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(Quinze heures douze minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission des affaires sociales se réunit afin de
procéder à une consultation générale et à
des auditions publiques sur T'Énonce de politique sur les services de
garde à l'enfance" déposé à l'Assemblée
nationale le 24 novembre 1988. Cet après-midi, nous recevrons la
Fédération des associations de familles monoparentales du
Québec, la Fédération des femmes du Québec, le
Comité national des jeunes du Parti québécois et la
garderie Gribouillis inc.
Donc, nous avons une heure pour le premier groupe, si je comprends bien,
qui est la Fédération des associations de familles monoparentales
du Québec. Bonjour.
Fédération des associations de familles
monoparentales du Québec
Mme Pothier (Marie-France): Bonjour.
Le Président (M. Bélanger): Je vous prierais de
bien vouloir identifier vos porte-parole. Lors de la période de
questions et de réponses avec les parlementaires, après vos 20
minutes de présentation, lorsque vous aurez à prendre la parole,
il serait important de bien vouloir vous identifier aux fins de la
transcription du Journal des débats. Je vous remercie. Je vous
prierais de commencer, s'il vous plaît.
Mme Pothier: Merci beaucoup. M. le Président, Mme la
ministre, MM. et Mmes les commissaires, j'aimerais vous présenter les
deux personnes qui m'accompagnent aujourd'hui. À ma gauche, Mme
Céline Signori, qui est directrice générale. À ma
droite, Mme Madeleine Bouvier, qui est agente d'information.
Le Président (M. Bélanger): Vous-même, vous
êtes Mme Pothier.
Mme Pothier: Je suis Marie-France Pothier, présidente de
la fédération. Alors, nous tenons à vous remercier d'avoir
permis notre participation aujourd'hui. Je voudrais vous spécifier que
notre intervention apportera certains aspects différents du
mémoire peut-être, mais des aspects qui vont approfondir ce qui a
été rédigé dans le mémoire.
La fédération est un organisme provincial qui regroupe des
associations de familles monoparentales dans tout le Québec. Les membres
de ces associations représentent une bonne partie de la clientèle
actuelle des services de garde et peuvent être également une
clientèle potentielle par excellence advenant l'établissement
d'un réseau de services de garde au Québec.
La fédération souscrit aux objectifs de la Loi sur les
services de garde à l'enfance qui vise l'accessibilité des
services de garde, le respect de la liberté de choix des parents et
aussi la participation des parents. Quant à la logistique de la
consultation, on trouve que les délais ont été beaucoup
trop courts et que cela a tombé vraiment dans une période - le
temps des fêtes - qui nous a pris un peu de court pour vous
présenter un document. Et vraiment, même lors de la
dernière consultation, cela a été le même
scénario, c'était pendant la période estivale. On regrette
un peu cet état de choses.
La fédération souscrit à fond au droit fondamental
qu'a l'enfant à des services de garde de qualité. Nous
reconnaissons que seuls des services de garde collectifs répondent
vraiment aux besoins des services de garde au Québec.
La fédération reconnaît l'effort du gouvernement
dans son implication dans le dossier de la garde des enfants et reconnaît
l'importance d'une consultation publique. À la lecture attentive du
document d'orientation, "pour un meilleur équilibre", il est clair que
la trame de fond qui se dégage est un désengagement de
l'État. Premièrement, en subventionnant les garderies
commerciales, l'État se désengage du réseau des services
de garde comme premier responsable de la qualité, de
l'accessibilité et de la gratuité.
L'État abonde dans un rôle de collaborateur, de partenaire.
Il appuie, il suggère et il veut partager avec d'autres partenaires
économiques sa vocation de premier responsable des services de garde.
L'État ne croit pas à la nécessaire implantation d'un
réseau de services adéquats. La volonté politique est
absente. L'État ira chercher du gouvernement fédéral, nous
n'en doutons pas, toutes les subventions possibles en politique de garde, sans
y mettre un engagement ferme de sa part. L'État n'a pas de plan
d'ensemble qui viserait à long terme la gratuité des services. Au
contraire, telle la cigale, l'État valse des plus pauvres aux plus
riches, voulant sauver la chèvre et le chou, sans prendre aucun
engagement.
L'État ne répond pas aux besoins de garde des parents
à revenu moyen. Le seul effort d'aide au revenu moyen, c'est d'en
inclure un certain nombre admissible à une partie de
l'exonération financière avec le remaniement des seuils des
revenus admissibles. Mais, pour les revenus élevés, quelle
aubaine! L'État double la déduction pour frais de garde et en
enlève le plafond. Une déduction royale qui va à rencontre
de la philosophie fiscale de convertir en crédits d'impôt les
exemptions et déductions. C'est un cadeau princier fait aux revenus
aisés. Pourquoi le gouvernement privilégie-t-il les familles
à revenu aisé dans sa politique des services de garde par le
biais de la fiscalité? Ces dépenses
fiscales comptabilisées autrement pourraient servir à
élargir l'assiette financière de la politique des services.
Présentement, c'est un talon d'Achille dans une politique
cohérente des services de garde. S'il y avait volonté ferme de la
part du gouvernement, celui-ci négocierait tous les avantages fiscaux et
sociaux reliés à la charge d'enfants pour bâtir une
véritable politique de services de garde.
Si on regarde l'étude du Conseil national du bien-être
social dans son document intitulé "De meilleurs services de garde
d'enfants", publié en décembre 1988, il propose une option de
réaménagement de toutes les politiques reliées à la
garde d'enfants pour en bonifier une véritable politique d'ensemble, la
hausse considérable du nombre de places en garderies
agréées, la hausse du pourcentage d'enfants qui en
bénéficieraient, le montant des frais acquittés par les
parents, basé sur la capacité contributive de ceux-ci, la hausse
des salaires du personnel enseignant dans les garderies, la diminution du ratio
enfants-moniteur, le congé de maternité de 17 semaines, plus le
congé parental de neuf semaines, à 75 % du salaire.
Évidemment l'étude n'inclut pas les allégements fiscaux du
Québec dans son rapport.
Une catégorie qui nous tient bien à coeur, ce sont les
femmes, chefs de famille, assistées sociales. Ce groupe
représente une clientèle à risque lorsque l'autre parent
est souvent absent. La fédération recommande que les enfants de
ces familles soient toujours admissibles aux garderies, sans qu'il n'y ait une
obligation d'étude ou de travail rattachée à
l'admissibilité.
Tout ceci est une bonne mesure de prévention en santé
mentale. J'aimerais vous parier d'un cas qu'on a vu dernièrement dans
l'une de nos associations, celui d'une jeune femme assistée sociale qui
vient de vivre une séparation, il y a sept mois, qui a un jeune enfant
de quatre ans et qui a vécu cela très difficilement; elle
était seule et n'a pu avoir de soutien ni la possibilité de
parler de ce qui lui arrivait à personne. Elle se retrouve toute seule,
assistée sociale avec sa fille; son ex-conjoint est complètement
absent. Cette jeune femme commence à ressentir vraiment de la
difficulté à accomplir ses tâches familiales et elle
commence à démontrer un peu d'agressivité. Elle commence
aussi à faire une dépression et elle a des idées
suicidaires. Elle s'est présentée dans une association et la
première chose qu'on lui a conseillée, c'est d'inscrire son jeune
enfant en garderie environ deux à trois jours par semaine, ce qui
pourrait lui donner la possibilité de se retrouver, de se reprendre en
main, de penser à elle, d'aller même chercher de l'aide
psychologique, et que son enfant serait vraiment en sécurité et
dans un encadrement privilégié. Vous voyez que c'est vraiment une
mesure de prévention en santé mentale.
L'impact de cette mesure chez ces femmes, c'est justement de leur
permettre de se reprendre en main psychologiquement et physiquement et de
pouvoir assumer la rupture, chose qui est assez difficile, et, après,
penser vraiment à la reprise en charge financière.
Il y a aussi la question du parent au foyer. Ce parent qui se
sépare risque fort de devenir encore là une clientèle
potentielle par excellence des services de garde. S'il est marié en
séparation de biens, N est bien clair que ce parent devient
nécessairement pauvre en raison des lois actuelles, étant
donné qu'il n'y a encore rien au chapitre du partage des biens, à
moins que les actifs de la famille ne soient au nom des deux conjoints, ou
à son nom propre, chose qui est assez rare. On considère qu'il y
a des statistiques américaines qui avancent même que le niveau de
vie de l'homme augmente de 42 %, et que celui de la femme qui a la garde volt
le sien baisser de 73 % après un an de séparation ou de
divorce.
La Loi sur le divorce, le droit familial et la jurisprudence ne tiennent
pas suffisamment compte de la richesse réelle du couple et des
dépenses reliées à l'enfant. Donc, le partage des biens
familiaux se fait toujours attendre, malheureusement.
Pour le parent au foyer, la fédération recommande que les
haltes-garderies et les jardins d'enfants soient Incorporés au plus
tôt dans la gestion des services de garde par l'office, avec les
aménagements suivants: augmenter à un maximum de cinq heures les
périodes de garde et déterminer les mêmes critères
d'admissibilité à l'exonération financière que pour
les garderies, la garde en milieu familial et la garde en milieu scolaire.
L'impact de cette mesure fait en sorte de reconnaître que tout enfant a
un droit fondamental à des services de qualité et de permettre au
parent au foyer des périodes de bonne hygiène mentale.
La fédération a aussi étudié attentivement
le projet de garde au domicile de l'enfant, en tenant compte des
paramètres suivants: II faut établir des services collectifs pour
répondre aux besoins de garde; l'agence ne peut diminuer ses effectifs
au profit du particulier; il faut satisfaire les besoins de garde du soir, de
nuit, de fin de semaine et de garde en milieu rural. La
fédération recommande que la responsable de garde au domicile de
l'enfant relève d'une agence de services de garde, qu'elle soit
engagée et payée par l'agence, que l'agence négocie un
contrat avec l'employeur, que la responsable soit admissible à
l'information et à la formation, tout comme les responsables de familles
de garde, qu'un roulement soit établi pour assurer les services, en cas
de maladie ou de vacances, des responsables de garde au domicile de l'enfant,
que de bonnes conditions salariales soient apportées de façon
à éliminer la surexploitation des femmes. L'Impact de cette
mesure est d'assurer à l'enfant une sécurité en tout
temps. Il ne serait plus question de laisser l'enfant seul le soir, la nuit. Le
parent pourrait alors travailler en toute quiétude.
II y a un autre élément, aussi, qu'on trouve très
important. C'est qu'on se rend bien compte que la mère au foyer, qui
doit retourner sur le marché du travail, éprouve beaucoup de
réticences à faire garder son enfant. Premièrement, cette
femme a souvent peur de l'inconnu pour l'enfant, elle se croit indispensable
près de lui, elle éprouve un sentiment de culpabilité
à laisser son enfant, elle a l'impression qu'elle renie ses
responsabilités, elle n'est pas sûre de vouloir partager la garde
et le pouvoir qu'elle a sur l'enfant. La garde au domicile de l'enfant est
recherchée en premier lieu par ses parents, parce que rien n'est
changé dans les habitudes de vie de l'enfant; il a encore sa chambre, il
a ses jouets, il a son environnement, et le service n'est pas interrompu si
l'enfant est malade. Donc, la garde au domicile de l'enfant et la garde en
milieu familial sont privilégiées par les parents pour les
très jeunes enfants parce que ces services ressemblent le plus à
ce qui se passe à la maison.
Les activités de socialisation et d'éducation en garderie
sont souvent méconnues des parents comme apport important au
développement de l'enfant. La fédération recommande, par
rapport à tout cela, qu'une campagne de sensibilisation soit faite
auprès des parents sur le bien-fondé des services de garde
concernant les activités de socialisation et d'éducation, comme
démarche préalable à une mesure d'incitation au retour aux
études ou sur le marché du travail.
Nous tenons aussi à appuyer les recommandations des regroupements
des garderies sans but lucratif, les regroupements des agences de service de
garde et l'Association des services de garde en milieu scolaire dans leurs
revendications concernant de meilleures conditions de travail, une meilleure
formation, le ratio et les conditions salariales aussi.
Concernant le financement, la fédération s'oppose à
la méthode de financement proposée dans le document
d'orientation. Une subvention de fonctionnement basée sur la
participation financière des parents oblige les garderies à
majorer leur tarif pour améliorer leur sort, avec les effets
négatifs suivants: diminution de la clientèle à revenus
faibles et moyens pour qui la garde est trop coûteuse; obligation de
combler au maximum le taux d'utilisation des places en garderie, au
détriment des objectifs pédagogiques, donc amenant une perte de
qualité des services; augmentation du ratio enfants-moniteur/monitrice
déjà trop élevé; dégradation des conditions
salariales et de travail déjà fort mal rétribuées.
Donc, une augmentation des tarifs obligera nos familles à retirer les
enfants des garderies, à surexploiter la parenté pour faire
garder les enfants ou encore à se passer du minimum vital ou même
jusqu'à s'endetter.
Le programme APPORT a le malheur d'exercer auprès des familles
à bas revenus un contrôle aussi serré que celui de l'aide
sociale. Il est difficile et complexe à administrer. De plus, ce
formulaire est très difficile à remplir pour nos families et
même pour certains agents qui sont chargés d'administrer le
programme. Beaucoup ont de la difficulté à le comprendre.
Plusieurs familles monoparentales sont pénalisées parce que les
pensions alimentaires qu'elles reçoivent sont calculées comme
autres revenus et sont déduites à 100 % dans le calcul du revenu
admissible contrairement au revenu de travail. L'impact pour la famille
monoparentale implique que, pour un montant identique de revenus, s'N s'agit de
pension alimentaire bien sûr, elle n'aura pas droit à APPORT. La
fédération réclame que les pensions alimentaires soient
calculées au même titre que le revenu de travail dans le programme
APPORT, dans les prêts et bourses et à l'aide sociale.
Maintenant, un petit mot sur la garde en milieu scolaire. À
plusieurs reprises, la fédération a réclamé que la
garde en milieu scolaire prenne le nom de centre de jour en milieu scolaire,
pour mieux répondre aux objectifs d'encadrement et d'éducation.
On a fortement insisté aussi sur la structure des centres de jour en
milieu scolaire, pour qu'ils soient gérés par la
municipalité, pendant les jours et les heures non régis par le
scolaire, les jours de congé ainsi que les vacances estivales. Il est
inadmissible que ce service ne soit pas en force dans toutes les écoles
de la province, quand on pense que l'infrastructure est déjà en
place partout.
Le transport scolaire devient une priorité pour assurer
l'efficacité du service en région, là où le
transport en commun n'existe pas. Donc, l'impact de cette mesure, pour nos
femmes demeurées au foyer avec leurs enfants d'âge
préscolaire, est de leur permettre une intégration rapide au
marché du travail, en vue de l'atteinte de leur autonomie
financière. On recommande tout cela pour que des services de garde
soient établis et adéquats pour tous au Québec. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci beaucoup, madame.
Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Pothier. C'est très
intéresssant d'avoir l'opinion d'un groupe de femmes à cette
commission parlementaire. D'ailleurs, il y a déjà eu d'autres
groupes qui se sont joints à vous; il y en aura d'autres cet
après-midi et dans le courant de la semaine. On sait que les femmes sont
à la base de l'implantation des services de garde au Québec.
Ma première question, Mme Pothier, est celle-ci. Comment
pouvez-vous affirmer que le gouvernement québécois se
désengage, face à la politique des services de garde, alors que
le budget de l'office ne sera pas de 43 000 000 $, l'an prochain, mais bien de
143 000 000 $, que le gouvernement fédéral n'a pas encore
adopté son projet de loi C-144, et que pour la première fois,
finalement, on a un plan de développement, on a un budget prévu
pour la formation, on a des mesures qui sont Indexées pour la
première fois?
Comment pouvez-vous affirmer avoir l'impression que le gouvernement se
désengage?
Mme Pothier: J'aimerais que Mme Bouvier vous réponde.
Le Président (M. Bélanger): Mme Pothier, est-ce que
vous pourriez parler plus près de votre micro ou parler plus fort? On
vous entend très mal à ce bout-ci.
Mme Pothier: D'accord.
Le Président (M. Bélanger): Merci.
Mme Pothier: Mme Bouvier peut vous répondre à ce
sujet. (15 h 30)
Mme Bouvier (Madeleine): Voyez-vous, le gouvernement du
Québec a un plan de redressement, mais, à l'étude du
document d'orientation, ce qui est soulevé comme trame de fond, c'est
vraiment, tout d'abord et particulièrement, deux points. Le premier,
c'est le financement des garderies commerciales qui, étant donné
le nombre des garderies admissibles et le budget du gouvernement pour les
garderies, va diminuer la possibilité d'avoir des garderies sans but
lucratif pour pouvoir privilégier les garderies en milieu de travail. En
subventionnant les garderies commerciales, on se désengage de
l'idée que la garde d'enfants est un droit fondamental qui relève
de l'ensemble de notre société. Donc, le gouvernement doit se
considérer comme premier responsable. Comme je l'ai dit, la subvention
aux garderies commerciales est un fléchissement vers une certaine
privatisation, donc un certain désengagement de ce
côté.
Le deuxième point, c'est la hausse des déductions pour
frais de garde. Si on met tant d'argent dans la garde privée
individuelle, c'est que la déduction pour frais de garde
représente vraiment un élément Important pour une personne
qui fait garder à titre individuel. Ce sont les deux points qui
défont un peu un plan de redressement et un plan d'ensemble vers une
politique cohérente. Cela veut dire qu'on devrait prendre tous les
éléments qui touchent la garde d'enfants et en faire vraiment un
tout pour répondre d'une façon collective, comme gouvernement et
comme société, aux besoins des services de garde.
L'autre élément est un droit fondamental. Il faudrait
tendre à plus ou moins long terme vers la gratuité des services
de garde comme les services sociaux et le système scolaire. Ces deux
éléments nuisent beaucoup à ce processus en vue
d'atteindre la gratuité au chapitre de la garde d'enfants.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parliez tout à l'heure de
garderies commerciales qui sont finalement les garderies à but lucratif.
Qu'est-ce que vous nous suggérez? Il en existe actuelle- ment 250 au
Québec. Je l'ai mentionné à quelques occasions. On avait
le choix de les fermer, c'est-à-dire créer 11 000 nouvelles
places ailleurs, abolissant aussi 2500 emplois. On avait ce choix-là.
D'autres sont venus nous dire en commission parlementaire qu'il fallait les
transformer. On sait que la transformation d'une garderie à but lucratif
en une garderie sans but lucratif est non seulement coûteuse, mais, du
côté pratique, très difficile, compte tenu qu'on doit
complètement mettre à l'écart les administrateurs de cette
garderie, si on veut en faire une garderie sans but lucratif avec laquelle on
puisse bien fonctionner et qui soit bien gérée par la suite, si
on veut que les parents soient en mesure de gérer la garderie. Donc, on
avait le choix de leur accorder certaines subventions pour améliorer la
qualité, pour s'assurer que les enfants qui vont dans ces garderies
aient une qualité identique aux autres garderies. Quelle est votre
position face à ça? Est-ce de les fermer? Est-ce que vous avez
une position?
Mme Bouvier: Voyez-vous, ce n'est pas de les fermer
évidemment, parce qu'on ne défait pas ce qui existe. C'est de ne
plus en mettre sur pied. Par contre, nous ne sommes pas d'accord pour des
subventions à ces garderies-là parce qu'H y a
l'élément profit. Alors, vous dites que vous voulez que l'enfant
ait les mêmes avantages, mais l'enfant ne pourra jamais avoir les
mêmes avantages parce qu'il y a le côté profit qui va
à {'encontre de la philosophie d'une garderie sans but lucratif. Donc,
que vous subventionniez ou pas, l'enfant n'aura pas les mêmes avantages,
et c'est le choix du parent que d'opter pour la garderie à but
lucratif.
Mme Gagnon-Tremblay: Remarquez que je ne voudrais pas prendre la
défense des garderies à but lucratif, mais vous me dites, d'une
part, qu'elles doivent exister - elles sont là, elle doivent exister -
et, par contre, vous me dites que celles qui existent - je ne parle pas de
celles qui le devraient, si on devait en ouvrir d'autres - actuellement, il ne
faut pas les financer, il ne faut pas leur donner quoi que ce soit parce que
c'est dans le but de faire un profit. Par contre, on sait que l'écart
s'élargit de plus en plus entre les deux sortes de garderies. On sait
qu'il y a quelqu'un qui sera pénalisé tout à l'heure
aussi.
Mme Bouvier: L'écart entre les tarifs ou l'écart
relatif à la qualité des services?
Mme Gagnon-Tremblay: Je veux dire l'écart entre les deux
systèmes. Les représentants des garderies à but lucratif
sont venus nous dire, dans le cadre de cette commission parlementaire, que les
éducatrices et les éducateurs ont des salaires moindres. Elles
ont de plus en plus de difficulté parce qu'elles sont obligées
d'exiger des tarifs très élevés, même plus
élevés. Et, par
contre, comme elles ne sont pas subventionnées, sous aucune forme
- ii peut y avoir une notion de profit mais pas nécessairement -
à ce moment-là, elles sont venues nous dire qu'elles avaient
beaucoup de difficulté à garder ces garderies ouvertes,
étant donné qu'elles ont à faire face à un autre
système de garderies qui est subventionné. Donc, l'écart
va s'agrandir entre les deux genres de garderies.
Mme Bouvier: Vous avez souligné que c'était
difficile de faire la conversion. Même si c'est difficile,
éventuellement, il faudra peut-être penser à faire la
conversion d'une sorte de garderie à une autre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je sais que les familles monoparentales ont
quand même des besoins de garde qui peuvent parfois être
différents de ceux d'une famille biparentale. Est-ce que vous avez une
idée, par exemple, des modes de services de garde qui sont
utilisés par les familles monoparentales? Quels sont les modes les plus
utilisés? Avez-vous déjà vérifié?
Mme Pothier: Oui. On considère, en tout cas, que ce sont
les modes les moins coûteux qui sont utilisés par les familles
monoparentales, car, souvent, il y a une méconnaissance du
réseau. Je vous apportais l'exemple tantôt de la jeune femme qui
ne connaissait pas du tout le réseau de garde et qui m'a dit: Ça
va être très dispendieux si je vais mener ma petite fille en
garderie. Je lui ai répondu que non, parce qu'elle a droit à une
exonération financière, étant donné qu'elle est
prestataire. Ces femmes, souvent, font encore appel aux services à la
maison - tante, maman, soeur, grande soeur, grand frère qui offrent ce
service - ou n'utilisent pas les services de garde, soit parce qu'elles ne les
connaissent pas ou parce qu'elles ont l'impression que cela ne peut pas en
être autrement.
D'où notre demande tantôt, dans le document. Ce qu'on vous
demande, c'est la sensibilisation de ces gens au réseau de services de
garde. Qu'est-ce qu'un service de garde? Qu'est-ce que ça peut leur
apporter? Quels sont les avantages d'un service de garde aussi? Je pense qu'il
y a beaucoup de gens qui sont démunis financièrement et
psychologiquement et qui ont beaucoup de difficultés. Ce réseau
de services de garde est méconnu. C'est ça. Beaucoup de femmes
ont de la difficulté à retourner sur le marché du travail
justement parce qu'elles doivent accomplir un travail de nuit et un travail
dans les restaurants, dans les bars, des choses comme ça, et que,
souvent, elles n'ont pas la possibilité d'avoir quelqu'un à la
maison pour garder les enfants. C'est vraiment un problème pour cette
clientèle à faible revenu et défavorisée.
