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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Tuesday, March 10, 1998 - Vol. 35 N° 102

Consultations particulières sur le projet de loi n° 404 - Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions


Autres intervenants
M. Rosaire Bertrand, président
Mme Marie Malavoy, présidente suppléante
M. Léandre Dion
*M. Rénald Dutil, FMOQ
*Mme Ginette Primeau, idem
*M. Louis Godin, idem
*Mme Marie-Claire Daigneault-Bourdeau, AHQ
*M. Yvon Marcoux, idem
*M. Gilles Lagacé, idem
*M. Maurice Roy, idem
*Mme Ghislaine Gosselin, idem
*M. Jean-Paul Cadieux, idem
*Mme Jocelyne Beaumier, ARIHQ
*M. Serge Longpré, idem
*Mme Francine Longpré, idem
*M. Vital Simard, ministère de la Santé et des Services sociaux
*Mme Jo-ann Arvey, RPOCAA
*M. Marc Bruneau, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures trente-neuf minutes)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, bonjour tout le monde. Nous allons commencer immédiatement, en constatant le quorum. Est-ce que le quorum est constaté, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous rappelle le mandat de la commission: la commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 404, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives.

Est-ce qu'il y a des remplacements?

(9 h 40)

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne) est remplacée par Mme Houda-Pepin (La Pinière); et M. Paradis (Brome-Missisquoi) est remplacé par M. Marsan (Robert-Baldwin).

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Juste pour l'information des membres, au cas où il y aurait des questions, si un député non-membre participe à l'assemblée, comme c'est le cas de Mme Éthier, députée de Bourassa, le député ou la députée qui n'est membre d'aucune commission peut participer sans droit de vote aux travaux de toute commission. Le député qui est membre d'une commission peut participer aux délibérations d'une autre commission avec la permission de cette dernière, mais ne peut y voter ni y présenter de motions. Cette permission n'est pas requise lorsqu'une commission étudie les crédits.


Remarques préliminaires

Donc, aucun problème. Est-ce que tout le monde a pris connaissance de l'ordre du jour? L'ordre du jour est accepté. J'invite maintenant M. le ministre à faire ses remarques préliminaires. Il sera suivi du député de Nelligan.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Merci, M. le Président. Le projet de loi que nous allons étudier aujourd'hui est un peu particulier dans ce sens que c'est une série de modifications, de changements à la loi qu'on appelle communément, dans le réseau de la santé et des services sociaux, la loi 120, qui est la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Ce n'est donc pas un nouveau projet de loi qui introduit ou qui présente une législation spécifique pour un secteur; ça touche l'ensemble du réseau et c'est des modifications à la loi qui existe déjà.

Alors, dans ma présentation, je ne pourrai pas et je n'aurais pas la prétention, en quelques minutes, de pouvoir faire une synthèse complète de ce qu'on discutera. Je vais quand même, par contre, souligner ce qui m'apparaît être, peut-être, des éléments importants – pas parce que ceux que je ne vais pas mentionner sont moins importants – mais qui aussi sont importants et qui illustrent le type de changements qui sont proposés à la loi.

Comme trame générale de ce projet de loi et son intention fondamentale, il s'agit de voir comment on peut procéder le plus possible à des allégements administratifs du fonctionnement du réseau de la santé et des services sociaux et, à certains égards, de voir comment on peut avoir même un début de déréglementation. Ça, je souligne ce premier point-là et cette distinction-là, que j'ai apprise moi-même en cours de route, parce qu'on en parle depuis deux ans de ce projet de loi. Dès le début de la transformation du réseau de la santé et des services sociaux, on avait identifié, un des objectifs étant une plus grande décentralisation dans cette transformation, qu'on devait alléger et déréglementer le plus possible.

Certains sont peut-être déçus de voir qu'en termes de réglementation pure et dure, complète, on trouve moins que ce qu'on aurait pu souhaiter à l'origine. Ce n'est pas un changement d'intention et d'orientation, c'est plus d'avoir réalisé en cours de route que, pour aller jusqu'au bout d'une réglementation de façon optimale, comme plusieurs le souhaiteraient, avec laquelle je serais entièrement d'accord, il faut qu'on s'assure qu'on a des mécanismes alternatifs de reddition de comptes, décentralisés, qui fonctionnent bien autant au niveau local qu'au niveau régional, et qu'on ne peut pas laisser un service de santé et des services sociaux sans filet de sécurité entre deux bords. Parce que la reddition de comptes ultimement à l'Assemblée nationale par le ministre, mais aussi au niveau du ministère, tel que le système est bâti actuellement, est importante et elle doit être progressivement remplacée.

Mais, par contre, je pense que vous verrez que, pour tous les allégements qui peuvent être apportés au fonctionnement du réseau, on a essayé d'y aller de la façon la plus complète possible, et que, pour la déréglementation, on identifiera en cours de route certains éléments où deux ou trois – on n'aura pas besoin d'une panoplie de comités de travail – mais deux ou trois comités de travail pourront prendre la relève, immédiatement après l'étude de ce projet de loi et quand on verra les changements qui ont été adoptés, pour préparer une prochaine étape où éventuellement on pourrait aller encore plus loin.

Donc, je voudrais bien qu'on retienne ce premier point-là. C'est une étape importante – on verra dans les discussions – mais on ne pense pas qu'on puisse nécessairement tout, tout réaliser dans cette étape-là.

Ceci dit, il y a quand même des volets importants du projet de loi, je pense, qui pourront être touchés de façon significative, et c'est là que je vous donne quelques exemples. Encore une fois, vu que l'attente ne permet pas de faire un tour de piste complet d'un projet de loi qui couvre un horizon assez large, ce qui n'est pas mentionné n'est pas moins important, mais j'ai essayé de sélectionner différents types de changements qui donnent un bon échantillonnage de ce qu'on va retrouver.

Un des secteurs importants est, à mon avis, ce qui touche les droits des usagers et le régime des plaintes. Dans le réseau – on en a maintenant fait l'expérience depuis l'adoption de la loi originale en 1992 – vous savez qu'il y a eu et qu'il y a encore des discussions parfois en ce qui regarde le régime des plaintes du réseau, qui est différent du système de protection du citoyen qui existe pour tout l'appareil gouvernemental et qui vaut pour le ministère. Mais le réseau est plus sur un régime de plaintes qui veut être, dans sa pratique – et c'est comme ça, je pense, que les gens l'ont vu évoluer, sur le terrain et de la part du Commissaire aux plaintes – un service à la clientèle plus qu'un service quasi judiciaire. Sauf que les clients qui, pour une raison ou pour une autre, sont insatisfaits, qui ont des commentaires ou des suggestions à faire, il faut qu'ils puissent avoir une voie d'entrée, d'abord à l'établissement dont ils ont eu le service, mais aussi, au besoin, au niveau de la région, si la réponse n'est pas satisfaisante et, si nécessaire, même au niveau du Commissaire aux plaintes, pour que les gens obtiennent satisfaction. Mais, pour les intervenants du réseau ou les établissements, que ce soit aussi beaucoup plus une rétroaction qui les aide à améliorer constamment leur service pour une personne qui a un cas spécifique, mais aussi, de façon générale, à la suite de l'expérience de gens qui peuvent manifester des plaintes pour différentes raisons.

Il y aura donc des modifications qui vont tenter d'assouplir et d'orienter le régime dans ce sens-là. Ça va se manifester, par exemple, par l'identification d'une personne dans l'établissement, qui n'est pas nécessairement un cadre supérieur mais qui est vraiment identifié et dédié pour s'occuper du régime de plaintes. La loi, actuellement, prévoit que c'est un cadre supérieur de l'établissement qui est responsable de cette fonction. L'expérience a démontré qu'un cadre supérieur n'avait peut-être pas toujours nécessairement de temps à consacrer suffisamment et la liberté d'esprit de s'investir de façon majeure dans ce qui est tout le régime des plaintes, et qu'en pratique, bien souvent, pour que ça fonctionne bien, il y avait quelqu'un qui était désigné pour le faire sous la responsabilité du cadre. Et ça, ça marchait bien. Donc, à l'expérience, c'est une formule qui s'est trouvée mais qui, techniquement parlant, était illégale parce que ce n'était pas le cadre lui-même qui faisait le travail. Alors, ça, c'est un type de changement qui est fait, et ça, c'est peut-être assez caractéristique de beaucoup de changements qui sont proposés. Beaucoup de ceux-là ont été essayés. Les gens ont trouvé un meilleur moyen de faire que ce que prescrivait la loi, et c'est sur la base de cette expérience qu'on veut intégrer les changements dans le projet de loi pour profiter de ces améliorations.

Vous verrez aussi – je donne un autre exemple sur ce chapitre-là – qu'il y a des mesures qui prévoient qu'on ait un meilleur suivi de ce qui est fait lorsqu'une plainte a été formulée, y compris par le Commissaire aux plaintes. Ce serait qu'on s'assure qu'on ne fait pas seulement un rapport à la fin de l'année, si vous voulez – ce qui est déjà la situation, chaque établissement, chaque régie régionale fait une synthèse pour qu'on ait le portrait global de ce sur quoi ont porté les plaintes et les critiques à l'égard des services qui sont rendus – mais qu'on puisse avoir aussi pour chaque plainte un mécanisme plus rigoureux de suivi pour s'assurer que les changements ci-indiqués sont vraiment mis en pratique.

Un deuxième volet, M. le Président, est celui qui regarde toute la procédure électorale. Là, le réseau a vécu deux expériences, lors de l'adoption de la loi, encore une fois, et l'année passée, pour une première réélection. On sait qu'on a un réseau qui est un peu entre deux régimes, entre un régime carrément électoral, comme on retrouve au niveau des municipalités ou des commissions scolaires, et un régime qui est plus un régime de désignation par le ministère ou le ministre de membres pour faire partie du conseil d'administration. Les conseils d'administration sont plutôt désignés par des collèges électoraux, c'est un système un peu entre les deux, et l'expérience nous a enseigné un certain nombre de leçons où, sans aller – cette fois-ci en tout cas – jusqu'à changer carrément le système pour en faire un système purement électoral – le contexte ne permet pas de faire ça présentement – il faut s'assurer au moins que le processus électoral, quand ça peut s'appliquer, soit plus semblable à celui d'une élection et soit plus standardisé pour que l'équité soit assurée partout et que les gens puissent exercer ce droit de désigner, dans un collège électoral, de façon la plus standardisée possible.

(9 h 50)

Par exemple, à l'expérience, on nous a beaucoup dit, surtout après la dernière élection, quand on a fait le post mortem, qu'il n'y aurait pas de raison que la façon de disposer les boîtes de scrutin, compte tenu de la population et des types d'établissement, ne soit pas un peu plus standardisée, que les heures d'ouverture pour aller voter, ça ne soit pas un peu plus standardisé, et, comme c'est un système qui fonctionne en bonne partie sur l'honneur, qu'on resserre un peu plus en s'enlignant sur le mode et la procédure électorale générale au Québec, dans la mesure où ça s'applique. Alors, on verra un certain nombre de changements à cet égard qui seront faits, souhaitant qu'à la troisième édition des élections, qui viendra dans quelques années, on ait encore une façon plus facile, plus directe, pour la population, pour les gens qui sont intéressés et impliqués dans le réseau de pouvoir choisir ceux qui vont diriger les conseils d'administration, qui vont siéger sur les conseils d'administration en leur nom. Et ça, c'est très, très important qu'on compte des points encore là, même si on ne peut pas atteindre la perfection à cet égard. Parce que, dans une décentralisation, quand je vous parlais, tout à l'heure, des mécanismes de reddition de compte localement et régionalement, ça commence d'abord par des conseils d'administration qui ont vraiment la légitimité et la crédibilité pour assumer des responsabilités et des décisions d'allocation et d'utilisation de ressources dans le réseau, pour être capable de vraiment donner de la marge de manoeuvre localement aux gens.

Troisième section, le troisième type de changements, qui va dans le sens aussi de l'expérience des dernières années, essaiera de mieux préciser dans la loi même et de mieux montrer le lien entre les rôles respectifs du ministère, des régies régionales et des établissements – que les régies régionales, donc, soient vraiment bien centrées sur les fonctions de planification, d'évaluation, d'orientation à long terme, de même qu'en matière de santé publique – de préciser, de renforcer le rôle des régions et des régies régionales quant aux mécanismes de coordination de l'ensemble du réseau et de l'organisation des services et des établissements dans leurs responsabilités, et, en ce qui regarde les établissements, peut-être singulièrement le CLSC, qui devient, surtout avec les intégrations et les fusions, avec les soins de longue durée, vraiment l'établissement responsable des services de première ligne et l'interface avec les groupes communautaires et les médecins en pratique dans leur cabinet pour l'organisation de la première ligne, par rapport à des établissements qui ont une mission de deuxième ligne pour l'ensemble d'une région.

Un autre bon exemple est aussi dans tout ce qui regarde les technologies de l'information, où là on s'est aperçu que... le vieux principe qui dit que, quand on fait une décentralisation, ça veut dire qu'on décentralise certaines choses, mais parfois qu'on en centralise d'autres. Et là je pense que l'expérience des dernières années a montré aussi qu'ayant appris beaucoup de différentes expériences faites un peu partout dans les établissements et dans le réseau, en termes de systèmes d'information qui se sont développés... On a effectivement appris beaucoup, il y a des choses intéressantes qui se sont développées. Mais là on était rendu vraiment à un point que, pour un développement et une modernisation qui est maintenant nécessaire pour notre réseau de la Santé et des Services sociaux, on a besoin de se donner un système de télécommunications, un système d'autoroute de l'information, qui soit mieux coordonné. Et là, à ce moment-là, le ministère devra assumer des responsabilités additionnelles à cet égard.

Je mentionnerai deux autres points; et je pense que mon temps risquera d'être à peu près écoulé. En voyant fonctionner un réseau qui a une première ligne bien structurée, une deuxième ligne pour les fonctions de niveau régional et les fonctions nationales au niveau du ministère – ce qui était peut-être le moins bien organisé historiquement – au point où on en est rendu, c'est toute la première ligne. Je pense que l'hôpital existe depuis longtemps, son rôle évolue, son rôle se modifie, mais c'est un modèle qu'on va retrouver beaucoup dans le temps. Des fonctions plus nouvelles ont quand même retrouvé assez vite leur créneau au niveau régional, soit les services de réadaptation, les services pour des gens qui ont des problèmes de toxicomanie ou d'alcoolisme, de même que les services dans les secteurs de déficience intellectuelle ou de déficience physique.

La première ligne, ça a été plus en développement. J'y ai fait référence tout à l'heure dans le reciblage des missions au CLSC comme organisation de première ligne; mais il y a, pour les services médicaux, toute la pratique médicale qui est faite dans les cabinets, et ça, ça fait partie de notre organisation, ça fait partie de notre système. Mais là il y a une proposition de créer ce qu'on a appelé un département de médecine générale territorial, qui est au niveau de chacune des régions; à l'intérieur des régions, la loi ne propose pas d'organiser tout le détail du département dans la loi même, mais l'esprit est vraiment qu'il y ait une organisation qui va rejoindre le territoire local pour que, localement, une population, on puisse bien travailler en interface, et le CLSC comme guichet d'entrée du réseau de première ligne, mais avec les cabinets des médecins organisés autour d'un département – au niveau local ça prendra peut-être l'allure d'un service territorial de médecine familiale – où les médecins collectivement acceptent... Et ça, c'est des choses qui ont été discutées, acceptées en principe dans les conventions collectives avec les médecins.

Là, on a besoin de donner une assise législative pour que les discussions puissent continuer et que les médecins, sur un territoire, puissent assumer collectivement – ce qu'ils souhaitent faire – les mêmes responsabilités qu'ils ont su assumer et coordonner à l'intérieur d'un établissement comme l'hôpital, par exemple, c'est-à-dire que les médecins s'entendent et s'organisent pour que les services soient accessibles 24 heures par jour, sept jours par semaine, et que la gamme des services médicaux nécessaire soit disponible pour la population. C'est un élément qui peut devenir très important pour assurer une meilleure collaboration avec le CLSC. Il y a des médecins dans les CLSC, il y en a dans les cabinets; l'important, c'est que les gens travaillent ensemble, qu'il y ait une coordination aussi pour que les services soient accessibles dans les établissements de soins de longue durée, que les services médicaux nécessaires à domicile puissent être faits, autrement dit, qu'on puisse là aussi donner aux gens des marges de manoeuvre, des possibilités, des moyens, et qu'ils puissent localement organiser les choses pour que la population ait accès aux services. Alors, ça, ce sera un élément très important qui va être rajouté.

La Présidente (Mme Malavoy): M. le ministre, je veux simplement vous dire que vous pouvez...

M. Rochon: Je suis au bout?

La Présidente (Mme Malavoy): ...prendre votre temps. Non, c'est pour ça que je me permets de vous interrompre, pour vous dire que, compte tenu que, du côté de l'opposition, on souhaite prendre la demi-heure, vous pouvez prendre votre temps. C'est rare qu'une présidente fasse ça, mais je pense qu'on a...

M. Rochon: Je n'aurai pas besoin de tant que ça.

La Présidente (Mme Malavoy): On avait prévu une demi-heure de chaque côté maximum. Moi, je voudrais que le ministre se sente à l'aise pour poursuivre sans regarder l'horloge, simplement.

M. Rochon: Là, j'ai combien de temps de fait?

La Présidente (Mme Malavoy): Quinze minutes à peu près.

M. Rochon: Bon, de toute façon, je pense qu'avec encore quelques minutes, Mme la Présidente, j'aurai à peu près réalisé ce que je souhaitais faire, donner une vue à vol d'oiseau pour montrer un peu ce qu'on retrouve dans ce projet; mais, si ça coule un peu plus d'abondance, j'apprécie d'avoir cette flexibilité.

L'autre élément que je voulais mentionner, qui est très ad hoc et plus spécifique, c'est aussi un peu un exemple, quand même, je pense, de comment on a souhaité adapter le plus possible, sur la base de l'expérience acquise et avec la volonté des gens du milieu, le fonctionnement du réseau aux conditions locales. Chaque région du Québec est spécifique et particulière. Il n'y en a pas deux semblables, identiques, en tout cas. Mais la région du Nord-du-Québec avait la particularité d'avoir une petite population de 10 000 ou 15 000 habitants, je pense, sur un territoire très, très grand, allant du nord au sud, avec cinq établissements, une régie régionale. Alors les gens-même du milieu ont trouvé que la structure était un peu lourde – avoir une régie, avoir un hôpital, deux ou trois CLSC, un établissement de soins de longue durée – et il y a eu un mouvement, là, dans la transformation du réseau, qui a amené progressivement à fusionner d'abord l'ensemble des établissements de façon tout à fait volontaire.

Puis, après ça, les gens ont souhaité aller plus loin et dire: Une fois qu'on est fusionné, qu'on est un seul établissement, il y a beaucoup d'éléments de coordination que doit assumer une régie régionale dans une région où le territoire est plus vaste et une population plus nombreuse qui sont assumés par l'établissement. Par contre, il y a d'autres fonctions, sur le plan de la santé publique, par ailleurs, par exemple, qui restent importantes, puis certains éléments de planification qui ne sont pas nécessairement le propre d'un établissement qui a la responsabilité de gérer la dispensation de services.

Alors, vous verrez là une formule particulière, spécifique, qui a été développée avec les gens du milieu pour pouvoir simplifier les structures et avoir une seule entité organisationnelle qui pourrait assumer correctement des fonctions, certaines fonctions de planification de santé publique, sur l'ensemble d'une région, en lien avec les responsabilités d'un établissement qui, comme établissement, a plusieurs sites d'opération et de niveaux de services aussi, hôpital au niveau des soins spécialisés et des services de première ligne.

(10 heures)

Alors, voilà donc, Mme la Présidente, ce qui, je pense, fait un tour d'horizon. Encore une fois, je n'ai pas du tout la prétention d'être exhaustif. Je rappelle – et il y a des gens qui se sont ajoutés qu'on va entendre dans le courant de la matinée ou dans les jours qui vont suivre – que c'est un projet de loi qui a ceci de particulier qu'il vient modifier, à plusieurs endroits, une loi déjà existante.

Mais on a voulu le faire – et je souhaite, j'espère qu'on pourra garder cet esprit-là dans tous nos travaux – le faire vraiment sur la base de l'expérience acquise depuis l'adoption de la loi, en 1992, en disant que ça a été en 1992 une grosse réorganisation qui a été faite à cette époque-là. Il y a beaucoup de choses qui ont été conçues, qui ont été mises dans la loi, et ce n'est pas surprenant qu'à l'application il y ait certaines choses qui ont fonctionné autrement. Il y a certaines choses qui n'ont pas vraiment fonctionné. Les gens ont dû trouver d'autres moyens du bord pour faire avec.

Alors, on a trouvé, après trois ans de réorganisation du réseau, de travail assez intense, qui a impliqué beaucoup de monde, d'ailleurs... Il y a beaucoup de gens qu'on va entendre qui ont déjà participé à différentes réunions et discussions; j'espère qu'ils vont se retrouver dans ce que seront les conclusions qui sont déposées présentement.

Mais il y a vraiment eu un souci – puis, au besoin, on fera les corrections nécessaires – de ne pas essayer de rien réinventer de nouveau mais d'aller sur l'expérience acquise, de confirmer ou de consolider certaines façons de faire différentes qui se sont dessinées, ou, dans certains cas comme la région du Nord-du-Québec ou le département territorial de médecine, de développer quelque chose de nouveau, mais pas autour de la table à dessin. Vraiment sur le terrain avec les gens et la plupart des...

Il n'y a pas de surprise là. À ma connaissance, dans ce projet de loi, il ne devrait pas y avoir de surprise que les gens ne s'attendaient pas à avoir d'une façon ou d'une autre. L'angle de présentation pourra peut-être s'être précisé en cours de route, mais ça voudra être le reflet d'une expérience acquise au cours des dernières années et le voir en continuité.

Je répète ce que je disais au début, on a réalisé, référence travail, que c'est une tâche énorme de retravailler une loi aussi vaste et complexe que la Loi sur les services de santé et les services sociaux, qu'on ne veut pas réparer ce qui n'est pas brisé, dans une opération comme ça, et qu'on ne veut pas déséquilibrer non plus, tout en voulant quand même changer des choses de façon significative sur la base de l'expérience acquise.

Donc, il y aura un certain nombre de choses, surtout dans le sens d'une déréglementation qui pourrait aller encore plus loin, qui seront nécessairement une prochaine étape mais qui nous laisseront un agenda au lendemain de la loi actuelle... Qu'on réalise que, si on ne peut pas aller plus loin à certains égards, c'est parce qu'il faut préciser – et je reprends l'exemple, parce que c'est surtout ça qui a été marquant – des mécanismes de reddition de comptes efficaces, transparents, démocratiques – pour pouvoir le confirmer plus loin – une déréglementation qui va plus loin.

Donc, on a un agenda là qui va nous être laissé à la fin de ce projet de loi pour continuer à travailler. Et, dans un autre deux, trois, quatre ans – je ne sais pas – il y aura progressivement d'autres adaptations. C'est sûrement comme ça que va évoluer notre service, d'étape en étape, en continuant à adapter à mesure et, peut-être, en ayant moins à faire de grands exercices qui bousculent tout dans un temps très limité, mais qu'on puisse, par contre, ne pas manquer les occasions où on peut vraiment consolider des choses, ajuster, assouplir et donner des moyens aux gens et des façons de faire où les gens se reconnaissent plus.

Alors, je termine là-dessus et on sera très ouverts à entendre les commentaires, les suggestions qui seront faites. Et je nous mettrais peut-être tous en garde, pour avoir déjà eu un peu l'expérience de travailler sur des projets où on retouche à une loi pour vouloir la simplifier: on risque tous d'avoir la tentation de vouloir simplifier ce qui regarde tout le monde, sauf notre propre dossier ou notre angle de prise. Et, quand on additionne tout ça, en bout de ligne, ça risque d'être plus compliqué que ça l'était au début. Alors, je pense qu'on aura à se mettre en garde les uns les autres contre ce glissement-là qui est possible mais j'ai confiance que, dans une semaine, on aura vraiment un éclairage complet sur la base de ce qu'on va nous dire et qu'on pourra améliorer sensiblement le fonctionnement du réseau de la santé et des services sociaux. Merci, madame.

La Présidente (Mme Malavoy): Merci, M. le ministre, pour cette présentation. Je passe la parole au porte-parole de l'opposition officielle, le député de Jacques-Cartier. Nelligan, excusez-moi. Je m'excuse.

M. Williams: Pas de problème. Je sais que vous êtes de remplacement aujourd'hui et je suis vice-président de la commission des affaires... et pas de problème.

La Présidente (Mme Malavoy): C'est ça. Mettez-le sur le dos de mon remplacement.


M. Russell Williams

M. Williams: Pas de problème. Merci beaucoup, Mme la Présidente, pour cette chance de faire quelques remarques préliminaires. J'ai écouté comme il faut le ministre pendant quelques minutes, et ce n'est pas surprenant qu'encore une fois le ministre ait parlé de reddition de comptes, qu'il ait parlé de technicalités. Je n'ai pas entendu beaucoup de choses sur la question des soins, je n'ai pas entendu beaucoup dire qu'il prend les patients d'abord et avant tout. Avec ça, au moins, lui, il est constant et il approche les questions d'une façon, dans mon opinion, technocrate. Et nous allons certainement utiliser le temps de mieux comprendre ce projet de loi, parce que je ne suis pas convaincu que nous n'allons pas trouver des surprises, je ne suis pas convaincu pantoute que c'est juste une simple série de mesures, pas un nouveau projet de loi.

On peut trouver des changements profonds, dans ce projet de loi, qui peuvent avoir un impact tellement négatif. J'admets que ça peut être des bonnes choses, aussi; mais on peut avoir des choses tellement négatives, dans ce projet de loi, et c'est pourquoi je suis heureux que nous ayons au moins 28 groupes qui vont présenter... L'opposition a toujours essayé d'assurer que la population et les interlocuteurs privilégiés aient une chance de parler, et je suis heureux que, cette fois-ci, nous ayons le temps d'écouter tous les groupes pendant au moins les cinq prochains jours. Laissez-moi juste poser quelques questions auxquelles j'espère qu'on pourra avoir des réponses plus tard et, pendant les discussions, j'espère que je pourrai avoir des clarifications soit des groupes, soit du ministre.

Un, si le projet de loi est vraiment ciblé, une des choses sur lesquelles il est ciblé, c'est sur la répartition des effectifs médicaux, je voudrais savoir: est-ce la meilleure façon de faire ça et est-ce qu'on avoir une autre façon de s'assurer de la participation volontaire de nos médecins dans cette affaire? Je sais qu'ils ont fait beaucoup d'efforts, et on doit travailler encore dans cette direction.

Il y a certainement un grand chapitre sur le département régional médical général. Le ministre a parlé d'allégement administratif, il a parlé d'un projet de loi simple. Moi, je vois, au moins au moment où on parle, une certaine duplication avec le CMR et on veut savoir comment on peut travailler, le CMR et le DRMG – G comme Georges – général. Mais, avec ça, je voudrais certainement avoir le temps de mieux comprendre comment nous allons utiliser cette nouvelle structure supposée simplifier les choses et est-ce que nous sommes en train de créer un précédent – avoir d'autres commissions – une balle de neige et un effet domino avec les autres commissions? Déjà, nous avons reçu des mémoires sur cette affaire. Et je pense que le réseau a peut-être voulu avoir un projet de loi qui aide ses interlocuteurs, les travailleurs et travailleuses, à mieux faire leur travail, parce que, avec toutes les coupures que nous avons eues... Je sais que nous avons déjà reçu des mémoires et qu'effectivement, à cause de toutes les coupures, ils ont de la misère à avoir le temps de faire des représentations sur les projets de loi. Déjà, M. le ministre, c'est un exemple assez sérieux de l'impact de toutes les coupures. Et, ironiquement, aujourd'hui, on commence avec les manchettes: La régie régionale n'a pas les pieds dans la réalité . Je pense que vos remarques préliminaires mentionnaient qu'il y a toute une différence entre la bonne foi et la réalité.

J'ai une question: Est-ce que c'est une augmentation des structures? Et plus on augmente les structures, est-ce qu'on complique les choses? S'il y a des bonnes réponses à ça, je suis ouvert à les entendre. Je vois qu'il y a un transfert de pouvoir du gouvernement au ministère, un transfert de pouvoir du ministère à la régie, un transfert de pouvoir de la régie aux établissements. C'est comme d'habitude, il veut mettre un système où il n'y a personne de coupable – je m'excuse – d'imputable, personne n'est imputable. Et j'ai une question: Comment peut-on mieux comprendre ce que le projet de loi va faire à cet égard-là?

Je vois certainement une augmentation de la bureaucratie dans ce projet de loi et je voudrais mieux comprendre l'impact sur le réseau. Toutes les questions de régionalisation, je pense que tout le monde a essayé de privilégier la responsabilisation de nos régions. Mais je voudrais mieux comprendre comment nous allons nous assurer que nous n'allons pas avoir plus d'inégalités régionales avec ce projet de loi. Je vois ensuite une tendance encore à la sous-régionalisation. On veut s'assurer qu'effectivement, d'abord et avant tout, les patients soient protégés.

(10 h 10)

J'ai beaucoup de commentaires sur les élections, les nouvelles procédures électorales. Déjà, quand j'ai une chance de parler avec les interlocuteurs dans le réseau, il y a beaucoup de questions et de commentaires qu'effectivement elles sont une réduction de la démocratie dans le réseau, et non pas une amélioration.

Toute la question des plaintes nous préoccupe beaucoup. Comme M. le ministre l'a mentionné, nous avons un nouveau système depuis 1992; est-ce que c'est le temps de rafraîchir encore une fois ce système? Est-ce que ça va peut-être mieux aller, à ce moment-là, avec un système qui donne plus d'autonomie aux commissions? Je sais, c'était tout un débat en 1992, mais est-ce que ça va être mieux de donner plus d'autonomie, un peu comme le Protecteur du citoyen maintenant?

M. le ministre a parlé du nouveau système informatique. Et, particulièrement la semaine passée et cette semaine encore, devant la Commission d'accès à l'information, nous allons avoir des témoignages sur un autre dossier du ministère du Revenu. Nous avons vu, avant Noël, qu'il y a de l'information à vendre, de l'information privée à vendre. C'est assez étonnant. Je veux dire qu'effectivement j'ai été déçu quand j'ai vu que la Commission d'accès à l'information n'était pas invitée à se présenter, à témoigner devant cette commission, à faire ses propres commentaires.

J'ai entendu aussi, M. le Président, le ministre parler des prochaines étapes. Avec toutes les étapes que nous avons vues, les étapes que j'appelle les «coupures», je ne sais pas si le réseau est tellement heureux de savoir que d'autres étapes s'en viennent. Est-ce que ce projet de loi est un précédent d'ouvrir un nouveau système de capitation? On doit se questionner. Est-ce que ces – comment vous dites – «billing numbers» en anglais, est-ce que c'est ouvert, qu'est-ce qui est vraiment en arrière de cette stratégie?

Parce qu'on doit demander, particulièrement depuis trois ans et demi: C'est quoi, la logique derrière les projets de loi déposés à la commission des affaires sociales? Et, selon moi, c'était toujours le «bottom line» des coûts, c'était toujours comment on peut réduire les montants transférés au système de la Santé et des Services sociaux. Avec ça, j'ai peur effectivement qu'il y ait des choses derrière ce projet de loi. Et je demande, Mme la Présidente: L'impact de ce projet de loi sur nos jeunes médecins, c'est quoi? Quel est l'impact – je ne connais pas les réponses – d'inclure les cabinets privés? Peut-être qu'il y a de bonnes choses, peut-être qu'il y a de mauvaises choses. Je voudrais profiter vraiment des expertises devant nous pour mieux comprendre cette situation, parce que, comme législateurs, on peut avoir nos propres opinions, mais nos témoins sont les experts, et je voudrais vraiment comprendre l'impact de ces nouveaux gestes.

Mme la Présidente, je voudrais arrêter là. J'ai beaucoup d'autres commentaires mais je sais que mes collègues veulent faire quelques autres petits commentaires avant qu'on puisse commencer cet échange avec nos invités. En terminant, Mme la Présidente, j'ai beaucoup de questions. Avant qu'on adopte ce projet de loi, on doit s'assurer que les usagers sont bel et bien protégés; on doit s'assurer qu'effectivement nous n'avons pas plus alourdi le système; on doit s'assurer que ce n'est pas juste une autre façon de faire encore des coupures; on doit s'assurer que le réseau peut avoir assez des ressources nécessaires. Et, s'il y a vraiment des choses en arrière de ça, comme un geste pour la capitation, je pense qu'on doit avoir le courage de le dire clairement, on doit avoir un débat sur ça, et tout le monde doit avoir la chance de faire ses commentaires.

Merci beaucoup, Mme le Présidente, pour cette opportunité de faire quelques remarques préliminaires. Et je passe la parole à une de mes collègue.

La Présidente (Mme Malavoy): Je vous remercie. Juste avant que vous preniez la parole, Mme la députée, je voudrais dire aux gens, d'abord, qu'on s'excuse un peu de l'exiguïté des lieux. Normalement, on aurait dû avoir une autre pièce, mais elle est requise pour les cérémonies du 50e anniversaire du drapeau. Donc, ce qu'on appelle le «salon rouge» est occupé. Et je voudrais vraiment inviter les gens qui entrent à ne pas hésiter à prendre même des fauteuils qui sont sur les côtés de cette grande table, parce que c'est bien évident qu'il faut être assis pour pouvoir assister à une longue période de présentation comme celle que nous avons ce matin. Et, cet après-midi, si jamais il y a des gens parmi vous qui souhaitaient continuer à participer à ce qui se passe, on sera à la salle Louis-Joseph-Papineau, donc une salle plus réglementaire de commission parlementaire.

