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Version finale

31st Legislature, 2nd Session
(March 8, 1977 au December 22, 1977)

Tuesday, May 17, 1977 - Vol. 19 N° 75

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Affaires sociales


Journal des débats

 

Etude des crédits du ministère des Affaires sociales

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, messieurs!

Début des travaux de la commission des affaires sociales pour l'étude des crédits allant jusqu'au 31 mars 1978.

Les membres de cette commission sont: MM. Boucher (Rivière-du-Loup), Charron (Saint-Jacques), M. Clair est remplacé par M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), MM. Forget (Saint-Laurent), Gosselin (Sherbrooke), Gravel (Limoilou), Grenier (Mégantic-Compton), Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Lazure (Chambly), Marois (Laporte). Martel (Richelieu), Mme Ouellette (Hull), MM. Paquette (Rosemont), Saindon (Argenteuil), Saint-Germain (Jacques-Cartier), Shaw (Pointe-Claire).

Il y aurait lieu de faire la nomination d'un rapporteur. M. Gosselin, Sherbrooke.

Monsieur le ministre, avez-vous un exposé?

Exposé préliminaire du ministre M. Denis Lazure

M. Lazure: Oui, M. le Président. Mon exposé va être bref. Au moment où le nouveau gouvernement est entré en fonction, la préparation du budget était à toutes fins pratiques complétée. Les grandes opérations de base étaient très avancées. C'était normal qu'il en soit ainsi. Il y a quand même un certain nombre d'éléments qui ont été introduits pour bien marquer les priorités qui étaient inscrites dans le programme de notre parti, surtout à l'égard des personnes âgées et des malades chroniques.

Les crédits proposent davantage des réajustements de ressources et comportent très peu d'additions de nouvelles ressources, comme tout le monde le sait.

Cette année, le budget global du ministère pour 1977/78 est de $3,7 milliards, ce qui représente une augmentation d'environ 7% par rapport au budget modifié de l'exercice précédent.

De ce montant, $27,1 millions sont consacrés aux priorités de notre gouvernement dans le secteur des Affaires sociales. A titre d'exemple, au cours de 1977/78, le ministère consacrera une somme de $3,5 millions au développement des services à domicile afin de répondre aux besoins urgents des personnes âgées, des malades chroniques et des handicapés qui nécessitent des soins infirmiers à domicile ou des services domestiques à domicile.

Une somme de $3,9 millions sera consacrée au développement des soins aux malades chroniques. Tout cela, ce sont des montants additionnels, évidemment. C'est de l'argent de développement. Ce montant servira principalement au développement de programmes de formation du personnel oeuvrant dans ce secteur des soins pro- longés. Deuxièmement, il servira à l'implantation de programmes thérapeutiques, je pense en particulier à la physiothérapie et à l'ergothérapie et enfin, à l'addition de nouvelles ressources dans ce domaine.

Depuis la dernière commission parlementaire, deux nouveaux programmes se sont ajoutés dans le budget du MAS. Il s'agit, pour le secteur des régimes de compensation du revenu, de ce qui s'appelle la contribution à l'impôt foncier scolaire. Ce programme, dont le budget cette année est de $22 millions, est entré en vigueur en octobre 1976 et il vise à alléger le fardeau de l'impôt scolaire pour les personnes âgées de 65 ans et plus. Pour le secteur recouvrement de la santé, et ceci est le deuxième nouveau programme, il s'agit du programme intitulé: Contribution au financement du régime d'assurance-maladie. Ce programme a été créé en 1977/78 pour compenser le déficit d'opération anticipé de la Régie d'assurance-maladie du Québec.

Il ne m'apparaît pas pertinent, dans le cadre de cette présentation, de faire une description plus détaillée des activités du ministère. On aura l'occasion, au cours de l'étude des crédits élément par élément, de donner plus de détails. Je vais quand même faire quelques remarques pour présenter certaines grandes orientations.

Cette année, le budget 1977/78 découle d'une révision — je pense en particulier au budget des hôpitaux — des bases budgétaires. Au cours de 1976, le ministère a mis au point la révision de la base budgétaire des hôpitaux, des soins de courte durée. Cette opération a consisté, au moyen des diagnostics de sortie, à regrouper entre eux les établissements les plus ressemblants et une fois regroupés, à analyser leur productivité, c'est-à-dire leur rendement. Le ministère a aussi entrepris une autre opération qui sera complétée en juillet 1977. Elle a pour objectif de vérifier l'exactitude des ressources consenties aux centres hospitaliers de longue durée, ainsi qu'aux hôpitaux psychiatriques.

Sur le plan des services, l'indexation des allocations familiales, de 8,2% au 1er janvier 1977 et l'augmentation en moyenne de 27% des prestations à compter du 1er mai 1977, tel qu'annoncé dans le discours du budget et suite à l'abolition de l'exemption de la taxe de vente sur les vêtements et chaussures d'enfant; deuxièmement, l'indexation des prestations d'aide sociale, selon l'augmentation de l'indice annuel des prix à la consommation; troisièmement, une somme de $3,5 millions pour les services et soins à domicile; quatrièmement, équipement et fourniture pour fluoration, $1,3 million; garderie, $2 millions; amélioration des services d'hébergement et ouverture de nouveaux centres de jour pour personnes âgées en particulier, $5,6 millions; amélioration des soins et services aux malades physiques et aux malades mentaux, $9,1 millions; amélioration des services aux malades chroniques, on l'a dit tantôt, $3,9 millions et services ambulanciers, révision des tarifs, $1,7 million.

C'est une liste des principaux ajouts, des principaux éléments de budget qui vont servir au développement dans certains secteurs de service. Par ailleurs, les programmes d'orthèse et de prothèse, $2 millions; soins dentaires gratuits aux enfants de 10 ans et 11 ans, $8 millions et les programmes de gratuité des médicaments aux personnes âgées sont imputables au budget de la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Je vais terminer mes remarques ici. Je veux présenter aux membres de la commission parlementaire les collaborateurs qui sont avec moi. D'abord, le sous-ministre en titre, le Dr Brunet; à l'extrême-droite, M. Bélanger, conseiller financier au ministère et des membres de mon cabinet, Mlle Bélanger, Mlle Gagnon et M. Brûlotte.

M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Laurent.

Remarques de l'Opposition M. Claude Forget

M. Forget: Merci M. le Président. Je suis particulièrement heureux de voir la célébrité avec laquelle le ministre a procédé à ses remarques d'introduction. Les miennes seront également très brèves. Parce que je crois que l'utilité de ces travaux en commission parlementaire, lors de l'étude des crédits, ne réside pas à faire étalage de la capacité des uns et des autres, d'assembler des mots quant aux intentions à long terme des titulaires des responsabilités ministérielles.

Pour ce qui est de l'Opposition, il ne s'agit pas non plus de faire étalage de propositions de caractère général sur l'évolution des Affaires sociales. Ces notions, ces contributions, elles ont été faites, dans mon cas, alors que j'occupais le poste que détient l'actuel ministre des Affaires sociales. Je n'ai pas changé d'idée depuis; alors, je n'irai certainement pas ennuyer les membres de la commission par une répétition de notions et d'idées que j'ai déjà exprimées dans d'autres circonstances.

Les tâches qui nous attendent au sein de la commission parlementaire pour l'étude des crédits sont beaucoup plus pragmatiques et se situent dans le contexte d'une évaluation de la performance du gouvernement dans le secteur des Affaires sociales et, singulièrement, de la performance du ministre des Affaires sociales.

Je crois que lui comme moi, nous pouvons apprécier l'occasion qui nous est fournie, dans le cadre que nous procurent les travaux de la commission parlementaire, d'établir la vérité quant à certaines propositions, certaines allégations qui circulent à l'heure actuelle, malheureusement, à l'endroit du ministre. On prétend qu'il ne démontre pas, dans l'exercice de ses fonctions, un esprit de synthèse ou une compréhension suffisante de l'ensemble que constitue le réseau des établissements d'affaires sociales. Il a, à l'occasion, fait montre de partisanerie dans ses décisions. D'autres disent qu'il ne manifeste pas suffisamment, à l'endroit du réseau, des partenaires qu'il a dans le réseau, l'immense réseau des Affaires sociales, le respect nécessaire à l'exercice de ses responsabilités et nécessaire à leur succès, en particulier, mais qu'au contraire, il se livre à un exercice un peu arbitraire de l'autorité dont il jouit.

On dit également qu'il se livre peut-être un peu trop volontiers à l'improvisation plutôt que de tenir compte de la continuité essentielle dans un secteur aussi vaste et qui implique l'utilisation d'une part si importante des ressources collectives, car environ 30% ou un peu plus des ressources gouvernementales québécoises sont investies traditionnellement dans ce secteur.

Il n'y a pas de doute que le titulaire de ce ministère doit exercer ses responsabilités en connaissant pleinement le contexte dans lequel elles doivent s'exercer, contexte encore une fois où il y a des partenaires, mais un contexte historique également.

Donc, il y a ces allégations qui se retrouvent dans les journaux, dans certaines conversations, et je crois que c'est là une série d'affirmations qu'il est important de dissiper ou de confirmer, le cas échéant, mais, de toute manière, qu'il s'agit de tirer au clair, parce qu'il est très préjudiciable au fonctionnement du réseau d'avoir des propos comme ceux-là. Cela paralyse l'action du ministre, cela peut paralyser l'action du ministère, et cela peut engendrer ou aviver, le cas échéant, les antagonismes qui sont hélas trop nombreux déjà dans un secteur qui engage tellement de gens, tellement de groupes, avec des objectifs parfois en conflit les uns avec les autres.

Mon objectif, M. le Président, dans cette commission parlemenaire, ce n'est pas de lancer des accusations ou des injures au ministre, au contraire, ce sera, avec lui et à l'aide des réponses qu'il fournira lui-même, que ses collaborateurs fourniront, d'aider à éclaircir la nature, le genre, les implications de toutes sortes qui peuvent se dégager des décisions déjà arrêtées depuis six mois au ministère des Affaires sociales de manière, encore une fois, à établir la vérité et permettre à tout le monde, au grand public comme aux membres de la commission parlementaire, de porter un jugement sur l'ensemble de cette activité.

On peut croire que six mois, c'est encore insuffisant pour se permettre de porter un tel jugement. Cependant, ce sont des postes qui ne sont pas occupés pendant six ans, mais pendant souvent des périodes de temps beaucoup plus courtes, et je crois que, déjà, après six mois, il sera possible d'examiner, surtout à l'occasion de la préparation d'un budget où s'insèrent des éléments nouveaux, où s'insère également l'absence d'éléments nouveaux là où peut-être il devrait y en exister, il sera temps, je pense, il sera possible de porter un jugement après que nos travaux se seront terminés, lorsqu'il sera possible d'explorer toutes les implications d'un certain nombre de situations de fait.

C'est le but très factuel que je me fixe dans cette commission parlementaire.

Je n'ai rien d'autre à ajouter pour ce qui est des remarques générales. J'imagine que, lors de l'étude de chacun des éléments, il nous sera pos-

sible d'émettre quelques observations ou de poser quelques questions de caractère général, mais appropriées à la nature de chacun des programmes, des questions plus techniques ou plus spécifiques sur les aspects budgétaires de toutes ces activités.

Il y a une seule réserve ou une seule question, un seul point que j'aimerais soulever avant de terminer; c'est celui qui découle d'une tradition. Je pense que c'est une tradition à la commission parlementaire des affaires sociales de saisir l'occasion que nous fournissent certains éléments ou certains programmes qui apparaissent aux crédits du ministère pour faciliter, par la présence des responsables de ces organismes, une discussion des activités de la Régie des rentes et de la Régie de l'assurance-maladie. Dans le cas de la Régie de l'assurance-maladie, le problème se pose un peu différemment que dans le passé puisque le programme 18 apparaît, désormais, comme un poste budgétaire, ce qui n'était pas le cas dans le passé. Donc, la question ne se pose presque pas, mais, malgré tout, je crois qu'elle se pose techniquement afin d'assurer la présence à ce moment des porte-parole, des représentants, des administrateurs de la Régie de l'assurance-maladie.

Pour ce qui est de la Régie des rentes, il est de tradition d'inviter ses porte-parole à se présenter devant la commission parlementaire pour répondre aux questions lors de l'examen du programme 1, soutien du revenu familial, c'est-à-dire le paiement des allocations familiales. Il y a cette possibilité que j'aimerais que l'on ne perde pas de vue au cours de nos travaux, parce que c'est une tradition, aussi longtemps que je me souvienne d'avoir suivi les travaux de la commission parlementaire, que les présidents des régies soient présents avec quelques-uns de leurs adjoints. Alors, c'est terminé, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Vous aviez une réplique, M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, en ce qui concerne la dernière partie de l'intervention du député de Saint-Laurent, il est bien clair que nous allons maintenir cette tradition et qu'après entente avec les différents partis, nous aurons des périodes réservées, périodes où on aura la présence des responsables des différentes régies. Je n'ai pas terminé, si vous permettez.

Je voudrais quand même réagir à ce que le député de Saint-Laurent appelle des allégations. Pour ma part, je me réjouis aussi du ton calme et serein — jusqu'ici, en tout cas — de la commission et, sur un ton aussi calme et aussi serein, je ne voudrais quand même pas, étant donné que tout ce qui est dit ici est évidemment consigné de façon officielle par nos amis de la presse, laisser passer ces allégations véhiculées par le député de Saint-Laurent.

Ce qui peut apparaître parfois comme des improvisions résulte bien souvent de décisions qui devenaient absolument nécessaires, qui deviennent encore absolument nécessaires après de longues périodes d'indécision vécues au cours des quelques dernières années, ou des décisions prises, de façon officielle, mais non implantées. Je veux donner quelques exemples seulement, un en particulier qui me vient à l'esprit, l'hôpital Rosemont à Montréal, où décision a été prise, il y a quelques années, de fermer l'hôpital Rosemont, mais décision qui n'a jamais été appliquée.

