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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
La commission élue permanente des affaires municipales reprend
ses travaux. Son mandat est d'entendre les personnes ou organismes relativement
au projet de loi no 46, Loi modifiant la Loi de la Communauté urbaine de
Montréal.
Les membres de cette commission sont: MM. Bissonnet (Jeanne-Mance),
Caron (Verdun), Dubois (Huntingdon)... Est-ce qu'il est remplacé?
M. Caron: Remplacé par M. Ryan.
Le Président (M. Rodrigue): ... remplacé par M.
Ryan (Argenteuil); MM. Fallu (Groulx), Lachance (Bellechasse), Mme Lachapelle
(Dorion), MM. Léonard (Labelle), Ouellette (Beauce-Nord), Rochefort
(Gouin), Rocheleau (Hull), Tremblay (Chambly).
Les intervenants à cette commission sont: MM. Beauséjour
(Iberville); Bélanger (Mégantic-Compton) remplacé par M.
Polak (Sainte-Anne), MM. Brouillet (Chauveau), Desbiens (Dubuc), LeBlanc
(Montmagny-L'Islet), LeMay (Gaspé), Picotte (Maskinongé), Ryan
(Argenteuil), Saintonge (Laprairie).
Aujourd'hui, nous entendrons les mémoires des organismes
suivants: la Conférence des maires de la banlieue de Montréal, la
municipalité de la paroisse de Saint-Raphaël-de-l'île-Bizard,
le Groupe écologique STOP, la Fraternité des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal, la Fondation Héritage
Montréal et, finalement, pour dépôt de mémoire
seulement, M. Michel Barcelo. Je signale aux membres de la commission que deux
organismes qui devaient nous présenter des mémoires nous ont
avisés qu'ils avaient changé d'idée, qu'ils n'en feraient
rien. Il s'agit de la ville de Pointe-Claire, ainsi que les contribuables et
organismes publics de l'île de Montréal qui avaient
été inscrits à notre liste initiale d'organismes devant
présenter des mémoires.
M. Caron: M. le Président, est-ce que ce serait possible
de remplacer le député de Jeanne-Mance par le
député de Mont-Royal, s'il vous plaît?
Le Président (M. Rodrigue): Dans la liste des membres, le
député de Mont-Royal remplace le député de
Jeanne-Mance. M. Caron: Oui.
Le Président (M. Rodrigue): Donc, le député
Ciaccia de Mont-Royal.
M. Ryan: II y a le député de Saint-Henri qui est
absent également.
Conférence des maires de la banlieue de
Montréal
Le Président (M. Rodrigue): J'invite les
représentants de la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal à prendre place devant nous et à nous
présenter leur mémoire. Si je ne m'abuse, elle est
représentée par M. Jean Corbeil, le président.
M. Corbeil (Jean): M. le Président, M. le ministre, M. le
chef de l'Opposition, mesdames et messieurs les membres de cette commission,
vous comprendrez un peu qu'après avoir été servi de
l'Orchestre symphonique de Montréal, hier, les notes musicales que vous
allez entendre aujourd'hui ne sont pas de la même tonalité,
puisqu'elles proviennent du groupe amateur de l'Éveil musical
d'Anjou.
Je m'excuse, M. le ministre, de ne pas avoir de disque à vous
présenter, mais je me console du fait que les collègues que je
représente contribuent dans une proportion de 50% au Conseil des arts de
la Communauté urbaine de Montréal, qui est l'organisme qui offre
des subventions a l'Orchestre symphonique de Montréal. Nous partageons
donc avec la ville de Montréal cet honneur qui rejaillit sur
Montréal et auquel nous nous associons, comme nous nous sommes toujours
associés au succès et à la réussite de
Montréal dans tous les domaines. Nous ne sommes pas des adversaires,
nous tâchons d'être des partenaires.
Le présent mémoire s'inscrit dans le prolongement des
démarches entreprises par la Conférence des maires de la banlieue
de Montréal, depuis quelques années, pour obtenir, au nom des
municipalités qu'elle représente, le rôle à part
entière qui leur revient au sein de la Communauté urbaine de
Montréal. C'est à cette condition, croyons-nous, que la
communauté urbaine pourra atteindre le degré d'efficacité
et de
démocratie que sont en droit d'en attendre tous les citoyens de
l'île de Montréal. Après plus de douze ans d'existence, il
est grand temps que les structures et le mode de fonctionnement de la
communauté s'ajustent aux réalités démographiques,
politiques et socio-économiques de la région.
Le 15 septembre 1980, en réponse à l'invitation en ce sens
formulée à tous les intéressés par le ministre des
Affaires municipales de l'époque, M. Guy Tardif, la Conférence
des maires de la banlieue de Montréal transmettait au président
de la communauté urbaine, M. Pierre Des Marais II, ses observations et
recommandations sur les structures de la CUM. En déposant son projet de
loi no 46, le gouvernement du Québec a reconnu comme essentiel le
bien-fondé de notre argumentation en annonçant son intention de
doter ladite communauté d'une structure décisionnelle plus
appropriée. Certaines de nos recommandations initiales n'ont pas
été retenues, c'est le jeu de la consultation et de la
participation et nous nous y soumettons de bon gré.
Si nous revenons aujourd'hui à la charge ce n'est pas par esprit
revenchard ou pour pousser au pied du mur notre partenaire montréalais
dans la CUM mais parce que nous sommes convaincus que la réforme est
bien engagée et qu'un véritable équilibre entre les deux
parties est sur le point de naître. Cette réforme doit être
poursuivie; à moitié complétée, elle pourrait
s'avérer pire que le statu quo qu'elle prétend remplacer. Dans
une question aussi importante que celle qui est en cause, il n'y a pas lieu de
se satisfaire de demi-mesures.
Le projet de loi no 46 repose sur des principes de saine gestion
publique. Nous croyons que ces principes doivent être respectés
intégralement. C'est dans cet esprit que nous avons
préparé le présent mémoire.
Notre document est divisé en six parties:
L'esprit de la réforme, la réalité
montréalaise, les structures, les règles de fonctionnement,
l'organisation, les compétences de la communauté.
Je pense que pour les fins, M. le Président, de l'enregistrement
des débats, j'aurais dû vous présenter d'abord les deux
collègues qui m'accompagnent.
Le Président (M. Rodrigue): Je vous en prie.
M. Corbeil: À ma gauche, M. Mauril Séguin,
vice-président de la conférence et maire de la
municipalité de Sainte-Geneviève. À ma droite, le
vice-président aussi de la conférence, M. MacCallum, maire de la
ville de Westmount.
L'esprit de la réforme. Constituée par la loi du 23
décembre 1969, la Communauté urbaine de Montréal a connu
jusqu'ici une enfance passablement tumultueuse. Les circonstances de sa
création ne furent guère propices à susciter le climat
serein que cette nouvelle expérience aurait requis. Imposée
à la hâte, essentiellement pour répartir sur un plus grand
nombre de contribuables les coûts élevés du service de
police de la ville de Montréal, un tel chambardement politique
était inexorablement condamné à créer davantage de
problèmes qu'il en résolvait. Ce qui, en 1969, était
considéré comme autant de prophéties de malheur de notre
part s'est révélé deux ans plus tard la triste
réalité. À peine la CUM était-elle née
qu'elle était confrontée à une crise sévère
et que le gouvernement du Québec mettait sur pied un comité
d'étude, sous la présidence de M. Lawrence Hanigan, chargé
d'en étudier le fonctionnement.
Depuis, les organismes qui se sont penchés sur la question ont
tous abouti à la même conclusion: une seule raison justifie la
création d'une communauté urbaine soit la possibilité pour
les municipalités d'une même région de se doter, à
meilleur compte, d'équipements communautaires relevant de leur propre
juridiction.
Sans le mentionner explicitement, le projet de loi no 46, Loi modifiant
la Loi de la Communauté urbaine de Montréal, continue de faire de
ce principe l'élément clé de la structure et du
fonctionnement de la CUM.
Lorsqu'on prétend faire jouer à ce type de structures
administratives régionales un rôle autre que celui de coordination
et de gestion dans la prestation de certains services, l'expérience est
nécessairement vouée à l'échec. Que ce soit pour
l'exercice des droits démocratiques, la définition d'un milieu de
vie ou même les parcs publics, ce sont les entités municipales qui
sont les mieux placées pour déterminer les services à
offrir à leurs citoyens que ces derniers sont, par ailleurs, à
même de contrôler efficacement à travers le processus
électoral. La communauté urbaine n'a pas à se substituer
à ses municipalités participantes. Elle doit venir les appuyer
dans leurs différents intérêts.
C'est d'ailleurs ce principe qui gouverne la mise en place des
municipalités régionales de comté (MRC) lesquelles sont
régies par la loi 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
où l'on n'a pas laissé les plus grosses municipalités
imposer leur diktat aux villes, villages et paroisses de moindre dimension. Je
souligne en passant qu'il serait très improbable qu'il y ait
actuellement autant de MRC créées dans l'harmonie s'il avait
fallu imposer ce prétendu grand principe démocratique de faire
diriger les MRC selon le principe du prorata de la population des villes et
villages qui les composent.
Nous le soulignions dans notre mémoire de septembre 1980
relativement à la dimension administrative du rôle d'une
municipalité et nous le répétons: "On a longtemps cru
qu'il existait des économies d'échelle dans la prestation de
services urbains. L'expérience, non seulement à Montréal
mais ailleurs en Amérique du Nord, tend plutôt à
démontrer le contraire. L'analyse des coûts de production de la
plupart des biens et services municipaux a démontré l'absence
d'économie d'échelle dans la production de services tels que la
gendarmerie, la protection contre les incendies, la collecte des ordures, les
bibliothèques, l'entretien des rues, etc. De plus, la "taille optimale"
des municipalités est relativement petite. Elle se situe entre 15 000 et
100 000 personnes. L'évolution des dépenses et de l'effort fiscal
per capita des municipalités au Québec tend d'ailleurs à
confirmer chez nous la validité de ces résultats obtenus aux
États-Unis. Par contre, certaines économies peuvent être
réalisées lorsque le coût fixe des services est important -
par exemple, l'épuration des eaux et les systèmes lourds de
transport en commun - ou qu'il s'agit de services qui affectent l'ensemble
d'une région et qui visent à internaliser les effets de
débordement, par exemple, en aménagement du territoire. "Mais
encore faut-il que les structures de décision que le législateur
mettra en place ne viennent pas contredire ce principe de
décentralisation. Le développement harmonieux de l'île et
l'amélioration de la qualité de vie de l'ensemble des citoyens de
la CUM tiennent à la volonté des parties en cause, en
l'occurrence Montréal et les municipalités de banlieue, de
céder à une structure administrative régionale une partie
de leur propre "souveraineté" afin d'améliorer la qualité
et l'efficacité de certains services de nature locale. C'est parce que
ces deux grandes entités administratives que sont Montréal et les
villes de la banlieue montréalaise existent que la CUM est devenue
possible et même nécessaire. Et à l'intérieur de
cette communauté urbaine, elles doivent être partenaires à
part entière. Vouloir nier cette réalité, c'est en fait
prétendre revenir à la période chaotique de 1972 ou
même à l'époque d'avant 1969. "Cela correspond d'ailleurs
à l'avis donné en décembre 1978 par le Conseil de
planification et de développement du Québec à l'effet que
"la mise en place d'un organisme régional soit constituée
à partir de juridictions déléguées",
c'est-à-dire que l'organisme à caractère régional
doit correspondre à une instance déterminant ces pouvoirs par une
délégation des gouvernements locaux membres."
Cette définition est aussi conforme aux recommandations du
comité conjoint Québec- municipalités en ce sens que "les
communautés urbaines ne devraient être essentiellement que des
organismes de gestion intermunicipaux sous le contrôle exclusif des
municipalités membres."
Le gouvernement du Québec a accepté cette
définition des communautés urbaines. Dans le document expliquant
la réforme de la fiscalité municipale et du financement des
communautés urbaines et régionales, ainsi que du transport en
commun, il est précisé que "les communautés urbaines et
régionales sont avant tout des entités administratives dont les
membres ne sont pas directement élus aux postes qu'ils occupent."
Faudrait-il ajouter que la réforme du financement des communautés
urbaines et régionales avait pour objectif premier de respecter
davantage le principe de la responsabilité dans le financement des
communautés?
Il ressort de cette analyse que c'est au niveau des municipalités
que la plupart des fonctions urbaines ont avantage à être
exercées. Les communautés urbaines ont un rôle à
jouer, mais il se limite aux fonctions essentiellement métropolitaines
reliées aux objets suivants: la planification de l'aménagement
à l'échelle du territoire de l'agglomération; la
planification et la gestion des grands équipements et la coordination
intermunicipale.
Depuis 1977, le principe de la parité préside au
fonctionnement du Conseil de sécurité publique. Nous avons donc
une expérience tangible de la valeur du principe de la parité.
Les résultats ne peuvent être plus probants. D'une part, le
conseil travaille dans l'harmonie et offre ainsi une direction beaucoup plus
claire et plus ferme au service de police de la CUM. D'autre part, les
représentants des villes de la banlieue et ceux de Montréal n'ont
en aucun temps été confrontés à des conflits ou ne
se sont trouvés dans une impasse. Au contraire, les structures ont
favorisé la recherche de solutions cohérentes recevant l'appui de
toutes les parties. Soulignons enfin que Montréal ne se plaint pas des
résultats de cette parité et qu'elle ne la remet pas en cause.
(10 h 30)
Dans le même esprit, citons la Commission permanente
d'aménagement composée de trois représentants de
Montréal, de trois représentants de la banlieue et du
président ex officio du comité exécutif de la
communauté urbaine, lui-même un maire de banlieue. Les travaux
effectués par cette commission ont donné un résultat
convaincant quant à la faculté de s'entendre de ses membres dans
le cadre d'une telle structure administrative. Le fait que l'on procède
actuellement à l'aménagement des parcs régionaux et que,
dans un délai de quelques semaines seulement, un projet de
règlement du schéma d'aménagement sera
déposé au
conseil de la CUM n'est pas étranger à la composition de
la commission. Je fais remarquer ici, en passant, que les deux premiers parcs
régionaux sur lesquels la commission s'est penchée sont
situés à l'intérieur des limites de la ville de
Montréal.
Est-ce le hasard qui fait qu'au Conseil de sécurité
publique et à la Commission permanente d'aménagement, les deux
seuls organismes munis d'un mécanisme de consultation publique, les
affaires avancent et on parvient à des résultats concrets, soit,
au Conseil de sécurité publique, la définition d'objectifs
précis pour le service de police et, à la Commission permanente
d'aménagement, la réalisation d'un projet d'aménagement
des parcs de l'île de la Visitation et de
Rivière-des-Prairies?
Parlons maintenant de la réalité montréalaise.
Depuis 1966, la population totale de l'île de Montréal est
passée de 1 923 178 personnes à 1 740 397, soit une perte de 182
781 citoyens qui ont choisi d'aller vivre à l'extérieur de la
CUM. Il s'agit d'une perte appréciable de 10% pour l'ensemble du
territoire de l'île.
Sans les municipalités de la banlieue montréalaise, cet
exode aurait pu devenir une véritable hémorragie. En effet,
depuis 1966, la ville de Montréal a perdu, au rythme de 21 959 par
année, 329 485 résidents, soit plus du quart de sa population.
Pendant le même intervalle, la banlieue montréalaise a
gagné 146 704 résidents au rythme annuel de 9780 citoyens.
À elles seules, les municipalités de la banlieue de l'île
ont donc pu compenser 45% des pertes démographiques subies par la ville
de Montréal. Je vous invite, à cet effet-là, à
consulter les tableaux 1 et 2 qui sont inclus au mémoire. Alors qu'en
1951, la population des villes de la banlieue montréalaise
représentait 21% de la population totale du territoire de la
communauté, en 1976, ces pourcentages étaient passés
à 42,1% et 57,9% pour atteindre, selon des chiffres
préliminaires, 44,3% et 55,7% respectivement en 1981. Il y a là
un renversement démographique dont il est temps de tenir compte. Bien
plus, il s'agit de tendances lourdes qu'aucune politique ponctuelle ne saurait
modifier, du moins à court terme. On a beaucoup parlé de
l'opération 10 000 logements, mais on sait qu'à l'heure actuelle,
dans l'île de Montréal, la moyenne de personnes par logement se
situe à moins de trois. Alors, même quand on aura
complété l'opération 10 000 logements, on n'aura
ajouté, théoriquement, à la population de la ville de
Montréal, qu'un nombre de 30 000 personnes.
Loin d'être aux crochets de Montréal, les villes de la
banlieue sont génératrices de retombées économiques
pour la grande ville. On peut même dire que les municipalités de
la banlieue font vivre Montréal et font même "travailler"
Montréal. En annexe, on trouvera un aperçu du nombre d'emplois
produits par l'industrie manufacturière dans nos villes de la banlieue
montréalaise.
D'autre part, certaines de nos municipalités ont
été fondées depuis plus de 300 ans. Baie d'Urfé,
Beaconsfield, Dorval, Lachine, Pointe-aux-Trembles et Pointe-Claire existaient
déjà au 17e siècle en tant que paroisses. D'autres au 18e
siècle et beaucoup ont été incorporées au 19e
siècle. Le tableau ci-après donne un aperçu des dates de
"naissance" des villes de banlieue.
La cote financière. Il est important de ne pas déplacer le
débat. Néanmoins, il y a lieu de préciser que la cote
financière internationale de Montréal est, premièrement,
reliée à la solvabilité des autres municipalités du
territoire de la CUM, comme Saint-Laurent, par exemple, qui jouit d'une
excellente réputation financière, et à la
communauté urbaine, elle-même cotée A par Standard and
Poor's et par Moody's. Nous pouvons même avancer que c'est la cote de la
CUM qui soutient la crédibilité financière de la ville de
Montréal.
Deuxièmement, cette cote a pu se maintenir et même
s'améliorer grâce aux contributions des banlieues qui
défrayaient, en 1969, 21% de toutes les dépenses du service de
police, alors qu'en 1982 leur contribution est passée à
47,5%.
Quant au caractère international de Montréal, soulignons
qu'il est apparu ultérieurement à la constitution des villes de
banlieue, dont les citoyens, avec d'autres Québécois,
épongent et épongeront longtemps encore les fastes de cette
reconnaissance hors frontière. Soulignons néanmoins que la
conférence des maires ne s'oppose pas au statut de métropole de
la ville de Montréal, loin de là.
Nous ne pouvons que nous réjouir des efforts de Montréal
pour reconquérir son titre de plus grande ville du Canada. Avec elle,
nous nous enorgueillirons de cette reconnaissance internationale et, côte
à côte, nous travaillerons, comme nous l'avons fait lors du sommet
économique, pour qu'elle regagne tous ses titres de noblesse.
Londres est une ville dont personne ne conteste le caractère
international. Or Londres comme telle, à laquelle on se
réfère le plus souvent en termes de "The City", n'est que l'une
des villes parmi les 32 "boroughs" du "Greater London Council". Sa
renommée mondiale tient davantage à son dynamisme financier et
culturel qu'à la place qu'elle occupe ou n'occupe pas au sein du "London
Council". La ville de Toronto est un autre exemple. Au sein du Toronto
métropolitain, elle ne détient pas une place
prépondérante et pourtant elle s'est taillée une situation
enviable de chef de file. Elle a même détrôné
Montréal à certains endroits
en lui subtilisant son titre prestigieux de métropole du Canada.
Citons encore Mississauga, Etobicoke et Don Mills dont la vitalité, loin
de nuire à Toronto, a hautement contribué à son
succès.
Ce sont les gestes posés et non une majorité redoutable au
sein de la communauté qui feront de Montréal une ville
véritablement internationale. Jusqu'ici, a part Terre des Hommes, la
plupart des gestes posés par la ville de Montréal l'ont
été avec l'appui financier du gouvernement du Québec, donc
de tous les Québécois.
Le prétendu argument "financier" a aussi un pendant plus
qualificatif. La ville de Montréal serait ainsi non seulement le seul
pôle d'attraction économique du Québec, mais aussi le seul
milieu où puisse se développer une culture authentiquement
urbaine et ouverte sur le monde. Malheureusement, personne ne semble savoir de
façon précise ce qu'est cette culture authentiquement urbaine.
Hormis d'en demeurer à des critères tels la concentration
résidentielle, force est-il de constater que le fondement même de
cette culture urbaine s'appuie sur la possibilité, pour des individus
qui vivent sur un territoire donné, d'améliorer la qualité
et d'augmenter l'efficacité de leurs équipements ou même de
se doter de services auxquels ils ne pourraient avoir accès s'ils
étaient isolés. Ce sont ces services qui permettent aux citoyens
d'échanger afin qu'ils puissent jouir de tous les avantages de la
cohabitation. S'il faut s'en tenir à une définition de la culture
urbaine qui privilégie l'anonymat, les embouteillages, la congestion et
la pollution, c'est que nous n'avons guère progressé depuis
l'époque où l'on ne jurait que par le "gros" et le "cher". En
somme, s'il y a une culture montréalaise authentiquement urbaine, elle
ne peut nullement se définir en termes de juridiction municipale.
Si le principe d'efficacité dans la prestation des services, que
nous avons énoncé plus haut, est juste - et des études
ainsi que notre propre expérience le confirment - il doit pouvoir
être traduit en une parité dans la gestion administrative de ces
services. Bref, si l'existence des deux grands partenaires est reconnue au
niveau des services, elle doit aussi l'être pour ce qui est des
décisions collectives concernant ces services. Si Montréal et la
banlieue sont unies dans ce qu'il est convenu d'appeler les problèmes
régionaux, elles doivent aussi l'être lorsque vient le temps
d'imaginer et de mettre en oeuvre les solutions. L'égalité ne
saurait s'appliquer qu'au partage des problèmes.
Le projet de loi no 46 reconnaît tant au plan administratif que
décisionnel cette symbiose entre Montréal et sa banlieue. Ni
l'une, ni l'autre ne doit avoir d'exclusivité ou de priorité
lorsqu'il s'agit d'améliorer le cadre de vie de l'ensemble de la
région de la Communauté urbaine de Montréal.
En ce qui concerne les structures, en modifiant la Loi de la
Communauté pour inclure, au comité exécutif, six
représentants de la ville de Montréal et six représentants
des municipalités de la banlieue de Montréal, le projet de loi no
46 reconnaît dans les faits cette nécessaire égalité
entre les deux partenaires. Le président du comité
exécutif sera nommé par le conseil parmi ses membres, mais avant
d'entrer en fonction il devra démissionner de son poste de membre du
conseil d'une municipalité. Malgré cette démission, il
pourra continuer à siéger au conseil de la communauté et y
disposera d'une voix. C'est là le seul changement apporté par le
projet de loi no 46 à la composition du conseil.
C'est le comité exécutif de la CUM qui est le principal
instrument du conseil dans l'exécution des tâches de ce dernier.
Il doit posséder tous les pouvoirs nécessaires vis-à-vis
de tous les services de la CUM. À ce titre, il est au coeur de cette
collaboration entre la ville de Montréal et les municipalités de
la banlieue qui est la raison d'être de la CUM. Il est donc normal que ce
comité fonctionne sur le principe d'égal à égal.
Certes, cette égalité n'éliminera pas les oppositions qui
sont susceptibles de surgir entre les deux partenaires. Celles-ci font partie
intégrante du fonctionnement même de la communauté.
Jusqu'à une certaine mesure, elles en assurent le dynamisme. Mais cette
nouvelle égalité rend cette fois impossibles les solutions
artificielles qu'un des deux partenaires aurait pu imposer à cause de sa
prépondérance. En définitive, les décisions en
seront renforcées.
Tout déséquilibre dans la représentation entre
Montréal et les villes de banlieue au comité exécutif ne
peut qu'en enrayer le fonctionnement. Un tel déséquilibre
favorise la prédominance systématique d'une des parties et
n'oblige pas le comité à rechercher, au niveau des
décisions politiques et administratives, le consensus
nécessaire.
On ne peut, non plus, prétendre qu'une représentation
égalitaire paralysera le fonctionnement du comité
exécutif. Si les conditions objectives étaient telles que, dans
un cadre de participation égalitaire, le comité exécutif
serait paralysé par l'opposition de l'une ou l'autre des parties,
imaginons les problèmes politiques créés par les
mêmes conditions objectives dans un cadre de participation où
Montréal domine systématiquement. Nous avons
expérimenté ce cadre depuis les débuts de la CUM et nous
le rejetons. Nous avons également expérimenté, au niveau
du Conseil de sécurité publique et de la Commission
d'aménagement, la parité de représentation et point n'est
besoin de souligner l'amélioration apportée sur le plan de
l'efficacité.
Nous proposons de compléter cette réforme par la
nomination non pas d'un, mais de deux vice-présidents du comité
exécutif, l'un de Montréal, l'autre de la banlieue, qui
pourraient assumer leur rôle alternativement tous les trois mois, sur
l'exemple d'un maire suppléant dans une ville. Cette nomination, qui ne
modifie en rien l'équilibre au sein du comité exécutif,
aura pour effet d'assurer une meilleure répartition des
responsabilités dans la conduite de ses affaires courantes. (10 h
45)
L'autre changement structurel important proposé par le projet de
loi 46 est l'institution de cinq commissions permanentes du conseil, l'une pour
chacun des domaines suivants: l'aménagement, l'environnement, les
finances, la sécurité publique, le transport en commun. Elles
seraient composées d'au plus sept membres dont au moins deux
représentants de la ville de Montréal et deux
représentants des autres municipalités. Cette formule de
représentation, tout en préservant l'essentiel du principe de la
parité, permettra, d'une part, une certaine spécialisation du
travail entre les membres du conseil et, d'autre part, une plus grande
participation de ses membres.
Vu l'importance des budgets de la CUM et la complexité croissante
des problèmes, la création de ces commissions permanentes
était devenue une nécessité. Mais, afin d'assurer que ces
commissions ne fonctionnent pas en vase clos, nous suggérons que le
président du comité exécutif soit membre ex officio de
toutes les commissions pour des fins de cohérence et de
continuité.
Possédant un pouvoir d'étude et de recommandation, ces
commissions pourront donner des avis au conseil ou au comité
exécutif, sur demande ou de leur propre initiative. Afin de clarifier ce
processus, nous suggérons que les commissions ne fassent rapport
qu'à travers le comité exécutif. D'ailleurs, une telle
responsabilité unique serait tout à fait conforme avec le fait
que le président et le vice-président de chaque commission - l'un
devant être nécessairement de Montréal et l'autre d'une
municipalité de banlieue - sont automatiquement membres du comité
exécutif.
Il va sans dire que non seulement les postes de président et de
vice-président du comité exécutif et du conseil mais ceux
des commissions permanentes doivent respecter le principe
d'égalité de représentation Montréal-banlieue.
Une mise au point s'impose en regard d'une recommandation
antérieure de la conférence des maires relativement à
l'élection du président du comité exécutif de la
CUM au suffrage universel. La proposition du gouvernement telle que
présentée au projet de loi 46, soit que le président
démissionne de son poste d'élu local, nous apparaît sans
contredit une meilleure solution. Elle permet au président de faire
valoir les intérêts de l'ensemble de la communauté et lui
donne l'assurance de la plus grande vision communautaire possible. La
conférence trouve dans cette proposition réponse à ses
attentes concernant l'impartialité et la crédibilité que
commande ce poste. D'autant plus que le rôle principal du
président, selon nous, en sera un de conciliation et de médiation
plutôt que d'arbitrage. Cela évitera l'intransigeance des
positions et favorisera le dialogue entre les parties. L'entente en sera
d'autant facilitée.
Quant aux règles de fonctionnement, les décisions au
conseil de la communauté seront dorénavant prises à la
double majorité, c'est-à-dire qu'il faudra la majorité des
voix exprimées tant pour les représentants de la ville de
Montréal que pour ceux des autres municipalités, plutôt que
les voix de la moitié des membres présents de chaque groupe.
Cette règle de la double majorité reconnaît le
principe de l'égalité des parties, c'est-à-dire de
Montréal et des villes de banlieue, dans les grandes décisions de
la communauté. Au même titre que la réforme de la
représentation au comité exécutif, la règle de la
double majorité au conseil repose sur le principe de la
nécessité d'un consensus très large derrière les
grandes décisions de la CUM. Pour ce qui est des décisions du
comité exécutif, elles continueront d'être prises à
la majorité des voix exprimées mais avec un mécanisme par
lequel le vote des deux tiers des représentants de la ville de
Montréal ou des autres municipalités - soit 4 membres de l'un ou
l'autre groupe - pourra retarder une décision jusqu'à
l'assemblée suivante du comité.
En matière de budget, la règle de l'entrée en
vigueur automatique se trouve abolie. Il s'agit d'un progrès
marqué du processus démocratique. Si, le 1er janvier, le budget
n'a pas été adopté, le quart de chacun des crédits
prévus au budget de l'exercice précédent est censé
adopté et entre en vigueur. Il en va de même les 1er avril, 1er
juillet et le 1er octobre si, à chacune de ces dates, le budget n'est
toujours pas adopté. Cependant, dès le 15 janvier, le ministre
des Affaires municipales peut l'adopter à la place du conseil, avec ou
sans modification, si ce dernier se révèle incapable de le
faire.
Sauf pour ce qui est du recours à l'imposition d'un budget par le
ministre des Affaires municipales, nous appuyons d'emblée cette
procédure d'appropriation temporaire. Nous aurions cependant
préféré que l'appropriation se fasse par tranches plus
réduites, un douzième ou un sixième, afin de permettre un
plus grand contrôle de la part des membres du conseil.
Les questions mises à l'ordre du jour des assemblées
régulières et spéciales du conseil pourront
dorénavant provenir non plus uniquement du comité
exécutif, mais aussi de son président, d'une commission ou de
tout groupe d'au moins 15 membres du conseil qui en fera la demande. Cette
ouverture découle du rôle plus grand qu'on voudra faire jouer aux
commissions permanentes. Néanmoins, selon nous, les commissions
permanentes devraient transmettre leurs recommandations au comité
exécutif qui devrait lui-même être désigné en
principe comme responsable des mises à l'ordre du jour des
assemblées régulières et spéciales du conseil de
toutes questions qui auront fait l'objet au préalable des
recommandations des commissions permanentes.
Quant à l'organisation administrative, un poste spécifique
de directeur général est créé sur le modèle
des lois des autres communautés. Tous les fonctionnaires et
employés de la communauté seront sous son autorité sauf le
secrétaire, le commissaire à l'évaluation, le directeur,
les fonctionnaires et employés du service de la police. Ses attributions
et devoirs sont les suivants: premièrement, administrer les affaires de
la communauté sous l'autorité du comité exécutif;
deuxièmement, exercer à titre de mandataire du comité
exécutif, l'autorité sur les directeurs de services, à
l'exception du secrétaire et du commissaire à
l'évaluation; troisièmement, assurer la liaison entre le
comité exécutif et les directeurs de services;
quatrièmement, obtenir, examiner et présenter au comité
exécutif les projets préparés par les directeurs de
services; cinquièmement, assurer la réalisation des plans et des
programmes de la communauté.
La Conférence des maires de la banlieue de Montréal appuie
cette redéfinition des fonctions de secrétaire
général qui se concrétise par la création d'un
poste distinct de directeur général. Nous croyons d'autre part
qu'il est de toute première importance que soient établis
clairement les devoirs et limitations du directeur de police tant au niveau des
fonctionnaires et des employés du service de police qu'à celui de
la trésorerie et ce, aux fins d'éviter toute
ambiguïté et empêcher que ne se créent des structures
administratives parallèles.
Quant aux compétences de la communauté, cette
dernière continuera d'avoir juridiction sur les huit secteurs de
compétence suivants: la lutte contre la pollution de l'air,
l'assainissement des eaux, la récupération et le recyclage des
déchets, la santé publique, les loisirs et les parcs, la police,
le schéma d'aménagement du territoire, et
l'évaluation.
Dans la nouvelle définition des responsabilités qui
accompagne la définition de chacune des compétences, un secteur
nous apparaît poser certains problèmes, celui de la gestion des
déchets. Nous croyons qu'il est nécessaire que la
communauté obtienne la juridiction sur l'ensemble du secteur, exception
faite de la cueillette des ordures, ou que cette question soit exclue
totalement de la juridiction de la communauté. En effet, nous
recommandons que la cueillette des déchets demeure une
responsabilité municipale. Ce sont les municipalités qui sont les
mieux placées pour se charger de cette tâche et en assurer
l'administration d'une manière économique.
On s'interroge, d'autre part, quant à l'abrogation de l'article
167a relativement à la promotion économique. Nous osons croire
qu'il s'agit là d'un retrait involontaire, le service de la promotion
économique étant essentiel au développement du territoire
de la CUM.
En considération des réflexions qui
précèdent, nous présentons ci-après un
résumé des recommandations de principe sur le projet de loi no
46, Loi modifiant la Loi de la Communauté urbaine de
Montréal.
Premièrement, en ce qui concerne les structures, le comité
exécutif de la CUM doit comprendre deux vice-présidents, l'un de
Montréal, l'autre de la banlieue. Les deux vice-présidents du
comité exécutif doivent alterner tous les trois mois. Le conseil
est dirigé par un président et un vice-président, l'un
provenant de Montréal et l'autre des municipalités de banlieue.
Le président du comité exécutif est membre ex officio des
cinq commissions permanentes et de toute autre commission formée par le
conseil.
Les commissions permanentes transmettent leurs recommandations au
comité exécutif qui les porte à l'ordre du jour des
assemblées régulières et spéciales du conseil.
À défaut d'adoption, le budget sera reconduit par tranches
de un sixième ou de un douzième.
Les devoirs et limitations du directeur de police, tant au niveau des
fonctionnaires et des employés du service de police qu'à celui de
la trésorerie, doivent faire l'objet d'une définition claire et
précise.
La CUM doit avoir entière juridiction sur la gestion des
déchets, la récupération et le recyclage, à
l'exception de la cueillette des ordures qui doit demeurer une
responsabilité municipale.
Qu'il soit indiqué clairement dans la loi que le directeur du
service de police relève directement du président du
comité exécutif et que le service de police est sous
l'autorité du comité exécutif et du directeur.
La CTCUM, tout en demeurant une entité juridique distincte,
devrait être assimilée à la communauté en tant que
service de la CUM; le conseil d'administration de cette entité juridique
étant alors les membres du comité exécutif
de la CUM.
L'article 167a de la Loi de la CUM relativement à
l'établissement d'un service de promotion économique ne doit pas
être abrogé.
Il y a lieu de prévoir un mécanisme qui imposerait une
révision de la Loi de la CUM tous les cinq ans.
Un certain nombre de modifications ont été
recommandées par les conseillers juridiques de la CUM relativement
à des modalités techniques bien spécifiques. Nous les
faisons nôtres et les ajoutons aux présentes recommandations.
M. le Président, si vous me le permettez, j'aimerais aussi tenter
de fournir quelques observations, commentaires et réponses à des
affirmations ou des questions qui ont été laissées en
suspens hier. Une de ces questions, qui est à la base des raisons pour
lesquelles nous sommes ici aujourd'hui, est la suivante: Qu'a fait la ville de
Montréal pour nuire à la banlieue?
Je lisais, ce matin, les manchettes disant que des modifications au
système, à la procédure de prise de position au niveau de
la communauté humilieraient les Montréalais. Je livre à
votre réflexion quel peut être, depuis douze ans, le sentiment de
frustration des élus et des habitants de la banlieue de Montréal
en voyant qu'on les a emprisonnés dans une loi dont ils ne voulaient
pas, qui leur a été imposée de force et avec laquelle ils
ont le sentiment et la certitude de ne pouvoir absolument rien faire. Ils n'ont
pas, comme dans des entreprises commerciales où ils seraient soi-disant
des actionnaires minoritaires, la possibilité de quitter cette
compagnie. Ce qu'a fait la ville de Montréal pour nuire à la
banlieue, c'est d'entretenir par ce que j'appelle des bassesses mesquines le
climat de frustration et de perpétuer la notion
d'infériorité des banlieusards.
On a refusé, pendant les huit premières années de
la communauté, l'accession à la présidence de
l'exécutif d'un représentant des banlieues, même en
dépit du fait que la ville de Montréal était très
nettement majoritaire au sein de ce comité exécutif. Dès
l'accession en catastrophe du président actuel à son poste, en
août 1978, après la nomination de M. Lawrence Hanigan comme PDG
à temps plein de la CTCUM et le départ, dans des circonstances
que l'on connaît, du président de l'époque du comité
exécutif de la ville de Montréal, il a fallu quatre mois au
président du comité exécutif pour obtenir l'engagement par
ce comité exécutif d'une secrétaire. (11 heures)
On a refusé constamment depuis douze ans de permettre l'accession
d'un représentant de banlieue à la moindre présidence du
moindre comité de la communauté urbaine, que ce soit à la
commission Alie, que ce soit à la commission
Lamarre, que ce soit au sous-comité. Les objectifs politiques de
la CUM, présidé par M. Lamarre, que ce soit à la
commission permanente d'aménagement, que ce soit au comité
d'évaluation, présidé par M. Fernand Desjardins. Il n'y a
jamais eu de place dans cette structure pour qu'un représentant de
banlieue occupe une certaine place et qu'on reconnaisse la dignité de
ces gens qui représentent 800 000 personnes sur l'île de
Montréal.
Lorsque le ministre des Affaires municipales, en 1980, a demandé
aux intervenants de présenter des mémoires au président du
comité exécutif actuel sur les modifications souhaitées
aux structures de la communauté, le seul intervenant qui n'a pas
daigné adresser son mémoire au président du comité
exécutif, mais qui l'a adressé directement au ministre des
Affaires municipales, c'est la ville de Montréal. On a même
refusé, il y a à peine quelques semaines, au président du
comité exécutif, qui réclamait la possibilité de
venir devant vous présenter un mémoire sur les aspects
strictement techniques de ces modifications de structure, par un vote
majoritaire au comité exécutif - et je ne m'attarderai pas
à ce geste très délicat qui a été
posé devant vous au début de cette commission parlementaire, pour
bien souligner que le président du comité exécutif de
cette communauté, dans laquelle tout va si bien... - la
possibilité de venir parler au nom de cette communauté.
La gestion des déchets. La communauté possède,
depuis sa création, une responsabilité sur la gestion des
déchets qu'elle a le loisir d'exercer au moment de sa convenance. Le
président du comité exécutif de la communauté a
fait préparer, il y a environ deux ans, un projet de règlement
par lequel la communauté présenterait une demande à la
Législature du Québec pour exercer cette compétence. La
ville de Montréal a demandé quelques semaines de répit
pour étudier ce règlement. La première chose que l'on a
sue, c'est qu'il y avait un projet de loi privé présenté
devant cette Assemblée pour confier à la ville de Montréal
le soin de faire la gestion des déchets non seulement sur son
territoire, mais aussi la possibilité d'acquérir, à
l'extérieur de son territoire, des sites de disposition des
déchets et de les utiliser. La conférence des maires est
intervenue, à ce moment-là, pour demander que cette
disponibilité, cette prérogative ne soit pas donnée
exclusivement à la ville de Montréal, parce que cela risquait de
créer des problèmes éventuels considérables sur
l'île de Montréal. On nous a donné comme réponse que
ce n'était qu'une disposition temporaire et que, dès que la
communauté exercerait cette juridiction, la ville de Montréal
s'en retirerait.
Lorsque nous avons, par la suite, tenté de faire
réintroduire cette demande au comité exécutif de la
communauté urbaine, on nous a répondu que la ville de
Montréal avait réglé son problème elle-même
et que, si les autres villes de banlieue avaient un problème à
régler concernant la gestion des déchets, elles pouvaient le
régler entre elles. Nous nous sommes donc mis à la tâche et
nous présenterons, d'ici à quelques semaines, au ministre des
Affaires municipales, à moins que la loi 46, la Loi de la
Communauté urbaine de Montréal, ne donne nettement cette
juridiction à la communauté, nous présenterons une demande
pour former une régie intermunicipale de gestion des déchets pour
les municipalités de la banlieue. On aura donc un autre organisme dans
le décor qui viendra davantage compliquer la situation. Quelle belle
coopération, quelle belle entente!
L'intégration des trains de banlieue. Le plan de transport
intégré de l'île de Montréal n'est pas la
création, n'est pas l'invention des villes de banlieue. Le plan
intégré de transport, qui prévoit la finition du
métro souterrain, les lignes de métro régionales et
l'intégration des trains de banlieue, a été
déposé et rendu public par le ministre des Transports de
l'époque, M. Denis de Belleval. Nous l'avons appuyé à
300%. Depuis ce temps il y a eu des tergiversations considérables;
après beaucoup de mois il a fini par y avoir une entente à ce
sujet. On a fait beaucoup état hier du fait que la magnanimité de
la ville de Montréal avait permis dans ce dossier d'économiser 30
000 000 $. Je pense que nous, les petits administrateurs banlieusards, nous ne
savons certainement pas compter aussi bien que les grands administrateurs de
Montréal, mais je souligne simplement, et je vous laisse faire vos
propres calculs, que les 30 000 000 $ dont on parle, c'est le coût
maximal auquel on peut s'attendre que les ententes de service
s'élèveront. On a signalé qu'il y a eu la semaine
passée une entente de principe entre le CN et la CTCUM au coût de
12 500 000 $ et on a projeté, sur des données qui leur sont
possiblement disponibles et qui ne nous le sont pas, que l'entente avec le CP
serait de 17 500 000 $, faisant donc un grand total de 30 000 000 $. On a dit:
On a donc bien fait d'inscrire dans le projet d'entente que ça ne
coûterait pas plus de 6 000 000 $.
Or je vous réfère au projet d'entente, je vous
réfère au décret gouvernemental qui est la
concrétisation de ce projet d'entente et vous y verrez que ce à
quoi la CUM s'est engagée, c'est que le déficit d'exploitation de
ces lignes ne dépasse pas 6 000 000 $. Or que je sache, s'il y a 28
trains qui feront la navette entre le centre-ville et Deux-Montagnes sur la
voie du CN et possiblement au moins 22 à 25 trains qui feront aussi,
éventuellement, la navette entre le centre-ville et Rigaud, je n'ai pas
l'impression que les gens voyageront gratuitement. Il y aura sûrement un
certain montant de revenu. Selon le plan de subvention des commissions de
transport actuellement en vigueur, le gouvernement verse aussi aux commissions
de transport une subvention égale à 40% du revenu.
On peut situer le revenu potentiel à un niveau quelconque. Je ne
m'aventurerai pas dans des pronostics de cette nature. Mais il y aura
sûrement des revenus très importants puisqu'on parle d'environ 10
000 000 de transports annuellement qui seront exécutés par ces
deux lignes de trains de banlieue. Au revenu de ces 10 000 000 de passagers, le
prix du voyage n'étant pas encore fixé, il faudra ajouter les 40%
de la subvention du gouvernement et on s'apercevra probablement en fin de
compte que le déficit ne sera pas tellement plus haut que les 6 000 000
$ indexés que prévoient l'entente et le décret. Mais
entre-temps on a oublié aussi de mentionner que dans ce décret il
est bien dit que tant que ces ententes ne seront pas signées, les
travaux du métro continueront d'être financés sur
l'ancienne base de 75-25 et que lorsque l'entente sera signée la
nouvelle base de financement des travaux du métro deviendra en vigueur,
c'est-à-dire que le gouvernement assumera 100%. Comme cette entente n'a
pas encore été signée et qu'il y a eu effectivement des
travaux de métro d'effectués au cours de l'année - je vous
engage à vérifier auprès de la CUM ou de la CTCUM quant au
montant des travaux qui ont été effectués au cours de
cette année - il est fort probable que la CUM les assumera à 25%
si l'entente est respectée, alors qu'elle n'aurait eu aucun sou à
débourser si cette entente avait déjà été
effectivement signée. Vous verrez qu'en fin de compte le geste sublime
auguel on a fait allusion hier n'a pas la conséquence qu'on lui a
prêtée. Nous disons, tout simplement, que ces tergiversations
n'ont eu pour effet que d'exacerber davantage les citoyens des villes de
banlieue qui y ont vu le désir de la ville de Montréal
d'empêcher que les trains de banlieue ne soient effectivement
intégrés au système de transport.
M. Racicot, le président du syndicat des cols blancs de la CUM et
de la ville de Montréal, est venu mardi, je crois, vous parler du
problème de transfert des fonds de retraite qui n'est pas encore
réglé après douze ans. Il n'est pas près de se
régler parce que nous sommes dans une impasse totale. Il y a eu une
entente unilatérale entre la ville de Montréal et la CUM en 1971
ou 1972 à ce sujet, mais je pense que le ministre des Affaires
municipales pourra retrouver, quelque part dans le ministère, une note
interministérielle sur le fait que, selon les gens de la Régie
des rentes, cette
entente n'est pas conforme à la loi. Par conséquent, les
municipalités autres que la ville de Montréal n'ont jamais
signé cette entente et ne la signeront pas tant qu'elle ne sera pas
modifiée, parce que cela représente, pour elles, une
différence de 10 O00 000 $. Les évaluations actuarielles de cette
entente actuellement sont d'environ 20 000 000 $ qui sont absorbés par
la CUM, donc à 50% à peu près par Montréal et les
villes de banlieue, alors que si l'entente était faite de façon
correcte, pour la ville de Montréal, le coût serait d'environ 19
000 000 $, puisque 95% ou 96% des cols blancs qui ont été
transférés à la CUM lors de la création de la
communauté provenaient de la ville de Montréal.
La disposition des biens du transport. Le président de la
communauté a mentionné mardi que cette opération qui a
été confiée à la ville de Montréal et
à la CTCUM n'est pas encore complétée après douze
ans. On évoquera sûrement encore pendant plusieurs années
les difficultés techniques de cette entente parce que, pendant ce
temps-là, il y a des stationnements qui sont exploités par la
ville de Montréal sur des terrains qui, normalement, devraient
être transférés, depuis le début, a la
communauté.
On a demandé: Qu'a fait Montréal pour nuire à la
banlieue? Après l'énumération de ces quelques incidents,
je pourrais, à mon tour, demander: La banlieue a-t-elle
déjà fait quelque chose, depuis les débuts de la CUM, pour
nuire à Montréal?
Je ne puis encore comprendre aujourd'hui par quels mécanismes
épouvantables il pourrait arriver que, parce que nous serions à
parité égale au comité exécutif, le ciel tomberait
soudain sur l'avenir de la communauté. (11 h 15)
On nous a reproché, semble-t-il, je trouve cela assez
révélateur, d'avoir apparemment fait preuve de
coopération, puisqu'on n'a pas forcé plus de votes qu'il n'en
faut à la communauté. Il faudrait donc conclure que, pour bien
marquer qu'on n'était pas content, on aurait dû saboter de
façon délibérée tous les travaux de la
communauté depuis douze ans, alors que depuis au moins sept ou huit ans,
après les deux ou trois premières années, au cours
desquelles chacun sentait qu'il avait été projeté
malgré lui dans cette camisole de force de la CUM, après ces deux
ou trois premières années de rébellion, la banlieue a
tâché de coopérer avec Montréal pour faire
fonctionner la communauté. S'il n'y a pas eu plus de vote, je pense
qu'on peut y voir là le désir de la banlieue de coopérer
à ce que cela fonctionne.
On a dit hier qu'il fallait que Montréal contrôle
l'exécutif de la CUM pour assurer la rigueur administrative. Ce n'est
pas la banlieue qui a construit l'usine Charles-
DesBaillets de filtration des eaux, dont le coût est passé
d'environ 75 000 000 $, lors de la préparation des estimations, à
un coût de réalisation de près de 400 000 000 $. Et qui a
fait que cette usine a été basée sur une population
projetée de 3 000 000 de personnes dans l'île de Montréal,
alors que depuis 1966 les projections démographiques étaient
nettement en décroissant?
Je ne parlerai pas non plus de cet autre événement qui a
eu lieu en 1976 et dans lequel la banlieue n'a rien eu à voir. Je pense
que ceux parmi vous qui étaient ici à l'époque ont eu
droit à la même démonstration de la rigueur administrative
de la ville de Montréal, et que l'ensemble du Québec continue
d'en payer les coûts. On nous a dit hier que dans un document de la
Canadian Bonds Rating Services on avait insisté sur le fait qu'il
fallait contrôler les emprunts. Je me demande si cette entreprise a pris
connaissance qu'à quelque part dans les années soixante-dix il y
a une administration qui fait l'objet de ce "rating" qui a
dépensé au-delà de 1 000 000 $ sans qu'il y ait de
règlement d'emprunt d'adopté à cet effet, non pas par la
communauté, mais par la ville elle-même. La rigueur
administrative, je pense qu'on la retrouve dans l'ensemble de nos banlieues.
