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Commission permanente des affaires sociales
Etude des crédits du ministère des
Affaires sociales
Séance du jeudi 5 juin 1975
(Dix heures vingt-quatre minutes)
M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente des
affaires sociales): A l'ordre, messieurs!
Les membres de la commission, ce matin, sont les suivants: Mme Bacon
(Bourassa), MM. Bédard (Chicoutimi), Bellemare (Johnson), Bellemare
(Rosemont), Bonnier (Taschereau), Charron (Saint-Jacques), Dufour (Vanier),
Boudreault (Bourget), Forget (Saint-Laurent), Fortier (Gaspé); M.
Veilleux (Saint-Jean) remplace M. Lecours (Frontenac); M. Déziel
(Saint-François) remplace M. Massicotte (Lotbinière); MM. Samson
(Rouyn-Noranda), Saint-Germain (Jacques-Cartier).
L'honorable député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, c'est à ma demande
expresse je veux immédiatement en remercier le ministre des
Affaires sociales et le leader du gouvernement que la commission
siège ce matin pour la dernière fois pour l'étude des
prévisions budgétaires et du budget de l'année
financière 1975/76.
Je l'ai fait non pas, M. le Président, que j'aie la moindre
idée que nous puissions adopter, dans la séance de ce matin, les
treize ou quatorze programmes qu'il nous reste à adopter, mais je crois
qu'un certain nombre de problèmes mériteraient qu'au moins nous
les survolions pour permettre qu'un certain nombre d'informations puissent
être déposées sur la table de l'assemblée et de
mieux connaître les intentions du gouvernement quant à
l'utilisation des fonds que nous serons disposés, a la fin de cette
séance, à adopter en bloc. En effet, même pour les
programmes que nous n'aurons pas eu le temps de discuter, j'ai pris
l'engagement devant le leader du gouvernement et devant le ministre des
Affaires sociales que nous accepterions en bloc les crédits de ce
ministère, pour l'année financière, à la fin de la
séance de ce matin.
Je le fais aussi, M. le Président, sur un autre plan. Le
rôle de l'Opposition consiste également, tel que nous avons voulu
le pratiquer depuis que nous occupons ce poste à l'Assemblée, en
une courroie de transmission, l'expression était du chef de
l'Opposition, d'un service public entre les citoyens et le gouvernement. Il
nous arrive, à l'occasion, que certains groupes, certains responsables
dans le réseau des Affaires sociales communiquent avec nous pour nous
inciter à soulever le problème ou, à tout le moins,
à aller chercher un certain nombre d'informations. Je crois que cette
démarche est parfaitement légitime dans un régime
démocratique, non seulement d'espérer du gouvernement une oreille
attentive, mais aussi, à l'occasion, d'aller chercher l'appui de
l'Opposition pour faire avancer ce qu'ils estiment être une mesure
nécessaire et importante pour la région ou pour la ville qu'ils
représentent.
C'est donc en m'acquittant de cette tâche, ce matin puisque
nous n'avons guère eu le temps de le faire lors des autres
séances de la commission, alors que nous avons plutôt
abordé les questions d'ordre général, ce qui n'est pas un
défaut, non plus que j'ai l'intention de soulever un certain
nombre de questions très particulières qui s'enchaîneraient
à l'étude plutôt théorique que nous avons faite,
lors de la dernière séance, des centres locaux de services
communautaires.
Par la suite, j'ai l'intention d'aborder un certain nombre de questions
sur un autre programme que l'on retrouve à la fin des crédits
budgétaires du ministère des Affaires sociales, soit les
problèmes relatifs à un certain nombre de centres hospitaliers du
Québec: problème de croissance, problème
d'aménagement, problème d'implantation même dans certains
milieux. Finalement, puisque l'actualité s'y est mise, ce matin
sans même que je n'aie rien à y faire, et je le jure devant les
membres de la commission j'avais l'intention d'aborder le
problème des garderies puisque c'est probablement la dernière
occasion que nous avons de le faire. L'actualité m'y pousse encore plus
ce matin et la présence de madame le ministre d'Etat devient un
élément indispensable à cette discussion.
Donc, je pense que, lorsque nous aurons fait le tour de ces questions,
très rapidement, nous pourrons considérer que les crédits
du ministère des Affaires sociales sont adoptés.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Cela va. Services
communautaires (suite)
M. Charron: Puisque nous en étions au programme 4 qui
concernait les CLSC, j'aimerais demander question très
précise et très locale où le
ministère prévoit établir le CLSC qui doit desservir le
secteur sud de la région du comté de Montmagny. Il y a discussion
quant à l'implantation de ce centre local de services communautaires
dans une municipalité ou une autre du secteur sud de Montmagny.
Je voudrais savoir si le ministère est maintenant fixé et
quelles sont les raisons qui ont motivé ce choix plutôt que
l'autre.
M. Forget: Le député de Saint-Jacques
soulève un problème qui se manifeste à l'occasion du choix
de l'implantation de sièges sociaux de CLSC dans le cas de
Montmagny-Sud, qui s'est manifesté également dans d'autres
districts, c'est-à-dire ces territoires pour lesquels un CLSC est
prévu . Cela constitue probablement une catégorie de
décisions qui sont des plus délicates et des plus difficiles
à trancher.
Délicates et difficiles, parce que, qu'il s'agisse de CLSC ou
qu'il s'agisse d'à peu près n'importe quoi, on connaît
très bien l'importance et la jalousie dans le bons sens du mot
que les rési-
dents de toutes nos petites villes et de nos moins petites villes au
Québec attachent à l'implantation d'un symbole, quel qu'il soit,
d'activité économique ou sociale chez eux plutôt que chez
le voisin. Ce sont des sentiments qui sont tout à fait
défendables, tout à fait normaux, mais qui affichent, dans
certains cas, une très grande vivacité et avec lesquels il faut
compter. Difficiles et délicates, cependant, pour une autre raison
également, ces rivalités légitimes entre villes ou entre
municipalités, parce que le nombre de facteurs qui peuvent et doivent
être pris en considération pour décider de l'implantation
d'un siège social, est assez considérable et que, finalement, ces
facteurs, dans des cas particuliers, ne jouent pas tous dans la même
direction ou ne favorisent pas tous la même implantation.
Il reste donc une certaine pondération nécessaire entre
ces différents facteurs que je vais énumérer tantôt
d'ailleurs, qui introduit nécessairement un certain
élément de subjectivisme dans une décision comme
celle-là. Dans les régions rurales ou semi-rurales, ou
semi-urbaines, comme on veut, il existe peut-être deux approches qui sont
également défendables sur le plan théorique et qui vont
dans des directions opposées. Dans ces régions semi-rurales on
est généralement en présence d'une certaine carence de
services pour l'ensemble du district, mais c'est une carence qui est
inégalement répartie si on me permet cette expression
dans l'ensemble du district. Certains prétendent que, dans
l'implantation d'un CLSC, il faut privilégier les endroits où
cette carence est la plus manifeste et la plus forte, puisque ce
moment-là le CLSC jouera le rôle d'un élément de
compensation pour la pénurie de ressources observée.
D'autres prétendent c'est aussi un argument qui est
plausible qu'au contraire il faut choisir de cette localité de
préférence dans un district qui a déjà un certain
nombre de ressources. Quand on parle de resssources dans ces circonstances, on
parle, par exemple, des ressources médicales, de la présence de
médecins.
Ce sont évidemment deux conceptions différentes qui sont
elles-mêmes le reflet de deux perceptions, peut-être un peu
différentes du rôle du CLSC. La première perception est
celle selon laquelle le CLSC jouera, dans des régions où il y a
une carence de toute ressource, un rôle qui est essentiellement de donner
un foyer ou un pôle d'attraction pour des ressources ou des services
médicaux.
Le CLSC joue le rôle, à ce moment-là, de concurrent,
si vous voulez, mais c'est un concurrent qui est bienvenu puisqu'on y voit la
possibilité d'attirer des ressources médicales. Dans l'autre
conception, le CLSC est moins le foyer d'une activité médicale
qu'un complément à cette activité. C'est une structure
administrative qui regroupe, selon cette autre conception, un ensemble de
resssources humaines et techniques qui permettent de compléter
l'activité des médecins dans une région. Ces deux
conceptions ne sont pas nécessairement mutuellement exclusives; el- les
peuvent, selon les districts, être plus appropriées l'une que
l'autre. La raison pour laquelle je mentionne tout ceci, c'est justement pour
faire voir que l'implantation du siège social d'un CLSC dans un district
reflète non seulement des préoccupations de fierté locale,
de développement économique, etc puisque c'est un
créateur d'emplois, c'est un symbole; on a au moins certains services
publics que d'autres n'ont pas, etc., ce qui est en soi une source de
complication mais également des conceptions différentes,
des conceptions différemment appropriées ou appropriées
selon différentes régions ou différents districts, du
rôle d'un CLSC.
C'est l'ensemble de ces facteurs qu'il est important d'évaluer.
C'est un exercice auquel, encore une fois, nous nous sommes livrés dans
certains districts, mais, fort heureusement, pas dans tous, puisqu'il y a eu
une convergence de tous ces facteurs dans un certain nombre d'entre eux.
Dans le cas de Montmagny-Sud, c'est une décision qui n'est pas
arrêtée. C'est une décision qui n'est pas
arrêtée également dans le cas du district de Joli-Mont et
dans le cas du district d'East Angus, Weedon et Cookshire.
C'est non seulement un dilemme à certains égards, mais
c'est également une question qui est compliquée par le fait
qu'intervient aussi, en plus des considérations de planification dont je
viens de faire état, un processus de consultation.
Ce processus de consultation nous fait déboucher sur des
conclusions qui sont parfois le reflet beaucoup plus de préoccupations
quant à l'implantation géographique, à la situation
relative de différentes municipalités.
Il est normal qu'il en soit ainsi, puisque c'est l'aspect humain de la
décision qui doit être prise.
A plus long terme, cependant, le ministère est forcé de
considérer les facteurs dont je viens de faire état,
c'est-à-dire le rôle que ce CLSC est appelé à jouer
dans le district, les caractéristiques propres à un CLSC dans ce
district, par rapport à un autre. Ils ne jouent pas
nécessairement le même rôle.
Ceci peut nous amener et c'est une situation toujours
difficile à constater que la décision qui est
favorisée par le processus de consultation n'est pas
nécessairement la meilleure, étant donné toutes ces autres
considérations dont on vient de faire état.
Ces considérations, parfois, ne sont pas nécessairement
considérées comme pertinentes dans un débat qui est vu
surtout en termes de développement économique d'une ville par
rapport à une autre ville, du statut de différentes
municipalités, l'une par rapport à l'autre.
C'est donc tout cela qui fait que ces décisions sont difficiles
et qu'il faut les trancher après beaucoup de
délibérations. C'est ce qui explique aussi les délais dans
les décisions où ce genre de difficulté
M. Charron: Considérant le facteur temps, lorsque les
délibérations se font très longues, est-ce que cela ne se
trouve pas à favoriser un certain
nombre de facteurs au détriment des autres, je veux dire plus la
décision met du temps à venir? Est-ce que les facteurs,
appelons-les politiques, dans le sens mauvais et dans le bon sens du terme
ce que vous avez appeléhla consultation qui se fait ne se
trouvent pas à prendre beaucoup plus d'importance plus le temps dure? En
effet, cela permet aux forces de se cristalliser et aux équipements
politiques des régions de se mobiliser au besoin derrière un site
ou derrière un autre. Lorsque vous voudrez intervenir, avec les
considérations, que vous avez appelées une planification plus
technocratique, qui peuvent être à l'origine de l'implantation
dans un endroit ou un autre, elles ne feront pas le poids derrière
l'espèce de tourment politique qui aura accompagné cette
décision.
Je parle de Montmagny. Vous connaissez aussi les autres au sujet
desquels je voulais soulever le même genre de problème, le CLSC du
jardin du Québec, de la région de Châteauguay, de
Sainte-Martine, etc. Je ne l'ai pas avec moi, mais j'ai trouvé dans mes
dossiers les journaux locaux de la région où on en parlait en
première page. On voit tout de suite qu'un maire d'une
municipalité, avec la chambre de commerce du coin, appuie tel site. Le
député du coin aussi qui "grenouille" derrière un, ce qui
fait que, quand vous voudrez faire jouer des considérations un peu plus
objectives j'emploie votre mot vous aurez une marge de manoeuvre
très limitée.
Dans ce sens, la décision de Montmagny, puisque c'est elle qui
nous a amenés à avoir cette discussion, traîne en longueur,
celle d'autres endroits également vous les avez vous-même
nommés prennent du temps. N'y aurait-il pas moyen de faire
dilligence en ce genre de cas?
M. Forget: Sans doute. Il ne faut cependant pas exagérer
les délais qui courent dans tous ces cas. Il y a d'autres
démarches et d'autres questions qui peuvent être tranchées
concurremment. Il ne faut pas oublier que le CLSC n'est pas principalement un
établissement avec des services qui sont centrés dans un lieu
physique bien déterminé. C'est essentiellement une organisation
presque territoriale des services. Certainement, cet aspect doit demeurer
présent, quel que soit le siège social.
Dans la plupart des dossiers que j'ai vus, les différentes
étapes qui doivent nécessairement intervenir avant une
décision finale à ce sujet ne dataient pas de plusieurs mois,
mais de quelques semaines. Je pense que c'est un délai qui, encore une
fois, est inévitable, étant donné le nombre de facteurs
dont il faut tenir compte. Bien sûr, il y a, comme vous le dites, un
certain danger que des considérations plus émotives que
rationnelles finissent par prendre une importance exagérée,
excessive, mais c'est peut-être un risque plus théorique que
réel. Dans la plupart des cas, même si beaucoup de positions ou
d'opinions divergentes avaient été exprimées par
différents groupes, je n'ai jamais eu le sentiment que les jeux
étaient faits à cause de ces expressions d'opinions.
