d'augmentation, mais, par le biais d'un taux fixe avec possibilité pour un locataire de contester à la baisse, s'il croit qu'il y a eu détérioration de la qualité et, pour le propriétaire, à la hausse, s'il croit qu'il a fait des améliorations

à son immeuble. M. le Président, cette loi a été adoptée le 21 décembre dernier en Ontario.

Je pourrais apporter au député de Notre-Dame-de-Grâce et aux membres de cette assemblée la référence d'un Etat, qui est nul autre que l'Etat de la Californie où, à la suite de la loi 13 sur la baisse des impôts fonciers, la thèse des impôts fonciers, on a trouvé, entre autres pour cette raison-là, nécessaire d'établir un contrôle des loyers en Californie, justement afin, dans ce cas-là surtout, de faire bénéficier les locataires des diminutions importantes d'impôt foncier qui pouvait se trouver. J'ai pris évidemment très bonne note de cela, M. le Président, pour l'impact de la réforme de la fiscalité municipale.

C'est sûr que j'ai dit tantôt que le gouvernement a rejeté la liberté contractuelle absolue entre les parties et a rejeté le contrôle obligatoire absolu. Il a décidé de fixer un certain nombre de règles du jeu et de laisser les parties s'entendre pour le reste.

Lorsqu'on nous dit que c'est une attitude contradictoire de notre part que d'avoir agi de cette façon-là, que, finalement... Le député de Notre-Dame-de-Grâce — je ne suis pas sûr qu'il m'invite à un contrôle des prix — dit: Le ministre n'atteindra pas l'objectif que je partage avec lui, soit que pour assurer le droit à un logement, il faut assurer un droit à un logement de qualité. Je suis d'accord. Il faut assurer ceci à un coût raisonnable, parce qu'évidemment une sécurité ou un droit au logement qui ne s'accompagne pas d'un contrôle des loyers est un droit illusoire. Il suffit que je dise: Monsieur, vous avez le droit de demeurer là, mais si, par ailleurs, le propriétaire a le droit de vous demander une augmentation de 500%, je viens de vous donner un droit tout à fait illusoire. Il faut quand même que le législateur soit cohérent. Vous nous dites: Le contrôle des loyers devrait cependant, comme j'ai cru le comprendre, être un contrôle des prix, un contrôle des prix qui implique, toujours encore si j'ai bien compris, la possibilité de réviser le prix de base et non pas uniquement les hausses de loyer.

Or, la révision du prix de base est une chose qui est concevable, qui est envisageable. Evidemment, on entre dans toutes sortes de complications et dans toutes sortes de difficultés. Va-t-on fixer cela au mètre carré? Va-t-on fixer cela en évaluant chaque pièce d'équipement? Etant donné maintenant que les normes d'isolation thermique des maisons deviennent de plus en plus sophistiquées, si un mur a une résistance au froid de R-12 ou R-20, est-ce que ceci va également entrer dans la détermination du prix de base, etc.?

Je me souviens pertinemment qu'en commission parlementaire, selon que les groupes faisaient partie des locataires ou des propriétaires, les deux nous demandaient la possibilité de réviser le prix de base. Pour les propriétaires, c'était de pouvoir le réviser à la hausse et pour les locataires, c'était de pouvoir le réviser à la baisse, mais aucun des deux groupes n'était d'accord pour que cela puisse jouer dans les deux sens.

Nous avons adopté à la place le contrôle des loyers, le contrôle des hausses. Ceci après une période de cinq ans pour permettre aux lois du marché, de l'offre et de la demande, de jouer, de permettre à celui qui a bâti un immeuble — ce n'est généralement pas celui-là cependant; celui qui l'a bâti s'en est départi souvent dans les 18 mois qui ont suivi et c'est un autre qui l'a placé comme investissement; peut-être que celui-là a deux ans, trois ans pour ajuster ses loyers — de le faire en fonction des lois du marché. Une fois que ceci est établi, les règles de fixation jouent.

Ce n'est pas une attitude contradictoire. C'est une attitude voulue et qui fait partie de ce que j'ai appelé tantôt le fait de déterminer un certain nombre de règles du jeu et de laisser quand même les parties s'entendre sur les autres.

Je limiterai pour l'instant mes remarques. Il y a le député de D'Arcy McGee qui a soulevé toutes sortes d'analogies aussi avec sa profession, le médecine, la pédiatrie. Je ne veux pas revenir là-dessus, mais il a soulevé quelque chose d'intéressant en tant qu'ex-ministre des Affaires municipales responsable de la Société d'habitation en disant: Si on rend moins lucratifs "l'industrie" du logement ou les investissements immobiliers, il n'y aura tantôt de constructeurs d'habitation au Québec, que la Société d'habitation.

M. le Président, c'est précisément parce que — et d'ajouter le député: évidemment, on sait que cela coûte extrêmement cher les logements dits sociaux — le gouvernement est convaincu que la formule dite des HLM n'est pas parfaite — même s'il faut en avoir pour ceux des citoyens québécois pour qui cela prend une solution globale, à la fois en termes de qualité de logement et de coût — qu'il faut examiner d'autres formules qui peuvent s'apparenter au programme SAFER de la Colombie-Britannique, dont j'ai déjà eu l'occasion de parler, le programme RATE, au Nouveau-Brunswick, et d'autres ailleurs, qui sont des formules d'allocation-logement. SAFER pour Shel-terly aid for elderly residents, je crois.

Ces programmes justement supposent l'existence d'un contrôle efficace des hausses de loyer, parce qu'évidemment tout programme visant à donner une forme quelconque d'allocation-logement aux gens serait un transfert pur et simple de fonds du gouvernement dans les goussets de propriétaires s'il n'y avait un frein aux hausses.

M. le Président, ceci dit et ces précisions apportées de part et d'autre, peut-être que nous pourrions procéder à l'étude du projet de loi no 107 article par article. Je pense que nous avons eu des papillons, oui, on peut distribuer les papillons. Egalement, je viens à peine d'avoir, je l'ai retrouvé dans mon courrier de retour de vacances, cette loi de l'Ontario; si cela intéressait l'Opposition que j'en fasse faire des copies pour vous la remettre, il me fera plaisir de le faire.

M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais invoquer le règlement très brièvement. Je n'ai pas voulu interrompre le ministre, mais c'est pour

rétablir les faits. Il a dit que le député de Notre-Dame-de-Grâce était arrivé à l'Assemblée nationale après les autres. C'était quand même avant le député libéral d'Argenteuil, avant le député libéral de Jean-Talon et avant les députés libéraux de Prévost, Maisonneuve et Beauce-Sud.

M. Tardif: M. le Président, cela ne se voulait pas méchant du tout.

M. Scowen: M. le Président, il n'y a pas de problème, mais je veux vous poser une question de règlement.

Le Président (M. Laplante): Oui, monsieur, je la devine.

M. Scowen: C'est une question qui porte un peu sur les faits. Je vous avais proposé tantôt de rétablir un fait et je veux savoir simplement quand et comment vous voulez que cela se fasse. Si, par exemple, je dis que quelque chose est noir et un député me cite en disant que j'ai dit que c'était blanc, est-ce que je l'interromps ou j'attends jusqu'à la fin de son intervention ou j'attends à la discussion sur un article?

Le Président (M. Laplante): Je vais vous donner tout de suite la différence entre ce que vous avez fait, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, et ce que le député de D'Arcy McGee vient de faire, comme invocation de règlement. C'est qu'il l'a fait immédiatement après l'intervention du ministre. Je pense qu'il est sage, à un moment donné, d'attendre que l'intervention du député ou du ministre soit terminée au lieu d'interrompre. Ce que vous n'avez pas fait, vous, c'est que vous avez attendu qu'un autre interlocuteur fasse son exposé avant de commencer à répondre à l'autre interlocuteur.

M. Scowen: Comme le ministre l'a dit, je suis nouveau. Est-ce que je pourrais dire un mot, pour cette fois-ci? Ce sera assez bref, je vous assure, mais je pense que c'est important.

Le Président (M. Laplante): Je maintiendrai la décision que j'ai prise tout à l'heure à votre égard, c'est que...

M. Fontaine: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Un instant, s'il vous plaît.

M. Fontaine: Question de règlement, s'il vous plaît.

Le Président (M. Laplante): Je crois qu'au moment où on appellera l'article 1, si vous avez des commentaires à faire à l'intérieur de l'article 1, cela peut très bien s'accommoder en réponse au député de Taschereau.

D'accord, je vous donne des outils. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Si vous me permettez, M. le Président, sur la question de règlement, je pense qu'il est de tradition qu'au début d'une commission parlementaire, chacun puisse y aller de ses commentaires plus ou moins brefs ou plus ou moins longs et qu'il n'y a pas de temps limite aux interventions. Je pense que c'est la commission, à ce moment, qui décide, quand cela veut trop s'étirer en longueur, qu'on commence à étudier article par article, mais je ne pense pas qu'il y ait de règles strictes disant: Monsieur, vous avez vingt minutes. Vos vingt minutes sont écoulées. Vous n'avez plus le droit de parler. Je pense que ce serait peut-être un peu strict pour les parlementaires. (11 h 45)

Le Président (M. Laplante): Si vous m'aviez posé la question suivante, M. le député de Nicolet-Yamaska: Combien de minutes le député de Notre-Dame-de-Grâce a-t-il eues pour son intervention? j'aurais pu vous répondre et vous auriez pu constater que je n'ai pas appliqué la règle dans toute sa rigueur. De sorte que si vous voulez parler vous-même, vous avez présentement 20 minutes. Vous n'avez employé aucune de ces minutes. Si vous vous croyez brimé...

M. Fontaine: M. le Président, c'est justement... Il n'y a pas de temps limite pour faire des commentaires. Je pense que si le député de Notre-Dame-de-Grâce voulait continuer à faire d'autres commantaires, il pourrait le faire.

Le Président (M. Laplante): M. le député, je vous référerais au règlement à ce moment-ci.

M. Fontaine: Quel article, M. le Président?

Le Président (M. Laplante): Je vous réfère à l'article 160, M. le député. M. le député de Taschereau.

M. Guay: M. le Président, si cela peut faciliter votre tâche, nous n'avons, de notre côté, je pense bien, aucune espèce d'objection à ce que, compte tenu qu'il est nouveau dans cette enceinte, le député de Notre-Dame-de-Grâce...

Des Voix: Oh!

M. Guay: C'est lui qui l'a dit. Nous n'avons aucune espèce d'objection à ce que le député de Notre-Dame-de-Grâce utilise le droit qui est prévu en vertu de l'article 96, même si ce n'est pas au bon moment. Vous avez notre consentement, quant à nous.

Le Président (M. Laplante): Si c'est le voeu de la commission, moi, je suis bien d'accord.

M. Caron: II y a consentement et on va sauver du temps, à part cela.

Le Président (M. Laplante): II y a consentement. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Comme promis, M. le Président, je serai très bref. C'est sur la question de la nationalisation. M. le Président, je pense que le ministre m'a bien compris au moins. Je n'ai jamais dit que je croyais que ce projet de loi était une loi prévoyant la nationalisation des logements. Je n'ai pas suggéré ce fait-là. Ce que j'ai suggéré, c'est que si vous voulez vraiment aller en profondeur, jusqu'au bout avec cette question du droit au logement, vous êtes porté, inévitablement, vers la nationalisation, parce que dans une société où vous avez l'entreprise privée qui est censée construire 97%, si j'ai bien compris...

M. Tardif: 97%.

M. Scowen: ... des logements, vous ne pouvez pas l'obliger, à moins qu'elle croit elle-même que c'est rentable, à construire le genre de logements que vous voulez et aux endroits que vous voulez. Si vous voulez aller aux limites, vous êtes obligé de prévoir la nationalisation. Je n'ai jamais suggéré que ce projet de loi comportait une telle idée, un tel principe. J'ai dit au début que c'était une contradiction pour ce qui est de l'idée du droit au logement. Je veux dire de plus que dans le cas de l'entreprise privée — c'est ce que je vous suggérais, M. le député de Taschereau — ce projet de loi comme tel créera une augmentation pour 100 000 loyers l'an prochain, totalement injustifiée, une augmentation pour 100 000 loyers, d'après nous, au moins, totalement injustifiée, à cause du système que vous prévoyez. Je pense que vous commencez à réaliser que le système du libre marché vaut, d'après nous, non seulement pour les propriétaires, mais aussi pour les locataires qui veulent avoir un choix et qui veulent avoir le privilège de lire dans les journaux toutes les possibilités qui existent pour eux de choisir, de changer, etc. Mais dans le système que vous prévoyez, d'après nous, nous sommes convaincus que nous aurons l'an prochain, dès la première année où cette loi entrera en vigueur, au moins 100 000 augmentations de loyer totalement injustifiées autrement et que nous n'aurions pas si la loi n'était pas mise en vigueur. Quand on dit que la chambre de commerce est un peu pour ce projet de loi, je peux facilement imaginer pourquoi et je pense que vous verrez qu'il y a pas mal d'associations de propriétaires qui seront aussi pour parce que je suis persuadé que cela garantit à presque tous les propriétaires du Québec le droit d'augmenter le loyer, s'ils en ont besoin ou non, d'une façon injustifiée d'année en année. En effet, le système du libre marché joue dans les deux sens.

M. Guay: M. le Président, cela va être à mon tour d'invoquer l'article 96, si vous me le permettez, parce que je n'ai jamais dit que la chambre de commerce était pour le projet de loi. J'ai dit que la chambre de commerce avait dit qu'elle le comparait à la première version et qu'il y avait un gain important, soit la disparition de dispositions relatives au contrôle des loyers. C'est la chambre de commerce qui le dit et elle ne l'explique pas. Si vous lisez plus loin, il y a encore quatre lignes qui ne sont pas un éloge du projet de loi et la chambre de commerce n'est pas favorable au projet de loi. D'autre part, si le député me permet une question, c'est bien beau de lancer des chiffres en l'air comme cela mais à partir de quoi ou de quelle émanation de l'esprit lui vient cette idée de 100 000 augmentations injustifiées?

M. Scowen: Est-ce que le président préfère que je réponde aujourd'hui ou au moment où on arrivera aux articles? Parce que c'est une question de fond.

M. Guay: Quant à faire...

Le Président (M. Laplante): Je crois qu'il serait plus sage, parce que cela devient un dialogue.

M. Tardif: Si vous me permettez, M. le Président. Pour le plus grand bien des travaux de cette commission, je suis prêt à donner les papillons, les amendements à la loi de l'Ontario, les notes sur la Californie, tout ce que vous voudrez. J'aimerais bien cela savoir sur quoi s'appuie cette évaluation de 100 000 hausses qui seraient entraînées par l'application de la méthode et qui ne seraient pas autrement demandées? Cela pourrait être intéressant à connaître.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que les membres de cette commission accordent un temps additionnel pour cette réponse?

M. Tardif: Oui, oui.

M. Guay: Parce que si c'est comme les sièges sociaux...

M. Scowen: Oui.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Très bien, très bien. Je pense en effet que j'ai soulevé le même point le soir du 21 ou du 22 mais je vais essayer d'être très bref parce que c'est assez détaillé. Vous prévoyez l'impression d'un formulaire obligatoire pour chaque propriétaire qui veut augmenter n'importe quel loyer. Vous prévoyez, si je comprends bien, faire une campagne de publicité pour donner avis à tous les locataires et propriétaires de leurs droits et de leurs responsabilités qui roulent autour de ce formulaire.

Le formulaire, comme le ministre l'a dit, est basé sur certaines augmentations du coût, quelques-uns basés sur les augmentations réelles et d'autres basés sur les formules qui seront... Excusez?

M. Guay: Je m'excuse, je n'en suis pas certain, je peux me tromper mais je ne pense pas qu'un formulaire aussi détaillé que cela...

M. Scowen: Non?

M. Guay: Ah oui, oui! mais dans le projet de loi.

M. Tardif: M. le Président, d'accord, le député...

M. Scowen: Est-ce qu'il veut que je termine ou non, M. le Président?

M. Tardif: Oui mais je veux juste apporter une précision, M. le Président, avec votre permission et celle du député de Notre-Dame-de-Grâce. Le député de Notre-Dame-de-Grâce fait état d'un document de travail que je lui ai remis et qui n'est pas dans la loi, effectivement, qui est un projet. Je dois avouer — et là-dessus, je l'ai mentionné dès mes remarques de présentation — que ces commentaires nous ont fait réfléchir et il n'est pas sûr du tout que ce sera ce projet de formulaire qui sera envoyé. Je ferme la parenthèse pour l'instant. D'accord?

Ce que je veux savoir, c'est: Est-ce que l'estimation de 100 000 augmentations qui ne seraient pas autrement demandées résultait d'une étude, d'une recherche empirique d'une évaluation un tant soit peu scientifique ou objective? C'est sur cet aspect. Quant à l'impact du questionnaire, je serais prêt à reprendre cela avec lui à un autre moment.

M. Scowen: Bon. Si c'est accepté que ce formulaire ne sera pas utilisé, est-ce que je peux comprendre que vous êtes prêt à rayer l'article 83 qui donne le droit à la régie de développer des formules et des formulaires en ce qui concerne l'augmentation de loyer et de rendre l'usage obligatoire?

M. Tardif: Article 83?

M. Guay: 83, c'est de régie...

M. Scowen: 83? Je pense que c'est 83.

M. Guay: C'est de régie interne. Les règlements de procédure de la régie...

M. Scowen: Je pense que c'est 83. Une Voix: C'est 83.

M. Scowen: Ce que je constate, soit dans celui-ci, soit dans les autres formules développées par le gouvernement ou par la régie, c'est l'intention de la régie de développer un seul formulaire pour justifier les augmentations de loyer, d'en rendre l'usage obligatoire à travers le Québec et de faire en sorte que tous les locataires et les locateurs en soient conscients. Peut-être que je dois terminer et après on pourra avoir une critique de cette analyse, si vous voulez, M. le Président. Si c'est la vérité, je suis persuadé — et j'ai consulté beaucoup de monde pendant l'été — que si un tel formulaire, soit celui-ci ou un autre, est rendu public, est imprimé, est obligatoire, est disponible à toutes les caisses populaires et bureaux de poste à travers le Québec...

M. Guay: II y a beaucoup de "si".

M. Scowen: ... si on donne le droit à une augmentation de loyer basée en quelque sorte sur l'augmentation du coût, vous aurez un instrument fort utile pour les propriétaires qui, jusqu'ici, n'ont pas eu droit à des augmentations de loyer.

J'arrive maintenant à expliquer la façon selon laquelle je suis arrivé à 100 000. Si je comprends bien, nous avons chaque année à peu près 750 000 baux de signés; en 1977, si je me rappelle bien — je pense que c'était dans l'étude de Matthews — à peu près 30% des loyers au Québec n'ont pas eu d'augmentation. En effet, vous en avez les deux tiers où le loyer est augmenté et le tiers où il n'y a pas d'augmentation. Il y a donc, chaque année à peu près 200 000 baux sur lesquels il n'y a pas d'augmentation. Ce n'est pas une étude empirique.

Je prévois, d'après notre expérience avec la Commission de la lutte contre l'inflation, quand on a fait les mêmes normes que normalement toutes les personnes qui savent qu'elles ont droit à une augmentation, si elles font tout simplement le nécessaire sur un formulaire du gouvernement, elles vont essayer d'en profiter. Devant un formulaire du gouvernement imprimé au nom de la Régie des loyers donnant au bas le droit à une telle augmentation, devant un document comme ça, un propriétaire pourra dire: C'est permis par le gouvernement, comme vous le voyez, par la régie, c'est mon droit. Les locataires vont arrêter de faire la lutte contre cela parce qu'ils vont constater que c'est non seulement le propriétaire, mais le gouvernement. En effet, comme ce fut le cas à la Commission de la lutte contre l'inflation, la Régie des salaires a permis un maximum de 6% et le maximum est devenu le minimum. Quand j'ai dit 100 000, j'aurais pu dire 200 000 parce qu'en principe je suis persuadé que le tiers des locataires qui y ont droit vont essayer de profiter de cet instrument que vous leur donnez.

Mais simplement pour ne pas exagérer et croyant qu'il y a encore un certain jeu dans le marché quant au choix des personnes de déménager, j'ai dit 100 000, et je suis persuadé que je n'exagère pas. Voilà.

M. Guay: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: ... j'aimerais poser une question au ministre. Je ne sais pas s'il y a complicité entre le gouvernement et l'Opposition officielle. Je demande au ministre s'il y aurait possibilité d'avoir le formulaire que vous avez eu la gentillesse de remettre au député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Tardif: M. le Président, sauf erreur, le soir même de l'étude du projet de loi en deuxième

lecture, j'ai remis personnellement ces formulaires à l'Opposition.

M. Scowen: Est-il question de la réglementation aussi?

M. Tardif: Non, non. J'ai remis trois projets de règlements en disant que ces règlements, je m'étais engagé à les remettre ici, lors de l'étude article par article; j'ai devancé la remise en les donnant ce soir-là.

M. Cordeau:... les règlements. Nous sommes tous deux membres de la commission permanente et nous ne les avons pas.

M. Tardif: II est tout à fait possible qu'en ce dernier soir de session...

M. Cordeau: Ce n'est certainement pas une complicité voulue.

M. Tardif: ... les documents se soient égarés ou que leurs lecteurs se soient égarés, mais il me fera plaisir d'en remettre des exemplaires à l'Opposition à l'instant même, aussitôt qu'on les aura. D'accord?

M. Scowen: M. le Président, pour terminer...

M. Cordeau: C'est certainement un précédent de complicité.

M. Scowen: ... ajoutée aux 100 000 il y a la question de l'ajustement de base, du loyer de base. Vous verrez, M. le ministre, après la mise en vigueur de cette affaire-là, que vous serez obligé de donner ce qu'on appelait à la commission un "low base relief", un ajustement pour les propriétaires qui vont venir vous voir et vous dire: Ecoutez, nous tomberons en faillite à moins de pouvoir ajuster notre loyer parce que le loyer de base n'est pas acceptable. (12 heures)

Face au problème de pertes substantielles ou le refus d'un propriétaire de même entretenir son appartement, comme il est arrivé dans d'autres villes, je dois ajouter que vous serez obligé dans certains cas, d'ajuster le loyer de base de certains propriétaires. Mais vous ne serez jamais en mesure d'ajuster, en diminuant, ceux qui font des profits excessifs, parce que vous ne serez jamais conscient de ces cas.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je pense qu'on rentre dans les articles, actuellement, cela déborde un peu la question précise des 100 000. Est-ce que les membres sont prêts à commencer à étudier article par article...

M. Tardif: Un instant. Le député de Notre-Dame-de-Grâce a fait son argumentation. Il me semble que de ce côté-ci, on pourrait au moins donner la réplique avant... parce que comme c'est là, on a posé une question et on a eu une réponse, mais on peut peut-être...

M. Scowen: M. le Président, excusez-moi, ce n'était pas du tout mon intention de faire une argumentation. On m'a demandé d'expliquer une déclaration que j'ai faite. J'ai même suggéré que cela se fasse à l'intérieur des articles...

Le Président (M. Laberge): Exactement, je le prends dans ce sens-là, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce et je ne vois pas les argumentations sur ce...

M. Tardif: Est-ce que le ministre n'a pas le droit de parole privilégié?

Le Président (M. Laberge): Oui, mais actuellement, le ministre fait appel à l'article 1.

Une Voix: S'il y a consentement...

Le Président (M. Laberge): Si c'est cela que vous voulez, allez-y. Je suis bien d'accord.

M. Tardif: M. le Président, avec votre permission, je voudrais être assez indulgent, parce que je pense que s'il y a un certain nombre de malentendus qui sont dissipés dès le départ, si on sait sur quelle base chacun s'appuie pour faire ses projections, je pense que cela pourra nous aider plus tard.

Je remercie le député de D'Arcy McGee, pardon, de Notre-Dame-de-Grâce — ce sont des comtés assez voisins quand même — de nous avoir expliqué le cheminement de sa pensée, raisonnement très logique, sauf que, je n'ai pas saisi où il a pris ce sur quoi il s'apuie pour arriver au chiffre de 100 000. C'est-à-dire que, soi-disant que le tiers des locataires ne feraient pas l'objet d'une demande d'augmentation de la part de leurs propriétaires, d'où vient le ratio un tiers-deux tiers?

M. Scowen: C'était — si je me rappelle bien — dans le rapport Godbout-Matthews qui a donné les détails sur le niveau d'augmentation des loyers...

M. Tardif: D'accord, on trouvera la référence exacte.

M. Scowen:... comme zéro à aucune augmentation, zéro à 3%, des choses comme cela.

M. Tardif: C'est plus élevé qu'un tiers.

Ma deuxième question, M. le Président — je l'ai mentionnée tantôt, mais je voudrais la répéter et aussi corriger immédiatement un chiffre qui a été avancé. Tantôt, le député de Notre-Dame-de-Grâce, dans son intervention initiale, a dit: 80% des logements appartiennent au secteur privé, ce que nous nous sommes empressés de corriger de ce côté-ci de la salle, en disant: Ce n'est pas 80%, c'est 97%. Sauf que tantôt, lorsqu'il est revenu, en invoquant la question de règlement, en cherchant à corriger certaines interprétations, M. le Président, il en est venu à parler non pas de la propriété des logements, mais du volume de construction.

Alors, là, il en est venu à parler non pas de la propriété des logements, mais du volume de construction. Là, on ne parle plus de la même chose, parce que si cette année, la Société d'habitation du Québec construit 6000 logements et si par ailleurs, le stock total de logements mis en chantier cette année est de 40 000 au Québec, 6000 sur 40 000, c'est donc dire que la société ou le secteur privé occupera peut-être quelque chose comme 80% du volume de construction cette année. Mais dans le parc immobilier total de 2 millions de logements au Québec, il y a à peu près 25 000 HLM et à peu près 2000 coopératives. Alors, c'est là que je dis sur 2 millions, on n'a même pas 2% de logements qui appartiennent à d'autres que le secteur privé. Alors, je voulais faire la distinction entre le pourcentage de 80% et celui de 97%. Les 80% s'appliquent au volume de logements produits cette année et les 97% s'appliquent à l'ensemble du parc immobilier. On a déjà eu des échanges de chiffres, on ne parlait pas de la même chose.

Une Voix: C'est effrayant.

M. Guay: M. le Président, j'ai encore droit de parole, je crois.

Le Président (M. Laplante): Une courte intervention.

M. Guay: C'est simplement que l'affirmation des 100 000 logements cela me fait penser aux 100 000 emplois de jadis. Je ne suis pas sûr que ce soit beaucoup plus fondé. D'abord, on se base sur un formulaire hypothétique qui ne fait pas partie de la loi. Il est certain qu'il y a un article dans la loi qui prévoit la possibilité de faire des formulaires, mais celui-là n'est qu'une hypothèse et ce n'est pas nécessairement celui-là qui sera fait éventuellement.

On estime à partir d'une étude de Matthews à un tiers, si j'ai bien compris, approximativement, le nombre de locataires qui n'ont pas reçu d'avis d'augmentation de loyer de leur propriétaire au cours de l'année où s'est faite cette étude. En conséquence de quoi on dit: Automatiquement, du fait de l'entrée en vigueur de ce projet de loi no 107, il y aurait automatiquement un avis d'augmentation de loyer. Les propriétaires qui savent qu'en vertu des dépenses qu'ils ont faites ou de la hausse de l'impôt foncier, généralement, savent qu'à partir de cela ils peuvent prétendre à une augmentation de loyer, si vraiment ils veulent l'obtenir, à partir de ces deux faits entre autres. Si le propriétaire ne l'a pas fait, je présume qu'il n'a pas fait de réparation ou il n'y a pas eu d'augmentation d'impôt foncier. S'il n'a pas fait ces choses, s'il n'y a pas eu d'augmentation d'impôt, s'il n'a pas fait de réparation, en vertu du projet de loi no 107, en vertu du formulaire même qui n'est qu'hypothétique, il n'aurait pas plus le droit à une augmentation de loyer. Ce n'est pas automatique qu'à partir du moment où la loi 107 entre en vigueur ou qu'à partir du moment où ce formulaire, à supposer qu'il soit retenu, entre en vigueur que tous les propriétaires du Québec s'adresseront automatiquement à tous leurs locataires pour obtenir une augmentation. Cela varie d'un cas à l'autre.

L'avantage de la formule qui est proposée dans le projet de loi no 107, c'est que ce n'est pas une augmentation uniforme contrairement à l'Ontario, 6% pour tout le monde. C'est une augmentation qui varie d'un logement à l'autre selon la modification des charges financières qui pèsent sur le propriétaire au cours de l'année pour ce logement. Il se peut qu'il n'y ait pas d'augmentation du tout. Si je prends l'année qui vient et si un propriétaire n'a pas fait de réparation, ne fût-ce qu'à cause de la réforme de la fiscalité municipale, il se peut aussi que dans certaines municipalités on n'augmente tout simplement pas — bon an mal an, peu importe réforme ou pas réforme — la charge fiscale, l'impôt foncier. Dans ces logements il n'y aura pas d'augmentation permissible et je ne vois pas en vertu de quoi le projet de loi no 107, même avec un formulaire hypothétique comme celui-là, deviendrait un passeport à un chiffre aussi hypothétique que 100 000 ou 200 000 augmentations de loyer automatiques. Il ne m'apparaît y avoir absolument aucun rapport de cause à effet entre le fait de l'entrée en vigueur de cette loi et même de cet hypothétique formulaire et qu'au bout du compte des propriétaires qui n'avaient pas droit à une augmentation de loyer obtiendraient soudainement une augmentation de loyer. Ils n'y auront pas plus droit.

Si les 100 000 ou les 200 000 n'ont pas cherché à obtenir l'augmentation de loyer c'est peut-être qu'ils savaient au départ qu'ils n'y avaient pas droit. S'ils savaient au départ qu'ils n'y avaient pas droit, en vertu de quoi, en vertu de la nouvelle loi, ils s'imagineront tout d'un coup qu'ils y auront droit.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, je suis sensible aux arguments du député de Notre-Dame-de-Grâce, pas aux chiffres qu'il avance, mais au raisonnement et à l'effet, à la possibilité d'un effet secondaire non recherché du type qu'il décrit. J'aimerais cela, en temps et lieu, avoir des membres de cette commission des suggestions sur la façon d'obvier à cet effet secondaire que personne ne recherche. On veut empêcher les hausses abusives. On veut empêcher que le droit au logement soit un droit illusoire en permettant des augmentations que les gens ne peuvent pas supporter et qui équivalent à une expulsion ou une éviction. On dit: Très bien, faisons cela, mais sans provoquer, à l'autre extrémité, des augmentations qui n'auraient pas été demandées. Je suis tout à fait d'accord sur l'objectif poursuivi et toute suggestion, d'où qu'elle vienne en cette Chambre ou d'ailleurs pour parvenir à ce résultat, est bienvenue.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Merci, M. le Président. On a parlé durant quelques minutes beaucoup du prix des loyers de l'augmentation et tout cela. Je suis d'accord sur la plupart des arguments qui ont été évoqués de part et d'autre. Je pense qu'on est pas mal sur la même longueur d'onde.

Cependant, le député de Saint-Hyacinthe a attiré tout à l'heure l'attention du ministre sur d'autres questions que celle du prix, en particulier l'espèce de disproportion qui est faite entre les droits des locataires et les droits des propriétaires. On veut, par exemple, qu'à l'avenir, lorsque la loi sera adoptée, si le locateur veut augmenter son loyer et que le locataire refuse, ce soit au locateur de faire une demande en ce sens à la régie. On inverse le fardeau de la preuve comme il existait auparavant.

M. Tardif: M. le Président... M. Fontaine: Oui, allez-y.

M. Tardif: ... il faudrait corriger cela immédiatement.

M. Fontaine: C'est l'article 1658-6.

M. Tardif: De la part d'un membre avocat de cette commission, dire qu'on inverse le fardeau de la preuve...

M. Fontaine: 1658-6.

M. Tardif: M. le Président, je demande immédiatement de pouvoir corriger cela parce que, d'abord, le fardeau de la preuve a toujours incombé au propriétaire qui doit démontrer que l'augmentation qu'il voulait était justifiée. Il a toujours eu le fardeau de la preuve. Ce dont veut sans doute parler le député de Nicolet-Yamaska, c'est le fardeau de la démarche.

M. Fontaine: Oui. De la démarche.

M. Tardif: Ah bon! Déjà, c'est différent. M. le Président, je m'inscris en faux également contre cette interprétation parce que je pense qu'il faut plutôt parler d'un fardeau partagé entre les deux. Je pourrai en faire la démonstration plus tard. Mais l'autre, le fardeau de la preuve, cela aurait été vraiment un changement du tout au tout.

M. Fontaine: En tout cas, nous disons que la loi souligne souvent et avec raison les préjudices pouvant être causés au locataire. Toutefois, on passe assez souvent également sous silence cet élément lorsqu'il en est question pour le propriétaire. On parle également, de notre côté, d'une bureaucratie supplémentaire qui est apportée par cette loi. On dit, par exemple, qu'en première instance, la régie va rendre une décision, et si un litige survient, ce sera encore la régie qui pourra être partie intéressée à une cause, par exemple, en Cour supérieure. On note certains articles abusifs qu'on avait mentionnés au cours de la deuxième lecture. On note également la disparition du privilège du locateur. L'article 1637 du Code civil ne s'appliquerait plus au bail d'un logement. L'article 1637 disait: "Le locateur a, pour la garantie de ses droits, un privilège sur les effets mobiliers se trouvant sur les lieux et qui appartiennent au locataire."

M. Tardif: Je ne peux pas croire qu'on défende encore aujourd'hui la saisie avant jugement. Je ne peux pas croire qu'on entende une chose semblable; qu'on vienne défendre aujourd'hui, en 1979, la saisie avant jugement.

M. Fontaine: Pourquoi?

M. Tardif: Saisir les biens de quelqu'un avant qu'un jugement ait été rendu! Cela me renverse.

M. Fontaine: Cela existe toujours dans notre droit.

M. Tardif: Oui. On était le seul endroit en Amérique, je pense, où on avait encore cette antiquité dans le droit et on l'a fait sauter ici. C'est vrai.