Celui qui vous parle n'est certainement pas de la même trempe
administrative que les gens qui dirigent la ville de Montréal, il est
humblement originaire du carrefour des rues Beaudry et La Gauchetière et
il n'a pas de diplôme universitaire. Ville d'Anjou a quand même
réussi depuis deux ans à adopter un budget de fonctionnement
à croissance zéro, mais ce n'est certainement pas la rigueur
administrative des élus qui a permis, je présume, cette
réussite. On pourrait citer des exemples semblables dans beaucoup de
municipalités.
On a parlé aussi hier du transfert fiscal des infrastructures. Je
vous soumets humblement qu'en 1930 la Régie des eaux du Québec a
émis une ordonnance à la ville de Montréal, de construire
une usine d'épuration des eaux. Cette usine s'est finalement construite
à la fin des années 1970 après que le gouvernement du
Québec eut décidé de financer, avec l'aide du gouvernement
d'Ottawa, environ les deux tiers des coûts. Par la suite, il a
augmenté sa participation à 90%. Les infrastructures qui ont
été construites dans la ville de Montréal l'ont
été pour ses besoins propres. D'autres villes ont par la suite
demandé la permission de mettre aussi leurs égouts dans les
mêmes structures afin d'éviter des coûts. Je pense qu'il
s'agissait d'une démonstration de rigueur administrative de la part de
villes concernées, ce qui aurait constitué un scandaleux
gaspillage, si chacune des villes s'était dotée des mêmes
infrastructures.
On a parlé brièvement, en passant, de
ce transfert. Ce sont les représentants des cols bleus qui ont
parlé de ce transfert de la réparation des autos de police
effectué en 1977 à la suite d'une décision du conseil de
sécurité. Je souligne de nouveau à votre attention qu'en
1977, le conseil de sécurité était constitué de
trois représentants de la ville de Montréal, de trois
représentants des banlieues et d'un représentant du gouvernement
et que, avant de donner ses réparations à l'entreprise
privée, il était possible à la ville de Montréal,
si elle l'avait cru nécessaire, si elle l'avait cru possible et
souhaitable, de soumissionner elle-même pour conserver la
réparation des autos en question.
Quant aux 300 emplois dont on a parlé, le fait qu'il n'ait pas
été mentionné dans la loi que ces genres d'emplois
devaient aussi être transférés, je prétends que les
catégories d'emplois qui ont été transférées
sont des catégories sur lesquelles la communauté avait une
juridiction exclusive, par exemple l'évaluation, où il
était possible de dire: Tous les employés des différentes
villes au service d'évaluation deviennent des employés de la
communauté. La ville de Montréal continuait à exploiter un
parc automobile important pour ses propres véhicules et il aurait
été, à toutes fins utiles, physiquement impossible de dire
dans une loi quels employés parmi les cols bleus devaient être
transférés ou non.
On a parlé de la ville centrale où est le coeur des
activités culturelles. Je souligne aussi que lorsque le gouvernement du
Québec a décrété, avec l'accord du comité
conjoint sur la fiscalité, la réforme de la fiscalité
municipale en 1980, la majorité des villes de banlieue a appris qu'elles
contribuaient sans leur connaissance au Conseil des arts de Montréal
depuis fort longtemps par le biais d'un prélèvement par le
gouvernement du Québec, avant même que la distribution ne soit
faite aux villes, d'une partie de la taxe de vente. Comme la taxe de vente
était retirée des municipalités, la ville de
Montréal a pris la décision d'arrêter, de mettre la hache
dans le Conseil des arts. C'est à l'initiative de la Conférence
des maires qu'il y a eu par la suite une demande par la communauté au
gouvernement du Québec d'amender la Loi de la communauté pour lui
permettre de recréer le Conseil des arts de la Communauté urbaine
de Montréal dans lequel nous contribuons pour environ 50% selon les
quote-parts habituelles et dont les subventions sont versées, avec notre
plein accord, à 97% à des organnismes situés dans la ville
de Montréal et à 3% à des organismes situés en
banlieue.
Je souligne le fait simplement pour que vous sachiez que nous ne nous
dérobons pas à nos obligations culturelles et à notre
apport à la vie culturelle de la communauté. Sans vouloir dire
par là que nous ne sommes pas d'accord avec ces subventions du Conseil
des arts, nous en sommes extrêmement fiers. C'est la raison pour laquelle
je vous disais tantôt que j'aurais cru décent qu'au moment
où on parlait hier de l'orchestre symphonique et de l'honneur qui
rejaillit sur Montréal, considérant la présence ici des
villes de banlieue, on aurait pu au moins souligner cette participation.
On a parlé à plusieurs reprises des banlieusards
parasites. Je crois, au contraire, que les gens de la banlieue, qui vont chaque
jour dans le centre de Montréal pour y travailler, sont aussi
responsables du fait, en partie, qu'un grand nombre de magasins sont
situés dans le coeur de Montréal et, par le paiement de la taxe
d'affaires, ces magasins, ces restaurants, ces lieux de divertissement
contribuent grandement à la santé financière de
Montréal.
Durant les travaux du comité conjoint sur la fiscalité, il
a été déposé un document que je n'ai
malheureusement pas en ma possession, mais qui est disponible à travers
le système administratif du gouvernement, dans lequel on dit que les
services purement locaux de loisirs, de pompiers et ainsi de suite ne
coûtaient pas plus cher relativement parlant, per capita ou par dollar
d'évaluation, dans la ville de Montréal que dans les villes de
banlieue. Nous contribuons, la contribution des villes de banlieue au
financement de la communauté urbaine est de 47 1/2%, alors que sa
population n'est que de 44%. Je pense que cette différence
démontre que la banlieue contribue plus que sa part aux dépenses
de la communauté et à la santé financière de
Montréal, aussi.
On a parlé de Munich, je pense, dans le mémo du
président, comme nous parlons du Greater London Council et de Toronto
non pas en tant qu'exemples à imiter, mais simplement pour souligner que
la renommée, la santé financière, le rayonnement d'une
municipalité située à l'intérieur d'une
agglomération urbaine ne dépend pas de la domination de cette
agglomération par la ville concernée, elle dépend de son
propre dynamisme. Il est possible, par ces exemples, de démontrer que
même dans les cas où la ville centrale ne détient pas la
majorité, elle n'est pas brimée dans son rayonnement par le fait
qu'elle est minoritaire au sein de l'organisme régional de distribution
des services. Je répète ce que je disais au début, il n'y
aurait fort probablement pas une seule MRC de créée, à
l'heure actuelle, si on avait exigé dans la loi que la ville centrale
domine la MRC.
En terminant, je veux seulement parler de cette grande vertu qu'on
appelle la démocratie et qui sert souvent à abrier un grand
nombre de choses. Je passerai sous silence le fait qu'il est assez curieux de
constater qu'à cette table, hier, il y avait les grands
défenseurs de la démocratie qui
n'ont pas prouvé dans leurs gestes passés qu'ils
étaient les amants de la démocratie. Je souligne aussi que pour
avoir la coopération, l'harmonie dans un milieu il est important que les
deux partenaires se sentent heureux et se sentent confortables.
En juin 1980, le gouvernement du Québec a adopté une loi
sur la démocratie municipale qui faisait en sorte que, dans chacune des
villes, le conseil municipal devait être divisé en un nombre de
quartiers de façon que la population soit représentée
proportionnellement. À peine deux mois après l'adoption de cette
loi - M. le ministre, vous vous rappelez sans doute cette commission
parlementaire à laquelle le hasard a permis que j'assiste, où il
y avait fort probablement autant de personnes que dans cette salle maintenant
et qui contenait, m'a-t-on dit, un tout petit village, une toute petite ville,
des environs de Rivière-du-Loup; quelques milliers de citoyens. Depuis
cent ans, ces citoyens étaient dans un état de confrontation et
de bataille perpétuelle; on a parlé de batte de baseball avec
lesquelles les citoyens s'amenaient aux assemblées du conseil municipal;
la pagaille était prise dans cette municipalité depuis des
années. Cela a fait l'objet d'une demande de bill privé par des
citoyens qui sont venus demander, ici à l'Assemblée nationale, de
faire quelque chose pour ramener l'harmonie chez eux. (11 h 30)
Malgré cette nouvelle loi de la démocratisation municipale
qu'on venait d'adopter, le ministre a suggéré, dans un jugement
de Salomon, que peut-être on ramènerait l'harmonie dans cette
municipalité en faisant en sorte que, nonobstant la
représentation de la population, on confierait trois conseillers
municipaux à la partie du village ou de la ville - appelez-la comme vous
voudrez - qui avait 3000 habitants et aussi trois conseillers municipaux
à l'autre partie de la ville qui avait une population beaucoup moins
élevée; de mémoire, je crois que c'était 1500. Dans
un premier geste, les deux partenaires ont refusé, mais, par la suite,
ils ont accepté la suggestion du ministre. À l'heure actuelle,
selon les derniers renseignements que j'ai eus, il semblerait que la paix soit
revenue dans le village de Saint-Antonin, Rivière-Bleue ou
Rivière-Verte.
Tout cela pour dire que l'harmonie au sein d'une communauté ne
peut pas être basée sur une domination. Si on veut que
s'établissent une véritable harmonie et un travail de
coopération pour le succès de cette grande île de
Montréal, dans la communauté urbaine, il va falloir que l'on
accepte qu'il n'y ait pas de citoyens de deuxième classe. Les citoyens
de deuxième classe ne peuvent pas être plus à
Montréal qu'ils ne peuvent l'être en banlieue. Il faut que, dans
cette communauté, tous les citoyens se sentent égaux. Je pense
que c'est cet effort que l'on devra faire si l'on veut que la communauté
progresse et atteigne les sommets qu'elle peut atteindre selon le dynamisme de
ceux qui la composent. Autrement, j'ai l'impression, M. le ministre, que, si on
s'acharne à établir une certaine prépondérance, une
certaine domination, on n'aura pas d'autre choix que de considérer que,
plutôt que de se battre continuellement dans de stériles combats
d'arrière-garde, il nous faudra bien constater que la seule solution
à l'harmonie viendra peut-être de nous ou d'un éventuel
gouvernement qui constatera la situation dans quelques années,
c'est-à-dire de réaliser cette situation dont le maire de
Montréal nous a dit hier que ce n'était pas et que ce n'avait
jamais été le désir de la ville de Montréal,
c'est-à-dire "une île, une ville". Si nous sommes pour passer
notre temps au cours des prochaines années à nous battre
continuellement pour essayer de faire réaliser que nous sommes des
citoyens à part égale, nous sommes aussi bien de
reconnaître tout de suite qu'on va atteindre ce statut seulement à
l'intérieur d'une seule ville et de nous mettre à y travailler.
Merci.
Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, M. le président
de la Conférence des maires de banlieue, MM. les deux
vice-présidents, je vous remercie d'être venus ici ce matin et je
remercie aussi tous les gens de la banlieue qui sont ici, les maires en
particulier. Il y a une majorité de maires de la banlieue, je peux en
citer quelques-uns; il y a ceux qui viennent de Beaconsfield, de
Côte-Saint-Luc, de Dorval, de Lachine, de LaSalle, de
Montréal-Nord, d'Outremont, de Pointe-aux-Trembles, de
Saint-Léonard, de Verdun, de Westmount, de Kirkland,
Montréal-Est, Mont-Royal, Pointe-Claire, Sainte-Geneviève et
Saint-Raphaël-de-l'île-Bizard, qui sont ici, qui se sont
déplacés. Je vous souhaite aussi la bienvenue. Je souligne aussi
dans cette salle la présence de M. le maire Jean Drapeau qui tient bon
à nos réunions, malgré son accident.
Aujourd'hui, nous entendons la Conférence des maires de banlieue,
un des deux partenaires dans la Communauté urbaine de Montréal.
Après le témoignage que nous avons entendu, je pense que nous
pouvons avancer dans nos délibérations, parce que, mardi, quand
j'ai ouvert ces séances de commission parlementaire, j'avais dit qu'au
moins un des partenaires n'était pas très heureux. On a eu
l'occasion d'entendre quelques témoignages ce matin. Je les avais
entendus personnellement à quelques reprises, et c'est pour cela que,
finalement, un projet de loi a été mis sur la table pour
permettre
qu'on vienne ici les faire publiquement. Je ne les reprendrai pas
à mon compte, puisque je les connais. Peut-être que les
partenaires de la commission auront l'occasion tout à l'heure de poser
des questions, s'ils veulent des précisions sur chacun de ces
points.
Je poserai au président de la Conférence des maires de
banlieue la question que j'ai posée à peu près à
tous les intervenants qui sont venus ici, et qui les concerne tout
particulièrement. La CUM, ils ne la voulaient pas en 1969. Ils se posent
peut-être des questions maintenant, parce que, à la conclusion de
M. le président, on a l'impression qu'il se pose des questions, mais
est-ce que cette formule d'une communauté urbaine sur l'île de
Montréal reste quand même pour vous la meilleure? Faudrait-il
penser à des régies intermunicipales? Je sais que vous y pensez
en ce qui concerne les déchets ou la gestion des déchets, mais,
mis à part ce cas, ne pensez-vous pas que la communauté urbaine,
après douze ans, malgré peut-être que vous ne vous soyez
pas senti très heureux dans son sein jusque là, c'est quand
même la bonne formule?
M. Corbeil: M. le Président, sans conteste, et je le dis
de la façon la plus complète possible. J'occupe, depuis cinq ans,
le poste de président de la Conférence des maires de banlieue.
Les termes habituels de la présidence à cet organisme sont d'un
an et ils n'ont jamais auparavant duré plus de deux ans. À la
demande de mes collègues, j'ai accepté, depuis cinq ans, de
porter ce lourd fardeau, puisque nous ne sommes pas un parti, que nous ne
représentons pas une pensée monolithique - il y a 28 maires de 28
municipalités, avec des identités bien différentes, des
aspirations bien différentes, et ce n'est pas une sinécure, je me
permets de le dire moi-même, de présider aux destinées de
cet organisme - parce que je crois fermement que c'est simplement en croyant
à la communauté que nous pouvons l'améliorer. Les gestes
que nous avons posés depuis cinq ans et même un peu avant ont
été des gestes de coopération. Nous avons forcé le
vote public pour démontrer que cela ne fonctionnait pas seulement dans
les dossiers d'une extrême importance où il n'était pas
possible de faire autrement. Avant cela, nous avons accepté, à la
demande de l'autre partenaire, de ne pas faire éclater bien des tensions
sur la place publique, parce que nous étions conscients que les
prêteurs n'aiment pas prêter de l'argent à des organismes
qui sont continuellement en chicane.
M. Léonard: Oui, j'enregistre votre déclaration.
Sur le plan pratique, toutefois, on nous a souligné au cours de la
commission, à différentes reprises et peut-être à
des multiples reprises, que dans les conseils municipaux, les gens
étaient portés à jeter la faute des hausses de taxes sur
la communauté sans plus expliquer. En termes de climat, j'enregistre
votre déclaration, je comprends, mais, est-ce que, au plan pratique,
maintenant, s'il y a eu de telles attitudes dans le passé, on aura une
attitude plus constructive par rapport à la communauté
elle-même et qu'on va aussi, dans les municipalités de la
banlieue, expliquer les raisons pour lesquelles les comptes de taxes montent
pour les services rendus par la communauté? C'est difficile de prendre
un engagement au nom de vos collègues à l'heure actuelle, mais je
pense que, si on fait une déclaration que la communauté urbaine
doit exister, dans les faits aussi ça doit se défendre.
M. Corbeil: M. le Président, comme vous le dîtes si
bien, il est difficile pour moi de prendre un engagement semblable. Cependant,
je veux juste vous souligner une toute petite anecdote qui, je pense, peut
décrire d'une certaine façon l'esprit qui nous anime. Il y a eu
il y a quelques mois - vous en avez probablement pris connaissance par les
médias d'information - presque une révolte de la part des
citoyens de la ville de Mont-Royal qui s'opposaient à la fermeture du
poste de police dans leur ville parce que le service de police avait
décidé de l'installer dans le quartier Côte-des-Neiges. Il
y a eu une assemblée de plusieurs centaines de citoyens à
laquelle on m'a demandé de participer. Ce soir-là, dans la salle,
il y avait un conseiller municipal de la ville de Montréal, du nom de
Syd Stevens, qui incitait la population à cette révolte et
l'incitait à réclamer avec acharnement le maintien du poste de
police dans ville Mont-Royal. La seule personne qui est allée dire aux
citoyens de la ville de Mont-Royal qu'ils n'avaient pas raison de faire cette
révolte, qu'il était possible de rendre le même service
à la population en déménageant le poste à
Côte-des-Neiges, c'est celui qui vous parle.
M. Léonard: Vous avez évoqué aussi
l'existence ou la constitution éventuelle d'une régie
intermunicipale, qui est une possibilité qui est ouverte
déjà par les différentes lois du Québec, pour
donner le service. En particulier, dans la gestion des déchets, vous
êtes en train d'en constituer une. Ceci étant dit, d'un autre
côté, le fardeau fiscal de certains contribuables les amène
à l'heure actuelle à contester leur évaluation et leur
compte de taxes. Cette contestation peut conduire, à moyen terme,
à une remise en cause des formules inter-municipales actuelles. Quand
vous évoquez, à la fin, une île, une ville, je suppose que
vous l'évoquez d'une façon tout à fait
hypothétique, mais il y a aussi d'autres solutions entre-temps.
Comme on ne propose pas de fusion de villes ou d'arrondissements, dans
la loi, est-ce que vous êtes content que la situation demeure ce qu'elle
est, quitte à faire ces ententes intermunicipales? Dans le contexte
où les comptes de taxes augmentent et que certaines municipalités
auraient des difficultés financières, comment voyez-vous cette
solution?
M. Corbeil: Je ne sais pas si vous me demandez la solution aux
problèmes de Pointe-aux-Trembles. Je pense, M. le Président, que
si nous voulons encourager cette harmonie, si nous voulons créer ce
climat harmonieux, propice au progrès, propice à la
réussite, il faut faire en sorte, par tous les moyens possibles, de ne
pas faire pencher davantage la balance vers l'élargissement et
l'appesantissement, je pourrais dire, de la ville centrale. Chacune des
municipalités sur le territoire, je pense, est proche de ses citoyens.
Selon les renseignements que je possède, on aura la démonstration
très bientôt que les citoyens tiennent à leur ville. Par
conséquent, on devrait mettre tout en oeuvre... Je suis bien à
l'aise pour en parler parce qu'en 1970 la ville que je représente
attribuait à son service de la dette 63% de son budget annuel;
c'était une situation financière catastrophique. Nous en sommes
maintenant à environ 33% ou 34% du budget qui sont attribués au
service de la dette. Nous ne sommes pas riches, nous ne nageons pas dans
l'aisance, mais nous nous en sommes sortis. Je pense qu'il y a des moyens; il y
a la loi de la Commission municipale, il y a des possibilités d'aide
temporaire du ministère qui peut être accordée à des
municipalités en difficulté. La ville de Montréal
elle-même a déjà été mise en tutelle en 1940,
je pense, ou dans ces années-là. Il y a des moyens de se sortir
de situations financières qui peuvent être causées par
toutes sortes de raisons dans lesquelles je ne veux pas m'impliquer. Je pense
qu'il est important que toute fusion, de quelque nature qu'elle soit, respecte
les règles édictées par la Loi sur les cités et
villes et que l'on ne doit pas permettre que des situations financières
viennent fausser le mécanisme de la Loi sur les cités et
villes.
M. Léonard: Vous êtes satisfait que la loi ne touche
pas à ces questions de regroupement de villes, de fusion de villes ou
éventuellement aussi à des arrondissements qui avaient
été évoqués dans le rapport Hanigan en
1971-1972.
M. Corbeil: M. le Président, je suis fermement convaincu
que les villes pourront penser à se regrouper, peut-être à
modifier leurs frontières et à faire des changements lorsque tout
le monde aura enfin appris à travailler ensemble sur le territoire de
l'île. Je veux ajouter à la notion dont vous parliez tantôt
concernant le blâme que l'on attribue à la CUM pour l'augmentation
des budgets et des taxes. II y a 5 commissions de 7 membres, ça fait 35
membres, et il y a 84 membres au conseil de la communauté. Eh bien,
presque la moitié des membres du conseil auront la possibilité de
travailler de façon concrète à la préparation de
budgets de certains des services. Vu que le budget ne sera plus adopté
automatiquement, les gens auront la possibilité de le modifier. L'excuse
est facile actuellement; les budqets arrivent au conseil et les gens sont
confrontés avec la nécessité ou de les adopter tels quels
ou de les voir adoptés automatiquement. L'excuse est facile et humaine
de dire: Je n'ai rien eu à faire là-dedans, cela s'est fait
malgré moi. Quand les gens seront obligés de se mouiller par leur
participation à des commissions et quand le budget ne sera plus
adopté automatiquement, les gens seront forcés d'abandonner cette
excuse qui est trop souvent facile et qui ne résiste pas à une
analyse.
M. Léonard: II y a quelques minutes, j'ai
évoqué toute la question de l'évaluation, de la
montée des comptes de taxes parce que, en définitive, au
delà de la question d'évaluation des biens immobiliers, il y a
quand même des services dont il faut payer les coûts. J'ai
évoqué cela et je le mets maintenant en relation avec la baisse
démographique sur l'île de Montréal. Vous savez fort bien,
vous l'avez évoqué vous-même, que cette baisse
démographique entraîne une surcharge des coûts pour ceux qui
restent sur le territoire de l'île et, dans ce contexte, c'est surtout la
ville de Montréal qui en souffre présentement. Comment voyez-vous
qu'on peut freiner ce mouvement? En tout cas, il faut enrayer cette course
à la catastrophe. Comment, pensez-vous, peut-on venir en aide tout
particulièrement à la ville de Montréal puisque c'est elle
qui en souffre davantage?
M. Corbeil: M. le Président, je pense gu'entre gens de
bonne volonté qui veulent s'asseoir ensemble pour trouver des solutions
à des problèmes on est capable d'y arriver.
M. Léonard: La bonne volonté! II y a quand
même des gestes qu'il faut poser, il y a des attitudes qui peuvent
s'améliorer. Si on avait la solution, demain matin on pourrait l'enrayer
mais, en termes de grandes décisions, en termes d'aménagement, en
termes de transport, il y a des décisions qui peuvent avoir un impact
plus ou moins positif ou négatif sur la solution à cette
question. Je vous laisse aller.
M. Corbeil: M. le Président, en espèce
d'opposition à cela, je veux simplement dire que, si on s'acharne
à dire que c'est le poids de la population qui va finir par
déterminer le nombre de membres du comité exécutif et la
prédominance dans la prise de décision, on ouvre la porte
à une campagne de concurrence entre les municipalités
constituantes. Nous avons présentement environ 775 000 ou 800 000
personnes, à peu près 975 000 dans la ville de Montréal.
Si, après la loi no 46 et après avoir entendu ce qui s'est dit
ici, on a la certitude que ce n'est que par le poids démographique qu'on
va améliorer notre présence et notre parité au sein de la
communauté, on va donc se lancer, et vous ne pourrez pas nous en
blâmer, dans des programmes qui vont faire qu'on va essayer, chacun de
son bord, d'augmenter les constructions et la population de chacune de nos
villes. Je veux simplement vous souligner qu'on a beaucoup plus de terrains
vacants à un coût beaucoup moindre dans nos municipalités
que dans le centre-ville.
M. Léonard: Je comprends la dialectique. Au fond, si vous
arrivez au comité exécutif aussi à la parité,
c'est-à-dire que vous reprenez, disons entre nous, du poil de la
bête, qu'est-ce qui vous assure que vous ne vous servirez pas de cette
force accrue pour en profiter davantage? Alors, qu'en fait, compte tenu de la
situation actuelle, il faudrait non seulement qu'on en reste au statu quo quant
au partage des coûts, mais même qu'on améliore la situation
en faveur de Montréal.
M. Corbeil: M. le Président, nous serons davantage
prêts à participer aux coûts de la ville de Montréal,
lorsque nous serons participants aux décisions qui font que le fardeau
financier de la ville de Montréal s'accroît. On ne peut pas
simplement nous dire: On vient de faire quelque chose qui coûte 100 000
000 $ et comme on n'a pas tout à fait les moyens de le payer,
voudriez-vous partager avec nous? Si on veut cela, il faudrait qu'on accepte de
dire: Est-ce qu'on devrait les dépenser les 100 000 000 $? On le dit
dans notre mémoire, on ne peut pas nous demander de ne participer
qu'à la solution.
M. Léonard: En tout cas dans ce contexte-là, est-ce
que vous seriez d'accord qu'avec une loi qui modifie les structures de la CUM,
on revienne le moins possible sur des vieux contentieux, on ne revienne pas sur
des décisions antérieures et on se préoccupe surtout de
régler celles qui ne sont pas encore réglées?
M. Corbeil: M. le Président, on est prêt en tout
temps à ce que le législateur suive de très près
nos faits et gestes. Les décisions qu'on a prises dans le passé
attestent notre bonne foi, notre désir de participation à cette
communauté.
L'Assemblée nationale peut en tout temps se réunir et
modifier, d'urgence s'il le faut, la loi de la communauté si elle
considère que dans l'éventualité d'une parité, la
banlieue ne se comporte pas en adulte qu'elle prétend être et pose
les gestes d'irréfléchis qu'on nous prête.
M. Léonard: Vous avez évoqué dans votre
exposé l'expérience - appelons-la paritaire - au sein du
comité de la sécurité publique et à
l'aménagement. Je suppose qu'il y a eu des oppositions à
l'intérieur avant d'arriver à des décisions ou à
des propositions. Je me demande s'il y a eu des décisions
significatives. Est-ce que finalement, comme c'est paritaire, on n'aurait pas
aussi évité les débats sérieux? Je vous demanderais
de nous parler de votre expérience.
M. Corbeil: Je n'ai pas l'impression de dévoiler des
secrets, puisque le président en a parlé dans son mémoire
de lundi. Le schéma d'aménagement auquel la commission permanente
de l'aménagement en est venue de façon presque finale - les
travaux sont presque terminés - nous avons convenu qu'il faudrait et il
faudra, et ce sera au moment de la consultation notre devoir de convaincre les
villes, que ce schéma d'aménagement soit contraignant. Ce qui
n'était pas le cas jusqu'à aujourd'hui, mais nous sommes
prêts. Mes collègues qui siègent avec moi, à la
commission permanente de l'aménagement, en ont pris l'engagement par
leur participation à cette décision, le schéma
d'aménagement devra être contraignant. Quand on sait ce que cela
veut dire pour l'autonomie des villes, je pense qu'on est obligé de
constater qu'il y a un grand bout de chemin de fait.
M. Léonard: La ville de Montréal était
d'accord là-dessus?
M. Corbeil: Oui, c'est cela.
M. Léonard: Les représentants de la ville aussi. Je
voudrais vous poser des questions un peu plus précises sur certaines
dispositions du projet de loi. Le projet de loi prévoit que celui qui
accédera à la fonction de président de l'exécutif
devra démissionner de son poste. Est-ce que, lorsque vous avez lu cet
article dans le projet de loi, vous avez pensé que beaucoup de vos
collègues démissionneraient pour devenir président de
l'exécutif?
M. Corbeil: Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de
collègues qui seraient prêts à le faire. J'en connais un,
surtout, qui serait prêt à le faire et qui a
démontré sa
neutralité et sa capacité d'assumer cette fonction depuis
quatre ans. Je veux bien dire ici tout de suite que je ne suis pas candidat.
Cela va au moins éviter une chicane.
M. Léonard: Au conseil, auparavant, ou à l'heure
actuelle, avant l'adoption du projet de loi no 46, le vote est
enregistré de deux façons différentes: la double
majorité des voix et ensuite la majorité des membres
présents. Nous proposons que, dorénavant, le vote se prenne
seulement à la double majorité des voix Montréal-banlieue.
Est-ce que vous êtes d'accord avec cette disposition? Il n'y a pas eu de
récrimination dans vos rangs.
M. Corbeil: Nous y acquiesçons, M. le Président, en
soulignant que c'est une concession majeure que nous consentons puisque,
actuellement, il y a une majorité supplémentaire qui est requise,
c'est-à-dire qu'en plus d'avoir la majorité des voix on doit
avoir la majorité des membres présents. C'est une concession
importante que nous faisons parce que, contrairement aussi à ce qui a
été dit hier, j'ai ici les copies d'environ 50
résolutions, c'est-à-dire des extraits de procès-verbaux
de 50 réunions du conseil de la communauté, sur lesquelles il y a
eu effectivement des votes et vous êtes bien aise de les vérifier,
la banlieue ne vote pas toujours de façon homogène, bien au
contraire.
M. Léonard: Vous proposez qu'un point à l'ordre du
jour passe toujours par l'exécutif avant d'être inscrit, est-ce
que vous seriez d'accord pour que, lorsqu'une commission fait un rapport, elle
le fasse directement au conseil, mais en envoie copie seulement à
l'exécutif? Ou bien si vous maintenez toujours votre proposition que
l'exécutif doit contrôler tout ce qui arrive à l'ordre du
jour du conseil de la communauté?
M. Corbeil: Je ne demande pas mieux que d'être convaincu,
M. le Président, mais il m'apparaît, à première vue,
que c'est strictement une question de cohérence de faire en sorte que,
lorsqu'une recommandation d'une commission arrive au conseil, l'exécutif
l'ayant reçue d'avance soit en mesure, en même temps que les
recommandations de la commission, d'offrir un éclairage qui est celui du
comité exécutif de façon qu'il ne se prenne pas de
décisions par la communauté qui pourraient être
embêtantes par la suite. Il s'agit simplement que le comité
exécutif, étant celui qui est le plus préoccupé par
la gestion quotidienne de la CUM, ait l'occasion de faire connaître son
point de vue en même temps que le rapport qui est soumis par la
commission au conseil, mais là-dessus nous ne sommes pas figés et
nous sommes prêts à examiner d'autres moyens d'arriver aux
mêmes fins.
M. Léonard: Dans votre mémoire, vous faites une
proposition qui me surprend beaucoup. Vous êtes d'accord avec la
création d'un poste de directeur général, mais vous dites
plus loin que le directeur de l'évaluation ne doit pas relever du
directeur général.
M. Corbeil: M. le Président, je pense que c'est conforme
à...
M. Léonard: Si vous me permettez de continuer, cela fait
un directeur de police qui relève de l'exécutif, un directeur de
l'évaluation qui relève de l'exécutif, mais le directeur
général fait quoi?(midi)
M. Corbeil: En ce qui concerne l'évaluation, notre
préoccupation, c'est de rejoindre l'esprit de la Loi sur les
cités et villes où personne n'a le droit de donner des directives
au commissaire à l'évaluation, de modifier de quelque
façon que ce soit les données du rôle d'évaluation.
C'est la même chose que l'on retrouve dans chacune de nos villes
où, en ce qui concerne le travail du greffier, le greffier relève
du directeur général dans ses fonctions administratives
courantes. Et c'est la même chose pour le directeur à
l'évaluation, mais, en ce qui concerne, par exemple, la
préparation des procès-verbaux, le greffier ne dépend pas
du gérant d'une ville; le commissaire à l'évaluation dans
une ville, en ce qui concerne la confection du rôle d'évaluation,
ne relève de personne d'autre que de lui-même; autrement dit, il
prépare son rôle à l'intérieur de sa
compétence professionnelle, il dépose son rôle, il
relève du directeur général ou du gérant dans
l'accomplissement de ses fonctions administratives.
M. Léonard: Oui, d'accord; sur le plan administratif, il
doit relever du directeur général quand même; même
dans les municipalités relevant de la Loi sur les cités et
villes, le directeur de l'évaluation, administrativement, relève
du gérant, mais, sur le plan de ses responsabilités, il doit
suivre la loi strictement.
Maintenant, j'ai le goût de vous poser une question. C'est un
sujet à la mode du jour, l'évaluation. Il y a beaucoup de
plaintes sur le territoire de l'île de Montréal et, lorsqu'on fait
des relevés, si on compile des statistiques sur la situation,
effectivement, les maisons résidentielles, surtout les unifamiliales,
montent beaucoup quant à leur évaluation. Les duplex, les triplex
aussi, mais dans une moindre mesure; ce sont surtout les unifamiliales.
Par ailleurs, pour les valeurs ou les biens immobiliers, industriels,
commerciaux ou tous les édifices de ce type, l'évaluation
ne varie pas beaucoup. Est-ce que vous pensez qu'il n'y a pas un
problème là? Parce que, même s'il n'y a pas de transaction
dans le cas d'édifice commerciaux ou industriels, en
réalité, il y a d'autres mécanismes et d'autres techniques
pour en faire l'évaluation et leur faire suivre l'évolution de la
valeur au marché. Est-ce que vous considérez qu'à la CUM
le service de l'évaluation fait bien son travail?
M. Corbeil: Je tiens à évoquer le cinquième
amendement.
M. le Président, je vais certainement être obligé de
faire un jugement qui va être injuste envers beaucoup de monde. Je ne
suis pas un évaluateur, je n'y connais pas grand-chose, mais il me
semble - et ce n'est qu'une impression, si vous voulez, je voudrais qu'on
l'interprète de cette façon-là - il me semble que la
logique fait que les meilleurs évaluateurs, les plus compétents
ont tendance à se retrouver sur le marché privé où
il y a une demande considérable et où il y a des
possibilités, pour ceux qui sont les plus dynamiques, de faire des
revenus beaucoup plus substantiels qu'à l'intérieur de
l'entreprise publique, et que les évaluateurs qui sont au service de la
communauté, avec toute la compétence que je leur reconnais, sont
souvent dépassés par les évaluateurs de l'entreprise
privée. Les firmes qui contestent leur évaluation se
promènent partout à travers le Canada et les États-Unis
pour aller chercher les meilleurs évaluateurs et souvent, lorsqu'ils
arrivent en cour, la communauté se fait défaire ses
évaluations.
Maintenant, est-ce que c'est vrai de façon absolue? J'insiste sur
le fait que c'est une perception bien personnelle et je regrette d'avance
l'injustice que ça peut refléter chez les évaluateurs de
la communauté pour qui j'ai beaucoup de respect.
M. Léonard: Est-ce que c'est correct de conclure que,
finalement, il y aurait peut-être un effort particulier à mettre
dans l'évaluation des biens immobiliers, industriels et commerciaux sur
le territoire de la CUM à l'heure actuelle?
M. Corbeil: II a été souvent suggéré
par mes collègues, et je suis presque tenté de faire la
même chose, que l'on devrait fort probablement, au lieu de les faire
nous-mêmes, faire faire les évaluations par des firmes
extérieures.
M. Léonard: Je suppose que maintenant ces messieurs de
l'Opposition vont arrêter de nous poser des questions sur
l'évaluation du territoire de la CUM, à l'Assemblée
nationale.
Le Président (M. Rodrigue): Cela va?
M. Léonard: Oui, cela va.
Le Président (M. Rodrigue): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: M. Corbeil, nous vous avons écouté avec
beaucoup d'intérêt. Vous nous avez fait une présentation
claire, très vigoureuse, que nous avons vivement
appréciée. Je profite de la circonstance pour saluer vos
collègues des municipalités de banlieue qui sont ici; en
particulier, vous me permettrez de saluer le maire de Montréal-nord
d'une manière spéciale. Je me tiens à distance de lui ces
temps-ci le plus possible. C'est avec un intérêt égal que
nous avons écouté ce qui s'est dit ce matin et ce qui s'est dit
hier. Le groupe parlementaire libéral avait annoncé au
début des séances de la présente semaine qu'il n'avait pas
tiré de conclusion quant à certaines questions fondamentales qui
sont en litige actuellement. Nous continuons d'écouter avec un esprit
ouvert et un souci de justice. Je puis vous assurer que chacune des choses que
vous avez dites a été notée soigneusement, d'autant plus
facilement qu'elles sont consignées par écrit dans un document
qui est très bien fait aussi.
Je vais revenir, en premier lieu, sur une question de fond concernant le
dossier passé. Vous avez entrepris vous-même de répondre
à une question qui avait été soulevée hier. Est-ce
que des injustices auraient découlé du régime qui a
existé depuis quelques années? Vous avez fourni des exemples dont
certains relèvent du bon procédé. Ils sont regrettables en
soi, mais ils n'ont peut-être pas une très grande importance pour
le citoyen moyen. D'autres se rattachaient directement à des services
que fournit la CUM. Vous avez donné un exemple dans le secteur du
transport en commun sur lequel peut-être certains de mes collègues
auront tantôt des précisions à vous demander ou des
opinions à émettre. Vous avez parlé de la gestion des
déchets également. Il y a beaucoup d'autres fonctions que la
communauté urbaine est chargée d'accomplir dans le secteur de
l'évaluation foncière, de l'inspection des aliments, de la
police, évidemment, de l'assainissement des eaux, de l'assainissement de
l'air, de la promotion économique également. J'aimerais que vous
nous disiez, d'une manière, j'allais dire générale - mais
cela peut être particulier aussi parce que les exemples sont importants
là-dedans également - si, au cours des dernières
années, il y a des choses qui ont été imposées par
la majorité de Montréal qui n'auraient pas dû être
faites. Deuxièmement, est-ce qu'il y a des choses qui ont
été empêchées en dehors de celles que vous avez
déjà mentionnées, qui auraient dû être faites?
Je suis content de ce qu'a dit le ministre à propos de
l'évaluation,
parce qu'une grosse partie des hausses énormes de charges
fiscales qui échoient aux contribuables ces années-ci viennent
des nouvelles règles d'évaluation qui ont été
instituées par la loi 57. Ce que j'aimerais que vous nous disiez, c'est
si le fait que Montréal jouissait d'une majorité,
indépendamment des problèmes de querelles personnelles qui ont pu
se présenter ou des problèmes d'atmosphère souvent
très lourds à porter, cela a entraîné un
accroissement indu de la facture qui échoit aux contribuables à
chaque année. Est-ce que cela a entraîné des injustices
pour le contribuable, soit au chapitre de sa facture de taxe, soit au titre des
services auxquels il a droit et qu'il n'aurait pas reçus à titre
égal parce qu'il venait du groupe qui était
représenté minoritairement au comité exécutif?
M. Corbeil: La principale question qui me vient en mémoire
est la fameuse question du transport en commun. La non-réalisation des
ententes prévues, encore une fois, dans un protocole d'entente intervenu
entre la CUM et le gouvernement du Québec, confirmé par un
décret, a fait en sorte qu'un certain nombre de nos municipalités
qui ont été incorporées, si on veut, dans ce qu'on appelle
le club du transport, à partir d'une certaine date, sans un service
adéquat, ont contribué indûment au financement du transport
en commun. J'ai dit au cours de mon intervention qu'une grande partie des
problèmes provenait de ce climat de domination et de deux paliers
d'intervenants dans cette communauté. Je n'en veux comme preuve que
cette déclaration tout à fait formelle, hier, en ce sens que
jamais la ville de Montréal ne votera pour les banlieues et on a
assumé, pour notre part, que les banlieues ne voteraient jamais pour des
représentants de la ville de Montréal. De 1972 à 1978,
c'est un président de la ville de Montréal qui a
présidé le comité exécutif. J'ai nommé
tantôt les présidents de commissions et de comités qui ont
été nommés avec l'accord de la banlieue et qui
étaient tous en provenance de Montréal. Je pense qu'il faut se
mettre dans le climat qui prévaut et qui fait en sorte que les gens se
considèrent continuellement comme n'étant pas capables de faire
prévaloir leur point de vue dans ces grands problèmes du
transport en commun, de la gestion des déchets, de l'épuration
des eaux.
M. Ryan: L'épuration des eaux aussi. Il y a un
problème intéressant que pose l'idée de parité que
vous mettez ds l'avant. La parité absolue, je pense que tout le monde
convient que c'est impensable, c'est impossible. La meilleure preuve que je
peux vous en donner, ce sont les deux commissions dont vous avez parlé
où il y a sept membres et non pas six. Il y a trois représentants
de chacun des deux groupes; il y a un septième membre qui vient, dans un
cas, de Québec, et, dans l'autre cas, qui est le président de
l'exécutif de la communauté urbaine, si j'ai bien compris. Je
pense que tout le monde serait d'accord... Personne n'a proposé,
à ma connaissance, que ce soit six-six, point; il y a toujours un
treizième acteur qui intervient quelque part.
M. Corbeil: Le COPEM, hier, je pense, a suggéré
six-six, point.
M. Ryan: Oui, avec une alternance à tous les ans du
président, je pense.
M. Corbeil: Non, au comité exécutif, il
suggérait, je pense, si me le rappelle le mémoire...
M. Ryan: Oui, c'est vrai, six-six.
M. Corbeil: ... six-six, avec un président choisi parmi
les douze.
M. Ryan: La question que je voulais vous poser, M. Corbeil, est
à peu près la suivante: Est-ce qu'il y aurait moyen d'envisager
certains critères pour la sélection du président de
l'exécutif? Le ministre a ouvert la porte, d'ailleurs, dans une
déclaration liminaire qu'il a faite hier, au choix d'un président
de l'exécutif qui tiendrait compte de la différence de
population. Là, il y a un facteur de 200 000 qui reste inexpliqué
en partie. On cherche tous, avec bonne volonté, à trouver une
issue. Vous avez fait une comparaison avec la loi des municipalités
régionales de comté. C'est vrai que, dans les MRC,
l'équilibre du vote n'a pas du tout été établi en
tenant compte uniquement du facteur numérique, mais c'est vrai aussi que
les responsabilités de la Communauté urbaine de Montréal
sont bien plus grandes et que les charges financières qui en
découlent beaucoup plus lourdes que ce qui existe du côté
des MRC. Je pense que la comparaison a des éléments qui la
rendent discutable aussi. Est-ce que vous avez pensé à cela, vous
autres, pour éviter surtout l'ingérence de Québec?
J'ai cru comprendre, en toute justice pour le maire de Montréal
à gui cela ne m'est peut-être pas arrivé souvent de rendre
justice dans le passé, qu'il a dit hier: Nous ne voterons pas pour un
représentant de la banlieue si on maintient intégralement le
projet de loi comme il est là. Il n'a pas fermé la porte dans
d'autres cas, si j'ai bien compris. Je pense que c'est une précision
importante. Je voudrais vous demander si vous seriez prêt à
considérer la possibilité de tenir compte de ce facteur dans la
désignation du président de l'exécutif et
comment, ou si c'est mieux d'aller directement à Québec en
cas d'impasse invincible.
M. Corbeil: M. le Président, nous avons dit dans notre
mémoire que nous acceptons le projet de loi actuel parce que, dans notre
esprit, à partir du moment où il y aura six personnes qui seront
nommées, il y a des possibilités, si ces gens le veulent bien, de
s'entendre et, ce que le projet permet dans un premier temps, c'est que les
gens acceptent de s'entendre. Il me semble que si on ne mettait pas du tout de
critère, si la loi prévoyait seulement qu'en dernière
dernière dernière analyse le président soit nommé
par le comité exécutif, cela renforcerait le
phénomène de consensus. Les deux groupes étant en
présence sont obligés de reconnaître que s'ils ne font pas
preuve de compréhension et de bonne volonté pour se choisir entre
eux, en faisant les compronis qu'il faut, un président qui viendra
d'eux, il y a ultimement un président qui pourra être nommé
par le ministre et qui ne fera peut-être l'affaire de ni l'un ni l'autre.
(12 h 15)
Cette espèce d'épée de Damoclès qui est
suspendue sur la tête des gens m'apparaît un instrument qui va les
forcer à en arriver à un consensus. Dans mon esprit,
peut-être que j'ai une mauvaise conception de l'évolution, de la
problématique de cette loi, mais il me semble que le président
devrait - on le dit dans le mémoire évoluer, dans un contexte
d'égalité, vers un rôle de médiateur et de
conciliateur plutôt que d'arbitre, à l'avantage, je pense, des
deux parties qui n'auront rien a gagner si elles mettent constamment le
président dans la position d'être l'arbitre suprême. Ce sera
le rôle du président, avec l'aide des deux vice-présidents
qu'on suggère, d'amener les parties à faire des concessions. Le
statut du président, à ce moment-là, en sera d'autant plus
accepté et la crédibilité de cette personne
s'établira à la longue. S'il y a d'une façon quelconque la
certitude que la personne, en fin de compte, va venir de tel secteur, on met
tout de suite dans le mécanisme une espèce de grain de sable qui
va faire que les gens vont dire: On est aussi bien de ne pas s'entendre, de
toute façon il va être nommé et ça va être un
représentant de tel groupe. Pour nous, qu'une majorité s'exerce
à 7 contre 6 ou qu'elle s'exerce à 6 contre 5 ou 7 contre 5,
c'est la même chose. Il n'y a pas de différence entre une
majorité à 7 contre 6 ou à 7 contre 5. Ce que l'on
recherche ultimement c'est de trouver la personne qui sera capable de faire
preuve de la grandeur d'esprit nécessaire, non pas pour favoriser la
banlieue, mais simplement pour assurer la banlieue que ses prises de position,
ses dossiers sont bien considérés et que la décision
finale n'est pas prise en considération strictement de
l'intérêt immédiat d'un des partenaires mais en
considération du bien à long terme de l'ensemble de la
communauté.
M. Ryan: Je prends toujours l'hypothèse d'un
président qui serait nommé par Québec. Cet homme ou cette
femme n'aura pas de base électorale, ni dans la ville de Montréal
ni dans les banlieues. La seule base de pouvoir que cette personne aura sera le
mandat qu'elle aura reçu de Québec. Vous ne pensez pas, en
prenant l'éclairage de l'expérience du passé, qu'il y a
danger qu'elle devienne commissionnaire de Québec ou qu'elle soit
portée à se retourner du côté de ceux qui lui ont
donné leur confiance pour aller chercher des orientations ou partager
ses responsabilités? Je vous demande ça et je veux le savoir bien
clairement. On achève ces sessions...
M. Corbeil: Ma seule réponse, M. le Président,
c'est qu'au conseil de sécurité, où on travaille à
3-3 de chacun des côtés, avec un représentant qui est le
septième, ce n'est pas le président, c'est lui qui peut faire
pencher la balance d'un côté ou de l'autre. Loin de nuire, je
crois que cela va aider à faire parvenir directement à chaque
partie concernée le point de vue de l'autre et du gouvernement.
M. Ryan: ... différence. Si je comprends bien, au conseil
de sécurité, le représentant de Québec est un
septième membre. Ce n'est pas le président.
M. Corbeil: Non.
M. Ryan: Là-dessus, je voulais avoir votre point de vue.
Je pense que je l'ai. Je ne veux pas m'y attarder parce qu'on n'a pas la
prétention de régler ça ce matin. À propos des
commissions, il y aurait sept membres dans les commissions. Que va-t-il arriver
si on ne s'entend pas pour l'élection d'un président? De la
façon dont le projet est conçu, il n'y a pas de voie de solution.
Cela prend la double majorité pour l'élection d'un
président. À supposer que Montréal dise: Nous, on veut
avoir le président partout, on va vous donner le vice-président
partout. On peut peut-être vous donner une commission mais supposez qu'on
continuerait dans l'esprit dont vous avez parlé tantôt, que
personnellement j'enregistre comme un témoignage sans plus pour
l'instant, quelle est la solution au problème? Vous nous dites: la bonne
volonté. Le ministre l'a dit tantôt assez justement, on ne fait
pas des lois avec de la bonne volonté. Il faut avoir une clé.
Où est-elle, la clé, là-dedans? Je ne la vois pas.
M. Corbeil: Dans l'état actuel, je ne la
vois pas non plus, à moins que l'on fasse en sorte
qu'éventuellement, en cas d'impasse, la nomination soit faite par le
comité exécutif.
M. Ryan: La difficulté revient parce que s'ils ne
s'entendent pas et que le président est nommé par le
gouvernement, ça va lui en faire pas mal à faire.
