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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Tuesday, December 8, 1981 - Vol. 26 N° 7

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition des organismes intéressés au projet de loi no 27 - Loi modifiant diverses dispositions législatives dans le domaine de la santé et des services sociaux


Journal des débats

 

(Onze heures trente minutes)

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, mesdames et messieurs!

La commission élue permanente des affaires sociales se réunit ce matin pour entendre des organismes relativement au projet de loi 27, Loi modifiant diverses dispositions législatives dans le domaine de la santé et des services sociaux.

Les membres de la commission pour la séance d'aujourd'hui sont: M. Boucher (Rivière-du-Loup) remplacé par Mme Lachapelle (Dorion); M. Brouillet (Chauveau), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Houde (Berthier), M. Johnson (Anjou), Mme Juneau (Johnson), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Leduc (Fabre), M. Rochefort (Gouin), M. Sirros (Laurier).

Les intervenants: M. Beauséjour (Iberville), M. Bélanger (Mégantic-Compton), Mme Harel (Maisonneuve), M. Kehoe (Chapleau), M. Lafrenière (Ungava), M. Laplante (Bourassa), M. Mathieu (Beauce-Sud), M. O'Gallagher (Robert Baldwin) Est-ce qu'il y a des remplacements?

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le Président. Est-ce qu'on pourrait remplacer le député de Mégantic-Compton par le député de Mont-Royal, M. Ciaccia?

Le Président (M. Bordeleau): Le député de Mégantic-Compton remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal).

Mme Lavoie-Roux: Remplacer le député de Beauce-Sud par M. Lincoln, député de Nelligan.

Le Président (M. Bordeleau): Le député de Beauce-Sud remplacé par M. Lincoln, député de Nelligan. D'accord.

Mme Lavoie-Roux: Et remplacer le député de Robert Baldwin par le député de Jean-Talon, M. Rivest.

Le Président (M. Bordeleau): Mesdames et messieurs les membres de la commission, il y aurait lieu à ce moment-ci de nommer un rapporteur de la commission. Est-ce que j'aurais des suggestions? La députée de Johnson? Alors, le rapporteur de la commission sera Mme Carmen Juneau (Johnson).

Avant de procéder aux auditions comme telles, je voudrais vous faire part de l'ordre du jour que nous avons aujourd'hui. Nous devrions entendre, comme premier groupe, l'Association des hôpitaux du Québec, puis ensuite, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, l'Association des conseils des médecins et dentistes du Québec, la Conférence des CRSSS, la Corporation professionnelle des médecins du Québec et la Fédération des médecins résidents. C'est le programme de la journée.

Avant de passer aux auditions comme telles, je demanderais des commentaires préliminaires de la part des deux partis. M. le ministre des Affaires sociales.

Remarques préliminaires M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): Merci, M. le Président. Ce projet de loi 27, jusqu'à maintenant, depuis son dépôt, on l'aura remarqué, a causé certains remous chez la population, des inquiétudes légitimes chez les citoyens devant ce qu'ils voient se passer au-dessus de leur tête, particulièrement dans un domaine aussi sensible que la dispensation des services de santé sur le territoire. Des remous aussi, et encore là légitimes, à l'intérieur de la profession médicale qui, dans un contexte, on le sait, qui est celui de l'évolution graduelle, depuis un certain nombre d'années, des transformations qu'a connues cette profession et les conditions de son exercice, depuis une quinzaine d'années, s'interroge sur les orientations, s'interroge également, à juste titre et de façon légitime, encore une fois, au niveau de ces organismes représentatifs que sont les fédérations sur les intentions du gouvernement.

Interrogations également ou remous, mais peut-être un peu moindres, puisque c'est un appareil qui est intimement lié à l'État, de l'ensemble des établissements et de ceux qui oeuvrent dans les établissements, car si, dans ce projet, nous ne créons aucune nouvelle structure, si nous ne bouleversons pas intrinsèquement les principes et toutes les structures du système mis sur pied par le chapitre 48 de la loi de 1971, il n'en demeure pas moins que nous tentons d'y clarifier les rôles des uns comme des autres, encore une fois, dans une perspective de

répondre aux objectifs qui sont des objectifs de maintien d'un des systèmes les plus remarquables qui soient en Occident et qui souffre difficilement les comparaisons - qui souffre très peu de comparaisons, devrais-je dire - d'assurer son progrès, dans une recherche aussi d'harmonie des différents intervenants, notamment au niveau des établissements et, finalement, à l'égard du règlement de certains problèmes pour la population.

Je parlerai ici brièvement de la question des urgences dans des centres comme Montréal, de la question de la répartition des effectifs sur le territoire qui constitue un objet de préoccupation de tous les intervenants depuis de nombreuses années, de la participation des citoyens eux-mêmes à certaines décisions, à certains organismes et, finalement, de certains pouvoirs que l'on veut donner au gouvernement, des pouvoirs, encore une fois, qui ont pour objet, pour l'essentiel, de permettre de répondre à des situations qui mettent en cause notamment la santé publique ou qui mettent en péril la santé publique.

Les interprétations juridiques qu'on a pu donner à ce projet depuis qu'il a été déposé, c'est, encore une fois, dans un contexte qui est caractérisé par le fait que nous vivons une période particulière dans l'évolution du réseau et qu'à l'égard des professionnels nous vivons une période normale de renouvellement des ententes. Les interprétations ont varié sur la place publique, dans les groupes, dans les assemblées syndicales, dans les regroupements régionaux et, finalement, dans les conversations, j'en suis sûr, un peu partout, de ceux que cela implique les représentants du réseau ou les professionnels de la santé qui sont directement touchés par ce projet.

Je dois dire que certaines interprétations qui ont circulé étaient issues d'une certaine équivoque au moment de la présentation du projet de loi en même temps que les mandats de négociations à mes représentants. Certaines de ces interprétations n'ont rien à voir avec le projet de loi qui est devant nous, mais relèvent strictement et purement de la négociation puisque, dans le cas des professionnels de la santé, l'essentiel reste à déterminer dans le cadre d'une négociation. D'autres sont des extensions, mais qui ont peut-être un peu plus donné lieu à des procès d'intention de celui qui vous parle ou du gouvernement, plutôt qu'une approche purement juridique. D'autres, finalement, sont des inquiétudes ou des interrogations absolument légitimes sur le sens ou la portée de certains des articles du projet de loi 27.

Je pense que nous aurons l'occasion, dans les deux ou trois jours qui viennent, de préciser à la fois ces intentions, ce sens, cette portée et la circonscription précise sur le plan juridique de certaines situations où des organismes ou des individus pourraient se voir menacés. C'est pour cela qu'il y a une commission parlementaire d'ailleurs; c'est comme cela que nos institutions démocratiques sont faites.

Je suis heureux de constater l'intérêt de la part du réseau des affaires sociales comme de la part des professionnels de la santé, à travers, d'une part, leur syndicat que sont les deux fédérations, comme à travers d'autres organismes dans lesquels ils vivent quotidiennement, mais qui n'ont pas les mêmes rôles ou les mêmes vocations de défense des intérêts, qui est un rôle fort bien assumé d'ailleurs par leurs syndicats respectifs. Nous pourrons, au cours de ces deux ou trois jours, les entendre. Je peux les assurer que nous les écouterons c'est l'objectif de cette commission. Nous pourrons clarifier certaines des intentions. Après les avoir entendus, nous pourrons faire connaître aux membres de cette commission, aux membres de l'Assemblée nationale ainsi qu'aux premiers intéressés également que sont les professionnels et les représentants du réseau, les conséquences de ces clarifications que nous pourrions être amenés à apporter au texte, puisque l'objectif de cette commission, encore une fois, c'est de nous permettre ensemble, de part et d'autre de la présidence, comme dans une forme de dialogue avec les représentants des impliqués, de bonifier ce projet dans le but que les objectifs qui sont partagés, d'après ce que j'en ai compris, par l'immense majorité des intervenants, puissent être mis en application bientôt.

C'est donc dans ce contexte et avec cette attitude que nous aborderons les travaux, pour notre part, du côté ministériel, avec la conviction, encore une fois, de la collaboration de l'Opposition, comme de la sérénité dont savent faire preuve les intervenants dans ce milieu, pour le bien-être des citoyens du Québec, pour leur sécurité et aussi pour faire progresser certaines choses pour les citoyens du Québec. Nous pourrons donc échanger sur ce projet pour arriver à trouver des solutions qui soient les plus claires possible en même temps que les plus acceptables possible pour toutes les personnes concernées en ayant à l'esprit que c'est le rôle du gouvernement et du Parlement de décider de ces choses en respectant la démocratie et en respectant l'intérêt des intervenants comme l'ensemble de la population.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. À ma connaissance, depuis 1976,

peut-être mise à part la loi 101, que, je pense, on doit classer dans une catégorie tout à fait différente, je ne connais pas de loi qui ait soulevé autant d'inquiétudes chez toutes les personnes qui oeuvrent à l'intérieur de notre réseau de services de santé et de services sociaux. Je voudrais au point de départ dire qu'il y a certainement des objectifs, sans vouloir faire un discours de deuxième de lecture, auxquels nous souscrivons, mais je pense qu'il est important de le dire pour éviter toute ambiguïté. Il y a des objectifs qui sont poursuivis comme, par exemple, une meilleure distribution des ressources médicales en régions éloignées. Nous pouvons nous interroger quant aux moyens mis de l'avant pour atteindre cet objectif, mais je pense que c'est un objectif auquel le Parlement ne peut pas se soustraire et le gouvernement, en particulier. Il y a aussi la création par la loi des comités de bénéficiaires; encore-là, il y a des modalités qui pourront être examinées après la deuxième lecture, mais cette disposition qui existait déjà par règlement est maintenant mise dans la loi. Je pense que ça pourra répondre aux attentes des bénéficiaires. Mais je voudrais surtout ici interpréter les raisons pour lesquelles ce projet de loi soulève autant d'inquiétudes, que ce soit de la part de la profession médicale ou des intervenants dans le réseau de la santé ou des services sociaux. Évidemment, la presse a pris comme objet fondamental de ce projet de loi la question de la négociation entre les fédérations et le gouvernement. Je m'étonne que des éditorialistes - je pense que c'est peut-être la première fois que je fais des remarques à des éditorialistes, parce que je veux les laisser fonctionner en toute quiétude et indépendance d'esprit - n'aient même pas saisi l'aspect très important de ce projet de loi quant à l'avenir du fonctionnement des établissements dans le réseau des affaires sociales et de la santé. (11 h 45)

En ce qui a trait aux négociations, nous nous posons des questions sérieuses quant à certaines dispositions qui sont dans la loi et qui interviennent dans le processus des négociations. Je pense que les fédérations pourront faire valoir leur point de vue.

Évidemment, on peut regretter que les médecins ou la profession médicale soient obligés, par exemple, d'intervenir et d'agir sous une certaine forme de protestation, d'épouser certaines formes de protestation, mais il ne faut peut-être pas oublier qu'avec l'avènement de l'assurance-maladie, ce qui a été, je pense, un grand bénéfice pour toute la population, on a aussi changé les règles du jeu, de telle façon que maintenant la profession médicale comme d'autres professions ou d'autres groupes de travailleurs doit négocier ses conditions de travail. Même si, dans le cas des professions médicales, on parle d'une entente, c'est peut-être plus élégant, mais, à toutes fins utiles, c'est que les règles du jeu ont été changées et je pense que ces groupes, comme tout autre groupe, ont droit à la libre négociation. Il y a certainement - et je pense que le ministre en conviendra - dans la loi certains articles qui, en tout cas, suggèrent des interrogations très sérieuses quant à cette possibilité de respecter les règles du jeu d'une libre négociation.

Pour ce qui est du réseau, il y a des pouvoirs de réglementation, je dirais, presque illimités que s'accorde le ministre; à certains égards, des pouvoirs qui sont des décisions finales et sans appel. Il y a des pouvoirs dévolus aux conseils régionaux des services de santé et des services sociaux qui, comme je le disais tout à l'heure, remettent en cause les fondements de la loi sur les services de santé et les services sociaux au niveau de la participation et de la responsabilité locale, au niveau du dynamisme même du développement de notre réseau. Il y a également certains articles où m'apparaît, en tout cas à ce moment-ci, par la bande, l'introduction d'un ticket modérateur tant pour les médicaments que pour les soins, somme toute, remettant en question l'universalité des soins. Si le ministre peut ou modifier ces articles ou encore diminuer ou prouver que nos inquiétudes sont sans fondement, nous en serons très heureux, mais je pense que l'inquiétude des établissements, dans le réseau, à l'égard de ce qui apparaît une mainmise du gouvernement soit par le ministre lui-même, soit par le truchement des conseils régionaux des services sociaux et des services de santé, m'apparaît très fondée si on examine les articles, en particulier l'article 38 ou 18, l'article 173, enfin, comme je le dis, je ne veux pas faire une étude article par article du projet de loi à ce moment-ci.

J'entendais le médecin, pardon, le ministre dire tout à l'heure... Dans tout cet auditoire, il doit au moins y avoir un psychiatre qui pourrait expliquer mon lapsus, parce que je ne l'ai jamais fait avant aujourd'hui.

M. Johnson (Anjou): Je n'ai pas été invité à l'assemblée, par exemple.

Mme Lavoie-Roux: ... qui dit, vous savez, avec son ton de sérénité, apparente du moins, qu'il ne s'agit pas de modifier les rôles des établissements sans modifier en profondeur le réseau tel qu'il existe, c'est vrai qu'il ne dit pas qu'on enlève des CLSC, qu'on enlève des CSS, qu'on abolit des centres hospitaliers, il ne le dit pas. Il dit: On veut simplement clarifier des rôles, mais, ce qui est inquiétant, M. le ministre, c'est

que, dans votre clarification des rôles, vous soustrayez aux uns sans jamais leur ajouter quoi que ce soit, et vous donnez uniquement aux autres, les CRSSS, en ne leur soustrayant quoi que ce soit, sauf ce que le ministre s'attribue à lui personnellement. Je pense que c'est là la raison même de l'inquiétude de la population. Ceci pour moi pose la question du discours gouvernemental à savoir que l'on doive demander aux citoyens - nous concourrons d'ailleurs à ce principe - de se reprendre en charge, nous demandons aux communautés locales de contribuer par leur apport, par leur participation, à la qualité des services que la population se donne. Je crains fort que la loi, telle qu'elle existe, ne vienne justement tronquer ce beau principe ou ce discours que tout le monde tient à l'heure actuelle dans le Québec.

M. le Président, comme nous sommes ici pour entendre les gens, et non pas eux pour nous entendre. Il m'apparaissait quand même important de faire ces mises au point pour qu'on sache quand même où l'Opposition 9e situe à ce moment-ci du débat sur la loi no 27. Je m'en voudrais de ne pas déplorer, et ceci est une remarque qui, je pense, va revenir dans la plupart des mémoires, quelle que soit leur origine, que ce projet de loi ait été élaboré avec très peu de consultation, que ce soit de la part des organismes ou des établissements du réseau, que ce soit de la part des professionnels touchés, et je dirais même peut-être aussi très peu de consultation auprès de la Régie de l'assurance-maladie du Québec qui est quand même touchée par de nombreux articles.

Je voudrais aussi indiquer que nous avions convenu - et je voudrais à ce moment-ci que ce soit précisé - que, compte tenu, et cela a été fait avec l'accord de l'Opposition, parce que le ministre m'avait indiqué que ce projet de loi était tellement peu important qu'il ne fallait pas déplacer toute la population pour venir donner son point de vue, il avait donc été convenu que ce serait une commission parlementaire sur invitation. J'y avais souscrit. Par contre, après avoir eu le projet de loi en main et considérant son importance, nous avons convenu, de part et d'autre à l'Assemblée nationale, que, si des groupes avaient fait parvenir au secrétariat des commissions parlementaires des mémoires faisant valoir leur point de vue et qu'à la fin de ces auditions certains ne croyaient pas avoir été bien représentés par les différents groupes qui nous présenteront des mémoires, le droit de parole pourrait leur être accordé. Je veux simplement m'assurer, avant que nous commencions, que cette convention que nous avons eue, à l'Assemblée nationale soit respectée. Ceci pourrait reporter à jeudi soir ou fort possiblement à vendredi la possibilité pour ces groupes, s'il y en a, de se faire entendre.

J'aimerais également, M. le Président, qu'on nous assure que tous les mémoires qui seront adressés au secrétariat des commissions, parce que ceci a été l'invitation du leader du gouvernement, puissent être inscrits au journal des Débats, même s'ils ne feront pas l'objet d'une présentation formelle ici à la commission. J'aimerais aussi que, d'ici peu de temps, on nous fasse part des mémoires qui auront été déposés au secrétariat des commissions et qui ne seront pas présentés ici pour que nous puissions en prendre connaissance. J'aimerais avoir la liste de ces organismes et de ces mémoires, les autres, évidemment, nous seront apportés ici.

La population, les organismes et tout le monde ont regretté le peu de temps qu'ils ont eu et je pense que cette récrimination, si je peux dire, revient dans les mémoires. La consultation qu'ils ont pu faire avec les différents établissements qui constituent leur association a dû forcément être extrêmement réduite et certains sentent que leur point de vue n'est peut-être pas totalement représentatif des établissements qu'ils représentent. Alors, je pense qu'il faut déplorer qu'encore une fois le gouvernement en toute fin de session - parce qu'il a, pour des raisons pour lesquelles la population peut le juger, négligé de nous ramener à l'Assemblée nationale à une date plus hâtive que celle où il nous y a finalement rappelés - nous impose ce travail. Là, on a une semaine d'auditions parlementaires. Il nous reste une semaine - s'il fallait adopter le projet de loi, c'est un projet de loi d'une centaine d'articles - pour y apporter les amendements nécessaires. Je pense que c'est un projet de loi qui a tellement de conséquences qu'on ne peut que regretter que ceci soit fait avec une telle hâte.

Si le ministre avait besoin de certains éléments, il aurait pu les présenter dans une forme plus réduite. J'ai déjà signalé des points où nous pouvions être d'accord avec lui. Il a choisi dans une espèce de bill omnibus de tout régler pour peut-être pouvoir se penser le père de la nouvelle réforme de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. C'est le choix qu'il a fait. Non pas au nom de l'Opposition, car l'Opposition est ici pour servir la population, mais au nom de la population et des conséquences importantes que cette loi passée à la hâte pourrait engendrer, je pense que je dois exprimer ces regrets.

Quant à la commission parlementaire elle-même, M. le Président, nous l'abordons avec un esprit ouvert. Si la loi devait rester telle qu'elle est, je peux vous dire qu'il nous sera très difficile d'y souscrire dans sa forme actuelle. Une commission parlementaire avec audition a justement pour objectif d'entendre les différents points de

vue, d'améliorer le projet de loi. Selon l'ouverture que le ministre des Affaires sociales ou le gouvernement montrera, nous pouvons l'assurer de notre collaboration, dans la mesure où les amendements qu'il suggérera régleront ou corrigeront ce qui nous apparaît comme des failles très importantes dans ce projet de loi qui aura des répercussions, à court, moyen et long termes et pour longtemps, pour l'ensemble de la population du Québec.

Je vous remercie, M. le Président.

M. Johnson (Anjou): M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): ... si vous permettez, rapidement, avant qu'on ne passe à l'audition du président de l'Association des hôpitaux du Québec, trois remarques dont l'une sur la notion de hâte qu'on voudrait voir dans ce que nous avons fait. Nous nous sommes entendus, à l'égard des témoignages, pour faire en sorte qu'on puisse ouvrir la commission, ce que nous avons fait, notamment à l'égard de la communauté juive qui pourra être entendue, compte tenu de la nature particulière de certaines dispositions où elle croit pouvoir être touchée. Cependant, selon l'entente avec le leader du gouvernement, je rappellerai à la députée de L'Acadie que dans les propos tenus précisément par le leader, il n'est pas question d'ouvrir, comme un tonneau des Danaïdes, les témoignages à compter de cette commission. Cette commission entendra une vingtaine de groupes. Nous avons accepté les suggestions de l'Opposition, nous avons rouvert la liste à deux reprises. La dernière fois, c'était cependant avec l'entente très claire que si nous devions déborder quelque peu de l'objectif de jeudi, ce serait pour entendre les groupes inscrits et non pas entendre d'autres groupes.

Finalement, je pense qu'on pourrait s'entendre sur la procédure de la façon suivante: compte tenu du fait que le temps est déjà un peu avancé, pour aujourd'hui, on pourrait entendre, dès ce matin, l'Association des hôpitaux, et passer à travers le mémoire comme la période d'échange. Je pense que c'est ce que nous pouvons faire en l'espace d'une heure, même si on accepte de déborder de quelques minutes, l'association m'ayant assuré qu'elle pourrait présenter un mémoire en vingt minutes et on pourra consacrer 40 minutes à la discussion d'ensemble des points qui seront soulevés. D'ailleurs, le mémoire est un de ceux parvenus au secrétariat hier, si je ne me trompe pas, vendredi même.

Au tout début de l'après-midi, à 15 heures, M. le Président, ce serait immédiatement la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, avec l'audition de son mémoire et la période d'échanges.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je n'ai pas devant moi la réponse que le leader du gouvernement m'a donnée. Mon intervention est sous la réserve que - je ne l'ai pas au texte, mais je ne crois pas me tromper; plus tard, quand je l'aurai obtenue, on pourra faire la rectification - lorsque je suis revenue à la charge à plusieurs reprises à l'Assemblée nationale, dans ce contexte qui permettait au gouvernement de ne pas avoir à se soumettre au délai d'un mois pour convoquer la commission parlementaire. Le leader du gouvernement a bien dit que si des groupes se croyaient lésés, dans les représentations qui étaient faites par les différents groupes qui avaient été, eux, officiellement invités, on pourrait leur donner la parole. J'ai bien fait préciser au leader du gouvernement, je lui ai dit: II s'agit là d'un précédent, c'est bien ce que vous dites. C'est bien ce qu'il a affirmé. En tout cas, on pourra en faire la vérification à l'aide du journal des Débats, mais je veux au moins faire immédiatement cette rectification pour que, plus tard, des gens ne soient pas empêchés d'avoir la parole s'ils le jugent nécessaire. (12 heures)

Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mme la députée de L'Acadie. En ce qui concerne une question que vous posiez à propos des mémoires, selon les directives qui viennent de la présidence, il n'est pas automatique, et je ne voudrais pas que cela le soit non plus, que les mémoires soient tous consignés au journal des Débats, parce que le même texte paraît deux fois dans le journal des Débats. Par contre, je pense qu'on peut évaluer chaque cas, si un groupe ne pouvait pas se présenter pour une raison ou pour une autre, ou si on manquait de temps, on pourrait, pour tel mémoire, le consigner au journal des Débats.

M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Je pense que Mme la députée de L'Acadie souhaiterait que des mémoires qui seraient parvenus - on sait qu'il y en a deux en fait - de groupes qui ne seront pas entendus puissent être versés aux dossiers de la commission. À cet égard, à moins que la présidence n'y voit d'objection je comprends que le président de l'Assemblée nationale voudrait peut-être trancher, compte tenu de la valeur de précédent - nous n'avons, quant à nous, aucune objection. Il s'agit, en fait, du mémoire de l'Association des cadres intermédiaires, et celui des Départements de santé communautaire, qui ont été versés. Ces organismes n'ont pas été appelés à

témoigner, ils ne seront pas non plus appelés spécifiquement à témoigner à cet égard.

Le Président (M. Bordeleau): À ce moment, s'il s'agit de mémoires qui ne seront pas présentés, je n'ai pas d'objection à ce qu'on puisse les consigner au journal des Débats.

Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais quand même apporter une autre précision. Dans l'hypothèse où les organismes qui sont ici nous font un résumé de leur mémoire, leur mémoire devrait être versé au journal des Débats.

M. Johnson (Anjou): Quant à nous, d'accord. Je comprends qu'il appartient au président...

Le Président (M. Bordeleau): Je voudrais essentiellement, Mme la députée de L'Acadie et les autres membres de la commission, qu'on s'entende pour qu'on voie cela cas par cas. S'il y a des résumés de mémoires qui sont imposants, on pourra les inclure au journal des Débats, mais ce n'est plus de pratique courante aux commissions parlementaires d'inclure automatiquement les mémoires en double finalement au journal des Débats à la suite du texte de la commission.

Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis d'accord avec vous que si un mémoire était lu au complet, on n'a pas à le répéter au journal des Débats. Cela fait un chevauchement. Si un mémoire doit être résumé par la force des choses, à cause du temps qui est alloué, la coutume veut que le mémoire au complet soit versé au journal des Débats.

Le Président (M. Bordeleau): On pourrait le faire.

Je vois que nos invités sont déjà là. Quant à la procédure, avant d'entendre le premier groupe, j'aimerais expliquer la façon dont on va répartir le temps pour les intervenants. Comme l'habitude le veut, on devrait passer environ une heure par mémoire, ce qui donne approximativement vingt minutes au groupe, à l'association concernée pour présenter son mémoire et le résumer, s'il est vraiment trop volumineux pour le présenter durant ce temps. On laisse vingt minutes de chaque côté pour les questions à l'organisme ou au groupe. C'est la procédure que nous devrions suivre pour aujourd'hui et les prochains jours des travaux de notre commission.

M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, avant de commencer, est-ce que je pourrais avoir une directive de votre part? Ma collègue, la députée de L'Acadie, a demandé que les mémoires, même ceux qui sont entendus en résumé, soient déposés et fassent partie du journal des Débats. D'après les règlements, nous avons le droit de l'exiger; si je ne m'abuse, je crois que la présidence, à la suite de notre demande, a la responsabilité et l'obligation de l'accepter. Je voudrais que ce soit clair, si vous acceptez que tous les mémoires qui ne sont pas lus en entier soient déposés à la commission et fasse partie du journal des Débats.

Le Président (M. Bordeleau):

Effectivement... M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): À cet égard, M. le Président, nous n'avons aucune objection, ce qui nous permettrait peut-être d'entamer l'audition du mémoire de l'Association des hôpitaux du Québec.

Le Président (M. Bordeleau): Je veux que ce soit quand même clarifié, M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Je pense que oui. Dans le sens où vous posez la question, M. le député de Mont-Royal, il sera possible effectivement d'annexer les mémoires résumés au journal des Débats, sauf que, pour des questions d'économie, depuis un certain temps, on conserve tous les mémoires au secrétariat des commissions, on ne répète pas les mémoires déjà lus en commission à la fin du journal des Débats. Oui, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Une dernière précision, M. le Président. Vous avez établi comme règle que nous entendrions les mémoires pendant 20 minutes, qu'ensuite nous partagerions 40 minutes. En principe, je suis d'accord avec cela. Je veux indiquer au ministre que je n'ai nullement l'intention de ralentir l'audition des mémoires, parce qu'on a d'autres choses à faire, mais je pense qu'il n'est nullement superflu d'établir les règles avant de partir. Ce que je veux dire au ministre, c'est qu'on sait fort bien que, des fois, rendu vers la fin de l'audition des mémoires, il y a des choses qui se répètent; on prend alors moins de temps. Je ne voudrais pas qu'on soit strictement figé dans la règle de l'heure et je désirerais qu'on montre une certaine souplesse, selon que des questions sont poussées plus à fond dans un mémoire que dans d'autres.

Une voix: D'accord.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mme la députée de L'Acadie. Je voudrais simplement vous souligner que c'est justement une question de procédure pour ne pas faire attendre trop longtemps les invités de la commission qui viennent ici déposer des mémoires et faire des commentaires et qu'on a établi au préalable des horaires qu'il faut tenter de respecter, bien sûr. Je pense qu'il n'y aura aucune objection des membres de la commission, que ce soit d'un côté comme de l'autre, de dépasser de quelques minutes et même qu'à l'occasion de mémoires plus restreints on puisse reprendre ce temps. Je veux être comme président de la commission très réceptif à des changements quant aux minutes et ne pas compter les secondes.

Je pense que nos premiers invités sont déjà en place. Je présume qu'il s'agit de l'Association des hôpitaux du Québec dont le mémoire sera présenté par M. Marc Leclerc. M. Leclerc, si c'est bien vous et que vous voulez présenter les personnes qui vous accompagnent, la commission est prête à vous entendre.

Association des hôpitaux du Québec

M. Leclerc (Marc): M. le Président de la commission, M. le ministre des Affaires sociales, mesdames et messieurs, membres de la commission, la délégation qui m'accompagne est composée de M. Paul Pleau, ex-président de l'association et membre de l'exécutif; de M. Claude Desjardins, directeur général de Maisonneuve-Rosemont et vice-président; de M. Jacques Nolet, directeur associé de l'hôpital Douglas-Verdun, trésorier de notre association; de Mme Denise Thibault, présidente de l'hôpital Fleury, membre de l'exécutif, de M. Robert Beaulieu, DG de Matane, membre de l'exécutif; du Dr Gilles Lagacé, membre du comité chargé de la préparation du mémoire et, à ma droite, de M. Jacques Nadeau, directeur général de notre association; de M. Normand Choinière, directeur général adjoint de l'association; de Me Ghislaine Gosselin, adjoint au directeur général pour les affaires juridiques, et de M. Michel Cléroux, directeur des communications. Je ne pense pas en avoir oublié.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va.

M. Leclerc: Compte tenu de la courte période de temps que nous avons à notre disposition et de l'ampleur du mémoire que nous avons déposé vendredi dernier auprès du secrétariat des commissions parlementaires, je limiterai ma présentation à une brève description des principaux éléments que l'on y retrouve. Les personnes qui m'accompagnent, plus particulièrement le directeur général, auront l'occasion d'en expliciter par la suite tous les aspects.

Ces présentations étant faites, je voudrais au nom de l'Association des hôpitaux du Québec vous remercier de votre attention à notre égard qui nous permet ainsi de faire valoir le point de vue de nos membres sur cet important projet de loi. Ces derniers, par la voie de nos structures, ont d'ailleurs été consultés de façon intensive et les opinions que nous exprimons aujourd'hui reflètent très clairement leur volonté.

Le projet de loi 27, par la nature même des ses enjeux, le fait qu'il remette en cause certains fondements de la Loi sur les services de santé et les services sociaux et sa portée étendue sur d'autres lois nous font dire qu'il constitue le projet de loi le plus important dans le secteur des affaires sociales depuis dix ans. Voilà pourquoi nous sommes convaincus de la nécessité d'en scinder le contenu afin que les dispositions les moins urgentes puissent faire l'objet d'une démarche collective de réflexion entre consommateurs et producteurs de services de santé, gouvernement et dirigeants de ce réseau.

D'autre part, nous convenons avec le gouvernement de l'urgence d'agir en ce qui concerne les dispositions de ce projet de loi affectant la Loi de l'assurance-maladie et visant la répartition des médecins sur le territoire. À cet effet, nous ne pouvons qu'exprimer notre satisfaction générale à l'égard des intentions du gouvernement, puisque la plupart des recommandations que nous lui avons transmises en juin dernier ont été retenues.

Nous regrettons toutefois que nos recommandations concernant l'élaboration de plans d'effectifs médicaux sur le territoire, s'additionnant aux plans d'effectifs médicaux des établissements, n'aient pas été incluses dans ce projet de loi. Nous croyons en effet nécessaire de relier l'implantation des cabinets privés de médecins et les services qu'ils dispensent aux besoins de santé des populations.

Cette démarche nous semble à moyen terme et à long terme devoir être la pierre angulaire de l'organisation médicale du Québec.

De plus, nous aurions souhaité que les législateurs, à l'article 4 au projet de loi, prennent une orientation différente et permettent cette expérimentation quant aux modes de rémunération sur la base de la demande des établissements. Ceux-ci devraient quand même s'assurer de l'accord majoritaire des médecins visés. En fait, nous croyons que la rémunération en établissement devrait, dans ses modes, d'abord être déterminée en fonction des besoins de l'hôpital, dans le contexte de ses objectifs et programmes.

Nous proposons aussi que le législateur

confirme dans ce projet de loi la nécessité pour le gouvernement de consulter les groupements représentatifs d'établissements pour toute entente ou partie d'entente pouvant les affecter.

En ce qui concerne le centre hospitalier et son conseil d'administration, nous tenons à réitérer nos vues quant à la nécessité d'assurer une majorité de sièges aux gens de l'extérieur de l'établissement et du réseau, l'expérience des dix dernières années ayant démontré qu'un modèle contraire conduit à des situations paralysantes et à des tensions stériles.

Face à ce projet de loi, nous convenons donc d'en maintenir les dispositions relatives à la représentation des bénéficiaires, des universités et des trois catégories de représentants originant de l'intérieur: médecins, personnel clinique et personnel non clinique.

Quant aux représentants issus des groupes socio-économiques et des organismes bénévoles, nous considérons leur présence comme extrêmement pertinente. Mais, compte tenu de certaines difficultés rencontrées par le mode de nomination des représentants des groupes socio-économiques, nous ne voyons pas pourquoi ils ne pourraient pas être désignés de la même façon que ceux des organismes bénévoles, soit par le conseil régional.

D'autre part, nous comprenons l'objectif visé par le gouvernement quand il propose d'associer au conseil d'administration des établissements des représentants de chacune des autres catégories d'établissements. Cette proposition visant à promouvoir la complémentarité des établissements et à rendre le réseau organique pourrait être réalisée dans une forme qui présenterait moins d'aléas. À cet effet, il serait plus avantageux que le conseil régional désigne, précisément en fonction de cet objectif, un représentant au sein du conseil d'administration de chaque établissement. Nous croyons de plus qu'il serait vraiment conforme à l'économie de notre régime que l'on confie cette tâche à l'organisme qui, de par sa mission, a un tel mandat, plutôt que de favoriser la promotion de la complémentarité d'une façon confuse et douteuse par la base.

Quant à la désignation des personnes représentant les conseils régionaux, notre mémoire et son annexe proposent une démarche précise. Notre proposition limite donc la participation des gens de l'intérieur, soit du réseau ou de l'établissement à cinq sièges. Soulignons incidemment que nous croyons que des principes administratifs sains et l'expérience passée militent en faveur du maintien du directeur général comme membre, mais sans droit de vote. (12 h 15)

Quant à la complétion des sièges qui devraient être accordés aux gens de l'extérieur, nous sommes d'avis qu'il y aurait lieu de consacrer l'apport significatif des corporations hospitalières et des citoyens pris sur une base individuelle.

C'est ainsi que nous proposons au législateur, dans le cas de centres hospitaliers ayant une corporation, de maintenir leur représentation à quatre membres et de réserver deux sièges à des personnes élues par un collège électoral constitué d'une assemblée de citoyens et non plus d'usagers. Cette proposition présuppose d'autres modifications aux dispositions actuelles du chapitre 48(S-5) que nous explicitons dans notre mémoire et son annexe.

Enfin, bien que la majorité des établissements hospitaliers soit dotée de corporations, nous estimons que, dans le cas où il y a absence de corporation, le nombre de sièges réservés aux citoyens devrait être de quatre. Les représentants des corporations et ceux désignés par le collège électoral des citoyens que nous proposons constituent deux façons pour l'hôpital de s'ancrer dans sa communauté. Le bénévolat des représentants des corporations, leur désintéressement en même temps que leur expertise en font des membres fort valables, mieux, indispensables de nos conseils d'administration.

Dans le contexte que nous connaissons aujourd'hui, les établissements hospitaliers devront, pour atteindre leurs objectifs à l'égard du bien-être et du mieux-être, tant des populations que des individus qu'ils desservent, rentabiliser, bien sûr, leurs investissements mais aussi redéfinir leurs approches. Non seulement devront-ils mieux faire mais aussi faire différemment. Il faudra y pratiquer une médecine dynamique et renouvelée qui, tout en demeurant axée sur la personne, devra s'ouvrir encore plus aux perspectives communautaires de la santé. Mais pour que ceci se réalise, le centre hospitalier doit être doté des moyens nécessaires. Nous croyons que le modèle d'organisation médicale actuel ne cadre plus avec les responsabilités confiées aux établissements des années 80 et confirmées par ce projet de loi. De l'avis de l'Association des hôpitaux du Québec, les établissements hospitaliers ne doivent plus être des organismes de support à la pratique médicale individuelle mais des entreprises collectives de santé. Pour ce faire il s'avère absolument nécessaire que l'ensemble des ressources impliquées dans leur fonctionnement soit intégré à la poursuite de leur mandat. Il ne fait nul doute donc que l'objectif d'intégrer les médecins à l'organisation hospitalière constitue une nécessité de premier ordre et un objectif majeur.

Intégrer les médecins à l'entreprise hospitalière ne signifie pas qu'il faille tout

simplement les rendre "connaissants" des impacts économiques de leur pratique. Il faut aller au-delà de cette sensibilisation et rendre les médecins responsables auprès des autorités ultimes de l'organisation.

À la base de plusieurs difficultés que le monde hospitalier vit depuis de nombreuses années se retrouve ce problème que certains qualifient de bicéphalie hospitalière, de parallélisme des structures et des autorités.

Nos espérances étaient grandes, alors que nous anticipions ce projet de loi, de voir se redresser cette situation. Tel n'est pas le cas. Loin de corriger ce problème d'une extrême ampleur, le projet de loi 27 l'accentue en rendant les chefs de départements cliniques redevables de leurs fonctions élargies au Conseil des médecins et dentistes. Celui-ci voit son mandat s'étendre au point où il devra dorénavant adopter, sans référence à l'autorité du conseil d'administration, des normes sur la fourniture des soins requis et l'utilisation des ressources disponibles, le tout accompagné de possibles sanctions administratives qui, elles, doivent être approuvées par le conseil d'administration. Cette intention, telle que libellée, est inacceptable. Non pas que nous nous opposions au nouveau rôle du chef de département clinique, non pas que nous opposions à l'implication du Conseil des médecins et dentistes dans la formulation de ces normes ou encore dans celle des sanctions qui en découlent. Avant tout et fondamentalement, nous n'acceptons pas que tout ceci se fasse en parallèle et hors de l'autorité du conseil d'administration; en parallèle et hors de l'autorité hiérarchique qui en découle. Nous n'acceptons pas que les conditions régissant l'utilisation des ressources qui nous sont confiées nous échappent. Ce sont les conseils d'administration qui, ultimement, sont responsables de tout ce qui se passe à l'intérieur de ces murs, pas le CMD.

Nos propositions sont d'abord de modifier les responsabilités du directeur des services professionnels. Sa première responsabilité devrait être de diriger, coordonner et surveiller les activités des chefs de départements médicaux et dentaires de l'établissement. Notre vision de son rôle limite aussi ses responsabilités aux seuls professionnels médecins et dentistes. Comme principe général d'organisation et dans l'état; actuel des choses, il ne saurait être question de placer sous l'autorité administrative du directeur des services professionnels, s'exerçant par la voie des chefs de département, d'autres catégories de professionnels que les médecins et dentistes.

Quant au conseil des médecins et dentistes, il devrait, en plus d'assumer pleinement les responsabilités que lui confie déjà la loi, assister dans ses fonctions le directeur des services professionnels, notamment dans cette fonction très importante de préparer des normes sur la fourniture des soins requis et sur l'utilisation des ressources.

Ce modèle d'organisation médicale, contrairement au modèle dépassé de la hiérarchie des pairs, loin d'amplifier les problèmes que nous vivons, aidera véritablement à les résoudre. Il associera administrateurs et médecins à une tâche commune. Nous tenons à cette association et nous en anticipons la fécondité.

De l'avis de l'Association des hôpitaux du Québec, le projet de loi constitue un pas additionnel posé par le gouvernement vers la régionalisation de son réseau et, s'il ne tend pas à développer une très grande autonomie pour les conseils régionaux, il leur fait quand même jouer un rôle consultatif plus élargi. Soulignons, incidemment, leur contribution au pouvoir du ministre en matière de fusion d'établissements, pouvoir nécessaire dans le contexte de certaines situations qui ressemblent à des noeuds gordiens qu'il faut trancher.

L'approche du projet de loi en matière de structuration du conseil d'administration des conseils régionaux nous apparaît aussi intéressante. L'option retenue par le gouvernement de maintenir les représentants des maires, d'assurer celle des représentants des groupes socioéconomiques, des organismes bénévoles, des universités et cégeps, nous semble pertinente, de même que celle qui permet l'accession des personnes n'étant pas employées ou n'oeuvrant pas dans les établissements du réseau, ces personnes étant toutefois nommées par eux.

En fait, nous considérons de bon aloi que les directions hospitalières déjà présentes au sein des importantes commissions administratives existant dans les conseils régionaux ne se retrouvent pas dans leurs conseils d'administration. Par contre, nous ne pouvons souscrire à cette intention d'accorder un siège aux conseils des médecins et dentistes des établissements de la région pour le même principe. L'objectif sous-jacent du gouvernement d'associer aux conseils régionaux les médecins d'un territoire pourrait être retenu dans une forme plus acceptable et plus contemporaine. De façon précise, nous recommandons que soit constitué, dans chaque conseil régional, un conseil consultatif des personnels médicaux, dentaires et clinique de la région. Ce conseil consultatif devrait avoir pour mandat d'aviser le conseil d'administration du conseil régional dans toutes les matières d'intérêt professionnel et relatives à la planification, l'organisation et l'évaluation des services de santé et des services sociaux de la région. Notre mémoire et son annexe précisent les modes de désignation de ces personnes.

Dans un autre ordre d'idées, notre

association tient aujourd'hui a réitérer son désaccord à l'égard d'un mandat que se sont vu accorder les conseils régionaux et que ce projet de loi précise, soit celui de les engager à titre exclusif dans la production de biens et services communs. Nous sommes d'avis qu'afin d'exercer de façon plus adéquate leurs fonctions fondamentales en matière de planification, programmation et évaluation des services de santé et des services sociaux, les conseils régionaux doivent éviter de s'éparpiller dans l'accessoire que constitue pour eux la production de biens et services. L'Association des hôpitaux du Québec en ces matières recommande donc que les conseils régionaux maintiennent leur mandat de promotion à l'égard du partage des services et de leur mise en commun et qu'ils se voient aussi ajouter de façon spécifique un mandat d'assister à la mise sur pied de corporations de réseau constituées en vertu du chapitre 48(S-5), dont l'objet serait d'assurer effectivement la fourniture de ces biens et services.

D'autre part, nous comprenons qu'à défaut de I'existence de telles corporations, les conseils régionaux agissent de façon supplétive à l'occasion dans la fourniture de ces biens et services.

Ce projet de loi continue d'amplifier le pouvoir exécutif et technocratique de l'État. Notre mémoire illustre d'ailleurs de façon particulière cette opinion. Plutôt que de s'immiscer dans les moindres replis de l'organisation hospitalière, le gouvernement devrait proposer dans la loi de grandes orientations en ce qui concerne l'organisation des établissements et, par voie réglementaire, se limiter à mettre de l'avant des normes générales. L'ensemble des dispositions que ce projet de loi met de l'avant, en particulier à l'article 94, nous semble d'ailleurs se concilier difficilement avec les exhortations à la créativité et à l'imagination que l'on réclame des administrations hospitalières.

En conclusion, nous retenons que ce projet de loi constitue sous plusieurs de ces aspects une intention législative extrêmement positive, puisque, effectivement, il s'attaque avec courage à l'important problème que constitue la répartition territoriale des effectifs médicaux. Il propose des changements majeurs au chapitre 48, notamment quant à l'admission des médecins à la pratique hospitalière et, quoique nous différions profondément d'avis sur les modalités, il veut favoriser leur intégration à la vie de l'hôpital.

Ce projet de loi ouvre aussi la porte des conseils d'administration des établissements aux bénéficiaires et aux bénévoles, ce à quoi nous souscrivons chaudement.

Quant aux importantes réserves et même aux oppositions que nous avons sur différents articles, nous n'y reviendrons pas de nouveau. Bien que nous soyons toujours d'avis que ce projet de loi ne devrait pas être adopté à la course, que les questions qu'il soulève devraient faire l'objet de consultations plus élargies et approfondies, qu'il devrait être scindé, compte tenu du caractère non urgent de plusieurs de ses dispositions, notre dernière recommandation porte sur la prudence qui devrait animer le législateur. Il serait malheureux, pour tous les Québécois et ceux qui oeuvrent dans ce régime de santé et de services sociaux, que ce projet de loi devenu loi accentue des tensions plutôt qu'il ne favorise des consensus. En dépit des éléments très positifs que nous avons nommément soulignés, sa facture actuelle reste inquiétante quant aux effets auxquels elle peut conduire.

Le Président (Bordeleau): Merci, M. Leclerc. Pour les questions, M. le ministre des Affaires sociales?

M. Johnson (Anjou): Oui. Je voudrais d'abord remercier l'Association des hôpitaux du Québec qui, comme d'habitude, avec la qualité des ressources qu'on lui connaît, a produit un mémoire assez remarquable, à la fois par la qualité, la compréhension et les objectifs que l'association poursuit, et qui, à l'occasion, nous amène évidemment à frotter des conceptions un peu différentes de certaines choses.

J'aurais quelques questions que j'adresse initialement à l'association et je présume que peut-être que le directeur répondra ou d'autres personnes, selon le cas. À l'égard de cette notion des plans d'effectifs régionaux, qui est une idée, je sais, de l'AHQ depuis un certain nombre d'années, j'aimerais l'entendre élaborer son idée un peu là-dessus et plus spécifiquement sur cette question du développement des cliniques privées sur le territoire adjacent, auprès des hôpitaux. Comment verrait-elle cela? Je comprends l'objectif, mais je serais curieux d'entendre l'AHQ, sur le comment. Je rappellerai simplement que le projet de loi ne prévoit pas spécifiquement le contrôle sur le développement de tels établissements, bien qu'un ensemble de mesures qui peuvent être prises sur un plan administratif, à travers la notion de plans d'effectifs et dans le cadre de la négociation, puissent faire en sorte qu'on favorise encore une fois par une série de moyens la répartition, mais, si je comprends bien, l'association voudrait qu'il y ait une approche interventionniste plus claire à ce niveau-là.

M. Choinière (Normand): M. le ministre, au niveau des plans d'effectifs médicaux, on voit là, à moyen terme et à long terme, la solution au problème des effectifs médicaux

en région périphérique. C'est une solution que nous avons réclamée depuis un bon nombre d'années et qui est absolument indispensable, si on ne veut pas régler de façon coercitive les problèmes de la répartition des effectifs médicaux, comme, par exemple, des pouvoirs qu'est obligé de se donner le ministre pour assumer ses responsabilités, pour faire en sorte que les effectifs médicaux se retrouvent à la grandeur du Québec.

Nous, on dit que si on tient compte des effectifs médicaux qu'il y a dans les centres hospitaliers, qu'on oublie les autres types d'établissements et qu'on oublie également toute la question de la pratique privée, des cabinets privés, vous comprenez que, dans une région comme la Côte-Nord, par exemple, il pourrait se retrouver quinze ou seize médecins à Sept-Îles, mais, si ces gens-là sont tous en cabinet privé, la pratique institutionnelle n'est pas couverte et l'urgence n'est pas nécessairement couverte. C'est pour ça qu'on le voit dans l'ensemble. On pense que, si on veut apporter une solution globale, il faut absolument couvrir l'ensemble du territoire, pas seulement la pratique qui se fait au niveau du centre hospitalier. Je comprends que c'est un pas qui est intéressant, mais on aimerait que le gouvernement fasse un pas de plus. (12 h 30)

Vous dites: Comment est-ce que ça pourrait se faire? Je pense que ça pourrait se faire avec la formule des permis d'exploitation, en tenant compte de la complémentarité du secteur public et du secteur privé. Je pense que c'est la seule façon dont ça puisse se faire. Les gens qui devraient avoir la responsabilité d'élaborer ces plans, ce sont les gens qui connaissent bien le territoire, ce sont les gens qui ont une responsabilité au niveau de la complémentarité; je pense que ce sont les conseils régionaux.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Nadeau.

M. Johnson (Anjou): J'aurais peut-être...

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): ... une ou deux autres questions rapidement. J'aimerais qu'on explicite le chapitre auquel vous avez consacré de nombreuses pages de votre mémoire, notamment toute cette question de l'harmonisation de l'activité du médecin dans l'établissement avec les objectifs de l'établissement. Il m'arrive, à l'occasion, d'utiliser les mots intégration à l'établissement. Je pense que vous décrivez une intégration très claire, avec une ligne hiérarchique, un lien de subordination à l'égard de l'administration du médecin, le projet de loi prévoyant plus une harmonisation de ces secteurs. J'aimerais vous entendre expliquer ça, notamment, quant au rôle du directeur des services professionnels.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Nadeau.

M. Nadeau (Jacques): Oui. M. le ministre, depuis un bon nombre d'années, vous n'êtes pas sans savoir que les établissements de santé sont dirigés par deux lignes parallèles. D'un côté, il y a l'organisation médicale et, d'un autre côté, il y les gestionnaires. On n'est pas d'accord sur les moyens que vous prenez, mais on est d'accord sur l'intention. On veut faire en sorte que les médecins, les administrateurs et le gouvernement, tout ce monde-là soit intégré à l'organisation, c'est-à-dire travaille en fonction des mêmes objectifs.

La façon dont vous donnez des responsabilités additionnelles aux chefs de département à l'égard de l'utilisation des ressources, sous l'autorité du Conseil des médecins et dentistes, parce qu'il doit adopter ces normes, sans référence au conseil d'administration, ça accentue complètement la ligne parallèle qui existe. On dit que cette responsabilité, pour favoriser une unité de gestion, pour être certain que tout le monde travaille aux mêmes objectifs à l'intérieur des boîtes... Vous savez que, dans la période qu'on traverse, on a à remettre en cause certains objectifs dans les établissements. Les établissements ne pourront pas tout faire, comme c'était le cas il y a quelques années alors qu'on était en grande période de développement. On est obligé de faire des choix.

Je pense que tous les professionnels, y compris les médecins, doivent travailler dans le sens de ces choix. Pour ce faire, on dit que celui qui doit être responsable des normes, c'est le directeur des services professionnels. Évidemment, ce n'est pas lui qui va les faire, c'est bien sûr, mais il est responsable de les élaborer. Comment va-t-il faire? Il va aller voir les chefs de département et ceux-ci vont aller voir les chefs de service, parce que même les chefs de département, le chef de chirurgie, par exemple, n'est pas capable d'élaborer des normes en neurochirurgie. Il faut absolument qu'il consulte des experts là-dedans.

On dit que le directeur des services professionnels va être responsable, que les chefs de département clinique vont relever de lui. À ce moment-là, il n'y a pas de conflit d'intérêts possible entre un chef de département qui travaille avec des confrères qui divisent souvent un pool avec lui, tout ça. C'est indépendant de ça. Le directeur

des services professionnels, par le biais du directeur général, va soumettre ces choses au conseil d'administration. C'est là qu'il se fait une unité de gestion à la grandeur de la boîte. Je pense que l'unité de gestion est absolument indispensable.

Écoutez, l'implication du CMD, il ne faut pas l'oublier aussi. Le Conseil des médecins et dentistes va, quand même, collaborer avec le directeur des services professionnels à l'établissement de ces normes; il va continuer d'évaluer la qualité des actes médicaux et dentaires qui se posent dans le centre et il va en faire des rapports au conseil d'administration.

M. Johnson (Anjou): Je pense qu'on aura l'occasion de revenir, notamment au cours de la deuxième lecture, et sûrement lors de l'étude article par article, sur ces questions qui, finalement, ont un caractère assez complexe, mais dont le directeur, à la suite du président de l'AHQ, a finalement bien résumé les deux pôles et les deux approches essentielles. Est-ce qu'il y a moyen de réconcilier ces deux pôles et ces approches sans s'imaginer que c'est la quadrature du cercle? Je le souhaite. Il faut, d'une part, être capable de permettre aux médecins de développer une forme de solidarité avec l'établissement qu'ils ont peine à développer depuis un certain nombre d'années pour un tas de raisons, mais par ailleurs, de respecter ces notions centrales qui sont le fait de l'acte individuel, professionnel, engageant la responsabilité d'un individu à l'égard d'un patient. C'est toute cette difficulté qui est à la source de cette dichotomie que vous avez évoquée. Je me rends compte que vous tentez, à travers le DSP, si je comprends bien, de faire une espèce de jonction à ce niveau.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Nadeau.

M. Nadeau: Si vous voulez me permettre d'ajouter un petit mot, M. le ministre. Il ne s'agit pas, pour les administrateurs, de prendre la responsabilité des médecins et de faire de la médecine. Les chefs de département qui vont être sous l'autorité des DSP sont des médecins. Le DSP, c'est aussi un médecin.

M. Johnson (Anjou): Finalement, deux dernières choses avant de céder la parole à ma collègue. J'aurai donc pris à peu près dix minutes.

Mme Lavoie-Roux: ...

M. Johnson (Anjou): Oui. Deux dernières choses au niveau des CRSSS et de l'achat en commun - c'est un débat qu'on connaît bien, notamment dans la région de Québec - et du pouvoir de ceux-ci. Je vois un danger à ce que suggère l'AHQ. Dans le fond, les achats en commun, le but n'est pas très compliqué, ce n'est pas très philosophique ni idéologique, c'est de s'arranger pour faire des économies quand on achète de la literie et des produits. À l'occasion, cela peut conduire à certaines variantes qui frisent l'absurde mais, globalement, cela permet de réaliser des économies considérables sur des achats de 550 000 000 $ dans le réseau des affaires sociales. En épargnant 2% ou 3% dans ces affaires, ce ne sont pas exactement des cacahuètes, cela permet peut-être de consacrer cet argent à autre chose, ou enfin, de ne pas être obligé de restreindre d'autres activités. Notre objectif est nettement partagé. La preuve, c'est que beaucoup d'hôpitaux l'ont fait sur une base volontaire.