Je soustrait le temps que je viens d'utiliser du temps de parole de l'opposition. Mme la députée Bourassa, je vous cède la parole.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Mme la Présidente, merci. Alors, M. le ministre, dans les commentaires d'ouverture qu'il formulait, parlait d'allégements administratifs et même d'un début de déréglementation. On allait jusqu'à dire qu'il s'agissait de simplifier. Or il apparaît au contraire qu'on va créer une structure additionnelle. Ma préoccupation, c'est celle de la personne qui a besoin de recevoir des soins et des services de santé. Lorsqu'une personne est malade et qu'elle a à passer à travers le réseau de la santé, sa préoccupation ne va pas vers les structures. Ce dont elle a besoin, cette personne-là, c'est de recevoir des soins ou des services de santé. Elle a besoin d'une accessibilité. Elle a besoin de recevoir des soins et des services qui sont de qualité et qui sont continus et qui vont être dispensés de façon humaine.

J'aurais aimé – nous aurions aimé – trouver, puisqu'il s'agit de rouvrir la loi et d'y apporter des changements majeurs, un, un changement quant à l'utilisation du terme «usager». Ce terme réfère à une langue de bois, qui est mécanique, qui enlève toute dignité à la personne qui a besoin de recevoir des soins et des services. Ce terme-là a été décrié en de nombreuses occasions. Les personnes n'y trouvent pas le respect de ce qu'elles sont, et il est dommage qu'on n'ait pas témoigné d'un souci envers la personne en modifiant ce terme-là, qui réfère mécaniquement à un utilisateur de services, comme on consomme des services dans un autobus, dans le métro; un consommateur, c'est aussi une personne qui a à payer, et c'est une préoccupation qui est très loin de ce que les personnes malades souhaitent.

On parle de droits des usagers et on parle d'une procédure: la procédure de traitement des plaintes. J'aimerais vous rappeler que, pendant plus de 10 ans, j'ai dirigé le Comité provincial des malades, un organisme à vocation provinciale, qui avait comme seule préoccupation d'aider les personnes qui passent à travers le réseau.

Ici, on parle de personnes qui ont subi le virage ambulatoire, les compressions, les transformations majeures, des personnes qui ne savent plus à qui s'adresser, quel service elles recevront, de qui elles le recevront; donc, des personnes qui sont extrêmement vulnérables. On aurait souhaité que cette procédure-là, qui est extrêmement longue, qui est exigeante, qui est formaliste, encore une fois, pour une personne qui est fragile, qui est vulnérable, soit allégée, simplifiée, dans un esprit d'ouverture, permettant à toute personne de s'en prévaloir en ayant l'assurance qu'on va l'écouter véritablement, qu'on va être soucieux des commentaires qu'elle va avoir à formuler, parce que, qu'on change un nom, une dénomination, un mot pour un mot, je ne pense pas – nous ne pensons pas – que ça va apporter vraiment ce que les personnes souhaitent, à savoir une simplification, le souci véritable d'une ouverture. Vous savez, l'utilisation du terme «plainte», c'est extrêmement péjoratif; pour beaucoup d'établissements, malheureusement encore, tout le chemin ou toute la réflexion n'a pas été faite pour permettre cette ouverture qu'on souhaite énormément.

Les personnes. Quant aux changements qui ont été apportés, il n'y a aucun changement concernant un médecin, et ce, malgré qu'il y a eu de nombreuses suggestions qui ont été faites à cet égard, notamment par le Commissaire aux plaintes et par le Protecteur du citoyen. On fait référence, ici, à l'article 38 de la Loi sur les services de santé, lequel stipule que, lorsque la plainte de l'usager porte sur un acte médical, celle-ci est acheminée au CMDP.

Pour reprendre beaucoup de commentaires, on ne voit pas, à l'heure actuelle, dans le projet de loi, de changement à ce niveau-là, et c'est extrêmement regrettable, parce que, ce qu'on voulait, en s'attaquant à ce problème véritable, c'est une fois pour toutes offrir des véritables garanties à la personne qui porte plainte, des garanties quant au délai d'examen et des garanties quant à une assurance d'obtenir des conclusions motivées.

(10 h 20)

Encore une fois, il n'y a pas de changement véritable. La personne qui a besoin de services est encore la grande oubliée. C'est pourtant elle qui conditionne tous les gestes, tous les actes qui sont posés à son égard. On est pris avec des listes d'attente qui sont épouvantables, qui sont loin de s'alléger. On parle de la chirurgie, de l'oncologie, de l'orthopédie. C'est regrettable. Je pense que le réseau devrait se tourner vers la personne qui a besoin de soins et de services. Peut-être que, si on pouvait faire un consensus là-dessus, arriverions-nous enfin à assurer à cette personne malade, qui a besoin de tout le monde dans le réseau et qui reconnaît l'utilité des professionnels, qui reconnaît l'utilité des employés, peut-être pourrions-nous enfin avoir l'assurance d'un avenir meilleur.

La Présidente (Mme Malavoy): Je vous remercie. J'ai cru comprendre que le député de Robert-Baldwin voudrait dire quelques mots. Il reste cinq minutes de votre côté.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, Mme la Présidente. Moi, je voudrais simplement rappeler aux gens qui sont ici que, chaque fois qu'on a eu un projet de loi qui était présenté par le ministre de la Santé, il y avait toujours un dénominateur commun, et c'était: il faut récupérer de l'argent. On se souvient de la loi maintenant sur la fermeture des hôpitaux, sur l'assurance-médicaments, ça a toujours été la constante qui a dominé au niveau du ministre de la Santé.

Je voudrais aussi utiliser les termes du ministre qui nous dit que c'est un prétexte pour alléger les structures et déréglementer. Nous, on a beaucoup d'inquiétudes quand on entend ça. Quand on a étudié le projet de loi 33, celui de l'assurance-médicaments, bien, ça a été fait sur le bâillon et, au moment du bâillon, on a reçu pour à peu près 120 pages d'amendements. Alors, on n'a jamais pu regarder ça de façon claire, de façon objective. En tout cas, c'est une difficulté ajoutée, je pense, à tout le dossier de l'assurance-médicaments.

Aujourd'hui, on nous parle d'un autre projet de loi. On oublie complètement le patient. Ma collègue, je pense qu'elle en a parlé avec coeur, elle sait de quoi elle parle, elle a été près des patients, et c'est toujours très apprécié d'être avec toi, Michelle.

La procédure électorale. C'est la deuxième fois en deux ans qu'on va être obligés de retoucher à la procédure électorale. Là aussi, on avait proposé une espèce d'amendement, le projet de loi qui affectait les élections, celles que nous avons eue. On a proposé une motion de scission pour qu'on puisse le regarder dans son ensemble pour pas qu'on soit obligés de revenir avec un autre projet de loi. On nous l'a refusé, c'était sur le bâillon, alors, aujourd'hui on est obligés de regarder ça de nouveau.

Renforcer le rôle des régies régionales. Il y a pas un projet de loi qui a été présenté par ce ministre qui n'a pas renforcé les pouvoirs des régies régionales. Nous, ce qu'on dit: Voulez-vous renforcer les pouvoirs des patients et de ceux qui sont proches des patients? Puis c'est qui, ça? C'est les médecins et ce sont les infirmières, les établissement aussi, qui peuvent coordonner toutes les activités de soins.

On nous propose des nouveaux pouvoirs ministériels en matière de technologie de l'information. On nous propose toujours des nouveaux pouvoirs. On n'a pas confiance aux gens qui sont dans le réseau. Un exemple, dernièrement: le problème des urgences. Après tous les efforts qui ont été faits dans le réseau, dans le contexte budgétaire, bien, on accuse les administrateurs qu'ils ne savent pas gérer leurs urgences encore. C'est jamais le ministère, il a besoin de plus de pouvoir.

Conclusion, Mme la Présidente. Le ministre nous dit qu'il ne peut pas tout réaliser dans une seule étape. Je vous rappelle l'affirmation qu'il faisait lorsqu'il est devenu ministre de la Santé: on a planifié cette réforme dans les moindres détails. On n'est jamais capable d'avoir un plan d'ensemble. On ne sait pas exactement où s'en va ce ministère, ce parti.

Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Malavoy): Je vous remercie. Mme député de La Pinière, vous souhaitez faire des remarques préliminaires?


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Brièvement, Mme la Présidente, en comptant sur votre souplesse, puisque vous avez empiété sur le temps de l'opposition.

Je fais une première réflexion en regardant ce projet de loi, c'est de me poser la question suivante: Est-ce que le projet de loi qui est devant nous répond aux besoins des citoyens et du réseau de santé et services? En le parcourant article par article et en écoutant les commentaires qui ont été faits par mes collègues qui m'ont précédée, je constate qu'il y a un fossé entre les problème de la santé tels que vécus par les citoyens aujourd'hui et ce qui nous est proposé dans ce projet de loi.

Quels sont les problèmes de santé actuellement et depuis que le ministre préside aux destinées du ministère de la Santé et des Services sociaux? Essentiellement il y a trois problèmes majeurs: celui de l'accessibilité des citoyens aux services – il va sans dire que, dans ma perspective, je place le citoyen au centre de l'action; deuxièmement, celui de la qualité des services de Santé et des Services sociaux; et, troisièmement, celui de l'accessibilité aux ressources dans le réseau pour offrir des services de qualité et les rendre accessibles à tous.

Le problème, actuellement, c'est que, dans le réseau, dans les hôpitaux, il y a des listes d'attente comme on n'a jamais vu, qui s'allongent de plus en plus. Il y a une détérioration de la qualité des services, pas parce que les gens qui sont là n'offrent pas de bons services, mais parce qu'ils n'ont pas les ressources suffisantes pour offrir des services de qualité. Il y a moins de médecins, moins d'infirmières, moins de personnel soignant. On est rendu actuellement, dans la logique du gouvernement qui prétend vouloir atteindre le déficit zéro, à balayer dans les cours des hôpitaux, des CLSC même, pour les forcer à emprunter et à s'endetter, c'est inacceptable. On l'a vu, c'est encore dans l'actualité d'aujourd'hui.

On voit aussi, par rapport à toute cette politique menée par le ministre et ce qui s'ensuit, une perte finalement de services pour bien des gens. Et, quand on parle des régions, encore une fois, il y a une iniquité assez importante. Dans le projet de loi, on nous fait croire qu'il y aura une régionalisation des services de santé et des services sociaux. Or, quand on regarde l'action de ce gouvernement dans son ensemble, qu'est-ce qui a été fait sous le prétexte de la régionalisation?

Dans le domaine du développement économique de la grande région de Montréal, il y a eu une improvisation incroyable, une énergie qui a été dépensée pour mettre sur pied une autre structure supposément pour enlever la duplication, la Commission de développement économique de Montréal. Après de longues discussions, on a écarté le projet, ça n'existe plus. Les CLD, on a pitché ça dans le paysage. Aujourd'hui, les gens ne savent plus sur quel pied danser, ça ne marche plus, selon les régions. Les CRD, des structures existantes, on les a vidés de leurs pouvoirs pour en faire des «rubber stamps» de la politique gouvernementale.

Dans le domaine de l'éducation, la régionalisation ne marche plus non plus. Actuellement, on parle de la fusion des sociétés de transport dans la région de Montréal, également des problèmes qui sont posés par rapport à la régionalisation. Et là, on attaque le dossier de la santé et des services sociaux. Moi, je suis une députée représentant une région. Je suis présidente du caucus libéral de la Montérégie. Je travaille avec les partenaires du milieu, les décideurs locaux et régionaux. Les gens s'arrachent les cheveux, ils ne savent plus sur quel pied danser avec cette pseudo-régionalisation qui nous est imposée dans l'improvisation la plus totale.

La Présidente (Mme Malavoy): Mme la députée, je vais devoir vous interrompre parce qu'on arrive...

Mme Houda-Pepin: Je termine.

La Présidente (Mme Malavoy): Je vous demande de terminer.

Mme Houda-Pepin: Mme la Présidente, sur un point, celui de l'imputabilité, c'est extrêmement important que le gouvernement et que le ministre soient imputables dans le dossier de la santé et des services sociaux. Transférer ses pouvoirs à une structure bureaucratique, c'est se désengager dans un dossier qui est vital pour les citoyens du Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Malavoy): Je vous remercie. Cela met fin aux remarques préliminaires.


Auditions

Et, j'inviterai donc le premier groupe, les représentants de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, à venir prendre place en face de nous. Le seul avantage de cette pièce, c'est qu'on est plus près des gens qui viennent présenter des mémoires, et ça libérera quelques fauteuils s'il y a d'autres personnes qui se joignent.

Pendant que vous prenez le temps de vous installer, je vais simplement vous rappeler quelles sont les règles pour cette période d'une heure dont nous disposons. Le temps vous appartient, mais la coutume veut que l'on prenne environ 20 minutes pour la présentation et qu'ensuite on se partage les 40 minutes qui restent en deux: 20 minutes qui vont au ministre et au côté ministériel, et un autre 20 minutes qui va à l'opposition. Si vous débordez un petit peu dans votre présentation, c'est du temps retranché pour la période d'échanges qui va suivre.

Alors, je vous inviterais donc à vous présenter et à présenter également les personnes qui vous accompagnent et nous vous écoutons avec beaucoup d'intérêt.


Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ)

M. Dutil (Rénald): Mme la Présidente, M. le ministre, vous me permettrez d'abord de présenter ceux qui m'accompagnent. À ma droite, le Dr Jean Rodrigue, qui est directeur de la planification et de la régionalisation de la Fédération des médecins omnipraticiens; à ma gauche, le Dr Louis Godin, qui est le premier vice-président de la Fédération; Me Ginette Primeau, qui est le chef de notre contentieux; et Me Pierre Belzile, qui est également du contentieux de la Fédération.

La Présidente (Mme Malavoy): ...s'il vous plaît, pour les fins de l'enregistrement.

M. Dutil (Rénald): Pardon?

La Présidente (Mme Malavoy): Vous-même, s'il vous plaît.

M. Dutil (Rénald): Moi-même, Rénald Dutil, je suis président de la Fédération.

La Présidente (Mme Malavoy): Je vous remercie.

(10 h 30)

M. Dutil (Rénald): Alors, voilà, la Fédération accorde une grande importance à ce projet de loi. On y voit les bases d'un nouveau partenariat entre les omnipraticiens, la population et le réseau de la santé, entre autres avec la création des départements régionaux de médecine générale.

Le projet de loi, bien sûr, comporte un grand nombre d'autres dispositions qui sont importantes et des dispositions qui visent à consolider le réseau et le processus de transformation de notre système de santé. Dans notre mémoire, nous avons commenté un grand nombre de ces dispositions. Nous avons fait 23 recommandations. Il n'est pas possible dans une présentation de 20 minutes de commenter chacune de ces recommandations; aussi, je vais limiter ma présentation à certaines questions, entre autres le traitement des plaintes des usagers, les fonctions des établissements et les pouvoirs des régies régionales. Nous allons également discourir rapidement sur les plans d'organisation dans les établissements, le plan des effectifs médicaux. Et, bien sûr, nous allons parler du projet de département régional de médecine générale et de l'amendement à l'article 19 de la Loi sur l'assurance-maladie.

Quant aux plaintes des usagers, la Fédération fait un constat, à savoir que les modifications proposées répondent à certaines recommandations qui étaient présentes dans les derniers rapports du Commissaire aux plaintes, M. Francoeur. On constate cependant que le projet de loi est silencieux quant aux plaintes qui portent sur un acte médical, et c'est pourtant l'un des aspects qui est le plus problématique actuellement. Lorsqu'une plainte porte sur un acte médical, la seule procédure réglementaire possible actuellement, c'est celle de passer par le comité de discipline, une procédure qui est extrêmement lourde et qui, dans les faits, devient inapplicable. C'est d'ailleurs le constat qu'a fait M. Francoeur dans son rapport, à savoir que, n'ayant pas d'autre alternative, une telle procédure rend presque inapplicable le traitement de certaines plaintes, et on a tendance à ce moment-là soit à oublier ces plaintes ou à les banaliser.

La Fédération, dans sa première recommandation, suggère une procédure qui serait beaucoup plus souple, plus transparente, plus respectueuse également et qui répondrait aux recommandations qui ont été émises par le Commissaire aux plaintes. Je ne vous lirai pas toute cette procédure – vous la retrouvez dans notre mémoire, encore une fois dans la recommandation numéro un – mais nous croyons qu'une telle procédure nous permettrait de traiter d'une façon beaucoup plus adéquate l'ensemble des plaintes qui portent sur un acte médical. Et, pour nous, un acte médical, ce n'est pas uniquement la dispensation ou la non-dispensation d'un service. Ça inclut également la diligence et la conduite d'un médecin avec ses patients. Alors, c'est le premier point.

Le deuxième point: Fonctions des établissements. Nous remarquons que le projet de loi fait disparaître les programmes de santé et de services sociaux qui sont élaborés par le ministre, enlève la responsabilité des régies régionales quant à la mise en oeuvre de ces programmes, donne aux établissements la compétence exclusive dans le domaine des programmes cliniques sans autre justification qu'un souci d'allégement. Je vous avoue que notre Fédération est très étonnée par un tel laisser-aller à l'heure où de nombreuses activités sont regroupées à l'intérieur de programmes qui peuvent impliquer plusieurs disciplines et plus d'un établissement. Simplement rappeler que le développement plus ou moins anarchique de programmes locaux n'a pas toujours été heureux, particulièrement dans certains CLSC où les bonnes intentions d'un programme primaient sur son efficacité. Et, dans ce domaine, la cohérence interétablissements dans la nature et l'évaluation des programmes de même que leur coordination et leur intégration à l'échelle régionale sont des conditions essentielles à l'efficience de notre système.

On est encore une fois très surpris entre cette renonciation des responsabilités ministérielles et le fait que les régies régionales ne deviennent pas imputables. On comprendrait que la responsabilité du ministre d'élaborer de tels programmes soit confiée aux régies régionales. Si elle n'est laissée qu'aux établissements, ce qu'on craint, c'est que, malgré toute la bonne foi, bien sûr, des établissements, on vive ce que je viens de noter là: la mise sur pied de programmes qui encore une fois ne seraient pas toujours heureux parce qu'il n'y aurait pas cette conciliation, cette intégration et cette complémentarité entre les divers programmes d'une même région.

Or, l'abrogation du premier alinéa de l'article 91 – premier et deuxième alinéas, on voit également des changements à ce moment-là – fait en sorte que la régie régionale n'a plus comme principal objet de planifier, organiser, mettre en oeuvre et évaluer dans la région les programmes de santé et services sociaux élaborés par le ministre.

Enfin, à travers ce projet de loi, nous constatons que le ministre n'élabore plus de programmes. Cette responsabilité devient celle des établissements. Les régies régionales sont absentes en cette matière. On est en désaccord avec cette démission. Comment concilier, à ce moment-là, la logique d'une telle modification, eu égard aux responsabilités des régies régionales et eu égard aux responsabilités qu'auraient les départements régionaux de médecine générale?

Notre deuxième recommandation est donc à l'effet de faire en sorte que les responsabilités qu'assumait le ministre, eu égard à l'élaboration de ces programmes, soient à tout le moins reconnues aux régies régionales: donc, qu'on abroge les articles 31 et 32 du projet de loi. Notre recommandation 13, dans notre mémoire, reprend cette question.

Le troisième point dont je souhaiterais traiter, c'est celui des conseils d'administration. L'introduction de conseils d'administration unifiés vient changer une dynamique. On introduit dans le projet de loi un nouvel alinéa à l'article 127 de la loi qui a comme effet de rendre inopérante la garantie institutionnelle qui est prévue actuellement par l'article 186 de la loi, soit la création d'un service médical ou la désignation d'un médecin responsable dans un CLSC ou un CHSLD lorsque au moins un médecin y exerce. Ces conseils d'administration unifiés ou ceux d'établissements fusionnés regroupent souvent plusieurs centres qui ont des missions différentes, distinctes ou, encore, qui sont distincts sur le plan géographique.

Par le projet de loi, le conseil d'administration aurait finalement une vocation, celle qu'il représente principalement. Si, par exemple, le conseil d'administration représente davantage les CH, cet établissement serait réputé être un CH. Il y aurait, bien sûr, un CMDP, mais il n'y aurait plus l'obligation légale d'avoir un responsable médical – un chef médical désigné – soit dans un CHSLD ou soit dans un CLSC, même si les missions sont différentes, même si ces centres étaient géographiquement distincts, d'où notre recommandation d'abroger l'article 3 du projet.

Quant à la recommandation même des conseils d'administration, la Fédération recommande que la composition des conseils d'administration de tout établissement prévoie une personne élue par et parmi les médecins qui exercent dans le centre exploité par l'établissement concerné. C'est une recommandation que nous avons faite à diverses reprises dans le passé. Nous revenons sur ce point. Il nous apparaît important que, dans le conseil d'administration d'un établissement de santé, on retrouve à tout le moins un médecin qui est élu par et parmi les médecins de cet établissement.

J'en arrive au plan d'organisation des établissements et le plan des effectifs médicaux et dentaires. On fait référence aux articles 59 à 62 du projet de loi. La Fédération rappelle que le plan d'organisation a un effet direct sur le plan des effectifs médicaux et dentaires. La régie régionale doit le recevoir sans être obligée de le demander, tel que le suggère actuellement le projet de loi. Aussi, compte tenu des responsabilités des régies régionales, dont certaines seront répondues par les futurs départements régionaux de médecine générale, la Fédération recommande d'abroger les articles 59, 60 et 62 du projet de loi. C'est nos recommandations cinq et six.

Nous recommandons également d'abroger l'article 61 du projet de loi qui propose la voie du décret plutôt que la voie réglementaire quant à la formation obligatoire d'un département clinique de médecine générale dans les centres hospitaliers. La formation de tels départements dans les centres hospitaliers fut obtenue après bien des batailles de la Fédération il y a de cela un certain nombre d'années; aujourd'hui, tous les intervenants reconnaissent le bien-fondé d'avoir su créer des départements cliniques de médecine générale dans tous nos centres hospitaliers, à l'exception de quelques centres à vocation beaucoup plus spécifique.

(10 h 40)

Les modifications qu'on propose menacent cet acquis. On sait que, si c'est par règlement, il faut qu'il y ait publication; par décret, c'est une procédure autre. Aussi, la Fédération ne peut adhérer à un tel changement et nous allons toujours continuer d'argumenter la nécessité d'un département de médecine générale dans tout hôpital où il y a des omnipraticiens. Et nous allons également argumenter l'importance de retrouver des omnipraticiens dans tous nos centres hospitaliers, même les centres hospitaliers universitaires.

L'implication des omnipraticiens au niveau des services d'urgence, entre autres, doit être coordonnée par le chef de ce service sous l'autorité du chef du département clinique de médecine générale. Nous avons vécu souvent des crises d'effectifs, dans nos salles d'urgence, et la ressource qui fut le plus à même de résorber ces problèmes, dans les centres hospitaliers, fut le département de médecine générale, parce que ce département de médecine générale était imputable du service d'urgence.

J'en arrive au département régional de médecine générale, qui serait une nouvelle structure dans notre réseau. Nous avons eu, comme Fédération, l'occasion de discuter souvent de ce projet que nous avons mis de l'avant il y a déjà près de deux ans. Nous avons consacré beaucoup de temps et d'énergie, de réflexion sur la nécessité et les rôles que pourra jouer ce département dans le nouveau réseau en train de se façonner.

Les omnipraticiens, je le rappelle, ils oeuvrent, bien sûr, principalement en première ligne. Mais ils se retrouvent également de façon fort significative à d'autres niveaux de soins. Au niveau de la deuxième ligne, dans à peu près tous les établissements du réseau, nous retrouvons des omnipraticiens, que ce soit dans les unités pour des malades admis, que ce soit au niveau des soins palliatifs, dans les unités gériatriques. Nous retrouvons aussi en première ligne les omnipraticiens principalement dans les cabinets et cliniques privés et dans les CLSC.

La majorité des médecins omnipraticiens, actuellement, ont des activités mixtes. Des activités qui se partagent entre soit le cabinet privé, soit le CLSC, ou soit d'autres établissements du réseau. Il est apparu, dans notre réflexion et nos travaux, pour la Fédération, que les principaux problèmes qu'on vivait actuellement étaient bien davantage des problèmes de coordination et de complémentarité entre les activités des omnipraticiens, plutôt que des problèmes de pénurie d'effectifs. Lorsqu'on regarde le nombre global de médecins omnipraticiens, ici, au Québec, le Québec se situe encore en tête de liste des provinces canadiennes, immédiatement après la Colombie-Britannique. Et pourtant, on souffre de pénurie de médecins omnipraticiens dans plusieurs milieux, plusieurs communautés, dans plusieurs établissements. Il y a, pour nous, des problèmes de complémentarité, d'intégration, de coordination au niveau des services rendus par ces médecins.

Les problèmes de répartition intrarégionale sont, sans doute, les plus gros problèmes qu'on vit actuellement, lorsqu'on parle d'effectifs médicaux. On est en face de situations où le nombre global de médecins omnipraticiens est suffisant dans une région, mais par ailleurs vous avez des milieux, des communautés, ou encore des établissements de ces régions qui sont en pénurie importante de médecins omnipraticiens. Or, pour nous, il s'agit là d'un manque de concertation, d'un manque d'intégration dans le développement des effectifs médicaux en omnipratique.

Et c'est une des raisons fondamentale qui nous a amenés à proposer un département régional de médecine générale, un département qui devra regrouper tous les médecins omnipraticiens qui oeuvrent à l'intérieur du système public, un département qui va rendre les médecins omnipraticiens imputables de répondre aux besoins en services médicaux généraux de leur région, bien sûr, si les ressources le permettent. Ce département devra inciter à la mise sur pied de réseaux d'accessibilité de soins médicaux généraux.

On ne part pas de zéro. Il y a déjà plusieurs de ces réseaux qui sont en voie d'être installés. Mais ces réseaux d'accessibilité de soins doivent se structurer au niveau territorial, au niveau des communautés, soit à l'échelle des territoires de CLSC ou à l'échelle des territoires de MRC. Mais il est nécessaire d'avoir une structure régionale qui chapeaute ces réseaux d'accessibilité de soins, qui apporte la coordination voulue, qui fasse en sorte que la répartition des omnipraticiens à l'intérieur de ces réseaux d'accessibilité de soins soit adéquate. Et ce département, bien sûr, devra faire ses recommandations à la régie régionale, puisqu'il relèvera de la régie régionale quant au plan des effectifs médicaux en omnipratique.

Dans le contexte d'un département régional de médecine générale, nous acceptons que les cabinets privés soient dorénavant inclus dans les plans des effectifs médicaux régionaux. Une telle inclusion est très lourde de conséquences. Elle est très lourde de conséquences et il nous apparaît qu'elle ne pourrait pas se réaliser, elle ne pourrait pas s'opérationaliser sans une structure comme celle qu'on propose, une structure d'un département régional de médecine générale. Ce département, encore une fois, doit avoir une compétence régionale et inclure tous les milieux où se retrouvent des omnipraticiens: donc, ceux qui oeuvrent en cabinets privés, ceux et celles qui oeuvrent en CLSC, ceux et celles qui oeuvrent dans les établissements.

Les omnipraticiens, encore une fois, je le répète, ne sont pas cloisonnés à un seul niveau de soins, d'où l'importance d'un organisme régional qui vienne aider à la concertation et à la coordination de leurs activités. Ce département régional ne doit pas interférer avec l'autonomie interne des établissements, entre autres la gestion des départements cliniques de médecine générale, ou encore des services médicaux dans d'autres types d'établissements. Au contraire, les départements régionaux seront des supports aux départements cliniques de médecine générale.

Par exemple, si, dans un hôpital donné, le département de médecine générale n'arrive pas à recruter les effectifs voulus, je pense que le département régional de médecine générale sera là comme outil, comme support, pour aider cet établissement à recruter les effectifs voulus. On attache énormément d'importance au rôle qu'occupent les médecins omnipraticiens dans les hôpitaux, et il ne faudrait pas perdre de vue cela. Si nous avons voulu que le département regroupe aussi les médecins qui se retrouvent dans les établissements, c'est pour s'assurer également qu'ils continueront d'occuper de tels rôles dans les établissements et qu'ils viendront en aide aux établissements pour recruter les effectifs voulus.

L'inclusion des cabinets privés dans les plans d'effectifs, j'y reviens encore une fois, est une question qui est éminemment lourde de conséquences. Sans le département régional, il n'apparaît pas à notre Fédération qu'il serait possible d'inclure les cabinets privés et de rendre opérationnel un tel plan d'effectifs. Mais les départements régionaux n'ont pas comme objectif de conscrire les médecins de cabinets privés. Ce serait une grave erreur si l'on voulait limiter les départements régionaux à la seule inclusion des médecins de cabinets privés. La réalité, d'ailleurs, n'est pas celle-là. La réalité, c'est que les médecins de cabinets privés se retrouvent également, pour la majorité d'entre eux, dans d'autres établissements.

Les mandats du département seront très larges, tels qu'on les voit dans le projet de loi: recommander le plan des effectifs médicaux de la région, définir et proposer un plan régional d'organisation des services médicaux, en assurer la mise en place, l'application, définir et proposer le réseau d'accessibilité aux soins médicaux généraux. Donc, un mandat très large. Nous ne croyons pas qu'un tel mandat, qui, encore une fois, touche d'une façon très particulière les médecins de cabinets privés, pourrait être réalisé par une autre structure. On ne croit pas que les CLSC pourraient avoir le mandat de coordonner les services médicaux généraux dispensés par les médecins omnipraticiens, et c'est au-delà de 80 % de ces services qui sont dispensés par les médecins omnipraticiens.

La Présidente (Mme Malavoy): Je m'excuse, je me permets simplement de vous dire que nous en sommes à 20 minutes. Vous pouvez poursuivre, bien entendu, mais c'est juste pour que vous soyez conscient du temps.

(10 h 50)

M. Dutil (Rénald): Je termine là-dessus. Alors, je termine par ce point. Pour nous, les CLSC, pour différentes considérations, n'ont pas acquis la crédibilité voulue pour prétendre coordonner l'ensemble des services médicaux dispensés dans leur territoire. La Fédération, donc, propose la création de ce département régional de médecine générale. Nous proposons – et c'est notre recommandation n° 21, je pense – également une procédure générale pour le médecin qui s'inscrira et qui acceptera de remplir les obligations du DRMG.

Et, le dernier point – je conclus par cela – c'est les amendements que l'on propose à l'article 19 de la Loi de l'assurance-maladie. La Fédération est en désaccord avec certains mots qu'on y introduit, comme le mot «mesure». On ne peut pas adhérer à un tel libellé parce que ces mesures pourraient aller jusqu'à l'introduction de ce qu'on appelle familièrement un «billing number». C'est inacceptable. D'ailleurs, les tribunaux ne pourraient pas retenir une telle avenue. Aussi, on recommande de modifier l'article 168 du projet de loi par l'insertion suivante, après le sixième alinéa de l'article 19: «Une entente peut prévoir une rémunération différente pour certains professionnels selon leur lieu d'exercice ou le territoire où ils exercent afin d'assurer le respect des plans d'effectifs», mais de biffer le mot «mesure». Alors, je termine là-dessus, madame.

La Présidente (Mme Malavoy): Merci beaucoup, M. Dutil. Je vais laisser le ministre commencer la période d'échanges avec vous.

M. Rochon: Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup pour votre présentation et pour le mémoire que vous nous avez préparé. On n'aura sûrement pas le temps d'aller dans tous les détails, mais je pense qu'on a là beaucoup de matériel pour pousser plus loin l'étude de certains articles du projet de loi.

Il y a peut-être une ou deux questions qui seraient utiles pour s'assurer de bien comprendre vos suggestions. Vous avez d'abord parlé de l'article 38. On est entièrement d'accord sur le fait que la procédure actuelle pour l'examen des plaintes qui peuvent impliquer un médecin est très lourde et rigide et implique beaucoup de délais. Là-dessus, c'est un peu votre avis que je voudrais avoir. Il nous a semblé que les implications de changements à cet article-là pouvaient être assez importantes et les parties impliquées être assez nombreuses et que le fonctionnement des rouages d'un établissement, assez délicat aussi, qu'on ne se seraient pas sentis capables d'avoir la clé. Mais ce qu'on souhaiterait faire – et je disais ça en introduction, tout à l'heure, et ça, c'est un des exemples – c'est, sur la base que ça nous a amenés à constater, l'examen sérieux et tous les essais qui ont été proposés, de convenir de mettre sur pied un petit groupe de travail qui serait formé essentiellement de médecins qui ont des expériences différentes dans différents établissements pour qu'on trouve... Tout le monde s'entend sur l'objectif, qui est de simplifier la procédure, de s'assurer de bien distinguer ce qui peut être une plainte qui vise un acte médical comme tel, qui a tout un cheminement quant à son traitement qui est prévu, par rapport à une plainte qui regarde d'autre chose que la qualité de l'acte, quelque chose qui peut être plus relié à la relation, au comportement ou quoi que ce soit. Donc, il y a plusieurs éléments, ça ne nous a pas paru simple. Ou bien on trouve le moyen, dans le cadre de l'étude de cette loi-là, d'améliorer un peu l'article ou on convient plutôt de mettre sur pied un groupe de travail assez spécifique qui pourrait aller au fond de l'affaire pour voir comment on pourrait trouver une solution à ça.

La Présidente (Mme Malavoy): M. Dutil.

M. Dutil (Rénald): Écoutez, votre suggestion de mettre sur pied un groupe de travail est certainement recevable par notre Fédération, qui a constaté, au cours des années, de multiples problèmes quant au traitement des plaintes lorsqu'un médecin est concerné. Je demanderais peut-être à Me Primeau d'ajouter là-dessus puisqu'elle fut particulièrement impliquée dans ce dossier chez nous.

Mme Primeau (Ginette): Il est important de noter que le médecin qui fait l'objet d'une plainte de quelque nature ou de quelque portée que ce soit, ça aboutit toujours au comité de discipline, et c'est ce que M. Jean Francoeur dénonce, qu'il dénonçait – oui, oui – qui était Commissaire aux plaintes.