M. Corbeil: C'est le genre de choses dans lequel les
municipalités, enfin les deux partenaires, décideront de
s'embarquer.
M. Ryan: Je vais vous poser une question, et cela ne trahit pas
du tout d'arrière-pensée chez moi. Supposez que le projet soit
modifié de manière à prévoir que le
président de l'exécutif de la communauté sera élu
par le conseil, sur présentation de la ville de Montréal,
implicitement, tant qu'elle aura la majorité de la population et
qu'à ce moment-là, il devra être détaché de
toute autre fonction et se consacrer entièrement à sa
tâche. Pour vous, est-ce que ce serait pire que de le faire nommer par le
gouvernement, ou indifférent ou pas du même ordre de
considération?
M. Corbeil: Si je prends en considération ce qui a
été dit ici hier et que la ville de Montréal a
enregistré de façon catégorique qu'elle ne voterait jamais
pour un représentant de banlieue, on se retrouve très rapidement
dans un cul-de-sac.
M. Ryan: Encore une fois, ils ne l'ont pas dit exactement dans ce
contexte-là, d'après ce que j'ai compris. Ils ont dit qu'ils ne
voteraient pas si tout ce qui est dans le projet de loi demeure
intégralement comme c'est actuellement. Déjà c'est une
modification très importante qui est concevable. Pour l'instant, je n'ai
pas la responsabilité d'aller plus loin, c'est une question que je
pose.
Je continue et j'achève, en ce qui me concerne. Dans les
compétences de la communauté, dans l'ensemble, vous acceptez que
les compétences qui sont exercées actuellement soient maintenues,
que quelques autres soient précisées ou agrandies; n'y a-t-il pas
de choses spéciales que vous envisagez de ce
côté-là, des remarques particulières qui pourraient
davantage éclairer le projet? La promotion économique, n'y a-t-il
pas de danger de confusion entre les deux niveaux?
M. Corbeil: À mon point de vue et...
M. Ryan: II faudra mettre la démographie à la
communauté urbaine, on ne pourrait pas mettre aux municipalités,
ce n'est pas prévu.
M. Corbeil: À mon point de vue, et c'est, encore une fois,
une opinion personnelle, l'existence de l'Office d'expansion économique,
au cours des dernières années, n'a pas causé de
problèmes. Plus il y a de gens pour intervenir dans ce
domaine-là, dans le contexte que nous traversons, plus il y a de gens
qui travaillent à la promotion économique, mieux c'est.
L'existence de l'Office d'expansion économique n'a pas
empêché la plupart des municipalités qui ont un parc
industriel de se doter d'un commissariat industriel, et la ville de
Montréal de se doter d'un organisme qui est CIDEM. Je pense que c'est
très sain, j'ai toujours vu ça comme étant trois paliers
différents d'intervention. Le ministère de l'Industrie et du
Commerce doit s'occuper d'aller chercher quelque part des industries pour
s'installer dans l'ensemble du Québec. Il y a différents
intervenants qui essaient de convaincre les industries de venir
s'établir chez eux, dont la communauté qui essaie de les amener
sur le territoire de la communauté, et quand elles ont
décidé de venir sur le territoire de la communauté,
chacune des villes essaie de l'amener chez elle.
M. Ryan: Juste une petite question sur le service de police. Vous
dites que le directeur de la police devrait relever plus clairement de
l'autorité, je pense que c'est du président du comité
exécutif. Le reste du projet de loi ne crée pas d'objections dans
votre esprit, la nomination du directeur de police par Québec et la
présence d'un représentant de Québec à la
commission de sécurité publique?
M. Corbeil: M. le Président, on peut jouer les vierges
offensées et dire: On est assez grand qu'on devrait être capable
de choisir le directeur de police. Je me rallie à l'opinion émise
ici par le président du comité exécutif à l'effet
que, depuis 1977, lorsque le directeur actuel a été nommé
par le ministre de la Justice, je pense qu'on peut dire qu'on a connu la plus
grande paix, à ce niveau-là, depuis longtemps. Avant ça,
il y a eu une foule de querelles entre les différents directeurs de
police, le conseil de sécurité et ainsi de suite. À ce
jour, cela a bien fonctionné, peut-être qu'il y aura lieu
éventuellement de modifier ce système mais, pendant qu'on a
quelque chose qui fonctionne bien, essayons de faire, d'après nous, un
autre bout de chemin avec cette idée. On recommande qu'au bout de cinq
ans il y ait une révision automatique de la loi de la communauté;
on pourra peut-être à ce moment-là reparler de la
nomination du directeur de police.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Merci, M. le Président.
M. le président de la Conférence des maires de banlieue,
quand je lis votre mémoire et quand j'entends votre témoignange,
je me dis que finalement vous êtes peut-être d'accord tous
ensemble, la banlieue et Montréal, pour dire que la
représentation à l'exécutif devrait être
basée sur la population. Ce qui distingue les deux positions - et je
vais vous citer les passages de votre mémoire là-dessus - c'est
que Montréal dit: II y a encore un écart de 200 000 habitants
entre les deux. C'est un écart important et on est certain qu'il va
s'accroître dans le sens de Montréal, alors que vous nous dites
que c'est un écart qui est de plus en plus faible. Je prends la page 13
de votre mémoire où vous dites: "Une simple projection
linéaire de ces données démographiques laisse croire que,
si la population de Montréal continue de décroître et celle
des banlieues de s'accroître au rythme moyen des quinze dernières
années, les populations des deux entités concernées se
rejoindront vers 1988." Vous poursuivez en disant: "Même si les tendances
des cinq dernières années seulement se maintiennent, les
populations seront de même taille en 1992." Vous concluez le paragraphe
en disant: "Toutefois, les écarts entre les deux groupes sont
déjà si faibles qu'il vaut mieux traduire dès maintenant,
en termes structurels, cette parité inéluctable." Aussi,
tantôt, dans votre témoignage vous avez dit que même si
l'opération 10 000 logements donnait les résultats
escomptés, de toute façon, cela n'ajoutera que 30 000
habitants.
Alors, est-ce que je n'ai pas raison de penser que finalement vous
êtes tous les deux d'accord pour dire qu'on devrait tenir compte de la
population dans la représentation, quand je prends cette partie de votre
témoignage et ce paragraphe de votre mémoire? Ce qui vous
distingue, c'est de dire qu'on est aussi bien de le faire tout de suite.
M. Corbeil: On l'a dit et on le redit, il nous apparaîtrait
inconcevable qu'on en arrive un jour à ce que la banlieue soit
majoritaire et domine son partenaire et qu'on arrive avec plus ou moins de
vitesse dépendant de la façon dont les populations vont se
mouvoir sur le territoire. Comme cela ne devrait jamais arriver - la population
qui va déterminer que la banlieue va être majoritaire sur
Montréal - comme on est convaincu que la parité va faire en sorte
que le climat va favoriser l'harmonie et la bonne entente, faisons cela tout de
suite et arrêtons de parler et de penser que peut-être on est aussi
bien de ronger son frein maintenant, mais attendez tout à l'heure qu'on
soit majoritaire et vous allez y goûter. On va juste perpétuer
pendant longtemps le climat d'opposition.
On dit, et j'espère le plus clairement possible qu'on ne
recherche pas une domination, qu'on recherche l'entente et l'harmonie. Je n'ai
aucun pouvoir sur les comportements humains, mais les gens qui se sentent dans
un état de diminution ne peuvent pas faire autrement que de se comporter
avec les comportements qu'on a connus au cours des dernières
années.
M. Rochefort: Dans le mémoire que vous nous
présentez aujourd'hui, je ne retrouve pas une recommandation que vous
faisiez dans le mémoire que vous aviez déposé, je
présume, au comité ministériel qui
réfléchissait à la réforme de la CUM en septembre
1980. Vous proposiez ceci: Le conseil de la CUM doit être composé
du maire ou d'un délégué de chaque municipalité de
banlieue, ainsi que d'un nombre égal de représentants du conseil
de la ville de Montréal. Donc, vous proposiez aussi au conseil une
parité. Comment expliquez-vous les fait que vous ne proposiez plus cela
aujourd'hui? (12 h 30)
M. Corbeil: En 1980, le ministre nous a demandé de lui
faire parvenir nos réflexions sur ce que devrait être la
communauté. On lui a donc fait parvenir ce mémoire-là. Par
la suite, on nous met en présence d'un projet de loi et on nous demande
de réagir à ce projet de loi. On peut reprendre tout notre
mémoire et dire: Vous ne devriez pas faire cela, vous devriez faire
d'autres choses à la place. On dit: Comme il y a un projet de loi, il me
semble que cela doit refléter quelque part une certaine décision
au moins explorative qui a été prise par le ministre des Affaires
municipales. On essaie de réagir en disant: Oui, telle chose nous
paraît et telle autre chose ne nous paraît pas acceptable, sans
recommencer à réinventer la roue.
M. Rochefort: Sur l'élection du président de
l'exécutif, les dispositions du projet de loi font que chaque
municipalité de banlieue, quel que soit le pourcentage de la population
qui a appuyé le maire de la municipalité à l'occasion de
l'élection, arrive au conseil de la communauté avec 100% des voix
de sa municipalité, alors que la ville de Montréal arrive au
conseil avec tous les membres de son conseil, donc la possibilité de
fractionner le vote selon les différents partis
représentés au conseil. Est-ce que vous ne croyez pas qu'il y a
quelque chose d'inéquitable un peu dans cette formule de vote? Par
exemple, je ne sais pas combien il y a de conseillers dans Anjou. Je n'ai pas
par coeur, non plus, le nombre de votes que vous représentez au conseil
de la communauté, mais vous pourriez très bien avoir
été élu seulement pas 51% des suffrages exprimés
à l'occasion de l'élection municipale d'Anjou, sauf que vous
vous
retrouvez au conseil de la CUM avec 100% des votes que détient
Anjou alors que Montréal se retrouve avec tous les conseillers
élus. Donc, le maire ne contrôle pas 100% des votes de
Montréal, mais le vote peut être fractionné selon les
partis d'opposition. Je vais poursuivre mon raisonnement. Je pense à une
question fort importante; c'est la question qui est la plus débattue
depuis le dépôt du projet de loi, soit celle de la
présidence ou de la majorité à l'exécutif. Est-ce
que vous ne croyez pas que, pour cette question de l'élection du
président du comité exécutif, Montréal devrait
jouir du même privilège que toutes les municipalités de
banlieue et que ce soit le maire de Montréal qui se présente avec
100% des votes pour l'élection du président de l'exécutif
à la table du conseil?
M. Corbeil: J'ai de la misère à suivre la
mécanique.
M. Rochefort: Écoutez, c'est...
M. Corbeil: Vous disiez tantôt: Si je suis élu avec
51%, je représente 100% de la municipalité. Dans le contexte
actuel, je ne sais pas combien je représente de l'opinion de la
population puisque j'ai été élu par acclamation.
M. Rochefort: Tant mieux. Je vous en félicite, mais il y a
sûrement certains de vos collègues qui n'ont pas été
élus par acclamation.
M. Corbeil: Dans le projet de loi tel que déposé,
je pense que chaque personne vote selon une population, c'est-à-dire que
le conseiller de la ville de Montréal qui est là - on a dit que
chacun représente 22 000 -vote pour 22 000 personnes. Le maire d'une
municipalité va voter pour "58 000 personnes comme dans mon cas; celui
de Senneville pour 1500 personnes, celui de Montréal-Est pour 3400
personnes et ainsi de suite.
M. Rochefort: Je fais une dernière intervention
là-dessus. Même s'il avait été élu par
acclamation, faisons l'hypothèse qu'il ne sera pas toujours élu
par acclamation. Prenons l'exemple du maire de Montréal-Nord, c'est 94
000 ou 96 000 habitants.
Une voix: II a été élu par acclamation, lui
aussi.
M. Rochefort: Bon. Cela va bien en banlieue. Il se retrouve donc
au conseil de la CUM, par exemple, sur la question de l'élection du
président de l'exécutif avec un vote qui représente les 94
000 habitants de sa municipalité; tantôt on disait que c'est 22
000, je ne sais pas si c'est le chiffre exact. Par exemple, il pourrait
très bien se produire que quatre conseillers de Montréal,
représentant 88 000 personnes, votent de façon différente
tous les quatre, ce qui fait que, finalement, c'est un vote qui est
fractionnable alors que celui de chaque municipalité de banlieue n'est
pas fractionnable. C'est un tout, quel que soit l'appui que l'opposition aurait
reçu au conseil municipal de la municipalité
concernée.
M. Corbeil: Sauf que le vote de chaque membre est encore plus
fractionnable parce que ce ne sont jamais les 28 maires de banlieue, un parti
politique majoritaire; ce sont 28 individus qui peuvent voter de façon
bien différente. L'expérience est là pour le
démontrer: Les gens de Montréal en général, cela a
été dit ici, hier, par M. Fainstat et M. Auf der Maur, et
l'histoire le prouve, sont élus pour représenter des
intérêts de Montréal. La simple survie électorale de
ces gens-là les oblige dans les grands dossiers à voter
Montréal.
M. Rochefort: Mais vous conviendrez quand même avec moi
qu'il y a eu aussi des votes fractionnés au conseil de la CUM quand il y
avait 18 représentants de l'Opposition, comme vous nous dites
qu'à l'occasion parmi les 28 maires de banlieue, il y a un
fractionnement du vote. En tout cas, je voulais connaître votre opinion
là-dessus.
Sur la question des commissions, vous proposez à la page 21 ou 22
de votre mémoire que le président de l'exécutif de la
communauté siège à titre ex officio dans chaque commission
pour assurer une meilleure cohérence, une meilleure continuité.
Vous ne croyez pas qu'à partir du moment où le président
et le vice-président de chaque commission siègent à
l'exécutif que cette cohérence et cette continuité vont
être tout aussi bien assurées.
M. Corbeil: Tout simplement, c'est ce qui existe dans les villes,
le maire est membre ex officio de chacune des commissions du conseil; dans la
pratique, je ne vois pas - parce que pour lui comme pour les autres il y a
seulement vingt-quatre heures par jour - le président du comité
exécutif assister et suivre toutes les délibérations des
commissions, mais en étant membre ex officio, ça lui permet en
n'importe quel temps, lorsqu'il juge important que la pensée du
président du comité exécutif soit véhiculée
à l'intérieur de la commission, de se présenter d'office
et dire: Je viens donner mon opinion; s'il n'en est pas membre ex officio,
cette possibilité n'existera pas.
M. Rochefort: Vous reconnaissez que le président et le
vice-président de la commission qui sont deux membres sur treize de
l'exécutif peuvent aussi représenter ces
points de vue et ces considérations.
M. Corbeil: Ils vont représenter leur opinion personnelle,
pas nécessairement l'opinion de l'exécutif.
M. Rochefort: Les deux blocs, le vice-président et le
président étant soit de la banlieue de Montréal, on...
M. Corbeil: Ces derniers vont être là
théoriquement en permanence; c'est eux qui vont diriger les travaux de
la commission. Encore une fois, dans mon esprit, le président en
étant ex officio peut simplement y participer lorsqu'il le jugera.
M. Rochefort: Une dernière question, M. le
Président. Je crois que tout le monde s'entend pour dire que l'objectif
du projet de loi no 46, qui est actuellement sur la table, c'est le plus
possible de briser le climat, les structures, le contexte qui favorisent les
affrontements de deux blocs. L'objectif visé, c'est de briser ce climat,
ces structures qui font que ce sont des blocs qui s'affrontent plutôt que
de favoriser une dynamique communautaire à la Communauté urbaine
de Montréal.
Exception faite de la question qu'on débat depuis le
début, question de composition de l'exécutif, vous ne croyez pas
qu'il y a plusieurs dispositions du projet de loi qui vont de toute
façon favoriser cette plus grande dynamique communautaire et qui vont
aussi diminuer le nombre de situations où des affrontements vont se
produire entre les blocs, quand je pense, par exemple, au pouvoir et aux
responsabilités qu'on prend de l'exécutif et qu'on envoie au
Conseil; quand je pense à l'accroissement des pouvoirs des élus
sur la question du budget, de la police, du transport; quand je pense à
la création des commissions qui vont siéger en public; quand je
pense aussi au fait que le président et le vice-président des
commissions vont constituer l'exécutif plutôt que de voir
apparaître à la table de l'exécutif de la
communauté, l'exécutif en bloc, par exemple, de la ville de
Montréal; quand je pense au schéma d'aménagement, c'est un
point sur lequel les trois principaux représentants dans le dossier
s'entendent, vous autres, la ville de Montréal, et le président
de la communauté, vous dites: Le schéma d'aménagement,
c'est pour bientôt, on va finir par s'entendre, cela aussi, je pense que
c'est un élément très important dans le climat d'une
nouvelle dynamique communautaire qui doit s'installer...
Je termine avec ce dernier exemple, que le président doit
démissionner de son poste électif pour justement, un peu comme
vous le dites dans votre mémoire, être un conciliateur, un
médiateur, et ne pas être redevable à un groupe
plutôt que l'autre, vous ne croyez pas que déjà toutes ces
dispositions de la loi vont de toute façon favoriser une meilleure
dynamique communautaire, et diminuer les circonstances ou les blocs
qu'on...
M. Corbeil: Vous me demandez si le projet de loi tel qu'il est
déposé va favoriser cela. Je réponds: Oui. Si on change
des aspects du projet de loi, je ne suis plus d'accord.
M. Rochefort: Oublions l'article qui traite de la composition de
l'exécutif de la CUM pour l'instant. Vous dites: Non.
M. Corbeil: C'est là qu'est le noeud du
problème.
M. Rochefort: Vous dites donc que toutes les dispositions que je
viens d'énumérer ne sont pas susceptibles quand même de
favoriser une meilleure dynamique communautaire. Merci.
Le Président (M. Rodrigue): La commission élue
permanente des affaires municipales ajourne ses travaux sine die. Nous
reprendrons vraisemblablement cet après-midi, après la
période des questions. Je demande aux membres de la commission et
à nos invités d'être disponibles vers 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 41)
(Reprise de la séance à 16 h 05)
Le Président (M. Rodrigue): Â l'ajournement de la
séance ce matin, nous en étions à la période de
questions sur le mémoire présenté par la Conférence
des maires de banlieue de Montréal. À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. J'aimerais,
premièrement, souhaiter la bienvenue au président des maires de
banlieue et leur dire que nous avons apprécié leur mémoire
et la franchise avec laquelle ils se sont exprimés ce matin. M. le
président des maires de banlieue, face à la Communauté
urbaine de Montréal, simplement par curiosité, est-ce que
l'assiduité ou la présence aux assemblées de la
communauté, est assez importante?
M. Corbeil: Je pense que presque continuellement tout le monde
est là. Je n'ai pas de statistiques en main, mais, de mémoire, il
me semble qu'aux assemblées, ordinairement, tout le monde est
présent ou à peu près.
M. Rocheleau: Alors, disons qu'il y a un intérêt
marqué de l'ensemble des
municipalités à être présent. M. Corbeil:
Oui.
M. Rocheleau: D'autre part, M. le Président, ce matin et
hier, nous avons écouté plusieurs mémoires et tous
semblent reconnaître le fait que Montréal, c'est non seulement la
métropole de la grande région de Montréal, mais c'est
aussi la métropole nationale. Je pense que vous l'avez mentionné
et j'aimerais que vous le confirmiez. Cela m'inquiétait un peu ce matin,
ce genre de marchandage qui pouvait éventuellement s'opérer dans
le sens de vider Montréal de sa population pour permettre aux
municipalités d'accroître leur population respective. Les
statistiques démographiques démontrent quand même qu'il y a
une diminution constante dans Montréal depuis déjà
plusieurs années et actuellement Montréal semble faire des
efforts particuliers pour contrer cette diminution de population. Est-ce
qu'indépendamment que la population deviendrait moindre avec les
années vous reconnaissez toujours Montréal comme étant la
métropole et devant avoir au moins la parité avec l'ensemble des
municipalités faisant partie de la communauté urbaine?
M. Corbeil: Sans hésitation - j'ai eu l'occasion de le
dire à plusieurs reprises et c'est le fond de ma pensée - il n'y
a aucun doute possible dans notre esprit que Montréal est le moteur
économique de la région et doit le demeurer. On dit simplement
qu'il y a aussi des pièces qui se fixent à un moteur comme un
carburateur et un générateur et ce genre de choses. Si le
carburateur et le générateur ne fonctionnent pas harmonieusement
avec le moteur, le moteur a des ratés et ne fonctionne pas bien.
M. Rocheleau: II y a un autre point, M. le Président, et
je le répète une autre fois, nous aurions souhaité
rencontrer les représentants de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Montréal; malheureusement, il semble que
ces gens-là n'aiment pas rencontrer les politiciens et ils ont
souhaité être remplacés par un fonctionnaire ou un avocat.
Il n'en demeure pas moins que c'est une préoccupation que nous sentons,
le fait que le budget de la commission de transport ne semble pas être
approuvé plus souvent qu'autrement par la Communauté urbaine de
Montréal. Est-ce que cela dénote un manque de
responsabilité de la communauté urbaine, de ne pas se mouiller
afin de pouvoir critiquer, par la suite, certains abus qui pourraient se faire
à la commission de transport? Prévoit-on des mécanismes
quelconques? Vous avez mentionné ce matin qu'il semblait y avoir un
problème quelconque et vous sembliez souhaiter que la communauté
urbaine s'implique davantage dans les dépenses, dans le budget de la
commission de transport.
M. Corbeil: À notre point de vue, le déficit de la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal, qui
est absorbé par la communauté et donc payé par les
municipalités membres, est un montant excessivement important. De
mémoire, pour l'année 1982, cela représente quelque chose
comme 0,50 $, je crois, de taxe par 100 $ d'évaluation simplement pour
les fins du transport en commun. C'est une partie importante du compte de taxes
que les gens paient. Là comme ailleurs, puisque nous sommes comptables,
devant l'opinion publique, des fonds que nous percevons pour fins de taxes, il
me semble anormal, en 1982, que les élus n'aient rien à dire dans
la préparation du budget de la communauté. Je n'ai jamais
perçu, depuis que je siège au comité exécutif de la
communauté, que la commission de transport se préoccupe de ce que
peuvent penser les élus de son budget.
Lors de la dernière préparation du budget 1982, il y avait
eu une demande de la part du comité exécutif de réduire
d'au moins 7 000 000 $ le budget. La réponse nous est venue de
façon assez entortillée indiquant que c'était impossible
et qu'à toutes fins utiles, la commission nous remettait son budget en
n'y ayant retranché que 1 000 000 $. Il fallait adopter soit le budget
modifié avec 1 000 000 $ en moins ou le budget original. Les
événements qu'on a vécus au cours des derniers jours
témoignent du peu de préoccupation que la commission de transport
porte aux élus de la communauté.
M. Rocheleau: Est-ce que cela veut dire, du même coup, que
la Communauté urbaine de Montréal semble porter aussi peu de cas
du fait d'adopter ou de ne pas adopter le budget de la commission de transport.
On n'entend pas de grands cris en provenance de la communauté urbaine
face à la commission de transport, on ne semble pas voir qui...
M. Corbeil: On respecte les règles du jeu qui disent
qu'à toutes fins utiles, la seule chose que les élus de la CUM
ont à faire, est d'adopter le budget tel qu'il est
présenté ou de le laisser adopter automatiquement puisqu'il n'y a
aucun mécanisme par lequel les élus peuvent forcer des
modifications au budget.
M. Rocheleau: Voici ma dernière question, M. le
Président. Nous allons avoir d'autres intervenants. Je profite de
l'occasion pour mentionner au ministre des Affaires municipales que nous avons
eu l'occasion jusqu'à maintenant d'entendre plusieurs intervenants, tous
aussi intéressants les uns
que les autres mais l'horaire est relativement chargé. Mardi,
nous avons dû entendre des intervenants jusqu'à 23 h 30, la
même chose, hier, jusqu'à environ minuit. Ce soir, je ne sais pas
à quelle heure on va finir.
M. le ministre, voici une recommandation pour l'avenir, afin
d'éviter à tous ces gens qui ont à se faire entendre, une
certaine fatigue. Quand on arrive à 10 heures le matin et on doit
repartir à 23 h 30 ou minuit le soir, c'est quand même assez
fatigant. Il serait peut-être intéressant d'essayer de refouler
cela un peu pour que nous soyons en mesure de prendre tout le temps qu'il nous
est nécessaire aussi pour poser des questions.
Alors, ma dernière question au président des maires des
villes de banlieue et à un intervenant qui viendra dans quelques minutes
se faire entendre; on n'aura peut-être pas l'occasion de revenir et avoir
des commentaires. Il s'agit de la Communauté urbaine de Montréal,
actuellement. La première question du ministre, qu'il a adressée
à tous les intervenants, a été: la communauté
urbaine doit-elle continuer - je pense que tout le monde a dit oui - et y
a-t-il des municipalités ou certaines municipalités qui
voudraient se prévaloir de la loi actuelle pour s'en retirer. (16 h
15)
À propos de la municipalité de la paroisse de
Saint-Raphaël-de-l'île-Bizard, depuis longtemps on entend dire que
ses citoyens ne se sentent peut-être pas géographiquement faire
partie de la Communauté urbaine de Montréal. Je voudrais profiter
de l'occasion pour demander au maire d'Anjou, qui est président des
maires des villes de banlieue, de nous apporter son opinion personnelle, si ce
n'est l'opinion du président des maires des villes de banlieue, et nous
dire ce qu'il pense exactement de la situation comme telle, quant au territoire
de la CUM, afin d'éclairer nos lanternes. Si cette municipalité
voulait se retirer, qu'est-ce qu'il en pense? Je ne pense pas de vous mouiller
trop, trop, M. le Président?
M. Corbeil: Pas beaucoup.
M. le Président, cela n'a pas fait l'objet de
délibérations de notre part et cela n'a pas été
posé comme tel à la conférence des maires. La question que
vous me posez, à moi personnellement, je n'y vois aucune objection. Les
échos que j'ai pu avoir, qui sont très officieux, de la plupart
de nos collègues, étaient qu'eux n'y voient pas d'objection.
Mais, cela reste une demande personnelle de la ville en question qui a
répété cette demande à plusieurs reprises. Je pense
que nous sommes très mauvais juges pour décider si cela doit se
faire ou non, sauf que nous n'entendons pas faire objection à cette
demande.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Rodrigue): Mme la députée
de Maisonneuve.
Mme Harel: Alors, M. Corbeil, si vous me permettez,
peut-être avant de vous poser mes questions, une remarque
préliminaire. Elle ne s'adresse pas seulement à vous, mais
à d'autres qui sont venus témoigner durant ces trois jours. On
retrouve, à la page 17 de votre mémoire, et vous l'avez repris
d'ailleurs, dans votre témoignage - des exemples qui, pour vous,
illustrent les cas où une ville centrale ne détient pas la
majorité. Je me demande si c'est utile d'illustrer cela par des exemples
parce qu'évidemment il y a le fait qu'on pourrait trouver des exemples
contraires. Je me dis qu'autant dans le cas de Munich - et j'avais la revue
française d'administration publique qui parle du processus de
réforme communale en République fédérale
d'Allemagne - que, par exemple, à Toronto si on se réfère
à l'intervention que Nick Auf der Maur a faite hier soir au nom du GAM,
pour l'ensemble ou presque des organisations qui sont issues, il y a eu
préalablement une réforme territoriale dans bien des cas, une
incitation et même dans certains cas une espèce de coercition
à des regroupements, pour forcer ou inciter à des regroupements.
Lorsque vous parlez de Toronto, c'est en se rappelant qu'il y a des "boroughs",
cinq ou six, et que la ville de Toronto dans l'agglomération de Toronto
ne détient pas la majorité, loin de là. Alors, ce sont
d'autres contextes et, dans la plupart des cas, semble-t-il, du moins, dans les
pays industrialisés, le processus de réforme locale entrepris
depuis dix, douze ans s'est quand même fait pour beaucoup d'abord par une
réforme territoriale et une certaine fusion de communautés
locales. Ceci m'amène à penser, tout simplement, qu'il vaut mieux
ne pas nécessairement illustrer par des exemples qui ne peuvent pas
d'une manière analogique être repris dans le contexte, par
exemple, de l'agglomération de Montréal où on retrouve une
ville de près de 1 000 000 d'habitants et 28 municipalités dont,
je crois, la première en importance, c'est toujours Montréal-Nord
avec peut-être, combien?
M. Corbeil: Près de 100 000.
Mme Harel: Environ 100 000, donc, un rapport de un à dix.
Les questions... Oui?
M. Corbeil: Je voudrais bien spécifier...
Mme Harel: Je vais vous dire ceci avant: En toute
humilité, en toute modestie, je n'ai jamais fait partie de
délégations, je ne suis pas allée voir moi-même et
c'est, en fait, par des textes que je peux en parler.
M. Corbeil: Les exemples qu'on a apportés ici à
diverses reprises ne sont pas cités comme modèles à
suivre. C'était simplement pour illustrer notre pensée que ce
n'est pas l'existence d'une prédominance de la ville centrale dans la
prise de position qui assure nécessairement la vitalité de cette
ville. Le cas de Montréal est encore plus illustratif, si vous me
permettez l'expression, de cette position, puisque dans les centres dont on a
parlé, comme Munich, Toronto, Greater London Council, les villes qui
entourent la ville centrale étaient en mesure de concurrencer cette
ville et vraiment de lui nuire, d'être des concurrents pour
établir une ville plus forte que la ville centrale, ce qui est loin
d'être le cas dans l'île de Montréal. Cela nous fait dire
que ces illustrations ne servent qu'à renforcer le fait que les villes
qui l'entourent ne sont même pas des concurrentes pour s'établir
elles-mêmes un statut international. À ce moment, c'est encore
plus vrai que la parité ne peut pas avoir comme effet de réduire
le statut et l'implication de Montréal sur la scène
internationale ou son progrès économique ou culturel ou quoi que
ce soit. Encore une fois, ce ne sont pas des modèles à suivre,
mais simplement des illustrations, des exemples de choses qui ont réussi
ailleurs.
Mme Harel: À dire vrai, vous savez, M. Corbeil, je ne nie
pas la dimension internationale, elle est fort importante, mais c'est surtout
la situation actuelle à Montréal qui m'intéresse.
L'interprétation peut être également contraire dans des
communautés où l'équilibre se fait d'une certaine
façon du fait même que les villes sont de taille correspondante.
J'imagine qu'il n'y a pas nécessairement les mêmes situations
conflictuelles dans le cas d'une ville de 1 000 000 d'habitants si la ville
suivante a 100 000 habitants. De toute façon, la question que je veux
vous poser est la suivante: Vous avez fait valoir qu'il y avait des tensions,
des climats, des attitudes. C'est une blague, cela ne s'adresse pas qu'à
vous, loin de là, mais, dans le cas qui nous intéresse
présentement, on peut penser qu'il y a là des problèmes
d'hommes, je ne le dis pas au sens figuré seulement, parce que j'ai pu,
comme tout le monde, constater depuis trois jours bientôt que, dans le
domaine municipal à Montréal, ce ne sont pas les femmes qui, pour
tout de suite, occupent des postes de direction à quelque niveau que ce
soit. Que je sache, il y a eu une seule représentation où une
femme est venue durant ces trois jours à un titre ou à un autre
dans une délégation. Donc, je peux simplement constater, pour
vous comme pour les autres évidemment, que oui, c'est certainement
encore un problème d'hommes au sens figuré et propre du terme, au
sens littéraire.
M. Corbeil: Je pense que c'est un problème de relations
humaines.
Mme Harel: Vous avez dit à un certain moment ce matin que
vous aviez l'impression que la banlieue avait contribué plus que sa
part. Je me suis posé sérieusement la question si, pour vous, les
activités communautaires consistaient à se donner des services
pour soi, chez soi, des services qu'on met en commun, parce que cela
rationalise les coûts, dit-on, ou si c'est également en arriver
à pouvoir équitablement payer les dépenses qu'on
occasionne chez les autres...
En d'autres termes, ce que je voudrais vous dire, c'est que - vous
l'avez signalé à plusieurs reprises - les contribuables, les
résidents de vos municipalités veulent continuer à avoir
un milieu de vie qui se rapproche du village, d'une certaine façon,
où le service est personnalisé. Mais ne pensez-vous pas qu'il y a
un coût à payer pour être à la fois dans une
municipalité où il y a un service personnalisé, où
on a un milieu de vie qui cadre avec le village et, en même temps, la
proximité d'un centre-ville et que ce ne sont pas qu'aux
résidents de Montréal à défrayer les coûts de
l'ensemble du centre-ville? Contribuer sa juste part, est-ce que ce n'est pas
également contribuer pour le centre-ville, contribuer pour l'ensemble
des services plus anonymes évidemment, mais qu'on va chercher dans une
grande ville?
M. Corbeil: Si vous faites allusion au transport en commun,
à la police, je pense que les contributions actuelles sont justement
dans ce sens. Si vous parlez d'autres services municipaux, je vous dis qu'on ne
m'a pas encore fait la preuve. Le document auquel j'ai
référé qui fait partie du dossier du comité
conjoint établit que, dans la ville de Montréal, les services que
je pourrais appeler purement municipaux ne coûtent pas relativement plus
cher à la ville que les mêmes services dans nos
municipalités.
Je prends un exemple assez simpliste pour illustrer cela. Place
Desjardins, à Montréal, que vous connaissez sûrement
rapporte en taxes à la ville de Montréal sûrement beaucoup
plus d'argent que si le même emplacement était occupé par
des logements d'habitation. Les gens qui viennent tous les jours travailler
à Place Desjardins y trouvent des restaurants, des magasins, etc., qui
rapportent des taxes d'affaires et des taxes foncières qui vont à
Montréal n'occasionnent pas à Montréal de dépenses
au niveau de son service de loisirs, son service de récréation.
Pour nettoyer la rue autour de la Place Desjardins, ça ne coûte
pas plus cher parce que c'est la Place Desjardins que si c'était des
résidences privées.
Mme Harel: Vous ne parlez pas des centres commerciaux dans les
villes périphériques. Mais il reste - vous me direz si je me
trompe - que, per capita, le potentiel fiscal des Montréalais est plus
faible que celui des banlieues de l'ordre de 30%. C'est certainement dû
également, aux prix des terrains. Vous conviendrez avec moi que la
richesse foncière, c'est aussi le terrain et le coût qu'il
occasionne dans un centre-ville. Je me dis qu'il y a certainement un effort
soutenu à faire, à Montréal notamment, sur le plan
industriel, sur le plan des équipements industriels, sur le plan de la
revitalisation des équipements industriels.
Je vous pose la dernière question que je voulais vous poser. Vous
avez parlé des régimes de retraite et vous avez fait allusion au
syndicat des cols blancs qui est venu hier faire valoir son point de vue sur
cette question qui touche au-delà de 800 personnes, semble-t-il; 700 qui
viennent de la ville de Montréal et à peu près une
centaine qui viennent de la banlieue. En fait, vous avez un peu renvoyé
la balle à Montréal. Moi je vous demande, en tant que maire d'une
municipalité de banlieue et président de la Conférence des
maires de la banlieue, est-ce que vous êtes prêt à
reconnaître les années passées au service d'une banlieue
comme des années de service aux fins du calcul de la retraite?
M. Corbeil: Cela fait partie de tout ce dont je parlais ce matin,
de ce dossier immensément technique, et je pense bien que je n'ai pas
les qualifications nécessaires pour faire toute la lumière
là-dedans. Mais le principe de la reconnaissance des années
passées dans les municipalités me semble acceptable, au moment
où on se parle.
Mme Harel: Donc, comme maire d'une municipalité, vous
convenez que la municipalité aurait à défrayer les
montants que ça occasionne, cette position de principe.
M. Corbeil: Oui.
Mme Harel: Donc, concernant la demande des cols blancs, vous
êtes prêt, vous-même, à la soutenir, finalement.
M. Corbeil: Là, je n'ai pas la demande exacte entre les
mains. Je dis que le principe de la reconnaissance des années
antérieures m'apparaît un principe acceptable. Maintenant, encore
une fois, je n'ai pas les compétences techniques nécessaires pour
régler ici ce très grand dossier du transfert des fonds de
retraite.
Mme Harel: En fait, c'est un dossier qui traîne depuis 10
ans, depuis 12 ans. La demande était la suivante: qu'il y ait amendement
à la Loi de la Communauté urbaine de Montréal afin de
reconnaître les années passées par les ex-employés
d'une municipalité du territoire de la communauté urbaine aux
fins de participation au régime de rentes des fonctionnaires.
M. Corbeil: Oui, comme je vous dis, sur le principe, je ne vois
pas d'objection mais, encore une fois, j'aurais besoin sûrement d'avoir
à la main plus de documentation pour pouvoir me prononcer de
façon finale et procéder à la rédaction des
ententes. Le principe ne me pose pas, à moi, de problèmes.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Verdun. (16 h 30)
M. Caron: M. le Président, M. Corbeil, il y a deux blocs
actuellement: le bloc de Montréal et le bloc des banlieues. Si vous
aviez la parité, est-ce que cela casserait ces deux blocs? Depuis qu'il
y a un président venant de la banlieue, je pense qu'il y a une grosse
amélioration. Il y a une harmonie qui est venue s'installer et je pense
que la publicité est bien moins mauvaise qu'elle ne l'était,
depuis qu'il y a un maire de banlieue. Si, pour une raison ou une autre, le
ministre ne vous donnait pas la parité pour casser les deux blocs,
prévoyez-vous, comme j'ai posé la question hier, que cela puisse
continuer encore avec toujours un groupe d'un côté et l'autre
groupe de l'autre? Et ça, c'est le petit contribuable qui,
naturellement, en subit les conséquences.
M. Corbeil: Mon opinion est que la reconnaissance de deux blocs
dans la loi et la façon dont la communauté s'est
créée avec tout ce que cela a entraîné - qu'on aime
ça ou non, qu'on l'accepte ou pas, c'est une situation de fait qui est
attestée par environ 800 000 contribuables des villes de banlieue, par
28 maires et par environ 200 conseillers municipaux qui siègent aux
conseils municipaux de ces villes-là - a créé une
conviction - et tout ce que j'ai entendu au cours des dernières semaines
à ce sujet le confirme - qu'effectivement ce sont des citoyens de
deuxième classe. Puisqu'on dit que, si on ramène la
parité, on va rabaisser les Montréalais au rang des banlieusards,
c'est donc que, dans l'esprit de tout le monde, on considère qu'à
l'heure actuelle les banlieusards ne sont pas à la même hauteur
que les Montréalais. Autrement, on ne parlerait pas d'abaisser les
Montréalais au niveau de banlieusards.
C'est une notion qui existe et c'est pourquoi je faisais allusion
à un problème de relations humaines, cela existe. On a beau
prétendre que c'est le bonheur total et que tout va bien dans le
meilleur des mondes, je pense que les gens qui sont ici depuis trois
jours ne seraient pas ici simplement pour le plaisir si cette
chose-là n'existait pas. Et comme je n'ai pas, moi pas plus qu'un autre,
la possibilité de faire les opérations nécessaires dans
les cerveaux et dans les sentiments de tout le monde pour qu'à partir de
telle date on oublie tout cela et qu'on considère et accepte
d'être des citoyens de deuxième classe, cela ne changera pas les
mentalités. Je me suis battu depuis cinq ans pour qu'on en arrive
à démontrer, par nos attitudes, que nous étions, nous
aussi, des adultes qui pouvaient prendre, au même titre que les
représentants de la ville de Montréal, des décisions
"matures". Par ce processus, on en arriverait à prouver au
législateur qu'on a maintenant atteint l'âge où on peut
nous considérer comme des adultes égaux qui peuvent mettre
ensemble leurs ressources pour que la communauté se développe et
progresse.
Si après tous ces efforts on en arrive à dire: Non, on ne
croit pas que vous devez être traités sur le même pied, que
tous sur l'île sont des citoyens de la même catégorie, on ne
peut pas demander que, dans quelques semaines ou dans quelques mois, les
mêmes gens se rassoient à une table en continuant à se
considérer comme des être inférieurs et qu'ils soient en
mesure de dire: D'accord, c'est le bonheur total et il n'y a pas de
problème. Le genre humain est tel que quand les gens se sentent
frustrés et qu'ils ne sont pas heureux, ils ne peuvent pas être
portés à collaborer. L'essence, la base des relations humaines,
c'est de faire que les gens soient heureux dans leur peau. À l'heure
actuelle, les gens de banlieue ne sont pas heureux dans leur peau. On peut dire
que c'est simplement un "bug" et qu'ils ont seulement à oublier cela et
à penser autrement. Il y a quelques années, quand j'ai
décidé de partir de chez moi pour voler de mes propres ailes, mon
père n'a jamais compris, non plus, comment il se faisait que je
n'étais pas bien chez nous et que je voulais partir. J'avais un bon lit,
je mangeais des oranges, j'avais des repas trois fois par jour et ainsi de
suite. Il m'a dit: Tu ne trouveras jamais le bonheur autant que cela ailleurs.
Il ne pouvait pas comprendre, comme bien d'autres, et je ne lui en veux pas,
qu'on pouvait à un certain âge vouloir se considérer comme
des adultes. C'est cela le problème. Si on ne prend pas les moyens pour
que les gens en arrivent à tous se considérer comme des
égaux et qu'il n'y en ait pas un qui, de par une loi, se déclare
supérieur à l'autre, on va continuer pendant beaucoup
d'années encore à se chamailler et à ne pas faire que ce
soit un milieu dynamique qui arrive à des réussites. C'est la
raison pour laquelle j'ai dit moi, personnellement: Si cela crée ce
climat, il y a quelque part, un jour, dans dix ans, dans douze ans ou dans
quinze ans, un gouvernement, quel qu'il soit, qui dira:
Comme ils n'ont jamais réussi à s'entendre depuis 20 ans,
faisons en sorte qu'ils s'entendent en faisant une seule entité
juridique. Faisons une ville, une île, ce qui, apparemment, n'est pas
l'objectif de la ville de Montréal.
Mais il y a quelqu'un, un jour, qui va finir par conclure cela et je
dis: Plutôt que d'expérimenter les douze ou quinze prochaines
années, de s'entredéchirer et faire des combats
d'arrière-garde, concluons toute suite que c'est la meilleure solution
et développons les mécanismes pour arriver à une
île, une ville. Et on va arrêter de parler de cela ici. On ne se
retrouvera pas dans quinze ans à dire: II faut modifier la
communauté urbaine.
M. Caron: Je pense bien, M. le maire, que ce ne serait pas
l'idéal une île, une ville...
M. Corbeil: M. Caron, M. le député, s'il y avait
une seule entité, fort probablement qu'au niveau administratif cela
serait plus facile parce qu'il n'y aurait qu'un patron. Sauf que je ne suis pas
certain - je suis même convaincu du contraire - que les citoyens de
l'île de Montréal seraient mieux. Je suis un partisan du "small is
beautiful" et je pense que c'est par l'existence de 28 municipalités de
banlieue avec leur identité propre que les gens sont mieux servis et que
c'est cela qu'on doit privilégier.
M. Caron: M. Corbeil, je sais bien, je suis dans une ville de
banlieue et, quand on paie notre quote-part à la communauté, je
me sentirais bien malvenu de dire que les gens de banlieue sont de seconde
classe ou que la valeur de leur argent n'est pas la même. Je pense que le
législateur va être obligé d'essayer de trouver une
solution pour que les gens de Montréal ne soient pas plus que les gens
de banlieue et les gens de banlieue ne soient pas plus que les gens de
Montréal. Le ministre devrait en prendre note tout en respectant
certaines... La ville de Montréal est aussi prête à faire
certaines concessions d'après l'attitude du maire mais il faudrait que
tout le monde soit traité sur un pied d'égalité; pour ce
qui est de Montréal et des banlieues, il faut que le citoyen soit au
même niveau.
M. Corbeil: C'est ce qu'on recherche.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Merci, M. le Président. Beaucoup de questions
ont été posées que j'avais en note ici, on ne les
répétera pas. Je veux vous féliciter de votre performance;
de même, j'ai félicité la ville de Montréal hier. On
voit que ce sont deux blocs qui
s'affrontent et que vous avez des bons arguments dans deux blocs.
Concernant le conseil des maires qui regroupe 28 municipalités,
est-ce que les 28 municipalités en font partie?
M. Corbeil: II y a 25 municipalités sur 28. Il y a trois
municipalités qui, actuellement, ne sont pas membres.
M. Laplante: Lesquelles?
M. Corbeil: Verdun, Dollard-des-Ormeaux, Pointe-aux-Trembles.
M. Laplante: Vous pourriez me dire pourquoi? On a beaucoup
parlé de l'aspect économique, on dit toujours que l'association
fait la force. Si on regarde au point de vue de la valeur foncière,
Verdun est la plus pauvre de tout le grand territoire de Montréal
à 50 kilomètres à la ronde. Pourquoi ces villes ne
sont-elles pas intéressées à s'unir? Quel différend
peut-il y avoir pour que ces trois villes ne soient pas là?
M. Corbeil: II n'y a pas...
M. Caron: Ce n'est pas une question à poser. M le
député de Bourrassa, je pense que ce sont des choses internes qui
ne devraient pas...
Le Président (M. Rodrigue): M. le
député.
M. Caron: ... se poser.
Une voix: Je m'excuse, parce que je veux en venir à
d'autres choses.
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je pense que les députés savent qu'il n'y a pas de
question de privilège en commission; je veux le leur rappeler.
M. le député de Bourassa, si vous voulez poursuivre.
M. Laplante: Merci, M. le Président, c'est cela un conflit
d'intérêts, maire et député, à un moment
donné, on ne sait plus où aller. Il y a un moyen de savoir, parce
que cela va faire suite à une autre question tout à l'heure.
Pourquoi trois municipalités n'ont-elles pas rejoint vos rangs?
M. Corbeil: Dans le cas de Pointe-aux-Trembles, elle est
moralement membre. On a eu une demande de suspendre la cotisation et de garder
la ville membre quand même, à cause de sa situation
financière; ce que l'on a accepté. La conférence des
maires est une association volontaire, chacun est libre d'y adhérer ou
non. Les cotisations sont évidemment assez élevées,
étant donné que nous sommes un petit nombre. Malgré que
nous essayons de fonctionner avec un budget limité, il y a quand
même un personnel de quatre permanents, avec loyer, et tout ce que cela
comporte. Alors, les cotisations dans le cas des villes les plus populeuses
atteignent actuellement près de 15 000 $ par année.
Alors, est-ce que c'est une décision économique ou non?
Dans le cas de chacune des villes dont je parlais tantôt, autre que
l'explication que j'ai donnée concernant Pointe-aux-Trembles, on n'a pas
eu de raisons qui nous ont été données, on nous a
simplement informés que ces villes ne désiraient pas payer leur
cotisation.
M. Laplante: Comment faites-vous, entre vous, lorsque vous
arrivez à la communauté urbaine, pour faire un front commun si
par votre organisme du conseil des maires, vous ne pouvez pas vous parler?
M. Corbeil: Je pense qu'on se parle quand même; en fait il
y a 26 participantes sur 28. Alors, on communique nos dossiers à celles
qui ne sont pas membres lorsqu'il y a lieu, et les municipalités
décident ou non de suivre la directive ou l'indication que l'on donne
dans les dossiers que l'on prépare.
M. Laplante: La prochaine question, vous n'êtes pas
obligé d'y répondre, parce que...
Des voix: Elle est personnelle?
M. Laplante: Non. Est-il exact, vu que vous avez en main les 28,
que Verdun s'apprête à s'annexer à Montréal?
M. Polak: Demandez-lui.
M. Caron: M. le Président, question de règlement.
Je voudrais juste dire, M. Corbeil, que la ville de Verdun, l'an passé,
a décidé de couper tout y compris les congrès, afin
d'épargner l'argent du petit contribuable. Vous voulez donner l'exemple,
le gouvernement du Québec, avec tous les gaspillages un peu partout...
Le député de Bourassa aurait dû prendre cela en
considération, parce que la province est quasiment en faillite. Alors,
j'ai voulu donner l'exemple à Québec, mais je pense que ces gens
n'ont pas voulu comprendre. Le député de Bourassa, avec ses
idées de grandeur, circule un peu partout pour donner des subventions
aux petits amis péquistes.
