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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, September 10, 1997 - Vol. 35 N° 8

Audition du président de la Commission des services juridiques conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics


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Table des matières

Documents déposés

Exposé du Vérificateur général

Exposé du président de la Commission des services juridiques

Discussion générale

Remarques finales


Autres intervenants
M. Michel Côté, président
M. Henri-François Gautrin
M. Thomas J. Mulcair
M. Lévis Brien
M. Pierre Marsan
Mme Diane Barbeau
*Mme Céline Dubé, Commission des services juridiques
*M. Michel Samson, Bureau du Vérificateur général du Québec
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures neuf minutes)

Le Président (M. Côté): Je déclare la séance ouverte, constatant qu'il y a quorum. Alors, je souhaite la bienvenue au président de la Commission des services juridiques ainsi qu'à tout le personnel qui l'accompagne. La commission est réunie afin d'entendre le président de la Commission des services juridiques concernant la gestion des services d'aide juridique au Québec, conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

Je demanderais à M. le secrétaire s'il y a des remplacements.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Mulcair (Chomedey) a été désigné membre temporaire pour la séance.

(9 h 10)

Le Président (M. Côté): Merci. Bon, alors, nous recommençons nos travaux, en tant que commission, après une période de vacances, je pense, bien méritées pour tout le monde. Donc, aujourd'hui nous recevons justement la Commission des services juridiques. La manière dont on a décidé de procéder en tant que nouvelle commission, au niveau de la commission de l'administration publique, c'est que, suite aux rapports – le Vérificateur général fait deux rapports annuellement – donc suite aux remarques dans le rapport du Vérificateur général, nous, de la commission, décidons quels groupes nous désirons entendre conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

Pour ce qui est d'aujourd'hui, l'ordre du jour que vous avez en main, d'ailleurs, c'est: il va y avoir un exposé du Vérificateur général pour une dizaine de minutes; il va y avoir l'audition du président de la Commission des services juridiques; il va y avoir étude détaillée du rapport du Vérificateur général jusqu'à midi et suspension des travaux jusqu'à 14 heures, où il y aura reprise des travaux; à 17 h 20, remarques de clôture, président, Vérificateur et membres, 10 minutes; à 17 h 30, fin de la séance; à 17 h 35, séance de travail de la commission afin de déterminer les observations et conclusions préliminaires de la commission, pour un ajournement vers 18 heures. Mais, si les travaux sont terminés avant, bien entendu, ça pourra se terminer avant 18 heures.


Documents déposés

Vous constatez également qu'il y a beaucoup de documents qui ont été distribués aux membres de la commission. Alors, je pense que je demanderais aux membres de la commission l'acceptation du dépôt de ces documents. Est-ce que c'est accepté?

Une voix: Oui.


Exposé du Vérificateur général

Le Président (M. Côté): Donc, je demanderais, dans un premier temps, peut-être à M. le Vérificateur général de nous exposer, de nous faire une synthèse un peu de ce qui concerne les éléments de notre rencontre d'aujourd'hui suite à son rapport. J'aimerais aussi ajouter peut-être avant, M. le Vérificateur général, qu'il me fait plaisir de présider cette séance-là, aujourd'hui. Je suis le vice-président de la commission, donc, en remplacement du président, le député de Westmount–Saint-Louis, qui est absent présentement, en mission à l'extérieur du Québec, il me fait grandement plaisir de présider cette rencontre. Alors, je vous cède la parole, M. le Vérificateur général.


M. Guy Breton

M. Breton (Guy): M. le Président, madame, messieurs, le chapitre 4 du dernier rapport annuel du Vérificateur général à l'Assemblée nationale traite de l'étude que nous avons conduite, au cours de l'année 1996-1997, auprès de la Commission des services juridiques et de cinq des 11 centres communautaires juridiques. Afin de mieux situer cette étude, rappelons que ces cinq centres reçoivent à eux seuls près de 72 % des demandes d'aide juridique et que leur effectif représente 69 % de l'ensemble des ressources humaines du réseau. En 1995-1996, la subvention du gouvernement versée à la Commission s'élevait à 120 500 000 $. Le budget de la Commission était d'environ 4 500 000 $ alors que celui des centres totalisait 116 000 000 $. Environ 34 000 000 $ ont été versés à titre de rémunération aux avocats permanents des centres.

Le régime d'aide juridique a pour objet de faciliter l'accès des services juridiques aux personnes économiquement défavorisées qui répondent à certaines conditions d'admissibilité. Le rôle de la Commission est notamment de veiller à ce que les activités des centres soient conformes à la loi et aux règlements. Elle assure de plus le financement des centres par le versement d'une aide financière annuelle qui leur permet de fournir l'aide juridique aux bénéficiaires.

Des modifications importantes ont été apportées à la Loi sur l'aide juridique en 1996, et il était par conséquent difficile d'en évaluer les effets immédiats sur les activités du réseau. Toutefois, notre vérification portant principalement sur l'évaluation des mécanismes de gestion appliqués par la Commission et les centres, il est possible d'affirmer, à la lumière de nos constatations, que les récentes modifications législatives ne pourront pas corriger de façon significative plusieurs des lacunes qui ont été signalées dans notre rapport. Nous estimons donc que les faiblesses qui y sont relevées ne pourront être entièrement corrigées tant que la Commission et les centres ne se seront pas dotés des mécanismes de contrôle nécessaires.

Il importe également de signaler aux membres de cette commission que nous avons dû adapter nos travaux de vérification en raison d'une limitation importante qui nous a été imposée par les centres. En effet, les centres nous ont refusé l'accès aux dossiers des bénéficiaires pour des motifs qu'ils relient au respect du secret professionnel. Nous devons préciser que la consultation de ces dossiers était nécessaire, d'une part, pour évaluer plus précisément les déficiences que nous appréhendions au sujet de l'admissibilité des bénéficiaires et, d'autre part, pour dresser le profil et décrire la nature des services rendus de façon à nous permettre de mesurer adéquatement la prestation de travail et l'efficience des avocats permanents de l'aide juridique. Sur ce dernier point, il est important de souligner qu'il n'a jamais été de l'intention du Vérificateur général d'effectuer une vérification de la compétence juridique des avocats.

Les centres ont été informés que la loi oblige les employés du Vérificateur général à un devoir de discrétion qui les assujettit aux mêmes règles de confidentialité que celles que les centres ont eux-mêmes le devoir d'appliquer – l'article 54 de la Loi sur le vérificateur général. Le respect de la confidentialité est donc totalement assuré, puisque garanti par la Loi sur le vérificateur général. C'est du reste en raison même de cette garantie que la loi oblige les entités vérifiées à permettre au Vérificateur général de prendre connaissance de l'ensemble des renseignements relatifs à ses travaux de vérification – l'article 48 de la Loi sur le vérificateur général. À cet effet, vous n'êtes pas sans savoir que l'information ainsi communiquée n'est utilisée par le Vérificateur général que pour des fins d'échantillonnage et sans qu'aucune référence ne soit faite aux renseignements privés, personnels ou nominatifs dont il a pu prendre connaissance au cours de ses travaux de vérification. Il importe enfin de signaler que les renseignements dont veut prendre connaissance le Vérificateur général sont essentiels à ses travaux de vérification et que l'accès aux dossiers des bénéficiaires d'aide juridique est la seule façon de les obtenir afin qu'il puisse s'acquitter des responsabilités qui lui sont dévolues par la loi.

En terminant, nous devons également signaler aux membres de cette commission que des centres d'aide juridique ont suggéré que le différend qui les oppose au Vérificateur général soit soumis aux tribunaux. Ce serait un précédent, au Québec, et il ne m'apparaît pas souhaitable. Le Vérificateur général agit au nom de l'Assemblée nationale dans l'exercice d'une fonction qui en relève: le contrôle parlementaire des fonds et autres biens publics. Les centres, financés à même les fonds publics, sont assujettis à ce pouvoir de contrôle. Dans le présent cas, j'estime que c'est la responsabilité du Parlement en dernier ressort de déterminer l'étendue des pouvoirs du Vérificateur général. Il est donc hors de question pour moi, en ma qualité de personne désignée par l'Assemblée nationale, de faire intervenir le pouvoir judiciaire dans un différend qui oppose le Vérificateur général aux centres d'aide juridique.

Résultats des travaux de vérification. Le rapport du Vérificateur général à l'Assemblée nationale fait état d'un certain nombre de recommandations adressées à la Commission des services juridiques ainsi qu'aux centres visités et traitant notamment de l'analyse de la demande d'aide juridique, du resserrement des contrôles d'admissibilité, du recouvrement des coûts auprès des bénéficiaires, de la supervision des avocats, de l'évaluation et de la mesure de leurs prestations de travail, de la planification de leurs activités de même que de la reddition de comptes. Pour arriver à certaines des constatations exposées dans le rapport, des jumelages de fichiers ont dû être effectués avec le ministère de la Sécurité du revenu et le ministère du Revenu. Pour leur part, les centres n'effectuent aucun contrôle en ce sens, bien qu'ils puissent conclure des ententes à cet effet avec ces ministères. Les résultats obtenus démontrent, par exemple, que près de 35 400 bénéficiaires d'aide juridique ont déclaré, selon leur demande d'admissibilité, recevoir ou être en voie de recevoir de l'aide sociale, alors que, dans les faits, ils n'ont reçu aucune aide sociale, ni à l'ouverture ni à la fermeture de leur dossier juridique.

(9 h 20)

Par ailleurs, environ 82 700 bénéficiaires de l'aide juridique ont déclaré au ministère du Revenu des revenus supérieurs aux barèmes d'admissibilité en vigueur pendant la période couverte par notre vérification. Il est possible que ces bénéficiaires aient été admissibles à l'aide juridique au moment de leur demande, mais un meilleur suivi aurait pu permettre de détecter, le cas échéant, une amélioration de leur situation financière. Ce sont des bénéficiaires dont l'admissibilité à l'aide juridique peut tout au moins être mise en doute.

En résumé, nous estimons que la Commission des services juridiques et les centres communautaires juridiques doivent apporter des améliorations significatives pour en venir à une gestion optimale des 120 000 000 $ qui leur sont annuellement versés. En ce sens, rappelons que la Loi sur l'aide juridique confie à la Commission des services juridiques des fonctions importantes, notamment en matière de planification de l'évolution du système d'aide juridique. J'espère que ces propos seront susceptibles de permettre une reddition de comptes utile, complète et fiable et je demeure à la disposition des membres de cette commission pour répondre à leurs questions.

Le Président (M. Côté): Alors, merci beaucoup, M. le Vérificateur général, pour vos excellentes remarques. Et j'aimerais peut-être, avant de passer au président de la Commission, que vous nous présentiez les personnes qui vous accompagnent pour le bénéfice des membres de la commission.

M. Breton (Guy): D'accord. Alors, je suis accompagné de M. Jacques Henrichon, vérificateur général adjoint, de M. Michel Samson, directeur de vérification, responsable du mandat, et de M. Bertrand Carrier, qui était son adjoint au travail. Et j'ai nos deux conseillers juridiques, M. Alain Tremblay et M. Pierre Giroux.


Exposé du président de la Commission des services juridiques

Le Président (M. Côté): Merci. Alors, je demanderais maintenant au président de la Commission de faire de même et aussi de nous exposer ses remarques relativement à l'ouverture de cette rencontre. M. le président.


M. Pierre Lorrain

M. Lorrain (Pierre): Mme la députée, MM. les députés, M. le Président, j'aimerais d'abord, dans un premier temps, vous présenter ceux qui ont collaboré à la préparation du dossier que nous allons discuter ou débattre aujourd'hui: d'abord, à ma gauche, le vice-président de la Commission des services juridiques, Me Louis-Paul Allard; la trésorière de la Commission des services juridiques, Mme Céline Dubé, qui a travaillé plusieurs années comme trésorière dans une des régions les plus importantes du réseau et qui également travaille avec nous depuis plus de cinq ans, à la Commission des services juridiques; deux juristes de la Commission – je dis bien «de la Commission» – qui ont déjà pratiqué, par exemple, en réseau, chacun dans leur région respective, mais qui font partie de la direction de la division juridique chez nous, les Services juridiques, Me Lucie Dufresne, ici, derrière moi, et Me Monique Jarry, qui est aussi présente; et également un préposé chez nous, à la Commission, Me Richard Coulombe.

De 1972 à 1996, M. le Président, la loi a été modifiée à quelques reprises sans changements en profondeur et principalement dans le but de concordance avec d'autres législations. Cependant, depuis 1995, l'aide juridique est l'objet de bouleversements législatifs importants. En 1994, alors que j'arrivais à la Commission des services juridiques, s'est tenue ici même, à l'Assemblée nationale, une première commission parlementaire consultative de près d'un mois.

Le 11 mai 1995, le ministre d'alors déposait à l'Assemblée nationale un premier projet de loi, le projet de loi 87. Ce projet visait à modifier en profondeur les critères d'admissibilité et la couverture des services. Peu de temps après, le comité Schabas s'est constitué à l'automne 1995 suite au dépôt du projet de loi. Le 29 mai 1996, c'est-à-dire de l'année suivante, a été déposé le projet de loi n° 20 à l'Assemblée nationale, et ce dernier entrera en vigueur en deux étapes.

Le 26 septembre de l'an passé, 1996, les nouvelles dispositions sur l'admissibilité financière et la couverture des services sont entrées en vigueur, c'est-à-dire le premier volet, le volet qu'on qualifie de gratuit à l'aide juridique, et, le 1er janvier de cette année, 1997, le volet avec contribution, le volet contributif, qui est en vigueur maintenant, et qu'on applique, et que l'on gère, les permanents, en totalité depuis le 1er janvier 1997.

Je crois utile de vous rappeler que ce n'est que le 28 août 1996 que la version finale des règlements de l'aide juridique a été publiée dans la Gazette officielle , bien que la loi et les règlements aient pris effet le 26 septembre suivant, soit moins d'un mois après. De plus, c'est à compter du 17 octobre de l'an dernier, la même année, c'est-à-dire 1996, que nous devions appliquer un nouveau tarif d'honoraires des avocats pour la pratique privée. J'aurai l'occasion, au cours de la journée, de vous expliquer qu'actuellement, les permanents, nous gérons trois tarifs d'honoraires pour la pratique privée pour encore plusieurs mois. Je vous donnerai toutes les explications à cet effet.

Les difficultés rencontrées l'automne dernier ont créé beaucoup d'incertitude et d'inquiétude au sein du réseau d'aide juridique, et je ne veux pas rappeler de mauvais souvenirs, là, des mois d'octobre à aller jusqu'à janvier, février. Le comité dirigé par Me Henri Grondin, après plusieurs semaines de négociations entre le Barreau et le gouvernement, proposait des modifications aux règlements d'aide juridique et un nouveau tarif d'honoraires des avocats de pratique privée. Ainsi, quelques articles du règlement ont dû être amendés, c'est-à-dire le Règlement d'application de la Commission des services juridiques. C'est seulement le 23 juillet dernier, cette année, cet été, qu'un projet de règlement modifiant la pratique de l'aide juridique a été publié dans la Gazette officielle , entre autres modifiant l'admissibilité financière, touchant quelques modifications quant aux mineurs, et il prévoit maintenant une perception totalement gérée par les permanents. Auparavant, le projet de règlement prévoyait une perception du volet avec contribution par le privé quand il s'agissait d'un dossier privé, par les permanents quand il s'agissait d'un dossier accepté par un permanent. Ça propose également, ces nouveaux amendements, des normes de perception du volet contributif, c'est-à-dire des encadrements beaucoup plus stricts quant au recouvrement de la contribution, et enfin un nouveau projet également de tarifs parce que aussi, encore une troisième fois, c'est ce qui explique les trois tarifs en existence qui vont perdurer pour un certain temps, les tarifs des avocats de la pratique privée.

J'aimerais ajouter que la date d'entrée en vigueur de tous ces projets est pour nous, permanents, encore inconnue. Vous comprendrez tous avec moi que le personnel du réseau d'aide juridique du Québec, depuis mars 1994, vit des moments de changement, d'incertitude presque continuels, et, malgré tous ces imprévus et ces changements de direction, parfois provoqués par nous-mêmes, on l'admet, on a été très actifs dans l'évolution des projets qui étaient proposés, autant de règlements que de lois. Le réseau d'aide juridique et la Commission ont su relever avec succès l'immense défi de gérer et d'administrer une nouvelle loi, de nouveaux règlements très complexes, beaucoup plus nombreux au niveau des contrôles, alors que déjà nous assumions depuis déjà deux ans et demi des modifications majeures sur le plan de la gestion à l'interne et de l'implantation de nouveaux outils de gestion.

J'aurai sûrement l'occasion, au cours de cette journée, de revenir sur le rôle qu'ont assumé les différentes composantes de l'aide juridique du Québec, que ce soient la Commission elle-même via différents comités de transition pour gérer la réforme de l'aide juridique ou les représentants du réseau des différentes régions couvrant le Québec en son entier. Je peux immédiatement vous affirmer, M. le Président, ainsi qu'à tous les membres de votre commission, que le rapport du Vérificateur et les commentaires suscités par la presse en général et la population n'ont pas été sans effet auprès de notre personnel. Les commissaires ont pris très au sérieux le rapport du Vérificateur dans son ensemble, et, sans admettre pour autant la totalité des constatations ou des recommandations qui ont été formulées dans ce rapport, dès le premier jour du dépôt du rapport du Vérificateur, j'ai, en tant que président, émis certains commentaires, et de façon publique, très large, pendant une semaine, à l'effet que la Commission et ses commissaires considèrent tellement sérieux ce rapport qu'il n'est pas question de le remiser aux oubliettes mais plutôt de donner suite à certaines recommandations après en avoir discuté non seulement avec les commissaires qui gèrent l'aide juridique au Québec, mais également avec les autorités gouvernementales et le réseau, il va de soi, dans les semaines qui viennent. Vous comprendrez que, cet été, ce n'était peut-être pas l'occasion, avec les vacances de tous et chacun. Mais j'ai aussi, M. le Président, dit et répété à plusieurs reprises durant cette semaine, et cela, à toutes les occasions qui m'ont été données, que nous trouvions le rapport du Vérificateur général rassurant parce que plusieurs réformes, méthodes de travail, outils de gestion avaient été mis en place ou étaient à être complétés d'ici quelques mois, et ce, bien avant que le Vérificateur général débute ses travaux, à l'été 1996, tant à la Commission qu'en réseau.

(9 h 30)

Malgré toutes ces réformes, et tous ces changements, et ces virements, ces nouvelles complexités, ce changement de culture et d'approche de la nouvelle loi et de ses règlements, c'est vraiment un changement de culture, puis on aura l'occasion de l'exprimer clairement aujourd'hui, ce que c'était avant, ce que les différents gouvernements du Québec ont demandé aux permanents de l'aide juridique et ce que maintenant, avec sa nouvelle approche, la nouvelle économie de cette loi-là, la restriction des moyens que les Québécois ont de dépenser... C'est un choc pour le réseau dans son ensemble. Nous avons relevé et on va continuer de relever les défis, et ce, à la satisfaction non seulement du gouvernement, mais aussi des bénéficiaires.

J'avais mentionné, lors de notre premier contact avec le Vérificateur, que lui et son équipe venaient porter un jugement sur l'administration passée, l'été dernier, lorsqu'il a commencé, alors que nous étions à préparer la gestion de l'avenir de l'aide juridique. Et vous verrez tout le travail qui a été fait depuis le mois de juin l'an passé, c'est énorme la somme de travail. Le Barreau peut vérifier étape par étape tout ce qui a été fait pour pouvoir gérer en douceur, le plus aisément. On a eu des accrochages, ça, c'est sûr, c'est certain, mais dans l'intérêt des bénéficiaires de pouvoir gérer une transition aussi importante, alors qu'on avait un volume de clientèle de plus de 330 000 dossiers.

Lorsqu'on a initié la première loi en 1972, il n'y en avait pas de clients. Notre préoccupation, c'était d'ouvrir des bureaux; notre préoccupation première, c'était d'engager du personnel et de faire connaître une loi qui n'était pas connue des Québécois. Après 25 ans – parce que c'est notre 25e anniversaire – la loi de l'aide juridique est connue. Il y a un très grand volume dans nos bureaux et du jour au lendemain, en 24 heures, en quelques heures, on gère une nouvelle loi, un nouveau règlement, et on aura l'occasion de vous montrer comment ça peut être complexe. Et avec des outils de gestion d'informatique... bon, on n'a peut-être pas été chanceux, on était après implanter notre plan directeur d'informatique et la réforme est arrivée.

Je crois que tout au long de cette journée, vous aurez toujours à vous rappeler que la réforme de l'aide juridique, après 25 ans, est une réforme en profondeur de par sa philosophie; je l'ai mentionné tantôt. Et pour la majorité des permanents, ce fut un choc brisant des habitudes, parfois ancrées depuis 20 ans, et une gestion répétée année après année faisant partie du quotidien depuis le début des années soixante-dix. Mais sans aucun doute, et confirmé par tous les intervenants du milieu de la justice, quand même 25 ans de beau travail de la part des permanents de l'aide juridique qui ont l'exclusivité de la gérance de cette loi et de ce règlement. Je vous remercie.


Discussion générale

Le Président (M. Côté): Merci, M. le président. Alors, maintenant nous en sommes à l'étape de l'étude détaillée. Alors, je ne sais pas s'il y en a qui sont prêts à prendre la parole.

M. Gautrin: Oui, je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Côté): Oui.

M. Gautrin: Est-ce que le président n'a pas un complément de son exposé pour nous donner des diapositives, etc.? Dans votre intervention, j'ai cru comprendre qu'il y avait quelque chose qui est mieux...


Parallèle entre l'ancienne et la nouvelle loi sur l'aide juridique

M. Lorrain (Pierre): Au fil des questions, si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Côté): Oui, M. le président.

M. Lorrain (Pierre): ...je pense qu'il serait intéressant, pour le bénéfice des parlementaires, étant donné la complexité et le «deux mondes» de ces deux lois, de ces règlements, de peut-être faire un exposé de ce qu'était l'ancienne loi, de ce qu'étaient les conditions d'admissibilité et les critères de l'ancienne loi, et ce que nous exigent, depuis le 26 septembre – et non seulement depuis le 26 septembre, il y a eu des amendements, je vous l'expliquais tantôt, à quelques reprises – les conditions et les restrictions beaucoup plus encadrantes.

J'avais dit au mois de juin, pour répondre à certaines remarques de M. Breton, le Vérificateur général, que la première loi de l'aide juridique, qui a été quand même en force près de 25 ans, était une loi très permissive. Le législateur, l'avez-vous lu, avait permis à ceux qui administraient la loi, des largesses, des discrétions extrêmement importantes qui n'existent plus, qui ont peut-être porté à aller à certains abus – on n'est pas sans tache, on n'est pas sans faille, ça c'est définitif – mais qui ont été en grande partie réparés par la réforme qui a été mise en place et adoptée l'an passé, le 26 septembre. Et je pense que c'est important de voir en parallèle la très grande différence. C'est deux mondes. Puis vous allez voir le choc que j'expliquais tantôt pour nos permanents qui, pour eux, ont toujours géré un volet gratuit. À l'aide juridique, c'était gratuit. Les Québécois et Québécoises, l'aide juridique, c'est gratuit pour eux. C'est tout à fait nouveau, ça fait à peine huit ou neuf mois qu'on parle de volet avec contribution puis de recouvrements beaucoup plus serrés.

Le Président (M. Côté): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le président, les parlementaires sont présumés connaître le contenu des lois qu'ils ont votées, cette loi a été votée et débattue ici en Chambre. Je ne suis pas contre a priori l'idée de faire un bref aperçu, mais je désire savoir du président de la Commission combien de temps il compte passer là-dessus parce que nous on a plus des questions à lui poser qu'autre chose. Si c'est quelques minutes seulement, on est bien prêt à le faire, mais, si c'est pour faire 20 minutes là-dessus, on préfère passer outre.

Le Président (M. Côté): Alors, c'est pour combien de temps, M. le président de la Commission?

M. Lorrain (Pierre): Bon. Je vais me conformer au désir des parlementaires, du député de Chomedey. Je vais le faire rapidement. Il y a quelques fiches qu'on pourrait présenter, qui sont assez simples, claires, autant que ça. Vous avez à gauche... si vous me le permettez, je vais essayer de faire rapidement.

Le Président (M. Côté): Donc, c'est quoi, c'est une dizaine de minutes?

M. Lorrain (Pierre): Dix minutes, maximum. Vous m'arrêtez... M. le député.

Le Président (M. Côté): Est-ce que ça va?

M. Mulcair: Dix minutes, pas de problème.

Le Président (M. Côté): Très bien.

M. Lorrain (Pierre): Principe et objectif. L'ancienne loi, c'était d'abord un droit. C'est une très, très grande distinction par rapport à aujourd'hui, un privilège. Donc, le bénéficiaire qui veut maintenant s'adresser à l'aide juridique, il a un certain fardeau. Il doit faire un minimum d'efforts de nous fournir des renseignements, de fournir des documents et de nous faire la démonstration qu'il est admissible. Avant, tout le principe de la loi, c'était un droit. Alors, la mixité du régime a été maintenue: compétition entre l'entreprise privée, avocat permanent, toute personne économiquement défavorisée. Aujourd'hui, on dit: Toute personne admissible financièrement. Il doit faire un test beaucoup plus sévère. Et puis vous voyez, ça n'existait pas; le test du revenu, des biens et des liquidités n'existait pas. Auparavant, c'était un revenu hebdomadaire. Vous allez le voir sur une autre fiche.

Ancienne loi. Dépassement possible des barèmes de l'admissibilité. C'est peut-être la grande différence qu'il y a entre l'ancienne loi et la nouvelle loi. L'ancienne loi permettait aux directeurs généraux et aux comités administratifs des régions de dépasser et dépasser dépendant les conditions d'une famille. Une dame qui est hospitalisée, deux enfants, un accidenté, avec des coûts onéreux de déplacement ou de traitement, tout était pris en compte. Tandis qu'aujourd'hui le système ne permet plus cette discrétion à l'article 3 ni à l'article 4. Beaucoup de gens dans le passé, durant les 25 ans, ont été admis via ces discrétions-là, étant donné qu'on avait qu'à estimer le revenu hebdomadaire.

Pour vous donner un exemple, comparé à aujourd'hui, on évalue un revenu estimé annuel. Et le règlement qui a été publié cet été, qui va entrer en vigueur, va nous permettre de prendre en considération le rapport d'impôts de l'année précédente comme étant suffisant. Mais c'est toute une différence ça. Une année estimée de revenus par rapport au moment où l'individu vient dans ton bureau puis s'il ne gagne pas cette semaine-là, il est admissible. Et, si tu as réglé sa cause en deux semaines, même si dans trois semaines il gagne 30 000 $, c'est fini le dossier. Il était admissible. C'était l'esprit de l'ancienne loi.

C'était un service gratuit, je l'ai dit un peu tantôt. Les recouvrements, il y avait une possibilité de recouvrements mais minime. Dans la nouvelle loi, il y a un volet gratuit et il y a un volet avec recouvrements qui se trouve à viser la première couche de la classe moyenne au Québec, la première strate. Pardon?

Une voix: Volet contributif.

M. Lorrain (Pierre): Le volet avec contribution ou contributif – oui, excusez-moi – qui touche une première classe. Les seuils ont été augmentés naturellement, les seuils d'admissibilité. Vous verrez tantôt, il y a des classes, c'est calibré – on a des tableaux là-dessus – et il y a une plus grande accessibilité.

La couverture était totale. C'était la plus généreuse au Canada, et même en Amérique du Nord, celle du Québec. Il n'y a aucun système d'aide juridique, même européen, qui couvrait totalement les services sous toutes ses formes comme l'aide juridique du Québec le faisait. Aujourd'hui, bien, la nouvelle loi, couverture complète en matière familiale. Dans la nouvelle loi, on peut résumer ainsi: la famille, les jeunes, ont été totalement protégés; tout ce qui touche au droit administratif, au droit familial puis tout ce qui touche aux jeunes contrevenants ou demandes de protection, ç'a été conservé. Alors que dans la nouvelle loi, en criminel, il y a disparition de tout ce qui est statutaire et pénal, sauf exception. Et là on y ajoute des couvertures exceptionnelles, qu'on appelle discrétionnaires, mais qui sont extrêmement encadrées et limitées. Et on vous donne un peu les motifs: circonstance exceptionnelle, tort irréparable, etc.

On couvrait tout ce qui était juridique. Ça pouvait aller jusqu'à une mise en demeure, représenter quelqu'un qui vient avec un problème avec Hydro-Québec, une coupure d'électricité par le propriétaire parce que tu es trois jours en retard de payer ton loyer. On faisait beaucoup de droit préventif. C'était permis par l'ancienne loi. On faisait beaucoup de consultations, parce qu'il faut penser aussi que la clientèle qui vient à l'aide juridique est une clientèle – puis je m'excuse d'employer ce terme – extrêmement démunie, parfois désorganisée, et ce n'est pas leur faute. Ce sont des gens qui ne sont pas préparés des fois à affronter les tribunaux. Ce sont des gens souvent mal préparés à se défendre contre l'appareil de l'État. Et ce sont des gens qui ont besoin de conseils.

Alors, quand je dis qu'ils sont parfois désorganisés, c'est que seulement de trouver un talon de paie, de résumer les factures ou les dates qu'ils ont, c'est très compliqué pour eux. C'est souvent des illettrés, c'est souvent des gens qui ont été très peu à l'école. Alors, ces gens-là ont besoin d'assistance. L'ancienne loi qui avait un aspect social, en d'autres termes, que la nouvelle loi limite et de beaucoup, tout en conservant l'essentiel, augmentant les seuils et encadrant les conditions d'admissibilité autant sur la plan financier que sur le plan de la couverture. On a conservé l'essentiel dans la nouvelle loi, tandis que dans l'ancienne loi on couvrait tout, mais tout.

(9 h 40)

Le Président (M. Côté): Alors, merci, M. le président, de nous avoir rafraîchi un peu la mémoire relativement à l'ancienne loi et à la nouvelle loi qui s'applique maintenant. Alors, je céderais la parole maintenant au député de Chomedey.


Accès du Vérificateur général aux dossiers des bénéficiaires dans les centres régionaux

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, au nom de l'opposition officielle et à titre de porte-parole en matière de justice, il me fait extrêmement plaisir d'accueillir avec nous le président de la Commission ainsi que le Vérificateur général.

On doit remercier le Vérificateur général non seulement pour le fond de son rapport qui est aussi fouillé et aussi bien préparé et présenté que d'habitude, mais aussi pour le ton de son intervention aujourd'hui que nous, comme parlementaires, apprécions énormément et pour le point de vue qu'il a si clairement exprimé, à savoir qu'il est notre chien de garde. Il travaille pour vérifier que les sommes qui sont votées par l'Assemblée nationale sont dépensées conformément à la volonté de l'Assemblée nationale.

Le Vérificateur général aujourd'hui, M. le Président, nous explique qu'il y a un grave problème de gestion et qu'il y a des gens qui le bloquent dans son travail. Alors, loin de parler du beau travail des permanents de l'aide juridique, comme le président de la Commission a fait à la fin, c'est loin de notre pensée, ça. Personne n'est en train de mettre en doute le travail des permanents de l'aide juridique. Ce qui est interpellé devant cette commission aujourd'hui, c'est la compétence de la gestion du système d'aide juridique par la Commission qu'il préside et par les centres communautaires. C'est de ça qu'il s'agit. Alors, j'apprécie le sentiment du président de la Commission qui vient à la rescousse de ses permanents qui doivent se sentir, eux, interpellés dans toute cette question-là. Je tiens à les rassurer. C'est loin d'être le cas. Ce que nous avons, c'est un budget d'au-delà de 100 000 000 $ qui est mal géré. C'est ça, le problème. C'est de l'argent du contribuable, et on n'est pas capable de dire si c'est dépensé conformément à la volonté du Parlement du Québec.

Je commencerais, M. le Président, en posant une question au président de la Commission. Est-ce qu'il peut nous dire, aux termes de la loi, ancienne et nouvelle, quelle est l'obligation première de la Commission des services juridiques? Quelle est son obligation première aux termes de la loi?

Le Président (M. Côté): M. le président.

M. Lorrain (Pierre): D'abord, donner des services aux bénéficiaires en fonction de la loi et des règlements.

M. Mulcair: M. le président, je suis content d'entendre cette réponse-là, parce que ce n'est pas ce qui est écrit dans la loi. Ça va nous permettre de retourner à la loi, parce que c'est ce dont il s'agit lorsqu'on est dans un parlement et qu'on regarde en commission parlementaire ces questions-là.

Aux termes de la loi, M. le Président, au titre des fonctions et devoirs de la Commission, tel que prévu dans la loi, la Commission doit veiller à ce que l'aide juridique soit fournie dans la mesure établie par la présente loi et les règlements aux personnes financières admissibles. Veiller à quelque chose de proactif. Ce n'est pas juste surveiller, c'est «veiller à». C'est une obligation positive qui est imposée à la Commission, et il y a une différence entre ce qu'a retenu le président au nom de la commission et ce qu'a retenu le Parlement au nom des électeurs de cette province.