Je crois qu'il est normal que tout le monde s'exprime. Je crois qu'il
est normal, également, et ceci est accepté, que le
ministère des Affaires sociales finalement prenne la décision
finale à la lumière de tout cela. Le ministre sera jugé
à la lumière des décisions, de la sagesse ou de la
non-sagesse des décisions qu'il prend. Je crois que c'est un rôle,
si vous voulez, d'arbitre entre toutes ces considérations et toutes ces
opinions, qu'il est essentiel que je joue. Mais, précisément, je
ne peux pas le jouer si je ne donne pas le temps à tous ces groupes,
à toutes ces localités, la chance de faire valoir leurs avantages
ou leurs arguments.
Encore une fois, je n'ai jamais eu le sentiment que les jeux
étaient faits à cause de cela. Encore hier soir, j'ai eu à
prendre connaissance d'un de ces dossiers, pour une seconde fois, pour
approfondir à nouveau tous les points de vue exprimés. J'ai le
sentiment que, quelle que soit la décision que je prenne
éventuellement et, dans ce cas, elle ne tardera pas elle
sera essentiellement acceptée par tous ceux qui y ont participé,
parce que je crois qu'on peut faire valoir à l'appui de la
décision qui sera prise de très bonnes raisons. Encore une fois,
il y a un élément irréductible de choix, parce qu'il y a
des considérations également valables ou presque également
valables qui jouent en sens opposé. C'est ce qui fait la
difficulté. C'est aussi ce qui rend nécessaire, comme je le
disais tantôt, d'y penser et de prendre un certain temps pour vraiment
évaluer à son mérite chacun des arguments. Il n'y a pas de
solution parfaite, On ne peut pas mettre dans un ordinateur toutes les
données et s'assurer d'une réponse. C'est très clair. Plus
on regarde chacun de ces dossiers, plus l'élément de choix
paraît irréductible.
M. Charron: J'espère que vous n'entendez pas ma position
comme une demande de mettre cela dans les ordinateurs. Ce n'était pas le
sens de mon intervention. Pour ce qui est de la question du secteur sud de
Montmagny, quand prévoyez-vous une décision entre Saint-Fabien et
Saint-Paul, puisque le choix semble se cristalliser?
M. Forget: Je pense qu'au cours du mois actuel, pourvu que je ne
doive pas être présent en Chambre douze heures par jour, je
devrais pouvoir trancher, finalement, toutes ces questions, parce que je crois
que tous les dossiers sont prêts. Tout ce qu'il me faut, c'est quelques
heures de calme pour pouvoir en prendre connaissance dans chacun des cas.
M. Charron: II existe, dans la même région, un autre
CLSC dont le site est connu, celui de Saint-Pamphile, mais qui connaît
des problèmes de logement, de locaux, d'aménagement. J'aimerais
connaître les intentions du ministère. Est-ce qu'on a l'intention
d'aménager à nouveau? Parce qu'on dit aussi qu'il y a un rapport
très direct entre ce cas du CLSC de Saint-Pamphile et l'avenir de
l'hôpital de Saint-Jean-Port-Joli.
M. Forget: Je demanderais peut-être à... Je ne sais
pas s'il y a quelqu'un ici.
II y a peut-être une erreur d'orientation dans les deux cas.
D'après votre intervention, vous faites plus allusion au CLSC de
Trois-Saumons, qui est lié, si vous voulez, à la
réorientation de l'hôpital de Saint-Jean-Port-Joli. A
Saint-Pamphile, si je réponds pour clarifier ce cas, il y a un projet de
construction qui est en cours, qui va déboucher sur la livraison de
l'édifice au début de septembre. Temporairement, on a
autorisé l'aménagement de locaux pour élargir les
effectifs, pour répondre aux besoins des gens. Tout se déroule
très bien dans ce milieu de Saint-Pamphile ou de l'Islet-Sud, si vous
voulez. Dans le cas du CLSC de Saint-Pamphile, tout est dans l'ordre. Les gens
sont satisfaits. On a ajouté des effectifs. On a loué des espaces
additionnels, en attendant la livraison de l'édifice.
Dans le cas de Saint-Jean-Port-Joli, le CLSC de Trois-Saumons
c'est sûrement à cela que vous faites allusion il y a un
projet de réorientation de l'hôpital et une construction nouvelle
est envisagée pour répondre aux besoins, parce que
l'hôpital actuel, d'après les avis de l'agrément, doit
être démoli; il faut détruire cet ancien hôpital.
Ce qui retarde un peu, actuellement, c'est que le projet initial
considérait un projet d'aménagement pour une unité de
soins prolongés. Après, est venue la décision d'implanter
un CLSC. On a combiné, parce que le milieu est quand même assez
restreint, une corporation qui allait coiffer, si vous voulez, les deux
responsabilités: CLSC et unité de soins prolongés.
Cela nous amène à construire des locaux neufs. Etant
donné qu'avec le Conseil du trésor on avait prévu, au plan
d'immobilisation, des coûts surtout pour l'unité de soins
prolongés et, qu'après, par une autre décision, on y
ajoute un CLSC, parce que cela nous prend quand même des espaces, au
CLSC) la demande initiale, qui était je pense, de $1 million je
ne voudrais pas avancer de chiffre précis a été
portée à environ $2 millions. Nécessairement, le Conseil
du trésor s'est tourné vers nous pour qu'on justifie, dans un
mémoire, le bien-fondé des sommes additionnelles qu'on demande.
Actuellement, le Conseil du trésor délibère sur des faits,
sur cette décision.
Entre-temps, on a autorisé quand même, pour le CLSC, des
effectifs de démarrage On ne peut quand même pas allouer tous les
effectifs et, matériellement, on n'est pas capable de loger tout ce
monde mais on a quand même réussi, matériellement,
temporairement du moins, à même les locaux de l'hôpital
à dispenser des services.
Il y a déjà une équipe nouvelle au CLSC qui
dispense des services, surtout préventifs, par exemple, à
domicile et sur le plan des services sociaux, mais à un nombre quand
même restreint de personnes dans le contexte de démarrage.
M. Charron: L'unité de soins prolongés
fonctionne-t-elle actuellement?
M. Forget: Non.
M. Charron: Est-elle en construction?
M. Forget: On attend la décision. Tout sera construit en
même temps. Cela sera aménagé en même temps.
M. Charron: La première autorisation n'est jamais venue du
Conseil du trésor quant aux millions dont vous me parlez? C'est
maintenant porté à $2 millions et...
M. Forget: $2.5 millions.
M. Charron: ... l'autorisation n'est pas encore venue du Conseil
du trésor?
M. Forget:Selon nos dernières informations, le
mémoire est préparé. C'est une question de
délais.
M. Charron: D'accord. Un autre cas particulier je l'ai
mentionné tantôt celui du Jardin du Québec. On dit
que le conseil d'administration provisoire a décidé de le placer
à Saint-Michel. Le ministère prétend qu'il devrait
être à Saint-Rémi. Si on regardait le problème
d'autorité là-dedans, le comité d'implantation d'un CLSC
et son conseil d'administration provisoire ont-ils droit de regard, aux yeux du
ministère, sur le site d'implantation du CLSC ou est-ce une
décision propre au ministère?
M. Forget: Je pense que c'est une bonne illustration de ce que je
disais tantôt. Le comité provisoire, il y a un certain nombre de
mois, a créé un comité spécial ad hoc pour
étudier le problème de l'implantation du siège social. Ce
comité a été formé, en partie au moins, des propres
membres du comité provisoire et s'est adjoint des personnes ressources,
etc. Ce comité ad hoc a suggéré que le siège social
soit implanté à Saint-Rémi. Ce rapport n'a pas
été accepté par le comité provisoire en son entier,
mais il reste qu'il y avait à ce niveau, sur le plan du travail du
comité spécial créé par le comité provisoire
d'implantation, une reconnaissance de la valeur des arguments favorisant
Saint-Rémi.
D'autres organismes qui ont été consultés
organismes dans le secteur des affaires sociales ont fourni des
indications analogues et notre direction de planification au ministère a
eu la même opinion, c'est-à-dire Saint-Rémi.
Alors, nous nous trouvions devant un dossier où toutes les
raisons vraiment bien articulées qui avaient été fournies
favorisaient Saint-Rémi, et ceci tant au niveau du sous-comité du
comité provisoire qu'au niveau des organismes du milieu et des services
du ministère. Nous avions, face à cela l'opinion je la
respecte, remarquez, et je ne le dis pas de façon a
déprécier cette opinion d'un groupe de citoyens du
comité provisoire qui a fait une consultation populaire et qui optait
pour une autre ville. Je ne me souviens plus laquelle, mais ce n'était
pas Saint-Rémi. C'était Saint-Michel.
Alors, le problème était de prendre une décision en
fonction de raisons bien articulées ou de
prendre une décision en fonction de raisons qui ne
l'étaient pas et qui consistaient, essentiellement, dans l'affirmation
par processus de scrutin, que la priorité devait aller à un autre
site.
Mais, cette affirmation, justement, découlant d'un processus de
scrutin où la participation de la population n'était pas
nécessairement égale et uniforme entre les différentes
villes de la région, aurait très bien pu être
représentée comme étant un peu l'effet du hasard du
scrutin lui-même, des taux de participation très variables. Si
nous n'avions en face de nous que l'opinion de la population telle
qu'exprimée dans un tel sondage, si vous voulez, on aurait pu s'en
contenter, mais ce n'était pas, à mon avis, suffisant pour
surmonter la valeur ou la validité des arguments explicitement
présents au dossier et qui allaient tous dans le même sens,
c'est-à-dire un sens opposé.
Nous ne pouvions pas être sûrs que l'ensemble de la
population avait pris connaissance de ces raisons et les avait effectivement
rejetées. Nous avions une décision qui n'avait d'autre
justification, comme je l'ai indiqué, que sa propre affirmation. Bien
sûr, on avait dit que c'était autre chose, mais il n'y avait
aucune certitude qu'on avait tenu compte de tous ces critères, de tous
ces facteurs qui avaient retenu l'attention de tous les groupes ad hoc qui
s'étaient penchés sur le problème. Il m'est apparu que le
choix finalement, c'était un choix véritable, mais il
était tellement bien motivé que la prépondérance de
preuve allait du côté de Saint-Rémi, malgré cette
consultation. Je comprends la difficulté de faire une consultation sur
une chose comme celle-là, mais c'était loin d'être un
votetrès majoritaire et très représentatif de l'ensemble
des municipalités, de l'ensemble de la population. Je crois que c'est un
très bon exemple du genre de problème. Cette situation ne se
reproduira pas exactement nulle part; il y a toujours des variantes et c'est ce
qui en fait la difficulté.
M. Charron: Mais vous affirmez que c'est toujours au
ministère de décider du site.
M. Forget: Je crois qu'aucune autre attitude ne serait vraiment
crue et croyable pour la population. On sait très bien que c'est une
responsabilité qui nous revient. On a dit, et on y croit, que l'on veut
consulter, que l'on veut obtenir les avis de tous les intéressés,
mais il demeure que ce sont des consultations, ce sont des avis. Nous donnons
un poids inévitablement assez grand à des avis motivés par
rapport à des avis non motivés, ne serait-ce que cette
dimension-là. Je pense qu'on ne peut pas éviter que ces
décisions ne soient imputées, qu'on le dise ou non ou qu'on le
veuille ou pas, au ministère et, autant y aller franchement et
effectivement, c'est le ministère qui prend la décision. Je
souhaite que personne ne voie là un désaveu d'un processus de
consultation qui nous paraît toujours important, même si, à
l'occasion, on n'en retient pas les conclusions. Mais ce n'est pas une preuve
que l'on ne se préoccupe pas de la consultation, au contraire.
D'ailleurs, le délai lui-même et le fait qu'on s'est
interrogé longtemps, même si tout le dossier technique pointait
dans une direction, montrent qu'effectivement cela a été
sérieux et que ce n'est qu'à regret qu'on n'a pas retenu la
consultation.
M. Charron: Un autre cas particulier, M. le Président,
c'est celui du CLSC d'Hochelaga-Maisonneuve et de la situation
particulière qui prévaut quant à l'initiative qu'avait
prise ce CLSC, qui avait été autorisée d'ailleurs, et qui
consistait à utiliser à ses fins et à sa manière la
halte-garderie, comme on l'a appelée, qu'il avait implantée au
sein du CLSC.
Je comprends, à la lecture et à la prise de connaissance
du dossier que j'ai faite, les motivations exprimées par Mme le ministre
sur le genre de garderies que le gouvernement se permet indirectement de
financer, par l'entremise des parents. Mais est-ce que ce plan de
développement des garderies nous en rediscuterons plus tard,
à proprement parler, au cours de la réunion de ce matin
exige que l'initiative du CLSC Hochelaga-Maisonneuve soit placée devant
cette alternative de s'intégrer au plan de garderies ou de fermer?
Garderies.
Mme Bacon: II n'est pas question de priver les gens du quartier
Hochelaga-Maisonneuve d'un service de garde d'enfants. On essaie de donner de
l'aide financière dans tout le Québec. Nous avons
déjà rencontré le comité des parents
d'Hochelaga-Maisonneuve au moment où il y a eu des difficultés et
au moment où il y avait des revendications de la part de ce
comité. On s'est entendu, après discussion chacun a fait
connaître son point de vue pour qu'il y ait une période de
six mois où il serait possible au comité des parents de demander
une charte pour s'intégrer au système, s'intégrer à
ce programme de garderies. Il y aurait aussi de l'aide technique qui serait
apportée par les fonctionnaires du ministère. En plus, on
pourrait, avec un budget fantôme, parce qu'on revient toujours à
la question du budget dans les garderies, voir, au cours des trois ou quatre
mois qui nous rendraient jusqu'à la période limite de six mois,
si, avec un budget qui proviendrait de l'aide financière aux parents, on
pourrait survivre dans ce genre de garderies.