Le nouveau ministre des Affaires sociales se retrouve devant une situation très litigieuse où, avec de bonnes raisons, le ministère a cru bon de transmettre la décision de fermeture aux gens concernés, mais, d'autre part, pour des raisons tout aussi bonnes, je suppose, n'a jamais procédé à la fermeture dudit hôpital. Après deux années d'incertitude, il est évident qu'il faut qu'on transmette une décision à l'hôpital Rosemont et, entre parenthèses, nous attendons un rapport de la corporation... J'ai demandé à la Corporation professionnelle des médecins de faire une visite d'agrément de l'hôpital Rosemont et nous n'attendons que ce rapport pour appliquer la décision qui sera prise.

Un autre exemple, l'hôpital Sainte Jeanne D'Arc à Montréal. Depuis quelques années, les autorités de l'hôpital Sainte Jeanne D'Arc et tout le réseau hospitalier entendaient dire que le ministère allait convertir cet hôpital en hôpital pour chroniques. Mais jamais il n'y avait eu de décision bien ferme de prise, de transmise aux autorités de l'hôpital Sainte Jeanne D'Arc. Nous nous sommes rendus—les fonctionnaires et moi-même — à l'hôpital Sainte Jeanne D'Arc il y a quelque temps et nous avons rendu une décision très claire d'augmenter à 20% le nombre de malades chroniques, dans un premier temps, et à 30%, dans un deuxième temps, pour atteindre un plafond de 30% dans deux ans.

Je pense que les gens de l'hôpital Sainte Jeanne d'Arc ont été très satisfaits. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a une longue série, et je vous en épargne, de situations, en particulier, des fermetures d'établissements, que ce soient des centres d'accueil ou des hôpitaux ou des transformations de vocations qui avaient été parfois décidées, parfois envisagées et qui créaient un climat d'incertitude.

Je prends un autre exemple, plus près de nous, l'hôpital Cloutier, au Cap-de-la-Madeleine; il avait été décidé que cet hôpital cesserait d'être un hôpital général. Je suis allé sur place avec les fonctionnaires. Nous avons étudié la situation et il m'a paru qu'il fallait maintenir la vocation de ce petit hôpital général régional, qui rend d'énormes services et qui, comme dans le cas de beaucoup de petits hôpitaux, offre des services beaucoup plus humanisés que les grandes usines qu'on a à Montréal ou à Québec et qui s'appellent des hôpitaux.

Cela déplaît, bien sûr, à certaines personnes si on renverse des décisions. Bien sûr, un nouveau gouvernement qui arrive doit réviser... Le gouvernement, en 1970 et en 1973, a fait des révisions en profondeur; surtout en 1970, mon prédécesseur, M. Castonguay, avait fait des révisions en profondeur, pour des projets de construction et d'agrandissement d'hôpitaux, pour des douzaines et des

douzaines de millions de dollars, et ces projets ont été annulés ou réduits.

Quand on prend des décisions comme on a dû en prendre depuis cinq mois, des décisions qui vont à rencontre de décisions prises par un gouvernement qui représentait des orientations différentes, je ne vois pas pourquoi les gens s'en scandaliseraient.

L'allégation que le ministre actuel des Affaires sociales ne consulte pas suffisamment est facilement réfutable, si on fournissait un calendrier des séances de consultations que j'ai tenues avec toutes sortes de groupements, d'associations d'établissements et d'associations professionnelles.

Je veux simplement terminer là-dessus. Il faut distinguer entre consultation et adhésion à l'avance à l'opinion d'un groupe quelconque. Que l'Association des hôpitaux du Québec, l'AHPQ, qu'un groupe comme l'AHPQ, exprime un certain mécontentement devant certaines pratiques que nous voulons changer, par exemple l'attribution de sous-contrats par beaucoup d'hôpitaux à des entreprises privées de l'extérieur, que ce soit pour l'entretien ménager, que ce soit pour l'alimentation, que ce soit pour la sécurité, l'attribution de ces contrats, qui s'est multipliée depuis quelque temps dans le réseau hospitalier, devient inquiétante.

L'Association des hôpitaux a soutenu une telle orientation. Nous, du nouveau gouvernement, nous sommes opposés à une telle orientation. J'en ai informé l'Association des hôpitaux du Québec dès le début du mois de décembre. Nous avons convenu d'utiliser pour le moment l'incitation auprès des hôpitaux. Nous devons nous revoir bientôt pour établir un échéancier plus précis, mais qui va tenir de situations de fait.

Je cite cet exemple d'une orientation qui est directement rattachée à une orientation du Parti québécois, qui est maintenant le gouvernement. Le Parti québécois est au gouvernement actuellement. C'est ce que beaucoup d'individus, beaucoup de corps intermédiaires n'ont pas encore réalisé.

Il est essentiel que nous distinguions, les gens de la presse aussi bien que les parlementaires, entre un processus normal de consultation où on n'est pas lié par l'opinion de l'interlocuteur. Il est bien entendu qu'il serait plus facile pour moi, ministre des Affaires sociales, de me plier aux oppositions, aux obstacles qui sont en cours de route quand on veut modifier, dans un sens qui nous paraît plus social, dans un sens qui nous paraît plus démocratique, des pratiques dans le grand secteur des Affaires sociales.

Le Président (M. Laplante): Le député de Mégantic-Compton.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: M. le Président, très brièvement également, je voudrais bien que le ministre, qui commence l'étude de ses crédits ce matin, sache que même avec un changement de gouvernement, ce qui fait l'originalité d'un gouvernement, ce n'est pas de venir tout chambarder le système qui existe déjà. Je pense qu'on devrait y aller avec pondération dans le secteur des Affaires sociales principalement.

Il y a longtemps qu'on sait qu'il y a des sujets sur lesquels on peut difficilement légiférer et quand je parle de sujets, je veux dire dans le domaine de la religion, dans les moeurs, et dans la langue. On en sait quelque chose. Les gouvernements qui ont touché à des sujets comme ceux-là, cela a toujours été des sujets assez brûlants et on sait que le gouvernement actuel s'est fait élire sur des politiques qui cassaient peut-être avec la réalité qu'on connaît au Québec depuis plusieurs années, mais la population ne lui en voudra peut-être pas de revenir sur certaines de ces décisions. Parce que depuis l'arrivée du gouvernement, on se rend compte que plusieurs ministres, on ne dira pas tous, mais plusieurs voudraient se lancer dans des grandes déclarations ou dans de grandes réformes et dans de grands projets de loi seulement pour le plaisir de faire la manchette, quitte à revenir plus tard, comme on le voit, ou de se faire massacrer par la population.

Ici, à ce ministère des Affaires sociales, on en a entendu pendant la campagne électorale et on se prépare à certains changements qui ne seront peut-être pas pour le bien de la collectivité québécoise. Vous vous proposez, entre autres, de salarier les médecins. Ce serait peut-être bon. Ce serait peut-être bon d'attendre un peu. Vous avez un mandat qui va durer quatre ans; écoutez un peu ce qui se passe au Québec, et ne voulez pas tout chambarder dans la première année, comme on a vu certains ministres qui se sont lancés dans des projets de loi, qui sont en train de se promener dans la province et d'essayer de sensibiliser la population. On peut, avec la force d'un gouvernement, faire des réunions en province, remplir des salles avec son monde, il s'en trouve assez, et se faire applaudir dans plusieurs régions du Québec, mais ce n'est pas toute la population qui est dans les salles. Arrivera une élection, les gens ont bonne mémoire et ont le bras long. J'en sais quelque chose avec notre gouvernement et l'Opposition officielle en sait quelque chose aussi. Il serait peut-être bon d'y aller plus modérément et de prendre un peu plus de temps qu'un an pour régler des projets de loi qui chambardent l'opinion québécoise, qui chambardent nos coutumes. Cela a l'air le cas dans plusieurs ministères dans le moment. On sait qu'en fin de semaine, le premier ministre a eu l'air de vouloir mettre la pédale douce à certains de ses ministres trop rapides et à trop grandes déclarations. Mais dans votre ministère, ce serait peut-être le temps aussi qu'on y voit.

On aura à revenir sur plusieurs points qui feront l'objet de nos études pendant l'étude des crédits. On voit que le ministre, au mois de mars, a fait une déclaration, il promettait une injection de $5 millions au développement du système de garderies, alors qu'on voit qu'il n'y en a que $2 millions. C'est à cela que je fais allusion en disant de ne pas y aller trop vite dans les déclarations pour ne pas être obligé de revenir et avoir la preuve du contraire, trois ou quatre mois plus tard quand on

voit qu'il manque déjà 60% de la promesse initiale dans ce secteur. Quand on regarde la Presse du 12 mars, les affirmations voulant que les dépenses brutes du budget des hôpitaux ne pourront augmenter que de 4% au cours du prochain exercice financier, il est permis, sans faire preuve de pessimisme maladif, de douter de la capacité des administrateurs d'hôpitaux d'arriver à l'intérieur de cette augmentation dans leur budget. Il ne faudra peut-être pas être surpris de voir aussi des déficits au niveau des centres hospitaliers.

Changer les choses dans les hôpitaux uniquement pour changer aussi. J'entendais le ministre tout à l'heure, à la réplique de l'ancien ministre des Affaires sociales, dire qu'il y avait beaucoup trop de contrats qui se donnaient dans les hôpitaux. Personnellement, j'ai été mis au courant de cette politique appliquée dans plusieurs établissements. J'inviterais le ministre à se rendre compte pourquoi ces contrats ont été donnés. Il y avait peut-être des implications locales qui étaient importantes et il y avait peut-être plusieurs raisons de le faire. Il serait peut-être bon que le ministre sache aussi si cela a coûté plus cher à l'Etat que de donner des contrats dans le secteur privé. Il serait peut-être bon qu'il aille voir aussi si ce n'était pas pour régler un problème syndical dans plusieurs établissements.

Ce sont des questions que le ministre doit se poser, avant de dire qu'il faut encore revenir à ce qui existait... à une nouvelle politique. Il serait peut-être bon d'aller voir ce qui s'est passé dans ce secteur. En tout cas, j'en ai été témoin pour une bonne part et je ne suis pas prêt à condamner les institutions qui ont décidé de passer par des contrats privés, pour plusieurs bonnes raisons.

J'aurai des informations précises à demander au ministre sur la diminution de lits dans des centres hospitaliers. On m'a donné l'exemple tout à l'heure d'un hôpital en secteur plus rural, si on veut faire abstraction, si on dit que rural, c'est en dehors de Montréal et de Québec, de petits hôpitaux qui mériteraient d'être maintenus dans plusieurs centres. Il faut faire attention aux fonctionnaires. J'ai toujours fait bien attention à ce monde-là, moi, ce n'est pas du monde élu. On dirait qu'ils prennent plaisir à faire battre des députés. Cela leur fait... c'est encore eux qui ont le bras long dans plusieurs secteurs. Il y a du bon monde là-dedans, mais il y en a d'autres qui sont là pour faire passer leurs politiques à eux et qui se foutent pas mal de ce qui se passe dans les régions.

On en est victime dans les régions rurales, et ce n'est pas vrai seulement aux Affaires sociales. La Loi de la réforme scolaire en a été un exemple. La voix du ministre de l'Education — on aura des questions à lui poser cette semaine sur ses déclarations de la semaine dernière — avait l'air de venir des catacombes quand il a annoncé qu'il y aurait un retour aux écoles primaires dans chacun des villages de la province. C'est étrange que ça nous arrive 16 ans ou presque 17 ans après la réforme scolaire, et qu'on en revienne à penser que ce système qui existait en 1960 n'était peut-être pas si mauvais.

On dira peut-être ça dans une dizaine d'an- nées dans le domaine des affaires sociales. C'est peut-être pour ça qu'il ne faudrait pas aller trop rapidement. Quand on dit qu'on est en train d'installer des services d'urgence, à la grandeur du Québec, quand on diminue le nombre de lits dans des hôpitaux pour traiter des personnes qui viennent là, il faudrait peut-être que les fonctionnaires pensent que, dans des centres comme Lac-Mégantic, il y a des gens qui font 40 ou 50 milles pour venir aux services d'urgence et ne sont peut-être pas prêts à retourner la même journée. Il faudrait peut-être les hospitaliser. Avant d'annuler 14 lits comme on l'a fait l'an passé dans nos centres chez nous, avant de se préparer à en fermer 20 autres, avant de tenter de convaincre nos gens avec les "bumpers" qu'on a installés dans des régions, qui sont des CRSSS, avant de faire dire à nos gens que ça commence à être une bonne chose de fermer des lits un peu partout, sans tenir compte des régions rurales, qu'on les traite de la même façon qu'on traite les grands centres.

Quand je reste au coin de la rue de l'hôpital Rosemont et de n'importe quel centre hospitalier à Montréal, si j'ai à me déplacer à peine cinq minutes en voiture pour me rendre à l'hôpital, je ne dois pas être traité. Mais le gars de Dorset, dans mon comté, qui fait 45 milles de taxi pour se rendre à l'hôpital, je pense que c'est ce petit bout qui manque aux fonctionnaires. Vous parlez, c'est peut-être le bout que j'aime dans votre programme, j'espère qu'il sera respecté, de décentraliser mais il faut vraiment décentraliser cette fois, et donner de l'autorité aux gens en place, comme vous l'avez dit dans votre programme. Peut-être pas faire ce qui a été fait dans la question des Jeux olympiques, décentraliser pour mieux centraliser, mais donner vraiment du pouvoir aux gens des régions, les écouter davantage, passer à l'action.

