(Neuf heures trente-cinq minutes)
Le Président (M. Chagnon): Nous avons quorum. Je déclare la séance ouverte en vous rappelant que la commission se réunit ce matin afin d'entendre la curatrice publique en vertu de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics et, à cette fin, d'examiner le rapport spécial déposé à l'Assemblée nationale par le Vérificateur général sur le Curateur public.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Lamquin-Éthier (Bourassa) et Mme Houda-Pepin (La Pinière) ont été désignées membres temporaires pour la séance.
Le Président (M. Chagnon): Merci. L'ordre du jour sera le suivant. Il y aura d'abord des remarques préliminaires que je ferai fort brièvement, dans le fond, et l'exposé du Vérificateur général débutera nos travaux. Le Protecteur du citoyen suivra, représenté ici par M. Pagé, et ensuite évidemment nous allons demander à la curatrice de nous exposer le dossier que nous avons devant nous.
Remarques préliminaires
M. Jacques Chagnon, président
Alors, comme remarques préliminaires, je ne m'en tiendrai qu'à des objets. Je reviendrai sûrement après le dernier témoignage, c'est-à-dire après celui de la curatrice publique. Je voudrais fort brièvement évidemment signaler que nous nous réunissons ce matin de façon urgente et pressante, compte tenu du rapport du Vérificateur général qui a utilisé, pour la première fois depuis la mise sur pied du bureau du Vérificateur général, l'article 45 pour obtenir ou retenir l'attention des parlementaires de la façon la plus pressante sur un objet qui nous est apparu absolument incroyable comme rapport, celui qui a été déposé à l'Assemblée nationale la semaine dernière. C'est pour cela que notre commission a décidé de se réunir d'urgence de façon à regarder le rapport spécial du Vérificateur général, et c'est la raison pour laquelle nous avons convoqué les parties que nous avons devant nous aujourd'hui.
Depuis le rapport du Vérificateur, je souligne que notre commission a changé un petit peu. Quelques-uns de ses éléments ont été modifiés suite à des demandes des whips de chacun des partis. Je voudrais donc saluer le départ de M. Brien et particulièrement celui de M. Laprise qui a changé de commission et qui a beaucoup travaillé dans cette commission-ci. Je voudrais l'en remercier. Et je signale aussi, au nom de cette commission, puisque nous travaillons très étroitement avec le Vérificateur général, que nous lui offrons nos plus sincères condoléances suite au décès de sa mère, récemment. Je sais qu'il devra nous quitter pour les funérailles de cette dernière au début de l'après-midi. Alors, je trouve déjà extrêmement courageux le fait qu'il soit avec nous ce matin.
Alors je vais procéder tout de suite aux remarques du Vérificateur général.
Auditions
Vérificateur général
M. Breton (Guy): Merci, M. le Président. Mmes, MM. les membres de la commission, Mme Bailly, la semaine dernière, j'ai déposé un rapport spécial à l'Assemblée nationale après ma vérification effectuée auprès du Curateur public. C'était la première fois, comme vous le disiez, que le Vérificateur général du Québec recourait à l'article 45 de la Loi sur le Vérificateur général.
La décision de publier un rapport spécial est inspirée essentiellement par deux éléments. En premier lieu, les éléments de gestion à corriger sont tels que j'ai jugé qu'il fallait prévenir les autorités compétentes dans les plus brefs délais. Deuxièmement, les conséquences des problèmes constatés touchent en particulier des personnes éminemment fragiles et vulnérables.
Comme le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration l'annonçait dans sa déclaration ministérielle qui suivait le dépôt de mon rapport, le gouvernement a déposé une motion afin que la commission de l'administration publique nous entende ce matin, Mme la curatrice, le Protecteur du citoyen et moi-même. J'apprécie l'empressement qu'a eu le gouvernement pour ouvrir le débat, puisque l'ampleur du problème réclame une attention et une solution hors du commun.
La vérification de l'optimisation des ressources menée chez le Curateur public de juin 1997 à février 1998 a couvert l'ensemble de sa mission: les activités de protection des droits de la personne inapte sous régime public, la gestion de ses biens et l'administration des biens délaissés, la surveillance des régimes privés, et l'exercice des pouvoirs du Curateur relativement au mandat en cas d'inaptitude ont été étudiés. Cet examen des différentes facettes du mandat du Curateur nous a, de plus, amené à évaluer ses pratiques de gestion et l'affectation de ses ressources. Mon constat le plus navrant est que la protection continue des droits des personnes représentées par le Curateur est négligée. La méconnaissance de la situation des personnes qu'il représente et l'absence de maillage avec les ressources du milieu amènent le Curateur à être continuellement en réaction. Ainsi, il exécute des travaux à la pièce et fréquemment à la suite de plaintes.
(9 h 40)
La plupart des faiblesses décelées au sujet des différents volets de la mission du Curateur ont pour origine une administration générale défaillante. En effet, celui-ci a du mal à mettre en oeuvre les priorités retenues, ce qui engendre une mauvaise utilisation des ressources et un traitement inégal des dossiers. Par ailleurs, ses pratiques administratives ainsi que des méthodes et des outils de travail peu appropriés représentent des écueils de taille à la mise en place de saines pratiques de gestion. À la lecture de ce rapport, vous avez sûrement constaté que tous les secteurs d'activité du Curateur comportent des déficiences importantes. De plus, dans certains cas, les problèmes soulevés existent depuis fort longtemps. Pourtant, le Curateur n'est pas parvenu à redresser le cap au fil des ans. Je tiens à préciser que l'existence de la fonction du Curateur n'est pas remise en cause malgré les critiques formulées quant à son administration. Il ne faudrait donc pas confondre le mandat lui-même et son exécution.
Je voudrais, si vous le permettez, toucher un élément particulier qui a fait l'objet de nombreux commentaires lors du dépôt du rapport. Je veux parler ici du délicat sujet du consentement aux soins. Lors de la vérification, nous avons examiné 50 dossiers pour lesquels le Curateur avait donné un tel consentement au cours de 1997. Ce sondage a révélé 17 cas pour lesquels le consentement n'a pas été accordé correctement. Dans la plupart des situations, nous avons observé que la famille ou les proches de la personne inapte n'avaient pas été consultés. Sur ces 17 cas, cinq concernaient des projets de recherche, alors que les autres étaient plutôt des cas de non-réanimation, des interventions chirurgicales ou des soins dentaires.
Les cinq projets de recherche sont les suivants: deux personnes ont testé un médicament que l'on trouve maintenant en pharmacie; une personne a absorbé des gélules d'un nouveau produit qui, je pense, existait déjà sous forme de comprimé; deux autres personnes ont été soumises à des entrevues et à des observations dans le domaine neuropsychologique et psychosocial. Le Curateur était bien au fait de ce qui se passait pour ses protégés. Il ne faudrait donc pas conclure, à partir de nos travaux, que les personnes inaptes sous la protection du Curateur ont fait l'objet d'expérimentation mettant en danger leur vie. Cette conclusion est non fondée, du moins à partir de ce que nous avons pu observer lors de nos vérifications.
Dans mon rapport, j'exprimais le souhait que le gouvernement prenne les mesures qui s'imposent afin d'aider le Curateur à rétablir une situation déplorable. Depuis, le ministre a confirmé qu'il avait confié à M. Thomas Boudreau le mandat d'aider le Curateur public à redresser son administration. Il importe que les corrections soient apportées rapidement, puisque le Curateur est responsable de personnes sans défense soit directement, soit par l'entremise de tuteurs et de curateurs privés. À cet égard, et tel que le souhaite le gouvernement, je vous annonce que je devancerai mon calendrier habituel de vérifications pour effectuer un suivi des mesures de redressement qui seront mises en oeuvre. Je pourrai ainsi, à l'automne de 1999, faire le point sur la situation qui aura cours à ce moment-là chez le Curateur public.
Durant la présente séance, je suis prêt à vous donner tous les compléments d'information qui pourraient vous être utiles. Je vous ai fait parvenir ainsi qu'à Mme la curatrice des pistes de réflexion qui pourraient vous aider dans vos travaux ce matin. Les personnes qui m'accompagnent sont disposées à reprendre en détail chacun des messages de mon rapport et à répondre à vos questions. Voilà.
Le Président (M. Chagnon): Merci, M. le Vérificateur général. J'inviterais maintenant M. Jacques Meunier, adjoint au Protecteur du citoyen, à nous faire ses commentaires.
Protecteur du citoyen
M. Meunier (Jacques): Je voudrais d'abord vous prier d'excuser l'absence du Protecteur du citoyen, Me Daniel Jacoby, qui est présentement en Mauritanie, au IIe Congrès des ombudsmans et médiateurs de la francophonie.
Mme Charest: M. le Président, il faudrait qu'on entende plus. La voix n'est pas suffisamment forte. Est-ce qu'on peut monter le micro de ce monsieur, s'il vous plaît? Je n'ai rien entendu.
Le Président (M. Chagnon): Alors, M. Meunier, continuez.
M. Meunier (Jacques): Oui. Bon. Dans le cadre de vos travaux...
T Mme Charest: Ça va.
M. Meunier (Jacques): ...en vertu de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics, vous avez convoqué le Protecteur du citoyen au sujet des commentaires et des recommandations de nature administrative qu'il a faits dans son rapport annuel 1996-1997 et dans son rapport spécial de novembre dernier concernant le Curateur public. On se rappellera que ce dernier rapport contenait 43 recommandations du Protecteur du citoyen. Ces deux rapports sont entre vos mains. Vous avez sans doute pu en prendre connaissance. Il nous fera évidemment plaisir de les commenter au besoin.
Cependant, au moment où, à la suite du rapport spécial du Protecteur du citoyen, et notamment du tout récent rapport spécial du Vérificateur général, vous voudrez recommander l'adoption de mesures additionnelles à celles qui ont déjà été rendues publiques en vue de remédier à la situation constatée, il nous apparaît essentiel de vous soumettre quelques autres propositions dont les rapports qui sont devant vous ne font pas état. Avant de passer la parole à ce sujet à M. Guy Pagé qui, à titre de directeur d'enquêtes, a eu la responsabilité des rapports du Protecteur du citoyen relatifs au Curateur public, qu'il me soit permis de souligner que le Protecteur du citoyen a grandement à coeur le sort des personnes les plus vulnérables de notre société et qu'il souhaite avoir l'occasion de participer aux réformes qui seront entreprises en vue d'assurer à ces personnes toute la protection qui leur est due.
Alors, j'invite M. Pagé, mon collègue, ici, à vous indiquer quelques propositions auxquelles nous avons songé et qui n'apparaissent pas nécessairement dans les rapports qui vous ont été soumis.
Le Président (M. Chagnon): M. Pagé, s'il vous plaît.
M. Pagé (Guy): Merci, M. le Président. J'ai voulu regrouper, autour de quelques points que je juge d'intérêt, certaines matières à réflexion qui sont regroupées autour de six points, ceci afin de lancer une réflexion sur des points qui ont été soit peu traités ou soit non traités et aussi sur des points qui, avec peu d'énergie, pourraient être facilement solutionnés.
D'autres points sont des points qui sont beaucoup plus difficiles d'accès. Je les toucherai parce qu'il m'apparaît important que la réflexion débute par ces points.
D'abord, commençons par le mandat en cas d'inaptitude. Le Curateur public, effectivement, pose beaucoup la question: A-t-on ou n'a-t-on pas suffisamment de ressources pour fonctionner? On a, depuis 1991, suffisamment de dossiers pour certainement occuper tout le monde. Mais on a surtout une disposition qui est nouvelle, qui s'appelle le mandat en prévision d'inaptitude. C'est très facile. Il s'agit de remplir quelques lignes dans un formulaire qui est tout préparé. Tous les citoyens pourraient en avoir. L'expertise pourrait être facilement donnée par le Curateur public lui-même ou par des notaires partout sur le territoire. Là où le bât blesse, c'est qu'il n'y a pas de publicité. Si on faisait le tour des gens qui sont présents dans cette salle et qu'on vous demandait: Avez-vous pensé que, demain matin, à la suite d'un accident cérébro-vasculaire de façon très brusque et très rapide, vous pouvez devenir inapte? Avez-vous pensé à vous munir d'un mandat en cas d'inaptitude? Il y a fort à parier que la forte majorité des gens n'en disposent pas. Voilà un point qui est facilement abordable, où le gouvernement aurait intérêt à collaborer avec le Curateur public pour assurer la promotion de cette disposition qui s'appelle le mandat en cas d'inaptitude. C'est très facile et ça permettrait d'abord aux citoyens d'être bien protégés et d'être protégés par un membre de leur famille ou de leur entourage en lequel ils ont confiance, et ensuite ça permettrait au Curateur public d'éviter d'avoir à intervenir directement dans un très grand nombre de dossiers.
Deuxième point, le fameux dossier de l'autofinancement. Il apparaît important pour le Protecteur du citoyen que soit remis en question ce principe déjà établi de l'autofinancement du Curateur public. Cette question-là me semble cruciale. Bien sûr, on peut parler beaucoup de journalistes l'ont fait d'ailleurs on dira qu'il y a transfert d'argent, de la part des personnes inaptes qui ont un actif financier important, vers les personnes qui n'en ont pas. C'est-à-dire que, comme on peut tarifer à l'acte les personnes pour lesquelles on pose un acte, je parle ici du Curateur public, le fait de pouvoir les tarifer, puisqu'elles ont des sommes, correspond à payer pour celles qui n'ont pas d'argent dans leur actif. Après examen, il apparaît que, environ 10 000 personnes sur les 12 000 représentées directement n'ont pour ainsi dire pas ou peu d'actif. Il en reste donc environ 2 000 qui, effectivement, on pourrait penser qu'ils paient pour les autres. Au Curateur, on est en face d'une gestion relativement complexe où il y a gestion par fonds. Donc, on pourrait dire que finalement ce n'est pas tellement ce fonds mais cet autre fonds qui bloque. Mais on peut dire que, globalement, il y a certainement là un transfert d'argent: c'est ce qu'on appelle l'interfinancement.
(9 h 50)
Il y a aussi toute la gestion des biens délaissés. La gestion des biens délaissés, c'est ça qui donne beaucoup d'argent pour le fonctionnement du Curateur public et ça finance beaucoup d'autres fonds. Mais, là où il y a un problème réel avec l'autofinancement, c'est lorsqu'on vient pour, par exemple, permettre qu'une personne soit représentée par avocat ou qu'on vient pour compenser à la suite d'une erreur commise par le Curateur public. Là, on se rend compte que l'autofinancement commence à poser des problèmes sérieux. Jusqu'où va-t-on lorsqu'on a la décision à prendre, qu'on doit choisir entre le bon gestionnaire qui doit gérer de façon efficiente et économe et... Donc, on sera attiré vers une tendance où on va minimiser les compensations et on va de moins en moins offrir de services de représentation par avocat, dans le cas où les droits des personnes devraient être représentés, et, à l'autre extrême, on sera aussi partagé entre le fait de sauvegarder les droits de ces personnes qui sont inaptes. À la base, il devra, à mon avis, y avoir une réflexion très sérieuse, et je pense même que l'effort devrait commencer par cette réflexion, soit l'avenir du principe d'autofinancement chez le Curateur public.
Toujours dans cette ligne de l'autofinancement et la représentation par avocat ou par toute autre personne, il a été porté à notre attention que beaucoup de personnes, à la suite de comparutions devant les tribunaux, sont amenées à devoir passer devant la Commission québécoise d'examen des troubles mentaux. On nous assure, du côté de la Commission québécoise, que le Curateur public est toujours informé lorsqu'une des personnes qu'il représente doit se présenter devant la Commission. Du côté du Curateur public, il ne semble pas que la situation soit aussi claire. Il est très difficile, à ce moment-ci, de préciser la question. Toutefois, il se pose encore là de quelle façon va-t-on assurer la représentation de ces personnes et qui paiera? La question est exactement la même lorsqu'une personne inapte se présente devant la Cour supérieure ou devant le Tribunal administratif du Québec.
Quatrième point, il m'apparaît important bien sûr, je passe rapidement, on sera disposé à répondre aux questions par la suite que la présente consultation qu'on a ici ce matin débouche sur ce que j'appellerais «une réflexion de nature horizontale». Je m'explique. Ce matin, nous sommes, le Vérificateur général, le Curateur public et le Protecteur du citoyen regroupés pour réfléchir autour du sort des personnes inaptes telles que prises en charge par le Curateur public. On a au Québec, en ce moment, une importante vague de désinstitutionnalisation. La moitié des lits, selon les dernières déclarations du ministre de la Santé, devront être fermés pour que les personnes, au moins la moitié, aillent donc dans la communauté. Lorsque ces personnes vont dans la communauté, elles se retrouvent souvent à devoir échanger durement avec ce que j'appellerai «le réseau judiciaire». Puisqu'on ne les prend plus en charge dans les hôpitaux, dans les systèmes de santé, souvent on les retrouve en prison ou dans les postes de police, à ne pas savoir trop, trop ce qui leur pend au bout du nez.
Il me semble important que la commission attire l'attention du ministre de la Sécurité publique qui devrait participer à une réflexion sur le sort des personnes inaptes que le réseau dont il est responsable prend en charge, parfois de façon non pas abusive mais tout au moins injustifiée. Il en est de même pour le ministre de la Santé et des Services sociaux est-il nécessaire de le préciser, je parlais de désinstitutionnalisation. Je pense qu'il serait extrêmement important que, en matière de désinstitutionnalisation, c'est-à-dire en matière de transfert de personnes soit vers la communauté, soit vers d'autres types d'établissements du réseau, que Mme la curatrice publique adresse, à chaque président et directeur général des régies régionales de la santé, une lettre indiquant instamment aux présidents et directeurs généraux leur obligation de consulter le Curateur public pour chacun des déplacements de ces personnes. Le Curateur public a une mission; elle est très claire. C'est à lui que revient la responsabilité d'autoriser ces déplacements. C'est toute la question de l'accès à des services de qualité qui est prévue à l'article 5 de la loi sur les services de santé.
De la même façon, nous avons déjà indiqué, dans notre rapport mais je veux y revenir, ça me semble important que le Curateur public n'hésite pas à porter plainte au système de traitement de plaintes du réseau de la santé et des services sociaux. On parle de 12 000 personnes qui sont inaptes, un très grand nombre, c'est plus que la majorité de ces personnes, qui vivent en établissement ou même presque la majorité reçoivent des services des établissements de santé.
Alors, il apparaît étonnant que d'aucune façon, jusqu'ici, le Curateur public n'ait déposé de plainte, donc n'ait informé les établissements de santé de leur devoir d'agir d'une meilleure façon envers les personnes qu'il représente. Et même je dirais qu'il serait important que le Curateur public tienne une gestion cumulative de ces plaintes pour informer périodiquement, au moins annuellement, le ministre de la Santé de la teneur de l'ensemble de ces plaintes, ce qui m'apparaît ici un indicateur de gestion très important, ce qui va permettre au Curateur d'informer, sur une base très neutre et très objective, du développement des services du réseau qu'il chapeaute.
Finalement, vous savez qu'on a accompagné Mme la curatrice dans la visite de l'hôpital Saint-Julien, tout le monde pose la question sur la désinstitutionnalisation: Jusqu'où doit-on aller? Est-ce correct, est-ce adéquat? Alors, il est important de bien signaler que le Protecteur du citoyen ne remet pas en cause le principe de la désinstitutionnalisation mais plutôt les modalités de cette désinstitutionnalisation.
Si nous prenons, par exemple, l'exemple de l'hôpital de Saint-Julien, on a d'abord dit: Nous allons fermer l'hôpital, la décision est prise. La régie régionale recommande donc au ministre de la Santé la fermeture de l'hôpital, et il semble qu'on fonctionne. Et ce n'est que dans un second temps qu'on se rend compte qu'avant de fermer l'hôpital, on doit d'abord se demander qui sont les personnes, quels sont leurs problèmes, quels sont leurs besoins et vers où va-t-on les diriger. Cette façon de faire doit être remise en question. Alors, cette fois-ci, on a eu la possibilité d'accompagner Mme la curatrice dans cette visite, mais, quelques jours plus tard, les mêmes choses se sont représentées pour d'autres centres d'accueil ailleurs sur le territoire. Alors, il est important que le système de santé comprenne le rôle du Curateur public et il est important que la curatelle publique affirme bien son rôle par rapport aux interventions du réseau.
Cinquièmement, le Curateur public nous semble devant un mandat que je qualifierais de diffus ou peut-être d'un peu éparpillé. On parle de la gestion directe des personnes, on parle de la gestion de leurs biens, la protection des personnes, la gestion de leurs biens. On parle de la gestion des biens délaissés. On parle de la gestion des ruelles publiques qui sont sans propriétaire, un peu partout dans les villes, partout sur le territoire. On parle de la mise à l'encan, par un dernier ajout législatif, de véhicules qui sont saisis à la suite de conduite en état d'ébriété, qui font presque des pleines pages de quotidiens pour les fins de semaine. Et on a un seul organisme gouvernemental qui doit gérer tout cela. Alors, ici, se pose une question très importante, et, encore là, la réflexion devrait commencer par là non pas seulement le principe de l'autofinancement, mais bien le mandat global du Curateur public. Jusqu'où le législateur choisit-il de maintenir les différents volets de ce mandat? Est-ce qu'on va se concentrer et je pense que ce serait le choix du Protecteur du citoyen sur les mandats qui sont de nature semblable ou bien si on va continuer à fonctionner sur des mandats qui sont de nature relativement disparate et qui accentuent grandement les difficultés de gestion du Curateur?