Autre chose qu'il est important de savoir, c'est que ce qui est proposé dans le mémoire est déjà en application. Nous n'avons pas inventé la roue. Lors de la problématique qui s'intensifiait, le contentieux de la Fédération, avec des procureurs d'établissements, a travaillé en collaboration, et cette procédure-là, à quelques détails près, se retrouve dans plusieurs règlements de CMDP d'établissements. Et, malgré qu'on ait, selon l'expression, étiré l'élastique sur la légalité d'une telle procédure, les conseils d'administration l'ont adoptée. Donc, ça a fait un petit bout de chemin, cette procédure-là qu'on vous propose dans le mémoire. Alors, je ne pense pas qu'on soit obligé de recommencer à zéro. Je pense que les médecins, que ça soit au niveau du comportement, de la conduite, de la qualité de l'acte, je ne pense pas qu'ils vont souhaiter avoir deux procédures. Je pense qu'il faut que ce soit l'évaluation par les pairs, même au niveau du comportement, mais par un véhicule plus souple. Mais, à tout le moins, avec respect, je pense que ce qui est proposé dans le mémoire pourrait démarrer, si vous voulez absolument en faire un travail distinct du projet de loi. À tout le moins, qu'on ne reparte pas à zéro, parce que ceci a été appliqué et encore appliqué dans plusieurs établissements et, à mon avis, ça pourrait même être suffisant puis être adopté dans ce projet de loi là.

M. Rochon: O.K. Il y a, depuis assez de temps, assez d'établissements de natures différentes qui appliquent effectivement la procédure de façon satisfaisante.

Mme Primeau (Ginette): Exactement.

M. Rochon: Donc, si je vous comprends bien, vous souhaiteriez peut-être même qu'on examine rapidement vos suggestions et qu'au lieu d'un comité d'études on pourrait peut-être aller plus vite et déjà...

M. Dutil (Rénald): Encore une fois, votre suggestion, elle est recevable, mais il ne faudrait pas partir à zéro puisque, tel que Me Primeau vient de le dire...

M. Rochon: Non, ça, c'est sûr.

M. Dutil (Rénald): ...déjà on a une expérience avec la procédure qui vous est suggérée.

M. Rochon: Non, l'intention était vraiment de s'assurer qu'on a bien pris en compte ce qui s'est fait, parce que, je le disais aussi dans mon introduction, on a essayé dans plusieurs cas de bien comprendre ce que le réseau avait trouvé comme façon parfois d'assouplir, dans la pratique et dans la vie de tous les jours, des aspects de la loi qui avaient peut-être paru, à l'expérience, trop contraignants.

Là, on va vérifier avec aussi les autres représentants de médecins, les autres fédérations de médecins spécialistes, s'il y a vraiment d'établi une procédure qui semble, plus que ce qu'on nous avait dit, avoir apporté une amélioration notable et qu'on ne puisse pas penser qu'un comité trouverait autre chose, parce qu'on serait parti de toute façon de ce qu'est l'expérience. L'idée du comité, c'était de s'assurer de bien aller la chercher, cette expérience-là. On va regarder. Si jamais on peut aller plus rapidement et qu'il y a un accord, moi, je n'aurais pas d'objection à ce qu'on procède plus vite là-dessus. On va faire un suivi de ça, sur ça.

Vous avez parlé, M. Dutil, et très correctement, assez longuement, du département territorial. C'est un peu, je ne sais pas si on peut appeler ça du droit nouveau mais, ça, c'est vraiment une création qui est faite. Pour qu'on ait eu différentes discussions à différents niveaux là-dessus, j'ai aussi le sentiment qu'on a un angle de pris qui va nous ramener à faire une amélioration importante de l'encadrement de la pratique médicale, en fonction des besoins des gens, des patients, pour assurer une meilleure accessibilité des services et une meilleure interface avec le système public. Mais, à un moment, vous proposez que les responsabilités de désignation des établissements qui doivent dispenser des services d'urgence soient confiées au département régional de médecine générale plutôt que de rester une responsabilité de la régie régionale, si je comprends bien votre suggestion. Non?

M. Dutil (Rénald): Non, ce n'est pas exactement ce qu'on suggère, M. le ministre.

M. Rochon: Bon, c'est ça, je n'étais pas trop sûr d'avoir compris ce que vous nous suggérez là-dessus.

M. Dutil (Rénald): Ce qu'on retrouve dans le projet de loi, c'est que c'est maintenant par voie de décret qu'on déterminerait qu'un centre hospitalier devrait avoir un département de médecine générale alors que c'est la régie régionale qui viendrait déterminer quel établissement, quel centre hospitalier opère un service d'urgence. On pourrait se retrouver dans une situation où un centre hospitalier aurait un service d'urgence sans avoir de département de médecine générale alors qu'en vertu des dispositions de la loi actuelle, c'est le département de médecine générale qui est responsable du service d'urgence.

M. Rochon: Reprenez ça, je ne suis pas sûr que je vous suis. Le changement que vous voyez par rapport à la loi actuelle, c'est qu'au lieu de procéder par décret, ces régies régionales pourraient directement identifier...

M. Dutil (Rénald): Non. C'est que, par rapport à la loi actuelle, je laisserai Me Primeau peut-être commenter, en fait, c'est plus légal, je ne suis pas avocat, mais les dispositions actuelles de la loi stipulent que c'est par règlement qu'il existe un département de médecine générale...

M. Rochon: C'est ça. Vous seriez pour qu'on...

M. Dutil (Rénald): ...dans tous les centres hospitaliers.

M. Rochon: ...garde la voie réglementaire plutôt que du décret.

M. Dutil (Rénald): Exact, plutôt que le décret.

M. Rochon: Maintenant, parce que vous pensez que, par règlement, on n'est plus sûr de ne pas placer un département, un service d'urgence à la mauvaise place?

M. Dutil (Rénald): Un règlement, c'est plus fort qu'un décret, ça oblige une publication.

(11 heures)

M. Rochon: Là, je vous pose la question parce que je pense qu'on a un bel exemple de ce qu'on veut dire par déréglementer et assouplir une application d'une loi. C'est sûr qu'un règlement, c'est plus fort; puis une loi, ce serait encore plus fort.

Là, on a vraiment le sentiment que, dans ce cas-là, ça prend quelque chose d'assez formel quand même, là c'est pas une décision qui se prend purement administrativement, qui peut se prendre toujours rapidement, qui a besoin d'être assurée, et non seulement qu'on s'est assuré, mais qu'il y a apparence qu'on s'est assuré que tout avait été vérifié.

Un décret, c'est quand même une décision du gouvernement. C'est quand même le ministre qui va présenter un mémoire au Conseil des ministres, et c'est le Conseil des ministres qui décide. Ça nous apparaissait déjà assez lourd comme procédure et assez sûr comme mécanisme qu'on risquerait moins d'arriver là, en bout de piste, après sûrement discussion avec une régie régionale, consultation des établissements concernés et d'aller – surtout l'exemple que vous prenez – jusqu'à identifier un établissement pour lui demander d'avoir un service d'urgence alors qu'il aurait pas les ressources suffisantes pour le faire. Mais je pense que c'est un bel exemple. Est-ce qu'on déréglemente et on assouplit? Et pourquoi on ne pourrait pas le faire dans ce cas-ci? Ça ne me convainc pas, votre argumentation, je dois vous le dire.

Oui, Me Primeau.

Mme Primeau (Ginette): D'abord on a vécu des expériences avant votre...

M. Rochon: ...sous d'autres régimes.

Mme Primeau (Ginette): ...sous d'autres régimes où, par réglementation... Et là je vous dirais que c'est au niveau de la consultation qui découle d'une publication, c'est à ce niveau-là que la réglementation... Ce n'est pas parce que c'est plus lourd ou moins lourd, c'est au niveau de la consultation. Lorsque vous allez par pouvoir réglementaire, vous devez publier dans la Gazette officielle , ce qui n'est pas une obligation par le décret.

M. Rochon: Non, c'est 45 jours de plus puis...

Mme Primeau (Ginette): Oui, mais il n'en reste pas moins qu'au départ, on ne peut pas présumer qu'il y aurait une consultation informelle. D'accord? Le gouvernement n'est pas obligé de consulter qui que ce soit. Il consulte le Conseil des ministres mais non les intervenants du réseau. Il n'a pas cette obligation légale. Par un pouvoir réglementaire tel qu'on a actuellement dans la loi, c'est une obligation.

Or, on a déjà vécu une publication d'un règlement qui allongeait la liste des établissements exemptés de l'obligation de former un département clinique de médecine générale. Heureusement qu'il y a eu cette publication. La Fédération a pu faire des représentations, et le règlement n'a pas été adopté tel que publié.

Deuxièmement, lorsqu'on parle de services d'urgence... Et vous avez raison d'avoir de la difficulté à suivre, je pense que c'est difficile à suivre aussi, le législateur n'est pas toujours facile. C'est pour faire gagner leur vie aux avocats probablement. Actuellement, c'est le ministre qui peut désigner des établissements qui ont l'obligation de... ça existe depuis le début, bon, le ministre peut désigner des établissements qui doivent dispenser des services d'urgence. Là, ça serait la régie régionale qui le ferait. On pourrait arriver dans un contexte assez équivoque où... Actuellement, en vertu du règlement sur l'organisation et l'administration des établissements, la vocation d'un département clinique de médecine générale est d'assumer les services d'urgence. Si la régie régionale, de par son pouvoir de désigner des établissements, vient désigner un établissement qui doit avoir des services d'urgence, mais qu'en parallèle à ça, de façon rapide, le gouvernement décrète que des établissements n'ont plus l'obligation d'avoir un département clinique de médecine générale, voilà le constat, c'est qu'on se dit, on pourrait... Je pense que vous comprenez maintenant; seulement par l'expression de vos yeux, je vois que vous comprenez.

M. Rochon: Je vois très bien...

La Présidente (Mme Malavoy): Pour l'enregistrement, c'est préférable de le dire.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Malavoy): Tout à fait.

M. Rochon: ...ce n'est pas ce matin qu'on peut trancher ça, mais je pense que c'est vraiment une belle illustration du dilemme qu'on va avoir pendant toute l'étude de ce projet de loi. Déréglementer, oui, mais pas telle chose, oui, mais pas telle autre chose, et je suis pas sûr qu'en bout de ligne on risque de se retrouver avec pas mal moins de règlements.

C'est sûr que, si on a une décentralisation, si on passe du règlement au décret et qu'il y a certaines décisions du ministre ou du ministère qu'on passe à une régie régionale en termes d'organisation de services, et que la régie donne plus de marge de manoeuvre à l'établissement, on a acquis une certaine confiance qu'aux différents niveaux les gens ont l'information, ont la responsabilité, la capacité de prendre les bonnes décisions et, vu que toute décision humaine est soumise à l'erreur, si l'erreur arrive localement, on a pas mal de chances que, dans ce type de décision, il y aurait moins d'erreur ou que localement on sera plus près de sa décision, on pourra plus corriger.

C'est tout ça qu'il faut se donner ou pas comme confiance justement dans un système. Autrement – je reconnais votre point puis son mérite – si on suit cette logique-là dans plusieurs discussions qu'on va avoir, on va rester très centralisé comme système. On a un dilemme là parce que quand on... Le discours général sur la décentralisation, ça va bien; c'est quand on arrive à des choses précises que c'est moins évident. Mais je reconnais votre point, je le prends à bon compte.

Et on avait une autre chose, puis je vais arrêter là-dessus, Mme la Présidente. Je pense que la modification qui était proposée à l'article 108 pour ne plus soumettre une entente... c'est-à-dire l'article 31 du projet de loi qui réfère à 108 de la loi actuelle qui dit que, s'il y a des ententes d'échanges de services entre établissements, si un médecin est impliqué, le médecin doit avoir été informé, alors, là, on dit: On n'aura plus besoin de transmettre cette entente à la régie régionale, si des établissements en ont convenu, les médecins sont informés. Ça s'applique directement. Là, je pense, c'est la même question qui se pose: Est-ce qu'on assouplit au point...

Une voix: Non, non, non.

M. Rochon: C'est peut-être là qu'on a mal saisi. J'ai peut-être mal saisi l'aspect de votre suggestion à cet égard.

La Présidente (Mme Malavoy): Voulez-vous préciser?

M. Rochon: Alors, si vous référez, je pense qu'il faut vraiment prendre l'article 38 de la loi.

Mme Primeau (Ginette): L'article 108 de la loi actuelle...

M. Rochon: L'article 108, oui.

Mme Primeau (Ginette): ...dit que des établissements peuvent signer des ententes de services interétablissements avec un autre organisme, avec toute personne...

M. Rochon: C'est ça.

Mme Primeau (Ginette): ...donc, physique ou morale. Pour que cette entente-là soit valide, elle doit être déposée. Elle devient valide après 30 jours du dépôt auprès de la régie régionale, à moins que celle-ci l'ait désavouée.

M. Rochon: C'est ça.

Mme Primeau (Ginette): Ça va? Ça, c'est enlevé.

M. Rochon: C'est ça. Ce qui est proposé, c'est que...

Mme Primeau (Ginette): On n'a plus à le déposer à la régie régionale.

M. Rochon: ...si les établissements en ont convenu, ça peut s'appliquer tout de suite, sans un dépôt et un délai.

Mme Primeau (Ginette): Pas seulement que ça peut s'appliquer tout de suite, mais ça s'applique tout de suite, parce que la régie régionale n'a plus son veto à mettre ou à recevoir l'entente.

M. Rochon: C'est ça. C'est ce qui est proposé. Vous avez raison, c'est ça, oui.

Mme Primeau (Ginette): On aborde... L'article 109, c'est pour le médecin qui est lié. Ce n'est pas ça qu'on aborde; on aborde 108. Parce que vous comprendrez que le département régional de médecine générale est en arrière, il est toujours dans notre tête, et on se dit: Les responsabilités de la régie régionale assumées par le département régional de médecine générale demeurent sensiblement les mêmes, et de la coordination pour voir à une bonne organisation des services dans une région nécessite une connaissance adéquate de ce qui se passe. Alors, si des établissements entre eux signent des ententes de services et que la régie régionale n'en est pas informée, il y a une béquille en quelque part. On devient un peu boiteux.

M. Rochon: Bien, pas nécessairement; peut-être, mais c'est ça qui n'apparaissait pas évident. Je pense qu'on a encore un autre exemple jusqu'où on donne de la marge de manoeuvre aux établissements, surtout que les territoires, les populations que doivent desservir les établissements sont de plus en plus précisés et qu'ils doivent entre eux assumer la responsabilité vis-à-vis la population et leur clientèle de donner une gamme complète de services et de faire les ententes et les ajustements qu'ils doivent faire pour assurer ça à la population.

Je reconnais juste, là, qu'on a une certaine façon d'approcher ça. On dit: On a pas mal plus d'assurances si c'est revérifié et reconsolidé à différents étages comme décisions ou si on laisse une marge de manoeuvre aux gens, quitte à faire l'évaluation. Il y a une reddition de comptes puis une évaluation. Ou bien on contrôle beaucoup a priori sur processus ou on donne la marge de manoeuvre aux gens et on contrôle sur les résultats qu'ils obtiennent. Et là il y aurait un ajustement à faire. Je prends bonne note mais je pense que vous voyez le dilemme entre les deux...

Mme Primeau (Ginette): Je pense qu'on enlève une autre suggestion.

M. Rochon: C'est ça. À quel niveau...

(11 h 10)

La Présidente (Mme Malavoy): Si vous permettez, j'aimerais laisser brièvement la parole au député de Saint-Hyacinthe qui aimerait poser une question. Il ne nous reste pas beaucoup de temps, mais je pense que...

M. Dion: Ce sera très, très bref étant donné que le temps est très court. Ma préoccupation, moi, elle va à la base, là, toute la question du département régional dont vous nous parlez. Évidemment, ma préoccupation, c'est de savoir qu'est-ce que c'est qu'une région. Chez nous, la région, pour aller d'un bout à l'autre, c'est très long. À partir de près de Drummondville et pour aller jusqu'à Valleyfield, c'est au-delà de deux heures. C'est immense, et puis il y a plusieurs régions dans la région. Alors, qu'est-ce que c'est, la région? Et comment ça pourrait fonctionner en pratique du point de vue des médecins pour s'assurer que...

Parce que, s'il y a des services 24 heures – c'est pour assurer des services 24 heures – sur l'ensemble de la Montérégie, au fond, ça ne nous concerne pas vraiment à Saint-Hyacinthe. Tu sais, au fond, que ça soit dans la Montérégie ou à Montréal, pour nous, c'est à peu près la même chose en termes de disponibilité. Alors, ce qui nous intéresse, c'est qu'il y ait des services 24 heures sur un territoire relativement restreint. Alors, j'aimerais avoir votre point de vue là-dessus, comment ça pourrait fonctionner.

La Présidente (Mme Malavoy): M. Dutil.

M. Dutil (Rénald): Oui, vous avez raison de souligner cette préoccupation, et c'est aussi la nôtre. Le département régional, son territoire est celui de la régie régionale. Mais une régie régionale, vous avez raison de le dire encore une fois, c'est une réalité géographique qui est parfois très, très vaste, que ce soit dans des régions éloignées ou même dans des régions périurbaines comme la vôtre, d'où l'importance d'organiser ce qu'on appelle, nous, des réseaux d'accessibilité de soins ou des unités territoriales qui soient à l'échelle des communautés, soit des territoires de CLSC, soit des territoires de MRC. C'est à partir de la base du local que devront se structurer de tels services, si vous voulez, qui rendront une plus grande accessibilité, au besoin.

Alors, le département régional va travailler au niveau régional, presque au niveau macro, là. Il va chapeauter de telles unités territoriales qui, encore une fois, sont à une échelle beaucoup plus réduite. Il nous apparaît également que les gens d'une communauté, d'une MRC, d'un territoire de CLSC sont plus en mesure de définir leurs besoins et de s'organiser à la lumière de ces besoins que si tout vient d'en haut, du département régional, même si on est à l'échelle d'une région plutôt que de la province. Sauf qu'il y a des questions qui sont d'ordre régional. Le plan des effectifs, c'est régional. Donc, on a besoin d'une structure régionale pour le façonner, ce plan des effectifs régionaux, à partir des plans d'effectifs locaux qui lui seront transmis par ces unités territoriales.

La répartition intrarégionale: Vous êtes dans une région, M. le député, où on a beaucoup de problèmes de répartition intrarégionale, avec certaines zones où on est en surplus d'omnipraticiens et des zones, en pénurie dramatique. Il y a des problèmes manifestes de répartition intrarégionale. Je ne pourrais pas, si je n'avais que des unités territoriales, régler ce problème. J'ai besoin de quelque chose au-dessus pour assurer une bonne équité entre ces unités territoriales dans la répartition des effectifs.

Ce département qu'on propose est un...

La Présidente (Mme Malavoy): En terminant, s'il vous plaît, sur cette question.

M. Dutil (Rénald): En terminant, c'est un département administratif qui, bien sûr, sera sous l'autorité de la régie régionale, mais son principal mandat visera cette organisation régionale des services.

La Présidente (Mme Malavoy): Je vous remercie. Je passe maintenant la parole à la députée de Bourassa pour commencer l'échange avec vous.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. Une première question, que j'adresserais aux docteurs Dutil, Godin, Rodrigue et, également, à Me Primeau, j'aimerais savoir, le terme «usager», est-ce que vous êtes d'accord avec l'utilisation de ce terme-là?

M. Dutil (Rénald): Personnellement, j'ai toujours eu de la difficulté, madame. J'ai été élevé à une époque où on appelait les usagers des patients. C'est devenu des bénéficiaires. Je le comprends encore moins dans le contexte d'aujourd'hui, ce mot.

Mme Lamquin-Éthier: Des clients.

M. Dutil (Rénald): «Client», ce n'est pas un terme qui me plaît particulièrement. Au-delà du terme, je pense que c'est le respect qu'on doit à ceux qui utilisent les services. Personnellement, je parle encore de «patients»; «clients», j'ai un peu de difficulté. Je ne sais pas ce que mes collègues en pensent.

Mme Lamquin-Éthier: Vous avez raison.

M. Godin (Louis): Écoutez, si vous faites le tour des médecins qui sont encore en pratique, vous allez rarement les entendre parler de leurs usagers ou de leurs clients. C'est encore les patients. Souvent, nos patients nous reprochent de dire que c'est nos patients. C'est peut-être un peu trop paternaliste d'appeler ça «nos patients». Une chose est sûre: C'est des individus, je veux dire, de qui on prend charge et pour qui la relation que l'on entretient avec eux est des plus primordiales. Ça, je pense que c'est le vécu quotidien sur le terrain de ce qui se passe lorsqu'on soigne les gens.

Une voix: Alors, moi, non, je n'ai rien à ajouter.

Mme Lamquin-Éthier: Vous êtes tous d'accord? Donc, il y aurait peut-être lieu... peut-être pas de mettre un comité sur pied, parce que je pense que ça fait de nombreuses années que c'est très clair que cette utilisation-là occulte la réalité vécue par la personne, que ce n'est pas propre à fonder le caractère essentiel d'une relation intuitus personae entre un médecin et une personne qui est en besoin de soins ou en besoin de services et que, ce terme-là, il est irrespectueux de ce que les personnes sont et, si on ne les voit pas telles qu'elles sont, fragiles, vulnérables, je pense qu'on n'aura jamais le souci véritable de leur apporter tous les soins qu'elles requièrent.

Bon, un des volets absolument extraordinaires du travail d'un député, c'est que, en période intensive, deux fois par semaine, malheureusement, nos bureaux sont envahis littéralement par des personnes qui constituent notre réalité, ce qu'il y a de plus essentiel à notre mandat. Ces personnes-là passent à travers le réseau de la santé, elles sont confrontées avec les difficultés que l'on connaît. Et on regarde le département régional de médecine générale: Est-ce que vous pensez honnêtement que ça viendra régler définitivement, dans la réalité, les nombreux problèmes d'accessibilité que nous avons?

Moi, à tous les jours, je suis confrontée avec des personnes qui se présentent au CLSC où on leur dit d'aller à l'hôpital parce qu'il n'y a pas de médecins. De nombreuses personnes de mon comté sont en CHSLD ou en centre d'hébergement et de soins de longue durée, elles ont des médecins qui n'ont pas tous la formation en géronto – lorsqu'il y a des médecins – et qui n'ont pas tous une formation en gérontologie ou en gériatrie, ou des médecins qui n'ont pas tous le recyclage qui serait souhaité sinon souhaitable; des personnes doivent littéralement, dans plusieurs cas, livrer des combats pour ne pas se voir prescrire tout bêtement une médication, alors qu'on pourrait aborder une problématique dans un angle beaucoup plus global, beaucoup plus dans le respect. Est-ce que vous pensez vraiment que cette belle créature, encore une fois, cette belle structure, va venir régler des problèmes concrets que le réseau éprouve depuis de nombreuses années, au moment où on se parle?

M. Dutil (Rénald): Ce n'est pas un outil miracle, c'est une structure. Ça nous déplaît à nous aussi, des structures, on en a beaucoup, mais c'est un outil facilitant. C'est un département qui va rendre imputable les médecins omnipraticiens de la région, eu égard aux réponses à apporter aux besoins. Je vous signalais que les plus grands problèmes qu'on constate, c'est de la coordination, de la concertation, de la complémentarité entre les médecins omnipraticiens, qu'ils soient en cabinets privés, en CLSC ou en établissement, et entre les médecins omnipraticiens et les spécialistes ou les autres professionnels de la santé. Ce département va rendre imputables les médecins omnipraticiens de répondre à l'ensemble des besoins – s'ils sont assez nombreux, bien sûr, on ne créera pas deux médecins avec un s'il y a un département – et nous espérons que ce département, et nous avons de bonnes chances de croire que ce département va jouer les mêmes rôles que les départements cliniques de médecine générale dans les hôpitaux.

Vous savez, on a entrepris la même démarche que dans les hôpitaux: il y a 25, 30 ans, les omnipraticiens dans les hôpitaux étaient dispersés dans différents départements. C'est une discipline spécifique, l'omnipratique, on a besoin d'une structure qui nous est spécifique, et la structure départementale, c'est ça, la réalité du réseau de la santé. On fait, à l'échelle du territoire, de la région, ce qu'on a fait dans nos centres hospitaliers. Et, dans nos centres hospitaliers, à partir du moment où on a eu un département clinique de médecine générale, ce département s'est porté garant devant son hôpital de répondre aux besoins qui relèvent des médecins omnipraticiens. Ce n'est pas toujours facile, on n'a pas toujours les effectifs voulus, mais, à tout le moins, il a bien réparti les charges sur l'ensemble des médecins omnipraticiens.

Ce département régional, à l'échelle de la région, devra assumer les mêmes responsabilités, répartir les charges entre les médecins omnipraticiens de façon à répondre aux besoins, mais de façon également à ce que ce soit équitable entre les médecins omnipraticiens. On fait face à des situations où trop peu d'entre nous tirent la charette, s'essoufflent, alors que d'autres peut-être ont des pratiques qui pourraient se modifier. Donc, une répartition plus équitable des charges, un imputabilité, mais à cette imputabilité doivent se greffer des pouvoirs et une structure spécifique. Voilà pourquoi la CMR – dont on ne demande pas la disparition – pour nous, ne pourrait pas jouer ce rôle.

La Présidente (Mme Malavoy): Je vous remercie, M. Dutil. Je pense que le député de Robert-Baldwin a également des questions à poser.

M. Marsan: Oui, M. Dutil, à mon tour de vous remercier, de remercier toute votre équipe. Ce n'est pas la première fois qu'on vous voit en commission parlementaire et à chaque fois vous nous avez toujours présenté des mémoires extrêmement bien documentés et surtout appréciés. Je relève deux constatations. Celle que vous avez faite au début, concernant les départements de médecine générale: j'ai eu la chance d'être dans le réseau, j'ai dirigé différents établissements, et, depuis la création des départements de médecine générale, les omnipraticiens sont devenus, dans la gestion hospitalière, un partenaire vraiment incontournable mais surtout apprécié, et, pour moi c'est impensable et inacceptable qu'on essaie d'une façon ou d'une autre de réduire les départements de médecine générale. Il faut que dans chacun des établissements de santé où il y a des omnis – je ne me souviens pas des termes de la loi 120 – il faut continuer d'avoir des départements de médecine générale.

(11 h 20)

Quelque chose de nouveau et d'intéressant, et vous l'avez dit d'emblée en commençant, c'est les cabinets privés qui vont maintenant être inclus dans les plans d'effectifs. Là aussi je pense qu'il y a sûrement des améliorations qui vont être apportées par cette entente-là dans la planification des effectifs, et là aussi c'est très apprécié, le fait que vous supportiez cette recommandation.

Moi, je voudrais continuer, un peu comme l'a fait ma collègue, avec les départements régionaux de médecine générale et vous demander, dans un premier temps, de quelle façon ça va affecter les patients. Actuellement, les patients, là où ils se sentent en danger et très inquiets, c'est dans les salles d'urgence. Je pense que je ne vais pas relater tout ce qui est arrivé. Est-ce que vous pensez que la venue des départements régionaux va améliorer la gestion des salles d'urgence et, par conséquent, donner un meilleur service aux patients qui doivent les utiliser? Ça, c'est ma première question.

M. Dutil (Rénald): Le problème des salles d'urgence, c'est un problème complexe, qui ne se réglera pas uniquement en agissant à un niveau, soit celui de la gestion des centres hospitaliers et des services d'urgence. Il faut agir, entre autres, en amont et en aval de la salle d'urgence. En amont, l'organisation des soins de première ligne est drôlement interpellée dans le règlement de nos salles d'urgence, que ce soit pour prévenir, si vous voulez, une consultation à la salle d'urgence. Ce n'est pas les patients sur civière, peut-être, qui vont être moins nombreux, parce qu'ils vont se retrouver à la salle d'urgence quand même. Mais, si on réduit l'achalandage, on réduit quand même la pression sur tout le personnel de la salle d'urgence et les délais d'attente, etc.

Donc, si on a un réseau de soins de première ligne mieux organisé, mieux coordonné, ça va certainement aider au réseau des salles d'urgence. En aval de la salle d'urgence, par exemple le patient qui est retourné à domicile à la suite d'un congé précoce de l'hôpital, si on peut s'assurer d'avoir de meilleurs services médicaux à domicile, une meilleure prise en charge immédiatement après le congé de l'hôpital ou le congé de la salle d'urgence, on va éviter les phénomènes de portes tournantes, qu'on appelle, des patients qui retournent chez eux un peu vite et, parce que les ressources ne sont pas en place... Et c'est pas uniquement au niveau des médecins, il y a bien d'autres ressources requises par la médecine à domicile. Bien, au niveau des médecins, à tout le moins, si on peut avoir une structure qui assure davantage de services pour ces patients-là, ça va aider aussi les salles d'urgence.

C'est la même chose dans les CHSLD où, parfois, on transfère à la salle d'urgence des patients qui auraient pu être traités sur place si on avait eu les effectifs requis dans les CHSLD. Or, sans que ce soit un outil miracle, en utilisant davantage la disponibilité professionnelle actuelle et en étant davantage coordonné, plus sensibilisé à des besoins spécifiques comme le manque de médecins dans les CHSLD, entre autres, je pense que tout cela va contribuer à alléger la situation dans nos salles d'urgence.

M. Marsan: J'apprécie les commentaires. Je voudrais poursuivre, toujours avec votre département régional, et je vois un intérêt. Vous représentez bien, je pense, qu'il y a vraiment un intérêt pour plusieurs acteurs du milieu, aussi bien des omnipraticiens que des gestionnaires ou que tous ceux qui ont à graviter. Je me dis: À partir du moment où on accepte d'aller dans cette direction-là, est-ce que, tantôt, le ministre de la Santé n'arrivera pas avec un autre projet de loi, puis là ça va être vraiment de chirurgie générale qu'il va vouloir son département régional, ça va être le département de médecine, le département des laboratoires ou etc.? Est-ce qu'il va y avoir un effet cumulé de ces demandes d'avoir ces départements régionaux? Et puis loin de moi l'idée de dire qu'on est contre. Au contraire, je trouve qu'il y a des avenues qui méritent d'être étudiées, c'est pour ça qu'on est en commission parlementaire, et je comprends aussi pourquoi vous êtes les premiers à venir en commission parlementaire nous parler de ce dossier-là.

M. Dutil (Rénald): L'organisation de médecine spécialisée – je laisserai les médecins spécialistes parler pour eux-mêmes – elle sera quand même différente. Les médecins spécialistes exercent principalement dans des établissements où ils ont déjà des structures. Plusieurs spécialités, d'ailleurs, sont suprarégionales. Or, le besoin d'avoir des départements régionaux pour chacune des spécialités peut être questionné. La FMSQ, qui viendra parler pour elle-même, est bien informée de notre projet et a regardé ça de près. Pour le moment, ils ne voyaient pas d'intérêt à se restructurer immédiatement de cette façon. Le Collège des médecins, dans son rapport sur la santé mentale, vient de recommander la création de départements cliniques régionaux de psychiatrie.

On pense que le département régional de médecine générale est peut-être une première étape à une restructuration de la médecine spécialisée et, éventuellement, un CMDP régional. On n'écarte pas cette éventualité, dans un certain nombre d'années, lorsqu'on aura les outils voulus pour le faire. Il serait prématuré, actuellement, de dire: Faisons de la CMR un CMDP. On créerait quand même des départements, on ferait la même chose que dans nos hôpitaux, on dirait: On veut une structure départementale, nous, omnis, et les spécialistes voudraient leur structure départementale, j'imagine. C'est prématuré d'aller dans une telle voie.

M. Marsan: J'apprécie, là aussi, les commentaires, mais je pense que c'est un début et qu'il y aurait d'autres pièces qui devraient se rajouter. C'est là qu'on souhaiterait, nous, avoir le plan d'ensemble.

Juste en terminant, parce que mes deux collègues veulent poser quelques questions, est-ce que, à ce moment-là, ça va affecter la Régie de l'assurance-maladie comme agent payeur, est-ce qu'on va arriver avec des régies régionales d'assurance-maladie au Québec?

M. Dutil (Rénald): Pas du tout. Cette organisation, pour les médecins omnipraticiens, ne signifie d'aucune façon qu'on devra avoir des budgets régionaux, n'est d'aucune façon un premier pas vers la capitation, comme on peut le prétendre. Le mode de rémunération des médecins, la régionalisation des budgets RAMQ, c'est une toute autre question.

M. Marsan: Je vous remercie.

La Présidente (Mme Malavoy): Bien. Je pense que le député de Nelligan a demandé la parole.

M. Williams: Merci beaucoup. Merci beaucoup pour votre présence, votre présentation. Avec toutes les coupures que nous avons vues dans le réseau, c'est difficile aussi d'avoir de nombreux de médecins devant nous. Avec ça, je suis très heureux de vous voir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: Je voudrais, parce que c'est bien beau, les grandes discussions, je voudrais poser une question pratique. Dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, que je représente – ça peut être dans l'est de Montréal ou Laval ou «whatever» – chez nous, il y a l'hôpital du Lakeshore. Le ministère a décidé dans une soirée – je ne sais pas pourquoi – que nous avions trop de lits. Ils ont fermé un hôpital, ils ont arrêté l'agrandissement d'un autre. Nous avons perdu 220 lits. Et, finalement, bientôt j'espère, peut-être juste avant l'élection, ils vont annoncer l'agrandissement de l'hôpital, mais je lui laisse les annonces.

Mais est-ce qu'avec ce nouveau plan pour les affaires médicales, avec les cabinets privés – je comprends le bon côté de ça mais j'essaie de comprendre – si, par exemple, le ministère décide, après ça, la régie décide que le West Island a trop de médecins, jusqu'à quel point ce plan d'effectifs peut-il empêcher l'ouverture d'un cabinet privé, chez nous, où on veut l'avoir? Et n'oubliez pas, avec les fameuses régies régionales, que nous sommes dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal mais que 25 % de la clientèle de Lakeshore vient de la Montérégie, avec tout le respect pour mon collègue de la Montérégie. Mes 25...

La Présidente (Mme Malavoy): Donc, les conséquences du plan du ministre...

