To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Public Administration

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Public Administration

Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Tuesday, February 24, 1998 - Vol. 35 N° 32

Examen des recommandations du Vérificateur général concernant la Sûreté du Québec


Consultations particulières sur les emplois occasionnels au gouvernement


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Examen des recommandations du Vérificateur général concernant la Sûreté du Québec

Consultations particulières sur les emplois occasionnels au gouvernement


Autres intervenants
M. Michel Côté, président
M. Jacques Chagnon, président suppléant
M. Henri-François Gautrin
Mme Diane Barbeau
M. Pierre Marsan
M. Benoît Laprise
M. François Ouimet
Mme Solange Charest
Mme Fatima Houda-Pepin
M. Pierre-Étienne Laporte
*M. Maurice Sénécal, Sûreté du Québec
*Mme Maryse Cavuoti, idem
*Mme Martine Fourcaudot, idem
*M. Pierre Avon, idem
*M. Jean-Paul Roberge, CFPQ
*M. Michel Poirier, idem
*M. Serge Roy, SFPQ
*M. Robert Caron, SPGQ
*M. Normand Boucher, idem
*M. Guy Sylvestre, SACFQ
*M. Allen Charland, idem
*M. Réjean Lagarde, Syndicat des agents de la paix en services
correctionnels du Québec
*M. Luc Perron, SPEQ
*Mme Paule Delisle, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Côté): Alors, je constate le quorum et je déclare la séance ouverte. La commission est réunie afin d'examiner le suivi de la vérification de l'optimisation des ressources effectuée par le Vérificateur général en 1993-1994 et d'entendre à cette fin le directeur général de la Sûreté du Québec, conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Ouimet (Marquette) a été désigné membre temporaire pour la séance.


Examen des recommandations du Vérificateur général concernant la Sûreté du Québec

Le Président (M. Côté): Merci. Alors, comme ordre du jour, on a les remarques préliminaires, soit des membres de la commission, qui peuvent être faites par des membres de la commission. Ensuite, il y a l'exposé du Vérificateur général, pour 15 minutes environ. Il y a l'audition du directeur général de la Sûreté du Québec, pour environ 30 minutes. Ensuite, l'étude détaillée du rapport du Vérificateur général, les remarques de clôture et la clôture de la séance à 12 h 15. Les membres de la commission devront demeurer sur place pour les conclusions de la séance et la préparation des recommandations.

Je vous souhaite la bienvenue, M. le Vérificateur général, M. le directeur général de la Sûreté, ainsi que toutes les personnes qui vous accompagnent, que vous aurez sûrement l'occasion de nous présenter avec vos remarques dans quelques minutes.

Est-ce qu'il y a des membres de la commission qui ont des remarques préliminaires à faire?

M. Gautrin: Je pense qu'on préfère échanger plutôt que de commencer à faire des remarques préliminaires.

Le Président (M. Côté): Oui. Alors, je demanderais immédiatement au Vérificateur général de nous faire part de ses remarques préliminaires.

M. Gautrin: M. le Président, pourriez-vous demander au directeur de la Sûreté de présenter les gens qui ont la gentillesse de venir nous rencontrer?

Le Président (M. Côté): Oui. J'ai dit tout à l'heure que, lorsqu'il ferait...

M. Gautrin: Ah! quand il fera...

Le Président (M. Côté): ...au début de ses remarques préliminaires.

M. Gautrin: Parfait.

Le Président (M. Côté): M. le Vérificateur.


Exposé du Vérificateur général


M. Guy Breton

M. Breton (Guy): M. le Président, MM. les membres de la commission, M. le directeur et tout son état-major. Le chapitre 8 du dernier rapport annuel du Vérificateur général à l'Assemblée nationale traite du suivi de la vérification de l'optimisation des ressources que nous avons effectuée à la Sûreté du Québec en 1993-1994. Nous avions alors examiné les activités de la Sûreté liées à la répartition des patrouilleurs, à la gestion des appels, aux procédés administratifs, à l'information de gestion, à la gestion des pièces à conviction et au rapport d'activité.

Depuis notre vérification de l'optimisation des ressources, des améliorations et des correctifs ont été apportés à certaines déficiences que nous avions relevées à cette époque. En effet, la Sûreté a obtenu une plus grande flexibilité dans le déploiement de ses patrouilleurs. Elle a réussi à accroître la présence policière durant les vacances et la gestion et le contrôle des pièces à conviction s'effectuent avec plus de rigueur. Par contre, des lacunes subsistent relativement à certaines de nos autres observations.

La Sûreté n'a toujours pas pris les mesures afin d'évaluer et planifier les heures consacrées aux travaux discrétionnaires effectués par les patrouilleurs. Bien que la Sûreté ait revu l'attribution théorique de ses ressources de première ligne, nous n'avons pu nous assurer que le nombre de patrouilleurs retenu est optimal.

Par ailleurs, pour ce qui est de la gestion des appels, la Sûreté n'a modifié ni sa stratégie d'intervention relative aux incidents mineurs ni celle concernant les fausses alarmes. Pourtant, la majorité des organisations policières ont déjà modifié, depuis plusieurs années, leur stratégie d'intervention, ce qui leur a permis de réduire de façon marquée les déplacements concernant les incidents mineurs et les fausses alarmes. D'ailleurs, la Sûreté discute de ces dossiers depuis de nombreuses années, mais sans résultat concret.

Quant au temps consacré par les patrouilleurs aux tâches administratives, la Sûreté n'a toujours pas identifié de pistes concrètes de solution qui lui permettraient de réduire le temps et les énergies consacrés à la rédaction de formulaires et de rapports.

Enfin, la Sûreté a développé un tableau de bord qui lui permettra de rendre compte de la productivité des patrouilleurs et des enquêteurs. Selon la Sûreté, l'implantation de ce tableau de bord devrait s'effectuer au cours de 1998. Par ailleurs, elle n'a toujours pas amélioré sa reddition de comptes, grâce à un rapport d'activité complet. Elle avance que cette obligation incombe au ministère de la Sécurité publique.

En résumé, nous estimons que la Sûreté du Québec a apporté des correctifs satisfaisants ou qu'elle a entrepris une réflexion sur la plupart de nos recommandations. Par contre, nous n'avons pu nous assurer que les correctifs ont été apportés, car de nombreux projets étaient encore à l'étude ou en voie d'être implantés.

(9 h 40)

J'espère que ces propos seront susceptibles de permettre une reddition de comptes utile, complète et fiable et je demeure à la disposition des membres de cette commission pour répondre à leurs questions.

Le Président (M. Côté): Merci, M. le Vérificateur. Alors, maintenant, je céderai la parole au directeur général de la Sûreté du Québec, M. Coulombe.


Exposé du directeur de la Sûreté du Québec


M. Guy Coulombe

M. Coulombe (Guy): Bonjour, M. le Président. Je voudrais d'abord vous présenter les collègues qui m'accompagnent. D'abord, M. Gilles Bouchard, qui est directeur général adjoint par intérim à la Surveillance du territoire, qui couvre les principaux problèmes qui sont évoqués ou décrits dans le rapport du Vérificateur; M. Jacques Beaupré, qui est chef de projet à la Surveillance du territoire, qui va nous permettre de comprendre un peu mieux quelques grands systèmes auxquels on fait allusion dans le rapport du Vérificateur et dans notre rapport à nous; M. Sénécal, qui est directeur de la vérification et du contrôle de gestion, donc notre vérificateur interne; Mme Martine Fourcaudot, qui est adjointe au chef du Service des renseignements criminels, qui est accompagnée de M. Pierre Avon, qui est un analyste au Service des renseignements criminels, qui vont surtout vous parler, si l'occasion s'y prête, de tout ce qui touche les statistiques de criminalité et l'interprétation de ces chiffres; et M. Mario Lafrance, qui travaille à mon bureau.

Alors, écoutez, vous avez dit tantôt que j'avais une demi-heure. Avec votre permission, je voudrais en prendre un peu moins pour conserver le maximum de temps pour les questions et réponses, surtout qu'on vous a déposé un peu les remarques que nous avions à faire concernant le rapport du Vérificateur général. C'est un document que j'ai déposé, ou que je vais déposer, et qui reprend chacun des thèmes évoqués par le Vérificateur.


Document déposé

Le Président (M. Côté): Alors, on reçoit justement ces recommandations.

M. Coulombe (Guy): Bon. Alors, ça peut donner un peu la table des matières des questions ou des discussions qui pourront survenir par la suite.

Je voudrais tout d'abord dire que nous n'avons pas de querelle avec le Vérificateur concernant son rapport. Au contraire, c'est professionnellement fait et ça a été professionnellement reçu par la Sûreté. D'une façon générale, on peut dire que, sur les 14 points traités, il y en a huit qui sont à toutes fins pratiques réglés, et c'est confirmé par le rapport de suivi que le Vérificateur a fait. Parmi les six autres, nous aurons l'occasion d'en discuter, ça touche le problème des travaux discrétionnaires des patrouilleurs, le nombre optimal de patrouilleurs, la gestion des appels, les procédés administratifs, et nous avons l'intention au cours de la discussion de revenir de façon très concrète sur chacun de ces points.

Je voudrais quand même situer la Sûreté d'aujourd'hui par rapport à la Sûreté de 1992-1993 ou 1995-1996 lorsque le suivi des recommandations avait été fait. Je pense que c'est un secret de Polichinelle de dire que la Sûreté actuellement traverse une période d'examen externe via la commission Poitras et de réflexion interne via le travail qui s'est effectué depuis un an et quelques mois. Actuellement, on peut dire que... Je ne parlerai pas de la commission Poitras, mais je vais parler de ce qui se passe à l'interne. Actuellement, nos grandes priorités ont été établies. Il y a de nombreux changements qui interviennent, au moment où on se parle, dans la Sûreté et il y a quatre thèmes principaux qui président à ces changements.

Le premier, évidemment – et ça concerne énormément la commission de ce matin – c'est l'implantation de la police de proximité dans des contrats à signer avec l'ensemble des MRC du Québec. C'est une tâche énorme qui découle de la loi n° 77 que vous avez votée en décembre 1996 et ça a fait un remue-ménage complet sur tout le côté territorial de la Sûreté, c'est-à-dire – et je mets de côté le criminel pour le moment, ou les enquêtes, mais tout le côté territorial – environ 50 % de la Sûreté, soit environ 2 000 personnes. C'est une redéfinition des tâches qui est une perspective nouvelle de travail pour la Sûreté et qui repose essentiellement sur une relation contractuelle avec les MRC, avec les élus locaux. Cette relation contractuelle est une nouveauté pour la Sûreté. Avant ça, c'était essentiellement un service gouvernemental; aujourd'hui, c'est un service qui est en partenariat avec les autorités locales, politiques locales, mais dans le cadre d'un contrat et dans le cadre aussi d'un financement municipal ou intermunicipal de ces services policiers. C'est donc une redéfinition de la relation, une définition du travail quotidien des patrouilleurs et une nouvelle gestion qui en découle: financière, technologique – on le verra tantôt – et matérielle aussi.

Alors, on a 86 MRC. On a actuellement 65, 66 ententes de principe de signées et on est rendu à peu près à 28, 30 ententes de mise en oeuvre de signées. On espère finir l'opération pour le mois de septembre. Ça implique non seulement des bouleversements en termes de travaux, mais aussi à titre humain: ça implique la réaffectation d'environ 500 à 600 policiers qui vont changer de lieu de travail. Et changer de lieu de travail, ça peut avoir l'air assez banal, mais, lorsque vous avez une convention collective du type de celle de la Sûreté, changer 500 ou 600 personnes de place, ce n'est pas évident puis ce n'est pas facile, à cause de l'ancienneté puis à cause de... Alors, la carte policière actuellement est stabilisée à environ 95 %, mais je vous avoue que le 5 % qui demeure crée passablement de problèmes, en ce sens que, comme il y a de l'ambiguïté dans les décisions finales, bien, ça pose des problèmes justement de relocalisation du personnel. Donc, ça, c'est la première grande priorité, ça occupe 50 % des effectifs de la Sûreté.

Une deuxième grande priorité qui est moins avancée mais qui est en chantier de façon très précise, c'est toute la réorganisation de la dispensation des services spécialisés. Sans entrer dans les détails, la Sûreté du Québec est le corps policier, en grande partie avec le Service de police de la Communauté urbaine, qui offre la plus grande gamme de services spécialisés, allant des hélicoptères aux plongeurs, aux polygraphes, aux enquêtes du crime organisé, et ainsi de suite. Et, encore là, il y a une orientation majeure qui a été prise qui est de se baser sur le partenariat avec les grands corps de police municipaux, ce qui exige, encore là, une transformation interne très... une transformation même culturelle très importante. Si vous voulez qu'on en rediscute tantôt, on pourra en rediscuter, mais ces deux grandes priorités là couvrent la presque totalité du personnel de la Sûreté en termes de redéfinition de tâches, en termes d'installer de nouvelles façons de faire, et c'est très important comme transformation.

La troisième grande priorité de la Sûreté à l'heure actuelle, c'est une réforme – c'est fondamental – de l'encadrement. J'entends par «encadrement» le niveau officiers de la Sûreté, qui comprend environ 150 personnes. Donc, on veut faire passer les méthodes de sélection, de classification, de rémunération et de dotation, on veut faire passer ce système d'une ère traditionnelle, qui est à la Sûreté depuis des décennies, à une ère moderne et, en deux mots, ça veut dire un système où les emplois vont être mieux définis, les tâches vont être mieux définies, la dotation ne se fera plus par un cheminement de nominations au sens traditionnel, mais va se faire par concours, la dotation va se faire par concours. Et un des objectifs, c'est de stabiliser l'encadrement qui, malheureusement, dans le passé... les officiers changeaient de place très souvent et là on veut stabiliser pour que la performance soit améliorée. Donc, c'est un troisième grand chantier qui va aboutir très bientôt, et on espère le rendre public dans les prochaines semaines.

Un quatrième chantier qui est d'égale importance, c'est toute la question de la formation et de hausser le niveau général par des moyens exceptionnels d'études universitaires et par des moyens réguliers de formation continue où les programmes actuels, qui sont actuellement à la Sûreté depuis longtemps, vont être rafraîchis et structurés.

C'est les grandes priorités à l'heure actuelle de la Sûreté. Toutes ces priorités-là avancent, pas au même rythme, mais avancent, et on espère qu'en 1998, au milieu ou à la fin de 1998, ces quatre chantiers-là vont voir des réalisations très concrètes.

Parallèlement – et ça retouche les problèmes soulevés par le Vérificateur – il y a d'autres chantiers qu'on a mis en marche, et un très important, c'est toute la superstructure bureaucratique caractérisée – et le Vérificateur le souligne – par un amoncellement de procédures administratives dans lesquelles nous tentons de mettre de l'ordre et, fondamentalement, d'alléger. Un des premiers gestes qu'on a faits, c'est qu'on a, depuis quelques mois, lancé une vaste opération d'éclaircissement de la jungle des procédés administratifs et nous avons, à titre d'exemple, éliminé une cinquantaine de directives qui dataient de plusieurs années; ça a été éliminé carrément. Il y en a d'autres qui sont refondues ensemble. Et c'est un travail qui va bien, le but étant d'alléger les structures et d'alléger les contrôles, non pas pour les rendre inefficaces, mais pour les rendre plus transparents et plus efficaces.

(9 h 50)

Donc, ce sont les chantiers qui sont actuellement en cours à la Sûreté, ce qui, évidemment, donne une perspective un peu différente à certaines des recommandations du Vérificateur. Si je pense au problème du travail discrétionnaire des patrouilleurs, à titre d'exemple, c'est évident que, dans la nouvelle relation contractuelle, ce travail, ce que vous appelez «discrétionnaire», va prendre un autre sens dans la mesure où les priorités vont être définies par un comité de sécurité: définies ou négociées avec un comité de sécurité composé d'élus, de maires, de quatre maires dans chaque MRC, et les priorités d'action de la Sûreté vont être négociées, et ça va être à travers ces discussions que vont s'établir les priorités.

J'ai eu l'occasion personnellement de rencontrer plusieurs préfets et plusieurs maires des municipalités et je me suis aperçu que c'est un travail, d'abord, qui les intéressait formidablement parce que c'est nouveau – ils n'ont jamais eu l'occasion d'avoir leur mot à dire sur le travail concret des policiers qui étaient dans leur région; là, ils vont avoir le moyen de le faire – et, deuxièmement, ça met en lumière aussi les différentes priorités. J'ai assisté à des réunions de comités de sécurité publique que j'ai rencontrés et c'était visible que, entre le maire qui souhaitait avoir telle priorité et l'autre maire qui souhaitait avoir une autre priorité, il y a un dialogue interne qui s'est engagé et qui est extrêmement fructueux pour orienter le travail policier. C'est évident que ça, ça va avoir une influence sur le travail discrétionnaire et ça oblige à avoir des stratégies qui sont différentes selon les régions et selon les MRC. Et ça, c'est une différence fondamentale d'avec le passé. C'est que, au lieu d'avoir des directives qui partent du centre et qui disent que l'ensemble des policiers font telle chose, il va y avoir des grands encadrements. Mais, à l'intérieur de ça, les chefs de poste, dans la négociation avec les MRC, vont être capables de moduler leurs opérations, et même qu'une MRC va avoir des priorités différentes d'une autre MRC, parce que ça va surgir des... évidemment, toujours dans le mandat de la Sûreté que vous connaissez. Il ne s'agit pas d'avoir un autre mandat que celui qu'on a. Mais l'application de ce mandat-là va prendre une coloration différente selon les MRC et selon les problèmes vécus dans une région très rurale, semi-rurale, un peu plus urbanisée, et ainsi de suite.

Je pense aussi à la question de la gestion des appels dont on va vous parler tantôt et qui est un changement extrêmement important qu'on est en train d'introduire et qui va augmenter la productivité – un autre point qui est mentionné dans le rapport du Vérificateur – et qui va augmenter la productivité de l'ensemble des policiers lorsque ça va être en place – c'est un travail assez considérable, on va vous en donner des exemples – comme d'ailleurs le tableau de bord qui va permettre aux représentants, aux élus de la population, et même à d'autres personnes du milieu qui voudront s'en servir, d'avoir une vue exacte de l'état des problèmes reliés à la sécurité publique qui sont vécus dans leur milieu.

J'arrête là parce que je pourrais en parler très longuement, parce que ça fait vraiment le pain quotidien non seulement de tous ceux qui m'accompagnent, mais des 4 000 personnes de la Sûreté. Je tiens encore à répéter que ce n'est pas des changements qui sont définis ou qui ne sont vécus que par une superstructure dans une entreprise. Tout ce que je dis là touche le travail quotidien de 4 000 personnes, à toutes fins pratiques.

Je mets de côté plusieurs autres réformes qu'on est en train de faire, mais ce sont les principales qui donnent un peu l'encadrement aux remarques du Vérificateur, et j'ose espérer que dans le prochain... Je ne connais pas votre cédule de tournée des institutions, mais, lorsque vous allez revenir nous voir, tout ce que je dis là va avoir un aspect concret qui va se refléter à la fois dans notre action et à la fois, j'espère, dans votre rapport.

Alors, si vous voulez parler, discuter des points un par un ou autrement, on est à votre disposition.

Le Président (M. Côté): Je vous remercie beaucoup, M. le directeur de la Sûreté du Québec. Est-ce qu'il y a d'autres personnes qui veulent peut-être faire quelques remarques préliminaires avant de passer aux échanges?

M. Bouchard (Gilles): Si vous me permettez.

Le Président (M. Côté): Oui, veuillez, s'il vous plaît, vous identifier lorsque vous prendrez la parole, pour les fins de l'enregistrement.


Exposé du directeur général adjoint par intérim à la Surveillance du territoire


M. Gilles Bouchard

M. Bouchard (Gilles): D'accord. Gilles Bouchard. Si vous me permettez, M. Coulombe a dit beaucoup de choses, mais je voudrais juste vous donner des détails supplémentaires pour bien vous situer en ce qui concerne l'opération qu'on est en train de faire qui, à notre avis, sincèrement, devrait nous aider ou permettre de corriger les lacunes qui ont été soulevées par le Vérificateur général.

Je voudrais vous parler des ententes de services, rapidement, qu'on est en train de négocier et de signer avec les différentes MRC à travers le territoire du Québec. Dans ces ententes-là, il y a certains éléments qui sont extrêmement importants. Par exemple, la nature et l'étendue des services. On sait que le Règlement sur les services de base oblige les municipalités à offrir des services de police de différente nature, dépendamment de l'importance de la municipalité. En ce qui concerne la Sûreté du Québec, on assure une patrouille 24 heures sur 24 et des services d'enquête de base au niveau de chacune des MRC. Donc, le nombre de policiers est déterminé par rapport à trois critères bien précis: la superficie du territoire, la charge de travail théorique par rapport aux informations de gestion qu'on a recueillies dans les années passées et la population. Cependant, il se peut, à cause de caractéristiques particulières qui sont reliées soit au territoire, soit à une criminalité particulière, qu'on augmente ce nombre de policiers là.

L'emplacement du poste, qui est un élément important, qui est généralement le choix de la MRC, ce choix-là est fait surtout par rapport à l'efficacité que ça va représenter. L'élément principal, c'est de s'assurer qu'on sera efficace pour offrir des services à partir de la localisation de ce poste-là. Ça va bien, ça, au niveau des MRC généralement pour négocier l'emplacement du poste.

Le rôle et les responsabilités des parties sont très bien définis dans les ententes, ainsi que la durée de l'entente qui est généralement de cinq ans à partir de la signature.

Maintenant, l'autre aspect qui est important, c'est la création du comité de sécurité publique qui a un mandat qui est prévu par la loi. Il y a deux éléments importants qui constituent le mandat du comité de sécurité publique par rapport aux autres. C'est le suivi de l'entente et l'établissement des priorités. Ce comité-là est formé par quatre élus municipaux de la municipalité régionale de comté et deux représentants de la Sûreté du Québec dont le responsable de poste, le président étant un des élus. C'est une approche dynamique qui permet à tout ce monde-là de définir les priorités qui sont, je vous dirais, orientées par rapport aux problématiques vécues par la population locale.

Ça, ça se fait aussi dans un processus de consultation. La consultation peut se faire de trois façons: par la connaissance que les policiers ont du territoire, par la connaissance aussi des problématiques qui nous sont soulevées par les élus municipaux qui ont un contact privilégié avec les citoyens, et aussi par la voie d'un comité consultatif qu'on a mis en place en 1992, et qui existe encore, et qui peut demeurer en place selon la volonté du comité de sécurité publique.

Je voudrais aussi vous donner quelques éléments concernant les fondements de la police de proximité, parce qu'un des objectifs que la loi poursuivait, c'est le rapprochement de la police avec la population. La Sûreté du Québec a développé un concept de police de proximité qui s'appuie sur les fondements suivants.

Une présence familière. En gros, ça veut dire ceci. Il y a des patrouilleurs et des enquêteurs qui sont désignés pour parrainer des municipalités et qui devront, selon un mode de fonctionnement bien précis, faire des rencontres avec soit le maire, soit l'inspecteur municipal, soit les directeurs d'école, les comités de parents, la commission scolaire et différents groupes sociaux de la communauté pour tenter, d'abord, d'identifier les problématiques qui concernent cette population-là et, deuxièmement, d'y répondre de façon dynamique avec l'aide des citoyens.

La qualité de service. La qualité de service est reliée directement à la façon dont la Sûreté du Québec va répondre aux demandes et aux appels des citoyens. À cet égard-là, je demanderais au lieutenant Beaupré de vous présenter dès maintenant, succinctement, le nouveau modèle de gestion des appels que la Sûreté du Québec est en train d'implanter sur son territoire. Jacques.


Exposé du chef de projet à la Surveillance du territoire


M. Jacques Beaupré

M. Beaupré (Jacques): Lieutenant Jacques Beaupré, Sûreté du Québec. Merci, M. Bouchard. Ça me fait un grand plaisir de vous présenter aujourd'hui le nouveau modèle de gestion des appels à la Sûreté du Québec.

(10 heures)

Traditionnellement, la Sûreté du Québec répondait aux appels de façon réactive, c'est-à-dire qu'un appel entraînait une intervention immédiate. Souvent, ces interventions étaient aussi à de grandes distances l'une par rapport à l'autre. Donc, c'était un mode réactif. La gestion des appels visait à arriver à un modèle plus proactif, donc, par une meilleure gestion des appels, permettre l'application des principes de police de proximité.

Je vous rappelle ce que M. Bouchard donnait tout à l'heure, quelques-uns des principes de la police de proximité qui s'inscrivent bien à l'intérieur de la gestion des appels, le nouveau modèle de gestion des appels: la présence familière, dont M. Bouchard vous a fait tout à l'heure une description, la consultation de la clientèle, la prévention criminelle et routière, la résolution de problèmes.

M. Bouchard (Gilles): Là-dessus, si vous permettez.

Le Président (M. Côté): M. Bouchard.

M. Bouchard (Gilles): Merci. Là-dessus, au niveau de la résolution de problèmes, la Sûreté – je pense que c'est avec l'aide de l'Université de Montréal, mais là je dis ça... sauf erreur – a développé un concept qu'on appelle chez nous l'approche stratégique en résolution de problèmes, qui fait en sorte de mettre à contribution les citoyens et les intervenants qui sont impliqués dans une problématique locale. Je vais vous donner un exemple. Encore récemment, on avait dans une municipalité une problématique de jeunes qui causaient des problèmes dans un parc, des méfaits, des choses comme ça, puis ça dérangeait évidemment le voisinage. À partir de la maison des jeunes, la municipalité, des citoyens qui demeurent près de ce parc-là ont formé un groupe de travail, puis on a effectivement défini des éléments de solution qu'on a mis en place. La police a fait son bout de chemin, les citoyens ont exercé une certaine surveillance puis avisaient la Sûreté du Québec au moment où ils observaient ces problématiques-là ou ces gestes-là de la part des jeunes. Nous avons rencontré les jeunes qui étaient impliqués dans ces situations-là et la problématique s'est corrigée de façon importante. Ça fait que cette approche-là permet une approche dynamique avec la population, avec ceux qui vivent les problématiques de sécurité publique, pour arriver à une solution durable.

Le Président (M. Côté): M. Beaupré.

M. Beaupré (Jacques): Un autre des éléments est le développement de partenariat durable avec la communauté, ainsi que l'application des lois et règlements, qui est la mission première de la Sûreté du Québec.

M. Bouchard (Gilles): Si vous permettez, M. le Président.

Le Président (M. Côté): M. Bouchard.

M. Bouchard (Gilles): À moins que ça vous dérange, la façon dont on fonctionne là... C'est que, au fur et à mesure qu'on avance comme ça, je vais vous donner de l'information additionnelle. Est-ce que ça vous convient?

Le Président (M. Côté): Ça va. Combien de temps à peu près est prévu pour la présentation?

M. Coulombe (Guy): Vous nous arrêtez quand c'est le temps.

M. Bouchard (Gilles): Vous nous arrêtez.

Le Président (M. Côté): Mais la durée?

M. Bouchard (Gilles): C'est 10 ou 15 minutes.

Le Président (M. Côté): O.K.

M. Bouchard (Gilles): O.K. Au niveau de l'application des règlements, il y a un élément important là-dedans. Nous sommes en train, avec les MRC avec qui on contracte, d'uniformiser la réglementation municipale. Ça, ça va permettre à la Sûreté du Québec d'appliquer – d'abord, c'est déjà commencé dans plusieurs municipalités – les règlements municipaux qui ont trait à la sécurité publique, et ça va aussi nous permettre d'inciter les municipalités à légiférer en ce qui concerne les fausses alarmes. À ce moment-là, ça permettra à la Sûreté du Québec de régler cette problématique-là une fois pour toutes, qui n'était pas facile à régler compte tenu de l'état de la législation provinciale à ce niveau-là. Ça, c'est un élément extrêmement intéressant. Aussi, le retour des amendes ira à la municipalité. Les municipalités auront l'obligation de s'organiser une cour municipale ou contracter des ententes avec d'autres municipalités, ou la Cour du Québec dans certains cas. Il y a possibilité de contracter des ententes pour la gestion des infractions et la perception des amendes.

Le Président (M. Côté): M. Beaupré.

M. Beaupré (Jacques): Merci, M. le Président. Maintenant, les conditions de réalisation de la police de proximité. Le nouveau mode de réponse aux appels vise, entre autres, à dégager des plages de temps nécessaires à l'application des principes de la police de proximité. C'est donc dire qu'en limitant le nombre de déplacements pour des incidents mineurs on va être capable de dégager des plages de temps plus larges afin d'être capable de faire appliquer les principes dont on vient de faire la liste dans la diapositive précédente.

Je vous parle maintenant succinctement du nouveau modèle de gestion. Ce nouveau modèle vise...

M. Gautrin: Est-ce que vous allez pouvoir déposer ces diapositives, s'il vous plaît?

M. Bouchard (Gilles): Jacques, là-dessus.

M. Beaupré (Jacques): Oui, monsieur, c'est quelque chose qui est possible.

M. Gautrin: Parce que c'est un document intéressant et, plutôt que de prendre des notes...

M. Bouchard (Gilles): D'accord.

M. Beaupré (Jacques): Très bien, monsieur.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Côté): Alors, on déposera au secrétariat de la commission le contenu des...

M. Coulombe (Guy): On va envoyer au secrétariat toutes les...

M. Beaupré (Jacques): Excellent.

Le Président (M. Côté): Vous pouvez continuer, M. Beaupré.

M. Beaupré (Jacques): Merci, M. le Président. Donc, le nouveau modèle de gestion des appels à la Sûreté du Québec vise à répondre différemment aux appels des citoyens. On parle de la priorisation des types d'appels. Ce que je vous présente maintenant, au niveau de cette diapositive, c'est les trois types de priorité d'appels qui vont être retenus. La priorité 1 vise les appels de type urgent; les appels urgents, je vais y revenir, au cours de ma présentation, plus en détail. La priorité 2 vise des incidents qui sont moins importants et que l'on peut prendre par rendez-vous, c'est-à-dire avec un rendez-vous avec le citoyen; ils sont moins urgents, naturellement. Et la troisième priorité vise des interventions sans déplacement de la part des policiers dans le cas d'incidents mineurs.

Je reprend maintenant le type de priorité 1, donc d'appels urgents. Ce sont des appels qui doivent faire l'objet d'une intervention policière immédiate. Les principes qui ont motivé la Sûreté du Québec dans la définition de ce modèle de gestion des appels, particulièrement au niveau des appels urgents, c'est la sécurité des citoyens. Donc, dans tous les cas où la vie, la sécurité des personnes – on comprend également l'intégrité physique et psychologique des personnes – est menacée, l'intervention sera immédiate. On peut aussi voir que, si un ou des suspects peuvent être identifiés, à ce moment-là le véhicule de police va se rendre sur les lieux immédiatement. Un troisième élément également, que j'appellerais «tamis», afin d'être capable d'analyser un appel, c'est le risque de perdre des éléments de preuve ou que ces derniers soient altérés par le temps ou les conditions de température. Dans ces trois conditions, l'intervention policière sera immédiate.

Les appels, maintenant, qui peuvent faire l'objet d'une intervention différée dans le temps. O.K., je vais vous présenter – pardonnez-moi – un petit peu ce qu'on appelle le schéma intégrateur du premier type d'appels. Ce que vous pouvez voir, c'est que la Sûreté du Québec innove en ce fait que l'appel n'est pas codifié intrinsèquement par lui-même. L'appel est analysé à travers un processus, un «flow chart», si vous voulez, en fin de compte – excusez l'anglicisme – il est analysé afin de déterminer s'il fait partie d'une priorité 1. Donc, le premier élément qu'on vérifie lorsque l'appel arrive dans un centre de télécommunications, c'est s'il y a un risque pour la vie. Vous comprenez, à l'intérieur du losange, qu'on comprend l'intégrité physique, psychologique de l'appelant. Naturellement, ces questions-là entraînent une réponse qui est soit positive ou négative. Dans le cas où c'est un oui, il y a un risque, immédiatement le véhicule est dépêché sur les lieux. Dans le cas où c'est un non, on va aller vérifier la nature ou la codification, la nature intrinsèque de l'appel. C'est-à-dire qu'à partir des codifications qui sont amenées pour chacun des appels – puis ça, c'est dans tous les corps policiers; à la Sûreté du Québec, c'est la même chose – il y a des codes de priorité qui ont été associés. Il reste environ 90 codes de priorité et des codes de priorité intrinsèque ont été associés à ça. Par exemple, un crime contre la personne serait intrinsèquement un type 1, c'est-à-dire qu'on associe une priorité 1 à ce type-là, une voie de fait grave, par exemple.

Toutefois, avant de dépêcher le véhicule immédiatement sur les lieux, on va vérifier un autre élément, on va aller vérifier quand est survenu cet événement-là. Donc, si on regarde une voie de fait grave qui est survenue il y a trois semaines, où ce n'est plus le même type de priorité, ça ne nécessite plus non plus le même genre de déplacement... donc, on va aller tamiser encore une fois pour vérifier. Dans le cas où c'est survenu au cours des 60 dernières minutes, à ce moment-là ce qu'on applique, c'est la notion de l'heure d'or ou «golden hour» – excusez les anglicismes, c'est peut-être plus facile de définir – le «golden hour» qui définissait la période pendant laquelle une intervention peut avoir un impact sur la résolution ou sur la finalité d'un appel. Si on répond oui à ces éléments-là, immédiatement le véhicule de police est déplacé.

Maintenant, afin de s'assurer qu'on n'échappe aucun appel, que les citoyens reçoivent le meilleur service possible, on va aller vérifier s'il y a des possibilités d'arrêter. Vous voyez «arrêter», il faut comprendre «identifier» également un suspect, c'est-à-dire que, sur un appel... Je donnais un exemple récemment, un vol de bicyclette, par exemple; la bicyclette a été volée, mais on connaît la personne qui l'a volée. Elle est identifiée et il est possible qu'il y ait des récidives, qu'on continue à faire des vols alentour. À ce moment-là, le policier va se rendre sur les lieux, va procéder soit à l'arrestation ou l'identification du suspect et récupérer le bien. Vous verrez tout à l'heure, lorsqu'on parle d'intervention sans déplacement, la contrepartie de cette chose-là.

(10 h 10)

Et dernièrement, avant de s'assurer... avant de passer à un autre type d'appel, on va vérifier s'il y a des éléments de preuve qui peuvent disparaître ou être altérés.

Une fois que toutes ces vérifications sont faites, on va changer de type de priorité. Ce qu'on peut vous dire, c'est que, suite à de nombreuses consultations, à des études exhaustives qui ont été apportées, tous les cas présentement sont tamisés à l'intérieur de ces cinq éléments-là qui sont, en fin de compte, un cheminement logique de pensée qui nous permet de discriminer.

Je vais passer maintenant aux appels qui peuvent faire une intervention différée dans le temps. On parle de déplacements sur rendez-vous, donc on parle de planifier les déplacements. Dans ces cas où la présence des policiers est requise, mais n'est pas urgente, à ce moment-là ce qui va arriver, c'est qu'un rendez-vous sera pris avec l'appelant ou le plaignant afin que le déplacement du policier soit optimisé. C'est-à-dire qu'il va arriver qu'on ait peut-être deux appels dans un secteur donné et le policier va pouvoir planifier son déplacement, donc un déplacement pour deux appels, contrairement au modèle traditionnel où c'était en réactif: un déplacement, un appel. Et le rendez-vous est pris en collaboration avec le citoyen. Ça, c'est extrêmement important au niveau du service à la clientèle.

Je vous montre encore une fois, peut-être en plus détaillé, le schéma intégrateur, donc qui nous permet de mieux comprendre le cheminement logique qui nous permet de discriminer ce genre d'appels. Encore une fois, le premier élément, c'est la nature de l'appel, donc la codification par rapport au code de priorité qui est associé à partir des listes. Une fois que cette chose-là est vérifiée, avant de modifier le type de priorité, on va vérifier deux choses.

La première: Est-ce que l'appelant, malgré que ça ne soit pas quelque chose qui soit urgent, peut avoir besoin du support d'un policier? Je vous donne un exemple à ce titre-là, et c'est un exemple vécu d'ailleurs. Une dame, qui demeure dans un secteur rural et qui a eu un dommage à sa boîte à lettres qui était sur le bord de la route, téléphone pour avoir la présence des policiers, pour rapporter l'événement. L'événement n'est certes pas urgent, il n'y a pas de risque pour la vie, risque pour l'intégrité physique ou psychologique, pas plus qu'il n'y a d'éléments de preuve, d'indices, il n'y a absolument rien. Toutefois, cette dame qui demeure en milieu rural, c'est peut-être la première fois qu'elle communique avec les policiers. Elle a besoin d'avoir un support, elle a besoin de se faire rassurer et peut-être de recevoir certains conseils de sécurité. À ce moment-là, le policier va planifier un déplacement. Lorsqu'il va être dans le secteur – l'idéal, ce serait encore une fois le policier qui est en présence familière; lorsque M. Bouchard parlait tout à l'heure de policiers parrains, si vous voulez, en fin de compte – il se déplacera pour aller rencontrer cette dame-là, et peut-être les voisins, donc peut-être endiguer ou prévoir d'autres événements malheureux en plus d'améliorer le sentiment de sécurité des citoyens.

Un dernier élément qu'on va vérifier avant de laisser passer, encore une fois, le type de priorité, c'est une particularité de l'événement qui pourrait faire en sorte qu'on doit se déplacer. M. Bouchard parlait tout à l'heure de priorités qui étaient amenées par le comité de sécurité publique. Ce comité-là, dans son mandat, a, d'une part, de s'assurer du contenu de l'entente, oui, mais également d'établir des priorités locales ou régionales. Dans ce cas-là, c'est ici qu'on va récupérer le policier qui a une connaissance du terrain, une connaissance du poste; il connaît les priorités. Si le comité de sécurité publique a établi une priorité en vertu d'une problématique locale, à ce moment-là, le policier qui reçoit l'appel sera capable de discriminer et de décider de se déplacer pour aller vérifier pour être bien sûr que les orientations qui ont été données par le comité de sécurité publique sont bien appliquées et naturellement pour essayer d'avoir une résolution la plus large possible du problème en impliquant des intervenants du milieu. Donc, une fois que tous ces éléments-là sont faits, ce qu'on peut dire, c'est que l'appel n'est plus un appel urgent, ce n'est probablement même plus un appel qui nécessite un déplacement d'un policier.

Et je vais passer dans ce qui est complètement innovateur, c'est-à-dire les interventions sans déplacement. C'est des interventions qui sont plus rentables – pardonnez-moi le titre – c'est des interventions qui sont plus rentables en ce sens que, dans le cas d'incidents mineurs où il n'y a ni indice ni suspect, c'est-à-dire aucun élément qui puisse nous permettre d'identifier quelqu'un ou de poursuivre l'enquête immédiatement, les patrouilleurs peuvent intervenir de façon tout à fait aussi efficace sans avoir à se déplacer. Comment? La plainte, à ce moment-là, sera prise par téléphone. Dans le contexte de la Sûreté du Québec, les distances, souvent, entre les limites du territoire et le poste font en sorte que le déplacement du citoyen, des fois, n'est pas propice ou peut être coûteux même pour l'appelant. Donc, on a développé les mécaniques, les formulaires et le processus pour être capable de prendre ces appels-là par téléphone et fournir à l'appelant un numéro de dossier qu'il sera capable de fournir, lui, à ses assureurs.

Les informations qui sont ainsi recueillies, soit au téléphone ou... si le citoyen désire de toute façon rencontrer un policier, un rendez-vous sera pris, mais dans un point de services. Souvent, ces points de services se situent dans des municipalités. Ils ont été mis à la disposition des membres de la Sûreté afin d'y rencontrer les citoyens. Donc, on lui planifiera un rendez-vous qui pourrait être peut-être dans l'après-midi, ou 24 heures plus tard, à la convenance du citoyen et du policier, ou encore directement au poste où, encore une fois, sur entente entre le citoyen et le policier, on se rencontrera pour prendre les éléments. Les informations ainsi recueillies, qui sont consignées sur des formulaires, seront remises au bureau des enquêtes, donc aux enquêteurs qui, eux, procèdent, comme toujours, à l'analyse de la criminalité. Ils vont enquêter soit individuellement ou encore par occurrence, c'est-à-dire, s'il y a plusieurs genres de crimes qui se produisent, c'est le même modus operandi, à ce moment-là on va continuer à faire des enquêtes. Donc, c'est dire qu'on continuera à enquêter tous les crimes, mais de façon différente, afin d'être plus efficace et efficient.

Les bénéfices pour la communauté du nouveau modèle de gestion des appels de la Sûreté du Québec. Premièrement, c'est une meilleure réponse lorsqu'une intervention est urgente. Comprenons que les policiers, n'ayant plus à se déplacer de façon continue d'un appel à un autre, d'une limite à l'autre du territoire, auront plus de temps pour être... vont être mieux centralisés, plus stratégiquement centralisés. Donc, lorsqu'un appel urgent arrivera, on sera capable de se déplacer plus rapidement. On peut prévoir une meilleure réponse aux appels urgents.

Une meilleure gestion des interventions en fonction des priorités identifiées par le comité de sécurité publique. Naturellement, les policiers étant informés, premièrement, par la venue des comités de sécurité publique, vont mieux connaître les priorités ou les priorisations des citoyens. Et le fait également qu'on ait plus de temps pour être capable de planifier ces activités-là va faire en sorte qu'on va intervenir sur celles qui ont été identifiées.

Une plus grande disponibilité des policiers pour résoudre des problèmes de sécurité publique. Lorsque M. Bouchard vous présentait tout à l'heure la résolution de problèmes ou l'approche stratégique en résolution de problèmes, naturellement les policiers ayant plus de temps, n'étant plus réactifs mais un peu plus proactifs, ils auront plus de temps pour intervenir de façon plus profonde avec les intervenants du milieu pour résoudre les problèmes à plus long terme.

Une présence accrue dans les municipalités. Naturellement, lorsqu'on parle de présence familière, on a plus de temps pour se rendre dans les municipalités, y être présents et planifier les interventions qu'on va y faire, sans à tout moment être obligés de repartir pour aller faire une intervention, pour des incidents mineurs souvent.

Finalement, plus d'activités préventives. Naturellement, les activités préventives doivent se faire souvent avec les intervenants du milieu. Il faut prendre des rendez-vous avec eux et il faut avoir le temps de le faire. Les policiers seront plus à même de mieux gérer leur temps.

En conclusion, le nouveau mode de réponse des appels de la Sûreté du Québec permettra d'utiliser plus judicieusement les ressources policières qui sont mises à votre service. Je vous remercie.

Le Président (M. Côté): Merci, M. Beaupré. M. Coulombe.

M. Coulombe (Guy): Oui. Bien, justement, cet exposé répond fondamentalement à un des items du Vérificateur général sur la gestion des appels sur les incidents mineurs. Ça, ça règle ce problème-là. Je peux vous dire qu'on avait, dans l'élaboration de cette stratégie, une certaine forme d'inquiétude en se disant: Est-ce que la population va penser que la police, les policiers les négligent un peu, puis ainsi de suite? Je peux vous dire que tous les préfets puis tous les maires que j'ai rencontrés lors des réunions opposaient carrément ce problème-là, et on leur a expliqué un peu cette stratégie dans les grandes lignes, et leur réaction a été très positive. Parce que, eux-mêmes, dans le milieu, ils savent fort bien qu'une auto de police avec une ou deux personnes dedans qui se déplace pendant trois quarts d'heure pour aller sur les lieux d'un vol de corde de bois qui s'est passé voilà deux jours, ce n'était pas ce qu'il y avait de plus productif. Et notre inquiétude s'est dissipée justement dans ces discussions-là, en disant que les gens comprenaient fort bien que c'était fondamental d'avoir une hiérarchie de ces choses-là pour permettre aux policiers de s'occuper de choses plus importantes.


Période de questions

Le Président (M. Côté): M. Coulombe, vous avez parlé dans vos préliminaires que vous aviez quatre chantiers actuellement, même cinq chantiers, qui sont au travail, et puis que, d'ici à quelques semaines, au plus tard peut-être à l'automne, vous pourriez rendre public le résultat de ce travail. Est-ce que ces chantiers-là sont menés de front? C'est ce que je semble entendre. Est-ce qu'il faut qu'ils soient rendus publics aussi tous en même temps?

M. Coulombe (Guy): Non.

Le Président (M. Côté): Ou sinon, d'ici à l'automne, il peut y avoir...

M. Coulombe (Guy): Exact. C'est notre intention de les rendre publics lorsqu'ils seront présentables comme un tout, mais il n'y a aucune obligation de les présenter la même fois. Alors, on a l'intention de les expliquer de façon ponctuelle, graduelle.

Le Président (M. Côté): Merci. M. le député de Verdun.

(10 h 20)

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Dans les chantiers que vous avez, dans les remarques... Bon, je ne veux pas toucher la question de la police de proximité, je pense que mon collègue de Roberval va le faire. Les députés ruraux sont probablement plus à même de le faire. Je vais revenir sur deux commentaires du Vérificateur général dont vous avez en partie touché dans les réponses que vous avez faites, c'est-à-dire celle qui touche les tâches administratives que les policiers doivent faire et celle qui touche votre rapport d'activité. Je vais commencer par le rapport d'activité parce que c'est probablement ce qu'on peut régler le plus rapidement.


Rapport d'activité

Dans le rapport d'activité, ce que vous dites dans votre document que vous avez déposé tout à l'heure, c'est que la loi ne vous oblige pas à faire un rapport d'activité. Évidemment, il y a un rapport d'activité qui est inclus à l'intérieur de celui du ministère de la Sécurité publique. Vous dites aussi que vous ne vous sentez pas, disons, réfractaires à donner plus d'informations si les gens veulent donner plus d'informations. D'ailleurs, ce genre d'informations que vous devez donner, c'est le genre d'informations que, moi, j'aurais souhaité voir à l'intérieur d'un rapport d'activité. Qu'est-ce qu'il faut qu'on fasse pour avoir plus d'informations? Est-ce que c'est le sous-ministre au ministère de la Sécurité publique qui vous oblige à faire un rapport aussi succinct? Est-ce que c'est vous? Si vous faisiez un rapport plus développé, est-ce qu'il ne l'inclurait pas dans le rapport de la Sécurité publique? Vous comprenez que, si vous me dites que c'est la Sécurité publique, nous, on va se revirer de bord puis on ira reparler au sous-ministre de la Sécurité publique.

M. Coulombe (Guy): Non. Je pense que, sur ce point-là...

Le Président (M. Côté): M. Coulombe.

M. Coulombe (Guy): Oui. Sur ce point, notre rapport disait qu'on n'a pas d'obligation légale.

M. Gautrin: C'est exact.

M. Coulombe (Guy): Bon, mettons que, ça, ça règle l'aspect légal.

M. Gautrin: Je suis d'accord avec vous.

M. Coulombe (Guy): En ce qui nous concerne, je peux vous dire qu'on n'a aucune espèce d'objection, et même, avec ce que je viens de vous dire, on n'aurait aucune espèce d'objection et, même, on serait fiers de présenter un rapport annuel exhaustif de ce qu'on fait. On ne l'a pas fait l'année passée, je vous avoue honnêtement. On a un rapport annuel, dont je vois une copie, qui donne les grandes statistiques, et ainsi de suite.

M. Gautrin: C'est assez succinct.

M. Coulombe (Guy): Assez succinct. Et le problème avec la Sécurité publique.... il n'y en a pas de problème. En d'autres mots, on est parfaitement capables et libres de produire notre rapport. Comme je vous dis, moi, personnellement, je pense qu'il faudra le faire. La seule limitation, c'est le temps puis les facilités parce que c'est quand même une grosse tâche et, l'année passée, volontairement, je n'ai pas voulu qu'on passe beaucoup, beaucoup de temps là-dessus parce qu'il y avait trop de chantiers. Mais je vous dis honnêtement que, pour l'année 1998, non seulement il n'y aura aucune réticence de notre part, mais j'oserais même dire qu'on sera fiers de le sortir, le rapport d'activité et de performance de la Sûreté.

M. Gautrin: Et je dois vous dire qu'on serait fiers de le lire probablement de notre côté.

M. Coulombe (Guy): Mais je vous dis que la seule limitation, ce n'est pas de notre volonté, c'est l'aspect concret de mettre des ressources pour faire quelque chose qui en vaut la peine. Espérons qu'on va régler le problème cette année.


Réorganisation des tâches et des procédures administratives

M. Gautrin: Que vous serez en mesure de le faire.

J'en viens maintenant à la recommandation 8.59 qui est: «Nous encourageons donc la Sûreté à continuer de rechercher des moyens de réduire le temps consacré par les policiers aux tâches administratives.» Avant, à 8.57, on parlait de 400 000 heures-hommes consacrées annuellement à diverses tâches administratives. Je sais que vous avez fait un effort de conversion de postes de policiers en postes civils pour, disons, alléger un peu... c'est-à-dire prendre vos policiers et les mettre plus dans des fonctions soit patrouilleurs soit policières et de laisser des tâches administratives à des employés civils. Où est-ce que vous en êtes rendus là-dedans?

M. Coulombe (Guy): Premièrement, sur la question de l'allégement administratif, je vous ai dit tantôt qu'on avait un chantier ouvert là-dessus, un sous-chantier, si je peux m'exprimer ainsi, là-dessus...

M. Gautrin: Oui, je sais.

M. Coulombe (Guy): ...et ça va très bien. Maintenant, dans les formulaires administratifs, il faut un peu être prudents parce qu'il y a des formulaires qui sont remplis par les policiers qui sont exigés par des lois. Et ça, vraiment, on n'a pas le choix que de les faire remplir. C'est une obligation légale – ça peut être des lois du Québec, des lois fédérales – et c'est assez complexe. Donc, tout ce département de bureaucratie, on ne peut pas y échapper parce que tous les corps policiers du Canada ou, quand c'est une loi du Québec, du Québec sont tenus par la loi de remplir ces formules-là. Et il y en a passablement. Je ne suis pas un expert là-dedans, mais, autour de la table, il pourrait y avoir des exemples de donnés.

Quant à la conversion des postes policiers en postes civils, vous savez que le gouvernement a mis des comités sur pied pour opérer ces choses-là, non seulement à la Sûreté mais ailleurs, et le comité existe depuis quelques années à la Sûreté. Il s'était donné des objectifs, si mes souvenirs sont exacts, d'environ 327 postes.

M. Gautrin: 327 postes, c'est ça.

M. Coulombe (Guy): C'est ça, de transfert...

M. Gautrin: Que vous avez jugés convertissables.

M. Coulombe (Guy): Convertissables. Maintenant, c'est arrivé au moment où la Sûreté, dans le cadre de l'allocation des ressources financières, subissait une perte d'effectifs, entre guillemets...

M. Gautrin: Disons «des compressions» comme tout le monde.

M. Coulombe (Guy): ...des compressions d'environ 500. Alors, le phénomène de convertir des postes dans la mesure où aussi on... aurait dû accélérer, mais ça a eu un effet un petit peu contraire, en ce sens que ça a créé pas mal, ça crée pas mal de brouhaha dans l'entreprise. Maintenant, on le fait. Il y en a effectivement, des postes qui ont été convertis. Il y en a qui ne sont pas mentionnés dans le rapport que vous avez. On vient de décider, il y a quelques jours en fait, de convertir les postes d'administrateur dans les districts; les postes de ceux qui sont en charge de l'administration qui, traditionnellement, ont été toujours tenus par des policiers vont être convertis en des postes civils. Et ça, c'est des fonctions extrêmement importantes dans chacun des districts du Québec. Donc, on le fait. On ne le fait pas au rythme qui est souhaité par les syndicats de civils. On le fait à un rythme trop accéléré pour les syndicats de policiers. Alors, on joue entre... on ne joue pas, on essaie de se situer entre les deux exigences contradictoires. Mais ce n'est pas facile.