C'est important cette nuance-là. Ils ont le devoir de veiller à ce que l'argent soit dépensé conformément à notre volonté. On a changé la terminologie; maintenant, on parle de financièrement admissible plutôt que d'économiquement défavorisé. C'est parce qu'on a introduit tous les changements dont il a parlé. Il a toute notre compassion pour l'importante série de changements qui sont survenus au cours de la dernière année en matière d'aide juridique. C'est vrai que c'était sans doute extrêmement difficile. Mais je me rapporte à ce que le Vérificateur général a si clairement dit tantôt et que nous partageons. C'est que ce ne sont pas ces changements-là qui sont les causes des problèmes qui ont été soulevés et repérés par le Vérificateur général, et ce ne sont pas ces changements-là qui vont répondre à l'ensemble des observations faites par le Vérificateur général. C'est important ça. Il faut vraiment le retenir.

Alors, tout en suivant le président de la Commission lorsqu'il nous explique l'année difficile... Et on le partage. On l'a soulevé en Chambre. On savait que c'était le chaos, que les changements se sont succédé d'une manière rapide, et les structures n'étaient pas nécessairement en place. Le président de la Commission le sait, aussi bien que les membres de cette commission le savent, le problème, c'est le refus obstiné des centres de fournir l'information que les élus ont droit d'obtenir.

Pour faire une analogie, M. le Président, l'argument des centres est aussi absurde que l'argument qui serait avancé par un CLSC ou une régie régionale ou même une clinique privée qui refuserait accès, par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, à ses registres prétextant le secret professionnel des médecins. Le médecin qui aurait facturé la RAMQ pour 3 000 000 000 $ dans une année pour des accouchements de femmes de 80 ans et plus serait à l'abri parce qu'il pourrait arguer de son secret professionnel. L'argument ne vaut pas le papier sur lequel c'est écrit. Ça vole dans la face de toute la jurisprudence qui existe dans cette matière-là. Et pourtant on est ici aujourd'hui avec un Vérificateur général qui a ses propres budgets, on prend notre temps comme parlementaires et on doit essayer de percer ce voile-là pour la bonne et simple raison que la seule réponse que le Vérificateur général a reçue jusqu'à date, c'est: Bien, si vous n'êtes pas d'accord avec ça, allez en cour.

J'apprécie la réponse du Vérificateur général. Il n'a pas à aller en cour pour ça. Mais nous, comme parlementaires, on va assumer nos responsabilités. Et, si vraiment il y a quelque chose qui manque côté clarté dans la loi – ce que je n'admets pas – si c'est la meilleure manière de parvenir à lever ce voile, vous n'avez qu'à nous le dire. On va prendre note et on va agir tout de suite. Parce que des deux côtés – ce n'est pas une affaire partisane aujourd'hui – on est scandalisé d'apprendre qu'il n'y a pas moyen de savoir si cet argent-là a été donné à des gens qui étaient admissibles au terme de la loi.

Alors, j'aimerais, M. le Président, dans un premier temps apprendre du président de la Commission quelle est son appréciation de l'avis juridique, sous forme de lettre, qui a été fourni. C'est exactement les mêmes propos, donc c'était concocté, concerté entre les commissions au niveau local, ceux qui donnent les services. Je veux savoir la réaction qu'il a au plan juridique de leur avis et ce qu'il nous suggère comme solution pour régler le problème

Le Président (M. Côté): M. le président de la Commission.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, je prends bonne note de la première remarque que vous avez mentionnée, que vous aviez fait part tantôt à la Commission, M. le député de Chomedey, vous avez parlé d'un problème de gestion à l'aide juridique. Je retiens certaines paroles du Vérificateur général au tout début du mois de juin lorsqu'il a déposé ici même, à l'Assemblée nationale, le rapport – son premier rapport en tant que Vérificateur – et le chapitre IV concernant la Commission des services juridiques. M. le Vérificateur, en toute honnêteté, a mentionné qu'il y aurait probablement plusieurs réponses qui pourraient être apportées à certains croisements ou certains résultats de ces croisements constatés suite à ses études – qui se sont échelonnées quand même sur six, sept mois, dans cinq régions et également à la Commission des services juridiques – mais qu'il maintenait ses recommandations, qu'il maintenait ses constatations parce qu'il n'avait pas pu voir – et c'est les termes que le Vérificateur général a employés au mois de juin – et que la permanence, le réseau, avait peut-être beaucoup de raisons et de possibilités de justifier certaines découvertes qui avaient été faites par croisement de fichiers avec le peu d'informations qu'il a eues.

(9 h 50)

M. le Président, il faut ramener les choses dans leur état à ce moment-là. Ce qu'a eu le Vérificateur général, pour pouvoir faire sa vérification, il a eu accès au fichier, à la Commission des services juridiques, de toutes les demandes qui avaient été enregistrées dans le fichier chez nous, sauf le nom. La Commission des services juridiques, pour permettre au Vérificateur général de prendre accès, de pouvoir entrer dans notre fichier, on a obtenu l'autorisation des 11 régions. Parce qu'il y a une chose qu'il faut bien comprendre: la Commission des services juridiques n'est pas propriétaire de l'information; elle n'est que détenteur dans le but de confectionner, soit de consolider des rapports statistiques ou autres. Et tout ce que détient la Commission des services juridiques, c'était une copie des DA – qu'on appelle en terme jargon, à l'aide juridique – c'est une copie des demandes d'admissibilité qui, je vous avoue, dans l'ancien système étaient souvent écrites au plomb, très incomplètes. Il y a plusieurs remarques qui sont justifiées de la part du Vérificateur, parce que, bon, d'une région à l'autre puis de la façon dont c'est fait, dépendant de la personne qui procédait à l'admissibilité, oui, c'est vrai, ça pouvait être incomplet. Maintenant, on ne possédait pas en juillet, et on ne possède toujours pas, les commissaires, copie de tous les dossiers des permanents et des avocats de pratique privée depuis 25 ans. Ce serait inutile pour nous, la Commission, d'avoir... D'abord, ça nous prendrait trois étages de plus, au moins 50 avocats de plus pour classer ça, analyser ça. On n'en voit pas l'utilité.

Alors, ç'a été la surprise de l'équipe du Vérificateur général de voir le refus systématique qu'elle s'est fait opposer par le réseau qui, eux, ont les dossiers, qui, eux, gèrent l'admissibilité, qui, eux, pratiquent le droit au quotidien et qui protègent le secret professionnel de leur avocat. Bon, l'équipe du Vérificateur – M. Samson pourra en témoigner tantôt – pensait que nous avions un double de tous ces dossiers à la Commission des services juridiques.

Je pense que tout le problème, le fait qu'on est ici ce matin... Puis je ne suis pas contre, comme ancien président de l'Assemblée nationale. Je comprends très bien tout le rôle de la commission, M. le Président, et encore plus pour avoir travaillé pendant quatre ans avec le Vérificateur d'alors; son rôle est très important, et ça a été compris. Chez nous, on a totalement, totalement collaboré avec le Vérificateur général.

À la première occasion, en juillet, l'an dernier, lorsqu'on nous a remis une liste de documents, d'études, d'enquêtes, de chiffres, on a tout remis. Mais on a offert plus que ça au Vérificateur. Et on l'a fait, et ça a été accepté. On a donné plusieurs séances d'information au Vérificateur général avant qu'il commence à aller en réseau pour qu'il comprenne bien – par ce que j'ai mentionné tantôt – qu'il venait analyser le passé, mais qu'on était après préparer l'avenir, puis que le passé se gérait d'une façon, que l'avenir était pour se gérer d'une autre façon et que la réforme apportait plusieurs, plusieurs réponses à peut-être des vides passés. Ceci étant dit, je n'ai pas participé et ni les commissaires n'ont participé aux rencontres des juristes ou à la décision d'engager des juristes en réseau; j'ai été mis au courant, par exemple, par l'équipe du Vérificateur du refus de donner accès en tout ou en partie aux dossiers.

Je vais risquer beaucoup parce que j'y crois et je pense que quand vous dites: Le problème de gestion... Moi, j'ai marqué tout de suite au tout début, peut-être qu'il n'y aurait pas un problème de gestion, on ne parlerait pas d'un problème de gestion ce matin si la transparence, un minimum de transparence, avait été acceptée au tout début lors de la venue du Vérificateur général chez nous.

On ne vous cachera pas que ce que M. Breton et son équipe... Pardon?

M. Mulcair: J'espère que vous ne nous cacherez pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lorrain (Pierre): C'est peut-être ma façon de parler, M. le député de Chomedey, mais c'est... Je n'ai pas l'habitude de cacher. Non, mais, plus sérieusement, vous saurez, MM. et Mmes les parlementaires, qu'il y a des choses aussi auxquelles la Commission n'a pas accès. Le Vérificateur n'est pas seul à ne pas avoir accès. Ça fait des années qu'on veut avoir accès pour mieux comprendre le contenu des dossiers, refaire rapport et rendre compte au gouvernement de façon plus détaillée. Je pense qu'un minimum de transparence aurait été très utile. Je m'explique et là je ne me place plus comme président de la Commission des services juridiques; c'est Pierre Lorrain qui parle, et c'est mon opinion personnelle.

J'ai pratiqué moi-même le droit 15 ans. Je crois qu'on aurait eu intérêt à s'asseoir avec le Vérificateur, à impliquer le Barreau immédiatement au tout début et à trouver un compromis permettant à l'équipe du Vérificateur de prendre connaissance, vu qu'il est tenu à la confidentialité comme nous. Puis peut-être qu'on serait arrivé à une entente. Le petit peu de secret professionnel qui est maintenu dans un dossier par rapport à toute la charge de travail qui est faite, qui devient public immédiatement lorsque c'est déposé à la cour... tout rapport d'expert une fois déposé à la cour est public. Toute défense en divorce, toute action en demande, peu importe, lorsque déposée et inscrite au plumitif, est publique.

Je crois que ça a été peut-être le début d'un problème qui nous mérite aujourd'hui des jugements que je trouve sévères quand on parle de laxisme et de problèmes de gestion. Je pense que, si l'équipe du Vérificateur avait pu constater certaines choses, il y en a peut-être beaucoup de ces choses qui s'expliquaient par l'ancienne loi, la façon de la gérer et la façon dont les différents gouvernements ont maintenu cette façon de faire au su et au vu de tous. Il n'y avait pas... même le Barreau ne s'en plaignait pas, de la façon dont était gérée la loi pendant ces 25 premières années là. Je m'excuse, mais le défaut de transparence des fois, ça ne pardonne pas puis ça fait très mal. On a l'impression de remonter le courant ce matin.

M. Mulcair: Oui. M. le Président.

Le Président (M. Côté): Question en complémentaire? M. le député de Chomedey.


Opinion juridique justifiant le refus d'accès

M. Mulcair: Oui. Merci beaucoup. On voit qu'effectivement non seulement le président de la Commission a de l'expérience comme avocat, mais aussi comme président de l'Assemblée nationale, parce qu'il a sans doute vu pendant de très nombreuses années des politiciens esquiver des questions avec des longues réponses qui n'avaient pas de rapport avec la question.

Alors, je reviens à ma question qui concernait l'opinion juridique qui avait été donnée par les centres pour justifier leur refus de donner accès. Je l'ai qualifiée d'absurde, M. le Président, et je m'appuie sur une longue lignée de jurisprudence. Plus récemment encore, la Cour d'appel de Nouvelle-Écosse a été très claire là-dessus. La lignée de jurisprudence Mutual Life en matière de privilège et de confidentialité des renseignements entre avocats et clients, qui est un privilège qui existe aux termes de la Common Law et, comme nous le savons tous, donc, le législateur peut le changer à son gré s'il n'est pas d'accord, tout comme le fait l'article 231b, si ma mémoire est bonne, de la Loi sur les impôts qui prévoit certaines atténuations: Qu'est-ce qu'on a le droit d'obtenir dans les comptes de fidéicommis, d'une part, dans les chèques, etc., des avocats, d'autre part? S'il y a un problème à cet égard-là, on est prêt à agir. Donc, je veux revenir, M. le Président, et je passerai la parole à mes autres collègues après, mais je veux vraiment une réponse à cette question.

Dans la mesure où la Commission a comme devoir premier de veiller à ce que l'aide juridique soit donnée seulement aux gens qui y ont droit et dans la mesure où il y a une opinion juridique qui a été fournie qui a dit: le Vérificateur général n'a pas le droit de savoir si on a donné l'aide juridique aux gens qui y avaient accès, à la lumière de ce que le président de la Commission vient de nous redire – que ce n'est pas de sa faute à lui, ça fait longtemps, ça a été fait au vu et au su de tout le monde, la transparence aurait été meilleure – deux questions nous restent. Est-ce que le président de la Commission a infirmé l'opinion juridique donnée par les centres et, si oui, est-ce qu'on peut en avoir une copie? Et deuxièmement, lors des deux refontes de la loi auxquelles il a fait référence, les projets de loi n° 87 et n° 20, est-ce qu'il a demandé au ministre de changer cet aspect-là de la loi pour enlever le problème de transparence qu'il a vu et, le cas échéant, est-ce qu'il peut partager avec nous la lettre ou les documents dans lesquels il a demandé un tel changement?

M. Lorrain (Pierre): Non, je n'ai pas fait ces suggestions-là à M. Bégin, qui était alors ministre de la Justice. La problématique ne s'était pas posée, et je m'explique ainsi. Ce n'était pas la première fois que le Vérificateur général vérifiait la Commission des services juridiques et le réseau. Il était rendu à la quatrième fois, et les trois premières fois le Vérificateur général avait accepté de respecter – je vais nuancer, là – le fait qu'il ne pouvait pas avoir accès aux dossiers, de respecter la confidentialité, tel qu'argumentait le réseau. Je n'ai pas été mêlé d'aucune façon; je n'ai pas eu d'échanges et d'opinions, je n'ai pas eu à émettre d'opinions. Vous comprenez que chacun des réseaux est un employeur en soi, qu'il répond à un conseil d'administration qui est une personne morale, les décisions qui sont prises là... Je ne savais même pas qu'il y avait des discussions à un moment donné entre les juristes du Vérificateur général; je l'ai appris une fois que ça a été très avancé, là, puis que c'était quasiment des positions irréconciliables. Et, dans notre cas, on n'a pas eu à se mêler à ce débat, on n'avait pas de dossiers.

Ceci étant dit, je n'ai pas en aucune façon... Parce qu'à ce moment-là, au moment où les réformes sont mises en place, on n'a pas cette problématique-là. Le projet de loi actuel a été adopté avant que M. le Vérificateur vienne chez nous. Puis, lors du projet de loi en 1987, ni en commission parlementaire, ni en aucun moment au comité Chabas, on a parlé de ces expériences. Les trois autres fois que le Vérificateur général est venu chez nous, je n'y étais pas, je n'étais pas président. Et il semblerait que ça n'a pas posé problème. Sauf – et c'est ça, la grande distinction – qu'auparavant c'était une vérification plus comptable, et maintenant c'est une vérification intégrée. Et chacun des directeurs généraux et chacun des membres des conseils d'administration de chacune des régions s'est fait expliquer ce qu'était maintenant la vérification intégrée, que c'était beaucoup plus contraignant et que le Vérificateur voulait aller beaucoup plus loin – c'est la loi qui le permettait et c'est Québec qui l'a décidé ainsi – que de faire simplement une vérification comptable comme les trois premières fois, les trois premières expériences durant les années, je pense, mi-soixante-dix, début 1980, et la dernière fois, je ne pourrais pas vous dire, là, c'est fin 1985-1987, je n'étais pas là.

(10 heures)

Je maintiens mon opinion personnelle. J'ai pris connaissance de l'opinion du bâtonnier actuel, Me Francoeur; il va de soi que chez nous, à l'interne, on a examiné ça. C'est vrai que l'aspect secret professionnel est protégé par l'article 9 de la Charte québécoise, mais il y a toujours moyen de s'asseoir, de faire entente et de protéger cette partie du secret professionnel, parce que ça représente peut-être 5 % dans certains dossiers, 4 %. C'est l'échange qu'il y a – vous le savez, M. le député de Chomedey, vous êtes avocat vous-même – entre le client et l'avocat, mais toute la balance, c'est public. C'est ça qu'on aurait dû rendre public et c'est pour ça qu'on aurait dû s'asseoir et trouver un moyen, une méthode tout en gardant la confidentialité pour permettre au Vérificateur de vérifier si ces croisements entre les fichiers de la Sécurité du revenu et du Revenu étaient fondés ou pas.


Structure de la Commission des services juridiques

Le Président (M. Côté): Merci, M. le président. Pour faire suite aussi à l'intervention du député de Chomedey, peut-être pour mieux se situer, M. le président, j'aimerais qu'on me parle un petit peu de la structure, parce qu'il y a la Commission, il y a 11 centres communautaires juridiques, il y a 140 bureaux. Dans le public, quand on parle de services juridiques, c'est la Commission des services juridiques. Bon, il y a 11 centres communautaires juridiques et 140 bureaux. C'est quoi, la structure? Comment c'est composé? Quel est le lien de pouvoir d'intervention que vous avez, la Commission versus les centres et aussi les bureaux? Je pense que ça nous situerait encore davantage sur l'intervention qui vient de nous être posée. Alors, M. le président de la Commission.

M. Lorrain (Pierre): Si vous me permettez, M. le Président, avant de passer à cette acétate, j'aimerais avoir A-13 qui est les principes de gestion nouveaux qu'on ne retrouvait pas, mais qui étaient implicites dans l'ancienne loi et qui sont carrément inscrits dans la nouvelle loi de l'aide juridique. Ça, il faut retenir ça: coordination, cohérence, concertation, collaboration. Mais, jusque-là, après la concertation, collaboration, cohérence, coordination, il n'y a pas d'outil, il n'y a rien de contraignable dans ça. Ça se fait par la concertation. Dans la nouvelle loi, à l'article 3.2, c'est les principes de gestion qu'on y a inclus.

Maintenant, j'aimerais avoir le graphique A-23. On va vous faire souffrir un peu. Je vais vous le lire. La case en haut, c'est la Commission des services juridiques avec un conseil d'administration de 12 commissaires nommés par le gouvernement. Il y a un comité administratif, trois commissaires, secrétaire, président, vice-président, qui gère des questions particulières, l'article 4.13 qu'on utilise peu souvent. À la Commission des services juridiques, il y a seulement cinq directions. Vous allez penser peut-être qu'il y a beaucoup de monde à la Commission des services juridiques: on était 66 il y a deux ans et on est 48.

Il y a cinq directions très, très spécialisées. Il y a la trésorerie qui est dirigée par Mme Dubé. Il y a le secrétariat, c'est une personne et demie. Même moi, je n'ai qu'une demi-secrétaire que je partage avec une autre direction. Il y a l'expertise, éducation et recherche qu'on appelle la direction juridique. Ils sont quatre avocats qui donnent le service aux 400 avocats du réseau. Ils s'occupent de formation, ils s'occupent d'information et colligent ce que la loi nous oblige de faire, l'évolution jurisprudentielle de l'application de la nouvelle loi et des règlements de l'aide juridique.

On a une direction qui s'appelle le Comité de révision. Les bénéficiaires, c'est sans appel. Ce sont des avocats de pratique privée qu'on engage, minimum 15 ans de pratique – et je vous le dis tout de suite, ce n'est pas le pactole, à 50 $ de l'heure, quand tu as plus de 15 ans de pratique. Ils sont quatre avocats qui entendent au Comité de révision les refus ou les décisions qui ont pu être rendues en réseau par les directeurs généraux. Cette décision-là par ces juristes – ce sont tous des juristes de grande expérience – est sans appel et fait évoluer la loi et les règlements que vous retrouvez dans le volume bleu qu'on vous a remis, qui est un guide d'interprétation.

Également, il y a une dernière division qui est celle des statistiques informatiques. Parce que c'est nous qui rendons compte et toutes les consolidations du résultat de la pratique de l'aide juridique sont consolidées chez nous, à la Commission. Il n'y a aucune région qui communique directement avec le Trésor, par exemple, ou avec le ministère de la Justice. Tout est consolidé dans une forme unique présentable selon les modèles, les formats exigés par le gouvernement du Québec. Bon. Ça, c'est un employeur. Il y a deux syndicats dans cette case-là. Alors, je vous le dis, on est 48 et on était 56 il y a deux ans – j'ai fait erreur tantôt – deux syndicats.

En dessous, vous avez 11 autres employeurs, 11 autres conseils d'administration qui représentent des régions, avec une autonomie et une indépendance totale. Ce sont des personnes morales en vertu du Code civil qui, une fois qu'elles ont le budget, gèrent et administrent leur budget, engagent ou remercient leurs employés, négocient leur propre convention collective. Chacun a son vérificateur, vérificateur comptable, comme la Commission a son vérificateur comptable. Chacun a ses syndicats, deux syndicats: un syndicat de soutien, un syndicat d'avocats. Et parfois, dans deux régions, il y a des centres locaux avec conseil d'administration. Ce sont des cliniques également, et souvent ces gens-là peuvent être syndiqués ou pas. On a une région où le soutien est syndiqué et les avocats ne sont pas syndiqués, c'est la région de l'Outaouais. Croyez-le ou non, après 25 ans, des avocats et des avocates permanents de l'aide juridique ont décidé par choix de ne pas se syndiquer.

Dans l'ensemble, c'est 23 syndicats, 12 employeurs et, même, on pourrait en rajouter deux parce que vous avez les deux cliniques, une à Hull, une également dans Pointe-Saint-Charles–Montréal. C'est 110 bureaux permanents, une trentaine de bureaux volants à des endroits où il n'y a pas assez de population pour maintenir des avocats, des avocates de façon permanente. Alors, c'est des gens qui se déplacent à heure fixe. Souvent, on utilise des CLSC, des sous-sols d'églises, bureaux de poste pour rencontrer nos gens.

De plus en plus, ce sont les régions qui décident du conseil d'administration et de son directeur général qui, lui, s'occupe de l'administration quotidienne de l'aide juridique. Ce sont ces régions-là qui décident de la configuration. Je vous donne un exemple. Sur la Rive-Sud dernièrement, lors de l'opération budgétaire de cette année, le directeur général, devant tous les commissaires, lorsqu'on les reçoit, nous dit: Je vais fusionner et fermer un bureau; je fusionne deux bureaux. On connaît une autre région l'an passé qui a fait la même chose. Il y en a d'autres qui ont des projets de fusion, de disparition de bureaux. Ça dépend du mouvement de la clientèle, ça dépend de la réorganisation des services, ça dépend également des budgets. Et vous allez voir tantôt les compressions énormes depuis trois ans qu'on a à gérer, parce que ces gens-là, les 900 et quelques personnes qui font partie de l'aide juridique ne font pas partie de la fonction publique, donc ne peuvent pas être mutées dans un ministère, ont la sécurité d'emploi comme tous les membres de la fonction publique, mais ne peuvent pas aller au secrétariat pour être reclassées ou recyclées.


Degré d'autonomie des différents centres du réseau

Le Président (M. Côté): Alors, mais, lorsqu'il y a des recommandations qui sont faites, comme, exemple, le Vérificateur général a constaté des choses, quel est votre pouvoir d'intervention vers la base, si vous voulez? Il semble y avoir une très grande autonomie dans chaque centre, là, avec des conseils d'administration, et ainsi de suite. Quel est votre pouvoir d'intervention?

M. Lorrain (Pierre): Bon. Plus on fouille, plus on gratte, plus il est limité. C'est ce qu'on semble découvrir depuis quelques mois. Au fil des réformes de la loi, ça a obligé les juristes de l'État à se pencher sur la structure de l'aide juridique, sur les pouvoirs et les devoirs.

Quand on lit la loi, il faut la lire entièrement, il y a un éparpillement des pouvoirs, des responsabilités. C'est définitif que le gros de la gestion, de l'administration de l'aide juridique, ce n'est pas à la Commission que ça se fait, c'est en réseau. Le législateur a voulu accorder à chacune des régions une double décentralisation, et je m'explique: une première décentralisation qui est géographique appuyée avec un conseil d'administration qui accole au milieu et une deuxième décentralisation qui est implicite à la loi, c'est celle des pouvoirs. Alors, c'est eux qui engagent. C'est des personnes morales. C'est beaucoup.

Et, là-dessus, au-dessus de tout ça, on demande à la Commission de rendre compte, on demande à la Commission d'être imputable. Je ne renonce pas d'être imputable ici, là, aujourd'hui, il n'en est pas question, sauf que nos moyens sont extrêmement limités. Les plus grands moyens qu'on a, c'est ceux qu'on vous a exprimés tantôt par la coordination, la cohérence, la concertation et la collaboration. Et je pourrai vous donner un aperçu de ce qu'on a fait depuis deux ans et demi en se servant de ces quatre principes de gestion. Ce n'est pas tout à fait facile.

C'est définitif qu'une région qui refuse d'obtempérer à une directive de la Commission, bien on n'a pas beaucoup de moyens, là. Les moyens sont un peu ultimes, là. On ne commencera pas à mettre des régions en tutelle. On n'a pas les moyens, on n'a pas le personnel. On ne commencera pas à faire des examens d'enquête puis à envoyer des experts. Ça va finir par une confrontation.

Alors, je vous avoue que, de plus en plus, depuis deux ans, on s'aperçoit, et les juristes de l'État eux aussi le constatent, que la Commission a de moins en moins de moyens, et la loi est un peu silencieuse là-dessus.

(10 h 10)

Le Président (M. Côté): Puis la nouvelle loi n'apporte pas de modification.

M. Lorrain (Pierre): L'an passé, on a présenté un projet de règlement d'application. Le règlement d'application de l'aide juridique, ça n'a rien à voir avec les conditions d'admissibilité, c'est le règlement de la Commission, comment on gère, ce qu'on veut comme rapport, les formules, ces choses-là. On a présenté un premier rapport. On y a mis des articles un petit peu plus contraignants dedans, disant: Bon, bases de données, etc., nous avons besoin de ça. Ça a passé, mais ça a été dilué. Au conseil des ministres, on n'a pas la forme, le format et ce qu'on voulait avoir, parce que la loi ne nous habilitait pas à obtenir un règlement d'application aussi encadrant et contraignant pour le réseau.

On a fait une deuxième tentative cette année. Suite à l'entente Grondin qui est intervenue entre le gouvernement et le Barreau, on a réamendé et préparé un projet, parce que, là, c'était un peu chaotique, ce n'était pas trop facile, les relations avec la réforme. Alors, on a voulu avoir un règlement d'application qui disait ce qu'il y avait à dire, qui était clair. Bien, ça nous a été refusé. Ce qui est publié actuellement, qui a été publié en juillet, c'est un article très générique qui ne sera pas facile à appliquer.

C'est définitif qu'on a une tentative encore à faire. Ça a fonctionné pendant plusieurs années. Lorsqu'on gère la croissance, lorsque les outils sont là, c'est-à-dire l'argent est là, et qu'on n'a pas de problème de finance, la coordination, la cohérence, la concertation, la collaboration, il n'y a aucun problème. Mais, depuis le début des années quatre-vingt-dix, c'est le début de la décroissance à la Commission. Il y a des règles de plus en plus serrées qui nous sont demandées par le Conseil du trésor. Il y a eu un suivi accru des rapports du ministère de la Justice, il y a eu un suivi beaucoup plus serré et normal – dans d'autres domaines, c'est exactement la même chose – par le Conseil du trésor et d'autres ministères. Bien, ça a créé des tentions. Quand il y a un manque à gagner de 5 000 000 $ avec des conventions collectives fermées, sécurité d'emploi, et tu dois quand même, comme commissaire, prendre la décision finale et courageuse de distribuer des compressions puis d'imposer un plan de rationalisation, comme on a fait il y a deux ans, bien ça crée des tensions, ça crée des frictions et parfois c'est même contre-productif. Ça, c'est le vécu quotidien. Ça fait partie de l'évolution, peut-être, d'une démarche administrative.

Je pense que le législateur, en 1970-1971, dans la première loi, a voulu une gestion souple, une gestion simple, une gestion sociale, une gestion amicale entre la Commission des services juridiques qui avait d'abord une mission, c'est-à-dire d'installer – ça n'existait, pas le mot «aide juridique», au Québec – de construire une structure comme telle, d'engager du personnel et de dire à la population: Vous, démunis qui n'avez jamais été représentés, maintenant venez nous voir, on est après structurer.

Au fil des ans, au bout de 25 ans, les manques à gagner de l'État, les désirs de la population, le choix de l'Assemblée nationale a fait qu'il y a une réforme. Cette réforme-là, bien, dans un contexte de décroissance, de réorganisation des services, fait qu'il y a des tentions. Et je pense que je ne suis pas le seul qui l'a constaté. Je pense que le Vérificateur, après six, sept mois en réseau, avec des multiples rencontres auxquelles je n'ai pas participé – il a rencontré des directeurs généraux, des directeurs adjoints, il a rencontré des avocats, des directeurs de bureau – a été à même de constater ce que je vous avance, on le vit très, très souvent.

Maintenant, il ne faudrait pas en faire un cas général. La très grande majorité des conseils d'administration et des directeurs généraux collabore totalement avec la Commission. Je le répète, ce n'est pas un problème généralisé et ce n'est pas systématique. C'est normal qu'on s'accroche, des fois, parce qu'on a des choix difficiles à faire. Puis il y a des fois, peut-être, qu'une région aurait aimé mieux avoir un autre choix. Quand l'ordre de tombée budgétaire... C'est toujours là que ça ne va pas trop bien, quand il y a des manques à gagner. Et c'est à nous, les commissaires, au moins c'est un droit clair qui est dans la loi, on distribue et c'est nous qui accordons les budgets. On essaie de le faire le plus équitablement. On a un processus, sur lequel on pourrait revenir dans le cours de l'après-midi, très élaboré pour essayer d'assurer un équilibre, une équité entre les régions, parce qu'on veut éviter un système à plusieurs vitesses de l'aide juridique. C'est le vécu.

Le Président (M. Côté): M. le président, l'organigramme que vous nous avez exposé tout à l'heure, est-ce qu'on l'a dans la documentation?

M. Lorrain (Pierre): Non. Nous allons vous le faire photocopier, puis je pense qu'il y en a...

Le Président (M. Côté): Est-ce que vous pourriez peut-être nous le déposer à la Commission?

M. Lorrain (Pierre): Oui.

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.


Mécanismes de contrôle du travail du personnel juridique

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je vais revenir un peu, aussi, sur les rapports entre la Commission et les centres. Je vais aborder la question du point de vue d'un député. Vous avez été député vous-même, M. le président. Vous savez qu'on a toujours de l'information qui vient de la base. Ce qui a circulé, ce qui circule comme information sur l'aide juridique, c'est que, pour pouvoir vivre, les avocats de l'aide juridique multiplient les procédures. Ils sont en train de faire en sorte qu'il y a... parce qu'il y a des avocats de pratique privée qui ont des mandats de l'aide juridique. Autrement dit, je n'ai aucune étude pour justifier ça, mais je fais état de conversations avec des personnes qui sont maintenant juges ou qui même fonctionnent à l'aide juridique.

Ma question plus précise, c'est: Quel mécanisme vous avez, vous, à la Commission, pour vous assurer que les avocats de l'aide juridique, soit salariés, soit les avocats qui sont engagés en pratique privée, font leur travail de la manière la plus efficace et efficiente possible, autrement dit, qu'ils font ce qu'ils doivent faire, bien sûr, mais qu'ils le font de la manière que ça nous coûte le moins cher, c'est-à-dire qu'ils ne multiplient pas les procédures, les remises? Enfin, je ne suis pas un avocat, donc je ne connais pas toutes les technicalités, mais je pense que nos collègues pourraient savoir, vous devez le savoir aussi, tout ce qu'on peut multiplier pour pouvoir ralentir ou repoursuivre un dossier. Moi, ce qui m'intéresse, c'est le mécanisme de gestion que vous avez établi à la Commission pour vous assurer que les avocats que vous avez, soit salariés, soit ceux que vous engagez en pratique privée, font leur travail de la manière la plus efficiente possible.

M. Lorrain (Pierre): On n'a pas de mécanisme, de directives ou de réglementation. C'est d'ailleurs clairement établi dans la loi que ce n'est pas de notre ressort. Chaque employeur doit se donner ses normes, ses critères, faire sa vérification. On n'aurait pas le personnel pour faire ce que vous dites, M. le député. Même le Vérificateur général est assez clair dans son rapport, il n'est pas du ressort de la Commission de s'assurer de cette... C'est impossible, là. On a 100 et quelques bureaux qui couvrent tout le Québec.

M. Gautrin: Alors, chaque bureau doit le faire?

M. Lorrain (Pierre): Chaque corporation, centre communautaire juridique, sa direction, surtout son directeur général et ses collaborateurs, se doit de s'assurer de ses normes. C'est sa façon de gérer.

M. Gautrin: Est-ce que je peux vous poser, M. le président...

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Est-ce que vous, vous ne pouvez pas vous assurer ou est-ce que vous avez les mécanismes pour vous assurer que chacun des centres se soit doté de mécanismes pour évaluer l'efficience de son personnel juridique? Autrement dit, que vous ne le fassiez pas, je le comprends bien, mais faire assurer que les mécanismes soient instaurés par chacun des centres locaux de services. Est-ce que vous avez le pouvoir ou la possibilité de faire en sorte que les centres – qui, je comprends bien, je connais un peu la loi aussi, sont des employeurs réels, je comprends aussi – se soient dotés de ce mécanisme d'évaluation du travail du personnel juridique pour s'assurer de l'efficience de leur travail?