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Laplante: Je ne voudrais pas être méchant, mais
si on parle d'épargner de
l'argent au peuple, il faudrait qu'il démissionne comme maire
l'année prochaine, parce qu'il va avoir droit à une pension cette
année. La double pension avec celle de député.
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Laplante: D'accord. "Joke" pour "joke".
Le Président (M. Rodrigue): M. le député,
à l'ordre s'il vous plaît!
M. le député, je vous demande de revenir à la
pertinence du présent débat c'est-à-dire l'audition du
mémoire de la Conférence des maires de banlieue.
M. Laplante: Maintenant, la récupération des
déchets. Si je vous ai demandé tout à l'heure, les villes
qui participent à la conférence des maires... Vous avez dit tout
à l'heure aussi que la ville de Montréal s'est servie d'une loi,
d'un amendement à sa charte pour se donner les droits de la
récupération des déchets. Aussi, vous avez ajouté
que vous êtes à vous demander, par loi spéciale ou
réglementation, la permission de faire votre propre organisme pour la
récupération des déchets. De la part des maires ou des
villes, avez-vous unanimité là-dessus? (16 h 45)
M. Corbeil: Non, nous avons, je pense, 15 ou 16 villes qui ont
accepté de faire partie de cette régie intermunicipale. À
ma connaissance, la majorité, si ce n'est pas la totalité des
villes, a déclaré qu'elle est plus ou moins d'accord, et je
comprends; beaucoup de villes se disent: Encore un autre organisme qui va
coûter de l'argent, et dans quoi cela va nous mener.
Originellement, la CUM devait être un organisme qui nous ferait
économiser de l'argent, et puis on se retrouve aujourd'hui avec des
coûts auxquels on ne s'attendait pas. On doit un peu demander à
tout le monde qui accepte d'en faire partie une espèce d'acte de foi. On
n'en est qu'au principe de la création d'une régie et, par la
suite, on mettra sur pied les études nécessaires pour savoir,
dans la gestion des déchets, est-ce qu'on doit s'aligner vers
l'enfouissement sanitaire, vers l'incinération ou d'autres
méthodes de disposition? Cela va donc entraîner, forcément,
des études qui vont coûter un certain montant d'argent. Les villes
disent: Oui, mais ça va coûter combien? On n'a nous-mêmes
aucune espèce d'idée. Alors, lorsqu'on demande à des gens
de faire un acte de foi, de s'embarquer dans quelque chose sans qu'ils aient
des appréciations assez exactes de ce que cela va coûter, ce n'est
pas surprenant qu'il y ait des espèces d'attitudes d'attentisme. On
dit:
Lorsque cela sera créé et que vous aurez établi des
budgets, et puis que vous saurez un peu mieux dans quelle direction cela va
s'en aller, on révisera votre position.
M. Laplante: D'accord. Une dernière question. Vous avez
abondamment parlé de ce que les villes de banlieue donnent à la
ville de Montréal. Vous avez aussi annoncé que vous êtes en
faveur d'une métropole forte, comme pôle économique; j'ai
été heureux de vous l'entendre dire. Mais je voudrais savoir
aussi qu'est-ce que la métropole vous a apporté à vous, en
contrepartie, les villes de banlieue. Il ne doit pas y avoir seulement un
côté, ce n'est pas seulement du négatif.
Économiquement, est-ce que Montréal a été pour vous
autres un aspect bénéfique, comme les villes de banlieue ont
été un aspect bénéfique pour la ville de
Montréal?
M. Corbeil: Je ne suis pas en mesure d'identifier, je ne dis pas
qu'il n'y en a pas, je ne suis pas en mesure d'identifier positivement...
M. Laplante: Je vais vous aider.
M. Corbeil: ... les choses que la communauté nous a
apportées en tant que ville de banlieue.
M. Laplante: Je vais vous aider. Je cherche un équilibre
entre les deux. Vous avez parlé tout à l'heure de la mauvaise
gestion de l'usine Desbaillets. Je ne suis pas prêt à me prononcer
là-dessus, je trouve astronomiques les chiffres au bout de tout cela,
d'accord. Mais êtes-vous capable aujourd'hui, au prix que vous payez
l'eau, de vous construire une usine neuve et puis de fournir l'eau aux
concitoyens au prix que vous la leur fournissez actuellement, que vous payez
actuellement?
M. Corbeil: Aucune idée.
M. Laplante: C'est pour cela que j'aimerais cela, une fois pour
toutes... excusez.
M. Corbeil: La seule chose...
M. Laplante: Moi, j'aimerais, une fois pour toutes, qu'il y ait
des équilibres qui se fassent. C'est beau de venir à une
commission parlementaire et de dire: Tout ce qui est bien on le donne; mais
j'aimerais cela avoir l'autre côté aussi; pour qu'on puisse se
situer, nous, dans tout cela. Montréal, hier, a refusé de
répondre à la question: - je ne l'ai pas apprécié
non plus -Dans les 12 ans d'existence de la communauté urbaine, quel
effet cela a-t-il eu sur vos emprunts, sur le redressement de
la situation financière de la ville de Montréal? À
trois reprises, on n'a pas répondu. C'est un aspect négatif.
J'ai posé aussi une autre question, et je vous la pose à
vous. On se base strictement sur la population, 57, et en même temps,
lorsque c'est le temps de payer, on se base sur l'évaluation, 52; il y a
5% d'argent additionnel que Montréal reçoit pour sa population.
J'aimerais savoir de votre part si vous trouvez équitable et raisonnable
que ces 5% là puissent exister pour que Montréal, en somme, vive
un peu mieux.
M. Corbeil: À ma connaissance, on n'a pas remis en
question depuis fort longtemps la contribution des villes, la distribution, si
on veut, des quotes-parts au coût de la communauté urbaine. Pour
aller dans le sens que vous mentionnez, en 1981, l'ensemble des dépenses
de la communauté urbaine divisé par la population, le coût
per capita, ce que chaque habitant de la ville de Montréal paie pour la
communauté urbaine, 197 $; le coût per capita dans les banlieues,
224 $. Je constate simplement, sans dire que c'est correct ou que ce n'est pas
correct, que ce sont les règles du jeu actuelles et on vit avec.
En ce qui concerne l'eau, je n'ai pas affirmé qu'il y avait une
mauvaise gestion de l'usine Desbaillets. J'ai simplement donné l'exemple
des coûts de construction pour illustrer que la rigueur administrative
dont on a parlé à un moment donné n'était pas
toujours aussi stricte qu'on veut bien le faire croire. En ce qui concerne
l'eau, les coûts de l'eau dans les municipalités qui sont
desservies par la ville de Montréal sont fixés chaque
année par la Commission municipale qui prend en considération
pour fixer les taux toutes les dépenses, incluant les dépenses
d'immobilisation, les dépenses de fonctionnement, par exemple, les gens
qui coupent le gazon autour de l'usine d'épuration. Enfin, toutes les
dépenses sont calculées et ensuite l'eau est facturée
à la quantité consommée par chacune des parties. Nous
payons l'eau qui nous est fournie par Montréal au coût exact
qu'elle coûte à Montréal. La ville de Lachine, entre
autres, vend son eau - elle aussi en produit pour d'autres municipalités
aux alentours - moins cher à ses municipalités clientes que nous
la payons de la ville de Montréal.
M. Laplante: Vous détournez un peu la question.
Trouvez-vous cela rentable même en la payant à ce prix, au lieu de
vous faire une usine chez vous? C'est un service de Montréal qui, je
pense, est bénéfique aux banlieues parce que cela vous revient
meilleur marché. C'est ce que je veux faire ressortir. Ce n'est pas au
point de vue de...
M. Corbeil: On ne s'est pas élevé contre cela. On
vit avec ce système. On n'a jamais fait de réclamations contre
cette situation.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Juste deux ou trois questions bien courtes, M. Corbeil;
j'espère avoir des réponses courtes aussi. Ce n'est pas que je ne
veux pas vous donner l'occasion de répondre pleinement, mais vous savez
que le temps passe vite. J'ai lu votre mémoire et ce matin, vous avez
ajouté dans votre discours beaucoup d'arguments exprimant votre
frustration. Il n'y a pas de doute qu'il y a un grand sentiment de frustration.
C'est un peu normal.
À part cela, c'est un mariage forcé; donc il y a des
problèmes. À la page 10 de votre mémoire, vous parlez des
tendances démographiques. Évidemment, nous sommes un peu dans de
la spéculation. Dans beaucoup de grandes villes américaines, on a
une tendance au retour vers le centre-ville. Ils prennent des mesures pour
faire cela, apparemment, avec succès dans plusieurs grandes villes
américaines. Si cette tendance ne continuait pas et arrêtait ou
même si l'inverse se produisait et que Montréal perdait moins vite
sa population que la banlieue, est-ce que, dans un tel cas, vous
réclameriez encore la parité totale ou si les chiffres
démographiques ont influencé votre approche de demander
maintenant cette parité?
M. Corbeil: Nous continuons à réclamer la
parité basée sur le principe que nous sommes deux blocs qui
doivent travailler ensemble à faire une réussite de la
communauté.
M. Polak: Croyez-vous, si le projet de loi était
adopté tel quel, que les deux associés ou les deux conjoints dans
ce mariage forcé seraient plus heureux?
M. Corbeil: Oui.
M. Polak: D'après ce que j'ai compris de la
présentation du maire de Montréal, je pense que ce sera un
mariage terrible. En tout cas, ce que j'ai compris, c'est que vous n'allez
jamais réussir soit à élire un président ou
même un président de commission. Apparemment, on a eu une sorte
d'avertissement que ce sera une bonne guerre ou peut-être une mauvaise
guerre, mais pensez-vous que c'est peut-être un peu exagéré
de dire cela et que cela va marcher très bien?
M. Corbeil: Oui.
M. Polak: Au point de vue de l'élection
du président du comité exécutif - vous étiez
ici hier et, je pense, mardi aussi - il semble se dégager tout de
même une certaine tendance - le ministre l'a lui-même plus ou moins
affirmé - que le président devrait être quelqu'un de
Montréal. Le gouvernement donnerait à ce moment-là une
prépondérance à Montréal comme associé dans
ce mariage forcé, n'est-ce pas?
M. Corbeil: Oui.
M. Polak: Accepteriez-vous cela?
M. Corbeil: Non.
M. Polak: Est-ce que cela réduira un peu votre frustration
si on vous donne beaucoup mais non pas ce point-là, par exemple?
M. Corbeil: Non.
M. Polak: Vous serez aussi malheureux?
M. Corbeil: Oui.
M. Polak: Cela ne va pas bien dans le mariage!
Dernière question. À la page 28, vous suggérez - je
pense que vous n'êtes pas le premier groupe à suggérer cela
- en ce qui concerne le conseil d'administration de la CTCUM, que cela devrait
être le comité exécutif qui ait la charge de cela. Hier
soir, un des groupes a fait une remarque que je trouve tout de même assez
importante. Je comprends très bien l'idée d'avoir la
participation des élus à cela.
Personnellement, je suis pour une telle formule, mais il y a danger que
ce soient des politiciens qui, à ce moment-là, interviennent
là-dedans. Il y a toujours le problème des pressions. Il a
mentionné, par exemple, qu'une ligne d'autobus, on va l'arrêter
dans tel et tel district. Si c'est une fonctionnaire, il est peut-être
moins sujet aux pressions politiques qu'un politicien. Voyez-vous un danger
là-dedans?
M. Corbeil: Non.
M. Polak: Je vous ai demandé de me donner une
réponse courte, mais pas aussi courte que cela. C'est à vous de
décider si vous voulez élucider un peu ce conflit
d'intérêts qui peut exister pour un élu servant un secteur
de sa population et l'administration de cet appareil assez monstrueux. Il n'y a
pas de problème?
M. Corbeil: Non.
M. Polak: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Rodrigue): Mme la députée
de Dorion.
Mme Lachapelle: M. Corbeil, ce matin, M. le ministre des Affaires
municipales vous posait une question relativement à votre degré
de satisfaction face au service d'évaluation de la communauté
urbaine. Vous avez mentionné que vous n'aviez pas de compétence
en la matière. Je ne doute pas que vous en avez d'autres, que vous en
avez même beaucoup. J'ai trouvé que vous aviez une attitude assez
sévère dans vos propos face aux évaluateurs de la
communauté urbaine. Cela m'a peut-être un peu fâchée,
parce que je connais plusieurs évaluateurs qui font un très bon
travail et qui sont des personnes très compétentes.
Vous avez dit que la grande liste des noms des évaluateurs
compétents, on retrouverait cela plutôt dans l'entreprise
privée et que vous seriez plutôt enclin à transférer
cette politique communautaire à l'entreprise privée. Ma
première question serait de vous demander de justifier votre position
face à vos paroles de ce matin. Dans un deuxième temps,
j'aimerais savoir si cela répondrait à vos attentes si la
communauté urbaine se dotait d'évaluateurs qui auraient à
faire des expertises uniquement pour des immeubles où le besoin serait
nécessitaire, plutôt que de travailler à des
dépôts d'évaluation de masse. Est-ce que cela
répondrait à vos espérances?
M. Corbeil: J'ai essayé ce matin d'y mettre toutes les
précautions nécessaires en précisant bien que je
n'étais pas compétent en la matière. Si j'ai donné
l'impression, par ma réponse, que je voulais dire qu'on se
débarrasse du service d'évaluation pour le confier à
l'entreprise privée, ce n'est certainement pas ce que j'aurais voulu
dire. Si c'est sorti comme cela, je m'en excuse. Voici ce que j'avais à
l'idée. Dans le service d'évaluation de la CUM, la très
grande majorité des bâtisses, si on les compte à
l'unité, sont certainement des unités résidentielles; je
pense que cela ne cause aucun problème et je suis tout à fait
d'accord que ça continue de cette façon. Ce que j'avais dans
l'idée, c'était pour des édifices bien particuliers qui ne
sont pas nécessairement répétitifs, où il est assez
difficile de bâtir une compétence spécifique de ce genre de
bâtisses, à ce moment, on pourrait peut-être confier ce
travail très spécifique à l'entreprise privée. (17
heures)
À l'ajournement, à midi, on m'a dit que ça pourrait
très bien se faire aussi par des équipes
spécialisées qu'on entraînerait spécialement pour
ça. Je verrais très bien, dans un processus comme
celui-là, qu'on fasse justement des unités comme ça
à qui on confierait un certain nombre d'évaluations
et qu'en même temps on ferait faire un certain nombre
d'unités semblables à l'extérieur par des firmes
privées. À ce moment-là, on pourrait comparer si les
coûts sont plus avantageux d'une façon ou de l'autre, et
qu'après ça on prenne la décision du coût le plus
avantageux. Je pense que comme administrateurs municipaux, on a à se
préoccuper de faire le travail le mieux possible au meilleur coût
possible.
Le Président (M. Rodrigue): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: II y a juste une question sur laquelle je voulais une
clarification. À propos du président du comité
exécutif, vous avez dit que vous étiez favorable à ce
qu'une fois nommé il démissionne du poste électif qu'il
occupait, par exemple. D'abord, est-ce que vous tenez à ce qu'il soit
choisi parmi ceux qui sont élus au conseil de la communauté
urbaine? Ou pourrait-il être choisi au dehors?
M. Corbeil: Je pense que dans un premier temps il devrait y avoir
les efforts les plus absolus possible par les parties en présence de se
choisir un président parmi eux. Par la suite, s'il n'y a pas de
possibilité de s'entendre, il faudra bien en arriver à un
arbitrage quelconque et, en dernière analyse, que le ministre le nomme.
Il serait probablement préférable qu'il soit choisi de
l'extérieur complètement pour qu'il ait plus
d'impartialité et de crédibilité presque automatique.
M. Ryan: Supposez qu'il ait été élu parmi
les membres du conseil, trouvez-vous qu'il devrait démissionner du poste
qu'il occupe? S'il est maire d'une ville de banlieue ou s'il est conseiller de
la ville de Montréal, trouvez-vous qu'il devrait démissionner de
ce poste-là pour occuper à temps plein sa charge de
président du comité exécutif? Dans l'hypothèse
affirmative, ne trouvez-vous pas qu'il y aurait danger qu'il soit coupé
de toute base politique et qu'il devienne une sorte de fonctionnaire qui
n'aurait plus la force de frappe politique qu'un élu trouve, du fait
qu'il a un mandat de la population? Je complète. Est-ce qu'il y aurait
une possibilité, à supposer que ça soit une personne de la
ville de Montréal qui soit choisie président du comité
exécutif, il y a au moins 50 chances sur 100 dans votre
hypothèse, à supposer qu'il y aurait une règle
prévoyant que cette personne pourrait rester conseiller mais ne devrait
pas faire partie du comité exécutif de la ville de
Montréal, est-ce qu'il n'y aurait pas des avantages à ce qu'elle
garde sa base politique? Je vous pose la question.
M. Corbeil: Ce que nous recherchons, c'est que la personne en
question puisse établir sa crédibilité pour tâcher
d'être vraiment reconnue par les deux parties comme étant un
interlocuteur qui a un certain détachement. On est conscient que ce
n'est pas le lendemain matin du fait qu'une personne est élue qu'elle
acquiert automatiquement une impartialité et qu'elle bâtit
automatiquement sa crédibilité. Mais le fait qu'elle soit
détachée de son poste, elle est moins sujette à se
retrouver en conflit d'intérêts. Elle a plus de chance, selon
nous, d'atteindre à cette impartialité et à cette
crédibilité en démissionnant de son poste. Il y a
évidemment une possibilité et un danger que cette personne
pourrait - parce que l'on ne connaît jamais l'avenir et le comportement
éventuel des humains - tout à coup atteindre un degré de
performance ou une perception de son travail qui est plus près de celui
du fonctionnaire que celui de l'élu. Encore là, ce n'est pas
nécessairement pour dire: c'est parce que là cela a réussi
que ça doit être fait. Il y a un exemple près de nous,
celui de Metro Toronto où ce fut fait de cette façon-là et
cela a fonctionné; on se dit: si cela a fonctionné là
peut-être qu'il y aurait des chances que cela fonctionne ici.
Le Président (M. Rodrigue): M. le Président,
avez-vous des remarques à formuler avant que...
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Seulement une courte question M. Corbeil. Vous avez
donné certains exemples, vous avez eu des réticences ou des
objections quant à certaines dépenses. Vous avez mentionné
la question des transports. À part le secteur des transports, est-ce
qu'il y a des dépenses, soit dans des budgets d'immobilisation ou
autres, qui se sont faites et auxquelles les banlieues se sont opposées
mais que la Communauté urbaine de Montréal a décidé
de faire quand même; des dépenses auxquelles vous vous êtes
opposés en disant: Nous, comme banlieues, on ne veut pas que ces sommes
soient dépensées dans tel ou tel secteur. Mais, puisque la ville
de Montréal avait une majorité, elle a fait quand même ces
dépenses-là.
M. Corbeil: Au moment où on se parle, je ne m'en souviens
pas. S'il y en a eu, ça ne me frappe pas, en tout cas.
M. Ciaccia: La question ne se pose pas que si la ville de
Montréal avait effectué certaines dépenses contre le
gré des banlieues, puisqu'elle a la majorité, elle peut le faire,
malgré l'opposition des banlieues; ça ne se présente pas,
cette question-là.
M. Corbeil: Pas à ma souvenance.
M. Ciaccia: Comme ça, la question de parité vous
serait utile dans quel domaine? Ce n'est pas au niveau des dépenses qui
sont effectuées par la Communauté urbaine de Montréal que
vous voulez avoir une voix égale; ce n'est pas à ce
niveau-là.
M. Corbeil: Pour changer les mentalités, pour être
des gens qui travaillent positivement plutôt que des gens qui cherchent
à s'affronter.
Le Président (M. Rodrigue): M. le Président,
avez-vous des remarques à formuler avant que je ne cède la parole
au ministre pour conclure sur la présentation de votre
mémoire?
M. Corbeil: Simplement vous remercier, ainsi que M. le ministre
et tous les membres de cette commission d'abord de votre hospitalité et
votre patience à entendre mes explications.
Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, M. le président
de la conférence, je vous remercie d'abord de vous être
prêté de bonne grâce à toutes les questions que nous
vous avons posées cet après-midi; je pense qu'il y a eu
d'excellents échanges et nous avons bien enregistré votre
témoignage de ce matin sur les problèmes que vous avez
soulevés à la communauté.
Il y a une chose que je retiens, au départ, c'est la
réponse que m'ont fournie tous les intervenants municipaux à la
question: Croyez-vous qu'il faut une communauté urbaine? Je pense qu'il
faut constater que tout le monde a dit qu'il en fallait une et que
c'était mieux qu'à peu près n'importe quel autre
dispositif pour dispenser des services communs et régler des
problèmes communs. Je pense qu'au terme de ça, il faut être
convaincu, puisque vous en êtes vous-même convaincus, comme
élus municipaux, de la pertinence d'une communauté urbaine sur le
territoire de l'île de Montréal; du moins comme cadre
d'organisation intermunicipale. Vous avez même mentionné qu'on
aurait probablement souhaité qu'il n'y ait pas trop d'organismes
intermunicipaux lorsqu'il a été question, à tout le moins,
de la régie sur la gestion des déchets.
Je vous ai posé une question sur la réforme territoriale,
en passant, pour sonder encore ce que vous en pensiez parce que j'avais
déjà enregistré certains témoignages
là-dessus. Je pense que chaque municipalité tient à sa
vie, à son autonomie; c'est normal, c'est comme ça partout au
Québec et ça prend des raisons très graves pour discuter
de cette question. Je sais qu'assez souvent il y a une réforme
territoriale qui suit la réforme institutionnelle. Dans le cas de
l'Outaouais, cela s'est fait comme ça; en 1975, le nombre de
municipalités a été réduit de 32 à 8.
Après, on en a dégroupé quelques-unes, mais il reste que
cela a suivi plutôt la communauté urbaine. Je pense que c'est une
autre question. Ce n'est pas par incidence ou automatiquement
réglé par la même occasion. Cela a été la
même chose, d'ailleurs, à Toronto; en 1966, quelque douze ou
treize ans après la création du Toronto métropolitain, on
est passé de 13 à 6 municipalités. En fait, ce seront des
décisions ultérieures. Je pense que la communauté urbaine
est une institution à caractère intermunicipal qui permet
à tout le monde de continuer à vivre et à exister. Et
surtout quand il y a un bon esprit de collaboration et d'entraide entre les
municipalités, il n'y a pas de problème là-dessus.
Votre témoignage, d'autre part, du vécu de la
communauté me fait dire, je pense, avec encore plus de conviction qu'il
faut des modifications à la Loi de la Communauté urbaine de
Montréal, d'une part, au terme de ses structures et aussi en termes de
fonctionnement. Je voudrais simplement rappeler qu'il y a quand même
quelques objectifs que nous poursuivions dans tout ce dossier. Nous avons
cherché à renforcer le jeu démographique, il me semble,
cela me paraît évident. En tout cas, c'est ce que nous tentons de
faire, lorsqu'au conseil nous en arrivons à accorder des voix à
la proportionnelle. En même temps, nous voulons respecter les
caractéristiques d'une institution intermunicipale en donnant des vetos
aux groupes importants à l'intérieur de cette communauté.
Je pense que cela est un dispositif caractéristique des institutions
intermunicipales.
Nous proposons dans le projet de loi des commissions permanentes du
conseil. Je pense que, là-dessus aussi, les élus sont en
général d'accord, sinon favorables; en tout cas, on
fonctionnerait avec elles. Nous avons aussi mis dans la loi la
possibilité pour les conseillers d'entreprendre des débats
publics sans procéder nécessairement par le comité
exécutif. Je sais que cela est discuté. On n'est pas tout
à fait d'accord là-dessus, mais c'est dans un souci d'ouvrir les
discussions, d'ouvrir les débats publics. L'abolition de la
procédure de l'adoption automatique du budget, c'est dans le même
objectif aussi, c'est qu'il faut que les élus prennent leurs
responsabilités.
Nous avons voulu aussi arrimer le travail des commissions avec les
décisions qui se prenaient au niveau du comité exécutif,
de façon que ces commissions ne fonctionnent pas simplement sans
être branchées très concrètement avec l'instance
où se prenaient des décisions d'administration
courante. C'est l'objectif qui était poursuivi lorsqu'on a dit:
Les membres des commissions, président, vice-président, feront
partie de l'exécutif.
Il y a aussi une chose qui est importante, à mon avis, et que
nous avons voulu mettre dans la loi. Au-delà de la question de la
présidence de l'exécutif -cette question de la présidence
sera réglée, je pense, d'une autre façon; je sais que cela
fait l'objet de nos discussions ici - nous avons voulu que les débats
évoluent lorsque les questions se posaient, notamment, au niveau de
l'exécutif. L'exécutif en discute de façon normale, mais
s'il y a blocage, ce dispositif du veto permet à des gens d'intervenir
avant que la décision tombe pour rechercher les compromis, rechercher
des solutions, amener des gens peut-être à faire des
échanges, enfin, bref, comme cela se passe généralement
dans l'administration. Si on ne règle pas, il y a cet appel au conseil
où la question devient publique; les discussions s'élargissent au
niveau du conseil. En même temps que cela favorise le jeu
démocratique, cela permet aussi au débat d'évoluer en
permettant à d'autres personnes d'intervenir par le fait que le
débat ne se fait plus à huis clos.
Maintenant, il y a ce dispositif dans le projet où il y a une
majorité des deux tiers pour lever une décision prise par
l'exécutif ou par le vote prépondérant du
président. On peut en discuter; je pense qu'on est allé en
commission pour le faire. En tout cas, cela avait pour objectif de rallier le
plus possible de gens, soit pour, soit contre une décision qui pourrait
être prise à l'exécutif et qui pourrait être
discutable. Bref, cela a pour objectif de favoriser les discussions, favoriser
l'évolution des débats. (17 h 15)
Je suis content des échanges que nous avons eus, j'en avais
évidemment des échos. Je pense que le projet de loi et cette
commission parlementaire ont permis d'en discuter publiquement pour que les
gens comprennent de quoi il s'agit. Les positions des uns et des autres vont
être analysées à la suite de la commission, je parle
toujours des gens au niveau des instances municipales. Il y a une chose que je
retiens en terminant, M. le Président, c'est qu'il faut que les gens se
parlent; quelles que soient les structures qu'on peut avoir dans une
communauté urbaine comme celle-là, s'il n'y a pas un climat qui
s'installe, s'il n'y a pas une volonté de travailler ensemble, ce sera
difficile sinon impossible. Je pense que chacun doit y mettre du sien, et je ne
veux pas mettre le blâme sur les uns ou les autres, pas du tout. Chacun
doit y mettre du sien, parce qu'il s'agit de construire et d'administrer les
services municipaux de la métropole du Québec, du centre nerveux
du Québec. Alors, je pense que c'est vers cela que tout le monde
travaille et cela va sûrement donner des résultats.
Le Président (M. Rodrigue): Je remercie les
représentants de la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal.
Municipalité de la paroisse de
Saint-Raphaël-de-l'île-Bizard
J'invite maintenant les représentants de la municipalité
de la paroisse de Saint-Raphaël-de-l'île-Bizard à prendre
place devant nous et à nous présenter leur mémoire qui, si
je ne m'abuse, nous sera présenté par M. Bernard Patry, maire de
la municipalité. J'inviterais M. Patry à nous présenter
les personnes qui l'accompagne.
M. Patry (Bernard): Merci beaucoup, M. le Président. Je me
présente, je suis Bernard Patry, maire de la municipalité rurale
de la paroisse de Saint-Raphaël-de-l'île-Bizard -avec un archange -
depuis treize ans; cela veut dire que, depuis 1969, je connais et je vis la
situation de la Communauté urbaine de Montréal. Je suis
accompagné de M. Henri Walsh, qui est conseiller politique, et, en
arrière à la première rangée, il y a quatre
conseillers de notre paroisse.
À la suite des discours très longs mais très
intéressants des intervenants précédents, je vais essayer
de faire cela le plus court possible. Je crois qu'en dedans de dix minutes je
lirai seulement une partie du mémoire pour essayer de gagner du temps
afin de répondre le plus succinctement possible aux questions que vous
voudrez bien me poser.
L'historique de l'île Bizard, je crois que les parlementaires le
connaissent. Nous sommes à l'intérieur de cette Communauté
urbaine de Montréal depuis 1969, c'est-à-dire depuis sa
création. Nous y avions été intégrés de
force, parce que nous n'avions jamais été invités au
débat préliminaire à cette communauté. Hier soir on
nous a dit pourquoi, un représentant du GAM m'a dit à cette table
pourquoi l'île Bizard en faisait partie. C'est que le premier
président devait demeurer à l'intérieur de cette
Communauté urbaine de Montréal.
Nous avons donc, en 1973, présenté un premier bill
privé en commission parlementaire et nous sommes revenus à la
charge en 1977. En 1977, la réponse du ministre des Affaires municipales
fut la suivante: On doit attendre des changements profonds au sein des
structures de la Communauté urbaine de Montréal. Nous sommes donc
actuellement arrivés à ces changements et, dans le
mémoire, on peut voir que la situation, depuis 1977, a changé
d'une façon très marquée.
En 1978, l'île voit 81% de son territoire zoné agricole par
le décret de la
loi 90. Son développement domiciliaire est donc limité, ce
qui lie l'île à sa vocation rurale. Sa population était
alors de 4920 habitants. Aujourd'hui, son développement est restreint
par le nombre de sa population qui atteint bientôt un sommet de 7000
habitants et par les limites physiques de son sol. En effet, seulement 19% de
son sol a été prévu pour l'urbanisation, ce qui inclut les
parties déjà urbanisées, et de plus, une partie de ce 19%
est inondable et n'est pas utilisable pour fins de développement
résidentiel.
Ainsi, la superficie de terrain non zonée agricole est d'environ
430 hectares. De ce nombre, 225 sont urbanisés et 70 de sol inondable,
d'où il reste 133 hectares à urbaniser, soit 5,8% de la
superficie de notre île. Ce sol développable se divise en trois
secteurs: Le secteur périphérique à l'entrée du
pont est le seul qui peut être desservi par le réseau
d'égout et d'aqueduc. Les deux autres sont non desservis.
En tenant compte des normes et des contraintes de développement
actuel, le nombre d'unités de logement pouvant être construits
dans ces zones désignées serait d'environ 1200. Cette saturation
de développement plafonnerait ainsi la population à environ 10
500 habitants, ce qui inévitablement plafonnerait également les
revenus de la municipalité.
Les conséquences du zonage agricole ont été de
plafonner les revenus municipaux de notre île à moyen terme et
aussi, dans l'immédiat, de surtaxer son citoyen. En effet,
l'évaluation imposable de l'île a ainsi diminué de 15 500
000 $.
En 1979, les terrains à développer étaient
évalués à 23 500 000 $ et, en 1980, ces mêmes
terrains à vocation agricole furent évalués à 8 000
000 $.
Avant le zonage agricole, soit en 1979, l'évaluation des terrains
à développer comptait pour 28% de l'évaluation municipale.
En 1980, ceux-ci ne comptent que pour 10%. Conséquemment, dans
l'immédiat et en ces temps difficiles, la part du fardeau fiscal du
résident de l'île Bizard est augmentée de 28,5%.
L'île Bizard et le contexte urbain de Montréal. Sa
situation. Située dans la partie nord-ouest de l'archipel de
Montréal, l'île est communément connue comme faisant partie
du West-Island de Montréal; notion, à mon avis, fausse lorsqu'on
examine moins superficiellement sa géographie et sa population. Ainsi,
on se rendra compte que l'île se distingue singulièrement du reste
des municipalités constituantes du West-Island.
Ce territoire se définit par une série de
municipalités qui se sont développées à partir des
années cinquante, dans la direction ouest par rapport aux
agglomérations métropolitaines du temps, suivant les axes de
l'autoroute 20 et des voies de chemins de fer CN et CP, ainsi que le long de
l'autoroute 40.
Ces différentes agglomérations forment un tissu urbain
ininterrompu de Dorval à Sainte-Anne-de-Bellevue. Quoique certaines
d'entre elles soient de taille restreinte, elles s'associent bien à la
connotation West-Island par leur vocation et leur
homogénéité de population.
La municipalité de l'île Bizard, contrairement à ces
agglomérations, ne s'est pas développée au même
rythme que ces dernières car elle n'avait pas d'accès direct
à la route trans-canadienne. Ce seul phénomène d'ailleurs
est le principal facteur qui explique le freinage du développement de
l'île Bizard.
De plus, à cause de la nature insulaire de son territoire,
celle-ci fut coupée de la cadence des agglomérations riveraines,
ce qui a renforcé son isolement. Cet isolement, reconnu historiquement,
eut un effet sur la spécificité même de sa population qui
est demeurée stable jusqu'aux années soixante-dix, et garda,
malgré sa récente augmentation de population, une population
francophone de 77%.
On observe par ailleurs que le West-Island est inversement proportionnel
à l'île car il ne compte que 23% de francophones, selon les
statistiques de 1976.
Aussi, au niveau des revenus, les seuls qui sont disponibles sont parmi
les statistiques datant de 1971, on voit que les revenus moyens par famille du
West-Island en 1971 se chiffraient par 14 297 $, la région de
Montréal autour de 10 200 $ et l'île Bizard, 9 600 $.
Si on regarde l'indice des revenus des citoyens, on peut voir qu'une
évaluation moyenne de la maison unifamiliale à l'île Bizard
est de beaucoup inférieure à celle des municipalités du
West Island.
Autre notion: À l'île Bizard, en 1981, seulement 38
unités sur 1554 unités unifamiliales, soit 2,5%,
possédaient une évaluation supérieure à 100 000
$.
Notre municipalité se doit de donner des services aux citoyens.
Comme toutes les autres municipalités du Québec, elle est
responsable, et le coût de ces services communautaires pour
l'année 1979 se chiffrait, per capita, à 537 $.
En ces années économiquement difficiles, les
autorités municipales et les citoyens sont préoccupés par
un fardeau fiscal qui ne cesse d'augmenter. Voyons, dans un premier temps,
comment se situe la municipalité de l'île Bizard par rapport
à d'autres municipalités de caractéristiques semblables,
des municipalités situées dans la banlieue montréalaise,
mais ayant une population d'environ 7000 personnes, avec une croissance
démographique modérée. À titre d'exemples, nous
avons choisi les municipalités de Pincourt, de Lorraine et de
Lachenaie.
On peut voir dans le mémoire que les dépenses per capita
en 1979, 1980 et 1981 ne cessent de s'accroître et la différence
entre les municipalités de Pincourt, Lachenaie, Lorraine et l'île
Bizard s'accroît d'année en année. Le principal facteur,
à ce moment, c'est la Communauté urbaine de Montréal.
Si on examine de plus près la qualité et le coût des
services que la communauté urbaine fournit aux citoyens de l'île
Bizard, on voit, au chapitre de la sécurité publique,
premièrement, que le service de protection contre l'incendie à
l'île Bizard est fourni par nous. La protection du public est
assurée par les services de police de la communauté à
partir de la base du poste de police du boulevard Pierrefonds, à
Pierrefonds. L'île Bizard fait partie d'un secteur protégé
par une unité de patrouille de deux policiers, sept jours par semaine.
Cette unité de patrouille, au besoin, est secondée par des
services d'enquête, de prévention et d'encadrement.
En 1979, les policiers de la CUM sont intervenus 144 fois sur
l'île Bizard; en 1980, 213 fois, ce qui n'est même pas une fois par
jour. Ces interventions sont classifiées à partir de rapports
d'accidents ou de vols qualifiés. Les accidents représentent 41%
de ces cas, tandis que les vols avec effraction représentent le reste.
Dans les quatre dernières années, il n'y a eu que quatre vols
qualifiés sur l'île. Notre coût per capita pour
l'année 1981 est de 75,09 $, tandis que pour les services de Lorraine et
de Pincourt, il est de 45,25 $.
Le transport en commun: la CTCUM. Au cours des trois dernières
années, notre municipalité a contribué pour 1 127 000 $
à la CTCUM. Il est à noter que le service de la CTCUM ne s'est
implanté sur l'île qu'en novembre 1980. En janvier 1982, une
enquête toute récente menée par notre municipalité
révélait que le nombre maximum quotidien d'usagers du service de
la CTCUM était de 50 en départs ou en arrivées.
De plus, l'enquête révéla que la moyenne quotidienne
ne dépassait pas trente personnes. Les prévisions de
l'année qui vient, en se basant sur ces données, fixent le
coût moyen, par usager du service de la CTCUM de l'île, à
48,32 $ par déplacement. De plus, ce service de transport en commun de
l'île ne se rabat sur aucun point de transfert intermodal pour la
région de Montréal.
Un autre service quand même très important pour l'avenir,
c'est l'assainissement des eaux. La communauté urbaine a entrepris,
depuis quelques années, son opération de dépollution. Les
investissements majeurs prévus pour ce projet se divisent en deux blocs,
soit les intercepteurs nord et sud de l'île de Montréal, et
l'usine d'épuration des eaux usées. C'est un traitement
primaire.
Les sommes engagées jusqu'à maintenant pour chacun des
ouvrages mentionnés s'élèvent à 260 000 000 $ et
491 000 000 $ respectivement. On prévoit que les investissements totaux
pour ce projet, d'ici à 1986, seront de 1 255 000 000 $. La partie de
ces investissements attribuable à notre municipalité sera de 9
961 000 $. Les estimations actuelles des coûts annuels d'opération
de ce complexe seront d'environ 22 000 000 $ avec une participation
prévue pour nous d'environ 792 000 $ annuellement. (17 h 30)
À titre d'alternative, les ingénieurs-conseils de notre
municipalité ont évalué un projet d'usine
d'épuration à traitement non pas primaire, mais secondaire pour
les eaux usées de l'île. Son coût serait de 3 000 000 $ et
ce sans compter des subventions. L'exploitation annuelle de celle-ci
coûterait environ 400 000 $. Dans cette optique, la municipalité
de l'île-Bizard économiserait environ 1 800 000 $ par
année, soit une économie d'environ 64% par rapport à la
solution de la CUM.
Les autres services de la CUM, je vais simplement les
énumérer: le service d'évaluation, d'assainissement de
l'air, d'inspection des aliments, les services de promotion et de
développement industriel, les services d'urbanisme, ainsi que le service
de parcs régionaux. Tous ces services nous ont coûté 202
000 $ en 1981. Maintenant, à d'autres chapitres, les services tels que
la promotion industrielle et le contrôle de la pollution
atmosphérique soulèvent des interrogations quant à leur
pertinence pour l'île Bizard, surtout maintenant que nous avons 81% de
notre territoire zoné agricole. Enfin, signalons que le contrôle
de l'inspection des aliments, pour sept établissements, coûta
à l'île Bizard, en 1981, 8000 $.
Donc, on peut se demander ce qu'est l'autonomie municipale de
l'île Bizard et ce que nous avons comme hypothèses de travail.
L'île Bizard se doit de retrouver son autonomie municipale et de briser
ses liens actuels avec la CUM.
L'île Bizard: communauté agricole pilote.
Décréter par projet de loi que le territoire de l'île
Bizard soit agricole à 81%, tel qu'il fut fait en 1978, est une chose,
mais que l'île redevienne agricole en serait une autre qui exigerait la
volonté de lui rendre sa vocation originelle. L'île Bizard, de
façon objective, pourrait redevenir, à court terme, cette
communauté agricole qu'elle était jadis. D'abord, tout comme
ville de Laval, son versant sud jouit d'un microclimat qui lui est favorable
pour les primeurs agricoles au début de l'été.
Deuxièmement, bien que déficiente, il existe encore une structure
agricole opérante à l'île Bizard. Ces fermes sont
localisées du côté ouest de la montée de
l'église et appartiennent à des
familles de vieux cultivateurs.
Troisièmement, la proximité de l'île Bizard aux
marchés de l'agglomération montréalaise laisse entrevoir
un potentiel économique certain. Une volonté politique
très ferme rendrait à l'île Bizard sa vocation originelle.
Conscient que, depuis plusieurs années, les titres de plusieurs terres
sont passés à des investisseurs, n'y aurait-il pas moyen,
néanmoins, à partir de la structure agricole existante, par le
biais du ministère de l'Agriculture ou par l'application d'autres
mécanismes incitatifs, de favoriser un relancement qui deviendrait,
à moyen terme, une démonstration agricole?
La nature insulaire de ce territoire est propre à contenir les
paramètres d'une telle entreprise, car elle limite la taille de celle-ci
autant au niveau de sa planification que de sa réalisation.
Les espaces verts. À différentes époques,
l'île Bizard a été entrevue, autant par des individus que
des groupes, comme un immense territoire à vocation
récréative. L'on sait que l'appropriation et l'aménagement
d'immenses parcs régionaux impliquent des investissements coûteux.
En ces périodes économiquement difficiles, il va de soi que les
décisions dans ce sens méritent prudence et jugement. Il existe
peut-être d'autres voies pour protéger et rendre viable l'Ile
Bizard comme espace vert.
La Loi sur les arrondissements naturels, appliquée judicieusement
et combinée avec une opération agricole de remise en valeur du
territoire, pourrait non seulement consacrer une vocation verte à
l'île, mais aussi rendre celle-ci rentable
socio-économiquement.
Statut particulier. La municipalité de paroisse de
l'île-Bizard, dans la conjoncture actuelle, est prise dans la structure
existante qu'est la CUM et est potentiellement prise dans les
municipalités régionales de comté créées par
la loi 125.
Il est à noter que, si l'île Bizard, par son
caractère spécifique, n'a pas de lien organique rationnel avec la
CUM, elle n'en a pas, non plus, avec les municipalités régionales
de comté. Dans l'optique de la loi 125, il faudrait rattacher
l'île Bizard à une MRC ou bien, comme dans le cas de l'île
d'Orléans, à Québec, créer une MRC en tant que
telle; car, si l'on compare les caractéristiques de ces îles, l'on
s'aperçoit de leur similarité, malgré leurs
différences apparentes. L'île d'Orléans est une île
à caractère agricole, doublé d'un caractère
historique et adjacente à une communauté urbaine: la
Communauté urbaine de Québec. La population de l'île
d'Orléans, quoique regroupée en différentes
municipalités, ne regroupe que 6050 habitants et, à cause de sa
spécificité, est devenue une municipalité régionale
de comté en tant que telle.
Ainsi l'île Bizard, à cause de son caractère
agricole, de ses aspirations et de son devenir spécifique devrait, dans
une optique d'équité sociale, devenir aussi une
municipalité régionale de comté gérant sa propre
destinée en collaboration avec le gouvernement du Québec.
Le Président (M. Rodrigue): Je vous remercie, M. le maire.
M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, M. le maire, j'ai
effectivement pris connaissance de votre mémoire et je vous avais,
à l'occasion, rencontré. Je sais que les membres de la commission
auront des questions à vous poser pour leur propre gouverne et se
renseigner davantage. J'aurais quand même quelques questions, moi aussi,
à vous poser au départ. Je trouve qu'il y a une question qui se
pose dans le cas de l'île Bizard. Une île, je comprends que cela a
peu de relations directes avec d'autres territoires mais cependant, dans le
cas, la seule liaison qui existe c'est bien avec l'île de
Montréal.
M. Patry: En liaison permanente, oui.
M. Léonard: II y a juste un pont, un traversier
peut-être qui fonctionne de temps en temps.
M. Patry: Oui, il y a un traversier aussi avec l'île de
Laval.
M. Léonard: C'est un pont, un traversier avec...
M. Patry: C'est un pont avec l'île de Montréal et un
traversier avec l'île de Laval.
M. Léonard: C'est un traversier très
opérationnel ou si c'est un traversier de type touristique
plutôt?
M. Patry: Deux voitures à la fois, c'est petit l'île
Bizard.
M. Léonard: Alors vous avez différents services de
la Communauté urbaine de Montréal mais via le pont. La question
que je veux surtout vous poser c'est, finalement, sur l'île Bizard, les
gens qui y habitent travaillent-ils surtout à Montréal?
M. Patry: Disons que je m'attendais à cette question parce
qu'elle me fut aussi posée à trois occasions à des
commissions précédentes. Nécessairement les gens de
l'île Bizard, en grande majorité, travaillent sur l'île de
Montréal. Je ne veux pas faire ici une distinction avec la ville de
Montréal, il y en a peut-être à peine 10% qui travaillent
à Montréal comme tel, dans la ville de
Montréal...
M. Léonard: Je parle de l'île de
Montréal.
M. Patry: ... sur l'île de Montréal. L'île
Bizard génère environ 400 emplois. Mais, en toute
équité, si on regarde le pont - vous avez fait mention du pont,
c'est le seul accès permanent à temps plein pour aller sur
l'île de Montréal - c'est le seul pont qui n'est pas
congestionné le matin par la circulation, parmi les autres villes de la
région montréalaise, pour les gens qui viennent travailler sur
l'île de Montréal; c'est le seul. On génère
seulement 400 emplois mais il y a aussi beaucoup de villes - vous pouvez voir
d'après la carte - qui sont très près de l'île
Bizard - on ne parlera pas des grosses villes comme Laval, Longueuil, qui sont
quand même de très grosses villes - avec lesquelles nous nous
sommes comparé, comme Pincourt. Pincourt est très près de
la route transcanadienne...
M. Léonard: À ce moment-là, l'erreur c'est
peut-être de ne pas mettre Pincourt aussi dans la communauté
urbaine.
M. Patry: Écoutez, si l'équité exige que
tous les gens qui viennent travailler sur l'île de Montréal
paient, à ce moment-là, je pense que si c'est ça
l'équité...
M. Léonard: Bien.
M. Patry: ... l'île Bizard devrait payer, mais aussi toutes
les municipalités environnantes. Beaucoup de citoyens de ces
municipalités viennent travailler à Montréal.
M. Léonard: Finalement, il y a des relations constantes,
quotidiennes, régulières entre l'île Bizard et
Montréal étant donné que les gens, c'est leur seule
façon d'établir la liaison, passer par le pont pour aller
à Montréal. En termes de distance pratique c'est toujours
mesuré via l'île de Montréal. Je vais vous poser une autre
question. Vous dites que l'île Bizard a perdu de l'évaluation
à la suite de l'application de la Loi sur la protection du territoire
agricole, 15 500 000 $. En fait, si on relie ça aux dépenses de
la communauté ça change peu de choses parce que ça veut
dire que le compte de taxes payé par les citoyens de l'île Bizard
est moins élevé, à toutes fins utiles, puisque leur
évaluation est moindre. Donc, ça change quoi?
M. Patry: Je vais répliquer à ça. Disons que
pour le compte de taxes de la communauté c'est exact, parce que les gens
paient selon leur évaluation propre. Si vous avez une maison
évaluée à 30 000 $ vous payez toujours 30 000 $ à
la communauté.
Ce que j'ai voulu démontrer c'est que pour l'évaluation de
notre municipalité, pour les services offerts par notre
municipalité, nos propres services, en ayant perdu 15 500 000 $
d'évaluation, ce qui est environ 20% de notre évaluation totale,
pour reprendre ces 20% d'évaluation totale, il a fallu augmenter les
taxes. Pour la Communauté urbaine de Montréal, je suis d'accord
avec vous, le compte global ne se modifie pas parce que le compte de taxes d'un
propriétaire demeure le même parce qu'il correspond à
l'évaluation. Mais, pour notre municipalité, le zonage agricole a
fait perdre 15 500 000 $ d'évaluation en un an.
M. Léonard: Si je comprends bien, ce sont vraiment deux
questions complètement séparées, parce que du point de vue
de la communauté urbaine, cela ne change strictement rien. Parce que le
compte de taxes...
M. Patry: Le compte de taxes pour la communauté urbaine,
non.
M. Léonard: C'est ça, d'accord. Est-ce qu'il y a
beaucoup de producteurs agricoles actuellement dans l'île Bizard? Est-ce
qu'il y a eu une évolution comme ailleurs et que beaucoup ont
abandonné la culture?
M. Patry: Les gens ont abandonné...
M. Léonard: II n'en reste presque plus
présentement?
M. Patry: II en reste peut-être une douzaine.
M. Léonard: En fait, le travail des gens provient surtout
de l'île de Montréal?