Il est évident qu'au niveau des CLSC il faut s'en tenir à
des haltes-garderies, parce que ces services sont donnés aux parents qui
viennent pour recevoir des soins et des services et qui doivent se faire
accompagner des enfants, parce qu'ils n'ont pas de gardienne à la
maison. Je pense que, si on donne un service dans un CLSC, il faudra
généraliser. Ce n'est pas un réseau d'Etat qu'on a dans le
moment comme un service de garde, on pourra y revenir tantôt, mais, dans
ce cas qui nous préoccupe, celui d'Hochelaga-Maisonneuve, le
comité des parents a accepté de faire cet effort avec le
ministère pour que, dans six mois, on puisse arriver à des
résultats qui nous permettront, avec des services qui sont
peut-être nécessaires dans un quartier donné comme
celui-là, de nous intégrer dans le programme des garderies
qui est en vigueur dans tout le Québec.
Il est évident que beaucoup de cas qui étaient
référés au CLSC d'Hochelaga-Maisonneuve, à la
garderie, provenaient de bureaux de médecins qui ne connaissaient
peut-être pas tellement bien le programme que nous avions mis sur pied en
juillet 1974 et qui référaient des cas d'enfants qui avaient
besoin de s'intégrer socialement peut-être à un groupe. Il
est aussi évident qu'on veut, par le service de garde, donner à
ces enfants une formation sociale qu'ils n'auraient peut-être pas
à cause des multiples problèmes auxquels les parents ont à
faire face. Je pense qu'on en tient compte dans l'amélioration du
programme; on en tient compte aussi dans les demandes qui nous sont faites dans
d'autres quartiers, parce qu'on sait que ce programme s'adresse dans une
proportion de 90%, à des quartiers populeux, des quartiers
défavorisés.
C'est pour cela qu'on a voulu aider davantage les gens qui
étaient défavorisés par le revenu familial. L'aide
financière est apportée à ces gens-là au
départ.
M. Charron: Mais, à la fin de la période de six
mois, il est déjà quand même assuré que le service
de garderie, quel que soit le projet final, sera indépendant du
CLSC?
Mme Bacon: En fait, au bout de six mois, ce ne sera pas la
halte-garderie. Le CLSC conservera sa halte-garderie, mais il y aura aussi la
garderie de jour, qu'on appelle garderie du jour et non halte-garderie.
M. Charron: Qui, dans son administration et sa direction, sera
indépendante du conseil d'administration du CLSC?
Mme Bacon: C'est cela, avec une charte, comme les autres
garderies à but non lucratif.
M. Charron: Les six mois doivent conduire à quelle
période? Au début de l'automne.
Mme Bacon: Cela nous mène au mois de septembre.
Il y a eu des délais, certaines ententes avec le comité de
parents.
M. Charron: D'accord. M. le Président, pour les CLSC, cela
va. Je suis disposé à l'adopter immédiatement.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 4,
adopté.
Programme 5: Services en milieu scolaire. L'honorable
député de Bourget.
Soins aux personnes âgées
M. Boudreault: J'aurais peut-être eu quelques questions
à poser au ministre et voudrais porter à son attention certaines
choses, mais cela se situe- rait au programme 4, je crois, dans le soin des
maladies physiques.
Je voudrais porter à l'attention du ministre un problème
qui existe dans nos hôpitaux dans le moment, surtout pour les personnes
âgées, en ce qui concerne les soins qui leur sont apportés,
de même que leur entrée dans ces mêmes hôpitaux, qui
est rendue très difficile.
Vous comprendrez que ce problème m'inquiète davantage,
parce que je me dirige rapidement vers cette catégorie de citoyens et,
étant conscient que le rouage administratif est très lent, je
voudrais commencer immédiatement à en parler.
Actuellement, plusieurs plaintes sont arrivées à mon
bureau, à savoir que les personnes, rendues à un certain
âge, ne sont plus capables de faire leur entrée à
l'hôpital, même pour des cas aigus, parce qu'on a peur que cela
devienne des cas chroniques et qu'on soit pris avec ces cas dans les
hôpitaux. Par la suite, il sera difficile de les retourner à leur
résidence.
Je comprends que le ministre a annoncé dernièrement qu'il
y aurait des mesures au niveau des services à domicile, qu'il y aurait
peut-être une demande de budget supplémentaire pour donner des
soins plus avantageux au domicile.
Actuellement, nous avons, dans l'Est de Montréal, des
hôpitaux pour malades chroniques, pour personnes qui sont rendues
à la phase finale. Il n'y a pas tellement de problèmes de ce
côté, parce que les lits se vident assez
régulièrement. On vient à bout de suffire de ce
côté.
Mais les personnes malades qu'il faudrait soigner et qu'on pourrait
retourner chez elles ont de la difficulté à se faire admettre
dans les hôpitaux.
Il y aurait peut-être les foyers qui existent, qui ne sont
peut-être pas tout à fait adéquats dans le moment. Il y a
beaucoup de demandes. On comprend que cela va demander de grosses sommes
supplémentaires pour arriver à satisfaire tous les gens.
Dans l'Est de Montréal, j'ai une enquête qui se fait
concernant les personnes âgées. D'ici à cinq ans, le taux
actuel de 7% va être probablement dépassé; seulement dans
mon comté où l'enquête s'est faite, chez des personnes qui
auront 60 ans et plus, je pense qu'on va s'approcher près de 15%, ce qui
veut dire le double, d'ici à cinq ans.
Ma question est de savoir ce qu'on fait avec ces gens. Ce sont quand
même des gens qui ont bâti le Québec. Je ne veux pas
être le seul à être leur défenseur, mais, quand
même, j'y porte beaucoup d'intérêt.
C'est ce qui m'amène un peu à demander au
ministère, au ministre surtout qui le représente, si cela
n'entrerait pas dans ses vues d'établir un hôpital
spécialisé en gérontologie pour desservir ces personnes
qu'on pourrait éventuellement soigner et retourner à leur
domicile. C'est toute une étude que je propose au niveau du
ministère, à savoir si ce serait plus économique oui ou
non. Enfin, ce qui m'inquiète le plus, c'est de savoir si nos gens,
quant ils deviennent âgés et tombent malades, peuvent être
rapidement hospitalisés.
Actuellement, ce qui se produit, c'est que, si nos gens
âgés arrivent dans les hôpitaux, on les soigne dans le
passage. On a peur, en leur donnant une chambre, d'être pris avec ces
gens. Je comprends les hôpitaux. Je ne critique pas les hôpitaux,
à ce moment. Je comprends le problème des hôpitaux, surtout
que, dans mon comté, nous en avons un qui est assez important,
l'hôpital de Rosemont; il donne un très bon service, d'ailleurs,
en passant. Quand même, les responsables se rendent compte du
problème et ils ne veulent pas engager l'hôpital avec des cas
chroniques quand il y a tellement de soins immédiats à donner, il
y a la liste d'attente et ainsi de suite.
C'est ce qui m'amène à demander s'il n'y a pas,
éventuellement, possibilité d'établir un hôpital,
surtout avec des médecins spécialisés. Encore là,
je ne critique pas la compétence des médecins, mais je me demande
si on a réellement de vrais spécialistes en gérontologie
dans Montréal ou au Québec pour soigner les personnes du
troisième âge. C'est un problème qui existe actuellement et
qui va s'accentuer. Je demanderais au ministre si, dans ses vues ou dans ses
programmes futurs, cela a été pensé, le service pour les
personnes âgées.
M. Forget: C'est un large problème auquel fait allusion le
député de Bourget. J'aimerais peut-être brosser un tableau,
aussi large que le tableau du problème, des solutions qui sont
déjà acquises ou qui sont esquissées, du moins pour
l'avenir, dans ce secteur. Si on regarde l'évolution du nombre de lits
au Québec depuis environ cinq ans, je crois qu'on peut être
frappé, ceci particulièrement dans la région de
Montréal, par un développement significatif du nombre de lits
pour malades chroniques. C'est le seul secteur, dans le domaine hospitalier,
où il y a eu effectivement, depuis cinq ans, une expansion assez
significative.
Pour être plus concret, on peut se référer à
des décisions qui ont attiré leur part de publicité
à l'époque et à d'autres qui sont presque passées
inaperçues. Mais il y a, dans la région de Montréal,
malgré tout, une orientation pour malades chroniques qui a
été donnée au centre hospitalier Pasteur. Evidemment, il y
a des travaux qui sont requis. C'était un hôpital pour enfants
ayant des maladies infectieuses, qui sera transformé pour les maladies
chroniques. Ceci est une décision qui est d'ores et déjà
acquise. Il y a eu, dans le passé récent, deux centres
hospitaliers pour maladies aiguës qui ont été
consacrés aux maladies chroniques. Il y a le centre hospitalier
Catherine Booth, dans l'Ouest de Montréal. Dans l'Est, l'ancien centre
hospitalier de la Miséricorde est devenu le centre hospitalier
Jacques-Viger et il aura un rôle très important à jouer
pour les personnes âgées et pour la gérontologie, dans le
contexte d'un hôpital chronique dans ce quartier et avec le genre de
vocation qui lui est imparti.
M. Charron: Quelle est la capacité du centre hospitalier
Jacques-Viger?
M. Forget: La capacité totale du centre hospi- talier
Jacques-Viger sera de l'ordre de 350 lits. Cependant, à cause des
travaux qui sont nécessaires dans le moment, la capacité, cet
été ou à la fin de l'été, sera de l'ordre de
200 lits, je crois, ou peut-être un peu plus. Actuellement, c'est un peu
moins, mais il y a une mise en utilisation progressive qui va nous amener
à peu près à 200 lits, si ma mémoire est bonne, ce
qui laisse 150 lits qui ne pourront être occupés qu'à la
fin des travaux qui sont nécessaires. On avait, évidemment, une
installation qui, à certains égards, était satisfaisante,
mais qui, à d'autres égards, était gravement
déficiente. Certaines parties remontent à plus de 100 ans, comme
on le sait. Il y a des travaux qui sont nécessaires.
Enfin, le centre hospitalier Champlain qui ouvre ses portes
progressivement avec certaines difficultés, mais malgré tout, qui
les ouvre, est un hôpital pour malades chroniques dans la région
de Montréal.
M. Boudreault: Sa vocation, M. le ministre, est
spécialement de recevoir les malades chroniques.
M. Charron: C'est cela.
M. Forget: Spécialement pour les malades chroniques, mais,
dans le cas du centre hospitalier Viger, il est évident que vous avez
une partie foyer d'hébergement pour personnes âgées et une
partie centre hospitalier pour les chroniques, ce qui le fait tomber
particulièrement dans le type de besoins auxquels fait allusion le
député de Bourget. Il est clair qu'être des personnes
âgées ou des malades chroniques, dans une certaine mesure et
quelles que soient les possibilités, pour certains de retour dans leur
famille, c'est dans l'immense majorité des cas une réalité
qui est à peu près la même.
M. Boudreault: C'est là surtout que je m'appuie, M. le
ministre.
M. Forget: Maintenant, il y a aussi un développement qui
est parallèle à celui-là et qui est intéressant.
Comme on le sait, on se souviendra que cet hiver, en février, j'ai
annoncé la décision d'aller de l'avant avec la construction d'un
agrandissement, d'un coût d'environ $7 millions, du pavillon
Berthiaume-DuTremblay qui a une vocation particulière pour les personnes
âgées de la catégorie A-4, c'est-à-dire cette
catégorie de personnes âgées qui est presque à la
marge des malades chroniques. C'est une capacité additionnelle de 300
lits dans la région de Montréal. Cela devrait apporter quand
même un soulagement important.
Maintenant, pour ce qui est des personnes âgées, il est
clair que la région de Montréal continue et continuera,
malgré tout cela, à être déficiente. Cependant, il
est acquis, d'une façon graduelle, que, durant les prochaines semaines
et les prochains mois, nous pourrons mettre la main à la pâte, en
quelque sorte, pour le développement de sept ou huit centres d'accueil
d'une centaine de lits ou plus, chacun, dans la région de
Montréal. Les phases préliminaires d'autorisation pour
l'acquisition de terrains et toutes les phases de prépa-
ration des plans et devis s'effectueront graduellement au cours de I
été et de l'automne. Nous devrions avoir des mises en chantier
à l'automne ou au tout début de l'année 1976. Ceci
contribuera à environ 700, 800 ou peut-être 900 places
additionnelles dans la région de Montréal, dans un horizon d'une
vingtaine de mois. Le problème ne sera pas réglé
même avec cela.
Le ministère des Affaires sociales travaille à
l'élaboration d'un programme échelonné sur plusieurs
années, de trois ou cinq ans, pour la construction d'un nombre de places
en foyer d'hébergement pour personnes âgées. Cela nous
permettrait d'accéder, pour la première fois, à la
satisfaction de la norme de six places par cent personnes âgées de
65 ans ou plus dans toutes les régions et sous-régions du
Québec. C'est un programme d'une très grande envergure et d'un
coût considérable. Nous sommes à mettre la dernière
main à l'élaboration du programme pour, évidemment, le
soumettre a mes collègues du conseil des ministres et au Conseil du
trésor, et en tenir compte dans la programmation financière
d'ensemble du gouvernement pour les trois ou quatre prochaines années.
Il est clair qu'un effort substantiel sera requis. Je ne vois pas comment on
peut si je me permets d'anticiper un peu sur le résultat de ces
discussions que nous aurons au cours des prochains mois éviter
d'en venir à ces décisions et de développer ces services
qui sont absolument requis. C'est un minimum, la norme de 6%, dont nous sommes
très loin dans certaines régions. Cela se chiffre par plusieurs
milliers de places additionnelles qui sont nécessaires. Nous sommes sur
le point de prendre les décisions qui nous permettront d'y donner
suite.
Encore une fois, dans l'immédiat, il ya le programme
annoncé en 1973, dont la réalisation des derniers
éléments va se faire au cours des prochaines semaines.