M. Lorrain (Pierre): ...

Le Président (M. Côté): M. le président.

M. Lorrain (Pierre): Excusez-moi, M. le Président. J'ai oublié mes règles parlementaires.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Côté): Ça revient rapidement!

M. Gautrin: Mais vous étiez assez dur, à l'époque.

M. Lorrain (Pierre): C'est les mauvaises habitudes de la Commission des services juridiques.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lorrain (Pierre): Il y a deux choses. Je vous ai dit tantôt, à la fin de mon exposé en introduction, que les commissaires, on avait l'intention de réunir les régions. Quand je dis les régions, c'est le président de chacune des corporations et les directeurs généraux. C'est définitif que, même si certaines recommandations ne s'adressent pas à la Commission, nous allons susciter une discussion et tenter d'arriver à une uniformité. Il existe des règles dans chacune des régions, il en existe. Elles sont peut-être différentes, dépendant du gestionnaire, dépendant de la façon. Même nos conventions collectives prévoient certaines choses à cet effet-là, sur la productivité de nos gens.

Il y a quelque chose de tout à fait nouveau qu'on est à confectionner, qu'on est à compléter et qui va être terminé d'ici quelques semaines. Le Vérificateur général est au courant. C'est une décision qui a été prise il y a plus de deux ans, on va avoir un logiciel de suivi de dossiers. Actuellement, à l'aide juridique, à la permanence, chez nous, chaque avocat de pratique privée qui veut facturer est obligé de nous détailler un compte. Alors, ce qu'on sait d'un avocat de pratique privée, c'est qu'au moins il a produit sa défense, au moins il a inscrit, il a peut-être plaidé deux jours, ça apparaît, il s'est même déplacé, il a engagé un expert, on a la facture. En plus de ça, il a payé toutes sortes d'autres frais. On n'a pas ça, on ne le sait pas pour l'avocat de pratique privée. On a un logiciel de suivi qui va être équivalent à celui de l'avocat de pratique privée et qui est pratiquement confectionné. C'est un des huit logiciels qui font partie de notre plan directeur informatique, dont on a pris la décision en 1995, et qu'on a autofinancés à même nos surplus, échelonné sur quatre ans.

Maintenant, pour votre première question, les avocats qui multiplient les procédures, peut-être une ancienne loi, oui, M. le député, peut-être, mais maintenant, avec le forfait, l'intérêt de l'avocat de pratique privée, c'est d'aller obtenir le plus rapidement un règlement, parce que, de toute façon, peu importent les étapes, s'il peut régler rapidement, c'est très avantageux. Je pense que la loi est venue réparer encore une fois peut-être certains abus qui ont été décriés sous plusieurs années, là: multiplication de certaines procédures, enquêtes, examens volontaires, remises, remises. J'ai pratiqué 15 ans.

(10 h 20)

M. Gautrin: Vous le savez. Vous me permettez encore une dernière question?

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je comprends donc, à l'heure actuelle, de votre réponse, que des mesures de l'efficience du travail des avocats de l'aide juridique qui sont de la responsabilité des centres locaux sont en train d'être établies. Est-ce que vous pourriez transmettre à la commission une espèce d'état de situation? C'est-à-dire de dire, suivant chacun des centres locaux, ce qu'ils ont comme indicateurs ou mécanismes qu'ils ont établis pour mesurer l'efficience du travail de leurs avocats. J'imagine que la demande qu'on vous fait vous donne aussi une espèce d'arme, parce que ça vous permettra aussi de le leur demander en disant: Les parlementaires m'ont demandé telle chose, ce qui est une manière de vous assurer que ceci soit mis en place.

M. Lorrain (Pierre): Je suis sûr que la plupart des directeurs généraux, la très grande majorité vont m'envoyer leurs procédures, leur façon de faire, leur manuel d'interprétation. Je vais le faire. Je vais vous le produire.

M. Gautrin: Est-ce que vous pourriez le transmettre à la commission?

M. Lorrain (Pierre): Oui.

Le Président (M. Côté): S'il vous plaît, oui.

M. Gautrin: Ce serait une chose... Et peut-être que le Vérificateur général serait intéressé à le connaître aussi.

Le Président (M. Côté): Merci. M. le député de Rousseau. L'alternance.


Cas d'honoraires élevés facturés à la Commission

M. Brien: Merci, M. le Président. M. Lorrain, tantôt, bon, on a fait un bref survol de l'aide juridique. C'est bien certain, je pense que vous êtes conscient comme moi qu'en 1972 on vivait tous au Québec ce qu'on peut appeler l'État-providence. Je pense qu'il y avait des facilités et puis le Québec, après la Révolution tranquille, avait décidé de se donner le plus de services possible, les meilleurs services possible, ce qui fait que, oui, il y avait des largesses. On arrive aujourd'hui en 1997, vous savez comme moi que notre gouvernement vise le déficit zéro pour l'an 2000, ça veut dire l'assainissement des finances publiques. On doit donc faire plus avec moins tout en sachant très bien qu'il y a des choses, qu'il y a des services qui sont considérés comme essentiels, à tout le moins, très appréciés, nécessaires.

Moi, j'ai toujours compris, depuis que l'aide juridique est en vigueur, que c'était un service pour aider des gens démunis. Juste vous donner une image qui me vient comme ça ce matin. C'est sûr, le monsieur ou la madame qui a une maison à l'île Bizard, qui a deux Mercedes dans la cour, ça le stress moins de faire affaire avec un avocat, puis probablement que cette personne-là est capable de se payer un avocat. Par contre, monsieur ou madame qui vient de Saint-Lin qui est dans mon comté, ou de Saint-Calixte, ou de Sainte-Sophie où le taux de sans-emploi est de 30 %, qui a des difficultés, qui se fait débrancher par Hydro, qui a des difficultés énormes à arriver, à manger, à faire que ses enfants le matin déjeunent avant d'aller à l'école, c'est certain qu'à ce moment-là je pense qu'un service d'aide juridique est essentiel, c'est essentiel pour permettre à cette personne-là de se défendre contre un propriétaire peut-être abusif, contre une société d'État qui n'a pas toujours les sentiments à fleur de peau.

Je pense que l'aide juridique a fait du bon travail même si, ça, je le conçois, il a pu y avoir certaines largesses. L'important, à ce moment-là, était d'aider nos gens démunis, et puis je pense que l'aide juridique, ne serait-ce que là, a fait un excellent boulot, ce qui ne veut pas dire que tout est parfait. Moi, ce qui me chatouille un peu, ce sont les abus. C'était la même chose avec la RAMQ. Quelqu'un qui utilise sa carte d'assurance-maladie pour se faire soigner au Québec, que le médecin traitant facture la RAMQ adéquatement, je trouve que le système est bon en soi. Quand ce sont des gens de l'extérieur qui, d'une façon frauduleuse, utilisent nos services de santé, je trouve ça déplorable.

Qu'il y ait eu des gens, des bénéficiaires avec des revenus très intéressants, avec des propriétés, qui aient utilisé l'aide juridique, ça aussi, je trouve ça déplorable. Je sais que le Vérificateur parlait de 30 000 dossiers où cela s'était produit. C'est certain qu'à ce moment-là on doit réagir. On doit réagir pour s'assurer que les gens qui en bénéficient y aient droit. Vous parliez tantôt de droits et privilèges. Vous savez, je dirais, moi, l'isolant entre les deux est mince. Parce que, lorsque ce sont les contribuables du Québec qui paient la facture, il y a quelque part aussi une chance – si ce n'est pas le mot «privilège», au moins utiliser le terme «chance» – de pouvoir y avoir accès.

Moi, je souhaite grandement qu'il y ait des correctifs d'apportés, de telle façon qu'on juge l'admissibilité d'une personne. Par contre, je ne voudrais pas – et ça, je le dis aussi pour notre Vérificateur – que les critères fassent en sorte que des personnes nécessiteuses n'y soient pas admissibles. Ça veut dire qu'il faut être assez sévère, mais pas trop. Parce que le jour où il va falloir faire une recherche archéologique quasiment pour savoir si la personne est admissible, peut-être qu'il va être trop tard pour agir. Vous savez? Vous, les gens de la Commission des services juridiques, tout en respectant la loi qu'on a votée en septembre 1996, je me fie à vous pour avoir encore, et ça, c'est nécessaire dans nos services gouvernementaux, cet esprit de jugement, de gros bon sens, où on dit: Une minute, là. Dans les critères, je comprends qu'il y a ça, qu'il y a ça, qu'il y a ça, mais il y a aussi que cette personne-là en a besoin, et de laisser un endroit où, oui, on peut intervenir pour aider la personne.

Moi, ce que je retiens aussi du Vérificateur, c'était peut-être l'élément majeur, on disait, en 4.9: «Par ailleurs, au cours des années 1994-1995, certaines personnes ont bénéficié de services juridiques gratuits alors que leur admissibilité peut être mise en doute. Nous estimons à 13 000 000 $ la valeur des services rendus à des individus qui se sont faussement déclarés bénéficiaires de l'aide sociale ou en voie de le devenir.»

Moi, je pense que, à première vue, c'est sur ce montant-là que vous devriez travailler avec les nouveaux critères, le volet contributif, si je comprends, mais d'éliminer au maximum les gens qui n'y ont pas droit. Vous savez, probablement qu'en 1972 c'était un petit peu bar ouvert. La personne se présentait au bureau et on disait: Elle doit en avoir de besoin. Mais je pense qu'aujourd'hui, avec les finances serrées comme on a, vous savez, s'il y a 10 $ de coupures à la sécurité du revenu, on en entend parler longtemps, ça fait qu'imaginez que, quand on parle d'un budget quand même de 120 000 000 $, il faut le gérer efficacement. S'il y a une économie potentielle de 13 000 000 $, mon Dieu, qu'on essaie de récupérer ces sommes-là.

J'ai une ou deux questions, et je ne veux pas être embêtant avec ça, c'est que, vous savez, il y a une curiosité légitime, je pense, d'un député. Vous allez m'expliquer, M. Lorrain, c'est quoi, le truc pour un avocat de faire 300 000 $ à 400 000 $ d'honoraires. Il y en a cinq qui ont fait de 200 000 $ à 300 000 $. De quelle façon est-ce que ces personnes-là procédaient? Est-ce que c'est parce qu'elles avaient une équipe de support et de soutien extraordinaire? De quelle façon on peut arriver, en termes d'honoraires facturés à la Commission des services juridiques, à faire des montants semblables? Parce que j'en ai, des amis avocats, qui font 30 000 $ et 40 000 par année. Ça fait que j'imagine que c'est des cas assez spéciaux.

Le Président (M. Côté): M. le président.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, je peux assurer M. le député que ce n'est pas moi. Je n'ai jamais atteint ces sommets-là du temps où j'ai pratiqué. C'est plus en droit criminel, en droit pénal sous l'ancienne loi. Maintenant, avec la nouvelle loi, il y a un maximum, il y a un plafonnement des honoraires qui sont payables à un avocat, 125 000 $ par année d'honoraires. Mais c'est arrivé. Ce sont des gens qui vivaient dans de grandes agglomérations, donc l'agglomération de Montréal. C'est des gens qui travaillaient énormément fort, par exemple, très organisés, parce que c'était quasi un réseau. Personne ne leur en veut. Il n'y a personne qui a parlé négativement, que ce soient les juges qui les voyaient travailler tous les jours, les greffiers et le personnel de la justice.

(10 h 30)

D'abord, il faut être en demande, il faut que le client nous choisisse. Après ça, il faut être drôlement organisé. Il faut être dans plusieurs cours, avoir des assistants, être équipé, se lever très tôt, aller visiter des prisons, les gens incarcérés. Mais vous ne verrez plus ce genre de cas là dans le futur.

M. Brien: Merci. Une dernière question, peut-être.

Le Président (M. Côté): M. le député de Rousseau.


Moyens de contrôler la qualité du travail des avocats

M. Brien: Moi, comme député, parce qu'il y a des gens qui nous appellent puis qui disent: Bon, j'ai fait affaire avec mon avocat de l'aide juridique, parfois j'ai le sentiment que la personne, dans certains cas, est mal servie. Je comprends que c'est un service professionnel, quelque part. Vous savez, il y a de bons comptables, il y en a de moins bons. En médecine, c'est la même chose. Je pense que la profession d'avocat représente aussi d'excellents avocats, puis d'autres un peu moins bons, puis d'autres pas bons, puis c'est la même chose, je pense, dans les différentes professions. Mais on parlait tantôt d'efficience. Est-ce qu'il y a un système chez vous, à la Commission des services juridiques, qui permet de dire: Bien, écoutez, cette personne-là est entrée en contact la première fois avec toi telle date, tu n'as pas fait grand-chose jusqu'à telle date, après cette date-là, il s'est écoulé encore un délai et puis... Est-ce qu'il y a une façon de dire à un avocat ou à une avocate: Tu as mal servi ton client ou ta cliente d'aide juridique? Est-ce que ça existe, chez vous, un qualitatif, là, une cote où on dit: Bon, bien, écoute, là, ça n'a pas de mautadit bon sens, c'est une petite cause ou c'est une cause qui était assez facile à régler, et puis ça a traîné en longueur, et puis je juge que le service à la clientèle quelque part a fait défaut? Parce que, moi, j'ai des gens que je reçois chez nous. Oui, des fois, je me dis: Bon, bien, coudon, le problème, il est où, là? Est-ce que vous êtes capable de me répondre à ça puis de me donner des indications, M. Lorrain?

Le Président (M. Côté): M. le président.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, à la Commission, non, il n'existe pas de moyens ni de règles. Ce ne serait pas accepté à cause de la structure, on n'a pas le contrôle. Deuxièmement, on a de petits bureaux. La plupart de nos bureaux sont éclatés à travers le Québec; c'est des bureaux de quatre ou cinq. Il y a une espèce de forme que j'appellerais d'autodiscipline entre les avocats. C'est des gens qui travaillent des fois depuis 15 ans, 20 ans dans le même bureau ensemble. Un avocat qui ternirait la réputation du bureau par sa façon de pratiquer ou sa façon de travailler lentement, pour ne pas en dire plus... Je pense que l'incitatif est présent, l'incitatif est à côté. L'incitatif, c'est son voisin, c'est l'autre avocat d'aide juridique, l'autre avocate d'aide juridique qui, elle, travaille très fort.

Maintenant, je me suis engagé tantôt à déposer les règles de chacune des 11 régions, que chacun des directeurs généraux applique dans le but d'évaluer et de surveiller. Chaque bureau ou la plupart, pas tous, là, maintenant, parce qu'on a plusieurs directeurs de bureau qui ne sont plus considérés comme cadres... On a respecté les règles du Conseil du trésor, on a diminué de beaucoup notre nombre de cadres à l'aide juridique. Il y a des directeurs de bureau qui ont cette responsabilité de surveillance, ni plus ni moins, de gestion en général d'un bureau parce que le centre communautaire est souvent très loin. Surtout en régions éloignées, le centre communautaire peut être à 200 km, 300 km de différents bureaux d'avocats. Alors, il y a toujours un responsable qui se rapporte au directeur général. Mais, nous, on n'a pas de règles comme telles, à la Commission, ni de modèle à suggérer parce que ça ne fait pas partie de... Mais, comme j'ai dit tantôt, suite au rapport du Vérificateur qui a suscité beaucoup d'interrogations, je suis sûr, et c'est même demandé actuellement... Il y a même un directeur général et sa présidente qui m'ont écrit, qui m'ont dit: Bon, fin septembre, début octobre, est-ce qu'on serait prêts à faire une réunion et à débriefer les résultats du Vérificateur général? Vous savez, on a fait beaucoup de chemin, depuis le mois de juin. On n'a pas laissé ça dans le tiroir, là. Puis j'aurai l'occasion de vous en parler.


Moyens de contrôler l'accessibilité à l'aide juridique

Vous avez mentionné tantôt une somme de 13 000 000 $, des gens qui normalement auraient dû être assistés sociaux et qui ne le sont pas. Je peux vous dire une chose tout de suite: nous avons fait des démarches, le vice-président et moi, déjà. Nous avons rencontré M. Bertrand, ministre du Revenu, nous sommes déjà à faire des démarches auprès de la Sécurité du revenu. Nous n'avions pas les outils, durant ces années-là, pour pouvoir vérifier rapidement si, oui ou non... C'était plus la bonne foi de la personne qui disait: Bon, oui, j'ai perdu ma carte. Maintenant, c'est une obligation. Avec le nouveau logiciel d'admissibilité de l'aide juridique, le numéro d'assurance sociale doit être là. Et, si la personne, parce qu'elle est automatiquement admissible si elle a l'aide sociale... elle doit nous fournir le numéro et la preuve.

Mais on va aller plus loin que ça. On a déjà commencé. J'ai rencontré personnellement le ministre du Revenu. On veut faire un comité de travail parce qu'il y a un aspect technique à cette affaire-là, il y a un aspect confidentialité, il y a un aspect des droits des personnes, puis naturellement il y a un grand débat qui va se faire ici, cet automne, sur la confidentialité puis l'utilisation de certaines banques de données. On va y aller lentement. S'il le faut, il faudra demander l'autorisation de la Commission d'accès à l'information, mais on va trouver une façon de faire pour pouvoir vérifier... Parce que, maintenant, cette année, on va avoir les outils. Le plan directeur d'informatique est complètement terminé, puis nos outils sont compatibles avec ces deux ministères-là. À moindres coûts, on va pouvoir vérifier l'admissibilité, les revenus, les biens, les liquidités et surtout les allégeances entre les personnes. C'est très complexe.

Vous savez, à Sept-Îles, quand tu fais l'admissibilité, là, il y a bien des choses que... Si ces ministères-là nous fournissent cette information-là, ça va être un très, très grand changement. Je n'ai pas raison... On a été très, très bien reçus par le ministre du Revenu. On a été longuement en séance de travail avec lui, avec un sous-ministre et des membres de son cabinet.

M. Brien: M. le Président, si vous le permettez, j'aurais un dernier commentaire à faire, une dernière question.

Le Président (M. Côté): M. le député de Rousseau.


Attitude des avocats envers les bénéficiaires

M. Brien: M. Lorrain, est-ce qu'il existe chez vous puis est-ce que vous avez pensé à instaurer chez vous, si ce n'est déjà fait, en quelque sorte une espèce de travail de motivation? Je vous explique le but de ma démarche. Moi, j'ai vu, par exemple, des agents d'aide sociale. Ils traitaient tellement de dossiers, ils voyaient tellement de bénéficiaires d'aide sociale arriver à leur bureau qu'ils venaient avec le réflexe: C'est tous des voleurs, c'est tous des paresseux, c'est tous des gens qui veulent s'acheter une caisse de bière puis boire ça sur le balcon.

Vous savez, à force de traiter avec des bénéficiaires d'aide sociale, à un moment donné ils attrapaient, appelez ça «une maladie professionnelle». C'est que le jugement était fait avant que la personne arrive. Ça fait qu'imaginez quand la personne avait à se débattre puis à dire: Bien, écoutez, oui, j'ai des difficultés, les jeunes rentrent à l'école, je ne suis pas capable de payer les livres puis je ne suis pas capable de leur acheter des souliers.

Moi, je veux juste vous dire qu'il y a un danger lorsqu'on traite avec des citoyens et des citoyennes dans le besoin, c'est qu'ils soient étiquetés avant même qu'on ait examiné leur situation, et puis ça, ça me fait peur un peu. Je pense qu'il y a un côté, là, puis je reviens là-dessus, service à la clientèle, plainte du client ou de la cliente. Qu'est-ce qui fait que la personne a été bien servie ou mal servie? Est-ce qu'on l'a étiquetée avant d'écouter ce qu'elle avait à dire? Est-ce qu'on fait tout? Est-ce qu'on présume, comme on dit, de l'innocence de la personne en disant: Oui, c'est quelqu'un qui en a besoin, avant de dire: Bien, il a juste à payer son compte d'Hydro? Moi, c'est le côté service à la clientèle que j'aimerais voir à l'aide juridique, quitte à ce qu'il y ait des boîtes à suggestions. Peut-être que vous l'avez déjà fait.

Est-ce qu'il y a aussi une façon de motiver son personnel? Vous savez, écouter du matin au soir des gens qui sont dans le besoin puis des fois qui disent: Crisse de tabarnac, si ça se passe de même... Vous savez, c'est ça qui se passe dans la vraie vie. Est-ce qu'il y a un moyen, à l'aide juridique, pour garder un standard de qualité élevé et un standard de motivation élevé, quitte à ce qu'il y ait, par exemple, dans des bureaux – puis là je ne veux pas entrer dans les conventions collectives – peut-être une mobilité du personnel, de dire: Bien, toi, t'es à Joliette, est-ce que tu accepterais de travailler à Saint-Jérôme pour deux mois? question de mettre un petit peu plus de vie, à ce moment-là, des expériences différentes, une clientèle différente et puis de permettre à nos avocats et à nos avocates de l'aide juridique de connaître autre chose? Je vous écoute là-dessus.

Le Président (M. Côté): M. le président.

M. Lorrain (Pierre): La dernière partie de votre intervention, M. le député, j'espère qu'il y a certains présidents de syndicat qui l'ont enregistrée. Ha, ha, ha! Je la trouve extrêmement intéressante. Écoutez, je vais répondre à votre question comme ceci. On n'a pas la notion de clients, les permanents de l'aide juridique. Pour nous, ce sont des bénéficiaires, et ça fait toute la différence. Aller jusqu'à l'an passé avant la réforme qui est venue créer beaucoup d'incertitude, puis des campagnes de désinformation, et tout ça, les Québécois et les Québécoises étaient inquiets et peut-être qu'il y a eu une augmentation de plaintes. Quand je dis «de plaintes», souvent c'est de la malinterprétation de la loi, incompréhension de la loi ou encore des informations qui avaient été données dans un climat via les médias. Année après année, depuis 25 ans, on n'a jamais eu plus que 55 plaintes, aller jusqu'à il y a 18 mois, quand les réformes ont commencé. Là, c'est vrai qu'il y a eu une augmentation.

(10 h 40)

Et, quand on regardait... Puis je me suis donné la peine, parce que les plaintes arrivent à la Commission... Souvent, elles sont acheminées jusqu'au bureau du ministre. Je me suis donné la peine, en 1994-1995 – et tous les ans je fais l'exercice avec le secrétaire à la Commission – d'examiner le fondement de ces plaintes-là. Est-ce que c'est vraiment des plaintes qui visent un avocat qui recevrait mal ou qui a un préjugé défavorable à ce genre de clientèle qui parfois est vraiment mal pris, dépouillé de tout? C'est souvent une méconnaissance de la loi ou une petite vengeance. Quand t'es poursuivi en divorce puis que des fois il y en a un qui obtient un mandat d'aide juridique, bien, si t'étais capable de faire sauter le mandat d'aide juridique, le service, bien, là, ce serait peut-être plus facile de gagner ta cause. Bon, ça, ça arrive assez souvent.

Mais, depuis un an et demi, c'est vrai, il y a eu une augmentation, mais c'est dû, je pense, à tout ce qu'on a vécu de bouleversements que je vous ai expliqués au début. Mais je ne crois pas, sincèrement, et ça, on peut en référer et au Barreau, et aux juges, et aux gens qui nous voient travailler... Il n'y a pas un intérêt, pour un avocat permanent de l'aide juridique, à bâcler son dossier. Il n'y a pas d'intérêt. Il n'y a pas un tarif d'honoraires ou un 2 000 $ au bout de ça, il n'y a pas une prime à la course. Ce sont des gens qui, avec l'histoire, ont développé des secteurs tout à fait particuliers et spécialisés dans le domaine du droit des démunis. Comme en droit administratif, il y a plusieurs secteurs qui n'existaient pas, qui n'avaient pas été développés par les avocats – même, je ne connaissais pas ce domaine-là, je n'étais pas porté vers ce domaine-là quand j'ai commencé à pratiquer – mais qui ont été développés par les permanents puis que maintenant la pratique privée aussi utilise abondamment. Je doute que les gens qui viennent chez nous, surtout avec la rareté de la clientèle, la diminution de clientèle, la compétition de plus en plus féroce du privé... Et ce n'est pas un reproche que je fais au privé, j'ai pratiqué moi-même. Je sais ce que c'est, être obligé de gagner sa vie puis avoir à subvenir aux besoins du personnel et de son bureau. C'est normal. Mais je pense que ça va à l'inverse.

Maintenant, on a de la formation, on a des périodes de formation extrêmement régulières à l'interne sur l'évolution de certaines lois, des changements à certaines lois. Ce guide qui est ici, qu'on vous a donné, dont on est très fiers, a été vérifié par les juristes de l'État du ministère de la Justice, a été vérifié par le Barreau, a été préparé en concertation avec le réseau au fil de plusieurs dizaines de réunions, si ce n'est pas la centaine, que j'ai présidées avec la collaboration des représentants des régions dans le but de bien comprendre et d'avoir une seule et unique interprétation de la nouvelle loi et du nouveau règlement d'aide juridique. Ce guide circule, tous les avocats sont en possession de ça. Depuis l'an passé, on a fait 59 séances de formation parce que se sont ajoutées à ça de nouvelles loi comme la défiscalisation, dernièrement. C'est nous qui avons fait les guides.

(Consultation)

M. Lorrain (Pierre): Ils les ont? O.K. Ça a été travaillé par notre Service de recherche. La formation a été donnée non seulement à notre personnel, mais même aux juges, puis il y a même les gens du Barreau qui viennent assister à nos séances de formation, et ça, on l'a fait à la grandeur du Québec, des fois en petits groupes, des fois en plus grands groupes.

Je vous annonce tout de suite qu'à cause des nouveaux règlements qui ont été publiés en juillet, qui viennent changer les choses, oui, un peu beaucoup, et surtout inculquer cette nouvelle culture à nos permanents de l'aide juridique qui n'ont jamais été habitués de collecter de l'argent, d'exiger de l'argent, on a l'exclusivité d'une gérance, mais il faut l'accepter, cette loi-là. Elle a été changée par la volonté du législateur, et aujourd'hui faut collecter, faut recouvrer aussi. Bien, il va y avoir des cours, puis des sessions sont déjà annoncées pour le mois de novembre. Ce pourquoi on ne l'a pas fait en septembre et en octobre, c'est qu'on vient d'en faire une session au printemps. Tout ça va être doublé avec une séance d'information informatique parce qu'à ce moment-là notre logiciel sera terminé. Il faut que tout notre personnel et de soutien et d'avocats soit formé.

Et le recouvrement, lequel est un reproche important que nous fait le Vérificateur général, est maintenant sous informatique avec méthode de calcul, tout ça. Immédiatement, c'est l'ordinateur qui répond: Mme Unetelle doit 300 $, voici ses échelons de paiement. C'est déjà très, très... Ça devrait être terminé pour Noël. Alors, c'est différent, là. Mais je n'ai aucune gêne, là, puis je ne me trompe pas, ce n'est pas l'approche du tout qui est privilégiée dans notre réseau et ce n'est pas l'attitude de nos avocats et de nos avocates depuis 25 ans.

M. Brien: Merci.

Le Président (M. Côté): Merci, M. le président. M. le député de Robert-Baldwin.


Accès du Vérificateur général aux dossiers des bénéficiaires dans les centres régionaux (suite)

M. Marsan: Merci, M. le Président. J'aimerais revenir à la gestion des services d'aide juridique. J'écoutais le témoignage que vous nous avez rendu en disant: Ce n'est peut-être pas un problème de gestion, c'est un problème de manque de transparence. C'est vrai que, lorsqu'on manque de transparence, en tout cas ça suscite beaucoup de questionnement. Vous nous avez parlé des moyens limités que vous avez pour obliger les centres régionaux à donner les informations au Vérificateur et, par conséquent, aux députés.

Je note aussi, dans le rapport du Vérificateur, pour la même période étudiée, que 82 700 bénéficiaires de l'aide juridique ont déclaré au ministère du Revenu des revenus supérieurs aux barèmes d'admissibilité. Moi, je pense qu'il y a vraiment un problème de gestion, en tout cas, et je souhaiterais et j'espère qu'à la fin de notre séance on aura cette possibilité de savoir, qu'on pourra vraiment ouvrir tous les dossiers au Vérificateur. Ou bien on a un vérificateur ou on en n'a pas. Si on a un vérificateur puis qu'il peut rentrer à certains endroits puis pas à d'autres, je pense que ça va commencer à être difficile. J'ai une expérience dans le secteur de la santé, et on a été vérifiés de tous les bords, de tous les côtés, les hôpitaux, en tout cas, et à chaque fois je pense que la réaction, c'est que ça n'a jamais été pensable de refuser une vérification. Lorsqu'on comprend bien les mécanismes de la vérification, on s'aperçoit que ça peut nous aider grandement parce que ça ajoute à la crédibilité d'une organisation lorsque même le Vérificateur vous dit: Bien, écoutez, les politiques sont suivies avec des principes de saine gestion. Donc, c'est très important.

Ma question, M. le Président. Demain, le Vérificateur veut aller dans les centres régionaux. Est-ce que, oui ou non, il va avoir accès à l'information?

Le Président (M. Côté): M. le président de la Commission.

M. Lorrain (Pierre): Je ne suis toujours que le président de la Commission – ha, ha, ha! – et non pas le directeur général ou le président d'un conseil d'administration des 11 régions. Je vous ai dit tantôt qu'il y a une réunion qui va être provoquée. Vous connaissez mon opinion, je n'ai pas changé depuis ce matin. Je prétends qu'on aurait dû ouvrir. Et, pour vous montrer comment ça peut être aigu, le problème qu'a vécu le Vérificateur, nous le vivons, à l'heure où je vous parle. Actuellement, nous n'avons pas la base de données des statistiques de la région de Montréal depuis plus d'un an. Nous n'avons plus le détail des effectifs. Le registre de paie qu'on obtient de toutes les autres régions...

M. Mulcair: Le registre de...

M. Lorrain (Pierre): ...de paie de chacune des régions, on l'a. On peut savoir qui est au travail, qui n'est pas remplacé, quels sont les besoins de la région. On ne l'obtient plus depuis plus d'un an. Le suivi des dépenses de détail, des dépenses de fonctionnement de la région de Montréal, on ne l'obtient plus depuis plus d'un an. Même chose – je vous l'ai donné tantôt – pour le volume d'activités. Le volume d'activités, je suis obligé de me contenter d'une feuille avec un volume d'activités. Jamais les commissaires ne se contenteront d'un rapport sur une feuille sans avoir la base de données. Je trouve incompréhensible que pendant 23 ans on ait eu les bases de données, puis qu'on ait eu l'information des 11 régions, et que, peu importe la région, peu importe la décision, maintenant, malgré la visite du Vérificateur général et le message, je pense, qu'aurait dû lancer la venue du Vérificateur général, on ne puisse plus vous faire des rapports. Nous allons en parler probablement cet après-midi, des statistiques, on va probablement parler de l'impact de la loi au plan de la clientèle, mais vous verrez les réserves qu'on met sur nos graphiques.

Quand Me Henri Grondin a été nommé négociateur pour le Barreau et le gouvernement du Québec puis qu'il a été obligé de solliciter des statistiques qu'on ne détenait pas alors que le gouvernement voulait voir clair dans l'évolution de la réforme, c'était inacceptable. Lorsqu'on est obligés, nous, les commissaires, de prendre des décisions, et de distribuer les budgets, puis d'être équitables entre toutes les régions et qu'on n'a pas l'information totale d'une ou deux régions, c'est inacceptable. Je comprends la concertation, j'ai tout vu ça dans la loi, mais, si on n'a pas les outils nécessaires pour aller les chercher autrement que par tutelle, bien, là, c'est complètement désordonné et c'est inefficace. Nous n'avons pas la base de données de tout ce qui se passe à Montréal sur le plan de l'évolution des statistiques et de la nouvelle loi, ce qui est très, très grave. Le ministre de la Justice est au courant.

Le Président (M. Côté): Additionnelle?

M. Marsan: Oui, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Président (M. Côté): M. le député de Robert-Baldwin.

(10 h 50)

M. Marsan: J'apprécie votre franchise, M. le président. J'apprécie également le travail des commissaires qui sont avec vous et je pense que les gens comprennent bien que ce n'est pas le travail que vous faites qui est en jeu mais simplement l'information qui devrait être donnée par les centres communautaires ou les centres régionaux, et c'est cette information-là que l'on nous refuse. Lorsqu'on refuse cette information-là au Vérificateur, bien, on la refuse aux députés et on la refuse aux élus. Et puis là on ne refuse pas un secret professionnel. Puis je ne veux pas rentrer là-dedans, je vous assure, loin de là. Tout ce qu'on veut, c'est regarder avec vous des principes de gestion, et un des principes, c'est tout simplement: Est-ce que les centres régionaux vérifient l'admissibilité des bénéficiaires à l'aide juridique? On n'est pas capable de nous dire: Oui, c'est vérifié, ça. Donc, il y a des gens, et le Vérificateur cite 82 700 bénéficiaires potentiels, qui reçoivent des services pour lesquels ils n'ont pas droit alors qu'on sait que cette loi-là a été faite pour aider les gens qui sont les plus démunis.