Finalement, je conclurais par un sixième point. Comme Me Meunier le soulignait dans son introduction, il est très important pour le Protecteur du citoyen qu'on assure des services de qualité aux personnes qui sont inaptes au Québec. Aussi croyons-nous important d'offrir notre collaboration à cette commission et au Curateur public pour participer à la révision des processus, notamment les processus qui touchent la protection des personnes inaptes, ceci pour éviter qu'a posteriori le Protecteur du citoyen doive revenir et redétricoter les efforts qui auront déjà été consentis par les différents intervenants qui, dorénavant, vont assister Mme la curatrice. Je vous remercie de votre attention.
(10 heures)
Le Président (M. Chagnon): Merci, M. Pagé. Mme la curatrice.
Exposé de la curatrice publique
Mme Juliette P. Bailly
Mme P. Bailly (Juliette): Mmes et MM. membres de l'Assemblée nationale, permettez-moi, dans un premier temps, de vous présenter les personnes qui m'accompagnent. À mon extrême gauche, Mme Michèle Duplessis, directrice de la Protection par intérim; Mme Sylvain, à ma droite, directrice des Affaires financières; Me André Rochon, directeur des Affaires juridiques. Aussi dans la salle, Mme Andrée Dupont, directrice des Communications; Mme Thérèse Guimond, directrice adjointe de la Protection; Mme Louise Gareau, directrice des Relations avec la clientèle par intérim; M. Quenneville, vérificateur interne; M. Martin Turcotte, responsable des placements collectifs; le Dr Legault, médecin au Curateur public.
Alors, Mmes et MM. membres de l'Assemblée nationale, M. Guy Breton, Vérificateur général, M. Guy Pagé, délégué général adjoint au Protecteur du citoyen, avant de commencer le rapport du Vérificateur général, il nous semble important de situer le Curateur public. Le Curateur public est une personne nommée par le gouvernement du Québec pour protéger les droits et les biens des personnes inaptes ainsi que les biens délaissés. Cette institution existe depuis 1945 alors qu'un Curateur public était nommé pour protéger les aliénés non interdits. En 1963, le rôle du Curateur public est restreint à celui du curateur aux biens, alors que les médecins sont responsables des personnes. Ce n'est qu'en 1971 qu'il redeviendra curateur à la personne et aux biens en plus de devenir responsable de la surveillance des curateurs privés.
L'entrée en vigueur, en avril 1990, de la Loi sur le curateur public a précisé cette mission et modulé les régimes de protection en fonction de l'inaptitude de la personne. Elle a aussi a judiciarisé le processus d'ouverture d'un régime et institué une réévaluation périodique obligatoire des personnes sous protection. En ce qui concerne la protection des personnes et la gestion des biens, l'administration du Curateur public est fondée sur cette loi, sur certaines dispositions du Code civil du Québec et sur quelques autres dispositions législatives.
L'aptitude d'une personne est évaluée en fonction de sa capacité de s'occuper d'elle-même et de gérer ses biens. Des facteurs tels que la maladie, le vieillissement et même l'hérédité peuvent influencer l'aptitude d'une personne. On peut identifier quatre grands types de personnes inaptes sous régime de protection: les personnes ayant une déficience intellectuelle; les personnes présentant des troubles mentaux; les personnes atteintes de maladies dégénératives, telle la maladie d'Alzeimer il s'agit souvent de personnes âgées; ainsi, 48 % des personnes sous régime public ont plus de 60 ans il y a aussi les personnes présentant divers syndromes organiques ou un traumatisme crânien.
Seul un tribunal peut autoriser l'ouverture d'un régime de protection et décider de sa nature. Le Curateur public est appelé en dernier recours. Il est nommé par défaut lorsque la personne est totalement isolée, que sa famille et ses proches ne peuvent ou ne veulent en prendre charge ou que le tribunal juge que les intérêts de la personne seront mieux défendus par une partie indépendante.
Actuellement, le Curateur public représente directement environ 12 000 personnes majeures. Il prête assistance et surveillance à l'administration de près 11 500 tuteurs et curateurs privés. Il a aussi un pouvoir d'enquête sur près de 6 000 mandataires qui agissent en vertu d'un mandat en cas d'inaptitude. Il est à remarquer que ce mandat de surveillance n'a jamais été assorti de mesures coercitives que le Curateur public aurait pu appliquer d'office aux curateurs et tuteurs délinquants. Pour l'aider dans sa tâche, le Curateur public a le pouvoir de désigner des membres de son personnel pour le remplacer en cas d'absence et de leur déléguer certains de ses pouvoirs. L'effectif du Curateur public est de 248 personnes, incluant les personnes qui s'occupent des biens non réclamés.
Le Vérificateur général a déposé à l'Assemblée nationale, la semaine dernière, un rapport très sévère sur la gestion du Curateur public. À mon arrivée au Curateur public en octobre 1996, je ne me doutais pas que la situation était aussi grave, mais, plus le temps passait et plus je posais des questions, plus je me rendais compte de certaines anomalies dans le fonctionnement et dans la gestion du Curateur public. Quand j'ai appris que le Vérificateur général essayait depuis plusieurs années d'obtenir l'autorisation de vérifier la gestion du Curateur public, j'ai décidé, en accord avec le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, de lui ouvrir la porte afin qu'il fasse un diagnostic sur l'ensemble de l'organisation.
Nous avons collaboré avec l'équipe du Vérificateur général qui a scruté la gestion du Curateur public pendant 10 mois, c'est-à-dire de juin 1997 à février 1998. Je suis très surprise de l'ampleur des problèmes, mais je reçois les recommandations du Vérificateur général et j'ai déjà commencé à prendre des actions à la mesure de ses constats. Je vois ce rapport comme une occasion privilégiée pour faire du Curateur public une organisation moderne qui sera en mesure de donner aux personnes représentées tous les services auxquels elles ont droit. Les actions déjà planifiées sont de trois ordres: réparer le passé, corriger le présent et rebâtir pour l'avenir. Ce dernier volet est pour moi le plus important. Pour ce qui est de réparer le passé, le principe en est acquis et les modalités en seront bientôt précisées. À cet effet, M. Thomas Boudreau, qui a été nommé la semaine dernière par le Conseil des ministres, me fera des recommandations.
Par ailleurs, la démarche de redressement qui a débuté le 27 avril a deux objectifs: corriger le présent et rebâtir pour l'avenir. Pour le présent, l'équipe d'experts qui m'assiste a pour mandat de corriger le retard accumulé en matière d'ouverture de régimes de protection, d'investigation, de réévaluation des régimes de protection des personnes inaptes représentées, de déclaration de revenus, de production d'inventaires et de sûretés et, finalement, de mettre un terme aux situations actuelles qui pourraient être préjudiciables aux personnes représentées.
Pour l'avenir, le mandat de ces gestionnaires touche les principaux secteurs du Curateur public: la structure de l'organisation; l'embauche, la formation et l'encadrement du personnel; la révision des façons de faire ainsi que l'implantation d'outils pour améliorer la gestion et le contrôle. Si la situation l'exige, M. Boudreau pourra aussi recommander au gouvernement des amendements à certaines lois afin de mieux protéger et mieux servir les personnes inaptes. Vous trouverez une description plus complète de ces mesures de redressement en annexe de ce document qui vous a été déposé.
Je tiens à vous souligner que j'ai réalisé des actions significatives qui visent l'amélioration de la gestion du Curateur public, par exemple la restauration de l'équilibre budgétaire. Pour l'exercice financier terminé le 31 décembre 1996, le Curateur public affichait un déficit de 3 500 000 $ sur un budget total de 16 000 000 $. Au 31 décembre 1997, ce déficit a été ramené à 100 000 $. Et j'ai aussi nommé un vérificateur interne. De plus, dans une perspective de collaboration, j'ai eu des échanges avec le Protecteur du citoyen et le président de la Commission d'accès à l'information.
Dans un autre ordre d'idées, je sais que le rapport spécial du Vérificateur général a suscité de l'inquiétude chez les personnes représentées et dans leur entourage. J'ai pris différentes mesures pour leur donner l'occasion de s'exprimer pour que nous puissions parler avec eux de leurs préoccupations. Premièrement, j'ai mis en place un service téléphonique spécial qui fonctionne de 8 heures à 18 heures, et ce, même pendant les fins de semaine. Deuxièmement, j'ai fait parvenir un message écrit à tous les curateurs et tuteurs privés, aux intervenants dans les établissements et aux associations de défense des droits, soit 15 000 envois en tout, pour les informer des secteurs couverts par le plan de redressement. Ces mesures s'inscrivent dans la préoccupation que j'ai toujours eue de donner la priorité aux personnes les plus démunies de la société et de garantir l'exercice de leurs droits au même titre que tous les autres citoyennes et citoyens du Québec.
Dès les premiers mois de mon mandat, j'ai constaté que le Curateur public ne connaissait pas ses clientèles les plus vulnérables, soit les personnes qu'il représente et qui vivent seules à domicile. Nous avons procédé au recensement de ces personnes en urgence, nous avons trouvé des personnes qui étaient en danger et nous sommes intervenus rapidement pour corriger la situation.
Toujours dans la perspective de mieux connaître les personnes que je représente, je suis partie en tournée de consultation en mai et juin 1997 et j'ai rencontré des centaines de personnes dans leur milieu de vie. Dans les assemblées publiques que j'ai tenues, j'ai aussi échangé avec leur famille et leurs proches. Dans le même esprit, j'ai tenu à m'impliquer dans les débats publics sur les questions qui touchent la situation des personnes inaptes, comme la réforme de la santé et des services sociaux, la déshospitalisation, les mesures de contention et l'isolement des personnes atteintes de troubles mentaux. Vous remarquerez que ce sont des sujets qui ont été soulignés par le Vérificateur général et par le Protecteur du citoyen.
(10 h 10)
Aussi, je tiens à vous rassurer que les personnes représentées ne sont d'aucune façon soumises à des expériences médicales. Les demandes qui nous sont formulées sont pour des projets de recherche pharmacologique au niveau de la troisième phase, c'est-à-dire sans aucun risque pour les personnes et avec l'objectif d'améliorer leur situation. D'ailleurs, ces recherches, les personnes inaptes y ont aussi droit comme tout autre citoyen. Je vous rappelle que l'acceptation de participer à ces projets de recherche est conditionnelle à la présentation d'un protocole de consentement dûment autorisé par le ministre de la Santé et des Services sociaux. Depuis mon arrivée, j'ai resserré les mesures de consentement, dont je m'occupe personnellement. Par exemple, un médecin, une infirmière ainsi que d'autres professionnels sont en recrutement. Un comité multidisciplinaire est en place et un comité d'éthique est à venir.
Maintenant, les démarches de redressement dont je vous ai parlé aujourd'hui donnent la priorité aux personnes représentées tant au niveau du respect de leurs droits que de l'administration de leurs biens. Avec toutes ces actions, j'ai confiance que je parviendrai à redresser la situation pour le plus grand bénéfice des personnes inaptes dont je suis responsable, d'autant plus que je suis assurée de l'appui du gouvernement et de la collaboration de mon personnel dont l'engagement envers la mission du Curateur public ne peut être mis en doute.
Puisqu'il est question du personnel du Curateur public, je tiens à faire remarquer que, si le Vérificateur général ne lie pas les problèmes du Curateur public uniquement à son manque de ressources, le Protecteur du citoyen, qui a publié en novembre 1997 un rapport, est plus affirmatif à ce sujet, et je cite: «Bien que des ajustements soient nécessaires à la façon d'accomplir sa mission de protection des droits de la personne, le Protecteur du citoyen se doit d'alarmer le gouvernement, puisque le Curateur public ne peut et ne pourra jamais réaliser son mandat avec le personnel dont il dispose, soit 247 personnes.»
Finalement, je vous rappelle que nous sommes à faire le redressement avec une équipe de gestionnaires, depuis le 27 avril, au nombre de 16 personnes. Ces mesures sont de trois ordres: réparer le passer, corriger le présent et rebâtir pour l'avenir. Et je souhaite pouvoir vous présenter dans un prochain avenir les résultats de ce redressement. Mesdames et messieurs, je vous remercie de votre attention et je suis disponible, avec mes collaborateurs, à répondre à vos questions.
Discussion générale
Rapports du Vérificateur général et du Protecteur du citoyen
Le Président (M. Chagnon): Merci, Mme la curatrice. Je saluais au début de cette commission le départ de quelques-uns de nos collègues. Je salue aussi l'arrivée de quelques-unes de nos collègues, Mme Charest et Mme Léger. C'est un peu malheureux pour elles, ou encore heureux c'est singulier, en tout cas, comme expérience d'arriver au moment où on étudie un rapport spécial du Vérificateur général, rapport spécial qui démontre sans l'ombre d'un doute qu'il y a eu, depuis plusieurs années plusieurs années la plus sordide histoire de mauvaise gestion, d'incurie, je dirais, carrément, auprès de personnes qui sont les plus inaptes, les plus faibles de notre société, et les mots qui pourraient exprimer le mécontentement, je dirais, des parlementaires qui ont appris cet état de fait est sans nul doute insatisfaisant pour les gens qui ont été brimés. Parce qu'il y a des personnes qui ont été touchées là-dedans. Vous parlez d'une douzaine de milliers de personnes qui sont représentées par le Curateur, puis il y a celles qui sont des mineurs, qui sont représentées par un tuteur ou un curateur privé.
Le fouillis administratif, l'incroyable perte de contrôle de la curatelle publique à l'égard de ses mandats physiquement ou encore financièrement est une incroyable histoire pour ceux qui ont eu le temps de lire soit le rapport du Vérificateur général ou de compléter leurs lectures avec le rapport du Protecteur du citoyen. Il faut savoir gré à Mme Bailly d'avoir ouvert ses livres au Vérificateur général, sinon on se retrouverait peut-être dans la même situation où on était il y a 10, 15 ans ou le fouillis administratif qu'on rapporte là-dedans, qu'on rapporte dans le rapport du Vérificateur général et qui nous amène à se poser des questions même sur l'approche que nous avons actuellement, c'est-à-dire d'avoir quelques heures d'audition avec le Vérificateur général, le Protecteur du citoyen et le Curateur. J'ai des doutes, personnellement, sur l'efficacité de notre propre audition de ce matin. Nous aurons, plus tard, évidemment, à tirer des conclusions sur notre propre audition et même peut-être à tirer des conclusions sur ce qui devrait être fait ou sur ce qui pourrait être la poursuite de ce que nous aurons ainsi avancé ici ce matin.
Je pense que, lorsque le Vérificateur général dit que la plupart des faiblesses décelées au sujet des différents volets de la mission du Curateur ont pour origine une administration générale défaillante puis qu'on a du mal à mettre en oeuvre les priorités retenues, ce qui engendre une mauvaise utilisation des ressources et un traitement inégal des dossiers, c'est le moins qu'on puisse dire. «Les pratiques administratives et l'affectation inadéquate de ces ressources représentent des écueils de taille à la mise en place de saines pratiques de gestion. Le Curateur invoque souvent un manque de ressources pour expliquer ses difficultés à remplir adéquatement sa mission vous l'avez encore fait mais, à notre avis selon le Vérificateur général le problème ne se résume pas à cette seule dimension. C'en est une mais ce n'est pas la seule.»
Et, de fait, qu'on n'ait, par exemple, en 1995, rendu que 350 visites aux personnes qui étaient des inaptes sur les 12 374 démontre jusqu'à quel point l'organisme ne répondait pas aux besoins les plus criants des clientèles desquelles il devait assurer la protection. Des exemples, des exemples, des exemples, on en a sur 60 et quelques pages de ce document, quand on dit, par exemple: «De 1992 à 1995, le Curateur a examiné les services dispensés par 11 établissements hospitaliers hébergeant environ 6 600 personnes représentées, soit près de 50 % de la clientèle totale. Les conclusions de cet examen sont consternantes. En effet, elles mettent en relief l'extrême vulnérabilité de ces gens fragiles et sans moyens de défense. On a fermé les yeux sur la promiscuité évidente et la surmédicamentation. Ces personnes sont, en quelque sorte, reléguées aux oubliettes, puisque le Curateur les juge moins vulnérables. Il ressort clairement que les contacts avec les personnes représentées en établissement sont rarissimes.»
Sur le plan des revenus ou des biens de ces gens, on fait état qu'aucun rapport d'investigation pouvait faire en sorte que... Les biens de ces gens pouvaient être mis à l'encan sans qu'on sache exactement ce qu'il en était. J'espère que vous pourrez nous en dire un mot de cette question-là.
Que les revenus soient perçus... Puis, lorsque le Protecteur du citoyen nous parle de l'avenir de l'autofinancement de la curatelle publique, effectivement, c'est une question de taille à laquelle il faudra bien qu'on réponde un jour parce qu'il m'apparaît abusif de réclamer des pourcentages pour l'administration de biens, tant à l'encaissement qu'au décaissement: 3 % si ma mémoire est bonne; 3 % à l'encaissement, 3 % au décaissement pour des biens... Il m'apparaît, en tout cas, très cher payé pour donner un service qui n'est pas toujours aussi évident que celui qu'on voudrait bien qu'il soit.
Bref, c'est le musée des horreurs, et j'ai hâte d'entendre de la part de mes collègues... de reprendre des questions qui pourront être peut-être plus éclairantes, mais il n'en demeure pas moins que je suis surpris que vous ayez été surpris, après un an et demi à la curatelle, de ce que vous avez vu dans ce rapport-là.
Mme P. Bailly (Juliette): Je peux peut-être compléter. M. Chagnon, M. Breton et son équipe sont rentrés sept mois après moi et ils ont été là pendant 10 mois à une moyenne de 10 personnes. Je n'aurais jamais pu, moi seule, arriver dans une organisation, voir le portrait au complet. Déjà, j'avais rencontré M. Jacoby qui me disait: C'est épouvantable! C'est épouvantable! Bien, écoutez, on ne m'a pas, moi, mandatée de venir au Curateur public pour faire le grand ménage. Ça n'allait pas dans cette organisation-là, bon, ce n'était pas mon mandat quand je suis arrivée. J'ai fait le démantèlement de Louis-H. Lafontaine en 1991, et c'était mon mandat. Et, d'autre part, je me dis: S'il y a une organisation, avec les rapports que nous avons, de cet ordre-là, bien, ça n'a pas de bon sens non plus. Puis, tant mieux si le Vérificateur général est venu, on va pouvoir mettre à jour tous ces dossiers et faire la correction qui s'impose, parce que, là, même si on touche seulement un secteur, l'autre secteur, il n'est pas mieux, et ça va en cascade tout le temps comme ça.
Alors, je me dis: On n'aurait jamais pu savoir tout ce qui se passait. La mission est grande, mais on ne répond pas à cette mission-là. Que ce soient les personnes qui sont en établissement, c'est sûr qu'on ne peut pas aller toutes les visiter, mais il faudrait se donner un programme-cadre, qu'il y ait des visites qui soient faites simultanées, sans avertir, comme je l'ai fait dans la tournée de consultation. Quand j'allais dans les centres en tournée, il était 8 h 30 du matin, je ne m'annonçais pas, j'étais comme de la visite, on les a visitées, les personnes. Alors, il faut se donner des programmes-cadres. Et, même aussi au consentement, avant que j'arrive, quand j'ai commencé à regarder, l'hébergement, personne n'autorisait le transfert d'hébergement. Alors, vous voyez, on...
Fiabilité et formation des cadres et autres ressources humaines
Le Président (M. Cha7gnon): Je vais vous poser la question directe, on ne peut plus directe: Si vous êtes en situation de cascade de mauvaise gestion et d'incurie de tous bords, de tous côtés, comment pouvez-vous vous fier aux cadres et aux gens qui vous entourent dans cet appareil-là?
(10 h 20)
Des voix: Bravo!
Une voix: Il faut vider la curatelle, la vider.
Mme P. Bailly (Juliette): Bien, il y a des gens qui ont quitté au moment où on se parle. Je vous ai dit que...
Une voix: Encore plus, davantage.
Mme P. Bailly (Juliette): ...c'est dans les plans de...
Le Président (M. Chagnon): S'il vous plaît, à l'ordre dans la salle. On va laisser Mme la curatrice répondre à la question. C'est peut-être une question que vous vous posiez, on va donc écouter la réponse.
Mme P. Bailly (Juliette): Alors, il y a des gens qui ont quitté. D'autre part, aussi, dans le plan de redressement, vous avez remarqué qu'on refait tout, c'est-à-dire tout le plan de réorganisation, qui n'a pas été touché depuis 1983. C'est assez étonnant d'une organisation. Alors, toutes les descriptions de tâches, tous les postes vont être révisés, la fonction des directeurs, la même chose, et ces gens-là auront la formation et auront aussi le profil de l'emploi. Ce qui est très important, les bonnes personnes à la bonne place, et, avec les gestionnaires qui sont là actuellement, tous ces gens-là devraient être en place avant que les autres personnes quittent pour que l'action soit vraiment entreprise. Et, évidemment, du contrôle et de la rigueur. Je pense que, ça, je n'en ai pas vu depuis...
Le Président (M. Chagnon): J'ai quelques collègues qui ont demandé la parole: Mme Charest, M. Garon et Mme Lamquin-Éthier.
Mme Charest: Merci, M. le Président. Je ne répéterai pas ce que vous avez émis comme commentaires, M. Chagnon, parce que je les endosse également. Je pense que, lorsque nous avons pris connaissance du rapport du Vérificateur général, ça a été une stupéfaction, on a été stupéfaits et, je dirais, comme devant quelque chose qui était inimaginable. Et je pense que les gens qui sont à la curatelle publique depuis de nombreuses années, aujourd'hui, malheureusement, doivent quand même assumer des responsabilités par rapport à la clientèle.
Des voix: ...
Mme Charest: Non. Ça, c'est inadmissible, les applaudissements...