Ces gens ont de quoi à dire et ont des changements à apporter. Je voulais qu'on soit à l'écoute de la population rurale. Rappelez-vous une chose, la population rurale est peut-être moins importante que les centres urbains, mais elle a des besoins très différents. Il faudrait faire des distinctions entre ces deux clientèles. On a bien tendance, c'est le propre des fonctionnaires, à égaliser les problèmes... ça se règle mieux, pour des fonctionnaires, quand on a seulement une formule à remplir, tout le monde pareil, qu'on habite Montréal ou qu'on habite Lac-Mégantic. Je voudrais bien que ce soit acquis au départ et mes questions iront toujours dans ce sens: ce qui fait dans un centre comme Montréal, ça ne doit pas être vrai à Shawinigan et à Lac-Mégantic et à Aima, au Lac-Saint-Jean.

Dans le domaine des affaires sociales, c'est effrayant comme c'est important. Vous savez, quand on parle d'un centre de jour qu'on veut implanter, si on fait un centre de jour au foyer Glenton, chez nous, il n'opérera certainement pas de la même façon que celui qu'on opère à Montréal ou à Sherbrooke. Sur l'implantation, évidemment, je sais que là-dessus, on a certaines restrictions à proposer et j'ai hâte déjà de voir où on s'en va avec ça. La même chose du côté des CLSC.

M. le Président, je pense bien que le ministre va collaborer avec ses collègues; des gens qui représentent l'Opposition, mais il ne faut pas oublier que, même si on n'est pas nombreux de ce côté, on a représenté quand même 60% de la population, à la dernière élection. Il faudrait peut-être tenir compte un peu plus de l'Opposition. Je ne vous dis pas ça pour passer des remarques désobligeantes, mais pour vous aider. C'est tellement facile de se faire battre en politique avec des décisions du genre qu'on va discuter pendant une semaine; on en sait quelque chose. Je veux vous aider pour que vous reveniez au moins comme un tiers parti à la prochaine élection.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je veux remercier le député de Mégantic de son offre d'aide, de son offre de service. Je ne veux pas relever tous les points avancés du député de Mégantic, mais les principaux, en commençant par un des derniers, la diminution de lits, la fermeture de centres, en province.

Comme le député de Mégantic l'a senti, je pense que la position de son parti ou ce qu'il préconise ce matin, se rapproche beaucoup de notre position. J'ai fait allusion, tantôt, à ce phénomène où le gouvernement antérieur, à tort ou à raison — je ne veux pas discuter du bien-fondé — avait décrété la fermeture de plusieurs lits, autant dans le milieu urbain que dans le milieu rural.

J'ai donné l'exemple de l'hôpital Cloutier du Cap-de-la-Madeleine, tantôt. Je pourrais citer d'autres exemples. C'était vrai aussi dans le secteur des centres d'accueil; le centre d'accueil Sainte-Anne-des-Monts, par exemple, qui, à la suite de recommandations du conseil régional, d'accord, recommandations qui étaient entérinées ou sur le point d'être entérinées par le ministère...

Il y a eu littéralement des douzaines de situations comme cela. Ces situations provoquent beaucoup de mécontentement, si on révise la décision. Je reviens à vos premières remarques. Vous avez fait allusion à la religion, vous avez fait allusion, probablement, aux problèmes qui découlent de l'absence de comités d'avortement thérapeutique dans les hôpitaux, si j'ai bien compris l'allusion que vous avez faite. Je voudrais qu'on comprenne bien qu'il ne s'agit pas d'être pour ou contre l'avortement. Il s'agit de demander aux hôpitaux — c'est tout ce que j'ai fait jusqu'à maintenant — demander aux hôpitaux francophones de bien vouloir mettre à la disposition des femmes enceintes qui ont besoin d'un avortement thérapeutique prévu par la loi, des services qui sont quasi absents des hôpitaux francophones. Cela me paraît anormal que 96%—je le répète encore une fois — des avortements thérapeutiques, donc des avortements légaux, qui sont nécessaires pour la santé de la mère, aient été faits dans des hôpitaux anglophones. Cela me paraît anormal.

J'espère qu'on ne fera pas jouer l'élément religion dans cela, pour provoquer inutilement la passion des gens, les émotions des gens. Vous parlez de projets de loi qui vont trop vite. En tout cas, ce n'est sûrement pas le cas dans le secteur des Affaires sociales. Deux projets de loi importants sont prévus, vous le savez; un projet de loi sur les personnes handicapées et un projet de loi sur la protection de la jeunesse. Ce ne sont pas des projets de loi révolutionnaires. Le gouvernement antérieur, et je dirais même, le dernier gouvernement de l'Union Nationale, de 1966 à 1970, donc les trois ou quatre gouvernements antérieurs ont essayé de modifier la législation qui concerne la protection de la jeunesse, et n'ont pas réussi à le faire. Une des principales causes de cet échec a été un conflit de juridiction, une espèce de lutte entre deux ministères, le ministère de la Justice et le ministère des Affaires sociales.

Nous avons trouvé une solution à cette impasse et le projet sera déposé avant l'ajournement d'été de la session.

L'autre projet sur les personnes handicapées avait aussi été introduit par mon prédécesseur et je ne vois pas en quoi ces deux projets, qui sont à peu près les deux seuls projets de loi que le ministère présente durant cette session, sont un tant soit peu révolutionnaires. Au contraire, je pense qu'ils vont corriger des situations qui demandent à être corrigées depuis longtemps par des gens défavorisés dans notre société, les handicapés et les enfants délinquants.

Le montant de $5 millions pour les garderies, il faudrait d'abord voir dans quel contexte cela se situait. Nous avons, au ministère, tenté d'obtenir, comme c'est de bonne guerre, le plus d'argent possible pour les nouveaux crédits. Le chiffre qui avait été avancé représentait un objectif. Nous avons obtenu $2 millions.

Une dernière remarque: les hôpitaux, ce n'est pas une augmentation de 4% qu'ils ont, puisque les hôpitaux ont reçu leur budget depuis quelques semaines et les 4% qui avaient été annoncés comme un minimum d'augmentation, effectivement l'augmentation du budget des hôpitaux se situe entre 5,25% et 7,25% par rapport à l'an dernier alors que l'augmentation n'était que de 0,7% par rapport à l'année précédente.

Il faut faire attention. Quand on parle de restrictions budgétaires dans le secteur hospitalier, ces restrictions, ces contraintes, elles sont relativement moins fortes que celles de l'année dernière. Je vais m'en tenir à ces remarques, M. le Président, pour le moment.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richelieu.

Discussion générale

M. Martel: Merci, M. le Président. J'écoutais tout à l'heure le député de Saint-Laurent et celui de Mégantic-Compton parler d'incohérence dans le système des affaires sociales. J'ai nettement l'impression que cette incohérence du système des affaires sociales ne relève pas tellement des déclarations du ministre actuel qui a fait des déclarations fort à point, mais si je me reporte aux lamentations respectives du Parti libéral et du

parti de l'Union Nationale, que cette incohérence, dis-je, dans le système des affaires sociales est plutôt l'effet que la société québécoise ne peut déterminer elle-même ses priorités dans ce secteur vital. Les structures fédérales actuelles nous privent à la fois des pouvoirs fiscaux et également des pouvoirs législatifs nécessaires, non seulement pour établir notre propre politique sociale, mais surtout pour faire des choix sociaux et donner à notre société une véritable personnalité québécoise. Cette situation n'est pas d'aujourd'hui, elle remonte à près d'un demi-siècle.

Je pense qu'on se souvient tous des prises de position de Maurice Duplessis, par exemple, lorsqu'il a obtenu un demi-succès vis-à-vis du fédéral. Je pense que c'est important de le souligner, parce que ce ne sont pas des déclarations qui vont être l'incohérence du système, mais ce sont bien les prises de position, le refus d'Ottawa qui, malgré la constitution qui doit reconnaître la santé et les affaires sociales comme de juridiction provinciale, s'est toujours abstenu de donner ce champ véritablement aux provinces. Le demi-succès de M. Duplessis a abouti à l'imposition des impôts au Québec.

Sous le régime de M. Lesage, vous avez vu ce qu'il y a eu. Evidemment, on a été obligé d'établir un Régime de rentes, parallèlement au système de pensions de vieillesse...

M. Saindon: ... personnalité québécoise...

M. Martel: ... encore un dédoublement du système.

Sous Daniel Johnson, lorsqu'on a demandé — mon collègue de Mégantic-Compton était là— les 100% des points d'impôt, de façon à se donner une véritable politique sociale, est-ce que nous les avons eus?

Sous Jean-Jacques Bertrand, en 1968, qu'est-ce qui est arrivé, lorsque le ministre du temps, Jean-Paul Cloutier, est allé à Ottawa pour récupérer des points d'impôt et que, pendant des années, nous avons été bloqués de nos $200 millions qui revenaient aux citoyens du Québec?

Même sous M. Bourassa, par exemple, à la fameuse conférence fédérale-provinciale, je pense que c'est de mémoire récente, lorsqu'il était prêt à céder le rapatriement de la constitution pour autant que nous ayons nos propres politiques sociales, quelle rebuffade a-t-il essuyée de M. Trudeau? Il est revenu bredouille au Québec.

M. Castonguay qui avait, au préalable, préparé pour l'Union Nationale, le rapport Castonguay-Nepveu qui voulait que le Québec soit vraiment le maître d'oeuvre dans le domaine des affaires sociales, qu'est-ce qu'il a obtenu d'Ottawa? Le Québec a obtenu que M. Castonguay, qui est un homme brillant, cède le pas. Je ne pense pas que le député de Saint-Laurent ait obtenu plus de succès que son prédécesseur vis-à-vis d'Ottawa, vis-à-vis de cette récupération de points d'impôt pour s'assurer des pouvoirs législatifs et des pouvoirs fiscaux.

Tout dernièrement, lors de la conférence des ministres de Finances, en décembre 1976, nous avons vu le Québec, encore une fois, perdre $150 millions par suite du partage de points d'impôts aussi, $150 millions dont nous avions besoin pour nous donner nos politiques. C'est tellement vrai, ce pouvoir que les provinces doivent avoir et qu'Ottawa s'entête à ne pas leur donner à ne pas décentraliser dans le domaine des affaires sociales, qu'en 1949, ils ont dû faire amender la constitution par le Parlement de Londres — ce qui, à mon sens, est scandaleux — de façon à pouvoir imposer au Québec les pensions de vieillesse.

Evidemment, je pense qu'il est temps qu'on mette fin à ce conflit de juridiction, à ce dédoublement des montants qui prive les Québécois d'avoir des politiques cohérentes dans le domaine du revenu, à la suite de ce double emploi de services qui coûte énormément cher. On prive également les Québécois d'avoir des allocations familiales qui seraient beaucoup plus substantielles s'il n'y avait pas ce double emploi de services qui coûte des millions de dollars aux Québécois. Pourquoi deux systèmes d'allocations familiales?

Dans le domaine de la santé, c'est exactement la même chose. On pourrait étendre notre champ d'assurance-maladie si nous avions véritablement un pouvoir de décision au Québec. Nous pourrions étendre ces soins de services dentaires jusqu'à 18 ans, tel que convenu dans notre programme; cette année, cela va se rendre jusqu'à onze ans. C'est une nécessité pour le Québec. Nous pourrions avoir notre système d'assurance-médicaments universel, si nous avions ce transfert des montants qu'Ottawa garde, qu'Ottawa nous impose.

Je l'ai vécu sous le régime de Daniel Johnson, ce refus d'Ottawa qui a fait perdre des centaines de millions aux Québécois, parce qu'Ottawa était prêt à distribuer des montants, mais à la condition, évidemment, que les provinces se soumettent à une politique d'ensemble pour le Canada. A ce moment, on sait que, dans certains domaines, le Québec était plus avancé que d'autres provinces et que cela aurait été un gaspillage d'argent. J'ai vu des voyages — et le député de Mégantic en a été témoin — du ministre des Affaires sociales du temps, qui, comme celui d'aujourd'hui et le député de Saint-Laurent qui occupait ce poste, ont toujours reçu des rebuffades d'Ottawa dans ce domaine. Si on regarde, par exemple, les déclarations farfelues du ministre actuel de la Santé, M. Lalonde, concernant, tout dernièrement, sa prise de position en ce qui a trait à la saccharine, qui a dit que c'était dommageable pour les rats, ce même M. Lalonde, depuis 1972, promet à tous les Canadiens d'avoir une politique cohérente dans le domaine des médicaments. Si l'industrie pharmaceutique exploite la population du Canada, c'est à cause, je pense, d'une complicité tacite du gouvernement fédéral. Depuis 1972 que le ministre de la Santé fédéral promet d'avoir une véritable politique dans ce domaine et là, il nous arrive en nous disant que la saccharine causait le cancer chez les rats. A ce moment, il sait fort bien qu'il y a des centaines de médicaments brevetés qui sont sur le marché canadien, avec la bénédiction du département des aliments et drogues, et dont au moins

une douzaine, en 1972, ont été jugés inefficaces en faisant l'objet de publicité frauduleuse. Est-ce de la bonne administration de la part du gouvernement fédéral dans le domaine de la santé?

Lorsque le ministre de la Santé déclare, par exemple, à l'occasion du débat sur le crime organisé, lorsqu'il était question de la viande avariée: Ce n'est pas grave pour les Canadiens, la viande avariée; pour autant que c'est bien cuit, il n'y a pas de problème, il n'y a pas de danger d'attraper de maladie, est-ce que ce sont des déclarations responsables d'un ministre de la Santé? A ce moment, cela empêche justement le ministre des Affaires sociales du Québec d'avoir des politiques cohérentes; cela empêche le ministre des Affaires sociales, cette mauvaise volonté d'Ottawa de remettre aux provinces ces pouvoirs fiscaux, ces pouvoirs législatifs, d'étendre notre champ d'action dans le domaine de l'assurance-maladie, d'avoir une plus grande couverture de tous ces services. Je ne m'étendrai pas longtemps. Je sais que nous avons énormément de points de crédits à discuter.