Donc, il y a une difficulté sérieuse, et sûrement que vous pourrez rapporter à vos directeurs ou aux vis-à-vis des centres régionaux que, les gens de cette commission – commission qui est temporaire, en passant, qui est à l'essai – des comptes publics, on veut de plus en plus, les députés de tous les partis, sans faire de politique ou de politicaillerie, vraiment la vérité au niveau des gestionnaires de l'État, et, ce matin, force nous est de constater qu'on refuse de l'information aux députés. Je vous remercie.

Le Président (M. Côté): M. le président de la Commission, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter?

M. Lorrain (Pierre): Le simple commentaire que j'aimerais peut-être ajouter à cet effet, c'est que, en 25 ans, la Commission des services juridiques a toujours eu le contenu total des demandes d'admissibilité. On était obligé de les manutentionner et de les entrer dans le système parce qu'il n'y avait aucune réplique qu'il était possible de faire. Les systèmes informatiques étaient soit incohérents, soit inexistants ou ne parlaient pas le même langage, ce qui n'est plus le cas maintenant. Mais, à ma grande surprise, deux régions nous disent qu'elles sont d'abord à vérifier la légalité de nous faire parvenir la demande d'aide juridique au complet, incluant nom, numéro d'assurance sociale, basées sur certaines lois. Alors, si je n'ai pas le numéro d'assurance sociale, le numéro de sécurité, l'adresse, le nom du conjoint, je me demande ce qu'on va faire comme vérification.

Le Président (M. Côté): Merci. M. le député de Roberval.


Impacts de la nouvelle loi sur l'aide juridique

M. Laprise: M. le président, vous avez dit tout à l'heure, au début, lorsque vous avez donné votre exposé sur la loi, que vous avez quand même élaboré sur la première loi qui avait été faite en 1971-1972, disant que c'était une loi qui était très sociale, une loi qui tenait compte vraiment des plus démunis. Comparativement à la loi qui a été modifiée l'an passé, est-ce que c'est le gouvernement qui va être gagnant par cette loi-là ou si ça va être le citoyen? Est-ce que le citoyen est aussi gagnant dans la nouvelle loi qu'il l'était dans la première loi, malgré les abus qu'il a pu se faire dans la première loi, quoique j'aie de la misère à accepter qu'un organisme comme le vôtre, pendant 25 ans, ait toléré qu'il se fasse des abus au niveau de l'application de cette loi-là?

Moi, ce qui me préoccupe, c'est qu'il y ait eu des gens qui ont abusé de la loi, qui se sont servis de la loi et qui n'avaient pas droit. C'est sûr que c'est un problème. Mais, moi, ce qui me préoccupe, c'est s'il y a des gens qui auraient eu besoin de la loi et qui n'ont pas pu s'en servir. Ça, moi, ça me préoccupe.

Le Président (M. Côté): M. le président.

M. Lorrain (Pierre): Oui. M. le Président, j'accepte votre mot «abus», là, mais les abus potentiels, on n'a pas pu en voir. On n'a pas vérifié, on n'a pas pu vérifier. C'est des croisements de fichiers qui, par réflexe, donnent des résultats. Maintenant, si on avait pu vérifier chacun des dossiers, les dépassements étaient permis. Les dépassements étaient permis et prévus dans la loi, et les conditions de vie de la famille étaient aussi prises en compte. Ça n'apparaît pas, ça, sur la DA, sur la demande d'admissibilité. Bon.

Et votre autre partie, déjà? Vous disiez? Ah, est-ce que c'est la Commission...

M. Laprise: Dans la nouvelle loi, est-ce que le fait qu'on a mis ces restrictions-là va nécessairement pénaliser des personnes qui en auraient besoin et qui ne pourront pas y avoir accès?

M. Lorrain (Pierre): Non. M. le Président, je pense que la nouvelle loi a conservé l'essentiel. C'est plus le pénal qui est disparu, dans la nouvelle loi. Je comprends que, sur le plan admissibilité financière, c'est plus strict. Ils sont obligés de faire le fardeau puis de faire l'effort. S'ils veulent un service de l'État gratuit ou à peu de coûts, il faut qu'ils fassent l'effort de dire: Oui, je suis admissible et, oui, je suis couvert par le genre de droits, parce qu'il y a une partie de la couverture qui n'existe plus.

Mais, ceci étant dit, moi, je pense qu'avec les moyens, l'informatique dont je vous ai parlé, la demande d'admissibilité de la façon dont elle est faite maintenant, les exigences extrêmement strictes on va pouvoir éviter beaucoup de ces abus-là. Et l'impact de la loi, bien, c'est de permettre, comme je disais au tout début de ce matin, à peut-être la première strate de la classe moyenne d'avoir accès à un service juridique à coûts raisonnables ou à un coût arrêté, désigné, et là je parle du volet avec contribution.

Maintenant, quant à l'impact, est-ce qu'il est bon, est-ce que ça a accéléré? Il est peut-être un peu trop tôt. On connaît toute la mouvance d'impact de l'adoption de la loi l'an passé. Pendant quatre mois, là, aux alentours de septembre l'an passé, ce n'étaient pas des mois de référence. On oublie ça, il y avait un désengagement systématique des avocats de pratique privée. La loi était incomprise, il y avait des débats qui étaient maintenus à l'Assemblée nationale là-dessus. Je ne pense pas que ce soient des mois sur lesquels on peut compter.

Le volet avec contribution, on vient tout juste de commencer à le gérer, depuis le 1er janvier 1997. Il prend son élan, mais très, très, très lentement. Et je vais vous dire pourquoi on n'a pas encore choisi d'informer le public. Ça va prendre une campagne d'information du public très importante. Mais, tant que la loi n'est pas arrêtée... Les rumeurs, c'était qu'on était pour changer le volet avec contribution. Les contributions étaient censées changer. Alors, l'entente avec le ministère de la Justice, avec le Barreau et la Commission des services juridiques, attendons que la réforme définitive soit arrêtée, et les grands talents de Me Louis-Paul Allard, qui est spécialiste en communications, bien, là, il commencera puis il les fera valoir.

Je pense qu'à ce moment-là, peut-être d'ici un an, deux ans, quand la population du Québec comprendra ce que veut dire «volet avec contribution», ce dont elle n'a jamais, jamais entendu parler au Québec, ce sera très avantageux. Au lieu de payer 3 000 $ puis 4 000 $ pour un divorce, si ça coûte 200 $, je ne verrais pas pourquoi elle n'utiliserait pas le volet avec contribution.

M. Laprise: Une dernière question.

Le Président (M. Côté): M. le député de Roberval, complémentaire.


Consultations préalables à l'adoption de la nouvelle loi

M. Laprise: Est-ce que vous avez été consulté dans la préparation du nouveau projet de loi?

M. Lorrain (Pierre): Ah oui... Oh! excusez-moi. Excusez-moi.

Le Président (M. Côté): M. le Président.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président. Ha, ha, ha! Oui, oui, oui, et non seulement la Commission, là. M. Bégin, très régulièrement... Il y a eu plusieurs BSM, il y a plusieurs comités où ont siégé des directeurs généraux, parfois des avocats, parfois des juristes. Me Jarry et Me Lucie Dufresne sont venues régulièrement à Québec, ici, avec moi. Il y a plusieurs avocats aussi en réseau qui ont été mis à contribution. Il y a plusieurs mémoires, depuis 1994, qui ont été déposés à M. Lefebvre, qui était ministre de la Justice à ce moment-là, ainsi qu'à M. Bégin.

Ah oui, on a toujours, toujours, toujours été consultés. Même si des fois on ne partageait pas les mêmes orientations, on savait très bien que la décision finale ne nous revenait pas, mais on a participé aux commissions parlementaires puis on a participé aussi surtout à tous les comités parallèles servant à faire évoluer les projets de loi, que ce soit le 87, que ce soit le projet de loi n° 20. Même M. Bégin était venu présenter l'avant-projet 87 à tout le réseau d'aide juridique lui-même personnellement.

Le Président (M. Côté): Merci. M. le député de Chomedey.


Recours en cas de non-collaboration d'un centre régional

M. Mulcair: Merci, M. le Président. On a pris bonne note des remarques du président de la Commission, notamment en ce qui concerne la tutelle. Alors, j'aimerais justement attirer son attention sur l'article 24 de sa loi pour qu'on en parle directement.

M. Lorrain (Pierre): L'article...

M. Mulcair: L'article 24. Le sujet de notre rencontre aujourd'hui, M. le Président, c'est la gestion des services d'aide juridique au Québec, et le président de la Commission vient de nous parler d'un élément de cette gestion-là. L'article 24 parle d'administration provisoire. Il a utilisé le terme «tutelle», tout à l'heure. Sa loi ne parle pas de tutelle, mais l'administration provisoire, c'est cette fonction-là qui est prévue. Je le lis:

«La Commission peut assumer provisoirement les fonctions d'un centre d'aide juridique:

«a) si, après enquête, la Commission constate que ce centre présente une situation financière déficitaire, notamment en ayant encouru des dépenses qui n'étaient pas prévues à son budget ou qui ont été occasionnées par les activités qui n'étaient pas prévues par la présente loi, un règlement ou toute autre convention intervenue avec la Commission.»

J'ai demandé au président de la Commission tout à l'heure quelles étaient ses suggestions de changement de sa loi pour lever le voile imposé par les centres. Peut-être que cet après-midi il pourrait nous donner les fruits de sa réflexion là-dessus, parce qu'on n'a toujours pas eu sa réponse.

Maintenant, sur 24a, j'aimerais passer à travers la rédaction avec lui et lui demander à nouveau de réfléchir à la question s'il n'a pas de réponse tout de suite. Peut-être qu'on peut en parler cet après-midi. Mais, de la manière dont c'est rédigé, moi, je lis la chose suivante: vous n'avez pas, en vertu de 24a, la possibilité de mettre en tutelle, c'est-à-dire d'imposer une administration provisoire en l'absence d'une situation financière déficitaire. En d'autres mots, M. le président, on est face à une situation où la désobéissance civile qu'il est en train de nous décrire de la part d'un centre et la désobéissance du mandat et de l'autorité du Vérificateur général peuvent rester impunies, du moment qu'on n'a pas une situation déficitaire. Je m'explique. Tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas cette situation déficitaire aux termes de 24a, même si des dépenses ont été occasionnées par des activités qui n'étaient pas prévues à la présente loi, donc une dépense illégale, une dépense pour une personne non admissible financièrement, on ne peut rien faire tant qu'ils restent à l'intérieur de leur budget. Ça, c'est notre lecture de 24a. Est-ce que cette lecture est partagée par le président de la Commission?

(11 heures)

Le Président (M. Côté): M. le président.

M. Lorrain (Pierre): Oui et non, M. le Président.

M. Mulcair: Oui et non?

M. Lorrain (Pierre): C'est définitif que...

M. Mulcair: C'est peut-être pour ça qu'on commence à avoir des problèmes.

M. Lorrain (Pierre): ...si on n'avait pas pris d'autres mesures, on serait devant une situation de perdant-perdant. Suite à la non-collaboration systématique depuis près de deux ans de la région de Montréal, à toutes sortes de niveaux – tantôt je parlais de rendre compte de certains rapports, ça s'est élargi à toutes sortes d'autres relations entre la Commission et la région de Montréal – nous avons décidé, les commissaires – ça, c'est un des pouvoirs que la Commission a – de changer complètement le conseil d'administration de Montréal. Le conseil d'administration de Montréal, l'ancien conseil d'administration, partageait entièrement les vues, les choix de son directeur général. Et un des privilèges, des pouvoirs que la loi nous confère, c'est de nommer les membres des conseils d'administration des régions. Devant cet état de fait qui a perduré, devant cet état de fait qui était répété régulièrement, on a brisé une coutume. C'est dommage parce que depuis 25 ans les commissaires, de connivence avec les régions, acceptaient presque en totalité les suggestions qui venaient du directeur général d'une région, peu importe la région.

Je vous ai dit que, depuis quelques années, s'est installé un climat de tension, un climat conflictuel parfois, en différentes régions, pas toutes les régions, parfois c'est des régions différentes pour des motifs différents, et ça, c'est depuis le début des années quatre-vingt-dix. On peut facilement rapprocher ça avec le début des premières compressions, des premières demandes du Conseil du trésor, de rationalisation. Et ça s'est aggravé surtout dans les deux dernières années, parce que vous allez voir cet après-midi que les compressions qu'on a à subir puis à autofinancer à l'intérieur, c'est un bris avec le passé. Ça demande de se remettre en question, ça demande de refaire différemment, ça demande d'innover, ça demande des approches nouvelles, et parfois c'est mal accepté. Parce que c'est toujours les mêmes individus.

Chez nous, c'est les mêmes individus qui gèrent l'aide juridique depuis le début. Souvent, il y en a certains qui sont entrés le premier jour et qui occupent le même poste qu'ils occupaient le premier jour – puis je retiens la suggestion que vous avez faite tantôt. Alors, on l'a fait avec des gens extrêmement sérieux. On a recruté puis on a consulté; on a consulté les universités, le Barreau, les mouvements associatiques pour constituer un nouveau conseil d'administration. Et ça a été fait il y a quelques mois à Montréal.

Je pense, je ne siège pas sur le conseil d'administration de Montréal, mais je pense qu'avec les informations qu'on a communiquées et les informations qu'on a obtenues suite à deux réunions, les deux premières réunions de ce nouveau conseil, que l'atmosphère est après changer, et le ton va changer. On espère aussi que, suite aux rencontres qu'on aura en octobre avec les 11 représentants des conseils d'administration des régions et les directeurs généraux, certaines régions comprendront certains messages.

Le Président (M. Côté): M. le député de Chomedey.


Modifications souhaitables à la loi

M. Mulcair: Maintenant, j'apprécie énormément la réponse candide du président de la Commission et je tiens à refaire l'invitation qui a été faite tantôt, parce qu'il nous reste encore une heure ce matin, mais cet après-midi on peut revenir là-dessus. La question pour nous, comme législateurs, est double aujourd'hui. Dans un premier temps, on veut travailler avec celui qui est nommé par l'Assemblée nationale, le Vérificateur général, pour veiller à ce que les fonds soient dépensés conformément à la volonté du législateur; on veut travailler avec lui pour s'assurer que ça a été fait dans le cas qui nous occupe, dans l'aide juridique. Dans un deuxième temps, on veut travailler avec le président de la Commission des services juridiques, comme législateurs, afin de savoir quels changements, s'il en est, doivent être apportés à la loi, car c'est juste ici que ça peut se faire, à l'Assemblée nationale, qu'une loi peut être changée. Qu'est-ce que vous nous suggérez?

Alors, dans un premier temps, je vous ai amené sur la piste à savoir quel contrôle est possible avec un refus obstiné, concocté, coordonné entre les 11 régions. C'est de ça dont il s'agit avec la lettre de refus. Quand c'est la même lettre qui est envoyée, verbatim, ça a été concocté, ça a été coordonné. Donc, ils sont en train de s'organiser pour passer au-dessus de vous, parce que c'est vous qui êtes censé faire cette coordination; ils se coordonnent entre eux autres pour donner un refus. Premier problème. Qu'est-ce qu'on fait, comme gestion, pour combattre ça? Qu'est-ce qu'il manque dans la loi? Qu'est-ce qui doit être changé? Vous n'avez qu'à faire la demande, nous, on va se faire le devoir.

Comme vous l'avez bien senti ce matin, il n'y a rien de partisan à cette commission. Ce n'est pas le gouvernement contre l'opposition ou vice-versa. On est tous en train de travailler dans un seul but, s'assurer que les sommes, de plus en plus rares, votées par l'Assemblée nationale pour assurer l'intérêt du public, en l'occurrence l'aide juridique aux plus démunis, soient correctement dépensées. Qu'est-ce que ça vous prend?

Premier constat donc: il y a un problème parce qu'ils peuvent se concocter un soi-disant avis juridique, qui est une lettre, pour refuser accès. On va le changer; on n'a qu'à le changer, c'est très facile. Nonobstant ce que le président de la Commission nous a dit tantôt, sur l'existence aux termes de la Charte québécoise d'un tel droit, ça ne demeure qu'un droit privé aux termes de la Common Law et évidemment, aux termes de la même Charte, c'est le législateur qui apporte les limites de l'application de ce droit-là. Et, si c'est en train de nous empêcher de savoir s'ils respectent la loi, on va le changer.

Deuxièmement, on regarde 24a, on constate qu'il y a un problème rédactionnel, problème peut-être que personne n'a jamais eu à regarder vraiment, mais c'est seulement si c'est déficitaire qu'on peut vraiment intervenir avec les gros canons, parce que c'est la clé de voûte: déficit égale possibilité de tutelle, à 24a; absence de déficit, même des dépenses complètement illégales, non prévues par la loi, on ne peut pas imposer une tutelle. 24a.1: On peut imposer la tutelle si, après enquête, la Commission constate qu'un centre a pris au cours d'un exercice financier des engagements supérieurs au montant autorisé... «No problem». Encore là, ils n'ont qu'à prendre des engagements égaux ou inférieurs et les dépenser comme bon leur semble ça n'ouvre pas plus droit à la tutelle.

24b: «Si un centre a manqué gravement aux obligations qui lui sont imposées par la présente loi, par tout règlement ou par une convention intervenue [...] notamment en refusant ou négligeant de fournir l'aide juridique qu'il était habilité à fournir et en mesure de fournir ou en poursuivant d'autres activités...» Encore là, on dit: Ils refusent ou négligent de fournir ou ils poursuivent d'autres activités. Encore une fois, le cas de celui qui donne l'aide juridique, mais à des gens qui n'y ont pas droit, a l'air d'échapper, à moins qu'on puisse accrocher notre chapeau sur le crochet «manqué gravement aux obligations». Mais je ne suis pas du tout sûr que la rédaction ici suffirait pour vous permettre d'imposer la tutelle. Finalement, 24c: «s'il y a eu malversation, abus de confiance ou autres inconduites», on n'est pas là-dedans, dans les cas dont on s'occupe aujourd'hui.

Alors, il me semble, M. le Président, qu'une des choses que nous devons obtenir de la part de la Commission, comme législateurs, c'est une indication claire que c'est leur souhait d'avoir le pouvoir comme outil de gestion – parce que c'est de ça qu'il s'agit aujourd'hui, gestion des services d'aide juridique au Québec – d'avoir le pouvoir très clair d'intervenir lorsqu'il y a refus de donner de l'information et d'intervenir lorsqu'il y a des sommes dépensées pour des fins autres que celles prévues par la loi. Est-ce que le président peut nous dire s'il est d'accord avec nous là-dessus?

Le Président (M. Côté): M. le président de la Commission.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, vous venez de soulever le problème de structure du réseau d'aide juridique du Québec. Maintenant je pense que tous et chacun comprennent bien les pouvoirs de chacun, l'autonomie de chacun, l'indépendance et l'éparpillement des responsabilités prévus par la loi.

Suite à la vérification de l'équipe, une des recommandations qui a été demandée, exigée à la Commission des services juridiques, c'est de faire une étude le plus rapidement possible sur la structure de l'aide juridique, qui date des années 1972. La structure n'a pas toujours dysfonctionné; elle a fonctionné très bien pendant des années. Mais là maintenant, se cachant derrière une autonomie, une indépendance et un pouvoir total – ce sont des personnes morales – chaque conseil d'administration, chaque directeur général se rapporte d'abord... Je n'ai pas de pouvoir de directive direct à un directeur général sur sa gestion de l'aide juridique.

Nous avons demandé et nommé en juin, immédiatement après que le rapport du Vérificateur ait été rendu public, un comité d'étude dont le président fondateur de l'aide juridique, le juge Robert Sauvé, préside le comité, dont Me François Aquin, un grand spécialiste en droit administratif, a fait partie également de ce comité et la firme RCMP qui, en 1992, avait été la firme qui a fait une étude sur la Commission des services juridiques et qui a confectionné le plan directeur et le prix de revient dont on parlera cet après-midi. Alors, Me Jacques Gilbert, trois avocats ont fini de siéger.

(11 h 10)

Vendredi matin, il y a réunion des commissaires à Montréal; c'est une réunion spéciale, et le rapport des membres du comité, leur réflexion sur la structure, sera déposée aux commissaires. Nous nous engageons à vous envoyer copie aussitôt que les commissaires auront pris connaissance de ce rapport qui pourra répondre à la très grande majorité des questions que vous posez ce matin, M. le député de Chomedey, sur le manque de pouvoirs habilitants permettant à la Commission à un moment donné, s'il y a un vide, d'émettre une directive ou de légiférer par réglementation. Mais ce qui est extrêmement compliqué. Je pense que la voie de la directive va être favorisée par tout le monde, suite à plusieurs discussions que j'ai pu avoir avec certains juristes.

Le Président (M. Côté): Avez-vous une additionnelle, M. le député?

M. Mulcair: Oui, la question est évidente, c'est: Quand est-ce que ce rapport va être disponible?

M. Lorrain (Pierre): Ce rapport va être déposé vendredi matin à une réunion des commissaires, à Montréal. Et après j'ai l'intention de faire parvenir copie du rapport au président de votre commission.

M. Mulcair: Donc, en fin de matinée vendredi, j'ai ce rapport dans mon bureau de comté.

M. Lorrain (Pierre): En fin de matinée ou peut-être lundi, en début de semaine, parce qu'on va vous l'envoyer ici à l'Assemblée nationale.

M. Mulcair: C'est dommage qu'on n'ait pas pu avoir ça avant les travaux d'aujourd'hui.

M. Lorrain (Pierre): Le comité vient tout juste de m'aviser qu'ils viennent de terminer, puis on m'a demandé, puis on a convoqué une réunion spéciale pour ça vendredi.

M. Mulcair: Il y a une expression, en anglais: «When in doubt, strike a committee». Mais, moi, je veux quand même savoir l'opinion, M. le Président, du président de la Commission là-dessus, parce que c'est lui qui est devant nous aujourd'hui et pas son comité qui va pondre un rapport vendredi. Moi, je veux savoir son opinion à lui.

M. Lorrain (Pierre): Moi, je pense, M. le député de Chomedey, que je vous ai déjà répondu. J'ai parlé d'un pouvoir de directive. Quand il y a un vide à un moment donné, il faut qu'on réussisse à rendre compte. On a une obligation de rendre compte, on est imputable devant vous, on est imputable devant les demandes du Conseil du trésor, on est imputable, la Commission des services juridiques, devant le ministère de la Justice. On a un décret, on a obtenu un budget par décret du Conseil des ministres cette année avec des règles budgétaires incluses. On se doit de respecter ces règles-là, mais on se doit aussi, la Commission, d'avoir les moyens de les faire respecter.

M. Mulcair: Mais tout à fait, c'est pour ça qu'on en parle aujourd'hui.

M. Lorraine (Pierre): Bon, alors, je pense que l'étude qu'on a fait faire... C'est un problème de structure. Quand on avait tout l'argent nécessaire et qu'il n'y avait aucune difficulté, jamais, jamais... on n'a pas vécu pendant 25 ans les tensions puis les réticences ou les réserves que l'on vit depuis 1990-1991. Mon prédécesseur a démissionné. Après à peine trois ans, il a démissionné. Il n'en pouvait plus, il n'arrivait nulle part. Il a démissionné. Ça, écoutez, c'est le vécu.

M. Mulcair: Aux termes de la loi, M. le Président, est-ce que le président de la Commission peut nous dire, avec le volet contributif, qui va être responsable de recouvrir les sommes qui sont dues, auprès de la Commission, pour du trop-payé ou pour le volet contributif?

M. Lorrain (Pierre): Ce sont les régions, et un logiciel est prévu pour ça, le logiciel de suivi de dossiers. Et le logiciel également de la demande d'admissibilité, tel que je vous le mentionnais tantôt, est déjà fait et prévu pour calculer la contribution de la cliente et également le mode de recouvrement.

Et il y a plus que ça. Le logiciel de suivi va aviser que le dossier a coûté tant et que ce dossier-là est pour recouvrement; ce qu'on n'avait pas auparavant. Et, à cause de la loi qui vient d'être amendée, qui vient tout juste d'être publiée, le 23 juillet, et qui on espère va entrer en force – le nouveau règlement, pas la loi – cet automne, il y a déjà, tel que je vous le disait tantôt, une nouvelle séance de formation et avec les outils informatiques et également sur le nouveau règlement qui prévoit que nous recouvrons non seulement pour nous, mais pour la pratique privée. Et ça, c'est très, très important.

Maintenant, il y a des méthodes différentes qui vont être installées, ça, c'est sûr. On ne collecte pas de la même façon à Montréal. Je sais qu'à Montréal le recouvrement s'est fait de façon centralisée. Mais en Gaspésie, ce n'est pas possible. En Gaspésie, probablement que chacun des bureaux d'avocats va recouvrer dans chacun leurs dossiers les sommes, autant pour la contribution ou pour le recouvrement des mémoires de frais ou des déboursées. Mais, dans des grands centres, il y aura certainement des systèmes qui sont différents, ça ne sera pas un système uniformisé. Mais il est clair dans la loi et les règlements que c'est une responsabilité qui revient au réseau d'aide juridique, c'est-à-dire au centre communautaire.

M. Mulcair: On s'entend là-dessus. Alors, justement au-delà d'un outil de gestion plutôt mécanique, qui est un logiciel, qu'est-ce que législativement la Commission peut faire devant le refus prévisible d'un centre avec son D.G. qui a une philosophie: On ne coure pas après les gens démunis; nous, on ne va pas mettre d'autres avocats aller recouvrer ces sommes-là? Concrètement, qu'est-ce que vous anticipez que vous allez pouvoir faire dans un tel cas?

M. Lorrain (Pierre): Je pense que l'incitatif est dans les crédits de cette année. Il nous manque plus de 5 700 000 $. Il y a trois formes de revenus qui sont tout à fait exceptionnelles et nouvelles maintenant que les permanents d'aide juridique doivent gérer. C'est d'abord les revenus de recouvrement, tel que par le passé. On a possibilité de faire des revenus avec la défiscalisation. Il y a deux enveloppes qui ont été adoptées par le Conseil du trésor et le gouvernement pour gérer la nouvelle loi sur la défiscalisation. Et il y a une troisième façon de boucler nos budgets et d'aller se chercher une forme de revenu et de pouvoir rencontrer des conventions collectives de nos salariés, c'est le volet avec contribution. Si chez nous on ne comprend pas que ce sont de nouvelles formes d'autofinancer notre manque à gagner... Parce que, écoutez, 70 % de la dépense chez nous est en salaire, 70 % des budgets de l'aide juridique est en salaire, 9 % en loyer puis équipement, seulement 4 % en déboursés judiciaires, et toutes les autres dépenses pour les 140 bureaux, c'est moins de 10 % du budget de l'aide juridique.

En chiffres concrets, les coûts fixes, si on enlève les loyers, le téléphone et les coûts fixes qu'on doit rencontrer, on est à peu près à 6 400 000 $ pour gérer plus de 140 bureaux, à l'aide juridique. C'est le salaire qui est là. Et vous comprendrez que le salaire, c'est le nerf de la guerre. On a des conventions collectives, puis on vient de se le faire rappeler, il y a quelques jours, qu'on doit les respecter, même si elles ne sont pas encore totalement terminées comme négociations, et... Bon, c'est une forme de revenus.

Je pense que c'est le meilleur incitatif plus, deuxièmement – il ne faut pas mettre ça de côté, je ne reviens pas sur tout ce que je vous ai dit ce matin, ça ne fait pas partie de la culture du réseau – il va falloir faire de la formation et faire comprendre aux avocats et aux avocates que c'est changé et que ça fait partie des exigences de la nouvelle loi et des règlements. Si ça ne va pas, on fera rapport, et il y a des décisions qui seront prises.

M. Mulcair: On fera rapport puis il y a des décisions qui seront prises. Je pense, M. le Président, que l'invitation que l'on fait et qu'on répète au président de la Commission n'est pas encore tout à fait passée comme message. Ce qu'on essaie de lui dire, c'est que plutôt que de faire des rapports, plutôt que de revenir puis plutôt que de réparer les pots cassés, c'est le temps de faire un peu de médecine préventive. On est en train de lui parler de l'exemple de la perception des sommes dues, mais ça ouvre aussi la porte sur d'autres défis de taille, d'ordre administratif, par exemple la gestion physique de ces fonds-là. Parce que du moment que c'était des budgets impartis, puis c'étaient des choses relativement hermétiquement fermées, puis un chèque qui partait là et là, c'était un style de gestion. Maintenant, avec la perception, avec ces entrées de fonds là, ça va exiger des compétences de gestion dans les centres qui n'ont jamais eu besoin d'exister auparavant.

M. Lorrain (Pierre): Définitif.

M. Mulcair: Et comme législateur qui est en train d'écouter les explications «such as they are», que l'on reçoit ce matin, je suis passablement inquiet pour l'avenir. Je ne veux pas attendre un autre rapport, un autre comité, une autre analyse et qu'on revienne et qu'on fasse rapport ici puis qu'on nous dise: Bordel, c'est vrai qu'en 1997, quand on est venu, vous nous avez parlé de ça, mais on s'est rendu compte deux ans plus tard que ça ne marche pas; c'est vrai, mais ce n'est pas de notre faute, ça fait 23 ans que c'est comme ça, puis c'est la faute de la nouvelle loi.

Il faut maintenant que vous nous disiez ce que vous allez faire avec ce que vous avez. Ou encore – et c'est une invitation qu'on répète – que vous nous disiez clairement ce que ça vous prend. C'est une chose de dire qu'il faut donner des outils de gestion dans les centres, mais encore faut-il que nous, comme législateurs, on vous donne vos outils pour s'assurer, pour «veiller à», pour reprendre les termes de l'article 22. C'est bien beau de dire «veiller à», mais, si on ne vous donne pas les outils pour le faire, c'est des voeux pieux.

Alors, je répète l'invitation: Dites-nous ce dont vous avez besoin de plus pour veiller à ce que les problèmes du passé ne se répètent pas. Mais surtout pour veiller à ce que les nouveaux défis de gestion puissent être accomplis sans que les fonds du public soient dépensés d'une manière contraire à la volonté exprimée par le législateur. C'est vraiment ça qu'on est en train de dire aujourd'hui. Ce n'est pas un exercice de blâme qu'on appelle en anglais «finger pointing». C'est un exercice qui consiste à dire: On sait qu'il y a de l'argent qui a été dépensé d'une manière non conforme à la volonté du législateur par le passé. Qu'est-ce qui manquait comme outil de gestion? Ou qu'est-ce qui n'a pas été exercé? Et comment on s'y prend pour l'avenir? Maintenant, on est dans le volet réparation.

Puis pour que jamais ça ne se répète, que notre mandataire, celui en qui nous avons confiance, qui est le Vérificateur général, rencontre une porte fermée, qu'est-ce qu'on va faire ensemble pour ouvrir ces portes-là? Parce que c'est inadmissible ce qui est arrivé dans ce dossier-ci, pas au plan de la gestion, rappelons-le, mais au plan des centres et le refus concerté, concocté, le refus illégal auprès du Vérificateur général. C'est de ça dont il s'agit aujourd'hui.

Le Président (M. Côté): Oui, M. le président.

M. Lorrain (Pierre): Il y a deux choses, concrètement, qui ont été faites, qui étaient dans les moyens et les responsabilité de la Commission. Dans un premier temps, écoutez, il y a à peine 18 mois, ça n'existait pas l'informatique et les outils qu'on a. Je vous ai parlé qu'il y a deux logiciels qui vont servir et même la demande d'admissibilité est le commencement de l'opération recouvrement sous toutes ses formes. On a même une calculette. Ce n'est pas la personne qui dit: Madame, vous nous devez 300. Une fois que la demande est terminée, c'est la machine qui dit combien madame doit verser, en vertu du logiciel.

(11 h 20)

En plus de ça, bien, on vous a dit tantôt qu'on organisait des sessions de formation tout à fait pointues là-dessus. On a reconnu, et après vérification avec le réseau, le réseau constate: Oui, c'est vrai, ils n'ont jamais collecté dans le passé; ce n'est pas la culture et ce n'est pas ce qu'on demandait, ce n'est pas ce que le gouvernement demandait. Mais dans un troisième temps je vous ai parlé aussi d'une autre décision qu'ont pris les commissaires. Devant certains refus, devant la structure de plus en plus complexe qui vient jouer à l'encontre d'un bon fonctionnement ou d'une transparence, on a demandé une étude. Cette étude va être déposée vendredi. Je me suis engagé à vous la déposer. Il va y avoir peut-être des suites à cette étude-là, et je pense qu'une partie de la réponse que vous me demandez ce matin est peut-être dans cette étude.

Maintenant, écoutez bien, ça ne pourra pas durer comme ça. Tantôt on va passer à des statistiques puis, quand une région représente 33 % de la clientèle de l'aide juridique puis je ne sais pas ce qui se passe, on a un problème. On a un très gros problème.

