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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Tuesday, June 10, 1997 - Vol. 35 N° 89

Étude détaillée du projet de loi n° 144 - Loi sur les prestations familiales


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Table des matières

Documents déposés

Remarques préliminaires

Étude détaillée


Autres intervenants
M. Rosaire Bertrand, président
Mme Solange Charest, présidente suppléante
Mme Pauline Marois
M. Léandre Dion
Mme Nicole Loiselle
Mme Marie Malavoy
M. Rémy Désilets
M. Benoît Laprise
*M. Marc Lacroix, Régie des rentes du Québec
*M. Louis-Marc Laliberté, idem
*M. Claude Legault, idem
*Mme Lise Gauthier, ministère du Revenu
*M. Thomas Duperré, ministère de la Santé et des Services sociaux
*Mme Francine Gauvin, ministère de la Sécurité du revenu
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Onze heures dix-neuf minutes)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Avant qu'on commence nos travaux, juste pour votre information, on a discuté de la question des lumières. Il y a quelqu'un actuellement qui vérifie, avec les spécialistes, les techniciens, durant le courant de la journée, pour voir si on doit vraiment garder cette intensité. Alors, simplement pour vous faire savoir, les membres de la commission, que les autorités ont pris connaissance de la problématique.

Bonjour, tout le monde. Mme la secrétaire, est-ce que le quorum est constaté?

(11 h 20)

La Secrétaire: Oui, M. le Président, nous avons quorum.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup. Je déclare donc la séance ouverte et je vous rappelle que le mandat de la commission des affaires sociales est de se réunir afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 144, Loi sur les prestations familiales.

Est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. LeSage (Hull) sera remplacé par M. Gautrin (Verdun); M. Paradis (Brome-Missisquoi) par M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup. Je vous rappelle qu'à l'item «remarques préliminaires» chaque membre a 20 minutes, et je commence par Mme la ministre, pour vos remarques préliminaires.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Comme nous avons terminé nos consultations vendredi en début de soirée et que nous avions fait le point sur un certain nombre d'éléments, parce qu'on consultait, évidemment, sur les prestations familiales et sur la loi concernant le nouveau ministère, de même que les modifications à l'Office des services de garde et à l'ensemble du réseau des services de garde, je n'ai pas l'intention de présenter de remarques préliminaires. Simplement, M. le Président, cependant, vous dire que j'avais l'intention de déposer les amendements immédiatement, les projets d'amendements, les papillons, comme on les appelle dans notre jargon, les projets d'amendements, de sorte que les membres de la commission puissent les avoir immédiatement. Je crois qu'il y en a six. C'est ça?

Une voix: Sept.

Mme Marois: Sept, pardon. Donc, ça permettra aux membres de pouvoir mieux travailler. Et aussi le Règlement sur les prestations familiales, parce que, évidemment, pour mieux comprendre certains aspects de la loi, je crois que, d'avoir en main le règlement, va nous aider à progresser beaucoup plus rapidement.

Alors, je vais demander à mes gens de les déposer. Évidemment, c'est une version non définitive, vous le comprendrez, parce que cela doit passer éventuellement au Conseil avec la loi, une fois qu'elle sera adoptée. Ça va de soi. Je pense qu'on s'entend bien sur cela.


Documents déposés

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Les documents sont reçus. Ils seront transmis, pour l'information des membres, aussitôt que possible.

Mme Marois: Parfait. Je pense que ça facilitera notre travail.

Vous allez me permettre, M. le Président, immédiatement de vous présenter les gens qui sont avec moi, parce que, comme c'est une loi qui comporte certains aspects assez techniques, je pense qu'il est préférable de se référer à des personnes de nos institutions qui sont plus à même de répondre parfois à des questions, ce qui nous évite de nous perdre dans certains aspects alors que ça ne touche pas nécessairement au fond des choses.

Donc, M. Legault, je pense que beaucoup de mes collègues connaissent, qui est le président de la Régie des rentes du Québec, M. Claude Legault; à mon extrême droite, M. Marc Lacroix, qui est vice-président à la Régie des rentes; et, à ma droite, M. Louis-Marc Laliberté, qui est conseiller juridique à la Régie, toujours.

Alors, je suis prête, quant à moi, à ce que nous débutions l'étude du projet de loi n° 144 sur les prestations familiales.


Remarques préliminaires

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, Mme la ministre, et j'invite le porte-parole de l'opposition, M. le député de Jacques-Cartier.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. En premier lieu, je veux remercier la ministre pour le dépôt de ces documents. C'est souvent une demande, une réclamation de l'opposition pour mieux comprendre les articles de la loi. D'avoir le règlement et d'avoir ça dès le début de nos travaux, je pense, va nous aider à clarifier la situation et, dans ce projet de loi, c'est avant tout ça qui est l'objectif de l'opposition officielle. Il y a des changements qui sont importants et nous avons eu le dépôt de plusieurs tableaux dans les semaines récentes. Quand même, il y a beaucoup de questions qui demeurent dans les familles, qui ne comprennent pas tous les changements. Alors, le travail qu'on va faire ensemble, quant à moi, c'est un travail d'éclairage – on ne manque pas d'éclairage aujourd'hui – mais c'est quelque chose qu'on va chercher à la fois dans le texte de nos lois – et l'éclairage qui est tout à fait évident dans le salon rouge ce matin.

Il y a plusieurs points, quand même, qui ont été soulevés par les groupes qui ont témoigné ici, et je pense qu'on a tout intérêt à prendre quelques principes en compte. Au moment où on va traverser l'étude article par article, on tombe rapidement dans les détails, mais je pense qu'il y a quelques principes de fond, quelques éléments de fond qui ont été soulevés par plusieurs groupes.

Moi, peut-être que le premier que je retiens était le nombre de témoins qui sont venus pour défendre le principe de l'universalité de nos programmes et dire que c'est très important qu'il y ait un soutien accordé à toutes les familles québécoises et pas uniquement à certaines des familles québécoises. Alors, en établissant les barèmes, les critères, les choses qui sont dans le projet de loi n° 144, je pense qu'on a tout intérêt, comme parlementaires, à rappeler le nombre de groupes qui sont venus ici pour voir qu'effectivement il y a un principe fort intéressant de défendre l'universalité des programmes sociaux, et ça, c'est quelque chose qu'il faut regarder de près.

Deuxièmement, quelque chose que je n'ai pas soulevé vendredi passé, quand nous avons terminé nos travaux, c'est que tôt ou tard le gouvernement doit donner aux parlementaires, à la population la ventilation des crédits alloués pour les conséquences d'une nouvelle politique familiale. Parce qu'il y avait, au moment du dépôt du budget du ministre des Finances, un 314 000 000 $ qui est non négligeable, c'est presque 1 % de nos dépenses de programmes qui sont non identifiées dans le budget, et ça, c'est très, très important d'avoir une idée plus claire, à savoir comment cet argent va être utilisé. Dans les chiffres qui ont réussi à confondre le monde, on ajoute, on coupe, il y a les conséquences ici et là des décisions qui ont été prises. Alors, je pense qu'on a tout intérêt à voir comment le gouvernement va utiliser le 314 000 000 $.

Je pense que c'est très important parce que ça mène à un des autres principes qui ont été soulevés en commission parlementaire, c'est toujours cette notion d'un équilibre ou une équité entre l'offre des services aux parents québécois et l'allocation ou le soutien financier accordé aux parents. Parce que, si on veut vraiment respecter tous les choix des parents... Nous l'avons répété, on va regarder ça dans l'étude détaillée du projet de loi n° 145, les garderies c'est un outil nécessaire, les garderies c'est un outil essentiel pour les couples, ou soit si c'est une femme monoparentale, ou si les deux conjoints travaillent. Alors, on convient que le nombre de places de qualité dans des garderies de qualité, au Québec, est un enjeu majeur pour plusieurs familles québécoises. Mais il faut rappeler aussi qu'il y a d'autres familles québécoises qui ont fait d'autres choix. Il faut toujours garder à l'esprit un certain équilibre entre les besoins de ces familles, où un parent, souvent la mère, a fait le choix de rester à la maison pendant la petite enfance de leurs enfants, et ne pas trop exagérer sur un côté ou sur l'autre côté. Et ma crainte, et c'est pourquoi on aimerait voir la ventilation des budgets, c'est que, en ajoutant d'une façon très importante dans les services de garde, on va imposer davantage sur certaines familles de la classe moyenne qui ont décidé de s'arranger ou de faire un autre choix. Et je pense qu'en respectant ces choix il y a un équilibre, il y a une balance, il y a une équité qu'il faut préserver, et je pense que c'est uniquement en ayant un survol de l'ensemble des engagements financiers de ce gouvernement, comment il va dépenser l'argent pour soutenir les besoins des familles québécoises, qu'on peut tirer les conclusions quant au maintien ou au respect de cet équilibre qui est déjà là dans plusieurs programmes que nous avons mis en place pour le soutien des familles québécoises.

Nous avons aussi plusieurs questions quant à l'arrimage de l'allocation familiale avec l'aide sociale. Nous avons vu avec le professeur Ruth Rose qu'elle a soulevé quelques questions. Je pense qu'on est en train de corriger, les barèmes qui ont été changés ont répondu, mais je pense que l'étude détaillée va nous permettre de regarder attentivement le questionnement que Mme Rose a soulevé, juste pour s'assurer que le départ de l'aide sociale et le réaménagement du programme n'auront pas des conséquences néfastes.

Je sais que mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce a déjà indiqué que, sur plusieurs des articles de loi, il y a des mécaniques qui risquent d'être très compliquées à gérer, parce que, pour préserver certains des bénéfices périphériques aux personnes qui bénéficient de l'aide sociale, il y a une certaine gymnastique qu'il faut faire au niveau de la gestion, qui semble être compliquée à première vue. Alors, peut-être qu'après les explications des personnes responsables on aura une meilleure façon de comprendre comment ça va, mais, à première vue, il risque d'y avoir des ratés, des complications inutiles.

Je peux faire cette remarque de façon non partisane, parce que j'ai deux grandes réformes dans le domaine de l'aide sociale ou des affaires sociales à l'esprit. Premièrement, dans le dernier gouvernement libéral, il y avait un changement de système pour les familles qui bénéficient d'une exonération dans les services de garde, à l'OSGE, et ça a coûté au gouvernement beaucoup plus qu'on pensait parce que l'ordinateur, malgré les promesses de nos experts, n'a pas livré la marchandise. Je pense aussi au problème grave qui continue dans la gestion de notre système des pensions alimentaires. Même si tout va bien entre deux ex-conjoints, ça prend au moins quatre mois avant que la personne qui reçoit une pension alimentaire encaisse le premier chèque. Alors, pour une famille où ce n'est pas évident où elle peut toucher son argent, un délai de quatre mois, des fois, cause des préjudices importants. Alors, comme je dis, il y a toujours les belles promesses des fournisseurs de logiciels et d'ordinateurs qui arrivent et qui nous convainquent qu'ils sont capables de gérer les choses.aaa

Moi, j'ai fait du porte-à-porte dans les comtés de Beauce-Sud et Prévost à partir de notre belle liste électorale permanente, et le nombre de fautes... J'ai trouvé un appartement de trois pièces et demie avec 12 personnes inscrites sur la liste électorale, parce que le nouveau système n'a pas radié les noms au moment des déménagements. Alors, on ajoute, on ajoute, et il y avait comme 12 adultes dans un petit appartement. C'était dans la liste électorale permanente, qui ne fera pas défaut. J'ai entendu tous les engagements qui ont été pris par le Directeur général des élections; Ça va être une liste parfaite à 100 %.

(11 h 30)

Moi, je ne suis pas un expert dans les ordinateurs, M. le Président, et j'ai toujours un esprit très sceptique quant à la livraison de la marchandise. Alors, je pense qu'on a tout intérêt à regarder comme il faut que le système qu'on va mettre en place pour la gestion des allocations familiales ne causera pas d'autres ratés, des retards indus pour les familles québécoises quant à la gestion. Alors, je pense que c'est notre devoir comme parlementaires, c'est notre devoir de représentants des familles de nos comtés de voir comment le système va fonctionner et, pour ça, je veux féliciter de nouveau la ministre pour le règlement qui va mettre au clair le fonctionnement: Qui doit faire quoi, quand? En sortant de l'hôpital, c'est quoi le formulaire que la mère ou le père doit remplir? On va envoyer ça à qui? C'est quoi les délais d'attente avant de recevoir la première allocation familiale? Etc.

Il y a une grande liste de questions ponctuelles, pratiques, et je pense que c'est le moment privilégié pour les parlementaires de poser ce genre de questions, de prévoir peut-être des choses qui ne marcheraient pas et, si on peut les corriger avant... comme je dis, et c'est une remarque non partisane, parce que les deux gouvernements ont été coupables de faire les belles promesses d'une grande réforme avec les logiciels, ordinateurs, etc., et on a vu, quand on a essayé d'utiliser le système, que c'était moins évident... Je pense que ça fait partie de la nature humaine, ce n'est pas un reproche à qui que ce soit, mais c'est des choses qui arrivent dans la vie et, si on peut prévoir des choses comme ça, c'est tant mieux.

Aussi, je me réjouis, au moins je ne suis pas la seule personne au Québec qui tombe des fois dans la confusion. Quelques paroles de la ministre, la semaine passée, m'ont fait croire que je suis le seul qui a de la misère à comprendre les tableaux: Qui gagne et qui perd? et tout ça. Alors, j'étais très heureux de voir dans La Presse de samedi que M. Chapleau, qui est le caricaturiste de La Presse , lui aussi, a trouvé quelque misère à comprendre entièrement la nouvelle politique familiale. Alors, au moins, il y en a deux maintenant...

Mme Marois: Ha, ha, ha!

M. Kelley: ...le député de Jacques-Cartier et le caricaturiste du Devoir ...

Mme Marois: De La Presse , de La Presse .

M. Kelley: ...qui ont quelques questions qui restent, quelques éclairages qu'il faut faire avant de mieux comprendre le système. Comme je dis, on regarde les tableaux, on voit sur les tableaux l'impact de certaines des décisions, mais on en exclut d'autres; entre autres, certains des tableaux qui ont été déposés devant cette commission la semaine passée n'ont pas inclus l'allocation à la naissance. Alors, je comprends qu'il y a une clause crépusculaire pour les familles existantes dans le système, mais, par contre, si je reviens sur le thème de l'équité que j'ai soulevé tantôt, à court, à moyen terme, il y a moins d'allocations et plus de services. Et ça, c'est quelque chose qu'il faut regarder de près. Peut-être que dans nos tableaux, surtout le tableau qui touchait la famille de quatre enfants et 60 000 $, c'est évident que la perte de l'allocation à la naissance est un oubli important parce que ça va changer le portrait.

Alors, je deviens toujours curieux, mais peut-être qu'après notre étude détaillée...de voir dans la page 6 du discours de la ministre, au moment de sa conférence de presse le 15 mai dernier, de voir que 95 % des familles verront leurs revenus augmenter ou demeurer les mêmes, à partir de septembre prochain... Par ailleurs, presque 55 000 familles nombreuses à revenus moyens ou élevés, de trois enfants ou plus, ou 5 % des familles québécoises verront, pour leur part, leur aide gouvernementale diminuer temporairement, mais ça va être compensé à partir de juillet 1998. Quand je regarde les barèmes – et même le barème qui était déposé, c'est une famille qui était perdante – il y avait un écart entre ce qu'ils reçoivent maintenant et ce qu'ils vont recevoir, pas uniquement à partir de juillet de cette année, mais à partir de juillet de l'année prochaine aussi, et c'est une famille nombreuse. Alors, j'ai de la misère à comprendre toujours. C'est évident, l'économie de la réforme qui est devant nous, c'est de prendre l'argent des familles en haut de 60 000 $, alors les 32 % des familles québécoises avec un revenu supérieur à 60 000 $, d'enlever l'argent d'eux autres pour enrichir les barèmes pour les familles à faibles revenus, les familles à revenus modestes. C'est ça que j'ai compris de l'économie de la loi n° 144. Alors, de toute évidence, il y aura, à l'oeil, peut-être le tiers des familles québécoises qui sortiront perdantes. Alors, si je ne me trompe... On va regarder ça de près dans l'étude détaillée, mais, si j'ai bien compris le principe et l'objectif du projet de loi, c'est que, de toute évidence, puis, j'imagine, les familles de la plupart des parlementaires autour de la table auront moins d'argent à la fin... Alors, et comme je dis, ça, ce n'est pas quelque chose que je veux contester, c'est juste quelque chose que je veux mieux comprendre, et je ne vois pas comment on peut dire que 95 % des familles verront leurs revenus augmenter ou demeurer les mêmes. À ma compréhension de l'économie du projet de loi, ce n'est pas possible. Alors, on verra, et c'est peut-être quelque chose avec l'éclairage encore plus fort aujourd'hui que d'habitude... ça va même éclairer le député de Jacques-Cartier, mais je pense qu'il y a quand même des choses très importantes.

Il y a quelques autres questions techniques qui ont été soulevées à la fois sur la notion de conjoint. J'ai participé aux délibérations de la commission des institutions et on n'a pas loin de 16 définitions différentes de «conjoint» dans les lois québécoises. Alors, je pense qu'il faut mieux comprendre c'est quoi un conjoint et ce n'est pas si évident que ça. Également, il y avait toute la notion... les revenus de quel conjoint seront calculés pour établir le revenu familial et, en conséquence, les barèmes pour l'allocation familiale? Ça, c'est compliqué. Ce n'est pas qu'on veut mêler les cartes, mais il y a quelques groupes qui ont soulevé le fait: Le conjoint non parent qui demeure avec les enfants, est-ce que ses revenus vont être calculés afin de mieux comprendre la situation économique de la famille dans son ensemble? Quel traitement est-ce qu'on va faire pour les pensions alimentaires? Il y a des groupes qui sont venus ici pour soulever cette question. Je pense qu'on a tout intérêt à regarder ça comme il faut, mais c'est également une question compliquée, le nouveau régime pour les pensions alimentaires, et c'est quoi le traitement qu'on va donner à ça aussi.

Finalement, et je pense que mon collègue de Nelligan va expliquer ça davantage, il y avait le témoignage de M. Comeau, le président de la Commission d'accès à l'information, qui a soulevé des questions, et je pense qu'on a tout intérêt à regarder ça comme il faut. Je prends la parole du président de la commission de la culture, le député de Lévis, qui a dit devant la commission de la culture que la protection de la vie privée pour le XXIe siècle va devenir un petit peu comme la protection de l'environnement de nos jours et qu'on a tout intérêt, devant le monde de l'ordinateur, devant le monde du couplage des fichiers, juste de s'assurer comme il faut qu'il y a une protection étanche, parce que, en comparaison avec l'ancien système de l'allocation familiale universelle où il y avait très peu de renseignements personnels requis pour le bon fonctionnement du système, on tombe maintenant dans un système où il y a d'autres facteurs, le statut civil, le statut du couple, les revenus de la famille, qui deviennent essentiels pour la bonne gestion du système.

Alors, avec ces données qui ont un caractère peut-être plus personnel, encore plus privilégié, je pense qu'on a tout intérêt à indiquer davantage à nos gestionnaires de la fonction publique jusqu'à quel point les parlementaires trouvent que, ça, c'est des enjeux très importants pour notre société et à faire tout ce qu'il faut faire pour s'assurer de la bonne protection de la vie privée de nos commettants, de nos concitoyens et concitoyennes.

(11 h 40)

Alors, sur ça, comme je dis, je pense que ça va être une occasion intéressante pour les parlementaires de bien comprendre les changements et on va travailler, on va faire notre devoir comme opposition officielle, poser beaucoup de questions, parce que c'est notre devoir, et c'est le devoir du côté ministériel, dans la mesure du possible, de fournir des réponses. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Juste quelques commentaires. C'est surtout en ma qualité de porte-parole de l'opposition officielle en matière de services aux personnes handicapées et en matière de sécurité du revenu que j'ai l'intention de suivre de très près les travaux de cette commission sur le projet de loi n° 144.

J'ai cru comprendre, M. le Président, et j'imagine que ça va se faire au moment où on commencera la discussion sur les dispositions particulières à l'allocation pour enfant handicapé, que l'OPHQ, l'Office des personnes handicapées du Québec, s'est intéressé à ce dossier et j'ai cru comprendre qu'il y avait une correspondance de l'OPHQ portant sur les articles 11 à 15. Si c'est inexact, on va s'ajuster en conséquence. Mais, de façon particulière, je désire et espère qu'on puisse avoir les informations, les éclaircissements de l'OPHQ quant à la portée des articles 11 à 15. Une comparaison simple avec la loi sur les allocations familiales qui régissait les allocations des enfants handicapés n'est pas très «éclaircissante», parce qu'il s'agissait plutôt des règlements adoptés en vertu des allocations d'aide aux familles, Lois refondues du Québec, chapitre A-17, publiés par la Régie des rentes. Ils sont compliqués. Je pense que, si on avait un jugement global de l'OPHQ quant à l'impact des nouvelles dispositions contenues dans la loi n° 144, ça pourrait éclairer davantage les parlementaires autour de la table. Ce n'est pas évident de faire la comparaison des articles 11 à 15 avec des règlements adoptés en vertu de la loi précitée, les allocations d'aide aux familles, à savoir si on resserre les critères, si c'est plus libéral, les critères sont plus libéraux dans leur sens strict du mot, à savoir si on aide les familles avec des enfants handicapés ou si on rend leur tâche plus difficile. Alors, on va suivre ça de très près rendu aux articles 11 à 15.

Il y a également une série d'articles, M. le Président, touchant la Loi sur la sécurité du revenu, entre autres, les articles 51 et 55 de la loi n° 144. Je vous rappelle simplement, M. le Président, que, lors de notre consultation sur le livre vert sur la réforme de la sécurité du revenu, Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité avait indiqué que le but de la réforme, en partie, était de simplifier notre système d'aide sociale, de réduire le nombre des barèmes applicables, et pour enfants et pour adultes. En fin de compte, si ma mémoire est fidèle, M. le Président, on parlait de sortir les enfants de l'aide sociale, du calcul de l'aide sociale, pour être compensés par les allocations familiales.

Si la lecture du projet de loi est exacte, et c'est toujours un gros «si», hein, M. le Président, on ne se limite pas aux députés de Jacques-Cartier et Chapleau qui deviennent un peu confus dans ces affaires – elles sont très techniques – il y a également le député de Notre-Dame-de-Grâce qui a besoin des éclaircissements de temps en temps... On ne sort pas les enfants du calcul de l'aide sociale, on augmente le barème des adultes pour les enfants et, dans un deuxième temps, on soustrait le montant des majorations pour enfants à charge déterminé par le Règlement sur les allocations familiales. Je ne suis pas convaincu que c'est la meilleure façon de procéder, M. le Président, d'augmenter, de majorer le barème des adultes pour les enfants puis de soustraire les allocations familiales par la suite. Il me semble que, si on est à la recherche d'un système de simplification de notre régime, on rend la tâche très compliquée et, d'ailleurs, on a certaines indications, même du ministère de la Sécurité du revenu, que ce calcul serait, pas difficile, mais qu'il serait onéreux en termes de calcul pour chaque famille à l'aide sociale.

Alors, c'est les commentaires que j'avais à faire, M. le Président, et, une fois rendu, comme je l'ai indiqué, aux articles 11 à 15, en ce qui concerne les enfants handicapés, et surtout... mais pas limitant les articles 51 à 55, en ce qui concerne la Loi sur la sécurité du revenu, on va suivre ça de très près, exiger des clarifications de la part de la ministre et peut-être des conseillers de la Régie des rentes et du ministère de la Sécurité du revenu à cet égard. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions pour des remarques préliminaires? M. le député de Nelligan.


M. Russell Williams

M. Williams: Oui, merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais cibler mes commentaires aujourd'hui sur les questions de «privacer» la protection de l'information confidentielle des familles québécoises. Comme j'ai eu l'opportunité de le dire pendant le débat sur le principe du projet de loi n° 144, je suis inquiet. J'ai beaucoup de questions sur ça. Je pense qu'on doit être responsable, M. le Président, de s'assurer... Avant d'adopter les articles du projet de loi n° 144, on doit être assuré que la vie privée, le secret fiscal, l'information confidentielle de toutes les familles québécoises sont bel et bien protégés, et, au moment où on se parle, je ne suis pas convaincu de ça, M. le Président. Actuellement, je suis loin d'être convaincu de ça. Plus je lis le projet de loi, plus j'ai de questions. Et il faut que je demande pourquoi le projet de loi inclut des articles, comme nous l'avons vu avec l'article 47 qui ajoute l'échange d'informations sur le revenu des familles à une longue liste d'autres échanges d'informations dans les mégafichiers de ce gouvernement, dans la centrale de données, qui mettent en péril la vie privée de la population québécoise, et j'espère qu'on pourra nous assurer pendant ce débat que la vie privée est protégée, M. le Président.

Je voudrais juste citer quelque chose que j'ai cité pendant le débat sur les projets de loi nos 36 et 32 l'année passée, quand le gouvernement péquiste a commencé cette fameuse banque de données, centrale de données, couplage et mégafichier, où nous avons voté contre, M. le Président. Je voudrais juste citer le U.S. Privacy Protection Study Commission, 1977: «The real danger is the gradual erosion of individual liberties through automation, integration, interconnection of many small, separate record-keeping systems, each of which alone may seem innocuous, even benevolent and wholly justifiable.» M. le Président, le projet de loi n° 144 est exactement ça. Peut-être qu'il y a quelque chose d'utile sur l'échange d'informations, et si c'était juste ça, peut-être qu'on peut tous vivre avec ça. Mais, quand on ajoute cet échange d'informations sur le revenu de chaque famille qui veut avoir une allocation familiale, je pense que c'est dangereux, ça met en péril la vie privée de la famille québécoise, et on doit certainement questionner ces mesures.

La Commission d'accès à l'information, M. le Président, ils ont fait une présentation vendredi passé, ici, dans cette chambre, devant la commission des affaires sociales. Quand j'ai questionné M. Comeau, le président de la Commission d'accès à l'information, à la fin, j'ai dit qu'il me semble qu'avec l'article 47 – je ne le lis pas parce que c'est assez compliqué... mais ça ajoute la responsabilité du ministre du Revenu d'envoyer toute l'information fiscale à la Régie des rentes sur chaque famille qui veut avoir une allocation familiale. Je lui ai demandé: Est-ce qu'il pense que ça cause un problème? Moi-même, j'ai dit que ça cause des graves problèmes aux familles québécoises; j'ai pensé que ce n'est pas nécessaire et que c'est potentiellement dangereux, particulièrement, M. le Président, parce que, juste dans les derniers deux mois, nous avons eu des manchettes dans les médias avec les problèmes sur le terrain, le marché noir d'informations privées sur la population québécoise. C'est grave. Avant d'embarquer dans cette affaire-là, M. le Président, nous devons assurer que toute la protection est en place.

Et, comme le député de Jacques-Cartier l'a déjà mentionné, les règles sont en train de changer, la technologie est en train de changer, ça avance tellement vite, et on doit être prudent avant d'adopter des projets de loi comme ça. Comme je l'ai mentionné vendredi passé, je ne mets aucun doute sur la bonne foi de la ministre sur cette question. Mais, avec toute la bonne foi, on peut faire des erreurs. Quand nous sommes en train d'ajouter un autre échange d'informations sur 1 500 000 familles québécoises, c'est potentiellement dangereux.

(11 h 50)

Quand j'ai questionné M. Comeau sur ça, à la fin, il a dit: Vous avez – en parlant de moi – soulevé le problème réel de la transmission, dans un premier temps, possiblement de l'ensemble des renseignements concernant toutes les familles du Québec. Là, il y a un problème, et ce problème est en discussion actuellement. Nous espérons résoudre la présentation du projet, de l'entente, c'est un problème effectivement. La Commission a dit que c'est un problème. On espère qu'ensemble on va trouver une solution.

Mais, M. le Président, quand je vois comment le projet de loi est bâti... Je peux citer quelques articles. Je sais que, plus tard, nous allons faire article par article, mais je pense que j'ai besoin de faire un court résumé de ces articles qui peuvent toucher, entre autres, la vie privée de la population québécoise.

L'article 10 dit que chaque famille doit soumettre une déclaration de revenus. Chaque famille qui veut avoir une allocation familiale doit soumettre une déclaration de revenus. Bon. On va demander: Est-ce que c'est un problème et c'est quoi la logique en arrière de ça? Mais chaque famille doit soumettre cette déclaration de revenus.

L'article 28: Chaque famille doit faire un rapport de tout changement de son statut, tout de suite, aux instances décisionnelles.

L'article 33, pour faire ça en ordre, dit que l'échange avec le ministère du Revenu, l'exactitude des renseignements communiqués, ce n'est pas la compétence de la Régie ni celle du Tribunal administratif du Québec. Il doit transmettre ça, il doit donner à la Régie toute l'information fiscale – si ce n'est pas toute, l'information assez secrète à la Régie – mais l'article dit: S'il y a un problème, si le ministère du Revenu s'est trompé, ce n'est pas la compétence de la Régie ni du Tribunal administratif du Québec. Il doit faire contestation selon la Loi sur les impôts. Il doit transmettre ça, mais il n'a pas de compétence. Je vais avoir des questions sur ça, M. le Président. Déjà, la ministre a compris qu'il va y avoir des dépenses plus élevées, maintenant, avec tout cet échange d'informations des mégafichiers, les grandes centrales de données, les échanges d'informations.

À l'article 40, la ministre a mis que les dépenses doivent être payées selon les formulaires du gouvernement. Avec ça, je pense qu'elle veut s'assurer que ce n'est pas son département qui paye. Déjà, c'est une démonstration claire qu'il va y avoir des dépenses.

À l'article 41, il y a un pouvoir de déléguer et de sous-déléguer. Il va y avoir un pouvoir de déléguer tout pouvoir dans ce projet de loi, et il va y avoir un autre pouvoir de sous-déléguer ce pouvoir. M. le Président, vous pouvez dire: Effectivement, ça va être une façon de s'assurer que c'est efficace. Mais, quand on mentionne qu'une partie de ces pouvoirs, c'est un mégafichier de toute l'information, où c'est de l'information sensible sur les revenus de chaque famille, si le ministre peut déléguer ce pouvoir et que ce pouvoir peut être sous-délégué, moi, je voudrais m'assurer que, dans cette sous-délégation ou délégation, nous avons mis les balises pour s'assurer que la vie privée, l'information confidentielle est bel et bien protégée.

M. le Président, j'ai mentionné 10, 28, 33, 40, 41 et 47, juste pour donner un scénario de ce qui se passe dans ce projet de loi. Sauf que, quand je retourne à l'article 7, avant tous ces articles, il dit: «Les prestations familiales ne sont accordées que sur demande, sauf dispenses prévues...» Que sur demande. Avec ça, M. le Président, chaque famille doit faire une demande. Je pense que c'est illogique. Je ne suis pas contre ce concept que je retrouve dans cet article 7 qui dit que chaque famille, selon les règles, je présume... Oui, je trouve «par règlement». Il y a un autre règlement ici. On va discuter de combien de règlements? Mais, par règlement, chaque famille doit soumettre une demande. Mais il me semble que, dans cette demande, les familles québécoises peuvent expliquer leur niveau de revenus, leur statut de famille. On peut accepter la bonne foi, l'honnêteté des contribuables et l'honnêteté de la famille québécoise. Mais non, ce n'est pas ça qu'on trouve. Il y a une obligation que chaque famille doit soumettre cette application. Mais le ministère du Revenu va envoyer l'information sur chaque famille à la Régie des rentes, si j'ai bien compris, et ils vont faire un couplage d'informations.

Avec ça, comme la Commission d'accès à l'information a dit ici, dans cette commission parlementaire: Les secrets fiscaux commencent à être loin d'être des secrets. Et, souvent, le système, si je prends les paroles de la commission, ils disent que souvent le système répond plutôt au système qu'aux personnes, à la famille québécoise. M. le Président, il me semble qu'on doit utiliser le temps ici pendant l'étude article par article pour s'assurer qu'on réponde à ces questions, parce que c'est grave, les questions, et on doit s'assurer qu'au-dessus de tout doute nous avons protégé la vie privée de la population québécoise.

M. le Président, M. Comeau, quand il s'est présenté ici vendredi passé, il a dit – je pense que vous étiez ici; vous étiez pas mal occupé cette journée, mais je pense que vous étiez ici: Depuis 1993, le gouvernement a fait 14 dérogations à la protection de la vie privée, 14. Et c'est pourquoi je retourne à la première citation que j'ai commencée. Peut-être qu'à chacune des 14 fois on peut, devant un ministre, dire: C'est logique, j'ai besoin de ça, ça rend le système plus facile, ça va être plus efficace. Oui, dans chaque cas, peut-être qu'on peut défendre ça. Peut-être qu'il y a quelques exceptions, comme j'ai mentionné pendant l'étude article par article du projet de loi n° 32. Mais, dans les autres, peut-être qu'ils sont tellement défendables. Mais, quand on fait ça ajout par ajout, quand on commence particulièrement avec les technologies informatiques que nous avons maintenant, quand on donne le pouvoir à l'État – et c'est une remarque non partisane, M. le Président, nonobstant le parti qui est du côté ministériel – de chercher toute l'information sur la vie privée de la famille québécoise, on doit être tellement prudent.

M. le Président, je vois une tendance de ce gouvernement qui veut savoir tout et qui veut contrôler tout. Et il me semble que les articles que j'ai mentionnés, ou l'impact de ces articles – si ma compréhension est correcte, M. le Président – l'impact de ces articles qu'on peut trouver dans le projet de loi n° 144 peut être encore une autre invasion dans la vie privée de la population québécoise. C'est mettre le concept de secret fiscal en doute, c'est mettre la confidentialité en doute. Et je pense, malgré cette session intensive, qu'on doit prendre le temps nécessaire pour s'assurer qu'au-dessus de la bonne foi de la ministre, et mes questions, et le procès-verbal de cette commission, nous allons avoir les règlements, les articles de loi et le pouvoir clair de s'assurer que la vie privée de la famille québécoise est protégée. Je ne veux pas donner un choix à la population québécoise, qu'il va y avoir un choix entre leur vie privée et leur allocation familiale. J'espère que nous n'allons jamais passer des lois comme ça.

C'est pourquoi, M. le Président, je vois qu'il y a une certaine réaction de la ministre à mes commentaires. J'ai voulu avoir les réactions. J'ai voulu avoir aussi les amendements, mais, malheureusement, en première lecture, je n'ai pas trouvé les amendements. Moi-même, j'ai quelques idées de... les amendements sur ces articles, Mme la ministre, je m'excuse. J'ai fait une lecture vite. Peut-être il y en a quelques-uns. J'ai fait une lecture vite. Et s'il y a quelques articles qui vont être amendés qui peuvent répondre à mes craintes, tant mieux. Mais je vais certainement étudier ça pendant l'étude détaillée de ce projet de loi.

(12 heures)

Je termine là, M. le Président. Mon intervention a eu pour but de sonner une cloche aux contribuables et aux familles québécoises, de dire que, étape par étape, pas à pas, ce gouvernement est en train de mettre complètement de côté la protection de la vie privée de la population québécoise. Étape par étape, il rend le concept du secret fiscal presque inutile. Et, au moins, dans ce projet de loi – je ne veux pas dire que ce projet de loi est à cause de tout ça, c'est un ajout à ce que nous avons vu dans les autres projets de loi – dans le débat de sur ce projet de loi n° 144, j'espère qu'on pourra ensemble trouver les balises, les critères, les paramètres et potentiellement les règlements pour s'assurer que la vie privée de la famille québécoise est bel et bien protégée. Merci beaucoup, M. le Président, pour cette opportunité de soulever au moins une des questions que j'avais sur le projet de loi n° 144.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? Pas d'autres remarques préliminaires. Nous passons à l'item des motions préliminaires. Est-ce qu'il y a des motions préliminaires? Pas de motions préliminaires.


Étude détaillée


Objet et champ d'application

Alors, nous sommes prêts à procéder à l'étude détaillée du projet de loi. Je mets l'article 1 en discussion. Mme la ministre, si vous voulez débuter.

Mme Marois: Évidemment, comme c'est un nouveau projet de loi, on dit: «Le régime institué par la présente loi prévoit l'attribution d'une allocation familiale, variable selon le revenu et la composition de la famille, et d'une allocation pour enfant handicapé.» Ça nous permet peut-être de clarifier cette question d'universalité versus l'approche sélective.

Nous avons maintenu une notion d'universalité, et c'est celle du crédit d'impôt de base pour enfant. Notre collègue, tout à l'heure, a fait quelques remarques sur cette question. Alors, nous l'avons maintenue. Évidemment, on ne la retrouve pas ici, puisque cela se retrouve au régime fiscal. Donc, il y a un crédit de base qui est, lui, universel et, d'ailleurs, qui nous caractérise en cela, parce que c'est, je pense, assez intéressant de constater...

Je pense que c'est Ottawa qui n'a pas ce crédit de base, il n'a pas l'universalité. Souvent, on a regardé les modèles... Le gouvernement fédéral, il y a un certain nombre d'années, a été le premier à innover du côté d'une approche plus universelle. Et le Québec, par contre, qui a voulu justement préserver son champ d'action en matière d'intervention sociale, a décidé qu'il aurait son propre système d'allocations familiales et a innové aussi de son côté en ce sens. Il avait introduit cette notion d'universalité et l'avait assumée. Ottawa s'est retiré de... enfin, ne s'est pas retiré de ce champ, au contraire, il va y venir par la prestation fiscale. Mais Ottawa, lui, n'a pas retenu l'universalité, puisqu'il n'a pas ce crédit de base, au plan fiscal. Alors, nous, nous l'avons retenue.

Mais c'est vrai que nous introduisons une mesure sélective, c'est-à-dire que, selon le revenu de la famille, le montant de l'allocation va être différent. Et je pense qu'il y a une certaine forme d'équité entre les familles, à partir du moment où on a voulu cibler les problèmes de pauvreté des enfants. Puis je pense qu'il y a aussi une orientation fondamentale dans ce document-là, c'est de reconnaître la présence d'enfants dans les familles; on le fait au plan fiscal et on le fait au plan des allocations.

Jusqu'à une certaine hauteur de revenus, nous intervenons en versant une allocation. Quand on dépasse un certain seuil, qui se situe à 50 000 $, 55 000 $, 60 000 $, là, les allocations diminuent. En fait, à 50 000 $, elles commencent à diminuer, et c'est l'allocation familiale de base, telle qu'on la connaît maintenant. Puis, après ça, elles se réduisent pour disparaître complètement. Évidemment, l'allocation familiale, elle va diminuer plus tôt qu'à 50 000 $. La somme totale est versée aux parents à une certaine hauteur de revenus et, à partir de 19 000 $, 26 000 $, cela décroît progressivement, jusqu'à hauteur de 50 000 $, où l'allocation demeure et, après, elle disparaît.

Mais je pense que c'est un petit peu normal, M. le Président, que des familles qui ont, par ailleurs, des moyens plus importants, au plan financier, puissent assumer la réponse aux besoins essentiels de leurs enfants, même si l'État a une forme de reconnaissance dans le crédit d'impôt, comme je le dis, qui, lui, est universel. À partir du moment où nous pensons qu'il est important d'avoir une approche qui nous permet d'aider des enfants qui sont plus mal pris, effectivement, ça donne des allocations plus élevées pour les enfants qui vivent dans des familles à bas revenus. Et les familles à hauts revenus voient leur allocation diminuer, jusqu'à disparaître. Et je pense qu'il y a une forme d'équité et de justice dans ça. Alors, c'est ce que l'article nous dit, tout simplement.

Cet article dit aussi, cependant, que nous conservons l'actuelle allocation pour enfant handicapé. Parce que vous savez qu'il existe déjà une allocation pour les enfants handicapés, et on aurait pu aussi la requestionner comme nous requestionnons l'ensemble des allocations: allocation à la naissance, allocation premier enfant, deuxième enfant, allocation jeune enfant. Par contre, celle pour les enfants handicapés, nous croyons qu'il est important qu'elle demeure, compte tenu justement de la lourdeur que peut représenter un enfant et ses besoins lorsqu'il vit une situation de handicap. Alors, voilà, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. M. le député de Jacques-Cartier, porte-parole de l'opposition.

M. Kelley: Merci, M. le Président. J'ai plusieurs questions à soulever, mais je pense que, d'entrée de jeu, il faut mettre ça au clair. Ce n'est pas à partir de 50 000 $ que les familles vont commencer à voir leur allocation baisser. J'ai les tableaux ici, et c'est pour les familles monoparentales. Alors, pour un enfant, on voit le montant commencer à baisser à 15 000 $. Alors, je pense qu'en donnant l'idée que c'est juste à partir de 50 000 $ qu'il y a les baisses, il faut faire attention. On a établi les barèmes, on a bonifié les montants à l'intérieur de ces barèmes, mais, à partir d'un enfant, ça tombe et, rendu à 51 000 $, il ne reste plus rien. La femme monoparentale avec un enfant, avec 52 000 $ de revenus, va avoir 31 $ par année. Alors, je ne sais pas si ça va être versé mensuellement, en tout cas, ça va donner des montants assez minimes, merci beaucoup. Alors, je pense que c'est clair de dire qu'il y a des réaménagements à partir d'un certain montant.

Et il y a à la fois l'allocation familiale, mais il y a également l'impact sur les autres allocations qui ont été coupées, c'est-à-dire l'allocation pour jeune enfant et l'allocation à la naissance. Alors, c'est quelque chose qu'il faut dire quand on veut comparer les choses. Il y a des allocations qui ont été abolies pour bonifier d'autres allocations, mais également pour bonifier d'autres programmes. Alors, je pense que c'est très important que ce n'est pas uniquement à partir de 50 000 $ qu'il y a des changements, il y a des changements à partir de 20 000 $ pour une femme monoparentale.

Il y a également, pour une famille biparentale, des changements. Pour un enfant, c'est 131 $ par année. Ça, c'est ce qu'on a à l'intérieur de l'allocation familiale existante. Mais ça met de côté tout le débat sur la question de l'allocation pour les jeunes enfants, par exemple, qui est exclue des tableaux qui ont été présentés jusqu'à date devant la commission. Alors, il y a des changements.

C'est pourquoi, quand je reviens au texte de la ministre, je ne comprends pas comment on peut dire que 95 % des familles... Alors, c'est beaucoup de familles qui doivent avoir des revenus pas loin de 100 000 $ par année, pour arriver à 95 % des familles. Le montant au-delà de 100 000 $, est-ce que c'est 3 %, 5 %? Ça doit être de cet ordre de grandeur là. Alors, si je crois la ministre, toutes les familles en bas de 100 000 $ verront leurs revenus augmenter ou demeurer les mêmes. Je vois ça, je vois les tableaux qui sont présentés, et il y a un écart, ici.

Alors, je pense qu'il faut avoir un débat. C'est pourquoi j'ai mentionné aussi qu'il faut avoir une idée de la ventilation des conséquences de la politique familiale pour avoir une très bonne idée. Parce que je pense qu'une des conclusions de Mme Ruth Rose était que les familles à revenus élevés qui ont des enfants dans une garderie sortent gagnantes. Alors, ça contredit la logique de la loi n° 144 avec la loi n° 145. Parce que, dans les frais de garde existants, il y avait un test quant aux revenus de la famille. Alors, les bénéfices pour une famille à 20 000 $ pour les frais de garde remboursables sur l'impôt sont supérieurs pour la famille à 50 000 $.

Alors, il y a une reconnaissance, dans le système existant qu'on va abolir, avec la loi n° 145, de tester ça contre les revenus de la famille. Dans un programme, on va dire: Universel pour toutes les familles dans les garderies et, dans le projet de loi qui est devant nous, on va dire: Non, non, on va couper ça pour les familles à partir, comme je dis, de 24 000 $ pour un enfant, à partir de 22 000 $ pour deux enfants, etc.

(12 h 10)

Alors, il y a des choix qui sont faits. Et la confusion est due au fait qu'il y a un manque d'information important quant au coût des programmes différents, quant au réaménagement à l'intérieur des enveloppes. Je pense que ça, c'est très important. Et, comme je dis, je n'en reviens pas. Peut-être que la ministre peut m'expliquer comment elle peut affirmer, dans la logique de la loi n° 144, que 95 % des familles ont des revenus qui vont augmenter ou demeurer les mêmes. Ça ne se peut pas.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: Là, il y a une confusion qu'on sème au départ et, je pense, qui mérite d'être clarifiée. Actuellement, tout le monde a une petite allocation familiale, qui est à 131 $ par année pour un enfant. On se comprend bien? Et il y a, en sus, un certain nombre d'autres allocations qui sont liées soit à la naissance de l'enfant, selon que l'on est un enfant de premier rang, de deuxième rang ou de troisième rang, et il y a l'allocation jeune enfant.

Évidemment, ces allocations-là – prenons celles-là seulement, qui sont soit l'allocation à la naissance ou l'allocation jeune enfant qui va jusqu'à six ans – les familles reçoivent des montants assez importants s'ils ont trois ou quatre enfants. Mais c'est terminé à six ans. Et là ils ont le niveau de l'allocation qui est celui de l'allocation familiale que tout le monde a, à 131 $ pour un enfant dans une famille biparentale.

Et ce qu'on fait, c'est qu'on transforme ces allocations-là pour les verser d'abord à tous les enfants, à hauteur de certains revenus, dans certaines familles, donc, de zéro à 18 ans. Et, pour ne pas pénaliser les familles qui avaient déjà des allocations relativement à la naissance, on va laisser ces allocations-là aux familles, et ce sont les nouvelles familles qui vont évidemment, elles, s'inscrire dans le nouveau système.

Alors, ce qu'il faut voir, c'est que c'est vrai qu'il y a des familles qui vont avoir moins d'allocations, et ce sont les familles à hauts revenus et à moyens hauts revenus. Elles vont avoir moins d'allocations, pour ne pas dire plus du tout, oui, c'est vrai. À 53 000 $, un enfant, il n'y aura plus d'allocations; puis, à 54 000 $, deux enfants, il y en aura encore, ça ira à 57 000 $; puis, si on est même avec trois et quatre enfants, ça va plus loin que 60 000 $. Ce n'est quand même pas, je me dis, la misère totale. En répartissant autrement les allocations, nous remettons des sommes plus importantes aux familles à très bas revenus et à moyens bas revenus.

Et là, moi, je ne suis pas capable de comprendre, quand on me dit: Il y a des pertes terribles pour ces familles. Quand on fait l'addition de tout ce que ces familles auront, de zéro à 18 ans... Prenons une famille de quatre enfants. J'ai un exemple, ici. En 1997, cette famille a quatre enfants, d'un an, de trois ans, de cinq ans, de sept ans. Au total, pendant toute la période, jusqu'à ce qu'ils atteignent 18 ans, elle est gagnante de 3 209 $, avec un revenu familial de 60 000 $. C'est plus, ce que l'on verse aux familles, que ce qu'on verse maintenant.

Les gens me disent: On a moins quand on additionne ci et ça. On a moins temporairement. Par exemple, si on n'a pas l'allocation jeune enfant, on ne l'a plus, mais c'est très temporaire. La famille ressort gagnante. Je vais vous donner un autre exemple: revenu d'une famille...

M. Kelley: Juste sur le premier exemple...

Mme Marois: C'est important, parce qu'on fait dire n'importe quoi aux chiffres, sans ça. Le revenu d'une famille biparentale. Donc, deux parents, un père, une mère, ont des enfants de sept et neuf ans, un seul revenu de travail, donc un des deux conjoints est à la maison. Ils n'ont pas de frais de garde et ils n'ont pas le programme APPORT, qui est un supplément à leurs revenus. Bien, en juillet 1998, ils seront gagnants de 2 364 $. Et, pour septembre 1997, c'est 2 093 $. Ce n'est quand même pas rien, M. le Président.

Mais c'est vrai qu'il y a des familles qui n'auront plus, et c'est celles qui se situent à plus de 50 000 $, si elles ont un seul enfant... Même pas, ce n'est pas à 50 000 $, c'est à 52 000 $ qu'il n'y a plus aucune allocation; c'est vrai. Et, donc, c'est sûr qu'on fait des économies là qu'on réintroduit dans les mesures d'aide.

Par contre, on introduit un nouveau service, on donne accès à un nouveau service, qui est celui des services de garde, à raison de 5 $ par jour, par place occupée par son enfant. Et c'est là qu'effectivement des familles à plus hauts revenus peuvent être gagnantes. Mais là, un peu comme à l'éducation...

Moi, mes enfants vont, comme tous les autres enfants du Québec, enfin la majorité des autres enfants du Québec, dans nos écoles publiques, comme ceux du député de Jacques-Cartier, et puis j'ai un certain revenu qui est probablement plus confortable que beaucoup d'autres citoyens. Mais, qu'est-ce que vous voulez, on s'était entendu que c'était un service essentiel, puis on a dit: L'éducation, ça va être l'État qui va l'assumer. Donc, peu importe le niveau de revenus des parents, les services d'éducation publique sont accessibles, pas tout à fait gratuitement, parce qu'il faut payer quelques fournitures, on sait ça, mais il reste que...

M. Kelley: «Quelques», ha! ha! ha!

Mme Marois: ...le fond, si on avait à payer vraiment ce que ça coûte, évidemment, ce ne serait pas possible.

On a décidé que, dans le cas des services de garde et dans le cas des services éducatifs aux enfants, c'était suffisamment important pour que ce ne soit pas gratuit, mais que ce soit accessible à un coût relativement bas. Et c'est ça, les choix qu'on a faits. Mais, sauf que ce qu'il faut voir, c'est que les familles gagnantes, ce sont les familles à bas revenus, à moyens bas revenus et avec de nombreux enfants, et, celles-là, elles sont gagnantes, et c'est ce qu'on voulait, et on atteint l'objectif. Et c'est vrai que c'est sélectif, ce n'est pas universel, comme mesure, sauf sur les services de garde et sur le crédit d'impôt de base. Mais l'allocation, elle, elle n'est pas universelle.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Oui, je veux juste rappeler aux membres de la commission que nous avons voté pour le principe de ce projet-là.

Mme Marois: Voilà!

M. Kelley: Je comprends le principe. Et c'est pourquoi je ne comprends pas comment la ministre peut affirmer en conférence de presse que 95 % des familles québécoises verront leurs revenus augmenter ou demeurer les mêmes; ça, c'est impossible. Dans la logique de la ministre même, c'est évident. Et même dans les tableaux qu'elle a dits, je regarde, avec les jeunes enfants, sans prendre en considération l'allocation à la naissance: la famille, la situation actuelle, ce mois-ci, c'est 47 160 $; la situation en septembre, ça va être 45 151 $; écart comparé, moins 2 009 $.

Alors, dans le comté de Jacques-Cartier, si on a 2 009 $ de moins, on est perdant. Peut-être que c'est différent dans un autre comté, mais, chez nous, si on part à 47 000 $ et on a 45 000 $ après, on est perdant. Et, même, les mêmes familles, après les changements au niveau fédéral, il y aura un écart de 804 000 $ par année, dans le tableau qui a été déposé dans...

Alors, je regarde ça et je dis: La famille sort perdante. Et ça, c'est en faisant l'exclusion que deux des quatre enfants en question ont reçu 9 000 $ pour l'allocation à la naissance; fois deux, c'est 18 000 $. Alors, il n'est pas mention de ça dans ces écarts qui sont établis ici. Alors, même si la famille va augmenter son revenu quand les enfants seront plus vieux, elle ne sera jamais capable, selon les chiffres sur ce tableau...

Mme Marois: Oui, mais, M. le Président...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: ...ça, on l'a expliqué à moult reprises aux députés de l'opposition, et je vais le reprendre pour les membres de la commission, ici, et ceux qui nous écoutent. C'est vrai que, quand on regarde le papier, ici, on dit: Ah! c'est terrible, il va y avoir une baisse de 2 000 $. Ce n'est pas une baisse de 2 000 $. C'est que ce qu'on a voulu: on a voulu être très transparent, vous donner vraiment toute l'information.