Le Président (M. Chagnon): S'il vous plaît, les manifestations... Je m'excuse, Mme Charest. Les manifestations de tout ordre ne sont pas permises ici, à l'Assemblée. Je vous demanderais, tout le monde, de garder votre calme et votre humeur pour, au moins, la fin de nos travaux.
Mme Charest: Alors, merci, M. le Président, de rappeler à l'ordre le public, parce que, je pense qu'il faut le dire, à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire comme en Chambre, le public n'est pas admis à applaudir.
Alors, ceci étant dit, je pense qu'il faut être très vigilant pour le futur. Ce n'est pas tout de distribuer des responsabilités par rapport au passé. Je ne veux pas mettre l'éponge sur ce qui a été fait, ce n'est pas ça que je dis, mais je pense qu'il faut maintenant prendre les moyens pour que des situations d'horreur comme celles-là ne se reproduisent plus jamais.
Et, moi, je voudrais savoir, dans un premier temps: Le personnel de la curatelle publique a quoi comme profil de formation pour occuper les postes qu'il occupe?
Mme P. Bailly (Juliette): C'est tout ça aussi qu'on remet en question. C'est comme le guichet unique, là. C'est bien beau, le guichet unique, mais je pense que ce n'est pas... C'est comme le maintien à domicile, ce n'est pas à n'importe quel prix. Alors, il faut moduler les responsables clients. Ce sont des techniciens en administration. il y a des professionnels, quelques travailleurs sociaux qui sont supports à ces personnes-là, mais c'est sur mandat seulement. Alors, ça aussi, tout le volet responsables clients est complètement à revoir, le moduler avec des travailleurs sociaux, des infirmières, des éducateurs. On n'a que six travailleurs sociaux au Curateur public pour tout le Québec. Alors, vous voyez qu'on n'est pas en affaires avec ça. Alors, là, on est en recrutement actuellement, et c'est le niveau, là, des... Surtout, c'est des techniciens comptables pour, évidemment, les biens. Mais, au point de vue professionnel, c'est vraiment minimal et difficilement accepté dans ce cadre-là.
Mme Charest: Vos employés cadres, ils ont quoi comme formation?
Mme P. Bailly (Juliette): Bien, vous avez des comptables agréés, vous avez d'autres gestionnaires. On a beaucoup de professionnels en situation de cadres. On a des gens avec des maîtrises. Des nouvelles personnes qui occupent les postes actuellement...
Mme Charest: Oui, mais je m'excuse, Mme la curatrice...
Mme P. Bailly (Juliette): Oui.
Mme Charest: ...je veux savoir votre cadre... Vous en avez un qui est comptable. Est-ce que vous avez un professionnel qui a une formation en sciences humaines, qui peut exercer toute une vision par rapport à l'encadrement de la relation d'aide qui doit être donnée à la clientèle?
Mme P. Bailly (Juliette): C'est tout le volet, comme je vous dis madame... C'est ça qui nous manque. Les travailleurs sociaux, les éducateurs, il n'y en a que six. Mais tout le côté de la direction de la protection qu'il faut venir soutenir avec d'autres professionnels les six ne suffisent pas c'est vraiment cette partie-là aussi qui est très faible et à laquelle il faut ajouter des professionnels pour aussi intervenir dans le réseau et parler aux intervenants du réseau. Alors, il n'y a pas mieux qu'un travailleur social pour parler à un autre travailleur social, un éducateur aussi. Alors, c'est vraiment ce volet-là qui est très, très faible que nous n'avons pas, madame.
Le Président (M. Chagnon): Merci.
Mme Charest: Je reviendrai avec d'autres questions plus tard.
Le Président (M. Chagnon): M. Garon, Mme Lamquin-Éthier, Mme Houda-Pepin, M. Côté et Mme Léger.
Notion d'imputabilité
M. Garon: On parle beaucoup d'imputabilité, à tel point que c'en est devenu presque un gargarisme, mais je ne l'ai jamais vue appliquée, moi, l'imputabilité nulle part. Je n'ai jamais vu ça. On en parle beaucoup, mais je ne sais pas ce que ça veut dire au fond, à tel point que... Alors, j'aimerais savoir, vous, dans ce qu'on vient de révéler dans le rapport du Vérificateur général et puis du Protecteur du citoyen, si on vous parlait en termes d'imputabilité, faire le ménage dans la boîte, ça veut dire quoi?
Mme P. Bailly (Juliette): Je pense, de remettre les pendules à l'heure. Je pense qu'une organisation comme le Curateur public du Québec ne peut pas se permettre d'avoir une organisation aussi défaite que ça. Écoutez, on est en l'an 2000. Moi, je viens du réseau de la santé et j'avais 1 000 personnes, 600 personnes âgées sous ma responsabilité dans un centre hospitalier et je n'ai jamais vu une organisation à ce niveau-là, défaite comme ça. Je ne pensais jamais voir ça. Alors, l'imputabilité, c'est de mettre ça vraiment à jour, répondre à notre mission pour les personnes, et je me sens très responsable de le faire.
Le Président (M. Chagnon): M. Garon.
M. Garon: Ce n'est pas ça. Là, vous ne dites pas c'est quoi, l'imputabilité. L'imputabilité, ça veut dire que des personnes doivent être imputables. Je comprends que vous êtes arrivée... On dit que vous avez permis au Vérificateur général d'ouvrir la porte, ce qui avait été interdit dans le passé. Maintenant, en termes d'imputabilité, sûrement que, quand vous avez lu ces rapports-là, vous vous êtes dit qu'il y a des gens qui sont en charge des services vous les connaissez qui sont responsables. Ça ne marchait pas, c'est parce qu'il doit y avoir des gens responsables. L'imputabilité, pour vous, ça veut dire quoi? En prenant votre courage à deux mains, là.
Mme P. Bailly (Juliette): Bien, évidemment, il y a des gens qui ont changé de place, qui ne sont plus là. Parce que, pour moi, la protection des personnes, ce n'est pas attendre qu'il se passe quelque chose, c'est de faire de l'intervention, et les directeurs de la Protection, et tout, étaient plutôt... On va voir ce qui va arriver, etc. Et, moi, j'interviens partout, alors, au lieu d'attendre, on a fait des interventions. Et sa façon de voir les choses ne correspondait pas du tout aux interventions qu'on voulait faire, alors, dans ce cadre-là, on ne pouvait pas fonctionner. Alors, imaginez, pendant un an et demi, le temps de voir ces gens-là, leur façon d'agir, leur façon de penser, de remettre ça ou de dire à ces personnes-là: Non, ce n'est pas ça, le Curateur public. On doit intervenir, on a des personnes inaptes. Ce n'est pas vrai qu'on va attendre qu'il se passe quelque chose puis qu'on va tomber. Alors, de fait, ces gens-là ont été changés parce que, d'après moi, ils n'étaient pas responsables de cette mission-là, la façon dont on devait la voir.
Mesures prises découlant du principe d'imputabilité
M. Garon: Mais vous, vous analysez le rapport, vous êtes en charge de l'institution, vous la connaissez, vous connaissez ses responsabilités, l'imputabilité, ça peut vouloir dire, à mon avis, deux choses: Est-ce que les gens sont compétents, un? Et puis, s'ils sont compétents, est-ce qu'ils ont manqué à leur mandat ou à leur devoir? Et, dans les circonstances, qu'est-ce que vous pensez qui doit être fait?
Mme P. Bailly (Juliette): Bien, dans les circonstances, c'est de tout réviser la position. C'est ce qu'on fait dans notre plan de redressement.
M. Garon: Oui, mais concrètement, ça veut dire quoi? Là, je comprends, mais je ne comprends pas, concrètement, ce que vous voulez dire quand vous dites ça.
Mme P. Bailly (Juliette): Qu'est-ce que vous voulez m'entendre dire?
M. Garon: Parce que l'imputabilité, à un moment donné, il va falloir dire: Ça «veut-u» dire quelque chose? Moi, je vais vous dire que j'arrive à la conclusion ça fait longtemps que je suis dans le Parlement que ça ne veut rien dire. C'est un gargarisme, mais ça ne veut rien dire. Alors, si c'était dans une entreprise privée puis en charge d'une boîte comme ça, là, puis que quelqu'un se rendait compte que ça se passe comme ça, puis après un rapport comme ça, qu'est-ce que vous feriez, normalement, dans l'entreprise privée?
(10 h 30)
Mme P. Bailly (Juliette): D'abord, ça ne serait sûrement pas arrivé là, à ce point-là. C'est comme la gestion des établissements, on doit refaire le tout. Alors, c'est pour ça que c'est vraiment du mur-à-mur qu'on fait, on redresse complètement. C'est pour ça que je vous ai donné en détail... Les mesures qui sont prises sont vraiment à la grandeur du rapport du Vérificateur général et du Protecteur du citoyen. Il n'y a aucun secteur qui va être laissé pour dire que ça va bien. On les reprend à la base zéro.
M. Garon: Oui, je comprends tout ça. Mais il y a des rapports qui sont là. Ou bien vous êtes capable de le faire, ou bien vous arrivez puis vous dites que vous n'êtes pas capable de le faire.
Mme P. Bailly (Juliette): Bien, est-ce que j'ai demandé de l'aide?
M. Garon: Les rapports sont écrits, là. Vous savez ce que ça veut dire au point de vue des gens qui accomplissent ces fonctions-là, puis ce qu'on a trouvé dans tel secteur administré par telle et telle personne. En termes de, je reviens, imputabilité, ça veut dire quoi? Ça veut dire que tout le monde est beau, est gentil, puis on continue comme avant, puis on fait un petit peu de brassage, puis on continue comme avant ou bien...
Mme P. Bailly (Juliette): Bien là, on ne fait pas juste du brassage. On fait du mur-à-mur. On a une équipe de 16 gestionnaires. Moi, j'ai dit au ministre: Je ne peux pas, avec une ampleur d'un rapport semblable, arriver à faire ça seule. Alors, il nous faut une équipe de gestionnaires dans tous les secteurs. Et même, toutes les mesures ponctuelles vont être faites en simultané de la refonte de la gestion. Alors, on a demandé de l'aide, on a de l'aide, le gouvernement nous en a donné. C'est la seule façon qu'on va passer au travers.
M. Garon: Il y a des responsabilités là-dedans. Là, une équipe, je comprends ça, c'est comme un chameau qui est un cheval dessiné par un comité. Ce n'est pas ça que je veux savoir. Les équipes, c'est la meilleure façon de dire qu'il n'y a personne de responsable. Qui est responsable? Il y a des gens là-dedans qui avaient des responsabilités. Ils l'ont fait ou ils ne l'ont pas fait? Par incompétence ou par négligence? Qu'est-ce qui s'est passé? Pour faire le remède à ça, qu'est-ce que vous allez faire en termes d'imputabilité? Parce que là ce que je comprends, c'est que le mot ne veut rien dire. Est-ce qu'il y en a, de l'imputabilité? Moi, je pense que vous avez le meilleur cas, actuellement, pour dire au gouvernement, dans l'administration publique, s'il y a de l'imputabilité ou non. L'imputabilité, à mon avis, ça va vouloir dire de faire le ménage.
Le Président (M. Chagnon): Notre collègue, c'est un grand garçon, il pourra me dire si j'erre, mais, si j'interprète bien ce que notre collègue suggère, il voudrait savoir s'il y a effectivement des sanctions pour des gens qui ont été, en fait, irresponsables par rapport aux responsabilités dont ils avaient le mandat. C'est ça, la question de mon collègue.
Mme P. Bailly (Juliette): Je pense qu'il y a des gens qui ont quitté, que j'ai réitéré tantôt. J'aurai des recommandations de M. Boudreau. On verra ensemble quelle partie on peut faire sur la responsabilité. Mais, dans le cadre de l'organisation et de la mission du Curateur public, c'est vraiment... on revoit tout, c'est du mur-à-mur, on ne veut rien laisser. Et je me sens très responsable de mener ça...
M. Garon: Avez-vous fait... Je vais vous donner un exemple. Je pose la question simplement, naïvement. Vous avez des comptables. Est-ce que, par exemple... Vous avez des gens qui sont avocats. Vous avez des gens qui sont membres des ordres professionnels. Avez-vous fait des plaintes aux ordres professionnels concernant la pratique de certaines personnes qui étaient chez vous?
Mme P. Bailly (Juliette): On n'ignorera pas ça. S'il y a lieu d'en faire, on en fera.
M. Garon: Mais vous n'en avez pas fait à date?
Mme P. Bailly (Juliette): Maintenant, non.
M. Garon: Vous êtes-vous posé la question?
Mme P. Bailly (Juliette): Oui.
M. Garon: Puis?
Mme P. Bailly (Juliette): Bien, je vais voir. Je vais consulter, puis il n'est pas dit qu'on n'en fera pas.
M. Garon: Oui, mais ce n'est pas rassurant.
Mme P. Bailly (Juliette): Oui, mais je ne veux pas faire n'importe quoi non plus.
M. Garon: Je comprends, mais là, nous, on s'interroge.
Mme P. Bailly (Juliette): Je veux être sûre des personnes qu'on peut identifier.
M. Garon: Au point de vue... Le gouvernement, voyez-vous comment ça marche, il a adopté une loi. Il a confié... Ce n'était pas le gouvernement. L'Assemblée nationale a adopté une loi. Il y a des gens qui l'administrent.
Le Vérificateur général, il est nommé par l'Assemblée nationale pour voir si les lois sont bien administrées. Il arrive avec un rapport comme celui-là. Bon, bien, là vous ne pouvez pas dire: Je vais faire mon possible. Là il y a quand même une obligation de résultat. Ça va plus loin.
Moi, je vous pose des questions, je vais vous dire pourquoi. Je veux savoir si vous êtes capable ou si vous n'êtes pas capable de faire la job. Ce n'est pas bien, bien compliqué. Vous avez été correcte en disant au Vérificateur général d'y aller, mais est-ce que... Les enquêtes administratives, moi, je ne crois plus à ça. J'en ai vu, au gouvernement. Habituellement, c'est une façon de pousser la poussière en dessous du tapis. Alors, ça doit aller jusqu'où pour que le ménage soit fait? Là vous ne nous indiquez rien en termes d'imputabilité. C'est pour ça que je pose la question, M. le Président, pour dire... Autrement, nous autres, il va falloir tirer des conclusions à la fin de ce travail-là. À la fin de l'exercice, on va se réunir et on va dire ce qu'on recommande. Alors, moi, j'essaie de savoir actuellement si vous êtes capable de faire la job ou si vous n'êtes pas capable. Autrement, il va falloir recommander quelque chose au point de vue de faire la job.
Parce que les rapports inutiles, au gouvernement, il y en a eu assez, là. À un moment donné, il faut dire: «The buck stops somewhere.» Alors, là, vous avez un bon exemple. On ne peut pas avoir plus, on a le Protecteur du citoyen puis le Vérificateur général qui sont les deux plus grandes institutions. Puis j'imagine que, si la Commission des droits de la personne s'était mis le nez là-dedans, ils diraient: Est-ce qu'on a protégé les gens que la curatelle doit protéger ou si on a plutôt protégé ceux qui devaient protéger les gens qui étaient mal pris? Alors, il faut se poser les questions telles qu'elles sont. Là on a deux organismes de l'Assemblée nationale. Il y en a quatre, en réalité, la Commission d'accès à l'information et puis la Commission des droits de la personne. Alors, dans un rapport comme celui-là, ils font rapport à l'Assemblée nationale qui a voté les lois. Vous avez voté les lois puis elles sont administrées comme la chienne à Jacques. Alors, face à ça, qu'est-ce qu'on devrait, nous, comme commission, faire? M. Boudreau, je le connais, c'est un confrère de classe. C'est un gars compétent. Mais ce n'est pas suffisant. Le public, lui, il doit être rassuré demain matin.
Mme P. Bailly (Juliette): Mais je pense qu'on a pris les mesures. C'est bien difficile pour moi de voir qui était responsable avant ou après. Moi, je vous dis, maintenant, j'ai la responsabilité des personnes inaptes au Québec. J'ai toujours pris mes responsabilités. Ce n'est sûrement pas à mon âge que je vais changer. Et les mesures sont prises. Si ces mesures-là ne sont pas correctes puis on n'en a pas assez, je vais le dire publiquement pour qu'on ne passe pas à côté de cette mission aussi importante. Et, quand j'ai dit oui pour devenir curatrice, c'est parce que je croyais aux personnes inaptes au Québec, ayant travaillé avec elles pendant des années. Alors, c'était l'objectif que je poursuivais.
Le trouver comme ça, bien, là je vous assure que ça, c'est une autre paire de manches. Mais, étant donné que je suis là puis que les résultats sont là, le Protecteur du citoyen, M. le Vérificateur général, on est en mesure... Et je pense qu'il a regardé, il avait recommandé au gouvernement de mettre ça à jour et de remettre les pendules à l'heure pour faire en sorte que cette organisation-là, qui a une mission des plus importantes au Québec, fasse en sorte qu'on réponde à ces personnes-là.
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie. Mme Lamquin-Éthier, Mme Houda-Pepin, M. Côté, Mme Léger.
Cadre de l'intervention
Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais d'abord accueillir M. le Vérificateur général de même que les personnes qui l'accompagnent. J'aimerais accueillir également M. Meunier, de même que M. Pagé et Mme la curatrice, de même que les personnes qui vous accompagnent.
Dans un deuxième temps, j'aimerais vous faire part de mes étonnements, trois étonnements. Le premier, il me semble mais je peux me tromper que le député de Gouin qui est responsable des relations avec les citoyens, mais qui est surtout responsable du Curateur public, est absent. Moi, j'ai de la misère avec ça. Je ne comprends absolument pas que le ministre qui est responsable du Curateur public, après le dépôt d'un rapport-charge, ne soit pas ici. Est-ce que je dois comprendre que la déclaration ministérielle est, en fait, étant prononcée...
Mme Charest: M. le Président, à l'ordre, s'il vous plaît!
Le Président (M. Chagnon): Oui.
Mme Charest: Rappelez que, dans ce type de commission, les ministres ne sont pas là, généralement, et ce n'est pas leur rôle et leur mandat que d'être présents à la commission. Je pense qu'il faut préciser ça parce qu'il faut...
Le Président (M. Chagnon): En ce qui concerne les mandats de 198...
Mme Charest: Un instant, là! Il ne faut pas charrier.
Le Président (M. Chagnon): ...c'est vrai que les ministres ne sont pas obligés d'être ici, effectivement. Généralement, ils n'y sont pas, d'ailleurs.
M. Gautrin: Mais ils peuvent l'être.
Le Président (M. Chagnon): Mais ils peuvent l'être.
M. Gautrin: Ils peuvent l'être dans le cas de la loi 198, article...
Le Président (M. Chagnon): Bon, continuez, madame.
Mme Lamquin-Éthier: Écoutez, on parle de personnes, ici, qui sont extrêmement vulnérables, des personnes qui ont un besoin d'avoir des attentions particulières, des personnes qui ne sont pas en mesure de se représenter, des personnes qui sont confiées à l'État. Et on parle... C'est un rapport, il faut le lire. On parle du monde, du vrai monde dans la vraie vie et de choses qui sont inacceptables, qui sont, comme société... En tout cas, moi, je veux maintenir mon étonnement. Je suis sidérée pour ces personnes-là, le respect qu'on doit à leurs droits, à leur dignité, que le ministre ne soit pas ici. En tout cas, je tiens à le soulever.
(10 h 40)
Deux, je suis également étonnée, le Protecteur du citoyen a déposé, en novembre 1997, un rapport extrêmement important, un rapport qui couvre plusieurs chapitres, qui s'intéresse aux personnes, qui s'intéresse... mais plus particulièrement aux personnes, ce qu'elles ont vécu, un rapport qui passe en revue l'ensemble des systèmes. Et M. le Vérificateur général a dit, dans son rapport, qu'il rejoignait à beaucoup d'égards les constatations qui avaient été faites et dénoncées par le Protecteur du citoyen, en novembre 1997.
Est-ce que soit le ministre des Relations avec les citoyens ou le ministre de la Santé et des Services sociaux avait reçu ce rapport-là? Et comment se fait-il que le gouvernement n'ait pas, dès le mois de décembre 1997, pris des mesures d'urgence, des mesures spéciales pour s'assurer du respect des droits et de la protection des personnes vulnérables? Comment se fait-il qu'on se retrouve en mai 1998 alors que déjà le gouvernement avait un dossier extrêmement complet, bien monté, avec des illustrations qui lui auraient permis de s'empresser d'agir pour s'assurer la protection des droits de la personne?
Troisièmement, comme disait M. le Président, je suis étonnée que, comme parlementaires, alors qu'on parle de personnes, de violation de droits fondamentaux, légitimes, d'attentes, de besoins qui n'ont pas été satisfaits, d'une clientèle qui est silencieuse, qui est captive, on soit en commission de l'administration publique pour examiner, en trois heures, des situations qui mériteraient une attention extrêmement rigoureuse, par respect pour les personnes qui ont été lésées ou qui seraient possiblement lésées.
Comment se fait-il qu'on n'ait pas reçu la demande de l'opposition officielle de convoquer une commission élargie, une commission spéciale qui permettrait d'abord aux personnes de se faire entendre? Parce que c'est un beau principe qu'on retrouve partout, ça, la primauté de la personne, mais, en pratique, on ne les entend pas, ces personnes-là. On ne leur demande pas leur avis. On ne leur demande pas ce qu'elles en pensent, ce qu'elles souhaitent comme intervention. On fait peu intervenir les parents.
Comment se fait-il qu'on n'ait pas accepté de convoquer une commission spéciale qui permettrait d'abord aux personnes de nous expliquer, puis qu'on ait le frisson, qu'on soit scandalisés de ce qu'elles ont vécu et de ce qu'elles vivent et de ce qu'elles risquent de vivre? Pourquoi on ne permet pas à des parents de se faire entendre, de préciser leurs attentes légitimes, leurs doléances, leurs insatisfactions et surtout leurs demandes à l'égard de cette institution-là?