M. Mulcair: M. le Président, je peux juste dire en terminant, avant de passer la parole à nos autres collègues...

Le Président (M. Côté): Oui, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: ...au président de la Commission que c'est sûr qu'une des suites du rapport que nous attendons avec impatience vendredi c'est qu'on va avoir l'immense plaisir de la ravoir devant nous pour étudier ce rapport, parce que c'est dommage qu'on soit ici un mercredi sachant que le rapport sort vendredi. Mais ça va nous donner le temps de l'étudier. Ça va nous faire plaisir de la reconvoquer devant cette commission avec la présence du Vérificateur général.

Le Président (M. Côté): M. le Président.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, juste ajouter là-dessus qu'il n'y a aucune stratégie quelconque de notre part. On a agit très, très rapidement. N'oubliez pas que le dépôt du rapport du Vérificateur s'est fait début juin. Il a fallu convoquer une réunion de commissaires, prendre connaissance du rapport. Je vous le dis, les commissaires ont pris le rapport très sérieux.

Mais il y a aussi des choses qu'ils reconnaissent, qui ont été faites bien avant que l'équipe vienne chez nous. Mais ceci étant dit, c'est une des recommandations qui s'adressaient à la Commission. On n'a pas perdu de temps. Déjà le 23 juin, le comité était au travail. Mais un comité qui a rencontré... Et vous verrez la brochette de gens qu'ils ont rencontrés, c'est très, très sérieux. C'est très sérieux. On ne pouvait pas aller plus rapidement.


Système informatique pour le recouvrement des sommes versées en trop

Le Président (M. Côté): J'aurais peut-être une petite question additionnelle avant de passer la parole à M. le Vérificateur. M. le président, lorsque vous dites que vous avez mis en place un logiciel pour justement aller recouvrer les sommes qui ont été versées en trop... Parce qu'il n'y en avait pas avant de recouvrement, vous dites que ça ne faisait pas partie de la culture, bon, tout ça. À partir de maintenant vous allez pouvoir le faire, est-ce que vous le faites à partir de maintenant ou si vous avez un rétroactif que vous allez chercher?

M. Lorrain (Pierre): Non, il s'en fait du recouvrement. Il s'en est toujours fait. Il s'en est fait, mais d'une façon seulement. Ce qui était déboursé, frais judiciaires, mémoires de frais; c'était la seule façon de recouvrer auparavant, sous l'ancienne loi. Maintenant, il y a trois façons à cause du volet avec contribution. Ça, c'est une contribution. D'ailleurs, un bénéficiaire qui veut faire ouvrir son dossier doit immédiatement déposer son 50 $. Déjà là, c'est une source de revenus et pour la pratique privée et pour les permanents. Après la machine dit, quand on a complété son admissibilité par logiciel... Imaginez-vous si on travaillait encore comme il y a à peine 1994; il y a des régions qui travaillaient encore au crayon au plomb pour faire l'admissibilité. Je n'ai pas à en dire plus.

Là, on sait déjà quel est le montant que cette dame ou ce monsieur doit débourser pour avoir le service pour lequel la machine dit: Oui, t'es admissible, c'est couvert. Il y a plus que ça financièrement: T'es admissible, mais à 200 $. La loi dit, le nouveau règlement, qui vient d'être publié en juillet encadre l'étalement des paiements. Tu dois payer dans les 15 jours, sauf pour certaines raisons... Maximum six mois. Encore là l'entente doit se faire immédiatement puis apparaît sur... Ça fait qu'automatiquement, c'est la machine qui va rappeler, qui va systématiser. Maintenant, comme je vous disais tantôt, je suis sûr que certains directeurs généraux vont faire la réclamation, le recouvrement dans leur centre et d'autres le feront à travers leurs bureaux. Les méthodes seront différentes.

Mais c'est déjà commencé, lentement par exemple. C'est lent le démarrage du volet avec contribution, mais, lorsqu'il aura pris sa vitesse, je pense que tout le monde va comprendre qu'il y a une source de revenus extrêmement importante pour subvenir à nos besoins, nos manques à gagner, la Commission et le réseau. Et soyez assuré d'une chose, M. le député de Chomedey, le message est très bien compris. Il y a deux commissaires qui sont ici; ils sont venus sur leur temps, bénévolement, qui ont laissé leur travail pour assister aux délibérés de la commission. Il y a des gens qui siègent sur la Commission depuis sept ans, huit ans, qui ont siégé avec trois présidents différents. Ils sont extrêmement conscients qu'on est déjà avisés que M. Breton – et toute son équipe – va revenir, et notre intention, c'est de faire bouger les choses.

Et on a déjà commencé pour la partie qui nous concerne, pour la partie... Vous regarderez le rapport annuel de l'aide juridique qui va être déposé cet automne à l'Assemblée nationale. J'y ai assisté pour y ajouter une phrase. Une phrase. Mais l'an prochain, on va commencer à le modifier et on espère avoir des rapports plus pointus qui vont donner un aperçu plus complet de ce qu'est la clientèle et l'évolution de la clientèle de l'aide juridique au Québec. Et, au lieu de parler en termes de dossiers, on va peut-être parler en termes de personnes qui ont 12 ans avec une famille monoparentale et qui ont été poursuivies en vertu des jeunes contrevenants. Ça serait pas mal plus intéressant. On pourrait peut-être avoir des échelles de salaires aussi de familles qui viennent à l'aide juridique. On pourra peut-être vous donner un portrait aussi des dépassements et des discrétions. Ce qu'on n'avait pas comme outil auparavant.

Écoutez, chez nous actuellement, à l'heure où je vous parle, il y a encore deux systèmes informatiques puis Wang – puis Wang avec des rubans de cette largeur-là. C'est l'époque du Moyen Âge là, mais il y a 49 000 000 $ de comptes à payer pour les avocats de pratique privée dans ça; c'est inquiétant. On est passé à autre chose. On est à gérer d'une façon différente, mais on n'a pas complété encore la mise en place de tous ces outils, de toutes ces méthodes de gestion qui, je pense, vont nous aider grandement à rencontrer les obligations qui, pour bonne part, il va falloir bouger.

Le Président (M. Côté): Mais ma question, M. Lorrain, aussi c'était, bon, si, par exemple, vous avez un cas de 1995 où il y aurait eu des recouvrements à faire et ça n'a pas été fait. Puis maintenant, avec les outils que vous avez, vous pouvez le faire, est-ce que vous allez aller en rétroactif pour aller le chercher? Parce que vous dites, bon, c'était pas une culture puis... C'est quoi, votre position face à...

M. Lorrain (Pierre): Ce n'est pas un outil de perception de correction qu'on va avoir, c'est un outil qui va nous aider à dire: Oups! Ça, il faut que tu collectes et voici comment tu vas le systématiser. Là, il faudrait aller fouiller dans l'ancien dossier qui, lui, ne fait pas partie du nouveau système informatique, qui a été probablement ouvert avec des copies carbones, là. Les mandats d'aide juridique, quand je suis arrivé comme président à l'aide juridique, c'était le même mandat qu'en 1972: les comptes, feuille jaune, feuille blanche, feuille rose et feuille de carbone. On reprogrammait dans une autre machine à la Commission tous les mandats d'aide juridique qui avaient déjà été saisis en région, et aucune réplication n'était possible. On est après passer à une autre vitesse, là. Ça n'a pas été évident, là...

Le Président (M. Côté): Donc, c'est avec la nouvelle loi...

M. Lorrain (Pierre): Oui. Non, non, on avait commencé avant avant. Une chance parce que là...

Le Président (M. Côté): Oui, mais particulièrement le logiciel est fait en vertu de la nouvelle loi.

M. Lorrain (Pierre): Oui.

Le Président (M. Côté): Bon. Merci. M. le Vérificateur, je pense, aurait peut-être des éléments supplémentaires à apporter.

M. Breton (Guy): Oui, c'est simplement un élément d'information pour dire que la Commission ou le comité de recherche qui vient de faire un travail, qui va déposer son rapport vendredi, est venu nous rencontrer à nos bureaux durant le courant de l'été, justement pour faire le tour du contenu du rapport annuel. Donc, cet aspect-là aussi aura été couvert par eux, directement en s'adressant à nous.

Le Président (M. Côté): O.K. Merci. M. le député de Robert-Baldwin.


Diminution des demandes d'aide juridique

M. Marsan: Merci, M. le Président. Deux questions. Pourquoi le nombre de demandes d'aide juridique a-t-il diminué de façon importante avec le changement de la loi? Et, si c'était possible, juste d'expliquer rapidement comment fonctionne le volet contributif, sans rentrer dans tous les détails. Ce serait apprécié, M. le Président.

Le Président (M. Côté): M. le président.

(11 h 30)

M. Lorrain (Pierre): Si vous permettez, M. le Président, on peut peut-être commencer par les statistiques pour faire des comparatifs avec des tableaux, par matière. Vous allez voir l'évolution dans les derniers mois. Après ça, on donnera les échelons. On va vous projeter les échelons du volet avec contribution. C'est très, très clair: famille, revenu et la contribution exigée. Est-ce que je pourrais avoir les graphiques s'il vous plaît sur les statistiques, les consolidés? A-45, s'il vous plaît.

C'est une première référence. Alors, c'est la répartition des demandes qui avaient été acceptées de 1986-1987 à 1996-1997. Regardez la constance des deux lignes, bleu et rouge, rouge étant permanent et la pratique privée. Mettons de côté les notaires, les notaires viennent faire rapprocher les deux lignes. Il n'y a pas tant de différences que ça, mais on ne les a pas mis là-dessus. Là où il y a la chute, suite à votre question, M. le député, vous voyez l'année 1996-1997, 128 000 dossiers, 14 000 pour les permanents et 109 336. Auparavant, la totalité des dossiers qui étaient traités, si on enlève, là, quelques dizaines de milliers pour les notaires, c'était plus ou moins, dans les cinq dernières années, 300 000 dossiers que se partageaient la pratique privée et les permanents. Alors, on voit tout de suite, là, qu'on arrive à peu près à 240 000 pour cette année-là.

Maintenant, faisons attention, c'est une année charnière. C'est une année où six mois on pratique avec une loi et la balance de l'année – je suis correct dans mon affaire, six mois? – avec la nouvelle loi. Deuxièmement, je ne veux pas vous rappeler des souvenirs de l'automne passé puis du début de l'hiver, ça ne faisait pas foule dans les bureaux d'aide juridique à cause de toute la campagne de désinformation, de la réaction un peu puis des incertitudes, mais ça vous démontre tout de suite, là, qu'il y a une baisse.

A-46, s'il vous plaît. Bien, ça, je ne vois rien de plus, là, moi. Les deux lignes du haut, les deux seules choses, peut-être, qui sont additionnelles, là. Je vous disais qu'on traitait plus de 300 000 dossiers. Regardez, à partir de 1991, on traite pratiquement toujours 330 000 dossiers, pas bénéficiaires, 330 000 dossiers, et sont acceptés, année après année, à peu près 300 000 dossiers. Et regardez l'année 1996-1997, on traite 289 236 dossiers. C'est la première fois qu'on baisse, et de beaucoup, en bas de 300 000. L'autre ligne d'en bas, bien c'est dossiers admis. C'est ça? Permanents et privés.

Mme Dubé (Céline): La deuxième année.

M. Lorrain (Pierre): On va passer à A-47. Est-ce que ça apporte quelque chose de plus?

(Consultation)

M. Lorrain (Pierre): Ce qui est important, c'est une matière qui a été touchée par la réforme, les deux premières lignes en haut, le civil et le civil administratif. Alors, sur les années 1992-1993 à 1996-1997, vous voyez, la première ligne d'en haut, il y a une baisse de 77 322 à 60 978. Là, il y a une baisse significative à cause du civil qui, dans la très grande majorité, devient discrétionnaire et n'est plus admissible. L'administratif reste pratiquement totalement couvert. Le familial, lui, vous l'avez à la deuxième ligne d'en haut. Alors, il y a une baisse là aussi, 75 930 à 60 918, encore là, année charnière.

Mme Dubé (Céline): C'est 68 918.

M. Lorrain (Pierre): Excusez, 68 918. Excusez-moi, là. C'est une petite baisse d'à peine 7 000 dossiers qui peut s'expliquer par le contexte dans lequel... et également par le fait que les conditions d'admissibilité, sur le plan économique, sont beaucoup plus strictes. Si vous allez à 1992-1993, il y a quand même une augmentation. En 1992-1993, on en traitait 67 772, des matières familiales. L'an passé, malgré la réforme, on en a traité 60 860. Moi, le parallèle que je voulais vous faire, c'est avec les derniers mois, l'année précédente.

M. Marsan: M. le Président, juste là-dessus, si vous le permettez.

Le Président (M. Coté): Oui, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Je reviens juste à votre première acétate. Il y a quand même une diminution de 300 000 et quelques à 240 000 au total.

M. Lorrain (Pierre): La première?

M. Marsan: Et les raisons? Vous avez parlé de campagne de désinformation, mais il doit y avoir plus que ça. Comment ça se fait que, du jour au lendemain, il y a 60 000 bénéficiaires qui disent: Woup! on...

M. Lorrain (Pierre): Tantôt, on va vous le montrer par un autre schéma. Il y a des matières qui ne sont plus couvertes. O.K.? Il y a des matières qui sont exclues. Il y en a d'autres, c'est discrétionnaire seulement. Maintenant, on vous a parlé de la loi qui est beaucoup plus encadrante, la nouvelle loi. Alors, il y a des tests d'admissibilité, au niveau économique, qui sont très stricts. Moi, je pense, je le dis très sincèrement, M. le Vérificateur, que la réforme et la façon dont pratique la permanence, la réforme et les règlements d'aide juridique démontrent qu'on suit à la lettre les objectifs qui étaient recherchés par la loi et les règlements. C'est l'impact.

Je m'inquiéterais beaucoup s'il n'y avait pas de baisse de clientèle, parce qu'il y a des matières qui sont disparues. Avant, c'était la couverture la plus totale en Amérique du Nord. Mais, maintenant, c'est clair qu'il y a certains secteurs qui sont disparus. Deuxièmement, même s'il y a augmentation des seuils, les tests d'admissibilité sont très stricts et ils sont suivis à la lettre. Maintenant, si les gens ne font plus l'effort aussi et ne nous apportent pas les pièces justificatives, bien, parfois, c'est clair dans la loi, c'est clair dans le règlement, ils peuvent perdre le bénéfice du service. Alors, c'est un peu normal. C'est dans le criminel surtout, là, qu'il y a des baisses. Vous allez le voir tantôt, par d'autres tableaux. On vous le donne par groupes de familles de droit.

M. Marsan: La deuxième question.


Fonctionnement du volet contributoire

M. Lorrain (Pierre): Et le volet contributoire qui devrait venir compenser, bien il n'a pas pris sa vitesse. Oubliez ça, là. Il n'a pas pris sa vitesse de croisière. Ça fait seulement à peu près six mois. On est encore après changer le règlement. Puis il n'y a eu aucune campagne d'information du public. Je vous ai dit pourquoi. Ça a été décidé par nous, la Commission, le ministère de la Justice et le Barreau. La loi n'est pas complétée. Les règlements ne sont pas encore en force.

M. Marsan: Je pourrais vous émettre... Juste en terminant, ce n'est pas une question, c'est un commentaire, toujours en précisant bien, là, que le travail qui est fait par le président et les commissaires est toujours apprécié, mais qu'il y a une difficulté au niveau des centres régionaux. Eh bien, si on avait un problème seulement pour vérifier les critères d'admissibilité tantôt, le volet contributif, est-ce que, automatiquement, ça va bien aller? Moi, j'ai des doutes, à moins qu'il y ait des changements profonds. Vous avez parlé qu'il y en aurait fort probablement. En tout cas, on écoutera la suite cet après-midi.

M. Lorrain (Pierre): Bon, je présume de la bonne foi et du bon travail passé quand même de ces gens-là. Vous savez, le climat d'incertitude, de crainte et de remise en question, là, depuis un an et demi à la Commission des services juridiques est réel. On n'a jamais convoqué autant de réunions de régions avec la Commission. Cette année, ça fait trois fois qu'on rencontre les présidents des conseils d'administration, trois fois dans les 10 derniers mois. L'an passé aussi, ça a été quatre fois. Je me déplace en région pour aller parler quand on m'invite et j'assiste aux assemblées générales des conseils d'administration. Les directeurs généraux, depuis deux ans et demi, s'ils ne sont pas venus deux fois assister à des séances de travail à Montréal, ils ne sont pas venus une fois.

Moi, j'ai l'impression... Je suis plus optimiste que ça. Je comprends votre réaction, puis je n'essaie pas d'éviter d'être imputable et de rendre compte, puis je n'essaie pas de gagner du temps. Écoutez, tout est enregistré ici, et je n'essaie pas de gagner du temps. On va faire ce qu'il y a à faire et, si ça ne fonctionne pas, on revient.

M. Marsan: Oui, parce que vous savez qu'on est là pour vous aider aussi.

M. Lorrain (Pierre): Oui.

M. Marsan: Les objectifs, je pense qu'ils sont clairs, et on les poursuit ensemble. Merci.

Le Président (M. Côté): Merci. Monsieur...

M. Lorrain (Pierre): Il n'est pas question, derrière tout ça... Oh! Pardon.

Le Président (M. Côté): Continuez, M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): Les recherches des commissaires, ce n'est pas gérer les... On n'a pas l'intention de gérer les régions. On n'a pas le personnel, on n'a pas les budgets puis on n'a pas la compétence non plus d'aller faire le travail au quotidien de ce qui est inscrit dans la loi de l'aide juridique. Mais de rendre compte, par exemple, ça, là...

Le Président (M. Côté): Merci. M. Breton avait quelque chose à ajouter.

M. Breton (Guy): Oui. Concernant les statistiques qui ont été publiées, elles sont pour l'année 1996-1997. Est-ce qu'il serait juste de dire que la moitié de cette statistique a trait à l'ancienne loi et l'autre moitié a trait à la nouvelle, et que, s'il y a un écart assez grand entre l'année antérieure et l'année courante, c'est seulement l'impact de six mois et que, si on voulait avoir l'impact réel de la loi, il faudrait pratiquement multiplier cet impact par deux, ce qui nous donnerait l'erre d'aller pour les prochaines années ou est-ce que c'est une extrapolation qui est un peu trop forte?

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): Oui, M. le Vérificateur, M. le Président, c'est peut-être un peu trop fort de multiplier par deux. C'est vrai qu'il y a un chevauchement de deux années, c'est vrai aussi qu'il y a eu un blitz au niveau de l'admissibilité. Parce que, à l'aide juridique, souvent, les rendez-vous pour l'admissibilité peuvent s'étaler sur quatre ou cinq semaines. Quand les gens ont vu que la nouvelle loi s'en venait, on a envoyé un avis à tout le monde et les gens ont accéléré pour se faire admettre sous l'ancienne loi. Ils voulaient être admis sous l'ancienne loi. Ils avaient fait affaire avec nous autres sous l'ancienne loi. Ils avaient pris un rendez-vous pour être admis sous l'ancienne loi. Il y a eu un blitz. Ça vient défaire un peu, ça vient fausser un peu les statistiques de dossiers qui étaient pendants, par exemple, qui pouvaient être ouverts, dont l'admissibilité n'était pas complétée. Et là le bénéficiaire a voulu la compléter sous l'ancienne loi. Il y a eu un blitz, donc une augmentation vers la fin septembre et au mois d'août, là, de clientèle.

Deuxième point. Ça a été beaucoup trop chaotique pour dire que c'est une année modèle, que c'est une année type, la fin de l'année 1996-1997, pour dire: On va prendre cette base puis on va essayer d'extrapoler pour le futur. Moi, je pense qu'il faut que, d'abord, la loi soit bien comprise du public. Elle n'est pas totalement comprise. On fait beaucoup de choses, là: campagnes, conférences de presse, dépliants, mais une loi qui est aussi fondamentale que celle-là avec une réforme aussi profonde, ça va demander plus que ça.

(11 h 40)

Maintenant, le volet avec contribution qui devrait être un apport important au niveau de l'admissibilité et au niveau de la clientèle ne fonctionne pas, loin de là, à pleine vitesse. Et ça, je vous l'ai dit tantôt, il faut le dire au public. Le public ne le sait même pas, que ça existe, puis de quelle façon. Moi, je pense qu'il pourrait devenir très intéressant... Mais ça va dépendre beaucoup de nous aussi. On a à le vendre, les permanents, on a à le vendre régulièrement quand on rencontre nos clients. Et ça, bien, c'est un changement, mais on va le faire.

Le Président (M. Côté): Mme la députée de Vanier.


Lien avec la sécurité du revenu

Mme Barbeau: Merci, M. le Président. Moi, c'est une question un petit peu plus pointue. Si vous ne pouvez pas me répondre immédiatement, ça pourra venir par la suite. C'est par rapport aux démunis, parce que, moi, j'en ai pas mal dans mon comté. Là, je comprends que la nouvelle loi, ça va être plus sévère par rapport aux pièces justificatives. Même si je suis en accord avec le fait que les gens doivent être responsables et prouver qu'ils ont besoin de l'aide, qu'ils peuvent être admissibles à l'aide, je pense que dans la vraie vie il y en a qui sont très démunis, ils ne portent pas le nom pour rien, et surtout les gens à l'aide sociale.

Moi, je participe activement présentement à la réforme de l'aide sociale et je voudrais savoir, si vous êtes capables de me répondre, quels papiers vous allez exiger de ces gens-là et si vous voulez avoir plus de relations avec la Sécurité du revenu. Si vous en avez déjà, des communications, est-ce que les communications se font présentement par rapport à ça? Est-ce que vous voudriez en avoir plus pour éviter que quelqu'un qui est très démuni, bon, son chèque, il le change deux minutes après qu'il l'a. Il n'a rien, par exemple. Je donne un exemple. La personne vient me voir, puis là elle braille, puis là je lui dis: Bien, tu y as droit. Est-ce que vous avez pensé à ça? Est-ce que vous voulez avoir plus de relations avec la Sécurité du revenu? Moi, ça m'aiderait, en tout cas, dans mon travail de l'autre bord de la barrière et aussi dans mon travail de comté.

Puis la deuxième, c'est plutôt une réflexion qu'une question, c'est quand vous avez dit que vous avez fait beaucoup de... Pour faire connaître votre service, moi, je vous suggère, comme on le suggère à beaucoup de gens dans l'administration publique, de parler avec le personnel des bureaux de comté des députés, parce que c'est une bonne façon de faire connaître ce qui se passe. Nous, on a les gens qui entrent, puis souvent les attachés politiques et même les députés qui votent les lois, vous le savez, on n'est pas toujours dans le détail près capables d'expliquer tout. Mais je pense que c'est une bonne formule à penser dans le futur. Peut-être par région faire une séance d'information pour les attachés politiques des bureaux de député, quels qu'ils soient, je pense que ça pourrait aider dans votre démarche de faire connaître les changements, les nouveaux services, etc., et aussi dans le travail qu'on fait auprès des citoyens.

Alors, c'est ma première question. Elle est peut-être un peu pointue, mais j'aimerais... si vous avez une idée là-dessus, sinon on pourra peut-être en reparler ultérieurement.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, votre deuxième suggestion est bienvenue. La preuve de ça, c'est que souvent les plaintes sont acheminées via les bureaux de député. J'ai moi-même parlé à plusieurs attachés politiques, aux représentants de députés, cette année, au cours de la réforme. Oui, on va se faire un plaisir. On est équipés pour ça. On trouvera le moyen et le moment. On se déplace parfois en région, parce que notre formation, on n'a plus les moyens de déplacer tout le monde puis de faire des congrès pendant, on va plutôt sur place former nos gens.

Pourquoi on ne le ferait pas? On couvre le Québec au complet. On pourrait réunir une dizaine, une quinzaine, une vingtaine d'attachés politiques. Il y a de la documentation qu'on pourrait vous fournir aussi. Il y a une loi annotée qui est en préparation par le service de recherche. En plus du guide d'interprétation qu'on vous a remis, il y a une loi annotée qui s'en vient avec la nouvelle jurisprudence du Comité de révision. Il va y avoir un règlement annoté également qu'on est après préparer à l'interne, à la Commission, qui va être distribué. Aussitôt que les campagnes, on aura décidé du format final, que la réforme sera enfin terminée, c'est définitif que Me Allard a comme projet d'avoir des outils de communication faciles qu'on pourra vous envoyer à chacun, aux députés.

Quant à votre première question, oui, ça fait partie de nos projets. On veut faire exactement un groupe de travail avec la sécurité du revenu, la Commission des services juridiques et le ministère du Revenu, et on est censés rencontrer Mme Harel. Ça n'a pas adonné, là, vacances, travail, etc., mais ça va se faire très rapidement pour essayer d'en arriver à une entente où on pourra aller chercher le nécessaire. Ça rendra probablement service à ces gens-là. Vous le dites vous-même, quelqu'un qui est très démuni n'a peut-être pas les moyens de s'organiser, n'a peut-être pas toutes ses choses classées dans une filière chez lui. Bien, via l'informatique avec les clés nécessaires pour la sécurité de la confidentialité, on obtiendra peut-être ce qu'il faut pour cette dame-là et automatiquement, quand on a la réponse, on la met au dossier et cette dame sera admissible.

Mme Barbeau: ...puis il va se faire quelque chose? O.K.

M. Lorrain (Pierre): Oui. On n'aurait pas pu le faire, puis je le dis au bénéfice de l'équipe du Vérificateur parce que j'ai eu l'occasion de parler avec eux pendant plusieurs heures cette année et l'an passé, on n'aurait pas pu faire ça l'an passé, on n'aurait pas pu se brancher. Il aurait fallu le faire à prix coûteux, avec des méthodes douteuses du respect de la sécurité et de la confidence de ce qu'on aurait appris soit par téléphone, soit par bureaux régionaux, soit d'une façon différente d'une région à l'autre. Il y avait même des régions qui n'étaient pas informatisées et je doute très bien que beaucoup des systèmes qu'on avait étaient compatibles avec ceux des deux réseaux de banques de données, alors que maintenant je pense que, à très peu de coûts, ça pourra se faire. Mais ce n'est certainement pas tous ceux qui feront l'admissibilité qui auront accès à ces banques-là, c'est trop délicat. On trouvera un moyen, un mécanisme, un canal par le bureau du D.G., je ne le sais pas. On verra.

Mme Barbeau: Mais c'est dans vos préoccupations.

M. Lorrain (Pierre): Absolument.

Mme Barbeau: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Côté): M. le député de Chomedey.


Connaissance des problèmes de la région de Montréal au ministère de la Justice

M. Mulcair: Très brièvement, M. le Président. Aux termes de l'article 87 de la loi, de l'émission de loi, «dans les quatre mois qui suivent la clôture de son exercice [...] transmettre au ministre de la Justice un rapport financier vérifié», je voulais savoir, de la part du président, si le rapport a déjà été transmis au ministre de la Justice. Est-ce que le président peut nous dire si son rapport contient des indications détaillées concernant la situation grave et inquiétante qu'il nous a expliquée pour la région de Montréal?

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, non, pas dans les états financiers, sauf que M. Bégin, le ministre de la Justice d'alors, était au courant, le sous-ministre également. Je pense que les gens sont au courant du fait, sauf que c'est de notre responsabilité, la Commission. Je vous ai dit tantôt quelles sont les décisions qu'on avait déjà de prises. On en a pris une très, très importante, c'est de renouveler en totalité le conseil d'administration il y a deux mois. Ça revient à nous. Ce n'est pas un pouvoir qui est donné au ministre de la Justice, mais à la Commission.

Dans un deuxième temps, on a nommé un comité et le comité s'est penché sur l'impact de la structure, les effets de la structure, que ça soit positif ou négatif. Je pense que ça va vous intéresser beaucoup lorsqu'on pourra vous remettre le contenu de ce rapport-là. Mais c'est définitif que, à ma première rencontre avec le ministre de la Justice, M. Serge Ménard, c'est un des points à l'ordre du jour.

M. Mulcair: M. le Président, dans la mesure où les rapports annuels servent également aux membres de l'Assemblée dans leurs délibérations et leurs travaux, il est important, peut-être, de considérer l'expansion des informations qui sont contenues, parce que bien plus qu'un simple rapport financier vérifié par un comptable agréé, il faut, à notre sens, donner les indications essentielles aux membres de cette Assemblée afin qu'ils puissent répondre aux besoins. Là, on est en train de parler d'une situation d'urgence. On attend avec impatience le rapport qui doit arriver vendredi et on aura l'occasion de revoir le président de la Commission, mais, de la même manière qu'on lui offre notre collaboration, on lui demande de nous transmettre l'information, aux parlementaires.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): Si vous me permettez, M. le Président, dans notre rapport annuel cette année, qui sera déposé d'ici quelques semaines à l'Assemblée nationale, il est mis une réserve, j'ai exigé qu'on mette une réserve. Il y a des rapports statistiques qui sont dans le rapport, dans notre rapport annuel. Il y a une réserve qui dit qu'on n'est pas en possession de la banque de données de telle ou telle région.

M. Mulcair: Non, on se comprend, mais c'est un peu comme la limitation que peut mettre un comptable au début d'un état financier. Vous savez, j'ai eu à faire une transaction commerciale dans mon bureau d'avocat la semaine dernière, et la manière du comptable de se dégager, on avait les larmes aux yeux tellement on riait. C'était vraiment, en huit phrases, dire: Si vous croyez un mot de ce qui est écrit dans les pages qui suivent, vous êtes vraiment des couillons. Alors, on a beau ajouter une phrase, dire: Ne vous fiez pas aux états financiers, mais ce que, nous, on veut, c'est que les outils nécessaires pour gérer les régions – c'est ça, l'expression que le président de la Commission a employée tantôt... On veut lui donner les outils de gestion. C'est ça, notre préoccupation aujourd'hui, n'est-ce pas? On veut lui donner les outils de gestion pour gérer les régions.

L'obligation qui incombe à la Commission n'est pas différente de celle que j'ai bien connue quand j'étais président de l'Office des professions du Québec, qui était de veiller à ce que les ordres professionnels fassent leur travail de protection du public. On ne gérait pas les ordres professionnels, mais il fallait qu'on ait suffisamment d'outils pour s'assurer qu'ils étaient en train de faire leur travail. Il y a toujours de la résistance là-dedans. Les gens ne voulaient pas des analyses de leur performance. On avait fait des grilles d'analyse, des indicateurs de performance. Ils détestent ça. Mais ça renvoit à la question de mon collègue de Verdun tantôt. Mon collègue de Verdun a dit: Comment est-ce que vous savez la performance, et tout ça? C'est d'autres outils dont il faut se doter aussi dans cette mesure-là, puis on est là pour vous aider, pour vous les donner.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, je n'ai jamais dit que le désir des commissaires, c'était de gérer les régions.

(11 h 50)

M. Mulcair: Non, j'ai compris que c'était tout le contraire. Vous ne voulez pas gérer les régions individuellement, mais il faut que vous vous assuriez qu'en leur demandant de rendre compte vous obteniez une information qui a de l'allure.

M. Lorrain (Pierre): Voilà. D'avoir le pouvoir de directive de demander de rendre compte et d'avoir les pouvoirs contraignants de le faire.

M. Mulcair: Oui, oui.

M. Lorrain (Pierre): C'est ce qu'on n'a pas.

M. Mulcair: Vous voulez... Oui, je l'ai mal dit.

M. Lorrain (Pierre): Mais pas de gérer.

M. Mulcair: Il faut veiller à ce que les régions soient en train de gérer correctement, et, en ce moment, vous n'avez pas les mécanismes pour les obliger de rendre compte. On s'entend là-dessus. Donc, à la fin de la matinée, je vous laisse avec ce message-là: Dites-nous, cet après-midi ou vendredi, ce que ça vous prend, puis, comme législateurs, nous, on va assumer nos obligations. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Côté): M. le député de Roberval.

M. Laprise: Moi, comme opinion, je pense qu'il n'est pas normal qu'à une commission comme la vôtre vous n'ayez pas droit de regard sur l'ensemble des institutions en région, un droit de regard de gestion. Je ne dis pas d'aller gérer à leur place, mais au moins un droit de regard, et d'opinion, et de surveillance. Parce que vous êtes imputables face au gouvernement, donc vous êtes imputables jusqu'à la clientèle. Mais il faut que l'ascenseur revienne vers le gouvernement avec des informations précises, des informations claires. À ce moment-là, ça vous prend un droit de regard. C'est inconcevable que vous n'ayez pas eu ça dès le début, d'ailleurs, d'après moi. Je ne suis pas un spécialiste, remarquez bien. Je ne suis pas un avocat.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): J'ai écouté attentivement. Je n'ai pas de commentaires.


Données sur le nombre de dossiers par bénéficiaire

Le Président (M. Côté): Moi, j'aimerais vous ramener à 4.7 sur le rapport du Vérificateur général. Au fond, ça rejoint un petit peu ce qui vient d'être soulevé. On dit, à 4.7: «En 24 mois, soit au cours de l'année 1995 et 1996, chaque bénéficiaire a effectué, en moyenne, 1,6 demande. Alors, un examen plus détaillé révèle qu'il y a eu 108 000 requérants qui ont bénéficié de l'aide juridique de deux à six fois au cours de ces années et qu'il y en a 5 800 qui ont eu recours de sept à 59 fois durant la même période. De plus, près de 35 000 bénéficiaires ont été admis dans plus de deux bureaux d'aide juridique et certains ont effectué des demandes dans cinq à sept bureaux en moins de deux ans.»