Alors, ce qu'il faut savoir, c'est qu'il y a effectivement une hausse d'impôts provinciale pour cette famille-là, qui va s'appliquer pendant quatre mois, qui sera donc temporaire, le temps qu'on harmonise, et avec la prestation fiscale fédérale. Si on l'annualisait, si on la mettait sur une année, cette baisse-là pour cette famille, c'est vrai que ça pourrait signifier ça. Mais elle ne s'appliquera que pour quelques mois. Donc, la baisse ne sera que de 670 $ et non pas de 2 009 $, toujours pour notre même famille: couple d'un revenu de travail, quatre enfants, d'un an, de trois ans, de cinq ans et de sept ans, revenu de 60 000 $.

Mais, attention, et là il faut être de bon compte, c'est temporaire, parce que, effectivement, les enfants sont jeunes, mais, à partir du moment où ils dépassent l'âge de six ans, la famille devient gagnante. Et, au total, et c'est ce que je vous disais tout à l'heure, elle sera gagnante de 3 209 $. Il n'y aura donc pas de perte pour cette famille, il y aura un plus, en termes de retour d'argent – on se comprend? – dans ses poches, de l'argent sonnant: 3 209 $ pour une famille qui gagne 60 000 $.

Et ce qu'il faut savoir, nous avons regardé la proportion des familles qui étaient concernées, et c'est pour ça que j'arrive à mon 95 %. On peut dire: Ah! oui, elle est perdante pour quelques années, mais elle va être gagnante sur une moyenne période, très clairement. Alors, on a regardé combien il y avait de familles de quatre enfants et plus. Alors, j'annonce au député de Jacques-Cartier, qui fait partie de ces familles, avec moi, d'ailleurs... Nous partageons cet heureux titre et avec bonheur, d'ailleurs.

(12 h 20)

M. Kelley: Mais nous sommes minoritaires.

Mme Marois: Mais nous sommes très minoritaires. Au Québec, actuellement, sur les 960 000 familles, il y en a 22 000 qui ont quatre enfants et plus. Alors, nous faisons partie de ces familles et, comme je le dis, c'est avec bonheur, d'ailleurs. Et, dans les faits, à partir d'un revenu de 40 000 $, les familles vont être gagnantes. À partir de 60 000 $, en moyenne période, c'est évident, elles vont l'être, mais, à court terme, c'est sûr que, si les enfants sont tous concentrés entre un, trois, quatre ans, cinq ans... Il n'y a pas beaucoup de familles concentrées comme ça qui ont exactement des enfants de deux ans, quatre ans, cinq ans, un an.

M. Kelley: Au moins une. Ha, ha, ha!

Mme Marois: Moi aussi, j'ai vécu cette situation-là. On a vécu ça ensemble.

M. Kelley: On en a trouvé déjà deux.

Mme Marois: On est excentriques, au sens d'en dehors de ce qui se fait dans la norme générale, pas excentriques dans le sens d'originaux, là. Ha, ha, ha! Mais c'est ça. Nous le sommes aussi un peu, j'imagine, pour être là, parfois. Mais c'est ça, la réalité. Alors, il faut être correct, hein.

M. Kelley: Non, mais dans le tableau E – question précise – ça ne comprend pas...

Mme Marois: Ah! oui, puis sur les 22 000, soit dit en passant, de biparentales: quatre enfants, seul revenu de travail, un an, trois ans, cinq ans, sept ans, il y a 804 familles. On est bien... Pardon?

Une voix: Il y a 400 familles.

Mme Marois: Excusez-moi, il y en a 400 familles. Il faut quand même savoir de quoi on parle. Ça ne veut pas dire que ça ne vaut pas la peine de s'en occuper, et on s'en occupe.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Mais, le tableau E qui est présenté ici, ça ne comprend pas l'allocation de naissance. Alors, je comprends qu'il y a une clause crépusculaire pour la famille dans le système. Mais laissez ça de côté, comparez la famille ici avec la même famille dans l'année 2001, c'est évident qu'il y aura une baisse de 3 200 $ par année de revenus du gouvernement parce qu'il y aura le 1 600 $ par année dû à l'allocation à la naissance qui disparaît au rythme de croisière. Alors, pour la même famille, en cinq ans, ça va être 3 200 $ de moins par année sur cinq ans, n'est-ce pas. C'est beaucoup d'argent.

Mme Marois: Oui. C'est vrai, mais ce n'est pas vrai sur la longue période. Il faut voir ça comme ça.

M. Kelley: Non, non, mais avant...

Mme Marois: On introduit un changement...

M. Kelley: Parce qu'on a ajouté les bénéfices sur le tableau F...

Mme Marois: Oui.

M. Kelley: ...mais on n'a pas soustrait les coûts dans le tableau E. Alors, c'est ça qui confond le monde, parce qu'on ne compare pas. Et on peut mettre les bénéfices dans F, mais il faut mettre tous les coûts dans E. Et c'est ça que je veux dire.

Mme Marois: Mais on les met, les coûts.

M. Kelley: Non, parce qu'on n'aligne pas le 3 200 $ par année à cette famille.

Mme Marois: Oui, mais c'est parce qu'en moyenne puis en longue période cette famille va être gagnante parce que, dans les faits, ses enfants vont recevoir l'allocation jusqu'à 18 ans, alors qu'ils recevaient une allocation significative mais pendant quelques années, de la naissance à six ans. Alors, c'est ça.

M. Kelley: Si je peux faire une suggestion, M. le Président, j'aimerais voir la preuve de ça. Parce que, moi, je vois les tableaux, ici, qui ont été fournis pour les membres de la commission, je ne suis pas fiscaliste, je n'ai pas un énorme ordinateur derrière moi, mais je pose les questions sur les conséquences de la réforme de la politique familiale qui comprend aussi l'allocation à la naissance, l'impact sur la famille et la même famille et je comprends... Mais laissez de côté le débat sur la clause crépusculaire. Les changements sur cette famille, à moyen terme, vont être énormes. La même famille, en cinq ans, va perdre 3 200 $ par année, qui ne sont pas reflétés dans les chiffres sur le tableau.

Alors, oui, il y a des bénéfices à moyen terme, aller à 18 ans. Mais, même à ça, je regarde à l'intérieur de l'enveloppe du gouvernement, la famille de trois enfants à 64 000 $ aura une allocation de 3 $ par année. Encore une fois, ça soulève des questions. Est-ce que ça va être payé d'une façon mensuelle ou si, une fois par saison, ils vont recevoir le gros chèque de 0,25 $? Mais ça, c'est pour un autre moment dans nos délibérations. Moi, je comprends. Comme j'ai dit, nous avons supporté le principe qu'on prend l'argent des familles à revenus plus élevés et qu'on va redéployer ça dans des familles à revenus plus modestes; ça, je comprends, M. le Président. Mais je ne vois pas comment, après avoir accepté ça, on peut affirmer, comme la ministre a affirmé, que 95 % des familles au Québec sont à revenus modestes ou faibles.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que je peux, à ce moment-ci, faire une recommandation? Je comprends que, dans tout projet de loi, l'article 1 est toujours l'important et débattu davantage. Compte tenu qu'on parle d'un tableau que tout le monde a mais qui est interprété différemment, est-ce qu'on pourrait recommander qu'il y ait une rencontre quelque part dans la journée? Sans toucher à l'article 1, on pourrait continuer quand même, et vous pourriez avoir une rencontre avec les fonctionnaires. Parce qu'on parle du même tableau, il n'y a pas de raison... Et on pourrait revenir sur l'article 1.

Mme Marois: M. le Président, je suis tout à fait d'accord. D'ailleurs, nous avons déjà déposé tous ces tableaux. Il y a eu déjà des discussions et des échanges. Aucun problème avec ça. Par contre, ici, à la commission, parce que ce sont des propos qui sont ensuite repris, évidemment, au Journal des débats , je pense que, pour les fins de notre bonne compréhension, on ne peut pas dire que les familles vont être perdantes, comme ça, tous azimuts, alors qu'elles sont gagnantes. Et, si, oui, il y a une baisse temporaire, dans certains cas, de revenus, c'est à une période transitoire, de telle sorte qu'en bout de piste c'est 95 % des familles qui auront soit le même montant qu'elles ont maintenant ou davantage.

Une voix: ...

Mme Marois: Davantage! Ça ne veut pas dire moins, ça. Et ça, c'est important. Et l'allocation jeune enfant, quand on dit 3 000 $, c'est comme si on prenait pour acquis que toutes les familles québécoises avaient quatre enfants. Bien, voyons donc! On sait très bien que, toutes les familles, c'est un ou deux enfants, c'est là que sont les familles québécoises. Et ce n'est pas 3 000 $ qu'elles perdent, elles ont 500 $ pour le premier enfant puis 1 000 $ pour le deuxième. Alors, on ne peut toujours bien pas dire qu'elles perdent 3 000 $. Puis, en plus, lorsqu'elles sont à bas revenus, c'est compensé par les allocations qui sont versées. Elles ont beaucoup plus d'allocations versées que ce montant qu'elles reçoivent actuellement à la naissance.

Ce qui fait, cependant, que les montants sont plus significatifs... C'est évident que nous intégrons, ce qu'on a souhaité de toutes parts, et la prestation fiscale fédérale et l'allocation familiale que le Québec verse. Et, une fois qu'on a tout intégré ça, les familles sont nettement gagnantes. Moi, je pense qu'au lieu d'essayer, je dirais, d'aller chercher le x dollars chez les familles de 65 000 $, 70 000 $ qui vont être perdantes, moi, je pense qu'on devrait regarder les 800 000 familles, les 850 000 familles – je n'ai pas fait le calcul exactement – qui sont gagnantes. Je pense que c'est pour celles-là qu'on travaille. On travaille pour la majorité.

M. Kelley: Mais, dans le tableau en question, ce n'est pas l'opposition officielle qui a choisi ce cas type, ce n'est pas nous autres.

Mme Marois: Mais on vous l'a expliqué, justement pour être de bonne foi. La prochaine fois, on va juste vous donner les chiffres tels qu'ils apparaissent dans nos documents très officiels. Vous ne serez pas contents, mais au moins vous ne pourrez pas dire n'importe quoi avec les chiffres que l'on vous donne.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'ai fait une suggestion. Il y a un tableau qui circule. Je pense, d'après ce que j'entends, et je vous vois aller, qu'on va discuter très, très longtemps sur à peu près le même tableau. Alors, je recommande simplement: ou on poursuit la discussion jusqu'à ce qu'il y ait un terrain d'entente quelconque, ou on suspend l'article en question, et vous vous rencontrez pour...

Mme Marois: Mais l'article 1, M. le Président, cependant, n'a rien à voir avec les tableaux. Les tableaux évidemment s'obtiennent par le règlement qui fait le calcul. On peut quand même suspendre l'article 1.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je suis parfaitement d'accord. J'aurais pu, il y a déjà longtemps, le souligner, mais il est de tradition de... Quand on a liquidé l'article 1 à la satisfaction de tout le monde, normalement, ça va beaucoup plus vite. Alors, est-ce que vous voulez continuer durant quelques minutes ou on suspend l'article 1?

M. Kelley: On peut continuer. Moi, j'ai une autre question.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, allez-y, M. le député.

M. Kelley: J'ai une autre question. Ça a l'air anodin, mais je pense que c'est très important pour clarifier la situation. Pourquoi on n'a pas juste gardé l'allocation familiale? Mais, on regarde, on a commencé avec une allocation unifiée pour enfant. Après ça, on regarde le projet de loi, et ce n'est pas une loi sur les allocations familiales, c'est une loi sur les prestations familiales. À l'intérieur des prestations familiales, on remplace le régime d'allocations d'aide aux familles avec un régime de prestations familiales, et le régime prévoit l'attribution d'allocations familiales. Il y a beaucoup de termes qui circulent à l'intérieur de tout ça. Peut-être, pour simplifier, pour moins confondre le monde, pourquoi ce n'est pas uniquement une loi sur les allocations familiales?

(12 h 30)

Mme Marois: Le terme «prestations familiales» est plus générique. C'est le terme générique, et c'est pour ça qu'on l'a choisi, permettant de recouvrir l'allocation familiale, l'allocation pour enfant handicapé qui a une dénomination différente.

Et je vais revenir sur l'allocation unifiée, je pense que c'est tout à fait pertinent, ce qui est soulevé. Quand on a bâti le livre blanc sur la politique familiale et quand on a bâti le projet qu'on étudie aujourd'hui, l'objectif du gouvernement était d'unifier les allocations. On a donc, pour la bonne compréhension des débats et de la discussion, appelé cette allocation l'«allocation unifiée». Mais, évidemment, c'est l'objectif que nous poursuivons, d'unifier les allocations. Qu'est-ce que ça dit à quelqu'un: Je reçois une allocation unifiée, alors que, dans le fond, nous voulons verser une allocation familiale? Et on est revenu à ce terme qui rend mieux ce que nous faisons, ce que nous versons comme allocation.

Alors, dans les débats, nous avons parlé d'une allocation unifiée parce que c'était la volonté du gouvernement d'unifier les allocations. Nous avons atteint cet objectif. Et maintenant c'est une allocation familiale qui s'inscrit dans une loi sur les prestations familiales qui, évidemment, est plus large et peut comprendre d'autres éléments, dont, entre autres, l'allocation pour enfant handicapé, qui ne s'appelle pas «allocation familiale», à titre d'exemple.

Et M. Legault me fait remarquer qu'il y a aussi l'allocation à la naissance qui, elle, est maintenue pour les cinq prochaines années pour toutes les familles qui l'ont déjà. Donc, en ce sens-là, c'était préférable d'utiliser le terme générique. Alors, c'est ce qui explique tout simplement ce pourquoi maintenant on revient à la notion fondamentale de l'allocation familiale.

M. Kelley: Mais on peut dire «la loi sur les allocations familiales», s'il y en a plus qu'une. C'est juste d'introduire un autre terme. Je comprends, mais je pense que la confusion qui est créée, ce n'est pas uniquement ma faute, et je pense qu'il y a beaucoup de questions. Et on a vu beaucoup d'expressions, encore une fois. Maintenant, c'est les «prestations», pour nos légistes, j'imagine qu'il y a une idée très précise qu'ils vont avoir, avec tous ces changements. Mais, pour les familles, les parents, c'est moins évident. Les trois exemples que la ministre vient de donner sont tous les trois des allocations: une allocation aux enfants handicapés, une allocation à la naissance qui est maintenue dans la clause crépusculaire et la nouvelle allocation aux familles. Alors, une loi sur les allocations familiales ou quelque chose comme ça peut couvrir les trois et peut-être éliminer une phrase. Il y aurait une phrase de moins, pour confondre le monde. Parce que, l'AUU est chose du passé, si j'ai bien compris.

Mme Marois: C'est ça.

M. Kelley: Mais c'était quelque chose qui avait été lancé, comme idée. Alors, c'est dans le paysage, maintenant, que les familles vont encaisser le chèque d'AUU. Maintenant, on va laisser ça de côté...

Mme Marois: D'allocations familiales.

M. Kelley: ...avec un nouveau régime de prestations qui va nous permettre de payer une allocation. Peut-être, des fois, simplifier la langue au bénéfice de nos commettants, ce n'est pas mauvais comme objectif.

Mme Marois: Bien, là, c'est ce qu'on a essayé de faire, dans un sens. D'abord, un, on a consulté sur la question de l'appellation de la loi, du titre de la loi. Et la notion de «prestations familiales», après avoir consulté les spécialistes de la langue française, c'était vraiment le terme à privilégier. Et je pense que, dans le fond, rapidement, les gens vont constater que, leur allocation familiale se modifiant, ça reste quand même une allocation familiale. Je pense que, dans un sens, c'est peut-être préférable qu'on revienne – moi, je crois que ça l'est, c'est pour ça qu'on l'a fait – à la notion d'allocation familiale. Mais la loi elle-même, elle doit porter un terme plus générique. C'est évidemment cette réalité qui nous habite, dans la francophonie, qui fait que certains mots doivent être plus précis, et c'est le cas.

M. Kelley: C'est différent en anglais: it's «family benefits» and «family allowance». Alors...

Mme Marois: «Allowance».

M. Kelley: ...ce n'est pas uniquement dû à la francophonie.

Mme Marois: Oui, c'est ça. Non, je sais qu'en anglais aussi ça se passe comme ça.

M. Kelley: On a les deux notions dans le texte anglais du projet de loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, M. le Président. Est-ce que je dois comprendre que l'allocation pour enfant handicapé est universelle?

Mme Marois: Bien, elle est universelle en autant qu'on est handicapé. Oui.

M. Copeman: Elle ne varie pas selon le revenu de la famille?

Mme Marois: Ah! oui, tout à fait. Oui, c'est tout à fait le cas.

M. Copeman: Qu'elle ne varie pas.

Mme Marois: Elle ne varie pas.

M. Copeman: Elle ne varie pas.

Mme Marois: On le verra, d'ailleurs, par le règlement qui la calcule.

M. Copeman: Moi, je l'ai vu un peu en lisant l'article 1, qui fait en sorte qu'on associe clairement l'allocation familiale, qui est variable selon le revenu, mais on poursuit avec...

Mme Marois: Mais on la dissocie, là: «et d'une allocation».

M. Copeman: C'est ça, «et d'une allocation pour enfant handicapé». Évidemment, M. le Président, je ne peux que me réjouir que le gouvernement ait décidé de maintenir de façon universelle l'allocation pour enfant handicapé, je crois que c'est une bonne chose. Je ne veux surtout pas suggérer qu'on devrait niveler par le bas, autrement dit qu'on devrait assujettir l'allocation pour enfant handicapé à un test de revenus. Ceci étant dit, peut-être que la ministre peut expliquer davantage pourquoi on l'a laissée de façon universelle. Moi, je comprends, être parent d'un enfant handicapé, on doit assumer des coûts additionnels, c'est très clair à mon esprit. Mais est-ce que les coûts sont plus importants pour une famille à 100 000 $ qu'une famille à 30 000 $, dans la logique...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que je peux vous demander d'attendre un petit peu? Parce que je pense qu'il y a une conversation importante. Puis vous avez une question importante. C'est difficile pour la ministre de pouvoir suivre les deux.

(Consultation)

Mme Marois: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On peut reprendre? Alors, M. le député, si vous voulez reprendre votre question.

M. Copeman: Alors, je demande à la ministre essentiellement de nous expliquer pourquoi l'heureuse décision de maintenir l'allocation pour enfant handicapé de façon universelle, mais de ne pas faire la même chose pour l'allocation familiale.

Mme Marois: Nous avons décidé de maintenir l'allocation pour enfant handicapé parce que, évidemment, et, je pense, pour tout le monde, ça va tomber sous le sens qu'un enfant handicapé présente des exigences tout à fait particulières pour une famille, bien sûr. Et ce que nous souhaitons, c'est que la majorité et la totalité, dans le fond, des enfants handicapés puissent s'intégrer dans la société – je n'ose pas dire normale parce que c'est parfois contesté – et y participer à part entière comme citoyens, comme citoyennes. Et, pour ce faire, dans tous les cas, parce que ce sont évidemment des handicaps quand même assez sérieux, les familles doivent consentir des ressources considérables. Donc, nous croyons qu'il est normal de reconnaître cette difficulté supplémentaire que présente un enfant lorsqu'il a un handicap.

M. Copeman: Encore une fois, M. le Président, je veux que ça soit clair, je ne serais pas plus pour une limite ou un test de revenus sur l'allocation pour enfant handicapé. Mais si on remet en question la nature universelle du régime générale d'allocations familiales, pour des raisons qu'on peut comprendre, que des familles pauvres ont besoin plus d'aide que des familles riches, je me pose la question simplement, M. le Président: Est-ce qu'une famille à revenus de 100 000 $ nets n'a pas les mêmes coûts pour un enfant handicapé qu'une famille à 20 000 $ nets? Mais est-ce que cette famille n'a pas des ressources additionnelles? Et est-ce qu'on ne devrait pas peut-être bonifier l'allocation pour enfants handicapés pour des familles à faibles revenus, en étant tout à fait d'accord qu'on maintient l'universalité?

Mme Marois: Ce que vous suggérez, c'est son contraire, c'est de la rendre sélective.

M. Copeman: Non, mais ça serait peut-être d'aider de façon accrue des enfants des familles pauvres, en maintenir un élément universel. Ça se fait, hein?

Mme Marois: C'est ça.

M. Copeman: Je ne dis pas qu'il faut enlever et, je le répète, je ne prône pas qu'on assujettisse une diminution de cette allocation pour des familles avec un certain revenu. Mais, dans la logique, Mme la ministre, est-ce qu'il n'y a pas peut-être moyen de tenter de bonifer l'allocation pour enfants handicapés pour des familles à faibles revenus et à revenus modestes, plutôt que de la maintenir au même niveau pour tout le monde?

Mme Marois: Bon, écoutez, je n'ai pas devant moi, M. le Président, toutes les mesures qui s'adressent aux personnes handicapées, mais je peux vous dire que nous avons un ensemble d'interventions très significatives à l'endroit des personnes handicapées. Je pense au monde scolaire, entre autres, évidemment, comme ministre de l'Éducation. Je peux vous dire que nous consacrons des ressources considérables, beaucoup plus importantes pour les enfants handicapés que pour les enfants qui n'ont pas de handicap. Ça se reflète très bien, d'ailleurs, dans les budgets. On accompagne certains enfants dans les classes. Des fois, il y a un accompagnateur ou une accompagnatrice pour un enfant. C'est des coûts considérables, ce sont des investissements très importants.

(12 h 40)

Donc, l'État a choisi d'intervenir par l'intermédiaire de services, et nous le faisons pour une large part des enfants, pour le très grand nombre des enfants handicapés, qui présentent, donc, des difficultés sérieuses et, en plus, nous maintenons cette allocation qui est universelle. Alors, je pense que, pour des familles qui auraient des revenus plus modestes, il reste qu'elles ont accès à des services qui, eux, sont de très grande qualité et qui permettent à des enfants de s'intégrer dans leur société et dans leur milieu de vie. C'est le choix que nous avons fait, et je pense qu'à ce moment-ci il est judicieux.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député...

Mme Marois: Alors, je serais prête à adopter l'article 1.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan. Oui?

M. Copeman: Juste en terminant, M. le Président, je comprends toutes les mesures qui existent, les mesures de crédit d'impôt, des mesures que la ministre a oublié de mentionner, les mesures dans le réseau de l'éducation, entre autres. Mais, évidemment, les familles à revenus supérieurs ont accès à tous ces éléments-là aussi. Et on peut, à partir d'un vécu très spécifique dans plusieurs commissions scolaires, questionner sur la qualité des services offerts, à cause des compressions budgétaires. Mais je ne veux pas refaire le débat, loin de là, et ce n'est pas ici qu'on va le faire, mais c'est la ministre qui a ouvert la porte là-dessus. Mais je comprends le choix du gouvernement de maintenir de façon universelle. Je la félicite. Mais, je vous le dis de façon très personnelle, M. le Président, j'aurais peut-être préféré voir des allocations pour enfant handicapé, oui, universelles, mais bonifiées pour les familles à faibles revenus, parce qu'elles ont beaucoup plus de difficulté à compenser financièrement les coûts associés pour leurs enfants handicapés qu'une famille à 100 000 $ de revenus. C'est le choix du gouvernement de le faire, et je le comprends.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, merci beaucoup, M. le Président. Quelques questions de clarification sur l'article 1 de ce projet de loi. Quand on parle de prévoir «l'attribution d'un allocation familiale, variable selon le revenu et la composition de la famille», comment nous allons calculer le revenu de la famille? Est-ce que c'est vraiment juste les parents, le demandeur ou la demanderesse et le conjoint? Et est-ce qu'il y a un changement? C'est quoi, le changement de définition du mot «famille», dans cet article? Deux clarifications, s'il vous plaît.

Mme Marois: Alors, on peut répondre ici, mais on pourrait adopter, à ce moment-là, deux articles en même temps, le 1 et le 8, puisque c'est à l'article 8 que viendra cette question. Alors, moi, je n'ai pas d'objection, si vous le souhaitez, on pourrait entreprendre l'adoption de l'article 8. Sinon, on peut attendre jusque-là et puis on verra exactement...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que vous voulez garder votre question pour l'article 8, M. le député, étant donné qu'on la retrouve à l'article 8?

M. Williams: Ce n'est pas moi qui ai...

Mme Marois: Je pense que ce serait pertinent d'attendre à l'article 8, à moins qu'on ne traite les deux articles en même temps.

M. Williams: Mais, voyons donc, là! Ce n'est pas moi qui ai écrit ce projet de loi, M. le Président. On arrive avec l'article...

Mme Marois: Justement, on l'a écrit, donc on est capable de le défendre.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Bien, à l'article 8...

M. Williams: Je m'excuse, M. le Président, c'est moi qui ai la parole. Peut-être que la ministre veut essayer de m'interrompre tout de suite, mais j'ai commencé avec une question de clarification.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Allez-y.

M. Williams: Nous sommes ici avec l'article 1, pas l'article 8. Ce n'est pas moi qui ai écrit ce projet de loi. J'ai demandé une simple question de clarification. Si la ministre n'est pas capable de répondre à mes simples questions de clarification, on verra sur ça. J'ai demandé: Comment nous allons... Dans les mots de l'article 1, pas le 8, pas les autres articles, ça dit «variable selon le revenu et la composition de la famille». Il me semble, M. le Président, que c'est un concept assez important de l'article 1. J'ai demandé, pas de faire un débat sur chaque mot – on peut y arriver plus tard – j'ai demandé une simple clarification, comment nous allons calculer ça et c'est quoi, la définition de la famille. Je n'ai pas pensé avoir une réaction de la ministre comme ça. Il me semble que, si elle veut avoir notre appui sur l'article 1, ça va être assez important de juste répondre à une simple question de clarification comme ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, écoutez, moi, je vous demande une directive, M. le Président. Ce n'est pas à l'article 1 que ça se définit, c'est dans les articles subséquents. Le calcul se définit à l'article 8. À l'article 2, on dit qui a droit à la prestation familiale. C'est parce que je pourrais répondre de façon, il me semble, beaucoup plus pertinente au député. S'il veut qu'on étudie tous les articles en vrac, je n'ai pas de problème, je suis d'accord, je suis prête à le faire avec vous. Mais c'est vous qui dirigez nos travaux. Moi, je n'ai pas de problème. On va étudier en même temps l'article 2. Parce que, sans ça, je veux dire, on fait tout ça dans le désordre.

Alors, prenons-les tous ensemble. Prenons l'article 2, il dit qui a droit aux prestations familiales; qui est le conjoint, c'est l'article 3; l'article 4, l'enfant, dans quelles circonstances a-t-il droit; l'article 5, quels sont les besoins couverts. Alors, le député est quand même habitué de travailler à l'étude des projets de loi. Il sait fort bien qu'une loi, justement, pour être très claire et pour éviter toute espèce d'interprétation, départage chacun de ses objets en un certain nombre d'articles, et c'est aux articles suivants qu'on voit ces questions-là. Alors, j'éprouverai beaucoup de plaisir à répondre aux questions du député au moment où on sera rendu à l'étude de ces articles.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On peut l'interpréter de deux façons. Ce qui va être dit va aussi faire gagner du temps. Mais je pense qu'article par article c'est quand même plus précis, quant à moi.

Mme Marois: Il me semble aussi, mais...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste une question d'information pour les experts qui accompagnent la ministre: Est-ce qu'ils ont évalué la recommandation du Conseil du statut de la femme – je suis peu familier avec ça – d'abolir le crédit d'impôt non remboursable et de le transformer dans la partie de l'allocation universelle? Ça, je pense que c'était également la recommandation de Bouchard-Fortin. C'est vraiment une question que je lance comme ça. Moi, je n'ai pas les moyens de tester cette idée, mais ça a été soulevé par le Conseil du statut de la femme au moment où il est venu témoigner ici. Alors, c'est quoi, les avantages et les inconvénients d'opter sur la façon de cibler les allocations et de garder les crédits d'impôt non remboursables universels au lieu du contraire?

Mme Marois: M. le Président, évidemment, ça ne concerne pas l'article 1, mais je n'ai pas d'objection à répondre à cela. Vous vous souvenez qu'avant...

M. Kelley: Ça touche l'universalité, c'est l'article 1.

Mme Marois: ...que l'on commence cette commission nous avons procédé à des audiences publiques et nous avons entendu, donc, le Conseil du statut de la femme. Et, au moment où le Conseil est venu, j'avais mentionné, d'ailleurs, que mes collègues et moi-même, de ce côté-ci de la table, nous aurions peut-être souhaité regarder de plus près cette question, parce que, effectivement, c'est un crédit d'impôt qui n'est pas remboursable, cependant, qui sert essentiellement à voir l'impôt du conjoint qui a un revenu de travail... qui sert à le diminuer, évidemment, à le diminuer en partie, parce qu'il y a une proportion de prévue pour la déduction pour conjoint. Et, donc, oui, ça pourrait être imaginable. Il n'y a pas eu de simulation de faite, à ce que je sache, dans les dernières années. Il y en a peut-être eu il y a un certain nombre d'années, parce que ça fait longtemps que cette demande a été présentée par différents groupes de femmes, ce qui serait sans doute intéressant à évaluer avec le ministre des Finances, puisque c'est lui qui est responsable de la politique fiscale et de sa préparation; évidemment, nous le sommes tous, comme membres du gouvernement, mais il est responsable de sa préparation. Et c'est une chose, je pense, qui mériterait d'être regardée éventuellement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Est-ce que ça va? Il y a d'autres commentaires?

M. Williams: Non, M. le Président. Ce que nous avons décidé de faire... Je trouve ça assez bizarre qu'avec la simple question que j'ai demandée on ne peut pas procéder avec cette clarification. J'ai voulu juste savoir... Vous avez déjà recommandé de suspendre l'article 1.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je disais tout à l'heure qu'on peut toujours permettre de précéder les articles, parce qu'ils vont être beaucoup plus précis, quand on va arriver à 3 ou 4, par rapport à votre question. Si on demande à Mme la ministre de répondre de façon plus précise, peut-être qu'on pourra passer plus vite. Mais c'est une question d'efficacité, donc, qu'il faut regarder.

Mme Marois: Je vais cependant les lire, les articles. Écoutez, l'article 1, M. le Président, définit l'objet de la loi. Il dit: On institue un régime pour une allocation familiale qui va être variable selon le revenu et la composition de la famille.

Après ça, on ne définit pas, justement, qui est la famille, mais plus loin on le définit, et c'est sûr qu'il faut le faire. Et je n'ai pas, évidemment, d'objection au fond de ce que présente le député de Nelligan, M. le Président.

(12 h 50)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Le député de Nelligan est d'accord, d'après ce que je peux comprendre.

Mme Marois: Mais c'est plus loin, on va le faire de toute façon. Ça va faciliter l'étude et ça va accélérer nos travaux, s'il accepte avec nous de passer à l'article suivant.

M. Williams: Je respecte toujours, M. le Président, vos interventions. Avec ça, au nom de l'efficacité, je suis prêt à avancer. Et mon vote sur ça, ça va être toujours en tenant compte des réponses plus tard, pour l'efficacité. Parce que le but de ma question, ce n'était pas de retarder, c'était de mieux comprendre le projet de loi. Avec ça, sous réserve, je suis prêt à voter, mais je trouve ça...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Comme j'ai dit au début, c'est toujours normal qu'au premier article, surtout sur un nouveau projet de loi, on prenne plus de temps.

Mme Marois: Bien sûr, c'est tout à fait normal.

M. Williams: C'est pourquoi j'ai demandé des questions, M. le Président, pendant l'article 1, et je n'ai pas retardé pour 5, 8 et 9.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il n'y a personne qui blâme qui que ce soit, M. le député. Je pense qu'on fait ça correctement jusqu'à maintenant.

Mme Marois: Pas du tout.

M. Williams: Mais j'ai toujours pensé que, si nous avons toutes les explications, plus tard, on peut avancer beaucoup plus vite. Mais, malheureusement, la ministre a décidé de faire ça d'une autre façon.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mais là vous allez avoir des explications encore plus précises à chaque terme. Est-ce que je comprends bien que l'article 1 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. Article 2, Mme la ministre.

Mme Marois: Bon, alors, voilà, nous y sommes. «2. A droit aux prestations familiales prévues par la présente loi toute personne ayant la charge d'un ou de plusieurs enfants, à condition qu'elle réside au Québec au sens de la Loi sur les impôts et qu'elle-même ou son conjoint possède l'un des statuts suivants:

«1° citoyen canadien;

«2° résident permanent au sens de la Loi sur l'immigration (Lois révisés du Canada (1985), chapitre I-2);».

L'autre statut, c'est:

«3° visiteur ou titulaire de permis au sens de la loi visée au paragraphe 2° ayant résidé au Canada pendant au moins 18 mois;

«4° réfugié suivant la Convention de Genève reconnu par l'autorité compétente canadienne.

«Sont exclus les étrangers visés aux articles 982 et 983 de la Loi sur les impôts et ceux visés par un règlement pris en vertu des paragraphes a à c du premier alinéa de l'article 96 de la Loi sur le ministère du Revenu.»

Alors, on a essentiellement, bien sûr, ici, le champ d'application de la loi. Je vais d'abord prendre la notion de résidence fiscale. Elle est nécessaire, bien sûr, parce que l'allocation devra varier selon le revenu net fiscal de la personne qui va recevoir de l'allocation ou celui de son conjoint.

D'autre part, pour ce qui est des statuts auxquels on fait référence, de citoyen, de résident permanent, de visiteur, de réfugié, on reprend en grande partie les dispositions du règlement actuel en ce qui concerne les conditions qui sont relatives à cet aspect. Et, quand on dit, à la fin de l'article, au dernier alinéa, qui sont exclus, ce sont les personnes qui sont des fonctionnaires, par exemple, étrangers qui sont exemptés d'impôt. Alors, ils ne paient pas d'impôt, mais n'ont pas non plus les bénéfices de l'État dans lequel ils résident parce qu'ils ne sont pas des citoyens de cet État.

Alors, ce qu'il faut savoir, M. le Président, c'est que le statut du bénéficiaire, d'abord, ici, il est calqué sur les dispositions fiscales. Parce que, évidemment, on va procéder à un test de revenus préalable, ce qui veut dire qu'on va devoir vérifier les revenus pour verser l'allocation familiale. Donc, évidemment, les dispositions fiscales nous aident à définir qui est ce citoyen qui aura droit ou pas aux allocations. Et c'est important, je pense, qu'il y ait de la cohérence dans nos lois, je pense que tous les gouvernements ont cherché cela, de telle sorte qu'un citoyen puisse s'y retrouver.

Il n'y a pas une définition quand il est au Revenu puis une définition différente quand il est considéré par le ministère – je ne sais pas, moi – de l'Industrie et du Commerce ou le ministère de la Famille. Les critères énoncés dans les paragraphes que je viens de lire sur le statut sont similaires – donc, ce que je disais tout à l'heure – à ceux qu'on retrouve aux règlements, mais aussi ils sont similaires à ceux qui vont être exigés pour avoir droit à la prestation fiscale pour enfants du fédéral. Alors, ça aussi, il y a une harmonisation à cet égard-là. Puis, évidemment, les étrangers, c'est vraiment ceux qui sont généralement des fonctionnaires d'un pays autre que le Canada, de même que les membres de leur famille.

S'il y avait des questions plus précises, au plan technique, quant à l'un ou l'autre des alinéas, mes collaborateurs, sûrement, pourraient répondre à ces questions.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Si j'ai bien compris l'économie de l'article 2, on a pris un article d'un règlement existant puis on le met dans la loi maintenant. Alors, il n'y aura pas de règlement pour remplacer cet article, ça va se trouver maintenant dans le nouveau projet de loi.

Mme Marois: Effectivement, vous avez tout à fait raison, on le retrouve dans la loi.

M. Kelley: O.K. Parfait. Deuxièmement, dans la formulation du règlement existant, on parle que la personne et l'enfant doivent avoir leur résidence principale au Québec. C'est hypothétique, mais, dans le cas d'une garde partagée, avec une personne qui demeure à Hull et le conjoint qui demeure à Ottawa, est-ce que les enfants doivent nécessairement résider au Québec, maintenant, ou est-ce que c'est uniquement la personne qui a la charge? Et, si c'est une charge partagée, est-ce que c'est envisageable? Je soulève la question. Est-ce que je peux à la fois avoir les allocations du Québec et de l'Ontario?

Mme Marois: Il faut que l'enfant vive habituellement avec la personne qui reçoit. Donc, évidemment, normalement, elle devrait passer la majorité de son temps, j'imagine, au Québec, si c'est un résident du Québec, et que les enfants vivent avec la personne. Si jamais la personne vit en Ontario et a charge de ses enfants, majoritairement, à ce moment-là, elle réclamera en Ontario, mais elle ne pourra pas réclamer au Québec. Et ça, on le retrouve, d'ailleurs. Ce n'est pas à cet article-ci qu'on le précise, c'est à l'article 6 qu'on le retrouve.

M. Kelley: Mais, dans une garde partagée, c'est toujours un parent qui a l'enfant pour la majorité du temps et, des fois, c'est plus ou moins kif-kif, hein.

Mme Marois: Oui, effectivement. D'abord, c'est payable à la mère, la prestation; ça va venir plus loin aussi, tout ça. Mais c'est payable à la mère. Et on me dit que je suis obligée d'aller à l'article 6 pour répondre à cette question.

M. Kelley: O.K. On peut reprendre la discussion à l'article 6. C'est juste pour expliquer, parce que, dans le cahier que vous m'avez aimablement fourni...

Mme Marois: C'est ça, vous avez les explications, voilà.

M. Kelley: ...je vois la différence dans la formulation. Et je pose la question parce que, dans l'ancien règlement, on dit «la personne et l'enfant». Alors, on a précisé ça, et je trouve ça, dans le premier paragraphe de 2, moins précis que c'était. Alors, je me demande pourquoi nous avons changé la formulation. Est-ce qu'il y a une souplesse cherchée qui n'existait pas?

Mme Marois: Non, attention. Regardez, la différence principale, M. le Président, c'est lié au fait qu'on se colle à la Loi sur les impôts. C'est ça, la différence. Parce que, dans l'ancien règlement, on disait: «La personne ou l'enfant visés à l'article 14 – on faisait référence évidemment à un article plus loin – sont réputés avoir leur résidence principale au Québec et y demeurer, et ils possèdent l'une des qualités suivantes...» Alors, là, c'est le statut que je vous ai lu tout à l'heure.

M. Kelley: Oui.

Mme Marois: Mais, ici, on dit: «A droit aux prestations familiales prévues par la présente loi toute personne ayant la charge d'un ou de plusieurs enfants, à condition qu'elle réside au Québec...» Donc, on reprend le même élément, mais «au sens de la Loi sur les impôts». Et là on est plus précis, parce qu'on dit: La Loi sur les impôts, elle, elle prévoit un certain nombre de définitions de ce que ça signifie que de vivre au Québec et de résider au Québec. On pourrait retourner, après ça, maintenant, au règlement, deux revenus, pour voir ce que ça signifie que de vivre au Québec, et là, on aurait les explications à cela.

M. Kelley: Est-ce qu'il y a une redondance qui explique pourquoi on a biffé le quatrième alinéa de l'article existant?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Lacroix, peut-être?

Mme Marois: Oui, oui, M. Lacroix, allez-y, expliquez-le.

M. Lacroix (Marc): C'est que 4, ce n'est pas un statut, c'est une condition. Par exemple, être citoyen canadien, c'est un statut, résident permanent, tandis qu'être reconnu comme un particulier qui a fait sa demande à la prestation fiscale, ça, c'est une condition. On le retrouve à l'article 4 du règlement. Et aussi la dispense de faire une demande d'allocations familiales au Québec, si on l'a fait déjà à la prestation fiscale, se retrouve à l'article 7 de la présente loi.

Mme Marois: Alors, on l'a remis mais plus loin. On l'a repris plus loin.

M. Kelley: O.K. Alors, c'est parce que, j'imagine, il y avait une raison de le mettre intérieurement... C'est qui, les personnes visées dans 4°? C'est un non-citoyen... Je demande qui on ne couvre pas dans les premiers trois alinéas qui serait touché par le quatrième?

Mme Marois: Qui serait touché, autrement dit, par le quatrième?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Lacroix.

M. Lacroix (Marc): C'était tout simplement une redondance. On l'a mieux traduit dans l'article 7 de la présente loi en disant que, si quelqu'un fait une demande de prestation fiscale, il est reconnu comme ayant fait une demande d'allocations familiales au Québec. Alors, on a voulu ici mettre des pommes avec des pommes, nettoyer un peu, en profiter dans la rédaction législative pour faire un peu de ménage sans altérer le fond.

Mme Marois: À quel article?

M. Lacroix (Marc): À l'article 7 de la loi et à l'article 4 du règlement aussi.

Mme Marois: Oui, c'est ça.

M. Lacroix (Marc): Mais le quatrième n'a pas le même statut, si on veut, que les autres.

M. Kelley: Ah non, non, je comprends ça.

M. Lacroix (Marc): C'est une condition, c'est de nature différente.

M. Kelley: Mais je cherche pourquoi c'était inclus dans le passé. C'était quoi, une clientèle visée par le quatrième alinéa qui ne serait pas couverte par les autres. C'est juste une question de...

(13 heures)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'article 2?

M. Kelley: Oui. On n'a pas de réponse à cette question: Est-ce que le monde visé par 4°...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Lacroix?

M. Lacroix (Marc): Il n'y a personne qui tombe dans un vide, c'est une question de rédaction, tout simplement.

Mme Marois: C'est ça. C'est de s'assurer qu'on couvre bien toutes les personnes que l'on veut couvrir mais aux bons endroits. Alors, ce que M. Lacroix disait, c'est que ce n'est pas un statut. Ces personnes qui étaient reconnues dans l'ancien article, alors, on va les retrouver plus loin. Puis on a mis au texte de l'article 2, d'abord, évidemment, la condition pour l'obtention, la première condition formelle et, ensuite, le statut. Et là on a mis quatre éléments qui définissent les statuts: citoyen, résident, visiteur, réfugié. L'autre cas, ce n'était pas ça. C'est ramené plus loin.

M. Kelley: Alors, juste pour résumer, 4 n'a pas donné admissibilité au programme.

Mme Marois: Attendez un peu, à quel 4 vous faites référence?

M. Kelley: Dans l'ancien règlement, 4 n'était pas utilisé comme critère d'admissibilité au programme d'allocations d'aide aux familles.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Lacroix, vous pouvez y aller.

M. Lacroix (Marc): Non, ce n'était pas un critère.

Mme Marois: C'est ça.

M. Kelley: O.K. Alors, c'était juste mis, ça, pour une raison qu'on ignore et pas essentiel. Tout le monde est couvert, tout le monde admissible est déjà couvert par les quatre autres, c'est-à-dire réfugié, visiteur...

Mme Marois: Oui. Citoyen, réfugié, visiteur, etc.

M. Kelley: ...immigrant reçu ou citoyen. Ça couvre l'ensemble des personnes admissibles au programme.

Mme Marois: C'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Compte tenu de l'heure, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

Mme Marois: Est-ce qu'on pourrait adopter notre article avant de suspendre, M. le Président? Ce serait fait.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que vous êtes prêts à adopter? Je pense que le député de Nelligan avait une autre question.

Mme Marois: Ah! C'est parfait.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, on reprend les travaux à 15 heures. Et je vous souligne déjà que, ce soir, ce sera à 21 heures au lieu de 20 heures. Ne pas l'oublier!

(Suspension de la séance à 13 h 3)

(Reprise à 15 h 2)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous recommençons nos travaux. Nous sommes à l'article 2, et le député de Nelligan avait demandé la parole avant de passer à l'adoption de l'article 2. Alors, je comprends que le député de Nelligan a décidé qu'il n'avait pas d'intervention à faire?

M. Williams: Oui, M. le Président. On commence bien, M. le Président? Oui, effectivement, j'ai une question, au moins une, sur l'article 2. Et j'espère que je demande ma question à la bonne place. Mais je vais prendre...

Mme Marois: On vous l'indiquera, si ce n'est pas le cas.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Sinon, on va vous le dire.

M. Williams: Sinon, je pense que je vais avoir un commentaire sur ça assez vite.

Mme Marois: Rassurez-vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: À la fin de l'article 2, vous avez parlé des exclus, des étrangers visés aux articles 982 et 983 de la Loi sur l'impôt et aussi ceux qui sont visés par le règlement, les paragraphes a et c, au premier alinéa de 96 de la Loi sur le ministère du Revenu.

M. le Président, j'ai fait ma recherche et, si j'ai bien compris, la première partie touche les fonctionnaires étrangers qui sont ici et leurs familles, s'ils sont inclus dans la même entente avec un autre pays. Si on regarde 96 de la Loi sur le ministère du Revenu, on voit les fonctionnaires d'un autre pays, d'organismes internationaux, souvent les Nations unies, etc. Avec ça, je pense que c'est assez logique que ces personnes soient exclues des prestations familiales.

Je voudrais savoir, selon cette définition de «résident permanent», si nous avons des Québécois ou des Québécoises qui voyagent pour l'État et qui ne sont pas là pendant une période d'impôts, de taxation, est-ce qu'ils sont exclus aussi? Ça peut être les Forces canadiennes, ça peut être nos fonctionnaires qui représentent l'État. Je voudrais juste comprendre ce qu'on fait pour ces familles-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Si j'ai bien compris, c'est Mme Gauthier...

M. Williams: M. le Président, j'espère que c'est au bon article que je demande la question.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, c'est correct.

Mme Marois: Tout à fait pertinent.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Pour la première fois, c'est correct.

Mme Marois: De toute façon, on vous le dira lorsque ça ne sera pas le cas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: Quelle surprise! Ha, ha, ha!

Mme Marois: On va vous aider, on va vous guider dans l'étude du projet de loi.

M. Williams: Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Lise Gauthier, du ministère du Revenu.

Mme Gauthier (Lise): Oui, merci. Les article 982 et 983 visent des fonctionnaires étrangers qui viennent au Canada, dans un premier temps, et qui sont non-citoyens canadiens. Dans le règlement, à l'article 96, ce que l'on vise, c'est les fonctionnaires étrangers des organisations internationales, gouvernementales et non gouvernementales. Pour les Québécois qui vont travailler à l'étranger, on va regarder s'ils sont résidents du Québec. S'ils demeurent résidents du Québec, c'est l'article 2 du projet de loi, le premier alinéa – j'espère...

Mme Marois: Oui, «résident permanent au sens de la Loi», c'est ça.

Mme Gauthier (Lise): Résident au sens de la Loi sur les impôts. Donc, un fonctionnaire québécois qui va à l'étranger demeure résident du Québec au sens de la Loi sur les impôts.

M. Williams: O.K. Avec ça, ils sont inclus dans ça.

Mme Gauthier (Lise): Même s'ils sont à l'étranger, l'article 8 répute qu'ils sont résidents du Québec pendant leur absence. Donc, ils sont résidents.

M. Williams: Excellent. Avec ça, ceux et celles qui représentent l'État ou dans les Forces canadiennes sont inclus.

Mme Marois: Parce que, dans le fond, à ce moment-là, comme on exclut les gens de l'étranger, qui sont issus de l'étranger, qui ne paient pas leurs impôts ici, a contrario, eux, paient leurs impôts comme citoyens canadiens, mais ils sont en poste à l'étranger pour les fins de leur travail. On se comprend.

M. Williams: Oui, oui, mais je parle d'une façon internationale, pas interprovinciale aussi et je voulais juste m'assurer qu'ils sont inclus. Selon votre réponse, ils sont inclus.

Mme Gauthier (Lise): Oui, parce qu'ils sont résidents du Québec.

M. Williams: Ils peuvent avoir accès à ces allocations parce qu'ils sont traités comme des résidents permanents, malgré le fait qu'ils sont...

Mme Gauthier (Lise): Malgré le fait qu'ils soient à l'étranger, ils sont réputés résidents du Québec.

M. Williams: Merci beaucoup. Je pense que c'est assez important pour nos familles québécoises qui représentent l'État ailleurs. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. Est-ce que l'article 2 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. L'article 3, Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, l'article 3 nous dit ceci:

«3. Pour déterminer si une personne est le conjoint d'une autre personne, il est fait application de l'article 2.2.1 de la Loi sur les impôts, compte tenu des adaptations nécessaires.»

Alors, que nous dit cet article? En fait, à quoi réfère cet article? Il réfère essentiellement à la Loi sur les impôts et à la notion de conjoints de fait. Comment se définissent les conjoints de fait au sens de cette loi? Ce sont des personnes de sexe opposé qui ont vécu maritalement ensemble pendant une période d'au moins 12 mois – donc, il faut avoir vécu ensemble pendant 12 mois pour être considéré comme conjoints de fait – ou moins, si un enfant est issu de leur union. Alors, évidemment, ce renvoi est rendu nécessaire, ça va de soi, compte tenu que le montant de l'allocation est basé sur le revenu net au plan fiscal. Alors, on détermine, dans le fond, qui est le conjoint.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a des questions? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Oui, alors, dans la situation actuelle, ça prend nécessairement des conjoints qui sont de sexe opposé? La raison de cette question, c'est quand nous avons fait, je pense, la loi n° 131, devant la commission des institutions, il y a eu toute une longue discussion sur la notion de conjoints, et c'est là où, je pense, les fonctionnaires ont déposé les 16 définitions différentes de conjoints dans nos lois québécoises. Alors, dans la situation, où pour d'autres fins peut-être, un couple homosexuel réclame d'être des conjoints, le revenu ne sera pas utilisé afin de calculer l'allocation familiale, si j'ai bien compris.

Mme Marois: Je vais demander à notre collaboratrice et experte dans ces questions de venir nous rejoindre...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Peut-être de rester assise avec nous...

Mme Marois: ...au ministère du Revenu. C'est sûr, on connaît tous des situations où des conjoints de même sexe ont des enfants. Alors, comment cela est-il traité?

Mme Gauthier (Lise): Les conjoints de même sexe ne sont pas reconnus aux fins de la Loi sur les impôts, actuellement.

M. Kelley: C'est juste la concordance avec... Parce que la loi n° 131, traitait des régimes...

Mme Gauthier (Lise): C'étaient les régimes d'assurance, de mémoire, qui étaient visés par cette loi-là. Et la Loi sur les impôts n'a pas été modifiée encore pour prévoir les cas de conjoints de même sexe. Donc, si vous avez des conjoints de même sexe, pour nous, ce ne sont pas des conjoints aux fins de la déclaration de revenus. Donc, le revenu du conjoint, entre guillemets, ne sera pas pris en considération pour déterminer le montant de l'allocation familiale.

(15 h 10)

M. Kelley: O.K. Alors, ça va être juste le parent ou l'un des deux qui va...

Mme Marois: La personne qui s'occupe généralement de l'enfant, comme on l'a vu tout à l'heure.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? M. le député de Nelligan.

M. Williams: Pour bien comprendre la dernière interprétation, il y a un couple hétérosexuel avec deux revenus, avec un enfant...

Mme Gauthier (Lise): Vous m'avez dit homosexuel?

M. Williams: ...avec deux revenus et un ou deux enfants; pour le calcul des prestations, il doit calculer les deux revenus. Pour un couple de même sexe, il n'a pas besoin d'ajouter...

Mme Gauthier (Lise): Non, on ne prendra pas le revenu de l'autre personne parce que ce n'est pas son conjoint au sens de la Loi sur les impôts. Parce qu'on fait référence quand même à la déclaration de revenus. Donc, lorsque les gens produisent leur déclaration de revenus au Québec, ils vont cocher s'ils ont un conjoint au 31 décembre de l'année, qui est l'année de référence aux fins du calcul de l'allocation familiale. Donc, comme nous ne reconnaissons pas les conjoints de même sexe, ils n'identifieront pas qu'ils ont un conjoint, malgré le fait que, dans le langage populaire, ils peuvent se considérer conjoints.

M. Williams: Vous avez copie de l'article 2.2.1 de la Loi sur les impôts?

Mme Gauthier (Lise): L'article 2.2.1 de la Loi sur les impôts, oui.

M. Williams: Est-ce que je peux en avoir une copie, s'il vous plaît?

Mme Gauthier (Lise): Ce n'est pas la version officielle. Je peux vous donner l'extrait que j'en avais fait.

Mme Marois: On peut faire des copies pour...

M. Williams: Nous avons ça, ici.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Quelqu'un l'a.

M. Williams: La ministre a décidé d'utiliser 2.2.1 comme la façon de définir le conjoint, si j'ai bien compris, et c'est assez clair dans la loi. Pourquoi la ministre n'a pas décidé d'aller plus loin que ça? Pourquoi avez-vous décidé de prendre ça tel que c'est déjà écrit?