M. Fontaine: Aujourd'hui, ceux qui sont propriétaires d'immeubles savent ce que c'est. Ils ont souvent affaires à des locataires qui sont assez difficiles à retracer à un moment donné.

M. Tardif: En tout cas, M. le Président...

M. Fontaine: Ceux qui pratiquent couramment dans ce domaine le savent. C'est un domaine auquel les locateurs ont à faire face tous les jours...

M. Tardif: M. le Président, des recours...

M. Fontaine: ... et enlever cet article, nous prétendons que c'est reculer plutôt qu'avancer. On en a également, M. le Président, contre le coût et la taille de la régie. On ne sait pas encore combien coûtera cet appareil bureaucratique. On ne sait plus quelle sera la taille de ce nouvel appareil bureaucratique, car la loi ne fait qu'indiquer qu'il y aura des régisseurs en nombre suffisant. On en a discuté également en deuxième lecture et on aura l'occasion d'y revenir tout à l'heure. La régie peut imposer des conditions qu'elle estime justes et raisonnables. Quels sont les critères pour déterminer si une condition est juste et raisonnable? Ce n'est pas défini et je ne pense pas qu'on le définisse non plus dans les règlements. M. le Président, ce sur quoi on veut attirer l'attention du ministre, ce sont ces deux points; l'augmentation de l'appareil bureaucratique et la disproportion qui peut exister à un moment donné entre les droits des propriétaires et les droits des locataires.

M. Tardif: M. le Président, je pense qu'on va appeler l'article 1. L'intervention du député de Nicolet-Yamaska, en dehors de cette question de

la saisie avant jugement, qui est avantageusement, je pense, remplacée par le recours qu'auront dorénavant les petits propriétaires devant la Cour des petites créances pour tout ce qui touche le logement est, je pense, une procédure beaucoup plus équitable que celle de la saisie avant jugement qui, encore une fois, est un vestige d'une autre époque en ce qui me concerne.

M. Fontaine: C'est bien beau d'avoir un jugement, mais quand on ne trouve plus le débiteur, c'est difficile à exécuter. (12 h 15)

M. Guay: Le député de Nicolet pourrait peut-être proposer l'emprisonnement pour dette, quant à faire!

M. Fontaine: Non, mais la saisie avant jugement était une procédure qui permettait de conserver les droits.

M. Tardif: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 1.

Le Président (M. Laplante): Projet de loi 107, titre 1, la Régie du logement. Chapitre I, application. J'apelle l'article 1. M. le ministre.

Etude du projet de loi

Régie du logement

Application

M. Tardif: Cet article complète la définition du mot "logement" telle qu'utilisée dans le Code civil. Il la complète en ce sens que pour les fins des articles 32 et suivants, reliés à la conservation du stock de logements, cette définition doit inclure non seulement un logement qui est occupé, mais bien un logement qui est offert en location ou qui est devenu vacant après location sans quoi, évidemment, dès qu'un logement devient vacant, s'il perdait cette qualité d'être un logement, on pourrait donc en faire ce qu'on veut et le démolir, contrairement aux articles qui sont prévus.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, avez-vous des commentaires sur l'article 1?

M. Scowen: En ce qui concerne le premier article, à moins que mes collègues aient un mot à dire là-dessus, je pense que ça ira. L'exemption pour les cinq ans est prévue dans les articles?

M. Tardif: Oui.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe, avez-vous des commentaires?

M. Cordeau: Non, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Habituellement, lorsqu'un projet de loi établit de nouvelles règles, assez souvent et presque toujours une série de définitions nous est donnée soit à l'article 1 ou à l'article 2. J'aimerais que le ministre nous dise pourquoi on ne nous donne pas certaines définitions. Par exemple, la définition d'un corps public, la définition d'un conciliateur. On retrouve ce terme à plusieurs reprises dans la loi et il n'est pas défini. A l'article 140, je pense, on dit qu'il va y avoir un ministre désigné pour le titre 1 ; dans la première version, on disait quel serait le ministre désigné alors qu'ici on ne le donne pas. Est-ce que ce sera le ministre des Affaires municipales, est-ce que ce sera le ministre de la Justice? Est-ce qu'il y aura juridiction partagée entre les deux? Le ministre pourrait-il nous dire pourquoi on ne donne pas de telles définitions?

M. Tardif: Partout où la définition ne paraît pas dans la loi, c'est qu'elle a le sens que lui donne le petit dictionnaire. Un conciliateur, dans le petit dictionnaire, est une personne qui cherche à amener les parties à s'entendre. Il ne faudrait quand même pas qu'on répète dans les textes de loi la définition de tous les mots utilisés. Donc, dès lors que c'est le sens qu'on retrouve au dictionnaire, aucun problème.

Quant à l'autre expression, le ministre des Affaires municipales ou le ministre désigné par le gouvernement, justement, une révision de la loi en question nous a appris que cette loi était passée d'un ministère à l'autre, à un moment donné, et il nous a semblé préférable d'adopter cette formulation en laissant le Cabinet désigner le ministre titulaire de cette loi. Ce sera le ministre des Affaires municipales ou ce sera quelqu'un d'autre.

M. Fontaine: Pouvez-vous nous dire, dans l'intention immédiate du gouvernement après l'adoption de cette loi, qui sera le ministre désigné?

M. Tardif: Je n'ai aucune précision à apporter à ce sujet-là. Pour autant que je sache, cela continue à être le ministre des Affaires municipales.

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Normalement, quand on voit, au premier article d'un projet de loi, une définition du mot "ministre", qui est généralement fort simple — le ministre désigné en vertu de l'article untel pour être responsable de l'application de la loi — c'est parce qu'à divers articles on lit: Le ministre pose tel geste. En l'absence d'une telle définition, pouvons-nous, de l'avis du greffier en loi, conclure à chaque endroit où on lit: Le ministre pose tel geste, que c'est implicite, que c'est le ministre désigné en vertu de l'article en question?

M. Tardif: De l'avis des légistes du gouvernement, oui, M. le Président.

M. Goldbloom: D'accord.

Le Président (M. Laplante): L'article 1 est-il adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 2.

M. Tardif: L'article 2, M. le Président, vient également compléter la définition du mot "logement" pour les fins de cette loi, puisqu'elle étend ceci évidemment au terrain destiné à l'installation d'une maison mobile et ceci, afin d'éviter des renvois compliqués et artificiels pour les articles qu'on verra plus loin. On le précise.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: M. le Président, le ministre pourrait-il m'expliquer pourquoi cet article est nécessaire quand, dans l'article 1650.3, il est clairement dit que les articles 1650 et suivants s'appliquent également, en faisant les adaptations requises au bail d'un terrain destiné à l'installation d'une maison mobile et que l'article 1, chapitre I dit que cet article est là-dedans? Est-ce parce qu'on termine à l'article 2? Pourquoi ne dit-on pas à l'article 1 : "un logement visé dans les articles 1650 et 1650.3", en laissant tomber l'article 2? Il me semble que c'est une duplication.

M. Tardif: M. le Président, on m'informe que l'effort que souligne le député de Notre-Dame-de-Grâce a été tenté pour en venir à une seule formulation, mais c'était finalement préférable de procéder de cette façon. C'était plus simple. Il y a eu trois ou quatre versions d'essayées, pour le dire justement dans le même paragraphe et, finalement, ce ne serait ni élégant ni pratique.

M. Scowen: Pour les profanes, il me semble que ma suggestion de changer simplement l'article 1, de dire "dans les articles 1650 à 1650.3" est plus simple et plus claire. Est-ce que j'ose demander le raisonnement derrière l'autre solution?

M. Tardif: M. le Président, justement, j'ai ici en parallèle la première version de l'article 1 du projet de loi 107 qui était rédigée exactement comme le souligne le député de Notre-Dame-de-Grâce. Il y a eu des groupes qui, en commission parlementaire, sont venus nous dire que ce n'était pas évident du tout que c'était couvert de cette façon. Puisqu'il y avait, dans l'esprit des gens qui s'y étaient penchés avec leurs avocats, des doutes, à plus forte raison pensions-nous qu'il pourrait y en avoir auprès de gens qui parcourraient la loi. Ce n'est pas...

M. Scowen: Je m'excuse, mais ce n'est pas clair pour moi que, simplement parce que quelqu'un dans un mémoire a suggéré un change- ment, on doive l'accepter. Si oui... Mais votre conseiller croit-il que mon raisonnement est faux? Je pense que...

M. Tardif: A la limite, M. le Président, je pense que le raisonnement du député de Notre-Dame-de-Grâce est juste. Effectivement, il serait possible techniquement de rédiger un tel article qui comprenne les deux. On dit...

M. Scowen: Avec le changement d'un seul chiffre.

M. Tardif: Cela nous amène à dire, M. le Président, si on prend l'ancienne formulation que j'ai devant moi qui se lisait comme suit: "Pour l'application du présent titre, on entend par logement un logement visé dans les articles 1650 à 1650.3 du Code civil qui est loué, offert en location ou qui est devenu vacant après une location". Or, ceci venait à dire carrément qu'un terrain de maison mobile, c'est un logement, alors que la formulation en le séparant, en disant que le présent titre s'applique également, en faisant les adaptations requises à un terrain loué, on dit que ces dispositions s'appliquent, mais cela n'en constitue pas un logement pour autant.

M. Scowen: Finalement, j'ai fini par comprendre. Je vous remercie.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Je crois que c'est l'Association des commerçants de maisons mobiles qui avait fait cette demande.

Le Président (M. Laplante): L'article 2 est-il adopté?

M. Goldbloom: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: ... un très bref commentaire que j'ai déjà fait en d'autres occasions. Le gouvernement s'est imposé un programme de francisation. Ce programme fait disparaître de bonnes vieilles expressions comme "mutatis mutandis", sauf que le programme de francisation n'est pas uniforme. Les rédacteurs des projets de loi ne semblent pas s'entendre sur l'expression française à utiliser. Dans certains cas, c'est "en l'adaptant". Dans d'autres cas, c'est "en faisant les adaptations requises". Je voudrais simplement inciter le gouvernement à plus d'uniformité dans son programme de francisation.

Le Président (M. Laplante): L'article 2 est-il adopté?

M. Tardif: Les légistes en ont pris note.

Le Président (M. Laplante): Adopté? J'appelle l'article 3.

M. Tardif: L'article 3, M. le Président, est clair. Il vise à éviter toute polémique qui pourrait être soulevée à savoir si la Couronne est liée ou pas par cette loi. Alors, le gouvernement s'y soumet volontiers et il le dit carrément.

Le Président (M. Laplante): L'article 3 est-il adopté?

M. Scowen: J'ai seulement une petite question.

Le Président (M. Laplante): Oui.

M. Scowen: Qui n'est pas lié par les lois? Je présume que le fédéral, avec les habitations que vous leur avez demandé de retenir au moins sur une base temporaire, n'est pas lié. Est-ce vrai?

M. Tardif: Non, M. le Président. Les augmentations dans des immeubles, peu importe qui en est le propriétaire, sont soumises au contrôle de la régie y compris des immeubles...

M. Scowen: ... du Québec.

M. Tardif: On me souligne qu'effectivement, constitutionnellement, le problème pourrait être soulevé, mais dans le cas des logements— et cela représente le gros des logements appartenant à une agence fédérale, les reprises de possession, par exemple, de la Société centre d'hypothèques et de logement, qui étaient au nombre d'une vingtaine de mille au Québec — ils acceptent volontiers la juridiction de la régie en la matière. Ils ne la contestent pas sur le plan constitutionnel.

M. Scowen: Oui, oui. Je me posais la question aussi. En effet, c'est une question juridique. Il est lié. Cela reste une question, mais ils ont accepté de ne pas poser la question, si vous voulez.

M. Tardif: Jusqu'à maintenant, cela n'a jamais été soulevé.

M. Scowen: Y a-t-il d'autres logements, qui appartiennent aux autres instances, qui ne sont pas liés? Est-ce que les coopératives, les...

M. Tardif: Les coopératives tombent sous le coup de cette loi. Il y a des modalités particulières, évidemment, selon qu'on est membre ou non de la coopérative comme telle.

M. Scowen: Les logements qui appartiennent, par exemple, à des sociétés dans les villages, dans le Grand Nord, etc. sauf avec l'exception qui est indiquée, ils sont liés...

M. Tardif: C'est cela, sauf s'il s'agit de logements publics dits HLM, auquel cas la méthode de fixation de loyer n'est pas la même.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Concernant les coopératives, M. le Président, est-ce qu'un individu qui loue un logement d'une coopérative, qui est membre lui aussi de la coopérative, bien sûr, peut aller devant la régie s'il trouve que l'augmentation de son loyer est exagérée et s'il trouve que la direction de la coopérative abuse?

M. Tardif: M. le Président, ceci est couvert par l'article 1658.21, où on dit que les articles 1658.6 à 1658.20, c'est-à-dire ceux relatifs à la fixation du loyer, paragraphe 2, ne s'appliquent pas au bail d'un logement loué par une coopérative d'habitation à l'un de ses membres. Dans le cas d'un membre d'une coopérative, étant en quelque sorte copropriétaire, à titre de sociétaire membre de la coopérative, c'est au sein de cet organisme que doit se déterminer le montant du loyer que les sociétaires s'imposent, en quelque sorte. (12 h 30)

M. Cordeau: Nous reviendrons sur le sujet à cet article-là.

M. Tardif: D'accord.

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais faire un commentaire qui pourrait paraître étrange dans ma bouche. C'est un article qui paraît bien. Le gouvernement dit, en quelque sorte, que l'Etat n'est pas au-dessus de la loi, que le gouvernement respectera la loi, ce qui pourrait être perçu comme une vérité de La Palice, mais qui a quand même sa raison d'être sur le plan juridique. Je reconnais cela. Dans le cas qui nous préoccupe ici, je ne vois pas de mal à ce que cet article paraisse dans la loi. Le gouvernement, et notamment ses mandataires et organismes, n'établiront pas leurs échelles de loyer indépendamment des règles qui devront être suivies par tous les autres. Mais il y a, je pense, M. le Président, une mise en garde à faire parce que le gouvernement actuel est en train — parce que c'est une innovation — d'établir un précédent, une tradition que, dans autant de lois que possible, le citoyen pourra lire "la présente loi lie le gouvernement et ses ministères, ses organismes et mandataires".

Il ne faudra pas, M. le Président — et je l'ai dit au sujet du projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme — que le gouvernement, par de tels articles dans toutes les lois, sacrifie son pouvoir de gouverner, et c'est important, M. le Président. Il y a des situations où le gouvernement, en se liant, peut permettre à d'autres, qui n'ont pas le même mandat, qui ne sont pas élus pour exercer le même mandat, de prendre une série de décisions qui reviennent de droit au gouvernement. C'est une mise en garde que je voulais exprimer. Je me sens obligé de le faire par une question de principe d'autorité dans une société comme la nôtre.

Le Président (M. Laplante): L'article 3 sera-t-il adopté avant... Je vais suspendre, si vous ne l'adoptez pas, jusqu'à 14 heures. Les travaux sont...

M. Guay: Si vous me le permettez...

Le Président (M. Laplante): ... suspendus jusqu'à 14 heures.

Suspension de la séance à 12 h 33

Reprise de la séance à 14 h 10

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît!

Reprise des travaux de la commission des affaires municipales pour l'étude article par article du projet de loi no 107, Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives.

A la suspension des travaux, nous en étions à l'article 3 et la parole était au député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Est-ce que nous avons quorum, M. le Président?

Le Président (M. Laplante): Oui, nous avons quorum, monsieur.

M. Fontaine: Je vous ferais remarquer qu'il n'y a que deux députés du...

Le Président (M. Laplante): Vous savez bien que le président, n'aurait pas ouvert l'assemblée s'il n'y avait pas eu quorum.

M. Fontaine: Je voulais tout simplement faire remarquer qu'il n'y a que deux députés ministériels de l'autre côté des banquettes.

Le Président (M. Laplante): Suivant les règlements, monsieur, vous m'avez demandé s'il y avait quorum. Je vous ai répondu que oui. Le quorum est de six et nous sommes sept.

M. Fontaine: Merci, M. le Président. Si nous prenions un vote immédiatement, je pense que ça...

Le Président (M. Laplante): C'est à vous de décider, monsieur.

M. Goldbloom: Nous demandons un vote enregistré, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Le président votera, à ce moment-là. Article 3.

M. Fontaine: Pas de problème?

Le Président (M. Laplante): Pas de problème.

M. Fontaine: On va voter. S'il n'y a pas de problème, on va voter.

Une Voix: Voter sur quoi?

Le Président (M. Laplante): Sur quoi voulez-vous voter?

M. Fontaine: Sur l'article 3.

Le Président (M. Laplante): Oui? J'appelle le vote sur l'article 3, d'accord? Etes-vous consentants à voter?

M. Goldbloom: Ah oui!

M. Caron: J'aimerais bien savoir sur quoi je vais voter...

M. Fontaine: M. le Président, j'aurais quelques commentaires à fournir.

Le Président (M. Laplante): Bon, là, vous revenez au sérieux? D'accord. Article 3, messieurs.

M. Fontaine: Je voudrais attirer l'attention du ministre sur le mot "organismes". On mentionne à l'article 3 que "la présente loi lie le gouvernement, ses ministres, ses organismes et mandataires." Le mot "organismes" n'est pas tout à fait défini. On ne sait pas trop exactement de quoi il s'agit. Des organismes du gouvernement peuvent être bien différents, que ce soit tel ou tel organisme, il y a des différences entre chacun des organismes.

Dans d'autres lois, on voit que le mot "organisme" est défini. On a eu l'exemple de la loi 90, je pense, la Loi sur la protection du territoire agricole, où il y avait une définition des mots "organisme public". Je pense que la même définition, ou à peu près la même chose, est reprise dans la loi no 125. Egalement, il y a eu, dans les mémoires qui ont été présentés, une recommandation du Barreau de définir plus spécifiquement les mots "organisme public", afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté et d'être bien sûr que tel ou tel organisme est lié par la loi que le gouvernement veut adopter.

Le Barreau suggérait de reprendre la définition qui nous était donnée dans la loi 90, qui se lit comme suit: "Organisme public: une corporation scolaire ou un organisme dont le gouvernement ou un ministre nomme la majorité des membres, dont la loi ordonne que le personnel soit nommé et rémunéré suivant la Loi de la fonction publique (1965,1ère session, chapitre 14) ou dont le capital-actions provient, pour plus de la moitié, du fonds consolidé du revenu."

Je pense que cette définition est assez claire et nous dit exactement ce qu'est un organisme qui doit être considéré comme public. Je suggère bien humblement au ministre des Affaires municipales

qu'il devrait songer à définir les mots "organisme public", pour qu'on sache bien de quoi il s'agit.

M. Tardif: M. le Président, je comprendrais l'objection du député de Nicolet-Yamaska si — non, mais enfin, le sens de son intervention — cette loi avait, je dirais, un caractère d'exception et ne lierait que certains organismes et non pas d'autres. Mais, au départ, il faut bien se mettre dans la tête que l'univers visé par la loi, c'est l'univers total des immeubles offerts en location permanente au Québec, aussi bien appartenant au secteur privé, coopératif, que ceux appartenant à des commissions scolaires, à des municipalités, à une régie d'Etat.

J'ai en mémoire le cas des immeubles de la rue Ontario qui appartenaient à la Régie des loteries et courses du Québec, lorsqu'elle a acquis le quadrilatère au coin d'Ontario et de Saint-Denis, par exemple, et dont les immeubles tombaient sous la compétence de la régie. Dans ce cas-là, évidemment, le mot "organisme" est au sens le plus large du terme. Et si ce ne sont pas des organismes gouvernementaux, ce seraient des organismes pa-ragouvernementaux ou privés qui sont, de toute façon, astreints à cette loi. C'est pour ça que ça ne m'apparaît pas tellement important ici de le préciser dans ce sens, mais je pourrai vérifier tantôt avec les légistes de la régie là-dessus.

M. Fontaine: Je comprends. Ce que vous dites, c'est que ce soit un organisme gouvernemental ou que ce soit un organisme privé, de toute façon, la loi s'y applique.

M. Tardif: De toute façon, la loi s'y applique. M. Fontaine: D'accord, j'accepte... M. Goldbloom: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: ... j'aimerais revenir brièvement à ce que j'ai soulevé avant la suspension. J'ai réfléchi au projet de loi no 125, dont le ministre des Affaires municipales sera le responsable qui contiendra un article identique, je pense, à savoir que "la présente loi lie le gouvernement, ses ministères, ses organismes et mandataires..." Il y a pourtant dans l'autre loi, celle sur l'aménagement et l'urbanisme, une série d'articles qui ont pour effet d'enlever cette liaison, de faire en sorte que le gouvernement n'est vraiment pas lié du tout. Le ministre d'Etat à l'aménagement, en cherchant à expliquer pourquoi la loi avait été construite et rédigée de cette façon, a dit — je ne voudrais pas mal le citer ou caricaturer ses mots; j'essaie d'être aussi fidèle que possible — "nous établissons le principe que le gouvernement est lié mais, dans les faits quotidiens de l'administration publique, il faut que le gouvernement puisse aller à rencontre de certaines décisions prises au niveau local ou régional".

Ma réaction a été: Mais, dans ce cas, pourquoi inscrire dans une loi un article qui est presque fictif, parce que, dans les faits, le gouvernement n'est pas lié; il se donne, de façon très explicite, le pouvoir de passer outre aux décisions qui seraient prises, en vertu de cette même loi, par d'autres instances? La réponse a toujours été: Nous établissons un principe. Mais c'est sur ce principe que j'insiste, M. le Président. Dans un cas comme celui que nous avons devant les yeux, il convient plus facilement de déclarer que le gouvernement est lié, c'est-à-dire que le gouvernement va se comporter en bon citoyen. Et surtout dans ce cas-ci, ce sont des organismes et les mandataires qui risquent d'être, à un titre ou à un autre, propriétaires ou locataires, et intéressés par l'application de cette loi. Mais quand il s'agit de l'aménagement du territoire — je ne veux pas refaire l'argumentation, M. le Président, je fais la comparaison pour souligner le point qui me paraît assez fondamental — quand il s'agit de la prise de décisions qui affectent l'ensemble des citoyens, pour ma part, je trouve plus logique que le gouvernement se donne le pouvoir de passer outre, quand il faut que le gouvernement assume ses responsabilités au nom de la collectivité québécoise, que de prendre l'habitude de dire, un peu partout dans les lois du Québec: La présente loi lie le gouvernement, ses ministères, ses organismes et mandataires...

Je pense, M. le Président, que si nous sommes pour prendre l'habitude d'écrire de tels articles, il faudra que ces articles veuillent dire, dans les faits, exactement cela, que le gouvernement est effectivement lié, ce qui n'est pas le cas dans l'autre loi. Ce n'est que l'établissement d'un principe. L'obligation est imposée au gouvernement, s'il veut passer outre à des décisions locales ou régionales, de le faire devant tout le monde par un processus qui permet à l'opinion publique de prendre connaissance du fait que le gouvernement est en train de passer outre à ce qui a été décidé localement, tout en invoquant l'autonomie municipale, la démocratie et tout ce que vous voudrez.

Donc, M. le Président, je réitère la mise en garde que je sens assez profondément. Un gouvernement est élu pour un mandat qui a une durée qu'il détermine lui-même ou que le premier ministre détermine, jusqu'à un maximum de cinq ans; mais, à la fin de ce mandat, il faut que la population se prononce sur la façon dont ce gouvernement, cette formation politique s'est acquittée de sa tâche.

Mais, entre-temps, le mandat est là et le gouvernement est élu pour gouverner. M. le Président, je ne veux pas m'éterniser là-dessus mais je trouve le principe assez important.

M. Tardif: M. le Président, je prends bonne note des remarques du député de D'Arcy McGee. Même si je n'étais pas là lors de l'étude de la loi 125 en commission, des échos m'en sont parvenus jusqu'aux...

M. Goldbloom: Répétés...

M. Tardif: ... confins du continent, en Alaska et au Yukon, sous le soleil de minuit. M. le Président, je comprendrais les remarques du député si nous discutions d'un article comportant précisément des exceptions. Mais, il n'y en a pas. Ce n'est pas le cas ici. C'est l'article qui établit le principe, et je pense que le député de D'Arcy McGee conviendra avec moi que le problème n'est pas tout à fait le même. Lorsque, par exemple, après avoir, dans une région, dans un schéma d'aménagement, déterminé que telle zone devait être utilisée à telles fins et que, par exemple — imaginons-le — une décision est prise de construire un barrage hydroélectrique ou de favoriser un investissement de plusieurs centaines de millions qui peuvent avoir un impact sur l'économie, un schéma d'aménagement, c'est quelque chose qui pourrait être modifié, disons, pour le bien commun.

Dans ce cas-ci, M. le Président, il n'est pas prévu d'exceptions à cette règle qui veut tout simplement qu'en matière d'augmentation de loyer, de prolongation de bail, les édifices ou les logements, qu'ils appartiennent au gouvernement ou à un de ses organismes, soient soumis aux mêmes règles.

M. Goldbloom: M. le Président, chaque loi qu'adopte l'Assemblée nationale s'inscrit dans une continuité législative et il faut penser non seulement à la concordance entre les lois qui sont adoptées successivement, mais aussi à une certaine suite dans les idées et à la création de certains précédents. Je me serais reproché d'avoir laissé passer un autre article de cette nature, tout innocent qu'il soit dans cette loi, tout convenable qu'il soit dans cette loi, et je l'accepte, sans faire de commentaire général.

M. Tardif: Merci.

M. Guay: Je comprends que le député de D'Arcy McGee, au nom de sa formation politique, se trouve à s'inscrire en faux contre — je comprends peut-être mal — le fait que le gouvernement se soumette aux lois, ne soit pas au-dessus des lois et qu'il puisse y avoir un contrôle judiciaire des actes de l'exécutif et du législatif quant à...

M. Goldbloom: M. le Président, le député de Taschereau lira le journal des Débats pour les quelques minutes qu'il a rnanquées au début de cette partie de notre travail et il constatera que tel n'est pas du tout le cas.

M. Guay: J'en suis fort heureux, parce que j'ai entendu la fin de l'argumentation du député de D'Arcy McGee et, tout comme son argumentation en fin de matinée ce matin, je la trouvais singulièrement inquiétante, mais je lirai le reste.

Le Président (M. Laplante): Article 3, adopté?

Des Voix: Adopté.

M. Goldbloom: II n'y a rien à faire?

Le Président (M. Laplante): Adopté. Chapitre II, constitution et fonction de la régie. J'appelle l'article 4. M. le ministre?

Constitution et fonctions de la régie

M. Tardif: M. le Président, je n'ai pas de commentaire, autre que de rappeler que cette Régie du logement, qui est instituée par cette loi, remplace l'actuelle Régie des loyers.

Le Président (M. Laplante): Des commentaires, M. le député de Verdun?

M. Caron: M. le Président, je comprends que le ministre n'a pas de commentaire, mais l'organisme actuel qui est structuré, est-ce qu'il va automatiquement être éliminé complètement ou si c'est trop vite pour lui demander ça?

M. Tardif: La régie, telle qu'elle est présentement constituée, elle est formée d'un président, de deux vice-présidents — je l'ai mentionné ce matin — de quatorze commissaires, si ma mémoire est bonne, et d'à peu près 70 administrateurs, commissaires et administrateurs étant presque totalement des gens qui exercent leur profession normalement et qui siègent à la séance, à la commission et, d'autre part, de personnes qui font maintenant partie de la Fonction publique, c'est-à-dire à peu près 300 fonctionnaires. C'est bien évident que le personnel de cette régie conserve ses privilèges et ses droits dans la Fonction publique. Quant au personnel non permanent, ce sont les nouvelles règles que nous verrons dans les articles à venir qui s'appliqueront quant à leur fonction, à leur sélection et à leur détermination.

M. Cordeau: M. le Président, est-ce qu'on peut continuer sur le même sujet? On reviendra...

M. Tardif: Si on veut.

M. Cordeau: Parmi les administrateurs, est-ce qu'il y a des administrateurs qui ont leur permanence dans la Fonction publique?

M. Tardif: II y a présentement deux ou trois administrateurs permanents. Il y en a deux qui sont permanents.

M. Cordeau: Deux qui ont leur permanence, sur les 70 dont vous avez fait mention ce matin.

M. Tardif: Je m'excuse du renseignement. Ce sont chez les commissaires qu'il y a deux permanents, les commissaires étant ceux qui entendent les causes en appel, alors que chez les administrateurs, ce sont tous des gens travaillant à la séance.

M. Cordeau: Tous à la séance? Il me semblait que chez nous... A Saint-Hyacinthe, il y a un administrateur et il me semble qu'il est permanent.

M. Tardif: On me dit que parmi les 300 fonctionnaires de la régie...

M. Cordeau: Oui.

M. Tardif:... qui sont distincts, eux, des administrateurs nommés par arrêté en conseil, quelques-uns parmi eux — cinq ou six — peuvent entendre des causes, mais, à ce moment-là, eux, ce sont des fonctionnaires permanents. Ils entrent dans ces 300 permanents.

M. Cordeau: Actuellement, ils agissent comme administrateurs dans le bureau où ils se trouvent.

M. Tardif: Ils peuvent entendre des causes.

M. Fontaine: D'après l'explication que le ministre nous a donnée, sans nous l'avoir dit clairement, est-ce que ça veut dire que les personnes qui sont nommées ad hoc vont plus ou moins devoir se trouver un autre emploi lorsque la loi sera adoptée?

M. Tardif: C'est-à-dire que toutes ces personnes exercent présentement un autre emploi et siègent peut-être un après-midi par semaine à entendre des causes. Si on entend par là qu'elles n'assumeront plus ces fonctions, la réponse, c'est oui. Il est prévu des régisseurs permanents, ce qui n'empêchera pas ces personnes de postuler un poste de régisseur permanent.

M. Fontaine: D'accord.

M. Cordeau: Est-ce qu'un administrateur actuellement, qui est permanent, c'est-à-dire dans la Fonction publique, pourra postuler un poste de régisseur, s'il est déjà en fonction et qu'il entend les causes? Il agit presque comme régisseur actuellement. (14 h 30)

M. Tardif: Oui. La procédure d'embauche et de sélection qui fera l'objet d'une réglementation se voudra aussi large que possible, de façon à intéresser aussi bien les personnes à l'extérieur que celles qui sont déjà à l'emploi du gouvernement — je pense aux corps des personnes travaillant au ministère de la Justice comme substituts du procureur ou pour l'aide juridique — qui pourraient être intéressées par ce genre de fonction. Alors, c'est notre intention de l'ouvrir le plus largement possible.

M. Cordeau: Advenant le cas où un administrateur actuel qui a sa permanence solliciterait le poste de régisseur et qu'il l'obtiendrait — je crois qu'un régisseur va être nommé pour cinq ans, d'après le texte de loi — après son mandat, va-t-il revenir à la fonction publique?

M. Tardif: Normalement la procédure pour garantir l'impartialité des personnes assumant une fonction quasi judiciaire, c'est celle de leur assurer une certaine inamovibilité pendant une période de temps et, pour les quelques commissaires, je pense que déjà la formule du congé sans solde de leur employeur, pour ces fins, a été utilisée.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Verdun.

M. Caron: M. le ministre, avez-vous l'intention de garder en place le président et le vice-président qui sont là actuellement ou est-ce trop vite pour le dire?

M. Tardif: Ce n'est pas le genre de décision qui est arrêtée au moment où nous nous parlons. Vous avez ici, devant vous, les deux vice-présidents, la vice-présidente, Mme Robert ou Me Robert et M. Chapdelaine. Quant à la question de la présidence, ça reste une chose à discuter entre le président et moi, quant à ce qui pourrait survenir, mais je ne suis pas en mesure maintenant de commenter ceci.

M. Caron: Si je vous ai posé la question, c'est que le président est un très bon contribuable de Verdun.

M. Tardif: II pourra demeurer un très bon contribuable de Verdun quand même!

Le Président (M. Laplante): Y a-t-il d'autres questions sur l'article 4? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je pense...

M. Tardif: Je comprendrais la question du député s'il était question de déménager le siège social de la régie, mais il n'en est pas question.

M. Caron: Dans notre future zone qui va être commercialisée, on pourrait bâtir ça là.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: M. le Président, je pense que, dans l'article 4, nous sommes devant la question importante à savoir si oui ou non on doit avoir une régie. C'est un point clef et je pense qu'il vaut la peine d'y réfléchir un peu, parce que c'est un moment important.

En gros, je serais porté à croire que oui, en ce cas, une régie s'impose. Je suis persuadé, quand même, que la période de gouvernement du Parti québécois sera reconnue par les historiens comme la période de "régimanie", parce qu'il me semble que, du moins depuis mon arrivée à l'Assemblée nationale, il n'y a pas une seule semaine qui se soit passée sans que nous ayons entendu parler d'une nouvelle régie pour réglementer et administrer davantage la vie des Québécois. Par hasard, j'ai lu quelque chose, récemment, qui peut expliquer ce phénomène et qui pourrait même être un avertissement pour nous en ce qui concerne notre gouvernement fédéral. La personne qui avait étudié les gouvernements de l'Europe de l'Ouest et de l'Amérique du Nord a constaté que, normalement, les régies apparaissent quand les ministres se trouvent devant des restrictions budgétaires assez fortes. Quand des projets d'expansion

de grande envergure, soit la baie James, soit la réforme importante des systèmes sociaux ou de santé ne sont plus possibles à cause d'un ministre des Finances qui est conservateur, les ministres sont obligés de démontrer une espèce d'activité, devant le public, d'une façon ou de l'autre, et la route normale c'est de réglementer et de créer des régies.

