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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, October 16, 1996 - Vol. 35 N° 40

Consultation générale sur le document intitulé «Pour vous et vos enfants : garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec»


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Table des matières

Auditions


Intervenants
M. Michel Létourneau, président
Mme Louise Harel
M. Henri-François Gautrin
M. Russell Copeman
*M. Pierre Girardin, Towers, Perrin
*M. Jacques Lafrance, idem
*Mme Gisèle Bérubé, Coalition des aînées et aînés du Québec
*M. Jean-Marie St-Jacques, idem
*Mme Denyse Lacelle, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Dix heures dix-sept minutes)

Le Président (M. Létourneau): Alors, mesdames et messieurs, nous allons commencer nos travaux. Je vous rappelle le mandat de la commission. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur le document de consultation sur la réforme du Régime de rentes du Québec intitulé «Pour vous et vos enfants: garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec».

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Deslières (Salaberry-Soulanges) sera remplacé par M. Campeau (Crémazie); Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne) par M. Gautrin (Verdun). Voilà.

Le Président (M. Létourneau): Merci. L'ordre du jour ce matin. Nous allons entendre deux groupes. Premièrement, les gens de Towers, Perrin, suivis de la Coalition des aînées et aînés du Québec. Alors, je vous rappelle le temps prévu. Vous avez 20 minutes, et après, chacun des deux partis va disposer aussi de 20 minutes pour les échanges. Alors, je vous invite à présenter qui va faire la présentation, à vous présenter et à débuter les travaux, et en s'excusant aussi pour le petit contretemps de tantôt.


Auditions


Towers, Perrin

M. Girardin (Pierre): Parfait. Alors, je suis Pierre Girardin. Je suis un actuaire et associé de la firme Towers, Perrin. Je suis accompagné de Jacques Lafrance, un conseiller de notre bureau.

Alors, au nom de Towers, Perrin, j'aimerais remercier la commission parlementaire des affaires sociales de nous permettre de présenter notre mémoire. On va porter principalement nos commentaires sur la section du document de consultation qui a pour objet la réforme du Régime de rentes du Québec. On ne fera pas de commentaires sur les commentaires du livre vert sur la prestation aux aînés.

Le premier constat qu'on veut faire pour ce qui est de l'avenir du Régime de rentes du Québec, c'est qu'il y a une crise de confiance qui est très évidente, là, dans la population. On peut affirmer cet état de crise grâce aussi à un sondage que Towers, Perrin a fait et au cours duquel seulement 29 % des répondants de 18 à 29 ans croient qu'ils toucheront des prestations du Régime de rentes du Québec ou du Régime de pensions du Canada. C'est un sondage fait à la grandeur du Canada. Et ce pourcentage de 29 % n'augmente qu'à 47 % pour les personnes âgées de 50 à 64 ans. Ça fait que, de toute évidence, la confiance en l'avenir du Régime de rentes du Québec et du Régime de pensions du Canada est sérieusement minée, et nous croyons que cette confiance continue de faiblir.

En un sens, ce manque de confiance facilite la tâche du gouvernement parce que toute décision relative au Régime de rentes du Québec ou au Régime de pensions du Canada est préférable à l'inaction. Si on décide d'éliminer le Régime de rentes du Québec, au moins les gens sauront à quoi s'en tenir, et il sera possible pour eux de planifier en conséquence. Si on décide de le maintenir, on doit l'encadrer de façon à convaincre les Québécois qu'il continuera à exister de façon permanente. Sous quelle forme doit-il être maintenu? Quelles devraient être les prestations et les cotisations? Comment le financement doit-il être géré? On ne peut et on ne doit pas prendre ces décisions sans tenir compte de leur incidence sur chacun des autres volets privés de notre système de retraite, soit les régimes complémentaires de retraite, les régimes d'entreprise, les REER et les autres formes d'épargne personnelle. Nous sommes d'avis que seul un examen de tous ces éléments peut nous permettre d'atteindre le véritable objectif, soit donner aux Québécois le moyen de s'assurer une retraite digne et sûre.

(10 h 20)

Notre système d'épargne-retraite comporte trois volets importants ayant chacun un rôle et une fonction spécifiques. Le volet privé forme le coeur du système pour les travailleurs à revenus moyens et élevés, et cela devrait continuer ainsi. Les régimes de retraite établis par l'employeur et les REER devraient faire partie de la planification en vue de la retraite de tous les Québécois ordinaires. Est-ce qu'on doit rappeler qu'actuellement une personne qui reçoit la pension de sécurité de la vieillesse et la rente maximale du Régime de rentes du Québec a droit aussi au supplément de revenu garanti? On considère donc cette personne comme pauvre; elle aurait dû épargner en vue de la retraite. Donc, la sécurité de la vieillesse, qui deviendra bientôt la prestation aux aînés, offre un filet de sécurité pour ceux qui sont incapables d'économiser en vue de leur retraite. Le Régime de rentes du Québec, quant à lui, c'est la principale source de revenus de retraite des personnes qui travaillent mais qui ne gagnent pas plus que le salaire moyen.

À notre avis, un régime contributif et obligatoire de retraite, pour la population active du Québec, constitue toujours une source essentielle de revenus de retraite. De plus, le Régime de rentes du Québec représente le programme à privilégier, puisqu'il permet d'atteindre plusieurs objectifs: il représente un contrat social entre le gouvernement et la population, il s'agit d'un engagement qui a déjà été pris et qui doit être honoré; notre système de retraite doit comprendre une certaine part de rentes obligatoires, rôle que remplit actuellement le Régime de rentes du Québec; finalement, l'élimination du Régime de rentes du Québec en ce moment bouleverserait grandement le système de retraite, puisque de nombreux régimes de retraite privés sont coordonnés avec lui. Ce programme, le Régime de rentes du Québec, étant solidement en place, les Québécois pourront, à ce moment-là, concevoir en toute confiance leurs autres régimes de retraite. En résumé, le Régime de rentes du Québec doit faire partie de la garantie sur laquelle les Québécois peuvent fonder leur retraite.

Le document de consultation fait aussi état de certains principes pour appuyer ces propositions. Le premier, c'est l'équité entre les générations. Alors, selon la plus récente évaluation actuarielle du Régime de rentes, le taux de cotisation devrait être éventuellement porté à 13 % pour maintenir les prestations à leur niveau actuel et si l'on veut adopter une longue séquence d'augmentations graduelles des cotisations. Pour les générations à venir de travailleurs ainsi que pour leurs employeurs, la cotisation de 13 % s'ajouterait au coût du système de santé et au coût des mesures d'assistance aux retraités qui serait beaucoup plus élevé qu'aujourd'hui, compte tenu du vieillissement de la population. Le montant cumulatif de ces charges sociales serait néfaste pour l'avenir économique du Québec. Il pourrait aussi remettre en question la viabilité même du Régime de rentes du Québec si les générations futures de contribuables décident qu'un jour les cotisations à 13 %, trop, c'est trop.

Le gouvernement vise donc à réduire les déséquilibres entre les générations dans le financement du Régime de rentes du Québec. L'équité, selon la définition qu'en donne le gouvernement dans ses propositions, exigerait que le relèvement des cotisations se fasse sur une période relativement courte et les porte à un niveau qui peut être maintenu constant sur une très longue période. Nous sommes d'accord avec ce principe.

Un autre principe est celui de la solidarité sociale qui exige que tous les retraités bénéficient d'un minimum d'assistance, surtout dans le cas de ceux dont les revenus insuffisants ne leur ont pas permis d'épargner. Cette aide minimale devrait être procurée au moyen des mesures d'assistance de l'État. Comme l'indique le document de consultation, cette solidarité exige que les retraités actuels ne soient pas pénalisés. Cependant, la solidarité n'est pas une voie à sens unique. Par exemple, peut-on justifier de maintenir l'indexation des rentes au niveau actuel si les augmentations nettes de salaires accordées aux travailleurs se révèlent en moyenne inférieures à l'inflation? Aux fins de cette question, nous définissons l'augmentation nette de salaire comme l'augmentation du salaire, moins l'augmentation du taux de cotisation au Régime de rentes du Québec. Pourquoi enrichir, en quelque sorte, de façon plus importante les retraités que les travailleurs?

Nous sommes d'accord également avec les deux principes suivants énoncés dans le document de consultation, soit que la sécurité du revenu à la retraite est une responsabilité partagée entre les travailleurs, les employeurs et l'État, et, deuxièmement, que l'État doit mettre en place les mécanismes, les systèmes ou les cadres législatifs et réglementaires qui soutiendront le travailleur dans sa responsabilité d'épargner au moyen des régimes complémentaires de retraite et des régimes enregistrés d'épargne-retraite.

Nous devons reconnaître l'inévitable: le système de retraite privé supportera un fardeau plus lourd à l'avenir. Aujourd'hui, nos gouvernements peuvent faire deux choses très importantes pour soutenir ce système: premièrement, éliminer les barrières et, deuxièmement, informer le public. Dans les deux cas, cela n'a rien à voir avec une théorie oiseuse; il s'agit d'actions pouvant être réalisées aujourd'hui et qui doivent l'être au nom d'un meilleur avenir.

La première tâche consiste à éliminer les obstacles à l'épargne-retraite. Compte tenu du fait que les gouvernements ont tout intérêt à permettre une épargne-retraite suffisante, il n'y a aucune raison valable pour que la politique gouvernementale se révèle un des principaux facteurs lui faisant obstacle. Trop souvent, les gouvernements sont eux-mêmes leurs pires ennemis en ce qui concerne l'épargne-retraite, à cause de leur manque de coordination et de vision à cet égard.

Le gouvernement du Québec devrait inciter le gouvernement fédéral à cesser de miner la fiscalité des régimes de retraite et des REER. Il ne devrait pas hésiter à permettre aux contribuables à revenus moyens et élevés d'économiser grâce à ces programmes. Il devrait plutôt encourager ce genre d'épargne. L'épargne fournit des capitaux de placement, représente une source de recettes fiscales pour l'avenir et allège le fardeau du système de retraite public.

La loi de l'impôt sur le revenu elle-même, avec ses complexités et ses détours monstrueux, dissuade les employeurs de maintenir ou d'établir des régimes de retraite, surtout lorsqu'on considère les difficultés et les coûts de l'administration des régimes qu'engendre l'ensemble de normes applicables aux régimes de retraite qui découlent tant des lois fédérales que des lois provinciales. Cela décourage réellement les promoteurs de régimes et va à l'encontre de l'intérêt du gouvernement et de la population.

Le gouvernement du Québec devrait adopter, de concert avec le gouvernement fédéral et les autres gouvernements provinciaux, des lois sur les normes applicables aux régimes de retraite qui soient uniformes et simples pour les régimes de retraite parrainés par l'employeur. Présentement, ces normes sont différentes pour chacune des provinces. On ne cesse de se plaindre du fait que les régimes de retraite privés n'offrent pas une protection suffisante. L'une des raisons est que les lois régissant les régimes de retraite au Canada ressemblent à une mosaïque et obligent les promoteurs des régimes à affecter à l'administration une partie disproportionnée des sommes qu'ils allouent à l'épargne-retraite. Des lois simplifiées permettraient de vraiment consacrer ces sommes aux prestations de retraite et de lever un obstacle à l'établissement d'un nouveau régime de retraite. Le gouvernement du Québec devrait assumer un leadership quant à la mise en place d'une législation simple et uniforme en matière de retraite.

En second lieu, le gouvernement doit prendre des mesures importantes pour informer la population de la nécessité de l'épargne-retraite, compte tenu du présent système à trois étages que l'on a. On l'a dit tantôt, si les gens se fient uniquement à la prestation aux aînés, au revenu du Régime de rentes du Québec, c'est insuffisant pour avoir un bon revenu à la retraite. Si les Québécois sont appelés à assumer davantage de responsabilités quant à leur retraite, on doit les inciter à acquérir les connaissances et la compréhension nécessaires pour que cela engendre des résultats positifs. On peut et on doit y arriver par l'information, et ça sera la même chose avec la réforme du Régime de rentes du Québec. Lorsque vous avez vos discussions, je suis certain que vous êtes en mesure de comprendre que la population ne comprend pas le régime actuel et son mode de fonctionnement.

Je vais maintenant passer la parole à Jacques pour la suite.

M. Lafrance (Jacques): Je vais maintenant discuter des mesures envisagées dans le document de consultation concernant le Régime de rentes du Québec.