Alors, M. le président, toutes ces données qui ont été compilées par le Vérificateur général – c'est lui qui a fait ce relevé-là – pourquoi de telles analyses ne sont pas effectuées régulièrement par la Commission ou encore que les centres soient à jour de ce côté-là pour pouvoir donner l'information? Qu'est-ce qui a empêché encore... «C'est-u» par rapport que vous n'avez pas justement le pouvoir d'aller chercher ces informations-là à la base? J'aimerais avoir plus d'informations sur cet élément-là. M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, non. Ces informations-là, on les possédait. D'ailleurs, j'en ai expliquées quelques-unes en début juin, lorsque le Vérificateur général a rendu public le rapport.

Il est tout à fait normal... Le cas de 239 est très connu de la Commission. C'est facile, on le voit passer; il ne peut pas nous passer entre les dents. C'était une méthode d'ouverture de dossier que la couronne appliquait à ce moment-là. Si on retrouvait le même individu dans les quatre ou cinq districts judiciaires différents où il a été arrêté, où il a décidé de régler ses problèmes de récidiviste, je pense qu'aujourd'hui on aurait peut-être, pour le même individu, une trentaine de dossiers au lieu de 239. Mais c'était la façon de porter les plaintes dans le temps.

On a porté 239 chefs d'accusation contre un individu qui, sur une seule période de trois mois, a été transféré devant plusieurs corps policiers différents: Sûreté du Québec, municipale, il a fait Roberval, il a fait plusieurs districts judiciaires. Il n'a pas eu, comme un certain journaliste a dit à Montréal sur les ondes, 239 «clic-clac» en voulant dire 239 factures. Pas du tout. Il n'a même pas eu une facture. C'est un permanent qui représentait l'individu, à part ça. C'est le permanent qui a fait transférer tous les dossiers dans deux districts judiciaires. Certains dossiers ont été plaidés; il a été acquitté sur d'autres; d'autres plaintes ont été retirées. Mais il a fait aussi un genre, excusez l'expression, d'entente ou «package deal» avec la couronne pour lessiver un passé, disons, pas facile d'un individu.

Ce n'est pas rare en criminel, puis j'ai pratiqué moi-même 15 ans, de voir quelqu'un qui arrive avec cinq, six, sept ou huit chefs, puis quelqu'un qui vit du crime, il peut venir trois ou quatre fois par année, puis c'est souvent cinq, ou six, ou sept chefs. Bien, par affaire, si ce sont des plaintes différentes, si ce sont des numéros de cour différents, on ouvre un dossier différent. C'est comme ça. Pour les permanents, dans le passé, on avait toujours ouvert les dossiers de la même façon que la couronne les ouvrait.

Maintenant, votre deuxième point, la clientèle qu'on retrouve dans différents bureaux. Il arrive parfois qu'un client a plus qu'une matière. Si je prends l'exemple de Montréal, il y a un bureau spécialisé en criminel, il y a un bureau spécialisé en jeunesse, il y a un bureau spécialisé en matrimonial. Oui, c'est exact qu'il y a du va-et-vient entre certains bureaux. Aussi, il y a peut-être eu certains abus. Ce n'est pas un très grand volume. Ça peut être normal aussi qu'un dossier soit commencé par un avocat et transféré dans une autre région ou un autre bureau vu la compétence, vu l'absence, vu la maladie de l'avocat, peu importe.

Mais il y a aussi le fait que maintenant, à cause de la... puis le fait que tous nos ordinateurs sont intégrés, même le directeur général, tous les soirs, va pouvoir savoir tous les dossiers qui ont été admis ou refusés dans sa région, il va pouvoir vérifier le nom et le déplacement d'une personne qui s'essaie, Rimouski, Mont-Joli ou peu importe. On n'avait pas ces moyens-là auparavant. Souvent, nos dossiers se ferment très rapidement. Les dossiers pénaux, les dossiers criminels, ce n'est pas des dossiers, souvent, qui durent plusieurs mois. Parfois, aussi, il y a des dossiers administratifs qui se règlent très rapidement avec un téléphone. Notre technique maintenant va nous permettre de...

Le Président (M. Côté): Mais ce genre de données ou de statistiques, vous pouvez y avoir accès régulièrement?

M. Lorrain (Pierre): Oui. Ça, par exemple...

Le Président (M. Côté): De manière systématique, ça, c'est disponible?

M. Lorrain (Pierre): De manière systématique, oui.

Le Président (M. Côté): Alors, ça, c'est tenu par les centres, ce genre de statistiques là?

M. Lorrain (Pierre): Oui, c'est de l'admissibilité. D'abord, c'est des dossiers de cour. On peut vérifier à la cour, au plumitif, là. S'il y a eu 59 chefs, ils apparaissent au plumitif de la cour puis aux dossiers de la cour, ce qui est public, à part ça.

Bon. Si la personne est venue pour un dossier de divorce, elle se réconcilie, six mois, elle revient, puis là, au lieu d'un divorce, c'est un dossier de séparation, bien la même personne, on va refaire son admissibilité. On ouvre un nouveau dossier, puis là elle fait une tentative. Peut-être qu'elle va arrêter au milieu du dossier, mais on aura fait une requête pour une mesure pour pension alimentaire. La même personne peut venir nous voir des fois trois, quatre ou cinq fois pour des problèmes différents.

Maintenant, inutile de vous dire que ce sont des bénéficiaires qui souvent sont en problème. Écoutez, ils sont en problème. Ils sont en manque d'argent, ils sont en manque de tout, ils sont en manque d'organisation familiale, ils sont en manque de structure, d'encadrement. Alors, ils viennent nous consulter puis ils ont plus qu'un problème. Je ne veux pas canaliser les gens, les bénéficiaires de l'aide juridique comme criminels plus que d'autres, là, ces gens-là ont différents problèmes puis ils viennent nous consulter. Et, dans des villes comme Montréal, Longueuil, parfois Québec, il y a des spécialités dans nos bureaux. Bien, tu vas une place puis tu es obligé d'aller à l'autre. Tu peux avoir un dossier à une place puis deux dossiers à l'autre dans la même région parce que nos criminalistes sont à une place, jeunesse à une autre place, matrimonial à une autre place.

Le Président (M. Côté): Je pense que M. le Vérificateur aurait quelque chose à ajouter, peut-être. M. Breton.

M. Breton (Guy): On avait compris ou on a compris en cours de route qu'effectivement c'était la forme d'ouverture de dossier par la couronne qui créait cette multiplicité. En ce qui concerne les tribunaux administratifs, il n'y a pas de plumitif comme tel. Alors, cette partie-là, on ne peut pas la consulter. Et je pense que, si les données brutes étaient disponibles, les analyses pour sortir le genre de statistiques qu'on a citées n'étaient pas une pratique courante.

Le Président (M. Côté): Merci, M. Breton. Donc, il est 11 h 59. Alors, je suspends les travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 11 h 59)

(Reprise à 14 h 7)

Le Président (M. Côté): Nous recommençons nos travaux, maintenant que nous avons quorum. Alors, la parole était au député de Verdun. Vous avez la parole, M. le député de Verdun.


Degré d'autonomie des centres régionaux

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Dans toute la discussion qu'on a eue ce matin, il reste qu'il y a un problème pour les parlementaires qui est les rapports de la Commission. La Commission vient témoigner devant nous, et nous vous parlons, et l'impression que, moi, j'ai – je crois que certains de mes collègues l'ont eue aussi – c'est que l'organisme qui est réellement opérationnel sur le terrain, c'est les centres. Les liens entre la Commission qui vient rendre compte de ce qui se passe dans l'aide juridique et puis les centres, il y a une espèce de coupure au milieu, c'est-à-dire que, dans le fond, vous, vous êtes l'organisme financier pour les centres, vous donnez des indications aux centres, mais les centres sont autonomes, ils ont leur propre conseil d'administration, ils ont leur propre manière de fonctionner, ils ont leur propre manière d'établir des mesures – le problème qui m'importerait – d'évaluation de déficience de leurs employés.

Moi, M. le président, j'aurais le goût de vous poser une question. C'est: Est-ce qu'il y aurait lieu de changer la loi pour donner à la Commission un rôle plus important en matière de contrôle de ce qui se passe dans les centres, c'est-à-dire pour que les centres soient réellement imputables à la Commission? Actuellement, ils ne le sont pas, si j'ai bien compris ce que vous avez dit ce matin. Actuellement, les centres le sont par voie budgétaire, c'est-à-dire que budgétairement vous allouez les montants et que vous allez pouvoir dire, à l'extrême limite: On peut vous couper les sous, et vous n'aurez plus rien – ha, ha, ha! – plus une cent, puis vous ne pourrez rien faire. Ça, c'est la position extrême. Bon, je reconnais que vous avez ce pouvoir-là. Mais est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, dans toute la réflexion de l'imputabilité qui se passe autour de cette table, de faire en sorte que les centres soient mieux imputables ou plus imputables à vous, vous qui êtes imputable aux parlementaires, ou, à l'extrême limite, que les centres eux-mêmes soient imputables?

(14 h 10)

Vous comprenez bien que, nous, et je dis bien... Moi, je suis député de Verdun, il y a M. le député de Robert-Baldwin, j'ai le député de Roberval, la députée de Vanier, on a tous à peu près les mêmes problèmes, mais c'est des problèmes qui touchent d'abord et avant tout des choses qui touchent les centres et non pas la Commission. Alors, est-ce qu'il y aurait lieu, d'après vous, de réfléchir, de changer la loi, d'améliorer la loi, de vous donner un pouvoir sur les centres de manière que, nous, on puisse vous dire: Bon, le centre à Gaspé, ça ne marche pas et puis pour telle et telle raison? Parce que, là, ce que vous allez me dire, c'est: Le centre à Gaspé est autonome, et puis, nous, on est là, puis...

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, toute la structure mise en place en 1972, la structure qu'on revoit dans la nouvelle loi et qui a été maintenue, c'est-à-dire identiquement, là, avec les mêmes pouvoirs, les mêmes partages de responsabilités, ça avait d'abord un objectif, c'était de protéger les droits des bénéficiaires pour ne pas que les droits des bénéficiaires deviennent des semblants de droits, ou des droits virtuels, ou des droits accidentels. Alors, toute une structure a été mise en place pour éviter les conflits d'intérêts entre le ministre de la Justice, le Procureur général et le jurisconsulte du gouvernement, éviter les conflits d'intérêts entre le Conseil du trésor, par exemple, ou l'exécutif et les avocats qui, eux, représentent des bénéficiaires. Dans le fond, la structure a été mise en place non pas pour protéger l'autonomie des conseils d'administration, elle a été avant tout imposée dans la première loi pour protéger les droits des bénéficiaires.

Cette structure, cette façon qui est idéale – parce qu'il y a beaucoup de provinces qui ne vont pas jusque-là... Dans la très grande majorité des provinces canadiennes, il y a des contacts quasi directs, puis le conflit d'intérêts, vous savez... Bon, un ministre qui est agent payeur, négociateur, et puis l'employeur, défendeur puis demandeur, il y a certains systèmes où ce n'est pas aussi hermétique, aussi protégé que celui du Québec dans certaines autres provinces canadiennes.

Ceci étant dit, vous mentionnez: Est-ce qu'il est nécessaire d'amender la loi pour rendre les directeurs généraux ou les conseils d'administration imputables à la Commission? S'ils deviennent imputables, tel que le mot... ou sur le plan administratif, leur indépendance, leur autonomie vient de disparaître et là peut-être que le potentiel conflit d'intérêts pourrait arriver. Mais d'être obligé, par exemple, de rendre totalement compte et complètement compte à la Commission, ça, oui, ça devrait exister, puis il devrait y avoir un moyen.

M. Gautrin: C'est le début de l'imputabilité. Moi, je vais vous dire...

M. Lorrain (Pierre): Bien, de l'imputabilité... C'est de faire rapport de leur gestion. Mais, s'ils sont imputables totalement, on pourrait porter des jugements sur leur gestion quotidienne, et on n'est pas leur employeur.

M. Gautrin: Non, ça, je comprends ça. Mais comprenez-vous la difficulté qu'on a, actuellement? C'est que, dans le fond, les liens que vous avez avec les centres sont uniquement financiers. Est-ce que j'ai raison ou pas?

M. Lorrain (Pierre): Non.

M. Gautrin: J'ai tort.

M. Lorrain (Pierre): Excusez-moi.

M. Gautrin: Non, allez-y, M. le président.

Le Président (M. Côté): Allez-y, M. le président. M. Lorrain.

M. Gautrin: M. le Président, est-ce qu'on pourrait être un peu plus souples? Je pourrais bien...

M. Lorrain (Pierre): Non, non, non! Il ne faut pas faire ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lorrain (Pierre): Non, j'en connais quelque chose là-dessus, sur la souplesse. J'ai payé et j'ai déjà donné.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lorrain (Pierre): Non, non, non. Je veux que ça reste tel que ça doit être.

Le Président (M. Côté): Ça peut nous mener très loin.


Liens structurels entre la Commission et les centres régionaux

M. Gautrin: Alors, je vais continuer à avoir la rigidité qui s'adresse à vous. M. le Président, moi, je voudrais quand même savoir quels sont exactement les liens structurels ou d'autorité qu'il y a entre la Commission et les centres.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, ce matin on a mis une fiche au tableau, c'était l'article 3.2. Avec toute la base de la loi des années soixante-dix, la souplesse que le législateur a bien voulue puis qu'il a maintenue pendant 25 ans, la légèreté du système... Je vous ai parlé même de double décentralisation: décentralisation régionale, décentralisation aussi des pouvoirs de responsabilités et d'autonomie avec des conseils d'administration. Bien, je vous ai dit qu'il y avait des moyens de concertation, de cohérence, de collaboration, et c'est inclus dans la loi actuelle. Ça, c'en est, des moyens de se concerter.

Maintenant, ce n'est pas vrai qu'au début de l'année on n'a fait que distribuer les enveloppes budgétaires et qu'après on attend 12 mois pour redistribuer d'autres enveloppes. Dans la très grande majorité des régions, M. le député, les gens se conforment aux directives de la Commission. Peu importe la portée légale, l'ultime portée légale du pouvoir de la Commission d'émettre des directives administratives ou budgétaires, la très grande majorité des régions s'y conforme, la très grande majorité des D.G. collabore. On a certainement parfois des accrochages dans un contexte de compressions importantes, dans un contexte de réorganisation des services, surtout avec une réforme aussi profonde que celle-là, on ne partage pas tous la même opinion. Je ne vous dis pas que ça s'est fait en 10 heures, le consensus du manuel d'interprétation. Ça a parlé fort puis ça a crié fort.

Maintenant, ceci étant dit, c'est bien plus que ça que joue le rôle... Puis la preuve de ça, c'est qu'on rend compte au ministère de la Justice depuis 25 ans et que c'est beaucoup plus détaillé que certaines allusions qui sont faites dans le rapport du Vérificateur. Il y a beaucoup d'autres rapports qui ne sont pas mentionnés. Rapports statistiques, rapports comptables, rapports mensuels, trimestriels, préparation de plans triennaux, toutes ces choses-là, la plupart des régions nous rendent compte de ça et répondent aux commandes de la Commission. Ça nous est arrivé qu'une ou deux et parfois trois régions manquent à certaines commandes et ça ne nous a pas permis de rendre pleinement compte au gouvernement de la gestion de l'aide juridique.

Si on va plus loin maintenant et si on touche la confidentialité, si on touche l'ouverture des dossiers, si on touche l'implantation d'un logiciel de suivi de dossiers, ah bien, là, si encore une fois on n'est pas capable d'en arriver à un consensus très rapidement, après l'expérience qu'on vient de vivre avec le Vérificateur général dans les six, sept derniers mois, si encore une fois la Commission se voit refuser d'avoir accès aux bases de données de la DA, là c'est inacceptable et là on vous a dit qu'on avait commencé des démarches. D'abord, il y a un comité qui fait rapport vendredi. Deuxièmement, je vous ai dit qu'il y aurait une convocation de tous les présidents de conseil d'administration ainsi que de tous les directeurs généraux avec les commissaires pour faire le point sur le rapport du Vérificateur. Après ça, il y a le comité qui a été formé par le premier ministre pour étudier les structures des 200 sociétés. Nous faisons rapport comme les autres. On a communiqué avec nous, et on va faire rapport à ce comité-là. Et, dans un but ultime, s'il n'y a pas moyen, il y a un nouveau ministre de la Justice, c'est déjà fixé, j'ai déjà mon rendez-vous et c'est un des sujets à l'ordre du jour avec le ministre de la Justice. Après ça, on l'a dit ce matin, c'est fort possible que, si on est à un point de non-retour, à un point impossible à concilier, bien, vous allez peut-être nous reconvoquer. Je suis imputable puis je vais être ici, et là faudra bouger.

M. Gautrin: Est-ce que je peux faire un pas de plus?

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Est-ce que je peux faire un pas de plus avec vous? M. le Président, je m'adresse à vous.

Le Président (M. Côté): Ah oui?

M. Gautrin: M. le Président, c'est pour être formel. O.K. Je comprends que le président de la Commission nous explique tout ce qui va se faire. Si jamais il y a un échec, si jamais ça ne marche pas, est-ce que, nous, on pourrait le savoir, les parlementaires? Parce que... Un instant. Parce que vous êtes aussi... Moi, je poursuis quand même une ligne très claire là-dedans. Des lois, ça se change. Je préfère la concertation par rapport aux liens directifs, vous aussi, je l'ai bien compris, je comprends tout ça, mais, à la fin du bout, il faut que ça marche. Et, si jamais ce que vous êtes en train de faire, ça ne fonctionne pas, est-ce que vous pourriez nous faire rapport et nous faire rapport si ça fonctionne aussi? Donc, est-ce qu'on pourrait avoir un rapport de ce que vous avez entrepris, qui va être transmis au président de la commission qui nous le transmettrait après comme membres, comme parlementaires?

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, on est prêts à aller au-delà de ça, les commissaires. Je ferai part de votre demande vendredi matin. Vous allez avoir copie du document qui va être déposé aux commissaires vendredi matin, vous allez tous en avoir copie, les membres de votre commission. Mais, suite aussi à cette réunion-là et à la dernière réunion de tentative de concertation avec présidents de corporation, D.G. et commissaires, je ferai part...

M. Gautrin: Merci. Donc, vous allez nous faire rapport à ce moment-là. Merci, M. le président.

Le Président (M. Côté): Alors, on va attendre le dépôt de ce rapport-là. M. le député de Robert-Baldwin.


Accès du Vérificateur général aux dossiers des bénéficiaires dans les centres régionaux (suite)

M. Marsan: Oui, s'il vous plaît. Je vous remercie, M. le Président. On sait que c'est les 11 régions qui ont décidé ensemble de prendre des avis légaux et de refuser l'accès aux dossiers au Vérificateur. J'aimerais – et j'espère que c'est possible, M. le Président – demander au Vérificateur: Comment ça s'est passé dans certaines régions? J'imagine qu'il y en a où ça a été plus facile que d'autres, d'autres, plus difficile. Ce n'est pas comme la Caisse de dépôt? Je ne sais pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Marsan: La Caisse de dépôt. Non, j'aimerais savoir, quand même. Vous êtes un organisme qui émane du Parlement. Comment est-ce que vous avez été reçu?

Le Président (M. Côté): M. Breton.

M. Breton (Guy): Si vous permettez, M. le Président, je vais demander à M. Michel Samson, qui a dirigé les travaux sur le terrain, de nous faire part de son expérience dans les régies régionales.

Le Président (M. Côté): M. Samson.

(14 h 20)

M. Samson (Michel): M. le Président, tout d'abord nos travaux ont débuté, si j'exclus la Commission, dans les centres communautaires avec un projet-pilote – que, nous, on qualifie de projet-pilote dans un centre communautaire – pour voir si tous nos procédés sont applicables aux autres régions et, par la suite, on a étendu ça aux autres régions. Dès le début, on a eu des discussions pour avoir accès à la demande d'admissibilité et aux dossiers et c'est là qu'on a eu le refus concernant l'accessibilité aux dossiers des bénéficiaires de l'aide juridique. Je vous dirais que, sur les cinq régions, il y en a avec lesquelles ça a très bien été, si on exclut le problème d'accessibilité aux dossiers, tandis qu'avec d'autres régions ça a été beaucoup plus ardu à tous les niveaux pour obtenir de l'information, des rencontres, etc. Sur cinq régions, je vous dirais qu'il y en a trois où ça a très bien été.

Le Président (M. Côté): Merci, monsieur.

M. Marsan: Vous dites que vous avez été reçu de façon ardue. C'est quoi, ça, de façon ardue?

Le Président (M. Côté): M. Samson.

M. Marsan: Je rappelle toujours que vous êtes une organisation qui émane du Parlement de Québec.

M. Samson (Michel): Oui, oui. Mon Dieu, je crois qu'on mettait peut-être un petit peu en doute nos compétences ou notre crédibilité, dans certaines régions, ce qui rendait les discussions beaucoup plus difficiles.

Le Président (M. Côté): M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Est-ce qu'à ce moment-ci c'est un secret? Est-ce qu'on peut savoir quelles régions, ou si c'est préférable... ou si vous vous sentiriez plus à l'aise de ne pas les nommer? Je le laisse à votre discrétion.

Le Président (M. Côté): M. Samson.

M. Samson (Michel): Bien, Me Lorrain a soulevé la région de Montréal, ce matin. Effectivement, on a rencontré des difficultés avec la région de Montréal ainsi qu'avec la région de Québec à divers niveaux.

Le Président (M. Côté): M. le député de Chomedey.


Modifications souhaitables à la loi (suite)

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Dans un premier temps, j'aimerais demander au président de la Commission si, avec le temps de réflexion dont il a disposé, il a des réponses pour nous pour les questions qu'on lui a posées ce matin.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): Non, pas immédiatement. Je veux respecter tout l'enclenchement du processus des commissaires qui ont demandé une étude dont on n'a pas pris connaissance ensemble, dont le comité doit nous rendre compte. C'est extrêmement complexe. C'est juridique, c'est très juridique, toute la construction, l'architecture du système d'aide juridique. La structure de l'aide juridique a été pensée dans les années soixante-dix, à une autre époque. Je vous ai expliqué tantôt pourquoi elle avait été pensée comme ça, dans quel objectif. C'est définitif que ça ne reviendra pas, et je ne me sens pas la compétence professionnelle ni le devoir d'avoir à faire un choix seul, isolé et de l'imposer soit à des commissaires ou à un appareil gouvernemental.

C'est définitif que, si on n'avait pas les résultats escomptés à court terme... Et on n'attendra certainement pas que M. le Vérificateur général cogne encore une fois à notre porte pour commencer à négocier la façon dont on aurait pu collaborer avec lui et jusqu'où. Il va falloir qu'il y ait un consensus à travers tout le réseau et la Commission des services juridiques, et je vous ai dit tantôt que, si ce consensus-là ne se fait pas... C'est un consensus de dernière chance, il y a toutes sortes de comités qui sont déjà formés, il y a une étude qui est faite, vous m'avez demandé de faire rapport; je vais faire rapport à brève échéance, et après le ministre de la Justice et le gouvernement, ou même les parlementaires, vous déciderez de ce qu'il y a à faire. On est imputable, à la Commission des services juridiques, devant vous et on va vous tenir au courant.

Maintenant, non, on a plutôt privilégié de gérer, dans les deux dernières années, la réforme très importante, majeure, profonde et de la gérer avec succès. Actuellement, il n'y a personne au Québec qui se plaint qu'il n'est pas desservi, qu'il n'est pas admis ou qu'il est refusé dans les services d'aide juridique avec une loi totalement différente, avec un plan directeur qui n'est pas complété, qui est une révolution pour notre personnel de soutien puis nos avocats, puis ça, on l'a fait et le Barreau le reconnaît, actuellement, que ça fonctionne. On s'est surtout penchés là-dessus, mais on n'a pas négligé, M. le député de Chomedey, votre aspect, puisqu'on a déjà des décisions de prises puis qu'on a déjà des rendez-vous de donnés.

Le Président (M. Côté): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, je suis content de savoir qu'il y a des décisions de prises et des rendez-vous de donnés. On avait un rendez-vous ici aujourd'hui avec celui qui préside la Commission et ses proches collaborateurs et collaboratrices, et je tiens à le remercier, le président de la Commission, de nous avoir redit que le rapport du comité va être disponible à brève échéance. Pour ma part, je vais réitérer le regret que le président n'ait pas demandé le report de la présente réunion de deux jours pour qu'on puisse en prendre connaissance et ne pas être obligé de tout reconvoquer.

Mais les questions que j'avais posées au président de la Commission ce matin n'ont rien à voir avec son besoin de consulter les autres commissaires de la Commission des services juridiques. Il n'a pas besoin de les consulter pour nous donner son opinion pour savoir si la loi a besoin d'être changée ou s'il accepte, pour sa part, l'interprétation qui a été utilisée pour servir une fin de non-recevoir aux représentants du Vérificateur général. Je l'ai invité ce matin à réfléchir à ça. La question est fort simple: Devrait-on proposer au ministre de la Justice, au nom de cette commission, de changer votre loi pour enlever tout doute sur la pertinence de mettre le mandat du Vérificateur général auprès de ces centres très clairement dans la loi, conscient que ça peut poser d'autres problèmes d'ordre rédactionnel? Parce que, à notre sens, c'est tellement clair qu'il a le droit de regard là-dedans que, si on l'exprime clairement dans ce cas-ci, selon une bonne règle d'interprétation, le fait de l'exprimer clairement dans un cas peut peut-être présumer son exclusion dans d'autres.

Mais oublions cette problématique pour l'instant. Juste sur la première question, la très simple question de savoir s'il faut aller dans ce sens-là, je ne pense pas que j'aie besoin d'un rapport de votre comité ni d'une consultation avec votre commissaire, M. le président. Je ne pense pas qu'on ait besoin de ça pour connaître l'avis personnel du président de la Commission.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): Je suis d'accord avec vous. Il me semblait l'avoir donné ce matin assez tôt, mon avis personnel. J'avais dit que je trouvais inacceptable qu'on n'ait pas trouvé un compromis puis qu'on ne soit pas arrivés à une entente avec le Vérificateur général. Je vous ai dit aussi qu'un des rôles de la Commission, c'est de rendre compte de la gestion d'une dépense de 120 000 000 $ au gouvernement, et indirectement aussi aux parlementaires parce qu'on dépose à l'Assemblée nationale notre rapport annuel tous les ans. Je trouve inacceptable, et je l'ai dit sans aucune réserve, que certaines régions, au nom de l'indépendance et de l'autonomie ou peu importe, peu importent les risques...

M. Mulcair: Le secret professionnel a même été...

M. Lorrain (Pierre): Voilà! Je trouve inacceptable qu'on ne puisse pas rendre compte au gouvernement, tel que la loi le prévoit et tel que les règlements l'exigent. Ceci étant dit, je pense que c'est implicite. D'avoir demandé aux commissaires, immédiatement après le rapport du Vérificateur, de former un comité... C'est parce que c'est complexe, la question que vous me posez. Puis, s'il faut aller là, oui, je vous le dis, si la dernière chance de concertation, de consultation puis de compromis... je vais suggérer non seulement à votre comité, mais surtout au ministre de la Justice de faire une réforme et de donner les pouvoirs nécessaires sans peut-être toucher à toute la structure. Mais il faut avoir des poignées, il faut avoir un retour. On ne l'a pas. Si on n'a pas le pouvoir de directive ou de réglementation, faudra nous le donner. On verra en temps et lieu.

Pendant 25 ans, ça a fonctionné. Pendant 25 ans. Ce n'est pas tout le monde qui refuse, c'est quelques exceptions. On pense aussi que, avec certains gestes qu'on a posés concrètement, qui sont une première dans l'histoire de l'aide juridique... Jamais, jamais les commissaires n'ont changé un conseil d'administration au complet, 12 sur 12; on l'a fait il y a trois mois, puis les gens qui sont là, ce sont des gens sérieux. Je vous ai dit que la Commission avait consulté auprès de deux universités, du Barreau, de mouvements associatifs et de grandes institutions. Les gens qui sont là, c'est des gens extrêmement sérieux qui sont sur le conseil d'administration de Montréal. On pense que ça, c'est un geste concret. En d'autres termes, on respecte l'esprit de la loi, on tente d'en arriver à un compromis. S'il n'y en a pas, c'est inacceptable, ce qui est arrivé. Et je n'ai jamais changé de langage. Lors des points de presse et des rencontres de presse suite au rapport du Vérificateur, j'ai toujours tenu le même langage et j'ai eu l'appui unanime de tous les commissaires, dont deux qui sont ici présents. Alors, je n'ai pas trois langages.

Si, dans une semaine, trois semaines ou un mois, dépendant des délais et des échéanciers des rencontres, il n'y a pas de résultat, oui. Oui. Je pense que tout ce que je vous ai dit ce matin exprime cette opinion-là. Mais quel genre d'amendement? Je ne le sais pas. Je ne suis pas un juriste, je ne suis pas légiste, je ne me suis pas penché là-dessus. C'est extrêmement...

M. Mulcair: Vous n'êtes pas un juriste?

M. Lorrain (Pierre): Bien, écoutez, je ne suis pas un spécialiste de... Je suis un praticien, mais de là à prétendre que je peux écrire des lois avec toutes les subtilités que ça peut comprendre... On a vu que c'était assez complexe. Ça fait deux ans qu'on essaie, là, dans une réforme... Ça a été extrêmement complexe d'écrire les textes. Je n'ai pas cette prétention-là. Je n'ai pas eu le temps, et je n'avais pas ce mandat-là, puis on ne m'a pas demandé ça, de réécrire quelque texte que ce soit, sauf que, si on échoit dans notre tentative, je vous le dis, c'est la solution. Maintenant, il y a des spécialistes pour ça, pour écrire. Si ça prend un article, deux articles, trois articles... Est-ce que ça prend un pouvoir réglementaire ou un pouvoir de directive? On verra. Mais, moi, je ne peux pas vous répondre après midi à ça.

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.


Mode de nomination des membres des conseils d'administration des centres régionaux

M. Gautrin: Brièvement, j'ai une question qui m'arrive. Vous avez changé le conseil d'administration d'un centre. Ça me fait me rendre compte d'une ignorance de ma part. Les conseils d'administration des centres sont nommés comment? Les centres ont un conseil d'administration qui sont nommés comment? Vous me permettez, M. le Président? Et ensuite, une fois que j'aurai là-dessus... je pourrai réintervenir. Est-ce que c'est vous qui nommez les conseils d'administration des centres?

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

(14 h 30)

M. Lorrain (Pierre): Oui. Le conseil d'administration de la Commission des services juridiques, qui comprend 12 membres dont deux représentants de ministères cooptés qui ont droit de parole seulement, est nommé par le gouvernement, et les commissaires, eux, nomment les 11 conseils d'administration. C'est extrêmement complexe de changer les... Il faut attendre l'expiration des mandats, les termes ne finissent pas tous en même temps, alors il nous a été impossible, avant il y a trois mois, de pouvoir faire le changement qu'on a fait avec la région de Montréal à cause de sa non-collaboration. Mais, par coutume, par usage, pendant plus de 20 ans, les commissaires, avec différentes administrations, mes prédécesseurs, on écoutait les régions et on acceptait les suggestions qui nous étaient faites par les régions.

Je vous l'ai dit ce matin, pendant plus de 20 ans, ça allait sur des roulettes, on gérait le bonheur, on ne manquait pas d'argent puis on gérait du développement; ce n'est plus ça. Il fallait assurer aussi un équilibre quand on gérait la décroissance, un équilibre parce qu'il fallait respecter autant la Côte-Nord qu'une région importante comme celle de la Rive-Sud. Alors, il y a parfois des décisions difficiles à faire, puis, pour les prendre, ces décisions-là, ça prend de l'information.

Depuis quelques années, je ne vous cacherai pas que la Commission exige beaucoup plus qu'elle exigeait il y a une dizaine d'années et je vais vous donner un exemple concret. Lorsque je suis arrivé à la Commission des services juridiques, en 1994, on distribuait les budgets des régions dans une enveloppe. L'autre région ne connaissait pas le budget, ne connaissait pas les résultats de l'année d'avant et ne connaissait pas les... C'était du donnant, donnant, chacun négociait avec la Commission ou le président de la Commission, et ce n'était pas un problème, à ce moment-là. En 1994, j'ai ouvert tous les résultats financiers de chacune des régions à la première opération budgétaire, au printemps 1994. Maintenant, tout le monde sait ce qu'il dépense, ce qu'il gère, les résultats et le «caseload» de chacune des régions, la productivité, ni plus ni moins, en termes de dossiers de chacune des régions.

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je continue là-dessus. Donc, vous nommez les membres des conseils d'administration des centres qui sont des organismes indépendants mais quand même nommés par vous-même. Est-ce que je peux avoir de vous l'engagement que les personnes que vous avez nommées sur ces conseils d'administration sont des gens qui vont comprendre la nécessité d'avoir des mesures d'efficience claires telles que vous les percevez, vous? Autrement dit, si vous nommez quelqu'un, assurez-vous donc qu'il partage la même idéologie que vous, puis qu'il va faire en sorte qu'il partage aussi, en termes d'établissement, des mesures d'efficience par rapport aux avocats qu'il va engager après, et puis après qu'il va vous donner des rapports faciles. Est-ce que c'est ça que vous allez faire ou pas? C'est parce que, à ce moment-là, vous avez quand même un lien entre les deux que je ne voyais pas au début.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, soyez convaincu de ça.