C'est ce qui explique en partie la situation générale qu'on trouve, ici, au Québec, depuis deux ou trois ans. Ma seule peur c'est qu'avec les restrictions budgétaires qu'on a vues récemment à Ottawa — avec 30 ministres conservateurs qui n'ont rien à faire — que nous pouvons prévoir une période de "régimanie" de leur côté aussi. J'espère que non; mais dans ce cas-ci, je pense que la régie est quelque chose de moins mauvais qu'autre chose, pourvu que, dans les articles qui suivent, le ministre puisse accepter certains amendements que nous allons proposer pour essayer de démêler un peu le problème très difficile, que j'ai souligné, lors du débat en deuxième lecture, notamment la question des responsabilités, fonctions et activités très différentes, même contradictoires de temps en temps, de ce seul organisme.

Nous aurons des suggestions à faire dans les articles qui suivent et je suis confiant que le ministre puisse accepter ces changements.

Le principe de la régie est acceptable pour nous, mais je ne veux pas passer à l'article 5 avant d'avoir souligné brièvement quelques commentaires que j'ai faits ce matin, au sujet du rôle du gouvernement dans le secteur du logement, commentaires qui ont été légèrement critiqués dans les commentaires de notre collègue, le député de Taschereau.

J'ai dit, au début ce matin, que le Parti libéral, son chef, ses députés et leurs partisans sont fortement attachés au marché privé, à la libre entreprise dans le domaine de l'habitation. Le député de Taschereau a essayé de dire que c'était quelque chose de négatif, qui jouait contre une grande partie de la population et en faveur d'un petit groupe de propriétaires, de capitalistes, etc. Il a généralisé un peu ses commentaires et...

M. Guay: Je n'ai jamais dit ça!

M. Scowen: II a de plus parlé des personnes démunies qu'il fallait protéger contre les abus des locataires.

Simplement pour élargir un peu ce que j'ai dit ce matin, je vais dire que, d'abord de notre côté, nous sommes convaincus qu'il existe des locataires démunis et des locataires exploiteurs, comme il existe des propriétaires démunis et des propriétaires exploiteurs; il y en a des deux côtés. Au départ, nous n'avons aucun préjugé en faveur des uns ou des autres.

Nous sommes convaincus que le marché libre a joué et continue de jouer en faveur des deux et, de plus, nous sommes convaincus que la grande majorité des Québécois...

Le Président (M. Laplante): M. le député de

Notre-Dame-de-Grâce, il faudrait aller à l'article 4, s'il vous plaît!

M. Scowen: Oui, je vous remercie, M. le Président, mais j'insiste sur le fait que quand on parle du principe d'établir une nouvelle régie au Québec, on a le droit de parler des principes qui sont à la base de la création de cette régie et je veux continuer jusqu'au bout de mes pensées; je pense que c'est fondamental.

Le Président (M. Laplante): C'est sur la clôture!

M. Scowen: On est devant un projet de loi important et un article qui propose la création d'une régie...

Le Président (M. Laplante): C'est que je sais que, dans d'autres articles, vous allez pouvoir déballer amplement tout ce que vous avez actuellement sur la restriction du locateur, du locataire...

M. Scowen: Avec tout le respect du monde, M. le Président, vous m'avez proposé ce matin d'attendre un article et vous m'avez promis — si je me rappelle bien — amplement de temps — je pense que je vous cite, on peut le rechercher au journal des Débats — pour m'expliquer. Je me trouve au bon endroit, parce que c'est le principe même de création d'une régie, et, à moins que je ne me trompe, c'est plus ou moins fondamental.

Le Président (M. Laplante): Pour les fins du journal des Débats, ce matin, c'était sur un sujet très précis, et les membres de cette commission vous ont accordé cette permission.

M. Scowen: Est-ce que vous trouvez qu'en parlant de la question de créer une régie je suis...

Le Président (M. Laplante): Absolument pas, c'est parce que vous étiez complètement sorti du sujet. Ce que je veux vous rappeler très poliment, avec des gants de velours, si vous le voulez, c'est de revenir à l'article 4.

M. Scowen: Oui. Si on doit avoir cette régie — je vais terminer mes brefs commentaires sur le principe d'une régie; je pense que c'est très important pour la question de l'article 4 — aujourd'hui, j'ai trouvé dans le Soleil quelques pages de la liste des appartements à louer, ici, à Québec. Je suis persuadé que la grande majorité des locataires du Québec sont très contents qu'il existe un marché libre, d'avoir le droit de fouiller un peu, de parler avec le locateur de cet appartement, avec vue magnifique à Courville, qui fait concurrence à celui qui, à Courville, a un balcon et des portes donnant sur un patio, etc., de les jouer un contre l'autre, de faire l'offre et les demandes. Les locataires du Québec, en gros — je pense que je parle de tout le monde en face de moi — sont très contents qu'il existe un marché libre de logements au Québec. Ils veulent qu'il soit vigoureux et ils veu-

lent de plus, j'en suis persuadé, que ce document comporte plus de dix pages, que ça arrive à 15, 20, 35, que le choix soit encore plus grand.

La réalisation d'un tel choix que chacun veut faire pour ses propres besoins — tout le monde est pour la liberté personnelle — dépend, je suis certain que vous en êtes conscients, de la présence des propriétaires qui pensent pouvoir faire un profit intéressant de l'autre côté. Il y a environ 200 000 propriétaires au Québec aujourd'hui, je pense que c'est la moyenne des propriétaires de logements à louer, avec deux ou trois logements. C'est le marché. Notre désir est de maintenir ce marché, ce choix pour vous tous et pour nous tous, en tenant compte du fait qu'il existe un équilibre entre les deux côtés et que — je le répète parce que c'est très important; le député de Taschereau l'avait un peu nié — les plus démunis doivent avoir une certaine protection. Il y a ceux qui disent qu'il y a de meilleures façons de régler le problème pour les démunis, avec des questions d'impôts négatifs et revenus; mais, en-ce moment, on n'est pas devant ça. Il faut aussi qu'on étudie la question des plus démunis, mais, en général, je le répète, comme le ministre, on n'est pas obligé de choisir entre le marché libre total et le contrôle total, je pense que c'est même une exagération, on est aux deux pôles; il y a longtemps qu'on a dépassé ces deux solutions extrêmes et le ministre, ainsi que les ministres antérieurs avaient le choix de se rendre un peu plus à gauche ou un peu plus à droite du problème délicat de maintenir cet équilibre. (14 h 45)

Je le répète, j'admets, M. le Président, que c'est un peu une réplique à quelques légères déformations de mes paroles, de ce matin, par le député de Taschereau, j'espère que ses pensées ou ses passions — je pense que je dois dire ses passions — ne sont pas celles du gouvernement comme tel, mais elles sont quand même importantes et je pense que c'est important de soulever les nuances que j'ai soulevées. Mais si vous acceptez de réfléchir sur ces commentaires, j'ai une seule question à poser sur l'article 4 avant de consentir, du moins en ce qui me concerne, à son adoption; c'est une question qui a été soulevée par un de nos juristes. Il est clair que cette régie doit être un tribunal d'archives, qu'il doit y avoir un greffier, un greffe, si vous voulez. On n'a pas trouvé dans la loi une déclaration claire de cette responsabilité de conserver tous les dossiers pour qu'ils soient disponibles. Est-ce que c'est clairement inscrit dans la loi ou non?

M. Tardif: M. le Président, on me dit que cette question a été abondamment débattue par les légistes qui se sont penchés sur cette question. Effectivement, ce n'est pas un tribunal d'archives, semble-t-il; l'actuelle Commission des loyers a ses dossiers et elle va les conserver; donc, ça ne semble pas poser de problème.

M. Scowen: Si la régie est en effet un tribunal, si on veut prendre des responsabilités des autres cours...

M. Tardif: Justement, après examen, il semble que les deux attributs essentiels d'un tribunal d'archives, c'est que ces archives puissent faire preuve de ce qui a été entendu et jugé. Il semble donc que ceci ne pose aucun problème; il y a un article dans la loi — on va me le trouver — qui dit bien que les archives de la commission ont ce caractère. Le deuxième, c'est la possibilité d'utiliser l'outrage au tribunal comme mesure devant le tribunal. Or, ce pouvoir est accordé à la régie, mais alors, là, il est encadré dans un article précis.

M. Scowen: Dans un article précis? M. Tardif: Dans le texte de loi.

M. Scowen: Pouvez-vous nous dire exactement où?

M. Tardif: A l'article 110, il est prévu un pouvoir de condamner pour outrage au tribunal quiconque refuse de se conformer à une ordonnance de la régie.

M. Scowen: Oui, mais ça... M. Tardif: C'est cela.

M. Scowen: A moins que je ne comprenne mal, cela ne répond pas à ma question.

M. Tardif: Quelle est la question?

M. Scowen: La question, c'est: Est-ce que la Régie des loyers est un tribunal d'archives?

M. Tardif: La réponse, c'est non.

M. Scowen: C'est non. Vous avez dit...

M. Tardif: Elle a certains attributs d'un tribunal d'archives, notamment que ses archives peuvent être produites en preuve devant toute instance ultérieure et, deuxièmement, elle a certains attributs, notamment le pouvoir de condamner pour outrage au tribunal, mais elle n'est pas comme telle un tribunal d'archives.

M. Scowen: La régie n'a pas l'obligation de maintenir, d'établir un greffe comme tel? Oui. Où trouve-t-on cette obligation dans le projet de loi?

M. Tardif: On vous donne la référence immédiatement. L'article 22, deuxième paragraphe.

M. Scowen: N'étant pas juriste, je vais poser une question très spécifique. Cet article qui dit: "La Régie peut avoir des greffes à tout endroit qu'elle détermine", donne-t-il l'obligation d'avoir un greffe? Le mot "peut", en termes juridiques, veut dire "est obligée". C'est peut-être...

M. Tardif: On me dit que l'interprétation à donner à ceci, c'est que, si elle peut avoir des greffes, elle est obligée d'en avoir un, au moins un.

M. Scowen: Oui, c'est intéressant. Pour faire suite à cette réponse, puis-je dire que, partout où on voit ici dans le projet de loi le mot "peut", on peut comprendre que c'est une obligation?

M. Tardif: Non, mais si elle peut en avoir plusieurs, c'est que, dans ce cas-là, elle doit, me dit-on, en avoir un, mais elle peut en établir plusieurs. C'est le sens de l'article.

M. Scowen: Acceptez-vous, M. le ministre, que, quand on arrivera à l'article 22, on puisse faire une suggestion pour rendre plus précise cette obligation?

M. Tardif: Je veux bien voir avec les légistes s'il est possible de préciser cet article.

M. Scowen: Bon!

Le Président (M. Laplante): L'article 4 est-il adopté? M. le député de Taschereau.

M. Guay: Très brièvement et très rapidement, je regrette presque que le nouveau programme du ministre des Affaires sociales concernant les prothèses auditives pour les personnes jeunes ne s'applique pas au député de Notre-Dame-de-Grâce, car, après la déformation qu'il a faite des propos que j'ai émis ce matin, il me semble en avoir un grand besoin. Je ne reviendrai pas sur cette déformation outre mesure, elle est tellement grossière que je laisse au député de Notre-Dame-de-Grâce le soin d'en assumer la paternité et je n'ai pas l'intention de le suivre sur cette voie-là.

Le député de Notre-Dame-de-Grâce trouve que la création d'une nouvelle régie qui est, en fait, le remplacement d'une régie existante... Il ne s'agit pas d'ajouter une régie, il s'agit de la remplacer par une autre. C'est une mutation et non pas une création. Enfin, il paraît qu'on sera puni pour la "régimanie" a-t-il dit, parce que, semble-t-il, on crée des régies alors que, dans ce cas-ci, on en crée en en abolissant une, ce qui fait un progrès net de zéro pourcent. Mon Dieu! il se peut effectivement que, dans certains cas... Ce n'est pas la première fois que le gouvernement du Québec, quel que soit le parti au pouvoir, a recours à la création de régies. On a eu droit à une thèse sur le pourquoi des créations de régies. C'est une hypothèse et, à mon avis, assez farfelue.

C'est sur l'idée du marché libre que je voudrais m'arrêter deux secondes. Si le député de Notre-Dame-de-Grâce résume le marché libre à la publication dans les journaux comme Le Soleil des offres de logements disponibles, à ce moment-là, nous ne parlons pas de la même chose. Il est bien évident qu'en vertu du projet de loi 107, et en vertu de la loi existante, cette possibilité d'annoncer les logements existe, doit continuer d'exister, est tout à fait normale, est un service à la collectivité, est la chose la plus utile au monde pour les gens qui se cherchent un logement. C'est une vérité tellement banale... qu'on se demande pourquoi le député de Notre-Dame-de-Grâce a cru bon de nous en parler pendant dix minutes, un quart d'heure.

Là, où c'est différent, c'est lorsqu'on parle du marché libre en termes de l'offre et de la demande non vérifiées, non contrôlées, de la loi de l'offre et de la demande pour ce qui a trait à la fixation des loyers, c'est-à-dire de laisser le marché fixer le prix des loyers. Là, c'est une toute autre chose.

Si, ce matin, quand le député de Notre-Dame-de-Grâce nous parlait du marché libre, il voulait simplement entendre la possibilité d'avoir un cahier d'habitation quotidiennement dans le Soleil, à ce moment-là, on ne parle pas du tout de la même chose, mais s'il nous vantait les mérites incontestés du marché libre au sens que c'est le marché qui doit fixer le prix du logement, les fluctuations du marché qui doivent fixer le prix du logement, de la location du logement, à ce moment-là, nous parlons d'une toute autre chose. Je suis heureux de voir que, parti d'un point de vue très promarché libre, le député de Notre-Dame-de-Grâce se rallie maintenant à l'idée qu'il doit y avoir une régie, j'en suis fort heureux. Nous verrons subséquemment quelles sont les attributions de cette régie-là, mais il me semblait utile, M. le Président, de faire cette distinction entre ce que dit le député de Notre-Dame-de-Grâce lorsqu'il parle du marché libre et ce qui est généralement compris lorsqu'on parle du marché libre dans le domaine du logement. Se faire l'apôtre du marché libre comme il le fait en le définissant d'une manière aussi superficielle, c'est autant vous dire utiliser des paroles pour faire perdre le temps de la commission.

Le Président (M. Laplante): Article 4, adopté?

M. Cordeau: Je ne suis pas ici pour défendre le gouvernement conservateur d'Ottawa, mais, par contre, tantôt, si j'ai bien compris le député de Notre-Dame-de-Grâce, il a fait allusion aux trente ministres qui n'avaient rien à faire à Ottawa. Je suis réellement à me poser la question: Que faisaient les ministres libéraux avant les élections?

M. Guay: Le député de Saint-Hyacinthe, M. le Président, a un bon point d'ailleurs en citant cela, parce que les trente ministres conservateurs à Ottawa ont beaucoup de pain sur la planche à défaire le merdier dans lequel le Parti libéral a laissé l'appareil de l'Etat au niveau fédéral de la même façon que nous avons eu beaucoup de travail à faire pour remettre les choses en place une fois que les libéraux ont été chassés du pouvoir ici à Québec en 1976.

Le Président (M. Laplante):... M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, jusqu'à...

Le Président (M. Laplante): Je ne voudrais pas que ce soit dans la même continuité, parce que...

M. Goldbloom: Oui, M. le Président, ce sera dans la continuité, exactement.

Le Président (M. Laplante):... la commission a bien débuté et je ne voudrais pas qu'elle tourne au vinaigre à ce moment-ci. Sur un point de règlement, M. le député de D'Arcy McGee. Non?

M. Goldbloom: Non, M. le Président, c'était dans la continuité, que m'a inspirée le très distingué député de Taschereau qui a parlé de merdier, si j'ai bien saisi le mot et qui a sorti encore une fois la vieille rengaine sortie par chaque gouvernement qui a succédé à un autre; nous avons trouvé les affaires de l'Etat dans une condition pitoyable et...

Le Président (M. Laplante): Article 96. Vous avez le choix, M. le député de D'Arcy McGee. S'il vous plaît!

M. Goldbloom: Oui, M. le Président. M. le Président, si...

M. Guay: Je veux bien qu'il parle mais pas en vertu de l'article 96.

Le Président (M. Laplante): Article 4, adopté.

M. Goldbloom: M. le Président, je veux bien que vous déclariez l'article adopté, mais je ne laisse pas passer les paroles du député de Taschereau.

Le Président (M. Laplante): Preuve que le message est passé.

M. Goldbloom: Je les trouve d'autant plus regrettables, ces paroles, que le ministre — qui est jusqu'à nouvel ordre le porte-parole du parti ministériel quant à l'étude de ce projet de loi — a fait preuve d'un sérieux et d'une ouverture d'esprit qui lui font honneur. N'eussent été les interventions intempestives du député de Taschereau, nous aurions pu, M. le Président, poursuivre plus rapidement.

Le Président (M. Laplante): Article 4, adopté.

M. Guay: M. le Président...

M. Alfred: N'eut été les interventions...

Le Président (M. Laplante): A l'ordre! Il ne faut pas que cela tourne non plus... A l'ordre, s'il vous plaît! Je n'accepte aucune remarque additionnelle, sinon que sur le pourquoi on doit changer le nom de la régie pour le nom de Régie du logement.

M. Guay: Pour les fins du journal des Débats, je voudrais noter que le député de d'Arcy McGee n'a pas pu faire ses remarques sans rire.

Le Président (M. Laplante): Je n'accepte pas. L'article 4 est-il adopté?

M. Scowen: Adopté.

Le Président (M. Laplante): Adopté. J'appelle l'article 5. S'il vous plaît, M. le ministre.

M. Guay: Le président est sur les nerfs aujourd'hui, je ne sais pas ce qu'il a. C'est effrayant.

Le Président (M. Laplante): C'est parce que si on laisse aller la commission, elle tournera au vinaigre. Elle s'en vient bien et je ne veux pas qu'elle tourne comme cela. Je veux que tout le monde soit respecté sur le même pied.

M. Guay: Allons donc. (15 heures)

M. Tardif: M. le Président, l'article 5 est l'article qui énonce les fonctions de la Régie du logement. Ce domaine du logement locatif est un domaine complexe qui évidemment nécessite différents types d'interventions. On voit que le premier des rôles de la régie comme telle, c'est d'arbitrer des litiges qui naissent d'un contrat de bail entre particuliers, entre les parties, mais elle a aussi un rôle en matière de conciliation, de conservation du stock de logements, un rôle également d'information, de faire connaître la loi qu'elle est chargée d'administrer et les services qu'elle offre. Evidemment, certains de ces renseignements doivent être dirigés vers la clientèle, le public, mais, d'autre part, vers ceux qui sont chargés de l'appliquer, notamment le ministre désigné, ne serait-ce que pour justifier, présenter devant les commissions parlementaires et autres les crédits des organismes dont les ministres dits de tutelle doivent défendre régulièrement. Cette énumération des tâches est contenue à l'article 5.

Le Président (M. Laplante): Vous avez une remarque ici, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce?

M. Scowen: Ici on se trouve devant la réalité de la complexité des responsabilités de notre régie. Je pense que c'est clair que, quand vous regardez la liste, vous voyez les responsabilités de nature administrative, de nature publicitaire, de nature recherche et surtout de nature judiciaire, c'est-à-dire d'un tribunal. Je pense que tout le monde peut facilement accepter qu'à moins que ce soit organisé d'une façon très précise, on peut avoir des conflits et des contradictions là-dedans. C'est toujours important, mais c'est extrêmement important quand vous trouvez un organisme qui a comme une de ses responsabilités la responsabilité d'être un tribunal, parce que je pense que toute notre tradition judiciaire est basée sur le principe que les tribunaux doivent être impartiaux, qu'ils ne doivent avoir aucune autre contrainte, qu'ils doivent faire leur travail avec une impartialité parfaite. Si vous donnez à un tribunal des responsabilités et des critères autres que ceux de la justice, vous créez prima facie des problèmes potentiels qui peuvent pourrir de plus en plus et vous donnez de plus à ce tribunal une porte d'entrée à des instances politiques, que ce soit le

gouvernement actuel, que ce soit le dernier ou le prochain. J'accepte que ce soit quand même une solution qui puisse peut-être marcher, nous sommes au moins prêts à l'essayer, mais je pense qu'il y a certains changements qui s'imposent et on va en parler un peu plus tard aux articles 6 et 7 de quelques suggestions, mais, pour ce qui concerne l'article 5, je pense que si vous acceptiez de passer aux sous-articles un par un, on pourra peut-être...

Le Président (M. Laplante): Si c'est la volonté des membres, j'accepte. Nous passons à l'article 5, premièrement. D'accord?

M. Scowen: Je ne sais pas s'il y en a d'autres qui ont des commentaires globaux à dire.

Le Président (M. Laplante): On va faire les commentaires un par un. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci, M. le Président. J'accepte la proposition du député de Notre-Dame-de-Grâce d'y aller sous-article par sous-article. Par contre, au début, nous constatons que certaines modifications ont été apportées.

Avec le projet de loi, tel qu'il a été présenté lors de la première impression. J'aimerais demander au ministre pourquoi il a changé le mot "litige" pour le mot "demande" et également, à l'article 1, par les renseignements généraux que je demande, pourquoi dit-il "renseigner le locateur et locataire" au lieu de "de renseigner le public" comme on le disait dans l'ancien article. Je crois qu'un individu est propriétaire ou locataire. Il est l'un ou l'autre dans la vie. Je pense qu'un individu a sa propre propriété ou il est locataire. C'est bien sûr qu'il peut y avoir une vie de famille à l'intérieur de certaines communautés. Quel est le pourquoi de ces changements?

M. Tardif: Voulez-vous que je réponde immédiatement à cela, au fur et à mesure ou...

M. Cordeau: Peut-être après les observations avant de commencer l'étude article par article en répondant aussi peut-être aux autres qui interviendront. Je crois également que le principe de cet article est que les membres de la régie pourront donner des avis ou aider les personnes à remplir leurs demandes, globalement. Nous craignons que les gens de la régie soient appelés à donner des conseils juridiques, parce qu'à un moment donné l'individu qui va s'y présenter demandera des renseignements, peut-être même un renseignement juridique et la personne en charge ou la personne à l'information lui donnera réponse à sa demande.

Suite à ces réponses, le citoyen pourra faire une demande à la régie en prétendant que ce soit dans son droit suite aux réponses que les membres de la régie lui auront données. Il fera sa demande prétendant que sa demande est juste et qu'il gagnera devant la régie. Peut-être que le régisseur à ce moment-là ne sera pas du même avis que lors de la première demande, parce qu'à ce moment-là le régisseur aura le pour et le contre du problème soumis. Voilà certains renseignements ou explications que nous aimerions avoir du ministre avant de passer à l'étude article par article.

Le Président (M. Laplante): D'autres commentaires sur l'article 5 globalement avant de passer... M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: II y a, M. le Président, des questions qui ont été soulevées un peu par le député de Notre-Dame-de-Grâce mais sur lesquelles je voudrais revenir. Il y a des renseignements que la régie va pouvoir donner aux locateurs et locataires sur leurs droits et obligations résultant du bail. Il faudrait que ce soit bien clair que ces renseignements donnés aux locateurs et aux locataires ne soient pas des renseignements particuliers à untel ou untel, il faudrait que ce soient des renseignements d'ordre général pour empêcher q'il y ait des conflits à un moment donné, parce que si la régie donne un renseignement ou même presque une opinion juridique à une personne en particulier et que, par la suite elle a à trancher un litige résultant de cette opinion qu'elle aura donnée, je pense qu'elle sera placée dans une mauvaise situation. Il peut y avoir un certain conflit. Si ce n'est pas cela le but de la loi, le ministre pourrait nous renseigner là-dessus.

Il y a d'autres pouvoirs qui sont donnés à la régie. Le député de Notre-Dame-de-Grâce ne les a pas mentionnés comme tels. Je pense que ce sont là des pouvoirs politiques. Par exemple, donner au ministre désigné son avis sur toute question que celui-ci lui soumet et sixièmement, analyser les effets de l'application de la présente loi et faire au ministre désigné les recommandations qu'elle juge utiles, ce sont des recommandations ou des questions politiques que la régie va devoir exercer. Là, on peut peut-être se demander, à cause de ces obligations qu'on va lui faire, est-ce que la régie sera impartiale?

On sait, entre autres, que les régisseurs vont être nommés pour une période de cinq ans, selon la loi telle qu'on nous la présente. Est-ce que les régisseurs ne seront pas tentés de donner des opinions politiques qui vont être favorables au gouvernement en place pour peut-être essayer de conserver leur poste le plus longtemps possible, et ce indépendamment de qui que ce soit qui sera nommé comme régisseur? On ne les connaît pas, et on ne sait pas qui ce sera. Je pense qu'il y a une question fondamentale à se poser là.

M. Tardif: M. le Président, je pense que...

Le Président (M. Laplante): Voulez-vous entendre les remarques du député de Verdun avant de répondre globalement, M. le ministre?

M. Tardif: Oui, volontiers.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Verdun.

M. Caron: Je vais être...

Le Président (M. Laplante): Pas sur l'article 1, c'est sur le projet de loi global, actuellement. Par la suite, on prendra les articles un à un.

M. Caron: Si je comprends bien, M. le Président, à l'article 5, on donne beaucoup de détails sur ce que la régie va donner au point de vue des services. Il y a plus de gens qui vont s'adresser à la régie, j'imagine, qu'auparavant. On prévoit cela, du moins, surtout au début, votre publicité, donner des renseignements. Est-ce que vous avez des statistiques à savoir combien cela va coûter? Qu'est-ce qu'on paie actuellement? Quel est le budget de la Régie des loyers et combien cela coûtera pour administrer la nouvelle régie?

M. Tardif: M. le Président, sur cette question précise, étant donné que la question a été soulevée ce matin par le député de Notre-Dame-de-Grâce qui nous demandait justement, d'abord, d'avoir des statistiques sur le personnel, le volume d'affaires traitées et tout cela depuis aussi loin qu'on puisse remonter, les deux, trois ou quatre dernières années, à ce moment-là, je préférerais, si vous permettez, pouvoir produire ces documents devant la commission probablement demain matin, et que lorsque nous aborderons certains articles où il est question d'effectifs, là, précisément, nous pourrions répondre en même temps à cette question. D'accord?

M. Goldbloom: M. le Président, puisque vous avez invité les membres de la commission à formuler leurs commentaires d'ordre général avant que le ministre réponde, je vois que l'article 5 donne un mandat non seulement large, mais varié à la régie qui doit décider des demandes qui lui sont soumises, donc agir en tribunal. Sur les sept éléments du mandat tels qu'exposés à l'article 5, il y en a deux qui, à mon sens, conviennent à un tribunal: ce sont les numéros 2 et 7, c'est-à-dire favoriser la conciliation entre locateurs et locataires, cela en parallèle, si vous voulez, au tribunal qui encourage les règlements en cours. Il est bon qu'il en soit ainsi.

Certainement, personne autour de cette table n'aimerait que la règle générale soit le litige, au contraire. Nous aimerions tous que la société elle-même, avec l'aide de la régie qui fournirait des renseignements, qui encouragerait de diverses façons la conciliation, permette à des propriétaires et à des locataires de s'entendre. Le numéro 7, publier périodiquement un recueil de décisions rendues, c'est tout à fait normal qu'un tribunal fasse un tel recueil. (15 h 15)

Mais quand on regarde les autres éléments du mandat, on est obligé de constater qu'il y a des attributions qui sont normalement celles d'un conseil consultatif: par exemple, faire des études et établir des statistiques, donner au ministre un avis sur des questions que le ministre lui soumet et analyser les effets de l'application de la loi. Nor- malement, un tribunal ne fait pas cela; normalement, un tribunal dit que la loi a été adoptée par le législateur et doit l'appliquer telle quelle. A certains moments, il y a, surtout avec le ministre de la Justice, sans doute, et peut-être avec d'autres ministres, des communications qui permettent au gouvernement de mieux comprendre les effets de l'application d'une loi, mais ce n'est pas la fonction primordiale d'un tribunal.

Il y a des éléments qui seraient attribuables à un bureau d'information, d'autres à un office d'habitation même, quand on parle de favoriser la conservation des logements. Puisque nous allons en discuter paragraphe par paragraphe, j'attendrai l'appel du paragraphe 3 pour en parler davantage en détails.

On voit, dans les articles suivants, que le gouvernement prend la peine de prévoir les critères de candidature pour le poste de régisseur: un code de déontologie, une considération assez précise quant à des conflits possibles d'intérêts. Je me demande, à l'instar de notre collègue de Nicolet-Yamaska, s'il n'y a pas, dans l'éventail assez large d'éléments du mandat, des aspects de conflits d'intérêts quant à l'exercice par un tribunal de sa responsabilité de tribunal. Normalement, si un ministre intervient auprès d'un tribunal... Nous en avons vu des exemples au niveau fédéral et en Ontario, où un ministre a pris le téléphone, a placé un appel, en croyant poser un geste innocent, et c'était monté en épingles dans chaque cas et cela a coûté à au moins un ministre son poste de ministre. Est-ce que le tribunal qui doit exercer son jugement et rendre des décisions doit en même temps être l'organisme qui est le conseiller du ministre et qui doit commenter pour le ministre les politiques du gouvernement par rapport aux résultats obtenus, par rapport à une politique de conservation de logement, de production de nouvelles unités de logement, parce que telles seraient sûrement les statistiques qui seraient demandées à cet organisme? C'est la question que je me pose.

Puisque, tout récemment encore, nous avons discuté d'un conflit d'intérêts possible dans l'exercice par la Commission municipale du Québec de son mandat qui est quasi judiciaire à certains égards et administratif à d'autres égards, je me demande si le ministre n'aimerait pas repenser ce mandat et établir deux secteurs de responsabilité à l'intérieur d'un organisme, ou même deux organismes.

M. Tardif: M. le Président, j'ai écouté attentivement toutes les interventions parce que je pense qu'elles ont pour fondement une certaine ambiguïté qui, peut-être, provient d'une définition erronée et rigoureuse à la fois de ce que sera la régie qu'on assimile à un tribunal, et un tribunal n'a d'autre fonction, ainsi que l'a dit le député de D'Arcy McGee, que de rendre justice, lire la loi et dire si telle personne y contrevient ou n'y contrevient pas.

Or, la régie n'est pas un tribunal au sens strict du terme, c'est une régie et, comme telle, elle est composée à la fois de régisseurs et d'un personnel

de soutien. Toute l'ambiguïté provient de ce que l'on parte de l'idée que ça pourrait être les mêmes personnes, à savoir des régisseurs, qui, tantôt sur le banc rendraient justice, tantôt iraient faire de la conciliation, tantôt feraient des études statistiques, tantôt feraient, bref, toutes les fonctions qui sont énumérées là.

Je pense qu'il est évident — et il faut lire l'ensemble de la loi pour s'en rendre compte — que les régisseurs, comme tels, vont évidemment rendre des décisions, qu'ils seront responsables de l'application des articles, par exemple, 3 et celui très général d'arbitrer les litiges, que c'est évidemment le personnel de soutien, ces 300 personnes qui sont là présentement et qui accomplissent ces fonctions, qui va remplir les fonctions 1, 4 et 7, par exemple, renseigner les locataires et locateurs. Là-dessus, je voudrais relever la remarque du député de Saint-Hyacinthe qui préférait le mot "propriétaire". Les propriétaires, dès lors qu'ils ne sont pas des propriétaires bailleurs, des propriétaires loueurs, ne sont pas touchés par cette loi. Ce ne sont donc pas tous les propriétaires qui sont visés, mais seulement les propriétaires bailleurs.

L'autre point, évidemment, la conciliation, au point 2, peut être faite par des régisseurs, de même que par des conciliateurs; quant aux points 5 et 6, il appartient évidemment au président, au vice-président et aux cadres qui sont responsables des tâches administratives de fournir leur avis au ministre sur des questions que celui-ci leur soumet. Je prends, par exemple, le fait qu'un groupe de citoyens dans une région du Québec demande d'ouvrir un bureau de la régie, que peut faire le ministre? S'en aller lui-même sur place voir s'il y a un volume de demandes suffisant, s'il y a un nombre de locataires suffisant? Il se tourne du côté de la régie et dit: Combien avez-vous eu de causes au cours des derniers douze mois, des derniers vingt-quatre mois provenant de cette région? Il peut demander de faire une étude et de donner un avis, à savoir si on devrait vraiment ouvrir un autre bureau ou pas.

L'autre point, encore une fois... La régie, ce n'est pas, comme tel, un tribunal, quand on dit, par exemple: Un juge de la Cour provinciale siégeant, c'est la cour qui siège. Dans ce cas-là, c'est un organisme qui a des fonctions administratives et des fonctions judiciaires, qui les remplit présentement, et ce n'est pas un précédent, toutes les régies ou à peu près fonctionnent de la même façon. En Ontario — je vous ai fait part, ce matin, de cette loi qui a été votée le 21 juin dernier — on retrouve, à peu de choses près, des fonctions similaires à l'article 81, avec en marge le titre: "Duties of the commission". On dit ceci: "The commission shall: a) perform the duties assigned to it by or under this act, and shall administer this act and the regulations; b) periodically review this act and the regulations, and recommend, from time to time, amendments or revisions thereof; c) advise and assist the public on all residential tenancy matters, including referral where appropriate to social services and public housing agencies; d) take an active role in insuring that landlords and tenants are aware of the benefits and obligations established by this act; e) periodically prepare and publish a summary of significant decisions of the commission and the reasons therefore.

On se rend donc compte, M. le Président, que ces tâches, qui sont dévolues à cet organisme qui remplit à la fois des fonctions judiciaires et administratives présentement, c'est commun dans les régies de trouver de semblables choses. Je serais tout à fait d'accord avec le député de D'Arcy McGee lorsqu'il dit qu'une intervention du ministre qui aurait pour effet de dicter à la régie ou à un régisseur de rendre tel jugement ou de passer l'éponge sur telle affaire qui est devant elle, c'est tout à fait inadmissible, c'est une intrusion dans le pouvoir judiciaire qui n'a aucune place. Que le ministre communique avec la régie pour lui demander son avis sur l'ouverture ou la fermeture d'un bureau, c'est autre chose.