Pourquoi on n'entend pas des amis qui s'occupent bénévolement de ces gens-là au quotidien, depuis de nombreuses années, et qui, eux aussi, ont de la misère à se faire entendre? Pourquoi on ne convoque pas des organismes de promotion et de défense de droits? Pourquoi on ne fait pas entendre les comités d'usagers alors qu'on dit que le Curateur public n'a pas été en mesure de faire ce maillage essentiel avec le réseau de la santé?
Comment le Protecteur du citoyen arrivera-t-il à faire ce maillage s'il n'entend pas de la bouche des gens qui ont vécu ces problèmes, ou de leurs représentants, ou des personnes qui sont sincèrement intéressées, c'est quoi, leurs inquiétudes, c'est quoi, leurs doléances, c'est quoi, leurs revendications?
Il ne faut pas qu'on regarde la structure, le système. C'est bon. C'est important, j'en conviens. Mais, ici, il faut s'attarder aux personnes d'abord, d'abord, d'abord, et je pense qu'on risque de passer totalement à côté.
Comment on peut... Moi, je suis habitée par de grands doutes, habitée par une conscience aiguë du respect des droits. Comment pourrais-je, en trois heures, avoir l'assurance que les droits de ces personnes-là vont être représentés pour l'avenir? Je ne le sais pas. Je suis vraiment, vraiment, vraiment inquiète.
Le Président (M. Chagnon): Il y a un problème, c'est que, pour une partie des questions que vous posez, on ne pourra pas demander à Mme la curatrice d'y répondre parce que, évidemment, c'est plutôt des questions à poser au gouvernement ou, à tout le moins, au leader en Chambre qui... Non, je ne réfute pas la pertinence des propos...
Mme Lamquin-Éthier: Non, non, non.
Le Président (M. Chagnon): ...mais la curatrice pourrait difficilement répondre sur pourquoi telle ou telle approche a été prise, par exemple l'organisation de cette commission, plutôt qu'une autre. Mais, sur votre dernière question, en tout cas, Mme la curatrice pourrait peut-être ajouter...
Rôle du Protecteur du citoyen
Mme Lamquin-Éthier: Je peux faire le lien, M. le Président, si vous me le permettez. À la page 10 du rapport spécial du Vérificateur général, notamment à l'item 56, le Vérificateur prend la peine de préciser que le premier rapport du Protecteur du citoyen était axé sur des situations vécues par des personnes représentées, alors que les travaux du Vérificateur portaient sur des pratiques de gestion du Curateur. «Nos constats de vérification convergent généralement dans le même sens que les observations du Protecteur du citoyen.»
Également, à l'item 69, on dit que le Curateur public est peu enclin à créer et à maintenir des liens avec les organismes communautaires de promotion et de défense des droits des personnes, organismes qui sont pourtant reconnus par les régies régionales, et peu enclin à créer et à maintenir des liens avec les comités d'usagers dont sont dotés les établissements de plus de 20 lits. Et on sait que la majeure partie de la clientèle se trouve dans ces établissements-là. On dit, à la dernière ligne du paragraphe de l'item 69: «D'ailleurs, la plupart des comités des usagers rencontrés n'ont aucun contact avec le Curateur.»
On est aussi en présence d'un verdict qui est accablant. La préoccupation, c'est de se demander... On parle beaucoup de structure, mais, encore une fois, moi, je veux revenir sur les gens qui souffrent. Au paragraphe 84, on a dit: «Malheureusement, les plans d'action conçus à la suite de cet examen donc l'examen du Curateur public pour les établissements de santé où était la clientèle ne portaient pas sur les problèmes les plus criants, notamment sur le fait que ces personnes ne jouissaient pas des mêmes conditions de vie et possibilités de traitement que celles d'autres départements. On a fermé les yeux sur la promiscuité évidente et la surmédication. Les plans d'action portaient davantage sur la transmission d'information et la visibilité du Curateur sur place. Depuis, le Curateur public a abandonné ces plans d'action.» Alors, je me demande comment on pourra arriver... Comment le Curateur public peut-il arriver à assumer sa mission première fondamentale de protection des droits des personnes qui sont confiées?
Est-ce que vous ne pensez pas qu'on devrait permettre au Protecteur du citoyen d'avoir juridiction, puisque la majeure partie des clientèles se retrouve dans des établissements de santé et des services sociaux? Puisqu'on a fermé les yeux sur les problèmes les plus criants, puisque le Curateur n'a pas spontanément, proprio motu, adressé des plaintes soit au réseau de la santé ou encore à des corporations professionnelles, est-ce qu'on ne peut pas, devant ces faits qui sont accablants, dans un souci d'assurer le respect des droits, confier dès maintenant au Protecteur du citoyen la juridiction en ces matières, en santé et services sociaux, et plus particulièrement quant à ces clientèles?
Le Président (M. Chagnon): Mme la curatrice.
Mme P. Bailly (Juliette): Oui, Mme Lamquin. Oui. De toute façon, les personnes d'abord, j'en suis, et tout. J'étais déjà en consultation, à visiter des gens qu'on représentait, un peu partout dans la province, que ce soit l'hôpital Saint-Julien, à Charlevoix... D'autre part, quand vous voyez une organisation qui ne tient à rien comme ça, vous ne pouvez plus poursuivre auprès des personnes parce qu'il n'y a aucun secteur qui tient, parce que, pour donner aux gens qu'on représente, puis être présents, puis avoir des programmes- cadres, il faut une administration qui tienne, qui s'assoie sur des fondements.
Alors, c'est un peu pour ça que j'ai mis les freins dans cette tournée-là, pour revenir pour l'organisation, pour faire en sorte que ça ne revienne plus et pour mieux s'occuper des personnes qu'on représente. Mais on ne peut pas séparer l'un de l'autre, sinon on n'y arrive pas. De cette façon-là, je pense que, si l'organisation est solide avec le volet protection des personnes, bien, ce sera un non-retour, c'est-à-dire s'occuper des personnes puis avoir des programmes bien définis pour voir à ces gens qui sont dans les institutions ou à domicile.
Moi, j'ai mis ma priorité à domicile, dans un premier temps. Je ne veux pas dire que les autres, ce n'est pas important, mais, quand vous en avez des seuls à domicile, bien, là tu dis: Ceux-là, ils sont vulnérables, et tout. On a fait l'opération, mais cette opération-là, elle tient pour les personnes qui ne sont pas seules à domicile, qu'on doit faire... et aussi les établissements.
Mais, dans ce cadre-là, on a été... compte tenu qu'on ne savait pas combien il y en avait à domicile dans ce cadre-là. En fait, cette opération-là, les grands comités, on a laissé tomber puis on a mis tout le monde sur le terrain pour faire ce relevé-là. On a appelé tous les intervenants. Et ceux qu'on n'a pas visités, c'est parce que les intervenants du réseau les voyaient deux fois-semaine. C'étaient des personnes en santé mentale puis il y avait une surveillance.
Mais vraiment on a fait une opération et des suivis, actuellement, dans ce cadre-là. Mais ça, c'est juste un bout. Alors, là, on n'a pas fait tout le volet personne. Autant en psychiatrie, en déficience intellectuelle, ces programmes-là ne sont pas faits. Si on a une structure solide, on va pouvoir poursuivre ça. Mais sans structure, vous savez, vous regardez en arrière, c'est le précipice. Alors, il n'y a rien qui tient. Comment vous voulez aller faire des grandes démonstrations partout si votre structure, votre organisation ne tient pas? Il faut avoir les deux.
(10 h 50)
Mme Lamquin-Éthier: Bon, je vous remercie de ces précisions. Vous-même, compte tenu du rapport, compte tenu surtout du contenu du rapport, compte tenu de votre volonté de vous assurer de la protection, allez-vous concrètement recommander au ministre responsable du Curateur public d'élargir le mandat du Protecteur du citoyen pour vous assurer, justement, de l'atteinte de cet objectif-là qui est le vôtre, qui est le premier objectif, de protéger les personnes qui sont extrêmement vulnérables?
On sait que d'ailleurs, le Protecteur du citoyen l'a dit dans l'état actuel des choses, vous savez, il faut être réaliste, on se doit d'être honnête pour la clientèle à protéger. Il ne faudrait surtout pas aller jusqu'à prétendre que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Dans le rapport du Protecteur du citoyen du 21 novembre, à la page 24, évidemment, le Protecteur résume l'ensemble des problématiques. D'ailleurs, M. le Vérificateur général le rejoint, et les hommes se rejoignent parfaitement. La conclusion: «Le curateur public n'est pas actuellement en mesure d'assurer pleinement que les personnes représentées sont protégées adéquatement.» Sachant ce fait, compte tenu des faiblesses à tous les niveaux dans votre organisation, ça va prendre trois ans. Il y a du monde, dans la vraie vie, qui va souffrir demain matin et aujourd'hui. Est-ce que vous comptez, dans les meilleurs délais, recommander au ministre, par respect pour les droits, par respect pour la dignité, d'élargir le mandat du Protecteur du citoyen?
Mme P. Bailly (Juliette): Je pense...
Le Président (M. Chagnon): Mme la curatrice.
Mme P. Bailly (Juliette): Merci, M. le Président. Dans le cadre des recommandations du Protecteur du citoyen, on avait dit notre accord sur ce principe-là par rapport au Protecteur du citoyen à l'époque, à M. Jacoby.
Position et recommandations de la curatrice
Mme Lamquin-Éthier: Deuxièmement, Mme la curatrice, quelle est votre position? Est-ce que vous allez faire une recommandation à M. le ministre pour que les personnes, les parents, les amis, les organismes de protection et de défense, les comités d'usagers soient entendus, donc pour une commission?
Mme P. Bailly (Juliette): Nous, oui, on pourrait réévaluer tout ça. Les comités des bénéficiaires, on a eu des contacts avec des endroits plus privilégiés, bien sûr, mais c'est, là aussi, comme les organismes de défense des droits des personnes... Je veux dire, il faut réorganiser. L'intention, c'était de réunir toutes les associations et qu'elles puissent se nommer une personne au Curateur public pour nous conseiller, dans le fond, et regarder un peu tout ce qui se passe, parce qu'il est impensable d'être partout en même temps, et ces organismes-là pourraient nous aider et voir en même temps. D'autre part, quand votre organisation ne fonctionne pas, comment voulez-vous organiser des comités et faire des suivis? Parce que faire des comités pour faire des comités, pour la galerie, puis on ne s'en mêle pas... Moi, quand je les fais, c'est pour le vrai, avec des suivis, et je veux assumer. Mais actuellement, dans l'organisation aussi défaillante, on ne peut pas mettre tous ces comités-là en même temps. Alors, il faut nous laisser un peu d'espace pour que, quand on va le faire, on va assumer et on va en tenir compte, pas juste pour la galerie.
Le Président (M. Chagnon): Merci.
Mme Lamquin-Éthier: Mme la curatrice, on parle d'une commission parlementaire élargie et non pas d'un comité à l'interne.
Mme P. Bailly (Juliette): O.K. D'accord. Bien là, je ne sais pas, c'est le gouvernement qui va...
Mme Lamquin-Éthier: Mais, vous-même, est-ce que vous êtes prête, compte tenu de...
Mme P. Bailly (Juliette): Je suis prête à regarder ça, toutes ces modalités-là.
Mme Lamquin-Éthier: ...à en faire une recommandation à M. le ministre?
Mme P. Bailly (Juliette): Tout dépend de l'ampleur que ça peut avoir, parce que je m'y connais en...
Mme Lamquin-Éthier: On l'a, l'ampleur, là.
Mme P. Bailly (Juliette): Oui, oui. Ça, oui, je sais. J'en ai plein les bras.
Le Président (M. Chagnon): Merci. J'ai Mme Houda-Pepin, M. Côté, Mme Léger, M. Gautrin.
Position de la curatrice sur les rapports du Vérificateur général et du Protecteur du citoyen
Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, d'abord, mes premiers mots sont pour remercier le Vérificateur général et le Protecteur du citoyen qui nous ont permis de lever le voile sur ce cauchemar. La dernière fois que j'ai vu la curatrice publique, c'était justement en commission parlementaire, et on a insisté beaucoup pour que le Vérificateur général puisse avoir accès aux informations. Je suis très contente de voir que ce travail-là a été fait. Grâce à vous, les deux institutions majeures, on a pu au moins savoir l'étendue des dégâts et des problèmes qui sont vécus par les personnes qui sont sous la protection de la curatrice publique.
Ceci étant dit, Mme Bailly, vous avez pris connaissance des deux rapports: celui du Vérificateur général et celui du Protecteur du citoyen. Première question: Êtes-vous d'accord avec toutes les recommandations qui sont présentées dans ces deux rapports, ou est-ce qu'il y a des recommandations qui vous posent problème sur le fond ou sur les moyens?
Mme P. Bailly (Juliette): Oui, sûrement sur le fond et sur les moyens. D'autre part, le constat est immense, c'est bien sûr. Si vous regardez dans la protection, on nous demande comment on va faire pour protéger les personnes dont les curateurs et les tuteurs privés sont responsables, s'assurer de leur bien-être. Il y a 12 000 personnes comme ça. Comment, nous, on peut identifier... C'est les tuteurs et les curateurs privés. Là on a le mandat du public dont on veut prendre charge, avec tous ses détails. C'est multiplié comme responsabilité de ces personnes au public. D'autre part, on dit, dans le rapport du Vérificateur, qu'on devrait... et ce qu'on va faire pour s'assurer du bien-être des personnes qui sont représentées par les curateurs et les tuteurs privés.
Alors, nous, on demande un rapport annuel, etc., mais on ne va pas visiter. Moi, je l'ai fait dernièrement sur signalement, parce que quelqu'un nous le signalait et on a exigé d'aller voir la personne. Mais qu'on s'assure simultanément du bien-être des personnes qui sont représentées par les curateurs et les tuteurs privés, il faudrait avoir une équipe tout à fait remarquable pour faire un programme-cadre pour ces personnes qui sont représentées par des curateurs et des tuteurs privés. Alors, il faudra avoir des ressources, aussi, bien encadrées, avec des professionnels pour le faire. Est-ce qu'on veut assumer toute cette possibilité-là et est-ce qu'on doit le faire? Si oui, on va prendre les mesures pour le faire, parce que c'est large comme... Moi, ce que je veux dire, on ne peut pas dire qu'on va faire ce qu'on ne fait pas, là; il faut assumer. Alors, si on ne peut pas assumer, il faut qu'on le dise. Je ne vois pas, dans le contexte actuel, comment on pourrait assurer cette vérification-là auprès de ces 12 000 autres personnes. Si c'est ça qu'on veut, bien, moi, je vais prendre les mesures pour le faire, mais je ne veux pas de contraintes de ressources non plus.
Mme Houda-Pepin: Je constate...
Le Président (M. Chagnon): Mme Houda-Pepin.
Réalisation des recommandations des firmes de consultants externes
Mme Houda-Pepin: Oui, M. le Président. À la page 39 du rapport du Vérificateur, le point 209: «Le Curateur paie fréquemment des firmes externes pour des travaux ou études visant à orienter son action ou à l'assurer du bon fonctionnement de ses opérations. Cependant, ces travaux sont souvent futiles puisque le Curateur est incapable de les intégrer dans ses pratiques courantes, d'en assurer le suivi, etc.» Comment vous pouvez concilier ce que vous venez de dire avec le constat qui est fait par le Vérificateur général et qui semble être une pratique courante dans votre propre institution?
Mme P. Bailly (Juliette): Je n'ai jamais vu dans une organisation autant de consultations et de firmes, etc. Les tiroirs sont pleins. Alors, nous, dans le réseau de la santé, quand on a des recommandations et des notes au dossier, on corrige. Mais, quand j'ai vu cette ampleur-là de corrections mitigées, à moitié réalisées, compte tenu... Bon, il y avait le personnel qui manquait, mais, bon, ce n'est pas suffisant. C'est parce que ce n'était pas assis sur des structures organisationnelles de fond et de contrôle et de rigueur. C'est dans ce cadre-là que... Pour répéter ce que M. Breton dit, il disait: Vous êtes en train de faire le bilan, pourquoi vous ne le faites pas au complet? Alors, c'est pour ça que, sept mois plus tard, après moi, il rentrait. Et, dans ce cadre-là, ça nous permet aujourd'hui, même si c'est désolant d'avoir un rapport semblable mais tout le monde le sait, ce n'est pas caché on va prendre les mesures pour le faire. Et c'est ça, la nouvelle, dans le fond. Je ne regrette pas d'avoir fait venir le Vérificateur général, parce qu'une organisation aussi importante, aussi défaite que ça... Comme je disais au ministre: C'est comme ça, ça n'a comme pas de bon sens.
Besoins immédiats en termes de ressources humaines
Mme Houda-Pepin: Une fois que vous avez pris connaissance de ces deux rapports, et vous avez certainement fait une évaluation des ressources que ça vous prendrait pour apporter les correctifs nécessaires et urgents, c'est quoi, les ressources dont vous avez besoin dans l'immédiat pour faire fonctionner cette institution de façon minimale?
Mme P. Bailly (Juliette): Déjà, dans les actions posées et dans le plan de redressement, on est en train de refaire ça. Aussi, c'est pour ça qu'il faut établir notre juridiction, jusqu'où on veut aller, ce que le Québec veut du Curateur public, s'il veut vérifier tous les curateurs et tuteurs privés, etc.
Dans le cadre du document du Vérificateur général, nous sommes à identifier pour remplir cette mission très élargie, parce qu'on est rendu actuellement évidemment, on a des demandes aussi pour qu'on le fasse à environ une centaine de personnes de plus.
Mme Houda-Pepin: Une centaine de personnes de plus? Est-ce que vous pouvez nous détailler le profil que vous voulez avoir des personnes qui vont travailler avec vous?
Mme P. Bailly (Juliette): Des profils. Les administrateurs pour tenir nos programmes puis tenir la structure pour bien représenter les personnes, c'est évidemment tout le volet droits de la personne, représentation de la personne, des travailleurs sociaux, des infirmières, des éducateurs, des psychoéducateurs. C'est vraiment un niveau de professionnels par rapport à la personne qui est prioritaire.
(11 heures)
Mme Houda-Pepin: Par rapport aux différents mandats, comment est-ce que vous allez répartir ces ressources, les mandats tels qu'identifiés par le Protecteur du citoyen?
Mme P. Bailly (Juliette): On a le mandat-personne qui est en contact. C'est pour ça que le guichet unique, je dis: Pas à n'importe quel prix. Il devait être modulé avec les travailleurs sociaux et les infirmières pour voir aux personnes. Questionner aussi. Je pense qu'un professionnel qui questionne les personnes peut aussi identifier des gens en difficulté et avoir des équipes tactiques pour se présenter à chaque endroit où il faut être. Ça, c'est vraiment un must. Et, aussi, regarder l'environnement, où la personne vit aussi.
Mme Houda-Pepin: Dernière question.
Le Président (M. Chagnon): M. le Vérificateur général, est-ce que cette affirmation-là qu'il manque 100 personnes à la curatelle publique vous apparaît comme fondée?
M. Breton (Guy): Je comprends que, s'ils sont arrivés à ça c'est que les consultants ont déjà commencé à identifier. Il faut savoir le travail que les consultants font. Ils prennent, en autant que je comprenne, chaque faiblesse, analyse le fond de la faiblesse, les solutions potentielles, le personnel requis pour résoudre le problème et passer à l'action et, également, une évaluation des gens déjà en place. Est-ce qu'ils conviennent ou ne conviennent pas? Et est-ce qu'il y a assez de personnel pour atteindre les solutions cherchées? On nous dit qu'il y a déjà un besoin pour 100 personnes de plus pour être capables de répondre aux besoins. Je n'en sais pas plus que ça.
Le Président (M. Chagnon): Je souligne que l'article 41 de votre mémoire dit ceci: «Le Curateur invoque souvent un manque de ressources pour expliquer ses difficultés à remplir adéquatement sa mission. À notre avis, le problème ne se résume pas à cette seule dimension. Selon nous, le Curateur est incapable de redresser la situation sans aide extérieure. Or, des gestes concrets à court terme s'imposent.» Est-ce que 100 personnes, cela vous apparaît comme étant un élément qui fait du sens? Il y a 230 et quelques personnes qui travaillent à la curatelle. Cent personnes, c'est quasiment un ajout de 45 % de TC. Donc, ça pourrait être 200, mais...
M. Breton (Guy): Je regrette, mais je ne suis pas capable de me prononcer. Tout ce que j'en sais, c'est qu'on est rendu à 100 dans l'évaluation. Ce en quoi j'ai confiance, c'est que ce 100 n'est pas un chiffre lancé en l'air mais le résultat de travaux systématiques pour identifier ce que ça prend, quel niveau, quel profil et évidemment j'imagine qu'on se pose la question les gens déjà en place conviennent-ils ou non? Faut-il les remplacer par d'autres ou faut-il les encadrer mieux afin qu'ils fassent ce qu'ils faisaient déjà mais d'une façon moins encadrée?
Le Président (M. Chagnon): Mme Houda-Pepin.
Problèmes consécutifs à la désinstitutionnalisation
Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Quand on parle du problème sur lequel on se penche actuellement de 12 000 personnes qui sont sous la protection du Curateur public, le Protecteur du citoyen a amené un point que je trouve très intéressant au sujet de la réflexion horizontale, pour se préoccuper de toute la question des personnes qui sont en situation de désinstitutionnalisation. Pour être députée sur le terrain, je peux vous en parler longuement, de cas de comtés, de parents qui viennent en pleurs nous voir parce qu'ils n'ont plus de ressources pour leurs enfants. Ils ne savent plus où se mettre la tête avec ça. J'ai des cas de personnes qui sont fonctionnelles, mais parce qu'elles sont désinstitutionnalisées, elles se ramassent à Pinel avec des chaînes à la main. C'est dramatique comme situation. Comment vous réagissez au constat qui est fait par le Protecteur du citoyen par rapport à ce phénomène-là de désinstitutionnalisation?