M. Gautrin: Il y a M. le Vérificateur...

Le Président (M. Côté): M. le Vérificateur.

M. Breton (Guy): J'aimerais demander au directeur: Qu'en est-il des transmissions téléphoniques ou encore de l'utilisation des ordinateurs pour inscrire l'information une seule fois et non pas avoir à recopier des documents?

M. Sénécal (Maurice): Maurice Sénécal, directeur de la vérification interne. J'ai vérifié cette problématique. Définitivement, nous allons avoir éventuellement, avec le développement de l'informatique, des formulaires informatisés qui vont être sur ordinateur, qu'on va pouvoir compiler, et transférer des données. M. Coulombe...

M. Gautrin: Excusez-moi. Ça veut dire, par exemple, que le patrouilleur qui a un ordinateur dans son automobile pourrait remplir son rapport directement à l'intérieur de son automobile?

M. Sénécal (Maurice): C'est exact. Et ça, c'est prévu dans la deuxième phase du projet de réingénierie... pas la réingénierie des appels, mais ce qu'on appelle le RITP, le Réseau intégré de télécommunications. Il va y avoir des terminaux véhiculaires dans les véhicules de patrouille. On prévoit en installer, je pense que c'est 200 ou 250 dans les prochaines années. On a parlé de formulaires tout à l'heure. On a seulement 70 formulaires opérationnels à la Sûreté, et ce n'est pas compilé, c'est chacun pour un événement précis. Par contre, on en a au-dessus de 200 qui viennent d'organismes extérieurs, dont le ministère de la Justice, le Bureau des drogues dangereuses. Alors, comme M. Coulombe disait, c'est des obligations; on ne peut pas les annuler, ces formulaires-là. La seule solution pour avoir un gain de productivité, c'est vraiment d'avoir ça, tous des formulaires qui vont être sur ordinateur, qu'on va pouvoir compiler et, ensuite, transférer les données de l'un à l'autre. Et on l'a déjà fait au niveau des enquêtes criminelles avec le rapport progressif, c'est-à-dire que c'est alimenté une fois, lorsqu'on a alimenté le nom d'une personne, sa date de naissance, et ainsi de suite. Ça, c'est possible maintenant.

M. Gautrin: L'ordinateur le remet automatiquement sur tous les formulaires, puis ce n'est pas la peine de retaper trois fois ou quatre fois.

M. Sénécal (Maurice): C'est ça, il y a un interface. Bon. Pour ce qui est des appels, c'est une suggestion du Vérificateur, on en a discuté. À la Sûreté, c'est difficile à faire. Il y a certaines, comme la Commission des normes... il y a certaines commissions où ils ont des clients qui sont toujours les mêmes ou approximativement les mêmes. C'est plus facile parce qu'ils procèdent avec les mêmes personnes, c'est déjà enregistré. Ils peuvent référer à ces documents-là. Nous, on a affaire avec toute la population du Québec. Alors, ce n'est pas tout le monde qui est fiché, à la Sûreté du Québec. Alors, c'est plus difficile à aller chercher. Il va falloir se servir, à un moment donné, de l'informatique de façon plus efficace. Mais ça, ça vient avec le temps et c'est sûr qu'il faut étaler ça dans le temps. C'est des coûts astronomiques lorsqu'on regarde tous ces fichiers-là. Et on espère y arriver le plus tôt possible, mais il faut étaler ça sur quelques années, ça va de soi, comme toutes les grandes entreprises le font.

M. Gautrin: Mais l'informatisation des rapports, ça, vous êtes capables de la faire assez facilement. Il s'agit d'avoir un ordinateur par automobile et la possibilité que, quand vous commencez à remplir un rapport, automatiquement l'autre rapport se remplit pour les parties qui sont les parties communes, c'est-à-dire l'identification du citoyen...

M. Sénécal (Maurice): C'est exact, monsieur. Une fois que nous avons les terminaux véhiculaires, les rapports, ils sont compris. Une fois que c'est enregistré, une fois qu'on n'a plus besoin...

(10 h 30)

M. Gautrin: Plus besoin. Mais le plan pour mettre ça sur pied, c'est une question de coûts, je sais, le budget...

M. Coulombe (Guy): Je ne voudrais pas qu'on soit...

M. Gautrin: Trop optimiste?

M. Coulombe (Guy): ...trop optimiste là-dessus, en ce sens que ça va prendre quelques années à bâtir. Et tout est une question d'allocation des ressources. Donc, déterminer les terminaux véhiculaires, oui, mais peu probable cette année.

M. Gautrin: Je reviendrai après, M. le Président.

Le Président (M. Côté): Alors, Mme la députée de Vanier.


Gestion des appels

Mme Barbeau: J'aurais deux petites questions par rapport à la gestion des appels. Dans mon document, c'est écrit que c'est un projet-pilote dans l'Outaouais, mais de la manière dont vous l'avez présenté, c'est comme si ce n'était plus un projet-pilote, c'est officiel. Moi, j'ai ça comme note, là, je ne sais pas d'où ça vient. Peut-être vous autres...

Le Président (M. Côté): M. Bouchard.

M. Bouchard (Gilles): Dans le document, c'est présenté comme un projet-pilote, mais c'est une première étape pour l'implantation de ce système-là, puis c'est un peu le test qu'on veut lui donner pour le mettre à l'épreuve, le modifier, le bonifier. Mais l'intention ferme, c'est de l'appliquer partout. Et, quand on l'appliquera partout, il sera utilisable partout puis efficace partout. Ça fait que c'est dans ce sens-là qu'on parle d'un projet-pilote. Disons que c'est une police d'assurance qu'on se donne.

Mme Barbeau: C'est plutôt votre test qu'un projet-pilote, dans le sens que vous pensez faire comme ça, mais vous l'essayez.

M. Bouchard (Gilles): C'est plus un test, exact.

Mme Barbeau: Moi, je trouve ça franchement très intelligent, et ça me plaît beaucoup comme système. La question que je me pose, c'est: Étant donné que vous ne «switchez» pas directement comme avant – si comprends bien, ça marchait comme ça: directement, vous envoyiez un policier – là, vous faites une sélection, vous faites une discrimination, est-ce que le temps de réponse est de beaucoup rallongé? C'est-à-dire la personne au téléphone, est-ce qu'elle répond à un questionnaire... J'exagère, là, mais c'est juste pour bien... Parce que, on le sait, des fois, c'est lourd. Nous, on le voit dans nos bureaux, les gens se plaignent souvent. Est-ce que vous avez évalué le temps de réponse? Est-ce qu'il est beaucoup plus long ou à peu près pareil?

Le Président (M. Côté): M. Beaupré.

M. Beaupré (Jacques): Merci, M. le Président. Madame, oui, effectivement, tous ces paramètres-là ont été évalués. Ce qu'on peut vous dire, dans le cas des appels urgents, les questions à répondre touchent le premier élément, c'est le quoi: Qu'est-ce qui se passe exactement? le où: À quel endroit ça se passe? et le comment: Comment est-ce que ça s'est produit? Puis, immédiatement, le policier ou le véhicule est détaché. Donc, dans l'urgence, on raccourcit effectivement l'analyse de l'appel, les questions sont très structurées à l'intérieur... C'est une base données ou un système quasi expert, qu'on appelle, qui va nous permettre de faire l'analyse.

Dans les autres cas, ce qu'il faut comprendre, c'est que, sur entente entre le citoyen et le policier, en matière de service à la clientèle, on ajuste les attentes du citoyen. Comment je vous dirais? Je vais l'informer quand je vais intervenir, et ça va être d'un commun accord. Donc, ça veut dire que, si, vous, cet après-midi, à 16 heures vous êtes disponible, le policier va vous informer qu'il va être là à 16 heures. Donc, votre attente par rapport à ça, voyez-vous, va être plus ajustée, vous savez à quoi vous attendre puis quand ça va arriver, puis le service est donné exactement comme on l'a prévu. Je pense qu'à ce moment-là ce n'est pas nécessaire que le policier soit immédiatement là, mais que le policier soit là lorsqu'il a dit qu'il y serait. Et c'est là l'élément de contrôle où il va falloir qu'on soit très structuré.

Mme Barbeau: Mais, dans le fond, pour la question urgente, c'est les mêmes questions qui devaient être posées avant? Où, quand, comment, ça devait être posé avant aussi. Sauf qu'à partir de là c'est là que vous décidez de quel bord il part: priorité 1, 2... En tout cas, priorité 1, sauf peut-être si ce n'est pas urgent, puis vous passez aux autres questions ensuite?

M. Beaupré (Jacques): Effectivement. Donc, immédiatement on passe aux questions. Le premier élément, c'est de savoir ce qui est urgent. Si c'est urgent, on envoie le véhicule immédiatement, donc c'est le minimum de questions pour être capable de se situer. Par la suite, plus on va discriminer, on va analyser et plus c'est long, naturellement.

Mme Barbeau: Bien, c'est sûr. Mais, si l'urgence n'est pas reconnue, c'est moins pire.

M. Beaupré (Jacques): Exactement.

Mme Barbeau: L'important, c'est que la situation urgente soit... C'est beau, pour l'instant. Merci.

Le Président (M. Côté): Merci. M. le député de Robert-Baldwin.


Vérification interne et contrôle de gestion

M. Marsan: Merci, M. le Président. J'aurais deux commentaires, deux questions. Premier commentaire, souligner l'excellent travail qui est fait par la Sûreté du Québec, et on sait que souvent, ce n'est pas dans des conditions faciles, alors sûrement profiter de cette occasion pour souligner la confiance de la population envers la Sûreté du Québec.

Le deuxième commentaire. En lisant ou en parcourant le rapport du Vérificateur, je constate que le Vérificateur affirme quelque chose, et tout de suite vous arrivez avec un correctif. Je vous donne des exemples: «Information de gestion. ...la Sûreté n'était pas en mesure d'évaluer ni de rendre compte de la productivité des patrouilleurs et des enquêteurs.» Tout de suite, vous avez évalué et vous avez mis sur pied un projet-pilote. C'est 8.60, 8.61.

Un peu plus loin, c'était les lacunes dans la gestion des argents liquides soulignées par le Vérificateur général: «La Sûreté a réussi à obtenir les modifications législatives nécessaires. Depuis lors, l'argent est saisi et confisqué est déposé dans une institution financière.»

Je poursuis. Certaines lacunes dans le contrôle des pièces à conviction en circulation, la réponse, et ce n'est pas la réponse de la Sûreté, c'est le Vérificateur qui nous dit ce que vous avez fait: «La Sûreté a implanté un système d'inventaire informatisé.» Puis ça, c'est suivi. Enfin, «dans le district de Montréal, les drogues et argents saisis n'étaient pas entreposés de façon sécuritaire».

Et tout de suite, à 8.65 et 8.68: «La Sûreté a mis en place une nouvelle procédure...» Vous me donnez l'impression, lorsque quelqu'un de crédible comme le Vérificateur général – puis il y en a peut-être d'autres – vous adresse une critique dans laquelle vous êtes en mesure de... vous ne perdez pas de temps, vous dites: Écoutez, «c'est-u» vrai ou ce n'est pas vrai? Si c'est vrai, voici le correctif. En tout cas, c'est l'impression que vous me donnez.

Deuxième point. Nous, notre commission, c'est une commission qui est nouvelle, et on essaie de travailler, en tout cas, le plus possible sans partisanerie, on essaie vraiment d'analyser si les dépenses du gouvernement sont dans le meilleur intérêt de la population. On sait que tout coûte cher, aujourd'hui, les impôts, etc. Et je remarque, ce matin, dans votre présentation, que vous nous arrivez avec un directeur de la vérification et du contrôle de la gestion. Moi, en tout cas, c'est quelque chose que j'apprécie beaucoup.

Ma première question. J'aimerais lui demander juste de nous résumer rapidement le travail qui est fait. Mais aussi j'aimerais vous demander si, lorsque vous faites des recommandations qui, à votre avis, sont sûrement pertinentes, comme notre Vérificateur général, est-ce qu'elles sont suivies par vos supérieurs? J'aurais une autre question ensuite.

M. Coulombe (Guy): M. Sénécal.

M. Sénécal (Maurice): Pour répondre à votre question, effectivement, lorsque la vérification fait des recommandations, je ne peux pas vous dire que ça a toujours été suivi. Depuis l'arrivée de M. Coulombe, on a changé notre façon de faire, on a institué des «follow-ups», c'est-à-dire que la vérification interne doit être considérée comme un agent de changement. Lorsque, avec les gestionnaires, on a évalué un problème et qu'on fait une recommandation, la direction de la Sûreté tient à ce que ça soit mis en place, et on ne négocie pas ça. Alors, c'est fait automatiquement.

Dans la majorité des cas, je suis satisfait. Ça n'a pas toujours été le cas, je vous le dis. La vérification interne, souvent, la plus grande frustration d'un vérificateur, c'est qu'on ne suive pas ses recommandations; à moins qu'on ait des raisons valables, ça va de soi.

Mais, à la Sûreté du Québec, effectivement, comme pour les vérifications du Vérificateur général – il y en a qui sont moins faciles à régler, il y en a où ça prend plus de temps, il faut les talonner dans le temps – il y a des actions concrètes qui sont prises pour régler les problèmes. Et je peux vous dire, j'ai une équipe de 15 vérificateurs, tout le monde est motivé et tout le monde est content de travailler à la Sûreté à la vérification interne. Je n'ai pas de difficulté à recruter des gens, que ce soit des professionnels ou des policiers, justement à cause de cette dynamique-là qui existe à la Sûreté.

M. Marsan: En tout cas, j'apprécie... Excusez.

Le Président (M. Côté): M. Coulombe.

M. Coulombe (Guy): Peut-être que je pourrais ajouter aussi qu'un de nos objectifs en regard de la vérification, c'est que nous avons aussi comme objectif, avec l'arrivée d'un nouveau directeur des finances à la Sûreté, M. Pelletier, nous avons l'intention, en 1998, de préciser un peu plus le rôle d'un contrôleur financier. M. Pelletier est directeur des finances, mais, moi, personnellement, je pense qu'il faut, pour épauler le Vérificateur puis former un équilibre, avoir un peu plus d'encadrement élaboré par un contrôleur interne qui dépendrait du directeur des finances et qui préciserait les règles du jeu, les règles d'encadrement pour permettre au Vérificateur de vérifier l'exécution de ces règles-là. Et ça, c'est une lacune qu'on veut corriger le plus tôt possible, de mettre en place, justement, ce rôle de contrôleur interne, qui est différent du rôle de contrôleur budgétaire, c'est un rôle beaucoup plus spécifique d'élaboration de directives et d'élaboration de contrôles, qui permet, après ça, au Vérificateur général de dire: Est-ce que ces contrôles-là sont suivis ou ne sont pas suivis? Comment faudrait-il qu'ils soient suivis? et ainsi de suite. Alors, ça va compléter le travail du vérificateur interne.

M. Marsan: M. le Président.

Le Président (M. Côté): M. le député de Robert-Baldwin.


Compressions budgétaires

M. Marsan: En tout cas, comme membre de cette commission, moi, j'apprécie le travail de vérification qui est fait à partir de la Sûreté.

Ma deuxième question s'adresse à vous, M. Coulombe. On parle de restructuration. Nous autres, les politiciens, on a appris que restructuration, peut-être, ça avait une connotation de coupures de budget, de réduction... Je ne donne pas d'exemples, on le sait, la santé, l'éducation, les municipalités, on a fait des restructurations dans tous ces secteurs-là. Alors, je voudrais vous demander, un, si vos budgets ont été réduits. Deux, est-ce que les services à la population sont affectés?

Le Président (M. Côté): M. Coulombe.

(10 h 40)

M. Coulombe (Guy): Je pense que ça serait nier la réalité... que la Sûreté ne vit pas dans une bulle étrangère à l'ensemble des grandes fonctions gouvernementales. Donc, on a eu à absorber des coupures budgétaires qui, je dois dire, étaient peut-être moins fortes que dans beaucoup d'autres secteurs de l'activité gouvernementale. Je ne pourrais pas vous dire les chiffres exacts parce que je n'ai pas tout le budget du Québec, mais je pense que ça a été des restrictions ou une allocation de ressources qui a été un peu moins considérable qu'ailleurs.

Par contre, il faut bien penser que, sur les trois dernières années, il s'est agi d'une baisse monétaire d'une cinquantaine de millions, et j'ai dit tantôt à peu près 500 effectifs de moins. Par contre, il ne faut pas regarder ça d'un oeil strictement mathématique, parce que, par exemple, la gestion des appels, on voit que les modifications qui ont été faites à la convention collective en octobre 1996 – avant que j'arrive, donc, ce n'est pas moi qui suis responsable de ça, de ce bon coup – ont apporté une flexibilité beaucoup plus grande, donc une augmentation de productivité.

En d'autres mots, dans beaucoup de secteurs on peut rendre les mêmes services à la population, mais d'une façon différente. Et un bon exemple, c'est ce qu'on vient de vous expliquer avec la gestion des appels où ça va donner plus de temps, si ça fonctionne bien, aux policiers pour faire du travail véritablement de policier. Sans parler des conversions de postes de policiers en civils, sans parler justement de l'introduction des auxiliaires, qui permettent beaucoup plus de souplesse dans le travail. Donc, en partie, cette baisse d'allocations financières a été compensée véritablement par une augmentation de productivité. Je dis bien en partie. Je ne veux pas vous dire par là qu'on ne souhaiterait pas avoir plus de budget. La réponse est oui, parce qu'on a beaucoup de projets.

On parlait d'informatique, tantôt. On a du retard à reprendre dans le domaine de l'informatique. Mais je pense qu'aujourd'hui on peut dire que les services à la population... Et, malgré toutes ces choses-là, l'Assemblée nationale et le Parlement du Canada avaient une abondance de lois nouvelles, de règlements nouveaux, de responsabilités nouvelles qui ont été confiées à la Sûreté. Donc, je pense que, globalement, la Sûreté, le service à la population n'a pas souffert pour les éléments essentiels de sa mission.

M. Marsan: Merci.

Le Président (M. Côté): M. le député de Roberval.


Gestion des appels (suite)

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Je tiens quand même à féliciter le président-directeur général, M. Coulombe. Malgré tout ce qui se passe au niveau de l'enquête, vous avez su recréer dans votre milieu de travail un climat de confiance et vous associer à des personnes qui sont en mesure quand même d'avancer et de changer des choses. Et je crois que cette nouvelle philosophie, que cette nouvelle politique de travailler avec les gens du milieu est fort intéressante.

Maintenant, ce qui me préoccupe toujours quand je vois des organigrammes et des objectifs, je pense, qui sont très clairs, qui sont précis: Mais comment est-ce que le citoyen se retrouve là-dedans, face à ça? Est-ce que c'est des boîtes vocales qui répondent aux gens lorsqu'on appelle à la Sûreté du Québec?

Une voix: Comme dans les CLSC.

Le Président (M. Côté): Alors, M. Beaupré.

M. Beaupré (Jacques): Merci, M. le Président. Non, monsieur, il n'est pas question de boîte vocale à aucune étape au niveau de l'analyse de l'appel. La Sûreté du Québec est dotée de 12 centres de télécommunications, ou CDT, et c'est des personnes qui prennent chacune des appels, qui parlent avec le plaignant et qui font l'analyse. Afin de faire cette analyse-là, ils sont dotés d'un outil informatique qui leur permet de discriminer certaines questions. Mais, en tout temps, c'est une personne qui répond.

M. Laprise: Oui. Allez-y.

Le Président (M. Côté): M. Bouchard.

M. Bouchard (Gilles): Je voudrais juste ajouter. Ce sont des personnes civiles qui sont formées spécifiquement pour répondre à ces appels-là. Cependant, dans la plupart des cas, les appels sont transférés dans le véhicule à un chef d'équipe ou à un chargé de relève, à un responsable de relève au moment où l'appel nécessite l'avis d'un policier. Ça fait que c'est très dynamique, comme gestion.

M. Laprise: Maintenant...

M. Gautrin: Un instant. Est-ce qu'on pourrait savoir comment ça fonctionne?

Le Président (M. Côté): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Il y a la téléphoniste ou le téléphoniste qui reçoit l'appel. C'est bien ça? Ensuite, si jamais il considère que c'est urgent, c'est-à-dire qu'il y a risque sur l'intégrité physique ou psychologique, là, il transfère dans une automobile. C'est ça?

M. Bouchard (Gilles): Exact. Il va assigner un véhicule de patrouille pour répondre immédiatement à l'appel. Mais, si l'appel...

M. Gautrin: Et le véhicule de patrouille est en contact avec le citoyen au téléphone. C'est ça?

M. Bouchard (Gilles): Absolument. C'est possible de le faire. Maintenant, si c'est urgent, le préposé aux télécoms va assigner immédiatement un véhicule de patrouille, dépendamment du secteur, pour répondre à l'appel. Si ce n'est pas urgent, mais que ça nécessite l'avis d'un policier ou que le citoyen souhaite parler à un policier, l'appel est transféré automatiquement dans le véhicule, et c'est confidentiel. On a un système d'encryptage des ondes, et c'est confidentiel. Donc, c'est toujours une personne, un préposé aux télécoms ou un policier, qui parle au citoyen.

Le Président (M. Côté): M. le député de Roberval.


Ententes avec municipalités et les MRC et relations avec les corps policiers municipaux

M. Laprise: Excusez-moi, une question concernant les ententes avec les MRC. C'est bien sûr, ça couvre un ensemble de territoires ruraux. Mais, à l'intérieur de ça, il y a des villes qui ont déjà des corps de police avec lesquels il y avait eu de la collaboration avec la Sûreté, dans le temps. Est-ce qu'aujourd'hui c'est la même chose? Est-ce qu'il y a quand même un travail, une collaboration, un partenariat qui se fait au niveau de la criminalité, par exemple, qui couvre un secteur rural donné dans lequel il y a une ville, disons, de 10 000 ou 15 000 âmes qui est là et qui a un service de police quand même assez bien organisé?

Le Président (M. Côté): M. Coulombe.

M. Coulombe (Guy): Il y a une double approche à ce problème-là. D'abord il y a l'approche de la police de proximité et des relations avec la police municipale soit de la MRC ou de la région. Donc, ces contacts-là qui étaient traditionnellement existants vont être intensifiés, et cette année on a l'intention de multiplier ces contacts-là. Dans chaque district, on a l'intention de faire des échanges avec les polices municipales, d'envoyer un de nos patrouilleurs dans une police municipale et de prendre un policier municipal et de le faire travailler sur nos territoires. Ça va se négocier cette année. Et on espère que – pas cette intégration, loin de là – cette collaboration va profiter aux deux, c'est-à-dire à la police municipale et à la Sûreté pour voir les problèmes sous un angle différent. Ça, c'est la première dimension. Et les contacts sont constants et fréquents.

D'ailleurs, dans les comités de sécurité publique, les maires qui sont là, dans la MRC, le maire de la municipalité qui a son corps de police siège à la MRC. Alors, quand le comité de sécurité publique va apporter un problème, par exemple, de drogue dans les écoles, un problème de drogue dans les polyvalentes, et ainsi de suite... Et ça a été fréquent dans nos réunions. Les comités de sécurité publique qui travaillent avec nous posaient le problème de leurs enfants qui vont à la polyvalente de la grosse ville où est située la police municipale. Alors, c'est évident qu'il va devoir y avoir des rencontres entre nos postes et la police municipale pour examiner ensemble le problème, par exemple de la drogue dans les écoles. Parce que, dans ces polyvalentes-là, ce ne sont pas seulement des gens de la ville qui vont là, mais toutes les personnes sont impliquées. Donc, la collaboration est exacte et réelle.

L'autre dimension, qui est la dimension plus d'enquêtes criminelles, là, ça rejoint l'autre préoccupation dont je vous ai parlé, c'est-à-dire la collaboration entre les enquêteurs un peu plus spécialisés de la Sûreté, qui ne sont pas nécessairement au niveau des MRC mais qui sont au niveau des districts ou du quartier général à Montréal, et des agglomérations où il y a des corps de police municipaux. Dans le cadre d'un comité que le gouvernement a mis sur pied sur les services spécialisés, nous discutons actuellement des possibilités que j'appelais tantôt de partenariat, c'est-à-dire des ententes qu'il y aurait entre la Sûreté et les polices municipales, selon leur taille, de collaboration, mais de collaboration factuelle, écrite, concrète, dans le cadre de protocoles. C'est en discussion actuellement. Il n'y en a pas qui sont signées, mais c'est une de nos intentions de préciser ce partenariat dans des ententes avec les municipalités qui ont leur corps de police.

Le Président (M. Côté): M. le député de Roberval.

M. Laprise: Je regardais une entente que vous avez avec une municipalité régionale de comté. C'est bien évident, quand on regarde la liste des obligations de la Sûreté du Québec, comparativement à ce que vous aviez comme responsabilités face aux municipalités rurales, au moment où on ne chargeait pas aux municipalités rurales... Est-ce que vous prévoyez que les factures vont augmenter aux municipalités, suite aux nouvelles responsabilités que vous avez de la protection du citoyen?

M. Coulombe (Guy): D'une façon générale, les factures sont déjà, à toutes fins pratiques, réglées par le mécanisme que vous connaissez. Et, nous, on pense qu'il va y avoir une stabilité contractuelle dans les cinq prochaines années. Je ne dis pas que le montant va rester le même, mais qu'il va y avoir une stabilité dans les cinq prochaines années. Au-delà de ça, c'est la dernière chose dans laquelle je me risquerais de prédire ce qui va arriver au point de vue financier dans cinq ans.

(10 h 50)

Le Président (M. Côté): Merci, M. Coulombe. M. le député de Verdun.


Indicateurs de gestion

M. Gautrin: Merci. J'ai trois questions à vous poser, donc trois niveaux de questions. La première question, les indicateurs de gestion. Vous êtes en train de mettre sur pied ce que vous appelez les tableaux de bord. Donc, je voudrais que vous nous expliquiez un peu ce que vont comporter ces tableaux de bord dans les indicateurs de gestion, premièrement. Vous allez l'impliquer, si je comprends bien... Il y en a un qui est opérationnel à titre expérimental dans l'Outaouais. Vous allez les généraliser pour l'automne 1998? Et qu'est-ce qu'il y a dans ces tableaux de bord? Sous-question: Dans votre rapport que peut-être vous ferez, moi, j'aimerais bien connaître ces indicateurs et voir une évolution de ces indicateurs dans votre rapport.

M. Coulombe (Guy): Parfait. Juste avant de demander à mes collègues de présenter la notion du tableau de bord, je voudrais quand même dire que les indicateurs de gestion sont de plusieurs ordres. Je pense que le Vérificateur, il tient compte de ça.

M. Gautrin: Oui, je comprends. Il y en a un sur la criminalité...

M. Coulombe (Guy): Il y en a qui sont corporatifs.

M. Gautrin: Corporatifs. Mais il y en a qui sont sociologiques...

M. Coulombe (Guy): C'est ça. Exact.

M. Gautrin: ...c'est-à-dire l'évolution... C'est sûr que, s'il y a criminalité zéro dans une région, c'est un indicateur, bien sûr.

M. Coulombe (Guy): Donc, le tableau de bord, qui n'est pas uniquement en fonction des critères de...

M. Gautrin: De gestion.

M. Coulombe (Guy): ...de gestion, mais qui déborde ce cadre-là, est un exemple, justement, de l'instrument de travail qu'on est en train de bâtir. Alors, on peut présenter cet instrument.

M. Gautrin: Alors, ça, c'est les miracles de l'informatique. Ha, ha, ha!

Mme Cavuoti (Maryse): Maryse Cavuoti. Bonjour. Depuis octobre 1997, il y a un projet de tableau de bord qui est implanté dans tous les postes du district de l'Outaouais. Son objectif est de doter les responsables de poste d'outils leur permettant de donner des réponses rapides et précises aux élus quant aux ressources, aux activités et aux résultats de la Sûreté.

Quelle est la définition d'un tableau de bord de gestion? Un tableau de bord est une façon de sélectionner, d'agencer et de présenter l'information – les indicateurs – de façon sommaire et ciblée, en général sous forme de flash essentiel et pertinent. Il met en évidence les résultats significatifs, les exceptions, les écarts et les tendances.

Les orientations, maintenant. L'émergence d'une gestion axée sur les facteurs critiques qui se rattachent à la mission: diminution des formulaires maison; mise à jour régulière pour permettre le suivi auprès des MRC et des CSP, comités de sécurité publique. Le but n'est pas une mécanique de contrôle, mais un outil d'analyse des tendances.

L'importance de l'information de gestion, outil d'aide à la décision: pour le poste, le district et éventuellement le GQG. Analyse des résultats entre les résultats prévus et ceux qui ont été obtenus; amélioration de la qualité de l'information; uniformisation des informations statistiques à la grandeur de la SQ.

Le contexte historique. C'est comme je mentionnais tout à l'heure. Il y a également eu la création d'un comité de validation des variables de tableau de bord. Le comité était constitué de responsables de poste, d'un commandant de district et des représentants des différentes grandes fonctions à la Sûreté du Québec. Il y a également eu une analyse de faisabilité du projet, avec un prototype déposé et validé à la fin du mois de février 1997.

Il y a un plan d'action, l'implantation en trois phases, en trois livraisons. La première livraison a déjà été livrée vers le mois de novembre, ça a été les domaines de la criminalité et de la sécurité routière. Rappelons qu'il y a cinq grands domaines, il y a la criminalité, la sécurité routière, le service à la clientèle, l'administration et la prévention. Dans les mois qui viennent, l'administration va être développée. Deux mois environ après, on aura les deux derniers qui vont être développés aussi, toujours dans le district-pilote de l'Outaouais.

M. Gautrin: Je m'excuse de vous interrompre. On est en février. Est-ce que l'implantation dans le district-pilote pourrait être faite en juin? C'est ça?

Mme Cavuoti (Maryse): Pardon?

M. Gautrin: Là, vous en avez deux.

Mme Cavuoti (Maryse): On en a deux, oui.

M. Gautrin: Vous avez fait criminalité et sécurité routière.

Mme Cavuoti (Maryse): C'est cela.

M. Gautrin: Là, vous êtes en train de faire administration.

Mme Cavuoti (Maryse): Administration.

M. Gautrin: Et, ensuite, dans deux mois, vous allez pouvoir avoir... Et après, le calendrier, vous allez établir ça à l'ensemble du territoire, ou en 1998, en automne 1998...

Mme Cavuoti (Maryse): Vers la fin 1998.

M. Gautrin: ...vous allez pouvoir le respecter.

Mme Cavuoti (Maryse): Exactement. Et, une fois que ça va être implanté partout, il va y avoir une troisième phase, qui va répondre aux besoins spécifiques de chacun des postes. Si, par exemple, il y a des postes qui ont des besoins particuliers, comme des endroits de villégiature où il y aurait plusieurs lacs, il pourrait y avoir des informations qui traitent de la sécurité nautique, par exemple.

Tout à l'heure, on parlait, aussi, dans service à la clientèle, le genre d'informations ou d'indicateurs qui vont être abordés dans le service à la clientèle sont les ressources affectées, les temps-réponse aux appels, le nombre d'appels, les priorités du comité de sécurité publique et les priorités SQ. On a également les informations. Toutes ces informations-là sont disponibles pour la Sûreté du Québec et pour les MRC.

M. Gautrin: J'imagine aussi que vous allez discriminer entre les appels, les appels urgence 1, urgence 2 et urgence 3?

Mme Cavuoti (Maryse): Oui, ça va être fait. C'est pour répondre aux besoins, oui.

M. Gautrin: Dans le tableau, c'est évident.

Mme Cavuoti (Maryse): Oui.

M. Sénécal (Maurice): Maurice Sénécal. Si vous permettez, ça répond ici à deux attentes du Vérificateur général. Le temps-réponse, on va pouvoir l'avoir au niveau du tableau de bord et aussi établir une moyenne d'intervention, ce qui était demandé par le Vérificateur général et ce qu'on voulait savoir aussi.

M. Gautrin: ...de performance.

M. Sénécal (Maurice): Exactement.

Le Président (M. Côté): M. Coulombe.

M. Coulombe (Guy): Je ne sais pas si le Vérificateur admettrait que c'est un bon critère de... de recevoir un prix pour un...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Ça dépend qui l'a décerné.

Le Président (M. Côté): On va voir ça dans le prochain rapport du Vérificateur.

Mme Cavuoti (Maryse): Dernièrement, soit le 17 février 1998, le tableau de bord de gestion s'est vu décerner un prix d'excellence qui a été accordé pour un nouveau projet dans le cadre de l'activité Hommage 1998, au Salon informatique: Affaires de Québec. Hommage 1998 a pour but de reconnaître le rôle moteur des acteurs du secteur public dans le domaine des technologies de l'information au Québec ainsi que de souligner les réalisations récentes les plus exemplaires en émanant. Les prix d'excellence ont été décernés afin d'honorer celles et ceux qui se sont exceptionnellement distingués dans la conception et le développement de solutions et de projets performants au sein du secteur public, contribuant ainsi hautement à l'efficacité et à la rationalisation de leur organisation. Maintenant, on va voir ce que le tableau de bord a l'air.

M. Gautrin: C'est ça que je voulais voir.

Mme Cavuoti (Maryse): On retrouve nos cinq domaines d'information dont je parlais tout à l'heure, avec nos deux, ici, qui se sont développés, sécurité routière et criminalité. On a ici le district de l'Outaouais. On peut sélectionner un des postes qui fait partie de l'Outaouais, dépendant des besoins.

M. Bouchard (Gilles): Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Côté): M. Bouchard.

M. Bouchard (Gilles): On pourrait peut-être donner un exemple. On pourrait aller chercher le type d'accident, par exemple, qu'il y a eu au mois de décembre 1997 dans le district de l'Outaouais.

Mme Cavuoti (Maryse): D'accord. Alors, on fait ce qu'on appelle du forage, c'est un outil qui est très «user friendly», exceptionnellement facile d'utilisation, et c'est une des raisons pour lesquelles d'ailleurs cet outil a été choisi parmi d'autres outils disponibles sur le marché. Et, avant d'aller faire l'exemple dont M. Bouchard parle, on a aussi... C'est ici qu'on voit qu'on a la possibilité d'aller vers une vue MRC, donc les deux volets pour tenir compte des nouveaux besoins...

M. Gautrin: De la police de proximité.

Mme Cavuoti (Maryse): Oui, exactement.

M. Gautrin: Mais ça dépasse, les tableaux de bord, la police de proximité.

Mme Cavuoti (Maryse): On a inclus ça dans nos tableaux de bord pour répondre de façon complète aux besoins de la Sûreté du Québec.

M. Bouchard (Gilles): On peut peut-être éclater les accidents pour le mois de décembre 1997.

Mme Cavuoti (Maryse): D'accord. Ici, on voit que nos indicateurs qu'on avait tout à l'heure, les accidents et les interventions sont éclatés de façon plus détaillée. C'est un principe d'aller du général au particulier. Plus on fore, plus on va vers un niveau de détails qui nous donnent une information plus pointue.

M. Gautrin: Et vous avez l'heure de l'accident. C'est ça?

Mme Cavuoti (Maryse): Oui, ici, on a les heures d'accident, et ça va de 8 heures à 9 heures et on peut aller comme ça jusqu'à minuit, 1 heure du matin.

Le Président (M. Côté): M. Bouchard.

M. Bouchard (Gilles): Maintenant, si vous me permettez, pour continuer un exemple pour qu'on comprenne bien, on pourrait aussi éclater les accidents avec blessés, par cause.

Mme Cavuoti (Maryse): Oui. Ici, on a des causes d'accident qui peuvent être dus aux capacités affaiblies, par exemple, à la vitesse.

M. Bouchard (Gilles): Pour donner un exemple des capacités affaiblies pour les accidents avec blessés... Combien d'accidents avec blessés? On se souvient qu'il y a 37 accidents avec blessés.

Mme Cavuoti (Maryse): Oui.

M. Bouchard (Gilles): Combien impliquent un conducteur qui a consommé des boissons alcooliques?

Mme Cavuoti (Maryse): Un, pour le mois de décembre.

M. Bouchard (Gilles): Un, pour le mois de décembre, dans l'Outaouais. Ça donne un bon indicateur. Maintenant, on pourrait aller chercher la vitesse. Vous allez voir que, dans le mois de décembre, probablement, la vitesse a été un facteur beaucoup plus prédominant en ce qui concerne les accidents avec blessés, compte tenu aussi de l'état de la chaussée puis des conditions de...

Mme Cavuoti (Maryse): On en a 10.

(11 heures)

M. Gautrin: Est-ce que vous allez pouvoir avoir des éléments comparatifs? C'est-à-dire, ça, je comprends que c'est une photographie à une période donnée. Un indicateur, c'est intéressant de comparer sur deux périodes pour voir une évolution, c'est-à-dire si les politiques que vous mettez en place ont un effet ou pas d'effet sur...

M. Bouchard (Gilles): Actuellement, dans ce qui a été développé, on a deux éléments comparatifs: l'année précédente et la moyenne des cinq dernières années.

M. Gautrin: Parfait. Alors, on l'a sur le tableau?

Mme Cavuoti (Maryse): Oui.

M. Gautrin: Vous pouvez l'avoir?

Mme Cavuoti (Maryse): Un comparatif, oui.

M. Gautrin: O.K. Janvier à décembre et...

M. Bouchard (Gilles): Vous avez la moyenne des cinq dernières années puis vous avez aussi l'évolution des accidents par rapport à la moyenne des cinq dernières années.

Mme Cavuoti (Maryse): Toujours par rapport à la cause d'accident, la vitesse, qu'on voit ici. Là, on peut vous montrer un graphique peut-être?

M. Gautrin: Allez-y! C'est beau.

M. Bouchard (Gilles): Vous voyez, ça, c'est un excellent exemple. Juste sur le plan visuel, on remarque, vous avez la ligne rouge qui est la ligne qui représente les accidents par plage d'heure et la ligne bleue qui représente les interventions en sécurité routière. On s'aperçoit rapidement qu'entre 17 heures et 21 heures les interventions baissent par rapport à la courbe des accidents. Donc, ça indique au responsable de poste, à ce moment-ci, qu'il y a un effort à apporter pour cette plage d'heure là. Maintenant, pour pouvoir apporter un effort efficace, il faudra qu'il vérifie aussi quelles sont les causes. Comment ça se fait que nos patrouilleurs n'interviennent pas pendant ces plages d'heure là ? Il peut y avoir différentes raisons qui peuvent expliquer ça. On a le pendant de ça au niveau de la criminalité aussi.

M. Gautrin: Je comprends. C'est très intéressant ce que vous donnez. Est-ce que vous avez, pour les fins de la commission, une espèce de petit document qui nous expliquerait ce que vous faites?

M. Coulombe (Guy): Oui, oui. On va le déposer au Secrétariat des commissions.

M. Gautrin: Parce que vous comprenez qu'on est intéressé par ça. Je vois ce que vous avez fait. Si on se rencontre dans un an, comme nous, on n'oublie pas, on vous demandera où vous êtes rendus.

M. Coulombe (Guy): C'est pour ça que je voulais intervenir là-dessus. C'est ce que je disais au Vérificateur, en retrait. C'est que c'est un sujet fort complexe qui suppose beaucoup de formation...

M. Gautrin: Absolument.

M. Coulombe (Guy): ...et qui suppose la mise en place des appareils au moment... Et je pense que je concours avec madame, quand elle dit qu'en 1998 on va l'étendre un peu partout, mais je voudrais avoir un sentiment de prudence. Je ne voudrais pas que: L'an passé, vous nous avez dit que c'était ça, puis c'est...

M. Gautrin: Bon Dieu! que vous êtes politiciens!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Coulombe (Guy): C'est complexe et...

Le Président (M. Côté): Je dirais qu'il est prudent, moi.


Formation

M. Gautrin: C'est ça. Je reviens donc sur ma deuxième... Dans vos grands champs, M. Coulombe, vous avez donné vos grands champs d'intervention, il y en a un qui touchait la formation. Et, donc, moi, j'allais faire un lien, et vous avez quasiment fait le lien que je voulais faire, entre ce nouvel instrument que vous allez donc donner et la formation. Alors, quel type de formation vous avez mis sur pied? Qu'est qui est en train de se faire ou...

M. Coulombe (Guy): Vous pouvez donner les détails de la formation concernant le tableau de bord? En général ou...

M. Gautrin: Bien, c'est-à-dire, en général et avec le tableau de bord. Vous comprenez bien qu'on veut savoir ce que vous faites comme formation. Mais, si vous donnez un instrument comme ça, ce n'est pas quelque chose qu'il faut apprendre à utiliser...

Le Président (M. Côté): M. Coulombe.

M. Coulombe (Guy): Il faut dire qu'il va y avoir une instrumentation, comme vous venez de voir, dans chacun des postes. Ça va être au bureau du chef de poste, où non seulement le chef de poste, mais sa secrétaire vont devoir manipuler ce genre... Madame disait tantôt que c'était un «user friendly», mais encore faut-il que l'amitié se développe.

M. Gautrin: Il faut que l'amitié se développe. Et vous comprenez bien que l'utilité d'une telle chose n'a un sens que si ceux qui entrent l'information dedans le font d'une manière cohérente, parce que, si...

M. Coulombe (Guy): Exact. Donc, c'est carrément des cours d'utilisation qui vont être... Les secrétaires, les chefs de poste et ceux qui manipulent ces données vont être formés pendant quelques jours pour non seulement manipuler l'appareil, mais comprendre la logique interne. Donc, c'est toute une série de cours, au sens formel du terme. Sur le problème général de la formation, je vous l'ai dit tantôt, il y a un effort massif qui se fait. Cette année, on va augmenter les budgets concernant la formation. Toute la question de la formation continue sur ces nouveaux projets-là va être accélérée, et les budgets vont être augmentés là-dessus.

M. Gautrin: Est-ce que vous avez un document sur... Je vais terminer mes questions, peut-être, si vous avez des documents là-dessus, ça éviterait... Sur vos quatre grands chantiers – et, moi, j'en avais deux que j'avais retenus, c'étaient la réorganisation de vos officiers supérieurs et la formation – est-ce que vous avez un document que vous avez écrit et que vous pourriez nous envoyer?

M. Coulombe (Guy): J'ai un document préliminaire qui date de quelques mois qu'on peut vous faire parvenir très rapidement. Et, de plus, je peux vous dire que le rafraîchissement de ce document va être prêt dans trois semaines, un mois. Alors, on pourra vous envoyer la copie qui existe et on pourra vous envoyer la nouvelle copie.

M. Gautrin: C'est gentil. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Côté): Merci. Mme la députée de Vanier.


Projet équipiers

Mme Barbeau: Merci. Le député de Verdun a posé les questions que je voulais poser, mais ce n'est pas grave, j'en ai... Au niveau de la prévention, il y a un projet équipiers, et je ne connais pas, peut-être parce que je suis en milieu urbain, c'est peut-être... Je ne sais pas.

Le Président (M. Côté): M. Bouchard.

M. Bouchard (Gilles): Gilles Bouchard. Le projet équipiers, je vous dirais, est très embryonnaire. C'est un projet qui consiste à recruter des jeunes de 13 à 17 ans, un peu sur le modèle des cadets de l'armée, en région, qui seraient parrainés par un membre du poste de la Sûreté de la MRC où ces jeunes-là sont recrutés. Ce qu'on vise par ça, c'est d'abord de développer des valeurs fondamentales pour contribuer à ce que ces jeunes-là deviennent un jour de très bons citoyens et, deuxièmement, de les impliquer dans différents programmes de prévention qui ont cours à la Sûreté du Québec actuellement et qui touchent autant les jeunes que les personnes âgées ou d'autres groupes de personnes qui forment les populations locales.

On est en train, actuellement, de discuter avec un poste du Nord-Ouest – je m'excuse, mais je ne me souviens pas exactement de quel poste – pour la mise en place d'un premier groupe d'équipiers. Mais je vous dirais qu'essentiellement c'est un peu à l'image des cadets de l'armée, mais sous l'égide de la Sûreté du Québec. Et ils porteront aussi une chemise et des «crest» de la Sûreté du Québec. Ils auront de la formation offerte par la Sûreté du Québec. Et ça, ça ne coûte pas un sou, ce sont des policiers bénévoles qui s'occupent de ces équipiers.

Mme Barbeau: Ce ne sont pas des activités comme on connaît, d'aller dans les écoles ou les maisons de jeunes pour faire un exposé.

M. Bouchard (Gilles): Ça pourrait être ça.

Mme Barbeau: Ça pourrait être intégré dans ça?

M. Bouchard (Gilles): Ça pourrait être ça. Ça va être intégré là-dedans. On veut les mettre à contribution dans la grande majorité de nos plans d'intervention en ce qui concerne la prévention.

Mme Barbeau: Mais ce serait plus en région, si je comprends bien.

M. Bouchard (Gilles): Un peu partout au Québec, tant et aussi longtemps qu'il y aura des... Autant il y aura de MRC intéressées, autant il y aura d'équipiers dans la province de Québec sous la coordination de la Sûreté du Québec.

Le Président (M. Côté): Merci.

Mme Barbeau: L'autre question... Excusez.

Le Président (M. Côté): Oui, Mme la députée de Vanier.


Statistiques concernant la criminalité

Mme Barbeau: C'est parce que, l'autre fois, je ne sais plus si c'est en séance de travail – en tout cas, on en fait tellement qu'on ne sait plus – on était intéressé à avoir les tableaux des taux de criminalité, par exemple chez les jeunes – moi, ça m'intéresse beaucoup – par région, au Québec, comparativement à d'autres provinces, par exemple, ou d'autres États. Je ne sais pas si vous avez ça, vous autres.

Le Président (M. Côté): M. Coulombe.

M. Coulombe (Guy): Sur l'état des statistiques de criminalité, qui, encore là, est un sujet compliqué, je voudrais demander à Mme Fourcaudot de peut-être donner une petite synthèse de l'état de la situation.

Le Président (M. Côté): Mme Fourcaudot.

Mme Fourcaudot (Martine): Martine Fourcaudot, Service des renseignements criminels. Dans un premier temps, il faudrait apporter une précision sur cette première requête-là. C'est que, si l'on prend l'ensemble des plaintes ou des événements réels rapportés à la Sûreté du Québec, en moyenne, par année, c'est 70 000. Alors, lorsqu'on divise sur le territoire en 100 ou en 1 200 municipalités, la masse est tellement – comment dire – désagrégée qu'on arrive avec quelque chose comme 60 événements par municipalité. Alors, il est difficile, avec ça, de dégager des tendances.

Donc, en réponse à votre question, sur les tendances générales de la criminalité, ce qu'on pourrait davantage faire, c'est peut-être vous donner un topo sur les tendances générales de la criminalité au Québec, à l'intérieur de ça, vous entretenir des variations en nature et en volume et, à l'intérieur de ça, peut-être plus vous entretenir sur les dossiers que la Sûreté traite sur ses territoires exclusifs, ce qu'on appelle, nous, des dossiers SQ, dans notre langage statistique, et des dossiers aussi qu'on traite conjointement ou encore en assistance, entre guillemets, avec les corps de police municipaux.

(11 h 10)

Il faut comprendre que, dans l'ensemble des événements criminels rapportés au Québec, sur près de 360 000 ou 380 000 et quelques par année, ça se partage bien sûr entre les dossiers traités en exclusivité par la Sûreté du Québec, ceux traités par les corps de police municipaux, qui représentent dans leur cas 50 % du volume, parce qu'il y a 156 corps de police municipaux qui traitent 50 % de ces 400 000 infractions-là. La Sûreté du Québec en traite 14 % ou 15 %, dont 2 % en assistance. Donc, ce sont des crimes majeurs sur lesquels les corps de police municipaux ne sont pas obligés d'enquêter, en vertu du règlement qu'on connaît sur les services de base, leurs responsabilités en enquête. Et, si on décortiquait la pointe de tarte en trois, l'autre proportion fait que – il y a des mathématiciens, ici; 100 %, moins 50 %, moins 15 % – il en reste probablement 35 %... C'est mon député mathématicien.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Fourcaudot (Martine): Il en reste 35 % sur le territoire exclusif de la Communauté urbaine de Montréal. Ça, c'est globalement, parce qu'on ne voulait pas vous éclater cette criminalité-là en 1 200 municipalités, vous n'auriez rien appris.

Je vais laisser la parole à M. Avon, qui est statisticien aux renseignements criminels, pour vous dresser un peu les grandes tendances. Et, juste en termes de commentaire général, on n'échappe pas aux grandes tendances nord-américaines, et ce n'est pas nécessairement des mauvaises nouvelles. Depuis les cinq dernières années, il y a un tendance nord-américaine à la baisse générale de la criminalité, et les grandes villes nord-américaines aussi ont le même phénomène, Montréal aussi et aussi sur nos territoires exclusifs. Alors, je vais laisser la parole à Pierre Avon, qui va plus vous donner des faits saillants. Et n'hésitez pas, si vous avez des questions plus spécifiques, on est là pour ça.

Le Président (M. Côté): Merci. M. Avon.

M. Avon (Pierre): Je vais quand même y aller un petit peu en vrac, parce que c'est bien évident que, si on parle de criminalité générale, on ne parle pas juste de la criminalité de la Sûreté du Québec qu'on trouve, parce que, effectivement, comme Martine l'a dit, ça fait juste 15 % en tant que tel. Alors, commençons par les bonnes nouvelles. Depuis deux ans, la criminalité est effectivement assez stable, au Québec. Les deux années antérieures à celle-là, elle est effectivement en diminution d'à peu près 10 %.

Qu'est-ce qui explique ça? Effectivement, il y a beaucoup de facteurs économiques. Quand même, on a eu une crise économique en 1991-1992, et la récession s'est résorbée, ce qui fait qu'effectivement lorsque les gens reprennent un peu l'emploi, même si c'est à temps partiel, et ainsi de suite, il y a beaucoup moins de criminalité à ce niveau-là. Il y a un effet de vieillissement aussi. On sait très bien qu'effectivement c'est plutôt l'apanage des jeunes de commettre des crimes. Donc, il y a eu un certain vieillissement de la population. Il y a aussi d'autres personnes qui travaillent un peu moins ou à temps partiel, ce qui fait aussi un phénomène de «cocooning». Quand on est à l'intérieur de la maison, il est très difficile d'avoir des introductions par effraction dans notre domicile.

Il ne faut pas se le cacher, pratiquement les deux tiers des infractions au Québec, à peu près un tiers ce sont des introductions par effraction et un autre tiers, à peu près, ce sont des vols de véhicules. Le gros de la masse des 400 000 infractions qu'il y a par année, quand même, les deux tiers sont des vols. Naturellement, ce n'est pas ce qui fait les manchettes, mais il faut quand même enquêter sur ce volume considérable.

Le bon point, donc, effectivement, c'est qu'il y a une diminution à cet égard-là. Le phénomène est au Québec, le phénomène est aussi nord-américain. Si on regarde un peu dans les très grandes villes américaines, on voit aussi que même la violence a diminué. Nous observons ça aussi également au Québec.

Les mauvais points, effectivement, peut-être deux des mauvais points qu'on peut vérifier depuis cette année, c'est que les introductions par effraction ont légèrement augmenté et les vols de véhicules ont aussi légèrement augmenté. Parce que, depuis trois ans, il y avait vraiment une diminution des vols de véhicules, ce qui faisait qu'on voyait que les projets spéciaux qu'on avait faits, dont le projet Kojak et une série d'autres projets, permettaient de résorber cette problématique qui était surtout concentrée à Montréal, mais quand même répandue partout au Québec. On se rend compte, depuis un an, à peu près, un an et demi, qu'il y a une recrudescence des vols de véhicules. Je regarde juste rapidement, par rapport à l'an passé, on parle d'à peu près 3 500 vols de véhicules de plus. C'est passé de 46 000 à 49 000 vols de véhicules par année. C'est important, comme volume, sauf que la problématique demeure toujours à Montréal et dans la grande périphérie de Montréal.