M. Williams: Avec ça, je voudrais savoir jusqu'où ça peut aller. On parle d'ententes, on parle de mesures. Est-ce que ça peut aller jusqu'à empêcher l'ouverture d'une clinique privée?

M. Dutil (Rénald): Écoutez, quand on parle d'un département régional, son principal mandat sera d'élaborer le plan des effectifs en omnipratique pour une région – donc, pour faire ce plan, il devra avoir une connaissance des besoins de chacun des milieux de la région – d'assurer une bonne répartition intrarégionale aussi.

Dans une région comme Montréal, le plan n'est pas atteint. En fait, il n'est pas atteint dans aucune des régions, sauf la région 03. Si le plan n'est pas atteint, un médecin va pouvoir continuer à s'installer dans la région. Et soyez assuré que, sur le plan conventionnel, nous allons demander certaines garanties, de façon à ce que les médecins aient encore la liberté d'ouvrir un cabinet privé ou de pratiquer en établissement si c'est cela qu'ils souhaitent. Mais, tout ça enchâssé à l'intérieur, quand même, d'un plan d'effectifs où les besoins sont établis, où il y a une meilleure répartition des effectifs.

J'aimerais vous répondre au nom des médecins omnipraticiens qu'un médecin peut s'établir n'importe où sur la chaîne de production de soins sans se faire poser de questions. Mais ce n'est plus la réalité d'aujourd'hui. La réalité d'aujourd'hui, c'est que tous les médecins exercent dans un système public. Les ressources sont relativement rares, il nous faut donc faire des priorités. Et l'une de nos priorités, comme médecins omnipraticiens, c'est de s'assurer qu'il y ait une saine répartition. Et cela se concilie avec le respect de la liberté qu'aura un médecin d'ouvrir un cabinet privé dans une région comme la vôtre, où le plan des effectifs le permet.

Mais le département régional... Ce n'est pas le ministre qui va élaborer le plan des effectifs, c'est le département régional qui fera la recommandation à la régie régionale. Le département régional sera dirigé par des médecins omnipraticiens qui vont connaître la réalité de leur milieu. S'il manque des médecins dans votre sous-région, le département régional, bien sûr, serait tout à fait d'accord pour qu'un médecin ouvre un cabinet dans cette région-là. Sauf qu'il va informer les médecins des besoins de la région et faire en sorte qu'il y ait une meilleure répartition.

(11 h 30)

M. Williams: Merci pour cette réponse. Et par respect pour ma collègue, je vais continuer ma discussion avec vous après, parce que je pense que la députée a une autre question. Et j'espère que vous pourrez, avant la fin de cet exercice, au moins expliquer encore une fois votre opinion sur la capitation, mais, peut-être après, en terminant. Je vous laisse la parole pour expliquer ça. Mais je veux juste m'assurer que ma collègue ait le temps de questionner, je vous demande d'attendre pour votre réponse jusqu'à la question de...

La Présidente (Mme Malavoy): Si je comprends bien, on va vous demander deux réponses...

M. Williams: Oui, oui, mais je laisse le temps à ma collègue de poser sa question aussi.

La Présidente (Mme Malavoy): Alors, Mme la députée de La Pinière, une brève question parce que, là, il y aura deux réponses à faire en peu de temps.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Merci. Alors, je vais être brève, puisqu'on me le recommande. Comme je vous ai dit tantôt dans mes remarques préliminaires, je représente une région qui a fait parler beaucoup d'elle au niveau des services de santé et services sociaux, la Montérégie. Un des problèmes majeurs que nous avons, c'est le manque de ressources, ressources humaines, en médecins, personnel soignant, etc., parce que le virage ambulatoire, tel qu'il a été implanté, a eu pour conséquence d'exercer d'énormes pressions sur les services existants, sur les établissements existants, aussi bien ceux des hôpitaux que les autres services, et on manque de médecins, on manque d'infirmières. Il y a eu des départs précipités, on m'annonce que probablement on va réengager les gens parce que justement il y a une pression énorme. Comment le département régional de médecine générale de la Montérégie va-t-il régler ce problème?

Vous avez, dans vos commentaires, dit que...

La Présidente (Mme Malavoy): Mme la députée, il faudrait que la question soit brève parce qu'il reste vraiment peu de temps.

Mme Houda-Pepin: Très bien, mais permettez-moi donc de la poser. Vous avez donc dit dans vos commentaires qu'il y aura des problèmes de répartition intrarégionale au niveau des médecins. Qu'en est-il de la répartition interrégionale?

M. Dutil (Rénald): Première réponse, capitation, j'avais le goût de demander: C'est quoi, la capitation, ça? En fait, je vous dirai d'emblée que la capitation, c'est un mode de rémunération qui se retrouve principalement dans les pays européens. Pour notre Fédération, elle n'apparaît pas adaptée au contexte québécois. Et ce n'est pas uniquement les médecins, c'est peut-être davantage la population qui deviendrait brimée par un modèle de capitation tel qu'on le retrouve dans d'autres milieux.

Quant à la question de madame, le département régional ne résoudra pas tous les problèmes de pénurie. Vous me parlez de pénurie d'infirmières, d'autres travailleurs du réseau de la santé. Le département régional est un département qui regroupe les médecins omnipraticiens et dont le mandat ne concernera que les médecins omnipraticiens, avec bien sûr comme mandat, à un moment donné, de créer une plus grande articulation avec d'autres professionnels de la santé. Mais je veux dire que ce n'est pas le département régional qui sera interpellé par le manque d'infirmières. Il pourra cependant faire des représentations auprès de sa régie régionale pour décrier les pénuries qu'on retrouve dans nos établissements, entre autres au niveau des infirmières ou d'autres professionnels de la santé ou d'autres ressources, mais ce ne sera pas son mandat à lui de régler ces problèmes-là.

La Présidente (Mme Malavoy): Je vous remercie beaucoup, M. Dutil, ainsi que les gens qui vous accompagnent. Je vais demander au groupe suivant, l'Association des hôpitaux du Québec, de venir presque immédiatement vous remplacer. Vous nous excuserez mais, comme l'espace est exigu et que le temps est compté, on ne pourra pas faire une pause pour aller vers vous. Mais on vous remercie très chaleureusement de votre présence. Merci beaucoup.

J'invite donc l'Association des hôpitaux du Québec à prendre place.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Malavoy): Ça va, ça va, prenez le temps de vous installer tout de même.

Est-ce que vous êtes prêts? Alors, je vous souhaite la bienvenue. Je vous rappelle que nous essayons, en une heure, d'avoir 20 minutes de présentation, puis 20 minutes du côté ministériel, 20 minutes du côté de l'opposition, pour des échanges. Si vous prenez un peu moins de temps, il y a plus de temps pour les échanges; si vous en prenez plus, c'est réduit d'autant. Et je vous demanderais de commencer en vous présentant et en présentant les personnes qui vous accompagnent, pour fins d'enregistrement de leurs paroles, étant invitées au besoin à prendre la parole elles-mêmes.


Association des hôpitaux du Québec (AHQ)

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): Merci, Mme la Présidente. Alors, Mmes et MM. les commissaires, je me présente, je suis Marie-Claire Daigneault-Bourdeau, je suis présidente de l'Association des hôpitaux du Québec. Je suis également présidente du conseil d'administration du centre hospitalier régional du Suroît à Valleyfield, en Montérégie.

M'accompagnent dans cette délégation, en commençant par ma droite, M. Yvon Marcoux, vice-président exécutif de l'Association des hôpitaux du Québec; le Dr Maurice Roy, directeur des services professionnels à l'Hôtel-Dieu d'Arthabaska; à ma gauche, M. Jean-Paul Cadieux, président du conseil d'administration de l'hôpital Jean-Talon; M. Gilles Lagacé, directeur général de l'Hôpital Laval; Me Ghislaine Gosselin, directrice des affaires juridiques à l'Association des hôpitaux du Québec.

Mme la Présidente, le mémoire que nous vous avons déposé auprès de votre commission a été rédigé à la suite d'une consultation que nous avons faite auprès de nos membres. Je vous ferai part en premier lieu de commentaires généraux sur la portée du projet de loi n° 404 et sur la nécessité d'un allégement administratif législatif pour les établissements. J'aborderai ensuite la question de l'organisation des services médicaux, qui représente sans contredit une pièce majeure de ce projet de loi. M. Marcoux, vice-président de l'Association, poursuivra en commentant d'autres sujets faisant l'objet ou non de modifications dans le projet de loi mais qui préoccupent les membres dans leur gestion quotidienne.

D'entrée de jeu, permettez-nous de vous dire que nous espérions beaucoup plus du projet de loi n° 404. Le discours en faveur de la décentralisation, de l'allégement légal et administratif, du partage des responsabilités trouve peu d'applications pour les établissements dans ce projet de loi. Notre lecture nous démontre qu'il se limite plutôt à transférer les pouvoirs réglementaires du gouvernement à ceux du ministre et les pouvoirs réglementaires du ministre à ceux des régies régionales. Les conseils d'administration et les directions d'établissement, pour leur part, s'attendaient à se voir octroyer davantage de pouvoirs et d'outils pour leur permettre de gérer avec plus d'efficacité et d'efficience les centres qu'ils exploitent.

La réforme axée sur le citoyen, qui a servi d'assise à notre loi, réaffirmait solennellement que la participation de la population à la gestion et à l'orientation du réseau de la santé et des services sociaux s'imposait comme une valeur fondamentale sur laquelle notre réseau devait s'ériger. S'ensuivaient des orientations à l'effet de ramener la prise de décision le plus près possible de l'action et d'accorder une véritable marge de manoeuvre aux établissements. L'accroissement des responsabilités devant être assumées par l'instance régionale ne devait pas, nous disait-on alors, se traduire par une nouvelle centralisation des pouvoirs à ce niveau. Malgré ces intentions louables, depuis l'entrée en vigueur de la loi, en 1991, persiste un malaise certain en ce qui a trait au partage des pouvoirs et des responsabilités entre les trois niveaux décisionnels: central, régional et local.

À l'heure actuelle, les conseils d'administration se sentent étouffés par l'excès de directives, de contrôles et de normes qui leur viennent du palier régional dans le cours de l'exercice de leurs responsabilités dans les établissements. Ils ne trouvent pas, et nous l'avons dit, les marges de manoeuvre décisionnelles qui permettent l'innovation et l'application de solutions adaptées à leur réalité, à leur situation locale. Ils ont même le sentiment d'être le plus souvent écartés des débats pourtant essentiels pour faire évoluer les connaissances et les mentalités.

Malgré ces raisons de désaffectation, ils l'ont démontré, ils ont pourtant relevé la lourde charge des plans de transformation. Les reconfigurations actuelles qui ont lieu dans le réseau depuis les dernières années plaident aussi en faveur d'une nouvelle dynamique entre le niveau régional et le niveau local. Le nombre d'établissements a considérablement été réduit, on le sait. La majorité des établissements, qu'ils soient regroupés ou autonomes, ont vu s'accroître l'étendue de leurs champs d'intervention ou de leur territoire de desserte. Concurremment, beaucoup en raison du virage ambulatoire, les partenariats ont connu un essor sans précédent.

(11 h 40)

Le réseau ne se présente donc plus comme une multitude de centres difficiles à coordonner en raison de leur nombre. Il est plutôt constitué d'entités majeures qui doivent, plus que jamais, être parties prenantes des décisions relatives à l'organisation des services, qu'il s'agisse de la détermination des continuums de soins et de services, de l'élaboration des plans d'effectifs médicaux, du développement des systèmes d'information, autant d'éléments qui concernent les établissements au premier titre dans l'exercice de leur activité quotidienne.

L'ensemble des établissements représente une force dont nous devrions mieux reconnaître la place. Nous sommes ainsi rendus au stade d'instaurer des conditions qui faciliteront l'exercice des responsabilités respectives à chacun des niveaux du système. Une importante réflexion est déjà faite à ce sujet par un groupe d'experts et a donné lieu au rapport Deschênes. Et nous réitérons notre entière adhésion aux conclusions et aux recommandations de ce rapport. Il est temps, plus que jamais, de définir des mécanismes de reddition de comptes axés sur l'atteinte des résultats plutôt que sur le contrôle. Ce faisant, nous arriverons à donner un sens véritable et concret au concept d'imputabilité dont il est si souvent question et auquel aspirent les conseils d'administration et les directions d'établissement.

Avant d'aborder la question plus spécifique de l'organisation des services médicaux, nous énonçons une recommandation d'ordre général et qui nous tient à coeur, à savoir que l'encadrement législatif soit véritablement allégé de façon à s'adapter aux attentes des établissements et à une nouvelle réalité qui commande des pouvoirs accrus au niveau local, une gestion axée sur les résultats et des mécanismes renouvelés de reddition de comptes.

L'organisation des services médicaux et le département régional de médecine générale. Sur l'organisation des services médicaux, mentionnons, en premier lieu, que nous souscrivons à l'objectif qui sous-tend la création d'un département régional de médecine générale, à savoir d'assurer une meilleure répartition de la main-d'oeuvre des médecins omnipraticiens du Québec et, ce faisant, d'améliorer l'accessibilité aux services médicaux généraux.

Toutefois, et compte tenu que cet objectif s'appuie sur des paramètres qui réfèrent davantage aux besoins et aux intérêts collectifs d'une population et que la création d'un tel département aurait un impact direct sur tout le réseau de la santé, nous éprouvons une difficulté réelle à concevoir que ce département ait fait l'objet d'une négociation entre le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, sans y avoir associé les établissements. Et cela nous préoccupe grandement.

Est-ce que les dispositions concernant le département régional de médecine générale, lesquelles reprennent une entente, peuvent être encore modifiées? Veut-on confier l'autorité des plans d'effectifs médicaux, les PROS, et même des services d'urgence – si on se réfère aux recommandations qu'on vient d'entendre de la FMOQ – en ignorant les responsabilités des conseils d'administration des établissements? La présente consultation en commission serait-elle un exercice illusoire? Nous nous posons la question.

Nous nous questionnons également sur les modalités qui présideront au choix des priorités quant aux besoins en effectifs médicaux à combler entre les centres hospitaliers de soins généraux et spécialisés, les centres hospitaliers psychiatriques, les centres locaux de services communautaires et les centres d'hébergement et de soins de longue durée ainsi que les cabinets privés.

Il y a un pas à franchir pour penser à la place prépondérante que pourraient occuper des médecins provenant d'un milieu de pratique particulier qui, par le fait même, seraient placés en position d'influencer les décisions. Aussi, dans le même ordre d'idée, nous estimons qu'il devrait appartenir à chacun des différents milieux de pratique de procéder aux nominations des personnes qui prendront place au comité de direction du département et non de procéder par cooptation à partir des trois membres élus.

Enfin, nous sommes d'avis que la juxtaposition du département régional de médecine générale avec la commission médicale régionale risque de constituer une source d'ambiguïté au niveau de la prise de décision. Les tendances sont à l'intégration et à la complémentarité. Il faut sans contredit éviter les duplications de services et, à plus forte raison, les duplications de structures. Nous recommandons donc, M. le président, que les responsabilités de la commission médicale régionale déjà en place soient revues afin d'intégrer les fonctions prévues pour le département régional de médecine générale. Nous croyons, par ailleurs, que ces nouvelles responsabilités devraient s'exercer en termes d'objectifs à atteindre en matière d'accessibilité et en prenant en considération les unités territoriales qui composent la région.

Les plans d'effectifs médicaux et dentaires. Pour terminer sur les questions relatives à l'organisation médicale, mentionnons que nous accueillons avec satisfaction l'introduction des médecins exerçant en cabinet privé dans les plans régionaux des effectifs médicaux. Enfin, nous insistons encore une fois pour que la loi soit modifiée de sorte à autoriser les établissements de santé à rémunérer les médecins pour les fonctions médico-administratives, comme ça avait déjà été demandé.

Je laisse maintenant la parole à M. Yvon Marcoux, vice-président exécutif de l'Association, pour la suite de la présentation. Il vous entretiendra entre autres des plans d'organisation d'établissements. M. Marcoux.

M. Marcoux (Yvon): Alors, M. le Président, mesdames, messieurs, j'aborderai brièvement cinq sujets: les plans d'organisation des établissements, les plaintes des usagers, le conseil d'administration, les ressources humaines et financières et, finalement, les actifs informationnels et la sécurité de l'information électronique.

Premièrement, les plans d'organisation des établissements. L'article 36 du projet de loi introduit de la souplesse en ce qui a trait à l'élaboration des plans d'organisation des établissements multivocationnels, et c'est avec faveur que nous accueillons ces modifications. Cependant, dans la perspective du discours d'une plus grande responsabilisation des administrateurs et des dirigeants, et également pour faciliter l'adaptation aux changements qu'a vécus le réseau au cours des dernières années, nous nous attendions à une déréglementation substantielle en matière des structures administratives des établissements.

D'ailleurs, le rapport Marcoux – il n'y a pas de lien de parenté – en 1995, recommandait d'abolir le pouvoir réglementaire en ce qui a trait à la forme du plan d'organisation d'un établissement, les éléments qu'il doit contenir et les règles selon lesquelles il doit être élaboré. Et je cite le rapport: «Il est inopportun de réglementer la forme et le processus à suivre pour élaborer le plan d'organisation. Il s'agit d'un élément organisationnel majeur où il faut responsabiliser, faire confiance, donner à l'autorité locale sa marge de manoeuvre. Le mur-à-mur pour tous les types d'établissements est devenu inacceptable.» Fin de la citation.

La réalité des établissements varie de l'un à l'autre, les modèles de gestion évoluent et les structures ne peuvent être monolithiques, elles doivent s'adapter afin de servir les patients le plus adéquatement possible. Les établissements, par exemple, s'orientent maintenant vers la structure des programmes de gestion de clientèles. Donc, ça s'adapte plus mal, ça, avec ce qui est prévu dans la loi qu'avec des structures fonctionnelles.

Deuxièmement, les plaintes des usagers ou des patients. De façon générale, nous souscrivons aux modifications qui sont proposées dans le projet de loi n° 404 concernant les plaintes des usagers, et plus particulièrement celle qui permet à un membre du personnel de l'établissement d'être désigné comme responsable de l'application de la procédure d'examen des plaintes. Toutefois, en ce qui a trait à des plaintes concernant les médecins, je pense qu'une telle plainte devrait être examinée selon une procédure qui intègre les garanties offertes aux usagers à l'égard de toute autre plainte, soit entre autres le délai d'examen et l'assurance d'obtenir également des conclusions motivées.

Le conseil d'administration, certains commentaires relatifs aux conseils d'administration d'établissements. En premier lieu, nous exprimons à nouveau notre avis à l'effet qu'un même conseil d'administration devrait pouvoir administrer un établissement qui exploite un CLSC et un ou plusieurs établissements exploitant des centres d'hébergement, soit à la fois un centre d'hébergement et un centre hospitalier de courte durée, même si ce dernier a plus de 50 lits. La balise des 50 lits qui est imposée par la loi actuelle pour avoir une fusion ne nous apparaît pas fondée et empêche sur le terrain des mouvements vers des regroupements d'établissements qui correspondent aux besoins exprimés par la population.

Au sujet de la composition du conseil d'administration, nous nous objectons à la proposition qui est apportée par l'article 49 du projet à l'effet que, pour être valides, les nominations des membres cooptés devraient être soumises à l'approbation de la régie régionale. Nous estimons qu'il revient aux membres déjà élus d'y procéder et que toute nécessité d'approbation par la régie régionale constitue encore une fois un manque de confiance flagrant à l'égard des conseils d'administration des établissements. Au surplus, et bien que nous convenions qu'il revient au législateur d'établir les principes et les exceptions qui doivent gouverner le fonctionnement des conseils d'administration, nous sommes d'avis que les modalités de fonctionnement devraient être déterminées par les conseils d'administration eux-mêmes en leur donnant le pouvoir réglementaire à cet effet. Ainsi, les modalités concernant la participation de membres du conseil, par exemple, conférences téléphoniques par vidéoconférences, etc., le nombre de réunions durant l'année de même que l'utilisation de toutes sortes de moyens lors de situations d'urgence, c'est superflu de mettre ça dans le projet de loi.

(11 h 50)

Les ressources humaines et financières. En matière de gestion des ressources humaines, dans le cadre de la transformation du réseau, plusieurs établissements se retrouvent maintenant confrontés à gérer du personnel réparti dans plusieurs accréditations syndicales qui coexistent dans un même environnement. On retrouve fréquemment, par exemple, de 15 à 30 unités d'accréditation dans un même établissement; un de nos membres compte même 58 unités d'accréditation. Je dois vous dire que la multitude de telles unités a des impacts importants sur le plan de la gestion quotidienne des établissements; on n'a qu'à penser à la dotation, à la mutation, aux libérations syndicales, au processus de supplantation, etc. Nous proposons donc que la loi reprenne la procédure qui est prévue au projet de loi n° 109 concernant la Loi sur l'instruction publique, laquelle permet, entre autres, et dans le cadre de la fusion aux commissions scolaires, au Commissaire du travail de déterminer, selon un processus, quel syndicat obtiendra l'appui d'une majorité de salariés et de lui accorder l'accréditation.

Sur le plan financier, nous attirons également l'attention sur deux modifications législatives qui devraient, selon nous, apparaître et qui seraient nécessaires en raison de leur forte incidence sur le plan des ressources financières des établissements – et nous pourrons en reparler. Il s'agit, d'une part, des problèmes reliés au paiement et à la récupération de la TPS et de la TVQ, également au paiement des droits de mutation lors d'intégration d'établissements, et qui représentent des sommes pouvant se chiffrer à plusieurs millions de dollars.

Le dernier thème que nous abordons est celui des actifs informationnels et de la sécurité de l'information électronique. Le projet de loi introduit de tout nouveaux articles à cet effet, lesquels, sous certains aspects, suscitent des interrogations. D'autant plus, vous savez, qu'il ne faut pas oublier que les systèmes d'information, maintenant, constituent des investissements importants et peuvent avoir des impacts considérables sur le plan de la gestion, en termes d'informations de gestion. Entre autres, nous nous interrogeons sur l'article 520.2 qui énonce que le ministre détermine les orientations en matière d'actifs informationnels et que les régies régionales sont responsables de leur mise en oeuvre. On ne fait aucunement référence aux établissements; c'est comme s'ils n'existaient pas ou qu'on les considère peut-être comme des éléments un peu négligeables qui, de toute façon, devront à un moment donné payer la note.

Le rapport Deschênes, qui a été publié en décembre 1996, qui a examiné les responsabilités, le partage des responsabilités dans l'ensemble du système, discute de cette question des actifs informationnels et recommande que l'on s'assure de la participation des établissements dans l'identification des besoins ainsi que dans la conception, le développement et la gestion des systèmes d'information. Nous demandons donc que l'article 520.2 soit modifié pour considérer les établissements comme des partenaires à part entière avec des régies régionales dans le développement et la mise en oeuvre des orientations en matière de gestion de l'information.

Quelques mots, également, sur l'article 520.4 où on indique que le ministre peut édicter un règlement sur les normes de sécurité requises pour assurer la confidentialité et la sécurité de l'information. L'objectif est louable, mais nous pensons que le ministre se place peut-être, en quelque sorte, dans une position un peu de juge et partie, compte tenu qu'il sera une partie prenante des décisions concernant l'utilisation de l'information. À notre avis, il reviendrait peut-être, dans un tel cas, davantage au gouvernement d'édicter un tel règlement. Les actifs informationnels sont au coeur du développement de notre système de santé et vont prendre de plus en plus d'importance, même sur le plan du domaine des systèmes technologiques comme la télémédecine. Il faut s'assurer que l'encadrement législatif à cet effet vienne faciliter l'utilisation efficace et efficiente des outils qui nous servent tant dans la gestion quotidienne de nos opérations que dans les activités de planification.

En guise de conclusion, nous rappelons que le projet de loi, s'il comporte certains éléments en matière d'allégements législatifs et de déréglementation – nous avons discuté, tout à l'heure, des ententes entre établissements – ajoute également des nouvelles structures – nous avons parlé du département régional. Dans l'ensemble, sur le plan de la déréglementation et de la décentralisation, il n'est pas à la hauteur des attentes de nos établissements. La préparation du mémoire a suscité une réflexion en rétrospective sur le vécu des dernières années et nous a conduits à formuler des recommandations qui vont dans le sens d'attribuer aux membres des conseils d'administration des établissements les pouvoirs et les outils requis pour une gestion efficace et efficiente. Ce que nous recherchons tous, je pense, c'est de dispenser des meilleurs services aux patients, les rendre plus accessibles, de façon efficace. La manière façon d'atteindre cet objectif, selon nous, c'est d'accorder à ceux qui sont en contact avec la population, qui sont en contact avec les patients, ceux qui sont à la ligne de front, comme on dit, les responsabilités et les pouvoirs pour s'adapter aux situations diverses qu'ils vivent quotidiennement. Il est normal de vouloir rendre les établissements responsables de leur gestion – c'est l'imputabilité – mais encore doivent-ils avoir les pouvoirs de prendre les décisions qui s'imposent.

Donc, on vous remercie de votre attention, et chacun des membres de la délégation est à votre disposition pour répondre à vos questions sur l'un ou l'autre des points du mémoire.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup. J'inviterais maintenant M. le ministre à échanger avec vous.

M. Rochon: Merci beaucoup, merci pour la présentation de votre mémoire. Vous me permettrez d'abord un commentaire à la suite de votre commentaire. Je ne sais pas si vous étiez arrivés quand, dans ma présentation, j'ai bien rappelé qu'effectivement, par rapport au langage qui s'était développé dans le réseau quand on parle de déréglementation, le projet de loi qu'on soumet peut laisser certains sur leur appétit, je le reconnais. Je veux rappeler, par contre, qu'on a dû faire face – et vous avez peut-être d'autres commentaires à nous faire là-dessus, par exemple – à une réalité à l'effet qu'il fallait, d'abord, alléger considérablement le fonctionnement du réseau par ce qu'on appelle, dans le jargon, les allégements administratifs parce que, même si la loi, comme elle est faite, dit beaucoup de choses quant aux citoyens au centre du système, il y a beaucoup de langage de décentralisation. Mais, quand on regarde les mécanismes d'application, on s'aperçoit que c'est très centralisé, même par procédures administratives.

Un, il nous a semblé, donc, qu'il y avait une première étape à franchir de plus que, moi, je l'avoue, j'avais pensé au tout début, il y a trois ans, en termes d'allégements administratifs pour un peu nettoyer l'horizon. Et, encore là, je pense qu'on a déjà vu et on verra une résistance des uns et des autres à l'égard même des allégements administratifs. Donc, est-ce que c'est assez juste de voir qu'il faut d'abord passer cette étape-là? Et, deuxièmement, avant d'aller vraiment à des déréglementations, quoiqu'il y en ait un peu, d'y aller plus, il faut qu'effectivement on ait validé un certain nombre de mécanismes de reddition de comptes sur le terrain, où on a un système – je pense qu'on le sait tous – qui est assez bâti pour beaucoup de contrôles a priori sur les façons de faire. Et, si on veut passer en déréglementant, les contrôles deviennent a posteriori sur des résultats atteints. C'est tout un mode de gestion complètement différent et, moi, j'avais senti qu'on nous disait: On n'est pas vraiment prêts pour y aller, partout, continuant toujours à assurer l'imputabilité à travers ce système-là. Il y a donc une progression.

Alors, d'un côté, je souhaite un peu vous rassurer que les intentions ne sont pas changées. Mais, deux, s'il y a vraiment des éléments où on pourrait aller plus loin en termes d'aménagements administratifs ou de certaines déréglementations, compte tenu des deux commentaires que je viens de faire, à la fois comment on rassure ou on convainc tous ceux qui, quand ça les vise directement, aimeraient mieux garder certains contrôles dans le projet de loi, on a peut-être le moyen, vous connaissez peut-être certains éléments de mécanismes de reddition de comptes qui pourraient s'appliquer plus vite et qui permettront d'aller plus loin. Je n'ai vraiment pas d'objection là-dessus. Mais on a vraiment eu le sentiment d'aller aussi loin qu'on pouvait aller tout en s'assurant qu'on suit un peu la dynamique du système, surtout qu'on s'est fait dire plus qu'une fois qu'on était allé pas mal trop vite sur pas mal trop de choses. Alors, on essaie d'ajuster le rythme pour se mettre en mode de consolidation, première question.

On va peut-être poser la deuxième tout de suite. Ça vous permettra d'enchaîner sur les deux. C'est pour ça que j'essaierai, tantôt, de revenir sur des éléments plus pointus. La question du département de médecine générale, vous y venez, puis je pense que c'est important que tout le monde qui est visé ou qui peut dire un mot là-dessus s'exprime parce que c'est vraiment nouveau, ce qu'on introduit dans la loi. Et je reconnais, je pense que vous le soulignez correctement, qu'il y a peut-être certaines clarifications qu'il faudrait apporter entre le rôle de la Commission médicale régionale et les fonctions attribuées au département, spécialement en ce qui regarde les plans d'effectifs et les activités médicales particulières. Je reconnais qu'il faudra revoir ça de plus près. Il y a peut-être des choses à préciser.

(12 heures)

Mais, ceci dit, est-ce que c'est juste, d'après vous, de penser que le département, quitte à faire certains ajustements pour qu'il n'y ait pas de confusion avec la Commission médicale régionale, vient peut-être remplir une place, un vide dans l'encadrement de pratique médicale en dehors des établissements, des départements de clinique, encore de la pratique médicale en fonction de la mission de l'établissement, des besoins des gens qui se présentent à l'établissement? La pratique en cabinet privé, il n'y a vraiment aucun encadrement en fonction d'une population, en fonction d'un territoire, et moi, j'avais compris que ce département-là veut venir compléter, en fait, la mosaïque en s'assurant que la pratique en médecine familiale, hors établissement surtout, est encadrée en fonction des besoins de la population. Si ça, c'est juste, c'est-à-dire qu'on vient apporter là un ajout, est-ce que l'avenir – comme certains le disent et certains le suggèrent quand on circule dans le réseau – d'une Commission médicale régionale, c'est peut-être une évolution plus dans le sens du rôle des CMDP et des conseils des médecins et dentistes qui resteraient dans des établissements?

Mais il y a peut-être une fonction régionale de la mission d'un conseil de médecins et dentistes en rapport avec la qualité, l'assurance de qualité des services qui pourrait se jouer utilement au niveau régional, en soutien des établissements avec leur CMDP, qui est autre chose que la gestion plus directe des effectifs et l'assurance, en plus, de la qualité, de l'accessibilité aux services, qui est plus le domaine du département. Comme les médecins font à l'intérieur des départements en clinique, la CMDP s'assure de la qualité, si je comprends bien – en gros, on peut dire ça – et le département clinique gère, sous le conseil d'administration, l'accessibilité aux services. Moi, je pense que la logique qui s'était développée à ces deux égards-là, c'est qu'il y avait vraiment là un complément.

Quant aux modalités de fonctionnement, c'est sûr qu'on va toujours devoir déterminer – puis, Mme la Présidente, vous aviez un bon commentaire à cet effet-là – il faut pas régler par voie de convention collective ce qui appartient à une loi ou un règlement, et vice versa. Je pense qu'il faut être prudent là-dessus, mais la convention a prévu le mécanisme et la façon de l'installer, et là on passe à la prochaine étape, lui donner une assise légale correcte. Après ça, ça va suivre avec les instances appliquées.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Daigneault-Bourdeau.

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, je demanderai à M. Lagacé de répondre par rapport au département régional de médecine générale. Et Me Gosselin par la suite.

M. Lagacé (Gilles): Vous aurez sûrement besoin d'aide de mes confrères. Il y a, au niveau de toute cette discussion, vraiment un problème de compréhension, je pense, des rôles du département sur une base territoriale. Ce qu'on connaît comme département, il faut voir que ça répond à un département d'une organisation hospitalière avec des fonctions très précises qui sont reliées aux activités, bien sûr, des médecins mais également à leurs actes professionnels posés. Lorsqu'on arrive pour transposer ça au niveau régional, on voit qu'on néglige tout un aspect, en tout cas, de la fonction d'un département hospitalier pour centrer les actions, si on comprend bien, sur vraiment l'accessibilité des services, à différents types de services, qui devraient être accessibles pour l'ensemble des clients d'un territoire.

Une première chose, je pense, qui devrait être faite, ce serait qu'on ne devrait peut-être pas appeler ça un «département», au départ. On voit toute la confusion qui a porté dans le passé au sujet des notions départementales, les département administratifs, les départements cliniques. On devrait peut-être trouver un terme quelconque qui décrirait selon moi davantage la fonction recherchée. Si je la comprends bien, encore une fois, il s'agit là d'organiser l'accessibilité à des soins, et c'est presque exclusivement ça que je retrouve dans le projet. Si ma compréhension est bonne, on devrait apporter une nuance pour dire que c'est très distinct de ce qu'on retrouve dans l'organisation hospitalière.

M. Rochon: Est-ce qu'il n'y a pas, puis toute analogie ne peut pas être identique... bien, la responsabilité d'un chef ou d'une chef de département clinique hospitalier, est-ce qu'elle n'est pas d'assurer que l'organisation de la pratique dans l'hôpital va assurer la couverture 24 heures par jour, sept jours par semaine, que les soins vont être faits et que les décisions du CMDP et de son conseil d'administration sont... c'est de gérer la pratique médicale sur le terrain qui a le département hospitalier. Est-ce qu'on peut pas voir la même analogie à ce qu'il y ait de la pratique médicale hors département, hors hôpital, hors établissement, des médecins dans leur cabinet à toutes fins pratiques, mais qui recherchent par là une coordination en fonction non pas d'un établissement mais d'un territoire?

Moi-même, je pensais qu'on essayait de tracer une analogie, mais en faisant les mutatis mutandis qu'il faut, évidemment.

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): Maintenant, le docteur Maurice Roy pourrait peut-être apporter des éléments d'information avant la présentation de Me Gosselin.