Mme Gagnon-Tremblay: Aux pages 4 et 5 de votre mémoire,
vous mentionnez votre désaccord concernant la garde au domicile de
l'enfant. Vous êtes en désaccord également sur le projet
d'offrir aux parents, par le biais des agences, des services de recrutement de
gardiennes pour la garde au domicile de l'enfant, sous prétexte que ce
type de garde n'est pas un service collectif et qu'il ne revient pas à
l'office d'en surveiller l'application. Tout à l'heure, justement, vous
me faisiez part de certains problèmes spécifiques, de certains
besoins qui ne sont pas comblés actuellement, telle la garde de fin de
semaine, la garde du soir, la garde de nuit. C'est quand même
problématique, et il n'y a pas beaucoup de solutions. On n'est pas face
à des solutions multiples pour ce genre de garde. Donc, comme ce mode de
garde est utilisé par bon nombre de parents - parce qu'y faut dire que
ce ne sont pas tous les parents qui peuvent envoyer leurs enfants dans des
garderies, par exemple, ou qui le souhaitent, pour toutes sortes de raisons;
par exemple, je pense au parent qui doit quitter son domicile à 6 heures
du matin et qui préfère avoir une gardienne à domicile
pour avoir soin de ses enfants - compte tenu de tout ça, ne croyez-vous
pas que c'est légitime, par exemple, pour le gouvernement, d'apporter
aux familles qui le souhaitent, un soutien, tout au moins concernant le
recrutement de ces gardiennes?
Mme Bouvier: Justement, nous nous sommes posé beaucoup de
questions concernant la garde au domicile de l'enfant. C'est pour cela que,
dans la présentation, Marie-France a apporté beaucoup
d'éléments nouveaux, car on s'est dit: Nos gens, comme le disait
Marie-France, ont besoin de la garde le soir, la fin de semaine, la nuit pour
certains travaux, donc, il doit y avoir quelque chose, mais, par contre, il
fallait tout de même considérer que c'était un service
collectif qu'il fallait offrir. Donc, il n'était plus question de la
proposition dans le document d'orientation qui disait que l'expertise de
l'agence en ce qui concerne l'engagement serait mise à la disposition du
parent individuel qui recherche une gardienne. On s'est dit: Il faut rendre
cela un service collectif, et c'est dans ce sens-là qu'on a dit que,
quant à la garde au domicile de l'enfant, la responsable ou
l'employée doit faire partie d'une agence de services de garde et que
ces personnes-là seraient engagées, non pas par l'employeur dans
une relation individuelle employeur-employé, mais par l'agence qui les
engagerait pour aller travailler au domicile de l'enfant et les paierait.
Donc, il y aurait un contrat qui lierait l'agence à l'employeur.
Les responsables de cette garde au domicile de l'enfant relèveraient de
l'agence et pourraient, à ce moment-là, profiter de
l'information, de la formation qui doit être donnée aux
responsables de familles de garde. Elle serait un peu sur le pied des
responsables des services des familles de garde, sauf qu'elle serait dans une
maison privée: l'enfant serait à son domicile. L'autre
élément, c'est qu'il faudrait
un roulement pour assurer toujours une présence,
c'est-à-dire que si ta gardienne privée de l'enfant d'un parent
est malade, le parent n'a pas de gardienne et doit trouver quelqu'un. Il
faudrait un roulement également pour assurer un service continu.
Mme Gagnon-Tremblay: Les responsables des services de garde en
milieu familial actuellement sont autonomes. Comment pourrait-on priver les
parents de cette autonomie d'avoir à choisir? Finalement, ce que nous
suggérons, c'est beaucoup plus un programme de dépannage, ce
n'est pas dans le but d'en faire un service réglementé. C'est
beaucoup plus un dépannage pour permettre, par exemple, aux parents de
pouvoir puiser, à même une banque, des noms de personnes qui ont
été identifiées comme des personnes compétentes
pouvant donner des services, comme je dis, de dépannage, parce qu'on
pense que, dans nos services actuels, ce ne sont pas tous les services qui
peuvent répondre à ces besoins très particuliers. Ce n'est
pas une garderie qui va offrir ses services à 6 heures du matin ou la
nuit. C'est cela finalement qui est visé, mais c'est vraiment un service
de dépannage qui était prévu pour les parents.
M. Bouvier: Alors, si je comprends bien, le service que vous
préconisez c'est un groupe ou encore un réseau de gardiennes qui
seraient appelées à différents moments par des parents.
(15 h 46)
Mme Gagnon-Tremblay: C'est cela.
Mme Bouvier: Cela ressemble....
Mme Gagnon-Tremblay: C'est sur une base expérimentale
aussi. C'est sous forme expérimentale naturellement parce que cela ne
s'est pas fait en réalité. Et on doit travailler avec les agences
pour voir si elles sont prêtes à offrir ce genre de service. C'est
en plus des services qu'elles offrent déjà. Cela peut être
aussi un service qui peut être payé par la personne qui a à
faire cette référence.
Mme Bouvier: En fait, ce qui nous a semblé très
clair dans cette proposition, c'est que, finalement, la responsable de
l'agence, qui doit trouver des responsables de familles d'accueil pour son
réseau, se trouve ni plus ni moins à travailler à
l'encontre de son réseau parce qu'elle se trouve à recruter des
gardiennes qui seront engagées d'une façon...
Mme Gagnon-Tremblay: Oui.
Mme Bouvier: ...de dépannage, mais, pour moi, un
particulier qui a un besoin va engager sa gardienne d'une façon
permanente. Donc, c'était ni plus ni moins amoindrir le réseau de
l'agence en offrant...
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord, je comprends.
Mme Bouvier: ...de la façon dont c'était
expliqué et c'est sur cela qu'on a voulu travailler et apporter des
éléments qui respectent tout de même le cheminement d'un
réseau de service de garde complet mais qui, également,
répond aux besoins. En tout cas, ça nous fera plaisir de laisser
le document pour...
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, d'accord. A la page 6 de votre
mémoire, concernant la garde...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, Mme la
ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Ah! Déjà terminé! Le
Président (M. Bélanger): Hélas!
Mme Gagnon-Tremblay: C'était au sujet du ratio, j'aurais
aimé vous parier du ratio pour savoir si, pour vous, c'est le statu quo.
Peut-être que vous pourrez me répondre tout à l'heure...
J'ai complètement terminé. Je m'excuse. On pourra en discuter
après la réunion, madame. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux vous saluer,
Mme Pothier de même que Mme Signori et Mme Bouvier. Mme Signori, je crois
comprendre que vous siégez aussi au nouveau Conseil de la famille. Je
manque de statistiques présentement. Je me demandais s'H était
possible... J'ai communiqué avec le Secrétariat à la
famille et on n'a pas voulu m'en fournir à moins de passer par le
cabinet du ministre. Est-ce que, au Conseil de la famille, vous avez votre
propre secrétariat où vous pouvez obtenir les informations que
vous souhaitez avoir?
Mme Signori (Céline): Bon. Le Conseil de la famille est
tout à fait nouveau. Nous avons siégé trois fois
seulement. Nous avons du nouveau personnel qu'on vient d'engager. Depuis
octobre, il y avait le président et sa secrétaire qui
étaient au bureau du Conseil de la famille. Les nouveaux engagements ont
été faits tout à fait dernièrement. Donc,
probablement que les services que vous désirez seront plus faciles
à obtenir après l'engagement des personnes. Je n'ai pas eu la
chance de les rencontrer encore, mais notre prochaine réunion est
justement jeudi. On manquait de personnel. La grande cause, c'était
cela.
Mme Harel: Oui, je comprends, parce que l'absence de
l'Intervention du Conseil de la famille dans le présent débat des
services de garde m'a, je vous le dis, sincèrement
Inquiétée.
Je vois tout de suite que vous voulez réagir.
Mme Signcri: Oui. Je voudrais aussi savoir quelles sortes de
statistiques vous inquiètent?
Mme Harel: En fait, ce qui m'intéresse beaucoup, c'est de
savoir, parmi les mères ayant un enfant, quel est le taux
d'activité sur le marché de l'emploi? Parmi celles qui ont deux
enfants, quel est leur taux d'activité et parmi celles qui en ont trois
également? Mme Signori, je reviendrai avec vous, mais il faut regarder
un peu loin, il faut faire un peu de prospective et loin. Pour moi, loin, c'est
dans cinq ans. Mais quand on voit les tendances qui se dessinent...
Aujourd'hui, je constatais que l'évolution du taux d'activité des
mères d'enfants de moins de trois ans a augmenté de 90 % de 1975
à 1985. Vous vous rendez compte? De 1975 à 1985, quand on regarde
la progression du degré d'activité des mères d'enfants de
moins de trois ans, c'est 90 %, et cela s'amenuise parce qu'évidemment,
elles étaient à 28 % en 1975 et je pense qu'elles sont à
51 % en 1985. Les progressions ont été moins spectaculaires dans
le cas des mères d'enfants de quatre et cinq ans ou de six à onze
ans, parce que le point de départ était différent. Cela
est important. Si l'on veut avoir une vue d'ensemble de ce qu'il faut faire en
termes d'intervention, il faut savoir évidemment ce qu'est la
réalité des femmes. Loin de moi l'idée de réserver
simplement les services de garde aux mères qui sont sur le marché
de l'emploi. Il faut aussi, et j'y reviendrai parce que c'est un
élément qui est absent de l'énoncé de politique,
avoir une politique de ressources de service de garde à l'égard
de femmes qui ont droit aussi à un épanouissement personnel, et
pas simplement quand elle sont de mauvaises mères. Parce que, Mme
Pothier, l'exemple que vous nous avez donné...
Mme Signori: Mme Harel, il faut faire attention...
Mme Harel: Oui.
Mme Signori: ...quand on parle d'une mère qui est
déprimée ou un petit peu fatiguée, elle n'est pas mauvaise
mère pour cela. Il faudrait...
Mme Harel: Je sais que, pour vous, elle ne l'est pas. Mais...
Mme Signori: J'espère que pour la société
elle ne l'est pas non plus.
Mme Harel: ...elle l'est pour elle-même, parce que, dans le
fond, elle se sent incompétente et elle a l'impression d'abdiquer
à quelque chose. Le danger c'est que la société ne vienne
sanctionner son rôle parental que lorsqu'elle faillit à sa
tâche. Vous comprenez Mme Signori ce que je veux souligner.
Mme Signori: C'est important qu'on fasse la distinction, parce
que c'est toujours un petit peu chatouilleux, relativement à la
façon dont vous l'aviez présenté.
Mme Harel: Et c'est très important, parce que je suis
chatouilleuse sur la manière dont vous l'avez présenté,
Mme Pothier, parce que l'exemple qu'on donne, c'est un exemple marginal. Il
faut aussi revendiquer un service de garde dans la normalité. Ce n'est
pas juste parce qu'une personne a des difficultés temporaires dont elle
va se relever et pour lesquelles il lui faut un coup de pouce, qu'on doit
prévoir un service de garde, mais c'est aussi, pas simplement quand elle
faillit, pour la soutenir afin qu'elle maintienne son rôle parental. Je
sens que vous avez quelque chose à dire, Mme Bouvier.
Mme Bouvier: Oui, j'aimerais vous dire que nous y avons
touché dans la halte-garderie et les jardins d'enfants, en demandant
d'abord que les heures soient plus longues, des périodes de cinq heures
au maximum, donc qui permettent vraiment une bonne demi-journée de
repos, et on va même jusqu'à dire que tous les parents qui veulent
l'utiliser devraient avoir droit à l'exonération
financière, au même titre, c'est-à-dire selon les
mêmes critères du revenu.
Mme Harel: Je reprends le début de notre intervention,
à moins que Mme Signori vous vouliez... Aviez-vous une remarque à
faire? Cela va?
Mme Signori: Cela va.
Mme Harel: La ministre, d'entrée de jeu, vous a fait grief
du constat que vous nous apportiez relativement au désengagement de
l'État en matière des services de garde. Elle vous a dit: C'est
impossible de constater un tel désengagement. Et je crois qu'il y a eu
là certainement une erreur; elle a parlé de 43 000 000 $ cette
année et de 143 000 000 $ l'an prochain. En fait, ce qu'elle voulait
signaler, c'est qu'il y avait une augmentation de 43 000 000 $. Mais cette
augmentation se ventile de la manière suivante: 38 000 000 $ qui
viendront d'Ottawa, et 5 000 000 $, de Québec. Ces 5 000 000 $ qui vont
venir de Québec le seront au titre de la garde en milieu scolaire. Mais,
pour le service de garde que l'on connaît, pour les moins de six ans, en
1989, la contribution de Québec va être la même qu'en 1988,
ce qui signifie, compte tenu du taux d'inflation évidemment, une baisse
que l'ordinateur évalue à 4,1 % en moins, c'est-à-dire
qu'il y a un moins devant le 4,1 % et non pas un plus.
Dans ce sens, je pense que vous avez raison de parler d'un
désengagement, à moins que Mme la ministre ne prenne ici
l'engagement solennel qu'elle entend faire en sorte que ce budget soit
ferme, quelle que soit la décision prise par Ottawa. Si tant est
que ce soit le cas, si le gouvernement du Québec est prêt à
mettre, indépendamment d'Ottawa, la môme somme d'argent pour 1989,
alors, puisqu'il en a les moyens, pourquoi ne pas le mettre aussi? Pourquoi la
contribution nouvelle de l'un justifierait-elle le désengagement de
l'autre? C'est cela, dans le fond, qu'on lui dit depuis le début de la
commission. Ce n'est pas parce qu'Ottawa va enfin en mettre qu'il faut que
Québec en profite pour se désengager. Je ne sais pas si vous avez
eu ces chiffres à l'association des familles monoparentales. Est-ce que
vous avez eu ces chiffres des contributions respectives de Québec et
d'Ottawa pour les trois prochaines années?
Mme Bouvier: Oui, on les avait.
Mme Harel: Vous les avez. Vous nous avez mentionné, et
vous avez discuté là-dessus avec Mme la ministre, la question de
la garde au domicile de l'enfant. J'aimerais, si vous me le permettez, revenir
sur cette question, parce qu'à la lecture de votre mémoire, entre
autres à la page 6, j'aimerais vous interroger sur le deuxième
paragraphe où on lit: "Par ailleurs, il faudra examiner plus à
fond une agence pour regrouper les responsables de garde pour le service dans
les maisons privées relevant de l'agence comme service collectif qui
répond à une demande individuelle et non pas une aide technique
à la demande individuelle.'' J'ai compris l'esprit de votre
recommandation dans la discussion que vous avez faite avec Mme la ministre. Ce
que vous dites, c'est qu'il peut y avoir ce besoin de garde, mais n'isolons pas
les femmes qui vont le faire, permettons-leur une dynamique évolutive
où elles seront en apprentissage ou en formation étant entendu -
et c'était sous-jacent - je crois, que, dans la relation à
l'enfant, on a toujours des choses à apprendre avec le temps qui change
aussi.
Je voulais vous dire: Savez-vous que cela existe en France? Tout
dernièrement, je recevais de la documentation. Cela s'appelle des
assistantes maternelles agréées. Je ne sais pas si vous en avez
entendu parler. Peut-être qu'il pourrait être éventuellement
intéressant que la fédération organise un stage pour aller
voir ce qui se passe là-bas. Cela fait seulement depuis huit ans, 1980,
et elles sont 130 000 maintenant parce que, évidemment, la population
est différente de la nôtre. 130 000 assistantes maternelles
agréées. Elles offrent 200 000 places relativement, si vous le
voulez, au nombre d'enfants à garder et l'État leur couvre toutes
les cotisations sociales de la régie des rentes, toutes les autres
cotisations sociales qui font qu'elles sortent de l'ombre où,
malheureusement, sous prétexte de bons sentiments, la proposition de la
ministre va les garder ici comme un service de dépannage où elles
n'ont aucune reconnaissance du rôle social qu'elles jouent. Je ne le sais
pas, est-ce que vous aviez entendu parler de cette formule des assistantes
maternelles agréées?
Mme Pothier: Pas du tout.
Mme Harel: Voulez-vous que je vous envoie de la documentation
là-dessus?
Mme Pothier: Ce serait fort intéressant. Vous pourriez
peut-être envoyer un chèque pour qu'on aille faire un stage
là en même temps.
Mme Harel: Ha, ha, ha! À moins d'en faire plutôt la
demande à l'Office franco-québécois. Ce serait
peut-être intéressant. D'autre part, vous avez aussi parlé
des garderies commerciales, avez-vous dit, enfin qui sont les garderies
à but lucratif. Mme la ministre a fait état de l'écart qui
s'accroît entre les conditions salariales de ces garderies et des
difficultés. Je cite: "Beaucoup de difficultés à garder
des garderies privées ouvertes." En fait, c'était là
l'expression qu'elle a utilisée. Est-ce que vous savez que,
malgré ces difficultés leur nombre a doublé et que depuis
trois ans, la croissance la plus importante des places s'est faite dans les
garderies privées? Est-ce que c'est de là que vient
l'inquiétude que l'on sent sous-jacente à tout votre
mémoire?
Mme Bouvier: En fait, l'inquiétude sous-jacente, c'est
qu'on a essayé de voir la vision d'ensemble vers un réseau de
services de garde accessibles, de qualité et gratuits. On se dit: Ce
n'est pas pour aujourd'hui la gratuité, ce n'est pas pour demain, mais
il faut que ce soit à plus ou moins long terme et qu'on en arrive
là. C'était particulièrement à cause de cette
vision qu'il nous a semblé inadmissible qu'une sorte de garde, qui va un
peu à rencontre de cette dynamique, soit subventionnée. C'est
vraiment pour cela. C'étaient les deux éléments qui
démontraient la déduction pour frais de garde et les subventions
aux garderies commerciales qui laissaient voir que, finalement, on ne croyait
pas à un réseau accessible, de qualité et gratuit,
à plus ou moins long terme. (16 heures)
Mme Harel: Dans le mémoire, d'entrée de jeu,
à la page 2, vous nous parlez de l'autonomie financière par
rapport à la résistance au changement. J'aimerais vous entendre -
je ne sais pas laquelle de vous trois, ou les trois, j'imagine - sur cette
question. Depuis le début de la commission, vous savez que c'est le
débat qui est souterrain à ce dont on discute. Vous mettez une
phrase entre guillemets: "II n'y a rien comme la mère au foyer pour que
les enfants ne deviennent pas délinquants." Je sais que vous êtes
des femmes responsables, conscientisées, qui avez de
l'expérience, qui avez tenu aussi... C'est votre
fédération qui a tenu, je crois, un très Important
colloque sur la "monoparentalité", qui a même fait rédiger
des actes qui nous ont mieux fait connaître toute la dimension de la
"monopa-
rentalité", ce qui, notamment, a permis à la
société de découvrir qu'il y avait une délinquance
assez importante, à l'adolescence, dans les familles monoparentales.
J'aimerais vous entendre parler, pour le bénéfice de toute la
commission, de cette question.
Mme Signori: Cela aussi c'est un aspect chatouilleux, en tout cas
chez moi. Je vais parler pour moi, comme ça je n'impliquerai pas mes
partenaires. Quand on dit ici dans le document: "II n'y a rien comme la
mère au foyer pour que les enfants ne deviennent pas
délinquants", c'est le discours qu'on entend beaucoup et c'est le
discours qu'on entendra beaucoup, mais nous ne sommes pas tout à fait
d'accord avec ça. Évidemment que la délinquance n'est pas
apportée par la "monoparentalité", et, dans ce sens, on se veut
agents de changement social, parce que, que ce soit un enfant
élevé par une femme chef de famille - puisque ce sont
majoritairement des femmes - qui, tout à coup, perd son milieu de vie,
sa maison ou son appartement, son école, ses amis, ou un enfant de
famille biparentale qui subit la même chose, sans subir la rupture, mais
qui, lui, vit de la violence, de l'inceste ou des choses comme ça, ce
dernier aura tout à fait les mêmes chances de devenir
délinquant que l'enfant qui vit dans une famille monoparentale. C'est ce
discours qu'on veut véhiculer, parce que ce n'est pas
nécessairement le fait qu'il soit un enfant d'une famille monoparentale
qui fait qu'il devient plus délinquant, ce sont les conditions
socio-économiques qui entourent sa vie qui feront que l'enfant deviendra
délinquant, qu'il soit d'une famille monoparentale ou d'une famille
biparentale. Je pense que c'est Important qu'on continue à le dire.
Est-ce que cela répond à...
Mme Bouvier: J'aimerais ajouter un point. Il faut aussi dire que,
lorsqu'il y a des problèmes, si la femme est seule, les services sociaux
mettront l'enfant en centre d'accueil...
Mme Harel: En famille d'accueil.
Mme Bouvier: ...en famille d'accueil ou en centre d'accueil,
mais, si le père et la mère sont là et que l'enfant vit
les mêmes problèmes, bien, le père n'a qu'à donner
un coup de poing sur la table et à dire: Cet enfant ne sortira pas de
chez nous, et l'enfant reste dans sa famille. C'est un autre
élément qui semble dire que, dans les centres d'accueil, dans les
familles d'accueil, ce sont des enfants qui proviennent de familles
monoparentales dirigées par des femmes. Mais c'est le système qui
a enlevé cet enfant, et la femme n'a pas réussi, parce que j'en
connais qui se sont battues et qui se sont battues pour réussir à
garder leurs droits sur leur enfant.
Mme Harel: Vous avez insisté à plusieurs reprises
dans votre mémoire sur la nécessaire latitude qu'il faut laisser
au chef de famille de retour aux études ou sur le marché du
travail. Souventefois, vous avez insisté pour qu'il n'y ait pas
d'incitation forcée. Pour vous, cela vaut à tout âge? Vous
savez sans doute que, dans les lois nouvelles, à l'aide sociale et dans
la réglementation qui s'en vient, après l'âge de six ans,
il y a le travail obligatoire, en fait, ou la participation obligatoire
à une mesure. Est-ce que c'est à ça que vous vous
référez quand vous insistez, dans votre mémoire, sur ces
questions?
Mme Signori: C'est à quelle page? Toujours à la
page 2?
Mme Harel: Sur le fait qu'il ne faut pas qu'il y ait d'incitation
forcée au retour aux études.
Mme Pothier: Quand on parle d'une femme chef de famille
monoparentale, il faut toujours voir aussi l'élément de la
rupture, c'est-à-dire que, quand une femme a vécu un divorce ou
une séparation, on considère que cela lui prend au moins deux ans
pour se remettre d'aplomb psychologiquement et physiquement, avant
d'entreprendre une démarche active de recherche d'emploi. Je pense que
c'est un élément très important et qu'il ne faut pas
l'oublier. En tout cas, ce qu'on voulait dire quand on pariait tantôt
d'une non-incitation au retour au travail, c'est que la femme qui va inscrire
un enfant en garderie a le droit de l'inscrire sans avoir l'obligation de faire
un retour sur le marché ou un retour aux études. Je pense que
Madeleine avait autre chose à ajouter par rapport à
ça.
Mme Bouvier: J'aimerais apporter l'élément suivant.
Je pense que, particulièrement dans le cas des femmes chefs de famille
et assistées sociales, l'incitation doit être volontaire.