(10 h 30)

D'abord, l'accroissement des cotisations et le niveau approprié de la réserve. Nous ne préconisons pas un provisionnement substantiel à l'avance des prestations du Régime de rentes du Québec. Il faut toutefois reconnaître l'inévitable: les changements démographiques font en sorte que les taux de cotisation devront augmenter. Alors, nous, ce que nous recommandons, c'est que les cotisations ne soient rehaussées qu'au niveau nécessaire pour continuer à alimenter un petit fonds de stabilisation, donc une petite réserve. On pourrait songer à augmenter ce fonds à trois ou quatre fois les sorties de fonds annuelles, afin d'amoindrir les déséquilibres entre les générations. Dans ce cas-là, il devrait être entendu clairement qu'il s'agit d'une mesure temporaire. La marge devrait ensuite être réduite au cours des années, selon l'évolution démographique.

Aucune augmentation des cotisations ne devrait cependant entraîner d'effets perturbateurs importants sur l'économie. L'échelonnement des augmentations doit être donc déterminé en consultation avec les employeurs et les experts en matière d'économie. Vu l'incertitude liée aux projections à long terme que les actuaires font, nous recommandons qu'à intervalles réguliers, par exemple cinq ans, le gouvernement passe en revue le niveau des cotisations pour vérifier que l'équilibre est maintenu entre les réalités économiques, d'une part, et l'équité entre les générations, d'autre part.

Une des premières mesures envisagées dans le document de consultation, c'est de geler l'exemption générale. Alors, l'exemption générale, c'est la portion des gains sur laquelle on ne cotise pas. Nous, d'après nous, c'est une idée qui se défend parce que ça permet d'accroître de façon graduelle les sommes disponibles pour servir les prestations. Toutefois, il ne faut pas se méprendre sur la nature ou la principale répercussion de cette mesure: c'est une augmentation des cotisations versées à la caisse du Régime de rentes du Québec. Pour la majorité des travailleurs, ça va signifier peu ou pas du tout d'augmentation des prestations.

Une autre mesure envisagée dans le livre vert, c'est de réduire proportionnellement l'exemption générale. Ça, ça fait en sorte que tout le monde va cotiser plus. Alors, brièvement, l'exemption serait graduellement réduite à mesure que les gains dépassent le seuil de l'exemption pour devenir nulle si les gains atteignent le plafond des gains soumis en cotisation. Donc, ceux qui atteignent le maximum des gains admissibles cotiseraient sur le plein maximum des gains admissibles.

Si c'était mis en vigueur immédiatement en 1997, par exemple, un tel changement occasionnerait une augmentation de la cotisation de tous les travailleurs et employeurs d'environ 11 %. Autrement dit, le taux de cotisation passerait d'environ 6 % à 6,7 %. Ça aurait exactement le même effet. Donc, l'application immédiate et intégrale de cette mesure entraînerait une hausse rapide des cotisations. C'est pourquoi nous estimons qu'en plus d'être répartie sur quelques années l'application de cette mesure devrait être soit intégrée à une séquence de hausses graduelles du taux de cotisation, soit reportée lorsque le taux à long terme sera atteint.

Une autre mesure envisagée, c'est de faire cotiser les bénéficiaires d'une rente qui travaillent. Cette proposition semble attirante pour certaines raisons. Cependant, nous estimons que ce changement devrait être évalué à la lumière des autres démarches permettant d'offrir aux travailleurs plus de souplesse dans la retraite, surtout dans le cadre d'une retraite graduelle. On sait, par exemple, qu'il y a eu un comité mis sur pied, employeurs et syndicats, là-dessus. Nous encourageons le gouvernement à envisager de telles mesures. Un nombre croissant de Québécois conçoivent leur retraite comme une réduction graduelle de leurs heures de travail plutôt qu'une fin abrupte de leur carrière active.

Maintenant, en ce qui a trait au réaménagement des prestations, les commentaires qu'on voulait faire d'abord, c'est que, nous, on croit que le Régime de rentes du Québec devrait d'abord être axé sur les rentes de retraite pour les cotisants et les prestations de survivant pour leurs personnes à charge. Notamment, au niveau des prestations de retraite, nous ne sommes pas en faveur de la réduction des prestations de retraite ni du relèvement de l'âge de l'admissibilité aux prestations, en ce moment. Le coût des prestations de retraite du Régime de rentes du Québec doit être évalué à la lumière de nos priorités comme société. Cependant, dans un esprit d'équité envers les générations actuelles et à venir de travailleurs qui devront assumer des augmentations importantes de cotisation, il faudra envisager de restreindre l'indexation des rentes en paiement, par exemple, comme mon collègue le mentionnait tantôt, en plafonnant celle-ci selon la moyenne de l'augmentation nette des salaires. Une explication claire de cette mesure devrait faciliter son acceptation parmi les retraités actuels.

Après avoir pris l'engagement de maintenir le Régime de rentes du Québec, nous recommandons qu'à intervalles réguliers, par exemple encore cinq ans, le gouvernement passe en revue les prestations du programme ainsi que les taux de cotisation, afin que l'on puisse parvenir à un équilibre approprié entre les priorités sociales et les réalités économiques. Plus particulièrement, si l'on constate que le coût relatif des prestations du programme est trop élevé, le gouvernement pourra envisager une diminution de la protection contre l'inflation applicable aux prestations de retraite. Une solution de rechange moins intéressante consisterait à abaisser le niveau des prestations de retraite en diminuant directement les prestations ou en repoussant l'âge de l'admissibilité à la pleine rente au-delà de 65 ans. Quoi qu'il en soit, une modification importante des prestations doit comprendre une période de transition suffisante pour permettre la planification individuelle.

En ce qui a trait aux prestations de décès, nous prenons comme position qu'on devrait éliminer toute prestation de décès en versement unique. Une protection minimale d'assurance-vie, pour ceux dans le besoin, devrait plutôt relever d'un programme d'assistance que du Régime de rentes du Québec. Cependant, les prestations de survivant pendant la retraite devraient être maintenues. Quant aux prestations de survivant avant la retraite, elles devraient être réexaminées en tenant compte de l'évolution contemporaine des styles de vie.

En ce qui a trait aux prestations d'invalidité, nous croyons qu'elles devraient être retirées du Régime de rentes du Québec et remplacées par un programme versant des prestations aux personnes invalides. S'il est nécessaire d'administrer les prestations de retraite et d'invalidité ensemble, à tout le moins, les coûts et les taux de cotisation de chacun devraient être comptabilisés et présentés séparément afin de tenir compte de leur différence de nature. Il faudra envisager de modifier les dispositions relatives au calcul des prestations de retraite payables à compter de 65 ans à des participants invalides; il y a présentement des anomalies. En outre, le calcul doit tenir compte du fait que de nombreux travailleurs québécois commencent à recevoir leur rente de retraite avant d'avoir atteint l'âge de 65 ans.

En résumé, nous sommes d'avis que nous avons déjà en place les fondements de l'un des meilleurs systèmes de retraite au monde. Nous devrions nous efforcer de l'améliorer et non pas de le mettre en pièces. Le Régime de rentes du Québec représente une partie importante de l'ensemble du système de retraite qu'on a présentement. Le gouvernement doit déployer des efforts permanents afin de garantir qu'il puisse fournir, conjointement avec les REER et les régimes établis par l'employeur, les prestations promises à nos retraités, de la manière la plus efficace possible.

Finalement, nous encourageons le gouvernement du Québec à harmoniser tout changement apporté au Régime de rentes du Québec avec ceux pouvant être effectués au Régime de pensions du Canada, alors sa contrepartie dans les autres provinces. Pareille harmonisation est importante pour un grand nombre d'entreprises qui exercent leurs activités partout au Canada et afin de maintenir la compétitivité des employeurs québécois. Elle est également importante pour les travailleurs qui doivent poursuivre une partie de leur carrière dans une autre province. Merci beaucoup.

Le Président (M. Létourneau): Alors, MM. Girardin et Lafrance, je vous remercie. J'inviterais Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité à commencer les échanges.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Bienvenue, M. Girardin, vous-même, M. Lafrance. Je comprends que vous cumulez à deux une importante expertise en la matière. J'ai appris, M. Girardin, que vous aviez d'ailleurs fait un passage remarqué à la Régie des rentes, il y a quelques années de ça, je pense que ça fait une décennie...

M. Girardin (Pierre): Environ.

Mme Harel: C'était dans les années quatre-vingt? Est-ce que l'un des deux, de vous, est actuaire?

M. Girardin (Pierre): Les deux, malheureusement.

Mme Harel: Les deux. Ha, ha, ha! Bon. Alors, vous allez tout de suite m'expliquer comment vous justifiez la recommandation que vous faites d'un fonds de réserve qui soit moindre que celui qui est proposé dans le livre vert. Vous savez, dans le livre vert, en fait, la proposition, c'est six fois, six fois pendant que la génération du baby-boom arrive à la retraite, et puis après on revient à quatre fois. Vous, vous dites: Un petit fonds de stabilisation, hein, je pense, le mot «petit» qualifie ce que vous envisagez, et dans votre mémoire vous dites: Un fonds de réserve à trois ou quatre fois, je pense, les sorties de fonds annuelles, de façon temporaire. Ça veut dire que vous anticipez qu'après cela il faudrait revenir à moins que trois ou quatre fois. Donc, parlez-nous donc de ça un peu.

M. Lafrance (Jacques): Effectivement. Par contre, on pense qu'il n'y a aucun doute qu'à court terme ou à moyen terme on va atteindre le trois ou quatre fois; même présentement, on l'a déjà. C'est qu'il ne faudrait pas viser à long terme, si on parle peut-être de 30 ou 40 ans d'ici, de dépasser beaucoup plus que deux fois les prestations. Une fois que, effectivement, la génération du baby-boom sera passée, à partir de ce moment-là, ce qu'on préconise, c'est de maintenir un fonds de réserve petit, pas exagéré. Ça ne sert à rien d'avoir... On ne croit pas dans la capitalisation très forte du Régime de rentes du Québec.

Mme Harel: Bon, attendez. Alors, je comprends qu'à ce moment-là – on est à trois présentement, on s'en va vers deux – vous dites: Il faut maintenir à trois ou hausser ça à quatre, le temps de la génération du baby-boom. Après, deux, ça vous apparaît suffisant. Est-ce qu'il y a beaucoup d'écoles de pensée divergentes dans votre métier?

(10 h 40)

M. Girardin (Pierre): Je serais porté à dire que oui. On a vu le mémoire de l'Institut canadien des actuaires pour la réforme du Régime de pensions du Canada, où ils parlaient d'un financement judicieux dépendant des hypothèses économiques. En anglais, ils appellent ça le «smart funding». C'est une partie des actuaires qui sont membres de l'Institut canadien des actuaires qui ont préparé ce mémoire-là, qui, eux, se sont basés plus sur des notions de coût d'opportunité économique pour définir, si vous voulez, à quel niveau et à quel moment on devrait avoir plus ou moins de réserve au niveau du financement d'un régime public.

D'autres qui vont dire que... On pourrait dire aussi qu'actuellement on aurait dû avoir fait cotiser la génération précédente de façon beaucoup plus importante que le taux de cotisation auquel ils ont cotisé pendant très longtemps, le 3,6 % combiné, parce qu'il y a trop d'argent qui est reporté dans le futur. Ça fait que le niveau de la réserve, je pense qu'il faut prendre une attitude à savoir est-ce qu'on veut un régime plus du type répartition, c'est-à-dire qui n'accumule pas de réserve de façon systématique, par opposition à une pleine capitalisation.

C'est sûr qu'à l'intérieur de ces deux extrêmes-là on peut se poser beaucoup de questions, puis il peut y avoir beaucoup de théories, à savoir est-ce que c'est trois fois, quatre fois, six fois. C'est une question de degré.

Mme Harel: Vous êtes encore mieux informé que moi – j'en suis certaine, parce que c'est votre métier – qu'il y a toujours eu deux approches, y compris il y a 30 ans, au moment de la création de la Régie: l'approche proposée par le Canada était un genre de «pay as you go» avec un taux de cotisation à 2 %, une période de transition de 10 ans pour obtenir la pleine rente; la thèse du Québec d'il y a 30 ans, c'était une période de transition de 20 ans avant d'obtenir la pleine rente.