M. Boudreault: M. le ministre, je comprends très bien
quand vous me parlez du centre d'accueil et de ces choses. C'est entendu qu'on
ne pourra pas réussir à placer toutes nos personnes
âgées dans les centres d'accueil, parce que les derniers chiffres
nous disent, je crois, que, l'année prochaine, de 189,000, on va passer
à environ 221,000 personnes de 60 ans et plus dans la ville de
Montréal.
L'inquiétude des personnes âgées, actuellement, avec
qui j'ai beaucoup de contacts, c'est de savoir ce que leur réserve tout
cas de maladie. Quand elles sont en santé, il n'y a pas de
problèmes. C'est quand elles arrivent avec un cas comme celui qui s'est
produit encore en fin de semaine. On m'appelle dans la nuit: Qu'est-ce qu'on va
faire? Ecoutez, je ne peux pas faire de miracles. Il y a toujours des cas de
panique. Ils ne sont pas capables de rentrer dans les hôpitaux et c'est
de là que vient le problème, M. le ministre.
On peut remplacer les résidences, les centres d'accueil, pour
ceux qui sont en santé, par des logements à prix modique. Les
gens préfèrent demeurer au foyer. Ils le désirent. Le
foyer d'hébergement est un complément à cela, mais, avant
tout, les gens désirent demeurer au foyer. Leur cas c'est
spécialement quand ils tombent malades. Qu'est-ce qui leur arrive? Une
maladie bénigne, un bras cassé ou une maladie qui peut être
soignée. Le problème est de leur enlever toute inquiétude.
C'est pour cela que je réclame en leur nom un hôpital
spécialisé pour eux, où ils pourraient se faire soigner.
Si c'est un cas chronique et qu'on ne peut pas garder le patient dans cet
hôpital, qu'on l'envoie dans un hôpital pour maladies chroniques,
qu'il soit examiné par un médecin spécialiste, mais que ce
soit réellement dans un hôpital spécialisé pour
personnes âgées.
C'est le sens, M. le ministre, de mon intervention.
M. Forget: Oui.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 5: Services
en milieu scolaire.
M. Charron: Comme nous l'avons convenu au début, M. le
Président, ce n'est pas que je n'aurais pas de remarques à faire
là-dessus, mais, faute de temps, j'adopterai ce programme
rapidement.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 5,
adopté. Programme 6: Soutien aux organismes volontaires.
M. Charron: La même chose, M. le Président.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Adopté.
Programme 7: Consultation psychosociale.
M. Charron: Adopté, M. le Président, même
chose, mêmes remarques.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Adopté.
Programme 8: Réadaptation de l'enfance et des adultes.
Adopté?
Programme 9: Protection et hébergement.
M. Boudreault: J'étais en avant de mon temps. M.
Forget: Vous étiez en avant de votre temps. Le Président
(M. Houde, Limoilou): Adopté?
M. Charron: C'est aussi l'endroit, M. le Président,
où nous pouvons discuter des garderies. Je ne l'adopte pas tout de
suite, celui-là, M. le Président.
Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Saint-Jacques.
Garderies (suite)
M. Charron: M. le Président, j'ai, d'abord un certain
nombre d'informations à demander à Mme le ministre d'Etat. Ce
sont des informations qui sont probablement au sein du ministère, mais
qui ne sont pas connues et que j'estime de nature à nous aider à
mieux juger le plan d'implantation de garderies.
Avec les récentes modifications du 1er avril dernier, combien de
familles reçoivent de l'aide actuellement?
Mme Bacon: J'ai fait sortir, tantôt, le nombre de notes de
crédit qui ont été envoyées aux parents. Il y a eu
environ 2,973 notes de crédit envoyées au cours du dernier mois,
ce qui veut dire que c'est envoyé deux fois par mois à un peu
plus de 1,500. Mais cela varie suivant les mois. La progression se fait
normalement. Quand on considère les bénéficiaires
enregistrés au départ, l'augmentation qui se fait de mois en
mois, cela peut augmenter à peu près de 200 par mois. Disons
qu'on avait prévu peut-être 3,000 à la fin de
l'année 1975, et je pense qu'on s'en va vers cela, à peu
près 3,000 familles qui pourront recevoir de l'aide. Evidemment, c'est
une clientèle potentielle, je disais qu'autrefois, on s'adressait
à 30% de la population; avec l'amélioration que nous avons
apportée, considérant les nouveaux barèmes,
considérant le fait que nous prenons maintenant en considération
la taille de la famille, quand on pense aux exemptions qui sont
accordées aux parents, nous allons toucher maintenant 45% de la
population; 45% des gens pourraient demander les services de garde et recevoir
l'aide financière du gouvernement.
M. Charron: Avez-vous une estimation des quelque 1,500 ou 1,600
familles du dernier mois, mai? Combien de ces familles sont dites
monoparentales?
Mme Bacon: Je pense que pour la grande majorité de notre
clientèle on s'adressait au départ à des familles
monoparentales. C'est un peu ce genre de personnes qu'on voulait aider au
départ, de même que les familles à faible revenu.
Il est évident qu'on retrouve surtout nos
bénéficiaires dans l'île de Montréal et dans les
environs: 78% de notre clientèle se situent à Montréal,
12% se situent dans la région de Québec et les 10% qui restent,
dans l'ensemble du Québec. Alors, notre clientèle, c'est
Montréal.
M. Charron: Et, comme vous me le dites, avec une grande
majorité de familles monoparentales.
Mme Bacon: Oui.
M. Charron: Combien de subventions de démarrage a-t-on
données sur le budget initial de $5 millions?
Mme Bacon: Malheureusement, je n'ai pas le nombre de garderies
qu'on a rejointes avec le budget de démarrage, mais, en grande
majorité, on s'est rendu pas mal au maximum de $5,000 qu'on pouvait
accorder. Il y a eu certaines lenteurs administratives, au départ, parce
qu'il a fallu faire vite avec l'arrêt des projets PIL et mettre sur pied
ce programme l'été dernier. Il faut dire qu'il y a eu certaines
difficultés d'adaptation au départ, sur le plan de
l'administration, ce qu'on est en train de corriger. Dans le moment, il y a
beaucoup plus de rapidité. Les délais sont moins longs pour
émettre ces chèques qui permettront aux garderies de fonctionner
et, en plus, il y a les $3,000 de frais de rénovation,
d'aménagement qui sont remboursés. Avec $8,000, je pense que les
nouvelles garderies peuvent se tirer d'affaire.
M. Charron: Mais vous ne savez pas combien de subventions de
démarrage ont été données?
Mme Bacon: Je pourrais fournir le montant au député
de Saint-Jacques, mais je n'ai pas, dans le moment, le nombre de garderies.
M. Charron: Savez-vous si la même statistique que vous
m'avez donnée, quant à la répartition géographique,
s'est poursuivie quant aux nouvelles garderies qui ont demandé une
subvention de démarrage? Autrement dit, retrouve-t-on, encore une fois,
quatre sur cinq des garderies en implantation sur le territoire
montréalais?
Mme Bacon: Peut-être quatre sur cinq des demandes.
M. Charron: Des demandes.
Mme Bacon: On a reçu 392 projets de demandes de garderies.
Or, quand on reçoit un projet, on retourne tout de suite un
questionnaire et ce dernier nous a été retourné
complété par seulement 88. Alors, il faut peut-être
s'arrêter aussi au sérieux des projets qui nous sont soumis, quand
on pense au décalage entre les 395 demandes et les 88 retours. On a
donné suite aux 88 retours dès que nous avons reçu le
formulaire. Je pense que cela est important à juger quand on dit qu'il y
a un nombre énorme de demandes qui sont faites, il faut voir au
sérieux de ces demandes aussi.
M. Charron: C'est donc dire que ceux qui demandent des
formulaires...
Mme Bacon: Entre ceux qui soumettent des projets et ceux qui nous
retournent un questionnaire, il y a ce décalage, quand on prend les
chiffres: 395 à 88.
M. Charron: Croyez-vous que c'est parce que, s'apercevant des
détails, des informations qu'ils ont à fournir dans le
formulaire, ils se sentent incapables de remplir la tâche et
démissionnent, en disant: On n'est pas capable de fournir cela? Cela ne
nous donne rien de retourner cela au ministère. On ne sera jamais
accepté.
Mme Bacon: II y a peut-être cette crainte quand on a
à fournir des informations au ministère, mais il y a aussi le
sérieux de certains projets qu'il faut remettre en question. Nous
essayons, par tous les moyens possibles, de donner l'aide technique pour
répondre aux besoins du milieu par le réseau du ministère
des Affaires sociales. On va amplifier cette aide technique. Un guide doit
sortir bientôt; il sera fourni aux garderies quand elles feront une
demande et leur permettra de réa-
liser qu'il y a plusieurs étapes à franchir avant que le
projet ne soit accepté. Quand on parle des lenteurs, cela réduira
peut-être aussi ces délais si les gens savent vraiment ce qu'ils
ont à faire pour soumettre un projet et donner suite à la
soumission de projet. Ce guide doit sortir dans les prochaines semaines.
M. Charron: Quel est le nombre de garderies, actuellement, qui
ont des permis?
Mme Bacon: Au 31 décembre 1974, il y avait 330 garderies
qui ont des permis.
M. Charron: 330. C'est le chiffre actuel.
Mme Bacon: Oui. Des 88 questionnaires qui nous ont
été retournés, il y en a sept qui ont dû être
retournés à nouveau parce qu'ils étaient incomplets.
M. Charron: Oui.
Mme Bacon: II y a 34 demandes, de ces 88, qui ont fait l'objet de
recommandations positives; il y a 23 demandes de recommandations qui ont
été négatives et 24 faisaient encore l'objet
d'études des différentes directions du ministère. Alors,
cela veut dire qu'il y a quand même 34 demandes qui ont fait l'objet de
recommandations positives, ce qui est assez énorme.
M. Charron: A partir du moment où la recommandation
positive est faite, combien de temps peut-on calculer entre cette
recommandation positive et l'ouverture de la garderie?
Mme Bacon: Je pense qu'il ne faut pas se baser sur
l'expérience antérieure. Comme je le disais tantôt
je l'avoue bien honnêtement il y a eu des délais à
cause des adaptations qu'il fallait faire au départ du programme. Il y a
eu des difficultés d'adaptation. Mais ces délais sont
réduits sensiblement. Avec la personne nommée maintenant à
la programmation pour prendre la responsabilité totale de ce programme
de garderies, qui fonctionne avec des gens de différentes directions,
les réunions se font plus nombreuses maintenant, l'étude des
projets se fait plus rapidement. Il y a vraiment un effort qui est mis au
niveau de l'administration pour réduire les délais, parce qu'on
sait que, si les gens font la demande, c'est parce que la demande est forte au
moment où on la fait. Je pense qu'au moment où on soumet le
projet on a déjà le nombre d'enfants, la plupart du temps, pour
répondre à ces besoins. On essaie, autant que possible,
d'apporter une amélioration au programme.
M. Charron: Les 330 garderies fonctionnant actuellement
desservent combien d'enfants en tout?
Mme Bacon: Environ 10,000 enfants, et avec les enfants qui sont
subventionnés par le ministère, cela peut aller à 12,000
ou 13,000 au cours de l'année 1975. Mais cela progresse normalement,
comme nous l'avions dit au départ.
M. Charron: Les 10,000 enfants présentement accueillis
dans ces garderies ou leurs parents reçoivent tous l'aide
financière du gouvernement?
Mme Bacon: Non, il est évident que, lorsqu'on dit que l'on
n'en subventionne que 1,500 ou 1,800, c'est parce que pour les autres, les
parents sont en mesure d'en défrayer le coût. C'est pour cela
qu'on a voulu au départ, que notre programme s'adresse aux parents qui
avaient besoin d'aide financière, pour que le développement de
l'enfant sur le plan intellectuel, physique et social se fasse plus
rapidement.
M. Charron: Sur les $5 millions votés en février,
je pense...
Mme Bacon: L'an dernier.
M. Charron: ... l'an dernier, combien ont été
dépensés?
Mme Bacon: Je n'ai pas le chiffre exact, mais c'est un peu plus
de $1,100,000 pour les déboursés de services de garde. La
différence, c'est presque $55,000 pour autant que ma mémoire est
fidèle ce matin, pour les frais de démarrage et d'autres frais.
En fait, on n'a pas dépensé le budget total parce qu'il faut
compter aussi que le programme débutait au mois de juillet et se
terminait à la fin de l'année.
M. Charron: Le surplus sera utilisé comment?
Mme Bacon: Malheureusement, il est retourné au fonds
consolidé de la province. Mais les $5 millions de cette année, je
pense qu'avec les améliorations qu'on vient d'y apporter... Il est
évident que dans ce programme ce n'est pas comme on le disait
tantôt, six lits pour des personnes âgées sur 100 personnes
âgées il n'y a pas de chiffres précis où on
dit: II faut tant de places pour tant d'enfants dans une région
donnée. Il faut y aller suivant les besoins, suivant les demandes, les
projets qui nous sont soumis et les demandes qui nous sont faites. On a
déjà apporté de l'amélioration. Je pense que j'ai
suivi pas mal ce que je m'étais fixé comme objectif, c'est
qu'à mesure qu'on connaît mieux les besoins, qu'on connaît
mieux le développement qu'on peut apporter à ce programme, on
apporte des améliorations qui peuvent être considérables,
suivant les objectifs que nous nous étions fixés au
départ.
M. Charron: Les garderies à but lucratif, il en existe
combien maintenant au Québec?
Mme Bacon: Si on dit qu'il y a environ 300 garderies qui
détiennent un permis, qu'on peut compter à peu près 50% de
ces garderies à but non lucratif, il y en aurait 150.
M. Charron: Et, à partir du 1er juillet 1975, il n'y a
plus d'aide pour les enfants?