Mme Marois: En fait, c'est que tout notre système d'allocations familiales est basé sur des notions fiscales. Et, à partir de là, ou on change la Loi sur les impôts pour définir autrement le conjoint de fait, ou on fonctionne avec la base qui est utilisée et par le ministre des Finances, lorsqu'il fait sa planification, et évidemment par le ministre du Revenu, lorsqu'il prélève, ou rembourse, ou paie des allocations, ou, par le fait de l'information qu'il a accumulée, nous permet, nous, d'aller verser des allocations. Alors, c'est une question de concordance.

J'avoue cependant que c'est le genre de question qui devrait être soulevée, à mon point de vue, plus globalement. Ce n'est peut-être pas le temps, à ce moment-ci, de se poser la question à l'intérieur d'une loi comme celle-ci. Mais une loi comme celle-ci peut nous permettre cependant de soulever la question et, éventuellement, d'avoir un débat sur cela. Parce qu'on les reconnaît, maintenant, les conjoints de même sexe, pour ce qui est de la question des assurances. Est-ce qu'il y a d'autres endroits, au plan de nos lois sur les impôts? Non, je ne crois pas.

Mme Gauthier (Lise): Non, pas dans la Loi sur les impôts, non, aucunement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, ça va?

M. Williams: Non. Ce n'est pas mon...

Mme Marois: Il y a peut-être une autre chose qu'il faut savoir. Vous savez, on va expliquer ça un peu plus tard dans le règlement, que c'est Revenu Canada qui va gérer l'admissibilité, n'est-ce pas, à cause de la prestation fiscale. Éventuellement, ce sera nous qui gérerons l'admissibilité mais, pendant une période, ce sera Ottawa. Et Ottawa a aussi cette même définition. Ce n'est pas nécessairement une obligation, évidemment, vous savez que nous nous distançons souvent d'Ottawa mais, dans le cas présent, ça facilite la gestion du régime.

M. Williams: O.K. Oui, effectivement, Mme la ministre, c'est l'état maintenant que c'est Ottawa qui gère ça. Mais nous sommes en train de faire un débat sur un projet de loi qui va changer les règles. Et j'ai voulu juste mieux comprendre, un, pourquoi nous avons juste accepté les règles d'Ottawa. Et, deux, est-ce que, peut-être au niveau du Conseil des ministres, vous avez discuté de la possibilité d'adapter cette définition de la famille telle que vous l'avez déjà dans les autres programmes, comme l'assurance, pour être plus concordants avec les décisions que nous avons prises comme société? Avez-vous discuté de ça?

Mme Marois: Non, nous ne l'avons pas discuté, ça n'a pas été soulevé, d'aucune espèce de façon. Évidemment, ce sont des cas qui existent. Ils sont assez exceptionnels en nombre, j'en suis persuadée, mais ils existent. Moi, je n'ai pas d'objection de principe à ce qu'on puisse éventuellement l'aborder. Pour l'instant, on change pas mal de choses, évidemment, vous le savez, vous êtes conscients de ça, et, le député de Jacques-Cartier le rappelait, ce matin, ça obligera à modifier beaucoup de nos systèmes, à les adapter, etc. Et compte tenu de tous les changements que nous apportons, il est peut-être utile de faire ceux-là de la manière dont on les fait maintenant. Mais ça n'empêche pas qu'une question comme celle que vous soulevez puisse être reprise éventuellement. Moi, je n'ai pas d'objection, aucunement, à le faire.

M. Williams: Dans l'article 3, ça finit avec les mots «compte tenu des adaptations nécessaires». Qu'est-ce que ça veut dire exactement? Ça peut aller jusqu'à quelle limite, ces adaptations nécessaires?

Mme Gauthier (Lise): C'est que, dans la Loi sur les impôts, on va parler d'un contribuable, ce qui n'est pas dans la Loi sur les prestations familiales. Lorsqu'on parle d'adaptations nécessaires, c'est pour tenir compte du vocabulaire qui est employé dans une autre loi.

M. Williams: Et est-ce que ça peut aller jusqu'à inclure la discussion que nous avons eue?

Mme Marois: Non.

M. Williams: Non. Mais je voudrais juste comprendre les balises. Parce que c'est assez large, «compte tenu des adaptations nécessaires», c'est assez ouvert. Et je voudrais juste, pour moi-même et ceux et celles qui nous écoutent, mieux comprendre. On donne jusqu'à quoi, comme pouvoir d'adapter cet article de la loi?

Mme Marois: Soi dit en passant, c'est une formule d'usage aussi qui tient compte de la terminologie que l'on a à l'intérieur de nos lois pour prévoir, j'imagine, des éventualités qui ne seraient pas autrement identifiées et formellement. Mais il n'y a pas d'intention derrière un texte comme celui-là. Parfois, un texte en cache un autre, mais ce n'est pas le cas.

M. Williams: Mais, avec tout respect, mes juristes, je pense qu'ils sont en arrière, ils ont toujours dit qu'il n'y a pas un mot inutile dans un projet de loi québécois.

Mme Marois: Normalement.

M. Williams: Normalement, pas un. Et je pense que tout le monde est d'accord avec ça. Mais, avec ça, il me semble que, s'ils sont inutiles, on peut enlever «compte tenu des adaptations nécessaires», s'il n'y a aucune raison d'avoir ça. Ce n'est pas nécessairement une proposition formelle, M. le Président, nous sommes en train de discuter. Je voudrais savoir ce que ça veut dire. Peut-être que c'est utilisé dans le jargon assez souvent, mais «compte tenu des adaptations nécessaires», il me semble que ça touche...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Gauthier a donné un exemple de... Voulez-vous le répéter?

Mme Gauthier (Lise): C'est très important, c'est que, lorsque vous relisez le texte de l'article 2.2.1, lorsque vous voulez l'appliquer dans la Loi sur les prestations familiales, on dit: «Les mots se rapportant au conjoint d'un contribuable», ce n'est pas une expression qui se retrouve dans la Loi sur les prestations familiales. Donc, on va parler du conjoint d'une personne, du conjoint d'un particulier. On va remplacer le mot «contribuable» par le mot qui se retrouve dans la Loi sur les prestations familiales. C'est ça, les adaptations nécessaires qui doivent être faites. C'est pour permettre de lire un texte en fonction d'une autre loi.

M. Williams: O.K. «Les adaptations nécessaires» sont juste des mots de concordance et ne changent pas le fond.

Mme Gauthier (Lise): Jamais.

Mme Marois: C'est ça.

M. Williams: Jamais. Merci beaucoup.

Mme Gauthier (Lise): On ne peut pas changer le fond, non.

Mme Marois: C'est pour ça que je vous disais qu'il n'y a pas d'intention cachée derrière les mots qui sont là.

M. Williams: Non, non. Et je pense que je n'ai pas mentionné une intention cachée, Mme la ministre.

Mme Marois: D'accord.

M. Williams: J'ai voulu bien comprendre ça, parce que, souvent, on arrive au ministère du Revenu avec des lois assez complexes. Et, après que nous avons eu tout évacué les choses, nous avons vu que c'est effectivement un changement de mot, d'un mot à l'autre. Avec ça, j'ai voulu juste m'assurer que nous sommes en train de donner un pouvoir raisonnable d'adapter ou d'être de concordance et pas nécessairement de changer le fond. Et j'ai bien aimé la réponse que j'ai reçue. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste d'une façon générale, est-ce qu'il y a assez d'avantages dans nos lois fiscales pour encourager le monde à déclarer être un conjoint de fait? Parce que, dans ce cas-ci, ce serait un désavantage de déclarer.

Mme Marois: Oui.

M. Kelley: Alors, est-ce qu'il y a assez d'avantages pour compenser pour...

Mme Gauthier (Lise): Il peut y avoir des avantages...

Mme Marois: Remarquez qu'il pourrait y avoir, même dans ce cas-là... Moi, je pense aussi, que, normalement, ça devrait être un désavantage. Parce que, quand les deux conjoints sont au travail, avec deux revenus, ça augmente immédiatement le revenu global de la famille. Évidemment la prestation étant reliée au revenu net, mais global, ça peut jouer. Parce qu'il pourrait y avoir des conjoints de même sexe, dont un des conjoints est à la maison. Et là il y a peut-être un intérêt, à cause d'un seul revenu, à le déclarer. Mais ce serait normalement assez exceptionnel.

M. Kelley: Oui, mais je pense que ça va être toujours un désavantage de déclarer le deuxième revenu pour les fins de ce projet de loi. Et c'est pourquoi ma question: Est-ce qu'il y a d'autres avantages dans notre régime de fiscalité pour encourager les conjoints à s'identifier ou non?

(15 h 20)

Mme Gauthier (Lise): Il y a le crédit pour conjoints, ce qu'on appelle pour personnes mariées. C'est un crédit de 5 900 $ qui est donné.

Mme Marois: Mais ce n'est pas considéré dans la formule fiscale.

Mme Gauthier (Lise): Oui, il parlait des hétérosexuels, là.

Mme Marois: Moi, j'étais toujours dans les conjoints de même sexe.

M. Kelley: Non, non, moi, je parle des conjoints de fait.

Mme Marois: Ah! bon, oui, d'accord. Non, ça, ça va. C'est parce que, moi, j'étais dans les conjoints de même sexe.

M. Kelley: Pour eux autres, je comprends fort bien qu'il y aura toujours intérêt de ne pas déclarer les deux revenus parce que c'est évident que ça va affecter...

Mme Marois: Les conjoints de fait.

M. Kelley: Mais, moi, je parle juste maintenant dans le général de conjoints de fait tel que défini dans 2.2.1 Il y a assez d'avantages quant aux déductions...

Mme Gauthier (Lise): Le principal avantage, c'est le crédit pour personnes mariées.

M. Kelley: Parce qu'on ne veut pas créer des situations où il faut cacher, ou quelque chose comme ça, et nécessiter d'autres projets de loi n° 32 pour aller fouiller dans les affaires personnelles des contribuables. Alors, dans l'ensemble, même avec un changement comme ça... Parce que c'est évident que, si les deux ensemble ou si quelqu'un a trois enfants, ça peut avoir un impact énorme si on ajoute un conjoint non parent qui a un revenu de 50 000 $ ou de 40 000 $. Ça va complètement changer. Et je veux juste m'assurer qu'on a fait le calcul des avantages et des inconvénients de déclarer un conjoint de fait et que c'est toujours avantageux de le faire.

Mme Gauthier (Lise): Non, ce n'est pas toujours avantageux de le faire. Je ne pourrais pas vous dire ça, que c'est toujours avantageux de déclarer un conjoint de fait. Surtout quand le conjoint de fait a un revenu, ce n'est pas nécessairement avantageux. Sauf que la législation fiscale est claire, et on traite sur le même pied d'égalité les conjoints légaux que les conjoints de fait, on ne fait pas de discrimination entre les deux.

M. Kelley: O.K. Non, non. C'est juste...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Kelley: Une autre. Est-ce que c'est pertinent ici ou dans un autre endroit? Quelques-uns des groupes qui ont témoigné ont soulevé le fait qu'on peut aller jusqu'aux trois parents, le revenu calculé afin de déterminer. Parce que, si on fait les deux parents, ou le parent et l'ex-conjoint qui paie une pension alimentaire et le conjoint non parent, ajouter les trois ensemble... Est-ce que c'est le meilleur article pour discuter de ça ou est-ce que ça va revenir plus loin?

Mme Marois: Ce serait plutôt dans l'article 8, au deuxième alinéa.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): «Déterminer le mode de calcul du revenu visé au paragraphe 1°.»

Mme Marois: Et là on aura un règlement.

M. Kelley: O.K. Non, non. Je veux juste m'assurer, parce que c'est un point qui a été soulevé par quelques-uns des groupes qui ont témoigné ici. Alors, je ne veux pas perdre l'occasion, à l'article, de discuter de ça parce qu'il y a des inquiétudes qui ont été soulevées par les groupes qui ont témoigné.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Est-ce que l'article 3 est adopté?

Des voix: Adopté.


Contenu et conditions d'attribution des prestations familiales


Dispositions communes à l'allocation familiale et à l'allocation pour enfant handicapé

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. Merci. Mme la ministre, article 4.

Mme Marois: «4. Chaque enfant a droit au bénéfice des prestations familiales jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de dix-huit ans, sauf les cas prévus par règlement du gouvernement.»

D'abord, on commence un autre bloc d'articles. Les articles 4 à 7 – donc, celui-ci est le premier – introduisent les conditions d'attribution des prestations familiales. Évidemment, c'est commun, ces articles, tant à l'allocation familiale qu'à l'allocation pour enfants handicapés.

Ici, qu'est-ce qu'on fait? C'est celui âgé de moins de 18 ans; je pense que ça va, c'est clair. Et on introduit dans cet article la possibilité de prévoir par règlement les cas où l'enfant n'ouvre pas droit au paiement de prestations familiales. Alors, quels sont-ils, ces enfants? Essentiellement, on prévoit deux situations, à ce moment-ci. C'est l'enfant qui est placé en famille d'accueil ou en centre d'accueil par les services sociaux et si la contribution exigible au plan parental pour la garde de l'enfant n'est pas versée. Donc, le parent, normalement, devrait verser une contribution parce que son enfant n'est pas chez lui, il est placé ou en famille d'accueil ou en centre d'accueil, mais il ne verse pas de contribution. Donc, évidemment, s'il ne verse pas de contribution, il ne prend pas soin de l'enfant, n'en est pas responsable – enfin, il n'en est pas responsable, financièrement parlant – et ne fait pas la preuve qu'il l'est parce qu'il ne verse pas. Donc, évidemment, à ce moment-là, aucune contribution parentale ne sera exigée pour la garde d'enfants qui...

Une voix: ...

Mme Marois: Ah! oui. Quand on bénéficie de prestations de la sécurité du revenu, c'est une autre situation. Alors, donc, c'est l'enfant placé pour lequel le parent ne contribue pas, on ne verse pas, donc, au parent, l'enfant n'est pas là, il est en institution ou dans une autre famille; deuxièmement, l'enfant qui est le conjoint d'une personne qui a bénéficié d'un crédit d'impôt pour conjoint à charge. Voilà.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a des questions? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste pour bien saisir, parce qu'il y avait dans le cahier... Qu'est-ce qu'on vise dans les personnes qui ne sont pas nécessairement touchées par l'article 2? Parce que dans l'article 2, nous avons créé les règles d'admissibilité générales, c'est-à-dire citoyen, réfugié, etc. Dans ces cas-là, c'est plutôt le parent qui a le droit à l'allocation familiale. Et, en 4, on en train de créer une autre exception, c'est les enfants, d'une certaine façon, sans parents, si je peux...

Mme Marois: Oui. En fait, dont les parents ne prennent pas charge physiquement.

M. Kelley: Alors, on vise ces personnes. Et peu importe où ils se trouvent, ils ont droit aux allocations. Alors, même dans une famille d'accueil, le revenu de la famille d'accueil ne compte pas?

Mme Marois: Alors, on va demander à M. Duperré, qui est du ministère de la Santé et des Services sociaux, de nous donner quelques explications dans ces cas plus précis.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Thomas Duperré.

M. Duperré (Thomas): Lorsqu'un enfant est placé dans le réseau des affaires sociales, il y a une contribution qui est imposée dont le maximum correspond, en gros, aux coûts des besoins fondamentaux de l'enfant. Auparavant, à venir jusqu'à maintenant ou il y a quelques années, cette contribution avait une composante d'une contribution minimale, on exigeait au minimum, en gros, l'équivalent des paiements de transfert, sauf ceux à l'aide sociale, qui étaient donnés à l'enfant. Parce que cette somme est censée être versée pour défrayer les coûts des besoins fondamentaux de l'enfant. Alors, le règlement avait été structuré de façon à avoir une certaine neutralité, que les parents n'aient pas à payer plus, que l'argent qui est supposé être consacré aux besoins de l'enfant soit transféré, en quelque sorte, dans le réseau des affaires sociales pour payer pour les besoins de l'enfant. Alors, il y a un principe de neutralité.

Tout ça a changé un peu au cours des dernières années parce que le fédéral a changé sa politique d'éligibilité à l'endroit de la prestation fiscale. Alors, la prestation fiscale, maintenant, est acheminée dans le réseau directement. Mais le Québec, lorsque le choix a dû être fait de laisser l'éligibilité aux parents pour l'allocation familiale, le choix a été fait de laisser l'éligibilité, quitte à ce que la contribution qui est exigée pour le placement de l'enfant soit payée, sous sanction de perdre l'allocation familiale, au cas où cette contribution n'est pas payée.

Maintenant, ceci ne dit rien du type de contribution qui est imposée et de celle qui va être imposée dans le futur ou qui ne sera pas imposée. En fait, le ministère de la Santé est dans une réflexion sur ces contributions. Il y a plusieurs aspects d'intégration et d'harmonisation et de mécaniques administratives qui sont à réviser. Mais le principe reste le même, que les parents des enfants placés gardent l'éligibilité à l'allocation familiale, quitte à devoir assumer une contribution qui est fixée dans un règlement en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Je ne sais pas si je réponds à votre question.

M. Kelley: O.K. Il y a beaucoup de contributions exigées, mais ce n'était pas clair, éxigées par qui et payées par qui. Pour prendre un cas type, moi, je demeure un parent admissible, et mon enfant est maintenant placé dans un centre de jeunesse, un centre d'accueil. Alors, mes devoirs parentaux sont assumés par le réseau de la santé et des services sociaux. Alors, moi, je suis toujours admissible, mais je dois verser l'argent vers le système ou on va verser l'argent à l'enfant pour verser ça au centre d'accueil?

(15 h 30)

Mme Marois: Vous avez un enfant, il est placé en famille d'accueil, on demande une contribution de votre part. Vous la versez, vous êtes considéré, donc, comme le parent responsable de son enfant et qui continue de s'en occuper physiquement, moralement et psychologiquement, vous recevez donc l'allocation familiale. Si la contribution à verser est plus élevée ou plus basse que l'allocation familiale, il n'y a pas de relation nécessairement, parce que ça dépend à ce moment-là du revenu du parent, tandis que la contribution, elle, est une contribution, j'imagine, qui doit être à peu près uniforme.

M. Duperré (Thomas): Bien, ça dépend aussi des revenus des parents, mais c'est plus généreux que...

Mme Marois: C'est ça.

M. Duperré (Thomas): C'est des niveaux plus généreux que les niveaux d'aide sociale, si on veut.

Mme Marois: Voilà. Et quand le parent ne contribue pas, de toute façon la famille d'accueil, elle, reçoit une aide pour prendre en charge l'enfant, et là c'est l'État qui la verse. Alors, on ne va pas se verser à nous-mêmes, évidemment, des contributions à l'allocation familiale. On ne les transférera pas au ministère de la Santé et des Services sociaux. On se comprend bien.

M. Kelley: Alors, juste pour résumer, parce que je n'ai aucune expérience dans ça. Pour l'enfant dont les parents ne versent pas les paiements – c'est le cas d'abandon ou on ne peut pas les retrouver – l'allocation familiale, l'enfant a droit au maximum du barème, j'imagine? Si je prends le tableau, un enfant, c'est 2 200 $.

M. Duperré (Thomas): Peu importe la barème, là. Si les parents de l'enfant placé ne paient pas la contribution qui est exigée...

Mme Marois: Ils n'ont pas d'allocation.

M. Duperré (Thomas): ...l'allocation est coupée.

Mme Marois: Il n'y en a pas.

M. Kelley: Mais, ici, on dit: «Chaque enfant a droit au bénéfice...»

Mme Marois: Sauf les cas prévus au règlement, et c'est celui-là qu'on prévoit.

M. Kelley: O.K. Alors, règle générale, il n'y aura pas d'enfants visés par ça parce que soit les parents sont toujours responsables...

Mme Marois: C'est ça.

M. Kelley: ...et on va verser l'argent même si ça va aller au centre d'accueil ou quelque chose comme ça, éventuellement. Le chemin normal va être toujours d'envoyer l'argent aux parents et, si les parents ont un enfant qui est maintenant placé dans un centre d'accueil, c'est les parents qui vont verser l'argent directement au centre d'accueil.

Mme Marois: C'est ça.

M. Kelley: Alors, vraiment, ici, est-ce qu'on peut imaginer un cas où l'enfant serait bénéficiaire sous l'article 4 ou non?

Mme Marois: Non, parce que... En fait...

M. Kelley: Est-ce que les cas prévus vont évacuer tous les autres?

Mme Marois: Tous les enfants reçoivent, sauf des cas spécifiques prévus par règlement. Ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a deux cas, et l'un de ces cas, c'est celui où l'enfant est placé en famille d'accueil ou en centre d'accueil et que le parent ne contribue pas aux fins des coûts reliés à la garde. Actuellement, il y a 11 000 enfants placés, dont 4 000 enfants pour lesquels il n'y a pas de contribution parentale payée. Mais, pour ce qui est de l'enfant lui-même maintenant, ça ne change rien au sens strict du terme, parce que le ministère de la Santé et des Services sociaux verse une allocation à la famille d'accueil ou au centre d'accueil pour que cette personne, cette famille ou cette institution prenne charge de l'enfant.

M. Kelley: C'est parce que, il y a trois semaines, j'ai rencontré Father Emmett Johns, le bon pasteur dans la rue... Il n'y a aucune manière de verser les allocations familiales aux enfants dans la rue? Je n'imagine pas, mais...

Mme Marois: Aux enfants dans la rue? Bien écoutez, c'est un peu comme le même principe des personnes sans résidence...

M. Kelley: Des sans-abri.

Mme Marois: ...sans abri, sans domicile fixe.

M. Kelley: Mais, avec les sans-abri, on a maintenant les mécaniques pour les envoyer... c'est l'aide sociale.

Mme Marois: Il y a une mécanique pour les verser par l'intermédiaire de l'aide sociale. J'imagine que des situations semblables pourraient amener des réalités semblables, mais, à ce moment-là, ce n'est pas un adulte, hein. Alors, elles seraient versées à un tuteur, elles seraient versées à une institution.

M. Kelley: Non, mais, dans le libellé de la loi, ici, on dit que «chaque enfant a droit au bénéfice des prestations». Et j'étais étonné, en parlant au bon pasteur dans la rue, à Montréal, du nombre d'enfants avec qui il travaille. Il a sa roulotte, et le travail qu'il fait, l'oeuvre de charité faite par le pasteur Johns est tout à fait remarquable. Et je me demande, dans le libellé de ça, si les enfants qui sont dans la rue pendant deux ans ou trois ans, avec tous les syndromes horribles que, trop souvent, on retrouve, et tout ça, si c'est envisageable de verser l'allocation à ces enfants, directement aux enfants?

Mme Marois: On ne verse jamais directement aux enfants, là. Il faut être bien conscient. Tant qu'on n'a pas 18 ans, on n'a pas directement accès à une prestation, n'est-ce pas. C'est le parent qui a la prestation, pour l'enfant et pour les soins de l'enfant. On le dit dans d'autres articles.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Même s'il est dans la rue.

Mme Marois: Même s'il est dans la rue, c'est le parent qui a...

M. Kelley: Mais c'est juste le libellé de cet article, parce qu'on parle ici...

Mme Marois: Il a droit au bénéfice.

M. Kelley: On est en train de créer une loi où chaque enfant a droit à un bénéfice.

Mme Marois: Oui, au bénéfice des prestations familiales. Le bénéfice, ce n'est pas la prestation elle-même.

M. Kelley: Nécessairement, mais il y a un certain bénéfice quand même.

Mme Marois: Non, ce n'est pas la prestation elle-même. Il a droit au bénéfice des prestations familiales. Bénéfice, c'est-à-dire ce que l'on peut lui offrir comme avantage dû au fait qu'on reçoit l'allocation familiale. Et dans la loi, c'est clair d'ailleurs, ça doit servir aux fins des soins de l'enfant, ça apparaît dans un article formellement.

M. Kelley: Ça, c'est le prochain article.

Mme Marois: Vous allez le voir, là, je ne me souviens pas si c'est le prochain. C'est ça, on dit: «Les prestations familiales doivent être utilisées pour les besoins de l'enfant», mais elles ne sont pas versées à l'enfant. Dans le domaine de la santé et des services sociaux, ce que l'on fait, c'est que, lorsqu'un enfant est pris en charge, ou délaissé par ses parents, ou ses parents ne peuvent pas l'assumer pendant une certaine période au plan physique et psychologique, ils peuvent toujours contribuer financièrement. On voit que la grande majorité le font. Mais, à ce moment-là, c'est l'État qui se substitue aux parents et là assume par la voie de services directs dans l'institution ou d'aide à une famille d'accueil qui va recevoir l'enfant. Donc, le gouvernement se substitue au rôle parental, assume le rôle parental.

M. Kelley: Je comprends très bien, et c'est très ciblé dans les textes de règlements ou lois existantes, qui sont dans le cahier, où on parle spécifiquement des personnes dans la loi sur la santé et les services pour les autochtones cris, la Loi sur les jeunes contrevenants. Alors, c'est très ciblé. Quand je lis le libellé d'un nouveau texte: «Chaque enfant a droit au bénéfice des prestations familiales», chaque enfant. Alors, dans le cas hypothétique de mes enfants sans abri, de moins de 18 ans, j'aimerais savoir pour quelles raisons on peut le refuser.

Mme Marois: Mais il n'y en aurait pas, dans le fond, dans un sens, il n'y en aurait pas, et vous le retrouvez plus loin. Sauf que – c'est ça que je dis – ça ne sera pas versé à ce moment-là à l'enfant directement, ça va être versé, ça pourrait être versé à l'institution comme ça pourrait l'être à la famille d'accueil. Mais là on ne sera pas deux fois payeur. Alors, l'État peut décider, parce que, écoutez, les allocations familiales, ce n'est pas un régime d'assurance, c'est un régime d'allocation. Alors donc, que l'argent vienne du fonds d'allocation ou qu'il vienne du fonds général, du fonds consolidé, ça n'a pas beaucoup d'importance. On se comprend. À ce moment-là, évidemment, le montant de l'allocation, lui, pourrait être équivalent, mais versé à ce moment-là, par exemple, par le ministère de la Santé et des Services sociaux à l'institution.

D'ailleurs, je vous ramène à l'article 20... d'abord, à l'article 6 qui dit que «les prestations sont versées par la Régie des rentes à la personne qui assume principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et qui vit habituellement avec lui. Ce droit n'est reconnu qu'à une seule personne pour un même enfant. Toutefois, on peut, par règlement, déterminer qui reçoit les prestations lorsque plus d'une personne assume cette charge.» Puis on y reviendra tantôt. L'article 20: «Lorsque la personne qui reçoit les prestations familiales prive l'enfant du bénéfice de ces prestations, la Régie peut les verser à une autre personne ou à un organisme. Cette personne ou cet organisme doit tenir une comptabilité de l'administration des prestations reçues pour chaque enfant visé et, sur demande, rendre compte à la Régie de son administration.»

Mais là il faut être bien conscient que la prestation qui est versée, elle l'est sur la base du revenu net des parents. Alors, évidemment, à ce moment-là, qu'est-ce qu'on va prendre comme revenu d'une institution? Donc, c'est là que ça devient important qu'il y ait un arrimage de fait avec la santé et les services sociaux, et comme, normalement, aucun enfant ne doit être laissé sans sécurité... d'ailleurs, c'est la loi de la protection de la jeunesse – je ne sais plus si elle s'appelle toujours comme ça, je crois que oui – c'est la loi de la protection de la jeunesse qui crée une obligation, d'abord aux familles, mais éventuellement à l'État, d'assumer les soins de l'enfant. Bien, à ce moment-là, on ne se versera pas à nous-mêmes des allocations. On se comprend. Ça coûte pas mal plus cher de prendre soin d'un enfant dans une institution que l'allocation même maximum qu'on pourrait verser à une institution.

M. Kelley: Mais, moi, je pense, juste en faisant la lecture de ça avec les autres articles qui ont été cités, que, en principe, Le Bon Dieu dans la rue ou un autre organisme communautaire, s'il peut faire la preuve que l'enfant est sans abri, sans adresse permanente, abandonné par ses parents, qu'il le nourrit dans sa cuisine ou quelque chose comme ça... Est-ce qu'il peut, en théorie, réclamer le bénéfice des prestations familiales pour cet enfant abandonné qui n'a pas encore 18 ans?

(15 h 40)

Parce que les chiffres sont étonnants; de mémoire, je pense qu'on parlait de 25 000 à 30 000 enfants à Montréal qui sont régulièrement en bas de 18 ans et qui sont, d'une certaine façon, soignés, ou, au moins, il y a une certaine aide donnée par Le Bon Dieu dans la rue à ces enfants, alors c'est une clientèle importante. J'imagine que les parents continuent de réclamer ou reçoivent une allocation familiale pour ces enfants, mais, en théorie... Parce qu'on parle ici de créer un droit. Un droit, ce n'est pas une possibilité, mais il faut lire la loi comme il faut. Si je suis le pasteur Johns, est-ce que ça ouvre la porte à la possibilité que, si je peux faire la preuve que l'enfant est effectivement sans abri, sans adresse permanente, un petit peu comme nous avons fait avec l'aide sociale... est-ce que ces enfants peuvent avoir ces montants versés au bon pasteur dans la rue, par exemple, ou à un autre organisme communautaire qui prend soin de leurs besoins au moins alimentaires? Parce que la pauvreté de ces sans-abri à Montréal, c'est un problème réel, c'est un grand enjeu social dans notre grande métropole.

Mme Marois: Bien là, écoutez, il faut revenir, après ça, à la définition de base qui est ici. Parce qu'on a deux façons de voir ça. On a d'une façon très formelle, dire: Strictement, on applique la Loi sur les prestations familiales. À ce moment-là, on l'applique. Ils pourraient toujours, mais il faut qu'ils répondent à tous les critères de la loi. Or, la loi, elle dit ceci: «Les prestations familiales sont versées par la Régie des rentes du Québec à la personne qui assume principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et qui vit habituellement avec lui.» Est-ce que le père Johns pourrait dire: Oui, ils vivent avec moi dans la roulotte? Non, je pense qu'on le sait, que ce n'est pas tout à fait comme ça que ça se passe. Sauf que, dans les faits, l'institution qu'il représente ou l'organisme qu'il assume, là, peut souhaiter et demander – d'ailleurs est reconnu dans les faits – de l'aide de la part de l'État. Quoique je pense que le père Johns n'en reçoit pas. C'est nos contributions personnelles qui l'aident, hein, on en envoie tous, un jour ou l'autre.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Saint-Hyacinthe, est-ce que c'est un complément de réponse ou une question dans le même ordre?

M. Dion: Dans le même ordre, exactement dans le même ordre d'idées, mais je ne sais pas si vous y avez touché tout à l'heure, c'est toute la question de l'émancipation. Il peut arriver que des enfants de moins de 18 ans soient émancipés, pour toutes sortes de raisons prévues au Code civil. Comment ça fonctionne, dans ce cas-là, un enfant qui se lance en affaires ou je ne sais pas trop quoi? C'est quoi la mécanique dans des cas comme ça?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On parle toujours en bas de 18 ans?

Mme Marois: Oui.

M. Dion: En bas de 18 ans, oui.

Mme Marois: En bas de 18 ans.

M. Dion: Donc, qui sont des émancipés qui sont traités, pour toutes sortes d'autres fins, comme des adultes.

Mme Marois: À ce moment-là, il faudrait que le parent déclare qu'il n'est plus sous sa responsabilité, formellement, parce qu'il peut toujours avoir une certaine forme d'autonomie, mais rester quand même, jusqu'à un certain point... d'ailleurs, il le reste de toute façon au plan de l'âge, c'est-à-dire, jusqu'à ce qu'il atteigne l'âge adulte, il reste sous la responsabilité de ses parents.

Il y a un cas qu'on prévoit, on dit: «l'enfant qui est le conjoint d'une personne qui a bénéficié d'un crédit d'impôt pour conjoint à charge», ce qui est des cas exceptionnels, mais ils peuvent toujours exister.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, juste m'assurer que je comprends bien la réponse de M. Duperré avec cette définition, «qui sont exclus». J'ai lu le règlement. J'ai eu moi-même la visite de familles québécoises à mon bureau de comté qui disent que, après un séjour dans un CPEJ, ils ont reçu une facture pour l'hébergement, et tout ça. Selon la définition dans le règlement, qu'on peut trouver rattachée à l'article 4, les parents qui paient ça vont avoir le droit d'avoir l'allocation familiale.

Mme Marois: C'est exactement ce qu'on dit par l'article qui est ici.

M. Williams: Oui, je l'ai lu.

Mme Marois: C'est exactement ce qu'on dit.

M. Williams: Dans le règlement, on voit la liste des enfants exclus, mais, dans 1a et 1b, il y a la liste des familles qui sont exclues de l'exclusion – ça commence déjà à être compliqué – qui sont promis d'avoir ça. Quand je vois l'article 1a et 1b, on parle des parents qui paient la contribution et des parents de l'enfant qui sont dispensés de payer cette contribution. Est-ce que je peux comprendre la différence entre les deux?

Mme Marois: Entre...

M. Williams: 1a et 1b.

Mme Marois: ...1a et 1b. Alors, on dit: «Les parents de l'enfant paient la contribution exigée en vertu du Règlement d'application de la Loi sur les services de santé.» Il y a une contribution qui est exigée, qui est fonction du revenu des parents, donc ils doivent payer la contribution et, parfois, ils peuvent être dispensés de cette contribution en vertu de ce même règlement. Et là quelles sont les situations où ils seraient dispensés de ça?

M. Duperré (Thomas): Il peut arriver que le calcul de la contribution arrive à zéro. Ils n'ont pas de contribution à payer. Sous mention de la contribution minimale... à l'heure actuelle, on réfléchit là-dessus, mais il peut très bien arriver que le règlement de contribution exempte complètement une personne d'une contribution. Il est sujet à la contribution, mais sa contribution égale zéro.

M. Williams: On suggère une contribution? Est-ce que c'est ça que vous avez dit?

M. Duperré (Thomas): Non, non, non.

M. Williams: Est-ce qu'il y a des normes, des standards pour ça?

M. Duperré (Thomas): Ah! oui, oui, il y a un règlement qui va être constitué.

M. Williams: O.K. Avec ça, si mon enfant...

M. Duperré (Thomas): D'ailleurs, le principe ici, c'était de favoriser la responsabilisation parentale. En laissant les allocations, en soumettant, il y a un circuit qui s'établit. Alors, c'est clair que les besoins fondamentaux de l'enfant sont quand même pris en charge par les parents, mais ça ne veut pas dire...

Mme Marois: D'ailleurs, ça, c'est intéressant ce que monsieur...

M. Williams: Oui, je comprends le principe, mais je voulais juste clarifier la différence entre a et b. Si j'ai bien compris la différence entre a et b, b, c'est techniquement si la contribution est de zéro.

Mme Marois: C'est ça. Ils peuvent être dispensés de payer cette contribution.

M. Williams: Est-ce qu'il y a d'autres exceptions? Je voudrais juste bien comprendre la différence entre a et b, parce que vous avez listé deux choses différentes.

Mme Marois: Bien, il y a l'aide sociale aussi. L'aide sociale est un autre exemple où ils sont dispensés de payer cette contribution.

M. Duperré (Thomas): Je pense que b est plus une sécurité, peut-être, pour prévoir un cas où on arriverait avec une exception à a, mais....

M. Williams: O.K.

M. Duperré (Thomas): C'est parce que là...

M. Williams: On ne sait pas quel cas, mais nous avons juste protégé le système d'avoir cette...

Mme Marois: Le cas des assistés sociaux, des personnes bénéficiant de la sécurité du revenu, c'est un bel exemple, on n'exigera aucune contribution parentale, dans le cas des prestataires de l'aide de dernier recours.

M. Williams: O.K.

Mme Marois: D'accord? Parce que, dans le fond, c'est très logique par rapport à tout ce que l'on fait maintenant, parce qu'on a associé l'allocation à l'enfant, n'est-ce pas, et, bien sûr, en tenant compte du revenu du parent. Et quand l'enfant est dans une famille à la sécurité du revenu, il a la pleine allocation. Comme, lorsqu'il est dans une famille à très faibles revenus ou à moyens/faibles revenus, il a le maximum. Alors, là, évidemment, à partir du moment où l'enfant n'est plus là, on ne versera pas l'allocation pour le plaisir d'aller la rechercher ensuite. Mais on ne demandera pas non plus une contribution sur l'allocation que les parents reçoivent pour eux-mêmes. Mais, en contrepartie, ils n'auront pas l'allocation familiale.

M. Williams: O.K. Mais, pour la deuxième section, ça touche vraiment les enfants mariés qui utilisent un crédit d'impôt pour leur conjoint, l'article 752.0.1 de la Loi sur les impôts. C'était le crédit d'impôt pour les dépendants, hein? Est-ce que c'est ça?

Mme Marois: Oui.

M. Williams: C'est un enfant marié, marié avec un autre enfant, qui utilise un crédit d'impôt...

Mme Marois: C'est ça. Mais c'est des...

M. Williams: Non, non, je comprends. Je voulais juste m'assurer...

Mme Marois: Il faut vraiment tout prévoir, alors nous prévoyons tout.

M. Williams: Non, non, je ne mets pas ça en doute et je veux juste qu'on comprenne bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: M. le Président, ma compréhension de la Loi sur la sécurité du revenu et des règlements qui en découlent fait en sorte que l'enfant qui est majeur, mais qui est à l'étude à temps plein à l'école secondaire, se qualifie... le parent se qualifie pour une augmentation de barème dans le calcul de l'aide sociale. Quel est l'impact de l'article 4 sur cette situation où, dorénavant, semble-t-il, si on a plus que 18 ans, on ne peut pas se qualifier pour les prestations familiales même si l'enfant est à l'étude à temps plein, au secondaire?

Mme Marois: Mme Gauvin, du ministère de la Sécurité du revenu, va répondre à cette question.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Gauvin, votre prénom?

Mme Gauvin (Francine): Francine.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Francine Gauvin.

Mme Gauvin (Francine): En vertu du Règlement sur la sécurité du revenu, actuellement, on accorde des majorations pour enfant à charge aux études à temps plein. Ces majorations vont être maintenues, et c'est dans ce sens-là que les modifications qu'on a apportées au texte de loi que vous avez dans la Loi sur les prestations familiales prévoient des majorations pour enfant à charge qui s'ajoutent au barème des besoins des adultes, entre autres, pour permettre de majorer, pour couvrir les besoins des enfants majeurs aux études.

M. Copeman: Autrement dit, il y aura toujours des catégories de personnes qui ont l'aide de dernier recours qui vont avoir une majoration pour enfant...

Mme Gauvin (Francine): À charge.

Mme Marois: À charge.

(15 h 50)

M. Copeman: ...à charge et, par contre, une diminution dans les allocations familiales ou une absence totale d'allocations familiales, dépendamment de leur situation.

Mme Marois: Ça pourrait être le cas. C'est ça.

Mme Gauvin (Francine): Si l'enfant a 18 ans, effectivement.

Mme Marois: C'est s'il a 18 ans. Et, pour les moins de 18 ans, bien là il y a tout un mécanisme de prévu lorsqu'on vient à la sécurité du revenu alors qu'on était sur le marché du travail, puis on le verra plus tard dans le règlement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Copeman: Oui, sauf un commentaire assez général et générique, et c'est d'ailleurs un commentaire qui a servi beaucoup des gens en face quand ils étaient de notre côté de la table: que d'inscrire quelque chose dans la loi de façon législative et compenser par règlement, comme législateur, ça m'inquiète un tout petit peu.

Mme Marois: Je m'excuse, je n'ai pas entendu le début de l'intervention de mon collègue.

M. Copeman: De préciser par voie législative que le bénéfice des prestations familiales arrête à l'âge de 18 ans, mais de compenser par voie réglementaire ailleurs parce que c'est essentiellement une majoration par règlement, ça m'inquiète. C'est un commentaire général et générique que je fais. On sait, il est beaucoup plus facile de changer des règlements que de changer des textes de loi. Mais, si c'est ainsi que le gouvernement a décidé de procéder, c'est le choix de la ministre et du gouvernement de procéder ainsi.

Mme Marois: ...c'est notre choix.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est ça. Est-ce que...

M. Copeman: Si vous me permettez, un dernier commentaire.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Une dernière question, petite.

M. Copeman: Un autre commentaire d'ordre très général sur la portée de l'article 4. Je ne veux pas relancer un débat, un long débat là-dessus, mais, quant à moi, quand je le lis, l'article, il n'est pas vrai que chaque enfant a droit au bénéfice des prestations familiales jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de 18 ans. Mes enfants n'y auront pas droit. En vertu de vos niveaux de revenus.... Non, mais n'est-il pas inexact de déclarer dans un projet de loi que chaque enfant a droit au bénéfice?

Mme Marois: S'ils le reçoivent. Ça se lit dans son ensemble, une loi. Or, on a défini qui recevrait la prestation familiale, l'allocation familiale, en vertu du revenu des parents. Et, à partir de là, à partir du moment où il y en a, il a droit au bénéfice des prestations familiales.

M. Copeman: Moi, M. le Président, dans mes qualités de député sans affectation à une commission permanente, je ne peux pas faire des amendements. Mais je trouverais beaucoup plus limpide, beaucoup plus transparent si l'article de loi se lisait «tel que prévu dans les articles de loi», au lieu de déclarer de façon globale que chaque enfant a droit au bénéfice, sauf dans les cas prévus au règlement. Il est manifeste, quand on lit la loi dans son économie générale, que ce n'est pas exact.

Mme Marois: M. le Président, je suis désolée, mais c'est le premier article du projet de loi que nous avons adopté: «Le régime institué par la présente loi prévoit l'attribution d'une allocation familiale, variable selon le revenu et la composition de la famille.» Alors donc, c'est variable. «Variable» peut vouloir dire que c'est zéro.

M. Copeman: Alors, mes enfants ont droit à un bénéfice de prestations familiales de zéro.

Mme Marois: C'est ça.

M. Copeman: Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste sur le même sujet. Ce que je n'aime pas dans 4 non plus, c'est le fait qu'on veuille sucrer la pilule en retrouvant le langage de l'universalité dans un projet de loi où l'objectif était de l'abandonner, l'universalité. Alors, on essaie de jouer sur les deux bords en disant que chaque enfant... Or, ce n'est pas vrai. De toute évidence, ce n'est pas chaque enfant qui a droit à ce bénéfice. Le gouvernement a fait le choix de cibler certains enfants. Alors, je dis: De façon globale, de dire que chaque enfant a droit, ce n'est pas ça qu'on est en train de faire. Et le principe du projet de loi est tout à fait le contraire. C'est de prendre l'argent qui est disponible et cibler les besoins de certains enfants. Je conviens avec la ministre que c'est la majorité des enfants au Québec. À quels montants? C'est la confusion qui demeure autour des tableaux et le débat qu'on a eu avant 13 heures, mais, de même, ça demeure qu'il y a des enfants exclus. On a lancé la discussion sur un autre cas très spécial, les 25 000 enfants sans abri à Montréal – ça, c'est un groupe – mais c'est évident, à cause des revenus, qu'il y a certains autres enfants qui n'auront pas le bénéfice des prestations familiales.

Alors, ce n'est pas, comme j'ai dit, de contester le principe de 1, nous avons voté pour, mais je pense que, si ça, c'est le principe du projet de loi, il faut rédiger les articles subséquents en concordance et je pense que c'est beaucoup plus vrai de dire que certains enfants ont droit au bénéfice des prestations familiales. Ça, c'est beaucoup plus près de la vérité que ce qu'on est en train de faire ici. Moi, je dis ça aux parents dans mon comté, je dis: Chaque enfant a droit – chaque enfant, c'est tous les enfants qui demeurent dans Jacques-Cartier – mais ce n'est pas vrai, parce qu'il y aura des parents qui n'auront pas, à cause de leurs revenus, accès au bénéfice des prestations familiales. Alors, je pense qu'au niveau de la clarté, pour bien expliquer qu'est-ce que le législateur est en train de faire, on est mieux de dire les choses comme il le fait, soit: certains enfants ont droit au bénéfice des prestations familiales.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: La loi ne veut pas être plus claire, M. le Président. On définit, au départ, à l'article 1, très clairement, le type d'allocation familiale dont il s'agit et, ensuite, on dit que chaque enfant y a droit, sauf les cas prévus par règlement du gouvernement – nous prévoyons les cas ici – et l'autre partie du règlement qui prévoit les calculs. À cet égard, c'est très, très clair.

Je dirai, d'autre part, M. le Président, que si nous avions plus de ressources à investir dans les familles, même si nous en investissons trois fois plus que la Colombie-Britannique et deux fois plus que l'Ontario – à cet égard, nous mettons deux fois plus d'argent que ce qu'en met l'Ontario à l'égard des familles – si nous avions les moyens, nous pourrions nous assurer que l'allocation familiale... qu'il y ait toujours une allocation, si petite soit-elle, même quand on a 150 000 $ de revenus. Mais nous avons fait un choix qui est un peu différent. Si, cependant, par voie de règlement, parce que nous voulons augmenter le niveau de prestations, on peut couvrir un plus grand nombre, tant mieux. Notre objectif n'est pas de ne pas couvrir le plus grand nombre, au contraire. Mais je pense que, tel que l'article est rédigé, tel que la loi est rédigée, c'est très clair, ça ne sème pas d'ambiguïté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Kelley: Comme je dis, je demeure insatisfait de cette réponse parce que ce n'est pas... Je pense qu'il faut être clair qu'on est en train de changer le régime au Québec. Alors, je pense que c'est très important de dire que ce n'est pas chaque enfant, parce que ça, c'est l'universalité. Ça, c'est le principe que la ministre a décidé d'abandonner. Alors, le gouvernement a fait ses choix, et je ne conteste pas le fait que les choix ont été faits. Au contraire, nous avons voté pour en principe, mais, découlant de ça, je pense qu'il faut mettre des choses claires dans nos projets de loi. J'ai fait ça verbalement, je vais faire ça par écrit, mais je pense qu'on est mieux de biffer les mots «chaque enfant a» et de les remplacer par «certains enfants ont droit au bénéfice», de mettre ça au clair que le gouvernement a décidé de choisir et de faire une distinction. Alors, ça va me prendre mes 30 secondes pour écrire ça rapidement, l'amendement proposé, mais je pense que, pour une certaine clarté, de dire que chaque enfant a droit...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'on pourrait demander, sur le plan légal, à quelqu'un qui l'a travaillé, parce que, en fait, vous posez une question... ce n'est pas une question de principe, c'est peut-être plus une question sur le plan légal, le pourquoi de chacun des mots, là.

M. Laliberté (Louis-Marc): Le législateur s'exprime par des règles, par des principes.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Laliberté, Louis-Marc.

M. Laliberté (Louis-Marc): Oui. Il y a l'article 4 qui énonce un principe qui doit se lire avec l'article 1. La loi forme un tout. C'est ça, la règle.

Mme Marois: Moi, je suis très confortable, M. le Président, avec l'article qui est là, je crois qu'il est cohérent avec ce que nous voulons faire. Si le député de Jacques-Cartier veut proposer un amendement, on le défera, c'est tout.

(16 heures)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que ça va? Vous voulez proposer un amendement?

M. Kelley: Oui, juste 30 secondes, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que vous voulez qu'on suspende cet article et qu'on continue à un autre article, quitte à y revenir?

Une voix: Trente secondes.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Trente secondes?

M. Williams: M. le Président, nous respectons notre entente de 30 secondes.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui.

M. Williams: J'ai écrit ça assez vite, mais on propose – c'est sur un morceau de papier, mais, quand même, je pense que ça va être clair – d'ajouter...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il faut que ce soit sur papier, il faut que ce soit écrit.

M. Williams: C'est écrit.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui? Vous allez venir nous le porter?

M. Williams: J'espère que vous pourrez lire ça. Après les mots «prestations familiales», à l'article 4, on ajoute «en conformité avec la présente loi».

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): «Chaque enfant a droit au bénéfice des prestations familiales, en conformité...

M. Williams: Avec la présente loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...avec la présente loi, jusqu'à ce que...»

M. Williams: Et je dépose l'amendement, M. le Président. On attend votre décision, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): L'amendement est recevable. Vous voulez parler sur votre amendement, ça va de soi.

M. Williams: Oui, je pense que le député de Jacques-Cartier...

Mme Marois: Est-ce qu'on pourrait le relire, M. le Président?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je peux le relire. Alors, ça dirait: «Chaque enfant a droit au bénéfice des prestations familiales,» et on ajouterait, après ça, les mots «en conformité avec la présente loi».

M. Williams: Le but de ça, c'est de répondre aux besoins du député de Jacques-Cartier, de dire qu'effectivement ce n'est pas chaque enfant, il y a des balises et il y a des enfants qui n'ont pas le droit.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Tout en reconnaissant que c'est recevable, est-ce que je peux quand même demander, quant au mot à mot, de s'assurer qu'il est écrit correctement et peut-être de le faire vérifier sur l'élément légal avant d'en discuter?

M. Williams: Oui, certainement, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On peut faire ça?

M. Williams: On peut suspendre quelques secondes.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que vous préférez que je suspende une ou deux minutes, le temps de l'écrire correctement, ou on continue sur d'autres...

Mme Marois: On peut passer à l'autre article, peut-être?

M. Williams: On peut suspendre l'article 4, commencer 5 et revenir.

Mme Marois: C'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, l'article 4 est suspendu. Nous commençons l'article 5.

Mme Marois: Alors, c'est très simple, M. le Président, les prestations familiales doivent être utilisées pour les besoins de l'enfant. Ça ne peut pas être plus clair que cela.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a des questions là-dessus?

M. Kelley: Je comprends, c'est d'une clarté remarquable, mais, dans son applicabilité, ça veut dire quoi, au juste? C'est évident, chez nous, l'argent qui est payé pour un loyer ou une hypothèque va pour les besoins de l'enfant, l'argent qui est dépensé à l'épicerie. Alors, c'est un genre de voeu pieux. Je ne comprends pas ce qu'on ajoute en mettant ça dans le projet de loi, parce qu'il n'y a pas une dépense d'une famille qui ne peut pas être justifiée comme pour le besoin des enfants, même dans le cas d'un enfant qui est négligé. Alors, je cherche, juste au niveau pratique, au niveau de l'application, ce qu'on ajoute à notre régime en mettant ça. Tout le monde est d'accord, on ne peut pas contester ça. Mais, juste au niveau pratique, on fait quoi avec cet article?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: Bien, écoutez, d'abord, un, sur le fond, quand on dit à quoi cela doit servir, bien sûr, les besoins essentiels et les besoins de base, c'est se loger, se nourrir, se vêtir, pour moi, aussi se former, avoir accès à un minimum de loisirs, selon les moyens, évidemment, que l'on a. Ce sont ceux-là qui sont des besoins reconnus. Ça va de soi, donc, que, si on paie une partie du coût de la maison parce qu'on y loge notre famille, ça répond aux besoins de l'enfant. Je pense que ça va de soi. Cependant, il peut y avoir des cas où, effectivement, l'un des parents dilapide complètement les sommes, aux fins – je ne sais pas, moi – de jeu, d'achat de drogue, de circonstances comme celles-là, ou tout simplement pour ses fins propres, en délaissant complètement ses enfants, en les laissant dans des situations de dénuement total et sans qu'on puisse par ailleurs aller... Je dirais, par exemple, si la conjointe ou le conjoint qui utilise ces sommes laisse l'autre conjoint avec son enfant dans une situation de dénuement total et qu'ils ne peuvent évidemment réclamer de la sécurité du revenu, parce que, normalement, les allocations versées devraient couvrir, ça peut être des circonstances où, formellement, on peut retirer l'allocation, bien sûr. Écoutez, on va se le dire entre nous, ça va comporter d'autres types de gestes à poser, ça va de soi. À ce moment-là, la Protection de la jeunesse devra sans doute s'en mêler et intervenir, etc.

M. Kelley: Mais, est-ce que ça permet à la Régie de récupérer les sommes, le non-respect de l'article 5?

Mme Marois: Les sommes sont insaisissables et incessibles, et, donc, on ne peut pas les récupérer pour...

M. Kelley: De toute façon. Alors, c'est juste là comme souhait.

Mme Marois: ...des remboursements qui seraient dus à l'impôt ou autre. On se comprend bien. À l'article 21, d'ailleurs, on dit:

«La personne qui reçoit des prestations familiales sans y avoir droit ou qui ne les utilise pas pour les besoins de l'enfant doit les rembourser à la Régie, sauf si elles ont été versées par suite d'une erreur administrative que cette personne ne pouvait raisonnablement constater.

