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Version finale

36th Legislature, 2nd Session
(March 22, 2001 au March 12, 2003)

Thursday, October 18, 2001 - Vol. 37 N° 6

Audition du secrétaire général du Conseil exécutif et de la secrétaire du Secrétariat du Conseil du trésor concernant l'éthique au sein de l'administration gouvernementale


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-sept minutes)

Le Président (M. Kelley): Alors, je constate le quorum des membres de la commission de l'administration publique. Alors, je déclare la séance ouverte, en rappelant le mandat de la commission. La commission est réunie afin d'entendre le secrétaire général du Conseil exécutif et la secrétaire du Secrétariat du Conseil du trésor sur l'éthique au sein de l'administration gouvernementale québécoise, et ce, en vertu de la Loi sur l'administration publique.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements ou des participants... des membres temporaires?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gautrin (Verdun) viendra se joindre à l'équipe tout à l'heure.

Organisation des travaux

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme la Secrétaire. Alors, je pense que tout le monde a l'ordre du jour. Je vais relire ça rapidement. On va faire un exposé d'une dizaine de minutes, de M. le Vérificateur général. Ensuite, il y aura un exposé du secrétaire général du Conseil exécutif. Il y aura un exposé d'une vingtaine de minutes ? pardon ? et un exposé de la secrétaire du Secrétariat du Conseil du trésor, d'une autre vingtaine de minutes. Ensuite, il y aura des échanges avec les parlementaires. Tout ça va se terminer vers 12 h 20, quelque chose comme ça, pour permettre à certains collègues d'aller au caucus.

n (9 h 40) n

Alors, sur ça, juste un mot de bienvenue à M. St-Gelais, à Mme Jean, à M. le Vérificateur, comme d'habitude notre témoin privilégié devant la commission de l'administration publique. Et je pense que le sujet qui est devant nous ce matin est très important. On est au moment des grands changements dans la fonction publique québécoise suite à l'adoption de la loi n° 82, et le Vérificateur général ? qui est d'une certaine façon dans un mode de testament, je pense qu'on peut dire, parce que son mandat prend fin bientôt ? a jugé bon de mettre un chapitre dans son dernier rapport concernant la structure ou les mécaniques nécessaires pour assurer une attention accrue sur la question de l'éthique dans la fonction publique québécoise.

Et je trouve que c'est très important et, si on peut diviser les grandes questions qui sont devant nous ce matin, c'est un rôle de conseil: Est-ce qu'il y a une manière qu'on peut conseiller les fonctionnaires qui ont des questions éthiques? Est-ce qu'il y a des mécaniques qui sont nécessaires quant à la divulgation? Est-ce qu'il y a un moyen d'avoir une meilleure formation et peut-être un genre de code ou déclaration des principes qui seront importants? Et c'est quoi, les redditions de comptes qu'il faut donner aux parlementaires? Et peut-être la dernière question qui découle de tout ça, c'est une question de où vient le leadership pour assurer l'importance de ces questions dans la fonction publique québécoise.

Alors, j'essaie de résumer les grands principes, mais c'est vraiment maintenant le tour du Vérificateur général qui va faire ses remarques préliminaires, et après ça ça va être à M. St-Gelais et Mme Jean, à votre tour aussi, de faire le débat. Mais j'insiste surtout sur l'importance de cette question, dans un article qu'on veut donner une plus grande souplesse, décentralisation, responsabilisation à des membres de la fonction publique québécoise. Je pense que ce serait la modernisation de la fonction publique. Tout le monde est d'accord pour le faire, mais on exige en même temps une reddition de comptes peut-être plus rigoureuse. Comment différents partenaires dans ce projet... est-ce que nous pouvons travailler ensemble pour en arriver à souligner l'importance de l'éthique au sein de la fonction publique québécoise? Sur ça, je vais donner la parole à M. Breton.

Exposé du Vérificateur général

M. Guy Breton

M. Breton (Guy): M. le Président, Mmes et MM. les membres de cette commission, M. le secrétaire général du Conseil exécutif, Mme la secrétaire du Conseil du trésor. Soyez assurés que c'est avec un intérêt... avec intérêt que je participe à cette séance de la commission de l'administration publique qui souhaite aujourd'hui se pencher sur le sujet de l'éthique au sein de l'administration gouvernementale québécoise. Je vous rappelle que le tome I de mon rapport annuel pour 2000-2001 présente, dans le chapitre III, les résultats détaillés de ma vérification.

Je désire tout d'abord souligner que les travaux de vérification qui ont été effectués n'avaient pas pour but de rechercher des manquements à l'éthique. Ils visaient plutôt à s'assurer que les structures nécessaires étaient en place pour minimiser les risques que de tels manquements se produisent, et ce, tant au niveau des personnes oeuvrant dans le service public qu'à celui des organismes qui sont subventionnés ou ceux qui traitent avec l'administration gouvernementale québécoise.

Pour ce faire, nous avons rencontré certaines personnes au ministère du Conseil exécutif, au Secrétariat du Conseil du trésor et à l'ancien Secrétariat à la modernisation de la gestion publique dont les activités ont depuis été regroupées avec celles du Secrétariat du Conseil du trésor.

Nous avons aussi demandé à 50 entités faisant partie de l'administration gouvernementale québécoise de nous fournir divers documents et de répondre à un questionnaire portant sur nos critères d'évaluation. La sélection de ces 50 entités s'est faite de manière à favoriser la diversité de chaque groupe, c'est-à-dire les ministères, les organismes ou les entreprises et selon, entre autres, leur importance, la nature de leurs activités et la loi à laquelle leur personnel est assujetti.

Les critères d'évaluation que nous avons retenus pour nos travaux sont basés sur les grands principes énoncés par l'Organisation de coopération et développement économique, l'OCDE, en matière de gestion de l'éthique dans le service public. Enfin, nous avons pris connaissance d'une enquête menée par cette organisation auprès de ses pays membres et dont la publication a eu lieu pendant notre vérification. Nos travaux se sont déroulés de la mi-septembre 2000 jusqu'à février 2001, mais certains constats portent sur des situations antérieures à cette période. Ainsi, divers éléments ont été mis en place par l'administration gouvernementale québécoise en matière d'éthique au fil des ans.

Je constate toutefois que l'infrastructure actuelle de l'éthique pourrait être améliorée. Entre autres, il y a absence d'un corps commun de valeurs fondamentales et de règles minimales pour guider la conduite des détenteurs d'une charge publique. Ainsi, à la lecture des lois et des règlements qui s'appliquent exclusivement aux détenteurs d'une charge publique, nous constatons que ces derniers ne sont pas soumis à des valeurs ni à des règles communes pour guider leur conduite. L'examen des divers codes d'éthique et de déontologie obtenus des entités répondantes conduit à la même constatation.

Je note dans mon rapport que l'information transmise aux détenteurs d'une charge publique pour favoriser la compréhension et, du même coup, l'adhésion aux valeurs et aux règles actuellement définies pour certains d'entre eux n'est pas toujours claire et complète. Elle est même discordante parfois. Ainsi, notre analyse révèle que plusieurs codes n'explicitent pas et n'illustrent pas clairement la notion de conflit d'intérêts. De plus, nous avons constaté que certains administrateurs n'ont pas de code d'éthique et de déontologie, alors que c'est requis par la législation.

Au chapitre de la formation donnée au personnel des entités ayant fait l'objet de nos travaux, nous avons relevé qu'elle était souvent insuffisante. En effet, les activités de formation sur l'éthique concernaient surtout la protection des renseignements personnels. Bien que l'éthique couvre un domaine beaucoup plus vaste que cela, seulement cinq entités ont abordé l'éthique en général, soit par un cours d'introduction à l'éthique, soit en examinant le code d'éthique et de déontologie en vigueur.

Par ailleurs, les mesures incitant à un comportement éthique ne sont pas toujours adéquates. Un élément important qui incite le détenteur d'une charge publique à adopter un comportement éthique est la sanction qu'il peut encourir à la suite d'un écart de conduite, mais encore faut-il que ce manquement soit détecté. Or, parmi les 50 entités répondantes, près de la moitié nous ont révélé qu'elles ne disposent pas de mécanismes internes pour détecter les actes répréhensibles commis par des membres de leur personnel. Par ailleurs, seulement 22 % de ces entités ont mis en place des procédés pour détecter les manquements commis par des partenaires extérieurs.

En matière de reddition de comptes, finalement, l'OCDE propose d'utiliser un critère d'évaluation additionnel, soit l'éthique, afin de démontrer que les résultats n'ont pas été atteints sans égard aux moyens utilisés. Là encore, je constate qu'il y a beaucoup à faire.

Je voudrais également porter à votre attention que le Secrétariat du Conseil du trésor ainsi que le ministère du Conseil exécutif ont indiqué dans leurs commentaires que divers travaux sont en cours afin d'améliorer l'infrastructure de l'éthique.

En terminant, j'aimerais souligner l'excellente collaboration obtenue des 50 entités sélectionnées qui ont toutes répondu à notre questionnaire, et plus particulièrement les entités avec lesquelles nous avons eu des échanges plus soutenus, soit le ministère du Conseil exécutif, le Secrétariat du Conseil du trésor ainsi que l'ancien Secrétariat à la modernisation.

À mon tour, M. le Président, je vous offre ma pleine coopération, étant convaincu que les travaux de cette commission influencent directement la qualité de la gestion des deniers publics. Je vous remercie de m'avoir écouté.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Breton. Et maintenant, pour les membres de la commission, nous avons reçu une copie de la présentation de M. St-Gelais. Alors, bienvenue, M. St-Gelais, devant la commission de l'administration publique, et la parole est à vous.

Exposé du secrétaire général
du Conseil exécutif

M. Jean St-Gelais

M. St-Gelais (Jean): Je vous remercie beaucoup, M. le Président. M. le Président, Mme la députée, MM. les députés membres de cette commission, M. le Vérificateur général, Mme la secrétaire du Conseil du trésor, messieurs les experts externes invités. Je suis honoré de me présenter devant cette commission pour la première fois. Il s'agit d'une première pour moi. Je pense que c'est peut-être une première aussi au gouvernement. Ça fait un petit plus de sept mois que j'occupe ma fonction actuelle comme secrétaire général du gouvernement. Alors, je vous demanderai d'être indulgents à mon égard si les règles... je ne suis pas familier avec l'ensemble des règles. Et, s'il y a des accrocs à la procédure à l'occasion, vous me rappellerez à l'ordre et je m'y soumettrai.

Je suis... Je m'efforcerai de répondre, avec l'équipe de gens qui m'accompagne, au maximum à toutes les questions à la satisfaction des parlementaires ici présents. Je crois que les initiatives comme celle qui est prise par la commission sont nécessaires et importantes et qu'elles témoignent de la vitalité de la démocratie québécoise. Je pense que nous avons une fonction publique qui est professionnelle, intègre, de haute qualité. On n'a pas à... On doit en être fier et, avec les exercices comme celui qu'on mène ce matin avec vous, on ne peut qu'améliorer les choses.

n (9 h 50) n

Je suis accompagné pour... évidemment de Mme Diane Jean, secrétaire du Secrétariat du Conseil du trésor, qui a été invitée au même titre que moi pour ses fonctions; de M. Charles Grenier, qui est secrétaire général associé chargé du Secrétariat à la législation; de M. Gilles R. Tremblay, secrétaire général associé chargé du Secrétariat des emplois supérieurs; de M. Louis Sormany, qui est au Secrétariat à la législation, également au Conseil exécutif; de M. François Giroux, secrétaire associé au personnel de la fonction publique, au Secrétariat du Conseil du trésor; et de M. Jacques Lafrance, secrétaire associé aux marchés publics, au Secrétariat du Conseil du trésor également.

Alors, je tiens à vous remercier encore une fois de me donner l'occasion de vous dire de vive voix ce que j'ai déjà eu l'occasion d'exprimer par écrit au Vérificateur général lorsqu'il m'a demandé de lui transmettre les commentaires du ministère du Conseil exécutif sur le contenu du chapitre III de son rapport annuel 2001 intitulé L'éthique au sein de l'administration gouvernementale québécoise.

D'entrée de jeu, je tiens à dire que nous sommes globalement en accord avec les grands constats de son rapport et que nous partageons la même perception quant à la démarche à suivre afin de solidifier, appliquer et mieux faire connaître auprès des personnes concernées au premier chef et de la population en général l'infrastructure de l'éthique au sein de l'administration gouvernementale. Cependant, nous ne partageons pas nécessairement l'impression qui pourrait être véhiculée par le rapport à l'effet qu'il n'existe pas actuellement une infrastructure de l'éthique au niveau du secteur public.

Nous croyons en effet que les dispositions législatives et réglementaires qui régissent la fonction publique depuis déjà un bon nombre d'années ainsi que leur application pratique au quotidien ont toujours favorisé le comportement éthique des employés du secteur public et que les grandes valeurs éthiques maintenant officiellement reconnues par l'OCDE ont servi à l'époque de fondement à la rédaction de ces dispositions.

Je vous réfère d'ailleurs à cet égard à l'annexe I du cahier qui vous a été remis, qui est intitulée Analyse du contexte législatif et réglementaire relatif à l'éthique et à la déontologie dans la fonction publique. Cette analyse est intéressante en ce qu'elle rend justice à notre Loi sur la fonction publique, qui est un texte simple et bien fait contenant en son sein les grandes valeurs éthiques de base et dont l'application au fil des ans ? et ce, avant bien des États membres de l'OCDE ? a toujours permis à l'État québécois de pouvoir compter sur une fonction publique professionnelle, consciencieuse et d'un comportement éthique d'un très haut niveau.

J'estime aussi que les mécanismes traditionnels de détection, de contrôle et de sanction d'actes répréhensibles pouvant être commis ont également fait la preuve de leur efficacité au cours des ans et que notre fonction publique a toujours été et est encore plus que jamais extrêmement honnête. Je pense qu'il était important que cela soit dit.

Certes, le caractère épars et quelque peu vieillot de certaines dispositions concernant l'éthique et la déontologie méritait d'être revu, surtout en raison de leur apparition... surtout en raison ? pardon ? de l'apparition des textes législatifs plus modernes telle la nouvelle Loi sur l'administration publique, elle-même issue pour une bonne part, comme vous l'avez mentionné, M. le Président, des travaux de votre commission parlementaire. Mais, de là à laisser entendre que nous partons presque à zéro en matière d'éthique et de déontologie, il y a là une marge que, évidemment, je ne suis pas prêt à franchir.

C'est d'ailleurs sur le plan de cette appréciation globale que réside notre seule véritable différence de perception par rapport à celle du Vérificateur général, encore que, lors d'un colloque sur l'éthique organisé le 25 novembre 1999 par le Centre d'études Noël-Mailloux ? dont le directeur, M. François Pouliot, est avec nous, je crois ? le Vérificateur général a exprimé alors publiquement que, et je cite, «notre cadre juridique québécois semblait satisfaire à la recommandation de l'Organisation de coopération et de développement économique». L'écart de nos appréciations globales n'est donc finalement pas si grand que cela.

Maintenant, pour ce qui est des constats plus particuliers et des mesures contenues dans le rapport du Vérificateur général, je tiens tout d'abord à signaler que le gouvernement du Québec n'a pas attendu que ce dernier initie sa démarche de vérification avant de prendre les mesures nécessaires afin de consolider le système actuel. Nous étions au fait qu'il fallait s'y adresser et nous l'avons fait.

Comme il est mentionné dans le rapport, les préoccupations en matière d'éthique ont été prises en considération depuis plusieurs années par l'administration gouvernementale québécoise. Dans le contexte de la modernisation de la gestion publique, la façon de prendre en compte ces préoccupations se devait toutefois d'être revue, et c'est pourquoi une démarche concrète a été entreprise depuis quelques années pour adapter notre infrastructure de l'éthique à cette nouvelle réalité.

Au début des années quatre-vingt-dix, l'administration publique avait encore une éthique institutionnalisée, en ce sens que les valeurs sous-entendues dans les saines pratiques de gestion et un comportement éthique étaient généralement traduits en règles et normes administratives. Une telle situation s'expliquait facilement dans un environnement où il y avait peu de liberté dans le choix des moyens pour les administrateurs publics et le personnel de la fonction publique.

Par la suite, de nouveaux modes de prestation des services publics ont été introduits, notamment par le développement d'une nouvelle approche de gestion axée sur les résultats, la responsabilisation des fonctionnaires de l'État et la reddition de comptes. D'un système reposant sur la conformité à des normes et des règles, nous sommes passés à un nouvel environnement axé sur les objectifs avec une plus grande liberté d'action pour les gestionnaires.

Dès la fin de l'année 1994, un processus a donc été initié au sein de la fonction publique québécoise pour revoir notre infrastructure de l'éthique. Ainsi, le 29 novembre 1994, dans son discours d'ouverture de la Trente-cinquième Législature, le premier ministre du Québec annonçait qu'un projet de loi serait présenté pour fixer des règles de conduite en matière d'éthique dans le domaine de l'administration publique. Dès le mois de janvier 1995, le ministre de la Justice confiait à un groupe de travail le mandat de lui proposer des balises et des mécanismes pour améliorer les composantes de la dimension éthique dans la gestion des biens publics.

À la suite du rapport Côté sur l'éthique, la probité et l'intégration des administrateurs publics et à la tenue d'une commission parlementaire, l'Assemblée nationale a adopté le projet de loi n° 131, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et d'autres dispositions législatives concernant l'éthique et la déontologie, qui est en vigueur depuis le 1er janvier 1998 et qui couvre tant les administrateurs publics que les administrateurs des réseaux de la santé et de l'éducation. Le Règlement sur l'éthique et la déontologie en a découlé.

À la suite des modifications apportées au cadre juridique, d'autres dispositions habilitantes en matière d'éthique ont systématiquement été introduites, en 1996 et 1997, pour les membres des tribunaux administratifs et ceux de la Régie du logement. Certes, il ne s'agissait pas de l'aboutissement d'un processus, mais il n'en reste pas moins que des pas importants ont été franchis dans la bonne direction.