Donc, on croit qu'il y a quand même certains réseaux de vol de véhicules automobiles très ciblés. J'ai travaillé particulièrement sur un dossier là-dessus. Et on ne vole pas n'importe quel type de voiture, c'est très ciblé, il y a des réseaux très organisés, et il y a des modèles favoris, à ce niveau-là. Alors, grosso modo, si on éliminait ces deux tendances, d'augmentation de vols de véhicules et d'introductions, qui ont recommencé à augmenter, on pourrait effectivement avoir une diminution encore plus importante de la criminalité. C'est bien évident que, si on va de façon plus particulière ou plus pointue dans une MRC, dans une municipalité, etc., le danger qu'on a, c'est qu'on dilue carrément l'information. Et passer de 12 infractions à 14 infractions, ça fait une grosse augmentation de 16 %, mais c'est juste...

Mme Barbeau: Par rapport, mettons, à une région donnée qui peut avoir une problématique particulière, je ne sais pas, ça peut donner un indice pour la région. Peut-être pas pour une ville, mais, je veux dire que pour une région donnée, des fois, il peut y avoir une problématique qui peut... En tout cas, moi, je trouve ça intéressant de savoir ça, parce qu'on est approché pour toutes sortes de projets, tout le monde veut partir un organisme pour aider, soi-disant pour régler un problème qui existe peut-être, mais on est mal outillé, des fois, pour dire: Effectivement, ça répond à un problème. On est obligé de faire des démarches dans tous les ministères, de vérifier. On n'a pas d'outils. Et, au niveau de la criminalité, et tout ça, des groupes pour aider les jeunes, pour les suicides, etc., on a beaucoup...

M. Avon (Pierre): Il faut nous appeler.

Mme Barbeau: On vous appelle?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Barbeau: Mais vous pouvez nous fournir ça?

Mme Fourcaudot (Martine): Martine Fourcaudot. Il se fait de l'analyse opérationnelle de la criminalité, il se fait un suivi mensuel, un peu comme à l'échelle d'un poste, où on compare l'évolution mensuelle de certains crimes indices. Ça, il s'en fait régulièrement. Et, à ce moment-là, ce qu'on fait d'ailleurs dans une unité, aux renseignements criminels, lorsqu'on constate une tendance, des fois, il y a des soubresauts. Mais lorsqu'on constate une tendance, à ce moment-là, il y a des mécanismes internes où on sonne la cloche au responsable des enquêtes, si c'est un phénomène comme les agressions sexuelles, au responsable des enquêtes en matière de crimes majeurs qui, lui, communique avec le bureau des enquêtes criminelles dans la région. Il se fait comme un genre de vigie ou de prospective sur...

Mme Barbeau: Ça fait que, si, moi, je vous appelais puis que je vous demandais, dans la région de Québec, dans la communauté urbaine, par exemple, le taux, à peu près, de crimes par les adolescents ou par les jeunes en bas de 18 ans...

Mme Fourcaudot (Martine): J'aimerais mieux que vous m'appeliez pour me la poser que de me la demander ici, aujourd'hui, parce que... Ha, ha, ha!

Mme Barbeau: Non, non. Je ne veux pas vous la demander aujourd'hui.

Mme Fourcaudot (Martine): Oui, on pourrait vous répondre.

Mme Barbeau: Mais je me dis: c'est quelque chose que vous nous fourniriez parce que, des fois, ça peut nous servir dans des choix qu'on a à faire, nous, pour des organismes de toutes sortes.

Mme Fourcaudot (Martine): Sur la demande en services, on peut même aller plus loin dans des analyses, parce que ce dont on dispose, qui est le module d'information policière, d'ailleurs auquel ont adhéré... Le module d'information policière, c'est un module, comme on dit, d'information policière, mais c'est aussi un module qui permet de produire des statistiques. Et, sur les quelque 150 corps de police au Québec, il y en a plus de, je vous dirais, 95 % qui adhèrent au MIP. C'est-à-dire que, lorsque vous êtes victime d'un événement ou encore plaignant et que la police complète ce qu'on appelle, nous, un rapport d'événement, tout ça est informatisé. Et ce qu'on a à l'intérieur de ça, c'est aussi des variables qui nous permettent de faire de l'analyse. On a donc ce qu'on appelle, nous, le modus operandi: heure, date, lieu et comment l'infracteur a procédé, mais aussi... Donc, heure, date, lieu, vous comprenez déjà ça nous permet de faire des analyses sur le contexte.

Mme Barbeau: Les détails, ce n'est pas grave. Ha, ha, ha!

Mme Fourcaudot (Martine): Mais on a aussi le profil des victimes, le profil du suspect pour mettre en place certains projets spéciaux, certains projets de prévention. Nous, ça nous sert pour déployer nos effectifs, mais ça nous sert aussi pour conseiller les développeurs de programmes de prévention. Et ça peut être bon aussi au profit de la communauté. Si vous avez le choix entre différentes mesures ou encore si vous avez un choix à faire pour différentes mesures ou encore le choix à faire sur dans quelle – je ne sais pas – partie de votre comté installer tel type de service, oui, on peut l'offrir.

Mme Barbeau: Bien, on le sait un petit peu parce que, je veux dire, on le voit, les quartiers plus démunis, il y a souvent plus de violence. Mais, je veux dire, on n'a rien pour s'appuyer.

Mme Fourcaudot (Martine): Mais vous disiez que vous étiez en territoire urbain, alors...

Mme Barbeau: Je suis à Vanier.

Mme Fourcaudot (Martine): Pardon?

Mme Barbeau: Je suis à Vanier. Bien, du côté de Vanier.

Mme Fourcaudot (Martine): Ah! d'accord. Alors, dans ce cas-là, votre corps de police municipal aussi dispose un peu de la même banque d'informations et il peut se comparer avec d'autres corps de police qui, eux, compilent leurs données ou leurs événements ou les données sur leurs événements sur la même base d'informations.

Mme Barbeau: C'est la même base, c'est-à-dire qu'ils ont vos statistiques. Ça, c'est vice et versa.

Mme Fourcaudot (Martine): Il y a une règle à respecter, par contre, c'est que, selon, d'ailleurs, un règlement du CRPQ, les données appartiennent à l'agence, donc au corps de police. Donc, si vous me posez une question concernant, par exemple, un corps de police municipal sur votre territoire, nous, la Sûreté du Québec, on ne peut pas y répondre, c'est à votre corps de police d'y répondre. On peut vous aider pour y répondre et on travaille souvent conjointement avec eux, on fait des analyses de certains phénomènes avec eux, et ça, sur des bases régulières, avec plaisir.

Mme Barbeau: Bien, vous me laisserez votre carte tantôt.

Mme Fourcaudot (Martine): Oui.

Mme Barbeau: Merci.

Le Président (M. Côté): Merci. Tandis qu'on est sur le taux de criminalité, je vois, moi aussi, que le taux de solution des crimes, dans le rapport d'activité de la Sûreté du Québec de 1994 à 1996, il semble y avoir une baisse dans la solution des crimes. Qu'est-ce qui explique cette baisse-là? Est-ce que c'est repris dans l'autre sens ou... Ça, c'est des statistiques de 1996. Qu'est-ce qui explique que le taux de solution des crimes aurait une tendance à la baisse dans l'ensemble des infractions? Parce qu'il y a les crimes contre la personne, la propriété puis les autres. Mais, pour l'ensemble, il y a une baisse, il semble y avoir une tendance vers la baisse. Qu'est-ce qui explique ce phénomène-là?

Mme Fourcaudot (Martine): C'est un indicateur, le taux de solution, comme tant d'autres. Juste pour vous familiariser, c'est un indicateur où on a le nombre d'événements résolus sur le nombre d'événements réels rapportés; juste pour situer les gens. Donc, parfois aussi on arrive avec des chiffres aberrants. Tu sais, ça se passe sur une année, ça, un taux de solution, on le mesure sur une année. Alors, je pensais davantage que vous alliez nous questionner sur le fait qu'on ait des taux supérieurs à 100 %. Ça aussi, ça nous arrive. C'est-à-dire qu'on peut résoudre dans une année plus d'événements qu'il nous a été rapportés. Ça fait que c'est ce qui fait que notre nombre de résolus est supérieur au nombre de...

(11 h 20)

M. Gautrin: Parce que vous résolvez des vieux crimes, dans une année... Vous ne résolvez pas immédiatement. C'est-à-dire, il y a un délai entre le moment où quelqu'un rapporte une infraction puis le moment où vous la solutionnez. C'est pour ça.

Mme Fourcaudot (Martine): Oui. On peut peut-être examiner par groupe, là où on a des... Mais en matière de crime, juste un constat général, en matière de taux de solution de la Sûreté, si on compare avec d'autres corps policiers, parce que des indicateurs, c'est pour se comparer à nous-mêmes dans le temps, mais pour se comparer avec d'autres...

M. Gautrin: C'est le «benchmarking».

Mme Fourcaudot (Martine): ...la Sûreté a toujours eu un taux de solution enviable par rapport à celui des autres corps de police municipaux. Et on a toujours été assez rigoureux aussi dans nos modes de compilation, dans nos critères pour décider si un crime était ou non résolu.

Le Président (M. Côté): Si on se compare avec notre...

Mme Fourcaudot (Martine): Si on se compare avec d'autres corps de police comme on le faisait avec...

Le Président (M. Côté): Ou encore nos voisins, en Ontario, comment est-ce que...

Mme Fourcaudot (Martine): Avec l'OPP? Oui. Je n'ai pas les tableaux comparatifs ici, mais, si on se compare avec l'Ontario, on a toujours eu des taux comparables. Avec l'OPP, ça se compare mieux. Si on se compare avec un corps de police municipal, on a un taux plus que comparable, on a un taux enviable, parce qu'il va de soi que ça va selon, peut-être, sans doute la connaissance que l'enquêteur a de son milieu. Il est plus facile d'identifier un suspect lorsque tu le connais. Il est plus facile de l'identifier. Je vais laisser Pierre, peut-être, vous expliquer les variations, les taux de solution. Mais il demeure que, dans les catégories de crimes graves, les taux de solution sont encore performants.

Le Président (M. Côté): Parce que je vois qu'il y a une grande différence entre la solution des crimes contre la personne versus contre la propriété puis les autres crimes. Il y a une grosse différence dans les...

Mme Fourcaudot (Martine): Ce qui est lié à la nature des phénomènes, sans tomber dans des analyses criminologiques, c'est sûr que nos taux de solution en matière de crime contre la personne sont supérieurs parce que, souvent, les crimes de cette nature-là ont lieu entre des personnes qui se connaissent. Alors, ce n'est pas anonyme, dans une grosse proportion des cas, c'est des gens qui se connaissent. Et, à moins que la personne soit décédée, elle peut identifier son agresseur. Alors, les taux ont toujours été autour de 84 % à 86 % – j'ai 86 % en tête – autour de plus de 80 %, supérieurs à ça, en matière de crimes contre la personne, ce qui est constant, ce qui est normal.

Le Président (M. Côté): Mais contre la propriété, en 1994, 26,5 %, en 1996, 23,3 %, la même chose pour les autres crimes aussi qu'on répartit de 68 % puis on est rendu à 64 %.

Mme Fourcaudot (Martine): Oui. Je peux vous dire ce qu'on tente de faire pour le résoudre, parce que ça nous préoccupe. C'est qu'au lieu d'analyser – comment dire – au lieu d'enquêter crime par crime, ce qu'on préconise, c'est d'analyser des phénomènes et non pas des événements, c'est-à-dire en regroupant des événements, ce qui va contribuer sans doute, premièrement, à augmenter l'efficience de l'enquêteur, qui va pouvoir prendre plus de dossiers, en plus d'augmenter son efficacité.

Le Président (M. Côté): Alors, toute la réorganisation qui est en train de se faire devrait contribuer à une amélioration. M. Coulombe, oui.

M. Coulombe (Guy): D'ailleurs, ce que Mme Fourcaudot dit, puis on pourrait en discuter longuement, mais aussi c'est la nature des renseignements statistiques qui sont demandés, en d'autres mots, le type d'événement, la définition de cet événement – puis ça, c'est souvent des statistiques qui sont définies de façon globale, nationale – et les formules dont on parlait tantôt pour remplir ça. Évidemment, avec la gestion des appels, et ainsi de suite, ça va avoir de l'influence aussi sur les taux de solution.

Mme Fourcaudot (Martine): Ce qu'on appelait tantôt l'heure d'or le «golden hour», l'heure dorée...

M. Coulombe (Guy): C'est ça.

Mme Fourcaudot (Martine): Oui, ça a un jeu. Mais, encore là, il ne faudrait pas présumer qu'on va atteindre un sommet. Les crimes contre la propriété, des taux de 20 %, c'est déjà satisfaisant, parce que, dans la moyenne des autres corps de police, ça joue autour de 13 % ou 14 %. C'est déjà beau que ce soit autour de 20 %. C'est normal, parce que, lorsque les gens sont victimes d'introduction par infraction, ils ne sont pas là et aussi ils ont peut-être été victimes parce que les voisins n'étaient pas là, donc on n'a pas, non plus, trop de témoins pour cheminer dans l'enquête.

M. Coulombe (Guy): Dans le phénomène des vols d'automobiles, il y a aussi une évolution sur l'attitude des compagnies d'assurance, et ainsi de suite. C'est différent de ce que c'était il y a plusieurs années, dans ce domaine-là.

Mme Fourcaudot (Martine): Il y a aussi quelque chose d'autre, c'est que, dans le phénomène des vols d'automobiles, ce qu'on constate, et puis c'est vrai aussi pour les introductions par infraction, il y en a moins, mais il y a une professionnalisation, ou encore les criminels sont plus organisés qu'avant. C'est le fait des vols d'autos. Avant, on aurait fait une analyse similaire, il y a peut-être 15 ans de ça, et on aurait constaté que le «joyriding», ça aurait été un jeune ou une jeune qui s'empare d'un véhicule pour une randonnée, pour le plaisir. Le «joyriding» représentait 40 %, peut-être même 50 % de l'ensemble des événements qu'on identifiait comme des vols. Maintenant, cette proportion-là diminue. Et ce qu'on constate, parce qu'on ne retrouve pas les véhicules entiers, on retrouve des pièces de véhicules ou on ne les retrouve pas du tout parce qu'ils sont peut-être sur des containers vers les pays d'Europe de l'Est, entre autres, donc c'est plus dur d'enquêter sur ça et c'est plus dur à résoudre.

Même chose pour les introductions par effraction aussi. Avant, c'était plus des phénomènes spontanés. Des jeunes passent dans un quartier: On fait celle-là. Maintenant, ils sont plus organisés, ça veut dire qu'ils ciblent plus leurs victimes, leurs habitudes, et ça diminue les chances qu'ils se fassent appréhender. Un des facteurs qui explique ça, c'est que nos criminels sont plus organisés. Ils sont plus vieux aussi, ils sont moins spontanés. Ça n'aide pas nécessairement notre taux de solution. Pour compenser, aussi, nos méthodes d'analyse et notre façon de traiter l'information s'améliorent, mais...

Le Président (M. Côté): Mais est-ce qu'on pourrait avoir des données de...

Mme Fourcaudot (Martine): Sur les taux de solution?

Le Président (M. Côté): Exemple, de l'Ontario par rapport à... Il faudrait se comparer avec quelque chose de comparable, aussi, je pense, à un moment donné.

Mme Fourcaudot (Martine): On n'en a pas sur l'Ontario, ici?

Le Président (M. Côté): Non?

Mme Fourcaudot (Martine): On n'en a pas, mais...

M. Avon (Pierre): Je regarde juste les chiffres que j'ai de disponibles actuellement...

Le Président (M. Côté): Vous allez vous identifier, s'il vous plaît, monsieur?

M. Avon (Pierre): Pierre Avon. Alors, juste pour voir ce que Martine Fourcaudot disait, c'est que, oui, effectivement, 20 %, ce n'est pas énorme. Maintenant, quand je compare avec d'autres statistiques que j'ai sur d'autres corps de police municipaux, on parle de 14 % ou de 9 %. Je ne veux pas me vanter, mais c'est quand même jusqu'à deux fois plus élevé.

Un autre point sur lequel il faudrait revenir, ici, c'est que c'est bien évident que de courir après une masse critique de 30 000 ou de 40 000 infractions en introduction, ça demande énormément d'énergie, ce n'est pas toujours payant. Alors, ce sur quoi la Sûreté du Québec essaie de mettre l'emphase, c'est surtout sur les gens qui font du recel. Alors, si, effectivement on arrête les receleurs, les vendeurs qui font de l'introduction, etc. ont des marchandises à vendre et n'arrivent pas à les repasser, ils ont des problématiques. Et, si on regarde les taux de solution, effectivement, sur les problèmes de recel, on a eu une augmentation de près de 15 %, l'année passée. Alors, c'est plus facile d'arrêter le lien au niveau du recel qu'au niveau de l'introduction, pour les petits voleurs.

Le Président (M. Côté): M. le député de Marquette.


Mission de la Sûreté du Québec dans la perspective d'un Québec souverain

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse peut-être à M. Coulombe, question ouverte ou une série de questions sur le développement stratégique de la Sûreté du Québec pour les années à venir. Je ne veux pas vous entraîner sur le terrain politique, mais vous allez voir que ma question se situe sur ce terrain-là, et ça se rattache aussi à l'optimisation des ressources de la Sûreté.

On dit souvent que gérer, c'est prévoir et tenter de prévoir l'avenir. Est-ce que la Sûreté du Québec a réfléchi à son rôle, à sa mission et au nombre d'effectifs dont elle aurait besoin dans la perspective d'un Québec souverain? En d'autres termes, on sait que la GRC exerce les pouvoirs qui relèvent actuellement du champ de compétence fédéral. Dans la perspective d'un Québec souverain, on met un terme à notre appartenance à la fédération canadienne. Et je me demandais, compte tenu qu'il y a eu deux référendums, dont celui de 1995, et on nous en annonce un autre si jamais le gouvernement actuel conservait le pouvoir: Est-ce que vous avez réfléchi à ces questions-là?

Le Président (M. Côté): Non. Un instant. Je voudrais, ici, rappeler au député de Marquette que ça ne fait pas du tout partie de notre mandat, en termes de travail à l'intérieur de la commission. Lorsqu'on a à vérifier ou encore à regarder la gestion d'un organisme, et ainsi de suite, de là à anticiper sur des choses qui ne sont pas là encore... Alors, j'aimerais qu'on s'en tienne à ce qui relève de notre mandat spécifiquement. Alors, je trouve que cette question est hors d'ordre, tout simplement.

M. Ouimet: M. le Président, je comprends vos préoccupations, mais vous comprenez que, dans le cadre d'un rapport qui a été fait par le Vérificateur général sur l'optimisation des ressources, sur une planification stratégique, sur savoir à partir des chiffres qui nous ont été donnés au niveau de la baisse des effectifs, il est quand même d'intérêt pour les parlementaires de savoir si la Sûreté du Québec a réfléchi à ces questions-là, des questions qui ont été posées en 1995. Si M. Coulombe veut répondre, ou quiconque.

Le Président (M. Côté): M. Coulombe.

(11 h 30)

M. Coulombe (Guy): Non, sur le cadre, la réponse à votre question, c'est que cette réflexion-là sur l'avenir de la Sûreté, sur son positionnement dans l'univers policier au Québec, la réponse est oui. La variable à laquelle vous faites allusion, la souveraineté ou non, ne fait pas partie spécifiquement de cette analyse. Mais, quand on réfléchit sur l'organisation de la police au Québec, notre cadre de référence, c'est quoi? C'est la Loi de police, c'est l'ensemble des règlements qui nous régissent à l'heure actuelle. Et, dans ce cadre-là, oui, la réflexion a lieu, oui, on a une idée des chantiers que j'ai mentionnés tantôt sur la réorganisation des MRC, sur le partenariat avec la police municipale dans le cadre des services spécialisés, qui nous conduit à avoir une vision du nombre optimal – mais je n'aime pas le mot «optimal» parce que, optimal, c'est en fonction de quoi, exactement? – du nombre nécessaire pour remplir la mission qui est dans les lois actuelles.

Nous, notre postulat de base, c'est que la Sûreté du Québec a une responsabilité sur l'ensemble du Québec, en partenariat avec les municipalités. Et, dans ce cadre-là, il y a des services à donner à la population, qui sont de nature spécialisée, qui sont de nature de services de proximité lorsqu'on est dans des municipalités de 5 000 et moins. Donc, tout cet univers-là nous conduit à avoir fixé, en ce qui concerne les municipalités, un nombre d'effectifs qui existent à l'heure actuelle et dont on est capable de démontrer la nature et le nombre exact.

Quant aux services spécialisés, l'étude est en cours. Nous pensons que ça va exiger tôt ou tard une augmentation des ressources matérielles, humaines et financières pour que la Sûreté remplisse son rôle de dispensateur et de partenaire de services spécialisés. Parce que, là, on sort un peu des questions d'orientation politique pour rentrer dans le domaine des choses très opérationnelles. Il va falloir que le Québec se dote, indépendamment de son statut politique, de certains services policiers qui font appel à des nouvelles formes de criminologie. Il va falloir avoir plus de spécialistes dans le domaine des crimes économiques, dans le domaine des crimes informatiques, dans le domaine des crimes des valeurs mobilières, ce qu'on a peu actuellement. Et on ne peut pas en avoir partout. Chaque corps municipal ne peut pas se doter de spécialistes de ce genre.

Donc, il va falloir que la Sûreté, si le gouvernement est d'accord, se dote de ces ressources, augmente ses ressources dans ce domaine-là, parce que les criminels n'attendent pas après la Sûreté pour s'organiser. Donc, il faut que la Sûreté s'organise, dans la mesure où le concept d'un corps policier... je ne dis pas au service du gouvernement, un corps policier n'est pas au service du gouvernement, mais d'un corps policier qui couvre l'ensemble du Québec, il va falloir que ces ressources-là soient disponibles. Est-ce qu'elles peuvent être disponibles l'année prochaine? Dans deux ans? Dans trois ans? Là, on fait partie d'un cadre plus général d'allocation des ressources, et l'équilibre entre ce qu'il faut mettre dans la Sûreté par rapport à ce qu'il faut mettre dans l'éducation, la santé, et ainsi de suite, ça ne nous regarde pas, ça regarde le gouvernement.

Mais la réflexion est en cours. C'est la base de nos grands chantiers. Et je ne vous dis pas qu'on a des réponses fulgurantes, mais les éléments que je vous donne, c'est ce vers quoi on se dirige. Quant à l'encadrement politique, quand il y aura des décisions, quelles qu'elles soient, on les communiquera.

M. Ouimet: Mais, à la question que je posais, M. Coulombe, vous me dites que l'opération de réfléchir aux années à venir est présentement en cours. Est-ce qu'il y a une hypothèse sur laquelle vous travaillez ou sur laquelle vous avez réfléchi, qui est l'hypothèse d'un Québec souverain?

M. Coulombe (Guy): La réponse est non, parce que je viens de vous dire que notre cadre de référence de réflexion, c'est les lois actuelles, la Loi de police, qui donne un mandat très général à la Sûreté du Québec sur l'ensemble du territoire. Et c'est à partir de cette notion-là qu'on réfléchit sur la meilleure organisation possible pour rendre le service aux citoyens. Au moment où on se parle, c'est ça, notre cadre de référence. Et, dans beaucoup de domaines, comme je viens de mentionner, sur l'attaque à la grande criminalité, et ainsi de suite, de même que la police de proximité, je doute que le statut politique puisse avoir une grande influence sur la relation au niveau de la sécurité publique entre le policier et le citoyen ou entre les policiers spécialisés et la criminalité.

Maintenant, je viens de vous le dire, notre cadre de référence, c'est les lois actuelles, les lois qui existent et qui sont à la base du travail de la Sûreté. Mais, après avoir dit qu'on a un rôle sur l'ensemble du territoire, il faut savoir qu'il existe des polices municipales, qu'il existe un grand corps de police sur l'île de Montréal, et c'est donc des variables dont il faut tenir compte. Mais on est persuadé, à la Sûreté, qu'il y a beaucoup d'efforts à mettre sur la possibilité de donner à la Sûreté les moyens pour lutter contre la criminalité, surtout la criminalité émergente, nouvelle. Et, actuellement, on collabore non seulement avec les corps de police, mais on collabore avec la GRC, on collabore avec tous ceux qui s'attaquent à la criminalité, au moment où on se parle.

M. Ouimet: Donc, juste pour terminer, aucune réflexion sur le rôle, la mission, le nombre d'effectifs et toute autre question connexe, dans un contexte politique qui changerait. Il n'y a eu aucune réflexion, à la Sûreté du Québec, sur ces données-là.

M. Coulombe (Guy): Je ne dis pas qu'il n'y en a pas qui peuvent réfléchir à ça dans leur... Mais, formellement, au niveau de la Sûreté, notre cadre de référence, c'est les lois, actuellement.

Le Président (M. Côté): Alors, merci. M. le député de Roberval.

M. Laprise: Merci, M. le Président. Si on regarde le rapport du Vérificateur et la responsabilité de notre commission, je pense que c'était d'interpeller la Sûreté du Québec sur la façon dont elle avait reçu le rapport du Vérificateur et la façon dont elle s'entendait pour corriger les choses qu'il y avait à corriger. Et, face à cette nouvelle décentralisation de la Sûreté du Québec versus la MRC, ça vient peut-être sensibiliser davantage la Sûreté du Québec à l'approche vers le citoyen et ça vient, je pense, répondre au questionnement du Vérificateur, qui veut non seulement qu'on atteigne des objectifs transparents sur le plan économique, sur le plan de notre gestion, mais aussi sur le plan des résultats auprès du citoyen.

Moi, je suis quand même très satisfait de la réponse que nous avons eue, ce matin, de la part de la Sûreté du Québec, et je crois que la responsabilité de la commission est complétée pour aujourd'hui. C'est mon opinion.

Le Président (M. Côté): Merci. M. le député de Verdun.


Services spécialisés

M. Gautrin: Merci. Deux questions, M. le Président. Je reviens sur votre troisième chantier, je pensais que d'autres allaient intervenir sur... On a abordé la police de proximité, on a abordé la réforme de vos cadres, on a abordé la question de la formation, il reste les services spécialisés. Vous en avez touché un mot tout à l'heure, il s'agit essentiellement des services que vous offrez à d'autres corps de police. Je les ai ici, il y a les plongeurs, le polygraphe, l'hypnose, il y a les cynophiles – ça, les cynophiles, c'est les chiens que vous avez – les techniciens en explosifs, etc.

Une petite question: Comment vous voyez le développement de ces services? Je comprends bien que vous allez en mettre d'autres, parce que vous allez rentrer plus dans les crimes économiques et dans cette dimension-là. Et quels sont les éléments de facturation entre la Sûreté du Québec et un corps de police qui, par exemple, emprunte – je vais prendre un truc amusant, mais enfin il y en a d'autres – vos chiens pour... Je pourrais en prendre d'autres, si vous voulez.

M. Coulombe (Guy): D'abord, je voudrais tout simplement aussi souligner que, dans le cas des services spécialisés, ce n'est pas seulement les services qu'on offre aux polices municipales...

M. Gautrin: Mais que vous achetez aussi.

M. Coulombe (Guy): ...mais qui, pour la Sûreté, est un élément essentiel... Par exemple, il va falloir donner des services spécialisés aux MRC; il y a des phénomènes, là, qui se passent qui nécessitent des services spécialisés. Donc, ce n'est pas seulement pour les fournir aux services municipaux mais pour la clientèle propre de la Sûreté.

Deuxièmement, sur notre hypothèse actuelle... Je dis bien «notre hypothèse» parce que le débat sur les services spécialisés, je vous l'ai dit tantôt, il y a un grand comité qui existe, au moment où on se parle, dont on est partie avec la Communauté urbaine et l'Association des chefs de polices, qui étudie justement ce phénomène-là. Donc, je ne vous parle pas au nom de ce comité-là, je vous parle au nom...

M. Gautrin: Mais, actuellement, la facturation se fait comment?

M. Coulombe (Guy): Dans notre esprit, la facturation, notre hypothèse actuelle, c'est que la Sûreté n'en a pas. On ne facture pas les services spécialisés qui sont offerts aux municipalités sur la base du concept, mais qui peut être changé si la réflexion conduit à d'autres phénomènes... Mais, actuellement, notre hypothèse, c'est que certains services spécialisés – mais encore faut-il ne pas confondre tous les services spécialisés – la plupart des grands services spécialisés, c'est l'équivalent d'un service que le gouvernement doit offrir à sa population du type qui est payé, si on veut, par la taxation générale, un peu comme des universités, des grands services publics. Dans ce sens-là, dans notre esprit – je ne parle pas au nom du gouvernement – il n'y a pas de facturation, au moment où on se parle.

M. Gautrin: Et, dans vos états financiers, est-ce que ça apparaît clairement qu'il y a des éléments qui sont propres à ce que vous appelez les services spécialisés?

M. Coulombe (Guy): C'est-à-dire la distinction, quand un de nos services spécialisés...

(11 h 40)

M. Gautrin: Autrement dit, le nombre de policiers affectés, par exemple, aux équipes d'explosifs.

M. Coulombe (Guy): On peut reconstituer, par les événements dont ils sont responsables ou dans lesquels ils ont été impliqués, ce qui était pour les services propres de la Sûreté de ce qui était en assistance aux municipalités. Il n'y a pas de problème à distinguer ça. Mais, comme je vous dis, notre hypothèse actuelle, c'est que de la facturation pour des services spécialisés de haut de gamme, il n'y en a pas à l'heure actuelle, et notre thèse, c'est qu'il ne devrait pas y en avoir non plus. Maintenant, je parle en mon nom personnel. Si le gouvernement en décide autrement, bien...


Confidentialité des renseignements

M. Gautrin: Moi, j'ai une deuxième question, M. le Président, dans un champ différent. On a vu au ministère du Revenu, et ça nous a inquiétés beaucoup, des fuites de renseignements confidentiels, qui ont été donnés à des tiers par des fonctionnaires du ministère du Revenu. Est-ce que vous avez un mécanisme à l'intérieur de la Sûreté pour vous assurer que des renseignements – parce que la Sûreté détient énormément de renseignements policiers pour ses fins propres – ne soient pas communiqués à l'extérieur? Est-ce que vous avez...

M. Coulombe (Guy): La réponse, c'est oui. Nous avons tous les systèmes internes pour éliminer ce problème-là, mais encore faut-il se rappeler que ce sont des systèmes qui...

M. Gautrin: Je suis d'accord avec vous. Mais ce que je voudrais savoir, c'est ce que vous avez sur pied pour la protection. Il n'y a rien qui est absolument...

M. Coulombe (Guy): Voilà, c'est ce que j'allais dire.

M. Gautrin: Il n'y a rien qui empêche, ça c'est sûr. Mais est-ce que vous avez quand même... Entre dire que vous êtes totalement hermétique, et ça, j'accepte qu'on ne peut pas être totalement hermétique... Mais est-ce que le phénomène, et pour vous assurer qu'il y a...

M. Coulombe (Guy): Dans ce cadre-là...

M. Gautrin: Par exemple, au ministère du Revenu, ils s'étaient assurés que, s'il y avait quelqu'un consultait trop souvent le même dossier, on pouvait penser qu'il avait peut-être des raisons de le consulter. Est-ce que vous avez ce genre de vérification interne?

M. Coulombe (Guy): Nous avons un programme, à l'heure actuelle, qui va procéder sur toute l'année 1998 et qui va probablement se terminer au mois de mars, avril 1999, dans lequel plusieurs étapes sont prévues pour rendre de plus en plus étanches nos services, qui le sont déjà passablement. Alors, on va aller à la fine pointe de ce qui existe actuellement pour avoir des mécanismes qui permettraient de savoir qui fait quoi, qui a demandé telle information, il venait d'où, ce que ça a donné, ainsi de suite. On le sait, actuellement, mais il y a des failles, on a certaines failles, mais ce n'est pas...

M. Gautrin: Mais vous pouvez, par exemple, savoir s'il y a une consultation abusive d'un même dossier.

M. Coulombe (Guy): Exact. Ça, on peut le savoir, à l'heure actuelle. Mais on va aller plus loin que ça pour rendre ça encore plus étanche. Donc, c'est un programme qui est en cours, à l'heure actuelle, puis on en a déjà discuté assez longuement avec la Commission...

M. Gautrin: D'accès à l'information.

M. Coulombe (Guy): Voilà, qui est venue chez nous passablement souvent. Ils ont examiné ça à fond. Mais on est satisfaits actuellement que les contrôles existent. Mais, sous réserve d'admettre qu'il n'y a pas de contrôle à 100 % étanche...

M. Gautrin: Je suis d'accord.

M. Coulombe (Guy): ...nous, on est satisfaits que notre grand système, le CRPQ, fonctionne bien. Mais il faut dire que c'est des millions et des millions de transactions annuelles, et tous les corps de police y font appel. Alors, évidemment le rôle de la Sûreté là-dedans est un rôle de gérant du grand système. Mais, même si on signe des protocoles d'entente très précis avec chacune des polices municipales, on n'est pas en mesure d'exercer toutes les... En d'autres mots, ce n'est pas un système qui est contrôlé à 100 % par la Sûreté. Sa gestion est contrôlée.

M. Gautrin: Je comprends, mais vous pouvez quand même vérifier que, si, par exemple, un policier de Vanier demande trop souvent telle ou telle information, il y a peut-être une raison que peut-être...

M. Coulombe (Guy): Oui. Puis il y a des individus qui ont été trouvés coupables de manquement, il y a des sanctions, il y a des gens qui ont été mis à la porte, il y a eu des suspensions. Mais on le raffine continuellement, et ça, en collaboration avec les organismes qui sont à la fine pointe de ça. On est satisfaits qu'actuellement notre système fonctionne bien et est bien contrôlé.

M. Gautrin: Je vous remercie.


Travaux discrétionnaires des patrouilleurs

Le Président (M. Côté): Merci, M. le député de Verdun. Moi, j'aimerais peut-être revenir au niveau de la gestion du temps. Dans le rapport du Vérificateur général, il y avait des observations à l'effet que les heures disponibles pour les travaux discrétionnaires des patrouilleurs n'étaient pas tellement planifiées. C'est les patrouilleurs qui établissent leurs propres priorités. Il manquait de coordination d'un poste à l'autre. Puis, selon les vérifications, celles-ci représentent environ 45 000 000 $ en traitements et avantages sociaux.

Alors, la recommandation du Vérificateur était à l'effet d'évaluer de façon régulière les heures disponibles pour travaux discrétionnaires et de les planifier concrètement. Et puis, dans vos remarques, vous disiez: «Nous faisons nôtres les recommandations du Vérificateur. Cependant, nous ne pouvons souscrire à l'affirmation que les heures discrétionnaires ne sont pas planifiées et que les patrouilleurs établissent leurs priorités sans coordination.» J'aimerais que vous nous entreteniez un petit peu sur ce sujet-là.

M. Coulombe (Guy): C'est à peu près le seul sujet dans le rapport du Vérificateur sur lequel on pourrait s'asseoir longuement et discuter jusqu'à temps que tout le monde soit épuisé autour de la table sur, exactement, ce que ça peut signifier.

M. Gautrin: Vous savez, on est durs à épuiser.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Coulombe (Guy): Et tout ce que je veux dire, c'est que les heures disponibles, c'est-à-dire celles qui ne correspondent pas à des activités concrètes définies – arrestation, billets, ainsi de suite – vont prendre de toute façon une dimension nouvelle avec la police de proximité. Parce que – ce qu'on disait tantôt – lorsque le comité de sécurité publique se sera entendu, après des discussions, sur certaines priorités, c'est évident que le travail du policier va prendre une dimension différente, et la planification va exister au sens large du terme parce qu'il va y avoir des priorités qui vont être données au travail policier. Est-ce que ça va être les camions, dans telle MRC, alors que, pour l'autre MRC, c'est les lacs qui sont prioritaires, ou c'est les jeunes, le samedi soir, ou c'est ci, c'est ça? Il va donc y avoir des priorités.

Il va y avoir des plages de temps où le policier va être en contact avec la population. Surtout quand on ajoute à ça le parrainage de policiers qui ont une municipalité précise à s'occuper, c'est évident qu'une partie de son temps va être des contacts. Alors, là, il faudrait parler de la qualité de ces contacts-là, il faudrait parler de la fréquence de ces contacts-là. Et on sait tous que, dans ce domaine-là, la police de proximité, la simple présence policière, est un atout. Alors, comment la calculer, en termes véritablement de productivité? Nous, on serait prêts à s'asseoir avec le Vérificateur et à avoir des longues discussions là-dessus.

Ce qu'on dit, nous, c'est qu'une vision trop mathématique ou trop critère de performance peut conduire à des excès d'utilisation de taxes, et ce n'est pas compatible avec le travail qu'on veut que les policiers fassent. C'est important que le policier, par exemple, ait une plage de temps pour aller au dépanneur du coin, pour aller dans telle industrie ou dans telle école pour discuter à la porte avec les enfants, et ainsi de suite. Après avoir dit ça, c'est évident que, ça, ça se planifie, aussi, c'est-à-dire que ce n'est pas du temps perdu. Mais chaque MRC va avoir son rythme, et chaque chef de poste va avoir à imprimer son rythme d'utilisation de ces temps-là.

Toute cette grande démonstration pour vous dire que c'est compliqué terriblement et qu'on peut avoir différentes visions là-dessus. Mais un danger dans lequel il ne faut pas tomber, c'est d'être trop mathématique là-dedans, parce que, de toute façon, la conséquence d'une analyse très fine, très coûteuse, très scientifique, va toujours se buter à une réalité, c'est qu'on a des ressources x, puis qu'il faut les utiliser au maximum. Alors, on n'a pas trop de personnel par rapport à la police de proximité.

Mais ce qu'on vous dit, ce que je peux vous dire, parce qu'on y a travaillé passablement, c'est que le nombre de policiers qui sont affectés aux MRC dans le cadre de la police de proximité est au... il y a une espèce de «bottom line». Et il ne faudra pas trop qu'il y ait des gens très malades, puis qu'il y ait beaucoup d'accidents, puis beaucoup de ci, puis beaucoup de ça, avant qu'on tombe en bas d'un seuil, là, qui... Parce qu'on a des engagements dans les contrats; la patrouille 24 heures, la présence, et ainsi de suite, il va falloir les respecter. On est capables de les respecter, au moment où je vous parle, mais il ne faudra pas trop qu'il y ait de bouleversements pour que, dans certains coins, on ait un peu de difficultés à les respecter. Donc, la notion de temps disponible est une notion complexe à gérer et à définir et à évaluer.

Le Président (M. Côté): Mais, par contre, la préoccupation est là, de votre part, elle existe.

M. Coulombe (Guy): Elle existe. Et ça va prendre une nouvelle façon, avec les rapports, dans le cadre des comités de sécurité, ça va prendre une nouvelle dimension, cette notion-là.

Le Président (M. Côté): Alors, la réflexion se continue.

M. Coulombe (Guy): Exact.


Traitement des demandes de renseignements

Le Président (M. Côté): Ensuite, j'aurais peut-être une autre question. Il y a eu, de la part du Protecteur du citoyen, dans son rapport... À titre d'exemple – il en est peut-être arrivé d'autres – il y avait un jeune homme qui avait été accusé de voies de fait, en 1990. Quelques mois plus tard, il a été acquitté. Et puis, sept ans plus tard, en 1997, il a voulu s'inscrire à un cours de formation. La commission scolaire exige alors une attestation d'absence d'antécédents judiciaires, parce que c'était pour un cours de camionneur puis qu'il fallait qu'il fournisse ça.

(11 h 50)

Alors, il y a une demande qui a été faite à la Sûreté du Québec. La Sûreté ne peut fournir de documents, puisqu'un fichier existe toujours. Il semblerait que ça ne disparaît jamais lorsqu'il y a quelqu'un qui eu déjà une accusation. Alors, l'enquête du Protecteur du citoyen confirme les faits. La Sûreté du Québec demande alors une lettre du citoyen l'autorisant à effacer son registre. Cependant, la procédure prend normalement deux semaines, ce qui aurait pour effet d'exclure le jeune homme du cours auquel il s'était inscrit. Alors, il a fallu l'intervention du Protecteur du citoyen pour accélérer le processus.

Est-ce que c'est toujours difficile comme ça d'avoir de l'information à la Sûreté du Québec? Parce que, là, c'était une question d'études en vue d'obtenir un emploi, puis il aurait pu être écarté de son cours par rapport à ce laps de temps que ça demandait. Est-ce qu'on est préoccupé par ce fait-là aussi, à la Sûreté du Québec?

M. Coulombe (Guy): Oui, je suis incapable de vous donner la réponse exacte au cas que vous mentionnez, mais le problème des renseignements personnels est un problème important, à la Sûreté, sur lequel nous avons réfléchi. Et un autre des, j'appellerais ça sous-chantiers, parce que ce n'est pas dans les quatre grandes catégories, mais une autre des réflexions qu'on a entreprises, c'est justement la réorganisation des banques de données qui existent à la Sûreté avec les mécanismes nécessaires à mettre en place pour les épurer et avoir des techniques de travail plus claires dans ce domaine-là, et ça, c'est en marche. On en a au moins, à mon avis, pour un an avant d'atteindre des solutions définitives là-dedans. C'est un problème. Peut-être que Mme Fourcaudot, qui est dans les renseignements criminels... Parce qu'il faut distinguer entre les renseignements de sécurité et les renseignements criminels. Peut-être que tu peux ajouter quelques mots sur les banques de renseignements criminels.

Le Président (M. Côté): Alors, Mme Fourcaudot.

Mme Fourcaudot (Martine): Oui. Martine Fourcaudot, Service des renseignement criminels. G-11, qui est une base de données de renseignements criminels, est indépendante des autres banques. Ce n'est pas tous les citoyens qui sont identifiés à l'intérieur de cette banque-là. Donc, il ne faudrait pas assumer que le cas de l'individu dont vous parliez tout à l'heure est concerné par ce genre d'information-là. Évidemment, je ne connais pas très bien le cas, je ne sais pas si l'incident datait d'il y a plusieurs années, mais probablement que, s'il avait fait une demande de pardon, il n'aurait pas été inscrit et il n'aurait pas...

Le Président (M. Côté): 1990.

M. Sénécal (Maurice): Je m'excuse. Maurice Sénécal.

Le Président (M. Côté): Oui.

M. Sénécal (Maurice): Pour répondre à votre question, c'est probablement un cas d'espèce, ce n'est pas un cas qui devrait se retrouver souvent. La banque d'informations policières, c'est une banque d'informations policières, c'est comme mon calepin de notes. Je peux le garder, mon calepin de notes. Mais, si le gars veut suivre un cours dans un cégep, ça ne lui nuit pas du tout. Je ne vois pas pourquoi on lui a demandé une lettre. On demande une attestation comme quoi il n'a pas de dossier criminel? S'il a été reconnu innocent, s'il a été acquitté, définitivement, il n'a pas de dossier criminel, donc il pouvait avoir sa lettre. C'est probablement un cas d'espèce. C'est sûrement rare, des cas comme ça. S'il a été acquitté... Là, on n'a pas toutes les coordonnées.

Le Président (M. Côté): Oui, mais lorsqu'ils disent qu'il est resté dans les fichiers? Il a été acquitté, mais il est toujours dans le fichier. C'est ça.

M. Sénécal (Maurice): C'est une information policière, et c'est bien mentionné dans nos fiches, tous les renseignements vont rester dans le fichier. C'est tout simplement une information policière comme si elle était dans un carnet de notes. Ça donne des pistes aux policiers pour résoudre des enquêtes éventuellement, on s'en sert, mais ça ne peut pas nuire au citoyen comme tel, définitivement.

M. Coulombe (Guy): Mais, pour l'engagement, je sais que ce cas-là fait référence à un problème plus général qui est la question des organismes qui s'informent sur les dossiers des individus avant de les engager. Nous autres, à la Sûreté, on est très stricts là-dessus. Nous, on n'est pas d'accord que la Sûreté – en tout cas, la Sûreté, on ne parlera pas des autres – puisse donner des certificats de bienséance. Nous autres, on est opposés à ça. Alors, on suit, là-dedans... Parce qu'il y a des règlements assez stricts là-dessus, on les suit à la lettre et on est très scrupuleux là-dessus. Il n'est pas question que, si quelqu'un veut engager du monde, il appelle la Sûreté, puis la Sûreté dit: Non, engagez-le pas, celui-là, et ainsi de suite. Jamais on ne s'embarquera là-dedans.

Le Président (M. Côté): Oui.

M. Coulombe (Guy): Donc, là-dessus, il y a une sécurité pour les citoyens, qui est garantie non seulement par la réglementation générale, mais par le fait qu'on la suit aussi et scrupuleusement. Par contre, ça pose toutes sortes de problèmes, c'est évident, je vous l'ai dit tantôt. On l'examine, nous. Et tout le problème de la gestion des banques d'informations, et ainsi de suite, il y a de la réflexion à faire là-dessus, il y a de la modernisation à faire là-dessus, et on est en train de l'entreprendre, cette modernisation.

Le Président (M. Côté): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, ça met fin à nos travaux, s'il n'y a pas d'autres questions. J'aimerais permettre peut-être à M. le directeur général de la Sûreté du Québec et aux autre invités, s'il y a lieu, de dire quelques mots, si ça...

M. Coulombe (Guy): Bien, écoutez, je voudrais, au nom de mes collègues, vous remercier de l'accueil de ce matin. Ça nous a permis d'expliciter un peu plus ce qui se fait à la Sûreté du Québec. Je peux vous garantir, encore une fois, et je retourne à l'introduction que j'avais faite, que, malgré les circonstances qui nous placent dans l'oeil du public, avec une commission d'enquête, je peux vous signaler qu'il y a beaucoup de travail très productif et beaucoup de travail d'envergure qui est en train de se faire à la Sûreté.

Et, comme je vous l'ai dit tantôt, si on a l'occasion éventuellement, le temps et les ressources pour faire un rapport annuel de classe qui pourrait résumer tout ça, nous en serions très fiers. Parce que je pense que la Sûreté était une bonne organisation, mais je pense qu'on prend les moyens actuellement pour qu'elle en devienne une meilleure puis que ce soit un corps policier exemplaire.

Le Président (M. Côté): Merci. M. le Vérificateur général?

M. Breton (Guy): Je souhaite à la Sûreté les ressources nécessaires pour faire un beau rapport annuel.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Côté): Alors, moi aussi, j'aimerais en profiter pour vous remercier du temps que vous nous avez accordé. Les échanges ont été très, très fructueux puis éclairants, je crois, autant pour nous. Puis aussi le travail qu'on fait, c'est pour toujours ensemble essayer d'améliorer les choses pour que la population puisse bénéficier le plus possible des services de votre organisme.

Alors, je vous remercie beaucoup ainsi que tous les membres de votre équipe, et je remercie le Vérificateur général aussi de sa présence de même que tous les collègues, ici, de la commission.

Alors, je demande maintenant que la commission se réunisse à huis clos afin de déterminer les conclusions et les recommandations et...

M. Gautrin: On peut suspendre, une minute ou deux, de manière...

Le Président (M. Côté): Justement, on va suspendre deux minutes, le temps de quitter. Les travaux sont ajournés.

(Suspension de la séance à 11 h 58)

(Reprise à 14 h 6)


Consultations particulières sur les emplois occasionnels au gouvernement

Le Président (M. Chagnon): À l'ordre! La commission de l'administration publique est réunie afin de procéder à des consultations particulières portant sur les emplois occasionnels au gouvernement du Québec, conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Laporte (Outremont) et M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon) ont été désignés membres temporaires pour la séance. Excusez-moi, Mme Charest (Rimouski) également.

Le Président (M. Chagnon): Merci. Alors, l'ordre du jour: 14 heures, la Commission de la fonction publique, suivie du Syndicat de la fonction publique du Québec, du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, du Syndicat des agents de conservation de la faune du Québec, du Syndicat des agents de la paix en services correctionnels et du Syndicat des professeurs de l'État du Québec. Est-ce que l'ordre du jour est adopté? Merci.

J'ai, en fait, 45 minutes par intervention de chacun des groupes, nous avons prévu un maximum de 45 minutes. Alors, je me permettrai de commencer tout de suite en demandant à la Commission de la fonction publique, d'abord, à M. Jean-Paul Roberge, son président, de nous présenter les gens qui l'accompagnent, tout en saluant la présence du Vérificateur général, qui est avec nous, comme c'est l'habitude en ces occasions. M. Roberge.


Auditions


Commission de la fonction publique du Québec (CFPQ)

M. Roberge (Jean-Paul): Alors, merci, M. le Président, Mmes, MM. les parlementaires, je veux d'abord présenter les autres membres de la Commission: à ma gauche, Mme Hélène Roy-Lemieux, commissaire; à ma droite, M. Michel Poirier, commissaire; et, à l'extrême droite, M. Jean Marquis, secrétaire de la Commission de la fonction publique.

Avec votre permission, M. le Président, je vais laisser au commissaire Poirier le soin d'exposer la position de la Commission relativement à la gestion des emplois occasionnels et de leurs titulaires.

M. Poirier (Michel): J'aimerais peut-être débuter en demandant une directive, parce que je sais que, le texte que nous avons préparé, sa lecture excède 15 minutes, alors je voudrais vérifier au départ, si je dois m'en tenir aux 15 minutes, je vais...

Le Président (M. Chagnon): Vous pouvez choisir. Lisez-le plus vite. Ha, ha, ha! Mais je pense que c'est le texte que nous avons reçu. C'est le texte que...

M. Poirier (Michel): Oui, c'est ça. Exactement.

Le Président (M. Chagnon): Celui-ci, hein?

M. Poirier (Michel): Oui.

Le Président (M. Chagnon): Alors, je vais prendre pour acquis que les membres de la commission l'ont déjà lu. Alors, vous pouvez quand même peut-être nous le...

M. Poirier (Michel): Vous le présenter en essayant...

Le Président (M. Chagnon): ...présenter en faisant en sorte de permettre une période de questions qui soit un peu plus longue.

M. Poirier (Michel): D'accord. Très bien, merci. Alors, la Commission a accueilli avec satisfaction l'invitation des membres de la commission parlementaire à participer à cette séance de travail sur la gestion des emplois occasionnels et de leurs titulaires. La Commission considère, d'une part, que ce genre d'intervention cadre bien avec les relations qu'elle croit devoir entretenir avec les membres de l'Assemblée nationale et, d'autre part, qu'il s'agit là d'une occasion de contribuer d'une façon positive à l'amélioration de la gestion des emplois occasionnels.

C'est dans une perspective tout à fait positive que notre organisme participe aux travaux de la commission parlementaire, et ce, en tout respect de points de vue qui pourraient diverger relativement à la question sous étude. Nous n'avons d'autre intérêt que celui de l'adoption et du respect d'un cadre de gestion des emplois occasionnels et de leurs titulaires qui soit cohérent avec les principes fondamentaux que le législateur a inscrits dans la Loi sur la fonction publique, particulièrement à son article 3, lesquels principes constituent des critères importants d'analyse des événements et des normes pertinentes.

Cette question de la gestion des emplois occasionnels et de leurs titulaires en est une à laquelle la Commission est confrontée sur une base régulière, depuis de nombreuses années. En effet, la Commission a été appelée à traiter de nombreuses plaintes relatives à certains aspects de la gestion de ces emplois et aussi à décider de nombreux appels mettant en cause le cadre de gestion applicable aux employés occasionnels. De plus, elle a réalisé des activités de vérification ainsi que des études relativement à cette question. La Commission a fait état de ses constatations et de ses recommandations dans chacun de ses rapports annuels.