Le problème qui se pose, et je le soumets à l'AHQ, c'est qu'à partir du moment où vous avez une politique d'achat en commun, qui se fait à l'aide de fonds publics, dans une région donnée, et que cette politique peut affecter adversement des fournisseurs, carrément des emplois dans certains cas, cela se fait avec des fonds publics. L'intérêt pour nous, je dois vous dire l'objectif, pour nous, de confier cela au Conseil régional de la santé et des services sociaux, c'est que quelqu'un en répond. La création d'organismes indépendants formés avec une charte de différents hôpitaux, un groupe qui va faire des achats en commun, qui a les mêmes objectifs que nous, mais qui n'a pas à répondre devant qui que ce soit de l'utilisation qu'on fait de ces fonds - je ne prétends pas que l'utilisation en est irresponsable, bien au contraire, c'est dans une recherche de meilleure gestion - les conséquences sont parfois des conséquences qui deviennent d'ordre public à cause du nombre limité de fournisseurs. Il y a une personne qui peut en répondre au bout de la ligne, c'est celui qui taxe. À travers cela, il faut voir quelles sont les structures qu'on a, et parmi les structures qu'on a, il y en a ce qu'on appelle les CRSSS. Le ministre des Affaires sociales est obligé de répondre des CRSSS devant l'Assemblée nationale et ses différentes commissions, au moment où il dépose le rapport annuel. C'est le problème central qui est là-dedans.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Nadeau.

M. Nadeau: M. le ministre, ce qu'on vous propose, ce sont des corporations sans but lucratif, mais incorporées en vertu du chapitre 48. Ce qui fait que cela donne carrément la responsabilité au ministre, que c'est le ministre qui en répond, c'est que ce sont des corporations qui sont incorporées en vertu du chapitre 48, d'une part. D'autre part, l'autre élément que vous soulevez, c'est

de voir les CRSSS qui s'occupent d'en faire la promotion. Ils sont prévus dans ces corporations, on les met là-dedans. On pense que c'est essentiel qu'ils le soient également. Il faut dire une chose, M. le ministre, c'est que si on donne aux administrateurs la possibilité de gérer eux-mêmes leurs achats, vous allez drôlement les motiver. Je parle des achats, mais j'implique tous les services en commun qu'on s'est visés.

M. Johnson (Anjou): Je comprends ce que vous voulez dire, d'autant plus que j'entends souvent des médecins parler ainsi à l'égard de beaucoup de choses qui se passent dans l'établissement. C'est évident que plus on est impliqué, plus on est motivé.

M. Nadeau: Et on veut les impliquer.

M. Johnson (Anjou): C'est le problème d'un système très complexe avec beaucoup d'intervenants et avec beaucoup de... D'accord.

Finalement, sur le pouvoir technocratique qui est l'appellation générale qu'on peut donner au pouvoir réglementaire, je veux simplement, au départ, rassurer M. Leclerc quant à certaines de nos intentions. Il verra, en cours de route, qu'on aura à préciser des choses. On peut dire qu'il y a des pouvoirs réglementaires de deux ordres qu'on se donne dans ce projet de loi et ils ont de toute façon tous les deux la même caractéristique. D'une part, il y a le pouvoir délégué notamment à l'égard du Conseil des médecins et dentistes où il ne s'agit pas de donner des pouvoirs au ministre ou au gouvernement de déterminer des cas d'espèce, mais il s'agit de déléguer, dans le cadre d'un règlement général, certains pouvoirs à ces structures, que ce soit le Conseil des médecins et dentistes dans certains cas, que ce soit le Département de santé communautaire dans d'autres, etc. Je pense que c'est une confusion qui est venue, mais remarquez qu'elle n'est pas dans votre mémoire cependant.

Vous avez vu juste sur bien d'autres choses cependant, c'est-à-dire que vous avez visé juste sur bien d'autres choses. C'est un lapsus. Deuxième caractéristique des règlements, je ferai remarquer que beaucoup de ces règlements existent déjà. Le règlement de 1973, publié à la suite de la réforme Castonguay-Nepveu, qui est une brique considérable, couvre une diversité absolument phénoménale de sujets, comme vous le savez, mais certaines des assises juridiques sont rentrées carrément dans ce que j'appellerais la culture hospitalière. On respecte certaines choses quant au rôle de certaines personnes, mais il n'y a rien qui, dans la loi, dans certains cas carrément, ne valide ces règlements qui ont été adoptés alors qu'il allait sans dire, dans bien des cas, qu'il fallait faire ces règlements et tout le monde les respecte.

En ce sens, il faut bien voir que certains articles un peu de portée générale ont comme objectif de permettre un encadrement de certains de ces règlements. Mais j'aimerais vous entendre sur certains des pouvoirs spécifiques qui vous inquiètent au niveau du pouvoir réglementaire.

M. Nadeau: M. le ministre, pour n'en prendre qu'un, l'élément X, je pense qu'il est très clair celui-là: Le ministre peut, par règlement, appliquer toute autre mesure utile à l'application de la présente loi. Vous comprenez, M. le ministre, que c'est aussi vaste que l'enceinte dans laquelle on est.

M. Johnson (Anjou): C'est une reprise d'un article général qu'on retrouve dans de nombreuses lois depuis de nombreuses années, mais on comprend.

M. Nadeau: C'est très large. M. le ministre, pour la première partie de votre argumentation en ce qui concerne le Conseil des médecins et dentistes où vous pensez à des pouvoirs particuliers, nous disons: Si c'est le cas et si c'est vrai que c'est important, on aimerait beaucoup que ces choses se retrouvent dans la loi. Le cas échéant, on connaîtrait très clairement les intentions du ministre.

Si vous me permettez de répéter. En ce qui concerne les pouvoirs délégués au Conseil des médecins et dentistes, vous dites qu'il pourrait peut-être y avoir des choses importantes qui pourraient être mises là-dedans. Nous disons: Si c'est vrai, M. le ministre, que c'est important, on aimerait que ce soit dans la loi et, le cas échéant, on connaîtrait très clairement les intentions du ministre.

M. Johnson (Anjou): Je pense que c'est une remarque fort pertinente à l'égard de X, comme à l'égard de l'autre pouvoir qui touche les Conseils de médecins et dentistes, d'autant plus que les intentions encore une fois, c'est souvent une question de technique juridique qui est utilisée. La tendance des législateurs, c'est d'en mettre large, le plus large possible; c'est pour ça qu'il y a des commissions parlementaires pour qu'on vienne nous dire parfois qu'il y en a trop large.

M. Nadeau: II y a le point k), M. le ministre, la question des urgences.

M. Johnson (Anjou): Pardon?

M. Nadeau: II y a le point k) également, à savoir que le ministre puisse définir les urgences. Il y a la question des services...

M. Johnson (Anjou): Ah oui...

M. Nadeau: ... et toutes ces choses-là. On est d'accord que le ministre établisse des normes générales, mais qu'il laisse un peu de place aux administrateurs. (12 h 45)

M. Johnson (Anjou): On vous répondra là-dessus. D'abord je dois vous dire que, déjà, avec 1000 établissements dans le réseau et 150 fonctionnaires à la direction des services de santé, je ne tiens pas particulièrement à ce qu'on en ait plus à assumer. Mais il reste que, sur certaines orientations et certaines choses qui relèvent notamment du péril à la santé publique, la notion par exemple d'urgence ici, on le verra en cours de route, est beaucoup plus dans son acception de la catastrophe naturelle, du désastre naturel: inondation, feu, etc. C'est ce qui est visé par ce type d'article, encore une fois, qui valide beaucoup de règlements, mais la formulation qui a été utilisée dans la loi pour les valider peut prêter à peut-être une certaine largeur, dont nous verrons à discuter lors de l'étude article par article sûrement.

M. Nadeau: Est-ce que je peux, M. le ministre, sur la question des urgences, juste vous montrer une phrase qui termine le paragraphe k), ce que peut être un cas d'urgence et, s'il y a lieu, les soins qu'il comprend?

M. Johnson (Anjou): Je vais vous donner l'exemple précis qui est visé par ça et qui vient d'une directive, si je comprends bien, du ministère, qu'on voudrait asseoir juridiquement. Est-ce qu'on ne doit pas considérer - je pense qu'on doit le considérer comme responsable du ministère qui a la vocation de la mission de santé - les cas de viol comme des urgences, les cas d'intoxication aiguë comme des urgences? On sait que dans certains établissements, pour une raison ou pour une autre, on a choisi ou on n'a pas une approche qui vise à considérer ces situations comme des situations proprement d'urgence. Et ça, ce n'est pas seulement une détermination professionnelle.

Encore une fois, il ne s'agit pas de rentrer dans le cas d'espèce, il s'agit d'asseoir un pouvoir pour le ministère, d'établir, par directives ou règlements, qu'il doit y avoir, sans présumer de son contenu, l'armature nécessaire pour recevoir les cas de viol et les cas d'intoxications aiguës, et que ça doit être traité comme des urgences, au niveau des urgences. C'est l'intention qu'il y a derrière ça. Encore une fois, je pense que c'est une remarque qui était tout à fait juridique.

M. Nadeau: Dans le cadre des normes générales, on n'aurait pas d'objections, M. le ministre. Maintenant en ce qui concerne les catastrophes que vous soulevez, je pense bien que la loi sur la santé publique, vous donne dans ces cas-là pas mal de pouvoirs. En tous cas, c'est à regarder.

M. Johnson (Anjou): Mais il faut qu'il y ait épidémie.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président, moi aussi je veux remercier l'Association des hôpitaux du Québec pour son mémoire, qui est quand même un mémoire très sérieux et qui met de l'avant des observations très pertinentes. Pour faire suite à tout le problème de l'articulation, je dirais, des responsabilités prévues pour les médecins à l'intérieur de l'unité clinique ou du département clinique et leur articulation à travers le CMD et la direction, est-ce que le CMD n'a pas une relation avec le directeur général de l'établissement? Est-ce que ce n'est pas articulé à ce niveau-là?

M. Nadeau: Le Conseil des médecins et dentistes relève du conseil d'administration. Au niveau de l'exécutif du Conseil des médecins et dentistes, le directeur général est un membre de l'exécutif.

Mme Lavoie-Roux: Le directeur général est là.

M. Nadeau: C'est ça. Comme le directeur des services professionnels d'ailleurs.

Mme Lavoie-Roux: Quelle est exactement votre crainte quant au fait de donner une certaine autorité - enfin, ce n'est peut-être même pas une autorité - ou certaines responsabilités aux médecins au niveau du département clinique?

M. Nadeau: On n'a pas d'objection à donner certaines responsabilités au niveau des départements cliniques, on est absolument d'accord avec cela, sauf qu'on veut que ces responsabilités s'exercent sous l'autorité du directeur des services professionnels et non du Conseil des médecins et dentistes; c'est la seule différence. Nous, on pense que l'autorité ultime à l'intérieur de la boîte, c'est le conseil d'administration, et la hiérarchie pour y arriver passe par le directeur des services professionnels et le directeur général.

Mme Lavoie-Roux: Vous ne pensez pas que vous pouvez y arriver par le truchement du CMD où se retrouve le directeur général?

M. Nadeau: C'est au niveau de l'exécutif, ça. Ce ne sont pas eux qui acceptent les normes, ce ne sont pas eux qui déterminent les normes.

Mme Lavoie-Roux: Au sujet de ces fameuses normes, quels sont les efforts... parce que nous parlerons beaucoup de normes cette semaine et la semaine prochaine.

M. Nadeau: Je ne sais pas si j'ai été assez clair. Le directeur général ne fait pas partie du Conseil des médecins et dentistes, que ce soit bien clair. Il siège au comité exécutif mais il ne fait pas partie du Conseil des médecins et dentistes.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, au sujet des fameuses normes dont on va beaucoup parler cette semaine et la semaine prochaine, si on se rend à l'étude du projet de loi article par article, quels sont les efforts qui ont été déployés dans les hôpitaux jusqu'à maintenant pour établir ces normes-là? Tout le monde parle de normes, mais est-ce qu'il y en a d'établies, est-ce que c'est le CMD qui avait la fonction de les établir jusqu'à maintenant?

M. Nadeau: Cela dépend des centres hospitaliers. Moi, j'ai vécu dans trois centres hospitaliers et je peux vous dire que dans ces centres hospitaliers les normes étaient préparées par le Conseil des médecins et dentistes, avec le directeur des services professionnels et les chefs de département, et elles étaient acceptées par le conseil d'administration de l'établissement.

Or, il y a un paquet de normes qui existent actuellement dans le réseau. Je ne peux pas vous dire qu'il y en a partout et qu'elles sont toutes bien faites, je pense que c'est à voir et à refaire, et c'est excellent qu'on en parle, mais cela a été accepté, dans bon nombre de cas, par le conseil d'administration. Je ne dirai pas partout, mais dans bon nombre de cas. Moi, dans les établissements où j'ai vécu, c'est comme ça que cela fonctionnait.

Mme Lavoie-Roux: Cela n'apparaît pas suffisant puisqu'on dit maintenant: II faut le faire par l'intermédiaire du département clinique. Est-ce cela qu'il faut conclure?

M. Nadeau: C'est qu'elles sont adoptées par le Conseil des médecins et dentistes à l'heure actuelle et non par le conseil d'administration. Nous, on veut qu'elles soient adoptées par le conseil d'administration, préparées par le directeur des services professionnels, faites en consultation avec les chefs de départements, avec les chefs de service, avec le Conseil des médecins et dentistes et adoptées par le conseil d'administration. C'est ce qu'on suggère.

Une voix: Je pense que M. Leclerc a un complément de réponse.

M. Leclerc: C'est qu'en plus des normes de qualité, la loi prévoit les normes d'utilisation des ressources. C'est bien important de voir que, cela ajouté, ça change le contexte.

Mme Lavoie-Roux: En fait, ça nous amène à l'article 85 qui, lui, dit, et j'aimerais avoir votre réaction sur cela: "Le conseil d'administration d'un centre hospitalier accepte la candidature du médecin en tenant compte du plan d'organisation et du coût engendré par l'engagement de ce médecin ou dentiste." Quelle est votre réaction à cet article-là? Là, c'est en fonction des ressources financières de l'hôpital et ça vaut également pour les normes à l'intérieur des départements cliniques?

M. Nadeau: On est d'accord sur cet article. Que l'on tienne compte, dans l'admission des médecins, du plan d'effectifs médicaux, c'est essentiel. D'ailleurs on en prône, un plan d'effectifs médicaux, donc il faut en tenir compte. Il faut aussi tenir compte des ressources qui sont disponibles dans l'établissement. On est entièrement d'accord sur cette orientation.

Mme Lavoie-Roux: Vous ne croyez pas qu'à ce moment-là, si l'engagement d'un médecin... Que vous teniez compte des effectifs, c'est déjà en vigueur dans les hôpitaux universitaires, alors là-dessus... Mais si l'engagement d'un médecin, parce qu'il est un spécialiste ou est surspécialisé, engendre des coûts plus hauts, est-ce que cela veut dire qu'à ce moment-là il devient soumis aux normes strictement économiques quant à la qualité des services qui pourraient être offerts?

M. Nadeau: Ce qu'on comprend c'est que le plan des effectifs médicaux est recommandé par le Conseil des médecins et dentistes et accepté par le ministre, alors on suppose que si le ministre accepte un plan d'effectifs médicaux qui contient telles sortes de catégories de médecins, il va accepter de mettre le budget en conséquence, il va mettre les ressources en conséquence.

Mme Lavoie-Roux: Vous ne croyez pas qu'un article comme celui-ci puisse venir limiter la qualification d'un médecin parce que tel médecin va coûter plus cher qu'un autre?

M. Nadeau: Non, je ne le pense pas. À

partir du moment où il y a un plan des effectifs médicaux qui est fait, l'embauche va se faire à partir de ce plan. Je dis l'embauche, c'est l'acceptation, pardon, parce que l'embauche c'est aller pas mal vite.

C'est l'acceptation des médecins, on ne veut pas les embaucher.

Mme Lavoie-Roux: Puisqu'on parle des effectifs qui désormais seraient établis pour tous les centres hospitaliers, alors que c'est la loi no 84 qui a déjà établi ces plans d'effectifs pour les hôpitaux universitaires ou les hôpitaux d'enseignement, est-ce que vous avez une opinion sur le fonctionnement de ce contingentement des effectifs dans les hôpitaux universitaires? Est-ce que cela a été une expérience heureuse parce qu'à ce moment-ci on propose de l'étendre à tous les hôpitaux? C'est bien ce que je comprends dans l'article 49?

M. Nadeau: On ne peut pas l'évaluer à ce moment-ci parce que ce n'est pas en vigueur dans bien des endroits, vous savez. C'est vraiment récent. Je ne suis pas en mesure de porter une évaluation sur cette expérience qui est très nouvelle. Ce n'est pas en fonction dans un bon paquet de centres hospitaliers.

Mme Lavoie-Roux: Alors, qu'on l'étende à tous les hôpitaux. Vous dites: On n'a même pas de données sur... Je comprends, le temps n'a pas été très long et il s'agit d'une période de deux ans. Est-ce qu'il y a quand même des indications selon lesquelles on doit demain l'étendre à tous les hôpitaux?

M. Nadeau: Évidemment la grosse faiblesse actuellement, c'est que ces plans-là ne concernent pas l'ensemble des centres hospitaliers, ils ne s'adressent qu'à une catégorie de centres hospitaliers. C'est pour cela qu'on veut que cela s'adresse à toutes les catégories de centres hospitaliers et, en plus, à tous les types d'établissements, les autres, les CLSC qui ont des médecins, si on veut que cela aille jusque-là, et en plus on parle de toute la question de la pratique privée.

Le Président (M. Bordeleau): M. Leclerc.

M. Leclerc: Est-ce que je pourrais demander à M. Pleau de faire part de l'expérience de Québec qui, volontairement, a étendu cette chose-là?

M. Pleau (Paul): Simplement un mot, parce que, de toute façon, cela fait peut-être un an que je suis sorti de la région. Je dois dire cependant que l'exercice, quand la loi est venue en vigueur pour les institutions à caractère universitaire, dans la région de

Québec, on a demandé de faire l'exercice pour l'ensemble des hôpitaux dans la région 03. Je dois dire que c'est un exercice qui a été, je dirais, louable et qui a été intéressant pour l'ensemble des établissement. On a, à mon point de vue, décelé beaucoup de faiblesses dans la distribution des gens et cela a aussi mis en relief la situation qui prévalait, non seulement dans les hôpitaux des centres urbains, mais dans les hôpitaux en périphérie, comme Témiscouata; la région de Québec est une région quand même de 150 000 personnes. Cela a permis de découvrir un peu ce qui se passait sur le plan médical dans ces hôpitaux et, de là à dire que l'on touche et qu'on réalise les plans tels quels, il y a peut-être une autre démarche, mais cela a quand même, à mon point de vue, sensibilisé énormément de gens et il y a eu une participation très active aussi bien des médecins que des administrateurs ou des conseils d'administration. La réalisation de cela, je pense qu'elle est à venir, parce que tout cela est assez récent.

M. Nadeau: Si vous me le permettez...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Nadeau.

M. Nadeau: Je voudrais ajouter une notion, M. le Président. C'est que c'est un concept qui est extrêmement valable, qui permet de rationaliser l'organisation des effectifs médicaux, qui permet d'admettre la main-d'oeuvre en fonction des objectifs de l'établissement et non en fonction des demandes des médecins. Alors, c'est un concept qui est extrêmement valable.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, je voudrais revenir au début de votre mémoire, à la page 6. Je pense qu'un des objectifs principaux de la loi, c'est une meilleure distribution des effectifs en région éloignée. Vous dites que vous êtes satisfaits "à l'égard des dispositions contenues dans ce projet de loi en ces matières. Les incitatifs financiers nouveaux qui s'ajoutent à ceux existant déjà ou permis par la loi ou les ententes devraient contribuer à une meilleure répartition des médecins sur le territoire." D'abord, je pense que vous avez parmi vous un représentant qui, d'après ce que j'ai cru comprendre, vient d'une région plus éloignée que Montréal ou Québec. Est-ce que vous pourriez nous dire dans quelle mesure les "incitatifs" financiers ont été utilisés et aussi de quelle façon vous pensez que cet "incitatif" financier, si on peut l'appeler comme ça, dans la loi qui est devant nous, à l'article 4, va aider à résoudre le problème des régions éloignées, puisque c'est un "désincitatif" plutôt qu'un "incitatif", une forme de pénalité qu'on imposera à ceux qui

ne voudront pas aller dans les régions éloignées? On peut jouer là-dessus, à savoir si c'est un "incitatif" ou pas.

Je voudrais, d'une part, connaître ceux qui ont été utilisés et pourquoi vous dites qu'ils s'ajoutent à ceux qui existent. Ce n'est certainement pas de la même forme que ceux qui ont déjà été utilisés, je pense.

M. Nadeau: Actuellement, si on faisait le portrait de ce qui existe dans le réseau, vous verriez toutes sortes de choses dans les régions périphériques, il y a toutes sortes d'ententes. Il y a des ententes officielles et il y a des ententes qui se font en dessous de la table, c'est épouvantable le "melting pot" qu'il y a là-dedans. C'est pour ça qu'on a dit qu'il faut apporter à ça une solution qui soit uniforme dans tout le Québec.

Je prends l'exemple de Sept-Îles, il n'y a pas de problème particulier là, mais je prends seulement un exemple de région périphérique. Si on s'entend qu'on a besoin de médecins et qu'on fait un effort un peu plus grand, qu'on donne des avantages qui ne se donnent pas ailleurs, on le sait, on revient à notre établissement et on dit: À Sept-Îles, on donne telle affaire, vous devriez nous donner telle affaire. Cela n'a vraiment pas d'allure et c'est pour ça qu'il faut qu'on ait une base unique qui serve partout au Québec.

C'est bien sûr que le système qu'il y a à l'heure actuelle est un "désincitatif" pour une personne qui s'en irait dans une région non désignée. Par contre, dans le cadre de la proposition qu'on fait, ça ne serait que temporaire, parce que cette proposition est valable et continuelle à partir du moment où il y a des plans d'effectifs médicaux dans les centres hospitaliers. Cela veut dire que les gens pourraient aller dans le secteur privé et avoir des "désincitatifs", mais, dans le cadre des plans régionaux, on propose l'ensemble de la pratique médicale et, à ce moment-là, ce serait temporaire, ça irait jusqu'au moment où les plans d'effectifs médicaux existeraient. Quand ces plans seraient en vigueur, à ce moment-là, il n'y aurait plus de ces "désincitatifs". (13 heures)

Mme Lavoie-Roux: Vous pensez que cela va être suffisant pour retenir les gens en régions éloignées?

M. Nadeau: On va prendre un exemple bien clair. Supposons qu'il y a un orthopédiste qui est sur le marché et que, dans les plans d'effectifs médicaux à Montréal, il y a assez d'orthopédistes, il n'y a pas de postes libres, il n'y en a pas à Trois-Rivières, il n'y en a pas à Sherbrooke, il n'y en a pas à Québec. Il va falloir que les gens regardent ailleurs. C'est dans ce sens qu'on dit que les plans d'effectifs médicaux, à moyen terme, vont venir à combler ce besoin. C'est bien sûr qu'au niveau de la négociation il va falloir regarder un certain nombre de clauses là-dedans, parce que les gens qui s'en vont à Sept-Îles, à Baie-Comeau ou à Hauterive ne veulent pas y aller pour cinquante ans. Quand il y aura un poste qui sera ouvert à Montréal, il va falloir prévoir des choses au niveau des conventions avec les fédérations. Cela me paraît absolument essentiel.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Je vais laisser la parole à mes collègues. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): J'ai reconnu d'abord le député de Gouin.

M. Rochefort: J'aimerais aborder une question qui me semble très importante et qu'on retrouve aux pages 6 et 7 du mémoire de l'Association des hôpitaux du Québec et qui concerne l'implantation des cabinets privés de médecins sur le territoire. Vous dites, entres autres: "Nous croyons nécessaire de relier l'implantation des cabinets privés de médecins et les services qu'ils dispensent aux besoins de santé des populations. Ceci doit se faire en tenant toutefois compte des caractéristiques de ces dernières, des orientations et politiques de santé et des ressources financières disponibles". Vous ajoutez à la page suivante: Cette démarche, complémentaire à court terme, nous semble à moyen et à long termes devoir être la pierre angulaire de l'organisation médicale du Québec". Il me semble que c'est une question très importante. J'aimerais que vous développiez un peu plus à fond votre conception de cette façon de voir toute la question de l'implantation des cabinets privés sur le territoire, particulièrement dans les milieux urbains.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Nadeau. S'il vous plaît, rapprochez votre micro, on a de la difficulté à vous entendre.

M. Nadeau: C'est un peu ce que je vous disais tantôt. Les besoins socio-sanitaires varient d'une région à l'autre. Quand on va tenir compte des plans d'effectifs médicaux, tant dans le secteur privé que dans le secteur institutionnel, on va tenir compte de ces besoins particuliers. Les plans d'effectifs médicaux vont tenir compte de cela. Les plans d'effectifs médicaux vont toucher tant la pratique institutionnelle que la pratique privée. À ce moment, on va les faire dans un cadre de complémentarité entre les deux. C'est la pierre angulaire parce que ce sera la façon de desservir pour toutes les régions socio-sanitaires, les besoins médicaux de la population.

M. Rochefort: Si je comprends bien, cela mettrait fin à l'implantation

désordonnée des cliniques médicales privées. M. Nadeau: Absolument.

M. Rochefort: D'autre part, est-ce que vous avez pensé à une formule qui nous permettrait de regarder ce qu'on pourrait faire en ce qui a trait à celles qui sont déjà implantées?

M. Nadeau: On n'a pas regardé cet aspect. Je ne pense pas qu'il soit question de rétroagir, même au niveau des plans d'effectifs médicaux. On sait par exemple que, dans certaines régions à Montréal, il y a peut-être, dans certaines spécialités, trop de médecins. Je ne pense pas qu'il soit question de dire à un médecin en particulier: Toi qui es à Montréal depuis dix ans, tu vas t'en aller à Gaspé. Je ne pense pas qu'il soit question de cela, sauf que, si un orthopédiste part, on ne remplacera peut-être pas ce poste. On va attendre qu'il y ait un trou avant de combler un poste comme celui-là. Comme on le voit dans les conventions collectives avec les salariés, il s'agit de clauses grands-pères, on protège ce qui existe à partir du moment où on part.

M. Choinière: II ne s'agit pas, en pratique, de procéder par diminution des cabinets privés dans des zones urbaines comme Montréal, Québec ou ailleurs. Si on se réfère à certaines données statistiques qu'on connaît bien, entre autres la production de médecins au Québec eu égard au développement de sa population, il est assez aisé de comprendre que, dans les cinq ou six prochaines années, il pourra y avoir assez de médecins pour se rendre dans les régions plus éloignées, sans pour autant niveler par la négative les régions fortement pourvues de médecins ou densément dotées de population.

M. Nadeau: C'est clair pour nous autres; on ne revient pas sur les effectifs en place; on ne joue pas par la négative.

M. Rochefort: D'accord, je comprends cela. Sans jouer par la négative, prenons l'hypothèse, par exemple, toujours à Montréal, de l'ouverture éventuelle de CLSC additionnels sur le territoire. Est-ce que vos réflexions vous mèneraient jusqu'à essayer d'apporter au projet de loi des amendements qui viseraient à inclure des incitatifs pour que les médecins passent de cabinets privés aux CLSC qui seraient mis en place éventuellement?

M. Nadeau: Je pense que cela pourrait faire l'objet de la négociation.

M. Rochefort: Si je conclus, vous êtes favorables à ce qu'on apporte des amendements au projet de loi en ce qui a trait au contrôle d'implantation des cabinets privés?

M. Nadeau: C'est-à-dire qu'on est favorable à ce qu'il y ait des plans d'effectifs médicaux qui couvrent l'ensemble du territoire.

M. Rochefort: Incluant donc une...

M. Nadeau: Incluant la pratique privée et la pratique institutionnelle.

M. Rochefort: Merci.

Le Président (M.Gagnon): M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: J'aurais voulu vous demander une clarification sur les pages 19 et 20 de votre mémoire au sujet de la représentation des centres hospitaliers au sein des conseils régionaux.

Présentement, en vertu de la loi existante, vous avez trois représentants au sein du conseil régional et ce sera diminué à un représentant. Est-ce que je comprends bien les remarques de votre mémoire, savoir que c'est un changement qui ne vous préoccupe pas nécessairement, que vous considérez tout à fait normal, ou bien, si vous considérez que vu l'étendue des centres hospitaliers, un seul n'est pas suffisant? J'aurais voulu que vous rendiez cette question plus claire. Est-ce que ce changement vous préoccupe ou non?

M. Nadeau: Nous considérons que ce changement est bon. L'objectif qu'on vise, c'est que les conseils régionaux soient formés de gens de l'extérieur du réseau. Ce ne sont pas des gens qui travaillent dans le réseau. Alors dans ce cadre-là, on reçoit très bien la proposition mise de l'avant par le ministre. Évidemment, il y a un aspect de cette proposition qu'on n'accueille pas très bien. C'est celle d'avoir un représentant du Conseil des médecins et dentistes, parce que pour nous, le représentant du Conseil des médecins et dentistes travaille dans le réseau. Sauf qu'on est conscient qu'il peut apporter un éclairage particulier. C'est pourquoi on met un comité consultatif où, avec d'autres professionnels, il pourra apporter un éclairage qui soit plus professionnel qu'organisationnel, comme on trouve dans les diverses commissions administratives.

M. Lincoln: Je voulais vous le demander. La suggestion que vous faites par rapport aux médecins et dentistes, d'un conseil consultatif, est-ce que cela ne va pas entraîner une bureaucratie qui va être très lourde, plutôt qu'un représentant directement

au sein du conseil régional?

M. Nadeau: Mais c'est une chose qu'on retrouve déjà dans nos centres hospitaliers. C'est une formule qu'on y retrouve. Donc, ce n'est pas une formule nouvelle. Cette formule permet à des professionnels au niveau régional sous l'aspect professionnel plutôt qu'organisationnel de se faire entendre. À cet égard, il y aurait des choses intéressantes à dire. Alors, on est d'accord avec ça.

M. Lincoln: Est-ce que je peux vous poser une dernière question par rapport à l'article 94 qui préoccupe beaucoup de gens? Du reste, vous en avez parlé dans votre mémoire, à la page 23. Vous prenez, par exemple, le paragraphe I de l'article 173 modifié par l'article 94 du projet de loi. Alors, c'est l'article 94 qui donne des pouvoirs vraiment immenses au ministère. Ça va jusqu'à X, heureusement, il reste deux lettres, on pourra avoir Y et Z après.

Le ministre, d'après ce que j'ai compris, est peut-être favorable à l'idée de retirer X, qui est une clause, "open clause", qui allait donner toute sorte de pouvoirs qu'on ne saurait pas. Parmi les paragraphes de 94, est-ce que vous auriez pu situer plus spécifiquement ce qui vous gêne le plus? Parce qu'il y en a qui ont une portée très étendue et peut-être que ça nous aiderait. Il y a tellement de sous-entendus dans ce qui vous préoccupe, particulièrement, comme centre hospitalier.

M. Nadeau: Alors, elles sont situées dans le mémoire. Remarquez bien qu'on est d'accord avec le fait qu'il y ait des orientations générales, mais on dit pas aussi précises que celles qui sont là-dedans.

Ce qui nous fatigue en particulier, évidemment x), je pense que vous le comprenez, il y a également le paragraphe q), il y a 0 et 1), ce sont ceux qui nous frappent particulièrement.

M. Leclerc: M. le député, d'une façon générale pour un membre de conseil d'administration, on trouve qu'il y a toujours trop de règlements. Il y a quelque temps on avait même déposé une liste des directives nous venant du ministère et cela équivalait à deux ou trois par semaine. On doit admettre que dernièrement ils ont mis moins de directives mais, si on les retrouve toutes dans la loi, ce ne sera pas mieux.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée de L'Acadie, vous m'avez demandé de poser une dernière question.

Mme Lavoie-Roux: J'aimerais...

M. Nadeau: M. le député, il y a un autre aspect...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, d'accord, M. Nadeau.

M. Nadeau: II y a un autre aspect évidemment, c'est toute la question de la rémunération des cadres. Au niveau des salariés, je pense que les associations patronales ont un mot à dire qui est important et au niveau des cadres, si on regarde l'article tel qu'il est déposé, on n'a pas grand-chose à dire là-dedans. Je pense que, si on a un mot à dire au niveau des salariés, on en a aussi un à dire au niveau du personnel non syndiqué, on en a aussi un à dire au niveau de nos cadres.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Moi, j'aimerais avoir vos réactions à l'article 39. Évidemment, derrière ça il y a la notion d'urgence, le service d'urgence. Mais, comme administrateurs d'hôpitaux, que pensez-vous quand on vous dit qu'un conseil régional désigné par règlement peut exercer les fonctions suivantes: établir les politiques d'admission et de transfert des bénéficiaires dans les établissements de sa région, à l'exception des cas de la protection de la jeunesse, autoriser le déplacement d'un bénéficiaire vers un autre établissement quand on juge qu'il est trop engorgé, etc.? Enfin, c'est grosso modo. J'oublie le 38, la première partie de l'article .18, on en a discuté un peu tout à l'heure.

Il y aussi la fusion des établissements. Vous avez dit qu'il faut trancher les noeuds gordiens. Moi, je suis prête à admettre avec vous autres qu'il y en a des noeuds gordiens, je n'en mentionnerai pas, il y en a un qui a été discuté à l'Assemblée nationale, c'est un noeud gordien. Je trouve que c'est en donner large au CRSSS, par réglementation, parce que la journée où cela vous touchera... Est-ce prudent? Est-ce que cela ne doit pas plutôt être fait par concertation que tout à coup par le CRSSS ou le ministère, peu importe? Parce qu'il n'y a pas grande différence entre le ministère et les CRSSS au moment où on se parle; ce sont tous des gens nommés par le gouvernement, 18. Au conseil d'administration, il va y en avoir combien de nommés par le gouvernement?

M. Johnson (Anjou): Trois. Ce n'est pas exactement la dictature, trois sur dix-huit. C'est plus que deux sur vingt-deux, j'en conviens, mais c'est seulement trois sur dix-huit.

Mme Lavoie-Roux: À tout événement, quelle est votre réaction sur les conséquences? Peut-être dans l'immédiat que

cela peut résoudre les noeuds gordiens, mais, si tous les jours on se retrouvait avec des nouveaux noeuds gordiens ou qu'on identifiait des nouveaux noeuds gordiens, à quelle place cela vous mène-t-il comme réseau?

M. Leclerc: Est-ce que je peux répondre?

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Leclerc.

M. Leclerc: Une fois quelqu'un en grande autorité au ministère m'avait répondu que, pour la rationalisation, il était difficile de le faire n'ayant pas les pouvoirs légaux au ministère. J'ai suggéré qu'il y avait un bon pouvoir, il y avait celui du budget. Semble-t-il, c'est le seul moyen par la loi de permettre ces rationalisations qu'à l'occasion nous-mêmes recommandons, mais de façon volontaire, elles se font rarement.

M. Nadeau: La concertation est bien difficile à ce niveau.

M. Leclerc: Oui, M. Nadeau.

M. Nadeau: II y a trop d'intérêts en jeu à l'occasion des fusions et, si le ministre n'a pas un pouvoir, je vous dis qu'il ne s'en fera pas beaucoup, ça c'est certain. Pendant la période qu'on vit, cela va être essentiel qu'il s'en fasse à certains endroits. C'est pour cela qu'on pense que le ministre peut prendre ce pouvoir-là, évidemment, après consultation du CRSSS qui, lui, connaît bien la situation.

Au niveau des pouvoirs que se donne le conseil régional désigné par règlement, nous, on comprend que le ministre va désigner par règlement ces CRSSS dans les régions où il y aura des problèmes sérieux. Je pense qu'il l'a fait dans la région de Montréal parce qu'il y avait là des problèmes sérieux. Dans les régions où il n'y a pas de problèmes sérieux, en tout cas, on espère, - je pense que c'est important - que le ministre ne se serve pas de ces prérogatives-là. Cela me paraît essentiel. Ce qu'on voit là, c'est ce qu'on retrouve dans la région de Montréal. Évidemment, il faut absolument que ce ne soit utilisé que dans les régions où il y a des problèmes sérieux.

Mme Lavoie-Roux: Cela touche la question de la fusion de ces établissements, mais je vous avais aussi posé la question en fonction du premièrement de 18.1 et de 18.2.

M. Nadeau: C'est à cela que je vous réponds. (13 h 15)

Mme Lavoie-Roux: Vis-à-vis des transports de bénéficiaires etc.?

M. Nadeau: C'est l'exemple qu'on vient de vivre à Montréal; c'est ça qui est confirmé par la loi. Évidemment, on n'est pas très heureux de cela, c'est bien sûr. Sauf qu'on dit que, dans les régions où il y a des problèmes sérieux, je pense que c'est important que le CRSSS puisse faire un certain nombre de choses comme celles-là.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, j'accorderais une petite question au député de Nelligan qui veut revenir.

M. Lincoln: Voici une clarification bien importante. Le ministre a dit qu'il y avait 18 personnes au nouveau conseil régional. Il y en a 14. Alors, 3 sur 14, c'est bien plus que 3 sur 18.

M. Johnson (Anjou): C'est moins que 2 sur 22, pardon.

M. Lincoln: Si on ajoute que les organismes bénévoles ont maintenant un représentant qui peut être nommé par le ministre, et si on ajoute le directeur général, cela fait toute une différence par rapport à auparavant.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si je peux vous arrêter, je suis sûr qu'on aura un débat extrêmement intéressant, article par article là-dessus, d'autant plus qu'il faudra peut-être revoir les textes ensemble. Je m'excuse du lapsus de 18, m'étant inspiré du commentaire de ma collègue. Je voudrais simplement dire, à l'égard des fusions, qu'il y a quand même des balises. La notion d'intérêt public, ce n'est pas la bonne humeur de celui qui se lève le matin. Les fusions ne pourront intervenir que dans la mesure où il y a une notion d'intérêt public qui est impliquée. Encore une fois, ce n'est pas purement arbitraire, l'intérêt public. Le pouvoir reste arbitraire, dans la société, étant soumis avec démocratie, éventuellement, mais c'est l'intérêt public qui est la notion centrale. Il y a quelqu'un de garde, je pense.

Deuxièmement, et on l'a vu récemment, quand on parle de noeud gordien, il faut bien que le responsable de l'intérêt public, dans les circonstances, en réponde. Je pense qu'ils sont quand même des facteurs extrêmement limitatifs en soi qui, je pense, ne donnent pas ouverture, quoi qu'on en dise, quoi qu'on veuille voir, à des interventions qui seraient un peu inopportunes ou un peu téméraires. Je pense que les balises sont là et elles sont extrêmement puissantes, notamment le fait d'être obligé d'en répondre sur la place publique, dans les choses aussi sensibles que les fusions d'établissements. On le sait, on est en train d'en vivre, une situation, en ce moment, et c'est un peu délicat, on le sait.

Finalement, il y a tout le processus de

consultation. Ce n'est pas le CRSSS qui décide, c'est, au sens de la loi, le gouvernement qui décide, après consultation du CRSSS, pour les raisons assez évidentes qu'a évoquées le directeur général de l'association.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, est-ce que cela va?

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le ministre, comme vous dites, c'est une discussion article par article. L'article 18.3 dit: "Un établissement est lié par une décision du conseil régional prise en vertu du paragraphe 1 de l'article 18."

M. Johnson (Anjou); Oui, mais 18.1, en fait, réfère à cette notion des urgences. Il faut bien comprendre. Ce n'est pas de façon générale. Les établissements sont liés à toutes les décisions des CRSSS. Les établissements sont liés aux décisions du CRSSS prises en vertu de l'article 18.1. Or l'article 18.1, en pratique, ce sont des normes de fonctionnement dans les cas d'urgence, etc. On a là en gros la description, mais je le dis, une extension aussi, on a essentiellement la description de la situation de Montréal, du mandat qui est en cours de réalisation, dans ce cas. Il faut bien comprendre que ce n'est pas...

Mme Lavoie-Roux: Cela peut être étendu aux autres conseils régionaux, pas seulement Montréal.

M. Johnson (Anjou): Cela pourrait être étendu à d'autres conseils régionaux. Cependant, par règlement spécifique, donc par arrêté en conseil, c'est l'un des pouvoirs, ou l'ensemble des pouvoirs, le cas échéant, qui pourraient l'être. Je pense qu'au niveau de la deuxième lecture, on aura l'occasion d'y revenir, ainsi qu'à l'étude article par article.

Mme Lavoie-Roux: L'intérêt public, il faudra le définir aussi. M le ministre, si l'intérêt public, ce sont uniquement les difficultés financières du gouvernement, ce sera de l'intérêt économique et non pas de l'intérêt public nécessairement. Je pense que...

M. Johnson (Anjou): Là-dessus, ça ne vous fait pas un bien bon discours en Chambre, par exemple.

Mme Lavoie-Roux: Écoutez, on pourra le faire...

M. Johnson (Anjou): Ça prend plus, je suis d'accord avec vous.

Mme Lavoie-Roux: ...en Chambre.

Le Président (M. Bordeleau): ...en Chambre, on va revenir en Chambre. Je voudrais remercier... M. Nadeau, s'il vous plaît.

M. Nadeau: II nous apparaît essentiel que le gouvernement favorise les mécanismes appropriés aux responsabilités qui sont confiés aux conseils d'administration. Si on regarde toute la question salariale des conventions collectives, ça échappe aux conseils d'administration. Si on regarde au niveau des cadres, on enlève la consultation avec les conseils d'administration qui engagent les cadres à l'intérieur de l'établissement. Dans la négociation avec les médecins, ça se passe chez nous et on ne veut pas être à la table de négociation, on a déjà eu l'occasion de discuter avec le ministre à l'occasion d'un programme, on pensait bien qu'il était pour nous répondre rapidement, ce n'est pas fait encore, ça sera peut-être pour les prochains jours, mais ça va se passer dans nos boîtes et on aimerait pouvoir dire un mot de ce côté.

Au niveau de la gestion des ressources, on s'en va vers un modèle qui est caractérisé par un bicéphalisme, je pense que c'est important qu'on ait nos ressources. On favorise une réglementation plus poussée là-dedans. En Ontario, ils s'en vont vers une période de déréglementation. On nous compare souvent avec l'Ontario, on pourrait peut-être s'en inspirer, pour cette période de déréglementation.

Les intérêts particuliers qui nous sont proposés dans le conseil d'administration des établissements, on pense que ça devrait être une majorité des gens de l'extérieur, justement pour enlever ces intérêts. Au niveau des services en commun, on voudrait avoir toute la motivation nécessaire à l'intérieur de ça. On pense que le ministre pourrait apporter des modifications à son projet de loi qui pourraient nous permettre de mieux faire notre job, d'offrir, dans le contexte qu'on connaît, d'excellents services à la population. Si on donne l'autorité des conseils d'administration à tout le monde, comment voulez-vous qu'on assume nos responsabilités?

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): ...je voudrais remercier les représentants de l'Association des hôpitaux du Québec, encore une fois, qui ont démontré à nouveau non seulement leur intérêt mais leur capacité de répondre à ces préoccupations. Je note que, de façon générale, sans vouloir pousser à l'extrême le propos, ils partagent certains des grands objectifs, je dirais l'ensemble des grands objectifs du projet de loi comme ils l'ont

dit. Ils ont des réserves sur certaines choses. Ils vont même beaucoup plus loin que le projet de loi ne va sur certaines choses dans leurs propositions, notamment à l'égard du contrôle des cabinets privés. Nous serons à même sans doute de répondre à de nombreuses préoccupations qu'ils ont au niveau de cette analyse assez serrée qu'ils ont faite de certains articles, notamment au chapitre de la réglementation et notamment au chapitre de certains des éléments de la composition des conseils d'administration. Ils ont soulevé des problèmes réels. Nous aurons l'occasion, encore une fois, d'en discuter plus longuement. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Je veux remercier les représentants de l'Association des hôpitaux du Québec de s'être présentés devant la commission. Nous allons suspendre les travaux jusqu'à cet après-midi où nous entendrons la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. On pourrait suspendre jusqu'à 15 h 30. Cela vous irait?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): On va s'entendre. La commission suspend ses travaux jusqu'à cet après-midi 15 h 25.

M. Johnson (Anjou): Est ce que je pourrais demander - est-ce qu'on pourrait me donner le micro - s'il y a des médecins du comté d'Anjou qui désirent voir le député d'Anjou? Je sais qu'il y en a qui ont formulé la demande. Le député d'Anjou, en tant que député d'Anjou, est prêt à les voir. J'aimerais simplement qu'on me fasse savoir s'ils sont ici. Je sais que c'est le cas d'autres députés en ce moment.

(Suspension de la séance à 13 h 24)

(Reprise de la séance à 15 h 36)

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous remercie.

Nous sommes prêts. La commission des affaires sociales reprend ses travaux et nous entendrons, pour commencer, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec dont, je pense, les représentants sont déjà assis à la table. Si vous voulez vous présenter et présenter les gens qui accompagnent la délégation.

Fédération des médecins omnipraticiens du Québec

M. Czitrom (André): M. le Président, M. le ministre, mesdames, messieurs les députés, permettez-moi, d'abord, de vous présenter l'exécutif de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec qui m'accompagne en cette journée. À ma droite, le Dr Georges-Henri Gagnon, de Rimouski, vice-président; le Dr Daniel Drolet, de Chicoutimi, trésorier; le Dr Serge Lauzière, de La Mauricie, de Trois-Rivières, qui est administrateur; à ma gauche, Me François Chapados, qui est le porte-parole de la fédération; le Dr Clément Richer, de Montréal, secrétaire général; le Dr Richard Gosselin, de Granby, administrateur; le Dr Zamilda Fortin, de Québec, administrateur et le Dr Marc Couturier, de Val-d'Or, administrateur.

J'ai également le plaisir de vous présenter trois personnalités qui ont bien voulu répondre à mon invitation et, par leur présence ici à cette table, manifester la solidarité que le monde médical éprouve dans ces circonstances: le Dr Paul Desjardins, président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec; le Dr Marc David, président de la Fédération des médecins résidents et internes du Québec, et le Dr Claude Chicoine, président de l'Association des chirurgiens dentistes du Québec.

Le Président (M. Bordeleau): Avant que vous continuiez, je voudrais tout simplement faire remarquer à nos visiteurs qu'il est normalement de mise que ceux qui peuvent s'exprimer soient ceux qui sont assis à la table. On demande aux spectateurs de ne pas faire de gestes. Alors, je rappelle les usages de la commission. Vous pouvez continuer.

M. Czitrom: M. le Président, si vous le permettez, je vais faire une courte présentation de l'essence même de ce que nous désirons que notre mémoire comprenne. Par la suite, mon porte-parole, Me Chapados, fera de façon plus technique le point sur les recommandations que nous entendons soumettre à cette commission.

À l'occasion du dépôt du projet de loi, le ministre des Affaires sociales a déclaré et je cite: "Que le système de santé québécois constituait un acquis indéniable qu'il était important de conserver et de consolider". Il a de plus affirmé à la même occasion que dans leur ensemble, les experts nord-américains s'accordaient à dire que le régime d'assurance-maladie du Québec était le meilleur au Canada. La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec souscrit d'emblée à ces affirmations. Elle souhaite autant que le gouvernement que la population du Québec conserve ce remarquable acquis social. Sa fédération a d'ailleurs collaboré activement à l'édification de ce système de santé en guidant et en canalisant les efforts de participation de tous les médecins omnipraticiens du Québec. Elle peut de la sorte prétendre avoir parfaitement réussi à défendre adéquatement les intérêts de ses membres, tout en conciliant ceux-ci avec les exigences de la société québécoise.

Compte tenu des objectifs qu'elle a toujours poursuivis et des traditions qu'elle s'est toujours efforcée de respecter, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec s'explique mal l'attitude du ministre des Affaires sociales et s'oppose énergiquement aux moyens que retient le projet de loi no 27 dans la poursuite des objectifs, par ailleurs louables, du ministre. Elle regrette le climat d'urgence qui entoure la présentation et les discussions d'un projet de loi qui veut modifier profondément le système de santé au Québec. Nous regrettons surtout que ce projet de loi ait été mis au point sans aucune consultation avec les organismes représentatifs de la profession médicale.

Nous croyons fermement que le gouvernement dispose actuellement de tous les pouvoirs nécessaires pour administrer correctement son programme de santé. La fédération pense que le ministre des Affaires sociales a surestimé l'importance de certains problèmes de fonctionnement et réagit avec une violence qui paraît être absolument, à nos yeux, démesurée. Nous sommes convaincus que plusieurs des dispositions nouvelles du projet de loi 27 ne trouvent aucune forme de justification dans cette nécessaire mise à l'ordre dont parle le gouvernement et qu'en fin de compte ce projet de loi n'a même pas sa raison d'être. La fédération croit que les moyens dont disposera le ministre auront comme conséquences immédiates la déstabilisation et l'affaiblissement du syndicalisme médical d'abord, sinon tout le syndicalisme du monde de la santé.

Nous estimons finalement qu'en substituant les décisions arbitraires et unilatérales aux solutions négociées et qu'en remettant à des technocrates des pouvoirs jusqu'ici partagés entre la fédération et le ministre des Affaires sociales, le gouvernement porte une atteinte grave aux droits fondamentaux de représentation et de négociation dont disposent les médecins omnipraticiens du Québec.

La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec appuie les objectifs que poursuit le projet de loi 27. L'accessibilité de tous aux soins de santé, la répartition adéquate des effectifs médicaux sur tout le territoire du Québec, l'implication du médecin au niveau de la gestion de la médecine dite institutionnelle et la mise en place de mécanismes de contrôle des coûts inhérents à la dispensation des soins sont là autant d'objectifs fondamentaux que la fédération a fait siens depuis déjà fort longtemps.

Autant la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec est d'accord avec les objectifs visés, autant elle dénonce les moyens que le législateur propose pour les atteindre. Nos actions récentes voulaient en être une démonstration ferme et visible. Les griefs de la fédération sont nombreux et je n'en retiens que les plus importants.

Les incidences réglementaires et les possibilités étendues de décret que contient le projet de loi favorisent l'action unilatérale du gouvernement et traduisent une approche législative qui va à l'encontre de l'établissement d'un dialogue constructif entre l'État et la profession médicale. La fédération s'oppose fortement à une telle philosophie d'action. Le projet de loi 27 précise, en le restreignant, le cadre juridique dans lequel le ministre des Affaires sociales pourra conclure une entente avec la fédération et stipule que telle entente devra dorénavant porter sur les seules conditions de travail du médecin. La fédération dénonce cette approche restrictive qui est diamétralement opposée aux droits de représentation, de négociation et de participation, droits fondamentaux qui ont jusqu'ici toujours été respectés dans les échanges intervenus entre l'État et la profession médicale. (15 h 45)

Enfin le projet de loi no 27 soustrait de la négociation tous les champs de l'activité professionnelle du médecin en milieu hospitalier pour le situer au seul niveau réglementaire. La fédération ne peut accepter que l'activité professionnelle du médecin soit régie par la norme réglementaire et les aléas de l'appareil administratif.

S'il était adopté tel quel, ce projet établirait le règne de la norme, normes sur les politiques d'admission, normes sur le transfert des bénéficiaires, normes de fonctionnement de services d'urgence, norme d'utilisation et de distribution des lits, normes quant au nombre de médecins pouvant exercer dans un centre hospitalier, normes sur la fourniture des services, normes sur l'utilisation des ressources. À travers ces normes, que devient la liberté diagnostique et thérapeutique? Où se situe le besoin du malade? À quel moment doivent intervenir les règles de l'art? Noyé sous les normes, menacé de sanctions, qu'advient-il du statut du professionnel de la santé? Et que fait-on du lien personnel et privilégié patient-médecin sous-jacent à toute responsabilité professionnelle et à la conscience qui en résulte? Il ne faut pas oublier que l'on traite des êtres humains avec leurs particularités et non pas des maladies bureaucratisées.

La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec pense que plusieurs des moyens proposés dans le projet de loi no 27 pour atteindre des objectifs, avec lesquels elle s'accorde par ailleurs, constitue autant de menaces à la poursuite d'une concertation qui a été jusqu'ici extrêmement profitable à toute la population du Québec. Le respect des droits de représentation et de

négociation des professionnels de la santé a permis la mise en place d'un système de santé qui constitue un acquis indéniable pour le Québec. La négation de ces mêmes droits et l'absence de concertation qui en découlera nécessairement risquent de mettre en péril l'objectif que partagent le gouvernement et les médecins omnipraticiens d'améliorer le système de santé du Québec.

C'est ce que démontre très clairement, croyons-nous, le mémoire que nous déposons aujourd'hui devant cette commission. Nous espérons sincèrement que l'argumentation que nous soumettons et les modifications que nous proposons au texte de ce projet de loi permettront au gouvernement de modifier suffisamment son approche pour que nous soyons à même d'appuyer finalement son action, ce que nous souhaitons ardemment.

Si vous me le permettez maintenant, je passerai la parole à Me Chapados, qui va être, comme je l'ai annoncé tout à l'heure, plus technique.