«S'il est établi qu'une autre personne aurait dû recevoir les prestations, le versement de celles-ci demeure valablement fait si elles ont été utilisées pour les besoins de l'enfant.»

C'est quand même très bon. On garde vraiment le principe de la loi, qui est que les prestations familiales doivent être utilisées pour les besoins de l'enfant. Alors, on dit: Si c'est une personne autre qui aurait dû recevoir les prestations, le versement de celles-ci demeure valablement fait si elles ont été utilisées pour les besoins de l'enfant.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Donc, ce qui justifie l'article 5.

Mme Marois: C'est ça. Exactement.

M. Kelley: Et, dans le cas, j'imagine, d'un divorce, mettons, ou...

Mme Marois: Ça, c'est prévu par règlement.

M. Kelley: Oui, mais laissez-moi juste finir un cas hypothétique. La mère qui reçoit les allocations, abandonne ses enfants et avise la Régie de continuer de verser les chèques pour l'allocation à sa nouvelle adresse, mais ses enfants ne sont plus avec elle. Juste un cas comme ça. Selon l'article 5, si, un an après, on constate que l'allocation aurait dû être payée au père parce que c'est lui qui garde les enfants, à ce moment, la Régie peut récupérer les sommes pour un an, si c'est raisonnable et...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui. Selon l'article qu'on vient de lire, l'article 22, oui.

Mme Marois: C'est ça. Selon l'article 21.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): L'article 21. Ça va?

Mme Marois: C'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que c'est sur 5 ou sur 4?

M. Williams: Sur 5.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Sur 4? Alors, on va finir 5, M. le député, avec votre permission. Est-ce que ça va sur 5?

M. Kelley: Je pense qu'il a des commentaires sur 5.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est sur 5? Ah! Excusez-moi!

M. Williams: Oui. C'est sur 5.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Parce que j'arrive avec 5, 20 et 21 tellement mal à l'aise, M. le Président. Sur le grand but, «doivent être utilisées pour les besoins de l'enfant», je voudrais savoir qui va décider et comment ça va être décidé parce que, plus tard, avec l'article 20, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais, si j'ai bien lu, chaque personne doit tenir un compte de comment elles sont utilisées. Si le ministère, le ministre arrive avec une définition beaucoup plus restreinte et dit: Non, effectivement, vous n'avez pas le droit d'utiliser ça comme ça, selon notre définition des besoins de l'enfant, on peut avoir, je pense, un grave problème, particulièrement avec les articles 21 à 24, une fois que l'État décide que la personne n'a pas vraiment bien utilisé, selon lui, les fonds.

Avec ça, je retourne à la même question. Il me semble que, si nous allons avoir un article comme 5, si on a besoin de ça – et je demande cette question: Est-ce que nous avons besoin de ça? – ce n'est pas mon style souvent de recommander un autre règlement, mais il me semble qu'on doit donner des balises pour s'assurer qu'on comprend ce que ça veut dire, «les besoins de l'enfant».

Je ne sais pas si vous avez la même interprétation, M. le Président, «doivent l'utiliser pour les besoins de l'enfant», on doit comptabiliser ça avec l'article 20 et, si l'État décide que ce n'est pas fait correctement, il peut demander un remboursement de ça. Il me semble que c'est compliqué et potentiellement dangereux.

(16 h 10)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous me demandez si je lis la même chose que vous. J'ai peut-être une lecture un petit peu différente, parce qu'on dit bien: C'est une autre personne, et c'est l'autre personne qui doit tenir la comptabilité et non la personne qui reçoit ou le parent, si le ou les parents sont en défaut de... C'est pour ça, je le lis différemment.

M. Williams: Oui, mais le point est que je suis mal à l'aise avec la tendance de ce gouvernement de définir pour moi c'est quoi, «dans les intérêts et les besoins de mes enfants». Si j'ai une allocation familiale, qui donne le droit à l'État de décider c'est quoi, dans les intérêts et les besoins de l'enfant? Et je voudrais vraiment savoir, au moment où on parle, nous avons un article de loi devant nous, c'est quoi, la définition exacte des besoins de l'enfant et comment on peut s'assurer que ça va rester le même?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que, M. Lacroix, vous voudriez répondre?

Mme Marois: Je vais répondre, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: D'abord, ce n'est pas notre gouvernement qui a inventé ça, c'est là depuis 1974. On l'applique comme tel, et puis ça ne pose pas de difficulté, on n'a pas eu de problème, à ce que je sache, jusqu'à ce jour. C'est déjà comme ça qu'on procède, c'est déjà la loi, la loi est déjà comme ça. Alors, dans le fond, on modernise certains termes, un point, c'est tout, pour les ajuster au nouveau contexte de la loi, mais on ne modifie pas l'essentiel de ce que l'on fait à cet égard. Alors, si, pendant 23 ans, on a réussi à bien gérer ça sans trop de trouble, d'après ce que je constate, je ne vois pas pourquoi on en aurait maintenant pour les prochains deux ou trois ans.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va, M. le député?

M. Williams: Non. Je n'ai pas reçu une réponse à ma question. Je demande encore, selon le gouvernement, maintenant, au moment où on parle, avec le projet de loi n° 144, article 5, c'est quoi, la définition des besoins de l'enfant et ce que le ministère va utiliser comme définition plus tard, quand on va arriver avec l'article 21, s'il veut décider que ce n'est pas bien utilisé. Je voudrais savoir la définition utilisée maintenant, la définition légale.

Mme Marois: C'est quoi, les besoins essentiels de l'enfant? De toute façon, je l'ai dit, j'ai déjà répondu à cette question tout à l'heure, mais je peux le répéter. Je pense que ça va comme de soi, à savoir se vêtir, se nourrir, se loger, se former, s'éduquer, avoir des soins adéquats, en termes de santé, et avoir un certain niveau de loisirs. Après ça, le reste, c'est évidemment au choix des familles. Mais il reste que c'est ça. Et il y a une définition, mais elle est de nature fiscale et elle n'est pas introduite, cette définition, dans nos lois fiscales, mais elle permet d'identifier, cependant, la hauteur de la somme nécessaire pour couvrir les besoins essentiels et elle est faite à partir d'enquêtes qui ont été faites. C'est-à-dire, cette définition des besoins est retenue, si on veut, en termes fiscaux, suite à une enquête faite auprès des familles pour savoir les sommes qu'elles consacrent à leurs enfants à l'égard des champs ou des besoins dont je viens de parler. Et ceux-là sont les besoins généralement reconnus. Ce n'est pas défini au Code civil, ce n'est défini nulle part. Alors, on ne commencera pas, M. le Président, à réinventer la roue, ici.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député.

M. Williams: Derrière la question, ce n'est pas la roue, c'est les familles, s'assurer qu'elles vont être bien traitées. Je connais beaucoup de familles qui gardent leurs chèques, leurs allocations familiales. Elles mettent ça dans une banque, directement pour les enfants, peut-être pour plus tard ou pour sauver de l'argent. C'est une façon, pour la famille, de sauver de l'argent. Et, de temps en temps, je l'ai entendu, elles ont utilisé ça pour l'agrandissement de leur maison ou pour des vacances, ou pour des affaires comme ça.

Mme Marois: Les vacances, j'imagine que ça doit être utile aussi à la famille à l'occasion.

M. Williams: C'est pourquoi – Mme la ministre, soyez à l'aise, aujourd'hui; je trouve un certain niveau d'impatience – je vous demande, et si je peux avoir les réponses, tant mieux: C'est quoi, la définition? Parce que, une fois que je vois 5 attaché avec 20, 21, 22, 23, 24, je voudrais m'assurer qu'une fois qu'on a passé 5... Je ne suis pas contre le grand principe de 5. Je trouve que c'est un peu «motherhood and apple pie». Mais, une fois que cet article est passé, plus les autres, on ne peut pas arriver avec une définition trop serrée, trop difficile. Je ne mets pas en doute la bonne foi de nos fonctionnaires, les personnes qui mettent nos lois en vigueur, mais je voudrais m'assurer que, comme législateur, on protège la famille. C'est pourquoi j'ai demandé ces questions. Est-ce que c'est aussi évident qu'une vacance compte dans ça ou un agrandissement, une piscine, ou je ne sais pas? Je voudrais juste savoir comment on peut décider ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Saint-Hyacinthe, est-ce que c'est en réponse ou une autre question?

M. Dion: C'est dans le même sens. Je suis assez inconfortable avec ce qui se passe présentement. M. le député nous dit qu'il est très mal à l'aise avec la tendance qu'il suppose ou, en tout cas, qu'il perçoit de ce gouvernement de définir à la place des parents les besoins des enfants, et, ensuite, il dit: Définissez-moi les besoins des enfants. Je pense que c'est de commune connaissance que, quand on définit, dans un texte de loi, on limite nécessairement, on restreint. Or, l'objectif de la loi, c'est justement de répondre aux besoins des enfants. Les besoins des enfants, c'est de sens commun, c'est connu par tout le monde. Il ne s'agit pas d'aller demander aux parents de tenir une comptabilité stricte de la façon dont ils ont dépensé ces sommes-là. Au contraire, ce qu'on veut c'est qu'on fasse face et qu'on satisfasse aux besoins essentiels des enfants. À partir du moment où les enfants, leurs besoins essentiels sont satisfaits, on ne se pose plus de question comment il faut les définir, ou quoi que ce soit.

Donc, le gouvernement évalue les besoins essentiels à un certain niveau et y satisfait par le moyen d'une allocation. Je pense que ça serait très malheureux d'aller définir ces besoins-là parce qu'on risquerait d'introduire tout un domaine nouveau de contestation juridique qui ne serait pas à l'avantage ni des parents ni des enfants. Alors, c'est pour ça que je suis très mal à l'aise avec ce genre de questionnement-là. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, juste parce que je trouve que, sans être de la partisanerie dans ça, c'est un débat assez important. Il y a un changement de mots. Dans l'ancienne loi, nous avons parlé du bien-être de l'enfant, maintenant on parle des besoins de l'enfant. Je pense, comme parlementaire, sans vraiment avoir plus de définition parce que, effectivement, je ne veux pas que ce gouvernement donne une définition de mes besoins, je cherche une réponse, pas parce que j'encourage plus de définition. Je voudrais juste, en nombre, m'assurer que la population qui nous écoute et qui va lire ça plus tard, puisse savoir, une fois qu'elle a l'article 5, ce que ça veut dire, particulièrement si l'article 21 entre en vigueur. Parce que l'article 21 dit que quelqu'un d'autre peut définir ça et, s'il décide que vous n'avez pas utilisé ça pour les besoins ou le bien-être de l'enfant, il peut y avoir des problèmes. C'est pourquoi je cherche une réponse que je n'ai pas reçue jusqu'à maintenant et j'attends encore.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, d'un côté, on prétend avoir donné la réponse et, d'un côté, on prétend ne pas avoir reçu la réponse. Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre qui veut intervenir? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste pour revenir sur la question des sans-abris à Montréal, parce que, effectivement, ici, une famille dont l'enfant a quitté pour quelques mois ou des années même, en principe, doit retourner l'argent à l'État ou un effort de l'État doit être fait de voir s'il y a un autre moyen de par un organisme.... La possibilité est ouverte, dans 20 ou 21, de mémoire, de trouver un autre organisme, une agence ou quelqu'un qui peut-être peut aider l'enfant. Alors, est-ce que ça, c'est une bonne compréhension de l'article 5? Est-ce que ça ouvre cette possibilité que peut-être l'État peut venir en aide à ces sans-abris à Montréal?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: Écoutez, est-ce qu'on peut s'entendre que l'État, à l'égard des enfants, se substitue aux parents si les parents ne sont pas capables d'assumer leurs responsabilités. Nous avons des lois pour se faire, entre autres la loi de la protection de la jeunesse, qui prévoit qu'on ne peut laisser un enfant sans ressources jusqu'à ce qu'il atteigne l'âge adulte et qu'il soit suffisamment autonome pour lui-même pourvoir à ses propres besoins.

(16 h 20)

En ce sens, certains enfants s'excluent eux-mêmes de leur société. Évidemment, je ne dis pas que c'est par choix qu'ils le font, mais les circonstances les amènent à cela. Et, comme État, évidemment, on va soutenir les institutions, les organismes qui peuvent les aider, qui peuvent les accueillir. On le fait par le biais de subventions aux institutions dans le domaine de la santé et des services sociaux. Mais, qu'est-ce que vous voulez, une fois que ces jeunes sont dans la rue on peut reconnaître des organismes qui vont aller les chercher, qui vont aller les aider, qui vont aller les accueillir, je le répète, qui vont établir un dialogue avec eux, mais on ne peut pas, non plus, je dirais, les attacher quelque part, s'ils se trouvent dans cette situation et qu'ils veulent s'y maintenir et que, dans le fond, ils défient jusqu'à un certain point les lois que nous avons. Alors, on essaie de toute espèce de façon de les soutenir pour qu'on puisse les aider. Mais, quelque part, autrement qu'en passant par l'aide aux institutions et aux organismes communautaires et d'entraide, on est aussi démuni, comme toutes les autres sociétés du monde, à moins de les enfermer.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député, est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Kelley: Non, non, c'est juste pour compléter. Moi, je comprends tout ça. Mais c'est le constat d'une situation réelle, qui existe surtout à Montréal. Je cherche dans tout ça pas un programme développé, élaboré et annoncé – demain matin: grande conférence de presse – mais c'est juste les marges de manoeuvre et les possibilités que peut-être un jour...

Je comprends fort bien que ces enfants demeurent dans un état d'un certain refus envers la société. Mais si, par la possibilité du projet de loi qui est devant nous et les textes qu'on est en train d'examiner, on peut créer une certaine bouée de sauvetage, moi, je dis que je pense que ça mérite qu'on regarde ça. Ce n'est pas pour demain matin. Je ne dis pas qu'il faut mettre tout ça en place, mais peut-être qu'en relisant ces articles, en relisant ces intentions du gouvernement, c'est juste un message à livrer que peut-être, dans ça, un petit peu comme nous l'avons fait pour les sans-abri adultes, on ouvre les portes pour envoyer les prestations directement à certaines adresses pour les sans-adresse. L'État a réussi à faire ça. Est-ce que ça a changé complètement la vie de ces individus? Non. Mais peut-être que ça a réussi quand même à améliorer leurs conditions de vie, d'une certaine façon.

Comme j'ai dit, je n'ai pas devant moi le chiffre que le père Johns m'a donné, mais c'est un nombre assez important, autour de 20 000, de mémoire, enfants sans-abri à Montréal. Alors, si, en faisant le projet de loi n° 144, on peut en même temps ouvrir cette possibilité et demander aux personnes qui travaillent dans le domaine des services sociaux, peut-être que c'est une piste intéressante qu'on peut ajouter aux propositions qu'on peut faire envers ce ministère.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur l'article 5? En l'absence d'autres commentaires, est-ce que l'article 5 est adopté?

M. Kelley: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'on est prêt à revenir à l'article 4? Alors, vous avez reçu, je pense, une copie de l'amendement proposé, qui se lit ainsi: «L'article 4 est modifié en ajoutant après les mots "prestations familiales" les mots "en conformité avec la loi".» Est-ce qu'il y a des questions sur cet amendement?

M. Kelley: Juste un commentaire. Et, s'il y a une autre formulation qui serait plus précise, moi, je suis prêt à la recevoir. Moi, je dis que, dans un projet de loi où le principe même est l'abandon de l'universalité... Et les groupes qui sont venus ici ont plaidé pour le contraire. Le gouvernement a fait ses choix. Alors, ce n'est pas de remettre en question le débat sur l'article 1. Mais, moi, je suis convaincu que, si on veut être clair avec les familles québécoises, si on veut dire que c'est un nouveau régime, c'est des changements, on ne peut pas réutiliser le langage de l'universalité. Qu'est-ce qu'on a ici dans l'article 4? On a dit: Calmez-vous parce que chaque enfant a droit aux bénéfices. On a les tableaux et, à partir de certains revenus il y a des enfants qui n'ont pas de bénéfices. Alors, ça varie entre le nombre d'enfants, ça varie entre le revenu, etc., mais c'est faux de dire que chaque enfant a droit. C'est faux parce qu'on a prévu maintenant des exclusions basées sur les revenus des familles. C'est l'économie même du projet de loi, et je ne conteste pas cette économie. Mais, pour les parents qui cherchent dans nos projets de loi, maintenant, sur Internet, pour les lire, et tout ça, je pense qu'il y a une certaine clarté... Et, si je suis non-juriste, j'arrive dans le Web site de l'Assemblée nationale et je vois, au bout de la ligne: Chaque enfant a droit à des bénéfices des prestations familiales, alors mes enfants sont automatiquement compris, en faisant la lecture de ça, je pense que c'est clair. Et si, dans l'avis qui a été déposé par le Conseil de la famille, 32 % des familles québécoises ont des revenus supérieurs à 60 000 $ et, règle générale, c'est autour de 60 000 $ que les barèmes tombent à zéro, c'est évident que les enfants, dans ces 32 % de familles, n'ont pas droit aux bénéfices, avec quelques exceptions pour les grandes familles. Mais la ministre a fait la preuve ce matin que les grandes familles sont assez exceptionnelles. Excentriques? Non, c'est quoi, l'adjectif qui a été utilisé?

Une voix: Excentriques...

M. Kelley: Oui, «unorthodox», en tout cas, il y avait un mot cherché pour ça. Alors, pour des fins de clarté et, comme je l'ai dit, la formulation, s'il y a une autre formulation qui peut mieux cerner ça, je pense que c'est très important de dire clairement aux familles québécoises, aux parents québécois, que l'universalité, le gouvernement a fait son choix de l'abandonner, alors ce n'est plus vrai que chaque enfant a droit, au moins baliser ça, que c'est dans l'économie de la loi ou en conformité avec la loi, c'est-à-dire faire le rappel aux parents qu'on a changé quelque chose et que, pour certaines familles qui avaient droit à ces allocations, elles n'ont plus droit à ces allocations. Je pense qu'on a tout intérêt, comme législateurs, à mettre ça au clair dans l'article 4 parce que l'article 4, c'est quand même le début du chapitre II et c'est l'annonce, d'une certaine façon, également, des grands principes.

Je comprends, l'article 1, c'est les grands objets et le champ d'application. Mais, même si on regarde la façon dont nous avons rédigé le projet de loi, 4 et 5 sont encore une fois des grandes déclarations de principe dans le projet de loi. Et je pense que la ministre doit dévoiler ses couleurs, doit indiquer clairement aux familles qu'on a fait un changement. Oui, c'est vrai que, dans le passé, c'était chaque enfant qui avait droit au bénéfice.

Quelle coïncidence, parce que, j'imagine, c'est le député fédéral Stanley Knowles, qui est décédé hier, à qui on a fait un hommage à l'Assemblée nationale ce matin, qui, probablement, était là au moment de la création d'un programme universel pour les familles, à la fin de la dernière Guerre mondiale, au Canada. On est en train de faire un changement, alors je pense qu'il faut aviser les parents que le principe a changé. Et le principe est maintenant qu'on va cibler les enfants qui ont le plus grand besoin. Alors, je pense qu'on a tout intérêt à reformuler 4.

L'opposition officielle a fait une humble suggestion. S'il y a une plume qui est plus habile dans la salle, qui peut nous aider, tant mieux, mais je pense que l'objectif visé, c'est quand même d'aviser les familles pour clarifier la situation parce qu'il demeure de la confusion autour de la réforme de la politique familiale. On a de la correspondance, on a des appels à nos bureaux de comté pour en faire la preuve. Alors, je pense que c'est important, ici, de mettre ça au clair, M. le Président, que ce n'est plus chaque enfant qui y a droit, mais certains enfants. Alors, je pense qu'il faut faire un rappel au principe de la loi et je veux appuyer la proposition qui a été déposée par mon collègue le député de Nelligan.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre, sur l'amendement.

Mme Marois: Alors, très brièvement, M. le Président, ce serait complètement redondant, alors je propose que nous rejetions cet amendement. C'est l'économie générale de nos lois qui est ainsi faite, et je pense que ça n'ajoute rien, ce que nous disons ici.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, si je comprends bien, l'amendement est refusé?

Mme Marois: Oui.

Des voix: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): L'amendement est rejeté. On revient à la proposition principale. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? Est-ce que l'article 4 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. L'article 6, Mme la ministre.

(16 h 30)

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. L'article 6. J'aurai un amendement, mais je vais d'abord regarder l'article:

«6. Les prestations familiales sont versées par la Régie des rentes du Québec à la personne qui assume principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et qui vit habituellement avec lui.

«Ce droit n'est reconnu qu'à une seule personne pour un même enfant. Toutefois, le gouvernement peut, par règlement, déterminer qui reçoit les prestations lorsque plus d'une personne assume cette charge.»

Dans l'expression «vit habituellement avec l'enfant», le mot «habituellement» doit recevoir son sens courant, c'est-à-dire que l'enfant vit ordinairement avec la personne qui en prend soin. En fait, on a dû utiliser cette expression pour éviter que la disposition ne puisse être interprétée comme obligeant l'enfant à vivre continuellement avec la personne qui en prend soin. Et là on peut évidemment imaginer toute espèce de situation: l'enfant qui étudie à l'extérieur, qui est hospitalisé, etc. Alors, ça, c'est pour l'essentiel de l'article qui est là.

Nous suggérons et nous proposons un amendement, M. le Président, qui serait d'insérer, à la fin du premier alinéa de l'article 6, les mots suivants: «, sauf les cas prévus par règlement du gouvernement». Donc, on lirait le premier alinéa: «Les prestations familiales sont versées par la Régie des rentes du Québec à la personne qui assume principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et qui vit habituellement avec lui, sauf les cas prévus par règlement du gouvernement.»

Alors, qu'est-ce qu'on vise à prévoir? Ce sont les cas où les parents peuvent continuer à recevoir des prestations familiales, a contrario justement par rapport à ce qu'on a discuté tout à l'heure, malgré que l'enfant soit placé par les services sociaux dans une famille d'accueil ou un centre pour enfants. Les cas qu'il est envisagé de prévoir par règlement seraient les suivants: les parents de l'enfant paient la contribution exigée d'eux – on l'a débattu tout à l'heure – en vertu du Règlement d'application de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, ou les parents de l'enfant sont dispensés de payer cette contribution en vertu du règlement précité parce que leur condition de revenu ne justifie pas qu'ils puissent payer. Et on pense, entre autres, aux personnes bénéficiaires de l'aide sociale.

Alors, c'est exactement, dans le fond, la même chose que ce qu'on a fait tout à l'heure, de telle sorte qu'il y ait concordance avec l'article 4.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste une question de directive. Est-ce qu'on fait l'amendement en premier lieu?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): L'amendement d'abord.

Mme Marois: Généralement l'amendement.

M. Kelley: O.K. Parfait. Alors, si j'ai bien compris, il faut «sauf les cas prévus par règlement du gouvernement» dans l'article 6 pour permettre le projet de règlement que nous avons reçu ce matin. Est-ce que c'est exact?

Mme Marois: C'est exact, mais, dans le cas présent, évidemment, ça concerne l'article 6. Et c'est exactement, je dirais, la même situation que l'on décrivait à l'article 4 où on disait: «Chaque enfant a droit au bénéfice des prestations familiales jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de 18 ans, sauf les cas prévus par règlement du gouvernement.» Et là on expliquait qu'un enfant placé en centre d'accueil ou en services d'accueil, et où le parent doit verser une contribution et qu'il ne la verse pas, bien on ne va pas verser l'allocation au parent. Alors, c'est exactement la même chose.

Ici, la personne qui a un enfant peut être identifiée comme celle qui assume principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et qui vit habituellement avec lui, mais qui, pour une circonstance x, de problèmes familiaux, de désorganisation, peu importe, voit son enfant placé et qui ne peut verser les sommes – c'est le cas de la personne à la sécurité du revenu. Alors, on dit qu'il faut pouvoir évidemment tenir compte de cette situation. Ou dans le cas où le parent a son enfant qui est placé, donc il n'est pas généralement avec lui, mais il paie pour cet enfant qui est placé. À ce moment-là, on lui verse son allocation parce qu'il en assume la responsabilité physique, et matérielle, et financière.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va, M. le député?

M. Kelley: Oui. Juste pour souligner, parce qu'on a fait le débat tantôt pour la clarté... Je comprends qu'à l'article 4 c'était «chaque enfant», qui découle de l'article ici. La section I du projet de règlement sur les prestations familiales, le titre, c'est Enfants exclus du bénéfice des prestations familiales . Alors, je veux juste souligner encore une fois que la clarté est manquante ici parce que la section du projet de règlement en question qu'on discute ici et dans l'article 6 contredit à 180 degrés le grand principe en 4, parce qu'on vise les enfants exclus du bénéfice des prestations familiales pour des raisons compliquées: l'arrimage avec notre système pour la protection de la jeunesse, nos centres d'accueil, et tout ça. Mais quand même il y a un certain manque de clarté dans tout ça quand on dit beau et haut: «Chaque enfant a droit», mais le règlement qui découle de l'article 6, le titre est Enfants exclus du bénéfice . Alors, je ne sais pas, mais «chaque enfant, sauf» et, à ce moment, on va...

Mme Marois: Quel titre?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Le titre...

Mme Marois: Ah!

M. Kelley: Enfants exclus du bénéfice . Alors, c'est bien beau de dire «chaque enfant», mais la première chose qu'on est en train de faire après avoir eu ce débat, c'est d'exclure des enfants.

Mme Marois: Oui, mais écoutez, justement, le règlement vient prévoir les cas d'exclusion; alors, il faut bien le nommer. On peut bien décider qu'on ne le nomme pas, mais ça va changer quoi à la réalité? Alors, le règlement prévoit les cas d'exception, puisque la loi, elle, prévoit les cas généraux, et les cas généraux, c'est 1 600 000 enfants qui vont être couverts, puis il y en a quelques dizaines de milliers qui vont vivre des situations un petit peu différentes. Je ne sais pas combien on a d'enfants actuellement en placement. Je sais qu'à une époque on en avait 30 000, parce que j'avais été responsable de...

M. Kelley: Onze mille.

Mme Marois: ...toute cette opération de révision à travers tout le Québec, donc je m'en souviens. Il y en a 11 000, me dit-on, actuellement. Donc, ça les concerne, eux particulièrement, et, à travers eux, leurs parents lorsqu'ils sont à la sécurité du revenu. Et donc, c'est heureux, dans le fond, que cette exclusion ne concerne qu'une infime minorité, parce que c'est ça que l'on veut faire, et ce n'est pas de les exclure pour qu'ils n'aient pas accès au bénéfice, mais c'est qu'au contraire on ne pénalise pas leurs parents, qui s'en occupent même si l'enfant est placé, c'est ce que cela fait, et on ne veut pas pénaliser les parents qui sont à la sécurité du revenu, qui sont donc à l'aide de dernier recours et qui ne pourraient pas, de toute façon, aider l'enfant à même leurs maigres prestations.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que ça va, avec l'amendement? M. le député de Nelligan.

M. Williams: Avec l'amendement?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Sur l'amendement seulement.

M. Williams: Sur l'amendement, oui, pour moi, ça va.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

Mme Marois: Bon. Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, on revient à l'article. Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que l'article, tel qu'amendé, est adopté?

M. Kelley: Non, non.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On revient à l'article?

M. Kelley: On revient à l'article...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): D'accord.

M. Kelley: ...mais l'amendement est adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): L'amendement est adopté. Alors, M. le député de Jacques-Cartier, ou M. le député de Nelligan?

M. Kelley: Dans tout ça, c'est un parent ou l'autre, mais la ministre a dit tantôt que c'est l'argent qui va être versé à la mère. Est-ce qu'il y a une raison de ne pas spécifier ça ici, que généralement ces montants seraient versés à la mère? Parce que ça, c'est une des questions que la Fédération des femmes, le Conseil du statut de la femme et d'autres groupes ont mentionnée quand ils ont fait leurs témoignages ici. Alors, ici, on parle d'une personne qui est neutre. Alors, pourquoi n'avons-nous pas précisé que la règle générale, si j'ai bien compris, serait de verser ça aux mères des familles?

Mme Marois: Effectivement, en fait, notre règlement prévoit des situations pour lesquelles les prestations familiales ne seraient pas versées à la mère. Donc, généralement, elles sont versées à la mère. Si, cependant, évidemment, il y a eu séparation, il y a eu divorce et que c'est le père qui a la garde des enfants, évidemment, l'allocation va aller au père. Et, en ce sens, on n'a pas prévu de modifications. Évidemment, par contre, il y a des cas de garde partagée. C'est ça.

M. Kelley: Ça, c'est une autre question. Mais, moi, juste dans le premier alinéa, au lieu de dire...

Mme Marois: Voilà. Alors, écoutez, juste pour qu'on soit bien clairs. Donc, c'est la mère qui reçoit l'allocation, sauf... et là, voilà les cas particuliers, et on les retrouve au règlement, sauf si:

«la mère déclare à la Régie des rentes qu'elle vit avec le père de l'enfant et qu'il assume principalement la charge des soins et de l'éducation de chacun des enfants avec lesquels les deux vivent – on dit bien «les soins et l'éducation»;

«la mère est elle-même l'enfant d'une personne qui bénéficie de prestations familiales à son égard et chacune d'elles présente une demande de prestations pour l'enfant;

«l'enfant vit avec plus d'une personne répondant à la définition de «mère» visée au premier alinéa et chacune d'elles présente une demande de prestations pour l'enfant;

«plus d'une personne présente une demande de prestations pour l'enfant qui vit avec chacune d'elles à des endroits différents.» C'est, entre autres, le cas de la garde partagée. C'est tout.

(16 h 40)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est dans les règlements plutôt que dans la loi.

Mme Marois: Alors, ce sont les seules exceptions, et ça, c'est dans les règlements. Un règlement, évidemment, vient couvrir justement des exceptions à la règle, la règle, elle, étant la loi. Cependant, on doit les prévoir quelque part.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Kelley: Mais juste pour répondre aux groupes qui sont venus, est-ce que ça changerait grand-chose de dire: «Les prestations sont versées par la Régie à la mère qui assume principalement la charge des soins, sauf...», parce que l'amendement qu'on vient d'adopter, c'est «sauf les cas prévus par règlement du gouvernement»? Alors, si j'ai bien compris, ça va être à l'État de le faire. Est-ce que ce serait mieux de répondre aux revendications de ces groupes et de préciser qu'au lieu de «à la personne», c'est «à la mère»? Je soulève la question comme ça parce que c'est une revendication qui a été répétée à maintes reprises par les groupes qui sont venus témoigner ici.

Après ça, j'aurai une précision sur le troisième alinéa du règlement.

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: Je posais la question, parce que je me la suis posée aussi à un moment lorsqu'on a préparé le projet de loi, puis je ne suis pas revenue sur ça par la suite. On a posé la question, si on pouvait mettre effectivement «la mère», et on nous dit à la Justice qu'il y aurait un problème de discrimination, qu'on doit donc s'en tenir à une définition plus générale et neutre dans le sens où on le définit par «la personne qui assume principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et qui vit habituellement avec lui». Remarquez que ça heurte un peu mes principes féministes, je vous le dis, en le lisant. Mais c'est ça. C'est ça. Parce que, à mon point de vue, les enfants, quand on décide de les mettre au monde, c'est ensemble. On devrait décider d'en prendre soin ensemble et, généralement, y consacrer autant de temps l'un que l'autre. Sous cet angle-là, on nous disait que c'était discriminatoire. On n'a donc pas mis «la mère». Mais on s'est assurés, en mettant ceci, que cela correspond à ce qu'on retrouve dans nos lois de l'impôt et c'est la mère actuellement qui a le versement de la prestation et de la prestation fiscale fédérale aussi, hein. C'est bien ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Moi, j'ai aussi eu le plaisir de travailler avec les avis du ministère de la Justice. Mais, si c'est ça que le gouvernement va faire, est-ce que la conclusion du ministère de la Justice, c'est discriminatoire de verser ça aux mères? Je comprends qu'ils ne veulent pas mettre ça dans la loi, mais si, par règlement, on dit que généralement l'argent est versé aux mères, est-ce que, ça, c'est discriminatoire ou est-ce que le fait même que c'est comme ça... Moi, je ne le conteste pas. Moi, je pense qu'il faut verser l'argent aux mères. Mais c'est ça que le gouvernement va faire de toute façon. C'est aussi discriminatoire dans le geste que de l'écrire dans le projet de loi et peut-être pour rassurer les groupes qui sont venus témoigner ici. Si c'est ça, de toute façon, que le gouvernement va faire, pourquoi ne pas biffer «personne» et mettre «mère»?

Mme Marois: Le règlement ici prévoit une priorité à la mère. Donc, on ne l'indique pas à la loi, mais on le fait dans le règlement cependant, ce qui donne concrètement le même effet, le chèque s'en va à la mère, sauf les cas, justement, que le règlement exclut, ce qui est correct.

M. Kelley: Avec votre amendement, c'est couvert.

Mme Marois: Écoutez, moi, je n'ai pas d'objection de principe. J'en ai une jusqu'à un certain point, parce que, moi, je ne voudrais pas qu'effectivement ce soit indiqué que ce soit à la mère. Ça pourrait être à la mère ou au père, selon qu'il assume principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et vit habituellement avec lui. Parce que, en vertu de la discussion qu'on a eue tantôt, enfin, de la démonstration que je vous ai faite tantôt, moi, je pense que les pères, d'abord, ne sont pas inaptes à prendre soin des enfants. Je pense qu'ils sont aussi capables que les mères de prendre soin de leur enfant et ils le font dans un grand nombre de cas que nous connaissons bien, tout le monde autour de la table. Et, en ce sens, il y a quelque chose d'un peu choquant de dire que c'est normalement et immédiatement la mère qui prend soin, alors que, justement, on défend autre chose sur plusieurs tribunes et dans plusieurs autres organisations. On défend le fait que ce soit autant la mère que le père qui se sente responsable de ses enfants et qui en prenne soin. Alors, évidemment, si, par une loi, on dit formellement que c'est à la mère que la prestation va aller parce qu'on prend pour acquis qu'elle va prendre soin de l'éducation, prendre charge des soins, etc., de l'enfant, alors que ça peut être aussi bien le père, hein, on se comprend... Mais on respecte une tradition et la façon de la respecter, cette tradition, c'est de l'inscrire plutôt au règlement que dans la loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député.

M. Kelley: Pour la clarté, je comprends fort bien, mais, en se basant sur le principe énoncé par la ministre, elle doit prévoir maintenant un mécanisme où les pères peuvent faire application, et ce n'est pas son intention si j'ai bien compris, on va garder la tradition, on va continuer tel que nous avons géré ça. Alors, peut-être que ce serait mieux d'être plus clair au lieu de soulever cette possibilité, et je conviens que nos pères sont capables aussi de prendre soin de leurs enfants. Mais, si c'est ça qu'elle doit faire, elle doit être prête en conséquence à changer la gestion du système et laisser le choix au couple que le chèque sera destiné au père ou à la mère. Mais ce n'est pas son intention de faire ça. L'économie générale va demeurer qu'on va verser ça aux mères et, si c'est cela le cas, peut-être qu'il faut le mettre au clair dans notre loi. C'est tout.

Mme Marois: Alors, écoutez, moi, c'est un débat que je trouve intéressant. Comme vous voyez, je trouve ça d'intérêt que l'on puisse ensemble aborder cette question-là. On me fait valoir ici, en plus des arguments évidemment que j'ai présentés, M. le Président, pour la défense de cet article, qu'évidemment, nous, vous savez qu'on va fonctionner en harmonie avec Ottawa, avec le fédéral, pour ce qui est de cette prestation, de telle sorte qu'on simplifie la vie de tout le monde. On va fonctionner comme ça. Mais, en plus, il faut ajouter qu'actuellement, pour justement éviter les problèmes administratifs qui étaient soulevés, on va fonctionner pendant un certain temps avec l'information qui va nous venir du fédéral. On n'ira pas nous-mêmes chercher l'information, on nous déclarera les enfants, et c'est à partir de cette information-là qu'on procédera. Et notre système deviendra autonome dans deux ans, c'est ça? En décembre 1999. Voilà! Donc, dans deux ans et un peu plus, en décembre 1999, notre système deviendra autonome, et là on pourra évidemment se permettre, comme on le fait d'ailleurs à la Régie des rentes et dans d'autres programmes, et je l'espère bien, on pourra évidemment se distancer un peu de ce qui se fait par ailleurs et donc choisir nos propres définitions et nos propres règles sous cet angle.

Et, moi, je suis prête à ce qu'éventuellement on refasse le débat dans le sens de ce que suggère le député et, à mon point de vue, on devrait mentionner que oui, les prestations familiales sont versées par la Régie des rentes à la personne qui assume principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et qui vit habituellement avec lui, que ce soit le père ou la mère. Alors, ça n'irait pas dans le sens, par exemple, de ce qui est souhaité nécessairement actuellement par les groupes – on se comprend bien – parce que les groupes souhaitent, eux, que nommément on mette «à la mère». C'est ce qu'on fait actuellement; concrètement, c'est ce qui va arriver.

M. Kelley: Et on va continuer.

Mme Marois: Mais, éventuellement, moi, je pense que c'est un débat intéressant qu'on devrait avoir et je suggère qu'on le garde en mémoire et qu'on puisse le reprendre au moment où on voudra faire des amendements à cette loi. Ça viendra sûrement, il y a toujours des ajustements qu'on doit faire à une loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député.

M. Kelley: Juste à titre d'information. Au fédéral, ils sont versés à la mère, si j'ai bien compris. Ça, c'est la règle générale au niveau fédéral aussi.

(Consultation)

Mme Marois: Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'ai justement demandé à M. le député d'attendre quelques secondes.

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Pour l'information des gens qui regardent le débat, c'est des consultations qui se font occasionnellement. Alors, vous pouvez y aller, M. le député.

M. Kelley: Non, c'est juste pour m'assurer que la règle générale, au niveau fédéral, c'est qu'on verse ces montants aux mères et c'est juste par exception quand on envoie ces montants aux pères ou à d'autres personnes. Est-ce que, ça, c'est exact?

Mme Marois: Effectivement, on le dit bien dans le règlement: «Pour l'application du présent article, le mot "mère" s'entend au sens de l'article 2 de la Loi sur les impôts, compte tenu des adaptations nécessaires.

«Les prestations familiales sont versées en priorité à la mère lorsque l'enfant vit avec elle, sauf dans les cas suivants»...

M. Kelley: Oui. O.K. Parfait.

Mme Marois: ...et là on a une série de cas.

M. Kelley: Et ça, c'est le même régime au niveau fédéral.

(16 h 50)

Mme Marois: Oui, c'est le même régime, exactement.

M. Kelley: C'était ma question. Dans le troisième alinéa – ça, c'est le cauchemar des personnes qui vont écrire les biographies – mais comment est-ce qu'on peut avoir plus qu'une mère? Ha, ha, ha!

Mme Marois: Bien, ça peut être une grand-mère.

M. Kelley: Pour les adeptes de Freud qui pensent que, ça, c'est quand même la relation la plus essentielle. Ha, ha, ha! On va laisser ça sur le comité des affaires psychiatriques.

Mme Marois: On me dit ici que ça peut être une mère et une grand-mère qui s'occupent, les deux, de l'enfant.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est une bonne réponse. Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'article 6?

M. Kelley: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, M. le député, vous n'avez pas terminé?

M. Kelley: Non, j'attends. À l'alinéa 3, je veux juste savoir, juste par curiosité, qui est visé. C'est les grands-mères, ou les tantes, ou...

Mme Marois: Pourquoi ça ne pourrait pas être une tante? Alors, on va demander à notre conseiller juridique. Allez-y.

M. Kelley: Je n'ai pas d'arrière-pensée, mais ça me frappe un petit peu comme curieux.

Mme Marois: M. Laliberté, allez-y.

M. Laliberté (Louis-Marc): Cette notion-là vise la mère biologique, la mère adoptive, la grand-mère et la belle-mère, quand il y en a une évidemment. Normalement, le cas où il y aurait deux mères, entre guillemets, serait la mère et la grand-mère qui vivraient avec l'enfant.

M. Kelley: Mais, règle générale... Je sais que tout est possible dans les années quatre-vingt-dix, mais, si on ne vit pas avec la mère biologique et que c'est une mère dans une famille recomposée, c'est rare qu'on va vivre ensemble. Ha, ha, ha!

Mme Marois: Mais c'est pour ça qu'on dit...

M. Kelley: Ce n'est pas impossible, probablement... Ha, ha, ha!

Mme Marois: Ha, ha, ha! C'est pour ça qu'on dit que ça peut être mère et grand-mère. Ce seraient des situations peut-être plausibles. Mais, sinon, c'est rare qu'effectivement la mère biologique va vivre avec la blonde du papa, n'est-ce pas?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que, M. le député, vous avez d'autres interventions?

M. Kelley: Oui. Au deuxième alinéa, on parle de... lorsque plus d'une personne...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On est toujours à l'article 6...

M. Kelley: Oui, oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...et non sur les règlements.

M. Kelley: Non, non, ça, c'était juste en référence au règlement, j'ai vu la notion d'avoir deux mères, et, des fois, les enfants prétendent qu'une est suffisante. Mais, dans le cas de la garde partagée, est-ce qu'on va verser deux chèques, moitié-moitié? C'est quoi? On dit que ça va être fait par règlement, mais est-ce que l'idée, dans le cas d'une garde partagée 50-50, c'est qu'on va donner la moitié au père et la moitié à la mère? Comment est-ce que la Régie prévoit, par règlement, gérer le deuxième alinéa?

Mme Marois: Alors, sur ça, il faudra songer effectivement à un régime spécial. Je pense que ça vaudrait la peine qu'on donne une explication ici.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Marc Lacroix.

M. Lacroix (Marc): Oui. Bien, écoutez, vous le savez, la Régie est dépendante du fédéral pour la gestion de l'admissibilité à l'allocation familiale et, dans la situation actuelle, la prestation fiscale pour enfant n'est pas partagée entre les parents qui assument une garde partagée. Donc, il serait très difficile pour la Régie d'appliquer des conditions différentes. Ça créerait d'abord des irritants pour la clientèle, d'une part, et, deuxièmement, des coûts de mise en place importants à court terme. Mais, comme madame disait, à partir de décembre 1999, le Québec gérera, donc, l'admissibilité et pourra revoir cette question. Mais, dans le règlement, toutes les conditions d'exclusion qui sont nommées sont identiques à celles de la prestation fiscale fédérale. On nous transmet l'information et nous payons en fonction de cette information qui nous est transmise, exactement.

M. Kelley: Non, mais c'est juste pour mieux comprendre. C'est juste une question de clarification. Alors, règle générale, dans une question de garde partagée, une ordonnance de la Cour qui partage la garde, et c'est fait conjointement, l'argent est toujours versé à la mère?

Mme Marois: Oui.

M. Kelley: Est-ce qu'on peut dire que, règle générale, c'est le cas?

Mme Marois: Oui, oui.

M. Kelley: Je suis peu familier avec la Loi sur le divorce. Alors, est-ce que c'est prévu dans les conditions d'une entente sur un divorce, le partage de ces montants?

Mme Marois: Bon, là, on parle de garde partagée. Évidemment, que ce soit en cas de séparation ou de divorce, il peut y avoir garde partagée, même en cas de divorce.

M. Kelley: Oui, mais, si j'ai signé une entente de divorce, est-ce qu'on peut prévoir que l'allocation familiale est partagée ou est-ce que c'est fait...

Mme Marois: Oui, bien sûr. Bien sûr. Ça dépend de la circonstance, évidemment, devant laquelle on se trouvera...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): De par l'entente.

Mme Marois: ...et de l'entente. Sauf que, dans un premier temps, ce que l'on dit actuellement, c'est qu'on sera à même vraiment de partager éventuellement l'allocation. Pour l'instant, on ne le ferait pas. On sera à même de le faire à partir de 1999.

M. Kelley: C'est parce que c'est juste, comme député... Je pense que tous les députés ont reçu des revendications de pères qui disent qu'ils sont défavorisés dans toute la notion de garde des enfants et, également, dans cette notion des allocations financières de l'État pour appuyer les enfants dans le cas d'une garde partagée. Alors, pour le moment, l'économie générale qui est empruntée du niveau fédéral, c'est: on verse l'argent à la mère, peu importe une décision de garde partagée. Et, effectivement, au niveau d'un père qui assume la moitié du temps dans une garde conjointe ordonnée par la cour, il y a une certaine... peut-être que «discrimination» est un mot trop fort, mais il y a un désavantage en comparaison avec la conjointe qui a la moitié de la garde, si j'ai bien compris.

Mme Marois: Oui. Mais, actuellement, la façon dont ça va procéder... effectivement, imaginons, comme on dit, que c'est moitié-moitié... Ce sera traité. Enfin, ce cas-là sera traité, n'est-ce pas, on se comprend? Ce cas-là sera traité et on partagera tout simplement l'allocation en deux, six mois à l'un, six mois à l'autre. Alors, on peut le faire, le fédéral peut faire ça, et nous, on peut, en conséquence, agir aussi dans ce sens-là, puis éventuellement sophistiquer un peu plus le système s'il y a des changements en cours de route, etc. Mais là c'est possible. Sauf qu'on prend pour acquis, au départ, que c'est la mère qui l'a. Évidemment, selon l'entente, après, on peut faire valoir... Le père peut dire: Écoutez, il y a une entente entre nous, on a eu un jugement et puis on partage également la garde; bien, je voudrais que vous partagiez également l'allocation. Et ça, ça devra se traiter et se faire.

M. Kelley: Ça, c'est à moyen terme, si j'ai bien compris.

Mme Marois: Non, on pourra, ça, le faire maintenant. On pourra le faire maintenant. C'est bien ce que je comprends. Sauf que ça devra être traité cas par cas, il n'y aura pas d'automatisme. Mais, de toute façon, il ne peut pas y avoir d'automatisme dans ces situations-là. Il faut que les gens signifient leur changement de situation. Ça, on ne peut pas la deviner.

M. Kelley: Mais on ouvre la porte, et la Régie sera capable, si les deux ex-conjoints arrivent en disant: On veut que ce soit payé, ça, autrement... Nos ordinateurs vont être assez sages pour faire ça?

Mme Marois: Oui. On me dit évidemment...

M. Kelley: Les fonctionnaires, c'est évident qu'ils le sont. Mais, des fois, les ordinateurs, il y a des ratés.

Mme Marois: Non, mais ce qu'il faut voir, c'est qu'actuellement et jusqu'en 1999 ce sera encore comme cela. L'admissibilité, elle est établie par Revenu Canada dans le cadre de l'administration de la prestation fiscale pour enfant et, à partir de là, le résultat est transmis à la Régie. Donc, nous, on fonctionne sur cette base-là. Évidemment, sur la hauteur de l'allocation, bien là il y aura une autre information qui viendra du Revenu pour nous assurer de la hauteur de l'allocation à verser.

M. Kelley: Alors, c'est plutôt pour...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mais, s'il y avait une demande de changement, elle devrait être faite au fédéral et du fédéral à la Régie.

Mme Marois: Voilà, qui, immédiatement, nous la transmet et, nous, on réagit en conséquence.

M. Kelley: O.K. Et est-ce que le régime fédéral va permettre ces genres de changements ou on ne sait pas?

Mme Marois: En fait, ils font du cas par cas actuellement. La garde partagée est déjà reconnue et, normalement, donc, ça devrait ne pas se modifier.

M. Kelley: Ça va suivre.

Mme Marois: C'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Kelley: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais savoir: Est-ce que, dans les balises que la ministre est en train de chercher... et je ne cherche pas que le gouvernement définisse la famille pour nous, comme le député de Saint-Hyacinthe a déjà mentionné. Mais est-ce que les mots «qui vit habituellement avec lui» sont essentiels? J'ai eu le plaisir de visiter, par exemple, le comté de Duplessis, la Côte-Nord, avec l'ancien député, et j'ai visité les villages, et la ministre de l'Éducation était au courant que, souvent, les familles québécoises doivent envoyer leurs enfants assez loin, vivre dans les villages proches des écoles secondaires régionales. Ça marche bien. Mais, souvent, les enfants restent, selon l'information que j'ai reçue, 10 mois, plus ou moins 10 mois par année avec une autre famille. Et, selon ma compréhension de l'article 6 tel qu'écrit, ça peut compliquer le droit d'avoir une prestation familiale.

(17 heures)

Je pense que le concept le plus important, c'est qu'on doit envoyer cette allocation familiale à la personne qui assume principalement la charge, le soin, l'éducation. Je présume que les parents gardent encore cette responsabilité. Mais les enfants, et souvent assez jeunes, 12, 13, 14 ans, doivent être hébergés ailleurs. Mais, selon ma lecture de cet article de loi, ces enfants ne demeurent pas habituellement avec leurs enfants sur une...

M. Copeman: Leurs parents.

M. Williams: Avec leurs parents. Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Mais ils demeurent au moins pour neuf mois – je ne veux pas exagérer les chiffres – les trois quarts de l'année avec une autre famille. Je voudrais savoir comment cet article de loi peut affecter ces familles ou s'il y a un autre article plus tard qui va donner une souplesse à ca.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, il y a une explication que j'ai donnée tout à l'heure, je crois. Mais on peut revenir à la notion de «vit habituellement avec l'enfant». On a justement choisi «habituellement» plutôt que «continuellement», pour tenir compte de ces réalités. Et «habituellement», ça doit recevoir, je dirais, dans son interprétation, son sens courant, à savoir que l'enfant vit ordinairement avec la personne qui en prend soin. Mais, évidemment, on voudrait éviter que la disposition puisse être interprétée comme obligeant l'enfant à vivre continuellement avec la personne. Et ça voulait couvrir ces cas où des enfants doivent aller étudier à l'extérieur du foyer. C'est le cas des enfants qui vivent en région éloignée et qui sont à l'école ou pensionnaires ou autrement.

Écoutez, c'est un ensemble de critères qui se cumulent, c'est «qui assume principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et vit habituellement avec lui». Normalement, une famille, on peut accepter que, pendant quelques mois dans une année, son enfant aille étudier à l'extérieur, même si c'est la majorité des mois. Mais, généralement, on paie pour et on assume les soins en ce sens-là et l'éducation.

M. Williams: Oui, j'ai voulu juste clarifier comme il faut, parce que, quand un enfant visite temporairement une autre école et est hébergé là, c'est une chose. Mais, quand ils sont là habituellement année après année, de septembre jusqu'à juin, peut-être une visite pour Pâques et Noël, je voudrais m'assurer que ces familles-là ne sont pas pénalisées, ni les familles, pour une raison ou l'autre – parce que de plus en plus la vie est compliquée pour les familles québécoises – quand les parents doivent quitter peut-être leur province pour un peu de temps pour travailler ailleurs et ils laissent les enfants avec leurs grands-parents. Je voudrais m'assurer – je ne prolonge pas le débat – si c'est assez clair que ces familles ne seraient pas «impactées» négativement par ces mesures. C'était ça, le but de ma question, Mme la ministre.

Mme Marois: Non. Il n'y a pas d'inquiétude à avoir. C'est assez clair et cela relève du sens commun, tel que dit ici.

M. Williams: Mais le sens commun et les lois, de temps en temps, ce n'est pas la même chose. Avec ça, c'est pourquoi j'ai demandé la question, Mme la ministre.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: J'écoutais attentivement le débat sur «habituellement». Je suis allé faire la recherche du mot dans le Petit Robert . C'est un peu mes habitudes, M. le Président, de vérifier le sens commun des choses. Je ne suis pas tout à fait convaincu, parce que ça pourrait être une définition: De façon très fréquente, presque toujours, aussi. Mais, si la ministre nous assure qu'il y a une portée soit judiciaire ou claire, on va se contenter de l'explication de la ministre. Il y avait une autre question, M. le Président, en ce qui concerne l'arrimage avec...

Mme Marois: ...contenter, mais ça ne fait rien, si ça peut satisfaire le député, il n'y a pas de problème.

M. Copeman: M. le Président, j'aurais une autre question en ce qui concerne l'arrimage avec notre système d'aide sociale. Encore une fois, si mes informations sont exactes...

Une voix: ...