Mme P. Bailly (Juliette): Nous, on le vit beaucoup dans des régions, à Montréal et à l'extérieur aussi, où, vraiment, on est intervenus auprès des régies régionales. On a une personne, ça fait la 16e fois, c'est vraiment la porte tournante. Un jeune adulte qui est en difficulté, il fait un délit, il retourne. J'ai dû intervenir auprès du directeur de la régie régionale pour que cette personne-là ait une place; ce qui a été fait. Mais c'est des gens en difficulté que nous avons, et on a beaucoup de personnes en santé mentale aussi qui ne sont pas volontaires aussi pour le traitement. Le réseau dit: Écoutez, il y en a qui veulent se faire traiter, on va traiter ceux-là. Et, nous, on doit intervenir auprès du réseau pour insister pour qu'ils traitent ces personnes-là et les suivent attentivement, sinon ils sont sous une ordonnance. Ces gens-là sont restés dans une maison de chambres sur la rue Saint-André à Montréal, que j'ai visitée d'ailleurs. Il n'y a pas de suivi. Le CLSC ne les voit pas. Dans six semaines, il y aura une autre injection, et c'est reparti, là. Alors, il y a toute cette difficulté-là.
Qui plus est, les personnes qui sont en institution, la préparation... Je suis intervenue auprès d'un autre directeur de la régie dernièrement, que ce soit pour Saint-Julien, où on n'évaluait même pas. Le médecin... Il n'y avait aucune évaluation médicale qui était prévue, médicale ou psychiatrique, pour la «désins» et... C'était marqué: Au besoin seulement. Et j'ai insisté auprès du directeur de la régie pour qu'il y ait des évaluations psychiatriques par d'autres psychiatres de l'établissement, simultanées, à la sortie, pour l'évaluation, ce qu'il a accepté d'ailleurs récemment. On a dû intervenir.
Alors, c'est tout ça, un peu partout. Comme disait M. Pagé, en plus de l'organisation des services de santé qui ne nous informe pas non plus du déplacement des gens, et on l'apprend par le Protecteur du citoyen, de ce cadre-là, on devrait faire un envoi à tous les directeurs des régies régionales. On est intervenu auprès d'un directeur de la régie, d'une autre régie pour dire qu'il y a des endroits sans permis et les gens sont en danger, et on me répond que ce n'est pas leur rôle.
Alors, je m'adresserai au ministre de la Santé pour savoir qui s'occupe de ça.
Le Président (M. Chagnon): Non, ça va aller. J'ai déjà d'autres collègues. Vous reviendrez si vous voulez. C'est d'abord, M. Côté, Mme Léger, M. Gautrin. Alors, on aura fini le premier tour en table de l'ensemble des députés. Ensuite, j'aurai Mme Charest, M. Garon et Mme Lamquin-Éthier, et Mme Houda-Pepin, si on a le temps.
Contenu des rapports annuels
M. Côté: Je vous remercie, M. le Président. Mes salutations à Mme Bailly ainsi qu'aux gens qui l'accompagnent. Salutations également à M. le Vérificateur et aussi aux personnes qui l'accompagnent ainsi que M. le Protecteur du citoyen, adjoint au Protecteur du citoyen et son collègue.
Moi aussi j'ai été bouleversé lorsque j'ai pris connaissance du rapport spécial du Vérificateur général. Avec toutes les horreurs qui sont relevées dans ce rapport-là, on ne peut pas être insensible, surtout lorsque ça touche les plus démunis, des gens qui sont démunis au niveau de la société.
Alors, quand on parle de 25 000 personnes inaptes dont les biens sont gérés par un organisme puis qu'on découvre de telles horreurs, je pense qu'il faut absolument s'arrêter puis réfléchir sérieusement sur comment maintenant se réorienter, comment corriger aussi cette situation.
La députée de Bourassa parlait tout à l'heure, elle semblait vouloir, un peu, mettre le gouvernement, ou encore le ministre, un peu, et même vous aussi, la curatrice, à l'effet qu'on n'a pas agi, pourquoi on n'a pas agi, et ainsi de suite. Je pense que, là, on est devant une situation et un contexte pour lesquels je pense qu'il faut ensemble trouver les solutions pour ne plus que ça se répète et corriger cette situation. Parce que ce n'est pas d'aujourd'hui, je crois, quand même, qu'on s'interroge sur la curatelle. J'ai fait juste quelques relevés ici. En juin 1994, lors de l'adoption du principe de la loi 25, le député de Frontenac, M. Lefebvre, disait que la curatelle publique est bien administrée: Je ne crois pas que je vais changer d'idée concernant le [...]. Alors, les réponses qu'a données la curatrice m'ont satisfait. Alors, ça, c'est en 1994. Ça ne fait pas si longtemps que ça. Aussi, toujours en juin 1994, toujours relatif au projet de loi 25, il y a Mme Caron, qui était députée de Terrebonne, qui est aujourd'hui la whip du gouvernement, qui disait: Il m'apparaît essentiel qu'on ajoute, dans notre loi sur la curatelle publique, que la curatrice doit obligatoirement, chaque année, venir rendre compte de son administration à la commission des institutions et qu'on puisse effectivement suivre par la suite, à chaque année, les changements et s'assurer que cette administration, elle est faite d'une manière ouverte. Alors, on voit qu'il y avait déjà quand même des préoccupations ou encore des interrogations relativement...
(11 h 10)
Toujours en avril 1994, lors de l'étude des crédits, il y a eu des questions à cet effet-là. Le député de Frontenac, qui était ministre de la Justice à ce moment-là, dit: «Le Protecteur du citoyen, dans son rapport annuel, d'aucune façon ne remet en question l'administration globale de la curatelle présentement sous la responsabilité de Mme la présidente Fontaine.» Sauf erreur, le Vérificateur général n'a condamné l'administration ni globalement ni non plus dans des dossiers ponctuels de la curatelle publique sous la responsabilité alors, je me répète, de Mme Fontaine. Alors, le vérificateur externe, parce que c'est très important que je rappelle que tout ça, particulièrement à Mme la députée de Terrebonne qui l'interrogeait, c'est la firme comptable Raymond, Chabot... RCMP qui a comme responsabilité de vérifier l'administration de la curatelle et ce que je sache et qu'on me contredise si je me trompe, RCMP donne une note de bonne administration à la curatelle.
Alors, ça, ça ne fait pas longtemps. Mais, par contre, il y a eu un changement de curatrice en automne 1996, et puis le 23 janvier 1996, en commission, le Protecteur du citoyen, sur l'état de la curatelle publique, il y a eu une question qui a été posée à ce moment-là, à M. Jacoby et qui a référé la réponse à la directrice générale des enquêtes, Me Hudon. Me Hudon dit: «Il y a toujours certains cas où il peut y avoir eu une certaine négligence, mais, en général, je ne peux pas dire que le Curateur a un fonctionnement illégal; il y a aussi question d'un manque de ressources.» Alors, c'est là que ça s'en vient, je pense, au niveau des ressources comme telles, le manque de ressources, que ça commence vraiment à ressortir.
Et puis, si on peut parler aussi de février 1997, M. le ministre Boisclair a demandé à la curatrice publique et au Vérificateur général de lui faire des propositions afin de dénouer le litige. Alors, je pense que, là, on commence vraiment en main puis à prendre nos responsabilités, comme gouvernement. Mais, par contre, en ce qui a trait à la gestion de la curatelle, Mme la curatrice, est-ce que dans les rapports annuels parce qu'à chaque année, il y a un rapport annuel qui est déposé par la curatrice est-ce qu'il y a été fait mention antérieurement parce que ça fait quand même un certain temps que la gestion comme telle, il y a des choses qui se passent, il y a des horreurs qui se passent est-ce qu'on a fait mention en quelque part dans un rapport annuel où il y avait un manque de ressources pour bien gérer cette boîte-là?
Mme P. Bailly (Juliette): Oui.
M. Côté: Parce que le rapport... C'est nous, les élus, en commission parlementaire et au gouvernement, on fonctionne un peu aussi selon le rapport des organismes qui sont faits. Alors, si jamais on a fait mention de quoi que ce soit, bien, là, il y a quelque chose qui ne va pas en quelque part.
Mme P. Bailly (Juliette): Le premier rapport que j'ai déposé, c'est le 31 décembre 1996. Et déjà on signale des difficultés à l'intérieur. On demande aussi des ressources. Évidemment, il est très exhaustif dans ce premier rapport annuel du Curateur public où on donne toute la mission, les faiblesses qui déjà étaient identifiées dans ce rapport. Je pense, si vous regardez d'autres rapports, je ne pense pas que ce soit aussi complet, mais déjà rapport annuel de juin 1997, pour l'année du 31 décembre 1996, je signalais avec mes collaborateurs les difficultés et les faiblesses. Je n'avais pas vu le rapport du Vérificateur général, bien sûr.
M. Côté: Les rapports antérieurs, est-ce que vous en avez pris connaissance?
Mme P. Bailly (Juliette): Les rapports antérieurs étaient plus sommaires. Je pense qu'ils sont accessibles, mais c'était effectivement beaucoup plus sommaire. Je ne les ai pas tous revus systématiquement, mais je pense que ce n'est pas identifié, le manque de ressources, sous toutes réserves de vérifier ces rapports antérieurs.
M. Côté: Est-ce que vous croyez que le rapport annuel soit plus explicite sur, justement, les besoins ou les choses que vous constatez pour vous assurer qu'une meilleure gestion soit mentionnée à l'intérieur du rapport?
Mme P. Bailly (Juliette): Oui. Absolument.
M. Côté: Alors, pour assurer une plus grande transparence aussi.
Mme P. Bailly (Juliette): Si vous remarquez, dans ce nouveau rapport annuel, pour la première fois d'abord on sait ce que le Curateur fait... Parce que, moi, quand vous me demandez ça, le Curateur public, on va toujours voir le rapport annuel. Et quand je suis rentrée au Curateur public, j'ai dit: Je vais faire un rapport annuel. S'il y a des gens qui veulent de l'information, bien, ils peuvent l'avoir d'une couverture à l'autre; ceux qui veulent avoir des choses précises, bien ils l'auront. Mais, au moins, on va avoir le portrait complet du Curateur avec sa mission et ses responsabilités.
Et celui de cette année aussi va démontrer autant d'information et des faiblesses évidemment, et il portera sûrement aussi sur le rapport qui a été déposé par le Vérificateur général. Mais c'est toujours notre intention de poursuivre. Dès le début, moi, j'ai fait cette forme de rapport annuel, aussi exhaustif que possible, pour que, évidemment comme vous dites, les gens publics puissent voir s'il y a faiblesse, et le prochain sera surtout sur des corrections, et un plan de redressement est de rigueur.
Budget des trois lignes d'affaires
M. Côté: Une autre question concernant la gestion. Vous dites qu'il y a 12 000 personnes inaptes, en termes de personnes représentées par le Curateur public, et on laisse sous-entendre qu'il y en aurait 6 000 qui paieraient pour les 6 000 autres, par rapport qu'il y en a qui n'ont pas assez de revenus, justement, vous pouviez retenir les frais ou quelque chose comme ça. Est-ce que vous pourriez nous expliquer un petit peu les dépenses de services au niveau des personnes représentées, la surveillance des curateurs privés, puis l'administration des biens délaissés? Parce qu'il y a aussi des biens délaissés. Quelles sont les dépenses puis quels sont les revenus que vous en retirez de chacun de ces blocs-là?
Mme P. Bailly (Juliette): Les personnes représentées, on appelle ça la mission publique, les gens qui ont l'aide sociale. Il y a des critères d'admissibilité qu'on renonce à nos honoraires. Ces montants d'argent là, ces revenus qui viennent compléter la mission publique, c'est dans les biens délaissés. Peut-être que Mme Sylvain pourrait compléter aussi sur toutes les modalités.
M. Côté: Les montants, est-ce que vous avez ça, en main, les montants exacts pour chacun de ces blocs-là? Puis qu'est-ce qui revient en termes de biens délaissés? Quels sont les montants qui auraient relativement...
Mme Sylvain (Ginette): On ne les a pas dans le rapport annuel, parce que c'est un condensé de toutes nos responsabilités qui figure dans le rapport annuel, c'est le fonds général du Curateur. Par contre, celui qui est vérificateur interne a déjà fait une étude de prix de revient qui, par ligne d'affaires, a ciblé les coûts de chacune des lignes d'affaires ainsi que les revenus associés à ces lignes d'affaires là. C'est plus un prix de revient qu'un état financier, à ce moment-là, mais ça ne figure pas dans le rapport annuel. Si vous voulez, je pourrais vous donner un aperçu des données.
M. Côté: Comme biens délaissés, vous dites que vous allez chercher de l'argent dans cette partie-là...
Mme Sylvain (Ginette): Oui.
M. Côté: ...avant de remettre la balance à l'État?
Mme Sylvain (Ginette): Les biens non réclamés coûtent, en dépenses de fonctionnement, 1 500 000 $. Mais on va en chercher, d'honoraires, 3 000 000 $. Ça veut dire qu'il y a 1 500 000 $ qui finance les personnes représentées avec les biens non réclamés.
M. Côté: Donc, vous n'allez pas chercher nécessairement dans les dossiers où ils sont vraiment capables de payer, le manque à gagner que vous avez concernant les personnes représentées?
(11 h 20)
Mme Sylvain (Ginette): C'est ça. Mais il y en a une partie qui vient du secteur public aussi. Dans le fond, il y a 40 % de nos clients qui ne sont pas en mesure de payer les honoraires. Il y a une renonciation de 2 900 000 $ par année, dont 1 000 000 $ qui vient des biens non réclamés, parce que ce n'est pas tous les biens non réclamés non plus qui sont capables de payer leurs honoraires. Quand on est liquidateur dans une succession déficitaire, bien des fois le Curateur public doit absorber ces honoraires-là aussi.
Mais du côté public, il y a comme 1 700 000 $: il y en a une partie, 1 500 000 $, qui est assumée par les biens non réclamés, mais il y en a une petite partie qui est assumée par la clientèle publique.
Il faut dire aussi que, du côté privé, il y a un déficit. Quand on surveille les tuteurs et curateurs privés, il y a un déficit de près de 1 000 000 $.
Mesures de redressement de la situation
M. Côté: Merci. Ensuite, j'aurai une autre question. Mme la curatrice, vous avez parlé dans vos notes préliminaires de redressement dans un proche avenir. J'aimerais que vous me précisiez davantage c'est quoi, ce redressement-là dans un avenir rapproché? Quels gestes vous allez poser, quoique vous en avez déjà posés, mais dans l'immédiat, qu'est-ce qu'on va être capable de mesurer d'ici, par exemple, à l'automne? Est-ce que vous êtes capable de nous donner des échéanciers où on pourrait vraiment mesurer les gestes qui ont été mis de l'avant, qui ont été posés pour redresser la situation dans un proche avenir?
Mme P. Bailly (Juliette): Alors, vous avez compris qu'on allait en simultané. D'abord, il y a des équipes qui vont corriger les torts qu'il y a eu et revoir tous les dossiers et aussi faire des actions ponctuelles, c'est-à-dire les rapports d'impôts en retard, les sûretés qui ne sont pas demandées, et tout ce secteur-là sera fait par des gens ponctuels. En parallèle, l'organisation fait en sorte de réévaluer toutes les structures, créer peut-être des nouveaux postes, en abolir d'autres, définir les professionnels, faire de la formation, et faire en sorte que, quand ces gens quitteront, les autres personnes, l'embauche aura été faite, la formation sera faite aussi, qui plus est permettrait que l'équipe actuelle ne puisse pas quitter tant que les autres personnes ne sont pas en fonction et que les cadres ne sont pas bien définis et que les mesures de contrôle ne sont pas faites dans ce cadre-là.
L'équipe qui fait des corrections ponctuelles sur les rapports d'impôts, etc., elle, quand c'est terminé, ça va. D'ailleurs, dans le processus d'encadrement, ces gens-là auront aussi les moyens de faire en sorte que les rapports d'impôts ne soient plus en retard, à titre d'exemple. Nous, on dit à court terme. En parallèle, il y a M. Boudreau qui, lui, doit faire des recommandations sur les corrections.
M. Côté: Pour vous, à court terme, c'est quoi?
Mme P. Bailly (Juliette): Moi, c'est en termes de mois. Je pense pouvoir venir vous faire rapport à l'automne, en termes de mois, pour dire où on est rendu et qu'est-ce qui s'est passé.
M. Côté: Donc, ça veut dire octobre, novembre, à l'automne.
Mme P. Bailly (Juliette): En tout cas, on pourra vous donner les débuts... comment et où on en est rendus.
M. Côté: Merci.
Le Président (M. Chagnon): Mme Léger. M. Gautrin. Ensuite, nous recommencerons avec Mme Charest, M. Garon, Mme Lamquin-Éthier.
Mme Léger: Oui, bonjour tout le monde. D'abord, Mme Bailly, vous avez la tâche ingrate d'arriver dans ce fouillis indescriptible. On sait tous que tout ne vous incombe pas à l'égard des années passées, mais c'est évident que tout vous incombe maintenant de le relever, de le redresser et d'y mettre une main de fer, je crois. Le redressement qui est demandé, c'est sûr, est énergique et immédiat, comme disait le ministre, non pas à l'effet de l'existence de la fonction du Curateur, comme disait le Vérificateur général, mais d'arriver à un traitement juste et équitable, même diligent, à apporter aux demandes de bien gérer les biens et faire valoir les droits des personnes inaptes.
Je pense que ce qui doit nous guider aujourd'hui, notre démarche en tout cas est celle de la transparence et celle du respect des personnes concernées et aussi d'excellents gestionnaires de biens qui ne vous appartiennent pas vraiment. Alors, le plan de redressement qui nous est apporté aujourd'hui, je pense qu'il est nécessaire et plus qu'urgent qu'il soit mis en place.
J'aimerais revenir, rappeler un petit peu... La loi a été adoptée en 1990, la nouvelle loi qui a quand même remis tout... En tout cas, on a tout révisé en fin de compte cette loi-là, par le gouvernement libéral, qui a été attendue et souhaitée, c'est vrai. Je dois quand même dire qu'on indiquait d'embaucher 200 personnes pour arriver à bien gérer cette loi-là. Effectivement, il n'y a eu que 100 personnes qui ont été embauchées à ce moment-là, et trois ans plus tard on a réduit avec le gouvernement libéral, il faut le dire de 50. Or, je pense qu'il y a un réajustement à faire.
Comme gouvernement du Parti québécois, il faut le dire, on a annulé, nous, en 1997, une réduction de l'effectif du Curateur public, qui était programmée par l'ancien gouvernement, d'une trentaine de personnes. Alors, on l'a annulée. Le gouvernement a autorisé une augmentation de l'effectif du Curateur public de 14 % cet automne, que vous êtes en train de faire. Dès la réception du constat du rapport du Vérificateur général, je pense qu'il faut le dire, à la demande de la curatrice publique, l'embauche d'une firme externe d'experts conseils, dont on a amplement dit tout à l'heure, a été autorisée.
J'aimerais revenir, moi, sur l'imputabilité de la curatrice. Tout à l'heure, la députée de Bourassa disait que le ministre n'était pas... Moi, je pense qu'il faut dire aussi que l'imputabilité de la curatrice fait en sorte que c'est l'absence du ministre aussi pour conserver cette imputabilité-là. Alors, je pense qu'il faut être cohérents aussi dans notre imputabilité, d'une part. Deux, le nombre d'heures aussi qui est accepté ici. Je pense que c'est le président qui a accepté le nombre d'heures aussi. On a un trois heures ici. C'est dans notre charge de commission. Alors, c'est de notre mandat à nous de le faire.
J'aimerais aussi rappeler que l'entrée du Vérificateur général a été demandée depuis plusieurs années. En tout cas, ça nécessitait de le faire, et je pense que ce n'est que récemment qu'il a réussi à y entrer, et je pense que c'était de bon augure qu'il soit là. Alors, moi, j'aimerais aujourd'hui... Je veux dire, on peut vouloir cogner le clou puis pousser le marteau très fort, mais je crois que ce qui est important pour nous aujourd'hui, c'est de savoir comment on va redresser immédiatement la situation.
Moi, ma question, c'est: Demain, vous allez faire quoi? Parce que vous dites: Quelques mois. Oui, mais je pense qu'il faut rassurer la population. Et vous êtes ici aujourd'hui aussi pour nous assurer de comment, suite au plan de redressement que vous avez sur les mains, de l'avis du Protecteur du citoyen... Qu'est-ce que vous allez faire dans l'immédiat, demain, dans votre structure de redressement?
Mme P. Bailly (Juliette): Bon, évidemment, là, on est quelques semaines sur ce plan-là versus aussi rassurer, dans un premier temps, toutes les personnes qu'on représente et les familles, ce qui a été fait. On a des gens qui répondent au téléphone, qui revoient avec les personnes les difficultés. Les envois: 15 000 envois devraient arriver hier ou aujourd'hui. Alors, toutes les ressources sont affectées pour répondre à ces personnes-là.
Je pense que dans l'immédiat c'est important de rassurer les gens, de donner les mesures de redressement. Actuellement, avec la firme de gestionnaires, nous sommes en train de faire les évaluations les plus rapides, c'est-à-dire où il y a un préjudice aussi pour les biens, les rapports d'impôts qui ne sont pas faits et tous les retards, les rapports annuels des curateurs et des tuteurs privés, aussi de s'assurer que les argents soient en parallèle sur les montants à retenir. Ça, ça se fait dans l'immédiat. Et aussi, on regarde tout le volet protection évidemment qui est au-dessus de tout dans ce cadre-là, et pour prendre des mesures le plus rapidement possible.
