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Commission permanente des affaires sociales
Etude des crédits du ministère des
Affaires sociales
Séance du mercredi 9 avril 1975
(Dix heures vingt-deux minutes)
M. Gratton (président de la commission permanente des affaires
sociales): A l'ordre, messieurs! La commission permanente des affaires
sociales reprend ce matin l'étude des crédits du ministère
des Affaires sociales. Je pense qu'au moment de l'ajournement, hier soir, la
parole était à l'honorable député de
Rouyn-Noranda.
Exposé de M. le ministre (suite) M. Camille
Samson
M. Samson: M. le Président, ce matin, avant de commencer
les travaux, je viens d'avoir une très bonne nouvelle de la part du
président de la Régie des rentes du Québec. En effet, on a
modifié le dossier de la famille Samson, quant aux allocations
familiales, et je m'aperçois que c'est entièrement en
français depuis ce matin. C'est une très bonne nouvelle, M. le
Président. Je remercie le président d'avoir fait diligence dans
ce cas. C'est un problème qui a été soulevé en
1967, pour la première fois, et qui avait été, m'avait-on
dit, corrigé, mais qui, finalement, ne l'avait pas été.
Après recherches à la Régie des rentes, on a
découvert, selon mes informations, que, si on correspond en anglais avec
certains Canadiens français du Québec et même avec
plusieurs, c'est que les informations proviennent du Service des allocations
familiales fédéral où, paraît-il, la langue du
Québec est la langue anglaise, dans plusieurs cas.
J'ai souligné, M. le Président, la semaine passée,
à l'Assemblée nationale, ce problème que nous retrouvons
aussi dans d'autres ministères. Puisque nous sommes à
l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales, je
pense que c'est au moins, ce matin, un signe d'un effort qui sera fait pour
corriger cette situation qui, je le reconnais, n'est peut-être pas facile
pour les représentants de la Régie des rentes qui ont, je pense,
plus d'un million de dossiers et dont les machines ordinatrices n'ont
peut-être pas participé aux débats sur le bill 22. C'est
peut-être pour cela qu'on se retrouve avec ce genre de
problèmes.
Maisj'invite, en tout cas, les intéressés non seulement
à corriger mon dossier, mais à corriger tous ceux qui se trouvent
dans le même cas. Pour tous ceux dont les noms sont de consonance
française, je pense qu'il est normal qu'au Québec c'est la
moindre des choses on puisse exiger cela.
Hier, au moment de l'ajournement, j'en étais à discuter de
relations entre les propriétaires de logements et les assistés
sociaux et également de relations entre les propriétaires de
logements et certains officiers du ministère des Affaires sociales.
Le cas type dont je parlais hier soir, je le souligne à
l'attention du sous-ministre concerné, est celui d'une famille qui
cherchait un logement et qui a dû faire appel au bureau de
bien-être social, le propriétaire ne voulant pas louer parce que
c'est une famille sur le bien-être social, donc sans trop de garanties de
paiement.
Finalement, il semblerait, d'après mes informations, qu'on aurait
donné des autorisations écrites de paiement au ministère
des Affaires sociales pour deux mois, mais qu'on aurait verbalement
mentionné au propriétairequedans ce cas-là le logement
serait payé directement. Sur la foi de ces propos, paraît-il, le
propriétaire en question aurait accepté de louer; sinon, me
dit-il, il n'aurait pas loué.
Il se retrouve, la semaine dernière, avec trois mois de logement
non payés et, évidemment, là on nous répond, au
ministère des Affaires sociales, que c'est impossible de payer le
logement parce qu'il y a eu des modifications au dossier de la personne
concernée. Depuis le début, depuis ce temps-là,
c'est-à-dire depuis six mois, il y a eu deux ou trois mois de paiement
et trois mois de non-paiement.
Le tout amène une situation quasi impossible. D'abord, le
propriétaire veut être payé. La Régie des loyers
vient de décider, dans un jugement, de permettre au propriétaire
de vider le logement. C'est une famille de trois ou quatre enfants. Cela
amène des problèmes humains extraordinaires, et là, on
répond au propriétaire: On vous avait dit ça, mais
verbalement. Vous savez, il y a des choses qui peuvent changer, et c'est vrai,
etc.
Alors, sans avertissement, le propriétaire se retrouve avec
ça. Si j'amène ce problème devant la commission, M. le
Président, c'est que ça fait plusieurs fois que ça m'est
mentionné dans divers coins du Québec. Je ne veux pas situer le
problème à un endroit particulier parce que je ne voudrais pas
quand même qu'on croie que je veux m'en prendre à des officiers du
bien-être social plus particulièrement dans un coin que dans
l'autre.
Je ne pense pas qu'ils agissent de mauvaise foi, mais compte tenu des
règlements, de la loi et la façon dont ils sont obligés de
fonctionner il reste que les résultats font que plusieurs
propriétaires aujourd'hui ne veulent même plus risquer de louer
des logements à des assistés sociaux. C'est un problème,
M. le Président, qui mérite d'être non seulement
amené devant la commission, mais qui mérite une étude
sérieuse de la part du ministère. Quelle est la solution? Je
disais hier soir que la solution véritable serait un changement de
l'ensemble du système, mais je ne pense pas que le ministre soit
disposé à nous faire cela aujourd'hui. Dans le contexte du
système actuel, il reste qu'il y a place à amélioration.
On ne peut pas permettre que des enfants soient victimes de la mauvaise
administration, soit du père de famille dans certains cas ou de la
mauvaise administration d'autres responsables. Il reste que dans le cas que je
viens de vous citer, M. le Président, il y a une famille qui sera mise
à la porte cette semaine parce qu'il y a trois ou quatre mois de loyer
en retard. Cela va se faire concrètement. Qui est responsable? Il y a
eu, dans ce dossier, des changements. Le père de famille a reçu
de
l'assurance-chômage, il y a seulement une partie qui provient du
bien-être social. Ce n'est pas suffisant pour payer le loyer, de sorte
que le problème demeure entier. Qui va régler ce problème?
Le bien-être social va-t-il le régler? Je ne le pense pas. Et les
temps sont passés où c'était le curé de paroisse
qui réglait tous les problèmes. On a un problème sur le
dos. Pour l'information du sous-ministre concerné, je serais
disposé à en discuter personnellement avec lui. Si j'amène
ce cas type c'est parce qu'il y en a d'autres comme cela dans la ville de
Québec. Il y en a d'autres comme cela ailleurs.
M. le Président, également, dans un autre ordre
d'idées, je voudrais que le ministère se penche sur le
problème des personnes âgées, le problème
d'hébergement. On a encore des plaintes de partout. On a beau faire des
propositions, fai re des suggestions, il ne semble pas que cela change
vite.
Il y a un besoin d'hébergement, il y a un besoin de logements
pour les personnes âgées. Il y a un besoin également pour
les personnes âgées qui souffrent de maladies chroniques, il y a
différents besoins de ce côté. Et ça ne va pas trop
vite quant aux solutions.
Il y a même un mouvement qui se dessine, selon nos informations,
un petit peu partout en province. On ferme des hôpitaux ou on veut en
fermer et il semblerait que plus le besoin de soins et de services de
santé se développe, moins on permet des services de santé
adéquats. Ce n'est pas en fermant les hôpitaux qu'on règle
les problèmes.
Je veux bien croire qu'on a peut-être des possibilités de
donner d'autres services, d'autres façons par des cliniques externes,
etc., mais quand on a un problème entier, M. le Président, ce
n'est pas en déplaçant tout simplement les problèmes, ce
n'est pas non plus en permettant d'orienter les projecteurs sur un autre
problème qu'on a automatiquement réglé le problème
réel. Et dans le cas qui nous occupe, c'est un peu cela qui se
passe.
Il y a du mécontentement dans la population. Qui doit-on accuser?
Si nous avions à accuser quelqu'un, je pense qu'on aurait beaucoup de
difficulté à mettre le doigt sur le nom de quelqu'un. Il reste
qu'il y a du mécontentement dans la population. Les gens viennent nous
voir, à nos bureaux de député, puis on se plaint des
difficultés d'avoir des services de santé, des difficultés
de rencontrer les médecins, des difficultés d'être
reçu dans les salles d'urgence, de toutes sortes de difficultés
comme cela.
Notre rôle à nous, M. le Président, c'est de faire
valoir ces objections qui nous viennent de la population, c'est de faire valoir
ce mécontentement qui existe présentement. Il y a sûrement,
au ministère, des consultants, des gens qui, à l'occasion
d'études, font valoir des argumentations beaucoup plus techniques que
les nôtres. Mais même si nos argumentations, à nous
députés, sont plus terre à terre, il demeure qu'elles sont
peut-être plus réalistes aussi.
Nous nous retrouvons régulièrement devant ces
problèmes, peut-être parce qu'à un certain moment les
politiques étaient de bâtir des hôpitaux qui avaient un
certain attrait électoral.
On s'est retrouvé, par la suite, avec des hôpitaux
électoraux et moins d'hôpitaux qui donnent des services de
santé réels. A titre d'exemple, je vous mentionne le cas de
Rouyn-Noranda qui est le comté que je représente. Sous un ancien
gouvernement, un hôpital électoral a été construit.
C'est comme ça qu'il faut appeler cela. Il a été vide
pendant plusieurs années avant qu'on se décide de l'utiliser.
Finalement, on l'utilise, mais on se retrouve avec l'ancien hôpital qui
est vide; on se retrouve avec des bâtisses vides et avec des besoins.
S'il n'y avait qu'une bâtisse vide, ce ne serait pas grave, mais il y a
des besoins qui sont là devant une bâtisse vide et
inoccupée.
J'ai personnellement vu le ministre à ce sujet, il y a
déjà un an ou deux, je pense. On en a parlé à
plusieurs reprises. La porte n'a jamais été fermée
à de nouvelles discussions, mais, finalement, le problème n'a
jamais été réglé. Il reste qu'on se retrouve encore
devant ce problème, encore avec un besoin pour des malades chroniques,
un besoin d'hébergement pour personnes âgées parce que,
dans le secteur particulier qui nous concerne, les foyers d'hébergement
pour personnes âgées ne sont pas suffisants.
Je sais que dernièrement un mémoire a été
soumis au ministre par le centre hospitalier Rouyn-Noranda. Dans ce
mémoire, on a certaines recommandations qui permettraient l'utilisation
rationnelle de ces locaux. Je ne sais pas quelle est la réponse du
ministre, je ne sais pas quelle sera la réponse du ministre. Sans
vouloir aller dans les détails de ce mémoire qui
été présenté, je peux vous dire qu'il va falloir
que bientôt on considère ces suggestions valables. On nous parlera
peut-être de budget, mais, justement, on est là pour parler de
budget. Qu'on ne vienne pas nous dire, à l'occasion de l'étude
des crédits, que, si on ne fait pas telles ou telles choses qui sont
nécessaires, c'est parce qu'on n'a pas d'argent. Dans les crédits
qu'on nous demande, il y a sûrement de la place à faire au moins
des choses que la population veut avoir. Il se fait des choses, dans ce
ministère, qui ne sont pas nécessairement demandées par la
population, alors qu'il y a des choses qui sont nécessaires et
urgentes.
On a également des problèmes quant aux centres de
transition pour délinquance juvénile. Je fais
référence, à ce moment-ci, au problème de la Maison
Rouyn-Noranda, dont le ministre est particulièrement au courant et
madame le ministre également.
M. le Président, ce qui se passe dans ce centre de transition est
quasi inexplicable. Il y a eu une enquête faite par le ministère
des Affaires sociales, l'an dernier. Quoique ayant pris connaissance du rapport
de l'enquête et m'attendant à une action spécifique du
ministère, je dois vous dire que, malheureusement, il n'y a pas
grand-chose qui a bougé. D'abord, il y a là-bas un
problème de personnalité; il y a un problème où on
a mis à la porte des professeurs sans considération et il y a
toutes sortes d'autres problèmes, dont des délinquants qui sont
sous la garde des responsables de la Maison Rouyn-Noranda qui ont des fiches
mentionnant jusqu'à 17,18 ou 19 évasions. On nous rapporte
que
beaucoup de ces jeunesse retrouvent devant le juge pour des choses comme
vol avec effraction ou différentes choses comme cela. On peut même
pousser plus loin. Il y a un père de famille qui est carrément
venu me voir pour me dire qu'après deux mois de séjour de sa
petite fille dans ce centre de transition, il a lui-même fait les
démarches pour demander au juge de la cour de Bien-Etre social de
reprendre l'enfant, parce que malgré qu'il y avait un problème
familial, il y avait beaucoup moins de danger encore dans la famille que dans
ce centre de transition. Après deux mois ou trois mois, 15 ou 16
évasions, le père de famille qui retourne chercher sa petite
fille de 16 ou 17 ans, enceinte, M. le Président, je vous assure qu'il
va se rappeler longtemps l'expérienc.e de la Maison Rouyn-Noranda.
On pourrait multiplier les exemples comme cela, en partant de plaintes
que nous avons dans nos bureaux. C'est à se demander si bientôt il
n'y aura pas des actions concrètes de la part du ministère pour
corriger cette situation. C'est à se demander si on ne devra pas tout
simplement nous orienter vers le ministère de la Justice et lui demander
une enquête.
C'est aussi sérieux que ça. Alors, c'est évident
que je n'ai pas l'intention de m'en prendre à des personnes dans cette
affai re. Je serais malvenu de le faire. Le ministre sait très bien
pourquoi d'ailleurs. Lui et moi risquerions d'être accusés de
faire de la politicaillerie si on prenait des dispositions en fonction de
personnalités.
Pour mieux me faire comprendre et pour appeler les choses par leur nom,
c'est que je ne voudrais, pas je pense que le ministre partage mon
opinion là-dessus que nous nous en prenions à la personne
du directeur de la Maison Rouyn-Noranda parce qu'il était candidat du
Parti québécois à la dernière élection. Je
ne voudrais pas qu'on s'en prenne à lui parce que je ne veux pas que ce
débat soit politisé. Ce c'est pas parce que ce type est un homme
politique qu'il n'a pas le droit de gagner sa vie. Ce n'est pas parce qu'il
était un homme politique, qu'il a déjà été
député qu'il n'a pas le droit d'être à la direction
de la maison Rouyn-Noranda. Je veux que ce soit bien clair. Il faut enlever de
ce débat cette partie.
Mais cela n'empêche pas que les résultats, que je viens de
dénoncer, sont là. C'est ça que je veux qu'il soit
corrigé. Je ne demande pas qu'on coupe des têtes mais je demande
qu'on corrige la situation.
Egalement, je pense que puisque j'ai parlé tantôt de
services de santé, il serait peut-être bon, à ce moment-ci,
d'insister davantage sur le plan humain. Puisque j'ai parlé hier de la
nécessité de faire plutôt la promotion de la cellule de
base de la société, qu'est la famille, plutôt que de la
détruire, il vaut mieux établir au Québec, au plus vite,
un système de pouvoir d'achat garanti minimum qui éviterait
beaucoup des problèmes sociaux que nous connaissons
présentement.
Quand je vous disais hier que les évêques ont
dénoncé le démantèlement de la famille,
l'augmentation du taux de divorce, la baisse des taux de natalité, etc.,
etc., tout cela, M. le Président, est relié au problème
économique familial. Quand il y a des problèmes
économiques dans la famille, cela entraîne le
démantèlement de la famille. Cela amène d'abord
l'épouse à être obligée de travailler pour gagner
aussi une partie du revenu familial, cela entraîne un paquet de choses
comme cela. Et lorsque le petit ouvrier, celui qui gagne un petit salaire, doit
le faire quand même en travaillant neuf ou dix heures par jour, quand il
arrive à la maison, le soir, et qu'en guise de repos, il retrouve un
conjoint découragé parce que le budget familial ne boucle pas,
cela ne l'encourage pas à retourner travailler le lendemain matin. Cela
amène des frictions.
M. le Président, ce n'est pas avec des politiques de
planification des naissances dont on sent le ministère prêt
à faire la promotion, par les temps qui courent, qu'on va régler
les problèmes. On vous parlera de revenus pour personnes
âgées, peut-être. M. le Président, si cela continue
comme cela, avec des déclarations comme j'en ai entendues
dernièrement, nous, qui sommes tous des candidats, qui que nous soyons,
à la pension de vieillesse, un jour, on se retrouvera avec personne pour
payer les taxes pour ces pensions. C'est à la veille de s'en venir comme
cela. C'est aussi simple que cela. Continuons à faire la promotion d'une
planification des naissances, de la mode de la contraception et du diaporama et
tout cela et vous allez vous retrouver bientôt avec pas tropd e monde
pour payer les taxes. On n'aura pas besoin de se retrouver alentour de la table
pour étudier des crédits parce qu'il ne restera pas de monde.
M. le Président, il y a encore pire que cela. C'est qu'il nous
semble qu'il y a quelqu'un, dans ce ministère, qui est même
prêt à aller jusqu'à faire la promotion de l'avortement.
Quoique le gouvernement du Québec ait, à ce chapitre, fait
connaître sa position clairement plusieurs fois contre les avortements
illégaux, il reste que mes informations sont que la Régie de
l'assurance-maladie paie pour des avortements qui se font à
l'extérieur du Québec. M. le Président, si c'est le cas
ce sont les informations que j'ai, j'espère que le ministre me
dira que ce n'est pas vrai si réellement la Régie de
l'assurance-maladie du Québec paie quelque chose comme $65 pour les
avortements qui se font dans l'Etat de New York, si c'est le cas, c'est
être complice de choses qui sont illégales au Canada. Et on
retrouve cela sous le chapeau du ministère des Affaires sociales.
M. le Président, non seulement on a une politique qui vise
à détruire la famille par le revenu familial, par les
échelles de revenu familial, mais encore, on essaie de la
détruire autrement, c'est-à-dire en s'assurant qu'il y aura de
moins en moins de familles.
Où s'en va-t-on avec ça? Je veux bien croire qu'au
ministère des Affaires sociales on est pris avec plusieurs
problèmes, mais, si on tente de régler les problèmes en
partant d'une mauvaise philosophie, on va les multiplier au lieu de les
régler.
Quelle est la philosophie du ministère des Affaires sociales en
matière de famille? On ne l'a jamais eue clairement du ministre. On l'a
eue partiellement du ministre d'Etat, madame le ministre dernièrement.
Je ne sais pas si elle a eu des entretiens avec des fabricants de produits
pharmaceutiques, mais il
reste que c'est inacceptable, le genre de déclaration qu'afaite
madame le ministre dernièrement. Je ne le fais pas dire par les voisins;
elle siège à ma gauche, là.
C'est inacceptable. Ce ne sont pas des pilules qu'on doit donner aux
gens; c'est de l'argent pour vivre qu'on doit leurdonner. Ce n'est pas des
pilules pour empêcher les gens de venir au monde qu'on doit donner; c'est
de l'argent pour permettre à ceux qui sont au monde de vivre.
A ce moment-là, vous n'aurez pas besoin de regarderdu
côté de la planification des naissances. On a eu au Québec,
un jour, ce qu'on a appelé la revanche des berceaux.
Depuis la révolution tranquille, on ne se venge pas fort fort. On
ne se venge plus. Les berceaux, on les a arrêtés et on se pense
fin au ministère des Affaires sociales d'avoir fait la promotion de cet
arrêt-là. On entend des gens nous parler de la libération
du Québec, de la libération de ci et de la libération de
ça et de la séparation de ci et de la séparation
deçà. Ne vous en faites pas, vous n'aurez pas besoin de les
battre aux prochaines élections, M. le ministre; si vous continuez avec
des politiques familiales comme ça, on va tous se battre seuls. Vous
n'aurez plus besoin de séparer, il n'y aura plus rien à
séparer. Parce que, si ça continue comme ça, seuls les
immigrants bientôt vont constituer la relève. C'est aussi grave
que ça. Je ne sais pas si on le réalise bien à ce
ministère-là, mais c'est aussi grave que ça.
Bien sûr, le ministre dira peut-être qu'on dramatise, mais,
si on n'allume pas la lumière rouge bientôt, il sera trop
tard.
On fait tellement la promotion du démantèlement de la
famille... Regardez ce qui se passe dans les naissances aujourd'hui. Un
curé de paroisse me disait dernièrement en boutade mais
c'est une boutade qui est vraie : Si j'avais pas eu des filles
mères dans ma paroisse l'année passée, je n'aurais pas eu
de baptêmes.
Je peux vous donner le nom du curé; ça ne le
gênerait pas de le redire devant n'importe qui, à part ça;
Si j'avais pas eu de filles mères dans ma paroisse, je n'aurais pas eu
de baptêmes cette année.
Cela veut dire que les familles, on les décourage, d'abord par le
petit salaire, parce que trop de familles sont aux prises avec un salaire qui
est trop bas comparativement au coût de la vie.
Et ceux qui n'ont pas de salaire du tout, qui sont aux prises avec le
revenu familial, c'est totalement en bas du seuil de la pauvreté.
On a entendu, M. le Président, toutes sortes de belles paroles du
ministre du point de vue technique. C'est beau. C'est bien beau. Cela pourrait
faire un beau livre, mais cela ne donne pas à manger. Je vous dis qu'il
faut changer la philosophie du ministère des Affaires sociales.
Déjà, cela s'est appelé le ministère de la
Santé, de la Famille, du Bien-être. On a tout regroupé cela
pour en faire les Affaires sociales. On est à se demander si en
regroupant cela on n'a pas tout simplement enlevé la famille, la
santé et le bien-être. Les gens nous diront: On fait notre
possible dans les circonstances. M. le Président, ce n'est toujours pas
l'argent qui manque dans le budget des Affaires sociales pour avoir au moins
des politiq ues humaines. Qu est-ce que vous faites avec cet argent si vous
n'avez pas des politiques humaines? C'est bien beau de bâtirdes
hôpitaux. On a des budgets pour bâtir des hôpitaux et en
même temps on en ferme d'autres. On ferme des hôpitaux là
où les gens ne veulent pas les laisser fermer et on en bâtit
ailleurs.
Qu'est-ce qu'on fait, également, pour encourager les
médecins à revenir à une médecine plus familiale?
Qu'est-ce qu'on fait de ce côté avec le système
d'assurance-maladie où c'est devenu onéreux pour un
médecin de se déplacer et aller faire une visite à la
maison? Savez-vous, M. le Président, qu'il n'y a presque plus de
médecins au Québec qui le font? Presque plus. Il me semble que
c'est le genre de médecine qui était pas mal plus proche de la
population que la médecine où vous allez attendre dix ou douze
heures dans une salle dite d'urgence. Il semble que plus votre maladie
revêt un caractère d'urgence, plus on vous fait attendre longtemps
dans les salles d'urgence. Alors, ou bien on corrige la situation, ou bien
changez le nom des salles d'urgence et appelez cela des salles d'attente ou
autre chose comme cela. N'appelez plus cela des salles d'urgence, de
grâce! Parce qu'il ne faut pas que cela presse pour aller là.
M. le Président, dans les services à être
donnés, je pense qu'on oublie trop souvent j'en ai parlé
tantôt les personnes âgées. Trop souvent, parce
qu'elles sont une des classes de la société qui ont des
difficultés à se faire entendre, elles sont dépourvues de
moyens dans plusieurs cas.
On les reçoit comme des chiens dans un jeu de quilles, les
centres d'hébergement ne sont pas assez nombreux puis, quand on les
envoie à l'hôpital comme malades chroniques, ils manquent de
place. Là on a, c'est drôle, M. le Président, des
situations assez cocasses.
On prend un vieillard qu'on est obligé d'envoyer à
l'hôpital comme malade chronique, puis là on va l'envoyer à
100 milles de chez lui pour s'assurer que les enfants ne pourront pas aller le
voir trop souvent. Puis vous avez des hôpitaux sur place qui pourraient
les recevoir, mais ils ne sont pas catalogués pour cela. Cela marche
comme cela.
Par contre, là où on reçoit des gens, des malades
chroniques, cela arrive souvent que ceux-là on les envoie ailleurs, puis
cela se retrouve aux mêmes 100 milles. On les croise, on fait du
chassé-croisé avec les vieillards, du chassé-croisé
avec les malades chroniques, tout comme si on voulait s'assurer de les
éloigner assez de leurs enfants pour que les enfants n'aillent pas les
voir de temps en temps, pour être sûr qu'ils vont s'ennuyer assez
pour crever plus vite, puis que cela coûte moins cher à
l'assurance-maladie. C'est à peu près cela qu'on fait avec nos
malades chroniques puis nos vieillards.
C'est clair, M. le Président, que cela coûte moins cher
à l'assurance-maladie de soigner des jeunes, mais est-ce qu'on le fait
consciemment ou inconsciemment? Je préfère vous dire que je crois
que cela se fait inconsciemment, parce que, si c'était consciemment, ce
n'est pas d'une commission parlementaire qu'on aurait besoin, mais d'un
tribunal.
Je pense que cela se fait inconsciemment. Les politiques du
ministère des Affaires sociales sont des politiques de machines
ordinatrices. Vous ne pourrez jamais programmer une machine ordina-trice pour
lui donner un coeur humain. Il faudrait qu'on prenne soin plus des gens, sans
tous les passer dans le même boyau, parce qu'il semble qu'à ce
ministère on ne tienne pas compte de la dimension de la personne
humaine.
Que vous soyez grands, que vous soyez petits, que vous soyez autrement,
on les passe tous dans le même trou. On rapetisse les têtes qui
sont trop grosses, puis on gonfle celles qui sont trop petites. C'est comme
cela, M. le Président. Si vous êtes trop grand, comme le
sous-ministre devant moi, c'est un grand homme, on lui couperait la tête
à celui-là. Par contre, celui qui est plus petit, on prendrait la
têtede celui-là puis on la mettrait sur l'autre pour les mettre
toutes de la même longueur.
Je n'en veux pas à ce sous-ministre, au point de lui appliquer la
politique de son ministère, M. le Président. Voyons! Il reste que
c'est peut-être très imagé, mais cela traduit la
réalité. Qu'est-ce qu'on va faire pour donner du coeur à
ce ministère? Qu'est-ce qu'on va faire? Qu'est-ce qu'on va faire pour
rendre ce ministère plus humain?
Est-ce qu'il va falloir changer to us les employés qu'il y a
là? Cela ne changera rien. Cela ne changera rien. Il y a un
sous-ministre qui dit qu'il n'a pas d'objection. Il doit avoir une convention
collective qui s'en vient, lui. Mais non, cela ne changera rien, M. le
Président. C'est la philosophie du ministère qui doit changer.
Les fonctionnaires, moi, je pense que ce sont des humains qui sont prêts
à rendre des services à la population, mais les directives qu'ils
reçoivent, ils sont obligés de les appliquer.
M. le Président, le ministre, lui, est quelqu'un qui peut donner
des directives. Lui et les autres de ses collègues du conseil des
ministres sont les responsables de la situation. Si cela ne marche pas,
à vous, messieurs, du gouvernement, qui avez des responsabilités
de la changer la situation.
Ne venez pas nous dire que vous êtes pris avec un problème
de budget parce que vous avez un budget qui est passablement ronflant vous
autres au ministère des Affaires sociales. Il est passablement ronflant.
Comme le disait quelqu'un hier, si on vous demandait de sortir toutes les
factures, vous trouveriez cela fatigant. C'est un budget ronflant. On ne vous
demandera pas de sortir toutes les factures mais on va vous demander, au moins,
qu'il y ait quelque chose qui paraisse être des politiques basées
sur le respect et la dignité de la personne humaine. C'est ce qu'on va
vous demander. On ne peut pas vous demander moins que cela. Jusqu'à
présent, vous n'avez pas passé le test. C'est bien de valeur,
mais vous n'avez pas passé le test jusqu'à maintenant.
Plus vous changez vos politiques, plus vous aggravez le problème.
L'an dernier, à la même époque, on faisait état des
barèmes de bien-être social. Cela revient tous les ans. Le
ministre nous a dit: On va changer cela, on va rendre cela plus
réaliste. On a ramené le test du loyer à $85. C'est pas
mal plus réaliste! Des logements, dans la ville de Québec,
essayez d'en trouver à moins de $150 et des fois plus que cela. Ramenons
cela à $85, ce sera une politique plus réaliste. L'année
passée, la dernière semaine du mois, les assistés sociaux
devaient se contenter de pain pas trop beurré et de steak de bologne, le
plus mince possible. Cette année, avec le changement qu'on a fait, on ne
se rend pas à la troisième semaine, on commence à la
deuxième semaine à faire cela. C'est la réalité et
c'est dans le contexte d'une province qui, normalement, est capable de faire
vivre sa population.