M. Gautrin: Merci. Alors, j'attends donc deux choses: d'une part, que vous allez nous dire ce qui se fait déjà en termes de mesures d'efficience, et puis après on va pouvoir mieux, dans le futur, vous questionner sur ces liens-là. O.K. Alors, M. le Président, vous permettez quand même...

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.


Mécanismes de contrôle du travail du personnel juridique (suite)

M. Gautrin: Comment voyez-vous les mesures à mettre? Imaginons que vous, qui êtes le président de la Commission... De quoi est-ce qu'une personne que vous avez nommée sur le conseil d'administration d'un centre doit se doter comme instruments pour mesurer l'efficience de ses avocats?

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): Ça dépend beaucoup de la région parce que, sur la Côte-Nord, par exemple, où il y a très, très peu d'avocats par rapport à des régions où il y a au-delà de 100 avocats puis des fois peut-être 180 personnes de soutien réparties dans 20 bureaux, c'est des petits bureaux à deux avocats. On a même des bureaux à un avocat à travers le Québec, et le D.G. est extrêmement loin. Je vous donne l'exemple du Bas-Saint-Laurent– Gaspésie, le conseil d'administration ne se réunit pas tous les mois. C'est extrêmement dispendieux, les distances. C'est tous des bénévoles, ces gens-là, c'est tous des gens qui ont des familles, qui ont un travail. Comme les commissaires chez nous, lorsqu'ils se déplacent, c'est trois jours de travail qu'ils perdent. Il y a des gens qui viennent du Lac-Saint-Jean, il y a des gens qui viennent de l'Abitibi, il y a des gens qui viennent... et c'est tous des professionnels qui viennent siéger à la Commission. Alors, une journée de transit, une journée de travail, une journée de retour.

Non. Moi, je crois que les gens qui ont été nommés, autant dans le passé que ceux qu'on nommera, dépendant de l'échéance de chacun des mandats, sont des gens qui veulent travailler sincèrement puis qui comprennent le rôle... Maintenant, quant au contrôle que vous insinuez sur chacun des avocats, ou à la validité, ou à l'évaluation du personnel, ça revient au gestionnaire qui, lui, gère au quotidien, c'est-à-dire le directeur général et ses adjoints.

M. Gautrin: M. le Président, vous me permettez?

Le Président (M. Côté): Oui, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je reviens quand même au point de départ. Moi, je suis parfaitement d'accord que celui qui doit faire l'évaluation, ce soit le gestionnaire. Ce sur quoi, moi, j'insiste ici, c'est qu'il y ait une grille, un mécanisme d'évaluation qui soit établi et sur lequel tout le monde s'entend. Une fois que ça, c'est établi, la manière dont on l'applique, bien sûr, ce n'est pas vous, ça va être le directeur général du centre, et puis personne ne veut faire le job du directeur général – ha, ha, ha! – du centre de la Gatineau ou de la Gaspésie, le cas échéant. Mais l'importance que j'ai, c'est de savoir s'il existe une grille d'évaluation, comment ça fonctionne, ce qu'on mesure, et que vous soyez, vous, d'accord avec cette grille-là, d'une part, et qu'éventuellement, nous, les parlementaires, en but ultime, puissions vous questionner sur cette grille d'évaluation.

Aujourd'hui, j'ai cru comprendre, dans l'intervention que vous avez faite ce matin, qu'il en existe, des grilles qui ont été établies sans nécessairement en lien avec vous. Il existe des grilles dans différentes régions. Vous allez nous transmettre ces grilles-là dans le futur, pour autant qu'elles existent par région. Moi, j'aurais besoin de m'assurer qu'il y ait plus d'uniformité et de contrôle. J'accepte le lien que vous me dites à l'heure actuelle, que vous nommez les gens sur les conseils d'administration. Nommez-les en fonction de ce qui va être votre perception des grilles de mesures d'efficience.

Et, le cas échéant, pouvez-vous transmettre à la Commission... Je ne voudrais pas non plus vous mettre en mal ici, mais qu'est-ce qu'on doit évaluer quant à l'efficience des différents avocats qui travaillent dans les centres? Une fois que vous nous aurez dit ça, à la commission, j'imagine que vous allez le dire aux gens que vous allez nommer sur les conseils d'administration, qui vont le dire après au directeur général, puis la roue va tourner.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): Dans nos conventions collectives, il y a des politiques de rémunération au mérite qui sont déjà incluses depuis plusieurs années et qui ont été négociées. Je pense que le Vérificateur général a été à même de constater que certaines régions ont un genre de grille d'évaluation. Je ne vous dis pas qu'elles sont toutes identiques, je connais celle que m'a déjà démontrée le directeur général de la Rive-Sud. J'imagine que chacun des directeurs généraux qui doit évaluer au mérite ses avocats et ses avocates doit le faire sérieusement, sinon il aurait un grief.

Maintenant, on a constaté, à la lecture du rapport du Vérificateur, que c'était probablement insuffisant. Maintenant, toutes les rencontres et toutes les entrevues qu'ont pu faire le Vérificateur général et ses collaborateurs, je n'y étais pas. Il semblerait qu'il ait été véhiculé des opinions différentes à des degrés différents et des méthodes, et parfois même des absences d'évaluation au mérite. Alors, je suis un peu mal placé, là.

M. Gautrin: M. le Président.

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je me permets de terminer là-dessus. Il y a quand même une différence entre l'évaluation au mérite des individus qui travaillent dans un bureau et l'évaluation de l'efficience d'une structure que vous avez mise sur pied. Vous pouvez être parfaitement efficace à l'intérieur d'une structure inefficiente, c'est-à-dire que vous êtes efficace à l'intérieur d'une structure, mais en soi la structure est inefficiente parce qu'elle a été bâtie de cette manière-là. Donc, moi, je ne veux pas qu'on fasse ici la mesure de l'efficacité des différentes personnes que vous employez. Ça, c'est des relations de travail, et, bon Dieu, je n'ai pas le goût du tout qu'on rentre là-dedans. Mais ce dont je veux m'assurer, c'est que vous ayez une mesure de l'efficience de chacun des centres et des bureaux d'aide juridique – c'est simplement ça que je voudrais savoir – puis qu'il y ait une manière de le mesurer, puis que ça soit transmis à la commission, puis qu'on le regarde.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, en 1995, une des décisions qui avaient été prises par les commissaires, c'était de faire une étude de prix de revient par activité. Ça n'avait jamais été fait en 25 ans à la Commission des services juridiques. C'est le conseil d'administration actuel, celui qui est encore en force actuellement et que je présidais à ce moment-là, qui a mis une réserve de côté et qui a fait faire par l'étude RCMP un prix de revient par activité, et le prix de revient par activité était un peu plus bas pour les permanents, à ce moment-là, pour l'année 1994-1995, que celui de la pratique privée. C'est une étude d'ailleurs qu'on a présentée en détail au Vérificateur général avec tous les résultats de l'étude. Nous sommes à revoir le logiciel qui est un outil de gestion du prix de revient par activité, et je vais vous expliquer pourquoi il n'est plus fonctionnel. Il n'est plus fonctionnel à cause de la réforme. Il y a un paquet d'actes juridiques qui existaient en 1994 quand on l'a fait. Il y a des coûts qu'on paie à la pratique privée et qui ont été augmentés et il y a des augmentations de salaire qui ont été données aux permanents de l'aide juridique.

(14 h 40)

Nous avons demandé à la firme de revoir le logiciel du prix de revient par activité. Ce n'est pas tellement dispendieux de le corriger et de le refaire, et après, quand on reçoit les états financiers des régions, on n'a qu'à programmer le tout et on va avoir le prix de revient par activité. C'en est, une forme de calcul d'efficience, d'efficacité, de productivité de nos employés, ce qui n'existait pas même en 1994.

M. Gautrin: Absolument.

Le Président (M. Côté): Merci. Il y a d'autres questions additionnelles? M. le député de Chomedey.


Modifications souhaitables à la loi (suite)

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Le président de la Commission vient de nous donner certaines explications des outils qui existent à l'heure actuelle, et il nous a donné certaines explications ce matin sur comment ils essaient de prévenir les coûts prévisibles avec l'instauration du nouveau système, en termes de gestion.

J'aimerais demander au Vérificateur général, même si son travail consiste surtout à regarder le passé, avec son expérience et connaissant – comment dire – la culture de gestion qu'il a pu constater à la Commission: Est-ce qu'il y a des choses additionnelles, sur le plan de la législation, qui devraient être prévues pour permettre à la Commission de rencontrer ses obligations? Je mets cartes sur table. Je crains qu'avec cette pluie de nouvelles obligations, que ce soit aller percevoir de nouvelles sommes, faire la distinction entre les gens qui vont être gratuits alors que tout le monde était gratuit auparavant puis les sommes qui seront contribuées... Je vous avoue bien sincèrement qu'avec ce que j'ai entendu jusqu'à date je suis inquiet pour l'avenir. Alors, est-ce qu'il y a des suggestions que le Vérificateur général peut faire aux membres de la commission sur comment on pourrait mieux préparer et munir la Commission en vue de ses nouvelles obligations?

Le Président (M. Côté): M. Breton.

M. Breton (Guy): Je pense qu'avant d'utiliser la réforme du texte de loi il y a, d'une part, l'approche de formation qu'il faudra peut-être intensifier sur les modes de gestion qui devront être améliorés en fonction des nouvelles pratiques de la loi, comme par exemple, entre autres, cette gestion des revenus, les trois types de revenus qu'il faudra maintenant percevoir, gérer également, mettre à la banque temporairement, etc. Ça suppose sans doute une amélioration dans le niveau de connaissances ou le niveau de pratique pour la gestion locale, et j'imagine que la Commission, qui expliquait tout à l'heure qu'elle a les outils pour faire de la formation, devra fournir une formation spécifique sur cet aspect.

Deuxièmement, même si elle n'a pas encore des droits de direction, elle peut peut-être établir quand même l'équivalent d'un standard ou d'une énumération des connaissances minimales ou des expertises minimales pour être capable de gérer ce type de revenus, cette façon de percevoir les revenus et inviter les directeurs généraux à prendre les dispositions nécessaires, à savoir: Est-ce que j'ai les personnes qualifiées pour le faire ou faut-il que je remplace mon personnel? J'ai aussi confiance que, si les conseils d'administration, après ce qui s'est passé à Montréal... Donc, il est bien évident que la Commission peut nommer des conseils d'administration et ne se privera pas, dans le futur, de le faire en trouvant des gens qui comprennent la même façon de rendre compte. Ça peut peut-être inciter les prochains conseils d'administration à s'intéresser un peu plus au mode de reddition, à une plus grande transparence. Encore là, je pense qu'il faudra faire de la formation spécifique sur la pertinence d'être transparent, le niveau de transparence requis ou attendu.

Il demeure aussi que, pour être capable, pour la Commission, de vous rendre compte et également pour chaque régie ou centre de rendre compte, il y a possibilité de faire mieux en mesurant un peu plus loin. Présentement, les quelques statistiques de gestion qui sont préparées, par rapport à celles qu'on a vues, sont insuffisantes ou pourraient être beaucoup plus détaillées, beaucoup plus précises, jusqu'à un point tel où le lecteur d'une reddition de comptes peut littéralement apprécier l'efficience de la place. Encore une fois, on peut imposer toutes ces règles ou toutes ces mesures, tous ces standards par texte de loi, par texte de règlement, mais il y aura toujours quelqu'un pour être de mauvaise volonté puis ne pas les donner.

Par contre, si on a des conseils d'administration qui ont saisi le nouvel esprit, ou la nouvelle orientation, ou cette nécessité de rendre compte, on peut espérer que chacun va jouer son rôle et qu'il y aura cette recherche de collaboration puis d'effort qui sera fait dans la même direction. Il demeure que beaucoup de formation est requise, je pense, pour s'assurer que les ressources sont compétentes dans ces nouveaux champs d'information qu'on veut qu'ils nous donnent et que, deuxièmement, le message est bien passé clairement aux conseils d'administration qu'il vaut mieux jouer maintenant la transparence, sinon voyez ce qui est arrivé à Montréal. Et, à partir de là, le texte de loi, pour moi, m'apparaît le dernier recours.

M. Mulcair: Oui, comme toujours.

M. Breton (Guy): Mais, avant ça, il y a un certain nombre de gestes qui peuvent être posés pour convaincre et former. Il y a beaucoup de formation à faire parce que ça change, et il faut s'assurer que les ressources compétentes seront en place. Peut-être que certaines personnes devront être changées parce qu'elles n'ont pas la capacité de gérer les revenus, par exemple, mais ce sera à être évalué localement. Mais, une fois qu'on aura expliqué localement aux gens que vous avez un standard à rencontrer si vous voulez être au même niveau que tous les autres...


Modernisation des outils informatiques de gestion

M. Mulcair: Maintenant, un petit peu plus parce que le président de la Commission, à plusieurs reprises, a fait allusion à son matériel, et à son logiciel actuel, et à ce qu'il projette d'avoir. Il nous a expliqué qu'il avait des vieux systèmes Wang qui étaient tout à fait désuets, et tout ça. Au niveau matériel, justement, est-ce que c'était votre impression également que c'était vraiment désuet, qu'il y avait des choses qui vraiment dataient d'une autre époque et qui auraient dû être changées depuis longtemps?

M. Breton (Guy): On n'est pas... Ah, qui auraient dû être changées il y a longtemps, ça, c'est une autre histoire. Quand aurait-il fallu le changer? Je ne le sais pas. Mais ce qu'on a constaté, c'est qu'il y avait plusieurs logiciels en développement ou en fin de processus de développement. Ce qu'on n'a pas mesuré, c'est l'efficacité ou l'efficience de ces systèmes et leur précision parce qu'ils n'étaient pas opérationnels à un niveau tel qu'on puisse dire: Bien, O.K., on prend le temps d'analyser. Il y en a huit, je pense. On n'a aucune opinion sur les huit. Ils sont là, ils étaient là. Quelques-uns avaient commencé à tourner et d'autres étaient encore en phase de test, mais ils sont là. Ça va nous prendre un an avant de dire quel bilan on peut tirer de ce qui s'est fait.

Le Président (M. Côté): En additionnelle, M. le député.


Structures et mécanismes de gestion

M. Mulcair: Juste en terminant avec le Vérificateur général sur cette question des structures et des mécanismes de gestion, c'est peut-être mon tour de poser une question un peu naïve. La semaine dernière, avec les membres d'une autre commission, j'ai eu l'occasion d'aller visiter la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Lorsqu'on regarde les budgets dont elle est responsable, les paiements, et tout ça, moi, je vous avoue très sincèrement, sans votre expertise mais basé quand même sur 20 ans dans l'administration publique, que ça me frappe comme étant quelque chose de très léger par rapport à ce que ça a à accomplir, les 30 programmes différents qu'elle gère, et tout ça, la structure, le nombre de personnes. It's humming when you walk through there, eh? Ça bourdonne, ça bouge, bon, ça frappe. Ça donne vraiment cette impression-là. Ça, c'est une boîte qui roule, qui est bien gérée.

Si on regarde un de ses nombreux programmes qui est le nouveau programme d'assurance-médicaments... J'étais là physiquement avec les personnes qui sont là de 8 heures le matin à minuit, sept jours par semaine, puis, après quelques petits ratés qui n'ont pas duré longtemps dans littéralement les premiers jours, le temps que tout le monde s'habitue, voilà que, à l'intérieur de quelques mois, on avait un système, si vous me pardonnez une autre expression en anglais, «up and running», hein? C'était là, c'était prêt, ça roulait avec tout ce qu'il y a de plus moderne en termes de matériel, en termes de formation, en termes de logiciels.

Comme législateur, je suis intrigué de voir un groupe qui gère 120 000 000 $ et qui m'explique, en montrant un geste, qu'on a des vieux Wang avec des «tapes» comme ça, je suis intrigué de savoir comment il se fait qu'il y en a qui vivent encore à l'âge des Pierrafeu alors qu'il y en a d'autres qui vivent dans le XXIe siècle et qui semblent avoir la culture organisationnelle et de gestion qui comprend comment mettre ces structures-là en place. Comment est-ce qu'on fait, dans la gestion de l'ensemble du gouvernement, pour faire profiter à ceux qui n'ont pas l'expérience nécessairement, pour toutes sortes de raisons historiques, de ces nouvelles méthodes de gestion et comment on peut leur en faire profiter sans attendre que déjà on soit rendu à l'autopsie? Parce que le Vérificateur général est rendu là-dedans. Comment est-ce qu'on peut faire, pour rester avec une image, pour donner naissance, et bien nourrir, et laisser grandir sainement et correctement ces organismes-là? Quelle leçon a-t-on à tirer, comme parlementaires, de cette expérience-là, à votre point de vue, M. Breton?

(14 h 50)

Le Président (M. Côté): M. Breton.

M. Breton (Guy): M. le député, la difficulté de la comparaison que vous me posez s'attache au fait que la Régie de l'assurance-maladie du Québec est, je dirais, par définition et depuis sa naissance, un exemple à suivre au point de vue gestion globalement et au point de vue informatique comme telle. Il faut quand même constater qu'il y a 30 ans d'expérience en informatique à la Régie de l'assurance-maladie, qu'il y a donc un bagage de connaissances, de vécu, qu'il y a déjà des fichiers en place, ou des programmes en place, ou des services en place, du personnel qui possède les connaissances sur le fonctionnement de cette entité. Alors, qu'on leur demande d'ouvrir toute une nouvelle section pour les médicaments, ces gens recyclent des connaissances qu'ils ont déjà dans la gestion de tout le reste du monde médical et c'est une richesse. Et la Régie, sans dire qu'elle est suprariche, est quand même un beau modèle de gestion, tant en informatique que pour le reste, et ça, depuis le premier jour où M. De Coster en a pris charge.

Dans les organismes beaucoup plus petits où, par exemple, pour passer de l'état informatique qu'elle avait avant, la Commission est passée à un nouveau modèle, je n'ai pas examiné, on ne m'a pas expliqué le détail, mais je perçois que, pour elle comme pour tous les autres, il faut éventuellement aller voir des conseillers externes et leur dire: Voulez-vous prendre connaissance de mon état de la situation, de la vétusté de mes systèmes? Voulez-vous comprendre ma loi? Voulez-vous que je vous explique ce que j'espère ou ce que je souhaite, quels sont les nouveaux objectifs qu'on voudrait rencontrer avec ce nouveau système? Voulez-vous vous asseoir, le concevoir, le faire tourner en essais et erreurs? Mais, autant que possible, après vous avoir déjà tout expliqué, on espère tomber sur un outil qui va bien fonctionner, et ça va vous prendre un an pour le roder avant de nous donner un produit fini.

Vous savez qu'il y a certains cabinets maintenant ou certains organismes gouvernementaux qui, dans leur contrat de développement de systèmes semblables, disent: Écoutez, on vous donne un prix fixe pour former, monter notre système, mais, l'année qui suit, vous allez nous le mettre à jour, le peaufiner à vos frais; alors, ne faites pas n'importe quoi en espérant avoir des honoraires indéfinis pendant trois ou quatre ans à venir peaufiner ce que vous aurez mal fait à l'origine. Vous le faites bien à l'origine? Ça ne vous coûtera pas cher, la première année, pour peaufiner, sinon vous le faites mal puis ça vous coûtera cher à peaufiner, mais on ne vous paiera pas, ce qui démontre justement la difficulté de commencer avec des gens qui ne sont pas de l'interne comme, je dirais, les programmeurs de la RAMQ. Alors, c'est là que, quand on veut faire une comparaison entre les deux, on dit: Bon, bien, ce n'est pas équivalent parce qu'ils n'avaient pas la richesse d'avoir des informaticiens qui se sont formés pendant 25 ans pour la journée où on leur demande d'inventer quelque chose.

M. Mulcair: Comme parlementaire et comme membre du public, je constate quand même qu'il y a deux organismes qui ont été mis sur pied sensiblement à la même date et qu'il y en a un justement qui, en termes de gestion et d'organisation, a toujours su se garder à la fine pointe. On entend des explications puis on écoute les explications du président de la Commission qui nous dit: Bien, c'était comme ça, on est en train de le changer, on attend des logiciels, c'est ci, c'est ça. Ça, c'est le passé, mais là, comme parlementaire qui a vu les débats sur 87 et sur 20, qui sait tous les détails de ce règlement-là et de la loi, moi, je suis inquiet parce que le background justement n'est pas là.

Alors, tout autant qu'on peut s'asseoir ici et dire: Nous, Vérificateur général, malgré le fait qu'on s'est heurté à un mur de refus, dont on a traité ce matin, de la part d'un certain centre, on a fait un certain nombre de constats. Les constats sont les résultats de problèmes à la base de gestion. Le président nous dit, sans doute avec raison, qu'à son point de vue la nouvelle loi règle un certain nombre de ces choses-là pour le passé. Peut-être. J'ai entendu le Vérificateur général nous dire le contraire, qu'à son point de vue ce n'était pas nécessairement le cas. À mon point de vue, sans même trancher ce débat-là, à savoir si la nouvelle loi règle les problèmes, je sais que la nouvelle loi apporte des camions pleins de nouveaux défis organisationnels et de gestion pour la Commission et pour les centres et je suis loin d'être assuré qu'au cours des deux ou trois prochaines années on va pouvoir rencontrer ces défis de gestion, sans regarder le passé, sans parler du refus des centres, juste là où on s'en vient. En d'autres mots, si notre travail en vertu de la loi 198 consiste à rencontrer les responsables des organismes et à poser le genre de questions qu'on pose depuis 9 heures ce matin, c'est une chose. Il me semble qu'il y a des alarmes qui devraient être en train de sonner aussi pour l'instauration du nouveau système parce que, pour ma part, je suis loin d'être assuré que le nécessaire est en place. Et je veux savoir, en terminant, M. le Président, de la part du Vérificateur général, s'il a des choses à nous dire là-dessus.

Le Président (M. Côté): M. Breton.

M. Breton (Guy): Alors, pour terminer la comparaison, vous avez cité à nouveau la Régie de l'assurance-maladie. Il faut savoir que la Régie de l'assurance-maladie, dès la première journée, a été créée en fonction de l'informatique, sinon elle ne pourrait pas exister. C'est une boîte informatisée à 100 %, sinon ça n'existe pas, c'est impossible à gérer. La Commission, c'est l'inverse, c'est une boîte, je dirais, manuelle par définition. Ce sont des interventions manuelles, et on a informatisé dans le cours des 25 dernières années pour essayer de centraliser, pour essayer de compiler, pour consolider.

Heureusement, maintenant la technologie permet d'utiliser l'informatique à des frais minimes pour de grands, grands résultats, et c'est cette conversion. On arrive, on profite de la technologie pour dire: Utilisons la technologie partout où on peut afin d'avoir des outils de gestion, afin d'avoir ce qu'il faut pour consolider, afin de savoir où on va, de s'analyser. C'est le tournant que presque toutes les administrations font, maintenant. Il y en a qui l'ont fait il y a cinq ans, puis il y en a qui le font cette année, puis il y en a quelques-unes qui ne l'ont pas encore fait. Mais on ne peut pas comparer ça à une régie d'assurance-maladie qui, par définition, dès le premier matin, était informatisée, sinon on n'aurait pas pu exister.

Parenthèse. J'étais là, en novembre 1969, j'ai été engagé comme consultant informatique à ce moment-là pour participer, avec 200 autres consultants, à inventer la RAMQ informatique. Alors, ce n'est pas la même chose. Une boîte informatique depuis le premier matin roule en informatique tout le temps et puis va continuer à évoluer. À chaque fois qu'il va se présenter un nouveau besoin, ça va être la solution informatique rapidement imposée. On a de l'informatique ailleurs, à la CSST. Là, on travaille avec des consultants externes. C'est une autre histoire qu'un jour on ira voir. Mais les petites boîtes qui n'ont pas raison de se payer un informaticien pendant 20 ans au cas où à la 21e année on voudrait développer quelque chose, c'est sûr qu'elles ne sont pas dans le même environnement, et puis on constatera toujours que, à partir de l'instant où elles veulent se convertir à l'informatique, bien, elles partent d'un peu plus loin que les autres puis c'est plus difficile pour elles.

Là, il y a huit logiciels sur la table qu'on n'a pas examinés, à savoir: Est-ce qu'ils font le travail, est-ce qu'ils rencontrent leurs promesses, est-ce qu'ils sont très rentables, est-ce que ça va donner des résultats intéressants, est-ce qu'il y a des bogues dedans? On ne le sait pas. Dans un an, dans deux ans, on pourra vous dire: Écoutez, on a regardé comment ça marchait, puis, huit sur huit, il y avait de très bons développeurs, ils répondent exactement aux besoins et c'est une grande amélioration. Ou peut-être que dans deux ans on dira: Malgré tous les efforts qui ont été faits, les développeurs n'étaient pas assez puissants ou les problèmes n'avaient pas été suffisamment identifiés, puis ça vaut ce que ça vaut, mais il y aurait beaucoup d'améliorations à y apporter si on voulait atteindre un maximum. On ne le sait pas pour l'instant, on espère que ça va être très bien, mais il faudra voir à l'usage. Mais on ne peut pas comparer ça à la RAMQ, et, vous-mêmes, en tant que parlementaires, vous aurez toujours à distinguer entre des boîtes comme le ministère du Revenu, qui est informatisé...

(15 heures)

Si vous vous rappelez le ministère de la Sécurité du revenu, le temps que ça lui a pris, hein, quand il a voulu réinventer et puis les trois premières années de tentative pour réinventer, il a échappé littéralement la balle en cours de route jusqu'à temps qu'un sous-ministre en particulier ramasse le projet, s'y adresse personnellement, et, à partir de là, en deux ans le ministère a livré la marchandise. Mais le coût a été beaucoup plus élevé que prévu, et ça a coûté beaucoup plus cher que prévu à l'origine, puis ça a pris presque cinq ans parce que, les trois premières années, ça ne levait pas, ça tournait plus ou moins en rond.

Le Président (M. Côté): Alors, merci, M. le...

M. Mulcair: Je vais terminer là-dessus, M. le Président. Ce que je pense qu'il est souhaitable, c'est qu'éventuellement on ait un vérificateur général pour les choses en cours de route aussi, c'est-à-dire que l'expérience, la vision de quelqu'un qui a 20, 30 ans d'expérience, qui a déjà vu ces choses-là puisse aider vite à intervenir pour éviter que l'exemple qu'il vient de nous donner à la sécurité du revenu perdure pendant cinq ans. C'est sûr qu'il ne faut pas présumer l'existence d'un tsar de l'organisation gouvernementale qui va court-circuiter les ministres et la responsabilité des élus. Cependant, je pense qu'il nous manque un maillon dans la chaîne quand j'entends des exemples comme celui-là. J'apprécie toutefois l'énorme expérience que partage le Vérificateur avec nous.

M. Breton (Guy): Pour terminer le sujet, je vous...

Le Président (M. Côté): Oui, M. Breton, s'il vous plaît.

M. Breton (Guy): Oui. Pour terminer le sujet, je vous dirai que nous avons mis en place cette année chez nous une équipe d'informaticiens dont le rôle est de s'intéresser à ce qu'on appelle «les applications informatiques du gouvernement». Alors, le rôle de cette équipe est strictement de parler informatique: Est-ce que l'informatique qu'on fait est adéquate? Est-ce que soit les achats, soit l'équipement, soit le développement de systèmes, soit les raccordements, soit les réseaux, l'informatique au gouvernement en tant qu'informatique comme telle... Alors, on a monté une équipe dont c'est le mandat, qui va prendre de la vitesse et qui, d'ici un an ou deux, commencera à vous donner des rapports qui portent sur l'informatique en tant qu'informatique.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain, je crois, a quelques remarques à ajouter.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, je voudrais peut-être ajouter à ce que M. le Vérificateur vient de mentionner quant au plan directeur informatique de la Commission des services juridiques. En novembre dernier, si ma mémoire est fidèle, M. Samson, qui est ici présent, a présenté le plan directeur informatique à toute l'équipe de vérification. Il nous était impossible de mettre en place le plan directeur informatique avant de connaître les règlements et la Loi sur l'aide juridique, et j'ai mentionné ce matin qu'on a eu la dernière version des règlements qui ont été publiés en septembre dernier seulement à la fin d'août de l'an dernier, et c'est là qu'on commence à composer le logiciel d'admissibilité.

La vérification. Les deux années de vérification portaient sur le vécu antérieur. L'ancien logiciel que quelques régions possédaient, avec chacun des systèmes différents... Je peux vous donner le portrait de 1994 à l'aide juridique. Cinq régions sur 10 avaient acquis le même logiciel d'admissibilité, mais, écoutez bien, aucune la même version. Deux régions avaient développé leur propre logiciel et trois autres ne possédaient aucun logiciel d'admissibilité. C'était ça, la réalité. Puis après ça il fallait tout refaire, nous autres, à la Commission parce que notre système, c'était Wang.

Le budget de l'aide juridique n'a pas toujours été de 120 000 000 $. Ça a été de très, très, très petits budgets puis ça ne nécessitait pas, au début, dans les 10 premières années, des systèmes très sophistiqués d'informatique à cause du volume d'affaires qu'on avait puis qui était éparpillé. N'oubliez pas, là, on vient d'installer 400 postes de travail qui parlent le même langage, avec le même environnement, tous interconnectés aux centres communautaires et interconnectés à la Commission. Auparavant, notre demande d'aide juridique comprenait 50 points d'information. Le nouveau logiciel, avec des clés sécuritaires, possède 300 points d'information sur notre clientèle. Alors, quand une des recommandations du Vérificateur nous dit: Vous devrez rendre compte beaucoup mieux du profil de votre clientèle et de ce que vous faites comme travail à l'aide juridique, je pense que le logiciel va le faire.

Écoutez, je ne veux pas rapporter tout ça aux problèmes de structure, mais notre nouvelle demande va nous permettre de faire des rapports qui auparavant étaient impossibles à faire et de faire des économies importantes.

M. Mulcair: Votre nouvelle demande?

M. Lorrain (Pierre): Notre nouvelle demande, notre nouveau formulaire de demande. Notre nouveau logiciel de demande de l'ADA nous permet même des économies en termes de personnel, et je m'explique. Pendant des années, il y a eu 11 personnes à la Commission qui ne faisaient que répéter ce que les avocats, les avocates et le personnel de soutien avaient fait en réseau, entrer ça dans le fameux système Wang. C'était ça. Je vous l'ai dit ce matin, j'ai paniqué quand j'ai vu la machine. Mais c'est comme ça. Ces personnes-là aujourd'hui n'ont plus besoin de reprendre le formulaire, il entre la nuit par réplication, il entre les fins de semaine et tout est colligé au complet à la Commission. Même les bureaux tantôt seront tous interconnectés avec leur centre. Chaque directeur général qui attendait, pendant 25 ans, que la Commission des services juridiques prépare son rapport statistique et le lui envoie en région va pouvoir faire ses propres programmes de statistiques, vérifier le contrôle de ses avocats, l'admissibilité de ses avocats et de ses avocates et la production de chacun de ses bureaux en région bien avant que la Commission le sache parce qu'il est le premier qui va détenir l'information.

On a huit logiciels, on n'en avait pas. On a procédé par prototypage. Et, pour vous dire comment on a procédé parce qu'on n'avait pas les moyens pour 400 postes de travail, incluant la formation au complet du personnel de soutien et les avocats, la fabrication et l'architecture de huit logiciels, on a investi 1 600 000 $ et on couvre le Québec au complet. Ça complique, là. Si on était tous dans le même immeuble, ça serait beaucoup plus simple. Mais pour 1 600 000 $. Alors, ce qu'on a fait, c'est que, au lieu de faire affaire avec une firme extérieure, on a engagé quatre jeunes architectes à salaire et qui travaillent par prototypage, c'est-à-dire par équipe avec le réseau puis le terrain, on a développé nos logiciels avec l'expertise du terrain puis l'interprétation de la loi puis on a testé au fur et à mesure ce qu'on a fait. Je ne vous dis pas que ça se fait facilement, mais il faudrait d'abord que la réforme finisse par en finir, parce qu'elle n'est pas finie. Puis, à chaque fois qu'on amende la réforme, on amende nos logiciels. C'est comme ça depuis trois ou quatre mois et c'est comme ça aussi pour la formation qu'on donne à notre réseau.

Alors, tout ça étant dit, moi, je pense que c'est un pas en avant puis que c'est encore un outil de gestion très important, très sophistiqué, très pointu. C'est la première fois dans l'histoire de l'aide juridique qu'on va avoir un logiciel de suivi de dossiers. Bien, un logiciel de suivi de dossiers, ça égale coûts de revient tout de suite à la fin.