Relation personnelle avec les personnes inaptes
Mme Léger: Ce que je peux comprendre, ce matin, c'est qu'il y a une collaboration de votre part, très étroite, avec le nouveau plan de redressement. Mais qu'est-ce que vous pensez de la relation... On parle du maillage, en tout cas, avec les ressources du milieu, que le Vérificateur général a soulevé d'une façon assez claire. Quelle est la relation personnelle que vous voyez, que vous devez avoir avec les personnes inaptes? Comment vous le concevez, ça?
Mme P. Bailly (Juliette): Parce que, quand on voit, avec les établissements... Parce que, bon, ça a deux volets. Quand je vais en tournée puis que je rencontre tous les intervenants du CLSC... Aussi, on a tendance à dire: Bon, le Curateur, c'est un partenaire. Je pense que ce n'est pas un partenaire, c'est un collaborateur. Parce que, comme représentante de personnes, je dois intervenir contre le réseau. Et j'ai quand même trois, quatre poursuites qui sont déjà faites contre des établissements, parce que les gens n'ont pas été respectés dans leurs droits. On a aussi dû faire une plainte au criminel pour d'autre chose, pour une personne qui a été abusée. Alors, dans ce cadre-là, nous, on ne peut pas être juste des partenaires, c'est des collaborateurs.
Nous, on leur dit souvent... Je disais aux CLSC... Ils se dépêchent à mettre sous régime et tout, parce que, bon, ils pensent que, quand ils sont sous régime, là, c'est fini. Bien, non. J'ai dit: Ça commence. Parce que, nous, notre rôle, ce n'est pas de donner des services, c'est de s'assurer que ces gens-là ont des services. Alors, tout ce maillage-là, cette information auprès des intervenants, on sait la difficulté actuelle et l'instabilité du réseau de la santé et des services sociaux, les gens qui ont quitté, il y a des nouvelles personnes. Alors, le Curateur, il faut donner une information très approfondie parce qu'ils ne connaissent pas... Puis quand ils demandent des régimes, bon, le volet isolé puis la personne est inapte, bon, bien, il faut tout remettre ça en place.
(11 h 30)
Et cette partie de... Je compte sur le réseau comme collaborateur et non pas comme des partenaires, parce que je suis la famille proche de l'individu. Et, si l'individu n'a pas eu les services auxquels il doit s'attendre comme tout individu ou la famille le verrait, je dois intervenir contre le réseau à ce moment-là. Et c'est comme ça qu'on doit être vigilants. Et c'est peut-être là aussi qu'on va commencer à faire officiellement des plaintes aux différentes régies dans le cadre que monsieur donnait tantôt. Et c'est cette partie-là et l'information et le fait d'avoir plus de professionnels au Curateur public...
On l'a vu dans l'opération blitz, là, que le fait que les intervenants du Curateur s'adressaient aux intervenants du réseau d'une façon claire avec des profils de personnes représentées, cela changeait. Les gens prenaient en charge les personnes puis il y avait un rapport direct avec le Curateur. Ce n'était pas parce qu'une personne était sous régime qu'ils n'entendaient plus parler de personne. Là ils entendent parler de nous, ils voient nos exigences et on ne les laisse pas aller, de sorte que ça fait un virage aussi de connaissance des intervenants du réseau avec les intervenants du Curateur public.
Alors, ça, cette partie-là est à poursuivre et à approfondir davantage. Mais il se passe quelque chose, on l'a vu dans l'opération blitz. Et, quand on a fait l'opération verglas, bien, on n'en a pas perdu un parce qu'on les avait tous à jour puis on connaissait les intervenants qui en prenaient soin.
Mme Léger: Avec tous les cris d'alarme que vous entendez de tout bord tout côté, je pense que c'est presque mettre à terre les choses puis de les recommencer. Puis je pense que c'est ça qu'on a besoin de savoir, puis c'est de ça qu'on a besoin de s'assurer. Que ce soit que des gens qui n'ont plus à y être n'y soient plus, que ce soit de revoir tout votre fonctionnement, que ce soit de revoir... ce qui est pour moi essentiel, c'est d'abord la personne, la personne inapte qui est au centre de tout ça et qui est vraiment le centre des préoccupations de la curatrice et du Curateur public.
Je termine en pensant un petit peu à ce que M. Pagé a dit, tout à l'heure, face au mandat en cas d'inaptitude. C'est très vrai, je pense qu'il n'y a pas vraiment de promotion qui se fait à ce niveau-là. Je pense qu'il y en a peut-être seulement quand on va faire notre testament. Puis je pense que, si on regarde les statistiques à ce niveau-là, ce n'est pas tous les gens qui font leur testament. Alors, je pense qu'il y a une promotion à faire à ce niveau-là et que l'idée est très bonne pour s'assurer que, je veux dire, les gens, les familles ne soient pas outrés parce qu'ils ne savent pas ce qui se passe quand il arrive une situation telle quelle. Merci.
Le Président (M. Chagnon): Merci beaucoup, Mme Léger. En ce qui concerne le mandat d'inaptitude, je rappelle que, dans le rapport du Vérificateur, l'article 197 spécifie qu'«en décembre 1997 donc, il y a moins de six mois près de 6 000 mandats avaient été homologués alors que l'on en compte près de 440 000 notariés». Il y a un problème. M. Gautrin.
Pertinence d'une enquête publique de l'Escouade des crimes économiques de la Sûreté du Québec
M. Gautrin: Merci, M. le Président. Mme Bailly, d'emblée je dois dire que je vous félicite d'une chose: que vous ayez laissé rentrer le Vérificateur général dans la curatrice publique. Ça faisait un long conflit qu'on avait, nous qui suivons le Vérificateur général depuis longtemps, entre la curatrice et le Vérificateur général et les poursuites qu'il y avait pour empêcher qu'on puisse rentrer dans ces lieux. Donc, je commence par vous féliciter sur ça, premièrement, et, deuxièmement, pour dire que mes remarques que je vais avoir ne vous concernent en aucune manière, vous, personnellement.
Ceci étant dit, quand j'ai lu le rapport du Vérificateur général et que je vois... Je ne toucherai pas sur les personnes la députée de Bourassa et la députée de Pointe-aux-Trembles ont abordé la question des personnes je vais aborder la question des biens. Alors, je remarque que, par exemple à la page 20, il y a eu une période où les bijoux et les objets recueillis n'étaient pas vraiment évalués, ils disparaissaient entre... Je vais vous lire une phrase à la fin, c'est la 106 je pourrais en citer pas mal: «Le Curateur doit assurer, jusqu'à la fin de son mandat de protection, l'intégralité et l'intégrité des patrimoines gérés, mais il est difficile de s'acquitter de ce devoir puisque la description des biens et faites attention n'est pas la même entre le rapport d'investigation lorsqu'il y a une description des biens le connaissement d'entrepôt et celui de la vente à l'encan.» Et je pourrai revenir aussi en citer. On a tous eu, dans nos comtés, des cas de gens qui nous disent que, dans le fond, soit pour l'évaluation de tableaux, soit pour l'évaluation de biens, soit des comptes en banque qui diminuent ou qui disparaissent, etc... Moi, ma conviction profonde, c'est qu'il y a dans vos employés de la curatelle publique des gens qui ont volé. Et je le dis ici en...
Je ne suis pas incapable de le prouver, mais je suis convaincu qu'il y a des gens actuellement, dans la curatrice, qui, dans le passé, ont fait des actes qui sont des actes criminels dans la mesure où ils ont volé des bénéficiaires. Et je ne pourrai pas être convaincu et faire confiance, en aucune manière, dans le redressement que vous faites si on n'est pas assuré que les employés que vous avez sont tous vérifiés. On ne pourra le faire que s'il y a une enquête de la Sûreté du Québec et de l'Escouade des crimes économiques de la Sûreté du Québec.
Moi, je vous dis, madame et je voudrais savoir votre réaction là-dessus probablement que 98 % des employés de la curatrice et de la curatelle sont des gens d'une totale intégrité. Mais je ne peux pas concevoir qu'on accumule autant de gestes d'incompétence en termes de gestion des biens sans qu'il y ait nécessairement une intention derrière, une volonté derrière ou une possibilité d'en tirer bénéfice. Lorsque les bijoux ne sont pas évalués dans une succession... On m'a cité des cas de tableaux qui ne sont pas vraiment évalués. C'est tellement simple de prendre un tableau et de dire: C'est une croûte, ça ne vaut rien, et, après, de le revendre à un de ses amis et, brusquement, ça devient un chef-d'oeuvre. Je m'excuse de vous le dire, on m'a cité des exemples de ce type-là. Le Vérificateur ne prend qu'un exemple, le cas du manteau. C'est un manteau de vison qui devient un manteau de drap. Évidemment, il est manteau de vison, manteau de drap et, après, il est vendu à l'encan comme un manteau de drap. C'est bizarre. Moi, j'ai rarement vu un vison devenir un drap. C'est un peu bizarre et un peu rare.
Je pense, Mme la curatrice, et je dois dire et je répète que j'ai confiance en vous. J'ai confiance en vous et j'ai confiance dans le geste que vous faites à l'heure actuelle, mais je ne pourrai avoir confiance dans les actions que vous posez que si j'ai confiance dans le personnel que vous avez. Et les indications de ce qui s'est passé me laissent croire ou me portent à croire qu'il peut y avoir, à l'intérieur de votre personnel, des gens qui en ont tiré un bénéfice. La seule manière de clarifier ça, d'après moi, c'est de demander une enquête publique de l'Escouade des crimes économiques de la Sûreté du Québec. Je vous pose la question: Est-ce que vous serez prête à l'accepter?
Le Président (M. Chagnon): Madame.
Mme P. Bailly (Juliette): Effectivement, le Vérificateur général a signalé à un moment donné certains dossiers. Dès que j'ai pris connaissance de ces dossiers, j'ai fait une plainte à la Sûreté du Québec en bonne et due forme, à M. Coulombe, et ils sont venus faire enquête dans ces dossiers-là. J'ai eu une réponse de la Sûreté du Québec à cet effet-là, en date du 22 avril 1998, dont j'ai fait part à M. Breton, que, d'après les éléments qui étaient là, il n'y avait pas lieu de faire enquête parce qu'il n'y avait pas d'éléments criminels. J'ai la lettre de la Sûreté du Québec.
M. Gautrin: Est-ce que vous pouvez bien me préciser ce que vous avez demandé à la Sûreté du Québec? Parce que, si on demande sur un cas en particulier... Moi, j'ai l'impression à l'heure actuelle, si vous me permettez, qu'il y a à l'intérieur même de l'ensemble de votre personnel probablement quelque chose qui n'a pas fonctionné quelque part. Si on demande une enquête sur un cas particulier, peut-être qu'il n'y a pas lieu de trouver que le rôle est criminel, mais, moi, je voudrais qu'il y ait une enquête réellement sur l'ensemble des gens qui ont fonctionné dans ce cadre-là.
Permettez-moi de vous dire que je crois très sérieusement qu'il y a eu de la malversation. Je ne peux pas concevoir qu'on ait autant d'accumulation de gestes de mauvaise gestion strictement par phénomène du hasard. Alors, évidemment, si on dit: Pouvez-vous enquêter sur tel cas? On va dire: On enquête. Bon, il n'y a peut-être pas eu... Mais c'est réellement sur l'ensemble. C'est l'accumulation des indices qui, moi, m'amène à penser. Je ne peux pas, actuellement, parce que je n'ai pas plus d'information que ça, je ne peux pas dire: Il y a eu ou il n'y a pas eu. Mais l'accumulation des indices... Autrement dit, si quelqu'un se trompe une fois ou fait de la mauvaise gestion, je me dis qu'il a peut-être fait une erreur. Mais, quand je vois que les pratiques sont de cette manière-là et que ce qu'on entend dans le champ parce qu'on a aussi des oreilles; la fonction d'un député, c'est d'avoir des oreilles toute la critique qui est de dire: On a mal géré mes affaires, ah! je m'excuse de le dire, mais il y a du monde qui va vous dire: On a volé le patrimoine de ma mère qui était sous curatelle, ou de mon père qui était sous curatelle. Ça, on l'entend. On n'est pas capables de le prouver. Mais, moi, je vous dis que, si vous n'êtes pas capable à l'heure actuelle de clarifier l'ensemble des personnes qui travaillent pour vous et de me garantir que ce sont des gens sur lesquels on a une totale assurance de leur intégrité, je m'excuse, tout le redressement que vous allez pouvoir faire, ça va être du redressement administratif qui ne mènera nulle part.
(11 h 40)
Je crois réellement qu'on est rendus là à ce moment-là, Mme la curatrice. Je n'ai pas l'information pour dire: Tel jour, à telle heure, dans tel cas, il y a eu vol ou pas. Je ne le sais pas. Mais je crois qu'il y a suffisamment d'indications pour nous pour demander une enquête globale de l'Escouade des crimes économiques de la Sûreté du Québec sur comment a fonctionné la curatrice. Et comment a fonctionné la curatrice. Je l'ai mis volontairement en aparté parce que je vous fais confiance et je trouve qu'au moins vous avez l'ouverture en ce sens.
Le Président (M. Chagnon): M. Breton.
M. Breton (Guy): Messieurs, madame, j'ai effectivement vu cette correspondance avec la Sûreté du Québec, à l'effet qu'il y avait un manque d'éléments de preuve pour permettre de présumer d'un acte criminel. Mais il s'agissait d'une situation très particulière que nous avions non pas découverte, mais dont nous avions provoqué la découverte par le vérificateur interne.
Sur ce cas précis, la Sûreté pense qu'elle n'a pas assez d'éléments pour procéder. Mais, à ma connaissance, je n'ai pas vu de correspondance où on demandait une revue générale des opérations, tel que M. le député le demande. À ma connaissance, la seule réponse que j'ai vue était pour un élément, un seul cas, et non pas pour l'ensemble. Donc, ça ne répond pas à la proposition que fait M. le député.
Le Président (M. Chagnon): Mme la curatrice.
M. Breton (Guy): À moins que vous n'ayez une autre correspondance que je n'ai pas vue.
Mme P. Bailly (Juliette): Non, que vous n'avez pas fait non plus, M. Breton, à l'effet de faire une enquête à l'ensemble. Bien, je pense qu'on doit retenir ça et voir la possibilité, mais...
Vente à l'encan de biens de personnes sous curatelle
Le Président (M. Chagnon): Est-ce que vous avez déjà assisté à un de ces encans?
Mme P. Bailly (Juliette): Oui, oui. Moi, je suis ça régulièrement, voyez-vous.
Le Président (M. Chagnon): Et vous avez trouvé ça comment?
Mme P. Bailly (Juliette): Bien, justement, on s'ajuste au fur et à mesure, parce que, bon, le fait qu'il n'y a pas tellement de personnes du Curateur qui étaient là... J'y vais tous les samedis par mois pour voir comment l'encanteur fait ça, comment ça se passe, et j'interviens à savoir s'il y a des choses qui n'ont pas été évaluées, ce qui me permet, quand je vais à ces endroits-là, de pouvoir en parler après.
Le Président (M. Chagnon): Non, mais vous êtes satisfaite de ce que vous avez vu dans les encans?
Mme P. Bailly (Juliette): Non. On a dû mettre fin, même, à un contrat de l'encanteur, redonner un nouveau contrat à l'ancien et qu'on suit pas à pas. Il y a un nouveau directeur qui est arrivé dans ce secteur-là, qui, lui aussi, est là tous les samedis, où il nous fait des recommandations, et là les choses sont en train de changer. Comme les inventaires, qui prend l'inventaire, les camions, les déménageurs, on va tout regarder ça. Puis c'est qui, les contrats de déménageurs, qui est... Tu sais, faire ça selon les règles de l'art, comme on fait dans le réseau public, on va en soumissions pour trois personnes, pour les déménageurs. Alors, tout est en train de se vérifier, et ma connaissance est que je suis là et c'est pour ça que je peux en parler aujourd'hui.
M. Gautrin: Permettez, je ne doute pas de votre volonté. Encore une fois, je répète, Mme la curatrice, que j'ai confiance en vous. Ça va? J'ai confiance en vous et je ne doute pas de votre volonté. Je pense qu'il y a probablement eu, dans le passé, ce que j'appelle des encans truqués. Des encans truqués, ça s'appelle quoi? Ça veut dire qu'il y a des ententes, plus ou moins, entre les encanteurs et le peu de clients susceptibles de pouvoir faire les achats. Bon. Maintenant, je n'ai pas, en mesure, ici, la possibilité de faire toutes les enquêtes policières qui sont... Mais, tant qu'il y aura, dans votre personnel, des gens qui, peut-être, ont participé soit par une manière de mauvaise évaluation ou... dans une chose où on puisse penser qu'il puisse y avoir eu des encans truqués, tant que ces gens-là seront là, ça remettra un doute sur votre organisation.
Alors, je le répète encore, Mme la curatrice, j'ai confiance en vous. Mais je vous suggère réellement d'accepter non pas une enquête de l'Escouade des crimes organisés sur un cas particulier, mais sur le mode de fonctionnement de vos employés dans le passé, de manière à ce que les 98 % des employés qui, je suis convaincu, sont des employés honnêtes soient libérés de tout blâme et qu'on ait réussi à trouver les pommes pourries. Parce que je suis à peu près convaincu que, dans la curatelle, il y a eu des pommes pourries.
Le Président (M. Chagnon): Merci. Mme Charest, M. Garon.
Procédure d'inventaire
Mme Charest: Eh bien, justement, M. le député Gautrin, de Verdun, a posé les questions que j'avais parce que je trouvais ça préoccupant, toute la question des inventaires. Pardon? Non, non. C'est correct. Je pense qu'on a les mêmes préoccupations. Dans le fond, ce que l'on veut redonner à la curatelle publique, c'est la transparence. Et je pense que, là-dessus, les parlementaires des deux côtés de la Chambre ont cette préoccupation-là. Là-dessus, moi, je suis estomaquée de voir qu'à chaque petit coin de papier qu'on lève on assiste à une horreur, on voit des horreurs. Mais je ne reviendrai pas là-dessus parce que je pense qu'on l'a suffisamment dit.
Moi, je voudrais savoir, en ce qui regarde les rapports d'investigation, quand vous avez à faire des inventaires, le Vérificateur dit que ce n'est pas suffisamment détaillé, ça ne démontre pas non plus la fiabilité du travail de l'enquêteur. Même, l'enquêteur en question qui fait l'inventaire, il n'est pas protégé du tout, parce qu'on dit que, en cas de contestation par la personne représentée par ses proches ou les héritiers, on pourrait toujours contester l'inventaire puis que même celui qui fait l'inventaire, n'ayant pas de témoin, faisant ça parfois au téléphone... Parce qu'on nous a rapporté qu'il y avait des inventaires qui se faisaient strictement par appel téléphonique. Ça suppose, quand même, que c'est très aléatoire, l'inventaire qui peut être fait. Moi, au téléphone, je peux dire: Oui, il y a une T.V. Mais quel type de T.V.? De quelle année? Je peux dire qu'il n'y a pas de tableau, puis qu'il y en a, enfin vous voyez un peu le genre.
J'aimerais savoir: Qu'est-ce que vous entendez modifier dans la procédure actuelle pour la rendre conforme aux règles de l'art lorsqu'on a à faire des inventaires? Parce que ces inventaires-là servent, après, pour la gestion des biens des personnes, et ça va même jusqu'à des encans. Alors, ça, j'aimerais vous entendre de façon très précise.
Mme P. Bailly (Juliette): D'ailleurs, on en rediscutait, il y a quelques semaines, de cette façon-là, parce que les gens, les propriétaires qui sont là ne veulent pas signer comme quoi ils ont fait la prise d'inventaire. Alors, quand il y a juste une personne du Curateur... Et c'est dans ce cadre-là qu'il faut, nous, avoir deux autres personnes qui accompagnent celui qui fait l'investigation, pour s'assurer... Parce que tout commence là, voyez-vous. Si on fait bien ça au départ, si on fait le bon inventaire, si on s'occupe bien de la personne puis qu'on sait les besoins de la personne, on ne peut pas avoir d'erreurs, mais, quand les données, au départ, ne sont pas correctes, bien là, ça nous suit tout le temps. Peut-être que Mme Duplessis pourrait...
Mme Charest: Oui. J'aimerais savoir c'est quoi, un bon inventaire, et c'est quoi, les règles, pour vous, pour que cet inventaire-là soit à la fois non contestable, qu'on puisse être sûr que l'inventaire est adéquatement fait et juridiquement inattaquable. C'est quoi, les règles précises?
Mme P. Bailly (Juliette): Peut-être que Mme Duplessis veut compléter. C'est son secteur, en protection...
Mme Duplessis (Michèle): Bon. Alors, pour revenir, aussi, aux inventaires qui sont faits par téléphone, j'aimerais préciser des choses. C'est que chaque fois que l'investigateur fait un inventaire où la personne demeure à domicile, il va sur place, à domicile, ou en appartement, ou en logement. En fait, il va sur place faire l'inventaire. Les fois où il fait l'inventaire par téléphone, ce sont des cas où la personne est déjà en établissement de soins longue durée, par exemple, où elle a le minimum dans sa chambre bon, déjà c'est une précision importante, je pense elle a un minimum de meubles avec elle. Ensuite de ça, il complète un cahier. Quand...
Mme Charest: Je m'excuse, je vous arrête tout de suite. Ça veut dire que, lorsqu'une personne est en établissement, vous établissez un contact téléphonique avec un porte-parole de cet établissement-là pour faire l'inventaire par téléphone.