Vous avez des groupes d'assistés sociaux qui se forment un peu
partout. Ils sont en train de vous amenerdevant une convention collective, eux
aussi. Ils sont en train de s'organiser. Mais vous ne pouvez pas les
blâmer parce que la politique du ministère des Affaires sociales,
en cette matière, est une politique qui ne fait qu'aggraver le
problème et ne permet pas aux familles de vivre normalement. C'est cela,
la politique. Bien sûr, pour celui qui n'a pas ce problème, il
peut passer douze mois par année à côté de la
machine ordinatrice et cela ne le dérange pas trop. Pour celui qui est
dans notre catégorie de salaire, la troisième semaine du mois, on
n'est pas pire, mais ils ne sont pas tous dans notre catégorie de
salaire. Je vous dis que la troisième semaine du mois, chez les
assistés sociaux, c'est la semaine où on a commencé
à se serrer la ceinture à partir de la deuxième semaine. A
la troisième, la ceinture est assez serrée q ue le ministre
aurait avantage à mettre cette ceinture-là parfois, il
comprendrait mieux. C'est cela, leur problème, c'est la situation.
Là, je ne vous parle pas par ce que j'en ai entendu dire, j'en ai
vu. Pour l'information du ministre, une fois par semaine, je vais dans mon
comté et j'en profite pour aller visiter de ces familles. Je le fais
parce que quand on nous le rapporte, des fois, on charrie un peu. Je suis
conscient de cela. Je me rend personnellement voir ce qui se passe et je ne
demande pas un rapport d'officier ou de fonctionnaire pour me dire où
aller, j'y vais sans le dire à personne. Je frappe à une porte et
j'entre. Là, j'examine la situation et j'y vais
généralement dans la troisième semaine parce que c'est la
troisième semaine du mois, c'est celle-là, la fatidique. Quand
vous n'avez pas le petit épicier du coin qui fait confiance et qui a
assez pitié des assistés sociaux pour leur avancer quelque chose
dans la troisième semaine, il y a des endroits où ils ne
mangeraient pas dans la troisième semaine parce qu'on a obligé,
avec le test du loyer à $85, les gens à prendre de l'argent de la
nourriture pour payer le loyer.
On en a assez, de cela. On en a assez. Qu'on nous annonce des 10.4%
d'augmentation alors qu'on est 31% ou 32% en arrière et qu'on fasse cela
à la mode politique, par-dessus le marché... Hé, cela va
permettre bien de quoi, imaginez-vous, les politiques déjà
adoptées, etc.
Des communiqués de presse pour annoncer aux assistés
sociaux qu'ils vont mieux vivre, quand on leur donne seulement le bout de la
fourche, on en a assez.
La solution n'est pas de multiplier les assistés sociaux, non
plus. Le ministre n'est pas le seul responsable des problèmes. Le
problème économique
au Québec est un problème global dont le ministère
des Affaires sociales n'est pas l'unique responsable, il faut quand même
le dire. Il y a d'autres ministères qui ont leur part de
responsabilité. Les ministères à vocation
économique ne font pas tous leur travail. La politique d'ensemble
gouvernementale est déficiente. Il reste que, dans le contexte où
on se trouve, seul le ministère des Affaires sociales peut aider ces
gens qui sont défavorisés par la société. C'est
cela que je voulais faire comprendre au ministre, ce matin.
Je m'excuse auprès du ministre si j'ai peut-être un peu
élevé la voix, mais je pense que je n'avais pas le choix. Puis,
si c'est nécessaire, je l'élèverai de nouveau, à
l'avenir; je n'ai pas l'intention de lâcher ce dossier.
Cependant, depuis l'an dernier, il y a eu quelques petites
modifications, je dois le reconnaître. Je n'ai pas l'intention seulement
de faire ressortirtous les problèmes. Le ministre a fait des choses. Il
a favorisé l'arrivée dans les régions
éloignées de médecins par des politiques, au cours de
l'année 1974; caisse de dépannage dans les milieux
éloignés, au point de vue du bien-être social. Ce sont des
choses dont on a parlé, l'an dernier, aux crédits.
Honnêtement, je dois remercier le ministre qui a pris ces
dispositions.
Je ne sais pas de quelle façon ce serait vu, mais j'ai presque
envie de faire une suggestion qui serait d'ordre pratique et administratif,
quant à la meilleure compréhension des politiques, en ce qui
concerne surtout l'aide sociale. Je fais référence, à ce
moment-ci, à une expérience qui a été tentée
par la Commission des accidents du travail, il y a quatre ans. On a, à
un moment donné, invité, pendant trois ou quatre jours, à
Québec, les secrétaires de comté des députés
pour leur faire part des politiques de la Commission des accidents du travail
et leur expliquer le fonctionnement de ce service. Cela n'a pas
réglé tous les problèmes, mais, étant donné
qu'on a aussi, de ce côté, beaucoup de problèmes qui nous
sont soumis, cela a permis à nos secrétaires de comté de
faire un meilleur travail, quand nous recevons des gens qui ont des
problèmes de ce côté, en sachant, par exemple, à qui
s'adresser, de quelle façon le faire, etc., etc.
Je voudrais faire une suggestion semblable au ministre. Il serait
probablement très utile qu'au niveau du ministère des Affaires
sociales on prenne trois ou quatre jours et qu'on prépare quelque chose
à présentera nos secrétaires de comté: qu'on les
invite trois ou q uatre jours à Québec et qu'on leur explique
tout le fonctionnement... Cela va éviter beaucoup de problèmes
aussi chez nous, dans nos comtés. Les gens viennent nous voir à
nos bureaux, nous posent des questions ou posent des questions à nos
secrétaires. Ce n'est pas notre travail, évidemment, de remplacer
les agents du bien-être social, au contraire. Mais, c'est notre travail,
par exemple, de recevoir la population. Quand on vient chez nous, M. le
Président, c'est parce qu'on a confiance à l'élu du
peuple. C'est normal que l'élu du peuple puisse donner les meilleurs
renseignements possible quant aux règlements, quant aux lois. C'est une
suggestion que je fais. Je ne sais pas de quelle façon elle sera
reçue.
J'espère qu'elle sera bien reçue parce que, du moins si le
ministre n'entend pas en faire une politique permanente, peut-être qu'un
projet pilote serait intéressant, et on verrait ce que cela donnerait
par la suite. Si cela ne donne pas le résultat escompté, qu'on
l'arrête, mais je pense que, de ce côté, il y aurait
peut-être une possibilité d'effectuer davantage ce rapprochement
entre la population, les élus du peuple et l'administration.
Il y a également cela me vient à l'esprit, en
terminant des diététiciennes qui sont aux études
présentement et qui nous informent j'ai reçu plusieurs
lettres il y a quelques jours de leur incapacité de poursuivre
leurs études. Je ne sais trop, je pense qu'il est question d'une
période qu'elles doivent poursuivre en milieu hospitalier et les milieux
hospitaliers ne favorisent pas trop cette période parce qu'il y a un
manque de budget ou de crédit.
Malheureusement, je n'ai pas les lettres avec moi mais je me rappelle
cela de mémoire. J'aimerais que le ministre nous en parle un peu. Je
trouverais très malheureux que des personnes qui ont suivi des cours,
qui sortent de l'université, ne puissent entrer sur le marché du
travail parce qu'il y a cette période pratique qui ne serait pas
favorisée par un manque de politique du ministère des Affaires
sociales.
J'aurais beaucoup d'autres choses à dire mais je pense qu'on aura
l'occasion, au cours de ces crédits, d'y revenir et, à chaque
programme, peut-être, de faire connaître nos positions.
Je voudrais peut-être que le ministre je ne sais pas si
c'est la coutume... Il me semble que le ministre avait l'habitude de donner
réponse aux quelques questions qu'on pose à travers nos
exposés. Quant à moi, j'aimerais bien recevoir l'opinion du
ministre sur certaines questions que j'ai posées.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable ministre
des Affaires sociales.
M. Forget: Je vous remercie, M. le Président. Je n'ai pas
l'intention de faire un débat ou une réplique systématique
à tous les arguments qui ont été avancés par nos
collègues, les dép utés de Saint-Jacq ues et de
Rouyn-Noranda.
Je crois que leurs exposés sont très intéressants
parcequ'ils nous permettent de voir, dans une certaine mesure, à la
lumière de quelle philosophie ils vont procéder à
l'étude des crédits. Je les remercie personnellement de cet
éclairage qu'ils nous donnent sur les préoccupations d'ensemble
qu'ils ont vis-à-vis des activités du ministère des
Affaires sociales.
Il est évident que ceci est une occasion pour diverger d'opinion.
C'est la raison pour laquelle je ne crois pas nécessairement opportun
d'entreprendre un effort de réfutation de chacun des points de vue
exprimés puisque je crois que ce sont, encore une fois, des sujets sur
lesquels il est possible de diverger d'opinion mais où il est bien
difficile de faire des preuves. Certainement, je n'ai pas entendu de preuve que
les opinions qui ont été exprimées étaient les
meilleures. J'ai eu l'occasion et j'aurai encore l'occasion d'expliquer
pourquoi les politiques que nous avons adoptées, la philosophie, si
l'on veut, que nous articulons par ces politiques est celle qui doit
être préférée.
Malgré tout, il y a un certain nombre de points,
particulièrement dans l'exposé du député de
Rouyn-Noranda, qui me semblent appeler des corrections. Parce que si on les
laisse sans commentaire, ils sont susceptibles de créer une impression
erronée, étant donné qu'ils portent non pas seulement sur
des valeurs ou des attitudes, mais sur des points de fait qu'il est
nécessaire de connaître de façon exacte.
Je n'aborderai pas nécessairement les problèmes dans
l'ordre dans lequel ils ont été abordés. Cependant, je
voudrais signaler, en premier lieu, que.les différences
extrêmement spectaculaires dont a fait état le
député de Rouyn-Noranda entre la situation au titre de l'aide
sociale de personnes seules et de ménages, de familles, sont des
différences qui sont réelles seulement dans le sens dans lequel
elles nous ont été données, c'est-à-dire en
ignorant toute une partie du problème et en choisissant de faire porter
tout l'exposé sur un aspect qui n'est, encore une fois, pas le seul qui
doit être considéré.
Il est clair que lorsque l'on considère la situation de personnes
qui vivent isolément les unes des autres, comme dans le cas d'une
famille qui se désintègre, dont les les membres se
séparent, on ne peut pas envisager isolément le revenu qui est
versé à ces personnes par l'aide sociale sans tenir compte des
dépenses qu'elles doivent encourir.
Or, il est élémentaire de constaterqu'il ne coûte
pas la même même chose pour un nombre donné d'individus de
vivre ensemble ou de vivre isolément. Tout le monde a connu cette
expérience, à une certaine période de sa vie, ne serait-ce
que quand on quitte sa famille, mais c'est aussi vrai dans toute autre
circonstance. Il est clair que des gens qui vivent isolément doivent
assumer des dépenses de logement, doivent assumer en double, en quelque
sorte, certains frais communs qu'ils partageaient jusque là et il faut
considérer à la fois les dépenses et les revenus pour
avoir un tableau complet de la situation. En choisissant de ne parler que des
revenus, on produit évidemment une situation qui semble anormale, qui a
l'air injuste, même, mais si l'on tient compte des revenus et
c'est très certainement l'intention qui est derrière les
barèmes que nous appliquons dans l'aide sociale nous retrouvons
une situation où les différences de revenus sont
expliquées par les différences dans le niveau de
dépenses.
Le niveau de logement, sur lequel s'est longuement étendu le
député de Rouyn-Noranda, présumément parce qu'il
était important, parce que c'est un facteur important du budget
familial, il est tout aussi important dans ces circonstances et il explique
à lui seul les différences dans le niveau des prestations.
Donc, il est faux de dire et ce n'est pas une question de
philosophie, c'est une question de fait que les barèmes que nous
avons encouragent la dispersion des familles. Tous ces arguments, encore une
fois, sont basés sur une vision incomplète de la
réalité.
Sur le problème plus général du niveau des
prestations, il est clair qu'il est facile de proclamer le besoin d'une
majoration des barèmes. C'est un besoin qui est ressenti par tous et
auquel, d'ailleurs, le gouvernement a donné suite durant la
dernière année. D'ailleurs, le député de
Rouyn-Noranda l'a reconnu lui-même. Je ne le blâme pas de juger que
ces augmentations sont insuffisantes. Je crois qu'on peut affirmer aussi que du
point de vue du ministre des Affaires sociales, elles sont également
insuffisantes mais il faut compter avec les autres besoins du gouvernement,
d'autres secteurs d'activité. C'est un équilibre qui est
réalisé, que l'on peut sans aucun doute critiquer, mais c'est un
équilibre inévitable et nécessaire entre différents
besoins, différents besoins sur lesquels il a, presque dans le
même souffle, continué à nous exposer tout ce qui devait
encore être fait et qui n'est pas fait. Donc, c'est un équilibre
qu'on doit réaliser non pas seulement au sein du gouvernement dans son
ensemble mais au sein du ministère et je crois mais c'est un
sujet sur lequel nous pourrons revenir que l'augmentation des
barèmes d'aide sociale, au cours des dernières années, au
cours des derniers mois, démontre assez concrètement que c'est
notre intention d'atteindre les seuils de pauvreté tels que
définis par des organismes indépendants. C'est d'ailleurs une
réalisation dont nous pouvons faire état pour certaines
catégories d'assistés sociaux, une réalisation qui va se
poursuivre au cours des prochaines années, puisque l'on remarque
traditionnellement que la hausse des barèmes a toujours
dépassé, chaque année, l'augmentation de l'indice du
coût de la vie.
Quand le député de Rouyn-Noranda nous parle des
barèmes de logement, je suis porté à me poser des
questions sur sa candeur dans son exposé. Je suis très
intéressé à obtenir des points de vue qui reflètent
des préoccupations véritables mais il sait aussi bien que tous
ses collègues de l'Assemblée nationale que lorsque nous avons
réduit ces barèmes, nous avons effectivement fait
bénéficier les assistés sociaux.
On peut, encore une fois nous disputer sur le caractère suffisant
ou insuffisant de ces changements-là. Là-dessus, il a pleine
liberté de le faire. Mais représenter la baisse des
barèmes comme il l'a fait, encore une fois ça me laisse songeur
sur les intentions véritables que poursuit le député de
Rouyn-Noranda. Il me semble qu'il saittrès bien que si l'on veut
continuer sur la voie qui a déjà été
amorcée, continuer à favoriser les assistés sociaux
relativement au besoin de logements, il va falloir continuer à diminuer
ces barèmes-là et non pas les augmenter.
C'est un peu une caricature que de comparer les barèmes au
coût des logements. Cela n'a jamais été, du moins depuis
qu'on a intégré le besoin de logements dans la location
forfaitaire, ça n'a pas du tout été ce but-là.
C'est malheureux, c'est difficile à expliquer, c'est un peu technique,
mais c'est, malgré tout, une réalité que, je crois, tout
le monde connaît très bien maintenant.
Sur une autre question, des affirmations ont été faites,
sous une forme interrogative, malgré tout, et c'est peut-être
mieux quand c'est sous une forme interrogative, mais il reste que le doute est
créé et qu'il faut absolument le dissiper. C'est cette question
du paiement ou du non-paiement, par la Régie de l'assurance-maladie,
pour des avortements effec-
tués en dehors du Québec et to ut particulièrement
en dehors du Canada. Parce qu'il est clair que les dispo-sitions du code
criminel canadien s'appliquent partout au Canada. Donc, je présume que
la question portait essentiellement sur le paiement d'avortements
pratiqués en dehors du Québec et en dehors du Canada.
Pour ce qui est de cette dernière catégorie, il
s'agitd'une pratiqueextrêmement réduite. Au cours des quelque
trois demieres années, il y a eu, au total, moins d'une vingtaine de ces
paiements qui ont été effectués. Et la Régie de
l'assurance-maladie s'est assurée, dans tous ces cas, que les conditions
prévues par les lois du pays relativement à la pratiq ue de ces
avortements, c'est-à-dire qu'il s'agissait bien d'avortements
thérapeutiques, ont été respectées, même
s'ils étaient pratiqués dans des hôpitaux à
l'extérieur du territoire canadien.
D'ailleurs, on ne peut pasexpliquerautrement la disparité
très considérable, même s'il n'y a pas de statistiques
officielles ni même officieuses sur le sujet, entre une vingtaine
d'avortements pratiqués à l'étranger sur trois ans et le
nombre, sans aucun doute, beaucoup plus considérable des avortements
plus ou moins clandestins qui sont effectués outrefrontières.
Je crois qu'il est important de préciser cet aspect-là. La
régie n'a pas violé la loi du Québec en faisant ces
quelques paiements mai s a eu des indications lui permettant de s'assurer que
les lois du pays étaient respectées même dans ces
cas-là.
Relativement aux personnes âgées, on déplore la
carence dans les services qui leurs sont disponibles. Je pense qu'on peut le
faire très valablement. C'est d'ailleurs aider le ministère des
Affaires sociales que de dire que ces services sont déficients puisque
notre intention c'est d'en convaincre effectivement tout le monde pour nous
aider à les accroître.
Il demeure que durant l'année en cours, nous mettrons en chantier
près d'une trentaine de centres d'accueil. En grande majorité, ce
sont des centres d'accueil et d'hébergement pour les personnes
âgées qui entraîneront des déboursés de
l'ordre de près de $90 millions.
Déjà plusieurs de ces projets ont reçu le feu vert
par arrêté en conseil, en novembre, plus précisément
en 1974, en février et en mars. D'autres projets, puisqu'il s'agit
là d'un processus administratif qui est malgré tout assez
compliqué, d'autres projets seront bientôt l'objet d'approbations
similaires au printemps et à l'automne.
Ce qui nous permet d'envisagerque l'ensemble des projets annoncés
il y a déjà quelque temps, et pour lesquels une programmation
très détaillée a été préparée
dans l'intérim, l'ensemble de ces projets, dis-je, seront donc
exécutés, amorcés au moins, à l'intérieur de
l'exercice financier 1975/76.
Outre ces réalisations, le ministère travaille à
l'élaboration d'un second plan de développement des centres
d'accueil, d'ailleurs dont les échos ont transpiré, je crois,
dans la presse, durant les derniers mois, et qui impliquent des
déboursés encore plus considérables, pas seulement dus
à l'inflation mais parce que le programme en lui-même, dans ses
dimensions, sera plus considérable. Les objectifs que vise le
ministère des Affaires sociales dans tout ceci sont bien connus: assurer
une accessibilité égale dans toutes les régions du
Québec à des services d'hébergement pour des personnes
âgées, pas seulement à des services d'hébergement,
mais également à des services de centres de jours.
Le député de Saint-Jacques soulignait que j'avais
visité cette semaine, dans son comté, un centre de jour qui s'est
développé un peu en marge d'un centre d'accueil, mais tous les
centres d'accueil qui vont désormais démarrer vont comporter un
centre de jour. C'est le cas de tous ceux qui seront amorcés cette
année et dans les années futures, de manière à
permettre à ces personnes de rester dans leur mi lieu de vie naturel et
de bénéficier, malgré tout, d'un certain appui. Cet appui
vient non seulement du centre de jour, mais aussi des services connexes que
développent, en priorité, les CLSC qui déjà
consacrent à des services à domicile, à des programmes
particulièrement dirigés vers les personnes âgées
une partie significative de leurs ressources.
Donc, ce sont des éléments de fait qui, je pense, doivent
être cités puisqu'on a porté un blâme à
l'endroit du ministère des Affaires sociales et du gouvernement qui,
à mon avis, à ce moment-ci, n'est pas justifié. Bien
sûr, on peut déplorer la situation de carence qui va demeurer tant
que ces ressources nouvelles ne seront pas, effectivement,
complétées, mais, au moins au niveau des intentions très
concrètes, il y a déjà des réalisations et des
faits très positifs.
Les autres points sur lesquels le député de Rouyn-Noranda
a attiré notre attention sont des points sur lesquels nous devrons nous
renseigner davantage. Je pense en particulier à ce problème des
diététiciennes. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un
problème budgétaire cependant, car des stages de
perfectionnement, qui sont incorporés dans des programmes de formation
professionnelle n'impliquent pas comme tels des budgets, puisque ce sont des
stages qui sont faits sans rémunération en règle
générale, étant donné qu'ils sont des
périodes de formation beaucoup plus que des périodes de
prestation de services. Quant à sa suggestion...
M. Samson: M. le Président, est-ce que le ministre me
permettrait, puisqu'on parle des diététiciennes? Si j'ai bien
cornpris les lettres que j'ai reçuesà ce sujet, ce sont les
hôpitaux qui ont mentionné ne pas avoir les budgets
nécessaires. Ce n'est peut-être pas une question de salaire aux
diététiciennes, mais c'est peut-être un manque de budget
qui fait qu'on ne peut pas s'assurer de leurs services. Il me semble que le
sous-ministre, le Dr Brunet, est au courant de la situation.
M. Forget: Comme je l'ai indiqué, nous allons nous
informer plus en détail de la nature du problème, mais des
argumentations basées sur des difficultés budgétaires,
lorsqu'il est question simplement d'admettre dans un établissement des
personnes qui veulent compléter leur formation par un stage, simplement
pour observer ce qui se fait, je com prends qu'on peut vouloir s'en servir pour
obtenir de plus g rands budgets. Je ne pense pas q ue ce soit une raison
valable, indépendamment du fait de la
rémunération. Il peut y avoir d'autres difficultés
ou même des difficultés connexes, mais j'aimerais avoir plus de
détails avant de vous faire une réponse complète.
M. Samson: Est-ce que le ministre me permettrait une question?
Est-ce qu'au ministère vous avez reçu de ces lettres des
étudiantes d'université?
M. Forget: Non, nous n'en avons pas entendu parler jusqu'à
maintenant. Université ou CEGEP?
M. Samson: Université. M. Forget: Les CEGEP?
M. Samson: Non. L'Université d'Ottawa. Des gens du
Québec. Si le ministre le permet, cet après-midi, je lui
apporterai une copie de lettre.
M. Forget: C'est très différent si c'est CEGEP ou
université.
M.Samson: Je vous en apporterai une copie cet après-midi
et on verra.
M. Forget: II y a l'internat pour les
diététiciennes qui ont fini leur cours au niveau universitaire.
Parce qu'au niveau collégial on a des contrats avec le
ministèrede l'Education. Habituellement, il n'y a pas de problème
pour les stages cliniques. ll peut y avoir des difficultés
occasionnelles, mais il y a des contrats en bonne et due forme et les processus
administratifs et financiers sont inclus. Maintenant, il y a le problème
des diététiciennes de niveau universitaire qui doivent faire une
année supplémentaire comme internes dans certains
hôpitaux.
M. Samson: C'est celles-là.
M. Forget: L'internat se fait à Montréal. Il y a
maintenant des stages, à Québec, à l'hôpital
Saint-Sacrement. Mais c'est possible, s'il y a des étudiants de
l'Université d'Ottawa, qu'ils aient des problèmes.
M. Samson: Oui. Ce sont ceux-là. Alors, je vous apporterai
une copie de lettre pour vous donner plus de détails.
M. Forget: Je n'en ai pas reçu, quant à moi.
Enfin, comme dernier point, M. le Président, le
député de Rouyn-Noranda a fait une suggestion relativement
à l'aide sociale.
Les membres de la com mission se souviendront que, l'an dernier, une
pochette d'information leur a été distribuée sur le
fonctionnement de l'aide sociale, les règlements, l'organisation,
l'administration de l'aide sociale, qui visait précisément
à familiariser avec tout cela non seulement les députés,
mais évidemment leurs secrétaires de comté qui ont, au
jour le jour, à faire face à des demandes, pour les aider
à effectuer leur travail. J'avais indiqué, à ce
moment-là, qu'il était normal q ue le député dans
son rôle, dans le rôle traditionnel qu'il assume vis-à-vis
de ses commettants et l'ensemble de la population de son comté,
reçoive toute l'aide possible pour vraiment diriger ces demandes et ces
appels d'aide ou de révision par les canaux les plus
appropriés.
Donc, je crois que cette suggestion, dans le contexte des efforts qui
ont été entrepris dans le passé, sera examinée de
manière à voir, à la lumière d'autres
recommandations ou d'autres suggestions qui seront sans doute faites au cours
de l'étude des crédits, portant spécifiquement sur l'aide
sociale, dans quelle mesure il est possible d'améliorer encore les liens
qui doivent exister entre tous ceux auxquels le public a à faire et les
bureaux du ministère des Affaires sociales qui administrent nos
programmes.
Il est clair que l'information doit être accessible, et je crois
que nous avons l'intention d'utiliser tous les moyens possibles pour la rendre
accessible.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 1,
élément 1. Allocations familiales. Le député de
Saint-Jacques.
Allocations familiales
M. Charron: M. le Président, je vais chercher d'abord
quelques indications d'informations qui pourraient me manquer. Est-ce qu'il
existe, auprès du ministre, un tableau plus récent que celui que
j'ai en main, qui date de septembre 1974 et qui illustre la répartition
du nombre d'enfants par famille et par âge? C'est le plus récent
que je puisse avoir.
Je crois, M. le Président, si nous faisons toujours preuve de la
souplesse que l'on aeuedansladiscus-sion des programmes, que
l'élément que vous venez d'appeler, Allocations familiales, se
retrouve en fait sous un secteur qui porte un nom beaucoup plus vaste et qui
s'appelle la politique de soutien du revenu familial du ministère, qui
devrait nous donner l'occasion, ici, d'avoir quelques échanges, comme
nous l'avons fait l'année dernière, sur une politique de la
famille et aussi, puisque le ministreaeu l'occasion de prendre position sur ce
sujet au cours de la dernière année financière, la
politique de natalité du gouvernement du Québec, dont le
principal responsable demeure encore, jusqu'à nouvel ordre, le
ministère des Affaires sociales.
Mais je m'en tiendrai, pour l'instant, à l'élément
que vous avez appelé, soit la discussion des allocations familiales. Je
vais commencer par dire que, quant à moi, malgré toutes les
critiques que nous serons peut-être appelés à faire
à l'occasion sur l'administration proprement interne du
ministère, sa lenteur, parfois son blocage, il faut souligner que nous
commençons ici par une exception ou, si vous voulez, par un cas
exceptionnel, contrairement à ce que souvent l'Opposition est
appelée à faire, c'est-à-dire que nous soulignons
l'excellente administration du système d'allocations familiales du
Québec par la Régie des rentes. Comme on le sait, c'est vraiment
une des sources d'émission de revenu à la population qui
fonctionnent le plus régulièrement, sans difficulté et
aussi, il faut le dire, avec le plus de justice.
Tous les citoyens, sauf les assistés sociaux, ont reçu les
bénéfices complets de la loi que nous avons
votée au début de cette Législature, en 1973, et
l'administration de cette loi s'applique, à mon avis, sans
difficulté.
M. le Président, les crédits que nous sommes
appelés à voter à l'élément Allocations
familiales passent cette année de $97.4 millions à $102.1
millions, soit une augmentation de $4.7 millions.
Je voudrai s demander simplement aux administrateurs si, dans les
prévisions, ces crédits ont été établis en
tenant compte du nombre de nouvelles naissances prévues pour
l'année 1975/76. Qu'est-ce qui a permis d'établir ce calcul
différent?
M. Forget: M. le Président, j'aimerais, avant qu'on fasse
des réponses à ces questions, faire ce que j'avais l'intention de
faire tantôt et je l'ai oublié. Je voudrais faire distribuer trois
documents pour l'information des membres de la commission. Un sur I aide
sociale, un autre sur les CLSC et un autre sur le programme de garderies. Ces
trois documents sont disponibles en nombre de copies suffisant à tous
les membres de la commission. Cela pourrait probablement
accélérerou, du moins, éclairer les travaux de la
commission. J'ai également, ici, un document que je pourrais faire
circuler quitte à le faire reproduire avant, bien sûr, et qui
constitue, je pense, une réponse à la question de tout à
l'heure du député de Saint-Jacques relativement au nombre de
familles, au nombre moyen d'enfants par famille, à la répartition
des familles selon le nombre d'enfants de mars à décembre I974.
Ce sont donc des chiffres plus récents...
M. Charron: Bon, c'est plus récent que ce que j'avais.
M. Forget: ...que ceux qui sont disponibles dans les publications
à cause des délais de publication.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Documents
déposés.
M. Forget: Pour ce qui est des prévisions quant au nombre
d'enfants.. Pour ce qui est des effectifs, je pense que nous arriverons,
finalement, à la réponse. Le nombre total d'enfants
âgés de 0 à 17 ans a été estimé pour
les fins de la préparation de ces crédits, au 30 juin 1974,
à 2,062,100; au 30 juin 1975, à 2,019,300 et, au 30 juin 1976,
à 1,976,800. Il s'agit de simulations et de prévisions
démographiques établies par le ministère des Affaires
sociales dans le cadre de ses prévisions démographiques du
programme Medics.