M. Roy (Maurice): Oui, de fait, pour en revenir à la question de l'objectif du département de médecine générale, on avait dit au départ qu'on souscrivait aux objectifs. De fait, une organisation qui verrait à organiser un continuum de soins, de service, sur une base territoriale, l'Association des hôpitaux est en accord avec ça. Ça vient, de fait, combler un vide. Mais on pense que le moyen qui est proposé dans le projet n'est pas le bon moyen. L'organisation du continuum de services doit se faire à un niveau territorial différent de la région. Peut-être employer le terme sous-territorial. Comme questionnait le député de Saint-Hyacinthe, je crois, avec beaucoup de pertinence, je ne pense pas qu'un département régional soit sensible aux préoccupations locales et soit capable d'organiser le continuum de soins et services. Il faut que ce soit sur une base locale.

Si on fait un système en parallèle à la commission médicale régionale pour les omnipraticiens, comment après ça au niveau régional va-t-on pouvoir s'assurer d'une coordination entre les soins et les services médicaux généraux et les soins et services médicaux spécialisés, si ce n'est par la commission médicale régionale? Comment pourra-t-on ajuster les plans d'effectifs médicaux entre les médecins omnipraticiens et les médecins spécialistes? Parce que, de toute évidence, dépendamment du territoire, dépendant de l'organisation des services, le plan d'effectifs de l'un a un effet sur le plan d'effectif. Ça prend une coordination régionale qui dépasse la dimension simple de la médecine générale et des soins généraux courants. Alors, je pense que le meilleur moyen, ça serait qu'on laisse, au niveau des territoires naturels, le soin de s'organiser et de brancher ces territoires-là, ces comités territoriaux là, sur la Commission médicale régionale, pour permettre justement la coordination.

On disait, tout à l'heure – c'est Me Primeau qui disait ça – qu'il faut se fier aux expériences qu'il y a pour voir où enligner l'avenir. Il y a déjà, au niveau des omnipraticiens, dans plusieurs régions, des comités territoriaux sur une base de MRC qui se sont institués justement pour remplir les objectifs et, si on se fie aux omnipraticiens de la base, je ne suis pas convaincu qu'ils ne privilégieraient pas cette voie-là plutôt qu'un département de médecine régional qui n'est pas sensible aux différents territoires de sa région.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Me Gosselin.

Mme Gosselin (Ghislaine): Oui, alors, écoutez, si vous me permettez, je vais dans un premier temps revenir à votre première question qui relevait plus de l'allégement législatif. Alors, c'est avec beaucoup d'intérêt, M. le ministre, que je vous ai entendu au tout début de la présentation nous expliquer les rôles respectifs des trois paliers décisionnels: celui du ministre, qui était là pour planifier, orienter et évaluer – l'Association des hôpitaux vous appuie dans ça en disant qu'elle a à établir des politiques et des priorités; le rôle de la régie régionale, qui est là pour coordonner, organiser des services, donc elle établi son plan régional des organismes de services, et, dans les PROS, quelquefois, elle inclut un petit peu les programmes, aussi, ou en tout cas des éléments de programme; et il appartient aux établissements d'être responsables de l'exécution de ces services en élaborant et en mettant en oeuvre effectivement les PROS, et c'est à cet égard qu'on va établir des programmes de services.

Alors, ce n'est pas le projet de loi n° 404 qui est venu créer effectivement cela, ça existait depuis longtemps. Alors, il y a effectivement, si on entend nos prédécesseurs, confusion dans les termes. Je pense que la disparition du mot «programme», au niveau des responsabilités du ministre, ne change en rien ses vraies responsabilités, et il ne faut pas pour autant penser qu'il y a des nouveaux pouvoirs qui sont donnés aux établissements, loin de là.

Quand vous parlez d'un futur allégement législatif, certes l'Association des hôpitaux va vous donner encore un peu de temps, on est très patient. Ce qui est quand même important de noter, c'est qu'il faut que le projet de loi soit revu en profondeur pour établir des objectifs, déterminer les mécanismes de reddition de comptes, prévoir des pouvoirs aux établissements, aussi, et des outils. Il y en faut des choses, dans la loi, il ne faut pas se leurrer, mais c'est beaucoup plus des outils pour être capable d'atteindre nos objectifs. Cela dit, quand on est pris pour analyser le projet de loi n° 404, comme ça le donne un petit peu mais pas assez, on ne sait pas trop comment réagir, quelquefois, et on est pris pour faire de l'analyse article par article et ça se prête très mal à un allégement législatif. Alors il faut en tenir compte, peut-être, dans nos commentaires.

Au niveau du département régional de médecine générale, pour renchérir un petit peu sur les commentaires qui ont été faits par mes prédécesseurs de la délégation, ce qui nous a préoccupés, d'une part, c'est que, lorsqu'on lit l'article 377, on note que l'élaboration des plans d'effectifs médicaux de la région devra être adoptée sur recommandation des départements régionaux. Or, déjà là, on dit: Oups! le département régional, c'est un peu plus que ce que vous nous avez souligné au niveau de l'omnipratique. J'ai eu le plaisir, en fin de semaine, de lire le mémoire de la FMOQ, ils vont encore plus loin en demandant également d'autres pouvoirs de recommandation. Ils vont même jusque, à un moment donné, aux services d'urgence. Et c'est un peu là qu'on a peur parce que, oui, les médecins, les omnipraticiens sont des intervenants indispensables dans notre réseau, au même titre que les spécialistes. Mais on ne devient pas pour autant, nous, des intervenants inutiles; c'est-à-dire que la responsabilité d'exécuter les services de santé appartient aux établissements, et il ne faut pas l'oublier.

(12 h 10)

Donc, ne serait-ce qu'au niveau des plaintes, M. le ministre, tout à l'heure, quand vous demandiez: Est-ce qu'on peut s'entendre avec les médecins? bien, je dirai: Vous avez, encore là, oublié les établissements de santé. Le processus de plaintes qui a été instauré a été fait ultimement pour assurer la qualité des services dans les établissements, et c'est un mécanisme pour assurer cette qualité, c'est une responsabilité de l'établissement. Oui, il s'est développé, effectivement, une façon de faire parce que ça n'a pas de bon sens que, dès que la plainte touche un médecin, on soit tout de suite relié avec une procédure disciplinaire, c'était vraiment trop. Donc, il faut départager une plainte d'un usager pour une meilleure qualité de services versus une mesure disciplinaire. Mais, ceci dit, M. le ministre, associez-nous dans votre démarche, parce qu'il y a des éléments administratifs dans ça indispensables.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Ça termine l'intervention ministérielle.

Mme Lanthier, Mme Lamquin-Éthier.

Mme Lamquin-Éthier: Ce n'est pas grave.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je me trompe.

Mme Lamquin-Éthier: Je vous pardonne.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: C'est moi quand même. Si vous me permettez, M. le Président, de m'excuser auprès des représentants de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, vous savez, moi, j'apprends plusieurs choses, j'en suis encore à mes balbutiements. J'ai omis, dans mon enthousiasme, de vous saluer et de vous remercier de votre présence et je vous prie de m'en excuser. J'aimerais maintenant remercier et bien accueillir tous les délégués de l'Association des hôpitaux du Québec.

Permettez-moi d'emblée de vous soumettre la même question – M. le ministre, je pense que vous allez me la pardonner – à plusieurs reprises. Que pensez-vous de l'emploi du terme «usagers»?

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, je pense que de plus en plus, dans nos établissements de santé, si on se réfère à la définition du dictionnaire, nos usagers s'appellent maintenant des patients et je pense que...

Mme Lamquin-Éthier: Ça dit tout.

Une voix: Vous aurez pu remarquer que c'est le terme que j'ai utilisé également dans ma présentation.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres questions?

Mme Lamquin-Éthier: Dans votre mémoire plus particulièrement... Bon, je remercie Me Gosselin pour les commentaires qu'elle a repris, notamment quant aux plaintes des usagers. Le mémoire reprend bien et déplore que le projet de loi n° 404 ne soumette pas de modifications relativement aux plaintes concernant un médecin. Et on dit bien, tout en rappelant le contexte, actuellement, effectivement: «Dans plusieurs centres hospitaliers – sans que mention expresse soit faite quant au nombre – des procédures internes ont effectivement été mises en place comme solution aux problèmes évoqués: un médecin, donc, désigné par le CMDP pour analyser les plaintes et s'assurer de leur traitement. On distingue alors, de l'ensemble des plaintes qui concernent un médecin, celles qui commandent la formation d'un comité de discipline.»

Et, ayant posé ces constats-là, vous arrivez à dire: «À cet effet, le traitement d'une plainte ne devrait pas s'inscrire automatiquement dans un processus disciplinaire pour un médecin, mais plutôt viser à solutionner le problème soulevé afin d'offrir les meilleurs services médicaux aux usagers.» Je pense que le rappel du problème et la solution fondamentale recherchée, à savoir s'assurer que l'usager recevra les meilleurs services, commande qu'on puisse effectivement revoir ce manque dans le cadre de l'étude du projet de loi.

J'aimerais, si vous me le permettez, reprendre, eu égard à votre page 16, vous parlez, toujours dans le processus du traitement des plaintes, des ressources intermédiaires et des ressources de type familial, qu'elles puissent bénéficier de la procédure de traitement des plaintes qui est prévue dans la loi et des modifications proposées en conséquence. Vous les recevez très bien, sauf que vous distinguez ou qu'il vous apparaît important qu'on puisse distinguer l'établissement qui recrutera la ressource de l'établissement qui va dispenser les services professionnels, afin de tenir compte des rôles respectifs. La procédure est très lourde actuellement, extrêmement formaliste. Vous avez une exigence de porter plainte par écrit, et tout le dédale qui s'ensuit, les délais qui sont associés. Un, j'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi, dans quel but vous faites cette proposition-là, eu égard à votre souci de vous assurer que l'usager va porter plainte auprès du bon établissement pour avoir le bon résultat?

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, Me Gosselin.

Mme Gosselin (Ghislaine): Alors, écoutez, ce qu'on veut surtout préciser ici, c'est que l'établissement qui est le coordonnateur va allouer des ressources, mais les professionnels sont dans d'autres établissements et, par conséquent, l'établissement qui a retenu la ressource n'a pas l'autorité pour apporter des mesures dans l'autre établissement. D'où tout simplement l'importance de dire que, si la plainte réfère à un comportement d'un professionnel ou d'un employé d'un autre établissement, l'établissement qui est le coordonnateur référera la plainte au bon endroit pour que les mesures appropriées soient apportées; sans ça, il ne pourrait pas le faire lui-même. C'est ce qui est recherché.

Mme Lamquin-Éthier: Ah, parfait!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui. Merci, M. le Président et merci à l'Association des hôpitaux du Québec pour votre présentation et votre présence ici. On discute d'un projet de loi qui peut avoir un impact majeur dans notre réseau et votre participation est assez importante.

Vous êtes la deuxième présentation, et déjà le ministre a dit qu'il doit commencer à refaire son projet de loi. Avec ça, félicitations. Effectivement, quand nous avons parlé, le CMR et le DRMG, je voudrais savoir, est-ce que le ministre vous a rencontrés en préparation de ce projet de loi? Vous avez parlé de partnership, de partenaires, le réseau des hôpitaux, est-ce que vous avez été consultés pendant la préparation de ce projet de loi?

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, M. Marcoux.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Marcoux.

M. Marcoux (Yvon): M. le Président, à ma connaissance, non. Je ne suis pas à l'Association depuis très longtemps, mais peut-être qu'il y a eu des discussions sur l'entente ou le département régional. Moi, je ne suis pas au courant. C'est pour ça que je voudrais peut-être...

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): Concernant le projet de loi n° 404, de consultations, je dirais très ouvertement, au même titre que la FMOQ, non. Mais je peux dire que, sur les projets de loi, on a toujours été consultés.

M. Rochon: M. le Président, pour apporter une précision là-dessus, pour clarifier. Le projet de loi qui est déposé, non, il n'y a pas eu de consultations de personne là-dessus parce qu'on avait compris que, quand on est rendu à ce stage-ci, la consultation, elle se passe présentement, là. Mais, sur des travaux préliminaires, d'abord le comité Marcoux – sans lien de famille – avait parlé à pas mal de monde dans le réseau et fait le premier rapport qui était l'assise de base pour préparer ce projet de loi. Ça, ça avait donné lieu à un autre document il y a à peu près un an, un an et demi, où là il y avait eu une autre grande consultation de tous les groupes. On s'était revu, ce qui était déjà dans la foulée du premier comité qui avait consulté tout le monde, un rapport d'une première synthèse, il y avait eu une autre consultation. Là, on est à la troisième étape. Alors, il faut se rappeler de ça: des fois, les processus sont plus longs que les gens qui les traversent.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci beaucoup. Et je présume que le temps du ministre ne compte pas dans notre temps. Parce que, s'il doit se défendre, il doit utiliser son propre temps...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'imagine que vous me laissez ça.

M. Williams: Oui, oui, oui, tout est ouvert, là. Moi, je vous écoute, nous avons parlé de la répartition des effectifs médicaux, on parle d'avoir l'accessibilité, l'équité. Mais on sait que nous avons eu des coupures sévères dans le système de santé et services sociaux. On parle des CMR, on parle de département médical, on parle maintenant de département régional médical général, on parle des PROS. Là, est-ce que nous sommes en train de faire un réaménagement des chaises sur le Titanic? Est-ce que le vrai problème, c'est le montant disponible? Est-ce qu'il y a une duplication entre les niveaux?

J'essaie de comprendre. Si un des hôpitaux a décidé qu'effectivement vous avez besoin de certains effectifs médicaux et le département décide que non, comment allons-nous décider? Moi, je ne suis pas un professionnel dans ça. Je voudrais savoir qu'effectivement, quand je suis malade, je peux avoir accès aux soins de santé et de services sociaux. Je voudrais bien comprendre. S'il y a un problème entre tout ça – et le problème, je pense, vient des coupures – qui va régler quoi? Est-ce que vous pouvez expliquer ça? Moi, je vais prendre des notes certainement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Daigneault.

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, bien sûr on a dit dans notre mémoire que nous voulions qu'il y ait une meilleure réorganisation des services médicaux, de tous les services, sur les territoires. Mais nous avons dit aussi, et on le répète, que faire une duplication de structures, comme c'est le cas par exemple pour le département régional de médecine générale, à notre goût, même si on souscrit à l'objectif principal qui est de donner de meilleurs services, nous croyons que la commission médicale régionale qui existe déjà, qui est en place, pourrait être élargie et remplir ce rôle, pour éviter d'avoir une duplication de structures. Mais l'objectif d'avoir des services toujours améliorés, nous y souscrivons.

M. Williams: Ce que vous dites met en doute tout le rôle de conseil d'administration de chaque hôpital, ça met en doute l'autonomie de nos hôpitaux, ça déresponsabilise, si c'est un mot, parce qu'il me semble qu'on doit encourager nos hôpitaux à travailler ensemble. Si j'ai bien compris la tendance, c'est eux autres qui vont décider pour vous. Est-ce que c'est votre interprétation?

(12 h 20)

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, disons que la place qui est donnée aux établissements dans l'élaboration de ces départements régionaux de médecine générale, la place est mince, en tout cas, la consultation qui est permise aux établissements. Et on sait que les établissements ont vraiment à vivre l'organisation des services dans leur région. Ils ont une population à desservir et ils doivent favoriser l'accès à des services de qualité. Alors, ils sont vraiment reliés de très près à l'organisation des services et c'est en ce sens que les établissements doivent être consultés et vraiment reliés de très près à toutes ces ententes-là qui peuvent avoir lieu avec les médecins, parce que ça a un impact direct sur les établissements. Et M. Marcoux veut ajouter, et Dr Roy ensuite.

M. Marcoux (Yvon): Peut-être seulement un point. Lorsqu'on parle, par exemple, de recommandations dans la loi, on dit: Le département régional va faire des recommandations. Mais il semble bien que ces recommandations, lorsqu'elles seront présentées au conseil d'administration de la Régie, si on suit la philosophie qui sous-tend la loi, c'est que le conseil d'administration ne pourra pas les modifier. Donc, les recommandations, selon l'interprétation, en tout cas, que nous pouvons voir, c'est que ça devra être soit adopté, soit refusé, et je pense que ce n'est pas une façon où vraiment on peut avoir un forum qui permet de réconcilier les intérêts des intervenants. Et je pense que les établissements qui ont à vivre avec les patients, à fournir les services, que ce soit autant les hôpitaux que les CLSC que les CHSLD, doivent avoir un mot important à dire là-dedans.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Dr Roy.

M. Roy (Maurice): Juste pour revenir aux expériences locales ou territoriales que je signalais tout à l'heure, contrairement à ce que propose le projet de loi, où on évacue complètement les établissements, les expériences territoriales incluent dans les comités territoriaux que je connais – je ne les connais probablement pas tous – des représentants des services médicaux des différents établissements de la volonté même des omnipraticiens du terrain. Alors, c'est plus représentatif de la réalité terrain puis des besoins de l'ensemble du territoire, autant en cabinet privé que pour les établissements.

M. Williams: Merci pour cette réponse. Juste pour être certain que j'ai bel et bien compris, selon vous, avec le projet de loi n° 404, le conseil d'administration de la régie régionale, qui est bel et bien lié par toute une série de mesures, n'a pas autre chose à dire de plus que: On accepte ou on n'accepte pas. Avec ça, c'est rejeté ou accepté. Tous les représentants municipaux, tous les autres représentants ne peuvent pas nuancer, ne peuvent pas raffiner le plan compte tenu de leurs connaissances sur le territoire. Est-ce que c'est ça que vous avez dit?

Mme Gosselin (Ghislaine): Je vais répondre à la question.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Me Gosselin.

Mme Gosselin (Ghislaine): Alors, écoutez, pour ne pas faire de duplication, je vous dirai que nous avons eu également l'occasion de lire le mémoire de l'Association des CLSC et CHSLD et que tout le développement, effectivement, des fonctions confiées au département régional de médecine générale, nous l'endossons. Et vous comprendrez qu'un de ces arguments est effectivement le pouvoir de recommandation confié au département régional.

Dans notre loi, à l'heure actuelle, quand le mot «recommandation» est employé, il est fort. C'est-à-dire qu'au niveau des établissements de santé le Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens recommande l'adoption de ses règlements de régie interne. Le conseil d'administration ne peut que l'approuver ou le désavouer, mais ne peut pas corriger un règlement du CMDP. La même chose lorsqu'il s'agit de nommer un médecin ou un dentiste sur recommandation du CMDP. Alors, le mot «recommandation» est fort et, quand on emploie ce mot «recommandation» au niveau des départements régionaux de médecine générale, il ne pourrait pas avoir un sens différent que celui prévu dans les autres articles de loi.

C'est à cet égard qu'on s'interroge beaucoup, d'autant plus que, lorsqu'on lit le mémoire de la Fédération des médecins omnipraticiens – ils ne m'ont voudront pas trop – ils spécifient eux-mêmes qu'ils n'ont pas qu'un simple rôle d'aviseurs. Ils veulent avoir un rôle de recommandation et ils en demandent beaucoup. Or, c'est dans cette optique-là qu'on s'interroge, parce que, même s'il relève, ce département-là, du D.G., le D.G. ne peut qu'accepter ou refuser ce qu'on lui recommande. C'est-à-dire, à ce moment-là, que c'est un peu vain, effectivement, de dire: Oui, mais nous sommes dans une belle structure hiérarchique. C'est dans cette optique-là que nous nous posons des questions en ce qui concerne le département.

Par ailleurs, au niveau des conseils d'administration, il y a sûrement beaucoup de choses à faire. Certes, nous avons participé – et j'ai eu personnellement l'honneur d'en faire partie – au comité Marcoux au niveau de la déréglementation. Si on pense strictement au niveau des pouvoirs des conseils d'administration, le fonctionnement du conseil d'administration, nous pensons, à l'Association des hôpitaux du Québec, qu'il revient au législateur de dire les principes de fonctionnement d'un conseil, tels le conseil est public, le conseil doit prévoir une période de questions.

Il doit également prévoir les exceptions à son principe; il est possible de communiquer par d'autres moyens que par une réunion. Mais, quant à toutes les modalités de fonctionnement, pour moi, ça revient tout simplement au conseil d'administration de savoir comment ça va se vivre. Je trouve ça très lourd de lire ça, parce que, même quand on a donné une exception dans le projet de loi n° 404, on prend la peine ensuite de dire: Oui, mais il faut écrire ça: a, b, c, d, e, f. C'est pratiquement ridicule, parce que ceux qui l'écrivent ne font pas généralement du droit corporatif, et ce n'est pas tout à fait comme ça que ça se passe.

Alors, ce qui est important, c'est qu'il y ait les principes, qu'il y ait les exceptions, mais qu'il laisse quand même le fonctionnement aux établissements, strictement son fonctionnement de régie interne, on n'en est qu'à ça. On peut aller plus loin, c'est-à-dire que, quand on parle des pouvoirs de conseils d'administration, la nomination des directeurs généraux, il y a beaucoup de monde qui intervient dans ce processus-là. Est-ce que le conseil d'administration est décisionnel ou pas? C'est des exemples comme ça qu'on pourrait donner, qui nous interrogent, nous, quant à l'autorité des conseils d'administration.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Une dernière question, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui, je vous remercie pour la seule question que je peux poser. Je veux d'abord remercier la grande équipe de l'Association des hôpitaux, Mme la présidente, M. le vice-président, et je veux aussi souligner la présence de Me Gosselin, qui a été de tous les mémoires depuis plusieurs années, même si elle est très jeune. Elle a essayé de changer souvent ou d'améliorer le législateur; elle n'a pas toujours réussi, mais elle a travaillé dans ce sens-là, et on l'apprécie beaucoup.

Ma question. On parle des départements régionaux de médecine générale. Je voudrais savoir si l'instauration d'un tel département ou l'amélioration d'une commission régionale médicale, comme vous semblez le suggérer davantage, ça va aider à régler, à solutionner le problème dans les salles d'urgence. Dernièrement, vous savez, le ministre a déclaré qu'une des raisons pourquoi ça allait mal dans les urgences, c'était à cause de la mauvaise gestion, c'est-à-dire vos établissements, vos administrateurs. Est-ce que vous êtes d'accord avec l'affirmation du ministre?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, une minute. S'il vous plaît.

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, je vais laisser la parole à mon collègue le président du conseil d'administration, M. Jean-Paul Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul): Récemment, on a eu l'occasion, au niveau de la conférence régionale de Montréal de l'Association, de faire état que – et là on rejoint nos prédécesseurs de la FMOQ ici quand ils disaient que le problème n'est pas spécifique à l'urgence – bien sûr, c'est en amont et en aval qu'il faut le regarder, d'accord. Alors, c'est une réalité, ça. Et, en supposant qu'on donne raison quant aux intentions visées par ce département, en supposant que ça se matérialiserait, donc, ce ne serait pas ça qui serait la solution. D'accord? Je pense qu'il faut être bien clair là-dessus, d'une part.

Maintenant, je voudrais profiter de l'occasion pour revenir un peu sur un commentaire que M. le ministre a fait à un moment donné lorsqu'on parlait de responsabiliser davantage les établissements. M. le ministre a dit: Mais ce n'est pas nécessairement tout le monde qui semble le souhaiter. C'est vrai, mais on sait que, dans quelque organisation que ce soit, il est plutôt rare qu'on va rallier 100 % des personnes concernées à l'idée. Alors, je pense que le mémoire qu'on vous présente ici témoigne d'une volonté générale des membres de l'Association.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup. Au nom de tous les membres de la commission, merci. Je suspends les travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi dans la salle Papineau.

(Suspension de la séance à 12 h 29)

(Reprise à 15 h 35)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre! s'il vous plaît.

Alors, nous recommençons nos travaux. Et nous recevons les représentantes et les représentants de L'Association des ressources intermédiaires d'hébergement du Québec. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire. Ensuite, il y a échange de 20 minutes avec le côté ministériel et le côté de l'opposition. Mme Beaumier, je vous invite à présenter les gens qui vous accompagnent.


Association des ressources intermédiaires d'hébergement du Québec (ARIHQ)

Mme Beaumier (Jocelyne): Alors, je suis à la place de Mme Francine Longpré qui est présidente de l'Association et M. Serge Longpré qui est vice-président de l'Association.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça fait que vous pouvez commencer.

Mme Beaumier (Jocelyne): Alors, dans un premier temps, on voudrait vous remercier de nous permettre de venir s'exprimer, de vous donner notre point de vue, en fin de compte, principalement au sujet des ressources intermédiaires. La ressource pavillon, c'est la principale ressource qui nous préoccupe.

Alors, le sens même de notre étude, en fin de compte, on a voulu, nous, faire deux distinctions à partir du projet qui nous a été remis, le projet de loi n° 404. D'une part, vous allez vous apercevoir qu'on a peu traité de tout ce qui regarde le contexte de l'hôpital comme tel, ce qui regarde un soin plus de courte durée ou une condition plus aiguë. On s'est attardé davantage à ce que j'ai appelé la notion de ressource non institutionnelle, même si ce n'est pas un terme de la loi. J'ai regroupé, à l'intérieur de ça, toutes les ressources d'hébergement qui ne font pas partie de traiter de la clientèle qui est dans une condition aiguë au niveau de sa santé ou plus sévère. Alors, c'est un peu l'esprit dans lequel on a travaillé.

Je dois vous dire qu'on est resté un peu sur notre appétit parce qu'il y avait peu d'éléments qui nous concernaient dans le projet de loi n° 404. Il y avait, bien sûr, la définition de ce qu'est une ressource intermédiaire avec les transformations qu'on va traiter un petit peu plus loin. Et certaines transformations dans la gestion des plaintes et des choses comme ça où, là, on a apporté la notion de ressource intermédiaire et de ressource de type familial. Alors, ça, on est resté, comme je vous dis, un peu sur notre appétit.

Puis notre grande, en termes... un peu dans l'esprit dans lequel je vais traiter le dossier, notre grande crainte qu'on avait là-dedans, c'est tous les aspects d'incohérence qui ressortent. Notre but, nous-autres, dans le fond, c'est de pouvoir éventuellement connaître ou comprendre une loi, mais qui s'applique, en même temps, avec une réalité qui est sur le terrain, les situations que les différents types de ressources vivent. Alors, quand j'ai j'ai parlé de ressources non institutionnelles, bien, je vous les ai nommées. J'ai rentré là-dedans tout ce qui est de l'hébergement qui serait plus de type alternatif, comme des ressources privées, des ressources de type familial, les pavillons, bien que, dans les domaines, j'aie un petit peu explicité, mais je vais le traiter seulement un peu plus loin, le détail qu'on met dans chacun des types de ressources.

J'ai distingué pavillons et ressources intermédiaires puis je pense que, quand on étudie le document, vous allez voir un petit peu, comprendre le sens, pourquoi j'ai voulu le distinguer, et les organismes communautaires qui font de l'hébergement et tous les autres types de ressources qu'on ne voit nulle part dans la nomenclature de la loi, mais qui existent en quantités, quand même, assez intéressantes. Il y en a certains, comme le privé non conventionné autofinancé, qui sont quand même nommés dans différents documents du ministère. Alors, j'ai identifié, j'ai mis une petite synthèse de chacune de ces ressources et, déjà, je mets en lumière certaines incohérences qui nous apportent des irritants.

Le sens même, comme je vous dis, de notre analyse, c'est de faire ressortir ces incohérences-là et d'espérer, en fin de compte, que dans le projet final on pourra arriver à différentes clarifications qui pourront peut-être nous apporter plus de confort dans notre quotidien. J'ai une petite parenthèse, aussi, en même temps, parce que c'était peu présent lorsqu'on a eu à étudier, cet automne, le système sociosanitaire québécois, bilan et perspectives. Encore une fois, on ne s'est pas vu beaucoup apparaître dans ce document-là non plus, et je l'avais exprimé au niveau du mémoire qu'on a remis à ce moment-là.

Pourtant, nous, d'un côté, on voit que c'est une transformation, quand même, qui est très importante, si on regarde tout le virage ambulatoire, la réforme qui se fait avec les hospitalisations qui sont moins longues et toute la prestation de services qui est à donner à la population. À ce moment-là, je pense que c'est un bloc qu'il est important de traiter puis de concrétiser davantage, toute cette transformation-là.

(15 h 40)

Alors, avant d'aller plus loin, je veux quand même vous dire quelques mots, aussi, sur notre Association, qui demeurait, en fin de compte... Ça fait depuis les années 1972 qu'on a démarré. Ça s'est appelé la CoPFAA. Et je tenais à faire un peu ce petit historique parce qu'à ce moment-là, déjà, on avait une étape qu'on vivait, comme société, qui est un peu semblable à ce qu'on vit présentement, c'est-à-dire l'émergence, en fin de compte, de beaucoup de ressources qui n'avaient pas nécessairement un encadrement au niveau légal et qui n'étaient pas nécessairement mentionnées dans la loi sur la santé et les services sociaux. Quand on a vu la désinstitutionnalisation qui a commencé dans les années soixante – vers 1965, 1966 – on s'est mis à faire tous les foyers affiliés et des appartements supervisés et toutes sortes de ressources qui ont commencé à naître, puis il y avait comme une espèce d'incoordination aussi. Il y avait des ressources de type familial aussi qui naissaient, puis c'était le regroupement en fait des deux associations qui géraient à ce moment-là des foyers affiliés et d'autre types de ressources, foyers de groupes; il y avait différents noms comme ça.

Ils se sont regroupés dans les années 1972 pour former la CoPFAA – probablement que plusieurs ont connu ça – la Corporation des pavillons et familles d'accueil pour adultes. Alors, cette institution-là a existé jusqu'en 1992. En 1992, on a vécu une transformation majeure. On partageait des intérêts différents. Il y avait des formes de rémunération différentes qui amenaient des écarts dans la façon de gérer les choses. Quand on gérait un nouveau pavillon, on avait plus affaire peut-être à un entrepreneur, des normes différentes à rencontrer, une forme de rémunération différente, et il est arrivé un conflit à l'interne – peut-être que certains étaient présents ou ont connu cette histoire-là. C'est devenu, en fin de compte, le RRIHRAQ qu'on a formé, et ARIHQ, ARAQ. Ça fait un peu de «r», mais on a tenté par cette transformation-là de donner un pouvoir plus clair à chacune des associations afin qu'elles puissent mieux représenter leurs membres dans l'esprit dans lequel elles devaient travailler avec eux. Ce regroupement-là, en fin de compte, s'est dissout en 1994 parce que le lien a quand même été difficile à cause des différences de culture. Le lien a été quand même difficile à conserver.

Vers 1995, il y a eu un événement particulier qui a été l'acceptation par le Conseil du trésor du nouveau contrat. Notre contrat pour les pavillons était en négociation depuis 1984. Il y avait eu des amendements en 1989 et, en 1995, la version finale a été acceptée, et il y a eu les étapes de circulaires qui sont nées vers avril 1996 pour la mise en application de ce nouveau contrat-là. Et, par la suite, un moratoire serait apparu qu'on n'est arrivé à clarifier vraiment qu'à l'automne dernier, à savoir que ce n'était pas un moratoire qui était émis par le ministère comme tel, mais ça a apporté beaucoup de difficultés au sein de l'Association qui s'est retrouvée en fin de compte, au début de l'année 1997, en administration provisoire.

Le mandat nous m'a été donné à ce moment-là de revoir un peu tout ce qui se passait pour la situation des pavillons au Québec, voir ce qui arrivait avec le contrat puis revoir aussi une restructuration interne de l'Association. Alors, en février, on a commencé ce qu'on a appelé notre virage qualité. Actuellement, on a accompagné l'ensemble des ressources pavillon pour leur donner de la formation, les amener à requestionner leur façon de faire et les accompagner dans le but d'arriver justement à s'ouvrir aux transformations qui s'en viennent dans le réseau de la santé.

Ceci nous illustre un peu ce qui se passe actuellement. Cet automne, nous avons eu... je pense que, dans toute l'histoire des pavillons, c'est la première année qu'il y a autant de résiliations de contrats. On a eu 23 propriétaires de pavillon qui ont eu des résiliations de contrats sous toutes sortes de prétextes. Quelquefois, à cause de la reconfiguration des services; d'autres fois, les motifs sont demeurés assez diffus et plus ou moins prononcés. Et tout ça crée actuellement énormément d'irritants qui, vous allez voir, vont aller un petit peu dans le sens de notre étude. On se sent peu appuyés, peu d'éléments clairs au niveau de la loi nous permettent de faire respecter, en fin de compte, ce qu'est un pavillon. Actuellement, il y en a 222 pavillons, qu'on a sur notre liste, au Québec, qui représentent environ 4 000 usagers ou résidents – qui est notre nominalisation qu'on utilise davantage.

Alors, je peux vous dire qu'il y a un esprit d'ouverture dans le but d'envisager la transformation. Mais encore, nous, ce qu'on voudrait exprimer avec les travaux qui vont se faire et qui vont continuer, c'est: Qu'est-ce qu'on transforme vraiment? Parce que je pense qu'au fil du temps on a perdu de vue, un peu, ce qu'était le pavillon, son contexte juridique. On a posé la question à plusieurs personnes. Et, dernièrement, nous, on s'est payé la traite de faire l'ensemble de cette recherche-là et de remonter à tous les documents depuis 1960. On a questionné des vieux membres aussi et on a refait cette recherche-là au complet pour essayer de définir ce qu'était le pavillon, et, dans nos prochains travaux, pouvoir le confronter peut-être avec les gens au ministère: Est-ce que c'est bien ça, le pavillon? Puis, comment on le transforme? Parce que si on veut le... Oui?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): 10 minutes.

Mme Beaumier (Jocelyne): 10 minutes. O.K. Parfait. Alors...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Quand je fais des signes, là.

Une voix: Il faut compter les doigts.

Mme Beaumier (Jocelyne): O.K.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est pour vous donner un indice.

Mme Beaumier (Jocelyne): Alors, vous voyez dans quel esprit on doit travailler actuellement, au niveau de l'Association. Ce n'est pas évident. Puis, comme je vous dis, nous, ce qu'on veut rechercher, c'est de la clarification au niveau de la loi. Malgré tout, en traitant le projet, on s'est quand même arrêtés à différents points qui étaient traités pour quand même s'exprimer, même si ça ne touchait pas directement les ressources intermédiaires.