Mme Duplessis (Michèle): Généralement, c'est ce qu'on fait, mais ça n'empêche pas que... Oui, allez.
Mme Charest: Je m'excuse, je vous arrête, là. Pour moi, il y a un problème majeur en partant, parce que, sans mettre en doute l'intégrité de toutes ces personnes, vous n'avez pas plus de garanties par un intervenant d'un établissement que par qui que ce soit, dans le cadre d'une maison privée où un individu est chez lui puis que quelqu'un d'autre peut répondre de l'inventaire qui existe dans la maison privée. Parce que, écoutez, on a déjà vu dans le passé et peut-être qu'on le verra encore, mais ce n'est pas à souhaiter que des personnes inaptes à s'occuper de leurs propres affaires peuvent aussi, par du personnel soignant ou du personnel administratif d'établissement... Parce qu'il y a différents types d'établissements. Il y a le public, il y a le parapublic, mais il y a aussi le privé. Et je pense que ces personnes-là sont tellement vulnérables que, même si elles sont en établissement, ce n'est pas une garantie que leur sécurité et l'intégrité de leurs biens sont automatiquement assurées.
Je m'excuse, mais je réagis rapidement à ce que vous me dites parce que ça, ça ne m'apporte pas de garantie sur l'intégrité de l'inventaire et la qualité de l'inventaire qui peut être fait, parce que, en partant, au téléphone, pour moi, c'est inadmissible et ça ne devrait pas exister. Mais je vais continuer de vous écouter pour la suite des choses.
Mme P. Bailly (Juliette): C'est un peu pour indiquer... Quand le Vérificateur général dit qu'il en a fait par téléphone, ce n'est quand même pas des maisons au complet, etc. Je ne dis pas que c'est correct, mais c'était dans ce cadre-là.
(11 h 50)
Mme Charest: Oui. Même si ce n'est pas des maisons, quand ils sont dans une chambre, il peut y avoir des bijoux, il peut y avoir de l'argent liquide... Oui.
Mme P. Bailly (Juliette): Je le sais, oui. Mais c'était juste pour faire le rapport, pour ne pas que vous pensiez que c'était aussi un...
Mme Charest: Je comprends, je comprends.
Mme Duplessis (Michèle): Si je pouvais poursuivre là-dessus aussi je pense que Mme Bailly en a parlé tout à l'heure on parle d'un plan de redressement, on parle de choses à revoir, de fonctionnements à revoir. Je pense que ça en fait partie, ça aussi, quand on parle des témoins aussi, mais quand on parle des ressources qui font ce travail-là aussi. Alors, ce n'est pas quelque chose qui est oublié ou quelque chose qui est, si vous voulez, dans le ciment, comme on pourrait dire.
Si je reviens au formulaire d'inventaire, il y a vraiment le formulaire complet où on relate, si vous voulez, des meubles, en fait. Les investigateurs vont faire le tour de chacune des pièces, ils vont prendre les photos requises. Ils vont constituer leur inventaire de cette façon-là. Maintenant, pour ce qui est de la procédure par la suite, quand il y a un déménagement, il faut qu'il y ait une nouvelle prise d'inventaire; quand ça arrive à l'entrepôt, il faut qu'il y ait une nouvelle prise d'inventaire aussi, pour être certain qu'on parle bien des mêmes meubles, si vous voulez.
Il y a aussi la difficulté des signatures par témoins. Vous savez, souvent les gens ne veulent pas signer. Premièrement, ils ne veulent pas être présents lors de l'inventaire, parce qu'ils disent: Je ne veux pas être là. Parce que, des fois, c'est des personnes isolées. Donc, là il faut demander au concierge, il faut demander au propriétaire, il faut demander à des gens, et puis ces gens-là ne veulent pas signer non plus le formulaire, parce que, maintenant, les gens refusent de signer quoi que ce soit, au cas où ça les engage un jour à quelque chose. Ça fait qu'on a des difficultés à plusieurs niveaux, beaucoup de choses à retravailler, puis je pense que c'est ce qu'on est en train de faire.
Mme Charest: Moi, je reviendrais aussi sur une autre question. Enfin, ça, on pourra toujours... et je relirai vos commentaires pour, peut-être dans le cadre de nos travaux, poursuivre notre réflexion sur cet élément-là. Mais je vous encourage à être très stricte sur les règles de procédure. Je pense qu'il n'y a aucun inventaire, même si c'est strictement l'inventaire d'une chambre, qui doit être fait au téléphone. Ça, en partant, je pense que là-dessus... Et je pense que le problème de témoins signataires, il y a possibilité de trouver une solution à ce type de situation, parce que, écoutez, les notaires ont souvent besoin de témoins et les gens acceptent de signer comme témoins, et souvent ils n'ont même pas entendu le contenu des testaments, alors que, quand il s'agit de voir ce qu'il y a là, il me semble que ça peut se résoudre, ce type de problème là.
Administration des chèques d'aide de dernier recours
Moi, je reviendrais sur une autre chose, Mme la curatrice, c'est toute la question des personnes qui doivent recevoir l'aide du dernier recours, de la sécurité sociale. Ce qu'on apprend à la lecture du rapport du Vérificateur général, entre autres à la recommandation ou, en tout cas, au commentaire 110 de la page 21, on dit: «Le Curateur n'a pas l'information nécessaire pour dépister les cas où une personne représentée ne reçoit aucun revenu d'aide de dernier recours même si elle y est admissible.» Alors, à l'inverse, la curatelle publique ignore les cas où la personne n'est plus en droit d'encaisser de tels montants. On nous faisait remarquer que c'était aussi souvent dû au fait que ces personnes-là, si elles veulent... ce n'est pas la curatelle qui encaisse les chèques et qui administre, mais on confie parfois, si la personne est dans un établissement, à l'établissement d'encaisser les chèques, et là la personne décède et il n'y a personne qui se préoccupe de dire: Là, c'est assez, la sécurité du revenu, ou: Non, ça en prend, il faut que cette personne-là en reçoive. Alors, j'aimerais savoir...
Mme P. Bailly (Juliette): Des mesures, déjà, à cet effet-là, sont prises.
Mme Charest: ...maintenant qu'on connaît cette situation-là, quels sont les moyens que vous avez pris pour pallier à ce problème.
Mme P. Bailly (Juliette): Des ententes sont en train de se faire avec ces niveaux de ministère. Les chèques vont être récupérés et tout est en train de reprendre, tel que la loi nous demande de le faire. Alors, les mesures sont sur le point d'être corrigées.
Mme Charest: Donc, ce que vous nous dites, c'est que...
Mme P. Bailly (Juliette): On va s'en tenir à la loi.
Mme Charest: ...dorénavant, les chèques vont être émis à la curatelle...
Mme P. Bailly (Juliette): Oui.
Mme Charest: ...et la curatelle va voir à les administrer directement...
Mme P. Bailly (Juliette): Exactement. Bien, dépendamment...
Mme Charest: ...en fonction...
Mme P. Bailly (Juliette): ...de la personne.
Mme Charest: ...du statut...
Mme P. Bailly (Juliette): Mais ce n'est pas l'établissement qui va les recevoir. Des mesures sont en négociations actuellement pour avoir aussi... pas des chèques de tout le monde, mais selon les nouvelles règles de l'informatique.
Mme Charest: Mme la curatrice, les personnes qui y avaient droit dans le passé et qui, par, entre guillemets, négligence et je pense que je ne suis pas très méchante en disant «négligence» ne l'ont pas reçu, est-ce que vous êtes préoccupée aussi de réclamer ces...
Mme P. Bailly (Juliette): Oui.
Mme Charest: ...sommes qu'elles auraient dû recevoir et qu'elles n'ont pas reçues?
Mme P. Bailly (Juliette): Ça fait partie du mandat correction dans notre phase de redressement. Alors, tout ça va être revu aussi. Qui plus est, avec le Vérificateur général, il y a des informations qu'il nous a permis d'aller chercher, qu'on n'aurait probablement pas eues non plus si ça n'avait pas été du Vérificateur général. Alors, moi aussi, j'ai appris plein de choses. D'autre part, il y a des facilités aussi d'aller vérifier versus les revenus des différents paliers, ce qui fait que, nous, on va pouvoir corriger ces parties-là et s'organiser pour ne plus que ça revienne.
Mme Charest: M. le Vérificateur général...
M. Breton (Guy): J'aimerais attirer votre attention, vous poser la question: Si les chèques qui étaient envoyés aux établissements sont maintenant envoyés à la curatelle pour être selon la loi, est-ce à dire qu'automatiquement la tarification de 3 % à la réception du chèque et de 3 % à l'émission entre en ligne de compte et vous venez de trouver de nouveaux revenus?
Mme P. Bailly (Juliette): Pas nécessairement, parce qu'on sait que ce sont des personnes sur revenus. Alors, même s'il y avait honoraires, il y serait renoncé à la fin, selon les revenus. Alors, si les revenus ne correspondent pas, ça ne s'applique pas du tout s'il y a renonciation à la fin.
M. Breton (Guy): D'accord.
Mme P. Bailly (Juliette): Il n'y aura pas de charge.
Révision de la tarification des services
Mme Charest: Ça me soulève une question sur la tarification de vos services. J'aimerais savoir, là, comment vous allez revoir cette tarification-là. Parce que ça semble poser problème. Dans certains cas, on nous dit qu'il y en a qui sont surtarifés et il y en a d'autres qui sont sous-tarifés, et que ce seraient les gens qui ont des biens qui paieraient pour ceux qui n'en ont pas. Alors, est-ce que vous pouvez nous éclairer par rapport à ça?
Mme P. Bailly (Juliette): Effectivement, sur la réglementation de la tarification, actuellement, vous avez vu qu'il manquait de rigueur par rapport aux gens à qui on ne chargeait pas des honoraires, et tout. Ça aussi, ça fait partie du plan de redressement. D'autre part, sur la tarification, actuellement, nous, on suit le règlement de la Loi du curateur public. D'autre part, je sais qu'il y aura aussi des recommandations qui seront différentes pour les niveaux de tarification, comme le signalait M. Breton dans son rapport. Les gens sont conscients de ça. Mais, nous, on n'a pas fait double tarification comme Curateur public. On s'en est tenus aux règlements de la Loi du curateur public. Alors, s'il y a lieu de corriger, ce sera au niveau du règlement.
Le Président (M. Chagnon): Merci, Mme Charest. M. Garon, Mme Lamquin-Éthier, M. Côté. Je pense, M. Breton, que vous aviez demandé d'être libéré à midi. C'est ce qu'on devrait faire. On vous remercie beaucoup. Peut-être une question à M. Breton?
Mme Lamquin-Éthier: Si vous le permettez.
M. Garon: Je n'ai pas une question à M. Breton, mais le temps va être écoulé.
Le Président (M. Chagnon): Mais on va finir à midi et quart. Vous avez une question rapidement, Mme Lamquin-Éthier?
Utilité de doter la curatelle publique d'un conseil d'administration
Mme Lamquin-Éthier: Oui. Je voulais savoir, M. le Vérificateur, si le Curateur public peut être mis en tutelle et si vous croyez que la mise en place d'un conseil d'administration permettrait d'assurer le respect des droits légitimes des personnes représentées?
M. Breton (Guy): Je pense qu'un conseil d'administration aiderait la curatelle publique à avoir des personnes avec qui pouvoir échanger, recevoir de l'aide et avoir, je dirais, des adjoints pour influencer le gouvernement, nécessairement, lorsqu'il y a des besoins à être exprimés. En ce qui concerne être en curatelle ou être comme tel, je n'en vois pas la nécessité. Je pense que, jusqu'à maintenant, les efforts qui sont en place devraient donner des résultats. Maintenant, si les résultats ne sont pas évidents d'ici quelques mois, je dirais au début de l'automne, si ça ne lève pas de terre, il sera toujours temps de changer. Au fond, si on veut prendre une expression un peu commune, il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain.
D'autre part, je pense qu'il a été exprimé aussi qu'il ne s'agit pas de remplacer tout le personnel immédiatement. Il faut récupérer la connaissance que le personnel actuel a depuis 10, 15, 20 ans. Il faut vraiment du nouveau personnel avec des connaissances plus adaptées, des cadres plus adaptés. Ensuite, le personnel actuel, s'il peut s'ajuster à ce nouvel environnement, tant mieux pour lui. S'il n'est pas capable de s'ajuster, bien, il faudra bien qu'il cherche ailleurs à gagner sa vie.
(12 heures)
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup, M. le Vérificateur général. Encore une fois, nous vous offrons nos condoléances. M. Garon.
Questions irrésolus
M. Garon: Bien, je vais vous dire, moi, je pense que trois heures pour analyser cette question-là, ce n'est pas assez. Je vais être franc avec vous, moi, je pense que ça prendrait plusieurs heures additionnelles, et je vais vous donner un exemple. Je regarde le paragraphe 58, le Vérificateur dit: «Le Curateur, en dépit d'une charge qui lui a été confiée en 1971, n'a pas encore déterminé son rôle de protecteur de la personne inapte même si les modifications législatives de 1990 ont précisé ses responsabilités, qui comprennent notamment une obligation de maintenir une relation personnelle avec la personne inapte.» C'est drôlement une question de fond, ça. Un des mandats les plus importants n'est pas respecté, on ne sait pas trop pourquoi puis on n'a pas eu le temps d'approfondir cette question-là.
Au paragraphe 60: «Le Curateur ne s'acquitte pas de son mandat de protecteur, il est incapable de maintenir une relation personnelle avec ces personnes, d'obtenir leur avis et de les tenir informées des décisions prises, comme le prescrit son mandat.» Je regarde un peu plus loin. Tu sais, c'est des questions... On est dans les questions de fond, on n'est pas dans les queues de renard des représentants d'automobiles.
Je regarde après ça au paragraphe 106. Là, on parle de l'affaire du manteau de fourrure de 5 000 $. Le député de...
M. Gautrin: Verdun.
M. Garon: Verdun, tantôt, a parlé des tableaux. On ne peut pas juste parler comme ça, moi, je pense qu'il faut aller plus loin que ça pour pouvoir faire une véritable recommandation.
Je regarde le paragraphe 138. «Mentionnons aussi que le Curateur a produit chaque année, jusqu'en octobre 1997, environ 260 déclarations fiscales de personnes représentées décédées pour lesquelles il existe des héritiers légaux. Pourtant, puisqu'il n'est pas liquidateur de ces successions, cette obligation ne lui incombe pas.» Imaginez-vous, il manque de personnel, puis il fait des jobs qu'il n'est pas supposé faire. Tu sais, on est rendu... on est dans l'incompétence crasse, là, on n'est pas...
Continuons. Je regarde, par exemple, Aide et assistance. Au paragraphe 165: «Afin d'assumer son rôle d'aide et d'assistance, le Curateur, au début de son mandat de protection, envoie au représentant légal un guide l'informant de son rôle, de ses responsabilités et des documents à produire à la suite de sa nomination. Pourtant, il ressort des procès-verbaux et de la tournée d'information effectuée par la curateur en 1997 que les représentants légaux ne connaissent pas ou comprennent mal leur rôle, de sorte que la responsabilité d'aide et d'assistance incombe souvent aux organismes du milieu.»
À 166: «Le Curateur ne joue pas davantage son rôle auprès du conseil de tutelle; il se contente de lui transmettre un guide en début de mandat.» Puis on est dans les responsabilités importantes.
Redditions de comptes, 194: «Avant avril 1997, le Curateur n'examinait même pas les redditions de comptes qu'il recevait, en dépit de l'exigence explicite du Code civil. D'avril à décembre 1997, le Curateur n'a reçu que 15 % des redditions de comptes. Cependant, il ne fait guère d'efforts pour les obtenir puisque, après deux rappels, le dossier est fermé sans mesure additionnelle.» On est dans...
Je continue. Quand on va arriver à la dotation du personnel, écoutez bien si c'est bon. 212... À moins de marcher sur la confiance aveugle, écoutez bien, on nous dit qu'on manque de personnel. «L'organisation qui comptait, il y a à peine un an, cinq directeurs, est pourvue présentement de deux directeurs qui parent à l'urgence au détriment d'une gestion ordonnée. Au 31 décembre 1997, un poste de directeur était occupé par un professionnel en situation de gestion depuis le 15 avril 1997, et le processus de dotation n'était toujours pas entrepris. Quatre postes de cadres intermédiaires sont actuellement vacants quatre cadres sont vacants et plusieurs postes de chefs d'équipe sont soit vacants, soit occupés par des techniciens et des agents de bureau, alors qu'ils requièrent des professionnels.» Tu sais, parler de 100 personnes additionnelles, mon oeil! Comprenez-vous? Les postes sont vides, les jobs ne sont pas remplies. C'est quelque chose, là. C'est pour ça qu'on ne peut pas...
Mme P. Bailly (Juliette): Mais il faut comprendre, monsieur...
M. Garon: Après ça, 214. On dit à 214: «De plus, un cadre...» On parle d'un cadre qui a reçu une double rémunération, lui. «Notons que ces initiatives du Curateur n'ont pas été approuvées par le Conseil du trésor, contrairement à ce que les mesures de départ assisté prévoyaient expressément.» Vous pouvez lire 214, ça va dire double rémunération. Les primes de départ ne sont pas acceptées, puis on paye les deux salaires, les deux rémunérations.
Supervision et encadrement. À 215, on dit: «Ainsi, certains gestionnaires font preuve de laxisme et ils n'assurent pas le suivi des feuilles de temps.» Écoutez bien. «D'ailleurs, on observe des délais de quatre mois et demi avant l'acceptation de celles-ci.» Imaginez-vous qu'il doivent se rappeler ce qui s'est passé dans les feuilles de temps. «Cette situation est d'autant plus préoccupante que les chefs de service ne sont pas en mesure de jauger la productivité des employés.»
Après, vous regardez 218: «Le Curateur doit s'assurer que son personnel possède la formation, l'expérience et les connaissances nécessaires pour accomplir ses fonctions.» Mais il y a absence complète de programmes de formation continue. Tu sais... Alors, il faut regarder ça tout le long.
À 242: Depuis l'entrée en vigueur du règlement, en 1990, nous estimons qu'il y a eu double rémunération à 4 200 000 $, les revenus ainsi perçus à double titre dans les dossiers des personnes représentées par la curatrice. «En avril 1995, un comité interne avait recommandé au Curateur de ne plus appliquer les tarifs de gestion des biens administrés aux montants investis dans les placements collectifs, mais le Curateur a choisi de maintenir l'application des tarifs actuels. Cette décision n'a pas été révisée depuis.»
Alors, voyez-vous, je nomme seulement quelques éléments qui me sautent aux yeux. Et, je vais vous dire, trois heures, ce n'est pas assez, j'aimerais ça qu'on approfondisse davantage cette question-là parce que, autrement... La première question que j'ai posée au début, vous avez remarqué, c'est: Est-ce que l'administration actuelle est capable de faire le virage? Le virage, je suis loin d'être convaincu de ça. Et est-ce que ça prend une enquête et une tutelle en même temps? Moi, ça prend peut-être les deux, mais j'aimerais, moi, avoir plus de temps pour regarder puis approfondir ces questions-là parce que trois heures, là, je pense que c'est sans doute pour ça que ça ne marche pas, la curatelle, parce qu'on ne met pas le temps qu'il faut. Il faudrait mettre du temps, à mon avis, pour regarder cette situation plus profondément, pour apporter véritablement les correctifs qui s'imposent, parce que, là, moi, je vais vous dire, j'ai été au gouvernement, au Parlement depuis longtemps et je n'ai jamais vu un rapport de même. Je n'ai jamais vu un rapport comme ça. Je n'ai jamais vu ça et je suis certain qu'il y a d'autres places, là, puis que...
Vous savez que les gens, quand on regarde, là, on va évoquer... Je ne sais pas quoi on va évoquer. Tantôt, c'était la DPJ, puis on s'aperçoit que quelqu'un a pu torturer son enfant pendant 15 ans, puis tout le système a passé dessus, puis ils n'ont rien vu. Tu sais, ils n'ont rien vu. Quand des organismes sont supposés protéger les enfants maltraités ou des personnes inaptes, là, je suis en train de me demander si ce n'est pas la curatelle qui est inapte. Et, moi, je pense qu'il faut se poser des questions plus fondamentales que ça parce qu'on a un rôle, on adopte les lois ici, à l'Assemblée nationale. On a rarement l'occasion de vérifier si elles sont bien administrées, hein? On a un bon exemple, et je pense qu'on devrait prendre le temps qu'il faut pour faire le ménage.
Moi, ce que je ne sais pas, j'aimerais le savoir. Est-ce que ça marche de même depuis que la curatelle existe, depuis 1945? On a confié des responsabilités additionnelles au cours des années, on s'aperçoit qu'on ne s'en est pas occupé. Alors, ce n'est plus une question... Ça ne nous donne rien de faire des lois s'il n'arrive rien. Alors, moi, je pense que, le Parlement, on a, comme législateurs, une responsabilité très importante parce que c'est l'application de nos lois. Le Vérificateur général, lui, va voir qu'est-ce qui est arrivé avec les lois qui ont été adoptées par l'Assemblée nationale au point de vue de leur administration. Le Protecteur du citoyen voit comment les gens sont traités dans l'administration de ces lois-là. Moi, je pense que notre devoir, c'est de prendre le temps qu'il faut avant de se décharger ou de demander à quelqu'un d'autre de continuer. Moi, je pense qu'on a besoin de plus de temps pour faire ça que le trois heures qu'on a eu ce matin.
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup. J'avais des demandes. Mme Lamquin-Éthier, peut-être que votre question a été posée au Vérificateur général, c'était...
Mme Lamquin-Éthier: C'est une question, M. le Président, à l'intention du Protecteur du citoyen.