M. Charron: Ces prévisions sont faites en calculant des
sorties à 18 ans mais des entrées à 0. Prenons le chiffre
que vous venez de me donner, M. le ministre, pour le 30 juin I975.
M. Forget: On me dit qu'on ne prévoit aucune diminution
dans le taux de natalité. La diminution dans le chiffre total est due au
fait que la classe des 18 ans qui quittent est plus considérable que la
classe des 0 à I an.
M. Charron: Oui.
M. Forget: Pour ce qui est du taux de natalité... M.
Charron: C'est cela.
M. Forget:... c'est le même taux qui est projeté
pour 1975 et 1976, que celui observé pour les années
immédiatement antérieures.
M. Charron: J'avais, en septembre I974 encore une fois, je
me réfère au seul document que j'ai pour l'instant 8I,9I9
enfants qui n'avaient pas encore un an, donc nés au cours de
l'année de septembre 1973 à septembre 1974. Combien en
prévoit-on pour 1975? Vous me dites à peu près la
même chose, 81,000.
M. Forget: Ce serait peut-être un chiffre différent
qui serait basé sur un taux de natalité identique mais
peut-être appliqué à une population de ménages
légèrement différente, en tout cas.
M. Charron: Le taux de natalité est à q uoi,
actuellement, tel que calculé par le ministère?
M. Forget: 14.9%. M. Charron: 14.9%.
M. Forget: Mais tout ceci sous réserve de
vérification.
M. Charron: Oui.
M. Forget: Ce sont des chiffres que l'on cite de
mémoire.
M. Charron: II est à 14.9%. Est-il exact qu'il
était à 13.8% en 1972?
M. Forget: II y a eu une hausse, je pense, de I972 à 1973.
Il y a eu une hausse, oui.
M. Charron: II y a eu une hausse.
M. Forget: Oui, à cause du plus grand nombre de femmes en
âge de procréer.
M. Charron: Oui, d'accord.
M. Samson: Les connaissez-vous toutes?
M. Charron: Le taux de 14.9%, que vous venez d'affirmer, M. le
ministre, constitue-t-il toujours le taux le plus bas au Canada, dans les
provinces canadiennes? Il l'est toujours?
M. Forget: Sous réserve de vérification, il s'agit
de point après la décimale. Je ne pense pas que la position
relative du Québec aitsubi de modifications très sensibles,
durant les quelques dernières années, mais j'aimerais mieux
vérifier avant. On pourra le faire et vous transmettre les
données cet après-midi.
M. Charron: Quel montant, sur la somme totale que nous sommes
appelés à voter à l'élément 1, se
trouve avoir été prévu pour l'augmentation qui
surviendra le 1er janvier 1976? Je sais qu'on ne connaît pas d'avance
l'indice à partir duquel on indexera l'allocation familiale, puisque le
calcul...
M. Forget: On a prévu une hausse de l'indice, au 1er
janvier 1976, de 8%, comparativement à 10.4% pour le 1er janvier 1975,
l'indice des rentes.
M. Charron: Est-ce qu'on peut dire tout de suite que ces 8% vont
être également le taux prévu à tous les autres
calculs d'indexation, par exemple, l'aide sociale tout à l'heure? Est-ce
que c'est le taux uniforme?
M. Forget: Ce serait une hypothèse logique et c'est
probablement celle qui a été faite. Oui, c'est ce qu'on a
fait.
M. Charron: Ce qui veut dire qu'il est possible d'avoir un budget
supplémentaire encore, en cours de route, si les 8% se sont
avérés insuffisants?
M. Forget: Dans tous les programmes, comme on sait, qui
comportent, en vertu de la loi, une réglementation, des barèmes
établis et où l'élément de variabilité
découle de la clientèle qui n'est pas absolument
prévisible dans le cas des allocations fami-liales, c'est plus
prévisible qu'autre chose, bien sûr, mais dans le cas de l'aide
sociale, auquel nous vien-drons dans quelques minutes ou dans quelques heures,
il s'agit évidemment d'une clientèle qui est sujette à des
fluctuations il est clair que, dans tous ces cas il s'agit de
programmes qu'on appelle ouverts, en quelque sorte si c'est
nécessaire, à cause d'une variation dans la clientèle ou
d'une imperfection dans la prévision de l'indice des prix à la
consommation, il est clair qu'il faut s'attendre à un budget
supplémentaire.
Je ne crois pas que ce soit, malgré tout, le cas d u
côté des allocations familiales, encore que ce soit...
M. Charron: L'année dernière, M. le ministre,
l'indexation survenue en janvier 1975, celle de l'année fiscale
écoulée, a été de 10.4%?
M. Forget: Oui.
M. Charron: Dans le calcul précédent, comme celui
auquel on se réfère, elle avait été prévue
à combien?
M. Forget: Dans le calcul précédent, elle n'avait
pas été prévue comme telle, puisqu'on se souviendra qu'en
janvier 1974, ce n'est pas une indexation qui est survenue mais...
M. Charron: Une augmentation.
M. Forget: ...un changement de toute la structure. On est parti
à zéro, en quelque sorte, en 1974, avec un nouveau régime
d'allocations familiales. Et la première fois où l'indexation
pouvait s'appliquer, c'était en janvier 1975.
M. Charron: Oui.
M. Forget: Alors, c'est le premier taux d'indexation.
M. Charron: Cela peut aller pour trois mois, les trois derniers
mois de l'année fiscale. Vous n'aviez à prévoir comme
indexation à fournir...
M. Forget: Dans les crédits de l'an dernier, seulement
janvier, février et mars 1975.
M. Charron: Mais, quand même, il devait y avoir un taux
prévu, puisque la loi comportait...
M. Forget: Qui avait été prévu, oui.
M. Charron: ...l'engagement d'indexer au 1er janvier 1975.
M. Forget: Vous avez raison. Mais c'était 10%. M. Charron:
C'était 10% et cela a été 10.4%? M. Forget:
Oui.
M. Charron : Cette année, c'est 8% de prévu ; cela
va être 12% probablement, ce qui nous permettra d'avoir une autre
discussion sur l'indexation, lors d'un budget supplémentaire.
J'ai peut-être ce renseignement dans les documents que vous allez
me faire parvenir, mais peut-être aussi qu'il serait bon de le
déposer dans la transcription de nos débats. Le nombre moyen
d'enfants par famille, en juin 1974, au Québec, était de 2.18.
A-t-il augmenté, est-il sensiblement le même?
M. Forget: C'est-à-dire que les chiffres que j'ai ici, qui
sont peut-être des chiffres corrigés par rapport à ceux que
vous avez, de 1974, indiquent que le nombre moyen d'enfants par famille
était de 2.166. En 1975, on estime qu'il sera de 2.082, donc une
diminution, et, en 1976, de 2.023. Il s'agit des enfants de moins de 18 ans;
les enfants selon la définition légale, évidemment.
M. Charron: Des allocations familiales?
M. Forget: C'est cela. Maintenant, pour ce qui est de la
distribution en pourcentage d'enfants selon le rang, il y a une modification
assez intéressante, je crois, qui mérite d'être
soulignée. Les enfants de rang 1 qui, en 1974, constituaient 46.2% de
l'ensemble des enfants admissibles aux allocations familiales en constitueront,
selon les estimations qui sont faites, dans le contexte actuel, 49.4%, donc une
augmentation de 3.2%, de 3.2 points de pourcentage sur ces deux ans.
Et les enfants de rang 4 passeront de II.3% en I974 à un
pourcentage estimé à 8.9% en I976. C'est une autre façon
de représenter la diminution de la taille moyenne des familles.
M. Charron: D'accord.
La participation fédérale au plan d'allocations familiales
se fait en vertu d'une loi fédérale, bien sûr. Le ministre
est-il au courant, à travers des contacts qu'il doit
nécessairement avoir avec le ministère
fédéral, s'il est possible que du côté
fédéral on bouge, quant à la participation proprement
fédérale, qu'il y ait des modifications au cours de
l'année, qui seraient annoncées à la Chambre des communes
à un moment ou à un autre, qui feraient que le revenu total des
allocations familiales se trouverait modifié pour les
Québécois?
M. Forget: Bien, il ne m'appartient pas de dire pour le
gouvernement fédéral quelles sont ses intentions dans le domaine.
Mais ce que je puis indiquer, cependant, c'est que, dans le contexte des
discussions qui se poursuivent sur la révision de toutes les mesures de
sécurité du revenu, cette possibilité n'a pas fait l'objet
de discussions ou de propositions durant les récents mois.
M. Charron: L'administration proprement dite du régime, si
elle est bonne, comme je l'ai souligné tout à l'heure, elle est
coûteuse également, augmente de 23.53%, si le calcul est exact,
cette année par rapport à l'année dernière. Quelle
est la modification?
M. Forget: C'est une augmentation qui est attribuable largement
à des hausses de traitements et des hausses d'autres dépenses,
fournitures, etc., services d'ordinateurs, de postes, etc. Les traitements sont
haussés évidemment. Il s'agit essentiellement des dépenses
d'administration.
M. Charron: Oui.
M. Forget: Donc, il n'y a pas d'augmentation réelle, en
quelque sorte, dans les ressources qui sont consacrées. Ce sont surtout
les traitements.
M. Charron: Ce sont surtout les traitements.
C'est quand même plus considérable que partout ailleurs
où nous allons le retrouver au chapitre de l'administration. Je ne pense
pas que l'administration de chacun des programmes...
M. Forget: C'est-à-dire, attention! il y a une
augmentation dans le budget 1975/76, par rapport à la dépense
probable de 1974/75, de 9.1%.
Oui, il faut distinguer entre le budget original et le budget
révisé en cours d'année pour tenir compte notamment des
indexations de traitements. Ce qui fait que, par rapport à la
dépense probable, l'augmentation n'est que de 9.1%. Et le ministre
pourrait vous donner les deux facteurs qui...
Or, cela est normal, très normal...
M. Charron: D'accord.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Au très questions sur
le programme I?
M. Charron: Sur l'article réservé aux allocations
familiales, je n'en ai plus sauf que, comme je l'ai signalé
tantôt, j'aimerais bien ici, à ce programme, avoir une discussion
sur ce qui s'appelle la politique de la famille, la politique de
natalité. Si le député de Rouyn-Noranda ou d'autres ont,
sur les allocations familiales, des questions, je n'en ai plus.
M. Samson: Bien, M. le Président....
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Rouyn-Noranda.
M. Samson:... ce n'est pas nécessairement sur les
allocations familialesque j'aurais unequestion à poser mais je ne sais
pas trop où.dans l'étude des crédits, je dois poser ma
question. Je me demande si je ne serais pas mieux de la poser
immédiatement. C'est une question qui se rattache à une des
politiques de la Régie des rentes. Ce n'est peut-être pas long, je
peux peut-être vous la poser immédiatement.
Régime de rentes du Québec
M. Forget: En effet, ceque le présidentde la régie
me souligne et ce dont certains membres de la commission se souviendront, c'est
qu'étant donné qu'il s'agit là du seul programme qui a un
impact budgétaire dans les crédits approuvés par
l'Assemblée nationale, et que le président de la régie est
avec nous à cette oocasion en particulier, on peut très
commodément en profiter, en quelque sorte, pour éclairer les
membres de la commission sur le fonctionnement du régime de rentes,
étant donné qu'il ne s'agit pas d'un sujet qui ne vient jamais en
commission pour l'étude de crédits.
Je suis sûr que le président de la régie serait
à votre disposition pour répondre à des questions sur ce
sujet.
M. Samson: M. le Président, ce qui me préoccupe,
c'est le contenu d'une lettre, qui est parvenue au ministre le 20
février 1975, de la Provincial Association of Protestant Teachers of
Quebec. Ils écrivent en français, par exemple. C'est
peut-être l'inverse de la Régie des rentes!
M. Forget: On a un cas sur un million! C'est un assaut mutuel de
politesses!
M.Samson: M. le Président, voici ce qu'on y dit. Je pense
que c'est intéressant. Ces gens représentent des enseignants, des
retraités, des employés du gouvernement et des organismes
publics. Le paragraphe qui est important dit ceci: "II y a beaucoup de
publicité, récemment, dans les journaux, au sujet des amendements
au régime de rentes du Canada, lesquels permettent à toute
personne qui a 65 ans et plus d'obtenir un emploi à temps plein sans que
cela affecte ses versements en vertu du régime des rentes du Canada. Il
semble que le gouvernement du Québec n'a pas l'intention d'incorporer
une telle modification au régime de rentes du Québec ".
C'est là ma question, M. le Président. Est-ce qu'on
prévoit, en vertu du régime de rentes du Québec, permettre
aux personnes retraitées de gagner quelques dollars sans que ces dollars
soient directement affectés? Je pense qu'actuellement, si mes
renseignements sont bons, tout gain qui dépasse $1,100...
M. Forget: ...$1,300.
M. Samson: ...devient taxable à 50% directement.
M. Charron: M. le Président, puis-je ajouter, en
m'accrochant à la question du député de Rouyn-Noranda, que
nous avons eu cette discussion en Chambre? Nous avons proposé un
amendement à cet effet, qui visait le même objectif que celui du
député de Rouyn-Noranda, et l'amendement a été
défait par le gouvernement. Il s'agit peut-être d'une autre
occasion d'expliquer pourquoi, en répondant à la question du
député.
M. Forget: Volontiers. D'abord, un certain rappel historique est
indispensable pour expliquer convenablement et comprendre convenablement cette
situation. Le régime de rentes du Québec, sur cette question, n'a
pas subi de modification depuis son introduction en 1966. Si l'on
considère le point de vue qui est souvent défendu par ceux qui
critiquent cette disposition du régime, à l'effet qu'ayant
contribué à ce régime, ils ont acquis un droit à
une prestation qui soit inconditionnelle, quels que soient les revenus dont ils
puissent bénéficier d'une autre source, je crois que c'est un
argument qui n'est pas valable comme tel puisqu'à plusieurs
égards il a été jugé, premièrement, qu'une
rente qui n'avait pas commencé à être versée ne
constitue pas un droit acquis. Ceci est un argument peut-être plus
étroitement juridique qu'un argument d'équité. Mais il est
exact également que ceux qui ont contribué au régime
depuis le début n'espéraient pas un tel versement inconditionnel
puisque le régime ne leur a jamais promis un tel versement
inconditionnel. Au contraire, le Québec, en 1972, a pris l'initiative
d'une libéralisation des dispositions par lesquelles le montant de la
rente de retraite, entre 65 et 70 ans, est affecté par les revenus
provenant d'une autre source.
Il y avait, avant 1972, des dispositions beaucoup plus
sévères à cet effet que celles qui sont actuellement en
vigueur. Donc, les actions qui ont été prises en 1972 par le
Québec visaient à libéraliser cette mesure tout en la
retenant comme un des éléments originels du régime, un des
éléments qui font partie du régime depuis son
début. Ceci pour l'historique de la situation.
Il est clair que la disparité qui existe maintenant entre le
régime fédéral et le régime du Québec est
attribuable au fait que le régime, non pas fédéral dans ce
cas-ci, mais le régime du Canada, autre que le Québec, pour ce
qui est des rentes, a été modifié de manière
à supprimer entièrement cette mesure, l'an dernier.
La position que nous avons défendue dans tout ceci était
fort simple. Elle était la suivante: nous nous sommes, depuis 1973,
engagés dans un processus de révision de l'ensemble des mesures
de sécurité sociale. Sans aucun doute, ceci ne nous a pas
empêchés, dans certains cas, d'introduire des mesures de
bonification des régimes particuliers qui étaient compatibles
avec l'orientation générale des réformes qui semblaient
devoir se réaliser dans l'ensemble des régimes.
Sur ce point-là, nous avons différé la
décision plutôt que de la rejeter et c'est le point que
j'ai défendu à l'Assemblée nationale tenant compte
du fait qu'une analyse actuarielle quinquennale est en voie de
préparation à la date du 31 décembre 1974 et qu'il sera
nécessaire, à la suite de la réception de cette analyse
actuarielle, de revoir, dans son ensemble, le problème du financement du
régime de rentes et de la Caisse de dépôt, de
manière à assurer, dans le long terme, le maintien de
caractéristiques et d'objectifs jugés essentiels à ce
financement et qu'il faudra déterminer à l'occasion de cette
révision. Il faudra également juger, à la lumière
des développements qui vont se faire pendant la même
période dans les programmes de soutien du revenu, quelle est la part qui
doit être assumée par les régimes d'assurance sociale par
rapport aux régimes de soutien du revenu non contributoires, tels que
l'aide sociale ou d'autres régimes qui pourraient se développer
à partir de l'aide sociale ou à partir d'autres régimes de
soutien du revenu.
C'est dans ce contexte qu'il nous paraît plus approprié de
prendre éventuellement des décisions relativement à la
sécurité du revenu pour les personnes âgées et
à cette question de l'examen des gains. Ce n'est donc pas un refus qui
est basé sur l'absolue impossibilité de considérer
l'abrogation de cette mesure, mais il est clair que c'est une mesure qui ne
pourrait pas se faire isolément, qu'il faudra considérer dans
tout un contexte.
J'ai regretté que le régime de pension du Canada soit
modifié sur ce point au milieu d'un processus de révision de
l'ensemble des mesures de sécurité sociale. Parce que l'aspect
qui est visé, même s'il n'est pas sur le plan financier tellement
considérable dans son impact, est, malgré tout, très
fondamental quant à sa nature. C'est toute la différence qui doit
exister entre un régime contributoire, un régime d'assurance
sociale et un régime non contributoire. Il me paraît que la
relation qui existe entre les deux, particulièrement vis-à-vis de
la population des personnes âgées, n'est pas très logique
dans la situation actuelle et que la décision unilatérale, en
quelque sorte, du gouvernement fédéral d'amender cette
partie-là du régime de la sécurité de la vieillesse
n'est pas particulièrement heureuse dans ce contexte d'un manque
d'intégration de toutes les mesures de sécurité du revenu
pour les personnes âgées.
M. Samson: Est-ce que, compte tenu de l'étude qui semble
en cours, on peut nous informer d'une date possible à laquelle le
ministre pourrait suggérer certaines modifications?
M. Forget: Non, il est beaucoup trop tôt, M. le
Président, pour suggérer des dates. Il y a deux études
essentiellement qui devront se faire successivement. Il y a, d'abord, une
étude actuarielle qui est en cours actuellement et qui devrait
probablement être terminée vers le mois de juin de cette
année. Mais c'est une étude qui va devoir être
considérée très attentivement. D'ailleurs, dans d'autres
contextes, nous avons discuté des problèmes de financement
à long terme du régime, de financement de la Caisse de
dépôt, etc., de l'équilibre nécessaire entre les
régimes, encore une fois, de soutien de revenu et d'assurance
sociale.
Alors, toute cette question-là, à la lumière de
l'analyse actuarielle, devra être reprise,
rééiudiée. Dans l'intervalle, comme je l'ai
indiqué, il y a eu d'autres développements qui se sont
effectués, dans nos discussions avec les autres gouvernements canadiens
des provinces, comme avec le gouvernement fédéral.
Cette étude sera faite par le gouvernement, soit de façon
purement interne, soit par la création d'un comité qui aurait un
mandat plus large, comité d'experts, pour suggérer des mesures
appropriées au gouvernement. Donc, on ne peut pas, étant
donné toutes ces échéances, donner des indications
très précises quant aux dates, mais ce sont des questions
extrêmement importantes. J'ai déjà eu l'occasion, lors de
l'étude d u projet de loi amendant le Régime de rentes l'automne
dernier, d'exposer quelles étaient nos préoccupations dans ce
secteur. Je pourrais vous référer, peut-être, pour la
brièveté du débat, à ce qui a été dit
à cette occasion. Cela demeure entièrement ce que nous pensons,
même aujourd'hui. Mais il y a toute une série de questions qu'il
va falloir examiner, dont les implications sont très
considérables.
Maintenant, ceci doit quand même être
considéré dans le contexte général d'une
évaluation du Régime de rentes du Québec relativement au
Régime de pension du Canada. L'on tire des parallèles, encore une
fois, en s'aidant d'un élément du régime. On
considère de façon isolée ce en quoi et ce en quoi
seulement le Régime de rentes du Québec est moins
généreux que le Régime de pension du Canada. Or, c'est une
comparaison qui est fausse puisque dans l'ensemble, le Régime de rentes
du Québec est plus généreux pour une contribution
égale que le Régime de pension du Canada. Je rappellerai aux
membres de cette commission que l'élément forfaitaire qui est
versé aux veuves, aux invalides, etc., aux orphelins, est plus
élevé et par une marge importante, $60 de plus par mois, que ce
n'est le cas pour le Régime de pension du Canada. C'est une partie qui
est très importante et peut-être plus significative socialement
que ne peut l'être cette possibilité de gains additionnels pourdes
personnes qui, après tout, ayant ces autres revenus, cherchent, en
quelque sorte, à majorer des revenus au-delà de ceux qu'ils ont
déjà. La situation, socialement parlant, est beaucoup plus
pénible dans le cas des veuves, dans le cas des orphelins, dans le cas
des invalides et c'est ceux que le Québec a décidé de
privilégier dans l'ensemble des réformes qu'il a apportées
au Régime de rentes du Québec.
Je pense qu'il est un peu injuste, toute considération partisane
mise à part, de comparer le régime du Québec à un
autre régime, comme le régime du Canada. On pourrait faire
d'autres comparaisons en ne parlant exclusivement que des
éléments qui sont relativement moins généreux. Je
crois qu'il est de notre devoir de souligner, à tous ceux qui se
plaignent de ce fait, que les sommes qui pourraient être
consacrées aux personnes retraitées qui veulent conserver, en
plus d'un revenu d'emploi, un revenu de rentes qui n'a pas été
conçu pour s'ajouter à leur revenu mais pour s'y substituer quand
il fait défaut, que ces sommes sont consacrées à des
choses beaucoup plus prioritaires, à notre avis.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Saint-Jacques.
M. Charron: Je veux souscrire à la dernière partie
de la dernière intervention du ministre des Affaires sociales. Si le
député de Rouyn-Noranda et moi-même avons accroché
le grelot à un endroit où le bât blessait, ce
n'était certainement pas parce q ue nous voulions remettre en question
cette victoire constitutionnelle du Québec des années soixante.
Elle est pouvons-nous l'invoquer tout de suite, à la suite du
ministre une preuve, M. le Président, que les
Québécois, lorsqu'ils décident de s'occuper de leur
politique sociale, peuvent être à l'occasion, non seulement
capables de gérer leur propre politique sociale, mais aussi de faire
mieux que de laisser un autre gouvernement, laisser une autre
société, administrer et intervenir dans la politique de soutien
du revenu, en particulier des personnes aussi défavorisées ou
éprouvées que les veuves, les invalides ou les personnes
âgées. Certainement que le Régime de rentes du
Québec, victoire des années soixante, est un acquis pour le
Québec, constitue le meilleur régime que les
Québécois puissent espérer dans le contexte actuel. Mais
il y a cet anachronisme dans le régime de rentes qu'il nous fallait
expliquer parce que c'est le seul endroit, probablement, comme le dit le
ministre, où le Régime de rentes du Québec est moins
avantageux pour un Québécois âgé que le
régime canadien. Mais, mon Dieu, je souscris sans
hésita-tionà l'affirmation du ministredes Affaires sociales
Je dis que, si nous avions, par exemple, de nous-mêmes une
politique des allocations familiales dont le Québec serait uniquement et
totalement le maître d'oeuvre et de conception, nous avons
déjà fait la preuve à une autre occasion que ce
régime également pourrait être plus généreux
pour les Québécois que d'appartenir et d'être à la
remorque d'initiatives fédérales.
Là où nous ne le sommes pas et dans un endroit où
nous avons fait nos preuves non seulement par le talent d'administration que
nous y avons mis comme citoyens québécois, mais aussi comme
bénéfice à l'ensemble de nos concitoyens, il faut le
souligner avec emphase, je pense.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député
de Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, bien sur, quand le ministre
nous dit que le régime du Québec est plus généreux
que les autres régimes quant aux veuves, aux invalides, ces
gens-là, on ne peut qu'applaudir à cela, parce que je ne crois
pas que notre ambition québécoise soit d'être en
deçà de ce qui se fait ailleurs. C'est de tenter de faire mieux
que ce qui se fait ailleurs.
Mais je me demande, tout de même, quelle est la différence,
dans le domaine des 65 ans ou plus, entre le régime canadien qui couvre
les autres provinces et le régime québécois.
Comparativement, est-ce qu'on est plus haut ou plus bas? Je ne le sais pas.
J'aimerais peut-être que le ministre me donne des indications quant aux
montants versés aux 65
ans et plus. De quelle façon cela se compare-t-il avec les
autres?
M. Forget: Les prestations sont les mêmes, en vertu du
régime du Québec et du régime du Canada. Ce qui
intervient, c'est qu'entre 65 et 70 ans, au-delà d'un montant
d'exemption qui est d'environ $1,300, $1,320 effectivement, pour chaque dollar
de revenu gagné, découlant d'un emploi, par le
bénéficiaire ou la personne qui s'est retirée de l'emploi
qu'elle occupait et au titre duquel elle a fait ses contributions au
régime, sa prestation de rente est réduite de $0.50 par dollar
additionnel.
Etant donné le niveau de la prestation, il lui faut gagner
environ $4,000 par année pour ne plus avoir droit à aucune somme
de sa pension de retraite. Donc, il s'agit là d'un revenu qui s'ajoute
à sa pension de vieillesse, ce qui veut dire que nous avons une
personne, qui, entre 65 et 70 ans, a un revenu de $5,200 ou environ par
année, au moment où elle cesse de recevoir sa rente du
Québec.
Si elle a plus que cela, elle ne reçoit rien. Si elle a un peu
moins que cela, elle peut, quand même, garder une partie de sa rente du
Québec. Au niveau, simplement, d'une certaine justice sociale entre
différents groupes de population, évidemment c'est un montant qui
est passablement supérieur pour une personne âgée à
ce qu'il peut être pour toute autre personne.
L'argument utilisé, évidemment, viserait à donner
à cette personne qui a $5,200 de revenu une somme additionnelle au titre
du régime de rentes. C'est là que nous ne voyons pas une
priorité sur le plan des politiques sociales. Il est clair que
l'ambition du Québec ne peut pas être de donner moins, mais il est
clair également qu'on ne peut pas être différent
après tout, c'est la nature du problème que ce
régime-là puisse être différent en
n'étant jamais inférieur et en étant partout
supérieur, puisqu'on se compare, malgré tout, à des
régimes qui ne sont pas moins bien dotés financièrement
que celui que nous administrons.
Donc, il est clair que les différences, de façon
générale, sont parfois positives, parfois négatives et
reflètent des priorités différentes. Encore une fois, on
peut déplorer ces priorités, mais on ne peut pas parler des seuls
points où la différence est au désavantage de certains
bénéficiaires au Québec et monter en épingle ces
seules différences. Il faut aussi parler des autres.
Autrement, on a une image complètement faussée de
priorités différentes et qui continuent d'être, à
mon avis, les bonnes priorités d'un régime de soutien de
complément du revenu, sans entrer dans les distinctions entre
l'assurance et le soutien du revenu.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Jacques-Cartier.
M.Samson: Je m'excuse, M. le Président, je n'ai pas...
Le Président (M. Houde, Limoilou): II a tout simplement une
question, je pense.
M. Saint-Germain: Sur le même sujet, oui, si vous le
permettez. Dans toutes nos politiques sociales on essaie tout de même de
conserver, dans la population, la motivation au travail. Est-ce que vous ne
voyez pas là un élément qui enlève cette motivation
au travail pour un homme qui a atteint ses 65 ans et qui, en plus de son
impôt régulier, est taxé à $0.50 pour chaque dollar
gagné au-delà de la somme que vous avez mentionnée? Il
faut dire que c'est une perte de motivation, à mon avis, assez
considérable. C'est une taxe très élevée sur le
revenu.
M. Forget: Vous avez raison, mais il ne faut pas oublier que nous
partons de très loin pour ce qui est de ces motivations, étant
donné que pour presque tous les autres régimes, la taxe dont vous
parlez est de 100%. Une personne qui gagne $1 se voit diminuer ses allocations
de $1, sauf en une période de transition dans le cas de l'aide sociale.