Vous savez que, finalement, dans la négociation, Québec avait perdu ce... Mais le taux de cotisation proposé par Québec était de 4 %, celui par Ottawa était de 2 %. Finalement, le compromis, ça a été 3,6 %, comme vous savez.

Cependant, il demeure qu'il y a sûrement une période pour garantir... Vous avez parlé beaucoup de la confiance, du déficit de confiance. Vous parlez d'un sondage auquel vous avez été partie prenante. Dépendamment des catégories d'âges, je crois que ce sont même les plus jeunes qui ont moins confiance.

M. Girardin (Pierre): C'est ça.

Mme Harel: Alors, il y a donc une sorte de coup de barre à donner pour garantir la confiance. Incidemment, vous recommandez vous aussi – puis ça se retrouve dans plusieurs mémoires – qu'à intervalles réguliers il y ait un réexamen des prestations puis des taux de cotisation. Alors, il est de notre intention d'introduire, finalement, dans le projet de loi, cette clause qu'on dit crépusculaire, dans notre jargon, qui fait que, à tous les cinq ans, le Parlement aura à se pencher sur cette question-là. Je comprends que, si ça avait été le cas depuis 10 ans au moins, ça aurait permis d'agir plus rapidement que c'est le cas, étant donné le retard qu'on a accumulé, comme vous le savez.

Moi, je voudrais tout de suite, avec vous, examiner les recommandations que vous faites concernant les prestations. Bon, vous dites: Il faut affirmer... Vous affirmez, plutôt, que le Régime de rentes doit faire partie de la garantie sur laquelle les Québécois peuvent fonder leur retraite. Ensuite, vous vous dites d'accord avec le gel de l'exemption générale. Le gel, de toute façon, je le signale tout de suite, c'est un gel à long terme, en fonction de l'augmentation du coût de la vie; alors ça prend 40 ans. Donc, c'est une méthode douce, n'est-ce pas, pour à la fois assurer un meilleur financement, mais aussi pour consacrer, si vous voulez, un plus grand nombre de cotisants, une plus grande ouverture pour faire bénéficier des prestations à un plus grand nombre de travailleurs, puisque particulièrement les jeunes sont étrangement et paradoxalement de plus en plus sur le marché du travail, mais de moins en moins parmi les cotisants, parce qu'ils ont un revenu inférieur à l'exemption générale. Donc, quand le calcul se fera sur la totalité des années travaillées, ils finiront par être perdants. Je ne sais pas si vous le voyez comme ça aussi, mais c'est une mesure qui assure un meilleur financement mais qui, en même temps, je pense, moi, bénéficie aussi à un plus grand nombre de travailleurs à faibles revenus.

Ceci dit, la réduction proportionnelle de l'exemption générale, vous vous dites en accord, je pense, hein, dans le mémoire, mais en même temps vous soulevez la question de savoir, si c'est appliqué brusquement, l'impact que ça peut avoir. Donc, il y a diverses hypothèses qui sont étudiées, notamment l'hypothèse de débuter cette réduction proportionnelle de l'exemption générale au moment où on aura atteint la vitesse de croisière seulement, où ça sera un taux stable.

Bon. Ceci dit, avant que le président me dise que mon temps est fini, ce que je veux regarder avec vous, c'est plus toute la question des prestations de décès, des prestations dues à l'invalidité. Je pense que tous les régimes publics de retraite, si je ne me trompe pas, là, tous les régimes publics de retraite ont une protection contre la perte de revenus, la perte des revenus de travail qui est due au vieillissement, à l'invalidité ou au décès. Est-ce qu'on s'entend là-dessus? Elle ne prend pas la même forme, mais je pense que tous les régimes publics ont cette protection-là. Elle peut, si vous voulez, varier dans sa générosité ou pas, mais il n'y a pas de problème à offrir ce genre de protection dans un régime public. Est-ce que vous concevez que c'est le cas?

M. Girardin (Pierre): Oui. Je pense que je vais demander à Jacques d'expliciter la partie du mémoire qui est rédigée là-dessus.

M. Lafrance (Jacques): Effectivement, on n'est pas contre un régime d'État qui procure des prestations d'invalidité. Ce qu'on préconise plutôt, c'est qu'il faudrait dissocier les deux, au moins aux fins de la comptabilisation des coûts, parce qu'on a un problème; je dirais que le problème est plus accentué au niveau du Régime de pensions du Canada. Mais il est quand même bon de savoir, je pense... Le travailleur ou les employeurs devraient savoir quelle partie d'une cotisation va pour la prestation d'invalidité et combien va pour la prestation de retraite, à tout le moins.

Mme Harel: Vous êtes certainement informés, là, notamment, du rapport du Vérificateur général du Canada à l'effet que de 1987 à 1994, je pense, la rente d'invalidité aurait augmenté de 2 % au Régime de rentes du Québec et de 92 % au Régime de pensions du Canada. En 1995, là, les chiffres que j'ai sont à l'effet que les sommes versées pour l'invalidité représentaient 9 % de l'ensemble des versements effectués en 1995. Donc, c'est encore sous contrôle au Régime de rentes du Québec, ce qui n'a pas l'air d'être le cas au Régime de pensions du Canada où, notamment, la rente d'invalidité est versée après 55 ans, avec un test qui est l'équivalent de celui qu'on a après 60 ans. Il n'y a pas d'harmonisation non plus avec les régimes provinciaux d'accidentés du travail ou autres régimes d'indemnisation. Donc, ça, c'est un autre problème important qu'ils ont à résoudre.

Vous suggérez l'abolition de la prestation de décès. Incidemment, imaginez – puis ça se passera de plus en plus, là – un cotisant qui décède avant d'avoir l'âge de la retraite et qui n'a pas de conjoint – il y a de plus en plus de ménages d'une personne seule – alors il aurait versé des cotisations au régime et il n'aurait jamais bénéficié d'aucune prestation ni même de celle qui est de 3 400 $, je pense, ou qui est au maximum, là, au maximum de la prestation de décès.

(10 h 50)

Bon. Ceci dit, on peut regarder ça de plus près, la prestation de décès, mais je reviens à la prestation... Vous dites aussi de regarder – ce qui, dans le fond, est raisonnable, là – la prestation de conjoint survivant avant la retraite, hein. Vous prenez pour acquis qu'après la retraite, là, vous la considérez comme justifiée, mais qu'avant la retraite il peut y avoir un examen.

Par ailleurs, vous dites: La prestation d'invalidité devrait être gérée différemment. Bon. Ça peut se concevoir. Mais je pense que vous allez plus loin. Vous proposez qu'elle ne relève plus de la Régie des rentes, n'est-ce pas? Vous proposez, dans le fond, qu'elle soit afférente à un programme d'assistance, plutôt, donc à un programme contributoire. Est-ce que je comprends ce que vous proposez?

M. Lafrance (Jacques): Non. C'est un régime, un programme séparé mais pas nécessairement, non, une mesure d'assistance, non. Plutôt, ça demeurerait quand même un régime pour les travailleurs, et...

Mme Harel: Contributoire.

M. Lafrance (Jacques): ...financé par les travailleurs et leurs employeurs.

Mme Harel: D'accord. À ce moment-là, ce serait uniquement... C'est bien. Bon. C'est, disons, plus simple dans l'échange que nous pouvons avoir, parce que, sinon, je vous aurais demandé qui va financer. Évidemment, quand on connaît l'état des finances publiques et le processus d'assainissement dans lequel on est engagés, il serait difficile d'envisager un nouveau programme de cette nature-là. Alors, je comprends que c'est un programme contributoire, mais il permettrait de bien distinguer ce qui relève de la rente de retraite et ce qui relève, finalement, des prestations afférentes à l'invalidité, en cas de perte de revenu de travail. C'est ça que vous recommandez. C'est bien.

Déjà, M. le Président? Alors, je vous remercie de votre contribution, et merci d'être venus nous faire bénéficier de votre expérience.

Le Président (M. Létourneau): Merci, Mme la ministre. Je cède la parole maintenant au député de Verdun, porte-parole de l'opposition officielle.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous remercier et vous féliciter pour votre mémoire qui est un des plus instructifs parmi ceux qu'on a reçus jusqu'à date. Je vais suivre un peu le même type de questionnement que ma collègue la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Vous ne recommandez pas de capitaliser le régime, c'est-à-dire d'augmenter la capitalisation du régime. Mais vous comprenez bien que, compte tenu de ce qu'on prévoit comme étant les sorties de fonds en rapport avec la masse salariale, la seule manière de ne pas avoir, en 2005 ou 2010, une cotisation qui soit trop élevée, c'est de commencer à la capitaliser dès maintenant.

Est-ce que, sur la situation actuelle, disons à court terme, compte tenu qu'on va – je reviendrai là-dessus – se reparler tous les cinq ans, il ne serait pas bon d'augmenter la capitalisation du régime, surtout qu'on est dans une situation où le taux d'intérêt réel est beaucoup plus important que la croissance de l'économie, malheureusement? J'insiste sur le «malheureusement». Ha, ha, ha!

M. Girardin (Pierre): C'est ça, mais je veux dire, je pense que, dans notre mémoire, on n'est peut-être pas assez clairs, là. Je veux dire, il faut distinguer le concept de capitalisation et la hausse des cotisations. On est favorables à une hausse des cotisations, mais entre les deux scénarios présentés...

M. Gautrin: Je comprends.

M. Girardin (Pierre): ...dans le livre vert, on est favorables au scénario le plus rapide. Si on regarde, effectivement, la situation à court terme, ce qui est un peu dommage, c'est que – et dans le public, c'est très peu connu, c'est quoi, le coût du Régime de rentes du Québec – nulle part dans l'évaluation actuarielle, on ne fait référence au coût du Régime de rentes du Québec. Dans l'évaluation actuarielle du Régime de pensions du Canada, on avance certains chiffres avec certaines hypothèses qu'on pourrait qualifier d'un peu conservatrices, mais on parle d'un coût à long terme du régime, dans la dernière évaluation, à 10,5 % du salaire, ce qui voudrait dire que, si un individu voulait payer le vrai coût du régime, il devrait cotiser 10,5 % de son salaire durant toute sa carrière. Or, à date, il n'y a personne qui a payé ce coût-là.

M. Gautrin: Je suis parfaitement d'accord avec vous.

M. Girardin (Pierre): Alors, à ce moment-là, je veux dire, c'est sûr – ça, ça fait partie de l'éducation dont je parlais tantôt, de l'information – que des retraités, la génération actuelle des retraités va dire: Bien, écoutez, nous, on a payé ce qu'on nous a demandé, qu'on nous donne ce à quoi on a droit. Ils ne savent même pas qu'ils n'ont pas payé le vrai coût du régime. Ça fait que c'est très difficile pour les gens, à ce moment-là, d'apprécier les prestations qui proviennent du régime.

M. Gautrin: Et, si je comprends bien la logique de votre document, quand vous dites: On ne peut pas augmenter indéfiniment les cotisations, vous dites: Regardons aussi les prestations, de manière à ce qu'elles correspondent au véritable coût que les gens sont prêts à payer. C'est un peu une partie de la ligne de pensée que vous avez.

M. Girardin (Pierre): Bien, un des principes, c'est l'équité entre les générations et un autre principe, c'est la solidarité sociale. Ces deux-là viennent un petit peu en conflit dans la mesure où les retraités actuels n'ont jamais payé le vrai coût du régime. Est-ce qu'ils seraient en mesure de recevoir les pleines prestations puis de refiler toute la facture aux prochaines générations? Alors, nous, notre préférence est plutôt, à ce moment-là, de dire: Non, on devrait limiter l'indexation dès maintenant, la diminuer à moins de 100 % de l'IPC, de l'indice des prix à la consommation, dès maintenant, de façon à diminuer les hausses de cotisation éventuelles et aussi à favoriser l'équité entre les générations, puis à favoriser la permanence du régime.

M. Gautrin: Vous avez fait état d'un sondage, au début, fait par votre firme. Est-ce qu'il a un caractère confidentiel ou est-ce que, éventuellement, vous pourriez faire bénéficier la commission du sondage? Je comprends que vous nous avez fait état de certains résultats du sondage, mais est-ce que l'ensemble du sondage pourrait être disponible à la commission, si vous pouviez le rendre public? Je me demande si le président serait prêt, si vous étiez prêts à le déposer...

M. Lafrance (Jacques): Oui. En fait, nous ne sommes pas totalement propriétaires du sondage; on est des coparticipants. Alors, je vais informer mes...