M. Patry: Pour le travail, comme j'ai dit, l'île Bizard
permet environ 400 emplois. Les autres personnes, en grande majorité,
travaillent dans l'île de Montréal, il y a peut-être un
certain pourcentage en dehors de l'île de Montréal mais, la grande
majorité, c'est dans l'île de Montréal sauf 400 emplois. Il
faut aussi calculer que 400 emplois, c'est beaucoup pour une
municipalité comme la nôtre. Nous avons environ 1800 familles et,
parmi elles, beaucoup sont des rentiers, des gens de l'âge d'or, des
retraités ex-cultivateurs qui ne vont pas travailler à
l'extérieur. En pourcentage, il y en a plus de la moitié qui vont
travailler dans l'île de Montréal; ça, je vous
l'accorde.
M. Léonard: Je crois comprendre que vous seriez
particulièrement pénalisés, parce que vous auriez un
caractère agricole et que ce ne serait pas très normal de rester
dans la communauté. Cependant, il reste que vous êtes quand
même, sur le plan des distances,
très près de l'île de Montréal et
malgré ce caractère agricole, malgré le fait que vous
soyez dans la communauté, votre population de 1971 à 1981 est
passée de 2950 à 6495.
M. Patry: Oui.
M. Léonard: Elle a plus que doublé. Les avantages
n'étaient quand même pas si grands, parce que les gens auraient
choisi d'aller dans l'île Laval ou ailleurs.
M. Patry: Oui, mais maintenant il y a eu une certaine courbe
ascendante du point de vue de la population. Depuis un an, cette courbe est
demeurée stationnaire et, ce qu'il faut aussi comprendre...
M. Léonard: Excusez-moi. Disons qu'ailleurs, dans la ville
de Montréal, la population a nettement diminué et, dans les
autres villes de banlieue, elle s'est stabilisée, même, elle a
diminué un peu.
M. Patry: Dans le total des villes de banlieue.
M. Léonard: C'est partout pareil. Il n'y a pas de
progression démographique à l'heure actuelle au Québec. Ce
n'est pas relié à la communauté urbaine finalement.
M. Patry: Non. Ce que je veux tout simplement vous expliquer
maintenant, c'est que l'évolution de la population que nous avons
actuellement, nous ne l'aurons plus parce que nous n'avons plus les moyens de
développer notre municipalité. Il est complètement
impensable d'être dans la plus grosse communauté urbaine de
Québec et d'être zonée agricole à 81%. Donc,
l'évolution démographique, nous l'avons eue de 1971 à 1981
parce que les gens ont vendu leur terre et qu'il y a eu des
développements, mais nous ne l'aurons plus.
M. Léonard: Mais vous avez quand même encore du
terrain pour développer, mais enfin... Je trouve que l'île est un
lieu extraordinaire, parce que vous êtes dans une communauté
urbaine et vous avez pratiquement un parc à la porte de chez vous. Vous
êtes un parc...
M. Patry: Oui, c'est un parc qui est maintenant très
dispendieux. Ce que j'ai voulu démontrer par ce mémoire, c'est
qu'il va devenir tellement dispendieux que ce ne sera plus abordable de la part
des citoyens.
Vous avez parlé de démographie, mais le maximum qui nous
est permis de développer actuellement, nous allons atteindre 10 000 de
population. Et après 10 000 de population, nous allons faire quoi? Ce
qui veut dire que nous serons toujours le même nombre de personnes
à payer pour l'augmentation des taxes. J'ai tout simplement voulu
démontrer, par l'assainissement des eaux, que les gens vont payer des
factures effarantes. Si vous prenez le problème de la CTCUM, vous avez
vu le petit drapeau qui montre où nous sommes desservis, il y a à
peine 20% de la population qui est desservi: Cet autobus ne va nulle part. Nous
avons fait des demandes à la CTCUM pour que toute notre
municipalité puisse être desservie, la réponse est non. La
réponse va toujours être non parce que les normes de la CTCUM ne
permettent pas d'aller dans des endroits où il n'y a pas assez de
population. (17 h 45)
Donc, les gens se trouvent à payer, cette année, environ
500 000 $ pour une CTCUM qui est pratiquement inexistante chez nous. Ce qu'on
voudrait - c'est à même la nouvelle loi, le projet de loi no 31
qui va être présenté par le ministre des Transports la
semaine prochaine, il va y avoir une commission parlementaire - c'est pouvoir
se servir des autobus scolaires que nous avons chez nous et pouvoir faire du
transport d'appoint. Chez nous, c'est ce qu'on devrait avoir.
M. Léonard: De chez vous au territoire de la CUM.
M. Patry: Pour desservir chez nous si les gens en ont besoin;
c'est ce qu'on devrait avoir, que ce soit permis de faire du transport
d'appoint.
M. Léonard: Vous ne trouvez pas, M. le maire, qu'on
s'aligne plutôt vers une duplication de services, finalement, si vous,
vous faites du transport d'appoint par des autobus scolaires et que les autobus
de la CUM, juste de l'autre côté du pont ou même chez vous,
viennent de temps en temps? Ce ne serait pas mieux de négocier avec la
CUM, peut-être, des horaires différents ou deux ou trois autobus
de plus ou quelque chose comme cela?
M. Patry: Ce que je voulais dire, c'est: si les citoyens
désirent vraiment avoir du transport en commun. Il y a deux ans, avant
l'implantation de la CTCUM dans notre municipalité, nous avons fait un
référendum, au mois d'août, où 65% de la population
est venu nous dire, à 95% en faveur, qu'ils ne voulaient pas le service
de la CTCUM qu'on nous proposait. Négocier avec la CTCUM, je l'ai
vécu depuis 1969. On ne négocie pas avec la CTCUM. Et même
avec les meilleures dispositions qu'on a vues hier et avant hier ici, à
cette table, disons que je ne le pense pas.
M. Léonard: Bien, je pense, le projet de loi...
M. Patry: Tout ce que je voulais simplement vous dire, c'est que
nous, cela ne nous mène nulle part. Vous savez, les gens de l'île
Bizard, on est près de l'île de Montréal mais on est loin
des voies de l'autoroute transcanadienne, de l'autoroute 2-20 auparavant. On
est loi de ces autoroutes-là. Donc, on ne peut vraiment pas se servir de
la CTCUM pour venir travailler, même dans l'ouest de l'île de
Montréal; les gens doivent prendre leur voiture.
Si les gens veulent avoir un service de transport en commun, on va les
rencontrer et s'ils veulent, on pourra avoir des services d'appoint seulement
pour notre municipalité.
M. Léonard: Cela m'étonne un peu. Je ne veux pas
insister davantage mais, quand même, malgré les problèmes
que vous dites exister, il y en a d'autres ailleurs et il y en a
particulièrement sur l'île de Montréal et à la ville
de Montréal, en termes de population, de progression
démographique, je dirais. Chez vous, je regarde un peu plus
attentivement les chiffres de population que j'ai ici: 1971, 2950 habitants;
1976, 4101, et 1981, 6495 habitants. Les chiffres proviennent de la
Communauté urbaine de Montréal. À les regarder plus
attentivement, la progression démographique s'est
accélérée, dans les cinq dernières années,
comparativement aux cinq premières années. Donc, il y a des gens
qui trouvent très intéressant d'aller chez vous. Un des facteurs
importants que les gens considèrent, lorsqu'ils vont construire des
maisons, ce sont les taxes foncières. À la lecture de cela, je
dois conclure, au moins pour une chose, que ce n'est pas un handicap majeur,
parce que c'est sûr qu'il y aurait des indices au contraire. J'en reste
là pour l'instant; je veux laisser la chance aux autres de vous poser
des questions.
M. Patry: Est-ce que je peux simplement répondre à
votre dernière question? J'en conviens, jusqu'en 1980, ce n'était
pas un handicap. Depuis 1980, c'est un handicap parce qu'en surplus on a la
CTCUM à 500 000 $ cette année. Il faudrait voir maintenant toutes
les demandes qu'on peut recevoir à l'hôtel de ville et les
explications qu'on doit donner aux citoyens pour des services dont ils n'ont
pas besoin et qu'ils ne veulent pas. Il faut aussi penser que, lorsque vous
avez dit que les gens sont venus s'établir à l'île Bizard,
ils savaient quels services la municipalité leur donnait, et ils
étaient d'accord pour payer ces services. Maintenant, avec le coût
d'infrastructures depuis 1980 et 1981 - je suis d'accord que c'est partout
pareil - aussi à cause du coût de la Communauté urbaine de
Montréal qui augmente, du service qui a diminué, de la CTCUM qui
est venue s'implanter et aussi avec l'assainissement des eaux qui va venir
s'ajouter, cela deviendra insoutenable chez nous. C'est cela que je voulais
vous dire.
Le Président (M. Rodrigue): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Est-ce que vous avez eu la chance de faire des
comparaisons, docteur, entre les coûts qui sont encourus par les
contribuables de l'île Bizard et ceux des municipalités
environnantes pour les fins de la CUM? Est-ce qu'il y a une grosse
différence dans les taxes que vous impose la CUM pour la même
valeur d'évaluation et les taxes qui sont imposées aux
contribuables, disons, de Pierrefonds, de Kirkland, de Baie-d'Urfé, de
Sainte-Anne-de-Bellevue? Est-ce que le fardeau fiscal est comparable?
M. Patry: Disons que le taux de taxe est donné par la
Communauté urbaine de Montréal selon un potentiel fiscal. Cela
veut dire qu'à 99% le compte de taxes d'un citoyen, pour la CUM, de
l'île Bizard et d'autres municipalités avoisinantes comme
Pierrefonds et Dollard-Des-Ormeaux est à peu près le même,
parce que les gens paient à l'évaluation. Sauf que les autres
municipalités, étant donné leur caractère et leur
situation géographique, ont beaucoup plus de services que notre
municipalité. Chez nous, les services sont de beaucoup inférieurs
à ceux des autres municipalités du territoire de la
communauté urbaine.
M. Ryan: Vous, vous soutenez que, pour les fins de transport, les
fins de police en particulier qui sont les deux services les plus coûteux
de la CUM, votre municipalité pourrait s'arranger à bien meilleur
compte.
M. Patry: Oui, à moitié coût.
M. Ryan: Les développements qui sont survenus chez vous,
qui ont entraîné cette augmentation de la population dont parlait
le ministre, cela a été des développements
résidentiels importants...
M. Patry: Oui, des développements résidentiels
faits par trois ou quatre compagnies à ce moment-là.
M. Ryan: ... qui ont transformé le caractère de la
population. Aujourd'hui, même si cela a été
décrété agricole à 80% du territoire, c'est une
population plutôt urbaine, finalement.
M. Patry: Disons qu'elle est mi-urbaine, mi-rurale; on peut dire
que c'est environ moitié, moitié actuellement. Suite à un
schéma directeur, pour garder le cachet de l'île, toutes les
nouvelles propriétés sont situées dans un territoire quand
même assez
restreint afin de ne pas détruire le caractère de notre
municipalité.
M. Ryan: Vous avez dit qu'il restait seulement une dizaine de
cultivateurs actifs sur l'île.
M. Patry: C'est cela.
M. Ryan: Qu'est-ce qu'il va arriver avec le zonage agricole?
Est-ce que vous avez fait des démarches auprès de la Commission
de protection du territoire agricole pour obtenir des changements ou si vous
acceptez que ce soit zone à 80% des cas sans qu'il y ait d'utilisation
à des fins agricoles?
M. Patry: Disons que nous avons négocié pendant
plus d'un an avec la CPTAQ, la Commission de protection du territoire agricole
du Québec; comme nous ne sommes pas parvenus à une entente avec
la CPTAQ, le zonage agricole nous a été imposé. Les terres
sont quand même cultivées; lorsque je dis "quand même
cultivées", c'est par 10 ou 12 cultivateurs. Il y a aussi d'autres
cultivateurs qui cultivent des terres qui ne leur appartiennent pas parce que
les compagnies qui détiennent les terres les laissent cultiver par des
anciens cultivateurs. Il y a quand même une bonne partie des terres de la
municipalité qui sont cultivées.
M. Ryan: Est-ce qu'il y a déjà eu des expressions
d'opinion pour détacher la municipalité de la communauté
urbaine? Dans la population là-bas, est-ce qu'il y a eu des expressions
d'opinion très explicites là-dessus?
M. Patry: Oui. En 1977, lors d'une dernière tentative par
un projet de loi privé, des citoyens nous ont fait parvenir
différentes pétitions. Environ 90% des gens de la population qui
ont signé la pétition et, sur les 90%, trois citoyens
désiraient demeurer à l'intérieur de la communauté;
sur les trois, je pense qu'il y en avait au moins un qui travaillait pour la
Communauté urbaine de Montréal. Cela veut dire que chez nous la
population est entièrement derrière le conseil municipal. Lors de
la dernière commission parlementaire, en 1977, nous étions venus
en autobus, il y avait plus de 200 citoyens qui étaient venus nous
appuyer ici même dans ce salon rouge.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Lorsque M. Corbeil parlait d'une île, une
ville c'est la deuxième île. C'est comme si la communauté
urbaine, lorsqu'on l'a fondée, avait pris, au lieu de l'île
Bizard, l'île Perrot; c'est la même chose. L'île Perrot est
voisine de la communauté urbaine et est une île qui est comparable
à l'île Bizard. Lorsqu'on a créé cette
communauté, on aurait aussi bien pu prendre l'île Perrot
plutôt que l'île Bizard.
Ce n'est pas la première tentative par laquelle les citoyens de
l'île Bizard veulent se départir de la communauté urbaine,
et je pense qu'ils sont très légitimés dans leur demande
au gouvernement de les rendre autonomes. Lorsqu'on compare la communauté
urbaine à Munich, Toronto, toutes les grandes villes, je suis convaincu
qu'il n'y a pas une région dans ces communautés urbaines qui est
une région rurale. Dans toutes les grandes comparaisons qu'on fait, je
ne pense pas qu'on trouve un participant qui est rural à 81%.
Voici la question que je veux vous poser, M. le maire. Si le
gouvernement vous donnait votre autonomie, je pense qu'il y a un motif, vu que
c'est une île, c'est la raison, parce que, évidemment, il y a
d'autres municipalités, M. le ministre, qui pourraient tenter de
demander le retrait de la communauté urbaine, mais le fait que ce soit
une île et que c'est comparable à une autre île, l'île
Perrot à côté, de quelle façon vous
organiseriez-vous, parce qu'à 48 $ par tête, vous pourriez fournir
un taxi à chacun de vos concitoyens pour aller les reconduire. Il
faudrait bâtir un pont pour aller à Laval aussi, je pense que ce
serait favorable à votre demande... De quelle façon
organiseriez-vous le transport en commun? Est-ce que votre conseil y a
pensé?
M. Patry: Le transport en commun pourrait se faire avec, comme je
l'ai expliqué tout à l'heure, un transport d'appoint qui se
rabattrait sur des circuits intermodaux, des circuits soit comme le Canadien
Pacifique ou le Canadien National, comme on en discute actuellement à la
Communauté urbaine de Montréal, qui vont desservir vers l'ouest,
jusqu'à la ville de Rigaud. Ces gens ne paieront pas plus; la même
chose pour Saint-Eustache. On aura des rabattements sur ces lignes.
M. Bissonnet: Merci. C'est surtout un témoignage d'appui
à la demande à la ville de...
M. Laplante: M. Patry, quand vous êtes venu en 1977, je
m'en souviens très bien, on a eu l'occasion de se parler à
différentes reprises de ce que vous viviez comme problèmes
à l'île Bizard. À ce moment, vous nous donniez à peu
près les mêmes raisons qu'aujourd'hui. La différence,
aujourd'hui, c'est que vous nous dites que jusqu'en 1980, cela a bien
été. On ne le sait plus pour les années
ultérieures, 1981, 1982, 1983. Vous attribuez cela à l'expansion
qui s'est arrêtée
dans votre ville à cause des terres agricoles. Le ministre vous
demandait aussi ce que cela donnait comme taxes indirectes chez vous, si vous
payez à la CUM plus qu'une autre ville avec les mêmes
évaluations. Vous avez dit: Non, c'est uniforme. Cela n'en enlève
pas; cela n'en donne pas. Vous avez appuyé le transport
énormément, mais j'ai eu d'autres sons de cloche, au sujet du
transport aussi chez vous, à savoir que vous n'étiez même
pas intéressé qu'il soit organisé, à cause,
justement, de la disparité des gens chez vous, des professionnels, et
à cause de l'accès aux routes. Vous avez donné une foule
de raisons, et vous ne vouliez pas qu'on dépasse la borne
établie. On vous a même dit: Faites-vous un stationnement pour
regrouper les gens et on les transportera ailleurs; on me dit que les
réponses ont été négatives.
Vous aviez aussi mis tous vos oeufs dans Campeau Construction. Vous avez
fait des rêves énormes, pour une grosse ville, pour essayer, par
la suite - c'est juste de la part d'un maire, je ne vous nierai pas ce droit -
de fonctionner d'une façon autonome, une île, une ville.
Aujourd'hui, j'aimerais vous poser une question dont, j'en suis certain, vous
avez la réponse. J'aimerais que vous me disiez quelle est la
qualité des terres qui y sont situées actuellement.
M. Patry: Je vais répondre à votre question, si
vous le permettez, M. le député. Il y a plusieurs réponses
mais, quand même, je vais réfuter un peu vos prémisses.
Vous avez dit que, de 1977 à 1980, il n'y a pas eu de changement. Il y
en a eu un majeur, c'est le zonage agricole. En 1977, lors de ma
précédente intervention, il n'y avait pas de zonage agricole dans
notre municipalité, je suis d'accord. En 1978, il y a eu le zonage
agricole, et le zonage agricole est là et il y est pour très
longtemps. Pour nous, c'est très important parce que ça limite
à 10 000 de population notre développement. (18 heures)
Vous avez parlé des rêves du maire de l'île Bizard.
Là-dessus, je pense que ce n'étaient pas les rêves de notre
municipalité, c'étaient les rêves d'une
société que vous avez nommée. Les rêves de
l'île Bizard, comme vous le savez, en tant que maire, mais pas surtout en
tant que maire, mais en tant que médecin - qui est quand même
quelqu'un de choyé dans la société
québécoise - on peut rester comme nous sommes actuellement, je
l'ai déjà dit en 1977. Beau terrain, beau bord de l'eau,
très bel environnement, tout ça, je peux me le payer, mais les
citoyens ne peuvent pas tous se le payer. Ce qui veut dire que les rêves
de croissance à l'île Bizard ne sont non pas les rêves du
conseil municipal et encore moins ceux du maire, c'est une
réalité comme telle qui a fait que les taxes augmentent. Comme
les taxes augmentent, il faut permettre parallèlement d'avoir un peu
plus de population afin que ce ne soit pas toujours la même population
qui paie les augmentations de taxes, le coût de la vie comme tel.
Je ne sais pas d'où proviennent vos sources, mais elles sont
sûrement erronées parce que vous savez, pour faire des terrains de
stationnement à l'île Bizard, avec la grandeur de terrain que nous
avons, c'est très facile. Le circuit qu'emprunte actuellement la CTCUM
passe dans des champs, il passe devant le cimetière, mais il passe aussi
devant notre petite école et notre centre socioculturel, et nous avons
un stationnement pavé qui peut facilement accommoder 200 à 300
voitures. Le problème de la CTCUM, ce n'est pas de faire un parc, c'est
que la CTCUM nous amène où? Elle nous amène au centre
commercial Fairview, c'est tout. Si mon garçon joue au hockey dans une
ville sur le territoire de l'île de Montréal, je dois l'amener
à l'autobus et lui doit prendre deux autobus pour parcourir un
mille.
Même les raccordements de la CTCUM entre l'île Bizard et les
autres trajets sur l'île de Montréal ne se font plus comme au tout
début, parce que, comme on nous le dit très bien dans la
correspondance que nous entretenons avec la CTCUM, le nombre de passagers en
provenance de l'île Bizard n'est pas suffisant pour amener une
amélioration. Donc, l'île Bizard, à vie, va rester avec son
petit drapeau, tel que vous avez pu le voir sur la carte, pour être
desservie par la CTCUM. C'est ça, mais ce n'est pas suffisant.
M. Laplante: Maintenant, passons à la qualité de
terres que vous avez là.
M. Patry: Quant à votre dernière question sur la
qualité de terres, lorsque nous avons préparé un
mémoire à la CPTAQ sur le projet de loi 90, nous avons dit que la
qualité des terres de l'île Bizard est excellente dans les trois
quarts de son secteur; le seul secteur où elle ne soit pas excellente,
c'est le secteur est, qui est boisé. Elle est excellente pour les
marchés. Pourquoi est-elle excellente? C'est que, tel que
mentionné dans le rapport, l'île Bizard est située dans le
lac des Deux-Montagnes et jouit d'un climat préférentiel. La
gelée à l'automne se fait plus tard, la fonte des neiges se fait
plus tôt et les fermiers de l'île Bizard peuvent être sur le
marché deux ou trois semaines avant les autres fermiers du territoire de
la région montréalaise.
M. Laplante: Vous savez aussi que le petit boisé a quelque
chose à faire avec ça. Vous êtes d'accord?
M. Patry: Oui, certainement, je suis d'accord.
Le Président (M. Rodrigue): Un instant, s'il vous
plaît.
M. Laplante: J'achève, il ne me reste que deux
questions.
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous
plaît! Étant donné qu'il passe un peu 18 heures, je vais
demander le consentement de la commission pour poursuivre jusqu'à 18 h
15. Par la suite, nous devrons suspendre les travaux jusqu'à 20
heures.
Je vais vous demander d'être très brefs dans vos questions
et dans vos réponses. Le député de Hull m'a signalé
qu'il avait également trois questions à poser. J'aimerais bien
lui fournir l'occasion de les poser et permettre au ministre de conclure pour
18 h 15. Il y a consentement?
Une voix: Consentement.
M. Paquette: II faudrait comprendre que le caucus des
députés ministériels se tient à partir de 18
heures. Personnellement, je vais devoir m'absenter, je n'ai pas d'objection
à ce que la commission continue.
Le Président (M. Rodrigue): Je vous remercie. Il y a
consentement.
M. le député de Bourassa, si vous voulez conclure.
M. Laplante: Pour les terrains qu'il vous reste à
bâtir, pourquoi ne pas faire la même chose que Brossard fait
actuellement? Ils font un choix de maisons. Vous avez un patelin de 7000
habitants, avec un choix de maisons. Les autres terrains, n'y a-t-il pas moyen
de les rentabiliser par des constructions qui feraient que votre ville serait
beaucoup plus viable? Et est-il exact aussi que Campeau Construction essaie
actuellement de faire dézoner une partie de l'île Bizard?
M. Patry: Pour répondre à la deuxième partie
de votre question...
M. Laplante: ... spéculateur.
M. Patry: ... c'est Campeau qui est le plus gros
propriétaire de banque de terrains dans notre municipalité.
Campeau est propriétaire d'environ 90% des terrains à
développer dans la municipalité et il y en a encore pour deux
à trois ans. Si la compagnie les faisait dézoner, elle devrait
non pas payer des taxes avec une très basse évaluation sur des
terres zonées agricoles mais des taxes de spéculation. Donc,
aucune demande de la société Campeau n'a été
présentée au conseil municipal pour faire dézoner des
terres.
Quant à votre première question, la population, que nous
avons estimée à un peu plus de 10 000, avec les terrains qui
restent, c'est une population qui est rentabilisée selon les normes du
ministère des Affaires municipales, c'est-à-dire une
densité de plus en plus accrue. Vous savez, la politique des maisons
unifamiliales comme nous l'avons connue dans les cinq dernières
années avec de grands terrains, à cause de l'infrastructure,
c'est du passé, il faut rentabiliser les terrains. Cela répond
à votre question?
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, j'ai un commentaire
à émettre et des questions suivront. J'en ai un premier sur le
dernier du député de Bourassa, soit qu'une partie du territoire
de l'île Bizard pourrait être construite, et il accusait, bien
entendu, de spéculateurs les investisseurs possibles. Je trouve
malheureux l'attitude du gouvernement dans ce sens-là. Alors qu'on tente
d'inviter au Québec des gens à venir construire pour procurer des
habitations à nos citoyens, on les traite de spéculateurs.
Ce commentaire fait, M. le Président, je trouve, d'une part,
vivant personnellement dans une communauté régionale, ayant
été maire de l'une des municipalités, la métropole
de l'Ouest du Québec, de l'Outaouais, la ville de Hull, pendant
plusieurs années, ayant subi des contraintes importantes au cours des
douze dernières années, je peux comprendre quelque peu la
frustration de plusieurs maires et conseillers au Québec à
l'intérieur de communauté urbaine ou régionale.
Dans le cas de la Communauté urbaine de Montréal, je
trouve absolument aberrant, M. le ministre, qu'en 1969 on y ait inclus
l'île Bizard. Cela a été une erreur au départ. Ce
que je trouve plus aberrant, c'est que, de 1969 à aujourd'hui, cela n'a
pas été corrigé, et j'inclus l'ancien gouvernement qui
vous a précédé, M. le ministre. Ce n'est pas plus
acceptable du temps des libéraux de 1970 à 1976 qu'on n'ait pas
corrigé cette situation. Je considère que cela ne doit pas
continuer et on ne doit pas, aujourd'hui, punir les citoyens de l'île
Bizard pour une erreur d'un gouvernement passé.
M. le Président, je me pose une question importante qui va
sûrement revenir. Concernant la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Montréal, je me demande si on ne devrait
pas, à un moment donné, ouvrir une enquête publique. Quand
on permet de dépenser environ 49 $ par déplacement pour
transporter un citoyen, c'est à se poser la question, à
savoir
combien de millions de dollars on gaspille par année dans des
organismes semblables où il y a un contrôle, où on peut les
considérer pratiquement comme des chasses gardées.
Dans le cas de l'île Bizard, j'aimerais poser une question au
maire. Si l'île Bizard était détachée de la
Communauté urbaine de Montréal, est-ce qu'on accepterait par le
fait même de se priver de certains services comme la commission de
transport, entre autres? J'aimerais avoir une réponse à cette
question.
M. Patry: Certainement, il y a certains services auxquels la
population serait prête à se soustraire comme celui de la
commission de transport. Ma réponse à cette question est
affirmative.
M. Rocheleau: M. le Président, j'espère que cette
commission n'aura pas une tendance partisane à traiter des cas comme
celui que nous traitons aujourd'hui. Je pense que tous les intervenants ont
mentionné le fait que la communauté urbaine devait et doit
continuer à la suite de modifications importantes. Mais dans le cas de
l'île Bizard, je pense qu'on a été patient d'attendre de
1977 à aujourd'hui pour qu'on y apporte un correctif. J'ose souhaiter,
M. le ministre, que c'est avec diligence que vous répondrez à la
demande de l'île Bizard et de son conseil municipal, et plus
particulièrement de sa population. Je trouve particulièrement
important que l'île Bizard contribue ou ait contribué 1 127 000 $,
sur trois ans, à la commission de transport. Je trouve cela absolument
honteux, M. le Président. J'ose souhaiter que le gouvernement va
corriger cette situation le plus rapidement possible. On a
déploré l'absence des responsables de la commission de transport,
je souhaiterais que nous puissions les rencontrer afin de les questionner sur
des choses semblables. Je vous remercie.
Le Président (M. Rodrigue): M. le maire.
M. Patry: Si vous me permettez - ce n'est pas une conclusion, la
conclusion appartient à la commission parlementaire, au gouvernement,
à M. le ministre - ce qui est quand même important dans ce
débat, c'est qu'il faut quand même voir les partenaires de
l'île Bizard. Je crois que tous les partenaires, du moins ceux des villes
de banlieue que j'ai rencontrés officieusement, ne s'opposent pas
à ce que l'île Bizard sorte de la Communauté urbaine de
Montréal.
Hier soir, un conseiller d'une formation politique de la ville de
Montréal en a fait mention aussi, en ce sens que l'île Bizard ne
devrait pas faire partie de la Communauté urbaine de Montréal.
Quant à Montréal, écoutez, ma position et mon opinion sont
très claires là-dessus. Que l'île Bizard en fasse partie ou
n'en fasse pas partie, ça n'enlève rien à la
métropole du Canada comme telle. Je ne crois pas qu'on enlève
rien et ça ne donne rien de plus.
Donc, je crois que l'île Bizard, cette fois-ci avec les nouvelles
structures de la Communauté urbaine de Montréal, devrait du moins
corriger, à mon point de vue, l'erreur qui a été faite en
1969, lors de sa création, du fait que le premier président se
devait de vivre à l'intérieur de cette communauté.
Merci.
Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre.
M. Léonard: Nous avons maintenant terminé. Je
voudrais vous remercier, M. le maire, d'être venu nous présenter
vos doléances en ce qui concerne la CUM.
Chacun des points que vous nous avez mentionnés va être
analysé très attentivement. Je sais qu'il y a eu des prises de
position de part et d'autres de cette table, à cette commission
parlementaire. Nous verrons à les analyser elles aussi.
Vous mentionnez toujours que le rattachement de l'île Bizard
à la communauté urbaine provient du fait qu'il y avait un premier
président de la communauté urbaine qui venait de là.
C'est, paraît-il, un fait. Est-ce vraiment cela, la justification? C'est
autre chose...
Une voix: Ce n'est pas exact. M. Saulnier habitait
Montréal...
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Léonard: Enfin, je pense que, au-delà de cela,
que ce soit exact ou pas, il reste qu'il faut en discuter de façon
objective et il faut prendre une décision sur des bases objectives.
Merci.
Le Président (M. Rodrigue): Je remercie les
représentants de la municipalité de la paroisse de
Saint-Raphaël-de-l'île-Bizard. La commission élue permanente
des affaires municipales suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 13)
(Reprise de la séance à 20 h 10)
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente des affaires municipales reprend
ses travaux. Son mandat est d'entendre les personnes ou organismes relativement
au projet de loi no
46, Loi modifiant la Loi de la Communauté urbaine de
Montréal.
Groupe écologique STOP
Nous entendrons à ce stade-ci le mémoire du groupe
écologique STOP qui nous sera présenté par M. Bruce
Walker. M. Walker, si vous voulez nous présenter votre
mémoire.
M. Walker (Bruce): Merci, M. le Président. Je m'appelle
Bruce Walker et je suis le directeur de la recherche de STOP. Incorporé
au Québec en septembre 1970 à titre d'organisme écologique
formé de citoyen, STOP oeuvre pour la protection de l'environnement et
la rationalisation de l'exploitation et de la consommation des ressources
naturelles. STOP est bien placé pour exprimer les inquiétudes des
citoyens désireux de combattre la pollution.
Dans les domaines de la pollution atmosphérique et de
l'épuration des eaux usées, la Communauté urbaine de
Montréal demeure l'intervenant gouvernemental premier vers lequel les
citoyens vont se tourner. Le projet de loi 46 apporte des amendements
importants au chapitre de la protection de l'environnement en
général. Cependant, STOP estime qu'il existe certaines lacunes
dans le projet de loi 46 et, en conséquence, soumet les propositions
suivantes.
Premièrement, en ce qui concerne l'accès à
l'information, depuis plusieurs années, STOP a essayé en vain
d'obtenir de la Communauté urbaine de Montréal les données
concernant certains pollueurs en particulier. Au cours de l'été
1980, la communauté urbaine a refusé d'accéder à
notre demande pour nous fournir des données concernant la
qualité, la quantité ou la concentration des contaminants
émis, dégagés, rejetés ou déposés
dans les égouts publics.
Dans sa lettre du 12 août 1980, M. Pierre Des Marais II, le
président du comité exécutif de la communauté
urbaine, répondait: "Dans le cas de votre demande pour l'obtention de
renseignements sur la nature des rejets industriels dans les égouts
publics par une ou plusieurs industries, il est impossible d'y accéder
sans compromettre en grande partie l'efficacité du travail du service de
l'assainissement des eaux dans ce domaine... Dans le contexte actuel, nous
croyons qu'une meilleure collaboration et une plus grande efficacité
pourront être obtenues de la majorité des industries, si
l'échange d'informations entre l'industrie et la communauté peut
se faire sans la crainte d'une publicité négative."
Les autorités de la communauté urbaine refusent donc de
nous fournir les chiffres concernant certains pollueurs spécifiques ou
encore nous devons nous contenter des chiffres qu'elles veulent bien nous
donner! Selon nous, c'est une situation intolérable; les citoyens
devraient avoir le droit de juger par eux-mêmes les changements affectant
la qualité de leur environnement, la provenance de la contamination et
le degré d'efficacité des mesures de contrôle.
C'est à la suite d'interventions et de représentations de
la nature de la présente que le ministère de l'Environnement du
Québec, en décembre 1978, a finalement garanti l'accès
à de telles informations en ajoutant l'article 118d de la Loi sur la
qualité de l'environnement, et je le cite: "118d. Toute personne a droit
d'obtenir du ministère de l'Environnement copie de tout renseignement
disponible concernant la quantité, la qualité ou la concentration
des contaminants émis, dégagés, rejetés ou
déposés par une source de contamination."
Malheureusement, cet article ne s'applique pas à la CUM. Il est
donc impensable que le nouveau projet de loi 46 ne contienne pas une
disposition semblable afin de permettre l'accès à l'information
au niveau de la communauté. Il existe donc maintenant un double standard
au Québec; les 4 000 000 de Québécois qui demeurent en
dehors de l'île de Montréal ont accès à ces
données au ministère de l'Environnement; par contre les 2 000 000
de résidents de la CUM n'ont pas accès à ces
données dans les classeurs du service de l'assainissement des eaux de la
Communauté urbaine de Montréal; c'est-à-dire qu'ils sont
actuellement des citoyens de deuxième classe. On propose donc d'ajouter
l'article suivant au projet de loi no 46, et je cite: "Toute personne a droit
d'obtenir de la Communauté urbaine de Montréal copie de tout
renseignement disponible concernant la quantité, la qualité ou la
concentration des contaminants émis, dégagés,
rejetés ou déposés par une source de contamination."
Deuxième point, la pollution de l'air par les véhicules
à moteur.
Les polluants principaux émis par les véhicules à
moteur sont le monoxyde de carbone (CO), les oxydes d'azote (NOx), les
hydrocarbures et le plomb (Pb). Les oxydes d'azote et les hydrocarbures sont
transformés en ozone (O3) dans la lumière du soleil, ce qu'on
appelle le "smog" autochimique. Les concentrations d'ozone à la CUM
devraient nous inquiéter.
Les émissions de nouveaux véhicules sont
réglementées par Transport Canada et Environnement Canada. En
septembre 1974, le ministre de l'Environnement du Québec -le Dr
Goldbloom - avait proposé un projet de règlement relatif aux
émissions des véhicules automobiles afin de réglementer
les émissions sur la route. Or ce projet de règlement n'a jamais
été adopté.
Concernant la section sur la lutte
contre la pollution de l'air, STOP appuie la plupart des amendements
proposés à l'article 168 de Loi de la Communauté urbaine
de Montréal. Cependant, étant donné que le problème
de la pollution de l'air par les véhicules moteurs est strictement
propre à la communauté urbaine, STOP estime que cette
dernière devrait se voir attribuer une juridiction plus complète
dans ce domaine.
Pour ces raisons, STOP propose les modifications suivantes à
l'article 50 du projet de loi 46. Article 50, paragraphe 9: "Limiter la
période de fonctionnement du moteur d'un véhicule
stationné; et interdire l'émission de fumées, provenant
d'un véhicule, dont l'opacité excède le degré
qu'elle fixe; et interdire l'émission d'émanations gazeuses,
provenant d'un véhicule, dont le taux ou la concentration excède
les niveaux qu'elle fixe."
D'autres points divers. Premier point. STOP appuie fortement la
création de cinq commissions permanentes. STOP attend avec impatience
l'occasion de suivre les délibérations de ces commissions et de
témoigner devant certaines d'entre elles. Cependant, étant
donné l'importance des sujets qui seront discutés lors de ces
commissions et les conséquences qu'ils auront sur la vie de 2 000 000 de
personnes, ces commissions ne prendront leur véritable sens que
lorsqu'il existera une transcription officielle "verbatim" de leurs
débats c'est-à-dire un journal des débats. Il va sans dire
que cette proposition vaut également pour les débats du conseil
de la communauté urbaine.
Deuxième point. L'ordre du jour de chaque réunion
régulière future du conseil et des commissions permanentes
devrait paraître en entier dans les journaux La Presse, Le Devoir et The
Gazette.
Troisième point. La Communauté urbaine de Montréal
devrait demander aux dirigeants de la ville de Montréal d'interdire
l'usage du tabac dans une des deux galeries situées dans la salle du
conseil et ouvertes au public.
Dernier point. Le coût des photocopies des documents en provenance
des archives de la Communauté urbaine de Montréal devrait
être réduit de 0,50 $ à 0,10 $ ou 0,15 $ la page.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, vous êtes
M....
M. Walker: Walker.
M. Léonard: Walker.
M. Walker: Je suis le directeur de la recherche.
M. Léonard: M. le directeur, je vous remercie d'être
venu ici et de vous être donné la peine d'y présenter un
mémoire. Je pense bien qu'il fait référence à la
question de l'accès à l'information qui est actuellement en
discussion, ou qui le sera bientôt, à l'Assemblée
nationale, dans une autre commission. Je pense qu'il y a des choses qui
pourront être réglées par ce projet de loi qui est une loi
générale qui va s'appliquer à tous les organismes publics,
donc, qui serait normalement de nature aussi à vous satisfaire, au moins
en bonne partie, dans ce que vous demandez.
J'ai bien noté que vous vouliez plus d'informations, donc, cela
pourra être résolu par le cadre général.
Maintenant, j'ai une question plus précise. Lorsque vous parlez
de la pollution de l'air, vous avez remarqué que, dans le projet de loi,
il y a déjà la permission, pour la Communauté urbaine de
Montréal, de réglementer l'émanation de fumée,
chose qui n'était pas possible jusqu'ici. En tout cas, les services de
police, la CUM nous avaient mentionné qu'ils ne pouvaient
contrôler l'émission de fumée.
Maintenant, vous proposez un changement et vous faites une distinction
entre fumée et émanation gazeuse. Remarquez que j'avais, dans le
temps, des notions de chimie qui s'estompent au fur et à mesure que les
années passent. Quelle distinction faites-vous entre fumée et
émanation gazeuse, pratiquement? Il me semble que c'est un peu la
même chose, quand on parle de pollution. Je suppose qu'il y a des
données très techniques et scientifiques qui font la distinction
entre les deux.
M. Walker: La fumée est visible, émise par un
camion, une voiture; ce sont normalement des particules solides. Ce ne sont pas
tellement des gaz.
M. Léonard: La fumée est visible, vous dites. La
fumée est visible, alors que les gaz ne le sont
généralement pas.
M. Walker: C'e3t cela. La plupart des gaz sont invisibles. La
fumée est composée de gaz, d'essence, d'huile à diesel non
brûlés. Ce sont plutôt des particules, des solides. Ils sont
très petits, évidemment, mais ils sont encore des solides. Ils ne
sont pas dans un état gazeux. Évidemment, c'est décrit
dans les deux premières phrases du paragraphe 9° de l'article 50,
mais il faut ajouter le droit de réglementer les émanations
gazeuses, parce que, au point de vue de la pollution de l'air réelle,
c'est plutôt les polluants gazeux qui vont créer des
problèmes pour la santé. Évidemment, les gens n'aiment pas
la fumée
d'un camion, d'une voiture, d'un autobus de la CTCUM ou autres. À
notre bureau, à STOP, nous recevons beaucoup de plaintes de tout type de
pollution, surtout de pollution de l'air, les camions, les autobus de la CTCUM,
etc.
Le service de l'assainissement de l'air de la Communauté urbaine
de Montréal a un système d'inspection, un système
d'application de son règlement assez efficace. C'est accessible aux
citoyens. Au point de vue d'enregistrer une plainte, c'est très facile.
Mais jusqu'à maintenant, la communauté urbaine n'a pas la
juridiction complète au niveau des voitures. La communauté
urbaine a la juridiction au niveau des sources fixes, les industries, les
incinérateurs et tout cela, mais pas au niveau des véhicules
automobiles.
M. Léonard: Mais c'est cela qu'on voulait rendre possible
par le projet de loi.
M. Walker: Jusqu'à un point, mais pas une juridiction
complète.
M. Léonard: Vous trouvez que cela ne répondait pas,
justement, à l'objectif qu'on poursuivait?
M. Walker: Non, on peut dire que "l'émission de
fumées, provenant d'un véhicule, dont l'opacité
excède le degré qu'elle fixe", cela veut dire juste les
émanations visibles et cela n'inclut pas les gaz invisibles.
M. Léonard: Je suis très heureux de savoir cela,
parce que, au fond, ce qu'on voulait solutionner, c'est justement le
contrôle de l'oxyde de carbone et alors on passe à
côté. C'est un cas de "visa le noir tua le blanc", je suppose?
Cela veut dire qu'en principe, pour autant que je suis concerné et que
je comprends les choses, nous sommes favorables à ce que vous demandez,
en tout cas à la page 5.
M. Walker: Merci beaucoup.
M. Léonard: Je veux vous poser une question. Hier, on nous
a dit à cette table que la qualité de l'air à
Montréal était très bonne, à tel point qu'il n'y
avait plus personne qui demandait des renseignements là-dessus ou des
statistiques en particulier. C'est M. le maire de Montréal qui a dit
cela. Qu'est-ce que vous pensez de cette déclaration?
M. Walker: Sans doute, depuis la création de la
communauté urbaine, on peut noter une amélioration importante en
ce qui concerne la qualité de l'air ambiant de plusieurs polluants dans
plusieurs quartiers de l'île de Montréal. Il existe encore des
problèmes: le bioxyde de soufre dans certains quartiers au centre-ville
et dans le secteur des raffineries; les particules en suspension dans le
quartier Saint-Michel, les fameuses carrières Miron. Nous avons suivi de
près le dossier du fameux incinérateur municipal des
carrières qui sont en train de faire des réparations au
coût de presque 8 000 000 $. Mais un polluant pas tellement bien connu,
c'est l'ozone. La communauté urbaine a commencé à prendre
des échantillonnages de l'ozone juste en 1977 et, depuis ce
temps-là, on peut noter des taux très élevés.
L'ozone, c'est le type de "smog" qu'on peut trouver à Los Angeles, le
"smog" photochimique, et cela cause des problèmes pour la santé.
Un des polluants qui causent l'ozone est l'oxyde d'azote qui vient surtout des
véhicules automobiles. Les oxydes d'azote causent aussi les pluies
acides. En ce qui concerne les pluies acides au Québec, elles sont
causées pour un tiers par les bioxydes de soufre et pour un tiers par
les oxydes d'azote. Les normes canadiennes sur les voitures neuves sont trois
fois moins strictes qu'aux États-Unis, mais évidemment c'est de
la juridiction fédérale. La réglementation des
émissions des véhicules sur la route, c'est une juridiction
provinciale du gouvernement du Québec. Évidemment, le
gouvernement du Québec n'a pas indiqué qu'il veut faire quelque
chose; il y a sept années le gouvernement a publié un projet de
règlement dans la Gazette officielle, mais ce ne fut jamais
adopté ni par les libéraux, ni par le Parti
québécois. Parce que c'est uniquement un problème au
niveau de la région de Montréal, il est logique de donner cette
juridiction à la Communauté urbaine de Montréal, qui a une
équipe efficace, compétente. Selon mes discussions avec les
fonctionnaires de ce service, je pense qu'ils sont prêts à assumer
un tel rôle.
M. Léonard: J'ai noté que vous étiez
d'accord avec les cinq commissions, mais j'ai pensé que vous
étiez surtout d'accord avec la commission de l'environnement.
M. Walker: Sans doute, oui. Seulement une remarque personnelle.
Depuis 1974, j'ai assisté à la plupart des réunions du
conseil de la Communauté urbaine de Montréal. Après huit
ans j'ai beaucoup de questions à poser à la commission permanente
de l'environnement, après huit ans j'ai déjà pris beaucoup
de notes, et ce serait une occasion pour les citoyens de s'impliquer
directement dans les programmes de dépollution de la
communauté.
M. Léonard: Au point 4 de la page 6 -dernière
question que je veux vous poser -vous dites que le coût de photocopie des
documents devrait être réduit de 0,50 $ la page à 0,10 $ ou
0,15 $. Je ne sais pas
exactement comment ils calculent leur coût; est-ce que le principe
là-dedans ça ne devrait pas être que celui qui demande une
page doit payer ce que cela coûte?
M. Walker: C'est très facile à expliquer. Je visite
les archives de la Communauté urbaine de Montréal au complexe
Desjardins quatre ou cinq fois par année, et je lis les
résolutions du comité exécutif et tout cela. Si je
décide de demander une ou dix photocopies, selon le secrétaire
général, M. Duhamel, ça coûte 0,50 $ la page, pour
moi, pour un journaliste ou n'importe qui.
M. Léonard: Ce que...
M. Walker: Avis de mention...
M. Léonard: Ce que je veux dire c'est que, si l'usager ou
celui qui le demande paie le coût à peu près exact de ce
qui est encouru par l'organisme, il y aura probablement moins de
réticence à laisser tous ces documents, tous ces dossiers
ouverts; à ce moment-là, c'est plus facile.
M. Walker: Si les 2 000 000 de résidents de la
Communauté urbaine de Montréal obtiennent les mêmes droits
que les autres Québécois en ce qui concerne l'accès aux
données environnementales, le coût des photocopies est
important.
Juste une remarque au sujet de l'accès à l'information.
Certains parmi vous savent que ce n'est pas la première fois que STOP
fait une intervention dans le domaine de l'accès à l'information.
J'ai justement témoigné devant la commission permanente des
communications en septembre passé au sujet du rapport Paré. En
principe, nous n'avons aucune objection à un tel droit à
l'information dans une loi-cadre telle que proposée par le rapport
Paré. Il y a peut-être certains dangers. Il faut mentionner qu'il
arrive assez souvent qu'une telle loi-cadre soit très vague, tandis que
la plupart des documents sont ouverts, sauf une dizaine ou une vingtaine
d'exceptions. C'est vraiment important que l'on ait accès aux
données environnementales; on est très spécifique.
Je voudrais aussi citer une lettre que nous avons reçue
après avoir écrit notre mémoire. Elle provient de M.
Marcel Léger, le ministre de l'Environnement, en date du 10
février 1982. En voici une partie: "II me fait plaisir de vous informer
que nous avons l'intention d'apporter une réponse à la question
de l'accès du public à l'information environnementale de la
Communauté urbaine de Montréal par l'entremise d'un projet de loi
général sur l'accès du public à l'information que
mon collègue des Communications, M. Jean-François Bertrand, a
l'intention de déposer à l'Assemblée nationale dans les
prochaines semaines." (20 h 30)
M. Léonard: Cela veut dire que cela s'en vient.
M. Walker: Oui. On l'attend avec impatience.
M. Léonard: Oui, je comprends. Je vous remercie
beaucoup.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Nous vous saluons,
M. Walker. Nous apprécions sûrement votre participation à
cette commission parlementaire. Sans répéter les questions du
ministre des Affaires municipales, plus particulièrement la modification
que vous souhaiteriez à l'article 50 du projet de loi, qui est une
addition à la modification déjà apportée,
c'est-à-dire l'interdiction d'émissions ou d'émanations
gazeuses provenant d'un véhicule, je conviens plus facilement que
l'émission de fumées, c'est quand même plus facile à
localiser ou à voir... Voici ma question. De quelle façon peut-on
établir une certaine surveillance sur certains véhicules qui
pourraient avoir des émanations gazeuses alors que ce n'est pas visible?
Il y a des émanations gazeuses qui sont inodores.
M. Léonard: Puis-je donner une explication
là-dessus, si vous me permettez, M. le député?
M. Rocheleau: Sûrement, M. le ministre.
M. Léonard: À l'heure actuelle, la
réglementation fait que les policiers de la CUM, lorsqu'ils
arrêtaient une voiture pour une raison ou pour une autre, qu'ils
voulaient vérifier si le système antipollution était
branché, n'avaient pas ce qu'il fallait, du point de vue
réglementaire, pour sévir ou émettre une contravention.
C'est cela qu'on voulait corriger. Ce que monsieur vient de nous dire, c'est
que le texte n'était pas suffisamment organisé, complet pour
vraiment régler la question. Puisque ce texte la réglerait, nous
allons...