(14 h 10)

Notre organisme a donc eu l'occasion, au fil de ces activités régulières, d'être sensibilisé aux divers aspects de la gestion des emplois occasionnels et d'acquérir une connaissance concrète des problèmes vécus par divers intervenants: gestionnaires, employés occasionnels ou candidats à des emplois occasionnels. Par ailleurs, depuis bientôt une dizaine d'années, la Commission a aussi été amenée à exprimer son point de vue dans une perspective plus globale, à l'occasion de certains événements particuliers mais importants que nous allons rappeler brièvement.

Ici, aux fins d'alléger la présentation, je ne ferai pas lecture de tous ces événements, rappelant simplement qu'à la commission Lemieux-Lazure à l'automne 1990, nous étions intervenus en déposant un mémoire. En décembre 1990, nous avions fait un rapport spécial à l'Assemblée nationale sur la question des concours réservés. En 1991-1992, nous avons collaboré à l'étude du Vérificateur général, intitulée le projet GERANHIUM, sur la gestion des ressources humaines. Et en janvier 1996, suite à des représentations d'un certain groupe d'occasionnels professionnels, nous avons également fait des recommandations au ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor sur la question, encore une fois, du règlement du problème des faux occasionnels.

Finalement, en septembre 1997, la Commission a émis un avis au Conseil du trésor, en vertu de l'article 83 de la Loi sur la fonction publique, relativement à certaines directives, dont celle portant sur la gestion des emplois occasionnels. C'est cet avis qui a été déposé devant l'Assemblée nationale par le Conseil du trésor, et les membres de cette commission parlementaire en ont reçu copie. Le présent rapport reprend le principal problème dont cet avis faisait état, soit ce qu'il est convenu d'appeler le problème des faux occasionnels. Nous aborderons ce problème à travers une brève présentation de ce que devrait être, à notre avis, un véritable emploi occasionnel et les caractéristiques essentiels d'un cadre de gestion des emplois occasionnels. Finalement, nous formulerons certaines recommandations en faisant une distinction entre la situation des faux occasionnels déjà en place et ce qui pourrait être fait à l'avenir pour prévenir la répétition d'une telle situation.

Alors, la position de la Commission. Il est utile, tout d'abord, de préciser que le phénomène de l'embauche des employés occasionnels dans la fonction publique est loin d'être négligeable. Selon les données apparaissant au rapport publié par le Conseil du trésor relativement à l'effectif de la fonction publique, l'effectif occasionnel représentait, en mars 1997, 13 560 personnes. En termes d'équivalents temps complet, l'effectif occasionnel représentait 11 207 ETC, soit 18,4 % de l'effectif total, donc une question très importante qui mérite qu'on y accorde beaucoup d'attention.

Les statistiques citées précédemment font état de la situation des personnes dont le statut est celui d'employé occasionnel. Cependant, une partie significative de ceux-ci occupent un emploi qui, selon la Commission, ne constitue pas véritablement un emploi occasionnel. Cette définition d'un emploi occasionnel est à la base même de la position de notre organisme relativement à la question sous étude, étant entendu que seule la dotation des véritables emplois occasionnels devrait être régie par des normes dérogatoires au régime général prévu à la Loi sur la fonction publique.

Pour la Commission, un emploi occasionnel est un emploi créé par un sous-ministre ou un dirigeant d'organisme pour une durée limitée afin de pallier à une pénurie de ressources humaines découlant d'un besoin provisoire de ressources humaines dû à trois circonstances: un surcroît temporaire de travail, la réalisation d'un projet spécifique ou l'absence d'une employée ou d'un employé.

Par ailleurs, notre organisme considère qu'un cadre de gestion des emplois occasionnels tels que nous venons de les définir devrait présenter les caractéristiques suivantes, c'est-à-dire permettre au gouvernement de satisfaire efficacement à ses besoins en main-d'oeuvre occasionnelle, mais dans le respect des principes fondamentaux établis par le législateur, notamment à l'article 3 de la Loi sur la fonction publique, et aussi dans le respect de la politique du gouvernement concernant l'embauche dans la fonction publique, particulièrement les articles 5 et 6.

Qu'en est-il du cadre de gestion adopté par le Conseil du trésor en 1997? Quant à la notion d'emploi occasionnel, il faut noter une différence fondamentale avec la définition qu'en donne la Commission, soit la présence des emplois cycliques et saisonniers. Nous y reviendrons plus loin. Quant à la constitution d'un fichier central et à son mode de fonctionnement, au recours à des appels de candidatures ou à des listes de déclarations d'aptitudes émises à la suite de concours de recrutement, et à l'allégement du cadre normatif, la Commission considère que ces nouvelles dispositions du cadre de gestion apportent solution à des problèmes qu'elle avait soulevés, de même que le Vérificateur général, et qu'elles correspondent généreusement aux caractéristiques recherchées.

Cependant, certains aspects du cadre de gestion mériteraient d'être améliorés en regard de ces caractéristiques. À cet égard, il est utile de citer les articles 4 et 5 de la directive concernant les emplois occasionnels de la fonction publique en se rappelant que l'article 4 établit la règle générale d'accès aux emplois et l'article 5, des dispositions qui, en principe, devraient régir les cas d'exception.

L'article 4. «Pour accéder à un emploi occasionnel dans la fonction publique, une personne doit être inscrite au fichier central. La sélection de la candidate ou du candidat s'effectue alors selon des critères de compétence et le respect des objectifs en matière d'accès à l'égalité parmi les personnes inscrites au fichier central qui sont identifiées au moyen d'un processus impartial assurant à toutes et à tous une chance égale d'être choisi.»

L'article 5. «Sous réserve des dispositions relatives au droit de rappel prévues aux conventions collectives de même que des dispositions prévues à l'annexe A, une employée ou un employé occasionnel doit être recruté et sélectionné parmi les personnes inscrites au fichier.»

Donc, en plus de la possibilité, voire même de l'obligation de pourvoir à un emploi occasionnel à partir des listes de rappel, les ministères et organismes pourront embaucher des personnes non inscrites au fichier central pour pourvoir à des emplois occasionnels identifiés à l'annexe A, laquelle énonce 11 situations qui dispensent de recourir au fichier central.

Le résultat concret, c'est que ce nouveau cadre de gestion contient en lui-même des mécanismes susceptibles de compromettre l'atteinte d'objectifs gouvernementaux, notamment en regard de l'égalité d'accès aux emplois et du partage du temps de travail.

Il est intéressant de noter que, selon des informations obtenues de représentants du Secrétariat du Conseil du trésor, le régime général, qu'on appelle le fichier central, sera utilisé afin de pourvoir à une minorité des emplois occasionnels, alors que les dispositions dites d'exception permettront de pourvoir à la majorité – on nous dit peut-être 60 % – des emplois occasionnels. C'est précisément dans cette partie de la dotation des emplois occasionnels, soit celle qui échappe aux mécanismes du fichier central, que se retrouve une part significative des faux occasionnels.

Ceci nous amène à proposer une typologie de ce que la Commission considère être de faux occasionnels. Cet exercice apparaît important parce qu'il permet de mettre en évidence la source même des problèmes et, par voie de conséquence, d'identifier plus aisément des voies de solution. La Commission en distingue deux catégories.

La première catégorie de faux occasionnels comprend deux groupes qui ont en commun le fait que des employés ayant un statut d'occasionnel occupent des emplois qui, en réalité, ne sont pas des emplois occasionnels mais plutôt des emplois réguliers. Le premier groupe concerne des emplois dont nous avons traité précédemment, soit les emplois cycliques ou saisonniers. La Commission réitère ce qu'elle a maintes fois soutenu à l'effet que de tels emplois ne devraient pas être considérés comme des emplois occasionnels. Il s'agit plutôt d'emplois réguliers dont la prestation est associée, par définition, à un cycle ou à une saison, mais qui se répète à chaque année. D'ailleurs, la définition d'emploi cyclique ou saisonnier qui apparaît à la directive confirme le caractère récurrent de ces emplois.

Dans le cas présent, le fait que l'on retrouve de faux occasionnels tire son origine non pas d'une mauvaise application du cadre de gestion, mais du cadre de gestion lui-même, qui ne devrait pas considérer ces emplois comme occasionnels.

Le deuxième groupe ne met pas en cause exclusivement le cadre de gestion, mais aussi son application par les ministères et organismes. Il s'agit des personnes ayant le statut d'employé occasionnel qui sont engagées d'une façon répétitive pendant de nombreuses années pour exercer des attributions d'emploi qui ne sont pas véritablement des emplois occasionnels, mais plutôt des emplois réguliers. Plusieurs de ces personnes sont embauchées en référence à un projet spécifique dont la durée devient indéfinie. Sans détenir de chiffres précis, la Commission a été amenée à constater l'existence de pareilles situations à de nombreuses reprises.

Dans ce cas, la source du problème réside en partie dans le cadre de gestion, qui ne fixe plus de limites maximales à la durée d'un projet spécifique et, en conséquence, à la durée de l'emploi de son titulaire, et en partie dans l'application qu'en font les ministères et organismes, dans un contexte où ils n'ont pas vraiment à répondre de leurs décisions.

Quant à la deuxième catégorie de personnes, que nous assimilons à des faux occasionnels, il s'agit des personnes dont le nom apparaît sur une liste de rappel et qui, en conséquence, ont un accès préférentiel aux emplois occasionnels. Ces personnes peuvent demeurer pendant plusieurs années sur une liste de rappel et exercer au besoin un recours exécutoire pour faire respecter ce droit préférentiel.

(14 h 20)

La Commission n'a pas à juger de la légitimité de l'action syndicale lorsqu'il s'agit de protéger ou de promouvoir les droits sociaux et économiques des syndiqués. Il faut cependant constater que, dans ses effets, l'exercice des droits préférentiels d'accès à plusieurs emplois occasionnels contrecarre les objectifs gouvernementaux identifiés précédemment quant au partage équitable du temps de travail entre les citoyens et d'atteinte de certaines cibles en matière d'accès à l'égalité pour certains groupes. Ici, le problème se situe essentiellement au niveau du cadre de gestion, qui confère des privilèges à certains groupes au détriment d'autres citoyens.

Il résulte des situations décrites précédemment essentiellement trois types de conséquences. La première, c'est que des emplois réguliers sont pourvus à partir d'un cadre de gestion qui ne devrait pas leur être appliqué. Les emplois réguliers doivent être pourvus selon la Loi sur la fonction publique, c'est-à-dire à la suite de concours. La deuxième, c'est que des personnes occupent des emplois réguliers tout en étant maintenues indûment, souvent pendant plusieurs années, dans une situation précaire. Et la troisième, c'est que de véritables emplois occasionnels ne sont pas accessibles à plusieurs citoyens à cause des listes de rappel, et ce, dans le non-respect de la politique d'embauche du gouvernement.

La Commission formule ses recommandations en deux parties, la première visant les employés occasionnels déjà en place et la seconde visant des façons de faire pour l'avenir. Pour ce qui est des occasionnels déjà en place, la Commission réitère la recommandation maintes fois exprimée à l'effet de régulariser la situation des occasionnels en place depuis plusieurs années au moyen d'une modification législative conférant la permanence à ces personnes. La Commission tient à rappeler que cette recommandation vise toutes les catégories d'emploi et non pas seulement les employés de la catégorie des professionnels.

En tout respect pour l'opinion contraire, la Commission considère que la Loi sur la fonction publique, particulièrement son article 43, n'autorise pas le gouvernement à tenir des concours de recrutement réservés à certains de ses propres employés ayant un statut d'occasionnel, d'autant plus que les seuls candidats admissibles à de tels concours sont des employés dont le statut porte à faux, comme le dit l'expression «faux occasionnels».

Il est difficile de croire que la loi légitimerait un accès privilégié par voie de concours à des emplois réguliers à des personnes dont le statut ne respecte pas les normes applicables. Quoi qu'il en soit, la Commission considère que, même si c'était légal, ce ne serait pas opportun de tenir de tels concours. Ces concours sont inutilement coûteux en plus de ne constituer qu'un rite où l'on demande à des personnes de se qualifier à des emplois qu'ils occupent depuis plusieurs années à la satisfaction de leurs supérieurs. Finalement, de tels concours n'apportent pas de solution concrète au problème des faux occasionnels, car ceux-ci n'ont aucune garantie d'accéder à un emploi permanent, souvent leur propre emploi. D'ailleurs, certaines personnes s'étant déjà qualifiées lors d'un concours réservé à des occasionnels détiennent toujours leur statut d'employé occasionnel.

Pour ce qui est de l'avenir, la Commission suggère un certain nombre d'éléments de réflexion susceptibles d'éviter de recréer la situation des faux occasionnels et de contribuer à l'amélioration du cadre et de certaines pratiques de gestion des emplois occasionnels. La Commission réitère que les emplois cycliques et saisonniers ne sont pas de véritables emplois occasionnels et qu'ils devraient, en conséquence, être régis par le régime général applicable aux emplois réguliers, quitte à prévoir certains mécanismes particuliers relatifs à l'acquisition de la permanence en raison du fait que ce ne sont pas des emplois à temps plein. Il est intéressant de rappeler que, même dans la définition qu'en donne le cadre de gestion, le caractère récurrent des emplois est reconnu.

Quant aux emplois réguliers occupés par des personnes ayant un statut d'employé occasionnel – faux projet spécifique – il faut reconnaître que cette situation est plus difficile à gérer ou à normaliser, dû au fait que, dans certains cas, les emplois peuvent avoir au départ l'apparence d'un véritable emploi occasionnel rattaché à un projet spécifique puis graduellement se transformer en emplois réguliers. La difficulté réside alors dans la qualification de l'emploi en regard des normes applicables.

La Commission formule donc la proposition suivante afin d'aider à solutionner le problème dans le respect des principes fondamentaux de la Loi sur la fonction publique: premièrement, que l'on fixe dans la directive une durée maximale à un projet spécifique, durée qui soit réaliste, qui tienne compte des besoins de l'administration; deuxièmement, que les nominations aux emplois reliés au projet spécifique à partir du cadre de gestion applicable aux emplois occasionnels ne puissent être faites qu'à partir de listes de déclarations d'aptitudes émises à la suite de concours; troisièmement, que les nominations à des emplois reliés à un projet spécifique établissent au départ la durée maximale de l'emploi à l'intérieur, évidemment, de la limite prescrite par la directive. En pareil cas, si les termes prévus à l'acte de nomination sont respectés, la Commission considère qu'il s'agirait d'un véritable emploi occasionnel. S'il devait arriver que les activités reliées au projet spécifique se continuent après la limite permise, il y aurait lieu de permettre au titulaire de l'emploi de revendiquer, par la voie d'un recours, le statut de permanent.

Cette solution inciterait l'administration au respect de ses propres directives. De plus, elle donnerait à l'employé, éventuel faux occasionnel, un outil permettant de régulariser son statut tout en évitant de lui faire supporter le non-respect du cadre de gestion. Enfin, puisque, au départ, la nomination serait issue d'une liste de déclarations d'aptitudes, le principe de sélection au mérite aurait été respecté.

Quant aux emplois occasionnels pourvus à partir de listes de rappel, la Commission réitère que le problème des listes de rappel réside dans ses effets, qui compromettent les objectifs ou les orientations énoncées notamment à la politique d'embauche. On comprendra facilement que, si la majorité des véritables emplois occasionnels devait être pourvue, en marge du fichier central, en application de listes de rappel, le gouvernement devrait en toute logique renoncer aux objectifs généraux mentionnés précédemment, ce qui, à notre avis, ne serait pas opportun.

Des moyens devraient donc être trouvés, permettant, à défaut d'éliminer les effets négatifs, de les limiter le plus possible. Les droits de rappel pour les emplois occasionnels devraient éventuellement être limités à certains emplois spécifiques préidentifiés, relativement spécialisés et requérant une formation particulière pour en exercer les attributions. De plus, le gouvernement devrait conserver la préoccupation de rendre accessible la majorité des emplois occasionnels aux citoyens inscrits au fichier central.

La Commission remercie les membres de la commission parlementaire de lui avoir fourni l'occasion d'exprimer ses commentaires sur cette question. Elle souhaite que son intervention puisse contribuer d'une façon positive à l'amélioration de la gestion des emplois occasionnels et de leurs titulaires, et elle demeure à votre disposition pour fournir tout complément d'information. Merci.

Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup. Évidemment, notre commission se réunit d'abord pour faire suite au dépôt de votre rapport à l'Assemblée nationale, que vous avez déjà rendu public en octobre 1997. Nous avons tenu à regarder un peu plus en profondeur l'ensemble du dossier des occasionnels, qui nous apparaissait être un peu problématique, suite au dépôt de votre rapport. Je vous remercie pour votre participation aussi à cette commission.

Peut-être deux questions, une de détail sur le plan du... Dans la page 5 de votre document, vous donnez quelques chiffres, vous nous amenez quelques chiffres. Vous prétendez que vous les avez trouvés dans le rapport publié par le Conseil du trésor relativement à l'effectif de la fonction publique, l'effectif occasionnel représentant, en mars 1997, 13 560 personnes. Avez-vous l'endroit où vous avez vu ça?

Moi, j'ai un document du Conseil du trésor, ici, qui me donne, sur les cinq dernières années, 1992-1993, 1993-1994, 1994-1995, 1995-1996, 1996-1997, l'évolution du personnel occasionnel en ETC et en excluant les étudiants: j'en ai 13 419, en 1992-1993, pour 26 878 personnes; en 1993-1994, j'ai 10 762 occasionnels, pour 23 742 personnes; en 1994-1995, 9 794 occasionnels, pour 21 611 personnes; en 1995-1996, 9 693, pour 20 744 personnes; et finalement, pour 1996-1997, 10 682 occasionnels, pour 21 998 personnes.

C'est peut-être un détail, mais il me semble que le chiffre que vous avancez, de 13 560 personnes, et qu'on va retrouver d'ailleurs dans le même dossier, Effectif de la fonction publique du Québec, que nous avons – on l'a retrouvé – ne correspond pas au chiffre qu'on a reçu du Conseil du trésor, à une autre donnée statistique qu'on a reçue du Conseil du trésor.

M. Poirier (Michel): Je suis un peu mal pris pour commenter là-dessus. Nous avons pris les données dans le rapport officiel sur le tableau de l'effectif.

Le Président (M. Chagnon): Oui. On a un rapport officiel, puis un rapport officieux, ça a l'air, du Conseil du trésor.

M. Poirier (Michel): C'est possible.

Le Président (M. Chagnon): Deuxième point. La définition d'un emploi occasionnel que vous faites, est-ce que c'est la même définition que l'on fait au Conseil du trésor?

(14 h 30)

M. Poirier (Michel): Non. La seule distinction, c'est la présence, dans la définition qu'en donne la directive, donc, du Conseil du trésor, des emplois cycliques et saisonniers. C'est la seule différence.

Le Président (M. Chagnon): Le mérite de votre définition, c'est d'être plus claire, de nous démontrer d'avance où on peut retrouver de faux occasionnels parce que, comme vous le dites dans votre document, les emplois cycliques, par exemple, les gens qui travaillent l'été le long des routes ou au ministère du Revenu après la période d'impôt, c'est un travail cyclique, mais c'est un travail qui revient année après année.

M. Poirier (Michel): Qui est récurrent.

Le Président (M. Chagnon): L'herbe pousse à tous les étés puis on fait les rapports d'impôts à tous les ans. Alors, inévitablement ça prend des gens qui vont s'occuper des unes et des autres choses.

M. Poirier (Michel): La directive définit «emploi cyclique et saisonnier», puis «emploi occasionnel», en disant «un emploi cyclique et saisonnier», et reprend la définition que nous donnons. Donc, il y a déjà une petite nuance dans la directive même. Mais, pour ce qui est de l'application de la directive, ça couvre les deux.

Le Président (M. Chagnon): On a trouvé comme personnel occasionnel – bien, ce n'est plus une occasion, mais c'est devenu quasiment un fait courant de notre vie – des gens qui ont été engagés, par exemple, par le ministère de la Sécurité publique pour le sinistre d'inondation au Saguenay, qui ont passé ensuite au sinistre suivant, le verglas dans Lanaudière, qui sont rendus dans le verglas sur la rive sud. Le prochain sinistre... Leur projet spécifique s'interrompt ou devient un nouveau projet spécifique. On garde les mêmes occasionnels. Vous les considérez aussi comme faux occasionnels ou...

M. Poirier (Michel): Nous reconnaissons qu'il puisse y avoir des projets spécifiques où il y a des emplois occasionnels. Évidemment, l'exemple que vous donnez peut être sujet à interprétation selon que le petit dénominateur commun est le sinistre, auquel cas ça pourrait être un vaste projet spécifique. Mais, si ça devait être identifié à une situation précise, soit le verglas, normalement, ça devrait s'arrêter là, mais je pense qu'il y aurait d'autres endroits dans la directive sur les occasionnels pour embaucher ces gens-là en dehors d'un projet spécifique. Je pense normalement à un surcroît de travail qui est dû à un événement qui est tout à fait imprévu ou même à une situation d'urgence.

Le Président (M. Chagnon): Pendant que vous lisiez votre mémoire, j'ai pris de l'avance un peu, je me suis avancé sur le mémoire du Syndicat de la fonction publique qui va vous suivre. Parmi ses recommandations, il faisait la suivante: On vous demande, on suggère que vous enquêtiez sur les raisons particulières qui ont fait en sorte qu'il y ait une augmentation aussi importante des faux occasionnels affectés à des projets spécifiques. Sans avoir fait une enquête, avez-vous des opinions là-dessus? Ou avez-vous fait une enquête?

M. Poirier (Michel): On n'a pas fait d'enquête spécifiquement sur cette question-là, mais, dans le cadre de nos activités, on a été amené à constater un certain nombre de situations apparentées à ça. En tout cas, dans certains cas, on voit au départ que ce sont des activités permanentes. Ça n'a rien à voir avec un projet spécifique, mais on peut noter dans de la documentation au dossier que le ministère dit: Bon, je n'ai pas d'emplois permanents, je n'ai pas d'effectifs permanents pour faire le travail. Alors, je vais faire un projet spécifique, j'ai un budget pour embaucher des occasionnels. On a vu des projets spécifiques – j'en ai plusieurs en tête – débuter en 1989 et qui roulent encore, où le ministère indique dans des documents que ce sont des activités à caractère permanent, mais...

Le Président (M. Chagnon): Et l'accroissement de ce nombre de projets à caractère spécifique?

M. Poirier (Michel): Les données statistiques là-dessus, je vous avoue, nous, on n'en a pas vraiment. C'est difficile parce que... D'autres personnes pourront peut-être vous éclairer là-dessus, mais les systèmes en place nous permettent difficilement de... Peut-être que le secrétariat du Conseil du trésor, via des informations émanant des ministères, a l'information.

Le Président (M. Chagnon): Oui. Bien sûr que le secrétariat va passer demain. C'est évidemment une question qu'on va lui poser. Ne peut-on pas présumer que c'est une façon peut-être plus facile de faire une gestion de personnel en ayant moins de contraintes?

M. Poirier (Michel): On pourrait, oui. C'est évident qu'on peut le penser parce que ces gens-là ont un statut précaire. Et j'ai vu moi-même, dans des projets spécifiques, des individus, qui sont là depuis 1989, être renouvelés à l'occasion pour trois mois, puis ensuite six mois, un an, des durées qui variaient pour des raisons qui n'étaient pas évidentes. Alors, ces gens-là, évidemment, sont dans une situation précaire.

Le Président (M. Chagnon): Absolument. Il y a eu un nettoyage de fait des listes d'occasionnels en 1990-1991, 1991-1992. On a titularisé plusieurs milliers de postes d'occasionnels, à ce moment-là.

M. Poirier (Michel): Vous référez probablement aux conversions de postes...

Le Président (M. Chagnon): Oui.

M. Poirier (Michel): ...à la suite des concours réservés en 1990-1991.

Le Président (M. Chagnon): C'est ça. En 1991-1992, de mémoire. C'est à peu près ça, il y a sept, huit ans, et il y en avait plus de 5 000 qui avaient été convertis ou titularisés, de ces postes-là. C'est la même suggestion que vous faites cette année, dans le fond, de retitulariser des postes qui ont été jugés occasionnels sur des projets spécifiques qui traînent et qui durent depuis tout le temps puis dont on ne voit pas la fin.

M. Poirier (Michel): C'est-à-dire que les recommandations que nous formulons, on les divise en deux parties, c'est-à-dire les gens qui sont là et dont il serait reconnu qu'ils occupent depuis, je ne sais pas, moi, cinq, six, sept ans, des emplois réguliers. Au lieu de tenir des concours réservés pour les mettre sur des listes de déclaration d'aptitudes sans garantie, que ça soit réglé que... Là, c'est fondé sur une interprétation de la Loi sur la fonction publique. Nous, on pense que le concours réservé n'est pas permis. On dit: Modifiez comme ça s'est fait en 1983, modifiez la Loi sur la fonction publique pour leur accorder de ce fait le statut de permanent. Et l'autre type de recommandation, c'est pour l'avenir, pour éviter que ces choses-là, ces situations-là puissent se reproduire en mettant, dans le fond, une clé dans la main de l'éventuel faux occasionnel – sur projet spécifique, à tout le moins – pour éviter que la situation ne perdure. C'est pour ça qu'on divise...

Le Président (M. Chagnon): C'est clair. J'ai compris que le Vérificateur général avait une opinion tout à fait semblable à la vôtre sur l'ensemble de votre dossier. Est-ce qu'il y a d'autres questions? M. Côté.

M. Côté: Lorsqu'on parle d'emplois occasionnels, d'employés occasionnels, on dit qu'il y en a deux catégories. Alors, il y a les faux occasionnels et les occasionnels. Il y a deux catégories de faux, également. Mais, par contre, au niveau de la statistique, du nombre, est-ce qu'on peut savoir combien il y en a, de faux occasionnels?

M. Poirier (Michel): Moi, j'aimerais bien le savoir. Tout ce qu'on sait, nous, c'est que, dans les statistiques relatives aux employés occasionnels, ces individus-là, qui sont répertoriés, ont un statut d'employé occasionnel mais on ne sait pas, parmi ces gens-là, quels sont ceux qui, en réalité, exercent un emploi qui est un emploi régulier. On n'a aucune indication, aucune idée.

M. Côté: Ce n'est pas possible, ça, de savoir que quelqu'un, ça fait cinq ans, six ans qu'il est au même poste de travail, qu'il n'a pas occupé d'autre poste, toujours au même poste, qu'il a encore son statut d'occasionnel.

M. Poirier (Michel): Moi, je vous dis l'avoir constaté dans certains dossiers, mais à l'occasion d'une activité particulière. Je me suis adonné à le constater, mais ce n'est pas, à ma connaissance, une donnée qui existe au système. En fait, ça serait peut-être même étonnant, parce que faux occasionnels, je ne vois pas que les gens soient enregistrés comme tels.

M. Côté: En tout cas, moi, je trouve ça un peu déplorable qu'il ne soit pas possible d'avoir de telles données parce que, si on veut aller de l'avant pour justement régulariser davantage au niveau des emplois occasionnels, comment on va s'y prendre pour faire la différence entre les deux catégories de faux occasionnels?

M. Poirier (Michel): Ça m'apparaît évident que ça nécessiterait, à moins que quelqu'un ait les données, un inventaire pour chacun des ministères et organismes de la situation des employés occasionnels pour fins d'analyser dans chaque cas ce qu'il en est.

Le Président (M. Chagnon): Je remarque qu'à la page 8 du mémoire du Syndicat de la fonction publique du Québec , qui encore une fois va vous suivre, en page 8 du rapport... Je ne sais pas si vous l'avez. Vous n'avez peut-être pas de copie. Peut-être qu'on pourrait leur fournir une copie pour qu'on puisse... Quelqu'un va...

(14 h 40)

M. Côté: On aurait dû entendre l'autre groupe avant! Ha, ha, ha!

Le Président (M. Chagnon): Oui, c'est ça. Enfin, le mémoire indique, selon les sources du Syndicat, qu'en 1994 les faux occasionnels cycliques, projets à long terme et saisonniers, correspondaient à 1 057 postes ETC. En 1997, ils correspondaient à 1 656 postes ETC. Évidemment, le secteur du Syndicat des fonctionnaires. C'est une évaluation faite par le Syndicat, ici. Ça nous donne une idée, un ordre de grandeur.

M. Poirier (Michel): Oui. Si vous me permettez une remarque, je crois que, pour ce qui est des emplois cycliques et saisonniers, la probabilité, c'est qu'on les retrouve au niveau du Syndicat de la fonction publique, fonctionnaires et ouvriers, davantage que...

Le Président (M. Chagnon): J'en conviens. Davantage que chez les professionnels. Davantage, c'est sûr.

M. Poirier (Michel): Donc, c'est en progression.

Le Président (M. Chagnon): La progression, vous remarquerez, est aussi importante en ce qui concerne les projets à long terme, donc ce qu'on appelle des projets spécifiques qui...

M. Poirier (Michel): Il faut reconnaître que la tentation est probablement réelle, à partir du moment où il y a des coupures de postes, de trouver des moyens de compenser à un moment donné en recourant à de la main-d'oeuvre occasionnelle. C'est un phénomène qui est difficile à cerner très précisément.

Le Président (M. Chagnon): Sauf que ça entraîne une précarisation de la fonction publique.

M. Poirier (Michel): Oui.

Le Président (M. Chagnon): Mais pas nécessairement une amélioration de services pour tout ça. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Oui, M. Marsan.

M. Marsan: Oui. Merci, M. le Président. Moi aussi, j'essaie de comprendre un peu la situation. On avait déjà eu des présentations. Depuis, il y a eu une directive du Conseil du trésor, selon mon entendement. Mais je pense qu'on pourrait au moins s'entendre rapidement. On donne un exemple de 11 207 équivalents temps complet occasionnels. Je pense qu'on pourrait, j'imagine, en tout cas, dire que ça n'a pas d'allure. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas à un moment donné.

Moi, j'essaie de me rappeler mes expériences passées dans le domaine hospitalier et, oui, ça arrivait des fois que, dans des catégories d'employés, par exemple les infirmières, il y avait trop de temps partiel ou d'occasionnels ou d'emplois précaires. Ce qu'on faisait, on s'assoyait avec le syndicat puis on regardait... Parce que finalement la dépense est là. On la fait, la dépense, et on est obligé de supporter un nombre d'employés.

Donc, il n'y a pas, en arrière d'une décision comme ça, une économie vraiment réelle. Peut-être que ce n'est pas 11 000 qu'il faudrait afficher, peut-être que c'est 10 000. En tout cas, il y a toujours une marge de manoeuvre où on a besoin de vrais occasionnels. Dans l'ensemble, je pense qu'il y a un montant... En tout cas, quand on arrive à 11 000, je suis sous l'impression – vous semblez me dire que oui – que c'est beaucoup trop.

À partir de ce moment-là, on a la directive du Conseil du trésor; je pense que c'est en septembre 1997. Moi, j'aimerais simplement vous demander de reprendre les critiques que vous faites à l'endroit de cette directive-là, particulièrement pour les cycliques. Est-ce que vous nous dites que finalement on a réglé en partie le problème et pas complètement? Jusqu'où on est rendu? Pourriez-vous, dans vos mots à vous, nous donner le portrait exact à ce moment-ci, selon la perception de la Commission aujourd'hui?

M. Poirier (Michel): C'est-à-dire que, si vous permettez, ce que nous disons, c'est qu'il y avait eu des critiques de divers ordres relativement au cadre de gestion antérieur et plusieurs solutions ont été apportées par le nouveau cadre de gestion. Mais, pour ce qui est de la question des faux occasionnels, notre prétention, c'est qu'il n'y a pas véritablement de solution qui est apportée par cette directive-là de 1997, il y a tout ce qu'il faut pour que la situation, qui est dénoncée d'ailleurs depuis 1983 par la commission Bisaillon, demeure.

Donc, sur cette question-là, on dit: Il n'y a rien de réglé, d'après nous. Et là on fait des distinctions selon qu'on n'est pas d'accord avec la directive pour ce qui est des emplois cycliques et saisonniers parce que, d'après nous, ce ne sont pas des emplois occasionnels. Alors, si ce sont des emplois occasionnels, c'est correct qu'ils soient gérés par cette directive-là. Mais, si ce ne sont pas des emplois occasionnels, ils ne devraient pas être dotés à partir d'un régime qui déroge à la Loi sur la fonction publique.

Ça, c'est un groupe. Les autres groupes sont les gens qui sont engagés de façon répétitive et prolongée, pendant des années, sur des projets spécifiques ou d'autres formules et qui demeurent à statut précaire pendant cinq ans, 10 ans et même plus.

Et la dernière situation, c'est celle des listes de rappel qui, comme on le mentionne, au niveau des effets, contredit l'objectif que le gouvernement s'est donné dans sa politique d'embauche: de permettre – c'est l'article 5 de la politique – au plus grand nombre de personnes différentes possible de se partager le temps de travail. Ce qu'on constate, c'est que le système permet le système qui serait correct pour ça, mais ne couvre que la minorité des emplois occasionnels. La majorité des emplois occasionnels sont dotés à partir de systèmes dérogatoires au fichier central.

M. Marsan: O.K. Tantôt, je vous ai entendu dire – et corrigez-moi – que vous n'étiez pas tellement en accord avec la directive du Conseil du trésor. C'est ce que vous avez laissé entendre.

M. Poirier (Michel): Sur la définition d'emploi occasionnel.

M. Marsan: Elle ne règle pas vraiment le problème.

M. Poirier (Michel): Oui.

M. Marsan: Donc, on a une difficulté. Et là je reprenais le rapport du Vérificateur général qui, lui, semblait dire que ça peut jusqu'à un certain point répondre à certaines recommandations exprimées. En tout cas, j'essaie juste de voir. On sait que tantôt on va écouter le Syndicat de la fonction publique. J'ai l'impression que les gens vont sûrement rejoindre un peu les préoccupations que vous avez. Si la directive du Conseil du trésor, finalement, n'a pas atteint son but, il faudrait en faire une autre...

M. Poirier (Michel): En fait, c'est que, quand on parle...

M. Marsan: ...et vite.

M. Poirier (Michel): ...du nouveau fichier central par rapport à ce qu'il y avait avant, nous considérons que c'est une grande amélioration. Et il y a plusieurs autres aspects qui sont de grandes améliorations qu'on souligne en page 6 du mémoire.

M. Marsan: O.K.

M. Poirier (Michel): Recours à des appels de candidatures, listes de...

M. Marsan: Quand vous parlez d'améliorations... Excusez-moi.

M. Poirier (Michel): Par rapport à la situation antérieure.

M. Marsan: Mais si on parle de 11 207 équivalents temps complet, combien là-dessus... Est-ce qu'il y en a qui vont être convertis d'occasionnels en temps complet ou permanents?

M. Poirier (Michel): Pour ce qui est de la conversion, non, il n'y a rien d'assuré avec ça. Ce qu'on dit, c'est que, par exemple, le fichier central, pour nous, c'est une bonne façon de fonctionner, on est d'accord avec ça. Mais, ce qu'on constate, c'est que ce système-là ne sert à combler que la minorité des emplois occasionnels. Donc, il a beau, dans cet aspect-là, être correct, mais il contient en lui-même des exceptions qui font que finalement il ne s'applique pas à la majorité des emplois occasionnels.

M. Marsan: O.K. Avec la permission de M. le Président, pour ma compréhension peut-être personnelle, on part avec un problème où on a trop d'occasionnels, tout le monde en convient: 1 200. On devrait diminuer ça. On passe ça à la dépense, on est obligé de les payer de toute façon. Ça enlève de la motivation aux gens parce que... Évidemment, s'ils savaient où ils s'en vont depuis cinq ans, depuis sept ans, ça leur donnerait une motivation accrue d'avoir un poste, et pour beaucoup – je pense qu'on est tous fiers des employés de la fonction publique – je pense que ça donnerait sûrement un élément de motivation additionnel.

Alors, il y a une directive du Conseil du trésor. La directive ne s'adresse qu'à un groupe. Tant mieux pour ce groupe-là – vous semblez le signifier – mais ça n'atteint pas l'objectif que j'ai dit au début: on a 11 207 équivalents temps complet et on veut les réduire. Ces gens-là travaillent de façon équivalente à temps complet. Donc, on a tous l'ambition – et j'imagine le Conseil du trésor aussi; il y a des fonctionnaires là-dedans – de diminuer ce nombre-là pour que ces 11 207 personnes équivalents temps complet, ça puisse peut-être tomber seulement à 2 000 parce que les postes auront été affichés, ils auront obtenu des permanences, ils sauront davantage où ils s'en vont, ils auront un cadre économique et social beaucoup plus identifié.

Alors, là, ce que j'essaie de bien saisir dans l'échange que nous avons, c'est: Est-ce que je suis dans la bonne direction? «Faut-u» pousser en demandant au Conseil du trésor, par exemple, suite aux auditions que nous avons: Écoutez, peut-être que c'est un pas dans la bonne direction, ce que vous avez dit, mais on voudrait aller beaucoup plus loin, on voudrait diminuer de façon importante: de 11 207, on aurait un objectif... Peut-être qu'on voudrait en avoir 10 000, postes affichés, et on le règle, le problème, pour environ 10 000 employés pour lesquels on a une appréciation, en tout cas. Je «saisis-tu» bien la dynamique qui se passe, selon vous?

M. Poirier (Michel): Nous divisons nos recommandations en deux. Premièrement, les gens qui sont là, qui sont en place. Dans les gens dont on parle, qui sont répertoriés comme occasionnels, il y a, selon notre prétention – mais on ne peut pas dire le nombre – un certain nombre de personnes qui ne sont pas des employés occasionnels. Et donc, si on leur applique la recommandation que nous faisons, modification législative, une fois que c'est identifié puis qu'on leur attribue la permanence, si vous permettez, ils changent de colonne dans le tableau des effectifs, eux autres, pour s'en aller du côté des permanents, donc il y a déjà moins d'occasionnels.

Les cycliques et saisonniers...

M. Marsan: Vous n'avez pas le nombre, hein, en passant?

M. Poirier (Michel): Non.

M. Marsan: O.K. Mais quand même.

M. Poirier (Michel): Et même chose pour les cycliques et saisonniers. Si on dit: Ils ne sont plus assujettis au régime des occasionnels mais au régime général, bien ils y sont déjà, dans nos statistiques. Eux autres aussi, ils changent de colonne. Ça nous amène à quel chiffre? Je l'ignore. Mais, chose certaine, d'après nous, en tout cas, pour ce qui est des principes en cause, on s'en va dans la bonne direction parce que les véritables occasionnels sont gérés par le cadre des emplois occasionnels, et les gens ne sont pas maintenus indûment en situation précaire pendant des années.

(14 h 50)

M. Marsan: Mais le fait que vous ne soyez pas capable de nous dire exactement combien il y en a de postes saisonniers ou cycliques... Vous n'avez pas un cahier des postes, à la fonction publique, qui identifie...

M. Poirier (Michel): Ce n'est pas de notre...

M. Marsan: C'est chacun des ministères, à ce moment-là? Il n'y a pas moyen d'avoir cette information-là, qui serait intéressante? Moi, ma préoccupation, ça n'a pas d'allure – vous l'avez dit vous aussi – 11 207 occasionnels équivalents temps complet. Donc, c'est combien, le seuil qui serait raisonnable?

Moi, je peux comprendre qu'il peut y avoir des occasionnels, des vrais, dont on a besoin dans un ministère plus que dans un autre, à un moment donné. Mais, pour ceux qui sont là depuis plusieurs années, peut-être qu'on pourrait régler le problème. Puis je pense que, au-delà de tout ça, il y a deux préoccupations: il y en a une, économique, puis il y en a une qui est aussi la motivation du personnel. Il me semble qu'on pourrait atteindre ces deux objectifs-là. En tout cas, c'est le commentaire que je vous fais.

Le Président (M. Chagnon): Merci. M. Côté.

M. Côté: Bon, j'aurais peut-être une autre question, moi. Lorsqu'il y a un emploi, un poste qui est occupé par un employé occasionnel depuis quatre, cinq, six ans, et puis que ce poste-là, on l'ouvre pour qu'il devienne permanent, alors, la personne qui l'a occupé de manière occasionnelle pendant quatre, cinq, six ans – même, il y en a jusqu'à 10 ans – elle est obligée de passer par le même processus, c'est-à-dire passer par un concours, puis...

M. Poirier (Michel): Si vous permettez, avant d'arriver au concours de recrutement, il y a une politique, au gouvernement, sur les modes de dotation, qui donne des préséances aux gens en disponibilité, par exemple, ensuite à des gens qui vont exercer des droits de retour. Il y en a toute une série, là: il y a la mutation, l'affectation et, au bout de la ligne, c'est le concours de recrutement.

La personne, n'étant pas un fonctionnaire, ne pourrait pas y accéder autrement que par un concours de recrutement, après qu'on aura respecté toutes les...

M. Côté: Mais vous trouvez ça équitable qu'une personne, ça fait quatre, cinq, six ans qu'elle est renouvelée à chaque année ou même aux six mois pour la même fonction, à un même poste, et puis qu'après avoir, pendant cinq, six ans, bien accompli sa tâche, cette personne-là, qu'elle soit obligée de passer par un concours qui va être préparé de façon tellement pointue, assez souvent, que cette personne-là peut être éliminée? Est-ce que vous trouvez ça équitable?

M. Poirier (Michel): Nous ne sommes pas d'accord avec ça. Notre recommandation, c'est: modification législative. Ne faites pas de concours réservé seulement, modification législative, et accordez-leur leur statut de permanent. Point. Ce n'est certainement pas la situation idéale.

Le Président (M. Chagnon): C'est la situation actuelle que vous voudriez voir changer, en fait.

M. Poirier (Michel): Oui.

Le Président (M. Chagnon): Eh bien, on vous remercie. Je remercie les représentants de la Commission de la fonction publique, et je vais inviter le Syndicat de la fonction publique du Québec. M. Roy, bienvenue. Est-ce que vous auriez l'amabilité de nous présenter les gens qui vous accompagnent? Et nous vous écoutons.


Syndicat de la fonction publique du Québec inc. (SFPQ)

M. Roy (Serge): Alors, je vous remercie de nous recevoir à cette commission parlementaire. Mon nom est Serge Roy, je suis président du Syndicat de la fonction publique du Québec, et je suis accompagné de M. Jean Robert, qui est vice-président à l'exécutif de notre organisation et qui est responsable du service de la négociation; également, M. Gilles Lavoie, qui est responsable du service des recours et de l'application des conditions de travail et, à ce titre-là, il a plus particulièrement à s'occuper du dossier des occasionnels.

Le Président (M. Chagnon): Nous vous souhaitons la bienvenue.

M. Roy (Serge): Alors, je vais vous présenter succinctement le mémoire que nous avons préparé pour l'occasion. La question des faux occasionnels, comme on en parle de plus en plus maintenant, est une question sur laquelle le SFPQ s'est penché et est intervenu à maintes reprises et continue d'intervenir en ce moment même pour essayer de trouver des solutions et faire en sorte que les personnes que nous représentons obtiennent, d'une certaine façon, je dirais, un respect, obtiennent une certaine stabilité d'emploi parce que nous constatons qu'au fil des années un grand nombre de ces personnes-là, effectivement, devraient être considérées comme des permanents. Et, pour un grand nombre d'autres, qui ne sont peut-être pas dans une position pour devenir immédiatement du personnel permanent, nous pensons qu'il y a moyen d'améliorer considérablement la gestion des emplois occasionnels pour faire en sorte que ces gens-là sachent un petit peu où ils s'en vont dans la vie. Parce que la problématique des occasionnels, ça n'est pas seulement une question d'application d'une directive, je vous dirais, c'est que nos gens vivent également des situations, vivent les conséquences de la précarité.

Alors, les représentations que nous avons déjà faites dans le passé et notre connaissance de la réalité qui est vécue par nos membres nous amènent à dire que le Conseil du trésor de même que plusieurs ministères et organismes ont recours à du personnel occasionnel pour répondre en réalité à des besoins de personnel permanent. Et comment se fait-il qu'on en arrive à une situation comme celle-là? Il n'y a pas d'explication documentée, il n'y a pas d'enquête approfondie qui a été faite ni par nous ni par d'autres, à ma connaissance, mais je pense que le fait des réductions d'effectifs, des compressions budgétaires des dernières années a fait en sorte que les ministères, n'obtenant pas la possibilité de remplacer le personnel permanent qui quitte la fonction publique, trouve de cette façon-là une manière de poursuivre les activités, d'assumer leurs responsabilités et de réaliser leur mandat.

Dans notre membership, vous savez que le SFPQ représente environ 40 000 travailleurs et travailleuses de la fonction publique dans les différents ministères et organismes. C'est un chiffre arrondi, bien entendu; ça fluctue, et surtout à la baisse, je vous dirais, depuis quelques années. Alors, 40 000 personnes, et là-dessus il y en a plus de 10 000 qui sont des occasionnels, ça veut donc dire qu'à peu près 26 % de nos membres sont des personnes à statut d'occasionnel ou saisonnier ou cyclique, comme vous en avez discuté précédemment. Et ce nombre-là est en croissance continuelle. On l'a indiqué dans notre mémoire, à la page 8 – vous avez regardé ces chiffres-là tout à l'heure – il y a une croissance qui, à notre avis, est fort inquiétante pour l'avenir de la fonction publique.

On comprend que le gouvernement avait des objectifs, des objectifs de compressions budgétaires, des objectifs de rééquilibrage financier, mais il nous semble que le moment est arrivé de songer à la consolidation de la fonction publique. Et c'est dans cette perspective-là que, nous, on travaille, depuis déjà passablement de temps, pour essayer de faire en sorte que le poids relatif des emplois occasionnels dans la fonction publique diminue. Là, on vous signale un pourcentage de 26 %, environ. Évidemment, c'est un pourcentage par rapport au nombre global du personnel. Mais, quand on parle du nombre d'occasionnels qui, en réalité, selon nous, devraient être des permanents, on se rend compte que, sur les quelque 10 000 employés occasionnels, il y en a environ 1 656 qui sont, quant à nous, des personnes qui devraient avoir le statut de permanents. C'est 15,6 % du personnel occasionnel que nous représentons.

Or, nous, on pense que le Conseil du trésor, de façon délibérée, contourne la Loi sur la fonction publique en regard du processus de dotation qui est prévu aux articles 42 à 54 de la loi.

(15 heures)

L'article 42, en particulier, prévoit spécifiquement que les fonctionnaires sont recrutés et promus par voie de concours, et, au fond, ce qu'on fait, c'est qu'on utilise la possibilité, en vertu de l'article 83, de soustraire l'application de 42 à 54 pour les emplois dits occasionnels, alors que, en réalité, rien n'empêche dans la loi, au contraire, à notre avis, que les employés occasionnels de toutes catégories soient recrutés par voie de concours, et c'est une des recommandations sur laquelle je reviendrai un peu plus loin, que nous allons faire. Nous, on pense que ces dispositions-là assurent le respect du principe de l'égalité d'accès de tous les citoyens et toutes les citoyennes à la fonction publique...

Une voix: Les concours réservés, ça?

M. Roy (Serge): Ce dont je vous parle en ce moment, c'est l'application stricte de la Loi sur la fonction publique, le processus de dotation. Ce processus-là permet le respect du principe, qui est énoncé dans la loi d'ailleurs, à l'article 3, qui veut qu'il y ait une égalité d'accès pour le public. Et je reviendrai cependant sur la question des concours réservés, c'est aussi une de nos recommandations. Nous, on pense que le recours systématique à de faux occasionnels contrevient à ce principe-là.

À part ça, la pratique nous apparaît aussi inéquitable pour les personnes concernées qui se voient privées de l'accès aux conditions d'emploi des permanents, entre autres la sécurité d'emploi. Et je dis «entre autres» parce que, dans les conventions collectives que nous avons, il y a un très grand nombre d'articles qui ne trouvent pas leur application lorsqu'il s'agit d'emplois occasionnels ou saisonniers. Il y a toute une modulation, une variation d'applications des articles des conventions collectives en fonction des statuts que possèdent les individus.

Pour ce qui est de la directive sur les emplois occasionnels, nous, dans l'état actuel des choses, on estime qu'elle facilite tout simplement le contournement de l'application de la loi en permettant que des emplois cycliques ou saisonniers aient une durée équivalant à toutes fins pratiques à une année entière. Par exemple, au ministère du Revenu – je donnerai cet exemple-là – il y a des listes de rappel d'employés saisonniers qui sont en fait des employés cycliques, si vous voulez. C'est un peu la même chose, ce sont des personnes qui sont sur listes de rappel. Et la durée, la période cyclique, qu'on appelle ça, de ces gens-là, c'est du 15 janvier au 15 décembre. Alors, je pense que, si on regarde ça, il ne manque pas grand-chose pour que ce soit 12 mois par année. Et si on considère que, dans la fonction publique, les gens en général ont droit à un mois de vacances, et on pourrait aller plus loin que ça, ils ont également droit à un mois de congé sans solde, on arrive à 10 mois, donc les gens qui ont une possibilité de travail de 11 mois par année, il nous semble que ce sont franchement et très clairement des emplois permanents. Et ça, c'est un exemple d'emplois cycliques. Mais on peut trouver aussi des exemples... je pense, par exemple, au ministère de l'Emploi et de la Solidarité qui embauche des agents d'aide socioéconomique à titre occasionnel, mais qui, en fait, sont là depuis des années et des années, soi-disant pour combler un surcroît temporaire de travail. Je vous dirais que, dans l'état actuel des choses au Québec, je n'ai pas l'impression que les fonctions d'agents d'aide socioéconomique vont devenir moins importantes ou moins utiles dans la société. Je pense qu'on a encore un bon petit bout de chemin à faire avant d'arriver à cette situation-là.

Quand je disais tout à l'heure que le Conseil du trésor, au fond, agit délibérément dans ce dossier-là, je voudrais vous donner trois dossiers dans lesquels nous sommes pris à l'heure actuelle dans des pourparlers qui ne finissent plus avec le Conseil du trésor, et je vous dirais qu'à mon avis ça frise la mauvaise foi. En 1995, et ce n'est peut-être pas la situation idéale, ce n'est peut-être pas la solution magique, mais c'était un pas pour permettre de donner un peu de stabilité à nos membres, nous avons négocié avec le Conseil du trésor le principe d'établir des listes de rappel pour du personnel occasionnel autre que les personnels cycliques ou saisonniers qui, eux, ont déjà des listes de rappel depuis la fin des années soixante-dix. Alors, on a établi ce principe-là, fin 1995. Nous sommes rendus au mois de février, presque le mois de mars 1998, deux ans et demi plus tard, et ces listes-là ne sont pas encore entrées en vigueur. Et, encore cette semaine, je vous dirais que le Conseil du trésor utilise toutes sortes de stratagèmes pour essayer d'éviter la mise en application de ces listes de rappel là. Et ça, bien sûr, vous me direz que ça ne relève pas de la directive sur les emplois occasionnels dans la fonction publique, mais c'est simplement pour vous illustrer à quel point on tente de manipuler les gens, on tente de faire en sorte que rien ne trouve de solution dans le domaine des emplois occasionnels au gouvernement du Québec.