Malheureusement, on n'a pas réussi à faire bouger les choses dans
ce sens-là. Mais iI y a un autre élément que j'aimerais
apporter à toute la commission. La Loi sur l'aide sociale permet
à la femme chef de famille de demeurer au foyer quand l'enfant est
d'âge préscolaire. Ce qui arrive, c'est que, si la femme a le
malheur d'émettre le désir de sortir de l'aide sociale, tout de
suite elle perd son immunité, si on peut dire, et elle est inscrite
à des programmes. Il est arrivé un peu la même chose pour
l'assurance-chômage. Ces femmes se font comme prendre au mot. Je
comprends qu'H faut penser à la prise en charge économique, sauf
qu'H doit tout de même y avoir une espèce de respect de la
personne et de son cheminement à travers cette façon de faire.
Surtout quand l'enfant est très jeune, de lui soutirer presque cette
phrase pour ensuite la forcer à adhérer à des programmes,
je trouve ça tout à fait inadmissible.
Mme Harel: On me dit que mon temps de parole est
déjà terminé; cela va tellement vite. Je vous remercie
pour cet échange de vues et
pour l'expérience que vous avez de toutes ces questions. Je suis
contente, Mme Sorgini, Mme Signori plutôt - je pense à la
comédienne des Dames de coeur - qu'on puisse la mettre à la
disposition du Conseil de la famille. Je sais que vous avez beaucoup
d'expérience dans ces questions. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mmes Po-thier, Bouvier et Signori.
J'aurais bien aimé discuter avec vous de la recommandation que vous
faites concernant les centres de jour en milieu scolaire, en collaboration avec
les municipalités, mais peut-être aura-t-on l'occasion, en dehors
de cette commission parlementaire, de poursuivre la discussion sur ce sujet
précis. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie la Fédération des associations de
familles monoparentales du Québec et invite à la table la
Fédération des femmes du Québec.
Nous suspendons nos travaux deux minutes, histoire de saluer
l'équipe.
(Suspension de la séance à 16 il 9)
(Reprise à 16 il 11)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! Je demanderais à chacun et chacune de bien vouloir
reprendre sa place afin que nous puissions reprendre nos travaux et recevoir la
Fédération des femmes du Québec.
Bonjour, mesdames. Je voudrais simplement vous préciser nos
règles de fonctionnement. Vous avez un maximum de 20 minutes pour
présenter votre mémoire ou votre point de vue et, ensuite, il y a
une période de discussion de 40 minutes avec les membres de la
commission. Ce sont des temps fermes parce que nous avons plusieurs organismes
et que nous ne pouvons pas nous permettre de déborder. Je vous invite
donc à vous présenter et à présenter vos
porte-parole. Chaque fois que vous aurez à prendre la parole lors de la
discussion, s'il vous plaît, essayez de vous rappeler de donner votre
nom, ceci pour la transcription du Journal des débats, pour que
ce soit le plus fidèle possible. Je vous prierais donc de vous
présenter et de procéder à la présentation de votre
mémoire. Merci.
Fédération des femmes du
Québec
Mme Thibault (Charlotte): Merci, M. Bélanger, Mme la
ministre, Mme Harel, Mme Marcotte ainsi que les députés. Mon nom
est Charlotte Thibault. Je suis directrice générale de ia
Fédération des femmes du Québec. J'aimerais d'abord
excuser Mme Ginette Busqué, présidente de la
fédération, qui est absente aujourd'hui pour cause de maladie.
J'aimerais vous présenter, à ma droite, Mme Lyne Goyette, membre
du conseil d'administration de la Fédération des femmes du
Québec, et, à ma gauche, Mme Catherine London, agente de liaison
à la fédération.
Pour accélérer le débat et nous permettre d'avoir
plus de temps, je vais vous lire les recommandations de la
Fédération des femmes du Québec plutôt que
l'ensemble du mémoire. La Fédération des femmes du
Québec recommande que la ministre tienne compte de l'ensemble des
enfants québécois de moins de douze ans pour évaluer les
besoins de la clientèle en services de garde. La FFQ recommande qu'une
étude plus approfondie des parents en services de garde soit faite pour
permettre une orientation mieux adaptée de la politique des services de
garde, qui corresponde aux besoins réels. La FFQ propose que le
gouvernement sorte, dans les plus brefs délais, les détails
concernant les modalités d'opération d'une planification
régionale. La FFQ demande une accélération du rythme de
développement des services de garde à l'enfance, afin de
répondre aux besoins réels des parents et des enfants
québécois. La FFQ recommande que le gouvernement du Québec
cesse immédiatement l'attribution de permis pour les garderies à
but lucratif et qu'aucun financement ne leur soit accordé. Nous
recommandons aussi que le gouvernement du Québec révise sa
politique de financement de fonctionnement des services de garde, afin de
s'assurer que les travailleuses et les travailleurs en garderies
reçoivent des salaires plus adéquats.
Nous proposons aussi que le gouvernement du Québec finance de
façon adéquate les services de garde en saison estivale. Nous
demandons au gouvernement du Québec de trouver des moyens de
concertation entre les commissions scolaires et les municipalités, pour
permettre une utilisation maximale des équipements sportifs et de
loisirs par les enfants du niveau primaire. Nous recommandons que le
gouvernement du Québec prévoie des subventions d'implantation et
de fonctionnement pour les haltes-garderies. Nous recommandons que le
gouvernement du Québec n'oblige pas les parents à aller chercher
du financement par le biais de plusieurs programmes, mais établisse un
seul programme d'aide financière, ce qui simplifierait le système
et permettrait aux parents de se prévaloir de toute l'aide
financière possible. Nous recommandons que le gouvernement augmente le
montant de base qui est présentement de 4,75 $ par enfant par jour, afin
que les familles payant des tarifs de garde moins élevés puissent
en profiter. Nous demandons au gouvernement d'adopter un mode de financement
basé sur les coûts réels des garderies et du nombre de
places disponibles. Ceci serait infiniment plus équitable pour les
garderies plus pauvres, entre guillements, et celles ayant des coûts de
fonctionnement plus élevés. Nous
recommandons qu'une façon plus équitable soit
trouvée pour assurer la formation des éducatrices et
éducateurs dans les garderies québécoises. À titre
d'exemple, un montant fixe pourrait être accordé aux garderies par
éducateur et éducatri-ce. Ce montant pourrait aussi varier selon
la région dans laquelle la garderie est située.
En conclusion, la Fédération des femmes du Québec
félicite la ministre, Mme Monique Ga-gnon-Tremblay, de l'initiative
prise par le gouvernement afin de prévoir un pian de
développement des services de garde. Il nous apparaît très
intéressant que les 60 000 places annoncées sur sept ans, au
printemps 1988, soient plutôt développées sur cinq ans. La
FFQ s'inquiète cependant de la pertinence des données qui ont
servi à l'élaboration de l'énoncé de politique.
Nous souhaiterions vivement que le gouvernement puisse les réviser, afin
d'avoir une vision plus juste de la clientèle à desservir et des
besoins réels des parents et des enfants québécois.
La FFQ constate, en outre, que le gouvernement québécois
n'assume pas un financement plus adéquat du développement des
services de garde. Alors que les parents sont déjà au seuil de
leur capacité de payer, alors que les travailleuses et les travailleurs
en garderie sont sous-payés et que les garderies ont déjà
beaucoup de difficultés financières, la FFQ s'inquiète,
à juste titre, que le gouvernement du Québec ne finance pas
davantage la consolidation des services de garde sans but lucratif. De plus, la
FFQ dénonce le financement des garderies à but lucratif, ce qui
aura pour effet d'accroître les garderies commerciales. La
fédération est aussi en désaccord sur le nouveau mode de
financement à la formation des éducatrices et des
éducateurs en garderies.
De façon générale, la FFQ incite le gouvernement du
Québec à réviser en profondeur toute la politique
proposée, et ce, en concertation avec les différents intervenants
et intervenantes, afin de permettre aux enfants du Québec de profiter de
services de garde d'excellente qualité et accessibles à tous.
Merci.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Thibault: Je veux qu'on ait une discussion.
Le Président (M. Gervals): Merci. Mme la ministre.
Mme Gag non-Tremblay: Merci, Mme Thibault, pour votre
exposé. Je pense que je vais aller immédiatement droit au but
avec la première question. Lorsque vous parlez d'étude plus
approfondie pour connaître les besoins des services de garde, parce que
je pense que vous faites mention aussi que vous mettez en doute, par exemple,
les chiffres qui ont servi à identifier les besoins, je ne veux pas,
moi, parler de chiffres parce que je suis sûre que, si on prenait les
chiffres qui nous ont été soumis, nos chiffres, à ce
moment-là, cela ne servirait qu'à faire une guerre de chiffres,
alors que ce qui est important, c'est d'identifier les véritables
besoins. Je pense aussi que c'est sur le terrain qu'on va pouvoir
véritablement les identifier ces besoins.
Alors, quand vous parlez d'étude plus approfondie, est-ce que,
pour vous, la planification régionale, ça tient compte de cette
étude ou bien si vous voyez autre chose que la planification
régionale?
Mme Thibault: Quand on parle d'étude plus approfondie, on
parle, entre autres... Dans le fond, toute l'étude, pour ce qui est des
besoins comme tels des parents, a été faite à partir de
deux sondages, comme on l'explique. Ce qu'on dit, nous, c'est qu'on n'est pas
vraiment sûres de la qualité des sondages. On n'est pas
sûres que les questions posées sont suffisantes. Nous avons des
membres de la fédération qui ont une expertise dans le domaine
des sondages et qui ont vérifié, avec des employés de
l'Office des services de garde, pour voir quel genre de questions avaient
été posées et de quelle façon cela avait
été fait. Alors, on n'est pas sûres que, vraiment, toute la
clientèle a été couverte de façon adéquate.
C'est pour ça qu'on dit qu'à partir du moment où on n'est
pas sûres du bassin qui a été utilisé, on n'est donc
pas sûres des résultats et des prévisions du gouvernement.
Donc, ça n'a rien à voir avec la planification
régionale.
Mme Gagnon-Tremblay: Finalement, cela veut dire que, si on va
dans chacune des régions, des municipalités et que, sur place, on
va vérifier - peut-être pas par sondage, même pas par
sondage - auprès des personnes qui ont véritablement ces besoins,
ça pourrait remplacer l'étude ou cela ferait état...
Mme Thibault: Mme Gagnon-Tremblay, je pense que ce serait
beaucoup plus dispendieux que de faire une enquête scientifique et avec
un assez bon échantillon de tout le Québec, des
différentes régions du Québec. Je ne pense pas qu'on ait
besoin d'aller dans chaque municipalité. Il faut plutôt avoir un
excellent échantillon de l'ensemble du Québec, qui couvre
à la fois les parents dont les mères sont sur le marché du
travail et les parents dont les mères ne sont pas encore sur le
marché du travail.
Mme Gagnon-Tremblay: Par contre, si on veut faire une bonne
planification et réévaluer, par exemple, le plan de
développement que nous proposons au bout de deux ans, il faut être
en mesure d'évaluer. C'est la raison pour laquelle on veut travailler
avec les gens du milieu, les municipalités, les municipalités
régionales de comté, en somme, tous les intervenants, dans le
but d'identifier les véritables besoins et de trouver le type de
services qui pourraient répondre à ces besoins, parce qu'on sait
que, dans chaque région, on peut avoir des besoins très
diversifiés puisque les clientèles sont très
différentes les unes des autres, selon les régions.
On est venu ici nous dire que, dans certaines régions, par
exemple, on a beaucoup de travail saisonnier. On nous a aussi parlé du
milieu rural. Alors, il y a des municipalités où ce n'est
peut-être pas possible d'avoir des garderies mais où on peut avoir
d'autres types de services. Alors, c'est dans ce but-là que !a
planification régionale est faite.
Mme Thibault: Nous sommes entièrement d'accord avec une
planification régionale. On trouve que c'est une excellente initiative.
Qu'il y ait un travail qui se fasse avec les municipalités et les
municipalités régionales de comté, on trouve cela
excellent. On encourage ça. C'est évident que les besoins des
milieux ruraux, semi-ruraux et urbains sont différents, et on est
entièrement d'accord avec vous pour ce qui est de ça. D'ailleurs,
c'est une des raisons pour lesquelles on dit qu'on doit avoir des services de
garde variés qui répondront aux besoins réels des
parents.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez, dans votre mémoire, d'un
statut particulier pour la gardienne à domicile qui est
coordonnée par une agence en milieu familial. Vous avez parlé
d'un statut particulier qui pourrait être accordé à cette
gardienne. Je ne sais pas si vous êtes au fait - et j'avais l'occasion
d'en prendre connaissance tout récemment - que le ministère du
Revenu a publié récemment, à la demande de l'Office des
services de garde, une petite brochure pour faire connaître à ces
gardiennes ia possibilité de déductions fiscales, parce que,
souvent, elles ne sont pas au fait des déductions auxquelles elles
peuvent avoir droit. Cette petite brochure se réfère à une
travailleuse autonome et on y mentionne justement que cette travailleuse
autonome a droit à des déductions pour la fourniture domestique,
les accessoires de jeux, toute ia nourriture, le matériel dont elle se
sert pour la garde des enfants, l'utilisation de ia maison aussi. Il y a une
quote-part pour l'utilisation de la maison ou, si elle loue un local, à
l'extérieur du logement, il y a certains frais de réparations ou
de remplacement de certaines pièces du mobilier qui peuvent être
déductibles, de même que d'autres dépenses qui sont en
rapport avec le revenu. Lorsque vous parlez d'un statut particulier, est-ce
autre chose que ce statut de travailleuse autonome auquel vous faites
référence?
Mme Thibault: L'objectif qu'on a à la
fédération quand on parle, c'est de services régis par
l'office, donc de service. C'est uniquement de ça dont on veut parler.
On n'a pas été dans le détail des modalités. On
veut simplement s'assurer que tous les parents aient des services de
qualité, par exemple, qu'il y ait des cours de donnés aux
gardiennes qui viennent garder le soir à l'occasion, etc., en fait qu'il
y ait un maximum possible de services de qualité. Mais je dois
être très honnête et vous dire qu'on n'a pas
été dans le détail et que je ne connaissais pas le
dépliant dont vous faites mention.
Mme Gagnon-Trembiay: Finalement, c'est que cela ne signifie pas
que cette travailleuse autonome, dans Se milieu familial... Parce que c'est
comme ça que je l'avais compris dans votre mémoire, soit que vous
souhaitiez que cette gardienne régie par l'office, c'est-à-dire
qui est coordonnée par une agence, ait un statut particulier. Mais ce
n'est pas à ça que vous vous référiez?
Mme Thibault: Non.
Mme Gagnon-Trembiay: D'accord. Quant à la formation du
personnel, vous recommandez, d'une part, de distribuer l'enveloppe
budgétaire de façon plus équitable entre les
éducatrices et les éducateurs des différentes garderies
et, d'autre part, vous suggérez également que le montant varie
selon la région dans laquelle la garderie est située. Que cette
enveloppe soit répartie par tête de pipe ou per capita, c'est une
chose qui pourrait être envisagée, mais, par contre, au niveau des
différentes régions, vous ne trouvez pas que cela pourrait
être inéquitable d'allouer des montants différents selon la
région? Lorsqu'il s'agit, par exemple, de couvrir des frais de
déplacement - parce que vous parlez surtout de frais de
déplacement - on sait que ces frais peuvent varier beaucoup à
l'intérieur d'une même région. Parfois, vous pouvez
être à Montréal, mais avoir à vous déplacer
quand même et à faire peut-être deux heures de route avant
d'être capable d'aller chercher cette formation-là. Est-ce bien
ça que vous vouliez?
Mme Thibault: Ce dont on veut parler... Je vais vous donner un
exemple: En ce qui concerne une garderie située tout près de
l'Office des services de garde, juste à côté du
cégep du Vieux-Montréal, c'est évident que
l'éducatrice en garderie qui veut aller suivre son DEC le soir n'a alors
qu'à faire deux ou trois coins de rue. Donc, c'est très peu
dispendieux pour elle en comparaison avec une garderie qui pourrait être
située à Lac-Mégantic: une éducatrice aurait
peut-être à venir à Sherbrooke pour suivre des cours.
Alors, c'est très différent comme situation et c'est la raison
pour laquelle on dit que l'on doit réfléchir à des budgets
mieux adaptés aux régions pour tenir compte de ces distances.
Alors, ou bien il faut que ces cours se donnent partout où il y a des
services de garde pour réduire les frais des éducateurs et des
garderies, ou bien il faut que les budgets tiennent compte
des distances. C'est uniquement ça qu'on veut mentionner.
Mme Gagnon-Tremblay: Mais vous savez que la norme de un-trois
'.tait prévue depuis cinq ans...
Mme Thibault: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: ...et que plusieurs n'ont pas pu s'y
conformer pour différentes raisons. Mais plusieurs s'y sont
conformés et même certains provenant de régions lointaines.
Alors, est-ce que le fait d'accorder une subvention à ce moment-ci pour,
par exemple, atteindre cette norme-là n'aurait pas pour effet
d'être moins équitable envers ceux et celles qui ont fait l'effort
de se déplacer depuis les cinq dernières années, pour
atteindre cette norme?
Mme Thibault: Probablement pas plus, Mme la ministre, que de
garantir 1 % du budget qui est prévu pour les salaires pour la
formation. Je pense que, de la même façon qu'il y a eu une
époque où, par exemple, les prêts et bourses étaient
plus ou moins intéressants, il est sûr que c'est moins juste pour
la personne qui, à une certaine époque, a pu en profiter ou ne
pas en profiter, si on pense au système de l'éducation, alors, de
la même façon, certains seront plus chanceux et pourront
effectivement avoir de meilleures possibilités de terminer leur
formation. Mais je ne trouve pas ça plus injuste comme tel pour les
travailleurs et les travailleuses.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez de réglementation au
sujet - ce ne sera pas tellement long - des haltes-garderies ou des jardins
d'enfants. Vous savez qu'on a l'intention de promulguer les articles de la loi
concernant les haltes et les jardins d'enfants. Mais qu'entendez-vous, par
exemple, par réglementation? Plusieurs sont venus nous dire, en
commission parlementaire, qu'il faudrait réglementer autant, par
exemple, que dans d'autres services. D'autres sont venus nous dire: Si vous
réglementez trop, cela aura peut-être l'effet aussi de faire
fermer plusieurs services parce que les haltes-garderies, entre autres, sont
très différentes les unes des autres. Vous pouvez avoir une
halte-garderie dans un centre commercial, qui peut servir à une
clientèle qui est très différente, par exemple, de celle
d'un jardin d'enfants ou d'une autre garderie d'une municipalité.
Comment voyez-vous cette question de réglementation?
Mme Thibault: Nous n'avons pas parlé de
réglementation. On a mentionné qu'on trouverait important qu'il y
ait des haltes-garderies qui puissent s'ouvrir. On parle, entre autres, de l'R
des centres de femmes. La recommandation nous vient de l'R des centres de
femmes qui regroupe, je pense, 60 centres de femmes dans tout le Québec.
C'est simplement que ces centres essaient de fournir des services de garde aux
femmes qui viennent utiliser ou qui viennent comme bénévoles
participer à différentes activités des centres de femmes.
Je pense que nous ne parlions pas tellement de l'aspect réglementation,
mais de l'aspect subvention. On trouve très important que des organismes
sans but lucratif comme les centres de femmes, par exemple, puissent avoir des
subventions pour pouvoir maintenir des haltes-garderies.
Mme Gagnon-Tremblay: Croyez-vous que ces centres de femmes
seraient prêts à accueillir une clientèle autre que les
femmes qui vont aux centres de femmes, si on devait subventionner les
haltes-garderies?
Mme Thibault: Je n'en ai aucune idée, madame. Je pense que
là-dessus, il faudrait sans doute avoir une rencontre avec Mme
Françoise David de l'R des centres de femmes pour pouvoir lui demander
plus de détails.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui.
Mme Thibault: Je pense qu'en premier lieu, elle parlait de la
clientèle des centres de femmes parce qu'évidemment, c'est fait,
en ce moment, à bout de bras, de façon bénévole en
bonne partie. Maintenant, je n'ai aucune idée, s'il y avait des
subventions intéressantes, si elles accepteraient de recevoir d'autres
enfants que ceux des femmes qui sont, en ce moment, dans les centres de
femmes.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci. M. le Président, mon
collègue avait...
Le Président (M. Gervais): M. le député de
Fabre.
M. Joly: Merci, M. le Président. Ma question peut
s'adresser autant à Mme Busque qu'à Mme London ou à Mme
Goyette. Dans les remarques d'ouverture, Mme Busque faisait mention tout
comme... Pardon?
Mme Gagnon-Tremblay: Mme Thibault a remplacé Mme
Busque.
M. Joly: Ah! Mme Thibault, excusez, faisait mention dans ses
remarques d'ouverture, tout comme à la page 19 du mémoire,
qu'elle était tout à fait contre le financement des garderies
à but lucratif. Nécessairement, on a eu, dans le passé,
à écouter d'autres organismes dont deux associations
féminines importantes, soit le Cercle de fermières et l'AFEAS,
qui partagent un point de vue tout à fait différent. On sait que
l'AFEAS de même que les fermières, qui représentent quand
même 65 000 membres, ont fait des recommandations contraires et, pour en
arriver à faire ces recommandations, elles ont eu le plein soutien de
leurs membres. Dans mon comté, j'ai
eu quelquefois l'occasion de parler, de rencontrer des membres de
l'AFEAS de même que des membres ou des représentantes du Cercle de
fermières. Par contre, je n'ai j'amais eu l'occasion de rencontrer de
membres de votre fédération, qui est la Fédédration
des femmes. Ma question, celle qui m'intéresse et pour laquelle je
voudrais avoir un peu plus de détails, c'est de savoir de quelle
façon vous en êtes arrivées à prendre position pour
dire que vous êtes tout à fait contre les organismes à but
lucratif, les OBL (16 h 30)
Mme Thibault: Depuis plusieurs années, la
Fédération des femmes du Québec a pris position contre le
développement de services de garde à but lucratif au
Québec et au Canada. Cette position a été
véhiculée en assemblée générale à
différents moments, et jamais nos associations membres ne se sont
opposées à cette position. Au contraire, elles nous ont
encouragées à aller de l'avant dans ce sens. Il faut vous
expliquer aussi - je ne ferai pas une bataille de chiffres au sujet de notre
"membership" - que la fédération regroupe différentes
associations, contrairement à l'AFEAS et aux cercles de
fermières, qui sont des associations. Nous regroupons donc 70
associations dans tout le Québec. C'est à la fois, dans certains
cas, des organismes qui voient à la réinsertion des femmes sur le
marché du travail et dans d'autres cas. des comités de condition
féminine de centrales syndicales. Je pense au syndicat des agricultrices
de l'UPA dans l'Outaouais, aussi à !a Fédération des
infirmiers et infirmières du Québec. Donc nous regroupons, par
l'intermédiaire de nos associations membres, 55 000 femmes, et nous en
rejoignons au moins 200 000. Depuis plusieurs années, nos membres ne se
sont nullement opposés à vos prises de position en faveur des
garderies sans but lucratif, et à nos réticences au
développement de garderies à but lucratif. Ces positions sont
publiques depuis de nombreuses années.