Alors, si on se met à l'intérieur du document, au niveau de la gestion des plaintes, le fait que maintenant on définisse – au niveau de la gestion des plaintes – que ce soit davantage un membre du personnel, ça nous a inquiétés un peu. O.K.? Si c'était dans un autre contexte, ça pourrait peut-être être moins inquiétant. Mais, dans le contexte qu'on gère présentement, nous, ça nous a inquiétés. Ce dont on a peur, par rapport à ça, c'est de banaliser ou de trop, peut-être, simplifier, ne pas donner suffisamment d'importance au traitement des plaintes. On voit mal une personne qui serait employée, qui aurait à traiter une plainte et qui serait, quelquefois, vis-à-vis de son supérieur ou quelque chose comme ça. Quel pouvoir elle va avoir de pouvoir vraiment traiter la plainte, à ce niveau-là? Bien qu'on fasse un lien, dans la transformation, au conseil d'administration, je dois vous dire que ça nous inquiète pas mal, de ce côté-là. Alors, on demanderait de peut-être définir davantage le genre de poste que cette personne-là pourrait occuper, dans la loi.

Il en est de même lorsqu'on continue vers le processus de gestion des plaintes puis qu'on veut le gérer, vers les régies régionales, on précise moins le rôle ou le niveau hiérarchique. Je n'aime pas parler juste de la notion de niveau hiérarchique parce que je pense qu'on pourrait avoir un pouvoir de décision, si un mandat est bien exprimé à une personne. Mais, dans notre pratique courante, ça ne semble pas évident à ce niveau-là.

Au niveau des ententes conclues par les établissements, au niveau d'une forme de contrat, vu qu'on n'a pas beaucoup de temps, je vais traiter en même temps, ce un peu vers quoi je finis, qui est tout l'ensemble de la notion qu'on peut signer un contrat.

Là où ça devient ambigu pour nous autres, si je regarde les pavillons, c'est un contrat-type de location de biens et services qui est un document standard du ministère. On fait référence pour ça aux articles 485, 486 de la loi. Avec 475, on donne plus de souplesse ou plus de pouvoirs à la Régie régionale, de pouvoir aussi traiter des contrats, qui se rapprochent aussi de confier des responsabilités de gérer certains soins et services dans certaines installations. Et on le confie aussi à l'article 108, mais cette fois-ci on le confie aux établissements, et avec moins de droit de regard, en fin de compte, de la Régie régionale que c'est davantage maintenant, ils n'ont qu'à remettre la copie du contrat.

Pour nous, ça devient très compliqué actuellement, parce qu'on voit trois niveaux où il pourrait éventuellement s'écrire presque un même contrat pour un même type de ressources. Comment on peut se retourner pour faire valoir la notion de ce contrat-là qui pourrait être écrit? Et actuellement nos ressources qui sont en transformation et même en résiliation de contrat, on s'aperçoit qu'on part d'un document standard du ministère puis tout à coup, vite, l'établissement peut composer une autre forme de contrat. On ne se comprend plus trop trop là-dedans. Ça devient plutôt incohérent. Et il me semble qu'il devrait être clarifié, quel type de contrat réellement doit être défini qu'un établissement a le droit de faire, qu'une régie... le pouvoir de la régie via le pouvoir du ministre vis-à-vis de ces contrats-là.

(15 h 50)

Alors, je dois vous dire que 3.2, vous pourrez le traiter à la fin, avec le financement des autres services, où j'ai traité davantage toutes les notions de contrat. Alors, c'est un peu toute cette incohérence-là. En même temps, il y a quand même certains articles de la loi qui ont pas été changés et puis qui disent qu'un contrat peut être de nullité absolument si signé par un établissement alors que ça devrait être déterminé par une autre instance au niveau de notre système.

Alors, quand on va pour faire appliquer ces choses-là, on ne se retrouve carrément pas là-dedans; alors, ça devient assez complexe. Et en même temps, avec tout ça, on arrive avec toute la notion de permis qui vient s'attribuer à ça avec les articles 437, 438 où on nous dit que, si on fait les activités qui sont pour un établissement, bien ça prend un permis.

Alors, si je regarde tout le réseau de ressources non institutionnelles, ça fait des activités à l'intérieur de ces ressources-là qui ressemblent à ce qui se passe dans des centres d'hébergement, centres de réadaptation, et on dit d'une part: Ça prendrait un permis, sinon on devient en contradiction avec la loi. Et on prévoit même des mesures disciplinaires à ce niveau-là. Et, même quand on va traiter la résidence privée comme telle, on va dire: Mais elle est une ressource clandestine si elle n'a pas de permis d'établissement puis qu'elle garde la clientèle en perte d'autonomie.

Pourtant, cette clientèle-là est la même qui est dans les ressources intermédiaires ou de type familial; alors, c'est compliqué de se retrouver là-dedans puis de dire, bien voilà, est-ce ça en prend un permis ou ça n'en prend pas? Ce qu'on aimerait, c'est que ce soit clair. Parce que c'est la même clientèle qui se promène à l'intérieur de tout ça, mais même quelques fois dans la résidence privée sans permis, je retrouve de la clientèle qui est de soins de longue durée, assez lourde. Puis, il n'y a pas de permis là.

C'est sûr qu'on a une certaine tolérance, et je le comprends parce que c'est une masse de la population qui est là aussi, en même temps, puis on serait pris avec une autre sorte de problème, avoir à y faire face immédiatement. Alors, ce qu'on se dit, c'est: Si ça ne prend pas de permis, bien, on l'enlève, puis on enlève cette notion-là. Si ça en prend juste pour des établissements style courte durée ou des choses comme ça, bien, on le définit bien dans la loi, puis ça va faire une application qui va être beaucoup plus facile dans notre quotidien.

Et sur ce, j'en arrive, justement... Je vais passer des points, parce que mon 10 minutes va achever assez facilement. Je veux en venir à la notion de ressource intermédiaire que je vais aller plus...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va être un 10 minutes U.S.

Mme Beaumier (Jocelyne): U.S. Ah! bien, j'ai droit à trois, quatre minutes de plus. C'est 30 %, 40 % de ce temps-là, le transfert. Ça fait que c'est pas pire. Je vais être avantagée.

Alors, la nouvelle définition d'une ressource intermédiaire, bien, je pense qu'elle vient clarifier des choses d'une part, puis en compliquer d'autres. Parce que, d'un autre côté, on dit maintenant que c'est bien clair que dans une ressource intermédiaire, c'est une clientèle qui est inscrite, puis ce n'est pas une installation d'un établissement. O.K.?

D'autre part, l'article 619.27 vient nous dire ce qu'on reconnaît comme ressources intermédiaires: les établissements qui gèrent, foyer affilié, appartement, pavillon. O.K.? Un pavillon, actuellement, il y a une clientèle qui est admise puis c'est une installation. Alors, le pavillon ne serait comme plus une ressource intermédiaire et, par contre, on le dit dans 619.27 qu'il est une ressource intermédiaire. Alors, comment est-ce qu'on va le transformer, à ce moment-là? Et ce qui est encore plus mélangeant, c'est que maintenant on a appelé pavillon à peu près toutes les installations à l'intérieur des regroupements. Alors, ça devient assez compliqué quand, des fois, j'ai eu à vérifier toute la liste de membres, cette année, de nos membres, à savoir si les installations qu'on avait, nos pavillons existaient toujours. Et quand j'appelle dans un hôpital, disons, si j'appelle à Notre-Dame, quand je dis: Parler à un pavillon, on me réfère à... c'est à quel pavillon que vous voulez parler? Puis on... C'est très confus. Puis, nous autres, on est quand même des gens qui gèrent avec ça. Imaginez, pour le public, ce que ça peut faire. Puis imaginez pour les résidents, à l'intérieur de ça, comment ça peut être mélangeant.

M. Rochon: Pour le ministre, qu'est-ce que vous pensez?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Beaumier (Jocelyne): Ah! mais pour le ministre? Alors, ça peut être aussi mélangeant. Puis, moi, présentement, je viens de présenter plusieurs dossiers, nos 23 fermetures, O.K.? Puis je tente d'une part, on a fait un côté juridique pour essayer de clarifier tout ça. Tout le monde est mêlé là-dedans. Au niveau de l'Association, au niveau de nos propres membres, on tente de clarifier ça. Puis, sans doute, quelques-uns ont peut-être lu notre dernière petite revue où on a fait un bilan provincial en demandant à tous nos propriétaires: Allez voir vos directeurs pour signer votre nouveau contrat puis tout ça, puis demander les réactions des régies régionales. Et on est arrivés avec quelque chose de très très mélangé.

M. Longpré (Serge) : Et mélangeant.

Mme Beaumier (Jocelyne): Et mélangeant pour tout le monde. Alors, c'est un peu dans l'esprit dans lequel... J'ai traité de quelques autres articles qui nous intéressaient, mais c'est un peu dans l'esprit dans lequel je veux vous amener l'ensemble de ces choses-là. Mais je voudrais aussi retenir toute la notion d'équité aussi à l'intérieur de ça. Bon. On a un petit article qui m'achalle un petit peu, l'article 313 qui n'a pas été touché dans le projet de loi. Vous avez vu que tout ce qui était du gras, je veux dire les «caractères gras» dans le texte...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Pour nous autres, ça a des significations.

Mme Beaumier (Jocelyne): Je vais clarifier. Je ne veux pas dire qu'il reste encore du gras dans notre réseau. Alors, ce que je veux clarifier là-dessus, c'est que l'article 313 ouvre, en fin de compte, à une notion quand on dit que ce n'est pas un moyen de profit. Alors, notre recherche d'équité nous dit que voilà, si on s'occupe de garder de la clientèle, et que ça ne correspond pas à une notion de profit et que la résultante, c'est que des revenus ne sont pas imposables, c'est sûr qu'on demande de revoir ces choses-là au niveau de la loi. Bon, on peut avoir l'idée de dire, oui, ça ne correspond pas à une notion de profit, mais, si on parle d'une équité à l'intérieur d'un réseau, il ne faudrait pas que ce soit une notion de profit pour personne. Et si on élargit encore davantage, bien, tout travail, je pense, a sa valeur et ça ne devrait pas être une notion de profit pour personne dans la société, n'est-ce pas?

Alors, nous, on tenait à exprimer ces choses-là. Cette notion d'équité, comme je vous dis, nous la voulons au niveau des types de ressources, de l'organisation des ressources, du mode de rémunération, puis aussi dans une région, je veux dire, et entre les régions. Alors on aimerait que cette équité puisse vraiment ressortir.

Le dossier ressource intermédiaire pourrait donner dans sa forme, dans le cadre de référence dans lequel elle est définie un bon moyen de redéfinir l'ensemble de ces ressources et de les faire exister de manière valable. Mais ça va prendre un effort et un leadership et des directives très claires pour le faire exister. Alors, je peux conclure là-dessus.

Deux minutes?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Deux minutes.

Mme Beaumier (Jocelyne): Deux minutes? Mais c'était vraiment du U.S.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mais vous êtes dans le gras, par exemple.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Beaumier (Jocelyne): Alors, en tout cas, c'est un peu dans l'esprit dans lequel on voulait vous présenter nos grandes préoccupations sur l'ensemble de ce projet de loi là.

Alors, je suis ouverte à vos questions.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup. Vous m'avez dit tout à l'heure que c'était votre première expérience. Une chance! Je voudrais juste vous souligner, avant qu'on commence, que quand vous parlez – puis c'est valable pour les gens qui vont vous suivre – et qu'il y a des gens qui viennent parler au ministre, le ministre a toujours l'oreille quand même. Mais ce sont des informations. Parce que, ce matin, j'étais dans une autre commission, puis les gens se demandaient ce qui se passait. Alors, ce n'est pas de la distraction.

M. le ministre, si vous voulez commencer votre échange.

M. Rochon: Bon. Alors, oui. Merci, M. le Président. Alors, merci pour la présentation. Je suis, entre autres, je dirais, un peu soulagé ou conforté de comprendre qu'une personne qui est sur le terrain, qui vit dans tout le domaine de l'hébergement trouve que c'est un peu compliqué parce que, même comme ministre, depuis trois ans, je dois dire que j'ai beaucoup travaillé avec les équipes du ministère. Et je suis d'accord avec vous, il s'est développé beaucoup d'initiatives et ce n'est pas toujours facile de clarifier. On dirait qu'à mesure qu'on clarifie, il y a d'autres initiatives qui se développent, puis le tableau, je ne veux pas exagérer non plus, mais c'est assez dynamique et ça bouge beaucoup. Et, à cet égard, je pense que ce que vous soulignez aussi que la limite entre privé, public, hébergement, soins, n'est pas facile à tracer.

Bon, évidemment, dans les amendements qu'on faits à la loi, actuellement, on ne pensait pas pouvoir, puis on ne prétend pas tout régler. Il y a eu d'autres avenues. Vous avez fait référence au cadre de référence des ressources intermédiaires qui a été longtemps en discussion avec tout le monde, qui est maintenant terminé, qui est sorti. Normalement, vous le connaissez. On avait compris – puis je vais en profiter pour avoir un peu de rétroaction de votre part – moi, j'avais cru comprendre, d'après ce qu'on me dit, que c'est assez bien reçu, que ça correspond assez à ce qui était souhaité et que ça aide un peu à clarifier, pas au complet, mais un certain nombre de choses auxquelles vous avez fait référence.

Mme Beaumier (Jocelyne): Moi, j'ai toujours été une fidèle défenseur de ce cadre de référence là. Je suis avec l'Association depuis un an, mais je suis impliquée dans le réseau de la santé, par mes activités de ma compagnie, depuis 10 ans et j'ai toujours été une fidèle défenseur de ça. Je pense que ça vient nous clarifier beaucoup de choses.

M. Rochon: C'est ça.

Mme Beaumier (Jocelyne): L'inquiétude, c'est de l'amener sur le terrain.

(16 heures)

M. Rochon: C'est ça. O.K. Mais ça, je voudrais juste le distinguer, parce que les amendements au projet de loi qu'on fait, ça ne prétend pas vouloir améliorer des choses qui devraient l'être plus par le cadre de référence. Alors, c'est deux discussions complémentaires mais qui sont différentes, dans un sens.

Mais, au besoin, on pourra revenir à ça. Vous pourrez en reparler, si vous voulez. Mais on ne prétendait pas, on ne voulait pas, nous, dans le projet de loi, en mettre plus qu'il faut... et garder des moyens souples comme un cadre de référence pour régler ce qu'il peut régler, de ce côté-là, et tenir compte aussi qu'il y a, là, tout un milieu assez dynamique qui réagit beaucoup au changement des besoins, qui fait beaucoup pour s'ajuster aussi aux besoins.

Et, la préoccupation du ministère, on essaie de plus en plus de bien cibler la mission d'un réseau de santé et de services sociaux en ce qui regarde les soins par rapport à toute la question plus générale de l'hébergement. Et on n'essaie pas de réglementer la vie de tout le monde outre mesure non plus, parce que, quand quelqu'un est chez lui, chez des parents, dans une ressource privée, quelqu'un qui a une relative perte d'autonomie, qui a besoin des soins plus de type soins à domicile...

Mme Beaumier (Jocelyne): Oui.

M. Rochon: ...il ne sera pas nécessairement institutionnalisé trop rapidement.

Alors, je reconnais avec vous qu'il y a une zone grise, dans la réalité aussi, je pense, et que, si on essaie de trop – en tout cas, on pensai – l'organiser, plus qu'elle l'est dans la vie réelle, à un moment donné, on n'y arrive pas. Ça devient sollicitable. Dans des changements faits à la loi, par contre, ce qui était souhaité en ce qui regarde les plaintes que les gens peuvent faire – et ça, on le voit beaucoup plus en terme de services à la clientèle – c'est qu'on sache être en lien avec les patients, les clients ou ceux qui sont hébergés dans nos établissements, que les gens puissent manifester un désaccord, une critique, une insatisfaction et qu'on puisse la prendre en compte, pour la personne comme pour le système en général, quand il y a plusieurs personnes qui se plaignent de la même chose.

De vous relier à un établissement ou l'établissement avec lequel vous êtes reliés à contrat, ça, je voudrais être bien sûr de bien comprendre de votre part que vous êtes d'accord avec ça et que ça peut faciliter...

Mme Beaumier (Jocelyne): Oui, d'être reliés, oui.

M. Rochon: Bon. Premièrement, un commentaire, puis là je vous laisse réagir. Sur la personne, maintenant, de l'établissement qui en est responsable, on a un peu un dilemme. Vous dites: C'est mieux si c'est quelqu'un en autorité. C'était ça qu'on avait avant. C'était un cadre intermédiaire, un cadre...

Mme Beaumier (Jocelyne): Un cadre supérieur, oui.

M. Rochon: ...pas une ressource intermédiaire mais un cadre tout court. L'expérience a été qu'on a pu voir que, pour que ça soit fait vraiment bien, que quelqu'un s'investisse assez en termes de temps puis d'implication, un cadre qui a d'autres travaux d'encadrement à faire – à moins qu'il ait vraiment une plainte ou deux par année ou que ça soit très, très, très limité – il n'a peut-être pas le temps, et même, jusqu'à un certain point peut-être, le temps de développer l'expertise correcte pour donner un bon service à la clientèle. Une personne qui est désignée pour ça, qui va relever d'un cadre, qui va relever d'une autorité à l'intérieur de l'établissement, où il y aura un cheminement même jusqu'au conseil d'administration de ce qu'on voit, mais qu'on ait plus quelqu'un qui est là et qui est dédié à cette fonction, c'était ça qui était l'intention. Vous ne pensez pas que, entre les deux, on a choisi le moindre mal, au moins?

Mme Beaumier (Jocelyne): Je dois vous... Je peux?

M. Rochon: Oui, allez.

Mme Beaumier (Jocelyne): Alors, par rapport à ça, le processus de plainte, je dois vous dire que je suis tout à fait d'accord avec vous que c'est un cadre supérieur et que ça ne donnait pas des résultats nécessairement extraordinaires de ce côté-là. O.K., je ne veux pas le mettre de façon générale, mais, dans plusieurs situations, on s'apercevait qu'il n'avait peut-être pas cette disponibilité-là.

M. Rochon: C'est ça.

Mme Beaumier (Jocelyne): Que ce soit une personne... nous, dans la façon dont on a fait la recommandation, c'est que son rôle soit très bien campé, O.K., puis que sa capacité de pouvoir agir vraiment dans la plainte soit bien campée parce que, connaissant le fonctionnement du système, on pourrait facilement écraser cette personne-là puis ignorer la plainte. Alors, c'est à ce niveau-là que, nous, on a des inquiétudes.

Mais je suis tout à fait d'accord avec vous qu'une personne qui serait vraiment désignée pour ça, avec la formation adéquate pour ça, va souvent être peut-être beaucoup plus près des gens et avoir tendance à scruter peut-être davantage la force de la plainte et être plus près du terrain. À ce niveau-là, le principe est très bon, en ce sens-là. Mais, comme je vous dis, c'est l'inquiétude de comment ça va se gérer ou s'appliquer, tout le long, dans le sens de la déréglementation ou décentralisation qui est exprimée au sens du projet. Je suis d'accord avec la notion de décentralisation, c'est l'application qui m'inquiète.

Si je vois le constat, vis-à-vis du développement de tout ce que j'appelle les ressources institutionnelles, tous les zigzags que ça a pris puis toutes les tendances et la créativité qui était très importante... Il faudrait peut-être encadrer cette créativité-là, et c'est un peu dans cet esprit-là que la décentralisation nous inquiète, là. O.K.?

M. Rochon: O.K. Merci. Peut-être juste une précision. J'ai vérifié avec le personnel du ministère... Bon, il y a une clarification qu'on peut apporter peut-être, un peu. Vous demandiez: Entre une ressource intermédiaire, puis un pavillon, qu'est-ce qu'il y a comme différence? Moi, si je comprends bien, c'est qu'il n'y en a pas, de différence. Un pavillon, c'est une ressource intermédiaire. Alors, on n'a pas voulu, là, créer quelque chose de plus.

Alors, il y a les ressources de type familial, ça, c'est neuf personnes ou moins qui se retrouvent regroupées ensemble; ou il y a des ressources intermédiaires, dont le pavillon ou foyer d'accueil, où il y a deux ou trois autres types d'établissements là-dedans.

Mme Beaumier (Jocelyne): Oui, sauf que, dans ma compréhension, si je regarde dans le cadre de référence, on retrouve aussi le type familial. La notion de maison d'accueil, c'est cette situation-là qui est...

M. Rochon: Ah, il y a les deux, je pense: le type familial et la ressource intermédiaire. C'est ça? Non? Peut-être, M. le Président, est-ce qu'on peut demander à quelqu'un, au moins, qu'on comprenne exactement ce dont on parle, là.

Mme Beaumier (Jocelyne): Je vais voir s'il le dit comme il faut, parce que, là, je m'en viens bien là-dedans.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On va lui demander de se présenter, pour fins d'enregistrement.

M. Simard (Vital): Alors, Vital Simard. Je suis au ministère de la Santé et des Services sociaux et je m'occupe du dossier, donc, des ressources de type familial et intermédiaire, entre autres choses.

Alors, la question, c'est la distinction entre une maison d'accueil au sens de ressource intermédiaire et une ressource de type familial. C'est que, actuellement, on a des ressources intermédiaires qui sont à caractère familial, mais qui ne sont pas nécessairement le lieu où les gens qui desservent les services habitent. Exemple: il y a des corporations d'établissement qui ont des maisons qu'ils mettent, donc, au service d'un établissement qui, lui, dans le cadre d'une entente contractuelle, engage des personnes pour pouvoir dispenser des services; et ces gens-là habitent, soit par quart de travail ou de façon permanente, avec les gens, mais la maison appartient à la corporation et, lorsque ça ne fait plus l'affaire, les personnes, donc, sont remplacées par d'autres, sont à contrat. Alors, c'est-à-dire que c'est la maison d'accueil.

Alors que la famille d'accueil ou la résidence d'accueil pour les adultes et les personnes âgées, c'est vraiment le lieu où la personne vit. Elle accueille chez elle des personnes pour dépanner le réseau d'établissements publics par rapport à une clientèle qui normalement devrait être moins lourde, en termes de problématique, que ceux qu'on retrouve en ressources intermédiaires de type maison d'accueil. Je ne sais pas si ça clarifie.

M. Rochon: Ça clarifie au moins pour qu'on soit sûr qu'on...

Mme Beaumier (Jocelyne): Un petit morceau. C'est vrai dans la définition, et je suis tout à fait d'accord avec les définitions qu'on se donne. C'est toujours, nous, dans la pratique, c'est pas ça qui existe, c'est pas comme ça que ça marche.

M. Rochon: Ça marche comment dans la pratique?

Mme Beaumier (Jocelyne): Dans la pratique, comment ça marche? «J'ai-tu» droit à un bon cinq minutes?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Allez-y. C'est sur le temps du ministre d'abord.

Mme Beaumier (Jocelyne): Dans la pratique, tout à fait dans la définition que M. Simard vient de donner, on a aussi des ressources qui sont dites actuellement intermédiaires, mais le couple vit là, puis ils ne sont pas une famille d'accueil, ils ne sont pas une résidence d'accueil. Alors, vous en avez sur le territoire de Québec, ici. Ils ont quatre résidents, et puis ce ne sont pas des...

M. Rochon: Excusez. Ce que je comprends, c'est ce que monsieur vient de dire. Mais ces gens, ça serait un couple qui est à contrat avec l'établissement qui, lui, l'établissement, est le propriétaire de la maison ou du foyer?

Mme Beaumier (Jocelyne): Oui.

M. Rochon: Ça, c'est une ressource intermédiaire. C'est quelqu'un qui est employé pour faire ça. La famille d'accueil, c'est quelqu'un qui est dans sa maison, qui rend des pièces disponibles pour recevoir des gens – famille d'accueil.

Mme Beaumier (Jocelyne): Oui, sauf que ceux-là sont aussi dans leur maison, ça devient leur loyer. Je pense que M. Simard, on a parlé de situations comme ça?

M. Simard (Vital): Si vous me permettez, un autre élément distinctif, c'est que la maison d'accueil, donc, on va demander aux gens d'arrêter de travailler, de mettre à terre des murs, de faire des aménagements pour répondre aux besoins d'une clientèle beaucoup plus lourde. Alors que la résidence d'accueil, par son caractère même, on n'arrivera pas chez vous pour bouleverser votre vie familiale. La compensation qu'on va vous donner, c'est une compensation financière qui n'est pas supposée être une source de revenus. Alors qu'on a besoin de ressources à caractère familial pour lesquelles il faut justement aménager le milieu, il faut que ce soit une source de revenus pour garantir une qualité de service. Alors, c'est ce qui explique que la loi, donc, sur la maison d'accueil ressource intermédiaire a été bâtie et construite en continuité avec ce qu'on retrouve en ressource familiale parce qu'on a besoin de plus et que le cadre financier des ressources de type familial ne peut pas s'appliquer aux maisons d'accueil ressources intermédiaires du fait qu'il n'est pas assez élevé en termes de rémunération.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Madame, vous aviez l'air à vouloir ajouter quelque chose.

(16 h 10)

Mme Longpré (Francine): Oui, parce qu'il y a quelque chose qui me fatigue. Moi, je suis propriétaire de pavillon. J'ai 21 résidents chez nous, en santé mentale. Je suis affiliée avec pavillon Rosemont. Si vous êtes capable de démêler ça, vous êtes bon. Comme je vous dis, je suis un pavillon, je suis affiliée avec un autre pavillon. Mais, pavillon Rosemont, c'est l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. Alors, donc, moi, je suis pavillon, mais je suis propriétaire de mon pavillon. J'ai acheté le pavillon voilà 10 ans. Je l'ai transformé. Je garde des résidents, j'essaie de leur donner une qualité de vie où, au lieu d'être à l'interne, ils sont à l'externe. Mais ils sont dans un pavillon, ils sont chez moi. Alors, on a fait des aménagements, on a fait des chambres privées. Bon, c'est sûr que, nous, en pavillon, on appelle ça un «per diem». J'ai un per diem, j'ai 29,66 $ par jour.

M. Rochon: Alors, il y a peut-être au moins une chose, aujourd'hui, qu'on espère préciser pour aider un peu. On ne veut pas nuire à toute, comme vous dites, la créativité qu'on retrouve dans ce domaine-là.

Mais le souci d'un amendement porté à la loi, si on regarde ça du point de vue des gens qui demeurent dans ce type de ressources là, comme on dit, c'est de s'assurer, d'abord, peut-être, de faire moins de distinctions pavillon et différents types de ressources, et reconnaître que «ressource intermédiaire» peut représenter un certain nombre de variétés de ressources, mais pour des gens qui ont des besoins plus lourds que la famille d'accueil, mais qu'elles soient toutes en lien avec un établissement qui, lui, a une responsabilité, une mission dans notre loi. Donc, que ce soit clair qu'en termes de reddition de comptes, qui est responsable de quoi, ultimement, vous avez un contrat avec un établissement, peu importe le type de ressource familiale, l'établissement doit assumer la responsabilité avec ces différentes ressources familiales que le service donné soit bon, soit ajusté. Et c'est pour ça qu'on voudrait y relier le service de plaintes, que, si des gens veulent souligner quoi que ce soit comme amélioration souhaitée, que ça fasse partie du même micro-système.

Alors, il y a au moins ça qu'on souhaitait faire dans la loi. Je pense que c'est ce qui était voulu, ne pas tout régler, puis, encore là, faire attention pour ne pas briser des choses qui vont bien, puis qui évoluent, puis rechercher une adaptation au service aussi – ça, on connaît ça – mais relier les responsabilités, les identifier et relier les gens ensemble, chacun sachant, à l'intérieur d'un contrat, de quoi il est responsable.

Maintenant, là-dessus, en termes de déréglementation, on avait pensé aussi qu'on n'avait pas besoin d'un contrat unique, une fois les responsabilités bien identifiées, les fonctions bien identifiées, qu'on pouvait laisser aux établissements de déterminer le contrat détaillé qu'ils souhaitaient passer avec différentes ressources intermédiaires.

Vous avez l'air de dire que vous trouvez que ça va peut-être trop loin ça, qu'on ne devrait pas décentraliser ou déréglementer tant que ça, ou...

Mme Beaumier (Jocelyne): Ça pourrait très bien se faire. C'est juste l'espèce d'encadrement qui manque autour. Parce que, là, c'est très créatif, aussi, la composition des contrats, actuellement. Alors, c'est des contrats qui sont de type unilatéral, à la satisfaction complète de l'établissement. Il ne faut pas réagir à ça. Il faut accepter de signer ça. Sinon, c'est les pressions. On baisse les nombres de places, on baisse les permis, ou on ferme. Alors, c'est inconcevable...

M. Rochon: Certains appellent ça des négociations.

Mme Beaumier (Jocelyne): Oui, certains appellent ça des négociations, mais c'est des négociations qui ne sont pas de type démocratique, alors, qui sont d'un autre type et qui sont très inconfortables.

J'aimerais revenir sur la notion de compensation pour payer les choses. Quand on dit d'une famille d'accueil, dans une résidence d'accueil, que la clientèle, elle est plus légère, puis qu'on donnerait une compensation qui serait moindre, avec la catégorisation, cette compensation-là peut aller jusqu'à 55 $ par jour par personne. Alors que, pour une clientèle qu'on dit plus lourde, elle va à 29.60 $ par jour. Alors, c'est pour ça que la notion, moi, de compensation, via dire: On donne une petite compensation, les gens arrivent chez eux, ils n'ont pas à faire de transformations majeures... Le per diem est plus élevé, en bout de ligne, avec les catégorisations.

M. Rochon: O.K. Alors, ça, ça réfère peut-être plus au cadre de référence. Parce qu'une des choses qui est souhaitée, actuellement, et avec le début de l'application du cadre de référence, c'est qu'il y ait un peu de clarification qui soit apportée de ce côté-là, tout en respectant la créativité. M. Simard me confirme qu'il y a, effectivement, des ressources de type familial qui n'en sont peut-être plus maintenant...

Mme Beaumier (Jocelyne): Non.

M. Rochon: ...qui l'ont peut-être été mais qui sont devenues d'autre chose et qu'on souhaiterait bien, dans l'application du cadre de référence, clarifier ça, au moins, pour qu'encore une fois les responsabilités des fonctions soient de plus en plus claires pour le réseau, mais pour la personne qui se présente là aussi. La personne qui va résider, il faut qu'elle sache si elle va dans une famille d'accueil ou dans une ressource intermédiaire; elle peut s'attendre à des services différents. Et si ses besoins sont plus grands que ce qu'une famille d'accueil peut donner, bien, que le monde ait l'information et qu'ils sachent que ce n'est pas là qu'ils vont avoir ces services-là, et qu'il y a d'autres choses de disponibles et que la patiente, ou le patient, ou la personne, le sachant... Ça correspond aussi à l'obligation qu'a la personne de la ressource intermédiaire et de l'établissement d'aller assurer le service.

Alors, ça, j'espère que, si on peut clarifier ça dans la loi, ces lignes-là et le cadre de référence s'appliquant, j'espère qu'on fera un bout de chemin, là, pour clarifier un certain nombre de choses avec ça.

Mme Longpré (Francine): Excusez. Comme vous dites, c'est sûr que le résident a le droit d'aller dans une plus petite ressource ou une plus grosse ressource ou selon, c'est son choix, sauf que, lorsqu'un résident est placé dans un pavillon tel que chez nous, ses menues dépenses sont de 148 $ par mois. C'est sûr et certain que, si on dit au résident: Si tu t'en vas dans une famille d'accueil, tes menues dépenses vont être de 190 $ par mois... C'est là, aussi, qu'il n'y a pas d'équité pour le résident. Moi, je travaille beaucoup au niveau du résident parce qu'il a des droits. Et c'est sûr que, s'il s'en va dans une petite ressource, la petite ressource, bon, ils ne sont pas nombreux, ils ne paient pas d'impôts, ils ne font rien. Le résident s'en va là, il a 190 $ par mois, tout le kit. Il s'en vient chez nous... Ça devient un manque d'équité à quelque part...

M. Rochon: Je m'excuse de vous interrompre, madame, mais c'est un autre bon exemple de ce que le nouveau cadre de référence veut clarifier puis nettoyer jusqu'à un certain sens. Il y a peut-être un peu de brume qui s'est mis dans le paysage.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le ministre. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: À mon tour de vous remercier bien sincèrement pour la qualité de votre exposé, les représentants de ressources intermédiaires. On sait jusqu'à quel point ça peut être important. J'ai eu la chance, lorsque j'étais directeur de l'Hôpital du Sacré-Coeur, de travailler avec ce genre de ressource, particulièrement au pavillon Albert-Prévost; on avait d'autres pavillons également. Alors, je pense que c'est clair pour nous, l'utilité des ressources intermédiaires.

Moi, ce sur quoi j'aimerais vous questionner, d'abord, est-ce que vous pouvez nous donner un portrait global de la situation des ressources intermédiaires au Québec? Puis c'est une réponse bien simple, combien est-ce qu'on a de places en ressources intermédiaires? Ça comprend tout, là, les familles d'accueil. Est-ce que vous avez un chiffre? Je voulais juste continuer un petit peu, en même temps, ce que Mme Longpré nous a dit tantôt, que le coût per diem, en tout cas, est de l'ordre d'à peu près 29,66 $, disons 30 $ par jour. Je voudrais simplement vous rappeler – vous le savez sûrement – que, dans les centres hospitaliers généraux et particulièrement universitaires, ce n'est pas 29 $ par jour, vous savez que ça peut être de 500 $ à 1 000 $ par jour. Et, si j'ajoute également l'utilité et la personnalisation des soins et des services qui sont donnés dans ce genre de ressources intermédiaires, qui est très, très importante... Alors, tout de suite, deux points majeurs, deux éléments qui militent en faveur de travailler avec les ressources intermédiaires: beaucoup moins coûteux, mais aussi des services, je pense, beaucoup plus personnalisés, adaptés aux patients.