Le Président (M. Bordeleau): Me

Chapados.

M. Chapados (François); Alors, M. le Président, comme l'a souligné le président de la fédération tout à l'heure lorsqu'il a dit que la fédération avait, selon lui, toujours su concilier les intérêts de ses membres avec les exigences de la société, c'est là un principe ou une règle qui vaut au niveau politique de la fédération et également qui sera, je l'espère, traduite par les recommandations techniques et précises que nous entendons vous faire ici cet après-midi.

Deuxièmement, je m'en excuse presque, mais je pense que le projet, vous l'avez eu en main propre dans le courant de la matinée. Quand même, disons que, pour gagner du temps, je vais tenir pour acquis que tous les membres de la commission en ont pris connaissance, de façon à écourter le plus possible les représentations techniques que j'ai à faire, quitte à compléter ultérieurement s'il y avait des questions.

Ceci étant dit, je référerais les membres de la commission, M. le Président, à la page 19 du document que vous avez devant vous. Je souligne tout de suite que je m'arrêterai quelques instants sur le paragraphe 1 de la recommandation qui est là: "Que l'article 4 du projet de loi 27 se lise dorénavant comme suit - et on réfère à l'article 19 de la loi - "Le ministre peut, avec l'approbation du gouvernement, conclure avec les organismes représentatifs de toute catégorie de professionnels de la santé toute entente aux fins de l'application de la présente loi". Disons que ce paragraphe est d'une extrême importance et recoupe d'autres parties du mémoire. Je vous réfère nommément aux pages 8, 9 et suivantes. Par exemple, on parle, à la page 8, du droit de représentation, à la page 9, de l'objet de la négociation, à la page 11, du champ d'application; à la page 12, on parle d'entente individuelle; à la page 16, on élabore longuement sur la portée d'une entente.

En d'autres mots, ce que nous soumettons - je vais le résumer et c'est la règle générale que défend la fédération -c'est que, dans un régime de négociation collective, la règle, c'est que l'entente intervenue entre le ministre des Affaires sociales et, d'autre part, l'organisme représentatif des médecins omnipraticiens constitue, en fait, la loi des parties.

Deuxième point que je voudrais soulever quant à ce premier paragraphe-là, c'est que nous conservons, par rapport à la loi qui existe actuellement, le statu quo quant à ce paragraphe. Je vous souligne que le projet de loi déposé mentionne que cette entente doit porter sur les conditions de travail. Avec humour, je noterai ce matin que, dans ses remarques introductives, le ministre des Affaires sociales a compris l'intérêt légitime des médecins devant l'évolution de leurs conditions d'exercice, et c'est Mme Lavoie-Roux qui a parlé de conditions de travail.

Relativement à cette question, nous recommandons que le statu quo soit maintenu, pour une raison bien simple - il y a d'autres points qui viendront illustrer ça plus tard - c'est que l'objet de l'entente déborde de beaucoup le strict cadre des conditions de travail. L'entente actuelle porte sur la répartition des effectifs médicaux, elle porte sur l'activité professionnelle en milieu institutionnel, sur des mécanismes très complexes - l'annexe 9 de contrôle des, appelons ça masses monétaires ou autrement. Tout ce que je veux souligner, c'est que l'entente actuelle déborde de beaucoup du cadre strict, j'ajouterai provocateur qu'on veut proposer par le nouveau paragraphe 1 de l'article 19, en précisant que, dorénavant, les ententes devront porter sur les conditions de travail.

Comme ce paragraphe est extrêmement important, je soulignerai qu'il exclut d'autres paragraphes de l'article 19, tel que proposé au projet de loi no 27. Je note le paragraphe qui précise qu'à défaut d'entente pour déterminer la rémunération différente visée dans le troisième alinéa - c'est-à-dire pour les jeunes médecins - le gouvernement peut agir par décret. Les remarques que je viens de faire élimineraient également l'autre paragraphe qui précise qu'à titre expérimental - c'est assez nouveau dans un projet de loi - le ministre pourrait, avec l'acceptation d'un conseil d'administration ou avec l'acceptation des médecins de l'établissement - on fait intervenir d'autres personnes - édicter un mode de rémunération prévu à l'entente, mais applicable à un certain groupe de médecins. Ceci éliminerait

- je reviendrai à ce point tout à l'heure -l'autre paragraphe qui dit: S'il estime que, dans une région, l'absence de services médicaux adéquats met la santé publique en danger, le ministre peut conclure des ententes individuelles.

Tout à l'heure, vous verrez que ce que nous proposons concilie, c'est ce que nous soumettons, l'intérêt public et les responsabilités qu'a le ministre en semblable matière. Donc, quant à ce premier paragraphe, ce sont des remarques schématisées, courtes, mais je pense qu'elles visent l'ensemble des problèmes qu'a soulevés tout à l'heure le Dr Czitrom en parlant d'accrocs au droit de représentation, aux objets de l'entente, au champ d'application, à sa portée, etc.

J'attire également votre attention sur le deuxième paragraphe. Une entente peut prévoir une rémunération différente pour la fourniture des services médicaux dans un territoire où le ministre estime que les effectifs des professionnels de la santé sont insuffisants. Nous ajoutons: Le ministre détermine, par arrêté publié dans la Gazette officielle du Québec, après consultation des organismes représentatifs de professionnels de la santé, les territoires qu'il estime insuffisamment pourvus de professionnels.

Nous maintenons que cette proposition concilie justement cette responsabilité publique du gouvernement vis-à-vis de certains territoires, prévoie également que le ministre peut, le cas échéant, au niveau de la détermination des territoires, agir d'autorité et agir par décret. Comme vous le verrez tout à l'heure - je passe au troisième paragraphe - nous maintenons que la santé publique ne doit pas pour autant créer des précédents dangereux ou exclure la négociation.

Nous en arrivons au troisième paragraphe qui est proposé. Une telle entente peut, pour assurer une répartition adéquate des professionnels de la santé sur le territoire du Québec, établir une procédure ayant pour effet de déterminer le nombre de professionnels admissibles à participer au régime d'assurance-maladie ou au régime d'assurance-hospitalisation dans un même territoire ou établissement en tenant compte de la catégorie ou spécialité à laquelle ils appartiennent.

Ce paragraphe reprend le mot à mot d'une partie de la loi 84 votée par le gouvernement actuel, disposition qui n'a jamais été mise en application. Nous sommes d'avis qu'en ce qui a trait à la répartition des effectifs, on doit permettre à la négociation de jouer le rôle qu'elle doit jouer, surtout lorsque le ministre, quant à certains aspects de la question, notamment la détermination des territoires, etc., se voit reconnaître et se voit donner par la loi des pouvoirs d'agir par décret.

Cela est extrêmement important. J'aimerais faire une petite parenthèse, sans lancer de prunes à personne. En 1976, lors de la dernière entente, l'un des points majeurs qui avait été introduit à cette entente était justement tout le chapitre sur la répartition des effectifs. Cette disposition devait, selon le ministre de la Santé de l'époque, être suivie très brièvement de mesure, soit au niveau de prime d'encouragement ou analogue à celle-ci qui a été adoptée dans la loi 84, pour donner justement plus d'instruments et de force au comité de répartition. L'histoire a voulu que, quelques mois plus tard, le ministre en cause ne soit plus ministre. Un nouveau ministre l'a remplacé pour qui, semble-t-il, cette question n'était pas une de ses priorités, mais toujours est-il que les parties se retrouvent après un certain nombre d'années et que les dispositions qui auraient dû être adoptées en 1976 pour faire en sorte que ce comité fonctionne adéquatement sont adoptées en 1979 et, là, à cause du hasard, d'une foule de circonstances, elles n'ont jamais été employées comme elles auraient dû l'être.

La fédération croit donc à ce chapitre que la négociation a un rôle important à jouer dans la répartition des effectifs. Je relie cela à une intervention qui a été faite ce matin par l'AHQ, lorsque celle-ci, par exemple, propose d'assujettir les ententes conclues par un organisme représentatif des professionnels de la santé à un plan d'effectifs édicté par un conseil régional. Ce que nous soumettons en toute déférence, c'est que vous avez ici un paragraphe qui donne des pouvoirs à des parties qui visent tant le Régime d'assurance-maladie que l'assurance-hospitalisation et qui permettraient justement de couvrir de façon globale tous les aspects de la question que représente la répartition des effectifs. Nous soumettons à cet égard que la voie la plus carrossable, la plus sûre, celle qui aurait le plus de succès, c'est celle que nous proposons. Nous disons en fait pourquoi -c'est ce pourquoi j'ai fait un petit historique tout à l'heure - le chapitre dont on avait convenu n'a peut-être pas donné tous les résultats qu'il aurait dû donner.

Je tourne la page, page 20. "S'il estime que, dans une région, l'absence de services médicaux met en péril la santé publique, le ministre peut, afin de permettre la fourniture de ces services dans un établissement, par décret du gouvernement publié dans la Gazette officielle, prendre, en vertu de la présente loi, les mesures spéciales qu'il considère nécessaires pour que des services médicaux puissent être fournis par l'établissement visé et ce pour une période indiquée au décret qui ne doit pas excéder 90 jours."

Nous comprenons que, dans le texte de

la loi, on parle de santé publique; nous comprenons très bien qu'il peut y avoir ries cas où la santé publique exige une intervention prompte. Cependant, à une situation grave qui exige une intervention rapide doit également correspondre une mesure de même nature, c'est-à-dire une mesure spéciale et promulguée par décret qui doit entrer en vigueur et demeurer en vigueur un certain temps. Encore là, une fois sauvegardé et préservé cet aspect de la santé publique, par le biais de moyens que le ministre aurait à sa discrétion, à l'intérieur de certains paramètres, ce que nous soumettons, c'est que, dans ces cas, la négociation, en prétextant le paragraphe précédent, pourrait fort bien permettre aux parties non seulement de concilier les objectifs respectifs qu'elles ont, mais aussi de faire en sorte que des professionnels de la santé soient envoyés sur les lieux en cause. (16 heures)

Ce que le projet de loi propose, c'est que le ministre, au nom de la santé publique, pourrait conclure ries ententes individuelles. Étant donné la réalité géographique du Québec, je pense qu'il est bon de poser a priori une hypothèse qui est la suivante - et c'est la crainte des gens qui sont devant vous - c'est que cette entente individuelle, qui n'existe nulle part dans le domaine de la négociation collective, permette une entente individuelle tantôt à Rivière-du-Loup, tantôt à Matane, tantôt à Gaspé, tantôt à Val-d'Or, de sorte qu'à un moment donné, après 3, 4 ou 5 ans d'entente individuelle, il n'y aura plus de règle générale des parties. La fédération, pour sa part - les hauts fonctionnaires du ministère le savent - a toujours combattu énergiquement les ententes individuelles qui intervenaient entre ries établissements et des médecins. Elle a toujours préféré des règles négociées à la table qui s'appliquent uniformément à tout le monde.

Devant cette proposition, cette suggestion que contient le projet de loi, il apparaît à la fédération qu'il s'agit là, en fait, d'un précédent susceptible de déboucher non pas sur un règlement de problèmes, mais sur la création de problèmes additionnels qui vont vicier tout le climat des échanges entre, d'une part, les omnipraticiens et, d'autre part, le ministre des Affaires sociales. Ceci dit en retenant que la proposition qui est contenue là donne les pouvoirs suffisants d'intervention au ministre des Affaires sociales, lorsqu'il aura décidé que la santé publique est en jeu.

L'autre paragraphe: "Toute entente ou partie d'entente peut, s'il y est pourvu expressément, lier tout établissement, notamment, quant aux médecins et dentistes, en matière d'activité professionnelle". Cette partie s'inspire un peu de la législation actuelle. C'est que la loi actuelle de l'assurance-maladie contient, à l'article 173 i) une réserve qui dit ceci: Le plan d'organisation d'un établissement doit, en matière d'activité professionnelle, respecter les ententes conclues entre les professionnels de la santé et le ministre des Affaires sociales. Tel que la chose a été mentionnée tout à l'heure par le Dr Czitrom, tout le chapitre de l'activité professionnelle qui est actuellement dans l'entente, si le projet de loi est adopté, s'écroule. C'était un des gains qui avaient été faits à la suite de la contestation de 1975 et qui s'est traduit par l'entente de 1976. Ce que disent les médecins, sommairement, aux membres de la Commission médicale, c'est qu'à un régime rie normes réglementaires sur la fourniture des services et sur l'utilisation des ressources, la fédération, quant à elle, préfère garder la voie dans laquelle elle s'est engagée dans le cadre de la législation actuelle et qui s'est concrétisée en 1976 par le chapitre qui existe dans l'entente intervenue entre le MAS et la FMOQ.

Autre paragraphe: "Une entente peut également, selon les modalités qu'elle énonce, lier un conseil régional mandaté par le ministre pour organiser et assurer le fonctionnement, dans son territoire, d'une centrale de coordination comprenant la dispensation de visites médicales d'urgence hors établissement". Est intervenu, il y a quelque temps, entre le ministre et la fédération, une entente quant à la dispensation des visites médicales d'urgence hors établissement, entente qui couvre la région du Montréal métropolitain. Nous avons eu recours, à ce moment-là, à divers artifices légaux pour faire en sorte que l'entente se tienne sur trois pattes et demie. Ce que nous demandons aujourd'hui aux membres de la commission et ce que nous suggérons au ministre, ce serait d'incorporer, tout simplement à l'article 19 une disposition qui permettrait justement, dans le cadre de l'entente générale, peut-être de convenir de certains paramètres qui s'appliqueraient éventuellement à certains CRSSS si jamais le ministre des Affaires sociales décidait d'exporter dans d'autres territoires l'expérience que connaît actuellement l'agglomération de Montréal. C'est tout ce que j'ai à dire pour le moment quant à l'article 19; il s'agit d'un article qui est capital. L'article 4 qui réfère à l'article 19 de l'assurance-maladie est capital pour la fédération et au besoin, tout à l'heure, à la suite des questions que vous poserez, nous compléterons.

À la page 20, nous recommandons que l'article 73 du projet de loi no 27 soit retiré. L'article 73 prévoit ceci: "Le conseil des médecins et dentistes d'un centre hospitalier remplit également les autres fonctions déterminées par règlement." Je

relie également cette disposition à une autre disposition du projet de loi no 77, l'article 94 qui amende l'article 173k et également une autre disposition dont on a fait mention ce matin, soit que le ministre peut prescrire tout ce qui peut être utile aux fins d'application de la présente loi.

Ce que nous craignons, par le mariage de l'ensemble de ces dispositions, permettant, d'une part, au lieutenant-gouverneur en conseil d'édicter certaines fonctions, de confier certaines fonctions par règlement alors que, d'autre part, il peut passer certains règlements qui peuvent lui paraître utiles pour fin d'application de la présente loi, c'est qu'on en arrive à la situation où, à un moment donné, les CMD, dans la réforme que l'on propose, seraient, à toutes fins utiles, encadrés et chapeautés ou mandatés par le Conseil des ministres. C'est la crainte que nous exposons; on peut peut-être dire que c'est une crainte exagérée sauf que je crois qu'étant donné les vocables très larges employés dans l'article 94 de la loi, quant aux pouvoirs du lieutenant-gouverneur, si on conjugue les deux paragraphes en question, on peut également arriver à des résultats surprenants. Il faut le dire d'avance, une fois que la loi est adoptée, il est trop tard. C'est la deuxième recommandation que nous faisons.

La troisième recommandation, c'est que l'article 74 du projet de loi no 27 soit retiré. L'article 74, c'est la disposition qui édicté 112.1 de la Loi sur l'assurance-maladie, qui suggère que le Conseil des médecins et dentistes d'un CH doive adopter pour chaque département clinique des normes sur la fourniture des soins requis et l'utilisation des ressources disponibles. Ces normes peuvent prévoir des sanctions administratives pour, notamment, limiter ou suspendre le droit d'un médecin ou dentiste d'utiliser les ressources disponibles dans le centre hospitalier.

Je réfère les membres de la commission aux remarques que je faisais tout à l'heure. Lorsque la fédération demande, à l'article 19, de prévoir certaines dispositions relatives à l'activité professionnelle, ceci exclut évidemment la voie proposée par le ministre des Affaires sociales où on parle de normes de fourniture de services et de normes sur l'utilisation des ressources. Je pose ici certaines questions au niveau du projet de loi qui est déposé. On ne définit pas la norme sur la fourniture des services et je ne veux pas faire de procès d'intention; serait-ce une norme médicale? Une norme à incidence médicale? Serait-ce une règle de soins? Serait-ce une norme économique ou à vocation économique? Serait-ce une norme à vocation médico-économique? On ne le sait pas, ce n'est pas déterminé dans le projet de loi.

Devant un projet de loi qui propose des normes dont on peut faire un usage très large et tout ça par voie réglementaire - on va dire que c'est le Conseil des médecins et dentistes qui les adopte, les pères, je préviens l'argument - de toute façon, c'est une voie de normes dont, au départ, on ignore exactement la nature et la portée. C'est pourquoi nous demandons, dans les circonstances, privilégiant la voie qui est la nôtre actuellement, de la négociation de normes d'activités professionnelles telles qu'elles apparaissent à l'entente, de retirer cet article du projet de loi.

Je retourne à la page 21: que l'article no 51 du projet de loi 27 soit amendé de la façon suivante: Nous disons dans notre mémoire que nous craignons que le chef clinique, aux termes de la loi, devienne quasiment un syndic à la médecine hospitalière. Ce que nous proposons, c'est que le chef de département clinique d'un CH, d'une centre hospitalier est responsable de la gestion des ressources de son département et surveille la façon dont s'exerce la médecine dans son département.

À l'article no 51 de la loi, lorsque nous disons - et c'est une crainte fondée - que nous craignons que le chef clinique, avec les pouvoirs qu'il a, qui lui sont octroyés par l'article no 51 de la loi, ne devienne un syndic à la médecine hospitalière, c'est qu'il faut retenir que le même projet de loi propose que la personne en question soit responsable de l'application de ces normes-là et que, le cas échéant, il imposera des sanctions. Nous disons que c'est donner beaucoup de pouvoir à un seul individu lorsqu'on sait que la même loi prévoit que le droit d'exercice d'un médecin dépend du respect des normes sur la fourniture des services.

En d'autres mots, advenant l'édiction de normes, un bonhomme courrait faire l'objet d'une sanction administrative décidée par un chef clinique à savoir qu'il est suspendu, qu'il ne peut dorénavant fournir de services, où, pour une période de six mois, l'effet automatique de cela, comme le droit d'exercice de ce bonhomme-là est relié au respect des normes, est qu'il risque de se retrouver un jour ou l'autre, à la suite d'une décision administrative, sans droit de pratique. De toute façon, quant à l'article no 4, et l'objection fondamentale, c'est une voie de normes réglementaires; nous demandons que ce soit retiré.

La cinquième recommandation que nous faisons, nous l'avons abordée tout à l'heure un peu dans l'article no 19, lorsque j'ai dit que les ententes devaient lier les établissements notamment en matière d'activité professionnelle. Nous demandons également que l'article no 173i de la Loi sur l'assurance-maladie demeure substantiellement, respecte quant à la question soulevée, le libellé actuel, ce qui

donnerait: "0 déterminer les directions, services et départements que le plan d'organisation d'un établissement doit prévoir et, sous réserve, quant aux médecins et dentistes, des stipulations relatives à l'activité professionnelle contenue à une entente conclue en vertu de la Loi sur l'assurance-maladie, prévoir leurs rôles et activités ainsi que les qualifications et fonctions du chef de ces directions, services et départements.

En d'autres mots, c'est la transposition au niveau de l'article no 173i proposé par le gouvernement de ce qui existe déjà officiellement au niveau du 173i de la Loi sur l'assurance-maladie.

Enfin, nous proposons que l'article no 31 du projet de loi no 27 soit retiré. L'article no 31 touche la portée de l'entente. L'article 31 se lit comme suit. Il édicte... C'est l'article no 104-1 de la Loi sur l'assurance-maladie qui stipule: "La présente loi est d'ordre public.

Toute disposition d'une entente qui contrevient à la présente loi ou à un règlement, décret ou arrêté adopté en vertu de celle-ci est réputée non écrite.

Je vais vous dire, M. le Président, que j'ai rarement vu, sauf dans des lois qui s'apparentent à la Loi des mesures de guerre, des dispositions aussi draconiennes. Je ne pense pas que le ministre des Affaires sociales ait eu, depuis qu'il est le titulaire de ce poste, ou que ses prédécesseurs aient eu de problèmes à ce jour, au niveau de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, avec le caractère public de la loi. (16 h 15)

Il y a eu des tentatives, j'ai moi-même plaidé, devant la commission des affaires sociales ou en Cour supérieure, des causes où un établissement privé disait qu'il n'était pas soumis, quant à lui, n'étant pas conventionné, n'était pas soumis à loi 65, etc., etc., et tous ces jugements ont été unanimes pour dire à tout ce beau petit monde: Messieurs, cette loi est d'ordre public, et s'applique à tous les établissements. Paragraphe à la ligne. À noter qu'à ce moment-là, la loi ne disait pas qu'elle était d'ordre public. Mais j'en viens à ce qui suit: "Toute disposition d'une entente qui contrevient à la présente loi ou à un règlement, décret ou arrêté adopté en vertu de celle-ci est réputé non écrite. Ce que nous demandons, M. le Président, au ministre des Affaires sociales, c'est d'une part de conclure une entente avec des organismes représentatifs des professionnels de la santé. Cette entente est ratifiée par le lieutenant-gouverneur en conseil, par le gouvernement. Nous demandons tout simplement au signataire de l'entente, une fois cette entente signée, d'agir en conformité de l'engagement qu'il a pris au niveau des réglementations ou des décrets qu'il peut adopter. Sinon, l'entente a un caractère extrêmement secondaire. Même plus, aux termes de la Loi sur l'assurance-maladie, cette disposition précisant que la disposition de l'entente est réputée non écrite, ce que nous suggérons, c'est qu'advenant l'adoption d'un règlement ou d'un décret, le médecin devrait, à ce moment-là, parce qu'il exigerait le respect de l'entente, nécessairement procéder par le conseil d'arbitrage établi selon la loi. Devant le conseil d'arbitrage, on rappellerait évidemment à l'arbitre: M. l'arbitre, vous êtes ici pour appliquer l'entente, c'est votre vocation principale. Or la disposition en cause est réputée non écrite, vous n'avez pas juridiction. D'où on va déboucher à divers niveaux sur des problèmes. Alors, ce que nous demandons purement et simplement quant à cette disposition, c'est de faire en sorte qu'elle soit tout simplement retirée. Dans le passé le caractère public ou la portée de la loi n'a jamais été mis en cause. Je demanderais au ministre ou à toute autre personne de m'indiquer si la loi dans un cas a déjà été mise en cause, ou sa portée. Elle a toujours été appliquée comme une loi et il n'y a pas eu de problème.

Quant au reste, ce que nous demandons au gouvernement, une fois l'entente signée, c'est d'être logique avec les engagements qu'il signe et de légiférer en conséquence. Nous demandons tout simplement le retrait de cette disposition. J'ajouterais un autre argument: c'est que telle qu'elle est rédigée, le tribunal d'arbitrage qui serait saisi d'une disposition quelconque d'une entente, d'un décret ou d'un règlement qui serait contraire se verrait allègrement contester sa juridiction, d'où on risque d'assister, dans le cas des ententes des professionnels de la santé, à une prise en série de brefs d'évocation. Je pense que si on doit de temps à autre s'inspirer du domaine du travail, s'il en est un où on ne doit pas s'engager dans cette voie, c'est bien celui-là. Alors, nous demandons le retrait de cette disposition.

L'article 109, c'est la septième recommandation. À l'article 109, la même chose, je dirai pourquoi. Dans le mémoire nous parlons de procédure d'amendement automatique de l'entente. En quelque sorte, à l'article 109, on dit que l'article 104.1 et édicté par l'article 31 s'applique à l'entente actuellement en cours. Alors nous demandons le retrait de l'article 109; je donnerai plus de détails tout à l'heure s'il y a des questions.

Enfin, il y a un huitième point à la page 22 qui est très technique. C'est que le nouveau projet de loi introduit, au niveau des professionnels de la santé, un tribunal statutaire. Auparavant, c'était soumis à l'arbitrage si les ententes en prévoyaient la constitution; là-dessus il y a eu une jurisprudence qui dit que ce sont des

tribunaux privés, y compris la Cour d'appel. Le nouveau projet de loi établit les tribunaux statutaires, qui eux vont devenir sujets à brefs d'évocation ou à contestation de juridiction. Encore une fois, ce que nous prétendons là-dessus - il peut y avoir d'autres vues - c'est que c'est une tradition qu'on retrouve dans le monde du travail, qui ne doit pas nécessairement se transposer au niveau du monde de la santé.

Dernière petite remarque, page 24. Est-ce que j'ai dépassé mon temps, M. le Président?

Le Président (M. Bordeleau): Pas loin. M. Chapados: Pas loin.

Le Président (M. Bordeleau): En fait vous n'avez pas dépassé l'heure, sauf que vous avez dépassé le temps normalement prévu de 20 minutes. Je pense qu'on peut comprimer un peu.

M. Chapados: Une seule remarque, je réfère les membres de la commission à la page 24 du mémoire, c'est capital: "nous recommandons que l'article 49 du projet de loi 27 se lise dorénavant comme suit, et l'article 70 de la Loi sur l'assurance-maladie se lirait comme suit: Le plan d'organisation d'un centre hospitalier doit de plus prévoir la formation de départements cliniques et de services cliniques. Un tel plan comprend obligatoirement la formation d'un département clinique de médecine générale."

À ce sujet, actuellement, nous disons pourquoi nous en arrivons à cette proposition. C'est qu'actuellement, si je prends les CH désignés - M. Deschênes est ici, c'est un ancien directeur général d'hôpital - dans la plupart des CH désignés dans la province, la structure légale et réglementaire prévue à la loi n'est aucunement respectée. Cela ne veut pas dire que ça fonctionne mal partout, ça fonctionne bien, mais il y a une constante, c'est que tous les gens qui sont là contournent la structure établie actuellement aux termes de la loi et des règlements. Ce que nous demandons, c'est de clarifier une fois pour toutes le statut du département de médecine générale qui n'est pas un mini ou un petit département, ou un département à gogo, mais qui est un vrai département et qui est un département clinique au même titre que les autres. L'argument traditionnel qu'on a sorti, c'est que les omnipraticiens pratiquaient dans plusieurs départements dans un hôpital et que ledit département devait, à cause de ce fait, sinon pour l'urgence de première ligne et les soins externes généraux, être administratif.

Ce à quoi je réponds: II est clinique au niveau de l'urgence et des services externes généraux et, d'autre part, lorsqu'un omnipraticien va pratiquer en pédiatrie ou en obstétrique, etc., il se trouve dans la position de l'interniste, dans un hôpital, qui s'en va soigner un malade dans les lits ou dans le département de chirurgie. Pour autant, on n'a jamais jugé nécessaire d'abolir le département de médecine.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Chapados. M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Merci, Dr Czitrom, pour le mémoire assez abondant que vous avez produit. Avant de commencer, avant d'entrer dans certains aspects de la plomberie, peut-être faudrait-il revenir sur certaines des équivoques que j'ai déjà évoquées ce matin. J'ai été frappé d'entendre, de la part du porte-parole de la fédération, les mots "nous craignons", à plusieurs reprises. Je pense que c'est assez significatif de ce qui se passe autour de ce projet de loi: nous craignons. Je voudrais faire appel à ce sentiment d'inquiétude pour dire qu'il n'a sans doute pas raison d'être sur l'essentiel. Encore une fois, les jours qui ont suivi le dépôt du projet de loi ont été marqués par certains événements qui troublent les citoyens du Québec, parce qu'encore une fois, ça se passe au-dessus de leurs têtes. Le métier que les hommes et les femmes de ces professions exercent est un métier essentiel à la société. Il est également un métier qui touche l'essentiel pour les êtres humains de façon générale. Il ne faut pas s'étonner que, chaque fois que la population a l'impression qu'elle peut être privée de ces services, elle réagisse aussi avec anxiété.

Justement parce que nous avons, de part et d'autre de cette table, celui qui vous parle aussi, à cause de la formation qu'il a reçue, pas celle qui lui permet, à l'occasion, de participer à des projets de loi, mais le métier qu'il a pratiqué, nous avons, de part et d'autre, une responsabilité de tenir ce débat et de regarder ces questions dans un contexte qui soit celui du respect de la population. Je ne doute pas que votre présence ici aujourd'hui en soit un signe, bien au contraire.

Il y a aussi des remous chez les professionnels eux-mêmes. Encore une fois, c'est sans doute ce qui explique le "nous craignons". Il y a dans cette loi un changement qui, à bien des égards, est significatif de l'évolution du Québec lui-même, de la profession médicale, des difficultés inévitables que connaît le système de dispensation de soins que nous avons et qui est significatif d'un progrès aussi, en même temps. Ce qui caractérise ce changement, c'est d'abord que le gouvernement a choisi, dans le cadre de la profession médicale, au niveau des moyens, de prendre les moyens qu'il prend dans le reste de la société quand il y a des

problèmes à régler, c'est-à-dire de fournir un encadrement juridique à certaines actions.

Historiquement, les fédérations qui font leur boulot de défendre les intérêts des professionnels et qui le font, je dois le dire, mieux que n'importe qui d'autre dans les structures médicales, parce que c'est cela le rôle, ont peut-être été habituées à participer à la rédaction du projet de loi avant même qu'il ne soit déposé. Ces fédérations, aujourd'hui, sont appelées à participer, et pleinement d'ailleurs, au processus de la commission sur laquelle nous siégeons aujourd'hui et au cours de laquelle nous vous entendons, nous lisons vos mémoires et nous aurons à prendre les décisions qui en découleront et qui feront l'objet en deuxième lecture, donc la semaine prochaine, des déclarations quant aux conséquences et ce que nous retenons de vos commentaires.

Deuxièmement, il y a un changement dans la mesure où on vient confirmer certaines choses qui existent dans la réalité et aussi affirmer une volonté très nette du gouvernement, en collaboration avec les professionnels, de vouloir régler certains problèmes qui traînent au Québec. Les lois habituellement sont faites pour cela. Elles ne sont pas faites pour créer des problèmes, elles sont faites pour en régler. Je ne dis pas que toutes les lois règlent les problèmes, mais que certaines sont souvent source de difficultés. L'objet fondamental d'une loi en démocratie - c'est notre rôle autour de cette table, avec la légitimité des citoyens qui nous ont élus d'un côté comme de l'autre de la table - est de tenter de régler des problèmes avec le moyen que nous avons à notre disposition en démocratie, qui s'appelle des lois. Il ne faut pas accorder au mot "loi" la notion péjorative parfois qu'on semble lui accorder dans certaines discussions. Encore une fois, je ne parle pas des propos qu'on a échangés aujourd'hui.

Parmi ces problèmes, il y a celui de la répartition des médecins sur le territoire, problème de fond qui existe depuis longtemps et pourtant, malgré les ententes, malgré le champ illimité de négociations caractéristique du Québec et non pas de l'ensemble des provinces canadiennes - on pourra dire que c'est la faute de l'un ou que c'est la faute de l'autre, c'est sans importance - il n'est toujours pas réglé dans le Nord-Ouest, il n'est toujours pas réglé sur la Côte-Nord, il n'est toujours pas réglé dans le Bas-du-Fleuve, il n'est toujours pas réglé dans une bonne partie de l'Outaouais. Ce projet de loi, à cet égard, veut s'adresser directement à cette question et à quelques autres. Les moyens qu'il prend sont ceux à notre disposition, c'est-à-dire la définition de certaines choses. Cela fait dix ans que c'est négociable. Je suis allé à Rouyn, j'ai rencontré les médecins à Rouyn, après les événements qu'on a connus cet été. Je n'ai pas eu l'impression d'avoir affaire à des omnipraticiens avaricieux ou des gens qui ne réclamaient que le pécule pour ce qu'ils faisaient. Il y avait des gens qui trouvaient cela difficile de pratiquer en région. Je me suis rendu compte qu'une des raisons pour lesquelles ils trouvaient difficile de pratiquer en région, c'était à cause de la répartition du fardeau de la tâche. Une des raisons pour lesquelles il y a, dans ce projet, une série de dispositions, c'est justement pour sortir du règlement ad hoc qui a fait l'objet, comme le syndicat le sait, d'environ 60 arrangements particuliers non négociés, sans le consentement du syndicat, sans le consentement du ministre des Affaires sociales souvent, localement. Nous voulons que cette question de la répartition des médecins sur le territoire reçoive la considération qu'elle mérite depuis dix ans. C'est bien beau de dire qu'on est d'accord avec les objectifs, mais chaque fois que des moyens sont tentés, on dit: On s'oppose aux moyens. (16 h 30)

Deuxièmement, ce projet veut introduire aussi une notion de "responsabilisation" collective dans le but de favoriser le développement d'une certaine solidarité à l'égard de l'établissement que le médecin pourrait avoir. Il fut une époque au Québec où c'étaient Soeur Joseph et le chirurgien en chef qui menaient dans l'hôpital. Ceux qui ne sont plus jeunes ici vont se le rappeler. Ce n'est plus comme cela. Cela a été très différent à partir du milieu des années soixante. Notamment, depuis une dizaine d'années, on a littéralement marginalisé la médecine à l'intérieur des établissements. Par contre, on a tapé sur les médecins tout le temps en disant que c'étaient eux autres qui consommaient les ressources et un peu par définition d'ailleurs, parce que ce n'est pas normal. Après tout, que je sache, ce ne sont pas les autres professionnels de la santé qui empêchent les ulcères de saigner ou qui fournissent les traitements et le diagnostic. La recherche qu'il y a dans ce projet de loi au niveau des grandes intentions, cela m'apparaît important, c'est de trouver le moyen que les médecins eux-mêmes, à travers les structures qui existent en ce moment en vertu de nos lois et dans lesquelles ils évoluent avec plus ou moins de succès, plus ou moins inégalement sur le territoire, selon les établissements, réussissent collectivement à se "responsabiliser". C'est cela qu'il y a comme objectif.

Finalement, à l'égard d'un objectif qui n'y est pas mais qui semble avoir été présenté les dernières semaines comme un objectif gouvernemental, celui d'écraser les associations représentatives ou les organismes représentatifs, comme le dit la loi actuelle

d'ailleurs - en fait, ce sont les deux fédérations - je peux vous dire que, si nous avions voulu que des dispositions, par exemple, comme l'article 31 sur lequel on aura à revenir sûrement, soient là pour permettre au gouvernement de déchirer par arrêté en conseil l'entente qu'il aurait signée la veille, je dois vous dire qu'on n'aurait pas pris la peine de faire un projet de loi de 100 articles. Il y aurait eu un article: Dorénavant les conditions de travail de la médecine au Québec seront fixées par règlement. Cela aurait été bien moins compliqué. Ce n'est évidemment pas notre intention.

À cet égard, il est important de distinguer ce qui tantôt est quelque chose qui n'a rien à voir avec la loi et ce qui tantôt est une extrapolation, mais sur quoi on fait beaucoup de procès d'intention que je retrouve moins cependant, je dois le dire, dans le mémoire que j'ai entendu aujourd'hui que peut-être dans d'autres propos, mais dans un contexte différent que je peux comprendre, que j'ai pu entendre et ce qui doit faire l'objet d'une préoccupation tout à fait légitime, normale et sur laquelle nous aurons sans doute quelques échanges et au sujet de laquelle le gouvernement aura à prendre des décisions avant de passer en deuxième lecture. Je pense que l'objet de votre mémoire, c'est cela, de la même façon que l'objet de la commission, c'est cela.

Je poserai tout de suite d'entrée de jeu au Dr Czitrom, qui pourra toujours me référer à celui des membres de son groupe qu'il voudra bien - Je pense que c'est à lui d'en décider - quelques questions immédiates notamment sur cette notion de la remise des pouvoirs aux technocrates - Je pense que j'ai utilisé son expression; je l'ai prise en note dans son résumé. J'aimerais qu'il explicite un peu et qu'il me réfère plus précisément aux dispositions du projet de loi qui visent cela.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Czitrom.

M. Czitrom: M. le Président, il est bien évident que, lorsque l'on établit que dorénavant, dans les institutions, la médecine sera régie par des normes, que ces normes seront établies peut-être par des pairs au niveau du CND mais, il va falloir que ces normes soient approuvées par le ministère. Vous faites intervenir des normes qui, peut-être, vont aujourd'hui représenter la distribution des lits, comme c'est prévu au niveau du CRSSS, mais qui, possiblement demain, vont représenter autre chose, à savoir liberté thérapeutique, liberté diagnostique. Je sais bien que ce n'est pas votre intention aujourd'hui, mais il n'y a rien qui me garantisse, dans le libellé de cette loi-là, que ça ne sera pas le cas tout à l'heure. À partir de ce moment-là, si vous avez des hauts fonctionnaires qui, eux, doivent approuver ou désapprouver les règlements qui seront édictés, c'est bien entendu que ce n'est plus le médecin tout seul qui, à un moment donné, prendra les décisions vitales. Vous avez comme moi, suivi un entraînement médical, M. le ministre, vous savez comme moi, que les décisions, dans notre métier, doivent se prendre parfois très vite et que, parfois, on est tout seul à les prendre. C'est justement ce qui fait la difficulté, peut-être aussi le charme de cette profession. C'est la responsabilité de l'individu tout seul, vis-à-vis du péril de l'autre. Ça, ce ne sont pas seulement les cas extrêmes du polytraumatisme ou de l'arrêt cardiaque, mais c'est notre vie quotidienne au bureau, à l'urgence et n'importe où ailleurs. Mais, toutes les fois que j'ai une décision à prendre, dans l'intérêt même de mon patient, il faut que je respecte la norme, parce qu'il y a une norme, il y a des sanctions, il y a un maître de salle qui, lui, a le droit de me le rappeler. Je comprends parfaitement bien votre souci. Je sais très bien qu'il y a un besoin de contrôle des coûts, un tout petit peu partout. Mais, je me dis que c'est tellement gros cette liberté que l'on donne et qu'on enlève au médecin que - je ne doute pas de votre bonne foi, M. le ministre - même si aujourd'hui je suis sûr qu'il n'y aura pas d'abus, il n'y a rien qui me garantisse qu'en se basant sur cette loi-là, il n'y en aura pas demain.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que je peux me permettre de revenir rapidement là-dessus? Je pense que c'est très important. Dans votre mémoire comme dans votre exposé, on semble assimiler deux types de choses qui, pourtant, au niveau du texte, sont très différentes. D'une part, il y a ces pouvoirs qu'on retrouve à 173 de la loi actuelle. Ce sont les pouvoirs généraux qui appartiennent au gouvernement: soit déterminer une série de choses, statuer aisément sur les pièces essentielles des dossiers, déterminer les formalités d'inscription, déterminer les critères relatifs à la résidence des bénéficiaires, fixer les conditions minimums d'hygiène, statuer sur le contenu des formes d'assurance-responsabilité, déterminer les conditions que doivent remplir les personnes qui sollicitent un permis, bref, l'ensemble du pouvoir réglementaire du gouvernement qui est là depuis des années. C'est ce qu'on retrouve dans le projet de loi actuel, repris, dont une bonne partie est reformulée, et dont une autre partie vise à asseoir de la réglementation existante dans ce cahier, que la plupart d'entre vous, qui travaillez en institution, connaissez bien et qui est la réglementation depuis tous les

temps, si je peux m'exprimer ainsi, notamment depuis 1973, réglementation qui régit le fonctionnement des hôpitaux.

Donc ce n'est pas nouveau à cet égard-là, ce n'est pas normalisé de façon additionnelle. Je conviens cependant, je ne disconviens pas du tout qu'à l'article 74 il y ait l'addition de certains pouvoirs, je m'excuse, l'article 94, à la page 33, il y ait l'addition de pouvoirs un peu plus précis donnés au ministre, mais qui vont dans le sens de ces pouvoirs généraux qui existent depuis toujours au sujet desquels, notamment à IJKL, déjà certaines réserves ont été exprimées, qui doivent je pense, continuer de faire l'objet de discussion, je suis sûr que l'Opposition en fera sûrement un relais lors de l'étude, article par article, sans compter ce que nous y apporterons.

Mais il y a d'autre part, toute cette notion, ce mot norme d'ailleurs, est un peu ennuyeux, parce que, habituellement, on voit un rond de cuir avec un crayon, dans un endroit poussiéreux, élaborer des théories sur le traitement, plutôt que de parler des gens en vie. Ces normes dont on parle au sujet du Conseil des médecins et dentistes, c'est le conseil lui-même; et le gouvernement ne les approuve pas. Il s'agit de permettre aux médecins dans l'établissement, à l'égard de l'utilisation des ressources dans l'établissement, de se "responsabiliser" collectivement sous forme de bien des choses que propose notamment la corporation des médecins depuis des années et qu'elle reprend d'ailleurs à certains égards avec les nuances qu'il faut y mettre, dans le cadre de son mémoire sur ce projet de loi.

Il n'y a pas de fonctionnaires. Il y a des normes élaborées par les personnes, dans le milieu médical, qui ultimement doivent avoir une sanction juridique au niveau du conseil par exemple et on dit que le chef de département sera en mesure de les appliquer. Cette notion d'application, par le chef de département encore une fois, vise une intervention de nature collective, l'information qui lui est transmise, non pas les décisions dans les cas individuels; cela relève des lois professionnelles que nous ne modifions pas à cet égard; cela relève de la pratique, il ne s'agit pas de modifier cela. Je pense qu'il est très important qu'on fasse cette distinction, mais il est vrai qu'on introduit une plus grande "responsabilisation" des médecins eux-mêmes dans l'établissement. Après tout, l'hôpital est le lieu où vous traitez vos malades; c'est pour ça qu'on parle de cela. Que ça se fasse dans le contexte qui est le contexte que le Québec connaît sur le plan budgétaire au niveau des hôpitaux, on le sait; il y a 400 000 000 $ de déficit dans les hôpitaux, vous ne pouvez pas ignorer cela, vous vivez dedans et vous en subissez à la fois les conséquences comme tout le monde, sans compter qu'au niveau de la taxation, vous en subissez aussi les conséquences.

Mais, il y a des choses qui s'imposaient par le bon sens même, si nous considérons que les médecins doivent avoir leur place dans l'établissement et je n'accepterai jamais, tant que je serai ministre des Affaires sociales - et je présume qu'aucun de mes successeurs n'oserait le faire non plus -qu'un fonctionnaire ou quelqu'un qui n'est pas médecin intervienne dans la relation entre le médecin et le patient. Si vous regardez attentivement le projet de loi, il n'est pas question d'autre chose que de cela.

J'aurais peut-être une autre question qui touche ce qu'on voit comme une atteinte aux pouvoirs syndicaux, notamment, à l'article 4 que vous avez évoqué et qui, dans le fond, est probablement l'article central de ce projet de loi puisqu'il touche à bien des choses; il touche d'abord à tout le monde et, deuxièmement, à beaucoup d'objets. On dit: "S'il estime que dans une région l'absence de services médicaux adéquats met en péril la santé publique, le ministre peut, afin de permettre la fourniture de ces services dans un établissement, convenir avec tout professionnel de la santé de conditions de travail différentes de celles prévues à une entente." J'aimerais que vous me disiez, Dr Czitrom, ce qui vous ennuie dans ce texte. C'est au-delà des formulations juridiques pour lesquelles nous sommes, de part et d'autre, équipés pour que des gens en discutent; après tout, on leur paie des honoraires pour cela. Sur le fond?

M. Czitrom: Le fait, M. le ministre, qu'en signant et en légalisant les ententes individuelles avec des professionnels de la santé individuels, on grignote, petit à petit, le champ d'application de l'entente générale. On va, à partir de ce moment-là, se permettre de signer... Si l'entente ne convient pas, on va signer un petit contrat individuel avec Pierre, Paul ou un autre. On ne vous nie pas le rôle, en tant que ministre, de voir à ce que la santé publique ne soit pas menacée; nous sommes parfaitement d'accord avec ça. Si vous estimez que la santé publique est menacée, ce que nous vous proposons, c'est d'agir par décret avec une durée limitée par laquelle vous pourrez imposer les mesures que vous jugerez nécessaires, lorsque la santé sera en effet menacée.

Mais, nous avons peur que ce soit une porte ouverte aux petites ententes individuelles qui finiront pas faire qu'en réalité une entente générale ne s'appliquera que dans les grandes villes et peut-être même pas partout dans les régions. (16 h 45)

M. Johnson (Anjou): Je comprends la nature de votre intérêt ou de votre inquiétude là-dedans à l'égard des droits

syndicaux que, encore une fois, je le réitère, nous entendons respecter. C'est pour cela que c'est probablement un bel exemple où l'interprétation juridique finalement prête à interprétation. D'ailleurs, si ça ne prêtait pas à interprétation, les avocats ne pourraient pas vivre, mais, en même temps, cela permet, et je dis cela en tout respect à l'égard de votre procureur dont je connais le talent - il l'a déjà fait valoir devant les tribunaux - à chacun son métier, mais, en même temps, peut-être qu'au niveau des intentions c'est important de clarifier les choses.

Ce qui est visé au dernier paragraphe de cet article, ce sont très concrètement des situations comme la suivante, comme on en a vécu d'ailleurs depuis un certain nombre d'années au ministère, dans certaines situations, qui est la détérioration aiguë de la situation en matière de santé pour une population donnée dans un établissement, que ce soient des diabétiques qui se décompensent, que ce soient des patients qui saignent, des gens aux soins intensifs, alors que les gens ne peuvent plus tenir le coup, pour une raison ou pour une autre.

Techniquement, pour pallier une situation de cette nature qui peut être de la nature d'une catastrophe, on ne pourrait pas dire à un groupe de médecins dans un établissement ou ailleurs: Vous vous rendez à tel endroit, on fournit l'avion, c'est 1000 $ par jour pour la fin de semaine, ça dure quatre jours, et on vous fournit un gîte et un logement à tel endroit. Techniquement, on ne peut pas faire cela en ce moment en vertu de nos lois sans avoir l'accord de la structure syndicale.

Ce qui est visé, ce n'est pas d'établir un régime progressif de conditions différentes dans des régions sur une base individuelle, ce qui est visé, c'est de s'armer comme société pour répondre à une situation aiguë dans un contexte aigu où c'est la responsabilité de l'État que de l'assumer et des professionnels dans la mesure où, individuellement, ils sont essentiels au fonctionnement. C'est ce que vise cet article, au niveau des intentions et je pense qu'au-delà de cela, ce serait faire un procès de ces intentions.

Je comprends la préoccupation qu'il y a derrière cela, si vous dites: Formulé comme cela, il y aurait un danger qu'on se mette à faire une série d'ententes individuelles, alors que ce qui n'est pas du tout ce qui est visé; c'est de savoir comment on peut s'armer pour répondre à des situations aiguës sans que le gouvernement se voie opposer un veto syndical, ne se le voie pas plus opposer par la CSN, ne se le voie pas plus opposer par l'Ordre des ingénieurs, s'il y a quelque chose qui est en train de tomber ici et qu'on doive faire venir des ingénieurs d'urgence; c'est l'affirmation d'un principe général qui existe dans toutes les sociétés civilisées d'ailleurs, mais qui, à cause de la définition qu'on a donnée au cours des années du champ des ententes, a littéralement paralysé l'action dans les cas d'urgence. Ce que vous évoquez cependant, ce sont peut-être les 60 cas à travers le territoire du Québec où il y a des ententes qu'on appelle sous la table entre des établissements et des médecins individuellement sans que vous y participiez et sans que le ministre des Affaires sociales y participe.

Or, il n'est pas de notre intention de faire autre chose que de permettre que ça retourne dans le champ de la négociation comme ça doit l'être normalement, et c'est dans ce sens-là qu'on aborde la question régionale. Ceci dit, dans le cas où il y a une détérioration subite ou grave ou aiguë de la santé publique, il nous apparaît que c'est d'une autre nature.

M. Czitrom: Si vous permettez, M. le ministre, mon conseiller ici, mon procureur ronge son frein, mais je vais le laisser piaffer quelques instants de plus, parce j'ai quand même en mémoire deux cas bien précis où nous avons eu des problèmes de ce genre, où la santé publique était réellement détériorée, et nous avons pu de façon très rapide, le ministre et la Fédération, conclure des ententes particulières et non pas individuelles qui se sont avérées être satisfaisantes pour tout le monde, et les médecins et la population. Je pense aux Îles-de-la-Madeleine, où nous avons eu un problème parce que les quatre médecins qui y étaient pour desservir une population de 14 500 n'en pouvaient plus. Ils voulaient s'en aller. On a signé une entente particulière qui a permis que, depuis ce temps-là, c'est en 1977, il y ait douze médecins qui s'y trouvent actuellement et vous êtes parfaitement au courant de ce problème.

C'est la même chose dans le Grand-Nord, à la Baie-James et ailleurs. Nous avons pu, en très peu de temps, puisqu'il y avait effectivement un problème, arriver à nous entendre et, à ce moment-là, on a respecté toute la technique syndicale à laquelle nous sommes habitués.

Une voix: M. Chapados si vous voulez...

M. Chapados: Ce que je dirais en réponse à cela, c'est que l'entente actuelle contient déjà des débuts - je ne l'ai pas avec moi - d'amorce relativement au cas souligné par le ministre.

Premièrement, l'entente actuelle du MAS et de la FMOQ, tout d'abord, reconnaît le certificat d'autorisation temporaire qu'on remet aux termes des règlements de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, à 1.19, et elle exempte le médecin, en fait, de toute procédure de nomination, justement pour répondre à ce genre de cas

que le ministre souligne. Ce qui s'est produit, c'est que les gens qui, dans le passé, ont été dépêchés, du moins par la fédération, des fois par le ministère, ont été payés selon l'entente générale. Les gens sont venus et restaient à ce moment-là. En fait, M. le ministre, vous parlez un peu de plomberie, à savoir qui va payer les avions, qui va payer l'hébergement ou des choses comme cela. C'est un genre de questions où il peut y avoir un très petit chapitre dans l'entente générale qui pourrait régir tout cela et où le ministre aurait, justement, tous les pouvoirs requis pour pouvoir faire face à des situations de ce genre.

Ce que je veux dire, c'est qu'au niveau des ententes particulières - on va dire les choses telles qu'elles sont - il y a eu des ententes particulières d'intervenues entre des médecins et des établissements, ententes particulières que nous avons dénoncées et que nous avons portées, dès que nous l'avons su, à la connaissance du ministère. Il y avait même des ententes particulières qui étaient absolument abracadabrantes par rapport à l'entente générale. Vous savez, quand un établissement dit à un médecin: On va vous engager, vous travaillez 30 heures par semaine et vous facturez 60 heures: En d'autres mots, à chaque fois qu'il y a eu des ententes particulières de cette nature, nous sommes intervenus pour y mettre fin, lorsque nous en avons été informés, parce que ce genre d'entente contient des abus, la plupart du temps. Ceci est le premier type d'entente.

Le deuxième type d'entente, M. le ministre... Il faudrait également se dire que, si c'est vrai qu'il y a eu des ententes entre médecins et établissements, également, il y a eu des ententes avec la bénédiction du ministère aussi. Je ne ferai pas le procès du ministère là-dessus, ce n'est pas mon intention du tout de le faire, sauf que cette petite partie du projet de loi vise précisément à légaliser cette marge de discrétion où, à un moment donné, le ministère a pu décider ainsi: Voici, pour telle catégorie de médecin dans tel coin, on va payer une prime d'éloignement de tant de milliers de dollars, etc. Nous, face à cela, nous sommes parfaitement conscients de toutes les situations qui peuvent se présenter, mais nous disons que dans l'entente générale il y aurait lieu de régler vos problèmes d'hébergement, vos problèmes d'avion et de transport, tout cela de A à Z. Il y aurait également peut-être possibilité, à ce moment-là, pour les parties, d'avoir un mécanisme plus rationnel, c'est-à-dire au niveau de ces cas particuliers, parce que, d'après l'expérience que nous avons vécue, ce sont évidemment des problèmes qui se sont posés.

Le ministère a rencontré des médecins de Rouyn-Noranda, il en a rencontré ailleurs dans la province. Nous faisons transmettre des propositions, ou ce qui, à un moment donné, est proposé et nous nous apercevons qu'on a appliqué ce que l'on proposait. En fait, ce sont des solutions à la pièce, du "patchage". À telle place, on propose telle chose et à un moment donné, au congrès de la FMOQ, les médecins de Sept-Îles ou de Rouyn-Noranda se rencontrent avec d'autres médecins et disent: Quoi, ce n'est la même chose? Nous, nous disons que cette façon de procéder ne dit rien qui vaille à moyen terme pour les relations qui doivent exister entre l'État et la profession. Tous les problèmes techniques que vous soulevez se résoudraient en un tour de main. Il s'agirait tout simplement de prévoir certains paramètres cadres, justement prévoir ces cas où un médecin doit aller durant trois jours à Val-d'Or ou ailleurs; tout le monde serait satisfait et cela n'aurait pas pour effet de vicier un climat. C'est ce que nous suggérons. Et qu'au niveau de l'approche le ministère adopte des ententes individuelles, lorsque la santé publique l'exige.