M. Joly: Est-ce que cela reviendrait à dire que lors
d'assemblées générales, il pourrait y avoir 70 personnes
qui représentent, par exemple, vos 70 associations, et que ce serait de
là qu'on prendrait position? Donc 70 personnes pourraient
représenter, comme vous le dites, peut-être 55 000 membres.
Mme Thibault: C'est-à-dire qu'il n'y aurait pas 70
personnes. Il faut vous expliquer que les membres et les membres
délégués de la fédération regroupent
à peu près 800 personnes, qui reçoivent à l'avance,
dans chacun des groupes, les résolutions qui sont
présentées en assemblée générale et qui
reçoivent chaque fois les documents comme le mémoire que nous
avons présenté, le mémoire de la fédération,
et qui nous donnent leur appui chaque fois. Il n'y a donc aucune
inquiétude à avoir. Nous savons que nous avons nos membres
derrière nous, comme nous les avons eues, par exemple, dans le dossier
de l'aide sociale.
M. Joly: Donc, vous prétendez avoir autant de membres que
les deux organismes que je mentionnais tantôt, l'AFEAS et les cercles de
fermières, ce qui veut dire que vous avez des positions contraires
à ce qu'eux peuvent préconiser.
Mme Thibault: Je dirais que la fédération, comme
les cercles des fermières et l'AFEAS, sont une des trois grandes
associations au Québec tout simplement. Comme je vous l'ai dit, je n'ai
pas envie de faire une bataille de chiffres, et la fédération
s'est appuyée depuis plusieurs années sur les positions de ses
membres pour pouvoir prendre position dans ce domaine. Nous avons d'ailleurs
travaillé avec certaines de nos associations membres pour prendre
position et pour préparer ce mémoire.
M. Joly: Merci, madame.
Mme Thibault: Ce n'est rien.
Le Président (M. Gervais): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, il reste encore quelques minutes, M. le
Président? Mme Thibault, à la page 18 de votre mémoire, au
début de la page, vous dites: "À cause de plusieurs facteurs,
tels que le roulement habituel des enfants dans une garderie et les enfants
gardés à temps partiel, le taux d'occupation moyen, dans les
garderies au Québec, est autour de 80 %. Laisser croire qu'un taux de
100 % est envisageable, comme le fait l'énoncé de politique n'est
pas réaliste, et de plus nulle part n'est-il question du rapport taux
d'occupation - tarif de garde." Cela m'intrigue beaucoup, et je me demande
à quel endroit vous avez vu dans notre énoncé de politique
la référence à un taux d'occupation de 100 %, puisque tous
nos chiffres et toutes nos données sont basés sur un taux moyen
de 82 %.
Mme London (Catherine): II n'est effectivement mentionné
nulle part un chiffre de 100 %. Par contre, quand on calcule la subvention aux
garderies, on la calcule à partir du tarif moyen, de l'an passé,
des garderies dans toute la province. Cela est basé, il m'a
semblé, sur un taux d'occupation de 100 %.
Mme Gagnon-Tremblay: 82 %. La subvention aux revenus de 45 % est
basée - c'est sûr que c'est 45 % des revenus réels - en
fonction du tarif et d'un taux d'occupation moyen de 82 %. Si vous regardez,
par exemple, à la page 69 de la politique, le tableau 13, on parie d'une
garderie de 50 places avec un tarif de 15 $ et un taux d'occupation de 82 %.
Donc partout, notre formule de 45 % des revenus réels équivaut
à un tarif moyen de 15 $ et à un taux d'occupation de 82 %. C'est
pour cela que Je m'étonne un
peu de voir dans votre mémoire qu'on pariait de 100 %. C'est pour
cela que je voulais avoir plus de précisions.
Le Président (M. Gervais): Je m'excuse, je vous
demanderais de vous identifier, madame, s'il vous plaît.
Mme London: Catherine London. Le Président (M.
Gervais): Merci.
Mme London: Par contre, quand on calcule le seuil de subvention
possible à une garderie, c'est calculé sur le taux moyen d'une
garderie pour l'année dernière, s'il y avait un taux d'occupation
de 100 %.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce qui arrive, c'est que si la garderie a un
taux d'occupation de 82 %, elle va recevoir une subvention supérieure
à celle déjà prévue, parce que son taux
d'occupation est supérieur à notre taux d'occupation de 82 %. Je
pense qu'il y a bien d'autre chose sur quoi on peut discuter, mais
c'était juste pour savoir, finalement, parce que je voyais dans votre
mémoire que vous parliez du taux de 100 % et cela m'inquiétait un
peu. Je me suis dit: Est-ce que véritablement dans notre
énoncé, on a mentionné 100 % quelque part et qu'on ne
l'aurait pas vu?
Mme London: Je crois que ce qui nous inquiétait beaucoup,
c'est que, dans l'énoncé de politique, on a l'impression en le
lisant qu'un taux d'occupation de 100 % est possible, donc qu'une garderie
puisse avoir de meilleures subventions soit en augmentant ses revenus,
c'est-à-dire en effectuant des hausses de tarif, soit en augmentant son
taux d'occupation, ce qui n'est pas toujours possible. On donne l'impression,
dans l'énoncé de politique, qu'avec un petit peu de marketing,
une garderie pourrait augmenter son taux d'occupation.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est sûr que oui, dans certains cas.
La garderie, par exemple, qui a un taux d'occupation de 65 % ou 70 %, oui, elle
devra augmenter son taux d'occupation au moins à 82 %, puisque vous avez
déjà 60 % des garderies qui ont un taux d'occupation de 82 % au
Québec. C'est sûr qu'on ne vise pas un taux de 100 %. On sait que
c'est utopique de viser un taux de 100 %, étant donné qu'il y a
bien des facteurs qui entrent en ligne de compte. On les a
énumérés au cours de cette commission parlementaire:
l'intégration des nouveaux enfants, les journées de maladie, les
congés fériés... Il y a beaucoup de choses, alors on ne
peut pas viser 100 % naturellement. Ce serait peut-être un chiffre
à atteindre, mais je pense que, logiquement, on ne peut pas atteindre
100 %. Je comprends quand même votre raisonnement.
Alors, le temps est terminé, M. le Prési- dent?
Le Président (M. Gervais): D'accord. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
vous accueillir. Vous transmettrez mes meilleurs voeux à la
présidente, Mme Busque. J'entendais la discussion que vous aviez avec le
député de Fabre et je me disais qu'il doit certainement ignorer
que la Fédération des femmes du Québec fêtait son
20e anniversaire l'an passé et qu'à cette occasion, bon nombre de
femmes éminentes qui appartenaient à sa formation politique sont
venues rappeler qu'elles avaient été à l'origine de la
fondation de la Fédération des femmes du Québec.
M. Joly: Excusez-moi, M. le Président, je n'ai pas voulu
enlever la crédibilité à l'association des femmes du
Québec...
Mme Harel: À la fédération.
M. Joly: ...à la Fédération des femmes du
Québec parce que des gens de notre parti n'en font plus partie.
Remarquez bien que ce n'est pas cela.
Mme Harel: Donc, elles en font toujours partie, M. le
Président, M. le député.
M. Joly: Ce n'est pas cela que j'ai voulu dire.
Mme Harel: Je veux simplement signaler deux choses. Quand on
discute avec des groupes, comme l'a fait le député de Fabre,
j'aimerais qu'il m'écoute, parce qu'il a défendu des positions
devant notre commission des cercle de fermières et de l'AFEAS. Il a bien
insisté sur le fait que les deux organismes avaient déjà
présenté leur mémoire et avait pris fait et cause pour les
garderies à but lucratif.
Je veux lui rappeler que, dans un cas, c'est prématuré
parce qu'on entendra l'AFEAS demain et qu'on aura l'occasion avec elle d'en
rediscuter. Avec les cercles de fermières, c'est outrancier, parce qu'il
l'a présenté comme si c'était sans condition, avec un
appui inconditionnel, ce qui est bien loin d'être le cas, et il faudrait
qu'il relise le mémoire des cercles de fermières. Leur principale
revendication n'était pas du tout celle-là, bien au contraire,
mais en faveur du développement d'un service de garde, autant pour la
personne qui fait la garde à la maison, la mère, que pour le type
de garde collectif. Pour avoir interrogé les cercles de
fermières, il privilégie la garde régie par les parents.
Alors, je pense qu'il faut remettre les choses dans leur contexte. Et demain,
avec l'AFEAS, on aura l'occasion d'en rediscuter.
Vous aviez insisté, entre autres, dans votre mémoire, sur
la question de la halte-garderie, et
il y a eu une discussion sur les centres de femmes. Je crois comprendre,
avec les informations que j'ai pu obtenir, que c'est extrêmement
fréquent qu'il y ait des haltes-garderies à l'initiative des
centres de femmes. Une majorité de centres de femmes ont
déjà une halte, alors, certainement, la revendication qu'on
retrouve dans votre mémoire va dans le sens de ce qui est
réclamé par les 73 centres de femmes du Québec, qui est
une reconnaissance des services qu'elles offrent déjà en
matière de halte-garderie. Je ne sais pas si vous avez des contacts avec
le regroupement. Le regroupement est membre de la fédération, je
crois?
Mme Thibault: Oui. L'R des centres de femmes est membre, et c'est
d'ailleurs Mme Françoise David qui a écrit cette partie du
mémoire pour la Fédération des femmes du Québec.
Mme David est coordonnatrice de l'R des centres de femmes.
Mme Harel: Alors, on doit comprendre qu'il y a déjà
un réseau, subventionné par le ministère de la
Santé et des Services sociaux, où se réunissent des femmes
qui ont souvent comme caractéristique d'être des mères,
même si elles sont des travailleuses...
Une voix: Au foyer.
Mme Harel: ...ou si elles sont à la maison, et qu'il
serait plausible, compte tenu de la réalité actuelle, qu'elles
aient justement besoin d'un coup de pouce pour soutenir financièrement
ces services qu'elles offrent déjà.
Mme Thibault: C'est tout à fait ça.
Mme Harel: Dans votre mémoire, à la page 9, vous
nous rappelez, avec raison, et je vous cite, que le plan annoncé dans
cet énoncé constitue donc un net recul quant au rythme de
développement des services de garde". C'est la première fois -
vous savez que c'est quand même sans doute le huitième ou le
neuvième jour que l'on siège en commission sur le dossier des
services de garde - qu'en termes statistiques, en taux, en pourcentage, on a
les croissances annuelles depuis 1977. C'est intéressant de se rendre
compte que, durant les prochaines années, on assistera au taux de
croissance le plus faible depuis dix ans. Alors, vous dites: La moyenne des
taux de croissance annuels pour les années 1989 à 1994 sera de
12,45 %, et la moyenne des taux de croissance annuels, pour le même
nombre d'années, jusqu'en 1988, c'est-à-dire de 1983 à
1988 est de 13,35 %, et vous signalez qu'en outre, la moyenne des taux de
croissance annuels, de 1977 à 1985, était de 18,16 %, et cela
comprend les années de récession, les années dures, les
années difficiles, les années que le gouvernement actuel n'a pas
encore connues, les années où il n'y a pas simplement du
ralentisse- ment mais une récession, où on ne va pas juste
à Ottawa pour parler contre la hausse des taux d'intérêt de
la Banque du Canada, mais où les banques affichent 21 % ou 22 %,
c'était au mois d'août 1982. Alors, dans un contexte relatif de
prospérité, comme celui dans lequel on est, c'est quand
même étonnant de voir un taux de croissance qui va en
ralentissant. Je ne sais pas si vous avez un commentaire à faire
là-dessus?
Mme Thibault: Oui. Soit dit en passant, Mme Harel, et un peu
à la blague, on a remarqué qu'il y avait des pics de
développement les années d'élections.
Mme Harel: C'est cela. Et ce qui est étonnant, c'est qu'il
n'y en a pas cette année. Est-ce qu'il faut penser qu'il n'y aura pas
d'élections?
Mme Thibault: II faut quand même reconnaître que,
cette année, il y a un plan sur cinq ans d'annoncé, je veux quand
même admettre avec la ministre que cette année, c'est
intéressant dans le sens où on voit un plan sur cinq ans.
Mme Harel: Oui. Mais son plan prévoit moins de croissance
que quand il n'y avait pas de plan. Est-ce qui faut penser que quand il n'y a
pas de plan, ça augmente plus que quand iI y a un plan? (16 h 45)
Mme Thibault: Je vais vous laisser faire vos conclusions
vous-même, Mme Harel. Écoutez, il y a une inquiétude
à la fédération. On a lu dernièrement que le
gouvernement du Québec, dans ses prévisions, utilise beaucoup
l'argent qui arrivera du gouvernement fédéral pour permettre un
développement à ce rythme. Notre Inquiétude nous est venue
d'un article paru dans le Globe and Mail. Nous avons d'ailleurs
envoyé à Mme Gagnon-Tremblay ainsi qu'à vous-même
une copie de l'article et de la lettre que nous avons écrite au premier
ministre Mulroney. Notre inquiétude vient du fait que, dans cet article,
on nous dit qu'au lieu de donner 50 % pour le soutien des garderies dans les
provinces riches, on pourrait possiblement donner 40 %. Nous sommes inquiets
et, au fond, nous voulons avoir l'assurance de Mme Gagnon-Tremblay que,
même s'il y avait une réduction de la part du gouvernement
fédéral, U n'y aurait pas une réduction
supplémentaire du développement des services de garde. On
trouverait très important, s'il y avait une réduction de la part
du fédéral, qu'il y ait une augmentation de la part du
gouvernement provincial pour s'assurer que le rythme reste le même. On
trouverait très Important de pouvoir avoir des garanties de la part du
gouvernement du Québec là-dessus, quels que soient les
résultats ou quel que soit le prochain projet de loi
fédéral sur les services de garde.
Mme Harel: Dès l'ouverture de la session, le 14 mars
prochain, on va avoir l'occasion de vérifier si la ministre a obtenu des
garanties de son homologue fédéral concernant les pourcentages de
financement. En contre-partie, on aura nécessairement à
interroger le gouvernement sur son intention d'aller de l'avant avec le plan de
développement.
Dans votre mémoire, j'ai trouvé réponse à ma
question, c'est à la page 10. Tantôt, je vous demandais s'il faut
comprendre que, lorsqu'il y a un plan, cela se développe moins que quand
il n'y a pas de pian. Vous me disiez que vous me laissiez la conclusion, et je
l'ai trouvée à la sixième ligne de la page 10: "Nous
voyons clairement, écrit la fédération, que le rythme de
développement des services de garde n'est certes pas
amélioré, au contraire, il ralentit." Alors, ma réponse
est là.
Il y a une information. Évidemment, vous êtes parfois
à même de colliger beaucoup d'informations. Vous avez un bon
centre de documentation. Dans votre mémoire, vous avez mis en doute le
taux d'activité qu'on utilisait. Vous dites que c'est 57,2 % à
taux constant sur cinq ans. Est-ce que cela vous étonne qu'on n'ait pas
aussi utilisé le rang de l'enfant? Finalement, quand on relit tout cela,
on se rend compte que c'est simplement l'âge des enfants qu'on a
utilisé, c'est-à-dire le taux d'activité selon
l'âge. On peut l'obtenir selon l'âge de l'enfant. On sait que, pour
les moins de trois ans, le taux d'activité des mères est presque
le même que pour celles qui ont des enfants de plus de six ans. C'est
à peine 4 % ou 5 % de différence. Donc, c'est sensiblement le
même taux d'activité, que les enfants aient moins de trois ans ou
plus de six ans. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de vérifier
ces statistiques.
Mme Thibault: Non, pas vraiment.
Mme Harel: On les a eues de Statistique Canada.
Mme Thibault: Nous n'avons pas eu l'occasion de les
vérifier.
Mme Harel: II y en a une qui est très déterminante
et qu'on ne retrouve pas du tout dans l'énoncé - vous avez
peut-être l'occasion de la retrouver - c'est celle qui concerne le rang
des enfants. Est-ce que les taux d'activité sont les mêmes s'il y
a un enfant de premier rang, s'il y en a un de deuxième ou s'il y en a
un de troisième? Quel est le maintien du taux d'activité? Quel
est le retrait du marché du travail selon le rang de l'enfant? Est-ce
que vous avez des informations là-dessus?
Mme Thibault: Pour être très honnête, non. Par
contre, parce qu'on a un peu discuté de la question de la
dénatalité à la fédération, je sais qu'on a
fait des comparaisons avec d'autres pays européens, nous indiquant
qu'effectivement quand une femme est rendue à son troisième
enfant, souvent elle se retire pendant un certain temps du marché du
travail. Donc, on peut penser que c'est sans doute un phénomène
semblable au Québec.
Mme Harel: Vous savez que c'est la pierre d'assise sur laquelle
on peut bâtir une politique familiale et une politique d'autonomie
financière des femmes. Je n'ai pas cette donnée fondamentale.
Récemment, je retrouvais des chiffres assez éloquents, concernant
la France, qui nous permettent entre autres de vérifier un assez fort
taux d'activité, malgré que le taux d'activité des
mères soit bien moins élevé que nous. Il est d'à
peine 41... Attendez. Non, il a progressé comme le nôtre, en fait.
Il a progressé du double comme le nôtre. Mais les mères
ayant un enfant sont actives à 70 %, tandis que celles qui ont deux
enfants le sont à 63 % et que celles qui en ont trois le sont à
35 %. Alors, vous voyez que, dans le fond, la progression est spectaculaire,
d'une certaine façon. Vous n'avez pas du tout ces
chiffres-là?
Mme Thibault: Comme je vous dis, ça correspond aux
analyses qu'on nous a décrites pour ce qui est de certains pays
européens, ce que certains membres nous ont apporté comme
documents et comme études et qu'on n'a pas avec nous. Mais on pourrait
sûrement avoir une discussion avec vous et vous donner nos
contacts...
Mme Harel: D'accord.
Mme Thibault: ...dans le domaine. Cela nous ferait plaisir.
Mme Harel: Vous avez aussi insisté sur le fait qu'il y a
plusieurs facteurs qui peuvent jouer sur la préférence des
parents. J'aimerais peut-être vous entendre là-dessus parce qu'il
m'a semblé qu'il y en a un qui est lié aux changements
effectués au sein de la famille, au contexte familial lui-même.
C'est évident qu'une famille biparentale peut développer,
à l'égard des services de garde, une attente différente de
celle des familles monoparentales. Je ne sais pas si vous avez parlé un
peu de ces facteurs qui peuvent influer. Il y a celui des naissances hors
mariage, celui des divorces, et il y a évidemment aussi la
désintégration de la famille élargie au profit de la
famille nucléaire. Il n'y a plus de grand-mère pour garder. En
tout cas, si elle est là, elle garde à l'occasion le samedi, mais
elle travaille aussi. Le plus fort taux de progression sur le marché du
travail a été celui des femmes de plus de 55 ans. Ce sont elles
qui, depuis trois ans, ont eu l'accès le plus considérable au
marché du travail.
Je ne sais pas si vous avez pu prendre connaissance des dernières
statistiques sur le
taux de fécondité. On voit que 33 % des naissances au
Québec en 1988 ont été hors mariage; 28 850 naissances sur
83 000 ou 86 000. Donc 33 %, une sur trois hors mariage. Cela ne veut pas
nécessairement dire sans conjoint, mais if y a quand même une
explosion des familles monoparentales aussi. On sait qu'il y a quatre divorces
pour dix mariages. Alors pensez-vous que, dans ce contexte-là, il y a
une priorité de l'état en matière de services collectifs?
Comment envisagez-vous cet équilibre entre garde privée et garde
collective?
Une voix: Mme Goyette.
Mme Goyette (Lyne): En fait je ne vois pas pourquoi... Pour moi,
cette diversité de la famille, c'est comme une richesse pour les
enfants, c'est comme une richesse collective. Donc, je ne pense pas qu'il
faudrait prévoir des types de garde différents selon l'origine
familiale de l'enfant, à savoir que ses parents viennent de se
séparer, qu'il vient d'une famille biparentale, que ses parents soient
d'orientation sexuelle semblable ou dissemblable. Je pense que c'est ce qui
fait la richesse, c'est ce qui fait qu'on aime que nos enfants
fréquentent des lieux de socialisation comme les garderies. Là
où il faut se poser des questions, c'est plutôt non pas s'adapter
aux types de familles mais s'adapter aux types de travail que les femmes
choisissent, aux types de travail et aux types de vie que les gens qui ont des
enfants choisissent.
Quand vous donniez tantôt, Mme Harel, les chiffres sur les enfants
en bas de trois ans et qu'on relate... Nous avons été timides
dans le document de la fédération. On en parlait plus tôt,
il n'y a absolument pas d'originalité dans les services de garde
actuellement pour ce type de garde-là. C'est plutôt ça
qu'il faut développer, la garde pour les parents qui travaillent en
soirée, la garde pour les gens qui étudient le soir et qui n'ont
pas de garde subventionnée actuellement. Alors, c'est plutôt
ça que...
Mme Harel: Vous parlez de garde collective.
Mme Goyette: Oui, toujours de garde collective. En fait, je pense
que c'est à la société d'assumer finalement la
reproduction de nos enfants.
Mme Harel: La tentation est grande présentement de
prétendre que les femmes vont travailler, dans le fond, non pas parce
qu'elles y tiennent vraiment, mais parce qu'elles ne peuvent pas faire
autrement et que, si on leur donnait de l'argent pour rester à la
maison, même si elles en gagnaient moins qu'en travaillant, elles y
resteraient. Vous dites: Écoutez, il faut plutôt que l'État
s'adapte au choix de vie et au choix de travail plutôt que l'inverse. Que
pensez-vous de ce courant qui n'est pas du tout souterrain, qui est très
visible, et qui prétend que la meilleure place pour les femmes serait
à la maison pour garder leurs enfants?
Mme Goyette: Je pense que c'est un courant nostalgique. On fait
face à un éclatement des formes familiales. On cherche des
explications partout. La plus facile à portée de la main, c'est
celle-là. Les enfants font plus de fautes à l'école parce
que les mères sont au travail. Bon, n'importe quoi! Pourquoi un enfant
est-il toujours mieux avec sa mère? Quand on sait que la famille, ce
n'est pas toujours le meilleur milieu pour un enfant... De toute façon,
l'enfant a quatre chances sur dix d'être élevé dans une
famille où les parents sont séparés. SI on ajoute les
unions de fait, c'est encore plus que ça. Il n'y a pas de raison. C'est
un discours nostalgique qui ne s'appuie sur rien.
Mme Harel: Vous pensez qu'on devrait développer une
politique de la petite enfance spécifique à la petite
enfance.
Mme Goyette: Je ne comprends pas.
Mme Harel: Dans le fond, votre préoccupation, c'est de
dire: Indépendamment du statut social ou économique des parents,
il devrait y avoir un projet de socialisation pour la petite enfance.
Mme Goyette: II serait temps qu'on pense aux enfants, oui. Cela
devrait être Intégré à la politique familiale. Qu'on
arrête de culpabiliser les mères qui sont au travail, aux
études, en voyage ou n'importe où. Qu'on pense aux enfants. On va
en avoir plus.
Le Président (M. Bélanger): En conclusion.
Mme Harel: On nous demande de conclure. J'entendais Mme la
ministre signaler tantôt qu'il pouvait y avoir de l'injustice parce que,
auparavant, il n'y avait pas les subventions que vous réclamez
maintenant dans votre mémoire. Cela me faisait penser
qu'évidemment, on peut de cette façon-là résister
continuellement aux changements en prétendant que c'était injuste
pour les générations précédentes qui n'ont pas pu
en bénéficier. C'est sûr que le changement social se fait
toujours à partir d'une situation nouvellement créée.