Mme Bacon: Non. Nous avions dit qu'à ce moment-là
les garderies devraient se transformer en garderies sans but lucratif et nous
avons rencontré les responsables des garderies privées. Ce que
nous ne voulions pas, c'est que les enfants qui étaient
déjà en garderie et dont les garderies avaient été
choisies par les parents cessent d'avoir ces services, qu'ils soient
transportés dans un autre endroit ou dans un autre quartier ou tout
à fait transplantés ailleurs. Nous ne voulions pas qu'il y ait
une discontinuation de services. Nous avons permis aux garderies privées
de continuer à fonctionner et nous continuons à financer les
parents qui reçoivent cette aide pour leurs enfants. Les enfants
continueront de recevoir les services dans ces garderies.
M. Charron: M. le Président, si vous me le
permettez...
Mme Bacon: Excusez-moi, si vous me le permettez, M. le
Président, il y a peut-être une autre chose. Nous avons dit aux
garderies privées que, sauf un cas exceptionnel ou un cas qui exigerait
que le ministère se penche sur leurs besoins, elles n'auraient plus
droit à de l'expansion ou à augmenter le nombre de places. On en
restait aux effectifs en vigueur, disons, le 1er juillet. Il n'y a donc pas
d'expansion, il n'y a pas de nouveaux permis donnés à des
garderies privées je pense que c'est bon d'apporter cette
information sauf des cas d'exception. Dans une ville ou une petite
localité où il n'y aurait qu'une garderie privée, si
c'était la seule a offrir les services et qu'aucune autre personne
n'était en mesure de fournir des services de garde dans une garderie
à but non lucratif, on pourrait voir s'il faut donner de l'expansion,
mais seulement dans des cas exceptionnels.
M. Charron: M. le Président, est-ce qu'à partir du
budget que nous serons bientôt disposés à adopter nous
pouvons nous attendre à une nouvelle modification des normes d'aide
financière au service des garderies?
Mme Bacon: Nous avons déjà augmenté le
maximum, qui était de $5. à $5.50 pour les enfants de 0 à
2 ans. C'est un départ sur l'augmentation qui peut être
prévue. Nous allons continuer, comme je le disais tantôt, suivant
les besoins qui nous sont mentionnés et suivant aussi
l'expérience parce qu'on peut dire qu'il y a une
expérience qui a été faite depuis l'année
dernière, soit juillet à examiner la possibilité
d'augmenter. En effet, comme n'importe où ailleurs, il y a quand
même une augmentation de coûts au niveau des garderies. Nous
apportons des améliorations à mesure que nous avons de
l'expérience. A la lumière de cette expérience, il y aura
sûrement des améliorations qui seront apportées en cours de
route.
M. Charron: M. le Président, maintenant que certains
détails statistiques ont été déposés pour
l'information des membres de la commission, il serait peut-être heureux
de profiter de cette occasion, qui ne se répète pas souvent, pour
reprendre et réentendre, à la lumière de
l'expérience d'une année ou une année et demie de
pratique, certaines affirmations théoriques qui avaient
été faites à la base du plan actuel de
développement de l'aide financière.
Mme le ministre connaît certainement, et les membres de la
commission aussi, la position du Parti québécois sur cette
question que nous avons défendue. Une des différences majeures,
je pense, dans l'approche que nous avions de ce problème, qui n'avait
pas été retenue par le gouvernement, c'était notre choix
de subventionner les institutions plutôt que les familles. Le
gouvernement a choisi d'intervenir dans ce nouveau champ d'action sociale par
la famille, par le critère du revenu de la famille, alors que nous
préférions ce sont des positions que nous avons toujours
défendues que l'aide aux garderies soit faite directement sans
passer par l'entremise des parents.
Notre position, c'était, autrement dit, que la subvention totale
de démarrage, de fonctionnement et d'amélioration des services se
fasse entre le ministère des Affaires sociales et les initiateurs d'un
projet de garderie, sans que les parents aient à fournir de l'argent,
des efforts, ou à subir des tracasseries ou des contrôles inutiles
dans cette galère. Je veux demander au ministre d'Etat si elle est
toujours convaincue qu'il est préférable de passer par le mode de
financement qu'a jadis préféré le gouvernement et
pourquoi. Je veux la réentendre et savoir, à la lumière de
l'expérience d'une année, si elle maintient les objections
qu'elle avait, que le gouvernement a exprimées quant à la
subvention aux institutions mêmes de garderie.
Mme Bacon: Là-dessus, je dois continuer de dire que l'aide
qui a été apportée aux parents a rejoint 69% des parents
qui gagnent $5,200. C'est dire que nous voulions, dans notre programme comme
dans d'autres programmes, nous adresser au départ aux personnes qui en
ont le plus besoin, qui ont droit, elles aussi, comme d'autres, aux services de
garde, mais qui n'ont pas les moyens financiers de se procurer ces
services.
C'est pour cela que l'aide s'est adressée à cette partie
de la population qui avait besoin des services, mais qui ne pouvait se les
procurer. Nous avons donné l'aide financière aux parents, au lieu
de donner l'aide financière aux garderies.
Cela permet tout de même à ces garderies de fonctionner.
Cela permet aussi une juste distribution financière, parce que je nous
vois mal aider davantage les gens qui gagnent $20,000, $25,000 par année
et qui auraient cette aide, par le fait même, si le ministère des
Affaires sociales finançait directement la garderie.
Je n'exclus pas, personnellement, dans les mois ou les années qui
viennent, la possibilité d'apporter un certain soutien aux garderies, un
soutien financier. Mais, de là à financer directement la
garderie, je prétends encore j'ai l'impression d'avoir raison
que nous avons quand même aidé les gens qui en avaient le
plus besoin.
C'est cette partie de la population, qui a besoin de l'aide du
ministère des Affaires sociales, qui l'a reçue et qui est en
droit de la demander.
C'est ce que nous continuons à faire dans le moment, en
évaluant la clientèle et également les besoins des
garderies. Je ne minimise pas les problèmes auxquels les garderies ont
à faire face. Je ne minimise pas, non plus, le fait que les absences des
enfants peuvent perturber un peu le budget.
Nous avons prévu de continuer aussi le financement des services
de garde, même si un enfant est absent pendant une semaine. La garderie
continue à recevoir l'argent du ministère et le parent remet sa
note de crédit, de toute façon, à la garderie.
Les versements qui sont faits aux parents le sont deux fois par mois, ce
qui permet aux garderies d'équilibrer leur budget, au moins deux fois
par mois, et non d'attendre de recevoir tout le montant au bout du mois et
d'avoir des comptes à payer.
Il est évident que la philosophie du député de
Saint-Jacques et la mienne sont différentes là-dessus, mais je ne
minimise pas, encore une fois, le problème auquel les garderies ont
à faire face. Les garderies nous demandent parce qu'on nous
demande tout de même de les financer, par les demandes qui sont faites,
par ce qu'on voit dans les journaux aujourd'hui de financer du
personnel, de donner des frais de soutien aux garderies, ce qui est un
réseau d'Etat.
Nous ne sommes pas prêts, en ce moment, à avoir un
réseau d'Etat qui coûterait plusieurs millions de dollars de plus,
multiplié par les besoins. A ce moment-là, ce seraient des sommes
énormes et l'ensemble de la population n'est pas prête non plus
à payer pour un petit nombre de personnes.
Il suffit de parcourir le Québec pour le savoir. Le
député de Saint-Jacques le fait assez souvent, je pense, pour
être à l'écoute de la population et savoir que ce n'est pas
l'ensemble de la population qui veut avoir des garderies et les financer
Partout où je suis passée, moi, en tout cas, j'ai
rencontré des gens qui nous ont dit que le fait de financer par
étapes, avec les gens qui en ont le plus besoin, pour eux, cela
répondait peut-être à cette justice distributive, mais cela
répondait aussi à leur façon de voir les choses, parce
qu'ils ne veulent pas financer un réseau d'Etat.
M. Charron: L'argument que soutient le ministre à la
défense de son programme, c'est celui qu'elle a évoqué
à la toute dernière phrase également, celui de la justice
distributive.
Il était essentiel de commencer quelque part. Donc, le
critère de revenu familial, la situation difficile où peuvent se
trouver certaines familles, les incitant plus que d'autres à recourir
aux services de garderies, est celui qu'a retenu le ministre d'Etat pour
implanter son programme.
Je dis que, le gouvernement aurait-il choisi d'établir un
réseau d'Etat de garderies et de procéder, comme nous l'avons
suggéré, par des subventions aux institutions plutôt qu'aux
familles, l'objectif que vise le ministre d'Etat aurait quand même pu
être atteint.
Il est bien évident que, si le gouvernement avait choisi cette
philosophie, il ne pouvait pas, du jour au lendemain on se l'est fait
dire aussi bien pour les CLSC que pour les centres hospitaliers ou pour les
soins aux personnes âgées dont on a discuté
brièvement tout à l'heure réaliser tout, partout en
même temps.
Son choix aurait pu se faire et les premières garderies d'Etat
à être implantées auraient pu être choisies dans les
quartiers, dans les régions où les revenus et la situation
socio-économique des familles nous permettent de croire, plus
légitimement qu'ailleurs, que ces services deviennent une urgence. Ce
qui peut être, pour une autre catégorie de population, une aide au
développement du revenu familial, non pas nécessairement
obligatoire et pas nécessairement interdite non plus, peut finalement
atteindre, à un autre moment, les paliers de population qui, comme nous
le dit le ministre c'est exact n'en ont peut-être pas fait
la demande.
Mais le choix d'établir un service universel et gratuit n'exclut
pas une priorité quant à l'établissement de ces soins. Je
suis bien d'avis, M. le Président, que, dans le Montréal
métropolitain, par exemple, il est évident que nous aurions
dû établir un réseau d'Etat où des quartiers
auraient reçu les services d'abord et avant d'autres. Celui que je
représente en particulier, en est un parce que c'est effectivement, chez
nous, un service essentiel maintenant. La femme au travail ou le nombre de
familles monoparentales dans le quartier auraient, à la seule
lumière des statistiques, justifié la priorité que le
gouvernement aurait eu à accorder à ce quartier par rapport
à d'autres. Personne n'aurait fait de reproche à cela, puisqu'il
semble que l'objectif de justice distributive soit le même, d'un
côté et de l'autre de la table. Pour autant que nous sommes les
représentants de la population, il est donc loisible d'affirmer que cet
objectif, nous le partageons.
Je crois encore et je croirai longtemps que la subvention aux
institutions aurait été une méthode
préférable. En effet, il faut l'admettre, le mode de financement
choisi par le gouvernement a mis certaines institutions dans une
précarité financière qui a amené un certain nombre
d'entre elles des garderies coopératives peut-être issues
des projets d'initiatives locales, mais c'est un autre sujet à
fermer leurs portes privant ainsi de ces services des citoyens qui avaient
bénéficié des services rendus à cet endroit par un
établissement bien précis dans une rue, dans un quartier.
Le mode de financement choisi par le gouvernement a
entraîné il faut lire l'actualité d'aujourd'hui
un certain nombre de tracasseries administratives, de la paperasse, des
contrôles inutiles. Il a conduit à un ralentissement du
développement des services de garderies, à très peu
d'extension du réseau, à l'abandon de plusieurs projets, à
l'impossibilité pour les parents de se regrouper. Je pense que tous ces
phénomènes sont à porter au dossier du choix qu'a fait le
gouvernement de ce mode de financement.
Certaines garderies ont été mises devant le choix de
diminuer la qualité des services ou, alors,
d'exiger le coût réel, ce qui a "disqualifié" des
familles qui, autrement, auraient pu recevoir de l'aide, parce qu'elles ne
peuvent pas débourser le montant supplémentaire. J'en viens
à ma dernière critique sur ce sujet. Je dis que, même dans
la logique du gouvernement, même dans le choix que le gouvernement a fait
quant à son mode d'aide financière pour l'établissement
d'un service de garderies, l'argument que défend Mme le ministre d'Etat
pourrait rallier notre adhésion si, effectivement, le montant mis
à l'arrière répondait à l'objectif.
Or, l'échelle de revenu familial utilisée dans le calcul
de l'aide financière aux familles est, dans bien des circonstances,
évaluée comme ridiculement basse. Elle ne correspond pas aux
besoins de la famille québécoise.
Dans les statistiques que me donnait Mme le ministre tout à
l'heure, elle affirmait qu'une grande majorité des
bénéficiaires actuels sont des familles monoparentales. Or,
prenons un cas bien précis pour vous montrer la limite et l'injustice,
au fond, qu'il y a dans l'échelle de revenu à partir de laquelle
on calcule l'aide financière. Une famille monoparentale, cela veut dire,
dans un cas comme il y en a une multitude dans le comté que je
représente, une femme seule qui doit travailler pour gagner sa vie et
celle de ses enfants. Prenons le cas où cette femme aurait un salaire
hebdomadaire d'environ $115 par semaine, ce qui lui donnerait au total, sur le
plan annuel, disons quelque $6,000 de revenu. Si on regarde l'échelle
à partir de laquelle l'aide financière est octroyée
actuellement, cette personne aurait droit pour son enfant à $4 de
remboursement hebdomadaire du ministère des Affaires sociales. Le
coût de la garderie est plus élevé que cela pour la
personne. Elle aura donc à débourser de $3 à $4
d'elle-même, parce que les $5 calculés actuellement, ne sont pas
le coût réel imputé aux garderies pour la charge d'un
enfant. Il est fixé actuellement à $7.50 ou $8 et il est
appelé à augmenter.
S'il n'augmente pas, c'est au prix et au détriment du
développement des services et de la qualité des services. C'est
souvent aussi au prix d'un surplus de travail pour le personnel en place. Le
ratio actuel du personnel est d'un moniteur pour quinze enfants à peu
près, si on l'extrapole, en fin de compte, parce qu'il n'y a pas de
ratio personnel dans les normes québécoises de la subvention de
démarrage et de l'aide financière octroyée aux parents.