Ce vers quoi nous voulons aller, c'est un régime qui serait aussi
généreux et aussi motivant, peut-être, que de ne diminuer
que de $0.50 les prestations sociales lorsque le revenu d'un emploi
s'accroît de $1. Mais nous sommes très loin de cette
situation.
Est-ce vis-à-vis de cette partie de la population qu'il faut
faire les plus grands efforts de motivation au travail, la population de 65
à 70 ans, alors qu'on sait très bien que ce problème se
pose avec beaucoup plus d'acuité vis-à-vis d'autres
clientèles pour lesquelles l'incitation au travail est beaucoup plus
réaliste, comme principe directeur de réforme, qu'il ne peut
l'être pour des gens qui sont déjà à leur retraite?
Il ne faut pas oublier que ces gens sont à leur retraite puisqu'ils sont
éligibles à la rente de retraite. Ils ont donc
décidé de quitter ou ils ont dû, pour toutes sortes de
raisons, quitter un emploi régulier à 65 ans ou à 66 ans
et ils veulent maintenant avoir un emploi qui n'est pas régulier, qui
est un emploi plus ou moins occasionnel et qui n'a pas de caractère de
permanence, sans aucun doute, dans la plupart des cas. Dans un très
grand nombre de cas, je crois que ce que nous constaterions, c'est que ceux qui
ont ces possibilités de gain après 65 ans sont des personnes qui
ont des revenus fort supérieurs à la moyenne. Ce sont des
professionnels, ce sont des personnes qui ne seront pas tout juste en haut des
$5,200, probablement, mais qui pourront très bien être à
$15,000 ou $20,000. S'il n'y a aucun examen des gains, en plus d'un revenu
professionnel fort élevé, il retirerait du régime de
rentes une pension complète.
Je ne suis pas convaincu q ue ce soit une priorité sociale et,
très certainement, on ne commet, à leur égard, aucune
injustice dans le moment puisque, pour les contributions qu'ils ont faites au
régime, ils n'ont jamais eu d'indication qu'ils pourraient obtenir une
rente de retraite complète entre 65 et 70 ans. Nous n'avons rien
changé, c'est le régime tel qu'il a existé et au titre
duquel ils ont fait leur contribution pendant leurs années de travail.
Ce n'est pas une injustice vis-à-vis d'eux et je ne vois pas que ce soit
une injustice vis-à-vis de ce qu'on fait à d'autres
personnes.
M. Saint-Germain: Mais, croyez-moi, au...
M. Forget: Ce qui ne diminue pas ce que j'ai indiqué
tantôt, c'est que ce problème, relativement à tout ce qui
peut intervenir au niveau des autres programmes de sécurité
sociale, la division nécessaire des tâches entre les programmes
d'assurance sociale et les programmes de soutien du revenu, fera l'objet d'une
réévaluation qui va impliquer beaucoup d'autres choses si l'on
regarde les problèmes de financement à long terme ou à
moyen terme de tout le régime de rentes qu'il faudra trancher, sans
aucun doute, au cours des prochains mois.
M. Saint-Germain: II reste tout de même, si vous le
permettez, M. le Président, qu'au point de vue politique ce n'est pas
facile à défendre, croyez-moi, surtout dans un comté comme
chez nous. Je comprends très bien, M. le ministre, quand vous dites que
ceux qui sont des professionnels ou qui ont des revenus très
élevés ne sont pas ceux qui font des pressions non plus, mais on
n'a pas tenu compte, dans ces discussions, de l'inflation qui a diminué
considérablement la pension du travailleur à revenu moyen. Il a
sa propriété, il a une certaine façon de vivre, il s'est
fié sur une pension et sur ses économies pour pouvoir maintenir
un minimum de niveau de vie et voilà qu'à $5,000, bien souvent,
il ne peut pas, à cause des temps inflationnistes, continuer le
même niveau de vie. Il est obligé de vend re sa
propriété. Les taxes municipales ont augmenté
considérablement et cette différence est très importante
pour une bonne partie de ces gens qui travaillaient dans les usines, et ainsi
de suite.
D'autant plus, je crois, que les sommes impliquées, si mes
informations sont bonnes, sont minimes. C'est un problème politique, je
crois, mais qui pourrait être résolu avec quelques dollars
relativement aux sommes énormes qui sont versées par le
régime de retraite. Cela impliquequoi? Je penseque cela n'implique
même pas $1 million, si je ne m'abuse. C'est très minime.
M. Forget: Encore une fois, je crois que c'est un problème
qui n'a pas été tranché pour seulement des
considérations financières. Que les sommes impliquées
soient considérables ou non, il reste que, si elles ne sont pas
considérables, elles n'aideront pas grand monde. Si elles le sont, elles
posent le problème très carrément. En tout état de
cause, ceux qui ont les problèmes auxquels vous venez de faire allusion,
les problèmes de rentes de pension privée, par exemple, qui ne
sont pas indexées, qui deviennent insuffisantes, il reste que la
proposition, telle qu'elle est faite, de supprimer le test de gains va aider
finalement ceux qui ont d'autres ressources plutôt que d'aider ceux qui
n'en ont pas et ne sera pas un facteur pour aider ceux qui en ont le plus
besoin, malgré tout. C'est plutôt le contraire. Donc, même
si l'on peut s'appitoyer, et avec raison, sur le sort de ceux qui prennent leur
retraite et qui, pour toutes sortes de raisons, ont des revenus insuffisants,
donner plus d'argent à ceux qui ont des possibilités de revenus
autres n'est pas nécessairement la meilleure façon d'aider ceux
qui en ont le plus besoin et qui ne sont pas capables, peut-être parce
qu'ils ne peuvent pas prendre un emploi après 65 ans, d'avoir des
sources de revenus autres. Le problème que vous posez est
véritablement un problème, enfin il y a de nombreux
problèmes que vous soulevez dans votre intervention, c'est un
problème de soutien du revenu des personnes âgées; c'est un
problème aussi de l'insuffisance, peut-être, des régimes
privés et des régimes supplémentaires privés. Ce ne
sont certainement pas deux problèmes qu'on peut résoudre à
l'intérieur du régime de rentes tel qu'il est conçu.
Maintenant, pour ce qui est du coût, on m'indique qu'il s'agit
d'un coût de 5% à 6% du régime, en longue période,
que cette abolition de l'examen des gains. Donc 5% à 6%, même si
ce ne sont pas des pourcentages très élevés, cela se
traduit par des sommes absolues qui sont assez considérables en longue
période.
M. Saint-Germain: Pourriez-vous nous donner, cette année,
la somme que tout ceci a impliqué? Combien a été .
retourné au gouvernement?
M. Forget: Là, il faut faire attention. Si vous songez aux
sommes qui sont récupérées de ceux qui ont
travaillé, cela n'est pas très élevé.
M. Saint-Germain: Oui.
M. Forget: Je pense que cela peut se situer, pour l'année
1973, peut-être à $400,000 ou $500,000. Mais ce n'est pas cela qui
est le coût, parce que je ne veux pas me prononcer sur le fond du
problème, je veux simplement donner des faits le coût c'est
que, si vous enlevez le test, tout le monde, à 65 ans, a sa pension. On
ne peut pas se baser simplement sur les sommes récupérées
pour évaluer le coût.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Alors la commission
suspend ses travaux àquinze heures et la parole sera au
député de Rouyn-Noranda.
(Suspension de la séance à 12 h 19).
Reprise de la séance à 15 h 14
M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente des
affaires sociales): A l'ordre, messieurs!
L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, ce matin, au moment de la
suspension, nous en étions à discuter du problème
occasionné par le fait que la Régie des rentes du Québec
n'a pas ajusté son programme au régime de pensions du
gouvernement fédéral en ce qui concerne la possibilité,
pour un assisté, de gagner de l'argent en plus de l'allocation de la
Régie des rentes.
Cependant, qu'il me soit permis d'ouvrir une parenthèse, parce
que, ce matin, avant d'en arrivera ce problème, j'avais mentionné
au ministre un problème qui nous avait été soulevé
par des étudiantes en diététique à
l'Université d'Ottawa, mais qui sont des gens du Québec.
Pour mieux faire comprendre la situation, j'ai quatre photocopies d'une
lettre, mais j'en ai cinq ou six qui ont exactement le même texte. Alors,
qu'il me soit permis de remettre au ministre copie de ces lettres pour
considération.
Pour en revenir au problème qui était soulevé au
moment de la suspension, le ministre nous a fait comprendre, ce matin, que la
Régie des rentes du Québec avait, dans ses programmes, un genre
de compensation, c'est-à-dire que, par exemple, pour les veuves, les
invalides, nous étions plus généreux au Québec que
l'est le régime de pensions du Canada.
Alors, ce que je voulais poser comme question, c'est: Dans quelle
proportion le ministre peut-il nous dire, suivant les renseignements qui sont
à sa disposition, qu'il n'y aurait pas dans les autres provinces des
programmes compensatoires? Si on compare la Régie des rentes du
Québec au régime de pensions du Canada, si on se considère
plus généreux pour les veuves et les invalides, est-ce que, dans
les autres provinces, il n'y a pas un système compensatoire qui fait
que, dans le fond, notre générosité n'est que technique
comparativement aux autres provinces? C'est le genre de question que je voulais
poser.
S'il y a des programmes compensatoires, comme mes informations
l'indiquent, à ce moment-là, la générosité
manifestée par le ministre ce matin perdrait un peu de sa valeur.
Dans un autre ordre d'idées, pendant que le ministre va consulter
ses fonctionnaires, il me sera peut-être permis de souligner que les gens
au-dessus de 65 ans se trouvent à perdre, si vous voulez, 50% de la
valeur de leurs gains dépassant $1,320 par année. C'est bien cela
que j'ai compris ce matin, ces gens perdent des gains. Mais il reste que les 5%
ou les 6% dont le ministre a fait mention, si nous ajustions notre
régime à celui du Régime de pensions du Canada, le
ministre a dit qu'il en coûterait 6% de différence. Moi, je
considère que ce n'est pas 6% de plus, mais parce que nous n'avons pas
ajusté notre régime à celui du Canada, le gouvernement du
Québec, c'est-à-dire la Régie des rentes du Québec
économise 6% de ce qu'elle devrait normalement donner.
M. Charron: C'est une façon de voir cela.
M. Samson: C'est peut-être une façon à la
Bourassa, oui! Le ministre nous a dit ce matin...
Mme Bacon: Est-ce qu'il faut la rire, celle-là?
M. Samson: Non, vous devriez la pleurer!
Le ministre nous a dit, ce matin, que ce n'était pas une
condition sine qua non parce qu'on paie des contributions à la
Régie des rentes, qu'il y a automatiquement une prestation qui va venir.
Mais là, si on ne se laisse pas entraîner sur le terrain
technocratique, on se rappellera qu'en 1966, quand M. Jean Lesage, alors
premier ministre du Québec, avait institué le régime de
rentes, M. le Président, c'est-à-dire en 1965, quand ils ont
préparé le plan, de la façon dont on l'a
présenté au public, ce n'était pas comme cela. Là,
je me place, si vous voulez, du côté du public parce qu'à
ce moment-là, j'étais de ceux qui n'avaient comme source
d'information que ce que voulait bien nous donner le gouvernement. Cela a
été présenté au public comme un régime de
rentes en lui disant: Vous allez contribuer pour une certaine somme annuelle
mais, à 65 ans, vous aurez de l'argent d'économisé, vous
aurez de l'argent... C'est comme cela qu'on nous l'a présenté, M.
le Président.
Evidemment, je ne peux pas accuser le ministre actuel de l'avoir
présenté de cette façon, ce n'est pas lui qui l'a
présenté. Il est là aujourd'hui, il a remplacé un
autre ministre, qui a remplacé un autre ministre. Il y a eu tout un
chapelet de ministres depuis ce temps. Mais il reste que le public, lui, quand
on lui a présenté ce programme, on le lui a
présenté de cette façon: on va vous cotiser malgré
vous autres, à la source, mais vous allez avoir quelque chose à
65 ans. Cela va être économisé pour vous autres, cela va
être là.
Ce qu'on a oublié de nous dire dans ce temps-là et ce que
je vais dire, c'est que l'argent que le public donne, c'est de l'argent qui est
prêté avec des intérêts et que les mêmes
montants d'argent que la population donne malgré elle depuis 1966, ces
mêmes montants, si on considère un jeune homme de 20 ans
jusqu'à l'âge de 65 ans qui aurait contribué pendant tout
ce temps constitueraient en banque beaucoup plus d'argent que la régie
ne lui en versera jamais.
Bien sûr, on va me dire que c'est un système du genre
assurance qui fait qu'il y a des risques. Il y en a qui vont contribuer moins
longtemps, il y en a qui vont contribuer plus longtemps, et c'est par
l'étude actuarielle qu'on arrive à établir des taux de
prestations. Maisjetrouve anormal etc'est pourquoi, ce matin, j'ai
posé ces questions, voulant me porter à la défense de ces
gens que même si on arrive à 65 ans et qu'on a droit
à des prestations de la Régie des rentes du Québec, si
l'on dépasse des gains de $1,320.00 par année, l'on coupe
automatiquement les prestations de la Régie des rentes du Québec
de
$0.50 dans la piastre. Je trouve cela absolument anormal.
Le député de Jacques-Cartier, qui n'est pas présent
mais qui était là ce matin, qui est un député
ministériel, se plaignait également du même
problème. Est-ce que c'est parce qu'on arrive à 65 ans qu'on n'a
plus le goût de travailler quand on est encore capable de le faire?
Est-ce que c'est parce qu'on est arrivé à 65 ans qu'on doit
décourager les gens au travail? Je dis non.
Et le ministre, dans son approche sociale, nous dit: II y a des gens qui
auraient un surplus de revenu à ce moment-là. Je dis que ce n'est
pas une approche sociale, c'est une approche socialiste, parce que ça
veut dire qu'on ne permettrait, en décourageant les gens de travailler,
à personne d'avoir un gain supérieur au chiffre fixé par
le système de la Régie des rentes.
Cela veut dire ce que je disais ce matin; cela revient à la
même chose. Dans ce domaine-là comme dans les autres, on veut
passer tout le monde dans le même tuyau, on veut un maximum qui ne
permettrait à personne d'aller plus loin. C'est là
décourager quelqu'un de son initiative au travail; c'est un
découragement général. Et l'approche humaine nous dit
ceci: II y a des gens qui, même à l'âge de 65 ans, doivent
continuer à occuper des fonctions.
Je ne sais si le ministre est au co'urant mais peut-être que le
sous-ministre, qui a eu certaines expériences dans ce domaine sait que,
si du jour au lendemain quelqu'un qui a travaillé toute sa vie pendant
40 ou 45 ans cesse de travailler, n'a plus d'occupation, le ministre a une
chance de ne pas l'avoir sur les bras bien longtemps à la Régie
des rentes, parce qu'il va crever vite. Dans le domaine pratique, c'est comme
ça que ça se passe. L'approche humaine, c'est ça. On ne
doit pas cesser nos activités aussi rapidement que ça. Cela doit
se faire de façon à ne pas changer le mode de vie d'une personne
trop rapidement.
Je dis que le ministère refuse de s'ajuster au régime de
pension du Canada, qui lui dit que toute personne âgée de 65 ans
et plus peut obtenir un emploi et n'est pas pénalisée. Et ce
régime, dans ses fonctions actuelles, permet à tous les citoyens
de 65 ans et plus du Canada, sauf de la province de Québec cela
fait quand même neuf provinces sur dix de se préparer une
retraite progressive, en n'étant pas pénalisés.
Pourquoi? Je veux bien croire que le ministre nous a dit qu'au
Québec nous avons peut-être des pensions plus
élevées pour les veuves et les invalides en vertu du
régime de rentes, mais pourquoi pénaliser ceux de 65 ans? Est-ce
que, selon une approche plus humaine, on ne pourrait pas avoir ces prestations,
qui sont qualifiées de généreuses par le ministre, mais
qui ne sont pas du tout qualifiées de généreuses par les
veuves? Est-ce qu'on ne pourrait pas avoir une approche qui permette de ne pas
pénaliser les veuves et les invalides, tout en ne pénalisant pas
ceux de 65 ans ou plus?
Dans le système actuel, tel que préconisé par le
ministre ce matin, chaque fois qu'on lui démontre qu'il y a une lacune
quelque part, il nous dit: Bien oui, c'est parce que nous en donnons plus
à l'autre classe de la société.
C'est là, je pense, permettre de générer encore une
fois une lutte des classes, parce qu'on tente de dire aux veuves et aux
invalides que, si on permet à ceux de 65 ans et plus d'avoir un certain
revenu sans les taxer, eux vont en avoir moins. C'est jouer sur
l'émotivité de la population et c'est préconiser
inconsciemment ou consciemment une lutte des classes.
Nous sommes capables de permettre, comme le fait le régime des
pensions du Canada, que les retraités de 65 ans ou plus ne soient pas
pénalisés.
S'ils gagnent $4,000 par année, même en étant
retraités, laissons-leur donc ce qu'ils vont gagner, M. le
Président. Laissons-leur donc cela. On les a quand même fait payer
pendant des années, ces gens.
C'est vrai que le régime de rentes existe depuis 1966 seulement,
mais d'ici quelques années, cela va faire plus d'années que cela
dure, cette affaire-là, puis les jeunes de 18, 19 et 20 ans, qui ont
commencé à payer, vont avoir déjà plusieurs
années de payées là-dedans. Quand ils vont voir ce que
nous faisons à nos personnes âgées, nous autres,
présentement, qu'est-ce que vous pensez qu'ils vont avoir, si vous le
voulez, comme objectif pour leurs vieux jours, ces jeunes?
Ils vont se dire: Avec la sorte de système dans lequel on vit,
plus on en donne pour se préparer une retraite, moins il va en rester
pour la retraite. C'est cela qu'on est en train de faire là. On est en
train d'établir publiquement qu'on nous soutire des cotisations à
la source pour préparer la retraite et que plus on nous soutire de
cotisations, plus il y a des dangers que la retraite soit plus mauvaise. C est
dans ce sens que j'ai préparé ce matin la question que j'ai
posée au ministre. La Provincial Association of Protestant Teacher's of
Quebec, qui écrit en français, nous dit qu'ils sont 9,000 membres
qui pensent de la même façon. Et puis, si vous alliez poser la
question à tous les citoyens du Québec, vous pourriez multiplier
les 9,000 membres par plusieurs fois, parce que plusieurs citoyens du
Québec pensent la même chose.
Nous avons des personnes retraitées qui trouvent des emplois leur
permettant d'avoir une nouvelle raison de vivre à cet
âge-là. Cela, c'est une approche humaine que vous ne retrouverez
pas dans vos machines IBM. C'est bien malheureux, mais vous ne trouverez pas
cela là-dedans. C est une approche humaine que nous retrouvons quand
nous côtoyons les humains. Ce sont des gens qui se trouvent quelque chose
à faire à cet âge-là, qui doit être un peu
rémunérateur, et ce quelque chose à faire, c'est le moteur
qui nous permet de vouloir continuer à rester en vie.
Puis, si vous ne l'avez pas, le moteur, je peux vous donner des noms, si
vous n'en avez pas, je vais vous en donner des noms de gens qui, un an
après avoir pris leur retraite, sont passés de l'autre
côté, deux ans après-avoir pris leur retraite sont
passés de l'autre côté... Si on leur avait permis à
ces gens de
continuer à occuper des fonctions et de se sentir
nécessaires dans la société, on aurait peut-être pu
prolonger leur vie de cinq, dix ou vingt ans.
Mais, malheureusement, encore une fois, le ministère des Affaires
sociales a une politique antifamiliale.
Je l'ai dit ce matin et, même si le ministre a
réfuté certains des arguments que j'ai soulevés, je
répéterai ce que j'ai dit ce matin s'il le faut parce que je suis
convaincu que j'avais raison de le faire. A ce chapitre, nous retrouvrons
autant la politique antihumaine du ministère des Affaires sociales parce
que nous cataloguons les individus, nous cataloguons les personnes humaines
comme des numéros dans une machine IBM.
C'est bien de valeur, mais, si on veut faire la promotion de notre
société, il va falloir que nous changions notre fusil
d'épaule un peu. Le ministre nous a dit: "Nous avons des études
actuarielles". Oui, d'accord, nous avons des études actuarielles, mais
on a déjà entendu cela. On a entendu cela chaque fois que le
ministère des Affaires sociales nous a présenté une
nouvelle loi: Nous avons des études en cours. Il y a des études
actuarielles, probablement, qui ont été confiées à
l'ancien ministre des Affaires sociales, mais l'ancien ministre des Affaires
sociales en avait fait, des études actuarielles, avant de devenir
ministre des Affaires sociales pour nous pondre un paquet de choses que la
population a presque rejetées, mais qui ont été
sauvées, finalement, par le jeu électoral.
Je vous assure que, si le ministre des Affaires sociales avait
été le seul à faire la dernière campagne
électorale, vous n'auriez pas eu 102 députés
libéraux; vous les auriez effacés complètement de la carte
électorale, à ce moment-là. C'est parce qu'il y a eu
d'autres ministres, d'autres ministères et surtout des stratèges
électoraux que vous avez eu gain de cause. Le ministre des Affaires
sociales et son ministère sont très impopulaires auprès de
la population et cela, que vous le vouliez ou non, c'est la
réalité présentement. Le ministre va me dire: Je ne suis
pas là pour être populaire. Je suis bien d'accord avec lui et,
d'ailleurs, il a fait la preuve que ce n'est pas ce qu'il voulait, non
plus.
Il reste une chose, la population du Québec est en droit de
s'attendre, au moins, qu'on donne justice à des gens qui sont
cotisés malgré eux. Si le ministre prétend que son
régime de rentes est tellement bien que la population peut l'accepter,
qu'il ose, pour un moment, permettre la liberté de contribution et je
vous assure que, quand il présenterait cette mesure il verrait des
demandes écrites chez les employeurs pour annuler les contributions au
régime de rentes du Québec. Mais non, vous n'oserez jamais
permettre la liberté de contribution; vous allez toujours continuer
à imposer, malgré eux, à tous les citoyens du
Québec une contribution au régime de rentes. Puisque c'est comme
cela, puisque c'est le système actuel, au moins, nous avons raison de
réclamer qu'on donne justice à des gens qui ont
contribué.
Les gens de 65 ans, c'est bien malheureux, mais, dans le système
actuel dans lequel le ministre se plaît à nager, dans ce
système-là vous allez conti- nuer, consciemment ou
inconsciemment, à faire la promotion de la déchéance de
notre population.
C'est ce que nous avons réclamé, ce matin, tel que cela a
été fait l'automne passé, quand il y a eu un projet
d'amendement à la loi de la Régie des rentes. Mais à ce
moment, je pense que je n'étais pas présent, je n'avais pas
l'occasion de l'être. Qu'est-ce que vous voulez, on n'était pas
tellement nombreux et on nous fait siéger souvent, vers les fins de
session, en Chambre et à deux commissions parlementaires en même
temps, on ne peut pas couvrir tout. On ne peut pas être partout à
la fois. Je m'excuse auprès du ministre, si je n'étais pas
là, à ce moment. Mais il reste une chose que même si je
n'étais pas là, le problème reste le même, il n'a
pas été réglé. Selon les réponses que nous
avons eues du ministre, ce matin, ce n'est pas par l'étude actuarielle
qu'ils vont régler le problème. Il semble que le ministre a des
préjugés contre ces personnes, parce qu'il a peur qu'elles
gagnent trop d'argent, à l'âge de la retraite.
M. le Président, quand une personne a vécu toute sa vie
avec un certain standing, ce n'est pas à l'âge de la retraite
qu'il faut lui casser ça. Il faut, au contraire, lui permettre de
continuer d'une façon raisonnable et normale. Aujourd'hui, il y a des
gens qui arrivent à l'âge de la retraite, à 65 ans, qui
gagnent le pain de la famille mais dont le conjoint a 57, 58 ans. Cela arrive,
c'est bien de valeur; vous changerez le ministre des Affaires sociales tant que
vous voudrez, mais vous ne changerez pas la nature. Les gens vont se marier
à l'âge qui leur plaira et les gens vont continuer à
choisir leur conjoint, selon leur propre choix, selon leur propre goût,
selon leur propre conviction, et non en fonction de l'âge, pour arriver
à la retraite au même âge tous les deux, pour avoir les
mêmes avantages en même temps. Vous ne changerez pas cela. Vous ne
changerez pas la nature. Ce qui fait que nous arrivons avec des situations
aussi absurdes que celle que nous trouvons présentement: un des
conjoints, qui gagne le revenu de la famille, à 65 ans, s'il gagne plus
que $1,320 par année, le ministère des Affaires sociales via la
Régie des rentes du Québec, coupe 50% de son revenu. Autrement
dit, M. le Président, s'il était permis de le dire si moi
je ne le dis pas, en tout cas, dans la population, il y a des gens qui
appellent ça un vol direct je dirais que c'est un vol direct de
$0.50 dans la $1, parce qu'on ne permet pas à ces gens de
récupérer l'avoir en considération du travail qu'ils
font.
Ce n'est pas parce qu'on a 65 ans, M. le Président, que c'est
plus facile de travailler. Au conttaire, c'est plus difficile, c'est plus
pénible. Quand c'est plus pénible, la Régie des rentes du
Québec va chercher $0.50 dans la piastre. Le ministre n'accepterait pas
cela qu'on aille lui chercher $0.50 dans la piastre de ses propres honoraires,
M. le Président, à moins que cela dépasse
évidemment, un certain chiffre. Qui accepterait, dans cette salle, de
son salaire de $4,000 ou $5,000 par année, s'il y en a qui gagnent cela,
qu'on aille lui chercher $0.50 dans la piastre?
Personne n'accepterait cela et pourtant le ministère des Affaires
sociales obligent les vieillards de 65 ans et plus à accepter qu'on leur
coupe $0.50
par dollar de leur gain parce qu ils ont osé travailler,
osé faire quelque chose pour la société passé
l'âge de 65 ans.
Je demande, en terminant, au ministre non pas de nous dire qu'il y
aurait une étude et que dans X années on aura peut-être des
réponses à nous donner, mais qu'il nous dise que le
ministère des Affaires sociales va se pencher sur ce problème
avec une approche humaine. C'est ce qu'on demande, on ne demande pas autre
chose que cela.
Quand le ministre risquera de se pencher sur ce problème avec une
approche humaine, vous allez voir qu'ils vont être traités de
façon différente. C'est tout simplement cela qu'on demande pour
nos personnes âgées, pour celles qui ont contribué à
bâtir le pays de peine et de misère.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable ministre
des Affaires sociales.
M. Forget: M. le Président, je ne veux pas me
répéter et répéter les arguments dont j'ai saisi la
commission ce matin, mais il demeure que le genre d'interventions dont nous
venons d'être témoins, témoignent, à mon avis, une
méconnaissance du régime de rentes et une méconnaissance
qui est sérieuse parce qu'il est, je pense, maintenant acquis que c'est
un régime qui rend d'immenses bénéfices, qui doit
continuer à en donner mais qui ne pourra pas le faire s'il est mal
compris et s'il est jugé en fonction d'objectifs qu'il n'a jamais eu
l'intention de réaliser.
C'est clair que l'objectif du régime de rentes était non
pas de résoudre tous les problèmes de revenu de l'ensemble de la
population mais, en tenant compte de ceux qui, normalement, tirent leur revenu
de l'occupation d'un emploi, de voir si certaines circonstances qui
entraînent l'interruption de ce revenu ne pourraient pas recevoir une
solution par un régime qui se substituerait au revenu perdu par le
décès, par la retraite, par l'invalidité. C'est le butdu
régimede rentes que de donner un revenude substitution à ceux qui
le perdent parce qu'ils quittent leur emploi principalement, bien entendu,
à cause de leur retraite.
Vouloir en faire un régime qui indépendamment du
fait qu'une personne occupe un emploi ou pas, a atteint ou non l'âge de
la retraite et continue ou non à occuper un emploi verse des
sommes d'argent à ces individus en fonction, à ce
moment-là, non pas, j'imagine, des contributions qu'ils ont faites au
régime et des revenus qu'ils n'ont plus puisqu'ils continueraient, par
définition, à les recevoir mais en fonction d'une
évaluation quelconque de leurs besoins, c'est vouloir en faire une
espèce de deuxième étage au régime d'aide sociale.
Je crois qu'il est important de maintenir la distinction entre les
régimes de soutien du revenu, qui cherchent à donner un revenu
minimum à des gens qui en sont privés, et des régimes
d'assurance sociale, qui cherchent à pallier une carence de revenus qui
intervient de façon prévisible lors de la retraite, lors du
décès, lors d'une invalidité et à continuer, dans
une mesure précise, dans une mesure qui n'est pas à 100% bien
sûr, mais à continuer ce revenu qui a été perdu
à cause de la retraite ou de l'invalidité.