Je pense bien que la question, au fond, c'est de savoir dans quelle
mesure on veut investir dans les enfants. Alors là, il va y avoir toutes
sortes de voies détournées pour essayer d'en responsabiliser
d'autres. Vous allez voir, je sens qu'on va assister à un nouveau
courant qui va plutôt penser qu'il faut que les femmes retournent a la
maison, évidemment en ne prenant pas toujours en considération
qu'elles y sont aussi. C'est parce qu'elles cumulent les deux et parce qu'elles
décident de faire des bébés qu'il y a encore des enfants.
Mais je pense qu'il
n'y a pas encore une décision vraiment éclairée
d'investir dans les enfants comme société. Je souhaite
qu'à la fédération, vous marquiez, vous ouvriez, comme
d'habitude, les sillons pour continuer à réclamer qu'il en soit
ainsi.
Mme Goyette: Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Gag non-Tremblay: Merci, M. le Président. En
terminant, j'aimerais vous remercier pour votre exposé. Je pense que
vous avez tout à fait raison lorsque vous dites que vous auriez
souhaité, par exemple, un développement beaucoup plus rapide.
Nous aussi, on l'aurait souhaité, et c'est pour ça, d'ailleurs,
que dans notre énoncé de politique, on parle d'ordre de grandeur,
mais on sait qu'on ne pourra pas satisfaire tous les besoins.
Vous savez, il y a dix ans, on parlait de développement. Par
contre, maintenant, on ne parle plus uniquement de développement, mais
on doit parler de consolidation parce que, justement, il faut faire un
rattrapage de dix ans. Il y a dix ans, tout en faisant le développement,
on n'a pas prévu, par exemple, que les formules devaient être
indexées. Si elles l'avaient été, comme on s'apprête
à le faire actuellement, par exemple, on n'aurait pas de rattrapage
aussi grand à faire et peut-être qu'on pourrait faire un
développement beaucoup plus accéléré. Mais
là, malheureusement, on doit tenir compte de la consolidation,
également. Merci de votre exposé.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie la Fédération des femmes du
Québec et invite à la table le Comité national des jeunes
du Parti québécois. Nous suspendons les travaux pour deux
minutes.
(Suspension de la séance à 17 heures)
(Reprise à 17 h 1)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! Je demanderais à chacun et à chacune de bien
vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît, afin que nous
procédions à l'audition du mémoire présenté
par le Comité national des jeunes du Parti québécois.
Je vous invite, d'une part, à présenter vos porte-parole
et à les identifier. Vous connaissez nos règles de
procédure. Vous avez 20 minutes maximum pour présenter votre
mémoire et il y a ensuite une période de discussion de 40 minutes
avec les gens de la commission.
Lorsque vous avez à prendre la parole, je vous prierais de bien
vouloir donner votre nom auparavant, ceci pour la transcription du Journal
des débats. Alors, si vous voulez procéder, nous vous
écoutons.
Comité national des jeunes du Parti
québécois
M. Boisclair (André): Merci, M. le Président. Pour
ma part, je suis André Boisclair, président du Comité
national des jeunes du Parti québécois. J'aimerais vous
présenter à ma gauche, M. Joseph Facal, vice-président aux
affaires politiques ainsi que M. Martin Scallon, qui est trésorier du
Comité national des jeunes du Parti québécois.
Dans un premier temps, j'aimerais remercier le personnel de la
commission qui nous a permis de faire différents arrangements pour venir
présenter ce mémoire. On a déplacé la date, et je
sais que les travaux de la commission ont dû être
réajustés. Dans un premier temps, particulièrement
à Mme Lamontagne qui, je crois, est secrétaire... La
voilà! On s'est parlé au téléphone à
quelques reprises. Alors, je tiens à remercier le personnel de la
commission qui nous a facilité notre travail pour venir aujourd'hui vous
présenter un mémoire.
Cependant, ce qui a été un peu plus difficile pour nous en
venant ici, cela a été les courts délais pendant lesquels
nous avons dû préparer un mémoire. Il est important pour
nous, comme groupe de jeunes, de venir nous prononcer sur cette question des
services de garde, mais dans les délais très courts qui nous ont
été accordés, nous avons fait un effort assez important
pour faire la recherche nécessaire. N'ayant pas les services que bien
des hommes ou femmes politiques ont, nous nous sommes débrouillés
tant bien que mal pour présenter un document qui, je crois, se veut
constructif.
Nous voulons tout simplement apporter notre grain de sel dans le
débat, et ce, de bonne foi bien sûr, parce que, pour nous, en tant
que jeunes, il y a des choses importantes qui nous semblaient
intéressantes à dire.
La réflexion sur cette question-là n'est pas nouvelle pour
nous. Je voudrais souligner rapidement que le Comité national des jeunes
qui est formé, bien sûr, de 27 membres, a adopté ce
document. Donc, il a fallu consulter l'ensemble des membres du comité
des jeunes sur ce document. La réflexion s'est amorcée à
l'occasion du grand rassemblement des jeunes qui a eu lieu à
Sainte-Adèle au mois d'octobre dernier, où il y avait
toute une politique sur la question de la natalité et de la
démographie. On a abordé ces questions des services de garde
à l'enfance, et c'est à cette occasion-là que le
comité des jeunes a entrepris cette démarche. C'est un peu dans
ce sens-là que nous vous présentons ce document aujourd'hui.
Il y a un document que j'aimerais distribuer aux membres de la
commission, qui est légèrement modifié par rapport au
document que nous avons pu vous remettre et que vous avez sans doute entre les
mains. Il s'agit d'ajouts ou de corrections parce qu'on n'avait pas encore
toute l'information en main. Et, à cause de différentes
recherches, quelques ajouts ont donc été faits. On a mis
l'emphase sur différents points à la suite de consultations que
nous avons menées aussi avec des gens dans le milieu. J'aimerais faire
circuler ce document.
La présentation se fera en deux temps. Je commencerai et M. Facal
complétera ensuite ma présentation.
Dans la mesure où le Comité national des jeunes du Parti
québécois a, parmi ses raisons d'être, celle de
sensibiliser les Québécois et les Québécoises aux
préoccupations des moins de 30 ans, !i nous est apparu souhaitable
d'être présents à cette commission parlementaire sur les
services de garde à l'enfance.
Le sujet est en effet d'une importance vitale. Les transformations de la
famille et l'arrivée en force des femmes sur le marché du travail
ont entraîné une forte augmentation dans la demande des services
de garde. Dans ces conditions, une politique sur les services de garde devient
une composante essentielle de toute politique familiale vraiment soucieuse
d'agir sur la baisse du taux de natalité au Québec.
Le présent mémoire n'a aucunement la prétention
d'être exhaustif. Nos principaux soucis ont été de mettre
l'accent sur les attentes propres aux jeunes, à ceux et celles dont la
"parentalité" est toute récente ou à l'état de
projet et de procéder, dans notre évaluation de
l'énoncé de politique gouvernementale, avec bonne foi et de
manière constructive.
Dans un premier temps, nous ferons donc ressortir les
préoccupations propres aux jeunes en ce qui a trait aux services de
garde, puis nous évaluerons, dans ses grandes lignes,
l'énoncé gouvernemental. Enfin, dans un troisième temps,
nous mettrons de l'avant notre propre diagnostic de la situation et quelques
suggestions. Il va de soi, comme je vous le disais tout à l'heure, que
ces dernières ne doivent être envisagées que comme !es
premiers jalons d'un plus vaste projet de réforme qui verra le jour
ultérieurement.
Au Québec, nous le savons, le taux actuel de natalité
n'assure plus le renouvellement des générations. De 1980 à
1986, le nombre de naissances a chuté de 13,2 %. Le Québec aura
donc connu pendant cette période près de 13 000 naissances en
moins. Nous savons tous l'ampleur du problème et l'urgence de
réagir.
Évidemment, cette chute du taux de natalité est
liée à un certain nombre de transformations sociales qu'on ne
peut que trouver globalement positives: généralisation de
l'instruction, participation accrue des femmes au marché du travail,
progrès techniques, etc. Toutefois, personne ne niera que la situation
actuelle requiert une politique familiale visant véritablement à
ce que ceux et celles, voulant avoir des enfants, aient les moyens de le faire
et soient assistés par une gamme de services appropriés.
Or, nous savons qu'actuellement, une faible partie des besoins en
matière de garde est comblée par les services autorisés et
que la limite, en termes de capacité à payer, est atteinte pour
la très grande majorité des parents.
Certes, ces problèmes ne sont pas spécifiques - bien
sûr, et vous en conviendrez - aux jeunes parents de moins de 30 ans, mais
on comprendra qu'ils les ressentent avec plus d'acuité,
considérant leurs capacités financières
généralement plus faibles. Pour bien des jaunes parents, la garde
apparaît actuellement comme une option ouverte seulement aux families
biparenîaies de classe moyenne et plus.
Le maître mot pour les jeunes est donc accessibilité
à un triple palier: en termes de nombre de places disponibles, en termes
de diversité des modes de garde et en termes de coût moyen des
frais de garde. I! faut donc agir dans la direction d'une consolidation et
d'une diversification du réseau des services de garde de qualité,
accessibles aux familles à faibles revenus, tout en cherchant
parallèlement à adapter sans cesse davantage les milieux de
travail aux besoins de la "parentaiité".
Voyons maintenant si le projet gouvernemental est bien un pas dans ce
sens. L'énoncé de politique gouvernementale identifie un certain
nombre de problèmes actuels, dégage les principes directeurs d'un
projet de réforme, établit des objectifs et propose un nouveau
mode de financement ainsi que quelques mesures concrètes d'appoint. Fort
bien! Nous savons que les objectifs de l'actuelle Loi sur les services de garde
à l'enfance sont au nombre de trois: l'accessibilité des
services, la liberté de choix et la participation des parents. Ces
objectifs sont repris dans l'énoncé gouvernemental, et il faut
s'en réjouir. Toutefois, nous constatons avec surprise que la notion
d'accessibilité, si cruciale pour les jeunes parents, ne trouve pas sa
place dans les sept principes directeurs de la réforme, contrairement
à la participation des parents et à la liberté de choix.
L'oubli nous paraît significatif en ce qu'il se traduit par des lacunes
concernant les mesures concrètes de facilitation et
d'accessibilité.
Les autres principes directeurs nous paraissent fondés et nous
les endosserions sans arrière-pensée, si ce qui nous est
proposé en termes de suivi concret ne confirmait certaines de nos
craintes. Par exemple, nous adhérons à l'idée que les
services de garde à l'enfance ont un rôle préventif et
éducatif à jouer, mais nous n'avons trouvé dans le texte
que peu de mesures concrètes pour le soutien de ce rôle. Plus
simplement, nous ne pouvons qu'aller dans le sens des regroupements
d'intervenants qui auraient souhaité voir l'accessibilité des
services et le redressement des conditions de travail des éducateurs,
élevés au rang des principes directeurs afin de leur donner le
maximum de chances d'être suivis de mesures concrètes.
Évidemment, au-delà des principes, c'est toujours la
façon dont le financement d'une
réforme est assuré qui en dit le plus sur ses
mérites. Il faut donc évaluer le montant total octroyé aux
services de garde et la manière dont les fonds seront
dépensés. Or, cet exercice permet des constats
intéressants. Pour 1989-1990, le budget de l'Office des services de
garde sera de 138 300 000 $ dont 69 400 000 $ seront versés par
Québec et 68 900 000 $ par Ottawa. Or, cette contribution de 69 400 000
$ du gouvernement du Québec reste pratiquement inchangée par
rapport à celle de 1988-1989, qui était de 69 200 000 $. La
contribution versée par Ottawa, elle, a plus que doublé, passant
de 31 400 000 $ en 1988-1989, à 68 900 000 $ en 1989-1990. Dans la
mesure où la contribution de Québec stagne, on peut se demander
si le gouvernement du Québec ne laisse pas à Ottawa la charge de
faire davantage d'efforts. Le tableau qui vous est présenté dans
le mémoire montre bien l'évolution respective des contributions
de Québec et d'Ottawa au financement de l'office pour les
dernières années et les prochaines.
Notons également qu'au-delà de la volonté
proclamée par l'énoncé de doubler le nombre de places
disponibles d'ici cinq ans, les chiffres montrent que moins de places nouvelles
en garderies ont été créées en 1989 qu'en 1986,
1985 et 1982.
Avec les sommes dont U dispose, le gouvernement du Québec a
choisi de prioriser la création de garderies en milieu de travail, leur
réservant 50 % des places. Nous ne sommes évidemment pas
opposés à la garderie en milieu de travail. Le débat sur
ses mérites et ses inconvénients est connu, et nous ne le
referons pas. D'ailleurs, si la création de places de garde en milieu de
travail passe par l'engagement financier des entreprises, nous ne pouvons que
l'encourager. Mais y ne faudrait pas commettre l'erreur de croire qu'il s'agit
d'une panacée et la favoriser indûment au détriment des
autres modes de garde. Or, c'est ce qui semble se produire dans le projet
gouvernemental.
Prenons le cas de la garde en milieu scolaire. Le projet gouvernemental
prévoit l'augmentation du nombre de places de garderies et, en soi, il
s'agit d'un pas dans la bonne direction. Mais nous parlons ici du pas de
quelqu'un qui aurait de bien courtes jambes, puisqu'au terme d'une
période de trois ans, c'est à peine 40 000 places qui seront
offertes aux 600 000 enfants qui fréquentent l'école primaire
publique. Nous savons par ailleurs que les commissions scolaires sont
généralement réticentes à l'établissement
des services de garde. A cet égard, il aurait été
souhaitable que le projet de loi 107 comporte la possibilité, pour au
moins dix parents par école qui l'exigent, d'obtenir ces services dans
leur commission.
L'énoncé gouvernemental nous apprend également que
la garde en milieu familial, à savoir dans un autre domicile que celui
de l'enfant, représente pour sa part le choix d'environ 10 % des
parents. Un pourcentage qui demeure sensiblement constant, peu importe les
divers groupes d'âge d'enfants, ou encore les périodes de
l'année ou ce type de garde est utilisé. Compte tenu de la faible
attraction, selon les chiffres mêmes du document, que ce mode de garde
suscite chez les parents, il est difficile d'expliquer le développement
considérable qu'y connaîtrait dans les trois prochaines
années, si l'on suit le plan du gouvernement.
De plus, le gouvernement fait la sourde oreille à la modification
du ratio autorisé par la loi pour les enfants d'âge
préscolaire, principale revendication des responsables de familles de
garde. Certes, y sera dorénavant permis d'accueillir deux enfants
d'âge scolaire après les heures de classe, mais la demande des
agences de services de garde en milieu familial d'autoriser les responsables de
familles de garde à accueillir cinq enfants, y compris les leurs, au
lieu de quatre comme présentement, ne nous apparaît pas
déraisonnable et aurait dû être entendue.
Il est difficile aussi de comprendre pourquoi les agences de garde en
milieu familial n'auront droit à aucune subvention pour le
perfectionnement de leur personnel et l'acquisition de matériel
pédagogique, alors que les garderies privées y auront maintenant
droit. En effet, d'une façon générale, le Comité
national des jeunes du Parti québécois déplore que la
problématique des garderies soit moins posée en fonction des
besoins des parents et des enfants - temps de garde, plein ou partiel, jour,
soir ou nuit, etc.; lieux de garde: école, résidence, entreprise;
besoins spécifiques de l'enfant: intégration culturelle, handicap
physique, ressources pédagogiques, etc. - qu'en fonction des divers
modes de gestion, subventionnés ou non, à but lucratif ou
non.
En d'autres termes, bien qu'un effort louable ait été fait
dans le sens d'une plus grande diversification, les choix de garde contenus
dans l'énoncé s'adressent pratiquement tous aux besoins d'un
travailleur, plus généralement une travailleuse, de jour,
à temps plein et à horaire régulier. Tous les autres cas
de figure se voient offrir la portion congrue des services. Certes, nous
comprenons que les ressources du gouvernement ne sont pas illimitées,
mais qui niera, à la lecture de l'énoncé, qu'un
véritable éventail de choix de garde risque de se faire attendre
encore longtemps?
Si bien des éléments du projet gouvernemental sont
louables, notamment la planification régionale élaborée en
concertation avec les partenaires sociaux, il en est un qui nous
déçoit profondément. C'est, bien sûr, la
décision de subventionner les garderies à but lucratif. Nous ne
pouvons concevoir que la recherche du profit, car c'est de cela qu'il s'agira,
soit associée à ce qui devrait être un service public,
essentiel, et d'accès universel. Et il ne s'agira pas de sommes
insignifiantes, puisque au seul plan de la consolidation, la subvention de 4
200 000 $ qui sera octroyée sera équivalente à la moyenne
des
subventions accordées aux garderies sans but lucratif. De plus,
si l'on calcule le ratio des montants obtenus par place au permis, on voit que
les garderies sans but lucratif recevront 357 $ par place comparativement
à 364 $ par place dans les garderies commerciales. Pour qualifier cela,
le Comité national des jeunes du Parti québécois n'a qu'un
mot qui lui vient à l'esprit, "effarant". Cela d'autant qu'en 1988, pour
la première fois, le nombre de places créées dans les
garderies à but lucratif a été supérieur à
celui des garderies sans but lucratif. (17 il 15)
Le secteur des garderies à but lucratif comprend, certes, nombre
de travailleurs et travailleuses dévoués et compétents. La
question est ailleurs. La recherche du profit par les propriétaires des
garderies commerciales entraîne des contraintes incompatibles avec un
service de qualité. Le contrôle par les parents usagers est
faible, les salaires sont bas, la qualité n'est pas garantie, etc. Quant
à l'argument si souvent entendu selon lequel bien des parents ne
tiennent pas à s'impliquer dans la gestion des garderies, il vaut autant
pour les garderies sans but lucratif. Que les garderies à but lucratif
aient, au même titre que l'école privée, le droit à
l'existence, peut se plaider. Mais que le gouvernement les subventionne au
même titre que les garderies sans but lucratif nous renverse. D'autant
plus que les jeunes parents auront, dans la grande majorité des cas,
toutes les difficultés à en assumer les frais. Tant qu'à
entrouvrir une porte qui serait désormais difficile à refermer,
il aurait été préférable de ne pas leur octroyer
d'appui financier.
L'énoncé gouvernemental assure que l'octroi de subventions
aux garderies à but lucratif sera conditionne) à la mise sur pied
de comités consultatifs formés de parents. Mais, à moins
de mettre parallèlement en place des mécanismes de contrôle
serrés de l'efficacité de ces comités, on volt mal comment
s'assurer que leur existence ne sera pas surtout symbolique. À cet
égard, les garderies à but lucratif ont déjà fait
savoir qu'elles n'approuvaient pas la création de ces
comités.
Le document gouvernemental prétend aussi que la priorité
accordée aux garderies gérées par les parents et le
contingentement de certaines localités qui résulteront de
l'application du plan de développement régional, en soi - et j'en
conviendrai avec vous - une excellente idée, freineront l'ouverture de
nouvelles garderies commerciales. Mais si le gouvernement avait clairement,
fermement et courageusement pris la décision politique de se ranger sans
équivoque du côté des garderies sans but lucratif, il
aurait été logique qu'H décrète un moratoire sur la
création de nouvelles garderies privées.
M. Facal (Joseph): Je vais reprendre là où
André a laissé. Je vais m'attarder simplement à la formule
de financement et aux conditions de travail du personnel dans les garderies.
L'énoncé énumère toute une série de mesures
financières qui vont de pair avec ses choix de développement.
Nous nous réjouissons entre autres que le gouvernement s'engage à
subventionner désormais 75 % des coûts d'implantation des
garderies sans but lucratif. Il s'agit incontestablement d'une avancée
et nous le reconnaissons volontiers.
Quand à la nouvelle formule de financement, II est clair qu'elle
accroîtra les revenus de certaines garderies dans des proportions
variables selon leur situation. D'autres auront des revenus moindres, mais
bénéficieront de mesures d'appoint compensatoires. Nous nous
sommes penchés sur cette question au mieux de notre expertise et nous
avons certaines craintes.
À la lecture du projet gouvernemental, on croit comprendre
qu'après un surplus, possiblement la première année, les
garderies risquent de n'avoir d'autre choix par la suite que d'augmenter leurs
revenus de garde. Or, on voit mal comment elles y parviendraient autrement
qu'en augmentant les tarifs. En effet, étant subventionnées
à 45 % des revenus de garde, elles n'auront d'autre solution, si elles
veulent bénéficier d'une subvention accrue l'année
suivante. En d'autres termes, nous nous demandons si une subvention aux revenus
n'exercera pas une pression à la hausse sur le tarif quotidien. Est-ce
qu'il n'en résulterait pas à ce moment-là une aggravation
des disparités entre quartiers favorisés et
défavorisés, puisque dans les quartiers défavorisés
la capacité maximale de payer des parents sera atteinte plus
rapidement?
De plus, comme ces garderies en milieu défavorisé
recevront moins d'argent que les autres, est-ce qu'elles ne pourront pas
d'autant moins s'attaquer aux conditions de travail déjà
pénibles de leur personnel et ainsi de suite? Nous nous sommes
demandés s'H n'y avait pas là un cercle vicieux. Nous en sommes
venus à la conclusion que l'abandon de la formule de financement par
jour par place n'était peut-être pas le choix qui aurait dû
être fait. De plus, nous pensons qu'il aurait été
souhaitable aussi de transformer la déduction pour frais de garde en
crédit d'impôt.
Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, M.
Facal, je vous inviterais à conclure.
M. Facal: D'accord. Écoutez, il y a encore des points
qu'il aurait fallu soulever. Je m'en tiendrai là. Je rappellerai tout
simplement que le projet prévoyait que 1 % de la masse serait
consacré à la formation. Nous nous demandons si, là aussi,
ça ne risque pas de jouer au détriment des garderies en milieu
défavorisé. Probablement que nous pourrons revenir sur les autres
points pendant la discussion.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie
beaucoup. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie pour votre exposé et
je vous félicite pour votre mémoire, je trouve qu'il est bien
articulé, et pour la variété et l'à-propos des
préoccupations que vous soulevez. Je suis toujours heureuse de voir que
des jeunes s'impliquent dans les dossiers importants qui concernent l'avenir de
nos jeunes.
Je constate aussi, entre autres, que vous reconnaissez, à la
suite du gouvernement, la nécessité d'agir dans la direction
d'une consolidation et d'une diversification des réseaux de services de
garde de qualité, accessibles aux familles à faible revenu, tout
en cherchant parallèlement à adapter sans cesse davantage les
milieux de travail aux besoins de la "parentalité". On retrouve cela
à la page 4 de votre ancien mémoire. Probablement que c'est
à la même page, mais je n'ai pas suivi le nouveau document que
vous nous avez présenté.
Ma première question est la suivante, concernant les coûts
de la réforme suggérée par le comité. À la
page 12 de votre premier mémoire, vous suggérez une
réforme des services de garde équivalente, toute proportion
gardée, à celle de l'éducation et de la santé, dans
les années soixante et soixante-dix. À vos yeux, est-ce que cette
réforme, telle que vous l'envisagez, suppose une étatisation des
services de garde, comme ce fut le cas dans le domaine de la santé et de
l'éducation?