M. Gautrin: Si vous pouviez vérifier avec vos partenaires au sondage...

M. Lafrance (Jacques): Oui.

M. Gautrin: ...s'ils auraient l'amabilité de nous transmettre ce document; ça pourrait être quelque chose qui serait utile. Je suis sûr que le président accepterait qu'on puisse le déposer.

Le Président (M. Létourneau): Oui.

M. Gautrin: Si j'ai bien compris, en termes d'indexation, vous avez plaidé... Je comprends bien que les indexations des rentes devraient suivre les indexations des salaires et non pas les indexations de l'IPC, parce que vous plaidez en termes d'un principe d'égalité et vous dites, à ce moment-là, que, si les salaires augmentent avec un certain rythme, il faut que ce soit le même rythme auquel doivent augmenter les prestations de retraite. C'est bien la logique que j'ai comprise chez vous?

M. Lafrance (Jacques): On a fourni ça à titre d'exemple, dans le sens qu'effectivement, si, moi, comme travailleur, j'ai une augmentation de salaire moyenne mais que ce que je rapporte comme revenu à la maison est diminué en raison des augmentations des cotisations au Régime de rentes du Québec, qui ne seront pas subies par les retraités actuels, en fin de compte mon revenu disponible, peut-être, augmente moins que le revenu des retraités actuels s'ils continuent de recevoir une indexation basée sur l'indice des prix à la consommation. Alors, c'est un peu un principe... Il faut se questionner sur le principe, à savoir: Est-ce que c'est juste que les retraités reçoivent une augmentation plus forte que l'augmentation du revenu disponible des travailleurs?

M. Gautrin: Je comprends. Je voudrais simplement faire une remarque – et je le fais en termes de remarque, M. le Président, parce que c'est un débat qu'on va poursuivre – sur la question de l'exemption annuelle de base. Il est clair que, comme il y a des années de retranchement, un individu a avantage, dans les années de retranchement, à avoir un salaire de presque zéro qu'à avoir à contribuer à un salaire minimum ou à un petit montant. Mais je pense que c'est un échange qu'on aura à continuer de part et d'autre ici. Vous comprenez, les 15 % d'années de retranchement, c'est plus bénéfique de n'avoir rien contribué pendant ces années de retranchement que d'avoir contribué à un montant assez faible. Je pense qu'on aura à échanger plus tard entre nous là-dessus.

Vous n'êtes pas favorables au relèvement de l'âge de la retraite, c'est quelque chose que vous avez éliminé, le relèvement de 65 ans à 67 ans de l'âge de la retraite, bien que, comme vous le savez – et vous êtes probablement les mieux pour connaître cela – les espérances de vie à 65 ans aillent en croissant. Disons que, depuis la création du régime jusqu'à aujourd'hui, l'espérance de vie à 65 ans a augmenté de deux ou trois ans chez les hommes et de deux ans, je crois, chez les femmes – je vous donne ça de mémoire, à peu près. Et vous n'êtes pas favorables au relèvement de l'âge de la retraite actuellement.

M. Girardin (Pierre): Tant qu'à viser une diminution des prestations, il serait beaucoup moins perturbateur pour le système de viser à diminuer l'indexation que de changer l'âge normal de la retraite. Plusieurs régimes de retraite privés, comme je le mentionnais tantôt, sont intégrés au Régime de rentes du Québec et ont un âge de retraite auquel ils intègrent, là... L'âge charnière est 65 ans. Alors...

M. Gautrin: Ah oui, je comprends.

M. Girardin (Pierre): ...à ce moment-là, je veux dire, si on relève l'âge auquel la rente du Régime de rentes du Québec est admissible à 66 ans...

M. Gautrin: Votre argument, c'est parce que, à ce moment-là, ça a un effet perturbateur sur l'ensemble des régimes privés, à cause de l'arrimage qu'il y a entre les régimes privés et le RRQ. Je comprends.

(11 heures)

M. Girardin (Pierre): Ça fait que c'est sûr qu'éventuellement s'il y a un choix à faire, soit de diminuer les prestations, soit qu'on décide de diminuer l'indexation. Si on décide du côté de l'âge de la retraite, il est peut-être... C'est sûr que, dans cinq ans, on va peut-être se rendre compte que les hypothèses utilisées dans la dernière évaluation actuarielle ne se sont pas réalisées. Il ne faut pas oublier qu'il y a des scénarios alternatifs qui sont présentés en annexe, dont certains sont plus pessimistes. S'ils se réalisent, on va manquer de marge de manoeuvre puis on va devoir peut-être...

M. Gautrin: Je suis heureux de vous entendre dire ça. M. le Président, j'aurais d'autres questions, mais je pourrais permettre au député de Notre-Dame-de-Grâce de poser une question ou deux et je pourrais revenir s'il nous restait du temps.

Le Président (M. Létourneau): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, M. le Président. M. Girardin, M. Lafrance, je suis un peu confus quant à vos recommandations au sujet des prestations d'invalidité. Tantôt, à la ministre, vous avez répondu que ce n'est pas tout à fait nécessaire de retirer les rentes d'invalidité du régime, mais plutôt de faire une distinction entre ce qui est vraiment une rente d'invalidité puis une rente de retraite. Dans votre mémoire, par contre, vous dites très clairement à la page 10 – à moins que ce soit moi qui ai mal compris: «Les prestations d'invalidité devraient être retirées du Régime de rentes du Québec et remplacées par un programme versant des prestations aux personnes invalides.» Il y a un peu de confusion. Est-ce que c'est moi qui ai mal compris, là? Il me semble que votre mémoire est plus clair que votre réponse à la ministre tantôt.

M. Lafrance (Jacques): C'est que nous préconisons, effectivement, un programme séparé. Toutefois, nous reconnaissons qu'il pourrait être plus efficace, en fait. On serait prêts à plier, admettons, pour que ça demeure comme c'est présentement, mais, à tout le moins, faire une comptabilisation séparée. Mais, quand même, notre première option serait un régime séparé.

M. Copeman: Financé par... Comment?

M. Lafrance (Jacques): Par les travailleurs et les employeurs.

M. Copeman: En quoi est-ce que ce sera différent, d'abord, de notre régime d'invalidité, s'il est financé par les travailleurs et les employeurs? Moi, je saisis mal la différence. Je comprends la distinction en termes de taux de cotisation, peut-être, où là, encore une fois, j'ai des questionnements pour vous, mais, si vous dites qu'il faut financer par les employeurs puis les employés, comment est-ce que ce sera différent, nécessairement, de notre régime présent?

M. Lafrance (Jacques): Ça pourrait être, entre autres, moins sujet aux fluctuations démographiques qu'on a présentement. Par exemple, on a un grand débat sur le taux de cotisation au Régime de rentes du Québec, qui est grandement influencé par les équités entre les générations. Si on avait un programme séparé, entre autres, on n'aurait probablement pas ce débat-là. Ce serait plutôt une question: Est-ce qu'on a un régime d'invalidité approprié? Est-ce que les prestations sont à un niveau adéquat? Est-ce que le coût est à un niveau adéquat? Ainsi de suite. Ça serait plus facile, je dirais, de bien l'administrer, ce régime-là, si on avait un régime séparé. C'est probablement ça... La principale différence, ça serait ça.

M. Copeman: O.K. Selon vous, les prestations qui sont versées dans le cadre de la prestation d'invalidité, est-ce qu'elles sont trop élevées? Est-ce qu'on a un problème présentement avec la façon dont le programme est géré au Québec?

M. Lafrance (Jacques): Concernant la gestion, il y a certaines anomalies. Entre autres, je me souviens d'un débat qu'on a eu la semaine passée, c'est qu'on sait, par exemple, que la condition d'admissibilité, à 60 ans, change. Alors, ça, c'est un problème. Je pense que beaucoup de travailleurs peuvent demander la rente d'invalidité à 60 ans sous des conditions beaucoup moins sévères. C'est une certaine façon de déjouer le système pour éviter la pénalité qu'on a normalement à 60 ans, qui est de 30 %. Alors, ça, c'est une des anomalies qu'on a présentement.

On peut se questionner... Je ne veux pas faire un grand débat là-dessus ce matin, mais la question est: Est-ce qu'il est valable d'avoir une prestation à un niveau forfaitaire? À ce moment-là, ça se trouve à être indirectement du transfert de revenus entre les plus riches et les plus pauvres. Est-ce que c'est normal d'avoir une telle prestation à l'intérieur d'un régime entièrement financé par des travailleurs? C'est un débat, je pense, qu'il faudrait regarder.

Le Président (M. Létourneau): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, il me reste peu de temps, mais j'aborderais une dernière question avec vous. Vous, vous favorisez la réunion, tous les cinq ans, pour revoir les taux de cotisation – et ça, je comprends ça – et vous ajoutez aussi de revoir les prestations. Je sais, moi, qu'il y a eu une tendance dans le passé, régulièrement, à augmenter les prestations, par exemple à assouplir l'âge de la retraite, à étendre le concept de conjoint. Enfin, il y a des éléments qui, à chaque fois, sont mineurs, mais qui, quand on les accumule, font pression sur le régime.

Mais, par contre, est-ce que vous ne pensez pas qu'il serait bon, pour accroître la sécurité – je reviens donc à votre sondage au début, il y a une forme d'insécurité par rapport au régime – de ne pas retoucher, tous les cinq ans, l'ensemble des prestations? Qu'on touche la cotisation, ça, je comprends, qu'on ait une réflexion, ici, pour se dire quelles devraient être les prestations, de peut-être les réévaluer compte tenu des modifications sociologiques que l'on a dans une société, mais quand même pas, tous les cinq ans, mettre dans la loi qu'on revoie l'ensemble des prestations du régime. J'ai l'impression que ça créerait une forme d'incertitude.

Alors, j'ai un peu de divergence avec vous sur cette question-là. Je ne sais pas ce que vous vouliez dire lorsque vous avez inclus cette question-là.

M. Lafrance (Jacques): En fait, nos points de vue convergent là-dessus. En fait, oui, réviser...

M. Gautrin: Comme sur les autres.

M. Lafrance (Jacques): ...mais il faut faire attention. Est-ce qu'il faut faire une révision complète des prestations à tous les cinq ans? Non. Ce qu'on peut voir, c'est... On peut constater que certaines prestations... On parlait tantôt de reporter l'âge de la retraite...

M. Gautrin: De la retraite, oui.

M. Lafrance (Jacques): ...à 65 ans. On le voit qu'il y a des changements tant dans l'espérance de vie, mais aussi des changements... Et on peut penser que, d'ici 20 ans, il va y avoir des changements dans la définition de ce qu'un Québécois se dit: Qu'est-ce qu'une retraite? Présentement, si vous posez la question à des travailleurs, la retraite, on pense, on vise 60 ans, en général. Si on parle à un groupe de travailleurs, c'est, en général, ce qu'on entend, même souvent plus jeune que ça. Dans 20 ans d'ici, peut-être qu'on va être beaucoup plus en forme. On ne sait pas. Peut-être que notre vision de la retraite, ça va peut-être être 65 ans, 70 ans. À ce moment-là, il faudrait en tenir compte, pas nécessairement à tous les cinq ans, mais, à ce moment-là, on pourrait constater certaines choses à tous les cinq ans et bâtir là-dessus.

M. Gautrin: Je vous remercie. Ça clarifie... Je comprends que notre temps est épuisé, M. le Président...

Le Président (M. Létourneau): C'est exact.

M. Gautrin: ...mais je voudrais vous remercier pour la qualité de votre prestation.

Le Président (M. Létourneau): Alors, MM. Girardin et Lafrance, au nom des membres de la commission, on vous remercie de votre présentation, et j'inviterais les membres de la Coalition des aînées et aînés du Québec à s'avancer, s'il vous plaît.

(Consultation)

Le Président (M. Létourneau): Alors, Mmes, MM. les représentants de la Coalition des aînées et aînés du Québec, je vous souhaite la bienvenue à cette commission. Je vous rappelle que vous aurez 20 minutes pour faire une présentation, et chacun des deux partis aura également 20 minutes pour faire des échanges avec votre organisation.

Alors, sans plus tarder, je vous invite à vous présenter, s'il vous plaît.