Alors, ma première question serait, en plus de celles que je vous ai posées sur le nombre: Est-ce que les ressources intermédiaires, on les appauvrit actuellement ou est-ce qu'elles s'améliorent, et est-ce que le projet de loi qui est devant nous contribue à améliorer la situation, oui ou non? J'en ai beaucoup, là.

Mme Beaumier (Jocelyne): Il y en a beaucoup. Le côté du nombre de places qu'il pourrait y avoir, je ne peux pas dire qu'il y a recensement vraiment complet. On a tenté de le faire dernièrement, on a commencé à le faire. Il y a les chiffres qui avaient été avancés lors de la recherche, quand on a fait le guide pour les soins pharmaceutiques, on avait avancé 14 000 places en ressources intermédiaires. Mais qu'est-ce qui a été vraiment recensé? Je sais que, dans plusieurs régies régionales, actuellement, ils ne sont pas en mesure de nommer quelles sont leurs ressources intermédiaires. Moi, en tout cas, je peux nommer tout près de 40 noms de types de ressources qui ne sont pas nommés dans la loi, nulle part, et qui pourraient peut-être éventuellement entrer dans une notion de ressource intermédiaire, mais peut-être pas non plus; parce que, si on regarde les critères qui sont établis, ça ne rentre pas.

Et c'est de la clientèle qui, la plupart du temps, est inscrite là-dedans, mais on va comme placer des employés d'hôpitaux qui vont plutôt aller donner les services, des gens qui ont été mis en disponibilité d'emploi, puis on va utiliser ces postes-là pour aller donner des services ou différentes choses comme ça. Alors, c'est difficile. Il n'y a pas de recensement. Je sais qu'à la régie de Québec il y avait eu un mandat qui avait été donné pour justement faire le recensement de toutes les ressources intermédiaires. Et puis je pense que ce n'est pas encore terminé, on n'était pas en mesure de nous donner quelque chose de vraiment précis là-dessus.

Vous avez dit: Inclure aussi les ressources de type familial, résidences d'accueil pour adultes. Les résidences d'accueil pour adultes, bon, on le gérait dans le temps. En 1992, on en avait environ 3 400. Il y en a à peu près 4 000 présentement au Québec. Il y a une moyenne de 3,5 personnes, je pense, que ça donnait en 1992 comme résultat, ce qui nous donnerait un chiffre autour d'à peu près 12 000 personnes qui seraient en résidence d'accueil.

M. Marsan: Et est-ce qu'on s'améliore ou qu'on s'appauvrit, au niveau des ressources?

(16 h 20)

Mme Beaumier (Jocelyne): Je pense que, au niveau du pavillon comme tel, on s'appauvrit, parce qu'il garde une clientèle qui s'est alourdie. La plupart des autres ressources intermédiaires ont un per diem qui est plus élevé que le pavillon, qui va se situer plus autour de 33 $, 34 $, 35 $, quand on parle de ressources qui sont gérées un peu semblable au pavillon. Quand je parle de per diem géré par le personnel de l'établissement, naturellement, vous avez vu dans le document que je parle de 170 $, 190 $ et plus par jour-client. C'est un peu assommant quelquefois, parce qu'une ressource qui est payée à ces prix-là, il va y avoir un transfert du résident, parce qu'il est comme trop lourd pour cette ressource-là, puis il va quelquefois être transféré dans un pavillon à 29 $. Alors, ça crée un phénomène qui n'est pas très confortable.

M. Marsan: Et le projet de loi dans son ensemble, est-ce qu'il contribue à mieux utiliser les ressources intermédiaires d'après vous ou si, au contraire, on ajoute de la réglementation, des structures?

Mme Beaumier (Jocelyne): Actuellement, moi, je pense que... Comme je vous dis, où on reste sur notre appétit, c'est que les transformations qui permettraient de vraiment alléger le processus ne sont pas dites dans la loi comme telle. Comme toute la notion de permis dont je vous parlais, à quelque part, on devient délinquant par rapport à la loi parce que ça prend comme un permis si on regarde la loi puis, d'autre part, on dit: Bien, on n'en donnera pas de permis nécessairement là-dedans. C'est tout ça qui devient très obscur puis très incohérent là-dedans.

Est-ce que d'être en lien avec un établissement fait qu'on n'a pas besoin de permis? Est-ce que c'est suffisant? La loi ne le précise pas. Que le cadre de fonctionnement soit souple, ça, on tient à ce que ça soit souple, mais toujours avec des directives peut-être pour les comportements que je dis inacceptables. Vous savez qu'en n'importe quelle situation de changement, la créativité, des fois, devient très grande. Si on n'a pas des directives claires qui sont établies, je pense qu'on prend quelquefois des tendances qui sont difficiles à défaire.

Actuellement, je sais que j'accompagne des travaux dans une région que je trouvais très arriérée dans sa... Je ne nommerai pas la région. C'est question de... ne pas nommer ces choses-là dans ce temps-là, alors, je ne les nommerai pas. Mais maintenant je les félicite parce que je ne les trouve pas arriérés du tout. C'est qu'on s'est assis ensemble, une table multidisciplinaire, et puis je pense qu'on va être en avant des autres parce qu'on n'aura pas à défaire un tas de choses. Comprenez-vous? Alors, c'est dans cet esprit-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Bonjour, bienvenue. Merci d'avoir soumis un mémoire qui est extrêmement intéressant. Je pense que ça attire l'attention de façon très sentie – si je peux utiliser cette expression-là – sur les réalités que vous vivez au quotidien et surtout la nécessité de peut-être faire le ménage pour qu'on s'y retrouve au niveau de la nomenclature et surtout au niveau des impacts que ça peut avoir sur le quotidien des gens qui y vivent.

Puisqu'on parle du quotidien des gens qui y vivent, j'aimerais vous demander: Est-ce que vous êtes confortable avec l'utilisation, dans la Loi sur les services de santé et services sociaux, de l'appellation «usager»?

Mme Beaumier (Jocelyne): Je trouve que ça a l'air seconde main. C'est mon impression.

Mme Lamquin-Éthier: Seconde main.

Mme Beaumier (Jocelyne): Ça a l'air d'un produit altéré.

Une voix: Une auto usagée.

Mme Beaumier (Jocelyne): C'est ça. Alors, on comprend qu'il est malade et qu'il a besoin de certaines réparations. J'ai pensé que ça venait peut-être de ça. Nous, on emploie plutôt la nomination de «résident».

Mme Lamquin-Éthier: Celle-ci vous semble plus respectueuse des réalités vécues par les gens?

Mme Beaumier (Jocelyne): Oui, tout à fait. C'est leur milieu de vie. Dans notre réseau à nous, c'est «résident» qu'on emploie. Usager, on l'emploie très, très peu. Quelquefois, on voudrait bien s'harmoniser, mais ça a l'air un petit peu défait.

Mme Lamquin-Éthier: «Used».

Mme Beaumier (Jocelyne): Oui, «used».

M. Longpré (Serge): On ne dirait pas à nos résidents qu'ils sont des usagers.

Mme Beaumier (Jocelyne): Ils ne se sentiraient pas vraiment...

Mme Lamquin-Éthier: Respectés dans ce qu'ils sont.

Mme Beaumier (Jocelyne): Oui, c'est ça. On a de la misère un peu avec ça.

Mme Lamquin-Éthier: Vous n'êtes pas la seule.

M. Marsan: M. le Président. Moi, je voudrais aussi vous demander... On a, à l'occasion, malheureusement, identifié ce qu'on appelle des «foyers clandestins». Vous regroupez quand même pas mal de monde; on parle de 14 000 places, peut-être même un autre 4 000 pour les foyers familiaux. Est-ce que vous avez une certaine assurance d'un contrôle de qualité à l'intérieur des différentes résidences, si vous me permettez? Et est-ce que le projet de loi touche à cet aspect extrêmement important pour les résidents?

Mme Beaumier (Jocelyne): Bon. Il y a un aspect qui est touché là-dedans quand on parle d'agréer les ressources. O.K.? C'est un aspect qui est touché dans la loi. Encore, moi, je demeurais comme un petit peu entre deux vis-à-vis de ça parce que ça me mettait toujours par rapport à la notion d'établissement. Là où la notion de qualité... Je pense qu'il y a des dossiers qui sont sur le terrain actuellement pour arriver à cette qualité-là.

En dehors de l'Association, j'ai eu à travailler avec à peu près tous les types de structures que je vous nomme là-dedans, autant dans le réseau de la santé via les établissements, hôpital universitaire et tout ça et tous les types d'autres structures que je peux qualifier dans le non-institutionnel. Alors, je peux vous dire qu'il y a une préoccupation pour cette qualité-là.

Cette qualité-là, souvent, dans plusieurs résidences qu'on dit «clandestines» ou foyers privés, ils ont une motivation qui est quelquefois autre qu'une ressource qui est agréée du réseau, c'est la loi de la concurrence. Alors, si tu n'arrives pas à avoir une bonne qualité de services, tu n'as carrément pas de résidents qui vivent là. Et ça, c'est un point dans la loi où vous avez allégé. Lorsqu'il y a un processus de plainte dans une résidence qui n'est pas en lien avec un établissement, au lieu de remonter jusqu'au ministère, vous avez pu permettre que ça se règle au niveau des régies. Puis j'ai félicité d'ailleurs dans le mémoire là-dessus parce que je pense que ça va simplifier, parce que la plainte se perdait en cours de route, le mécanisme était trop complexe. Alors, cette préoccupation, elle est présente.

Il y a des régies actuellement où les dossiers avancent au niveau de cette préoccupation-là pour mettre les mécanismes en place pour de la surveillance et pour offrir des choses là-dessus. Alors, on a des travaux quand même qui avancent mais ça pourrait être... Je pense que la loi, elle a à dire qu'il faut qu'il y ait des mécanismes pour la surveillance de la qualité, pour la protection du public puis des résidents. Je pense que la loi a à dire ça puis je pense que, sur le terrain, on devrait ressentir une obligation de mettre des processus en place rigoureux, tout en gardant une souplesse d'acquisition de cette qualité-là, mais des directives claires pour l'application. C'est dans ce sens-là que je le conçois.

M. Marsan: Vous avez parlé d'une résiliation de 23 contrats tantôt, est-ce que c'est quelque chose qui est habituel ou si c'est une opération qui vise peut-être à récupérer de l'argent? Est-ce que vous pouvez nous parler de ça?

Mme Beaumier (Jocelyne): Ce n'est pas une opération... Moi, je connais les pavillons depuis les foyers affiliés, 1969, alors quand j'ai eu à retracer toute l'histoire, j'avais pas mal de contacts pour aller recontacter des gens, les voir puis les papiers puis tout ça. C'est la première fois que je vois une fermeture aussi massive. On a eu, au départ, autour de 240 pavillons au Québec, ça montait à 243, 244, je pense, le maximum qu'il y a eu, et on a une vingtaine qu'on a perdus peut-être sur en 15 ans d'histoire, 15 à 20 ans, dont certaines fermetures, je dois vous dire que c'était pour des causes de mauvaise qualité.

Actuellement, sur mes 23, j'ai deux situations de mauvaise qualité qu'on n'a pas remis en cause, on a même, dans une situation, aidé l'établissement à fermer la ressource, parce qu'on ne tolère pas cette mauvaise qualité-là dans nos orientations.

M. Marsan: Pour les 21...

Mme Beaumier (Jocelyne): Les 21 autres, je dois vous dire que j'ai de la reconfiguration de services. Dans une situation, c'est vraiment de la reconfiguration de services; dans d'autres endroits, c'est carrément de la récupération de ces argents-là. C'est difficile à comprendre parce que c'est tellement minime, le coût qu'il y a d'attribué à ces budgets-là, c'est les ressources à peu près les meilleur marché que vous avez sur le terrain, au Québec, c'est à peu près les ressources les meilleur marché qu'il y a là. C'est incompréhensible qu'on pense à les fermer. Nous, on pense plutôt à mettre en accent leur qualité, à faire développer leur qualité, c'est dans cet esprit-là qu'on travaille.

M. Marsan: En tout cas, j'apprécie que vous ayez encore insisté sur le fait qu'au niveau des services que vous pouvez rendre ils sont très près des patients et aussi au niveau des coûts, et c'est sûrement une alternative qui mérite d'être considérée et sûrement développée.

Moi, je voudrais, en terminant, faire un commentaire sur le commentaire que vous faites dans votre conclusion et que j'apprécie particulièrement, vous allez voir qu'on va vite être d'accord. C'est le deuxième paragraphe: «En lisant les propos du député de Lévis, M. Jean Garon, lorsqu'il faisait dernièrement une sortie en règle contre les régies régionales qui ne sont, selon lui, qu'une république de petits copains, nous n'avons pu qu'applaudir. En fait, c'est souvent ainsi que nous apparaît le réseau de la santé dans son ensemble.» Et, moi, j'ajoute que, nous aussi, nous pensons comme vous. Je vous remercie beaucoup, madame.

Mme Beaumier (Jocelyne): Je vous remercie.

(16 h 30)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mesdames et monsieur, au nom de tous les membres de la commission, merci beaucoup, merci d'être venus, merci de nous avoir présenté ce mémoire-là.

Et j'invite maintenant les représentantes et représentants du Regroupement provincial des organismes communautaires d'assistance et d'accompagnement à se présenter.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous recevons les représentants et représentantes du Regroupement provincial des organismes communautaires d'assistance et d'accompagnement. Mme Arvey, si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent pour fins d'enregistrement, et vous pouvez commencer votre 20 minutes.


Regroupement provincial des organismes communautaires d'assistance et d'accompagnement (RPOCAA)

Mme Arvey (Jo-ann): Merci. Alors, M. Marc Bruneau qui est trésorier du Regroupement et qui représente la région de l'Abitibi-Témiscamingue; également Mme Jacinthe Thériault qui est vice-présidente et qui représente la région de la Côte-Nord; et dans la foule en délire...

Une voix: Ha, ha, ha!

Mme Arvey (Jo-ann): ...il y a également au moins quatre, cinq autres régions. Ça fait qu'il ne faut pas attaquer les régions.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mais on les salue.

Mme Arvey (Jo-ann): Je vous remercie. Avant d'aller plus loin, je vais peut-être laisser la parole à Marc, deux petites minutes, qui présentera c'est quoi le Regroupement. Ça va vous permettre de saisir notre angle d'attaque.

M. Bruneau (Marc): O.K. Alors, bonjour tout le monde. Merci de nous recevoir ici. Alors, le Regroupement provincial des organismes communautaires d'assistance et d'accompagnement, le RPOCAA, est la table provinciale qui réunit 15 organismes communautaires régionaux d'assistance et d'accompagnement aux plaintes répartis partout sur le territoire du Québec. Cette association a, en outre, le mandat de regrouper ses membres et de promouvoir leurs intérêts, a comme principal objectif de contribuer au respect des droits des usagers et usagères des services de santé et des services sociaux en favorisant l'amélioration continue des services d'assistance et d'accompagnement.

Le Regroupement adhère entièrement aux principes de gratuité, d'universalité et d'accessibilité qui ont prévalu à la mise en place du système de santé et services sociaux. De plus, nous croyons à la notion d'autodétermination des citoyens et citoyennes de tout le Québec. En ce sens, nous appuyons le principe directeur de la loi 120, qui est de situer le citoyen et la citoyenne au centre même du système de santé du Québec. Enfin, selon nous, la mise en place du régime de plaintes doit permettre à la population de prendre la parole et de faire connaître son évaluation des services qu'elle utilise afin d'en améliorer la qualité.

Avant d'aller plus loin dans l'analyse de ce projet de loi, nous aimerions vous apporter quelques questionnements par rapport au processus qui entoure le présent projet de loi. Enfin, dans le but de faciliter notre analyse du projet de loi n° 404, nous l'avons divisé en thèmes que nous vous présenterons dans les pages qui suivent.

Alors, je laisserai la présidente de notre regroupement, Jo-ann Arvey, vous faire part de nos réflexions.

Mme Arvey (Jo-ann): O.K. Alors, comme vous comprenez, hier, le GAPS, à Montréal, on passait en audience à la régie régionale, et on m'a reproché de m'occuper trop des plaintes. Alors, vous comprendrez qu'on a expliqué que c'était notre raison d'existence. Donc, dans ce sens-là, on va concentrer notre analyse particulièrement au niveau de l'ensemble du régime des plaintes et des impacts qu'a le présent projet de loi sur les procédures de plainte.

J'aimerais souligner peut-être quatre éléments dont je vais parler dans les prochaines 17 minutes. Alors, entre autres, il y a toute la réalité, les différents amendements qui concernent le remplacement d'un cadre supérieur par un employé. Dans l'ensemble, vous allez voir que nous sommes en désaccord. Je pense que, pour les amendements qui font de la concordance, on ne s'y arrêtera pas comme tels. Pourquoi est-on en désaccord avec le fait qu'un cadre supérieur pourrait être remplacé par un employé? Nous, on a peur qu'on banalise, en fait, la procédure de plainte et tout le processus.

En fait, nous, on pense qu'un cadre supérieur a des pouvoirs particuliers au sein d'une structure, d'une organisation et on a peur que les recommandations qui viendraient d'un employé régulier ou intermédiaire autre qu'un cadre supérieur ne seraient pas nécessairement appliquées, faute de pouvoir réels ou de moyens pour les actualiser. Il faut voir que, dans la réalité, ce n'est pas nécessairement facile, dans un établissement, pour quelqu'un qui fait du traitement de plaintes, d'arriver et de dire: Écoutez, vous devez corriger une situation qui est x, y, z et vous devez le faire de telle ou telle manière; généralement, ce n'est pas facile. Donc, au moins, un cadre supérieur risque d'être peut-être mieux entendu qu'un employé.

Également, il faut comprendre que, pour l'usager – on va utiliser le terme «usager» ici, parce que c'est ce qui est utilisé dans la loi – il n'est pas facile de formuler une plainte. Les gens sont vulnérables, ils ont peur des représailles, il y a toute la question de confidentialité. Donc, le fait de formuler sa plainte auprès d'un cadre supérieur, il y a toute l'espèce de vision qu'on a quand on veut porter plainte et l'attention qu'on nous apporte et le fait qu'on pense que, si c'est un cadre supérieur, on a des chances qu'on soit mieux écouté et qu'il y ait des mesures qui soient prises. Donc, pour nous, c'est très important.

Aussi, il y a le fait que, pour nous, un cadre supérieur selon la loi est imputable et doit rendre des comptes au conseil d'administration – ce qui n'est pas nécessairement le cas pour l'ensemble des employés – et on dit: Si jamais... Parce que certains collègues du réseau nous ont dit: Écoutez, dans certains cas, entre autres les petites organisations comme par exemple des petits CLSC, il y a un cadre supérieur, qui est le directeur général. Si, en plus, il fait le traitement de plaintes, il n'y arrivera jamais. On dit: Minimalement, ça devrait être un cadre intermédiaire. Et, même à ce titre-là, nous, on pense que ça doit toujours être encadré par un cadre supérieur, de la même façon que le Commissaire aux plaintes – la Commissaire aux plaintes, maintenant – ne fait pas de traitement de plaintes quotidiennement, c'est des employés, elle délègue son pouvoir; la même chose au niveau, par exemple, de la Régie régionale de Montréal, où la personne qui reçoit les plaintes ne fait pas de traitement de plaintes, donc elle délègue son pouvoir. On pense que ça devrait être la même chose dans les établissements.

(16 h 40)

Maintenant, un autre élément qu'on voulait attaquer, c'était les ressources de type familial et les ressources intermédiaires. Nous, on est tout à fait en accord avec tous les amendements qui proposent que ces types de ressources là soient soumises, soient intégrées à l'intérieur du présent régime de plaintes, à savoir que, si une plainte concerne une ressource intermédiaire ou une ressource de type familial, elle devra être déposée en première instance à l'établissement dont dépend la ressource intermédiaire ou la ressource de type familial.

C'est pourquoi on parle, d'une part, que ces ressources-là sont souvent des petites organisations qui font qu'ils n'ont pas l'expertise ni le temps de faire un traitement de plaintes, je dirais, entre guillemets, objectif et, également, le fait que, éventuellement, une personne qui a une expertise à travers un établissement pour faire du traitement de plaintes va pouvoir suggérer des mesures correctrices plus intéressantes.

Le troisième élément qu'on voulait aborder, c'est le pouvoir de recommandation du Commissaire aux plaintes et qu'on aimerait... là-dessus aussi on trouve que c'est intéressant. Maintenant, si on regarde l'amendement – je ne me rappelle pas du numéro de l'amendement, mes collègues devraient être capables de me répondre, O.K. – un amendement qui dit que, dorénavant, le Commissaire aux plaintes, lorsqu'il fait une recommandation dans un établissement, il devrait y avoir un retour de l'établissement qui dit: Vous nous avez recommandé telle mesure corrective, on a fait telle ou telle chose et pour telle ou telle raison, ça a donné tel résultat – c'est l'amendement 21 – ou, encore, on n'a pas pu faire les corrections telles que suggérées, pour telle et telle raison. On pense que c'est une bonification intéressante et importante du régime de plaintes et ce processus, je dirais, d'aller-retour des recommandations, selon nous, devrait être appliqué également au niveau des régies régionales.

Parce que, souvent, il y a des recommandations, les conclusions sont apportées à l'usager. Assez souvent, d'ailleurs, il est recommandé que les conclusions de la régie régionale soient déposées aux établissements. Dans la pratique, c'est ce qui se fait assez couramment. Mais, quand il y a des recommandations qui sont faites, on ne sait pas si elles sont appliquées ou non; des fois, la personne, l'usager va nous le dire parce qu'il en a entendu parler ou non, donc nous, on trouve ça intéressant également comme idée.

Ensuite, le quatrième élément qu'on voulait aborder, c'est les fameux comités d'usagers. Nous, on n'est pas du tout d'accord avec l'amendement 66. Donc, dans cet amendement-là, on disait qu'il ne serait plus nécessaire que le comité d'usagers soit composé majoritairement d'usagers. Selon nous, c'est une entrave importante, c'est une perte de pouvoir de parole pour les usagers, selon nous, c'est important de faire en sorte que ça soit appliqué à la lettre. Et, nous, on croit que les comités d'usagers ne devraient pas perdre éventuellement de la place à l'intérieur du réseau, mais bien en prendre de plus en plus.

Et ce n'est pas facile quand on regarde la réalité, puis ce qui est vécu à travers les établissements, entre autres dans les établissements où il y a de l'hébergement, des soins de longue durée ou les centres de réadaptation de personnes handicapées, etc., les gens sont souvent bâillonnés parce qu'ils ont peur de parler, étant donné que, s'ils parlent contre les gens qui leur donnent des services, ils vivent là quotidiennement, donc ils ont peur de vivre des représailles.

Donc si, en plus... et souvent les comités d'usagers, les gens – parce qu'on a des contacts assez fréquents avec les gens des comités d'usagers – les gens ont l'impression d'être inféodés, c'est-à-dire qu'il y a toujours... Des fois c'est le directeur général, des fois un autre employé de l'établissement qui siège sur le comité d'usagers et, assez souvent, ils ont l'impression d'être menés à la baïonnette ou encore d'être utilisés, à savoir, un petit peu comme à l'époque – j'exagère un petit peu, je voulais juste voir si vous étiez attentifs – donc, assez souvent, ils ont l'impression, un petit peu, d'être à l'époque des comités d'école, là, où les directeurs d'école sont présents puis disent: Bien, on va faire ça, ça, ça, puis l'argent, on va en faire ça, ça, ça, êtes-vous d'accord? Oui ou non? Bien là, tu dis oui, tu sais, surtout quand tu es très malade et vulnérable.

Donc, dans l'ensemble, c'est nos recommandations. Naturellement, en lisant le document, vous allez voir qu'il y a d'autres recommandations qui concernent d'autres secteurs que les plaintes comme telles, il y a les comités d'usagers, comme on a parlé, on parle aussi des établissements, des fonctions, on se questionne beaucoup sur le fait qu'on a l'impression que le ministère va s'éloigner, il n'y aura plus de programmes, il n'y aura plus d'espèce de vocation, de supervision, et ça, ça nous fait peur un peu, on a l'impression que chaque régie va devenir un peu maître et seigneur dans son fief.

Ensuite, au niveau des assemblées publiques, encore, on est en désaccord avec le fait de leur disparition. On croit que c'est encore un des endroits où il est possible pour M. et Mme Tout-le-Monde, incluant les personnes qui utilisent les services du réseau, de faire connaître leur point de vue et on croit qu'ils devraient continuer à exister.

Concernant les salariés des groupes communautaires, on est en désaccord avec le fait qu'ils ne pourraient plus siéger sur des conseils d'administration, étant donné que, selon nous, étant un groupe communautaire et s'associant aux revendications de l'ensemble des groupes communautaires du Québec, les salariés des groupes communautaires ne sont pas des salariés du réseau de la santé et services sociaux puisque, en principe, les groupes communautaires ne font pas partie intégrante, sont des partenaires, effectivement, mais ils ne font pas partie du réseau comme tel.

Et au niveau des directives en matière de conflit d'intérêts. Bon, vous allez lire un petit peu les différents amendements qu'on a faits, les différents commentaires qu'on a faits. Je pense qu'on aborde toujours... En fait, nous, ce qu'on trouvait le plus intéressant dans la loi 120, c'est son assise qui fait qu'on dit toujours qu'avec cette loi, en principe, c'est le citoyen au coeur du réseau, au coeur de la réforme et tout ça. D'ailleurs, ce qu'on a inscrit, d'entrée de jeu, dans les premiers articles de la loi 120, c'est les droits des usagers. Nous, c'est ce qu'on défend mordicus. On dit que c'est important. Le réseau, il n'est pas là pour servir ni à la régie, aux régies régionales, ni aux établissements, ni au ministère, il est là pour desservir la population, il faut permettre à M. et Mme Tout-le-Monde de prendre part à l'organisation du réseau, de pouvoir en faire sa propre évaluation, de pouvoir participer activement à son plan de services ou aux services qu'il détient, de pouvoir en faire une évaluation. Donc, dans ce sens-là, on croit qu'il est important de maintenir toutes les différentes structures à l'intérieur du réseau qui permettent au citoyen de dire son mot.

Et, par rapport au régime de plaintes, nous, on y croit. Naturellement, ce serait fou de ne pas y croire, on se tirerait dans le pied, je pense. Mais on pense qu'il y a des articles de loi qui sont intéressants, qui donnent plus de dents, je dirais, au régime de plaintes, et on continue à croire qu'il faudrait lui donner des plus grands budgets, faire une formation, de la sensibilisation, et éventuellement avoir plus de pouvoirs pour les gens qui travaillent dans ce domaine-là, pour pouvoir ajuster le réseau selon les besoins et les commentaires de la population.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous avez encore du temps.

Mme Arvey (Jo-ann): Ah oui! J'ai encore du temps?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ce n'est pas à vous que je faisais un signe de tête.

Mme Arvey (Jo-ann): Non, bien je pense que j'ai fait à peu près le tour. Je ne sais pas si mes collègues ont des choses à ajouter.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? Alors, je demanderais à M. le ministre de commencer l'échange.

M. Rochon: Alors, M. le Président, en préliminaire, je ne voudrais surtout pas enlever à la députée de Bourassa sa question mais... Je veux très bien qu'elle soit posée et reposée, mais...

Mme Lamquin-Éthier: ...la poser jusqu'à ce qu'on convienne qu'il faut changer ce terme.

M. Rochon: Alors, justement, ce terme, j'ai déjà eu à dire à beaucoup de gens dans le réseau, quand on en parlait – et c'est surtout dans des centres où des gens sont hébergés ou hébergent pour une longue période de temps – on m'a dit, les gens m'ont dit que le terme «usager» choquait ou était insatisfaisant, j'ai souvent eu à dire que le monde s'appelle comme il souhaite s'appeler. Même si la loi dit «usager», ce n'est pas ça qui est important dans la vie de tous les jours, si on veut parler de résidents ou n'importe quel autre terme. Mais, moi, je suis prêt à aller beaucoup plus loin, M. le Président... Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Malavoy): Excusez, il y a eu un changement.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rochon: Ça change aussi vite que les ressources intermédiaires...

La Présidente (Mme Malavoy): C'est un peu troublant.

M. Rochon: ...c'est ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Du monde en mouvement.

M. Rochon: Ce terme-là est dans la loi qui a été votée en 1992 sous un autre gouvernement. Je suppose qu'à l'époque on avait des bonnes raisons pour avoir choisi le terme «usager». Si on souhaite le changer, moi, je n'ai aucune objection.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Faites-le.

M. Rochon: S'il y a un consensus sur un autre terme, qu'on fasse un consensus et qu'on mette le terme qui conviendra le plus, présumant qu'on va en trouver un autre qui va convenir à tout le monde. Mais, encore là, je suppose qu'à l'époque, en 1992, il devait y avoir une bonne raison, à moins que l'opposition n'était pas assez vigilante à l'époque pour s'opposer à ce qu'on ait un terme aussi affreux dans la loi. Mais, comme là on a une bonne opposition vigilante, alors j'inviterais des suggestions sur d'autres termes qu'on pourrait – sérieusement, madame, je voudrais finir ça sérieusement – d'autres termes qu'on pourrait utiliser, en reconnaissant que, dans un hôpital, le terme «patient» est toujours très valable pour désigner une personne qui est là.

Mme Arvey (Jo-ann): «Ultrapatient», peut-être? Ha, ha, ha!

(16 h 50)

M. Rochon: Parfois «ultrapatient», très patient. Vous allez me dire qu'il faut peut-être être patient pour aller à l'hôpital, oui. Ou si on ne l'est pas, on le devient.

Mais il y a quand même des gens qui ont d'autres services dans notre réseau: le jeune qui est en difficulté, qui a des services au centre jeunesse; ou des personnes qui ont des services plus de services sociaux, puis ces gens-là ne se voient pas comme des patients, ce n'est pas la même culture. Alors, ce n'est pas simple de trouver un terme qui soit à la fois générique pour être dans la loi et désigner toutes les personnes qui utilisent des services ou d'autres; «utilisateur», il va y avoir des gens pour ou contre aussi. Alors, tout ça pour dire qu'on n'a pas de blocage majeur, nous autres, là-dessus, si les moeurs... Autres temps, autres moeurs. S'il y a un autre terme qui conviendrait, je serais vraiment très ouvert à toutes les suggestions là-dessus.

Une question plus spécifique, Mme la Présidente, en rapport avec la présentation qui nous a été faite. Il y a au moins un autre groupe qui a soulevé le même type d'arguments ou de remarques que vous quant au choix d'une personne désignée, dédiée, autre qu'un cadre de l'établissement, pour être responsable des plaintes. Je pense que vous connaissez la raison qui a amené ce changement qui était relié vraiment à s'assurer que la personne qui s'occupe des plaintes est disponible pour ça, est bien formée pour ça, et s'implique assez en termes de temps pour vraiment bien suivre les plaintes. Là, on a dit, si ce n'est pas une personne qui a un statut de cadre, peut-être qu'elle n'aura pas l'autorité pour remplir son rôle.

Alors, la question que je voudrais poser là-dessus, d'abord: Quelqu'un qui a un mandat qui est donné par un supérieur quelconque a sûrement l'autorité du mandat qu'on lui donne ou un supérieur qui devrait appuyer cette personne-là si elle en a besoin? Mais il y a aussi dans la loi, à ma connaissance, qui est pas touché, l'article 40 qui dit que «le directeur général de l'établissement doit transmettre au conseil d'administration toute recommandation, tout rapport que lui adresse le cadre supérieur dans l'exercice des fonctions qui lui sont conférées en vertu de l'article 29», qui est celui qu'on amende. Alors, là, ce ne sera pas le cadre supérieur, c'est la personne dédiée.

Alors, juste souligner que la loi, l'intention veut maintenir la même force d'application. C'est une personne qui a ça comme fonction. Elle devrait avoir la même autorité. Elle aura au besoin un supérieur qui pourra l'appuyer. Et le lien avec le conseil d'administration de l'article 40 demeure intégral. Est-ce que ça peut vous rassurer un peu? Parce qu'un moment donné il faut choisir peut-être entre deux maux, vous allez me dire. Ou est-ce qu'il faudra créer un «cadre supérieur aux plaintes»? Le titre de «cadre...» En tout cas, on va vous entendre là-dessus.

Mme Arvey (Jo-ann): Hier, je discutais avec des gens de la conférence des régies parce qu'ils nous demandaient: Ça va être quoi, vos recommandations? Puis là on ne voulait pas faire de scoop, mais on pouvait en jaser quand même. Et eux étaient d'accord avec nous. Ils disaient: C'est vrai qu'à la façon dont c'est formulé, en tout cas... La Commissaire aux plaintes aussi semblait dire: Semble-t-il que ce n'était pas ça vraiment à l'époque qu'on voulait dire. Ce qu'on voulait dire, c'est: Oui, le cadre supérieur n'a pas le temps, la disponibilité pour effectivement quotidiennement gérer... Dans un hôpital comme Notre-Dame, il y a environ 800 plaintes par année. Donc, c'est sûr que le cadre supérieur n'a pas le temps de gérer toutes ces plaintes-là.

Mais la nécessité de laisser la personne ou les personnes qui feront le traitement des plaintes être supervisées par un cadre supérieur qui, lui, doit rendre des comptes au conseil d'administration semblait faire un consensus intéressant. Donc, effectivement, on sait que, dans la pratique courante, c'est pas nécessairement possible que ce soit toujours un cadre; mais, nous, on croit que c'est nécessaire que ça demeure sous la responsabilité d'un cadre supérieur qui soit imputable et qui ait le pouvoir si nécessaire d'imposer, je dirais, des mesures correctives. Donc, vraiment dans ce sens-là.

M. Rochon: O.k. et si je peux, peut-être, un autre commentaire pour avoir aussi...

La Présidente (Mme Malavoy): Certainement.