Enfin, il faut mentionner à l'actif partagé du gouvernement et des parlementaires la nouvelle Loi sur l'administration publique, qui a été sanctionnée le 30 mai 2000, qui, en raison de son côté innovateur et structurant, a elle-même généré au sein de l'appareil gouvernemental un questionnement important en rapport avec les différentes facettes de la gestion moderne de l'État, d'où la création, parmi sept autres tables de travail sous-ministérielles sur différents sujets reliés à la gestion publique, d'une table concernant spécifiquement l'éthique et la déontologie.

Dans sa volonté de faire face à cette nouvelle donne sur le plan de la fonction publique qu'est la conciliation permanente qui doit être faite entre la mission traditionnelle de la fonction publique, soit le soutien et le conseil auprès de l'autorité constituée, et les exigences d'une nouvelle Loi sur l'administration publique qui crée un nouveau cadre et une nouvelle philosophie de gestion, notamment en regard des services aux citoyens, de l'atteinte des résultats, de la transparence et de l'imputabilité, la table de travail sous-ministérielle a identifié deux nouveaux impératifs: premièrement, la nécessité de s'assurer que les citoyens reçoivent effectivement des services de qualité auxquels ils ont droit et, d'autre part, que le lien de confiance qui existe présentement entre les personnes, les groupes et les entreprises du Québec et la fonction publique de l'État soit développé et encore davantage renforcé dans ce contexte nouveau; deuxièmement, l'importance de valeurs claires, appropriées au service public et connues de tous, ainsi que de hauts standards éthiques.

Ces valeurs du service public québécois que nous partageons avec les États démocratiques modernes ont été identifiées par la table de travail comme étant les suivantes. Elles sont de quatre, si vous voulez: les valeurs démocratiques, les valeurs professionnelles, les valeurs liées à l'éthique et les valeurs liées aux personnes.

n (10 heures) n

Premièrement, en ce qui concerne les valeurs démocratiques, ces valeurs s'articulent autour de la notion fondamentale d'une fonction publique au service de l'intérêt public, tel que présenté et interprété par le gouvernement démocratiquement élu et exprimé dans les lois décrétées par l'Assemblée nationale. On peut penser plus particulièrement à la loyauté, l'intégrité, l'impartialité, le respect des droits et libertés de la personne et des règles de droit et la protection des renseignements personnels.

Deuxièmement, les valeurs professionnelles. On y retrouve les valeurs professionnelles... qu'on prenne notamment la compétence professionnelle, l'excellence, l'efficacité, la franchise, l'objectivité et le souci de la qualité des services aux citoyens.

Troisièmement, les valeurs liées à l'éthique. Ces valeurs comprennent notamment l'intégralité, la neutralité, la prise effective de responsabilités, la prudence, la justice, l'impartialité, la fiabilité, la discrétion, le respect de la loi et des procédures établies et la saine gestion des ressources publiques. Ces valeurs ne diffèrent pas de celles que l'on retrouve dans les autres secteurs de la société, mais elles revêtent un caractère particulier à cause de leur lien avec les valeurs démocratiques et professionnelles qui sont propres à la fonction publique.

Quatrièmement, les valeurs liées aux personnes. Ces valeurs que l'on peut qualifier d'existentielles et que l'on peut incarner ou vivre sont notamment la rigueur, la modération, le savoir-vivre, la courtoisie, la tolérance, l'ouverture d'esprit, le sens de la mesure, celui de la responsabilité, la compassion et l'empathie. Vous trouverez, en annexe II du cahier qui vous a été remis, pour de plus amples informations, un texte plus complet et réflectif sur ces grandes valeurs, intitulé Les valeurs contemporaines de la fonction publique québécoise.

Sur le plan des défis éthiques découlant de la modernisation de l'administration publique, il a aussi été établi que les enjeux de la modernisation de la gestion passaient par l'approfondissement par chaque ministère ou organisme de sa réflexion sur les défis particuliers qui s'imposaient à la lumière de la mission conférée à leur organisation et l'identification par chaque organisation des éventuelles nouvelles zones à risque, au plan de l'éthique et de la déontologie, qui découlent elles-mêmes chez elles des nouveautés... des nouvelles possibilités autorisées par la Loi sur l'administration publique.

Des recommandations de cette table de travail sous-ministérielle sont issues plusieurs initiatives importantes en matière d'éthique qui progressent actuellement au gouvernement, principalement au Secrétariat du Conseil du trésor. Parmi ces dernières, nous pouvons plus particulièrement distinguer celles-ci: une déclaration des valeurs fondamentales propres à l'ensemble du service public à être éventuellement soumise pour adoption par le Conseil des ministres et déposée à l'Assemblée nationale; un nouveau règlement sur l'éthique et la déontologie dans la fonction publique ? ce règlement sera mis au niveau avec celui concernant les administrateurs publics et traitera, entre autres, des règles d'après-mandat des fonctionnaires; des guides de saines pratiques de gestion applicables à tous les ministères et organismes; la mise sur pied d'un nouveau programme d'accueil pour les employés... pour les nouveaux employés de la fonction publique; la diffusion d'une nouvelle version du guide sur l'éthique dans la fonction publique; la tenue de séances de formation et de perfectionnement concernant l'ensemble des nouvelles initiatives en matière d'éthique et de déontologie; l'identification de personnes-ressources au sein des ministères et organismes en matière d'éthique et de déontologie. La secrétaire du Conseil du trésor, Mme Diane Jean, pourra sûrement traiter de ces sujets de façon beaucoup plus détaillée avec vous.

J'ajouterais que, sur le plan du perfectionnement, les sessions d'intégration à l'intention des administrateurs d'État et des dirigeants d'organismes nouvellement nommés comprennent maintenant un volet éthique et que des présentations spéciales ont été faites par M. Charles Grenier sur l'éthique au cercle des sous-ministre associés ou adjoints ainsi qu'au forum des présidents et dirigeants d'organismes.

Ces initiatives, qui devraient prochainement trouver leur aboutissement, s'inscrivent toutes dans l'esprit du rapport du Vérificateur général et font l'objet de la plupart des recommandations émises à la suite de sa vérification, d'où le fait que nous soyons à l'aise et sur la même longueur d'onde par rapport à leur contenu. Lorsque ces mesures auront été mises en place, nous sommes d'accord pour dire que nous pourrons alors prétendre à une véritable infrastructure de l'éthique au sein de l'administration gouvernementale québécoise et au sens où le Vérificateur général l'entend sur le plan de sa vérification comptable.

Bien sûr, d'autres actions en matière d'éthique et de déontologie restent à entreprendre et devront l'être dès lors que les mesures plus fondamentales auront été mises sur pied. Je pense en priorité à tout ce qui touche l'application le plus uniforme possible des mêmes règles à tous les détenteurs de charges publiques, pour reprendre le vocabulaire et l'harmonisation des termes de ces dernières, que les personnes en question soient régies par la Loi sur la fonction publique ou non.

C'est la voie qui nous est tracée par les passages du rapport du Vérificateur traitant, entre autres, de la section... de la situation, pardon, des 22 entités répondantes dont le personnel n'est pas régi par la Loi sur la fonction publique et qui ne donne pas l'impression de faire l'objet de mesures de contrôle efficaces et uniformisées. Il en va de même des directives ou règles supplétives émises par diverses entités dont le personnel est régi par la Loi sur la fonction publique.

Les dirigeants des organismes visés restent les premiers responsables sur le plan de leur administration et en sont imputables. Il s'agit là d'un grand principe qu'il ne faut pas perdre de vue. Cependant, tout en respectant l'autonomie et le particularisme de chaque entité visée, nous convenons que l'examen des lois concernées et des directives en question... des directives en question dans le but d'en faire un cadre normatif commun, clair et harmonisé devrait constituer une priorité gouvernementale en matière d'éthique et de déontologie au cours des années à venir.

Par ailleurs, le rapport fait état des défis nouveaux que pose la problématique de l'éthique et des nouvelles technologies de l'information. À ce sujet, vous trouverez en annexe III de votre cahier une note que mon prédécesseur adressait le 7 août 2000 à tous les sous-ministres et dirigeants d'organismes relativement à l'application des règles d'éthique et dans l'utilisation des nouvelles technologies. Cette initiative a permis d'effectuer une vaste opération de sensibilisation auprès du personnel et des organismes visés. Elle sera suivie par la diffusion prochaine d'orientations gouvernementales en la matière.

Je porte également à votre attention que le gouvernement a été étroitement associé au congrès de l'Association sur l'accès et la protection de l'information, qui a eu lieu les 24 et 25 mai 2001, dont le thème était Accès, confidentialité et éthique ? Bilan et tendances. Plusieurs personnes, dont de nombreux responsables de la protection des renseignements personnels au sein des ministères et organismes, qui ont participé à ce congrès poursuivent leur réflexion au sein de leur organisation respective contribuant ainsi aux efforts de sensibilisation.

Avant de conclure et de pouvoir échanger avec vous, j'aimerais attirer cotre attention sur le fait que certains passages du rapport, malgré nos nombreux échanges en la matière, peuvent toujours laisser entendre de par leur formulation que, sur le plan juridique, des manquements et des incohérences existent. Je pense, par exemple, à la façon de présenter les annexes III et IV du rapport du Vérificateur général, sur laquelle nous avons émis des réserves juridiques qui font que, selon nous, leur contenu peut être intéressant et informatif sans nécessairement par contre être le reflet de la réalité juridique. Vous trouverez ces commentaires de nature juridique ainsi que certains autres sur des passages plus techniques du rapport à l'annexe IV du cahier qui vous a été remis.

En conclusion, l'éthique constitue une problématique inépuisable et en constante évolution. Il s'agit également d'un sujet qui, s'il est bien traité, est une source de cohésion et de motivation au sein de toute l'organisation... de toute organisation. Personne ne peut prétendre à un monopole de vérité face à un sujet aussi complexe ou se comporter comme si l'ensemble des règles existantes en la matière était immuable.

La manière dont un État fait face à ces questions constitue maintenant un indice du niveau démocratique d'une société, ce qui, même si le Québec s'est toujours bien comporté en la matière, doit nous interpeller constamment. Je puis vous assurer que ce quatrième e qui constitue maintenant économie, efficience, efficacité et éthique de toute véritable reddition de comptes au sens où l'entend le Vérificateur ainsi que le contenu du rapport constituent et surtout constitueront une préoccupation constante du gouvernement et que nous allons poursuivre, en concertation avec toutes les personnes intéressées et au premier chef les parlementaires, les efforts initiés au cours des dernières années en matière d'éthique. Je vous remercie de votre attention.

n (10 h 10) n

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. St-Gelais. Vous m'avez fait penser... et j'ai dû présenter nos deux ressources externes, mais il y avait deux personnes qui ont aidé les membres de la commission ? trois ? qui ont aidé, un qui a travaillé avec le Vérificateur général... Alors, je veux présenter M. Yves Boisvert, qui a aidé les membres de la commission hier, dans notre séance de travail, également M. François Pouliot, qui est le directeur du Centre d'études Noël-Mailloux en éthique et en psychologie, et finalement M. Pierre Bernier, qui est chargé de mission auprès de l'ENAP. Alors, bienvenue à ces trois personnes qui ont enrichi les réflexions des membres de la commission hier et qui sont bienvenues ce matin.

Sur ça, je vais donner la parole maintenant à Mme Diane Jean. Mme Jean.

Exposé de la secrétaire
du Secrétariat du Conseil du trésor

Mme Diane Jean

Mme Jean (Diane): Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, Mmes et MM. membres de la commission, M. le Vérificateur général, M. le secrétaire général, chers experts, collègues. À l'instar du secrétaire général, je peux vous dire qu'au Secrétariat du Conseil du trésor nous sommes généralement d'accord avec les recommandations contenues dans le rapport du Vérificateur général portant sur l'éthique au sein de l'administration publique québécoise. Je vous présenterai d'ailleurs plusieurs actions du Secrétariat du Conseil du trésor qui poursuivent le même objectif que ces recommandations, soit la consolidation de l'infrastructure de l'éthique dans l'administration publique québécoise.

Par ailleurs, j'aimerais vous mentionner deux éléments du contexte gouvernemental actuel qui à mon avis incitent le Secrétariat à poser des gestes précis en matière d'éthique. D'abord, l'arrivée de nouveaux employés dans le cadre du renouvellement de la fonction publique nous apparaît un moment opportun pour sensibiliser et informer la relève à l'éthique. C'est également l'occasion de faire un rappel à tous les autres employés sur l'éthique et de pouvoir promouvoir les valeurs et les normes de comportement attendu dans la fonction publique. Ensuite, la fonction publique est en voie de moderniser son cadre de gestion. Cette modernisation a pour objectif ultime l'amélioration des services aux citoyens. Elle viendra modifier notre façon de concevoir les relations entre l'État et les citoyens, mais elle marquera également le passage vers un nouveau modèle de gestion à la fois plus souple et mieux adapté pour répondre aux attentes et aux besoins de la population québécoise.

Compte tenu de l'allégement des normes de gestion, nous croyons pertinent, comme plusieurs pays membres de l'OCDE, de faire appel au raisonnement éthique comme mode de régulation du comportement des individus, et ce, à tous les niveaux de l'organisation. Dans cette perspective, le renforcement de l'éthique à travers diverses mesures faisant partie d'une infrastructure de l'éthique nous apparaît essentiel pour orienter le comportement et faciliter une prise de décision éclairée. En effet, les actions que nous estimons nécessaires sont de l'ordre du renforcement, car, comme l'a souligné le secrétaire général un peu plus tôt, les principales assises de l'infrastructure de l'éthique sont présentes depuis longtemps dans la fonction publique, et le comportement des employés est généralement d'un niveau élevé sur le plan de l'éthique.

Le Secrétariat du Conseil du trésor a procédé à une analyse des principaux éléments de l'infrastructure de l'éthique préconisés par l'OCDE au regard de l'infrastructure actuelle pour le personnel assujetti à la Loi sur la fonction publique. Je vais donc vous présenter notre point de vue quant au portrait comparatif de cette infrastructure.

En ce qui concerne l'engagement politique, l'OCDE préconise... précise qu'il se traduit par la mise en place de dispositifs législatifs et institutionnels qui renforcent les comportements éthiques et sanctionnent les actes répréhensibles. Il ne fait pas de doute que cet engagement existe depuis fort longtemps dans la fonction publique. En effet, la Loi sur la fonction publique de 1965 et celles de 1979 et de 1983, modifiées plusieurs fois par la suite, énoncent les valeurs et les règles communes dans la fonction publique. C'est ainsi que nous y retrouvons principalement la loyauté, la compétence, l'intérêt public, l'impartialité, l'honnêteté, le traitement du public avec égard et diligence, la discrétion et la neutralité politique.

L'OCDE prône également un cadre juridique efficace. Or, nous possédons, dans la fonction publique, des règles et des sanctions, énoncées dans la Loi sur la fonction publique et précisées au Règlement sur les normes d'éthique, de discipline et le relevé provisoire des fonctions dans la fonction publique. À titre d'exemple, la Loi sur la fonction publique indique qu'un fonctionnaire qui contrevient aux normes d'éthique et de discipline est passible de mesures disciplinaires pouvant aller jusqu'au congédiement. De plus, le Règlement sur les normes d'éthique, de discipline et le relevé provisoire des fonctions dans la fonction publique précise les différentes mesures disciplinaires qui, selon la gravité de la faute, peuvent prendre la forme suivante: une réprimande, une suspension ou un congédiement.

Toujours selon l'OCDE, les normes d'éthique doivent être claires. Or, en plus des règles stipulées dans la Loi sur la fonction publique et au règlement sur les normes d'éthique dans la fonction publique, certains ministères et organismes ont des lignes de conduite qui leur sont propres, par exemple à la Société de l'assurance automobile du Québec et au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

De plus, la brochure intitulée L'éthique dans la fonction publique québécoise explicite ces normes. Les règles, regroupées sous quatre volets, sont les suivantes: le premier volet, soit la prestation de travail, qui comprend l'assiduité et la compétence; le deuxième volet porte sur le lien avec l'organisation et il traite de l'obéissance hiérarchique, de la loyauté et de l'allégeance à l'autorité constituée; le troisième volet s'intéresse aux services publics par l'entremise de la courtoisie, la non-discrimination et de la diligence; le quatrième et dernier volet traite du comportement; il y est question de la discrétion, de la neutralité politique et la réserve, de l'honnêteté et l'impartialité, de l'absence de conflit d'intérêts et de l'exclusivité du service. En se conformant à ces règles de conduite, les employés de l'État maintiennent la réputation d'excellence et d'honnêteté de la fonction publique québécoise.

L'OCDE mentionne aussi que des procédures et des sanctions appropriées devraient exister en cas de comportement fautif. Comme je l'ai mentionné il y a quelques instants, des sanctions administratives et disciplinaires sont prévues à la Loi sur la fonction publique et au règlement qui en découle. Depuis, des enquêtes sont effectuées dans les ministères et organismes, notamment par les directions de vérification interne. J'ajoute que certaines de ces directions comprennent un service d'enquête administrative.

L'OCDE préconise que les employés puissent bénéficier d'information, de formation et de conseils en matière d'éthique. La formation facilite en effet la sensibilisation aux problèmes d'éthique et permet de développer des compétences essentielles pour l'analyse éthique et le raisonnement moral.

Présentement, la majorité des ministères et organismes informent et sensibilisent leurs nouveaux employés au moment de leur accueil. Certains ministères et organismes forment leur personnel sur le sujet, tout particulièrement les gestionnaires. De plus, chaque ministère et organisme doit former son personnel à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. La fonction conseil, quant à elle, est assumée par les supérieurs immédiats et hiérarchiques ainsi que par les directions de vérification interne, de services juridiques et de ressources humaines.