M. Boisclair: Je répondrai rapidement et M. Facal
complétera. Écoutez, chaque chose en son temps. Ce que nous
retenons, à l'heure actuelle, c'est que, malgré le beau discours
le gouvernement du Québec peut tenir sur la question des services de
garde, les budgets ne suivent pas ce qu'on entend sur la place publique. Je
pense que si on veut vraiment vérifier l'effort réel
consacré, c'est par l'argent qu'on est prêt à mettre sur la
table. On a un peu l'impression que cette réforme est faite sur le dos
du gouvernement fédéral qui a injecté des sommes
importantes. Ce qu'on aimerait voir, c'est effectivement le gouvernement du
Québec investir des sommes plus importantes.
Quant à la question de l'institutionnalisation de tout le
réseau des services de garde, on verra dans les années à
venir, mais à l'heure actuelle, ce qui nous apparaît essentiel,
c'est d'avoir plus d'argent du gouvernement du Québec sur cette
question. N'oubliez pas qu'en tant que jeunes, avant d'avoir des enfants, on
veut bien s'assurer qu'ils aient tous les moyens nécessaires pour leur
plein épanouissement, et aussi, que pour le couple qui prend cette
décision d'avoir des enfants, j'en suis convaincu, c'est un des
éléments qui pèse dans son choix. M. Facal, est-ce
que...
M. Facal: Cela va. Il n'y a pas de problème.
Mme Gagnon-Tremblay: J'imagine qu'en tant que jeunes, vous avez
aussi la môme préoccupa- tion que celle que les gouvernements
peuvent avoir, c'est-à-dire la capacité d'être capable de
rembourser ses frais, tout en étant réaliste.
Tout à l'heure, lorsque je vous posais la question concernant
l'éducation et la santé, c'est très important, parce
qu'indépendamment d'où proviennent les sommes... La santé
et les services sociaux, est-ce que c'est ce vers quoi vous tendez pour
l'avenir, ou bien... C'est quoi, exactement?
M. Facal: Je pense qu'H y a peut-être une
légère confusion. Quand nous parlons d'un effort, somme toute,
comparable à celui qui fut fait en éducation et en santé,
nous ne parlons pas d'un effort comparable en termes de chiffres. Nous savons
bien que le contexte a complètement changé. Nous pensons que la
société québécoise, à un moment donné
de son développement, en est venue à la conclusion qu'un effort
massif devait être fait dans le domaine de l'éducation et dans
celui de la santé. Et il y a eu vraiment un consensus social pour y
mettre le paquet.
Nous pensons que le débat sur les garderies n'est peut-être
pas aussi mûr que le fut jadis celui sur l'éducation et la
santé, mais le moment est venu, disons, d'y mettre le paquet. Et certes,
les coûts sont considérables, mais, à l'époque, le
calcul qui fut fait, c'est qu'à terme, il valait mieux investir
massivement plutôt que d'y aller de cataplasmes successifs. Nous en
sommes venus à l'idée que, justement, il y avait des
déboursés immédiats considérables, mais que, si
nous y allions d'une réforme globale et cohérente à long
terme, celle-ci se révélerait rentable, d'une façon pas
uniquement quantitative. En ce qui concerne la dénatalité, si on
y mettait vraiment le paquet, il y aurait Un message clair qui serait
lancé aux jeunes parents et un accès accru aussi au marché
du travail pour les femmes qui n'auraient plus à se poser ces questions.
Donc, nous sommes conscients des déboursés. Mais je me demande
si, à moyen ou à long terme, ce ne serait pas rentable.
Finalement, à force d'y aller à court terme, et de court terme en
court terme, et de court terme en court terme, si on faisait la somme de tous
ces courts termes, est-ce qu'on n'arriverait pas à un montant qui serait
extrêmement considérable, lui aussi? Mais ce passage aurait pu
être un peu plus précisé, j'en conviens.
Mme Gagnon-Tremblay: Le Parti québécois de la
région de Montréal-Centre, de passage en commission parlementaire
il y a une dizaine de jours, déclarait que les budgets du gouvernement
devraient traduire l'importance à accorder à la famille, quitte
à instaurer des impôts pour atteindre cet objectif. Est-ce que
vous partagez cette opinion? Et, selon vous, quel serait le pourcentage de la
contribution de l'État au financement des services de garde?
M. Boisclair: II y a plusieurs façons d'abor-
der cette question. Certains parlent de crédits d'impôt
universels et remboursables. Il y a plusieurs éléments lorsqu'on
aborde cette question. Il nous apparaîtrait peut-être envisageable
et même souhaitable que les sommes nécessaires soient
dégagées justement dans une politique globale de soutien à
la famille. Ou pièce à pièce et, vous me passerez
l'expression, du "patchage" comme on en a connu depuis les dernières
années, ne nous paraissent pas répondre à la demande. Il
nous semble qu'il faudrait un effort concerté des différents
intervenants sur le dossier.
Sur le plan des idées, je crois qu'au Québec, nous sommes
prêts pour donner plus de pouvoirs aux régions et aux
différents intervenants dans le milieu. L'énoncé aborde
déjà cette question. Est-ce qu'il y aurait moyen de donner un
certain pouvoir de taxation dans les régions? Maintenant, reste à
savoir à quelle institution on le donnerait. Je crois qu'on est
mûrs pour que certains pouvoirs puissent être retournés vers
les régions avec les sommes qui accompagnent ces pouvoirs et, en ce
sens, pour donner les outils nécessaires aux régions qui
décident de s'organiser. Ces régions sont souvent beaucoup mieux
placées pour répondre aux besoins spécifiques de leurs
clientèles. Rappelons-nous le rapport du Conseil des affaires sociales
et de la famille qui nous pariait d'un Québec cassé en deux. Je
suis mal à l'aise qu'on nous propose des programmes mur à mur
à la grandeur du Québec. Je suggérerais d'aller vers les
régions et de leur donner sans doute un pouvoir de taxation.
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, si je comprends, pour pouvoir
faire un développement accéléré dans le but de
répondre aux besoins et aussi de résoudre les problèmes
existants, vous seriez prêts à Instaurer des impôts
additionnels.
M. Boisclair: Écoutez, nous n'avons pas la contrainte que
vous avez. On parle de ce qui est souhaitable et de ce qui, dans bien des cas,
est réalisable. On dit qu'il faudrait voir à un juste
équilibre entre le travail qui se fait dans les régions et celui
qui se fait de façon nationale. Il nous semble important de donner plus
de pouvoirs aux régions, avec le pouvoir de taxation qui suit le pouvoir
de décision. Si on prend l'exemple de la création d'emplois, les
différentes initiatives qu'on a réussi à mettre sur pied
et qui sont d'ailleurs porteuses de succès pourraient être prises
à bien des égards, à mon avis, sur la question des
services de garde et d'une politique familiale plus globale.
Mme Gagnon-Tremblay: En parlant de planification
régionale, dans votre mémoire, vous affirmez que
l'énoncé de politique gouvernementale est un bon pas dans la
direction d'une régionalisation systématique des services de
garde. Entre autres, vous parlez du rôle des
CLSC et vous mentionnez qu'il devrait être revu. Pour votre part,
pourquoi pensez-vous que les CLSC seraient les mieux placés pour jouer
ce rôle? En passant, je suis un peu déçue de voir que la
fédération des CLSC n'ait pas présenté de
mémoire pour faire valoir une position quelconque. Mais vous, qu'est-ce
que vous entendez par le rôle des CLSC dans une planification
régionale? Est-ce que ce sont vraiment les CLSC qui sont les mieux
placés pour jouer ce rôle?
M. Facal: Oui. Au colloque des Jeunes de Sainte-Adèle, une
proposition avait été amenée qui parlait d'une plus grande
implication des CLSC. Donc, quand nous avons vu que l'énoncé
disait qu'il serait souhaitable que les CLSC soient davantage impliqués,
on s'est dit: Oui, sur cette base-là, en effet, on est plutôt
d'accord. (17 h 30)
Le problème, c'est qu'à partir du moment où on dit
qu'idéalement, les CLSC pourraient faire plus, reste la question du
comment. Et, sur le plan théorique, autant on conçoit bien que
les CLSC soient les mieux placés, autant on se demande comment, en
pratique, dans l'état de débordement dans lequel ils se trouvent
bien fréquemment, Ils pourraient trouver une minute de plus pour, en
plus, prendre en charge toute la question des garderies. Alors, oui, nous
n'avons rien contre le fait qu'ils s'impliquent davantage, mais le temps
étant un capital limité, il y aura une espèce d'arbitrage
à faire. Nous ne savons pas encore exactement comment et nous n'avons
pas la prétention d'arriver avec un projet définitif clé
en main. Mais disons qu'il est clair qu'une fois qu'on dit que les CLSC
devraient s'impliquer, on tombe sur la question de l'inégalité de
développement selon les régions. Et nous pensons qu'il aurait
été intéressant que, dans l'énoncé, on
prévoie des budgets particuliers pour les garderies qui sont dans les
régions éloignées ou dans des milieux
défavorisés. Est-ce que ce sont les CLSC qui auraient à
les administrer? Vraisemblablement, oui. Mais on aurait voulu quelque chose de
peut-être un petit peu plus différencié par région,
sachant que les situations sont très différentes d'une
région à l'autre.
En parlant aussi d'enveloppes spécifiques aux régions, il
y a toute la question du montant qui est alloué au perfectionnement du
personnel. Vous parlez, si je me souviens bien, de 1 % de la masse salariale.
Là aussi, on aurait voulu que les montants alloués au
perfectionnement constituent une enveloppe distincte qui soit
déterminée en fonction... Le coût de perfectionnement est
variable selon la région. Il est variable selon la situation. On aurait
voulu qu'il soit dans une enveloppe à part et non pas simplement
calculé au pourcentage. On aurait voulu aussi que cette enveloppe soit
fixée en tenant compte des salaires qui sont à peu près
bas partout, mais aussi certainement du coût de la vie qui est
différent d'une région à l'autre. Donc, on aurait
voulu que ce qui concerne l'implication des CLSC soit plus approfondi.
Là-dessus, oui, on s'entend sur le fait qu'il y ait davantage
d'implication des CLSC.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est sûr que, lorsque l'on parle de
l'implication des CLSC, c'est aussi beaucoup quant à la
prévention. Je pense que, quant à tout ce qui touche la
prévention dans les garderies, les CLSC ont un rôle important de
collaboration à jouer avec les milieux des garderies. Mais, si je
comprends bien, vous ne souhaitez pas que l'Office des services de garde
transmette ses pouvoirs aux CLSC. Ce n'est pas ça que vous
désirez?
M. Boisclair: Écoutez quant aux modalités, c'est
une suggestion qu'on a mise de l'avant et qui vient surtout d'une
réflexion qui a été entreprise chez nous à
l'occasion du grand rassemblement des jeunes de Sainte-Adèle.
Maintenant, est-ce qu'il faudra y avoir transfert de pouvoirs de l'office vers
les CLSC? Je pense que là n'est pas la question. L'essentiel de notre
intervention, c'est sur le besoin d'avoir des services qui répondent aux
particularités d'une région. On propose les CLSC. Si ce n'est pas
l'exemple approprié, soit, mais ce qui nous déçoit un peu
dans cette politique-là et ce sur quoi nous aimerions mettre l'emphase,
c'est justement d'avoir des services qui répondent aux besoins des
différentes régions. Qu'on ait une garderie à Outremont ou
en Gaspésie, il y a là une grande différence de
clientèle, des services et de la réalité. Il est temps
que, sur le plan des idées, nous ayons plus de pouvoirs vers les
régions avec, comme je vous le dis, un pouvoir de taxation aussi.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est pour ça, finalement, que la
planification régionale est sûrement quelque chose qui a son
mérite puisque, justement, on va pouvoir rejoindre davantage les gens de
chacune des régions pour bien identifier les besoins et, après
ça, pouvoir leur donner les types de services dont ils ont besoin.
M. Boisclair: Rapidement. La question n'est pas de savoir si ce
sont les CLSC ou pas. Il y a des choses là-dessus à la suite de
consultations qu'on a menées auprès de différentes
personnes dans le milieu. Il y a la question de la nouvelle formule de
financement qui nous inquiète beaucoup et aussi la question du fardeau
fiscal. On n'a pas abordé cette question-là, mais le fardeau
fiscal nous semble encore très élevé pour les parents, et
je pense qu'on ne peut pas se permettre de l'oublier. Les 45 % de ce qui est
ramassé dans le privé nous Inquiètent aussi beaucoup. Vous
avez beau dire que c'est important, mais comment concilier justement ce besoin
de répondre aux individus dans les régions avec leurs
réalités locales, alors qu'on instaure une formule de financement
mur à mur qui laisse peu de place justement, à notre avis, pour
répondre aux besoins des régions?
Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez quand môme pris connaissance
aussi, j'imagine, de la formule d'exonération financière aux
parents et de l'ancienne formule qui existait, qui était une formule mur
à mur, 4,50 $ fixes et sans aucune indexation, indépendamment des
besoins parce que c'était par place, indépendamment du coût
de chacune des places. C'était finalement une formule qui était
un peu mur à mur.
M. Boisclair: L'objectif n'est pas de trouver des coupables, mais
plutôt de mettre de nouvelles solutions sur la table.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est ce qu'on essaie de faire
actuellement.
M. Boisclair: Je pense que les programmes mur à mur,
à bien des égards, ont prouvé leur inefficacité.
Alors, je ne vois pas pourquoi on continuerait dans le même sens. Si on a
fait des expériences et qu'elles ne se sont pas
révélées rentables, pourquoi retomber dans le même
piège?
Mme Gagnon-Tremblay: Vous mentionnez, dans votre mémoire,
les questions reliées aux conditions de travail des éducatrices
et des éducateurs et vous auriez souhaité que leur manque
à gagner soit chiffré et qu'un plan de rattrapage soit
présenté. J'imagine que vous savez très bien que le
gouvernement n'est pas l'employeur des éducatrices et des
éducateurs, que chaque corporation est une corporation autonome.
Finalement, ce sont les parents qui gèrent cette corporation. Dans ce
sens, que voulez-vous dire parce que vous dites que vous auriez aimé un
plan de rattrapage? Par exemple, comment concilier cette proposition avec le
fait que l'État ne soit pas l'employeur? Comment aurait-on pu faire un
plan de rattrapage pour chacune des garderies et chiffrer finalement... Est-ce
que c'est parce que vous ignoriez que les parents... Vous saviez sûrement
que les éducatrices n'étaient pas les employées du
gouvernement.
M. Facal: Non, c'est-à-dire que nous sommes bien
conscients que l'État n'est pas directement l'employeur. Par contre, je
pense que nous ne sommes assurément pas les premiers à être
venus ici et à dire que les conditions de travail des éducateurs
et des éducatrices sont extrêmement difficiles. La plupart d'entre
eux ont demandé au gouvernement d'agir. Je ne crois pas que la meilleure
attitude à cet égard soit de dire: Oui, mais dans la mesure
où ils ne relèvent pas directement de notre pouvoir, nous
préférons ne pas agir. Il y a assurément des façons
d'agir. Entre autres, concernant le coût de perfectionnement sur le plan
des conditions de travail, je pense que le gouvernement peut tout de même
fixer des normes minimales auxquelles les comités
de parents pourraient se voir contraints de correspondre sans que ce
soit directement le gouvernement qui présente un plan de rattrapage
clé en main en disant: Telle année vous passerez à tant,
l'année suivante vous passerez à tant. Le gouvernement peut tout
de môme mettre des paliers, des barèmes, auxquels il s'agirait
ensuite de faire en sorte que les directions des garderies se conforment.
Je n'ai évidemment pas lu tous les mémoires qui ont
été présentés. Mme la ministre, c'est votre cas
à vous. Vous pouvez sans doute reconnaître que la question des
conditions de travail revient dans un grand nombre de mémoires. Et nous
nous sommes dits qu'assurément il n'y a pas de fumée sans feu.
Donc, nous avons voulu attirer votre attention sur ce point, puisque nous avons
été étonnés de ne pas le voir revenir dans
l'énoncé. Il y a le constat, oui, que les conditions de travail
sont pénibles, mais nous aurions voulu vraiment que le document aille
plus loin.
Mme Gagnon-Tremblay: Ma dernière question concerne les
garderies à but lucratif. Vous suggérez un moratoire concernant
le développement des garderies à but lucratif. À votre
avis, sur combien d'années devrait s'étendre ce moratoire?
M. Facal: Je ne pourrais pas vous dire exactement combien
d'années. Par contre, je rejoins votre question initiale par laquelle
vous cherchiez à savoir si nous étions favorables à une
étatisation complète des services de garde. Non. Qu'il y ait des
garderies à but lucratif, à !a limite, ça peut se
défendre, tout comme l'existence de l'école privée peut se
défendre. La question, c'est que le mode de financement nous
apparaît peut-être généreux à l'endroit des
garderies à but lucratif. Et il nous a semblé que la
priorité devait être mise sur un réseau sans but lucratif
et que, ma foi, les garderies à but lucratif ne doivent
assurément pas être mises sur le même rang de
priorités que les garderies sans but lucratif. Cela dit, sur combien
d'années étendre le moratoire, pour émettre une opinion
là-dessus, il aurait fallu avoir accès à des chiffres que
nous ne possédons pas. Mais nous reconnaissons le droit à ces
garderies-là d'exister. Nous disons simplement qu'en termes d'assistance
du gouvernement, assez, c'est assez!
Mme Gagnon-Tremblay: Juste une remarque, en terminant, pour
rectifier. Vous parliez d'un montant de 4 200 000 $ comparativement à 10
000 000 $ cette année pour les garderies sans but lucratif. En toute
honnêteté, il faut se dire que les garderies à but lucratif
ne recevaient aucune subvention auparavant. Alors, on ne peut pas comparer 4
200 000 $ par rapport à 10 000 000 $. il faut comparer 4 200 000 $ par
rapport à 45 000 000 $ ou tout près de 50 000 000 $, qui vont
directement dans les garderies à but lucratif. C'est juste une petite
rectification.
Dans votre exposé, vous disiez que, beaucoup trop
comparativement, on accordait 4 200 000 $ aux garderies à but lucratif
comparativement aux autres. Je voudrais qu'on fasse la comparaison à
partir d'un budget global et non pas des 10 000 000 $ supplémentaires
cette année, puisque les garderies à but lucratif
n'étaient pas financées auparavant.
M. Boisclair: J'en suis, Mme ia ministre. Si on veut faire des
comparaisons, que dit-on aiors de la contribution du gouvernement du
Québec de 69 400 000 $ qui reste pratiquement inchangée et qui
était de 69 200 000 $?
Mme Gagnon-Tremblay: Si vous vouiez en discuter, on pourra en
discuter longuement tout à l'heure.
M. Boisclair: Cela aurait été intéressant
d'en discuter.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme
la ministre. Mme la députée de Maison-neuve.
Mme Harel: Je veux vous saluer et vous dire que c'est depuis le
début de la commission que l'on discute de ces 69 000 000 $ qui
resteront 69 000 000 $. Par ailleurs, c'est intéressant que vous soyez
parmi nous. Dans la table des matières, je lisais une petite note au bas
de la page: "Dans le texte qui va suivre, l'utilisation du féminin (...)
comprend aussi l'autre genre", ou vice versa. Je me disais: C'est
intéressant. En général, ce sont surtout des femmes qui
ont participé aux travaux de notre commission parlementaire, sauf
lorsque l'Union des municipalités est venue et qui était
entièrement représentée par trois hommes et vous. C'est
Intéressant. Est-ce que cela dénote l'absence de jeunes femmes au
sein du comité ou si cela dénote surtout votre grand
intérêt pour la question des services de garde?
M. Facal: Cela me fait plaisir que vous le voyiez comme
peut-être un peu le signe des temps nouveaux. Oui, ces sujets nous
intéressent. Cela en stupéfie peut-être quelques-uns, mais,
que voulez-vous? C'est comme ça. Pour le reste, présence
féminine réduite à la portion congrue au sein du
comité national, pas du tout. Par contre, les contraintes d'horaires, et
ce n'est pas à vous que je l'apprendrai, sont des choses avec lesquelles
il faut parfois composer, et il est arrivé simplement que
c'étaient trois hommes qui pouvaient aujourd'hui venir, mais, dois-je le
dire, au grand regret de toutes les femmes du comité qui auraient bien
voulu venir et qui nous enviaient.
Mme Harel: Alors, si on continue comme ça,
je vais pouvoir leur dire que vous avez bien fait les choses. Plus
sérieusement, beaucoup plus sérieusement, parce que c'est une
question de fond très importante et sur laquelle la ministre entretient,
depuis le début de la commission, une confusion. Je ne sais pas si la
confusion est volontaire ou si elle est inconsciente, mais c'est une confusion
qu'il faut absolument dissiper, sinon on est tout mélangé. La
confusion est la suivante. Lorsque l'État met plus d'argent, c'est comme
si cela signifiait l'étatisation et c'est la confusion entre
l'intervention financière de l'État pour subventionner et la
gestion par l'État. C'est une sorte de confusion immédiate.
À la lecture de votre mémoire, tout de suite la ministre vous a
demandé... Il n'est pas paginé, alors ce sera difficile de vous
noter la page. Cela s'intitule "L'urgence d'aller plus loin", où vous
parlez justement de la nécessité, toute proportion gardée,
d'une réforme globale et audacieuse équivalente à celle de
l'éducation et de la santé dans les années soixante et
soixante-dix, et, immédiatement, le spectre de l'étatisation.
Là, je pense qu'N faut bien s'entendre. Ce n'est pas parce qu'un
réseau est financé qu'H en est pourtant géré par
l'État. Un réseau peut être géré par le
communautaire; par exemple, les maisons d'hébergement pour femmes
battues. Il n'est pas entièrement financé actuellement, il l'est
en partie; il est en voie de financement, mais il pourrait l'être
à 100 %. (17 h 45)
Rien ne s'oppose à ce qu'un réseau soit financé
à 100 %, cela n'emporte pas la gestion. Le financement, l'intervention
financière de l'État ne signifie pas la gestion. C'est quelque
chose qu'on a réussi à ne plus confondre depuis quelques
années. Mais c'est la confusion des années soixante. Il existait
tout un réseau de centres de santé dans les quartiers. Alors,
quand il y a eu la réforme de 1974, on a complètement
cessé de les subventionner au profit, justement, des CLSC. Cela a
été la même chose pour l'aide juridique. L'État a
complètement cessé de les financer au profit des commissions des
services juridiques et des aides juridiques dans les quartiers.
Il me semble qu'il faut vraiment bien se comprendre. Le seul
réseau de services qui est géré par les parents, mais pas
à moitié, entièrement géré, même si
l'État le finançait à 100 %, on se comprend bien, cela n'a
rien à voir avec l'étatisation, parce que la gestion pourrait
rester entièrement entre les mains des parents. Cela n'a rien à
voir. L'étatisation, ça veut dire que l'État prend
à sa charge et assure le contrôle et la gestion. Ce dont on parle,
c'est d'un financement. Alors, on revient à la question de fond: Qui
doit financer ce réseau? Est-ce qu'on ne s'est pas déjà
entendus sur qui doit le gérer? Et c'est cela qui est mis en cause par
les subventions que la ministre annonce en matière de garderies
privées. Ce qui est mis en cause, c'est que, depuis dix ans, on pensait
que le réseau de garderies devait être géré par les
parents, il me semblait que cela était clair, quel que soit le mode de
financement.