Coalition des aînées et aînés du Québec

Mme Bérubé (Gisèle): M. le Président, mesdames et messieurs, je vous présente les membres de notre délégation. À l'extrême droite, Mme Liliane Lecompte, présidente de l'Association québécoise de défense des droits des retraités-es et préretraités-es; immédiatement à ma droite, M. Jean-Marie St-Jacques, représentant de l'Association provinciale des retraités-es du secteur public et parapublic – un nouveau nom, que vous connaissiez avant sous le nom des retraités du gouvernement; à ma gauche, Denyse Lacelle, qui est une personne-ressource pour nous; moi-même, Gisèle Bérubé, coprésidente de la Coalition des aînées et aînés du Québec.

Le Président (M. Létourneau): Bienvenue.

Mme Bérubé (Gisèle): Je vais vous faire la lecture de notre document et, après, nous serons prêts à échanger avec vous.

1. Le document produit par le gouvernement du Québec, «Pour vous et vos enfants: garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec», fournit nombre de constats qui doivent guider toute réforme des rentes de retraite. Et voici les cinq constats que nous faisons.

(11 h 10)

D'abord, les changements démographiques et leur impact sur le financement du régime; le nombre de Québécois et de Québécoises qui ne peuvent compter sur un régime complémentaire de retraite et la nécessité, donc, de maintenir un bon régime public; le fait que nombre de travailleurs et travailleuses à l'heure actuelle ne peuvent contribuer ou ne contribuent pas suffisamment au Régime de rentes du Québec pour se prévaloir d'un revenu de retraite suffisant; la position vulnérable des femmes qui, de loin, plus souvent que les hommes, vivent dans la pauvreté en raison du chômage, du sous-emploi, des faibles salaires et, pour ces femmes-là, il est impératif de protéger puis de développer leur indépendance économique; et, finalement, l'impact négatif de la récente décision du gouvernement fédéral d'abolir la pension de sécurité de la vieillesse universelle et de la remplacer par la prestation aux aînés qui ne fournit aucune assurance d'un soutien financier pour les aînés, en particulier pour les femmes.

2. Votre document met de l'avant un certain nombre de propositions qui ne sont pas sans intérêt. D'abord, le gouvernement entend maintenir le taux de remplacement à 25 % du revenu. En fait, ce niveau devrait peut-être être même revu à la hausse pour certaines personnes. L'âge normal de retraite serait maintenu à 65 ans avec la possibilité que ceux et celles qui continuent à travailler au-delà de cet âge puissent continuer à contribuer. La pleine indexation des pensions. Le maintien de la possibilité de soustraire du calcul de la pension un certain nombre d'années aux revenus moindres.

Ce sont là des acquis intéressants de notre système de pension qu'il convient de maintenir. Nous ajouterons que les prestations doivent demeurer individuelles, la prise en compte du revenu familial ayant des conséquences incalculables sur l'autonomie financière des femmes.

Toujours au niveau des acquis à préserver et à élargir, notons la gestion des cotisations par un organisme autonome et indépendant, nommément la Caisse de dépôt. En aucun cas, nous ne voulons voir le Conseil du trésor mettre la patte sur nos cotisations. Par ailleurs, il convient de souligner que l'État et ses sociétés se montrent très mauvais employeurs: les comptes à recevoir des caisses de retraite des employés de l'État, d'Hydro-Québec, de la Société Radio-Canada sont impressionnants et tributaires du fait que l'employeur ne paie pas ses cotisations. Il serait intéressant de voir tous les régimes de retraite administrés par des comités paritaires et que ces comités veillent à la bonne gestion de ces fonds et au paiement des cotisations.

3. Comme le document de réflexion le soulève, la mise en place de la prestation fédérale aux aînés fait en sorte que les revenus des aînés deviennent très vulnérables face à tout changement de politique du gouvernement fédéral et, la Régie le soulève aussi, la pension de sécurité de la vieillesse constitue le premier étage, la première étape de l'édifice des pensions. La conversion de cette pension universelle en un programme d'assistance – la nouvelle prestation des aînés – lié aux revenus risque d'avoir un effet négatif sur l'épargne et sur la contribution à un régime public. Il devient donc encore plus important de modifier le Régime de rentes du Québec de façon à répondre le plus possible aux besoins des retraités, même quand leur relevé de contribution est peu élevé. En substance, il est essentiel de trouver des façons d'accroître la couverture, particulièrement pour les travailleurs, les travailleuses à faibles revenus ou ceux et celles qui sont présentement exclus du régime, et de hausser le niveau de revenus du nombre important d'aînés qui vivent actuellement sous le seuil de la pauvreté.

4. Ceci dit, il semble inévitable, dans le document, que l'on doive accroître substantiellement les revenus de la caisse de retraite. On retrouve dans le document des propositions à cet effet: la hausse des taux de cotisation, ainsi que le gel de l'exemption à 3 500 $ et son élimination progressive en fonction des revenus.

4.1. Sur la hausse des taux de cotisation, si on nous demande si elle doit être plus rapide ou plus lente, nous répondons: Elle doit être plus lente. Les résultats à long terme seront peut-être moins bons, mais on laisse ainsi plus de temps aux cotisants pour faire face à la demande. Ceci dit, nous avons de la difficulté à croire qu'une augmentation si substantielle des cotisations soit réaliste. Les travailleurs à faibles revenus ne pourront pas faire face à de telles augmentations, et il y a tout lieu de croire que certaines entreprises ne le pourront pas non plus. En fait, une telle augmentation incite à baisser les salaires ou alors à garder moins de personnel et aussi à encourager le travail au noir. Bref, on n'a pas là une proposition très cohérente avec l'objectif de maintenir et de créer des emplois. Cette proposition repose, par ailleurs, sur une projection des données démographiques et du taux d'emploi; des projections qui sont sujettes à erreur.

Notons, au sujet de ces projections, qu'elles reposent actuellement sur des données liées à l'expérience actuelle du Régime de rentes du Québec, un régime qui n'est pas arrivé à maturité, puisque nombre des bénéficiaires n'ont pu contribuer tout au long de leur vie de travail, puisque le régime n'a été mis en place qu'en 1966. Par ailleurs, si on ne peut guère agir sur le vieillissement de la population, on peut faire quelque chose par rapport au taux de chômage et par rapport au taux d'intérêt.

4.2. Le document identifie certains moyens d'élargir l'assiette de contribution, notamment par le gel et l'abolition progressive de l'exemption sur les premiers 3 500 $ de gains. Cette proposition a le mérite d'être progressive et d'offrir une meilleure protection à ceux et celles dont les revenus sont les plus bas, à ceux qui travaillent à temps partiel, qui sont des occasionnels, et le reste. L'adoption rapide d'un niveau d'exemption variable pourrait également générer des gains importants pour le fonds de retraite.

4.3. Cette idée amène à d'autres possibilités. Par exemple, l'exemption de base pourrait être établie à moins de 3 500 $ si le taux de contribution variait également selon le revenu. L'exemption pourrait être de 2 000 $, par exemple, si le taux de cotisation, à ce niveau, était de 1 % ou même moins.

Deuxièmement, il pourrait être possible de faire varier le niveau de contribution des employés en fonction de leurs revenus, sans pour autant réduire celui de l'employeur. De cette façon, les employés à faibles revenus pourraient payer un faible taux de cotisation et, tout de même, recevoir une pension raisonnable. De plus, la couverture serait accrue, notamment en permettant aux personnes qui cumulent deux ou trois petits emplois de contribuer sur le total de leurs gains.

Troisièmement, il pourrait être possible d'élever le seuil de revenus cotisables, ce qui aurait pour effet d'augmenter les entrées d'argent dans la caisse de retraite. Les revenus élevés de pension pourraient être rabaissés par l'application d'un régime d'impôt sur le revenu plus progressif.

4.4. De telles propositions, à l'évidence, demandent de reconsidérer l'idée que les contributions à un régime de pensions et les bénéfices qui en sont retirés doivent être égaux à tous les niveaux de revenus ou que les prestations versées doivent avoir un rapport fixe avec les cotisations payées. Comme le document de réflexion le soulève, le principe de solidarité doit être maintenu. Il doit être clairement affirmé que les travailleurs à faibles revenus ont droit à une pension, à un taux de cotisation qu'ils peuvent payer.

Le tableau 4, dans votre document, suggère une échelle qui réduit l'exemption trop rapidement. Les travailleurs et les travailleuses à faibles revenus ne peuvent contribuer 5 % ou 6 % de leurs revenus et, de toute façon, ne peuvent pas vivre avec le produit d'un si petit investissement. Ils et elles ont besoin d'une couverture à un moindre taux.

(11 h 20)

D'un autre côté, il n'y a aucune raison sérieuse pour que le revenu maximum sur lequel on paie des cotisations soit maintenu à 35 400 $. Les bénéfices peuvent être proportionnels mais imposés progressivement. De telles recettes permettraient d'éviter une augmentation drastique des cotisations.

4.5. Finalement, notons qu'une autre façon d'élargir l'assiette de cotisation, c'est de s'en prendre avec énergie au taux de chômage. Une sérieuse stratégie de création d'emplois est une nécessité impérieuse pour le Québec, pour un ensemble de raisons, l'une d'elles étant de garantir l'avenir du régime de retraite.

5. L'hypothèse de ne pas augmenter les cotisations et de réduire les pensions doit être écartée, et ce, d'autant plus que les modifications imposées par le dernier budget fédéral risquent de complètement fausser la balance pour les futurs retraités de la classe moyenne. Peut-être devra-t-on réévaluer à la hausse le taux de remplacement du revenu, qui est actuellement à 25 %.

6. Le document produit par la Régie met en lumière que la proportion de personnes âgées dans la population croîtra rapidement au cours des 30 prochaines années. Cela signifie que de plus en plus de gens dépendront des pensions. La réponse du gouvernement fédéral à une telle situation, c'est d'accroître les charges sur les particuliers et de réduire les prestations. Il est évident que cela laissera de nombreuses personnes sans protection autre que la charité du gouvernement au pouvoir. Une telle situation est inacceptable, tant politiquement qu'humainement.

Notre position est à l'effet que la situation requiert une nouvelle façon de considérer les pensions qui doivent dorénavant être vues comme un problème public, collectif, nécessitant la contribution des secteurs de l'économie qui ont les moyens de payer. Des précédents existent, notamment l'assurance automobile ainsi que la décision récente du gouvernement de mettre sur pied un régime d'assurance-médicaments, ce dernier étant contestable à d'autres égards, cependant. Mais ces deux programmes exigent que tous contribuent, indépendamment de leur utilisation personnelle. Il va sans dire qu'une telle proposition doit être liée à une révision en profondeur de la fiscalité.

Finalement, toujours au sujet du gouvernement fédéral, le Régime de pensions du Canada est lui aussi à l'étude, et les hypothèses de travail qui ont été publiées sont loin d'être encourageantes. Nous sommes vivement préoccupés de ce qui restera des engagements ci-haut mentionnés, quand viendra le temps d'harmoniser à nouveau le Régime de rentes du Québec et le Canadian Pension Plan. Merci.

Le Président (M. Létourneau): Je vous remercie, Mme Bérubé. Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Bienvenue à la Coalition des aînées et aînés du Québec, à vous-même, Mme Bérubé, qui en êtes la coprésidente, et aux personnes qui vous accompagnent.

Alors, en vous écoutant, je me disais, vous vous rappelez cette chanson: «Tout le monde veut aller au ciel, oui mais personne ne veut mourir»? Et je retenais, donc, que la Coalition des aînés considère qu'un taux de cotisation de 10 % est trop élevé. C'est bien le cas, je crois, dans les propos que vous nous mentionnez?

Cependant, le niveau de prestation, qui est actuellement versé aux retraités, équivaut à 10 %. Et le paradoxe est le suivant, le paradoxe est que, si on ne fait pas attention, la situation va faire en sorte que, pour avoir l'équivalent de bénéfice de 10 %, les générations futures vont avoir à payer un taux de cotisation de 13 %. Ça signifie donc que, si rien n'est fait, les jeunes qui nous suivent vont avoir un taux de cotisation de 13 % pour recevoir des prestations égales à celles que reçoivent les cotisants actuels, n'est-ce pas, qui travaillent, qui sont sur le marché du travail, qui paient un taux de 5,6 %, puis égales à celles que reçoivent les retraités actuels qui ont payé un taux de 3,6 %.

Ce que j'indique simplement par là, c'est ceci: Moi, dans mon livre à moi, là, Mme Bérubé, les personnes, si on rouvre les prestations des personnes déjà à la retraite, à mon point de vue, on aggrave le manque de confiance, le déficit de confiance que la population a à l'égard du Régime de rentes. Il faut qu'il y ait des acquis sur lesquels on ne revienne pas comme société.