Selon l'OCDE, l'interaction croissante entre le secteur public et privé exige qu'une plus grande attention soit portée aux valeurs du service public et elle exige aussi que les partenaires extérieurs s'engagent à respecter ces mêmes valeurs. Pour ce faire, des lignes directives... directrices claires en matière de relation entre le secteur public et le secteur privé devraient exister. Dans cette optique, le Secrétariat du Conseil du trésor a promulgué des lignes de conduite liées à l'éthique dans les documents types d'appels d'offres. Ces documents, qui sont publiés dans l'Intranet gouvernemental, sont utilisés par la très grande majorité des ministères et organismes. C'est ainsi que des clauses relatives notamment à la notion de conflit d'intérêts et à la protection des renseignements personnels ou confidentiels sont stipulées dans ces documents.

Par ailleurs, l'OCDE mentionne que la fonction publique doit posséder de bonnes conditions d'emploi afin de favoriser un comportement conforme à l'éthique. Il est notamment question des perspectives de carrière, d'un niveau approprié de rémunération et d'un régime au mérite qui s'applique à la promotion et au recrutement. À cet égard, la fonction publique offre des conditions très favorables. Le régime au mérite est un principe fondamental de la Loi sur la fonction publique. Les règles en matière de dotation sont claires à cet effet. La rémunération fait l'objet de négociations avec les syndicats. La permanence des employés est aussi prévue dans la Loi sur la fonction publique. Cette loi, à l'article 3, précise notamment des principes fondamentaux tels: égalité d'accès à tous les citoyens à la fonction publique, impartialité et équité des décisions affectant les fonctionnaires et la contribution optimale des diverses composantes de la société québécoise à la fonction publique.

De plus, en cas de désaccord, des mécanismes de recours sont à la disposition des individus, notamment auprès de la Commission de la fonction publique. Selon l'OCDE, il ne suffit pas que les administrations publiques se contentent de se doter de structures fondées sur le respect de règles, les politiques et les pratiques de gestion d'un organisme devraient permettre de démontrer son attachement aux normes éthiques. À cet égard, les politiques et les pratiques de gestion véhiculées par le Secrétariat du Conseil du trésor ont toujours eu comme toile de fond de favoriser un comportement éthique. Le processus de décision... de prise de décision, d'après l'OCDE, doit être transparent, et des mécanismes de reddition de comptes doivent exister.

Or, il est prévu à l'article 29 de la Loi sur l'administration publique que les sous-ministres et les dirigeants d'organisme peuvent être invités à comparaître en commission parlementaire, comme c'est le cas aujourd'hui. Les parlementaires peuvent alors discuter de la gestion administrative, notamment des pratiques en matière d'éthique qui sont adoptées par les ministères et organismes.

De plus, les médias et toute autre personne ou organisme peuvent avoir accès aux documents grâce à la Loi sur l'accès. Cette loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, et ce, quelle que soit la forme de ces documents, écrits, graphiques, sonores, visuels, informatisés ou autres. Sous réserve de diverses dispositions concernant la protection des renseignements personnels. De plus, plusieurs outils de gestion émanant des ministères et organismes sont rendus publics dans le cadre de la Loi sur l'administration publique.

n (10 h 20) n

Comme vous pouvez le constater, les résultats de l'analyse réalisée par le Secrétariat des principes de l'OCDE me permettent d'affirmer que l'infrastructure de l'éthique dans la fonction publique québécoise est bel et bien développée et a été mise en place dans les ministères et organismes. Toutefois, nous sommes d'avis que certains aspects doivent être améliorés en vue d'une consolidation de l'infrastructure de l'éthique, comme l'a recommandé le Vérificateur général. D'ailleurs, avant même la parution du rapport, le Secrétariat du Conseil du trésor avait amorcé plusieurs actions dans ce domaine.

J'aimerais souligner que toutes les actions du Secrétariat sont prises en association avec les ministères et les organismes. En outre, il est essentiel de respecter leur autonomie pour assurer l'imputabilité. De fait, ce sont les sous-ministres et les dirigeants d'organismes qui sont responsables de mettre en place les différents éléments de l'infrastructure de l'éthique et de faire notamment respecter les règles qui sont adoptées par le gouvernement. Ainsi, au printemps dernier, à la suite des réflexions de la table de travail sur l'éthique et la déontologie, qu'a mentionnée le secrétaire général dans son intervention, le Secrétariat a entrepris la révision du Règlement sur les normes d'éthique, de discipline et le relevé provisoire des fonctions dans la fonction publique ainsi qu'une démarche portant sur les valeurs dans la fonction publique.

Les annexes I et II de ma présentation présentent le projet de règlement et le projet de déclaration de valeurs. Les modifications prévues au règlement visent à actualiser les règles pour tenir compte de l'adoption de la Loi sur l'administration publique, de l'évolution des pratiques de gestion et des règles énoncées au Règlement sur l'éthique et la déontologie des administrateurs publics. Par exemple, nous prévoyons des règles portant sur l'après-mandat.

Ainsi, le fonctionnaire qui a cessé d'exercer ses fonctions doit se comporter de façon à ne jamais tirer d'avantages indus de ses fonctions antérieures dans la fonction publique. De plus, le fonctionnaire ne doit pas communiquer une information confidentielle ni donner à quiconque des conseils fondés sur l'information non disponible au public concernant l'État ou un tiers avec lequel il avait des rapports directs importants au cours de l'année qui a précédé la fin de son emploi. Il est interdit, dans l'année qui suit la fin de son emploi, d'agir au nom ou pour le compte d'autrui relativement à une procédure, à une négociation ou à une autre opération au sujet de laquelle il détient de l'information non disponible au public et dont il a pris connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. De plus, les fonctionnaires du ministère ou de l'organisme pour lequel le fonctionnaire travaillait à la fin de son emploi ne peuvent traiter, dans les circonstances qui sont prévues au deuxième alinéa du projet, avec ce fonctionnaire dans l'année où il a quitté son emploi.

Le projet de règlement confie expressément au sous-ministre ou au dirigeant de l'organisme la responsabilité de s'assurer des normes d'éthique et discipline par les fonctionnaires de son ministère ou de son organisme.

En outre, le Secrétariat a préparé un projet de déclaration de valeurs fondamentales communes aux ministères et organismes dont le personnel est nommé en vertu de la Loi de la fonction publique. En sus des considérations légales, quelques critères ont servi au choix de ces valeurs. Ainsi, les valeurs retenues devaient: promouvoir la démocratie et traduire la volonté de servir l'intérêt public; soutenir l'action quotidienne et guider la prise de décision; être partagées par le plus grand nombre de personnes et refléter un large consensus; être limitées en nombre afin de faciliter leur compréhension; être en relation les unes avec les autres et se renforcer mutuellement; s'interpréter facilement et être de celles dont on se souvient aisément.

Dans le cadre de ce mandat, nous avons pris connaissance des valeurs privilégiées par d'autres fonctions publiques. À titre d'exemple, le Royaume Uni a adopté les valeurs suivantes: objectivité, intégrité, honnêteté, transparence, altruisme, la responsabilité et les capacités de gestion. L'OCDE, dans ses études, a mis en exergue les valeurs les plus fréquemment citées par les 29 pays membres. On y trouve: l'impartialité, 24 fois; la légalité, 22; l'intégrité, 18; la transparence, 14; l'efficience, 14; l'égalité, 11; responsabilité, 11; la justice, 10.

Dans le projet de déclaration de valeurs de la fonction publique québécoise, le Secrétariat a identifié les cinq valeurs suivantes: premièrement, l'intégrité. Le fonctionnaire se conduit d'une manière juste et honnête. Il évite de se placer dans une situation où il se rendrait redevable envers quiconque pourrait l'influencer dans l'exercice de ses fonctions.

Deuxièmement, l'impartialité. Le fonctionnaire fait preuve de neutralité et d'objectivité. Il prend des décisions dans le respect des règles applicables et en accordant une chance égale à tous.

Troisièmement, le respect. Le fonctionnaire manifeste de la considération à l'égard de toutes les personnes avec qui il transige dans ses fonctions. Il fait preuve de courtoisie, d'écoute et d'empathie dans ses relations avec les citoyens et les autres fonctionnaires.

Quatrièmement, la compétence. Le fonctionnaire s'acquitte de ses tâches avec professionnalisme. Il met à profit ses connaissances, ses habiletés et ses expériences. Il est responsable de ses décisions et de ses tâches ainsi que de l'utilisation judicieuse des ressources mises à sa disposition. Il fait preuve de diligence lorsqu'il interagit avec les citoyens et les autres fonctionnaires.

Finalement, la neutralité politique. Le fonctionnaire prend des décisions et agit de manière à servir l'intérêt public. Il remplit ses fonctions sans considération partisane. Il fait preuve de réserve dans la manifestation de ses opinions politiques.

Je tiens à vous souligner que le projet de déclaration de valeurs dans la fonction publique n'exclut pas la possibilité pour chaque ministères et organisme d'ajouter des valeurs plus spécifiques à sa mission. Ce projet de déclaration de valeurs fait l'objet de consultations depuis la fin du mois de juin dernier. Jusqu'à maintenant, les commentaires recueillis des ministères et organismes sont favorables aux propositions du Secrétariat du Conseil du trésor. D'après la plupart des répondants, le projet reflète bien les valeurs qui doivent guider la fonction publique. Certains ministères et organismes ont d'ailleurs signalé que les valeurs proposées correspondent aux valeurs déjà adoptées dans leur organisation.

Par ailleurs, le Vérificateur général recommande spécifiquement dans son rapport d'améliorer l'information et la formation relatives à l'éthique. Nous convenons que des mesures de sensibilisation aux normes et aux comportements attendus en matière d'éthique sont nécessaires. Il existe déjà des moyens visant la sensibilisation et la formation des employés à l'éthique; d'autres mesures viendront progressivement s'ajouter. Certaines de ces mesures visent l'ensemble du personnel, alors que d'autres sont spécifiques aux gestionnaires. Entre autres, la dimension de l'éthique fera partie du programme d'accueil gouvernemental pour les nouveaux employés de la fonction publique. Ce programme permettra à tout nouveau membre du personnel régulier d'acquérir des connaissances de base sur l'éthique et les valeurs dans la fonction publique.

Le Secrétariat du Conseil du trésor a confié à l'École nationale d'administration publique un mandat en vue de concevoir et de diffuser ce programme d'accueil. Près de 1 500 personnes par année, selon nos prévisions, seront appelées à suivre cette formation, qui débutera le 5 décembre. La dimension de l'éthique est également prise en compte dans le cadre du programme d'apprentissage des nouveaux cadres de la fonction publique. Le Secrétariat du Conseil du trésor a confié à l'ÉNAP la gestion de ce programme.

De plus, un projet concernant le développement d'un programme de sensibilisation et de formation axé notamment sur la résolution de situations présentant une problématique éthique est aussi en voie d'élaboration. Comme vous pouvez le constater, le Secrétariat du Conseil du trésor soutient déjà les ministères et organismes dans le domaine de l'éthique et continuera de le faire dans l'avenir.

Le Secrétariat a également l'intention de soutenir un réseau de répondants en éthique. Ces personnes seraient désignées par les ministères et organismes. Elles devraient être désignées en fonction de leur rôle dans l'organisation, de leurs qualités de professionnels et de leurs connaissances en matière d'éthique. Ce réseau aurait notamment pour objectif de favoriser les échanges sur les différentes problématiques en matière d'éthique.

Divers outils sont aussi en développement afin de faciliter la prise en charge par les ministères et organismes du dossier de l'éthique. Par exemple, dans le but d'informer les gestionnaires des principaux développements en matière d'éthique, une veille stratégique est activement maintenue. Cette veille permet de suivre les expériences les plus probantes dans d'autres administrations publiques ainsi que dans les ministères et organismes québécois. Les résultats de ce recensement seront mis à la disposition des hauts dirigeants et gestionnaires de la fonction publique afin de les soutenir au regard de l'éthique dans leur organisation.

Voilà quelques actions que nous allons prendre à court terme pour la fonction publique. D'autres pourront s'ajouter éventuellement, puisque nous comptons rester à l'affût des besoins des ministères et organismes. Enfin, en ce qui concerne les organismes visés par la Loi sur l'administration publique, le Secrétariat du Conseil du trésor assumera un leadership en cette matière. Ainsi, nous entendons intervenir auprès des dirigeants et des organismes afin de promouvoir les valeurs et normes d'éthique adéquates. Des actions seront également prises à cette fin. Bien entendu, ce leadership sera exercé dans le respect de l'autonomie des organismes.

En conclusion, je suis d'avis que l'infrastructure de l'éthique de la fonction publique québécoise répond adéquatement aux principes de l'OCDE. Il reste cependant des aspects à améliorer. Au cours des prochains mois, nous poursuivrons les actions entreprises afin d'améliorer notre infrastructure de l'éthique. Je vous remercie de votre attention.

Discussion générale

Adaptation de la notion d'éthique aux nouvelles
valeurs de la fonction publique

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Jean, et merci beaucoup pour ces deux présentations. Peut-être, je vais poser la première question, parce que les messages que je reçois des deux présentations sont en accord avec les constats du Vérificateur général. Cependant, insister qu'on est pas... on part pas de zéro, qu'il y avait des règlements, des lois, des activités qui étaient mis en place dans le passé. Alors, on a un certain cadre existant. Il y a peut-être un besoin de consolidation, si j'ai bien compris.

n (10 h 30) n

Mais d'où vient le changement? Peut-être que c'est ça, le sens de ma question. Et j'ai devant moi un tableau qui, je pense, vient dans la foulée du rapport Tait, à Ottawa, où, à l'addition des quatre sections des valeurs traditionnelles: valeurs liées aux personnes, valeurs liées à l'éthique, valeurs démocratiques et valeurs professionnelles ? alors, je pense, ça regroupe les quatre qu'on trouve dans votre présentation, M. St-Gelais ? ils ont ajouté les nouvelles valeurs professionnelles, et c'est là où ils ont mis un certain accent sur l'innovation, l'initiative, créativité, horizontalité, dans l'optique qu'on veut changer nos façons de faire dans le gouvernement.

Et, moi, je sais... juste une expérience comme député. Quand quelqu'un vient dans mon bureau de comté, qui a un problème qui touche deux ministères, je dis: Bonne chance! Parce que, souvent, quelqu'un qui est pris entre les deux, c'est souvent très complexe, parce qu'on essaie de trouver une solution. Entre autres, je me rappelle, dans la foulée de la crise d'Oka, les personnes qui avaient... J'avais un commettant qui était en train de peinturer le pont Mercier au moment du déclenchement de la crise. Alors, à quel moment est-ce que les responsabilités du ministère des Transports étaient impliquées? Il y avait un décret du gouvernement... gouverné par le ministère de la Sécurité publique, pour une compensation pour les personnes touchées par la crise d'Oka. Et ce pauvre monsieur, ça a pris trois, quatre ans pour régler l'affaire, parce qu'un ministère disait: À une certaine limite, c'est de mes responsabilités. Et il était référé à l'autre, il disait: Non, c'est pas ici, il faut retourner à l'autre.

Alors, comment encourager ces genres de changements? Et c'est peut-être ça que je cherche dans vos présentations qui sont à la fois rassurantes. Mais, dans l'optique qu'on veut faire les changements, qu'on veut changer les mentalités, est-ce que, dans vos réflexions, il y a place d'insister qu'on veut que les choses changent? Parce qu'on a fait... Tout le processus de la loi n° 82, on a fait beaucoup de changements pour donner une plus grande souplesse. Alors, comment, dans cette réforme, est-ce qu'on va insister davantage sur les valeurs additionnelles?

M. St-Gelais (Jean): Oui, je pense que votre commentaire, votre question est tout à fait pertinente, parce que ça fait l'objet des défis auxquels toute la fonction publique, tout l'appareil de l'État est confronté. Moi, je dirais que, si nos présentations indiquent... sont rassurantes puis indiquent que tout va pas trop mal, tout compte fait, même assez bien, c'est parce que, je crois... c'est également en général ce que nous a dit le Vérificateur général dans ses recommandations. Brièvement, là, moi, j'ai retenu ? vous allez peut-être dire: On retient les bouts qui nous intéressent le plus ? que le Vérificateur général mentionnait, entre autres, qu'en regard de l'infrastructure il fallait consolider, compléter, améliorer puis poursuivre ? des termes que j'ai pris dans son rapport, dans ses recommandations, à 3.98 ? ce qui veut dire que, à mon avis, on est, pour l'essentiel du rapport, on a la même perception puis on n'est pas en divergence, loin de là.

Par contre, à ce que vous mentionnez: Comment adapter l'éthique aux nouvelles valeurs qui doivent se refléter dans la fonction publique? le défi, à mon avis, est double. Il y a premièrement à insister puis insérer à tous les jours, dans chacun des ministères et organismes, cette nouvelle façon de gérer. La nouvelle Loi sur l'administration publique a été adoptée récemment. Les ministères et organismes savaient que les choses progressaient. L'Assemblée nationale a statué récemment. Et tous les ministères et organismes ont dû déposer leur plan stratégique, leur déclaration de services aux citoyens. Ils ont à rendre des comptes. C'est nouveau, mais tout le monde est aujourd'hui là-dedans.