Je voulais vous le signaler parce que vous avez parlé de
financement mur à mur. S'il y a un réseau qui n'a pas
été financé, c'est celui-là. Mme la ministre vous a
parlé de la subvention par place au permis, mais il y a
l'exonération aux parents et l'allocation au logement. C'était
là une combinaison de deux allocations qui ne jouait que lorsqu'il y
avait la présence de parents de milieux défavorisés ou
lorsqu'il y avait un écart important dans le coût des loyers.
C'est, au départ, un réseau dont le financement n'a pas
été mur à mur. On n'a pas à craindre qu'il le soit
et personne nous demande qu'il le devienne. Les gens nous disent: Gardez-nous
le même mode de financement. C'est la ministre qui dit: Ce n'est pas
uniforme; je vais essayer d'uniformiser cela. Depuis le début, elle nous
dit qu'H y a trop d'écart. Je pense que c'est un aspect sur lequel il
faut revenir. Ce n'est pas parce que vous souhaitez un réseau complet,
accessible, que cela veut dire étatiser. Je ne sais pas si vous avez un
commentaire à faire là-dessus?
D'autre part, vous vous avez parlé des parents de moins de 30
ans. Est-ce qu'il y en a beaucoup, selon vous? J'ai toujours l'impression,
quand je rencontre des jeunes de moins de 30 ans, qu'un bon nombre d'entre eux
ont l'impression de ne pas avoir les conditions réunies pour faire des
enfants, de ne pas avoir de job ni de sécurité, de ne pas avoir
non plus de revenus assurés. Est-ce que vous avez pris connaissance des
dernières statistiques sur le taux de fécondité qui
remonte un peu? Vous avez peut-être vu que c'étaient surtout les
naissances de premier rang, chez les femmes de 25 à 39 ans, qui avaient
retardé depuis six ou sept ans. Avez-vous pris connaissance d'une
statistique très éloquente, selon laquelle le tiers des
naissances au Québec sont hors mariage? On peut penser sans doute faire
un enfant hors mariage, peut-être deux, mais est-ce qu'on peut en faire
trois? Je ne sais pas si vous avez réfléchi à toutes ces
questions, j'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.
M. Facal: II y a une chose qui est peut-être un petit peu
gênante, mais je ne pense pas que cela mette en cause notre
représentativité, je pense qu'il n'y a aucun de nous trois ici
qui a des enfants. Par contre, cela ne nous empêche pas de nous
intéresser au sujet. D'ailleurs, nous disons à la page 1 du
préambule, que nous nous intéressons évidemment à
la condition des jeunes parents de moins de 30 ans, mais aussi à celle
des jeunes dont la "parentalité" est à l'état de projet.
La formulation était peut-être un petit peu ampoulée, mais
essentiellement, ce que cela veut dire, c'est qu'on a envie et la raison pour
laquelle on est venus témoigner, c'est parce qu'on voulait bien
s'assurer, on était intéressés de savoir si on nous
donnerait toutes nos
chances de concrétiser l'envie d'être parent.
André?
M. Boisclair: Rapidement. On a effectivement, par le biais des
journaux, n'ayant pas accès aux services de recherches auxquels les gens
autour de cette table ont accès, pris connaissance des
différentes statistiques qui ont été
présentées. C'est une question que bien des gens se posent, et
c'est une inquiétude importante chez plusieurs jeunes, qu'on a voulu
venir traduire ici. Comme M. Facal le soulignait tout à l'heure, c'est
cette espèce de "parentalité" qu'on aimerait bien voir, et je
pense que ce goût existe. Mais avant d'avoir des enfants, qu'advient-il
du congé parental? On nous parle peut-être d'un congé
parental d'un an subventionné à 90 %, mais on n'en voit toujours
pas la couleur. On lisait cela dans les journaux. En tout cas, c'est ce qu'ils
disent.
Mme Harel: Pas subventionné?
M. Boisclair: En tout cas, apparemment, il y a des documents
confidentiels qui circulent dans ce bâtiment, il y a des choses, des
mesures très concrètes, à notre avis, qui n'existent pas
et dont on a grandement besoin. On n'a pas souligné non plus la question
du fardeau fiscal qui, à notre avis, Mme la ministre, demeure encore
beaucoup trop élevé pour les parents qui décident
d'envoyer leurs enfants dans les garderies. Il nous semble aussi que pour ce
qui est des congés parentaux et des services de garde, il y a des
efforts supplémentaires qui devraient être faits. J'ai de la
difficulté à m'expliquer qu'on ait pris compte de cet
énoncé de politique. Bien sûr, nous n'avons pas toutes les
contraintes que vous pouvez avoir ou les contraintes que d'autres personnes
peuvent avoir au gouvernement, mais de voir que le gouvernement du
Québec que la majorité des citoyens ont élu aux
dernières élections n'a pas mis un cent de plus pour les
garderies, je me dis qu'il y a, à un certain moment, un peu de mauvaise
foi dans tout cela. Le budget demeurera à 69 400 000 $; il était
à 69 200 000 $. On a beau entendre des beaux discours sur la politique
familiale, mais de voir que ce n'est pas traduit par des gestes concrets, on se
demande vraiment si, oui, cette volonté-là... Qu'est-ce qu'on va
aller expliquer aux jeunes qui se posent des questions et qui ont des
inquiétudes? À l'heure actuelle, le Comité national des
jeunes est en tournée. Nous rencontrons une série de jeunes dans
les institutions scolaires, et, une des questions fondamentales pour eux, c'est
justement l'avenir du peuple francophone et non pas la question de la
natalité, et je voudrais revenir là-dessus. Il y a bien des
domaines sur lesquels ils se posent des questions et ils nous posent des
questions puisque nous sommes des leaders d'un mouvement quelconque, aussi
important que bien d'autres, ils nous disent: Pourquoi aurais-je des enfants si
j'ai de la difficulté à avoir des places en garderie? Les
congés parentaux ne sont pas assurés. Il me semble qu'un
gouvernement pour qui cette réalité tient à coeur cette
réalité et qui est conscient de cette réalité
devrait mettre plus d'argent qu'il en met à l'heure actuelle. C'est
cette principale inquiétude.
Il y a aussi la question du financement à 45 %. On se pose de
sérieuses questions. Mme Harel, j'en ai profité pour relancer
cette question, sur laquelle on n'a pas trop entendu parler la ministre, les 69
400 000 $. Je pense qu'il y a un ensemble de conditions à l'heure
actuelle qui sont réunies qui font que des gens de notre âge ou
peut-être plus vieux que nous décident de retarder leur projet
d'avoir des enfants, il va falloir, à mon avis, que cela passe par des
mesures concrètes et, vous le savez comme moi, c'est l'argent qui est le
nerf de la guerre, il va falloir mettre plus d'argent sur la table.
Mme Harel: J'ai pris bonne note dans votre mémoire que
vous considériez que, pour 1989-1990, la contribution du Québec
stagne. Et vous avez évidemment les chiffres. Vous savez, les
congés parentaux dont il est question dans les journaux, c'est un
congé sans compensation. C'est le congé de maternité dont
il est question, mais, ce congé de maternité, il n'y a pas,
à ma connaissance, de mémoire pour le réaliser. On se
demande si on ne va pas offrir de garder des enfants dont on n'aura pas encore
accouché, parce que, finalement, on va mettre le congé parental
avant celui qui permet l'accouchement.
M. Boisclair: Je faisais référence à un
article que je me souviens avoir lu dans Le Devoir, où on faisait
état d'un document qui circule dans les mains du premier ministre
à l'heure actuelle où il y aurait différents
scénarios. J'en connais ce qui est écrit dans les journaux, sans
plus.
Mme Harel: J'ai vu ce document, oui. C'est un document qui est
étudié présentement par un comité
ministériel.
Dans votre mémoire, vous nous rappelez - il n'y a pas eu
plusieurs groupes qui l'ont fait, il y en a eu quelques-uns, mais vous avez
raison de le répéter - que ia problématique dans tout
l'énoncé n'est pas posée en termes de besoins de garde, et
c'est vraiment important. C'est comme si tout l'énoncé reposait
sur les modes de garde régis ou non régis, et non pas sur les
besoins des parents, comme si on avait mis la charrue devant les boeufs. On
n'est pas partis du besoin des parents et des enfants, comme vous le signaliez,
en termes de garde partielle, de jour, de soir, de nuit, ou de lieu de garde,
résidence, entreprise, école, ou de besoins spécifiques,
mais on est partis comme à l'envers des modes existants. Je pense que
c'est partir, d'une certaine façon, sans vouloir prendre en
considération l'ensemble des besoins de garde de
la petite enfance. Est-ce que vous avez un commentaire à faire
là-dessus?
M. Boisclair: Oui. Effectivement, on a peut-être mis la
charrue devant les boeufs, et, à la lecture de ce document, ça a
été notre première réflexion: Quels ont
été les différents principes directeurs qui ont
dirigé la rédaction de ce document? Est-ce que ce sont plus des
contraintes budgétaires, des contraintes de gestion, que plutôt
répondre aux besoins de la clientèle? Je pense que c'est un peu
ce qu'on a essayé d'expliquer dans le mémoire. il y a justement
un autre élément que nous avons soulevé dans la
présentation, c'est toute la question de l'accessibilité, qui est
un peu le maître mot, pour nous, à un triple niveau, comme je le
disais tout à l'heure, les places disponibles, la diversité des
modes de garde et le coût moyen des frais de garde. Justement, de voir
que cette notion ne trouve pas sa place dans les sept grands principes
directeurs de la réforme nous posait certains problèmes.
Mme Harel: Ce sera tout, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme
la députée de Maisonneuve.
La commission des affaires sociales remercie le Comité
national... Excusez-moi, Mme la députée.
Mme Harel: ...de remercier immédiatement. C'est
intéressant, votre mémoire nous apporte des
éléments nouveaux. Je n'avais pas fait les calculs des
subventions par place au permis pour les garderies privées et pour
celles gérées par les parents, et c'est un élément
nouveau que personne d'autre nous avait apporté. Je vous remercie pour
votre contribution. C'est extrêmement intéressant qu'on ait pu
discuter, en commission parlementaire, de vos préoccupations. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la
députée. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, en terminant, je
voudrais mentionner que, bien que la politique ne réponde pas à
tous les problèmes ou à tous les besoins, étant
donné qu'ils sont énormes, je pense que c'est un pas dans la
bonne direction et un pas très considérable. Justement, ce que
nous voulons faire, entre autres, ce n'est pas du pièce à
pièce, comme on avait l'habitude de le voir auparavant, mais bien de
régler le problème dans son ensemble. C'est pourquoi c'est la
première fois qu'on a un plan de développement et des budgets
prévus pour trois ans. Vous vous souviendrez qu'on avait annoncé
12 000 places lors de Décisions 1985, mais aucun budget n'avait
été voté pour ces 12 000 places. Il y a un budget de trois
ans de prévu. Il y a un budget de formation qui est prévu pour la
première fois ainsi que l'indexation des formules qui n'avait jamais
été prévue auparavant. Justement, si on avait pu indexer
auparavant, le rattrapage ne serait peut-être pas aussi énorme.
Vous comprenez que, compte tenu des contraintes budgétaires que nous
avons... La population nous a élus en décembre 1985 justement
à cause de notre sens du réalisme et à cause de la gestion
des finances publiques, et non pas pour accumuler des déficits. Je vous
remercie pour votre exposé, messieurs.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie le Comité national des jeunes du Parti
québécois et invite à la table les représentantes
de la garderie Gribouillis inc.
La commission suspend ses travaux quelques instants afin de permettre
aux gens de s'installer.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 18 il 1)
Le Président (M. Bélanger): Bienvenue aux
porte-parole de la garderie Gribouillis inc. Pour vous expliquer un peu nos
règles de procédure, vous avez 30 minutes à votre
disposition, c'est-à-dire dix minutes au maximum pour la
présentation de votre point de vue et 20 minutes de discussions avec les
parlementaires. Je vous prierais, d'une part, d'identifier vos porte-parole et,
par la suite, lorsque vous aurez à prendre la parole, de bien vouloir
donner vos noms pour la transcription du Journal des débats, afin
qu'il soit le plus fidèle possible. Avant de présenter votre
mémoire, si vous pouviez identifier vos porte-parole, nous les
présenter et procéder. Nous vous écoutons.
Garderie Gribouillis inc.
Mme Fortier (Denise): D'accord. Bonjour Mme la ministre, M. le
Président, Mme Harel et les membres de la commission. Je vais vous
présenter Louise Goyette, parent, qui nous accompagne, Sylvie
Théberge, parent, Claire Beaulieu, parent et porte-parole, Claire
Grand-mont, parent et porte-parole, Mireille Lauren-deau, éducatrice, et
moi-même, Denise Fortier, coordonnatrice. Je tiens à vous
préciser que nous ne ferons pas la lecture de notre mémoire que
vous avez eu l'occasion de lire.
Mme Grandmont (Claire): Mme la ministre, mesdames, messieurs.
Connaissez-vous beaucoup de travailleurs qui soient obligés d'effectuer
un deuxième travail bénévole pour sauver le premier? C'est
ce que nous faisons, nous, les employés de la garderie Gribouillis
à Louiseville. C'est cette réalité qui nous a
poussés à lire attentivement votre énoncé, Mme la
ministre, et
à vous envoyer ce mémoire et c'est de cette même
réalité dont nous voulons vous entretenir aujourd'hui. Nous
faisons partie du dernier tiers des garderies dont les tarifs sont
inférieurs à la moyenne. Nous évoluons dans un milieu
économiquement défavorisé. Taux de chômage
élevé; nous sommes les champions de la région.
Présence de maternelles quatre ans; elles n'existent que dans les
milieux défavorisés. Et enfin, une économie basée
surtout sur des entreprises vulnérables dont les ralentissements et les
mises à pied temporaires font balancer notre taux de
fréquentation. La capacité de payer de nos parents ne peut
supporter beaucoup de hausses. Nous sommes à 13 $ par jour. Nous pensons
passer peut-être à 14 $ d'ici deux ans. Donc, nos chances
d'amélioration basées sur le tarif sont très minces. Par
contre, nous répondons à un réel besoin. Les gens de la
région de Louiseville ont droit à un service de garde en garderie
et le nombre de clients qui ont utilisé les services de la garderie
depuis huit ans le prouve. Nous avons un permis de 60 places dont 53
subventionnées, et les places sont remplies presqu'à longueur
d'année. Cette année, nous avons accommodé près de
100 familles régulières et occasionnelles. Nous desservons une
petite ville et un ensemble de plusieurs petites municipalités de la MRC
de Maskinongé. Nous avons offert des services à des gens de
chacune des douze municipalités depuis les débuts de la
garderie.
Mais revenons plutôt à notre interrogation première.
Connaissez-vous beaucoup de travailleurs qui soient obligés d'effectuer
un deuxième travail bénévole pour sauver le premier?
Depuis notre ouverture en 1980, nous ne comptons plus nos heures de
bénévolat. Au début, des heures passées à
l'élaboration de tous les documents nécessaires à notre
bon fonctionnement: programme d'activités, règlements de
régie interne, philosophie de la garderie, et j'en passe. Par la suite,
toutes les heures mises sur la construction de chars allégoriques pour
la Saint-Jean-Baptiste, pour la publicité, toutes les heures mises dans
des opérations porte ouverte, pour la publicité, toutes les
heures mises pour l'élaboration de feuillets publicitaires
distribués par nous dans tous les établissements d'importance de
la région, pour la publicité. Vous en vouiez plus? Imaginez six
mois de rénovation lors de notre relocalisation où parents,
employés et conjoints ont sacrifié bénévolement
fins de semaine et vacances afin de combler le manque à gagner entre les
25 000 $ de subvention donnés par l'office et les 68 000 $
demandés par notre plus bas soumissionnaire, des travaux, soit dit en
passant, faits dans une école désaffectée depuis à
peine un an et entrepris presque uniquement pour répondre aux nombreuses
normes de l'office et des différents ministères
concernés.
Enfin, comment passer sous silence nos nombreuses heures passées
en campagne de financement? En cinq ans, nous avons amassé la rondelette
somme de 44 990,32 $. Personne ne pourra nous accuser d'avoir manqué
d'Imagination et d'ardeur. Folles, peut-être, démotivées,
pas encore. Mais quand même, quand on y réfléchit bien,
trouvez-vous normal que des travailleuses soient obligées de vendre des
dizaines de billets à 100 $ pour maintenir leur salaire à un taux
horaire moyen de seulement 7,57 $? Trouvez-vous normal que le parent en fasse
autant pour maintenir un tarif journalier qui corresponde à sa
capacité de payer?
Mme Boaulieu (Claire): Je suis parent et membre du conseil
d'administration de la garderie Gribouillis Inc. Je vous ferai part des
préoccupations et des changements que votre politique soulève
dans nos familles. Après une politique familiale très discutable
sur la natalité, où les sommes d'argent allouées ne
permettent même pas de payer les frais de garde, permettez-moi de
m'interroger encore plus sur le soutien réel que vous voulez apporter
aux familles pour la garde de leurs enfants. Nous espérions un tarif
pour la famille plutôt qu'un tarif individuel, sujet à la hausse,
où les femmes ne pourront plus choisir leur mode de garde, ni même
posséder le droit au travail ou aux loisirs. Laissez-moi vous expliquer
dans le concret ce que signifie une telle affirmation.
Je suis mère de trois enfants d'âge préscolaire, et
cela me coûte 37 $ par jour pour les envoyer dans un milieu que mon
conjoint et moi avons choisi pour le développement de nos enfants. La
garderie nous apparaît, après avoir essayé d'autres types
de garde, celui qui répond le mieux à nos besoins. Ce milieu de
vie possède une qualité certaine, un encadrement adapté et
un personnel qualifié. En plus de permettre à nos enfants de se
socialiser avec d'autres enfants, car il n'y a pas d'enfants du même
âge dans notre voisinage, la garderie permet de faire des apprentissages
de motricité, de langage, de musique, et j'en passe. Elle offre aussi
à nos enfants l'occasion de s'aérer entre eux, étant dans
des unités de vie différentes, et de développer d'autres
liens. Bien entendu, vous comprendrez, Mme la ministre, qu'un tel tarif rend
difficile un travail occasionnel ou à temps plein. Imaginez quel devrait
être mon salaire avec 185 $ par semaine de frais de garde! Nous allons
même, avec trois enfants, jusqu'à remettre en question notre choix
et notre accessibilité à un mode de garde qui nous convient
pourtant parfaitement, puisqu'il est dispendieux et pas adapté à
une réalité familiale. Voyez-vous, une famille possède
d'autres dépenses que les frais de garde: hypothèque, auto,
chauffage, alimentation, vêtements, et j'en passe. Je m'interroge
sérieusement sur l'avenir de la famille au Québec. C'est à
croire que les gouvernements ont déjà statué sur le nombre
d'enfants. Avec un soutien aussi minime, un troisième ou d'autres
enfants tiennent d'une entreprise plus que téméraire. Ne parlons
plus du droit de la mère au travail ou aux loisirs, comme je viens de
vous l'expliquer, sans
parler du climat dans lequel vous nous placerez avec les
éducatrices de nos enfants. Elles travaillent professionnellement et
avec beaucoup de zèle auprès de nos enfants. Elles ont droit
à un salaire à l'égal de leur somme de travail investi. Le
bénévolat pour elles, comme pour nous, les parents, a des
limites, surtout lorsqu'on devra payer plus, sans pour autant savoir si l'an
prochain on pourra tenir encore. Vous comprendrez que la motivation s'effrite
avec une perspective aussi précaire, d'autant qu'on atteindra vite le
plafond de notre capacité de payer, compte tenu de notre
réalité socio-économique défavorisée. Alors,
qui devra payer? Les éducatrices ou nous, les parents? Car les campagnes
de financement, c'est aussi d'autres parents qui y participent et paient les
billets. Après tant de promesses, de principes, surtout, et de promotion
d'aide à la famille québécoise, nous étions en
droit, parents, de nous attendre à un meilleur support pour garder nos
enfants. Les principes de la politique sont charmeurs, mais les chiffres,
malheureusement, désenchanteurs.
Un quatrième enfant paraît envisageable, seulement, a mon
avis, avec un mode de garde traditionnel, la mère, le père et les
grands-parents. J'exagère, direz-vous? À peine. Nous avions des
espoirs, beaucoup d'espoirs, tel un tarif pour la famille où le
deuxième enfant paie la moitié du tarif et le troisième le
quart et le quatrième est gratuit pour le parent. Voilà, à
notre avis, ce à quoi ressemble une politique familiale sur les services
de garde "pour un meilleur équilibre". Nous espérions
également des modifications quant à l'échelle
d'exonération d'aide financière, de manière à aider
davantage les parents de la classe moyenne, soit les revenus de 22 000 $
à 35 000 $. Voyez-vous, Mme la ministre, les principes de votre
politique ont alimenté beaucoup d'espoir, mais perdent, à notre
avis, leur effet dans le quotidien.
Mme Grandmont: Dans ces conditions, vous comprendrez que nos
espoirs face à votre politique étaient fort grands mais, selon
nous, réalistes. Après huit années d'existence, nous
espérions pouvoir stabiliser notre entreprise, nous assurer d'un revenu
fixe, régulièrement indexé, ne pas écraser notre
parent sous le poids de hausses de tarif excessives régulières,
permettre à notre parent de la classe moyenne d'avoir un accès
plus facile à l'aide financière, pouvoir hausser nos
critères de qualité afin d'offrir un service encore meilleur
à nos tout petits, et enfin pouvoir rémunérer plus
adéquatement notre personnel, étant donné sa formation,
son expérience et sa motivation qui sont fort grandes chez nous.
Était-ce de la naïveté de notre part? Vous nous avez dit,
Mme la ministre, que nous serions contentes de vos propositions. Nous devons
malheureusement vous avouer qu'il n'en est rien; nous sommes
déçues.
Les subventions que nous avons reçues cette année
totalisent 40,75 % de nos revenus.
Ceux-ci seront moindres l'an prochain, parce que notre type
d'organisation nous a forcées à abandonner deux projets: la garde
scolaire l'été et la garde scolaire le matin et en fin de
journée, et lors des journées pédagogiques. De plus, nous
attendons depuis deux ans une augmentation de sept places subventionnées
au permis. Avec cette augmentation, l'aide de l'office aurait totalisé
45,5 %. L'an prochain, si votre énoncé est adopté, nous
auront 45 % de subvention, mais moins de revenus. Comme nous ne pouvons
envisager des hausses tarifaires fréquentes, notre situation ira
forcément en se dégradant. Nous ne sommes pas
déçues, nous sommes atterrées.
Cependant, Mme la ministre, soyez assurée que nous reconnaissons
tous les efforts et toute la ténacité que vous avez dû
déployer pour convaincre, à plusieurs échelons, des hommes
de débloquer ces quelques millions pour améliorer notre
situation. Cependant, nous ne pouvons accepter cette répartition de
l'argent au pourcentage. Nous ne ressentons pas de sentiment d'injustice par
rapport à d'autres garderies qui réussissent mieux que nous
financièrement, à cause de leur situation géographique
plus avantageuse.
Le Président (M. Bélanger): Je vous demanderais de
conclure, madame. Vos dix minutes sont écoulées,
malheureusement.
Mme Grandmont: C'est presque fini, deux petites minutes?
Le Président (M. Bélanger): Oui? Alors,
consentement.