Deuxièmement, à titre expérimental, avec l'accord du conseil d'administration d'un établissement, l'accord des médecins, etc., qu'on applique un certain mode de rémunération. On va se retrouver dans différents établissements de même catégorie avec des expériences différentes etc. Nous disons à ce moment là, qu'à moyen terme, ce n'est pas le genre de politique, nous le disons en toute déférence, qui va donner les résultats qu'escompte le ministre. Au contraire, ça va viser à créer des problèmes. Puisque vous avez fait, tout à l'heure, deux allusions juridiques, j'aimerais apporter une mise au point. Lorsque vous disiez que, pour l'entente individuelle, il y avait des discussions juridiques, oui, il y avait des discussions juridiques sur l'entente individuelle. Vous vouliez sans doute invoquer une certaine jurisprudence; si vous voulez l'invoquer, on peut en discuter.

M. Johnson (Anjou): À l'étude article par article, je pense, on fera cela.

M. Chapados: Ah bon! Cette jurisprudence se fonde sur un lien de dépendance et je ne savais pas...

M. Johnson (Anjou): Je sais que le député de Taillon, je m'excuse, le député de Jean-Talon - c'est une erreur à ne pas commettre - je sais que le député de Jean-Talon est appelé à faire un discours en Chambre bientôt et qu'il a quelques questions; je vais lui laisser la parole.

M. Rivest: ...si vous permettez...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je m'excuse, je dois aller parler de constitution. Je voudrais poser ma question à M. Chapados. Une des choses qui m'inquiètent, c'est le régime syndical proprement dit, le champ de négociation. À la suite des remarques du ministre, on a eu l'occasion de passer un temps considérable, 56 heures à peu près, pour examiner la notion de services essentiels en cas de conflit dans les établissements hospitaliers. La loi que le gouvernement a adoptée à cet égard, lors de l'établissement définitif de services essentiels, puisqu'il s'agit de la répartition du territoire et compte tenu des exemples que le ministre a indiqués où il y a une urgence ou une situation tout à fait inacceptable, à ce moment-là, la politique générale du gouvernement, lorsqu'il s'agit de services essentiels en cas de conflit, a été de soumettre ça à l'objet d'une entente. À ce que je sache des décisions du gouvernement, il ne serait pas question, du moins c'est ce que le ministre du Travail nous a clairement laissé entendre, d'enlever cette question du champ d'une entente négociée et plus loin, d'ailleurs, puisque la loi en cette matière accorde la primauté à la liste syndicale, donc aux employés et aux fournisseurs des services.

Dans ce projet de loi, à la lumière de l'exemple au niveau des ententes individuelles, non seulement ce ne sont pas les professionnels de la santé qui sont appelés à décider de la question, puisqu'on la retire du champ de l'entente, mais on procède par normes. Je me demande - on aura l'occasion d'en discuter avec le ministre - sur le plan de la fourniture des services, dans ces situations, où se situe une certaine cohérence du ministère des Affaires sociales et du gouvernement par rapport aux intervenants et aux principaux professionnels de la santé. Si j'ai bien compris, M. Chapados, le sens de votre mémoire, c'est que ce champ de la négociation est, me semble-t-il, l'essentiel de votre témoignage en ce qui concerne le régime syndical et l'essentiel de la proposition d'amendement formelle que vous avez déterminée, c'est qu'il y a beaucoup plus que les simples ententes individuelles. Vous mentionnez, touchant d'abord la notion même de conditions de travail par rapport à conditions d'exercice... C'est quand même assez fondamental et le ministre aura sans doute l'occasion de vous répondre sur la raison véritable qui a amené le gouvernement à changer. Pourquoi a-t-il décidé de restreindre ça au niveau des conditions de travail? Quel est, dans l'esprit du gouvernement, le changement que cela apporte pour les professionnels de la santé? (17 heures)

De la même manière, M. Chapados, vous avez mentionné qu'il y a tout le problème des rémunérations différenciées pour les jeunes médecins et, à titre expérimental, pour certains établissements, les fonctions de représentativité. Je voudrais vous poser la question suivante, je m'excuse de son caractère général. Au niveau des médecins, le ministre vous a signalé tout à l'heure que les processus d'entente n'a pas abouti à régler le problème de carence de médecins dans des régions éloignées. Est-ce que vous pourriez indiquer à la commission les inconvénients au point de vue de la santé des gens - plaçons-nous dans cette perspective - que le régime actuel pose? Quelle est votre interprétation, si vous n'en trouvez pas, des raisons fondamentales qui amènent le gouvernement à restreindre à ce point le champ de la négociation? Personnellement - je pense que c'est également l'avis du porte-parole de l'Opposition, la députée de L'Acadie - je crois qu'il y a beaucoup plus que des craintes au niveau du champ de négociation. Il y a une normalisation qui va exister et qui vise des choses dont le ministre a parlé. C'est bien beau la solidarité avec des établissements, on comprend ces grands principes mais, en termes concrets, il y a certainement des choses qui sont inacceptables actuellement de l'avis du ministère des Affaires sociales. Je voudrais vous poser la question suivante: Qu'est-ce qui vous paraît être la carence du processus actuel de l'entente en regard des services? Deuxièmement, d'après vous, si vous n'en identifiez pas, quelles seraient les intentions réelles que poursuit le gouvernement en cherchant à limiter à ce point le cadre d'application ou le champ d'application des ententes?

Le Président (M. Bordeleau): M.

Chapados, un instant. M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Avant que M. Chapados ou que le Dr Czitrom s'expriment, je viens de comprendre les longs prolégomènes d'introduction à un préambule que vient de nous faire le député, ce qui lui a permis de passer sa vision et ses messages. Je dirai cependant qu'il a terminé en faisant une invitation à M. Chapados de me faire un procès d'intention. Je suis sûr que M. Chapados ne tombera pas dans le panneau.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Chapados, s'il vous plaît.

M. Chapados: Justement, on va passer par le plus intéressant, les procès d'intention. Comme dit le ministre, je ne lui en fais pas, sauf que je vais poser certaines questions. Ce serait peut-être une façon d'avoir une réponse du ministre. Les interrogations que nous posons, si on parle d'intentions réelles ou appréhendées ou tout ce que vous voulez,

sont substantiellement les suivantes: Comment se fait-il que le ministère - parce qu'il y a des choses à moyen et à long termes dans le projet de loi no 27 - après avoir voté la loi 84, qui a été votée par ce gouvernement-ci, dont l'encre est à peine séchée, subitement, par processus législatif, décide de soustraire quant à nous, quant aux médecins omnipraticiens, tout le champ de l'activité professionnelle au domaine des ententes? Je pose la question parce que c'est ce même gouvernement qui, en faisant voter la loi 84, disait: Voici, ce cadre régira les prochaines négociations. C'est une question. Quelle est la raison pour laquelle on a procédé avec d'autant de presse avec une loi qui va avoir pour effet de décapiter, quant à cet aspect, la question de toute l'activité professionnelle qui entre actuellement dans le cadre de l'entente? Pourquoi enlever cela du champ de négociation? C'est une question que nous nous posons.

Deuxième question que nous nous posons: Comment se fait-il qu'après avoir voté la loi 84, qui donnait aux parties des mécanismes au niveau de la négociation, les moyens de faire des stipulations au niveau de l'assurance-maladie et de l'assurance-hospitalisation et dont l'encre est encore humide, l'on décide subitement de retirer ce secteur du champ de la négociation alors qu'aucune de ces dispositions n'a été expérimentée à la table des négociations par les parties? Je ne prête pas d'intentions, je pose des questions.

Une autre question dans la même veine. Comment se fait-il qu'un homme habile comme M. Johnson - on s'envoie des compliments - par son projet de loi, en amputant le domaine de l'activité professionnelle de l'entente, propose, suggère une nouvelle voie suivant laquelle les médecins seront assujettis, sous peine de sanctions administratives, au respect de normes sur la fourniture de services et l'utilisation des ressources, le tout chapeauté par un chef clinique qui, lui, va avoir autorité sur cela? On parle d'intégration. Est-ce que c'est vraiment de l'intégration? Cela aussi, c'est une autre question. C'est qu'il y a là un régime, une voie réglementaire, une application très stricte des pénalités administratives. Nous nous demandons pourquoi, à l'aurore d'une négociation, pour faire un parallèle avec le Code du travail appliqué avant la venue du ministre, on prend le Code du travail, on déchire les dix premières pages et on dit: On change cela et, là, on s'asseoit. C'est le genre de questions que nous nous posons. Je ne voudrais pas me vanter, mais elles ne sont pas si folles que cela ces questions, ces interrogations.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, voulez-vous répondre immédiatement?

M. Johnson (Anjou): Rapidement. Je pourrai peut-être évoquer cela ensuite moi aussi. J'ai une autre question à poser au Dr Czitrom. Cela tombe bien.

Une voix: II n'y a personne qui répond.

M. Johnson (Anjou): Non, je vais y revenir rapidement, mais j'aurai aussi des questions à poser au Dr Czitrom. On me dit et on m'assure que dans la loi 84 il n'a pas été question de ces questions relatives à l'exercice professionnel et aux conditions d'exercice. C'est une loi qui avait des visées et des buts de nature essentiellement administrative pour faciliter les choses à la RAMQ - certains diront pour compliquer la vie aux professionnels dans l'administration -que ce soit au niveau de la facturation, des délais de prescription, de la présentation de la carte, etc. Ce n'est pas une loi qui prétendait ou voulait toucher au cadre de la négociation ou à ce qu'on fait, absolument pas. Encore une fois, c'était une loi - est-ce que je peux me permettre de le dire comme cela sans porter un jugement sur le fond? -dont l'objet était de considération administrative ou bureaucratique au sens du terme où on ne prête pas d'intentions, M. Chapados. De toute évidence, il y a un problème de dispositions transitoires, pour exprimer cela en termes juridiques. Je pense qu'il me comprend.

Par ailleurs, il y a aussi le fait que la loi vient préciser une chose. Encore une fois, on a dit: On n'a pas ajouté de structure, on n'a pas modifié intrinsèquement de structure. On clarifie des rôles notamment en augmentant le champ d'intervention du Conseil des médecins et dentistes, donc des pairs, des médecins, non pas des administrateurs, d'une part, et, deuxièmement, en faisant en sorte que ces "normes", entre guillemets, qu'il ne faut pas voir... Peut-être qu'il faudrait utiliser un autre mot pour qu'on se comprenne bien. On aura peut-être l'occasion d'ailleurs, dans les jours qui viennent, à même deux autres mémoires, d'utiliser d'autres mots que le mot "normes", je pense, pour bien décrire la réalité. Ce sont des choses qui existent d'ailleurs dans bien des hôpitaux, on le sait, en ce moment, que ce soit au niveau des lits, au niveau des politiques d'utilisation, des cédules opératoires, de l'utilisation des lits de chirurgie à des fins électives, etc. Ce sont des normes; cela s'appelle comme cela et c'est cela que vous appliquez quotidiennement dans les hôpitaux, quand vous y travaillez.

On établit également que le chef de département pourra appliquer ces choses qui encore une fois existent à bien des endroits déjà et, finalement, qu'il pourra appliquer

administrativement des sanctions - le mot "sanction" ne devant pas être pris dans son appellation du Code pénal, parce qu'en ce moment, la seule sanction qui existe pour le non respect de quelque norme que ce soit, fut-elle élaborée par les médecins eux-mêmes dans un établissement, c'est la suspension des privilèges. C'est-à-dire ce qui est un peu un marteau pilon, merci, dans biens des cas, compte tenu du type de "non respect", entre guillemets, de certaines de ces normes, qui pourrait être fait par un médecin. Est-ce que ça mérite la suspension des privilèges pour un an, que de ne pas respecter la politique des admissions électives en chirurgie générale deux fins de semaines d'affilée. J'ai un peu de misère à croire ça. Mais par ailleurs, est-ce qu'au niveau de la vie médicale il n'y a pas moyen de s'arranger pour que l'évaluation de l'utilisation des ressources se fasse par les médecins eux-mêmes et qu'on puisse établir des balises, des critères, des références et une façon de voir comment on fait évoluer l'établissement. Et tant que ça n'arrivera pas, il n'y aura pas ce développement, ce que j'appelle une sorte de solidarité des médecins eux-mêmes en établissement à l'institution.

Pour revenir sur la question des droits syndicaux. Finalement, c'est la loi. La loi prévoyant que les CMD eux-mêmes élaborent ces choses et que les chefs de départements les appliquent; il est bien entendu que c'est les CMD que la loi dit élaborer, ce n'est pas le syndicat. Je vois mal d'ailleurs comment le syndicat pourrait se promener d'hôpital en hôpital, puisque ces notions de vie intra-hospitalières sont celles que les professionnels eux-mêmes connaissent. Encore une fois, le ministre n'est pas partie à ça, c'est-à-dire, ce sont les médecins entre eux.

J'aurais une question, sur la question des droits syndicaux, encore une fois; cette appréhension quant à ce qu'on retrouve au bas de la page 6 du projet de loi, au dernier paragraphe de cette page. Le ministre peut, à titre expérimental, rendre applicable, par arrêté qui tient lieu d'une entente, un mode de rémunération prévu à une entente, à l'ensemble des professionnels d'un département ou de l'ensemble des professionnels qui exercent le même genre d'activité, pourvu qu'il y ait l'accord des professionnels concernés dans le département et celui du conseil d'administration et du conseil des médecins et dentistes de l'établissement. Ces dispositions ont permis tout à l'heure au Dr Czitrom d'évoquer le fait qu'il y a de nouveaux "intervenants", entre guillemets, dans le cadre de la négociation, je résume un peu sommairement ce qu'il disait: d'abord les intentions là-dessus, je pense aussi que c'est important. Vous savez, le salariat des médecins pour moi, ce n'est pas une idéologie. Ça l'est pour bien des gens, parmi ceux qui sont pour comme parmi ceux qui sont contre. Mais pour moi, ça ne l'est pas.

Je sais qu'au Québec on a un système qui fonctionne relativement bien, les citoyens sont relativement satisfaits, on sait aussi qu'il coûte les yeux de la tête et que ce n'est pas seulement la faute des médecins, ça, on le sait; on sait aussi qu'on est obligé, comme société, de se poser des questions sur l'avenir de ce système, et que certains ont cru trouver dans la notion de salariat la réponse finale. Bon, à cet égard, on sait que dans les mandats de négociations, ce qui a été une des sources d'équivoque, en vertu de principes sur lesquels je n'élaborerai pas ici, parce que je pense que ce n'est pas l'endroit pour ça, nous avons donné des mandats à nos négociateurs, que, une certaine catégorie d'activités ou de spécialistes puissent être mis à salaires ou à honoraires fixes, le cas échéant, dans certaines catégories d'activité. (17 h 15)

Deuxièmement, ça ne serait pas intéressant de voir ça au Québec, à partir du moment où, je présume, que la qualité de notre système de santé dépend largement de l'implication des professionnels eux-mêmes, puis de leur motivation à le faire. Je pense que c'est un élément important. Il n'y aura pas un bon système de santé au Québec si les professionnels et, en premier lieu les médecins, puisqu'ils occupent la place la plus importante, un peu par essence, ne sont pas heureux; c'est clair qu'il y a des éléments de motivation qui sont fondamentaux là-dedans. Il faut qu'ils soient heureux dans la mesure du possible; le problème de Rouyn, une bonne partie du problème de Rouyn, c'est qu'ils n'étaient pas heureux, c'est un problème de ressources mais c'est aussi ça, des gens qui ont changé de type de vie et qui ont de la misère à vivre dans ce contexte-là sur le plan individuel.

C'est la même chose avec le salariat, l'objectif de l'article, encore une fois, ce n'est pas d'aller gruger les pouvoirs syndicaux, je comprends qu'on entendra différentes positions là-dessus, notamment celle de la FMSQ. C'est vraiment de permettre, là où ça serait possible, d'expérimenter très concrètement ce que ça voudrait dire. Pour éviter que, dans un certain nombre d'années, dans une solution de facilité, dans un contexte où peut-être les médecins eux-mêmes, ne serait-ce qu'à cause de leur nombre soit dit en passant, dont ils ne sont pas responsables, et dont c'est la responsabilité de l'État et des universités, ne soient pas dans une position où ça sort comme une panacée, c'est dans ce contexte et cette perspective que cet article a été écrit. Encore, je ne voudrais pas un long débat juridique là-dessus, je dis que c'est ça, notre intention et il faudra s'assurer que ça traduit notre intention et pas plus.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Vous voulez répondre, M. Czitrom?

M. Czitrom: J'aurais voulu revenir juste un instant d'abord à la loi 84. Ce que nous prétendons, c'est que la loi 84 prévoit déjà des mécanismes par lesquels, après entente, on peut prévoir des incitatifs, pour que des médecins s'établissent dans des régions que l'on considère dépourvues de médecins, et prévoir aussi une certaine forme de contingentement. Le seul problème avec tout ça, c'est cet "après entente" et ça, c'est déjà dans la loi 84 et ça n'a jamais été mis en application. Je ne veux pas, encore une fois, moi non plus, faire des procès d'intention, surtout à des ministres qui ne sont plus ici, mais lorsque le ministre nous dit que la loi 84 est surtout de caractère administratif, nous avons vraiment mal compris, nous, les médecins parce que nous avons compris, à un moment donné, que l'allée commune de ces objectifs était de limiter les moyens de contestation que les médecins avaient, en rendant les désengagements pratiquement impossibles.

Pour ce qui est - et je m'excuse de cette parenthèse - du salariat, le ministre nous dit qu'il n'en fait pas une religion. J'en suis fort aise, mais je voudrais lui répondre que nous non plus nous n'en faisons pas une religion, ni pour, ni contre. Depuis des années déjà, la FMOQ a crié haut et fort qu'elle voulait représenter les médecins, quels que soient leur mode de pratique, leur lieu de pratique et leur mode de rémunération. Quant à nous, les médecins, nous n'avons jamais prétendu que nous étions de grands défenseurs de la médecine du paiement à l'acte avec la bannière en avant et 5300 gars en arrière. Nous avons, au contraire, négocié avec le ministère des formes de rémunération différentes, soit la vacation, soit les honoraires fixes et ma foi, nous nous en portons très bien. Je crois que ce n'est pas à ce niveau que nous craignons que l'on nous impose des modes de rémunération venant d'en haut. Je voudrais moi aussi clarifier cette situation, parce que je n'ai jamais mentionné, nulle part, que c'était un problème qui nous fatiguait dans la loi ou ailleurs. La Fédération des médecins omnipraticiens a fait sienne, depuis longtemps, cette multiplicité et cette faculté, justement, d'adaptation du médecin à ses conditions, qu'elles soient de travail ou de rémunération.

M. Chapados: M. le Président, j'aimerais, avec votre permission, ajouter peut-être une chose, suite à cette question du ministre. C'est peut-être un des paragraphes du projet de loi - il ne m'incite pas à faire un procès d'intention - qui m'incite à poser une très bonne question.

Tout à l'heure lorsque nous avons parlé d'ententes individuelles par référence aux cas pressants, nous avons dit tout bonnement, à tous les membres de la commission, ce que nous pensions de cette approche-là. Ce que j'aimerais souligner ici, c'est que là, il n'y a pas de santé publique et d'urgence; on veut agir à titre expérimental, on veut expérimenter un mode de rémunération à un certain niveau. Ce que la fédération dit tout bonnement, c'est: Faisons-le ensemble. C'est à titre expérimental, on la fera ensemble, l'expérience, on l'évaluera ensemble et si elle est si bonne que ça, on la généralisera à certains secteurs. D'où cette nouvelle proposition contenue dans le projet de loi qui laisse au ministre, avec l'accord d'intervenants extérieurs, l'établissement, les médecins concernés, le CMD ou différentes personnes... Nous soumettons en toute déférence, qu'encore une fois... On dit: L'organe qui négocie la loi des parties n'a pas d'affaire là et tout ça, à titre expérimental. Je pense que si c'est à titre expérimental, les parties ont le temps de faire une vraie bonne expérience; ça nous permettra de l'évaluer ensemble.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, merci, M. Chapados.

Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il m'apparaît qu'il y a un problème de fond dans vos représentations auquel le ministre n'a pas répondu.

Vous êtes ou je crois comprendre que vous êtes d'après les informations que le ministre nous a données, en voie de renouveler votre entente. Du moins, il y a des efforts dit-on, je vais accorder la bonne foi aux deux côtés; d'un côté et de l'autre, on est, dit-on, dans le processus du renouvellement de la renégociation d'une entente.

Le ministre dit: On essaie d'harmoniser des choses, etc. Il m'apparaît quand même, M. le ministre, que vous arrivez tout à coup dans ce processus avec cette loi, qui vous permet, enfin que ce soit par l'article 31, que ce soit par l'article 19 ou d'autres, par exemple, dans tout le champ de l'activité professionnelle, d'intervenir au moment où, officiellement en tout cas, les gens sont censés être en négociation.

Je me dis que le seul motif pour lequel un gouvernement devrait intervenir dans ce processus, c'est si on ne peut pas parvenir à une entente, même en mettant toute la mauvaise foi de l'autre côté, en disant que c'est cette partie qui est de mauvaise foi, et qu'il n'y a absolument pas moyen d'arriver à une entente. Sinon, c'est très difficile d'expliquer pourquoi, à ce moment-ci, le gouvernement intervient avec cette loi qui vient quand même poser un cadre assez

précis aux négociations en cours. Qu'elles soient lentes, qu'elles n'aillent pas aussi vite qu'on le veuille, c'est une autre affaire et, là-dessus, je trouve que la fédération a un objet de contestation qui m'apparaît valable. Maintenant, je voudrais quand même demander d'abord à la Fédération si c'est là pour elle le fondement d'une partie de ses contestations à savoir que cette loi qui vient quand même encadrer d'une manière assez précise les objets de la négociation est une chose qui lui apparaît une intrusion dans ce processus de négociation.

Le Président (M. Laplante): M. Czitrom.

M. Czitrom: M. le Président, le problème pour lequel nous avons mis en marche depuis quelque temps certains mouvements de contestation que nous voulions par ailleurs civiliser, où nous ne voulions vraiment pas causer de problèmes graves de santé, je crois que ceci aujourd'hui est de l'histoire, tout le monde le sait, c'est comme cela que ça c'est passé, c'était justement pour que l'on mette en marche, le moment venu, le processus de négociation d'une nouvelle entente.

Nous savions à travers les branches que le ministre préparait une loi. Nous ne savions pas son étendue. On croyait qu'il s'agissait à ce moment-là particulièrement du problème des régions éloignées. Au moment de cette préparation, lorsque nous avons déjà déposé notre fameuse brique, il y a deux ans, on s'attendait à entreprendre ensemble de façon positive et rapide des négociations, mais on s'est retrouvé devant un projet de loi qui remettait en cause à nos yeux, et nous en avons parlé assez longuement, tout le processus de la négociation et de la représentation syndicale. Nous avons eu l'impression qu'une des raisons pour lesquelles cette négociation que nous avions voulu entamer a été retardée, c'était que justement on a changé les règles du jeu en édictant une loi avec laquelle par la suite, évidemment, nous avons été obligés de vivre et de vivre dans des conditions qui ne sont plus tout à fait les mêmes.

Mme Lavoie-Roux: Alors, si je comprends, on semble soustraire par ce projet de loi toute la partie de l'activité professionnelle. Vous avez nommé trois objets particuliers de la négociation. Le premier, c'est la distribution des effectifs. La deuxième, c'est l'activité professionnelle, et une grande partie de l'activité professionnelle se trouve soustraite à la négociation par ce projet de loi qui est devant nous. Est-ce que je comprends bien ou est-ce que j'interprète bien votre pensée?

M. Czitrom: Oui, absolument, madame.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que c'est important de le faire préciser.

Maintenant, j'admets qu'un gouvernement, à un moment donné, doit intervenir si l'intérêt public est en jeu, et poser des gestes. C'est le gouvernement et il doit gouverner. Est-ce que vous pouvez me dire à ce moment-ci, si vous avez l'impression que - je vais vous le demander d'une façon plus concrète - si vous avez eu des offres de la part du gouvernement? Il y a eu un moratoire de 1979 à 1981. On sait qu'en 1981, quand le ministre est arrivé, il a demandé un répit, et cela on le comprend très bien. Mais, il s'agissait vraiment d'une négociation du renouvellement de l'entente générale. Est-ce qu'il y a eu, de votre côté et du côté du gouvernement, des ouvertures pour négocier avant que cette loi-là soit mise sur la table? Enfin, c'est cela ma question.

Le Président (M. Bordeleau): Pour ce qui est de la négociation...

M. Czitrom: ... la réouverture d'une entente générale, la réponse est non. M. le Président, nous n'avons pas eu de séance de négociation quant à la réouverture de l'entente générale. Nous avons rencontré le négociateur en chef du ministère le 29 octobre, qui nous a annoncé que dans peu de temps nous allions avoir à discuter de l'entente générale, mais il n'y a pas eu de négociation.

Mme Lavoie-Roux: Étiez-vous prêts à négocier, vous autres de votre côté, l'entente générale?

M. Czitrom: Nous étions prêts depuis deux ans à négocier l'entente générale, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Je pense que M. le ministre aurait une réponse ou en tout cas voudrais faire un commentaire, pour le moins.

Mme Lavoie-Roux: Je sais qu'il y a une espèce d'entente tacite, à savoir que lorsqu'il y a des négociations en cours, on ne soulève pas cela en commission parlementaire. Je pense que c'est une sorte de convention. Mais comme on nous présente un projet de loi qui vient toucher au processus des négociations en pleine négociation, ou ce qui devrait normalement être en pleine négociation, M. le Président, je me suis permis de soulever une question directement reliée à la négociation.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. M. le ministre, vous avez un commentaire?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je

pense que c'est important. J'ai vu la réaction un petit peu exceptionnelle, peut-être des accompagnateurs dans les galeries. C'est important, je pense cette question de la négociation et j'espère que c'est la dernière fois qu'on en parle ici en commission, parce que ce n'est pas le lieu pour faire cela; on est ici pour parler de la loi. Je comprends qu'il y a une relation à bien des égards. Je le rappellerai au Dr Czitrom, et il le sait. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion de lui rappeler récemment qu'historiquement - cela ses conseillers juridiques le lui confirmeront - sa fédération, avant qu'il n'occupe le poste de président, a accepté, ainsi que la Fédération des médecins spécialistes, de reconduire l'entente existante pour une période d'un an. Elles ont obtenu des montants forfaitaires ou des ajustements, selon le cas, avec des modifications uniquement au tarif et non pas sur le reste des textes. Ce document visant à reconduire l'entente existante, en fait, permettait ce qu'on a appelé un moratoire pour un an. Donc c'était une entente. (17 h 30)

C'est comme ça que c'est, juridiquement et de fait, c'est la base d'un contrat dans une société normale; les deux parties ont signé un document dans lequel elles considéraient qu'elles reconduisaient les textes précédents, sauf des ajustements à l'égard du tarif et des montants forfaitaires. Cela s'appelle une entente, juridiquement, au niveau de ce que sont les relations de travail normales entre deux groupes et entre l'État et une fédération ou des fédérations représentatives.

Or, ce moratoire ou ce contrat ou cette entente, je le rappellerai, est expirée depuis juin dernier, ça fait donc six mois; entre-temps, celui qui vous parle a été nommé à la direction du ministère. J'ai eu l'occasion de rencontrer le Dr Hamel, comme j'ai eu l'occasion de rencontrer le Dr Desjardins, pour leur dire, un peu avant le mois de juin, quelques jours après ma nomination, sachant que les ententes allaient bientôt expirer: Messieurs, je n'ai pas donné de mandat encore à mes gens, puisque l'entente n'est pas échue, que je viens d'arriver, qu'il y a des élections et, on le sait, quelquefois, les élections bousculent bien des choses. Ça vaut à bien des endroits, d'ailleurs, pour bousculer des choses, pas seulement en politique, ça vaut aussi pour les organismes représentatifs. C'est normal.

Il y a eu ce temps d'arrêt normal, je dirais, de toute la société, pendant une élection. En arrivant au ministère, j'ai pu assurer le Dr Hamel qu'à compter de l'automne nous serions prêts à nous asseoir pour le renouvellement de l'entente, en lui faisant remarquer une chose, c'est-à-dire que l'entente antérieure avait pris quatre ans à être négociée, quatre ans. Ceux qui ne s'en souviennent pas devraient se le rappeler. Quant à nous, j'ai dit que je demandais une période de grâce de six mois après l'expiration et nous sommes arrivés dans le contexte que nous connaissons.

J'ai, par ailleurs, à ce moment-là, dit également aux présidents des syndicats que je considérais que certains problèmes exigeaient un encadrement législatif, sans pour autant, je le reconnais, entrer dans le détail des dispositions du projet de loi et, deuxièmement, j'ai accepté, à la demande du Dr Hamel, que nous négociions de façon spécifique la question des médecins omnipraticiens faisant de l'anesthésie, la question des médecins omnipraticiens s'occupant de psychiatrie à Drummondville et la question des médecins s'occupant des services d'urgence à Montréal. Le Dr Hamel, à ce moment-là, pendant l'été, nous a dit: Si on peut au moins fonctionner à ces tables, on considérerait, dans les circonstances qu'il y a quelque chose qui bouge. Effectivement, on a fonctionné à ces deux tables, on a réglé deux de ces problèmes et le troisième, je pense que nos gens en discutent encore. Je n'entrerai pas dans le détail des choses. Je pense qu'il faut laisser faire le travail là où il doit être fait. Je pense que les raisons pour lesquelles cela a achoppé sont bien connues maintenant du Dr Czitrom et de moi-même; je pense qu'on tente de régler le problème.

Ceci dit, on est rendu bientôt à la fin de l'automne, il y a le projet de loi qui donne les intentions, j'ai rendu publics les grands objectifs de la négociation et nous serons prêts, j'ai l'impression, au bord des fêtes, d'un côté ou de l'autre, à commencer cette négociation. C'est ce que je tenais à dire pour rassurer tous ceux qui, dans l'assistance, ont cru voir l'explication totale donnée par ma collègue de L'Acadie, pour leur dire comment cela s'est déroulé. Je pense que c'est important que les faits soient bien connus, quelquefois.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, Mme la députée de l'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je dois comprendre, de l'explication que le ministre vient de donner, qu'à ses yeux la négociation n'a pas débuté et qu'il se donne un cadre juridique comme, par exemple, le gouvernement se donne un cadre juridique dans le cas des négociations qui doivent régir le front commun ou les relations. C'est ce que je dois comprendre de votre explication, M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): C'est-à-dire qu'il y a, dans ce projet de loi - j'ai eu l'occasion de l'exprimer - très précisément, à l'égard de la négociation, les éléments suivants, certaines conditions exigées par la loi,

notamment au chapitre de la répartition des médecins en région, sur lesquelles j'aimerais revenir dans deux minutes.

Mme Lavoie-Roux: C'est mon autre question.

M. Johnson (Anjou): Je pense que c'est important qu'on y revienne. Deuxièmement, certaines dispositions confirmant ou donnant au gouvernement des pouvoirs spécifiques en matière de santé publique, ce sur quoi on a parlé tout à l'heure, et sur lesquelles le syndicat aimerait que, dans le temps et dans les circonstances au moins, on puisse s'ajuster avec précision pour que cela traduise mieux l'intention et également la notion d'introduction, qui est nouvelle, sur une base expérimentale du salariat ou autres conditions de rémunération dans le but que j'ai évoqué tout à l'heure. C'est cela qu'elle change, la loi.

Par ailleurs, elle confie - c'est en dehors de la négociation, dans le chapitre 48, cela n'a rien à voir avec la négociation intrinsèquement - à des organismes qui ont déjà des pouvoirs en vertu de nos lois, notamment les CMD, les chefs de département, les CRSSS, la composition des conseils d'administration, etc. Elle vient toucher, notamment au titre des CMD et chefs de département, certaines choses qui intéressent les médecins, mais qui intrinsèquement ne sont pas négociées dans la mesure où c'est dans la loi. Cela a toujours été là, la structure des CMD, les chefs de département et le DSP existent dans la loi. C'est ce qu'on vient modifier en étendant certains pouvoirs et, finalement, en assoyant le pouvoir réglementaire du gouvernement et en l'étendant, dans certains cas, à des conditions dont on aura amplement l'occasion de discuter.

Avant de terminer et de laisser la parole, pour le reste du temps qu'elle voudra bien prendre, à la députée de L'Acadie, je pense qu'il y a une question très importante qui n'a pas été abordée jusqu'à maintenant, c'est toute cette question qui touche la distribution d'effectif sur le territoire, dans le contexte de ce que dit le projet de loi. J'ai parlé suffisamment du problème tout à l'heure que les médecins eux-mêmes connaissent souvent, du genre de moyens qu'on se donne. Ce que la loi dit, pour que ce soit bien clair, c'est que c'est le gouvernement qui détermine les territoires. Il faut que quelqu'un mette son chapeau et dise: Je prends la responsabilité de dire que tel territoire est en insuffisance de ressources médicales. On dit: Cela, en soi, ce n'est pas négociable. Ceci dit, qu'il y ait de la consultation, cela me paraît normal et souhaitable, parce que si c'est négocié, tout ce qu'une partie a à faire en cours de route, c'est de trouver les raisons, de bonne foi, pour ne pas s'entendre sur une chose et on ne règle pas le problème. On dit: C'est une responsabilité d'État et il y a quelqu'un qui va en répondre devant les citoyens, devant les syndicats et devant tout le monde.

Deuxièmement, on introduit dans la loi clairement - ce qui est une demande de la FMOQ depuis un certain nombre d'années -le principe de la rémunération différenciée selon les territoires. Cela veut dire qu'il pourrait y avoir dans les ententes des dispositions qui prévoient qu'on peut être plus rémunéré dans certaines circonstances.

Troisièmement, la loi introduit un autre principe qui est inspiré du postulat suivant, l'option étant, comme le disait quelqu'un, le projet de loi de M. Bisaillon sur le service civique obligatoire, qu'à la sortie de leurs études ou à leur arrivée dans le système de la RAMQ, pour être plus précis techniquement, les nouveaux médecins donc, les autres conservent, en vertu même de la loi, leurs droits acquis prévus dans les conventions - puissent avoir une rémunération différentielle, mais qui peut être dans le sens d'une rémunération moindre qu'un collègue pour un territoire donné, notamment un territoire pourvu. Un exemple: la loi permettrait, pas plus et pas moins, qu'on désigne des territoires où il manque de médecins et qu'on dise qu'un nouveau qui arrive dans le système, qui va s'installer à un autre endroit que les territoires identifiés - et ils peuvent varier de façon considérable, à ce moment - toucherait une rémunération moindre que celle de ses collègues s'il s'installait à Montréal ou à Québec, par exemple. Je parle des omnipraticiens dont on ne manque pas, de façon générale. La rémunération pourrait être moindre. S'il allait dans une des régions désignées, sa rémunération serait celle des collègues qui sont déjà dans le système, de telle sorte qu'on crée un "désincitatif" à aller dans les centres, dans le cas de tous les nouveaux qui entrent dans le système, en vertu de principes lesquels on aura à discuter longuement avec la Fédération des médecins internes et résidents et les associations d'étudiants qui viendront se faire entendre.

Finalement, à l'égard de cette clause et de cette clause seulement, c'est-à-dire celle qui introduit la notion de tarifs différentiels dans le cas des médecins qui arrivent, on dit: Le gouvernement pourrait, par décret, en l'absence d'une entente négociée - si ce n'est pas négocié déterminer ce qu'est ce tarif différentiel. Pour quelle raison? Pour une raison très simple sur le plan des relations de travail. C'est que, techniquement, si on ne met pas cette disposition, les organismes représentatifs et le gouvernement n'ont qu'à se regarder pendant trois ans et rien ne va se produire. Le jour où on introduit une espèce de principe de "last offer", où le

gouvernement devra se mettre dans la position odieuse de décréter des tarifs "à la baisse", entre guillemets, et où les syndicats devront se mettre dans la position de défendre ce qu'ils ont fait à la table des négociations, on va peut-être s'arranger pour le régler, mais on introduit le principe, c'est évident, à partir des objectifs que j'ai déjà évoqués et sur lesquels je ne reviendrai pas. Je pense que c'est important qu'on le précise et c'est dans ce cas seulement que le pouvoir de décret existe; il n'existe pas dans les autres cas.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, Mme la députée de L'Acadie.

M. Johnson (Anjou): J'ai fini.

Mme Lavoie-Roux: Oui, je suis contente de récupérer mon droit de parole.

Le Président (M. Bordeleau): Vous ne l'aviez pas perdu, Mme la députée de L'Acadie, vous avez tout simplement été retardée un peu.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il y a peut-être une ambiguïté qui a été levée. Je ne sais pas ce que la fédération en dira. Le dernier mot que je dirai sur la négociation générale de l'entente, c'est qu'à la suite des questions que j'ai posées au ministre à l'Assemblée nationale, il m'a à quelques reprises, du moins il m'a laissé cette impression, laissé entendre qu'il était prêt à négocier et qu'il attendait que la fédération vienne négocier. Aujourd'hui, il me dit: Non, il s'est donné six mois et que, là, on vient d'établir un cadre de négociation pour la prochaine entente. Enfin, c'est l'interprétation que j'en fais.

M. Johnson (Anjou): On va laisser passer.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président... M. Johnson (Anjou): Un peu facile!

Mme Lavoie-Roux: Non... C'est facile, enfin, c'est peut-être difficile pour vous, M. le ministre. Il y a deux questions précises que je voudrais poser. Je vais essayer de les faire courtes, parce que je sais qu'il y a des collègues qui veulent en poser.

Il y a toute la question de l'activité professionnelle qui est reliée en partie au fonctionnement du chef de département qui doit organiser le département ou le fonctionnement de ses médecins selon certaines normes. Vous craignez qu'à la suite de l'absence de définition des normes ce puisse être des normes économiques, des normes médico-économiques ou des normes de soins. Enfin, on n'a pas de définition précise. Mais j'ai cru comprendre que ce qui vous fatiguait le plus, c'est qu'on risque, compte tenu de l'absence de définition des normes, compte tenu que ce n'est pas négocié par l'entente dans le contexte de l'activité professionnelle, de remettre la qualité des soins en question. Est-ce que c'est un concept qui vous répugne que ces normes ou ces dispositions soient introduites dans l'entente ou dans la négociation de l'entente? Ce concept existe déjà en pratique, de toute façon. Ou est-ce simplement le fait qu'il y ait une absence de définition des normes... J'aimerais avoir votre réaction là-dessus.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Chapados.

M. Chapados: M. le Président, en réponse à la question qui vient d'être posée, j'aimerais souligner ceci: L'ancienne loi, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, avait ce caractère particulier qu'elle disait qu'en matière d'activités professionnelles les plans d'organisation des centres hospitaliers devaient respecter les ententes conclues en vertu de la Loi sur l'assurance-maladie. On appelait cette clause la réserve.

Ce que fait le projet de loi? Il abolit cette réserve, d'où notre conclusion, évidemment, que tout le champ de l'activité professionnelle, qui avait été stipulé préalablement à l'entente, tombe automatiquement, parce que c'était la réserve à la loi 48 qui justifiait les stipulations qu'on faisait en vertu de la Loi sur l'assurance-maladie. C'est clair.

Deuxièmement, il y a un problème de normes. Quant à nous, là-dessus, nous avons pris une orientation de fond et nous vous avons dit que nous privilégions la voie que nous avions déjà empruntée qui s'inspirait de l'article 173i de la loi actuelle qu'on veut abolir. Nous avons donc fait une recommandation dans le mémoire concernant l'article 173i que nous proposons à la Loi sur l'assurance-maladie. (17 h 45)

Autre chose, autre exemple que je vais donner, le projet de loi - et ça, ce sera un excellent exemple pour le ministre qui cherchait des exemples tout à l'heure de normes bureaucratiques - c'est que, l'article 39 du projet de loi déposé, pourvoit qu'un conseil régional peut fixer les normes de fonctionnement des services d'urgence d'un établissement. C'est clair. Nous comprenons très bien, si je me réfère à l'expérience qui se fait actuellement dans le Montréal métropolitain, qu'il s'agit là d'une chose qui puisse à un moment donné être nécessaire pour assurer une certaine coordination des services qui sont donnés. Ce que nous disons à la page 28 de notre mémoire, c'est que cet article 39 permet un conseil régional,

permet d'édicter des normes sur le fonctionnement des services d'urgence où exercent en masse les médecins omnipraticiens, sans qu'il n'y ait aucune réserve pour prévoir l'articulation de ces normes-là avec l'activité des professionnels qui y sont.

Le ministre va peut-être nous répondre: Bien, peut-être que les normes arrêtées par les CMD vont prévoir cela. Nous, nous recommandons que, pour pallier à cette omission, la fédération suggère qu'une réserve expresse, portant sur les activités au sein des médecins, soit introduite à cet article. Ça, c'est un des exemples; j'aurais pu en citer tout à l'heure six ou sept, quand le ministre demandait au Dr Czitrom: Citez-moi des normes bureaucratiques, technocratiques, etc... c'en est un exemple, les CRSSS qui vont édicter des normes sur les fonctionnements des services d'urgence. On ne dit pas non plus, au ministre, que c'est complètement folichon. Au contraire, on dit que ça peut s'imposer dans le cadre d'une coordination, d'une articulation des services d'urgence. Le seul problème, - et ça c'est la philosophie du projet de loi - c'est ce qui va exister, ce sont les normes sur le fonctionnement des services d'urgence.

Le projet de loi ne prévoit pas d'articulation entre ces normes-là nécessaires et l'activité des professionnels qui vont y exercer, où sont, soit dit en passant, dans 85% des cas, des omnipraticiens. C'est clair, c'est juste ça notre position

M. Johnson (Anjou): C'est pour ça qu'il y a des commissions parlementaires. C'est pour pouvoir s'exprimer là-dessus.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, il y a d'autres points sur lesquels je ne reviendrai pas et que vous avez mentionnés, comme je vais le signaler au ministre en passant; il a dû l'entendre, ou quelqu'un va lui dire, l'article 73 que vous demandez, et surtout, si vous le mettez en relation avec l'article 294 w ou x, je ne me souviens plus quelle lettre de l'alphabet, qui donne d'autres pouvoirs réglementaires sur... Je pense que c'est une chose, je pense que le 73 on en avait parlé, on a parlé du 294.

M. Johnson (Anjou): C'est le cas des gardes. On a évoqué ce matin l'exemple, c'est pour asseoir la notion qui existe déjà dans la réglementation, sur le fait que le CMD est celui qui fixe les horaires, a le pouvoir de réglementer en matière de garde dans l'établissement, ce qui se passe dans la majorité des cas.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, moi je pense que le plus urgent, c'est la question des services en régions éloignées. J'aurais aimé que ceci fasse peut-être l'objet, si c'était nécessaire, encore faut-il s'entendre là-dessus, d'une loi particulière si on avait besoin de légiférer et que les autres aient pu faire l'objet d'un débat beaucoup plus long que celui qu'on nous propose en fin de session. Mais, je voudrais bien comprendre, M. Chapados, si en page 19, lorsque vous dites, le dernier paragraphe, évidemment c'est une proposition de modification que vous faites à l'article 19, mais est-ce que j'ai bien compris quand vous avez dit: Cette possibilité de répartition adéquate des professionnels sur le territoire, établir une procédure ayant pour effet de déterminer le nombre de professionnels admissibles etc... Je ne vous le lis pas au complet. Ceci était déjà, soit dans la loi 84, soit dans l'entente que vous avez signée en 1976; c'est sur cela que je voudrais...

Le Président (M. Bordeleau): M.

Chapados.

M. Chapados: Ceci était dans la loi 84 et j'ajouterai de plus ceci, parce que le ministre a fait tout à l'heure un petit historique des négociations, je ne veux pas entrer dans les détails. Je suis peut-être la personne qui a vécu l'ensemble de l'historique au complet. J'aimerais ajouter une chose, puisqu'on parle de répartition des effectifs. J'aurais eu certaines précisions à apporter, mais étant donné le temps, je ne l'ai pas fait. Concernant les régions éloignées, lorsque le drame ou le problème a éclaté à Rouyn-Noranda - et si on s'en souvient bien, le problème était antérieur, en fait, à la dernière campagne électorale -nous avions saisi le ministre de l'époque de ce problème et nous avions transmis des demandes à la personne que nous avions rencontrée. Nous avions fondé ces demandes précisément sur cette disposition de la loi 84.

Depuis ce temps jusqu'à aujourd'hui, il n'y a toujours pas eu de négociateur nommé dans le dossier des régions éloignées, nous avons notre réponse dans la loi 27; avec la loi 27, nous comprenons - le ministre favorisant soi-disant les ententes individuelles - qu'il n'y ait pas eu, à ce jour, de négociateur nommé; je parle pour les régions éloignées. Ce sont des faits, ce n'est pas un procès d'intention, la seule réponse que nous ayons eue et qui a été corroborée après en septembre, c'est le ministre qui nous l'a donnée à la fin d'août: il nous a annoncé que, d'après ce qu'il avait décidé, le problème des régions éloignées se réglerait dans le cadre du renouvellement de l'entente générale. En plus, évidemment, il y a le dépôt du projet de loi 27 qui touche une facette de cette question-là. C'est la seule

précision que je voulais apporter.

Mme Lavoie-Roux: Je vais revenir après, je vais lui donner mon droit de parole.

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît. Vous prêtez votre droit de parole au ministre.

Mme Lavoie-Roux: Je lui prête mon droit de parole.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, à cet égard, je pense que c'est la dernière fois qu'on va revenir sur cette question de négociation, parce que je ne pense pas que ce soit le forum pour cela et il y a toutes sortes d'autres occasions pour le faire.

Je veux simplement rappeler, puisque le porte-parole de la fédération tend à le faire, que, d'une part, l'entente que j'avais avec son mandant, le Dr Hamel, était spécifique et qu'elle excluait spécifiquement et nommément la négociation de l'ensemble de la question de la répartition des effectifs sur le territoire puisque, d'une part, je savais qu'il devrait y avoir une partie des dispositions qui doivent être contenues dans la loi.

Deuxièmement, c'est exactement ce qui a expliqué pourquoi, dans le cas des omnipraticiens anesthésistes, pendant de nombreuses semaines, cela a achoppé; cela n'a pas fonctionné à cause de cela, parce que mes représentants avaient comme mandat de ne pas dépasser le cadre de l'entente existante. Or, s'ils avaient eu le mandat de ne pas dépasser l'entente existante, c'est justement parce qu'il y avait une entente qu'on ne réglait pas le problème des régions à travers celui des anesthésistes, pour le régler dans un cadre plus général. Je trouve peut-être un peu regrettable qu'on entre dans ce type de plomberie ici, je pense que j'ai été clair; je prends la parole de M. Chapados quant à sa bonne foi, je présume qu'il prendra la mienne aussi quant à ma bonne foi dans ce dossier. Nous avons eu trois tables, et la preuve c'est que nous avons une législation, et, deuxièmement, des mandats de négociation qui ont été révélés.

J'ai évoqué publiquement qu'une partie du règlement du problème de la répartition des effectifs sur le territoire, tout ce qui touche le tarif différentiel pour tous ceux qui sont dans le système, il n'y a rien dans la loi de contraignant pour ceux qui sont dans le système, il n'y a rien de contraignant dans cela.

J'ai cependant dit que, dans les mandats de négociation, une partie des fonds additionnels - et on n'en a pas beaucoup à mettre, parce que la situation est difficile et vous la connaissez, d'ailleurs, vous payez assez d'impôt pour le savoir - une partie des sommes additionnelles serait consacrée spécifiquement à une série de mesures dans le cadre de la négociation pour les fins de la distribution des effectifs sur le territoire.

C'est en prenant le tout, y compris les mesures administratives, que nous entendons mettre sur pied, que nous pensons que ça fait un "package". J'espère qu'il va être acceptable, je ne peux pas en présumer, c'est pour cela qu'on va négocier. Je veux simplement prendre à la lettre et au mot ce que dit M. Chapados, et croire à sa bonne foi; je voudrais seulement qu'il ne la mette pas en doute en ce qui me concerne.

Le Président (M. Bordeleau): Madame la députée de L'Acadie, vous pouvez continuer.

Mme Lavoie-Roux: Je comprends que le ministre doive continuellement se justifier ou justifier son gouvernement ou le ministre qui l'a précédé, mais il y a une chose qui m'apparaît claire et, si je me trompe, je n'ai pas d'objection à être corrigée: il y avait quand même déjà, à la suite de l'entente de 1976, des possibilités de corriger - nous espérons que c'est possible - le problème des effectifs dans les régions éloignées.

La loi no 84 apportait de nouvelles possibilités et je pense que j'ai entendu tout à l'heure, pas à la suite de ma première question; mais antérieurement, les représentants de la FMOQ nous dire que jamais on n'avait tenté d'utiliser ces mécanismes qui étaient en place pour essayer de corriger la situation des effectifs en régions éloignées.

Alors, si j'interprète mal la FMOQ, j'espère qu'on me corrigera. Si telle est la chose, M. le Président, cela semble assez -je ne voudrais pas employer de qualificatif que je regretterais - étrange et surprenant que l'on arrive avec ce projet de loi si on n'a pas d'abord tenté tous les efforts possibles de résoudre le problème par entente. S'il y a eu de la mauvaise foi de l'autre côté, que le ministre nous le dise; mais si de son côté le ministre ou ses fonctionnaires avaient décidé depuis X temps qu'il fallait que cela se solutionne par un projet de loi, c'est regrettable.

Il reste, M. le Président - c'est la dernière remarque que je vais faire - que je pense que tout autre groupe de travail qui rechercherait le renouvellement de sa convention, ou enfin tout syndicat qui quand même tenterait peut-être de faire certaines exceptions pour certaines catégories, mais dans le cadre d'une entente, accepterait difficilement, par exemple, tel que c'est rédigé présentement, l'essai à titre expérimental d'un mode de rémunération. Pas qu'on en soit contre; je ne pense pas que la

fédération soit contre. Elle a dit: On peut le tenter à l'intérieur d'une entente.

Deuxièmement, je ne mets pas en doute la foi du ministre qui dit: Je vais utiliser les ententes particulières uniquement dans des cas de santé publique, de bien public ou d'intérêt public. Mais il reste que lorsque c'est introduit dans une loi, on ne peut quand même pas s'étonner que les syndicats, quels qu'ils soient, posent de sérieuses questions sur une disposition semblable dans une loi, M. le ministre, vous en conviendrez. Peut-être y aurait-il lieu... Tout le monde est pour la santé publique, mais il reste que dans la façon dont c'est rédigé, il faudrait peut-être des balises supplémentaires pour rassurer la FMOQ, à savoir que vraiment c'est mieux défini que là. On pourra toujours invoquer la santé publique. En tout cas, je peux assurer le ministre que du côté de la répartition des effectifs dans les régions éloignées, nous sommes prêts à lui apporter tout l'appui nécessaire, mais quand même à l'intérieur de conditions qui respectent les interlocuteurs avec qui vous devez travailler et avec qui tout le monde doit travailler. J'arrête ici mes questions, je pense que mes collègues en ont, j'en aurais plusieurs autres.

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, je rappelle à tous nos visiteurs que la règle normale qui existe ici aux commissions est que les invités ne doivent pas manifester leurs émotions.

M. Johnson (Anjou): Ils ne doivent que les ressentir.

Le Président (M. Bordeleau): Ils peuvent quand même les ressentir, bien sûr. Oui, il n'y a pas de problème, j'ai dit qu'on pouvait les ressentir. Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci. D'abord, sur les effectifs dans les régions éloignées, si ma mémoire est bonne, il y a une étude demandée par le ministre sur cette question, spécifiquement sur la région de Rouyn-Noranda, préparée par le Dr Landry du Montreal General Hospital et j'aimerais demander au ministre quel est le statut de ce rapport, je crois qu'il n'a jamais été rendu public. Est-ce que la loi tient compte des recommandations de ce rapport?

M. Johnson (Anjou): Brièvement...

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): ...le Dr Landry, effectivement, à l'occasion de sa nomination comme tuteur dans la question de Rouyn-Noranda, a choisi, dans le cadre d'une étude faite par le département de santé communautaire de l'hôpital Montreal General auquel il appartient, où il a son port d'attache, de décrire, à partir de ce cas, en fonction de la méthode des administrateurs, la méthode de cas, ce qui s'était passé à Rouyn-Noranda. Le mérite de cette description est de bien dire que le problème de la répartition des effectifs sur le territoire, ce n'est pas seulement une chose, ce n'est pas seulement ou l'argent, ou la contrainte, ou le rattachement institutionnel, mais c'est qu'il y a un ensemble de facteurs sur lesquels il faut jouer, non seulement pour permettre d'atteindre des masses critiques de médecins en nombre suffisant dans certaines régions suffisamment dotées, en termes d'équipement, pour les recevoir, non seulement de les attirer, mais de les garder. (18 heures)

Cette approche existe d'ailleurs dans de nombreuses autres études qui ont été faites. Ce n'est cependant pas le rapport que j'ai demandé au Dr Landry de me faire sur la tutelle, étant donné que la tutelle se poursuit toujours; c'est une étude qu'il a faite avec les gens de son département. Si on s'inspire de l'étude, des éléments de cette étude, comme on en retrouve ailleurs, parce que je pense que c'est le bon sens... Le bon sens, c'est de régler le problème de la répartition des médecins sur le territoire. Je pense qu'effectivement il y a une notion d'incitation financière qui n'est pas étrangère à cela, puisqu'elle existe en partie déjà pour certains domaines, d'autres domaines d'activité, ne serait-ce qu'au titre des conventions collectives, mais il ne faut pas confondre les régions et les territoires éloignés, parce que ces notions peuvent être très différentes, les régions isolées comme la Baie-James, par exemple. Donc, il y a une dimension financière à laquelle il faut être sensible, mais il y a aussi des limites à ce qu'on peut donner à ces dimensions financières.