Comment ça va se traduire dans chacun des ministères et organismes? C'est à chacun des ministères et organismes auxquels revient la tâche d'incarner à tous les jours, dans le travail qu'ils ont à faire auprès de la population, auprès des services publics... et ce n'est pas simple. Quand on veut... Avec l'évolution des technologies de l'information, de la recherche en biotechnologies, en tout ce qu'on veut nommer, en pharmaceutique, en ce qu'on connaît bien au Québec, où à bien des égards on est des leaders dans le monde, on est les premiers, et je crois qu'il faut en être fiers, eh bien, ça nous pose de nouveaux défis, la fonction publique. Quand un dirigeant d'organisme est interpellé par un dirigeant d'entreprise qui lui dit: J'ai trouvé la meilleure recette au monde, il faut que vous m'aidiez tout de suite, sans procédure d'appel d'offres, sans rien, sinon on va rater le bateau, bien, ça dépose... ça soulève de nouveaux défis qui étaient pas présents quand on parlait plus... uniquement de faire des routes. J'ai rien contre faire des routes, il faut en faire, c'est important, mais les pratiques et les modifications, là, sont pas d'aussi grande envergure que les changements auxquels vous avez fait référence, M. le Président: initiatives, nouvelles technologies, c'est toutes ces choses-là.

Alors, à mon avis, le règlement sur l'éthique devra suivre en parallèle avec les nouvelles façons de faire dans chacune des organisations. Ça va être à nous, moi dans mon rôle, et, au Secrétariat du Conseil du trésor, pour Mme Jean, c'est la même situation... on devra s'assurer que les ministères qui sont confrontés les plus à ces nouveaux changements là sont ceux qui adaptent le plus rapidement possible leurs nouvelles pratiques de gestion en matière d'éthique à ce nouvel environnement là. Ce n'est pas simple, c'est quelque chose qui à tous les jours... auquel on est confronté, et il faut que chacun des administrateurs d'État se demande, en sa conscience, quand arrivent de nouvelles situations: Comment je peux réagir? qu'il fasse un... On nous demande en même temps d'agir à tous égards de façon intègre, impeccable, et il faut le faire, mais aussi de ne pas manquer aucune opportunité d'être à l'avant-plan, etc. C'est pas simple, mais c'est le travail qu'on a choisi de faire, puis je crois que tout le monde de la fonction publique québécoise essaie de le faire correctement. Je sais pas si ça répond en partie à votre question?

Leadership en matière d'éthique

Le Président (M. Kelley): Non, non, ça répond, mais ça revient toujours... Quand nous avons fait les audiences publiques sur le projet de loi n° 82, une des critiques ou une des questions qui étaient soulevées souvent, c'est la notion que ça prend un champion, un leader qui va... parce qu'on demande d'aller dans deux sens... en même direction, dans le sens qu'on veut éliminer, dans la mesure du possible, les règlements, les balises, les cadres, et tout ça, et créer un climat d'une plus grande souplesse. Alors, je sais pas... en haut, on va tout dire, parce que, si on fait ça, on va dans le contre-courant de l'esprit de la modernisation. Mais, par contre, comment est-ce qu'on va envoyer le signal que l'éthique est très importante et que souplesse, quand même, doit être faite à l'intérieur de certaines balises, certaines préoccupations? L'image du Vérificateur général, dans son rapport, c'était qu'il souhaite que, sur les autoroutes, tout le monde conduise bien. Alors, on peut rester uniquement sur un souhait, ou peut-être il faut dire quand même: Il y a une limite de 100 km à l'heure, il y a quelques...

Une voix: Polices.

Le Président (M. Kelley): ... alcool au volant, et toutes les autres choses qu'il faut mettre aussi pour donner un certain sens à notre souhait, et c'est pas uniquement un voeu pieux, mais il y a quand même...

n (10 h 40) n

Dans les mêmes choses, je pense qu'on s'entend sur quelques grandes valeurs. Je pense qu'elles sont bien énumérées dans les présentations. Mais comment insister et comment en soi la formation, et je pense à une question précise, qu'au moment qu'on embauche quelqu'un, qu'ils sont conscients que l'éthique, c'est vraiment important et c'est pas juste: On va vous donner un dépliant que peut-être vous allez lire, que peut-être que ça va être à lire, dans la grande pile des choses à lire qui sont sur tous nos bureaux ? surtout le mien... Mais comment envoyer le signal, envoyer le leadership que ça, c'est les questions qui sont préoccupantes? C'est pas qu'on veut gérer toutes ces questions, c'est pas à nous autres, mais de dire que ça, c'est des choses très importantes.

Parce que, surtout dans le domaine de peut-être la protection des renseignements confidentiels, on a eu quand même des problèmes, et c'est les cas isolés et c'est toujours dans les cas de ne pas peinturer l'ensemble de la fonction publique avec... C'est comme les politiciens; règle générale, les politiciens sont des hommes et des femmes dévoués, honnêtes, et tout le reste. Il y en a quelques-uns qui font défaut, alors tout le monde va dire que tous les politiciens sont des pas bons. Dans le même sens que... je dirai pas la même chose sur les fonctionnaires, mais il faut, surtout dans le domaine de la protection des renseignements personnels, ça fait plusieurs manchettes, et il y a des problèmes, il y avait des lacunes, et les nouvelles technologies, que vous avez évoquées, compliquent l'affaire davantage, parce qu'il y un plus grand couplage des fichiers, il y a une plus grande circulation des renseignements, la capacité de garder des renseignements est accrue.

Alors, le problème est de plus en plus important, là. Qui mène? C'est qui, le leader? C'est qui, le champion? tout en respectant l'esprit de la modernisation.

M. St-Gelais (Jean): Si vous me le permettez, je vais dire quelques mots, puis je crois que Mme Jean souhaiterait également prendre la parole, si vous le jugez utile.

Je pense que vous avez tout à fait raison, il faut que la fonction publique sente qu'il y a une direction qui est donnée, qu'il y a un leadership, que c'est pas seulement de belles paroles qu'on dit à l'occasion, même en commission, puis, quand la commission parlementaire est terminée, on passe à autre chose, puis quel est le prochain problème. Il faut vraiment que ce soit incarné à tous les jours et, pour le faire, ça commence peut-être au premier chef avec moi. Il faut que l'ensemble de la fonction publique sache que l'éthique dans la fonction publique, c'est quelque chose de sérieux, même si on ne croit pas qu'il y a de problèmes graves et importants dans la fonction publique du Québec, au contraire, que, sur le plan de l'éthique, on est, je croirais, à l'avant-garde, à mon avis, pas parce qu'on n'a pas tout écrit dans les textes à quelque part qu'on le fait pas correctement. Et pour l'incarner, bien, il faut que les fonctionnaires, les administrateurs d'État voient du changement, voient des choses. Je peux vous dire que, de mon côté, au ministère du Conseil exécutif, surtout avec la sensibilisation qui a été faite avec le rapport du Vérificateur général et puis les travaux de cette commission, je vais insister à chacune des instances, à chacun des forums sur lesquels je dois intervenir sur l'importance de ça, quitte à... mais ne pas non plus... il faut pas, peut-être comme la crise du 11 septembre qu'on vit, ne pas céder à la panique non plus. Pour l'éthique, c'est pas la panique, loin de là, mais ça va commencer au ministère du Conseil exécutif.

J'ai l'intention de recommander au premier ministre, qui va, s'il juge bon de donner suite, le faire adopter par le Conseil des ministres, qu'il y ait un poste de secrétaire général adjoint, un sous-ministre adjoint à l'éthique au ministère du Conseil exécutif. Son rôle va être d'abord et avant tout, pour ce qui concerne les postes nommés par le Conseil des ministres, qui sont au nombre de 700 à temps plein, je crois, et encore plus à temps partiel, et tout ça, il va s'occuper de ça. Et ce secrétaire-là, il faut pas non plus trop en mettre sur ses épaules avant qu'il soit engagé... Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. St-Gelais (Jean): Il va devoir également, si on donne suite à la recommandation, collaborer avec toutes les différentes instances, au premier chef le Secrétariat du Conseil du trésor, pour lancer le message partout dans la fonction publique, dans les réseaux, etc., que l'éthique, non seulement c'est sérieux, mais qu'on doit s'en préoccuper à tous les jours. Ça va commencer de ce point de vue là.

Il faut également, pour transmettre le leadership, que le leadership vienne de tous les leaders au gouvernement. Il y a des chefs, il y a des joueurs dans l'équipe, il y a tout ça, il y a beaucoup, beaucoup de monde dans un gouvernement, vous le savez, alors tous les dirigeants d'organismes, tous les sous-ministres, tout ça, vont être interpellés, comme ils l'ont été peut-être avec les renseignements personnels où, à certains égards, il faut l'avouer, on réagissait aussi à des problèmes. Là, il s'agit pas d'attendre que les problèmes surviennent, mais de prendre les devants, d'aller à l'avant pour faire en sorte que ce leadership puisse être... transpire partout dans l'ensemble de la fonction publique, et vous jugerez à un autre moment si le leadership est assumé ou pas, comme vous devez le faire. Je sais pas si vous souhaitez entendre Mme Jean?

Le Président (M. Kelley): Oui, Mme Jean, si vous voulez...

Mme Jean (Diane): En fait, j'ajouterais que, de façon pratique, le programme d'accueil dont je vous ai parlé d'entrée de jeu tout à l'heure, il est conçu, il est prêt à être mis en oeuvre. Le 5 décembre, il y aura une première rencontre. On va même faire un retour sur les gens qui sont entrés depuis le printemps 2001. Alors, il y aura de la formation à l'entrée. Il y a un programme pour les cadres, les nouveaux cadres. Il y a aussi un programme pour les nouveaux administrateurs publics, les dirigeants d'organismes, les membres de conseils d'administration. Et je vous ai aussi... j'ai abordé aussi rapidement dans mon discours un réseau de répondants. Un réseau de répondants, ça veut dire qu'on réunit régulièrement des personnes désignées dans leur organisation pour être responsables de l'éthique, ces personnes qui recevront une formation particulière au fur et à mesure que notre veille stratégique nous indiquera que de nouvelles façons de faire ou de... sont disponibles, et qui vont nous servir de relayeurs dans toute l'administration publique pour garder l'administration à niveau en termes de formation et de sensibilisation sur l'éthique.

Alors, c'est tout ce que je voulais ajouter. Mais on a une structure de formation, d'information, on compte ajouter une structure de sensibilisation, alors je pense que la diffusion et le maintien de l'animation qu'entend débuter le secrétaire général vont être assurés.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Maintenant, M. le député de Lotbinière.

Activités de formation

M. Paré: Merci, M. le Président. Ma question porte sur les infrastructures au niveau de l'éthique. Le Vérificateur général, d'entrée de jeu, disait que ça pourrait être amélioré. Il avait observé aussi que 22 % des organismes seulement avaient des règlements ou... au niveau de l'éthique de nos organisations. En sachant que la culture, c'est plutôt stable, la culture organisationnelle, c'est aussi pas mal stable, au niveau maintenant des attitudes, des comportements, c'est bien sûr que, sur les valeurs, on peut travailler à un certain nombre de choses.

Je voyais, parce que j'ai à l'exemple un jeune homme qui est un de mes voisins, dans mon petit patelin, qui a intégré la fonction publique tout à fait, il vient de finir ses études à l'université et a intégré la fonction publique, et il a rencontré son directeur, ça a duré 15 minutes, et, après, c'est l'adjointe administrative qui a dit: Bon, voici comment tu vas faire tes comptes de dépenses, voici qu'est-ce que tu peux faire, voici qu'est-ce que tu peux pas faire, et bonjour, bonne chance!

Mme Jean (Diane): On va le revoir le 5 décembre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paré: Mme la secrétaire vient de nous dire, tout à l'heure, parce que j'ai écouté attentivement ses propos, elle vient de nous dire: Bien, écoutez, à partir du 5 décembre, il y aura intégration, il y aura des sessions de formation, et vous nous en parlez aussi, M. le secrétaire, au niveau de la mise sur pied d'un nouveau programme d'accueil pour les nouveaux employés de la fonction publique, donc la tenue de séances de formation, de perfectionnement concernant l'ensemble des nouvelles initiatives en matière d'éthique et de déontologie.

Le jeune homme en question, dans l'équipe, nouvellement arrivé, est aussi quelqu'un qui ne partage pas la même religion, ne partage pas donc les mêmes valeurs. À l'intérieur de ça, j'imagine que le programme de formation, c'est bien sûr qu'il faut sensibiliser ces gens-là, vous avez parlé de sensibilisation tout à l'heure. Qu'est-ce que vous comptez faire?

J'ai vu aussi des initiatives que vous comptez mettre. Mais ce que le Vérificateur général nous disait aussi, c'est que, au niveau des initiatives que vous avez prises et que vous allez prendre... bon, lui, c'est l'absence d'initiatives, là, qu'il avait soulignée. Donc, ces initiatives-là, est-ce qu'elles vont aussi intégrer d'une façon ou d'une autre, par la formation, ces valeurs-là à des gens, justement, qui ne partagent pas nécessairement, par religion ou par d'autres aspects, ces mêmes valeurs? Donc, comment on va respecter en même temps ces gens-là et comment aussi on va s'assurer qu'on met les services en fonction justement de... et développer une culture organisationnelle qui soit éthiquement correcte?

M. St-Gelais (Jean): Je peux correctement répondre en détail à votre question, mais il est certain que des situations comme celle dont vous faites mention, M. le député, surviennent dans la fonction publique, dans les réseaux. J'espère que ce n'est pas la règle, mais ça survient, c'est certain. J'ai moi-même été 16 ans jusqu'à maintenant dans la fonction publique du Québec, et puis, bon, j'ai dû accueillir des gens et, dans certains cas, je dois avouer que j'ai probablement été fautif moi-même. Alors, je l'avoue, on ne met pas toujours tout le temps à toutes les choses correctement, il faut s'assurer cependant que quelqu'un le fait éventuellement et qu'il le fait correctement.

n (10 h 50) n

Comment on peut faire en sorte que tout le monde adhère à des... aux mêmes valeurs puis au moins les comprendre pour essayer de les partager? Bien, il faut les sensibiliser le maximum, le plus possible à l'éthique et à la déontologie, et ma collègue du Secrétariat du Conseil du trésor va avoir beaucoup de travail à ce compte. Et je sais qu'elle doit préparer, entre autres ? je ne sais pas si... on s'est entendus un peu avant qui répondrait à quoi, peut-être que Diane va trouver que je réponds à sa place, mais en tout cas... On est à préparer, notamment au Secrétariat du Conseil du trésor, un soutien documentaire. Il va y avoir, entre autres... il y a la brochure qui existe, L'éthique dans la fonction publique, on va la mettre à jour, elle contient toutes sortes de règles de conduite, là, qui sont l'assiduité, la compétence, l'obéissance hiérarchique, la loyauté, l'allégeance à l'autorité constituée, la courtoisie, la non-discrimination, et tout ça, je pourrais toutes les nommer. Il faut évidemment être clair et précis avec les gens qu'on embauche et ceux qu'on veut faire adhérer à nos valeurs, parce que plus on nomme de règles, surtout comme celles-là qui sont suggestives à bien des égards, alors on peut en arriver à mêler tout le monde puis pas avoir un grand résultat. Mais le Secrétariat du Conseil du trésor va mettre à jour ces choses-là, il va les diffuser en long et en large.

Le programme d'accueil gouvernemental dont on a parlé, selon les prévisions de Diane, si je me trompe pas...

Une voix: ...

M. St-Gelais (Jean): ...ça doit être fait... Il y a à peu près 1 500 personnes par année qui vont être appelées à suivre cette formation, en partenariat avec le Secrétariat du Conseil du trésor puis l'École nationale d'administration publique. Il va y avoir des sessions d'accueil qui vont se tenir à Montréal et à Québec, une centaine de personnes par session. Dans les autres régions, il va y avoir également des sessions, mais, à ce moment-là, les groupes vont être plutôt de l'ordre de 25, des plus petits groupes. Puis ça va débuter, comme le mentionnait Mme Jean, le 5 décembre.

On va également... La dimension éthique va être incorporée également dans les programmes d'apprentissage des nouveaux cadres de la fonction publique, ça va être un volet particulier, puis on va essayer de moderniser également, faire la sensibilisation, là, dans un projet-pilote qui va être implanté en juin, sur un programme de sensibilisation, de formation sur l'éthique au travail dans un contexte de marge de manoeuvre accrue, comme vous en avez parlé un peu, tout le monde. Ce programme va être axé sur la résolution de situations présentant une problématique particulière. Le projet permettra de saisir l'importance de l'éthique dans la fonction publique québécoise. De plus, il va favoriser l'adoption d'attitudes, de comportements puis d'outils appropriés au regard de l'éthique, ainsi que l'utilisation des moyens requis. Il va proposer un volet théorique portant sur les enjeux qui sont liés à l'éthique puis leur impact sur le rôle des gestionnaires et des employés. Puis il va y avoir un volet pratique qui va concerner les situations problématiques qui engendrent des considérations d'ordre éthique puis leur repérage rapide, leur analyse adéquate, puis il va les conduire à des choix d'action éclairés. C'est le programme de formation qui est prévu.

Puis, le Sous-secrétariat au personnel de la fonction publique, dont M. Giroux a la charge, va mettre en place une veille stratégique sur l'éthique pour suivre ce qui est déjà fait puis accentuer les travaux. C'est une veille qui permet de suivre les expériences les plus probantes des autres administrations puis dans les ministères et les organismes, puis ce qui se fait dans différents ministères et organismes québécois, les résultats et les recensements qui vont être mis à la disposition des hauts dirigeants d'organismes, les gestionnaires de la fonction publique, afin de les soutenir.

Pour l'engagement des employés, on va recommander aux ministères et aux organismes de faire signer, au moment de leur entrée en fonction... l'employé dans la fonction publique, un document dans lequel il va avoir affirmé avoir pris connaissance des valeurs et des règles à respecter en matière d'éthique dans la fonction publique.

Pour les emplois supérieurs, en ce qui concerne le ministère du Conseil... plus le ministère du Conseil exécutif, on a l'intention de faire en sorte que les administrateurs d'État, il va y avoir des sessions... dans leur session d'intégration, ceux qui sont nouvellement nommés, les mêmes critères vont être incorporés. Il va y avoir dorénavant un volet éthique qui va être plus présent, puis il va y avoir des présentations spéciales comme celles que M. Grenier a déjà faites.