Cette femme dont je parle, aurait donc à débourser de $15
à $20 supplémentaires par semaine.
Si on calcule que son revenu familial est de $115, son avantage à
aller chercher du travail est passablement limité. Cette même
femme pourra peut-être avoir grand avantage à
bénéficier plutôt de la Loi de l'aide sociale et à
ne pas se donner comme charge d'aller travailler pour gagner le revenu et
assurer le pain à ses enfants, si elle a, en plus de cela, à
fournir, à cause de l'aide insuffisante de l'Etat une partie de ce
qu'elle gagne hebdomadairement pour sa famille.
Cela veut donc dire que même si nous devions adopter la
philosophie dite de justice distributive par l'aide financière aux
familles, comme le soutient le ministre, encore faudrait-il que cette aide
financière aux familles soit équivalente à la charge
réelle que subit une femme qui place un, deux ou trois enfants dans une
garderie pour aller travailler.
Je dis que, si nous devons rester dans l'approche gouvernementale
actuelle, soit le choix, de l'aide financière à la famille
plutôt qu'aux institutions. Alors, il faut rehausser l'échelle de
revenus et la norme, le barème actuellement calculé, qui est
ridiculement bas, et qui ne permet pas à certaines familles de
bénéficier de ce service.
Je donne un autre exemple, M. le Président. Il est impossible,
actuellement, à un couple dont les deux membres travaillent de recevoir
de l'aide. Par exemple, deux personnes travaillant au salaire minimum
prenons le cas le plus bas et cela constituera l'exemple maximal, si vous
voulez qui est de $2.60 l'heure depuis quelques jours, s'assurent un
revenu annuel d'environ $IO,8l6,si je prends le calcul actuel. Avec les
déductions permises de $600, l'aide pour un enfant, sera de $0.00, s'ils
ont un enfant en garderie, et l'aide, pour deux enfants, sera de $0.50.
Autrement dit, la possibilité pour un couple dont les deux membres
travaillent de bénéficier de quelque manière que ce soit,
de l'aide financière apportée par le gouvernement pour un service
de garderie est à peu près inexistante. Donc, ce service,
actuellement, ne dessert qu'une très faible partie de la population qui
peut avoir besoin de ce service.
C'est pour cela que, tout à l'heure, je demandais, en
dernière question, à la suite des dépositions statistiques
que nous recevions, s'il est possible d'espérer un aménagement
des normes actuelles dans le budget que nous sommes disposés à
adopter, pour permettre au gouvernement d'augmenter le nombre de
bénéficiaires éventuels de cette aide financière
pour la garderie.
Mme Bacon: Je trouve qu'on pourrait peut-être apporter,
aussi, un autre exemple. Quand on parle d'une famille composée de deux
adultes et de deux enfants qui fréquentent une garderie et dont le
revenu net est de $10,000, si les deux parents travaillent, il faut regarder ce
qui se donnait auparavant. L'aide qui était accordée par jour,
c'était de $1.00. Maintenant, avec les nouvelles améliorations
que nous avons apportées au programme, compte tenu de la taille de la
famille, l'aide accordée serait de $4.50 par jour, ce qui fait une
différence de $3.50 par jour, et une augmentation, par année, de
près de $1,000, $910 . Je pense que si on se met à jouer avec les
chiffres, M. le Président, on peut travailler là-dessus
longtemps.
Ce qui est important, ce sont peut-être les objectifs que nous
poursuivons dans ce programme de services de garde, et qui sont, je pense, les
mêmes que ceux poursuivis par le député de Saint-Jacques,
c'est d'essayer de rejoindre le plus possible de personnes qui ont besoin des
services de garde, qui n'ont pas les moyens de défrayer le coût
des services de garde, et d'essayer d'être aussi le plus juste possible,
le plus exact possible, compte tenu du coût de la vie, du coût de
fonc-
tionnement d'une garderie. Je n'ai pas exclu la possibilité de
revoir les normes et les barèmes qui sont employés actuellement,
dans les mois qui viendront, au cours de l'année 1975. Nous avons
déjà augmenté, comme je le disais tout à l'heure,
à $5.50 pour les enfants de 0 à 2 ans et il faudra revoir, pour
ceux de 2 à 5 ans, ce qui peut être fait par le ministère,
pour essayer de permettre aux garderies de donner les soins et les services
nécessaires aux enfants et, en même temps, d'avoir du personnel
compétent qui ne soit pas surchargé par le nombre d'enfants, par
les tâches qui leur sont dévolues.
J'en viendrai peut-être à parler des problèmes qui
ont fait en sorte que certaines garderies ont dû fermer leurs portes. Je
pense qu'il ne faut pas passer là-dessus trop rapidement, non plus. Il
faut voir que les projets PIL qui existaient au départ quand on a
commencé le programme étaient quand même des projets
qui créaient des emplois. Il a fallu que certaines garderies s'adaptent
au ratio d'un moniteur pour dix enfants de zéro à deux ans, un
moniteur pour quinze enfants. Elles peuvent, évidemment, suivant leurs
revenus, avoir un moniteur pour sept enfants ou un moniteur pour huit enfants
ou pour dix enfants, mais nous avions à fixer des normes au niveau des
normes du ministère et cela fait partie des normes. Cela aussi est sujet
à révision. C'est sujet à étude et, comme je le
disais tout à l'heure, on serait malvenu de changer totalement le
programme qui existe déjà sans voir l'expérience qui en
est déjà faite et sans continuer de tenter de l'améliorer,
mais en poursuivant toujours les mêmes objectifs, soit de fournir
à la population qui ne peut se le permettre des services de garde pour
le développement de l'enfant, son développement physique, social
et intellectuel.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Le ministre des
Affaires sociales.
M. Forget: J'aimerais appuyer les remarques de mon
collègue, le ministre d'Etat. Comme on a soulevé des questions
qui sont peut-être d'un certain caractère général,
je voudrais bien préciser que, sur le plan des principes que l'on a
soulevés, je crois qu'il y a des divergences de vues importantes entre
le gouvernement et l'Opposition et je crois qu'il est important de les
souligner.
L'expression "un réseau d'Etat de garderies" entretient une
certaine équivoque parce que, dans le fond, on semble poursuivre, sans
vraiment faire une distinction qui s'impose, deux objectifs différents.
Un réseau d'Etat de garderies pourrait vouloir dire un réseau qui
est administré de façon tout à fait centralisée,
à la façon des autres types d'établissement, et avec un
pouvoir de tutelle du ministère quant à l'administration de ces
établissements et les mêmes processus d'autorisation touchant tous
les aspects de leur fonctionnement par l'approbation détaillée
dans un budget.
Ce que l'on soulève à ce moment, c'est le caractère
de l'autorité qui s'exerce sur la garderie comme établissement.
Je suis tout à fait en désaccord avec le député de
Saint-Jacques lorsqu'il semble suggérer que ce sont les milieux qui ont
encouragé le gouvernement à s'engager dans la voie d'un appui
financier, que c'est ce que ces milieux voulaient.
Au contraire, je me souviens qu'avant même que des
décisions soient prises au niveau gouvernemental pour embarquer dans ce
nouveau programme, certains milieux qui, je pense, pensaient probablement
embarrasser considérablement le gouvernement dans ses décisions,
avaient dit: Nous voulons des garderies contrôlées par les parents
et non pas contrôlées par le gouvernement. C'est une
activité qui est très près de l'éducation des
enfants et il est inimaginable que le gouvernement veuille se mêler de
cela. Ce n'est pas de l'éducation formelle. Ce sont véritablement
des responsabilités parentales.
Encore une fois, je pense qu'on croyait beaucoup embarrasser le
ministère, sans se douter que c'était dans ce sens
également que nos projets allaient, puisque c'est tout à fait
conforme à notre philosophie d'affirmer la responsabilité
parentale. Quelle meilleure façon y a-t-il, M. le Président, pour
permettre aux parents d'exercer leur rôle vis-à-vis des garderies
que de leur donner à eux les moyens de le faire? Je reviendrai
tantôt sur l'autre aspect de l'équivoque que j'ai soulevée
concernant les barèmes d'aide financière et le fait de savoir si
c'est universel ou sélectif sur le plan de l'admissibilité
financière. Mais quel autre moyen meilleur peut-on suggérer pour
donner véritablement aux parents un droit de regard sur ce qui se fait
dans la garderie?
Je dois vous avouer, M. le Président, devant la
précarité qu'on allègue découler de ce
régime de financement, qu'il est indéniable qu'il y a des
difficultés administratives qui à mon avis, ne sont pas
supérieures ou différentes, quant à leur degré de
sévérité, des difficultés administratives qui
existent aussi dans un réseau d'Etat, un réseau public pour
n'importe quel type d'établissement. Il s'agit de penser simplement
à ce qu'on nous dit des relations entre les centres hospitaliers et le
ministère. Il est évident que n'importe quel régime
comporte des difficultés administratives dont la nature diffère
d'un régime à l'autre, mais qu'on ne peut pas éliminer,
quel que soit le caractère public ou officiel de l'organisme en
question, je dirais même presque au contraire.
De toute manière, s'il y a une précarité dans le
fonctionnement des garderies, soit, mais je crois que c'est une
précarité qui est très saine, parce qu'elle résulte
de quelque chose de fondamental, au-delà des ajustements dont le
ministre d'Etat a fait part pour payer tous les quinze jours, pour ne pas
cesser les paiements pour une absence occasionnelle. On sait que les enfants
sont malades, ils ont des rhumes, etc. Evidemment, il faut tenir compte de
cela. Mais au-delà de tous ces accommodements qui sont faits, la
précarité, qui demeure, c'est un genre de précarité
que je voudrais bien voir s'installer dans tous nos établissements, si
c'était seulement possible, parce qu'elle résulte justement du
pouvoir des utilisateurs de se retirer et d'aller chercher ailleurs leurs
services.
S'il était imaginable de donner aux usagers de
tous nos établissements qui prétendent leur donner des
services et qui, dans la plupart des cas évidemment leur donnent des
services, je crois que tout ce qu'on a dit sur la participation acquerrait un
sens tellement réel et tellement concret que nous y verrions, je pense
bien, la possibilité d'une amélioration con3idérable de la
qualité des services. Malheureusement, la plupart des autres
établissements ne donnent pas des services d'une nature telle que ces
solutions puissent être facilement appliquées. Mais c'est une
expérience qui me fascinerait personnellement de pouvoir donner ce
pouvoir aux usagers dans tous les établissements.
Le deuxième aspect de la question, c'est ce que cette notion, ces
allusions à des garderies d'Etat masquent un peu. En effet, quant
à ce premier aspect, il n'y a pas de doute que je considère ce
régime supérieur au régime d'un établissement
public du type classique, avec des financements de type classique. Le
deuxième aspect, c'est l'aspect d'universalité. Je pense que le
ministre d'Etat a très éloquemment montré que le moyen
choisi, c'est-à-dire l'application d'un barème d'aide
financière, était seul susceptible de concentrer notre aide dans
les classes de revenus qui en ont véritablement besoin. On dit: D'autres
moyens sont possibles pour cela, tels que privilégier certains
quartiers.
Mais on sait très bien les hasards de la localisation, les gens
ne coïndident pas du tout avec les clivages socio-économiques. Pour
donner un exemple qui fait peut-être un peu image, il y a des pauvres
à Outremont, il y en a peut-être moins que dans d'autres
quartiers, mais il y en a là aussi. C'est un phénomène qui
est très connu qui a été décrit dans des
études fort sérieuses. Privilégier certains quartiers
implique que l'on met ces populations dans une situation de discrimination qui
est en soi injustifiable. C'est la raison pour laquelle je crois que la formule
basée sur une évaluation de chaque individu, de chaque famille
est beaucoup plus juste que de se fier au hasard de la localisation.
En effet, il ne faut pas oublier que, si l'on ne veut pas entretenir
d'équivoque, même dans une garderie publique comme telle, le
problème de la sélectivité pourrait se poser exactement de
la même façon et ces barèmes d'aide financière
pourraient être appliqués dans les garderies publiques comme ils
le sont dans le contexte actuel, largement décentralisé. Il faut
faire attention à ne pas confondre les choses. Quand on parle de
garderies d'Etat, on parle de l'emplacement ou de la localisation de
l'autorité vis-à-vis de l'établissement; nous l'avons
située chez la famille, chez les parents. On peut vouloir penser aussi
ou faire allusion indirectement à un régime universel de
gratuité.
C'est une confusion qu'il importe de ne pas perpétuer. On a
donné je termine là-dessus l'exemple d'une famille
dont les deux membres travaillent et qui gagnent un revenu équivalent au
salaire minimum. On a dit: Cette famille ne reçoit pas d'aide de l'Etat.
Je comprends qu'on peut désirer aider ces gens et aider tout le monde
à la limite. Il reste qu'une famille qui gagne cette année
$10,000 ou presque $11,000 de revenus se situe au-dessus de la moyenne du
revenu familial au Québec. Or, il y a des familles qui paient des
impôts et qui ont des revenus fortement inférieurs à
celui-là. Ce que l'on nous propose, c'est de demander à des gens,
qui paient des impôts et qui ont un revenu familial de $9,000, de voir
une partie de leurs impôts utilisée pour payer des services de
garde à leur voisin, à une autre famille qui a un revenu de
$1,000 ou $2,000 supérieur au leur. A plus forte raison dans un
régime universel où des gens qui ont un revenu familial de
$9,000, et en moyenne au Québec d'environ $10,000, paieraient des
garderies à des familles de professionnels où les deux
travaillent et où il peut y avoir un revenu combiné de $60,000.
Il n'y a rien d'impossible à ça dans le monde où l'on vit,
quand on est en face de deux professionnels qui travaillent tous les deux.