M. Rocheleau: S'il n'y a pas plus de problème que cela, M.
le Président, nous allons sûrement l'appuyer.
Par contre, à la page 6, simplement pour apporter,
peut-être, une précision concernant le coût des photocopies,
les modifications ont été apportées par le gouvernement
dans un projet de toi omnibus, il n'y a pas tellement longtemps. Je ne sais pas
si c'était pour bonifier certaines lois dans les municipalités,
il n'en demeure pas
moins que c'est une exigence du gouvernement que les
municipalités doivent exiger un coût de 0,50 $ la copie.
Par contre, à titre d'information, M. le Président,
plusieurs municipalités aujourd'hui mettent à la disposition des
citoyens, dans les bibliothèques municipales, les procès-verbaux,
et les citoyens peuvent les consulter, les emprunter dans les
bibliothèques municipales. Il y aurait peut-être une demande qui
pourrait se faire dans ce sens, si ce n'est pas actuellement fait à la
Communauté urbaine de Montréal.
D'autre part, il y a aussi des associations ou organismes à but
non lucratif qui peuvent demander d'être abonnés, dans les
municipalités, afin d'obtenir les procès-verbaux des
assemblées des municipalités et, si c'est un organisme reconnu,
c'est gratuit. Je ne sais pas si, à la Communauté urbaine de
Montréal, c'est la même chose.
M. Walker: Pas du tout. Premièrement, quant à
l'accès à l'ordre du jour, etc., les résolutions du
comité exécutif, les procès-verbaux du conseil, etc., tout
le monde peut les consulter, dans les archives de la Communauté urbaine
de Montréal, gratuitement. Il n'y a là aucun problème,
mais il n'y a qu'un seul endroit où c'est disponible, c'est
évidemment au complexe Desjardins.
STOP a un abonnement à l'ordre du jour de chaque réunion
du conseil de la communauté urbaine. Cela coûte 2 $ l'exemplaire.
Nous recevons une facture dans chaque enveloppe. Assez souvent, nous recevons
l'enveloppe après la réunion. Il y a six réunions du
conseil par année, sauf les réunions pour les discussions sur le
budget, le troisième mercredi du mois. L'ordre du jour est envoyé
normalement le vendredi ou même le lundi avant la réunion du
mercredi. Avec l'excellent service de Postes Canada, ça arrive assez
souvent à notre bureau le jeudi ou le vendredi après.
M. Rocheleau: Mais, en somme, il existe quand même
certaines contraintes, M. le Président. C'est que dans certaines
municipalités ça coûtait énormément cher en
photocopies annuellement. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles
le gouvernement a statué sur des prix pour toutes les
municipalités du Québec, parce que même dans l'entreprise
privée aujourd'hui ça coûte plus cher que ça pour
obtenir une photocopie.
M. Walker: II faut faire la distribution entre la documentation
facile à trouver pour un commis et un autre type de documentation dans
le cas où un fonctionnaire doit prendre son temps afin de trouver les
réponses à des questions, les vrais chiffres, et faire des
recherches comme telles. Le type de document que je demande aux archives de la
Communauté urbaine de Montréal, ça prend au maximum dix
à quinze secondes pour le commis à le trouver.
M. Rocheleau: En tout cas, s'il y a des moyens quelconques...
C'est parce qu'actuellement c'est prescrit dans la loi. Ce sont des taux qui
sont établis pour l'ensemble des municipalités du
Québec.
M. Caron: M. le Président, il n'y a pas de mal, je pense,
à ce que les gens aient à payer un certain montant. Autrement,
les municipalités deviendraient une imprimerie pour tout le monde. Je
pense que c'est normal qu'il y ait un montant à payer. Je n'ai rien
contre ça en tant que maire. Je pense que c'est tout à fait
normal que les documents sortent. Qu'on les donne je n'ai rien contre
ça; la communauté urbaine devrait en donner plus, je suis bien
d'accord, mais, d'un autre côté, il faut aussi qu'il y ait un
contrôle de cela.
Fraternité des policiers de la CUM
Le Président (M. Rodrigue): Alors, je remercie le
représentant du groupe écologique STOP et j'invite maintenant les
représentants de la Fraternité des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal à prendre place devant nous
et à nous présenter leur mémoire. Si mes informations sont
bonnes, le mémoire devrait nous être présenté par M.
Claude Fleurent, le président de la fraternité. C'est bien
ça?
M. Fleurent (Claude): C'est exact.
Le Président (M. Rodrigue): M. Fleurent, si vous voulez
d'abord nous présenter les personnes qui vous accompagnent, puis nous
présenter un résumé de votre mémoire.
M. Fleurent: M. le Président, M. le ministre, mesdames et
messieurs de la commission, à ma droite, je voudrais vous
présenter M. Pierre Lenoir qui est vice-président, M. Gilbert
Côté qui est le directeur exécutif et Réal
Déry qui est le secrétaire de la Fraternité des policiers
de la Communauté urbaine de Montréal.
La fraternité se sent vraiment privilégiée de
passer à l'heure du dessert, à une heure tardive, après
les trois jours où nous avons entendu des doléances, où
nous avons entendu plusieurs intervenants. La communauté urbaine traite
ses policiers comme des gens de banlieue. C'est donc qu'on se sent très
minoritaires, quand on regarde les intervenants et les gens qui veulent
écouter ce qui se passe au sein du plus petit corps de police au Canada,
dont la
criminalité va rentrer dans le livre de Guinness parce que c'est
aberrant de voir ce qui se passe. J'ai entendu dire, durant les trois derniers
jours ici, que 80% des budgets de la Communauté urbaine de
Montréal étaient affectés au transport, ainsi qu'au
service de police. Pourtant, ni le chef de l'Opposition, ni M. Des Marais, ni
M. Drapeau, ni M. Lamarre, notre grand patron, n'ont attendu avec plus de
patience pour entendre ces chers petits policiers de la CUM.
Maintenant, je me suis fait dire que le mémoire qui a
été présenté en deuxième rang, ici à
la commission parlementaire, aurait été lu. J'imagine que vous
avez eu le temps de le lire; je vais en faire un résumé, comme
vous me l'avez demandé, par devoir professionnel parce que nous
représentons 5000 membres, 5000 policiers du territoire de la CUM.
Le résumé est comme ceci: l'été dernier, le
président de la Fraternité des policiers de la Communauté
urbaine de Montréal, Gilles Masse, a démissionné avec
fracas. On peut se souvenir des raisons pour lesquelles M. Masse a
démissionné. Ces raisons ont été lues dans le livre
noir qui a été présenté au premier ministre de la
province. Dans ce livre noir, il y avait des incohérences, des
imbroglios et il était impossible de continuer à évoluer
et à travailler dans cette optique. Suite au livre noir, nous avons fait
des suggestions et il y a eu le projet de loi no 46 sur lequel nous nous sommes
penchés. Nous avons fait des interventions auprès du
ministère de la Justice et de différentes personnes pour produire
ce travail. Notre participation est une participation policière
syndicale et elle n'est aucunement politique.
J'ai oublié de mentionner que nous trouvons extrêmement
surprenant de voir qu'il n'y a aucun policier du territoire de la CUM, de la
direction du service qui est ici. Pourtant ce sont eux qui ont
l'expérience de vivre avec la Communauté urbaine de
Montréal en ce qui concerne la sécurité publique.
Nous sommes obligés encore une fois de porter deux chapeaux parce
qu'en premier lieu nous sommes des policiers et, en second lieu, nous sommes
des syndicalistes. D'après le Code du travail, nous représentons
ces policiers. Nous avons fait des suggestions dans le mémoire que vous
avez lu et le résumé de ceci est sur trois volets.
Nous vous avons suggéré qu'il y ait une unité de
direction au sein du service. Nous avons vécu des problèmes dans
le passé avec le directeur, qui a été obligé
d'appartenir au palier des négociations et qui a perdu en quelque sorte
son leadership auprès des policiers en voulant défendre la partie
patronale, ce qui est nécessaire quand tu négocies. Nous
prétendons que le directeur du service ne devrait pas faire partie des
négociations quand la communauté négocie avec ses
policiers ainsi que les membres de la commission de sécurité, vu
que cette commission sera là justement comme consultants. Nous voyons
mal que ces gens soient aux tables de négociation.
À la fin de notre mémoire, nous suggérons
l'institutionnalisation de la consultation dans le comité de
sécurité que vous avez suggéré dans la loi. Nous
prétendons qu'il devrait y avoir des personnes du service de police, des
personnes-ressources, ainsi que des personnes nommées par la
Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de
Montréal, non des élus de la fraternité. Ces personnes
seraient sanctionnées par le gouvernement du Québec; elles sont
des spécialistes de la sécurité et on aurait ainsi une
meilleure représentation auprès de la population concernant la
sécurité publique.
C'est en quelque sorte le résumé de ces 30 pages de
mémoire. Si vous avez des questions, il serait plus rentable de
répondre aux questions vu que vous avez en main exactement ce que nous
pensons.
M. Léonard: M. le président, vous dites aux pages 7
et 8 que le projet de loi no 46 fera en quelque sorte tomber les masques. Le
conseil de sécurité publique disparaît et personne ne s'en
plaindra. Le pouvoir est remis aux mains des politiciens ou des élus
qui, de toute façon, étaient demeurés responsables
vis-à-vis des citoyens tout en voyant échapper leur
contrôle d'un service essentiel et coûteux. Je pense que, dans
l'ensemble, vous êtes d'accord avec les recommandations, c'est
mentionné à certains endroits.
Il y a des problèmes dans lesquels je ne veux pas entrer puisque
ça relève aussi du ministre de la Justice de trancher
là-dedans. Il reste que vous êtes d'accord pour que les
responsabilités reviennent aux élus, fondamentalement.
M. Fleurent: Il y a une suggestion que nous avions faite. Il y a
des patrons multicéphales comme c'est inscrit dans le mémoire. On
va voir le directeur du service qui, en l'occurrence, est nommé par
Québec dans le contexte actuel et qui nous dit qu'il est
l'administrateur du service; on se réfère au conseil de
sécurité, lequel dit qu'il a tout simplement un pouvoir
consultatif dans la loi et non un pouvoir décisionnel. On nous transmet
au conseil de la communauté urbaine et finalement, cela a fini avec le
trésorier de la communauté urbaine. C'est ce qu'on dit aussi,
dans le mémoire. (20 h 45)
Nous avions demandé dans le livre noir d'avoir un patron, lequel
serait nommé par qui, on est indifférent à cela, on ne
veut pas
faire de politique comme j'ai dit tantôt. Qu'il soit nommé
par Québec ou par Montréal, on ne veut pas faire
d'ingérence dans ces discussions. Nous demandions un patron avec qui
dialoguer, avec qui parler et avec qui régler les problèmes.
Actuellement, il n'y en a pas. C'est la raison pour laquelle nous avons
apporté un mémoire et des suggestions concernant le projet de loi
no 46.
M. Léonard: Je pense que c'était une des grandes
revendications aussi des gens de la CUM et d'un peu tout le monde. Au moment
d'un projet d'amendement ou d'un projet de loi privé qu'il y avait eu
à la CUM, les gens, tant de Montréal que de la banlieue,
étaient tombés d'accord sur un certain nombre de modifications
importantes dans ce domaine de la sécurité.
Il y a une question qui se pose. Je sais que même par rapport
à la rédaction actuelle du projet de loi no 46, nous avons
reçu des représentations et peut-être, la question la plus
difficile à trancher est celle de l'unification des services et la
distinction entre les opérations de nature policière et celles de
nature strictement administrative.
Est-ce que vous avez une idée, est-ce que vous pourriez nous
renseigner là-dessus? Quelle est la distinction entre des
opérations de nature policière et des opérations de nature
strictement administrative?
Un service de paie ou un service des achats, à notre avis, nous
apparaissent comme étant des opérations de nature administrative;
mais parait-il qu'il y a certains cas où cela a des implications sur les
opérations policières?
M. Fleurent: Si vous avez remarqué, parmi tous les
intervenants qui sont venus ici, personne n'a parlé de la façon
dont on plantait des arbres ou on creusait dans les rues pour changer des
tuyaux; mais tout le monde a parlé du service de police. Tout le monde
connaît comment faire fonctionner la police. C'est très rentable
politiquement et probablement sur le plan municipal. Pas plus loin.
Quand on parle de choses sur lesquelles on est moins renseigné,
en administration policière, je pense qu'on est en voie de se tromper.
C'est la raison pour laquelle on suggérait des gens qui connaissent le
métier autant de la fraternité que du service de police qui
seraient à votre comité du conseil de sécurité
publique. C'est sûr qu'il y a de l'administration, il y a des coûts
à la police et c'est sûr que cela coûte très cher la
police, on en est bien conscient. Mais, il a des minimums et ils doivent
être respectés parce que si on ne paie pas à une place, on
paie à l'autre. On a vu qu'il y a des coupures de budget au service de
police mais s'il y avait des spécialistes de la sécurité
publique, ils diraient peut-être aux gens:
Vous allez couper moins au service parce que vous allez le payer en
prime d'assurance. Ce sont des choses que les citoyens doivent payer de toute
façon.
M. Léonard: Oui mais... Allez-y, je vous en prie.
M. Lenoir (Pierre): Si vous permettez, lorsqu'on parle
d'orientation ou de gestion comme telle, l'exemple que les gens ont
donné avant nous, c'est lorsqu'on dit: Le service de la paie, du
contrôle, de la gestion, cela est sur le plan administratif. Sur le plan
des opérations policières comme telles, c'est au jour le jour.
Mais où le problème se pose, à titre d'exemple, c'est
lorsqu'on doit donner l'orientation au service. Doit-on avoir un service de
police à la CUM construit d'une façon centralisée ou
décentralisée?
On a connu récemment, il y a quelques années, une
décentralisation sur le territoire de la CUM. À la suite
d'études qui ont été faites chez des villes
américaines, entre autres, à Détroit, à Los Angeles
et ainsi de suite, lorsque le service de police de la communauté a
décidé de décentraliser notre corps policier sur le
territoire de la CUM, cette décision qui a été prise par
les représentants du service de police allait à l'encontre de
toutes les études américaines qui avaient été
faites auparavant.
Alors, à ce moment, comment les hommes élus peuvent-ils
intervenir dans un domaine policier comme tel et dire au service:
Écoutez, les études que nous avons analysées, les
recherches que vous avez faites auprès des villes américaines
démontrent le contraire de ce que vous faites présentement. C'est
alors que cela devient plus délicat pour les élus de donner des
directives au directeur du service de la police de la communauté. C'est
là que ça commence à dire: qui va faire quoi et comment
cela va-t-il se passer exactement? C'est de là que le problème
vient.
M. Léonard: Je comprends et je crois que vous avez raison
sur ce plan. Cependant, à la CUM, à l'heure actuelle, il y aurait
deux services de paie, il y aurait un service des achats à la police et
un service des achats à la CUM. Les revendications que j'ai entendues
là-dessus, c'était à l'effet d'utiliser le même
service de paie, même en ce qui concerne la police. Je ne pense pas que
les élus réclament la direction ou le pouvoir de planifier des
opérations policières. Tout le monde est bien conscient que le
service de la police est un service qui a certaines caractéristiques
particulières. C'est d'ailleurs ce qui explique que dans le texte du
projet de loi, il est proposé que le directeur de la police
relève de l'exécutif via le président, et non pas du
directeur
général, ce qui est déjà une grosse
distinction par rapport aux autres services de la CUM.
M. Fleurent: On a fait une suggestion dans le sens qu'il devrait
justement se rapporter directement aux élus. Quand vous parlez du
côté administratif, de technicités, comme le service de la
paie et ces choses-là, on n'a pas objection, bien entendu, pour sauver
des coûts. Il y a une distinction à faire quand on parle du bureau
du personnel. Il devrait y avoir des policiers, et je pense qu'il n'y a pas de
problème dans ce sens-là, cela va prendre du personnel. Vous
savez qu'en relations humaines ou au bureau du personnel, il y a des policiers
et des gardes-malades. On ne fait pas la même sorte de travail, cela
prend des gens qui connaissent cela. Il y a toutes sortes de gens qui
travaillent au bureau du personnel de la CUM.
Quant au sens administratif des orientations, vous disiez qu'il n'y a
pas de politiciens qui veulent donner les orientations d'un service de police.
J'ai des grands doutes. Si on fait l'historique, c'est dans les années
soixante que Way et Gobiac ont été engagés par des
politiciens. Quand on met des factionnaires à Montréal, ce sont
des politiciens qui demandent des hommes à pied et on se faire dire,
encore ici, en coulisse, depuis trois jours, que c'est très bon, des
factionnaires. On s'est même fait dire qu'un factionnaire à pied,
c'était mieux que dix hommes sans radio. C'est là de
l'incompétence flagrante de gens qui ne connaissent pas cela. Et la
preuve de cela -quand des politiciens veulent mettre des factionnaires -
regardez le taux de criminalité et à quel coût.
M. Léonard: Puisque vous en parlez, du taux de
criminalité...
M. Fleurent: C'est un chapeau du patron, mais ils ne sont pas
ici, je vais vous répondre, cela me fait plaisir.
M. Léonard: Ils sont ici...
M. Fleurent: Les patrons, pas d'ici. On est un syndicat, mais je
vais vous répondre, parce qu'on connaît notre métier.
M. Léonard: Quand vous disiez que les patrons ne sont pas
ici, je voyais M. Des Marais, M...
M. Fleurent: M. Corbeil parle de vrais patrons. Je ne les vois
pas, les vrais patrons, il l'a marqué dans le livre noir.
M. Léonard: Je reviens quand même. Vous dites
qu'à Montréal, il y a un taux de criminalité à la
CUM qui va figurer bientôt dans Guinness. Expliquez-vous un peu
là-dessus. Vous dites que c'est à cause des structures.
J'aimerais que vous vous expliquiez davantage. Est-ce qu'on peut dire que c'est
juste à cause des structures ou des Montréalais ou quoi?
M. Fleurent: On est porté à comparer
Montréal et Toronto, je vais en profiter. À Montréal, il y
a environ 600 institutions financières: des banques et des caisses
populaires sur le territoire, à Toronto on il y a 800 environ. Des vols
qualifiés à l'intérieur de la communauté urbaine,
on en compte plus de 9000 à Montréal contre 2000 à
Toronto. Mais si on parle d'institutions financières, il y a 64 cas de
vols à main armée dans les institutions financières contre
900 sur notre territoire. Quand on compare 600 banques à 800, les 800
ont 64 vols à main armée et nous, on en a 900. Alors, c'est un
syndicat qui crie au scandale, parce qu'on représente des policiers qui
sont capables de faire "la job", mais il y a certainement des politiciens qui
se mêlent des choses qu'ils ne connaissent pas. On n'endurerait pas cela
sur notre territoire, parce qu'il y a des victimes. Je n'ai pas entendu parler
de victime ici, c'est bien sûr qu'on est sur le projet de loi no 46, dans
les refontes, les querelles. On a vécu des querelles encore pendant
trois jours, on le voit, et nous, à la base, comme policiers, on a une
déformation professionnelle quand on voit des querelles; on est entre
l'écorce et l'arbre lorsqu'on veut essayer de les empêcher sur le
territoire.
M. Léonard: Disons que je vais m'assimiler aux politiciens
et je vais vous dire ceci: Vous leur jetez la faute très facilement,
vous dites: Ce sont les politiciens, c'est la faute aux politiciens. Alors,
j'aimerais cela que vous soyez un petit peu plus précis.
M. Fleurent: Je leur donne le résultat -ce n'est pas de
leur faute - si on veut faire de la politique. J'en suis un politicien; je suis
élu, moi aussi, en passant. Ce n'est sûrement pas de la même
envergure.
M. Lenoir: Une chose qu'on peut dire, c'est qu'on dit que la
police nous coûte cher. On constate aussi qu'il y a de la
criminalité d'une façon effarante sur le territoire de la CUM.
Mais les effectifs du service de police de la communauté sont
établis par les politiciens, justement; ce sont ces gens-là qui
les établissent. Cette année, dans le budget 1982 de la
communauté, on dit qu'il devra y avoir 4618 policiers sur le territoire
de la CUM. Comment peut-on, avec la criminalité que l'on connaît
sur le territoire de la CUM, diminuer nos effectifs, alors que vous êtes
certainement au courant que les maires de
banlieue disent: II n'y a pas assez de policiers, il en manque dans nos
villes? On crée des polices parallèles, il y a une absence de
police et puis on réduit les effectifs. Lors de l'intégration les
forces policières en 1972, on était 5400. Il manque effectivement
sur le territoire de la CUM quelque 800 policiers.
M. Fleurent: Je vais vous donner un exemple flagrant. Lorsque le
conseil de sécurité a fait des sondages auprès du public
montréalais de la communauté urbaine pour savoir quelle sorte de
police on voulait - ils ont fait des espèces de commissions
parlementaires sur le territoire de la CUM -les gens ont dit qu'ils
désiraient avoir plus sur la police jeunesse et puis des factionnaires.
Mais on s'est aperçu, politiquement parlant, que les factionnaires,
c'était beaucoup plus rentables. On en a entendu parler dans tous les
médias. Pourtant, à police jeunesse, à cause de coupures
budgétaires, on en a coupé sept dans les prévisions de
1982.
Je vais vous donner un autre exemple dans les coupures
budgétaires. On parle des ambulances. Je ne peux pas me servir de ce
podium-là pour parler des ambulances, mais, comme on dépense des
sommes pour la publicité dans n'importe quelle organisation, on en
dépense aujourd'hui pour revaloriser le service de police de la CUM dans
les différents médias. Le meilleur médium que nous
connaissions à ce jour, ce sont les ambulances. Je m'explique. Lorsqu'on
a confiance à un service de police et qu'on aime ses policiers parce
qu'ils nous rendent un bon service avec les ambulances, si on a cette confiance
envers les gens qu'on représente au prix qu'on les paie, on va les
appeler pour leur donner des informations sur la criminalité, on va leur
faire confiance dans tous leurs devoirs au complet. Si on coupe des ambulances
et qu'on met des motos en plus, je ne pense pas que c'est bien rentable dans le
sens que les gens vont haïr plus la police et ça, ce sont des
gestes que des politiciens ont posés. Ce sont des décisions
strictement politiques.
M. Léonard: Je veux bien, mais je vois M. Des Marais ici,
M. Corbeil et il y a des maires, des gens de la ville de Montréal aussi.
Eux, ils prennent la décision de taxer et ils font des comparaisons.
Tout à l'heure, on est venu un peu en faire, par exemple, par rapport
à Toronto. Je ne veux pas entrer dans le fond du sujet là-dessus;
je sais qu'il y aurait de très grandes, de très longues
discussions sur toute cette question. Mais je reviens au point, il me semble,
qui nous préoccupe le plus; une question de structures. La demande qu'on
me fait, c'est qu'on fasse l'unification des services administratifs, qu'il y
ait un service de paie, qu'il y ait un service des achat;; unique à la
CUM et que, lorsque le service de police a besoin, je ne sais pas, moi,
d'uniformes ou bien de chaussures, on passe par le service des achats
régulier de façon à éviter la duplication. Vous
êtes d'accord là-dessus. La distinction entre opération
policière et opération administrative, de façon
générale, elle se fait, sauf qu'il y a des zones grises. Est-ce
que vous pouvez identifier assez précisément quelles sont ces
zones grises? (21 heures)
M. Fleurent: Je vais vous donner un exemple flagrant qui est
d'actualité. Nous avons un rapport de la Commission de police du
Québec concernant les vestes pare-balles, les vestes antiballes. On sait
qu'en Ontario le gouvernement ontarien a voté des budgets pour acheter
des vestes antiballes à tous les policiers provinciaux. On donnait une
subvention de 50% à toutes les municipalités qui voulaient
acheter des vestes pare-balles à ses policiers. Dans la recommandation
de la Commission de police du Québec, on peut y lire, avec leurs
enquêtes, qu'ils ont acheté 55 000 vestes pare-balles dans
l'État de New York. Tous les policiers en ont. Dans les compressions
budgétaires que nous connaissons - nous sommes des citoyens, en passant,
des contribuables, nous aussi les policiers, on comprend bien la situation
-nous avons suggéré dans les recommandations de la commission de
police qu'au lieu d'acheter - des vestes pare-balles à chaque policier,
que certains n'utiliseront pas, on place des vestes pare-balles à
l'intérieur des autos-radios. Donc, au lieu d'avoir 4800 vestes
pare-balles, cela en prend environ 1200. On a essayé d'avoir ces vestes
pare-balles, avec autre chose. On va au service. Le service dit: On n'a pas
d'argent. On va au conseil de sécurité. Il nous dit: Ce n'est pas
le temps. On reçoit des lettres: C'est à l'intérieur des
conventions. Cela n'a rien à voir avec les conventions collectives. Cela
fait deux ans et demi que nous attendons cela. Nous sommes dans une impasse.
C'est la raison pour laquelle, si nous avons un patron, un service d'achat, des
budgets, on va savoir comment régler ces problèmes. C'est un
problème actuellement. M. Lamarre est très ouvert, mais c'est par
la bonne foi d'un individu, comme on disait tantôt. Vous êtes ici
pour essayer de changer des structures. C'est bien certain que, si les hommes
étaient tous de bonne foi, on ne serait peut-être pas ici, mais
cela prend des structures et nous sommes bien d'accord avec cela.
M. Côté (Gilbert): Les opérations
policières et l'aspect administratif, je pense que cela ne se partage
pas aussi bien qu'on puisse le penser dans un premier temps. Nous avons des
contractions budgétaires cette année; cela a été la
même chose l'an passé,
on a décidé de couper une centaine de véhicules sur
la flotte automobile des policiers de la CUM; ils en ont coupé 100 l'an
passé, ils en ont coupé encore cette année. C'est une
mesure administrative probablement, mais cela affecte de façon
très importante les opérations policières. Il y a des
policiers-enquêteurs, il y a des sergents détectives entre autres
qui sont obligés de passer la journée dans le bureau à
attendre d'avoir une automobile. Cela affecte les opérations
policières. Quand on coupe les effectifs, cela affecte aussi les
opérations policières. Ce sont des mesures administratives. On va
décider - on en a parlé tantôt - de placer 150
factionnaires, qui sont des policiers qui se promènent à pied sur
la rue. La population prétend se sentir mieux protégée
avec des policiers à pied, mais on sait que, de façon
professionnelle, ce n'est pas aussi efficace que d'autres méthodes.
C'est la connaissance policière. Ce sont des décisions qu'on
pourrait peut-être qualifier d'administratives ou de politiques. Cela
affecte grandement les opérations et toute la question de la
décentralisation, qui est un problème qui dure chez nous depuis
deux ans pratiquement. C'est une décision administrative, c'est un
changement de structure, c'est une décision qui a été
prise par des autorités et policières et politiques et qui fait
qu'au niveau des opérations policières cela ne fonctionne pas. Je
pense que ce n'est pas une question qu'on peut départager facilement, et
dire: Les hommes politiques décident des questions administratives, le
chef de police, des questions opérationnelles.
M. Léonard: II me semble que ce sont des choses qui ont
déjà été réglées dans d'autres
villes. Je ne suis pas allé à Toronto voir comment cela
fonctionne ou à Baltimore. Ils doivent avoir réglé cette
question. Cela doit avoir été réglé quelque part.
On ne doit pas tellement innover dans cette matière.
M. Côté: Comme on a dit tantôt, sur la
question de la décentralisation, il y a des études qui ont
été faites partout. Cela n'a pas fonctionné ailleurs. Ils
l'ont essayé et ils sont revenus à une police plus
centralisée. Chez nous, à la CUM, au lieu de faire comme il avait
été fait ailleurs, au lieu de prendre avantage des
expériences vécues ailleurs, on a voulu essayer quand même.
Au niveau de la patrouille à pied, on a cité récemment des
expériences américaines où les factionnaires
sécurisent les gens et font que la population se sent
protégée en voyant un policier à pied en avant de leur
demeure; mais, au niveau de la protection réelle, de
l'efficacité, de la diminution de la criminalité, cela n'a pas
d'effet. Ce sont deux concepts différents. Pour nous, c'est tellement
évident qu'on ne comprend pas qu'au niveau politique, au niveau de la
direction policière on n'accepte pas de prendre avantage de ces
expériences vécues ailleurs.
M. Fleurent: M. Caron disait lui-même cette semaine
qu'à l'intérieur de sa ville il y avait une auto-radio qui
patrouillait Verdun et une partie de LaSalle. La raison est très simple,
c'est que, quand on met des factionnaires, ou qu'on n'a pas l'effectif que nous
avions auparavant, on est obligé de les prendre quelque part ces
policiers, on est obligé d'enlever des autos-radios. C'est la raison
pour laquelle il y avait seulement une auto-radio dans Verdun.
L'été dernier, on a coupé de quarante à cinquante
véhicules de police à l'intérieur de la communauté
urbaine. Ce sont des mesures administratives et des décisions
politiques, parce que ce sont des politiciens qui, à l'aide de sondages,
ont demandé à la population ce qu'elle voulait. On a dit: On veut
avoir des factionnaires; on se sent plus sécure à
l'intérieur de nos villes et dans nos rues. C'est ce qu'on a
donné. On voit les résultats que cela apporte. Quand tu coupes
cinquante autos, je suis bien certain que, si la population savait ce que
c'était en réalité, elle n'aurait certainement pas
opté pour des factionnaires.
M. Léonard: Une dernière question sur les
commissions. Nous avons inscrit au projet de loi une commission sur la
sécurité et nous lui demandons de siéger publiquement au
moins deux fois par année. Par ailleurs, ses membres sont des
élus. Je crois qu'il ne serait pas normal d'en changer. Même si
vous demandez une participation, je suppose que c'est plutôt à
titre de personne ressource, ce n'est pas comme membre d'office de la
commission.
M. Fleurent: Ce sont des personnes-ressources.
M. Léonard: Là-dessus, cela peut très bien
se faire, parce que j'imagine bien que cette commission, à un moment
donné, va demander aux policiers, ou à leurs
représentants, ou au directeur de la police de venir et de faire des
rapports, établir leurs besoins, etc., discuter même leur budget
éventuellement.
On s'entend là-dessus, mais je ne pense pas que cela pourrait
être à titre de membre d'une commission, parce que le principe,
c'est une commission formée d'élus.
Je vous remercie beaucoup; j'y reviendrai peut-être tout à
l'heure.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président.
Je tiens à souhaiter la bienvenue à la Fraternité
des policiers de la CUM. Je voudrais, pour le bénéfice de cette
commission, corriger M. Fleurent, à la suite d'une certaine affirmation
qu'il a faite en commençant. Je ne peux répondre pour les membres
de la Communauté urbaine de Montréal, ni pour les responsables de
la ville de Montréal qui ne sont peut-être pas ici. Je remarque,
par contre, que le président de la communauté, le
président des représentants des maires de banlieue et plusieurs
maires sont ici.
Une voix: Les représentants de Montréal aussi.
M. Rocheleau: Oui, les représentants de Montréal
aussi sont ici. Par contre, vous avez mentionné, dans ce groupe, que M.
Ryan, le chef de l'Opposition n'était pas ici. Je voudrais vous dire, M.
Fleurent, que le chef de l'Opposition a assisté, durant les trois jours,
à cette commission parlementaire. Le chef de l'Opposition est le pendant
du premier ministre du Québec, M. René Lévesque, que je
n'ai pas vu ici à cette commission parlementaire au cours des trois
dernières journées. Si on avait coordonné davantage nos
travaux à cette commission, on n'aurait pas eu à passer trois
journées complètes, jusqu'à près de minuit,
à entendre les intervenants et à les faire patienter toute la
journée dans cette salle afin de nous permettre les questions
nécessaires pour éclairer cette commission. On regrette cet
aspect.
De plus, M. Fleurent, le député de Verdun est plus
particulièrement le responsable du point de vue de l'Opposition
officielle à cette commission. C'est lui qui aura à rapporter
à notre caucus les recommandations qui pourront être
éventuellement acheminées en deuxième lecture. (21 h
10)
Quant à la possibilité de voir inscrire dans le livre des
records Guinness, un de ces jours, Montréal - ou la Communauté
urbaine de Montréal - comme la ville au plus haut taux de
criminalité, je vous suggérerais fortement de frapper à la
bonne porte, c'est-à-dire à la porte du ministre de la Justice
qui pourrait apporter certaines modifications. Je tiens à souligner que
j'ai été aussi maire d'une municipalité qui avait un corps
policier relativement important et avec qui on sympathisait beaucoup, dans le
sens que nos policiers faisaient un travail efficace, professionnel. Souvent,
on faisait des arrestations, mais quand ça passait en cours, les
jugements étaient souvent des jugements de fin de semaine. Quelques
jours après, on retrouvait le même bonhomme ou la même bonne
femme dans la rue qui commettait un autre délit. Cela tenait nos
policiers drôlement occupés. Il faudrait peut-être demander
certains correctifs sous cet aspect-là. D'autre part, en ce qui concerne
la flotte des véhicules à la CUM qui sont actuellement
affectés au service de la police, est-ce qu'on pourrait en
connaître le nombre exact?
M. Lenoir: Environ 800.
M. Rocheleau: Environ 800. On parlait hier de l'entretien, de
changements, des cols bleus qui étaient affectés
déjà à Montréal, est-ce que, du point de vue de
l'entretien, ces véhicules sont en excellente condition?
M. Fleurent: J'aimerais vous faire remarquer ici que je serais
capable de répondre à ça. Ce n'est aucunement une
intervention syndicale. Je disais tantôt qu'on porte deux chapeaux. Si je
réponds à cette question-là - je sais la réponse -
mais si je réponds à cette question-là, je vais
répondre à la place d'une personne qui aurait dû être
ici; de là l'intervention que j'ai faite en partant.
M. Rocheleau: Remarquez que...
M. Fleurent: Je comprends que vous êtes à la
recherche de la vérité. Si on fait des erreurs, on veut faire des
erreurs dans des choses que nous représentons. Nous représentons
des policiers syndiqués ici, M. le député.
M. Rocheleau: D'accord, je comprends ça.
M. Fleurent: Je connais la réponse mais...
M. Rocheleau: Au point de vue des patrons, nous aurions
souhaité voir votre patron immédiat comme on aurait aussi
souhaité rencontrer les patrons de la commission de transport.
Malheureusement, vos patrons ne semblent pas souhaiter trop de contact avec les
politiciens; même si c'est un endroit tout à fait
acceptable...
M. Fleurent: On aime ça, nous autres, on connaît
ça.
M. Rocheleau: ... pour rencontrer des gens. Vous autres, vous
connaissez ça et je pense que ce n'est pas dangereux. Cela nous
permettrait, dans la loi 46, de voir à certaines modifications qui
amélioreraient l'efficacité de nos principaux services. On a
mentionné, et c'est un fait, que la police est un service important dans
une municipalité ou dans une communauté. Le transport aussi,
c'est un service important, comme les autres services sont aussi importants;
cela a un aspect qui touche davantage la sécurité et
ça préoccupe les municipalités. Combien de fois
a-t-on entendu les maires des municipalités de banlieue crier et
à combien de reprises pour avoir plus de sécurité dans
leur municipalité de banlieue?
Malheureusement, ça crie encore et je pense qu'on ne peut pas
reprocher aux politiciens locaux de demander plus. Mais à cause des
compressions budgétaires qui affectent tous les services, ça peut
comporter certains problèmes. Mais j'aimerais vous entendre justement
sur le fait que, même s'il y avait un policier par rue, si l'appareil
judiciaire comme tel n'apporte pas les correctifs nécessaires, ça
vous crée une tâche additionnelle. J'aimerais vous entendre
là-dessus.
M. Fleurent: Bien sûr, le code criminel c'est un code
criminel canadien. Quand je faisais la comparaison entre Montréal et
Toronto, c'est le même code criminel. Maintenant, l'administration de la
justice est faite par les provinces et également par le ministre de la
Justice. Mais tantôt, quand je répondais à la question: de
quelle façon les politiciens se mêlaient des choses de la police?
je n'ai pas frappé à la mauvaise porte en venant ici. On dit: on
veut avoir un patron avec qui parler. Quand on parle de criminalité,
bien sûr qu'on va aller au ministre de la Justice. On y est allé.
Mais c'est le patron que nous voulions avoir. Dans ce sens-là,
c'était une réponse que je donnais quand je faisais une
comparaison à cette criminalité-là. Il y a certaines gens
qui endurent la criminalité. Ce ne sont certainement pas les policiers,
parce qu'un policier aime voir un gars en prison, un voleur. Ce sont des
décisions qui sont probablement beaucoup plus politiques. Quand on fait
des coupures de budget, on enlève des policiers quand on devrait en
ajouter parce qu'on connaît actuellement cette criminalité. Je
n'ai pas fait allusion à rien tantôt.
Tout à l'heure, quand j'ai énuméré des noms
et que j'ai parlé du chef de l'Opposition, j'ai donné un nom,
mais je ne voulais pas viser le chef de l'Opposition pendant qu'il
n'était pas ici. Ce sont simplement des personnes que je nommais qui
n'étaient pas ici et, quand j'ai mentionné les patrons, parce
qu'on en a plusieurs, il n'était pas arrivé à ce
moment-là. C'est simplement un correctif que je veux faire.
M. Rocheleau: M. le Président, je me devais, quand
même, d'apporter ce correctif parce que M. Ryan a eu la
délicatesse d'être ici, étant donné que la
Communauté urbaine de Montréal, c'est très important.
M. Fleurent: On l'a remarqué; c'est pour cela qu'on en a
parlé.
M. Rocheleau: Comme dernière réflexion, c'est
peut-être heureux ou peut-être malheureux, mais on a
déjà eu comme ministre des Affaires municipales "une ancienne
police montée"; il vous aurait peut-être compris davantage.
M. Fleurent: Ce n'est pas sûr, ça. Quand je parle de
police, je parle de police. Je ne suis pas complexé, je suis un
politicien.
Le Président (M. Rodrigue): Mme la députée
de Maisonneuve.
Mme Harel: Malheureusement, je me suis absentée peu de
temps et, en rentrant, je me suis rendu compte que j'avais complètement
manqué l'exposé. J'imagine que cela s'est fait rapidement.
J'avais déjà lu votre mémoire.
M. Fleurent: On l'a fait en sténo.
Mme Harel: Les questions que j'ai à vous poser, il est
évident que vous pouvez toujours me répondre que c'est à
votre employeur immédiat que je devrais les poser, mais je voudrais en
profiter puisqu'on vous a sous la main. Vous vous rendez compte, depuis trois
jours, combien de fois on a parlé de vous et vous avez sûrement
entendu les représentants de COPEM hier. Dans leur mémoire que
vous avez peut-être lu, ils n'y vont pas de main morte quand, par
exemple, ils font un jugement assez global qui est à peu près le
suivant, à la page 8 de leur mémoire: "On observe une nette
diminution des services quant à la qualité et à la
quantité, alors que l'on doit subir simultanément une escalade
effrénée des coûts." Vous les avez peut-être entendus
faire référence à la profonde insatisfaction qui
amène les municipalités de banlieue à se doter de services
de police parallèles. J'imagine qu'il serait possible de croire
qu'à Montréal, si ce n'est pas le cas dans certains quartiers,
c'est peut-être parce que les gens n'ont pas les moyens de se les payer.
Qu'est ce qui détermine la répartition des effectifs sur le
territoire de la Communauté urbaine de Montréal?
M. Fleurent: M. Côté va vous répondre
à ça, les polices parallèles, si vous voulez avoir une
réponse.
Mme Harel: Je reviendrai ensuite sur police jeunesse.
M. Fleurent: Cela va.
M. Côté: C'est une question assez
intéressante. C'est pas mal l'explication du phénomène de
la police de la CUM. Il y a l'entité Montréal, il y a
l'entité
banlieues et depuis les trois jours qu'on est ici, on s'aperçoit
qu'il y a des conflits entre Montréal et les banlieues et on retrouve
ça avec la création des polices parallèles. Dans certaines
municipalités, on prétend que les services sont moins bons qu'ils
ne l'étaient avant l'arrivée de la CUM. Par contre, quand on
parle aux policiers qui travaillaient dans ces municipalités-là,
qu'on appelle les municipalités de banlieue, ce sont des policiers qui
rendaient des petits services à tout le monde. Je parle de la
période avant M. Corbeil. C'est à ville d'Anjou qu'il y avait des
policiers qui allaient faire ce qu'on appelle en anglais "booster" les
véhicules des citoyens. On donnait un service personnalisé
à ville d'Anjou et on aimait ça et c'était bien. On
donnait aussi un tas d'autres services personnalisés. On allait
reconduire Mme la mairesse chez le coiffeur. Il y avait un tas de petits
services particuliers qui étaient rendus dans ces municipalités.
C'est bien sûr que, quand la police de la CUM est arrivée, il y a
eu un peu de rationalisation qui a été faite. Dans des services
de police où des policiers nous ont conté qu'il y avait beaucoup
de monde, il y avait beaucoup d'officiers, il y avait beaucoup de personnel,
mais tout le monde était dans le poste à la journée longue
et, sur la route, il y avait une voiture, c'était l'auto-radar. Il y a
eu des changements dans ça. Dans la majorité des endroits, il y a
eu des services accrus qui se sont donnés. Ce qu'on déplore,
c'est l'attitude politique à certains endroits où on se sert de
la CUM pour l'accuser de tous les malaises qui peuvent survenir et, au fond,
c'est la population et la police qui en souffrent. (21 h 20)
Quand dans des banlieues, par exemple, on créé une police
parallèle, on fait une publicité positive incroyable pour dire
que ces polices parallèles, qui sont des agences de
sécurité qu'on engage à rabais, sont composées de
gens qui doivent avoir la confiance de la population, et on les met en
opposition avec la police de la CUM. Il y a des concours de popularité
dans ces municipalités. Comment peut-on, avec des raisonnements comme
cela, arriver à avoir l'appui de la population auprès de la
police officielle qui est la police de la CUM? Et nous, en tant que policiers,
on sait qu'on a besoin des gens pour faire notre travail. Ce n'est pas comme un
chauffeur d'autobus; on prend l'autobus parce qu'on est obligé, parce
qu'on en a besoin. Pour faire des arrestations, pour lutter contre la
criminalité, il faut que les gens nous aident. Si les hommes politiques,
comme c'est le cas chez nous depuis dix ans, se querellent continuellement ou
tentent de discréditer le service de police, nous en tant que policiers,
on ne peut pas être plus efficaces qu'on l'est. Si on dit qu'il n'y en a
pas assez, qu'on continue à couper le personnel et qu'on engage d'autres
personnes pour faire notre travail, on ne s'en va nulle part. C'est un des
aspects du problème quand vous parlez des services qui sont
moindres.
Quant à nous, avant l'arrivée de la CUM, des
municipalités de banlieue avaient recours aux services de la
Sûreté du Québec pour des enquêtes de meurtre ou des
enquêtes de fraude, etc. Maintenant, ce sont des services qui sont
fournis par la CUM. Il y a des groupes tactiques, il y a des escouades
spécialisées, il y a un tas de services qui sont disponibles. Il
y a des unités de soutien, des unités de renfort, il y a des
services spécialisés qui sont disponibles, mais jamais personne
n'en parle. On parle toujours de la police de la CUM comme étant une
police inefficace et une police qui coûte cher. Ce qu'il y a
d'intéressant dans la commission, dans le projet de loi no 46, c'est ce
désir de réunir tout ce monde pour que, finalement, on accepte la
police de la CUM comme étant une entité qui est importante, qui
est là, qui existe et qui a besoin de l'appui des gens. Les policiers de
la CUM, c'est tout ce qu'ils demandent finalement. C'est que les gens les
aident, que leurs patrons les appuient et que, comme le représentant de
l'Outaouais disait, les autorités au niveau judiciaire appuient aussi
cet effort.
On dit dans le rapport Laplante, par exemple, que les sentences qui sont
données au Québec, qui sont en moyenne de trois ans pour des vols
à main armée, se comparent avec ailleurs au Canada; ces sentences
devraient être plus sévères chez nous parce qu'on a un
problème incroyable au niveau des vols à main armée. Il y
a 8500 vols à main armée dans Montréal par année,
c'est absolument incroyable et ce n'est pas seulement un effort de la police,
c'est un effort des autorités municipales, gouvernementales et
judiciaires. La police ne peut rien faire toute seule dans cela. Mais on veut
que nos autorités, nos patrons soient clairement identifiés,
c'est ce qu'on dit dans notre mémoire. On veut qu'ils appuient la police
qu'ils ont et qu'ils paient.
M. Fleurent: On peut parler de motivation aussi, dans le sens des
polices parallèles, pour répondre à cela. On est policier,
on travaille dans un secteur donné mais on fait de la publicité
pour que les gens aient confiance, comme je disais tantôt, à une
organisation qui a une moins grande qualité; je parle de qualité
quand on fait l'embauche. Un policier a une formation de policier et bien
entendu, quand on fait l'embauche d'une personne qui va travailler à la
sécurité, c'est sûr qu'elle n'a pas la même
formation. Quand on parle de liberté des individus, je pense qu'on
devrait laisser cela à des gens qui connaissent cela. À
Montréal,
le service de police s'est acquis une réputation qui est enviable
et on est capable de faire le travail. On parle de motivation; mais quand on se
sent remplacé à moindre coût, là on parle de
démotivation; la démotivation entraîne un travail amoindri
et on n'a pas d'encouragement. On a parlé d'intégration parce que
cela aussi, c'est une loi qui a été votée. Ce ne sont pas
les policiers qui ont demandé cela, ni de la banlieue ni de
Montréal. Et les grands perdants - il y en a eu partout des perdants -
ont été ceux de Montréal. Quoi qu'on en dise.
À Montréal, à l'époque, nous y étions
tous, il n'y avait pas l'ingérence politique que nous connaissons
actuellement. Cela n'est peut-être pas négatif comme tel, il y a
des gens qui veulent bien faire mais avec des connaissances qu'ils n'ont pas
tout le temps. Dans le temps à Montréal, quand on parle des
policiers qui ont perdu, on parle peut-être de 1000 promotions. À
Saint-Laurent, par exemple, il y avait un corps de police exemplaire. Il y
avait plusieurs capitaines détectives, il y avait plusieurs lieutenants
détectives et je crois qu'il y avait seulement un
sergent-détective. Quand ils ont été
intégrégrés, plusieurs de ces policiers ont gardé
leur grade. Cela a enlevé des grades aux policiers de Montréal;
si on parle de querelles, c'est à cause de lois qui ont
été adoptées à cette époque.
Il y a d'autres syndicats qui ont des problèmes depuis dix ans
avec des cols blancs. On a certains problèmes de policiers de banlieue,
c'est le point que ces derniers ont voulu toucher directement. Pour les
policiers de banlieue, il y a des fonds de pension, il y a des gars qui sont
obligés de travailler beaucoup plus longtemps que leur compagnon, qui
est dans la même auto, qui fait le même ouvrage, mais le compagnon
vient de Montréal. Ce sont des lois dans lesquelles, dans le temps, il y
a eu des trous, il y a eu des erreurs, et on est obligés de vivre avec
elles. C'est pour cela qu'il faut faire attention quand on change la loi. C'est
le but des interventions que nous faisons, c'est professionnel.
Mme Harel: Je reviens à ma question de la
répartition des effectifs. Vous avez fait valoir qu'il y a eu diminution
de l'effectif et augmentation de la criminalité. Mais, par rapport aux
effectifs actuellement existants qui sont de l'ordre de 4800...
M. Fleurent: C'est réduit pour les prévisions
budgétaires, 4618. Bien entendu, la répartition se fait comme
suit: c'est qu'à l'époque...
Mme Harel: L'indice de criminalité -l'indice de violence
dans un quartier - est-il un critère qui préside à la
répartition?
M. Fleurent: Si c'était un critère, on serait 6000,
parce que la criminalité augmente. Il y a bien des gens qui disent:
C'est du socio-économique actuellement et ce n'est pas simplement
à cause de la diminution de l'effectif que la criminalité
augmente, c'est pareil partout. Quand on entend des gens à la
télévision dire: On est très bien à la CUM, on a
seulement 85 meurtres, ils en ont 1800 à New York. Je pense que ce n'est
pas une façon de parler. On est bien sur notre territoire, on
était mieux avant et je ne vois pas pourquoi on serait pire, justement
pour des situations. On ne demande pas d'engager 1000 policiers, c'est
qu'auparavant, les gens qui demeuraient dans la banlieue avaient des services
qu'ils ne payaient pas, des services indirects.