Puis, on va étendre également... Tous ces outils-là, on va les rendre disponibles à tous les détenteurs d'une charge publique, qu'ils soient ou non sujets à la Loi sur la fonction publique. Les outils vont être donnés aux dirigeants d'organismes, puis on va les sensibiliser à la chose, on va leur demander de les faire connaître dans leur organisation, et on va en faire un suivi.

Peut-être que Mme Jean a quelque chose à ajouter qui est plus précis sur ce que j'ai mentionné en général.

Mme Jean (Diane): Je voudrais peut-être faire une illustration pratique de qu'est-ce que c'est, avoir initié un processus de réflexion personnelle sur l'éthique. Je vais utiliser un document qui a été développé au Conseil du trésor puis utilisé. Alors, comment on s'assure puis comment on fait que, pour une décision donnée, on utilise un processus éthique? Bien, ce qu'on a conçu, ici, c'est trois questions à se poser face à une situation. Les trois questions sont, puis je vais vous les lire, c'est très simple.

L'orientation que j'envisage est-elle conforme à la loi et aux principes de l'équité et de transparence contenus dans la réglementation? Alors, on se pose la question: Est-ce que ce que j'envisage est conforme?

Deuxièmement, bien que ma décision puisse ne pas être favorable à chacun des intervenants ? parce qu'une question éthique, c'est toujours parce qu'il y a des gagnants et des perdants ? ceux-ci auront-ils le sentiment d'avoir été traités équitablement et avec toute la rectitude requise dans les circonstances? Alors, la deuxième question à se poser: Est-ce que... Je suis convaincue que les intervenants auront l'impression d'être traités équitablement.

La troisième question, puis peut-être la plus importante, en tout cas celle qui touche le plus celui qui se la pose: Suis-je en mesure d'expliquer clairement cette décision en ayant la nette conviction d'avoir agi avec justice et loyauté et de la justifier auprès de mes supérieurs, des médias et de ma famille?

Alors, c'est une illustration assez simple de quel type de réflexion on peut mener auprès de l'ensemble des personnels, et on peut voir qu'avec une formation appropriée et avoir à l'esprit quelques questions fort simples on peut garder présentes auprès de l'ensemble du personnel les préoccupations et l'éthique fondamentales. Quand on doit prendre... si on prend le temps de réfléchir, pour une de ces actions, à la conformité avec la réglementation, à l'impact sur les personnes concernées en termes d'équité et sur l'explication qu'on peut donner à ses proches, eh bien, je pense qu'on est en bonne voie pour maintenir un raisonnement éthique dans l'ensemble de la fonction publique.

Le Président (M. Kelley): Alors, M. le député ou...

M. Paré: Je vous remercie.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Rosemont.

Recours possible à de l'expertise
en matière d'éthique

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Bien, d'abord, je trouve ça fort intéressant, les échanges que l'on a, puis ce n'est pas... c'est pas facile, dans une bureaucratie, de changer les façons de faire, c'est pas facile aussi d'harmoniser les valeurs ou même d'identifier des valeurs communes. Le Vérificateur général a dit, a écrit, à la page 47 de son rapport, au point 3.13, et je le répète parce que c'est un peu au coeur de la réflexion que j'aimerais entamer avec vous: «Dans un contexte où il est de plus en plus courant de demander aux détenteurs d'une charge publique d'être responsables de leurs actes...» Ça semble assez fascinant de lire ça dans un document du Vérificateur général, parce que, moi, je pensais que c'était déjà acquis, mais ça m'a fascinée de lire ça.

Cela étant dit, je pense que notre perspective à nous comme parlementaires, c'est une perspective qui doit traduire les attentes des citoyens. Et, moi, je fais une différence entre les citoyens qui ont affaire directement à des fonctionnaires et les fonctionnaires qui ne sont pas directement sur la ligne de feu avec les citoyens. Alors, je vais m'attarder un peu sur ceux qui sont sur la ligne de feu, surtout dans le contexte où ils doivent être responsables de leurs actes; en fait, je crois qu'ils le sont. La difficulté, c'est comment nous pouvons nous assurer qu'ils aient un comportement qui reflète non seulement un comportement éthique ? je pense que l'outil que vous avez présenté ici, c'est fort utile comme aide-mémoire et puis, dans des cas précis de doute, se référer ? mais le comportement éthique, ça fait référence à la rigueur, ça fait référence aussi à la responsabilité.

n (11 heures) n

Or, dans une société ouverte comme la nôtre, jeune aussi, qui accueille une population immigrante à un rythme effarant, supérieur à ce qui se fait, je crois, dans la majorité des pays, si on compare les taux, nous avons un énorme défi pour faire partager... d'abord, faire connaître nos valeurs, les valeurs de la société québécoise, les faire évoluer et les faire partager, parce que les valeurs sont liées souvent à des coutumes, à des religions, enfin. Et, moi, je trouve que... ce qui me préoccupe dans toute cette capacité à réussir à établir, à établir des lignes de conduite éthique et des valeurs éthiques dans notre société, notamment au niveau des employés de la fonction publique, c'est que... il y en a beaucoup, c'est complexe. Je me demande comment on peut, et on en a discuté dans notre session d'hier, comment on peut réduire la réflexion ou les éléments de réflexion à trois ou quatre principes simples, parce que, quand on fait de la formation pour des employés qui joignent la fonction publique, ils partent pas tous du même point. Ils ont pas tous le même bagage, ils ont pas tous la même religion, les mêmes coutumes. C'est un fait, il faut... Alors, on va les former, on va faire des sessions pour assurer une formation continue, j'imagine. Mais quel est leur recours, à eux, quand ils sont dans le doute? Comment peuvent-ils aller valider, peut-être? Et la contrepartie de ça, c'est le citoyen, lui, quand il se retrouve face à un fonctionnaire qui à son avis n'a pas un comportement éthique, parce que, encore là, lui aussi, il a ses idées, là, sur ce que ça devrait... ce qui devrait se faire. Alors, quels sont les recours concrètement pour ces deux personnes-là par rapport à une difficulté d'interprétation qui n'est pas commune?

M. St-Gelais (Jean): Votre question est, comme vous le mentionniez, Mme la députée, tout à fait correctement, c'est pas simple.

Mme Dionne-Marsolais: Non, c'est pas simple, je le sais.

M. St-Gelais (Jean): C'est loin d'être simple. Moi, je crois au premier chef qu'on ne peut pas... on ne devrait pas demander simplement aux fonctionnaires de l'État qui sont sur la ligne de feu avec la population simplement de dire: L'éthique, c'est important. C'est un ensemble de dispositions, de valeurs, de... à tous les jours comment on partage, comment on assume le leadership dans notre tâche, comment on fait transpirer ça aux employés qui sont pour nous, qui font qu'une équipe... puis que quelqu'un qui va travailler chaque jour, chaque matin, il va en confiance... qu'il aime son travail, qu'il veut le bien du public, de la société, et ça permet, en continuité, à avoir les meilleurs règles d'éthique possible.

Quand... Et là ça tient à évidemment tous les ministères qui ont des clientèles importantes, avec, comme vous l'avez mentionné, l'immigration au Québec, et tout ça, qui crée de nouvelles problématiques. Il faut que les gens sur le terrain sachent qu'ils sont appuyés par le gouvernement, par les dirigeants, qu'ils ont les outils pour faire le travail qu'il faut. Et, parmi ces outils et parmi ces valeurs-là, s'inscrit évidemment comme en importance l'éthique.

Dans la déclaration de valeurs de la fonction publique du Québec, un projet qui existe puis qu'on veut faire cheminer, on ramène ces valeurs-là à cinq éléments et on essaie de ne pas les multiplier, comme vous le mentionnez, pour que les gens s'y retrouvent. On y retrouve: l'intégrité, l'impartialité, le respect, la compétence, vous l'avez, et la neutralité politique. Alors, on essaie de garder ça simple. Bien qu'on ajoute dans les discours qu'on fait ici toutes sortes d'éléments, on essaie de garder ça simple.

Puis, les recours des citoyens qui... des employés qui ont un doute, qui ont... sur l'éthique, etc., il y en a peut-être pas suffisamment actuellement et c'est la raison pour laquelle, avec le Secrétariat du Conseil du trésor, on a pensé à mettre sur pied le plus rapidement possible ce qu'on a appelé les «répondants» dans chacun des ministères et organismes. On a déjà des répondants pour les programmes de soutien aux employés en difficulté dans chacun des ministères et organismes. On va dorénavant avoir des répondants en éthique. Et il ne s'agit pas de mettre des gens qui vont faire la chasse aux sorcières puis à déterrer tous les comportements non conformes à l'éthique, mais plutôt des répondants qui vont soutenir les employés qui font face à des problématiques complexes.

Idéalement, quand c'est possible, quand une équipe de travail fonctionne bien et que ces problèmes-là surgissent, les gens se regroupent, en discutent entre eux, partagent leur problème. Ça fait des points de vue différents souvent, puis on arrive à un équilibre là-dedans, dans les équipes qui fonctionnent bien avec les fonctionnaires, les directeurs niveaux intermédiaire ou supérieur.

Pour les citoyens, bien évidemment, il y a tous les recours qu'on connaît déjà, là, qui existent au gouvernement, les différents organismes qui permettent au citoyen qui se voit confronté avec un fonctionnaire, un employé de l'État qui a pas un comportement éthique de porter plainte. Et il arrive que c'est simple, il arrive que c'est complexe, selon le cas. Il existe déjà un filet. C'est à peu près la façon avec laquelle je pourrais répondre. Je sais pas, M. le Président, si vous souhaitez que Mme Jean complète ou...

Le Président (M. Kelley): Si elle le veut.

Mme Jean (Diane): J'ajouterais seulement, là, que, sur le thème des plaintes, les déclarations de services aux citoyens, qui sont requises en vertu de la Loi de l'administration publique, ont été rendues publiques par tous les ministères et organismes. Ces déclarations-là prévoient les dispositifs concernant les plaintes. Et puis, la mise en oeuvre de ces articles-là de la loi concernant la déclaration de services aux citoyens prévoit le développement: plan d'amélioration de l'accès services aux citoyens, puis ça inclut le développement des plaintes. Alors, il y a aussi un chantier d'ouvert sur l'amélioration des services aux citoyens à travers les déclarations de services aux citoyens.

Mme Dionne-Marsolais: Bon, alors, je comprends... Là, vous nous avez donné deux... deux nouvelles importantes aujourd'hui: d'abord, le fait d'envisager un secrétaire général adjoint à l'éthique. Ça, je pense que c'est très important. Je vous en félicite d'ailleurs. Maintenant, les répondants dont vous parlez, est-ce qu'il y en a dans tous les ministères et organismes, incluant les régies, en ce moment?

Mme Jean (Diane): Quand vous parlez de régies, vous parlez de régies d'assurance maladie?

Mme Dionne-Marsolais: Bien, les régies régionales, là.

Mme Jean (Diane): Ah non! En fait, quand on a parlé d'un réseau de répondants à ce moment-ci, on a parlé d'un réseau de répondants pour le personnel nommé et rémunéré en vertu de Loi de la fonction publique. Alors, le premier réseau dont il est question, c'est tous les ministères et organismes qui ont du personnel de la fonction publique. Bon, pour les autres organismes... Par exemple, pour les réseaux de la santé et des services sociaux puis...

Une voix: ...

Mme Jean (Diane): Non, non, ça existe pas. Il est en train d'être créé, celui des répondants pour les ministères et organismes. Mais ce dont on parle, c'est ce réseau-là avant toute chose. Pour les autres intervenants, là, vous nous parlez du réseau de la santé et services sociaux, ou bien ça pourrait exister pour l'éducation, ce que Jean... ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Jean (Diane): ...M. le secrétaire général a dit tout à l'heure, c'est qu'il entendait assumer un leadership, puis on va le seconder à cet égard pour informer, supporter, diffuser toute l'information, et aussi concernant les exigences légales, réglementaires puis les adapter, le cas échéant. Mais le réseau d'animation qu'on envisage actuellement, c'est pour le personnel nommé et rémunéré en vertu de la Loi de la fonction publique. Ce seront des personnes qui vont appartenir à divers secteurs de leurs organisations. Mais, comme les responsables des programmes d'aide aux employés, ils vont avoir un accès direct et facile de la part de l'ensemble du personnel. Ils vont être réunis régulièrement pour recevoir de la formation, de l'information et pouvoir la relayer.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, c'est... Donc, votre réseau de répondants et avec toute la documentation, toute la sensibilisation, c'est excellent. Votre objectif pour l'implantation réelle, là, concrète de ce réseau de répondants, c'est quand pour tous les ministères?

M. St-Gelais (Jean): Mon objectif à moi, c'est de mettre de la pression sur le Secrétariat du Conseil du trésor.

Mme Dionne-Marsolais: Mais votre résultat attendu, c'est quand? Ha, ha, ha!

Mme Jean (Diane): Ça, ça doit vouloir dire les prochaines semaines.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Dionne-Marsolais: Ha, ha, ha! O.K. Donc, actuellement, ça n'existe pas et c'est dans votre plan de le réaliser, là, au cours de cette année. On peut convenir de ça?

Mme Jean (Diane): Oui.

Mme Dionne-Marsolais: Bon. Parce que, quand même, c'est aussi une nouvelle discipline, au niveau de la formation, là. Ça ne sera pas si simple que ça à trouver, des personnes-ressources dans ça, là.

M. St-Gelais (Jean): Mais, si vous le permettez, je vais ajouter que Mme Jean nous a parlé de la fonction publique et les ministères, tout ça. Mais, tous les dirigeants d'organismes, qu'ils soient assujettis à la Loi de la fonction publique ou non, vont être incités à faire la même chose, et fortement incités. Alors...

Sociétés d'État et régies régionales

Mme Dionne-Marsolais: Je suis heureuse que vous fassiez ce commentaire-là, parce que ma deuxième question a trait aux sociétés d'État. Alors là j'ai... et puis aussi aux régies régionales, parce que, là, le Vérificateur mentionnait, à son point 3.59, qu'il y avait encore cinq des 18 régies régionales qui n'avaient pas encore adopté de code à l'intention des membres de leur conseil d'administration au moment où ils avaient fait leurs travaux. Peut-être que c'est terminé aujourd'hui. Moi, je vais vous parler d'un cas concret, d'autant que, pour faire notre travail aujourd'hui, on a eu accès aux actes du colloque qui avait été tenu et dont vous avez parlé d'ailleurs vous-même dans votre introduction, là, sur l'éthique et les conflits d'intérêts.

n (11 h 10) n

C'est une notion assez particulière, la notion du conflit d'intérêts, hein, parce que jusqu'où ça va, là... Et je vais vous donner des exemples très concrets, parce que, moi, c'est un sujet qui m'intéresse beaucoup depuis longtemps. Je suis toujours fascinée de voir que, dans le domaine des conflits d'intérêts, les parties de golf, les parties de pêche, les billets à l'Omnium canadien, les billets à Tennis Canada, tout ça, ça fait pas partie des enjeux de conflit d'intérêts.

M. St-Gelais (Jean): Vous faites référence...

Mme Dionne-Marsolais: Bien, je vous fais référence à l'invitation...

M. St-Gelais (Jean): ...aux cadeaux.

Mme Dionne-Marsolais: ...des fonctionnaires par des tiers, par des fournisseurs à ces événements-là. Je ne les critique pas, je constate, hein? On en voit beaucoup. Alors, la question que je me pose est la suivante. Je regarde, dans nos sociétés d'État, par exemple, là, vous avez dit que vous allez essayer de généraliser votre philosophie au niveau de l'éthique jusqu'aux sociétés d'État. Et, moi, récemment, je lisais un rapport annuel d'une de nos papetières québécoises et je constatais, dans le rapport annuel, que le secrétaire d'une de nos sociétés d'État ? Hydro-Québec, pour pas la nommer ? était aussi membre de ce conseil d'administration. Le secrétaire général d'une compagnie. J'avoue que j'ai pas vu ça souvent, moi, dans des conseils d'administration de compagnies en bourse, où les secrétaires des compagnies sont membres d'autres conseils d'administration. J'ai pas vu ça souvent. Alors, je me suis demandé...

Puis j'ai d'ailleurs vu, dans le rapport ici, un discours de la part de ce secrétaire général qui parle du code d'éthique de l'entreprise, qui en fait l'éloge. Et, effectivement, je l'ai vu, je l'ai fait venir, le code d'éthique de certaines de nos sociétés d'État ? celles qui en ont, puis elles en ont, pour la plupart ? mais ça touche les administrateurs. Celui de notre juridiction, ici, touche les administrateurs parce qu'ils sont nommés par l'État. Mais, dans le cadre des entreprises elles-mêmes, est-ce qu'il y aurait pas un effort à faire de la part du gouvernement pour qu'au moins les sociétés d'État aussi... Parce que là elles s'autodisciplinent, hein? Puis j'ai rien contre ça, mais il faudrait au moins qu'il y ait une cohérence là-dedans. Moi, je sais pas ce que vous en pensez, mais, moi, ça me trouble beaucoup, ça.

M. St-Gelais (Jean): C'est...

Mme Dionne-Marsolais: Je vous demande pas un engagement, M. St-Gelais.

M. St-Gelais (Jean): Non, non, non.

Mme Dionne-Marsolais: Je vous demande un avis.

M. St-Gelais (Jean): Ça peut, dans certains cas, comme vous le dites, être troublant, particulièrement dans les sociétés d'État qui... dans certains cas, il y en a qui ont un caractère commercial évident, d'autres où c'est moins le cas, mais qui ont...

Mme Dionne-Marsolais: ...dans les cas où ils traitent, hein?

M. St-Gelais (Jean): Exactement. Oui, oui.

Mme Dionne-Marsolais: Parce qu'il faut bien penser que, dans une société... une papetière, le principal coût de production, c'est l'énergie. Alors, c'est en ce sens-là, là.