En ce qui concerne le rôle de publicité, le député de Nicolet-Yamaska, évidemment, sur un plan professionnel, s'inquiète du fait que des agents de la régie pourraient jouer un rôle de conseiller juridique, d'avocat et, dit-il: Je comprends qu'elle puisse avoir un rôle d'information, pour peu que ce rôle soit général, par exemple, publier des brochures de cette nature à l'intention de locataires et locateurs. Mais, M. le Président, ce n'est pas sérieux. Il entre annuellement à la régie trois quarts de million d'appels téléphoniques, 750 000 demandes de citoyens qui appellent à la régie pour toutes sortes de choses.

Lorsqu'un citoyen appelle à la régie pour savoir si, effectivement, c'est un avis de trois mois ou de six mois qu'il faut donner avant de chercher à reprendre possession de son logement, par exemple, est-ce que cela prend un avocat pour répondre à cela? Evidemment, je ne suis pas du tout d'accord avec cela. Si c'était cela que voulait signifier le député de Nicolet-Yamaska, que la régie ne devait ou ne pouvait pas répondre à des demandes individuelles de renseignements, c'est bien évident que cela ne peut pas fonctionner ainsi.

M. Fontaine: M. le Président, est-ce que vous me permettez de rétablir certains faits? Ce n'est absolument pas cela. La régie est formée de commissaires. Quand on dit: La régie pourra renseigner des locateurs et des locataires, cela veut dire que des régisseurs pourraient le faire, et c'est cela qui m'apparaît inacceptable.

M. Tardif: Qu'un régisseur dise à un...

M. Fontaine: Que ce soit un fonctionnaire qui travaille à la régie, je n'en ai rien à foutre.

M. Tardif: Effectivement, pour rassurer le député de Nicolet-Yamaska, ce ne sont pas les

régisseurs, comme actuellement ce ne sont pas les administrateurs qui répondent au téléphone, à la régie, aux trois quarts de million d'appels téléphoniques qui rentrent.

M. Fontaine: II y en a qui répondent au téléphone.

M. Tardif: Qu'ils puissent être là par hasard, qu'on puisse leur acheminer un appel, peut-être dans une affaire dont ils s'occupent, je veux bien, mais les personnes qui répondent au téléphone, ce sont des agents d'information qui tentent de donner l'information la plus objective possible, et non pas les conseillers juridiques.

Voilà en gros pour cet aspect de l'information. Un des autres points soulevés par le député de Saint-Hyacinthe, c'est pourquoi on avait changé le mot "litige" pour "demande": "La régie exerce la juridiction qui lui est conférée par la présente loi et décide des demandes qui lui sont soumises". Toutes les affaires qui vont devant la régie ne sont pas des litiges, ne mettent pas deux parties en conflit. On peut aller à la régie en vertu de l'article 46 pour avoir un avis sur une transformation ou la vente d'un immeuble dans un ensemble immobilier, par exemple, ou encore pour une transformation en copropriété. Dans ce cas-là, il n'y a pas deux parties en présence, ce n'est pas trancher un litige, mais c'est donner un avis. C'est la raison pour laquelle le terme "demande" qui avait une connotation plus large a été employé. J'ai essayé de couvrir... on me les a donnés un après l'autre.

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Le ministre nous a dit que le mandat de la régie est large et couvre un éventail de fonctions parce que, dans certains cas, ce seront les régisseurs qui agiront au nom de la régie et, dans d'autres cas, le personnel de soutien. Je voudrais souligner respectueusement le fait que l'article est quand même unique et déclare que la régie exerce la juridiction et est chargée en outre de cette catégorie d'activité, même si, à d'autres articles, les articles 28 à 31 notamment, il est indiqué que seuls les régisseurs, et même seuls les régisseurs qui sont juges ou avocats peuvent accomplir certaines tâches. Je n'ai pas remarqué d'article qui indique que, quant à d'autres fonctions, d'autres éléments du mandat, seul le personnel de soutien s'en occupera. La régie a un président qui, à mon sens, est responsable de tout cela, de l'aspect quasi juridique et des autres aspects. (15 h 30)

Finalement, je voudrais rappeler au ministre que l'ancienne Régie des alcools du Québec a été divisée en deux organismes afin de séparer cet aspect de responsabilité quasi judiciaire. Je dis "quasi judiciaire"; ce n'est pas comparable à la responsabilité qui existe ici, mais, quand même, c'était une décision que devait rendre un organisme paragouvernemental sur l'octroi de permis et cela a été séparé de l'aspect administratif.

M. Tardif: Commercial, pour être plus exact.

M. Goldbloom: Commercial, oui. Il y a des précédents où l'on a trouvé que la fonction quasi judiciaire n'était pas parfaitement compatible avec d'autres fonctions. Je demeure légèrement inquiet quant à la mise en commun de tout cela sous une seule autorité administrative.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Si je peux ajouter un seul mot aux commentaires de mes collègues, c'est plutôt pour renforcer leurs opinions. C'est clair que nous sommes devant une loi inévitable dans laquelle on va demander au locataire et au locateur de suivre beaucoup d'articles très précis en ce qui concerne le bail d'un logement. C'est peut-être dommage que la vie soit rendue si compliquée, mais je crois qu'on a déjà dépassé les limites. J'accepte — et je pense que mes collègues aussi — que c'est malheureusement inévitable que de plus en plus l'élément judiciaire soit mêlé avec l'élément administratif. Comme vous l'avez dit, avec 750 000 appels téléphoniques, il est essentiel que quelqu'un ait le droit de donner l'information qu'il faut.

Le point qu'on voulait souligner sur un plan global, c'est que, quand nous étudions les sous-articles, il nous faut regarder des responsabilités de très près afin, autant que possible, d'éviter des conflits qui peuvent s'élargir au fil des années. Le député de Taschereau a souligné que le Parti libéral a laissé pas mal de problèmes au gouvernement qui l'a suivi; je suis très conscient que c'est possible, même probable que ce soit un gouvernement libéral qui doive appliquer cette loi un jour. Je pense qu'il est de notre propre intérêt...

M. Guay: Un jour!

M. Scowen: Cela viendra peut-être avant que cette nouvelle régie soit en place. C'est nous qui devrons l'administrer. C'est la raison pour laquelle nous voulons vous aider afin d'éviter les pièges dans lesquels vous avez accusé le gouvernement antérieur d'être tombé. Sur la question globale, cela va; je crois que c'est plutôt sur les précisions qu'il faut réfléchir.

M. Tardif: M. le Président, j'allais soulever une question de privilège. Je me demandais si c'étaient des climatiseurs et on me dit que non.

Le Président (M. Laplante): Quand ils fonctionnent, on n'entend plus rien. Cela éteint le timbre de la voix.

M. Tardif: Y aurait-il possibilité qu'on change de salle?

Le Président (M. Laplante): Non, la seule possibilité, c'est d'aller un peu plus vite sur le projet de loi. Il paraîtrait qu'un ancien premier ministre montait les calorifères à ce moment-là!

M. Scowen: On pourrait attendre au mois d'octobre, quand ce sera plus frais.

M. Goldbloom: M. le Président, je vous croyais plus impartial que cela.

Le Président (M. Laplante): Je suis impartial parce que les deux parlent autant l'un que l'autre. Ce soir, on pourra changer de salle; on me dit que la commission des transports achève et probablement qu'à 18 heures ce sera terminé. Ce soir, on pourra aller dans la salle 81-A.

M. Tardif: Tout le monde convient que les fonctions énumérées là sont des fontions qui doivent être remplies par quelqu'un. Evidemment, dans l'hypothèse où ce n'est pas la régie, où ça n'est pas son personnel de soutien, cela supposerait presque créer une autre structure.

Or, après ce que j'ai entendu ce matin, même à la reprise tantôt, sur la structurite galopante qui afflige toutes les administrations et toutes les bureaucraties de par le monde, on ne voudrait certainement pas créer deux organismes; un qui ne ferait que siéger, entendre les causes...

M. Fontaine: II n'y aurait pas plus de monde.

M. Tardif: Bien non, mais il y aurait deux patrons...

M. Guay: Deux services du personnel, deux services d'administration.

M. Tardif: Deux services du personnel et deux services d'administration. Un instant. Ce seraient vraiment deux contentieux et tout ce qu'on voudra. Non mais, écoutez, cela fait partie, je pense, de données qu'on peut trouver drôles mais avec lesquelles il nous faut vivre. Je pense que l'important c'est que ce ne soit pas toutes les personnes qui remplissent toutes ces fonctions et surtout qui les remplissent simultanément. Qu'un régisseur ayant terminé de siéger, d'entendre une cause donne un renseignement comme citoyen qui participe à une émission de télévision pour expliquer l'application de cette loi, bravo! Qu'ils en fassent de plus en plus de cela.

Je comprends que le député de D'Arcy McGee dit: Les juges doivent traiter et procéder cas par cas; c'est l'approche du clinicien, dans ce cas auprès du client et non pas auprès du malade. Il reste que, si la responsabilité du médecin c'est une chose, celle du corps médical en est une autre. Procéder cas par cas ne doit pas empêcher des études épidémiologiques et autres. On pourrait faire un parallèle pendant un certain temps là-dessus, parce que ce matin il s'en est permis des références, des analogies au corps médical. On va arrêter cela. Pour trouver le moyen d'accrocher la pédiatrie là-dedans, il faut le faire.

Le Président (M. Laplante): D'autres commentaires? M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, le ministre nous dit que, quand on va demander des statistiques, quand on va demander des recommandations au ministre sur tel ou tel sujet, cela va être le personnel de soutien qui va effectuer le travail. Je suis bien d'accord, mais c'est sûr que cela va être le président de la régie avec les régisseurs qui vont signer la recommandation au ministre.

Il nous dit également: Ce n'est pas un tribunal. C'est bien dommage, mais, si ce n'est pas un tribunal, il a drôlement des juridictions importantes, quand on sait, par exemple, que le locataire évincé a droit à une indemnité de trois mois de loyer et des frais de déménagement et que cela peut même aller jusqu'à $10 000, et cela va être entendu par la régie; si ce n'est pas un tribunal, cela passe proche d'en être un. Je trouve qu'on cache un peu les mots, d'autant plus que ce semblant de tribunal qui n'est pas censé en être un va le faire à peu près sans règle précise.

M. Tardif: M. le Président, je voudrais m'inscrire en faux contre cela, parce que je pense avoir fait la distinction entre des tâches administratives et des tâches judiciaires. L'article 9, parce qu'on va y arriver tantôt à cet article, dit bien: le président dirige la régie et il est responsable de son administration et de la direction générale de ses affaires. C'est le président qui, à cet égard, a les deux casquettes et même toutes les casquettes; il est responsable du personnel de soutien, il est responsable des régisseurs, il fait les rôles et les régisseurs entendent les causes, un point c'est tout. Ce ne sont pas les régisseurs qui remplissent les autres fonctions administratives. C'est vrai que le président est aussi bien celui qui va donner les directives aux régisseurs que celui qui va faire travailler le personnel de soutien et qui va soumettre les rapports au ministre. Il est là pour cela. Il a une fonction, à la fois administrative à titre de président de régie et une fonction de supervision de ses régisseurs. Mais ce ne sont pas tous les régisseurs qui vont remplir toutes les fonctions administratives. Cela devrait être clair et c'est précisé à l'article 9.

Maintenant, il y a aussi un article, c'est l'article... pardon?

M. Fontaine: II exerce des fonctions judiciaires aussi.

M. Tardif: Qui? Le président? Oui, le président pourrait effectivement exercer une fonction judiciaire de décider de siéger lui-même, de s'inscrire au rôle s'il le voulait. C'est tout à fait juste, il aurait ce pouvoir, comme l'a présentement le président de la Commission des loyers.

Maintenant, il y a aussi l'article 64 qui dit qu'un régisseur peut être récusé s'il est partie à une demande portée sur une question pareille à celle dont il s'agit dans la cause, etc., s'il a donné conseil sur le différend, ou s'il en a précédemment connu comme arbitre ou comme conciliateur.

II y a donc aussi des règles, même des règles inscrites dans la loi, pour éviter le genre de conflit d'intérêts qui pourrait naître dans ce cas, dans des cas semblables. Dans la mesure où, encore une fois, les tâches administratives sont dévolues expressément de par l'article 9 au président, celui-ci a en quelque sorte la main haute à la fois sur le personnel de soutien, le personnel administratif et le personnel qui entend les causes, c'est lui qui a la responsabilité de toute la boîte, effectivement, mais les diverses fonctions ne sont pas nécessairement remplies par les mêmes personnes.

M. Caron: Dans le même ordre d'idées, à l'article 110 — je ne lirai pas tout l'article, juste le deuxième paragraphe— on lit ceci: Toutefois, si le contrevenant refuse de se conformer à une ordonnance prévue par l'article 55 ou par l'article 1656-2 du Code civil, l'amende est d'au moins $5000 et d'au plus $25 000. S'ils peuvent condamner quelqu'un, j'imagine que cela devient un tribunal.

M. Fontaine:... une juridiction plus élevée que celle de la Cour supérieure.

M. Tardif: II n'a jamais été question de nier que la régie remplit des fonctions judiciaires d'adjudication, elle tranche des litiges. Il ne s'agit pas de nier cela. La régie, c'est un corps et il y a des gens là-dedans qui vont entendre des causes, qui remplissent la fonction judiciaire et il y a d'autres personnes qui vont répondre au téléphone si un citoyen de Verdun veut savoir ce qu'il doit faire dans tel cas. Ce ne sont pas les mêmes personnes. Est-ce qu'il faut deux organismes pour remplir ces deux types de fonctions, la fonction de renseignement, d'information et autres? Nous disons: Non.

Pour les mêmes raisons que l'Opposition nous a données ce matin: Les structures gouvernementales. Arrêtons la sédimentation! D'ailleurs, le mot est du ministre des Finances.

M. Fontaine: L'impartialité, il faut que cela se paie, aussi!

M. Guay: Voyons donc! Le député de Nicolet-Yamaska devrait le savoir, lui qui est membre du Barreau; il a déjà vu des organismes judiciaires ou des organismes quasi judiciaires.

M. Fontaine: Vous, pour la pratique que vous avez faite, vous n'avez pas de leçon à donner à personne!

M. Guay: Justement. Je n'ai pas de pratique, mais je comprends singulièrement ce qu'est une régie, ce qu'un avocat qui a fait de la pratique devrait comprendre, il me semble.

M. Fontaine: Les régies, jusqu'à présent, exerçaient des fonctions judiciaires.

M. Guay: C'est moi qui ai la parole, si vous n'avez pas d'objection. La régie qui est proposée ici est calquée sur le modèle de la plupart des ré- gies existantes; il n'y a rien de secret là-dedans, il n'y a rien de nouveau. On semble tout d'un coup, du côté de l'Opposition, découvrir ce qu'est une régie en ce 4 septembre 1979.

On pourrait regarder dans la Loi de la Régie des services publics, qui est la plus vieille d'entre toutes, celle qui a même été la mère d'un certain nombre d'autres régies, et on trouverait des dispositions autant vous dire analogues à celles-ci, c'est-à-dire des dispositions qui portent sur les recommandations qu'elle peut faire au ministre, qui portent sur des renseignements qu'elle peut donner au public. Jadis, lorsque la Régie des services publics avait la prétention — que la Cour suprême lui a enlevée — d'avoir la juridiction sur la câblo-distribution au Québec, elle devait donner des renseignements aux câblodistributeurs ou au public, c'était même inscrit sur les enveloppes et c'était prévu dans la réglementation. Quand vous recevez votre compte de câble, que ce soit ici, à Québec, ou ailleurs, si vous n'êtes pas content, vous vous adressez à la régie. Forcément, la régie avait un rôle de renseignement au public à ce moment-là, ce qui n'empêchait pas les régisseurs de trancher la nature des litiges comme tout organisme quasi judiciaire est appelé à le faire. Il n'y a rien de nouveau là-dedans et il n'y a rien d'éminemment sorcier à moins qu'on veuille remettre en cause le principe même des régies et leur fonctionnement. C'est la jonction de l'administratif et du judiciaire, c'est tout le principe même des organismes quasi judiciaires. On peut vouloir remettre cela en cause, mais je soumets, M. le Président, que ce n'est pas l'endroit pour le faire.

M. Tardif: Je comprendrais que dans le cadre d'une réforme des tribunaux judiciaires on veuille se pencher sur le problème des tribunaux administratifs et de créer, comme cela existe dans certains pays d'ailleurs, à côté des tribunaux réguliers, une série de tribunaux d'instance qu'on appelle des tribunaux administratifs et qui sont en quelque sorte en parallèle au système régulier de justice. Ce peut être un choix qu'une société peut faire à un moment donné. Je pense qu'on comprendra ici qu'on ne révolutionne pas le droit québécois en instituant une telle régie qui, encore une fois, existe à des dizaines d'exemplaires au Québec et ailleurs au Canada, et que cette Assemblée nationale a adoptée encore cet été avec la Loi sur les loteries et courses, en créant notamment une régie chargée de trancher les litiges, d'émettre des permis, donc, qui a à la fois des fonctions quasi judiciaires et des fonctions administratives. Je pense que le point se pose, mais dans une réforme plus vaste des tribunaux. (15 h 45)

M. Fontaine: M. le Président, c'est qu'on est en train de créer, au fur et à mesure que les jours, les mois passent, une série de régies ou de commissions gouvernementales qui ont des rôles à la fois administratifs et judiciaires. Les deux sont mêlés ensemble. L'exemple que le député de Taschereau nous a donné tantôt, la Régie des services publics, à ce que je sache, elle n'exerce

pas tellement de contrôle judiciaire. Elle donne des permis.

M. Guay: Elle peut donner des amendes aussi.

M. Fontaine: La Commission de contrôle des permis d'alcool exerce elle aussi un contrôle judiciaire, mais c'est divisé en deux. Il y a une partie administrative et une autre partie judiciaire. Cette commission fonctionne de cette façon et je pense que cela ne va pas si mal.

On a vu, depuis quelques mois, avec le gouvernement du Parti québécois, la création de diverses régies et on a eu à faire face encore à ce problème, c'est-à-dire la Régie d'assurance automobile qui fait la même chose que ce qu'on veut créer actuellement. Vous avez la Commission de la protection du territoire agricole, c'est encore la même chose et on a encore beaucoup de problèmes actuellement, quand on voit les gens chez eux, qui sont pris quotidiennement avec ces problèmes. La Commission de protection du territoire agricole entend les demandes, c'est une façon de parler, elle n'entend personne, elle ne respecte même pas la règle audi alteram partem, les gens font la demande et sans en informer qui que ce soit, elle rend une décision. Après cela vous allez en appel devant la régie, devant les mêmes personnes qui entendent encore la même cause.

M. Tardif: Le problème ici, on ne parle pas d'un appel. L'appel est entendu devant les tribunaux réguliers.

M. Fontaine: Non, je comprends, mais je vous donne un exemple de ce qui se produit avec les régies qu'on a actuellement. C'est pour cela que je voudrais que le ministre comprenne que de faire exercer des fonctions politiques à une régie...

M. Tardif: Qu'est-ce que vous entendez par des fonctions politiques? Qu'est-ce que le député entend par des fonctions politiques?

M. Fontaine: Donner des avis au ministre, ce n'est pas politique cela?

M. Tardif: Donner un avis sur l'opportunité d'ouvrir un bureau de la régie à Nicolet, par exemple, je ne considère pas cela un avis politique. Elle a l'expertise administrative, elle connaît le volume de travail, le volume de causes et me fait une recommandation pour que j'inscrive cela dans mon prochain budget comme responsable.

M. Fontaine: C'est un exemple d'avis que vous pouvez lui demander, mais vous pouvez en demander bien d'autres, qui peuvent être politiques.

M. Guay: Ce sur quoi le député n'est pas d'accord...

M. Fontaine: Vous pouvez demander d'analy- ser les effets de l'application de la loi et c'est politique.

M. Tardif: Bien oui, c'est bien évident.

M. Fontaine: De donner des recommandations quant aux modifications qui pourraient être apportées à la loi, c'est politique aussi. C'est une décision politique de changer la loi.

M. Tardif: Cela se fait couramment. Si on entend politique au sens de servir de guide dans l'action, en effet, j'ai l'intention de demander à toutes les règles et les organismes qui relèvent de moi tout ce qui me sera utile comme législateur et comme administrateur et responsable d'un ministère, c'est vrai.

M. Fontaine: Ce n'est pas le rôle d'un juge de faire cela.

M. Guay: Est-ce que le député...

M. Fontaine: Parce que la régie va entendre des causes qui peuvent aller même jusqu'à $10 000, vous l'avez dit tantôt.

M. Guay: Mais est-ce que le député n'est pas d'accord que l'expertise...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Guay: Je ne peux pas poser une question au député.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Guay: M. le Président, est-ce que je peux poser une question au député?

Le Président (M. Laplante): Consentez-vous à une question?

M. Fontaine: Oui.

M. Guay: Est-ce que le député n'est pas d'accord que puisque ce sont des organismes spécialisés, celui-là ou un autre, il en a énuméré un certain nombre d'autres et il y en a d'autres aussi, que l'expertise acquise par ces organismes spécialisés, les font des conseillers de tout premier plan pour le gouvernement sans pour autant qu'il y ait confusion dans les rôles?

M. Fontaine: Si vous acceptiez la suggestion pour diviser le rôle administratif du rôle judiciaire, je serais parfaitement d'accord que le personnel de soutien, le personnel administratif de cette régie pourrait certainement donner des avis valables au ministre et lui faire des recommandations.

M. Guay: Entendre les causes.

M. Fontaine: Mais que ce soit les juges qui entendent les causes, qui donnent des avis politiques au ministre...

M. Guay: Un juge.

M. Fontaine:... vous me permettrez de différer d'opinion.

M. Tardif: M. le Président, je voudrais donner à l'intention des membres de cette commission et du député de Nicolet-Yamaska en particulier un exemple, où précisément la nature des renseignements qui peuvent nous provenir de la régie en tant qu'organisme rendant des décisions peut être utile.

L'Assemblée nationale a voté un amendement à la Loi favorisant la conciliation entre propriétaires et locataires pour inclure les chambreurs, il y a de cela plus d'un an. Au bout d'un an, j'ai demandé à la régie, avant de déposer la loi 107 modifiée, comment cela a fonctionné. Il y a eu une nouvelle clientèle qui est venue s'ajouter, les chambreurs. Leur réponse, émanant de la présidence, de la direction, a été: Zéro. Seuls sont venus devant la régie des étudiants d'université demeurant en résidence et représentés, entre autres, par un groupe d'étudiants en droit. Bravo! Le chambreur de la rue Panet, vivant dans un taudis, n'a pas été touché par notre amendement. On viendra me dire que c'est de l'ingérence politique ou que c'est un avis politique que la régie émet dans ce cas-là de dire: La juridiction que vous avez voulu étendre pour protéger les chambreurs vivant dans des taudis dans certains quartiers de la ville, cela passe à côté de l'objectif puisque, comme par hasard, des étudiants de l'université — je n'ai rien contre eux, tant mieux — vivant dans des résidences payées par l'Etat sont ceux qui s'en sont prévalu. Sur 1000 causes, 850 provenaient d'étudiants vivant en résidence à l'Université de Montréal. Je veux drôlement le savoir, comme législateur, si on est passé à côté de la question. Si cela n'intéresse pas le député de Nicolet-Yamaska, moi, ça m'intéresse.

M. Fontaine: Je suis d'accord pour dire que l'exemple que vous me donnez, ce n'est pas un cas d'ingérence politique, mais je peux vous dire également que vous n'avez pas besoin d'un régisseur pour vous donner cette information.

M. Tardif: Je voulais donner cet exemple parce qu'il ne portait pas précisément sur des aspects administratifs — exemple: Ouvrir un bureau de la régie à Nicolet — mais bien sur un champ nouveau et qui était lié à l'exercice d'une compétence. Je voudrais arrêter là. Je pense qu'il y a suffisamment d'exemples pour dire que les fonctions doivent être remplies; on pourrait, à la limite — j'en conviens avec le député de Nicolet-Yamaska — décider d'avoir deux corps distincts, mais le gouvernement a décidé qu'il y en aurait un. C'est cela.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

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M. Scowen: Je trouve que les commentaires du député de Nicolet-Yamaska sont pertinents et touchent une question assez profonde. Avant de commencer l'étude article par article, je veux simplement demander des éclaircissements sur un point qui est fondamental en ce qui concerne la juridiction d'une régie: C'est la façon dont les loyers seront contrôlés. Je demande au ministre de me dire si j'ai bien compris parce que ce n'est pas parfaitement clair dans les articles, à mon avis. Si je comprends le sens du système proposé, l'Assemblée nationale va adopter une loi dont l'article 1658.5 donne une série de critères qui seront utilisés obligatoirement pour toute augmentation ou demande d'augmentation de loyer au Québec. Je ne vais pas les lire, il y en a sept, dont le loyer payé pour le logement à la fin du bail, etc. Sur la base de ces sept critères et en vertu de l'article 106.3, le pouvoir de réglementation du gouvernement, sur une base annuelle, le gouvernement "va déterminer les règles de mise en application des critères prévus par les articles 1658.15" etc. et ils vont développer un formulaire — un peu comme le formulaire que nous vous avons donné au mois de juin — disant, par exemple, que cette année, toutes les personnes qui utiliseront l'huile à chauffage auront droit au coût actuel et à une augmentation de 16.1% etc.

C'est le gouvernement qui va, sur une base annuelle, établir ces chiffres, ces formules sur la base des critères que l'Assemblée nationale va adopter. Une fois que ces formules précises seront adoptées, elles seront en vigueur pour toutes les augmentations de loyer au Québec et la régie, en vertu de l'article 83, aura le droit de développer — je pense qu'ici c'est une erreur, ce ne sont pas les formules, mais les formulaires — les formulaires nécessaires à l'application de la présente loi, tenant compte des formules établies par le gouvernement par règlement.

Toutes les augmentations de loyer seront au maximum sur la base de ces règlements et je présume qu'elles sont sur une base annuelle, parce que ces augmentations vont changer de temps en temps et que les seules contraintes du gouvernement seront les contraintes établies dans l'article 1658. En effet, le tribunal de la régie, si vous voulez, n'aura pas le droit d'aller au-delà des normes établies par réglementation par le gouvernement et son rôle sera simplement de vérifier que les coûts actuels présentés par les propriétaires seront en effet la vérité et que les mathématiques ont été faites d'une façon correcte et sans erreur. En effet, si elles sont correctes et si le propriétaire peut justifier les coûts actuels sur lesquels il a basé ses augmentations, la régie est tenue de permettre cette augmentation à n'importe qui. Est-ce que c'est en gros votre programme?

M. Tardif: Je pense, M. le Président, qu'à peu de chose près cela résume assez bien le fait

qu'une méthode de fixation des augmentations sera déterminée, laquelle méthode sera fondée sur les critères énoncés à l'article en question. Cette méthode ayant fait l'objet d'un règlement, elle aura force de loi effectivement. A ce moment, le rôle des régisseurs siégeant sera, primo, d'apprécier. Enfin, évidemment tous les gens qui auront voulu s'entendre entre eux sur la fixation du loyer l'auront fait. Seules les causes venant devant la régie seront jugées selon ces critères, selon ces règles du jeu qui seront connues évidemment et le rôle du régisseur ou des régisseurs consistera à apprécier si, effectivement, advenant litige entre le propriétaire, le locataire sur le fait qu'il n'y a pas eu telle réparation, que ce n'est pas toute la toiture qui a été remplacée, c'est un trou qui a été bouché et enfin que sais-je, ce genre de choses, que nous pourrions également avoir d'autre part le locataire qui pourrait faire un plaidoyer pour dire que par rapport à l'immeuble qu'il a loué, il y a un an, il y a eu détérioration de la qualité, que la toiture coule, que l'eau chaude ne fonctionne pas, et autres preuves qu'il pourrait faire de détérioration ou de diminution de la qualité, ce genre de situation pourrait être appréciée par le régisseur, mais pour ce qui est de la méthode de fixation comme telle, il devra lire la loi comme tout juge présentement lit la loi. Si les éléments constitutifs de l'infraction a), b), c), d), sont présents, eh bien! monsieur vous êtes coupable.

M. Scowen: Je peux prendre votre exemple: la question de détérioration du plafond...

Le Président (M. Laplante): J'ai une demande à ce moment-ci. C'est qu'on s'était accordé de faire un tour d'horizon sur l'article 5, chacun des membres, je m'aperçois que cela fait une heure et quart qu'on fait le tour d'horizon là-dessus, mais on est entré dans le sujet de chacun des paragraphes. Il serait peut-être bon qu'on commence les paragraphes, les vider chacun et après cela en adopter l'article. (16 heures)

M. Scowen: M. le Président, j'accepte que c'est long, mais je vous assure que je n'essaie pas de prolonger indûment l'affaire. Je pense que cette question du rôle...

Le Président (M. Laplante): Ce n'est pas cela que je veux dire. Je ne voudrais pas que vous pensiez que c'est cela que j'avais à l'esprit. C'est parce qu'on s'était entendu pour faire un tour d'horizon, mais là c'est plus qu'un tour d'horizon; on est après vider l'article 5. Si vous voulez continuer globalement comme cela et après l'adopter, je n'ai pas d'objection. Si vous voulez retourner après cela à l'étude paragraphe par paragraphe, je pense que ce serait le temps de commencer à le faire.

M. Scowen: Je vous explique, M. le Président; c'est précisément parce que ce rôle de contrôle précis des loyers n'est pas explicite dans les sept paragraphes de l'article 5 que je veux que tout le monde en soit parfaitement conscient.

Le Président (M. Laplante): II y a l'article 7 où vous pouvez parler de tout cela, puisqu'il traite des règlements.

M. Scowen: Je ne le pense pas.

Le Président (M. Laplante): Oui, c'est là-dedans.

M. Scowen: Le sous-article 7.

Le Président (M. Laplante): Non, pas le sous-article, mais l'article 7, parce que là vous devancez de deux articles.

M. Scowen: Pour moi, M. le Président, à l'article 7, c'est la question de la nomination des régisseurs, si je comprends bien. Cela touche uniquement la question de la nomination des régisseurs, la façon de nommer les régisseurs. Ce ne sera pas long; je pense qu'on y arrive, mais je pense que c'est très important que ce soit explicite.

Par exemple, comme j'ai dit, vous avez parlé de ce droit d'exercer un certain jugement dans le cas de l'entretien des plafonds. Mais c'est précisément un des sous-articles dans 1685-15 sur lesquels le gouvernement est supposé faire la réglementation. J'imagine qu'ils vont dire quelque chose pour donner des limites précises à la régie en ce qui concerne cela. Non?

M. Tardif: Est-ce qu'on parle des normes minimales dont copie du règlement a été remise aux membres de la commission dès le mois de juin? Je ne sais pas si c'est ce à quoi réfère le député.

M. Scowen: Est-ce que je peux savoir le sens précis du préambule de l'article 1658-15 que je cite: "Le tribunal saisi d'une demande de fixation ou de révision de loyer détermine le loyer exigible conformément au règlement, compte tenu..."

Le Président (M. Laplante): Là, je vais vous arrêter. Là, on sort de l'article 5 complètement. Si vous lisez bien l'article 5, c'est "la régie exerce la juridiction qui lui est conférée par la présente loi et décide des demandes qui lui sont soumises. Elle est en outre chargée de renseigner..." Si vous voulez, on va les prendre article par article et là cela va vous donner des réponses.

M. Tardif: M. le Président, me permettez-vous de faire une remarque qui pourrait dissiper un malentendu? Dans le projet de loi no 107 tel que déposé en première lecture, en effet, on ne retrouvait pas cette nomenclature des éléments devant entrer dans la méthode de fixation. En commission parlementaire, face à différents groupes qui étaient venus se faire entendre, j'avais dit: Ce n'est pas nécessaire de l'avoir là; il y aura un règlement, ce sera dans le règlement. Cependant, si ma mémoire est fidèle, tant des propriétaires que des locataires ont dit: Nous serions plus rassurés au moins si, en plus du règlement, les grands éléments, les principaux facteurs sur lesquels s'ap-

puiera la réglementation étaient énoncés dans la loi, parce que, disaient-ils, un règlement peut être modifié par le gouvernement, tandis que la loi, évidemment, c'est l'Assemblée nationale. C'était cela qui avait amené cette addition dans l'article 1658 des principaux facteurs. Je ne sais pas si vous vous souvenez de cela.

M. Scowen: Oui. Cette expression "compte tenu" est-ce que c'est la régie qui doit tenir compte des sept critères en dessous, au-delà des réglementations, ou est-ce que c'est le gouvernement qui doit tenir compte de ces sept paragraphes dans la création des règlements? C'est la question que je trouve essentielle pour qu'on puisse comprendre le rôle de la régie.

M. Tardif: M. le Président, je veux bien vérifier, d'ici à ce qu'on arrive à l'article 1658-15, si le libellé est ambigu comme tel. Il est bien évident que le gouvernement va édicter un règlement dont j'ai déjà remis une copie à l'Opposition. C'est ce règlement, qui, lui, ne sera pas complètement le fruit de l'imagination du ministre ou de quiconque, mais qui devra s'ancrer autour de ces critères et qui aura force de loi. Si le paragraphe d'introduction à l'article 1658-15 portait à confusion à savoir si la régie le fera conformément à cela ou conformément au règlement qui, lui, aura été établi en fonction de cela, il me fera plaisir de le préciser.

M. Scowen: Oui, mais quelle était l'intention...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, on retourne à l'article 5, si vous voulez.

M. Scowen: M. le Président, la question que je posais...

Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît! On est rendu à l'article 1658. A l'article 5, on n'en parle pas.

M. Tardif: M. le Président, je m'excuse. On me signale qu'à l'article 106, si on le lit attentivement, il y a là la réponse à la question du député de Notre-Dame-de-Grâce. Le gouvernement peut — non pas la régie — par règlement — on va à 3° — déterminer des règles de mise en application des critères prévus par les articles 1658-15 à 1658-18 du Code civil pour la fixation ou la révision d'un loyer. D'accord? C'est cela. Donc, c'est le gouvernement qui détermine par règlement les règles de mise en application des critères prévus et non pas la régie.

M. Scowen: Jusqu'où ira la discrétion de la régie en ce qui concerne le contrôle des loyers? Sera-t-elle petite ou grande? Me comprenez-vous?