Ceci dit, une fois que c'est dit, là, par exemple, il va falloir s'aider, parce que, quand vous dites, je dirais, quasiment un peu trop de façon simple: Ne touchez pas à nos prestations, n'est-ce pas, alors non seulement vous dites: N'y touchez pas, mais même vous aimeriez qu'on augmente le remplacement du revenu qui est à 25 % présentement. Ça, incidemment, ça ne finance pas le régime, ça. Ça viendrait juste l'améliorer, si vous voulez, pour les prestations.

Ensuite, vous dites: Déplafonnez le seuil de maximum de gains admissibles qui est à 35 400 $, mais ça ne finance pas le régime parce que, à ce moment-là, le remplacement du revenu va être à 25 % sur un maximum de gains admissibles déplafonné, c'est-à-dire 40, 45, 50.

Alors, vous dites, d'autre part: 10 %, c'est trop élevé. Vous choisissez la méthode lente, mais en même temps en la choisissant – ce que l'on sait de façon certaine, comme 2 + 2 font 4 – c'est que moins vite on y arrive, moins vite les cotisants actuels qui sont de la génération du baby-boom participent à l'effort de cotisation, alors plus ils vont arriver dans 10 ans, 15 ans avec une génération massive à la retraite sans avoir cotisé pour ce qu'ils vont aller chercher. C'est toujours 10 %.

Là, à un moment donné, vous savez, si dans la vie vous dépensez 10 000 $ chaque année puis vous en gagnez 5 600 $, il arrive à un moment donné que vous avez assez accumulé de dettes que les générations qui vont vous suivre, eux autres, là, vont être obligées de les payer. C'est ça, dans le fond, notre régime actuel: 10 % de prestations pour 5,6 % de cotisations.

Alors, vous savez, je dis, là: Il faut choisir. Ou les cotisations vont augmenter au niveau de nos prestations... C'est un régime d'assurance, ça. C'est un régime contributoire. On se donne pour 10 % de primes puis on pense qu'on peut se donner 10 % sans payer. Mais qui va payer? Alors, ou on diminue les prestations.

Mon collègue de Verdun pose l'équation en termes simples. C'est: Ou les cotisations ou les prestations. On ne peut pas se donner pour 10 % de prestations si on ne se paye pas pour 10 % de prestations. Alors, comme je l'ai considéré, j'ai dit: Mon Dieu, ils ont une belle formule. Pas de diminution de prestations, quasi pas d'augmentation de cotisations. Mais qui va payer, Mme Bérubé?

Le Président (M. Létourneau): M. St-Jacques.

(11 h 30)

M. St-Jacques (Jean-Marie): En fait, si vous lisez notre document, vous constatez que nous proposons des augmentations de cotisations. Une des premières propositions, c'est d'enlever l'exemption totale pour les 3 500 $ et moins. En fait, il y a énormément de personnes qui sont à statut précaire, qui sont embauchées avec des heures-semaine très faibles, qui travaillent pour des salaires inférieurs aux 3 500 $ par année et qui sont obligées de cumuler un, deux ou trois emplois. Au moment du paiement de leurs impôts, il est évident que, quand on cumule le total de leurs salaires, ils vont contribuer à un montant, sauf qu'il ne faut pas oublier que l'employeur ne paie aucune cotisation sur ces salaires inférieurs à 3 500 $.

Vous allez me dire: C'est une charge sur la masse salariale. Oui, c'est une charge de participation des corporations à bonifier l'état de santé puis l'état de vie des personnes qui atteignent 65 ans et plus. Et, cette bonification, est-ce qu'elle affecte des personnes qui sont en mesure de payer?

Nous disons qu'il y a une partie importante de cette population, qui travaille dans des conditions comme celles-là, qui provient d'organismes qui sont en situation de profits très importants. Nous pensons aux banques. Tout le réseau des banques fonctionne aujourd'hui avec des 10 heures, 12 heures-semaine, ce qui veut dire qu'il y a très, très peu de participation de la part de l'employeur. Il y a d'autres organismes, et on n'a qu'à penser aux organismes comme Wal-Mart, Réno-Dépôt, enfin ces organismes qui emploient du personnel pour une période de temps très faible et qui vont multiplier le nombre d'emplois mais pour des personnes qui ne sont pas en mesure d'accumuler ou de bonifier leur prise de retraite.

Alors, nous disons que, quand on prend le tableau, à la fin, et qu'on tient compte de l'état de réserve par rapport aux déboursés, si on augmente la masse salariale imposable, avec 8 %, 8,5 % il y a possibilité de maintenir l'état de réserve pour que ce soit deux fois le déboursé de l'année antérieure, si vous examinez le tableau. Alors, nous croyons que ces mesures, tout en permettant, à ce moment-là, de maintenir la relation entre la réserve et les déboursés, feront aussi que le montant de la caisse par rapport aux déboursés va se bonifier. Mais, lorsque nous disons, à ce moment-là, une évolution lente, je pense que l'évolution qui apparaît dans le tableau n'est quand même pas tellement rapide mais qu'elle n'est pas lente non plus, surtout si on considère qu'on veut atteindre 13 %.

Alors, pour les raisons que je vous dis, si on demande aux personnes qui ont des traitements supérieurs à 35 000 $ de contribuer à la bonification de la retraite de l'ensemble de la société, il faut penser que, selon les données de la situation économique des aînés qui ont été publiées et qui ont été distribuées, compilées par le Conseil des aînés, il y a 4,7 % de la population qui a des traitements supérieurs à 40 000 $, mais il y a 69 % de la population qui, selon les chiffres de 1993, avait des traitements inférieurs à 15 000 $ par année; pas des traitements, je devrais dire des revenus.

Et, quand on considère que la pension de sécurité de la vieillesse et le maximum de la Régie des rentes du Québec représentent un peu plus de 11 000 $ par année, ça veut dire qu'il y a ce pourcentage de personnes qui sont dépendantes de la Régie des rentes et de la pension de sécurité de la vieillesse pour se bonifier. Et il y a énormément de personnes, au-delà du tiers de la population, qui ne peuvent pas bénéficier de la Régie des rentes du Québec parce que les traitements n'étaient pas imposables. Et ces personnes-là, ça inclut surtout les femmes qui sont arrivées sur le marché du travail après avoir élevé leur famille et qui sont obligées de se contenter d'emplois à statut précaire.

Mme Harel: Me permettez-vous, M. le Président? Oui. Je vous remercie, M. St-Jacques. Vous avez parlé de 8,5 %, n'est-ce pas, du taux de cotisation avec un niveau de prestations qui est à 10 %. Alors, vous êtes conscient que, là aussi, il y a un problème dans la mesure où, depuis 1992, on décaisse, c'est-à-dire qu'on sort plus d'argent et qu'on va chercher le capital accumulé.

M. Gautrin: Les revenus d'intérêts ne sont pas suffisants.

Mme Harel: Les revenus d'intérêts ne sont pas suffisants. On a commencé à piger dans les revenus d'intérêts en 1983. Et là, maintenant, on décaisse depuis 1992. Vous avez l'air de dire: Ce n'est pas grave. Je ne pense pas que ce soit ça que vous vouliez dire aujourd'hui.

Alors, ça signifie que la réserve, c'est quelque chose dont il faut tenir compte. Là, on est à trois ans, mais on glisse vers deux ans. Et, s'il n'y a pas d'intervention rapide, avec l'arrivée de la génération du baby-boom, on va se retrouver où, croyez-vous? On va se retrouver dans une situation où la génération la plus importante démographiquement va arriver à la retraite sans avoir cotisé à l'équivalent des prestations qui vont lui être versées. Et qui, pensez-vous, va avoir à les payer après, ces prestations? Ce sont les générations de nos enfants et de nos petits-enfants.

Alors, ça signifie quoi? Ça signifie qu'au moment où le régime est créé, en 1966, il y a un retraité pour huit travailleurs. Et puis, en l'an 2030, là – ce n'est pas si loin que ça, l'an 2030, hein, d'une certaine façon, dépendamment de l'âge qu'on a – ça va être un retraité pour deux travailleurs. Alors, vous ne pensez pas, là, qu'il y a urgence d'agir, qu'à défaut d'agir, en laissant l'idée qu'on peut se payer des prestations, l'équivalent de 10 %, avec des cotisations moindres comme si... Qui va les payer à un moment donné? Il y a quelqu'un qui va les payer à un moment donné. Si ce n'est pas ceux du passé, qui sont actuellement retraités, si ce n'est pas ceux actuellement cotisants, bien ça va être nos enfants. Est-ce que c'est ça qu'on veut?

Le Président (M. Létourneau): Mme Lacelle.

Une voix: Je pense que vous...

M. St-Jacques (Jean-Marie): Ce n'est définitivement pas ça qu'on veut. Et la preuve de ça, c'est que, quand je vous dis qu'en allant chercher une masse salariale supérieure à cotiser ça veut dire qu'on augmente les rentrées de fonds, ça n'augmente pas la population qui va atteindre 65 ans.

Mme Harel: Attendez, M. St-Jacques. À ce moment-là, quand vous dites la masse salariale, le maximum de gains admissibles en haut de 35 000 $, mais...

M. St-Jacques (Jean-Marie): En haut de 35 000 $ et...

Mme Harel: Je comprends... Oui.

M. St-Jacques (Jean-Marie): ...la portion des employeurs sur les salaires qui sont inférieurs à 3 500 $.

Mme Harel: Bon. À ce moment-là, pensons-y, vous nous dites qu'il y a un principe, et ce principe, c'est que la rente doit couvrir, compenser 25 % du revenu, c'est un remplacement de 25 % du revenu. Alors, pour l'appliquer, ce principe-là, je veux bien qu'on déplafonne, là, ça peut être un scénario intéressant, mais vous comprenez que, sur ce déplafonnement, il y aura 25 % de revenu parce que c'est un régime contributoire. Vous contribuez pour 30 000 $, 35 000 $, 40 000 $, 45 000 $ ou 50 000 $ et vous avez 25 % du revenu de ce pour quoi vous contribuez. Sinon, vous n'êtes plus dans un régime d'assurance.

Mme Bérubé (Gisèle): Il va payer des impôts.

Mme Harel: Vous êtes dans une taxe. Là, vous êtes dans un autre régime différent, et c'est en ce sens-là qu'on ne peut pas dire que le Régime de rentes est une taxe sur la masse salariale. C'est un régime d'assurance, vous devez en avoir pour la contribution que vous y mettez. Sinon, si vous en avez moins, c'est que, dans le fond, c'est une sorte d'impôt déguisé, si vous voulez.

Alors, je comprends donc, dans votre proposition, qu'on déplafonne à 35 000 $ et puis qu'on n'augmente pas... Les gens vont continuer à cotiser mais n'auront pas, finalement, un remplacement de revenu sur le maximum, disons, de gains...

M. St-Jacques (Jean-Marie): Sur l'excédent du 35 000 $.

Mme Harel: C'est ça que vous proposez?

M. St-Jacques (Jean-Marie): Oui.

Mme Harel: Bon. Alors, entre les deux mesures, c'est-à-dire celle d'aller chercher, si vous voulez, une augmentation de revenu à partir de personnes qui vont dire: Ce n'est plus dans un régime d'assurance, on n'est plus dans un régime d'assurance, on est dans un régime, finalement, où on est imposé, vous êtes conscient qu'à ce moment-là on change de régime.

Le Président (M. Létourneau): Mme Lacelle.

(11 h 40)

Mme Lacelle (Denyse): Oui, juste pour amener quelques précisions. Effectivement, il y a un problème avec la façon dont le régime s'en va et il faut le régler. Loin de nous l'idée, comme vous le résumiez tantôt, de proposer qu'on augmente les prestations sans toucher aux cotisations. L'essentiel de ce qu'on propose, c'est, d'une part, d'augmenter les cotisations de façon moins rapide que ce que le document suggère et de ne pas les augmenter jusqu'au taux, qu'on a vu dans un document ou dans l'autre, de 12 % et même de 13 %. C'est la première chose. Comment donc, compte tenu de ces limites, faire en sorte que la caisse balance? C'est une préoccupation qu'il doit y avoir, et on répond de deux façons: en élargissant l'assiette de cotisations et en transformant, dans une certaine mesure, la nature du régime. Et je vous réfère là à la dernière section de notre mémoire.