On pourrait peut-être brancher directement le ministère du Revenu sur la Régie de l'assurance-maladie, parce qu'on se demande, à un moment donné, si ce ne sont pas des vases communicants entre l'impôt sur le revenu des particuliers - et les médecins en paient un peu comme bien d'autres dans la société - et les conditions à travers un système qui est public, donc on dispense de l'argent public. C'est simplement de dire ici: On n'imprime pas l'argent, on le prend quelque part, donc il y a des limites à cela.

Deuxièmement, on retrouve la notion de qualité de vie dans ce rapport. J'entends le député de Jean-Talon, qui a sans doute terminé son discours sur les questions constitutionnelles, me dire d'être bref. J'admets que c'est un petit peu plus court que ses prolégomènes de tout à l'heure. Donc, il y a la nécessité de fournir un environnement professionnel qui soit le plus

adéquat possible et cela, notamment par ce qu'on appelle le rattachement. Ce qu'on vise, entre autres, dans d'autres dispositions du chapitre 48 de cette loi, qui vont nous faciliter la tâche, que ce soit par les CRSSS ou les contrats de services des établissements eux-mêmes, c'est de rattacher certaines institutions en région à d'autres pour permettre une plus grande communication, une meilleure facilité de référence, un contexte professionnel plus facile pour celui qui va en région. C'est ce qu'on appelle le jumelage institutionnel, auquel on peut ajouter un tas d'autres choses, et il y a une partie de la loi qui traite de cela indirectement.

Troisièmement, il y a toute la notion du milieu de vie, mais cela ce ne sont pas les lois qui vont régler cela, ce sont les gens dans les régions qui, au niveau du recrutement, devront convaincre des médecins et des finissants, mais des deux ordres, qu'ils soient dans le système ou qu'ils y arrivent, que s'il n'y a pas la Place des Arts à tel endroit il y a peut-être une autre sorte de vie qui n'est pas désagréable à l'automne et que l'hôpital de Rouyn n'est pas fait en rondins avec un toit de chaume, c'est un vrai hôpital. Cela est important, parce que c'est toute la notion. Le député de Jean-Talon avait la politesse, mais vous semblez insister sur le contenu de la répartition d'effectif.

Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée de L'Acadie, sur une question de règlement.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, l'heure avance, comme on peut voir.

Le Président (M. Bordeleau):

Exactement, il est 18 heures passées et cela me prend le consentement des membres de la commission pour continuer. Est-ce que vous me l'accordez?

Mme Lavoie-Roux: Oui, on vous l'accorde, mais je me demande si, dans l'intérêt public, le ministre ne pourrait pas déposer ce rapport, puisqu'il touche directement au problème des régions éloignées. C'est cela la question.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): II n'y a pas de drame en soi là-dedans. Des études, il n'en manque pas au gouvernement; le problème, ce sont les décisions, et il y en a des décisions là-dedans.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous allez déposer le rapport dans l'intérêt public?

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! Question de règlement, M. le député de...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de règlement. Est-ce que j'ai le droit de poser une question au ministre?

Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais je vais d'abord prendre la question de règlement de M. le député de Gouin.

Mme Lavoie-Roux: Ah! je m'excuse.

M. Rochefort: Vous êtes bien gentille d'accepter de m'entendre. M. le Président, je crois qu'on aura d'autres occasions pour discuter de cette question entre nous. On en a eu jusqu'à maintenant et on en aura d'autres. Le mandat de la commission aujourd'hui, c'est d'entendre des organismes. Il y a un organisme actuellement à la table qui, je présume, a des choses à dire. Il en a déjà dit beaucoup et je pense qu'il en a encore. Il y a aussi d'autres organismes qui sont dans la salle à qui on a souligné que leur participation s'effectuerait aujourd'hui et qui souhaitent sûrement passer aujourd'hui. Je suis peut-être moins habitué aux rouages que certains de mes collègues de l'Opposition, mais je crois que c'est ainsi que cela devrait fonctionner pour respecter tout le monde, les parlementaires comme les organismes qui sont dans cette salle.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous plaît! Un instant! Je vous remercie de votre question de règlement, M. le député de Gouin. Cela va me permettre justement de demander la collaboration des membres de la commission, parce que je pense avoir été très large et ce, volontairement, cet après-midi pour permettre toutes les questions possibles, mais je voudrais simplement vous faire savoir qu'il y a d'autres organismes, d'autres groupes qui doivent être entendus aujourd'hui, qui le seront ce soir, mais que tout le temps qu'on met à discourir sur différents sujets, cela retarde d'autant les autres organismes. Je ne voudrais pénaliser personne, pas plus les membres de la commission que les organismes qui sont venus ici présenter leur mémoire, mais je pense que tous les membres de la commission devraient tenir compte de ces aspects.

D'autres questions?

Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Sur quoi, le oui ou le non?

M. Rivest: Sera-t-il rendu public, oui ou non? C'est cela la question.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Rochefort: Est-ce que vous avez statué sur ma question de règlement?

Mme Lavoie-Roux: Cela n'a rien à voir avec cela.

Le Président (M. Bordeleau): J'ai statué; je vous ai répondu.

M. Rochefort: Je pense que cela indique comment on doit poursuivre les travaux de la commission.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Bordeleau): On va quand même laisser le droit de parole à tout le monde.

M. Rochefort: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): S'il y a une question de posée par le député de Jean-Talon ou par qui que ce soit au ministre, par Mme la députée de L'Acadie... M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): J'ai terminé.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre! Mme la député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Le député de... Le Président (M. Bordeleau): Gouin. Une voix: Gouin.

Mme Lavoie-Roux: Le député de Gouin laisse entendre qu'on fait perdre le temps de la commission. On a posé une question au ministre, c'est d'intérêt public ce rapport; on discutait des régions éloignées. Les fonds des contribuables ont servi à payer cette étude. Le ministre peut-il la rendre public au moment où on discute des effectifs en régions éloignées?

M. Rochefort: M. le Président, je m'excuse, on n'est pas en Chambre ici, il n'y a pas de "filibuster" autour de la table pour l'instant. M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, tout le monde.

Mme Lavoie-Roux: Répondez. M. Rochefort: ... je n'ai jamais...

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! M. le député de Gouin, sur une question de règlement.

M. Rochefort: ... voulu laisser sous-entendre que des députés autour de la table faisaient perdre le temps de la commission. Tout ce que j'ai voulu souligner, c'est que nous avions un agenda chargé et que les questions qui avaient été posées n'allaient pas dans le sens du mandat de la commission mais que ça allait plutôt dans le sens du mandat que la commission recevra ultérieurement.

Le Président (M. Bordeleau): Vous aviez raison de soulever le point, M. le député de Gouin.

M. Sirros: M. le Président, avant de proposer, est-ce que je pourrais soulever une question de règlement sur le même sujet avant que vous statuiez, pour que vous puissiez avoir les deux côtés d'opinion.

Le Président (M. Bordeleau): Je pense que j'ai déjà statué là-dessus, c'est simplement un point de règlement. Je pense que le député de Gouin avait raison de faire part aux membres de la commission...

Mme Lavoie-Roux: On veut une réponse, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Non, là, ce n'est plus sur la question de règlement, je m'excuse.

M. Sirros: J'aurais simplement...

Le Président (M. Bordeleau): Je pense que le député de Gouin avait raison de soulever son point de règlement, ce qui m'a permis de répéter justement que nous avons d'autres organismes dont les mémoires doivent être reçus ce soir. Le temps que nous mettons à ce mémoire-ci ou aux discussions actuelles retarde de beaucoup la présentation des autres mémoires. C'est simplement le point que j'ai fait valoir aux membres de la commission.

M. Sirros: II me semble, M. le Président, que la thèse du député de Gouin c'était à l'effet que le rapport Landry ne touchait pas nécessairement le mandat de cette commission. J'aimerais vous soumettre très respectueusement que, finalement, le projet de loi no 27 parle des régions

périphériques. La FMOQ en a parlé dans son mémoire et je crois que ce serait très pertinent de savoir, parce que la semaine passée, le ministre m'a dit, en Chambre, qu'il n'avait pas en main le rapport Landry. Il semble qu'il a reçu, depuis ce temps, une réponse courte et précise. Cela suffirait pour qu'on termine ce débat. Oui ou non, est-ce que le ministre a l'intention de rendre ce rapport public?

M. Rochefort: Question de règlement. Je n'ai pas laissé sous-entendre que la question de la députée de Jacques-Cartier ne concernait pas le sujet qui était en discussion. J'ai dit qu'elle n'allait pas dans le sens du mandat que l'Assemblée nationale tout entière nous a confié, qui est d'entendre des organismes relativement au projet de loi no 27.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, ça va.

M. Rochefort: II me semble que c'est clair.

Le Président (M. Bordeleau): De toute façon, n'importe quel membre peut poser une question et le ministre est en droit d'y répondre ou de ne pas y répondre.

Mme Dougherty: On peut soulever la question en Chambre.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée de Jacques-Cartier, vous voulez poser d'autres questions. D'accord.

Mme Dougherty: J'ai une autre question à poser au sujet des médecins. Nous avons à l'heure actuelle un des meilleurs systèmes de services de santé au monde. Il me semble que la loi 27 risque de mettre les hôpitaux en tutelle permanente et de réduire graduellement la marge de manoeuvre professionnelle des médecins. Est-il possible qu'on puisse apprendre quelque chose des expériences des autres pays? Avez-vous des renseignements ou des études des expériences de la Suède par exemple, où on a déjà pris ce virage centraliste et bureaucratique? Avez-vous des renseignements sur, par exemple, l'impact sur les coûts des services, la qualité des services ou la productivité des effectifs dans les services de santé dans d'autres pays qui ont déjà centralisé leur système de santé, comme on le propose dans la loi 27?

Le Président (M. Bordeleau): M.

Chapados.

M. Chapados: Je regrette de décevoir le député; au niveau des statistiques récentes, je n'aurais pas d'éléments à communiquer ce soir à la commission. Les dernières journées ont été consacrées à autre chose, comme vous vous en doutez.

Maintenant, la mise en tutelle des établissements, à la page 23, paragraphe 1 du rapport de l'AHQ qui parle de cela, ça ne nous concerne pas; d'autre part, ce qui nous concerne, par exemple - et là, je rejoins un peu votre question - ce sont les demandes, les réserves qu'on fait au niveau de l'activité professionnelle. C'est capital pour les omnipraticiens du Québec qui occupent, ici au Québec, une place particulière, si on compare cela à la place que d'autres omnipraticiens occupent dans d'autres pays. D'où l'insistance que nous mettons sur toutes ces demandes de réserves au niveau de l'activité professionnelle et aussi l'insistance que nous mettons sur la recommandation où nous disons que tout plan d'organisation devrait comprendre obligatoirement un département clinique de médecine générale. Cela est unique au Québec, la situation de l'omnipraticien, le champ d'activité qu'il occupe et ce, à tous les niveaux de soins.

M. Czitrom: Est-ce que vous permettez, M. le Président?

Le Président (M. Bordeleau): Oui, rapidement si vous voulez bien.

M. Czitrom: Oui, très rapidement parce que, de toute façon, je n'en ai pas beaucoup à raconter parce que mes informations ne sont pas tellement complètes. Ce que je sais, c'est qu'il existe actuellement, en Suède, un système de médecine parallèle à côté du système public parce que, justement, les attentes, surtout en chirurgie, sont extrêmement longues. Les listes d'attente sont très longues et ce que cela a donné, c'est une médecine parallèle. Les gens qui paient pour voir des médecins qui ne sont pas dans le système se font traiter beaucoup plus rapidement que les autres qui ne peuvent pas payer.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, ça va?

M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Je pense que je vais laisser porter parce que je suis sûr d'avoir l'occasion de poser les mêmes questions au sujet de votre mémoire. Il y a quelque chose qui est resté un petit peu flou là-dedans, c'est la question du rapport Landry. Est-ce que le ministre ne va pas répondre ou est-ce qu'il choisit de ne pas répondre ou est-ce qu'il dit oui ou non parce que je n'ai pas compris?

Le Président (M. Bordeleau): Alors, la question est lancée!

M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, vous voyez que je choisis de ne pas répondre.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord alors...

M. Johnson (Anjou): Je suis d'accord avec ce que dit le député de Gouin, je ne pense pas que ce soit la place, on aura l'occasion de le faire mais ailleurs et autrement. Je ne pense pas qu'en commission parlementaire, et à ma connaissance c'est pour les fins du respect du précédent et du genre de comportement qu'on a dans nos commissions, que ce soit dans cette loi ou dans n'importe quelle autre loi. Le dépôt de rapports de cette nature ne fait pas partie des activités normales, ce serait, comme vous le savez, M. le Président, créer un précédent et nous faisons bien attention avant de créer des précédents. Sur le fonds cependant, on sait bien qu'on vous enverra tout ce qu'on peut vous envoyer au sujet de cette question sur laquelle, encore une fois, il a coulé beaucoup d'encre.

En terminant, M. le Président, je voudrais remercier le Dr Czitrom, ses acolytes, ses conseillers, membres de l'exécutif et collègues et l'assurer que nous avons pris très bonne note de beaucoup de ces préoccupations; nous aurons à le faire à travers une étude exhaustive de son mémoire, point par point; nous aurons l'occasion aussi de tenir compte, j'en suis sûr, de certaines de ces choses qui lui confirmeront que, d'une part, nous n'avons aucune intention, d'une façon déguisée ou d'une façon explicite de nous en prendre à ce qu'on appelle les droits syndicaux.

D'autre part, cependant, nous n'avons pas non plus l'intention d'abdiquer ce qui nous apparaît normal en terme de responsabilité à l'égard de la santé publique et par ce truchement, encore une fois, de limiter nos interventions à ce qu'elles doivent être. (18 h 15)

Finalement, à l'égard de la présence des médecins dans notre système, nous sommes convaincus du sens de la responsabilité de ceux-ci, qui est demandé par ceux-ci depuis de nombreuses années. Voilà, même si c'est à travers une articulation comme d'ailleurs dans la plupart des autres provinces canadiennes qui n'implique pas que tout soit négocié, voilà une amorce qui m'apparaît intéressante à la fois pour l'avenir et la santé des citoyens dans notre système de dispensation de soins et l'avenir de cette profession elle-même dans l'ensemble de la société.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.

M. Czitrom, vous avez...

M. Czitrom: M. le Président, juste un mot de remerciement au ministre et aux membres de cette commission qui ont bien voulu être patients avec nous pendant aussi longtemps. Je les prie d'excuser les excès d'émotion, peut-être, de nos confrères qui sont dans la salle, mais qui sont habitués à travailler et à vivre dans d'autres enceintes que celle-là, parce qu'on a fait de l'obstétrique, nous.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, messieurs les représentants des médecins omnipraticiens du Québec. La commission suspend donc ses travaux jusqu'à ce soir, 19 h 30.

(Suspension de la séance à 18 h 17)

(Reprise de la séance à 19 h 51)

Le Président (M. Bordeleau): La commission des affaires sociales reprend donc ses travaux. Nous en étions, à la suspension, à recevoir les représentants de l'Association des conseils des médecins et dentistes du Québec. Ce sont, je pense, M. Claude Farah-Lajoie et d'autres représentants que j'aimerais que vous nous présentiez.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je ne serai pas longue, mais, compte tenu du fait que ce soir, j'ai rencontré certains groupes qui ont déposé un mémoire et qui aimeraient être entendus, j'ai ici la réponse du leader du gouvernement à la question que j'ai posée. Je vous fais grâce, parce que cela a duré assez longtemps. Au moins une dizaine de mémoires étaient arrivés, etc. On leur dit: Faites d'abord confiance à vos représentants; je leur ai fait l'invitation verbale que je fais publiquement ici sur le parquet de l'Assemblée. Je ne veux pas vous interdire de venir, je vous invite même à venir. Si vous estimez après que votre association ne vous a pas bien représentés, je pense que personne ne veut rien bousculer là-dedans et tous les députés seront là pour entendre vos représentations. La commission sera libre de vous offrir le droit de parole. Je ne veux pas ouvrir la frontière encore plus large qu'elle ne l'est déjà, à mon avis. Je lui ai fait préciser si tel était son point de vue et il a dit: Je suis d'accord et c'est de bonne foi. Après le témoignage de son association représentative, un groupe, etc., pourra se faire entendre.

Alors, je veux bien vérifier, parce qu'il y a des gens qui m'ont dit: Nous, on reviendrait jeudi soir ou vendredi matin si

cette possibilité là nous est offerte. Alors, sans faire un long débat, si vous ne voulez pas nous donner votre réponse ce soir, M. le Président, je n'ai pas d'objection à ce que vous nous la donniez demain matin. Mais je voulais quand même le rapporter, parce qu'on en avait discuté ce matin.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, je vous remercie, Mme la députée de L'Acadie. Je vérifierai tout simplement demain matin avec les leaders et la présidence pour voir comment on peut adapter un ordre du jour, comment on peut recevoir des gens. À ce moment-ci, je fonctionne avec une liste qu'on m'a remise au niveau du secrétariat des commissions. Alors, je vais essayer de m'en tenir à cette liste-là pour ce soir et demain, on pourra s'en reparler au début de notre commission.

Mme Lavoie-Roux: C'était juste pour signaler...

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Nous pouvons entendre maintenant l'Association des conseils des médecins et dentistes du Québec.

Association des conseils des médecins et dentistes du Québec

M. Farah-Lajoie: M. le Président, M. le ministre, MM. et Mmes les députés et les membres de la commission, il me fait plaisir, au nom de l'Association des conseils des médecins et dentistes de la province de Québec, d'accepter l'invitation que vous avez bien voulu nous envoyer pour présenter nos opinions et l'opinion de nos membres.

Avant de commencer la présentation, j'aimerais d'abord présenter les membres de l'exécutif de notre association: à ma gauche, le Dr Henri-Paul Noël, de l'hôpital Saint-Sacrement à Québec; le Dr Marc Bois, de l'Institut de cardiologie à Montréal; Me Jacques Laurent, avocat de l'association; le Dr Dollard Bergeron, neurologue de l'hôpital Laval de Québec; le Dr Paul Demers, ophtalmologiste au centre hospitalier Saint-Joseph de Trois-Rivières, et le Dr Robert Michaud, cardiologue de l'hôpital Fleury.

Messieurs et mesdames, nous n'avons pas la prétention de vouloir comparer l'élégance des mémoires d'organismes aussi puissants que ceux qui nous ont précédés aujourd'hui, ni l'accessibilité au sérieux d'un organisme qui, financièrement, est alimenté par les fonds publics. Ledit organisme nous a fait nous sentir très petit, mais à la fois très grandi par l'importance du fait que cet organisme, nommément l'AHQ, d'une si grande envergure consacre des fonds si immenses à nous démolir.

Sans préambule, je passe au mémoire. Il nous apparaît opportun et important de souligner que l'ACMDQ est une association regroupant dans un libre choix la majorité des conseils des médecins et dentistes du Québec. C'est pourquoi, dans notre étude de ce projet de loi, nous avons été principalement préoccupés par la disposition législative devant modifier la loi sur les services de santé et les services sociaux du Québec. Cependant, il nous est aussi apparu que certaines des autres dispositions de ce projet de loi, qui ont pour objet de modifier la Loi sur l'assurance-maladie du Québec, pourront nuire au bon fonctionnement des conseils des médecins et dentistes si elles sont mal reçues par les médecins concernés ou si elles nuisent au maintien d'une qualité optimale de l'enseignement et à l'épanouissement scientifique des médecins. Ce premier commentaire de notre part vous permettra donc de situer notre intervention.

L'ACMDQ souscrit largement au maintien d'un système de médecine curative visant un standard d'excellence comme par le passé, tout en maintenant son accès universel et gratuit sans toutefois surtaxer indûment le contribuable. Nous comprenons que les dispositions du présent projet de loi, dans le contexte des restrictions budgétaires actuelles, ne devraient pas amoindrir la qualité des soins ni compromettre le développement de la médecine hospitalière.

Nous souscrivons également à l'effort, quoique timide, de promouvoir une plus grande interdépendance des partenaires dans le secteur des affaires sociales. Il est bien évident que ceci n'était possible qu'en reconsidérant le rôle de chaque partenaire, plus particulièrement celui de l'administrateur en regard de celui du médecin dans l'établissement ou au niveau régional. Nous sommes donc heureux du fait que le pouvoir médical décisionnel, qui s'amenuisait de plus en plus depuis les dernières 15 ou 20 années au profit d'une administration de plus en plus lourde, soit de nouveau reconnu comme étant nécessaire et qu'il doive être intensifié afin d'en arriver à une réelle cogestion médico-administrative.

La persistance d'une mauvaise répartition d'effectifs et de services médicaux dans la province ainsi que la nécessité d'intégrer davantage le médecin à la gestion des établissements ont rendu plus impérative cette volonté de réformer globalement les services de santé. Toutefois, l'ACMDQ souhaite qu'on puisse en arriver à un consensus général de tous les intervenants. C'est pourquoi une réforme aussi profonde ne devrait pas s'effectuer si hâtivement.

De toute manière, nous appuyons le gouvernement dans sa volonté d'obtenir une meilleure répartition des effectifs médicaux. D'ailleurs, nous nous inquiétons depuis fort longtemps de cette problématique, plus particulièrement à la suite des visites que

nous avons effectuées dans les régions périphériques et éloignées. Nous savons pertinemment que les causes qui sous-tendent ce problème sont multiples et qu'il en sera de même des solutions. C'est pourquoi l'ACMDQ a organisé une table de concertation l'été dernier afin de permettre à tous les intervenants de bien soupeser ce problème. L'ACMDQ en a également fait le thème de son récent congrès, tenu en novembre 1981.

Nous nous devons donc d'insister sur le point que le projet de loi no 27 ne comporte qu'une solution partielle à ce problème des effectifs médicaux puisque celui-ci remet en question non seulement une meilleure répartition des allocations de ressources, mais également la formation médicale elle-même et la qualité de vie des professionnels. La solution proposée par ce projet de loi demeure donc partielle et, à certains égards, coercitive. L'ACMDQ, quant à elle, favorise plutôt une approche globale et la recherche de mesures incitatives. Nous anticipons donc avec impatience la mise en place de nouveaux dispositifs qui viendront compléter ces premiers efforts. À cet égard, l'ACMDQ estime être la plaque tournante des partenaires et intervenants dans le domaine de la santé et elle est en mesure d'assumer les responsabilités qui pourraient lui être confiées dans cet objectif de règlement des problèmes d'effectifs médicaux dans les régions dites éloignées.

Nous partageons naturellement l'avis du gouvernement à savoir que les médecins et dentistes soient davantage intégrés à la gestion des établissements par l'octroi de responsabilités additionnelles. Nous somme également d'accord avec le fait que les pouvoirs des chefs de départements soient élargis. Toutefois, si le Conseil des médecins et dentistes doit élaborer des normes de fourniture de soins et d'utilisation des ressources, l'ACMDQ est d'avis que les chefs de départements cliniques des établissements de santé doivent s'inscrire dans la hiérarchie des conseils de médecins et dentistes, et nulle part ailleurs. (20 heures)

Le directeur des services professionnels devra continuer de surveiller et de coordonner les activités professionnelles et scientifiques des médecins.

Cependant, dans la recherche d'une meilleure coordination des services de santé dans les établissements, nous proposons et souhaitons vivement que le DSP soit également chargé de la direction des activités non seulement des médecins, mais également des autres professionnels de la santé oeuvrant dans les établissements. Nous sommes évidemment opposés à l'établissement d'une autorité hiérarchique unique qui souhaiterait que tous les médecins d'un établissement exercent leurs activités médicales sous l'autorité de chefs de département ou de service qui relèveraient dans leur fonction de l'autorité d'un directeur médical, le DSP, relevant lui-même du directeur général de l'établissement.

Dans cette optique, afin de maintenir une qualité maximale de soins face à une diminution de ressources, l'ACMDQ propose que les services hospitaliers soient placés sous le contrôle des chefs de département et de la direction des services professionnels.

Nous sommes heureux de constater une présence médicale au niveau du conseil d'administration des conseils régionaux. Cette présence permettra au corps médical de contribuer d'une façon plus positive à cet effort de coordination régionale de la distribution des services de santé.

L'ACMDQ veut s'intégrer d'emblée à cet effort par sa proposition de modification de l'article 24 de la loi sur les services de santé et services sociaux, telle qu'elle apparaît au texte ci-joint. L'ACMDQ se croit d'ailleurs pleinement justifiée de recueillir et d'obtenir le rôle qu'elle réclame à ce titre en raison de ce caractère inhérent de représentativité, de compétence médicale, de motivation et d'impartialité.

À la lumière de certaines réalisations et de certaines décisions récentes de ces instances régionales que sont les conseils régionaux, nous sommes toutefois sceptiques quant à leur pertinence et même leur raison d'être dans le réseau des services de santé et nous invitons le gouvernement à examiner de plus près le fonctionnement de ces conseils régionaux. Peut-être y trouvera-t-on la source de certaines difficultés dont la chronicité est tout aussi lourde que celle d'autres problèmes que le gouvernement a à affronter dans le domaine des services de santé.

L'ACMDQ est d'accord avec la volonté du gouvernement de former des comités de bénéficiaires dans les centres d'accueil et les centres hospitaliers de soins prolongés. Cette nouvelle disposition ne pourra qu'améliorer la situation des patients vivant dans ces établissements.

En somme, l'ACMDQ souscrit à l'esprit qui semble dominer dans cette nouvelle loi et elle est même d'emblée d'accord avec certaines dispositions particulières qui favorisent la participation des conseils des médecins et dentistes et des médecins individuellement à la gestion des établissements de santé.

Toutefois, l'ACMDQ ne peut en aucune manière souscrire à ce que le gouvernement puisse imposer des mesures ou des moyens de coercition qui, à son avis, risque de réduire non seulement la qualité de la vie, mais surtout la qualité des soins dispensés dans les établissements de santé. C'est pourquoi nous souhaitons de tout coeur que le gouvernement définisse de nouveaux moyens

de nature strictement incitative en remplacement de certaines mesures proposées dans le présent projet de loi, afin d'atteindre ces objectifs de qualité médicale et de répartition plus équitable des effectifs médicaux sur l'ensemble du territoire.

À toutes fins utiles et dans l'esprit de ce qui précède, nous avons préparé et avons joint à ce mémoire un recueil de modifications que nous souhaitons faire apporter à certaines des dispositions contenues dans le projet de loi.

Si vous le voulez bien, je vais passer la parole à Me Jacques Laurent qui va essayer de vous présenter...

Avant de passer à l'autre volet de notre présentation, y a-t-il des questions à ce stade-ci ou si vous préférez que...

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Je voudrais d'abord vous remercier beaucoup, Dr Farah-Lajoie, pour la présentation que vous faites. Je connais un peu l'historique de votre association. Je connais aussi la dose de volontariat, pour ne pas dire carrément de bénévolat à bien des occasions, qu'implique le fonctionnement de votre organisme, étant donné qu'il n'est pas financé autrement que par la cotisation volontaire de ses membres. Je pense qu'il faut que nous reconnaissions que le travail que vous avez fait, malgré ce peu de ressources, comparé à d'autres intervenants du réseau - certains sont fort bien équipés, on le sait - est quand même un travail remarquable et qui cerne très bien le domaine des préoccupations des conseils des médecins et dentistes.

J'aimerais peut-être vous entendre et peut-être qu'en cours de route, vous pourrez passer la parole à Me Laurent si vous jugez que c'est utile. Sur toute cette problématique entre les conseils des médecins et dentistes en ce qui a trait à la qualité, par opposition au Conseil des médecins et dentistes à côté d'un DSP en ce qui a trait à la dimension plus administrative de l'exercice de la profession à l'intérieur de l'établissement. J'ai compris, d'après ce que vous dites, qu'à vos yeux, si les chefs de département doivent appliquer des normes élaborées par des conseils tout en ayant un pouvoir de sanction, vous considérez qu'il doit exclusivement relever de la structure des CMD. J'aimerais peut-être vous entendre là-dessus, je pense que c'est le débat de fond autour de cette question.

M. Farah-Lajoie: Pour nous comme pour d'autres organismes, mais surtout pour nous, je pense que c'est le point le plus important de la discussion. Nous sommes en complet désaccord avec les opinions d'autres organismes face à cette présentation, cette ligne de pensée qui s'inscrit dans la volonté du ministère de donner une certaine responsabilité, une conscience plus grande du médecin de la gestion hospitalière. Nous enveloppons les responsabilités du médecin qu'on nomme actuellement le chef de département parce que c'est de lui qu'on parle.

Évidemment, le chef de département aura des normes, le Conseil des médecins et dentistes aura à établir ces normes, ces règles du jeu, ces règlements de services et départements; le chef de département aura à les faire maintenir à un niveau acceptable et on parle même de sanctions. Pour nous, évidemment, un organisme qui va être appelé à donner des normes, à édicter des règlements, doit, je pense bien, être conséquent avec lui-même et voir à ce que l'application de ces normes soit bien faite.

Notre ligne d'autorité, pour nous, est très claire; le Conseil des médecins et dentistes relève directement du conseil d'administration dans son rôle principal et je pense que si on veut lui donner des responsabilités accrues et l'impliquer dans la gestion d'une façon plus importante, on ne doit pas lui demander simplement de faire certaines normes et ensuite de ne plus s'en occuper, de les distribuer dans une autre ligne qui serait celle du directeur des services professionnels qui, pour nous, est un élément de l'organigramme, pour appeler cela par son nom, qui a une importance plus grande que celle qu'il avait par le passé. Je pense bien que notre mémoire sous-tend que nous voulons que le directeur des services professionnels s'occupe non seulement de la "gestion des médecins", mais je pense que les médecins sont responsables de leurs actes et les actes impliquent certains autres professionnels de la santé qui oeuvrent dans les départements d'un centre hospitalier. Alors, notre ligne d'autorité se situe à ce niveau-là. Par son rôle de directorat, avec sa coordination et la surveillance de toutes les activités professionnelles et scientifiques, de tous les professionnels de la santé dans le milieu hospitalier, nous voulons donner à l'ADG un rôle accru. Quant aux normes qu'on veut établir par le Conseil des médecins, par son exécutif, je reviens un peu à ce qui s'est dit ce matin au sujet du manque de communication, du manque de directorat face au CMD. Je pense que le directeur général fait partie intégrante du Conseil des médecins et dentistes par son exécutif; un exécutif de conseil des médecins, c'est le pouvoir décisionnel qui relève directement du conseil d'administration. Alors, nous pensons que nous avons amplement d'autorité et nous avons à... Nous nous devons par la loi de faire le travail pour lequel nous avons été élus, et nous relevons directement dans ce travail du conseil d'administration. Alors,

c'est la ligne d'autorité que nous préférons et même, nous insistons beaucoup là-dessus parce qu'à toutes fins utiles, si on demande au Conseil des médecins et dentistes d'être simplement un instigateur de normes, de distribution de ressources, etc., je pense qu'il ne sera que consultatif à ce moment-là. Pour nous, c'est une diminution de pouvoirs et non pas une augmentation des pouvoirs de Conseil de médecins. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Johnson (Anjou): Je pense que vous avez couvert l'ensemble de ce à quoi je m'attendais, ce qui nous permet d'expliciter certaines choses, en tout cas de bien circonscrire ce débat sûrement. Si M. Laurent veut procéder à l'autre partie; ensuite, je permettrai à mes collègues de...

Mme Lavoie-Roux: J'aime autant...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Laurier.

M. Sirros: À la page 6 du mémoire, vous parlez des conseils régionaux. Vous dites que vous êtes sceptique quant à leur pertinence et même leurs raisons d'être dans le réseau de services de santé, et pourtant vous faites une série de recommandations, à l'article no 39, qui donnent des pouvoirs accrus aux conseils régionaux. Vous pourriez peut-être expliquer un peu ces deux aspects-là?

M. Farah-Lajoie: Nous n'avons pas voulu, pour parler un peu de la façon dont ça c'est fait cet après-midi, faire de procès d'intention aux CRSSS, nous voulons tout simplement demander au gouvernement de se pencher sur l'efficacité de certains CRSSS; nous ne visons aucun CRSSS en particulier. Je pense que les sommes énormes qui sont dépensées dans ces organismes justifieraient peut-être un certain regard d'une façon un peu plus précise sur le fonctionnement, sur le rôle réel qu'ils ont joué à ce jour; je pense que, depuis qu'ils sont en place, ils ont probablement fait beaucoup de travail.

Maintenant, pour ne parler que d'une région que nous connaissons très bien, les problèmes semblent encore très chroniques, c'est-à-dire que les problèmes prennent beaucoup de temps à être réglés. Nous pensons, nous insistons, nous sommes bien fiers de pouvoir avoir une voix; une voix sur quatorze, c'est déjà mieux qu'aucune voix sur vingt-deux, c'est déjà beaucoup. Je pense que le médecin qui sera à ce conseil d'administration, du moins je l'espère, pourra amener une expertise qui pourra aider à l'efficacité; je pense qu'on se pose certaines questions. Il n'y a rien de précis, mais c'est un voeu qu'on fait, qu'il y ait quand même une certaine recherche, pour savoir si l'efficacité est en relation directe avec les coûts.

Le Président (M. Rochefort): Cela va? Madame la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Comme on a commencé les questions, on fera l'autre par la suite.

En page 2 de votre mémoire, vous dites que les dispositions du présent projet de loi ne devraient pas amoindrir la qualité des soins, ni compromettre le développement de la médecine hospitalière. Est-ce que vous pourriez développer ceci un peu? Moi, je crois comprendre que... En tout cas, au moins vous vous posez la question. Quels sont les points dans ce projet de loi qui à votre point de vue, pourraient causer cet amoindrissement de la qualité des soins? En fait, si je l'interprète tel que c'est écrit; je peux me tromper. (20 h 15)

M. Farah-Lajoie: Évidemment, il faut comprendre le rôle du Conseil des médecins et dentistes. La qualité de l'acte médical posé dans un établissement, c'est la base de notre travail. C'est le principal but du Conseil des médecins et dentistes. Évidemment il y a d'autres dispositions dans la loi, mais c'est le principal. Nous veillons à la qualité de l'acte. Pour ce qui est d'amoindrir la qualité des soins, les restrictions budgétaires font que certaines administrations ont tendance à diminuer la quantité du personnel, par exemple en clinique externe; enfin, dans les coupures budgétaires, il y en a qui n'ont peut-être pas tout à fait compris le message et ont tendance à couper des services aux bénéficiaires.

Face à ça, on se dit qu'évidemment la qualité des soins, nous devons quand même la maintenir à un niveau satisfaisant. Face aux restrictions budgétaires, face au manque de ressources pour l'amélioration des techniques et du matériel, le renouvellement des équipements, etc., nous craignons que, à moins de...

Mme Lavoie-Roux: C'est en fonction de la loi, c'est en fonction des contraintes budgétaires que vous avez exprimées, cette opinion-là.

M. Farah-Lajoie: ... dans l'absence des... oui, enfin, c'est principalement à cause des restrictions budgétaires, mais il reste que, du côté médical, je pense - on en a fait mention beaucoup aujourd'hui - que la médecine québécoise était quand même à la fine pointe de la médecine dans l'Amérique du Nord et même dans le monde entier. La loi, en vertu du contingentement médical dans les Centres hospitaliers urbains, aura peut-être certaines tendances - je me réfère

à quelques articles, l'article 70.1, par exemple, et d'autres de cette nature, à y diminuer la qualité des soins. C'est encore une question que nous nous posons. Nous insistons beaucoup pour que la qualité des soins et le développement de la médecine hospitalière québécoise ne soient pas compromis par cette loi. Il y a en effet certains articles qui pourraient être restrictifs, si on y a recours d'une façon un peu trop restrictive, surtout du côté du développement hospitalier.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que peut-être ces détails nous seront donnés tantôt par Me Laurent, il vaut peut-être mieux laisser courir et on y reviendra par la suite, je pense. Je dois vous dire que nous, les mémoires, on les a reçus derrière le dos, pendant qu'on attendait l'autre groupe, alors je ne les ai pas lus, c'est pour ça, je m'excuse.

Le Président (M. Rochefort): Me

Laurent.

M. Farah-Lajoie: Dans cet ordre d'idées, c'est la raison pour laquelle je voulais que Me Laurent dissèque un peu pour vous les amendements que nous avons proposés.

M. Laurent (Jacques): Ma première intervention, avec votre permission, M. le Président, serait pour donner suite à la question qu'adressait M. le ministre en rapport avec la coordination entre le CMD, les chefs des départements et le directeur des services professionnels. Selon les dispositions du projet de loi no 27, le Conseil des médecins et dentistes se voit attribuer deux nouvelles fonctions: celle d'adopter pour chaque département des normes sur la fourniture des soins requis et l'utilisation des ressources disponibles, et également de prévoir des sanctions. Par une autre disposition de cette loi, l'article 71.1, on attribue aux chefs des départements cliniques, la responsabilité de l'utilisation de ces ressources par les médecins de leurs départements et la gestion des ressources.

On ajoute d'ailleurs, au deuxième alinéa de 71.1, que le chef de département doit veiller à l'application des normes sur les fournitures des soins requis et l'utilisation des ressources disponibles élaborées par le CMD conformément à l'article que je viens de lire.

Or, ceci va très bien. Ceci est en accord avec les souhaits qui ont souvent été formulés par l'ACMDQ. Toutefois, une disposition nous apparaît quelque peu incohérente. Ce projet de loi confie, en vertu de l'article 118, l'article 77 du projet de loi, la coordination et la surveillance des activités des chefs de département aux directeurs des services professionnels. Il nous apparaît incohérent que ce soit le CMD qui établisse des normes telles que décrites à l'article 112, donc qui adopte des normes sur la fourniture des soins et l'utilisation des ressources. On confie la mise en application de ces normes et cette utilisation des ressources aux chefs de département jusque-là, cela va très bien - mais par la suite, on confie aux directeurs des services professionnels l'autorité quasi complète de coordonner les activités des chefs de département. Nous souhaiterions vivement qu'au contraire la même ligne soit entretenue, c'est-à-dire que les normes étant établies par le CMD, elles soient confiées au chef de département pour qu'il voie à leur application, celui-ci répondant au CMD de l'exercice de ses fonctions et non pas au directeur des services professionnels.

C'est pourquoi nous souhaiterions que cette nouvelle fonction qu'on veut attribuer par ce projet de loi au DSP lui soit retirée, de sorte que la relation reste directe entre le CMD et les chefs de département, sans pour cela rendre le directeur des services professionnels d'un établissement inutile. Il continuerait naturellement à coordonner et surveiller les activités professionnelles et scientifiques qu'il exerce dans l'ensemble de l'établissement et, tel que nous l'indiquons dans nos modifications, il dirigerait également les services hospitaliers.

Tel que c'est présenté, il nous semble qu'il y ait une incohérence dans les relations entre ces trois éléments d'un établissement de santé, soit le CMD, le chef de département et le directeur des services professionnels.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a d'autres points que vous vouliez faire ressortir?

M. Laurent: C'est à votre guise... Mme Lavoie-Roux: Oui, allez-y donc. M. Laurent: On peut y aller rondement. Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Laurent: Si vous voulez prendre connaissance des modifications donc, nous avons... Pardons, monsieur!

M. Johnson (Anjou): Je pense que Me Laurin a exposé de façon très précise le point de vue en complétant à l'aide des articles, par des références juridiques, l'exposé du Dr. Farah-Lajoie. Quand à moi, je n'ai pas de questions, je pense que l'opinion est claire...

M. Laurent: Claire, tant mieux...

M. Johnson (Anjou): ... l'opinion est claire, ce qui ne veut pas dire...

M. Laurent: ... j'espère que la perception...

M. Johnson (Anjou): ... que c'est un point de vue entièrement partagé.

M. Laurent: ... est claire aussi. M. Johnson (Anjou): D'accord.

M. Laurent: Nous avons donc proposé certaines modifications. En partant de l'article 39, les références sont faites au projet de loi. Brièvement; puisque je sais que le temps court et que vous avez d'autres groupes à entendre, je ne voudrais pas que nous nous éternisions là-dessus. Donc, tel que le Dr Lajoie vous l'indiquait, les modifications que nous proposons sont en entier en rapport avec la Loi sur les services de santé et les services sociaux, puisque c'est cette loi qui nous préoccupe davantage.

Nous comprenons mal d'une part, à l'article 39, qu'on veuille accorder au conseil régional dont certains doutent à l'occasion de l'efficacité, des tâches exclusives telles qu'elles apparaissent à l'article 39 et à l'article 18.2 de la loi sur les services de santé. Nous voyons mal qu'un conseil régional désigné par règlement puisse être la seule autorité habilitée à autoriser des déplacements de bénéficiaires vers un autre établissement.

À l'appui de cette revendication, c'est-à-dire la revendication suivante, nous préférerions que les deux alinéas de l'article 18.2 soient intégrés à l'article 18.1, de sorte qu'il ne sera pas enlevé au conseil régional désigné par règlement l'autorité d'exercer les deux fonctions qui apparaissent plus bas, mais le conseil régional ne sera pas le seul habilité à le faire. Si c'est le cas, particulièrement si on veut autoriser strictement un conseil régional désigné par règlement, si on veut l'autoriser exclusivement, dis-je, à exercer les déplacements, à autoriser - vous excuserez la redondance - le déplacement de bénéficiaires, nous estimons que, par cette disposition, à la fois le patient perdra le libre choix de son médecin ou de son établissement de santé et cela va grandement limiter des initiatives, qui existent régulièrement entre des centres hospitaliers ou des médecins ou des services, de faire des échanges qui sont pour le bienfait exclusif du bénéficiaire. Si on accorde cette seule autorité au conseil régional, nous estimons, comme je viens de vous le dire, que ce sera créer un préjudice au patient et cela nous apparaît inacceptable. Nous n'aurions pas d'objection si la loi pouvait adopter que ces deux dispositions de l'article 18.2 deviennent des dispositions de l'article 18.1 et qu'elles deviennent des fonctions que pourra à l'occasion exercer un conseil régional, sans pour cela rendre le conseil régional exclusivement habilité à exercer ces deux fonctions, particulièrement la fonction qui est décrite au paragraphe 1 de l'article 18.2.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Est-ce qu'on peut finir tous les articles ou demander cela article par article?

Le Président (M. Bordeleau): II y a moyen de s'entendre...

M. Johnson (Anjou): Ceux qui parlent d'eux-mêmes, je parle de l'article 40, je pense que c'est clair.

M. Lincoln: ... article 39.

Le Président (M. Bordeleau): On peut y aller pour l'article 39. M. le député de Nelligan, allez-y.

M. Lincoln: Sur l'article 39, Me Laurent, je saisis ce que vous voulez faire; je suis tout à fait d'accord pour relier l'article 18 et l'article 18.1 pour justement ne pas donner l'autorité exclusive au conseil régional à l'article 18.2. Cela, je le comprends très bien. Mais si vous allez à l'article 18.3... Entre parenthèses, votre suggestion sur l'article 18.3 n'aurait pas dû inclure l'article 18.2, parce qu'il ne reste que l'article 18... Mais, dans votre article 18.3, l'article 18.2 devrait sauter, puisqu'il ne reste que l'article 18.1. En tout cas, à l'article 18.3, si vous voyez l'article 18.3, est-ce que ce n'est pas l'article qui donne le plus de pouvoir, en fait, au conseil régional? Parce que, si vous voyez l'article 18.3, cela dit: "Un établissement est lié par une décision d'un conseil régional prise en vertu du paragraphe e de l'article 18 ou des articles 18.1 ou 18.2 ou en vertu d'une fonction confiée par le ministre... d, g et h de l'article 18." Au h de l'article 18, qui a été ajouté, on donne au conseil régional le pouvoir "d'exercer à l'intérieur de son territoire, toute autre fonction que le ministre lui confie en vertu de la loi." Est-ce que cela a pris une part tellement grande que cela a annulé, en fait, ce que vous êtes en train d'essayer de faire en joignant l'article 18.1 et l'article 18.2, si, par le biais de l'article 18.3, on ouvre la porte complètement à un conseil qui est lié à toute fonction confiée dans son territoire par le ministère, c'est-à-dire que le ministère peut confier n'importe quelle fonction qui annule tout ce que vous voulez faire à l'article 18.1 et à l'article 18.2?

M. Johnson (Anjou): Je pourrais peut-être, si...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): ... M. le député de Nelligan me le permet, pour ne pas mettre le procureur de l'association dans une position où il est obligé d'interpréter une partie qui relève du ministère, c'est l'article qui existe dans la loi de 1971. Simplement, c'est l'espèce de pouvoir résiduel en matière de réglementation qu'on donne et sur lequel finalement les juristes, de façon générale au gouvernement, considèrent qu'on ne peut pas appuyer toujours des décisions aussi englobantes que celles qu'on a prises dans le passé. C'est pour cela qu'on est appelé à préciser ce pouvoir réglementaire, tout en conservant toujours la clause résiduaire, mais qui ne permet pas une intervention illimitée; c'est l'avis, je dirais, quasi unanime de nos juristes sur ces questions. En ce sens-là, ce n'est pas très nouveau, c'est dans la loi depuis 1971.

M. Lincoln: Mais l'alinéa h a été ajouté, n'est-ce pas, M. le ministre? Si vous voyez bien, l'alinéa h a été ajouté. "D'exercer", c'est nouveau dans le projet. Si vous regardez, l'alinéa h n'existait pas avant. Cela s'arrêtait à l'alinéa g et c'est l'alinéa h qui renferme la question principale; cela dit "d'exercer, à l'intérieur de son territoire, toute autre fonction que le ministre lui confie en vertu de la loi." Alors, ça vous donne des pouvoirs accrus que vous n'aviez pas avant. (20 h 30)

M. Johnson (Anjou): Je m'excuse, je ne voudrais pas vous induire en erreur. Le paragraphe h existait antérieurement à la loi 103. Pour une raison ou pour une autre, cela a sauté en cours de route à l'occasion de la loi 103.

Mme Lavoie-Roux: Vous êtes très conciliant cette semaine.

M. Lincoln: Oui, M. le ministre, mais peut-être que ça a sauté avec beaucoup de raisons, ce n'était pas là.

M. Johnson (Anjou): C'est une erreur technique. Il n'y a pas eu de débat là-dessus.

M. Lincoln: Je me le demande. Je crois que c'est quelque chose...

Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'il faudra faire une vérification sur ce que mon collègue a soulevé. Moi, je suis très heureuse que vous souleviez ce point qui est de limiter le droit de l'individu à choisir son centre hospitalier. Je pense qu'il y a des circonstances où cela peut se faire, dans les cas d'urgence, mais même à ce moment-là on devrait en priorité respecter le choix de l'individu. Dans ce projet de loi, on intervient dans les droits de l'individu à choisir son établissement et son médecin. La personne qui a toujours été soignée à l'Hôtel-Dieu de Montréal et qui est transportée d'urgence quelque part, peut-être qu'elle ne pourrait pas aller à l'Hôtel-Dieu parce qu'ils sont engorgés, mais c'est un des aspects qui m'inquiétaient dans ce projet de loi, cette espèce - ce n'est pas fait volontaire mais en tout cas - d'accroc. Quand il ne s'agit pas d'une urgence, je pense que c'est encore plus important de respecter ce droit. On pourrait, par le truchement de cette loi, si elle restait telle quelle, sectoriser d'une façon très précise les patients de tel territoire et de tel hôpital, évidemment, dans un territoire éloigné, cela se présente moins; j'imagine que les gens de la région de Val-d'Or vont aller à l'hôpital de Val-d'Or, mais dans la région de Montréal, là où on n'est pas obligé de le faire parce qu'il y a un choix d'établissements, on doit tenir compte du droit des patients au choix et ne pas les encadrer dans une chose aussi rigide que celle-là. Je suis heureuse, parce que vous êtes les premiers à le soulever.

Le Président (M. Bordeleau): D'autres questions?

Mme Lavoie-Roux: On est rendu à l'article 40.

M. Laurent: Article 40. Tel que proposé, il semble restrictif puisqu'on dit: "Un conseil régional doit prendre les moyens qu'il juge appropriés" pour en effet forcer le conseil régional à informer la population, puisque c'est l'autorité de la région, donc le forcer à donner à cette information plutôt que de permettre à d'autres intervenants de la santé de donner les informations. Nous souhaiterions que cet article soit légèrement amendé pour que le conseil régional prenne tous les moyens appropriés, non pas seulement les moyens qu'il jugera appropriés dans telle ou telle circonstance, de sorte que la population pourra s'en remettre au conseil régional pour obtenir toutes ces informations plutôt que de faire appel, soit au centre hospitalier, soit au Conseil des médecins et dentistes. Si on veut accorder un droit d'information à la population, elle doit, selon nous, avoir le privilège d'avoir recours à une seule autorité qui serait le conseil régional. Si cet article est laissé tel quel, quant à nous, il permettra au conseil régional de toujours fuir, pas toujours mais à l'occasion, ses responsabilités et de donner strictement les informations que lui jugera approprié de donner.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Article 41.

M. Laurent: L'article 41 est un peu plus délicat. Par cet article, fort heureusement, le conseil régional sera composé de 14 membres seulement plutôt que 22 membres, comme le disait le Dr Lajoie, et fort heureusement, au surplus, un des 14 administrateurs sera un membre des conseils des médecins et dentistes. Nous proposons que ce membre soit nommé par l'association qui est devant vous aujourd'hui, qui est une association qui existe depuis longtemps et qui regroupe la majorité des CMD du Québec, parmi les membres des conseils des médecins et dentistes constitués dans les établissements du territoire, afin d'éviter certaines injustices qui pourraient être causées ou, tout au moins, des états de fait qui pourraient se prolonger et créer des difficultés.

Ainsi, dans une région comme Montréal - je pourrais commencer par une région comme la Côte-Nord si vous voulez - je ne voudrais blesser personne - où il y a peu de conseils de médecins et dentistes, mais il y en a un plus gros que les autres. Immanquablement et au détriment peut-être des autres conseils de médecins et dentistes de la région, il pourra se produire que ce sera toujours le représentant du même conseil des médecins et dentistes qui siégera au conseil régional. Le même phénomène pourra se produire dans les grands centres comme Montréal et Québec où on pourra retrouver immanquablement au conseil d'administration du conseil régional un membre d'un CMD d'un des grands établissements, laissant de côté des médecins et des dentistes, membres de CMD, qui pourraient avantageusement, pour le conseil régional et pour la communauté en général, siéger au conseil d'administration.

L'association prétend avoir la représentativité, l'impartialité, la compétence, jusqu'à ce qu'on crée des CMD régionaux, ce qui pourrait être une initiative future de la loi, pour pouvoir désigner, parmi les membres des CMD de la région et de la façon la plus équitable possible, celui qui siégera au conseil d'administration du conseil régional à titre de représentant des CMD.

Dans cette optique d'ailleurs, en continuant, nous aimerions que soit apportée une modification à l'article 32 de la loi. Cela n'apparaît pas au projet de loi, mais on pourra l'introduire , dans l'esprit d'une "responsabilisation", si l'expression est juste, pour permettre au médecin de vraiment s'intégrer dans l'administration et dans la gestion des affaires de santé. Nous souhaiterions aussi que le comité administratif du conseil régional, qui est composé de cinq membres, compte obligatoirement le représentant des conseils de médecins et dentistes, de sorte qu'au comité administratif, à qui est dévolu de larges pouvoirs, siège automatiquement un médecin. Je crois que ceci répondrait au voeu du gouvernement, au voeu du législateur qui souhaite que, par ce projet de loi, le médecin soit davantage impliqué dans la gestion des affaires de santé dans sa région comme dans l'établissement où il travaille.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va?

M. Johnson (Anjou): Article 49.

Le Président (M. Bordeleau): Article 49.

M. Laurent: L'article 49, c'est une légère suggestion. Elle n'est pas légère de sens, mais elle sera facilement perçue. Au plan de l'organisation, qui a une grande importance pour l'avenir des centres hospitaliers, nous souhaiterions que le conseil d'administration, lorsqu'il transmet une partie de son plan d'organisation au ministre pour approbation, ce qui nous plaît d'ailleurs que cette transmission se fasse directement au ministre, après avoir pris naturellement avis du Conseil des médecins et dentistes, parce qu'il est le premier concerné par le plan d'organisation, se donne la peine d'y joindre les avis et recommandations du Conseil des médecins et dentistes de sorte que le ministre, qui sera chargé de l'approbation du plan d'organisation, puisse avoir connaissance, au moment où il l'approuvera, des avis et recommandations formulés par le Conseil des médecins et dentistes au sujet du plan d'organisation. Cela nous paraît tout à fait important que le ministre, chargé d'approuver les plans d'organisation, puisse avoir connaissance des avis et recommandations des médecins et dentistes, toujours dans cet esprit, que le ministre a décrit au début, que les médecins doivent s'impliquer davantage et qu'ils doivent être de plus en plus "responsabilisés".

L'article 50, si vous permettez.

Le Président (M. Bordeleau): Un instant, monsieur.

M. Laurent: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que ce serait possible de résumer davantage, parce que cela ressemble à l'étude article par article qui se fera, j'imagine, bientôt, mais lors d'une autre étape de l'étude du projet de loi? Je pense toujours à ceux qui attendent de se présenter devant la commission.

Mme Lavoie-Roux: L'article 50, on l'a

vu de toute façon.

Le Président (M. Bordeleau): Vous avez vu l'article 50 de toute façon.