M. St-Gelais (Jean): Oui, oui, oui. Vous avez raison. En général, quand... à mon point de vue, quand quelqu'un, par exemple pour le cas dont vous parlez... Je veux pas commenter ce cas particulier là, mais un cas similaire...

Mme Dionne-Marsolais: Un exemple.

M. St-Gelais (Jean): Un exemple. Quand quelqu'un accepte de se voir confier un poste au sein d'un conseil d'administration, il devrait en tous les cas faire état des conflits d'intérêts potentiels qui existent. Si le conflit d'intérêts est tel que la nature même de son travail fait en sorte qu'il est en perpétuel conflit d'intérêts, bien, il devrait sérieusement se poser la question sur le fait d'accepter une tâche comme celle-là.

On sait, par exemple, que, dans les questions de nature financière, qu'on parle de la Commission des valeurs mobilières du Québec, les Bourses, les banques, et tout ça, il arrive sûrement dans certains cas que des membres de ces conseils d'administration là ont, dans un dossier en particulier, peut-être des intérêts directs ou indirects, et dans tous les cas ils doivent en faire état et se retirer lors de la discussion de ces dossiers-là. Et ça devrait être la règle à suivre que chacun devrait suivre.

Quant à la responsabilité première de ces cas-là pour ce qui concerne les sociétés d'État, il en revient aux dirigeants des sociétés d'État. Les dirigeants de sociétés d'État importantes comme celles qu'on a au Québec ? Hydro-Québec, Loto-Québec, la Société des alcools du Québec, la Caisse de dépôt et placement du Québec ? doivent s'assurer au premier chef que ces règles-là d'éthique, les règles les plus strictes s'appliquent, notamment parce que leur mandat, leur rôle se situe à la frontière entre l'administration publique, où là c'est clair, net et précis: il ne devrait y avoir aucun comportement déviant.

Mais, dans les cas où tous les jours on peut être confronté à des potentiels conflits d'intérêts, ou des pressions, ou quoi que ce soit, l'éthique, les règles de déontologie prennent une plus grande importance. Et je peux pas répondre précisément à comment faire en sorte... mais vous pouvez être certaine que les discussions qu'on a aujourd'hui vont avoir écho auprès des dirigeants de ces organismes-là.

Mme Dionne-Marsolais: Moi, il m'apparaît important, et je suis bien consciente des limites de ? j'oserai utiliser le mot «autorité» ? de l'administration publique sur les administrations...

M. St-Gelais (Jean): ...autorité.

Mme Dionne-Marsolais: Oui. De nos sociétés d'État. Mais, compte tenu du fait que nous avons une organisation assez mixte, au Québec ? on a beaucoup de sociétés d'État qui ont beaucoup... puis il y a beaucoup de projets conjoints ? le rayonnement de l'approche gouvernementale face à l'éthique, à l'application de certaines règles, à des codes, à des comportements, est très important et il doit aussi être associé à une mesure, j'allais dire, de discipline. Ça, c'est plus difficile probablement, mais je pense qu'il faut... S'il y a pas... Ha, ha, ha! Je reprends le commentaire de mon collègue tout à l'heure. S'il y avait pas de police, je serais la première à dépasser les limites bien souvent sur les routes du Québec, n'est-ce pas? Puis je suis certainement pas la seule. Alors, dans ce contexte...

Le Président (M. Kelley): Mais pas le président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Dionne-Marsolais: Ha, ha, ha! Non, le président ne conduit pas. Alors, ça, ça le sauve. Ha, ha, ha!

Mais, en fait, c'est que faut qu'il y ait un mécanisme ? je ne veux pas utiliser le mot de «réprimande» ? mais pour garder le monde honnête, finalement c'est un peu ça, là. Et je pense que c'est d'autant plus important que, on le sait, au Québec, on a une notion de la chose publique qui est extrêmement... qui est de grande qualité, on le respecte, on le valorise. Les citoyens aussi sont très... valorisent beaucoup l'administration publique, la chose publique et le bien public. Et je pense que là on est dû pour faire un virage, pour assurer une certaine... Je sais pas, peut-être que vous pourriez suggérer à vos sociétés d'État d'adopter... Je sais pas, invitez-les en conférence une fois par année pour questionner, il faut trouver une manière, sans que ce soit un encadrement rigide, pour qu'ils rendent des comptes, mais pour les... pour assurer ce suivi quant à la prise de conscience de difficultés dans le maintien de certains codes d'éthique.

Difficultés juridiques liées à la notion
de conflit d'intérêts

Et, sur les conflits d'intérêts, bien là je veux revenir aux questions du Vérificateur général. Vous, vous avez dit, M. le secrétaire général, tout à l'heure ? j'ai pas compris, j'aimerais ça que vous me l'expliquiez ? que vous aviez des difficultés ? c'est-u juridiques? ? dans votre texte, là, par rapport à... Attendez.

Le Président (M. Kelley): Les annexes 3 et 4.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, oui, c'est ça, par rapport à... Il y avait un sujet... Je veux que vous m'expliquiez qu'est-ce que c'est, des difficultés juridiques.

M. St-Gelais (Jean): Si le président le permet, je pense que la meilleure personne pour y répondre serait M. Grenier, qui est du Secrétariat à la législation, pour les aspects juridiques.

Mme Dionne-Marsolais: Parce que c'est l'expression qui me...

M. Grenier (Charles G.): La seule chose que je ne sais pas, c'est si c'est le bout qui parlait plus du vide juridique apparent qu'on avait par rapport aux 22 entités dont le personnel est hors fonction publique ou si ce sont nos commentaires sur les annexes du Vérificateur?

Mme Dionne-Marsolais: Non, c'est vos commentaires, c'est ça.

M. Grenier (Charles G.): Alors, on vous a donné une annexe 4, M. St-Gelais, où on les reprend plus en détail, parce que ça peut être assez technique. Mais, nous, notre principal problème qu'on avait, c'est qu'on... c'est un tableau qui a été fait avec des réponses d'entités. Et chaque entité a répondu selon un questionnaire et a cité beaucoup de valeurs. Alors, évidemment, quand tu veux recouper le juridique avec ce que les gens ont répondu, il peut y avoir plusieurs valeurs ou plusieurs réponses qui ont été données qui, en apparence, peuvent avoir l'air contradictoires ou que chaque entité a pas donné les mêmes réponses. Alors, le Vérificateur, lui, a très correctement pris toutes les réponses en disant... il a fait un beau tableau avec ça en disant: Bon, bien, finalement, il y en a un qui dit une affaire, l'autre qui dit pas une autre, alors d'où une confusion.

Et, nous, on tient à dire que, et je vais le répéter, que nous entretenons des réserves juridiques quant au contenu et à la présentation des annexes, parce que la nomenclature des valeurs provient essentiellement de réponses ? alors je me répète, là, mais je le dis ? obtenues des entités consultées et d'une lecture littérale des termes. Or, ceux-ci peuvent souvent être synonymes ou recouvrir des réalités analogues, et certains peuvent les décrire sous un seul vocable, alors que d'autres le font sous plusieurs vocables ou autrement.

Alors, on disait, nous: Une simple lecture des x inscrits dans les grilles de ces annexes peut donner l'impression que certaines lois, règlements ou codes sont incomplets, alors que ce n'est pas le cas sur le plan juridique. Je vous donne un exemple: à l'annexe 3, là... à l'annexe 3, l'intérêt public n'apparaît pas comme tel dans la colonne Règlements sur l'éthique ? il y a une colonne Règlements sur l'éthique ? or, il ne fait aucun doute pour nous qu'il s'agit d'une valeur qui s'applique aux administrateurs publics, puisque ce règlement les oblige à éviter ou à divulguer les situations de conflits d'intérêts. Alors, vous voyez un peu comment on s'embarque dans toute une discussion sur le nombre de x ou...

Et, de même, à l'annexe 4, Qualité et Excellence impliquent Rigueur, Efficacité et Efficience. Alors, on les a traitées séparément. Égalité et Non-discrimination peuvent être recoupées dans Impartialité et Objectivité.

Mme Dionne-Marsolais: Ah, O.K., O.K., O.K.

n (11 h 20) n

M. Grenier (Charles G.): Alors, toutes ces notions sont traitées séparément dans les annexes. Le contenu de ces annexes, alors, comme on dit, nous, ça peut être intéressant et informatif sans nécessairement être le reflet de la réalité juridique. Et, évidemment, nous, on a été... pas critiqué, mais on a eu... on a fait l'objet d'un rapport qui a été quand même bien fait, mais sévère peut-être sur ce point où on pouvait... Si quelqu'un lit ça, il dit: Mon Dieu! c'est le chaos ici. Il y a pas personne qui a les mêmes valeurs; personne a les mêmes x. Alors, nous, on veut vous dire tout simplement que, sur le plan juridique, on est plus... c'est plus, comment dirais-je, c'est mieux regroupé que ça, là, sur le plan juridique.

Mme Dionne-Marsolais: O.K. En fait...

M. Grenier (Charles G.): Et c'était pour ça qu'on tient à le dire, là.

Mme Dionne-Marsolais: ...je dois vous dire, M. Grenier, qu'il y a personne ici, là, des deux côtés, qui a interprété ça de la manière dont vous l'avez fait. Honnêtement, on a pas eu cette impression-là. On a... Parce que, effectivement, c'est tellement exhaustif, tellement détaillé que finalement...

M. Grenier (Charles G.): Mais il restait quand même...

Mme Dionne-Marsolais: ...personne à interprété ça de cette manière-là. Alors...

M. Grenier (Charles G.): Il restait qu'on pouvait créer une impression.

Mme Dionne-Marsolais: Honnêtement, nous autres, on a trouvé que c'était... dans l'ensemble, que c'était un portrait intéressant. On est content des commentaires de ce matin. En tout cas, moi, je suis contente, mais on a eu l'impression qu'on commence dans ça en termes de structures et de notre action. Parce qu'il y a eu... C'est quand même jeune, hein! C'est notre gouvernement qui a mis de l'avant cette réflexion-là en... par la loi de 1997, vous l'avez rappelé. Et puis c'est quand même une bureaucratie qui est pas petite, là, une administration publique.

Alors, on a quand même fait des pas importants, et l'objectif que l'on a saisi, nous, de l'évaluation du Vérificateur général ? puis je le vois qui s'agite, il va vouloir parler, mais, avant de lui donner la parole, je vais finir sur ça ? c'était de voir où est-ce qu'on en était puis est-ce que, effectivement, cette réflexion-là progressait de manière à ce qu'il se passe des choses. Et aujourd'hui, bien, des fois, l'occasion d'échanger entre nous, ça nous permet d'apprendre, de provoquer quelques annonces plus vite que... et quelques gestes plus rapides. Alors, voilà! Merci.

Le Président (M. Kelley): Peut-être, je vais...

M. Grenier (Charles G.): Si vous me permettez, juste dire que... «intéressant et informatif», pour nous, «intéressant et informatif», mais peut-être pas le reflet de réalités juridiques.

Mme Dionne-Marsolais: Je comprends. Je comprends.

M. Grenier (Charles G.): C'est un peu le choc peut-être, si je me permets en toute amitié pour le Vérificateur, que je connais bien, le choc un peu entre la vision comptable et la vision juridique.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, oui.

M. Grenier (Charles G.): Alors, c'était juste ça, mais jamais on n'a vu ça non plus comme étant une agression ou quoi que ce soit.

Mme Dionne-Marsolais: O.K.

M. Grenier (Charles G.): Mais les impressions peuvent rester, des fois. Et les gens peuvent lire ces rapports-là, d'autres personnes que des parlementaires peuvent les lire, et quelqu'un qui connaît pas du tout ça pourrait lire... en lisant les annexes, dire: Mon Dieu! c'est vraiment la tour de Babel. Excusez-moi, c'était ma seule remarque à ce niveau-là.

Le Président (M. Kelley): Non, moi, je sais pas, réserve juridique, je trouve fort un petit peu. Moi, c'est plutôt une question de méthodologie. Moi-même, en regardant le tableau, il y a «Prudence», il y a «Réserve» et «Modération». Et on a un échange avec nos experts aussi, parce que souvent les choses sont nommées le plus souvent parce que c'est là où se trouvent les plus grands risques. Et le fait qu'on dit ça expressément, entre autres la question de la protection des renseignements personnels, c'est parce que effectivement il y avait des problèmes. Alors, c'est souvent quelque chose qu'on va soulever. Si, au niveau d'autres valeurs, ils sont moins souvent soulevés, c'est peut-être parce que ça va assez bien.

Coexistence des fonctions
de conseil et d'enquête

Peut-être, avant de passer la parole à mon collègue d'Ungava, juste dans la suite de l'annonce d'un secrétaire général associé, d'un réseau de répondants, une des choses que nos experts ont soulevée hier que j'ai trouvé fort intéressante, c'est de distinguer entre un rôle de conseil...

Pour le fonctionnaire qui est devant une décision, et il n'est pas certain... Et dans... Est-ce qu'il y a moyen... Et peut-être c'est pas toujours souhaitable d'avoir ça dans le même ministère. Il y a un geste posé, il y a une décision à prendre et il n'est pas 100 % sûr. Et, pour beaucoup de raisons, on a dit que peut-être c'est très important d'avoir un genre de service-conseil qui peut... Et, souvent, c'est pas nécessairement avec un patron ou, si c'est un ministère pas petit mais plus modeste, il y a pas de secret dans le ministère. Alors, d'avoir une protection que, avant de poser le geste, moi, je veux vraiment m'assurer qu'il y a pas de problème ici, il y a pas de conflit et que je vais dans le bon sens. Voilà, un volet conseil.

Et l'avis, qui est le deuxième volet de ma question, que ça doit être distinct d'un service d'enquête a posteriori que... on pense qu'il y a un manquement, qu'il faut avoir un processus, qu'au niveau de l'éthique qu'il y avait un manquement, il y avait une enquête pour pouvoir le faire, soit un citoyen qui a porté plainte, soit un fonctionnaire lui-même qui a dit: Moi, je pense... dans mon ministère, nous avons pris une décision, il y avait un manquement d'éthique. Alors, ils ont insisté sur... qu'il faut diviser ces deux tâches, parce que, si c'est la personne qui a donné le conseil: Vous pouvez aller de l'avant, puis il revient tout de suite après pour mener une enquête, il est juge et jury ou quelque chose comme ça.

Alors, dans la réflexion sur les responsabilités pour le secrétaire général associé, également pour le réseau des répondants, est-ce qu'on a regardé ces deux fonctions qui, à mon avis, sont très importantes?

M. St-Gelais (Jean): Nous en avons discuté, on l'a regardé. Par contre, je pense et je vous dis très sincèrement, peut-être crûment, un peu ce que je pense, s'il s'agit du rôle-conseil des ministères et organismes... Moi, j'ai oeuvré pendant 15 ans au ministère des Finances où mon rôle était essentiellement un rôle-conseil, pas de clientèle directement, et tout ça. Donc, je crois qu'il y a beaucoup... Je ne crois pas que ça existe beaucoup dans les pays de l'OCDE, des services-conseils comme ceux-là, mais je pense que c'est noté dans le rapport du Vérificateur que le Québec, à cet égard, ne diffère pas des autres juridictions.

Je crois qu'il y a un aspect un peu théorique à ce rôle, service-conseil en matière d'éthique qu'on pourrait aller consulter pour avoir une garantie, se dédouaner pour dire: Bon, maintenant qu'une personne assise quelque part dans un bureau m'a dit que je devrais faire ça, je peux y aller puis le faire, puis il y a plus de problème, parce que, à ce moment-là, c'est la personne dans le bureau qui se retrouve avec le problème. Elle... On prend un problème, on le met sur l'épaule d'un autre et puis sur les épaules d'une autre personne, et puis on pense que le problème est réglé.

Je crois qu'il faut que les gestionnaires de charge publique puissent savoir, qu'ils aient les assurances, qu'ils agissent dans un contexte où l'impartialité règne, où ils n'ont pas toujours à regarder en arrière de leur épaule si quelqu'un surveille, en matière d'éthique, ce qu'ils font bien, ce qu'ils font pas bien. Faut que l'infrastructure permette la résolution des conflits potentiels et que les fonctionnaires qui ont comme tâche d'offrir des services-conseils doivent être loyaux envers l'autorité qui a été élue par la population.

Quand on a affaire... aller offrir les services-conseils, on offre, sur un sujet précis, trois ou quatre scénarios différents aux autorités, aux ministres, aux membres de son cabinet, etc., avec les avantages et les inconvénients de chacun des scénarios, et une fois que, sur le plan politique, les discussions ont eu lieu, les arbitrages ont été faits, que la direction est donnée, le fonctionnaire doit suivre la direction et livrer... oeuvrer pour défendre au meilleur de ses compétences la politique ou l'orientation que le gouvernement, les autorités ont voulu se donner.

À travers ça, il doit évidemment gérer sa conscience, son éthique, si on veut pas... Si on veut se substituer à l'autorité politique, eh bien, on fait autre chose. Et je crois que la même chose est vraie dans les deux cas: lorsque les fonctionnaires souhaitent, ou veulent, ou essaient de faire de la politique, ça donne des résultats désastreux. Et les politiciens, s'ils veulent faire des actes administratifs, libres à eux, ils sont élus, mais ce n'est pas nécessairement toujours les résultats les plus heureux qui en ressortent.