Je veux revenir sur la deuxième section, sur l'élargissement de l'assiette: on peut jouer par en bas puis on peut jouer par en haut, c'est bien évident. Donc, on peut jouer effectivement avec l'exemption de 3 500 $. On trouve que la proposition que vous avez soumise est intéressante là-dessus. On propose également que les gens qui cumulent deux ou trois petits emplois puissent cotiser sur l'ensemble de leurs revenus et que leurs employeurs, donc, doivent cotiser également. Ça, c'est pour jouer dans la fourchette d'en bas.

Quand on joue dans la fourchette d'en haut, c'est là que... D'une part, une première note. Le fait qu'il y ait actuellement un plafond autour de 35 000 $, c'est une incitation pour nombre d'employeurs à recourir au temps supplémentaire plutôt qu'à faire travailler de nouvelles personnes, parce que, une fois que tu as atteint le maximum, là tu ne paies plus rien. C'est une incitation, donc, au temps supplémentaire, lequel a une incidence sur le nombre d'emplois au Québec – non pas que la réduction du temps supplémentaire constitue la seule solution au problème de l'emploi, mais bien un des petits morceaux – donc un impact sur le nombre d'emplois et, par là aussi, un impact sur le nombre de personnes qui peuvent contribuer au régime. Donc, nous, on dit qu'il faut faire sauter ce plafond-là.

Bien entendu, si on maintient le taux de remplacement à 25 %, comme vous l'avez souligné, ça donne que, quelques années plus tard, on doit verser des prestations à 25 % sur des montants beaucoup plus élevés, exact. D'où notre dernière proposition qui est de modifier la nature du régime dans une partie, d'en faire, finalement, un régime mixte qui soit mi-programme contributif, mi-programme social, de telle façon que, si on impose, d'une façon beaucoup plus équitable que ce qu'on connaît jusqu'à maintenant, les revenus les plus élevés, on va avoir des entrées en impôt – puis ça n'a pas besoin d'être déguisé, ça peut être dit très clairement – qui pourraient permettre, entre autres choses, de financer d'une deuxième façon un meilleur régime de rentes.

Mme Harel: Bon, écoutez, tantôt vous disiez qu'on allait chercher 12 % ou 13 %. Si on ne fait rien, ça va arriver là, et plus on retarde, ça va arriver là. En fait, l'idée, c'est donc simplement de convenir que plus vite on agit, moins on arrive là, n'est-ce pas? Alors, ça m'a surprise beaucoup, dans votre mémoire, de voir que vous choisissiez la méthode lente, parce que cette méthode lente, elle a un impact important, définitivement, parce que c'est maintenant que les cotisants qui sont de la génération du baby-boom peuvent être mis à contribution. Après, il va être trop tard. Ça, c'est le premier élément.

Bon, le second, écoutez, c'est un choix qui n'est pas celui du gouvernement que de transformer ce programme d'assurance en programme d'assistance, parce que, au contraire, il faut favoriser l'épargne-retraite. Et plus on va la favoriser et plus on va, dans le fond, la promouvoir, mieux on va s'en porter comme société. Je vous rappelle juste les chiffres, là, que je vous donnais tantôt. En l'an 2036 – j'ai calculé que j'aurais 80 ans – il y aura 46 % de la population du Québec, toutes choses étant égales par ailleurs, qui aura plus de 65 ans. Une personne sur deux aura plus de 65 ans.

Mme Lacelle (Denyse): On va être entassés dans nos centres d'accueil.

Mme Harel: Bon. Alors, on est mieux d'être en santé, hein?

Une voix: Ils vont mettre les jeunes dans les centres d'accueil puis...

Mme Harel: Mais, ceci dit, là, compte tenu de cette réalité-là, c'est évident que c'est maintenant qu'il faut faire comprendre aux gens qu'ils doivent épargner pour leur retraite, que c'est vraiment important, que c'est une contribution importante qu'ils font à leurs propres enfants que celle d'épargner maintenant pour eux-mêmes, pour ne pas être à leur charge plus tard. Je pense que c'est là un élément extrêmement important, et – comment vous dire? – tout discours contraire, y compris celui...

Avec raison, dans votre mémoire – puis, là-dessus, il me semble que vous frappez juste – vous dites: La prestation des aînés, dans le fond, c'est un désincitatif à épargner parce qu'un travailleur qui a un revenu moyen, finalement, est quasiment mieux de ne rien mettre de côté et puis d'attendre la prestation des aînés. Mais il va peut-être jouer à la cigale et à la fourmi, comme vous dites aussi, parce que, quand arrivera le temps de toucher sa prestation des aînés, les gouvernements qui se seront succédé décideront peut-être qu'ils ne sont pas liés par celui d'avant. Et, comme ce ne sera pas contributoire et qu'il n'y aura pas, dans le fond, un lien d'assurance qui liera la cotisation avec la prestation, ils pourront tout simplement la diminuer, et les gens se retrouveront plus appauvris qu'ils ne l'avaient anticipé.

Là-dessus, je pense que vous avez raison. Mais autant vous avez raison, dans votre mémoire, pour remettre en question ce genre de programme d'assistance qui vient faire déraper les programmes d'assurance, je pense, autant au Québec il faut vraiment promouvoir les programmes d'assurance.

Le Président (M. Létourneau): Je céderais la parole maintenant au porte-parole de l'opposition officielle, le député de Verdun, et on pourra peut-être continuer la nature des échanges, cher M. St-Jacques.

M. Gautrin: Peut-être voulez-vous répondre brièvement à la question de Mme la ministre? Brièvement, parce que c'est sur mon temps.

M. St-Jacques (Jean-Marie): C'est que je trouve assez curieux qu'on dise que la population des 60 ans va doubler vers les années 2000 quelque chose. Il faudrait que des gens oublient de mourir, parce que, en fait, quand on regarde l'espérance de vie, l'espérance de vie augmente à peine d'une année par décennie. Alors, je pense que, en chiffres relatifs par rapport à l'ensemble de la population, il est évident qu'il y a une augmentation, mais la population des 60 ans et plus ne doublera pas.

M. Gautrin: Je vous remercie. D'ailleurs, dans les variables démographiques, il faut, bien sûr, qu'on fasse des projections à ce moment-là, et les politiques familiales peuvent avoir des influences sur le nombre d'enfants que les gens vont avoir ou les politiques d'immigration peuvent avoir des effets aussi sur la population qu'on peut avoir. Donc, ce n'est pas des variables sur lesquelles on ne peut pas agir.

Je dois vous féliciter pour votre mémoire parce que vous amenez des idées neuves que peut-être on ne partage pas tous ici, autour de la table, mais au moins ça a l'avantage d'ajouter des éléments dans le débat. Si je comprends bien un élément sur lequel vous insistez beaucoup, vous dites que régler, disons, les problèmes du Régime de rentes, c'est aussi régler les problèmes de l'emploi au Québec. Autrement dit, s'il y avait plus de gens qui travaillaient, s'il y avait plus de gens qui cotisaient, on ne serait peut-être pas obligé d'augmenter le taux de cotisation, pas autant qu'on veut en parler. Autrement dit, si on était dans une situation de croissance continue de l'économie, on pourrait maintenir un régime de retraite tel qu'il était sans avoir de cotisations trop élevées, parce que ça vous permettrait, à ce moment-là, de bénéficier en quelque sorte des retombées de la croissance.

Et ce que vous nous dites comme message, si je comprends bien, à l'intérieur de votre document, c'est: Vous, gouvernements, agissez sur la croissance de manière que les cotisations n'augmentent pas trop. Est-ce que je comprends bien votre message, à ce moment-là? C'est ce que vous vouliez dire? Vous oscillez de la tête, mais peut-être que, pour l'enregistrement, il serait bon de dire oui ou non.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. St-Jacques (Jean-Marie): Oui, c'est dans le sens du document. C'est dans le sens de la proposition, je devrais dire.

M. Gautrin: Je vous remercie. Vous avez introduit aussi, dans votre document, un concept un peu nouveau qui est un taux différencié de cotisation avec le salaire. C'était dans la partie 4.1 si je comprends bien. Autrement dit, vous suggérez une diminution de l'exemption annuelle de base, c'est-à-dire que vous êtes prêts à accepter une certaine diminution de l'exemption annuelle de base, mais là vous dites: Le taux de cotisation de la part du taux de cotisation de l'employé doit être graduel avec son salaire. Et c'est dans le même esprit, si je comprends bien, que vous suggériez le déplafonnement du maximum des gains admissibles ou arrivant à près du maximum des gains admissibles en ayant un énorme taux de cotisation. La ministre vous a fait remarquer évidemment que vous brisez, à ce moment-là, le rapport du 25 %, le concept du 25 %.

(11 h 50)

Mais j'aimerais vous entendre un peu plus sur comment vous voyez ça, parce que c'est une idée qui est nouvelle et qui n'a pas été présentée par d'autres personnes. Comment vous articulez ça? Parce qu'à ce moment-là vous comprenez bien que vous ramenez tout à fait... Ce qui est actuellement un régime de pensions prend de plus en plus une forme déguisée de taxation ou d'imposition. Mais ça peut être logique. Je voudrais vraiment vous entendre sur la question.

Mme Lacelle (Denyse): Comme on vous le disait, ce n'est pas obligé d'être déguisé. C'est la première des choses. Alors, je pense que...

M. Gautrin: Alors, c'est réellement une forme, une approche de taxation.

Mme Lacelle (Denyse): C'est une approche différente, effectivement, puis je pense que les Québécois et les Québécoises sont très capables d'entreprendre des débats sains, clairs et démocratiques sur de tels enjeux. On n'a pas besoin de faire des passe-passe puis de cacher des taxes ou de cacher des impôts. Tout le monde, je pense, au Québec est prêt à faire sa part tant et aussi longtemps que le monde est convaincu que l'argent qu'il paie en impôts est bien utilisé à des fins qu'il trouve justes. Première des choses.

Effectivement, ce qui est proposé de toutes sortes de façons dans notre document...

M. Gautrin: Mais je me permets de vous interrompre...

Mme Lacelle (Denyse): Oui.

M. Gautrin: ...quand même sur un point. Vous ne suggérez pas du tout que ça soit pris comme forme d'impôt. Si je remarque, à un moment dans votre document, en boutade vous avez dit: Que ce ne soit surtout pas sous le contrôle du Conseil du trésor. Ça a été en boutade, mais c'est un peu...

Mme Lacelle (Denyse): Quand on parle de la gestion des régimes de retraite, exact. Tant qu'il y a de l'argent en caisse, on ne le laisse pas y toucher.

M. Gautrin: Ha, ha, ha!

Mme Lacelle (Denyse): Effectivement, ce qui est amené dans notre mémoire par toutes sortes de biais, c'est deux sortes de préoccupations. La première, c'est de faire en sorte que les personnes, les travailleurs et les travailleuses à faibles revenus n'aient pas à supporter un fardeau qui soit trop lourd. Déjà, quand on travaille au salaire minimum, puis les augmentations ne viennent pas vite, on a de fortes chances de vivre sous le seuil de la pauvreté.

M. Gautrin: Oui.

Mme Lacelle (Denyse): Ce n'est pas comique. Puis, nous, on pense que ces gens-là n'ont pas la possibilité, s'ils veulent pouvoir continuer à payer leur loyer, de voir leur chèque de paie clair diminuer encore. C'est la première des choses. Donc, il y a toutes sortes de raboutage pour essayer d'offrir une meilleure protection aux travailleurs et aux travailleuses à faibles revenus, tant actuellement quand ils sont des cotisants et des cotisantes, donc toutes sortes de «balançage» autour du taux de cotisation qui pourrait varier, puis de leur assurer une protection au moment de la retraite, donc toutes sortes de «balançage» autour du taux de remplacement qu'il faudrait peut-être élever, dans ce cas-là.

M. Gautrin: Vous permettez? Excusez-moi de vous couper la parole. Mais, implicitement, vous avez donc un niveau minimal de retraite. J'ai l'impression que c'était l'idée...

Mme Lacelle (Denyse): C'est l'idée qui est...

M. Gautrin: ...qui était sous-jacente à votre document. Il y aurait donc un niveau minimal de retraite, indépendamment...

Mme Lacelle (Denyse): Des cotisations réelles.