Motion irrecevable

M. Martel: Si la commission parlementaire était d'accord, malgré la directive du président de l'Assemblée nationale, je formulerais une motion; si j'avais l'unanimité des membres de la commission parlementaire, j'aimerais formuler la motion suivante: Que la commission, par exemple, des affaires sociales, réaffirme, pour le Québec, qu'elle est le maître d'oeuvre de ses politiques sociales sur son territoire et que le transfert des ressources budgétaires revienne au Québec, de façon que nous ayons véritablement des politiques sociales qui collent à la réalité du Québec. Si l'unanimité de la commission parlementaire se fait, je formule cette motion et je demanderais même qu'on vote là-dessus.

M. le Président, est-ce que vous acceptez ma motion avec le consentement unanime de la commission?

M. Forget: M. le Président, sur la recevabilité de la motion, je crois qu'il y a eu un incident du même genre dans une autre commission parlementaire où, à la faveur d'une confusion probablement explicable, au début du fonctionnement des commissions parlementaires et à cause d'une inexpérience relative, ceci dit en tout respect, des présidents des commissions parlementaires, une motion à peu près du même genre a été jugée re-cevable. On sait cependant combien cette question a été débattue entre les leaders des différentes formations politiques représentées à l'Assemblée nationale, et on sait également... Je crois, M. le Président, que vous êtes sensibilisé maintenant, à ce problème: de telles motions ne sont pas acceptables dans les commissions parlementaires, puisqu'elles sont une prétention injustifiée de la part d'une fraction de l'Assemblée nationale à s'exprimer au nom de l'ensemble de l'Assemblée nationale. De telles motions ne peuvent être débattues, ne peuvent être reçues qu'en Assemblée nationale plénière, non pas en commission parlementaire, dont ce n'est pas le mandat. Il n'y a pas de doute dans mon esprit. Je pense qu'il n'y en a pas non plus dans l'esprit du président lui-même, enfin, je me permets de le présumer, à ce moment-ci — vous n'avez pas encore indiqué votre décision — . Il ne devrait pas faire de doute dans l'esprit de quiconque qu'une telle motion n'est pas recevable dans le cadre des travaux d'une commission parlementaire permanente qui a pour mandat l'étude des crédits, non pas la délibération sur les relations fédérales-provinciales, non pas la délibération sur les politiques législatives ou constitutionnelles du gouvernement.

M. Martel: On pourrait cependant avoir une suspension du règlement avec le consentement unanime de la commission parlementaire.

M. Forget: II ne nous appartient pas de suspendre le règlement là-dessus, et je vous dis immédiatement, M. le Président, que vous n'aurez pas notre consentement pour nous prêter à une manoeuvre de ce genre qui n'a d'autre motivation que le désir qu'ont certains membres de cette commission, de s'attirer, personnellement, ou sur le parti ministériel, une publicité en présentant une argumentation qui n'a absolument aucune justification. Je ne souscrirai pas à ça. Nous devons adopter la même attitude ici que nous avons adoptée dans une autre commission parlementaire et nous nous abstiendrons de participer aux travaux de la commission si on nous impose ces cirques chaque fois.

M. Martel: M. le Président, ce n'est pas ici...

Le Président (M. Laplante): Un moment, s'il vous plaît, je pense que je passe pour un président assez efficace au point de vue de l'avancement des travaux. A ce moment-ci, je peux rendre ma décision déjà sur la motion...

M. Martel: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): ...telle que présentée par le député de Richelieu.

M. Martel: ...on a porté une accusation...

Le Président (M. Laplante): Vous y reviendrez...

M. Martel: ...à savoir que je cherche à me faire du capital politique, et je tiens justement à soulever un point d'ordre pour répondre à cette accusation.

Le Président (M. Laplante): Si vous voulez soulever un point de règlement...

M. Martel: Très brièvement.

Le Président (M. Laplante): ...je suis d'accord pour l'accepter.

M. Martel: Très brièvement.

Le Président (M. Laplante): Je ne veux pas que ce soit un forum actuellement en dehors du...

M. Martel: Non, ce ne sera pas un forum. C'est simplement pour dire au député de Saint-Laurent...

Le Président (M. Laplante): Sur quel règlement voulez-vous soulever...

M. Martel: C'est simplement pour dire au député de Saint-Laurent que je ne cherche pas de publicité personnelle, mais je cherche justement à faire un consensus pour que le Québec se donne une véritable politique sociale, et je veux mettre en évidence le fait que le député libéral de Saint-Laurent et le député de l'Union Nationale de Mégantic-Compton, prédécesseurs dans ce domaine, ne veulent pas être en contradiction avec ce qu'ils ont recommandé depuis toujours vis-à-vis du fédéral.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richelieu, il y a une question de règlement qui est soulevée actuellement par le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président, je vous ferai remarquer que le député de Richelieu enfreint complètement le règlement. Il discute du fond de la question. Il ne discute pas du règlement de la question, pas du tout.

M. Martel: J'ai soulevé un point d'ordre concernant une accusation à savoir que je cherchais de la publicité personnelle...

M. Saint-Germain: Bien oui, mais écoutez! C'est de bonne guerre. Ce n'est pas ça qui est une question de règlement.

M. Martel: ...alors que ce n'est pas le cas. M. Saint-Germain: II y a un point d'ordre.

Le Président (M. Laplante): J'en reviens à la décision sur la motion.

M. Martel: M. le Président, vous ferez cette motion à l'Assemblée nationale et je demanderai quelle soit votée par l'Assemblée nationale de façon que nous récupérions nos points d'impôt dans ce domaine.

Le Président (M. Laplante): C'est votre droit...

M. Grenier: Avant de donner votre opinion là-dessus, j'aimerais bien faire connaître l'opinion de notre parti. S'il est arrivé qu'à la Commission des affaires culturelles — j'y ai été membre avec droit de vote — on ait accepté une motion dans ce sens, c'était pour faire connaître l'esprit de notre parti. A ce moment, on a dit qu'on avait peut-être été le premier parti québécois. L'Union Nationale ne jouera pas le jeu des huit colonnes dans les journaux chaque fois qu'on veut ouvrir les débats à une commission parlementaire, comme tente de le faire ce matin, le député de Richelieu, pour tâcher simplement de démontrer que l'esprit nationaliste n'est vrai que pour le Parti québécois. C'est aussi vrai pour le Parti libéral que pour nous...

M. Martel: Vous manquez de suite dans les idées.

M. Grenier: ... c'est aussi vrai pour nous. On ne manque pas de suite dans les idées en disant que cela a été accepté une fois. Cela va faire, à partir de maintenant...

M. Martel: Si vous aviez eu de la suite dans les idées, vous en seriez rendu au Parti québécois.

M. Grenier: ... on est autour de cette table... M. le Président, je m'excuse, je vous ai écouté tout à l'heure, si vous voulez vous allez m'écouter une seconde. Vous avez dit des choses que je n'ai peut-être pas acceptées mais je vous ai écouté.

Vous allez comprendre qu'on ne perdra pas une journée à étudier, à faire connaître par les media d'information que le grand esprit nationaliste n'existe que chez le Parti québécois et n'existe pas chez le Parti libéral et chez l'Union Nationale parce qu'on va s'opposer à cela. Cela a été fait une fois aux Affaires culturelles. C'était un bon endroit pour le faire. Le Parti libéral a jugé qu'il devait s'opposer, à cause d'un aspect bien technique, à savoir que ce n'était pas l'endroit pour une motion. Ce matin, on s'opposera à cela, et on ne perdra pas une journée à discuter sur cette motion. Elle est, à mon sens, irrecevable; et, à partir de là, on va finir par comprendre que l'un ou l'autre des partis qui a administré le gouvernement et qui l'administre actuellement, peut être aussi nationaliste sur une question comme celle-là que le Parti québécois peut l'être. Qu'on arrête de faire croire à la province de Québec, avec des discours à l'indépendance, à chaque fois qu'il arrive des crédits... un petit discours avec un air d'indépendance, il y a toujours un député qui est chargé de le faire. C'est rarement le ministre, généralement un député. Cela commence à se sentir et on le voit à chacune des commissions. Tachez donc d'être sérieux et de passer à l'étude des crédits et nous permettre d'étudier les articles un par un. On s'opposera à cela M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Je suis prêt à rendre mon jugement sur la recevabilité de la motion. Je rejette la motion, non pas pour les raisons invoquées par les députés de Saint-Laurent et de Mégantic-Compton, mais parce que le député de Richelieu a invoqué une motion inconditionnelle... d'unanimité des membres. Il n'y a pas unanimité des membres sur l'acceptation de la motion. Je la déclare irrecevable.

On va continuer. Le député d'Argenteuil.

Discussion générale (suite)

M. Saindon: Suite aux propos tenus par le député de Richelieu. Premièrement, le député de Ri-

chelieu a abordé la question des médicaments. C'est une question qu'il ne connaît pas. Il cite, par exemple, le jugement ou les prises de position de certaines personnes. S'il veut se porter garant du jugement d'une tierce personne ou d'une autre personne, c'est bien son affaire, mais qu'il ne vienne pas en commission parlementaire nous porter des jugements globaux comme il le fait.

M. Martel: Je viens porter une accusation précise d'incompétence du fédéral dans le domaine des médicaments, en citant des exemples que je vous ai donnés. Je vous en donnerai d'autres, si vous le désirez.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richelieu, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Forget: Vous n'avez pas la parole.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richelieu, je vous demanderais de laisser parler les autres. Je peux placer votre nom sur la liste d'attente, si vous voulez répondre à toutes ces choses.

M. Saindon: M. le Président, quand la question d'unanimité a été soulevée, j'ai immédiatement dit que je m'opposerais. La raison pour laquelle je me serais opposé, et je m'opposerai encore, je voterai contre, c'est parce que, jusqu'à maintenant, la province de Québec fait encore partie du Canada.

Il est sûr que la responsabilité en matière de santé, notamment, des médicaments, des drogues comme on dit souvent, n'appartient pas uniquement à une province en particulier. Il reste quand même l'aspect santé qui touche tout le pays dans son ensemble. A ce moment, il est impensable qu'une province puisse prendre une position ou prendre une mesure quelconque qui pourrait être à l'avantage de sa population, mais qui, par contre, dans certains cas pourrait être contre les intérêts des autres.

Je ne crois pas que la responsabilité entière et totale en matière de santé relève uniquement des provinces.

M. Martel: Permettez que je réponde à cela, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Je voudrais que vous répondiez au président, non pas donner une réponse d'homme à homme et passer au-dessus de l'étude des crédits.

M. Martel: M. le Président, si on regardait la constitution de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, on verrait que les provinces sont souveraines dans le domaine de la santé. Je pense que le député, même si cela fait au-delà de dix ans qu'il siège ici, n'a pas consulté l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Dans le domaine des médicaments, je pourrais lui dire...

M. Saindon: Je parle avec mon bon sens.

M. Martel: ... que, depuis quatorze ans que je pratique la pharmacie, je connais les médicaments, comme tous les pharmaciens, mieux que les médecins peuvent les connaître. Je lui dirais qu'en plus, depuis 1908, nous vivons avec une loi des médicaments brevetés qui est vraiment archaïque. Ce n'est pas normal qu'il y ait une loi de 1908 qui régisse les médicaments brevetés au Québec. Ce n'est pas normal, après avoir eu une dénonciation de l'Ordre des pharmaciens concernant douze médicaments qui ont été étudiés scientifiquement et dont on a prouvé qu'ils n'avaient aucune valeur scientifique, qu'Ottawa donne encore des permis pour que ce soit mis sur le marché. Je me dis que le gouvernement fédéral...

M. Saindon: Ils ne sont pas nécessairement mauvais.

M. Martel: Ils ne sont pas nécessairement mauvais, mais je me dis que c'est une exploitation du public de mettre sur le marché un médicament qui n'a aucune valeur thérapeutique, aucune valeur pharmacologique. A ce moment-là, est-ce que ce n'est pas avec la complicité du gouvernement fédéral et des trusts, des compagnies pharmaceutiques, qui ont un "lobbying" très puissant à Ottawa. Je ne sais pas si on en a déjà eu ici à Québec, mais, d'après l'attitude du député, je me demande si les compagnies pharmaceutiques n'ont pas fait du "lobbying" aussi vis-à-vis de certains membres de l'Assemblée nationale.

M. Saindon: Je ne suis pas pharmacien.

M. Martel: C'est une situation vraiment indéfendable qu'il n'y ait pas eu d'action dans ce domaine et que l'on présente une loi qui s'appelle: Médicaments-grand public. A ce moment-là, les gens vont pouvoir se procurer des médicaments n'importe où et sans aucun contrôle. Or, on se plaint de la surconsommation de médicaments, on se plaint du prix exorbitant des médicaments et l'on sait que si le gouvernement abolissait la publicité sur les médicaments, il y aurait une diminution d'au moins 35%. Le député, qui est également médecin, sait que la publicité dite scientifique, qui coûte entre $5000 et $6000 par médecin, est une publicité qui n'est pas du tout scientifique, mais une publicité basée uniquement sur le marketing.

M. Saindon: La publicité ne fait pas mal, mais donner des médicaments gratuitement, cela peut faire mal.

Le Président (M. Laplante): Le député de Jacques-Cartier.