Un autre exemple. À la suite des départs à la retraite qui ont été très nombreux dans la fonction publique... je pense que vous le savez, il y a eu au-delà de 3 600 départs dans la fonction publique, dans la seule fonction publique. Je ne parle pas du grand secteur public-parapublic, où il y en a eu 36 000 environ, mais, dans notre réseau qu'on appelle «la fonction publique», 3 600. Suite à ça, on a fait des représentations. Je me suis adressé au Conseil du trésor, à M. Jean Larochelle, au début de juillet 1997, pour lui demander de s'asseoir avec nous, de discuter du problème que soulèvent les départs à la retraite et d'en profiter pour faire en sorte que les occasionnels ayant trois ans et plus d'ancienneté dans la fonction publique puissent avoir accès à des emplois stables, permanents, avec sécurité d'emploi. Là, on dit «trois ans et plus», mais il faut bien voir qu'il y a des gens là-dedans qui ont cinq ans, huit ans, 10 ans et plus d'ancienneté. Je ne vous dis pas que la plupart ont 10 ans, mais on se rend jusque-là. Et j'ajouterais qu'il y a même au-delà d'une centaine, très exactement 128 occasionnels dans nos catégories d'emplois qui ont profité des mesures de départs assistés, du Programme de départs volontaires de l'été dernier. Ils avaient quand même un petit peu d'ancienneté, ce monde-là. Alors, c'est là qu'à notre avis on arrive à une situation qui devient de plus en plus scandaleuse et inacceptable pour le Syndicat de la fonction publique.

Un autre cas, et c'est le dernier que je vais vous mentionner, parce que, lui aussi, même s'il touche seulement 125 à 130 personnes, dira-t-on, ce sont des employés temporaires qui sont inscrits sur listes de rappel... Non, je m'excuse. Je vais juste reprendre le point précédent parce que je voudrais signaler qu'on s'est adressé aussi au président du Conseil du trésor le 28 novembre dernier, par écrit, pour lui demander encore là de s'asseoir et de discuter de la problématique des trois ans et plus. Je n'ai pas eu d'accusé de réception. Est-ce que le président du Conseil du trésor s'occupe du personnel de la fonction publique ou s'il s'occupe d'autres choses? Moi, je me pose la question.

Je reviens aux temporaires. Le personnel temporaire, c'est du personnel qui s'est qualifié par voie de concours, mais qui n'a pas encore obtenu la permanence, qui n'a pas atteint les deux ans qu'il faut pour avoir accès à la sécurité d'emploi. Avec les diminutions d'effectifs dans la fonction publique que nous avons connues ces dernières années, on a eu un certain nombre de personnes qui se sont retrouvées temporaires et qui ont été mises à pied, parce qu'on faisait des mises à pied dans la fonction publique, qui se sont retrouvées sur une liste de rappel, parce qu'on a négocié ces choses-là, pour qu'on puisse espérer les ramener dans la fonction publique. Or, 48 mois plus tard, il reste encore 130 de ces personnes-là qui n'ont pas été placées. Et, quant à nous, même si le délai est en train de s'écouler, on est en train de le dépasser, il nous apparaît qu'on devrait donner la possibilité à ces gens-là d'avoir une chance additionnelle de se placer dans la fonction publique parce qu'ils se sont qualifiés.

Je vais accélérer un peu, si vous le voulez bien.

Une voix: ...

M. Roy (Serge): Et, dans bien des cas, c'est à quelques jours de l'atteinte de la sécurité d'emploi, comme signale mon collègue, le confrère Lavoie. Alors, il y a quelque chose là aussi d'un petit peu scandaleux. Et la réponse du Conseil du trésor là-dessus, c'est non; 48 mois, c'est 48 mois. Je pense que, quand on veut gérer du personnel avec des oeillères, c'est très facile. Mais, quand on veut essayer de solutionner les problèmes, il me semble qu'il faut s'ouvrir un petit peu.

J'arriverai tout de suite, si vous me le permettez, à nos recommandations parce que je pense qu'il faut regarder plus vers l'avant que vers l'arrière. On a un certain nombre de recommandations. Vous les avez vues probablement dans notre mémoire.

La première recommandation, c'est pour rendre justice aux personnes qui sont en place à l'heure actuelle. On voudrait que les postes occupés par de faux occasionnels soient convertis en postes permanents. On rejoint à cet égard-là la Commission de la fonction publique.

Notre deuxième recommandation: que des concours réservés au personnel occasionnel ayant trois ans et plus de service soient tenus pour combler ces emplois-là, qu'on aura identifiés. Il ne s'agit pas de faire des listes de déclaration d'aptitudes qui ne seront pas utilisées, mais je pense que c'est possible d'identifier des emplois qui ont trois ans et plus et de faire en sorte que des personnes se qualifient. Tout à l'heure, la Commission de la fonction publique a parlé de nommer automatiquement. Je pense qu'on se rallierait facilement à une solution comme celle-là, bien entendu. Mais la raison pour laquelle on parle de concours réservés, c'est parce que, selon nous, il devrait y avoir une certaine forme d'équité entre la manière qu'on a utilisée pour donner accès à des emplois permanents... Tous les autres fonctionnaires dans la fonction publique ont passé par la mesure du concours. Alors, c'est pour ça qu'on suivait cette logique-là du concours réservé. Mais on n'est pas fermés, bien entendu, à des formules qui seraient peut-être, oui, moins coûteuses, mais la forme de concours à laquelle nous pensons, ce n'est pas nécessairement une forme de concours – et, si on avait eu la chance d'en discuter avec le Conseil du trésor, on aurait pu aller plus loin sur ce terrain-là... Je pense qu'il pourrait y avoir une forme de concours, un exercice qui permet de vérifier simplement l'aptitude des gens, la compétence des gens, qui devrait être facilement reconnue, puisque ces personnes-là, sans statut de sécurité d'emploi, sont rappelées et maintenues à l'emploi par les ministères et organismes.

(15 h 10)

Autre recommandation que nous faisons: que la Commission de la fonction publique enquête sur les raisons particulières qui ont fait en sorte qu'il y a une augmentation aussi importante des faux occasionnels. Pourquoi? On a notre petite idée, je vous ai donné une explication tout à l'heure, mais elle n'est pas nécessairement scientifique. Je pense qu'on a besoin de savoir pour quelles raisons on en est arrivés à une situation où les ministères, parce qu'il n'y avait pas d'autres moyens, sont allés de plus en plus vers des emplois occasionnels. Il faut trouver les raisons pour, dans le futur, à long terme, trouver les solutions les plus adéquates.

Autre point: on suggère que la Commission de la fonction publique, suite à cette enquête-là, soumette son rapport à l'Assemblée nationale, pas à quelqu'un comme ça, par hasard, mais à l'Assemblée nationale, parce qu'il nous semble que les parlementaires auront des décisions à prendre, auront des choix à faire, et il nous apparaît que le Conseil du trésor devra se soumettre aux décisions de l'Assemblée nationale, de telle sorte que la gestion future des emplois occasionnels soit correcte pour l'ensemble du personnel de la fonction publique et aussi pour la population, parce qu'on croit à ça aussi.

Enfin, ce qu'on recommande, c'est que le gouvernement du Québec tienne des concours pour tous les postes devant être comblés dans le futur, y compris les postes occasionnels, comme le font d'autres administrations. Nous, on a regardé du côté du fédéral et on s'est aperçu que, de ce côté-là, effectivement, l'embauche d'employés occasionnels se fait par la voie de concours. Ce n'est pas quelque chose d'inapplicable, ce n'est pas quelque chose de sorcier, et il nous apparaît que c'est quelque chose qui est prometteur et qui consolide, encore une fois, la fonction publique.

Enfin, nous proposons que le gouvernement du Québec applique la Loi sur la fonction publique sans recourir aux exclusions qui sont prévues. Je réfère, en fait, à celles qui sont prévues à l'article 83.

Alors, ça fait un petit peu le tour de la position que nous voulions vous présenter cet après-midi.

Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup, M. Roy. Votre exposé a beaucoup de mérite et il est particulièrement clair. Vous savez que l'intention du législateur – parce qu'on fait un travail ici de législateur et de vérificateur – évidemment, n'est pas de commencer une négociation ni de se mettre en porte-à-faux entre le Conseil du trésor et différents représentants des employés de l'État, mais bien, comme vous l'avez signalé, de regarder vers l'avant puis de regarder comment on pourra faire en sorte d'améliorer la situation générale des gens qui sont des occasionnels et qui sont particulièrement ce qu'on appelle des faux occasionnels. Et puis, évidemment, ces gens-là sont dans un processus de précarisation d'emploi qui est tellement difficile qu'ils ont même, eux aussi, quelques remarques un peu acerbes à faire même à votre endroit. Pardon?

Mme Charest: Ça fait partie des...

Le Président (M. Chagnon): Ça fait partie des choses. Vous-même, vous avez...

M. Roy (Serge): Ça fait partie d'un débat démocratique.

Le Président (M. Chagnon): Absolument. Vous avez une opinion qui est assez dure à l'égard du Conseil du trésor, que vous accusez quasiment de «McDonaliser» la fonction publique, et, quand on regarde vers l'avenir, quand on regarde les suggestions que vous faites, je serais d'abord porté à vous demander si vous êtes d'accord avec la définition d'un occasionnel de la Commission de la fonction publique.

M. Roy (Serge): Vous vous référez, là, au document qui a été émis.

Le Président (M. Chagnon): Oui.

M. Roy (Serge): Nous, on pense que le problème, ce n'est pas tellement le problème de la définition comme l'utilisation qui est faite et le contournement qui est fait des différents emplois. Dans les définitions, il y a des employés occasionnels sur projets spécifiques, il y a des employés occasionnels cycliques, etc. Ça correspond à des réalités à l'intérieur de la fonction publique. Le caractère cyclique de certains emplois, il existe, bien entendu. Tout à l'heure, je donnais l'exemple du ministère du Revenu. Il est évident qu'il y a des fonctions, il y a une partie des fonctions au ministère du Revenu qui ont un caractère cyclique ou saisonnier, la même chose au ministère des Transports où, là encore plus, on peut identifier des fonctions qui sont à caractère saisonnier. Et je pense qu'il n'y a pas de difficultés à reconnaître ces faits-là. Là où il y a une difficulté plus grande, je dirais, c'est quand on arrive au niveau des projets spécifiques ou encore des emplois occasionnels comme tels qui n'ont pas un caractère cyclique, qui ne reviennent pas nécessairement à chaque année. Dans la définition, on parle de surcroît temporaire de travail, de réalisation de projets spécifiques, d'absence d'un employé ou d'une employée; ça, c'est à l'intérieur de la directive. Nous, ce n'est pas tellement là qu'on voit des problèmes, mais c'est dans l'utilisation qui en est faite. Je vais vous donner un exemple.

Quand on parle de projets spécifiques, vous savez, il y a bien des permanents qui fonctionnent sur des projets spécifiques, au fond, à l'intérieur de la fonction publique et, dans la gestion, on fonctionne par programmes, par exemple, qui ont une durée qui peut être d'une année ou qui peut être de quelques années et, parfois, d'une année à l'autre, on transforme ces programmes-là et le personnel permanent, parce qu'on sait qu'on va en avoir à chaque année, des programmes, on n'arrêtera pas de fonctionner de cette façon-là, on fonctionne donc de cette manière-là. Et, quand on parle de projets spécifiques, dans le cas des occasionnels, ce qui se produit bien souvent, c'est qu'on recrute du personnel occasionnel pour travailler sur ces projets-là alors que ces projets-là, quand on les met les uns derrière les autres, au fil des années, ça finit pas constituer aussi des emplois permanents. Dans les chiffres que nous avons colligés à même les informations que nous détenons sur nos catégories d'emplois, quand on établit, par exemple, qu'une personne travaille trois années et plus dans la fonction publique, ce qu'on veut dire par là, c'est que ces personnes-là ont travaillé dans une même classe d'emploi, dans un même ministère, pendant trois ans et plus. Donc, ça veut dire qu'elle a... je dis sans doute, parce qu'il faudrait faire une enquête et c'est là l'objet de l'enquête, il faudrait sans doute trouver, de façon plus particulière, plus précise, quels sont ces projets spécifiques là sur lesquels elles ont travaillé. Donc, ce n'est pas tellement dans la définition qu'on a des difficultés.

Le Président (M. Chagnon): Vous êtes d'accord pour qu'il y ait un concours pour tous ceux qui vont entrer comme occasionnels, dans l'avenir.

M. Roy (Serge): Tout à fait.

Le Président (M. Chagnon): Vous êtes d'accord pour titulariser tous ceux qui ont trois ans de service, qu'on titularise leur poste. Est-ce qu'il n'y a pas des règles transitoires qui devraient aussi faire partie de votre raisonnement? Parce que, si on a deux ans, 11 mois, 30 jours, 22 heures, on se trouve à être pénalisé toujours par une formule comme celle que vous suggérez.

M. Roy (Serge): Bien, je pense que je ne vous ai pas très bien saisi, là. Vous dites?

Le Président (M. Chagnon): Quand vous dites: On va titulariser un poste après trois ans...

M. Roy (Serge): Oui.

Le Président (M. Chagnon): ...est-ce qu'il n'y a pas des formules de transition qui devraient être mises de l'avant?

M. Roy (Serge): Bon, voici. Dans les recommandations que nous faisons, lorsque nous abordons cette question-là, nous, ce qu'on pense, c'est qu'un emploi, au bout de trois ans, revêt certainement un caractère plutôt permanent. Alors, si on embauche au point de départ, si les gens sont recrutés sur la base de concours de recrutement à l'entrée... c'est-à-dire que, pour occuper un emploi occasionnel, comme la Commission de la fonction publique l'a indiqué tout à l'heure, s'il y a un concours de recrutement, cette personne-là, elle peut être embauchée à titre occasionnel, mais, au bout de trois ans, il devrait y avoir la possibilité, selon nous, de transformer cet emploi-là en emploi permanent. Et là, la personne s'étant déjà qualifiée... au fond, le problème qu'on rencontre à l'heure actuelle, d'avoir des personnes qui sont en réalité des permanents, mais qui n'ont pas suivi le processus défini à la loi, elles disparaîtraient, à toutes fins pratiques. Je ne sais pas si je réponds bien à votre question.

Le Président (M. Chagnon): Et dans votre esprit, après trois ans, lorsqu'on titularise le poste, on ne passe pas d'examen, de concours réservé?

M. Roy (Serge): Bien, ça, c'est pour le futur.

Le Président (M. Chagnon): O.K.

M. Roy (Serge): On s'entend. La personne, elle s'est qualifiée au départ. Alors, supposons qu'à partir du 1er avril prochain il y a une mécanique de recrutement par voie de concours du personnel occasionnel, dans trois ans ces personnes-là, si elles ont été à l'emploi pendant... nous, notre prétention, c'est qu'un emploi qui est occupé 10 mois et plus par année, c'est un emploi permanent. Alors, cette personne-là, elle a accès à un emploi permanent; directement, son emploi devient permanent parce qu'elle a déjà réussi un concours. Le problème qui se pose à court terme, c'est celui des personnes qui ont actuellement trois ans et plus, qui ont été embauchées à titre d'occasionnels sans concours et là il faut trouver une solution. Nous, notre solution, ce sont des concours réservés pour ces personnes-là. Mais, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, on se rallie évidemment très facilement à l'idée...

Le Président (M. Chagnon): À la suggestion de la Commission.

(15 h 20)

M. Roy (Serge): À la suggestion de la Commission. Sauf que je vous dirais que, dans le passé, quand on a abordé ces choses-là, du côté gouvernemental c'était encore plus fermé que la question des concours réservés. Et les concours réservés, il faut bien s'entendre, pour nous, il ne s'agit pas de mettre en marche toute la mécanique et toute la quincaillerie habituelles lors d'un concours de recrutement auprès du public. Je pense qu'il y a moyen d'établir une forme de qualification qui réponde à des critères sérieux et qui fasse en sorte que ces personnes-là soient titularisées dans les meilleurs délais possible. Alors, il y a deux niveaux, au fond: il y a les cas présents et il y a les cas futurs qu'il faut régler.

Le Président (M. Chagnon): Avec l'opinion que vous avez du Conseil du trésor, vous n'avez pas peur, vous n'avez pas de crainte que, par exemple, si vous arriviez à une entente pour titulariser les occasionnels qui ont trois ans de service dans la même fonction, vous n'avez pas l'impression que la réponse ou le mode de fonctionnement du gestionnaire changerait, puis on vous organiserait tout simplement, après un an, un an et demi, deux ans, on vous mettrait dehors tout simplement, dans 15 jours, trois semaines, un mois, deux mois, de façon à pouvoir ne jamais avoir trois ans de...

M. Roy (Serge): Bien, je pense qu'il faudra prévoir des mécanismes, effectivement, qui empêchent et, à ce moment-là...

Le Président (M. Chagnon): Parce que c'est un peu ça, c'est un peu ce genre de fonctionnement là que vous décriez puis que vous reprochez, puis il me semble que votre mécanique ne protège pas à l'égard de...

M. Roy (Serge): Bien, c'est-à-dire que la mécanique qu'on propose, c'est... Nous, on reconnaît qu'il y a un besoin d'emplois occasionnels dans la fonction publique.

Le Président (M. Chagnon): Ça va.

M. Roy (Serge): Je pense qu'on peut difficilement passer à côté de ça.

Le Président (M. Chagnon): Absolument.

M. Roy (Serge): Ce ne serait pas crédible, me semble-t-il, que de prétendre l'inverse. Cependant, quand on arrive avec 26 % pour ce qui est de nos catégories d'employés occasionnels, je pense qu'il est très clair qu'il y a un abus du recours aux emplois occasionnels dans ce cas-là et la façon de solutionner le problème, c'est celle qu'on suggère. Maintenant, quand on propose que la Commission de la fonction publique fasse une enquête, je pense que ça signifie aussi qu'il faut rechercher une mécanique qui va faire en sorte que les gestionnaires ne seront pas tentés de faire comme vous le mentionnez, d'éviter que les personnes atteignent le niveau de la permanence. Je vous dirais qu'on a un petit peu cette mécanique-là à l'heure actuelle. Même pour les employés permanents, ça prend deux ans avant d'avoir la sécurité d'emploi dans la fonction publique. Alors, un gestionnaire pourrait arriver et, la veille ou quelques semaines auparavant, décider de mettre fin à l'emploi pour éviter que la personne acquière sa permanence ou sa sécurité d'emploi. Mais là, minimalement, en tout cas, je pense qu'on pourrait regarder les recours qui devraient aller avec ça. C'est déjà arrivé dans le passé que le Syndicat de la fonction publique ait défendu des personnes pour lesquelles on a pu faire la preuve que le gouvernement, l'employeur avait tenté d'éluder l'application de la permanence à telle ou telle personne. C'est sûr que c'est relativement compliqué de prouver ça, mais je pense qu'il faut aussi avoir un minimum de confiance, je vous dirais, et croire que la majorité des gestionnaires vont jouer le jeu. Et s'ils ont une possibilité d'embauche... parce que, dans les ministères et les différents organismes, ce qu'ils veulent, c'est de pouvoir disposer de personnel, pouvoir embaucher du personnel. Je vous dirais que, à la suite des départs à la retraite l'été dernier, les ministères et les organismes, ce n'est pas eux qui nous ont dit: On ne veut pas embaucher. S'ils avaient pu obtenir des autorisations pour embaucher, ils l'auraient fait. Quand vous regardez un ministère comme le ministère des Transports qui a perdu au-delà de 600 employés, si on avait dit: Écoutez, oui, vous pouvez remplacer 50 % de ce personnel-là, ça aurait offert des possibilités absolument positives et pour la fonction publique, et pour la population, et, en passant, pour les jeunes qui auraient pu avoir accès à des emplois. Et je fais remarquer que, dans nos occasionnels dont on parle, il y a beaucoup de jeunes, si on retient la définition de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité pour définir un jeune qui est âgé de 18 à 35 ans. Alors, il y en a beaucoup qui sont là et qui pourraient avoir accès à des emplois.

Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie. M. Laprise, Mme Charest.

Mme Charest: Écoutez...

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président.

Mme Charest: Ah! M. Laprise. Excusez-moi, M. Laprise.

M. Laprise: Suite aux départs nombreux dans la fonction publique, est-ce que vous avez perçu dans certains ministères qu'il y avait des occasionnels qui étaient utilisés pour faire des travaux qui étaient faits autrefois par ceux qui sont partis?

M. Roy (Serge): Écoutez, à observer de façon systématique, je ne peux pas faire cette affirmation-là, mais dans les conversations que j'ai eues avec plusieurs ministères, quand on leur demandait de quelle façon ils allaient passer l'été – dans certains cas, les travaux les plus intensifs dans certaines catégories d'emplois, c'était l'été – bien, le recours, c'était de recourir à du personnel occasionnel, oui, et de recourir à la sous-traitance, ce qui n'est pas nécessairement merveilleux pour consolider une fonction publique.

M. Laprise: Très bien.

Le Président (M. Chagnon): Mme Charest.

Mme Charest: Je suis quand même surprise de vous entendre dire que ça en est sur l'utilisation que vous en avez plutôt que sur la définition. Il me semble que, pour continuer à débattre de cette question, on doit au départ s'entendre sur la définition. Et je ne pense pas que vous ayez répondu de façon directe à la question que le président de la commission vous a posée. Est-ce que vous êtes d'accord avec la définition d'«occasionnel» proposée par la Commission de la fonction publique?

M. Roy (Serge): C'est parce que, nous, on s'est référé davantage à la directive.

Le Président (M. Chagnon): À la directive, à l'article 2 ou 3 de la directive.

Des voix: Quelle page?

Mme Charest: Parce que vous savez...

M. Roy (Serge): Écoutez, à première vue, je pense qu'elle rencontre les objectifs que nous pouvons avoir. Je pense que la Commission de la fonction publique définit l'emploi occasionnel comme étant un emploi d'une durée limitée. Je pense qu'effectivement ça doit être un emploi d'une durée limitée, qu'on sache bien à quoi s'attendre. Et, encore là, je dirais qu'il faudrait être un peu plus précis que cela parce qu'une durée limitée, c'est quoi? Trois mois, six mois, 18 mois, deux ans, 14 ans?

Mme Charest: Mais je pense que c'est un peu...

M. Roy (Serge): Parce qu'on a vu ça, hein.

Mme Charest: ...difficile de déterminer, dépendamment du type d'emploi occupé, dépendamment de la responsabilité de l'emploi occupé. Il peut être occasionnel, mais il peut être de huit mois pour un certain type d'emploi, et ça va être tout à fait normal. Et pour un autre type de responsabilité, il peut être de deux ans et ça va être un occasionnel pareil. Je veux dire, dans mon esprit, ce n'est pas en termes de jours et de mois et de semaines nécessairement ou exclusivement qu'on doit déterminer un occasionnel.

M. Roy (Serge): Bien, nous, on pense qu'il faut déterminer quelque chose, parce que ce qu'on vit depuis des années, c'est qu'effectivement les règles n'étant pas suffisamment claires, on passe à côté. Et je vous dirais que même, il y a quelques années, alors qu'il y avait une délimitation en termes de temps, en termes de durée de temps, on a vu bien des cas où on est passé à côté de ça, où on a changé des postes de travail d'unité administrative à l'intérieur d'un ministère. Et je ne pense pas que les gens le faisaient malicieusement, mais ça illustre qu'il y avait des besoins. Moi, je pense que ce sur quoi il faut jouer, c'est qu'il faut qu'il y ait une limite très claire à ce qu'est un emploi occasionnel. Et moi, un emploi de deux ans occasionnel, des fois, je commence à avoir des doutes.

Mme Charest: Bien, je peux être une professionnelle avec un mandat de diriger un dossier qui prévoit que ce mandat-là, pour le remplir, je peux être appelée à occuper le poste 18 mois, même 24 mois, et, après, c'est terminé, parce que le mandat a été rempli et c'était une tâche occasionnelle.

M. Roy (Serge): Oui, vous avez raison. Mais, moi, je vous poserais la question suivante. C'est que le fonctionnement des ministères et des organismes, que ce soit au niveau professionnel, technicien ou de soutien – et reprenons votre exemple de professionnel, ça pourrait s'appliquer sans doute pour beaucoup de techniciens aussi – il y a des mandats qui sont donnés. Un mandat de deux ans, vous me dites. Bien, à l'heure actuelle, nos permanents fonctionnent aussi dans le cadre de mandats qui doivent être réalisés au bout d'un certain temps. Et votre occasionnel qui est embauché pour un mandat de deux ans, moi, je veux bien qu'on pense que c'est un occasionnel, mais il est fort probable que, lorsque son mandat à cette personne-là va être terminé, il va y avoir d'autres mandats qui vont sortir et qui devront être assumés par du personnel. Alors, il y a un risque, à mon avis, en donnant une durée trop longue aux possibilités d'emplois occasionnels, qu'on se retrouve encore avec la même dynamique où les gens vont se retrouver avec des durées de mandat peut-être de deux ans, mais qu'au bout de la ligne il y aura d'autres mandats semblables ou en continuité qui se donneront et on va se retrouver encore avec la problématique des faux occasionnels.

(15 h 30)

Moi, je pense que ce qu'il faut bien voir, c'est: Dans la fonction publique, est-ce qu'on veut établir une base solide d'emplois permanents avec sécurité d'emploi et vraiment utiliser du personnel occasionnel pour du surcroît, pour quelque chose d'exceptionnel ou si on veut faire en sorte, comme c'est la tendance dans certains milieux, que la majorité des emplois deviennent des emplois occasionnels qu'on peut peut-être utiliser plus facilement, qu'on peut peut-être... je ne veux pas dire intimider, mais qui sont plus fragiles, en tout cas, par rapport au fonctionnement quotidien et sur le plan aussi de la pérennité des emplois et des activités dans la fonction publique? Et, ultimement, je vous dirais qu'on pourrait voir là une stratégie pour ne pas faire le débat sur la sécurité d'emploi, mais arriver à une situation où, à toutes fins pratiques, on la rendrait inopérante. Et ça, je vous assure que les syndicats des secteurs public et parapublic et particulièrement dans la fonction publique, on va se battre très, très fort contre ce genre de situation.

Mme Charest: Je n'en doute pas. Et, moi, je vous dirais, à titre d'opinion personnelle, que je pense qu'il y a une place pour des occasionnels, il y a une place pour des emplois permanents, mais il faut avant tout faire le débat, au Québec, sur ce qu'on appelle la sécurité d'emploi. Et ça, j'en suis persuadée. Et je pense que, là-dessus, vous avez raison. Je suis prête à vous donner raison là-dessus. Merci.

Le Président (M. Chagnon): Merci, Mme Charest. M. Marsan.

M. Marsan: Merci, M. le Président. Je ne pense pas qu'on va faire un débat sur la sécurité d'emploi, M. Roy.

M. Roy (Serge): Il est commencé et il revient de temps en temps.

M. Marsan: Je voudrais reprendre une affirmation que vous avez faite sur le nombre de postes qui pourraient être titularisés. Si j'ai bien compris – corrigez-moi – vous parlez de 10 000 postes au moins; on a parlé de 11 000 postes occasionnels tantôt. Et vous avez parlé d'afficher – «afficher», c'est mon langage – de titulariser, je pense, 1 656, l'équivalent de 15,6 %. Est-ce que ça veut dire pour vous que, sur les 10 000 occasionnels, il y en a au moins 1 656 qui mériteraient d'avoir un poste permanent? «C'est-u» ma compréhension? Est-ce qu'elle est exacte?

M. Roy (Serge): Oui. Nous, ce qu'on a comme chiffres, à partir de nos fichiers à nous, qui nous proviennent de l'employeur, de toute façon, parce que c'est à partir du fichier de paie, il y a 1 656 personnes qui correspondent à notre définition à nous de faux occasionnels.

Le Président (M. Chagnon): Je pense qu'on va parler non pas de 1 656 personnes, mais de 1 656 emplois à temps complet.

M. Marsan: Équivalents temps complet. C'est ça?

M. Roy (Serge): Pour nous, ce sont des personnes. Ce sont des personnes qui ont travaillé pendant trois ans et plus dans un même ministère, dans une même classe d'emploi. Est-ce qu'ils ont toujours occupé la même chaise? Écoutez...

Le Président (M. Chagnon): C'est parce qu'on remarque que le nombre de postes occasionnels en ETC est généralement comblé par deux vraies personnes. Alors, si ce sont des personnes, ça diminuerait le nombre de postes d'employés à temps complet.

M. Roy (Serge): Non. C'est vraiment 1 656. Ce sont 1 656 personnes qui ont travaillé pendant trois ans et plus dans la fonction publique et qui ont travaillé au moins dix mois par année pendant ces trois ans-là. Alors, on ne divise pas par deux ou par 1,2 ou par quoi que ce soit. C'est vraiment 1 656.

M. Marsan: Et votre première recommandation, tantôt, c'était: Ce sont des faux occasionnels qu'il faudrait convertir en postes permanents. Ce sont ces 1 656 là.

M. Roy (Serge): Ceux-là, on est sûr.

M. Marsan: Oui, c'est ce que vous nous dites. Et là, je fais écho à ce que le président ou les membres de la Commission de la fonction publique ont dit tantôt. Ils abondaient, je pense, dans le même sens que vous, dans le même sens que le Vérificateur et possiblement dans le même sens que les fonctionnaires du Conseil du trésor qui font partie de votre syndicat. Écoutez, 1 656 postes permanents sur 10 000, ça réglerait un problème qui est assez important pour les gens qui ont à le subir. Parce qu'il y a plusieurs années là-dedans et il y a des implications personnelles, et tout. Comment ça se fait qu'on n'est pas capable de régler ça? C'est le gros bon sens. Je ne sais pas pourquoi on est tous ici pour en parler. Tant mieux si on peut vous aider. Mais il me semble que ce n'est pas un problème qui est immense, et ça devrait être réglé. Qui ne veut pas le régler?

M. Roy (Serge): Je vous ai mentionné tout à l'heure que nous, on a fait des représentations et qu'on n'a pas eu de réponse. Et la dernière fois que nous avons abordé le sujet, début février, on nous a dit qu'il n'était pas question de discuter de ces problématiques-là à la pièce, qu'il y aurait une commission parlementaire ici et que le Conseil du trésor, lui, avait besoin de faire une étude, était à compléter une étude là-dessus, et, donc, qu'il faut attendre. Mais ça fait longtemps que nous attendons. Pourquoi? Je pense que vous aurez l'occasion de poser la même question aux représentants du Conseil du trésor. À nos yeux, c'est le Conseil du trésor qui bloque; ça, c'est très clair. Et nous, on est même prêts à regarder d'autres avenues, d'autres solutions, mais encore faut-il être capables de s'asseoir quelque part puis d'en discuter. Donc, la première chaise qu'on nous offre, c'est celle-ci, aujourd'hui, je vous dirais. Alors, on va continuer quand même à frapper à la porte du Conseil du trésor.

Mme Charest: Mais ce n'est pas ici qu'on va négocier.

Le Président (M. Chagnon): Non, ce n'est pas ici.

Une voix: Pardon?

Mme Charest: Je dis: ce n'est pas ici qu'on négocie, quand même. On peut discuter.

Le Président (M. Chagnon): Oui. M. Marsan?

M. Marsan: Parlant de négociations, si je ne me trompe pas, je pense que les contrats vont se terminer quelque part au mois de juin, fin juin. On est à quatre mois des négociations. Est-ce que le processus est enclenché, est bien enclenché? On pense qu'il faut toujours être prévoyant. Ce serait intéressant, en tout cas, d'avoir votre opinion là-dessus.

M. Roy (Serge): Sur le processus de négociations?

M. Marsan: Oui.

M. Roy (Serge): Nous, à l'heure actuelle, on est en train de finaliser la préparation de nos cahiers de revendication, et nous prévoyons déposer nos demandes à la fin avril. Et, à partir, donc, du 1er mai, la fête des travailleurs et des travailleuses, on est prêts à commencer à négocier, de façon intensive s'il le faut. On va être prêts à partir de ce moment-là. Alors, on verra si ça peut être possible d'aller rapidement, dans ce cas-là.

Mais, vous savez, avec l'expérience que nous avons des exercices de négociations dans les secteurs public et parapublic, on ne s'attend pas à avoir signé avant la fin...

Le Président (M. Chagnon): De la convention?

M. Roy (Serge): ...de la convention collective actuelle, le 30 juin 1998. On est prêts à aller jusqu'au 31 juillet.

Le Président (M. Chagnon): On vous remercie beaucoup, M. Roy, ainsi que le Syndicat de la fonction publique du Québec.

J'inviterais maintenant le Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec. Alors, M. Caron, nous vous souhaitons la bienvenue. Peut-être que vous pourriez nous présenter les gens qui vous accompagnent et à qui, à l'avance, nous souhaitons aussi la bienvenue, évidemment. Je rappelle à nos invités – à nos invités précédents aussi, qui n'ont pas encore quitté, heureusement – que nous avons l'intention, comme commission, de soumettre des recommandations au gouvernement à la suite de nos auditions. M. Caron, nous vous écoutons.


Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ)

M. Caron (Robert): Alors, bonjour, M. le Président, Mmes et MM. les parlementaires, je vous présente, à ma gauche, Éric Ouellet, qui est le quatrième vice-président du SPGQ; Mme Sylvie Desjarlais, qui a été temporaire, qui est occasionnelle et qui va redevenir temporaire. Je vous présente aussi M. Normand Boucher, à l'extrême gauche, qui est un occasionnel depuis 14 ans. On n'aura peut-être pas de définition précise, mais on va avoir un cas. On va en avoir un deuxième, M. Jean Nadeau, qui est occasionnel aussi depuis 10 ans au ministère du Revenu.

(15 h 40)

Alors, le SPGQ est heureux de l'invitation que lui fait la commission parlementaire de donner son point de vue. Vous connaissez déjà notre Syndicat: 12 600 membres environ, de toutes les professions, qui oeuvrent dans toutes les régions du Québec. Je pense que les travaux de la commission sont bien lancés, avec les mémoires précédents qu'on a écoutés avec beaucoup d'attention. On se sera pas d'accord avec toutes les recommandations qui sont faites de la part de la Commission de la fonction publique, surtout sur la question des concours réservés, mais on va être d'accord, je dirais, avec les recommandations très importantes que fait la Commission, je le dis tout de suite, sur la question de la définition d'«occasionnel» en particulier, sur la titularisation aussi des faux occasionnels après un certain temps.

Alors, depuis presque 20 ans, la précarité d'emploi s'est installée lentement mais sûrement au gouvernement. Ça a atteint des sommets, au début des années quatre-vingt-dix. Malgré les négociations, les recommandations de la Commission de la fonction publique, du Vérificateur général, malgré les comités mixtes qu'on a institués avec le temps, on peut dire que la situation est la même aujourd'hui. La précarité ne s'est pas résorbée. On peut dire, même, si on veut porter un jugement sévère, que la gestion des occasionnels, de ce dossier-là est déficiente, au gouvernement. On s'attend à ce que la présente commission recommande au gouvernement des mesures qui pourraient être appliquées rapidement. On s'attend surtout à des solutions équitables et durables.

Notre réflexion porte sur les éléments centraux de la problématique, c'est-à-dire autour de trois thèmes – c'est un peu la vie des occasionnels qu'on a essayé de montrer à travers ce mémoire-là: les règles relatives à l'embauche, celles qui se rapportent au rappel des employés et les modalités d'accès à des postes permanents.

Évidemment, je vais faire rapidement, je ne lirai pas notre mémoire, je vais aller à l'essentiel. Au SPGQ, actuellement, on a 1 310 employés occasionnels; 250 ont plus de trois ans de service. On en a déjà eu beaucoup plus que ça. On a vécu, comme vous vous en doutez, des années difficiles, particulièrement au début des années quatre-vingt-dix. Une bonne partie de ces employés sont à l'emploi depuis plusieurs années sans aucune interruption. Pour nous, ce sont des emplois de nature permanente. Cent quatre-vingt-deux personnes ont été déclarées aptes à la suite des concours réservés de 1995 et sont toujours en attente de titularisation.

Alors, c'est des employés qui sont toujours susceptibles d'être mis à pied, supplantés ou non renouvelés, même si – et j'insiste là-dessus – les organisations pour lesquelles elles et ils travaillent désirent les maintenir en poste en raison de l'expertise développée et du travail accompli. Parmi ces employés-là, plusieurs ont cinq, huit, 10 et même 15 ans d'ancienneté, des personnes qui ont bénéficié d'une formation et d'un perfectionnement afin d'accomplir leur tâche quotidienne et d'offrir en retour leur savoir-faire, leur expertise leur enthousiasme, leur motivation. C'est des employés qualifiés à juste titre de faux occasionnels – on est à la veille de les appeler des faux permanents aussi – qui effectuent les mêmes tâches et assument les mêmes responsabilités que celles confiées à leurs collègues de travail qui, eux, sont permanents.

Sur la question de l'embauche, je veux d'abord dire que le Conseil du trésor peut, comme vous le savez, utiliser son pouvoir dérogatoire en adoptant une directive relative à l'embauche du personnel occasionnel. Toutefois, cette mécanique d'exception doit servir à embaucher – et là, je vous donne une définition d'«occasionnel» – des employés, pour une période limitée afin de faire face à une pénurie provisoire de ressources humaines ou pour accomplir un travail spécifique qui se situe à l'intérieur d'une activité nouvelle et provisoire de l'administration. Ça, c'est une notion qui différencie un poste occasionnel d'un poste régulier, et ce n'est pas nous qui l'avons inventée, on la retrouve dans le Recueil des politiques de gestion de l'engagement du personnel du Conseil du trésor.

La Directive concernant les emplois occasionnels de la fonction publique, c'est une directive qui, comme vous le savez, constitue en quelque sorte la porte d'entrée dans la fonction publique des employés à statut précaire. C'est une directive qui a récemment aboli le système d'embauche qui prévalait antérieurement et qui était géré localement par les ministères et organismes de la fonction publique. Cependant, nous pensons qu'elle met en place des irritants susceptibles de donner encore plus d'ampleur au phénomène de la précarité d'emploi. Je m'explique. Cette directive met en place une norme d'identification des candidates et candidats qui, à notre avis, est imprécise, incertaine, voire même aléatoire – si vous voyez ce que je veux dire. Je fais référence au processus où on retient des personnes à la suite d'un tirage au sort. Alors, tel que libellé, une telle situation, quant à nous, n'est pas en mesure de répondre aux questions d'équité. Et on est loin d'une situation qui accorde une chance égale aux personnes occasionnelles, quand on risque de voir la candidature rejetée par un tirage au sort. Alors, nous ne pouvons que nous objecter à une formulation aussi imprécise et à toute forme de contrôle qui ne met pas, finalement, en évidence la compétence et la formation académique des personnes.

Cette directive n'indique pas, aussi, la durée maximale des emplois et favorise et, dans le fond, perpétue la problématique des faux occasionnels. Alors, je pense que la Commission de la fonction publique s'est étendue là-dessus; on est d'accord avec elle. Il est inacceptable qu'il y ait des projets spécifiques d'une durée de 15 ans, comme ça a été le cas au Fonds de la rénovation cadastrale, au ministère des Ressources naturelles. Il est également inconcevable, inacceptable qu'on ait des occasionnels saisonniers ou cycliques sur des emplois de 10 à 11 mois par année pendant 23 ans, comme ça a été le cas au ministère de l'Éducation.

Le Président (M. Chagnon): Pouvez-vous me dire où au ministère de l'Éducation?

M. Caron (Robert): Oui, oui, c'est ça que...

Le Président (M. Chagnon): ...ce ministère-là et je n'ai jamais entendu parler de ça.

M. Caron (Robert): C'est dans notre rapport à la page 9. Il est également inacceptable qu'il y ait des projets spécifiques prolongés année après année pour une durée cumulée de 10 ans, comme c'est le cas actuellement au ministère du Revenu. On pourrait probablement donner d'autres exemples. C'est sûr qu'on en avait, comme on dit, sous la main.

Le Président (M. Chagnon): À quoi vous pensez, au ministère de l'Éducation, comme type d'emploi qui dure pendant 10, 11 mois puis qui... C'est la première fois que j'entends ça.

M. Caron (Robert): Ah, mon Dieu! écoutez, on pourrait y revenir à la période de questions, si ça ne vous dérange pas, comme j'ai juste 15 minutes. Après ça, on pourra peut-être aller dans des cas, je ne dis pas croustillants, parce qu'il n'y a rien de drôle là-dedans...

Le Président (M. Chagnon): On n'est pas sauvages sur le temps qu'on accorde à nos invités.

M. Caron (Robert): Ah! vous êtes bien gentils. Alors, je peux continuer?

Le Président (M. Chagnon): On vous questionnera plus tard.

M. Caron (Robert): Oui. Sur la question de l'article 22 – parce que je veux toujours qu'on parle de la directive, je ne veux pas sortir du plan – nous, on pense qu'on instaure un système à deux vitesses, y compris sur la question de la rémunération: articles 22 à 25 sur le classement et le crédit d'expérience. L'article 22 prévoit que le classement et le crédit d'expérience s'établit de la même manière que lors d'un concours de recrutement dans la fonction publique. Et c'est là où le bât blesse, comme on dit. Concrètement, tel que le Conseil du trésor l'interprète et l'applique ou le fait appliquer dans certains ministères et organismes, c'est-à-dire de façon restrictive, cet article peut introduire le principe de la main-d'oeuvre à bon marché – en français on appelle ça le «cheap labour» – l'employeur, ne tenant pas compte des crédits d'expérience déjà acquis.

Alors, il est fréquent de voir des employés qui ont sept, huit, ou neuf ans d'expérience, avec l'échelle salariale correspondante, être rappelés sur des postes pour lesquels on a exigé seulement trois ans d'expérience, avec pour conséquence, évidemment, des conditions salariales à la baisse. C'est ce qu'on appelle, dans certains milieux – je ne l'ai pas écrit dans notre rapport – des clauses orphelin. Je pense que j'ai entendu ça en fin de semaine. Il y avait un congrès général quelque part et puis on a adopté des résolutions pour interdire des clauses orphelin au gouvernement. On est d'accord avec ça. Alors, on ne retrouverait pas, évidemment, ce genre de clause dans la Loi sur la fonction publique.

Alors, je viens aux recommandations:

Que l'embauche des personnes occasionnelles inscrites au guichet central des emplois occasionnels soit conditionnelle à l'obtention d'une déclaration d'aptitudes – je pense qu'on va dans le même sens que la Commission de la fonction publique;

Que les projets spécifiques d'une durée supérieure à trois ans fassent l'objet d'une procédure de dotation, conformément aux dispositions de la Loi sur la fonction publique;

Que la directive précitée soit modifiée pour dire clairement – parce que, là, il semble que ce ne soit pas clair – que, lors d'un rappel au travail ou lors d'un renouvellement de contrat, le traitement et les crédits d'expérience soient calculés en fonction du service acquis dans la fonction publique;

Finalement, que la directive soit modifiée pour faire en sorte que les emplois de nature temporaire soient occupés par du personnel vraiment occasionnel. C'est toute la question de la définition.

(15 h 50)

Sur la question de rappel – et j'essaie de faire le plus rapidement possible – le SPGQ a obtenu, dans le cadre des négociations, l'obligation pour l'employeur de donner priorité d'embauche sur des emplois occasionnels à des employés à statut précaire inscrits sur des listes de rappel ministérielles ou interministérielles. Évidemment, le Conseil du trésor et tous les ministères ont l'obligation de produire au SPGQ deux fois par année une copie de ces listes-là. Toutefois, on constate, malheureusement, que l'ancienneté des candidates et des candidats inscrits sur ces listes est de moins en moins respectée.

Alors, on voit toutes sortes de choses, malheureusement: l'embauche sur des emplois temporaires sans tenir compte de l'ancienneté des personnes inscrites; l'embauche en contournant l'ancienneté; la radiation de certaines personnes, alors que d'autres, pour les mêmes motifs, ne l'ont pas été; l'embauche de personnes hors de la fonction publique sur une base contractuelle, pour contourner l'application des listes de rappel; l'embauche des personnes sans qu'elles soient les plus anciennes. Probablement qu'on pourrait rallonger cette liste-là, mais c'est ce qu'on voit le plus souvent.

Évidemment, en plus des conséquences psychologiques et économiques néfastes pour les personnes directement concernées, le SPGQ et le gouvernement doivent investir des sommes importantes pour défendre leurs positions respectives; ça s'appelle procédure de règlement de grief, ça prend du temps avant de se régler. Bref, il n'y a personne qui gagne dans ce contexte-là.

Alors, les recommandations:

Que la liste des postes soit acheminée aux organisations syndicales et qu'il y ait un affichage sur les lieux de travail;

Que la liste de rappel ministérielle et interministérielle soit acheminée aux organisations syndicales et même sur support informatique – si on veut faire moderne.

Mais j'insiste – ce n'est pas dans notre rapport, mais comme j'ai entendu ce que disait la Commission de la fonction publique – sur l'à-propos de maintenir des listes de rappel dans l'intérêt non seulement des ministères et des organismes du gouvernement, mais aussi de la population, parce que les listes de rappel ministérielles, dans le fond, c'est un réservoir de compétences qui sont riches. Je disais tantôt que c'est des gens qui sont formés, qui ont travaillé des mois, des années pour le gouvernement. Il me semble que c'est plus facile pour le gouvernement de recourir à ces services-là, quand on a établi des listes de rappel. Bref, même si elles nous occasionnent quelques difficultés, pour autant, on ne voudrait pas qu'elles soient éliminées.

Dernier aspect, la titularisation des personnes occasionnelles. On va se répéter, on va vous dire que les emplois occasionnels ne sont pas tous de nature temporaire. Le Conseil du trésor a d'ailleurs reconnu cette réalité à plusieurs occasions en demandant aux ministères d'identifier les emplois de nature permanente occupés par du personnel occasionnel. Ces opérations ont permis déjà de régulariser la situation de plusieurs employés.

On pourrait se faire un historique. Nous, on va partir plus loin que 1990. Je voyais que la commission parlait même de 1980, avec la commission Bisaillon, qui était arrivée à la conclusion que le maintien durant plusieurs années d'employés occasionnels dans un statut précaire et sur des activités régulières était une pratique dérogatoire à une saine gestion des effectifs de la fonction publique. On sait que les travaux de la commission ont donné lieu à un amendement législatif où on a vu une trentaine d'employés occasionnels qui ont été intégrés de cette façon-là.

Si on veut aller plus loin, on va parler de ce qu'on connaît. Le SPGQ, on a fait plusieurs négociations ardues avec le gouvernement sur la question des occasionnels, en 1987. D'abord, il faut dire qu'entre 1983 et 1987 le nombre d'occasionnels a continué de croître de façon assez phénoménale; on peut parler peut-être même de phénomène de société. C'est des emplois typiques qui existent au gouvernement et qui existent ailleurs aussi, ce qui a fait en sorte que ça fait partie toujours de façon importante de nos négociations avec le gouvernement. En 1987, on a négocié ce qu'on appelle maintenant des concours réservés, à l'époque pour les plus de cinq ans de service, ce qui a fait en sorte que 53 personnes ont été classées et ont été titularisées.

En 1991, encore une fois, négociations très importantes avec le gouvernement, concours réservés pour 191 personnes, cinq ans et plus: 160 d'entre elles ont été titularisées. Ce qu'on note, c'est que ce n'est pas toutes les personnes qui ont été sur des concours réservés qui ont été titularisées. Comme on dit, des fois, il y en a qui ont passé au travers des filets, on en a échappé.

À l'automne 1995, on a négocié encore une fois avec le gouvernement, le Conseil du trésor, des concours réservés pour les trois ans et plus: 366 occasionnels ont été admissibles; 291 ont été déclarés aptes; et plus d'une centaine ont été titularisés depuis. Pour nous, c'est comme le verre à moitié vide et le verre à moitié plein. D'un côté, on nous disait qu'il n'y en aurait pas de postes vacants, qu'il n'y aurait pas grand-monde qui réussirait à aller sur ces postes-là. Il y en a quand même une centaine, mais, là, on note quand même une centaine. Mais, là, on note quand même qu'on en échappe près de 200, qui attendent toujours des emplois permanents.

Très, très rapidement, sur les concours réservés, je pense qu'on va diverger d'opinions avec la Commission de la fonction publique pour dire que la technique des concours réservés tire son fondement juridique de l'article 43 de la Loi sur la fonction publique. On ne veux pas partir un débat juridique, mais on pense que c'est tout à fait légal, finalement, ces concours-là. Les dispositions dérogatoires sont complétées par la Politique concernant l'embauche dans la fonction publique. La procédure aussi qui a été utilisée s'était inspirée en tous points des exigences qui apparaissent aux articles pertinents de la loi.

On fait état dans notre mémoire de la procédure qui a été suivie. Il faut dire qu'on y a participé de façon très étroite aussi, avec le gouvernement, entre autres sur l'identification des personnes. Parce que, vous savez, à chaque fois qu'on a négocié ça, ça n'était pas simple parce qu'on était presque des chasseurs de têtes. Ce n'était pas toujours évident de dire: Telle personne est admissible, ou: Elle ne l'est pas. Alors, on pense que chaque fois qu'il va y avoir ce type de concours, on va devoir aussi participer; mais on le fait de bonne grâce, dans ce temps-là.

Ce qu'il faut dire, cependant, c'est que la technique – on l'appelle comme ça – des concours réservés, n'est pas parfaite. Au contraire, l'utilisation des concours réservés présente certaines difficultés. En effet, ce n'est pas une méthode utilisée de façon systématique. D'ailleurs, elle a été obtenue, par le passé, suite à des négociations qui ont toujours été très ardues. Il y a donc plusieurs occasionnels qui rencontrent les critères d'admissibilité, au fil des mois et des ans, et qui risquent de ne plus être admissibles au moment où les concours sont tenus, en fonction des différentes dates butoirs qui sont prévues aux ententes. Bref, l'absence d'une mécanique de régularisation automatique soumet les occasionnels à la volonté politique ponctuelle du gouvernement.

Alors, il est nécessaire, selon nous, de convenir, avec évidemment le consentement des syndicats, de normes plus équitables d'embauche pour les occasionnels. Le gouvernement devrait mettre en place aussi une procédure qui vise à systématiser le recrutement sur des emplois réguliers par l'octroi de pouvoirs locaux plus importants au Conseil du trésor – c'est rare que vous allez entendre ça de la bouche d'un syndicat, mais ça peut arriver – pour procéder, comme dans le cas présent, de façon périodique à la titularisation de certains employés.

Alors, nous pensons que la mécanique mise en place devrait reposer sur les prémisses suivantes. Les occasionnels susceptibles d'être titularisés sur des emplois à caractère permanent devraient avoir cumulé cinq ans de service dans le même emploi au gouvernement. La procédure devrait être sensiblement la même que pour les concours dont j'ai déjà parlé. Les personnes identifiées devraient être, par la suite, nommées par décret sur des postes permanents.

On peut être conscient que le présent débat pose le problème de la sécurité d'emploi, qui n'est pas d'ailleurs relié à la dynamique des relations patronales-syndicales, même si on en parle souvent dans ce contexte-là. Pour nous, la sécurité d'emploi est liée plus à l'impartialité, à la neutralité, à l'intégrité de la fonction publique dans un État moderne et démocratique. Alors, je pense qu'il ne faut pas faire de faux débat. Le SPGQ a toujours placé au rang de ses priorités le traitement équitable de tous ses membres. Alors, le régime actuel, qu'on qualifie de régime à deux vitesses, n'est plus acceptable, surtout pour ceux et celles qui vivent l'insécurité chronique depuis des années.

Je veux vous parler très brièvement de la situation des temporaires. Je sais que le débat, ici, ne porte pas là-dessus, mais, comme on a des personnes, comme Mme Desjarlais, qui étaient temporaires, qui avaient passé des concours et qui ont été mises à pied à la suite de ce qu'on a appelé les coupures paramétriques du début des années 90, on a négocié, nous, avec la ministre responsable du Conseil du trésor, en 1994, un rappel au travail pour ces gens-là, qui ont été replacés pour la plupart sur des emplois occasionnels. C'est la raison pour laquelle on en parle aujourd'hui. Il y a encore de ces gens-là, qui ont été rappelés et qui sont toujours sur des emplois occasionnels et qui devraient occuper normalement des emplois permanents.