M. Copeman: Malheureusement, à chaque fois que je soulève ces questions, ça provoque un changement de chaises. Un peu de chaise musicale fait du bien de temps en temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est pour la cause.

M. Copeman: Tout à fait. Et je suis très reconnaissant, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est pour mieux répondre à l'opposition avec beaucoup d'efficacité.

Mme Marois: On veut s'assurer que toutes les informations sont disponibles pour l'ensemble des collègues de notre commission, M. le Président.

M. Copeman: Et on vous remercie beaucoup pour l'efficacité de ces informations et l'exactitude, M. le Président. La question, et c'est peut-être d'ailleurs la même réponse à la même question que j'ai posée tantôt en ce qui concerne les articles 51, 52, 53, etc., mais je vais la poser quand même. Si mes informations sont exactes, la loi sur la sécurité du revenu permet le partage des barèmes entre deux personnes potentiellement prestataires, de deux prestataires de l'aide de dernier recours en ce qui concerne le calcul s'ils ont des enfants à charge. Si mes informations sont exactes, on dit dans la loi et dans les faits que, jusqu'en 1999, on ne peut pas partager les prestations familiales. Est-ce que ça pose un problème d'arrimage entre les deux systèmes?

Mme Marois: On a prévu un certain nombre d'ajustements et de règles pour faire en sorte justement qu'on tienne en compte des situations de dénuement, donc de personnes qui laisseraient un travail ou qui auraient un revenu lié à une prestation, par exemple d'assurance-chômage, et qui seraient à l'aide sociale. On a prévu des mesures pour ajuster, évidemment, les prestations versées aux personnes et pour tenir compte de la présence d'enfants dans ces familles, compte tenu que la situation antérieure pour cette même famille, qui était soit sur le marché du travail ou avait une allocation d'assurance, enfin d'assurance-emploi, maintenant... L'allocation versée à l'enfant avait été évaluée sur la base de ce revenu-là de l'année antérieure. Et, donc, il y a des ajustements de prévus. Je sais que vous faites référence à une autre situation. Alors, je voudrais que vous la repreniez de façon plus pointue.

M. Copeman: Oui, je me suis peut-être mal exprimé, M. le Président. On indique qu'habituellement on ne peut pas partager les allocations familiales pour les fins de garde partagée telle que reconnue par la loi. Si ma compréhension est exacte, dans notre système d'aide sociale, présentement, des barèmes tiennent compte de la garde partagée selon la loi. Autrement dit, mettons, pour les fins d'hypothèse, le père qui est sur l'aide sociale, la mère qui est sur l'aide sociale, ils sont tous les deux bénéficiaires de l'aide sociale, présentement il y a un calcul qui se fait pour refléter la garde partagée des enfants au niveau des barèmes. Est-ce que cette même pratique pourrait se reproduire avec les allocations familiales qui vont remplacer la composante enfant dans le calcul des barèmes?

La Présidente (Mme Charest): Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je vais demander à Mme Gauvin de répondre techniquement à la question, mais c'est...

M. Copeman: Francine de son prénom.

Mme Marois: Mme Gauvin.

M. Copeman: Francine de son prénom.

Mme Marois: Je crois que c'est le cas. Vous savez que comme ministre responsable de la Famille je coordonne l'ensemble de la politique, j'en assume la gestion. Mais, comme il y a des interrelations avec plusieurs ministères, j'ai souhaité évidemment que les gens de ces ministères soient là, dont, entre autres, la Sécurité du revenu. Je vais demander, donc, à Mme Gauvin de répondre à cette question.

Mais il faut bien voir, c'est important de bien comprendre, je pense, le principe de cette nouvelle allocation familiale. On la lie à l'enfant et à l'adolescent, et elle n'est plus liée à la situation, si on veut, de prestataire de la sécurité du revenu ou de travailleur ou de travailleuse à bas revenus. On se comprend, n'est-ce pas?

M. Copeman: Je comprends tout ça.

Mme Marois: Alors donc, l'enfant est là, la famille a la prestation en fonction du revenu qu'elle a, que, ce revenu, elle le tire de la sécurité du revenu ou du revenu du travail. Et, si leur situation financière se modifie, l'allocation en conséquence pourrait se modifier. On se comprend bien. Là, il s'agit de la garde lorsque des personnes sont à la sécurité du revenu et se partagent l'enfant. Je vais demander à Mme Gauvin de nous répondre très spécifiquement à cette question.

La Présidente (Mme Charest): Mme Gauvin.

Mme Gauvin (Francine): D'accord, vous avez raison de mentionner qu'actuellement c'est prévu dans le cadre du règlement que, dans les situations de garde partagée, la portion enfant qui correspond à la couverture des besoins des enfants est partagée en fonction du temps de garde de chacun des deux parents, même en fonction du nombre de jours de garde de chacun des deux parents, et ce, sur une base mensuelle. Compte tenu du fait que l'introduction de la nouvelle allocation familiale implique pour nous de remplacer des barèmes qui couvrent les besoins des adultes et les besoins des enfants par des besoins adultes et des majorations pour enfants, ce que vont nous permettre les articles 53 et suivants de la Loi sur les prestations familiales, c'est d'accorder dans tous les cas aux familles prestataires une majoration pour enfants mineurs qui va correspondre au montant maximum d'allocations familiales auquel la personne pourrait avoir droit.

(17 h 10)

Donc, dans les situations où un prestataire aurait droit au montant maximum d'allocations familiales, la majoration serait égale à zéro, autrement dit, parce que l'allocation familiale reçue réduirait cette majoration-là. Et, dans les cas où le prestataire n'aurait droit à aucune allocation familiale, la majoration serait donc accordée intégralement, ce qui permettrait à la famille prestataire d'avoir droit au maximum de l'allocation familiale, à l'équivalent du montant de l'allocation familiale qui serait versé par la Régie, notamment dans les cas où le revenu de l'année précédente l'exclurait du bénéfice de l'allocation familiale pour l'année en cours. Alors, dans les cas de garde partagée, si le prestataire ne reçoit pas l'allocation familiale, alors qu'il a 50 % du temps de garde, nous allons lui donner l'équivalent de 50 % de la majoration pour enfants.

M. Copeman: M. le Président, on aura l'occasion, rendu aux articles 53 et ainsi de suite, de débattre l'applicabilité et l'efficacité de tous ces calculs, de majoration, d'une part, et de soustraction, par la suite. En tout cas, M. le Président, je vous le dis, avec les explications très claires et limpides fournies à date par les représentants du ministère de la Sécurité du revenu, je m'avance un peu, mais je suis en train de me former une opinion que le système va être beaucoup, mais de loin beaucoup plus compliqué à gérer que le système actuel et que l'objectif souhaité par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité de simplifier les barèmes devient de plus en plus douteux, avec tous ces cas de majoration, d'une part, de soustraction, d'autre part, en tenant compte de toutes les situations. On va se rendre. Si la ministre veut faire le débat tout de suite, je suis bien prêt à le faire. Mais c'est surtout aux articles 53... Et je doute énormément de l'efficacité du régime qu'ils sont en train de mettre en place.

Mme Marois: Alors, M. le Président, je ne veux pas qu'on en débatte maintenant, on en débattra plus tard. Cependant, je dois dire aux membres de la commission que, si ça nous cause des ennuis administratifs, ça, c'est notre trouble. L'objectif, c'est de faire en sorte qu'on traite équitablement les enfants, peu importe où ils sont et à quelle famille ils appartiennent. Alors, le reste, c'est notre trouble. Si c'est un peu compliqué, on le rendra plus compliqué, en autant que les enfants, eux, ne sont pas pénalisés d'une quelconque façon. Je pense que nous simplifions le régime pour tellement de gens qu'il souffrira l'exception.

M. Copeman: M. le Président...

Mme Marois: On fera le débat plus tard.

M. Copeman: Oui, oui, mais j'ai un commentaire. La ministre nous dit que, si ça nous cause des ennuis administratifs, c'est notre trouble. Pour avoir un peu travaillé avec des prestataires d'aide sociale pendant maintenant trois mois, je peux vous dire une chose, M. le Président, et tous les députés peuvent le constater, les ennuis administratifs au ministère de la Sécurité du revenu se traduisent immédiatement presque et de façon très directe dans une difficulté d'obtenir un chèque à la fin du mois, un changement de chèque. Je regrette, c'est ma constatation. Quand la ministre nous dit: Nos ennuis administratifs, c'est à nous de régler ça, il y a un impact direct sur les prestataires d'aide sociale, M. le Président, qu'il ne faut jamais oublier.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'imagine que, d'ici à ce qu'on arrive à l'article ou aux articles mentionnés, de part et d'autre, il y aura des occasions pour s'informer davantage. Est-ce que je comprends bien en pensant que l'article 6, tel qu'amendé, est adopté?

Mme Marois: Adopté.

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. L'article 7, Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, l'article 7. On dit: «Les prestations familiales ne sont accordées que sur demande, sauf dispenses prévues par règlement du gouvernement. Le gouvernement précise également, par règlement, les renseignements et documents qui doivent accompagner la demande. La Régie peut exiger du demandeur tout autre renseignement ou document qu'elle juge utile.»

Évidemment, je pense que ça va comme un peu de soi. Celui qui désire recevoir des prestations familiales doit en faire la demande. Ça permet aussi, cependant, de prévoir les cas où on est dispensé de faire une demande. Et, à titre d'exemple, il pourrait être prévu dans un règlement qu'un avis présenté pour obtenir la prestation fiscale fédérale pour enfants équivaut à une demande présentée en vertu de la loi québécoise, ce qui d'ailleurs va être le cas.

Cet article permet, de plus, à la Régie d'exiger les renseignements ou documents qui doivent accompagner la demande. En fait, ça reprend en très grande partie le texte actuel de la Loi sur les allocations d'aide aux familles. Et l'article 7 prévoit qu'il peut y avoir deux dispenses, donc, de présenter une demande, on le disait tout à l'heure. Et le seul cas envisagé pour l'instant est celui où une personne potentiellement bénéficiaire d'une allocation familiale a procédé préalablement à une demande de prestation fiscale pour enfants.

Et effectivement, si on va au règlement, maintenant, à l'article 4 du règlement, Demande de prestations familiales, c'est la section IV d'ailleurs, mais qui commence par l'article 4 jusqu'à l'article 6, on dit: La personne qui présente l'avis visé au paragraphe de la Loi sur l'impôt sur le revenu – et là on fait référence à celle du Canada – pour obtenir la prestation fiscale pour enfants prévue par cette loi est dispensée de présenter la demande visée à l'article 7 de la loi pour obtenir l'allocation familiale.

Autrement dit, on simplifie la vie du citoyen et de la citoyenne qui demande son allocation familiale. Cependant, si elle devait être demandée, on identifie les renseignements demandés, ce qui va de soi: nom, date de naissance, état civil, numéro d'assurance sociale et adresse du demandeur; date du début et de la fin, s'il y a lieu, de l'union du demandeur et de son conjoint; le statut du demandeur; les nom, date de naissance, adresse, numéro d'assurance sociale du conjoint; le statut du conjoint demandeur; le nom, la date de naissance et l'adresse de l'enfant; le lien de parenté entre le demandeur et l'enfant ainsi qu'entre le conjoint du demandeur et l'enfant; et la date à compter de laquelle le demandeur a commencé à assumer principalement la charge des soins et de l'éducation de l'enfant et habite habituellement avec lui. Enfin, on précise pour la date d'allocations pour enfant handicapé et ce qu'elle doit contenir en plus. Je pense que ça va de soi évidemment. On ne peut pas, de toute façon, deviner que l'enfant arrive ou que la famille change de statut ou quoi que ce soit.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Je pense qu'on tombe sur quelque chose de très, très important, parce que ça me surprend le nombre de fois, deux ou trois par année, où il y a des parents qui appellent à mon bureau de comté pour dire: Mon enfant a maintenant deux ans, et je n'ai rien reçu encore. Alors, c'est toujours possible pour des parents d'échapper à tout ça. Et, moi, je me rappelle, et on a une certaine expérience comme ça parce qu'on a fait ça cinq fois, qu'en sortant de l'hôpital avec un nouveau-né, on est fatigué, on a plein de joies, on a beaucoup d'émotions, et l'infirmière ou quelqu'un de l'administration de l'hôpital arrive avec une enveloppe, et il y a toutes sortes de choses dedans. Je vois le député de Saint-Hyacinthe. Je pense qu'il y a un petit test qu'il faut envoyer à Saint-Hyacinthe pour tester certaines maladies. En tout cas, il y a toute une série de choses. Et, comme parents, ce n'est pas toujours évident, dans tout ça, les monceaux de papier. Il faut aviser soit l'église ou la municipalité. Maintenant, on a changé ce régime, si j'ai bien compris.

Alors, je veux juste m'assurer que je comprends fort bien que les prestations ne sont accordées que sur demande, mais que ce qu'on va mettre en place va être facile. Comme je l'ai dit, ça me surprend toujours, comme député, il y a toujours quelques parents dans notre société qui, pour une raison ou une autre, ont manqué. On peut, je pense, réclamer jusqu'à un an. Alors, il y avait quelqu'un dans mon bureau il y a trois semaines, et je pense que sa petite a maintenant presque deux ans. Il a dit: C'est assez curieux, je n'ai rien reçu encore, et c'est jusqu'à ce moment... Mais c'est quelqu'un qui travaille et qui n'a pas pensé à ça. Alors, c'est des choses qui arrivent dans la vie.

Juste pour m'assurer que, peu importe le régime, on va faire quelque chose d'assez simple, d'assez souple. Je ne sais pas si on a déjà prévu des genres de renseignements qu'on va donner en sortant de l'hôpital, parce que, comme j'ai dit, si mon expérience est typique, l'hôpital arrive avec une tonne de papiers. Ils disent: Ça, c'est important. Et chaque document est identifié comme crucial, d'importance capitale. Comme jeune parent, tu veux toujours t'assurer que tu ne perds rien. Mais je veux juste m'assurer qu'on a un lien qui est établi à partir de l'hôpital, en général, ou le centre de naissance pour bien expliquer aux parents: Ça, c'est les démarches qu'il faut faire.

(17 h 20)

Au-delà de l'article 7 qui est devant nous, je pense qu'il faut prévoir quelque chose de «user-friendly», il faut prévoir en conjonction, si j'ai bien compris, avec le gouvernement fédéral quelque chose qui est souple, qui est efficace, qui va venir en aide à nos jeunes parents. Parce que je peux vous assurer qu'en faisant ces sorties à l'hôpital cinq fois, notre tête est dans un autre endroit. Et ce n'est pas notre lien avec nos gouvernements qui est la première priorité pour des parents qui sortent.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: J'écoutais le député de Jacques-Cartier, puis on essayait d'évaluer les situations où vraiment les parents se soustrairaient ou n'inscriraient pas leurs enfants pour fins de prestations fiscales ou pour fins d'allocations. C'est des cas, je pense, exceptionnels. Je vais vous expliquer comment ça procède, et puis, par ailleurs, il y a des éléments de motivation, si on veut, supplémentaires.

D'abord, la façon dont ça procède. La demande de prestations fiscales pour enfants est complété par les parents, évidemment. Les formulaires sont disponibles dans les centres hospitaliers. Donc, quand un enfant naît – on n'est encore pas trop loin de ça – ils nous amènent tout un tas de papiers puis, à travers ça, on découvre qu'on a les documents pour enregistrer nos enfants, si on veut les enregistrer à l'état civil, comment on doit procéder, comment faire pour demander l'allocation familiale, etc. C'est vrai aussi dans les CLSC, il y a des documents. Comme la plupart des gens encore vont donner naissance dans une institution, ils ont au moins les documents qui sont disponibles.

Aussitôt que c'est arrivé à Revenu Canada, ceux-ci les traitent assez rapidement pour voir s'il y a admissibilité et transmettent les renseignements à la Régie des rentes, y compris le résultat de l'évaluation de l'admissibilité. Ça, ça prend normalement, on me dit, environ deux mois, pour ce qui est des nouveaux-nés. Et nous, à la Régie, ça prend deux semaines pour qu'on puisse calculer, informer la famille et mettre en paiement immédiatement l'allocation. Donc, il y a ça.

Mais, par ailleurs, il y a maintenant tellement de crédits liés, par exemple à la TPS ou la TVQ, que les gens font leur rapport d'impôts et sont incités à le faire et généralement, évidemment, prennent connaissance à ce moment-là de la disponibilité de cette allocation. Si ce sont des gens à très hauts revenus, évidemment, dans le cas présent, l'allocation risque d'être un petit peu moins significative, et c'est pour ça qu'ils ne la demandent pas, c'est parce qu'ils ont déjà des ressources pour assumer les soins de leurs enfants. S'ils sont à bas revenus, rapidement, ils vont essayer de voir s'il n'y a pas moyen d'aller chercher cette allocation.

Alors, il y a donc des choses qui tombent sous le sens commun. Et on pense qu'avec toutes les informations qui sont disponibles normalement les gens devraient être amenés à faire cette demande et à ne pas être privés de cette allocation. Je pense, entre autres, actuellement aux gens de la sécurité du revenu qu'on a incités à procéder à un rapport d'impôts pour ce qui est de l'établissement aussi de la hauteur de l'allocation; parce qu'on va procéder comme ça pour le Québec. Donc, il y a un intérêt à le faire, sinon, évidemment, l'allocation n'est pas là. Et on a même prévu un mécanisme, je crois, de rétroaction pour les gens qui feraient leur déclaration un petit peu en retard, pour ne pas les pénaliser. Alors, normalement, je ne pense pas qu'il en échappe beaucoup, en bout de piste, et que, au contraire, on leur facilite la tâche lorsqu'ils veulent inscrire leur enfant et demander l'allocation.

M. Kelley: Je comprends, la vaste majorité. Mais c'est juste un plaidoyer, quand même, pour... Comme je l'ai dit, moi, je me rappelle que, surtout avec l'arrivée du premier enfant, c'est beaucoup de paperasse. Et juste au nom de nos citoyens, rappeler que, pour l'État, dire: On a mis ça dans une enveloppe que nous avons donnée à toutes les mères en sortant de l'hôpital, comme assurance absolue que le citoyen est bien informé, je veux juste mettre quelques bémols. Je comprends fort bien que c'est la responsabilité du citoyen de lire tous ces documents, mais il y a d'autres enjeux dans la vie, à ce moment-là. On a même vu qu'il y a une grande variété dans le temps que ça prend pour aller enregistrer la naissance. Certains parents brûlent de le faire le lendemain et d'autres une couple de mois après, peut-être trois mois après, la prochaine fois que je vais aller en ville. Alors, c'est juste un rappel que, quand même, les parents, au moment de l'arrivée d'un nouvel enfant, ont d'autres priorités aussi, de ne pas perdre ça de vue et de toujours avoir un système assez léger, assez souple.

Ça m'amène à mon deuxième point – et je sais que mon collègue de Nelligan veut peut-être s'exprimer davantage – d'être prudent avec le nombre de renseignements, le nombre de documents qui sont exigés. Si j'ai bien compris, il y a un acte de naissance, qui est une des quatre ou cinq formules remplies en sortant de l'hôpital, mais ce n'est pas la même chose qu'un registre de naissance qu'il faut obtenir, dans le passé, d'une église, maintenant, de l'état civil. Moi, ça m'a pris une couple d'essais avant de bien distinguer entre ces deux morceaux de papier. Alors, ce n'est pas donné, ce n'est pas évident.

Pour nous autres, ça peut être clair dans notre tête que la chose qui est donnée par le registre civil, ça a une certaine importance. L'acte de naissance, qui est quelque chose d'émis par l'hôpital, il n'y a pas le nom de l'enfant là-dessus, c'est juste: Bébé, bébé bottes bleues, bébé bottes roses. Ce n'est pas plus que ça qu'on peut trouver sur cet acte de naissance. Mais, pour un parent, un morceau de papier qui dit quelque chose... Je pense qu'il faut toujours rappeler d'être très clair dans nos exigences.

Je vois un pouvoir très large, surtout dans la dernière phrase de l'article 7, de demander toutes sortes de renseignements et de documents, et tout ça. Peut-être exiger une certaine précision, parce que la paperasse, il y en a en masse. Et peut-être que, si on peut cibler ça davantage: Un, deux trois, c'est les documents qu'on veut vraiment que les parents fournissent, et je pense qu'on a tout intérêt de très bien baliser ça au lieu de... Comme je dis, il y a des morceaux de papier sans arrêt. Alors, je vais m'arrêter là pour le moment. Je ne sais pas si mon collègue de Nelligan...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, merci, M. le Président. Je cherche encore quelques clarifications. Quand on voit, première phrase, «sauf dispenses prévues par règlement», je voudrais savoir dans quel cas tu peux avoir le droit d'avoir une allocation familiale sans faire une application.

Mme Marois: En fait, quand vous regardez le règlement que je vous ai déposé, M. le Président, on dit: «La personne qui présente l'avis visé au paragraphe 122.62(1°) de la Loi de l'impôt sur le revenu – soit les lois révisées du Canada, 1985, chapitre 1, 5° supplément – pour obtenir la prestation fiscale pour enfants prévue par cette loi est dispensée de présenter la demande visée à l'article 7 de la loi pour obtenir l'allocation familiale.»

En fait, on simplifie la vie de milliers de citoyens, enfin, de tous les citoyens qui réclament leur prestation fiscale fédérale, puisqu'on dit: L'information qui a été transmise pour obtenir la prestation et établir votre admissibilité est considérée comme étant une information que vous nous avez transmise.

Et l'article 19 d'ailleurs du règlement vient confirmer cela en disant: «Renseignements présumés. La Régie peut estimer que les renseignements qui lui sont communiqués par le ministère du Revenu [...] relativement à une personne qui reçoit la prestation fiscale pour enfants versée en vertu de la Loi sur l'impôt [...] constituent une notification de changement de situation...»

Donc, dans les faits, ce que ça permet justement, c'est de prendre en compte les informations qui nous sont transmises par Ottawa sur la base de l'admissibilité à la prestation fiscale fédérale et, à partir de là, on dispense toutes les personnes de nous donner des informations qui sont identifiées à l'article 7 et dont on établit la teneur et le contenu à l'article 5 du règlement.

Maintenant, je voudrais cependant dire que ce ne sera pas toute la vie comme ça. En 1999, le Québec va être capable de procéder à établir lui-même l'admissibilité. La Régie des rentes est en train de faire du travail en ce sens. Et, à ce moment-là, on demandera, bien sûr, un certain nombre de renseignements, mais qui seront les mêmes qui sont actuellement demandés, et on les identifie ici à l'article 5 du projet de règlement.

M. Williams: Merci pour cette réponse, Mme la ministre. On vise plus ou moins combien de familles avec l'article 4 de ce règlement?

Mme Marois: Pardon? Je n'ai pas compris le début de la question.

M. Williams: Combien de familles sont touchées par cette non-obligation?

(17 h 30)

Mme Marois: Toutes les familles sont concernées. Il y a un seul cas qui est exclu, c'est l'allocation pour enfant handicapé parce que seul le Québec la verse, et là on doit faire une demande particulière. Mais, sinon, ça couvre toutes les familles québécoises.

M. Williams: Toutes les familles jusqu'en 1999?

Mme Marois: Jusqu'en 1999. Et après, elles vont couvrir toutes les familles québécoises, mais ce sera directement avec le Québec qu'on fera affaire. Et je vous dirai qu'on pourrait espérer aussi autre chose, évidemment, ils pourraient faire affaire avec le Québec pour tout ce qui concerne l'ensemble de leurs dossiers de citoyens dans un État souverain.

M. Williams: Mme la ministre, si vous voulez commencer ce débat, on peut certainement commencer ça, parce que vous savez que c'est un cul-de-sac pour la population québécoise.

Mme Marois: Ah! Ça, on n'a pas le même point de vue sur cette question, bien sûr.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ceci dit, on revient à l'article 7.

M. Williams: Ah! Non, non, mais c'est assez clair. Et c'est deux fois dans l'histoire du Québec que la population québécoise a rejeté cette option. Et si la ministre veut commencer le débat, on peut commencer le débat.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On revient à l'article 7, M. le député.

Mme Marois: Même que ça les arrangerait peut-être, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On revient à l'article 7, s'il vous plaît.

M. Williams: Oui. O.K. Ce n'est pas moi qui ai commencé ça, M. le Président. Ce n'est pas nous qui nous sommes éloignés un peu.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je demande simplement de revenir à l'article 7.

M. Williams: Ce n'est pas moi qui ai mentionné que 62 % de la population québécoise a voté contre l'option de séparation. Ce n'est pas moi qui ai...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan, je demande simplement qu'on revienne à l'article 7 immédiatement, simplement.

M. Williams: Ce n'est pas moi qui ai mentionné les défaites du Bloc dans plusieurs comtés.

Mme Marois: On vous explique l'avenir, M. le Président, alors...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On revient à l'article 7, s'il vous plaît.

Mme Marois: On explique ce qui pourrait se passer dans l'avenir.

M. Williams: Bon. Merci pour la réponse, sauf pour la dernière partie de ça, Mme la ministre. Il y a 100 % des familles québécoises, sauf pour les personnes qui vont réclamer une allocation pour les enfants handicapés jusqu'à la fin de 1999. Après ça, ils doivent fournir l'information tel qu'on peut le voir dans l'article 5 de ce règlement.

Je voudrais savoir pourquoi vous n'avez pas demandé que les familles, à partir des huit autres points d'information, déclarent leur revenu dans leur application pour les allocations familiales?

Mme Marois: Parce que vous savez fort bien que l'allocation familiale est calculée sur la base du revenu net, M. le Président, le revenu net évidemment du Québec. Et, à ce moment-là, il y a déjà un calcul, si on veut, qui doit être fait sur ce en quoi consiste le revenu net; c'est la formule d'impôt qui permet d'y arriver. Et la façon la plus simple de connaître ce revenu net sans ennuyer le citoyen – il y a un objectif là bien clair – c'est bien sûr de procéder par un transfert de cette information de l'impôt vers la Régie des rentes, en prenant toutes les prudences nécessaires, et suite à l'avis, d'ailleurs, de la Commission d'accès à l'information qui considère que ce que nous avons fait jusqu'à maintenant et la façon dont nous nous apprêtons à le faire est conforme aux règles de l'art en ce qui a trait au respect de la vie privée des citoyens et des citoyennes.

M. Williams: Mais, la Commission d'accès à l'information – effectivement, Mme la ministre, on pourra discuter de ça aussi un peu plus tard – a clairement ...

Mme Marois: Ça viendra sûrement.

M. Williams: ...mentionné qu'il y a un problème assez important avec la transmission de l'information de toutes les familles québécoises. Je pourrais vous donner la dernière remarque du président, M. Comeau, sur cette affaire, si vous avez oublié ça. Mais, avec ça, la Commission d'accès à l'information a encore des questions et on doit s'assurer, comme vous l'avez mentionné ce matin, que la vie privée est protégée.

Mais, vous avez décidé que ça va être plus simple d'aller dans le transfert de cette information du ministère du Revenu à la Régie des rentes, dans le système de mégafichiers, que de demander aux citoyens et à leurs conjoints de fournir cette déclaration de revenu. C'est ça que vous avez décidé.

Mme Marois: Les mégafichiers, là, on sait fort bien qu'on peut à peu près dire n'importe quoi et tout sur cette question.

M. Williams: Juste la vérité.

Mme Marois: Nous, ce que nous faisons, c'est d'essayer de simplifier la vie des citoyens, de réduire les coûts affectés à la gestion de l'allocation familiale ou même du traitement de la formule d'impôt telle que nous l'envoie le citoyen et de prendre cependant toutes les précautions pour qu'effectivement le citoyen soit respecté quant aux informations qui concernent sa vie privée. C'est ce que nous offrons et nous assurons à cet égard, nous vérifierons et nos ententes seront l'objet de vérifications de la part de la Commission d'accès à l'information, M. le Président.

Mais, en bout de piste, je crois que le citoyen est gagnant à bien des égards. Il est gagnant d'abord sur le fait qu'il n'a pas une série de formules à remplir en double. Ça, ça lui épargne du temps. On vient d'avoir une bonne discussion sur cette question avec le député de Jacques-Cartier. Ça lui épargne des coûts d'administration, bien sûr, la constitution d'un autre fichier à côté comportant des informations qui, évidemment, sont plus susceptibles d'être erronées dans un bon nombre de cas puisqu'il y a un calcul préalable pour arriver au revenu net alors que, lorsqu'on remplit la formule d'impôts, on a déjà ces outils-là pour faire le calcul, et l'impôt confirme que c'est bien fait, c'est juste et c'est correct. Donc, on épargne des sous aux citoyens. Ce sont des sous qu'on peut laisser dans les services directs aux citoyens et aux citoyennes, que l'on peut laisser aussi dans les allocations familiales.

Je comprends l'inquiétude du député de Nelligan. Je pense qu'il faut être très préoccupé par ces questions-là, quant au respect de la vie privée des citoyens et des citoyennes, mais il ne faut pas non plus tomber dans la paranoïa et, à ce moment-là, faire payer aux citoyens des sommes considérables que l'on peut mettre par ailleurs dans d'autres mesures ou d'autres projets.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Williams: Non, M. le Président. Je m'excuse.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député.

M. Williams: Je voudrais encore questionner la ministre. Souvent, nous avons entendu beaucoup d'adjectifs, mais je ne suis pas nécessairement quelqu'un qui a été souvent appelé paranoïaque. Je pense qu'on doit assurer...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: Des collègues comme ça, M. le Président...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il y a des sceptiques dans votre entourage.

M. Williams: Oui. Oui, oui. Et je ne mentionne pas de quel côté j'ai entendu les commentaires. Je voudrais juste m'assurer que, de plus en plus, avec l'échange d'informations, on protège la vie privée. Il me semble que nous avons eu un choix. Je vais terminer avec ça, mais nous avons eu un choix de demander dans ce formulaire le revenu du demandeur et du conjoint ou de rentrer dans le système de mégafichiers, et la ministre a décidé d'entrer dans le système de mégafichiers avec les couplages. Je ne suis pas paranoïaque, mais nous avons tous vu que la Commission d'accès à l'information même a mentionné qu'il y a un marché noir sur l'information confidentielle, le secret fiscal de la population québécoise. Avec ça, on doit être plus prudent. Mais, nous allons avoir une chance plus tard, M. le Président, de discuter de ça.

Je voudrais proposer un amendement à l'article 7, M. le Président, parce que je vois, à la deuxième ligne, un règlement qui dit que le gouvernement peut arriver avec les instances que nous n'avons pas besoin de faire une application. Après ça, dans la troisième ligne, nous allons avoir un autre pouvoir encore pour un règlement que le gouvernement peut, par règlement, décider quels renseignements et quels documents doivent accompagner la demande. Avec ça, il a tout le pouvoir, par règlement, de faire ce qu'il veut quand il veut. Et nous avons vu déjà la ligne de pensée que je trouve bien expliquée aux points 4 et 5 de ce règlement.

J'ai de la misère à comprendre pourquoi, encore une fois, la ministre, le ministère cherche plus de pouvoir avec la dernière phrase de ce paragraphe: «La Régie peut exiger du demandeur tout autre renseignement ou document qu'elle juge utile.» Je comprends que, comme législateur, on doit s'assurer que nous avons pensé à tous les problèmes, mais je pense que ça commence à être un peu exagéré. Il y a dans un article de loi deux règlements, deux mentions de règlement: une pour laisser de côté ceux et celles qui ont besoin de faire une application, et l'autre, c'est de baliser, avec des critères bien faits, quelles informations, quels renseignements nous avons besoin par règlement. Je trouve ça légitime.

Mais, maintenant, juste au cas où ça pourrait être changé, on arrive avec une dernière phrase qui dit: Nonobstant tout ça, nonobstant que le contribuable a bel et bien répondu à toute l'information, la Régie peut exiger d'autres informations. Il me semble que c'est notre responsabilité comme législateurs d'assurer qu'on peut établir des règles et dire: Oui, effectivement, le gouvernement peut avoir le pouvoir de faire un règlement, mais, une fois ce règlement, ça va être assez.

(17 h 40)

Vous savez, M. le Président, que le gouvernement peut changer un règlement, mais ça donne au moins un sens d'imputabilité et je trouve ça important. Sans ça, je pense qu'on peut laisser ça, les familles, à la merci de la Régie. Avec ça, je voudrais proposer qu'on biffe la dernière phrase de l'article 7. Et je dépose mon amendement, M. le Président.

Mme Marois: Alors, je suis prête... Ah! Non, c'est vrai, on va voir si c'est recevable ou pas? D'accord.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il faut le recevoir d'abord.

M. Williams: Un peu impatiente?

Mme Marois: Pas de précipitation.

M. Williams: Non, rien.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, l'amendement est recevable. On peut le discuter tout de suite ou vous voulez en avoir un écrit? Est-ce que tout le monde veut en avoir une copie? C'est simplement de biffer la dernière phrase. Ça va? Alors, on peut en discuter tout de suite, Mme la ministre.

Mme Marois: Bien sûr, M. le Président. D'abord, vous savez, on travaille dans une perspective d'amélioration de ce qu'on avait déjà. Alors, l'ancien gouvernement n'avait même pas prévu que ce soit par règlement, que ce soit identifié, ce qu'on demanderait aux citoyens et aux citoyennes pour obtenir leurs prestations.

Nous avons eu une discussion avec le ministère de la Justice qui a souhaité que l'on identifie par règlement ce qu'on demanderait comme documents pour justement rendre visible ce qu'on allait demander. Alors, c'est donc une très nette amélioration par rapport à ce qu'on avait déjà.

La loi actuelle dit tout simplement que la personne qui reçoit des allocations doit, de plus, produire à la Régie tout document ou renseignement que celle-ci exige pour vérifier si la famille a droit à cette allocation, si cette personne a le droit d'en recevoir le paiement et si son utilisation est conforme à la loi. C'était une obligation qui était faite aux gens sans plus, on n'avait pas le règlement pour l'encadrer. Or, nous, on l'encadre par règlement.

Cependant, il est évident que si, par exemple – et je vous donne un exemple – dans le cas de la prestation fiscale fédérale, un renseignement supplémentaire était demandé d'Ottawa et que, rapidement, on puisse procéder en s'assurant que la Régie procède de la même façon, bien, notre article de loi couvre des situations comme celles-là. Et je pense que c'est raisonnable qu'on puisse se donner une certaine latitude.

S'il y avait abus, évidemment, je pense qu'on mériterait d'être réprimandé, mais je ne crois pas que c'est le cas. Je connais la Régie des rentes depuis suffisamment de temps, pour en avoir assumé la responsabilité pendant un certain moment, pour maintenant à nouveau avoir le plaisir de travailler avec eux, et je sais qu'on est toujours très rigoureux et qu'on essaie de faciliter la vie du citoyen et de la citoyenne qui a affaire avec la Régie.

Cependant, il faut aussi, en même temps, être raisonnable et être capable d'avoir une certaine latitude pour pouvoir travailler. Des fois, c'est des éléments qui sont tout à fait secondaires, mais c'est nécessaire. Et mieux vaut que ce soit prévu dans la loi. Mais, en même temps, nous sommes de bonne foi, M. le Président. Évidemment, personne n'en doute ici. Mais nous ajoutons au règlement les éléments qui doivent être fournis par un citoyen pour obtenir des allocations familiales.

Alors, je crois qu'on va beaucoup plus loin que ce qu'on a fait par le passé. Ce règlement est, lui, toujours soumis à consultation et on entend des points de vue puis les gens... Ce n'est pas caché quand on fait ça, c'est dans la Gazette officielle du Québec et tout le reste, et, aujourd'hui, pour justement faciliter l'étude de notre projet de loi, l'accélérer un peu, M. le Président, je l'ai déposé comme projet, évidemment. On ne peut pas dire qu'il est définitivement celui-là, parce qu'il devra être adopté par le Conseil des ministres et éventuellement soumis à la Gazette . Alors donc, quant à moi, je ne pense pas que ce soit utile que nous retenions cet amendement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres interventions uniquement sur l'amendement?

M. Williams: Je n'ai pas plaidé sur l'amendement jusqu'à maintenant.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Allez-y, M. le député.

M. Williams: Oui. Je vais essayer d'être bref mais, quand même, utiliser mon temps pour convaincre la ministre que si elle est en train d'améliorer la façon de faire, je vais appuyer les démarches de la ministre. Si c'est vraiment le but. Et je vois que, effectivement, nous sommes en train d'arriver avec des règlements qui vont être plus clairs. C'est pourquoi, dans mes commentaires, je n'ai pas questionné le droit de faire un règlement, je n'ai pas questionné le droit de faire un règlement, un, sur la première phrase qui dit que, effectivement, il va y avoir les familles... Et vous avez dit: Jusqu'à 1999, toutes les familles qui vont être exclues de la première obligation de faire une application.

Je n'ai pas questionné l'article 4 de ce règlement. L'article 5, je ne l'ai pas questionné non plus. J'ai questionné pourquoi vous n'avez pas inclu quelque chose, et on pourra faire le débat plus tard, mais je ne mets pas en doute et les législateurs ne mettent pas en doute le pouvoir de faire un règlement, mais il me semble que, si cet article donne une porte d'entrée pour les allocations familiales, on doit établir des règles afin d'être clairs, d'être justes. Parce que, selon ma compréhension de la réponse de la ministre, pourquoi ne pas juste arriver avec un article de loi qui dit qu'on donne un pouvoir à la Régie de faire le travail qu'on demande, si on veut juste laisser ça aussi ouvert que ça.

Il y a une raison pour avoir des règlements, c'est parce qu'on veut avoir des règles claires et précises, mais on veut aussi avoir ces règles soumises ainsi que la transparence et la façon démocratique d'établir des règlements. Si, après tout ça, il arrive que, pour une raison ou une autre, on doit avoir plus d'informations, je pense que potentiellement ça peut être injuste envers les familles québécoises. S'il y a des chances... J'ai entendu un exemple de la ministre, à cause de demandes et d'informations supplémentaires qui peuvent venir d'Ottawa; on doit mettre ça dans les règlements. Mais il me semble que c'est complètement contradictoire d'arriver avec un article de loi qui fait deux sujets dans un règlement et, après ça, nonobstant tout ça, on peut arriver avec une demande pour d'autres informations.

Selon ma compréhension de l'article 7, M. le Président, si vous n'avez pas bel et bien rempli votre application, votre formulaire ou la demande, vous pouvez être refusé. On peut arriver avec un cas: que la famille québécoise, le contribuable fournisse un formulaire, une application tout en respectant l'article 5 du règlement, mais, finalement, le ministère arrive et dit: Non, nous avons besoin de plus d'informations.

Il me semble que c'est assez clair, je partage le point de vue qu'on peut réglementer ces questions, mais on ne peut pas donner trop de pouvoir de changement aux régies. C'est pourquoi je pense que la meilleure chose, pour être simple et juste envers toutes les familles québécoises, c'est de dire: Oui, vous avez le droit de règlement, vous avez le droit de changer les règlements – c'est clair dans nos propres règles – mais, s'il vous plaît, une fois que vous avez un règlement, vous avez besoin de respecter ça et ne pas arriver avec des choses à la toute dernière minute.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Rejeté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Excusez, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Je peux ajouter à ça parce que je pense qu'il y a des faits nouveaux dans le dossier. Quand la ministre dit qu'on est juste en train de reprendre ce qu'il y a dans le libellé des lois existantes, je voudrais juste rappeler que le premier fait nouveau, c'est l'expansion incroyable de nos technologies d'information.

Alors, la commission de la culture, entre autres, a été saisie par tout le développement dans les échanges, le couplage des fichiers. On a pas moins de trois des agences de ce gouvernement qui sont appelées à veiller aux droits des citoyens qui ont indiqué un certain signal d'alarme avant Noël de l'année passée. Le Vérificateur général, dans son rapport annuel, a signalé beaucoup de questionnement quant au couplage des fichiers, quant à la mauvaise gestion des informations détenues par le gouvernement. Également, le Protecteur du citoyen a soulevé énormément de questions sur la gestion de l'information sur le citoyen et la Commission d'accès à l'information a également indiqué une certaine inquiétude quant, entre autres, au projet de loi n° 32 du ministère du Revenu et d'autres démarches qui ont été prises par le gouvernement.

Alors, de dire qu'on est juste en train de refaire les choses, je pense qu'on est devant un appareil gouvernemental qui devient de plus en plus gourmand d'informations. On exige et on couple des fichiers et ça va nous donner encore et encore des portraits assez complets. Moi, jusqu'au niveau de ce que le nouveau régime d'assurance-médicaments peut nous indiquer sur les citoyens, c'est très, très détaillé dans les fichiers de la Régie, pour l'assurance-médicaments, la durée des traitements, combien de pilules la personne a prises, le nombre de personnes qui ont pris plus de journées que prévu pour épuiser son dosage et tout ça, tout ça est maintenant dans le fichier. Et peut-être qu'il y a des bonnes raisons de tout avoir, mais je pense, comme législateur, que c'est notre tâche de rappeler à la fonction publique d'être très, très vigilante.

(17 h 50)

Et, quand je regarde le libellé, ici, la deuxième phrase, déjà, que le gouvernement précise par règlement les renseignements et les documents qui doivent accompagner la demande, alors, le gouvernement a le pouvoir, il peut faire une liste longue de trois pages des documents qu'il va mettre dans le règlement pour faire ça. Mais, si ce n'est pas assez, on va dire: Est-ce qu'il y a quelque chose qu'on peut oublier dans tout ça? Parce que ça, au moins, est fait par règlement et la ministre a souvent dit que ça va provoquer un débat.

Comme ministre responsable, elle doit publier dans la Gazette officielle : Ça, c'est la liste des documents requis. Et il y a un avis de 45 jours. Alors, tout le monde peut dire: On trouve que c'est trop loin pour exiger tel ou tel document. Il y a au moins la vraie similitude d'un certain débat public. Ce n'est pas aussi bon que de mettre ça dans une loi parce qu'une provision qu'ils mettent dans la loi provoque un débat à l'Assemblée nationale et en commission, qui serait encore souhaitable, mais, malgré le fait que le gouvernement peut identifier tous les renseignements et documents qui doivent accompagner la demande, ce n'est pas suffisant, comme on dit, pour un gouvernement, elle va ajouter une autre phrase: Que, au-delà de la grande liste déjà exigée du contribuable, déjà exigée de la famille, des parents, la Régie peut exiger de demander tout autre renseignement ou document qu'elle juge utile.

Tôt ou tard, il faut baliser ça un petit peu. Et, tôt ou tard, il est dit qu'on a déjà, dans l'économie de l'article 7, un mécanisme qui dit qu'on va établir une liste, on va publier ça dans la Gazette officielle , que les personnes sont aptes à regarder ça. Entre autres, la Commission d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen, les groupes communautaires, toutes ces personnes peuvent regarder un projet de règlement puis le commenter. Alors, moi, je pense que c'est suffisant. Le gouvernement et la Régie ont les outils nécessaires pour procéder à la bonne gestion. Alors, je ne vois pas un ajout additionnel à tout ça. Est-ce qu'il risque d'y avoir un morceau de papier quelque part qu'on n'a pas le droit de regarder? On ne le sait pas. Alors, on va mettre une autre phrase: que la Régie peut exiger du demandeur tout autre renseignement ou document qu'elle juge utile sans passer par un règlement, sans passer par un débat soit provoqué par la Gazette officielle ou en commission parlementaire. C'est quelque chose qu'elle peut exiger et il n'y a aucune balise là-dessus.

Alors, je pense qu'on a intérêt, comme législateur, à regarder ça. Est-ce que vraiment, si on biffe cette phrase de l'article, on va freiner la capacité de la Régie d'agir? Moi, je ne pense pas, parce qu'il y a des documents qui doivent accompagner la demande, qui sont déjà identifiés. Et, si, après avoir mis ça en application, en vigueur pendant six mois, on décide: Ah! Il y a des ratés, il y a des lacunes, il y a certains genres de renseignements, on va revenir. La ministre va publier un règlement qui ajoutera trois ou quatre autres alinéas au projet de l'article 5 dans le projet de règlement. On peut avoir un débat. Au moins, on peut s'assurer que la Commission d'accès à l'information...

Mais, juste de dire: Malgré le règlement et toutes les autres choses qu'on veut faire, la Régie peut faire n'importe quoi, je ne vois pas pourquoi on met ça dans la loi. Alors, je pense qu'on a tout intérêt à baliser ça comme il faut. Moi, je pense que mon collègue, le député de Nelligan, propose une solution très élégante, très simple, c'est juste de biffer la dernière phrase. Et on peut l'enlever, ça va laisser les outils nécessaires à la ministre, à son gouvernement, à la Régie pour appliquer le nouveau régime, mais sans laisser un pouvoir énorme que la Régie peut décider un jour: Bof! Je n'aime pas ce monsieur ou je veux peut-être compliquer sa vie. C'est ça, les choses qui arrivent des fois dans les relations entre l'État et les citoyens.

Ce n'est pas un reproche, M. Legault, c'est la vie. Ça, c'est la vraie vie de tout le monde. Et tout le monde dit... Moi, même comme député, des fois, il y a des commettants qui arrivent dans mon bureau, qui cherchent de l'aide... Il est bien difficile d'aller... J'ai l'obligation de représenter les 47 000 électeurs de mon comté, mais il y en a certains qui arrivent, qui ont des problèmes et j'ai mes doutes ou ça accroche avec moi, mais je les aide quand même. Et ça, ça fait partie de la vie, qu'on aime certaines personnes plus que d'autres.

Alors, quand je regarde ici, je pense qu'on n'a pas besoin de la dernière ligne. Vraiment, la Régie a les outils, la Régie peut procéder sans la dernière phrase. Alors, je veux appuyer la motion de mon collègue le député de Nelligan: qu'on enlève la dernière phrase.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Kelley: Adopté.

M. Williams: Vote nominal.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vote nominal? Vote nominal, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, ceux et celles qui sont en faveur de cet amendement. M. le député de Nelligan?

M. Williams: Pour.

La Secrétaire: Mme la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne?

Mme Loiselle: Pour.

La Secrétaire: M. le député de Jacques-Cartier?

M. Kelley: Pour.

La Secrétaire: Mme la ministre?

Mme Marois: Contre.

La Secrétaire: Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Malavoy: Contre.

La Secrétaire: Mme la députée de Rimouski?

Mme Charest: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Maskinongé?

M. Désilets: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Dion: Contre.

La Secrétaire: M. le Président?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Abstention. La motion est rejetée. On revient à l'article 7. Il nous reste cinq minutes. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, M. le Président. Deux questions, une d'ordre technique. On peut peut-être disposer immédiatement de la question d'ordre technique. On prévoit, à l'article 7, que «le gouvernement précise également, par règlement, les renseignements et documents qui doivent accompagner la demande».

J'ai bien lu le règlement proposé et j'ai pris connaissance, évidemment, des renseignements demandés. Si ma lecture du règlement est exacte, on ne fait pas référence à des documents qui peuvent accompagner la demande. Qu'est-ce qu'on entend par documents qui peuvent être nécessaires afin d'obtenir leurs prestations?

Mme Marois: Il y a un document qui est demandé effectivement: la demande doit être accompagnée de l'attestation du demandeur et de son conjoint énonçant que les renseignements présentés dans la demande sont exacts, complets et véridiques.

M. Copeman: Alors, c'est le seul document qu'on prévoit pour l'instant, qui est une attestation...

Mme Marois: C'est ça. Tout à fait.

M. Copeman: ...que les informations sont exactes. O.K.

M. le Président, je sais que la ministre de l'Éducation est sensible à cette question, alors, j'imagine que la ministre responsable de la Famille est également sensible à la même question?

Mme Marois: Habituellement, je réussis assez bien à faire la synthèse, là.

M. Copeman: Oui, vous vous entendez très bien, normalement?

Mme Marois: Je m'entends très bien. Ha, ha, ha!

M. Copeman: Oui. Pas de schisme...

Mme Marois: Non.

M. Copeman: ...schizophrène à l'intérieur de ces deux responsabilités ministérielles?

Mme Marois: D'aucune espèce de façon.

M. Copeman: Ah, je suis très réconforté de l'apprendre, M. le Président. La question des personnes analphabètes, ce n'est pas une question anodine. Nous savons fort bien qu'il existe un certain nombre de personnes analphabètes au Québec, malgré tous les efforts de notre régime d'éducation. Même, je me rappelle pertinemment bien, pendant nos consultations publiques sur la réforme de l'aide sociale, le témoignage d'un jeune homme qui avait obtenu son secondaire V mais qui n'était pas capable de lire et d'écrire.

C'est un phénomène qui existe et j'aimerais savoir simplement: C'est quoi, les mesures qui vont être prises par la Régie des rentes pour assurer ou tenter d'assurer le maximum de flexibilité pour les personnes analphabètes au Québec, en ce qui concerne une demande formelle pour les prestations familiales?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ou qui sont déjà prises actuellement aussi, j'imagine?

M. Copeman: Oui, oui, tout à fait. Peut-être qu'il y a des mesures qui sont déjà en marche?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre?

Mme Marois: Bien, justement, M. le Président, c'est intéressant, ce qui est soulevé, et c'est une préoccupation, effectivement, que la Régie a. Non seulement l'a-t-elle, mais elle a mis en marche un processus de discussion pour développer éventuellement une stratégie à l'égard de ces personnes avec les groupes relayeurs, comme les appelle la Régie, je crois. C'est bien ça. Ce sont essentiellement des groupes communautaires, des associations qui sont en lien avec les analphabètes et qui font du travail d'éducation populaire, etc.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que la Régie a des bureaux dans neuf régions du Québec, offre des services dans 40 villes additionnelles. Et, évidemment, la communication se fait par voie écrite mais aussi par la voie des médias électroniques, ce qui fait que quelqu'un qui n'a pas la possibilité d'écrire, généralement reste sensible aux informations qui lui sont transmises verbalement, et donc, comme ça, on s'assure de rejoindre quand même le plus grand nombre. Mais, déjà, c'est une préoccupation de la Régie et, en travaillant avec ces groupes, on a probablement pas mal plus de chances d'atteindre ces gens-là.

(18 heures)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Copeman: Alors, c'est essentiellement par le biais des groupes communautaires que la Régie fait, je dirais, du «outreach» des personnes qui sont analphabètes. On me dit qu'il peut y avoir jusqu'à 900 000 Québécois et Québécoises qui sont considérés comme analphabètes. C'est peut-être élevé, là.

Mme Marois: Ce sont les chiffres qui circulent effectivement, maintenant ça m'apparaît un petit peu élevé; on peut le discuter. Mais, cela étant, il reste que, quand on regarde nos fichiers, quand on fait la comparaison avec...

M. Legault (Claude): Il y en a quand même trop.

Mme Marois: Oui, c'est ça. M. Legault me disait que, même s'il y en avait moins que cela, il y en aurait quand même trop. Il y en aura toujours trop dans les sociétés comme les nôtres, bien sûr. Mais, quand on regarde nos fichiers et qu'on les compare au Bureau de la statistique du Québec, au Bureau de la statistique du Canada, une fois qu'on a mis ensemble toutes les données, bien, on ne peut pas inventer les enfants. Alors, effectivement, on verse les allocations, on pense au nombre d'enfants qui sont réellement là et ils sont donc bel et bien enregistrés à la Régie des rentes. Alors, ce problème-là n'a pas empêché des gens d'avoir accès. Il reste aussi que la Régie a des services d'accueil pour tenir compte de situations comme celles-là. On pourrait remplir à la place d'une personne sa formule sans problème.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'on est prêt à adopter l'article 7?

M. Copeman: Non. Bien, juste pour terminer le...

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Non. Sinon, on va ajourner.

M. Copeman: Ah!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, les travaux sont suspendus jusqu'à 21 heures. À ne pas oublier.

(Suspension de la séance à 18 h 2)

(Reprise à 21 h 5)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous reprenons nos travaux. Nous étions rendus à l'article 7 et, si j'ai bien compris, nous étions sur le point de l'adopter.