M. Martel: Je pense que c'est cela, les $6000 que l'on prend...

M. Saint-Germain: M. le Président, je veux simplement vous rappeler que cette question est absolument irrégulière. Nous avons un budget ici. Nous avons reçu des ordres de l'Assemblée natio-

nale d'étudier un budget qui représente pratiquement $4 milliards de dépenses. Il y a là matière à discussion pour des heures et des heures. Si vous laissez la discussion bifurquer sur le gouvernement fédéral, on n'en finira plus, et on va manquer envers l'Assemblée nationale aux obligations qu'elle a bien voulu nous transmettre.

M. Martel: C'est très difficilement défendable.

Le Président (M. Laplante): Je vous ferai remarquer, M. le député de Jacques-Cartier, que, dans un temps préliminaire, chaque membre de cette commission peut parler durant 20 minutes sur le sujet, pour autant qu'il ne déborde pas les Affaires sociales. Je crois que cela n'a pas encore débordé les Affaires sociales. Cela fait partie des programmes des Affaires sociales. Est-ce qu'il y aurait d'autres...

M. Grenier: J'aurais juste un point à relever. Le député de Richelieu me faisait sourire un peut tout à l'heure, quand il parlait des négociations avec le fédéral, affirmant que c'est toujours scandaleux. Tout à l'heure, j'ai posé une question au ministre, je lui ai dit qu'il avait demandé $5 millions à son gouvernement et qu'il n'en avait obtenu que $2 millions, il a raté son coup pour 60% de son objectif. Il serait peut-être bon de réaliser cela, et son gouvernement ne doit pas être un adversaire libéral d'Ottawa, je ne pense pas.

M. Martel: Mais pour quelle raison, M. le Président...

M. Grenier: M. le député de Richelieu, les objectifs et la réalité, c'est très différent, et vous allez apprendre cela à force de siéger en Chambre. Votre premier mandat ne vous a peut-être pas donné cela, parce qu'on ne vous voyait pas souvent en Chambre dans le temps, vous étiez préoccupé par autre chose. Mais vous allez apprendre cela pendant votre mandat. Vous êtes près du ministre des Affaires sociales là...

M. Martel: M. le Président, je dirai au député de Mégantic que j'ai été présent en Chambre pendant mon premier mandat aussi souvent que lui...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Laurent.

M. Martel: On a soulevé un point...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je crois que nous perdons rapidement le climat de sérénité que le ministre et moi-même aurions souhaité voir régner pendant l'étude des crédits du ministère. Je n'en ai pas pour longtemps, M. le Président, mais il y a aussi un autre facteur qui peut troubler la sérénité de nos travaux et celui-là, j'ai le regret de le dire, vient des affirmations mêmes du ministre, lorsqu'il a brièvement répondu à mes interventions de même qu'à celles du député de Mégantic-Compton.

J'ai compté pas moins de trois affirmations qu'il a faites et qui représentent, de la part du ministre, une carence, un manque déplorable d'information ou alors, je regrette de le dire, si ce n'est pas un manque d'information, ce sont des affirmations qui sont carrément fausses.

Je crois que j'aurai l'occasion d'y revenir, bien sûr, lors de l'étude de crédits particuliers, mais j'inviterais le ministre à s'assurer que les arguments qu'il utilise et que les réponses qu'il formule à nos questions sont, dans toute la mesure du possible, des affirmations qui sont fondées. Il y a trois affirmations qu'il a faites qui sont fausses et de nature à induire les membres de la commission en erreur et je crois que nous aurons beaucoup de mal à conserver notre sérénité s'il ne prend pas des soins plus grands pour s'assurer, encore une fois, que les choses détaillées qu'il allègue sont effectivement telles qu'il les a perçues, peut-être rapidement et peut-être avec confusion, je ne sais pas, mais, encore une fois, je suis inquiet de voir qu'on a à peine commencé l'étude des crédits qu'on se trouve dans une situation comme celle-là.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Sherbrooke.

M. Lazure: M. le Président, point de privilège.

Le Président (M. Laplante): II n'y a pas de privilège, mais vous avez droit à une réponse.

M. Lazure: Intervention de privilège, parce que M. le député de Saint-Laurent a dit à deux ou trois reprises que j'ai avancé trois faussetés, mais j'aimerais bien qu'elles soient un peu plus détaillées et un peu plus fondées, ces affirmations. Parce que, moi aussi, je pense que, sous un ton qui est calme, M. le député de Saint-Laurent en arrive facilement à devenir moralisateur et j'aimerais bien qu'il soit plus spécifique dans ses affirmations.

M. Forget: Ce n'est pas par esprit de moraliser, M. le Président, mais, quand je reconnais une affirmation comme étant sans fondement, je ne peux pas faire autrement que de la soulever. Encore une fois, je n'ai pas accusé nécessairement le ministre d'avoir dit des faussetés. C'est peut-être par inadvertance ou par défaut d'information de sa part et je vais spécifier ce que j'affirme de ce côté. Il a indiqué qu'il y avait eu, dans un cas particulier, une décision, il faisait part de toute une liste de décisions antérieures qui avaient été prises et non prises. Il y a là-dedans passablement d'interprétations, mais je ne soulèverai pas ça. Nous aurons l'occasion, lors de l'étude du programme no 11, d'aller en détail dans chacune des affirmations, de parler de l'hôpital Rosemont, de Sainte-Jeanne-d'Arc; je crois qu'il y aura des occasions pour le faire. La réalité n'est pas aussi simple que le ministre l'a fait apparaître.

Cependant, dans le cas de l'hôpital Cloutier

en particulier — c'est la première affirmation qui m'apparaît fausse — il a dit que le gouvernement antérieur avait décrété l'abandon par cet hôpital de sa vocation d'hôpital général. C'est une affirmation qu'il a faite et qui est fausse, il n'y a pas eu d'indication à cet effet. Il y avait eu, sans aucun doute, une invitation faite à abandonner les services d'obstétrique, de manière à favoriser le regroupement à l'hôpital Sainte-Marie. Mais jamais a-t-il été question de faire abandonner à l'hôpitalCloutier sa vocation d'hôpital général; au contraire, des travaux avaient été envisagés et acceptés en principe, de manière à permettre, la canalisation d'oxygène de l'hôpital, de manière à permettre le réaménagement ou l'amélioration de la suite chirurgicale, la suite opératoire et d'autres travaux qui supposeraient, au contraire, que, pour un avenir indéfini, l'hôpital conserverait sa vocation.

Cette affirmation du ministre, elle est fausse.

Relativement à la protection de la jeunesse, à la loi qu'il dit devoir déposer bientôt, il a invoqué que la difficulté ou même l'échec — ce sont ses mots — des précédents gouvernements à introduire une législation relativement à la protection de la jeunesse était causé par un conflit non résolu de juridiction entre la Justice et les Affaires sociales. Il a dit qu'il était celui qui a découvert la façon de résoudre ce problème. C'est une affirmation qui n'est pas fondée puisque la solution se trouvait dans le projet révisé, l'avant-projet revisé qu'il a trouvé au ministère à son arrivée et la solution existait, elle avait été discutée avec toutes les autorités administratives et judiciaires et, substantiellement, la solution existait à ce moment-là. Je pourrais d'ailleurs faire état de documents spécifiques qui établissent que le problème de juridiction a été résolu dès l'automne dernier.

Enfin, il a fait l'affirmation que le taux de 4% qui est maintenant porté de 5 1/4% à 7 1/4% d'augmentation des budgets était plus généreux que le 0,7% consenti sur les budgets l'an dernier.

C'est une affirmation qui est certainement susceptible d'engendrer une fausse appréciation de la réalité, parce que, ce que le ministre n'a pas dit, c'est que ces pourcentages ne s'appliquaient pas à la même chose; donc, les comparer ne rime à rien. Le 0,7% s'appliquait à toutes les dépenses non salariales, alors que le 5 1/4% à 7 1/4% de cette année s'applique, si je comprends bien, à l'ensemble du budget, dans lequel il faut compter les augmentations de salaires consenties dans les conventions collectives qui, à elles seules, dépassent ces pourcentages.

Ce sont des points sur lesquels nous reviendrons. Mais ce qui apparaît déjà très clair, c'est qu'il y a une diminution dans les budgets des hôpitaux cette année, contrairement à une très modeste augmentation, je l'admets, l'an dernier, de 0,7%.

Ce n'est pas du tout exact de dire qu'il faut comparer 0,7% à 5% ou 7%, que c'est dix fois plus généreux cette année. C'est moins généreux et la raison en est que les pourcentages s'appliquent à des bases extrêmement différentes. Donc, la signi- fication de tout cela est exactement à l'opposé de celle qu'en a tirée le ministre.

Encore une fois, j'hésitais à mentionner ces cas particuliers parce qu'on voit très bien que, dès qu'on aborde ces sujets, on aborde trois domaines de discussions dans lesquels on va certainement avoir plusieurs heures de discussion à passer et que c'est un petit peu difficile de les aborder immédiatement et d'en traiter de façon complète. Cependant, il y a eu là des affirmations que je me devais de soulever, parce qu'elles ne représentent pas la réalité.

M. Lazure: M. le Président, je réponds très brièvement, parce qu'on aura l'occasion d'y revenir dans la discussion des éléments un par un. En commençant par le dernier, l'augmentation de 5,25% à 7,25% touche la masse salariale, c'est-à-dire environ 75% du budget. Je ferai remarquer au député de Saint-Laurent que ceci ne paie pas les augmentations prévues par la convention. Ceci paie seulement le vieillissement normal des échelles.

Bien qu'il y ait quelques nuances à apporter — et là-dessus, je vous rejoins — on les apportera avec les chiffres, quand on arrivera à cet élément des crédits, il en reste quand même que l'augmentation est beaucoup plus substantielle que celle de l'an passé.

En ce qui concerne la Loi de la protection de la jeunesse, je n'ai pas singularisé l'action de mon prédécesseur dans cela. J'ai bien pris soin, justement, si on relit mes paroles, de situer cette impasse dans un contexte historique. Tout le monde sait que cela fait au moins une dizaine d'années que les gouvernements essaient de présenter une révision de la Loi de la protection de la jeunesse et j'aimerais bien que le député de Saint-Laurent m'explique pourquoi cela n'a pas été fait plus tôt.

Je n'ai pas dit non plus: Moi, j'ai trouvé la solution. Là aussi, je vous renverrai au texte. J'ai dit: Nous avons trouvé une solution. J'ai déjà eu l'occasion d'expliquer auparavant la principale voie qui nous a permis de trouver une solution. C'est la voie du comité de développement social où il s'est créé un esprit d'équipe entre les différents ministres qui ont une vocation sociale, en particulier le ministre de la Justice et le ministre des Affaires sociales.

Donc, ce n'était pas une accusation vis-à-vis du dernier ministre des Affaires sociales, mais il s'agissait de décrire une impasse qui était historique. Et la solution n'était pas là quand on est arrivé le 15 novembre, je peux vous l'assurer.

Pour la première question soulevée, celle de l'hôpital Cloutier, ce que j'ai dit d'elle, c'est que je l'ai citée comme l'un des exemples d'hôpitaux où la vocation était remise en question par le ministère. Je pourrai, s'il le faut, montrer au député de Saint-Laurent un télégramme que j'ai reçu il y a quelques semaines du conseil des médecins de cette institution, lesquels me disent textuellement: "Enfin, on a eu une réponse satisfaisante après des années d'incertitude".

Le Président (M. Laplante): Le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: M. le Président, simplement quelques considérations générales au début de la discussion des crédits du ministère des Affaires sociales. Je veux faire seulement quelques remarques générales.

Le budget du ministère des Affaires sociales est, avec celui du ministère de l'Education, le plus gros budget du gouvernement du Québec et engage plus de $3 milliards. C'est dire jusqu'à quel point c'est un ministère qui, dans le Québec d'aujourd'hui, correspond le plus, parmi les ministères, parmi les vocations que le Québec s'est données, aux attentes et aux besoins quotidiens de nos concitoyens. C'est dans le monde des affaires sociales qu'il y a le plus de malaises. C'est là où l'évolution a été la plus rapide, avec l'éducation. Il y avait un rattrapage énorme à faire au Québec, comparativement à d'autres provinces canadiennes et, en quelques années, en quelques décennies, nous avons tenté de doter les Québécois d'une politique complète et cohérente de programmes complets et cohérents en matière de politiques sociales.

Les malaises que nous constatons toujours dans l'organisation des choses, dans le secteur des affaires sociales et de la santé au Québec et à cet égard, je regrette que la motion du député de Richelieu ait été jugée inacceptable tout à l'heure... parce que ces malaises que nous constatons tiennent finalement à ce que nous soyons forcés d'agir dans ce secteur à la pièce et par morceaux consécutifs, par correction consécutive à des politiques incidentes dont nous n'avons finalement pas le contrôle.

C'est là l'héritage probablement le plus odieux et le plus quotidien pour nos concitoyens, de cet éparpillement machiavélique des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Dans chaque cas — ils sont nombreux — que ce soit les personnes âgées, les malades, les handicapés, les familles monoparentales, les assistés, cette population aspire à avoir un service, une réponse adéquate à ses multiples besoins. Dans ce secteur des affaires sociales et de la santé, à chacun de ces lieux, on assiste à un éparpillement, à un "raboutement" de politiques entre le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral qui en viennent à coûter plus cher qu'elles ne le devraient; tous les contribuables paient donc un double impôt, tant à Ottawa qu'à Québec pour un service qui, en fin de compte, s'avère constamment ou très souvent inadéquat.

Je crois qu'on assiste tous à cela. Il faudrait se mettre la tête dans le sable pour ne pas voir cette réalité quotidienne. Quand on fait du bureau, le lundi, dans nos comtés, qu'on soit de l'Opposition ou du parti ministériel, on est forcé de prendre conscience de cette misère dans le secteur des affaires sociales que les gens nous traduisent et qui tient à ces impossibilités que nous avons d'avoir autre chose que des politiques constamment raboutées les unes aux autres.