(16 heures)

Il y a des contradictions qui sont troublantes, entre autres dans le processus de supplantation. Il y a comme des problème d'équité aussi qu'il faut soulever. Il y a évidemment une hiérarchie des emplois dans la fonction publique, des permanents, des temporaires, des occasionnels, mais on est souvent confronté à des situations où il y a des employés permanents qui vont aller supplanter des personnes occasionnelles qui ont beaucoup d'ancienneté. Alors, je vous jure que le rôle du syndicat, dans ce temps-là, n'est pas facile.

Finalement, dans notre mémoire, on vous parle des autres réseaux de l'État. On vous dit qu'au sein des autres réseaux la gestion de la précarité d'emploi a ses propres mécanismes qui sont peut-être plus fonctionnels et normaux que ceux de la fonction publique. On n'a qu'à penser aux récents remplacements, à la suite des départs volontaires dans les réseaux de l'enseignement et de la santé, par des personnes à statut précaire sur liste de rappel. Ces remplacements ont fait en sorte que les personnes ayant le plus de service sur la liste de rappel ont été priorisées pour occuper les postes permanents dégagés par les départs. Dans la fonction publique, c'est impossible d'arriver à ce type de règlement, je dirais, ou d'entente avec le Conseil du trésor. C'est peut-être plus la loi qui empêche aussi les mécanismes qu'on n'a pas pu se donner jusqu'à maintenant.

Enfin, j'ai probablement été au-delà de la limite. Je n'ai pas à vous lire les recommandations qui sont là, je pense qu'elles ont été exprimées sous forme de commentaires. Je veux juste conclure en vous disant que les propositions du SPGQ poursuivent essentiellement quatre grands objectifs, soit: l'instauration d'un guichet unique d'emploi pour les personnes occasionnelles incluant un vrai processus de recrutement, une gestion équitable et transparente des listes de rappel et des mécanismes de supplantation, l'annualisation des concours réservés pour les personnes de trois ans et plus de service et une modification à la Loi sur la fonction publique pour titulariser les occasionnels longue durée. Alors, je vous remercie de votre attention. On est prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup, M. Caron. Tous les nouveaux emplois d'occasionnels vous apparaissent-ils devoir passer par l'étape d'un concours?

M. Caron (Robert): Non, je pense qu'on ne peut pas dire ça. À partir de notre mémoire, je pense qu'on dit qu'il y a de vrais emplois occasionnels. J'ai donné une définition tantôt, je pense...

Le Président (M. Chagnon): Non, ce n'est pas ça que j'ai dit.

M. Caron (Robert): Pardon?

Le Président (M. Chagnon): J'ai dit: Tous les nouveaux emplois d'occasionnels pour l'avenir...

M. Caron (Robert): Oui.

Le Président (M. Chagnon): ...devraient-ils passer par l'objet d'un concours?

M. Caron (Robert): Bien, on fait une proposition de guichet unique, nous, c'est justement pour ne pas que se répète la situation qu'on vit depuis des années, où on engage par une porte... Même si les gens, je dirais, travaillent pendant des années, des emplois qui sont supposés être occasionnels deviennent comme réguliers ou permanents. Mais à un moment donné on est incapable de faire en sorte que ces gens-là soient vraiment sur des emplois permanents.

Le Président (M. Chagnon): Je recommence. Dans les nouveaux postes d'occasionnels, est-ce que vous pensez qu'ils devraient être comblés après un concours? Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir un concours pour tous les nouveaux postes d'emplois occasionnels?

M. Caron (Robert): Oui, oui.

M. Boucher (Normand): Bien, la proposition qui est faite, c'est ce qu'on avance dans les faits. C'est, lors de l'embauche d'occasionnels, ça devrait être de façon systématique une déclaration d'aptitudes.

Le Président (M. Chagnon): D'accord.

M. Boucher (Normand): Et ça, c'est arrimé aussi avec la titularisation future. Si l'occasionnel a déjà fait une déclaration d'aptitudes, alors il va être plus facile par la suite, quand on va parler de permanentisation ou de titularisation, de dire: Il l'a déjà fait, son examen, alors, c'est envisageable. Mais oui, tous les nouveaux emplois occasionnels devraient faire l'objet d'une déclaration d'aptitudes.

Le Président (M. Chagnon): Mais, si j'ai bien compris, vous suggérez une titularisation après cinq ans et vous suggérez aussi le concours réservé après trois ans. C'est ça? Je reviens un peu à la question de M. Côté, tout à l'heure. Après trois ans, en principe – c'est un peu ce que la Commission de la fonction publique nous dit – si vous avez fait un travail, vous, dans un ministère pendant trois ans, comment ça se fait que vous n'êtes pas capable de passer à travers un concours trois ans plus tard pour devenir le titulaire ou pour devenir permanent?

M. Caron (Robert): Pourtant, c'est la démonstration que les occasionnels ont faite à l'automne 1995, après qu'on ait négocié des concours réservés, la très grande majorité a été déclarée apte.

Le Président (M. Chagnon): Oui, mais vous recommandez des concours réservés pour ceux qui ont trois ans.

M. Caron (Robert): Oui.

Le Président (M. Chagnon): La Commission de la fonction publique dit: Ce n'est probablement pas nécessaire puisque, en principe, les gens qui ont travaillé trois ans dans un emploi, ils devraient être capables de faire l'emploi, sinon on se serait aperçu qu'ils n'étaient pas capables de le faire. On ne les aurait pas gardés.

M. Caron (Robert): Oui, mais c'est évident. Regardez, nous, on propose un guiche unique, c'est...

Le Président (M. Chagnon): Tout le monde propose des guichets uniques dans toutes sortes de choses aujourd'hui. Ça veut dire quoi, votre guichet unique?

M. Caron (Robert): Bien, c'est évident que, quand il y a des emplois à caractère régulier ou permanent, il faut absolument qu'on passe par cette porte-là si on veut que les gens soient titularisés dans la fonction publique. C'est le problème qu'on vit depuis des années. La meilleure solution qu'on a pu trouver, parce qu'on ne pouvait pas avoir ce guichet-là avec les négociations qu'on a faites avec le gouvernement, c'était d'instituer des concours réservés. Ce qu'on dit, nous, c'est que le gouvernement avait le droit de le faire. Maintenant, s'il y a une titularisation automatique après trois ou cinq ans, on ne sera pas en désaccord avec ça. Mais, d'ici là, je pense que les concours réservés ont fait leur preuve. Ne serait-ce que de façon transitoire, moi, je pense qu'il faut continuer de faire les recommandations qu'on fait là-dessus.

M. Boucher (Normand): C'est une solution mitoyenne, en effet, qui est proposée: on a parlé de concours réservés pour les trois ans ou de titularisation pour les cinq ans. C'est une recommandation qu'on a retenue. Mais tant mieux si, suite aux recommandations de la commission, on arrive à la conclusion qu'il faut titulariser après trois ans, c'est sûr qu'on ne s'objectera pas à ça.

Mais la titularisation automatique, en tout cas, nous autres, ce qu'on avance, automatique, ce n'est pas par une modification à un article qu'on va reconnaître à un moment donné que les employés occasionnels rencontrent les critères de trois ans et doivent être déclarés permanents. La titularisation automatique doit se faire de façon systématique puis récurrente par le biais d'un décret. C'est pour ça tantôt, quand on faisait référence à des pouvoirs légaux additionnels au Conseil du trésor qui va faire une recommandation au gouvernement, comme ça se passe d'ailleurs au fédéral. De façon systématique, quand des occasionnels vont avoir les critères proposés – mettons que c'est trois ans de service continu – de façon automatique, par la technique du décret, le gouvernement, évidemment après un travail conjoint avec le SPGQ pour s'assurer des personnes qui rencontrent les critères, va les titulariser par décret mais de façon systématique, mais pas par une modification législative récurrente qui va se faire tous les deux ou trois ans, parce qu'on comprend que ça n'a pas de sens.

Le Président (M. Chagnon): Dernière question, à laquelle vous n'avez pas voulu répondre tout à l'heure: Quel genre de postes vous retrouvez au ministère de l'Éducation, depuis 23 ans, qui n'ont pas été titularisés? Moi, je n'ai jamais entendu parler de ça.

M. Boucher (Normand): Ces données-là, dans les faits... Le mémoire a été préparé de façon globale, on a apporté une appréciation de la directive. Les gens auxquels on fait référence au ministère de l'Éducation, c'est des fonctionnaires qui travaillent à la Direction de l'aide financière aux étudiants, au ministère de l'Éducation. Si vous voulez les noms, je pourrai vous les fournir.

Le Président (M. Chagnon): Non, ce n'est pas les noms, c'est les postes.

M. Boucher (Normand): C'est des agents de bureau qui sont là, qui travaillent 11 mois par année, et ça fait 23 ans qu'ils sont renouvelés, qu'ils travaillent sur le même poste. Tantôt, on vous parlait des personnes que ça fait 15 ans qu'elles sont sur un projet spécifique, au Fonds de rénovation cadastrale. Il n'y a pas eu d'arrêt pendant 15 ans puis le projet spécifique va jusqu'en l'an 2007. Ça, c'est une réalité. On ne peut certainement pas dire que c'est un emploi à caractère provisoire.

Le Président (M. Chagnon): J'en conviens. Vous m'avez appris quelque chose en ce qui concerne le ministère.

M. Boucher (Normand): Oui, au ministère de l'Éducation, puis, à la rigueur, je pourrai vous fournir les noms.

Le Président (M. Chagnon): Il y a 200 et quelques postes dans ce service-là, d'aide financière.

Mme Charest: Il y a combien d'occasionnels sur ce 200? Avez-vous une idée?

M. Boucher (Normand): En tout cas, moi, le groupe d'occasionnels que je connais, ils sont huit qui ont 22 ou 23 ans de service à titre d'employés cycliques ou saisonniers.

Mme Charest: Est-ce que je peux intervenir?

Le Président (M. Chagnon): Mme Charest, M. Côté et M. Marsan.

Mme Charest: Oui. Tout à l'heure, vous avez, M. Caron, parlé des clauses orphelin. Dans la fonction publique, il n'y a aucune clause orphelin. Des clauses orphelin, c'est des clauses qui stipulent que, lorsqu'on vient pour occuper le même type d'emploi, on est embauché à des conditions moindres. Et dans la fonction publique présentement il n'y a pas de clauses orphelin.

M. Caron (Robert): En théorie, en théorie.

Mme Charest: Mais il n'y a rien de signé là-dessus. Chez les médecins...

M. Caron (Robert): Non, non, mais voilà. Non, mais justement, en théorie... Nos conventions collectives, en temps normal, les gens reviennent à la fonction publique, c'est-à-dire que les gens reviennent sur des contrats d'occasionnels et normalement on devrait leur reconnaître toute leur expérience. Par la modification à l'article 22 et de la façon qu'elle est interprétée... Remarquez que, nous, on a tendance à dire que le droit reste le même, mais l'application de cette directive-là dans des ministères et organismes fait en sorte qu'on est comme en présence d'une clause orphelin. C'est qu'on dit à des gens dont le dernier contrat était peut-être à neuf ans avec le salaire correspondant, on leur dit: Bien, maintenant, c'est un emploi, je dirais, comme de grade III, si on parlait d'avant, des anciens grades, et on dit: Bien, le salaire, c'est le salaire qui est correspondant. Alors, il y a des gens qui prennent de moyennes drops de salaire, comme on dit des fois. Si ce n'est pas ça... Comme les clauses orphelin, c'est une image, parce que, c'est sûr qu'on n'a jamais négocié des clauses orphelin puis on n'a toujours pas l'intention d'en négocier.

Mme Charest: O.K. Et pour compléter votre information, c'est le Conseil national du Parti québécois qui, en fin de semaine dernière, a adopté une résolution à l'effet qu'il était contre les clauses orphelin.

(16 h 10)

M. Caron (Robert): Ah! Bien voilà! Je ne voulais pas le dire, madame, mais je suis content que vous me le disiez. C'est exactement à ça que je faisais référence parce que, quand j'ai entendu ça, j'ai dit: Magnifique, ce conseil-là est d'accord avec nous, alors, en commission parlementaire, je vais le souligner, évidemment. J'espère que le Conseil du trésor va prendre bonne note de ça, par ailleurs.

Le Président (M. Chagnon): Les règlements du Conseil du trésor et de la Sûreté du Québec de l'été passé ont amené des clauses orphelin...

Mme Charest: Des clauses orphelin à la Sûreté du Québec.

Le Président (M. Chagnon): ...pour les nouveaux policiers puis pour...

Mme Charest: Les nouveaux médecins également.

Le Président (M. Chagnon): ...les nouveaux médecins.

Mme Charest: Oui. On en est conscient.

M. Caron (Robert): Alors, bref, si on ne peut pas faire des choses directement, on ne doit pas aussi les faire indirectement. Alors, l'article 22 est à regarder de très près.

Mme Charest: O.K. Merci, monsieur.

Le Président (M. Chagnon): Alors, M. Côté.

M. Côté: Dans vos recommandations concernant la liste des postes affichés, la liste des postes de nature provisoire qui seraient à combler dans la fonction publique, vous demandez qu'elle soit acheminée à vos organisations syndicales pour que ça fasse l'objet d'un affichage sur les lieux de travail. J'essaie de voir quel est l'intérêt de la part du Syndicat. Ou encore, lorsque c'est affiché sur les lieux de travail, je ne vois pas comment un occasionnel pourrait appliquer sur un autre poste qui est provisoire ou qui est peut-être moins... Alors, c'est quoi l'intérêt que vous avez face à cette recommandation-là?

M. Caron (Robert): Je vais pas mal laisser répondre les gens qui sont avec moi. Mais je vais juste vous dire que vous seriez surpris comment les occasionnels surveillent les emplois qui s'ouvrent dans leur ministère et organisme d'origine, si on peut parler comme ça. Malgré tout, de toute façon... Je disais tantôt que c'est important qu'on reçoive ces listes-là; des fois, on a de la difficulté à les recevoir. Et malgré tout, il y a beaucoup de phénomènes de délinquance. Je donnais des exemples tantôt sur l'ancienneté et tout ça, mais peut-être qu'on peut donner des exemples concrets.

M. Boucher (Normand): Dans les faits, si l'occasionnel qui est sur liste de rappel, donc qui a de l'ancienneté, veut savoir quels sont les postes occasionnels qui sont proposés, faut-il qu'on lui dénonce, faut-il qu'il le sache. Et la seule façon de le savoir, c'est soit que ces postes-là sont affichés formellement au local du SPGQ ou dans le milieu de travail où cet occasionnel-là a souvent des contrats de travail, qui vont l'informer qu'un emploi occasionnel est à combler. Et là évidemment, si l'occasionnel qui est à la recherche d'emploi sait qu'il y a un emploi occasionnel à combler, puis il sait qu'il est le plus ancien, en principe, c'est à lui que le poste devrait aller. Mais actuellement il n'y en a pas de contrôle de ce genre-là, les postes sont demandés, accordés, les emplois occasionnels sont dotés, on met des employés occasionnels dessus. Mais, si on ne tient pas compte de l'ancienneté, comment voulez-vous que le plus ancien le sache que c'est lui qu'on aurait dû retenir puis ce n'est pas lui qu'on a retenu? Alors, la seule façon de s'assurer qu'il puisse le savoir, c'est qu'il faut donner une certaine forme de publicisation à ces postes-là.

M. Caron (Robert): Il y a plusieurs occasionnels qui appellent au Syndicat pour savoir ce qui se passe dans les ministères ou dans les organismes, parce qu'on a une banque de rappel ministérielle, une banque de rappel interministérielle. Alors, il y a une mise à jour de ça, il y a un contrôle qui est fait par le Syndicat, c'est notre rôle à nous de représenter adéquatement les occasionnels face à ces listes-là.

M. Côté: Une deuxième question. Vous nous demandez aussi que soit modifiée la Loi sur la fonction publique de telle sorte que la répartition des effectifs permanents et occasionnels puisse être négociée avec les syndicats. Ça là, je trouve que ça ressemble drôlement à la négociation d'un plancher d'emploi relativement au niveau des occasionnels. Est-ce que vous pourriez élaborer un peu plus sur cet aspect-là?

M. Caron (Robert): Non, on n'a pas parlé de plancher d'emploi.

M. Côté: Non, mais je trouve que ça ressemble.

M. Caron (Robert): Oui, oui, ça peut. Ha, ha, ha! C'est parce qu'on a besoin de faire le point régulièrement. De toute façon, on le fait. C'est un peu l'histoire de nos dernières négociations, je dirais, au cours des 10 dernières années avec le gouvernement. On ne négociait pas le plancher d'emploi, mais cependant on faisait le point quand même sur la situation des occasionnels au gouvernement, puis c'est à partir des constats qui étaient quelquefois mutuels qu'on en arrivait à des solutions comme les concours réservés. Alors, nous, évidemment, on prétend qu'on doit négocier toutes nos conditions de travail; alors, ce qu'on veut, c'est d'être en mesure de regarder la situation avec le Conseil du trésor.

M. Côté: Merci.

Le Président (M. Chagnon): Merci. M. Laprise.

M. Laprise: Toujours en fonction de ce qui a été fait, du départ de plusieurs fonctionnaires, lorsqu'il y a des temporaires, par exemple, ou encore des occasionnels qui accèdent à des postes permanents, à ce moment-là, est-ce que le poste d'occasionnel demeure ouvert ou s'il est fermé, dans l'expérience que vous avez?

M. Caron (Robert): Bien, je vais parler comme si j'étais le sous-ministre: Ça dépend des ministères. Ha, ha, ha! Normalement, la personne qui est titularisée, bien je pense que c'est comme un poste qui vient de devenir un effectif nouveau dans ce ministère-là.

M. Laprise: Dans l'éducation, par exemple, c'est sûr que si on met une personne... un poste permanent parce que, quand il y a des étudiants, ça prend un professeur, hein. Alors, c'est peut-être plus obligatoire de le remplacer qu'au niveau de la fonction publique comme telle, au niveau de certains cadres, de certains ministères, en tout cas, du moins, certain.

M. Caron (Robert): En apparence.

M. Laprise: En apparence. Mais il reste que c'est vrai également dans la santé.

M. Caron (Robert): Oui. Oui.

M. Laprise: Il y a des postes où il faudra retrouver une certaine permanence.

M. Caron (Robert): Oui, oui, oui. Mais, vous savez, on a le préjugé classique de dire: Vous avez raison, la santé, l'éducation, c'est essentiel. Dans la fonction publique, ah, c'est moins évident. Mais allez questionner les ministères et les organismes. Quand on leur dit, à un moment donné: Bien, écoute, on doit faire des coupures. Bien, écoute, il faudrait... Puis ça a été fait au début des années quatre-vingt-dix. On a dit: Bien, là, il faut couper des personnes. Puis les seules personnes qu'on peut couper, c'étaient des employés temporaires qui avaient passé des concours ou des occasionnels. Il y a des ministères qui ont vraiment fait l'effort de garder ces personnes-là parce qu'elles étaient essentielles au travail professionnel – moi, je parle de ce que je connais – finalement au gouvernement. Alors, moi, je pense que c'est pour ça qu'on dit que c'est des emplois permanents, c'est des emplois qui sont essentiels pour le gouvernement. C'est des emplois qui sont souvent à la fine pointe d'un ministère ou d'un organisme.

Le Président (M. Chagnon): Oui, M. Laprise.

M. Laprise: Trouvez-vous, par exemple, du fait que le gouvernement a fait une démarche par le haut, si vous voulez, en favorisant les départs des plus anciens au niveau de la fonction publique, au niveau du parapublic également, il a fait de la place pour des gens qui sont déjà dans la machine, qui sont déjà dans l'appareil gouvernemental...

M. Caron (Robert): Sauf que ça n'en a pas fait...

M. Laprise: ...et qui sont plus jeunes?

M. Caron (Robert): ...dans la fonction publique, par exemple. C'est ça le problème. Parce que, vous savez, on n'a pas négocié, je dirais, de bon coeur. Peut-être de grand coeur parce qu'à un moment donné on s'est dit: Si on ne négocie pas les départs volontaires, ce qui va en résulter, c'est des coupures justement d'emplois occasionnels ou temporaires au gouvernement, ce qu'on ne peut admettre aussi. Alors, on a fait, je dirais, un gros effort avec le gouvernement pour trouver, pour négocier des mesures de départs volontaires. Après ça, on s'est retourné de bord, on a dit au gouvernement: Il me semble que ça met un peu d'oxygène dans le système. Il me semble que là on devrait faire comme ça a été fait dans l'éducation et la santé: permettre à des emplois occasionnels d'être titularisés. Et je suis obligé de vous dire qu'on a eu une fin de non-recevoir là-dessus. On a eu l'impression même que le Conseil du trésor, que le gouvernement même changeait de discours, parce qu'on avait dit qu'il y aurait possiblement des emplois occasionnels qui deviendraient permanents dans les réseaux, qu'il y aurait du remplacement, mais pas dans la fonction publique. Et on a toujours le même problème aujourd'hui.

Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie, M. Laprise. M. Caron aussi, je vous remercie ainsi que les gens qui vous accompagnent.

M. Caron (Robert): Merci.

(16 h 20)

Le Président (M. Chagnon): Et j'invite maintenant le Syndicat des agents de conservation de la faune du Québec à s'avancer et à se préparer.

Alors, je souhaite la bienvenue à M. Sylvestre. M. Sylvestre est vice-président du Syndicat des agents de conservation de la faune du Québec. À l'avance, je souhaite la bienvenue à vos deux camarades, qui sont M. Jacques Leblanc et Allen Charland.


Syndicat des agents de conservation de la faune du Québec (SACFQ)

M. Sylvestre (Guy): Exactement. Messieurs et madame, bonjour et merci pour cette tribune qui nous apparaît très importante et très appropriée. Écoutez, on vous a préparé un mémoire dans lequel tout d'abord on a un préambule qui va vous situer dans le temps et aussi où les agents de conservation ont à travailler.

Le Service de conservation de la faune a comme mission notamment de prévenir, de protéger la faune ainsi que son habitat et aussi celle d'éduquer la clientèle qui utilise les ressources de différentes façons. Sur un territoire aussi vaste que le Québec, il est un joueur important particulièrement à l'égard du patrimoine, lequel est vulnérable, pour assurer sa pérennité. Il est toujours surprenant de voir que la clientèle est aussi grande, parce que depuis plusieurs années la clientèle est toujours grandissante dans les différentes activités. D'ailleurs, avec les moyens de déplacement, le territoire devient de plus en plus accessible. Cette dernière pratique ses activités dans toutes les régions.

Nous nous retrouvons devant la situation où, pour étendre son mandat à l'ensemble du territoire, le Service de conservation de la faune doit déployer ses effectifs en tenant compte de ce facteur. Par conséquent, nous nous retrouvons avec des points de services dans toutes les régions afin de répondre adéquatement à la demande qui est, dans certains cas, très lourde à supporter. Les points de services sont opérés de façon saisonnière.

La situation est claire, il est de plus en plus question de rendre les opérations le plus efficaces possible, ce qui demande des expertises organisationnelles des plus efficaces afin d'optimiser les opérations. Dans ce mouvement d'optimisation des opérations, les régions ont élaboré des stratégies qui ont comme éléments clés des emplois occasionnels. Il apparaît très clairement que cette solution est la plus appropriée dans le contexte budgétaire actuel. Toutefois, certains éléments doivent être retenus afin de rendre les opérations efficientes. Cet avis, nous le partageons, mais pas à n'importe quel prix.

Enfin, nous vous proposons un portrait de l'état de la situation actuelle à laquelle les employés saisonniers au Service de conservation de la faune ont à faire face dans les différentes étapes de leur carrière, parfois très longue, sans pour autant se prévaloir de leurs nombreuses années de service accumulées pour combler les postes permanents vacants.

Notre participation à cette consultation de la commission est pour notre organisation un levier important et utile, et elle a aussi comme objectif de recueillir les recommandations pour répondre à un besoin bien actuel. Par cette participation, nous osons espérer que celles proposées par notre organisation permettront, après analyse, d'élaborer des actions concrètes.

Comme nous l'avons souligné, ce mémoire a comme objectif principal de présenter l'état de la situation actuelle relative à l'accès pour les employés saisonniers à des emplois permanents. Comme résumée auparavant, la problématique est marquée par plusieurs facteurs: notamment, le redéploiement des effectifs sur le territoire ainsi que les critères de l'assurance-emploi. De toute façon, on va vous expliquer un peu plus loin dans notre document aussi que le facteur le plus important, c'est le redéploiement.

Beaucoup de tentatives réalisées par notre organisation ont été vaines depuis 1984, ceci par diverses ententes avec notre employeur, le ministère de l'Environnement et de la Faune. À l'époque, il faut bien le dire, on est passé aussi du ministère du Tourisme, Chasse et Pêche, et du Loisir, Chasse et Pêche maintenant au ministère de l'Environnement et de la Faune, et auprès de cette même commission. Tout ceci afin que soient régularisées, humanisées et rendues plus acceptables les conditions dans lesquelles les employés saisonniers, considérés comme employés à statut précaire, évoluent au service de la conservation de la faune depuis plusieurs années.

Pour les circonstances, on va vous présenter aussi un portrait de notre organisation qui a été accréditée en 1982. On offre les services à 450 membres, dont plus de 150 sont des employés saisonniers occasionnels. On les appelle «saisonniers» par leur emploi à caractère saisonnier et ils sont répartis dans la plupart des régions. Leurs conditions de travail sont dictées à même celles des employés permanents, toutefois soustraites à quelques-unes de celles-ci. Leur nom figure sur une liste de rappel régionale et leur rang est déterminé selon leurs années de service pour le rappel lors de nouveaux contrats de travail, le cas échéant. Cette situation est celle vécue par tous les employés saisonniers, tenant compte du grand nombre d'années de service à leur actif.

Maintenant, pour ce qui est de la dotation: de 1978 à septembre 1997, les agents de conservation saisonniers sont recrutés pour la grande majorité à partir d'une liste de déclaration d'aptitudes constituée à la suite de concours de recrutement, tel que défini aux règles de dotation de la Loi de la fonction publique. Ce processus a été institué à la suite de changements administratifs du territoire relativement aux activités de chasse et pêche, entamés en 1978 lors de l'opération Gestion faune qui faisait suite à l'abolition des clubs de chasse et pêche privés.

Ce soudain recrutement a été rendu nécessaire afin de combler un déficit à l'égard de la protection de ces territoires protégés à cette époque par des personnes engagées par les clubs privés. C'est-à-dire que les clubs s'étaient organisés ensemble pour justement avoir leur propre service de protection sur leurs territoires.

Par la suite, ce n'est que trois ans plus tard qu'un premier concours de recrutement s'est tenu, soit en 1981. Les agents de conservation saisonniers, malgré qu'ils s'étaient qualifiés lors de l'exercice Gestion faune, ont été, eux aussi, assujettis aux mêmes règles que les candidats provenant du public. D'autres concours ont suivi: 1987 et 1991. Ces concours comportent plusieurs étapes, dont des conditions d'admission, ce qui est général; deux examens écrits; des tests d'aptitudes physiques très élaborés et aussi complexes que ceux qui sont demandés aux nouvelles recrues de la Sûreté du Québec; une enquête judiciaire et un examen médical. Toutes ces étapes sont éliminatoires pour tous. Il en va de même pour les employés saisonniers qui, lors de ces exercices de recrutement, étaient à l'emploi du service depuis plusieurs années. De plus, tous ces concours de recrutement, sans exception, ont été contestés.

Des changements survenus en 1997 font que le recrutement pour les employés occasionnels se fait à partir d'une liste centrale où le nom du candidat potentiel apparaît pour une durée de deux ans. En tout cas, vous connaissez déjà la procédure. Dans le cas des tâches, l'agent de conservation de la faune est un agent de la paix, ce qui comporte certaines particularités, entre autres, qui sont soulignées dans la Loi de la fonction publique, ce qui comporte certaines particularités, dont: l'employé appelé à occuper un poste cyclique doit au préalable recevoir une formation de base ajustée sur les nouvelles fonctions, ce qui, par conséquent, en fait une personne en autorité et avec les responsabilités qui s'y greffent.

(16 h 30)

D'ailleurs, il est pourvu des mêmes outils de travail: revolver, menottes, poivre de cayenne. En fin de compte, les mêmes outils que le policier, qui sont ceux que l'agent de conservation permanent utilise pour réaliser sa tâche de façon régulière. De plus, il a à utiliser les équipements auxiliaires mis à sa disposition pour effectuer la surveillance, la vérification et l'inspection que son mandat lui confère, en plus de la notion de dangerosité reliée aux tâches. D'ailleurs, depuis 1972, nous déplorons cinq décès dans nos rangs, dont deux parmi ceux-ci étaient des agents qui occupaient des emplois cycliques au Service de la conservation de la faune. Enfin, il détient les mêmes pouvoirs que l'agent permanent à l'égard de l'interception, l'arrestation, la perquisition, l'accès du Centre de renseignements de la police du Québec, etc. Certaines de ses tâches, par leur complexité, notamment la Loi de l'environnement, la loi sur les habitats et chartes des droits et libertés, sont acquises à la suite de formation et surtout par l'expérience sur le terrain.

Le redéploiement. Comme le mandat de notre Service est d'offrir une protection sur l'ensemble du territoire du Québec, cela constitue un élément important de contraintes auxquelles les employés saisonniers doivent s'accommoder, notamment le changement de lieu de résidence pour eux et leur famille; par conséquent, ils doivent encourir des frais de déménagement non remboursés, ceci afin de poursuivre leur carrière.

La problématique. C'est là qu'on va vous expliquer, en tout cas, dans les plus brefs détails, ce que, nous, on a fait ressortir comme problématique à l'égard de l'emploi occasionnel dans le corps d'emploi d'agent de conservation de la faune. Ce que nous venons de voir, c'est le portrait, sans être exhaustif, de l'état de la situation vécue par l'ensemble des employés saisonniers cycliques du Service de la conservation de la faune. Il demeure néanmoins des irritants que nous devons dénoncer, et permettez-nous d'en faire une présentation.

Les effectifs opérationnels. D'abord, le nombre d'agents de conservation de la faune est à la baisse, comme dans l'ensemble des autres corps d'emplois, mais le territoire à surveiller est resté le même et les tâches ont augmenté. Pour y remédier, le ministère de l'Environnement et de la Faune fait appel aux emplois saisonniers cycliques pour équilibrer les effectifs permanents toujours à la baisse.

La dotation. L'année 1991 a été la dernière année où un concours de recrutement pour notre corps d'emploi s'est tenu. Il y a eu 2 511 candidatures; après le processus éliminatoire, 248 ont été retenues dans trois niveaux. De ces élus, seulement cinq ont été nommés sur des postes permanents, ce qui, par conséquent, est source de frustration. D'ailleurs, à peu de chose près, le même processus d'élimination est en vigueur, mais ce que nous retenons, c'est que les employés saisonniers étaient assujettis, malgré plusieurs années de service, aux mêmes conditions que celles du public. De plus, les coûts engendrés par la tenue de ces concours de recrutement pour quelques postes sont-ils justifiés dans le contexte budgétaire actuel quand il y a une banque de candidats déclarés aptes, ayant l'expérience et la maturité pour combler ces postes?

Les conséquences? C'est que ça provoque une démotivation chez les employés qui ont à subir plusieurs contraintes à chaque début de contrat: d'abord, le nombre d'emplois saisonniers disponible dans chacune des régions – en passant, le printemps arrive, les opérations commencent; là, on va connaître le nombre d'occasionnels, de saisonniers qui vont être disponibles, les postes saisonniers qui vont être disponibles dans chacune des régions – le lieu de travail et, enfin, la durée. Tout à l'heure, on va revenir avec la durée que, nous, nous recommandons. Une autre conséquence plus grave: l'exode de bons employés formés et avec expérience vers d'autres emplois, notamment la sécurité publique, la Gendarmerie royale du Canada, la détention, etc. De plus, même si l'État québécois n'a aucune obligation ou responsabilité légale envers les employés à statut précaire, il a néanmoins une obligation morale.

Autre constat. Depuis trois ans, c'est la diminution du nombre d'agents permanents et l'ajout de nouvelles ressources cycliques ou autre augmentation... la durée des contrats, ce qui crée des situations dénoncées à la Commission. Juste pour vous citer un passage, un exemple, pour vous donner des chiffres, c'est que, actuellement, on est 320 permanents agents de conservation de la faune et, en 1997, on comptait 152 occasionnels qui étaient aux opérations.

Le Président (M. Chagnon): Vous auriez dû nous écrire ça.

M. Sylvestre (Guy): Pardon?

Le Président (M. Chagnon): Vous auriez dû nous écrire ça, je cherchais ces chiffres-là, justement, dans votre présentation.

M. Sylvestre (Guy): Ah! mais, si vous les voulez, ça va me faire plaisir.

Le Président (M. Chagnon): Alors, je vais vous poser les questions tout de suite après.

M. Sylvestre (Guy): O.K. D'accord.

Le Président (M. Chagnon): Trois cent vingt, puis vous dites...

M. Sylvestre (Guy): Oui, 320, actuellement, permanents.

Le Président (M. Chagnon): Permanents.

Une voix: Occasionnels?

M. Sylvestre (Guy): Occasionnels, ça représente 153 exactement.

Le Président (M. Chagnon): O.K.

M. Sylvestre (Guy): Évidemment, on va le transformer en ETC tout à l'heure.

Le Président (M. Chagnon): O.K.

M. Sylvestre (Guy): Mais on reviendra sur le sujet.

Le Président (M. Chagnon): Ça va.

M. Sylvestre (Guy): En effet, la situation a comme conséquence de garder ces employés sur de plus longues périodes et, comme en 1990, on se retrouve avec des faux occasionnels. J'aurais le goût de vous dire des faux policiers, mais ce n'est pas la place. Donc, on va s'en tenir aux faux occasionnels.

Le Président (M. Chagnon): C'est un autre débat, ça.

M. Sylvestre (Guy): Oui, oui, c'est un autre débat, oui, effectivement. S'ajoutent à ces conditions difficiles le lieu et le contrat qui l'amènera... et, en d'autres occasions, voir celui-ci partagé, c'est-à-dire à un autre port d'attache ailleurs que dans la région. Je m'explique. Une personne peut avoir un poste d'attache X, par exemple, à Trois-Rivières, puis, à mi-contrat, on peut lui dire que le contrat va se terminer à La Tuque, donc c'est encore une condition difficile.

Aussi, nous désirons attirer votre attention sur quelques passages du rapport final de la commission du budget et de l'administration de décembre 1990. Donc, aux pages 97, 102 et 103, c'est surtout les impacts sur le plan socioéconomique et humain, dont la planification familiale, le statut inférieur au niveau de la convention collective, la dévalorisation face à ses pairs qui détiennent un emploi régulier, le stress et, aussi, en terminant, le sentiment d'appartenance à l'organisation.

Période de non-emploi. Revenons à la durée des contrats réalisés par les employés saisonniers, ce qui a, comme vous le savez, une incidence sur les prestations d'assurance-emploi que les nouvelles normes viennent encadrer. L'ensemble des conditions sont affectées. D'abord, la diminution de prestations et la période de prestations qui, par conséquent, dans certains cas, obligent l'employé saisonnier à se retourner vers d'autres ressources, dont l'aide sociale. Cette situation est due, entre autres, à la courte durée de contrats. Évidemment, dans notre corps d'emploi, pour les occasionnels saisonniers, les contrats sont d'une durée de 60 jours à 180 jours. Tout à l'heure, on reviendra plus en détail. Durant cette période de non-emploi – et c'est important ici qu'on vous le souligne – une des particularités de notre statut d'agent de la paix est que le lien d'emploi tient toujours, puisque ce statut est la condition sine qua non pour occuper la fonction d'agent de conservation de la faune. D'ailleurs, celui-ci est assigné à l'occasion à la cour lors d'événements traités durant la période d'emploi. De plus, l'employé saisonnier est contraint, d'une part, à des manoeuvres de persuasion lorsque vient le temps de demander un prêt quelconque à une institution bancaire. D'autre part, la recherche d'un nouvel emploi en période de non-emploi est particulièrement difficile dans sa communauté de par ses fonctions d'agent de la paix.

Nos recommandations, surtout à la dotation, on en a quatre. La première, c'est que l'autorité compétente – on reprend un peu qu'est-ce qui avait été suggéré lors de la dernière commission parlementaire – régularise la situation des employés saisonniers à caractère permanent de la façon suivante. Puisque les employés saisonniers embauchés pour occuper des emplois d'une certaine durée doivent se soumettre à un concours identique à celui des employés permanents, il conviendra d'en tenir compte lorsque des postes permanents deviendront disponibles. Lorsque cela surviendra, les personnes occupant des postes saisonniers à caractère permanent en période de non-emploi et conservant un lien d'emploi avec l'employeur devraient être titularisés, le cas échéant.

Deuxièmement, attendu que, à l'article 1 de l'avis de la Commission de la fonction publique de septembre 1997, le problème des faux occasionnels persiste, et davantage pour le corps d'emploi d'agent de conservation, et particulièrement, tout particulièrement pour le corps d'emploi d'agent de conservation de la faune, lequel est encadré par la notion édictée à l'article 49.05 de la convention collective, qui précise le lien d'emploi... Par conséquent, nous suggérons que les emplois que nous considérons saisonniers à caractère permanent soient reconnus comme permanents temps partiel.

Troisièmement, parmi les règles de dotation, la notion que nous retenons et souhaitons est celle prévue à l'article 50.1, alinéa 1, de la Loi de la fonction publique, c'est-à-dire la promotion. Par conséquent, tous les permanents à temps partiel visés seraient candidats potentiels à la participation d'un concours de promotion, lequel aurait comme objectif de permettre à ces derniers d'accéder à un poste permanent temps plein devenu vacant et de s'inscrire sur une liste de déclaration d'aptitudes.

Quatrièmement, favoriser la stabilité dans la désignation récurrente du port d'attache régional par un mécanisme développé par les autorités compétentes afin de garantir cette notion qui a une incidence sur le plan socioéconomique, tel que libellé dans le rapport de 1990, c'est-à-dire que, lorsqu'une personne est engagée, elle devrait revenir de façon récurrente toujours au même port d'attache.

La durée de contrat. Considérant les nouvelles règles particulières de l'assurance-emploi relatives à la période et à la prestation, nous recommandons que les contrats offerts aux employés saisonniers à caractère permanent qui se retrouvent sur la liste de rappel d'une région devraient avoir une durée minimale de 130 jours continus, sans interruption, et au même port d'attache.

(16 h 40)

Intimidation. Nous insistons sur la relation qui prévaut actuellement pour les personnes occupant un poste à statut précaire et le gestionnaire, laquelle est arbitraire de leur part, à quelques occasions, ce qui, par conséquent, crée des tensions.

En conclusion, le principal grief, perpétuellement dénoncé par les employés saisonniers ayant à leur actif plusieurs années de service, est de leur offrir une possibilité de promotion où ils pourront se qualifier pour être sur une liste de déclaration d'aptitudes afin d'occuper un poste permanent, le cas échéant. Aussi, cette solution trouverait certainement son profit sur le plan financier, puisque ces exercices de recrutement où des sommes importantes sont engagées pour aboutir... comme ce fut le cas en 1991 où il y a eu seulement cinq élus sur une liste de 248 candidatures retenues.

Enfin, en plus des différents propos que nous venons d'énumérer et qui sont actuels, le territoire demeure le même, la population qui pratique les différentes activités est toujours grandissante et le territoire de plus en plus accessible. La situation de protection se détériore au détriment de notre patrimoine faunique. Voilà.

Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup, M. Sylvestre. Moi-même un adepte des sports que vous contrôlez, j'ai été un peu surpris, par ailleurs, l'automne dernier, sachant que le nombre de vos collègues diminuait, d'être intercepté trois fois dans trois régions différentes: à l'Île-aux-Grues, dans les îles de Boucherville, puis au Cap-Tourmente, en dedans d'à peu près deux semaines et demie. J'ai trouvé que vous étiez partout sur le territoire en même temps, je vous ai trouvé pas mal efficaces.

Ceci étant dit, je pense que les membres de la commission, ici, apprécieraient si vous étiez capable de nous fournir un tableau dans lequel on pourrait retracer, sur les 10 ou 15 dernières années, ou par période de trois ans, quelque chose comme ça, le nombre d'agents de conservation qui étaient à l'emploi du gouvernement et qui le sont actuellement et le nombre d'occasionnels aussi. Là, je pars avec la dernière donnée que vous avez, c'est 320 permanents, si j'ai bien compris.

M. Sylvestre (Guy): Oui.

Le Président (M. Chagnon): En ETC, vous le traduisez comment?

M. Sylvestre (Guy): En ETC, le 1er septembre 1997, ça représentait 75 ETC.

Le Président (M. Chagnon): Oh! ce n'est pas la même chose, ça.

M. Sylvestre (Guy): Non, non, c'est pour ça que je voulais quand même préciser.

Le Président (M. Chagnon): 75 ETC?

M. Sylvestre (Guy): Pour 153 occasionnels actuellement, pour 1997, évidemment sur listes. Évidemment, il y a eu des modifications. On parlait du 1er septembre 1997, puis, comme vous le savez, septembre, c'est le début des grosses opérations, donc il est peut-être venu encore...

Le Président (M. Chagnon): Oui, oui, à partir du 25.

M. Sylvestre (Guy): ...s'ajouter des occasionnels.

Le Président (M. Chagnon): Vous vous partagez entre les orignaux puis les canards.

M. Sylvestre (Guy): Pardon?

Le Président (M. Chagnon): À partir du 25, vous vous partagez entre les orignaux puis les canards.

M. Sylvestre (Guy): Oui, exact, c'est ça. C'est un dilemme, on ne sait pas trop, trop, des fois.

Le Président (M. Chagnon): Ce n'est pas la même grosseur.

M. Sylvestre (Guy): Non, non.

Le Président (M. Chagnon): Au moins, ce n'est pas trop compliqué pour ça.

M. Sylvestre (Guy): Bon, écoutez, moi, j'ai un tableau ici.

Le Président (M. Chagnon): Si vous pouviez nous le donner, à la commission.

M. Sylvestre (Guy): Oui, oui, je peux, j'en ai quelques copies, entre autres, j'en ai trois copies.

Le Président (M. Chagnon): On va demander à monsieur d'aller la chercher.

C'est donc dire que vous avez presque le tiers de vos effectifs qui sont constitués d'occasionnels, dont le contrat varie de 60 jours à 180 jours.

M. Sylvestre (Guy): Exact.

Le Président (M. Chagnon): La majorité d'entre vous, vous devez être des finissants du collège de Baie-Comeau ou du collège de Saint-Félicien.

M. Sylvestre (Guy): Bon, écoutez, je ne voudrais pas rentrer dans le débat, puisque, actuellement, comme vous le savez, on est en exercice de relativité. La scolarité fait partie justement d'un enjeu majeur.

Le Président (M. Chagnon): O.K.

M. Sylvestre (Guy): Donc, actuellement, on est...

Le Président (M. Chagnon): La question de la scolarité a son importance, inéluctablement, mais, pour les nouveaux occasionnels dans votre corps de métier, est-ce que vous acceptez le principe qu'ils soient tous choisis suite à un concours?

M. Sylvestre (Guy): Oui, effectivement.

Le Président (M. Chagnon): Qu'est-ce que vous suggérez comme méthode de titu...

M. Sylvestre (Guy): Titularisation.

Le Président (M. Chagnon): Oui, enfin.

M. Sylvestre (Guy): Écoutez, si vous permettez, M. Chagnon...

Le Président (M. Chagnon): Titularisation.

M. Sylvestre (Guy): Titularisation, oui. Si vous permettez, à ma droite, j'ai mon collègue et représentant occasionnel.

Le Président (M. Chagnon): Vous pouvez le nommer?

M. Sylvestre (Guy): M. Charland.

M. Charland (Allen): Allen Charland.

M. Sylvestre (Guy): En passant, il a 20 ans de services saisonniers. Donc, écoutez, je pense qu'il est plus en mesure que moi de vous... Bien, je pourrais vous l'expliquer, mais je crois que je vais lui laisser l'opportunité de présenter la situation.

Le Président (M. Chagnon): Parfait. M. Charland, on vous écoute.

M. Charland (Allen): Le problème qu'il y a présentement avec les emplois saisonniers au Service de la conservation, c'est qu'il y a très, très peu de recrutement. Au dernier concours de 1991, cinq postes, ce n'est pas beaucoup. Il était censé y en avoir plus, mais, avec les coupures, il n'y en a pas eu. Avec un si faible roulement de personnel, c'est très difficile et c'est très coûteux de faire des concours «at large» pour le public ainsi que pour les agents qui sont déjà là, qui ont passé trois et des fois quatre concours de recrutement avec succès. Le dernier...

Le Président (M. Chagnon): Ma question s'adressait pour les nouveaux, pas ceux qui ont déjà été occasionnels ou qui sont reconnus comme occasionnels, mais pour les nouveaux, ceux qui ne sont pas dans le groupe des 320 et des 153.

M. Charland (Allen): Pour les nouveaux, je suis entièrement d'accord avec la Commission qu'ils devraient passer par un concours au mérite. Avec les nouvelles exigences qu'on croit que le Conseil du trésor va nous demander, je n'ai absolument rien contre ça. Suite à un certain nombre d'années au sein du Service de la conservation, où ils acquerraient de l'expérience et des notations positives de la part de leur patron, ils pourraient devenir permanents à temps partiel. Parce que, pour notre part, le gros de l'ouvrage se situe entre le mois d'avril et le mois de décembre. Avec les effectifs permanents à la baisse, comme on les a présentement, les permanents, c'est à peine s'ils peuvent suffire à la tâche, parce que, comme, les agents, on ne nous paie plus nos congés fériés et notre surtemps, les agents les prennent l'hiver. Donc, ils ont un manque d'agents de conservation l'hiver. Mais, les saisonniers, on n'est plus là, c'est pour ça que ça serait peut-être utile de titulariser les saisonniers qui sont présentement là ayant une certaine expérience, comme la Commission l'a prétendu.

Le Président (M. Chagnon): Évidemment, l'hiver, pour ceux qui connaissent moins le métier, c'est la protection des ravages d'orignaux, de chevreuils, et compagnie.

M. Charland (Allen): C'est ça, ainsi que l'éducation dans les écoles.

Le Président (M. Chagnon): Voilà.

M. Sylvestre (Guy): Si vous permettez.

Le Président (M. Chagnon): Oui, bien sûr.

M. Sylvestre (Guy): J'aurais juste à ajouter aussi que, au niveau de la complexité du travail, c'est bien particulier. C'est que, aussi, durant l'hiver, dû à des raisons qu'on vous a expliquées, qu'on vous a présentées, la dynamique au niveau des enquêtes se poursuit. C'est certain qu'il y a des contraintes, et tout. C'est évident que l'employé, on n'est pas... le gestionnaire n'est pas obligé, n'est pas tenu de faire – comment dire – réembaucher l'occasionnel. Donc, c'est évident qu'à l'hiver, durant la période hivernale, il y a une certaine baisse aussi au niveau des effectifs.

Le Président (M. Chagnon): Merci. Mme Houda-Pepin.

Mme Houda-Pepin: Oui, merci, M. le Président. Alors, à la page 4 de votre mémoire, vous expliquez les tâches qu'effectue l'agent de conservation de la faune. Je sais que mon collègue le député de Westmount–Saint-Louis, qui est président de la commission, lui, se fait prendre par les agents parce que...

Le Président (M. Chagnon): Je ne me suis pas fait prendre.

M. Sylvestre (Guy): Non, il se fait vérifier.

Le Président (M. Chagnon): Il se fait vérifier, il y a une nuance là, importante.

Mme Houda-Pepin: Vérifier, bon! Ha, ha, ha! Très bien, il s'est fait vérifier, ça veut dire...

Le Président (M. Chagnon): On va clarifier ça tout de suite.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Houda-Pepin: C'est ça. Mais c'est un amateur, en tout cas, sinon un professionnel. Donc, vous expliquez un peu les tâches que fait l'agent de conservation de la faune et vous insistez sur la proximité par rapport aux policiers...

M. Sylvestre (Guy): Oui.

Mme Houda-Pepin: ...aux agents de la paix. Je sais aussi que vous avez fait une revendication pour l'équité salariale avec les policiers, et tout ça.

M. Sylvestre (Guy): Effectivement.

Mme Houda-Pepin: L'opposition officielle a fait écho à votre demande. Et vous expliquez donc les tâches qui sont effectuées, mais vous n'insistez pas beaucoup sur la formation. Est-ce que la formation qui est exigée d'un agent de conservation de la faune est de même niveau que celle d'un policier ou s'il y a une différence? Des policiers, par exemple, il y en a qui sont de niveau collégial ou universitaire. En tout cas, si vous voulez m'éclairez là-dessus, j'apprécierais.

M. Sylvestre (Guy): Bon, d'accord. Actuellement, la formation, en tout cas les conditions d'embauche, les exigences sont un secondaire V. Nous, c'est évident, avec la complexité actuelle des tâches, notre prétention est à l'effet qu'on devrait détenir... en tout cas, pour les nouvelles recrues, il devrait y avoir une formation un peu plus élaborée.

(16 h 50)

Le Président (M. Chagnon): C'est un D.E.C. qui se donne en protection de la faune à Saint-Félicien et à Baie-Comeau.

M. Sylvestre (Guy): Oui, exactement. À Baie-Comeau aussi. C'est certain que, nous, on a fait nos représentations face aux autorités compétentes à l'effet qu'il y aurait possibilité justement d'élaborer tout un programme axé vraiment sur le travail d'agent de conservation de la faune. Les agents de conservation de la faune, en tout cas pour nous, à notre égard, on est des policiers, sauf que, actuellement, la formation que l'on a, que j'ai eue... moi, j'ai une formation professionnelle postsecondaire que j'ai acquise à Mont-Laurier. O.K.? Avec le temps, c'est évident que Mont-Laurier a dû s'ajuster, parce que, actuellement, Mont-Laurier ne peut plus offrir la formation qu'il offrait auparavant, puisque l'embauche des nouvelles recrues chez nous, il n'y en a plus. Donc, c'est évident que le processus de préparation d'un programme approprié et adéquat pour l'agent de conservation correspond à nos attentes, et ce serait approprié.

Mme Houda-Pepin: Donc, vous demanderez, vous accepteriez que les nouvelles recrues aient un D.E.C., par exemple...

M. Sylvestre (Guy): Absolument.

Mme Houda-Pepin: ...en technique de conservation de la faune.

M. Sylvestre (Guy): Oui, oui, absolument. On parlait tout à l'heure... On peut parler de période transitoire, c'est certain. C'est des règles transitoires, ça. Ça, on est ouvert à ça de toute façon. Puis on comprend très bien la dynamique aussi de la situation. Ça, on est prêt à s'asseoir et à discuter. C'est évident, ça, sur cet aspect-là.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Merci. C'est tout, M. le Président.

Le Président (M. Chagnon): M. Laprise.

M. Laprise: Je pense que ce que vous désireriez, c'est que les saisonniers deviennent des saisonniers permanents. Vous êtes conscients qu'ils ne peuvent peut-être pas travailler à l'année...

M. Sylvestre (Guy): Non, non.

M. Laprise: ...mais que des saisonniers deviennent des saisonniers permanents, qui reviennent à chaque année.

M. Sylvestre (Guy): Oui.

Le Président (M. Chagnon): Qu'ils ne soient plus de faux occasionnels.

M. Sylvestre (Guy): C'est ça, exactement.

M. Laprise: Exactement. Maintenant, avec la nouvelle perspective de l'utilisation de la forêt habitée, et ainsi de suite, et on sait qu'il y a de plus en plus de circulation en forêt, est-ce qu'à votre formation ou encore à vos tâches pourrait être ajouté, pour vous permettre de travailler plus longtemps... Prenez toute la sécurité de la motoneige, par exemple. Il me semble, moi, que ça serait une continuité de votre travail. Vous êtes habitués de vivre dans la forêt, vous connaissez toutes les facettes de la forêt pour faire percevoir justement aux touristes qui se promènent dans nos sentiers de motoneige toute la dimension importante que peut représenter la forêt.