Mme Marois: Oui, on est prêts à l'adopter.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il y a des sceptiques, quoi? Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Copeman: J'étais en pleine...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Oui, j'étais en pleine intervention, M. le Président, et on a été obligés de suspendre à cause de l'heure. Mais je voulais surtout insister sur l'importance pour la Régie et pour le gouvernement en général de s'assurer qu'il y a un effort particulier qui est fait au niveau des personnes qui peuvent être analphabètes ou qui peuvent éprouver certaines difficultés dans la production de formulaires et dans leurs relations avec le gouvernement. D'autant plus, M. le Président, parce qu'on sait fort bien que très souvent la question de la scolarisation, ou le peu de scolarisation, est reliée très directement à la pauvreté. En général, une famille qui est analphabète, les chances sont assez importantes que cette famille-là va être pauvre, et donc l'objectif, c'est de sortir les gens de la pauvreté. Il devient, quant à moi, très important de s'assurer qu'un certain effort est fait au niveau d'apporter une attention toute particulière pour les gens qui sont analphabètes.

Un dernier commentaire là-dessus, M. le Président. Je sais qu'on peut peut-être être tenté d'assimiler les cas vraisemblables des gens qui sont analphabètes et ceux qui peuvent être sur l'aide sociale. J'ai énormément de respect pour la Régie des rentes du Québec et je sais que la Régie a des bureaux à travers neuf régions, je pense, dans plusieurs villes. Mais le lien entre un bénéficiaire de l'aide sociale et son agent est beaucoup plus étroit que n'importe quel lien qu'un bénéficiaire peut avoir, je crois honnêtement, avec la Régie des rentes. Ça va de soi, les bénéficiaires d'aide sociale sont en communication constante avec les agents au CTQ, et je sais que, pour faire la demande d'aide sociale, il y a un certain nombre de conditions à remplir, c'est clair, il y a un certain nombre de formulaires à remplir, mais le tout se fait normalement en présence de l'agent qui aide la personne, qui accompagne la personne dans sa demande d'aide sociale.

C'est un avertissement simplement que je lance. Je sais que les gens de la Régie des rentes du Québec sont sensibles à ça, mais la dernière chose, il me semble, qu'on veut faire, c'est d'ériger des barrières ou quoi que ce soit pour les gens qui éprouvent des difficultés soit à produire des formulaires. Vous savez comme moi, M. le Président, que, pour beaucoup de personnes pauvres, faire affaire avec le gouvernement, déjà c'est un pas important à franchir. Nous, on le prend comme acquis, nous. Moi, la production d'un rapport d'impôt – on va se rendre à l'article 10 – c'est normal. Remplir des formulaires, j'en reçois une tonne, il n'y a rien là, compléter des formules et transiger avec le gouvernement. Mais, pour beaucoup de personnes, des personnes pauvres, des personnes assistées sociales, ce n'est pas aussi évident que ça, et je crois honnêtement que les gens de la Régie vont devoir être très sensibles à ça et s'assurer que l'excellent service qu'ils donnent déjà soit encore amélioré surtout pour un niveau de clientèle important qui va venir faire affaire avec la Régie sur cette question assez compliquée et complexe.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est noté, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Nelligan.

M. Williams: Une très brève question. Pendant nos discussions, M. le Président, juste avant 18 heures, j'ai compris que la ministre a dit que le règlement dont on discute, c'est un projet de règlement et ce n'est pas nécessairement le règlement final. J'ai bien compris? Je veux m'en assurer parce qu'elle doit discuter de ça au Conseil des ministres.

Mme Marois: C'est parce que, M. le Président, on ne peut pas avoir un règlement tant qu'on n'a pas la loi.

(21 h 10)

M. Williams: Oui.

Mme Marois: Alors, on va d'abord adopter la loi. Après ça, le règlement devra être approuvé, évidemment par le Conseil des ministres, et publié. Ça va comme de soi. Sauf que l'essentiel, notre intention... Si la question, c'est: Voulez-vous changer le projet qui est là? notre intention n'est pas de changer le règlement qui est là, même si c'est un projet, parce qu'on l'a bâti vraiment pour pouvoir répondre à la loi que nous voulons adopter ensemble. Alors, c'est ça.

M. Williams: Ça va être l'essentiel que la ministre va proposer au Conseil des ministres?

Mme Marois: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui.

M. Williams: Toujours ouverte à des petits changements, à des nuances?

Mme Marois: Bien sûr.

M. Williams: C'est ça que j'ai voulu établir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, est-ce que l'article 7 est adopté? Adopté.


Dispositions particulières à l'allocation familiale

L'article 8. Mme la ministre.

Mme Marois: Ça va. M. le Président, l'article 8:

«Le gouvernement détermine, par règlement, le mode de calcul de l'allocation familiale. Ce règlement peut notamment:

«1° établir le montant de l'allocation en fonction, entre autres, de la situation conjugale de la personne qui y a droit, de son revenu et de celui de son conjoint, du rang ou du nombre des enfants à charge;

«2° déterminer le mode de calcul du revenu visé au paragraphe 1°;

«3° déterminer la période de référence au cours de laquelle la situation conjugale de la personne qui a droit à l'allocation est prise en considération pour la fixation du montant de l'allocation et les changements de situation conjugale qui donnent ouverture à la révision du montant au cours de cette période;

«4° fixer le montant en deçà duquel la Régie est dispensée de verser l'allocation.

«Un règlement pris en vertu du paragraphe 1° peut avoir effet à toute date antérieure d'au plus six mois à celle de son entrée en vigueur.»

Alors, si on reprend maintenant chacun des paragraphes à l'article 8. «Établir le montant de l'allocation», je pense que ça va assez bien, ça correspond aux articles que nous avons adoptés précédemment, à savoir que nous implantions une allocation familiale qui serait basée sur le revenu des conjoints et sur le nombre d'enfants dans la famille. Alors, ça le dit tout simplement.

La détermination du mode de calcul, ça va assez bien aussi. Il faut qu'on ait une formule sur laquelle on s'entend pour déterminer le revenu.

Au troisième paragraphe, on dit: «déterminer la période de référence au cours de laquelle la situation conjugale de la personne qui a droit à l'allocation est prise en considération pour la fixation du montant de l'allocation». On a vu, par exemple, qu'un conjoint de fait était considéré selon la loi du revenu après un an de vie commune. Mais on dit que, s'il y a un enfant, c'est immédiat qu'on les considère comme conjoints. Donc, en ce sens-là, évidemment, il est important qu'on ait une définition de la situation conjugale pour fins de calcul et ça couvre toute autre circonstance aussi: un divorce, une séparation, etc.

«Fixer le montant en deçà duquel la Régie est dispensée de verser l'allocation.» En fait, c'est que, lorsque la somme due est tellement minime... On parle, j'imagine, de quelques dollars? 1 $, c'est ça? 1 $. C'est bien 1 $?

Une voix: On peut dire 1 $.

Mme Marois: On peut dire 1 $. Alors, si la Régie avait 1 $ à verser, on dit: Elle n'aura pas l'obligation de le faire. Ça coûte plus cher envoyer le 1 $ que de ne pas le verser.

Enfin: «Un règlement pris en vertu du paragraphe 1° peut avoir effet à toute date antérieure d'au plus six mois à celle de son entrée en vigueur.» En fait, ça permet de donner un caractère rétroactif au règlement pris en vertu du paragraphe 1°, puis ça reprend d'ailleurs la règle actuelle. Mais la limite de six mois est ajoutée en ce qui concerne la rétroactivité du règlement parce qu'il nous apparaît que c'est suffisant et c'est nécessaire pour pouvoir mettre en oeuvre l'allocation familiale dès maintenant.

Alors, voilà en quoi consiste l'article 8, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste quelques précisions à l'article 8. Règle générale, le rang de l'enfant, c'est le moins important ou est-ce qu'il y a toujours... C'est quoi, la distinction? Est-ce qu'il y a un montant supérieur pour le premier enfant? C'est quoi la nécessité de garder le rang? Parce que, si j'ai bien compris, ce n'est pas le même montant pour tous les enfants, ou...

Mme Marois: Alors, d'abord, il y a un montant de base qui est plus important effectivement pour un premier enfant d'une famille monoparentale et qui, dans le cas d'une famille biparentale – c'est ça ici – est un peu moins élevé en termes d'allocations et, après ça... en fait, c'est 2 600 $; après ça, 2 400 $. Et puis, pour un premier enfant dans une famille monoparentale, c'est 3 144 $. C'est ça, hein.

M. Kelley: ...le rang joue toujours un rôle dans la...

Mme Marois: ...incluant, évidemment, la prestation fiscale fédérale. Mais, si on prend seulement l'allocation familiale québécoise, en septembre 1997, pour un premier enfant dans une famille monoparentale, c'est 2 275 $; pour deux enfants, 3 250 $, etc., et, pour une famille biparentale, c'est 975 $, 1 950 $, 2 348 $. Évidemment, ces montants demeurent les mêmes pour juillet 1998. Quand on les additionne avec la prestation fiscale fédérale, évidemment, ça donne des montants qui sont plus considérables, qui sont ceux auxquels je faisais référence tout à l'heure.

M. Kelley: Et est-ce que, dans le premier alinéa, c'est le moment de soulever la question des pensions alimentaires ou est-ce que ça vient plus tard dans le projet de loi? Dans le calcul de la situation conjugale de la personne et de celle de son conjoint, est-ce que ça comprend le débat sur la pension alimentaire et son traitement?

Mme Marois: C'est maintenant qu'on peut parler de cette question.

M. Kelley: Je n'ai pas participé au débat sur les nouveaux barèmes et la fixation des nouveaux systèmes de pensions alimentaires qui sont non imposables. Il y a un changement qui donnait suite, entre autres, à la cause Thibaudeau, si j'ai bien compris. Alors, est-ce que cet argent va être considéré comme faisant partie du revenu familial pour les fins de calcul de l'allocation familiale?

Mme Marois: On a eu l'occasion d'en débattre au moment où on a rencontré des groupes qui sont venus nous donner leur point de vue. J'aimerais peut-être vous donner un petit peu les éléments qui suivent.

Qu'est-ce qu'on fait pour calculer l'allocation familiale qui sera versée de septembre 1997 à septembre 1998? En fait, les pensions alimentaires sont prises en considération dans le calcul du revenu net, puisqu'il s'agit du revenu de l'année 1996. Évidemment, les changements n'avaient pas été faits, donc on parle du revenu déclaré en 1996 et on procède au versement de l'allocation.

Pour les années suivantes, selon les nouvelles règles fiscales, les pensions alimentaires pour enfants versées en vertu d'une ordonnance judiciaire rendue ou en vertu d'un accord écrit conclu le 1er mai 1997 ou après cette date ne seraient pas incluses dans le revenu net. Donc, effectivement, à ce moment-là, tel que le jugement le prévoit, nous, on a fait la modification au plan québécois, de telle sorte qu'il ne serait pas tenu en compte pour ce qui est du versement de l'allocation familiale.

Maintenant, ce que j'ai dit, c'est qu'on n'avait pas fermé le dossier complètement dans le sens où des discussions devraient avoir lieu d'ici juin 1998, de telle sorte qu'on puisse déterminer les orientations gouvernementales en ce qui concerne l'inclusion des pensions alimentaires versées à l'égard des enfants dans le revenu net servant à l'allocation familiale. Parce qu'on peut décider de défiscaliser pour ce qui est de l'impôt, mais, pour ce qui est du versement de l'allocation, on pourrait décider qu'on tient en compte le fait qu'il y en a un versement pour l'enfant, ce qu'on ne peut quand même pas non plus ne pas... c'est-à-dire, se fermer les yeux et se dire: La personne reçoit x montant pour les enfants; l'allocation familiale est pour le bien et le soin des enfants, mais on ne tient pas compte du fait qu'elle reçoit déjà cette somme. Parce qu'il y a une distinction à faire, évidemment, entre du transfert, ce qu'on fait par l'allocation familiale, et de la fiscalisation d'un revenu où on dit: Là, on va vous faire payer de l'impôt sur cela, comme, d'ailleurs, on ne fait pas payer d'impôt sur les allocations familiales qu'on verse. Donc, il y a une logique à ce qu'on les traite de la même façon. Mais, cela étant, on n'a pas sur cette question mis le point et on se donne l'année qui vient pour pouvoir la discuter et voir comment éventuellement on la traiterait.

(21 h 20)

M. Kelley: Parce que j'imagine que, dans la réflexion, il y a une certaine équité envers les familles non divorcées.

Mme Marois: Mais c'est le problème auquel on fait face. Parce que là – je le répète – dire qu'on n'impose pas une somme qui sert aux enfants comme étant un revenu pour une conjointe ou un conjoint qui reçoit cette pension, c'est une chose. Mais, à partir du moment où on dit quelle somme doit être versée à un enfant pour reconnaître ses besoins essentiels et que nous, comme État, on verse cette somme par la formule d'allocation, si, dans le cas d'une personne divorcée ou séparée, elle reçoit pour ses enfants une somme encore plus considérable que l'allocation qu'on verserait, bien est-ce qu'on ne doit pas en tenir compte? Et c'est sur ça qu'il faudra se pencher dans les mois qui viennent pour qu'il y ait de l'équité, justement, entre les familles et qu'on ne traite pas un enfant dans une famille où les conjoints ont divorcé de la même façon qu'un enfant dans une famille où les deux conjoints vivent ensemble. Je pense qu'il y a une logique.

D'ailleurs, on a essayé dans le versement, justement, de toutes nos allocations d'avoir cette règle d'équité qui nous a causé un certain problème. Par exemple, le troisième ou le quatrième enfant à la sécurité du revenu était beaucoup moins considéré actuellement qu'il ne le sera avec la nouvelle politique. Par contre, le premier et le deuxième enfant étaient un petit peu plus considérés en termes de reconnaissance des besoins. Et là on a mis vraiment tout le monde sur le même pied, que l'enfant soit dans une famille à la sécurité du revenu, qu'il soit dans une famille à bas revenus et qu'il soit traité au plan de la sécurité du revenu ou de la fiscalité ou de l'allocation. Je pense qu'il y a quelque chose de très cohérent dans ce qu'on fait à cet égard-là.

Et c'est sûr que, dans le changement, il y a des ajustements à faire, mais je pense qu'il y a une cohérence dont on va être fier et surtout qui va être très, je dirais, efficace quant à la façon d'organiser nos systèmes. À partir de ce moment-là, une fois qu'on a une base solide, qui reconnaît l'enfant de la même façon, tous les changements après... Si on change la fiscalité, on dit: Parfait, on change aussi la sécurité du revenu; si on change la sécurité du revenu, ça devrait avoir un impact sur la fiscalité. De telle sorte que, cette base étant établie, c'est du solide pour améliorer, parce que, moi, je pense qu'il faudra un jour améliorer, et on le sait, que ce soient les seuils, que ce soient les allocations dans certains cas. Mais, au moins, le système étant bien bâti, étant équitable, reconnaissant bien les enfants, que ce soit lorsqu'il est à l'impôt, lorsqu'il est à la sécurité du revenu ou lorsqu'il est en famille et qu'on lui verse une allocation... Donc, il faudra tenir en compte aussi cette question des prestations alimentaires pour les enfants.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Autre question, M. le député.

M. Kelley: Oui, je veux juste continuer. Dans le troisième alinéa, on soulève la possibilité d'une révision, et nous avons discuté de ça: «les changements de situation conjugale qui donnent ouverture à la révision du montant au cours de cette période». Juste pour confirmer, parce que nous avons discuté de ça au moment des audiences, des consultations particulières, il était question qu'on va fonctionner un petit peu comme le fédéral. À partir du rapport de l'année passée, on va établir le montant de l'allocation familiale pour l'année après. Alors, à partir de 1996, on va fixer les montants pour 1997; à partir de 1997, on va fixer ceux pour 1998. Mais est-ce que j'ai bien compris que, dans le troisième alinéa, je ne sais pas, les changements de situation, un divorce, un décès... C'est quoi les changements de situation conjugale qui sont visés ici? Est-ce que ça va jusqu'à une perte d'emploi ou si c'est quelque chose...

Mme Marois: On a prévu les situations de divorce, de séparation et de décès où vraiment la situation du couple change de façon considérable. À ce moment-là, on signale cette situation, on avisera Revenu Canada, dans le cas présent, qui transférera évidemment l'information à la Régie et, immédiatement, on révisera la situation. Généralement, ce sera à l'avantage évidemment des gens de le faire, de toute façon. Si une personne se retrouve à la sécurité du revenu, donc ce qu'on appelle le dénuement, évidemment, là, selon la formule que j'avais commencé à expliquer, je crois, à votre collègue cet après-midi, il y aura un ajustement immédiat aussi pour ne pas que les enfants soient pénalisés. Alors, c'est la façon que l'on a choisie de retenir.

On n'a pas cependant tenu en compte les changements dans la rémunération des personnes. Dans le fond, on dit: S'il y a un changement brusque et majeur dû à la séparation, au divorce ou au décès, ou au changement de statut de travailleur, de travailleuse avec un revenu autonome à la sécurité du revenu, ce sont des situations qui créent des changements significatifs. S'il y a une hausse du revenu pour la personne, elle n'a pas à nous déclarer... de toute façon, c'était sur l'année précédente... alors, l'année suivante tiendra compte du fait qu'il y a eu une hausse du revenu pour l'établissement de la nouvelle allocation. De la même façon, s'il y a eu une baisse de revenu, on n'interviendra pas pour modifier l'allocation en cours de route parce qu'on pense que là, écoutez, ça voudrait dire qu'à toutes les semaines on aurait des milliers de changements. On pense que c'est équitable, la façon dont on fonctionne, mais, pour des situations où il y a des changements brusques et significatifs, là, on procédera, à la Régie, aux correctifs nécessaires.

M. Kelley: Ils ont les mêmes critères qui sont utilisés au gouvernement fédéral?

Mme Marois: Est-ce que ce sont les mêmes critères, j'imagine, selon les règles d'admissibilité? C'est exactement les mêmes, oui.

M. Kelley: Alors, ça, c'est les genres de changement de statut dont le fédéral est avisé automatiquement, et la Régie va être, en conséquence, avisée, surtout d'un changement dans l'état civil, s'il y a une séparation, un divorce, ou quelque chose.

Mme Marois: C'est pour ça qu'on dit «la situation conjugale». Dans ce sens-là, c'est important de mentionner aussi que le nouveau montant va être payé rétroactivement à compter du premier jour du mois qui suit le changement. Alors, autrement dit, dans le cas d'un décès, disons que l'on ne pense pas vraiment à des choses comme celle-là le lendemain matin, que la personne réagisse quelques mois plus tard, mais on rétroagira de telle sorte qu'on ne pénalise pas les gens. Parce que ce seront souvent des situations qui vont venir rehausser, probablement, le montant de l'allocation. C'est rare qu'un divorce amène plus de richesse à l'une ou l'autre des deux parties, malheureusement, mais c'est comme ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que ça va? M. le député.

M. Kelley: Juste pour les fins de ma compréhension, le dernier: «Un règlement pris en vertu du paragraphe 1° peut avoir effet à toute date antérieure d'au plus six mois à celle de son...» Ça me perd un petit peu. Alors, c'est juste un règlement pris à partir du premier alinéa, on ne peut agir juste six mois en arrière ou...

Mme Marois: Alors, je vais demander à M. Laliberté de nous expliquer un petit peu, parce que c'est un jargon un petit peu technique.

M. Kelley: O.K. Peut-être que c'est l'heure ou quelque chose comme ça, mais ça ne rentre pas facilement.

M. Laliberté (Louis-Marc): Cette règle-là est déjà dans la loi actuelle. Elle vise les cas où le changement est annoncé dans un discours du budget. Or, comme pour faire un règlement ça prend cinq à six mois, ça évite d'attendre cinq à six mois pour refaire le changement. Et la règle de six mois a été ajoutée justement pour éviter l'arbitraire, de pouvoir reculer trop long dans le temps. C'est uniquement ça qui est visé.

M. Kelley: O.K. Parfait.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci, M. le Président. Question de clarification. «Déterminer le mode de calcul du revenu», c'est clair que, quand on parle de l'allocation familiale et qu'on parle de revenu familial, on parle juste du revenu de la personne qui y a droit et de celui de son conjoint. S'il y a d'autres membres de la famille qui ont un revenu, ça ne compte pas dans le calcul du revenu familial pour les fins d'une allocation familiale. Est-ce que c'est vrai que ça ne compte pas?

Mme Marois: Bien non.

M. Williams: Je voulais juste m'assurer qu'il n'y a pas de changement.

Dans la section V du règlement, il y a deux sous-paragraphes: Lorsque la personne qui a droit à l'allocation ou son conjoint ne résident pas au Québec pendant toute l'année de référence, il faut ajouter le revenu, et aussi, le suivant: Lorsque la personne qui a droit à l'allocation ou son conjoint ne résidaient pas au Québec pendant l'année de référence, il faut calculer des revenus. Je voudrais savoir exactement c'est quoi et – je vais aller un peu plus loin – est-ce que dans le cas...

Mme Marois: Je n'ai pas compris ce que vous voudriez savoir. Vous dites?

(21 h 30)

M. Williams: Je voudrais savoir qu'est-ce que ça veut dire exactement. Et plus particulièrement pour ceux et celles à qui nous avons donné un congé fiscal, est-ce que, parce qu'ils travaillent pour les Nations unies ou sont représentants gouvernementaux ou autres, ils ont des congés fiscaux légaux – je ne parle pas des autres – est-ce que ces personnes, maintenant, doivent calculer leurs revenus pour les fins des allocations familiales ou est-ce qu'elles peuvent laisser ça à côté?

Mme Marois: Alors, bienvenue à notre table à nouveau.

Mme Gauthier (Lise): Merci. Si vous permettez, dans un premier temps, je vais vous expliquer les notions de revenu...

M. Williams: S'il vous plaît.

Mme Gauthier (Lise): ...qu'on retrouve dans le règlement.

M. Kelley: Mme Gauthier.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Gauthier.

Mme Marois: Mme Gauthier, c'est ça.

Mme Gauthier (Lise): C'est bien ça.

Mme Marois: Suzanne?

Mme Gauthier (Lise): Lise.

Mme Marois: Pardon, Lise Gauthier, oui.

M. Kelley: Pour les fins de l'enregistrement.

Mme Marois: C'est le Revenu, c'est vrai, le ministère du Revenu.

Mme Gauthier (Lise): Le revenu, aux fins de la Loi sur les impôts, se calcule selon le statut de la personne, le statut de résidence. On peut assujettir en impôts les gens qui sont résidents au 31 décembre. Donc, le deuxième alinéa de l'article 7 vise cette situation-là. On peut aussi assujettir les gens qui sont résidents pour partie d'année; ça, c'est un petit peu plus compliqué. C'est l'article 23 qui détermine le revenu. Dans ce cas-là, on prend la partie où la personne réside au Québec, on calcule son revenu, je dirais, sur son revenu mondial. On ne fait pas de différence, on prend, admettons, six mois de résidence au Québec, son revenu mondial est calculé. Pendant la période où elle est non-résidente, je prends uniquement les revenus qui ont été gagnés au Québec. Donc, je n'ai pas un portrait de revenu mondial pour toute l'année. D'accord? Est-ce que vous me suivez toujours? Ha, ha, ha!

M. Williams: Oui, oui, je pense.

Mme Gauthier (Lise): Une personne qui est non-résidente du Québec peut quand même être assujettie à notre loi si elle a travaillé au Québec, exercé une entreprise au Québec, disposé d'un bien québécois imposable. Donc, son revenu pour cette année-là va être fonction de ce qu'elle a fait au Québec. Donc, je n'ai pas un portrait comme un résident pour toute l'année. C'est pour ça qu'il y a des distinctions qui sont faites dans le mode du calcul du revenu.

Donc, on peut faire une fiction, parce qu'une personne qui est non-résidente au 31 décembre, si on a regardé l'article 2 du projet de loi, on exige que, pour avoir droit à l'allocation, la personne doit résider au Québec au sens de la loi. Donc, je prends pour acquis quelqu'un qui arriverait au mois de février d'une année. Au 31 décembre de l'année précédente, elle était non-résidente. Comme le calcul de l'allocation est basé sur son revenu de l'année précédente, je vais faire un genre de fiction pour calculer le revenu de l'année précédente comme si elle résidente toute l'année, pour avoir son revenu mondial, comme tout résident du Québec. C'est ce que l'article vise, c'est d'avoir le même revenu pour tout le monde dans toutes les situations.

M. Williams: O.K. Un couple, deux personnes vivent ensemble. Une reste ici, garde les enfants. Je peux prendre une famille traditionnelle: la femme reste ici ou l'homme reste ici – ça ne fait aucune différence – et l'autre voyage. Et, avec ça, un des membres est ici du 1er janvier jusqu'au 31 décembre avec les enfants. L'autre travaille pour un de nos bureaux de délégués avant que ce soit fermé.

Mme Marois: Ils ne sont pas tous fermés, quand même, il en reste pas mal encore. Ha, ha, ha!

M. Williams: O.K. Il travaille pour nous ou pour les Nations unies – un autre exemple – avec un congé fiscal. Ma question est...

Mme Gauthier (Lise): Votre exemple de congé fiscal, il n'est pas nécessairement évident, je vous dirais, parce que, si vous parlez d'un travailleur québécois, un délégué à l'étranger, il va continuer d'être réputé résident du Québec et il n'a pas de congé fiscal pour autant.

M. Williams: Oh! Je ne sais pas. On peut faire un débat sur ça. Je vais sortir les articles plus tard. Mais je vous donne un autre congé fiscal, pour les marins québécois.

Mme Gauthier (Lise): Pour les... Pardon?

M. Williams: Marins, «sailors».

Mme Gauthier (Lise): Les marins québécois?

M. Williams: Oui, oui.

Mme Gauthier (Lise): Pardon. Oui, d'accord. La déduction n'est pas dans le calcul du revenu net, elle est dans le calcul du revenu imposable.

M. Williams: Oui. Avec ça, je voudrais savoir... Parce que, dans le projet de loi n° 81, c'est ça que le ministre du Revenu a dit, quand il a donné le congé fiscal pour les chercheurs étrangers ici. C'est deux concepts dans le projet de loi n° 81. Pour cette famille québécoise – je vais demander plus tard celui de l'étranger – un est sur la mer pour 12 mois et il a un congé fiscal, selon mon interprétation d'un congé fiscal, il n'a pas besoin de déclarer ses revenus pour les fins d'impôts, une certaine partie de ça.

Mme Gauthier (Lise): Le fait d'avoir un congé fiscal n'empêche pas de déclarer.

M. Williams: C'est ma question. Est-ce que, pour les fins du calcul des allocations familiales, il doit déclarer ses revenus? C'est ma question.

Mme Gauthier (Lise): Aux fins de l'allocation familiale, oui, et aux fins de l'impôt, peut-être également, parce que, au niveau de la Loi sur les impôts, toute personne qui doit payer un impôt doit produire une déclaration de revenus. Et le fait d'avoir un congé fiscal à l'égard du revenu d'emploi ne fait pas nécessairement que je n'ai pas d'impôts à payer, par ailleurs, sur mes intérêts, mes dividendes, etc. Le congé fiscal qui est donné, c'est une déduction dans le calcul du revenu imposable. Le revenu qui est déterminé aux fins de l'allocation familiale, c'est le revenu net. Comment je vous expliquerais ça simplement? La déclaration de revenus, vous avez des...

Mme Marois: ...de nous faire remarquer à tous, ensemble, que c'est très compliqué.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Gauthier (Lise): Non, c'est parce que la plupart des gens ne font pas nécessairement leur déclaration de revenus.

M. Williams: Finalement, vous avez compris.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Non, non, ça va, vous l'expliquez très bien. Continuez, ça va nous aider, tout le monde.

Mme Gauthier (Lise): Dans une déclaration de revenus, je calcule les revenus d'une personne, d'accord? Je donne certaines déductions dans le calcul de son revenu d'emploi, déductions pour les REER, régime de pension. J'arrive à un revenu net. Ensuite, je calcule un revenu imposable sur lequel je vais calculer mon montant d'impôts à payer. Le revenu net, c'est ce qui sert, au Québec, pour déterminer quand vous parlez d'un crédit pour conjoint. On va demander: Prenez le revenu net de votre conjoint. C'est la ligne 275 de la déclaration.

Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de lire le budget du Québec de cette année, tous les crédits, à compter de 1998, vont être réductibles en fonction du revenu net. C'est le revenu qui va être choisi. C'est un revenu qui est simple à déterminer et qui représente la réalité de la situation de la personne. À compter de 1997, la SAAQ va être incluse dans le revenu net. Donc, le revenu va ressembler plus à un revenu économique encore.

Donc, la déduction dont vous parliez, de votre marin de tantôt, c'est une déduction dans le revenu imposable, ça n'affecte pas le revenu net. La personne ne va payer probablement aucun impôt au Québec, mais elle a un revenu net. Vous dites: Madame est au Québec, son mari gagne 50 000 $, un congé fiscal, ne paie pas d'impôts. Quand je vais demander à cette personne-là... Elle va vouloir le prendre à charge, il va falloir qu'elle tienne compte qu'il a eu 50 000 $ de revenus.

M. Williams: C'est ça, le but de ma question, de savoir...

Mme Gauthier (Lise): Il a un revenu réel, là. On ne peut pas nier qu'il a un revenu.

M. Williams: Et c'est le revenu...

Mme Gauthier (Lise): La technique de revenu imposable, ça fait vraiment en sorte de dire: Oui, vous avez un revenu, mais je donne une déduction dans le revenu imposable pour ramener le revenu sur lequel je vais calculer l'impôt à zéro.

M. Williams: Avec ça, quand on parle de revenu, selon le revenu de la personne et de son conjoint, est-ce que c'est le revenu brut ou le revenu imposable ou le revenu net?

Mme Gauthier (Lise): C'est le revenu net.

M. Williams: Net.

Mme Gauthier (Lise): Mais on ne tient pas compte des déductions selon le calcul du revenu imposable. Votre chercheur étranger, les gens qui travaillent pour l'ONU, toutes les déductions qui viennent ramener le revenu sur lequel l'impôt va être calculé, à zéro, ces déductions-là, on n'en tient pas compte. On va tenir compte des déductions de base dans le calcul du revenu d'emploi, les dépenses d'emploi, les dépenses d'entreprises, mais pas des déductions spéciales comme les travailleurs québécois à l'étranger; tout ça, c'est dans le revenu imposable.

M. Williams: O.K. Merci pour ça. Mais le manque de compréhension que je démontre, peut-être, ce n'est pas à cause de votre réponse, c'est juste...

Mme Gauthier (Lise): Non, je sais que la différence entre un revenu net et un revenu imposable n'est pas toujours facile à traduire. Mais vraiment le revenu que je vais prendre, c'est le revenu réel de la personne. Je regarde son revenu brut. Si on voulait parler de brut par rapport au net, je prends son revenu brut. Il gagne 100 000 $, je prends ses dépenses, les dépenses courantes, son régime de pension agréé, son REER, j'arrive à 90 000 $. Ça, c'est son revenu net. Je peux lui donner des déductions pour dire: Il travaillait à l'étranger, pendant 12 mois, il peut avoir droit à une déduction équivalente de 90 000 $. Son revenu imposable est de zéro, mais il a eu un revenu net de 90 000 $, et son conjoint, lorsqu'il regarde cette personne-là, il dit: Est-ce que j'ai subvenu à ses besoins? Si on répond oui à cette question, je dirais: Vous avez droit à 5 900 $, moins le revenu de votre conjoint. La réalité, c'est que ce conjoint-là a eu 90 000 $ de revenus.

M. Williams: Et c'est la même réponse, je présume, pour les congés fiscaux accordés aux chercheuses étrangères qui sont ici, qui sont potentiellement mariées avec un Québécois...

Mme Gauthier (Lise): Oui.

M. Williams: Avec ça, malgré les congés fiscaux, il doit ajouter le revenu net...

Mme Gauthier (Lise): La déduction du congé fiscal est dans le calcul du revenu imposable et non dans le revenu net...

M. Williams: O.K. Mais...

Mme Gauthier (Lise): ...d'après l'article 725. Dès que vous les voyez là, c'est dans le revenu imposable.

M. Williams: Travaillez-vous avec le Revenu ou...

Mme Gauthier (Lise): Oui.

M. Williams: Oui, il me semble. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

(21 h 40)

Mme Marois: Je dois vous dire, pour les fins de la commission, que notre collègue est critique, quand même, en ce qui a trait aux questions du ministère du Revenu.

M. Williams: Oui, je peux continuer...

Mme Marois: Donc, on pourrait longuement continuer dans... Ça lui permet de mieux saisir certains aspects, et nous aussi, sûrement.

M. Williams: Oui. Et souvent – juste pour vous faire remarquer, Mme la ministre – j'ai des réponses beaucoup plus claires à mes questions de l'équipe du ministère qu'à mes questions au ministre. Avec ça...

Mme Marois: Ça, là, c'est votre point de vue. Mais, vous savez...

M. Williams: Vous pouvez lire les galées et je pense que vous allez avoir la même réaction que moi.

Mme Marois: ...nous qui entendons le ministre, on trouve qu'il est très clair dans ses propos.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que...

M. Williams: Non, je n'ai pas fini. Je veux juste m'assurer qu'on parle des familles québécoises. Avec ceci, il y a une famille québécoise selon la définition de «conjoint» qu'on peut trouver dans 2.2.1. Les deux doivent additionner leurs revenus, mais, si ça vient d'un autre type de relation du même sexe, ils n'ont pas besoin de déclarer ça.

Mme la ministre, vous avez parlé des situations de divorce, de séparation, de décès. Mais, s'il y a quelque chose d'un peu plus flou, que la famille est légalement ensemble, mais qu'ils sont officieusement séparés et que le demandeur ne peut pas avoir accès au revenu du conjoint, qu'est-ce que nous allons faire pour faire le calcul de ça?

Mme Marois: Attendez un peu, reprenez votre deuxième... Allez-y.

M. Williams: Ce n'est pas une séparation légale encore, mais c'est deux personnes, un couple, qui ne sont pas vraiment ensemble pour le moment, étant en transition. Peut-être qu'ils veulent se retrouver ensemble dans un an, mais, pour le moment, ils ne sont pas ensemble. Mais, techniquement, selon la loi, ils sont conjoints encore. Comment allons-nous calculer le revenu de ce conjoint dans cette situation?

Mme Marois: On me dit: S'il y a eu séparation pendant plus de trois mois – pour ne pas, évidemment, intervenir sans arrêt – à ce moment-là, on peut modifier l'allocation et évidemment en rétroagissant, comme c'est prévu au règlement.

M. Williams: À partir de trois mois?

Mme Marois: À partir de trois mois, c'est ça. Donc, c'est quand même, je pense, raisonnable, parce que, évidemment, on sait que dans nos sociétés il arrive parfois que des gens, pendant quelques semaines, vivent un conflit, une difficulté, mais que c'est temporaire. Alors, on dit: Trois mois. C'est raisonnable, parce que, là, ça commence à avoir des impacts sur les enfants et la famille, évidemment, en termes de revenus.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Williams: Oui, merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier, une courte question?

M. Kelley: Juste une courte question. Pour revenir sur la question de la situation des pensions alimentaires, pour les fins du calcul pour le débiteur alimentaire, est-ce qu'il va être capable de déduire le montant qu'il paie en pension alimentaire pour les fins du calcul de l'allocation familiale dans une famille recomposée? Alors, s'il y a une deuxième famille, est-ce qu'il va être capable de soustraire le montant qu'il paie avant de calculer les nouveaux barèmes pour sa deuxième famille, mettons?

Mme Marois: Alors, là, c'est de la même façon que ce que je vous disait tout à l'heure. Actuellement, au plan fiscal, évidemment, on n'en tient pas compte; c'est la nouvelle façon de faire. On n'a pas statué sur la façon dont on allait le traiter pour la question de l'allocation familiale. On s'est donné quelque temps. On est allé, je dirais, camper bien le régime dans ses bases. Il y a des situations comme celle-là qui pouvaient nous permettre de prendre le temps nécessaire pour réfléchir à la question. Et, à ce moment-là, c'est une évaluation qu'on devra faire: Est-ce qu'on en tient compte pour les fins du calcul? Parce qu'il n'a plus, évidemment, cette somme dans son revenu. Par contre, pour les fins du calcul actuellement, évidemment, on prend le revenu net. Alors, à ce moment-là, ça veut dire qu'il est...

Mme Gauthier (Lise): En 1996...

Mme Marois: En 1996, c'est ça.

Mme Gauthier (Lise): ...la déduction pour pension alimentaire est accordée.

Mme Marois: Est accordée, effectivement.

Mme Gauthier (Lise): La défiscalisation commence uniquement à compter de 1997...

Mme Marois: Oui, 1997. C'est pour ça. C'est exactement...

Mme Gauthier (Lise): ...et ce n'est pas tous les jugements.

Mme Marois: Donc, éventuellement, c'est une discussion que nous aurons. Et il faudra revenir en règlement, de toute façon, pour voir comment on statuera sur cette question-là. Parce que, en le défiscalisant, évidemment, on a prévu aussi une utilisation des sommes aux fins d'enfant à laisser au régime et au système généralement. Mais il faut se poser la question: Comment on va le traiter sous cet angle-là? Si on le traitait essentiellement par la mesure fiscale, à ce moment-là, il ne pourrait pas le déduire, et puis, par contre, on ne pourrait pas le tenir en compte dans le revenu du conjoint qui reçoit. Mais comment on procédera pour la suite des choses? Ça, c'est autre chose.

M. Kelley: Ça peut avoir un impact sur le calcul du revenu net de la famille recomposée parce que, si elle doit payer 5 000 $ ou 7 000 $ par année, ça pourrait avoir un impact très important sur les barèmes dans le nouveau système, si j'ai bien compris. Alors, c'est un point, pas pour l'immédiat, je comprends, parce qu'on est toujours sur 1996, mais, d'ici un an, c'est très important de revenir sur cette question parce que ça risque d'avoir un impact direct sur une famille recomposée ou une deuxième famille.

Mme Marois: C'est tout à fait pertinent. Il faut effectivement faire une analyse et poser un jugement sur ça. Il est sûr qu'on ne pourra pas, j'imagine, le traiter différemment dans les mains de l'un ou de l'autre. Ou on le calcule ou on ne le calcule pas. Et, si on le calcule, à ce moment-là, on calculera pour la personne qui ne l'a plus mais aussi pour la personne qui l'a, selon la discussion qu'on avait tout à l'heure, sinon, il y a un problème d'équité.

M. Kelley: Non, non, c'est juste...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Non?

M. Copeman: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

Mme Marois: Je croyais que nous étions prêts à voter, M. le Président. Non? Il y a encore quelques questions?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce m'avait signifié, oui...

M. Copeman: Oui, M. le Président. Est-ce qu'il est exact de dire que le nouveau régime d'allocations familiales apporte des améliorations significatives à des travailleurs à faibles revenus et apporte une aide beaucoup moins significative aux familles assistées sociales? Est-ce que c'est un jugement qui est plus ou moins exact?

Mme Marois: C'est vrai, pas dans toutes les circonstances, mais c'est vrai généralement, dans le sens où la famille bénéficiaire de l'aide sociale recevra pour l'instant le même montant exactement et, de toute façon, conserve les droits qu'elle a déjà. Les nouvelles familles qui entreront dans un an, un an et demi entreront à un seuil un peu différent, à un barème d'allocations familiales un peu différent, mais leur situation, pour ce qui est du premier et du deuxième enfant, ne sera pas sensiblement changée. Pour ce qui est du troisième et du quatrième, cependant, ils étaient peu reconnus, ces enfants, à l'aide sociale et, donc, ils seront beaucoup mieux reconnus par l'allocation familiale. Donc, ça améliore la situation des personnes à la sécurité du revenu. Mais c'est évident que la situation que cela améliore d'une façon toute particulière, ce sont les bas et, comme je le dis souvent, les moyens bas revenus qui, eux, évidemment, avaient...

M. Copeman: Des travailleurs.

Mme Marois: Travailleurs, avec un revenu de travail, parce que, eux, ils n'avaient pas accès à un certain nombre de composantes de l'aide sociale; ils avaient l'allocation familiale qui était une petite allocation, et c'était tout, finalement. Tandis que, là, on améliore très sensiblement leur situation. Je vous donnais quelques cas ou quelques exemples, dans les derniers jours, où on parlait de montants jusqu'à l'ordre de 2 000 $, 2 500 $, dans certains cas. Je regarde ici, voyez-vous, 2 364 $ pour une famille biparentale avec un seul revenu de travail, c'est beaucoup plus que ce qu'elles ont maintenant, évidemment, c'est considérable. C'est vrai aussi pour une famille de 12 000 $, une famille de 20 000 $. C'est ça, voilà, 2 800 $ de plus pour une famille biparentale qui a trois enfants, un seul revenu de travail à 20 000 $. Alors, c'est évident, et on l'a toujours dit, que c'est là qu'on avait mis davantage l'accent pour aider les enfants pauvres à sortir de la pauvreté ou à ce qu'elle soit moins lourde pour eux.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Copeman: M. le Président, je vais faire un plaidoyer en faveur d'une certaine philosophie qui n'est pas tout à fait reflétée, je crois, dans le projet de loi et dans les calculs dans les allocations. Quand la ministre dit que le but du projet de loi, c'est en partie de sortir des enfants de la pauvreté, je pense qu'elle sera d'accord avec moi – en tout cas, j'espère qu'elle sera d'accord – pour dire qu'on s'entendrait sur le fait que les familles récipiendaires de l'aide sociale sont parmi les familles les plus pauvres; c'est une évidence, elle est confirmée par notre très estimée collègue la députée de Rimouski.

(21 h 50)

Si c'est une évidence et qu'il faut sortir les enfants de la pauvreté, comment se fait-il qu'un effort accru n'est pas donné pour aider des récipiendaires de l'aide sociale, en dépit du fait que peut-être pour le troisième et le quatrième enfants, il y a un ajustement? Mais, moi, je prétends, M. le Président, que l'effort n'est pas assez pour sortir les enfants des familles récipiendaires de l'aide sociale de la pauvreté. Et j'aimerais savoir pourquoi le gouvernement a choisi de procéder ainsi.

Mme Marois: Oui. C'est clair. Je pense qu'on a donné des explications solides sur le fond, à cet égard. C'est qu'on souhaite que les familles à la sécurité du revenu puissent s'assumer et puissent être autonomes, n'est-ce pas, et puissent occuper, donc, éventuellement, une fonction de travail et aller chercher un revenu qui va leur permettre d'assumer les besoins essentiels, d'elles-mêmes et de leurs familles.

Alors donc, ce que l'on fait, c'est que cette famille, lorsqu'elle quitte l'aide sociale... Actuellement, sa situation n'est pas changée, sensiblement, je pense qu'on convient de ça, avec l'allocation qui est versée. Mais elle est très sérieusement changée, cependant, si cette famille part de la sécurité du revenu pour aller sur le marché du travail, parce que cette allocation, qui est assez généreuse, ne lui est pas enlevée, elle est conservée, évidemment, jusqu'à un certain seuil de revenus, ça va de soi. Mais elle ne perd pas cette allocation-là.

Quand une famille qui est à la sécurité du revenu se met à faire les calculs, actuellement, quant à la différence qu'il y aura dans sa situation budgétaire, selon qu'elle reste à la sécurité du revenu ou selon qu'elle va sur le marché du travail, souvent, il n'y a pas d'intérêt à le faire financièrement. À ce moment-là, la famille, on peut le comprendre, on peut faire toutes sortes de commentaires, hein, mais on peut le comprendre, parce que, évidemment, elle dit: Bien, au moins, moi, je suis là avec mes enfants – si je suis une femme ou un homme, peu importe – et, si je m'en vais sur le marché du travail, ça ne donne rien de plus dans l'assiette de mes enfants, je ne vais pas chercher de sous de plus, parce que je perd en allant sur le marché du travail.

Tandis que, là, en allant sur le marché du travail, il y a un gain net très significatif dû à l'allocation qui est préservée, l'allocation familiale. Et c'est sûr qu'il y a là un incitatif au travail. Et, moi, je ne m'en suis jamais cachée, il y a un incitatif. Mais on n'a pas voulu, par contre, pénaliser les gens qui sont déjà à la sécurité du revenu, donc on maintient les allocations. Puis on dit: Si ces personnes vont sur le marché du travail, il ne faut pas les écraser au moment où elles décident d'en sortir.

Évidemment, la situation conjoncturelle est déjà suffisamment difficile pour ces personnes, à cause du problème d'emploi, on va convenir de ça ensemble. S'il y avait des masses d'emplois, ce serait plus facile de vivre avec cette réalité-là, mais il n'y en a pas, ce n'est pas le cas. Cependant, lorsqu'on en trouve un emploi, il y a un incitatif assez significatif.

Et, avec le nouveau plan de ma collègue, la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité, qui veut justement aider les gens à s'inscrire dans un parcours vers l'emploi, je pense que, là, on se dote d'outils qui vont permettre à des personnes de se prendre en main et éventuellement de s'inscrire dans un projet, que ce soit un projet de réinsertion, que ce soit un projet de formation, que ce soit un projet d'apprentissage. Et c'est intéressant, je pense, tout ce qui peut s'offrir comme gamme de possibilités. Puis on n'écrase pas les gens en partant.

Puis il y a une raison d'équité. La raison d'équité, évidemment, c'est que la famille qui a un petit revenu, au moins, je dirais, se voit reconnue, voit reconnue la présence d'enfants dans la famille par ce montant d'allocations qui est quand même pas mal plus généreux que ce qu'il est maintenant pour ces familles, et jusqu'à hauteur d'un certain revenu.

M. Copeman: M. le Président, je me sens dans l'obligation d'exprimer beaucoup de réserves quant à la philosophie qui sous-tend ces gestes posés par le gouvernement. À entendre la ministre – et si j'interprète mal ses mots et ses pensées, elle va me corriger – de la façon dont, moi, j'ai entendu, c'est un peu en disant qu'il y a un certain nombre de familles qui font le choix de demeurer sur l'aide sociale. M. le Président, il est peut-être vrai, quant à moi, pour un nombre très limité de familles. Moi, je prétends, par contre, que les gens ne font pas le choix de rester sur l'aide sociale, mais que c'est une situation qui leur est imposée à cause des circonstances souvent très hors de leur contrôle et que la conjoncture actuelle économique à laquelle a fait référence la ministre ne permet pas une transition facile, en ce moment, des gens récipiendaires de l'aide sociale vers le marché du travail. Avec le taux de chômage qu'on connaît au Québec, avec les difficultés qu'on connaît actuellement, moi, personnellement, je ne crois pas que les gens font le choix de rester sur l'aide sociale à cause des bénéfices qui découlent du programme.

Et je veux simplement, M. le Président, citer quelques extraits d'un rapport du Conseil national du bien-être. Je l'ai trouvé uniquement en anglais, je sais que ça existe, évidemment, en français, étant donné que c'est le gouvernement fédéral, mais, pour l'instant, je suis dans l'obligation de citer quelques phrases, quelques paragraphes en anglais.

C'est un rapport intitulé Child Benefits: A Small Step Forward . Ça fait état des changements au niveau fédéral avec la prestation fiscale fédérale et l'harmonisation qui se fait au niveau des systèmes provinciaux à travers le Canada. Dans un sous-paragraphe, «Better treatment of families on welfare», on parle du budget fédéral, M. le Président: «Under the budget proposals, the increased federal money going into the Canada child tax benefit for families on welfare is supposed to be offset by reductions in provincial and territorial welfare benefits, and the money saved by the provinces and territories is supposed to be reinvested in other programs for low-income families. The Budget Speech said specifically that the money would be reinvested in programs for low-income working families as opposed to low-income families who rely on welfare or other Government income support programs.» Et ça confirme un peu l'orientation qu'a exposée la ministre.

Je continue la citation, M. le Président: «Members of the National Council of Welfare are troubled by the suggestion, implicit in the Budget Speech – ça, c'est au fédéral, M. le Président – that working poor families with children deserve additional help from governments and families with children on welfare do not. The reality is that people on welfare, including the children in families on welfare, are among the poorest of the poor in Canada. The vast majority of recipients are on welfare because of circumstances well beyond their control: the loss of a job, the loss of a spouse or a parent, or the loss of good health.»

Pour résumer, M. le Président, le Conseil national du bien-être questionne sur la politique fédérale et, par extension, la politique québécoise telle que présentée par la ministre à l'effet qu'on aide davantage des familles avec des revenus de travail, comparé à des familles sur l'aide sociale. Et, je dois vous dire, M. le Président – je parle très personnellement – que je partage largement les préoccupations du Conseil national du bien-être. Et, j'aurais souhaité, moi, une aide accrue aux familles, en sachant quelles sont les situations que vivent présentement les prestataires d'aide sociale.

(22 heures)

M. le Président, vous l'avez vécu en tant que président de la commission pendant la réforme de l'aide sociale, nos consultations sur la réforme de l'aide sociale, où groupe après groupe, après groupe représentant des bénéficiaires de l'aide sociale ont témoigné devant cette commission quant à la difficulté quotidienne à laquelle ces gens-là font face pour rejoindre les deux bouts de leur corde budgétaire, et la politique proposée par la ministre ne règle pas assez, quant à moi, la situation de ces familles. Et, on sait, M. le Président, si les informations sont exactes, qu'il y a un total de 147 000 familles récipiendaires de l'aide sociale au Québec. Alors, on parle de 147 000 familles qui ne sont pas, quant à moi, aidées de façon assez accrue dans la politique de la ministre.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À ce moment-ci, vous me permettrez évidemment de permettre à Mme la ministre de commenter et répondre à vos propos, mais j'apprécierais qu'après on continue sur l'article.

Mme Marois: Sur le projet de loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Sur le projet de loi.

Mme Marois: Je n'ai pas d'objection, M. le Président. Je veux juste corriger le député. Évidemment, je n'ai pas dit que les gens choisissaient volontairement de rester à l'aide sociale. Je pense qu'on ne choisit pas l'aide sociale, on y est pour toutes espèces de circonstances. Le Conseil du bien-être justement faisait état de ces différentes situations qui faisaient qu'une personne se retrouvait malheureusement à l'aide sociale, parce que ce ne sont pas des situations très agréables à vivre et les revenus qu'on y trouve effectivement sont des revenus qui couvrent à peine les biens essentiels. On est bien conscient de ça. Je pense que si on avait plus de moyens, sûrement qu'on retoucherait à cette aide-là, comme on devrait rehausser aussi les seuils de couverture des familles à bas et moyens... bas revenus.

Alors, mon propos n'était pas celui-là, mon propos était le suivant: Une famille qui est à la sécurité du revenu, qui est à l'aide sociale et qui veut en sortir, et qui a la possibilité de le faire parce qu'elle a peut-être un emploi qui s'offre à elle, lorsqu'elle a fait le calcul et qu'elle se rend compte qu'en allant occuper un emploi qui est un emploi, par exemple, au salaire minimum ou à peine un peu au-dessus, elle va avoir moins d'argent finalement que ce qu'elle a maintenant à l'aide sociale, compte tenu de ce qu'elle doit rencontrer comme coûts pour être sur le marché du travail, que ce soit la garde d'enfant, que ce soit autre chose, même si on les ramène à un coût très bas.

Et, à ce moment-là, le choix qu'elle pourrait faire, ce n'est pas de rester à l'aide sociale parce qu'elle se trouve bien à l'aide sociale, mais de se dire: À l'aide sociale, dans le fond, je vais en mettre un petit peu plus dans mon assiette et dans l'assiette de mes enfants même si je suis à l'emploi. Et c'est un effet pervers de nos systèmes et c'est ça qu'il faut essayer de corriger. Et c'est ce qu'on corrige en partie... On ne corrige pas tout, mais c'est ce qu'on corrige en partie en laissant l'allocation familiale à la famille même si celle-ci n'est plus à la sécurité du revenu. Et là, il y a un net avantage dans le sens où, là, elle va en avoir un peu plus de revenus en sortant.

Vous vous souvenez, on a eu de longues discussions quand on a discuté du livre blanc qui a été préparé par M. Parizeau, ensuite adopté par M. Duhaime et déposé par ce dernier, sur la fiscalité et sur toute la question de préemption du revenu lorsqu'une personne sort de la sécurité du revenu. Qu'est-ce qu'on lui enlève? Est-ce qu'on lui enlève le dollar qu'elle a de plus aussitôt qu'elle le gagne ou on lui en laisse la moitié? Et, dans le fond, c'est un peu un choix comme celui-là qu'on fait actuellement. Donc, mon propos n'est pas de dire que les personnes choisissent de rester là, mais il y a des éléments qui font en sorte qu'elles ont un intérêt pour leurs enfants à y rester, et on ne peut pas les blâmer si elles font ce choix-là dans certaines circonstances. En plus, de fait, ajoutons à ça la conjoncture, etc. Je pense qu'on n'a pas besoin de se faire de grands dessins.