Mme Grandmont: Par contre, nous ressentirions un vif sentiment
d'inéquité si, en plus, ces mêmes garderies jouissaient
d'une aide financière accrue et d'un budget plus important pour la
formation et le ressourcernent de son personnel. Comprenez, Mme la ministre,
jusqu'à quel point nous sommes fatiquées de maintenir ce service
essentiel à bout de bras. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci de votre exposé, mesdames.
Je regarde un peu la situation de votre garderie, et, effectivement, on peut
dire que la situation financière est saine, en ce sens que vous avez dit
vous gérer peut-être difficilement, mais que vous
réussissez quand même à bien le faire avec un tarif de 13 $
qui date de 1987, comparativement peut-être à 9 % ou 10 % des
garderies qui ont un tarif de moins de 13,50 $. Et vous avez un taux
d'occupation qui est très élevé également. Je pense
qu'on est conscient de cela. Il y a le tarif qui est peut-être un peu
moindre qu'ailleurs, mais vous parlez aussi de votre milieu très
spécifique, considéré
comme défavorisé, avec un taux de chômage beaucoup
plus élevé. Finalement, tout cela m'amène à dire
que c'est justement le type de garderie avec lequel on devra, à un
moment donné, expérimenter un centre intégrant d'autres
services. C'est le genre de garderie qui fait partie actuellement d'un plan de
redressement, sur lequel on devra s'attarder lors de la planification
régionale.
Est-ce que vous avez déjà pensé, entre autres,
à intégrer d'autres services? Finalement, à part la
question du milieu défavorisé, et je passe peut-être en
avant d'autres questions... Je devrais peut-être commencer par vous
demander quels sont les critères que vous utilisez, par exemple, pour
dire que votre région est une région socio-économiquement
défavorisée? Est-ce à cause du taux de chômage?
Mme Laurendeau (Mireille): Le taux de chômage, la
présence de maternelles quatre ans dans la région, et nos parents
travaillent dans de petites usines de couture, de plastique, des choses de ce
genre, des petites usines très vulnérables. Il y a des fermetures
d'usine pendant l'hiver, alors notre taux fluctue évidemment comme cela.
On n'est jamais certains le mois suivant qu'on n'aura pas quatre ou cinq
parents d'enfants à temps plein qui, tout à coup, vont être
mis au chômage. On accommode aussi des parents qui ont des horaires
variables. Nous sommes au service de nos parents et nous essayons de les
accommoder. Nous avons un hôpital dans notre district, et plusieurs
parents travaillent quatre jours par semaine à l'hôpital et pas
toujours avec la même journée de congé. Alors, ils ont une
place à la garderie. Mais, une semaine, ils viennent le mardi et,
l'autre semaine, c'est une autre journée qui n'est pas prise. Alors,
c'est difficile à ce moment-là de prévoir d'une
façon assurée et régulière, comme il le faudrait,
selon nous, dans votre perspective d'organisation. (18 h 15)
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que vous avez dit que vous prolongiez
les heures d'ouverture pour accomoder les parents?
Mme Laurendeau: Non, nous ne prolongeons pas les heures
d'ouverture. Par contre, nous essayons tout ce qu'on peut Imaginer. On a
même essayé déjà la garde de fin de semaine. Mais on
n'a pas les reins solides. Alors, finalement, on ne peut pas tenir assez
longtemps un projet pour pouvoir le maintenir. Alors, pendant trois mois, on a
fait l'essai de garde de fin de semaine de 18 heures le samedi jusqu'au
dimanche midi. Les enfants dormaient à la garderie. On a engagé
du personnel très consciencieux pour le faire, mais, pendant les trois
mois, il y avait toujours une seule personne de payée, la
deuxième étant une des employées de la garderie. Chacune a
fait sa fin de semaine pour ne pas avoir à payer deux personnes parce
qu'on ne le pouvait pas. Alors, au bout de trois mois, ce service s'est
autofinancé. C'est arrivé kif-kif, comme on dit. On n'a pas pu
continuer parce qu'on ne pouvait pas demander à notre personnel de
refaire encore une fois pendant toute une nuit du tarif
bénévolement.
Mme Gagnon-Tremblay: Finalement, si vous avez dû abandonner
cette expérience, est-ce que c'était du fait que les parents ne
pouvaient pas l'assumer ou si c'était parce que la clientèle
n'était pas suffisante?
Mme Laurendeau: En trois mois, évidemment, on ne peut pas
dire que la clientèle a été soutenue. Elle a
été très très forte les premières fins de
semaine, aux sucres, à la Saint-Valentin, dans des moments très
précieux comme ça. On a déjà eu 35 enfants une
nuit, et on était cinq employés en poste cette nuit-là.
Par la suite, lors de fins de semaine plus tranquilles, où il n'y avait
pas d'activités sociales plus grandes dans la région, bon... Cela
doit faire partie des régions économiquement faibles où
les parents ne sortent pas beaucoup la fin de semaine, ils ne s'accordent pas
beaucoup de loisirs. Alors, on n'avait pas beaucoup d'enfants durant certaines
fins de semaine.
Mme Gagnon-Tremblay: Comme vous avez un travail qu'on peut
appeler saisonnier ou bien aussi occasionnel, c'est ce qui cause la majeure
partie des problèmes à votre garderie. Est-ce que vous avez des
listes d'attente?
Mme Laurendeau: Nous avons des listes d'attente pour le service
de pouponnière. On ne peut pas parler vraiment de listes d'attente pour
le reste de notre bâtisse, malgré qu'on soit pas mal toujours
rempli. Comme vous le disiez, on a un bon taux de fréquentation.
Cependant... Qu'est-ce que j'allais dire? J'ai perdu mon Idée. Je
m'excuse. Est-ce que vous avez une autre question? J'ai oublié mon
idée.
Mme Gagnon-Tremblay: Finalement, ce que j'allais vous demander
tout simplement, c'est si vous aviez une liste d'attente. S'il n'y a pas de
liste d'attente, est-ce que 60 places, par exemple, dans votre garderie...
Est-ce que c'est effectivement une garderie de 60 places qu'on aurait dû
développer ou une garderie de moindre importance?
Mme Fortier: Vous avez des chiffres dans notre tableau qui
démontrent que pendant plusieurs mois, on atteint notre capacité
de 60 enfants, mais ce sont des périodes estivales. Actuellement, nous
traversons une période où il y a une baisse de
fréquentation qui est due à la saison, je pense, ou au fait qu'il
y a des parents qui n'ont pas de travail en ce moment. Alors, je pense que oui,
on a la fréquentation qui motive notre capacité, sauf à
certaines périodes où c'est
plus difficile de la maintenir.
Mme Gagnon-Tremblay: Je trouve très intéressant le
sondage que vous avez fait auprès des parents de votre garderie. Cela
nous donne quand même une bonne idée. Cela nous indique quand
même des faits intéressants. Je trouve ça bien. Vous
êtes à peu près une des seules garderies, à ma
connaissance, qui ait fait cette vérification auprès de chacun
des parents. Je trouve ça très intéressant. Je vous
félicite pour ça.
Je reviens à une autre question. Tout à l'heure, j'ai
abordé rapidement le fait qu'on pourrait peut-être envisager
d'intégrer d'autres services. Est-ce que c'est quelque chose qui
pourrait aider au genre de garde auquel vous devez répondre, par
exemple, à cause de la garde occasionnelle, saisonnière et tout
ça? Est-ce que c'est quelque chose qui pourrait être
intéressant pour votre garderie?
Mme Fortier: Je vous dirai qu'actuellement, il y a un projet qui
a été soumis par le CLSC de notre localité, mais qui
n'affecte pas la ville même de Louiseville. Il vise plutôt les
petites municipalités environnantes. J'ai justement été en
contact avec le promoteur du CLSC qui m'en a parié pour savoir si la
garderie est intéressée à s'impliquer dans ce projet
d'agence de garde en milieu familial. Certainement qu'on va suivre cela de
très près pour voir la pertinence de s'impliquer. C'est bien
sûr que c'est probablement préférable qu'on suive le
dossier de près plutôt que de créer des situations
où cela nous mettrait plutôt en péril. Donc, oui, on s'y
intéresse mais ce qui est aussi très important, c'est qu'on doit
avant tout voir aussi à notre fonctionnement de garderie qui doit
composer avec la réalité de notre région.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que vous avez souvent des demandes
additionnelles pour, par exemple, de la garde comme halte-garderie? Est-ce que
c'est une demande qu'on vous fait de temps en temps ou bien si c'est
très rare qu'on vous demande si vous pouvez offrir ce service?
Mme Fortier: Oui, on nous appelle. On a une clientèle
assez variée. Par exemple, on a des enfants de un à cinq jours
par semaine. Il y a une demande pour des avant-midi, mais je vous dirai
qu'actuellement, on a majoritairement des enfants qui viennent des jours
pleins. C'est l'exception pour des demi-journées.
Une chose que je voudrais spécifier, peut-être que cela n'a
pas été évident. Ce qui peut nous donner le plus de
difficulté, c'est la garde au noir. C'est-à-dire qu'il y a
beaucoup de personnes qui vont garder à la maison, dans des conditions
qu'on ne connaît pas, et il y en a beaucoup aussi, d'où la
difficulté de hausser nos tarifs, qui nous appellent pour savoir quel
tarif nous demandons et qui vont fixer leur tarif en conséquence.
Pourquoi un parent irait-il à la garde au noir? En
général, on nous répond que c'est parce que le tarif est
un petit peu plus avantageux; peut-être aussi pour la proximité,
c'est plus proche de leur milieu familial. C'est donc ce avec quoi on doit
fonctionner.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Madame.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Je vous remercie, M. le Président. Je veux vous
souhaiter la bienvenue, mesdames. Il me semble que c'est un geste important que
vous avez posé en venant devant la commission parlementaire nous parier
de votre réalité. Je pense que vous soulevez dans votre
mémoire toute la question du mode de calcul, le nouveau mode de
financement. D'une certaine façon, vous avez raison de le faire parce
que, comme le dit l'adage: Pourquoi réparer ce qui n'est pas
brisé? Et personne ne considérait que c'était le mode
passé ou actuel qui était à réparer, mais qu'il
fallait plutôt l'améliorer en le finançant plus
adéquatement.
Au fil des semaines - vous savez qu'on a repris aujourd'hui les travaux
d'une commission qui se déroule depuis maintenant trois semaines - j'ai
comme l'impression qu'il y a eu un détournement de l'attention de
l'opinion publique et de l'opinion du milieu des garderies, parce qu'en mettant
le nouveau mode de calcul de l'avant, cela a comme fait oublier la
réalité que, dans le fond, le problème aussi, c'est qu'H
n'y a pas d'argent de plus. Si on regarde le maximum qu'il y aura, c'est la
consolidation et c'est 357 $ par place. C'est cela la consolidation. Comme moi,
vous avez dû entendre la ministre quand elle a conclu avec le groupe
précédent. Je l'ai pris en note d'ailleurs, elle a dit: Si on
avait indexé auparavant, jamais le rattrapage n'aurait été
aussi important. Il n'y a pas de rattrapage. Il n'y en a pas. C'est tellement
incroyable qu'avec un plan, il va y avoir juste 7 % de plus par année de
contribution pour les trois prochaines années, alors que, sans plan, il
y a eu des années jusqu'à des moyennes de 17 %. Je ne sais pas si
vous voulez... C'est Mme Laurendeau, je crois?
Mme Laurendeau: Oui. Nous avions une recommandation en ce sens.
Nous voulons que soit maintenu le système actuel de financement mais
amélioré, c'est-à-dire incluant un ajustement et une
indexation annuelle obligatoire des subventions de fonctionnement. Les
subventions actuelles nous paraissent beaucoup plus justes que le mode que vous
proposez, madame. Parce que nous sommes une garderie pauvre, nous obtiendrons
moins de subventions que d'autres garderies qui déjà se
débrouillaient mieux que nous. Ensuite, si on prend le perfectionnement,
encore là c'est la masse salariale. Notre masse
salariale est évidemment moindre que les garderies bien
avantagées. Alors, nous aurons moins d'argent à mettre sur le
perfectionnement. Nous sommes assez bien formés à la garderie,
mais nous sommes conscientes que c'est un domaine où il faut se
ressourcer constamment. On fait du ressourcement, mais ii faut toujours trouver
quelqu'un qui va venir en faire gratuitement. On a payé pour la
première fois une personneressource, il n'y a pas tellement longtemps.
Elle nous demandait 500 $ pour une journée de ressourcement. Nous
autres, on ne gagne même pas cela par deux semaines. Alors, ces
choses-là sont difficiles à avaler, et votre document va
entraîner cela encore plus que jamais. On le sent comme étant
très injuste pour nous. Si vous saviez, à quel point cela nous
fait mai!
Mme Harel: Tantôt Mme la ministre a dit, en
commençant la discussion avec vous, que votre situation est saine. Cela
m'a fait penser à un chiffre qu'elle n'a pas donné, mais que vous
avez énoncé: 7,57 $ l'heure. C'est cela? Alors, finalement, je me
suis dit: La situation est saine dans le fond parce que les éducatrices
portent sur leurs épaules le poids de la situation. Évidemment,
à 7,57 $, vous arrivez à boucler parce qu'l y a un taux
horaire que personne n'accepterait. Est-ce qu'il y a beaucoup d'hommes qui sont
éducateurs dans votre garderie?
Mme Laurendeau: II n'y en a aucun. Mme Harel: II n'y en a
aucun.
Mme Laurendeau: Nous avons aussi les campagnes de financement que
nous avons dû faire. Nous devons vous avouer que nous espérions
avoir fait la dernière, la dernière fois. C'est de plus en plus
difficile pour nous d'avoir à les refaire. Les employés sont
toujours les mômes. Les parents changent, mais les employés - on a
un personnel assez stable -sont les mêmes. Certains sont rendus à
leur cinquième ou sixième campagne de financement. Ce ne sont
jamais des choses faciles à faire.
Mme Harel: Je ne sais pas si vous avez un commentaire, Mme
Grandmont? Vous aviez levé la main.
Mme Grandmont: Cela va.
Mme Harel: Pourquoi l'office - je n'ai pas compris - retarde ou
refuse de vous accorder les sept nouvelles places subventionnées? Quels
motifs invoquent-ils?
Mme Fortier: Je pense que cela est dû probablement à
la préparation de cette nouvelle politique. Par contre, cela nous a fait
mal de ne pas avoir ces fonds. Alors, c'est pour cela qu'on espère quand
même que la situation va être réajustée, comme on
nous l'a laissé espérer.
Mme Harel: Quand vous a-t-on dit que vous auriez une
réponse?
Mme Fortier: Bien ces temps-ci.
Mme Harel: En tout cas, j'aimerais beaucoup qu'après
Pâques - c'est dans un mois et demi; vous savez, on recommence la session
aux alentours du 10 avril? - d'ici là, si vous n'aviez pas eu de
nouvelles, que vous m'en parliez.
Mme Fortier: D'accord.
Mme Harel: II n'y pas de bonne raison pour que ces sept places de
plus ne vous soient pas accordées, si j'ai bien compris? C'est cela, il
n'y a pas de motifs qui ont été invoqués pour ne pas les
accorder?
Mme Fortier: En fait, cela a été assez vague.
Mme Laurendeau: Est-ce que je peux ajouter quelque chose? Ce
n'est pas sur ce sujet-là, par exemple. Je voudrais parler des rapports
entre les parents et les éducatrices. Nos rapports avec nos parents sont
très bons. Nous sommes trois-trois aujourd'hui. On est toujours pas mal
amies avec nos parents. On les informe de tout. On a un bulletin d'information
qui est publié. Ils font partie des comités. On organise
conjointement avec eux une série d'activités sociales, pour le
plus grand bien de l'enfant. Il y a des sorties - Noel, Halloween, la cabane
à sucre. Les enfants aiment savoir que les parents participent. Ils sont
fiers de cela et ils se sentent, eux, bien importants quand leur parent est
dans un comité, alors que la mère de l'autre n'a pas de
réunion.
Mme Harel: Mme Laurendeau? Mme Laurendeau: Oui.
Mme Harel: J'aurais une question à poser à Mme
Beaulieu. Je ne sais pas si vous aviez quelque chose à ajouter parce
qu'il va me rester deux minutes et demie, et le président...
Mme Laurendeau: II m'en reste un petit bout.
Mme Harel: ...va faire son travail. Je ne pourrai pas lui en
vouloir et il va me dire d'arrêter.
Mme Laurendeau: C'était sur cela. Je me demandais si cette
belle collaboration pourra continuer d'exister, car, chaque fois qu'on veut
avoir des augmentations ou des améliorations de notre sort, il faut que
les parents acceptent d'augmenter suffisamment le tarif. Alors, est-ce qu'on ne
va pas se regarder en chiens de faïence à un moment donné
plutôt que de collaborer ensemble comme on le fait? Cela va pour moi.
Mme Harel: Je vous remercie, Mme Lauren-deau. C'est un
commentaire judicieux. Mme Beaulieu, vous nous avez dit que vous aviez trois
enfants et que cela vous coûte 185 $. C'est bien vous?
Mme Beaulieu: Cela nous coûterait 185 $ par semaine.
Mme Harel: Oui. Cela vous coûte combien?
Mme Beaulieu: Maintenant, je paie seulement 37 $ par jour, parce
que je ne travaille pas.
Mme Harel: Par jour.
Mme Beaulieu: Par jour, parce que je les envoie seulement une
journée par semaine. La raison, c'est pour me donner un répit
parce que je suis à la maison.
Mme Harel: Bon, bon, bon. Excusez-moi, mais vous êtes notre
première mère d'enfants d'âge préscolaire à
la maison. (18 il 30)
Mme Beaulieu: Ah bon!
Mme Harel: Je vous accueille avec plaisir. Dites-nous pourquoi
vous utilisez le service de garde?
Mme Beaulieu: Comme je vous le disais au début, j'ai
utilisé d'autres services de garde. Les raisons qui nous ont
amenés à choisir la garderie sont, premièrement, son
personnel qualifié et son encadrement adapté pour les enfants.
Cela permet aussi à nos jeunes de se socialiser et de créer
d'autres liens parce que, comme je vous le disais, dans notre voisinage, les
jeunes sont d'âge scolaire - six ans et plus - donc, quand les enfants
partent le matin, dans mon quartier, je me retrouve toute seule avec mes trois
jeunes. C'est beau trois frères - j'ai trois garçons -mais ils
finissent par se taper sur les nerfs les uns, les autres. Alors, quand ils
peuvent se faire des amis du même âge, cela leur permet de
s'aérer et d'apprendre des choses à leur niveau.
Mme Harel: Un tout dernier commentaire - je dis ça pour le
président - dans vos tableaux, dans votre sondage, vous avez
demandé aux parents s'ils désiraient avoir d'autres enfants ou
non. C'est une des questions qui suit le 2.2.1 des tableaux. Parmi ceux qui
disent oui, je lis ce commentaire: Oui, mais quand le premier enfant sera
à l'école, pour payer les frais de garde d'un seul enfant a la
fois. Entre parenthèses, il est écrit: D'ici ce temps,
peut-être que le désir d'un second enfant sera moins grand.
J'imagine que c'est vous qui avez rédigé et qui avez mis ce
commentaire.
Mme Beaulieu: Ah non!
Mme Harel: Peut-être pas vous, Mme Beaulieu, mais quelqu'un
de la garderie.
Mme Fortier: Non, c'est le parent qui l'avait
mentionné.
Mme Harel: Ahl C'est lui qui l'a mentionné. Alors le
parent dit: Oui, j'ai le goût d'en avoir un autre, mais je ne peux pas
payer deux gardes en même temps; donc je vais attendre, mais j'en aurai
peut-être moins le goût. Mme Thé-berge.
Mme Théberge (Sylvie): Je suis peut-être l'exemple,
en ce sens que j'ai dû attendre quatre ans avant d'en avoir un autre,
parce que c'était financièrement impossible, à cause,
entre autres, des frais de garde, parce qu'avec un maigre 25 000 $ par
année, étant âgés de moins de 30 ans, on a des
prêts et bourses, deux autos pour être mobiles, des salaires qui ne
sont pas immobiles en ce sens qu'ils ne sont jamais stables...
Mme Harel: C'était le salaire des deux, 25 000 $?
Mme Théberge: Oui, madame.
Mme Harel: Et vous avez à vous déplacer. Est-ce
qu'il y a du transport public ou si c'est très compliqué?
Mme Théberge: Non, cela prend deux autos, donc, deux
paiements, deux prêts-études; cela prend de la mobilité.
Nous avons tous les deux un travail à statut précaire et, avec un
maigre 25 000 $, nous nous retrouvons quand même avec un enfant pour
lequel nous devons payer 13 $ par jour. Avec la nouvelle échelle
d'exonération financière - j'ai effectué le calcul - cela
me donnera malheureusement 0,35 $ par jour pour ma fille de quatre ans.
Même pour nous, les parents, la nouvelle échelle
d'exonération financière n'est pas satisfaisante.
Mme Beaulieu: Est-ce que je peux me permettre un dernier
commentaire?
Le Président (M. Bélanger): Vraiment un dernier,
puisque notre temps est écoulé.
Mme Beaulieu: Avec mes trois enfants d'âge
préscolaire, ce qui fait que j'ai été capable d'envoyer
les trois à la garderie une journée par semaine, d'abord pour
répondre à leurs besoins et aussi aux miens, c'est que je
bénéficiais de l'assurance-chômage. Et mon
accessibilité vient de finir. C'était un luxe.
Le Président (M. Bélanger): Alors, on vous
remercie. Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Vous savez, c'est étonnant
comme parfois la connaissance qu'on a de la réalité vient
vraiment des organisations ou des groupes très proches, comme vous
l'êtes dans votre composition. Je vous remercie beaucoup pour votre
contribution.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Je voudrais
seulement revenir sur la question de vos places au permis pour vous rassurer.
En somme, ce n'est pas quelque chose de nouveau. Vous savez très bien,
si ma mémoire est bonne, que, depuis que la réglementation
existe, on ne subventionne pas toujours toutes les places au permis. Ce n'est
pas d'aujourd'hui. Justement, notre nouvelle formule de financement, comme elle
n'est plus maintenant à la place au permis, permettra finalement de
subventionner les revenus; donc, on n'aura plus à tenir compte de ces
places qui ne sont pas subventionnées actuellement. Dans un certain
sens, la formule actuelle ne vous avantage peut-être pas, parce que votre
garderie fait partie des garderies sur lesquelles nous devrons nous pencher et
pour lesquelles nous devrons penser peut-être à un pian de
redressement ou travailler avec vous, mais je pense que, pour ce qui est de vos
places au permis, concernant l'occupation comme telle, à ce
moment-là, cela sera réglé. Par contre, je comprends que
vous ayez des difficultés reconnues et pour lesquelles on devra
travailler avec vous.
Mme Laurendeau: Madame, elles seront plus grandes que
présentement avec le mode que vous proposez. C'est ce qu'on est venu
vous dire.
Mme Gagnon-Tremblay: Seriez-vous d'accord avec une formule mixte,
en terminant?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Sur ce, la commission
des affaires sociales remercie les représentantes de la garderie
Gribouillis inc. et ajourne ses travaux à demain, 1er mars, à 10
heures, en cette même salle. Alors, je vous remercie. Bonsoir et bon
retour, mesdames.
(Fin de la séance à 18 h 36)