Par exemple, si vous allez dans le Vieux-Montréal, votre carte de
crédit est acceptée, parce qu'il y a moins de fraudeurs, s'il y a
moins de fraudeurs c'est parce qu'il y a des gens spécialisés qui
s'occupaient des fraudeurs et c'était à Montréal, parce
que les banlieues n'avaient pas cette spécialisation. Il y avait les
gens qui travaillaient sur le crime organisé, il y avait des gens qui
travaillaient sur toutes sortes d'organisations criminelles que les banlieues
ne pouvaient pas se permettre, parce qu'il n'y avait pas l'effectif. Mais,
lorsque nous avons coupé l'effectif que nous connaissons, M. Vignola l'a
dit lui-même: je croyais qu'à ma nomination en 1977, il
était pour avoir des coupures seulement en 1977, mais on coupe depuis ce
temps-là, il n'est plus capable comme individu, comme homme de police,
de continuer à faire un travail décent avec des coupures
d'effectif.
Mme Harel: M. Fleurent, je comprends que vous plaidiez pour une
augmentation d'effectif. Mais, de toute façon, par rapport à
l'effectif actuellement existant, dans la répartition des
critères qui existent présentement sur le territoire, par
exemple, l'indice de criminalité, l'indice de violence est-ce que cela
en est un critère qui est retenu et à quel titre il l'est?
M. Lenoir: Pour répondre à votre question lorsqu'on
fait la distribution des policiers sur l'ensemble des 24 districts policiers,
on se sert de certains critères, d'abord le nombre d'appels qu'on
retrouve dans chacun des districts policiers, la criminalité, le nombre
de milles parcourus par les autos, ce sont des critères qu'on
détermine. Par la suite, on distribue le personnel en fonction de ces
critères-là, mais on part d'un nombre arrêté. On
dit: On a 2000 policiers, on les répartit en fonction de ces
critères-là. Mais on ne s'arrête pas à un moment
donné pour dire: Ce n'est pas 2000 dont on a besoin, c'est
peut-être 3500.
C'est la même chose au niveau de nos
enquêteurs, lorsqu'on lit les recommandations de la commission de
police, on dit: II devrait y avoir une plainte par enquêteur par jour.
Pour faire cela, il faudrait peut-être 1200 à 1500
enquêteurs, mais aujourd'hui on dit: On en a juste 600. Au lieu de leur
donner une plainte, on va leur en donner deux. Mais le résultat en
souffre pour autant, parce qu'ils n'ont pas le temps de faire leur
enquête d'une façon approfondie, on fait des enquêtes
plutôt superficielles.
Mme Harel: La réalité dans des quartiers urbains du
bas de la ville de Montréal, par exemple, c'est une diminution des
policiers de protection de la jeunesse, d'une façon dramatique, dans des
quartiers où on sait que c'est là où il y a le taux de
délinquance le plus élevé. Je me demande qui
décide, par exemple, s'il est question d'abolir ou de réduire la
police jeunesse. C'est le conseil de sécurité qui décide
ce genre de... (21 h 30)
M. Déry (Réal): Permettez que je réponde
dans ce dossier que j'aime bien débattre. En premier lieu, je
demanderais au président de la commission de reproduire
intégralement notre mémoire dans les procès-verbaux, chose
qui n'a pas été faite. C'est une technicité qu'on vous
demande, si c'est possible.
Le Président (M. Rodrigue): Nous ne reproduisons plus les
mémoires dans le journal des Débats. Cependant, ces
mémoires sont toujours disponibles et mis à la disposition du
public au secrétariat des commissions. C'est une directive et une
règle qui est adaptée depuis l'an passé.
M. Déry: Merci de l'information.
Le Président (M. Rodrigue): C'est dans le but
évident d'épargner de l'argent.
M. Déry: D'accord.
Le Président (M. Rodrigue): Alors, si vous voulez
poursuivre la réponse.
M. Déry: Vous m'apprenez de quoi, M. le Président;
ça nous fait plaisir de le savoir pour les futurs mémoires que
nous allons présenter.
À votre question, Mme la députée, M. le
Président, je répondrai que nous à la fraternité
des policiers, nous avons démontré hors de tout doute que nous
voulions une police jeunesse. Nous l'avons prouvé, premièrement,
en appuyant des organismes populaires afin de hausser le nombre de policiers
à police jeunesse. Nous l'avons aussi démontré en
produisant un cahier spécial, lors du lancement de la loi 24
relativement à la déjudiciarisation des jeunes au niveau du
territoire. C'est un document qui a servi même à la partie
patronale pour faire la formation de nos policiers afin que cette loi soit
appliquée, soit dit en passant.
Alors, je veux quand même faire un petit historique de police
jeunesse pour les gens qui ne suivent pas cela de très près.
À la police de Montréal, en 1935, un bureau d'aide à la
jeunesse a été fondé par un policier, et par la suite -
sans vous faire tout l'historique jusqu'en 1965 - en 1965, sous la direction du
directeur Gilbert ainsi qu'un des policiers, entre autres M. Claude Labelle,
des cours de formation en criminologie juvénile ont été
donnés aux policiers sur le territoire de la CUM. En 1966, on
appliquait, sur le territoire de la ville de Montréal seulement, une
police jeunesse spécialisée, et j'explique. À la police de
Montréal du temps, en 1966, nous avions une section centralisée
qui s'occupait exclusivement des jeunes au niveau des disparitions et des
crimes sexuels, et vous aviez dans les postes de police, sur le territoire de
Montréal, trois éducateurs et trois enquêteurs qui
s'occupaient exclusivement des jeunes.
Alors, après l'intégration qui s'est faite en 1972, et
à la demande de la population et à la demande des maires des
autres secteurs de Montréal qui voulaient avoir ce même service,
ils ont fait une "organisation", selon la partie patronale, mais nous on dit,
une "désorganisation", de police jeunesse. Pour satisfaire la population
des banlieues ainsi que les maires de banlieues, on a tout simplement aboli la
centralisation en prenant les 32 policiers qui étaient
spécialisés en matière de criminalité
juvénile et on les a répartis sur le territoire de banlieue.
Alors, de ces 32 policiers, il y en a 30 qui sont allés en secteur. Moi,
j'ai été chanceux, je suis allé à la
fraternité. Je faisais partie de ces 32 là.
Par la suite, en 1976, on a aboli tout simplement les éducateurs
et enquêteurs et on en a fait des généralistes. Alors, ces
policiers présentement oeuvrent sur tout le territoire de la CUM. Vous
comptez exactement 123 policiers qui s'occupent exclusivement de police
jeunesse. Quand je dis exclusivement, c'est dans mes termes. Moi je vous dis
qu'ils font d'autres sortes de travaux, mais qu'aussi ils sont appelés
à faire d'autres demandes au niveau des directeurs de postes. Alors, en
1976, ces policiers sont devenus des généralistes et aujourd'hui
nous avons, à police jeunesse, des généralistes.
Il y a un point que je veux souligner. Entre 1976 et au moment où
je vous parle, en 1979 plus précisément, avec la Loi de la
communauté urbaine, le président du conseil de
sécurité publique du temps, M. Yves Ryan, a fait une consultation
populaire sur le territoire de la CUM, à la télévision et
à
cinq endroits. Dans ces cinq endroits, 43 mémoires sont parvenus,
je crois si ma mémoire est bonne. Dans ces 43 mémoires, à
100% les gens demandaient une police jeunesse spécialisée pour
s'occuper exclusivement des jeunes sur le territoire de la CUM.
Deuxièmement, ils demandaient une augmentation des policiers, à
police jeunesse pour s'occuper des jeunes. Or, je peux vous apprendre
aujourd'hui, en 1982, trois ans après, qu'on en enlève de sept au
lieu de les augmenter. On appelle cela une réorganisation du service de
police jeunesse. Sur le territoire de la CUM, présentement, il y a
environ 3% de ces policiers, 123, qui s'occupent d'une criminalité de
37% commise par des juvéniles sur le territoire de la CUM.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Verdun.
M. Caron: M. le Président, dans le projet de loi, il y a
deux choses en particulier dont je suis déçu: c'est la commission
de transport et la police. Dans le projet de loi - nous allons parler de la
police, parce que c'est vous autres - on dit de qui le directeur va relever et
comment le choisir. On aurait dû penser à aller un peu plus loin.
Personnellement, je peux vous dire que dans le territoire que je couvre, les
gens ne sont pas satisfaits. Je dis bien qu'ils ne sont pas satisfaits, mais
pas de vous autres, les policiers, mais du système. J'ai eu l'occasion
de le dire hier, à un certain moment durant l'été, il y
avait une automobile qui couvrait l'île des Soeurs, la ville de Verdun et
une partie de Côte-Saint-Paul dans le territoire du président de
Montréal, M. Lamarre, ce qui fait environ 90 000 personnes. Ce n'est pas
beaucoup. Je pense que les maires de banlieue en général sont
contre la police parallèle. Je suis contre moi. Il faudrait que le
gouvernement se réveille, surtout que, dans le contexte de personnes
sans travail chez les jeunes, le crime augmente dans le West Island. Dans notre
coin, c'est nous, à Verdun, Côte-Saint-Paul, qui avons le plus
haut taux actuellement. Nous n'en sommes pas fiers. Il faut vivre avec cela.
Beaucoup de nos jeunes, s'ils travaillaient, ne chercheraient pas à
aller chercher de l'argent autrement, mais, dans le contexte actuel, il n'y a
pas énormément de travail. J'espère, chemin faisant, qu'on
pourra trouver une solution pour amener des amendements ou pour trouver un
mécanisme. Peut-être qu'il ne fera pas plaisir à la
fraternité, parce qu'il y a des choses qui se font chez vous qui ne sont
pas du travail de policiers. Pour le travail de policiers, personnellement, je
suis d'accord qu'il faudrait vous donner le personnel qu'il faut, mais il y a
des choses qui peuvent être faites par un civil. Qu'est- ce qui peut
être fait par un civil? Je suis assez honnête pour admettre qu'il
faut aussi que le policier prenne ses responsabilités au prix que cela
coûte aujourd'hui. Par exemple, quand je vois deux policiers qui marchent
sur la rue Notre-Dame ou sur la rue Wellington à Verdun -
peut-être pas sur la rue Sainte-Catherine le vendredi soir ou le jeudi
soir, parce qu'il y a des secteurs aussi... - un beau samedi après-midi
où il faut beau soleil, deux policiers qui sont quasiment main dans la
main, pensez-vous que ces policiers ne pourraient pas faire un meilleur travail
avec un "unmarked car"? C'est cela, l'affaire. Les policiers qui gagnent
environ 30 000 $ par année pour marcher sur la rue Wellington à
Verdun ou sur la rue Notre-Dame, je ne comprends pas les gens qui leur font
faire ça. Vous avez parlé à un certain moment qu'il y
avait des politiciens qui voyaient à cela, mais je pense que ce ne sont
pas tous des politiciens. J'espère que ce que vous nous dites, on aura
l'occasion de s'en reparler. L'Opposition va demander une autre commission
parlementaire sur le transport en commun à Montréal parce qu'on
veut savoir bien des choses; c'est normal, on doit le savoir pour les
contribuables. On va le demander au ministre aussi. J'ai même
demandé, M. le président de la fraternité, que la
commission se déplace, qu'on aille à Montréal. Au palais
de justice de Montréal, c'est aussi bien organisé qu'ici.
Beaucoup de gens viendraient, parce qu'ils ne sont pas satisfaits. (21 h
40)
Vous parlez de police jeunesse aussi. Je pense qu'on en a deux pour
couvrir 90 000 personnes. Je pense qu'il y a des choses sur lesquelles vous
avez raison et des choses sur lesquelles vous n'avez pas raison. Il y a du
travail qui doit être fait par des civils. Là-dessus, je ne vous
donnerai jamais le crédit qu'il faut, parce que je ne veux pas avoir de
faveur de vous autres, je ne veux pas que vous m'en donniez, mais je veux qu'on
le donne à la population. Actuellement, on coupe, on coupe et on n'a pas
raison de couper, parce que la criminalité augmente. Qu'on coupe dans
des domaines où il y lieu de couper. La publicité que les deux
gouvernements ont faite depuis une couple d'années, on aurait dû
couper tout cela et se servir de cet argent, soit pour les policiers ou pour
les hôpitaux.
J'espère que, dans votre projet de loi, vous irez un peu plus
loin pour dire si Québec ou le conseil va choisir le directeur. Je pense
qu'il faut aller en profondeur. Je suis maire d'une ville de banlieue et je
retiens mon conseil de ville, parce qu'il veut une police parallèle,
mais il va venir un moment où je ne serai plus capable de les retenir.
Ils m'ont demandé en venant ici... Cela fait rire le
député de Maisonneuve. Il y a des gens d'une autre formation
politique
dans mon conseil de ville. Ils ne sont pas satisfaits du service que les
policiers donnent et ce n'est pas et leur faute. Si cela ne change pas, il va
falloir qu'on prenne les grands moyens pour protéger notre monde, mais
je pense que la police doit relever de la communauté urbaine et on doit
avoir des policiers additionnels, on doit leur donner les outils qu'il faut, on
doit leur donner de bonnes autos pour avoir un bon rendement. Comme je disais
hier ou avant-hier, à un certain moment, les policiers partaient de
Verdun pour aller changer une "strap de fan" à Fleury. Imaginez-vous le
temps perdu pour deux policiers et le coût de cela.
Je pense, M. le ministre, qu'il était temps qu'on regarde le
projet de loi de la communauté urbaine. Cela a pris du temps; on doit
vivre. Je suis de ceux qui veulent que la communauté urbaine reste, mais
qu'on se penche pour trouver le mécanisme, je pense que c'est bien
important. On a vécu... Je parlais hier aussi de la question des
pompiers. Nous autres, nous travaillons avec d'autres municipalités et
cela ne coûte rien. Il doit y avoir une possibilité de trouver un
moyen en ne vous donnant pas tout ce que vous voulez, parce que, des fois, vous
en demandez beaucoup, mais en donnant ce qu'il faut pour fournir le service
à la population. Je peux vous dire que, des fois, avec le nombre qu'ils
sont, ils font des miracles. Un temps viendra où ces gars seront
écoeurés. Je dis le mot "écoeurés". Si le premier
ministre peut se permettre en Chambre de dire des mots comme ceux qu'il a dits
cet après-midi, on doit dire que les gens, la population, le petit, ceux
qui ne peuvent pas se rendre à Québec, ils sont
écoeurés, de même que les dames de 60, 65 et 70 ans qui se
font enlever leur "sacoche" et qui ne peuvent pas venir nous le dire ici. Mais,
nous autres, on dit au ministre qu'il faut donner un meilleur service de police
à Montréal, à la communauté. Il faut lui donner des
outils et, s'il manque d'argent, que le gouvernement fasse sa part, qu'il
injecte un certain montant et qu'on arrête de couper.
M. Fleurent: C'est une question très facile à
répondre. Je vais commencer par le 24e volet concernant les policiers
main dans la main. Je n'en ai pas vu. Mais pourquoi pas? On va couper sur le
budget, on ira ensemble M. Caron. On mangera des oranges.
Concernant les polices parallèles, il y a une plainte qui a
été faite par la Fraternité des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal, il y a une enquête qui est
faite par la Commission de police du Québec. Nous attendons les
résultats. On a mentionné tantôt ce qu'on pensait des
polices parallèles. Je ne pense pas que les citoyens méritent
ça à la CUM.
Quand vous dites que les gens sont insatisfaits, c'est le
résultat du travail accompli. Imaginez-vous comment les policiers le
sont, eux? Quand ça commence à paraître chez les citoyens,
c'est bien certain que c'est parce que ça fait longtemps que les
policiers le vivent. Pour ce faire, il y a eu le livre noir dont on a
parlé tantôt. Ceux qui ne l'ont pas lu, ça va nous faire
plaisir de vous en procurer un. Ce livre noir a été
acheminé au premier ministre dans un but strict; c'est qu'il y avait
plusieurs ministères qui étaient concernés dont le
ministère des Affaires municipales. Il a été
acheminé à la bonne source. Il a été
acheminé aussi au ministère de la Justice.
Nous avons présenté le mémoire actuel justement sur
l'incohérence, sur les problèmes administratifs que nous vivons.
Cela va probablement faire un autre débouché. Nous avons
également participé à un colloque à Magog avec
toutes les autorités de la CUM: des intervenants, des gens qui ont fait
des études sur la sécurité publique, les gens du conseil
de sécurité, les gens du service de police, les gens qui ont fait
des travaux comme les auteurs du rapport Laplante sur les vols à main
armée sur le territoire.
Vous avez mentionné également police jeunesse et la
criminalité sur le territoire, les personnes âgées, les
vieilles gens qui sont victimes d'assauts pour des vols, quand vous parliez du
contexte économique actuel. Bien sûr que plus ça va mal
dans la société, plus il faut donner des budgets aux services de
police. Cela se fait partout dans le monde. Nous ne sommes pas ici pour
demander des budgets, loin de là. Mais on doit savoir que 50% des vols
à main armée sur le territoire sont commis par des jeunes de
moins de 18 ans et que 33% de toute la criminalité, ce sont des jeunes
qui la font.
Maintenant quand vous parlez de remplacer les policiers par des civils,
on a à peu près 700 policiers de moins depuis
l'intégration. Je ne sais pas ce que les civils vont faire à la
place des policiers, mais maintenant il y a des conventions et c'est
négociable. Il y a des conventions collectives et c'est
négociable. À la fraternité, de bonne foi, cela a
été négocié à la dernière
négociation, concernant les gens qui émettent des billets - les
petits bonshommes verts à Montréal comme on les appelle - et,
bien entendu, lorsque nous signons nos chèques de paie, nous sommes des
gens responsables. C'est négociable. Maintenant, remplacer des policiers
par des civils, je ne sais pas dans quel domaine, parce que si vous payez en
plus des gens qui n'ont pas la formation et la compétence, cela en prend
deux ou trois. On a vécu ça; on a remplacé des policiers
à la Cour municipale de Montréal, ils étaient environ 19
par des gens de la sécurité, ils sont rendus 43. On a
changé des policiers aux communications et aux transports, si vous ne
mettez pas une personne qui connaît
son métier pour répondre aux citoyens, on peut l'acheminer
bien souvent aux pompiers. Parce que lorsque tu appelles la police -tout le
monde appelle la police lorsque le feu est pris; tout le monde appelle la
police lorsqu'on sonne à la porte - il y a des gens qui doivent
intercepter ces appels. Tout cela coûte cher, comme vous disiez
tantôt, on en a fait mention lorsqu'on parlait des policiers à
pied, nous sommes contre les policiers à pied sauf dans des endroits
névralgiques comme la rue Crescent et la rue Sainte-Catherine. Les
policiers se plaignent également - et c'est un syndicat qui vous le dit
- ils sont obligés de se promener par la main, ils n'ont pas d'autre
chose à faire.
M. Caron: ... j'ai dit quasiment par la main.
M. Fleurent: Juste pour finir, quand on parle de coupures et
qu'on parle d'interventions, je vais vous donner un exemple jusqu'où
ça peut aller, les coupures. Il y a 85 meurtres sur le territoire.
À Toronto, il y en a eu 54 ou 57, en 1981. À Toronto, ils ont 20
enquêteurs, 20 sergents-détectives qui s'occupent des homicides.
Ici, à la CUM, nous en avons 16. Maintenant, dans les prévisions
budgétaires de 1982 - ça aussi c'est une décision
politique - on a décidé de descendre de 16 à 8; il y a
seulement 8 enquêteurs sur les homicides, à la CUM, pour 85
meurtres. Cela fait quoi ça? Ce n'est pas bien compliqué,
ça va faire 150 meurtres, si on en coupe 8. Ils ne sont pas
coupés encore mais c'est ça.
On dit que ce sont des jeux politiques. Ce n'est peut-être pas
à mauvais escient, mais je vous donne un exemple comment cela a
été fait à la CUM. On a décidé de donner une
commande politique, au service de police, de ne pas augmenter le budget pour
l'année 1982. Pour l'année 1982, en n'augmentant pas le budget,
on a été obligé de prendre 500 policiers et de les mettre
à pied. On a demandé de monter le budget à 5%, ce qui
équivalait à 250 mises à pied de policiers. On s'est
arrêté à 9,5% pour diminuer l'effectif de 212 policiers.
L'augmentation réelle est de 7,7% parce qu'il y a eu 100% d'augmentation
à la Commission des accidents du travail et à
l'Assurance-chômage. Ce sont des montants qui sont versés par le
patron et cela n'a rien à voir avec la sécurité publique.
Donc, c'est 7,7% d'augmentation. Quand arrivent le directeur de police et son
personnel de soutien et qu'ils ont l'ordre de couper, il faut qu'ils coupent.
Ils en coupent 7 à police jeunesse, ils en coupent 8 aux homicides, ils
coupent sur des filatures. Tous les gens qui connaissent cette
criminalité savent que ce sont des criminels. Veut ou veut pas, ils
vivent sur notre territoire, ils lisent les journaux et ils savent exactement
ce qui se passe. C'est pourquoi on a une criminalité accrue, c'est aussi
simple que ça. (21 h 50)
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Merci, M. le Président de m'avoir permis d'aller
un peu plus vite, parce le député de Verdun et moi on prend
l'autobus à 23 heures pour retourner à Montréal. On sera
là à 2 heures du matin, mais on a fait notre travail, je
pense.
J'ai seulement deux questions. D'abord, je dois vous dire que je suis un
de ceux qui respectent énormément le travail des policiers.
Pendant dix ans, j'ai été juge municipal et procureur
auprès de la municipalité. J'ai donc travaillé avec les
policiers pendant 10 ans et je respecte énormément leur travail
professionnel. D'ailleurs, dans mon comté, je vois qu'il y a beaucoup de
travail volontaire de la part des policiers. Je pense qu'on a le droit de
savoir ça. Chez nous, à Sainte-Anne, il y a toute une
équipe de policiers qui viennent le vendredi soir expliquer aux
personnes âgées les méthodes pour se protéger contre
les infractions, etc. Je trouve ça merveilleux, il y a des gens qui
viennent volontairement. À la Saint-Jean-Baptiste, il y a des gens qui
sont venus volontairement, justement quelques gars de la division police
jeunesse, qui n'étaient pas payés et qui étaient là
justement pour observer un peu le comportement des jeunes sur le terrain. Je
pense que cela doit être dit.
Maintenant, M. Fleurent, vous avez dît que vous portiez deux
chapeaux. Je vous pose une question avec votre chapeau de chef de syndicat.
Vous faites une recommandation que je trouve très intéressante,
à la page 23, concernant votre présence à la Commission de
la sécurité publique. Je pense que le ministre vous a
répondu que quand il s'agit de personnes-ressources, il n'y a aucun
problème. Mais je veux vous protéger un peu plus, parce que,
quant à moi, il ne s'agit pas d'une personne-ressource comme le ministre
l'a compris. Vous dites clairement qu'il s'agit d'une personne qui va
être là comme membre du comité à tout point de vue,
sauf pour le droit de vote. Donc, il ne s'agit pas d'appeler M. Fleurent et de
dire: Voici, une réunion extra-spéciale, voulez-vous venir comme
personne-ressource? Ce n'est pas cela que vous demandez selon votre
mémoire. Vous demandez sa présence chaque fois qu'il y a une
réunion etc., tel qu'expliqué. Donc, je ne sais pas si le
ministre a bien compris parce qu'il a dit: Une personne-ressource, aucun
problème. Vous allez beaucoup plus loin que cela. D'ailleurs, je trouve
votre suggestion très intéressante; à titre personnel, je
serais en faveur de cela. Ayant entendu vos frustrations, je pense que
c'est
très important qu'on entende le côté professionnel.
Pourriez-vous peut-être clarifier cela auprès du ministre?
M. Fleurent: Je l'apprécie, M. le
député.
M. le Président, nous sommes des citoyens du Québec
à part entière et je vous donne un exemple: dernièrement,
le ministre de l'Éducation a fait appel à la Fraternité
des policiers pour nommer des gens au conseil de direction du cégep
d'Ahuntsic. Je me suis offert avec le vice-président, vu que j'ai
déjà enseigné, d'une part, au cégep d'Ahuntsic, en
sciences policières. Un syndicat, finalement, qui fait partie de
l'administration d'un cégep. Ce n'est pas fait, mais ce sont des
demandes qui ont été faites.
Je pense qu'on se rapproche beaucoup de la base en faisant ces
interventions. La suggestion que nous avions faite au ministre dans notre
mémoire, c'était un membre directement affecté à
cette Commission de la sécurité publique, des spécialistes
en la matière. Ce ne seront pas des gens élus à la
fraternité; ce seront des gens désignés, d'une part, par
la fraternité au service de la police de la CUM. Et, pour créer
un équilibre, ce serait une deuxième personne qui serait
désignée par le service de police de la CUM dans cette commission
permanente, les gens évolueraient d'une façon parmanente. C'est
une suggestion, de toute façon, qui serait entérinée par
le gouvernement du Québec. À partir de ce moment, ils
deviendraient des employés du gouvernement du Québec avec un
salaire qu'on établirait. C'est ce qu'on a suggéré dans
cette commission.
Pourquoi? C'est qu'actuellement nous critiquons parce que des gens n'ont
pas toutes les données. Ici, dans les trois jours, en passant, on s'est
fait des contacts formidables pour vendre la police, parce que c'est quasiment
du "marketing" qu'on est obligé de faire aujourd'hui. Il y a bien des
gens qui ne le savaient pas, comme il y a d'autres choses qu'on ne
connaît pas, qui ne sont pas de notre domaine. On a rencontré des
gens et on a dit beaucoup de choses sur ce que nous faisions comme policiers
à la CUM, comme syndicat également. C'est dans ce sens. Ce n'est
pas de la cogestion. Même si on ne pensait pas que les policiers auraient
le droit de vote à cet endroit, voici l'occasion d'avoir des
négociations permanentes. En passant, la Sûreté du
Québec a un système semblable. La Sûreté du
Québec a huit personnes désignées à une
espèce de comité professionnel, quatre de la partie syndicale et
quatre de la partie patronale. Un autre problème que nous avons
mentionné, lorsqu'une convention collective est signée, elle est
acheminée aux administrateurs de cette convention et, par la suite, elle
dure trois ans. II n'y a personne qui continue à négocier et
à voir si cela fonctionne ou si cela ne fonctionne pas. Voici l'occasion
d'une commission de sécurité publique, il y a des gens qui vont
dire: On n'est pas capable de fonctionner avec cet article de la convention.
Voici des gens qui vont aller voir des personnes-ressources, qui vont aller
faire des enquêtes et la fraternité n'aura pas à se servir
continuellement des médias pour faire ses représentations. Les
guerres seront privées, la crédibilité des services sera
augmentée, la population sera beaucoup mieux servie et au même
prix.
M. Lenoir: Si vous permettez... M. Polak: Excusez-moi.
M. Lenoir: À la fraternité présentement, on
retrouve un comité professionnel. Dans ce comité professionnel,
on retrouve deux membres de la fraternité, deux membres du service de
police de la Communauté urbaine de Montréal et le conseil de
sécurité a envoyé deux représentants, mais les
représentants du conseil de sécurité ne sont pas des
personnes élues, ce sont des employés du conseil de
sécurité. À ce moment-là, il n'y a jamais de
contact entre la direction, la fraternité et les élus,
d'où on demande qu'au conseil de sécurité ou à la
nouvelle commission de la sécurité on retrouve des gens
élus, des gens du service et des gens de la fraternité, pour
qu'ensemble ils trouvent des solutions aux problèmes de la police.
M. Polak: M. le Président, je ne pose plus d'autres
questions. J'en avais une, mais je respecte le droit des autres, il est temps
et on va partir. Donc, je vous remercie beaucoup.
M. Tremblay: Vous avez détaillé un peu ce qui se
passait avant l'intégration des forces policières de la CUM en
parlant d'Anjou où il y avait des policiers qui rendaient des services
supplémentaires à la population. C'est-à-dire qu'ils
faisaient des démarrages d'auto, du transport de personnes et ainsi de
suite. Je vois que vous portez tous sur vos vestons un macaron demandant que le
service ambulancier continue. Cela m'apparaît un service
supplémentaire que les policiers donnent. Comment pouvez-vous justifier
cela face à ces affirmations que vous aviez tout à l'heure au
service supplémentaire?
M. Fleurent: Le policier de base est là pour faire
respecter la propriété et la vie, c'est sa fonction principale.
Nous traitons avec des êtres humains de choses humaines. Puis pour le
policier, c'est tout le temps la personne qui fait l'intervention la
première.
Maintenant, lorsqu'on sait que le temps
d'intervention, c'est le temps primordial à la survie, c'est la
raison pour laquelle nous voulons garder le service d'ambulance qui a une
réputation enviable.
M. Tremblay: D'accord, je serais porté à badiner un
peu, et dire que si vous êtes les premiers arrivés, vous devriez
être pompiers aussi.
M. Fleurent: On peut être tout, on fait même des
accouchements; on est capable de faire n'importe quoi. On n'a qu'à
l'écrire et on va le faire.
M. Tremblay: En ce qui concerne votre présence aussi,
c'est une de mes questions sur le comité de police qu'il y aurait au
niveau du conseil. On pourrait penser, avec l'argumentation que vous nous avez
donnée, qu'il serait souhaitable aussi que siège à ce
comité le directeur de la police. On pourrait penser que dans les autres
comités qui vont être formés, il y asurait des gens qui
seraient du personnel de la commission qui souhaiteraient aussi être au
comité. On pourrait penser à la commission municipale ou à
toutes les autres commissions du gouvernement, que des maires ou des membres de
l'union des municipalités pourraient siéger. Comment
justifiez-vous cela, est-ce que vous pensez que mon hypothèse serait
retenable ou si, dans votre cas, il y aurait une exception qui ferait que ce
serait plus acceptable? (22 heures)
M. Fleurent: Bien, écoutez, lorsque qu'on fait des
suggestions, ce sont des suggestions rentables. On pense qu'on a quelque chose
à dire pour la population que nous représentons; parce que
indirectement, le syndicat c'est un syndicat de policiers. C'est pas mal
exceptionnel, ce n'est pas un syndicat qui se compare à tous les
syndicats. Et puis on ne veut pas non plus, loin de là, faire de la
gestion ni de la cogestion; on veut faire de la suggestion. On veut donner nos
connaissances. Bien entendu, si vous ne voulez pas qu'on le fasse, ça va
nous faire bien moins de travail, mais pourquoi à contrecoup? Pourquoi
ne pas être justement à un endroit qui pourrait aider tout le
monde à éviter des querelles? Des querelles équivalent
à des confrontations; des confrontations équivalent à des
non-motivations, des non-motivations équivalent à un manque de
travail, puis tout ce que l'on connaît actuellement? À la place
des querelles, on pourrait dire: Écoutez. Sur la
décentralisation, on pourrait faire des études. On a ces
études-là après coup.
On a convoqué une espèce de colloque, à Magog.
C'était la première fois que ça se faisait, avec tous les
intervenants. Cela se ferait d'une façon perpétuelle, permanente;
on pourrait, tous les jours, régler les problèmes, au lieu
d'attendre que le ballon soit gonflé puis qu'on le crève d'une
façon ou d'une autre, soit sur la place publique, ou ailleurs. On
voudrait participer directement. Je pense que c'est une chose rentable. C'est
ce qu'on nous a enseigné à plusieurs autres commissions. Il y a
des gens, dans la Beauce, qui ont commencé à faire de la
cogestion. Les patrons disent aux syndicats: Voici notre bilan financier; voici
tous nos actifs. Voici ce que nous avons investi. Vous ne pouvez pas nous
demander plus que ça. Les gens participent, les gens le vivent avec eux,
puis il y a des syndicats qui commencent à prendre la relève. Il
y a des syndicats qui aident les patrons. Cela en est une, façon,
ça, d'aider notre population.
M. Côté: Si vous permettez une remarque
supplémentaire sur ce sujet-là. Je pense que le travail policier
a une particularité, ça a été mentionné
tantôt, c'est la distinction entre les opérations
policières quotidiennes puis la question d'administration, qui peuvent
être plus ou moins difficiles à séparer. Mais quand on
parle, à cette commission-là, d'avoir un policier
désigné par le syndicat, puis un autre désigné par
la direction, ça pourrait permettre aux hommes politiques d'avoir
accès à des informations d'ordre opérationnel, si on veut,
mais en passant par le syndicat. Je pense que cela pourrait permettre de savoir
exactement ce qui se passe dans cette police-là, le fait que le syndicat
soit là, par mesure de sécurité ou de protection, qui
donne l'heure juste, autrement dit, à des hommes politiques, qui,
autrement, pourraient avoir des difficultés ou pourraient être
empêchés par la direction du service de police d'accéder
à ces informations-là. Je pense que c'est une
particularité de la police qui, quant à nous, est importante
à examiner.
M. Tremblay: Dans ce sens-là, puis dans le sens que M.
Fleurent a dit tout à l'heure, est-ce que vous ne pensez pas que
ça pourrait être le souhait de tout syndicat de pouvoir participer
à des commissions?
M. Fleurent: Vous avez l'air de penser que c'est de
l'ingérence que nous voulons faire. C'est tout simplement le contraire;
nous voulons atténuer les querelles qui existent actuellement par le
biais de cette commission. Maintenant, c'est une suggestion.
M. Tremblay: Vous interprétez un peu mes paroles,
beaucoup. Je posais la question et je vous la repose. Ne pensez-vous pas que
ça pourrait être un souhait? Puis, je ne dis pas que, dans ce
sens-là, ça pourrait être mauvais. Je vous pose la question
à vous. Ne croyez-vous pas que ça pourrait être le souhait
de tout syndicat de vouloir siéger aux comités d'une entreprise
gouvernementale
qui les concernent?
M. Fleurent: Je ne sais pas pour les autres. Nous autres, c'est
plus qu'un souhait, on l'a écrit, et puis, en plus, c'est consultatif,
ce comité-là. C'est une commission consultative, ça n'a
pas de pouvoir de décision.
M. Tremblay: D'accord, pour terminer je voudrais dire qu'on a un
peu l'impression, en lisant entre les lignes de votre mémoire,
évidemment, ce n'est pas clairement dit là-dedans, qu'il y a, de
la part du syndicat des policiers, une certaine forme de méfiance, face
aux décisions qui sont prises par les élus. Dans ce
sens-là, je vous demande comment, vous, vous voyez, et moi, mon
expérience passée a été effectivement qu'il y a des
difficultés très grandes à obtenir d'un corps policier
municipal une certaine efficacité, une certaine productivité.
Compte tenu qu'il doit y avoir quelqu'un qui est comptable, qui répond
à d'autres, en l'occurrence à la population qui paie, et de la
qualité et des services, comment voyez-vous la structure? Voyez-vous les
élus prendre des décisions qui comportent des conséquences
en ce qui concerne la qualité et la quantité des services qu'ils
veulent offrir à leurs citoyens?
M. Fleurent: C'est simple. Dans notre mémoire, nous
relatons les problèmes que nous avons vécus, d'une part, dans le
livre noir et, d'autre part, dans le projet de loi 46, pour qu'on change
certaines parties de la loi pour qu'on ne vive plus ces problèmes.
D'un autre côté, entre les lignes, c'est votre
interprétation, nous avons dit tantôt que, lorsque nous
étions à Montréal, vous pouvez faire le tour des policiers
qui travaillaient dans les banlieues, règle générale, ils
étaient bien. Les politiciens connaissaient directement les
problèmes pour les vivre quotidiennement. Il est sûr que, si le
projet de loi est dans le sens qu'il est conçu actuellement, il y aura
un patron, les élus connaîtront les problèmes. En plus, on
suggérerait, par le biais de la commission, de participer activement,
quotidiennement. Je pense qu'avec ce projet de loi cela devrait minimiser de
beaucoup... La suggestion que nous faisons, c'est que nous demandons aux
élus qu'ils deviennent nos patrons. Avec les problèmes
actuellement, il est trop facile de passer la balle dans le contexte que nous
vivons. Au contraire, comme je disais tantôt, les élus
étaient juste à côté du quartier
général à l'hôtel de ville de Montréal et il
n'y a jamais eu de problèmes.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Je vous remercie, M. le Président. J'ai
seulement une très courte question pour cette situation personnelle.
Étant donné que la communauté a regroupé plusieurs
municipalités en 1969, il y avait eu des problèmes particuliers
avec la question des règlements municipaux dans chacune des villes.
Est-ce que l'uniformisation de toute la réglementation a
été complétée ou s'il y a encore certaines
municipalités qui appliquent certains règlements municipaux de
certaines façons qui ne sont pas nécessairement les mêmes
que dans d'autres?
M. Fleurent: L'uniformisation n'est pas complétée.
Quand on parle de règlements municipaux, par exemple, un policier qui
travaille dans le secteur no 11, dans le West Island, il faut qu'il apprenne
six règlements municipaux de six villes différentes qu'il dessert
à l'intérieur de son secteur. Si, la semaine suivante, il est
prêté dans le secteur 12, il en apprend 5 autres. Ce n'est pas
fait actuellement.
M. Rocheleau: Est-ce que la fraternité ou le comité
de sécurité a déjà demandé aux
municipalités d'uniformiser la totalité de leurs
règlements municipaux afin que cela soit uniforme sur l'ensemble du
territoire de la CUM?
M. Fleurent: Cela a été suggéré par
la fraternité à différentes occasions dans d'autres
mémoires, mais, actuellement, ce n'est pas fait.
M. Rocheleau: Cela doit créer certains problèmes
quand il y a des équipes qui sont transférées d'un secteur
à l'autre ou d'une municipalité à l'autre.
M. Fleurent: Même si le policier est appelé à
travailler à temps plein dans un secteur donné, il a six sortes
de règlements à apprendre, simplement des règlements
municipaux, à part les règlements provinciaux et les
règlements du Code criminel. Actuellement, c'est une impasse. En plus,
il n'y a aucune forme de formation, justement, pour cesdits règlements
municipaux qui existent actuellement. C'est administratif.
Le Président (M. Rodrigue): Je signale aux membres de la
commission que le député de Marguerite-Bourgeoys demande la
permission de poser des questions. Étant donné qu'il n'est pas
membre, je dois vous soumettre la question. Y a-t-il consentement?
Consentement.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Ce ne sera pas
très long étant donné l'heure. D'ailleurs, il y a
plusieurs questions qui ont reçu une réponse en ce qui concerne
la criminalité, en particulier. Je voudrais saluer
M. Fleurent et ses collègues. Vous avez mentionné le livre
noir qui, si je me souviens bien, a été rédigé au
moment de la démission de M. Masse. Vous l'aviez fait parvenir à
diverses autorités, quelles réactions avez-vous eues de la part
du ministère de la Justice, par exemple? (22 h 10)
M. Fleurent: Le livre noir a été acheminé,
comme je le disais tantôt, au premier ministre vu qu'il y avait plusieurs
ministères qui étaient concernés. J'en ai parlé un
peu tantôt; nous avons eu des contacts très positifs avec le
ministère de la Justice concernant certaines parties du livre noir,
d'autant plus que nous avons eu l'occasion de participer à quelques
rencontres concernant le projet de loi no 46 qui est probablement, en grande
partie, le fruit du livre noir. Je pense que le livre noir a porté ses
fruits.
M. Lalonde: La loi 46 est en partie une réponse au livre
noir.
M. Fleurent: En partie; c'est sûr que c'est la loi
concernant la loi de la CUM au complet, mais il y en a certainement une partie
qui a été faite avec les appréhensions du livre noir. Cela
a beaucoup aidé. En fait, on a indiqué exactement, au point de
vue juridique, les problèmes que nous vivions à
l'intérieur de notre communauté.
M. Lalonde: J'ai lu votre mémoire. Vous accueillez
d'ailleurs avec faveur un certain nombre de changements, y compris la
disparition du conseil de sécurité. Je voudrais, en deux autres
questions rapides, m'attaquer au problème de la criminalité. Vous
êtes sûrement là pour le savoir, il y a une augmentation
effarante du taux de criminalité, surtout chez les jeunes. Je veux aussi
relier ça au service de police jeunesse. Dans mon comté, à
LaSalle, c'est une région où la démographie nouvelle et le
développement compliquent les choses en ce qui concerne la
criminalité. Nous avons un grand besoin de police jeunesse. Les services
qui sont rendus là sont incalculables.
Je voudrais vous poser deux questions là-dessus. Est-ce que la
Loi sur la protection de la jeunesse - je ne fais pas tellement appel au
président du syndicat, mais plutôt au policier, aux connaissances
que vous pouvez avoir dans le milieu, dans le champ -favorise la solution
à la criminalité des juvéniles ou si elle la
complique?
M. Fleurent: Je vais commencer par la dernière approche.
La loi 24, c'est une très bonne loi en ce qui concerne la
compréhension des jeunes sur le territoire du Québec. Par contre,
il y a eu des problèmes d'application de cette loi. Les policiers ont
été très mal renseignés. M. Déry l'a
mentionné tantôt, nous avons fait un cahier spécial sur
l'enfant citoyen. La fraternité a fait ce document à travers
duquel on expliquait la loi 24. Le service de police s'en est servi pour
éduquer ses policiers, mais strictement à cet égard.
Il y a eu une très mauvaise publicité de la loi 24
auprès des policiers sur son application. Par contre, nous avons fait
des contacts; ici à Québec, il y a une commission parlementaire
concernant la loi no 24 et nous allons aider à la rendre meilleure, nous
allons apporter notre expérience pour l'amélioration de cette
loi. Encore une fois, c'est le syndicat qui le fait et ça nous fait
plaisir de le faire.
Quand vous parlez de la criminalité, je vous donne un autre
exemple d'une approche politique locale. Des pressions ont été
faites par des gens qui ne sont pas policiers pour le maintien des policiers
qui travaillent à cheval dans la montagne. Vous allez dire que c'est un
détail, mais je vais vous donner un exemple. Il y a là 15
policiers et une personne a recueilli 140 000 signatures pour leur maintien.
Donc, décision politique: on garde les 15 policiers à cheval. Par
contre, la commande était de réduire le service à 4618
policiers. On n'a pas augmenté de 15, on a décidé de
garder ces policiers qui travaillaient à cheval et il a fallu couper les
15 ailleurs. Où les a-t-on coupés? Sur deux groupes de
filature.
Vous savez ce que ça fait, des policiers qui filent des
criminels, il y a maintenant deux groupes qui ne filent plus les criminels et,
pourtant, il y a 15 policiers à cheval. Syndicalement parlant, est-ce
que les policiers à cheval sont meilleurs que les gens qui travaillent
à des filatures? On n'est pas capable de répondre à cela
parce que ce sont 15 membres, d'une part, et 15 membres, de l'autre. Ce n'est
pas nous qui devons répondre à cela.
D'autres interventions. Par exemple, avec police jeunesse, vu le taux de
criminalité épouvantable que nous connaissons, on a
déplacé 429 policiers pour le projet ouragan, dont on a
parlé au mois de novembre - je ne sais pas si vous vous en souvenez -
pendant 20 jours. Cela va coûter à peu près 400 000 $ de
temps supplémentaire parce qu'on les a déplacés. Nous
avons la certitude, avec les chiffres que nous sommes capables de donner, qu'il
y a probablement eu une baisse d'au plus 2% de la criminalité des vols
qualifiés. En déplaçant 429 de ces policiers, police
jeunesse a eu, dans tous les secteurs, des hommes qui ont dû être
acheminés à ces endroits, des gens du crime organisé, des
gens de la moralité, etc. Il n'y a pas de personnel; alors, quand on
fait de telles opérations, ils mettent des factionnaires. Politiquement
parlant, je l'ai dit tantôt... (22 h 15)
M. Lalonde: En fait, vous avez commencé à
répondre à ma troisième question. Vous plaidez en faveur
de votre présence à la commission de la sécurité
publique, pour faire non pas de la gestion ni de la cogestion, mais des
suggestions.
Si, pour conserver le niveau - que vous n'acceptez pas - de 4618
policiers, vous aviez une suggestion à faire, soit le déplacement
d'effectifs, de quels services pourriez-vous déplacer un certain nombre
d'effectifs pour les ajouter à police jeunesse? Je sais que, pour
l'opération ouragan, il y a un certain déplacement temporaire,
mais, si vous étiez confronté au problème d'augmenter
police jeunesse - vous avez dit: On va baisser le nombre de 16 à 8 dans
les enquêtes sur les homicides, je pense; ça n'a pas de bon sens -
où les prendriez-vous?
M. Fleurent: C'est extrêmement difficile pour moi de
répondre à ça en quelques mots, je ne le ferai pas ici, je
ne pense pas que ce serait une réponse valable. Mais il y a une chose
que je peux vous dire, c'est qu'un service de police, c'est un mal
nécessaire et ça, c'est partout. On n'a jamais donné,
surtout à Montréal ou à la CUM... Je vais vous donner un
exemple. Il y a certains corps de police au Québec qui n'ont pas
à faire face à de la criminalité ou à peu
près pas; environ 75% de la criminalité du Québec se
produit sur le territoire de la CUM. Partout au Québec, vous allez voir
des corps de police qui ont des 12, des grillages à l'arrière des
autos et un équipement exceptionnel; il y en a qui sont
équipés de téléphones dans leurs automobiles, alors
que ça coûterait des prix astronomiques, à Montréal,
mais c'est là qu'on devrait avoir ce genre d'équipement. C'est
donc dire qu'on a toujours été au minimum. Depuis 21 ans que je
suis policier, je peux vous garantir qu'on n'a jamais eu de gras dans les
services de police à Montréal et un peu partout. Quand on a
commencé à diminuer et à couper, il est entendu qu'il y a
des choses qu'on a acceptées dans les conventions collectives, mais vous
n'êtes pas capable de couper davantage. On n'est pas ici pour faire une
demande de policiers additionnels, ce n'est pas le but de notre intervention.
Mais si vous me posez une question semblable... Si vous en coupez ailleurs,
vous allez augmenter la criminalité. Quand il n'y a plus de jus dans le
citron, c'est du sang qui coule.
M. Lenoir: Quand on parle d'augmenter ou qu'on parle de
réduction, en prenant ces gars à police jeunesse et en les
faisant travailler différemment, on va augmenter leur
productivité et, comme on le disait tantôt, recréer police
jeunesse centralisée comme cela existait auparavant. Peut-être
qu'alors, sans augmenter le nombre, on va répondre à nos besoins.
C'est peut-être la façon dont on travaille actuellement qui n'est
pas bonne, c'est peut-être ça qu'il faut repenser avant de dire:
On va augmenter. Je pense que le premier point qu'on doit regarder avant de
dire si on augmente ou on diminue, c'est: Comment ces policiers travaillent-ils
présentement? Y a-t-il une façon de les rendre plus productifs?
Ensuite, on va voir si on les augmente ou si on les diminue.
M. Lalonde: Oui, naturellement, ma question ne se voulait pas un
piège, vous aviez vous-même relié l'augmentation de la
criminalité à la diminution des effectifs. On sait que
l'augmentation de la criminalité se situe surtout au niveau des jeunes.
C'est pourquoi je voulais avoir une suggestion, à savoir si
l'augmentation de la criminalité est en fonction de la diminution des
effectifs. Peut-être devrait-on les augmenter a police jeunesse où
ils sont présents non pas comme policiers de répression, mais
d'éducation, comme je les ai vus faire à LaSalle.
M. Fleurent: Voici un exemple. Si nous étions dans le
même comité, vous êtes un homme élu, nous sommes des
policiers et on travaillerait dans un but commun de suggestions; parce que
vous, comme politicien, vous avez des responsabilités et des
données que je ne connais pas et vice versa, dans ce comité,
ensemble, sans augmenter, on pourrait rationaliser, on pourrait trouver des
solutions communes. C'est là la suggestion que nous voulons faire.
M. Lalonde: En vous remerciant, je voudrais simplement... Je sais
qu'on parle toujours du moral des policiers qui est toujours très bas.
Si ça peut vous rassurer un peu, à chaque sondage qu'on fait sur
la popularité des corps de métier, les policiers arrivent
toujours au premier rang et les politiciens au dernier!
Le Président (M. Rodrigue): Pour conclure sur la
présentation du mémoire, M. le ministre.