On en est toujours à se dire: C'est Québec qui s'occupe de l'assistance, c'est Ottawa qui s'occupe des pensions pour personnes âgées. Nous, on ne peut rien faire là-dessus. Allez donc voir votre député fédéral. Il se dégage de tout cela, finalement, une sorte de sentiment morbide dans la population, chez les citoyens, sur leur impuissance à conditionner les règles du jeu pour se donner les véritables instruments de promotion collective et de promotion sociale dont ils auraient besoin, un service universalisé de garderies, les soins à domicile pour personnes âgées, une extension des services comme l'exigerait le type de société civilisée où nous sommes parvenus. Il y a donc une impuissance morbide qui se dégage au sein de la population à constater qu'elle est constamment tourmentée, divisée, rapiécée, à cause de nos volontés politiques, par les deux pouvoirs souvent antagonistes du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial.

Je crois que cette constation est primaire et fondamentale, et préalable à la discussion des crédits que nous entamons du ministère des Affaires sociales du Québec. Finalement, lorsque nous discuterons tout à l'heure des politiques de sécurité du revenu, nous ne pourrons pas ne pas y revenir sur la carence de nos politiques en matière d'assistance aux citoyens à faible revenu, et sur le postulat que des correctifs à cette situation sont exigés par une récupération des pouvoirs fiscaux et des politiques sociales actuellement détenues par les deux paliers de gouvernement.

L'évolution des choses à cet égard, notamment en regard des programmes de sécurité du revenu, en arrive à produire un sabotage quotidien et permanent de nos propres politiques. Je voudrais seulement vous signaler notamment nos politiques d'assistance sociale, d'aide sociale. Les crédits que nous allons examiner tout à l'heure, au chapitre de l'assistance sociale, confirment des déboursés pour 1977/78 de l'ordre de $688 millions, selon les prévisions initiales. Or, on constate que, depuis les quelques dernières années, le régime d'aide sociale consacré initialement à une population vieillissante et malade en arrive à devenir la formule de subsistance pour les chômeurs, une catégorie de plus en plus grande de chômeurs, et même de jeunes chômeurs qui ne trouvent pas ailleurs, soit dans les régimes d'assurance-chômage ou dans les programmes de création d'emplois, leur propre subsistance. Il est en train de se produire une évolution dramatique héritée du transfert continu et régulier que le gouvernement fédéral exécute depuis quelques années de ses propres responsabilités en matière de lutte au chômage, et qui va se traduire dans l'exercice financier 1977/78 par l'ajout de quelques dizaines de milliers de nouveaux chômeurs québécois qui ne seront plus admissibles à l'assurance-chômage.

Je vous réfère aux multiples coupures de presse à ce sujet et à des discussions qui ont cours présentement à Ottawa sur le bill C-27 où, sans que le gouvernement, que nous représentons, ait été en mesure d'évaluer les correctifs à

ses propres programmes d'aide sociale, voilà que le fédéral agit de manière à saboter nos propres budgets en réalisant d'une manière à ce point odieuse — c'est le fruit de la politique que le fédéral est en train d'adopter par le bill C-27 — qui elle aura comme conséquence de priver quelques dizaines de millions de chômeurs québécois de l'assurance-chômage et d'augmenter encore considérablement le nombre d'assistés chômeurs que nous avons au Québec. Ces faits méritent d'être signalés pour que nous sachions voir que les correctifs et que les véritables politiques sociales que nous avons le devoir de développer au Québec, particulièrement en matière de sécurité de revenu, nous imposent d'agir pour la récupération, le plus tôt possible, collectivement, des ressources financières et de la cohérence et de l'unité de vision politique dont nous avons besoin pour vraiment répondre aux besoins de notre collectivité dans les années soixante-dix-sept, soixante-dix-huit et quatre-vingt. Je crois que le défi collectif que les Québécois vont avoir à assumer dans les prochaines années sera justement d'identifier comment, dans une société civilisée qui veut répondre aux besoins de sa collectivité, de ses membres, par des politiques tout aussi civilisées, il faut qu'il y ait, quelque part, un vrai gouvernement, un gouvernement responsable qui détienne tous les leviers, toutes les possibilités, tant fiscales que constitutionnelles, pour élaborer cette politique complète et cohérente. Je vous remercie.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que les membres de la commission sont prêts à commencer l'étude des programmes?

M. Forget: Oui, M. le Président.

M. Shaw: J'ai quelques mots à dire, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Premièrement, je voudrais parler en faveur de la position du gouvernement fédéral dans le domaine de la santé et du bien-être social des citoyens du Québec.

Premièrement, si on prend un peu le temps de se souvenir comme il le faut, c'est le gouvernement fédéral qui a introduit les programmes en vigueur maintenant dans la province. C'est le gouvernement fédéral qui a commencé le système d'hospitalisation que nous avons maintenant au Québec. Le gouvernement de la province de Québec, depuis 20 ans, n'a vraiment fait du travail que dans la voirie seulement, mais depuis ce temps, c'est le gouvernement fédéral qui a introduit les programmes, qui a commencé des services à d'autres niveaux pour les Québécois. C'est le gouvernement fédéral qui a commencé à accorder des allocations familiales. C'est le gouvernement fédéral qui a commencé le système de pensions qui a été fait au Québec dans un secteur séparé, vraiment mieux que celui du gouvernement fédéral, il n'y a pas de doute, mais ce sont les interventions du gouvernement fédéral qui ont commencé ces programmes. C'était la même chose pour les services médicaux, avec le "medicare" qui a été mis sur pied par le gouvernement fédéral. C'était la même chose pour l'assurance-chômage, puis nous devons accepter que dans le domaine de la santé et des affaires sociales, le contrôle de ces services soit au Québec, aux provinces. Mais ce sont seulement les crédits qui sont transférés du gouvernement fédéral qui ont commencé ces projets.

Si on parle de l'étude des médicaments qui a été faite par le gouvernement central, je suis totalement d'accord que des améliorations doivent être apportées. Mais on doit accepter en même temps que depuis quinze ans, avant la situation de la thalidomide, n'importe quel pays au monde a fait des études sérieuses des médicaments. C'est depuis ce temps que nous avons ouvert des bureaux à Ottawa, et le travail qui a été fait depuis ce temps est remarquable. Nous devons dire que si... Quant à moi, j'ai occupé un poste, dans ma profession, pour étudier les nouveaux médicaments, et mon expérience avec le gouvernement, le "Department of National Health and Welfare, Health Protection Branch" a été vraiment satisfaisante.

J'ai vécu l'expérience d'un nouveau produit qui a été présenté à ce service. La vérité est celle-ci, M. le Président: Ce sont les taxes de la ville de Montréal qui sont à la base de la taxe qui fournit l'argent pour les hôpitaux à Sherbrooke, pour les hôpitaux à Lac-Mégantic, peut-être même ici à la ville de Québec.

C'est la base de la taxe des gens qui travaillent qui fournit l'argent dans le secteur privé, qui fournit l'argent pour tous les programmes sociaux dans notre pays. C'est encore la vérité cette année, M. le Président, le gouvernement fédéral a fait des transferts dans beaucoup de domaines. Le surplus des transferts du fédéral sur la taxe provinciale des Québécois qui est payé par le fédéral, c'est une différence de $1,5 milliard. J'appuie mon collègue de Mégantic-Compton qui a dit que, nous, les administrateurs du peuple québécois, devons souvent chercher des sommes d'argent pour les programmes qu'on veut donner au peuple québécois. C'est toujours le problème des taxes que les niveaux de gouvernement ont la responsabilité d'accepter, au fédéral, au provincial ou au municipal.

Alors, M. le Président, je suis disposé à commencer à étudier les crédits de cette année. Je suis convaincu qu'il y a plusieurs endroits où nous pourrons faire des suggestions positives, mais je voudrais vous faire remarquer qu'on ne doit jamais mettre en cause le gouvernement fédéral pour la situation des Affaires sociales dans la province. Nous avons même besoin de le remercier des programmes qu'il a commencés.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous avez un programme préféré pour commencer? M. le ministre m'a demandé s'il y avait possibilité de commencer par le programme 2, mais je lui ai dit

que cela vous appartenait de commencer par le programme que vous voudriez.

M. Forget: Le programme 2 plutôt que le programme 1...

Le Président (M. Laplante): Quelle est la raison, M. le ministre?

M. Lazure: C'est tout simplement parce qu'au programme 1, "soutien du revenu familial", on préférerait avoir la présence du juge Gill Fortier qui est président de la régie et qui administre ce programme. Si tout le monde est d'accord, il pourrait être ici jeudi soir. J'en profite aussi pour dire que vendredi, le docteur Laberge, président de la Régie de l'assurance-maladie, pourrait être ici, si cela convient à tout le monde.

Si on passait au programme 2, aide sociale, on a tout notre monde ici pour l'attaquer.

Aide sociale

Le Président (M. Laplante): Le programme 2, "aide sociale"; ce programme vise à assurer à tout ménage un revenu fondé sur la différence entre ses ressources et ses besoins essentiels. Elément 1. M. le ministre, avez-vous des commentaires préliminaires?

M. Lazure: Juste quelques remarques. Il faut souligner que le montant du budget de 1976/77 qui était inscrit au livre des crédits ne tient pas compte de sommes supplémentaires de $13 600 000 obtenues par mandat spécial en février 1977.

Les prévisions budgétaires de 1976/77 incluent les prestations versées; cela, c'est $3,6 millions en vertu du régime de la sécurité du revenu des chasseurs et trappeurs cris.

En 1977/78, de telles prévisions sont inscrites au programme 15, élément 2.

L'augmentation de $38 280 000 de 1977/78 par rapport à 1976/77 est attribuable, entre autres, à l'indexation des prestations de 6% prévue pour janvier 1978 ainsi qu'à une somme de $500 000 prévue en vue d'une majoration éventuelle des tarifs ambulanciers. Nous anticipons qu'un budget supplémentaire qui pourrait atteindre $37 millions sera nécessaire en 1977/78 en raison d'un accroissement de la clientèle.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je voudrais être bien sûr d'avoir suivi le ministre dans son exposé. Lorsqu'on regarde les deux colonnes de 1976/77 et 1977/78, pour l'aide sociale, on a donc, dans la colonne de 1976/77, le chiffre de crédits plus mandat spécial du mois de février, un total de $610 650 000, c'est-à-dire $597 050 000, plus $13 600 000, ce qui fait $610 650 000. Ce serait le niveau des dépenses réelles pour l'exercice qui s'est terminé le 31 mars. En regard de cela, on a des crédits prévus actuellement de $633 millions et un budget supplémentaire qui apparaît désormais dès maintenant nécessaire au montant de $38 millions, ce qui porterait le chiffre total des crédits pour l'année 1977/78 à $671 millions, par comparaison à $610 millions de dépenses pour l'année qui vient de se terminer ce qui fait une augmentation totale de $61 millions, ce qui est à peu près exactement 10% d'une année à l'autre. Est-ce que, jusqu'à maintenant, j'ai dit des hérésies, ou si cela semble converger?

M. Lazure: Je suis en train de faire une vérification, c'est un peu complexe. On part, dans les livres, avec 1976/77, et si on prend les éléments un par un, $597 050 000, aide préventive, $17 millions, et administration, $32 millions, pour un total de $646 millions et si, à cela, on ajoute le budget supplémentaire de $13 600 000, cela donne un total de...

M. Forget: ... $660,1 millions...

M. Lazure: Quant à 1977/78 — si vous permettez, deux secondes... Si vous permettez, M. le Président, M. Bélanger pourrait donner...

C'est pour expliquer l'augmentation. Si on prend les éléments 1 et 2 du programme 2, si on fait la somme pour l'année 1976/77, on obtient on chiffre de $614 300 000.

M. Forget: $614 300 000.

M. Lazure: C'est-à-dire $597 050 000 plus $17 250 000.

M. Forget: Oui.

M. Grenier: Quel élément?

M. Lazure: $17 250 000.

M. Forget: C'est l'élément 2.

M. Grenier: D'accord.

M. Forget: Alors, c'est $614 millions et combien?

M. Lazure: $614 300 000. En fait, on traite les deux éléments ensemble.

M. Forget: Oui.

M. Lazure: II faut ajouter à cela un budget supplémentaire de $13 millions...

M. Forget: C'est-à-dire le mandat...

M. Lazure: ...un mandat spécial, pardon...

M. Forget: De $13,6 millions.

M. Lazure: Oui.

M. Forget: Ce qui donne $627,9 millions.

M. Lazure: Ce qui fait $627,9 millions, effectivement, le budget modifié, si vous voulez, comparativement à des prévisions de 1977/78 qui totaliseraient $652 580 000 millions...

M. Forget: C'est $633...

M. Lazure: $633 020 000 millions...

M. Forget: Plus $19,6 millions, $652,6 millions à peu près, en arrondissant aux premiers $100 000.

M. Lazure: D'accord.

M. Forget: $208 millions envisagés à l'heure actuelle.

M. Lazure: Ah oui, plus le budget supplémentaire...

M. Forget: Enfin, ce n'est pas parce qu'on approuve à l'avance le budget supplémentaire, mais c'est pour ne pas parler pour rien.

M. Lazure: Oui. Ce qui fait une augmentation de $62 millions, à peu près.

M. Forget: Cela fait $690,6 millions, moins $627,9 millions, effectivement, cela fait à peu près $62 millions.

Si on regarde le budget de $62 millions, plutôt que de parler du reste, l'accroissement, si je comprends bien, en comparant une année avec l'autre, il y a d'abord le résultat des taux indexés le 1er janvier 1977, qui se prolonge pendant neuf mois, est-ce qu'on peut nous donner le montant que ça représente dans l'accroissement des crédits?