Alors, on veut évidemment mettre en place... Et je dis... À quelques occasions, il a été mentionné que c'était une annonce, mais faut jamais oublier que ça va être une recommandation de ma part; c'est le Conseil des ministres, c'est le premier ministre qui décide. Ils peuvent en décider autrement même si je mets un peu pression sur eux aujourd'hui. Le conseiller ou le secrétaire adjoint en matière d'éthique va être surtout... servir à donner des services-conseils, donner des outils, mais pas nécessairement donner l'absolution à quelqu'un ou une garantie complète que son avis en matière éthique a été bon ou mauvais.

n (11 h 30) n

Vous savez probablement mieux que moi que, peu importe ce que disent nos codes, nos règles, tout ça, la notion de conflit d'intérêts, c'est large, c'est complexe, et déjà que de se placer de façon objective en conflit d'intérêts potentiel peut faire en sorte qu'il y a faute, qu'on en ait profité ou non. Alors, quand on a à juger: Est-ce qu'il y a eu conflit d'intérêts? est-ce que juste l'apparence de conflit d'intérêts est suffisant? et, avant de dire qu'il y a eu conflit d'intérêts, qu'il y a eu faute, il faut en préciser puis en mesurer l'impact de façon très sérieuse, parce que autant ça peut avoir des impacts sur les vies des personnes concernées, ça peut en avoir d'aussi grands sinon de plus grands sur l'image puis le respect qui entourent l'administration publique, les autorités. Alors, c'est pas simple. Et j'aurais bien aimé vous dire: Oui, on va mettre un service-conseil en place, ça va régler tous les problèmes. Je crois pas que vous m'auriez cru puis je crois pas non plus que c'est la solution magique, un remède miracle à la situation.

Le Président (M. Kelley): Et le deuxième volet de la question, le pouvoir d'enquête. Quand un fonctionnaire ou un citoyen, et, je sais, le citoyen, c'est un système de plainte que vous avez évoqué... Mais, quand quelqu'un trouve qu'il y a un manquement d'éthique dans son ministère ou dans la société d'État où il travaille, pratico-pratique, comment est-ce qu'il va porter ça... Le patron, peut-être c'est le patron même qui est en défaut. Alors, c'est quoi, la mécanique prévue pour cet individu?

M. St-Gelais (Jean): Je crois, moi, M. le Président, que les mécanismes actuels de détection, d'enquête que sont ? vous les connaissez ? les services policiers, les services d'enquête des ministères et organismes, le Contrôleur des finances, le Vérificateur général du Québec, les vérifications internes des ministères, le Protecteur du citoyen... ces différents organismes qui existent au Québec, à mon avis, font... jouent présentement un rôle de chien de garde, entre guillemets, qui est adéquat.

Est-ce qu'on doit, est-ce qu'on devrait en mettre plus ou est-ce qu'il y en a trop? À mon avis, on est dans le dosage. Je ne crois pas que le gouvernement du Québec devrait s'engager dans une voie qui serait trop rigide, un petit peu à l'exemple ? M. Grenier est un spécialiste là-dedans, beaucoup mieux que moi ? de ce que fait la Grande-Bretagne, où les fonctionnaires ont toute une procédure à suivre s'ils veulent faire de la dénonciation d'actes fautifs, et les conséquences d'avoir tort, lorsqu'on s'engage dans un processus comme celui-là, sont telles que ça décourage bien du monde. On se retrouverait probablement dans un contexte qui est peut-être pas aussi bon que celui qui existe au Québec, et on est dans le dosage. Peut-être qu'on devrait en faire un peu plus. Sûrement en matière de leadership, vous l'avez mentionné, il y a un manque là, et le rapport du Vérificateur général, à cet égard, va nous aider tous, tout le monde, dans la bonne direction. Mais, quant à mettre des pouvoirs d'enquête plus sérieux, plus étanches, je dois dire qu'on a des réserves à cet égard présentement. Peut-être que dans le futur, si on suit, avec la commission, l'évolution du dossier particulièrement, qu'on lui donne une attention particulière, les positions pourraient différer, on pourrait changer d'idée. Mais, pour l'instant, c'est...

Dénonciation d'actes fautifs

Le Président (M. Kelley): À votre avis, les protections nécessaires pour les personnes qui font la divulgation sont adéquates? Parce que c'est quand même... c'est très difficile, on tombe dans une zone très complexe. Mais de dire que... Ça prend du courage de questionner une décision ou un acte posé par son patron. C'est pas quelque chose qu'on prend à la légère. Avec toutes les protections qu'on a mises dans une loi... cet individu aura la réputation à l'avenir de quelqu'un qui sème le trouble... et pour l'avancement de sa carrière, et tout le reste, je vais dire: Comme gestionnaire, j'ai pas besoin de quelqu'un comme ça, parce que peut-être un jour il va me causer des problèmes. Alors, de poser cet acte est quand même très courageux. Par contre, les motifs pour le faire, il faut aller au fond des choses aussi. Et, si c'est quelqu'un qui n'aime pas son patron, ce qui arrive parfois dans la vie, ça, c'est le problème aussi. Parce qu'on ne veut pas transformer tout ça dans un forum pour un règlement de comptes, et tout le reste.

Alors, je sais que c'est très complexe, nous avons discuté de ça hier, et je veux, par contre, parce que je sais qu'il y a beaucoup de juridictions qui ont regardé la question du phénomène de «whistle blowers», et on veut... je pense, dans les médias récemment, il y a des médecins, des chercheurs à Ottawa qui travaillent sur... donner l'approbation de certains médicaments, qui sont contestés, sur une certaine pression qui vient en haut, de donner une approbation plus rapidement, que dans le jugement scientifique... et que je ne peux pas, dans ma conscience professionnelle, donner cette approbation, malgré le fait que les patients réclament, les patients écrivent à leur député, leur député écrit au ministre, alors il y a une pression d'aller de l'avant. Je pense, tous les députés ici, autour de la table, ont des expériences similaires, des pressions pour soit l'approbation ou, après ça, de mettre un certain médicament sur le formulaire du gouvernement du Québec, ça, c'est chose courante maintenant.

Alors, est-ce qu'on est sûr que la protection pour la personne... Parce que, malgré toutes les réserves que j'ai, c'est courageux de faire ça... Est-ce que la protection existante pour ce fonctionnaire est adéquate?

M. St-Gelais (Jean): Je ne crois pas qu'on puisse répondre catégoriquement dans l'affirmative à cela: Est-ce que la protection actuellement est adéquate? Il faut, en ces matières ? je crois que vous l'avez très bien exprimé ? il faut essayer de rechercher un équilibre entre, d'une part, permettre la dénonciation d'actes fautifs lorsqu'ils sont fondés, que le fonctionnaire puisse dénoncer en toute confiance, du fait qu'il ne sera pas sujet à des démotions, sa carrière ne sera pas mise en péril, etc., trouver un équilibre entre ça, d'une part, et, d'autre part, éviter de tomber dans un scénario ou dans une situation où tout le monde peut dénoncer tout le monde sur à peu près n'importe quel sujet parce qu'il y a pas de conséquence à dénoncer. Alors, comment s'établit l'équilibre? Ce n'est pas simple. Je n'irais pas jusqu'à dire que le système que nous avons est parfait, qu'il est adéquat, qu'il permet toute la... à tout le monde de le faire en confiance totale, mais, à mon avis, s'il s'agit de fautes graves, importantes, il y a peut-être des cas, mais extrêmement rares, où un fonctionnaire va être le seul aux prises avec le problème. Si un dirigeant d'organisme ou un de ses subalternes commet une faute grave, que ce soit gardé secret, que personne ne le sache, aucune personne, ça peut arriver, et c'est pas impossible, mais ça ne serait pas, à mon avis, quelque chose de généralisé au Québec, loin de là.

L'envers de la médaille, comme a décidé de le faire l'Angleterre, c'est de dire: On met en place un processus formel en vertu duquel quelqu'un qui veut dénoncer peut s'adresser à une personne en particulier, tout va être tenu secret, il n'a pas... son nom va être confidentiel, etc., rien ne va être divulgué. La conséquence, au terme de cet exercice-là, pour la personne, c'est que, si elle a erré et si la commission ou l'organisme en charge lui dit: Tu as eu tort, c'est la démission, c'est-à-dire, elle est démise de ses fonctions. Alors, est-ce qu'un tel système serait meilleur que ce qu'on a aujourd'hui? La réponse est pas claire.

Le Président (M. Kelley): Mais elle mérite d'être examinée quand même.

M. St-Gelais (Jean): Elle mérite sûrement d'être examinée, il faut poursuivre.

Le Président (M. Kelley): Parce que je comprends... mais c'est toujours difficile d'être la première à savoir quelque chose. Dès que 14, 15 personnes sont prêtes à dénoncer un geste, il y a un certain courage, parce qu'on est nombreux, mais d'être la première personne à questionner un jugement, ça, c'est toujours... ça, c'est difficile. Mais, dès que ça fait les manchettes ou qu'il y a un certain appui à l'externe, à ce moment, les choses sont beaucoup plus faciles. Mais d'être la première personne à faire la dénonciation, comme j'ai dit, c'est un acte courageux. Mais j'ai balisé ça et je suis conscient qu'on ne peut pas avoir un «free-for-all» non plus, que, à chaque fois qu'on n'aime pas une décision prise par le patron, je vais le questionner auprès de quelqu'un, ça, c'est... j'exagère, mais je suis conscient de ce problème.

n (11 h 40) n

Mais, dans l'optique qu'on veut la décentralisation de la prise de décision, et c'est pas... tout se passera pas sur le bureau du sous-ministre, qu'est-ce qu'on cherche, c'est de mettre les responsabilités dans les régions, dans les bureaux régionaux, alors qu'on peut avoir un plus grand... qu'on va multiplier le nombre de décisions et on va multiplier le nombre d'acteurs. Alors, les possibilités d'un manquement, parce que nous sommes tous des êtres humains, sont multipliées aussi. Alors, dans cette optique, comment protéger la personne et en même temps pas provoquer un genre de chaos?. Ça mérite de réfléchir. Peut-être que la prochaine fois on va poser la question au secrétaire général associé, qui va donner sa réflexion à cette question.

M. St-Gelais (Jean): Si vous me permettez un commentaire là-dessus, je dirais... je pense, pour nous, puis pour le nouveau secrétaire ou la nouvelle secrétaire générale associée, puis pour la commission, pour tout le monde, je pense que, dans un cas comme celui-là, il faut mesurer l'ampleur du problème. Est-ce qu'on considère que les problèmes potentiels sont d'une telle ampleur qu'il faut absolument se doter d'outils importants? Autrement dit, est-ce qu'on prend un canon pour tuer une mouche? Ou bien sinon... Non, c'est pas le cas. Le problème est sérieux et risque potentiellement d'être grand, et là il faut mettre en place une infrastructure, quelque chose. Je pense que c'est à ça qu'il faut répondre. Et si, comme, moi, je le crois, il s'agit, pour maintenant en tout cas ? pour le futur, on pourra voir ? de cas isolés, il faut se poser la question avant de partir quelque chose d'envergure qui risque peut-être de faire plus de dommages que de bien.

Le Président (M. Kelley): Merci. M. le député d'Ungava.

Mandataires, fournisseurs
et partenaires privés

M. Létourneau: Oui, merci, M. le Président. Bonjour. Entre autres, parmi les travaux que notre commission parlementaire effectue, il y a ceux, passionnants d'ailleurs, qui concernent l'analyse des engagements financiers de l'ensemble des ministères et des organismes gouvernementaux. Et, à l'analyse, on a constaté le nombre important de partenariats ou de transactions qui s'effectuent de plus en plus avec le secteur privé. Moi, ce qui m'intéresse, parce qu'on en a déjà parlé de toute façon en commission, il y a des préoccupations à cet égard-là... Est-ce qu'il existe, ou avez-vous l'intention d'exiger officiellement que l'ensemble des entités gouvernementales qui transigent avec le secteur privé imposent une ligne de conduite à leurs mandataires, aux fournisseurs ou aux consultants, aux différents consultants qui transigent avec l'État?

M. St-Gelais (Jean): Je pense que la meilleure personne pour y répondre, c'est Mme Jean, si vous êtes d'accord.

Mme Jean (Diane): Oui. Bon, en fait, on n'a pas l'intention d'exiger une ligne de conduite de tous les fournisseurs ou des mesures concrètes, là, pour favoriser l'éthique dans les relations contractuelles. Toutefois, on a une façon de faire qui relève plutôt du guide puis on a même des exemples qui pourront vous être distribués. Il existe des documents types d'appels d'offres, élaborés par le Secrétariat du Conseil du trésor, qui comportent des lignes de conduite reliées à l'éthique. Ils comportent des dispositifs sur les conflits d'intérêts, la protection des renseignements personnels, les droits d'auteur. Ces documents, c'est des guides qui sont mis à la disposition des ministères et ils font l'objet d'une fusion massive sur le Centre d'affaires du gouvernement du Québec, et les ministères et organismes sont fortement encouragés à les utiliser. On peut d'ailleurs affirmer que la majorité des ministères et organismes ont recours à ces documents, d'autant plus qu'il existe une édition électronique des documents. Alors, ils peuvent imposer indirectement aux fournisseurs des lignes directrices clairement reliées à l'éthique. On a des exemples ici puis on a aussi des exemples, des cahiers qui sont utilisés. Puis, si vous voulez plus de détails, bien, mon secrétaire associé au marché public pourrait vous expliquer plus en détail le contenu. Non, ça va?

M. Létourneau: Non, bien, ça va. C'est parce que je voulais faire le lien aussi lorsqu'on parle de... c'est qu'il y a des règles normalement qui s'appliquent pour les cadeaux, les dons...

Mme Jean (Diane): Les cadeaux et les dons.

M. Létourneau: ...des élus, par exemple. C'est aussi le cas ? on en a parlé tantôt ? en regard des fonctionnaires. Mais, comme ma collègue de Rosemont disait tantôt, il y a aussi des activités qui peuvent se dérouler avec la collaboration du secteur privé, entre autres, notamment dans une forme de reconnaissance quelconque de contrats ou de choses comme ça. Alors, c'est à cet égard-là qu'il y a une préoccupation, et je pense qu'en termes d'éthique il faut s'assurer d'être vigilants ou à tout le moins étanches à ce type de pratique là.

Mme Jean (Diane): Pour ce qui concerne les gens qui octroient les contrats, donc les fonctionnaires, les cadres de l'organisation, eux-mêmes sont soumis à des règles concernant les cadeaux et les dons. Actuellement, ça fait l'objet d'une directive du bureau du premier ministre et c'est repris dans le projet de règlement sur l'éthique qui est à l'étude. La directive dit que ça vaut pour les cadeaux qui viendraient d'un fournisseur potentiel, actuel ou passé. «Le fonctionnaire ne peut accepter aucun cadeau, marque d'hospitalité ou autre avantage que ceux d'usage et d'une valeur modeste. Tout autre cadeau, marque d'hospitalité ou avantage reçu doit être retourné au donateur ou à l'État.» Et c'est un dispositif qui doit en particulier faire l'objet d'un suivi quand il s'agit de gens qui sont en lien avec des fournisseurs. Il y a des secteurs plus à risque. Les secteurs plus à risque, c'est habituellement les dirigeants ou les sous-ministres qui font une... oui, par exemple, dans le secteur des achats puis des contre-offres, font l'objet d'un suivi particulier.

Mme Dionne-Marsolais: Et la modestie, ça vaut combien?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Jean (Diane): Il y a pas de prix d'indiqué, parce que ça peut...

Mme Dionne-Marsolais: C'était une critique d'ailleurs du Vérificateur.

Mme Jean (Diane): Vous savez, il y a des valeurs d'usage selon les secteurs et les endroits, et puis je pense qu'il faut se poser la question aussi chaque fois personnellement. Mais on parle d'un bien d'usage, un bien qui a une valeur symbolique, un bien avec lequel on est convaincu qu'il y aura pas d'influence sur notre action. Je pense que d'accepter un présent à la suite d'une conférence, de participer à une soirée de Noël ou des choses comme celles-là, qui représentent pas d'avantages particuliers, ça peut être modeste. Mais il y a des déplacements ou bien des cadeaux significatifs, là, qu'on garderait pas sur son bureau, par exemple, c'est une indication que c'est peut-être pas aussi modeste que souhaité.

Mme Dionne-Marsolais: Un billet pour aller voir Tiger Woods, ça vaut combien?

Mme Jean (Diane): Je le sais pas.

Mme Dionne-Marsolais: Voulez-vous que je vous le dise?

Mme Jean (Diane): Ah oui!

Mme Dionne-Marsolais: Ça vaut 150 $. Est-ce que c'est modeste?

Mme Jean (Diane): Écoutez, je peux pas répondre à une question comme celle-là.

Mme Dionne-Marsolais: Je la pose, la question, parce que je pense que ça mérite réflexion.

Mme Jean (Diane): Oui, ça mérite réflexion. Mais, habituellement, on n'a pas jugé qu'il était opportun de quantifier ce montant-là.

Le Président (M. Kelley): Voulez-vous ajouter, M. St-Gelais?

M. St-Gelais (Jean): Si vous le souhaitez. Mais j'ai trouvé, je pense, justement dans les travaux que le groupe que M. Pouliot dirige a faits, M. Louis Bernard a fait une présentation dans laquelle il dit, évidemment, que c'est pas simple pour personne, puis il dit qu'on devrait... ça devrait être à chacun des secteurs de s'ajuster. Si la pratique dans un secteur particulier, comme le tourisme, fait en sorte que les conventions sont celles-ci puis s'appliquent à tout le monde, puis il y a une personne qui ne peut pas les accepter, parce qu'il est administrateur de l'État puis que ça va jeter un discrédit ou ? excusez l'expression, là ? créer des problèmes à tout le monde, ça pourrait être considéré comme acceptable. Évidemment, si on va trop loin là-dedans, on peut en venir à justifier n'importe quoi, puis ça a pas de bon sens.

Mme Dionne-Marsolais: C'est pas simple.

M. St-Gelais (Jean): Alors, chacun dans sa conscience... Si quelqu'un est à l'aise d'aller voir Tiger Woods à 150 $, il doit être en mesure d'expliquer pourquoi il est allé.

Mme Dionne-Marsolais: C'est jouer avec lui qui serait plus le fun. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Et ça, c'est gratuit.