M. Laurent: Je dois insister sur l'article 50, puisque que c'est une des dispositions importantes de ce projet de loi avec laquelle l'ACMDQ est d'accord en principe: Le chef de département clinique est responsable de l'utilisation des ressources et de la gestion des ressources de son département. Nous souhaitons que la disposition qui se lit comme suit: "II surveille la façon dont s'exerce la médecine dans son département", soit biffée, puisqu'elle donnerait ouverture à une foule de... Je regrette, c'est l'article 51 plutôt que l'article 50, qui se traduit par l'article 71-1 de la Loi sur les services sociaux et les services de santé. Nous souhaiterions que cette phrase soit changée par la suivante: II coordonne et surveille les activités professionnelles et scientifiques exercées dans son département de sorte que ce serait la conséquence logique de ce qui précède. Étant donné qu'il est responsable de l'utilisation des ressources et de la gestion des ressources, il serait normal qu'il coordonne et surveille toutes les activités de son département et non pas strictement la façon dont s'exerce la médecine dans son département qui n'est peut-être pas un voeu pieux mais une formule assez large et qui conviendrait moins que celle que nous vous proposons.

Dans un deuxième temps, je le dis brièvement, nous n'acceptons pas, si vous me permettez l'expression, que ce soit le chef de département qui impose des sanctions administratives prévues à l'article prévu par le Conseil des médecins et dentistes. Nous préférerions, dans un esprit d'équité, que le chef de département, recommande plutôt au CMD les sanctions qu'il voudrait voir imposer, lequel serait juge de la situation et pourrait donner suite aux recommandations non sans avoir entendu le médecin qui serait visé par ces recommandations de sanctions du chef de département.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Pourquoi préférez-vous enlever cette responsabilité au chef de département? La deuxième question que je voudrais vous poser est: Dans l'état actuel des choses, le Conseil des médecins et dentistes doit veiller à la qualité des soins; dans quelle mesure intervenez-vous auprès de médecins à l'intérieur de l'établissement sur des cas qui vous apparaîtraient - là, je vais utiliser le mot déviant parce que je n'en trouve pas d'autres mais je pense que vous comprenez dans quel sens je l'entends - et avez-vous des statistiques là-dessus?

Me Laurent: Aujourd'hui, cette fonction est exercée par le Conseil des médecins et dentistes, par l'un de ses comités qui est le comité d'évaluation médicale et dentaire qui doit suivre une procédure assez longue avant d'en arriver à des sanctions.

Par cette loi, on veut permettre au chef de département d'imposer proprio motu des sanctions prévues naturellement par le Conseil des médecins et dentistes, mais il imposerait lui-même les sanctions à ses pairs, dans son propre département. Il pourrait se créer des situations, semble-t-il, où un chef de département pourrait s'en prendre un peu trop fortement à un ou à quelques membres de son département et cela pourrait créer, naturellement, des contrariétés, pour dire le moins, dans le département. Si c'est plutôt le Conseil des médecins et dentistes qui imposait les sanctions, sur recommandation du chef de département naturellement, il y aurait un plus grand esprit d'équité qui serait respecté.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, sur la deuxième question, jusqu'à maintenant, dans quelle mesure les CMD sont-ils intervenus auprès de médecins qui, à leur point de vue, ne respectaient pas le...?

Me Laurent: Je sais que les comités d'évaluation...

Mme Lavoie-Roux: Est-ce une chose courante ou si cela n'arrive à peu près jamais, c'est plutôt ça le sens de ma question si vous n'avez pas de statistiques?

M. Farah-Lajoie: Si vous me permettez, je voudrais apporter quelques petits commentaires à cette question. C'est une chose à laquelle le ministre a fait allusion cet après-midi. La suspension des privilèges et des choses comme ça, ce sont des choses très courantes, qui se font régulièrement dans tous les centres hospitaliers.

Un exemple peut-être, pour faire allusion à la première réponse que Me Laurent vous a donnée tout à l'heure. Il y a beaucoup de centres hospitaliers à l'intérieur desquels vous avez un département où il y a deux membres et où il y en a un qui est automatiquement chef; ces deux membres sont souvent dans le même bureau, ce sont des amis. Alors il est assez difficile, pour un chef, d'aller réprimander, cela pourrait lui causer plus de préjugés. Alors, si vous donnez l'ouvrage au CMD, ça va le dégager un peu de sa responsabilité et je pense que ce sont des choses qui sont quand même assez fréquentes auxquelles on a eu à faire face. Mais, comme CMD, ce sont des choses qui se font très régulièrement, suspension de privilège, pour vous n'en donner qu'un exemple, pour dossier non complété, des choses comme ça; tant que les dossiers ne

sont pas complétés, vous n'avez pas le droit d'hospitaliser pour X jours, cela se fait régulièrement actuellement avec nos comités.

Mme Lavoie-Roux: Je m'étais laissé dire que, finalement, vous n'interveniez à peu près jamais.

M. Farah-Lajoie: Non, c'est régulier dans tous les centres hospitaliers.

Le Président (M. Bordeleau): Bon, alors on peut continuer en tentant d'abréger autant que possible. (20 h 45)

M. Laurent: Oui, brièvement; je vais sauter, si vous le permettez, l'article no 56; notre proposition est claire, je vous laisse le soin de l'adopter.

L'article no 57 est plus important et je vais être bref là-dessus. Nous souhaitons que la loi revienne à ce qu'elle était avant et qu'au conseil d'administration d'un centre hospitalier siège un représentant des médecins internes et résidents, tel que c'était le cas auparavant. Je suis certain, c'est-à-dire que les gens que je représente m'ont dit que c'était certain qu'il s'agissait d'un oubli de votre part et que vous alliez vouloir le corriger promptement.

Mme Lavoie-Roux: ...

M. Laurent: Oui; d'ailleurs comme dit le Dr Bergeron, si vous voulez en faire des administrateurs, il faut...

M. Johnson (Anjou): ... passer à la troisième lecture aussi.

M. Laurent: Ce qui est très important pour nous, c'est qu'au Conseil des médecins et dentistes dont les pouvoirs sont exercés par un comité exécutif, le président du comité exécutif a beaucoup d'importance et souvent, ce n'est pas le président du comité exécutif, qui est à la fois le membre du CMD, qui siège au conseil d'administration. Etant donné à nouveau que vous voulez intégrer grandement les médecins à la gestion, il nous apparaîtrait souhaitable... D'ailleurs, c'est dans cette perspective qu'il serait souhaitable que le président du comité exécutif qui est vraiment au courant plus que tout autre, selon toute apparence, des problèmes du Conseil des médecins et dentistes de son établissement, siège au même titre que le directeur général, au conseil d'administration de l'établissement.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va. Alors, no 59.

M. Laurent: L'article 59 dit ce qu'il a à dire.

Dans l'ordre d'idées de ce que je viens de dire, il serait prévu naturellement que le président du Conseil des médecins et des dentistes qui siégerait au conseil d'administration ne soit pas là pour trois ans, mais seulement pendant le temps qu'il serait président du CMD naturellement.

Les autres dispositions importantes sont en rapport avec l'article no 73 où, comme fonction additionnelle, l'ACMDQ croit devoir revenir au conseil des médecins et dentistes de l'établissement. Nous avons ajouté, dis-je, la distribution des soins médicaux et dentaires dans l'établissement. Ceci existait déjà par le règlement. En vertu du règlement, c'était une des fonctions du conseil des médecins et dentistes; étant donné que le conseil est déjà chargé du contrôle et de l'appréciation des actes, du maintien de la compétence des médecins, de l'établissement des normes, il nous apparaîtrait plus que cohérent qu'il soit également chargé de la distribution des soins médicaux et dentaires dans l'établissement.

Toutes ces modifications... Celle qui suit, à l'article no 77, je n'y reviendrai pas, on en a parlé tantôt, ce sont les charges du directeur des services professionnels. Celles qui suivent, sauf la dernière à l'article no 94 sur laquelle nous voulons insister, nous apparaissent nécessaires pour véritablement intégrer le médecin ou le conseil des médecins et dentistes, davantage comme conseil des médecins, à l'administration, à la gestion qu'on veut lui confier dans l'établissement. C'est pour cela que nous vous avons proposé sous forme de recueil de modifications ce que je viens de vous expliquer brièvement.

A l'article no 94, c'est un souhait qui a été formulé par le Dr Lajoie dans son mémoire que l'article Q de l'article no 173 de la loi se lise comme il se lisait avant, c'est-à-dire: déterminer les centres hospitaliers, et qu'on raye les dispositions qu'on venait d'ajouter à l'effet que par règlement - je m'excuse, je cherche l'article Q ici - il soit autorisé à déterminer les mesures qu'un établissement peut ou doit prendre en cas d'urgence et préciser ce que peut être un cas d'urgence et, s'il y a lieu, les soins qu'il comprend. D'ailleurs, là-dessus je vais laisser le Dr Lajoie compléter.

M. Johnson (Anjou): Dr Lajoie, pour vous éviter de revenir sur cette question dont on a parlé assez longuement ce matin, je pense que vous y étiez, dans le fond, cela vise des notions comme des cas de viol et de toxicomanie et également les cas de catastrophe naturelle; ce sont des pouvoirs qui sont plus de la nature de la Loi sur la santé publique. C'est dans ce sens-là. Je comprends par ailleurs que vous ayez voulu qu'on l'écarte, puisque ce n'était pas clair et, en ce sens-là, c'est bien clair qu'il faudra clarifier.

M. Farah-Lajoie: Évidemment, pour des gens qui ne sont pas légalistes, le sens que vous en avez donné ce matin, on a de la difficulté à le retrouver dans cet article. Mais mon collègue a oublié un article important, l'article 88, c'est-à-dire 139.1, au sujet des changements de vocation de centres hospitaliers.

M. Laurent: Oui, là-dessus, si vous me le permettez, pour compléter, nous souhaiterions que lorsqu'un permis est modifié, soit dans sa catégorie ou, etc..., tel qu'il est indiqué, le ministre, après consultation, ou en même temps qu'il consulte, tienne compte des conséquences qu'une telle modification pourrait avoir sur les effectifs médicaux et paramédicaux du centre hospitalier qui sera affecté. Si vous changez la catégorie, si le ministre décide de modifier la catégorie, la classe, etc., d'un centre hospitalier, naturellement, le personnel pourra être affecté, mais également les médecins et dentistes et les autres professionnels de la santé qui oeuvraient ou qui oeuvrent dans ce centre seront grandement affectés par cette modification. Je suis sûr que vous saisissez d'emblée les conséquences que ça pourrait entraîner pour des médecins entre autres ou d'autres professionnels de la santé qui auraient à se déplacer, ou qui pourraient difficilement peut-être se déplacer à la suite d'une telle modification de classe ou de catégorie d'un établissement de santé.

M. Farah-Lajoie: J'aimerais apporter un commentaire à cet article-là. C'est un petit peu dans le sens des plans d'organisation des centres hospitaliers dans une région donnée. On voit mal un hôpital changer de vocation avec un certain nombre de personnes médicales et para-médicales qui sont parfois très spécialisées, qui auraient probablement de la difficulté à se trouver un emploi, pour ne parler que de ceux qui sont des paramédicaux, et les médecins, de par les plans d'organisation des autres centres hospitaliers, auraient aussi de la difficulté à travailler dans leur région. Nous sommes d'accord que, dans certaines régions, il peut y avoir des changements de vocation pour des centres hospitaliers, nous adhérons à cette philosophie. Il reste qu'il serait quand même important de penser au problème de l'interpénétration des CMD et de trouver, après consultation des CMD et des deux centres hospitaliers, s'il y a jumelage, des modalités de changements ou d'interpénétration de tout ce personnel.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Une autre question?

M. Johnson (Anjou): Je vous remercie beaucoup, Dr Lajoie, vos conseillers et vos collègues de l'exécutif et tous ceux qui les accompagnent, encore une fois, pour la qualité soutenue à la fois de votre mémoire et de vos interventions. Merci infiniment.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Vous ne m'avez pas laissé le temps de réagir. J'avais une question.

Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas grave. À la page 3 de votre mémoire, vous indiquez que vous avez fait une étude l'été dernier, si je ne m'abuse, sur le problème des effectifs en régions. Vous aviez organisé une table de concertation. Vous en avez fait le thème de votre congrès récent, en novembre 1981. Est-ce que vous avez soumis à ce moment une étude quelconque, ou, enfin, des réflexions sur le sujet? Est-ce qu'il y a des documents qui seraient à la disposition du public sur cette question à la suite de votre colloque ou en préparation de votre colloque?

M. Farah-Lajoie: Je vous remercie infiniment de me poser la question, parce que c'est, je pense, presque un voeu. C'est d'ailleurs une des résolutions de notre dernier congrès. À la suite de différentes visites dans les régions "éloignées", qui sont quand même assez rapprochées maintenant, nous avons ramassé tranquillement, à force de discussions, différents éléments. C'est un peu la raison pour laquelle nous disons que la loi 27 n'est pas allée, à notre avis, chercher en profondeur tous les problèmes des régions éloignées. On en a fait mention à quelques reprises aujourd'hui, on en a parlé, on a glissé un peu là-dessus, on a parlé de moyens incitatifs, d'émoluments, on a parlé de médecins mieux payés à l'extérieur que ceux qui vont rester dans les milieux urbains. Mais nous pensons qu'il y a plus que ça et nous nous sommes rendu compte qu'il y a effectivement plus que ça, parce que si vous parlez à des médecins qui travaillent, qui oeuvrent actuellement dans les régions éloignées et que vous leur dites: On va vous régler votre problème, on va vous donner des milliers de dollars, cela ne réglera pas leur problème, ils vont revenir. Il y a l'insécurité par mangue de couverture spécialisée. Il y a une vie sociale et familiale très difficile. Il y a un travail, pas nécessairement un travail physique important, mais une disponibilité qui est différente de celles des médecins qui sont dans les régions urbaines. La formation médicale - sur cela nous insistons beaucoup, c'est pour cela que nous avons parlé de table

de concertation et nous faisons allusion, à ce moment, aux universités, à la corporation -semble, et j'insiste sur ce mot, semble inadéquate pour les régions éloignées.

Les médecins sont bien formés, sont bien entraînés mais, dans les régions éloignées, tout est complètement différent. Pour ne vous donner qu'un exemple, un interne résident qui s'entraîne dans les grands centres hospitaliers de Québec, Montréal, Sherbrooke, se trouve sous une espèce de tente de spécialités, de confrères, il est chapeauté. Il se retrouve en régions éloignées seul, absolument sans aide et sans couverture. Ces médecins sont portés assez facilement à se fatiguer rapidement parce que les cas sont aussi graves dans les régions éloignées que dans les régions urbaines. Ils sont mal entraînés à faire face à ces urgences. Certains centres nous ont suggéré d'inciter les universités à envoyer les internes, les résidents en stage d'entraînement dans les régions éloignées avant d'être reçus médecins pour leur expliquer ce qui se passe, leur montre à quelle sorte de vie ils auraient à faire face une fois leur entraînement terminé dans les grands centres. On a parlé d'équipements qui sont insuffisants. On ne peut pas pratiquer la cardiologie, par exemple, dans une région éloignée comme on la pratique dans un centre de cardiologie superspécialisé à Montréal. La formation médicale continue à être difficile. Ces gens sont obligés de revenir à Montréal, à Québec, de dépenser des sommes fabuleuses pour venir suivre un cours de trois ou quatre jours pendant une fin de semaine dans un hôtel de la ville. C'est incroyable, mais ce sont toutes des choses qui n'ont pas été discutées. C'est pour ça que nous avons parlé de table de concertation et que nous pensons que nous de l'ACMDQ et les CMD pourrions être la table tournante de cette chose.

Je pense que ces choses doivent être dites. Les incitatifs pécuniaires, c'est pour nous un diachylon pour le moment. Je pense que le problème est en profondeur. Les doyens sont sensibilisés à ça. Mais c'est la formation future. C'est dans quatre, cinq ans que les nouveaux médecins vont être sur le marché du travail. Il faut les préparer à s'en aller dans des régions éloignées. Ils ne le sont pas actuellement. La formation, par exemple, de spécialités, pour ne parler que d'une spécialité qui est la chirurgie, est compartimentée actuellement. C'est assez difficile, pour un chirurgien, de ne faire que de la chirurgie générale pour laquelle il a été entraîné dans les grands centres à Montréal. Quand il se retrouve en Gaspésie, il doit faire face à des accidents orthopédiques, urologiques, gynécologiques, etc. Ce sont toutes des choses qui doivent être dites. Ce sont des choses que nous disons, que nous avons constatées. Les changements de formes de pratique, de l'entraînement des jeunes, par exemple, en omnipratique, avec la médecine globale, il y a quand même du bon là-dedans, mais ce jeune doit faire face à des urgences quand il se retrouve là-bas. Cela devient facilement stressant. Il souffre d'insécurité et, quand il a fait ses deux ans, il s'en retourne, il s'en revient. Il y a aussi le problème du conjoint ou de la conjointe qui a de la difficulté à s'adapter à son nouveau milieu et qui n'est pas capable de se trouver du travail, entre autres. Ce sont toutes sortes de petits points comme ça qu'on a relevés.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais vous n'avez rien d'écrit, vous n'avez pas de texte écrit sur votre réflexion. Je vous remercie quand même de ce témoignage. Je pense qu'il est important.

À votre point de vue, croyez-vous... Ce que je crois comprendre, c'est qu'uniquement avec le mécanisme prévu dans la loi 27 qui détermine la géographie... On n'a pas besoin d'une loi pour déterminer les régions géographiques, mais c'est en fait le mécanisme qui est prévu dedans, qui est une rémunération différente selon qu'on travaille dans un secteur donné ou dans un autre, compte tenu des distances, ce qui ne vous apparaît pas comme un mécanisme suffisant. Cela peut peut-être apporter un certain soulagement, mais qu'est-ce que c'est, votre...

M. Farah-Lajoie: En fait, c'est ça. C'est une solution qui nous apparaît actuellement incomplète, parce que cela ne réglera pas le problème qu'on prenne des arrangements, même des ententes avec les fédérations pour envoyer un spécialiste ou un médecin omnipraticien dans une région pour trois ans, avec des incitations financières. Dans trois ans, il va avoir à faire face même... Parce qu'on ne peut quand même pas envoyer douze médecins dans une région où on n'en a besoin que de deux. Le stress va demeurer là. La vie sociale va être perturbée autant. Le travail va être aussi ardu. Nous pensons qu'il faut aller plus loin.

Mme Lavoie-Roux: Merci bien.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Je remercie l'Association des conseils des médecins et dentistes du Québec.

J'invite maintenant la Conférence des CRSSS, représentée par M. Carrière. M. Carrière, si vous voulez bien nous présenter les gens qui vous accompagnent, nous sommes prêts à vous entendre.

Conférence des CRSSS

M. Carrière (Jean): M. le président de la commission, M. le ministre des Affaires sociales, mesdames et messieurs de la

commission, j'aimerais pour débuter vous présenter les représentants de la Conférence des CRSSS. Nous nous sommes entendus sur deux porte-parole officiels, si vous voulez, un d'une région urbaine, représentée par M. Denis Charest, président du Conseil du CRSSS de Laurentides-Lanaudière et moi-même, Jean Carrière, président du CRSSS 01, c'est-à-dire Bas-Saint-Laurent, Gaspésie et Îles-de-la-Madeleine.

Nous sommes deux représentants hors réseau et, à ce titre, nous espérons pouvoir représenter le plus fidèlement possible, finalement, le point de vue de la population des régions. Deux personnes ont gracieusement accepté de se joindre à notre équipe, deux personnes-ressources, et je les remercie: M. Gérard Marcoux, directeur général du CRSSS Montréal métropolitain et coordonnateur à la Conférence des CRSSS, ainsi que M. Jean-Yves Légaré, directeur général du CRSSS de Québec.

La Conférence des conseils régionaux de la santé et des services sociaux du Québec a accepté avec plaisir l'invitation qui lui a été faite de se faire entendre à l'occasion de la présente commission parlementaire instituée en regard de la Loi modifiant diverses dispositions législatives dans le domaine de la santé et des services sociaux.

Le présent mémoire commence par une brève présentation de la Conférence des CRSSS du Québec, afin de bien identifier l'interlocuteur et qu'il n'y ait pas de méprise possible sur ce qu'elle représente effectivement. Cette présentation est suivie d'un retour sur le vécu des conseils régionaux de la santé et des service sociaux des dix dernières années.

Après cette mise en situation, nous passons à l'appréciation générale de ce projet de loi que nous analysons aussi en procédant article par article. Cette partie, qui consiste en une appréciation spécifique, est présentée en annexe, suivie de la liste complète des recommandations regroupées. Ce sont principalement les articles ayant une portée sur l'organisation régionale des services de santé et des services sociaux qui ont été commentés. Quelques-uns de ces articles suscitent à la fois des commentaires et des suggestions de modifications, tandis que d'autres ne requièrent que l'un ou l'autre.

En conclusion au texte, nous attirons votre attention sur ce que doit être véritablement l'organisme régional qu'est le CRSSS.

La conférence a jugé opportun de bien circonscrire le cadre dans lequel elle désire intervenir. En effet, chacun des CRSSS étant essentiellement un organisme lié à un modèle régional de distribution des services de santé et des services sociaux, adapté aux besoins et particularismes de la population et du territoire qu'il dessert, il leur importe de préciser que la conférence constitue pour eux un lieu privilégié d'échanges.

Ce regroupement leur permet ensemble de veiller à la réalisation de leur dénominateur commun que représente la régionalisation et, en cela, la conférence est fort représentative. De plus, il est important de souligner que la régionalisation peut s'actualiser de plusieurs façons et essentiellement en fonction des particularismes régionaux tels l'étendue de la région, la répartition et la nature des ressources en place, les modes de vie, le milieu urbain, semi-urbain ou rural. Nous voulons donc vous présenter des opinions qui, croyons-nous, reflètent les préoccupations fondamentales de l'ensemble des CRSSS.

Ceci étant clarifié, un retour sur le vécu des dix dernières années s'impose, puisque c'est à la lumière de ce récent passé que des modifications législatives ont été suggérées.

Il y a dix ans maintenant, le législateur adoptait plusieurs lois dont trois principales, soit la Loi sur l'assurance-maladie, la Loi sur les services de santé et les services sociaux et la Loi sur la protection de la santé publique. Ces lois avaient pour but soit d'assurer à la population la gratuité et les services des professionnels de la santé, soit de fournir un encadrement à l'organisation des services de santé et des services sociaux, soit enfin d'assurer la protection de la santé du citoyen par des mesures appropriées.

Les objectifs poursuivis par la Loi sur les services de santé et les services sociaux étaient les suivants: accessibilité, universalité et qualité des services, lesquels devaient être distribués de façon continue et personnalisée, en tenant compte des ressources disponibles et de leur meilleure utilisation. De plus, la Commission d'enquête sur la santé et le bien-être social avait fortement insisté sur la nécessaire implication de la population non seulement à l'identification de ses besoins en matière de santé et de services sociaux, mais aussi à la gestion du système préconisé.

Le libellé de l'article 3 du chapitre S-5 confirme ces objectifs: "Améliorer l'état de santé de la population, l'état du milieu social dans lequel elle vit et les conditions sociales des individus, des familles et des groupes; "Rendre accessible à toute personne, d'une façon continue et pendant toute sa vie, la gamme complète des services de santé et des services sociaux, y compris la prévention et la réadaptation, de façon à répondre aux besoins des individus, des familles et des groupes aux plans physique, psychique et social; "Encourager la population et les groupes qui s'y forment à participer à l'instauration, à l'administration et au développement des établissements de façon à assurer leur dynamisme et leur renouvellement; "Mieux adapter les services de santé et

les services sociaux aux besoins de la population, en tenant compte des particularités régionales et à répartir entre ces services les ressources humaines et financières de la façon la plus juste et la plus rationnelle possible; "Favoriser le recours aux méthodes modernes d'organisation et de gestion pour rendre plus efficaces les services offerts à la population; "Promouvoir la recherche et l'enseignement."

Cette loi d'organisation des services arrêtait donc un cadre d'action pour la multiplicité des intervenants impliqués, commandant de nombreuses interrelations en vue de l'édification d'un véritable réseau à l'intérieur duquel chacun aurait une responsabilité à assumer.

Pour ces mises en application, il devenait évident qu'un partage des responsabilités était nécessaire afin d'harmoniser entre elles toutes les parties appelées à en assumer l'exercice. La notion de réseau comme tel n'apparaissait nulle part de façon explicite et encore moins de façon organisée. Les CRSSS, de par leur mission, ont eu à développer cette notion de réseau au fur et à mesure qu'ils travaillaient avec la réalité régionale puisqu'elle leur permettait d'atteindre les objectifs de la loi. Cependant, ils ont vécu et ils vivent encore des difficultés au niveau de l'actualisation de cette notion.

Cette loi donnait donc les grands paramètres devant servir à articuler ce réseau de services sur une base territoriale. Cette loi identifiait plusieurs composantes, c'est-à-dire établissements, qu'elle voulait autonomes quoique interdépendantes.

Autonomes pour que la prise de décision consécutive à l'exercice des responsabilités confiées soit imputable à une organisation responsabilisée; interdépendantes pour que les bénéficiaires reçoivent des services continus. Les organisations devaient donc être complémentaires afin de satisfaire aux attentes de la population.

De plus, la lecture de l'article 18 du chapitre S-5 démontre bien que les principales fonctions législatives confiées aux CRSSS visaient à une répartition plus adéquate des ressources par territoire ainsi qu'à leur utilisation optimale. Pour cela, les CRSSS devaient être à l'écoute de la population lors de l'identification de ses besoins. Ils se devaient aussi de susciter la participation de cette même population à l'administration et au fonctionnement des établissements dispensateurs de services. Ils avaient également à assurer les communications entre cette population bien circonscrite sur un territoire, les établissements de ce même territoire et le ministre responsable desdits services. Un autre moyen de connaître les besoins des citoyens en matière de services de santé et de services sociaux était de confier aux CRSSS le traitement des plaintes venant des bénéficiaires de services.

Enfin, l'aide-conseil et l'assistance aux établissements dans la confection de leurs programmes rendaient possible le lien nécessaire entre l'identification des besoins, la planification et la programmation. Plusieurs moyens pouvaient être utilisés par ces organismes régionaux pour favoriser l'émergence d'un véritable réseau de services. Le législateur identifia, comme moyens privilégiés, l'échange de services et la mise en place de services communs et il les confia aux CRSSS.

Cependant, même si le législateur avait déjà à l'époque souhaité donner les meilleurs moyens en termes d'organisation pour qu'un véritable réseau de services émerge, l'expérience des dernières années a fait ressortir la nécessité d'être plus précis quant au partage des responsabilités si nous voulons permettre à cette notion dynamique de réseau de vraiment prendre forme, d'évoluer et de s'adapter aux réalités sociales régionales changeantes.

L'expérience des dernières années a aussi démontré que la capacité de payer a ses limites et que l'objectif de rationalité prévu initialement devait être réalisé à brève échéance. La conjoncture économique difficile n'a fait que remettre en lumière cet objectif. En effet, la mise en place de ce nouveau modèle de services a suscité de nombreux projets de développement, risquant même d'amplifier les dédoublements. Quant à l'objectif de l'accessibilité des services, il demeure plus ou moins atteint surtout dans les régions périphériques.

Nous avons vécu avec cette toile de fond pendant dix ans. Nous sommes donc en mesure aujourd'hui, à la lumière de ce bilan, d'aller plus avant au niveau de l'identification des moyens requis pour favoriser une meilleure atteinte des objectifs visés. Une clarification des fonctions et des responsabilités des niveaux d'intervention et d'implication aiderait certes à mieux réaliser la notion de réseau qui demeure la clé de voûte du système préconisé.

Juste un mot ici avant de passer à l'appréciation générale du projet de loi sur le CRSSS, c'est un peu aussi en réponse à certaines interventions d'aujourd'hui. Le CRSSS représente finalement l'intermédiaire entre les citoyens d'une région et le ministre des Affaires sociales, mais il n'est pas pour autant un mini-ministère, si vous voulez, des Affaires sociales implanté en région, tout comme il n'est pas un groupe de pression régional. Il est entre les deux, c'est un intermédiaire. Il représente plutôt un groupe de concertation formé de gens de la région et, en ce sens, il représente la première ligne de décentralisation des décisions vers la

région, de façon qu'elle reflète le mieux possible les désirs de ses citoyens. (21 h 15)

Cette décentralisation des décisions doit, à notre avis, être vue comme un outil et non comme une fin, un outil qui permet de rapprocher le niveau décisionnel le plus près possible de ceux qui sont directement impliqués, de ceux qui ont à vivre avec les décisions. C'est précisément par ce rôle d'interlocuteur intermédiaire que le CRSSS peut exercer son rôle de leadership au niveau régional, c'est-à-dire chercher à établir des consensus entre les établissements d'une région afin d'améliorer la qualité des services de santé et des services sociaux offerts à une population. Ce rôle d'intermédiaire, le seul vraiment qu'un CRSSS revendique - il ne recherche pas, de façon générale, de pouvoir, de titre, si vous voulez - est essentiel car il est le moyen principal par lequel il peut développer les consensus au niveau de la région.

C'est donc effectivement par pouvoir de consensus que nous exerçons notre rôle régional, et non par pouvoir de titre. Le CRSSS n'est donc pas, de par sa nature, un générateur de division dans une région, mais il est plutôt un générateur de consensus. Il n'a donc pas comme rôle d'amoindrir l'autonomie des établissements dans une région, mais plutôt d'harmoniser l'autonomie des divers établissements afin d'offrir les meilleurs services de santé et de services sociaux à cette population régionale.

Passons maintenant à une appréciation générale du projet de loi. La raison fondamentale des modifications au projet de loi proposées par la conférence des CRSSS réside dans la consolidation des efforts consentis et des consensus, parfois durement acquis, en situant avec plus de précision les lieux de décisions et d'autorité correspondante aux responsabilités déjà dévolues, car les objectifs du chapitre F-5 demeurent. La clarification des rôles de chacun, soit le MAS, les conseils régionaux, les établissements, le personnel clinique et non clinique, les bénéficiaires, les bénévoles et la population, ce rôle est proposé dans l'optique d'une approche régionale en vue d'une meilleure rationalisation et d'une meilleure association des intervenants dans leurs interrelations, et ce, dans le respect des fonctions de chacun.

Les conseils régionaux ont travaillé depuis plusieurs années à l'édification de ce réseau en collaboration avec le MAS et les établissements de leur région. Le projet de loi no 27, à notre avis, cadre de façon très précise avec cette notion de réseau intégré car il tend à renforcer, au niveau de l'action, au niveau de l'application, la cohérence nécessaire entre les trois lois mentionnées précédemment. Conséquemment, ils donnent leur appui et une appréciation générale positive de ce projet de loi qui permettra d'ajuster les moyens aux nouvelles réalités sociales en matière de santé et de services sociaux.

En effet, le CRSSS formulait déjà, en juillet 1979, qu'une définition plus claire, plus articulée de la mission, des fonctions et des responsabilités, non seulement des CRSSS mais aussi du MAS et des établissements, permettrait d'asseoir les organisations régionales de services de façon plus rationnelle et de se rapprocher davantage de l'utilisation optimale des ressources. Ce même esprit de clarté et de concordance sous-tend les commentaires et les modifications proposés dans l'appréciation spécifique présentée en annexe.

Si vous voulez, on pourrait passer à cette annexe et regarder quelques points. Je pense qu'il n'est pas nécessaire que nous l'examinions article par article.

Le Président (M. Laplante): Oui, j'allais vous y inviter parce que je ne voudrais pas qu'on reprenne... Si vous voulez souligner un certain nombre de points...

M. Carrière: Oui, il y a quelques points qu'on aimerait faire ressortir pour permettre le maximum de questions de la part des membres de la commission.

Le Président (M. Laplante): Parfait.

M. Carrière: Par exemple, à la page 1 de l'annexe, à l'article 1: Rémunération des professionnels de la santé pratiquant en établissement - ce sont les tâches administratives - et services fournis par un résident. La rémunération par la Régie de l'assurance-maladie du Québec de professionnels de la santé, pour les tâches administratives qu'ils accompliront à la demande d'un établissement, ne pourra que les impliquer encore davantage quant aux retombées engendrées par la pratique médicale en établissement. Cette implication, il nous semble, ne peut être que bénéfique.

Nous recommandons que cet article s'applique aux CRSSS, compte tenu qu'ils ont besoin de faire effectuer les tâches, tant administratives que professionnelles, par les professionnels de la santé.

Dans la page suivante, l'article 4, ici... Je ne commenterai pas plus l'article 1. Si vous voulez, l'article 4, si c'est possible, M. le Président, j'aimerais le commenter avec l'article 29 à la page 7; on pourrait prendre les deux en même temps. C'est parce qu'ici, en fait, on parle de rémunération, on parle de mesures incitatives, incitatives dans le sens mélioratif du terme, nettement, et je pense qu'on pourrait joindre le problème de formation, comme le Dr Lajoie l'a très bien soulevé tout à l'heure pour les régions éloignées.

Donc l'article 4, ici: Rémunération des professionnels de la santé, fonction du territoire et des années de pratique; désignation des territoires. Cet article répond essentiellement aux besoins de régionalisation des services en matière de santé et services sociaux. Il répond à des besoins essentiels depuis longtemps exprimés. Il vient resituer, de façon plus ordonnée, les différentes séquences qui sont maintenant reconnues comme devant se dérouler dans les discussions entre les fédérations de professionnels et le gouvernement. L'intérêt public reprend de façon explicite la primauté qui lui revient et nous ne pouvons qu'en être satisfaits, compte tenu de notre raison d'être. Nous recommandons que les CRSSS soient consultés préalablement à la détermination des territoires désignés. Nous nous interrogeons sur les limites que peuvent présenter des incitatifs d'ordre financier seulement. Nous recommandons de prévoir des incitatifs relatifs aux autres conditions de travail susceptibles de favoriser le recrutement et la mobilité de ces professionnels." C'est ici qu'on pourrait joindre la question des bourses, si vous voulez. "Nous recommandons que cet article prévoit également des incitatifs de tous ordres propres à la rétention desdits professionnels, tel par exemple, un accès facilité à des activités de formation" des programmes de perfectionnement si vous voulez, pour le personnel de santé des régions éloignées. Pour ici, la page 8, je passerai la parole à M. Marcoux, pour cet article, sur la définition ici du mot usager.

M. Marcoux (Gérard): Alors M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs, sur cet article on pourrait aussi sûrement évoquer longuement des commentaires et des points de vue des conseils régionaux. Nous avons cependant pensé nous attarder plus particulièrement... Il vous a indiqué la page 8, mais c'est la page 10. Oui page 10, d'accord.

Une voix: De l'annexe.

M. Marcoux (Gérard): Oui. C'est l'article 38 "Les fonctions d'un conseil régional". Les fonctions d'un conseil régional. Nous ne voulons pas insister, M. le Président, sur l'augmentation des pouvoirs d'un conseil régional. Ce dont on se rend compte cependant ce soir, c'est que, si le vieil adage veut que le bien fasse peu de bruit et que le bruit fasse peu de bien, nous avons l'occasion de faire beaucoup de bien ce soir, en vous donnant véritablement dans cette enceinte, sur le plan des fonctions du conseil régional, le point clé qui nous occupe. Et on veut vous parler de façon plus particulière. Nous allons passer rapidement sous silence la question des plaintes, parce que c'est une vieille recommandation répétée des conseils régionaux.

Alors, vous savez ce qu'elle signifie. Le ministère est plein de recommandations depuis nombre d'années, concernant les pouvoirs d'immunité des responsables des plaintes dans les conseils régionaux; vous en disposerez. Mais on veut attirer votre attention de façon particulière sur le projet de loi 27 à l'article ii: fournir ces biens et services ou avec l'autorisation écrite du ministre, en confier le mandat à une corporation sans but lucratif. Ce que nous voulons vous soumettre respectueusement, en autant que nous sommes concernés comme conseils régionaux, c'est que, sur demande et sur mandat spécial, depuis maintenant nombre d'années, mais de façon plus spécifique depuis novembre 1980, avec une politique très claire. On a souvent dit du ministère des Affaires sociales qu'il manquait de clarté; cette fois-là, dans la politique-cadre des approvisionnements en commun, la transparence et la clarté s'y trouvaient, de telle sorte que, depuis novembre 1980, les conseils régionaux de l'ensemble de la province fonctionnent avec la responsabilité suivante, et je cite: Le conseil régional est le responsable exclusif de la mise en commun des approvisionnements dans sa région et des moyens de mise en oeuvre. À cette fin, le ministère des Affaires sociales préconise le recours à des commissions administratives dans le but d'intégrer les activités d'achat en commun dans les responsabilités des conseils régionaux.

Même s'il existe quelques regroupements d'approvisionnements qui ont utilisé d'autres modalités de fonctionnement que la commission administrative, il s'agit là de situations historiques qui doivent discontinuer progressivement. C'est il y a un an et plus. À cette fin, les conseils régionaux concernés ils se reconnaissaient très bien - doivent établir des protocoles de coordination puis d'intégration de sorte que chaque conseil régional exerce pleinement le rôle qui lui est spécifiquement déterminé par la loi et par la présente politique. Et, qui plus est, par souci de planter le clou de façon très précise, la même directive demandait aux conseils régionaux, sur le plan de leurs responsabilités et du rôle qui leur est dévolu, de se reconnaître eux-mêmes, comme entités, comme les seuls organismes responsables du programme d'approvisionnements en commun de leur région. Ils sont également responsables devant le ministère des Affaires sociales des activités qui en découlent. Leur rôle se situe au niveau de la planification, de l'organisation, de la coordination et du contrôle.

Nous croyons, M. le Président, que, dans ce qui est soumis par le projet loi no

27, nous accusons en tant que conseils régionaux un net recul sur une réalité vécue dans les conseils régionaux de la province au cours des deux dernières années. La situation pratique face à laquelle et le ministère et les conseils régionaux se trouvent confrontés, c'est qu'à partir du mandat confié, reposant toujours sur les statuts qui étaient existants (chapitre 48), qui étaient une conjoncture de deux responsabilités inscrites dans les fonctions d'un conseil régional, d'une part, promouvoir les services communs, l'élimination des dédoublements et, d'autre part, de s'acquitter des mandats concernant des programmes précis pour l'administration, la planification, la programmation et le financement de programmes déterminés par le ministre, ayant reçu ce mandat, évidemment, il y a des régions qui ont fonctionné et qui, actuellement, accusent des succès retentissants sur le plan d'organisation qui était extra-conseils régionaux. Je vais vous citer, M. le ministre, l'institut conjoint de Montréal avec sa commission d'achat pour les hôpitaux anglophones, qui s'est empressée d'entrer - alors que la directive est parue en novembre 1980 - à l'intérieur du conseil régional avant le 1er février 1981. Cette directive qui était donnée concernant la création de corporations sans but lucratif dépendant des conseils régionaux, demandait à chaque instance régionale de faire en sorte que, dans l'année de calendrier qui suivait, on procède avec les organismes, pas en sauvage, mais de façon civilisée, avec les organismes existants, à une intégration à l'intérieur des conseils régionaux des organismes existants. Nous assistons aujourd'hui, après cette période, à une situation où, dans le projet de loi, nous lisons que le ministre décide de demander aux conseils régionaux de fournir ces biens et services, oui, mais avec l'autorisation écrite du ministre de confier le mandat à une autre corporation. Il y a un deuxième argument qu'on voudrait vous fournir... (21 h 30)

M. Johnson (Anjou): M. Marcoux...

M. Marcoux (Gérard): II y a un deuxième argument qu'on veut vous fournir. C'est de vous dire que nous assistons présentement à une responsabilité qui est très évidente, concernant les conseils régionaux, qui est de pourvoir par délégation à la meilleure distribution possible des ressources et des organismes administratifs sur les différents territoires. Or, le ministre sait très bien qu'avec 1200 corporations, actuellement, il est absolument impossible de coordonner sensément les activités vers les objectifs qu'il recherche. Alors nous nous posons la question à savoir s'il est vraiment utile à ce stade-ci d'envisager dans des mécanismes, sur un plan régional, qu'une structure qui est déjà existante, une corporation au sens du Code civil, ayant déjà comme mandat de gérer ce type d'activité, ait comme fonction de promouvoir, avec l'autorisation écrite du ministre, de nouvelles corporations.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous me le permettez, M. Marcoux, dont l'exposé abondant décrit tous les tenants et aboutissants de ses préoccupations, nous amène à toutes fins utiles aux dispositions de l'article 18, paragraphe 1, qui ont permis l'émission d'une directive. En gros, ce que M. Marcoux nous dit, si je comprends bien, c'est qu'on est en train de faire reculer les CRSSS au niveau des achats en commun, au sens où le chapitre 48 de la loi de 1971 permettait qu'on confie des mandats aux CRSSS en matière du maintien de services en commun. Cette directive ayant été émise l'an dernier, de nombreux CRSSS, pour ne pas dire l'ensemble des CRSSS, ont commencé à effectivement mettre en branle des politiques d'achats en commun. Certains avec des succès effectivement retentissants qui ont littéralement permis l'économie de million de dollars en termes de fourniture.

Je comprends bien que M. Marcoux trouve qu'on recule dans la mesure où ce que le projet de loi présente, c'est, plutôt que d'intégrer la directive dans la loi - ce qu'on dit et on se réfère essentiellement au groupe de Québec, on le sait - que cette politique d'achat devra être assumée par le CRSSS, mais que le CRSSS pourra déléguer spécifiquement, sur autorisation du ministre ce type d'activité à une corporation autonome. Disons que c'est confirmer le mandat de façon spécifique dans la loi - il est inattaquable - alors que la directive juridiquement pourrait toujours l'être, c'est toujours la même chose avec les directives. Par ailleurs, je comprends que cela n'a pas le même caractère de limpidité absolue que rechercherait, je pense, M. Marcoux, qui est de donner le mandat exclusif. Mais on sait, par exemple, que dans la région de Québec il y a Partagec, qui est d'abord historiquement une mise en commun d'établissements importants. Il s'agit de reconnaître l'existence de certaines de ces corporations qui existent, qui peuvent rendre ces services, non pas tous les services, mais certains des services, et c'est l'objet de la loi. Disons que je n'entrerai pas plus loin dans le fond de la discussion, il y aura d'autres occasions en commission et en deuxième lecture pour le faire, ou en troisième lecture.

M. Marcoux (Gérard): Avec votre permission...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Marcoux.

M. Marcoux (Gérard): C'est que nous considérons, M. le Président, que bien entendu des cas d'exception qui demeurent avec persistance et avec résistance peuvent exiger des solutions de compromis. Mais nous nous disons que le ministre ne peut pas reculer sur deux points à ce stade-ci, à notre point de vue. Premièrement, c'est que si corporation il doit y avoir, elle doit être sous l'égide de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Deuxièmement, s'il doit y avoir corporation par rapport au mandat que le ministre a déjà donné aux conseils régionaux, ces corporations devront assumer leur responsabilité sous la juridiction du conseil régional concerné.

M. Johnson (Anjou): Je comprends très bien la préoccupation de M. Marcoux à cet effet. Tout cela pour dire, incidemment, qu'on essaie d'épargner quelques dizaines de millions pour les contribuables. Ce n'est pas une mauvaise idée. Cela vaut bien quelques minutes de discussion.

Le Président (M. Bordeleau): M. Carrière.

M. Carrière: M. le Président, est-ce que je peux continuer?

Le Président (M. Bordeleau): Oui, allez- y.

M. Carrière: À la page 14, article 41, je demanderais à M. Charest de commenter cet article.

M. Charest (Denis): Cet article traite de la composition des conseils d'administration des conseils régionaux. C'est un changement important pour les conseils régionaux. Cette nouvelle composition des conseils d'administration proposée dans la loi 27 répond au problème déjà identifié de conflit de rôles fréquent dans le cas de permanents du réseau qui sont membres du conseil d'administration des conseils régionaux. D'ailleurs, les permanents continueront de siéger aux commissions administratives des conseils régionaux.

Deuxièmement, le nombre de 14 membres rend moins lourd le processus de décision des conseils régionaux. Enfin, la population est beaucoup mieux représentée au sein de ce nouveau conseil qu'elle ne l'était auparavant. Nous souscrivons donc pleinement à cette proposition. Cependant, il y aurait peut-être lieu que le ministre, en exerçant son pouvoir de nomination, puisse répondre au moins partiellement au problème fréquent de sous-représentativité, que ce soit au niveau des sous-régions de notre territoire ou dans le cas, par exemple, de certains conseils régionaux où il n'y a pas assez de femmes ou bien où il n'y a pas assez d'hommes, ce qui est plus rare. C'est de la discrimination positive.

Mme Lavoie-Roux: Combien y a-t-il de femmes directeurs de conseils régionaux?

M. Johnson (Anjou): Une.

M. Charest: Je peux dire que, dans notre conseil régional, actuellement, il n'y a pas une seule femme.

M. Johnson (Anjou): Sur la Côte-Nord, il y a Mme Moranville.

Mme Lavoie-Roux: Non, qui sont directeurs des conseils régionaux?

M. Johnson (Anjou): Ah, DG?

Mme Lavoie-Roux: Directeurs généraux des conseils régionaux, il y a combien de femmes?

M. Johnson (Anjou): À peine plus qu'il n'y avait de sous-ministres il y a quelques années.

M. Marcoux (Gérard): M. le Président, ce qu'on peut vous dire...

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, c'est moi qui ai amené les difficultés, je retire mes paroles.

M. Marcoux (Gérard): Mme Lavoie-Roux, on peut vous dire très rapidement que le personnel des conseils régionaux est majoritairement féminin. Peut-être que les directeurs généraux...

Mme Lavoie-Roux: ... on ira plus loin tout à l'heure. Quelle poste occupe-t-elle?

Le Président (M. Bordeleau): Je vous invite à continuer.

M. Charest: On parlait des conseils d'administration.

Mme Lavoie-Roux: Réceptionniste.

M. Charest: Au niveau des conseils d'administration, effectivement, dans la majorité des conseils, il y a une sous-représentativité des femmes. Dans notre conseil, dans Laurentides-Lanaudière, actuellement, il n'y a pas une seule femme. Cela cause des problèmes parce que ce sont des corps électoraux qui nomment ces gens. Ce n'est pas notre faute si cela arrive comme cela. Peut-être que le ministre, dans son pouvoir de nomination, pourrait consulter les CRSSS, non pas pour savoir quelle personne doit être nommée, mais pour savoir s'il y a un problème de sous-représentativité,

s'il y a une sous-région qui est vraiment sous-représentée, ou s'il y a assez de femmes ou assez d'hommes, ou s'il y a d'autres éléments qui ne sont pas suffisamment représentés. Il pourrait exercer sa discrétion dans le sens d'une meilleure représentativité.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, on continue. Je vous fais remarquer qu'il n'est pas nécessaire de les passer un par un, mais simplement d'appuyer sur les points que vous considérez les plus importants.

M. Johnson (Anjou): Sur le plan de l'organisation et des effectifs, si je comprends bien, vous voudriez que le processus oblige le ministre à la consultation des CRSSS dans un processus où l'établissement fait parvenir ses plans au CRSSS qui fait un plan, et le ministre approuve par la suite, plutôt que le contraire.

M. Carrière: Vous devinez nos intentions, M. le ministre.

M. Marcoux (Gérard): M. le Président, nous demandons plus que la consultation.

Nous demandons le maintien de ce qui existe, M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): ... oui.

M. Marcoux (Gérard): L'article 43b qui a été évoqué ce matin par les parlementaires à la commission, qui a été adopté avec la loi 10, demandait à toutes les régions qui avaient des centres hospitaliers avec des contrats d'affiliation aux universités, confiait aux conseils régionaux la responsabilité d'autoriser les plans d'organisation. À ce chapitre, on pense qu'il est important qu'on prenne trente secondes ou une minute pour vous dire que, dans les principales régions qui ont eu ce mandat, il y a eu comme exercice, sur le plan des acceptations, des plans d'organisation de services, de départements et d'effectifs médicaux, la meilleure contribution et la meilleure participation des médecins impliqués dans les plans d'organisation que nous avions connue dans l'histoire des affaires sociales au cours des vingt dernières années. Nous ne craignons pas de l'affirmer, M. le ministre, ces plans d'organisation qu'on a constitués à partir du mandat que nous avons reçu, nous ne sommes pas prêts à vous dire que nous voulons les abandonner.

Actuellement, nous avons une autorité d'approbation des plans d'organisation à un niveau régional. Ce que nous vous demandons par les articles qui sont là, c'est le maintien de ce qui est acquis et, qui plus est, nous avons capté rapidement que, tant du côté de l'Opposition que du côté du gouvernement, il y a une constante sur laquelle il y a unanimité: celle de rechercher un consensus chez les professionnels participants. Nous l'avons réussi, comme conseils régionaux, et j'aimerais beaucoup que mon collègue de Québec vous indique ce qu'il a fait avec l'article 43b sur les plans d'effectifs médicaux dans les hôpitaux de Québec, alors qu'il n'avait pas l'obligation d'aller chercher les centres hospitaliers. Vous en avez eu un témoignage ce matin, d'ailleurs, avec l'Association des hôpitaux qui est venue dire à nouveau à cette commission parlementaire le succès obtenu avec l'article 43b.

M. le ministre, c'est une autre insistance de notre part de vous dire: Ne reculez pas sur ce qui a déjà été acquis avec la participation des professionnels médecins du réseau sur l'approbation des plans d'organisation. Nous vous demandons donc que cet article continue de maintenir le pouvoir au conseil régional, en sachant fort bien que l'approbation ultime est toujours au niveau du ministre. Mais, M. le ministre, nous vous plaignons fortement de recevoir 1200 plans d'organisation demain matin, à votre bureau, pour accepter une à une les nouvelles nominations de médecins dans chacun des établissements, puisqu'il y en a maintenant dans les CLSC, dans les centres d'accueil, dans les CHSP, dans les centres de courte durée et dans les centres spécialisés et ultra-spécialisés.

Avec votre permission, M. le Président, est-ce que vous voulez connaître le commentaire du représentant de la région de Québec?

Une voix: Oui.

M. Légaré (Jean-Yves): M. le Président, M. le ministre, mesdames, messieurs de la commission parlementaire, un quatrième porte-parole pour vous dire qu'à Québec, même si nous n'avions que le mandat de préparer des plans d'effectifs médicaux des établissements d'enseignement, nous l'avons fait dans les 37 centres hospitaliers de la région. Les médecins ainsi que les directions de ces établissements, de façon volontaire, ont accepté de collaborer à cette démarche et tous les plans d'effectifs ont été préparés pour tous nos établissements centres hospitaliers.

De la façon dont nous avons travaillé avec ces derniers, nous avons impliqué un médecin élu dans chacun des conseils de médecins de tous les établissements et, avec le directeur général, pendant un certain nombre rie mois, ils ont travaillé ensemble et ils ont préparé les plans d'effectifs. Je peux vous dire ce soir, comme nous vous l'avons véhiculé par écrit antérieurement, que tous nos conseils de médecins et nos directions d'établissement étaient satisfaits de cette opération.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

M. Johnson (Anjou): M. Carrière, avez-vous autre chose?

M. Carrière: M. le ministre, vous voulez parler?

M. Johnson (Anjou): Non, allez-y, si vous aviez autre chose avant qu'on passe à quelques commentaires.

M. Carrière: On pourrait passer aux articles 56, 57 et 59, sur la composition des conseils d'administration des établissements. Essentiellement, cette recommandation, c'est pour que les membres nommés aux conseils d'administration des établissements ne soient pas des employés d'un établissement à quelque niveau que ce soit. Vous comprenez que cela n'exclut pas pour autant la participation, dans le processus décisionnel, des employés du réseau au niveau des tables de concertation. Au niveau des conseils, c'est ce qu'on demanderait. On pourrait terminer, si vous voulez, par un article, l'article 111, à la page 33. M. Marcoux. (21 h 45)

M. Marcoux (Gérard): Alors, M. le Président, nous voulons par cette disposition transitoire tout simplement vous proposer qu'il y ait une date précise pour l'arrivée des nouveaux membres du conseil d'administration dans les conseils régionaux. La raison est simple, c'est que nous venons de vivre, il y a deux semaines, les conclusions d'une élection qui fait en sorte que dans la majorité des conseils régionaux entre six et huit nouveaux membres viennent d'être élus pour une période de deux ans. Il arrive que parmi ces personnes élues un grand nombre sont des permanents du réseau. Dans l'économie générale de ce projet de loi, nous nous demandons comment il sera possible pour le conseil d'administration de vivre quotidiennement si on maintient en place les nouveaux élus. Alors, nous vous recommandons de préciser une date, soit mars 1982, plutôt que d'attendre l'expiration des mandats, lesquels viennent presque tous d'être renouvelés.

Nous recommandons également, pour conserver un certain principe d'alternance et faire en sorte que les conseils régionaux ne soient pas privés de toutes leurs ressources au conseil d'administration du même coup tous les trois ans, nous vous recommandons de prévoir un mécanisme qui assure la continuité entre les membres actuels des conseils d'administration et les nominations faites en vertu du présent projet. À cet égard, le mécanisme suivant pourrait s'appliquer: Lors de la première élection en mars, les membres élus par les établissements le seraient pour un an, ceux élus par les cégeps, les universités et les organismes bénévoles le seraient pour deux ans et les autres, soit les nominations faites par les maires et par le ministre, le seraient pour trois ans, de telle sorte qu'à l'expiration de chacun de ces mandats il y aurait une continuité. Quant à la première fois, en mars 1982, il nous paraît assez évident que dans chaque conseil régional les nominations actuelles qui viennent d'être faites, si les permanents du réseau quittent les conseils régionaux... il est fort probable que les collèges électoraux rééliront les derniers venus qui sont actuellement membres du conseil d'administration.