M. Sylvestre (Guy): Ça vous «tente-tu» de venir voir, de rencontrer avec nous les gens d'en arrière? Ha, ha, ha!

M. Laprise: Alors, moi, je peux vous dire que, dans mon comté, j'ai une coopérative de travailleurs qui sont en train de regarder cette facette-là et de proposer des choses, à savoir faire différentes choses à différentes saisons, former leur personnel en conséquence et assumer des responsabilités supplémentaires.

M. Sylvestre (Guy): C'est une requête qu'on a présentée, qu'on a vraiment perpétuée, en tout cas qu'on a répétée et répétée. Écoutez, on est là. On a du matériel un peu partout, étendu sur l'ensemble du territoire du Québec. On a un inventaire qui est quand même assez bien étoffé. On a du personnel qualifié. On a des gens d'expérience en forêt. On a une formation. Il faut bien comprendre que, au fil des années aussi, on a une formation qui a été acquise. On a un centre de formation à Duchesnay où est-ce que chaque agent, une fois qu'il a été recruté, reçoit une formation de quatre mois sur l'ensemble des tâches que l'agent de conservation a à effectuer au cours des années de son travail. Donc, nous, on est là. La seule chose qu'on attend, c'est de nous permettre de s'afficher et d'être plus présents. Écoutez, on a la loi sur les habitats fauniques qui fait ses premiers balbutiements au niveau des terres publiques. Plus tard, ça va être les terres privées. Mais, écoutez, on est là. On est là, on est en forêt. C'est certain que les autres corps de police sont là. La Sûreté du Québec, les services municipaux sont là. Ils ont une portion, un volet qui les regarde. Ça, on est d'accord avec ça. Mais, nous, on est là, on est en forêt. Donnez-nous ce qui nous revient. On ne cesse pas de le répéter. On est disponible; ça, soyez assurés.

Le Président (M. Chagnon): Quelle est la proportion de vos collègues qui ont trois ans ou plus de trois ans d'ancienneté dans les 153 occasionnels?

M. Charland (Allen): Quatre-vingt...

Le Président (M. Chagnon): Une majorité, une très grande majorité.

M. Charland (Allen): Environ 95 %.

M. Leblanc (Jacques): Visiblement, au-dessus de 80 % des saisonniers à l'heure actuelle ont plus de trois ans d'expérience.

Le Président (M. Chagnon): Trois ans d'expérience, oui.

M. Sylvestre (Guy): Quand on parlait de la gestion faune, tout à l'heure ce que je vous ai présenté dans le mémoire, c'est la période où l'État a décidé d'abolir les clubs de chasse et pêche.

Le Président (M. Chagnon): Oui, oui, oui, bien sûr.

M. Sylvestre (Guy): À ce moment-là, les clubs de chasse et pêche, eux, avaient déjà leur service de protection déjà établi.

Le Président (M. Chagnon): Ils en ont encore d'ailleurs, des auxiliaires.

M. Sylvestre (Guy): Oui, oui. Maintenant, c'est une autre appellation, c'est des assistants, depuis janvier.

Le Président (M. Chagnon): Excusez, je suis en retard.

M. Sylvestre (Guy): Mais on est là justement pour les encadrer. En passant, c'est nous qui les formons, ces gens-là. Mais là on déroge un peu.

Le Président (M. Chagnon): Oui, absolument. Dans la même veine que la question de M. Laprise, dans votre ministère, depuis 1994, il y a aussi ce qu'on appelait et qui a été créé en 1991-1992, la police verte, les policiers.

M. Sylvestre (Guy): Les enquêteurs.

Le Président (M. Chagnon): Les enquêteurs environnementaux. C'est peut-être hérétique ce que je vais dire là, mais jusqu'à quel point il n'y a pas de possibilité de fusion de ces services-là de façon à ce que vous puissiez aussi faire de l'inspection de dossiers environnementaux et qu'eux aussi puissent faire...

Une voix: ...

Le Président (M. Chagnon): Ça se fait déjà?

M. Sylvestre (Guy): Écoutez, actuellement, on a une expertise en matière d'enquête. On a des enquêteurs chez nous, qu'on appelle le service d'enquête...

Une voix: Des renseignements.

M. Sylvestre (Guy): Des renseignements. On en a cinq actuellement. On a même un maître-chien. Quand même, on a une formation. Quand on parle de recrutement, c'est certain qu'on ne veut pas oublier nos saisonniers. On a la prétention qu'ils doivent venir joindre les rangs et peut-être avoir une structure bien, bien particulière. Je peux vous dire de quoi: même dans la Loi de la fonction publique, on a une section où est-ce qu'on fait partie. On est des cas particuliers.

Le Président (M. Chagnon): Dans cette optique, si les deux organismes fonctionnaient ensemble, vous pourriez faire de l'inspection...

M. Sylvestre (Guy): Absolument.

Le Président (M. Chagnon): ...justement environnementale, puis eux autres pourraient faire aussi de la vérification...

M. Sylvestre (Guy): Absolument.

Le Président (M. Chagnon): ...de chasseurs et de pêcheurs.

M. Sylvestre (Guy): Actuellement, il y a des parties de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et de la Loi sur la qualité de l'environnement qui attendent juste ça, qu'il y ait une fusion, qu'il y ait une mise en vigueur de certains critères.

Le Président (M. Chagnon): C'est ce qui était à la base de la réflexion qui a amené la fusion de ces deux ministères-là, entre autres...

M. Sylvestre (Guy): Oui.

Le Président (M. Chagnon): ...puis aussi pour les professionnels que sont les biologistes...

M. Sylvestre (Guy): Absolument.

Le Président (M. Chagnon): ...dans l'ancien ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et du ministère de l'Environnement. Je me rappelle de ça pour avoir joué dans ce films-là, d'avoir organisé les fusions à l'époque.

M. Sylvestre (Guy): Parce que, actuellement, on est vraiment de concert avec le Service de l'aménagement de la faune et puis les différentes...

Le Président (M. Chagnon): M. Laprise.

M. Laprise: Moi, je trouve que, en fait, notre commission, ce qu'elle veut savoir, c'est d'abord... C'est sûr qu'on fait une rationalisation financière, c'est un objectif du gouvernement, puis on veut la partager avec vous autres, puis on veut que vous nous apportiez des idées aussi. C'est vous autres qui êtes sur le terrain. Vous avez droit à des idées originales. Il n'y a pas rien que les universités qui peuvent inventer des choses. Les gens comme vous autres qui vivez sur le territoire, qui vivez sur le terrain, vous pouvez nous apporter des idées fort innovatrices pour mettre en valeur justement ces richesses qu'on a. On a bien beau pleurer sur ce qui nous manque, mais, si on met en valeur ce qu'on a, c'est encore bien plus positif.

M. Sylvestre (Guy): Exact.

M. Laprise: Et, moi, je pense qu'au niveau de la forêt, au niveau de l'écotourisme actuellement, au niveau de toute la dimension touristique qu'on veut redonner à la forêt, la dimension habitation qu'on veut donner à la forêt, il y a de la place pour de l'occupation et de l'occupation rentable. Pas nécessairement aller chercher des coûts supplémentaires, mais aller chercher aussi des revenus supplémentaires. Et vous êtes en mesure de nous proposer des choses.

M. Sylvestre (Guy): Absolument. On est là, monsieur. On n'a pas cessé de le répéter, ça. Le Service de la conservation, on a une province, on a 6 000 000 km² de territoire. On est là, on est présents partout dans la province, de Kuujjuaq jusqu'en Beauce, Blanc-Sablon, on est partout. On a du matériel partout. C'est sûr que là, actuellement, ce qui est déficient, c'est les effectifs. Puis les effectifs, évidemment, c'est une question de rationalisation. Mais, actuellement, avec les effectifs qu'on a sur le terrain, on pourrait certainement élaborer quelque chose, un processus, élaborer en tout cas des plans d'action, d'opération sur l'ensemble des différents volets légaux. Mais la titularisation des postes est importante aussi. En tout cas, c'est un aspect qu'on vous propose. Il y a certaines suggestions qui se dégagent de notre mémoire et c'est ça qu'on voulait vous soumettre aujourd'hui.

Le Président (M. Chagnon): On vous remercie beaucoup.

M. Sylvestre (Guy): Ça me fait plaisir.

(17 heures)

Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup, je remercie le Syndicat des agents de conservation de la faune, dont M. Guy Sylvestre a fait la présentation du mémoire, et j'invite le Syndicat des agents de la paix en services correctionnels. Alors, M. Réjean Lagarde, n'est-ce pas?


Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec

M. Lagarde (Réjean): Exact.

Le Président (M. Chagnon): Je vous souhaite la bienvenue à la commission. Nous vous écoutons.

M. Lagarde (Réjean): Merci, M. Chagnon. Comme je l'avais précisé au secrétaire de la commission, on a rédigé un mémoire, mais quand même assez court, et on l'a terminé tout simplement cet après-midi. Alors, on n'a pas pu vous faire parvenir les copies auparavant.

Le Président (M. Chagnon): ...au secrétaire de la commission? Vous en avez, vous? Vous avez des copies?

M. Lagarde (Réjean): Oui.

Le Président (M. Chagnon): Alors, on vous écoute.

M. Lagarde (Réjean): Dans un premier temps, je pense qu'il y aurait lieu de préciser que, lorsque le Secrétariat du Conseil du trésor nous a avisés qu'il révisait la directive sur les emplois occasionnels, on avait décidé de ne pas donner suite à la demande de consultation qui nous était faite, pour la simple et bonne raison qu'on était embarqués dans un processus où on s'enlignait pour changer nos emplois occasionnels en emplois à temps partiel. Donc, il n'y a pas eu d'avis de donné au Secrétariat du Conseil du trésor en ce qui avait trait à la révision de la politique. C'est pour ça que, lorsqu'on nous a contactés pour venir au niveau de la commission, on a quelque peu hésité à accepter l'invitation parce que, à moins d'événement imprévu, il ne devrait plus y avoir d'employé occasionnel qui occupe un emploi d'agent de services correctionnels à compter du 1er octobre 1998.

Les négociations, qui se sont terminées en novembre 1997, ont fait en sorte qu'on a transformé nos emplois occasionnels en emplois à temps partiel parce que de toute façon c'étaient des emplois qui étaient occupés de façon récurrente et de façon continue.

Dans le fond, ce dont l'employeur, chez nous, avait besoin, ce n'était pas d'une main-d'oeuvre dont il avait besoin soit par saison ou soit de façon cyclique, c'était d'une main-d'oeuvre dont il avait besoin de façon permanente mais avec une certaine flexibilité. Donc, si on a accepté de venir vous voir, c'est qu'on s'est dit que notre expérience de 15 ans avec des emplois occasionnels, elle devrait servir à faire changer des choses pour les autres organisations syndicales, mais aussi à faire changer des choses à la directive comme telle, parce que, malgré qu'on s'enligne pour changer nos statuts d'emplois occasionnels pour des emplois de temps partiel, il demeure tout de même que l'article 83 de la Loi sur la fonction publique va continuer à s'appliquer. Donc, le spectre des emplois occasionnels va toujours demeurer, même si on vient de faire des concessions énormes pour transformer ces emplois-là en emplois à temps partiel. Donc, c'est dans cette optique-là qu'effectivement on a accepté de venir vous voir.

En termes d'historique, jusqu'en 1983, les emplois d'agent de services correctionnels étaient tous occupés par des employés temporaires ou permanents, au sens de la loi. On avait, à ce moment-là, 20 % de nos emplois qui ne nécessitaient pas de continuité de service les fins de semaine, soit les samedis et dimanches. Donc, ces emplois-là étaient occupés par des employés réguliers, mais qui travaillaient du lundi au vendredi. 80 % des emplois nécessitaient une continuité de service les fins de semaine. Pour ces emplois-là, on avait des employés réguliers qui travaillaient sur une cédule rotative: sept jours de travail, trois jours de congé; sept jours de travail, quatre jours de congé. Donc, ça permettait aux services d'avoir un effectif équilibré sept jours sur sept.

En 1983, le ministère, avec des belles promesses, disant: Amélioration de la QVT puis, en même temps, aussi on va vous embaucher des employés de grande qualité, nous a introduit l'utilisation d'employés occasionnels. De 1983 à 1986, leurs conditions de travail n'étaient pas prévues à une convention collective, c'était la directive qui s'appliquait. En 1986, avec la convention 1986-1988, on a introduit des premières conditions de travail à la convention. En 1990, avec la dernière convention, on a ajouté à ça un droit de rappel. Et c'est toujours la même convention qui continue de s'appliquer jusqu'au 2 mars prochain. Donc, l'aventure olympienne de nos emplois occasionnels, si tout se passe comme prévu, aura duré 15 ans, de 1983 à octobre 1998.

Les emplois visés. En termes de situation vécue chez nous, les employés occasionnels, ça n'a jamais été utilisé sur la base d'un emploi cyclique ou saisonnier. En termes de projet spécifique, il y en a eu un seul, ça a été le Centre de détention de Laval, communément appelé le B-16, qui a duré six ans, de 1989 à 1995.

Et, quand j'ai regardé rapidement le mémoire qui avait été fait par la Commission de la fonction publique, il semblait se dégager de ça que ceux qui occupaient des emplois quasiment à temps plein, des emplois occasionnels à temps plein, c'étaient des gens qui étaient soit sur des projets spécifiques ou sur des emplois cycliques ou saisonniers. Chez nous, à part le projet spécifique du B-16, nos employés occasionnels n'ont jamais été utilisés sur cette base-là, et pourtant certains ont déjà 15 ans de service

Une voix: ...quelle base?

M. Lagarde (Réjean): Sur la base du surcroît temporaire de travail et de l'absence d'un employé. Actuellement, on a 700 employés occasionnels, tous des employés occasionnels sur appel. Et, pour aucun d'entre eux, je ne suis capable d'identifier quel employé régulier il remplace. Je ne peux pas dire: L'employé occasionnel numéro 1 remplace l'employé régulier X, l'employé occasionnel numéro 2 remplace monsieur Y. Non, je ne suis pas capable de les identifier.

Ce qu'on fait? On en fait un «melting pot». On prend un certain nombre d'emplois vacants et également aussi du remplacement d'employés qui sont absents – oui, effectivement, des congés de maternité, ça existe, des congés sans solde – et on transforme ça en une masse salariale qui sert tout simplement à payer les employés occasionnels. Chez nous, on peut évaluer environ à 30 % des emplois autorisés qui sont laissés vacants et utilisés à cette fin-là. Près de 500 des 700 employés occasionnels ont plus de trois ans de service.

Donc, c'est évident que, pour nous, le surcroît temporaire de travail devrait être intégré à la définition de l'emploi cyclique ou saisonnier et limité à ces paramètres-là, ne pas donner une définition de surcroît temporaire de travail qui est aussi large que ce qu'on retrouve dans la directive. Surcroît temporaire de travail, il va falloir être capable de le baliser quelque part.

Pour ce qui est du projet spécifique, on l'a connu à une occasion, de 1989 à 1995, mais je pense qu'il devrait faire l'objet d'une limite précise dans le temps.

Le Président (M. Chagnon): Ça, c'est le B-16?

M. Lagarde (Réjean): Oui. Et, passé ce délai-là, si on dit: Un projet spécifique, O.K., on l'essaie pour deux ans, c'est une activité nouvelle ou c'est un nouveau service qu'on donne au citoyen, bien, au bout de deux ans, qu'on statue. Ou on arrête de donner ce service-là, ou on le rend permanent. Et, si c'est le cas, rendons cette opération-là également permanente.

(17 h 10)

Et pourquoi ce serait tout le temps les employés qu'on a utilisés sur ces emplois-là qui seraient pénalisés? Pourquoi ces employés-là ne pourraient pas simplement être l'objet d'une nomination sans concours? Ce n'est pas de leur faute si on a essayé un projet puis que, finalement, on a décidé de le garder en marche. Pourquoi dire aux employés occasionnels qui ont travaillé sur un projet spécifique: Mais vous ne devriez même pas avoir accès à des concours réservés, voyons donc! sinon, on va vous avantager. Pourquoi avoir utilisé les services d'employés occasionnels pendant deux ans, trois ans, de façon continue sur un projet spécifique et ne pas leur permettre d'avoir accès à une nomination sans concours, de la même façon qu'on le fait pour les promotions sans concours?

Lorsqu'on a recours à un employé occasionnel pour palier à l'absence d'un employé régulier, si on veut éviter le principe du «melting pot», comme on l'a chez nous, on devrait identifier clairement à son contrat de travail quelle personne il remplace, pour quelle durée il la remplace et, dans le cas particulier, chez nous, indiquer sont quart de travail et son horaire régulier de travail. Ça va être à peu près la seule façon dont on va être capable de dire: Monsieur l'employé occasionnel numéro 1 remplace M. X, qui est en absence, congé sans traitement, durée d'un an, du 1er avril 1997 au 31 mars 1998. Qu'on rajoute une semaine ou deux d'extension possible autour de ça, il n'y a pas de problème, mais au moins on va savoir exactement ce qu'il fait là. Parce que, pour l'instant, ce qu'il fait là, c'est de remplacer un emploi qui est vacant.

Considérant également que, dans certains emplois dans la fonction publique, on ne peut acquérir ni la formation ni l'expérience ailleurs qu'en exerçant l'emploi, on pense également qu'il devrait être possible qu'un même employé occasionnel puisse avoir des contrats successifs de remplacement d'employés absents. Il faut penser aux coûts d'une formation et à la valeur de l'expérience acquise. Ce n'est pas juste arriver et dire: Écoute, O.K., tu as droit de travailler un an, et au bout d'un an: Merci, bonjour, on en engage un autre parce qu'on a un autre remplacement à faire. Cette personne-là, il faut la former, il faut qu'elle acquière l'expérience pour qu'elle puisse être rentable pour le service. Mais au moins qu'à chaque contrat on identifie très bien qui elle remplace, pour quelle durée, son horaire et son quart de travail.

Lorsque les conditions de travail des employés réguliers créent des besoins de remplacement de façon récurrente, on ne devrait pas faire appel à des employés occasionnels mais à des employés réguliers à temps partiel. Le plus bel exemple: en 1990, on a modifié notre horaire de travail pour les employés réguliers requis d'assurer la continuité de service les fins de semaine. Cette modification-là faisait qu'il y avait un besoin récurrent à chaque fin de semaine, pour lequel on dégageait 11 % des effectifs réguliers. Donc, ce 11 % des effectifs réguliers là aurait très bien pu être transformé en effectifs temps partiel, selon les règles qui sont déjà connues, où un ETC peut être remplacé par, je pense que c'est 2 point quelque chose temps partiel. Ça nous aurait peut-être évité beaucoup de problèmes, avec le temps.

Au niveau des articles de la loi non applicables. Je l'ai mentionné tantôt, nos employés occasionnels sont tous des employés sur appel et assujettis à la directive concernant les emplois occasionnels de la fonction publique. De 1983 à 1986, leurs conditions de travail n'étaient pas prévues par la convention collective, c'était la directive qui s'appliquait. Peut-on croire qu'un même employé occasionnel ait travaillé 365 jours de façon consécutive dans son année – et je dis bien «travaillé 365 jours» – sans jamais avoir droit à du taux de surtemps? Qu'est-ce que ça veut dire? Qu'on fait faire à quelqu'un près de 2 500 heures dans son année et que jamais on ne le paie à taux de surtemps.

Avec la convention 1986-1988, on a inclus certaines dispositions pour normaliser un peu leur utilisation, telles que l'application du taux de surtemps après avoir travaillé l'équivalent d'une journée ou d'une semaine régulière de travail. Mais, malgré cela, on a eu des gestionnaires qui étaient assez vites. Ils ont trouvé le moyen de continuer à abuser de cette catégorie d'employés là. Et à titre d'exemple, je peux vous mentionner deux quarts de travail effectués en continuité. Exemple: on demande à un employé occasionnel de travailler de 16 heures à minuit et de minuit à 8 heures. Comme ce n'est pas dans la même journée de calendrier, ce n'était pas du surtemps. On lui fait faire 16 heures, mais ce n'est pas de surtemps.

Comment on peut penser que des employés occasionnels qui ne sont pas utilisés sur une base provisoire mais permanente – la moyenne chez nous, je pense, de mes 700 occasionnels est de faire environ de 1 500 à 1 600 heures par année; comme je l'ai dit tantôt, j'en ai 500 sur 700 qui ont plus de trois années de service – comment on peut imaginer que jamais ces gens-là ne vont faire la moindre petite chose qui va faire en sorte qu'ils vont être sujets à une mesure disciplinaire?

Quand c'est des employés sur appel, on n'a pas besoin de leur appliquer le relevé provisoire ou les mesures disciplinaires. On fait tout simplement en sorte qu'on ne les appelle pas au travail. Donc, on fait de façon cachée ce que tout le monde connaît: imposition de mesures disciplinaires et relevé provisoire, tout simplement, en disant: Toi, je ne t'appelle pas pendant trois jours. Ou: Toi, va-t-en chez vous, je te rappellerai quand j'aurai besoin de toi.

Le Président (M. Chagnon): C'est quoi, un relevé provisoire?

M. Lagarde (Réjean): Un relevé provisoire de fonction pour permettre... Mettons qu'il y aurait un employé, chez nous, le ministère recevrait une plainte à l'effet que, M. X aurait fait l'objet d'accusation criminelle. Le temps que le ministère vérifie ça, on va prendre l'employé, on va le mettre en relevé provisoire de fonction. Mais, un employé occasionnel sur appel, il est payé pour le temps travaillé. Donc, si on lui dit: Reste chez vous, on ne t'appelle pas, il n'est pas payé. Mais, en bout de ligne, c'est tout le temps lui qui sera pénalisé, qu'on ait fait une erreur ou non. L'employé occasionnel revendiquera très peu souvent la reconnaissance de ses droits. Il sait très bien qu'il est facile pour un gestionnaire de le pénaliser en effectuant une gestion abusive de ses conditions de travail sans que ça paraisse trop.

Des plaintes ont été formulées par des groupes d'employés occasionnels de nos centres de détention principaux: Montréal, Québec, Tanguay. Dans le cas de Québec et de Tanguay, il y a eu des enquêtes de faites, et, dans les deux cas, on a constaté qu'effectivement les employés occasionnels avaient été victimes d'une gestion abusive. On a constaté ça, mais jamais ces employés-là n'ont été dédommagés, par contre, pour les préjudices qu'ils ont subis. On aurait peut-être pu, mettons, prendre un employé occasionnel et le faire travailler 40 heures-semaine. Mais, comme on a fait une gestion abusive, on l'a peut-être privé de 24 heures, de 32 heures dans sa semaine. Quand on a constaté qu'effectivement il avait été victime d'une gestion abusive, on n'a pas trouvé le moyen de venir compenser ça, on a dit: Oui, vous avez fait l'objet d'une gestion abusive? On va prendre des moyens contre les mauvais gestionnaires abusifs. Mais, toi, l'employé occasionnel, étouffe – excusez l'expression, mais c'est ça – on n'a rien pour te compenser, c'est temps travaillé, temps payé.

Les enquêtes sont faites, les gestionnaires sont pénalisés, mais ça n'arrête pas là. La gestion abusive se continue, mais elle se fait de façon plus fine, plus sournoise, plus cachée. Ça fait qu'en bout de ligne, un employé occasionnel, oubliez ça, ça ne se plaint pas.

Le gouvernement, s'il veut agir en employeur responsable, ne peut pas laisser un groupe d'employés aussi important que ça dans la fonction publique sans être capable de se défendre. Il faut qu'on leur donne un forum pour être capables de se défendre.

Pour nous, en tout cas, il est faux de prétendre que les employés occasionnels sont utilisés sur une base provisoire, ils sont utilisés d'une façon permanente. Si je prends un employé régulier, chez nous, il fait 2 087 heures, moins ses vacances, ses maladies, ses différentes absences, il fait peut-être 1 800 heures au total, puis un employé occasionnel fait à peu près 1 500 à 1 600 heures. Donc, qu'on ne vienne pas me dire qu'on l'utilise sur une base provisoire.

On applique aux employés occasionnels les dispositions des articles 16 et 17 de la loi, qui sont les mesures disciplinaires. On leur applique par la bande l'article 22, qui est le relevé provisoire. Mais, lorsqu'on arrive au niveau de l'article 33, là, on ne lui permet pas de contester ça. Et, s'il est sur un contrat de moins d'un an, ah! bien, là, il n'a le droit de rien contester pantoute. Mais est-ce qu'on se rend compte que les employés occasionnels qu'on a dans la fonction publique, même s'ils sont sur des contrats de moins d'un an, sont là depuis cinq ans, 10 ans, 15 ans? Je veux bien croire, un employé qu'on engage une très courte période, puis, après ça, c'est: Merci, bonjour, tu t'en vas, peut-être qu'on ne lui donne pas les mêmes droits de défense. Mais ceux qui sont là de façon régulière, comme ça, ça n'a pas de sens.

(17 h 20)

On dit également dans la loi que les articles 24 à 31 ne s'appliquent pas – qui sont des congés pour affaires politiques. Pourtant, chez nous, j'ai eu un employé occasionnel qui a été élu député au Bloc québécois, puis son boss lui a accordé un congé sans solde. Pourquoi tout simplement ne pas prévoir que ça puisse s'appliquer à tout le monde? On ne dit pas 24 à 31 au complet, mais 24 à 28 je pense qu'ils pourraient s'appliquer. En ce qui a trait à l'article 119 et aux paragraphes 3 et 4 de l'article 126, je pense que, si on veut arrêter la gestion abusive des employés occasionnels, il faut donner ces pouvoirs-là à la Commission.

Pour ce qui est de certaines dispositions de la directive – je vais essayer d'accélérer – en termes de recrutement et de sélection, au début, à partir de 1983, le ministère a été chercher les finissants de l'Institut de police. Effectivement, ça nous a amené une belle qualité de candidats. Mais, une fois que ça a été passablement fini, on a fait appel à toutes sortes de sources.

À titre d'exemple: un administrateur dans un centre de détention principal à Montréal. Un bon après-midi, il appelle au centre de main-d'oeuvre local puis il dit: J'aurais besoin d'une dizaine d'employés occasionnels pour demain matin. Le lendemain matin à 8 h 30, il y en avait huit qui avaient déjà l'uniforme sur le dos puis qui travaillaient. Ça fait qu'on ne vienne pas me faire accroire qu'on a pris le temps de vérifier les conditions d'admission, à savoir s'ils avaient un dossier criminel, puis qu'on leur a fait passer un médical. Je pense que, là-dessus, oui, le fichier central, c'est beau, on est d'accord avec ça, que ce soit géré par là, mais je pense aussi qu'il va falloir qu'on exige que le recrutement et la sélection de ces gens-là se fassent sur la même base que pour les employés réguliers parce que, de toute façon, on les utilise comme des employés réguliers.

Récemment, on nous avouait, quand on a finalisé nos négociations pour transformer nos emplois occasionnels en temps partiel, que 50 % de nos employés occasionnels n'avaient jamais passé l'examen médical. Je comprends pourquoi mes employés occasionnels ont peur. Il y a 15 ans, ils étaient peut-être en forme mais, aujourd'hui, peut-être un peu moins.

En conclusion, je pense que tout membre d'un syndicat s'attend à juste titre à être défendu par l'organisation à laquelle il paie ses cotisations syndicales. Tout syndicat également doit pouvoir compter sur l'appui de ses membres lorsqu'il revendique ou négocie en leur nom. Si le tiers de nos membres savent que nous ne pouvons pas vraiment les défendre parce qu'ils détiennent un emploi précaire, donc on ne peut pas leur accorder une défense pleine et entière, c'est là qu'on vient de tout débalancer. Le Syndicat sait aussi qu'il ne peut pas compter sur leur appui, de la même façon qu'eux autres savent qu'ils ne peuvent pas compter sur notre défense. Ça fait que le fragile équilibre qu'on a besoin d'avoir entre la force patronale et la force syndicale pour faire en sorte que les choses évoluent, je pense qu'aujourd'hui il est rompu; et même, pas rien qu'aujourd'hui, depuis longtemps, il est rompu.

Dans notre cas, on pense avoir réussi un véritable tour de force en transformant 700 emplois occasionnels en temps partiel. Puis pourtant ces employés occasionnels considèrent que c'est nous autres, le Syndicat, qui sommes l'ennemi à abattre. C'est un non-sens. Mais, pourquoi? Parce que, pour eux autres, ils ont déjà un emploi régulier à temps plein depuis des années. La possibilité que l'employeur leur enlève ça... Parce que, dans le fond, quand on regarde le contrat de travail d'un employé occasionnel sur appel, on lui dit qu'en tout temps, l'employeur peut mettre fin à son contrat; c'est écrit. Mais, dans les faits, ça ne se passe pas souvent, sauf quand on décide d'en ramasser un d'aplomb. Ça fait que, pour eux autres, ils ont des emplois réguliers à temps plein depuis des années puis, là, nous autres, on leur dit: Bien, non, le 1er octobre 1998, si tu ne t'es pas classé sur un concours de temps partiel, tu ne pourras plus travailler comme agent de services correctionnels. Donc, l'ennemi, c'est nous autres, parce qu'on veut leur donner une sécurité d'emploi et des conditions de travail qui ont de l'allure.

Les emplois occasionnels, ça peut être justifié en autant qu'on n'en abuse pas. Je pense que c'est la morale qu'on tire des 15 dernières années.

Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie, M. Lagarde. Je comprends l'hésitation que vous avez eue au début ou, du moins, avant de commencer à préparer votre mémoire et surtout avant de décider de venir nous rencontrer. Je pense que votre passage ici nous montre des avenues ou des situations qui sont pénibles et qui n'auraient pas dû avoir lieu. Et je pense que mes collègues vont prendre en considération les recommandations que vous suggérez.

Comment pourriez-vous baliser l'intégration dans la définition du travail temporaire, ce qu'on appelle le surcroît temporaire de travail? Parce que, si je me fie à ce que vous me dites, le surcroît temporaire de travail, s'il y a du monde qui a été en surcroît temporaire de travail pendant 15 ans...

M. Lagarde (Réjean): Mais, lorsque je regarde la définition qu'on donne à l'emploi cyclique ou à l'emploi saisonnier, on dit qu'il est limité dans le temps. Donc, qu'on fasse la même chose avec le surcroît temporaire de travail. Je pourrais comprendre, à un moment donné, que – je ne sais pas – mettons, sur une période de trois mois on prévoie un surcroît temporaire de travail. Mais qu'on arrête de jouer à l'autruche et de tout simplement juxtaposer les surcroîts temporaires de travail qui, dans le fond, sont des surcroîts permanents. Donc, oui, il pourrait y avoir une raison d'avoir un surcroît temporaire, mais qu'on le balise de la même façon qu'on balise l'emploi cyclique ou saisonnier.

Le Président (M. Chagnon): Ce serait quoi, l'avantage pour vos syndiqués d'être employés temps partiel plutôt qu'employés occasionnels?

M. Lagarde (Réjean): J'ai des gens qui se sont présentés à un concours le 11 février dernier, j'en ai d'autres qui vont se présenter à un autre concours d'ici l'été, et pourtant ils ont déjà trois ans, cinq ans, 10 ans, 15 ans de date. S'ils avaient passé le concours dès le début, ça ne serait pas à refaire, ils auraient acquis une sécurité d'emploi dans la fonction publique. Même s'ils risquaient quand même de demeurer temps partiel tout le long, au moins il y a la sécurité qui va avec, il y a le fait de pouvoir revendiquer tes droits et les défendre, aussi. Parce que, des employés occasionnels, en trouvez-vous beaucoup qui se plaignent, comparativement aux employés réguliers, toutes proportions gardées?

Le Président (M. Chagnon): Temps partiel c'est 1 500 heures, comme vos occasionnels étaient, je suppose.

M. Lagarde (Réjean): Ce qu'on a convenu, c'est que, comme on a un petit peu un besoin cyclique dans l'année – il y a notamment la période d'été, qui est un gros besoin, à cause des vacances des permanents; après ça, on a la période des fêtes où, effectivement, il y a un autre besoin de pointe – on a prévu qu'il pourrait y avoir, dans le courant de l'année, une partie des employés temps partiel qui seraient mis à pied. On sait que, dans les périodes de pointe, soit l'été et la période des fêtes, les gens vont faire du temps plein, 40 heures semaines, ça ne sera pas un problème.

Par contre, en dehors de ces périodes-là, on a convenu avec l'employeur qu'il ne gardera à son service que le nombre nécessaire pour que chacun puisse faire un minimum de 25 heures par semaine. Comme le besoin se précise davantage au niveau des fins de semaine, les gens pourront faire soit du 16 heures ou du 24 heures, dépendamment s'ils sont sur un horaire de huit heures ou de 12 heures, et venir compléter les heures jusqu'à 40 heures, sur semaine.

Le Président (M. Chagnon): Merci. M. Laprise, M. Côté.

M. Laprise: J'avais la même question que vous avez posée, ça répond à ma question concernant le transfert d'occasionnel à temps partiel

Le Président (M. Chagnon): M. Côté, Mme Charest.

(17 h 30)

M. Côté: Oui. Merci, M. le Président. Alors, M. Lagarde, vous nous avez brossé, je pense, un tableau de la situation vécue depuis les 15 dernières années dans votre milieu. D'ailleurs, vous avez parlé beaucoup de gestion abusive, à l'intérieur de votre milieu, par rapport à certains gestionnaires, et que des plaintes ont été formulées par des groupes d'employés. Est-ce que vous avez des statistiques de ces 15 dernières années là, qui démontrent... en termes de plaintes qui ont été formulées auprès de la direction? Et puis vous dites, en termes de gestion abusive, que personne n'a réparé les torts qu'on leur avait causés. Il y a eu des enquêtes qui ont été faites. Alors, est-ce qu'on pourrait avoir – si vous ne les avez pas présentement, soit nous le faire parvenir – un peu un tableau de ces plaintes-là? Est-ce que c'est de manière continue? Est-ce que ça progresse? Est-ce que c'est en décroissant? Et puis les enquêtes qui ont été effectuées, qui les a faites, ces enquêtes-là? Puis les rapports, de quelle manière ont-ils été traités? En tout cas, j'aimerais peut-être que...

M. Lagarde (Réjean): Il serait à peu près impossible de vous soumettre un tableau sur les plaintes soumises. Et, de toute façon, si on était capable d'en soumettre un, il serait totalement faussé pour la simple et bonne raison que, individuellement, la personne occasionnelle ne se plaint pas ou très peu souvent. On pourrait peut-être regarder dans nos relevés de griefs pour savoir, mettons, ceux qui se sont plaints parce que du surtemps n'a pas été payé ou des choses de même. Mais des plaintes de fond, les employés occasionnels n'acceptent de se plaindre que lorsqu'ils sont en groupe et lorsque ça dépasse, mais vraiment, tout ce qui peut être acceptable par un être humain. Et je pense que si vous regardez le rapport d'enquête sur la Maison Tanguay, de 1993 et 1994, ça va vous donner une très bonne image de ce que je vous exprime.

À Bordeaux, j'ai 160 employés occasionnels actuellement; le printemps dernier, 109 d'entre eux demandaient la tenue d'une enquête à Bordeaux. Le ministère a répondu à l'effet que, non, ça ne vaudrait pas la peine de tenir une enquête: On le sait, ce qu'on va trouver, on va trouver la même chose qu'on a trouvé à Québec, de la gestion abusive. On le sait, mais on veut travailler pour essayer d'améliorer ça. Par contre, ils étaient prêts à faire l'enquête au niveau des plaintes de harcèlement sexuel. Au niveau des plaintes de harcèlement sexuel, les gens se sont vus comme étant plus facilement identifiables personnellement; donc, personne n'a accepté de se plaindre sur le harcèlement sexuel. Par contre, lorsqu'ils étaient 109, là, ils pouvaient effectivement se permettre de se plaindre parce que gérer de façon abusive 109 employés, c'est pas mal plus difficile que d'aller en chercher une dizaine.

M. Côté: Oui, je vous comprends, mais quand on remarque dans votre rapport qu'il y a eu des plaintes qui ont été faites, qu'il y a eu des rapports d'enquête qui ont été également faits puis que ça a démontré clairement certaines constations qui ont été faites, bien, je pense que ça doit exister, ça.

M. Lagarde (Réjean): Mais, comme je vous le disais tantôt, le rapport d'enquête sur la Maison Tanguay est un rapport officiel qui a été produit en deux étapes: une première qui a permis de constater des choses et une deuxième qui a vraiment été une enquête qui a amené des mesures disciplinaires sévères contre cinq gestionnaires.

M. Côté: Ça, c'est en 1993-1994?

M. Lagarde (Réjean): Le rapport qui a amené les mesures disciplinaires contre les gestionnaires est de février 1994.

M. Côté: Après ça, d'autres rapports, à votre connaissance, qui couvraient un peu plus l'ensemble?

M. Lagarde (Réjean): L'autre rapport, qui était antérieur, avait comme fait le point sur la situation, et celui de février, par la suite, est venu préciser exactement ce qui était reproché à chacun.

M. Côté: Mais c'est toujours à Tanguay, ça?

M. Lagarde (Réjean): Toujours à Tanguay. Dans le cas de Québec, il y a eu un rapport d'enquête de produit en février 1997. On se souviendra, en période des Fêtes 1996, ça avait fait la manchette des journaux, les employés occasionnels se plaignaient d'une gestion abusive au Centre de détention de Québec et le ministère, par la suite, a fait enquête en janvier et février 1997.

M. Côté: Puis à Montréal il n'y a pas eu de...

M. Lagarde (Réjean): Et à Montréal, lorsque les employés ont demandé à avoir l'enquête, la réponse qu'on nous a donnée, c'est: Écoute, ça ne nous donne rien de la faire, on le sait, il faut qu'on travaille sur les moyens pour le régler.

M. Côté: Merci.

Le Président (M. Chagnon): Mme Charest, M. Marsan.

Mme Charest: Merci, M. le Président. Moi, je vous ferai surtout des commentaires. Ma collègue la députée de Vanier et moi, on vous écoutait et on s'est dit que ce n'était pas juste dans le secteur privé où il y avait des horreurs, mais qu'il y en avait aussi dans le secteur public. Et ça, c'est sérieux, c'est très sérieux. Vous savez, quand je vous entends parler de la gestion abusive, le parallèle qu'on fait, c'est de se dire que c'est comme le sexisme: ça continue d'exister mais de façon plus raffinée, plus sournoise, plus difficile à identifier, et ça finit que les personnes qui en sont victimes n'osent plus défendre leurs droits de base, les droits qui vont de soi.

Alors, je pense que là-dessus, ce que votre témoignage nous dit ainsi que celui du Syndicat des agents de conservation de la faune et ceux qu'on a entendus aujourd'hui, mais je dirais vos deux syndicats, les deux derniers, nous démontrent très clairement qu'il y a de faux occasionnels. Je n'en doutais pas avant, mais je pense que là, c'est irréfutable, ce que vous nous avancez comme situation, et je pense qu'on n'aura pas d'autre choix que d'exiger quelque part qu'il y ait vraiment quelque chose de fait, de concret, pour voir à ce qu'il y en ait de moins en moins et que ça finisse par ne plus exister, de faux occasionnels pour occuper des postes comme ceux qui nous ont été décrits aujourd'hui.

Écoutez, un agent de la faune ou un agent de la paix, ce n'est pas vrai qu'il a strictement des tâches d'occasionnels et que 700 personnes occupent des emplois occasionnels. Je veux dire, écoutez... Moi, en tout cas, quand vous me dites ça, je me dis: Ça n'a pas de sens, ça n'a aucun sens. Et je suis très à l'aise de le dire comme je le pense parce que ce n'est pas comme ça qu'on va se donner des travailleurs de qualité, valorisés dans ce qu'ils font et qui vont amener un plus dans le cadre de leur emploi.

Alors, moi, je suis très à l'aise de vous faire ce commentaire. Je pense que là-dessus M. le Vérificateur général a proposé des choses, il y a la fonction publique aussi qui propose des choses, il va falloir qu'il se passe quelque chose, il va falloir que ça aboutisse quelque part. Alors, je tenais à vous faire ces commentaires parce que je pense qu'on est conscient que les horreurs, au risque de me répéter, ce n'est pas seulement dans le secteur privé, il y en a aussi dans le secteur public.

M. Lagarde (Réjean): Ce que je pourrais rajouter à ça, c'est simplement que depuis plusieurs années les syndicats ont commencé à demander des concours réservés. Ce n'était pas pour rien, c'était parce qu'on était conscient qu'effectivement il y avait de faux occasionnels dans la fonction publique. Donc, à ce moment-là, on ne peut pas toujours pénaliser ces employés-là en leur disant: Bien, écoutez, non, quand vous êtes employés occasionnels, vous ne devriez même pas avoir accès aux concours de recrutement. C'est même l'inverse.

Et j'étais sérieux tantôt, quand je disais, pour le projet spécifique notamment: Pourquoi ne pas penser, quand les gens occupent un emploi de façon continue, comme c'est le cas avec les faux occasionnels, pourquoi ils ne pourraient pas être nommés sans concours comme la promotion sans concours existe?

Mme Charest: Et moi, je tiens aussi à rajouter que de la gestion abusive, ça ne doit pas être toléré. La gestion, ça doit être encadré au même titre que le travailleur doit être encadré. Et les gestionnaires ont un rôle à faire, ils doivent le faire de façon correcte. Et ça, je pense qu'ils ont des cadres supérieurs aussi qui doivent s'assurer que des cadres intermédiaires, subalternes, enfin que toute la hiérarchie à la base respecte le cadre dans lequel ils évoluent. Pour moi, de la gestion abusive, ça ne doit pas être toléré, au même titre qu'un travailleur qui fait mal son travail, qui est malhonnête ou enfin, vous savez, qui ne respecte pas le cadre de son travail. Pour moi, quel que soit le statut qu'on a, on ne doit pas abuser de son pouvoir. Et ça, c'est très clair que ça devra faire l'objet d'une surveillance, en tout cas, ou enfin de correctifs, de façon très précise.

Le Président (M. Côté): Merci, Mme la députée de Rimouski. M. le député de Robert-Baldwin?

M. Marsan: Oui, merci, M. le vice-président. Moi aussi, je voudrais vous remercier d'être revenu sur votre décision pour venir témoigner comme vous le faites aujourd'hui. Moi, je pense que c'est renversant, ce que vous nous dites. Je ne m'attendais pas à ça. Je pensais, comme d'autres: On regarde le problème des occasionnels. Mais là je pense que ça déborde vraiment sur la question de la sécurité des employés, des agents de la paix eux-mêmes; je pense qu'il y a eu des événements extrêmement tragiques qui l'ont démontré.

Et quand vous avez dit – et vous savez que tout ce que vous dites, c'est dans les minutes – et que vous avez écrit dans votre rapport – moi, je suis renversé – qu'«un administrateur d'un centre de détention principal a contacté le centre de main-d'oeuvre local dans l'après-midi afin de recruter une dizaine d'employés occasionnels; le lendemain, vers 8 h 30, huit nouveaux employés étaient déjà au travail avec l'uniforme sur le dos», il y a un problème majeur là.

Je pense qu'il y a des gens de la Commission de la fonction publique qui sont encore ici, il y a sûrement des gens aussi autour de la table qui ont écouté – je pense que c'est plus un commentaire que je fais que de formuler une question – mais, le commentaire, c'est: Merci beaucoup de votre témoignage et il faut qu'il y ait quelque chose qui arrive, ça ne peut pas continuer comme ça. Merci.

Le Président (M. Côté): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, je vous remercie, M. Lagarde, pour votre excellente présentation qui nous a apporté des éléments qui nous serviront certainement lors de nos recommandations, suite aux travaux de cette commission.

(17 h 40)

Pour les membres de la commission, le secrétariat va demander le rapport de Tanguay et de Québec pour alimenter justement encore davantage les membres de cette commission. Alors, je vous remercie beaucoup.

M. Lagarde (Réjean): Je vous remercie.

Le Président (M. Côté): J'invite le Syndicat des professeurs de l'État du Québec à prendre place.

Bonjour, M. Perron. Je vous demanderais, s'il vous plaît, de présenter les personnes qui vous accompagnent et ensuite de nous présenter le contenu de votre mémoire.


Syndicat des professeurs de l'État du Québec (SPEQ)

M. Perron (Luc): Oui. Paule Delisle, à ma droite, professeure émérite au COFI de Québec, ici; et puis Richard Gagnon, bassoniste, professeur-artiste au Conservatoire de musique de Québec; et moi-même, Luc Perron.

Je vous dépose simplement un document pour peut-être s'entraider et parcourir un petit peu l'exposé que nous voulons vous faire. Nous l'avons formulé pour une refondation de l'embauche du personnel enseignant dans la fonction publique québécoise. Avec vous, on tente, si vous voulez, d'échanger avec les membres de cette commission pour en arriver à entrevoir quels seraient les différents mécanismes qui répondraient davantage aux besoins de l'embauche d'un personnel qualifié au niveau des quatre réseaux d'enseignement spécialisé que nous représentons.

L'image, d'emblée, si vous me le permettez, que j'aimerais vous souligner: on se perçoit un peu comme le village gaulois devant une armée impériale au sein du territoire québécois. L'armée impériale se caractérise par le ministère de l'Éducation lui-même qui a toujours eu des velléités importantes d'aller chercher l'ensemble de ce qui peut se caractériser comme étant de l'enseignement au Québec. D'ailleurs, dans les comparaisons qui ont été faites par le Vérificateur général, des fois on tient compte d'un saut – saut, s-a-u-t, bien sûr – avec des données statistiques qui caractérisent un petit peu l'allure ou l'élan au sein du ministère de l'Éducation du Québec.

Deuxièmes dans l'armée impériale, c'est les gestionnaires que je qualifierais, pour les fins de cette discussion brève, de gestionnaires-bourreaux, bourreaux en invoquant des coutumes au Moyen Âge, c'est-à-dire qui veulent couper, couper, couper à tout prix, sans s'interroger évidemment sur les fondements des coupures.

Le troisième qui caractérise un petit peu cette armée impériale, selon nous, c'est ce que j'appelle malheureusement ce qui existe – on a des exemples qu'on va vous donner rapidement – c'est ce qui caractérise la commodité paresseuse qui, parfois, fait en sorte que les gestionnaires dans la fonction publique, dans l'un ou l'autre des quatre ministères ou au Conseil du trésor, s'assoient sur certains univers de pensée qui nous sont tout à fait étrangers.

De notre côté, pourquoi nous nous caractérisons comme un village de nature gauloise, c'est tout simplement qu'il y a 834 professeurs qui, contre vents et marées, réussissent à faire de ces enseignements de formation spécialisée qu'on maintienne le cap malgré le rapport de force entre l'escalade d'une embauche de professeurs occasionnels de façon totalement démesurée avec un maintien de stabilité qui est garanti minimalement par des professeurs qui ont une stabilité d'emploi. Évidemment, nous, notre village est caractérisé, bien sûr, par les 834 professeurs, indistinctement de leur statut; par les générations d'étudiants qui y sont passés; et fondamentalement par la nature du travail que nous exerçons dans l'un et l'autre des quatre réseaux.

À la première page, en introduction, ce que nous vous soulignons, c'est qu'avant 1979 les professeurs occasionnels, au niveau du Syndicat des professeurs de l'État du Québec, étaient considérés par les ministères comme des objets quelconques, c'est-à-dire, dans leur budget de fonctionnement, ils apparaissaient entre deux canisses de peinture. Maintenant, par ailleurs, depuis 1980, ce qui caractérise la perception, selon nous, de la gestion, c'est une raison de gestion qui fait en sorte de s'afficher pour couper toujours davantage et puis le moins possible, si vous voulez, ils doivent payer pour le maintien de ces réseaux d'enseignement spécialisé.

Nous, nous aimerions, dans les années quatre-vingt-dix, que ces raisons de gestion d'une rationalité, je dirais, de couperet fassent place à une réflexion sur la valeur à accorder à la formation spécialisée. Est-ce que vraiment le Québec a l'obligation, oui ou non, de maintenir de la formation spécialisée dans le domaine artistique, dans le domaine théâtral, dans l'intégration et la francisation de ses immigrants, dans le domaine de la restauration, de l'hôtellerie, puis dans la formation agricole pour le mieux-être de l'industrie agroalimentaire?

Je vous donne un exemple fort bref. En 1993, au niveau des COFI, au niveau donc de la francisation des immigrants et des immigrantes du Québec, la technocratie de gestion a fait en sorte de diminuer de 20 % le temps de formation. Or, pour les immigrants et immigrantes, on parle de 85 %, 90 % qui se ramassent dans la grande région de Montréal. Donc, on réduit de 650 à 600 périodes d'enseignement. Pourquoi on le fait? On ne sait pas. On a demandé s'il y avait des études, des analyses, enfin, des gestes d'intelligence qui nous feraient penser qu'à travers 600 périodes on peut obtenir le même résultat qu'à travers 750. On a eu une fin de non-recevoir puis, par la suite, ils ont eu la gentillesse de nous dire qu'il n'existait pas de telles études.

Maintenant, compte tenu qu'on a maintenu le cap au niveau de la formation, compte tenu qu'on fait la preuve au niveau du terrain, par le monde enseignant, qu'il est impossible en 600 heures d'obtenir ce qu'on a obtenu en 750, alors maintenant on a créé administrativement des classes de prolongation de 200 heures, ce qui nous donne comme résultat au niveau du terrain, 800.

Mais pourquoi je vous donne cet exemple-là, c'est parce qu'à travers l'escalade d'embauche de professeurs occasionnels on entrevoit toujours une diminution de la capacité de ces maisons de formation spécialisée à l'échelle du Québec. Et c'est ça qui appauvrit, à notre sens, le Québec.

À la page suivante, nous vous exposons les quatre réseaux. D'emblée, vous pouvez constater évidemment qu'il y a un rapport qui permet à une gestion de se fouter carrément du bien-fondé d'une réflexion sur la formation spécialisée. À votre gauche, dans le tableau, vous avez le ministère de la Culture. Alors, dans le ministère de la Culture, il y a un rapport inversé depuis 1980. Vous avez maintenant 55 professeurs qui ont une sécurité d'emploi, donc qui obligent l'administration, si vous voulez, à comprendre les disciplines qui sont dispensées à travers ces 55 professeurs-là et à voir s'il y a une pérennité de ces matières-là qui doive demeurer. Par ailleurs, ils ne s'interrogent d'aucune façon sur les 176 professeurs occasionnels qui enseignent. Pourquoi? Parce qu'ils peuvent en tout temps, compte tenu de leurs humeurs, compte tenu de leurs analyses que nous ne connaissons pas toujours et rarement, fermer des classes comme ils le veulent.

L'exemple que je vous donne dans ce mémoire, un peu plus loin, c'est que je vous dis qu'il a existé un directeur de la Direction générale des conservatoires de musique et d'art dramatique qui disait à un professeur occasionnel: Tu n'es qu'au bout d'un fil. Alors, c'est comme ça que tu dois te percevoir. Et moi, comme directeur, j'ai une paire de ciseaux et je peux le trancher quand je veux. Alors, ça caractérise, si vous voulez, ce que j'appelle cette commodité paresseuse d'une gestion qui fait en sorte qu'on ne voit plus le bien-fondé de la formation artistique mais qu'on voit tout simplement, à travers la main d'oeuvre qualifiée, qu'on peut toujours réduire l'enseignement au gré des vents.

Au niveau du MAPAQ, c'est un réseau actuellement, malgré ces courants-là, qui se tient un petit peu plus debout, où vous avez un personnel un peu plus stable parce qu'on estime que si on veut en arriver à intervenir dans le milieu de l'industrie agroalimentaire, et pas en fonction du Sommet qui s'en vient parce que c'est pensé d'avance, on se dit que ça prend un personnel régulier, ça prend un personnel qui a une stabilité, donc ça prend un personnel qui a une sécurité d'emploi.