M. Tardif: Elle va appliquer le règlement. Si le règlement dit que pour l'huile à chauffage le taux d'augmentation est 16,2 ou 16,3 ou 16,4 ou 16,8, avec huit décimales près d'augmentation, c'est ce qui est appliqué pas autre chose. Il pourrait évidemment y avoir une contestation, je présume, de la part du locataire qui dirait: Normalement, en vertu du code d'habitabilité le logement aurait dû être maintenu à 20 degrés centigrades alors que j'ai des preuves, témoins à l'appui, que la température moyenne, au mois de janvier, a été de 12 degrés centigrades dans la bâtisse. Il pourrait faire porter le litige là-dessus, d'accord, mais non pas sur le taux d'augmentation.

Le Président (M. Laplante): Article 5, paragraphe 1. Adopté?

M. Scowen: Oui.

Le Président (M. Laplante): Paragraphe 2. Adopté?

M. Scowen: Oui.

Le Président (M. Laplante): Paragraphe 3. Adopté?

M. Scowen: Au paragraphe 3, nous avons des réserves importantes et nous voulons proposer que ce sous-article soit rayé; je vous explique pourquoi.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que la commission me permettrait de suspendre trois minutes? J'aurais un message important. S'il vous plaît, je vous demande une suspension de trois minutes.

Suspension à 16 h 8

Reprise à 16 h 30

Le Président (M. Laplante): Nous en étions au paragraphe 3 de l'article 5.

M. Fontaine: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Oui, M. le député.

M. Fontaine: Nous avons commencé à étudier cette loi ce matin, c'est une loi assez importante et complexe. Nous devons assez souvent, tout en étudiant un article, référer à d'autres articles. Notre rôle en tant qu'Opposition et en tant que parlementaires est de prendre le temps nécessaire pour étudier à fond cette loi pour essayer de l'améliorer autant que possible. A ce que je sache, actuellement, dans les discussions que nous avons eues, il n'est pas question de filibuster, on essaie de collaborer le plus possible et le ministre essaie de faire la même chose de son côté. Ne serait-il pas possible, M. le Président, d'être un peu plus conciliant quant à la façon d'étudier ce projet de loi, de ne pas être trop sévère quant à l'étude de tel paragraphe pour qu'on puisse se

comprendre? Je pense que cela pourrait aider l'étude de ce projet de loi.

Le Président (M. Laplante): Ce matin, M. le député de Nicolet-Yamaska — je ne sais pas quelle argumentation vous pouvez apporter là-dessus — j'ai usé d'une très grande souplesse. Je n'ai pas le droit non plus, comme président, parce qu'il y en a d'autres qui président aussi et cela peu causer des précédents, à un moment donné... Ce que je ne veux pas dans une commission, autant que possible, c'est de créer des précédents dangereux. Si, en étudiant un article, vous vous retrouvez 20 articles plus loin et vous commencez à détailler cet article, c'est ce que je ne veux pas parce qu'à un moment donné il se produit souven-tefois un mélange entre les deux; ce sont deux chapitres différents, souventefois. Surtout au début d'un projet de loi, alors que les énoncés peuvent se faire sur l'ensemble, peuvent faire référence à d'autres articles, cela n'a peut-être pas la même signification que vous pensez et je ne voudrais pas prendre la chance qu'on le fasse pour tout le projet de loi. Si vous voulez suspendre un article, libre à vous, la commission est libre de le faire. Je n'ai pas d'objection dans ce sens.

M. Fontaine: Cela aide à la compréhension de tout le monde. Je pense que même le ministre était d'accord sur la façon dont nous procédions. Je comprends, M. le Président, que vous avez été assez large d'esprit depuis le début de l'étude ce matin, mais il a semblé tout à l'heure, avant de suspendre pour quelques instants, que vous vouliez qu'on se restreigne à l'étude article par article.

Le Président (M. Laplante): Je vais prendre cet exemple, j'ai pensé que vous l'apporteriez. Regarder l'article 5 globalement, il n'y a aucune allusion à ce dont parlait le député de Notre-Dame-de-Grâce, et je l'ai laissé aller. Je l'ai même laissé aller sur un sujet complètement en dehors de l'article 5. Complètement. D'une intervention à l'autre, cela vous amène à discuter d'articles qui n'ont rien à voir avec l'article 5. Autant que possible, je vous demande votre collaboration là-dessus parce qu'à ce moment, par devoir, je suis obligé de vous rappeler à l'ordre. On se comprend?

M. Fontaine: D'accord.

Le Président (M. Laplante): Merci. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est vous qui aviez la parole sur le troisième paragraphe.

M. Scowen: Avant de parler sur le sous-article 3, je veux simplement vous dire, M. le Président, que je partage l'opinion du député de Nicolet-Yamaska. J'ai constaté — je pense que vous aussi — que c'est une loi très complexe. Dans le cas de l'article 5, j'ai essayé, avant de parler des sous-articles, de comprendre la première ligne qui disait: La régie exerce la juridiction qui lui est conférée par la présente loi. Je vous dis franche- ment que cette juridiction, dans mon esprit — j'ai lu et relu cette loi depuis des mois, je ne la connais peut-être pas aussi bien que le ministre, mais j'ai l'impression d'être né avec cette loi, je la connais un peu — il m'arrive encore de ne pas parfaitement la comprendre. Je pense qu'il était essentiel pour tout le monde — de notre côté au moins — de comprendre ce que voulait dire la discrétion qu'aura la régie dans le domaine de la fixation des loyers.

J'ai essayé de le faire comprendre aussi vite que possible et je pense qu'en effet, c'est un peu notre devoir. Je vous assure qu'on ne fait aucunement une espèce de filibuster. On essaie d'être sérieux là-dessus et on va continuer. Mais je vous demande poliment, dû au fait que chaque article a des liens étroits avec d'autres, de nous permettre un peu d'aller en profondeur au sens des articles avant de dire: adopté. Je pense que c'est notre responsabilité.

Le Président (M. Laplante): Le président n'a jamais nié votre responsabilité là-dessus, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: ...

Le Président (M. Laplante): Si j'ai fait ou j'ai dit quoi que ce soit qui aurait pu brimer votre liberté de parole, je m'en excuse. Je serais très mal placé pour vous dire que vous êtes en train d'organiser un filibuster. Ce n'est pas à moi d'analyser ça, pas du tout. Je crois à l'honnêteté de chacun des membres...

M. Scowen: Oui...

Le Président (M. Laplante): ... et je ne voudrais pas porter de jugement semblable.

M. Scowen: Très bien.

A l'article 3, vous m'avez dit qu'il est question de proposer qu'un sous-article soit rayé à cause de concordance. Je vais donner mon opinion sur ce sous-article. Je pense que ses commentaires ont un lien étroit avec mes commentaires généraux avant les dangers... A l'article 2, on a donné à la régie, outre ses responsabilités juridiques, de favoriser la conciliation entre locateur et locataire. C'est une responsabilité que je peux appeler neutre. C'est d'éviter autant que possible que les causes apparaissent devant la cour. Je peux comprendre facilement que cette espèce de favorisa-tion est quelque chose de souhaitable.

Dans le cas de favorisation de la conservation de logements, je vois un conflit. Dans le 5, la régie exerce la juridiction qui est conférée par la présente loi et une partie de la présente loi — c'est très clair — la section II, touche la démolition d'un logement, les articles 32 à 44. Il y a beaucoup de matière là-dedans, mais c'est une loi qui détermine ce qui doit être démoli, comment présenter une cause, les critères qui doivent être utilisés, ainsi de suite. Je comprends que les régisseurs, doivent, en tenant compte des articles 32 à 44, donner une décision sur le propos de démolition, oui ou non.

Mais quand vous ajoutez cette responsabilité, très claire sur le plan juridique, à une autre responsabilité, qui est de favoriser la conservation des logements, je pense que vous voyez quelque chose qui est un peu contradictoire. A titre d'exemple, les tribunaux peuvent, par exemple, décider que, sur la base des articles dans la loi, la démolition ne doit pas se faire, non, excusez, doit se faire, sur la base de la loi. Mais, en tenant compte du sous-article 3, qui n'est nullement explicité, ils peuvent dire: Ecoutez, oui, d'après la loi et tous les critères qui se trouvent... sur lesquels on va avoir une conversation tout à l'heure, 35, au-delà de tout ça, nous avons le mandat de conserver les logements.

Pour moi, parce que c'est une partie de la loi qui est là, dont on va discuter tantôt, et qui vise en soi une conservation équilibrée des logements, ce n'est pas du tout nécessaire d'avoir le paragraphe 3. J'aimerais avoir les commentaires du ministre là-dessus.

M. Tardif: Oui. M. le Président, il est bien évident que, dans la mesure où le projet de loi no 107 réimprimé a conféré un rôle beaucoup plus grand aux municipalités en matière de conservation du stock de logements, dans la même mesure, donc, le rôle de la régie a été réduit considérablement.

Cependant, il faut bien se rendre compte que la régie, lorsque les municipalités n'auront pas décidé d'adopter un règlement, a quand même un rôle à jouer, ce rôle qui est décrit à la section II et qui peut aller, disons, qui va plus loin que strictement de décider de l'opportunité ou non de démolir un immeuble. Par exemple, on constate, à l'article 36, qu'une personne qui désire conserver à un logement son caractère locatif peut, lors de l'audition d'une demande, intervenir pour demander un délai afin d'entreprendre ou poursuivre des démarches en vue d'acquérir l'immeuble dans lequel est situé le logement. Ceci, en vue de conserver l'immeuble, de le restaurer, de ne pas diminuer le stock de logements. C'est donc, si vous voulez, dans cet esprit de favoriser le maintien du stock de logements que cet article 36 s'inscrit et il n'y a pas de contradiction, je pense, entre ces tâches spécifiques qui sont énoncées à la section II et ce que l'on retrouve, enfin, le passage, ou la mission ou la fonction qu'on retrouve au paragraphe 3, quand on dit que la régie est, en outre, chargée, en plus des autres tâches, de favoriser la conservation des logements.

Ce n'est pas contradictoire. Cela ne va pas plus loin que cela. Cela ne dit pas, disons, conserver à tout prfx les logements existants. On dit: favoriser la conservation. On voit que la régie, dans les articles 32 et suivants, a un rôle très large, a un pouvoir très grand en ce qui concerne, par exemple, l'audition de tiers qui pourraient être concernés ou intéressés à conserver lesdits logements. Pour ces raisons, ça m'apparaît tout à fait dans l'esprit de ces autres attributions qui vont suivre par la suite dans la section II.

M. Scowen: Est-ce que vous prévoyez la possibilité d'une action de la part de la régie basée sur le paragraphe 5.3, qui est au-delà d'une action basée sur les articles 32 à 44?

M. Tardif: Une action qui... Oui, on pourrait très bien concevoir que la régie, par exemple, dirige une personne, qui veut démolir un logement, vers la Société d'habitation du Québec, qui serait responsable de l'application d'un programme de restauration, pour dire: Voici, est-ce que vous êtes au courant, monsieur, qu'il y a des programmes de restauration qui existent, qui peuvent vous permettre de remettre ce logement en état? Ce serait donc dans l'esprit, ce serait conforme au mandat qu'elle aurait de favoriser la conservation des logements, sans, pour autant, l'obliger.

M. Scowen: Mais, sur quelle base cette favori-sation sera-t-elle faite? Est-ce que c'est de favoriser, point, la conservation, parce que c'est ça que ça dit? Je prends l'exemple d'une... J'ai reçu une lettre d'un architecte à Montréal, qui donnait son opinion sur un certain quartier de Montréal. Il trouvait que ce n'était pas très beau, ni pour les locataires ni pour le revenu de la ville de Montréal. Il attachait un article de Pierre Bourgault, qui, je pense... un de vous autres, là, qui disait qu'il trouvait que Montréal, en général, et ce quartier-ci aussi n'étaient pas très beaux.

Moi, je pense que c'est très subjectif, ces choses-là. Mais, si je comprends bien, et si on suit cette responsabilité, moi, si j'étais un régisseur, j'aurais, très clairement et nettement, la responsabilité, point, de favoriser la conservation des logements, point, qu'ils soient en bon état, en mauvais état, ce sont des choses qui doivent être conservées. C'est en noir et blanc, si vous voulez. Je pense que si vous disiez: favoriser la conservation des logements dans la mesure où ça se conforme à l'article 35 qui donne quelques critères, ou si vous ajoutiez quelque chose de substance... Mais quand vous dites qu'ils doivent exercer la juridiction sur les articles 32 à 44, et tout de suite après, qu'en outre, il doit favoriser la conservation du logement. Je vois une contradiction importante et qui ramène à cette question du tribunal administratif qui est assez importante. (16 h 45)

M. Tardif: Evidemment, dès qu'on donne à une régie le pouvoir d'émettre des permis, on lui donne aussi le pouvoir de ne pas en émettre. Au pire, ainsi que me le fait remarquer le député de Taschereau, ce paragraphe peut être tautologique par rapport à la section II qui suit, mais ce n'est sûrement pas contradictoire et cela indique, en tout cas, le souci de conservation du stock de logements. Encore une fois, cette conservation ne se fait pas à tout pris, mais bien à la lumière des critères énoncés plus loin. Cela, je pense que ça va de soi que la régie ne décide pas, de but en blanc, comme ça, d'exercer cette fonction qui lui est assignée indépendamment du reste de la loi.

M. Scowen: Dans ce cas, je voudrais proposer un amendement au sous-article 5.3, lequel se lit

comme suit: "De favoriser la conservation des logements sur une base consistant avec l'article 35." Si je comprends, c'est dans le sens de ce que vous avez dit suite à l'explication du député de Taschereau.

Le Président (M. Laplante): Je vais lire l'amendement proposé au paragraphe 3 de l'article 5 qui se lirait comme suit: "De favoriser la conservation des logements en conformité avec l'article 35." Cet amendement est recevable.

M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, je pense que c'est non seulement de l'article 35 dont doit s'inspirer la régie dans l'application de cette loi, mais c'est de toute la loi, et de toute la section II en particulier, en ce qui concerne la conservation des logements, si bien que je ne vois pas très bien ce que cet amendement aDDorterait. A la place, si cela satisfait le député de Notre-Dame-de-Grâce, je serais plutôt porté à retirer le paragraphe 3 de l'article 5 qui peut être jugé redondant, eu égard aux autres dispositions de la loi.

M. Scowen: C'est aussi ma préférence.

Le Président (M. Laplante): Retirez-vous votre motion, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce?

M. Scowen: Oui, je...

M. Tardif: M. le Président, attendu que dans l'introduction du paragraphe 5 on dit: "La régie exerce la juridiction qui lui est conférée par la présente loi et décide des demandes qui lui sont soumises..." et qu'une des juridictions qui lui est conférée par la présente loi, c'est celle que l'on retrouve à la section II, dispositions particulières à la conservation des logements.

M. Scowen: C'est très clair.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, faites-vous une motion pour retirer le troisième paragraphe de l'article 5? J'ai bien compris?

M. Tardif: C'est ça, M. le Président. Le Président (M. Laplante): Adopté? M. Scowen: Adopté.

Le Président (M. Laplante): J'appelle le quatrième paragraphe, qui devient le troisième, mais on fera une motion plus tard pour la rémunération.

M. Scowen: Au paragraphe 4, j'ai une seule question. Nous avons plusieurs statisticiens; est-ce que la Régie des loyers sera le seul organisme, au sein du gouvernement du Québec, à avoir cette responsabilité ou est-ce un dédoublement avec le ministère ou avec la Société d'habitation du Québec? Prévoyez-vous un regroupement des statisticiens?

M. Tardif: M. le Président, je pense que la Société d'habitation du Québec maintient des statistiques sur le nombre de logements sociaux existants, par type de logements, par clientèle, leur distribution géographique, alors que dans le cas de la régie, c'est évidemment surtout dans le stock de logements locatifs qu'elle est intéressée et il n'est pas question qu'elle fasse double emploi avec d'autres sources de données qui pourraient exister comme celles des rapports de Statistique Canada, par exemple, ou les documents compilés par la Société centrale d'hypothèques et de logement. Elle pourrait, au besoin, cependant, compléter ces documents. On sait, par exemple, que la SCHL publie, sur une base trimestrielle, des données sur les taux de vacance dans les régions métropolitaines du Canada. Ceci comprend trois ou quatre régions au Québec seulement et, même dans ces régions — par exemple dans la région de Montréal — ça ne couvre que les immeubles de six logements et plus. Alors, dès lors qu'on voudrait avoir une idée des taux de vacance et de l'offre et de la demande sur des immeubles de moins de six logements, on ne dispose, à l'heure actuelle, d'aucune donnée. Il ne s'agit donc pas de faire double emploi, mais il s'agit d'avoir un minimum de renseignements pour les fins de l'administration de cette loi.

M. Scowen: Dans votre esprit, le mot "logement", qui se trouve dans ce paragraphe, est le même logement qui apparaît dans l'article 1, logement locatif?

M. Tardif: Tel que défini, par exemple, n'entrent pas là-dedans les données sur l'habitation en général et l'habitation unifamiliale, il s'agit de logement locatif.

M. Cordeau: Sur le même article. Est-ce que la régie va être en mesure de fournir des statistiques dans les endroits où il manque de logements? Est-ce que ça a déjà été souligné?

M. Tardif: De logements locatifs, oui, ça pourrait effectivement entrer à partir du moment où elle compile des données sur les taux de vacance et de façon plus raffinée que ce qui est disponible présentement.

M. Cordeau: Incluant les quatre logements et moins?

M. Tardif: Evidemment, ceci pourrait être fait. A l'heure actuelle, à la SCHL, c'est pour plus de six logements seulement, en bas de ça, on ne sait pas.

M. Cordeau: Est-ce que vos statistiques comprendront toutes les formes de logements?

M. Tardif: Nous n'avons pas, à l'heure actuelle, dressé une liste des rapports que la Régie du logement devrait fournir, ceci restera à déterminer, compte tenu des besoins pour l'application de cette loi.

Le Président (M. Laplante): Le quatrième paragraphe est-il adopté?

M. Tardif: Adopté. M. Scowen: Adopté.

Le Président (M. Laplante): Cinquième paragraphe.

M. Scowen: M. le Président, j'ai une question à poser sur le cinquième paragraphe, mais si le ministre me le permet, je préférerais discuter de cette question, après qu'on ait discuté toute la question de la composition de la régie, dans l'article 6. S'il le préfère, je soulève la question, mais ce sera plus clair si on laisse ce sous-article, jusqu'à ce qu'on ait discuté... Est-ce qu'on suspend jusqu'au moment où on discutera l'article 6?

M. Tardif: Si vous voulez le laisser en suspens.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous aimeriez suspendre les cinquième, sixième et septième paragraphes et suspendre l'article 5 et faire le sixième?

M. Fontaine: Le septième, on peut l'adopter.

Le Président (M. Laplante): Vous pouvez adopter le septième.

M. Scowen: Oui, on n'a pas de problème avec le septième.

Le Président (M. Laplante): Septième paragraphe adopté.

M. Tardif: Adopté. Est-ce que le sixième pose...

M. Scowen: Les cinquième et sixième sont un peu liés dans mon esprit. Si on peut...

M. Tardif: On peut suspendre.

Le Président (M. Laplante): Les cinquième et sixième paragraphes de l'article 5 sont suspendus et l'article 5 suspendu. J'appelle l'article 6.

M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, l'article 6 est celui qui énonce la composition de la régie qui sera formée d'un président, de deux vice-présidents, "nommés, dit la loi, en nombre suffisant par le gouvernement pour un mandat d'au plus cinq ans. Le gouvernement détermine la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail des régisseurs."

Cet article reproduit en substance le deuxième alinéa de l'article 2 de la loi actuelle, sauf qu'il stipule que le mandat des régisseurs ne peut excéder cinq ans. Les autres commentaires qui pourraient être faits en ce qui concerne les régisseurs comme tels, nous les verrons lorsqu'il sera question également peut-être du pouvoir de réglementation de ceux qui assumeront ces fonctions.

M. Scowen: M. le Président, on a un peu réfléchi sur la composition de la régie, surtout devant les tâches multiples qu'on confère à cet organisme et nous avons une sugçestion à vous faire, un amendement, si vous voulez, et je veux expliquer un peu le sens de nos réflexions.

Premièrement, normalement, dans le cas d'une régie, on crée un conseil d'administration de quatre, cinq, six, huit, neuf, dix régisseurs qui sont responsables de l'application d'une loi. Vu que cette régie a cette responsabilité comme tribunal, on a décidé de nommer un nombre illimité de régisseurs avec l'idée que toutes les personnes qui auront le droit d'entendre une cause, un appel auront le titre et la responsabilité de régisseurs. On peut prévoir même, si notre programme de conciliation ne marche pas très très bien, que nous serons devant un nombre de régisseurs assez large.

Je pense que le ministre a prévu cette possibilité parce qu'à deux ou trois endroits il a donné un pouvoir au président de la régie qui, je pense, normalement et très souvent est la responsabilité de ta régie même. Je ne sais si j'ai suivi ses réflexions de façon correcte et étroite, mais mon impression, c'est que l'on va avoir peut-être une vingtaine ou une trentaine ou une cinquantaine de régisseurs. Ce ne sera pas possible qu'ils soient un conseil d'administration comme tel pour s'acquitter de toutes les autres responsabilités administratives. On voit, par exemple, deux ou trois endroits où on dit que c'est la présidence qui dirige la régie. (17 heures)

Nous croyons qu'une autre formulation pourrait nous aider à réaliser une certaine séparation des tâches judiciaires et des tâches administratives et publicitaires. Je veux proposer une idée sur laquelle le ministre pourra réfléchir et je le fais en guise d'amendement. Je vais le lire et c'est dans le but qu'il puisse comprendre nos préoccupations. La régie est composée de sept régisseurs — sept, c'est une idée — dont le président et le vice-président sont nommés par le gouvernement pour un mandat d'au plus cinq ans, lequel est cependant renouvelable. C'est une autre question. Le gouvernement détermine la nomination, etc. Le gouvernement nomme, en outre, cinq juges et des commissaires en nombre suffisant pour entendre toute demande de la juridiction de la régie. Les commissaires sont nommés à titre permanent et le gouvernement détermine leur rémunération, leurs avantages sociaux et leurs conditions de travail.

En effet, nous aurons une régie traditionnelle avec toutes les responsabilités administratives. Nous avons les amendements qui font concordance à cet article, qui vont indiquer, par exemple à l'article 10, que le président ou le vice-président de la régie coordonne et répartit, non pas surveille, le travail des commissaires. En ce cas, nous aurons un groupe de sept personnes qui peuvent fonctionner comme une régie traditionnelle, si

vous voulez, avec une responsabilité de la régie — totalement de la régie, pas du président — envers le ministre — dont le président, avec des fonctions plus ou moins normales — et à part un groupe de personnes qui peuvent former un tribunal...

Le Président (M. Laplante): En conformité avec le journal des Débats, nous allons juger de la recevabilité de la motion.

M. Scowen: Je m'excuse!

Le Président (M. Laplante): Elle n'est pas jugée. Pour couper court, après l'avoir lue attentivement, elle est recevable et vous pouvez continuer.

M. Scowen: Est-ce que je suis obligé de répéter tout ce que j'ai dit?

Le Président (M. Laplante): Non, c'est seulement pour les fins du journal des Débats. Vous en seriez heureux, quoi?

M. Scowen: Oui, mais j'espère que tout ce qui a été dit a été enregistré.

M. Caron: Aimeriez-vous mieux le redire?

M. Scowen: Je souligne seulement trois ou quatre petits points qui deviennent, je pense, plus cohérents avec ce changement. Je reviens à la question du sous-article 5 de l'article 5. Vous avez donné à la régie la responsabilité de donner au ministre désigné son avis sur toute question que celui-ci soumet. Vous avez donné, à l'article 26, au président la responsabilité de fournir au ministre désigné tous les renseignements que celui-ci requiert pour les activités de la régie.

En effet, le président, sur les bases de vos propos, aura un lien privilégié. Vous donnez à la présidence, d'après nous, des pouvoirs qui sont plus étendus que ceux qu'on voit normalement, des pouvoirs qui sont même à part des pouvoirs de la régie comme telle. Un pouvoir veut que ce soit le président qui dirige la régie. Nous préférons que ce soit les régisseurs qui dirigent la régie et non pas le président seul. Les régisseurs sont en nombre adéquat pour former un conseil d'administration efficace, utile et pratique. Je donne un exemple, l'article 83. A une assemblée convoquée par le président, les régisseurs peuvent, à la majorité, adopter des règlements de procédure jugés nécessaires. Vous pouvez imaginer une assemblée au Colisée avec quelques centaines de régisseurs qui adoptent les règlements. Ce n'est pas faisable, c'est un groupe trop considérable.

A mon avis, il serait beaucoup mieux d'établir une régie cohérente, qui peut fonctionner comme un conseil d'administration, qui peut s'occuper de l'administration de la régie, qui aura quand même un personnel assez élargi qui travaille de jour en jour dans le domaine de la publicité, dans le domaine de la conciliation avec des conciliateurs, dans le domaine de renseignements, la direction des études et recherches et tout et, à part, un groupe qui formera un tribunal — je le répète — qui sera sous la juridiction de la régie, des sept régisseurs en ce qui concerne la coordination et la répartition du travail, mais qui ne seront pas surveillés dans le sens que leurs décisions seront soumises à l'approbation des personnes qui sont plutôt de nature administrative.

Je propose cet amendement dans le but de séparer, d'une façon plus claire, les responsabilités assez complexes et assez diverses dont on a déjà parlé et j'aimerais avoir les commentaires du ministre là-dessus.

M. Tardif: M. le Président, je voudrais m'assurer que je comprends bien le sens de l'amendement. Il est dit ici: La régie est composée de sept régisseurs dont un président et deux vice-présidents nommés par le gouvernement pour un mandat d'au plus cinq ans, lequel est cependant renouvelable. Le gouvernement détermine la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail.

Après cela on dit: Le gouvernement nomme en outre cinq juges et des commissaires, en nombre suffisant pour entendre toute demande de la juridiction de la régie. Les commissaires sont nommés à titre permanent et le gouvernement détermine leur rémunération, leurs avantages sociaux et leurs autres conditions de travail. Donc, on aurait deux groupes: un premier groupe de sept régisseurs, dont un président et deux vice-présidents et après cela cinq juges et des commissaires en nombre suffisant.

M. Scowen: C'est une suggestion.

M. Tardif: La première question qui me vient à l'esprit c'est: Le premier groupe, c'est-à-dire ce que je crois être la déformation professionnelle du député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est-à-dire l'attitude de la "corporation", entre guillemets, du conseil d'administration, si vous voulez, d'une société d'affaires, est-ce qu'il s'agirait là de gens agissant à temps plein?

M. Scowen: Oui. Pourquoi pas? Ce n'est pas une question essentielle, mais je pense qu'on a des exemples des deux dans les autres types.

M. Tardif: Cela me paraît assez important parce que, quand même, il y a très peu d'entreprises, que je sache, qui regroupent à peu près 300 employés qui peuvent se payer le luxe d'avoir un conseil d'administration de sept personnes à temps plein. On va retrouver peut-être un PDG à temps plein et il y a des gens qui sont là et qui siègent, qui ont des jetons de présence pour siéger. D'abord, sept personnes à temps plein pour gérer une entreprise qui regroupe 300 employés, cela me paraît quelque chose d'énorme.

La deuxième, c'est cinq juges et des commissaires en nombre suffisant.

Evidemment, on dit: Cinq c'est un minimum et les autres seraient là à demande. D'abord, il y a le fait qu'on parle ici de cinq juges alors que dans la

loi il n'est évidemment pas question de se baser essentiellement ou principalement même sur des juges qui par définition — le député n'en parle pas — je présume, seraient des juges de la Cour provinciale, par exemple, pour entendre ce type de cause.

Dans la formule que nous avons retenue avec un président et deux vice-présidents s'occupant à la fois du partage des tâches entre les régisseurs et de fonctions administratives, il nous paraît que cette haute direction est suffisante en nombre, et ce qui n'empêche pas que la régie comme telle, cela entend des régisseurs comme corps nommés en nombre suffisant — tantôt je pourrai donner des indications de ce qu'on entend par cela — que ces gens puissent collégialement — c'est prévu à l'article 83 — se donner des règles de pratique. Je veux bien croire que sans doute le député de Notre-Dame-de-Grâce — je ne sais pas pourquoi je les mélange depuis ce matin tous les deux — a voulu un peu caricaturer la situation, lorsqu'il a dit: II faudra louer le Cotisée de Québec pour que les régisseurs puissent se réunir. Ils sont beaucoup trop nombreux.

Je vous ferai remarquer qu'il y a 155 juges à la Cour provinciale et 120 à la Cour supérieure et que c'est de la façon dont ils se donnent leurs règles de pratique, se réunissent collégialement et adoptent ces règles qui régissent leur fonctionnement de tous les jours. C'est donc dire que la formule n'est pas inédite et que, dans le cas de la Régie du logement comme telle, il n'est pas prévu un nombre aussi considérable; loin de là.

J'ai mentionné ce matin qu'il y a actuellement à la régie, siégeant en première instance, plus ou moins 70 administrateurs à la séance et qu'il y a une quinzaine — quatorze, je crois, maintenant — commissaires qui siègent en appel. On sait maintenant que, de par la loi qui est devant nous, les appels seront entendus par la Cour provinciale. Donc, il y a plus de juridictions d'appel.

Deuxièmement, toutes les matières de première instance — enfin, il y aura quand même un appel en matière de fixation de loyer — seront entendues par des régisseurs qui verront leur volume de travail s'accroître du fait qu'ils auront compétence sur tout ce qui, auparavant, allait à la Cour des petites créances, par exemple, dès qu'il s'agit du bail d'un logement, et ce qui serait de nature à faciliter les choses tant pour les propriétaires que pour les locataires. Quand un propriétaire voulait percevoir une créance due sur un immeuble, trois mois de loyer, et qu'il devait s'adresser, pour ce faire, à la Cour provinciale et débourser des frais, dorénavant il pourra le faire sans frais, sans avocat — avec un avocat s'il le veut, mais cela n'est pas nécessaire — devant la régie, ce qui devrait être de nature à faciliter et surtout lorsque cette démarche s'accompagne ou devait s'accompagner auparavant d'une double démarche, c'est-à-dire une à la régie pour résiliation de bail pour défaut ou non-paiement de loyer et une autre à la Cour provinciale pour le montant dû.

A l'heure actuelle, les 70 administrateurs entendent donc à peu près les 60 000 causes dont a été saisie la régie l'année dernière. On dit, cette année ou l'an prochain, peu importe, à cela viendront s'ajouter les affaires qui vont présentement devant la Cour des petites créances, donc un volume d'affaires plus grand. Or, il est prévu à peu près, en fonction du nombre de causes — évidemment, je ne cacherai pas au député de Notre-Dame-de-Grâce que ceci est un peu fonction de ces autres facteurs qu'il a évoqués tantôt comme, par exemple, le taux de vacance dans les logements dans la mesure où le taux de vacance est plus grand, que certains propriétaires ne demandent peut-être pas les augmentations qu'ils auraient demandées s'il y avait eu un resserrement du marché et qu'en conséquence, le nombre d'affaires allant devant la régie tombe. C'est un petit peu ce qui se produit présentement parce qu'il y a moins d'affaires au moment où nous nous parlons qu'à la même date l'année dernière. Il est prévu une trentaine de régisseurs à temps plein pour s'occuper de ces causes. A l'heure actuelle, les honoraires payés aux administrateurs siégeant à la séance se chiffrent à environ $1 million par année et l'engagement d'une trentaine de régisseurs à temps plein va coûter environ le même montant. D'accord? Il s'agit uniquement de ne pas se couler dans le béton quant à un nombre précis dans la loi et de le faire en fonction d'un volume prévisible d'affaires dont serait saisie la régie.

M. le Président, pour ces raisons, pour des raisons que j'ai mentionnées au tout début, à savoir que je ne vois pas la nécessité d'avoir un conseil d'administration de gens à temps plein, de sept personnes pour gérer un organisme, somme toute, assez modeste quant à sa taille, je crois que le député de Notre-Dame-de-Grâce, après avoir eu ces éclaircissements, voudra peut-être reconsidérer l'amendement et revenir au texte original. (17 h 15)

M. Scowen: Bon. Je remercie le ministre de ses commentaires et je pense que je n'ai pas assez clairement élaboré les intentions en ce qui concerne cet amendement. Premièrement, je veux dire franchement et tout de suite, l'allusion que vous connaissez c'est une caricature comme vous avez dit et je ne veux plus en parler. De plus, je veux ajouter que l'idée d'avoir cinq juges, sept régisseurs, ce sont des questions de détail, on n'est pas du tout pris. De plus, la question que les sept régisseurs doivent être à temps plein ou à temps partiel, c'est une autre question qui, je l'accepte, est très discutable.

Il y a deux éléments clés qui nous ont amenés à suggérer ces changements. Le premier, c'est que vous prévoyez une trentaine de régisseurs, très bien. Ce sera pour le départ, on peut prévoir que le nombre ne diminuera pas. C'est possible et c'est plutôt dans la nature des choses que cela augmentera. Il y en aura certainement d'autres qui vont s'occuper exclusivement de la section II, les experts dans la démolition. Chacun de ces régisseurs, sur le plan juridique, aura une responsabilité juridique pour tout ce qu'on trouve dans l'article 5. La régie est composée des régisseurs et les régisseurs exercent les juridictions dans le rensei-

gnement, la conciliation, les études, ainsi de suite. C'est clair pour vous, pour moi et pour tout le monde, que ce n'est pas praticable que ces régisseurs, qui seront dispersés à travers le Québec, puissent exercer dans aucun sens réel, cette juridiction sur les responsabilités de la régie.