D'autre part, le ministre vient de nommer deux membres socio-économiques à chaque conseil d'administration. Il nous paraît possible que ces membres puissent demeurer aux conseils d'administration pour assurer ainsi la continuité entre l'actuel conseil d'administration et le nouveau qu'on pourrait connaître en mars 1982.

Le Président (M. Bordeleau): Je voudrais simplement qu'on procède à des questions.

M. Carrière: Oui, mais j'aurais une brève conclusion, si vous voulez.

M. Johnson (Anjou): Allez-y, M. Carrière.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, d'accord, allez-y.

M. Carrière: Maintenant que nous avons présenté la conférence des CRSSS du Québec, que nous avons brossé un bilan du vécu des dix dernières années, que nous avons livré notre appréciation générale des aspects positifs du présent projet de loi no 27 et que nous en avons fait l'analyse spécifique, il nous semble essentiel, avant de terminer, d'attirer votre attention sur ce que doit être véritablement un conseil régional. La mission et la raison d'être de cet organisme se sont clarifiées à l'exercice des fonctions confiées sur la base de leur autorité de compétence et de la volonté de participation des différents intervenants de chacune des régions. Parler de la mission d'un organisme, c'est identifier la production, c'est-à-dire les attentes que l'on peut avoir face à cet organisme. Dans ce contexte, la mission d'un conseil régional consiste, en quelque sorte, à administrer régionalement les services de santé et les services sociaux, c'est-à-dire poser les actions régionales de planification, de programmation, de budgétisation et d'évaluation de contrôle quant aux services de santé et aux services sociaux dispensés sur son territoire. Il nous semble opportun de souligner que l'utilisation de l'expression "conseil régional désigné" dans le présent projet de loi souligne bien la

reconnaissance du phénomène de la régionalisation, car elle confirme que les conseils régionaux n'ont pas besoin qu'on leur confie toutes les mêmes fonctions, celles-ci pouvant varier selon les particularismes régionaux.

Dire également que le conseil régional ne doit pas être un autre organisme bureaucratique au niveau régional ne suffit certes pas.

En effet, le CRSSS se doit d'être un véritable moteur de la coordination régionale dans la distribution des services. Il se doit d'assurer un authentique décloisonnement des établissements pour la réalisation d'un réseau de services plutôt qu'un réseau d'établissements.

De plus, compte tenu que coordonner c'est ordonner un système avec les personnes impliquées dans ce système, il nous apparaît primordial de mettre en relief, que l'exercice de l'autorité régionale s'effectue avec la contribution des principaux intervenants du réseau, c'est-à-dire les établissements, puisqu'ils sont présents dans le processus de décisions régionales, chaque fois qu'une commission administrative ou un comité régional s'impliquent dans la conduite d'un dossier. Enfin, il demeure essentiel de redire que le fondement de la mission d'un conseil régional, c'est la population du territoire qu'il dessert.

En terminant, le CRSSS insiste donc pour identifier les deux principaux moyens dont il a besoin sur le plan administratif compte tenu qu'il désire être en mesure d'exercer cette mission de façon adéquate. Que les CRSSS soient en effet, chacun dans leur région, le seul intermédiaire entre le MAS et les établissements et qu'ils détiennent, chacun dans leur région également, l'autorité correspondante aux responsabilités confiées sans laquelle il est impossible de vraiment réaliser l'organisation régionale des services particulièrement Iorsque tous les efforts de concertation et de coordination ont été fournis.

Ce projet de loi ayant été déposé dans le but de fournir aux différents intervenants les meilleurs moyens pour la réalisation des objectifs mis de l'avant il y a dix ans, les conseils régionaux confirment que cette nouvelle législation leur donnera les outils de base nécessaires pour être les véritables moteurs de la coordination régionale des services. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, des questions.

M. Johnson (Anjou): Alors, M. Carrière, merci ainsi qu'à ceux qui vous accompagnent qu'ils soient en réseau ou permanents du réseau comme vous l'avez évoqué.

J'aurais en fait seulement un commentaire pour à peu près deux minutes et une question à laquelle j'aimerais vous entendre répondre pendant une minute aussi mais c'est une question assez large. Vous allez peut-être nous dire que vous allez y repenser et je pense qu'on va en discuter en troisième lecture.

Mon commentaire est le suivant: La performance des conseils régionaux au Québec est caractérisée par deux choses, c'est l'expérience bien modeste que j'en ai eue depuis six mois en faisant le tour du territoire, il y en a qui sont remarquables et qui ont réussi à harnacher les meilleures énergies possible pour obtenir une motivation et une implication des établissements comme dans certains cas des professionnels. Je pense que ce qu'on évoquait au sujet de Québec est assez caractéristique à cet effet-là. On pourrait citer Montréal pour d'autres éléments et quelques autres; je fais exprès pour ne pas les mentionner parce que quand il en restera seulement trois que je n'ai pas nommés, on va comprendre que c'est sûr que je les trouve moins remarquables.

La deuxième caractéristique, je pense -au-delà de cette diversité et encore une fois là où ils excellent, ils permettent vraiment un véhicule des besoins régionaux - c'est que tout le monde tire à la chevrotine sur eux. Je pense que cela a commencé ce matin et j'ai l'impression que ça va se poursuivre pendant deux jours; attendez, vous n'avez pas encore entendu l'Opposition parler là. J'ai l'impression, et c'est un peu normal puisque les CRSSS sont peut-être une structure finalement relativement mal connue qui n'a pas nécessairement intrinsèquement avantage à se faire connaître en tant que structure, intrinsèquement, je ne pense pas que ce soit la publicité qui soit importante; c'est qu'il se fasse ce qui se fait dans les régions actuellement. J'ai été à même de le constater depuis quelques mois, la période difficile à travers laquelle doit passer le réseau, comme bien d'autres affaires et comme ce qui arrive aux familles et à bien d'autre monde dans la société québécoise comme dans bien d'autres sociétés à cause de la crise économique, nous a permis de voir que des solidarités régionales s'étaient exprimées encore une fois d'une façon bien inégale sur le territoire qui avait permis qu'on progresse et qu'on avance avec un certain esprit de solidarité à certains endroits. Une définition des problèmes et surtout une recherche honnête de solutions et en ce sens-là - sans prétendre que c'est un blanc-seing - je donnerais cette structure; je dirais que les régions, c'est aussi un état d'esprit et c'est un état d'esprit à la fois dans les établissements et au ministère lui-même. De ce côté-là, ils peuvent être assurés que du côté du ministère, on fait des efforts considérables pour considérer cette dimension régionale des problèmes.

Je leur rappellerai en terminant, avant

de leur poser la question que j'ai pour eux, qu'ils n'ont cependant pas le droit de taxation encore, et que ce n'est pas pour demain matin, la veille. Toute la légitimité qui vient avec le droit de taxation comme la représentation fera qu'ultimement il faudra que le ministère assume des responsabilités et continue d'assumer ses responsabilités très larges. Donc, quelqu'un doit répondre sur la place publique, en l'occurrence, les personnes élues. Je dois subir d'ailleurs, avec plus ou moins de plaisir selon les jours, mes collègues en commission parlementaire, en budget ou ailleurs, ce que ne doivent pas subir les CRSSS, pas plus que les établissements.

La question est la suivante. Elle a trait à l'article 39 du projet de loi 18.2, premièrement: "autoriser le déplacement d'un bénéficiaire vers un autre établissement lorsqu'un établissement vit une situation d'engorgement après avoir appliqué toutes les procédures en vigueur". Bien entendu, je pense qu'on aura un débat en troisième lecture intéressant là-dessus, autour de ces pouvoirs, ce qui est plus spécifiquement relié à Montréal aussi, notamment. Mais, il y a une question extrêmement intéressante qui a été soulevée par un des groupes de médecins - je ne me souviens plus lequel, je pense que c'est un CMD, cet après-midi - c'est la liberté de choix. Je ne sais pas si vous avez une réflexion là-dessus, compte tenu du pouvoir qui est là. Qu'est-ce qui arrive avec la liberté de choix du citoyen, compte tenu du pouvoir dont on parle? Je ne m'attends pas nécessairement que vous ayez une réponse instantanée. J'avoue que c'est une question assez fondamentale.

M. Carrière: Pour répondre très simplement, j'aimerais aussi commenter le paradoxe qui semble se poser sur l'identité des CRSSS. Pour la question du libre choix, je pense que c'est la priorité finalement, c'est une priorité, c'est une des choses à respecter, si vous voulez, je parle en tant que hors réseau. Oui, en tant que hors réseau, c'est une priorité; c'est un geste démocratique qu'il faut maintenir absolument, je pense.

Concernant l'identité des CRSSS, je pense que c'est un sujet de critique, comme vous dites, critique souvent qui est vague, qui est un peu facile pour nous qui travaillons dedans depuis quelques années, qui y participons. C'est un paradoxe et je pense qu'il faut s'habituer à vivre avec cela, parce que d'un côté, si on se présente trop au niveau d'une région, d'une façon trop forte, si vous voulez, trop présente, on va être rebiffé parce que c'est une structure de plus, puis c'est vu par les autres établissements de la région comme étant une structure. Puis, nous serions peut-être vus dans ce contexte-là comme voulant promouvoir notre structure.

Si, d'un autre côté on fonctionne un peu dans l'ombre tout en étant efficace, on se fait dire: Est-ce que vous avez une raison d'être? Voyez-vous? On est pris dans ce dilemme-là. Comme je vous dis, on l'accepte et je pense qu'il faut s'habituer à vivre avec cela parce qu'à long terme... Pourquoi? On a toujours considéré que ce qui est le mieux pour la région, pour prendre une expression de mise en marché, de marketing ce n'est pas de vendre le vendeur, si vous voulez, c'est de bien vendre un produit, et le produit qu'on veut vendre, c'est de la concertation régionale.

Le Président (M. Bordeleau): Madame la députée de L'Acadie. M. Marcoux.

M. Marcoux (Gérard): M. le Président, pour ajouter un commentaire à la question précise du ministre, je pense qu'il faut véritablement lire l'article jusqu'au bout lorsqu'on parle de la seule autorité à autoriser un déplacement d'un bénéficiaire vers un autre établissement lorsqu'un établissement vit une situation d'engorgement, après avoir appliqué toutes les procédures en vigueur. Donc, l'autorité à laquelle on fait allusion, la seule autorité habilitée, elle exerce en suppléance, si personne n'a fait son devoir au niveau local, de telle sorte que quand vous êtes placé face à une coordination régionale, cela demeure quelque chose qui est essentiel, qui est sauvegardé. Je pourrais vous en parler longuement - vous avez donné trente secondes ou une minute - mais les procédures auxquelles il est fait allusion, en vigueur dans l'établissement, c'est que si tous les intervenants, les médecins, le conseil d'administration, se sont occupés véritablement et consciencieusement de prendre toutes les mesures nécessaires, on ne vivra probablement pas cette situation d'engorgement, parce que dans les cas les plus pathétiques que nous avons vécus, il y avait débordement pour des cas d'extrême urgence, parce que les salles d'urgence étaient encombrées de patients devant être hospitalisés et qui étaient dans les salles d'observation pour des périodes de 5 jours jusqu'à 48 jours. (22 heures)

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: J'aurais le goût de reprendre la dernière remarque de M. Marcoux. Si c'était juste cela, on réglerait les problèmes, mais vous savez fort bien qu'il manque de places d'hébergement pour les personnes âgées, pour les malades chroniques, ce n'est pas strictement le fait qu'on les tienne dans les corridors pendant

48 jours, au lieu de les monter aux étages. Est-ce que c'est cela le seul problème?

M. Marcoux (Gérard): C'est un des éléments du problème, vous avez complètement raison, c'est un des éléments. C'est justement la démonstration, Mme Lavoie-Roux, qu'à ce moment-là ce n'est pas une autorité locale qui peut régler ce type de problème, et, pour qu'une autorité régionale puisse le régler, il faut qu'elle soit munie d'une certaine autorité pour forcer, pour obliger justement ceux qui ne veulent pas prendre les patients hébergés à les prendre, quand vient le temps de les prendre. Ce n'est pas le cas actuellement. L'effort fait par le projet de loi 27 apporte justement sur un plan régional une autorité additionnelle, mais toujours - et il ne faut jamais l'oublier - en suppléance, si les procédures locales n'ont véritablement pas donné les résultats attendus.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie également pour votre mémoire. J'ai été un petit peu surprise, je dois vous le dire, qu'il y ait une espèce de consensus à savoir que peut-être on vous donnait trop de pouvoirs; vous autres, vous veniez en demander davantage. C'est peut-être moi qui ai une mauvaise perception des choses, mais je ne peux pas m'empêcher de vous le dire.

Vous définissez, et je vous remercie de l'espèce d'historique que vous donnez avec référence à la loi, la philosophie mise de l'avant dans l'établissement du réseau, dans la création des CRSSS, mais particulièrement la philosophie du réseau. Je retrouve cela en page 5 entre autres. Il y a d'autres endroits où c'est indiqué. "Cette loi donnait donc les grands paramètres devant servir à articuler ce réseau de services sur une base territoriale. Elle voulait que les établissements ou que les composantes soient autonomes pour que la prise de décision consécutive à l'exercice des responsabilités confiées soit implicable à une organisation responsabilisée."

À d'autres endroits, vous parlez de la participation et cela aussi faisait partie de la philosophie de base de la Loi sur les services de santé et des services sociaux. Est-ce que cela ne vous inquiète pas quand de plus en plus de pouvoirs vous sont donnés? C'est d'ailleurs, je pense, les représentations que d'autres vont faire, que justement vous venez saper d'une certaine façon cette participation, que vous venez démobiliser ou désinciter les gens à prendre leurs responsabilités.

Je vais revenir à l'exemple que vous donniez, M. Marcoux, dans le cas des services et des approvisionnements, je ne sais quel est exactement le terme, où vous dites: Nous, en tout cas, dans certains endroits où on l'a fait, on l'a fait avec succès. Je ne mets pas cela en doute du tout. Vous craignez fort que peut-être on ait l'impression de vous en soustraire un petit peu, puisqu'on pourrait en confier par mandat à une corporation sans but lucratif. Je ne vois pas ce qui vous inquiète là-dedans. Je me dis que vous n'êtes quand même pas les seuls à pouvoir assumer des fonctions administratives avec succès. Si on en est rendu là, on est mieux de faire sauter tous les conseils d'administration des établissements et de vous en confier la direction. Je ne peux pas m'empêcher de vous dire mon étonnement, parce que je trouve que vous avez beaucoup de pouvoirs et c'est la voix un peu commune qui se fait entendre ici. Or, vous venez dire: Écoutez, surtout ne nous en enlevez pas, parce qu'on a bien fait... Je ne dis pas que vous n'avez pas bien fait ce qui vous a été confié, d'ailleurs, je ne serais même pas capable de donner l'évaluation que le ministre a donnée des CRSSS, parce que je n'ai pas les données pour le faire. Je trouve ça un peu étonnant.

Ma question précise est: Est-ce que vous ne craignez pas qu'en vous confiant de plus en plus et davantage de responsabilités, on vienne justement saper cette philosophie de base qui a présidé à l'établissement de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, de rendre les gens responsables, de rendre les établissements responsables? Ceci n'empêche pas une coordination, une évaluation, une planification. C'est une de mes questions.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Carrière.

M. Carrière: Non, je ne crois pas, Mme Lavoie-Roux. Finalement, c'est une réforme qui a commencé vers 1971, mais on n'est pas rendu au bout de cette réforme démocratique, la prise en charge de la gestion des services par les citoyens des services de santé et des services sociaux. Pour vous donner un exemple de ça, de plus en plus, ce qu'on voit, c'est que les gens participent de plus en plus, non de moins en moins. Quand on disait tout à l'heure qu'un CRSSS est un intermédiaire, ce n'est pas un mini-MAS dans une région, il y a des consensus qui sont formés au niveau d'une région et après ça, il faut aller le vendre à Québec, au niveau du ministère. C'est l'inverse, souvent, c'est le cheminement de nos activités.

Si on établit un consensus, c'est parce qu'il y avait des citoyens à la base. Ce qu'on demande, c'est de démocratiser encore plus le système. Quand on demande d'avoir des gens hors réseaux sur les conseils d'administration des établissements, on veut redonner aux gens les moyens, on veut valoriser la prise en charge par les citoyens, de l'administration de leurs établissements.

M. Marcoux (Gérard): En addition, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: ...revaloriser... M. Carrière: Je n'ai pas terminé. Mme Lavoie-Roux: Excusez.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Marcoux, un complément de réponse?

M. Carrière: J'aimerais ajouter une deuxième chose, dans le contexte qu'on a dessiné ici, dans l'introduction, on dit qu'après dix ans, on a un portrait plus précis des responsabilités dont on a besoin, pour établir ces consensus régionaux. Tout le sens des recommandations spécifiques qu'on fait, les ajouts qu'on demande à la loi, ainsi de suite, c'est purement en fonction de mieux travailler à établir des consensus au niveau de la région. C'est ça la nature de l'autorité qui est demandée. Ce n'est pas un pouvoir de titre, ce sont des moyens que nous prenons pour être capables d'aller chercher des consensus pour donner de meilleurs services, soit entre deux établissements... Je peux vous donner un exemple,' je viens de Gaspé, on a travaillé cet automne, à un problème, on avait deux centres de santé, deux conseils d'administration, quatre corporations, j'en mets, je vais arrêter là. Finalement, c'est un problème de rationalisation de service. Il fallait que les gens se prennent en main. On s'est dit, il y a assez de compétence dans une ville comme Gaspé, pour être capable de régler un problème comme ça.

Au niveau du CRSS5, c'est qu'on a exercé un certain leadership, on a incité les gens à se rencontrer. Évidemment, cela a biffé un peu au début, mais par la suite, les deux conseils ont accepté de cheminer et on en est rendu à avoir une direction générale commune pour ces deux établissements. Mais à partir de ça, on peut rationaliser un tas de services à l'intérieur de ça. Cela a été bien repu par la population. Qui a décidé ça? Ce sont les conseils d'administration, les gens, ceux hors réseau de la population aussi.

Je parle d'un exemple; ça me porte à dire que c'est une conscientisation, ça se développe. Mais ce ne sont pas des choses qui vont venir du jour au lendemain, c'est une tradition démocratique établie. Depuis dix ans, je pense qu'on a fait beaucoup de chemin, mais il en reste beaucoup à faire.

Mme Lavoie-Roux: À la fin, vous pouvez toujours l'exercer d'autorité, à l'égard de certaines fonctions.

M. Carrière: Non, dans l'exemple que je vous ai donné, cela aurait été impossible. Sans un consensus des deux conseils, cela aurait été absolument impossible. Il a fallu amener ces gens à cheminer ensemble jusqu'à voir l'évidence. Ils l'ont vu. Mais s'ils ne l'avaient pas vu, on n'aurait rien pu faire. Même si on avait fait quelque chose, est-ce que cela aurait été valable? Je ne le crois pas parce que faire des choses en dépit de la volonté des gens, contre la volonté des gens, je pense qu'à long terme, on s'embarque.

Mme Lavoie-Roux: Tout à l'heure, dans le sens de cette participation - c'est un exemple, de mémoire - vous proposiez une modification au terme du mandat qui sera donné aux membres du conseil d'administration des CRSSS. Vous dites: II faudrait avoir une rotation pour assurer une continuité, etc. Je ne discuterai pas du fond, on y reviendra en commission parlementaire. Vous suggérez que ceux qui auront le plus long mandat soient nommés par le ministre. Vous donnez un an aux gens qui sont - il faudrait que je relise le mémoire, je ne l'ai pas - du comité des bénéficiaires, deux ans... Pourquoi, si vous voulez justement la participation, les bénéficiaires ont quand même, qu'on le veuille ou non, une nomination plus démocratique qu'une nomination par un ministre... Je m'excuse, M. le ministre. Vous dites que ce sont ceux qui sont nommés par le ministre qu'on garde trois ans. Vous nous dites qu'il faut que le milieu soit impliqué. C'est juste un petit exemple, mais je trouve que, même dans les suggestions que vous faites, vous ne démontrez pas...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, monsieur.

M. Charest: En fait, chaque groupe est nommé pour trois ans. Il s'agit de savoir par qui on commence. Cela peut aussi être par d'autres que par ceux nommés par le ministre. En fait, cela a plus ou moins d'importance pour nous. On dit: II ne faut pas que tous les membres soient nommés en même temps. C'est dit là. Cela pourrait être autre chose aussi.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Il reste que c'est quand même indicatif peut-être d'une certaine... Enfin, peu importe. Une autre question. Ce qui me surprend aussi dans votre mémoire, c'est que, comme CRSSS, vous ne signalez aucune difficulté que la loi peut créer à l'égard des citoyens ou des établissements qui sont sous votre égide. Cela m'étonne un peu, je vais vous donner un exemple. À l'article 23b.l, il me semble que c'est une question qui aurait dû vous préoccuper: "Prescrire les cas, conditions ou circonstances, dans lesquels des services visés à l'article 3 ne sont pas considérés comme des services assurés pour

les bénéficiaires ou ceux d'entre eux qu'il indique." Vous avez, à f, une autre disposition touchant les produits pharmaceutiques, si je ne m'abuse. N'avez-vous pas là des articles qui, d'une façon indirecte, pourraient imposer une forme de ticket modérateur, puisque, par cet article, le gouvernement pourrait diminuer l'accessibilité gratuite à des services?

Je m'étonne que vous ne nous en parliez pas. Vous dites que vous avez à coeur les soins. Je suis sûre que vous avez à coeur les citoyens. C'est un peu étonnant que vous arriviez et qu'il n'y ait aucune... Remarquez bien que, comme on l'a lu très peu, il y en a peut-être qu'on n'a pas lu ensemble. Il n'y a aucune remarque voulant que certaines dispositions de la loi vont apporter des contraintes aux citoyens ou aux établissements qui sont dans le réseau.

M. Carrière: Aux citoyens ou aux établissements, ce sont deux choses?

Mme Lavoie-Roux: Aux citoyens et aux établissements, si vous voulez.

M. Carrière: Non, c'est parce que, finalement, on n'en voit pas. Remarquez qu'avec le projet de loi, ce qu'on dit, c'est que...

Mme Lavoie-Roux: ... vous ne voyez rien.

M. Carrière: ... dans l'ensemble, on a une réaction positive au projet de loi. Cela nous donne des outils, si vous voulez, dans le sens qu'on le disait tout à l'heure, pour une plus grande démocratisation des services. Ce que cela permet, c'est une souplesse à l'intérieur de chacune des régions. De là à avoir un ticket modérateur, c'est un cas très spécifique. On n'a pas envisagé l'hypothèse dans le mémoire.

Mme Lavoie-Roux: C'est quand même important pour les citoyens dont vous nous avez donné la philosophie, au début.

M. Carrière: Oui, vous êtes d'accord avec moi, Mme Thérèse Lavoie-Roux, que je ne peux pas commencer à lire toutes sortes d'intentions dans le projet de loi et à les commenter, si elles ne sont pas là.

Mme Lavoie-Roux: Ce ne sont pas des intentions, c'est un article qui est dans le projet de loi. Enfin! Ma dernière question s'adresserait peut-être à M. Marcoux. À ce moment, vous êtes à établir une centrale d'urgence. D'ailleurs, il y a une disposition dans la loi qui permettrait aussi d'étendre des services analogues à une autre région. Est-ce que vous pouvez nous indiquer le coût de l'établissement de cette centrale d'urgence? Est-ce que vous en avez fait l'évaluation? Je vais vous poser tout de suite une deuxième question qui est différente pour épargner du temps. Est-ce que vous trouvez justifié que les membres du conseil d'administration du conseil régional puissent recevoir une rémunération? Ce seront mes deux dernières questions. (22 h 15)

M. Marcoux (Gérard): À votre question, Mme Lavoie-Roux, c'est que, sur le plan des estimations comme telles, de ce que pourrait représenter le financement de la coordination de toutes les urgences du Montréal métropolitain, je suis malheureusement incapable de répondre correctement à votre question, parce qu'il s'agit d'un ensemble tellement énorme. Il y a 32 centres hospitaliers avec des centres d'urgence dans le Montréal métropolitain. Les 32 centres hospitaliers ont un budget qui dépasse dans leur masse ensemble 1 000 000 000 $.

Mme Lavoie-Roux: ... central.

M. Marcoux (Gérard): Oui, mais pour la coordination, il arrive que nécessairement, comme actuellement le centre de coordination aura comme fonction principale de prendre en charge l'urgence préhospitalière, cela implique que sur le territoire il y aura des médecins, des ambulances. Cette analyse de tous ces coûts comme tels, si je me risquais à vous donner un chiffre, je vous donnerais quelque chose qui, au moment où on est en train de se parler, serait arbitraire.

Ce qu'on peut vous dire vis-à-vis de cela, c'est que nous n'assistons pas actuellement dans le Montréal métropolitain à une nouvelle dépense, on assiste à un réaménagement de ressources existantes.

Ce qu'on peut vous dire, par exemple, par rapport à tout ce qui se produit dans le cours des événements actuellement, c'est qu'il y a justement ce concensus vis-à-vis de toutes les catégories de ressources, les ressources privées et publiques vers l'objectif qui était poursuivi pour cette centrale.

Je vais prendre trente secondes pour répondre à votre question, parce que je brûle de vous répondre, Mme Lavoie-Roux. Il est certain que, dans cette enceinte, en aussi peu de temps, cette illustre commission parlementaire ne nous rend pas justice, parce qu'au plan de la performance, on aurait bien des choses à vous raconter. On pourrait vous dire que, dans l'exercice du pouvoir d'un conseil régional, si on comprend bien l'essence d'un conseil régional, c'est que nous ne sommes pas des assoiffés de pouvoir qui recherchent le pouvoir. La nature même d'un conseil régional, c'est l'assemblée de tous les intervenants dans le système de telle sorte que, si on vous parlait pendant trente secondes de notre performance comme

conseils régionaux, on vous dirait que notre première étoile au niveau des services à domicile, on est allé la chercher dans tous les groupes de bénévoles, les groupes de citoyens pour les attabler dans les conseils régionaux et faire la distribution des enveloppes que le ministère décidait de donner dans toutes les régions de la province.

La deuxième réalisation de performance, quand sont arrivés les programmes OSE, en l'espace de quelques mois, les conseils régionaux avec la participation de tous les éléments du réseau, parce que ce sont là nos ressources... Il ne faut pas que vous pensiez qu'à ce moment-ci, face aux conseils régionaux, nous sommes face à des bureaucraties énormes. C'est tout à fait le contraire, nous travaillons avec les intervenants du réseau.

On a eu un succès monstre avec les programmes OSE sur une période de deux mois, parce que la population était participante par les établissements, par les organismes bénévoles, par les groupes de citoyens.

Nous avons eu par la suite, Mme Lavoie-Roux, au niveau de la Commission des immobilisations - c'est un article sur lequel on est passé vite, qui était l'article 2 pour les immobilisations - avec la participation de tous les établissements et des directeurs d'établissements la meilleure réalisation, parce que, région par région, nous avons disposé des sommes aux bons endroits pour les immobilisations dans les centres hospitaliers pour tous les projets de moins de 1 000 000 $.

Le résultat de tout cela, parce que mon président me dit d'arrêter - il m'en reste encore trois ou quatre, mais je ne vous le dirai pas - c'est que ce qui fait la force d'un conseil régional, ce n'est pas le pouvoir que le ministre va nous donner, c'est le consensus qu'on va chercher avec la participation des établissements.

Le dernier défi dont je veux vous parler, madame et M. le ministre, c'est que le plan de redressement budgétaire que nous vivons présentement, c'était la mission la plus difficile à accomplir. Les conseils régionaux avec peu d'effectifs ont retroussé leurs manches et ont aussi porté épaule à la roue pour essayer de réaliser les objectifs des citoyens du Québec dans la conjoncture économique que nous sommes en train de vivre.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que ce sont les objectifs des citoyens du Québec ou les objectifs du gouvernement que vous avez essayé de réaliser?

M. Johnson (Anjou): Je ne veux pas répondre à ça, M. Marcoux.

M. Marcoux (Gérard): Je vous laisse le soin de répondre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M.

Charest.

M. Marcoux (Gérard): Oui, je pense qu'il y a d'autres questions, mais là-dessus je ne voudrais pas non plus...

Mme Lavoie-Roux: Vous n'avez pas répondu à ma deuxième question.

M. Marcoux (Gérard): Sur la question de la rémunération...

Le Président (M. Bordeleau): Pardon?

M. Marcoux (Gérard): Mme Lavoie-Roux a posé une question sur la rémunération.

Le Président (M. Bordeleau): Je voudrais souligner à tout le monde que le temps passe et qu'il nous reste encore deux groupes à entendre. J'aimerais que tout le monde essaie de concentrer ses questions et ses réponses.

M. Charest: Une réponse courte sur la question de la rémunération...

Le Président (M. Bordeleau): Une réponse courte.

M. Charest: ... des membres des conseils d'administration des CRSSS. On ne veut pas, nous, les bénévoles des conseils d'administration des CRSSS, faire des représentations de nature syndicale. Je pense que vous en avez eu aujourd'hui et on est bien mal à l'aise pour parler de cette question-là. Il est évident que si le gouvernement décide de rémunérer, d'une manière ou d'une autre, les membres des conseils d'administration, il y en a peu qui vont retourner leur argent mais ça ne fait pas partie d'une demande des membres des conseils d'administration. C'est tout ce que je peux dire.

Mme Lavoie-Roux: Je ne veux pas vous imputer ce motif-là, remarquez-bien, pas du tout. Ce que je voulais savoir sur le précédent que ça pouvait créer, c'est si ça vous semblait une nécessité - je suis sûre que ce n'est pas une demande qui vient, enfin...

M. Charest: On est mal placés pour en discuter.

Le Président (M. Bordeleau): C'est à vous. M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Moi, je ne vais pas poser la

question à M. Marcoux parce que je ne crois pas que le temps le permette. Je devrais dire à M. Marcoux que ce n'est pas une question qui est posée dans le sens de critiquer quoi que ce soit dans les CRSSS, mais c'est une question qui se pose du point de vue du principe.

En fait, comme ma collègue de L'Acadie l'a dit, le consensus semble se former - beaucoup de gens nous ont écrit, etc. - sur le fait que la loi va donner des pouvoirs immenses aux CRSSS sous 18.1, 18.2 et surtout 18.3. On voit aussi qu'on donne des pouvoirs d'approbation des contrats qui n'existaient pas avant.

Pourtant, lorsqu'on lit votre mémoire, on peut voir, j'ai compté onze nouveaux pouvoirs que vous voulez vous donner en plus de ceux qu'on va vous donner. Il y a les articles 4, 19, 20, enfin, on n'a pas besoin de les énumérer. Mais ce qu'il y a d'intéressant là-dedans, c'est que par deux fois, à l'article 1.7 de la section 5 et à l'article 38, le ministre veut vous donner son approbation, mais vous ne voulez plus que ce soit le ministre qui vous donne l'approbation, vous voulez vous donner l'approbation vous-mêmes. C'est intéressant. Ensuite, sur la question de l'information publique dans votre territoire, pour donner l'information publique aux usagers du territoire, vous avez décidé d'éliminer cela complètement.

L'article 41, il me semble que c'est un article qui, si votre recommandation était acceptée, serait un peu dangereux en ce sens que l'article 41 donnerait à votre conseil d'administration et à votre directeur général les pouvoirs immenses que vous avez déjà vous-mêmes. Ensuite, vous demandez une espèce de pouvoir de veto sur la fusion de deux établissements, sur les comptes rendus d'établissements. Il faudrait que ce soit approuvé par vous, selon l'article 81, et vous voulez des pouvoirs de recommandation sur la nomination d'un directeur général. Est-ce que vous ne pensez pas que déjà, de par le projet de loi, vous avez des pouvoirs immenses? Là, vous demandez des pouvoirs tellement grands et les seules fois que cela exige un veto du ministre, vous demandez que ce soit enlevé; je trouve que vous allez un peu trop loin. Ne pensez-vous pas que ça va beaucoup trop loin?

M. Marcoux (Gérard): M. le Président, là-dessus, pour vous répondre de façon très sommaire...

M. Lincoln: Non, moi, je veux le demander à M. Carrière parce que M. Marcoux..., allez-y.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, un des deux. M. Marcoux.

M. Marcoux (Gérard): Non, ce sera très bref, M. le Président. Un conseil régional est un outil pour la réalisation d'une régionalisation. Ce n'est pas une recherche de pouvoirs, c'est une recherche de décentralisation au bénéfice des intervenants de la région. C'est cela qui est demandé.

M. le député, avant de parler des fonctions qui sont données au conseil régional, il faut vraiment comprendre ce qu'est un conseil régional et de quoi il est constitué. C'est véritablement l'assemblée ou la réunion des intervenants dans une région donnée. À ce moment-là, les établissements, les organismes bénévoles, les médecins ne peuvent pas se plaindre d'un pouvoir qui devient régional, ils sont là dans l'action pour prendre des décisions sur le plan de la région. Pour chacun des dossiers qui ont été décentralisés, nous avons fait la preuve que l'exercice de cette autorité se faisait par ses intervenants. J'ai commencé à en citer tantôt, je n'en citerai pas d'autres parce que votre temps est précieux et que d'autres attendent.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, merci, M. Marcoux.

M. le député de Laurier.

M. Sirros: Je serai très bref, M. Marcoux. À la suite de cette série d'exemples de choses très bien réussies de la part du CRSSS, avant d'avoir ces nouveaux pouvoirs, n'est-ce pas cela un exemple du...

À mon avis, il y a deux approches à la régionalisation. Il y a une approche où il s'agit de concerter les choses en travaillant beaucoup sur le consensus en utilisant des choses, la bonne volonté qui existe dans le réseau. Il y a aussi l'approche "bulldozer". Finalement, moi, je crains qu'avec une augmentation des pouvoirs du CRSSS, ce qui a été dit tout à l'heure, les CRSSS ne sont pas des minima, mais les CRSSS vont devenir de plus en plus des minima finalement et, une fois que vous avez ce genre de pouvoirs au niveau du CRSSS, vous démobilisez effectivement, comme madame la députée disait tout à l'heure, la participation des gens à la base parce que, finalement, ça sert à quoi? Vous avez le pouvoir, vous allez décider.

J'aimerais vous laisser sur cela pour réfléchir peut-être un peu. Je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, ça va, s'il n'y a pas d'autres questions, on va remercier nos invités. Merci de vous être présentés devant notre commission.

M. Johnson (Anjou): Je voudrais remercier évidemment les représentants de la Conférence des CRSSS dont on a été en mesure d'apprécier non seulement les convictions, mais également la ferveur.

Mme Lavoie-Roux: Je suis bien d'accord.

M. Johnson (Anjou): Je pense que cette ferveur est au centre de bien des choses dans ce qui se passe en ce moment. Je trouve un peu regrettable aussi qu'il ne trouve pas plus de défenseurs, pour les CRSSS, ils sont entre l'écorce et l'arbre, et, de ce temps-ci, ce n'est pas très confortable. Je veux simplement leur dire que nous en sommes conscients.

Merci, messieurs.

Le Président (M. Bordeleau): J'appelle maintenant la Corporation professionnelle des médecins du Québec, représentée par le Dr Augustin Roy.

Veuillez nous présenter les personnes qui vous accompagnent, M. Roy.

Corporation professionnelle des médecins du Québec

M. Roy (Augustin): M. le Président, M. le ministre, M. le chef de l'Opposition, mesdames et messieurs les membres de la commission.

Je suis le Dr Augustin Roy, président de la Corporation professionnelle des médecins du Québec, et je suis accompagné du Dr André Lapierre, à ma droite, directeur général adjoint, et du Dr Pierre Saint-Georges, directeur du service d'inspection professionnelle.

Nous remercions le ministre d'avoir bien daigné nous inviter à cette commission parlementaire au cinquième rang, et de nous avoir donné l'occasion d'écouter tous les intervenants antérieurs. Nous sommes sûrs, évidemment, qu'il ne voulait pas que notre patience et notre fatigue fassent en sorte qu'on escamote notre mémoire. Nous allons essayer de le présenter au complet dans l'intention d'éclairer la commission et le public.

Nous n'avons pas l'occasion d'avoir la même galerie que nos confrères omnipraticiens qui sont allés se reposer pour pouvoir donner de bons soins à la population, aux malades du Québec demain, parce que nous savons qu'ils ont confiance en nous. Nous avons observé le ministre aujourd'hui. D'après ses observations et ses déclarations, nous avons l'impression que tous les dés ne sont pas pipés, comme on en a utilisé l'expression récemment, et qu'il y a encore des modifications à apporter à ce projet de loi 27 dans l'intérêt de la santé publique.

Ce projet de loi est extrêmement important. Il est compliqué et complexe, comme vous avez pu avoir l'occasion de vous en rendre compte aujourd'hui. Il y a beaucoup de considérations techniques, je suis certain qu'elles sont difficiles à saisir pour un grand nombre de députés, et nous allons essayer, avec les autres intervenants qui nous ont précédés et qui nous succéderont, de vous éclairer autant que possible pour faire adopter la meilleure législation.

Au cours des dix dernières années, c'est-à-dire depuis la publication du rapport de la commission d'enquête sur la santé et le bien-être social, la Corporation professionnelle des médecins du Québec a eu l'occasion de présenter de nombreux mémoires sur le système de santé et l'exercice de la médecine au Québec. À plusieurs reprises, dans ses mémoires, elle a attiré l'attention du législateur sur, premièrement, le fait que le système apporterait un plus grand cloisonnement des soins et, par le fait même, risquerait de manquer un des objectifs du régime, celui d'une médecine globale et humaine. (22 h 30)

Deuxièmement, sur les conséquences d'une bureaucratisation plus marquée. Nous soulignions le danger que l'exercice de la médecine soit axé sur des procédures administratives plutôt que sur la personne humaine. On doit réaliser qu'on a un système, malheureusement, de plus en plus dépersonnalisé et déshumanisé.

Troisièmement, sur la participation des médecins au régime de santé. On avisait le législateur, dans nos mémoires antérieurs, que la participation des médecins aux décisions dans les domaines de leur compétence, serait noyée dans le processus de participation suggéré et ferait disparaître complètement toute motivation, ce qui est en train de se produire.

Quatrièmement, les dangers de l'étatisation du régime de santé et des affaires sociales. La corporation, consciente que le ministre doit avoir l'autorité nécessaire pour intervenir rapidement et apporter les solutions appropriées pour le plus grand bien public, a toujours tenté de bien doser les pouvoirs de l'État. Le risque est grand que dans un régime sous contrôle étatique, l'exercice des professions ne le devienne. Il nous apparaît important que les règles nécessaires au bon fonctionnement du système soient établies en collaboration avec chacun des intéressés et achevées par des gens compétents dans le domaine. Ces règles doivent être le plus souples possible, permettre l'initiative et favoriser la motivation.

Cinquièmement, en 1972, nous attirions l'attention du législateur sur la nécessité de repenser l'organisation départementale.

Sixièmement, à la suite de nos publications sur les effectifs médicaux, depuis 1972, nous avons attiré, à multiples reprises, l'attention du législateur sur la répartition des effectifs médicaux dans les diverses régions du Québec et nous lui avons indiqué que la corporation avait les données nécessaires et l'expertise suffisante pour

participer aux décisions du ministère concernant la répartition des effectifs. La corporation a été éloignée de ce domaine. Nous attirons votre attention sur la publication, la semaine dernière, de la dernière monographie sur les effectifs médicaux au Québec que nous avons envoyée au ministre dès que nous l'avons reçue.

Nous avons de l'expertise dans ce domaine, nous sommes très sensibilisés au problème des médecins des régions éloignées, nous croyons que ce problème est soluble, pas aussi difficilement qu'on le laisse croire et qu'il exige une certaine volonté politique en concertation avec les intéressés qui sont les médecins. Personnellement, je connais assez bien ce problème des régions éloignées pour avoir exercé au Témiscamingue et ensuite, à Schefferville, pendant trois ans et demi, dans un endroit où il fut agréable de travailler et où je recommencerais à travailler si c'était à refaire. Je connais, par ailleurs, la difficulté de ce genre de pratique et je sais pourquoi les médecins des régions éloignées, à certains moments, ne peuvent plus endurer ces difficultés d'exercice, mais qui sont facilement surmontées, si on s'en donne la peine.

Septièmement, depuis 1964, la corporation a produit quelques mémoires sur la mise en place d'un système d'urgence dans la province et en particulier, pour la région du Montréal métropolitain. En 1964, nous avions estimé à 75 000 $ l'organisation d'un système d'urgence à Montréal. Nous avions demandé à l'époque une subvention au gouvernement pour organiser nous-mêmes, en collaboration avec les associations médicales, un système d'urgence, ce qui ne nous avait pas été accordé par le gouvernement. Nous sommes au courant de toutes les études qui ont été faites dans le domaine depuis très longtemps. Nous nous inquiétons, par ailleurs, de la lenteur avec laquelle le gouvernement tente de régler la situation par sa centrale des données localisée au conseil régional. Nous nous inquiétons des sommes d'argent astronomiques, des millions, qui ont été dépensées au cours de l'année, alors qu'un système n'est pas encore en fonction, qu'un médecin à temps plein est engagé, qu'il y a trente infirmières à temps plein qui y travaillent, que des millions y ont été engloutis, dont au moins 500 000 $ pour subventionner la faillite d'une organisation appelée Télé-Médic, alors que le système n'est pas encore en fonction. Nous espérons, par ailleurs, qu'on aura des résultats assez rapidement.

Huitièmement, la corporation a toujours recommandé que les libertés fondamentales, l'indépendance professionnelle, la liberté de participation aux régimes d'assurance-maladie, le libre choix du médecin par le malade et la libre acceptation du malade par le médecin, sauf en cas d'urgence, la liberté thérapeutique, la liberté d'installation, soient inscrits dans la loi et ainsi protégés plutôt que de faire l'objet de négociations.

Neuvièmement, enfin, la corporation a présenté, le 15 septembre 1981, un mémoire sur le régime des négociations dans les secteurs public et parapublic, et le maintien des services essentiels dans lequel elle proposait un nouveau modèle de relations de travail dans ces secteurs, fondé sur la raison plutôt que sur la force et permettant de restaurer l'autorité de l'Assemblée nationale dans ce domaine.

Ainsi, elle proposait l'adoption par l'Assemblée nationale d'un statut des agents des services de santé et des services sociaux; un nouveau mode de négociation, appelé "négociation concertée", et la constitution des agences de régulation des relations de travail dans les services de santé et les services sociaux où pourraient se faire entendre les parties concernées, les groupes de consultation et de bénéficiaires. La corporation déplore le peu d'attention qu'on a apportée à ce mémoire.

Je retourne au mémoire que vous avez en main et que je vais lire tout en passant des grands bouts. Nous espérons que le mémoire au complet tel qu'entendu ce matin apparaîtra au journal des Débats.

Après ces multiples recommandations répétées, nous constatons que l'effet principal du projet Loi no 27 est de renforcer le contrôle de l'État dans ses relations avec les professionnels de la santé soumis à une entente et sur la distribution des services de santé.

Les modifications proposées à la loi sur l'assurance-maladie taillent une brèche importante dans la représentativité des syndicats professionnels. Par ailleurs, les modifications accordent au ministre des Affaires sociales un plus grand accès aux renseignements que détient la Régie de l'assurance-maladie sur les professionnels de la santé, allant jusqu'à permettre, dans certaines circonstances, l'identification du professionnel dont les données sont fournies au ministre, ce à quoi la corporation s'est toujours opposée. Ces modifications donnent à la régie accès à des renseignements sur la rémunération que peuvent recevoir les mêmes professionnels en dehors du cadre de la Loi sur l'assurance-maladie.

Les modifications proposées à la Loi sur les services de santé et les services sociaux limitent l'accès des médecins aux établissements, renforcent les pouvoirs directs du ministre sur les établissements, mais plus particulièrement attribuent aux conseils régionaux de la santé et des services sociaux des pouvoirs par lesquels ils substituent leur autorité aux autorités locales des établissements du réseau. Il en résulte une perte d'autonomie des établissements qui deviennent des succursales d'un grand

établissement, le Conseil régional de la santé et des services sociaux.

Les modifications proposées à la Loi sur la protection de la santé publique accordent au ministre des Affaires sociales ou, par délégation, à un CRSSS, le contrôle absolu des services d'ambulance.

Commentaires et recommandations particuliers concernant la Loi sur l'assurance-maladie.

Article 1. Le dernier paragraphe de cet article laisse la corporation perplexe. Il se lit comme suit: "Un service fourni par un médecin qui est en stage de formation pour l'obtention d'un certificat de spécialiste n'est pas un service assuré, sauf s'il est fourni dans un établissement autre que celui où il est en stage." Ce paragraphe peut signifier que le professionnel de la santé qui a rendu un service considéré non assuré pourrait facturer directement le bénéficiaire. Est-ce bien là l'intention du législateur? Une clarification s'impose.

D'autre part, la corporation tient à faire une mise en garde. La modification proposée à l'article 1 du présent projet de loi peut avoir des conséquences graves sur la formation des résidents si l'on ne s'assure pas, en même temps, que les médecins enseignants soient rémunérés pour leurs activités d'enseignement. Si les médecins enseignants ne reçoivent pas de rémunération pour leur enseignement, ils seront amenés à poser eux-mêmes les actes, au lieu de les laisser poser par les résidents, de façon à pouvoir être rémunérés, et ce au détriment de l'enseignement de la médecine.

Article 4. La corporation est consciente des conséquences des dispositions introduites par cet article 4 du projet de loi qui touchent les libertés fondamentales de toute société démocratique.

La corporation laisse aux fédérations le soin de faire les commentaires appropriés sur la portée de cet article 4. Elle désire attirer l'attention du législateur sur les points suivants, cependant.

La corporation tient à signaler qu'elle doit faire partie des organismes représentatifs des professionnels de la santé consultés pour déterminer les territoires insuffisamment pourvus de professionnels. En plus d'avoir publié, depuis 1972, cinq études sur les effectifs médicaux au Québec, la corporation est tenue bien au fait des carences dans ce domaine par la visite, dans toutes les régions du Québec, des milieux hospitaliers, des CLSC et des cabinets de médecins.

Enfin, la corporation désire rappeler au législateur que les ententes peuvent avoir une influence sur l'orientation et la qualité de l'exercice professionnel; aussi, elle s'inquiète particulièrement des ententes individuelles qui pourraient être conclues. La corporation est également bien consciente que les jeunes médecins et les jeunes spécialistes sont particulièrement visés par cet article 4 du projet de loi no 27 et qu'il faudrait également tenir compte des besoins des hôpitaux d'enseignement dans le choix du personnel médical nouveau.

Articles 19 et 20. Ces articles donnent au conseil des médecins et dentistes d'un établissement et aux chefs de département clinique d'un centre hospitalier accès aux renseignements détenus par la Régie de l'assurance-maladie et concernant les professionnels de la santé de l'établissement ou du département. Un tel accès est inutile et ne ferait qu'augmenter la masse de papier au conseil des médecins et dentistes et dans les départements. Les données de la Régie, étant surtout de nature quantitative et n'étant aucunement validées quant aux diagnostics, n'apporteraient qu'une aide très limitée et très imparfaite à l'évaluation de la qualité de l'acte médical et de l'utilisation des ressources. La corporation croit que le gouvernement devrait plutôt mettre l'accent sur les données qu'une division du ministère des Affaires sociales appelée "Med-Echo" peut fournir aux établissements et aux chefs de département. Ces données sont plus directement reliées à la nature et à la qualité des actes médicaux posés dans les établissements. Durant la période des questions, le Dr Saint-Georges pourrait expliciter grandement cette question.

La corporation, par ailleurs, s'oppose à la transmission au ministre du profil de pratique collectif des professionnels de la santé par département clinique d'établissement ou par genre d'activités exercées dans l'établissement. Elle croit que l'article 65 de la Loi sur l'assurance-maladie accorde suffisamment d'accès au ministre concernant les renseignements détenus par la Régie de l'assurance-maladie. Il s'agit là d'une modification importante à l'esprit qui avait prévalu lors de l'établissement du Régime de l'assurance-maladie et qui assurait la confidentialité des données. Pourquoi une telle modification? Je me souviens très bien qu'en 1970, quand on a discuté de cette loi, on nous avait fait la garantie que tout ce qui était à la régie demeurerait confidentiel et qu'il n'y aurait pas de changement. Malheureusement, les gouvernements, eux, changent et il semble que leur politique change en même temps.

La corporation recommande depuis plusieurs années la création par voie législative d'un centre de données sanitaires qui aurait comme rôle de faciliter une utilisation rationnelle de ces données, tout en leur assurant un aspect confidentiel.

La corporation recommande donc de modifier l'article 19 en conséquence et de rayer l'article 20.

Article 28 (on passe par-dessus l'article 211. On se demande si une telle

augmentation des sanctions - il a trait aux sanctions des médecins qui sont accusés d'actes criminels - est justifiée. Le médecin trouvé coupable d'un tel acte criminel subit en effet une triple pénalité. Il encourt une amende lourde et souvent une peine d'emprisonnement du fait de sa condamnation par le tribunal. Il est automatiquement cité devant le comité de discipline de la corporation professionnelle où il peut écoper d'une autre amende ou d'une radiation, c'est-à-dire du retrait de son droit d'exercice pour une période plus ou moins longue et, enfin, il est exclu du régime d'assurance-maladie pour plusieurs mois. Aucun autre citoyen dans notre société n'est puni trois fois pour la même offense.

Quelques commentaires et recommandations particuliers concernant la loi médicale.

Article 33. Tel que rédigé - je suis à la page 9 - cet article 33 n'est d'aucune utilité. Depuis l'entrée en vigueur du Code des professions et de la nouvelle Loi médicale, les enquêtes de la corporation sont faites par le comité d'inspection professionnelle en vertu de l'article 112 du Code des professions et par le syndic et ses adjoints en vertu de l'article 122 du Code des professions, plutôt qu'en vertu de l'article 18 de la Loi médicale. Ces enquêtes ne présentent pas toujours un intérêt pour l'établissement. Elles peuvent porter sur la conduite ou l'exercice du médecin, en dehors de l'établissement, sans avoir d'effet sur sa conduite ou son exercice dans l'établissement. Nous vous suggérons donc que l'article soit modifié pour se lire comme suit: Sur demande ou de sa propre initiative, le bureau peut communiquer au conseil des médecins et dentistes d'un établissement auquel est rattaché un médecin visé par une enquête les informations obtenues par le comité d'inspection professionnelle et le syndic ou les syndics adjoints et qu'il croit utiles à l'exercice des fonctions du conseil des médecins et dentistes.

Commentaires et recommandations particuliers concernant la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Article 36. Une des dispositions de cet article exclut du personnel clinique des établissements les médecins et les dentistes, lorsqu'il y a un conseil des médecins et dentistes dans l'établissement. En conséquence, les médecins et dentistes ne peuvent plus participer aux recommandations faites par le conseil consultatif du personnel clinique au conseil d'administration sur l'organisation scientifique et technique de l'établissement. La corporation croit donc que les fonctions du conseil des médecins et dentistes devrait comprendre aussi celle de "faire des recommandations au conseil d'administration sur l'organisation scientifique et technique de l'établissement". Nous y reviendrons plus loin. (22 h 45)

Articles 38 et 39. L'article 38 accorde des pouvoirs exclusifs au conseil régional, réduisant l'autonomie des établissements, en liant ceux-ci aux décisions du conseil régional. L'article 39 permet aux conseils régionaux d'établir les politiques d'admission et de transfert des bénéficiaires, de fixer les normes d'utilisation et de distribution des lits. La corporation croit que le conseil régional devrait tout au plus proposer de telles politiques ou de telles normes. L'article 39 reconnaît que le conseil régional est la seule autorité habilitée à autoriser le déplacement d'un bénéficiaire vers un autre établissement, lorsqu'un établissement vit une situation d'engorgement. Il s'agit d'une ingérence dans l'exercice de la médecine, puisque l'évaluation de la condition médicale d'un bénéficiaire et des risques d'un transfert sont du ressort de l'exercice de la médecine.

Les articles 41, 56, 57, 59 et 60 du projet de loi modifient la composition et la durée du mandat des conseils d'administration des conseils régionaux, des centres locaux de services communautaires, des centres hospitaliers, des centres de services sociaux et des centres d'accueil. La corporation désire rappeler au législateur que la représentativité n'est qu'un des éléments qui devraient guider le choix des administrateurs. La corporation croit que l'on devrait augmenter la représentation des médecins aux conseils d'administration des conseils régionaux, des centres communautaires, des centres hospitaliers et des centres d'accueil. Au moins deux médecins comprenant, là où il y a un conseil des médecins et dentistes, le président de ce conseil, devraient siéger aux conseils d'administration de ces organismes. S'il est vrai que le projet de loi, comme on le verra ci-après, exige des médecins un contrôle plus strict sur leurs pairs dans les établissements, il n'augmente pas la participation des médecins au niveau décisionnel sur la gestion des conseils régionaux et des établissements. C'est là, croyons-nous, une lacune de la loi sur les services de santé et les services sociaux que nous avons toujours déplorée.