C'est ça que veut dire un régime universel de garderies. Je crois
que ce n'est absolument pas justifié par l'évaluation des
priorités sociales au Québec. Il y a des situations pires que
celle-là, parce qu'il faut se souvenir qu'à ces niveaux de
revenus, où les deux conjoints travaillent, par exemple, on vit dans une
société qui se paye plusieurs luxes, qui se paye des voyages, qui
se paye des vacances en Floride, etc. Je ne crois pas que ce soit une
priorité sociale de subventionner des services de garde pour des
familles où les deux conjoints travaillent à ces niveaux et, pour
ça, d'utiliser des impôts que des gens qui gagnent $7,000, $8,000
ou $9,000 doivent payer en partie.
C'est essentiellement la raison pour laquelle nous n'avons pas un
régime universel. Evidemment, nous vivons dans une société
qui, espèrons-le, va s'enrichir et où il sera possible d'utiliser
une partie de cette richesse pour favoriser des services communautaires.
Mais, il ne faut pas se dissimuler qu'il y a dans tout cela un
problème de redistribution qui ne doit pas être perverti, dans le
sens où on utilise des impôts perçus par des gens qui, au
Québec, malheureusement peut-être, ont encore des revenus
modestes. Il faut prendre la réalité telle qu'elle est pour
subventionner indirectement la consommation somptuaire de certains
ménages où les deux membres du couple peuvent travailler et
où une priorité devrait certainement être de payer pour la
garde des enfants plutôt que pour d'autres types de consommation.
Je crois qu'il s'agit d'un point sur lequel nous ne sommes pas d'accord
avec l'Opposition et pour des raisons que nous n'avons aucune hésitation
à défendre.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 9,
adopté?
M. Charron: Oui, d'accord.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 10:
Equipement des services sociaux.
M. Charron: Adopté.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Adopté.
Programme 11: Soins spécialisés et
ultraspécialisés.
Centres hospitaliers
M. Charron: J'ai quelques questions précises sur certains
centres hospitaliers comme l'hôpital de Rosemont. On a annoncé le
report de la décision au 1er janvier 1976, quant à l'avenir de
cet hôpital général.
Qui est chargé de l'étude que le ministre a demandé
sur cet hôpital?
M. Forget: En guise de préface, M. le Président,
j'ai été frappé, depuis deux ou trois jours, par une
pensée qui ne m'était jamais venue, probablement parce que je
suis trop près de ces questions pour les voir exactement de la
même façon que des membres du public. C'est que beaucoup de
personnes ont parlé de l'hôpital de Rosemont en pensant à
un hôpital en particulier, alors que le problème était
soulevé au sujet d'un autre hôpital.
On vient de mentionner, dans la discussion tantôt, l'hôpital
de Rosemont.
M. Charron: C'est Maisonneuve.
M. Forget: L'hôpital de Rosemont qu'on a mentionné
tantôt, ce n'est pas l'hôpital de Rosemont dont il a
été question depuis trois mois.
M. Charron: C'est l'hôpital Maisonneuve.
M. Forget: C'est le pavillon Rosemont de l'hôpital
Maisonneuve, de Rosemont. J'ai eu l'occasion, lors de conversations, de me
rendre compte tout à coup que les gens me parlaient, avec un certain
sens d'indignation, de la fermeture de l'hôpital Rosemont, et qu'ils
parlaient essentiellement du pavillon Rosemont de l'hôpital Maisonneuve,
de Rosemont.
Je pourrais comprendre leur sentiment d'indignation, mais je l'ai
compris seulement la semaine dernière, pour la première fois.
C'est peut-être surprenant, mais je me suis rendu compte que, finalement,
il y a bien des gens, y compris peut-être ceux qui ont signé des
pétitions, qui pensaient au vrai hôpital de Rosemont plutôt
qu'à l'autre.
A tout événement, cette affaire, comme je l'ai
indiqué à la Chambre, d'une façon un peu elliptique
peut-être, soulève plusieurs questions. C'est à la
lumière des discussions que j'ai eues avec des groupes et à
l'intérieur du ministère que toutes ces questions sont apparues
avec le plus de clarté.
La première question, la plus facile, si l'on veut, celle,
peut-être, qui a constitué le schème de
référence initial de la décision telle qu'annoncée,
au départ, par le ministère, est constituée par les
problèmes d'organisation physique de cet hôpital. Cet
hôpital, celui qu'il était question de fermer, n'est pas un
hôpital de 300 ou 400 lits, qui a été fusionné avec
l'hôpital Maisonneuve, mais un hôpital installé dans ce qui
était anciennement des maisons privées transformées aux
fins de les utili- ser comme hôpital, à l'exemple de plusieurs
petits hôpitaux de la région de Montréal qui ont
été fermés, depuis quelques années; cela
présente des problèmes d'aménagement physique
considérables.
Sur le plan sanitaire, on a, par exemple, fait ressortir qu'il n'y a
aucune clinique d'urgence, ni de clinique externe qui peuvent être
aménagées dans cet édifice essentiellement
constitué de trois unités de soins, de quatorze lits chacune. Il
serait nécessaire d'aménager ou de transformer
considérablement le centre pour lui permettre de jouer
véritablement le rôle d'un hôpital et en particulier d'un
hôpital de quartier où la clinique de miniurgence c'est la
clinique externe, évidemment jouerait le rôle
principal.
Ces éléments font défaut. La suite
opératoire est absolument déficiente, puisqu'elle n'est pas
isolée des voies de circulation. Elle ne peut donc pas assurer les
conditions d'asepsie normales pour une suite opératoire. On doit la
traverser pour se débarrasser des ordures du centre hospitalier. On doit
même, je crois, traverser la salle d'opération elle-même
pour avoir accès à la chambre des fournaises. Il y a là
des vices physiques qui font que l'hôpital doit, sur un plan physique, de
toute façon, être condamné. Quelle que soit l'issue des
discussions, c'est un hôpital qu'on ne peut pas tolérer de
conserver dans l'état où il est, à cause de son
aménagement physique.
Voilà une première catégorie de problèmes
et, comme je l'ai indiqué tantôt, cela a probablement
constitué le contexte le plus immédiat de la décision
originale du ministère. Un examen plus attentif de son fonctionnement a
fait apparaître des problèmes d'une plus grande envergure qui ne
peuvent pas être résolus indépendamment d'une
évaluation d'ensemble de la situation des services hospitaliers, en
particulier à Montréal. Nous avons constaté que ce petit
centre hospitalier jouait un rôle assez particulier, et ceci tout
particulièrement depuis un an ou deux. Il y a eu une évolution
dans son orientation. Il en est venu à jouer un rôle de centre de
chirurgie mineure, de chirurgie d'un jour et ceci sans vraiment que cette
nouvelle orientation ait fait l'objet, peut-être, des études et de
l'attention qui sont nécessaires. C'est un phénomène
général en Amérique du Nord que le développement de
ressources spécialisées pour la chirurgie d'un jour. Nous avons
pris connaissance de certaines expériences, de certains
développements, par exemple, aux Etats-Unis, qui mettent en
lumière les conditions spéciales de la pratique médicale
et, en particulier, de la chirurgie d'un jour, mais aussi certaines exigences
d'organisation, les relations qui doivent s'établir entre un tel centre
et les centres hospitaliers spécialisés.
Ceci est un domaine nouveau et c'est l'aspect qui fait l'objet d'une
étude de la part d'un comité que le ministère a
créé et qui regroupe des médecins du milieu universitaire,
des fonctionnaires du ministère, de manière à voir quelles
sont les orientations que nous devrions adopter dans le domaine de
l'organisation de la chirurgie d'un jour.
C'est donc cela le deuxième aspect qui doit faire l'objet d'une
étude que j'espère très brève
parce que, de toute manière, il ne s'agit pas de
réinventer la roue. Il y a des publications. Il y a des
expériences étrangères. Il y a aussi des
expériences au Québec, dans d'autres milieux, dont il faut tenir
compte. C'est probablement l'élément le plus important dans
l'évaluation du dossier. Je pense que, vers l'automne ou le milieu de
l'automne, puisqu'il y a toujours des délais inévitables dans
toutes ces études, nous devrions savoir dans quelle direction nous
allons de ce côté.
Il y a enfin des problèmes qui ont été
soulevés par le fonctionnement de l'hôpital et qui tiennent,
quelle que soit sa vocation, aux rôles respectifs d'un petit
hôpital communautaire, si vous voulez dans un grand centre urbain comme
Montréal, et des centres hospitaliers spécialisés, les
centres d'enseignement. Je ne veux pas entrer dans les détails de ce
côté, parce que j'aurai l'occasion de le faire
ultérieurement. J'ai certaines consultations et certaines
réflexions à faire avant de pouvoir vraiment déboucher sur
des conclusions de ce côté. Il me paraît qu'il peut
même être préjudiciable à un bon fonctionnement du
réseau hospitalier dans son ensemble, dans une région comme
Montréal, de ne pas préciser certaines règles du jeu quant
au rôle et au mode de fonctionnement d'un petit centre hospitalier
à côté d'un gros centre hospitalier.
On ne peut pas laisser simplement la loi de la jungle ou le
développement...
M. Charron: De la libre entreprise.
M. Forget: ... purement libre et sans contrainte, sans
règles du jeu bien précises et acceptées de toute part, et
avoir un système hospitalier qui fonctionne. A certains égards,
j'ai lieu de croire, mais je ne peux pas dire que j'ai vraiment conclu de
façon définitive, que loin d'améliorer, comme certains le
prétendent, le fonctionnement du réseau, l'existence d'un
hôpital comme celui-là, à moins que nous n'ayons des
règles du jeu beaucoup plus précises, peut être un facteur
très significatif pour rendre plus difficile encore le fonctionnement
des centres hospitaliers considérés dans leur ensemble. C'est
évidemment une question sur laquelle beaucoup de discussions devront
avoir lieu. Dans l'ensemble, on voit que les discussions et les rencontres
auxquelles a donné lieu l'annonce initiale de la décision ont
soulevé des problèmes d'une bien plus grande envergure que celui
de l'aménagement physique qui avait été soulevé
initialement.
Je crois que cela permet de voir pourquoi la décision a
été reportée. C'est que ces aspects ont paru
mériter une attention suffisante. Tant et aussi longtemps qu'on ne peut
pas conclure sur ces aspects beaucoup plus généraux, il devient
un peu faux de conclure dans un cas particulier puisque c'est une
décision qui doit être située dans un contexte et non pas
prise de façon isolée.
M. Charron: Ce que vous me dites là, ce sont les facteurs
qui ont motivé de reporter au 1er janvier 1976 la décision quant
à l'avenir de cet hôpital. Est-ce qu'ils n'existaient pas, ces
facteurs, au moment où vous aviez décidé de fermer
l'hôpital?
M. Forget: Tous les facteurs existent toujours, mais la
conscience des facteurs n'est pas nécessairement aussi vive que lorsque,
confronté par une décision, on est, tout à coup,
amené à prendre connaissance d'une situation de façon
beaucoup plus complète, beaucoup plus aiguë. Evidemment,
théoriquement, on devrait connaître toute la réalité
tout le temps, mais on est ainsi fait que c'est à l'occasion de la prise
de décisions particulières que certains aspects de la
réalité, qui étaient pourtant toujours là, nous
paraissent particulièrement importants.
M. Charron: Est-ce que, parmi les éléments de la
réalité, il n'existe pas aussi la réaction de la
population dans le quartier?
M. Forget: Je dois vous dire que la réaction de la
population a plutôt suivi que précédé cette prise de
conscience de ma part, lors de la révision du dossier. Alors que ces
mouvements prenaient seulement naissance, j'ai été à
même de faire ces constatations. D'ailleurs, si l'on s'en souvient bien,
le report initial de la décision est largement dû au fait que nous
étions déjà, à ce moment, conscients de ces
problèmes. Mais il y a eu une certaine discussion interne, au
ministère, pour savoir quelle était la meilleure façon
d'envisager une solution. C'est une décision qui est intervenue
relativement tard, si vous voulez, puisqu'on hésite toujours à
créer des comités d'étude particuliers pour des
problèmes. C'est au moment où nous avons finalement
décidé de ne pas traiter le problème comme un
problème isolé, mais vraiment de le considérer dans son
envergure véritable et de créer un comité ad hoc pour
l'étudier, avec une participation extérieure au ministère,
que la deuxième prolongation ou le deuxième report de la
décision est intervenu. Cela nous a pris un certain temps pour
apprécier correctement la nécessité d'une telle
étude.
M. Charron: D'accord, M. le Président!
Un autre centre hospitalier est le Centre hospitalier régional De
Lanaudière. Le député de Chicoutimi faisait parvenir, en
date du 7 janvier dernier, un télégramme au ministre des Affaires
sociales. Le ministre accusait réception du télégramme et
affirmait ceci je lis le deuxième paragraphe de cette lettre au
député de Chicoutimi "Aussitôt que les professionnels
responsables de la réalisation technique de ce projet pourront soumettre
au ministère des plans et devis suffisamment avancés pour
autoriser une demande de soumissions publiques, je m'assurerai que les
officiers de mon ministère procèdent avec la plus grande
diligence."
Ma question est donc la suivante: Est-ce que des plans et devis
suffisamment avancés ont été remis au ministère
pour qu'une décision soit prise ou en voie d'être prise?
M. Forget: A peu près à cette époque, un peu
avant ou un peu après, j'ai rencontré les responsables du Centre
hospitalier De Lanaudière, et j'ai justement exploré avec eux les
difficultés qu'ils
avaient éprouvées dans le cheminement de ce projet. Il
était exact, à l'époque, que nous attendions encore
certaines esquisses préliminaires, certains devis qui étaient
essentiels pour que l'on puisse aller au-delà.
Je pense que, depuis ce temps, ces esquisses et ces devis ont
été fournis. Maintenant, on peut peut-être...
Le dossier est venu à moi il y a à peine dix jours. Il y a
dix jours, il nous manquait encore certains éléments de
l'ensemble des plans et devis pour pouvoir prendre une décision quasi
définitive.