Si l'on tient compte de cet objectif, on ne peut pas ne pas se rendre
compte également que ceux qui ont souscrit au régime de
façon obligatoire... certes, c'est un régime public, et les
raisons pour lesquelles c'est un régime public ont été
fort bien connues, fort bien publiées à l'époque, sont
généralement encore acceptées et s'il y a q uelq ue chose,
je ne crois pas que la population du Québec se pose des questions quant
au régime de rentes, mais, bien au contraire, quant au caractère
satisfaisant ou insatisfaisant des régimes supplémentaires de
rentes qui, à cause d u fait qu'ils sont liés à des
entreprises, à des employeurs dont le statut économique peut
être variable dans le temps, ne sont pas toujours en mesure d'offrir les
mêmes garanties de continuité à long terme qu'un
régime public. Je ne crois pas que même si ce choix était
offert à la population, de façon majoritaire, les
Québécois ne veuillent pas maintenir leur contribution au
régime et maintenir le régime lui-même.
Tout le monde sait que les contributions sont versées par le
régime de rentes non pas depuis la première année, mais
presque, depuis son introduction au Québec, c'est-à-dire
qu'à partir de janvier 1966, tous les travailleurs, au Québec,
ont fait des contributions au régime de rentes. Si nous avions
été dans un régime strictement privé, dans un
régime d'assurance strictement privé, je ne crois pas qu'il
aurait été concevable que des prestations soient versées
dès 1967, comme cela a été le cas. Donc, pour ceux qui ont
contribué, jusqu'à maintenant, il n'y a certainement pas eu
d'injustice, il n'y a certainement pas eu de taxation, de fiscalité. Ils
recevront, en temps et lieu, plus que leur contribution. Ils ont reçu,
déjà, plus que leur contribution, sur une base stricte, au
régime.
Il reste qu'à court terme et tant et aussi longtemps que le plein
impact des prestations ne s'est pas fait sentir sur le financement du
régime, du versement des prestations, des réserves ont
été accumulées, mais cela non plus, ce n'est pas un
secret. C'est une décision qui a été prise à
l'époque et dont on ne peut que se féliciter, étant
donné la contribution que fait cette réserve à
l'économie du Québec et donc aux revenus, y compris les sources
fiscales de revenu grâce auxquelles le niveau général de
vie des Québécois peut être amélioré en
longue période. Donc, c'est une contribution qui est, à tout
point de vue, positive.
J'ai indiqué ce matin que dans l'aménagement du
régime de prestations, des choix ont été faits. Nous
n'avons jamais et c'était le but d'avoir un régime
distinct pour le Québec, un régime de rentes distinct du
régime de pensions du Canada considéré qu'un
changement qui intervenait dans le régimede pensions du Canada devait
nécessairement entraîner des modifications dans le régime
de rentes du Québec. Je crois que si nous en venions à de
pareilles conclusions, il serait futile, dans un si grand nombre d'autres
domaines, d'argumenter, comme le fait parfois à l'occasion le
député de Rouyn-Noranda et comme le font à l'occasion tous
les membres de l'Assemblée nationale, en faveur de régimes
distincts, de régimes que nous administrons. Je n'accepte pas que l'on
base sur une simple comparaison des deux régimes une critique quel-
conque de celui que nous avons ici et qui, comme je l'ai dit et pour les
raisons que j'ai indiquées ce matin, ne peut pas être plus
généreux qu'un autre régime auquel on le compare sous tous
les aspects.
Les priorités que nous avons données aux rentes de veuve,
aux rentes d'orphelin, aux rentes d'invalide correspondent à des
priorités indiscutables, à mon avis, relativement à la
situation de personnes qui ont atteint l'âge de la retraite, qui sont
cependant dans une situation exceptionnelle de pouvoir continuer à
gagner des revenus d'emploi alors qu'effectivement elles sont à leur
retraite.
Et à ce titre-là, à ce titre d'employés, de
gens qui ont des revenus d'emplois, ils n'ont certainement pas, sur l'ensemble
des ressources de la régie, des droits prioritaires à une
assistance financière.
Je n'ai peut-être pas, M. le Président, toutes les
ressources du député de Rouyn-Noranda pour imaginer comment
et c'est peut-être parce que je ne comprends pas la doctrine du
crédit social il serait possible de donner plus à tout le
monde à même les prestations existantes. Si des choix doivent
être faits, ça implique nécessairement, non pas qu'on
fasse, comme il a dit, des luttes de classes, mais qu'on privilégie
certaines catégories de bénéficiaires par rapport à
d'autres. Encore une fois, privilégier les veuves, les orphelins, les
invalides, qui eux, certainement, n'ont pas de revenu d'emploi, ne me
paraît pas injustifiable par rapport à ceux qui, de façon
exceptionnelle, sont entre 65 et 70 ans et peuvent malgré tout avoir des
revenus d'emploi.
Je voudrais bien savoir à combien de Québécois ce
genre de mesure peut s'appliquer et à quel le catégorie de revenu
ils appartiennent vraiment. Je suis à peu près sûr que nous
constaterions, à ce moment-là, que nous n'avons pas affaire aux
plus défavorisés.
Il n'est pas question de décourager totalement, de toute
manière, cette catégorie de la population du travail. Il est
clair que ce n'est pas le régime de rentes qui décrète
l'âge de la retraite. Pour ceux qui maintiennent leur emploi
au-delà de 65 ans, est-ce que l'on irait jusqu'à dire que
même s'ils conservent leur emploi, après tout pourquoi faire de la
discrimination? Ce serait l'argument qu'on entendrait immédiatement. Si
l'on permet à des gens qui ont un deuxième emploi, un emploi,
disons, qui n'est pas celui qu'ils ont abandonné à 65 ans, si on
leur permet de retirer le plein régime de rentes alors qu'ils ont un
deuxième emploi à titre plus ou moins occasionnel, après
65 ans, pourquoi ne donnerait-on pas la même rente de retraite à
celui qui n'a pas abandonné son emploi, celui qui ne s'est pas
retiré à 65 ans? Qu'est-ce qu'on fait alors de l'objectif du
régime qui est de substituer un revenu d'appoint au revenu qui est perdu
au moment de la retraite?
On vicie complètement les objectifs du régime, et on
serait obligés de définir un autre objectif entièrement
nouveau et je serais bien en peine de savoir lequel. Je serais bien en peine de
savoir quel est le but véritable que l'on poursuivrait si l'on faisait
ça.
On a parlé des études actuarielles. J'y ai fait allusion
ce matin, j'aimerais bien préciser que les études actuarielles
auxquelles j'ai fait allusion sont celles déposées, en vertu de
la loi, tous les cinq ans et qui permettent à l'Assemblée
nationale, au gouvernement, d'évaluer si le coût du régime,
le niveau des prestations, la relation qui doit exister entre les deux sont
telles qu'on doive continuer sans changement le niveau des prestations ou si
l'on doit modifier l'un ou l'autre. C'est une exigence de la loi, c'est une
exigence dont s'acquitte la régie elle-même, à même
ses propres ressources professionnelles.
J'aimerais, en terminant, M. le Président, répondre
à une question que nous a été posée au début
de l'exposé du député de Rouyn-Noranda quant aux
différences du régime de rentes du Québec relativement au
régime de pension du Canada qui sont telles que le régime de
rentes du Québec est plus généreux relativement à
certaines catégories de bénéficiaires, si ces
différences-là ne sont pas compensées dans d'autres
provinces du Canada par d'autres mesures. Je peux lui affirmer qu'il n'y a pas
d'autres mesures dans ces autres provinces qui font l'équivalent de ce
que fait le régime de rentes du Québec pour les infirmes, les
veuves et les orphelins.
Il s'agit donc de mesures qui n'existent qu'au Québec, qui sont
particulièrement favorables. Bien sûr encore, nous entendons le
député de Rouyn-Noranda nous dire que ces montants ne sont pas
suffisants, que l'on ne fait pas assez pour les veuves et les orphelins. Je
veux bien, mais, encore là, à défaut de connaître la
clé en vertu de laquelle on pourrait faire rendre au régime plus
qu'il ne peut rendre, il faut bien se contenterdes ressources que nous avons et
le véritable problème qui est celui de la répartition
entre différentes catégories de bénéficiaires.
Je persiste à croire que les priorités qui ont
été traduites dans des dispositions législatives qui se
sont succédé tous les ans, depuis trois ans, sont les bonnes. En
effet, en 1972, en 1973 et en 1974 le régime de rentes a
été modifié. Je prétends qu'il a été
modifié à chaque occasion, de manière à le rendre
meilleur, à lui faire rendre un plus grand nombre de
bénéfices.
D'ailleurs, si ma mémoire est bonne, ces amendements, chaque
fois, ont été introduits par un vote unanime de
l'Assemblée. C'est donc dire que ce régime peut se modifier, il
peut s'améliorer. Mais il ne faut pas en ignorer la nature, les
objectifs, parce que, si on le fait, ce n'est plus un régime viable que
nous aurons; c'est un régime qu'il serait impossible de faire durer
à long terme.
On a entendu les inquiétudes à long terme du
député de Rouyn-Noranda quant à la possibilité de
financer à l'avenir, à cause de la chute du taux de
natalité, le régime de rentes. Je crois que les arguments qu'il a
employés dans la suite de son exposé contredisent un peu ses
inquiétudes, puisque vouloir faire rendre au régime dans
l'immédiat des bénéfices plus considérables, en
prétendant maintenir les contributions au même niveau, c'est se
faire une illusion.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, le ministre n'a pas tellement
compris, d'après ce que je peux voir, ce que j'ai dit. Nous n'avons pas
demandé quoique
ce serait normal qu'on le demande peut-être d'ajouter au
régime et d'augmenter les prestations. Nous avons tout simplement
demandé de ne pas les baisser. Cela, c'est différent et il faut
le voir sous cet angle. C'est ça que nous avons demandé de
faire.
Quant aux veuves, aux invalides et aux orphelins, je pense qu'il est bon
de souligner que ce qu'on fait présentement par le régime de
rentes vis-à-vis de ces catégories, le gouvernement aurait
été obligé de le faire autrement. Tout ce qui a
été fait, cela a été de transférer d'un
poste budgétaire à un autre les responsabilités.
Avant que vous ayez le régime des rentes, le gouvernement avait
quand même des responsabilités vis-à-vis des veuves, des
mères nécessiteuses, des invalides, des orphelins. Il a encore
ces responsabilités, mais avec cette différence qu'on va puiser
dans la caisse du régime des rentes à même des
contributions directes, qui sont des taxes directes de la population, les
bénéfices qu'on va donner à cette catégorie, alors
que, si ça n'était pas pris dans le régime des rentes, il
faudrait que ça soit pris dans le budget du ministère.
Je ne suis pas prêt à suivre le ministre dans son
argumentation technique; qu'on me transfère du tiroir A au tiroir B ou
au tiroir C ou D, ça ne me dérange pas, moi.
Ce qui m'intéresse, c'est de connaître les
résultats, les avantages ou les services, si vous le voulez, adonner
à la population. C'est dans ces termes que je suis
intéressé de poursuivre le débat.
Mais que le ministre passe le reste de l'après-midi à nous
dire: Bien oui, le tiroir A, il est différent du tiroir A
fédéral, mais il y a des programmes compensatoires, dans les
autres provinces, il y en a. Que le ministre nous dise qu'il n'y en a pas,
c'est bien de valeur, mais il y en a. Je demeure dans un comté à
proximité de l'Ontario, il y en a des régimes compensatoires.
Qu'il y ait une veuve ou qu'il y ait un orphelin dans les autres provinces, ne
vous inquiétez pas, ils ne les laissent pas crever dans les autres
provinces.
Cela ne veut pas dire qu'ils ont des systèmes parfaits non plus.
Je ne suis pas là pour défendre les systèmes des autres
provinces, mais il reste qu'on ne viendra pas me faire croire, moi, qu'on est
obligé d'aller récupérer $0.50 dans la piastre de chaque
personne âgée de 65 ans ou plus qui dépasse des gains de
$1,320, sous prétexte qu'on en donne peut-être un peu plus que le
régime fédéral en ce qui concerne les veuves ou les
invalides ou les orphelins, appelons cela comme on le voudra.
Il reste que, dans les autres provinces, ils ont aussi, M. le
Président, des responsabilités et, à ce que je sache, le
Québec n'a pas beaucoup de leçons à donner à
certaines autres provinces. Il y a peut-être des leçons à
donner à certaines provinces également, mais pas à toutes
les provinces. De toute façon, ce ne serait pas parce que c'est moins
parfait ailleurs qu'on doive s'arrêter et ne pas tenter d'obtenir un
meilleur rendement, c'est-à-dire un meilleur service chez nous.
Le problème de la sélectivité a été
soulevé tantôt par le ministre. Je pense que c'est là la
base de tout le problème. C'est la sélectivité. On a dit:
II ne faut pas en donner trop, parce que ces gens-là, ils ont un emploi,
peut-être qu'ils pourraient garder leur emploi, continuer, puis avoir un
régime de retraite en plus.
M. le Président, c'est ce que le ministre n'accepte pas,
aujourd'hui. Si on se reporte plusieurs années en arrière, on
s'apercevra que, dans le domaine de la sécurité de la vieillesse,
ces choses n'étaient pas acceptés non plus, des choses qui le
sont présentement. Vous avez une rente de base, au point de vue de la
sécurité de la vieillesse, qui provient du fédéral
qui est donnée universellement présentement.
Il y a, je ne sais pas, 20 ans passés, ce n'était pas
donné de la même façon. Il y avait une sélection, on
donnait cela aux miséreux. Il fallait faire enquête, il fallait
avoir un papier du curé, des ceci et des cela. Mais là c'est
changé. Même les millionnaires reçoivent la rente de base
de la sécurité de la vieillesse fédérale
présentement, le ministre sait cela.
Il y a un ancien premier ministre fédéral, qui est
décédé il n'y a pas tellement longtemps, qui retirait sa
rente de base comme tout le monde et à ce q ue je sache, moi, il
était moins miséreux que plusieurs familles le sont. Il y a un
ancien premier ministre fédéral qui vit encore, qui est à
Ottawa, qui retire aussi sa pension de vieillesse de la même façon
que les miséreux la retirent, puis à ce que je sache on ne va pas
lui enlever son chèque parce que présentement,
l'universalité est acceptée.
Puis s'il y a des gains qui dépassent un certain barème,
fiez-vous au gouvernement libéral du Québec puis au gouvernement
libéral d'Ottawa pour aller chercher la différence en impôt
sur le revenu. Ne vous inquiétez-vous pas là-dessus, ils sont
champions. Ils sont capables d'aller chercher la différence et ne vous
inquiétez pas, ils ne permettront pas d'aller trop loin. Mais, je
n'accepte pas, malgré la réplique du ministre, que le ministre
nous dise: On n'est pas comme le fédéral sur ce point de
vue-là, mais on administre nous-mêmes notre propre programme.
Imaginez-vous quelle conquête on a faite. On administre
nous-mêmes notre propre programme C'est vrai qu'on réclame plus
d'autonomie pour Ie Québec, je ne m'en cache pas de le dire, je vais
continuer à le faire, mais réclamer de l'autonomie pour le
Québec, réclamer des pouvoirs pour le Québec, cela ne veut
pas dire qu'on ne doive pas les utiliser.
Cela ne veut pas dire non plus qu'on doive pénaliser les
Québécois parce qu'ils ont récupéré des
pouvoirs. Dans le domaine de la Régie des rentes, on a
récupéré ce pouvoir; ç'aurait dû être,
initialement, un programme canadien applicable dans toutes les provinces. On a
crié victoire, on est allé récupérer cela.
Là, parce qu'on l'a récupéré, on va seulement se
contenter de dire: On l'a, c'est nous qui l'administrons, on a notre autonomie,
mais on n'est même pas capable d'atteindre le niveau
fédéral.
Quand on réclame des pouvoirs pour le Québec, qui
appartiennent au Québec, c'est parce qu'on considère que le
Québec doit décider lui-même de ses programmes. Mais cela
ne veut pas dire qu'on
doit être en deçà et en bas des autres. On est quand
même dans un Canada qui a le même standard de vie, qui est dans le
même continent que les Etats-Unis et on doit suivre, ou bien on risque
bien gros de se retrouver dans la position que dénonçait, en
1960, le premier ministre M. Lesage avant qu'il devienne premier ministre du
Québec. Il dénonçait cette situation avant de devenir
premier ministre du Québec et il est devenu, par la suite, premier
ministre du Québec et, à ce que je sache, c'est un
libéral.
Depuis que cela a changé, les choses qui étaient
dénoncées avant le changement sont demeurées les
mêmes, c'est-à-dire qu'on se contente de victoires morales.
Victoire morale: On a récupéré cela. Bien oui ! on a
récupéré cela, mais nos citoyens en reçoivent moins
et ils ont moins de services de par notre système à nous autres,
récupéré et autonome, qu'ils en auraient s'ils
étaient totalement des services canadiens. Cela, c'est inacceptable.
Qu'on ne vienne pas me dire qu'on regarde seulement un côté
de la médaille parce que dans les autres provinces, s'ils ne le font pas
directement par la Régie des rentes, ils le font autrement. Ce qui
importe c'est ce que je voudrais faire comprendre au ministre
c'est ce que nous donnons, ce que nous permettons aux citoyens d'avoir. Que
vous le passiez par une machine IBM, que vous le passiez par une étude
actuarielle, que vous le passiez par autre chose, M. Tout-le-Monde, ça
ne le dérange pas trop. Ce que vous faites dans votre ministère,
de quelle façon vous travaillez, ça ne le dérange pas
trop. Ce qui le dérange, c'est le résultat que ça donne,
ce que ça lui donne ou ce que ça l'empêche d'obtenir. C'est
ça qui dérange M. Tout-le-Monde et c'est ça qui
dérange les Québécois, présentement.
Je pense qu'on ne bloquera pas les crédits éternellement
pour cette question-là mais il reste qu'il va falloir que quelqu'un se
penche là-dessus et quelqu'un du gouvernement, pas seulement
l'Opposition. On est là pour dénoncer certaines choses, mais si
le gouvernement ne fait jamais rien... Bien sûr, on pourrait nous dire,
comme je l'ai entendu à jne autre commission parlementaire, d'une
façon arrogante: Ah! on est là, on est nombreux et on va mener,
c'est nous qui menons. C'est dépassé pas mal, ce temps-là.
Je ne suis pas contre le fait que la majorité mène, c'est normal,
mais que la majorité ne consulte pas, que la majorité ne prenne
pas conscience des problèmes réels, c'est anormal.
Si j'étais le seul, dans l'Opposition, à crier cela, le
ministre pourrait me dire: C'est peut-être parce que je ne comprends pas
le crédit social, comme il vient de me le dire tantôt. Le
député de Jacques-Cartier.qui n'est pas des nôtres
maintenant mais qui était là cet avant-midi, a
dénoncé le même problème et, à ce que je
sache, il n'est pas créditiste, celui-là, c'est un
député libéral. Dois-je en conclure que, puisque le
ministre n'a pas donné une meilleure réponse au
député de Jacques-Cartier, qui est libéral, c'est parce
que le ministre ne comprend pas non plus le Parti libéral? Voyons donc!
Ce sont des choses qui n'ont pas de sens. Si on ne comprend pas ce qu'on dit,
c'est parce qu'on ne veut pas le compren- dre, tout simplement, ou bien on veut
se boucher les deux oreilles, ou bien on a des priorités qui se situent
ailleurs que celle du respect de la personne humaine. C'est aussi simple que
cela.
En tout cas, je ne bloque pas les crédits là-dessus mais
je vous assure, M. le Président, que le débat n'est pas
terminé, il ne fait que commencer. Les vieillards, les personnes de 65
ans ou plus ont besoin qu'on s'occupe d'eux, ils ne sont pas toujours capables
de se défendre seuls. Je demande au ministre de penser à ces
gens-là. Dans quelques années, il sera peut-être rendu dans
cette situation, il sera peut-être rendu à cet âge et il
sera peut-être content que des jeunes pensent à lui, pensent
à des gens comme lui, qu'ils pensent à ceux-là qui sont
moins capables de se défendre.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, puisqu'on a presque repris
à zéro le débat que nous avions entrepris ce matin sur ce
sujet, je ne voudrais pas abandonner le sujet sans avoir l'occasion de
reprendre certains arguments.
Tout au long de ce débat auquel j'ai assisté, si j'ai la
position de fond quant à la modification souhaitée au
régime de rentes par le député de Rouyn-Noranda que
j'approuve, je n'ai pas l'impression que j'endosserais chacun des arguments
qu'il a invoqués pour arriver à cette même fin.
Puis-je prendre quelques minutes de la commission pour rappeler un
certain nombre de faits qui constituent la position du Parti
québécois sur ce sujet qui, tantôt, vont regrouper les
arguments du ministre des Affaires sociales, et tantôt aussi, ceux du
député de Rouyn-Noranda? Mettons les choses au clair. Je l'ai
réaffirmé, ce matin, le régime de rentes du Québec
est un meilleur régime que le régime du Canada, si nous en
faisions partie.
Ce n'est pas, contrairement à ce qu'a dit le député
de Rouyn-Noranda, un "opting out" que nous avons fait, à ce moment, mais
c'est bel et bien une initiative québécoise qui avait
été prise dans le domaine social, peut-être une des
meilleures, au cours de cette révolution tranquille, et qui avait
même suscité l'admiration du côté canadien. Ce sont
eux qui ont ensuite copié, de façon différente et de
façon moins rentable, je dirais, pour les citoyens couverts par ce
régime, notre propre régime dont nous avions pris
nous-mêmes l'initiative.
Ce n'est pas souvent, M. le Président, et ce n'est plus
arrivé d'ailleurs aucune fois depuis cinq ans, rappelons-le, puisque
c'est dans le passé, que le Québec prend, face au
fédéral, une initiative. Non seulement était-ce une
initiative québécoise, mais, effectivement, je ne le conteste
aucunement, elle a fait la preuve que, dans le domaine social, nous sommes
capables d'assumer notre souveraineté. Quand nous décidons de
légiférer chez nous, avec nos moyens, avec la totalité de
nos ressources, nous sommes capables non seulement d'édifier un bon
régime qui fait l'envie de tous, mais d'offrir à nos concitoyens
une meilleure situation que si nous laissions, encore une fois, dans ce domaine
comme dans l'économique, l'initiative à l'étranger.
Deuxième chose, sur laquelle je suis parfaitement d accord avec
le ministre des Affaires sociales, c'est l'ordre des priorités qu'un
régime doit se donner. Je ne conteste aucunement l'ordre des
priorités que le régime de rentes s'est aujourd'hui donné.
Il ne pouvait couvrir tous les besoins, tous les soins à la perfection.
Dans les limites qu'il avait, il s'est donné comme priorité de
couvrir le manque à gagner qui survenait dans la vie de certaines
personnes, soit par le décès d'une personne qui était
à l'origine d'une source de revenu ou alors par un accident physique qui
les rendaient incapables de poursuivre le revenu qu'ils avaient.
Mais, M. le Président, si ce régime est effectivement
meilleur que le régime canadien sur bien des points, il a des points de
différence qui sont à son désavantage. Je ne conteste pas
non plus le fait qu'un régime puisse être meilleur sur certains
aspects et moins bon sur l'autre. La seule question que j'ai là-dessus,
c'est pourquoi c'est ce point précisément de notre régime
de rentes qui est inférieur à ce qu'offre le régime
canadien.
Les explications fournies jusqu'ici, que ce soit l'utilisation
d'études actuarielles en cours ou une question de principe quant
à la nature d'un régime contributoire ou non, me paraissent
beaucoup plus je reprends le vocabulaire que j'utilisais hier, à
l'ouverture de l'étude de ces crédits des excuses que des
explications. Autrement dit, je ne demande pas que le régime soit
parfait partout. J'admets, moi aussi, qu'il peut avoir des différences,
parfois à l'avantage, parfois au désavantage; s'il est
différent, cela va dans la nature des choses. Mais je ne comprends pas
pourquoi il est différent là. Je ne comprends pas pourquoi,
à cet endroit précis, on s'obstine, c'est le cas de le dire,
puisque l'amendement a été présenté et
débattu à l'Assemblée nationale longuement. Il l'est
encore aujourd'hui, et à chaque fois on reçoit la même
réponse.
M. le Président, cela me semble aller à l'encon-tre de
certains autres principes qui, ailleurs, par le même ministre et par le
même gouvernement sont mis à l'avant-garde. Regardons bien qui on
pénalise. Le ministre nous dit: C'est une toute petite fraction des gens
qui sont sous la "dépendance" du régime de rentes. Il s'agit de
gens qui ont atteint 65 ans, qui changent de métier et qui continuent
par un métier, donc par un travail, à avoir une source de revenu
qui dépasse $1,320 par année. J'admets avec lui que, sur le plan
nombre de personnes touchées par la mesure dont nous discutons, ce n'est
évidemment pas la majorité des Québécois.
M. le Président, nous touchons une catégorie de citoyens
qui travaillent, qui ont décidé d'utiliser le reste je
dois le dire de leurs énergies, la fin de leur vie à une
occupation qui, sur le plan de la distraction, sur le plan de l'occupation, est
différente de celle qu'ils ont occupée auparavant.
C'est, on en conviendra, tout le monde alentour de cette table, le droit
de chacun des citoyens. Vous pouvez avoir une occupation de travailleurs
d'usines, travailleurs salariés, cols blancs, cols bleus, ce que vous
voudrez, pendant 30 ans, 40 ans au service de la même entreprise. A un
moment donné, on vous supplie de prendre votre retraite parce qu'on vous
considère comme un individu aux aptitudes relâ- chées;
à cause de votre âge physique, on vous conduit
littéralement à la porte de l'usine. A 55 ans, parfois on
commence déjà à vous faire entend re que vous êtes
de trop et que, n'eût été d'une protection syndicale,
l'employeur vous mettrait déjà dehors. Donc, tout le
régime fait que, rendu à 65 ans. on vous pousse
littéralement vers la retraite. On vous incite même à
changer d'occupation.
Cette personne que décrivait le député de
Rouyn-Noranda ne fait donc que suivre la logique du système. En ce sens,
aucun membre alentour de la table de la commission ne voudrait voir
pénaliser quelqu'un qui à 65 ans, après 30, 35 ou 40 ans
dans une "job" difficile, parfois, ou plate cela le devient
nécessairement au bout de 35 ans décide de se donner une
occupation différente pour la fin de ses jours, qui lui permette de
ménager les forces qui lui restent mais qui lui permettent quand
même d'avoir cette créativité et cette
ingéniosité dont il a le droit de faire preuve enfin à son
propre compte.
D'ailleurs, le ministre, en face, cautionne un régime
fédéral, où l'autre gouvernement vient de mettre sur pied
un genre de programme interférant dans nos affaires sociales en ce
domaine, qui s'appelle Horizons nouveaux et qui vise justement ce même
principe de maintenir des gens retraités actifs. On a cru devoir mettre
un certain budget, minime me dira-t-on, mais le ministre a pu constater qu'il
est déjà en oeuvre à place Vermeille dans Saint-Jacques,
par exemple, pour inciter des citoyens à la retraite à demeurer
actifs, à se garder une occupation pour demeurer en santé le plus
longtemps possible et pouvoir vivre de la fin de leurs jours-Que ces personnes,
dans une occupation, y trouvent une rémunération, est-ce que nous
allons contester que c'est un droit de ces citoyens? Est-ce que nous avons
contesté cette incitation au travail qu'un autre programme d'un autre
gouvernement auprès des mêmes concitoyens continue à
activer? Personne d'entre nous n'a d'objection à cela.
Et même plus que ça, ce ministère travaille
tellement pour l'incitation au travail, valorise tellement la notion de travail
dans l'activité humaine quant à la santé morale et mentale
des humains que. par exemple nous l'étudierons tout à
l'heure lorsque nous prendrons le programme de l'aide sociale lorsqu'un
assisté social est sur la voie du retour au travail, on a même
pris des mesures pour ménager son retour au travail pour l'encourager
à le faire, c'est-à-dire ne pas le pénaliser pendant les
premiers mois où il quitte le bien-être social pour retourner au
travail. C'est une philosophie que tous les membres alentour de la table
admettront. Ce n'est certainement pas un des aspects de la Loi de l'aide
sociale que nous allons contester.
C'est-à-dire qu'un assisté social qui retourne sur le
marché du travail on ne lui retire pas immédiatement le
bien-être social mais qu'on lui permette de faire un retour progressif.