M. Lazure: Je ne sais pas si j'ai ce renseignement avec moi, j'ai uniquement...

M. Forget: L'effet de l'indexation sur le budget...

M. Lazure: ...l'effet de l'indexation, oui. Malheureusement, je pense que je n'ai pas de façon dissociée la partie qui est attribuable à l'indexation et la partie qui peut être attribuable à l'augmentation...

M. Forget: Ecoutez, quitte à y revenir, donnez-nous donc la ventilation que vous avez, de façon qu'on se comprenne, on verra si c'est satisfaisant ou pas.

M. Lazure: Pour expliquer...

M. Forget: Dans le fond, est-ce qu'on ne peut pas prendre la règle suivante: vous avez un accroissement de 8,2% en janvier 1977...

M. Lazure: Oui.

M. Forget: ...c'était le taux 8,2%, pendant trois quarts de l'année, non pendant le moitié de l'année, ça fait 4,1% de la masse.

M. Lazure: Avec les données que j'ai ici, ça ferait à peu près $37 millions, l'effet des 8,2% d'indexation à partir du 1er janvier et $10 millions...

M. Forget: Cela fait $36 millions, vous dites? M. Lazure: $37 millions. M. Forget: $37 millions, oui.

M. Lazure: La prévision du taux d'indexation de 6%, le 1er janvier 1978, ça donnerait un effet de $10 millions.

M. Forget: $10 millions d'accord, ce qui fait $47 millions au total. Alors, vous avez des projections d'accroissement de clientèle. Est-ce que ce sont les $15 millions de différence?

M. Lazure: C'est ça, avec un taux de chômage qui se maintient à 8,5%, 9,2% pour la période.

M. Forget: Cela veut dire combien de ménages de plus dans ces $15 millions?

M. Lazure: Voyez-vous, le nombre est passé de 8400 à 12 800 l'an dernier. C'est-à-dire a augmenté...

M. Forget: Ah bon! Il a augmenté l'an dernier de 8400 et, cette année, il augmenterait de 12 000. Alors, c'est plus 12 400 ménages, ce qui produirait les $15 millions. Est-ce que cet accroissement de clientèle tient compte des modifications à la loi fédérale de l'assurance-chômage ou est-ce un accroissement qui est projeté sur la base de la conjoncture générale, sans modification légale, et qu'il faudrait ajouter à ça peut-être une modification due à la Loi de l'assurance-chômage?

M. Lazure: On n'a pas tenu compte des modifications à la Loi de l'assurance-chômage et nos prévisions tiennent compte de l'évolution au cours de l'année dernière, avec les taux de chômage existant l'année dernière. On peut vous donner les chiffres, soit au point de vue des familles ou des personnes seules ou du total entre, disons janvier 1976 et janvier 1977...

M. Forget: Peut-être, en distinguant pour les personnes seules et les ménages avec enfants.

M. Lazure: Disons qu'en janvier 1976, pour les familles, c'était $90 615...

M. Forget: Oui.

M. Lazure: ...et en janvier 1977, $96 808. Pour les personnes seules, $118 810 à $134 430.

M. Forget: $134 430.

M. Lazure: Pour un total de $209 400 à $235 000.

M. Grenier: Est-ce que vous avez les données de l'augmentation des familles monoparentales pour la dernière année?

M. Lazure: Pour les personnes seules, à toutes fins pratiques, c'est $135 000. Pour les familles monoparentales, je vais vous la trouver, on l'a.

Il y a une augmentation sensible du nombre de chefs de familles divorcés qui vivent de l'aide sociale. Ce nombre est passé de 8450 ménages à 12 830 ménages, soit une augmentation d'environ 50%.

M. Grenier: Outre ces chiffres, est-ce que le gouvernement a une politique ou quelque chose de prévu pour que cela cesse, ces familles...

Le Président (M. Laplante): Si le député de Mégantic-Compton veut bien attendre que le député de Saint-Laurent ait terminé.

M. Grenier: Je m'excuse.

M. Forget: Je vais vous donner tout le loisir d'explorer à fond ce sujet.

M. Lazure: Le niveau des prestations qui entrent avec les indexations, de janvier 1976, pour voir les comparaisons totales, est passé, pour le total, la prestation moyenne... Je ne sais pas si vous la voulez par famille, par personne seule, encore...

M. Forget: Ce serait intéressant.

M. Lazure: Par famille, c'était $313.28, en janvier 1976. Par personne seule, $170.61 pour une moyenne de $232. C'est passé, en janvier 1977, à $336 pour les familles, $177 pour les personnes seules, et $243.50 pour la moyenne totale.

Il reste le nombre de bénéficiaires qu'on peut vous donner, qui comprennent les familles et les personnes...

M. Forget: Ca va pour ces statistiques-là, quant à moi. Ce qui me préoccupe, dans le fond, c'est qu'il va sûrement y avoir une modification à la Loi de l'assurance-chômage. Je n'en connais pas la nature, évidemment, parce que c'est actuellement en ballottement, en quelque sorte, mais une prévision a été faite sur la base du projet, tel que déposé.

Est-ce qu'on pourrait, pour le bénéfice de la commission — je connais le chiffre, évidemment, l'étude a été terminée avant que je quitte le ministère — je pense que cela serait bon que les membres de la commission soient saisis de ce chiffre, de la prévision originale de l'impact sur l'aide sociale.

M. Lazure: Peut-être qu'on pourra vous répondre jeudi matin, alors que Mme Granger sera ici. Malheureusement, ce matin, eîle n'est pas présente. On vous apportera les résultats...

M. Forget: Je ne me trompe pas beaucoup en disant que, sans aucune modification, c'est de l'ordre de $32 millions, pour une année complète.

M. Lazure: Les règles du jeu ont été modifiées. Enfin, on a annoncé, au gouvernement fédéral, qu'il y aurait une modification importante. On n'en connaissait pas exactement la teneur finale; on n'en a donc pas tenu compte dans nos prévisions budgétaires.

M. Forget: Je pense, pour n'offusquer personne, dans le fond, que le genre de modification qu'on avait l'intention, enfin la velléité, de faire au projet de loi, était celle qui était la plus coûteuse pour le Québec, l'autre était relativement insignifiante. La partie qui touchait la période de validation pour les bénéfices, huit à douze semaines, cela coûtait extrêmement cher. Je crois que c'était, à elle seule, 95% de la somme et l'autre partie, qui était l'extension d'un an, plus ou moins un an, c'était relativement insignifiant.

Je crois qu'il y a quand même des raisons d'espérer que le budget, y compris un budget supplémentaire, soit suffisant, si les tendances quant à l'emploi se maintiennent comme dans le passé et si la loi fédérale est modifiée dans le sens où elle semble devoir l'être. Cela va assez bien.

J'aimerais demander au ministre, étant donné les éléments qui se retrouvent dans le programme du Parti québécois, relativement aux prestations sociales, il est évident que les prévisions pour cette année ne comportent pas de mesure de financement nécessaire pour réaliser en particulier l'indexation aux six mois.

J'aimerais demander au ministre si, pour l'avenir prévisible, il a définitivement écarté cette chose-là et, sinon, s'il peut donner l'indication d'une date à laquelle le problème va être résolu dans le sens de l'orientation de son parti. C'est sûr que ce ne sera pas avant le 1er avril 1978. Est-ce qu'il a l'assurance que cela va intervenir dès le prochain exercice financier?

M. Lazure: M. le Président, je n'ai pas, malheureusement, l'assurance que cela va intervenir. Il est trop tôt encore pour le dire, dans un sens ou dans l'autre. C'est une des discussions que nous devrons avoir dans la préparation des prévisions budgétaires, dans les mois qui viennent, au cours de l'été, mais je ne peux pas donner une assurance dans un sens ou dans l'autre.

M. Forget: Ce qui veut dire qu'effectivement, cela demeure un objectif, malgré tout, du parti, à l'intérieur du premier mandat?

M. Lazure: Oui, cela demeure sûrement un objectif à l'intérieur du premier mandat, lequel objectif, évidemment, est rattaché à un autre objectif que nous avons, que le gouvernement antérieur a eu aussi, soit d'instaurer un régime de revenu annuel familial garanti.

M. Forget: Puisque le ministre aborde la question du revenu familial garanti, j'aimerais qu'il nous dise très brièvement si le document sous

couverture blanche — je crois que ce n'était pas un livre blanc, c'était plutôt ce qu'on appelle maintenant un livre vert qui a été publié en février 1976 — sous le titre d'un programme de revenu familial garanti pour les Québécois, si la configuration... je ne parle pas du niveau absolu des prestations, parce que cela change à tous les ans, mais si la configuration, la conception de ce programme demeure ou représente, c'est-à-dire, aux yeux du ministre actuel, le type ou le "design", si on me passe l'expression, d'un programme de revenu familial garanti qu'il souhaiterait mettre en application.

M. Lazure: Essentiellement, oui.

M. Forget: Bon. Sur des points plus spécifiques, M. le Président, je me rends compte que, là-dessus aussi, il n'y a pas de disposition dans le budget, ni même dans le budget supplémentaire qui est déjà envisagé pour l'automne, au titre de l'aide sociale, pour faire quoi que ce soit sur des problèmes spécifiques sur lesquels le ministre a dit qu'il étudiait, qu'il considérait, qu'il évaluait la possibilité de, etc. Je pense en particulier à la question de l'allocation de logement. Il en a été question en décembre; il en a été question subséquemment. Le ministre a dit qu'il lui semblait que l'allocation de logement était insuffisante dans l'aide sociale et qu'il verrait à la modifier. Pour la modifier, cela supposerait qu'il donne plus d'argent, plutôt que moins et cela n'est pas prévu pour cette année. Est-ce que l'idée a été rejetée ou si elle continue d'être étudiée? Si oui, à quelle date va-t-on la mettre en vigueur?

M. Lazure: II est trop tôt pour donner une date. Juste une parenthèse, c'est le dilemme des hommes politiques, surtout les nouveaux. On se fait talonner pour donner des dates et, ensuite, on se fait reprocher de trop s'avancer. Alors, on n'est pas en mesure de donner de dates. On continue à dire que ce test du logement, ce test du loyer n'est pas adéquat.

Je pense que ce qu'on vise comme objectif, c'est l'élimination de tout test. Cela rejoint évidemment un rapatriement de juridiction provinciale. Nous sommes obligés, malheureusement, dans l'état actuel des choses, dans l'état actuel des ententes fédérales-provinciales, de maintenir un test quelconque. C'est le test du loyer qui avait été retenu.

Nous espérons, dans un avenir prochain, pouvoir au moins, tout en conservant ce moindre mal, changer le chiffre du loyer pour que ce soit plus acceptable pour la population.

M. Forget: Mais le ministre avait indiqué que, selon lui, il fallait majorer l'allocation de logement qui apparaissait aux règlements de l'aide sociale. Est-ce qu'il s'est ravisé là-dessus depuis? Je le mentionne, non pas pour tendre un piège au ministre, mais pour lui donner une occasion de corriger l'impression qu'il a créée par ses remarques à l'Assemblée nationale.

En effet, pour donner plus d'argent aux assistés sociaux, il faut diminuer les montants...

M. Lazure: Oui.

M. Forget: ... alors qu'il a indiqué, à l'Assemblée nationale, qu'il fallait les majorer.

M. Lazure: Oui, d'accord. C'est...

M. Forget: C'est susceptible de se produire, je ne l'ai pas relevé à l'époque, mais j'en profite, à ce moment...

M. Lazure: C'est une chinoiserie. Je pense qu'on parle de la même chose et qu'on peut le prendre d'un bord ou de l'autre. Evidemment, il s'agit de diminuer — vous avez raison — ce qui va permettre à l'individu, finalement, d'avoir plus d'argent.

M. Forget: Alors, cela ne se fera certainement pas cette année. C'est encore à l'étude pour peut-être se faire dans une année subséquente.

M. Lazure: Exactement.

M. Forget: Maintenant, dans un autre domaine spécifique, également où le ministre s'est engagé à regarder attentivement et à apporter des améliorations dès le nouveau budget, c'étaient ses paroles à l'Assemblée nationale, qui ont d'ailleurs été rapportées par les media d'information, relativement à la question de la taxe d'eau pour les assistés sociaux, est-ce que, ayant fait le tour du dossier, il en est venu à la conclusion que c'est toujours un problème qu'il lui appartenait de régler? Si oui, est-ce qu'il envisage des mesures — cela n'a pas l'air qu'il envisage des mesures dans ce budget, donc c'est dans un budget subséquent— et quel genre de mesures, parce que, là, il y a beaucoup d'agitation, pour ne pas dire autre chose, qui s'est manifestée sur cette question? Je pense bien que des indications de sa part, quant à ses intentions, même si les gens savent que ce n'est pas pour cette année, ce serait quand même assez utile.

M. Lazure: II y a une certaine agitation, mais je dois dire qu'il y en a moins qu'il y a une couple d'années dans ce domaine. Mon prédécesseur connaît la complexité de cette question, lorsqu'il s'agit d'une juridiction qui est partagée entre une municipalité, c'est-à-dire Montréal, et le gouvernement du Québec. Nous avons commencé des pourparlers avec le président du comité exécutif, M. Niding. Nous avons une rencontre de prévue incessamment. Le moins qu'on puisse dire est qu'il y a une volonté politique, autant de la part de la ville de Montréal que de notre gouvernement, d'en arriver à une solution sur ce problème épineux et j'espère qu'on pourra en arriver à une solution d'ici six mois, mais je ne peux pas en dire plus.