M. Gautrin: ...du 25 % des cotisations versées.

Mme Lacelle (Denyse): Probablement que, si on avait eu plus de temps pour débattre en coalition de l'ensemble de ces propositions, on serait arrivés à quelque chose qui ressemble à ça. Ça n'a pas été le cas, donc il n'y a pas de...

M. Gautrin: Mais c'était sous-jacent, j'ai l'impression, à votre logique.

Mme Lacelle (Denyse): Mais c'est sous-jacent, effectivement. On aurait pu mieux le formaliser, mieux le ramasser, mais il y a là, effectivement, cette préoccupation-là.

La deuxième préoccupation, c'est, comme on le soulevait tantôt, de faire en sorte que, malgré ça, la caisse balance. Donc, l'argent, on n'a pas encore trouvé la machine pour l'imprimer ou, en tout cas, on ne l'a pas rapatriée. Ha, ha, ha! L'argent, il faut qu'il sorte de quelque part, d'où toute une série de propositions qui visent à faire en sorte que, tout en n'imposant pas un fardeau trop lourd aux personnes à modestes et à faibles revenus, il y ait quand même de l'argent qui rentre, d'où les propositions, d'une part, de déplafonner et, par ailleurs, de système mixte, mi-contributif, mi-programme social. Ce n'est pas les propositions les plus ficelées et les plus soignées qui soient, mais je pense que l'intention, la préoccupation qu'on porte est assez claire, par ailleurs.

M. Gautrin: Je comprends. Vous parlez de...

Mme Lacelle (Denyse): Vous voulez ajouter quelque chose, M. St-Jacques?

M. Gautrin: Vous voulez ajouter quelque chose, M. St-Jacques?

M. St-Jacques (Jean-Marie): En fait, ce qu'on dit et ce sur quoi on insiste surtout, ce sont les gens qui travaillent dans des emplois précaires, qui ont des traitements, à ce moment-là, qui sont dans la catégorie des exemptions et pour lesquels les employeurs ne contribuent pour aucune participation parce que ce niveau de salaire est exempt de contribution. C'est le point sur lequel on insiste surtout. Et on dit: Dans un tel cas, indépendamment du niveau du salaire, l'employeur devrait contribuer à un taux unique.

M. Gautrin: Je comprends aussi. Ça, j'ai compris ça dans votre document. Je vais entrer sur une question... Dans votre recommandation 7, vous semblez être un peu ironiques sur les questions d'harmonisation avec le Régime de pensions du Canada. Quelle est votre position? Est-ce que, pour vous, l'harmonisation entre les deux régimes, c'est quelque chose qui est important? C'est quelque chose à quoi vous tenez?

M. St-Jacques (Jean-Marie): Compte tenu que le gouvernement fédéral a déjà apporté un changement qu'on considère comme radical dans la pension de sécurité de la vieillesse...

M. Gautrin: Oui.

M. St-Jacques (Jean-Marie): ...et que le Régime de pensions du Canada, c'est un régime complémentaire au même titre que la Régie des rentes du Québec était complémentaire à une contribution de base fixée par la pension de sécurité de la vieillesse, nous disons: Si le Québec considère que son Régime de rentes du Québec doit devenir le régime de base par rapport à des régimes privés, il n'est pas essentiel, à ce moment-là, compte tenu que le fédéral a déjà changé, que le Régime de pensions du Canada soit nécessairement harmonisé avec le Régime de rentes du Québec.

M. Gautrin: Donc, pour vous, l'harmonisation, c'est moins important. J'ai une dernière question. Est-ce que je comprends bien que vous voulez étendre le Régime de rentes à l'ensemble de la population, que ces gens-là soient au travail ou non? J'ai cru comprendre ça à un moment, ou pas? Non? Il n'y a pas une volonté d'extension à tout le monde.

Mme Lacelle (Denyse): On n'en a pas discuté.

M. Gautrin: Ah bon, très bien. Sur – j'imagine que vous n'en avez pas parlé – l'augmentation de l'âge de la retraite, vous êtes opposés ou vous êtes en faveur? Vous en avez parlé?

Mme Bérubé (Gisèle): Soixante-cinq ans.

M. Gautrin: Vous voulez maintenir ça à 65 ans.

Mme Lacelle (Denyse): Au plus tard.

M. Gautrin: Au plus tard. Bien, vous savez qu'à l'heure actuelle il y a une possibilité de la prendre un peu avant, avec pénalité actuarielle. Est-ce que, tel que c'est actuellement, ça vous satisfait?

M. St-Jacques (Jean-Marie): On ne commente pas cette partie-là.

M. Gautrin: Vous ne commentez pas cette partie-là.

Mme Lacelle (Denyse): On vous a emmerdés assez comme ça. Ha, ha, ha!

M. Gautrin: La question qu'il y ait eu un débat jusqu'à – et ça, ça touche peut-être un certain nombre de vos membres – refaire contribuer au Régime de rentes les personnes qui touchent déjà une prestation et qui retournent sur le marché du travail, vous êtes en faveur de cette proposition-là?

M. St-Jacques (Jean-Marie): Oui.

Mme Lacelle (Denyse): En toute logique, ce qu'on dit depuis le début, c'est que, quand on travaille, on cotise.

M. Gautrin: Quand vous travaillez, vous cotisez; quand vous ne travaillez pas, vous ne cotisez pas. Vous n'avez pas touché du tout aux questions, éventuellement, de la diminution de prestations, parce que vous pensez qu'il ne faudrait pas toucher à ça du tout ou...

Mme Lacelle (Denyse): Vous avez une note à cet effet-là qui est la note 5, cotisations, où on n'arrête pas de dire qu'il faudrait peut-être penser à les augmenter dans certains cas, ce n'est sûrement pas dire qu'il faut les diminuer.

M. Gautrin: C'est-à-dire que vous comprenez quand même que des prestations... Je pense, par exemple, à des prestations au conjoint survivant qui avaient une importance pour les personnes, disons, de votre catégorie d'âge, que vous représentez, parce que souvent il n'y avait qu'une seule personne qui travaillait. Il y a eu des mutations sociologiques importantes dans la société qui font que, là, souvent, les deux personnes sont des contributeurs au régime. Est-ce que c'est quelque chose qui est...

Mme Lacelle (Denyse): On n'a pas discuté...

M. Gautrin: Vous n'avez pas discuté de ça.

Mme Lacelle (Denyse): ...non plus de ces deux autres sections que sont les pensions d'invalidité et les pensions au conjoint. C'est des aspects qu'on n'a pas abordés dans nos discussions, sur lesquels on n'a donc pas de position collective.

M. Gautrin: Bien, écoutez, moi, je vous remercie des pistes originales que vous avez soumises à notre discussion. Je crois que c'est un débat important qu'on doit avoir entre nous, et vous avez certainement amené des pistes originales et qu'on doit considérer.

Le Président (M. Létourneau): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, M. le Président. Messieurs et mesdames de la Coalition des aînées et aînés du Québec, comme député cadet du Parti libéral, votre présentation m'intéresse beaucoup. Je ne sais pas si ça a été volontaire ou involontaire, mais je pense que tantôt Mme la ministre a induit un peu la commission en erreur dans le calcul de son âge en 2036...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Copeman: ...parce que, en 2036, moi, je vais avoir 76 ans. Ça fait que, si Mme la ministre a juste quatre ans de plus vieux que moi, là, c'est que...

Mme Lacelle (Denyse): C'est parce qu'elle vieillit moins vite.

M. Copeman: ...elle vieillit moins vite.

Mme Harel: Quatre-vingt-douze.

M. Copeman: Quatre-vingt-douze? Ah, O.K.

M. Gautrin: Il y a un problème relatif. C'est sûr que, si tu augmentes la vitesse proche de la vitesse de la lumière, il y a une contraction du temps...

M. Copeman: Comment est-ce que...

Le Président (M. Létourneau): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Le physicien, là, est en train de proposer une thèse du temps.

On sait qu'à peu près 7 % des sources de revenu pour les personnes aînées proviennent des gains d'emploi, toujours. Dans le système actuel, pour toucher la rente de retraite, il faut ne plus travailler. Mais il y a un certain pourcentage des personnes à la retraite qui arrêtent de travailler, touchent leur rente et recommencent à travailler, et elles ne sont pas cotisées par la suite. Comment est-ce que, vous, vous réagiriez à une proposition gouvernementale à l'effet que ces personnes-là doivent continuer à cotiser après l'âge de la retraite si elles reprennent le travail? Est-ce que ce serait acceptable pour vous?

(12 heures)

Mme Lacelle (Denyse): M. le député cadet, si vous aviez écouté la question posée par votre confrère et la réponse qui lui a été apportée, vous n'auriez pas reposé la question.

Mme Bérubé (Gisèle): Oui, nous serions d'accord.

M. Copeman: Bon.

Mme Bérubé (Gisèle): Quelqu'un travaille...

Mme Lacelle (Denyse): Il cotise.

Mme Bérubé (Gisèle): ...il cotise.

M. Copeman: Merci pour la leçon, madame.

Mme Harel: M. le Président.

Le Président (M. Létourneau): Oui, Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, écoutez, suite à cet échange qu'on a eu avec M. St-Jacques, effectivement, M. St-Jacques, vous aviez raison. En fait, exactement, c'est ceci: c'est 46 % des personnes qui auront 65 ans et plus mais sur le total des personnes qui ont 20 ans et plus. En d'autres termes, c'est par rapport aux 20-64. Donc, par rapport aux 20-64, les retraités qui en ont plus de 65 sont 46 % de la population dite active, les retraités...

M. Gautrin: C'est le pourcentage de la population active.

Mme Harel: ...sur les personnes actives, c'est ça. Donc, ça revient à l'idée qu'il va y avoir, si vous voulez, 46 % des plus de 65 ans par rapport à la population de 20-64 ans. Donc, vous aviez raison, et ça, c'est en l'an 2030. Donc, j'avais raison, j'aurai 84 ans, et j'espère être là encore, en vous remerciant de votre contribution et en vous signalant qu'il y a là, en tout cas, matière à réflexion. Mais je vous invite à la poursuivre comme, nous aussi, on va la poursuivre, d'ailleurs. Merci.

Le Président (M. Létourneau): Une dernière, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Il nous reste un peu de temps, et je voudrais vous poser une question parce que je n'ai pas bien compris à ce moment-là... Je vous ai posé la question, vous m'avez dit non, vous ne voulez pas que ça soit généralisé. Puis je ne comprends pas votre document, la partie 6 de votre présentation, parce que vous faites une comparaison – et c'est pour ça que je voudrais poser la question – avec l'assurance automobile ou avec l'assurance-médicaments, qui sont des régimes universels, donc qui touchent l'ensemble de toute la population, indépendamment qu'elle soit sur le marché du travail ou non. Et j'avais cru comprendre, à cause de la comparaison que vous faisiez à ce moment-là, que votre proposition était d'étendre le Régime de rentes d'une manière universelle à tout le monde. Mais ce n'est pas ce que vous vouliez dire dans cette partie-là. Je m'excuse, je faisais référence, à ce moment-là, à cette partie-là.

Mme Lacelle (Denyse): Effectivement, en la relisant puis en vous entendant, je comprends qu'on peut comprendre ça. Il faudrait...

Mme Bérubé (Gisèle): Ce n'était pas l'aspect universel.

Mme Lacelle (Denyse): C'est ça. Ce n'est pas l'aspect universel sur lequel on voulait mettre l'emphase. Remarquez qu'on serait peut-être pour si on en discutait...

M. Gautrin: Oui, je comprends bien.

Mme Lacelle (Denyse): ...mais ce n'était pas quelque chose qu'on avait avancé. Ce à quoi on fait référence dans cette section-là, c'est l'idée que la caisse de retraite soit financée par, d'une part, les cotisations, mais aussi par le régime fiscal général.

M. Gautrin: Je comprends. Je vous remercie, mais vous comprenez qu'on aurait pu comme ça être amené à...

Mme Lacelle (Denyse): Oui, ça aurait pu être lu de cette façon-là, effectivement. Vous avez raison.

M. Gautrin: Merci.

Mme Lacelle (Denyse): J'en suis désolée.

Le Président (M. Létourneau): Alors, le temps étant écoulé, Mmes Bérubé, Lecompte et Lacelle, M. St-Jacques, on vous remercie de votre présentation, et j'ajourne les travaux au jeudi 17 octobre, 15 heures.

(Fin de la séance à 12 h 5)


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