M. Rochon: ...commentaire de clarification de votre part, d'abord, si j'ai bien compris votre commentaire que vous faites sur l'amendement 12, sur l'article 12, je pense, qui dit: «Une personne physique peut formuler une plainte auprès de la Régie régionale relativement à l'exercice d'une fonction ou d'une activité de celle-ci qui l'affecte directement et personnellement parce qu'elle reçoit ou aurait dû recevoir des services offerts par les établissements.» Alors, vous dites: La Régie est un établissement comme les autres. La Régie ne donne pas de services, n'est pas responsable de donner des services aux gens.

Je pense que l'intention qui était celle des changements, c'est de s'assurer que, s'il y a des gens qui ne sont pas satisfaits de ce que la Régie a fait, il peut y avoir une plainte, mais, en termes de services, que la Régie ne soit pas utilisée comme une espèce de tribunal où toute plainte contre tout établissement est envoyée à la Régie, mais que ça commence d'abord par l'établissement, dans l'esprit d'un service à la clientèle. Autant que possible, que ce soit là qu'on améliore immédiatement les choses.

Mme Arvey (Jo-ann): Mais ce qu'on disait, dans cet article-là, c'est que les gens ne pouvaient pas formuler de plaintes contre des services de la Régie. Moi, c'est ce que je comprenais de l'article. L'article disait qu'on suggérait que, maintenant, une personne physique ne pouvait pas faire de plaintes contre un service de la Régie.

M. Rochon: Bon, bien, je pense que c'est ça. Bien, on va clarifier, parce que je pense que ce n'était justement pas ça qui était l'intention. C'est...

Mme Arvey (Jo-ann): Parce qu'effectivement...

M. Rochon: L'article disait auparavant: Une personne physique intéressée peut formuler une plainte auprès de la Régie régionale relativement à l'exercice d'une fonction ou d'une activité de celle-ci. Et je pense que l'intention était vraiment de clarifier que quoi que ce soit relié à des services ou s'il y a un établissement impliqué dans le service, que ce soit lui qui soit visé par la plainte, d'abord. Ça, vous êtes d'accord avec ça?

Mme Arvey (Jo-ann): Ça, ça va. Oui, oui.

M. Rochon: O.K. Bon.

Mme Arvey (Jo-ann): Sauf qu'il y a, je pense, entre autres, par exemple, si on regarde dans les régies régionales, la liste d'attente pour les CHSLD, c'est les régies régionales, généralement. En tout cas, à Montréal, c'est la régie régionale qui gère. À ce moment-là, une personne qui est insatisfaite de ce qui se passe, qui a l'impression de ne pas être traitée équitablement au niveau de la liste, peut faire une plainte effectivement au niveau de la régie régionale. Nous, on dit: C'est sûr que présentement, en tout cas, c'est à peu près, si on parle de services directs auprès d'une personne, c'est à peu près les seuls services qui existent là, qui sont directement. Mais, en même temps, nous, on se demande pourquoi enlever cette possibilité-là à M. et Mme Tout-le-Monde d'intervenir auprès de la Régie et de dire: Écoutez, moi, je me suis senti lésé dans mes droits ou dans la qualité de service et tout ça, qui concerne un service que la régie régionale m'a donné. J'ai le droit de faire parvenir mes commentaires à la Régie. En tout cas, nous, c'est plus dans ce sens-là qu'on l'a compris.

M. Rochon: O.K. Merci.

La Présidente (Mme Malavoy): Est-ce que ça complète, M. le ministre, vos questions?

M. Rochon: Pour le moment, oui.

La Présidente (Mme Malavoy): Alors, je passerais la parole au député de Nelligan.

M. Williams: Merci beaucoup, Mme Arvey, pour votre présentation, cet après-midi. Mais merci pour votre travail, aussi, dans le réseau. Et, peut-être, la première question, je voudrais vous demander comment ça va dans le réseau?

Le ministre essaie de nous convaincre, ici, que tout est beau et que tout est correct et que son virage ambulatoire, c'est la meilleure chose «since motherhood and sliced bread». Mais je voudrais savoir: Est-ce qu'il y a une demande, une augmentation de demande de vos services, des services des 15 groupes, plus les accompagnements? C'est quoi la réalité que les groupes vivent maintenant sur la question des plaintes et représenter des patients?

Mme Arvey (Jo-ann): Si on prend au niveau... C'est sûr que les plaintes qui passent à l'intérieur des groupes d'assistance et d'accompagnement, c'est peut-être un dixième de l'ensemble des plaintes du Québec. Donc, des fois, les chiffres ne sont peut-être pas significatifs.

Si on regarde l'ensemble du régime des plaintes à travers le réseau, il y a une légère augmentation, depuis deux ans, de 2 %, 3 % par année. Donc, ce n'est pas significatif. Cependant, nous, on a, à l'intérieur de nos services et à l'intérieur des rapports que font les régies régionales, tout ça, on a vu un changement dans les objets de plaintes, assez significatif, je dirais, dans les deux dernières années, à savoir que présentement il y a environ 30 % des objets de plainte qui concernent l'accessibilité et la continuité des services. Alors qu'avant c'était à peu près de l'ordre de 19 %.

On se rend compte que, d'une part, les gens, avec toutes les mutations, les transformations qui sont subies dans le réseau, les gens ne savent plus où aller frapper. Souvent, des fois, ils ne le savent pas, ils ne frappent pas à la bonne porte. Ils disent: Je n'ai pas droit au service. Dans le fond, quand ils viennent chez nous, on dit: Vous n'avez pas frappé à la bonne porte.

Ou encore, le réseau n'est pas capable de prendre le temps de dire: Écoutez, nous, on ne peut pas vous donner le service, allez à tel endroit, ou d'expliquer comment ça se passe. Et il y a une insécurité très grande, là, chez les usagers. Et, nous aussi, le fait qu'il n'y a pas d'augmentation des plaintes, on attribue ça en partie au fait que les gens sont presque...

Présentement, on a l'impression que M. et Mme Tout-le-Monde est spectateur de ce qui se passe et un peu dépassé par toutes les transformations qui se passent dans le réseau. Donc, ils disent: Bien là, ça ne sert à rien de faire une plainte. La seule chose que j'essaie de comprendre, c'est comment je peux faire pour avoir mes services. Donc, effectivement, il n'y a pas d'augmentation des plaintes.

(17 heures)

M. Williams: Merci. Vous avez fait quelques commentaires sur le changement d'un employé ou d'un cadre supérieur. Mais, avec votre réponse, est-ce que c'est le temps peut-être de faire la réflexion de changer le rôle même du Commissaire aux plaintes? Avec la loi 120, ils ont mis ça sous le contrôle du ministère de la Santé et des Services sociaux. Est-ce que c'est le temps de réfléchir, de mettre ça comme un commissaire autonome? Est-ce que c'est une raison pour laquelle nous n'avons pas eu une grande augmentation des plaintes, parce que c'est sous le contrôle du ministre? Est-ce que ça va être bon maintenant d'avoir une instance autonome?

Mme Arvey (Jo-ann): Il y a certaines personnes ou certains groupes qui pensent que... C'est sûr que le fait que le régime des plaintes est géré par des gens à l'intérieur du réseau, qui sont salariés par le réseau, les gens peuvent ne pas avoir beaucoup confiance au régime en disant: Ben, écoute! Ils n'iront pas critiquer leur acolyte ou leur collègue ou leur boss, là. Donc, nous, on croit que, pour l'instant... Le régime des plaintes existe depuis à peine trois ans et demi, je dirais, donc, on pense que ce n'est pas encore prouvé que le régime des plaintes, tel qu'il existe, n'est pas bon. On pense qu'il faut lui donner des dents et, entre autres, le Commissaire au plaintes, il faudrait vraiment lui donner des pouvoirs plus grands, la même chose pour les régies.

Il faut également inculquer, à l'intérieur du réseau, une philosophie différente parce que présentement, s'il n'y a pas beaucoup de plaintes, il y a le fait que les usagers ont peur et ne connaissent pas le régime. Mais, à l'intérieur du réseau, on décourage souvent l'usager, la personne, à formuler une plainte parce qu'on ne connaît pas l'existence d'une plainte ou parce qu'on est atteint du syndrome «plein de zéros»: Moins j'ai de plaintes, meilleurs sont mes services. Donc, toute l'idée de qualité de service, d'amélioration continue, etc., ce n'est pas bien inculqué à l'intérieur du réseau, et il y a un travail important à faire à ce niveau-là. En tout cas, nous, on pense qu'il y a une nécessité, pour l'instant, d'apporter des corrections, mais je pense qu'il faut continuer et voir si, en donnant plus de formation, plus d'implication aux employés du réseau, il n'y aurait pas moyen d'amener un meilleur résultat.

M. Williams: Merci. J'ai plein de questions, mais je sais que mes collègues veulent poser des questions aussi. Je vais poser une autre question et, s'il y a encore du temps après mes deux collègues, je vais vous poser les autres questions. À la page 9 de votre mémoire, vous avez parlé de l'amendement 29 et, en bon français, vous avez parlé d'une liste noire, de «black listés». Ça m'étonne beaucoup, ce commentaire, noir sur blanc comme ça, parce que vous avez dit, si j'ai bien compris, que les intervenants mettent les patients sur une liste noire. Pouvez-vous expliquer le problème et la grandeur de ce problème?

Mme Arvey (Jo-ann): La grandeur, ça serait difficile, mais je peux vous dire que – et je ne parlerai pas des régions où les gens se connaissent encore plus et où c'est encore plus facile de pointer un individu dans une région, mais moi, je travaille à Montréal, donc, en principe, il y a plus de gens et les gens se connaissent moins – souvent, on appelle dans un établissement pour poser une question et, nous, on ne nommera jamais la personne. Je vais appeler dans un CLSC et je vais dire: «Écoutez, pouvez-vous me dire qu'est-ce qu'il arrive si une personne a besoin de services de maintien à domicile, avec telle, telle ou telle affaire, qu'est-ce que vous allez faire? C'est quoi vos politiques, etc.?» «Ah! Vous me parlez de Mme Tremblay?» Je n'ai nommé personne, là. Finalement, on continue à jaser, mais on est capable de nommer. Et là c'est la réceptionniste qui me parle, dans un CLSC qui reçoit peut-être 300 à 400 appels par jour, qui est capable de m'identifier la personne.

Donc, je pense que souvent les gens qu'on dit «chialeux chroniques», un moment donné, quand ils arrivent pour avoir accès aux services, ils sont effectivement «black listés». Souvent, quand on arrive avec un organisme extérieur à l'intérieur d'un processus de plainte ou d'un accompagnement autre, comme nous, il faut changer le canal de communication et dire: Là, vous faites affaire au CLSC X avec une travailleuse sociale Y. Ça ne marche pas, ce n'est pas possible ni d'un côté ni de l'autre, on va essayer de faire autrement. Dans un établissement assez gros, qui a assez de ressources, c'est possible de le faire. Mais, dans une plus petite organisation, c'est plus difficile de changer, et souvent ce qu'on entend de la part des cadres supérieurs responsables des plaintes, c'est de dire: Bien, là, écoutez, madame n'a plus confiance en nous, on n'a plus confiance en madame, il faudrait changer d'établissement. Mais de plus en plus les usagers, ils ont plus le droit de choisir les établissements où ils veulent aller. Mais il y a vraiment, je dirais, une chose à laquelle on est confronté assez fréquemment.

M. Williams: Mais, si j'ai bien compris votre interprétation, ça change tout le rôle des CLSC pivots que nous avons eus à Montréal. Il y a les CLSC qui donnent le service à l'extérieur de leur territoire pour les services spécialisés. C'est ça qu'il va empêcher, selon vous.

Mme Arvey (Jo-ann): Oui.

M. Williams: C'est grave.

Mme Arvey (Jo-ann): Oui.

M. Williams: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Malavoy): Est-ce qu'il y a d'autres personnes qui voudraient parler? Oui, Mme la député de Bourassa.

Mme Arvey (Jo-ann): Il me semblait aussi.

Mme Lamquin-Éthier: Bonjour.

Mme Arvey (Jo-ann): Bonjour.

Mme Lamquin-Éthier: Bienvenue et merci d'avoir déposé un mémoire. Ça me fait plaisir de vous revoir. Je vais revenir avec l'utilisation que vous avez d'ailleurs convenu, dans votre texte, vous utilisez l'expression «usager«, «usagère», parce que c'est celle de la loi. J'aimerais vous entendre. Vous accompagnez des personnes qui sont fragiles, qui sont vulnérables à travers un réseau qui est extrêmement compliqué. Quelle est la perception, où sont les commentaires que vous recevez de ces personnes quant à l'étiquette qu'on leur a apposée, «usager»?

Mme Arvey (Jo-ann): Bien, nous, quand on travaille avec les gens, c'est «monsieur», «madame» et puis on parle d'une «personne», de la «personne». On n'utilisera jamais «usager», «usagère». C'est quand on parle avec les intervenants du réseau qu'on va utiliser ce mot-là parce que c'est le mot qui est usuellement... dans les hôpitaux on parle plus de «patient». Mais, par rapport, je ne pourrais pas vous dire. Nous, il y a jamais eu personne, étant donné qu'on ne l'utilise pas, qui soit venu nous dire: Bien, on n'aime pas ça, cette appellation-là.

Mme Lamquin-Éthier: Donc vous faites attention de ne pas y référer lorsque vous accompagnez des personnes.

Mme Arvey (Jo-ann): Non, nous, c'est vraiment des «personnes» et quand, supposons, on appelle, on va dire «monsieur» ou «madame», dépendamment si c'est un homme ou une femme. C'est la façon dont on va procéder.

Mme Lamquin-Éthier: Vous évoquiez tout à l'heure différentes possibilités pour mettre des dents à ce qui est prévu à l'heure actuelle à l'intérieur de la loi sur les services de santé en ce qui a trait à la procédure de traitement des plaintes. Vous avez parlé d'information, vous avez parlé de formation. Vous avez parlé du réflexe qui n'est pas encore changé, parce qu'une plainte, ça a une connotation négative, et on ne voit pas encore dans une plainte cette capacité qu'on aurait d'aller améliorer la qualité ou la prestation des services. Y aurait-il d'autres dents?

Vous avez aussi parlé du Commissaire aux plaintes. Est-ce qu'on aurait pu faciliter cette procédure-là, dans le meilleur intérêt de la personne qui s'en prévaut, alors qu'elle a des insatisfactions importantes à faire valoir, notamment en ce qui a trait à la plainte lorsqu'elle porte sur un acte médical? Qu'est-ce que vous pensez du formalisme de l'écrit, notamment?

Mme Arvey (Jo-ann): Moi, je pense que présentement c'est très lié à l'individu qui fait le traitement de plaintes. Je dirais que, sur l'ensemble, si on divise le réseau en 100 %, je dirais qu'il y a peut-être 30 % des établissements qui disent: Bon, bien, il y a une loi, on s'y conforme, puis on l'applique de manière assez rigoureuse, mais c'est très désincarné. Donc, on applique le régime de plaintes tel qu'il est dit. Il y a un autre tiers qui, eux autres, disent: Si on pouvait ne pas exister. Puis d'ailleurs, quand ils nous voient arriver dans une réunion, ce qu'ils font souvent, c'est de s'en aller puis dire: Voilà encore les chialeux. Et je dirais qu'il y a un autre tiers, il y a des cadres supérieurs ou des organisations, des structures, qui ont très bien compris comment ça se passe. Ils sont même à l'avant-garde.

(17 h 10)

Moi, je pense qu'il faut laisser une place, outiller le régime. Tel qu'il est, c'est un outil. Il faut laisser la place à chaque organisation d'en prendre possession et vraiment d'en faire... moi, je pense qu'il faut en faire une culture dans le réseau. Et, pour en faire une culture, il faut commencer par faire une formation, une sensibilisation auprès des employés. La majorité des employés du réseau ne connaissent pas les droits des usagers, la presque totalité ne connaissent pas les droits des usager et la majorité ne connaissent pas le régime de plaintes. Ils savent qu'on peut faire une plainte et qu'il doit y avoir un cadre supérieur responsable; mais comment ça se passe, comment ça se fait, ils ne savent pas. Donc, moi, je pense qu'il faut commencer par là et vraiment faire une sensibilisation avec l'ensemble des employés du réseau pour dire: Bon, vraiment, maintenant, notre objectif, c'est vraiment la qualité de service.

Mais je vous jure que ce n'est pas demain la veille. En tout cas, ce n'est pas facile, entre autres dans les gros établissements où on a une culture qui est organisationnelle et qui est en place depuis 20, 25 ans, ce n'est pas facile. Même nous, on ne se sent pas vulnérables, ce n'est pas nous qui sommes lésés dans nos droits, et c'est assez impressionnant souvent. On a pris l'expertise d'arriver dans un gros établissement, un hôpital, etc., souvent on a l'impression d'être la punaise. Ça ne nous attaque pas personnellement, et on passe au travers, mais, pour M. et Mme Tout-le-Monde, je vous jure que c'est très impressionnant.

Un CMDP, un comité des médecins, dentistes et pharmaciens, eux autres, c'est les immuables, les intouchables, c'est à peine si... Quand on a leurs conclusions, on sait qu'ils ont parlé du cas de monsieur ou de madame, mais on ne sait pas ce qu'il en est advenu. Et aller présenter les arguments, demander à un usager d'aller participer à un CMDP pour donner ses arguments, moi, je n'ai jamais vu – et pourtant je suis assez baveuse – quelqu'un sortir de là sans avoir pleuré. Ils sont six professionnels, et tac-tac-tac! C'est assez impressionnant. Je pense qu'il faudrait effectivement ouvrir et faire en sorte qu'eux autres aussi aient des comptes à rendre, et pas seulement en catimini et en entrevues. Comment s'y prendre? Je ne le sais pas. Mais je pense qu'il y a un travail important à faire de ce côté-là.

La Présidente (Mme Malavoy): Est-ce que ça fait le tour de vos questions, madame?

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Je vais céder... Je ne voudrais pas prendre tout le temps.

La Présidente (Mme Malavoy): Alors, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Merci, Mme la Présidente. Je remercie votre groupe de cette présentation. Je pense que vous avez mis le focus surtout sur le traitement des plaintes et vous m'avez fait sursauter au début. Vous avez parlé qu'on vous a reproché hier, dans un forum, de trop vous occuper des plaintes. Moi, ça me scandalise, et j'aimerais que vous nous disiez le contexte, si ça ne vous dérange pas. Vous êtes une organisation qui défendez les patients. Comment est-ce qu'on peut vous reprocher de défendre des patients?

Mme Arvey (Jo-ann): Je pense que c'était dans le contexte des audiences publiques de la régie régionale sur leur plan d'organisation des trois prochaines années et je pense qu'ils s'étaient donné des rôles chacun. Il y avait peut-être 12 personnes, dont la majorité étaient sur le conseil d'administration, puis je pense qu'il y avait une personne qui avait comme mandat d'essayer de trouver les failles des arguments. C'est sûr que nous, quand on arrive... Peut-être qu'elle a trouvé ça désagréable parce qu'on a été assez critique. Parce que, nous, on amène les objets de plainte, qu'est-ce qui, selon nous, ne va pas. Je pense qu'elle n'avait pas pris le temps d'écouter qui on était et ce qu'on faisait.

Après, il y a eu d'autres personnes qui sont passées, les CLSC, etc., et je me suis rendu compte qu'elle disait: Vous nous reprochez nos mauvais coups mais allez-vous admettre également qu'il y a des bons coups qui se passent dans le réseau? Donc, je pense que c'était tout simplement son rôle de faire ça, j'ai l'impression. C'est là que, un moment donné, on s'est dit qu'elle n'avait pas vraiment pris le temps d'écouter qui on était, qu'est-ce qu'on faisait, et on le lui a expliqué. Après, on a été surpris des établissements qui ne nous aiment pas beaucoup, qui sont venus nous voir et qui ont dit: Vous lui avez répondu et vous avez bien fait. Ha, ha, ha!

M. Marsan: Vous avez sûrement bien fait, oui. J'arrive à la conclusion que vous nous présentez et, là aussi, je réagis et j'aimerais vous entendre, peut-être juste élaborer un petit peu parce qu'il ne reste pas beaucoup de temps. Mais vous êtes très critiques quant aux questions soulevées par la loi n° 104, vous dites: «Que l'on fasse référence à la remise en question, voire la disparition d'une certaine démocratie.» Vous savez que, dans le cadre de la loi 120, on a essayé, en autant que faire se peut, de démocratiser davantage. «Que l'on constate une volonté de plus en plus manifeste de la part du gouvernement de diminuer, voire même d'abolir un certain nombre de responsabilités ministérielles.» Corrigez-moi, mais j'avais l'impression que c'est des responsabilités qui partent du ministre pour aller aux régies. Et vous parlez aussi des éléments de privatisation. Je pense que vous faites un jugement très sévère. J'aimerais que vous puissiez juste nous donner le cadre de votre jugement, juste élaborer davantage.

Mme Arvey (Jo-ann): C'est peut-être, vous me direz, démagogue un peu de notre part.

M. Marsan: Non, non.

Mme Arvey (Jo-ann): Mais je pense qu'il faut à un moment donné... Je pense que, si on fait une analyse critique du projet de loi et de toutes les transformations qu'a subi le réseau dans son organisation comme telle depuis les deux dernières années entre autres, il y a lieu de se questionner beaucoup. Nous, on a l'impression que les usagers... le réseau s'installe, on tient compte des besoins des usagers – c'est sûr, c'est la raison d'être du réseau – mais le droit de parole de M. et Mme Tout-le-Monde, des usagers et même des membres de conseils d'administration, même des employés du réseau – on fait partie de la Coalition Solidarité Santé où les centrales syndicales sont présentes – pour avoir analysé, on a l'impression, vraiment, que le droit de parole des gens, à l'intérieur, des gens qui organisent le réseau, il est de plus en plus atténué. Et ça nous questionne beaucoup, dans ce sens-là. Maintenant, est-ce qu'on va faire en sorte d'être prudent par rapport à ça? C'est une question. Mais, si on regarde le droit de parole, la démocratie, la démocratisation, ça soulève beaucoup de questions de notre part.

M. Marsan: Je vous remercie, non seulement pour votre mémoire, aujourd'hui, pour votre présentation, mais pour ce que vous faites sur le terrain. C'est vraiment important pour les patients qui sont tellement démunis devant des machines.

Mme Arvey (Jo-ann): Les patients, vous dites les personnes?

M. Marsan: Les patients, les résidents. C'est ça. Je vous remercie beaucoup.

La Présidente (Mme Malavoy): Ça termine donc la partie d'échanges avec l'opposition. Comme il reste du temps du côté ministériel, M. le ministre aimerait en profiter, je pense, pour clarifier un certain nombre de choses.

M. Rochon: Oui, merci, Mme la présidente. Un point, essentiellement. À la page 9 de votre mémoire, vous faites référence à l'article 29 du projet de loi qui, lui, modifie l'article 80 de la loi. Et j'ai le sentiment – c'est ça que je veux vérifier avec vous – que ce que l'amendement veut faire, c'est justement ce que vous souhaitez qui se fasse, mais c'est interprété autrement par vous. Et vous vous opposez à l'amendement pour les raisons pour lesquelles l'amendement est fait, pour la même raison qu'il veut corriger. Je m'explique.

La Présidente (Mme Malavoy): Voulez-vous éclairer notre lanterne?

M. Rochon: Voilà! Ceci étant dit, on part. Ce que vous visez, je pense, c'est que le CLSC ne puisse pas refuser d'offrir les services à quelqu'un qui se présente au CLSC, même s'il ne demeure pas dans le territoire du CLSC. Bon. L'article de la loi, présentement, l'article 80 dit: «La mission du centre local de services communautaires est d'offrir en première ligne à la population du territoire qu'il dessert...» Et ça, ça a été interprété, nous dit-on, par certains CLSC, pour ne pas donner ou pour rendre plus difficile de donner des services à quelqu'un qui n'est pas de la population du territoire.

Mme Arvey (Jo-ann): O.K.

M. Rochon: L'amendement qui est proposé, c'est qu'on va plutôt dire: la population «dans» le territoire qu'il dessert, plutôt que «du» territoire qu'il dessert. Ça veut dire que le CLSC continue à rendre des services dans son territoire, à la population dans son territoire. Alors, s'il y a la population du territoire d'à côté qui vient dans le territoire du CLSC, elle peut recevoir les services. Tout ce qu'on ne va pas lui demander, c'est d'aller organiser des services dans l'autre territoire parce que, là, il y a un autre CLSC.

Mme Arvey (Jo-ann): O.K. Mais qu'est-ce qui...

M. Rochon: Puis on ne voudrait pas faire de batailles de frontière. Mais c'était justement ça. Je voulais qu'on s'entende là-dessus: on voulait corriger ce que vous pensiez que l'amendement risquait d'introduire.

Mme Arvey (Jo-ann): O.K. Bien, c'est ça. On n'était pas sûr de bien saisir.

M. Rochon: C'est ça que j'ai cru comprendre.

Mme Arvey (Jo-ann): Si vous me dites que ça abonde dans le sens de dire, finalement, que toute personne qui requiert des services d'un CLSC pourrait être reçue, peu importe le...

M. Rochon: C'est ça. Bien, là, je le mentionne, puis on va vérifier pour être sûr que la nouvelle formulation ne risque pas, aussi, d'être interprétée avec un effet pervers.

Mme Arvey (Jo-ann): O.K. Mais qu'est-ce qu'on fait...

M. Rochon: Mais c'est ça qu'on voulait corriger justement. Ce n'est pas la population «du» territoire mais c'est, la population est desservie «dans» le territoire.

Mme Arvey (Jo-ann): O.K. Mais qu'est-ce qu'on fait si, par exemple, tout à l'heure, on disait: Bien, là, il y a des gens qui sont «blacklistés». À un moment donné, on arrive avec une grosse plainte. Ça dure des mois et des mois. Finalement, le CLSC dit: Bon. Écoutez, madame, on reconnaît que ce n'est plus possible. On a brisé le lien de confiance mutuelle. Donc, on vous invite à aller au CLSC voisin. On va appeler au CLSC pour dire que vous allez y aller et tout ça. Bon. Pas de problème. Madame s'en va au CLSC voisin. Le CLSC fait l'analyse des besoins, ta, ta, ta. Quand on arrive pour donner les services, le CLSC dit: Ah! on ne peut pas. Là, on dit: Pourquoi? C'est des services de maintien à domicile. Bien, on n'est pas assurés. Elle n'est pas dans notre territoire. Qu'est-ce qu'on ferait dans une situation comme ça?

(17 h 20)

M. Rochon: Bon. Bien, là, je cherchais vite... Je ne trouve pas l'article, mais il y a un article, dans notre projet de loi, qui dit qu'une personne a le droit de recevoir les services d'un établissement, dans le cadre des ressources que l'établissement a. Bon, alors, moi, je comprends de ça que, si le CLSC du territoire où demeure la personne – on dit que le CLSC rend des services «dans» son territoire. Alors, s'il y a des services de maintien à domicile – je pense qu'il n'y a pas de CLSC qui n'a pas de services de soins à domicile, l'exemple que vous prenez – il doit les rendre à une personne qui les demande dans son territoire. Il n'est pas obligé puis il ne peut pas les donner nécessairement à la personne qui réside en dehors de son territoire. Mais, dans l'exemple que vous donnez, le premier CLSC ne pourrait pas, en vertu de notre loi, refuser des services dont une personne a besoin si c'est des services de soins à domicile et qu'elle est dans son territoire.

Maintenant, par ailleurs, il peut y avoir – et je pense que ça veut garder de la flexibilité – que si, pour une raison ou pour une autre, le CLSC du territoire voisin était mieux en mesure de desservir une personne, ou quoi que ce soit comme raison, bien là, la liberté de choix existe, et qu'un CLSC ou un établissement recommande à une personne d'aller plutôt vers un autre établissement qui serait mieux en mesure de répondre aux besoins parce qu'ils ont le type d'intervenant ou d'intervenante qui peut vraiment aller chercher plus la difficulté d'une personne...

Mme Arvey (Jo-ann): Donc, c'est vraiment le libre choix.

M. Rochon: ...on souhaiterait que se maintienne cette collaboration-là entre établissements en vertu du droit de recevoir des services et des libres choix qu'on a. On me signale à l'article 5...

Mme Arvey (Jo-ann): Choisir la ressource.

M. Rochon: «Toute personne a le droit de recevoir des services de santé et des services sociaux adéquats sur les plans à la fois scientifique, humain et social, avec continuité et de façon personnalisée.»

Mme Arvey (Jo-ann): Oui, c'est ça.

M. Rochon: Article 6, c'est le professionnel: «Toute personne a le droit de choisir – Ah! Vous avez raison, excusez – le professionnel ou l'établissement duquel elle désire recevoir des services de santé et des services sociaux. Rien dans la présente loi ne limite la liberté qu'a un professionnel d'accepter ou non de traiter une personne.» Ça, c'est le professionnel. Mais on a aussi plus loin évidemment que... Prenons un exemple plus facile peut-être au niveau d'un centre hospitalier qui n'aurait pas de service d'obstétrique, une femme ne pourrait pas exiger d'avoir un accouchement dans cet hôpital-là s'il n'y a pas ce genre de service là qui est offert. Mais, s'il est offert et que la dame vienne de n'importe tel territoire et décide d'aller à cet hôpital-là... On peut peut-être lui suggérer, si on pense qu'elle va avoir un meilleur service et plus d'accessibilité, d'aller dans un autre établissement, mais quand la personne ne veut pas, elle va dans l'établissement de son choix.

Mme Arvey (Jo-ann): C'est sûr qu'on est toujours en accord dépendamment comment on l'interprète, nous, c'est vraiment la liberté de choix de dire...

M. Rochon: C'est ce que notre loi consacre, et ça, on ne touche pas à ça.

Mme Arvey (Jo-ann): Mais, par contre, si vous dites «dans le territoire», qu'est-ce que vous faites présentement avec la sous-régionalisation qu'on connaît? Souvent deux ou trois CLSC vont dire par exemple... Je prends toujours Montréal, parce que c'est le plus facile pour moi; par exemple Maisonneuve-Rosemont, Hochelaga-Maisonneuve, ils vont se mettre quatre ou cinq CLSC et vont dire: O.K., ensemble on donne... C'est sûr que chacun donne les services à domicile, mais il y a certains services où ils vont dire: Le service de bain thérapeutique, c'est tel CLSC; le travailleur communautaire en toxicomanie, c'est tel CLSC. Là, ils ne pourront plus sortir du CLSC de leur territoire.

M. Rochon: La logique de la loi qu'on a là m'apparaît très claire. C'est que, si les trois CLSC conviennent par exemple d'avoir plutôt en commun des ressources pour un service qui pourrait être organisé... Puis, en général, je pense que, quand le volume de demandes du service rend plus difficile d'avoir l'équipe minimale ou optimale requise pour rendre le service, alors, au lieu de le faire à trois places, on va le faire à une place, ça vient d'être trois CLSC qui s'entendent que ce service-là va desservir la population des trois territoires, c'est la logique. Si le CLSC qui assume le service essayait de décider en cours de route: Bon, moi, je veux bien la population des deux autres territoires... Il y aurait deux CLSC qui vont l'interpeller là parce qu'ils ont fait nid en commun d'une ressource. C'est ce qu'ils ont fait pour donner un meilleur service à la population.

Mme Arvey (Jo-ann): O.K.

M. Rochon: Alors, l'idée est vraiment visée que, un, c'est le libre choix; puis deux, c'est qu'une personne ne peut pas tomber entre deux chaises. Un établissement, dans le territoire qu'il dessert, doit rendre le service dans son territoire. La personne peut choisir au besoin d'aller à différents endroits.

La Présidente (Mme Malavoy): Est-ce que ça contribue à clarifier?

Mme Arvey (Jo-ann): Oui, ça va.

M. Rochon: Oui? On s'entend? Alors, on va s'assurer que les interprétations avec les légistes sont vraiment ça. Mais je voulais au moins vous rassurer que ce qu'on voulait corriger, c'était exactement ce que vous craigniez que l'amendement risque d'introduire, qui était déjà dans la loi actuellement.

La Présidente (Mme Malavoy): Il reste un tout petit peu de temps du côté de l'opposition, alors je vais permettre au député de Nelligan d'y aller rapidement.

M. Williams: Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup de souligner ce point. Parce que j'ai écouté comme il faut les réponses du ministre et c'est soit une réponse terriblement compliquée ou c'est une autre démonstration comment le ministre peut être un pretzel, parce que.... Bref, j'ai entendu que le ministre a annoncé la fin de la sous-régionalisation, le sous-territorial, c'est ça qu'il a presque dit. Ils ont essayé de corriger ça un peu plus tard. Je vais sortir les galées, demain, et nous allons essayer de comprendre exactement qu'est-ce que le ministre a dit, comme d'habitude. Mais je pense que vous avez soulevé un point assez important, parce que, particulièrement pour les minorités, cette flexibilité est essentielle.

Vous avez parlé du problème de quelqu'un qui est sur une «black list», mais aussi, juste sur l'accessibilité pour les minorités culturelles ou linguistiques, ou les deux, nous avons besoin d'une certaine souplesse. Avec ça, j'espère avoir la réponse finale du ministre et savoir exactement ce qu'il privilégie. Il a plaidé pour le libre choix, c'est fantastique. Pour mes oreilles, là, c'était: Enfin, il a compris toutes mes questions. Mais on verra les prochaines réponses. C'est pourquoi j'ai voulu juste souligner que vous avez apporté beaucoup de commentaires assez importants, et merci beaucoup pour ça. Nous allons certainement vous mettre au courant de la prochaine réponse du ministre sur votre question. Merci.

La Présidente (Mme Malavoy): Est-ce que ça va?

M. Rochon: Mme la Présidente, c'est difficile de dire si c'est la question ou la réponse qui est difficile à comprendre. Ça dépend.

La Présidente (Mme Malavoy): Alors, écoutez...

M. Williams: Je vais sortir les galées demain.

La Présidente (Mme Malavoy): ...on va s'en tenir là pour le moment. Il me reste à vous remercier, madame, ainsi que les personnes qui vous accompagnent, d'être venue, d'avoir passé ce moment avec nous.

J'ajourne les travaux jusqu'à jeudi, 12 mars, 9 h 30, dans la même salle, la salle Papineau. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 17 h 27)


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