Tenant compte de cette réalité, je pense que ce que vous avez décidé de faire c'est de dire, et je cite: "Le président dirige la régie et il est responsable de son administration et de la direction générale." Vous n'avez pas trouvé un point mitoyen entre une seule personne, un président, et tous les régisseurs qui sont sur une base formelle les responsables pour ce qui concerne les sept articles. Nous trouvons que c'est un danger. Premièrement, parce que nous prévoyons un président avec un pouvoir et, d'après certains autres articles, un lien direct et privilégié avec le ministre qui sera connu de lui seul; il ne sera pas soumis aux conseils et opinions des autres régisseurs qui seront, comme je l'ai dit, dispersés et certainement pas au courant avec toute l'administration de cette affaire. A cause du fait que la régie est trop grande pour exercer vraiment, en réalité, les pouvoirs qui sont conférés dans l'article 5, vous étiez obligés d'aller envers... il n'y a pas de meilleur point, qu'on donne tous les pouvoirs à un seul président.

Ce que nous suggérons c'est un peu de régler ce problème avec la création d'un groupe, soit à temps plein, soit à temps partiel, soit les deux, contenant bien sûr les juristes parce qu'ils auront la responsabilité d'exercer un rôle de coordination et de répartition de tâches et un lien très très proche avec les personnes qu'on a appelées les commissaires qui vont faire entendre les causes. Comme cela, nous pouvons avoir plus d'une personne et nous pouvons avoir un partage des responsabilités. Nous pouvons réellement, comme vous l'avez suggéré, demander à la régie de donner son avis sur une question. On peut, si vous voulez rayer l'article 26 qui, pour nous, donne des pouvoirs très énormes, très forts, à une seule personne. On peut rendre la réalité du fonctionnement de la régie plus en conformité avec ce qui est écrit dans la loi.

M. Tardif: Encore là, je pense qu'il y a une ambiguïté fondamentale qui semble s'incruster dans l'esprit de certains intervenants autour de cette table. Il n'est pas question d'attendre des régisseurs qu'ils exercent toutes et chacune des fonctions énumérées à l'article 5. Les régisseurs, je dirais dans la totalité ou la quasi-totalité de leurs fonctions, vont faire de l'adjudication. Le voudraient-ils, M. le Président, qu'ils ne pourraient pas accomplir la plupart des autres fonctions. Lorsque je veux avoir une analyse statistique de la situation du logement, ce n'est pas au régisseur que je vais m'adresser mais bien au statisticien de service, au sociologue de service, à l'économiste de service, qui sont à la régie.

Il y a d'ailleurs ici, derrière moi, plusieurs conseillers de la régie actuelle qui ne sont pas des régisseurs, aucun d'entre eux ne l'est. Ce sont des membres du contentieux, ce sont des économis- tes, mais ce ne sont pas des gens... les régisseurs sont là à rendre des fonctions judiciaires, à décider des causes.

Alors, M. le Président, dans l'actuel organigramme de la présente commission, il y a en plus des administrateurs des gens qui remplissent toutes ces fonctions, il y a un attaché de relations publiques, il y a des chercheurs, il y a des spécialistes en mécanographie pour s'assurer de la fabrication des programmes informatiques nécessaires. On ne demande pas cela aux régisseurs.

Il y a donc ce partage des tâches entre, si vous voulez, l'adjudication comme telle qui va être le lot des régisseurs; il y a les tâches administratives qui vont être le lot du personnel de soutien, les quelque 300 personnes environ qui sont là et qui vont continuer d'exercer les mêmes fonctions et mieux, nous l'espérons; et il y a évidemment dans l'accomplissement de ses fonctions de présidence de la régie le pouvoir qu'a le président à l'article 12 de déléguer de ses fonctions au vice-président, pouvoir qu'a le président.

Il m'apparaît évident que pas plus dans la nouvelle régie que dans l'actuelle nous attendrons des hommes de loi autre chose que de dire la loi, de voir qu'elle soit appliquée dans les causes qui leur seront soumises. Mais de là à se lancer, chacun d'eux, individuellement, en province ou autrement dans les campagnes de publicité, chacun faire son petit relevé statistique, chacun faire ci, chacun faire ça, bien non, évidemment pas.

M. Scowen: Très bien. Je vous suis parfaitement, M. le ministre, mais ce n'est pas exactement ce qui est dit dans la loi et c'est cette contradiction qu'on voulait éviter. Si, par exemple, vous me proposez d'être régisseur et si je n'étais pas député j'accepterais heureusement, quelles sont mes responsabilités? Bon, vous allez me dire: Vous êtes un des régisseurs de la régie, vous faites partie de la régie.

M. Tardif: C'est cela.

M. Scowen: Et vous êtes en outre chargé, vous, parce que vous êtes le régisseur, vous faites partie de la composition de la régie, de renseigner, etc. C'est bien clair et c'est entendu que vous ne me demandez pas de faire le renseignement moi-même ni de faire les recherches moi-même. Je comprends parfaitement, c'est entendu mais par rapport à la loi, vous me donnez la responsabilité de vérifier que ces choses sont faites. Pour moi c'est clair dans la loi, la régie est composée des régisseurs et la régie est en outre chargée de: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. Alors, cela arrive souvent — on le voit souvent dans les organismes gouvernementaux — que les membres du conseil d'administration de la régie ne prennent pas leurs responsabilités. En effet, ce qui arrive dans la pratique n'est pas du tout conforme avec ce qui est écrit dans la loi.

Je ne pense pas qu'on doive créer un nouvel organisme, à moins que cela soit absolument

nécessaire, lorsque le ministre peut nous dire, à la création de la loi, que les responsabilités et les fonctions qui sont prévues pour les régisseurs ne sont pas du tout celles qui sont écrites dans la loi. C'est pour cette raison que j'ai proposé qu'on limite le nombre de régisseurs à un nombre convenable et qu'ils prennent leurs responsabilités de diriger comme un conseil d'administration, avec les responsabilités décrites à l'article 5. Cela sera une pas mal grosse affaire avec tout ce qu'on prévoit. S'ils vont faire leur travail d'une façon efficace, ce sera probablement un travail pour cinq ou six régisseurs à temps plein, dont deux ou trois permanents et deux ou trois à temps partiel. Vous pouvez dire aux autres, d'une façon très honnête: Vous n'avez pas de responsabilité en ce qui concerne les sous-articles de l'article 5.

M. Tardif: M. le Président, je voudrais attirer l'attention — j'ai parlé tantôt de l'article 12 qui dit que les vice-présidents exercent les fonctions qui leur sont déléguées par le président — de cette commission sur l'article 10 qui dit que "le président ou le vice-président qu'il nomme à cette fin coordonne, répartit et surveille le travail des régisseurs qui, à cet égard, doivent se soumettre à ses ordres et à ses directives". J'imagine que le député de Notre-Dame-de-Grâce, s'étant qualifié à un concours pour le poste de régisseur, est nommé en bonne et due forme, qu'il se rapporte au travail lundi matin, au bureau du président, et que le président dit: Très bien, monsieur; vous êtes régisseur et vous êtes assigné au bureau de Montréal. Maintenant, vous entendrez les causes qui seront inscrites au rôle pour vous. Un point, c'est tout.

M. Scowen: Oui, mais vous voyez — je l'espère — M. le ministre, un peu de contradiction entre la définition de la régie et les régisseurs aux articles 5 et 6 et la définition des tâches qui est précisée aux articles 10 et 12. Oui, j'accepte l'idée que vous pouvez fonctionner de cette façon, mais quand vous dites que la régie comme telle est composée d'un groupe de régisseurs et que vous donnez à cette régie, à ces régisseurs ces pouvoirs, il est tout de suite nécessaire, à la page suivante, d'aller un peu en contradiction de cette déclaration de fond qui crée les régisseurs et la régie en disant: Ecoutez! C'est vrai qu'à la page 6, vous avez toutes ces responsabilités, mais il ne faut pas les lire. Il n'est pas nécessaire de lire ni la page 6 ni la page 7. C'est tout ce qui vous concerne.

Je ne suis pas juriste, mais j'ai assez d'expérience dans ce domaine, à savoir qu'un régisseur peut, dans la loi, même avec l'article 10, sentir au moins qu'il a une certaine responsabilité dans le domaine des responsabilités globales de la régie. Je dis que cela n'est pas une question de théorie parce que je vois que la seule solution que vous avez trouvée pour régler le problème, c'est de donner à un président des pouvoirs qui sont normalement donnés à la régie elle-même.

Une Voix: M. le Président, j'aimerais intervenir dans le dialogue.

Le Président (M. Laplante): Concernant ce dialogue, le temps du député de Notre-Dame-de-Grâce est terminé. Il avait la parole depuis 17 h 4, dont neuf minutes ont été utilisées par le ministre, que j'ai soustraites; ce qui fait environ 22 minutes pour vous. Est-ce que cela vous satisfait?

M. Scowen: Je pense que je peux...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je ne voudrais pas empêcher les autres députés de revenir sur la question, mais d'après ce qu'on a pu entendre de la conversation qui vient de se dérouler, le député de Notre-Dame-de-Grâce dit qu'il y a des pouvoirs qui sont confiés par la loi à la régie et que le président de la régie va pouvoir dire à un régisseur: Vous allez vous occuper de la question, à savoir de faire des statistiques. (17 h 30)

M. Tardif: Non, non.

M. Fontaine: Et puis le ministre, de son côté, dit: Non, les régisseurs vont être nommés et le président de la régie va tout simplement dire: Monsieur, vous venez d'être nommé, vous vous en allez siéger pour entendre des causes à tel endroit. Je pense que le député de Notre-Dame-de-Grâce, dans l'interprétation qu'il fait de la loi, peut avoir autant raison que le ministre parce que le président de la régie peut assigner à un régisseur n'importe quelle tâche.

Cependant, si on prend l'argumentation du ministre qui dit que les régisseurs sont là pour rendre des décisions judiciaires, qu'ils vont faire de l'adjudication, on revient à la discussion que nous avions entamée tout à l'heure, à savoir que les régisseurs vont exercer tout simplement un pouvoir judiciaire et qu'il va y avoir du personnel de soutien pour exercer des fonctions administratives. A ce moment-là, la question se pose encore une fois: Est-ce qu'on ne devrait pas diviser les deux? C'est un peu ce que fait l'amendement proposé par le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Tardif: M. le Président, je vais essayer de me faire comprendre encore un petit peu plus clairement. C'est un fait que, si un régisseur, juriste de formation, puisque sauf pour les fins de l'article 2 on dit qu'ils devront être des gens de droit, se sentait porté vers les statistiques, avait développé, si vous voulez, une expertise et une connaissance en informatique et qu'il offrait ses services au président et que celui-ci dise: Ah! oui, excellente idée de refaire nos programmes d'informatique pour les simplifier, de passer je ne sais pas du langage COBOL à un autre, rien n'empêcherait le président, dans la loi, de dire: Parfait,

mon vieux, pendant une semaine tu ne sièges pas et tu refais un programme. Ce n'est pas exclu, mais c'est rare. Il y a des spécialistes pour faire cela, ça ne court pas les rues.

D'autre part, la solution du député de Notre-Dame-de-Grâce, je la comprends dans un contexte d'administration d'entreprise, de corporation où, si vous voulez, le président répond au conseil d'administration. Là, écoutez, on ne veut certainement pas que le président réponde à l'assemblée des régisseurs. Je pense que cela ne s'appliquerait pas.

Alors, pour moi, il est clair que c'est la situation actuelle qui prévaut, c'est-à-dire du président qui les assigne — on ne les appelle pas à l'heure actuelle les régisseurs; on les appelle les administrateurs — à entendre des causes. Point, c'est tout, ils entendent des causes. Et il y a les gens dont c'est la spécialité de faire la statistique, de faire je ne sais pas quoi. Il n'est pas question de changer cela. Ce n'est pas une addition; c'est la structure actuelle de la Commission des loyers: un président, deux vice-présidents, des adjudicateurs, un personnel de soutien et des cadres administratifs. C'est ce qui existe. Ce n'est pas quelque chose de nouveau. Cela fonctionne. On espère qu'on va améliorer le service à la population, mais il ne s'agit pas de créer une structure parallèle ou complètement différente de celle qui existe.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci, M. le Président. Est-ce à dire, M. le ministre, que dorénavant il y aura dans chaque bureau de la régie, à chaque endroit où la régie décidera qu'il faut un bureau, un administrateur concernant la paperasse et la préparation des causes probablement, ainsi de suite; par contre, que cet administrateur ne sera pas régisseur comme dans certains cas actuellement, c'est-à-dire remplissant le rôle d'un régisseur tel que cela se fait actuellement?

M. Tardif: Voici, M. le Président, il y a présentement environ 32 bureaux...

M. Cordeau: Bon, je voulais le savoir.

M. Tardif: ... où il y a justement des gens qui font — enfin, généralement une personne, sauf à Montréal et à Québec — de l'adjudication. Ces gens vont siéger à la séance, donc au besoin, et il y a en permanence évidemment un agent de bureau qui prépare les choses nécessaires pour les auditions. Il peut y avoir une secrétaire et un préposé aux renseignements, téléphone et autre, qui sont là en permanence.

A l'heure actuelle, il y a un administrateur qui va peut-être siéger une journée dans un bureau, une autre journée dans un autre bureau parce qu'il y a des bureaux itinérants. Il n'y a pas suffisamment d'affaires traitées pour justifier d'avoir, au même endroit, partout en province, des gens à temps plein. A l'heure actuelle, ce sont soit des administrateurs différents qui, à la séance, siègent un après-midi ou une journée par semaine à un endroit et un autre siège ailleurs ou l'un se déplace. Donc, c'est le même régime qui prévaudra, mais encore une fois la fonction adjudicative est distincte de la fonction administrative de bureau. Quant aux fonctions très spécialisées d'informatique, de contentieux et autres, c'est centralisé à Montréal et à Québec.

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, le ministre nous dit que la même personne ne serait pas normalement appelée à accomplir des tâches de nature diverse, ne serait pas normalement appelée à siéger comme régisseur pour juger de demandes formulées par des citoyens et à accomplir des tâches administratives. Il nous dit que, s'il y avait des exceptions à cette règle que j'énonce, elles seraient extrêmement rares. Mais ce que je constate à la lecture de l'article 5, c'est que l'on n'y parle pas de régisseurs individuellement, on n'y fait pas de distinction dans l'article 5 entre la personne appelée à exercer la fonction quasi judiciaire et l'autre personne qui normalement accomplirait les autres tâches.

Peut-être que d'autres collègues l'ont dit parce que j'ai dû et je m'en excuse, manquer quelques minutes, mais nous parlons ici de montants qui peuvent être passablement importants. Dans un cas, il peut s'agir de $40 par mois; donc, moins de $500 par année. Mais, s'il y a de nombreux locataires dans un même immeuble qui portent plainte, on peut se trouver devant des montants de plusieurs milliers de dollars et ainsi dépasser la limite normalement imposée à la juridiction de la Cour provinciale, par exemple. Pourtant, à la Cour provinciale, les juges n'agissent pas comme conseillers du ministre, ne fonctionnent pas comme analystes des effets de l'application d'une loi, ne compilent pas de statistiques, etc. C'est le sens de l'objection que nous avons.

C'est que le ministre est très clair et nous nous entendons sur la différence qui existe entre les deux sortes de fonctions, mais la loi n'est pas claire à ce sujet. La loi ne fait pas de distinction. La loi, quant à l'article 5, même s'il est assorti de certaines précisions qui paraissent à d'autres articles, dit toujours que la régie exerce la juridiction qui lui est conférée par la présente loi.

M. Tardif: Si j'ai bien compris l'intervention du député de D'Arcy McGee, il voudrait qu'on fasse un peu le pendant de ce qu'on... Il y a un article qui dit que seuls des régisseurs qui sont juges et avocats peuvent entendre des causes autres que celles prévues à la section II. Il voudrait qu'on fasse l'inverse, qu'on dise cela, mais aussi que les juges et les avocats désignés pour entendre des causes en vertu de la section II ne pourront pas faire autre chose qu'entendre des causes. Est-ce que je comprends bien?

M. Goldbloom: C'est essentiellement cela, oui.

M. Tardif: M. le Président, il me semble que c'est se priver de services qui pourraient être fort valables de la part de régisseurs, qui pourraient avoir une expertise dans un autre domaine — j'ai parlé de l'informatique ou n'importe quoi — et en faire bénéficier la commission.

M. Goldbloom: Mais, M. le Président, chaque fois...

M. Tardif: Est-ce qu'on veut interdire cela?

M. Goldbloom:... que l'on nomme un juge, on se prive de l'éventail de compétences que cette personne peut avoir...

M. Tardif: De moins en moins, ils ont le droit de voter maintenant.

M. Goldbloom: Ce n'était pas dans ce sens que je le disais, mais, mon Dieu, M. le Président, tout le monde sait qu'un juge ne doit pas se permettre un éventail important d'activités. Le fait d'être juge, qui confère des avantages importants, impose également des restrictions quant à ce que cette personne peut faire. Les gouvernements successifs font appel, de temps en temps, à des juges pour accomplir des tâches spécialisées...

M. Tardif: M. le Président...

M. Goldbloom:... mais c'est en tant que juges.

M. Tardif: ... si c'était de nature à nous faire avancer, parce que je trouve qu'on se répète, je serais d'accord — on a déjà suspendu les paragraphes 5 et 6 — pour suspendre cela. Nous allons le regarder pour voir s'il est possible de cerner, mais je ne voudrais quand même pas qu'on se prive totalement dans l'accomplissement d'autres fonctions ou que ceci nous amène à une définition à ce point stricte du président de la régie qu'il dirait à un des régisseurs: II y a une émission de télévision samedi soir ou tel soir dans la municipalité de Sherbrooke pour expliquer la loi; moi, je n'y vais pas, c'est contraire à tel article qui dit que j'entends des causes. C'est ce qui pourrait se produire si on en venait à cette définition très rigoureuse que tout ce que feraient les régisseurs, ce serait de l'adjudication. A ce moment-là, ils ne pourraient pas vraiment participer à une émission d'information publique pour informer les gens de la loi.

M. Fontaine:... une personne du contentieux. M. Goldbloom: M. le Président... M. Tardif: Je voudrais...

M. Goldbloom:... le ministre soulève un point important.

M. Tardif: Je suis d'accord...

M. Goldbloom: II y a des distinctions que l'on doit faire et, dans le cas d'un juge, que cette personne fasse part à l'opinion publique de ses connaissances, cela me semble normal, mais que cette personne, à titre de juge, soit en même temps un conseiller du ministre, je trouve cela moins normal.

M. Tardif: Le président, le président.

M. Goldbloom: La régie est en outre chargée de donner au ministre désigné son avis sur toute question que celui-ci lui soumet.

M. Tardif: M. le Président, je suis d'accord pour essayer peut-être de le reporter et de préciser cela, mais je voudrais seulement faire remarquer que les juges des différentes cours de justice au Québec, les juges en chef, individuellement ou regroupés dans le Conseil consultatif de la justice, conseillent le ministre de la Justice régulièrement sur toute question reliée à l'administration.

M. Goldbloom: Sur l'administration de la justice, oui, mais...

M. Tardif: Je ne veux pas d'autres conseils. Je ne veux pas de conseils sur les bouts de tuyau d'égout et d'aqueduc des municipalités de la part de ces gens. J'en veux seulement sur l'application de cette loi.

M. Fontaine: Vous pouvez leur demander n'importe quoi.

M. Goldbloom:-Mais derrière cette loi, il y a une politique d'habitation, M. le Président, et c'est sûrement sur cela que le ministre voudrait avoir des conseils.

M. Cordeau: M. le Président, avant de...

Le Président (M. Laplante): Vous avez terminé, M. le député de D'Arcy McGee? M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président, moi aussi je seconderais la motion du ministre de suspendre cet article, mais, avant, j'aimerais que le ministre nous fasse connaître le pourquoi d'un mandat d'au plus cinq ans, étant donné que les fonctions des régisseurs, telles que décrites par le ministre, seront des fonctions judiciaires...

M. Tardif: D'adjudication.

M. Cordeau: Oui, d'adjudication, alors c'est de rendre un jugement. Je pense que cela se rapproche énormément. Il faut demander une impartialité, ainsi de suite, dans tout cela. Pourquoi les nommer juges seulement pour cinq ans? Parce qu'ils vont remplir les fonctions de juges, bien sûr, avec quelques fonctions secondaires, comme le ministre nous en a informés tantôt. J'aimerais que

le ministre nous fasse part de son point de vue concernant la durée d'une nomination...

M. Tardif: Bon. (17 h 45)

M. Cordeau: ... d'un régisseur exerçant les fonctions d'un juge.

M. Tardif: M. le Président, d'abord ces gens-là ne seront pas des juges parce que, s'ils l'étaient, ils seraient effectivement nommés à vie comme c'est le cas des juges. Pour les régisseurs, la loi que je vous propose marque un net progrès par rapport à ce qui existe présentement, puisque les gens sont actuellement nommés selon le bon plaisir et renvoyés selon le bon plaisir. Ici, il y a une sécurité pendant cinq ans.

Vous allez me dire: Pourquoi ne pas l'avoir nommé à vie? Pour une raison très simple. On nous a fait valoir, après consultation avec des gens de la profession du droit, qu'il n'y aurait pas beaucoup de candidats qui seraient intéressés à assumer cette fonction d'adjudication en permanence uniquement dans ce secteur et qu'il se pourrait fort bien que des gens, faisant déjà partie du corps de juristes du gouvernement, qu'il s'agisse de l'aide juridique, des procureurs et autres, veuillent exercer cette fonction pendant cinq ans, reprendre une carrière dans l'administration et peut-être, subséquemment, être nommés juges. Encore une fois, il ne faudrait pas qu'on pousse le parallèle au point de dire: Ces gens-là vont être des juges, au sens de juge de la partie 24 avec pleins pouvoirs de juger les matières criminelles et autres. Ce sont donc les fins d'application d'une loi très précise; ces avocats, ces hommes de loi assumeraient cette fonction, le feraient pendant une période de cinq ans, peuvent avoir un cheminement de carrière qui les mènerait à la magistrature.

Pour l'instant, il nous a semblé que cette sécurité entre en faire des juges ou des fonctionnaires à vie et l'espèce de situation actuelle où on est engagé à la séance, on est engagé par qui on veut et on est remercié quand on veut, il y avait là de quoi intéresser, pendant un mandat fixe, de jeunes avocats pour qui il s'agirait d'un débouché intéressant dans le cheminement d'une carrière de juriste.

M. Fontaine: M. le Président, le ministre des Affaires municipales prend plaisir à mentionner le mot "adjudication" plutôt que dire que la personne en question va exercer une fonction judiciaire. Bien sûr, ces personnes-là vont être appelées des régisseurs, mais il faut bien tenir compte du fait que, dans le domaine du loyer, ces personnes vont avoir à rendre des décisions qui, bien souvent, vont même excéder la juridiction de la Cour provinciale qui est de $6000. Quand un locataire voudra demander le remboursement des dommages qu'il a subis parce qu'il s'est fait renvoyer de son logement, il est possible que cela excède cette juridiction. Je ne dis pas que cela sera courant, mais cela peut arriver.

M. Tardif: Si c'est au-dessus de $6000, cela relève de la Cour provinciale ou, enfin, de la Cour supérieure.

M. Fontaine: Non. Ce n'est pas cela que la loi dit.

M. Cordeau: Peut fixer. Il n'y a pas de montant, de limite.

M. Fontaine: II fixe le montant et il a un droit d'appel à la Cour provinciale. C'est simplement un exemple pour faire comprendre qu'il est possible, même si on ne dit pas qu'ils exercent des fonctions judiciaires, que ces gens-là aient des pouvoirs supérieurs à ceux d'un juge de la Cour provinciale.

M. Tardif: M. le Président, je suis prêt à regarder à nouveau l'article 6 en rapport avec les deux paragraphes de l'article 5 que nous avons suspendus, faire la même chose pour l'article 6 et voir si, dans les faits, c'est possible, sans en arriver à une description de tâches minutée comme on le retrouve dans certaines conventions collectives de travail, où les adjudicateurs ne feraient pas autre chose que s'asseoir sur le banc et entendre des causes. En dehors de cela, tout ce qui se passe à la régie où une demande de renseigner les gens ne se fait pas... Cela m'apparaît un non-sens. Je vais le regarder pour voir s'il est possible de libeller quelque chose dans ce sens-là.

M. Fontaine: Est-ce que...

Le Président (M. Laplante): L'article 6 est suspendu.

M. Fontaine: Un instant, M. le Président. Avant de suspendre, est-ce que le ministre pourrait également regardera possibilité, comme le député de Saint-Hyacinthe l'a suggéré, pour les régisseurs d'être nommés pour plus de cinq ans? Je suggérerais dix ans et ce, encore une fois...

M. Tardif: Non, il y a une politique gouvernementale...

M. Fontaine:... en vue d'une meilleure impartialité.

M. Tardif: D'ailleurs, cette pratique que le gouvernement avait de nommer des gens pendant dix ans, à différents postes, nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, est en train d'être complètement révisée. Il n'y a pas de nominations maintenant qui se font pour plus de cinq ans.

M. Fontaine: II faut tenir compte du fait particulier de ces régisseurs. Je vous dis qu'ils exercent des pouvoirs judiciaires.

M. Tardif: Vous n'avez un mandat que de quatre ans et cela ne vous empêche pas de fonctionner, M. le député.

M. Fontaine: Oui, mais je suis élu par la population et cela ne m'inquiète pas.

M. Tardif: Mais cela ne vous empêche pas de bien fonctionner quand même, je pense. On en a la preuve aujourd'hui.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que l'article 6 sera suspendu?

M. Fontaine: Suspendu.

Le Président (M. Laplante): L'article 6 est suspendu. Les travaux de cette commission sont suspendus et reprendront à 20 heures à la salle 81-A.

Fin de la séance à 17 h 52

Reprise de la séance à 20 h 12

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît!

Reprise des travaux de la commission des affaires municipales pour l'étude article par article du projet de loi no 107, Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives. L'article 6 ayant été suspendu, j'appelle l'article 7. M. le ministre.

M. Tardif: Oui, M. le Président, dans un moment, je vous ferai part de mes commentaires sur l'article 7, si je peux y arriver.

M. le Président, l'article 7 est un article qui regroupe un bon nombre de dispositions de la loi actuelle qui sont dispersées un peu partout, sauf qu'on a regroupé ici, dans un seul article, le pouvoir de réglementation, donc, le pouvoir de "déterminer la manière dont une personne peut se porter candidate à une charge de régisseur; autoriser le ministre désigné à former un comité de sélection pour évaluer l'aptitude des candidats à une charge de régisseur ou pour lui fournir un avis sur eux; fixer la composition et le mode de nomination des membres du comité."

Je m'excuse, M. le Président. Celui-là, ce n'est pas le pouvoir général de réglementation, mais bien celui de nommer les régisseurs et de les sélectionner; "de fixer le mode de nomination et la composition du comité, les indemnités et les allocations, etc; de déterminer les critères d'admissibilité et de sélection; de déterminer les renseignements que le comité peut requérir d'un candidat et les consultations qu'il peut faire." "Un règlement adopté en vertu du présent article entre en vigueur à la date de sa publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure."

Je voudrais seulement préciser que dans ce cas précis, encore une fois, nous partons du discrétionnaire absolu, qui est la situation actuelle, où le prince désigne qui il veut sans lui demander de qualifications, pour aller vers une formule comme celle-ci qui suppose un système ouvert à tous ceux qui rempliront les exigences. Je pense que c'est un net progrès par rapport à la situation actuelle. (20 h 15)

Le Président (M. Laplante): Je voudrais savoir, avant de commencer à étudier l'article 7, si vous voulez l'étudier paragraphe par paragraphe ou dans son ensemble.

M. Scowen: Ce sera sous-article par sous-article, je pense. Franchement...

Le Président (M. Laplante): Paragraphe par paragraphe. J'appelle le paragraphe 1. C'est parce qu'en dernier de tout, vous aurez le droit de parler sur l'article global, après que les paragraphes auront été adoptés. Vous pourrez reprendre, si vous voulez, 20 minutes pour l'ensemble de l'article. D'accord, est-ce qu'on s'entend là-dessus?

Une Voix: Ne serait-ce pas mieux de le faire au début?

Le Président (M. Laplante): Vous avez droit, dans l'étude paragraphe par paragraphe, à 20 minutes chacun, si vous voulez.

Une Voix: Ah!...

Le Président (M. Laplante): Ce sont les règlements que j'édicte. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, le paragraphe 1.

M. Scowen: A moins que mes collègues aient quelque chose? D'accord.

Le Président (M. Laplante): Le paragraphe 1 est-il adopté?

M. Cordeau: "Le gouvernement peut, par règlement..." est-ce que cela veut dire implicitement "doit" par règlement? De temps en temps on dit "peut" pour "doit" et...

M. Tardif: Oui...

M. Cordeau: J'aimerais mieux "doit" parce que c'est la sélection, c'est sûr que...

M. Tardif: Non, effectivement, le gouvernement pourrait décider de nommer les gens selon son bon plaisir... "pourrait". Il peut faire des règlements et il peut ne pas en faire. Maintenant, je voudrais vous faire remarquer que l'Assemblée nationale a adopté le chapitre 19 des Lois de 1978, modifiant la Loi des tribunaux judiciaires, et que c'est le mot à mot.

M. Cordeau: Est-ce qu'on aurait fait une erreur à ce moment-là?

M. Tardif: L'Assemblée nationale a adopté la Loi modifiant la Loi des tribunaux judiciaires, chapitre 19 des Lois de 1978, pour la procédure de

sélection des juges et c'est le mot à mot. Je peux lire, par exemple: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut, par règlement, établir une procédure de sélection des personnes aptes à être nommées juges des sessions et à cette fin il peut, notamment... — nous, ce sont des régisseurs, vous pouvez suivre sur le texte, je vais vous lire la procédure de nomination des juges — a) déterminer la manière dont une personne peut se porter candidate à une charge de juge; b) autoriser le ministre de la Justice à former un comité de sélection pour évaluer l'aptitude des candidats à une charge de juge ou pour lui fournir un avis sur eux; c) fixer la composition et le mode de nomination des membres du comité; d) fixer les indemnités et les allocations que les membres du comité peuvent recevoir; e) déterminer les critères de sélection dont un comité tient compte; f) déterminer les renseignements qu'un comité peut requérir d'un candidat et les consultations qu'il peut faire". Et il y a un petit topo en bas qui dit: "Un projet de règlement doit être publié dans la Gazette officielle du Québec au moins 30 jours avant son adoption et s'il est adopté le règlement entre en vigueur à la date de sa publication dans la Gazette officielle ou à une date ultérieure qui est fixée".

Donc, c'est le mot à mot de cette procédure déjà adoptée il y a quelques mois pour la nomination des juges.

M. Cordeau: M. le Président... M. Tardif: Oui.

M. Cordeau: ... cet après-midi, je crois que vous avez dit que ce seraient des avocats qui seraient régisseurs. Est-ce que...

M. Tardif: Pas nécessairement. M. Cordeau: Pas nécessairement.

M. Tardif: Pour ce qui est de l'application de la section II, sur le contrôle des démolitions, on pourrait très bien voir un architecte, un ingénieur s'occuper de ces cas, et avoir un banc composé à la fois d'un juriste et d'un ingénieur ou architecte, par exemple. Mais on dit que pour l'application de la loi, sauf la section II, il faut toujours qu'il y ait un avocat ou un juge qui siège.

M. Fontaine: Mais dans le cas où ce serait un avocat, par exemple, est-ce qu'il faut un minimum d'années de pratique? Il n'y a rien de mentionné.

M. Tardif: Ce sera établi dans le règlement.

Le Président (M. Laplante): D'autres questions sur le paragraphe 1?

M. Fontaine: Si le ministre décidait de ne pas faire de règlement?

M. Tardif: Je suis convaincu que le député de Nicolet-Yamaska serait là pour lui rappeler que l'article 7...

M. Fontaine: Alors, on serait mieux de marquer "doit".

M. Tardif: Hum... c'est le libellé de l'article 72-c de l'article de la Loi des tribunaux judiciaires, exactement.

M. Fontaine: Oui, je sais, je l'ai ici.

Le Président (M. Laplante): Premier paragraphe.

M. Scowen: Si je comprends bien le sens du premier paragraphe, c'est d'établir la procédure qui va se poursuivre, les critères d'admissibilité d'un candidat...

M. Tardif: Par exemple...

M. Scowen: ... qui doit avoir telle ou telle expérience... C'est cela?

M. Tardif: Par exemple, avoir pratiqué le droit pendant cinq ans, être avocat en règle du Barreau, des choses comme celles-là.

M. Scowen: J'ai une question globale et je vais la poser en guise de question concernant le paragraphe e) parce que cela touche un peu les... Qu'est-ce que l'objectif de l'article 7? Est-ce que c'est vraiment de rendre plus objective et moins politique la nomination des régisseurs ou si c'est un peu de maquillage? Est-ce qu'on doit vraiment essayer de contrôler cela? Si on n'avait pas l'article 7... En effet, vous n'avez pas besoin d'un article dans une loi qui vous permettrait de faire toutes ces choses-là, si je comprends bien.

M. Tardif: Non, je n'ai qu'à regarder, à ce moment-là, l'article de loi tel qu'il existe présentement...

M. Scowen: Oui.

M. Tardif:... qui dit: Le lieutenant-gouverneur en conseil nomme les régisseurs requis pour l'application de cette loi. Demain matin, je dépose au Conseil des ministres un projet d'arrêté en conseil nommant M. Tartempion, commissaire ou régisseur.

M. Scowen: Si vous voulez, vous pouvez... M. Tardif: A la place de cela...

M. Scowen: ... poursuivre toutes ces démarches-là.

M. Tardif: C'est cela. Sauf que là, pour faire un règlement, il faut avoir une loi habilitante. Un règlement qui ne serait pas fait en vertu d'une loi donnant le pouvoir de faire un tel règlement serait... Alors, le gouvernement consent à encadrer ce pouvoir discrétionnaire qu'il a actuellement dans une réglementation. D'accord?

M. Scowen: II peut, par exemple, écrire un règlement qui va vous donner le droit de former un comité et même de demander de choisir un membre de ce comité qui soit une femme anglophone de la Côte-Nord, de tels critères comme celui-là. Est-ce que c'est l'idée?