Il faut se souvenir qu'il s'agit là d'un
réaménagement très considérable d'un centre
hospitalier déjà existant et, suivant l'expression courante:
Quand on se met à réparer ou à travailler dans du vieux,
il y a toutes sortes de complications qui interviennent et qui entraînent
des délais. C'est un peu ce que nous avons vu. Il y a eu des
difficultés considérables à tout préciser ce qui
devait être précisé.
Il y a une conception d'ensemble du projet qui s'est faite par les
professionnels de la programmation, de la direction de l'équipement. Il
y a tellement d'interrelations entre les divers centres d'activité
qu'ils exigent, nécessairement, le dépôt des plans et devis
de l'ensemble.
M. Charron: Pour quand attendez-vous cela?
M. Forget: Etant donné les multiples interventions
je ne vous le cache pas au sujet de ce projet, soit de la population,
soit du monde médical, soit même du milieu politique, c'est ce que
j'appelle, sur ma table, un dossier chaud que je suis aux 24 heures.
Pour répondre à votre question, il faudrait que
j'interroge les professionnels dont la corporation a retenu les services.
M. Charron: Cela me satisfait de savoir qu'au ministère on
accorde beaucoup d'attention à ce dossier qui nous avait
été signalé lors de la tournée du chef de
l'Opposition, au début du printemps, je crois.
Un autre cas particulier parmi les derniers. En prenant connaissance du
dossier, je me suis interrogé quant aux projets réels du
ministère des Affaires sociales relativement à la transformation
des hôpitaux de Saint-Georges-de-Beauce et de Beau-ceville. Quel sera le
partage des services entre les deux institutions et, s'il existe des projets,
quels sont-ils?
M. Forget: On sait peut-être que j'ai fait une visite dans
cette région, il y a environ une quinzaine de jours, puisqu'à la
suite de la réception d'un grand nombre de rapports, de
résolutions, de mémoires de tous les groupes j'avais
indiqué, dès l'automne dernier, que je n'essaierais même
pas d'en arriver à des conclusions avant d'avoir rencontré les
gens et avant d'être allé sur place. C'est ce que j'ai fait.
Je les ai interrogés sur les conséquences possibles de
toutes les éventualités qu'il est possible de considérer.
Il est clair, à mes yeux du moins, que l'espèce de dilemme de
tout ou rien en quelque sorte devant lequel chaque centre hospitalier a choisi
de se placer en insistant sur une orientation très très
forte et très bien démarquée d'un centre hospitalier qui
deviendrait un centre pour maladies aiguës et d'un autre qui deviendrait
un centre pour malades dits aux soins prolongés force largement
la réalité. Il m'a paru évident que, même si cette
décision était prise aujourd'hui, le lendemain ou le même
jour on se poserait tout de suite des questions, à savoir: étant
donné cette décision, quels sont, malgré tout, les
services essentiels qui doivent être conservés à chacun des
endroits, et ceci du point de vue de chacun des centres hospitaliers?
Je les ai donc invités à réfléchir sur les
conséquences d'une décision qui les favoriserait dans la notion
traditionnelle de ce mot, c'est-à-dire qui favoriserait chez eux
l'implantation d'une vocation de soins spécialisés pour maladies
aiguës et, dans l'optique opposée également, de
manière à voir quelles conséquences les centres
hospitaliers eux-mêmes tirent d'un choix.
A mon avis, cela permettra de voir que le dilemme absolu dans lequel on
veut enfermer le problème est en partie artificiel. C'est ma conviction
et c'est ma conviction également que, devant de telles
conséquences, les deux centres hospitaliers voudront réexaminer
l'hypothèse d'une complémentarité qui a été
exclue ou presque au départ pour des raisons qui me demeurent un peu
mystérieuses, si ce n'est qu'elles sont probablement basées sur
le désir de chacun des centres hospitaliers de tirer à lui toute
la couverture, en quelque sorte.
C'est un peu un désir puéril, à mon avis, parce
qu'il est clair que le contribuable québécois ne pourra pas faire
les frais de réécrire l'histoire à partir de zéro
dans la région de la Beauce. Des investissements considérables
ont été faits dans deux centres hospitaliers et on ne peut pas
faire comme si cela n'avait pas eu lieu. Il est peut-être dommage,
à certains égards, que ces problèmes ne se soient pas
posés il y a 20 ans et il y a 15 ans. Mais si, à l'époque,
on ne se les est pas posés, on ne peut plus faire maintenant comme si on
se les était posés ou réécrire entièrement
ce chapitre à partir de zéro. Ce serait une dépense
inconsidérée.
Plus important, peut-être, encore que cela, est le fait que c'est
finalement la population de la région qui, par sa volonté
d'utiliser ces ressources plutôt que les ressources de Québec, va
déterminer le pouvoir d'attraction de la région pour
l'organisation de services spécialisés. Il est clair que toute la
population de la région ou presque la totalité est
nécessaire comme bassin de population pour justifier
économiquement la présence de certains spécialistes qui
viennent par paires, comme on le sait, parce que les gens ne veulent pas faire
la garde sept jours par semaines, 24 heures par jour. Donc, il faut justifier
économiquement une consultation pour des services
spécialisés de l'immense majorité de la population de la
région
pour que certaines spécialités soient viables
économiquement dans une telle région.
La clef de cela ne repose pas dans les mains du ministre, mais dans les
mains de la population. La seule contribution que nous pourrons y faire
nous devrons, pour cela, être appuyés par les deux
établissements travaillant la main dans la main c'est de
favoriser justement le recours aux ressources régionales par des
décisions qui tiennent compte de cet impératif.
Nous en sommes là dans nos réflexions et dans l'invitation
que nous avons lancée aux centres hospitaliers de faire un peu cet
exercice et de s'imaginer au lendemain d'une décision pour vraiment
comprendre les implications d'un scénario un peu trop dramatique pour
vraiment représenter la situation réelle où on est. Ce
n'est pas tout à fait cela, le choix qui s'impose. D'ailleurs, à
la suite de ma visite, j'écris ces jours-ci aux deux centres
hospitaliers pour leur donner certains jalons dans leurs réflexions.
Encore une fois, on peut déplorer les délais. Certaines
personnes l'ont fait publiquement en disant: II faudrait que le gouvernement
tranche. Encore une fois, il ne s'agit pas seulement de trancher; il s'agit
effectivement de produire entre deux centres hospitaliers une certaine symbiose
ou une certaine volonté de travailler en commun. Quand on a affaire
à deux centres hospitaliers qui sont à moins de 10 milles l'un de
l'autre, qui sont, en termes de temps, moins distants que deux centres
hospitaliers dans la même ville, qu'on pense à Québec ou
à Montréal, il est un peu artificiel de faire les oppositions
qu'on fait entre les deux. Même si je peux comprendre que, sur le plan
régional, ces oppositions ont une certaine valeur traditionnelle, une
certaine valeur d'émulation légitime, il demeure qu'on n'a pas
d'intérêt, au point de vue gouvernemental, à ajouter encore
à ces oppositions et à ces rivalités. Au contraire, nous
devons faire tous les efforts possibles pour les amener à travailler
ensemble et à se compléter l'un l'autre.
M. Charron: II reste une chose claire de ce que vous affirmez,
c'est que le statu quo, la situation actuelle, n'est plus tenable et il va
falloir la modifier, mais toujours dans le sens d'une
complémentarité et non pas de l'unicité des services dans
un endroit et de la disparition dans l'autre.
M. Forget: C'est ça.
M. Charron: Puis-je demander très rapidement ce qu'il
advient, si le ministre a en main le résultat de l'enquête que M.
Jean-Claude Martin a menée à sa demande, je crois, sur la
situation à l'hôpital Sacré-Coeur de Hull?
M. Forget: Non, je n'ai pas encore en main son rapport final.
M. Charron: Pourtant, est-il exact de dire que le
ministère a déjà décidé de diminuer le
budget de l'hôpital Sacré-Coeur de Hull?
M. Forget: Non, ce n'est pas exact de le dire. Je dirais
même, le contraire.
M. Charron: Ce sont les questions "sprint".
Je cite ce passage d'un média d'information, du Devoir, donc
source sacrée auprès du gouvernement...
M. Forget: Ils voient à ce que s'appliquent les lois, pour
le gouvernement.
M. Charron: Sauf pour le ministre du Travail. On dit, "Les
membres de l'Association des usagers de l'hôpital Sacré-Coeur ont
produit hier une copie d'une lettre adressée au juge Trahan en sa
qualité...
M. Forget: Ce n'est pas le même Sacré-Coeur.
M. Charron: Ce n'est pas le même Sacré-Coeur. C'est
ça la distinction.
M. Forget: II y a 17 hôpitaux du Sacré-Coeur. M.
Charron: II y en a 17, ah bon! M. Forget: Un bon nombre.
M. Charron: Mon erreur est peut-être un peu plus
explicable, parce qu'en voyant le nom du juge Trahan, j'ai compris. Alors,
faisons le lien avec l'hôpital Sacré-Coeur de Cartierville. Est-ce
que, dans ce cas précis, il y a effectivement une réduction de
budget annoncée?
M. Forget: Pas que je sache, il n'y a pas de réduction de
budget. Cet hôpital, comme quelques autres au Québec,
éprouve des fins de mois difficiles ou des fins d'année
difficiles.
J'en parle volontiers, parce que, encore une fois, c'est un
problème général dans certains hôpitaux, ce n'est
pas paticulier à celui-là.
C'est un problème sérieux, cependant, puisqu'on sait,
puisque les crédits indiquent $1.2 milliard aux centres hospitaliers du
Québec, qu'on ne peut pas impunément envisager qu'ils vont
dépasser leur budget de 5% ou 10% parce qu'il y a eu des
difficultés de parcours. 5% ou 10% sur $1.2 milliards, cela va chercher
entre $70 millions et $130 millions.
Je pense que les centres hospitaliers perdent de vue la forêt
pour employer l'expression anglaise tellement ils sont
collés aux arbres et voient des difficultés de parcours, des
difficultés qui leur sont particulières. Ils voient la
réaction normale du ministère devant ces difficultés comme
des gestes punitifs à leur égard.
Il ne s'agit pas du tout de punir qui que ce soit, mais il est
absolument impératif que les budgets soient respectés. Le centre
hospitalier Sacré-Coeur de Montréal, puisque maintenant c'est le
nom qu'il porte, a vu son budget absolument doubler durant les quatre
dernières années.
Je comprends qu'il y a eu l'inflation et des augmentations de salaires.
Mais il tombe sous le sens commun qu'en quatre ans, le budget, qui est
passé de quelque $14 millions à quelques $34 millions, a,
donc, plus que doublé.
Mais il faut tenir compte de la fusion avec l'institut
Albert-Prévost qui a ajouté $3 millions ou $4 millions, il y a
deux ans. C'est un rythme de croisière plus que satisfaisant et qui
dépasse largement l'indexation de tout ce qu'on voudra.
Il y a des problèmes de croissance. C'est peut-être
à cet égard que les problèmes du centre Sacré-Coeur
de Montréal sont les plus réels. On ne double pas son budget
ce n'est pas un doublement en termes réels, mais c'est 40% de
plus en quatre ans sans des problèmes administratifs
évidents.
Je crois que c'est de ce côté-là qu'il faut chercher
des solutions et pas dans une course encore plus rapide en quelque sorte, une
fuite en avant par des budgets encore plus considérables.
Il y a une discipline essentielle à tous les centres
hospitaliers. Quand on obtient une masse de $34 millions, par exemple, dans un
centre hospitalier, on a une bonne marge de manoeuvre, je pense, pour faire
face à certaines contingences.
On a maintenant, depuis quatre ans, une formule de budget global qui
donne énormément de souplesse, puisque presque toutes les
décisions, sur le plan des réaménagements d'effectifs et
de priorités à l'intérieur de l'établissement, sont
prises par l'établissement sans référence au
ministère. Il n'y a référence au ministère que
lorsqu'il s'agit d'un développement. Je crois qu'on est en droit de
s'attendre de nos centres hospitaliers à une discipline
budgétaire stricte. Car 5% de développement, dans les centres
hospitaliers, il ne faut pas l'oublier, c'est, en termes relatifs, autant que
l'on consacre à la protection de l'enfance au programme 9 et presque
autant que ce que l'on consacre à tous les services aux enfants
mésadaptés sociaux, au Québec.
On ne me fera pas croire que les priorités sont telles qu'on
peut, un peu par distraction ou pour faire face à des contingences de
fonctionnement, absorber des ressources à un degré si fantastique
dans le secteur hospitalier, alors qu'on sait combien sont aigus les
problèmes dans certains autres secteurs qui n'ont que cet ordre de
grandeur comme ressources. Je parle de leur dépassement annuel, je ne
dirais pas que c'est une espèce de distraction, mais c'est vraiment une
espèce de difficulté de parcours. Cela correspond à
l'ensemble des ressources pour tout un autre secteur où on a autant de
problèmes qu'on veut bien le dire et qu'on veut bien l'imaginer. Ce sont
des problèmes réels.
Cette discipline n'est pas due à une volonté punitive ou
à des tracasseries administratives; elle est due tout simplement
à des limites très claires et à la capacité de
payer du contribuable. On n'a aucune espèce de réticence à
faire pression sur les centres hospitaliers pour qu'ils respectent leurs
restrictions budgétaires. Je pense qu'on pourrait parler longuement sur
le sujet, mais c'est dans ce contexte qu'il faut voir les difficultés
dont a fait part, depuis quelques mois, le centre hospitalier en question. Cela
s'ajoute au fait, évidemment, qu'il se cherchait un directeur
général, celui qu'il avait ayant démissionné il y a
quelque temps pour aller vers une autre carrière, d'autres
sphères.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programme 11,
adopté?
M. Charron: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Houde, Limoilou): Programmes 12, 13, 14,
15, 16? Adopté. Tous les crédits du ministère des Affaires
sociales sont adoptés. La commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 38)