C'est le même cas pour ces gens de 65 ans qui, à l'occasion, vont
obtenir un revenu de $1,320 et plus et qui sont pénalisés, comme
le dit le député de Rouyn-Noranda. Là-dessus, il a
entièrement raison.
L'autre cas que je voudrais signaler, puisque nous avons parlé de
cette valorisation du travail que
le gouvernement fédéral, que le gouvernement provincial
québécois continuent à maintenir, cette dimension du
travail dans l'activité, il faut toujours retenir que la source de
revenu dont nous parlons et qui devient un revenu supplémentaire pour la
personne dont nous parlons provient d'un travail. Mais la personne, par
exemple, qui a un placement, une personne qui, au bout de 40 ans
d'activités dans le monde du travail, a réussi à
économiser, cela n'en prend plus beaucoup pour faire $1,320 de revenus
par intérêt. Au taux actuel de l'intérêt, une
personne n'a besoin d'avoir comme capital qu'aux alentours de $10,000. $10,000
bien placés, dirons-nous, dans une banque, dans une institution
bancaire, dans une entreprise, vont facilement rapporter à quelqu'un un
revenu annuel d'intérêt supérieur à $1,320. Cette
personne, qui ne travaille pas, qui ne fait que jouir de l'argent qu'elle a
probablement gagné en travaillant mais qu'elle a su bien placer, n'est
pas pénalisée. Elle reçoit le plein régime de
rentes sans avoir de pénalisation.
Mais une personne qui a encore le coeur et encore l'énergie,
après 30 ou 35 ans de travail, de s'en trouver un autre, qui lui donne
un revenu supplémentaire, qui lui permettra peut-être, avec sa
femme, si elle est encore avec lui, ou avec ses enfants, s'il en a, de jouir
des dernières années de sa vie, par son travail, par son
activité, activité consacrée pardes programmes du
même gouvernement à d'autres endroits, cela me paraît
anormal que de s'acharner, c'est le cas de le dire, sur une pareille
situation.
Ce n'est pas que le régime ait cette exception par rapport au
régime canadien qui est grave, c'est que cette exception soit là.
C'est un endroit où il ne devrait pas y avoir d'exception, parce que le
cas me semble tellement anodin, en fin de compte, qu'il ne devrait même
pas occuper le temps de cette commission tellement chacun d'entre nous
conviendra qu'une personne qui aencore le loisir de travailler,
l'énergie de travailler, qui veut encore travailler, que d'ailleurs on
incite à travailler à tous les autres endroits, qui a pu
contribuer, comme n'importe qui, pendant 30 ou 35 ans, au régime de
rentes, ait le droit de s'assurer ce revenu minimum qui lui permettra de
rajouter un petit peu plus de confort à la fin de ses jours,
peut-être un voyage, si elle n'a pas eu l'occasion de le faire en un
autre temps de sa vie. Mais maintenant qu'elle a une occupation à temps
partiel, M. le Présidentil faut bien dire à temps partiel,
aucune de ces personnes ne maintient, à 66 ou 68 ans, le même
rythme de travail qu'à 30 ou 35 ans pourquoi la
pénaliser?
Voilà donc toute la question, au fond, fondamentale et humaine
je reprends le vocabulaire du député de Rouyn-Noranda
qui est à la base de cela. Moi non plus, je ne veux pas revenir
là-dessus et qu'on me ramène les études actuarielles sur
la tête, mais c'est juste de dire: J'admets qu'il y a des exceptions, des
différences dans notre régime avec le régime canadien,
mais pourquoi celle-là? C'est peut-être bien un petit nombre de
gens, j'en conviens bien, mais ce petit nombre de gens, on les admire. Tous les
Québécois les admirent, ceux qui ont encore le courage de
s'engager et de travailler. Le gouvernement fédéral a
déboursé $10 millions, dans son budget, pour inciter les gens de
cet âge à travailler, et voilà que le gouvernement
québéoois, lui, lorsque ces gens travaillent, les
pénalise. C'est seulement le cas. Nous avons soutenu tout cela lors de
l'étude de la modification au régime de rentes, à
l'Assemblée. Le député de Chicoutimi avait à ce
moment-là présenté un amendement qui a été
défait. Mais reprenons l'argument aujourd'hui. J'éteins là
le débat si le ministre ne veut pas le poursuivre ni le
député de Rouyn-Noranda non plus, mais je dis que notre position,
là-dessus, n'est pas une question théorique, fondamentale, pour
laquelle il faut ériger des briques de justification. C'est se servir de
sa tête et un petit peu de son coeur pour regarder de quelles personnes
nous parlons et ce que nous faisons à ces personnes.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
ministre.
M. Forget: M. le Président, je vais me
répéter, mais je ne me lasserai pas de me répéter
sur ce sujet. J'ai l'impression que pendant un bon bout de temps, j'ai
déjà exposé les arguments qui, à mon avis,
justifient amplement les options qui ont été prises.
Lorsque le député de Saint-Jacques dit qu'il est d'accord,
en principe, avec des différences, mais qu'il n'est pas d'accord avec
cette différence en particulier, c'est une façon assez
élégante de faire plaisir à tout le monde, mais il demeure
que je peux difficilement imaginer des différences qui
"pénalisent" une catégorie quelconque de la population et
à laquelle on pourrait, a priori et d'emblée, donner son
assentiment. Il est clair que puisqu'on ne parle pas d'un individu en
particulier mais de groupes de gens, on ne peut pas dire qu'ils ne sont pas
méritants, on ne peut pas dire à leur égard qu'on ne
voudrait pas qu'ils aient des revenus plus abondants. Il s'agit de personnes
âgées et il est clair qu'il est concevable de s'émouvoir
sur leur sort et de s'émouvoir sur l'insuffisance des revenus des
personnes âgées en général. Il reste que ces
arguments sont des arguments assez vagues, des arguments théoriques.
En pratique, le problème n'est pas de s'émouvoir
généralement sur le sort d'une catégorie ou l'autre de la
population. Il ne s'agit pas non plus d'être d'accord avec le principe
que le régime de rentes du Québec peut être
théoriquement différent des autres régimes mais qu'en
pratique, dès qu'un autre régime offre un avantage, il faut
immédiatement le copier, sous peine de s'émouvoir sur une autre
catégorie de bénéficiaires qui sont probablement tout
aussi dignes d'admiration et d'estime que celle dont on parle aujourd'hui. Le
problème est essentiellement un problème de choix, un
problème de priorités et les priorités sont
défendables.
Elles sont défendables en vertu de ce que veut faire le
régime de rentes lui-même, c'est-à-dire donner à des
personnes qui sont privées d'un revenu d'emploi à cause de leur
retraite... Il s'agit d'une véritable retraite, pas d'une retraite
forcée qui s'accompagne, malgré tout, pour l'individu, d'une
capacité de travail non diminuée, capacité qu'il va
utiliser pour acquérir un nouvel emploi dans une autre entreprise, dans
une autre occupation.
Donc, la véritable retraite, celle qui est définitive,
celle qui s'accompagne de la perte d'un emploi et qui s'accompagne
également d'un appauvrissement très considérable, c'est
celle-là à laquelle on veut remédier par le régime
de rentes.
D'ailleurs, le député de Rouyn-Noranda, citant un fait que
tout le monde connaît, parle des régimes universels dont
bénéficient les personnes âgées. En citant cet
exemple, il donne lui-même une partie, au moins, de la réponse que
l'on veut donner à son argumentation et à celle du
député de Saint-Jacques.
Il existe, effectivement, des programmes qui, indépendamment du
statut d'emploi ou de non-emploi des individus, attribuent des revenus, une
pension de vieillesse à toute personne de 65 ans et plus. Le
régime de rentes, lui, n'est pas basé sur un principe de
redistribution de soutien du revenu, mais sur un principe de contribution.
C'est une assurance que les gens prennent contre un risque
déterminé de privation de revenu. On voudrait qu'au même
moment, à la même date, le même mois où une personne
atteint l'âge de 65 ans, quel que soit son revenu, quel que soit son
statut d'emploi, en plus de la pension de vieillesse, on lui donne une rente en
vertu du régime de rentes du Québec.
A ce moment-là, pourquoi avoir deux régimes, pourquoi
avoir un régime de rentes qui s'ajoute sans autre formalité, pour
aucune autre raison que celle de l'âge aux pensions de vieillesse? On
sent très bien que des questions fondamentales devraient être
posées par ceux qui invoquent ces arguments et qu'on ne peut pas
considérer un de ces régimes indépendamment de l'existence
de l'autre régime.
Pour ce qui est de l'incitation à l'emploi, il est évident
que c'est un argument très valable que l'incitation à l'emploi,
en particulier pour les chefs de famille et en particulier pour les adultes qui
sont à un âge où la possession d'emploi est non seulement
une condition nécessaire pour avoir un revenu décent, mais une
condition de respect de soi-même et des autres. En fait, c'est une
condition presque indispensable pour assurer un minimum de dignité
à l'individu dans la société où nous vivons qui est
basée sur la contribution de chacun parson travail à
l'édification de la société.
Cet argument d'incitation au travail est beaucoup plus fort dans ces cas
qu'il ne peut l'être pour ceux qui, ayant atteint 65 ans, sont, dans
l'immense majorité des cas, dans l'incapacité physique,
premièrement, et dans l'impossibilité matérielle, pour
toutes sortes de raisons, d'avoir accès à un emploi.
On favoriserait, à mon avis, ceux pour qui ces limites-là
sont moins réelles, soit sur le plan physique ou social. On sait, je
pense, d'expérience, que ceux qui ont la plus grande
accessibilité à des emplois à un âge avancé
sont ceux dont les perspectives de gains sont également les plus
élevées.
Je crois que, dans un tel contexte, la suggestion d'ajouter à ces
revenus élevés ou relativement élevés des revenus
d'appoint, que constituerait un régime de rentes, ne contribuerait en
aucune façon à diminuer la pauvreté qui malheureusement,
pour la plupart des gens, accompagne la vieillesse.
On favoriserait ceux qui sont déjà relativement
favorisés en introduisant dans un régime qui est basé sur
le remplacement d'un revenu perdu un nouveau principe, dont on ne saurait pas
très bien jusqu'où il pourrait s'étendre, de
supplémenter des revenus d'emplois pour aucune autre raison que celle de
l'âge avancé. Cet âge avancé est déjà
favorisé sur le plan du revenu par un régime universel auquel on
a fait allusion.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, je ne peux pas retenir
ces arguments aujourd'hui, plus que je ne les ai retenus dans le passé.
Il est évident que toute cette question de la sécurité du
revenu continue à faire l'objet de nos préoccupations. Je n'ai
pas besoin, pour ça, des exhortations du député de
Rouyn-Noranda ou des exhortations du député de Saint-Jacques.
Il est évident que le gouvernement se préoccupe des
problèmes de sécurité de revenu: il est évident
également qu'on ne peut pas donner plus à toutes les
catégories de la société et que nos priorités
jusqu'à maintenant ont été orientées vers ceux qui
nous paraissaient le plus avoir besoin de l'assistance gouvernementale ou de
programmes gouvernementaux.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Autres questions au
programme I?
M. Samson: M. le Président...
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Rouyn-Noranda.
M. Samson: Au programme I, compte tenu des réponses que
nous fait le ministre, qui sont totalement inacceptables, étant
donné que c'est à ce seul programme que nous pouvions discuter de
cette question qui relève de la Régie des rentes et que le
ministre ne veut aucunement nous indiquer le désir du gouvernement de
réviser cette situation, que les personnes de 65 ans et plus, qui
gagneront plus de $1,320 cette année se verront encore
pénalisées pour $0.50 pour chaque dollar gagné, il me sera
impossible de voter en faveur du programme I.
Je veux être bien spécifique, ce n'est pas contre la partie
des allocations familiales du programme I que je voterai, mais c'est contre la
position du ministre vis-à-vis des personnes âgées. Et je
demanderai un vote enregistré, M. le Président.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, sur le même sujet
j'enregistrerai ma dissidence également mais, puisque nous avons avec
nous le président de la Régie des rentes du Québec,
j'aimerais aborder un autre sujet qui le concerne.
Un membre du cabinet du chef de l'Opposition lui a fait parvenir il y a
quelques jours une lettre lui signalant un cas particulier qui ne
méritera pas certainement de prendre beaucoup de temps à la
commission mais qui peut se résumer assez facilement.
Plusieurs employés de la ville de Montréal se
sont aperçus récemment que, d'après les
relevés de la régie, il n'y avait aucun gain d'inscrit à
leur compte depuis I972. Est-ce une erreur mécanographique? Est-ce que
la ville de Montréal n'a pas contribué, ou toute autre raison?
Nous n'avons pas encore reçu réponse à la lettre que nous
avons fait parvenir au ministre du Revenu, parce que nous concevons bien que
c'est à lui la tâche de percevoir, mais nous avions fait parvenir
copie au ministre des Affaires sociales et au président de la
régie. Peut-il nous donner une explication brève
là-dessus?
M. Forget: D'abord, je dois vous dire que la lettre a
été adressée au bon endroit, au ministre du Revenu.
M. Charron: J'en conviens.
M. Forget: Parce qu'il faut comprendre de quelle façon le
registre des gains est constitué. Il est constitué à
partir des renseignements qui sont transmis à la régie par le
ministère du Revenu.
Le ministère du Revenu perçoit les contributions, il
reçoit les formules TP 4 des employeurs. Et c'est à partir des
formules TP4 que se bâtit le registre des gains. La régie, dans
son registre des gains, a les informations qui lui sont transmises par le
ministère du Revenu.
Il y a un problème. La raison pour laquelle les gains ne sont pas
inscrits dans ce cas, c'est fort probablement parce que le ministère du
Revenu ne nous avait pas transmis les renseignements pour les employés
de la ville de Montréal pour l'année I972.
C'est un problème...
M. Charron: L'année I972 et les suivantes.
M. Forget: Pour I974, il faudrait attendre, ainsi que pour I975.
Oui, pour I972 et I973.
M. Charron: Pour I972, I973, I974.
M. Forget: Mais I974 ...
M. Charron: On peut quand même inscrire zéro.
M. Forget: Je comprends, mais pour I974 il est certain que les
formules TP 4 viennent d'entrer au ministère du Revenu, je ne lui en
demanderai pas tant que ça.
M. Charron: Oui.
M. Forget: Ce problème qui existe, le retard à la
transmission des données, a fait l'objet de discussions entre le
ministère du Revenu et la régie, et je dois vous dire que nous
avons reçu du ministère du Revenu la semaine dernière
toutes les données jusqu'à la fin de I973. Ces données
vont être inscrites dans notre registre ces jours-ci, de telle sorte
qu'on pourra remettre à ces gens un autre état du registre des
gains qui devrait comprendre les gains pour les années I972 et I973.
Mais il y a un problème, il n'y a pas de cachette
là-dessus. Mais il va être en partie réglé. Il n'est
pas définitivement réglé.
M. Charron: Est-ce que ce cas est fréquent?
M. Forget: Ce cas n'est pas unique. Le ministère du Revenu
nous transmettait les renseignements après avoir balancé le
compte de chaque employeur. Evidemment, il est facile de comprendre qu'il y a
des problèmes avec des employeurs, que ça ne balance pas, alors
cela prend du temps dans certains cas. De toute façon, je ne veux pas
porter de jugement sur le travail du ministère du Revenu, mais je vais
constater simplement un fait qui est évident, par les documents que vous
avez, c'est que les données nous sont transmises avec beaucoup de
retard. Déjà on a pris des mesures pour corriger la situation et
on espère, dans l'avenir, que cela vaaller plus rapidement.
M. Charron: Mais par exemple, si un de ces employés de la
ville de Montréal était décédé pendant cette
période où vous aviez des données
incomplètes?...
M. Forget: A ce moment-là, par exemple, disons qu'il n'y a
pas de danger de perte de prestation. Vous avez parlé d'un
bénéficiaire décédé, mais prenons le cas
d'un retraité. Avant même de commencer à lui verser sa
prestation, on lui fait parvenir un état de ce qu'il y a dans le
registre des gains, en lui demandant de nous indiquer s'il y a des corrections
à apporter, de telle sorte que celui qui recevrait un état comme
celui-là où il n'y aurait pas de gain pour 1972,
évidemment nous le ferait savoir. Et on fait la même chose pour
toutes les prestations.
M. Charron: Avant même que le premier chèque soit
envoyé?
M. Forget: Oui, de telle sorte que l'on corrige
immédiatement s'il manque des données dans le registre des gains.
Evidemment, le registre des gains, je dois vous dire que c'est une
opération très complexe maintenir, parce qu'il y a des millions
de formules TP 4 qui doivent être entrées au registre des gainset
c'est une opération qui n'est pas facile à réaliser, mais
il n'y a rien d'impossible là-dedans.
Il est certain que la situation doit s'améliorer, et elle va
s'améliorer avec la coopération des deux organismes, soit la
régie ou le ministère du Revenu.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Autres questions, programme
1?
M. Charron: Non. Oui au programme 1, mais pas avec la
régie des rentes. Je pense qu'on peut dire que M. Fortier est
libéré de la commission...
M. Samson: C'est une libération temporaire. Politique
familiale
M. Charron: Conditionnelle. On va entreprendre maintenant,
suivant l'entente de ce matin, cette politique de soutien du revenu familial,
pour discuter quelques minutes avec le ministre des Affaires sociales sur les
autres modes de soutien du revenu
familial que ce programme doit couvrir outre les allocations
familiales.
L'année dernière, M. le Président, j'avais
avancé qu'il y avait d'autres moyens de soutenir le revenu familial. Et
j'ai vu, au cours de la dernière année, différents
organismes, effectivement sans prétendre aucunement qu'ils
s'inspiraient de mes remarques de l'année dernière mais dans leur
évolution des organismes familiaux, parafamiliaux, des organismes
sociaux à travers le Québec, effectivement réclamer que
d'autres mesures que l'allocation familiale arrivent à soutenir le
revenu des familles québécoises, en particulier l'allocation de
maternité que certaines sociétés occidentales ont
déjà créée, l'aide à l'accouchement et aux
premiers mois de naissance de l'enfant, allocation du conjoint au foyer, qui
est aussi un programme social pensable, imaginable, qui a d'ailleurs
été suggéré dans différentes
recommandations.
J'avais demandé au ministre, l'année passée, si on
avait entamé l'étude ou des études à
l'intérieur du ministère vers la réalisation de certaines
politiques de ce genre. J'avais reçu une réponse négative,
je repose la même question cette année. Ce ne sont pas ces mesures
que j'avais suggérées à partir du programme du Parti
québécois, tout simplement. Y en a-t-il d'autres sur lesquelles
on travaille pour le soutien du revenu familial actuellement?
M. Forget: M. le Président, je peux répondre
très brièvement à cette question en indiquant que, par
rapport à la question et à la réponse obtenue, l'an
dernier, par le député de Saint-Jacques, il y a un léger
progrès qui est perceptible au niveau du ministère des Affaires
sociales, puisqu'un certain nombre de ces mesures ont, au moins,
commencé à faire l'objet d'une étude, en effet.
M. Charron: Comme quoi, par exemple?
M. Forget: Celle que vous avez mentionnée, sans être
plus spécifique, des mesures alternatives, de natures diverses,
appartenant à cette catégorie d'aide aux familles.
M. Charron: Y a-t-il espérance que ces études, que
j'imagine très embryonnaires au moment où on se parle... J'avais,
d'ailleurs, l'habitude, quand j'étais à l'Education, de voir des
comités se former au moment où je les suggérais. Je ne
sais pas si c'est la même chose aux Affaires sociales; je ne sais pas si
le ministre vient juste de les créer. Peut-on espérer que ces
comités ou ces études auront des résultats au cours de la
présente année financière?
M. Forget: II est trop tôt pour le dire, M. le
Président. Je n'ai pas parlé de comité, remarquez,
quoiqu'il y a aussi des comités dont le travail sera impliqué. Ce
ne sont pas des comités créés spécialement pour ces
fins. Il est encore trop tôt pour dire quand et quelles conclusions
peuvent émerger de ces travaux.
M. Charron: Je soutiens que certaines de ces suggestions peuvent
peut-être frapper par le carac- tère de nouveauté qu'elles
signifieraient dans l'ensemble des politiques sociales du Québec, mais
leur évaluation financière, puisque nous sommes à
l'étude d'un budget, peut surprendre, à l'occasion, par sa
modestie. Je reprends une expression que je soutenais hier soir: II y a des
choses qui feraient du bien qui sont peut-être beaucoup moins difficiles
à faire qu'on ne le pense, puis beaucoup moins coûteuses à
faire qu'on ne le pense. Il suffit d'en avoir une volonté politique
ferme à l'arrière.
Par exemple, le Parti québécois proposait et propose
encore dans son programme une allocation de $100 pour couvrir les frais
inhérents à la naissance d'un enfant. Si je prends le chiffre
qu'on m'a fourni ce matin lors de l'étude des allocations familiales
où on s'attend à 80,000 naissances ou à peu près au
cours de cette année, cela représente une somme de $8 millions,
au maximum $9 millions ou $10 millions dans l'hypothèse d'une hausse du
taux de natalité. $8 millions, $9 millions ou $10 millions signifient,
dans un budget global, peu de chose. Quand on en engouffre dans la baie James
ou dans les Olympiques en les multipliant, je crois qu'une mesure sociale de
cette envergure, au départ, à la naissance d'un enfant,
constituerait un appoint.
J'ai vu, dans la documentation que j'ai eu à parcourir avant
l'étude de ces crédits, qu'un organisme social de
Montréal, je crois, avait parlé, lors de l'une de ses
réunions, d'une allocation de $500 par naissance, ce qui quintuplerait
le montant dont je viens de parler, bien sûr. Ce n'est peut-être
pas vers un montant de cette envergure que nous devons aller, mais une
allocation de maternité paraît certainement une politique
souhaitable.
Mme le ministre d'Etat aux Affaires sociales aura peut-être
l'occasion de me fournir elle-même les explications, mais dans cette
espèce d'explication à rebours qu'elle donnait sur ces
contraceptifs gratuits dont on a entendu parler à partir de Paris, on
dit ici, d'après la Presse canadienne et l'Agence France-Presse, que Mme
le ministre a souligné qu'il faudrait que les congés de
maternité soient de plus en plus autorisés dans le secteur
privé. Il faudra que l'Etat commence à regarder cela de plus
près, a dit Mme le ministre, rappelant que la femme perdait
généralement son salaire lors d'une maternité, sauf si
elle travaillait dans la fonction publique.
Nous sommes à discuter de mesures qui, ensemble, pourraient
constituer un début de politique de la famille.
J'imagine que Mme le ministre, selon ses responsabilités, ne
parlait pas à travers son chapeau, qui sont d'ailleurs fort
élégants, mais le disait parce qu'elle avait l'intention de faire
démarrer dans le ministère des Affaires sociales des politiques
à cet égard.
Je signale, avant de lui demander ce qu'elle a l'intention
d'entreprendre dans ce secteur, certaines incohérences qui lui ont
peut-être échappé, mais que je me permets de lui signaler,
non seulement parce qu'elle est ministre d'Etat aux Affaires sociales, mais
aussi parce qu'elle est la seule femme de notre Assemblée nationale.
C'est que, par exemple, le gouvernement du Québec, lorsqu'il a
rajouté,
au cours de l'année 1974, en juin, je crois, à l'intention
de ses fonctionnaires directement reliés au gouvernement ou ceux de la
fonction parapublique, c'est-à-dire oeuvrant dans le domaine social,
dans le domaine de l'éducation, une indexation qui s'appelait de
rattrapage au coût de la vie je ne sais pas si la formulation est
exacte, tous les enseignants du Québec ont eu droit à cette
indexation, à l'exception des femmes enseignantes qui étaient en
congé de maternité à ce moment et qui, en vertu de leur
convention collective ou en vertu du décret qui leur tient lieu de
convention collective y auraient eu droit. Mais il y a une mesure
discriminatoire qui s'est appliquée, à ce moment, à
l'égard des femmes, par le gouvernement même du Québec,
c'est bien cela, somme toute, qui sont encore à l'emploi, mais qui sont,
selon leur droit, en congé de maternité. Elles n'ont pas eu droit
à ce boni de rattrapage du coût de la vie. Je le signale à
Mme le ministre, à qui ce détail a peut-être
échappé, bien sûr, mais pour la rapprocher de son
affirmation à l'effet que les congés de maternité doivent
être de plus en plus autorisés dans le secteur privé. Il y
a peut-être une action immédiate à apporter même dans
les secteurs public et parapublic, puisque, je l'affirme, j'ai eu des preuves
là-dessus nombreuses, provenant de différentes régions du
Québec. Les femmes professeurs qui étaient en congé de
maternité, pour une raison inexplicable, et qu'un moment donné le
ministre de la Fonction publique aura probablement à expliquer ailleurs,
n'ont pas eu droit à ce boni. Ce n'est certainement pas une façon
d'encourager une politique de la famille.
M. le Président, j'aimerais entendre le ministre expliquer des
opinions qui nous sont venues de Paris.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le ministre d'Etat aux
Affaires sociales.
Mme Bacon: Je ne vois pas pourquoi j'aurais à
répondre sur l'allocution que j'ai donnée à Paris. Je
pense que, si je l'ai fait, c'est parce que j'y croyais. En passant, je ne
porte pas de chapeau, alors je n'ai pas l'habitude de parler à travers
mon chapeau.
Je pense qu'on a rapporté d'ailleurs j'ai dû
corriger certains échos qui étaient arrivés au
Québec, avant même mon retour, sur les fameux contraceptifs. J'ai
entendu, ce matin, le député de Rouyn-Noranda qui faisait part de
ses craintes. Je n'ai pas l'intention d'installer dans les différents
Cégep ou dans les différentes écoles secondaires des
distributrices de contraceptifs. Au contraire, je pense que ce que j'ai dit qui
touchait les personnes de douze ans je ne vois pas pourquoi j'aurais
encore à le répéter, mais je le ferai comme
l'information, qui semble encore incomplète. C'est C'est que nous devons
nous pencher sur l'information adéquate à donner aux enfants
à l'âge de douze ans, puisque, malgré ce qu'en pense le
député de Rouyn-Noranda, je pense que déjà 15, 16
ans c'était déjà trop vieux pour le diaporama qui
circulait dans les écoles. Déjà, à l'âge de
douze ans, si on fait comprendre aux enfants le respect de certaines valeurs,
le respect des autres, le respect de soi-même d'abord, et en même
temps le sens des responsabilités qu'ils auront à assumer plus
tard, je pense que même douze ans, ce n'est déjà pas trop
tôt. C'est un peu dans ce sens que je parlais d'information,
d'éducation sexuelle qui fait partie d'un ensemble d'informations aux
étudiants âgés de douze ans.
En ce qui regarde le rattrapage que les femmes québécoises
ont à faire, cela j'en suis bien consciente dans plusieurs domaines,
dans le domaine du travail, dans le domaine de la justice, dans le domaine des
affaires sociales, dans tous les domaines.
Ce serait mentir que de dire que les femmes sont en avance sur certaines
autres femmes dans d'autres pays. Même si nous avons déjà
fait quelques pas, il faut quand même continuer à en faire et,
comme membre d'un gouvernement, je pense que c'est ma responsabilité. Je
n'ai pas la prétention de représenter toutes les femmes du
Québec parce que je pense que c'est une grande responsabilité,
d'abord, à accepter, et le dire semble très prétentieux.
Comme nous représentons les gens de notre comté, je fais comme
mes autres collègues. Il y a des femmes, des jeunes, des hommes dans mon
comté et je pense que ma présence, la seule présence
féminine, fait en sorte que lorsqu'il arrive un moment où on doit
exprimer des opinions, comme je l'ai fait à Paris, je dois mettre de
l'avant certaines politiques. Elles existent déjà. Qu'il y aitdes
lacunes à regretter et que nous tentions de changer des situations
déjà existantes, je pense qu'il était de mon devoir de le
faire. Si, dans certains endroits, dans certaines régions ou certains
secteurs il y a des inégalités, je pense que c'était mon
devoir de les faire connaître, d'en prendre connaissance d'abord et de
dire ma façon à moi de percevoir les choses.
M. Charron: Est-ce que je peux demander au ministre qui vient de
parler, M. le Président, si elle a l'intention, au cours de
l'année financière, avec les crédits que nous nous
apprêtons à lui voter, d'établir au moins un début
de recherche? On s'en tient toujours à ce domaine parce que rien
n'existe, c'est effarant, rien n'existe dans ce domaine pour réaliser
ces voeux qu'elle a exprimés, qu'elle a parfaitement le droit
d'exprimer. Mais comme ministre on ne peut se contenter d'exprimer des voeux;
on a aussi la possibilité, que n'ont pas d'autres qui expriment des
voeux, de mettre en branle la réalisation de ses voeux et d'obtenir que,
par exemple, les congés de maternité soient de plus en plus
autorisés sans pénaliser la femme dans le secteur
privé.