Mme Dionne-Marsolais: Et ça, c'est gratuit, bien sûr. Ha, ha, ha!

n (11 h 50) n

Le Président (M. Kelley): Mais, dans la foulée de la question des fournisseurs, j'ai été un petit peu surpris, dans la réplique du Secrétariat du Conseil du trésor... page 67, du Vérificateur: «Il importe de s'assurer que la procédure faisant suite à un mauvais rendement ne pénalise pas les fournisseurs indûment en lui donnant une portée plus grande que celle de l'évaluation en cause.» Et je pense que les membres de la commission avaient été étonnés l'année passée, à un échange avec le ministre des Transports et son sous-ministre à l'époque, M. Trudeau, concernant le fait qu'au ministère des Transports, malgré le fait que, je pense, c'étaient six compagnies qui étaient condamnées d'une complicité pour le déneigement ? de mémoire ? il était incapable de les bannir des appels d'offres subséquentes. Alors, malgré qu'ils ont posé un acte criminel, qu'ils ont été condamnés, ils peuvent, le lendemain, retourner, participer dans les affaires du ministère des Transports. Et, selon M. Trudeau et M. Chevrette, il n'y avait aucun moyen de les empêcher. Et, nous autres, on a dit: On vient de faire la preuve qu'ils ont potentiellement fraudé les citoyens du Québec, en disant: Il y avait six contrats sur la table et, par pure coïncidence, chacun a obtenu un contrat. Et tout le monde avait fait les offres sur les autres contrats, mais, par pur hasard, chacun a gagné un contrat. Et, si j'ai bien compris, c'est juste parce qu'il y avait une septième entreprise en jeu qui était complètement exclue du processus, elle était prête à témoigner contre les six autres. Et c'est comme ça que la cour a été capable de faire la preuve et condamner les six autres. Mais le fait que, le lendemain, M. Trudeau et M. Chevrette sont obligés d'octroyer de nouveau des contrats à ces personnes, j'ai pas compris. Et, comme bon ministre, il a dit: C'est la faute au Conseil du trésor.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kelley): Alors, vu qu'on a maintenant la secrétaire devant nous aujourd'hui... J'ai trouvé ça étonnant. Et je pense que je parle au nom des membres de la commission, c'est un échange qui était vraiment... je sais que vous n'êtes pas au courant, mais c'est un échange qu'on a eu l'année passée, et on a été vraiment étonné par la réponse du ministre.

Mme Jean (Diane): Je vais vous donner les règles qui s'appliquent. Puis je ne peux pas commenter ce dossier-là que je connais pas. Et puis, s'il y a une faille dans les règles ou bien si ce dossier-là a pas été mené correctement, là, je peux pas en juger.

En fait, les pratiques de gestion font que l'administration peut émettre un rapport de rendement insatisfaisant, mais il y a des circonstances particulières et des dispositifs particuliers sur la circulation de ces rapports-là.

Le Secrétariat prévoit actuellement la circulation à l'ensemble de l'appareil gouvernemental... Puis, ce qui est habituellement soulevé, c'est pas la performance d'un fournisseur par rapport à d'autres contrats à obtenir dans son ministère, mais par rapport aux contrats à obtenir dans d'autres ministères et organismes, ce qui est soulevé dans le rapport du Vérificateur général... C'est que la circulation à l'ensemble de l'appareil des rapports de rendement insatisfaisant émis par un ministère ou un organisme, si on les diffusait à l'ensemble de l'organisation, ça pourrait avoir des effets d'inéquité pour le fournisseur, parce que les critères utilisés pour les rapports de rendement insatisfaisant sont basés sur un événement donné à une période déterminée et puis avec des personnes particulières chez le fournisseur. Alors, il nous semble qu'il y a une prudence qui s'impose avant de diffuser à l'ensemble de l'organisation un rapport de rendement insatisfaisant qui concerne un fournisseur dans une situation donnée, et ça risquerait de porter des préjudices sérieux à un fournisseur qui a connu des problèmes dans une circonstance particulière.

Les pratiques de gestion actuelles font que l'administration émettrice du rapport, c'est elle qui peut porter une action punitive à l'égard du fournisseur, c'est elle qui possède la meilleure connaissance de ce qui fait l'objet de l'insatisfaction. Pour ce motif, l'administration a la possibilité, au cas par cas et après l'exercice de son discernement, d'adopter le comportement qui lui semble le meilleur, soit celui d'accepter ou de refuser au fournisseur l'accès d'un marché de la même nature. Alors, en vertu des règles, celui qui a un rapport insatisfaisant a le choix de la façon d'agir.

Cependant, quand il s'agit d'un ministère qui a obtenu des noms de fournisseurs du fichier du gouvernement, ce fichier doit en effet préserver son intégrité quant au niveau de qualité rendue par les fournisseurs. Ainsi, un fournisseur ayant fait l'objet par un ministère ou un organisme de deux rapports de rendement insatisfaisant en trois ans sera radié du fichier. Alors, une disposition particulière quand il s'agit d'un fournisseur au fichier. La radiation sera effective pour une période de deux ans et aura un effet sur l'obtention de contrats de l'ensemble de l'appareil gouvernemental. Les cas de radiation sont cependant peu fréquents, puisqu'il y en a eu deux en 1999 et un seul en 2000.

Les dispositions réglementaires du gouvernement du Québec en matière d'évaluation du rendement du fournisseur, notamment quant aux suites données à un tel rapport de rendement insatisfaisant, nous semblent conformes aux principes sur lesquels la réglementation repose, soit l'équité, la saine concurrence et l'accès au marché public.

Le Président (M. Kelley): Je comprends la réponse, et peut-être qu'est-ce que je m'engage à faire, c'est de vous transmettre l'échange qu'on a eu avec le ministère des Transports parce que peut-être c'est pas dans la section du rendement, mais, quand même, au niveau éthique, on a la preuve devant une cour qu'il y a une entreprise condamnée pour avoir peut-être des coûts additionnels pour les citoyens et citoyennes du Québec, et on n'est même pas capable, le lendemain, de ne pas octroyer un nouveau contrat. Nous avons trouvé ça... ça nous a laissés perplexes, pour dire le moins. Alors, je vais vous transmettre l'échange qu'on a eu avec M. Trudeau et le ministre, député de Joliette, à l'époque, parce que c'est vraiment... on était... Je pense qu'un acte criminel, c'est quand même éthique... ou contre l'éthique. Alors, je pense que c'était tout à fait pertinent.

Mme Dionne-Marsolais: Moi, j'aimerais ajouter un commentaire sur ça, parce que je me rappelle bien, puis je comprends l'interprétation que le haut fonctionnaire nous avait faite, c'était comme... il avait l'impression que ce n'était pas... qu'il ne pouvait pas agir, alors que ce que vous dites: C'est à sa discrétion, il aurait pu l'exclure sur la foi de ce commentaire-là. Et donc, lui a interprété ? peut-être que ça vaudrait la peine de le rappeler ? lui, il l'a interprété comme si c'était pas... comme s'il avait pas le choix que de ne pas... que d'en tenir compte, il pouvait pas l'exclure. Peut-être qu'il faudrait rafraîchir la mémoire des hauts fonctionnaires avec ça...

Mme Jean (Diane): Il faudrait regarder le dossier. Il semble...

Mme Dionne-Marsolais: ...parce que c'est un point important dans le cas de condamnation.

Mme Jean (Diane): Oui, mais peut-être que le dossier n'avait pas fait l'objet d'un rapport de rendement insatisfaisant.

Mme Dionne-Marsolais: Ah!

Mme Jean (Diane): Je peux pas vous le dire. Alors...

Mme Dionne-Marsolais: Parce que c'était pas une question de rendement insatisfaisant...

Mme Jean (Diane): Je ne sais pas, je connais pas le dossier.

Mme Dionne-Marsolais: ...c'était une question qu'il était... il avait été condamné pour collusion.

Une voix: Pour collusion.

Mme Dionne-Marsolais: C'est ça.

Mme Jean (Diane): Mais là, les suites en justice, je peux pas évaluer ce dossier-là. Mais, s'il y avait un rapport de rendement insatisfaisant, le sous-ministre pouvait agir en vertu de la réglementation.

Mme Dionne-Marsolais: Mais dans le cas... je la pose concrètement, la question: Dans le cas où un fournisseur est condamné par la justice pour un cas de collusion ? c'est quand même pas rien, là ? est-ce que ça, ça devient un cas concret qui ferait le... et ça se traduirait par un rapport de rendement... je sais pas comment vous appelez ça, parce que là on est dans les mots. Mais le fond de la question, c'est: Est-ce qu'on doit interpréter ça comme pouvant être qualifié comme mauvais rendement ou... en fait, je sais pas comment on appelle ça...

Mme Jean (Diane): Écoutez, ça demanderait les documents puis une analyse technique. Alors, comme le président m'offre de...

Mme Dionne-Marsolais: Alors, ça va être intéressant à suivre.

Mme Jean (Diane): Je vous remercie. On va l'examiner.

Éthique et conformité environnementale

Le Président (M. Kelley): Moi, j'ai juste une couple de questions qu'il me reste. Un qui est peut-être plus précis, je vais commencer avec celui-là. On avait, je pense que c'est la Colombie-Britannique... entre les valeurs fondamentales, ils ont misé sur la question de...

Une voix: Un vote?

Le Président (M. Kelley): Est-ce qu'on est appelés à voter?

Une voix: Est-ce que ça se peut?

Une voix: Ça doit être le quorum.

Le Président (M. Kelley): Le quorum. Il y a une préoccupation de plus en plus importante, c'est... qui est l'environnement, on a échangé avec le Vérificateur général récemment à ce sujet aussi. Est-ce que, pour donner une façon concrète, tout le monde est pour le développement...

Des voix: C'est un vote.

Le Président (M. Kelley): C'est un vote? O.K., parfait. Si j'ai bien compris, je vais vous laisser le devoir de réfléchir. On va aller en Chambre et voter et revenir, mais c'est juste... Si j'ai bien compris, la Colombie-Britannique a mis comme une valeur fondamentale la protection de l'environnement, le développement durable comme une préoccupation éthique. Est-ce que c'est quelque chose qu'on peut envisager et comment au Québec? La question est posée, et je vais attendre la réponse.

Merci beaucoup. Et, sur ça, je suspends nos travaux pour permettre aux parlementaires d'aller voter.

(Suspension de la séance à 11 h 58)

 

(Reprise à 12 h 23)

Le Président (M. Kelley): Alors, peut-être qu'on va reprendre, parce qu'il nous reste très peu de temps. Je propose justement, M. St-Gelais, dans une façon assez simple, vous pouvez répondre à la question posée avant. Nous regrettons, comme devoir parlementaire, nous avons dû faire notre devoir démocratique, mais ça nous a causé un délai dans le temps.

Alors, si vous pouvez très brièvement répondre à la question pour permettre un temps pour les remarques finales... Si j'ai le consentement des membres de légèrement dépasser le temps par peut-être 5 minutes juste pour permettre le temps pour les remarques finales, s'il y a pas d'objection. M. St-Gelais.

M. St-Gelais (Jean): Alors, en ce qui concerne l'inclusion de l'environnement dans les valeurs qui seraient liées à l'éthique de la fonction publique, je crois que se chevauchent, là, si vous voulez, des valeurs qui concernent directement le fonctionnaire à chaque jour dans le fait qu'il a à rendre compte de son travail, à effectuer son travail, et des valeurs plus de la société en général. Et, entre les deux, peut-être que, lorsque la société a suffisamment évolué, on peut en venir à l'inclure, mais il existe... Par ailleurs, ce sont de grandes valeurs de société, l'environnement, le développement durable. Et, à mon avis, il existe au Québec beaucoup de ministères ? l'Environnement, le Bureau des audiences publiques sur l'environnement ? il y a beaucoup d'organismes et d'infrastructures qui permettent de tenir... de prendre en considération adéquatement le développement durable.

Peut-être qu'avec l'évolution on pensera que ce sera normal d'inclure ça dans les règles d'éthique. À mon avis, on n'y est pas encore rendu.

Remarques finales

Le Président (M. Kelley): Parfait. Merci beaucoup. Sur ça, peut-être en guise de conclusion, remarques finales... Je ne sais pas, M. Breton, si vous avez un mot à ajouter comme remarques finales? À vous la parole.

M. Guy Breton, Vérificateur général

M. Breton (Guy): Alors, M. le Président, je me réjouis que ce dossier que nous avons analysé et dont nous avons présenté les résultats ait provoqué la rencontre d'aujourd'hui. Je pense que le sujet sur l'éthique est cher à tous. Comme il a été dit, nous avons une fonction publique qui est honnête, parmi les plus honnêtes probablement qu'on trouve dans les gouvernements. Et, en ce sens, parler d'éthique, ce n'est pas les accuser de pas l'être, mais c'est leur donner des outils ou un environnement qui va maintenir cette honnêteté dans un contexte où peut-être les pressions externes vont s'accroître.

Et je suis très heureux que cette étude ait, comme je le disais, suscité cette rencontre, les débats qui ont été annoncés et les projets qui ont été mis sur la table, des projets très concrets avec ces gens qui pourront écouter au sujet de l'éthique dans tous les ministères, et, d'autre part, en souhaitant que ça devienne une réalité, ce secrétariat à l'éthique. Ce sont des messages qui signifient que le gouvernement veut prendre ou... veut montrer son leadership dans le respect de l'éthique, et c'est très intéressant. Donc, pour nous, c'est mission accomplie. Nous avons fait un bilan, et il y a des suites qui prennent forme de façon très intéressante. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci, M. Breton. M. St-Gelais.

M. Jean St-Gelais, secrétaire
général du Conseil exécutif

M. St-Gelais (Jean): Je tiens, moi aussi, à faire part de ma satisfaction, remercier la commission pour nous avoir entendus, pour les commentaires et les questions constructives que vous nous avez posées. Je veux remercier également le Vérificateur général pour son rapport et toute son équipe, qui a été un rapport de haut niveau également, qui a été bien fait, et on en partage la majorité de ce qui est inscrit.

Et je remercie aussi les experts externes qui ont contribué aux travaux de la commission, et puis j'espère que, si la commission choisit de nous demander de venir témoigner encore au sujet de l'éthique, on aura progressé à votre satisfaction, puis je vous en remercie encore.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Mme Jean.

Mme Diane Jean, secrétaire
du Secrétariat du Conseil du trésor

Mme Jean (Diane): Je joins mes souhaits et remerciements à ceux du secrétaire général et j'ajoute mes remerciements pour l'équipe du deuxième rang derrière nous, précieux collaborateurs qui nous ont aidé à préparer pour aujourd'hui l'ensemble des documents de support et qui seront grandement utiles aussi pour poursuivre les travaux amorcés. Merci.

M. Geoffrey Kelley, président

Le Président (M. Kelley): Et, au nom des membres de la commission aussi, je veux dire premièrement merci beaucoup pour la disponibilité de toutes ces personnes ce matin pour répondre à nos questions. Je veux souligner encore la participation de nos trois experts, M. Bernier, M. Pouliot et M. Boisvert, qui, je pense, nous ont alimenté beaucoup, parce que... J'insiste encore une fois, nous avons les propositions, et j'ai bien compris qu'elles sont toujours à l'état des propositions quant à un sous-ministre associé et également des répondants à travers les ministères, et on va suivre le développement de ça. Je trouve que c'est une piste intéressante.

n (12 h 30) n

Je demeure toujours conscient de toute la question de divulgation. On a un échange, et je pense que c'est très important. On a vu que c'est une question complexe, mais je pense que, au nom des membres de la commission, c'est quand même un enjeu qu'on n'est pas seul; il y a d'autres juridictions au Canada, aux États-Unis, en Europe, dans l'OCDE, qui sont en train de trouver une solution, et on voit les enjeux et il n'y a pas de solution parfaite ou magique.

Mais je pense que ça demeure une préoccupation, notamment parce qu'il y a les deux grandes tendances qu'on est en train de voir: à la fois notre réforme à l'interne de la fonction publique, à leur modernisation, de décentralisation, la responsabilisation, ça, c'est un contexte, mais je pense que ma collègue de Rosemont, entre autres, évoquait les partenariats privés et publics, qui est un enjeu différent aussi. Et on a pas eu peut-être assez de temps de poser les questions, mais je trouve... J'avais quelques questions, que je poserai la prochaine fois, mais, ça, c'est une préoccupation, parce qu'on a vu ça dans une réflexion sur la Loi sur l'accès à l'information, par exemple, dans un partenariat privé et public, à quel point la transparence qu'on exige pour le dollar du contribuable règne et à quel point est-ce que le secteur commercial et les autres enjeux plus particuliers que le secteur privé, il y aura toujours un conflit. Parce que, si le motif, c'est une entreprise 50-50, 0,50 $, c'est de l'argent public, alors, on exige la plus grande transparence possible, mais, si c'est une entreprise qui est dans un marché, il y a toute la confidentialité de ne pas donner les outils et l'information aux concurrents. Alors... Et, dans une optique où on favorise de plus en plus ces genres de partenariat, les questions éthiques, de transparence, d'impartialité, et tout le reste, ça va être encore plus complexe.

Alors, je pense... Mais je pense, nos experts nous ont dit que l'éthique, c'est avant tout un processus, c'est dans un mouvement, c'est une évolution constante. Je pense que le débat d'aujourd'hui est important. L'intérêt à la fois des parlementaires et les élus de la population, la fonction publique aussi est... sont numéros un, si je peux dire ça, ils se préoccupent. Le Vérificateur général a provoqué le débat. Je pense, c'est son rôle de toujours nous alimenter à faire les réflexions, surtout dans le contexte d'une mobilisation et un changement de nos façons de faire.

Alors, merci infiniment. J'ai trouvé l'échange ce matin ? je pense que je parle au nom de l'ensemble des membres de la commission ? fort intéressant. Alors, merci pour votre disponibilité, et, sur ça, j'ajourne nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 31)

 



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