M. Tardif: Ecoutez! Quel est le règlement actuel de la justice en la matière?

M. Scowen: Je veux comprendre un peu pourquoi on est là-dedans ici?

M. Tardif: On peut, par exemple, prendre le règlement qui existe au ministère de la Justice pour la sélection des juges. Sur ce jury, de mémoire, je pense qu'il y a le juge en chef du tribunal de la Cour provinciale. Il y a trois représentants: un du Barreau, un du tribunal où il y a vacance et un autre désigné par le ministre de la Justice. Ces personnes siègent donc sur ce jury. C'est connu dans le règlement.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président, au premier paragraphe de l'article 7, vous dites: Le règlement peut, par règlement, établir une procédure de sélection des régisseurs autres que le président, les vice-présidents et les juges et, notamment... Dans quel cas, les juges peuvent-ils... Dans quel cas, y aura-t-il une procédure de sélection?

M. Tardif: Oui. Quelqu'un qui serait déjà juge n'a pas à suivre cette procédure de sélection. Il pourrait être nommé pour siéger là; d'office, il est déjà juge. On n'a pas à l'élever au rang de régisseur.

M. Cordeau: Non, bien sûr.

M. Tardif: D'accord?

M. Cordeau: D'accord.

M. Tardif: II a déjà à passer à travers un filtre.

M. Cordeau: A un moment donné, la régie pourrait nommer un juge de la Cour provinciale pour rendre des décisions parce qu'il n'y a pas de régisseurs ou il en manque dans un district et il y a des causes pendantes.

M. Tardif: Cela pourrait être concevable, en effet.

M. Cordeau: Mais à ce moment-là, faut-il qu'il y ait une sélection pour choisir un juge? Le juge est déjà nommé.

M. Tardif: Non. Je présume que...

M. Cordeau: Pourquoi le mot "juge" est-il compris dans la sélection?

M.Tardif: Ayant atteint ce...

M. Cordeau: La façon de choisir les juges, c'est par une autre loi.

M. Tardif: Justement. Le règlement, l'article 7, ne s'applique pas à la personne du président, des deux vice-présidents et des juges qui pourraient faire partie.

M. Cordeau: D'accord.

M. Tardif: D'accord? Cela ne s'applique pas à eux.

Le Président (M. Laplante): Le premier paragraphe est-il adopté?

Une Voix: Oui.

Le Président (M. Laplante): J'appelle le paragraphe 2.

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Laplante): Adopté. Le paragraphe 3? Adopté. Le paragraphe 4?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Laplante): Adopté. Le paragraphe 5?

M. Caron: Le paragraphe 4, est-ce que c'est comme dans les autres commissions? Elles ont les mêmes énumérations.

M. Tardif: Personnellement, j'ai l'intention de prendre le règlement des juges...

M. Caron: C'est standard.

M. Tardif: ... et de l'appliquer mutatis mutandis ou avec les adaptations requises, est-ce que c'est cela, monsieur? — ou en les adaptant selon ce que préfère M. le député.

Le Président (M. Laplante): Le paragraphe 5? Adopté. Le paragraphe 6?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Laplante): Adopté. L'article 7 est-il adopté?

M. Tardif: Adopté.

Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 8. Voulez-vous compléter l'étude de l'article 6 pour finir avec les deux...

M. Tardif: On n'est pas prêts, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Vous n'êtes pas prêts. D'accord, merci.

M. Tardif: On veut laisser mûrir cela. Le Président (M. Laplante): L'article 8?

M. Tardif: M. le Président, cela me semble un article explicite. C'est un pouvoir de déterminer, par règlement, un code de déontologie qui serait applicable aux régisseurs. Je pense qu'il y a bien peu de domaines d'activités aujourd'hui dans l'exercice des professions qui n'ont pas un code de déontologie. Il nous semble que dans ce domaine il pourrait être éminemment souhaitable d'avoir un tel code.

M. Cordeau: Est-ce qu'on va dire "doit" ou "peut"?

M. Tardif: Pardon?

M. Cordeau: Le gouvernement peut, par règlement...

M. Tardif: Peut, par règlement. Cela donne le pouvoir habilitant de faire un règlement.

M. Cordeau: Et cela n'oblige pas le gouvernement.

M. Tardif: C'est-à-dire que cela n'oblige pas. A partir du moment où on inclurait le mot "doit" dans un tel article, dès demain matin, le gouvernement doit faire un règlement pour... Le législateur donne régulièrement de tels pouvoirs habilitants, par exemple, aux municipalités. Les municipalités peuvent faire des règlements pour ceci et des règlements pour cela. Elles l'utilisent.

Une Voix: ...

M. Tardif: Pardon? Il n'y a aucun pouvoir de coercition autre que ceux que l'opinion publique peut avoir...

M. Cordeau: Mais habituellement le...

M. Tardif: ... aidé ou pas par une opposition vigilante.

M. Fontaine: La municipalité de...

M. Cordeau: Habituellement, le ministère des Affaires municipales se réserve le droit...

M. Tardif: De?

M. Cordeau: ... de faire des interventions.

M. Scowen: Je pense que la...

M. Tardif: La loi 39 a donné...

M. Scowen: J'ai une question qui relève un peu de notre première intervention ce matin en ce qui concerne la grève dans laquelle cette permission a été liée avec une obligation. Je pense que vous avez essayé d'expliquer cela, mais le mot "peut" et le mot "doit"... C'est clair que, dans ce cas-là, cela a été une obligation.

M. le Président, si je peux revenir quinze secondes à l'article 7. Je veux simplement dire que dans notre proposition à l'article 6, laquelle on a discuté avant 18 heures, si quelque chose est accepté dans le cadre de nos suggestions, c'est clair qu'il faut changer légèrement les mots par le sens à l'article 7. On a décidé de ne pas faire une lutte à propos d'amendements sur chacun des articles qui suivent notre suggestion à l'article 6 parce que le ministre a déjà accepté de repenser l'affaire un peu.

M. Tardif: On fera une concordance.

M. Scowen: Parfait. Est-ce que vous avez quelque chose...

Le Président (M. Laplante): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: L'article 8 prévoit l'établissement d'un code de déontologie et, à l'article 16, il y a un élément qui fera sûrement partie d'un code de déontologie, c'est-à-dire la question du conflit d'intérêts qui ne doit pas exister. Egalement à l'article 17, on investit les régisseurs des pouvoirs et immunités d'un commissaire nommé en vertu de la Loi des commissions d'enquête. Là aussi, au moins implicitement, il y a un code de déontologie, il y a des contraintes qui sont imposées à celui qui accepte la charge de commissaire d'enquête. (20 h 30)

Le ministre peut-il nous donner un bref aperçu du contenu éventuel d'un code de déontologie quand, déjà, les régisseurs seront contraints par ces balises?

M. Tardif: On a pris la peine de prévoir de façon spécifique, à l'article 16, le problème des conflits d'intérêt qui pourrait être précisé d'ailleurs dans une réglementation de façon plus fine, notamment parce que c'est un problème que nous vivons actuellement d'ailleurs, surtout lorsqu'on est avocat de pratique privée et que des membres du même bureau peuvent représenter des intérêts ou lorsque, étant notaire, ayant enregistré les actes notariés pour un propriétaire il y a x temps et l'avoir instrumenté, comme ils disent, et par la suite on entend la cause des locataires vivant dans cet immeuble. On a le cas présentement, ce n'est pas un cas hypothétique que je vous donne, je pourrais mettre des noms dessus. C'est une chose et il nous apparaissait important de le prévoir de façon spécifique.

Par ailleurs, dans un code de déontologie pourraient apparaître des règles de conduite, d'impartialité et autres qui mériteraient d'être précisées.

M. Goldbloom: On pourrait même inclure qu'il serait défendu à un régisseur qui siège sur le plan

quasi judiciaire de conseiller le ministre sur le plan semi-politique.

M. Tardif: Je vais vous régler cela, votre article 7, si c'est ce qui vous fatigue. Je m'excuse, M. le Président, de dire cela. Si, effectivement, à l'article... lequel, 6?

M. Goldbloom: C'était l'article 5.

M. Tardif: L'article 5; si ce qui fatiguait les membres de cette commission, c'est de "donner au ministre désigné son avis sur toute question que celui-ci lui soumet à la régie", je vais l'enlever. De toute façon, je pourrai toujours écrire un mémo au président de la régie, en tant que ministre de la tutelle, pour dire: Que faites-vous là-dedans? Je ne me sentirai pas gêné. Alors, si c'est cela, on peut l'enlever et on va adopter l'article 5 bien vite.

M. Scowen: L'article 5 est très lié, dans mon sens, à l'article 26. Je pense qu'on peut prendre...

M. Goldbloom: M. le Président, le ministre nous a suggéré au début de cette séance de laisser mûrir ces réflexions. Laissons-les mûrir des deux côtés.

M. Tardif: Bien.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que l'article 8 sera adopté malgré tout? Article 8. Adopté?

M. Tardif: Adopté.

Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 9.

M. Scowen: A l'article 9, j'ai un mot à dire.

Le Président (M. Laplante): Oui, c'est votre droit.

M. Scowen: Merci. J'ai dit qu'on n'avait pas l'intention d'aller plus loin en profondeur dans la question soulevée à l'article 6. Mais c'est clair que cet article 9 est un élément important parce que nous avons des réserves importantes sur le droit, sur le bien-fondé de l'idée de permettre au président comme tel d'avoir la responsabilité de la direction de la régie et non pas aux régisseurs mêmes. Je veux simplement attirer l'attention du ministre, j'ai devant moi la constitution de la commission pour le projet de loi no 125 qui a créé une régie de cinq régisseurs. J'espère que quand il prendra en considération toute cette question, qu'il regardera un peu celle-là et celle de la Loi sur la zonage agricole pour voir comment ils ont décidé de régler ce problème. Je veux simplement ici répéter que nous avons des réserves à l'article qui dit que la direction de la régie est la responsabilité d'une seule personne.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous voulez suspendre l'article 9?

M. Tardif: M. le Président, de toute façon, à supposer que l'on modifie le libellé de l'article qui compose la régie, il restera que cette régie sera sous l'autorité d'un président comme toutes les régies d'Etat le sont. On pourra peut-être revoir les tâches qui sont dévolues à ce président, à cette personne responsable, mais tous les organismes quasi judiciaires sont sous l'autorité d'un président y compris la Régie de la commission de protection des territoires agricoles et d'autres organismes.

M. Scowen: Avant l'ajournement à 18 heures, j'ai donné au ministre des propos d'amendement sur quatre ou cinq articles qui suivaient les propos qu'on a faits sur l'article 6. Ma suggestion, c'est qu'on suspende l'adoption de ces articles ou qu'au moins, si le ministre ne trouve pas que c'est une solution acceptable, on présente nos amendements et qu'ils soient inscrits dans le journal des Débats. Je pense que, pour le moment, il n'y en a que cinq ou six et je préfère qu'ils soient adoptés au moment que le ministre aura pris une position. Je suis à sa disposition.

Le Président (M. Laplante): Avez-vous un amendement ou un sous-amendement à proposer sur l'article 9?

M. Scowen: Je pense que oui.

Le Président (M. Laplante): C'est peut-être le temps de le mettre sur la table.

M. Tardif: M. le Président, à la limite, je peux bien reporter cet article, mais je regarde ici l'amendement qui m'a été remis. Mettons qu'il n'est pas déposé. Il m'a été remis. On dit: Les régisseurs dirigent la régie et sont responsables de son administration et de la direction générale de ses affaires. Un corps de 30 personnes dirige la régie. Cela m'apparaît très lourd de voir que finalement cette autorité à la régie n'est pas investie dans une personne qui est le président.

M. Scowen: M. le ministre, M. le Président, on ne suggère pas que ce soient les régisseurs qui doivent diriger l'entreprise. On dit simplement qu'ils sont responsables pour cette administration et pour cette direction générale. En effet, la responsabilité pour la bonne gestion, si vous voulez, du directeur général, si vous décidez d'en avoir un, sera envers la régie et non envers le président. C'est la distinction qu'on fait. Ce n'est pas du tout une question que les régisseurs doivent ouvrir la porte le matin à 9 heures, mais qu'il prend la responsabilité comme c'est normalement compris, plutôt qu'une seule personne.

M. Tardif: M. le Président, dans un cas semblable, imaginons un directeur de service employé par la régie, recruté selon les normes de la fonction publique à titre de directeur du personnel qui ne ferait pas son boulot, cette personne serait responsable devant la régie d'une trentaine

de personnes de la gestion du service du personnel.

M. Scowen: M. le ministre, on a proposé que ce soit un système qui ne marcherait pas. On a proposé une régie dans notre affaire, deux, sept, cinq, six personnes et cette idée, si vous voulez, de conseil d'administration, sera le responsable. J'accepte parfaitement qu'avec 35 ou 40 régisseurs, c'est impossible. C'est l'idée de base de notre suggestion.

M. Tardif: M. le Président, à cause des relations de l'article 9 avec l'article 6, je n'ai pas objection à ce qu'il soit reporté et qu'on considère cela parmi les autres.

Le Président (M. Laplante): L'article 9 est suspendu. J'appelle l'article 10. L'article 10 sera-t-il également suspendu? Ce n'est pas la même chose. Il n'y a pas la même substance entre l'article 9 et l'article 10. C'est complètement différent. Le suspendez-vous quand même?

M. Tardif: Non.

M. Scowen: Ce n'est pas...

M. Tardif: Cet article se retrouve mot à mot dans la Loi des tribunaux judiciaires également en ce qui concerne, par exemple, la délégation de pouvoirs que le juge en chef peut confier à son adjoint en ces matières. Alors, cela reproduit...

M. Scowen: En effet, les changements qu'on propose à l'article 10 sont des changements de concordance. Il sera nécessaire de changer le mot "régisseur" par le mot "commissaire", etc. Comme dans le cas de l'article 7, si votre proposition est acceptée, on doit faire la concordance. Pour ma part, je suis en faveur du principe de l'article 10 sauf que si les changements qu'on propose sont faits, il faut changer le mot "régisseur". On a également suggéré le mot "vice-présidents" parce qu'on a proposé que le président peut donner une responsabilité à n'importe quel régisseur. C'est plutôt la question de concordance plutôt qu'une question de fond comme à l'article 9.

M. Tardif: Adopté sous réserve de concordance ultérieure avec les autres articles.

M. Scowen: Exactement.

Le Président (M. Laplante): L'article 10 est adopté sous réserve de concordance s'il y a. J'appelle l'article 11.

M. Scowen: Est-ce qu'on avait...

M. Tardif: Cela aussi, M. le Président, c'est un article standard qu'on retrouve dans les...

M. Scowen: Pas de problème.

Le Président (M. Laplante): Pas de problème. L'article 11 est adopté. J'appelle l'article 12.

M. Scowen: C'est la même chose. M. Tardif: C'est la même chose.

M. Scowen: C'est une question de concordance.

M. Tardif: D'accord. Adopté.

Le Président (M. Laplante): L'article 13? C'est la même chose, une question de concordance.

M. Scowen: Non, j'ai une question qui n'est pas reliée avec les autres articles. C'est une question qui a été posée dans les mémoires et je pense que le ministre peut nous donner son avis. Il est clair que c'est un changement fondamental par rapport à la situation actuelle qui existe à la commission. Il y a deux éléments que le ministre peut expliquer un peu en profondeur. Premièrement, quelles sont les exigences qui l'ont persuadé que le système actuel en vigueur, qui est un système composé de personnes à temps partiel, n'est plus valable? Est-ce qu'il est évident que ces personnes sont incompétentes ou préjugées envers l'une ou l'autre? Il nous semble que c'est quelque chose qui a bien fonctionné, au moins pour la grande majorité des cas, et de plus cela a évité que l'Etat crée toute une gamme de nouveaux fonctionnaires. Quelles sont les raisons qui l'ont porté à changer le système. Deuxièmement, il y a un point qui a été soulevé assez souvent. Il nous semble qu'il y aura tendance, même avec l'article qui dit un peu le contraire, pour que, de plus en plus, avec le temps, ces régisseurs insistent pour ne pas travailler le soir, le samedi, etc.? Aujourd'hui, au moins à Montréal, cela fonctionne bien, c'est pratique. Ce sont des avocats qui travaillent le soir. C'est le personnel qui veut se rendre à la régie. Normalement, ce sont des gens qui veulent y aller le soir. (20 h 45)

Est-il persuadé et peut-il nous convaincre que cette tendance, qu'on voit actuellement dans la grève de la Société des alcools du Québec, d'insister sur le droit d'avoir le temps supplémentaire, par exemple, pour le travail du soir, ne deviendra pas un problème ou une exigeance des fonctionnaires qui vont remplir ces rôles. Je pense qu'ils doivent expliquer un peu ces deux questions.

M. Tardif: M. le Président, le système actuel des avocats et notaires de la partie privée rémunérés à la séance ne nous apparaît pas devoir être maintenu. D'une part, parce que ce système n'est pas contrairement à ce qu'on pourrait penser meilleur marché, ne coûte pas moins à l'Etat. J'ai dit tantôt que la somme des traitements versés à ces personnes qui entendent les causes comme cela à la séance dépasse le million de dollars

annuellement. Que différents relevés nous ont indiqué que parfois étant payé à la séance, il nous est arrivé de dénombrer jusqu'à soi-disant cinq séances par jour, dans le cas des administrateurs à $100 la séance et des commissaires à $150 la séance, il nous apparaît, d'une part, que ceci peut être parfois une incitation à expédier les affaires dans la mesure où on peut libérer un rôle prévu, disons, de quatre ou cinq causes, d'expédier les affaires. Deuxièmement, il me semble que cela n'assure pas non plus le degré d'impartialité nécessaire et de désintéressement des personnes dès lors que ces personnes peuvent elles-mêmes ou par des membres d'une même étude agir dans des affaires semblables. Troisièmement, il nous paraît nécessaire de développer chez les administrateurs ou chez les régisseurs une expertise que seule une fonction à temps plein peut permettre de développer dans ce domaine.

Pour toutes ces raisons, ajouté au fait encore une fois que ces personnes doivent posséder une indépendance qui les protège contre toutes pressions extérieures et que nous devions avoir du personnel à temps plein qui fasse de l'application de cette loi sa chose, sa principale préoccupation qui puisse se familiariser avec le caucus de décisions rendues antérieurement; bref, d'avoir véritablement un corps d'adjudicateurs qui se consacre entièrement à cette fonction. Encore une fois, pour des déboursés de l'Etat qui sont tout à fait comparables à ce qui existe présentement et aussi, je pense, un service à la clientèle infiniment meilleur et valorisé et valorisant aussi pour les personnes qui accomplissent les fonctions. Je ne dis pas que tous les administrateurs présentement expédient leur boulot, mais je dis que dès que cela constitue une activité très marginale et très secondaire pour un avocat de pratique privée que de siéger comme cela, une demi journée ou une journée par semaine qu'on n'est pas nécessairement assuré que ces cas recevront toute l'attention qu'ils méritent et que finalement, certaines plaintes, certains griefs nous parviennent à savoir que les gens peuvent avoir parfois l'impression d'être vraiment bousculés, ne pas avoir l'occasion de s'exprimer, que tout ceci peut être inhérent au système qui existait jusqu'à maintenant et qui existe encore.

M. Scowen: Est-ce qu'il y a des cas où assez souvent les gens se sentent bousculés, avec des situations actuelles?

M. Tardif: J'inviterais, ce que je n'ai pas fait personnellement, mais peut-être les membres de cette commission, s'ils en avaient le loisir, d'assister parfois à certaines sessions où il y a très peu, finalement, d'échanges qui sont faits, que la partie de conciliation, même si cela s'appelle actuellement la Loi de conciliation entre propriétaires et locataires, que finalement, il y a très peu de place justement pour effectuer de la conciliation. Cela prend du temps, quand même, lorsqu'on veut essayer d'expliquer aux parties, lorsqu'on entend une des deux parties en présence, très briève- ment, et qu'on leur dit: Je vous enverrai ma décision et qu'elle est expédiée, le citoyen tant propriétaire que locataire n'est pas satisfait du tout du type de service qu'il a.

M. Scowen: Je veux simplement souligner que cette espèce de bousculade n'est pas seulement de la part des administrateurs à temps partiel. Si vous allez aux bureaux régionaux d'aide sociale, le cas est soulevé assez souvent par des personnes qui ont affaire à des fonctionnaires.

Est-ce que le ministre peut répondre un peu à la deuxième question? Est-ce qu'il a l'intention, par exemple, de payer le temps supplémentaire aux régisseurs qui travaillent en dehors des heures régulières de travail?

M. Tardif: II est prévu à l'article 23, que la régie peut tenir ses séances à tout endroit, même un jour non juridique, même aux heures déterminées par le président. Il est bien évident qu'à tour de rôle, des régisseurs sont invités par le président, à tenir des audiences le soir, pour satisfaire la clientèle.

M. Scowen: Etes-vous persuadé que vous avez les moyens d'établir, dès le départ, que le fonctionnement même de cette profession implique les travaux sur cette base et prévu, dans des contrats syndicaux, que ce ne sont pas des frais additionnels imposés aux contribuables? Parce que je ne sais pas comment vous avez calculé que le million qu'on dépense maintenant ne sera pas dépassé par les régisseurs. Si on arrive au temps supplémentaire pour accomplir la moitié du travail, il est possible que le million soit dépassé assez vite.

M. Tardif: II n'est pas prévu de surtemps là-dedans, cela fait partie des exigences de la tâche, que d'être disponible pour des séances en dehors des heures régulières, selon un système de roulement qui, j'imagine, fera en sorte que chacun n'assumera pas plus de temps, le soir, que d'autres, mais il n'est pas prévu de surtemps pour cela.

Le Président (M. Laplante): L'article 13 adopté? Adopté. L'article 14. A l'article 14, il y a un amendement présenté par M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, il y a un amendement pour que l'article 14 du projet de loi 107, tel que réimprimé, soit remplacé par le suivant: "14. La durée du mandat et la rémunération d'un régisseur, une fois fixées, ne peuvent être réduites". Donc, déjà on parlait du mandat... En fait, on change traitement pour rémunération, par souci de concordance avec l'article 6, où on parlait de rémunération.

M. Scowen: J'aimerais comprendre le sens de cet article. A l'article 6, vous dites que les régisseurs seront nommés pour un mandat d'au plus cinq ans. Alors, ce que je comprends à l'article 14, c'est qu'un régisseur peut être embauché pour

une période, par exemple, de quatre ans mais ce contrat et le traitement ne peuvent être réduits sauf s'il démissionne; c'est un contrat dans le sens que les deux parties sont obligées de maintenir la base du contrat original...

M. Tardif: Afin d'assurer une stabilité chez les régisseurs qui soit, disons, toutes proportions gardées, l'équivalent de l'inamovibilité qu'on retrouve chez les magistrats.

M. Scowen: En effet, si je comprends bien, si vous acceptez mes propos, vous engagez quelqu'un comme régisseur pour une période de trois ans et après deux ans il vous dit: Ecoute, je peux devenir juge ou je peux aller ailleurs, je veux prendre un autre travail. La régie a l'intention de faire une poursuite contre cet...

M. Tardif: Non, non, non. Il pourra démissionner en tout temps. Même un juge nommé à vie peut démissionner...

M. Scowen: Oui.

M. Tardif: ... se présenter aux élections, être élu, devenir ministre de la Justice, redémissionner, enfin, bon. Mais il ne peut être, disons...

M. Scowen: Si cela lie seulement... M. Tardif: Le gouvernement.

M. Scowen: ... la régie, si c'est trois ans, c'est trois ans...

M. Tardif: C'est cela.

M. Scowen:... cela ne peut pas être changé et cela ne peut pas dépasser cinq ans.

M. Tardif: C'est cela.

M. Guay: C'est un article de routine qu'on trouve partout.

M. Scowen: Oui, d'accord.

M. Guay: Pour éviter de réduire le traitement d'un régisseur à $1, si on ne l'aime pas.

M. Goldbloom: Je ferais cela avec certains députés.

M. Guay: La chose est possible mais je ne suis pas certain qu'on parle des mêmes députés.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que l'amendement à l'article 14 est...

M. Tardif: Adopté.

Le Président (M. Laplante):... adopté? Article 14, adopté. J'appelle l'article 15.

M. Scowen: Adopté.

Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 16.

M. Guay: On trouve cela partout.

M. Scowen: Dans l'article 16, M. le Président, je pense, j'espère qu'il sera possible de préciser davantage un conflit d'intérêts dans ce domaine. Je prends à titre d'exemple une personne qui a des actions dans une compagnie qui est dans le domaine immobilier. Si un régisseur se trouve avec cinq actions dans la compagnie CP, une compagnie immobilière dans la location, est-ce que c'est un conflit d'intérêts, une action dans une société publique? C'est quoi, est-ce que c'est défini, est-ce qu'il existe un règlement déjà, est-ce que... ce sera basé sur quoi? Parce que c'est un peu vague.

M. Tardif: C'est sûr qu'il s'agit là de matières qui pourront être précisées dans le code de déontologie. Lorsque le député de D'Arcy McGee me demandait tantôt ce qu'il y aurait dans le code de déontologie, eh bien! l'article 16 est un article standard qu'on retrouve dans toutes les lois créant des régies. Dans le cas d'un régisseur siégeant en matière de logement, par exemple, il est bien évident que le fait de détenir des actions dans une entreprise qui gère un portefeuille immobilier important, il pourrait se poser de sérieuses questions. Alors, cela ne fera pas l'objet d'une réglementation pour déterminer quelles seraient les mesures susceptibles d'empêcher justement qu'il y ait ces conflits d'intérêts.

M. Scowen: Je pose la question parce que...

M. Tardif: Je ne peux pas ici me prononcer sur...

M. Scowen:... le rédacteur de cet article avait, semble-t-il, quelque chose en tête quand il a écrit l'article, par exemple: la fin de la phrase "sauf si un tel intérêt leur échoit par succession ou donation, pourvu qu'il y renonce ou en dispose avec toute la diligence possible." (21 heures)

Alors, normalement quand on pense à un cas devant une régie qui devra passer le lundi, on espère que cela sera réglé le mardi ou le mercredi, que ce ne sera pas quelque chose qui va traîner pendant une longue période. Normalement, on ne peut pas imaginer qu'un régisseur puisse accepter de disposer avec diligence d'une action quelconque simplement pour le plaisir d'écouter un cas, dans le cas de cette régie, qui n'aura pas été réglé assez vite. Quelle était l'idée de procéder avec toute cette diligence? Pour ma part, il faut avoir quelque chose en arrière de cela. Qu'est-ce que c'est?

M. Tardif: M. le Président, encore une fois, c'est un article standard. C'est bien évident que

les affaires de succession — c'est bien connu — ne se règlent pas nécessairement rapidement. Dans un cas semblable, à supposer qu'une donation ou une cession d'un bien mette le régisseur en conflit d'intérêts, en attendant d'en disposer, celui-ci, dans cette cause en particulier, pourrait se récuser pour cause, je pense.

M. Scowen: Est-ce que je peux suggérer au ministre que l'article serait plus cohérent, dans le cas de notre régie, s'il se terminait pas "et les devoirs de leurs fonctions."? En effet, les deux dernières clauses n'ont rien à faire avec...

M. Tardif: Ecoutez! Ces deux dernières lignes ont pour but de protéger justement le régisseur qui recevrait un bien par donation, succession ou héritage; de ne pas avoir à le rendre inhabile à siéger nécessairement. C'est plutôt de nature à le protéger, à lui donner le temps de disposer de ce bien, de cette donation de façon à éliminer le conflit. C'est une mesure visant à le protéger.

M. Scowen: Prenez dont l'exemple précis du régisseur qui arrive devant un cas qui implique le CP. A cause de la mort de sa mère, il se trouve avec 100 actions dans le CP. Il dit: Moi, j'accepte de disposer de ces actions avec toute la diligence possible. Là il faut attendre. On entend la cause, elle est réglée, elle est finie. Il avait quand même ces actions pendant cette période, mais il avait donné l'engagement d'en disposer. L'affaire est terminée. Une semaine plus tard, il se trouve avec des actions qui n'ont rien à faire avec son travail à venir mais à cause d'un engagement qu'il a pris il y a deux semaines, il est obligé de disposer, par la suite, de ses actions. Je trouve que cela n'a rien à faire avec la réalité des cas qui se trouvent à la régie.

M. Tardif: C'est que...

M. Guay: II n'aura plus à régir de cas de CP à l'avenir. Prenez comme hypothèse que cela est arrivé une fois qu'il a eu à rendre une décision dans un cas où était impliqué le CP, par exemple, et que pour l'avenir il n'y aura plus du tout de cas où le CP va se présenter devant la régie et où il sera en cause. Il ne sait pas nécessairement quand.

M. Scowen: Ecoutez! Il faut prévoir un deuxième cas avec la même compagnie. Vous comprenez le sens de mon intervention. Il est possible que ce soit pertinent dans d'autres cas, mais pour la régie qui dispose de cas précis dans une période très courte, ces deux dernières clauses...

M. Guay: II y a des cas qui reviennent souvent annuellement. Si vous avez une compagnie dans le domaine de l'immobilier, a priori, le régisseur qui a des actions dans une compagnie qui oeuvre dans l'immobilier se place dans une situation un peu fâcheuse par rapport aux émissions. Il pourrait investir à la place dans la machinerie agricole ou quelque chose comme cela.

M. Tardif: Imaginons que les actions en question soient pour le Royal Trust qui administre 20 000 immeubles dans la région de Montréal. Pour moi, il y a un net conflit d'intérêts entre sa fonction de régisseur et celle de détenteur d'actions du Royal Trust. Je m'excuse, mais il y aura un choix à faire.

M. Scowen: II est beaucoup mieux de dire à ce régisseur: Ecoutez! Vous avez des actions dans le Royal Trust. Jusqu'au moment d'en disposer, vous n'aurez pas le droit d'entendre les causes qui touchent le Royal Trust. Quand vous en aurez disposé, vous pouvez commencer. Pour moi, c'est plus simple et plus clair.

M. Guay: ... à disposer de ses actions.

M. Tardif: Vous le forcez à disposer de ses actions.

M. Scowen: Oui, je le force, ici aussi, à le faire, mais après...

M. Guay: Si je comprends bien ce que vous voulez dire, qu'en plus de ce qui est là, il faudrait qu'il renonce non seulement avec la diligence possible, mais que pendant le temps ou jusqu'au moment où il y renoncerait, qu'il renoncerait lui-même à siéger dans une cause qui impliquerait, qu'il se désisterait en quelque sorte.

M. Scowen: M. le Président, si on dit: Les régisseurs ne peuvent avoir un intérêt direct ou indirect dans une entreprise susceptible de mettre en conflit leurs intérêts personnels et les devoirs de leur fonction. Tenant compte du fait que nous aurons une trentaine au moins de régisseurs, nous avons tout ce qu'il nous faut. Si on arrive devant le cas où il y a conflit d'intérêts, la personne doit être en mesure de disposer avant qu'il entende la première cause. Si c'est probable qu'ils vont les entendre régulièrement, comme vous l'avez dit, très bien, au moment qu'il a disposé de ses actions, il est libre de recommencer.

M. Tardif: M. le Président, je voudrais faire remarquer au député de Notre-Dame-de-Grâce que dès lors qu'un régisseur hériterait de tels biens ou de telles actions, il serait déchu de sa charge automatiquement parce qu'on dit bien: Sous peine de déchéance de leurs charges. A ce moment, il me semble que c'est très dur et qu'il est possible de prévoir dans le cas de déontologie des délais pour lui permettre peut-être de modifier son portefeuille ou ses actions dans d'autres domaines qui ne le mettraient pas en conflit d'intérêts. On vise le même objectif. Il s'agit de donner à une personne à qui ce bien tombe dessus, du jour au lendemain, le temps de se retourner de bord.

M. Scowen: Entre temps, il peut entendre les causes.

M. Tardif: S'il y avait des causes, oui, où de toute évidence il a fait preuve de la diligence

voulue pour modifier ou prendre des mesures nécessaires pour selon ce qui sera prévu dans le code de déontologie pour faire gérer ceci par quelqu'un d'autre ou autrement et de s'occuper de liquider la succession. A ce moment, il pourrait ne pas être inhabile ou être déchu de sa charge automatiquement, ce qui ne serait pas le cas si on éliminait les deux dernières lignes.

M. Cordeau: Est-ce qu'un régisseur peut se récuser, supposons qu'à un moment donné...

M. Tardif: Oui, il peut toujours se récuser. Il y a un article qui prévoit cela. Il peut se récuser face à une cause, mais néanmoins peut-être en entendre une autre. On pourrait très bien concevoir que des causes de démolition pourraient être confiées à une personne à qui échoiraient de telles actions momentanément et non pas sur des causes de fixation de loyer ou des choses semblables. Tout ce qu'on veut permettre par ces deux lignes qu'encore une fois on retrouve dans tous les articles, c'est de donner le temps aux personnes.

M. Scowen: Je laisse tomber l'affaire, mais je veux simplement répéter que dans le cas où une personne se trouve devant le cas de démolition avec une société dans laquelle il a des actions, il prend un engagement formel de disposer de ses actions, il entend la cause pendant qu'il a encore les actions parce qu'il a l'engagement mais il a encore ses actions et deux semaines après, la cause est réglée, d'après cette loi il est encore obligé de disposer de ses actions, mais des actions qui n'ont rien à faire avec ses responsabilités à venir. Je dis simplement que ce n'est pas très cohérent dans le cas de la Régie des logements. Si vous n'êtes pas d'accord, je ne veux pas passer la nuit là-dedans, mais je vais répéter que je trouve que ce n'est pas très cohérent.

M. Tardif: II faudrait peut-être qu'on précise que, dans mon esprit, le conflit d'intérêts ne résulterait pas uniquement du fait qu'un régisseur héritant d'actions dans, par exemple, le Trust Royal, je prends cela comme exemple, la Fiducie du Québec ou peu importe, pour moi, il y aurait conflit d'intérêts non seulement si cette personne devait entendre une cause impliquant le Trust Royal et la Fiducie, ce qui me semble évident, mais également, toute autre cause qui aurait pour effet d'impliquer le secteur immobilier comme tel de gestion de... Il me semble que c'est plus que d'avoir un intérêt direct au sein d'une compagnie qui comparaît devant la régie.