Il ne suffit pas d'en exprimer le voeu. Vous êtes en possession
d'un ministère qui peut oeuvrer dans ce sens. De quelle façon
avez-vous l'intention d'accomplir ce mandat, en particulier pour
réaliser ce voeu que tous les membres de la commission partagent, j'en
suis convaincu?
Mme Bacon: Je pense que c'est en assumant mes
responsabilités, et ce n'est pas en le faisant sur la place publique, je
pense, qu'on réussit à faire quoi que ce soit. J'ai
exprimé le voeu sur la place publique et je pense que c'est normal de le
faire.
Maintenant, le travail, je le fais au niveau du
ministère. Je le fais au niveau du gouvernement, au niveau du
conseil des ministres, au niveau du caucus. Je pense que ce sont toutes ces
étapes q u'il faut franchir; il faut sensibiliser les gens davantage
à des problèmes. A mesure que progressent certaines idées
ou certains voeux, je ne pense pas qu'il soit possible de passer son temps sur
la place publique à dire: Nous en sommes rendus à telle
étape.
Nous étudions les crédits aujourd'hui. Vous avez les
informations à même les crédits. Je pense que cela ne
m'empêchera pas de continuer à travailler même si
nous ne le voyons pas à tel ou tel programme au niveau du
ministère à faire avancer des idées.
Je pense que c'est ça, le rôle d'un ministre, travailler en
fonction de certains désirs de la population. Je pense qu'on est
là pour ça.
M. Charron: M. le Président, je pense que les membres de
la commission d'abord, l'opinion publique ensuite auront l'occasion très
bientôt de mesurer la portée réelle de voeux qui nous ont
été exprimés de loin et qui nous ont été
répétés cet après-midi. Madame le ministre, comme
elle vient de le rappeler, non seulement oeuvre alentour de la table de la
commission aujourd'hui, maiségalement dans le ministère, au
conseil des ministres et dans l'ensemble de la politique gouvernementale.
Or, le gouvernement aura l'occasion très bientôt de
déposer ses offres à ses employés de la Fonction publique
et du secteur parapublic. Par la loi que nous avons adoptée en
décembre dernier, le ministre des Affaires sociales se trouve
mêmeencore plus lié qu'il ne l'était lors de la
précédente négociation de la convention collective. Or, la
convention collective, plutôt le décret 7275 disait, quant aux
congés de maternité qui préoccupaient madame le ministre
jusqu'à Paris, à l'article 38.05: L'employée absente pour
grossesse ne reçoit pas de traitement durant son absence; il lui est
cependant loisible d'utiliser, s'il y a lieu, sa réserve de
congés de maladie afin de recevoir un paiement tenant lieu de traitement
jusqu'à concurrence des crédits accumulés à son
dossier au moment de son départ. Il lui reste toujours aussi, comme dans
le secteur privé, où madame le ministre disait qu'il faudrait que
ce soit de plus en plus autorisé, la possibilité de recourir
à l'assurance-chômage, mais de façon très partielle.
C'est une politique discriminatoire.
Nous n'avons plus, ensemble, qu'à exprimer des voeux ou à
souhaiter oeuvrer non pas sur la place publique mais dans le secret des
séances du cabinet pour que ces choses changent. Nous aurons l'occasion
de vérifier si ces voeux sont vraiment autre chose qu'un rattrapage
publicitaire de l'Année internationale de la femme ou si ce sont des
intentions concrètes d'un gouvernement de modifier des choses qui sont
inacceptables.
Nous connaîtrons très bientôt ce que fait le
gouvernement lui-même comme employeur avant de penser qu'il est en train,
dans le secret des séances du cabinet, d'imaginer une chose qu'il
imposera un tant soit peu ou, en tout cas, essaiera d'entraîner le
secteur privé à suivre. Il faudra d'abord que le gouvernement,
lui, avant de faire la leçon au secteur privé ou d'essayer de
pousser le secteur privé, reconnaisse dans un début de politique
familiale qu'on essaie de trouver cohérente en rattachant, morceau par
morceau, mais tenons-nous-en à cela puisqu'il n'y en a pas de plus
cohérente que cela... Nous verrons s'il est prêt à dire que
cette disposition 38.05 qui, puis-je vous le dire, M. le Président,
allait exactement à rencontre des demandes syndicales en ce domaine
il doit exister un juste milieu entre les demandes syndicales et les
propositions gouvernementales àdirequ'une employée de la
fonction publique, absente pour grossesse, ne reçoit pas de traitement
durant son absence.
Si le gouvernement dépose ce même genre d'opposition et
qu'après cela, on va nous dire que, dans le secret du cabinet, on est en
train de réaliser des voeux pour que le secteur privé se mette
à réaliser, presque par intuition ou par encouragement qui
viendrait de je ne sais où, ce que le gouvernement n'est même pas
capable d'offrir à ses employés, nous aurons là et
j'attends, la réponse de Madame le ministre la première
indication réelle qu'il ne s'agit pas que de voeux, qu'elle n'est pas
obligée de les réaliser sur la place publique mais qu'en fin de
compte, lorsqu'elle est au conseil des ministres, lorsqu'elle travaille
à la préparation des propositions gouvernementales pour ses
employés, elle tient son bout, elle défend le voeu qu'elle a
exprimé à Paris et elle obtient qu'effectivement des mesures
aussi discriminatoires à l'égard des femmes employées par
le gouvernement disparaissent de la prochaine convention collective.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable ministre
des Affaires sociales.
Mme Bacon: Un instant, M. le Président. Dans ce
sens-là, je serais tentée de dire que je suis un peu comme le
député de Saint-Jacques. Souvent, on émet des idées
et ce n'est pas accepté par l'ensemble d'un groupe auquel on appartient.
Je pense qu'il va le comprendre. Mais, comme lui, je n'ai pas l'impression de
lâcher quand je mets de l'avant certaines idées. Maintenant, il
faut les faire accepter à un groupe et, comme lui, ce ne sont pas
toujours toutes nos idées qui sont acceptées par un groupe. On ne
lâche pas.
M. Charron: Est-ce que, Madame le ministre, vous vous engagez
face à la commission, à militer, avec la chance de succès
que nous vous souhaitons, pour que les propositions gouvernementales
reflètent un tant soit peu, lorsqu'elles seront déposées
à la table de négociation, le voeu que vous avez exprimé
et qui est endossé par la commission?
Mme Bacon: Bien oui! Je serai d'abord fort aise de dire que j'ai
quand même l'appui du député de Saint-Jacques.
M. Charron: Vous avez l'appui, en cela, non seulement du
député de Saint-Jacques...
Mme Bacon: Je ne sais pas si je leur ferai peur ou non mais je
pourrai dire que j'ai l'appui du député de Saint-Jacques.
M. Charron: Vous l'avez non seulement du député de
Saint-Jacques mais vous l'avez de l'Opposition en entier, parce que c'est dans
le programme de l'Opposition depuis 1972.
Mme Bacon: Je le sais.
M. Charron: Nous l'avons toujours soutenu. Au besoin, si vous
avez du mal à formuler votre opinion, vous pourrez toujours recourir au
texte de notre programme.
Mme Bacon: Je l'avais déjà lu, d'ailleurs.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable ministre
des Affaires sociales.
M. Forget: Avant que le député de Saint-Jacques ne
parle trop longuement au nom de ses collègues, y compris le
député de Rouyn-Noranda, j'aimerais lui rappeler que...
M. Samson: M. le Président, je suis obligé de
soulever une question de règlement!
M. Charron: C'est de notre parti.
M. Samson: Tout le monde a compris que le député de
Saint-Jacques parlait au nom de l'Opposition officielle, mais je voudrais
peut-être ouvrir une parenthèse pour dire que je partageais une
forte proportion des propos du député de Saint-Jacques.
M. Forget: Vous êtes prudent, vous ne dites pas laquelle,
ni avec laquelle vous êtes en désaccord.
M. Samson: M. le Président, si le ministre veut que j'y
revienne, tantôt, je pourrai nuancer davantage.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
ministre.
M. Forget: M. le Président, je voulais rappeler au
député de Saint-Jacques, parce qu'il a récemment
changé ses responsabilités au sein du cabinet fantôme de
l'Opposition officielle, que lorsqu'il parle des conditions de travail et de la
convention collective...
M. Charron: II faut parler de convention...
M. Forget: ...dans notre secteur, nous parlons d'une convention
et non pas d'un décret.
M. Charron: Mais c'est celle qui s'adresse au syndicat des
fonctionnaires et non pas à ceux du milieu social; dans ce
cas-là, il s'agit bien d'un décret.
M. Forget: Malgré tout, mon rappel, je pense, est
retenu.
M. Charron: Oui, je prends bonne note, comme vous dites.
M. Forget: Pour ce qui est des...
M. Charron: ... il n'y a pas un décret?
M. Forget: Je ne pense pas.
M. Charron: Ah! c'est vrai. Après la...
M. Forget: Vous venez d'un secteur exceptionnel.
M. Charron: II faut dire qu'il y avait un ministre exceptionnel
aussi.
M. Forget: Pour ce qui est de l'offre que la partie patronale va
faire à la table de négociations, il est bien évident que
le député de Saint-Jacques ne s'attend pas que nous
répondions à une question qui est plutôt de
réthorique de sa part à ce moment-ci.
Mais j'aimerais lui rappeler que sur le plan des réalisations
concrètes, au plan des droits de la femme durant les quelques derniers
mois, il y a eu, malgré tout, des développements fort
appréciables où l'Etat, comme employeur, a manifesté son
intention d'accorder à la femme, à titre d'employée, les
mêmes droits qu'aux hommes, lorsque, par exemple, le régime de
rentes du Québec a été modifié de manière
à permettre à la femme qui travaille de gagner, pour ses
dépendants et son conjoint, les mêmes droits à une
prestation de survivant, par exemple, ou à une prestation d'orphelin qui
auparavant n'était acquise qu'aux travailleurs mâles.
Dans un domaine connexe et ceci à titre d'employeur, c'est
vraiment en ce sens-là que mes remarques de tantôt s'adressaient,
le régime de rentes supplémentaire de la fonction publique et des
régimes parapublics ont été amendés à peu
près au même moment, c'est-à-dire l'automne dernier, pour
consacrer un statut d'égalité entre les hommes et les femmes au
titre de tous ces régimes d'avantages marginaux, de
bénéfices marginaux.
Donc, des gestes concrets ont été posés.
Enfin, ceci étant moins concret parce qu'il s'agit d'un projet de
loi, la charte des droits fondamentaux, le bill 50, comporte une disposition
d'égalité ou de non-discrimination dans l'emploi en raison du
sexe, entre autres motifs possibles de discrimination. Un comité
interministériel a été formé cet hiver pour
étudier de façon très concrète l'implication d'un
principe de non-discrimination, principe qui, on s'en doute, peut avoir des
répercussions très considérables dans des régimes
d'emplois et dans des régimes d'avantages marginaux comme, par exemple,
les régimes supplémentaires de rentes.
Il est important que nous puissions voir d'avancequellesseront les
implications puisqu'il y a littéralement plusieurs milliers de
régimes supplémentaires de rentes qui, à l'heure actuelle,
établissent une discrimination, discrimination qui, rappelons-le, est
parfois favorable aux femmes plutôt qu'aux hommes, relativement à
l'âge de retraite par exemple, et qui introduit, dans l'ensemble des
avantages et des coûts d'un régime de rentes
supplémentaire, d'un régime de retraite supplémen-
taire, toutes sortes de considérations dont il faut tenir compte
pour vérifier l'impact possible de l'application d'un régime de
non-discrimination.
Ce comité-là travaille, doit nous produire un rapport
intérimaire d'ici quelques jours de manière que nous puissions en
tenir compte au stade de deuxième lecture ou de troisième lecture
du projet de loi no 50 mais il est à croire que ses conclusions finales
devront attendre encore quelque temps à cause de l'immense
complexité du problème lorsqu'on veut véritablement
assurer un principe de non-discrimination dans tous les plans privés
d'assurance et de retraite, etc.
Mais ce sont là des gestes positifs qu'il me paraît
important de souligner à ce moment-ci parce que la question a
été posée, elle est d'actualité,
particulièrement cette année et je crois que dans le contexte des
gestes qui ont déjà été posés on peut
s'attendre qu'il y ait des prolongements à tout ceci dans d'autres
domaines qui n'ont pas encore été touchés.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député
de Frontenac.
M. Lecours: M. le Président, j'aurais seulement une courte
question à poser. Hier, dans mon comté, il y avait justement une
marche des assistés sociaux pour protester contre les politiques du
ministère des Affaires sociales en ce qui concerne le soutien du revenu
familial. D'ailleurs, j'étais d'accord avec eux. Je leur ai
envoyé un télégramme et, avoir été
là, j'aurais marché avec eux.
J'aimerais seulement savoir, si le salaire minimum est augmenté
le 1er juin 1975, si, eux aussi, ne mériteraient pas une petite
augmentation avant le 1er janvier 1976.
M. Forget: La question de l'augmentation du salaire minimum se
pose selon des périodes et à des moments différents des
dates où la même question se pose pour l'aide sociale. Nous avons
adopté un principe d'indexation. Je vois mal comment on peut aller plus
loin qu'un principe d'indexation au coût de la vie des prestations,
d'autant plus que, s'ajou-tant aux prestations, des améliorations
interviennent toutes les années en cours de route pour améliorer
et bonifier le régime et le niveau des prestations.
J'ai cité, dans mon exposé du début, deux
modifications qui sont intervenues en 1974. J'ai indiqué
également que nous étions sur le point de faire une
dernière étude d'un projet de refonte totale des
règlements de l'aide sociale, dont certaines dispositions pourront avoir
des effets sur le niveau des prestations dans certains cas.
Donc, ma réponse est à la fois positive et négative
dans le sens suivant, c'est qu'il y a une majoration qui est faite dans le
niveau de l'aide sociale, mais à des périodes différentes
de celles où elle se fait pour le salaire minimum. On suggère
pour le salaire minimum c'est, d'ailleurs, presque une tradition
une majoration deux fois par année en mai et en novembre c'est
d'ailleurs la pratique des années antérieures
contrairement à ce qui est fait pour l'aide sociale où la
majoration prend effet le 1er janvier.
Encore une fois, ceci n'interdit pas de croire à des
améliorations en cours d'année, comme il yen a eu dans les
années passées. Malheureusement, je ne suis pas en mesure de vous
dire exactement quels changements pourraient intervenir cette année, ni
à quelle date, mais ce n'est certainement pas exclu.
M. Boudreault: M. le Président...
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Bourget.
M. Boudreault: J'aimerais peut-être ajouter quelques mots
afin de rassurer le député de Rouyn-Noranda sur les
déclarations de Mme Bacon, en France, et apporter un fait qui a
été vécu dernièrement. J'ai assisté à
l'ouverture de classes de jeunes filles mères dans mon comté et,
sur 80 jeunes filles, la moyenne d'âge était de 13 ans. Je pense
que c'est très important ce dont Mme Bacon a parlé, de donner
plus d'informations à ces jeunes qui sont réellement dans le
besoin.
Donc, M. le député de Rouyn-Noranda, je pense que, quand
on vit dans une situation semblable, ça nous laisse à penser et
j'ai bien confiance en Mme Bacon pour le travail qu'elle a entrepris à
ce niveau.
M. Samson: M. le Président, est-ce que je pourrais poser
une question au député?
Le Président (M. Houde, Limoilou): Non, ce n'est pas
permis.
M. Samson: Oui, c'est permis, M. le Président.
M. Boudreault: Laissez-le la poser. Je vais lui
répondre.
M. Samson: Le député nous parle d'une moyenne
d'âge de 13 ans.
M. Boudreault: Oui, et elles sont enceintes.
M. Samson: Les plus âgées et les moins
âgées se situaient à quel âge?
M. Boudreault: De 11 à 15 ans. M. Samson: M. le
Président...
M. Boudreault: II yen avait une qui avait 26 ans; malheureusement
c'était une débile mentale, mais quand même!
M. Samson: Elle a brisé la moyenne.
M. Boudreault: Elle a brisé la moyenne un peu.
M. Samson: Sur ce sujet, ça me fait penser à ce
qu'un médecin me disait hier soir, en parlant de certains programmes du
ministère des Affaires sociales dans ce domaine.
M. Lecours: Ce n'est pas moi.
M.Samson: Non, je souligne que ce n'est pas le Dr Lecours qui
disait ça. Mais il me disait que ça lui faisait penser à
un père de famille qui réunirait tous ses enfants au tour de la
table, qui mettrait un flacon de gin sur la table et qui dirait: Là, les
petits gars, je vais vous montrer à vous soûler comme il faut pour
que vous ne soyez pas malades le lendemain matin. C'est à peu
près ça que ça donne.
C'est pourquoi, moi c'est bien de valeur, mais je ne souscrirai pas
à tous ces programmes qui pourraient être visés par Mme le
ministre. Il y a peut-être une exception dans le cas du
député de Bourget.
M. Boudreault: Mais...
M. Samson: Je ne sais pas quelles sont les activités du
député de Bourget dans son comté je veux dire les
activités politiques, tout le monde a bien compris mais il reste
qu'on ne peut pas faire de cette exception une règle
générale.
M. Boudreault: Si on extrapole au niveau d'une province, quand il
y a seulement un comté...
M. Samson: Je n'y souscrirai pas, M. le Président.
Aucunement. Ce n'est pas parce que madame le ministre a l'intention de faire
une certaine éducation que cela va régler tous les
problèmes. D'ailleurs, en matière d'éducation, puisque
vous voulez parler d'éducation, en matière d'éducation, il
suffit de regarder la Presse d'hier, d'avant-hier, de samedi et vous verrez
qu'il y a une drôle de situation de ce côté.
On a des drôles de problèmes quant à l'enseignement
du français. Tout le monde sait qu'on a de la difficulté à
recruter des secrétaires et là, il semble que ce gouvernement a
délaissé l'enseignement du français puis s'en va dans
l'enseignement sexuel.
Je ne sais pas si c'est dans le comté du député de
Bourget, mais quelqu'un m'a dit qu'un électeur avait une trentaine de
chats dans son hangar. Ils n'avaient pas eu de cours d'éducation
sexuelle puis ils s'arrangaient très bien, apparemment. Ils
réussissaient à se reproduire sans trop de problème, sans
avoir recours à madame le ministre.
M. Boudreault: La directrice m'a dit qu'il y en avait beaucoup de
l'Abitibi.
Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous
plaît! Revenons aux affaires sociales. Le député de
Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, nous étions à
parler d'une politique familiale.
M. Boudreault: On peut parler en connaissance de cause.
M. Charron: Une des choses que je retrouve comme hypothèse
à mettre dans une politique familiale cela a été
demandé par plusieurs groupes, L'AFEAS dans son mémoire au
conseil des ministres, en décembre dernier, les Organismes familiaux
associés du Québec, en juillet dernier, la
Fédération des organismes familiaux du Saguenay-Lac-Saint-Jean et
d'autres groupes c'est l'implantation, au niveau du CLSC, je sais que
nous aurons cette discussion à un autre moment, l'implantation, dis-je,
de ce service particulier de consultation conjugale et familiale tel que
suggéré par ces organismes.
Avant d'entreprendre l'étude de toute la politique des centres
locaux de services communautaires, est-ce qu'au niveau du ministère des
Affaires sociales on a effectivement, je ne sais trop comment, en respectant
l'autonomie des CLSC, là où les CLSC en faisaient la demande,
favorisé la réalisation, àtravers un budget
accordé, de ce genre de service de consultation qui, si je regarde la
liste des organismes qui font à peu près la même demande,
semble s'établir dans tout le Québec?
M. Forget: Nous débordons assez largement le sujet
immédiat du programme no 1. Nous verrons au programme no 6 ou au no 7,
dans la consultation psychosociale, des crédits importants qui sont
versés aux centres de services sociaux. On sait que, traditionnellement,
la consultation familiale est une des vocations, est un des rôles
essentiels des centres de services sociaux, qu'ils continuent à assumer
avec des ressources légèrement accrues, quoique je doive dire que
la plupart des ressources nouvelles q ui ont été consenties aux
centres de services sociaux l'ont probablement été pour les
services aux personnes âgées et pour les services à
l'enfance.
Cependant, évidemment, il y a un certain recoupement entre les
services à l'enfance et les services de consultation familiale dans la
mesure où le problème des enfants est impliqué. Il y a
également des cliniques de consultation dans certains hôpitaux
pour certains types de problèmes de nature sociale ou de santé
mentale que l'on retrouve dans un certain nombre d'hôpitaux. Ces
ressources n'ont pas subi un accroissement peut-être très
significatif durant les dernières années, sauf dans la mesure
où elles s'intègrent, et ceci n'est pas négligeable, dans
le développement des équipes de santé mentale, des
équipes de secteurs en santé mentale.
Les organismes familiaux, par ailleurs, maintiennent depuis plusieurs
années, avec l'appui financier du ministère, sur une base non
professionnelle, des services d'entraide et de consultation en quelque sorte
basés sur l'entraide et sur la mise en commun des expériences par
un certain nombre de couples, et ils le font avec l'appui financier du
ministère. Leurs propositions visant à accroître les
services aux familles à l'intérieur des CLSC ont
été bien accueillies et sont incorporées dans le travail
qui est actuellement en cours pour définir de façon plus
précise un certain nombre de programmes parmi lesquels les CLSC seront
appelés à choisir dans l'orientation de leurs
activités.
Il parle là d'une orientation pour l'avenir plutôt que de
réalisations déjà acquises.
M. Charron: D'accord.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Autre question au programme
I?
M. Charron: Moi, j'en n'ai plus d'autres, sauf une. Je ne veux
pas couper le terrain à personne. Je m'en voudrais de terminer
l'adoption de ce programme sans avoir l'occasion de revenir sur une
déclaration du ministre des Affaires sociales, quant à la
situation de la famille et de la natalité au Québec, qui a fait
beaucoup de bruit et qui lui a valu l'occasion d'en refaire d'autres par la
suite, j'ai l'impression, soit parce qu'il estimait avoir été mal
interprété, comme cela arrive souvent, ou soit parce que...
M. Forget: Ou par l'Opposition.
M. Charron: ...parce qu'il estimait qu'il avait des explications
supplémentaires à fournir. Je trouve curieuse, aussi bien le dire
tout de suite, M. le Président, la déclaration du ministre des
Affaires sociales, qui a été publiée dans le Soleil du 9
novembre I974, en première page, avec un titre qui, peut-être, ne
rapportait pas exactement le contenu mieux expliqué à
l'intérieur que le titre fracassant, et n'était pas sans un
certain sens de la réalité, à mon avis.
Effectivement, je pourrais soutenir, comme lui, certaines affirmations
qu'il a faites quant au côté "avantageux" de la chute de la
natalité au Québec. Il ne se posait pas,lui, dans son poste de
ministre des Affaires sociales, comme un alarmiste, comme on en a connu ou
comme on en connaîtra vraisemblablement encore, mais essayait d'examiner
il le disait très bien aussi, c'est pour cela que je ne voudrais
pas qu'il soit mal interprété l'aspect proprement
économique de la chose. J'imagine que sur le plan culturel ce pourrait
être une autre discussion, que nous aurions ailleurs qu'ici, sur le plan
culturel, ce phénomène est particulièrement
inquiétant. C'est une ombre qui a plané sur la discussion de la
loi 22, l'année dernière, et qui va planer sur toutes les mesures
visant à protéger la culture française
québécoise. Sur le plan économique, je soutiens que le
ministre avait en partie raison; je dis en partie parce que je crois que c'est
à très court terme, effectivement. Pour lui répondre ou
pour lui faire ce reproche d'avoir fait ce raisonnement juste,mais juste que
pour un court moment, j'ai presque envie de recourir à une entrevue que
le premier ministre du Québec donnait à un autre journaliste.au
mois d'août I974, qui permettait au journaliste de titrer son article en
disant "Québec entend lutter contre la dénatalité" et qui,
surprise des surprises, nous permettait de voirque le premier ministre avait
des vues à long terme.
Le premier ministre, lui, à l'intérieur de ce
phénomène, craignait des déséquilibres sociaux
à venir par la suite, une pénurie de main-d'oeuvre qui ne
semblait pas inquiéter le ministre, à court terme. Mais il se
sentait, en fin de compte était-ce pour les besoins de la
publicité ou pour autre chose dans le besoin de dire au
journaliste qui l'interviewait qu'il était urgent que l'on regroupe un
certain nombre d'outils permettant de travailler à la lutte contre la
dénatalité au Québec. C'est alors qu'on a fait miroiter,
à un moment donné, cette possibilité de la création
d'un ministère de la population qui regrouperait, bien sûr, le
ministère de l'Immigration, si insignifiant qu'il soit actuellement, et
certains autres services retirés du ministère des Affaires
sociales, retirés du ministère du Travail ou ailleurs.
Je veux demander au ministre des Affaires sociales si brièvement
parce que ce n'est pas l'endroit d'une conférence sur ce sujet
il peut revenir sur ses conceptions et si au fond, en élargissant
la vision qu'il avait, il ne se sent pas la responsabilité aujourd'hui,
avec les crédits que nous allons lui voter, d'effectivement oeuvrer dans
le sens que le premier ministre l'indiquait en août dernier, sans que
nous ayons eu de décision concrète par la suite, mais de
regrouper, de travailler, sans aussi qu'il y ait de modèle
préconçu. Je pense que l'ancien ministre des Affaires sociales,
comme celui que j'ai en face de moi, actuellement, ont raison de soutenirqu'il
n'y a pas dans le monde de modèle de politique favorisant la
natalité qui ait été jugée miraculeuse et produise
l'effet de remonter la natalité ipso facto dans une
société. C'est plutôt un ensemble de facteurs, comme le
signalait le ministre, qui peuvent être rationnellement organisés
pour produire un meilleur résultat, qui peuvent être, au besoin,
regroupés sous la même responsabilité ministérielle,
mais ceci, entre autres, ne peut être qu'un facteur parmi tant
d'autres.
Mais est-ce qu'il ne sent pas le besoin, à long terme, d'oeuvrer
dans ce sens et de prendre à l'intérieur de son ministère
différentes responsabilités et différentes
décisions pour conduire le Québec sur cette voie?
M. Forget: J'hésite un peu, M. le Président,
à m engager dans des répétitions de ce que j'ai
déjà déclaré à l'Assemblée nationale
là-dessus. Je peux sans doute le faire, mais c'est nous engager dans un
débat qui est assez long. J'aimerais peut-être que le
député de Saint-Jacques, à la lumière des propos
que j'ai échangés je pense avec lui ou avec son collègue
de l'Opposition officielle, le député de Chicoutimi, je ne me
souviens plus exactement, l'automne dernier à la suite de la parution de
ces articles, me dise en quoi la réponse que j'ai pu donner à ce
moment lui semble ne pas tenir compte à la fois des perspectives
à long terme et aussi des distinctions qui me semblent esssentielles et
dont j'ai fait état lors de ces déclarations et lors de celles
que l'on m'attribue dans cet article qu'il vient de citer. Il serait plus
facile de maintenir ma réponse dans les limites de temps raisonnables si
on procédait ainsi.
M. Charron: Je crois qu'effectivement lors de la réponse
que vous aviez fournie à l'Assemblée au député de
Chicoutimi, qui vous interrogeait sur cet article, vous aviez eu l'occasion
d'ajouter ou d'éclairer davantage l'Assemblée sur une dimension
qui n'échappait pas à votre esprit, celle du long terme, comme je
l'ai appelée tout à l'heure, mais qui dans l'interview en
question n'occupait pas toute la place. Vous sembliez beaucoup plus vous
réjouir des résultats positifs que cela peut donner à
court terme sur le plan économique.
Vous aviez effectivement fourni à ce moment une différente
ce n'est pas ce que je vous demande de répéter en fin de
compte, je vous demande simplement si à la suite de cette
affirmation
que nous devons prendre comme vérité, que vous avez faite
à l'Assemblée, de votre préoccupation de ce que cela
pourrait signifier à long terme pour le Québec, non seulement
encore une fois sur le plan culturel, ce qui pourrait être la fin des
haricots, mais sur le plan économique même, pénurie de
main-d'oeuvre qualifiée, population vieillissante, surcharge
financière, mais cette fois non plus au domaine de l'éducation,
mais dans le domaine de la maladie, dans le domaine, autrement dit, de grever
le budget, comme vous le disiez, mais plus au même endroit, tous ces
facteurs qui jouent à l'encontre... On dit qu'en l'an 2000 le
Québec aura une des populations les plus vieilles et l'an 2000, je me
permets de dire que ce n'est pas loin, c'est dans 25 ans; nous serons tous
encore de ce monde, j'espère.