M. Léonard: Je remercie beaucoup les représentants
de la fraternité de leur témoignage. Je pense qu'il y a eu un
échanqe ici, sur beaucoup de sujets, peut-être des sujets qui
débordaient le cadre de cette commission, mais enfin, je pense que cela
a beaucoup renseigné les gens.
Il y a un objectif que nous poursuivons dans le projet de loi, c'est de
mieux identifier votre employeur. J'espère que celui-là au moins
aura été accompli et je pense qu'il pourra l'être davantage
parce qu'il y a encore des corrections à faire au texte même du
projet de loi.
Je reviens, en teminant, sur le rôle de
la commission. La commission est composée, comme vous savez, de
représentants de banlieue et de Montréal. Elle siège au
moins deux fois publiquement, mais elle peut travailler aussi à huis
clos. Je pense que, dans ce cadre, elle pourra travailler très
étroitement avec les effectifs, les cadres, avec le syndicat et avec la
fraternité. Lorsqu'elle siège publiquement... Cependant, elle est
composée d'hommes publics, des élus ou des politiciens. Il ne
faut pas y attacher non plus un sens trop négatif. Il me semble qu'il y
a aussi des choses positives que les politiciens font. Si on va à
l'article 213, on voit les fonctions de la commission. Lorsqu'elle siège
publiquement, "La commission de la sécurité publique
reçoit les commentaires ou les représentations de toute personne
à l'égard de l'administration du service de police et peut
procéder aux consultations qu'elle juge appropriées. Toutefois,
la commission ne peut procéder à des consultations sur une
question qui fait l'objet d'une enquête de la Commission de police du
Québec ou d'une demande d'enquête à celle-ci", qui est un
objet très précis, très particulier.
D'une part, la commission va rencontrer des gens qui vont demander
à l'avoir, et cela va donner l'occasion d'entendre ce que les citoyens
veulent réellement et d'en discuter avec eux par l'intermédiaire
de cette commission. D'autre part, il y a aussi le fait que, lorsqu'elle va
siéger à huis clos, vous allez pouvoir fonctionner avec les
élus et les politiciens et mieux ajuster les besoins du service de
police comme ceux de la population.
Je vous remercie beaucoup de votre représentation. Je regrette
que vous ayez eu a attendre aussi longtemps avant de vous présenter.
Cependant, vous êtes peut-être les gens les mieux informés
sur tous les problèmes de la CUM en haut lieu, à l'heure
actuelle, parce que vous avez entendu parler longtemps de structure durant ces
trois jours et vous avez entendu les positions de chacune des parties.
Alors, je vous remercie beaucoup de votre mémoire et de votre
appui au projet de loi no 46 ainsi qu'à ses principales
articulations.
Le Président (M. Rodrigue): Je remercie les
représentants de la Fraternité des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal.
Héritage Montréal
J'invite maintenant les représentants de la fondation
Héritage Montréal à prendre place devant nous et à
nous présenter leur mémoire.
C'est Mme Lambert qui nous présentera le mémoire?
Très bien. Est-ce qu'il y a des personnes qui vous accompagnent? Si vous
voulez nous les présenter lorsqu'elles auront pris place, pour les fins
de l'enregistrement. Également, je vous demanderai, si possible, de nous
faire un résumé de votre mémoire, étant
donné que, de toute façon, le mémoire a été
reçu et qu'il a déjà été lu par les membres
de la commission. Mme Lambert.
Mme Lambert (Phyllis): M. le Président, M. le ministre,
MM. et Mmes les députés, je suis accompagnée de
Marie-Odile Trépanier, professeur à l'Institut d'urbanisme de
l'Université de Montréal, qui a aidé à dresser ce
mémoire.
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre s'il vous
plaît!
Une voix: On va appeler la police...
Mme Lambert: Héritage Montréal, organisme à
but non lucratif dont la mission est de promouvoir un meilleur
aménagement ainsi que la protection du patrimoine urbain, est soucieux
de voir la réforme de la Communauté urbaine de Montréal
répondre à ses objectifs.
Nous sommes heureux de voir le gouvernement québécois
ajuster la Loi de la Communauté urbaine de Montréal dans le sens
des récentes réformes en matière d'aménagement du
territoire et de démocratie locale. Je vais vous présenter des
extraits de notre mémoire qui repose sur quatre grands principes et
comporte douze recommandations.
Pour notre premier principe, nous considérons que les citoyens de
la CUM doivent pouvoir jouer un rôle beaucoup plus actif que ne le
prévoit le projet de loi no 46 dans l'aménagement et la gestion
du territoire de la CUM. De plus, la diversité culturelle de cette
métropole cosmopolite doit faire aussi l'objet d'une attention
particulière sans pour autant nier son caractère unique de foyer
de la culture française en Amérique.
Principe 2: des mécanismes de concertation doivent non seulement
exister entre le gouvernement et les municipalités de la CUM, mais
également avec l'ensemble des nouvelles MRC en voie de création
dans l'agglomération montréalaise. 3. Les compétences et
les pouvoirs de la CUM ne peuvent être aussi limités que ceux des
autres municipalités régionales du Québec en raison
même de son caractère de centre névralgique du
Québec. 4. Les pouvoirs et obligations de la ville de Montréal
doivent être ajustés aux nouvelles règles introduites dans
la loi de la CUM en matière d'aménagement.
Je vais maintenant vous présenter les grandes lignes de nos
recommandations. Tout
d'abord, le sujet clé de notre mémoire,
l'amélioration de la qualité et de la transparence des
mécanismes démocratiques. Nous croyons qu'il est fondamental que
les habitants de la CUM soient aussi bien formés que leurs compatriotes
des MRC en termns d'aménagement. Donc, pour la composition et le
fonctionnement de la commission permanente de l'aménagement, notre
première recommandation veut que la commission permanente de
l'aménagement de la CUM comporte des membres autres que des membres du
conseil. Nous suggérons qu'il y ait un ou des représentants de
groupes ou d'organismes préoccupés par ces questions et qu'un
membre de l'Opposition y siège également.
En plus, je désire attirer votre attention sur la deuxième
partie de cette recommandation qui a été omise dans la
rédaction du mémoire et qui est très importante pour nous.
Nous recommandons que les personnes et les organismes qui le désirent
aient le droit de présenter des mémoires et de poser des
questions lors des séances publiques de la commission permanente de
l'aménagement.
Pour ce qui concerne les avis publics, nous recommandons (II): qu'un
avis des objets, de l'heure et du lieu des assemblées de la commission
de l'aménagement soit publié dans au moins un journal de langue
française et, puisque la population de la CUM est cosmopolite et
comporte plusieurs communautés culturelles, que les informations sur les
assemblées soient publiées dans un journal de langue
anglaise.
Nous passons ensuite aux articles concernant les comités
consultatifs municipaux. Nous recommandons (III): que soit
systématisée et améliorée la formule des
comités consultatifs d'urbanisme dans les municipalités de la
CUM, de façon que ces comités puissent servir de relais pour les
populations locales dans les discussions et la participation dans
l'élaboration du schéma d'aménagement de la CUM et des
plans d'urbanisme subséquents. Dans le cas de Montréal, ce
rôle pourrait être confié à des conseils de
quartier.
Nous suggérons que l'article 134 du projet de loi no 46 comporte
une référence à l'article 146 de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme et précise que de tels
comités sont obligatoires dans les municipalités membres de la
CUM; qu'ils soient établis le plus tôt possible après
l'adoption du projet de loi no 46 et qu'ils soient obligatoirement et
expressément mentionnés, mutatis mutandis, aux diverses
étapes de consultation prévues par la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme. (22 h 30)
Pour la diffusion du schéma, nous recommandons (IV): que soit
assurée une diffusion très large du schéma et qu'un
résumé de la proposition préliminaire et de la version
définitive du schéma d'aménagement soit envoyé
à chaque adresse civique ou alternativement publié dans au moins
un journal de langue française et un journal de langue anglaise.
Nous passons maintenant aux recommandations liées à notre
deuxième principe, c'est-à-dire une meilleure coordination de
l'aménagement de l'agglomération montréalaise. Des
relations à caractère économique, social et culturel sont
quotidiennes entre les MRC et la CUM et elles conduisent au partage
d'équipements, d'infrastructures, de services publics et privés
desservant l'ensemble de l'agglomération montréalaise; par
exemple, les aéroports internationaux, Dorval et Mirabel, les autoroutes
intrarégionales, le métro régional, les parcs et les zones
d'équilibre naturel, le patrimoine historique et culturel
régional. Donc, nous recommandons (V): que soit établie une table
de concertation permanente et institutionnalisée sur le
développement socio-économique et l'aménagement du
territoire réunissant le gouvernement, la CUM et la douzaine de MRC
prévues dans la région métropolitaine; par exemple, des
espaces de récréation comme le mont Saint-Bruno, le mont
Saint-Hilaire et l'archipel qui sont à l'extérieur de l'île
de Montréal, mais qui sont très importants pour les
Montréalais.
Nous présentons ensuite des recommandations qui visent à
l'amélioration des pouvoirs d'intervention sur le territoire de la CUM.
Nous croyons que le schéma d'aménagement d'une entité
territoriale de la taille et de l'importance de la CUM ne peut avoir de
véritables effets qu'avec des pouvoirs de contrôle et
d'intervention stratégiques plus élaborés que ceux qui
sont prévus par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme pour les
MRC de bien plus petite étendue territoriale, économique et
démographique.
Puisque la planication et la gestion des transports en commun est un
moyen privilégié d'améliorer la qualité de la vie
dans les quartiers urbains, nous recommandons (VI): d'insérer dans le
schéma l'obligation d'indiquer les tracés des réseaux de
transport en commun. Nous recommandons (VII): que des pouvoirs accrus soient
confiés à la CUM en matière de circulation sur les voies
publiques à caractère régional ou intermunicipal. En
conséquence, que l'ancien article 112c de la Loi de la CUM ne soit pas
abrogé, mais plutôt modifié de façon
appropriée en disant qu'on doit inclure des pistes
réservées pour les véhicules de transport collectif, la
localisation et la gestion de terrains ou de bâtiments de stationnement
en relation avec l'opération de réseaux de transport collectif,
etc.
Nous arrivons maintenant aux
recommandations directement reliées à la protection du
patrimoine. Puisque le document explicatif du ministre des Affaires municipales
accompagnant le projet de loi souligne l'importance de la conservation et de la
protection du milieu naturel et que le passé très récent a
démontré par de nombreux exemples la nécessité de
disposer de pouvoirs d'intervention à l'échelle régionale
ou intermunicipale en matière de patrimoine urbain; le boisé de
Saraguay et le boisé des Sulpiciens sont des exemples.
Ainsi, nous recommandons (VIII) que la protection du patrimoine naturel
et bâti à caractère régional fasse partie
intégrante des domaines de compétence de la CUM.
Qu'un nouvel article 193 comporte divers pouvoirs de protection du
patrimoine tels que: le pouvoir d'entreprendre des procédure de
classement, de concert avec le ministère des Affaires culturelles, et de
les gérer par la délégation de pouvoirs, le pouvoir
d'assistance financière aux groupes et organismes voués à
la conservation du patrimoine naturel et immobilier identifié comme
d'intérêt communautaire.
Nous ne l'avons pas précisé dans notre mémoire,
mais nous voulons attirer l'attention de la commission parlementaire, sur le
fait que nos recommandations présentées pour la protection du
patrimoine diffèrent des articles du projet de loi no 33 qui traitent
des parcs et des arrondissements naturels dans la CUM.
Premièrement, nos recommandations veulent donner à la CUM
les pouvoirs d'initiative de la protection du patrimoine régional ou
intermunicipal. Alors, que le projet de loi no 33 ne nous donne que des
pouvoirs d'administration.
Deuxièmement, l'article 92a du projet de loi no 33 prévoit
des mesures pour la conservation du milieu naturel et de ses
éléments. Mais, il s'agit ici d'un milieu naturel à
l'intérieur des parcs seulement. Nous insistons sur la
nécessité de créer et de maintenir des sites naturels
conservés à l'état naturel, sans équipement de
loisir, et des sites culturels à valeur culturelle et historique, sans
devoir les aménager comme les lieux de loisir. Par exemple, une telle
loi aurait pu protéger le site historique du domaine des Sulpiciens
à Montréal.
De plus, nous prévoyons la nécessité d'initiative
prise par la Communauté urbaine de Montréal pour la protection
des édifices. La CUM n'y intervient pas à l'heure actuelle et
nous pensons que c'est essentiel de lui donner ce pouvoir.
C'est important d'apporter ces changements ou les différences
à la loi no 33. Mais il est tard. Alors, je vais lire seulement les
grands titres et je vais vous inviter à nous poser des questions.
On est toujours dans le principe III, en ce qui concerne l'action
foncière. Nous recommandons (IX) que soient confiés à la
CUM le pouvoir d'établir des réserves foncières pour fins
d'exécution de schéma, en particulier un droit de
préemption dans toute zone définie dans le schéma comme
zone à restaurer ou à protéger.
En ce qui concerne les plans d'urbanisme locaux, nous recommandons (X)
d'accroître le contenu obligatoire des plans d'urbanisme des
municipalités comptant plus de 15 000 habitants y compris la ville de
Montréal.
Nous voulons ajouter à l'article 134... non, je ne vais pas lire
cela, c'est dans notre mémoire. Ce sont des choses que nous voulons
ajouter à la loi no 134.
Nous arrivons aux recommandations qui s'appliquent aux
technicités du contrôle intérimaire. Nous recommandons (XI)
que le projet de loi impose le contrôle intérimaire à la
CUM dès sa mise en vigueur. Je souligne les mots "dès sa mise en
vigueur". Le contrôle intérimaire s'applique au projet de loi no
46, tel que proposé. Nous vous recommandons qu'il s'applique plus
vite.
Nous terminons avec la question de l'ajustement des pouvoirs d'urbanisme
et d'aménagement de la ville de Montréal avec ceux la CUM. Nous
revenons aux questions clés de notre mémoire: le droit du citoyen
de s'impliquer dans le contrôle et la maîtrise de son
environnement, et le processus qui obligerait les niveaux de gouvernement
à rendre des comptes. Les citoyens de la ville de Montréal
devraient avoir au minimum les mêmes droits de consultation, dans
l'élaboration et l'adoption des plans et règlements d'urbanisme,
que leurs concitoyens des autres municipalités locales du Québec
et de la CUM. Nous recommandons de rendre claire l'obligation, pour la ville de
Montréal, de se conformer aux règles générales de
la loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
À l'occasion de l'adoption de la loi 46, nous souhaitons voir
abolir les mesures d'exception concernant la ville de Montréal, par
exemple, l'absence d'un référendum en matière de zonage,
et l'obligation que la loi no 125 impose, en matière de consultation
publique, qui ne s'applique pas aujourd'hui, à Montréal.
M. le ministre, M. le Président, notre mémoire veut
s'inscrire dans l'évolution normale de notre société et
dans l'évolution normale du développement de Montréal.
C'est dans cette optique que nos recommandations vous ont été
formulées. Je vous remercie de votre attention et je demeure à
votre disposition pour toute question que vous voudrez poser.
Le Président (M. Gagnon): Merci bien, Madame. M. le
ministre.
M. Léonard: M. le Président, mesdames,
je veux d'abord vous remercier tout particulièrement du
mémoire que vous déposez. Je regrettre qu'il soit cette
heure-là, parce qu'à sa lecture, je pense qu'on pourrait passer
des heures à le discuter. Il est impressionnant par la précision
de ses recommandations, du sérieux de ses recommandations. Je sais
qu'à mon ministère, les fonctionnaires vont l'étudier
très attentivement. Ils l'ont déjà lu, ils m'ont fait des
commentaires, aussi, très élogieux à son égard.
Nous connaissons, tous, tout l'intérêt que vous portez à la
région de Montréal. Quant à moi, je parle souvent des
aspects négatifs de Montréal, à l'heure actuelle, dans le
sens où sa population diminue, et je trouve cela dangereux pour
l'avenir. Ce que vous apportez et l'intérêt que vous portez,
notamment au patrimoine de Montréal et à la qualité de vie
de ses citoyens, c'est par là, probablement, qu'il faut commencer pour
redresser la situation.
Vous faites différentes suggestions et j'aurais quelques
questions à vous poser là-dessus. Je voudrais simplement vous
dire que dans la Loi de la Communauté urbaine de Montréal, dans
la loi 46 que nous proposons, nous avons voulu inscrire à tout le moins
le principe que la loi 125 s'appliquerait mutatis mutandis à la
Communauté urbaine de Montréal. Nous savons, compte tenu de la
situation particulière de l'île, que la loi ne peut pas
s'appliquer intégralement, telle quelle. Il faudra y apporter des
modifications, il faudra ajuster les mécanismes, il faudra voir dans
quelle mesure la consultation peut être faite sur Montréal, tout
en tenant compte de sa situation démographique particulière. Nous
nous attendons à proposer des amendements dans ce domaine. Il y a une
chose que nous voulions, c'est susciter la discussion sur cette application de
la loi 125 sur le territoire de l'île de Montréal. (22 h 45)
J'ai bien noté la suggestion que vous nous faites d'une table de
concertation qui déborde le cadre de l'île de Montréal. Je
pense qu'on veut parler de la zone métropolitaine. Tout au long de cette
commission, nous avons employé le mot Montréal avec
différents sens, je pense bien. Il y a la ville de Montréal, il y
a l'île de Montréal qui est le territoire de la CUM, il y a la
grande région de Montréal qui correspond à peu près
à l'agglomération de Montréal parce que, avec 3 000 000
d'habitants, c'est bien la région qui fonde cette grande
métropole en Amérique et au Québec. Je pense que toutes
ces parties sont nécessaires et que chacune recèle sa propre
richesse. On peut agencer ou mieux redéfinir cela par
l'intermédiaire d'un schéma d'aménagement.
Le schéma d'aménagement, tel qu'on l'a défini dans
la loi no 125, comporte des décisions prises par les instances
politiques et, dans le cas de la région, l'instance politique
institutionnelle la plus large qui existe, c'est celle de la CUM. C'est pour
cela que, dès l'ouverture de la commission, j'ai parlé de la
possibilité d'instaurer une table de concertation qui se réunira
au besoin, probablement une fois ou deux par année dépendant, et
qui sera beaucoup plus large, qui devra être plus large que la seule
île de Montréal, parce que Laval fait partie aussi du grand
territoire, comme la rive sud, la couronne nord. Je pense qu'une usine comme
General Motors à Sainte-Thérèse fait partie du grand
complexe urbain de la région de Montréal et que Mirabel aussi se
rattache à cela; vous y avez fait allusion tout à l'heure.
Alors, moi, je crois qu'à un moment ou à l'autre il va
falloir réunir exactement ce que vous proposez: les autorités de
l'île de Montréal, de la ville de Laval, de la couronne nord et
sud pour parler des grands objectifs du schéma d'aménagement.
Nous l'avons fait au plan économique l'automne dernier, mais je sais que
là-dessus, cependant, on ne pourrait pas s'attendre à avoir une
institution politique parce que je pense que ce n'est pas nécessaire
d'en créer une, mais au moins qu'on ajuste son tir dans toute cette
région-là, de part et d'autre.
Je voudrais poser une question aussi sur une chose que vous dites au
tout début. J'aimerais vous demander comment vous conciliez un des
principes de la Loi sur l'aménagement, à savoir que
l'aménagement est décidé par des autorités
politiques, et la demande que vous faites que la commission de
l'aménagement comporte aussi d'autres personnes que les membres du
conseil au niveau, en tout cas, de la CUM. J'aimerais entendre vos
réflexions là-dessus parce que c'est bien sûr que vous vous
êtes posé vous-mêmes la question; peut-être que vous
remettez un peu en cause le principe général.
Mme Lambert: Oui, je crois que, sur le principe, c'est essentiel
que tous les intervenants, les gens qui sont impliqués ou qui ont
quelque chose à apporter devraient pouvoir faire une table ronde sur le
sujet, de la même manière qu'on doit avoir des comités sur
des sujets très précis dans n'importe quelle organisation, que ce
soit une organisation à but non lucratif ou une organisation d'affaires
ou une organisation de gouvernement. C'est dans cette optique que nous avons
soulevé ce sujet-là. Marie-Odile, est-ce que vous avez
songé à une structure spéciale là-dessus?
Mme Trépanier (Marie-Odile): On savait que vous alliez
poser peut-être cette question. Évidemment, il faut trouver le
principe d'abord et les mécanismes après. On
ne vous apporte pas un mécanisme; moi, je ne l'apporte pas.
M. Léonard: Mais vous verriez qui sur une commission de
l'aménagement comme celle-là?
Mme Lambert: D'accord, on vise des citoyens, mais pas des
citoyens qui n'ont pas... Je crois que la démocratie, quand même,
implique que les gens ont une formation; on doit parler des questions sur
lesquelles on a travaillé, pour lesquelles on a une certaine formation.
Alors, on pense à des citoyens qui ont oeuvré au conseil
d'administration des organismes qui s'impliquent dans les questions du
patrimoine, des questions d'urbanisme, des organismes variés - je ne
pensais pas uniquement à Héritage Montréal il y a pas mal
d'organismes qui pourraient apporter, qui apportent leur contribution, qui
vivent la situation de la ville tous les jours et qui ont pensé aux
questions théoriques et pratiques. Allez-y!
Mme Trépanier: Peut-être que je pourrais ajouter le
contexte particulier du territoire de Montréal, la diversité des
préoccupations, aussi l'existence de structures ou d'organismes ou de
groupes qui oeuvrent dans des domaines particuliers et qui sont propres aux
grandes villes, aux grandes agglomérations urbaines et cela permet un
débat. On devrait, dans la préparation du schéma
d'aménagement, favoriser un débat avec ces gens-là. On
peut aussi dire, d'un point de vue peut-être plus conjoncturel et compte
tenu des principes de démocratie que vous avez et que nous avons aussi,
pourquoi ne pas élargir le débat à d'autres que les fameux
deux blocs qui s'affrontent continuellement sur le territoire de la
communauté urbaine? Pourquoi ne pas mettre à la commission
permanente d'aménagement des gens qui ont des préoccupations
proprement de protection et d'aménagement du territoire sur des
thèmes comme l'environnement, comme le patrimoine, comme le logement?
Cela permettrait peut-être aux élus de se poser d'autres
questions, qui a le pouvoir sur telle ou telle autre question? C'est
peut-être aussi de façon très conjoncturelle un moyen de
débloquer à moyen terme certaines situations difficiles.
M. Léonard: Je suis tenté de vous poser une
question à ce moment-là. Est-ce que vous pensez que dans le cas
de la CUM, au lieu de prendre la loi 125, on devrait en rédiger une
autre ou insérer à l'intérieur de la Loi de la CUM toute
une série d'articles très adaptés à la
réalité de la CUM, ou bien prendre la loi 125 et essayer de
l'adapter par d'autres articles? Il y a des problèmes particuliers
où vous adhérez au principe de la loi 125, je comprends, mais,
techniquement, est-ce que ça serait mieux d'avoir une loi
particulière là-dessus, compte tenu que la situation est vraiment
différente? Quand vous parlez des groupes qu'il y a et qui
s'intéressent au problème -et je pense que c'est tout à
fait souhaitable qu'il y en ait le plus possible - vous vous demandez comment
les intégrer, si les mécanismes de consultation de la loi 125
sont trop lourds ou tellement mal adaptés qu'il vaudrait mieux
rédiger une autre loi.
Mme Trépanier: Probablement que si on adoptait la plupart
de nos propositions il faudrait les inscrire dans la Loi de la CUM avec un
chapitre spécifique sur l'aménagement.
Mme Lambert: Mais je crois aussi en même temps qu'il
faudrait apporter des changements à la charte de la ville de
Montréal pour que les consultations publiques puissent être
adoptées en même temps.
M. Léonard: En ce qui concerne la ville de Montréal
c'est vrai qu'elle est exclue de l'application. C'est un autre morceau auquel
nous voulons arriver le plus vite possible mais je pense que ce n'était
pas le lieu, dans la loi 46, de le faire. Je pense qu'on devrait y venir aussi
pour la ville de Québec parce qu'il reste deux villes non soumises
à toute la section urbanisme de la loi de l'aménagement, la loi
125. Pour cause, car ces villes ont des chartes particulières et il va
falloir effectivement adapter tout ça. J'en parlerai sûrement un
de ces jours avec les autorités de la ville de Montréal parce que
bientôt nous viendrons en commission parlementaire sur un bill
privé, ça sera une occasion. Je sais cependant que les
préoccupations grandissent sur ce plan à la ville de
Montréal.
Maintenant je voudrais poser une question, M. le Président, si
vous le permettez, sur le contrôle intérimaire. Je sais que
ça peut faire problème, vous en parlez à la fin. De par la
loi 46, vous pensez que la CUM, à l'heure actuelle, n'est pas
suffisamment assujettie à un contrôle intérimaire.
Mme Lambert: C'est-à-dire que quand il y a des
changements, il faut pouvoir protéger certains éléments,
certains endroits où il y aura des difficultés. Par exemple,
à l'époque où il y avait beaucoup de démolitions
à Montréal et qu'on pouvait faire classer certains
bâtiments, vous changez des lois de zonage dans la ville, les deux outils
qu'on avait. Il y avait des problèmes; si on annonçait qu'on
allait changer le zonage, il fallait absolument bloquer immédiatement
toute action et c'est dans la même optique qui est de protéger
certains endroits qu'au
conseil où il y aura une pression terrible entre l'annonce de la
loi et ... D'ailleurs, je crois que depuis dix ans il y a un projet qui
prépare ça et il sera peut-être possible de le mettre en
place.
M. Léonard: On me dit qu'il est presque terminé,
que la commission de l'aménagement aurait pratiquement terminé et
qu'elle serait prête à déposer le schéma d'ici
à quelques semaines ou à peu près un mois. On lui donne
une semaine de grâce parce que j'ai entendu dire trois semaines. Je pense
qu'il y a beaucoup de citoyens qui ont hâte de voir.
Maintenant, si on applique des mesures de contrôle
intérimaire très strictes, vous allez me dire que, par les temps
qui courent, étant donné les taux d'intérêt, qu'il
n'y a pas de construction et que ça ne change pas grand-chose, mais il
reste que ça peut geler passablement la construction sur le territoire
de l'île de Montréal. Comme par les temps qui courent, il n'y en a
déjà pas beaucoup, si on gèle tout ce qui reste, on peut
avoir quelques problèmes sur le plan économique aussi, ou on peut
les aggraver.
Mme Trépanier: La loi 125 prévoit non seulement un
contrôle intérimaire c'est-à-dire un gel mais aussi la
possibilité d'adopter un règlement de contrôle
intérimaire dans lequel il y a quand même pas mal de latitude.
Comme le disait Mme Lambert, puisque cela fait 10, 12 ans et même plus
qu'on y travaille à la CUM et qu'on a le projet de schéma presque
prêt, il semble que ce serait assez facile d'identifier les zones
problèmes, les zones où on ne voudrait pas de
développement ou de transformation radicale pendant un laps de temps
assez court et de les mettre dans un règlement de contrôle
intérimaire. Je pense que le problème qu'a soulevé M. Des
Marais - peut-être qu'on pourra me corriger - pourrait se résoudre
dans un règlement de contrôle intérimaire.
M. Léonard: Pensez-vous que ça peut causer des
problèmes, quant au contrôle intérimaire, le fait que la
ville de Montréal ne soit pas assujettie aux dispositions de la loi 125
quant à l'urbanisme alors que, sur le plan de l'aménagement, elle
serait assujettie? Avez-vous des opinions là-dessus?
Mme Lambert: J'ai sûrement mon opinion là-dessus en
ce qui concerne le processus démocratique. Il est essentiel, comme nous
l'avons mentionné dans notre mémoire, que la ville puisse
être responsable. On fait un non-sens, d'une part, en agissant à
huis clos. Dans le même sens, à Montréal, on a vu quant au
vieux port un processus de consultation qui était vraiment très
bien rédigé. Ce n'est pas une concession abracadabrante mais qui
était bien gérée avec quelqu'un qui était
responsable de susciter les opinions d'une façon ordonnée. On a
vu que finalement c'était le comité des citoyens qui a
proposé un projet qui était beaucoup plus responsable envers le
budget, envers le patrimoine et envers l'histoire de Montréal,
plutôt que le projet qui était proposé par les
technocrates, les architectes - je suis architecte mais je peux le dire -qui
était subventionné par le gouvernement. Ils y prêtaient une
meilleure attention, ils étaient beaucoup plus connaissants et beaucoup
plus attentifs au développement de la ville qu'aux grandes idées
qui sont trop facilement lancées. Dans ce cas-là, je trouve qu'on
souffre toujours en n'ayant pas cette possibilité de consultation
publique. (23 heures)
M. Léonard: Je vais laisser la place à d'autres et
je reviendrai tout à l'heure.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je suis très
heureux qu'on ait la chance de discuter plus particulièrement
d'aménagement de territoire. Il est cependant malheureux que l'heure
soit si tardive, car nous aurions pu passer plusieurs heures à en
discuter.
Je suis particulièrement intéressé parce que
l'Outaouais québécois a servi de projet pilote. En somme, la
Communauté régionale de l'Outaouais adoptait son schéma
d'aménagement en 1978 et le gouvernement a sûrement utilisé
certaines formes de consultation qui se sont faites dans l'Outaouais. Mais ma
préoccupation est au niveau de la consultation.
En théorie et en pratique, c'est très différent,
dans le sens que, tel que le veut la loi 125, la loi sur l'aménagement
du territoire, les prescriptions commandent certaines formes de consultation,
à la suite du schéma préliminaire, je me pose la question,
à savoir si, dans l'agglomération de Montréal ou à
la Communauté urbaine de Montréal, ça peut être
aussi facile d'intensifier une forme de consultation que ça peut se
faire dans des municipalités à densité beaucoup plus
faible et à population aussi beaucoup plus restreinte.
Vous avez mentionné tantôt les technocrates, les urbanistes
qui ont à créer le concept d'un plan d'aménagement; vous
êtes une professionnelle dans le domaine de l'architecture, mais il n'en
demeure pas moins que, pour vous, il y a un intérêt probablement
particulier qu'on ne retrouve peut-être pas dans l'ensemble des citoyens
où il y a peut-être un certain manque d'intérêt.
Je me suis aperçu, entre autres, que, lors de la création
de la Communauté régionale de l'Outaouais, on avait établi
des formes de consultation à l'intérieur de chacune des
municipalités et on avait tenté
d'atteindre la population. Premièrement, on avait invité,
par la poste, la population à des rencontres dans les différents
secteurs des municipalités. Malheureusement, tout l'effort que nous
avions fait pour activer cette participation - avec tous les mécanismes
qui avaient pu être offerts, par les médias d'information,
journaux et autres, même l'information adressée individuellement
à chaque numéro de rue - nous avait terriblement
déçu lors de nos rencontres d'information.
Je me pose la question, à la Communauté urbaine de
Montréal, étant donné qu'un schéma
d'aménagement, c'est quand même relativement technique et
même très technique, quelle incitation nous pourrions tenter
d'établir.
Mme Lambert: M. Rocheleau, je voudrais répondre à
votre question à trois niveaux.
Premièrement, je viens de donner l'exemple d'un système de
consultation sur l'utilisation de l'ancien port de Montréal. Dans ce
cas, le gouvernement fédéral avait payé le salaire d'une
personne qui devait s'occuper du secrétariat et de la coordination de
tous les groupes. C'était très bien structuré et je crois
que c'est très important de structurer une chose, parce que, si on
consulte des gens sans leur donner une structure, sans donner une forme, cela a
beaucoup moins de chances de réussir.
Deuxième volet de ma réponse: à New York, qui est
une très grande ville, il y a un système de consultation qui a
été établi quand le maire Lindsay était au pouvoir
il y a à peu près une dizaine ou une douzaine d'années,
peut-être plus, une quinzaine d'années, le temps passe vite. A
cette époque, on avait divisé la ville en quartiers de
consultation et il y a tout un processus qui existe dans ce cas.
Troisième volet, c'est l'expérience que j'ai eue avec des
groupes, comme Sauvons Montréal. Des gens venaient de partout, ce
n'étaient pas seulement des experts sur la ville. D'ailleurs, je crois
qu'on peut dire que le mouvement de la conservation du patrimoine n'est pas
venu des gens techniques; c'est venu de gens qui avaient un certain bon sens,
qui voyaient que leur quartier disparaissait, qui voyaient qu'il n'y avait pas
de parcs, qu'il y avait des problèmes au niveau du transport scolaire,
qu'il y avait des problèmes avec la circulation. Par exemple, le
quartier Milton Park à Montréal est venu de gens qui
étaient des sociologues ou des citoyens tout simples qui voyaient le
grand danger de la détérioration de la ville, le changement de la
trame de la ville, du zonage qui apportait des démolitions dans un
quartier où il y avait beaucoup de familles. Les gens ont du bon sens et
je crois que si on donne une structure, il y a toujours des gens du milieu
professionnel qui veulent venir les aider.
Quatrième volet, parce qu'on n'a pas eu de réponse
à une question et que c'est difficile de mettre des nouvelles structures
en place, on ne peut pas dire à cause de cela qu'on ne devra pas le
faire. On doit le faire, notre société évolue uniquement
parce qu'on met en place de nouvelles structures. On se débat, c'est
difficile, si cela ne fonctionne pas, on passe d'un autre côté,
mais on ne peut pas ne pas les mettre en place parce que des gens ne
répondent pas.
M. Rocheleau: II y aussi des points relativement importants. Je
sais pertinemment que dans la loi 125 comme telle, les mécanismes de
consultation sont quand même très rigides, s'ils sont suivis
à la lettre.
Mme Lambert: Rigides ou structurels?
M. Rocheleau: Structurels et très rigides aussi, au point
de vue d'inciter la population à une consultation et à une
implication. Mais il y a aussi, face à certains aménagements,
dans certains secteurs, des groupes de citoyens qui, pour des raisons purement
et simplement de contestation, peuvent soulever une protestation face à
une modification, un zonage qui pourrait, dans son ensemble, très bien
desservir un secteur. Or, parce qu'il y a des mouvements qui protestent...
Souvent, on veut établir un parc de récréation, tout le
monde en veut un, dans un quartier, mais personne ne le veut à
côté de chez lui. Souvent des personnes ou certains groupes
incitent d'autres à s'opposer. C'est là que je me pose la
question, à savoir laquelle des formules est la plus souhaitable avec
une table de concertation. Je pense que c'est important de consulter un groupe
de gens lors de l'évolution du dossier ou de la préparation d'un
schéma. Mais je n'ai pas encore trouvé la formule magique et
j'espère que le gouvernement, avec la compétence du
ministère des Affaires municipales, pourra nous offrir un
mécanisme plus fonctionnel.
Mme Lambert: Je crois qu'il n'y a pas de formule magique;
ça doit évoluer et c'est difficile, vraiment difficile. Parfois,
il y a des gens, oui, qui vont contre le bon sens, mais ça, c'est le
processus démocratique. Je crois que c'est mieux d'avoir le processus
même avec les difficultés que de ne pas l'avoir. Pour moi, c'est
facile.
M. Rocheleau: II n'en demeure pas moins que ce sont toujours les
gens d'un milieu donné qui ont à choisir le genre d'environnement
qu'ils veulent.
Mme Lambert: Vous savez, la meilleure
façon de rendre les gens responsables, c'est de leur donner des
responsabilités. Les gens peuvent rouspéter
énormément et tout ça, mais, du moment que vous leur
donnez des responsabilités, c'est eux qui vont avoir le cou sous la
guillotine. Ils vont agir d'une autre façon. Quand on est membre du
parti qui n'est pas au pouvoir, on n'a pas besoin de prendre les mêmes
responsabilités que les gens qui sont au pouvoir, non?
M. Rocheleau: Je vous avoue que nous sommes quand même
soucieux de la loi 46 telle qu'elle est proposée et aussi
indépendamment de tout parti politique ou de toute partisanerie. Sur
certaines lois, la question n'est pas toujours de faire de la partisanerie. Je
pense qu'on doit atteindre un niveau où la population, les citoyens
doivent obtenir la meilleure qualité de vie possible. Je pense
qu'à ce moment, il y a des consensus qui se développent aussi. Il
n'en demeure pas moins que j'ai eu des expériences au niveau municipal
où on a trouvé quand même très difficiles cette ou
ces formes de consultation.
Mme Lambert: C'est sûr.
M. Rocheleau: Nous avons a certaines occasions accepté des
recommandations qui étaient quand même très valables. Mais,
une fois la réalisation complétée, les gens qui les
avaient demandées étaient les premiers à critiquer ce que
cela avait apporté.
Mme Lambert: Qu'est-ce qui arrive quand la même chose est
proposée par les technocrates, les gens du gouvernement?
Le Président (M. Rodrigue): Mme la députée
de Maisonneuve.
Mme Harel: Je suis assez contente que ce soit vous qui terminiez
cette commission parlementaire, parce que vous introduisez un peu
d'oxygène dans un débat qui devenait très
étouffant. Sur la question de la consultation, il reste qu'à
l'extérieur, souvent, de Montréal, et les remarques du
député de Hull semblaient manifester un peu le même sens,
il y a bien des remarques qu'on a entendues souvent à savoir, que dans
une grande agglomération comme la communauté urbaine ou la ville
de Montréal, ce serait difficile de faire de la consultation, comme si
ça l'était plus dans une agglomération de grande taille,
par exemple, que ça peut l'être dans une MRC qui a pourtant une
grande superficie, mais composée de plus petites municipalités.
Évidemment, il y a des expériences qui ont été
faites, qui sont récentes et je pense qu'il y a un début, il y a
une évolution. La CIDEM, par exemple, je pense aux quais de conteneurs
Task. La CIDEM a organisé une consultation dans les quartiers qui
pouvaient être affectés par les conséquences et les gens
sont venus extrêmement nombreux. Il y a, par exemple, le cas du terrain
des usines Angus qui doivent faire l'objet d'une société
d'aménagement mixte, Montréal-Québec. Il y a un
début dans ce sens.
J'aimerais plutôt vous interroger sur la question de la
préemption, c'est-à-dire de votre recommandation concernant les
réserves foncières pour fins d'exécution du schéma.
Vous les envisagez dans des zones, vous le dites, à restaurer ou
protéger. Ce peut être de grandes superficies qu'on a à
restaurer ou à protéger actuellement à Montréal.
Vous envisagez cette espèce de réserve foncière par quel
mécanisme, de quelle façon?
M. Léonard: Ce n'est pas le droit de préemption
c'est n'importe quel immeuble. (23 h 15)
Mme Harel: Sur l'ensemble d'un territoire déterminé
par le droit de préemption, mais à ce moment-là, le
territoire qui est sujet à ce droit est défini, choisi dans le
schéma d'aménagement. C'est cela?
Mme Trépanier: La technique du droit de préemption
ou la technique de création de zones particulières dans
lesquelles on applique un droit de préemption, c'est très
utilisé en Europe, par exemple, en Erance, avec la technique des zones
d'intervention foncières dans lesquelles il y a automatiquement un droit
de préemption, c'est-à-dire des zones qu'on a identifiées
comme zones à problèmes, des zones dans lesquelles on veut avoir
une activité publique plus considérable. Au Québec, dans
les lois québécoises, les lois que votre gouvernement a
adoptées récemment, on commence de plus en plus à
introduire ce droit. Les réserves fauniques, maintenant, sont
accompagnées d'un droit de préemption. Il y a la
possibilité, avec le projet de loi no 33, de créer des parcs
intermunicipaux dans le territoire de la communauté urbaine avec
possibilité de négocier une entente qui donnerait à la
communauté urbaine un droit de préemption. C'est un
mécanisme qui mériterait, bien sûr, une analyse plus
considérable, qui pourrait d'ailleurs être appliquée
à l'échelle de tout le territoire québécois. En
gros, c'est la définition d'une zone dans laquelle s'applique le droit
de préemption. Nous avons précisé surtout des zones
à protéger ou à restaurer, parce que c'est notre
préoccupation. On ne voudrait pas que ce droit de préemption soit
utilisé pour n'importe quoi, pour créer des centres commerciaux
ou pour créer n'importe quelle activité au gré des
fantaisies des uns et des autres. Ce qui nous préoccupe, c'est que ce
soit utilisé pour des questions de protection,
surtout, du patrimoine ou de l'environnement.
M. Léonard: Vous donnez le droit de préemption
à la communauté plutôt qu'aux municipalités.
Pourquoi?
Mme Lambert: C'est la loi de la communauté, je crois, le
schéma d'aménagement.
Mme Trépanier: C'est une loi sur la communauté.
M. Léonard: Oui, mais cela pourrait être aux
municipalités, par exemple. À la ville de Montréal, il y
en a déjà, en tout cas, en bonne partie. Qu'est-ce qui...
Mme Lambert: Cela peut devenir dangereux aussi, d'un autre
côté, d'avoir trop de contrôles, parce que c'est un des
problèmes. Votre réaction sur une étendue trop grande,
c'est très bien, parce qu'on peut y faire beaucoup plus de dommages que
dans un petit endroit. C'est un des grands dangers qu'on a connus. D'ailleurs,
dans les analyses de Montréal qui, au fond, est une ville où,
dans le centre-ville, il y a de l'habitation, ce qui est très rare en
Amérique du Nord, une des questions, c'est que dans l'île de
Montréal il y a beaucoup de petits groupements et il n'y a pas tellement
de possibilité de réunir facilement de grandes étendues de
territoire. Je crois qu'il faudrait regarder cela de nouveau pour éviter
de grands rassemblements de terrains. C'est pour cette raison, dans cette
optique de la protection, peut-être, des boisés, des choses comme
cela.
M. Léonard: J'aimerais vous poser une autre question un
peu différente. Dans le cas qui nous occupe, surtout sur le territoire
de la ville de Montréal, où il y a quand même certains
problèmes ou beaucoup d'édifices en dépérissement,
pensez-vous qu'un mécanisme de crédit d'impôts fonciers sur
une période assez longue, ou l'équivalent en termes de
subventions, un crédit d'impôts fonciers sur la valeur
rénovée ou la valeur de la rénovation serait un dispositif
efficace pour ramener l'habitation, pour ramener la vie dans les quartiers du
centre-ville?
Mme Lambert: Évidemment, avec la hausse des impôts,
dernièrement, je crois que cela pourrait certainement aider, mais je
crois qu'il y a beaucoup d'autres mécanismes que nous sommes en train
d'étudier en ce moment. Il y a des mécanismes. En tout cas, nous
préparons un certain dossier là-dessus, mais je crois qu'on
touche toujours les anciens mécanismes sans voir les possibilités
ailleurs. Par exemple, je trouve que la formule des coopératives
d'habitation est une formule extraordinaire pour la conservation de la ville,
parce que vous impliquez les gens dans le milieu, c'est-à-dire qu'ils
sont propriétaires, et cela permet à des gens qui n'ont pas les
moyens, de grands moyens, d'habiter en ville et d'avoir une action dans la
ville. Les taxes deviennent très lourdes à un certain moment,
lorsqu'on a rénové des maisons. Les taxes augmentent très
vite, c'est un grand problème.
M. Léonard: Si on accordait un crédit d'impôt
foncier élevé, très élevé même, sur la
valeur de la rénovation, pas sur toute la valeur de la maison ou de
l'immeuble, mais sur la valeur rénovée, et sur une période
de temps assez longue, de sorte qu'on ne soit pas taxé au bout de deux
ou trois ans de façon extraordinaire ou exorbitante, mais seulement sur
une période de cinq à dix ans ou au bout de cinq ans à dix
ans. C'est une question que je me pose à l'heure actuelle, parce que
c'est une disposition qui pourrait exister pour des programmes particuliers
d'aménagement, d'urbanisme. Cela a déjà été
expérimenté. Vous ne trouvez pas cela très
révolutionnaire, mais est-ce que cela pourrait être efficace quand
même?
Mme Lambert: Vous savez, par exemple, on donne des crédits
très intéressants. Pourquoi ne peut-on pas aider les gens
ordinaires avec les taxes? Pourquoi ce doit être uniquement les grands
entrepreneurs qui ont ces crédits? D'un autre côté, les
villes donnent des aides avec les taxes et remettent les taxes à
beaucoup plus loin, quand elles veulent attirer l'industrie. Alors, pourquoi on
ne peut pas apporter ces mêmes aides à l'habitation?
Évidemment, vous pouvez dire que l'industrie apporte du travail et
augmente la monnaie qui circule. Mais il faut aussi voir cela de l'autre
côté; si on laisse périr les quartiers de la ville, il faut
les rebâtir et tout cela et replacer les gens. C'est tout un coût
et un déplacement social énorme.
M. Léonard: Une dernière question. Est-ce que vous
trouvez que les mécanismes de consultation de la loi 125 sont trop
lourds, trop rigides? J'entendais le député de Hull tout à
l'heure dire que les gens pouvaient s'opposer à un parc de
récréation. Je pense qu'ils s'opposent plutôt à un
parc de stationnement en général. Mais, est-ce que vous pensez
que les mécanismes de la loi 125 sont trop lourds, trop contraignants
à l'heure actuelle?
Mme Lambert: Je n'ai jamais eu d'expérience avec ces lois.
Je regrette, mais je ne peux pas répondre, je n'ai jamais eu
d'expérience.
M. Léonard: Je vous remercie beaucoup. Votre
mémoire va être analysé d'un bout à
l'autre.
Le Président (M. Rodrigue): Je remercie les
représentants de la fondation Héritage Montréal.
Je demande au rapporteur de la commission d'indiquer à
l'Assemblée nationale que la commission élue permanente des
affaires municipales a accompli son mandat qui était d'entendre les
personnes ou organismes relativement au projet de loi no 46, Loi modifiant la
Loi de la Communauté urbaine de Montréal.
Pour les remarques de clôture, M. le ministre.
Conclusions
M. Léonard: M. le Président, je voulais souligner
qu'il y avait au moins deux autres mémoires que nous n'avons pas
entendus. Je voudrais signaler l'intérêt qui va être
apporté au mémoire de M. Barcelo. Il nous a prévenus qu'il
avait été empêché par la maladie de venir ici.
Alors, son mémoire sera étudié. Nous avons reçu
aussi un autre document de la part du Comité des femmes sur la
sécurité publique de la ville de Mont-Royal, que nous allons
aussi analyser, quant à nous.
Je sais que ce soir, à 11 h 25, il reste peut-être peu de
gens, peu de journalistes, mais il en reste un fidèle, un journaliste du
Journal de Montréal.
Je pense que cette commission a soulevé beaucoup
d'intérêt. Je suis très heureux de tous les participants
qui sont venus ici et qui nous ont transmis leurs recommandations. Je les
remercie très chaleureusement. Nous avons eu plusieurs courants
d'idées. Je pense que les gens de la commission les ont
écoutés. En passant, je voudrais remercier aussi l'Opposition de
sa collaboration. Je crois, aux termes de cette commission, qu'il y a eu des
progrès marqués. Au début, je pense que certains
intervenants n'étaient pas très en accord avec le projet de loi
46 et, au fur et à mesure que les débats se sont
déroulés, je pense que l'intérêt a grandi et des
progrès se sont manifestés.
Il y a eu aussi des consensus qui ont été
manifestés par les intervenants. Je crois, après les avoir
entendus, qu'on peut conclure de façon définitive que les gens
sont d'accord pour qu'il y ait une communauté urbaine sur l'île de
Montréal. Nous avons voulu, par le projet de loi 46, l'améliorer,
nous avons recherché un meilleur équilibre. Nous voulons aussi
mieux "responsabiliser" les élus, impliquer davantage les citoyens et
les contribuables pour que les gens soient plus heureux à
l'intérieur de la Communauté urbaine de Montréal. Je pense
qu'on vise aussi de meilleurs services communautaires, aux plus bas coûts
possible, pour faire face aux défis qui existe toujours pour les grands
ensembles parce que le nôtre, c'en est un; c'est notre ville, c'est notre
métropole, au Québec, ses concurrents sont à Toronto,
à Calgary, ou ailleurs. Ici, il faut travailler ensemble
vis-à-vis des autres. Merci, une fois encore, à tout le
monde.
Le Président (M. Rodrigue): La commission élue
permanente des affaires municipales ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 23 h 27)