Mais je voudrais ajouter autre chose, M. le Président. Il y a des mesures à la sécurité du revenu, bien sûr, il y a des mesures de soutien à l'emploi, d'insertion à l'emploi, on a toutes espèces de projets disponibles à la sécurité du revenu, au ministère de la Solidarité et de l'Emploi, etc. Il y a aussi d'autres mesures de soutien. Je prends l'autre champ de responsabilités que j'assume, tous les services éducatifs que l'on rend disponibles aux milieux qui vivent des difficultés. Je pense au préscolaire 4 ans, à la maternelle 5 ans qui est déjà à plein temps pour plusieurs écoles du Québec, dans des écoles où les enfants vivent des difficultés particulières et de la pauvreté. On permet donc à ces enfants d'avoir accès à ces services gratuitement, 5 jours semaine.

Dans les services de garde que l'on va implanter, les personnes à la sécurité du revenu vont contribuer une somme presque symbolique de 2 $ par jour, de telle sorte qu'ils ne paient pas davantage; justement, elles ne paieront même pas le 5 $, autrement dit, que l'on demande aux autres personnes pour utiliser les services. Pourquoi fait-on ça? Pour leur permettre d'avoir accès à de l'aide, si c'est nécessaire, auprès de leurs enfants. Alors donc, il y a en sus de ce que l'on fait à la sécurité du revenu, des mesures d'insertion en emploi, de formation, de soutien; il y a aussi des mesures de soutien aux familles et de services aux familles. Évidemment qu'ils ne se comptabilisent pas de la même façon, mais qui sont énormes en termes d'aide à ces familles pour qu'elles puissent se prendre en main et assumer leur autonomie.

Je pense que l'objectif de tout le monde ici, ce n'est pas qu'il y ait beaucoup de monde à l'aide sociale, dans la pauvreté, c'est qu'il y ait de moins en moins de monde à l'aide sociale, que ce soit des personnes autonomes, qui gagnent leur vie en occupant un emploi. C'est sûr que les enfants vont avoir à ce moment-là plus de ressources disponibles et plus de services. C'est ça qu'on essaie de travailler, mais en ne pénalisant pas les familles les plus pauvres, en essayant de créer de l'équité entre les familles, en ne désincitant pas non plus... Et, je le dis, ce n'est pas un jugement de valeur que je porte en disant cela, c'est une réalité très objective.

Calculez avec un crayon. En bout de piste, si j'ai 25 $ de plus par semaine en restant chez moi et en m'occupant de mes enfants, c'est mieux que si j'ai 25 $ de moins, que je suis sur le marché du travail et qu'en plus j'ai moins de temps à la maison. Qu'est-ce que vous voulez? C'est un calcul simple à faire, dans un sens, et on le comprend, c'est plus de moyens pour les enfants et pour la famille. Donc, je pense que notre approche dans ce sens-là est intéressante, sans nécessairement enlever justement des ressources aux familles les plus pauvres.

Je suis prête, M. le Président, à reprendre l'étude article par article. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on débatte de ça, c'est un débat que je fais depuis 20 ans, 25 ans. Vous savez, mon premier travail – parce que j'ai d'abord une formation de travailleuse sociale, en animation sociale – a été de travailler avec des bénéficiaires de la sécurité du revenu. Je les ai aidés de toutes espèces de façons en travaillant sur des projets de logement, en travaillant sur des projets d'éducation populaire. J'avais moi-même une petite allocation de rien du tout en travaillant dans un organisme communautaire et je sais ce que c'est que la misère humaine, la vie dure, les enfants qui vivent dans des milieux qui ont un coeur grand comme ça, mais des moyens petits comme ça. C'est évident que c'est à ça qu'il faut travailler comme société. Je pense qu'on passerait à côté de nos objectifs d'égalité des chances. Ce qu'on fait maintenant, je crois, va dans le sens de soutenir ces familles et de leur donner le coup de pouce qu'il faut finalement et qui va dans ce sens-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, est-ce qu'on revient sur le projet de loi?

M. Copeman: Tout à fait. Moi, je pensais que mes commentaires étaient pertinents. À l'article 8, c'est le calcul...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est la façon de calculer. On n'est quand même pas sur...

M. Copeman: La façon de calculer, M. le Président, a une incidence directe sur qui reçoit, à quel niveau de revenu on reçoit, etc. Je ne veux pas éterniser le débat. Je comprends les arguments de la ministre, je ne les partage pas à 100 %. Je suis parfaitement conscient du dilemme de comment tenter de sortir des familles de l'aide sociale en s'assurant qu'il y a un écart important entre les prestations d'aide sociale et la situation des familles des travailleurs à faibles revenus. Je suis conscient de ça et je suis conscient de l'enjeu, qu'il ne faut pas non plus inciter le monde à rester sur l'aide sociale.

Par contre, je prétends – et je terminerai là-dessus – que si l'objectif de la ministre était vraiment de sortir des enfants de la pauvreté, elle rate cet objectif avec 147 000 familles québécoises qui sont récipiendaires de l'aide sociale. On peut ne pas être d'accord avec mon analyse, mais c'est ce que je prétends. La ministre nous dit de bonne foi qu'elle veut aider et qu'elle a aidé dans le passé les prestataires d'aide sociale. J'accepte sa bonne foi. Sans doute. Mais, M. le Président, vous savez par contre que présentement il y a des centaines de milliers de bénéficiaires d'aide sociale qui disent quotidiennement que ce gouvernement n'est pas en train de les aider.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je manifeste fortement le désir qu'on revienne sur le fond, sur le projet de loi. M. le député de Nelligan.

(22 h 10)

M. Williams: Une dernière brève question sur l'article 8, sous-paragraphe 2°, où on parle du mode de calcul du revenu. J'ai vu qu'on parle des faillites québécoises dans le quatrième alinéa du projet de règlement. Je comprends que, particulièrement depuis le 12 septembre 1994, nous avons une augmentation des faillites ici, au Québec, mais il me semble, si j'ai bien compris – je voudrais juste profiter de la présence de Mme Gauthier ici – qu'on doit tenir compte de l'année complète malgré l'article 779 de la Loi sur les impôts, 779 qui touche 935.4, etc. Si j'ai bien compris, vous dites que l'année d'imposition commence avec la date de faillite. Mais, dans ce règlement, on veut dire qu'on doit tenir compte des revenus de l'année complète. Est-ce que c'est pour s'assurer qu'on n'utilise pas deux années fiscales pour réduire le niveau de revenus?

Mme Gauthier (Lise): Dans les cas de faillites, on répute qu'il y a deux années d'imposition pour l'année où un particulier devient un failli. Donc, dans l'année civile, du 1er janvier au 31 décembre, s'il fait faillite le 1er juin, il y a une première année qui va se terminer le 1er juin et il y a une deuxième qui va commencer le 2 juin au 31 décembre. Pour placer les contribuables québécois dans la même situation, on prend les deux années d'imposition et on les additionne. Donc, en réputant que la présomption de 779 ne s'applique pas, c'est qu'on fait le total de ces deux années. C'est tout simplement ça.

M. Williams: Et c'est s'assurer qu'on ne peut pas mettre un revenu caché dans une faillite et réclamer un niveau de revenus plus bas l'année prochaine. C'est ça?

Mme Gauthier (Lise): On ne réduit pas indûment son revenu en prenant le revenu post-faillite, c'est le revenu pour l'année entière.

M. Williams: Merci beaucoup.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Est-ce que l'article 8 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. Article 9. Mme la ministre.

Mme Marois: L'article 9, c'est: «Le montant de l'allocation familiale peut être majoré pour la personne qui assume seule la charge de l'enfant.

«Une personne est réputée assumer seule cette charge si elle n'a pas de conjoint.»

Alors, je pense que l'article parle de lui-même, il n'est pas sans doute nécessaire d'élaborer davantage.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Une seule question. La preuve que la personne assume la charge seule est le fait qu'il n'y ait pas d'autre rapport d'impôts d'un conjoint ou quelque chose comme ça? C'est quoi? Est-ce qu'on veut vérifier, juste pour s'assurer qu'il n'y a pas deux adultes à la même adresse ou des choses comme ça ou est-ce qu'on va juste assumer que la déclaration est faite comme ça? C'est juste comment clarifier la situation de la preuve exigée de la Régie que la personne assume seule cette charge.

Mme Marois: Bien, c'est ça. Vous avez vu, au projet de règlement, une série d'informations que la personne doit transmettre. Elle les transmet, pour l'instant, au fédéral, qui déclare l'admissibilité, et nous, on a l'information à partir de là et on commence à payer l'allocation. Évidemment, selon les demandes qui lui sont faites, elle doit dire effectivement s'il y a un conjoint et quel est le statut de ce conjoint. C'est prévu, quel est le lien... C'est ça. On dit: «La demande d'allocation familiale doit contenir les renseignements suivants.» À l'article 5 du projet de règlement, on retrouve la définition de ce que la personne doit produire et, à partir de là, on prend pour acquis qu'elle a déclaré son conjoint, s'il y avait matière à déclarer; s'il n'y en avait pas, il n'y en a pas, c'est tout.

M. Kelley: Il ne sera pas question de faire un couplage des fichiers pour vérifier les renseignements qui sont donnés, comme le ministère du Revenu a fait dans d'autres genres de dossiers?

Mme Marois: Nous, il n'est pas prévu de choses comme celles-là d'aucune espèce de façon. Évidemment, j'imagine cependant que, s'il y a des plaintes – peut-être qu'on peut m'aider – qui sont formulées, on peut, à ce moment-là, reposer des questions à la personne. Mais, sinon, on prend pour acquis que les déclarations sont conformes, correctes et tiennent compte de la réalité de la personne. Sauf qu'évidemment le revenu...

M. Kelley: Oui, mais, dans le projet de loi n° 32, nous avons...

Mme Marois: ...pour établir le montant de l'allocation, lui, nous est fourni par le ministère du Revenu.

M. Kelley: Parce que, comme je l'ai dit, dans le projet de loi n° 32, que nous avons adopté au mois de juin passé, il y avait beaucoup de possibilités de faire les vérifications internes sur l'économie de plusieurs articles de cette loi qui a été adoptée, c'est de faire des vérifications. Alors, la bonne foi du contribuable n'était pas suffisante, on a fait beaucoup de vérifications.

Et la Commission d'accès à l'information a souligné que peut-être les excès ou le potentiel des excès... Entre autres, chaque fois que quelqu'un achète une voiture de luxe, ces renseignements vont être transmis de la SAAQ au ministère du Revenu pour voir si le député de Charlevoix et président de notre commission a le moyen de payer une troisième Mercedes. Alors, ça fait partie maintenant du comportement du ministère du Revenu.

J'aimerais juste savoir s'ils vont mettre des genres de tests ou est-ce qu'ils vont vérifier pour s'assurer qu'il n'y a pas un conjoint de fait qui n'est pas déclaré aux fins de l'application de l'article 9.

Mme Marois: Bien, nous, écoutez, ce que j'expliquais tout à l'heure, c'est que la déclaration est faite au fédéral et on déclare aussi son revenu, évidemment. L'admissibilité est établie puis, après ça, ça s'en vient chez nous puis on le traite. Éventuellement, c'est nous qui ferons cela, mais on le fera comme on le fait actuellement, finalement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? Est-ce que l'article 9 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Kelley: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. L'article 10, Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, l'article 10 est le suivant:

«10. Celui qui désire recevoir l'allocation familiale, ainsi que son conjoint, doit fournir une déclaration de revenus suivant la périodicité et les conditions prévues par règlement du gouvernement.»

Et, si on veut se référer à l'article du règlement, c'est l'article 14. Alors, essentiellement, on doit présenter une déclaration de revenus. Ça s'applique évidemment au conjoint de la personne, puisque son revenu sera pris en considération aux fins de la détermination du montant de l'allocation familiale. On dit qu'une disposition similaire existe déjà dans la Loi sur la sécurité du revenu à l'égard du programme de Supplément au revenu de travail et ce fameux programme qui s'appelle le programme APPORT. En fait, c'est l'économie de la loi qui est ainsi faite, on en a parlé longuement déjà, c'est sur le revenu net que se calcule l'allocation familiale et tient compte des deux revenus, si on considère qu'on est avec un conjoint, soit une union de fait ou une union contractuelle.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Première question, pour toucher l'allocation fédérale, est-ce qu'il faut faire une déclaration de revenus, un rapport d'impôts, dans le régime actuel?

Mme Marois: Oui.

M. Kelley: Et, est-ce qu'on a estimé le nombre des parents, dans le système actuel, qui ne font pas un rapport d'impôts? Est-ce qu'on a une idée? Moi, c'est juste au niveau de la sensibilisation des parents dans le nouveau système, qui seront obligés. Et, si c'est un nombre infime, si c'est juste une centaine qui ne le font pas, juste avoir une idée c'est quoi la clientèle qu'il faut cibler pour une campagne de promotion pour s'assurer qu'à la fin de cette année, même les personnes qui n'ont aucun revenu doivent le déclarer afin de s'assurer qu'il y aura un calcul exact et à temps pour la détermination de la nouvelle allocation familiale. Alors, est-ce qu'on a une idée du montant de personnes qui ne font pas un rapport d'impôts?

Mme Marois: Alors, actuellement, ce qu'on me mentionne, c'est qu'il y aurait 70 000 personnes qui n'auraient pas fait de rapport d'impôts, 70 000 personnes.

M. Kelley: Adultes?

Mme Marois: Bon. Ce sont 70 000 adultes. Est-ce qu'ils ont des enfants, est-ce qu'ils n'en ont pas? Ça, c'est autre chose, n'est-ce pas? C'est évident qu'il y avait des personnes qui n'en faisaient pas. Je pense aux gens de la sécurité du revenu, qui n'avaient pas l'obligation d'en faire et qui, maintenant, auront l'obligation d'en faire. Ah! Ce sont 70 000 adultes avec enfant, on se comprend. Donc, ça veut dire que ce sont des familles à un conjoint ou deux conjoints.

M. Kelley: Combien avec enfants?

Mme Marois: On dit 70 000 adultes avec enfants.

M. Kelley: Qui n'ont pas déclaré.

Mme Marois: C'est ça. Alors, maintenant, ce qu'il faut se dire, c'est qu'il y a eu un travail énorme de fait auprès des familles, de la part de la Régie et de la part du ministère de la Sécurité du revenu. D'abord, il y a eu une campagne de publicité, il y a eu des affiches dans les différents salons de la famille, de la femme, etc. Il y a eu des interventions télévisées aussi, de la ministre responsable de la Sécurité du revenu, de la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.

(22 h 20)

Tous les bénéficiaires actuels des allocations familiales payées par chèque ont reçu à deux reprises une information leur faisant part de cette condition. Tous les bénéficiaires et conjoints des allocations familiales actuels, qui n'avaient pas produit de déclaration de revenus en 1995, ont reçu une lettre personnelle leur faisant part de cette condition. Tous les prestataires de la sécurité du revenu ont reçu à deux reprises un document leur faisant part de cette condition. Et enfin, tous les bénéficiaires et conjoints des allocations familiales actuels, qui n'auront pas produit leur déclaration en date du 6 juin, recevront bientôt une lettre personnelle accompagnée d'un formulaire de déclaration de revenus, des instructions spéciales facilitant le fait que l'on complète la déclaration seront fournies pour la clientèle de la sécurité du revenu. Des informations seront aussi fournies concernant les endroits où s'adresser pour avoir de l'aide pour compléter la déclaration.

Ce que l'on prévoit aussi, c'est que l'on prévoit accorder des délais de grâce, là, pour les gens, évidemment, qui n'auraient pas procédé. Alors, les personnes auraient quelques mois pour pouvoir procéder et le faire. Mais on pense qu'avec tout ce travail qu'on a fait, on devrait rejoindre à peu près toutes les familles. Donc, les derniers retardataires devraient normalement s'inscrire.

Ce qu'on me dit ici, c'est qu'au fédéral près de 100 % des familles produisent un rapport d'impôts justement pour obtenir la prestation fiscale fédérale pour enfants. Alors, comme l'allocation familiale sera maintenant aussi liée aux revenus, c'est un incitatif évidemment, ça va de soi, pour obtenir sa prestation. Et, rapidement, quand on constatera que finalement on n'en a pas... Parce que là, il faut bien voir. Actuellement, l'allocation familiale est versée d'une façon automatique, tandis que là, il n'y aura plus d'automatisme, il faudra demander. Donc, les familles qui vont ne plus recevoir le chèque, généralement, elles devraient rebondir assez rapidement. Et le délai qu'on a prévu nous permettra de les couvrir adéquatement et correctement.

Donc, je ne prévois pas, moi, qu'il y ait de difficultés, si on regarde les comportements au fédéral, si on regarde tout ce qu'on a fait jusqu'à maintenant. La dure réalité nous ramène vite aux gestes à poser lorsque c'est nécessaire.

M. Kelley: Mais, juste de mémoire, je pense que le gouvernement fédéral a quand même fait toute une campagne de publicité. Je me rappelle des annonces à la télévision, adressées aux personnes sans revenu. Alors, même si vous n'avez aucun revenu à déclarer, il faut faire un rapport d'impôts. Je pense qu'ils ont fait quand même un effort juste de tenir compte qu'il y avait un volet de publicité très important au moment où il y avait des changements dans le régime fédéral. Et je pense que, sur les 70 000 adultes ou parents qui n'ont pas fourni un rapport, est-ce qu'on peut dire que c'est beaucoup la clientèle de l'aide sociale, en partie avec le programme APPORT? J'imagine qu'il y en a certains qui sont familiers ou il n'y a aucune façon de cibler ça. Moi, je pense même que la famille traditionnelle, entre guillemets, où la femme n'a pas de revenu... Le rapport d'impôts, c'est pour les personnes avec un revenu, alors ça ne me concerne pas. C'est ça la mentalité qu'il faut modifier.

Mme Marois: On n'est pas très inquiet, je dois dire, là. D'abord, on pense que ce 70 000 va encore baisser dans les semaines qui viennent.

M. Kelley: Non, parce qu'on va sauver de l'argent.

Mme Marois: On a procédé à de l'information systématique qu'on va continuer à faire. On a fait aussi de la publicité, on l'a faite plus ciblée. Évidemment, quand les gens reçoivent une lettre à la maison, généralement, on la lit, on la regarde, on se pose la question. Donc, on pense que ce nombre va déjà baisser dans les semaines qui viennent. Et puis, éventuellement, au moment où on va commencer à verser les allocations, ce qui va arrêter, évidemment, le versement de l'allocation familiale telle qu'on la connaît maintenant, bien, ça va être immédiat, à mon point de vue, en termes de demandes. Le chèque n'entre pas, là. Ce n'est pas compliqué. À partir du moment où on ne fait pas la déclaration, il n'entre pas. Donc, ça déclenche le téléphone, hein? Moi, je suis persuadée.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Autres interventions? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Est-ce qu'on pourrait avoir un engagement de la ministre – et, encore une fois, je suis parfaitement conscient qu'elle opère de bonne foi – qu'il y aura des mesures transitoires pour assurer que, quoi qu'il arrive, faute de déclaration de revenus – et, moi, je pense surtout à des prestataires de la sécurité du revenu – ils ne verront pas leur chèque amputé d'une somme importante en attendant les ajustements à faire avec la déclaration du revenu?

Je suis convaincu que les gens de la Régie, du ministère de la Sécurité du revenu sont de bonne foi, mais on sait fort bien qu'il va y avoir des familles qui vont nous échapper. On dit en anglais «fall between the cracks». Hein, M. le Président? On l'a vu avec le régime de l'assurance-médicaments. Malgré toute la publicité qui a entouré ce programme, il y avait encore, après la date limite, des dizaines de milliers de Québécois et de Québécoises qui se sont inscrits parce qu'ils se sont rendu compte, à un moment donné, que c'était à leur avantage de le faire. Peu importe les modalités du régime d'assurance-médicaments.

Je veux juste m'en assurer. Je serais beaucoup plus rassuré si la ministre pouvait nous dire qu'il y aura des mesures transitoires très spécifiques pour assurer qu'il n'y aura pas de perte immédiate faute de produire une déclaration de revenus. Parce que les familles sur l'aide sociale ne peuvent pas se permettre ça, même pendant quelques semaines.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: Je peux rassurer immédiatement le député, dans le cas de la sécurité du revenu, c'est prévu comme ça. Ce sera à ce moment-là une aide conditionnelle, tant que la déclaration ne sera pas fournie. Dans le cas des autres bénéficiaires, qui sont généralement des travailleurs et des travailleuses, aussitôt que le bénéficiaire aura transmis son information au Revenu et que celui-ci l'aura transmis à la Régie, on va couvrir par le montant rétroactif. L'idée n'est pas de pénaliser les gens à cause de ça, parce qu'on sait qu'on est justement dans une période de changements. Mais, pour les personnes vraiment à la sécurité du revenu, à l'aide sociale, il y aura une aide conditionnelle immédiate. Donc, pas de délai, si on veut. Pour les autres cas, immédiatement quand on reçoit l'information du Revenu, on rétroagit pour verser les sommes qui sont dues aux parents.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, juste pour bien saisir, il doit déclarer ses revenus pendant la période de déclaration des impôts, quand on doit remplir un formulaire d'impôts. C'est ça?

Mme Marois: Oui.

M. Williams: En réalité, je voudrais juste savoir ce que ça veut dire. Si on finit ça à la fin de mars ou à la fin d'avril, au plus tard, pour l'année précédente, on part du 1er janvier jusqu'au 31 décembre de la même année, mais on soumet ça à la fin de mars. Peut-être que la situation fiscale ou le revenu de la famille, conjoint inclus, a complètement changé. Peut-être qu'ils ont perdu leur travail, peut-être qu'ils n'ont pas le même revenu. Je voudrais savoir comment vous faites la relation avec la déclaration de revenus de l'année passée? Le couple avait peut-être deux belles jobs – je ne fais pas un débat politique – mais ils ont perdu leur travail et ils n'ont pas le même revenu. Comment est-ce qu'on fait la connexion entre cette déclaration de revenus et la situation actuelle?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: J'ai déjà eu l'occasion de répondre, je pense, à un collègue du député, mais je n'ai pas d'objection à reprendre ma réponse. D'abord, il y a des circonstances qui sont prévues où il y a un changement dans la situation conjugale des personnes: séparation, divorce, décès. On intervient immédiatement. Lorsqu'il y a un changement dans le revenu, s'il est une amélioration du revenu pour la famille en cours d'année et que l'allocation qu'on leur versera l'année suivante serait sensiblement baissée, on n'agit pas sur l'année en cours, on maintient le niveau d'allocation. Mais, a contrario, si le revenu des familles se modifie à la baisse, on n'intervient pas en cours d'année, c'est au début de l'année suivante.

Pour le cas présent, évidemment, l'année suivante est en septembre, qui est le début du versement de l'allocation familiale; là, l'allocation sera conséquente au revenu gagné de l'année précédente. On n'intervient pas en cours d'année ni pour réduire ni pour augmenter l'allocation, prenant pour acquis que ce sont généralement des situations qui, dans certains cas, avantagent et, dans certains cas, désavantagent, mais pas de sommes suffisamment considérables.

(22 h 30)

Il y a une circonstance, évidemment, où c'est immédiat – j'ai eu l'occasion de dire ça aussi – c'est lorsque les personnes se retrouvent à la sécurité du revenu. Là, la composante enfants est prise en compte au complet.

M. Williams: Je veux juste bien comprendre là. S'il y a un couple, une famille qui a un bon salaire, un bon revenu jusqu'au 31 décembre. Ils perdent leur travail, ils perdent leurs revenus. Vous ne changerez pas le niveau d'allocation avant septembre? Je trouve ça grave pour les familles.

Mme Marois: Bien, écoutez. Si leur situation s'améliore, on ne changera pas non plus. Alors, normalement...

M. Williams: Je ne parle pas de ça, je parle de la famille qui a eu de la misère cette année, malheureusement. Il n'y a personne qui souhaite ça. Vous non plus. On ne fait pas de partisanerie ici. La compagnie a déménagé. Il n'a pas de job, pas de revenu.

Mme Marois: S'il n'a pas de job, pas de revenu, ça ne se pose pas: Allez à la sécurité du revenu. À la sécurité du revenu, il a l'aide complète.

M. Williams: Avec ça, il y a une personne qui veut vraiment travailler. Il trouve à un salaire très bas mais est juste assuré qu'il paie la nourriture. Je pense que vous comprenez ce que ça veut dire. Et je trouve ça un peu dur qu'on dise que, non, on ne peut pas ajuster ça avant septembre. Ça peut faire mal à la famille et je pense que peut-être on pourrait avoir plus de souplesse dans le système.

Mme Marois: Actuellement, voyez-vous, une famille qui a l'allocation familiale a 131 $ pour un enfant. Peu importe que sa situation change, c'est 131 $. Je veux dire, ce n'est pas plus, ce n'est pas moins. Tandis que là, généralement, les gens qui avaient un revenu qui était relativement élevé, c'est rare que la situation change brusquement. Il y a souvent une période transitoire. Soit que la personne va à l'assurance-emploi... Si elle avait un très bon revenu, elle va avoir en conséquence un remplacement de revenu qui va être décent.

Donc, la période que vous définissez devrait donc normalement être couverte et ne pas vraiment faire subir à la famille une baisse brusque de revenu qui amène évidemment une situation de dénuement suffisamment importante. Or, pour l'instant, ce qu'on a prévu à cet égard, c'est de ne pas modifier en cours d'année la formule d'aide. Le calcul, il sera refait à la fin de l'année.

A contrario aussi, je le répète, pour la famille qui voit sa situation s'améliorer, on ne va pas réclamer non plus. Je pense qu'il faut être de bon compte à cet égard-là. Si, évidemment, il y avait des situations dramatiques... Mais généralement elles sont prises en compte par la sécurité du revenu. Lorsqu'il y a une situation qui vient changer très sérieusement la situation conjugale par le décès, je le répète, le divorce, la séparation, ce sont des cas qui sont prévus actuellement au règlement.

M. Williams: Mme la ministre, je vois que, dans l'article 7, nous avons essayé de tout prévoir. On arrive avec l'article 10. Est-ce que vous êtes ouverte, un peu plus tard, avec les bons mots, à faire un amendement et vous donner un pouvoir discrétionnaire? Effectivement, vous avez dit que ça n'arrive pas souvent, mais, quand ça arrive, une situation tellement grave, que nous n'avons pas prévue – nous avons fait tout notre possible ici pour s'assurer que tous les cas sont protégés – est-ce que vous êtes ouverte, plus tard, à la place appropriée, à ajouter un pouvoir discrétionnaire au ministre pour les cas comme ça?

Mme Marois: Moi, je n'ai pas d'objection à ce qu'on prévoie des clauses semblables éventuellement. Pour l'instant, l'admissibilité est déterminée par Ottawa. Nous, on fonctionne avec ce qu'on nous transmet comme information. Quand un de nos collègues, le député de Jacques-Cartier, disait: On sait que les systèmes administratifs, c'est compliqué quand ça se met en oeuvre, ça ne donne pas toujours les résultats escomptés. Justement, on veut s'assurer qu'il n'y ait pas de problème dans nos systèmes. Alors, on pense que c'est plus sage de fonctionner sur la base que j'ai décrite tout à l'heure.

À partir de là, éventuellement, lorsque nous prendrons en charge l'ensemble de l'opérationnalisation de cela, et donc l'admissibilité, en 1999, on pourra voir, avec l'expertise qu'on aura accumulée aussi, quelles sont les circonstances qu'on peut imaginer où il y a nécessité d'intervenir. Mais, encore là, je le répète, par rapport à une situation que nous connaissons actuellement, c'est une amélioration pour l'ensemble des familles. Et, dans le fond, le jour où elles se retrouvent avec un changement de revenus, ce sera encore mieux que ce qu'elles ont maintenant, ou à peine quelques dollars par mois, puisque l'allocation familiale, qu'est-ce que vous voulez, elle n'est pas très élevée à l'heure actuelle. D'accord? On constate que les familles réussissent quand même à assumer leurs responsabilités. Je n'ai pas d'objection fondamentale éventuellement à revoir ça, mais je ne crois pas que ce soit pertinent de le faire maintenant.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Williams: Je suis, jusqu'à la fin, prêt à proposer ça, parce que le ministre de la Santé et des Services sociaux a dit la même chose avec son programme de médicaments et nous avons tous vu le désastre de ça. On commence le débat sur ça demain. Alors, j'ai pensé que mon offre était quelque chose d'intéressant, pas juste pour la ministre, mais plus particulièrement pour les familles québécoises. Parce que, malgré toutes les bonnes intentions ici, peut-être que nous allons avoir entre-temps des problèmes, et j'ai pensé que le pouvoir discrétionnaire au ministre, ça serait quelque chose d'utile. Mais je suis prêt à revenir sur cette idée un peu plus tard. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Est-ce que l'article 10 est adopté?

Mme Marois: Adopté.


Dispositions particulières à l'allocation pour enfant handicapé

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. Article 11. Est-ce que vous aimeriez avoir une petite suspension de deux minutes, trois minutes, cinq minutes? Ça va. Article 11. Mme la ministre.

Mme Marois: Bon. Là, on arrive à la question des allocations pour enfant handicapé. Je vous proposerais, M. le Président, que nous suspendions l'étude des articles 11 à 15, si vous n'avez pas d'objection, nous avons une dernière vérification à faire sur ces articles pour certains amendements et cela faciliterait leur étude harmonieuse lorsque ces dernières vérifications auront été faites. Alors, j'imagine que mes collègues n'ont pas d'objection. On pourra y revenir.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Pas d'objection? M. le député.

M. Copeman: Une courte intervention, M. le Président, avant qu'on suspende. Il va de soi que j'espère que la ministre et ses conseillers vont tenir compte des commentaires de l'Office des personnes handicapées du Québec, reçus et diffusés à tous les membres de cette commission. Je ne veux pas faire le débat ici, mais je veux juste aviser la ministre immédiatement, pour que ce soit clair et limpide, que si le gouvernement ne tient pas compte des recommandations ou n'est pas capable de réfuter les recommandations de l'Office, elle va avoir certaines difficultés à nous convaincre, de ce côté de la table, de voter en faveur des articles 11 à 15. Parce que le noeud de la question est là, il y a des objections majeures de l'OPHQ et il faut que la ministre en tienne compte quand elle reviendra avec les articles suspendus.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Les articles 11 à 15 inclusivement sont suspendus. Nous reprenons...

Mme Marois: Je voudrais juste dire qu'effectivement – c'est d'ailleurs l'une des raisons qui expliquent que nous suspendions les articles – nous croyions, je dis bien, nous avions cru que ça ne posait aucune difficulté après nos consultations préliminaires avec l'Office. On a été un peu étonné, je dois dire, là – je le dis très simplement – mais nous allons prendre le temps de bien faire les choses, de regarder ce qui nous est proposé et on verra comment, s'il y a lieu, en tenir compte. Et on aura l'occasion d'en débattre ici.


Versement et recouvrement des prestations

Versement

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, Mme la ministre. Alors, les articles 11 à 15 inclusivement sont suspendus. Nous allons maintenant à l'article 16. Mme la ministre.

Mme Marois: «Les prestations familiales sont dues le premier jour du mois qui suit celui au cours duquel les conditions de leur attribution ont été remplies. Cependant, lorsqu'il y a un retard dans la production de la déclaration de revenus prévue à l'article 10, les prestations peuvent être rétroactivement payées à la date à laquelle les autres conditions ont été remplies.

«Un règlement du gouvernement peut prévoir des cas de versement anticipé des prestations.

«Les prestations peuvent être versées à des intervalles autres que mensuels suivant les règles prévues par règlement du gouvernement.»

Alors, je pense que l'article se lit de soi et il y a un amendement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il y a un amendement, Mme la ministre. Nous allons procéder immédiatement à l'amendement?

Mme Marois: C'est ça. Oui. Alors, dans la cinquième ligne du premier alinéa... Je vais relire la phrase pour y ajouter ce que l'on souhaite par cet amendement. On dit:

(22 h 40)

«Cependant, lorsqu'il y a un retard dans la production de la déclaration de revenus prévue à l'article 10, les prestations peuvent être rétroactivement payées – et là on introduirait l'amendement – à compter du premier jour du mois suivant lequel les autres conditions ont été remplies.»

C'est un amendement de concordance avec le libellé du deuxième paragraphe de l'article 18 qui va nous amener plus tard à traiter des séparations de conjoints et des règles qui doivent s'appliquer lorsque justement on a à intervenir en cours d'année pour déterminer à quel moment on paie et on verse l'allocation.

Et les autres aspects, évidemment, ce sont des éléments qui nous retournent au règlement pour des cas de versements anticipés, s'il y a lieu, ou d'intervalles de paiements pour les allocations.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Discussion d'abord sur l'amendement, M. le député?

M. Kelley: Non. Juste pour bien comprendre, si un enfant est né le 20 janvier, il est admissible à partir du 1er février? C'est ça qui est visé?

Mme Marois: C'est ça.

M. Kelley: Si, en fait, c'est une famille recomposée, c'est à partir du prochain mois...

Mme Marois: Il est payable à compter de... Évidemment, admissible, mais là, après ça, bien, une fois qu'on a les papiers remplis, on rétroagit.

M. Kelley: Oui, ça devrait être rétroactif, le deux mois et tout ce qui joue dans tout ça. C'est ça qui est visé. Dans l'amendement, c'est deux formes. Alors, l'amendement est adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Question de concordance aussi avec l'article 18.

M. Kelley: Oui. Ça, c'est adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est adopté? Alors, on revient à l'article 16, M. le député.

M. Kelley: Juste une couple de questions. Le deuxième paragraphe ou la deuxième phrase: «Un règlement du gouvernement peut prévoir des cas de versement anticipé des prestations.» C'est quoi les conditions ou les cas qui sont visés par ces versements anticipés?

Mme Marois: Ah! Voilà. Alors, lorsque le premier du jour du mois, par exemple, est un jour férié, le versement est anticipé au premier jour ouvrable qui précède. C'est à l'avantage du bénéficiaire.

M. Kelley: Alors, c'est ça...

Mme Marois: Je vois que votre collègue est très heureux, à côté de vous, là. Ha, ha, ha! Par exemple, le premier versement des nouvelles allocations sera fait non pas le 1er septembre mais le 29 août 1997, parce qu'on sera en plein congé à ce moment-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Kelley: Ou, si ça tombe sur une fin de semaine, c'est le même genre de situation, c'est le vendredi précédent?

Mme Marois: C'est ça. Lorsque le premier jour du mois est un jour férié, si la fin de semaine... Bien, la fin de semaine, c'est deux jours de congé habituellement, le samedi et le dimanche. Effectivement, le versement pourrait se faire le vendredi, à la date du vendredi, pour éviter qu'il y ait un retard.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: M. le Président, en ce qui concerne la période de versement, je vois dans le règlement que ça peut être autre que mensuel, par règlement. Et, si j'ai bien compris, il s'agit des articles 16, 17 et 18 du projet de règlement proposé. Est-ce que je suis dans le bon champ?

À l'article 17, l'allocation familiale est versée mensuellement dans le cas suivant, on indique le virement automatique. Si la personne demande qu'il se fasse mensuellement et si la personne reçoit le montant, est-ce que... Autrement dit, si aucune de ces trois conditions-là n'est remplie, par défaut, c'est trimestriel?

Mme Marois: Oui.

M. Copeman: Je soulève simplement la question, M. le Président. Ça met un peu le fardeau sur l'individu de remplir ou de signifier potentiellement une de ces deux conditions. Le choix ne s'applique pas à la troisième condition, parce que si la personne ne reçoit pas le minimum, c'est clair qu'elle ne se qualifie pas. Mais il y a un choix à faire dans les premier et deuxième paragraphes.

Une toute petite mise en garde, M. le Président: quand on met le fardeau un peu sur le bénéficiaire, ça renverse un peu le fardeau, là. Je comprends, mais je voulais signifier simplement que si, par défaut, par manque de compréhension ou par autre chose, une personne qui peut recevoir des prestations ne les reçoit pas, ne fait pas la demande qu'elles soient mensuelles, ça va tomber automatiquement trimestriel. C'est peut-être le seul choix qui est ouvert pour des raisons administratives, mais, dans un monde idéal, j'aurais peut-être préféré l'inverse, que ce soit automatiquement mensuellement et que, si la personne les voulait par trimestre, qu'elle fasse la demande par trimestre.

Mme Marois: Mais, là, écoutez, M. le Président, de toute façon, il faut que la personne opte, fasse une option, procède à un choix, parce qu'on ne peut pas décider de lui faire un virement automatique si on n'a pas le numéro de compte. Alors, il me semble que ça va comme de soi. Parce qu'on dit: «L'allocation familiale est versée mensuellement dans les cas suivants:

«1° si la personne opte pour le virement automatique mensuel de l'allocation à un établissement financier avec lequel le gouvernement conclut une entente prévoyant ce type de virement.»

M. Copeman: Oui, mais le deuxième...

Mme Marois: Alors, à partir du moment où il faut qu'elle opte, on lui demande qu'est-ce que va être son choix, donc elle a immédiatement la possibilité de dire: Bien, moi, je préfère que ce soit un chèque et qu'il soit versé mensuellement. Puis, on lui dit: Si ce n'est pas le cas, si vous ne faites pas ça, il y a une troisième option que, nous, on appliquera; on vous l'enverra tous les trois mois. Mais, moi, je pense que c'est raisonnable parce qu'on travaille avec de grands nombres. On leur donne la possibilité de choisir.

(Consultation)

Mme Marois: Je savais qu'il y avait autre chose. C'est cependant seulement pour l'allocation minimale. Aussitôt qu'on va recevoir plus que l'allocation minimale, ça va être une allocation mensuelle. Vous l'avez au paragraphe 3° de l'article 17. C'est ça, on lisait seulement les deux premiers. La personne reçoit plus que le montant minimum d'allocation familiale prévue au troisième alinéa? À ce moment-là, elle est versée mensuellement. Donc, ça réduit de beaucoup le poids pour les familles de choisir et elles ont à choisir de toute façon: Est-ce qu'on le verse dans mon compte-chèque à la banque ou à la caisse populaire ou je le reçois mensuellement?

Et, on a fait des simulations sur ça à la Régie à partir de l'expérience qu'on a, de ce que l'on connaît maintenant. On dit: Au total des 724 000 bénéficiaires, il y aura 567 000 bénéficiaires qui seront payés par dépôt direct, 102 000 normalement seraient payés par chèque mensuel et 55 000 payés par chèque trimestriel.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Copeman: Juste pour m'assurer que j'ai bien compris, là.

Mme Marois: C'est une simulation, évidemment.

M. Copeman: Oui. Dès que le montant dépasse le minimum, il est automatique que ce soit mensuel.

Mme Marois: C'est ça.

M. Copeman: Ça répond à mes préoccupations à 95 %.

Mme Marois: Je pense que oui, hein.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Autres interventions?

Mme Marois: Parfait.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste un petit point d'information. Est-ce qu'il y a des économies importantes à encourager des virements automatiques?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Lacroix?

Mme Marois: Est-ce qu'il y a des économies importantes par le virement automatique? Moi, mon souvenir, c'est qu'il y en avait beaucoup parce que c'est toute la manipulation, c'est tout l'envoi, les frais postaux et tout le reste, donc on y va, vous allez me passer l'expression, me la pardonner, on y va par «batch», à ce moment-là. On dépose un certain nombre de chèques à telle institution financière. Évidemment, il y a un traitement aussi qui doit se faire, mais c'est d'un autre ordre à ce moment-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député.

M. Kelley: Et ce serait souhaitable d'encourager les 102 000 qui optent pour un chèque mensuel à changer leur comportement.

Mme Marois: Évidemment. De les amener à ce qu'ils proposent le dépôt direct. D'ailleurs, je pense qu'il n'y a pas d'entreprises actuellement qui n'ont pas la possibilité de le faire, qui ne l'offrent pas à leur personnel ou à leurs gens.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que l'article 16 est adopté? Adopté tel qu'amendé, je m'excuse.

Mme Marois: Adopté.


Recouvrement

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Article 17. Mme la ministre.

Mme Marois: Je me permets de noter mes articles adoptés; ça fait tellement plaisir quand on progresse comme ça. Alors, on va y arriver.

Une voix: On progresse constamment.

Mme Marois: On progresse constamment, je n'en disconviens pas. Lentement mais sûrement. Les prestations familiales peuvent être payées rétroactivement pour une période de 12 mois incluant celui de la demande.

(22 h 50)

Une voix: Ça progresse allègrement?

Mme Marois: Non, ça va, le rythme...

M. Kelley: Si on va trop vite pour la ministre, on peut ralentir. On est toujours...

Mme Marois: La ministre peut aller beaucoup plus vite, il n'en tient qu'à l'opposition. Je suis prête. Le but de l'article 17, évidemment, est de permettre à une personne qui aurait tardé de présenter une demande d'être payée rétroactivement jusqu'à concurrence de 12 mois incluant le mois de la demande. En fait, ça reprend, cet article, une disposition de la loi actuelle qui concerne les allocations d'aide aux familles.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Est-ce qu'il y a des questions?

M. Kelley: Juste une. Dans l'article 13, dans le cahier de l'ancien régime, on parle d'exception pour l'adoption d'un enfant. Est-ce que la situation d'une adoption est traitée autrement ou est-ce que c'est uniquement l'allocation à la naissance qui est couverte et qui n'existe plus?

Mme Marois: Non, j'imagine que c'est toute l'allocation familiale, peu importe la circonstance, que ce soit par adoption ou par naissance naturelle, si on veut. La venue d'un enfant.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Kelley: C'est juste parce que ça dit «à l'exception toutefois de l'allocation à la naissance payable en vertu», alors, vu que...

Mme Marois: C'est parce que là, dans l'autre cas, l'allocation à la naissance qui existait dans le passé n'existera plus à partir d'octobre, sauf évidemment pour ceux et celles qui l'ont déjà et jusqu'à expiration du programme.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que l'article 17 est adopté?

M. Kelley: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. Article 18. Est-ce que vous voulez donner un complément de réponse?

Mme Marois: Ah! Juste une chose intéressante: il faut voir que la rétroactivité n'est pas limitée, cependant, lorsqu'une déclaration de revenu amendée est transmise à la Régie par le ministère du Revenu.

Imaginons que le ministère du Revenu a fait une évaluation puis nous envoie le revenu net puis on dit: C'est ça. On vous fait l'allocation et tout puis, huit mois plus tard, un an plus tard, on reçoit une modification où on dit: Le Revenu avait mal évalué, avait fait une erreur de bonne foi, administrative ou autre. On peut rétroagir plus loin que 12 mois.

M. Kelley: Y compris un trop-versé?

Mme Marois: Un trop-versé, ça on l'a toujours dit, qu'à ce moment-là il n'y avait pas de rétroaction sur le trop-versé. Il peut y en avoir une? Trois ans? Ah oui! C'est vrai. Vous avez raison. Non, je confondais avec le versement de l'allocation sur une année selon que le revenu change, ça n'a rien à voir.

M. Kelley: Et la rétroactivité dans 17, ça va dans les deux sens. Si le revenu net amendé est inférieur, ça va être au bénéfice des familles concernées.

Mme Marois: Bien sûr.

M. Kelley: Mais si le revenu net est supérieur, on peut réagir jusqu'à trois ans?

Mme Marois: Il y a une compensation.

M. Kelley: Alors si, pour une raison x... Je ne peux pas imaginer pourquoi trois ans de suite. Mais, s'ils ont fait la découverte d'un revenu caché, oublié par un contribuable, mettons, on peut corriger juste trois ans en arrière pour prendre le nouveau portrait de la situation.

Mme Marois: C'est ça, dans le cas d'un paiement fait en trop, c'est trois ans; mais, dans le cas d'une amélioration pour la situation de la famille, il n'y a pas de limite. Sauf que la Loi de l'impôt doit en prévoir, quand même, une limite. Non? On ne peut pas rétroagir plus que cinq ans?

(Consultation)

Mme Marois: Bon. Bien alors, donnez-nous l'information.

M. Laliberté (Louis-Marc): Il y a un programme d'équité fiscale qui permet de remonter jusqu'en 1985 quand c'est à l'avantage du contribuable.

Mme Marois: Alors, ce qui veut dire que, dans le fond, c'est 12 ans à partir de maintenant. Donc, c'est quand même... Puis ce sera comme ça pour la suite des choses. Donc, je pense que c'est intéressant. On rétroagit sur une période beaucoup plus courte lorsqu'il s'agit de récupérer des sommes versées en trop. Puis, lorsque c'est à l'avantage de la famille, on n'a presque plus de limite, hein? Douze ans, c'est...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Pour fins d'enregistrement, on est toujours sur l'article 17. M. le député de Nelligan.

Mme Marois: Il n'est pas adopté?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, même si on l'a adopté, là.

Mme Marois: Il est adopté. Oui, c'est ça.

M. Williams: Oui. Et je ne veux pas me mêler – nous avons adopté ça – et mêler l'article 21. En cas de trop-paiement, je vois que le contribuable doit repayer ça, sauf si cela a été versé à la suite d'une erreur administrative que cette personne ne pouvait raisonnablement constater. Avec ça, si, pendant trois ans, ils ont reçu trop d'argent, ils n'ont pas raisonnablement constaté, ils n'étaient pas au courant. Il me semble que, selon cet article, ils n'ont pas besoin de repayer ça. Qu'est-ce que ça veut dire?

Mme Marois: C'est une erreur administrative.

M. Williams: Ou on peut attendre pour 21.

Mme Marois: Oui, mais attention là, c'est une erreur administrative que cette personne ne pouvait raisonnablement constater. Cependant, si c'est parce que la famille n'a pas déclaré un changement de situation, là, évidemment, ce n'est pas une erreur administrative.

M. Williams: Non, c'est une autre affaire, là.

Mme Marois: Oui, c'est ça.

M. Williams: C'est deux choses différentes. Avec ça. si le ministère du Revenu avait déclaré un montant trop haut pendant trois ans, basé sur une erreur administrative, la famille n'a pas besoin de repayer ça selon cet article de loi.

Mme Marois: Je n'ai pas compris le début de votre intervention.

M. Williams: S'il y a quelque chose de caché ou de changé par la famille, je comprends, il y a les autres articles.

Mme Marois: C'est ça.

M. Williams: Mais, si la famille a déclaré tout ça, vous savez, il y a des erreurs au ministère du Revenu, malgré les bons efforts. Selon cet article...

Mme Marois: Si c'est une erreur, la famille n'est pas pénalisée. D'accord.

M. Williams: O.K.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, on prend l'article 18. Mme la ministre.

Mme Marois: «En cas de séparation de fait des conjoints, les règles suivantes s'appliquent:

«1° le conjoint ne peut être considéré comme séparé que si la séparation, due à la rupture de l'union, dure depuis au moins 90 jours – j'avais expliqué ça tout à l'heure;

«2° les prestations familiales modifiées qui peuvent en résulter sont versées à compter du premier jour du quatrième mois suivant la séparation; elles sont cependant payées rétroactivement à compter du premier jour du mois suivant la séparation.»

Je pense que ça explicite très bien ce qu'on a déjà discuté préalablement à l'occasion d'un autre article, je crois.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste parce que je suis très peu familier avec ce qui arrive au moment de la rupture et tout ça – heureusement – on peut être séparé et toujours demeurer dans la même résidence, si j'ai bien compris. Je me pose la question.

Mme Marois: La notion de résidence familiale.

M. Kelley: J'ai un cadre très précis parce qu'on a aidé une amie à déménager en fin de semaine, qui était dans cette situation. Elle est allée voir un avocat avant Noël, ils ont décidé de faire une entente de séparation. Ils n'avaient pas beaucoup de revenus, alors ils ont dû vendre la maison dont ils étaient les propriétaires conjoints. En attendant, ils étaient toujours sous le même toit, séparés. Alors, c'est quoi juste légalement? Je ne sais pas. Pour faire preuve d'une séparation de fait, est-ce que ça prend une entente d'un avocat? Ça prend quoi pour signaler une séparation de fait ou est-ce que c'est juste une déclaration ou est-ce qu'il faut faire preuve de deux adresses distinctes?

Mme Marois: Non. On me dit que c'est une question de fait et qu'en les déclarant on considère qu'il y a séparation.

M. Kelley: C'est juste pour actualiser ça. Je demande: Comment le couple va signaler ça auprès de la Régie? Parce que, comme la ministre en est très consciente, souvent, ces ruptures, une des choses qui vont avec, c'est un changement important dans le revenu d'un des deux conjoints, trop souvent la femme. C'est la mécanique que je cherche. Je comprends très bien le principe de l'article, mais un couple qui vit une séparation, qui est tout à fait différente d'un divorce, c'est quoi les démarches, c'est quoi le processus d'un genre d'un signalement qu'il faut faire? On a traité tantôt des documents que la Régie peut demander, elle peut demander tout document. Alors, j'aimerais savoir les preuves ou c'est quoi la mécanique qu'il faut mettre en place pour mettre en vigueur le premier alinéa?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On parle bien d'une séparation et non d'un divorce. Mme la ministre.

Mme Marois: Il y a un formulaire à remplir, simplement. C'est d'ailleurs toujours la même chose, parce que l'admissibilité étant constatée par Revenu Canada, c'est un formulaire qui est envoyé à Revenu Canada et qui nous est ensuite transmis. C'est eux qui constatent l'admissibilité. Généralement, c'est par une simple déclaration. Évidemment, si on a le jugement de cour, j'imagine qu'il peut se mettre en référence ou en annexe. C'est par une simple déclaration.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Kelley: Oui. C'est juste ce genre de précision pour voir...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

(23 heures)

M. Williams: Une petite question. Dans le sous-paragraphe 1°, on parle «si la séparation due à la rupture de l'union». Est-ce que ces mots «due à la rupture de l'union» sont vraiment nécessaires? Il y a une interprétation de «due à quelque chose», mais je pense que la chose la plus importante est: Est-ce qu'il y a une séparation de 90 jours? Pourquoi nous avons fait ce jugement que ça doit être dû à une rupture de l'union? Est-ce qu'ils sont complètement utiles, ces mots, ou est-ce que ça change...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre ou M. Lacroix.

Mme Marois: Non, ça va aller. En fait, le conjoint ne peut être considéré comme séparé que si la séparation est due à la rupture de l'union, parce qu'on pourrait être séparé aussi, je me dis, physiquement, pour un temps, puis qu'il n'y ait pas eu rupture...

M. Kelley: Une session parlementaire.

Mme Marois: Pardon?

M. Kelley: Une session parlementaire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Nous connaissons cela, nous. Tiens, voilà! Donc, il y a eu vraiment rupture de l'union; sinon, évidemment...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que j'aurais le consentement pour permettre au député de Roberval de poser une question ou de faire une intervention?

Mme Marois: Bien sûr, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, consentement. M. le député de Roberval.

M. Laprise: Tout simplement une information. Est-ce que ça va être possible avec cette politique, avec cette séparation financière... Assez souvent, on se fait dire à nos bureaux, des gens qui viennent nous voir, qui ont des enfants, qui ont des besoins particuliers, vont dire que les travailleuses sociales disent, à un certain moment donné: Si vous étiez séparés, vous en auriez plus. Est-ce que cette politique-là va nous permettre justement d'être plus clairs dans ce genre de chose-là et d'éliminer ce genre de... Parce que, encore cette semaine, moi, j'ai eu un couple qui est venu me voir, avec des besoins particuliers, et on leur a dit ça.

Mme Marois: Alors, c'est exactement ce que l'on fait, à savoir qu'on rend la situation équitable selon qu'on a un revenu de telle hauteur, peu importe qu'on soit une famille unie ou une famille qui s'est séparée, à une seule différence près qu'une famille monoparentale, si elle a son premier enfant, le niveau des besoins est considéré un peu plus élevé que celle qui se retrouve dans une famille biparentale. C'est la seule différence qu'il y a, sinon on tient en compte le revenu et, à partir du revenu, de l'âge des enfants, l'allocation est versée. Et, à ce moment-là, on traite équitablement, je crois, autant les couples unis que les couples qui ont dû vivre une séparation.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Oui, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Pourquoi 90 jours? Est-ce que c'est une notion dans le Code de procédure civile?