Cet aspect devrait inciter celui qui a le portefeuille des Affaires
sociales et qui a affirmé être préoccupé par cet
horizon lointain mais peu encourageant à oeuvrer à un certain
regroupement de ce qui peut être des facteurs dans ce sens. C'est le sens
de ma question bien plus que de vouloir vous entendre répéter ce
que j'avais parfaitement compris à cette occasion.
M. Forget: Je veux bien essayer de répondre à cette
question au meilleur de mes possibilités de le faire dans un court laps
de temps et, évidemment, sans aucune préparation
spéciale.
J'en profiterai, au tout début, pour donner une réponse au
député de Saint-Jacques, à la question qu'il me posait ce
matin. On a pu, dans une certaine mesure, éclairer sur le taux de
natalité, pour les années récentes et celles qui ont
été utilisées pour les préventions des
crédits de l'année en cours.
Je donnerai à la fois, pour chacune des années, le nombre
absolu de naissances et le taux de natalité par 1,000. J'attire
cependant votre attention sur le fait que les taux que je vais citer ne sont
pas nécessairement ceux qui apparaissent dans les publications
fédérales mais résultent d'autres travaux et
d'estimations, ainsi que de projections puisque je donnerai les chiffres
jusqu'à 1976, obtenus au ministère des Affaires sociales
même.
Nous avons observé, à l'expérience, que les
données fédérales accusent un certain retard sur la
réalité, certaines inscriptions de naissance ne sont pas faites
au moment où elles devraient être faites. Il y a une certaine
sous-évaluation des naissances.
Alors, les chiffres, pour les années 1972 à 1976, sont les
suivants: Pour 1972, 88,787 naissances et un taux de 14.7%; pour 1973, 88,578
et un taux de 14.6%; pour 1974, 88,937, un taux de 14.5%; pour 1975, 89,500, un
taux de 14.6%; pour 1976, 90,618 et un taux de 14.7%.
On observe donc il s'agit, bien sûr, de projections et
d'estimations une stabilité dans le taux et une progression
modeste dans les nombres absolus. Je ne tirerai, cependant, aucune
espèce de conclusion de ces chiffres. On se doute bien qu'ils sont
basés sur des hypothèses pour ce qui est des années pour
lesquelles les données ne sont pas disponibles, des hypothèses
qui, à l'expérience, peuvent s'avérer fausses, soit
à la hausse, soit à la baisse.
Ce sont des taux qui, malgré tout, sont diffé- rents des
taux qui apparaissent dans les publications fédérales et qui sont
différents à la hausse. Malgré tout, même avec des
taux majorés et sans présumer de ce qui pourrait arriver aux
chiffres des autres provinces si une opération analogue était
faite sur elles, il demeure que le Québec continue à être
la province où le taux de natalité est le plus bas. Je pourrai
citer ici ces taux pour 1973, tels qu'ils apparaissent dans les statistiques du
gouvernement fédéral, dans Statistiques de l'état civil,
rapport préliminaire 1973, où on a, pour l'ensemble du Canada, un
taux de 15.5%; pour Terre-Neuve, de 22%; pour l'Ile-du-Prince-Edouard, de
16.4%; la Nouvelle-Ecosse, de 16.5%; le Nouveau-Brunswick, 17.5%; le
Québec, dans ces chiffres, 13.8% comparativement à 14.6% selon
nos nos estimations; l'Ontario, 15.6%; le Manitoba, 17%; la Saskatchewan,
16.3%; l'AIberta, 17.4%, la Colombie-Britannique, 14.8%; le Yukon, 21.3%; les
Territoires du Nord-Ouest, 31.9%.
On observe également qu'au cours des années, ces chiffres
ont varié, généralement à la baisse dans l'ensemble
du pays, ainsi qu'au Québec. Mais ils ont connu pas seulement un
mouvement vers la baisse mais également des fluctuations, lorsque l'on
porte son regard jusqu'à 1921. Dans le passé, on remarque qu'il y
a eu, effectivement, des fluctuations, fluctuations assez importantes par
exemple dans les années trente, qui correspondent avec les années
de difficultés économiques considérables. Le taux est
passé de un peu plus de 29%, au début des années 1930,
à 24% au milieu de la décennie, pour retourner à 25%, se
maintenir à peu près donc à un niveau assez bas,
jusqu'après la guerre, où, en 1944 et en 1945, il est
retourné à plus de 29%.
Donc, il y a des facteurs économiques qui ont pu jouer sur des
variations dans le taux, mais il y a, malgré tout, une tendance
séculaire à des familles de plus petite taille et à un
taux de natalité moins élevé.
Pour cequi est de l'avenir et de l'avenir éloigné, il
faudrait, évidemment, avoirdes projections à long terme. Tous
ceux qui se sont essayés à ces exercices savent combien les
variations sont importantes entre les hypothèses minimales et les
hypothèses maximales, deux séries d'hypothèses qui sont
ordinairement très défendables et qui sont inspirées de ce
qu'on a trouvé comme variations dans les années
antérieures.
Il est assez difficile de croire, cependant, que la tendance
séculaire vers une diminution du nombre des enfants dans les familles,
de la grosseur moyenne des familles, pourrait être facilement
renversée. Il faut donc anticiper que généralement, pour
l'ensemble ou Canada et non seulement le Québec, on ne verra pas de
mouvement spectaculaire. Il n'est peut-être pas interdit de croire,
cependant, que, par rapport à d'autres provinces, les variations
relativement plus considérables qui se sont manifestées au
Québec ne pourraient pas être, elles, renversées à
l'avantage du Québec. C'est là que les prévisions sont
extrêmement ténues. Véritablement le premier argument que
l'on doit faire valoir lorsque l'on parle du taux de natalité et surtout
du taux de natalité à long terme, c'est notre ignorance presque
totale sur ce que l'avenir, à long terme, nous réserve. Sans
aucun doute, il serait nécessaire
d'étudier les facteurs qui sont très mal connus, qui
expliquent non seulement les variations à court terme, qui sont
peut-être plus vraisemblablement liées à des fluctuations
dans le taux d'activité économique, mais qui sont liées
à des tendances séculaires qui ne reflètent certainement
pas le niveau de l'économie, certainement pas d'une façon
où on souhaiterait la modifier, de toute manière, puisque la
leçon de la tendance séculaire, ce serait véritablement,
si l'on veut stimuler la natalité, d'appauvrir systématiquement
le Québec et l'ensemble du pays. Puisque la richesse croissante du pays
a diminué la natalité, on pourrait croire qu'à long terme
on pourrait, en s'appauvrissant, multiplier les naissances.
C'est peut-être vrai à l'échelle internationale
quand on voit des pays comme le Bangla Desh, où les gens crèvent
de faim littéralement, avoir des taux de natalité galopants. Il y
a probablement, à long terme, une relation entre les niveaux de vie et
la natalité, mais ce n'est certainement pas, même si on
vérifiait cette relation, une conclusion qu'on voudrait tirer sur le
plan des décisions à prendre.
Si l'on se reporte à notre connaissance des moyens pour
influencer le taux de natalité, alors on est encore plus démuni
que pour ce qui est des causes, puisque nous n'avons littéralement
aucune expérience favorable de l'effet sur la natalité de quelque
mesure sociale que ce soit, à long terme.
Si l'on met de côté les variations de courte
période, que tous les pays ont connues lors de la crise
économique des années trente et l'espèce d'explosion
d'optimisme et d'enthousiasme que tous les pays ont également connue
après la conclusion des hostilités, en 1945, on s'aperçoit
que les différences de politiques sociales d'un pays à l'autre,
qui sont très considérables, sont impuissantes à expliquer
les tendances à long terme.
La France, qui était alléguée par quelques-uns
comme l'exemple a contrario, si l'on veut, de ce que je viens d'affirmer, tout
en voyant les mesures sociales auxquelles on attribuait la croissance de la
natalité demeurer inchangées et même être
améliorées durant les dernières années, a vu son
taux de natalité décroître comme celui de tous les
pays.
Il y a donc une ignorance considérable à la fois des
causes et des moyens pour y remédier et c'est dans cette optique qu'il
faut envisager, je pense, pour une part, le problème à long
terme, c'est-à-dire de diminuer notre ignorance à la fois sur les
causes et sur les moyens. D'où une première conclusion, c'est
qu'il faudra étudier davantage avant de pouvoir en venir à des
politiques et de pouvoir certainement différer d'opinion, avec un
semblant de raison, sur des politiques sociales, sur la base de leur effet sur
le taux de natalité, puisque nous n'en savons strictement rien.
Considérons les effets du taux de natalité c'est
là-dessus que mes remarques ont porté, beaucoup plus que sur ce
que je viens d'exposer à long terme.
Si l'on considère, dis-je, l'effet du taux de natalité
à long terme et non seulement à court terme, je crois qu'il faut
être malgré tout suffisamment ouvert quand nous considérons
ce problème pour en voir à la fois les aspects positifs et les
aspects négatifs. Les aspects positifs à long terme, même
sur le plan culturel et non pas seulement sur le plan économique,
existent. Je ne dis pas qu'ils sont prédominants, mais il faut
être malgré tout ouverts à leur présence, à
leur existence.
Nous constatons, et c'est une chose que nous pourrons constater
abondamment plus loin dans l'étude des crédits du
ministère des Affaires sociales, mais ce n'est pas limité au
ministère des Affaires sociales, que le Québec emploie sa
main-d'oeuvre de façon inexplicable ou presque inexplicable. Nous
constaterons, dans le secteur hospitalier au Québec, par exemple, que
nous employons une main-d'oeuvre plus abondante, relativement aux services
offerts, que tous les pays développés auxquels nous pouvons nous
comparer, qu'il s'agisse des pays américains ou européens.
Ce sont des statistiques qui sont bien connues, qui sont publiques, qui
sont constantes. Depuis une quinzaine d'années, au Québec, nous
avons, en moyenne, près de deux employés et demi par lit
d'hôpital alors que dans tous les pays développés nous n'en
trouvons que deux. Il y a donc une utilisation de la main-d'oeuvre au
Québec qui est de 30% supérieure.
On peut trouver à ceci des causes économiques ou des
causes de courte période, mais est-ce qu'il ne s'agit pas, puisque c'est
un phénomène qu'on retrouve dans les forces policières
enfin, je cite ces deux exemples, mais il y en a des tas est-ce
que ce n'est pas un phénomène qui reflète peut-être
des habitudes acquises au Québec, qui reflète non seulement des
habitudes acquises mais aussi le peu de valeur que l'on attache à la
main-d'oeuvre, à l'élément humain dans l'ensemble des
activités économiques? Ne serait-ce pas que les aspects
quantitatifs ont primé de façon exagérée dans la
façon dont on s'est comporté comme société
jusqu'à maintenant, aux dépens des éléments
qualitatifs? L'influence de ce comportement à long terme sur la
vitalité culturelle du Québec, sur son rayonnement, est tout
aussi importante que les simples arguments tirés des nombres. Je crois
que cet argument doit mériter au moins autant d'attention dans une fin
de siècle qui, certainement, ne donne aucune prime au nombre mais bien
plutôt à la qualité, même sur le plan culturel,
même sur le plan politique, au moins jusqu'au moment où on
envisage d'engager des conflits armés où les nombres comptent
encore, je crois. Mais à l'exclusion des conflits armés, je ne
crois pas que ces raisonnements tiennent vraiment. C'est dans cette optique
d'une valorisation de l'élément humain, dans toutes nos
activités, d'une valorisation de l'homme par rapport à toutes les
autres ressources que nous utilisons, sur laquelle beaucoup de progrès
peuvent être faits au Québec; nous en avons des manifestations
très très concrètes au Québec dans bien des
secteurs qui doivent manifester des causes assez profondes.
C'est sur ces causes-là que je crois qu'il est important
d'attirer l'attention lorsque l'on parle de natalité.
Enfin, il faut distinguer les gens. Je l'ai indiqué
bien souvent, notre ministère joue un rôle de tutelle
envers des établissements de santé et des activités
professionnelles qui s'intéressent à des individus dans les
situations de crise.
Il me paraît essentiel, comme découlant d'une saine
éthique de la façon dont ces services doivent être
administrés, que nous les administrions en ayant à l'esprit
seulement l'intérêt des personnes, des individus qui s'adressent
à ces services sans essayer de leur imposer des décisions, sans
essayer d'infléchir la façon dont ces services leurs sont
donnés pour des préoccupations ou des impératifs
politiques, culturels ou autres, qui sont des raisons collectives d'agiret non
pas des raisons personnelles.
Si l'on veut qu'on humanise nos services Dieu sait que nous
cherchons à les humaniser avec les moyens que nous avons, qui ne sont
pas nécessairement suffisamment efficaces et suffisamment rapides dans
leur action il demeure que nous ne pourrons pas les humaniser si nous
cherchons à imposer dans la façon dont ils sont donnés ou
dont ils ne sont pas donnés, dans la manière dont l'information
est rendue accessible aux gens ou n'est pas rendue accessible; en plus de la
solution des problèmes de crise des individus et des familles, des
préoccupations de politique, quelque noble qu'on la veuille au plan de
la collectivité, qui va faire que tout à coup on va dire à
un individu: Non, vous n'avez pas droit à ce service, non pas parce que
vous n'en avez pas besoin, mais parce que l'intérêt de l'Etat
commande que vous ne le receviez pas.
Si nous amorçons une démarche de ce genre,
personnellement, je ne veux pas être partie à un tel genre de
démarche. C'est la raison pour laquelle j'ai indiqué que, s'il
faut je crois qu'il le faut s'intéresser aux
problèmes de la population comme collectivité ce serait
illusoire de croire que ce n'est pas important et qu'on peut la
négliger c'est certainement au sein d'un autre ministère
qu'il faudra s'en occuper, parce qu'il faut séparer les genres et
s'assurer que la raison d'Etat ne viendra pas intervenir dans les relations
entre un professionnel de la santé ou les services et les gens qu'il
doit aider.
Sa seule préoccupation doit être l'aide concrète
qu'il peut leur apporter. C'est dans cet esprit, d'ailleurs, que l'information
qui fait partie, malgré tout de l'univers civilisé dans lequel
nous vivons, l'information sur les moyens de contraception, est rendue
disponible aux jeunes qui, s'ils ne l'ont pas, vont avoir des problèmes
dans leur vie, à eux, non seulement des problèmes, mais des
tragédies.
J'estime que nous n'avons pas le droit, sous prétexte de raisons
collectives ou de raisons d'Etat, quelles qu'elles soient et quelle que soit
leur légitimité sur ce plan, de refuser l'information, de tenir
les gens dans l'ignorance, comme on l'a trop longtemps fait sur bien des plans,
pour des raisons d'Etat ou pour des raisons de ce type.
Si l'information existe elle existe; ce n'est pas nous qui
l'avons développée, mais elle est là et tout le monde sait
qu'elle existe vaguement il faut la rendre accessible parce qu'elle peut
aider les gens à éviter des situations de crise.
M. Charron: M. le Président, j'apprécie grandement
l'intervention que vient de faire le ministre des Affaires sociales, car elle
nous permet peut-être de reprendre un débat que nous avons
entamé hier de façon très générale et de
ressortir certaines conceptions qui seront à la base de chacun des
programmes et de celui que nous nous apprêtons à adopter
également.
Beaucoup de choses dans ce que vient d'affirmer le ministre sont vraies,
mais juxtaposées les unes à côté des autres
c'est peut-être la différence qu'il y a entre les choses
spirituelles et les choses matérielles elles ne produisent pas
nécessairement un total qui est la somme exacte des deux. Cela peut
même, à l'occasion, donner le contraire de l'une et de l'autre une
fois qu'on les a mises ensemble ces vérités.
Par exemple, le ministre affirme avec une certaine raison que les
nombres comptent moins dans cette fin du vingtième siècle dans
laquelle nous nous engageons, la dernière tranche, que la
qualité. L'objectif de la qualité, l'impératif de la
qualité a supplanté partout. Les collectivités
occidentales ont plus de moyens techniques d'aspirer à la
qualité. Il est donc normal que la qualité devienne une
espèce d'objectif maintenant atteignable et qui, donc, s'inscrit dans
les valeurs des actions de chacun des individus.
Je crois aussi qu'il y a des avantages à être un petit
peuple en ce sens. Ceux qui sont les plus d'avant-garde dans le monde
occidental moderne sont souvent ces petits peuples, la Scandinavie par exemple,
qui ont su, en se gardant à l'extérieur des grands conflits ou
courants mondiaux, édifier des sociétés qui, sur le plan
interne de santé intellectuelle de toute une collectivité, sont
à l'avant-garde dans bien des domaines. Si je suis de ce
côté de la table, c'est que je considère que le peuple
auquel j'appartiens est du même type et que, si on lui en donnait la
chance, il peut également lui aussi fournir, malgré son petit
nombre, un effort dans l'effort collectif mondial de qualité,
justement.
Mais cette vérité ne m'en fera pas oublier une autre,
c'est qu'il est essentiel pour ces petits nombres, lorsqu'ils n'ont pas le
nombre, de savoir quelle est la qualité du pouvoir, quelle est la
qualité de l'autonomie. C'est une qualité fondamentale des
collectivités, et là où le petit nombre peut devenir un
avantage à l'occasion, il peut devenir un désavantage lorsque ce
petit nombre est gouverné par d'autres.
Dans ce sens, les risques culturels qu'il y a au loin, quant à
l'identité de cette collectivité, me paraissent toujours
imminents comme une ombre qui plane constamment sur le développement de
notre collectivité. Le ministre définit, dans un même type
de vérité, le genre d'approche qu'il veut avoir avec le citoyen
et Dieu sait qu'il est titulaire d'un ministère qui a le plus
d'approches quotidiennes des citoyens, d'un grand nombre de nos concitoyens
sur l'aspect individuel de cette personne, sur l'aspect personnel, je
dis individuel de la personne et personnel de l'individu qui se présente
à un ou l'autre des comptoirs des services de ce ministère, qui
ne veut pas être impératif sur le plan collectif du comportement
de ces individus.
Je dis que c'est vrai, à court terme, encore une fois. Cela
s'appelle une social-démocratie. J'emploie le mot non plus sous
l'étiquette publicitaire comme on l'a fait, mais ce genre de service est
une
social-démocratie de service. C'est augmenter le confort
individuel, s'orienter pour manifestement rendre l'individu plus disponible. Il
y a, dans le programme du parti auquel j'appartiens, M. le Président, un
certain nombre de mesures qui le font exactement dans le même genre:
accès au plein air, par exemple, prendre l'individu comme tel, sans
aucun impératif collectif, accès au plein air, accès
à de meilleurs services de santé, soutien de revenu familial qui
soit plus élevé, qui lui permette d'obtenir plus de loisirs,
diminution des heures de travail, société de loisirs, etc., ce
vers quoi on s'en va.
M. le Président, la tragédie, je reprends le mot que le
ministre a employé dans une autre description, mais la tragédie
de cette immense société occidentale, dont nous sommes une partie
et une exception en même temps, de ce continent nord-américain,
c'est qu'on s'est lancé à corps perdu et à âme
perdue dans le développement des services individuels, dans la promotion
individuelle, dans la sécurité individuelle.
Effectivement, le développement des "welfare states ' comme on
les a appelés, que ce soit le modèle britannique, Scandinaves ou
autres, a fini par créer à un moment donné un confort
éminemment matériel de ce que la jeune génération
nous a manifesté depuis une dizaine d'années et ce qu'elle refuse
encore de faire. Ce pourquoi les jeunes se refusent encore à participer
au genre de débat comme celui que nous tenons aujourd'hui, c'est qu'ils
ont compris et qu'ils nous ont exprimé, et avec raison, que
c'était souvent au prix de l'âme que nous augmentions ce service
individuel et qu'il est aberrant de penser que piloter une philosophie ou
piloter une approche des citoyens sous l'aspect individuel, n'est pas en
même temps défendre un aspect collectif, n'est pas en même
temps apporter des valeurs collectives, lorsqu'on intervient dans la
collectivité avec $2,789 millions, 4,617 humains disponibles. Et quel
que soit le modèle des relations que l'on incite ces individus à
avoir avec les autres individus citoyens, on transforme la collectivité
quand même, on intervient collectivement avec ces moyens et on affecte,
on change l'image de la collectivité.
Ce que j'admets de la position du ministre, c'est qu'il se garde d'avoir
une position totalitaire. Je crois que je l'ai exprimé moi aussi hier.
Je crois à la possibilité pour chaque personne de créer
son bonheur. Je ne veux pas imposer la conception du bonheur, d'ailleurs pas
plus que je ne veux que personne m'impose des conceptions de bonheur ou
m'oblige à avoir tel comportement. Je veux vivre ma vie comme je veux la
vivre et ce n'est pas l'affaire de personne.
C'est la même chose. Je n'ai envie d'obliger personne à
avoir un modèle de vie. Cette approche que décrivait le ministre,
je la partage entièrement, mais c'est de la naïveté de
croire qu'on intervient au niveau des services dans une
social-démocratie sans que l'ensemble de l'image de la
collectivité soit atteinte.
Par exemple, je mentionnais tout à l'heure la
société Scandinave. Je ne veux pas étirer inutilement non
plus mais, mon Dieu, si ça peut arriver des fois qu'on ait ce genre de
débat, cela ne nuirait pas, au lieu de se crier des bêtises et de
se "pitcher" n'importe quoi d'un bord et de l'autre de la table. Par exemple,
on dit: On analyse. J'y suis allé moi-même, j'ai eu l'occasion
d'avoir des contacts avec ces gens. Une société extrêmement
riche, celle qui a le plus haut niveau de vie en Europe, la
société suédoise est une société morte en
même temps. Morte. Il y a le chrome, il y a l'or, il y a le néon
et tout ce que vous voudrez, il y a des services disponibles, on évite
au maximum les conflits de travail à peu près partout, etc. Sur
le plan théorique, c'est un modèle de société.
Quant aux services individuels, l'approche individuelle, la possibilité,
pour chaque habitant de Stockholm, d'avoir son lac à proximité,
son camping, son plein air, ils sont, dans ce sens-là, à
l'avant-garde de notre collectivité. Par contre, ils l'ont fait au
détriment... En valorisant cette individualité, ils ont
abandonné le collectif.
Les jeunes ont bien raison, aujourd'hui, d'avoir peur du collectif parce
qu'il a toujours été, ici, mirage bien souvent. Ils essaient de
le recréer à partir... Rappelons-nous ces "trips " de 1968, les
communes, ce retour à la terre. Il faudrait le reprendre par en bas, le
collectif, sans abandonner l'individuel en s'en allant, parce que les causes
peuvent facilement devenir totalitaires. Ce qu'ils reprochent à la
société, en même temps, c'est de ne plus fonctionner que
par l'individuel, d'engraisser ni plus ni moins. C'est le cas de le dire. Nous
sommes une société où l'embonpoint est facile dans tous
les sens du mot, excepté pour celui qui vous parle, mais c'est un fait
que bon nombre de nos concitoyens ne sont pas en santé physique, pas
à cause des raisons qui affectent le Bangla Desh, mais pour exactement
le contraire. Nous sommes une société où il y a abondance
et de pain et de jeux. En ce sens, les jeunes nous invitent à maintenir
la distinction entre les deux. C'est pour cela que je voulais avoir cette
discussion qui, encore une fois, se greffe autour des remarques que le ministre
avait déjà faites un jour quant à ses inquiétudes
ou à sa façon d'apprécier la chute du taux de
natalité actuel.
Je soulignais tantôt que les démographes encore une fois,
prévisions erronées ou non, soulignent je pense qu'ils ne
peuvent pas se tromper tellement que nous serons bientôt l'une des
sociétés les plus vieilles et qu'en ce sens, quel que soit le
niveau de services individuels que notre collectivité aura réussi
par ses ressources fiscales à se donner, il se peut que le courant, le
dynamisme, la vie, quoi, soient disparus de cette société en
même temps. C'est une responsabilité de travailler à ce
qu'il y ait toujours des jeunes, qu'il y ait toujours, dans cette
société, des gens qui bousculent, des gens qui poussent, des gens
qui frappent à l'occasion. Chacun d'entre nous conviendra que, si nous
sommes, aujourd'hui, à parler de choses qu'il y a cinq ans, six ans
le député de Rouyn-Noranda le signalait tout à
l'heure étaient impensables et qui sont aujourd'hui des acquis
dont tout le monde se réclame, c'est parce qu'il y a eu des jeunes
citoyens, à un moment donné, qui l'ont exigé.
Je souffrirais énormément d'atteindre l'année 2,000
et d'être dans la moyenne d'âge de la collectivité, à
l'âge que j'aurai quand j'atteindrai l'an 2,000. J'espère bien
que, lorsque j'atteindrai l'an 2,000. il y
aura un fort groupe de jeunes de 18, 20 ans, qui me diront que je suis
fini, qui pousseront sur moi, qui diront que mes conceptions de service
individuel pour chacun sont largement dépassées parce que j'ai
oublié leur âme, j'ai oublié leur identité comme
génération.
Mais si la collectivité québécoise est, à ce
moment-là, contrôlée essentiellement par des gens d'une
quarantaine d'années, comme moi ou comme d'autres à ce
moment-là, ceux qui sont de ma génération, cela va
être une société plate à mort et le Québec
aura perdu beaucoup de son caractère d'exception sur le continent
nord-américain.
M. le Président, je vous remercie de nous avoir permis ces
échanges qui, comme je le dis, ne viennent pas assez souvent dans notre
Assemblée et, pour vous soulager, je suis prêt à adopter le
programme I.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme I,
adopté?
M. Samson: Non, M. le Président.
Pour les raisons que j'ai mentionnées tantôt et que je veux
respécifier avant qu'on prenne le vote, le ministère ne veut pas
donner suite aux demandes de la population quant aux possibilités, pour
les personnes âgées de plus de 65 ans, de gagner plus de $1,320
sans qu'on grève de $0.50 pour chaque dollar gagné leurs gains,
pour ces raisons, je voterai contre le programme I. Mais je spécifie que
ce n'est pas contre le programme des allocations familiales que je n'ai pas le
choix, c'est à ce seul programme que je peux manifester mon
désaccord quant au programme de la Régie des rentes
vis-à-vis des personnes âgées. Je demande le vote
enregistré, M. le Président.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Est-ce que la
commission est prête à voter? Mme Bacon (Bourassa)?
Mme Bacon: Pour.
Le Président (M. Houde, Limoilou): M. Bédard
(Chicoutimi)?
M. Bellemare (Johnson): M. Bellemare (Rosemont), M. Faucher
(Nicolet-Yamaska)?
M. Faucher: Pour.
Le Président (M. Houde, Limoilou): M. Bonnier
(Taschereau), M. Charron (Saint-Jacques)?
M. Charron: En faveur, M. le Président.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Pour? M. Dufour
(Vanier)?
M. Dufour: Pour.
Le Président (M. Houde, Limoilou): M. Bou-dreault
(Bourget), M. Forget (Saint-Laurent)?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Houde, Limoilou): M. Fortier
(Gaspé)?
M. Fortier: Pour.
Le Président (M. Houde, Limoilou): M. Lecours
(Frontenac)?
M. Lecours: En faveur.
Le Président (M. Houde, Limoilou): M. Massi- cotte
(Lotbinière)? M. Samson (Rouyn-Noranda)?
M. Samson: Contre.
Le Président (M. Houde, Limoilou): M. Saint-Germain
(JacquesCartier)?
M. Saint-Germain: Pour.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Pour: 8Contre:
1
Le programme no 1, adopté. Programme no 2.
M. Charron: Est-ce qu'on peut commencer juste demain l'aide
sociale? Cela me surprendrait qu'on l'adopte avant six heures.
M. Forget: Comme on va y passer beaucoup de temps, on peut
peut-être amorcer tout de suite. Vous avez sûrement des
interventions.
M. Charron : On va peut être entend re un exposé
liminaire jusqu'à six heures.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 2, aide
sociale.
M. Samson: Ce serait raisonnable qu'on prenne cela demain.
M. Forget: Si c'est le voeu de la commission, je ne m'y opposerai
pas.étant assuré d'une adoption rapide, demain.
M. Samson: Peut-être, on ne sait jamais.
Le Président (M. Houde, Limoilou): La commission ajourne
ses travaux à demain, dix heures.
(Fin de la séance à 17 h 48)