M. Forget: On parle d'une solution, mais si le ministre des Affaires sociales est engagé dans une discussion avec les autorités de la ville de Montréal, c'est donc qu'il juge que la solution ou une partie de la solution au moins lui appartient, qu'il lui appartient de résoudre le problème de perception ou de contribution à partir des crédits du ministère des Affaires sociales, relativement à la taxe d'eau, d'une façon ou d'une autre.

M. Lazure: Nous sommes prêts à assumer une partie du règlement de la solution, si vous voulez.

M. Forget: Dans l'optique où le ministre envisagerait justement, comme il le dit, dans ses mots, d'assumer le coût d'une partie de la solution, est-ce qu'il serait prêt à étendre les mêmes avantages aux personnes âgées qui sont aussi, évidemment, quand elles sont propriétaires ou même locataires, tenues de payer des taxes locatives, des taxes d'eau, souvent, comme on les appelle? Est-ce que, peut-être avec les mêmes critères, ce ne serait pas normal d'envisager que les personnes âgées ont les mêmes avantages, parce qu'historiquement, elles ont eu les mêmes avantages, lorsque la ville de Montréal adoptait dans toute cette question une attitude très différente de celle qu'elle a adoptée depuis quelques années, et qu'elles bénéficiaient de certains arrangements également de la part de la ville de Montréal?

M. Lazure: Je dois dire qu'on n'a pas regardé attentivement. On espérait avancer un peu plus dans les pourparlers avant d'introduire un deuxième élément. Il est bien sûr qu'au départ, avec cette priorité qu'on accorde aux personnes âgées, j'aimerais beaucoup qu'on puisse obtenir un règlement pour elles aussi, mais je ne peux pas en dire plus pour le moment.

M. Forget: Alors, c'est encore à l'étude, c'est en discussion. Advenant que vous en veniez à des conclusions durant le premier exercice en cours, cela supposerait que le budget supplémentaire dépasserait le chiffre que vous avez indiqué.

M. Lazure: C'est exact, mais c'est peu probable que cela soit dans l'année en cours. Il est plus probable que cela s'appliquera pour l'année fiscale suivante.

M. Forget: Le ministre entrevoit des difficultés d'en arriver à une entente avec la ville de Montréal, à ce que je peux voir?

M. Lazure: Oui, comme celles que vous avez éprouvées, M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Je n'ai pas cherché à en arriver à une entente sur une question qui était, à mon avis, de juridiction municipale, en exclusivité. Je n'entrerai pas à nouveau dans ce débat. Si le ministre réussit à régler un problème qui est la plaie de tout le monde depuis un trop grand nombre d'années, je l'en féliciterai.

J'espère cependant qu'il tiendra compte du fait que les ramifications d'une intervention du ministère des Affaires sociales dans un domaine de fiscalité municipale à l'intention d'une catégorie particulière de la population va soulever, à moins que ce ne soit fait avec une habileté rare, au moins autant de problèmes que ça va en régler. Mais, encore une fois, je lui souhaite bonne chance. S'il peut le régler, tant mieux.

Je ne sais, M. le Président, si ma question est pertinente. Je vais peut-être seulement en informer le ministre. Cela deviendra pertinent quand on étudiera d'autres questions, mais c'est tout de suite soulevé par la mention d'un budget supplémentaire.

On se rend compte que dans les années antérieures, le budget supplémentaire des Affaires sociales, au titre de l'aide sociale, depuis deux, trois ans, était à peu près exactement compensé par des crédits périmés à d'autres postes du ministère. Les crédits périmés, depuis deux ans, subissent un traitement fort particulier, comme le ministre en a été témoin, sûrement, durant les derniers mois de 1976. Le gouvernement précédent a vécu la même expérience. Cela veut dire que, cumulativement, il y a de moins en moins de marge de manoeuvre à l'intérieur de son budget, et il faudra se poser la question... On ne peut pas le faire au total, parce que le total comme tel, ce n'est pas un élément budgétaire. C'est peut-être le moment de le soulever. Il faudra s'assurer, quand on étudiera certains autres programmes pour savoir s'il est oui ou non vraisemblable de croire qu'il y aura une masse de crédits périmés d'environ $40 millions qui pourrait être dégagée, même à la fin de l'exercice en cours, parce qu'autrement, c'est toute la modification de l'équilibre budgétaire de l'ensemble du gouvernement qui va être mise en jeu à ce moment-là...

M. Lazure: M. le Président, je préférerais justement qu'on en discute au moment où on regardera des éléments qui sont susceptibles de permettre des crédits périmés, qui sont susceptibles de n'être pas dépensés en entier, alors qu'ici, c'est exactement le contraire.

M. Forget: Je suis d'accord. Est-ce que le ministre pourrait nous suggérer les crédits qui seraient susceptibles de subir un pareil sort?

M. Lazure: Dans le bloc 4, 5, 7, 8, 9, 11, 12, qui recouvre, si vous voulez, tout ce qui est prévention, recouvrement de la santé et réadaptation sociale; deuxièmement...

M. Forget: Cela dépend du fonctionnement du réseau.

M. Lazure: C'est ça.

Deuxièmement, dans mes remarques préliminaires de ce matin, j'ai fait état de nouveaux programmes, les programmes de développement pour lesquels on a eu des crédits additionnels. Il est possible que nous ne dépensions pas tout, à

cause de certains retards dans l'implantation des programmes, en particulier les services de soins à domicile, $3,5 millions; également une somme de $5,6 millions pour services d'hébergement et $3,9 millions pour l'amélioration des services aux malades chroniques, etc.

M. Forget: Bon! D'accord, ça, c'est utile. On y reviendra en temps et lieu.

Bon! Je pense qu'on a un bon tableau de l'aide sociale. Dans le fond, si on me permet de résumer un peu l'impression qui s'en dégage, compte tenu d'un budget supplémentaire de $38 millions à venir, c'est un budget qui permet de maintenir le rythme de croisière, y compris donc l'indexation pour les deux années, parce que ça chevauche deux années, qui prévoit une augmentation de clientèle, mais qui est silencieux et, dans le fond, optimiste quant a la nature des modifications à l'assurance-chômage.

M. Lazure: Voilà!

M. Forget: Pour ce qui est des autres modifications, il n'y en a aucune qui est budgétisée. Tout ce qui pourrait survenir en cours d'année supposera des crédits additionnels.

Bon! Là-dessus, M. le Président, je crois que, pour le moment du moins, je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Laplante): Le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, j'avais quelques questions un peu techniques sur lesquelles je reviendrai tout de suite après. Mais concernant l'attribution de ressources financières, dans le moment, est-ce que vous avez prévu, à ces crédits, de l'aide aux bénéficiaires de l'aide sociale, trois secteurs qui aideraient à atteindre les objectifs du retour au travail, par exemple, la promotion socio-économique, de même que la liaison dont on fait mention dans le rapport et les sommes attribuables?

M. Lazure: C'est une préoccupation constante. On pense surtout aux jeunes entre 18 et 30 ans qui sont en chômage actuellement. Nous avons un comité qui a été mis en place pour proposer pour la prochaine année fiscale, on l'espère, des mesures qui créeront des emplois de façon prioritaire pour les jeunes assistés sociaux aptes au travail, de 18 à 30 ans.

Dans cette fourchette d'âge, il y a une augmentation assez importante de chômeurs qui nous inquiètent énormément.

M. Grenier: D'accord. On voit qu'il y a certains postes qui sont offerts et il est difficile de percevoir les politiques de mises sur le marché du travail, pour un de ces points, du gouvernement. On voit du partiel, par exemple. Dans le partiel, évidemment, ce sont des gens qui vont revenir au chômage prochainement. On voit qu'on met l'accent là-dessus dans certains développements. Il y a même un budget alloué à cela. Il reste que ce ne sont pas des choses qui sont stables. Est-ce qu'il y a moyen de voir clair dans les politiques du gouvernement pour savoir s'il y a quelque chose de précis dans cela?

M. Lazure: M. le Président, ce n'est pas tout à fait la commission parlementaire qui doit le faire, c'est plutôt aux ministères du Travail, de l'Industrie et du Commerce ou des Affaires municipales dans des programmes de construction de logements. Ce sont ces ministères ou d'autres comme le ministère des Terres et Forêts qui, actuellement, vous le savez, car le discours du budget l'a énoncé, il y a quand même une somme importante d'argent pour la création de nouveaux emplois. Ce sont ces ministères qui seraient en mesure de donner des détails.

M. Grenier: Est-ce qu'il y a un comité interministériel qui s'est penché sur la possibilité d'implanter un nouveau programme de revenu familial?

M. Lazure: Oui, il y a eu l'étude, M. le député de Saint-Laurent en faisait mention tantôt, qui se poursuit. Les textes sont suffisamment étoffés pour une présentation; ce qui nous retarde, ce ne sont pas les connaissances qui se rattachent à ce sujet, parce que l'expérience a été faite ailleurs, dans d'autres pays, dans d'autres provinces, mais bien honnêtement, c'est l'insuffisance de fonds.

M. Grenier: Est-ce que cela entre parmi vos objectifs de continuer ce travail?

M. Lazure: Certainement.

M. Grenier: Dans une question d'ordre plus technique, on a fait mention tout à l'heure d'une augmentation de presque du tiers des familles monoparentales. Le nombre est passé de 8450 à 12 830?

M. Lazure: Oui, oui.

M. Grenier: Je ne sais pas si vous pouvez fournir des chiffres à ce sujet, mais combien de familles sont devenues monoparentales à la suite de décès ou bien de séparation? Vous n'êtes pas sans connaître le problème qui se rapproche de celui du Sud des Etats-Unis, c'est-à-dire des filles mères noires qui ont décidé de ne pas se marier et d'élever leur famille parce que c'était plus payant.

M. Lazure: C'est nettement, ici, la séparation et le divorce.

M. Grenier: Qui forme le gros montant? M. Lazure: Oui.

M. Grenier: Je ne sais pas si c'est l'endroit pour le poser, mais j'imagine qu'il va falloir le poser à quelque part...

M. Lazure: Oui, à ce sujet — le sous-ministre me le rappelle — il y a actuellement une étude qui est en cours en comité interministériel, Justice et Affaires sociales, pour en arriver à établir une législation ou une réglementation qui va permettre aux mères de famille abandonnées de percevoir... il y en a un grand nombre, c'est au moins un tiers des mères qui sont laissées seules et qui ne touchent pas du tout de pension de leur ex-conjoint. C'est un problème qui devient de plus en plus grave. On essaie, avec le ministère de la Justice, de trouver des solutions à ce problème.

M. Grenier: Oui.

M. Forget: Le ministre fait allusion à un rapport d'un comité interministériel. J'allais justement poser la question, parce que ce comité a été créé au début de 1976 ou peut-être à la fin de 1975. Je ne peux pas m'empêcher de m'émerveiller — je ne sais pas si c'est le bon mot d'ailleurs — du délai qui me paraît excessif pour l'obtention du rapport final de ce comité.

Est-ce qu'il n'y a pas eu des rapports intérimaires? Est-ce qu'il n'y aurait pas, parmi ces rapports intérimaires — de toute façon, même le rapport final n'est qu'un document de travail — possibilité d'en communiquer un exemplaire aux membres de la commission parlementaire? Parce qu'il serait bon que chacun fasse un certain cheminement intellectuel là-dessus. C'est un problème compliqué avec des implications extrêmement importantes pour le gouvernement, pour les finances publiques, mais aussi pour nos institutions de droit civil, l'institution du mariage et la signification du divorce, le rôle des cours, etc. Cela aiderait grandement à notre maturation là-dessus de disposer d'un rapport préliminaire s'il y en a un.

M. Lazure: Je n'ai pas d'objection. On va consulter nos collègues de la Justice et on va essayer d'en mettre un à la disposition de la commission.

Le Président (M. Laplante): Avec l'assentiment des membres...

M. Grenier: Une dernière question et j'aurais fini ce point-là, si on veut bien. On aurait terminé cet article.

Le Président (M. Laplante): D'accord.

M. Grenier: Est-ce que, dans le rapport, M. le ministre peut nous dire si on connaîtra, pour ce qu'on peut savoir dans ce secteur, les gens qui se sont laissés, comme vous disiez tout à l'heure, ou ceux qui, de façon bien entendue entre les deux conjoints, ont décidé de se laisser pour avoir des avantages sociaux fournis par l'Etat? Est-ce qu'il y aurait moyen d'avoir un aperçu de cela?

M. Lazure: C'est très difficile à identifier. On ne peut qu'avoir des impressions. On va essayer de vous donner le plus de précisions possible, mais on ne peut quand même pas aller faire des entrevues sur la vie privée de chaque individu.

Le Président (M. Laplante): On me demande d'accepter d'ajourner nos travaux sine die, avec le consentement de tous les membres. D'accord?

M. Saint-Germain: On continuera sur le même sujet.

Le Président (M. Laplante): D'accord.

M. Saint-Germain: J'aurais des questions à poser.

Le Président (M. Laplante): Nous ajournons nos travaux sine die.

M. Martel: Simplement, M. le Président, pour répondre aux accusations du député de Mégantic-Compton. La commission qui étudie les crédits de l'immigration, actuellement, est suspendue par suite d'une motion du député de Richmond de l'Union Nationale. Lorsqu'on nous accuse de vouloir faire de la publicité, je pense qu'on devrait regarder dans son propre parti et voir ce qu'on fait aux autres commissions parlementaires.

M. Grenier: M. le Président, vous me permettrez de répondre au député de Richelieu. J'ai une information qui n'est pas tout à fait la même.

Le Président (M. Laplante): Choquez-vous si vous voulez. C'est ajourné.

(Fin de la séance à 12 h 28)

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