Le recouvrement, on a un logiciel spécial pour ça. On vous a dit ce matin que le logiciel de demande d'aide juridique va déjà décider, le logiciel, la machine: madame doit payer 300 $, 400 $, 500 $ ou 600 $. Et après il y a tout un autre processus, il y a une calculette intégrée. C'est beaucoup plus sophistiqué qu'avant. Si on avait continué à travailler avec ça, on ne serait plus là ce soir ni cet après-midi. C'était la fin du réseau permanent d'aide juridique. C'est impossible de gérer une loi aussi complexe et des règlements avec le volume de clientèle qu'on a, de le faire et de reprocesser toutes nos données avec des crayons ou avec du personnel qui reprend ce qui a déjà été fait en région.

Alors, moi, je pense que, écoutez, il faut donner la chance au coureur, il faut donner un peu la chance au coureur. C'est vrai que ce n'est pas tout fini, mais on suit ça de très, très près et je peux vous dire une chose: ça fonctionne. Les avocats reçoivent leurs mandats, et on plaide dans les cours, puis on ferme des dossiers, puis on a des statistiques qui sont assez impressionnantes sur le nombre de dossiers qui continuent à fonctionner, et on fonctionne avec les nouveaux logiciels. Ah! il y a eu des bogues, ça, c'est sûr, puis je l'admets. Ce n'est pas possible qu'on ait la recette comme ça, là, ce n'est pas possible, mais on améliore à tous les mois. Mais on a des moyens limités. Savez-vous comment la Commission des services juridiques a trouvé le 1 600 000 $? Les commissaires ont imposé des directives budgétaires extrêmement strictes qui parfois étaient contestées par des régions, puis on a accumulé sur quatre ans des surplus qu'on a mis en réserve, et c'est comme ça qu'on a autofinancé totalement le plan directeur informatique de la Commission des services juridiques.

Le Président (M. Côté): Merci. M. le député de Roberval.


Utilité de la Commission des services juridiques

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Je m'adresserais au président. Considérant l'autonomie que les régions ont acquise avec les années et aussi l'aide technique qu'elles ont par l'informatique, qu'elles pourraient se rapporter quand même directement au ministère de la Justice, est-ce que vous croyez que la Commission aujourd'hui est encore utile? Est-ce qu'elle pourrait être éliminée? C'est une question peut-être un peu farfelue, là, mais je la pose pareil.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): Non. J'ai même demandé aux membres du comité à qui on a donné un mandat il y a deux mois et demi d'envisager la disparition de la Commission s'il le fallait. Si c'est un palier qui est inopérationnel, si c'est un palier qui, par obligation vis-à-vis du gouvernement, vis-à-vis de l'Assemblée nationale, n'est pas capable de rendre compte, bien, qu'on trouve un autre moyen. Je suis allé jusque-là et je pense qu'il y en a d'autres qui pensent aussi comme ça parmi les commissaires. Maintenant, je ne veux pas tout reprendre le débat de la protection du droit du bénéficiaire. C'est l'espèce d'entre-deux que le législateur, dans les années soixante-dix et encore une fois dernièrement, l'an passé, a trouvé pour protéger les démunis pour qu'ils aient vraiment un droit réel et pour protéger l'autonomie de l'avocat dans sa pratique quotidienne dans un dossier ou une affaire avec un client. Mais ça pourrait arriver.

M. Laprise: Oui. Localement, les organismes locaux auraient une imputabilité directe avec le ministère de la Justice, à ce moment-là, et ils devraient répondre de leur administration et de leur gestion, étant donné qu'ils ne veulent pas répondre à vous autres. Tu sais, c'est une question à se poser, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

(15 h 10)

Le Président (M. Côté): Merci, M. le député de Roberval. Est-ce qu'il y a d'autres membres... Oui? Le député de Chomedey.


Moyens envisagés afin d'assurer au Vérificateur général l'accès à tous les dossiers des bénéficiaires

M. Mulcair: En terminant avec le président de la Commission, M. le Président, j'aimerais revisiter brièvement un sujet qui a fait l'objet de plusieurs interventions et de questionnement, aujourd'hui. L'exercice auquel on se livre, on se le rappelait tantôt, vise justement à accroître l'imputabilité des dirigeants d'organisme devant l'Assemblée. Par la même occasion, il y a des choses que, nous, comme parlementaires, on peut apprendre sur la gestion de l'organisme qui est sous la loupe pour l'heure et le jour en question, mais plus généralement pour d'autres groupes qu'on a regardés, ceci afin de mieux remplir nos propres devoirs comme parlementaires et de mieux servir les citoyens.

Au début de la journée, on a entendu le président de la Commission nous expliquer sa version des faits concernant les centres au niveau local qui refusaient, sur la base d'une lettre où ils invoquaient le secret professionnel, de donner l'information requise par le Vérificateur général. Dans les dernières discussions qu'on vient d'avoir là-dessus, à deux reprises le président de la Commission nous a dit, et je le cite: On tente d'en arriver à un compromis, ceci en réponse à notre question qui visait à savoir si une modification législative était souhaitable. J'aimerais juste comprendre ces deux références-là à sa tentative d'arriver à un compromis. J'ai du mal à les saisir.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): M. le Président, je respecte simplement l'esprit de la loi puis je pense que les commissaires aussi sont respectueux de ce qu'ont décidé les législateurs. C'est inclus dans l'article 3.2. On se doit de tenter par concertation, conciliation, coopération, cohérence de gérer et d'administrer tout un système, toute une structure de l'aide juridique dans l'intérêt – puis on n'en a pas parlé beaucoup depuis ce matin – d'une personne, des personnes. Ce sont les bénéficiaires et non pas dans l'intérêt de quelque directeur général ou président de commission quelconque. C'est dans l'intérêt des bénéficiaires avant tout que toute cette structure a été mise en place. Alors, moi, je pense que l'avènement et la venue du Vérificateur général, le fait qu'on a nommé un comité qui va rendre compte, le fait que les commissaires se sont vu refuser depuis quelques mois par certains – pas par tous – de rendre compte complètement de leur gestion, vu que c'est récent, quand même, là, qu'on a des compressions de 5 000 000 $ puis de 6 000 000 $ par année avec des conventions collectives fermées et une sécurité d'emploi, ce n'est pas si facile que ça, mais on arrive. On a réussi notre plan de rationalisation, l'an passé. On n'a pas fait de déficit. On n'en a jamais fait puis on n'en fera pas encore cette année, mais on va prendre les moyens.

Ceci étant dit, moi, je crois que, si on arrivait à un consensus... Et c'est possible d'y arriver parce qu'on a pris des décisions. Si on n'avait pas pris des décisions, comme ne changer personne sur le conseil d'administration de Montréal, ne nommer personne comme comité, ne pas faire l'enquête que nous suggérait le Vérificateur général sur la structure et ne pas rendre compte au gouvernement des difficultés qu'on a rencontrées au fil des mois, ce qui a été fait... Bien, là, on verra. Je pense bien qu'il y a du monde qui va prendre ses décisions, hein, puis sérieusement. Ça ne peut pas perdurer, ça ne peut pas continuer comme ça. On est là pour gérer un service qui s'adresse à une clientèle particulière, des bénéficiaires, des démunis au Québec, on n'est pas là pour faire des petites guerres de clan, puis de région, puis de «moi, je peux, toi, tu ne peux pas», puis du juridisme, ou du formalisme, ou du pointillisme. On n'est pas faits pour ça, puis je n'ai pas compris que... Lorsqu'on m'a envoyé à la Commission des services juridiques, je ne m'attendais pas, comme gestionnaire, à faire toujours du juridisme, je m'attendais à ce qu'on soit pour gérer un service dans l'intérêt du bénéficiaire et non pas des luttes occasionnelles – ce n'est pas permanent – internes de pouvoir.

M. Mulcair: On ne saurait être plus en accord avec le président de la Commission à cet égard-là. D'ailleurs, l'article 3.2, premier paragraphe auquel il nous fait référence précise que, pour l'application de la loi, un des principes qui doivent guider, c'est l'importance qu'il y a d'assurer aux personnes financièrement admissibles les services juridiques dont elles ont besoin, et à nouveau l'article 22 prévoit que le premier devoir de la Commission, c'est de veiller à ce que l'aide juridique soit fournie dans la mesure établie par la présente loi et les règlements aux personnes financièrement admissibles. Alors, on est vraiment d'accord avec lui là-dessus.

Pour ce qui est du juridisme, je lui ferais une analogie entre son travail comme président d'un organisme gouvernemental et notre travail comme parlementaires. Je lui rappelais, au début de la journée, que le travail ici aujourd'hui était non partisan. C'étaient tous les parlementaires membres de cette commission qui cherchaient à en savoir plus, suite à un rapport qui contenait des éléments carrément alarmants et à certains agissements, et on voulait en savoir un peu plus. On remercie le président pour sa collaboration aujourd'hui.

De notre côté, le débat et la bataille partisane ont déjà eu lieu lors de l'adoption de 87 et de 20. C'était une de ces lois qui ont dû être imposées par bâillon, les débats étaient très féroces de part et d'autre, c'étaient vraiment deux visions différentes qui étaient là. De notre côté, par exemple, on trouvait inadmissible qu'une personne accusée d'un crime n'ait pas le droit à un avocat dans tous les cas si elle n'était pas capable de se le payer elle-même. C'était pour nous un principe fondamental, et on aurait vivement souhaité que le gouvernement conserve ça plutôt que d'inventer des critères en prenant la place du juge, en usurpant le rôle et l'indépendance du juge en disant: On va présumer d'avance pour pouvoir déterminer s'il y a une probabilité d'emprisonnement. Mais cette bataille-là, elle a eu lieu. Le côté ministériel, avec sa majorité, a voté une loi, et autant je me suis battu contre certains principes, autant je vais me battre pour son application maintenant comme parlementaire. C'est pour ça que je suis d'accord avec le président de la Commission quand il dit que c'est inadmissible, pour un quelconque dirigeant dans ce système-là, de se mettre au-dessus de la loi, car c'est de l'autorité de la loi qu'on parle dans son ensemble et c'est ça qui est vraiment troublant dans ce cas-ci: troublant de le voir opposer une fin de non-recevoir illégale au Vérificateur général, troublant de voir que le président de la Commission a été obligé de dépenser autant d'énergie à éteindre ces petits feux alors que tout le défi de l'application du nouveau système l'attend. C'est un gaspillage imposé au président de la Commission, et on le regrette.

Toute l'expérience aujourd'hui pour nous, M. le Président, était très intéressante. Ça va nous permettre de beaucoup mieux comprendre les défis auxquels le président de la Commission a eu à faire face, et le président, j'en suis convaincu, est plus sensibilisé à nos préoccupations suite à la journée qu'on vient de passer. Et, en terminant, de notre côté, on tient à le remercier, lui, et les collaboratrices et collaborateurs qui l'ont accompagné, du domaine de l'aide juridique, ainsi que le Vérificateur général et ceux qui l'ont accompagné pour leur excellente et habituelle collaboration et leur très grande expertise qui est toujours d'un apport très précieux pour les membres de cette commission. Merci.

Le Président (M. Côté): Merci.

M. Gautrin: J'ai encore une question.

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.


Montant et affectation des amendes

M. Gautrin: Oui. J'ai encore une petite question. Je regarde vos états financiers et je regarde aussi votre brochure. Il est marqué: «Rappelez-vous que des amendes variant de 500 $ à 1 400 $ pour une personne physique et de 1 000 $ à 7 000 $ pour une personne morale pourraient être infligées à quiconque fait une déclaration ou transmet un document contenant des renseignements faux ou trompeurs pour obtenir l'administration à l'aide juridique.» Alors, la question que je vous pose, c'est: Dans vos états financiers, ces amendes-là, est-ce qu'elles vont au fonds consolidé de la province ou elles vont chez vous?

M. Lorrain (Pierre): ...fonds consolidé, c'est la couronne qui prend ces poursuites-là. Ça ne nous concerne pas.

M. Gautrin: C'est la couronne qui prend ça, ça ne revient pas chez vous. Est-ce que vous avez une idée du nombre de causes qui ont été portées? Et puis qu'est-ce qui a été décidé comme amendes? Ça correspond à combien, l'année dernière?

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): On me dit que c'est probablement dans le rapport. M. le Président, pardon. Ça fait partie du rapport probablement du ministère de la Justice et non pas chez nous parce que c'est la couronne, la Justice, dans une de ses directions, qui pourrait peut-être...

M. Gautrin: Vous n'avez pas cette information-là. Vous ne pouvez pas la trouver.

M. Lorrain (Pierre): Non, on n'a pas cette information-là. Non, non, non.

M. Gautrin: Alors, M. le secrétaire...

Le Président (M. Côté): Oui, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Est-ce que le secrétaire pourrait écrire au ministre de la Justice? Moi, je serais intéressé de connaître combien de causes ont été portées actuellement par un procureur de la couronne, et quelles ont été les condamnations, et ce que ça a eu comme retour, et que ça soit transmis aux parlementaires.

Le Président (M. Côté): Merci, M. le député de Verdun. M. Lorrain, j'aurais peut-être aussi, moi, avec tous les échanges qu'on a eus depuis ce matin...

M. Gautrin: M. le Président, je peux terminer là-dessus? Il y a une chose que j'ai quand même un peu de difficultés à comprendre. Vous permettez? Je comprends le Procureur général, mais, vous, vous payez pour quelque chose qui n'est pas normal. Autrement dit, imaginez-vous que, moi, je ne pense pas avoir le droit à l'aide juridique. Je suis à peu près sûr que je n'ai pas le droit à l'aide juridique non plus.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Mais supposons que je réussisse à vous convaincre que j'ai le droit.

M. Lorrain (Pierre): Voulez-vous passer le test?

Des voix: Ha, ha, ha!

(15 h 20)

M. Gautrin: Oui, essayons. Supposons que j'arrive et que vous m'accordiez l'aide juridique. À ce moment-là, vous avez dépensé des fonds de votre budget pour moi et vous vous retournez après parce que vous dites: Tiens, il a fait une mauvaise déclaration. Vous vous retournez, vous n'avez aucune possibilité de recouvrir ou de retrouver les sommes que vous avez dépensées d'une manière inappropriée pour revenir dans votre budget. C'était le but de ma question, M. le président. Indépendamment des amendes qu'on m'imposerait, est-ce qu'on demande le remboursement des coûts? Et ça, ça devrait rentrer... J'ai regardé rapidement vos états financiers et je n'ai pas vu ça.

Le Président (M. Côté): M. Lorrain.

M. Lorrain (Pierre): Oui, ça se fait et c'est prévu. C'est le 400 000 $, en quelque part dans les états financiers, de revenus, parfois 500 000 $. Ça varie d'une année à l'autre, le recouvrement qu'on peut faire. Alors, si la personne avait illégalement obtenu l'aide juridique, on peut recouvrer tous les déboursés, tous les frais qu'elle a encourus.

M. Gautrin: Alors, dans ce cas-là, vous pouvez me dire combien de causes vous avez portées pour obtenir des remboursements et combien ont obtenu des remboursements après? Est-ce que vous avez l'information? Si vous n'avez pas l'information, pourriez-vous la transmettre aux membres de la commission? C'est une information qui me...

M. Lorrain (Pierre): Oui. On va voir. Chose certaine, M. le Président, on l'a sous forme d'argent, de revenus, parce que ces argents-là sont recouvrés par 11 régions et qu'il y a une directive qui dit qu'on retourne les recouvrements, les revenus à la Commission.

M. Gautrin: Aux régions.

M. Lorrain (Pierre): À la Commission, à la fin de l'année financière. Alors, maintenant, le nombre de dossiers de recouvrement s'adressant spécifiquement au genre de cas que vous venez de nous mentionner, on va le vérifier.

M. Gautrin: Bien, vous devez l'avoir.

M. Lorrain (Pierre): C'est en région. Ce n'est pas nous qui avons ça.

M. Gautrin: Non, je comprends, mais vous comprenez que, pour nous, toujours dans la mesure de savoir jusqu'à quel point il y a des gens qui, en quelque sorte, bénéficient injustement du régime, jusqu'à quel point vous êtes efficients pour les dépister, c'est une mesure qu'on serait intéressés à connaître.


Effets de la réorganisation informatique

Le Président (M. Côté): Alors, je reprends ma question, M. Lorrain. Vous avez dit ce matin que le mandat de la Commission, c'est de fournir des services aux bénéficiaires. Alors, je pense que ça, c'est bien clair. Et puis, bon, vous avez, je pense, exprimé à plusieurs reprises qu'en termes de pouvoir d'intervention pour aller faire corriger des choses dans le système dans l'organisation actuelle ça semblait très difficile. Vous avez aussi parlé beaucoup de réorganisation au niveau de l'informatique à l'intérieur qui va vous permettre de gérer, je pense, encore plus efficacement ou avec plus d'efficience le système. Mais est-ce que cette réorganisation-là à l'interne, au niveau informatique et tout, ça va vous permettre quand même de mieux intervenir ou d'intervenir davantage pour corriger des situations qui nous sont signalées, comme le Vérificateur général l'a mentionné dans son dernier rapport? Quand je vois, par exemple, que dans les centres communautaires on recommande de resserrer les contrôles relatifs à l'admissibilité, alors de quelle manière ça va vous permettre d'intervenir mieux ou encore auprès des centres?

Vous avez dit également que vous aviez un comité qui était formé pour faire l'examen de tout ça. Est-ce que vous avez senti de la part des centres et des bureaux une certaine collaboration ou encore... Est-ce que vous avez senti ça, une certaine collaboration pour en arriver justement à un consensus ou à une concertation dans les changements qui pourraient être apportés autres que le changement à la loi, s'il y a lieu?

M. Lorrain (Pierre): Merci beaucoup pour votre question, M. le Président. C'est très important. On a fait allusion à un certain négativisme, à certains refus, depuis le début de ce matin, mais il y a beaucoup plus de positivisme, de collaboration, de concertation que d'aspects négatifs. Je ne me suis peut-être pas assez exprimé tantôt quand j'ai parlé de groupes GTI, de groupes de travail informatique. Tous les groupes de travail informatique se sont faits avec des personnes de notre réseau. La demande, qui contient maintenant 300 éléments d'information, comparée à ce qu'on faisait avant à la plume – 50 – ça a été constitué avec des architectes informaticiens mais aussi avec le support permanent des 11 régions du réseau. Le logiciel a évolué par prototypage – on est rendus à la troisième version puis là on a une version beaucoup plus rapide qui s'en vient – tout le temps en le testant puis en le montant avec le réseau.

Ce qu'il y a dans le logiciel de la demande d'admissibilité, ce n'est pas quelqu'un de l'extérieur, là, un informaticien qui a pensé ça seul en lisant rapidement la loi, ça s'est fait et s'est conceptualisé à l'interne à la Commission avec notre personnel et nos juristes et tout était vérifié à chaque fois par l'équipe de juristes de la Commission. Alors, c'est une collaboration et ça fonctionne.

Tantôt, là, quand il va être finalisé, on ne pourra pas jouer avec. C'est le logiciel. Puis, si t'oublies de mettre le numéro, ça ne continue pas. Puis, si tu ne demandes pas la question puis si tu ne remplis pas les cases, il va y avoir des fermetures puis des clés. Avant, bien, c'était la méthode de la plume. Alors, on est deux personnes dans le bureau sur un comptoir, puis c'est à la plume. Ç'aurait été impossible de gérer cette loi-là avec ça.

Les outils, sincèrement, honnêtement, on va se donner un peu de recul, on va se donner la chance de les posséder. Ça fait plusieurs séances de formation aussi qu'on fait. Ça a été tout un choc pour notre personnel de soutien. Je vous disais tantôt quel genre d'informatique on avait dans le réseau. Il y a même quatre régions qui n'avaient aucun PC. Il a fallu les former. Mais ça fonctionne! Les 12 régions sont informatisées, et ça fonctionne! Puis chez nous on réplique à deux systèmes.

Mais le Barreau ne nous dit pas qu'on ne fournit pas. On a trois systèmes informatiques pour payer les comptes du Barreau: on a l'ancien – on en a encore pour cinq ans sur le Wang – on a un six mois qu'a duré le tarif de l'an passé – il a duré seulement six mois – puis on a l'entente Grondin, maintenant, rétroactive au 1er avril qui fait un autre... Bon. On est après peaufiner le logiciel, mais ça fonctionne. Et on va avoir un logiciel du paiement des comptes. On a la collaboration des gens, on a la collaboration des bureaux puis on a fait des belles découvertes.

Ce qui m'a agréablement surpris puis enchanté, c'est de voir des régions qui n'avaient peut-être pas eu les moyens ou les budgets, dans le temps, pour s'informatiser et de voir que c'est parmi les plus performantes maintenant alors qu'il n'y avait même pas de PC dans ces régions-là. Les gens y ont mis beaucoup de temps, beaucoup de temps hors travail, ont pris la formation comme très, très au sérieux, puis il y en a qui l'ont prise un peu comme un «bag» personnel – excusez, un atout pour leur région. Ils ont vraiment été impliqués tout au long.

C'est impossible d'implanter un plan directeur de l'extérieur quand on gère une loi et un règlement aussi complexes, impossible. Ça ne se fait pas en une formation d'une heure et demie. Faut que les gens vivent avec ça, le construisent, le testent puis disent: Même ce qu'on t'avait dit il y a un mois, ce n'est pas ça, on veut autre chose. Puis c'est comme ça qu'on l'a fait avec de jeunes, jeunes, jeunes architectes parce qu'on n'avait pas les moyens, je le répète, d'engager une grande firme comme CGI ou peu importe.

Le Président (M. Côté): Pourquoi, présentement, suite à la visite du Vérificateur général... On a soulevé des interrogations puis fait des recommandations également sur plusieurs points, en tout cas. Pourquoi, après tant d'années, ça arrive alors que vous avez eu quand même l'opportunité de le faire à l'intérieur déjà des commissions existantes où vous avez à exprimer les difficultés que vous rencontrez dans la gestion de votre Commission comme telle ou encore les succès que vous pouvez rencontrer aussi? Je pense qu'il y avait des commissions quand même auparavant qui existaient également. Qu'est-ce que vous en pensez, de ça? Qu'est-ce qui fait que présentement ça arrive tout d'un coup, que ça n'a pas nécessairement été soulevé antérieurement à l'intérieur des commissions existantes?

M. Lorrain (Pierre): Il n'y a pas une brisure. Ça n'a pas été instantané, ça a évolué avec le temps. La non-collaboration de certains – et, je répète, la grande majorité collabore – ça ne s'est pas décidé un matin, puis ça a été généralisé, puis ça a influencé tout le réseau. Dans l'ensemble, on veut dire que ça fonctionne et que ça fonctionne très bien. De ne pas être capable de rendre compte d'un rapport informatique totalement – on a l'information, mais on n'a pas la base de données – bien, c'est deux.

Je l'ai mentionné un peu ce matin, c'est depuis peut-être les années 1991, 1990, quand ça a commencé, les compressions, tout ça, mais ce n'était pas dysfonctionnel. Ça fonctionnait. Mais l'occasion est là. Moi, je pense que ce qui a provoqué le tout, c'est le défaut de transparence, puis on l'a dit ce matin, je ne voudrais pas tout recommencer. C'est peut-être ça qui a déclenché un peu la force de la réaction et l'obligation de venir témoigner ici cet après-midi.

Si le Vérificateur général, lors de sa vérification, avait été satisfait dans sa demande et avait pu constater – c'est fort possible qu'on ne fasse pas tout parfait, il y a certainement... – bien, on ne serait peut-être pas ici pour s'expliquer, après midi. Mais la problématique, c'est que, après huit mois, ils n'ont pas pu constater certaines recherches, certains résultats qu'ils ont corrigés chez nous. Bon. Alors, là, c'est très grave puis je pense que je suis d'accord avec les députés du côté de... avec vous tous. Nous-mêmes, les commissaires, c'est unanime, on ne l'accepte pas et ça ne pourra pas durer.

(15 h 30)

Le Président (M. Côté): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? C'est donc la fin des travaux de notre commission.


Remarques finales

Maintenant, je permettrais au président de la Commission, M. Lorrain, de formuler ses commentaires ou ses remarques de clôture, s'il vous plaît.


M. Pierre Lorrain

M. Lorrain (Pierre): Merci beaucoup. Mme la députée, MM. les députés, M. le Président, le groupe de vérificateurs qui sont ici présents, je vous remercie beaucoup de nous avoir donné l'occasion de s'exprimer. Je retiens une chose puis je pense que je l'ai mentionnée très tôt ce matin, il y a beaucoup plus de positif dans toute l'histoire et l'évolution des 25 dernières années à l'aide juridique. Il y a un réel vécu sincère de desservir une clientèle démunie, une clientèle que... Tous les différents gouvernements ont maintenu une loi très permissive, non encadrante de donner des services extrêmement généreux, peut-être les plus généreux en Amérique du Nord. J'ai eu même l'occasion parfois de faire certaines vérifications avec l'Europe. Notre système est extrêmement généreux.

Ce qu'il faut retenir, c'est que je pense qu'ailleurs aussi, non seulement dans notre secteur, à l'aide juridique, mais dans tous les domaines, il y a beaucoup de mouvance, actuellement, il y a beaucoup de changement, il y a beaucoup de réorganisation puis il y a aussi une forme d'assainissement et de méthode qui est après s'implanter dans le but d'obtenir – je ne me rappelle plus quel parlementaire le disait ce matin – plus d'efficacité, parfois même peut-être avec moins de moyens puis moins d'outils. Ça crée des chocs, ça crée parfois de la résistance.

Puis il ne faudrait pas oublier qu'on a un réseau qui a 25 ans de vécu. Ce n'est pas beaucoup, 25 ans, mais il y a des habitudes qui se créent, il y a des gens qui sont là depuis le début. Il y a des gens qui ont développé un concept de leur région en toute bonne foi, avec les moyens du bord, au fil des ans, mais qui ont peut-être plus de difficultés que d'autres à dire: Bon, bien, écoute, après 25 ans, faut que ça change puis c'est à moi encore à faire le changement. Il ne faut pas oublier que ces gens-là vivent avec les mêmes personnes, dans le même cadre physique, dans la même région, avec les mêmes avocats. Je pense que c'est à prendre en compte.

Maintenant, ceci étant dit, on ne se le cachera pas, il y a un malaise, il y avait un malaise, j'en ai fait part en temps et lieu. On a privilégié d'abord la loi pour les bénéficiaires, et c'est ça qui était important. Lorsque j'en ai parlé au tout début avec M. Bégin, il y a deux ans et demi, on a privilégié et, la Commission, on était d'accord de d'abord faire la réforme dans l'intérêt des bénéficiaires de l'aide juridique. Les petits problèmes d'accrochages internes d'administration pouvaient passer en secondaire. Mais, quand on est rendu à refuser au Vérificateur général qui vient chez nous pour vérifier, bien, là, on a un problème. Et c'est récent parce que pendant 24 ans la Commission n'a jamais manqué de rendre compte au gouvernement. Mais, quand on est rendu à n'être pas capable de rendre compte de la productivité d'une région, ou des statistiques, ou du nombre de clients qui entrent dans une région parce qu'on n'a pas accès à la base de données, bien, l'occasion, cette année, elle est arrivée, on l'a dit et on a pris nos décisions.

Maintenant, ce n'est pas un réseau statique, c'est un réseau vraiment qui bouge, c'est un réseau qui a encore beaucoup de vouloir puis j'aimerais que vous vous rappeliez de la page 106 et de la réponse que j'ai faite au Vérificateur lorsqu'il a rendu publique, qu'il m'a communiqué sa partie qui nous concernait. Il y a beaucoup de choses que les commissaires ont entreprises en trois ans et bien avant que le commissaire vienne commencer, en juillet dernier, sa vérification. Seulement pour vous dire l'information, l'éclatement de la charte des comptes du grand livre, en 1994, il n'y avait même pas une charte de comptes unique, à l'aide juridique. Alors, t'analysais les budgets, tu regardais puis, chacun, on pouvait mettre une dépense dans un autre poste. C'était impossible à comparer. C'est fait, c'est complété, et tout le monde parle le même langage, et tout le monde dépense de la même façon, et tout le monde rend compte de la même façon sur le plan comptable. Ce n'était pas ça.

Les suivis budgétaires mensuels de toutes les régions, l'imposition de nouvelles règles budgétaires aux centres régionaux puis des règles strictes pas toujours suivies, je suis d'accord, l'élaboration et les prévisions budgétaires triennales qui sont demandées depuis deux ans à chaque centre avant l'opération budgétaire, l'imposition d'un plan de rationalisation, l'an passé, de plusieurs millions de compressions, réussi, le développement de nouveaux rapports informatiques, l'uniformisation de la politique d'ouverture de dossiers. Pendant 23 ans, il n'y a pas eu de politique d'ouverture de dossiers. Il y en a une, puis une qui est équitable avec ceux de la pratique privée. Elle est complètement identique. Bien, ça, c'est fait.

L'élaboration d'un système de prix de revient, je pense qu'on a eu l'occasion d'en parler, tantôt. Il y a des développements d'indicateurs de gestion, il y a un guide de formation qui a été fait à l'interne, complètement à l'interne, accepté par le Barreau, accepté par le ministère de la Justice, puis les groupes de travail continuent à évoluer puis à faire avancer le réseau. Moi, je pense qu'il y a plus de positif puis qu'il y a plus de gens qui travaillent dans l'intérêt d'améliorer notre système d'aide juridique puis à donner un service équitable que de gens qui se retiennent. Je pense que, s'il n'y a que ça à régler, on va le régler, puis on va le régler avec votre collaboration et celle du nouveau ministre de la Justice, Me Serge Ménard.

Le Président (M. Côté): Merci, M. Lorrain. M. le Vérificateur général, est-que vous avez quelques mots à ajouter, peut-être? M. Breton.


M. Guy Breton

M. Breton (Guy): Alors, nous avons bien entendu aujourd'hui que la Commission, entre autres, s'est dotée d'outils, nommément huit logiciels, pour lui permettre d'atteindre ses objectifs ou d'avoir un mode de gestion plus efficient, et j'en suis heureux. On a eu l'occasion, dans la journée, également de rappeler que, avec ces outils, bien sûr, il sera possible à la Commission de savoir ce qui se passe, mais qu'il sera nécessaire de s'assurer que dans chaque région, dans chaque entité les gestionnaires et les conseils d'administration endossent l'idée d'une reddition de comptes et d'un mode de gestion où il y a une plus grande recherche d'efficience ou une meilleure mesure de cette efficience. Donc, il y a un état d'esprit, comme on le disait, il y a une formation à être donnée pour que l'ensemble du réseau soit au même diapason. Bien sûr, comme c'est la coutume, d'ici quelques années, nous retournerons constater l'état de la situation par rapport à ce qu'on avait déjà identifié et faire rapport sur les succès atteints et peut-être, malheureusement, quelques manquements qui demeureront.

Un dernier mot du Vérificateur général directement à la commission, à savoir que nous apprécions beaucoup que la commission saisisse la balle que nous lui lançons lorsque nous publions un rapport annuel sur un sujet en particulier. On a connu, il y a quelques années, que ces balles tombaient au sol et y restaient ad vitam aeternam, et, depuis quelques années, les commissions parlementaires, la vôtre en particulier depuis ce printemps et les autres, vous repartez de notre texte, et pour nous c'est le complément de notre travail, et nous l'apprécions énormément. Et, plus spécifiquement, nous apprécions que vous ayez insisté aujourd'hui pour rappeler le mandat du Vérificateur général et l'autorité dont il est recouvert pour exercer ce mandat. On comprendra que c'est un message qui nous a fait plaisir. Merci.

Le Président (M. Côté): Merci, M. Breton. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui désirent exprimer des remerciements?

M. Laprise: M. le Président.

Le Président (M. Côté): Oui, M. le député de Roberval.


M. Benoît Laprise

M. Laprise: J'avais une opinion suite à différentes expériences que j'ai vécues dans la chose publique. Je pense qu'il est important de regarder et de faire attention que la machine administrative, à un moment donné, existe pour elle-même. On oublie parfois la clientèle qu'on a à desservir en termes de disponibilité, en termes de qualité, en termes d'accessibilité. Je pense que toute machine administrative... Je l'ai vécu dans le monde municipal, et on constatait de temps à autre que la ville existait pour eux autres, que ce n'étaient pas eux autres qui étaient là pour les citoyens. Alors, c'est à faire attention, et je pense que la démarche de la commission, c'est dans le but justement de travailler en étroite collaboration avec toutes les instances gouvernementales dans un but ultime de donner le meilleur service aux meilleurs coûts aux citoyens.

(15 h 40)

Le Président (M. Côté): Merci. Alors, pour ma part, je remercie M. le président, M. Lorrain, ainsi que toute son équipe, M. le Vérificateur général également, pour l'excellente collaboration qu'ils ont apportée. Je crois qu'on a réalisé notre mandat qui est de vérifier, de voir comment ça se passe dans la gestion des affaires de l'État. Et puis, lorsqu'on veut que ça se fasse dans la plus grande collaboration puis dans la plus grande impartialité, je pense qu'on peut réussir, puis c'est notre objectif, et je vous en remercie sincèrement.

Alors, je demanderais aux membres de la commission de demeurer ici pour un huis clos afin de déterminer les conclusions puis les recommandations de cette séance et je demanderais aux invités de quitter dans les meilleurs délais.

(Fin de la séance à 15 h 41)


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