Mme Marois: Quatre-vingt-dix jours est quand même une règle qui permet de constater qu'il y a eu une, enfin, une séparation qui risque d'être malheureusement...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Plus permanente.

Mme Marois: ...plus longue et plus permanente. Donc, en ce sens, je pense que c'est un critère qui a de l'allure. Là encore, c'est harmonisé cependant avec ce que fait Ottawa à cet égard.

M. Copeman: Si j'ai bien compris la portée du paragraphe 2°, pendant cette période de 90 jours, la personne qui a l'enfant à charge, admettons, lors d'une rupture, ne peut pas recevoir des prestations?

Mme Marois: C'est-à-dire qu'elle reçoit les prestations qu'elle recevait déjà si elle a la charge des enfants, et normalement elle a la charge puisqu'elle va les réclamer. Elle reçoit donc les prestations qu'elle recevait déjà. Si le fait est que...

M. Copeman: S'il y a des changements dus à sa situation?

Mme Marois: ... – voilà – son revenu, par exemple, soit moins important, bien, là il y aura une correction pour la différence.

M. Copeman: Qui est rétroactive.

Mme Marois: C'est ça, qui est rétroactive. Donc, la personne n'est pas pénalisée.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Est-ce que l'article 18 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. Article 19, Mme la ministre.

Mme Marois: «Les prestations familiales cessent d'être dues le premier jour du mois qui suit celui au cours duquel les conditions cessent d'être remplies. Toutefois, le décès de l'enfant au cours du mois de sa naissance ne prive pas du droit à une prestation pour ce mois.»

Alors, les prestations familiales cessent d'être dues le premier jour du mois qui suit celui au cours duquel les conditions cessent d'être remplies. Bien, ça va de soi. L'enfant a atteint 18 ans, il n'est plus admissible. Ou le décès de l'enfant: «...au cours du mois de sa naissance ne prive pas du droit à une prestation pour ce mois.»

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a des questions sur cet article? Oui, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Juste m'assurer qu'il n'y a aucune contradiction entre l'article 19 et des changements de seuil de revenu. Quand on dit «les conditions cessent d'être remplies», on fait référence à quoi exactement dans «les conditions»? Est-ce qu'il s'agit uniquement de l'éligibilité de l'âge? Il faut revenir quelque part au projet de loi, j'imagine.

Mme Marois: Il faut revenir évidemment à la loi qui définit quelles sont les conditions à remplir. Alors, on a qui «a droit aux prestations familiales», à l'article 2, dans un premier temps. Et l'article 1, évidemment, qui dit: «allocation familiale, variable selon le revenu». L'article 2 dit les conditions et l'article 6, lui, définit qui reçoit la prestation, qui a la charge des soins et de l'éducation de l'enfant.

M. Copeman: Et on vient de dire, si j'ai bien compris, M. le Président, à un moment donné... Mettons que la situation surtout des revenus varie à un moment donné et qu'à cause d'une augmentation de revenus au courant de l'année on tombe à zéro. Si j'ai bien compris, la ministre a dit tantôt qu'on ne tient pas compte des changements de revenus en ce qui concerne l'attribution pendant l'année. Il n'y a aucune contradiction avec l'article 9 qui dit que quand les conditions cessent d'être remplies, les prestations familiales cessent d'être dues le premier mois du jour qui suit celui au cours duquel les conditions cessent d'être remplies. Je ne sais pas si je m'exprime assez bien, là.

Mme Marois: Il n'y a pas de contradiction. C'est ça, les conditions sont différentes de ce qui concerne le revenu. Les conditions sont celles qui ont été décrites par l'article 2.

M. Copeman: Uniquement.

Mme Marois: Oui.

Le Président (M. Bertrand (Charlevoix): Ça va?

Mme Marois: Les articles 2, 4 et 6, parce que, évidemment, là, on les décrit ensuite.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

Mme Marois: L'article 4, c'est 18 ans; c'est ça.

M. Kelley: Notre recherchiste a mentionné un cas très précis. La mécanique pour aviser la Régie du décès d'un enfant, pas suite à la naissance mais en règle générale... Elle est au courant d'un dossier où les parents peut-être n'ont pas avisé le gouvernement rapidement ou avaient dans la tête les funérailles et les autres choses. Il y a eu des lettres pour le trop-versé, pour une couple de mois, qui étaient dans la balance et qui sont un petit peu arrivées avec une épreuve comme ça, tragique. Je pense que tout le monde autour de la table peut comprendre que ces lettres tombaient d'une façon très difficile.

Alors, c'est quoi la mécanique pour aviser la Régie que les conditions cessent d'être remplies et est-ce qu'il y a une manière d'éviter que ce genre de situations provoque ce genre de lettres? Est-ce que la Régie serait capable de couper les paiements assez rapidement pour ne pas être obligé d'aller chercher le trop-payé après, auprès des familles qui sont dans le deuil?

Mme Marois: Actuellement, c'est toujours le même principe, le même mécanisme: la Régie reçoit les renseignements de Revenu Canada, à qui on doit déclarer le décès. Parfois certaines personnes s'adressent directement à la Régie et, dans ce cas, évidemment, une demande est complétée puis la Régie met en paiement le mois du décès mais arrête aussi les paiements pour la suite des choses. C'est vrai, donc, que ça peut causer le problème que vous soulevez, c'est tout à fait juste.

Par contre, la Régie travaille actuellement en vue de signer une entente avec le directeur de l'état civil, et là, on serait averti du décès de l'enfant. Ce qui fait qu'immédiatement on pourrait communiquer avec la famille et, évidemment, annoncer qu'on ne versera plus les sommes dues pour l'allocation, compte tenu que l'enfant est décédé, sauf pour le mois du décès. Le mois du décès sera couvert mais pas les mois subséquents.

Donc, ça permettra d'éviter des situations comme celle-là, de ne pas amener la famille à devoir poser un geste qui, parfois, là, évidemment, on ne compose pas dans des circonstances comme ça parce qu'on est trop préoccupé par ce qui vient d'arriver, qui est tout le temps dramatique, qu'on le veuille ou non. Alors, voilà, c'est ça. Mais, pour l'instant, c'est le mieux qu'on peut.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Si on veut pousser plus loin, c'est une situation qu'on retrouve aussi chez les adultes, un décès, puis ça arrive parfois que la même situation se produit...

(23 h 10)

Mme Marois: Bien oui, c'est sûr. Puis dans certaines circonstances, viennent modifier...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que ça va pour l'article 19? Est-ce que l'article 19 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. L'article 20, Mme la ministre.

Mme Marois: Nous y arrivons, M. le Président. «Lorsque la personne qui reçoit les prestations familiales prive l'enfant du bénéfice de ces prestations, la Régie peut les verser à une autre personne ou à un organisme – on l'avait regardé tout à l'heure;

«Cette personne ou cet organisme doit tenir une comptabilité de l'administration des prestations reçues pour chaque enfant visé et, sur demande, rendre compte à la Régie de son administration.»

Ici, je voudrais donner peut-être quelques explications, M. le Président. Comment la Régie peut-elle faire le constat qu'une personne prive l'enfant du bénéfice de la prestation qu'il reçoit? En fait, je le disais tout à l'heure, la Régie ne fait pas d'enquête systématique. Toutefois, si à la suite d'information reçue, soit du gouvernement fédéral ou d'une dénonciation provenant d'une autre source, on croit vraisemblable que les prestations ne sont pas utilisées pour les besoins de l'enfant, on peut décider d'enquêter. La Régie peut décider d'enquêter.

D'ailleurs, elle est investie à cette fin des pouvoirs des commissaires nommés en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui a une intervention? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Je comprends très bien que c'est quand c'est porté à l'attention de la Régie qu'on va voir si effectivement les prestations ont été utilisées pour le bénéfice des enfants. Mais, c'est quoi les personnes ou les organismes visés? On parle de verser... C'est un centre d'accueil, une famille d'accueil, une autre personne? Ça soulève la possibilité qu'on peut les verser à un autre membre de la famille autre que le père et la mère. Est-ce qu'une tante ou une grand-mère...

Mme Marois: Tout est possible, effectivement. On peut les verser à la personne qui va prendre charge de l'enfant, n'est-ce pas? Ma mémoire me fait un petit peu défaut sur ça, mais, dans la Loi sur la protection de la jeunesse, il y a des possibilités de confier la garde d'un enfant à une personne de la famille. On peut confier à une famille d'accueil; dans ce cas-là, on a vu comment ça se faisait, tout à l'heure. Mais ça peut être une personne apparentée, une tante, un oncle, un grand-parent. Et, à ce moment-là, c'est la personne qui prend charge de l'enfant et l'allocation peut être versée à cette personne pour les fins de l'enfant.

Évidemment, ici, c'est dans le cas où on constate que les prestations familiales, la personne qui les reçoit en prive l'enfant. L'enfant n'en bénéficie pas. Alors, là, c'est une circonstance bien particulière; mais, au-delà de ça, s'il y a une circonstance qui fait que le parent est considéré inapte ou incapable d'assumer la responsabilité de son enfant, que l'enfant est confié à une autre personne, bien là, il y a une possibilité que cette allocation soit versée à l'autre personne aux fins du bénéfice de l'enfant. Cette règle-là existe maintenant.

M. Kelley: Juste pour mieux le comprendre, alors, il y a toujours la possibilité que soit la famille va verser le montant directement à l'établissement des services sociaux ou la Régie va opter ou la famille va opter pour avoir un paiement direct de la Régie vers l'établissement de la santé?

Mme Marois: «Cette personne – on dit – ou cet organisme doit tenir une comptabilité de l'administration des prestations reçues [...] et, sur demande, rendre compte à la Régie de son administration.»

Je posais la question au personnel de la Régie qui est avec moi. On me dit que c'est exceptionnel. C'est vraiment très très rare comme cas. Allez donc, monsieur.

M. Lacroix (Marc): Oui, c'est très très rare, c'est exceptionnel. La Régie, à toutes fins pratiques, peut utiliser cette disposition. C'est probablement parce qu'on ne gère pas encore l'admissibilité et que les gens n'ont pas à s'adresser directement à la Régie, ils le font plutôt à Revenu Canada. Alors, nous, il faut savoir, on le répète, Revenu Canada nous transmet de l'information. Nous lisons des rubans et nous payons en fonction de l'information sur les rubans. En résumé, c'est la situation.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que je peux me permettre une question? Si une personne vous appelle, à la Régie, pour vous informer que, selon elle, les conditions ne sont pas remplies, est-ce que vous pouvez agir sans référer au fédéral?

M. Lacroix (Marc): C'est-à-dire que nous informons nos partenaires de Revenu Canada qui font, à ce moment-là, les changements ou qui, lorsque la situation le justifie, déclenchent une enquête sur le cas, et puis à ce moment-là ils nous renvoient l'information ajustée.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a des questions additionnelles?

M. Kelley: Et sans passer par le système de protection de la jeunesse?

Mme Marois: Bien, c'est-à-dire que j'imagine que...

M. Kelley: C'est les besoins essentiels que la ministre a énumérés tantôt. Alors, si on n'utilise pas les prestations pour combler ces besoins essentiels, c'est quasiment un cas d'abus.

Mme Marois: Bien, là, la Régie aurait l'obligation de signaler, parce qu'on sait que dans la Loi de la protection de la jeunesse, il y a une obligation de signaler le cas d'un enfant qui vit une situation de dénuement ou une situation d'insécurité ou autre majeure, évidemment.

M. Kelley: Parce que même une chambre et quelques vêtements pour une année... Si l'enfant a une chambre et des vêtements, on peut dire que le bénéfice est respecté; ça ne prend pas énormément, compte tenu des coûts pour...

Mme Marois: C'est ça.

M. Kelley: Les vrais coûts pour prendre soin d'un enfant dans notre société sont beaucoup plus élevés. Alors, ce n'est pas difficile d'arriver avec un montant qui dit que l'enfant a le bénéfice des prestations. Alors, de faire la preuve qu'il est privé, j'en conviens avec M. Lacroix, ça doit être très, très exceptionnel et ça doit être carrément un cas d'abus.

Mme Marois: C'est ça, et, à ce moment-là, c'est en vertu d'une autre loi qu'on intervient, par signalement...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il y a des mécanismes de prévus.

Mme Marois: Qui est la Loi sur la protection de la jeunesse.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan, je crois.

M. Williams: Oui. C'est un peu dans la même direction que le député de Jacques-Cartier l'a déjà demandé, parce que je voudrais m'assurer qu'on passe par les instances appropriées avant qu'on ne puisse décider que les besoins de nos enfants ne sont pas respectés. J'espère que nous allons avoir l'implication du CPJ. On doit faire la prise en charge et toutes les démarches nécessaires.

Mais, si j'ai bien compris la dernière intervention, c'était vraiment pour les cas exceptionnels. On ne veut pas établir une règle qui nous laisse un système où on peut verser les allocations familiales à une autre personne ou à une organisation; c'est vraiment, cet article, pour les cas exceptionnels. C'est ça?

Mme Marois: Oui.

M. Williams: Et la Régie a ce droit maintenant sur les autres allocations. Et vous avez utilisé ça combien de fois, ce pouvoir? Plus ou moins?

M. Lacroix (Marc): Écoutez, je ne le sais pas, mais exceptionnellement.

M. Williams: Moins d'une dizaine de fois?

M. Lacroix (Marc): Ah, beaucoup moins.

M. Williams: O.K.

M. Lacroix (Marc): Très, très rarement.

M. Williams: O.K.

Mme Marois: On pourrait peut-être, comme on n'aura pas terminé l'étude du projet de loi – enfin, ça pourrait arriver...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il faudrait peut-être faire une petite recherche.

Mme Marois: ...quand même qu'on termine avant minuit – on pourrait...

M. Williams: On achève pas mal vite, je trouve.

Mme Marois: ...quand même s'engager à transmettre l'information.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Peut-être faire faire une petite recherche pour quand on va revenir.

M. Williams: Oui, oui. La raison pour laquelle j'ai questionné – je retourne à l'exemple du Bon Dieu dans la rue – c'est quand j'ai vu qu'on peut verser un montant d'allocation familiale à une organisation. J'ai trouvé que peut-être, suivant la question du député de Jacques-Cartier, ça va être une façon de s'assurer que nos jeunes plus ou moins sans abri puissent avoir une allocation familiale. Mais, selon la réponse que j'ai juste reçue, je pense que ce n'est pas possible. Si j'ai bien compris, ce n'est pas l'intention de cet article.

Mme Marois: Il semble qu'il n'y aurait pas eu de cas formellement, qu'on me dit, déjà. Non. Évidemment, je reviens à ce que j'expliquais cet après-midi, à savoir qu'il faut que l'enfant vive habituellement... et que la personne s'occupe de son éducation et de répondre à ses besoins. Donc, à ce moment-là, évidemment, un organisme comme celui dont on fait état, c'est un organisme qui dépanne, je dirais, de façon très spécifique et très pointue à un moment dans le temps, etc., qui aide les jeunes; je ne dis pas qu'il n'aide pas, mais évidemment ça ne répond pas aux critères de la loi.

Une famille d'accueil qui recevrait un enfant, une institution, évidemment; mais alors, à ce moment-là, le gouvernement supporte cette institution autrement. On ne va pas commencer à verser une allocation familiale là, on verse à ce moment-là des sommes pas mal plus considérables que les allocations familiales pour prendre en charge au complet l'enfant. Parce qu'on est bien conscient que les allocations que nous versons, ça couvre les besoins essentiels de base, mais l'enfant, normalement, a accès à plus de ressources que ce qui est versé par l'allocation familiale.

(23 h 20)

M. Williams: Oui, mais dans le cas dont nous avons discuté cet après-midi, j'ai pensé que peut-être ça pourrait être un moyen d'aider ces enfants.

Mme la ministre, vous avez parlé de verser à une autre personne ou à un organisme qui a la charge de l'enfant, vous avez parlé d'une personne qui serait responsable de l'enfant. Est-ce que ça va mieux respecter l'esprit de cet article 20 d'ajouter cette définition de à quel type de personne on peut envoyer, on peut verser ces allocations familiales? D'utiliser les mots, au début du projet de loi «à la charge d'enfants» ou «responsable de l'enfant», je laisse les mots, à vous de choisir, mais est-ce que ça serait mieux de préciser, dans cet article qui est pour les cas exceptionnels, avant d'ouvrir l'opportunité trop large, d'arriver avec une balise qui explique que juste la personne ou une organisation qui prend la responsabilité, la charge de l'enfant peut avoir ces sommes, ces allocations familiales?

Mme Marois: Mais, là, l'économie de la loi prévoit ça. C'est déjà ailleurs dans la loi, où on dit à quoi doivent servir les sommes. À partir du moment où ce n'est pas le parent qui les reçoit pour les fins de répondre aux besoins essentiels, l'autre personne qui les recevrait les recevrait pour répondre à ces mêmes besoins essentiels. Alors, de toute façon, on ne peut pas les verser autrement que pour ça. Si c'est un organisme de santé ou de services sociaux qui autrement est déjà pourvu par des fonds gouvernementaux, on ne peut pas verser l'allocation familiale, évidemment, là. Je le répète, souvent les sommes versées aux jeunes sont pas mal plus élevées pour les recevoir en institution que l'allocation elle-même qui est versée. Parce que le coût d'une place en centre d'accueil, c'est...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

Mme Marois: ...probablement pas mal plus cher que notre 2 600 $.

M. Williams: Si le cas arrive – parce que, selon la réponse que j'ai reçue, vous n'avez pas vraiment eu de cas – ça prend juste un engagement de cette personne de dire qu'effectivement elle va prendre la responsabilité de l'enfant, elle va respecter les engagements...

Mme Marois: Les soins.

M. Williams: Ce n'est pas une entente, ce n'est pas un contrat, c'est un engagement verbal?

Une voix: C'est une comptabilité.

M. Williams: Oui, effectivement, M. le député, avec le deuxième paragraphe, il y a une certaine comptabilité.

Mme Marois: C'est ça.

M. Williams: Mais ça peut être n'importe quelle personne?

Mme Marois: La Régie peut les verser à une autre personne ou à un organisme. On pense ici à un CLSC, par exemple, qui, à la limite, pourrait...

M. Williams: Et ça peut être un oncle, une famille, un voisin, quelqu'un qui prend la responsabilité de l'enfant.

Mme Marois: Oui. Mais, évidemment, à ce moment-là, il y aura eu une entente, j'imagine, avec les services sociaux, donc le CLSC ou la DPJ, si c'est un cas de protection.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Williams: Je veux juste m'assurer: Cette entente, vous prenez ça comme acquis? Nous n'avons pas besoin de dire qu'effectivement il doit y avoir une entente pour la protection de l'enfant avant de verser ces sommes. Vous prenez ça comme acquis qu'effectivement le réseau va arranger ça.

Mme Marois: Évidemment, on ne va pas verser si la personne n'est pas responsable; il faut constater le fait qu'elle est responsable. Et, évidemment, s'il y a des cas de dénuement... Il n'y a pas de cas où il n'y a pas formellement une institution qui est impliquée.

M. Williams: O.K.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Une affaire minime, M. le Président. La ministre a déposé des papillons pour des précisions linguistiques en langue anglaise. Je pense que ce serait peut-être utile de regarder la version anglaise du deuxième alinéa de l'article 20: «The person or organization must keep accounts detailing the administration of the benefits received for each child concerned and must, on request, account to the Board for the administration.»

Il me semble que ce serait plus clair et plus précis si on disait «for their administration». On dit en français «son administration» et pas «l'administration». Alors, une suggestion que je fais peut-être à la ministre de regarder la question puis de revenir avec un papillon.

Mme Marois: On verra. On va vérifier, ici, nos linguistes vont regarder ça, si ça ne vous embête pas.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Est-ce que l'article 20 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Article 21, Mme la ministre.

Mme Marois: L'article 21. «La personne qui reçoit des prestations familiales sans y avoir droit ou qui ne les utilise pas pour les besoins de l'enfant doit les rembourser à la Régie, sauf si elles ont été versées par suite d'une erreur administrative que cette personne ne pouvait raisonnablement constater.

«S'il est établi qu'une autre personne aurait dû recevoir les prestations familiales, le versement de celles-ci demeure valablement fait si elles ont été utilisées pour les besoins de l'enfant.»

En fait, cette dernière règle vise à ne pas réclamer le montant des prestations familiales lorsque l'enfant en a bénéficié, même si le destinataire ne remplissait pas toutes les conditions pour les recevoir. On peut penser ici au changement de garde de l'enfant. À partir du moment où les sommes sont allées pour l'enfant...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a des questions? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: J'ai transigé longuement avec votre collègue la ministre de la Culture parce qu'elle a parlé du flou nécessaire dans les lois pour une certaine souplesse. Ce n'est pas mon expression, c'est l'expression de la ministre députée de Chambly. On a quand même qu'une «personne ne pouvait raisonnablement constater». C'est toujours, autour de ces questions: C'est quoi qui est raisonnable? Si, tout à coup, sans changement de mon statut, sans ajout d'enfants, sans d'autres changements dans ma situation, je vois mes allocations doubler, est-ce que c'est raisonnable que je continue de les encaisser ou est-ce que c'est irraisonnable de ne pas se questionner sur tout ça?

Mais on peut imaginer, surtout par un virement automatique, le va-et-vient qui est dans le compte de banque d'une famille typique au Québec. Il y a beaucoup de choses qui viennent, qui sortent et tout ça. Alors, ce n'est pas nécessairement qu'on va regarder d'une façon détaillée nos talons des déclarations bancaires pour dire: Oh! c'est curieux que ça ait doublé. Alors, c'est juste pour voir comment, dans la tête de la ministre, comment ces personnes qui l'accompagnent vont définir la notion de «raisonnablement». Juste pour donner quelques indications. Je sais qu'on ne peut pas tout prévoir à l'avance, mais c'est quoi qui est raisonnable, c'est quoi un constat ou c'est quoi l'expérience que nous avons eue dans l'application d'autres lois qui peut nous guider un petit peu sur c'est quoi un constat raisonnable par des parents qui ont un «trop-versé»?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la ministre.

Mme Marois: On me mentionne ici que c'est une situation qui a été maintes fois constatée à la Sécurité du revenu et il y a une jurisprudence qui s'est établie avec la Commission des affaires sociales. Donc, la notion de «raisonnablement», qu'elle ne pouvait raisonnablement pas constater, a été documentée, si on veut, par les expériences passées. Maintenant, en se référant à cela, on n'a pas de difficultés quant à l'interprétation.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va?

M. Kelley: Mais je cite des exemples. La Régie, au lieu d'utiliser le revenu supérieur d'un des conjoints, de transposer les chiffres ou quelque chose comme ça, a pris les chiffres de l'année, mettons, 1996, et c'était l'année prochaine. Alors, ils devaient prendre le revenu de 1997, mais, par erreur, ils ont transposé les chiffres et ils ont toujours utilisé 1996. Les revenus en 1997 étaient nettement supérieurs. Est-ce que c'est raisonnablement que le parent n'a pas constaté ce changement parce qu'il a continué d'encaisser les montants au même niveau que l'année précédente malgré le fait que son revenu personnel a augmenté d'une façon importante?

Mme Marois: D'abord, on peut partir de l'erreur administrative. On entend par erreur administrative, une erreur commise notamment par un membre du personnel de la Régie; par Développement des ressources humaines Canada pour ce qui est de l'attribution des numéros d'assurance sociale; le ministère du Revenu pour ce qui touche les déclarations de revenus; Revenu Canada pour les données d'admissibilité autres que le revenu; l'un de leurs employés ou de leur système respectif, et à laquelle le requérant ou le bénéficiaire ne peut être partie ou si l'erreur administrative lui est en partie imputable ou que la Régie aurait pu normalement prévenir. Alors là, vraiment, on essaie de bien définir l'erreur administrative et on dit: On est responsable de ça.

(23 h 30)

Écoutez, quand il y a un changement de quelques dollars dans une prestation, dans une allocation familiale, c'est sûr que les gens peuvent ne pas s'en rendre compte. Mais, si on constate que la prestation double du jour au lendemain sans qu'il n'y ait eu de modifications significatives au revenu, bien là, j'imagine que la personne, normalement, se serait rendu compte, aurait dû se rendre compte de ça. Parce que là on parle quand même de montants assez considérables, hein. Il n'y a pas beaucoup de petites prestations, sauf à partir du 130 $, 131 $, sinon ce sont d'importantes prestations. Alors, s'il y a un changement significatif, si c'est quelques dollars évidemment, elle ne peut pas raisonnablement peut-être le constater. Et, comme je le mentionnais, c'est déjà documenté et qu'on a déjà une expertise à cet égard-là, je pense qu'on peut assez raisonnablement se fier à l'article qui est là quant à son étanchéité juridique. On me dit aussi que la même règle se trouve aussi dans le Régime de rentes du Québec et on n'a pas de difficultés majeures.

M. Kelley: O.K. C'est juste un questionnement. Deuxièmement, dans le deuxième alinéa – parce que ça va être dans des situations de séparation ou de divorce avant tout où peut-être qu'on a payé à un conjoint et que c'est l'autre qui a charge de l'enfant – est-ce que la Régie aura le pouvoir de trancher si les faits sont contestés? Parce qu'on sait qu'au moment d'un divorce, des fois, l'un dit noir, l'autre dit blanc, par principe. Alors, est-ce que la Régie va être capable de trancher dans la situation où la personne qui a reçu le montant par erreur prétend qu'elle a dépensé ça pour le bénéfice de l'enfant? Ça, c'est un fait qui est contesté par l'autre conjoint en disant qu'il ou elle ne dit pas vrai. Est-ce que la Régie aura la capacité de trancher dans ces circonstances?

Mme Marois: Pour l'instant, ce n'est pas nous qui trancherons, c'est Revenu Canada, mais, un jour, ça nous arrivera et ce sera plus tôt que plus tard et, à ce moment-là, on développera évidemment une expertise en conséquence, à partir de celle qui est déjà utilisée.

Mais, voyez-vous, quand il y a divorce ou séparation, il y a soit un jugement ou une entente, alors on voit où et par qui est pris en charge l'enfant. Puis si le père a versé ou la mère a versé... pas la contribution parentale, mais a versé la pension alimentaire, bien, évidemment, si ça a servi aux fins de l'enfant et que ce sont des sommes encore plus importantes, on peut voir immédiatement qu'on a fait servir ces sommes au bien de l'enfant.

M. Kelley: Mais c'est juste qu'on vise ici une situation pour corriger une situation et on parle de cette notion de «valablement fait». Alors, je veux juste voir. Dans une situation où les conjoints sont dans un moment difficile ou au moment d'une rupture, de les amener à s'entendre sur n'importe quoi n'est pas toujours évident. Alors, si on peut, au moins si la Régie peut trancher pour constater que ces versements étaient valablement faits, au lieu de tomber dans le...

Mme Marois: Bon, imaginons, prenons une situation concrète, n'est-ce pas. Je ne sais pas, il y a eu séparation et c'est le père qui a eu la charge de l'enfant alors que c'est la mère qui recevait le chèque, comme c'était le cas. Cependant, dans les faits, la mère reçoit le chèque. À l'occasion, elle reçoit l'enfant, se sert des sous pour recevoir l'enfant. Même si elle ne s'occupe pas tout le temps de l'enfant, elle assume l'enfant à certaines périodes et répond à ses besoins. J'imagine que ça devrait être pris en compte, une situation comme celle-là, où on dit: Ça a vraiment servi à l'enfant. Imaginons que son allocation était de quelques centaines de dollars par mois – ça peut arriver, bien sûr – et qu'elle reçoit l'enfant suffisamment longtemps dans le mois pour dire: Écoutez, cette somme a servi aux fins de répondre aux besoins de l'enfant, ça ne poserait pas de problème.

M. Kelley: Le seul cas, je veux soulever le cas, c'est juste au moment d'un litige où les faits sont contestés...

Mme Marois: C'est sûr, hein, que c'est...

M. Kelley: ...et si la Régie aura le pouvoir ou si c'est Revenu Canada qui a le pouvoir de trancher.

Mme Marois: Actuellement, c'est Revenu Canada, mais on l'aura éventuellement. On s'inspirera, j'imagine, de ce qu'ils ont fait et on définira ce qu'on veut.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que l'article 21 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. L'article 22. Mme la ministre.

Mme Marois: Oui. Alors, l'article 22, c'est:

«La mise en demeure de rembourser un montant reçu sans droit mentionne les motifs de la demande de remboursement, le montant à rembourser ainsi que le droit de demander la révision de la décision dans le délai prévu à l'article 30.

«La mise en demeure interrompt la prescription de la dette.»

La prescription de la dette, on me dit ici qu'elle est de trois ans. Alors, les délais prévus à l'article 30 sont de quel ordre?

Des voix: De 90 jours.

Mme Marois: De 90 jours, c'est vrai. Alors, on dit: La mise en demeure de rembourser un montant reçu sans droit mentionne les motifs de la demande de remboursement et le droit de demander la révision dans le délai qui est de 90 jours.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a des questions ou interventions? M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci, M. le Président. Je pense que ça peut être un véritable cauchemar pour la famille si ça ne marche pas bien. Je vais essayer de m'expliquer lentement et m'assurer que je comprends moi-même. Je lis l'article 22 qui, il me semble, donne un droit d'appel, si la famille commence ce droit d'appel, pendant 90 jours. Un droit d'appel où? Au Tribunal administratif du Québec, si j'ai bien compris.

Mme Marois: Il y a un premier palier qui est une révision interne à la Régie. Après ça, c'est la Commission des affaires sociales, qui éventuellement sera un tribunal administratif, le Tribunal administratif.

M. Williams: Où on peut trouver dans l'article 32 qu'il doit rendre sa décision dans 60 jours. «Right»?

Mme Marois: Attendez un petit peu, on va aller voir.

M. Williams: Oui, j'essaie juste de faire... 22?

Mme Marois: Oui, oui. «La décision rendue en révision peut être contestée devant le Tribunal dans les 60 jours qui suivent sa notification.»

M. Williams: Oui. Avec ça, l'article 30...

Mme Marois: Mais il faut lire avant l'article 30 qui dit ceci: «La Régie peut, d'office ou sur demande, réviser toute décision qu'elle a rendue.» Quand on disait la révision interne, c'est ce à quoi on faisait référence, et c'est celle-là qui doit être faite dans les 90 jours qui suivent la notification de la décision.

M. Williams: Oui, je continue le cauchemar. Avec ça, effectivement, le droit d'appel. C'est finalement au Tribunal administratif du Québec. Sauf que l'article 33 dit: «L'exactitude des renseignements communiqués par le ministère du Revenu pour la détermination du montant de l'allocation familiale n'est pas de la compétence de la Régie ni de celle du Tribunal administratif du Québec. Toute contestation à cet égard s'exerce selon la Loi sur les impôts.» C'est l'article 33.

L'article 47 dit que le ministère du Revenu doit envoyer toute l'information sur les revenus du demandeur et du conjoint. Et, de temps en temps, nous avons vu qu'effectivement le ministère du Revenu peut faire des erreurs.

Mme Marois: Personne n'est parfait. On aimerait tellement ça parfois.

M. Williams: Maintenant, on parle d'une situation potentiellement grave, parce qu'il y a un impact simultané de temps dans 22, 32, 33, 47 et 23, parce qu'à 23 on peut avoir une suspension de paiement. S'il y a une erreur causée par le ministère du Revenu...

Mme Marois: Bon, là...

M. Williams: Laissez-moi finir, Mme la ministre, s'il vous plaît. Vous êtes pas mal impatiente aujourd'hui.

Mme Marois: Allez, allez. Je suis très patiente, au contraire.

M. Williams: Non, on avance peut-être trop vite avec l'étude détaillée de ce projet de loi, Mme la ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: Peut-être qu'on doit ralentir un peu.

Mme Marois: J'ai des doutes, j'ai des doutes. Vous me permettrez d'avoir des doutes. Ha, ha, ha!

M. Williams: O.K. Je peux recommencer ma question?

Mme Marois: Ça va aller. Je pense que vous mêlez un peu des pommes avec des poires, des oranges avec des carottes.

M. Williams: Non, non, je pense que non. Peut-être que c'est vous qui êtes mêlée.

Mme Marois: Mais on reprendra tout ça tranquillement.

M. Williams: On arrive avec de l'information qui vient du ministère du Revenu, qui dit à la Régie le montant des revenus de la famille, demandeur et conjoint, et il peut y avoir des erreurs. La Régie décide qu'effectivement il y a une erreur. La famille a reçu trop d'allocations familiales. On voit ça dans 21 et 22. Ils ont décidé qu'il y en a trop. Ils ont demandé un remboursement. Selon leur étude, ils ont payé trop. Ils ont le droit de faire ça. Sauf que le contribuable dit: Non, ce n'est pas correct, l'information que le ministère du Revenu a fournie à la Régie – selon l'article 47, si j'ai bien compris. S'il veut utiliser le droit d'appel qu'on peut trouver dans l'article 22, on arrive avec un échec parce que ça avance jusqu'au Tribunal administratif administratif du Québec, sauf que l'article 33 dit que ce n'est pas de sa compétence, le Tribunal administratif du Québec. Avec ça, la famille doit aller dans une autre instance.

(23 h 40)

Il me semble que le droit d'appel, si ma compréhension est correcte, et peut-être que c'est moi qui n'ai pas compris... Si ma compréhension est correcte, le droit d'appel qu'on peut dire qui existe à l'article 22, ça n'existe pas en réalité, si ça vient d'une erreur du ministère du Revenu. Si ça vient d'une erreur ailleurs, effectivement, il peut y avoir... si ça vient d'une erreur de la Régie, effectivement, je pense que 22 marche avec 32. Mais si l'erreur vient de l'échange d'informations entre le ministère du Revenu et la Régie, je pense que le contribuable, s'il veut contester, peut le faire, le fait. Ou, peut-être que je suis un peu trop dramatique dans ça, peut-être au moins le droit d'appel qu'on pense qui est dans l'article 22 n'existe pas, et on doit s'assurer que... Parce que d'avoir le droit d'appel pour aller devant le Tribunal administratif du Québec, ça me semble bon, sauf qu'avec l'article 33 on dit que ce n'est pas de la compétence du Tribunal administratif du Québec. Avec ça, d'avoir ce droit d'appel, ça ne m'aide pas beaucoup.

M. le Président, je demande qu'est-ce qui se passe avec ça, et j'espère que la ministre peut prendre le temps nécessaire pour expliquer. Est-ce que c'est moi qui ai mal compris? Ou est-ce que nous avons besoin d'améliorer les choses ou de trouver un meilleur système pour protéger...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On est habitués, à cette commission-ci, à prendre le temps nécessaire pour écouter et répondre. Mme la ministre.

M. Williams: On essaie d'avancer pas mal vite, mais il faut prendre le temps nécessaire.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va bien.

Mme Marois: Je pense que ça va bien, effectivement. C'est juste qu'on est un peu fatigués, évidemment. Alors, on va reprendre ça bien tranquillement.

Il y a l'établissement du revenu net, c'est la responsabilité du ministère du Revenu, en fait c'est la famille qui fait son rapport d'impôts, qui remplit son formulaire, qui arrive à la ligne 275 et établit son revenu net. Le ministère du Revenu reçoit le rapport, le valide. On dit: Voici le revenu net. Il transfère l'information à la Régie et la Régie évalue le montant que la famille peut recevoir.

M. Williams: Elle évalue ou juste accepte ça?

Mme Marois: Accepte ce qui lui est proposé du revenu.

M. Williams: Oui. O.K.

Mme Marois: Mais elle doit faire un calcul pour trouver le montant que la famille reçoit...

M. Williams: O.K. C'est ça.

Mme Marois: ...à partir du revenu net, du nombre d'enfants dans la famille, de l'âge, etc. À partir de là, le paiement se fait.

Il y a une erreur que l'on constate à la Régie et on met en demeure... Et là, dans l'allocation qui a été versée, parce qu'il y a eu un changement dans la situation de la famille qui n'avait pas été signifié, et là on le constate, par une information qui entre, par exemple de Revenu Canada, puisqu'on est arrimés ensemble, on constate qu'on a versé en trop des sommes assez considérables. Donc, on demande à la famille de procéder à un remboursement. La famille dit: Non, non, non, moi, je n'étais pas en mesure de constater, ça m'a échappé, je n'étais pas bien informée de cela. Elle demande une révision à la Régie. La Régie a 90 jours pour procéder à l'étude du dossier et donner une réponse à la famille en disant: Oui, on admet que c'était nous, là, et que vous n'étiez pas responsables de cela.

M. Williams: L'nformation qui vient de Revenu?

Mme Marois: Attendez un peu. Je n'ai pas terminé.

M. Williams: O.K.

Mme Marois: Mais là, c'est justement, il ne faut pas mêler tout.

M. Williams: O.K.

Mme Marois: Faisons une procédure et, après ça, on verra l'autre. Et là la Régie dit: Oui, c'est mon erreur. C'est terminé, on efface le tout, on continue les paiements selon la nouvelle allocation, évidemment, et on ne demande pas de remboursement à la famille.

La Régie dit: Non, vraiment, vous pouviez constater et nous n'avons pas fait d'erreur dans les versements; alors, notre révision nous confirme dans notre droit d'aller vous demander cela. Vous avez un autre droit que vous pouvez exercer en vous adressant au Tribunal administratif et vous pouvez contester cette décision dans les 60 jours qui suivent l'information que vous donne la Régie. Vous allez au Tribunal. Là, le Tribunal – il y a encore une autre procédure – évidemment prend une décision, je crois que c'est dans les 90 jours, hein. On dit: «Le délai d'appel à la Commission des affaires sociales d'une décision en révision prise en vertu de la Loi sur les allocations...» C'est 90 jours, c'est ça, hein.

M. Williams: C'est 90 jours plus, après ça, le 60 jours.

Mme Marois: C'est ça. Alors, ça, c'est pour contester une somme qu'on aurait reçue en trop et que la Régie nous réclame.

Maintenant, si on dit que c'est une erreur du ministère du Revenu, là il y a une procédure de prévue au ministère du Revenu lui-même et qui concerne la possibilité de contester par la personne concernée, et là vous l'avez à l'article 33 où on dit: Les renseignements communiqués par le Revenu ne sont pas de la compétence de la Régie ni de celle du Tribunal administratif, mais du Revenu, et, à ce moment-là, les procédures prévues, et elles sont prévues effectivement à la Loi sur les impôts, on manifeste une opposition, ensuite on peut aller en appel à la Cour du Québec, puis en appel à la Cour d'appel. C'est comme ça que l'on conteste l'exactitude des renseignements qui fondera le calcul de l'allocation familiale et que nous transmet le ministère du Revenu. Alors, ce n'est pas confondant, ce n'est pas mêlant. On dit: Si l'erreur est liée au Revenu, je procède par le Revenu. Si l'erreur est lié à la Régie, la Régie étudie une première fois, c'est-à-dire fait la réclamation. La famille conteste. La Régie a 90 jours pour étudier le cas.

Une voix: ...

Mme Marois: Oui, c'est vrai, c'est le client qui a 90 jours pour en appeler à la Régie, la Régie statue, ensuite le client a toujours la possibilité, à la fin de cette évaluation faite par la Régie, d'aller au Tribunal administratif, qui est actuellement la Commission des affaires sociales qui, éventuellement, sera le Tribunal administratif. Alors, voilà, c'est simple.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Ha, ha, ha! C'est simple.

Mme Marois: Quand on veut bien s'imaginer ça, très clairement, aucun problème.

M. Williams: Il n'y a aucune raison à cause de l'article 33 d'aller devant le Tribunal administratif du Québec si c'est une erreur causée par l'information...

Mme Marois: Et on n'y va pas à ce moment-là.

M. Williams: Avec ça, il n'y a en pas de 60 jours pour aller au Tribunal...

Mme Marois: Non, mais on n'y va pas non plus.

M. Williams: C'est un gaspillage.

Mme Marois: On n'y va pas non plus.

M. Williams: O.K.

Mme Marois: On n'y va pas non plus. Parce que si l'erreur est liée au Revenu, à l'établissement du revenu net par le ministère du Revenu, il y a une procédure, c'est très clair. On peut procéder par une opposition puis ensuite les différentes cours du Québec, Cour du Québec et Cour d'appel.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que c'est là-dessus, M. le député de Roberval? Est-ce qu'il y a consentement?

M. Williams: Oui, continuez.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Roberval.

M. Laprise: Durant les 90 jours que la Régie analyse le dossier, est-ce qu'on continue à verser à la famille ce qui normalement devrait être versé?

Mme Marois: Oui.

M. Laprise: Et, si elle est responsable, elle devra rembourser après?

Mme Marois: C'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je reviens au député de Nelligan.

M. Williams: Oui. Je voudrais juste peut-être... Mme Gauthier est encore ici.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, elle est encore ici effectivement. Est-ce que vous voulez venir, Mme Gauthier?

M. Williams: Oui, mais peut-être c'est sur un autre...

Mme Marois: Oui, allez donc. Alors, ça, c'est réglé. Pour ça, ça va, c'est clair.

M. Williams: Non, ce n'est pas clair, pantoute.

Mme Marois: Ah bon! D'accord. Il doit être trop tard, M. le Président.

M. Williams: Est-ce que vous voulez suspendre le travail, Mme la ministre? Je suis prêt à continuer.

Mme Marois: Non, il nous reste encore 10 minutes avant de finir la Commission. Il est minuit moins douze, en fait 12 minutes.

M. Williams: Je suis complètement ouvert à continuer plus tard aussi, si vous voulez, Mme la ministre. J'essaie d'assurer que nous ne sommes pas en train de créer un système tellement pénible pour les familles québécoises. Il y a un concept qu'on trouve...

Mme Marois: Mais c'est des droits qu'on donne aux familles de pouvoir...

M. Williams: Et il y a une situation ici, il y a une certaine reconnaissance dans l'article 21 d'une erreur administrative de la Régie. Je trouve ça actuellement intéressant qu'on puisse admettre qu'il y a une erreur administrative et je trouve l'article 21 intéressant comme concept parce que, souvent, quand on discute de la loi fiscale, j'ai de la misère à trouver plusieurs fois quand le Revenu a admis qu'il a fait une erreur. Comme département, ça n'arrive pas souvent. Avec ça, on arrive avec ce concept-là, une erreur administrative. Je voudrais savoir, avec 33, si ça vient d'un problème de transmission d'information. Il y a le 90 jours plus le 60 jours pour les choses qui viennent de la Régie. Qu'est-ce qui se passe dans le cas de la Loi sur les impôts? C'est quoi, les façons de faire? Est-ce que c'est les mêmes? Est-ce que le concept d'une erreur administrative existe? Ou est-ce qu'on doit plaider coupable ou non coupable? Est-ce que c'est plus une confrontation devant les tribunaux? Il me semble que oui. Avec ça, le contexte du droit d'appel est complètement différent dans les deux cas. Je voudrais mieux comprendre ça et c'est pourquoi j'ai voulu profiter de la présence de Mme Gauthier.

(23 h 50)

Une voix: ...

Mme Marois: Un moment. Cependant, il faut bien voir que, avant que la Régie ne transmette à la famille un avis de remboursement, il y a des vérifications d'usage qui sont faites pour être sûr que le Revenu avait fait les bons calculs, etc. Puis, si on constate que dès ce moment-là il y avait eu erreur, ça va être signifié au Revenu qui, lui-même, pourrait s'amender auprès de la famille. Parce que ça ne peut jamais être dans la transmission des données, là; franchement, ce serait un petit peu farfelu d'imaginer ça. C'est vraiment le ministère du Revenu qui établit le revenu net et le confirme. Il transmet cette donnée-là. Alors, c'est pas mal difficile de se tromper là, je veux dire, dans la transmission. D'accord?

M. Williams: Ça arrive, des erreurs, Mme la ministre.

Mme Marois: Oui, oui, ça arrive, des erreurs, mais je n'ai pas dit... Sauf que, dans la transmission, disons, ce serait un peu étonnant là. Cependant...

M. Williams: Demain, on peut arriver avec des exemples.

Mme Marois: ...l'établissement du montant, ça, c'est possible, bien sûr, parce que ça reste un calcul à faire, qui est assez simple cependant parce qu'il n'y a pas beaucoup de données dont on doit tenir compte pour établir le revenu net de la famille, mais il y en a quand même, et il peut y avoir des erreurs à ce niveau-là. Donc, le ministère du Revenu est nettement et très clairement responsable de cela et, s'il y a eu erreur, il y a une possibilité d'opposition et de contestation par la famille concernée.

Mais il faut prendre pour acquis – puis je pense que généralement le député fait cela – que nos administrations ont une certaine expérience dans la gestion de ce type de situation et y mettent toute l'intelligence utile avant d'aller poursuivre un citoyen ou lui demander de rembourser, parce que, évidemment, on vérifie et on s'assure que les données qu'on possède sont correctes. Et si, donc, on réclame une somme, c'est parce qu'on a des raisons de croire et qu'on a des preuves qui nous permettent de croire qu'on peut le faire, sinon on ne fait pas ça de façon farfelue ou parce qu'on a eu un doute. Il y a quelque chose d'un petit peu plus sérieux qui se fait quand même.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que, Mme Gauthier, vous avez une information additionnelle ou c'est complet?

Mme Marois: Ça va, Mme Gauthier.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est complet. M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, je retourne à ma première question. Suivant l'article 33: «Toute contestation à cet égard s'exerce selon la Loi sur les impôts». C'est quoi, les mesures prévues dans la Loi sur les impôts pour faire cette contestation?

Mme Marois: Je vais demander à Mme Gauthier de nous répondre en sus de ce que je vous donnais comme information, à savoir l'opposition, l'appel à la Cour du Québec et l'appel à la Cour d'appel. Est-ce qu'il y a d'autres mécanismes, Mme Gauthier?

Mme Gauthier (Lise): Il y a toujours des demandes de révision informelles qui peuvent être faites...

M. Williams: Un peu plus fort, s'il vous plaît!

Mme Gauthier (Lise): Pardon, des demandes de révision qui peuvent être faites hors délai, qu'on peut appeler. Le ministère peut accepter, dans certains cas, de revoir le dossier. Mais le cas visé à 33, comme madame disait, c'est vraiment un cas où il y a une détermination du revenu qui est à contester. Ce n'est pas seulement le chiffre qui a été transmis, une erreur informatique. C'est que la personne s'est vu refuser une déduction par le ministère du Revenu, il y a un montant qui a été inclus dans son revenu suite à des données qu'on avait au ministère et on a changé le revenu que la personne avait déterminé dans sa déclaration de revenus. Ça, ça peut être contesté par une opposition. Mais une erreur de transmission, la personne va appeler soit la Régie ou le ministère du Revenu et l'erreur va être corrigée. Ce n'est pas un mécanisme d'opposition formel et d'appel dans ces cas-là.

Mme Marois: C'est ça.

M. Williams: Et les délais de ces démarches, c'est quoi?

Mme Gauthier (Lise): Un délai d'opposition, c'est 90 jours, mais ça peut aussi couvrir une année, de mémoire, de la date de la cotisation. Mais il faudrait que je vérifie.

M. Williams: Plus ou moins 12 mois. Et, pendant cette période, la Régie peut suspendre les allocations familiales?

Mme Gauthier (Lise): Ça, je ne peux répondre.

Mme Marois: Pendant la période?

M. Williams: De contestation.

Mme Marois: De contestation. Est-ce que la Régie peut suspendre le versement des allocations? Normalement, non. Il me semble qu'on avait déjà vu ça tout à l'heure, c'est pour ça que je suis un petit peu étonnée. Normalement, non. C'est lorsqu'on a statué sur le cas que là on peut décider que la réclamation était fondée, et on s'assure de la mettre en application, oui, sinon, ce n'est pas le cas et, évidemment, ça ne se pose pas comme problème.

Alors, est-ce que vous croyez que nous avons eu suffisamment d'éclairage pour adopter notre article?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, c'est...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres informations, d'autres questions?

M. Williams: Oui, oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Lesquelles?

M. Williams: Ça s'en vient, monsieur. J'ai voulu juste mieux comprendre votre figure quand vous m'avez reconnu. J'ai voulu juste comprendre comment ça marche avec l'information qui vient du ministère du Revenu. Parce qu'on peut avoir toute une discussion avec la Régie: Est-ce que j'ai besoin de rembourser de l'argent ou non, compte tenu du montant que vous avez reçu du ministère du Revenu? De plus en plus – et c'est une autre discussion dans les autres commissions – ça commence à être une façon de faire au ministère du Revenu, il me semble. J'ai demandé de l'information plus précise de la ministre, si ça prend au moins trois années pour vérifier les dossiers, et, de plus en plus, nous avons le débat du changement des règles, et tout ça, et il y a les recotisations de cette année, de l'année passée, de l'année avant ça, etc. Est-ce que les changements et les contestations des déductions, des crédits, etc., trois années passées, peuvent affecter négativement les allocations?

Mme Marois: Je n'ai pas ces...

Une voix: ...trois ans.

Mme Marois: Oui, c'est ça, c'est jusqu'à trois ans. On a répondu à cette question, M. le Président, déjà. On a dit qu'on ne pouvait pas rétroagir plus loin que trois ans quand ils étaient...

M. Williams: Mais je parle de trois ans. Vous pouvez agir rétroactivement pour trois ans.»

Mme Marois: Pour trois ans, c'est ça.

M. Williams: Oui, oui.

Mme Marois: Mais, quand c'est à l'avantage de la famille, il n'y a pas de limite. Depuis 1985, hein, c'est ça? En fait, il y a une limite, c'est 1985. On ne peut pas rétroagir plus loin que 1985.

Une voix: Dans la loi, il n'y a aucune limite.

Mme Marois: Et, dans la loi, on les enlève complètement.

Une voix: C'est ça.

Mme Marois: Bon. Oui. Alors, voilà. Donc, quand c'est à l'avantage du bénéficiaire, nous pouvons rétroagir sur la période sur laquelle il y a eu désavantage et qu'on doit corriger.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Sans limite.

Mme Marois: Alors, c'est quand même... Puis dû à une erreur administrative, évidemment. Je pense que c'est très intéressant, ça. Dans le fond, on a un traitement qui est plus juste. On dit: Si on rétroagit pour aller réclamer un dû à cause d'une somme versée en trop, on ne peut pas le faire plus loin que trois ans en arrière, mais, si on n'avait pas suffisamment versé à la famille, on peut rétroagir sur toute la période où on n'a pas versé correctement la somme à la famille concernée. Alors, je pense que c'est une nette amélioration en ce qui a trait au traitement des citoyens et citoyennes, vu sous l'angle de l'aide aux familles.

M. Williams: À cause d'une erreur administrative ou d'une interprétation contestée par le contribuable.

Mme Marois: À cause essentiellement d'une situation qui doit être corrigée parce que le versement que l'on a fait était erroné, soit suite à la constatation d'une erreur administrative ou suite à un jugement rendu par le Tribunal administratif qui le constate. Alors, peu importe la source de la décision, à partir du moment où il y a une décision, on rétroagit, et qui est à l'avantage du contribuable.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? Est-ce que l'article 22 est adopté?

M. Williams: Non.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il y a encore des questions?

M. Williams: Oui.

Mme Marois: On a encore une minute et demie, M. le Président. Je croyais cependant qu'on avait fait pas mal le point quand même sur cet article-là. Il me semble qu'on devrait nettoyer l'ardoise pour ce soir, adopter cet article et, comme il y aura d'autres occasions de revenir sur ces questions dans les articles subséquents, on aura tout le temps devant nous pour le faire.

(minuit)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Parce que les articles suivants, on revient sur les mêmes questions.

Mme Marois: C'est ca. Donc, s'il y a des choses qui nous...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? Est-ce que l'article...

Mme Marois: Parce que, sinon, on risque de devoir reprendre nos débats, M. le Président. Ce n'est peut-être pas la meilleure circonstance.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est plus difficile reprendre que prendre un nouvel article.

M. Williams: Compte tenu de l'heure, M. le Président, j'ai actuellement plein d'autres questions, mais...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mais vous allez avoir l'occasion, dans les articles suivants, d'y revenir de toute façon.

M. Williams: M. le Président, je pense que je vais profiter de ces occasions de demander mes questions un peu plus tard. Comme d'habitude, je suis votre conseil sage et on peut adopter l'article 22. Mais je garde ma réserve de demander des questions sur le même sujet.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. L'article 22, adopté.

Une voix: Adopté.

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 0 h 1)


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