À l'ITHQ, vous les avez entendus. Vous avez entendu Mme Martel qui est venue devant vous le 4 février dernier, qui actuellement est complètement emballée par un élan d'autofinancement. Alors, pour elle, tout va, dans un avenir prochain, s'autofinancer. Et le rapport de force évidemment lui permet localement, compte tenu qu'il y a 49 occasionnels, d'en faire une denrée interchangeable. Donc, dépendant des menus, on peut, si vous voulez, conserver ou se défaire de tel ou tel professeur pour faire en sorte de s'adapter au menu du temps.

Au MRCI – je vous le gardais pour le dessert, le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration – évidemment, c'est là que c'est le plus effarant, dans le sens que c'est un ministère qui est très riche, depuis 1990. Il a hérité du fédéral d'à peine 338 000 000 $ pour les quatre années qui ont suivi, de 1991 à 1995. Et en mal de gérer du personnel, il a géré plutôt des établissements. Il a plutôt, si vous voulez, élargi sa vocation dans l'immobilier, par exemple, pour s'installer un super COFI dans un centre qui est tout à fait difficile ou impraticable pour la francisation, dans un quartier où l'ethnie est à majorité grecque. On n'a rien contre cela, mais si on veut vraiment répondre à la mission de francisation et d'établissement des immigrants au Québec, il faut réfléchir un petit peu avant d'installer n'importe où un bâtiment où on veut installer 3 000 immigrants par jour, avec des professeurs, en comptant qu'ils vont franciser ces gens-là.

(17 h 50)

Compte tenu qu'ils étaient très riches, donc ça a pu leur permettre des expériences aussi douloureuses que celle-là, qui ne donnent évidemment pas de résultat aujourd'hui compte tenu qu'on est rendu qu'on ouvre un COFI en Montérégie, qu'on ouvre un COFI à Laval et qu'on dissémine, si vous voulez, les professeurs à la grande échelle du territoire de Montréal, ce qui est très bien en soi.

Alors, vous avez donc le MRCI. Malgré cette richesse depuis 1990, compte tenu, si vous voulez, du rôle que peut jouer le ministère et le Québec au niveau de l'immigration, vous avez là un rapport effarant où vous avez 158 professeurs qui sont appelés au gré des vents, le matin, un peu n'importe quand; ils n'ont aucune considération professionnelle, on leur demande au pied levé. Qu'est-ce qui en est et qu'est-ce qui se fait dans ce ministère-là? Compte tenu que c'est la raison de gestion de couperet qui domine, on développe des mécanismes de contrôle administratif très, très sophistiqués pour couper des minutes d'enseignement advenant que la personne ne se présente pas en temps au travail. Alors, ça veut dire qu'on ne tient pas compte où elle reste, on ne tient pas compte du moment de l'appel, on tient compte seulement de l'arrivée et puis là on coupe. On gagne cinq minutes, 10 minutes, 15 minutes, et ça permet de faire des rencontres collectives de gestion plus importantes dans des endroits qui sont peut-être un petit peu plus onéreux.

Deux propos que je vous présente: un diagnostic en se basant sur les vrais professeurs occasionnels qui vivent ces situations-là telles quelles, qui caractérise 62 % de notre membership au niveau de l'organisation syndicale; par la suite, on vous ficelle ça un petit peu pour vous dire ce qu'on retient de ces témoignages-là et on vous fait sommairement des propositions.

La page suivante, au niveau de l'expérience qui parle, ce sont des témoignages authentiques. Alors, c'est un peu la façon qu'on a de procéder: au lieu de parler pour les gens, on fait parler les gens. Alors, là, vous avez la notion d'instabilité qui caractérise leurs conditions de travail. Une formation qualifiante, ce qu'on entend par là, c'est que le professeur arrive bien équipé et il travaille. Ça, c'est un professeur de l'Institut de tourisme, donc de 88. Il travaille durant un certain nombre d'années, il développe des cours puis évidemment il se forme. Puis après, qu'est-ce qui va arriver? Est-ce que j'ai une perspective de travail à moyen terme ou à long terme?

Un autre dit: C'est un choix de travail que je fais. Moi, j'ai autre chose aussi ailleurs et puis j'accepte de travailler à temps partiel. Vous avez des notions de stress, de fatigue, de discrimination. Vous avez une dame – en bas de la page – qui est occasionnelle seulement depuis 1976; donc, ça fait à peine 22 ans. Alors, elle, elle avait le choix entre cégep d'Alma ou le Conservatoire de musique de Chicoutimi; elle a préféré le Conservatoire de musique de Chicoutimi. Maintenant, avec recul, évidemment elle ferait autre chose.

Et puis là je vous annonce qu'au Conservatoire de musique de Chicoutimi, c'est là qu'on a notre record, au niveau du SPEQ. On a trouvé un collègue qui enseigne le hautbois depuis la fondation du Conservatoire de Chicoutimi, qui date de 1967. Donc, on a un occasionnel, vraiment, de 31 ans. Essayer de trouver les trois motifs pour dire que ça correspond à un occasionnel par rapport à la directive, c'est évident qu'on va errer longtemps.

L'autre page. L'occasionnel perçoit qu'il y a un manque d'équité entre lui et puis les professeurs qui sont permanents ou qui ont une sécurité d'emploi au niveau de la discrimination dans ses conditions de travail. Nous, on considère que s'il existe autant d'occasionnels, s'il y a une escalade autant – donc on ne réfléchit pas sur le bien-fondé du maintien de ces institutions d'enseignement-là, de cette formation spécialisée – c'est qu'il y a une gestion qu'on appelle bureaucratie, qui se nourrit d'elle-même. Alors, elle, elle peut s'élargir. Vous avez un exemple patent depuis 1990 au MRCI, où vous aviez avant une direction de la formation qui s'occupait de l'ensemble des COFI, puis actuellement vous avez une armée de gestionnaires qui s'occupent à peu près, si vous voulez, de ce que faisait la direction à l'époque, en 1980. Alors, vous pourrez comparer. On a des chiffres aussi qu'on a sortis, c'est intéressant. Où on dépense? Là, c'est à vous de le trouver.

Après ça, pour l'occasionnel, la précarité est créatrice pour l'autre, c'est-à-dire la question que pose un collègue du Conservatoire d'art dramatique de Québec: Est-ce que dans la gestion les gens sont précaires? Ce qu'on veut pour soi, est-ce que c'est aussi créateur pour le gestionnaire? Alors, c'est une course aux emplois pour joindre les deux bouts. Les gens se sentent exclus socialement par rapport à cette disparité. Les gens se sentent dépréciés par rapport à la formation artistique. C'est Richard qui vous signe cela, qui est ici avec moi.

La page suivante, on parle d'un continuum pédagogique qui est en péril. Compte tenu que la formation dans un conservatoire peut s'étaler sur 15 ans, c'est évident qu'un occasionnel qui a une perspective d'une session, de deux sessions, de trois sessions, ça lui est très difficile. Mais pour les étudiants aussi, qui veulent poursuivre avec ce professeur-là, ça leur est très difficile de maintenir leur passion, leur élan.

Un autre dit que la précarité se découpe en cinq semaines au COFI de Québec, alors on a appelé ça de la vivisection. Un autre dit que c'est évident qu'on veut payer toujours le moins possible. Prenez un exemple. Au Conservatoire, au lieu de payer sept périodes, ce qui vous donne un salaire de 22 000 $, 23 000 $, on va payer 6,7 périodes, ce qui vous donne un salaire de 10 000 $ de moins. Alors, c'est ce qu'on appelle un investissement sur le bénévolat. Nous, on estime qu'on est une société qui n'est pas nécessairement pauvre, qu'il y a un prix à l'éducation, qu'il y a une valeur à la formation en enseignement spécialisé et qu'on se devrait tout simplement de donner une rétribution, sur une base comparable avec celui qui donne effectivement 6,7, qui a un statut régulier ou sept périodes. Parce qu'on va s'entendre entre nous qu'enseigner 6,7 périodes ou sept périodes, c'est tout simplement une lecture administrative de couperet qui nous permet de penser que ça peut se faire.

L'organisation-concertation, c'est quelqu'un qui a une sécurité à travers son statut d'occasionnel, qui se dit: Bon, moi, compte tenu des rapports que j'ai avec la direction locale depuis 1991 à Saint-Hyacinthe, je pense que mon travail, on le reconnaît, on sait que c'est une discipline importante et je suis le seul à le dispenser, donc j'ai un avenir. Tu en as d'autres qui disent: Bien, il faudrait utiliser de l'audace pour voir autrement. Les gens qui sont occasionnels se sentent démotivés. Compte tenu que je suis quelqu'un qui a eu le plaisir de se former dans mes temps libres à l'ENAP, dans les cours de management I et II, on disait qu'il y avait deux concepts qui étaient importants, que j'ai retenus, c'étaient la motivation et la satisfaction. Alors, pour un occasionnel, ça le démotive toujours, cette situation-là, telle qu'il la vit, alors j'imagine que la démotivation a des effets qui ne sont pas les mêmes que ceux qui sont motivés.

Un autre commentaire: on parle d'une épée de Damoclès. On a une perception négative qu'on peut introduire, quand on est pernicieux, au niveau de la gestion en disant que l'occasionnel, peut-être qu'on peut le surveiller davantage et qu'on doit le surveiller davantage, alors ça conduit à des abus au niveau de l'évaluation par rapport aux professeurs qui sont là depuis un certain temps. Un occasionnel à l'ITHQ nous dit qu'il fait à peu près de tout, un autre nous dit qu'on lui demande à la dernière minute d'enseigner, donc on le perçoit comme une machine. Un autre dit, à l'ITHQ – il n'a pas osé se nommer... Je vous fais remarquer que les gens qui ont accepté qu'on identifie leur nom... il y en a beaucoup qui ont hésité, bien sûr, compte tenu que la précarité fait en sorte qu'il y a une relation avec l'employeur qui peut être dans une situation abusive par l'employeur. Mais malgré cela les gens ont accepté que leur nom y soit. Vous savez qu'on a des gens qui ont parlé dans le public chez nous, un professeur avait été suspendu deux semaines, un permanent. On a réussi, par arbitrage, bien sûr, à réduire ça à une semaine, mais, ceci étant dit, ça a réussi dans le sens qu'on bâillonne totalement l'ensemble des professeurs occasionnels qui ont peur de s'exprimer même en termes positifs sur ce qui se passe dans leur maison.

Alors, une question d'angoisse, une question de reconnaissance qu'ils n'ont pas. Un professeur, de façon très ironique, à Chicoutimi, qui est là seulement depuis 1978, dit: Heureusement que la location de l'immeuble coûte 831 000 $, il est possible, parce que ça coûte aussi cher, le Conservatoire de musique de Chicoutimi, qu'on me laisse travailler encore un certain temps. Par ailleurs, lui, évidemment, on émiette sa tâche, on ne veut pas reconnaître l'ensemble du travail qu'il doit y accomplir. D'autres occasionnels aussi ironiques se disent: On est des gens de seconde nature. Est-ce qu'on est des mutants par rapport aux réguliers? N'avons-nous pas les mêmes besoins? C'est-à-dire avons-nous le droit, nous aussi, d'avoir un revenu décent? Avons-nous le droit d'avoir un travail décent? Avons-nous le droit aussi d'avoir une famille puis peut-être même des loisirs? Alors, vous en avez un autre qui est positif, qui dit: Nous, on est aussi vaillants que les gens qui sont réguliers. Puis c'est pour ça que je vous parle de la théorie Y de McGregor.

Paule, qui est avec moi ici, elle dit: Bien, hors du travail, est-ce qu'il y a une existence? Elle dit: Est-ce qu'on a le droit aussi, par le travail, d'avoir d'autres possibilités? Est-ce que j'ai le droit, moi aussi, d'avoir une maison? Est-ce que j'ai le droit d'avoir un chez nous? Est-ce que j'ai le droit de penser que je peux prendre des vacances?

Les commentaires, brièvement, que nous vous formulons dans ce diagnostic, le premier, c'est: Comment obtenir une stabilité d'emploi? Je vous donne trois exemples. On a des professeurs qui sont futés, qui se sont glissés dans la direction. Une fois devenus directeurs, ils ont obtenu leur permanence, puis il y en a un qui est resté directeur, parce qu'il a l'air d'aimer ça, puis l'autre est redevenu professeur. Ça fait que c'est ça qu'on dit actuellement: Si vous voulez être permanents dans certains réseaux, devenez directeurs puis revenez chez nous. De toute façon, pour la cotisation syndicale, c'est le fun parce que des fois ils conservent leur salaire, qui est plus élevé que celui des professeurs.

Un autre, lui, qui est plus rusé, est allé comme directeur directement puis il est devenu professeur en art dramatique. Mais lui, il déblatère tout le temps contre – je ne dirais pas comme M. Borgia, lui, il fait bien ça – le statut de permanent, dans le sens qu'il dit que tout le monde devrait être occasionnel, c'est plus créateur. Mais, moi, je lui ai dit en assemblée syndicale: Pourquoi, toi qui déblatères contre le statut de permanent, ne deviens-tu pas occasionnel par choix? Parce qu'il est permanent. Il a dit: Quand tout le monde le sera, je serai content de l'être. Alors, c'est pour ça que je vous donne la citation de John Saul, que je trouve intéressante et puis son livre aussi, où il dit qu'une crise requiert de la réflexion, puis il dit que la réflexion n'est pas une fonction de gestion.

À la page suivante, je vous mentionne qu'on a payé le 6 %. Vous connaissez tous cela, étant de l'administration publique. Il y a 21 départs au MRCI, il y a 12 professeurs qui sont partis au MCC. Parce qu'on a payé le 6 % puis on l'a payé cher, mais il n'y a pas eu pour les occasionnels une situation de travail plus intéressante au moins pour 21 ou 12 d'entre eux, c'est-à-dire des contrats d'un an qui durent un an au lieu de contrats émiettés à la journée, à la session, à la semaine.

L'autre commentaire, j'en ai glissé un mot préalablement, l'inclinaison d'un pouvoir malsain. C'est évident qu'un directeur, qui veut expérimenter dans un rapport de pouvoir qui est tout à fait incorrect, dans une semblable relation de travail, peut en abuser. Alors, c'est l'exemple du directeur qui tient une paire de ciseaux.

L'autre, à la page 10, c'est l'exemple des systèmes de contrôle sophistiqués qui, au lieu de regarder l'enseignement... Un professeur de COFI, à Montréal, vient au pied levé donner quatre heures d'enseignement. Le gestionnaire local ne s'intéressera pas généralement à savoir d'où il vient, à quelle heure il a été appelé, il s'interroge: Tu devais commencer à 8 h 50 et tu commences à 9 h 5, on va te couper 20 minutes: 15 minutes parce que tu n'a pas enseigné puis 5 minutes pour que la prochaine fois tu arrives à l'heure. On trouve ça imbécile. On trouve ça vraiment imbécile. On trouve ça inapproprié, on trouve que c'est un manque de jugement.

(18 heures)

On va y arriver, on est patient. On devrait changer ces comportements-là. J'ai suivi des cours là-dessus en disant: Quand on a des attentes bien significatives, bien signifiantes, des fois les comportements d'en face changent. Mais je vous assure qu'il faut être très patient.

Vous avez d'autres exemples qu'on vous donne, où un directeur de conservatoire dans une région obligeait un professeur occasionnel d'aller aux conférences de presse à sa place parce que la personne était gênée d'y aller. Et puis elle lui disait: Écoute, ça serait le fun qui tu y ailles, puis je pense que tu vas avoir un travail, à l'autre session. Ça, on calcule que c'est de l'abus, c'est tout à fait inacceptable. Mais c'est évident qu'on ne peut pas nommer nos occasionnels parce qu'ils veulent encore travailler.

L'autre commentaire: de l'exclusion salariale à l'exclusion sociale. Donc, on interroge les membres de la commission à l'effet que le Syndicat, effectivement, a été faible. On n'a pas réussi à maintenir, si vous voulez, un système de rémunération global pour nos professeurs occasionnels. Nous en sommes navrés. Mais, par ailleurs, compte tenu qu'on est dans un contexte de concertation, de partenariat, et ainsi de suite, on se dit qu'une réflexion conjointe avec les gestionnaires ou avec des nouveaux gestionnaires – parce qu'on va changer le terme – disons, avec des administrateurs, avec des gens qui réfléchissent, qui veulent vraiment que la formation soit dispensée, alors, on devrait être en mesure d'arriver à certains résultats.

À la page 11, on vous mentionne nos quatre champs d'enseignement. Le premier, au niveau de la francisation et de l'établissement des immigrants et immigrantes. Actuellement, à Montréal, on rejoint à peine 40 % de la clientèle. Évidemment, la gestion paresseuse dit que c'est les profs qui font mal leur job. On ne rejoint pas 60 %. Nous, on se dit que la gestion a un rôle à jouer. Pourquoi, pour les 60 %, ils ne développent pas des mécanismes, ils ne développent pas des outils? Qu'ils nous en parlent, on va les aider. On est même rendu, actuellement, pour les conservatoires, qu'on paie de la publicité pour que les jeunes s'inscrivent au conservatoire. Pourtant, ils n'ont pas à être gênés, les gens, les gestionnaires des conservatoires.

On s'est fait venir, nous, de Trois-Rivières seulement – pour donner des exemples; on en aurait plein, il y a des palmarès qui sont parlants – 160 noms de gens qui ont passé par le Conservatoire de musique de Trois-Rivières. C'est un petit conservatoire de région qui irradie au niveau du rayonnement artistique tant dans la région, dans le Québec et ailleurs. Mais ça, ça parle. Les impacts sociaux, les impacts artistiques, est-ce qu'on les mesure? Puis, là, on se parle de façon gentille, en se disant: Ça, c'est important. Un Quilico, ça vaut combien? Angèle Dubeau, ça vaut combien? Mais on n'a pas vu ça dans les rapports, les fois qu'on en a pris connaissance.

La formation professionnelle du personnel pour les milieux de la restauration, on a dit que c'est 100 % quasiment du placement. On dit des ITA, des instituts de techniques agricoles, que c'est 100 % du placement. Alors, c'est des impacts importants. Pourquoi, si on constate que c'est des impacts qui sont réussis, les profs qui enseignent au niveau des opérations, on ne leur donne pas des conditions? On ne vous demande pas le Pérou. C'est le même système de rémunération qu'on a à l'échelle du Québec pour tout le monde de l'éducation. On n'en a pas importé un qui est original ou tout à fait exceptionnel. Non, c'est le même niveau qu'un professeur qui enseigne aussi dans l'ordre du primaire. Alors, pourquoi on ne donne pas à ces gens-là, si vous voulez, une possibilité d'avoir une rétribution qui est à la hauteur de leurs attentes?

Donc, on mise sur la réflexion partagée, qui pourrait conduire à donner le pouvoir et le soutien aux professeurs à statut précaire ou cette liberté dont ils ont besoin pour obtenir des résultats. Alors, devant vous, distingués membres de la commission, il nous agrée de vous mentionner que les centaines d'enseignants que nous représentons possèdent un héroïsme et sont capables de se passionner pour innover et trouver des réponses différentes à la discrimination salariale et, conséquemment, sociale que nous leur connaissons. Trois cent quatre-vingt-sept personnes – c'est des gens, ça, qui n'ont pas un engagement pour une année, donc c'est à la miette – ou 46 % de notre membership subissent une discrimination salariale inacceptable, que la directive, malheureusement, des occasionnels, pour des motifs qui ne s'appliquent nullement chez nous... Que ce soit un projet spécifique, on ne sait pas ce que ça veut dire. Que ce soit surcroît de travail, si c'est un surcroît de travail durant 20 ans, il y a comme un problème. Que ce soit un remplacement de professeur qui est décédé, on ne comprend pas, si vous voulez, pourquoi il n'y a pas au moins un contrat d'un an, de deux ans ou de trois ans, si la discipline est appelée à vivre longtemps.

À la page suivante, on vous fait mention de dépenses somptuaires, dans notre constat. Alors, je vous invite à lire ça; vous allez voir, c'est douteux. Pourquoi je vous mentionne des dépenses somptuaires? Parce qu'on calcule, nous, que c'est tout à fait inélégant, que c'est tout à fait inapproprié qu'un occasionnel qui travaille 6,7 périodes, on le voie privé de 10 000 $ annuellement parce qu'il n'a pas sept périodes, voir en même temps des dépenses qui sont tout à fait farfelues; par exemple, des directeurs qui partent de Montréal en avion pour venir à une petite réunion de 15 minutes à Québec parce qu'ils ont un agenda très serré. Enfin, des choses comme ça. On trouve ça tout à fait abominable. Et je vous donne une image qui est très dure, très sévère, mais c'est une métaphore. Je ne veux pas me faire poursuivre. On l'a déjà fait et on a déjà payé assez cher là-dessus. Ça fait que, là, je vous dis, là-dedans: des gestionnaires atteints d'une tristesse de ne pas avoir tout pu manger un service de sept plats. Ils sourient aux miséreux à travers leur vitrine – c'est une métaphore – qu'ils pourraient connaître un jour meilleur plus tard. Alors, le jour meilleur, moi, je pense que c'est pour les gestionnaires aussi. On apprend, des fois, à descendre, ou à traverser la vitrine puis à être au niveau des opérations.

Le paragraphe suivant, je vous mentionne ce que la sous-ministre du ministère de la Culture vous a dit le 4 février. Elle vous a dit: Oui, les coûts de main-d'oeuvre, ça réduit – elle répondait à la question de M. Gautrin, qui avait insisté beaucoup là-dessus – oui, nous autres, on tient compte beaucoup de ça, puis, ça coûte moins cher. Je comprends. C'est 99 occasionnels à la leçon. Alors, sur la tête de chaque professeur, on essaie de les placer à 6, 6,5. Il y en a qui veulent à 6, il y en a qui veulent à 5, il y en a qui veulent à 3, pas de problème. Mais il y en a qui sont capables d'enseigner plus. Puis on contingente. On fait en sorte qu'il y a des talents qui n'ont pas la formation qu'ils devraient avoir. Et là, évidemment, on fait une réduction ou une économie sur leur dos. On fait une réduction sur le loyer.

Elle vous a mentionné le coût du Conservatoire de musique de Val-d'Or. Elle a dit: Écoutez, ça coûtait 129 000 $, là, ça coûte 25 000 $. Mais allez-y, voir le Conservatoire actuellement, puis allez voir ce qu'il y avait avant. Nous, ce qu'on dit, là-dedans, c'est: Quels efforts ont fait les gestions pour maintenir un petit bijou comme le Conservatoire de musique à Val-d'Or? Plus précisément, on vous dit: des partenariats, la création d'un centre de ressources culturelles, un fonds d'innovation culturelle, d'autres initiatives, est-ce que ça aussi ça fait partie de la table de travail ou de dossiers sur la table de travail des administrateurs? Nous, on pense que ça devrait. Le Conservatoire, il aurait pu être commandité, il aurait pu être financé. C'était un petit bijou. Il y avait une petite salle de concert, c'était extraordinaire, l'utilisation qu'on en faisait. Là, les gens sont obligés de courir avec leurs élèves pour essayer de se produire en exercice pédagogique dans une salle ou dans une autre.

À la page suivante, on vous dit, au niveau de l'impact, parce que ça n'a pas été dit, l'autre fois, assez fermement en commission: Dans la région du Saguenay– Lac-Saint-Jean – ce n'est pas moi qui le dis, c'est M. le sous-ministre Lafleur, qui me disait ça aussi, puis on l'a vérifié par ailleurs, parce qu'il faut toujours vérifier un petit peu l'information qu'on se passe l'un et l'autre – il y a 5 000 jeunes qui gravitent près de la centaine d'étudiants du Conservatoire de musique de Chicoutimi. Mais, ça, ce n'est pas n'importe quoi.

Là, on fait une petite caricature. On dit: Conservons le patrimoine, oublions que c'est important, la formation artistique, on n'a pas les moyens de payer ça, mais payons un édifice. On dit: Payons le 831 000 $, augmentons ça, si vous voulez, à 1 000 000 $, économisons la formation en la tuant, et puis la télévision d'émissions artistiques importées créera par procuration la discipline des jeunes puis la qualité artistique régionale. Puis, là, vous voyez, j'ai fait une coquille volontaire, j'ai mis «siq»; c'est s-i-c que ça s'écrit, mais j'ai mis s-i-q pour Société immobilière du Québec, parce que ça n'a pas de saint maudit bon sens qu'avant qu'on enseigne une période d'enseignement on dise: Il faut payer 1 000 000 $. À Montréal, il faut payer 2 300 000 $. C'est l'exemple que je vous donne des bâtiments de Montréal, 2 000 000 $.

La mollesse des règles juridiques. On vous dit qu'on l'a testée, la directive, on l'a testée en 1982. On a été devant le juge Bérubé, qui était arbitre chez nous, alors, et puis, après l'arbitrage qu'on a perdu, parce qu'on voulait qu'un occasionnel ait un travail, il était là depuis très longtemps et puis on voulait qu'il ait un travail d'un an au moins, au niveau de l'année scolaire, dans le réseau des COFI, c'est un grief collectif... On l'a perdu parce qu'il n'y avait pas, si vous voulez, un papier du Trésor qui disait que c'était un projet spécifique. Puis il n'y en aurait jamais eu. Ça fait qu'on a dit: Nous, on n'ira pas plus loin. Parce que la bêtise, des fois, administrative, à travers, si vous voulez, le collimateur juridique aurait pu donner comme résultat que l'employeur n'aurait pas été capable d'embaucher quelqu'un parce qu'il n'entre pas dans la directive.

Je vais vous donner un exemple bien pratique pour me faire comprendre. Il y avait, dans une certaine situation de travail, l'obligation de l'employeur d'évaluer un fonctionnaire. L'employeur ne l'avait pas évalué, il a été congédié. L'employeur était venu en cour pour dire: Écoutez, c'est un excellent employé. Mais ils ont dit: Vous ne l'avez pas évalué, donc on ne peut plus le garder, donc on maintient le congédiement. Alors, nous autres, c'est la même chose, on a dit: Écoutez, la directive ne s'applique pas, mais, si on la défend trop fort puis ils empêchent les gens de travailler, même si c'est exploité, en l'occurrence, c'est évident que c'est... C'est encore mieux parce qu'on a l'espoir de lendemains meilleurs.

Le temps supplémentaire, comme autre commentaire, on vous demande de le prohiber comme nous, nous le suggérons. C'est parce qu'on veut le partage, si vous voulez, d'une richesse au moins entre les gens qui travaillent.

Les propositions, très rapidement, ce que nous vous présentons, c'est qu'il faut donner une valeur à la formation spécialisée. Je pense que ça nous apparaît important. Là, je vous mentionne les exportations auxquelles on donne beaucoup de valeur. On dit: L'exportation, au Québec, c'est bien important, il y a beaucoup de discours actuellement là-dessus. Mais on fait juste vous mentionner, juste comme ça pour un échange culturel, que l'industrie du papier, entre 1990 et 1995: 16 % de plus au niveau des exportations, mais ça a créé du chômage, 20 % dans son secteur, 7 315 emplois.

Nous, on vous dit: dans la fonction publique, les services, c'est 75 % du marché de l'emploi. Et puis il y a neuf emplois sur 10 qui se sont créés, ces dernières années, dans les services. Ça fait que l'État, pourquoi, des fois, il n'investirait pas, si vous voulez, à travers ses subventions, dans des services, en mesurant les impacts sociaux? Alors, c'est ce qu'on vous mentionne.

À la page suivante, dans les propositions, on vous demande que l'État assume la vie culturelle. L'État doit assumer avec fierté le rôle de dispensateur de la formation spécialisée dans nos quatre réseaux d'enseignement. On vous mentionne que l'État doit faire en sorte qu'il y ait de vrais leaders d'écoles spécialisées. Puis on vous donne les qualités de ces leaders-là, pas des gens qui s'enferment dans leur bureau puis qui ne créent pas de relations publiques, qui ne font pas en sorte – ce qu'on vous disait tantôt – de créer un centre de ressources culturelles ou de créer des alternatives à ce qui se passe actuellement.

On vous demande – pas ce qui s'est fait en Floride – qu'il y ait un ouragan d'équité et d'éthique qui particularise le nouveau socle – parce qu'on a parlé de refondation – au sein des écoles d'enseignement spécialisé, non par une exclusion salariale conduisant, selon nous, à une exclusion sociale, mais bien par une inclusion de l'ensemble des professeurs à la réalisation de la mission de chacune d'entre elles. On vous mentionne le cas de Val-d'Or, où vous avez du chant choral, ça va chercher une trentaine, une cinquantaine de personnes. C'est de l'intégration entre les jeunes au sein des familles puis entre les artistes de la région.

(18 h 10)

La proposition suivante, on vous demande que la nature contractuelle entre l'enseignant puis l'employeur contienne une transparence, une stabilité puis une durée nécessaires au bon accomplissement des tâches d'enseignement. Donc, on regarde ensemble vraiment: Est-ce que c'est là pour durer? Est-ce que la discipline qu'est le piano, dans un conservatoire, c'est une discipline qui est d'appoint ou si vraiment elle est importante, elle est essentielle? Comme le violon, pourquoi il y a des occasionnels qui enseignent le violon dans les conservatoires?

On vous demande de renverser la technocratie qui a caractérisé la gestion des années quatre-vingts. Puis on vous dit que, malgré cette technocratie-là, qui se nourrit d'elle-même, il y a eu livraison d'une formation spécialisée comme telle qui s'est faite par les 834 enseignants. Puis on dit: Si on ne maintient pas cela, évidemment, ça devient un mot vide de sens.

On vous demande de ne pas utiliser les bâtiments, si vous voulez, pour calculer le coût de l'enseignement ou qu'on nous déménage dans des bâtiments qui seront donnés ou qui seront loués ou qui auront d'autres coûts, mais qui ne mettront pas, si vous voulez, en péril la formation.

On vous demande de ne pas engager des enseignants qui, déjà, enseignent à temps plein ailleurs. On calcule que c'est un manque d'éthique. À Montréal, on engage des enseignants qui sont à temps plein pour venir enseigner dans les COFI. On calcule que ce n'est pas correct. L'employeur se sent mal à l'aise de refuser.

On vous demande puis on vous invite... On termine sur de nouveaux partages de travail. On est conscients qu'il faut peut-être créer des modèles qui sont nouveaux. Nous prenons sur nous de vous donner un modèle que nous connaissons seulement à travers la littérature, qui est aux Pays-Bas. Et puis je vous donne la citation, en bas de page, où on vous parle que «la réduction du temps de travail, associée à une modération du salaire – n'allez pas dire qu'on vous demande une diminution de 10 %; ce n'est pas ça que j'ai dit devant la commission – par tête qui en a favorisé le succès, a ainsi pu être compatible, au niveau microéconomique du ménage, avec une progression du revenu lié à l'ajout du salaire féminin et à davantage de temps hors travail pouvant être passé ensemble par les deux membres d'un couple d'actifs». Évidemment, j'affiche mes couleurs, là: je ne suis pas contre la famille, je suis tout à fait favorable ça.

Maintenant, on vous laisse simplement en vous disant que la troisième étape, bien sûr, vous appartient. Elle appartient vraiment aux membres de la commission, à ses institutions démocratiques puis surtout aux personnes qui composent les institutions démocratiques, si elles veulent bien assumer les responsabilités d'une formation spécialisée à l'échelle du Québec. Alors, on vous remercie de votre écoute puis de nous avoir permis de participer, par nos connaissances, à cet important débat sur le travail.

Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup, M. Perron. Il y a beaucoup de choses dans votre document. Vous traitez de la question sous des angles un peu nouveaux. Lorsqu'on parle du calcul des coûts des bâtiments, on n'était pas partis pour étudier particulièrement cette question-là aujourd'hui, compte tenu du fait que notre mandat porte sur les emplois occasionnels. Mais c'est une façon intéressante de toucher ou d'approcher la question.

En page 3 de votre document, lorsque vous nous donnez les statistiques d'emplois permanents et occasionnels dans chacun des quatre ministères que vous représentez pour les profs de l'un ou l'autre des quatre ministères, combien y en a-t-il qui ont trois ans continus, l'équivalent de trois ans continus de travail, dans ces occasionnels-là?

M. Perron (Luc): Je n'ai pas regardé une statistique qui est précise, mais nous avons une très, très forte majorité qui est là depuis très longtemps. Comme je vous disais tantôt, il y en a un qui a un record, Louis Côté, à Chicoutimi, de 31 ans à peine comme occasionnel. Et vous en avez beaucoup, beaucoup qui excèdent trois ans. Alors, c'est évident que toute mesure pour des concours réservés qui faciliterait, bien sûr, une reconnaissance, je dirais, humaine et professionnelle de l'investissement de ces gens-là pour leur maison d'enseignement, nous sommes tout à fait en accord avec cela. Il y en a beaucoup qui excèdent le trois ans.

Le Président (M. Chagnon): Outre les problèmes dus à la précarisation de l'emploi, que vous avez caricaturés, mentionnés, est-ce qu'il y a d'autres raisons qui motivent, selon vous, le fait qu'il y a un si grand nombre d'occasionnels, particulièrement au MRCI où madame travaille?

M. Perron (Luc): C'est-à-dire qu'on veut nous laisser croire que, évidemment, on est fonction de la clientèle telle qu'elle arrive, mais on ne s'assoit jamais ensemble, si vous voulez – ou on tente de le faire – pour faire en sorte de trouver des conditions qui soient plus stabilisantes, qui permettent de reconnaître l'apport du corps professoral.

Par exemple, si on estime qu'au Centre régional du Parc, où il s'entasse 3 000 immigrants par jour pour une formation en français il y a le bassin suffisant de professeurs qui est là, qui fait qu'on en aurait besoin de trois, quatre, cinq qui sont là comme réguliers pour remplacer des absences, ça peut être des mesures, si vous voulez, qui soient prises, mais on ne fait aucun effort en ce sens-là.

Actuellement, ce qu'on fait comme perception, compte tenu qu'on a le prisme de couper le plus possible, on essaie d'appeler la personne à la dernière minute. On essaie, si vous voulez, de contrer toute planification à quelques semaines d'avis. Donc, on appelle le vendredi pour un travail le lundi suivant, sans dire nécessairement, le vendredi, exactement où il se trouve, à Dollard-des-Ormeaux ou à Pointe-aux-Trembles ou ailleurs. Alors, c'est vraiment, là, des mesures qui existent, parce qu'on valorise le découpage, le découpage de façon indue, en disant que le professionnel, il l'est, peu importe où il se trouve dans le monde puis à l'improviste. Et, ça, c'est très, très malheureux. Puis Paule peut ajouter. Tu veux ajouter sur les...

Mme Delisle (Paule): Je peux dire que, moi, je signe constamment des contrats de cinq semaines et puis je le sais le vendredi ou le jeudi précédant le mardi suivant – parce qu'on commence toujours le mardi à enseigner – si j'ai un contrat ou non.

Le Président (M. Chagnon): Un contrat dans un COFI?

Mme Delisle (Paule): Oui. Je suis professeur au COFI de Québec. À Québec, il y a un seul COFI, c'est un peu différent de Montréal, mais on n'a jamais de sécurité d'avoir du travail plus de cinq semaines consécutives.

Le Président (M. Chagnon): Une autre question. Est-ce qu'il y a beaucoup de clientèle à Québec, dans un COFI? C'est-à-dire, c'est surprenant d'entendre parler qu'il y a un COFI. Est-ce que c'est un gros COFI, un petit COFI? 92 % des immigrants s'en viennent dans Montréal.

Une voix: ...

Mme Delisle (Paule): Oui. Ça dépend des périodes. Il y a des périodes où on a plus de classes que d'autres. On peut avoir 15 classes.

Le Président (M. Chagnon): Tant que ça?

Mme Delisle (Paule): Oui, de 17 étudiants, en moyenne.

M. Perron (Luc): Dans l'exemple de Québec, quand vous avez, par exemple, 15 classes, une classe, ça dure au moins 30 semaines. Alors, c'est quoi, le problème de dire qu'on n'engage pas quelqu'un pour 30 semaines? C'est quoi, ne pas lui donner, si vous voulez, une possibilité d'entrevoir sur une durée de temps comme celle-là un travail? Parce qu'on investit énormément, et tout ça, mais il n'y a pas de réflexion qui se fait là-dessus. S'il s'en faisait, c'est certain qu'on en arriverait, je pense, à des résultats qui tiennent compte de l'ensemble, si vous voulez, des composantes. Et, sur le plan humain, on arriverait à des résultats beaucoup plus intéressants que cela. Mais, actuellement, c'est toujours d'arriver à dire: Comment on peut payer le moins cher possible?

Le Président (M. Chagnon): Ça doit être un peu dans le même sens que ce qu'on retrouve dans la page 18 de votre document. Je vais vous lire un paragraphe, et vous me le traduirez: «Nous pensons que le calcul par la réduction que le Vérificateur général opère par le biais de la monnaie et de la valeur marchande sur le réel multiforme des maisons d'enseignement constitue un mode de pensée opposé à cette répartition – il manque des virgules, à part ça – indispensable des richesses de l'esprit comme nous l'avons mentionné plus tôt.» Alors, ça veut dire quoi, ça?

M. Perron (Luc): C'est-à-dire qu'on précise qu'au niveau par exemple, des impacts artistiques dans une région, il faut se donner l'obligation de mesurer cela. L'exemple que je vous ai donné plus tôt, où je vous parlais, par exemple, des 5 000 jeunes qui gravitent autour des 100 étudiants qui étudient au Conservatoire de musique de Chicoutimi, ça nous apparaît probant. Combien ça vaut, dans le collimateur d'une comptabilité qui n'existe peut-être pas au moment où on se parle, pour une région, cette vitalité artistique-là? Moi, je pense que c'est important et je pense qu'il faut investir pour vraiment que cela demeure.

Et l'image que je vous donne ou la caricature que je vous donnais tantôt, qui était très difficile... On ne peut pas prendre – c'est un prof de basson, à ma gauche – un instrument de musique par procuration, il faut qu'on s'éprouve soi-même, il y a toute une belle discipline. Puis c'est un talent, si vous voulez, qui vous appartient, qui dort en vous. Et, si on n'investit pas dans ce talent-là, on va aller entendre ce qui se passe ailleurs. Et je dis qu'on s'en irait là-dedans vers une société médiocre, et ça, il faut le mesurer.

C'est en ce sens-là que je me permets, avec un vocabulaire comme celui-là, de préciser que les richesses d'esprit sont excessivement importantes, et il ne faut pas se baser seulement sur des richesses matérielles, et, à mon sens, elles sont difficiles à évaluer, et ça mérite le développement d'outils analytiques qui tiennent compte de cela. Angèle Dubeau, ça vaut combien?

Le Président (M. Chagnon): Votre réponse est plus clair que votre écrit.

M. Perron (Luc): C'est le propre du dialogue.

Le Président (M. Chagnon): M. Laporte.

M. Laporte: Oui, Merci, M. le Président. D'autant plus que, dans le cas des conservatoires, c'est une institution qui m'est particulièrement chère, en tant que porte-parole officiel de l'opposition en matière de culture et de communication. C'est aussi une institution dont la tradition est de former des musiciens, en particulier des musiciens d'élite. Et c'est une institution qui a joué un rôle énorme, au Québec...

M. Perron (Luc): Et qui joue.

M. Laporte: ...du point de vue de l'accès non discriminatoire au statut de créateur ou, disons, d'artiste d'élite. C'est un peu épouvantable, ce qu'on observe dans les conservatoires, je suis bien d'accord avec vous là-dessus.

M. Perron (Luc): L'accès, ce n'est pas en fonction du portefeuille, c'est en fonction du temps.

M. Laporte: Oui, justement. Moi, il y a une question que je voulais vous poser, parce que, enfin, je suis arrivé un peu en retard, mais votre mémoire, je vais certainement le relire attentivement, parce que... Je vous connais, vous, parce que, moi aussi, j'ai travaillé... à l'époque, c'était, le MCCI, le ministère de l'Immigration, vous étiez là parmi les enseignants.

M. Perron (Luc): Je suis représentant des professeurs du réseau des COFI depuis à peine 1979.

(18 h 20)

M. Laporte: Et toutes les données qu'on a sur l'enseignement du français dans les COFI ont tendance à démontrer, je pense, d'une façon assez convaincante que le niveau d'efficacité de cet enseignement-là est loin d'être ce qu'il pourrait être, O.K.? Et, moi, je me suis toujours demandé – disons, ça pourrait être sur l'acquisition du français, la rétention du français, la capacité de retenir les immigrants qui ont acquis le français, il y a toutes sortes d'indicateurs, il y a des études qui ont été faites là-dessus, en particulier à l'Université de Montréal – s'il n'y avait pas une partie de cette efficacité, de ce rendement de l'enseignement du français dans les COFI, qui n'était pas due, en fait, au statut des gens qui enseignent le français dans ces COFI-là, du point de vue de leur sécurité d'emploi.

J'ai vu fonctionner les ulpanim, en Israël – parce que j'ai fait une mission en Israël, à l'époque – et une chose dont je suis convaincu, c'est que l'enseignement du français ou d'une langue – ça peut être l'hébreu, ça peut être l'allemand – aux immigrants, et on peut le voir, ça, dans les groupes communautaires à Montréal, d'abord, c'est très complexe et ça suppose de la part de l'intervenant, de l'enseignant une dévotion considérable. Et, dans le cas des ulpanim, en Israël, évidemment, les gens qui enseignent là-dedans, ce sont des fonctionnaires de l'État à plein temps et qui font preuve d'un dévouement, disons, sans égal, à mon avis.

Et je me demandais, dans le cas des COFI, est-ce que le procès que vous faites du taylorisme du MCCI – c'est clair – et l'espèce de situation d'oppression dans laquelle sont tenus les enseignements de COFI, ça n'a pas un impact sur le rendement de l'activité pédagogique de ces organismes-là?

M. Perron (Luc): Vous avez entièrement raison. C'est certain que l'abus de pouvoir qui peut être exercé, compte tenu de la précarité du statut, a fait en sorte que vous avez des gestionnaires qui sont en mal d'expérimenter, qui peuvent placer des gens dans des situations qui sont tout à fait farfelues. Par exemple, on peut astreindre un professeur à enseigner dans une salle qui ne porte que le nom de salle, mais où il y a sept classes en même temps, dans une cafétéria, dans une usine, et tenir compte d'une évaluation de ce travail-là de la même façon que quelqu'un qui enseignerait dans une classe, mettons, plus conventionnelle. Et ça, évidemment, ça crée des tensions qui sont importantes.

Mais je suis prêt à aller un peu plus loin, avec votre question, je la trouve fort pertinente. C'est que, quand on analyse ce qui se passe dans les COFI, on oublie que ce n'est pas, justement, un lieu d'enseignement traditionnel comme dans le réseau général de l'éducation. Les COFI, on oublie trop facilement que les intervenants que sont les professeurs, occasionnels ou permanents, bien sûr, tiennent compte de trois orientations qui se distinguent carrément du milieu de l'éducation.

La première, c'est que les COFI, jusqu'à maintenant, on oriente les gens sur le marché du travail. Alors, ce sont des gens qui arrivent au Québec et qui ont hâte de s'insérer socialement dans le marché du travail. Alors, le professeur doit tenir compte, à ce moment-là, de cette obligation-là, en termes d'orientation qui est prépondérante.

Une deuxième qui m'apparaît importante, qu'on oublie très souvent, c'est que, dans les COFI, on pratique l'approche communicative. Donc, on oblige l'aubin ou l'arrivant ou l'immigrant à pratiquer ou à s'exprimer en français dans des situations langagières, et ça, c'est important. Donc, c'est ça que développe le programme d'un COFI, qui le particularise comme tel.

Puis le troisième, qui est très, très important et qu'on ne retrouve pas dans une classe, je dirais, conventionnelle, c'est que le professeur de COFI se doit de tenir compte du référentiel de l'immigrant qui arrive. Et ça, on l'oublie trop souvent. Le gestionnaire, pour reprendre votre question comme telle, lui, il s'en balance – il y a une expression qui me venait, qui n'est pas gentille – il s'en balance malheureusement trop facilement, j'appellerais ça par commodité paresseuse, dans le sens que, lui, il peut envoyer, par exemple, un professeur féminin dans une classe où il n'y a que des musulmans puis il dit: Elle vivra une expérience. Ça serait peut-être intéressant de dire au professeur que, dans un tel contexte, peut-être qu'il peut lui arriver certaines résistances. Mais on ne fait pas cela. On dit: Les profs sont tellement brillants qu'ils vont apprendre sur-le-champ. Et ça, ça fait en sorte qu'évidemment ça démotive. Et, en plus, si vous êtes occasionnel puis vous vivez une expérience comme celle-là, vous n'osez pas, effectivement, l'exprimer ou faire autre chose ou l'acheminer, parce qu'on dit: Vous n'êtes pas un bon professeur, on ne vous reprend pas, parce qu'il y a de la menace, si vous voulez, toujours pour mettre fin à l'emploi.

Puis je terminerai la brève intervention – parce qu'on en aurait long à dire là-dessus, c'est un sujet qui me passionne – sur des études qui ont été faites. Parce que, quand, des fois, c'est connu, on nous les achemine. Alors, il y a une étude d'un sociologue à l'Université de Montréal, en sociologie, Jean Renaud, qui, lui, dit, en 1990... Puis c'est lui qui le fait sur une base comparative, ce n'est pas le Syndicat qui l'a commandité, c'est même le ministère, qui a commandité un professeur d'université; ça, ça arrive souvent. Alors, il commandite le professeur d'université, qui, lui, fait un travail. Puis, lui, il lui dit que le COFI, sur la base de l'enseignement qui se passait avant 1993, une formule de cinq heures par jour, par rapport à ceux qui arrivent au Québec, c'est une formule qui permettait à un immigrant, à raison de sept fois, d'accélérer ses chances de s'insérer dans le marché du travail francophone. Et c'est lui qui dit ça.

Et, malgré cela, pour reprendre encore ce que vous m'invitez à dire, le gestionnaire, lui, il a fait fi de ça, il a bousillé complètement cette structure qui donnait des résultats et il a innové avec d'autres structures qui, elles, actuellement, et ils sont à même de constater, ne peuvent pas donner les mêmes résultats. Et c'est pour ça qu'ils sont en train de les modifier, dont celle que je vous disais tantôt, de la baisse de 20 % du temps de formation, en 1993. Et ça, c'est malheureux.

C'est que le gestionnaire, quand on le définit dans notre document de technocrate, c'est quelqu'un qui se nourrit d'informations qui lui appartiennent à lui seul à l'intérieur de son bureau et qu'il ne va pas valider sur le terrain, mais qui a une grande vision. Par exemple, il y avait une grande vision de dire: À Montréal, les immigrants, on va les rassembler tous en un lieu – au Centre régional du parc, l'ancienne école William Hingston désaffectée depuis un an et demi – on va louer ça à coup de millions à la CECM. La CECM, elle est contente, elle. Écoute, je me mets à sa place, moi, un locateur de même, c'est extraordinaire. Je ne sais même pas s'ils ont négocié le prix. En tout cas, ils paient un très, très gros montant annuellement, puis ils mettent des immigrants...

Toute cette expérience-là, nous, en 1990, on leur a dit: Ne faites pas cela, ça va à l'encontre de toutes les connaissances que les professeurs nous véhiculaient puis de leur propre expérimentation avec l'immigration. Malgré cela, la gestion – je ne la nommerai pas parce que je ne veux pas me faire poursuivre – ce qu'elle nous dit: Si c'est une erreur, ça sera une erreur. Moi, je calcule que, dans la nouvelle gestion, on doit faire en sorte – puis c'est pour ça qu'on dit qu'on doit céder le passage à la force par l'intelligence – vraiment d'anticiper un succès à une décision administrative. Il me semble que ça, ce n'est pas compliqué. On devrait au moins faire cela. Il peut arriver un résultat non voulu, on n'a pas de problème avec ça, il n'y a personne de parfait. Mais, aller faire un super COFI dans un quartier qui n'est pas tout à fait, si vous voulez, favorable au fait français, en pensant qu'on va réussir à franciser 3 000 immigrants dans la même bâtisse, de façon très impersonnelle, et que, là, on va tout franciser le quartier...

On a demandé s'il y avait une étude quelque part, là-dessus. Ils nous ont dit qu'il n'y avait pas d'étude, qu'ils faisaient la tentative. Parce qu'il faut qu'un gestionnaire des fois, fasse des tentatives. Mais ça, à mon sens, c'était tout à fait aller au devant de l'erreur, au devant de l'échec. Puis, dans notre fonction publique, des fois, malheureusement, quand on fait un échec aussi retentissant, on est promu. Et la personne qui a fait cet échec retentissant là, les deux, trois, personnes, elles ont toutes été promues. L'occasionnel qui voit ça, c'est évident que, lui, il ne meurt pas de rire, mais c'est triste. Lui, en même temps il a des conditions qui sont difficiles, en même temps, on le place dans un environnement qui est très difficile pour obtenir puis atteindre les résultats qu'on attend de lui. C'est tout ça.

Le Président (M. Chagnon): Merci.

M. Perron (Luc): Le COFI de Hull, juste pour terminer. On avait – «un arrivage», ce n'est pas bien – des gens qui arrivaient, c'étaient des Hongrois, en masse, il y avait une classe presque de Hongrois. Eux-mêmes ont demandé à être dans d'autres classes parce qu'ils savent que, s'ils sont trop rassemblés, la tendance est... Mais ça, écoutez, ça ne prend pas un doctorat pour comprendre ça. Mais nous – vous, ça a pris deux minutes, une minute – avec un gestionnaire, des fois, qui a un certain style, ça prend une demi-heure, une heure, puis il faut revenir. Mais, dans l'enseignement, des fois, on fait ça, on revient...

Le Président (M. Chagnon): C'est ça, la pédagogie.

M. Perron (Luc): Oui, mais c'est triste un peu, quand même, c'est des gens...

Le Président (M. Chagnon): M. Laprise.

M. Laprise: Comment se fait-il que 0,5 % d'une période coupe les salaires de 10 000 $, 6,5 % à 7 %?

M. Perron (Luc): Ça, c'est atrophié, si vous voulez. C'est maintenir une pression abusive sur l'occasionnel. L'occasionnel, ce qui arrive, M. Laprise, et ce qui est triste là-dedans, c'est qu'il ne nous le dit pas toujours tout de suite, parce qu'il se dit: Si je le dit, mon syndicat intervient. Puis on n'a pas toujours bonne presse quand on dit: Écoutez, ce n'est pas correct, ce que vous avez fait, parce qu'ils n'aiment pas ça qu'on le sache. Et, des fois, ils vont corriger la situation, mais ils vont être pires, après, au niveau d'une coupure de cet ordre-là. Et ça, c'est malheureux, parce qu'un acte professionnel, vous et moi savons très bien qu'un enseignement de quatre heures... Il y en a, en trois heures, qui vont faire densément ce que d'autres vont faire en quatre heures. Ce n'est pas la minute qui est riche, c'est l'ensemble. Il y a beaucoup d'exemples qu'on pourrait donner à cet effet-là, qui, par ailleurs, illustrent l'inconfort de créer une escalade avec l'embauche de façon éhontée de professeurs avec un statut précaire. Parce que la précarité, ça traduit une relation avec l'employeur, qui est difficile à vivre.

Le Président (M. Chagnon): Il ne nous reste plus qu'à vous remercier et, effectivement, faire en sorte d'ajourner nos travaux à demain 9 h 30, pour qu'on puisse continuer puis tirer des conclusions, une fois qu'on va tous vous avoir entendus. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 18 h 30)


Document(s) related to the sitting