Le Président (M. Chagnon): D'accord. Et j'ai M. Côté qui m'avait demandé la parole aussi. Je terminerai avec ces deux intervenants. J'entendrai M. Henrichon, qui est Vérificateur général adjoint, M. Pagé et, finalement, Mme Bailly. Avant de tirer des conclusions sommaires qui seront présentées ici, nous allons nous réunir après cette fin d'audition, rester ici, en salle pour regarder les recommandations que nous pourrons faire à l'Assemblée nationale. Alors, à ce moment-là, je donnerai quelques pistes de réflexion qui vont dans le sens de ce qu'on a entendu ici depuis le début de la matinée.
Alors, allez, madame.
Double mandat du Curateur à l'égard des personnes et des biens
Mme Lamquin-Éthier: M. Pagé, vous avez soulevé dans votre présentation plusieurs points importants. Il y a des commentaires que vous avez formulés, et j'aimerais bien revenir dessus parce que ces commentaires-là vont directement en lien avec les items 58, 59, 60 et 61 notamment. Un, le Curateur doit bien comprendre son 7rôle, donc être capable de le cerner; deux, il doit l'expliquer à ses employés et aussi au réseau de la santé qui doit être capable de bien le comprendre et agir en conséquence. Lorsqu'on parle du Curateur public, on parle de deux mandats distincts qui comportent différents volets: un volet à l'égard des biens puis un volet à l'égard de la protection des personnes. Question à M. Pagé: Est-ce qu'il y aurait lieu d'opérer une séparation entre ces volets distincts du mandat pour ne pas qu'il y ait risque... Vous savez, quand on a de la difficulté à bien s'acquitter d'un volet à l'égard des biens, est-ce qu'on peut penser qu'on va être capable de s'acquitter d'un volet à l'égard de la protection? Et, dans le rapport, il y a des éléments qui nous permettent d'en douter. Alors, pensez-vous qu'il est possible de faire une séparation?
Et, deux, vous avez soulevé qu'il y a certaines fonctions... Prenons l'exemple des ruelles, est-ce qu'il n'y a pas certaines fonctions ou mandats appelez ça comme... je ne sais pas, là, j'ai de la difficulté à trouver le terme qui pourraient être confiés à d'autres personnes? Puis il y a l'autofinancement aussi qui est extrêmement important. Si vous pouviez, s'il vous plaît, commenter davantage.
(12 h 10)
M. Pagé (Guy): Bon, d'abord, sur les deux mandats principaux que le Curateur public opère, évidemment, il y a le mandat de la protection de la personne. Le rapport qu'a fait le Protecteur du citoyen en novembre 1997 était intentionnellement ciblé sur cet aspect du mandat. Bien qu'on était au fait qu'il y avait de graves problèmes du côté de la gestion des biens, on a délibérément ciblé le premier rapport sur la notion de protection de la personne dans l'espoir que, tous ensemble, on comprenne que la protection des personnes inaptes ne doit plus s'opérer en vase clos. Et, là-dessus, je pense que c'est la principale observation à faire, le Curateur public, probablement de par sa tradition de gestion des biens, a été amené à opérer de façon, disons, que je qualifierais d'un peu mystérieuse, très pris par des questions de confidentialité. Alors, on a souvent eu beaucoup de difficultés à obtenir des informations. Et, quand on a commencé à examiner en profondeur la complémentarité si complémentarité il y a des deux mandats, bien sûr que c'est ressorti que la protection des personnes était gravement remise en cause. Vous posez directement la question: Est-ce qu'on doit séparer les deux mandats? D'abord, je dirai qu'il faut dès maintenant se faire une idée très claire sur quel sera le mandat du Curateur. J'ai entendu ce matin énormément d'observations et de réflexions alors qu'on n'est pas encore arrêté sur la pertinence d'avoir tous ces mandats.
C'est la même chose pour l'autofinancement. Si le Curateur s'autofinance, cela appelle des attitudes très claires de gestion qui ne sont pas les mêmes que si on est en face de revenus qui proviennent, par budget annuel, du gouvernement. Ces questions-là doivent être étudiées de façon prioritaire, c'est ce qui va déterminer tout le reste des opérations du Curateur. Alors, vous posez cette question-là seulement sur les deux principaux mandats qui concernent et les biens et la protection de la personne. Il est évident que, si j'administre le bien d'une personne, par exemple une maison... Une dame qui reste dans une maison, qui devient inapte, est-ce que je choisis de vendre la maison pour liquider ce bien ou bien si je choisis de garder cette maison-là, éventuellement, en pensant que ça puisse avoir un heureux effet sur la réhabilitation de cette personne qui pourrait, par exemple, être heureuse de retourner périodiquement chez elle? Quel est le mandat que je privilégie et sur quelle base vais-je le privilégier? Sur la base de la simple équité? C'est trop large. Je regrette, mais c'est trop large. Est-ce que je vais dire: Ah, c'est la responsabilité du Curateur lui-même d'arbitrer ces choses-là? Est-ce que le Curateur va se pencher sur chacun des cas de façon ad hoc? Ce n'est pas opérationnel. Alors, sans répondre clairement à votre question en disant si, oui ou non, on doit séparer les deux mandats, je suis d'avis qu'il y ait une réflexion très grande. Et, je suis tout à fait d'accord avec la suggestion du député de Lévis, il faudrait absolument y consacrer le temps nécessaire.
Le Président (M. Chagnon): Merci. Je demanderais à M. Côté de livrer sa question. Ce sera la dernière question, en fait. Nous demanderons à nos invités de...
Tarification
M. Côté: Oui, je vais y aller rapidement. Mme la curatrice, vous avez mentionné dans vos notes préliminaires que les actions déjà planifiées sont de trois ordres: réparer le passé, corriger le présent et rebâtir pour l'avenir. Je pense que c'est un très bel objectif, mais, moi, je réfère, puis on a abordé un petit peu tout à l'heure... Le collègue de Lévis a passé rapidement sur 242 du rapport, justement, par rapport à la double tarification. On parle qu'il y a près de 4 200 000 $ qui ont été perçus à double titre dans les dossiers des personnes représentées par le Curateur. En avril 1995, il y avait un comité interne qui avait recommandé au Curateur de ne plus appliquer les tarifs de gestion des biens administrés. Est-ce que vous avez l'intention... Parce que, ça, là, ce n'est pas l'argent de l'État, c'est l'argent d'une clientèle, je pense, bien déterminée, inapte. Alors, 4 200 000 $ perçus, est-ce que vous avez justement l'intention de réparer cette erreur-là dans vos projets à court terme?
Mme P. Bailly (Juliette): Bien, c'est le mandat de M. Boudreau de voir à faire des corrections, de me faire recommandations à cet effet-là. Mais je veux préciser que la double tarification est dans le règlement de la Loi sur le curateur public, alors il faudrait que le gouvernement change la loi aussi. Mais je veux dire que ce n'est pas... Le fait que c'est le Curateur qui avait décidé de ça... Le comité...
M. Côté: Mais pourquoi est-ce que vous n'avez pas donné suite à la recommandation du comité?
Mme P. Bailly (Juliette): Bien, j'en ai pris connaissance qu'il y avait eu un comité en 1995, en même temps que j'ai vu le rapport du Vérificateur général. À ce moment-là, la décision de la curatrice, à l'époque, ce n'était pas de prendre cette recommandation. Moi, je l'ai su au moment où le Vérificateur général faisait le rapport. Mais, effectivement, le règlement pourrait être changé par le gouvernement parce que c'est vraiment dans le cadre du règlement. Mais on va voir ça avec M. Boudreau, s'il calcule les réparations, si c'est ça ou pas.
M. Côté: J'estime que vous avez la même réponse pour 247, alors que de 1990 à 1997 vous avez renoncé à des honoraires facturés à des personnes sous régime privé, alors que celles-ci avaient des actifs variant entre 5 000 $ et 500 000 $. Cette décision a entraîné un manque à gagner estimé à 200 000 $. Alors, là encore, c'est un 200 000 $ qui n'est pas pour votre clientèle, qui ne peut pas servir pour... Ou de remise à votre clientèle.
Mme P. Bailly (Juliette): Comme je vous le disais tantôt, dans les mois que j'étais là, on a quand même revu tous les honoraires. On n'est pas passé de 3 500 000 $ de déficit, dans un an, à 100 000 $. C'est parce qu'on a commencé à voir que les gens chargent des honoraires. Il y a des gens qui n'étaient pas au fait de cette mesure-là que le Curateur s'autofinançait. Alors, déjà on avait pris des mesures de passer de 3 500 000 $... Le Vérificateur général, il nous dit encore qu'il y a des honoraires qui ne sont pas du tout chargés. Alors, tout fait partie, ça fait partie du plan de redressement mur à mur.
Remarques finales
Le Président (M. Chagnon): Merci beaucoup. Je demanderai à trois groupes d'invités de, peut-être, nous donner le mot de la fin. M. Henrichon.
M. Henrichon (Jacques): Merci, M. le Président. Simplement, je réitérerai les dernières paroles que M. Breton a prononcées tantôt, c'est-à-dire que c'est inutile de jeter le bébé avec l'eau du bain. Je pense que les ressources qui sont là doivent être conservées, suffisamment longtemps du moins, pour conserver ce qu'ils connaissent, les expériences qu'ils ont. Mais c'est indéniable que le virage qui est demandé au Curateur va demander des ressources ou bien différentes ou bien encore formées différemment. Ce qui est important, je pense, c'est de regarder avec des nouveaux yeux la réalité du Curateur et de faire le meilleur virage possible.
Le bilan administratif a été fait. Mme la curatrice nous a ouvert les portes, et je pense que ça permet le débat qu'on a aujourd'hui. Ce qu'on constate chez le Vérificateur général, c'est que le gouvernement acquiesce, d'une part, à la gravité de la situation et, d'autre part, à l'importance des mesures correctives qui sont à prendre pour faire effectivement le virage.
Je vais simplement rappeler l'engagement du Vérificateur général d'aller voir l'an prochain si, effectivement, les mesures qui auront été prises dans la prochaine année auront permis, dans le fond, de corriger les déficiences qui ont été soulevées par le Vérificateur général.
Le Président (M. Chagnon): Merci. M. Pagé.
M. Pagé (Guy): Merci. D'abord, pour toute la question de la compensation, je rappellerai que, s'il y a eu erreur ou négligence de la part du Curateur, il faudrait s'assurer qu'on ne compense pas les personnes qui ont été lésées à même les actifs des personnes inaptes. J'inviterais Mme la curatrice, dans son mot de la fin, aussi à nous dire un mot sur les montants d'argent qui sont transférés annuellement au fonds consolidé. C'est très important. On parle de ressources, on parle de personnes, on parle d'effectifs, et le Curateur transfère à chaque année d'importants montants au gouvernement.
Le Président (M. Chagnon): ...ces trois dernières années.
(12 h 20)
M. Pagé (Guy): On a parlé beaucoup de la question de la formation. C'est vrai, le Protecteur du citoyen, dans son rapport, a fait l'objet de toutes les questions d'embauche, d'addition de ressources, de personnel spécialisé, du nombre d'experts, de la charge de cas par personne, tout ça dans les cinq ou six premières recommandations de son rapport. C'est vrai, donc, qu'il doit y avoir un remue-méninges à l'interne, mais c'est vrai aussi qu'il doit y avoir autre chose qu'un simple travail à l'interne.
Alors, je mentionnerai rapidement qu'on doit absolument revoir la Loi sur le curateur public, notamment pour lui donner la possibilité d'intervenir en cas de situation d'urgence. Si une personne, on reçoit la déclaration du directeur général, ça va prendre six mois avant que la déclaration d'inaptitude se fasse, donc six mois avant que le tribunal bouge. Six mois dans la vie d'une personne âgée qui tombe et qui devient inapte, qui a des problèmes de santé, c'est très long, et il peut se passer n'importe quoi dans ces six mois-là. Et le Curateur n'a pas la possibilité, lorsqu'il s'agit de protection des personnes, d'intervenir en situation d'urgence. Cette situation-là doit être corrigée.
Il y a non seulement des questions de loi, il y a des questions de système, et je dois souligner ici la très grave question d'accès aux soins des services de santé psychiatriques sur la question de la sectorisation dans la grande région de Montréal. Il est impossible de penser que, isolément, un seul ministère, si compétent soit-il, que lui-même puisse fonctionner et régler ces questions-là. Dans la région de Montréal, c'est mon code postal qui détermine qui sera mon médecin. Cette situation-là est inacceptable, elle contrevient au libre choix de l'établissement et du professionnel. Donc, il faut penser autrement, que, à l'interne, il faut aller à l'externe. Il faut cesser de travailler en vase clos. Ça, ça signifie que tout le réseau doit être interpellé, mais ça signifie aussi que l'article 15 de la Loi sur le Curateur public, où on parle de son pouvoir supplétif, donc son devoir d'aller chercher la collaboration maximale des familles, que tout ça doit être fortement encouragé. C'est la même chose pour les comités d'usagers. C'est la même chose pour les associations de défense des droits. Il y a en ce moment un vent de critiques très fortes à l'endroit du Curateur. Probablement qu'elles sont méritées, mais il doit aussi y avoir un vent de reconstruction, et ça ne se fera pas en vase clos.
Je pense que c'est évident, pour conclure, qu'on a besoin du Curateur public. On peut taper aller-retour, hein, c'est la délectation de Néron devant Rome qui brûle. Et on doit aller plus loin que ça. Le mandat est trop large, on doit le revoir. L'autofinancement est à revoir, et je pense qu'il faut absolument se pencher sur la situation de ces personnes-là dans le temps. Le temps ne nous permet pas un délai trop long.
Le Président (M. Chagnon): Merci. Mme la curatrice.
Mme P. Bailly (Juliette): Écoutez, désolée d'en avoir provoqué autant. J'espère que j'aurai au moins ce défaut d'avoir provoqué ce débat. Il est connu maintenant, je pense qu'on prend des mesures pour que ces personnes inaptes au Québec prennent leur place comme elles y ont droit, et les engagements sont là de la part de la curatrice, du gouvernement et du personnel qui veulent le faire, qui en ont fait des grands bouts, et eux aussi en ont assez de se faire dire plein de choses, de ne pas avoir les moyens et les outils. Alors, il y a des gens de bonne volonté, et je pense qu'ensemble on peut le faire. Et soyez assurés que, si on pense que ce n'est pas les bonnes choses, qu'on n'a pas les moyens de le faire, on le dira publiquement pour ne plus que ça revienne jamais.
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup. J'ai écouté... Après avoir lu, évidemment, les documents que nous avions reçus la semaine dernière avec le Vérificateur général puis, l'automne passé, avec celui du Protecteur du citoyen et avoir entendu tout le monde, trois heures, moi, je suis... Probablement que tout le monde ici est resté sur sa faim, on n'a pas... Il n'y a personne qui pourrait dire qu'on a complété l'étude en profondeur soit du rapport du Vérificateur général, soit du rapport du Protecteur du citoyen. Le mieux qu'on a pu faire ce matin, c'est d'avoir une mise en situation qui nous permette peut-être d'axer une orientation de suggestions qui pourraient être faites à l'Assemblée nationale. C'est le mieux qu'on pourrait faire. Et je ne pense pas que ce forum-ci soit non plus celui le plus approprié pour chercher ce que l'on voudrait avoir.
Moi, je n'ai jamais vu un document comme celui-là. Ce que le député de Lévis disait, je partage entièrement ses propos, je n'ai jamais vu une affaire de même, jamais entendu parler que ça pouvait même se produire, mais on est obligé de faire face au constat que c'est réel. Puis, Mme Bailly, on vous remercie énormément d'avoir pu aider à ouvrir les portes puis mettre la lumière dans cette histoire-là. Et, compte tenu de la situation actuelle de la curatelle, compte tenu du fait que... Parce que, on comprend, vous pouvez difficilement asseoir une autorité pour pouvoir rebâtir une administration complète là-dedans et attendu aussi le fait que vous avez plusieurs cadres qui sont soit partis, soit arrivés, comme le souligne le Vérificateur général, n'ayant pas nécessairement toutes les dispositions pour faire leur travail dans certains cas, contrairement à l'opinion du Vérificateur général, personnellement, moi, je pense que la meilleure des situations, ce serait celle-ci: celle où il y aurait une tutelle de l'organisme ou un conseil de tutelle dans lequel vous, Mme Bailly... Il faudrait que vous y soyez. Il faudrait que vous soyez le coeur de ce conseil de tutelle.
Je pense par ailleurs que, à partir des éléments soulevés par le Vérificateur général et le Protecteur du citoyen, comme on l'a souligné ici autour de la table, pour creuser le dossier...
Une voix: ...
Le Président (M. Chagnon): Non, pas uniquement pour chercher du pus, là du pus, il y en a beaucoup, on le sait mais pour aussi nous permettre d'avoir et vous permettre d'avoir une vision qui pourrait être différente, qui pourrait appeler un changement de la loi, un changement de la réglementation, je pense qu'une commission d'enquête publique serait le meilleur outil, l'outil le plus approprié pour approfondir toute cette situation-là.
Je pense qu'on devrait, nous, comme parlementaires, s'attendre à voir des recommandations de cet organisme, de cette commission-là qui pourraient juste dire quelques exemples davantage réorienter l'organisme à partir d'éléments comme l'avenir de l'autofinancement. La loi de 1990 a amené l'organisme à s'asseoir sur un autofinancement complet pour ses activités, il ne m'apparaît pas sain de penser qu'on puisse continuer comme cela, et, dans ce cadre-là, je pense que cette commission-là devrait étudier cette question-là.
Je pense qu'une commission devrait aussi être susceptible de suggérer des modifications légales quant à la structure de service. Et, quant à la structure administrative, je pense que le conseil de tutelle serait l'organisme le plus approprié pour y arriver. Ce serait l'organisme qui pourrait éventuellement suggérer... Le genre de suggestions que vous nous avez faites, c'est-à-dire quand vous dites: Ça nous prendrait 100 emplois de plus. Ce n'est pas évident en partant, mais ça pourrait être évidemment creusé et regardé en fonction des services que vous avez à donner, parce que, pour l'instant, on sait qu'il y a énormément de services qui devraient être donnés puis qui ne le sont pas.
J'ajoute, troisièmement, qu'une enquête policière devrait être faite. D'abord, l'enquête publique devrait aussi permettre d'entendre les parents et les groupes de défense des usagers ou des clientèles. On a une opération qui est faite par le Vérificateur général qui démontre qu'il y a des problèmes administratifs d'un bout à l'autre de la machine. Le Protecteur du citoyen est évidemment plus près des clientèles, mais je pense que cette commission-là aurait intérêt à écouter publiquement des parents ou des clientèles qui ont des choses, qui se sont sentis lésés dans le passé et, donc, à la suite de cette commission-là, pouvoir nous faire des recommandations, faire des recommandations au gouvernement qui, lui, devra suggérer des modifications légales.
Troisièmement, dis-je, l'enquête de l'Escouade des crimes économiques m'apparaît aussi...
M. Garon: ...la séance de travail, là. Est-ce qu'on a un ordre du jour? C'est marqué: Ajournement de la séance publique, séance de travail puis ajournement des travaux.
Le Président (M. Chagnon): Oui. Je dis tout de suite ce que je vais vous suggérer dans la séance de travail.
M. Garon: Bien, il me semble que ça devrait être fait en séance de travail, ça.
Le Président (M. Chagnon): Oui, mais je vous...
M. Garon: Là, on a un ordre du jour et on ne le respecte pas.
Le Président (M. Chagnon): Que je respecte. C'est les mots de la fin, alors je vous...
M. Garon: Bien, on a fini, il est 12 h 30.
Le Président (M. Chagnon): 12 h 30, oui. On va se réunir dans RC-161 pour compléter.
Alors, je pense qu'il devrait y avoir effectivement une enquête policière pour s'assurer de laver la réputation de l'organisme, de façon à ce qu'on puisse éviter à tout jamais une répétition de ce genre de choses.
M. Garon: M. le Président, question de règlement.
Le Président (M. Chagnon): Oui.
M. Garon: Une séance de travail, pour que ça soit les recommandations de la commission...
Le Président (M. Chagnon): Oui.
M. Garon: ...vous ne tirez pas les conclusions tout seul.
Le Président (M. Chagnon): Non, non, je les...
M. Garon: Alors, on était supposé d'avoir une séance de travail pour discuter de ça entre nous. Vous êtes en train de tirer des conclusions comme si vous étiez...
Le Président (M. Chagnon): Pas du tout.
M. Garon: Ça ne marche pas, ça.
Le Président (M. Chagnon): Non, non. Je suis en train, je répète... Ce que j'ai dit tout à l'heure, j'ai dit: Il m'apparaît qu'il y en a des choses sur lesquelles...
M. Garon: Il est 12 h 30. On est supposé ajourner la séance publique à midi...
Le Président (M. Chagnon): Il m'apparaît que...
M. Garon: ...pour faire la séance de travail.
Le Président (M. Chagnon): Oui, mais, si vous me permettez, je vais terminer. Il m'apparaît qu'il y a des choses qui doivent être regardées. Ce n'est pas, évidemment, des conclusions de la commission, c'est des conclusions que je pense que nous devons étudier en commission. C'est ça, tout simplement, et je pense qu'il devrait y avoir une obligation annuelle d'audition de votre organisme devant la commission des institutions. Et, quant à cette commission comme telle, elle devrait revenir l'automne prochain et réétudier et regarder... Elle devrait se réunir pour réévaluer le redressement de la situation qui a été fait en général dans votre organisme.
Ceci étant dit, je lève l'assemblée, j'ajourne notre commission sine die et je demande aux membres de la commission de venir ici, au RC-161, pour qu'on puisse regarder ça.
(Fin de la séance à 12 h 30)