Encore une fois, c'est un article standard qu'on retrouve dans toutes les lois du Québec, qu'on retrouve même dans un certain nombre de bureaux, de raisons sociales, ou encore d'organismes, d'officines de pharmacies, par exemple, où un pharmacien décède, sa femme hérite de la pharmacie et il y a, en vertu de la loi, à peu près les mêmes dispositions ici de devoir disposer, au bénéfice d'une personne dûment licenciée en pharmacie. On retrouve des dispositions semblables.

M. Cordeau: M. le Président, est-ce qu'un régisseur, qui est propriétaire de maisons à baux, de logis, ou un régisseur qui est propriétaire, un type qui est locataire dans un immeuble ou un type qui est propriétaire de maisons à logements, est-ce qu'il y a intérêt direct ou indirect dans une entreprise susceptible de mettre en conflit leur intérêt personnel? A ce moment-là, il peut rendre une décision en faveur du propriétaire, sachant que lui-même, que le propriétaire du troisième bloc à côté va dire lui aussi: Si je rends une décision dans tel sens, mes locataires, automatiquement...

M. Tardif: M. le Président...

M. Cordeau: C'est une question que je pose, une question générale.

M. Tardif: Justement pour cette question, je pense que ce sont des choses qui devront être spécifiées dans le code de déontologie. On demandait tantôt ce que cela allait contenir. Il y aurait très certainement une distinction à faire entre un propriétaire ou un régisseur ayant des intérêts dans l'immeuble à tel point que cela constitue un commerce et véritablement une source de revenus importante et le bonhomme qui a un duplex, il en habite un et il a un locataire là-dedans. Pour moi, il y a une différence entre exercer un commerce, en faire une activité commerciale, et de se loger. Mais ce sont des choses qui seront précisées justement dans le code de déontologie et j'imagine que là-dessus les régisseurs aussi en matière de code de conduite nous feront part de leur avis là-dessus.

M. Cordeau: A un moment donné, je peux être locataire et si je rends une décision qui peut être favorable...

Le Président (M. Laplante): Article 16 adopté.

M. Scowen: M. le Président, pour nous, c'est certainement une complication administrative pour le président et probablement ou possiblement un "loop-hole". On va l'adopter sur division.

Le Président (M. Laplante): Sur division. J'appelle l'article 17.

M. Tardif: C'est un article standard, M. le Président.

M. Scowen: J'ai une question à soulever à l'article 17, M. le Président. Il a été porté à notre attention que les comités municipaux qui vont agir dans le domaine de la démolition, c'est une idée assez nouvelle, ces comités municipaux et, semble-t-il, qu'il n'y ait rien, dans la loi actuelle, qui donne les mêmes pouvoirs et immunités à ces conseils et comités qui sont donnés aux régisseurs de la régie. Je ne sais pas si c'est quelque chose qu'on doit discuter ici ou plus tard, mais je veux soulever la question.

M. Tardif: On va sortir la Loi des cités et villes et le Code municipal pour voir effectivement de quelle sorte d'immunité jouissent les membres du conseil, puisqu'il s'agit de membres du conseil, siégeant en tant que représentants du conseil au sein d'un comité. Je n'ai pas d'objection à suspendre cet article-là pour vérifier.

M. Scowen: On peut suspendre et...

Le Président (M. Laplante): Vous voulez suspendre l'article 17.

M. Tardif: Oui, M. le Président. (21 h 15)

Le Président (M. Laplante): Article 17, suspendu. J'appelle l'article 18.

M. Scowen: C'est la même chose.

Le Président (M. Laplante): L'article 18 est un nouvel article.

M. Tardif: II y a un papillon, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Un nouvel article par papillon.

M. Tardif: M. le Président, excusez-moi, je reviens à l'article 17. N'est-il pas pensable d'adopter l'article 17 et tantôt, lorsque nous arriverons au pouvoir de réglementation des municipalités en matière de contrôle de démolition, de reprendre la question: Est-ce que les personnes siégeant sur les comités ont, elles, les pouvoirs? Il faut quand même que les régisseurs siégeant aient cette protection, d'accord? Donc, on peut adopter l'article 17...

Le Président (M. Laplante): L'article 17 sera adopté...

M. Tardif: C'est cela. Et tantôt, le représentant du ministère ici a noté la question quant aux immunités afférentes aux représentants des conseils municipaux.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que l'article 18, par exemple, qui est un nouvel article...

M. Tardif: L'article 18, il y a un papillon, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): II y a un papillon, oui.

M. Tardif: L'article 18 est remplacé par le suivant: "18. Aucun recours extraordinaire prévu par les articles 834 à 850 du Code de procédure civile ne peut être exercé ni aucune injonction accordée contre la régie ou un régisseur agissant en leur qualité officielle. Un juge de la Cour d'appel peut, sur requête, annuler sommairement un bref, une ordonnance ou une injonction délivrés ou accordés à l'encontre du présent article." Cette nouvelle formulation est proposée justement pour se conformer aux articles existants dans les lois actuelles alors que celui qu'il y avait dans le projet de loi no 107 pouvait sembler plus large. Donc, afin d'éviter ces problèmes, on a restreint par la nouvelle formulation le sens de l'article 18.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que le nouvel article 18 est adopté?

M. Scowen: Avec la réserve que j'ai mentionnée à l'article 17 en ce qui concerne...

M. Tardif: Que nous vérifierons tantôt ce qui existe pour les comités municipaux.

M. Scowen: ... les comités municipaux. M. Tardif: Alors, M. le Président...

Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 19.

M. Tardif: ... l'article 19 prévoit que tous les autres personnels de la régie sont nommés et rémunérés suivant la Loi de la fonction publique.

Le Président (M. Laplante): D'accord sur l'article 19?

M. Scowen: M. le Président, nous...

M. Tardif: Excusez-moi, M. le Président, l'article 18...

Le Président (M. Laplante): L'article 18 est adopté.

M. Tardif: ... tel qu'amendé.

Le Président (M. Laplante): Oui, tel qu'amendé. Maintenant, c'est un nouvel article, tel qu'au papillon.

M. Scowen: Avec la réserve.

Le Président (M. Laplante): Oui, il y a une réserve. Article 19.

M. Scowen: La question qu'on pose: Les membres du personnel de la régie sont nommés et rémunérés suivant la Loi de la fonction publique, 1978, chapitre XV. Pourquoi avez-vous décidé de nommer spécifiquement trois catégories d'employés? Pourquoi pas "les membres du personnel de la régie" simplement?

M. Tardif: Uniquement, M. le Président, parce que ces postes ou ces fonctions sont nommément désignés dans la loi: le greffier, on parle d'un inspecteur et on parle de conciliateurs dans la loi présentement. Comme ils sont nommés dans la loi, on les énumère là et on dit: les autres, il y aura le directeur du personnel, enfin, tous ceux qu'on retrouve; mais ceux-là étant désignés, on pourrait

croire qu'ils pourraient ne pas être couverts, qu'ils pourraient être nommés directement sans passer par la fonction publique. Alors, on les met de façon expresse. Ce n'est pas...

M. Scowen: D'accord.

Le Président (M. Laplante): L'article 19 est adopté. J'appelle l'article 20. C'est de concordance avec un article...

M. Tardif: C'est un article standard.

M. Scowen: Les articles 17, 18 et 20 sont tous...

Le Président (M. Laplante): C'est cela, de concordance.

M. Tardif: D'accord.

M. Scowen: Non, mais je soulevais une question sur les conseils municipaux.

Le Président (M. Laplante): Oui, sujet à... D'accord. L'article 20 est adopté. J'appelle l'article 21.

M. Scowen: C'est un autre exemple d'un conflit possible dans les divers rôles de la régie. Si le ministre accepte de créer une certaine séparation des pouvoirs, comme nous l'avons suggéré dans notre amendement proposé à l'article 6, nous n'avons pas d'objection à cet article, tel que rédigé. Mais si les personnes, qui agissent comme juges dans le tribunal qui est ici créé, ont la responsabilité indirecte du rendement des membres du personnel de la régie, je pense qu'elles seront dans un conflit d'intérêts. C'est une question qui a été soulevée dans deux ou trois mémoires soumis à la commission et je pense que c'est très important que cette dualité soit éclaircie. Si le ministre pouvait accepter, avec la même générosité qu'il a déjà démontrée aux autres articles, de suspendre l'adoption de cet article jusqu'au moment où l'on se penchera sur la question de fond à l'article 6, je suis prêt à arrêter ici.

M. Tardif: M. le Président, je remercie le député de Notre-Dame-de-Grâce pour la générosité qu'il me reconnaît...

M. Scowen: Mais c'est sincère. M. Tardif: ... si volontiers ce soir. M. Scowen: C'est très sincère.

M. Tardif: M. le Président, je voudrais quand même apporter certaines précisions. Que l'on voit une certaine ambiguïté dans certains aspects du rôle de la régie comme organisme administratif faisant de l'information, donnant des renseignements par téléphone ou dont certains de ses membres rendant des décisions, je pense que l'on ne parle plus tout à fait de la même chose ici à l'article 21. Lorsqu'on dit: "Les membres du personnel de la Régie doivent prêter leur assistance pour la rédaction d'une demande à une personne qui la requiert", il faut quand même penser — c'est le but de la régie et cela existe dans d'autres lois — que la plupart — en fait, c'est 97% — des personnes qui se présentent devant la régie le font sans avocat. Elles se présentent là, elles ne savent pas très bien comment tout cela fonctionne, elles peuvent être intimidées par ce milieu, ces gens qui ont l'air de se promener avec des gros codes, des gros bouquins. Donc, il peut être utile et nécessaire d'assurer au public une assistance technique dans la préparation d'une demande. Il nous semble que semblable loi, dans la mesure où elle veut permettre des recours simples, peu coûteux aux gens, faciles d'accès, rendre la justice facile d'accès, exige que les gens de la régie puissent donner cette forme d'assistance. Il y a des gens pour qui remplir un formulaire de demande, c'est extrêmement compliqué. Qu'un employé de la régie puisse les aider à remplir un tel formulaire m'apparaît tout à fait dans l'ordre.

D'ailleurs, on retrouve un article semblable dans la Charte des droits et libertés de la personne, chapitre VI de 1975, article 72, où on dit ceci: La commission et les membres de son personnel doivent prêter leur assistance pour la rédaction d'une demande d'enquête à toute personne ou tout groupe de personnes qui la requiert.

Ce n'est donc pas un précédent et cela fait partie, je crois, de ce souci que doit avoir un organisme semblable d'assurer aux gens que ces recours que nous étudions tous ensemble, ici, en commission, que nous prévoyons, ne restent pas lettres mortes parce que les gens ne sont pas capables de formuler une demande et qu'ils n'ont pas les moyens, non plus, d'avoir recours à un avocat. Ce n'est rien de plus.

M. Scowen: Je veux porter à l'attention du ministre et également à l'attention du député de Taschereau qui, je pense, s'intéresse à cette question, que dans les cas de contrôle, de fixation de loyers, toutes ces demandes seront faites par les propriétaires, parce que ce ne sont que les propriétaires qui ont le droit de faire les demandes de fixation des loyers devant la régie. Alors, c'est possible que, aux yeux de l'opinion publique, la régie soit un instrument favorisant les propriétaires, parce que c'est avec les propriétaires que les membres du personnel de la régie vont s'asseoir, en privé, pour rédiger les demandes de fixation des loyers. Il n'est pas prévu, c'est impossible que les membres du personnel de la régie, d'après l'article 21, puissent aider, dans le cas de fixation de loyers, les petits locataires ou les grands locataires, mais seulement les propriétaires. Et je pense, parce que c'est seulement un côté qui sera aidé dans cette question épineuse du contrôle des loyers, que ce serait mieux d'agir avec une certaine réserve.

M. Tardif: M. le Président, je voudrais quand même nuancer ces propos. Imaginons... C'est vrai qu'il y a, à l'heure actuelle, une espèce de partage du fardeau de la démarche, mais c'est aussi vrai qu'advenant qu'un propriétaire demande l'aide de la régie pour remplir le formulaire, rien n'empêche le locataire d'aller à la régie avec un formulaire dûment rempli et de dire: "Expliquez-moi cela, je n'y comprends rien, c'est rempli de chiffres", d'une part. D'autre part, même une fois la décision rendue, le régisseur ou l'administrateur qui aura rendu sa décision pourra dire à la partie mécontente: Vous avez un droit d'appel devant la Cour provinciale. A ce moment-là, on pourrait très bien concevoir que la régie puisse, même en matière de fixation, ce qui représente, soit dit en passant, à peu près une affaire sur deux à la régie, c'est à peu près 50%, l'ordre de grandeur des fixations, donc les autres recours peuvent être exercés par les locataires, que, même pour les fixations en appel, dis-je, que l'aide soit dispensée, cette fois, aux locataires qui voudraient aller en appel.

Maintenant, on me souligne que la Loi des petites créances permet également les mêmes dispositions; les parties peuvent avoir recours aux services de cette Cour des petites créances pour rédiger les formulaires ou les demandes. De mémoire, je crois que la Loi des jeunes délinquants, même en matière criminelle, permet la même chose au tribunal pour enfants, la Loi de la protection de la jeunesse, si je comprends bien, ou si ma mémoire est fidèle. Donc, ce ne sont pas là des dispositions nouvelles et elles s'inscrivent dans cet esprit de vouloir rendre la justice la plus accessible possible à toutes les parties.

M. Scowen: Bien sûr, mais si je vous comprends bien, M. le ministre, vous avez dit que, dans le cas de la fixation des loyers, les membres du personnel, lors de la première instance, peuvent aider seulement les propriétaires et, si le locataire n'est pas satisfait de la décision, les membres du personnel peuvent aider le locataire en vue d'un appel, devant la Cour provinciale. D'après moi, c'est clair que la seule personne qui peut faire une demande devant la régie, en ce qui concerne la fixation des loyers, si je comprends bien, c'est le propriétaire. Il est le seul qui puisse faire une demande.

M. Tardif: Lorsqu'il s'agit de la fixation des loyers. (21 h 30)

M. Scowen: Oui, dans ce cas.

M. Guay: Dans le cas de la fixation des loyers.

M. Scowen: Je pense qu'on peut accepter que la majorité des cas qui seront entendus par la régie seront les cas de fixation de loyers; c'est l'élément clé si les diminutions sont faites en grande majorité par les municipalités.

M. Tardif: Ce n'est pas tout à fait exact non plus. Ce n'est pas moi qui ai dit que seuls les propriétaires pourraient avoir recours à la régie en matière de fixation ou obtenir de l'aide pour remplir les formulaires. Les locataires le peuvent aussi. Prenons le cas du nouveau locataire qui arrive dans un immeuble, qui apprend que l'ancien locataire payait $50 par mois de moins et décide d'en appeler du nouveau taux de loyer imposé. Il peut s'adresser à la régie pour demander: Comment est-ce que je procède, moi? Je ne sais pas comment remplir cela. J'ai de la difficulté à parler le français, l'anglais, voulez-vous m'aider? Ils le feront. Le sous-locataire également peut s'adresser à la régie en matière de fixation. Ce n'est pas moi qui ai dit: Cela ne s'applique qu'aux propriétaires. C'est le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Non. Je l'accepte. Vous avez mentionné une ou deux exceptions, mais je répète que je suis persuadé que 97%, si vous voulez, des demandes seront des demandes plus ou moins normales d'augmentation de loyers et, dans ces cas, c'est seulement le propriétaire qui peut faire la demande. Dans la grande majorité des cas, la régie se trouvera devant la situation où elle peut aider le propriétaire dans la rédaction de sa demande, mais elle ne peut pas aider le locataire. J'ai l'impression, M. le ministre, franchement que cet article était dans votre première impression de la loi quand le fardeau de la preuve et la nécessité d'aller devant la régie étaient du côté du locataire. Au moment où vous avez décidé de changer la responsabilité et de la faire porter au locateur, vous n'êtes pas vraiment allé en profondeur dans l'article 21. Si je me trompe, très bien, mais je ne veux pas que la régie soit dans la situation... Si c'était dans l'autre sens, je serais contre aussi. C'est presque impossible qu'elle puisse aider les deux côtés de la même façon quand un seulement a l'obligation de faire la demande.

M. Guay: L'article 21 a une portée relativement restreinte. Il s'agit, comme on l'a souligné, d'abord, de la fixation des loyers qui est un aspect — c'est le plus important, j'en conviens, mais néanmoins, c'est un aspect parmi d'autres — du rôle de la régie. L'article 21 porte sur l'aspect de l'aide à la rédaction d'une demande. Il y a également l'article 5, si ma mémoire est bonne, paragraphe 1: "renseigner les locateurs et les locataires sur leurs droits et obligations résultant du bail d'un logement ou sur toute matière visée dans la présente loi." En fait, la régie peut fournir l'aide nécessaire au locataire aussi. Seulement, comme le locataire n'a pas de formule à remplir, cela ne s'applique pas dans son cas ou, enfin, rarement. Dans les cas qu'a soulignés le ministre, mais pas autrement. L'article 21 porte sur un sujet bien précis, l'aide à la rédaction. Dans la mesure où c'est le propriétaire qui doit faire la rédaction, bien sûr que c'est le propriétaire qui est aidé. Cela ne veut pas dire que le locataire ne jouit nullement de l'aide de la régie. C'est simplement que cette aide peut être verbale dans la mesure où lui n'a pas de formule à remplir, n'a pas de rédaction à faire. Mais cela n'empêche pas la régie de lui fournir de l'aide tout autant qu'au propriétaire.

M. Scowen: Je ne sais pas si le ministre accepterait de suivre ma suggestion initiale qui était de suspendre l'article 21 en attendant la résolution des autres questions.

M. Tardif: M. le Président, je voudrais poser au député de Notre-Dame-de-Grâce une question. Est-ce qu'il est d'accord qu'il faut, dans l'esprit d'une justice accessible, qu'une aide soit dispensée aux personnes qui seraient incapables de remplir un formulaire? Est-ce que c'est concevable qu'en se présentant devant la régie une personne de langue italienne ou ukrainienne ayant de la difficulté à s'exprimer en français, en anglais, regarde le formulaire compliqué et dise: Je voudrais que vous m'aidiez à remplir cela? Cela se conçoit.

M. Scowen: C'est très difficile d'être contre l'esprit de votre question, mais le problème qui se pose, c'est que, quand on se trouve dans une chambre, seul, avec une partie en cause et que vous êtes membre du personnel d'une régie, la personne va essayer de vous expliquer tous ses problèmes: Mon affaire n'est pas rentable. J'ai perdu de l'argent. J'ai beaucoup de problèmes. Aidez-moi à rédiger cette affaire, s'il existe une certaine discrétion, s'il existe des moyens. Tu peux ajouter celle-là et celle-là. Je pense que c'est compris dans la loi. Il y a des nuances et la discrétion qui seront très importantes. C'est clair que, si c'est simplement dire: Ecoutez, mettez les chiffres là et je vais vous aider à multiplier 17,1 par quelque chose, il n'y a pas de problème. Mais je vois la possibilité de toutes sortes d'abus si l'employé, le membre du personnel, accepte d'aller un peu en profondeur non seulement dans les faits sur le papier, mais dans les problèmes réels de la personne en cause. Dans ce cas-là, je vois que, normalement, il va aider la personne qui est devant lui, qui va lui présenter tout une histoire, bonne, mauvaise, colorée, teintée. On n'est pas devant un ordinateur; on est devant des humains avec du sang, des coeurs et des cerveaux et des préjugés d'un côté ou de l'autre. C'est très délicat surtout pour un organisme qui est au fond un tribunal d'avoir des employés, du personnel qui s'occupe de ces questions très délicates, même si je suis d'accord sur l'esprit, pour le pauvre Italien qui ne parle ni anglais ni français, bien sûr c'est difficile de dire qu'ils ne doivent pas l'aider, mais il y a d'autres moyens. Il y a des tierces parties, il y a des avocats du coin, il y a l'aide juridique, il y a les amis, il y a les conseillers, il y a toutes sortes de gens. Une personne se trouve rarement seule dans une ville. J'ai ma propre expérience, dans mon comté; les gens peuvent normalement demander des conseils de quelqu'un autour d'eux. Très souvent, ils viennent voir le député, même. Dans une régie qui a comme but premier, d'après moi, d'être un tribunal, je trouve que l'article 21 est pas mal dangereux.

M. Tardif: On ne dit pas que ce seraient les régisseurs qui rempliraient les formulaires, mais le personnel de la régie. Les membres du personnel de la régie, c'est un commis au bureau, préposé aux renseignements que quelqu'un vient voir et qui dit: Qu'est-ce que je dois faire? J'ai reçu un avis d'éviction parce que le propriétaire veut reprendre sa maison parce que, soi-disant, sa fille se marie, qu'est-ce que je peux faire, qu'est-ce que je dois faire? On pourrait concevoir un scénario où l'employé dit: Voici le formulaire et remplissez une demande. La personne qui regarde cela dit: Je ne comprends rien là-dedans, cela a l'air compliqué, qu'est-ce que je dois faire? Quelqu'un l'aide à mettre sur papier, à coucher sur papier les faits et les régisseurs jugeront la cause à son mérite, poseront les questions pertinentes, écouteront l'histoire de famille des parties.

Tout ce qu'on a fait cela a été de rendre un recours possible.

M. Scowen: Je suis d'accord en principe, mais quand même, M. le ministre, si la division qu'on a proposée est acceptée, ce sera encore, pour moi, un problème important, mais ce sera moins important dans le sens qu'au moins les juristes, les juges, si vous voulez, seront séparés. Mais même avec cela, prenez l'exemple de l'article 5.2 "de favoriser la conciliation entre locateurs et locataires". Le personnel a la responsabilité, d'une main, d'aider le propriétaire à compléter le formulaire sur une base d'une ou deux personnes dans la chambre et, après, de favoriser la conciliation. A moins que cette personne n'accepte que de remplacer un petit calculateur, elle est prise, avec un problème où il peut facilement exister un conflit, même pour le membre du personnel.

M. Tardif: M. le Président, je suis bien prêt à suspendre l'étude de cet article. Mais il faudra qu'on ait des raisons sérieuses pour ne pas permettre semblable recours qui, encore une fois, existe dans un tas d'autres lois. Je pense qu'il s'agit, dans ces cas, de personnes qui, si elles n'ont pas cette forme d'aide, n'auront pas recours à la régie.

Je veux bien, compte tenu de ce qu'on va regarder quant à la distinction que l'on pourrait faire de façon plus précise entre les tâches d'adjudication de la régie et les tâches administratives, voir si par ce biais on n'aurait pas une plus grande sécurité qui satisfasse les membres de cette commission. Pour l'instant, je suis d'accord, on peut peut-être en suspendre l'étude.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous avez dit que vous suspendiez l'étude de l'article 21?

M. Tardif: Oui, M. le Président, toujours dans cet esprit de générosité.

Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 22.

M. Tardif: L'article 22, M. le Président, est assez explicite.

Une Voix: II est où, le siège social, à l'heure actuelle?

M. Tardif: II est à Montréal et il demeure où il est présentement.

M. Scowen: A l'article 22, il y a une question qui est soulevée, c'est la question des bureaux de quartier. La régie peut avoir des bureaux à tout endroit qu'elle détermine. J'aimerais avoir un aperçu des intentions du ministre en ce qui concerne ces bureaux de quartier. C'est, en effet, les conciliateurs, je pense, qui sont nommés dans l'article 31, si je comprends bien, qui seront dispersés un peu partout à travers le Québec. Si j'ai bien compris les intentions du ministre dès son discours en deuxième lecture, il a l'intention de développer ces bureaux un peu partout. Cet effort de conciliation aujourd'hui est fait par les administrateurs à un coût de $1 million par année, d'après le ministre. Combien de bureaux de quartier prévoit le ministre, par exemple, à Montréal et combien de conciliateurs dans ces bureaux et à quel coût additionnel?

M. Tardif: A l'heure actuelle, M. le Président, il faut bien comprendre que nous avons des bureaux permanents dans 32 municipalités du Québec et des bureaux itinérants dans une quarantaine de municipalités autres que les 32 où on a un siège permanent. Donc, grosso modo, 70 endroits où la régie en permanence ou sur une base itinérante siège. Pour ce qui est de Montréal — incidemment, on retrouve à peu près 60% des activités de la régie dans le district judiciaire de Montréal — il y a déjà eu un premier effort de déconcentration qui s'est fait au début de l'été par l'ouverture d'un bureau à Laval et il y en aura un à Longueuil, sur la rive sud. Pardon?

M. Scowen: A Notre-Dame-de-Grâce, on vous attend. (21 h 45)

M. Tardif: Ah bon! On me dit qu'il est prévu, une dizaine de bureaux sur l'île de Montréal. Je ne crois pas qu'il y en ait un dans chacune des 28 municipalités de l'île, mais dans une dizaine d'endroits sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal ou l'île de Montréal, évidemment, en fonction de la demande. Il y a certains coins de l'île où il n'y a pas beaucoup de logements locatifs, on a plutôt des résidences unifamiliales.

M. Scowen: II reste quand même quelques usines à Montréal.

M. Tardif: Oui, il en reste encore. En gros, c'est ce qui est prévu pour la région de Montréal.

M. Scowen: Vous prévoyez combien de conciliateurs dans ces dix bureaux?

M. Tardif: Dans les...

M. Scowen: Vous prévoyez, si j'ai bien compris, dix bureaux à Montréal?

M. Tardif: C'est cela. M. le Président, c'est en fonction du volume de la demande. Les demandes ne sont pas les mêmes dans tous les secteurs de l'île, comme je l'ai mentionné, mais je pourrais peut-être plus, lorsque je produirai devant la commission les statistiques qu'on m'a demandées quant à l'évolution du nombre de causes et aux projections que nous avons faites, compte tenu de l'extension du champ de compétence de la régie, donner un meilleur aperçu, apporter ces tableaux, si vous me permettez.

M. Scowen: Le ministre est conscient que ce travail de conciliateur, dans ces bureaux, est fait maintenant par les administrateurs, si je comprends bien.

M. Tardif: II n'est pas fait, il ne s'en fait pas. On lie le droit. On entend des causes et on dit aux gens: Allez-vous en chez vous, vous recevrez ma décision. On n'amène pas les parties à la conciliation présentement.

M. Scowen: Si vous voulez, au nom de M. Parizeau, je veux vous demander si vous avez prévu que le million de dollars maintenant consacré aux administrateurs sera versé aux régisseurs. Globalement, quel est le montant prévu pour les conciliateurs et les frais d'opération à travers le Québec, si vous voulez, pour la première année au complet?

M. Tardif: M. le Président, on a prévu, concernant les bureaux de quartier, deux types de fonctions: celle qu'on pourrait appeler de conciliateur professionnel, qui pourrait se déplacer d'un bureau à l'autre — je ne crois pas qu'il soit nécessaire qu'il soit là en permanence, dans tous les bureaux, tout le temps — et, par ailleurs, la fonction d'agent d'information, sur place, capable d'aider les gens, de répondre aux questions au lieu de déplacer les gens vers le Palais de justice, rue Craig, de remplir les formulaires et tout cela. Donc, il y aurait des agents d'information localement, des conciliateurs itinérants qui pourraient aller là et des régisseurs qui pourraient aller tenir des audiences localement, dans ces bureaux qu'on retrouverait sur l'île de Montréal, selon les besoins et la nature de la demande.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le ministre, quel doit être le nombre de conciliateurs que vous avez l'intention de nommer dans les nouvelles structures?

M. Tardif: De conciliateurs, ne faisant que cela, on s'attend que les administrateurs ou les régisseurs puissent en faire plus qu'ils n'en font présentement; j'ai peut-être été un peu catégori-

que en disant qu'il ne s'en faisait pas, je pense qu'il y a des administrateurs qui tentent d'amener les parties à composition. Il y en a, cela existe, mais c'est peut-être l'exception, cependant. On voudrait que cela se généralise, que les régisseurs puissent en faire, qu'il y ait des gens qui ne fassent que cela. Quant aux professionnels comme tels, il est prévu au départ seulement l'engagement de six conciliateurs itinérants, qui pourraient donc aussi agir comme personnes-ressources pour nos agents d'information qui seraient disséminés un peu partout.

M. Cordeau: Oui, mais ce serait dans tout le Québec.

M. Tardif: Oui.

M. Scowen: Je voudrais porter à l'attention du ministre, s'il le permet, un autre aspect de cette question de l'administration de la régie. Avec la situation que vous proposez actuellement, où vous avez un président qui est seul responsable pour la direction de la régie, il y a un danger qui existe, pour un gouvernement et pour la régie même, c'est que ce président, qui aura la responsabilité totale de la direction, s'il a une forte personnalité — et on espère que oui — fasse jouer sa personnalité dans le choix du personnel. Normalement, après une certaine période, le choix du personnel a tendance à suivre un peu la personnalité de celui qui a le pouvoir de dire oui ou non. Cela pourra peut-être, selon le cas, apparaître aux gens, à la population, comme un préjugé favorable pour le propriétaire ou pour le locataire. Je pense que si on accepte d'avoir une régie de contrôle de cinq, six ou sept personnes, qui pourrait comprendre des personnes de diverses formations et de diverses...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Est-ce que ce ne sont pas des bureaux dont on parle actuellement?

M. Scowen: Non, ce n'est pas tout à fait dans... C'est simplement ce que l'on vit avec le personnel de bureau, mais je pense que le sens de mon intervention est compris. Un dernier point sur l'article 22, M. le Président. C'est ici que le ministre m'avait suggéré de soulever les questions de l'obligation d'avoir un greffe, est-ce que le mot "peut" a le sens d'une obligation ou non? Je pense qu'à la suite de sa demande, je le fais. Est-ce que la régie, suivant cette phrase, peut avoir des greffes à tout endroit, je veux dire dans le sens juridique, est-ce qu'elle est obligée d'avoir un greffe à au moins un seul endroit? Pour un profane, ce n'est pas clair que: "peut avoir, à tout endroit" veut dire "obligé d'avoir dans au moins un seul endroit". Je pense que, normalement, ce qui n'est pas compréhensible pour un citoyen informé n'est pas très clair devant la cour non plus.

M. Tardif: M. le Président, pour ce qui est du premier point, quant à la personnalité du président qui pourrait déteindre sur le choix de son personnel, je pensais qu'on s'en allait sur une autre pente glissante, où on voit présentement un gouvernement conservateur vouloir changer certaines têtes dans certains grands services de l'Etat canadien. Cela s'est arrêté court, peut-être grâce à votre intervention, pour parler des bureaux. Tel que je le lis là, effectivement, et cela m'a été confirmé par les légistes, la régie peut avoir des bureaux et des greffes à tout endroit qu'elle détermine, ce qui implique qu'elle doit avoir au moins un bureau et un greffe pour l'exercice des fonctions qu'on lui confie. Cela m'a été confirmé par les légistes. Ce que cet article implique, c'est qu'il peut y en avoir plus d'un.

M. Scowen: Dans l'article 7, où il est dit que le gouvernement peut, par règlement, établir sept critères différents pour la sélection des régisseurs, cela veut dire qu'il est obligé de créer au moins un règlement.

M. Tardif: Effectivement, dans ce cas, le règlement... Bien non, ce n'est pas tout à fait la même chose, il n'est pas obligé de faire des règlements, il est obligé d'en faire un.

M. Scowen: Je pense qu'il y a un moyen de rendre plus claire cette question...

M. Tardif: Je vous lis l'article 6 de la loi actuelle: "Le siège de la commission est à Montréal mais elle peut tenir des séances à tout autre endroit de la province". L'article 8 dit: "Le lieutenant-gouverneur en conseil nomme aussi un administrateur des loyers pour chaque territoire qu'il désigne et fixe sa rémunération". Point. On parle de tenir une séance, on ne parle pas ici d'avoir des bureaux et d'avoir des greffes.

Maintenant, il est bien évident qu'un tribunal ne peut pas fonctionner sans avoir un greffe et cela nous apparaît aller de soi.

M. Scowen: C'est clair que la régie est un tribunal d'archives et elle va avoir un greffe.

M. Tardif: Elle va avoir un greffe, oui. A l'heure actuelle, il n'y a rien dans la loi, et il y en a.

Le Président (M. Laplante): ... adopté? M. Tardif: Adopté.

M. Cordeau: Tantôt, M. le ministre, vous avez mentionné qu'à certains endroits on remplaçait des gens par d'autres, ainsi de suite. De toute façon, le tort qu'ils ont c'est peut-être de le dire, eux. Par contre, il peut arriver aussi que certains gouvernements fassent la même chose et ne le disent pas.

M. Tardif: Oh! cela se sait généralement.

M. Cordeau: On dit qu'on ne fait pas de patronage mais on crée des emplois.

M. Tardif: L'article 23, M. le Président.

M. le Président, avec votre permission, votre indulgence, je reviens. Si c'était de nature à satisfaire l'Opposition que le deuxième paragraphe de l'article 22 soit modifié pour dire: La régie a des bureaux et des greffes aux endroits qu'elle détermine, est-ce que cela répondrait à votre...

M. Scowen: Très bien.

Le Président (M. Laplante): Comment dites-vous?

M. Tardif: La régie a des bureaux et des greffes aux endroits qu'elle détermine.

Le Président (M. Laplante): L'article 22 est amendé, suivant papillon.

M. Tardif: D'accord.

Le Président (M. Laplante): Tel que papillon, adopté. Article 22.

M. Tardif: L'article 23, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Les travaux seront ajournés à demain, 10 heures, à la même...

M. Tardif: Mais ce n'est pas encore une heure non juridique, M. le Président; il est moins deux.

Le Président (M. Laplante): ... salle. Demain, ce sera...

M. Tardif: Ce n'est pas une heure non parlementaire.

Le Président (M. Laplante): ... un nouveau président. Vous l'avez brûlé aujourd'hui, celui-là. Je vous remercie. Demain, je dois me faire remplacer par le député de Jeanne-Mance, qui sera ici. J'espère que vous ne lui ferez pas de misère, c'est un bon garçon.

Fin de la séance à 22 heures

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