Article 49. Cet article oblige un centre hospitalier à prévoir, dans son plan d'organisation, la formation de départements cliniques et de services cliniques et le nombre de médecins et dentistes qui peuvent exercer dans ces établissements et services. Certains centres hospitaliers n'ont pas les ressources matérielles et humaines permettant de subdiviser les départements en services cliniques. Il ne faudrait pas que ces centres hospitaliers aient l'impression que la loi les oblige à former des services cliniques. Cet article a aussi pour effet d'obliger un centre hospitalier à fixer le nombre de médecins qui pourront y exercer leur

profession tant dans ce centre que dans chacun de ses départements et services. La corporation croit aussi que cet article 70 devrait prévoir la révision périodique du plan d'organisation au moins tous les trois ans et annuellement, en ce qui concerne le nombre des médecins et dentistes pour pouvoir tenir compte de la qualité et de la productivité des médecins qui y exercent et ainsi assurer le maintien de la qualité des soins.

Article 51. La corporation croit que la rédaction de cet article laisse planer une certaine confusion, qui existe d'ailleurs dans le règlement actuel, sur les fonctions qu'exerce un chef de département clinique, sous l'autorité du conseil des médecins et dentistes, responsable du contrôle des actes médicaux et dentaires, et celles qu'il exerce sous l'autorité du directeur des services professionnels, qui sont des fonctions de gestion. La corporation suggère donc de rédiger l'article 71.1 de la façon suivante -je suis à la page 15 - Le chef de département clinique d'un centre hospitalier surveille la façon dont s'exerce la médecine et l'art dentaire dans son département. Il est responsable de la gestion des ressources de son département; de proposer au besoin, pour son département, des règles de soins au lieu de normes qui peuvent prévoir des sanctions administratives que le conseil des médecins et dentistes doit adopter, conformément à l'article 112.1; de l'observance, par les médecins et dentistes de son département, des règles de soins adoptées par le conseil des médecins et dentistes. Il impose les sanctions administratives qui peuvent y être prévues et, dans ce cas, il doit en aviser le conseil des médecins et dentistes.

En ce qui concerne l'article 71, pour épargner du temps, nous vous référons au mémoire. Et la même chose s'applique à l'article 73, nous vous référons au mémoire écrit.

Article 74. Cet article oblige les conseils des médecins et dentistes à adopter des "normes sur la fourniture des soins requis et sur l'utilisation des ressources disponibles". Pour la profession médicale, les normes équivalent aux données de la science décrites à la littérature médicale et enseignées aux médecins.

Pour éviter toute confusion dans l'utilisation des termes, nous recommandons de remplacer l'expression "normes sur la fourniture des soins" par l'expression "règles de soins". Compte tenu des commentaires formulés aux articles 36, 51 73 et 74, les articles 112 et 112.1 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux devraient se lire comme suit: "112. Le conseil des médecins et dentistes est responsable vis-à-vis du conseil d'administration: a) du contrôle et de l'appréciation des actes médicaux et dentaires posés dans l'établissement: b) du maintien de la compétence des médecins et dentistes exerçant dans l'établissement à un niveau suffisant pour assurer des services de qualité à la population en ce qui a trait aux soins médicaux et dentaires. Il a aussi pour fonction de faire des recommandations au conseil d'administration sur l'organisation scientifique et technique de l'établissement. Le conseil des médecins et dentistes d'un centre hospitalier remplit également les autres fonctions déterminées par règlement." "112.1: Le conseil des médecins et dentistes d'un centre hospitalier doit adopter, s'il y a lieu, pour chaque département clinique, des règles de soins proposées par les chefs de département clinique - avec ou sans modification. Ces règles peuvent prévoir des sanctions administratives pour, notamment, limiter ou suspendre le droit d'un médecin ou dentiste d'utiliser les ressources disponibles dans le centre hospitalier. Une disposition de ces règles qui établit une sanction administrative entre en vigueur sur approbation du conseil d'administration du centre hospitalier."

Article 77. La corporation croit que pour bien indiquer l'autorité, en matière de gestion, du directeur des services professionnels sur les chefs de département clinique on devrait ajouter, au paragraphe a de l'article 118, les termes "diriger, coordonner et surveiller les activités de gestion des chefs des départements cliniques". Nous voulons noter ici que l'Association des directeurs de services professionnels est complètement d'accord avec toute notre position sur le rôle des directeurs de services professionnels, des chefs de département clinique et sur le rôle des conseils des médecins et dentistes.

Article 85. Il faudrait tout simplement remplacer - c'est quand même important - à la cinquième ligne, le mot "engagement" par le mot "nomination", puisque le médecin ou le dentiste n'est pas un employé du centre hospitalier. L'effet de cette modification à la loi est de limiter l'accès des médecins aux centres hospitaliers.

Le surpeuplement d'un centre hospitalier en personnel médical ou dentaire pouvait nuire au maintien de la compétence de ces professionnels, en ne permettant pas un volume d'exercice suffisant pour ce maintien. Une telle modification pourra peut-être contribuer à une meilleure répartition des médecins, tout en évitant, par ailleurs, qu'il se produise des chasses gardées.

Cependant, la corporation s'interroge sur le bien-fondé du principe énoncé à savoir que la candidature d'un médecin dans un centre hospitalier puisse être refusée sur une question de coût seulement. L'utilisation du critère "coût" pourrait amener une diminution de l'accessibilité des soins médicaux et possiblement de la qualité de l'exercice de la médecine pour des raisons d'ordre

strictement économique. De plus, il faudrait prévoir une façon d'intégrer aux activités de l'établissement, les médecins de la région desservie par ce centre hospitalier.

Article 94. Cet article qui traite des soins qui doivent être donnés dans un cas d'urgence relève du jugement du médecin dont on doit respecter la liberté professionnelle. Il doit sans doute s'agir d'une erreur de rédaction. Ce paragraphe devrait plutôt faire allusion à une situation de désastre et se lire comme suit: "q) Déterminé les centres hospitaliers qui doivent offrir et maintenir de façon ininterrompue un service d'urgence, déterminer les mesures qu'un établissement peut ou doit prendre en cas de désastre et préciser ce que peut être un cas de désastre", Évidemment, comme le ministre le dit, si on désire introduire la notion de viol, d'intoxication dans les cas d'urgence, je pense que l'article devrait être écrit différemment.

Enfin, la corporation croit qu'elle devrait être consultée avant que l'on procède à l'élaboration des règlements en vertu des paragraphes f, i, j et k de l'article 173 qui touchent de près les fonctions qu'elle exerce.

Commentaires et recommandations particuliers concernant la Loi sur la protection de la santé publique.

Article 100. Cet article accorde au ministre des Affaires sociales un contrôle complet du transport ambulancier au Québec. Ce n'est peut-être pas l'étatisation mais presque.

Compte tenu que le transport en ambulance peut avoir un effet sur les soins médicaux donnés à un patient et que la corporation a le devoir de surveiller la qualité de l'exercice de la médecine au Québec, la corporation croit que le paragraphe d des alinéas ajoutés devrait se lire comme suit: d établir des normes de transport en ambulance entre établissements, après consultation de la Corporation professionnelle des médecins du Québec.

Je passe sur l'article 105 puisqu'il s'agit manifestement d'une erreur de rédaction.

Article 106. La corporation recommande le retrait de l'article 40.3 proposé par cet article 106. L'article 40.3 est dangereux parce qu'il impose une sectorisation trop rigoureuse qui risque de nuire à la population dans certaines situations d'urgence. Il empêcherait, par exemple, un ambulancier qui n'est pas dans sa zone de prendre un malade en état d'urgence.

Article 107. Nous vous référons à notre mémoire pour épargner du temps.

Conclusion. Le projet de loi no 27 modifie considérablement les relations de l'État avec les syndicats professionnels et permet au ministre de les ignorer dans certaines circonstances. Le gouvernement maintiendra-t-il cette attitude au-delà des syndicats professionnels ou la réserve-t-il aux seuls professionnels de la santé soumis à la loi sur l'assurance-maladie?

Le projet de loi accroît les pouvoirs des conseils de médecins et dentistes dans les établissements mais surtout au niveau du contrôle de l'exercice professionnel plutôt qu'au niveau de la planification et de la prise de décision. La corporation saisit l'occasion des modifications proposées pour suggérer une clarification des fonctions du conseil des médecins et dentistes, du directeur des services professionnels et des chefs de département clinique. Le projet de loi supprime, à toutes fins utiles, l'autonomie des établissements qui deviennent des succursales des superétablissements que sont les conseils régionaux. Enfin, le projet de loi accorde au ministre le contrôle absolu du transport ambulancier.

La résultante de tous ces vecteurs représente une étatisation de plus en plus marquée des services de santé. Une telle centralisation des pouvoirs risque d'entraîner une augmentation d'une bureaucratie déjà excessive, s'appropriant une partie toujours croissante du budget.

La Corporation professionnelle des médecins du Québec, compte tenu de son rôle de protection du public, ne peut rester indifférente à ce contrôle étatique accentué, à la suite duquel les professionnels de la santé pourraient se sentir de moins en moins motivés. Cette démotivation pourrait avoir des répercussions sur la dispensation des soins.

Nous espérons que le gouvernement tiendra compte des suggestions qui lui sont faites pour améliorer les lois qui régissent l'organisation et la dispensation des soins de santé au Québec. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Roy.

Alors, des questions, M. le ministre?

M. Johnson (Anjou): Je me concentrerai sur les pages 3 à 22, c'est-à-dire que je ne tiendrai pas compte des deux premières pages ni de la dernière dans mes questions.

Il y a la question de l'information. Si je comprends bien - je voudrais juste qu'on me corrige - on suggère qu'on ait recours plutôt à Med-Écho pour le motif que Med-Écho est un instrument beaucoup plus adéquat, ce qui permet peut-être d'expliquer pourquoi on était intéressé au profil initialement et c'est pour les mêmes raisons pour lesquelles on serait intéressé à Med-Écho. Il ne s'agit pas d'identifier la pratique individuelle de qui que ce soit, les balises dans la loi sont là pour y pourvoir. Il s'agit simplement de donner au ministère, qui a une vocation de planification en matière de santé publique et qui a la vocation de déterminer le développement pour le bien-

être des citoyens, les instruments pour évaluer ce qui se fait comme niveau d'activités à certains endroits. Dans ce sens, je sais que la corporation, notamment les services du directeur Saint-Georges, si je ne me trompe pas, travaille beaucoup avec Med-Écho.

Quant au rapport d'enquête de la corporation, si je comprends bien, c'est une affaire de formulation et on considérerait plutôt que, lorsque les informations sont pertinentes à l'exercice ou à la conduite du médecin dans l'établissement, il y ait une telle transmission à demande. C'est bien cela? (23 heures)

M. Saint-Georges (Pierre): J'ai tout simplement une fausse impression, c'est que les enquêtes actuelles faites par la corporation ne le sont presque jamais; depuis deux ans, je pense qu'il y a une enquête en vertu des articles 16 et 18. Elles sont toujours faites, en vertu de l'article 122 du Code des professions, par le comité d'inspection professionnelle ou encore par le syndic.

Le fait d'introduire la notion des articles 16 ou 18 ne serait donc d'aucune utilité alors qu'on croit qu'il serait utile d'avoir les informations pertinentes provenant soit du comité d'inspection professionnelle ou du syndic.

M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, vous trouviez que c'était trop restrictif à l'article 16, ça permet un élargissement de la circulation de cette information pour les fins qui sont recherchées.

M. Saint-Georges: Absolument.

M. Johnson (Anjou): D'accord. À l'égard... Pardon, oui, Dr. Lapierre.

M. Lapierre (André): Je voudrais ajouter ici que nous ne voulons transmettre que les informations pertinentes et non pas les rapports d'enquête au complet, tel que l'article semblait vouloir le signifier.

M. Johnson (Anjou): D'accord. Est-ce que vous pourriez juste donner un exemple, évidemment sans nom et sans ce qui nous permettrait d'identifier quelqu'un, mais donner un exemple du contenu d'un tel rapport, qui pourrait d'une part intéresser le directeur du département, et d'autres types d'informations qui, elles, ne relèveraient, disons, que de la dimension disciplinaire dévolue en vertu des lois à la corporation.

M. St-Georges: Bon! On peut donner un exemple simple, par exemple, d'un rapport de l'inspection professionnelle d'un centre hospitalier où on constate que la pratique d'un chirurgien sur dix chirurgiens est aberrante par rapport aux autres. Actuellement, la situation est telle que l'on ne peut informer le Conseil des médecins et dentistes de l'état d'aberration de ce chirurgien par rapport aux autres chirurgiens, compte tenu des dispositions du Code des professions, qui nous interdit de divulguer les informations confidentielles que l'on obtient par suite des enquêtes.

On fait donc des recommandations au Conseil des médecins et dentistes. Actuellement, on utilise des voies détournées pour tâcher de le mettre sur la piste en lui signalant des numéros de dossier à étudier, ce qui fait qu'il finit par constater qu'il s'agit d'un médecin plutôt que d'un autre. Je pense qu'il serait beaucoup plus simple d'indiquer au Conseil des médecins et dentistes que tel chirurgien de tel centre hospitalier a des problèmes particuliers dont il devrait se préoccuper de la même façon qu'un chef de département.

M. Johnson (Anjou): Dans ce cadre, donnez-moi donc un exemple de ce que seraient des renseignements qui ne sont pas pertinents, en termes de transmission, simplement pour éclairer les membres de la commission; ce sont des sujets finalement assez complexes.

M. Saint-Georges: Je pense qu'on peut donner une information bien générale, à savoir que, parmi toutes les enquêtes qu'on fait, beaucoup sont faites à l'extérieur des centres hospitaliers.

M. Johnson (Anjou): D'accord.

M. Saint-Georges: À tel exemple, les enquêtes qui sont faites dans les cabinets de consultation. On visite systématiquement les cabinets de consultation de nos membres et il y a beaucoup de constatations qui sont faites dans ces cabinets, qui ne sont pas du tout pertinentes à l'activité du médecin dans le centre hospitalier lui-même.

M. Johnson (Anjou): À l'égard des plans d'organisation, si je comprends bien la phrase générale qui est dans le projet, vous la retenez comme un élément qui est souhaitable avec les réserves que vous y apportez cependant, au niveau de sa révision sur une base régulière. C'est ça?

M. St-Georges: Absolument.

M. Johnson (Anjou): Finalement, je vous poserai un fait. Probablement que ce qui est central et ce qui fait l'objet sans doute de la plus grande expertise de la corporation à cet égard et de son intérêt, c'est ce qui a trait aux normes où on parle de règles de soins, je trouve que c'est intéressant. On dirait que le mot "norme" a toujours quelque

chose d'un peu négatif encore une fois. Probablement que vous seriez à même d'élaborer un peu plus la notion de règles de soins que je trouve intéressante, sans présumer encore jusqu'où on fouillera ça, d'une part.

Deuxièmement, si vous pouviez élaborer votre idée aussi sur ce qui, finalement, après avoir entendu le mémoire de l'Association des conseils des médecins et dentistes, m'apparaît être une divergence de fond, évidemment, entre les CMD d'une part et la corporation, d'autre part, sur le rôle ou l'extension du rôle des CMD et le rattachement des chefs de département au DSP par opposition à la structure du CMD. Est-ce que je pourrais vous entendre sur ces deux questions, Dr Saint-Georges.

M. St-Georges: Concernant les normes de soins, je pense qu'il faut connaître l'historique de toutes les discussions qui ont entouré la promulgation des diverses lois du domaine de la santé depuis 1970. Je pense que vous avez été à même de constater aujourd'hui la sensibilité de la profession médicale à l'utilisation de ce terme. Il faut dire, par ailleurs, et je pense que vous en êtes bien conscient vous-même, que les conseils de médecins et dentistes, sans avoir ce pouvoir nommément inscrit dans la loi, établissaient toujours ou établissaient fréquemment des règles de soins lorsque des problèmes survenaient, problèmes qu'ils identifiaient eux-mêmes par l'évaluation systématique de l'exercice qu'ils font, ou problèmes qui leur étaient signalés par suite des visites de la corporation.

C'est donc dire que demander au Conseil des médecins et dentistes d'établir systématiquement, pour chaque département clinique, d'abord, des règles de soins, je pense que c'est absolument inutile; cela représenterait un travail très laborieux qui ne représenterait pas effectivement ou qui ne serait pas à la hauteur des problèmes existants. Concernant la possibilité, d'autre part, que ces règles de soins soient faites par le Conseil des médecins et dentistes, je pense que cela représente tout simplement la tradition. C'est toujours ce qui s'est fait. D'autre part, l'expertise des chefs de département est sûrement la première expertise qui doit être mise à contribution dans les centres hospitaliers. Je pense qu'un chef de département est fort probablement la personne la plus compétente pour, au moins, établir ces règles de soins.

Comme, par ailleurs, le Conseil des médecins et dentistes a l'avantage de rassembler l'ensemble des médecins et d'établir un certain consensus, l'approbation de ces règles de soins par le Conseil des médecins et dentistes est sûrement un élément intéressant pour motiver les gens à participer à ce genre de travail. Quant à la position des chefs de département vis-à-vis du Conseil des médecins et dentistes, pour faire allusion à la deuxième partie de votre question, M. le ministre, le Conseil des médecins et dentistes depuis la promulgation de la loi des hôpitaux dans la province de Québec et même bien avant, dans le temps de l'existence des bureaux médicaux sans qu'aucune loi ne régisse à ce moment les bureaux médicaux, les conseils de médecins et dentistes ont toujours été considérés à raison, pour autant que je suis concerné, comme des organismes conseillers au conseil d'administration, principalement en regard de la qualité de l'exercice. C'est la position maintenue dans toutes les provinces du Canada et c'est la position maintenue dans tous les États américains et particulièrement par la Joint Commission on Accreditation of Hospitals, qui est le pendant du Conseil canadien d'accréditation des hôpitaux. Donc, étant un organisme conseiller, le Conseil des médecins et dentistes peut difficilement être considéré comme un organisme de gestion.

C'est un organisme qui fait des recommandations concernant l'établissement des politiques et dont le mandat principal est d'évaluer la qualité de l'exercice. La responsabilité de gestion qui est tout à fait différente de la responsabilité du contrôle de l'exercice - et je pense que c'est une distinction essentielle à faire - la responsabilité de gestion est une responsabilité que le directeur général détient de façon générale dans les centres hospitaliers que, d'autre part, le DSP détiendrait par le fait des modifications qu'on apporterait à l'article qui traite de ces fonctions. Ce serait de façon ultime détenu par les chefs de département qui verraient à la gestion, tant des ressources matérielles qu'humaines, prenant le terme de gestion dans le sens qu'on retrouve dans tous les dictionnaires, de direction, d'organisation, de coordination et de contrôle, c'est-à-dire dans l'administration d'un département et dans son fonctionnement.

M. Johnson (Anjou): Une autre question, si on me permet.

Mme Lavoie-Roux: Si vous précisez...

Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je veux bien comprendre. Quel serait pour vous le canal de responsabilité du chef de département à l'administration de l'hôpital? Ce serait par le truchement du directeur des services professionnels du DSP. C'est bien ce que vous avez dit? En tout cas, c'est ce que j'ai compris.

M. Saint-Georges: En autant qu'il

s'agisse des responsabilités de gestion du chef de département évidemment, le canal de responsabilités est celui du directeur du service professionnel, du directeur général et du conseil d'administration; en autant qu'il s'agisse d'exercice professionnel, je pense qu'on devra toujours vivre cette bicéphalie, je ne connais pas d'auteur, personnellement, qui ait proposé d'autres formes de modèles. On a tenté, aux États-Unis, d'appeler le directeur des services professionnels, le "chief of staff", on a tenté toutes sortes d'expériences depuis que moi, je suis dans la direction médicale, depuis quand même quelque 20 ans; on a tenté toutes sortes d'expériences et on est toujours revenu à cette forme de "medical staff" aux États-Unis ou de bureau médical antérieurement ici, ou de Conseil des médecins et dentistes ultérieurement. Ce sont eux qui se préoccupent de l'exercice professionnel qui est, je pense, un niveau différent de la responsabilité de gestion d'un département. Si l'on veut, effectivement, que les médecins continuent à évaluer leur exercice comme ils le font actuellement - je pense qu'il y a des efforts importants qui se font depuis la création des bureaux médicaux dans la province de Québec, c'est-à-dire depuis plus de vingt ans - on doit garder, heureusement, cette bicéphalie que certains trouvent peut-être malheureuse.

M. Johnson (Anjou): J'aurais une autre question qui, je le sais, est extrêmement délicate à l'intérieur de la profession, non seulement parce qu'elle traduit deux groupes qui, historiquement, ont évolué de façon différente, mais parce que ces groupes se retrouvent dans deux organisations différentes au niveau de la défense de leurs intérêts: les spécialistes et les généralistes.

C'est la question sous le vocable général du rapport entre spécialistes et omnis, chefs de département et domaines d'activité pouvant relever d'une spécialité. Très concrètement, exemple: la pédiatrie de première ligne dans un centre hospitalier. On en connaît quelques cas qui font l'objet, toujours à ma connaissance, de discussions dans certains hôpitaux. J'aimerais peut-être vous entendre un peu là-dessus. On sait que c'est un domaine un peu difficile, un peu glissant mais où, finalement, la corporation, compte tenu de la distance normale que la corporation prend à l'égard de ces questions, compte tenu de son rôle, est peut-être à même de nous éclairer un peu. Je sais que cela pose une légère difficulté; je ne vous demande pas de nous donner la somme théologique en cette matière mais, au moins, d'évoquer les problèmes qu'on a devant nous.

M. Saint-Georges: Comme vous le dites, M. le ministre, c'est sûrement un sujet glissant, mais je pense qu'il faut accepter de pouvoir glisser occasionnellement, quand on est dans des positions comme celles où nous sommes. Les principes fondamentaux qui doivent régir l'organisation d'un département à l'intérieur d'un centre hospitalier sont, avant tout, des principes qui reposent sur la qualité de l'exercice professionnel que les gens doivent assurer à la population.

Les omnipraticiens, de façon générale -je pense que tout le monde en convient -sont des gens qui sont formés pour fournir des soins de première ligne. La compétence d'un certain nombre d'entre eux les amène à fournir des soins de deuxième ligne et même des soins de troisième ligne. La compétence des médecins spécialistes les amène, de façon générale, davantage à fournir des soins d'ordre secondaire ou de deuxième ligne et des soins de troisième ligne. On sait que les soins hospitaliers sont plutôt des soins de deuxième ligne que des soins de première ligne. L'intégration des omnipraticiens dans les centres hospitaliers, lorsqu'ils fournissent des soins de deuxième ligne, à mon avis, devrait se faire au niveau des départements cliniques existants dans lesquels exercent des médecins spécialistes; autrement, on devrait consacrer le fait qu'il existe deux types de médecine, qu'il existe une médecine faite par les omnipraticiens, qui pourrait être qualifiée de deuxième ordre, ce qui n'est pas le cas, et une médecine faite par les médecins spécialistes, qui pourrait être qualifiée de premier ordre.

Quand un omnipraticien a acquis la compétence pour traiter des pathologies aussi importantes que celles qui nécessitent le séjour d'une personne dans une unité coronarienne, je pense qu'il doit être intégré à l'équipe de soins coronarienne, donc, aux cardiologues. Si l'omnipraticien traite des gens à l'intérieur d'une unité de soins intensifs, avec des internistes ou d'autres types de diverses spécialités, je pense qu'il doit être intégré à cette équipe, ce qui fait qu'à l'intérieur d'un centre hospitalier, les membres d'un département devraient être ceux qui exercent à l'intérieur du département.

Il y a probablement deux secteurs d'activité auxquels les omnipraticiens sont plus intégrés que d'autres types de médecins, ce sont les soins qui sont donnés dans les cliniques d'urgence et, dans certains centres hospitaliers, les soins qui sont donnés dans les cliniques externes, dans les cliniques où les soins courants sont donnés à l'intérieur des cliniques externes. Je pense qu'à l'égard de ces deux secteurs d'activité, on pourrait croire à l'organisation d'un département clinique de médecine générale parce que, effectivement, il regroupe probablement presque exclusivement des omnipraticiens.

Quant aux autres départements dans lesquels ces derniers exercent, je pense qu'ils devraient être intégrés au groupe pour qu'on

ne se retrouve pas dans un centre hospitalier avec un département d'obstétrique qui regroupe des obstétriciens et un département de médecine générale qui regrouperait des omnipraticiens faisant de l'obstétrique et qui ne seraient pas intégrés avec les omnipraticiens. (23 h 15)

M. Roy: Tout en n'empêchant pas un hôpital d'avoir un département administratif de médecine générale qui regroupe les omnipraticiens pratiquant dans tout l'hôpital, pour pouvoir les lier sur le plan administratif.

M. Saint-Georges: Si vous me permettez, quand on parle du regroupement des omnipraticiens sur le plan administratif, on pense particulièrement, entre autres, aux sessions d'éducation médicale continue qui doivent être organisées parfois d'une façon différente pour les omnipraticiens que pour les spécialistes, le regroupement des omnipraticiens à l'intérieur d'un département administratif peut avoir, dans ce sens, des répercussions intéressantes.

M. Johnson (Anjou): J'ai une autre question relative à cela et une dernière immédiatement après. Est-ce que, pour vous - tout en comprenant à la fois la complexité et le côté pelure de banane de ce genre de sujet - c'est une approche qui doit souffrir des exceptions, est-ce concevable que cela souffre des exceptions comme approche, c'est-à-dire celle qui viserait à intégrer par exemple l'omnipraticien qui a acquis par sa pratique, je ne dirais pas une expertise, parce que ce n'est pas le mot, mais une présence dans un domaine de spécialité où service spécialisé pour les fins de cette activité? Est-ce que, pour vous, cela peut souffrir comme approche des exceptions, compte tenu de ce qui se passe dans les différents établissements, si vous arrivez à un hôpital dans une région? En d'autres termes, est-ce un modèle qui, une fois adopté et que ces conséquences administratives sont traduites par les règles des CMD - cela n'a pas grand-chose à voir avec la loi, mais cela peut nous éclairer sur bien des choses - est-ce que c'est une chose qui est un modèle et qui devrait être d'espèce d'application universelle ou qui pourrait souffrir de telles exceptions qu'on rencontrerait le modèle tout à fait contraire dans un hôpital donné, dans une région donnée, par exemple?

Le Président (M. Bordeleau): M. Saint-Georges.

M. Saint-Georges: Remarquez, je ne suis peut-être pas certain de saisir la subtilité de votre question, je pense que le modèle, comme tout modèle, pourrait sûrement subir des exceptions, je ne connais pas de modèle qui ne souffre pas d'exception. Cela serait une réponse facile à vous faire, mais c'est probablement...

M. Johnson (Anjou): Disons gros hôpitaux, petit hôpital, si on peut s'exprimer comme cela.

M. Saint-Georges: ...pas celle que vous attendiez...

Gros hôpital, petit hôpital, remarquez que ce n'est probablement pas justement dans les gros hôpitaux qu'il existe des problèmes de cet ordre, c'est probablement davantage dans les petits hôpitaux. Juste à titre d'exemple, je comprendrais mal que, dans un plus petit hôpital où exerce un obstétricien-gynécologue par exemple, celui-ci se retrouve seul dans son département d'obstétrique-gynécologie alors que, dans un département de médecine générale, on retrouve 15 omnipraticiens qui font de l'obstétrique et qui ne travaillent pas conjointement avec l'obstétricien-gynécologue dans le même département, ce qui fait qu'on aurait des activités départementales qui risqueraient d'être assez peu cohérentes. Je pense que, plutôt que de proposer que le modèle souffre des exceptions, on devrait proposer que le modèle soit adopté, quitte à bien savoir qui souffrira éventuellement des exceptions.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Lapierre, je pense qu'il y aurait quelque chose à ajouter!

M. Lapierre: Je me demande si on doit ici parler d'exceptions, parce qu'en fait, quand on accorde des privilèges à un médecin dans un hôpital, ce n'est pas parce qu'il est omnipraticien ou parce qu'il est spécialiste. Le certificat de spécialité est un des facteurs qui fait qu'on va accorder peut-être plus de privilèges. Ce n'est qu'un des éléments qui permettent d'évaluer la compétence d'un médecin.

La détermination des privilèges pour chacun des médecins dans l'hôpital se fait en fonction de sa compétence. Un omnipraticien qui démontre de la compétence acquise dans un domaine particulier pourrait avoir les mêmes privilèges qu'un spécialiste. Le certificat n'est qu'un des éléments et c'est la compétence qui est la base de jugement des qualifications, etc.

M. Johnson (Anjou): Cela ira, je pense, pour l'autre.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier la

corporation pour son mémoire, qui est très intéressant.

Je voudrais revenir sur un problème qui a été soulevé par plusieurs organismes; enfin, il n'est peut-être pas un très gros problème mais, je pense qu'il peut vous intéresser, c'est la possibilité, telle que prévue dans la loi, pour le chef de département clinique, d'imposer des sanctions à un de ses confrères ou une de ses consoeurs qui fonctionne dans la même unité.

Plusieurs ont soulevé la question de problèmes de relation que ceci pouvait créer, peu importe le nombre de médecins, à plus forte raison s'il n'y en a pas beaucoup. Vous autres, vous semblez conserver au chef de département clinique ce pouvoir de sanction à l'égard d'un médecin dans cette unité clinique. Est-ce que le problème soulevé par les autres ne vous apparaît pas comme un problème réel?

Le Président (M. Bordeleau): M. Saint-Georges.

M. Saint-Georges: Écoutez, je pense qu'on peut peut-être faire les commentaires suivants. D'abord, il s'agit de sanctions, tel qu'on a compris le texte de loi, imposées administrativement, qui sont donc des sanctions différentes des sanctions déjà prévues dans le règlement de la loi par rapport à des erreurs, à des négligences ou de l'inconduite, tel que le règlement de la loi l'indique.

Il s'agit donc de sanctions imposées administrativement. Je pense que c'est la première distinction qu'il faut faire. Il s'agit en plus de sanctions dont les dispositions ne sont mises en application qu'après approbation par le conseil d'administration. Donc, il s'agit de sanctions dont les gens ont convenu entre eux. Et je donne un exemple, qui est un exemple vécu presque chaque jour dans les centres hospitaliers. C'est l'exemple du médecin qui, malheureusement, ne complète pas à temps ses dossiers médicaux. Les conseils de médecins et dentistes, aujourd'hui, et de façon illégale, se dotent de règlements par lesquels ils suspendent eux-mêmes les médecins de leur privilège d'admission, entre autres, pour une semaine, quinze jours, trois semaines, selon la nature des offenses, du fait qu'un médecin n'ait pas complété ses dossiers. Et c'est admis, de façon générale, par l'ensemble des médecins, bien que le conseil des médecins n'ait pas le pouvoir de faire ce genre de règlement-là, compte tenu des dispositions du règlement et des dispositions de la loi. Et nous, nous pensons que souvent des problèmes de cet ordre-là ne se règlent pas justement à cause de l'ambiguïté du règlement et à cause de la procédure prévue de sanction dans le règlement actuel, qui demande que le médecin soit entendu, qu'on établisse une preuve hors de tout doute de la faute qu'il a commise, alors que l'ensemble des médecins convient que si, pour une raison ou pour une autre, le nombre de dossiers ou les dossiers incomplets dépassent quinze jours, par exemple, automatiquement, il y a une sanction qui s'impose au gens. Il y a même des conseils des médecins et dentistes qui s'imposent des amendes. Et les gens paient les amendes sans même suivre le processus prévu dans le règlement actuel. C'est effectivement un des domaines pour lesquels les conseils ont eux-mêmes inventé ce mode d'application administratif de sanction et, pour qu'il soit efficace, nous pensons que les chefs de département qui sont les gens les plus près de l'action et qui, effectivement, comme je le disais tantôt, ont des responsabilités de gestion, ce sont des gestionnaires, ce sont probablement eux qui devraient les imposer.

On indique par ailleurs, dans nos commentaires, que le conseil des médecins et dentistes devrait en être avisé pour que si, éventuellement, il y a répétition, il y a inconduite, abus de la part de l'individu, le conseil des médecins et dentistes puisse prendre d'autres dispositions que ces sanctions administratives qui pourraient être prévues. On ne croit pas qu'interviennent tellement de conflits de personnalité et il y a une remarque qu'on peut faire à ce sujet-là. C'est que, lorsqu'on parle d'un département clinique, on peut avoir bien des notions d'un département clinique. Mais je conçois très mal un département clinique qui soit constitué de deux personnes, comme on l'a dit. Ce n'est pas un département clinique, c'est tout au plus un service clinique. Et peut-être un mini-service clinique.

Mme Lavoie-Roux: Je voulais vous demander... Vous faites allusion, en début de mémoire, aux études que vous avez faites sur les effectifs médicaux, j'imagine, en régions éloignées et probablement aussi dans l'ensemble du Québec. Est-ce que les plus récentes peuvent être mises à notre disposition, enfin, est-ce que ce serait possible? Et vous avez peu parlé, ou du moins c'est peut-être parce qu'on l'a quand même lu d'une façon assez brève, du problème des médecins en régions éloignées. Moi, je voudrais avoir votre point de vue sur les mécanismes qui sont prévus dans la loi telle quelle pour - mise à part la définition géographique; ça semble être un prérequis, savoir où on en a besoin - corriger la situation. À votre point de vue aussi, quelle est l'étendue du problème?

M. Roy: L'étude qui a été publiée la semaine dernière a été envoyée au ministre des Affaires sociales. Je ne sais pas si le courrier de sa majesté la lui a déjà fait parvenir; de toute façon j'en ai une ici que

je vais laisser et nous en avons d'autres que nous vous enverrons par courrier à notre retour à Montréal. Ces études comprennent une foule de tableaux et des statistiques extrêmement intéressantes, dont d'ailleurs se sert abondamment le ministère des Affaires sociales pour compléter ses programmes de planification. Nous espérons que nous ne ferons pas d'erreur d'interprétation. De toute façon, nous sommes par ailleurs la seule corporation médicale, non seulement au Canada mais au monde, à faire des études semblables.

Pour les régions éloignées, c'est évidemment un des buts importants visés dans cette loi que de régler le problème des régions éloignées dont tout le monde est conscient et que tout le monde veut régler. C'est un problème important mais ce n'est pas un problème insoluble s'il y a une volonté politique de le régler avec les partenaires. Nous pensons qu'il y a déjà dans la loi les mécanismes voulus pour le régler par le biais des négociations.

Nos études démontrent, quand on fait des extrapolations, que le nombre de médecins nécessaires pour régler le problème des régions éloignées n'est pas extraordinaire. Si, par exemple, on établit une norme, une proportion, un ratio d'un omnipraticien par 1000 habitants, ce qui est énorme - à ce moment-là, ils se pilent presque sur les pieds mais supposons qu'on prend cette hypothèse excessive en tenant compte des distances dans les régions éloignées - les calculs les plus récents montrent que ça prendrait 147 omnipraticiens pour régler les problèmes de toutes les régions éloignées du Québec et au maximum 100 spécialistes. Encore là, je ne pense pas qu'on ait toutes les ressources pour les faire vivre à cause de l'équipement qu'on n'aurait pas d'une façon suffisante.

Ce n'est donc pas un problème énorme si on tient compte du fait qu'à chaque année au Québec nous octroyons des permis à 650 à 670 nouveaux médecins. Compte tenu de ceux qui quittent, de ceux qui décèdent, de ceux qui abandonnent, nous avons, d'année en année, un gain net d'environ 425 à 450 médecins au Québec. Donc, le problème n'est absolument pas catastrophique, il n'est pas énorme; c'est un problème qu'il faut régler en s'asseyant à la table entre partenaires intéressés et en discutant des méthodes pour le régler.

Je pense que les méthodes incitatives peuvent le régler facilement. Vous n'avez qu'à penser à la Baie-James, par exemple, qui n'a jamais manqué de médecins, aux compagnies minières - j'ai travaillé pour une compagnie minière à Schefferville, comme je l'ai dit tout à l'heure - qui n'ont jamais manqué de médecins, et cela a commencé en 1954. C'est tout simplement parce qu'on a donné des conditions raisonnables de pratique à quelqu'un qui allait dans ces régions. C'est comme pour un camionneur qui va à la Baie-James; il s'attend de gagner un peu plus cher qu'à Montréal parce qu'il va travailler plus souvent, plus longtemps.

Il y a un problème pécuniaire qui peut facilement se négocier et ça a été déjà réglé dans certaines provinces par ce biais. Il y a des conditions d'implantation de ces médecins pour les intéresser aussi à y demeurer en ajoutant des modalités pour leur permettre l'enseignement continu. Un des problèmes de ces médecins, c'est qu'ils sont coupés un peu de leurs confrères spécialistes des grandes régions. Ils sont trop occupés, ils manquent de temps pour se perfectionner et, évidemment, lorsqu'on manque de perfectionnement, en quelques années on perd énormément de sa compétence. Ensuite, il s'agit d'assurer un modèle de transport approprié quelques fois par année vers les grandes villes, s'assurer peut-être de la venue dans ces régions éloignées d'équipes de médecins spécialistes qui viendraient apporter les soins surspécialisés et ultraspécialisés, leur donner quand même une équipe de spécialités de base, anesthésie, par exemple, chirurgie générale, obstétrique et gynécologie, sur lesquelles ils pourraient compter et un certain nombre de médecins omnipraticiens pour éviter qu'ils soient surchargés de travail, qu'ils aient à faire 24 heures par jour, 7 jours par semaine, en tenant compte de ce genre de modalités incitatrices, et en ajoutant un nombre raisonnable de médecins. On dit 200, 225. En étant extrêmement généreux, on règle le problème des régions éloignées d'une façon facile. (23 h 30)

Nous pensons que la règle coercitive, qui est tentante, ne résoudra pas le problème; ce sera le jeu de la chaise musicale, les médecins iront faire leur devoir civil. Remarquez bien que je ne suis pas nécessairement contre le fait d'aller dans des régions éloignées, l'ayant fait moi-même et en ayant retiré un grand bien, mais je pense que ça ne serait pas logique de forcer tous les médecins qui ne sont pas encore entrés en médecine, à l'heure actuelle, à accepter cette condition d'aller dans des régions éloignées. Ils n'ont peut-être pas la personnalité pour aller dans des régions éloignées parce que ce n'est pas facile de travailler dans ce genre de régions, on n'a pas toujours la possibilité d'avoir des spécialistes à notre disposition pour consultation dès qu'on est mal pris.

Je pense que, par le biais des mécanismes volontaires, on pourrait régler le problème en tenant compte qu'il ne faudrait pas pénaliser les jeunes médecins, puisque ce sont les jeunes médecins qui sont visés dans ce projet de loi, pas les médecins déjà établis. Il faudrait leur montrer les avantages des régions éloignées, parce qu'il y a des

avantages à y aller, en leur faisant connaître les régions éloignées pendant qu'ils sont aux études médicales et en spécialité de même qu'aux études prémédicales, en leur faisant voir les avantages qu'ils y trouvent de façon à les inciter à y aller et à y rester autant que possible, sans pour autant les condamner à y rester toute leur vie. Il y en a qui vont vouloir y rester, il y en a qui aiment cela, il y en a qui viennent de Sept-Îles ou d'ailleurs qui sont venus étudier à Montréal et qui ont hâte de retourner chez eux.

Je pense qu'il va falloir avoir un peu d'imagination et de bonne volonté, de part et d'autre, pour régler ce problème important, mais qui est facilement soluble compte tenu quand même du grand nombre de médecins qu'on a au Québec, compte tenu que ces régions en général sont assez bien équipées en établissements de santé. Il faudrait peut-être tout simplement favoriser l'installation des médecins en mettant à leur disposition des cliniques médicales dans certains endroits, du personnel de soutien, du matériel de transport facile, des habitations à loyer convenable pour qu'ils n'aient pas à construire leur maison ou à acheter une maison.

Avec ce genre de mesures on peut régler facilement le problème, compte tenu de la population de ces régions qui est faible, compte tenu du besoin de médecins qui est relativement faible. On peut régler facilement le problème des régions éloignées en tenant compte aussi d'une chose; c'est qu'actuellement ce ne sont pas les omnipraticiens dont on manque le plus dans les régions éloignées, ce sont les spécialistes. Si on réussit à attirer assez de spécialistes pour donner des services ultra ou spécialisés, on va faciliter la venue d'omnipraticiens et on va surtout faciliter leur intention parce qu'une des raisons pour lesquelles les omnipraticiens partent, c'est qu'ils sont surchargés, ils sont obligés de faire et l'omnipratique et la médecine spécialisée et ils n'ont pas le soutien, l'appui nécessaire pour faire ce genre de médecine. Je pense qu'avec de la bonne volonté on peut régler le problème.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mme la députée de L'Acadie.

J'invite d'abord le député de Gouin, ensuite la députée de Jacques-Cartier et le député de Nelligan à prendre la parole. Alors, M. le député de Gouin.

M. Rochefort: M. le Président, je pars et je reviendrai à la fin.

Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Dr Roy, vous avez soulevé deux conséquences de la loi qui me semblent avoir une grande importance sur la qualité des services médicaux à l'avenir. D'abord, il y a l'impact sur notre capacité de retenir et d'attirer de jeunes spécialistes du Québec et d'ailleurs; deuxièmement, l'impact sur la qualité de l'enseignement des médecins. Vous avez discuté l'implication de la loi, aux pages 3 et 4, sur les activités d'enseignement et j'aimerais que vous expliquiez un peu vos commentaires ici.

M. Roy: Évidemment, le premier commentaire, c'est surtout sur l'accessibilité des services médicaux qui pourraient être diminués selon l'application qu'on peut faire de la loi, surtout en ce qui concerne les plans d'organisation, le contingentement des médecins, parce qu'il est bien clair qu'il y a une volonté de contingenter les médecins par établissement hospitalier dans toutes les régions. Ce qui nous inquiète et on l'a dit, c'est qu'on le fait souvent pour des raisons de coûts. On va dire: On ne peut pas prendre plus d'un ou deux chirurgiens à Rouyn-Noranda, par exemple, parce qu'en en prenant trois, cela va coûter plus cher, parce qu'il va se faire plus d'opérations. En en prenant seulement deux, on va pouvoir se permettre de fermer des lits. On ne prendra peut-être pas de cardiologue, parce que cela entraîne des équipements additionnels. C'est cette question d'accessibilité des services dont il faut tenir compte pour donner aux gens non seulement dans les régions éloignées mais à Montréal également l'accès aux soins auxquels ils ont droit et qui sont garantis par la loi. Il faut aussi pour assurer la qualité, ce qui n'est pas relié directement à la loi mais qui peut être une des conséquences des restrictions budgétaires énormes que l'on vit à l'heure actuelle dans le système par le biais de toutes sortes de contraintes bureaucratiques qui font que le personnel diminuant à cause des budgets insuffisants, les listes d'attente peuvent s'allonger.

Il y a du matériel qui peut être déficient dans les hôpitaux. On parle déjà d'hôpitaux où les lits ne sont pas changés aussi souvent qu'ils devraient l'être, où on manque de matériel comme de couvertures et de certaines choses, parce que la buanderie ne suffit pas. Cela peut amener la démotivation des médecins dans le système, démotivation due à la bureaucratisation excessive, au manque de communications, aux règlements, aux lois un peu trop rigides qui gouvernent tout notre système de santé, cela peut amener une démotivation qui, par incidence, pas parce que les gens ne sont pas compétents, tout le monde est compétent dans le système, mais la démotivation empêche souvent une bonne communication qui fait qu'en fin de compte c'est le patient qui en souffre. Déjà, les médecins nous

disent qu'il y a des changements dans le genre de distribution des services médicaux et de dispensation des services qui se fait dans les hôpitaux actuellement. Déjà, on sent un changement et on espère que tout le monde va jouer le jeu comme il faut dans le contexte des restrictions budgétaires, mais il ne faudrait pas, évidemment, serrer trop. Il faut quand même laisser aux médecins une certaine autonomie, leur indépendance professionnelle, pour qu'ils puissent exercer sans être soumis à des contraintes de coûts, à des contraintes économiques constantes.

Là, c'est un peu paradoxal. On veut impliquer les médecins dans les hôpitaux. On est tout à fait d'accord. On le dit depuis dix ans, mais, si on veut les impliquer aujourd'hui, c'est parce qu'on a des problèmes d'argent. Quand c'était l'euphorie et qu'il n'y avait pas de problèmes financiers, les administrateurs ne s'occupaient pas des médecins, mais, aujourd'hui, on a besoin d'eux pour gérer la décroissance. Il y a des limites à cela. Le médecin peut s'opposer à cela en disant: On ne peut pas diminuer davantage parce que nos patients ne seront pas traités adéquatement. Déjà, dans bien des hôpitaux, au niveau des salles d'urgence, au niveau de la chirurgie, on renvoie les malades chez eux, alors qu'ils pourraient rester une journée ou deux de plus. On en est rendu là.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Autre question? Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: La deuxième question, sur l'enseignement, sur le problème de rémunération des médecins qui enseignent aux étudiants...

M. Roy: Je ne veux pas parler de la rémunération. Je vais laisser à mes confrères des fédérations médicales le soin de parler de leurs problèmes de rémunération. Cela n'a pas été discuté ici aujourd'hui. Le projet de loi ne traite pas de la rémunération comme telle. Il traite des modalités d'application des ententes qui comportent déjà des modalités de rémunération comme les honoraires fixes, la vacation, la rémunération à l'acte. Jusqu'à maintenant, cela n'a même pas été discuté au niveau des négociations, la question de la rémunération. Ce sont les fédérations qui doivent s'en occuper. Il reste quand même que cela inquiète, d'après ce que je sais, énormément les médecins, parce que les coûts de fonctionnement des cabinets de médecins augmentent extrêmement rapidement, alors que les revenus n'augmentent pas.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. Lapierre.

M. Lapierre: En fait, madame, si vous me permettez de répondre à la question, je pense que c'est tout simplement l'article 1 qui...

Mme Dougherty: L'article 1 dont je parle.

M. Lapierre: ... fait que nous attirons l'attention du législateur et, à notre sens, cet article atteint des objectifs qu'on ne connaît pas. Il nous semble que cet article devrait être reformulé, parce que, tel que formulé, il peut avoir des conséquences sur l'enseignement médical.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Si on me le permet, rapidement là-dessus, M. le Président. Les internes et résidents dans leur mémoire qu'on finira, j'espère, par entendre étant donné qu'ils ont bien voulu se déplacer, ainsi que les doyens comme certains des membres de la corporation - ou enfin, certaines des personnes autour de la corporation - ont bien évoqué cette question. Peut-être que je peux la préciser immédiatement, même si normalement ces choses-là se font en deuxième lecture. Ce n'est pas notre intention de priver ceux qui dispensent l'enseignement d'un revenu auquel ils ont droit dans le cadre de la dispensation d'un soin, que ce soit dans le cadre de l'enseignement et de la surveillance des activités d'un interne ou d'un résident. L'objet vise plutôt le problème de la rémunération des résidents eux-mêmes, non pas des internes, en dehors des établissements, c'est-à-dire dans le contexte de leur formation. On sait là-dessus qu'il y a des écoles de pensées qui vont de la liberté totale pour le résident de pratiquer comme omni, jusqu'à la vision beaucoup plus restrictive et totalement hermétique qui est celle de l'Association canadienne des universités, des facultés de médecine, si je ne me trompe pas, qui a été véhiculée assez longuement d'ailleurs comme notion par le Dr Perey qui est le président du Collège royal des chirurgiens du Canada ou de l'Association des chirurgiens du Canada et qui, elle, ne vise absolument aucune activité extra-universitaire pour les résidents.

Alors, on voit qu'entre les deux, il y a différentes possibilités; ce que ça vise, c'est ça. Il est bien évident que tout effet vicieux à l'égard de la rémunération de celui qui fait des activités de clinique dans le cadre de l'enseignement n'est absolument pas recherché et on apportera les précisions nécessaires.

Le Président (M. Bordeleau): Des questions, M. le député de Gouin?

M. Rochefort: Oui, M. le Président; premièrement, j'aimerais souligner aux représentants de la Corporation professionnelle des médecins du Québec mon intérêt, je présume que c'est aussi le cas pour les autres membres de l'Assemblée nationale, après avoir reçu une copie de l'étude que vous avez effectuée sur les médecins en régions. D'autre part, j'aurais simplement un commentaire à faire sur les deux premiers paragraphes, les commentaires généraux qu'on retrouve au mémoire de la corporation. J'ai de la difficulté à comprendre ces commentaires généraux quand je regarde le mandat que confie le code des professions à la Corporation, qui dit qu'il a pour principale fonction d'assurer la protection du public. J'ai de la difficulté à voir comment c'est concilié.

M. Roy: II me fait plaisir de répondre au député de Gouin et de lui envoyer une copie de nos effectifs médicaux, pour que le prochain comité des onze prépare une étude plus extensive et plus complète sur les effectifs médicaux. Le rôle...

M. Rochefort: Ça nous fera plaisir.

M. Roy: Ça vous fera plaisir. Le rôle de la corporation est de s'assurer que la qualité des soins est bonne, que la compétence des médecins est bonne. Nous pensons qu'il est essentiel pour ça que les conditions de pratique des médecins, leurs conditions de travail et leurs activités professionnelles soient encadrées d'une façon satisfaisante et qu'ils soient traités avec déférence et comme des citoyens à part entière. Nous croyons donc que la loi actuelle dans l'article 4 brime d'une certaine façon certaines libertés fondamentales qui sont des libertés de représentation et de négociation. On a compris aujourd'hui certains paragraphes de cet article 4, pour des raisons de santé publique par exemple. Mais je pense qu'il y a d'autres modalités qui pourraient être utilisées pour régler le problème des régions éloignées sur lesquelles tout le monde s'entend.

Comme on l'a dit, c'est une chose importante à résoudre. Mais, nous pensons que les médecins, comme des membres à part entière, doivent être traités comme tous les autres citoyens de la société. Si on veut faire évidemment certaines règles d'exception, il faudrait peut-être les faire pour tout le monde. Nous avons l'impression que nous avons parfaitement le droit de nous inquiéter de la façon dont on pourrait traiter les médecins, différemment des autres citoyens. Nous espérons que telle n'est pas l'intention du gouvernement parce que nous voulons, et c'est important pour les patients, que les médecins continuent à donner d'excellents services médicaux.

(23 h 45)

Nous pouvons assurer la population du Québec que la pratique médicale est excellente au Québec. Comme vous l'avez vu, nous faisons des visites systématiques des hôpitaux, des cabinets de médecins, de tous les établissements de santé et nous pouvons vous assurer que la qualité des médecins au Québec est très bonne. Nous voulons qu'elle continue à être bonne et, pour cela, nous pensons qu'il faut leur donner les instruments nécessaires pour qu'ils continuent à pratiquer cette excellente médecine et qu'ils soient aussi motivés pour le faire.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de Gouin.

M. Rochefort: M. le Président, je suis heureux d'entendre l'intervention du président de la Corporation professionnelle des médecins du Québec qui me semble marquée par une plus grande modération que les propos qu'on lui a entendus récemment à certaines assemblées. Je voudrais le laisser avec un paragraphe que j'aimerais citer, auquel il pourrait peut-être réfléchir aussi à ce sujet qui est un paragraphe qu'on retrouve dans une étude de MM. René Dussault et Louis Borgeat, qui est titrée "La réforme des professions au Québec" qui est extraite de la Revue du barreau de 1974 et je le cite très rapidement: "La corporation professionnelle ne peut plus, dorénavant, jouer le double rôle de protection du public et de sauvegarde des intérêts économiques et sociaux de ses membres. Cette dualité des tâches était sans doute acceptable à une époque où l'exercice d'une profession étant une affaire purement individuelle, la question des intérêts socio-économiques d'un ensemble de professionnels ne se posait pratiquement pas. De nos jours, les situations mettant en conflit d'intérêts un groupe de professionnels se multiplient et nécessitent des négociations fréquentes, une nette dissociation des fonctions de protection du public et de protection des membres d'une profession s'impose." Ils concluent en disant: "Si l'État rend obligatoire l'appartenance d'un professionnel à une corporation professionnelle et permet à cette dernière de réglementer et de contrôler une profession, c'est uniquement dans le but de protéger le public. Toute corporation qui est munie de pouvoirs aussi importants entendrait jouer, à la manière d'un syndicat, un rôle de revendication économique et sociale et se placerait dans une situation de conflit d'intérêts." Je vous soumets ça en conclusion, on aura sûrement l'occasion de s'en reparler.

M. Roy: Nous voulons vous dire, en commentaire, que nous sommes parfaitement d'accord avec ces propos de MM. Dussault et Borgeat que nous connaissons bien; pour

votre information peut-être, nous pouvons peut-être ajouter que ce sont les médecins, parmi les professionnels, qui ont formé les premiers syndicats avant que la loi actuelle sur le Code des professions, la Loi médicale ne soit modifiée. Dans la Loi médicale antérieure, c'était le Collège des médecins d'État - c'était le nom à l'époque - qui avait écrit dans la Loi le soin de représenter les intérêts des médecins en même temps que les intérêts du public en ce qui concerne la pratique médicale. Nous avons été les premiers professionnels à comprendre que, même avec la Loi que nous avions, les pouvoirs que nous avions, il n'était pas normal de continuer d'exercer ce genre de pouvoirs et nous nous sommes départis de ce genre de pouvoirs. En 1962, la Fédération des omnipraticiens a été créée, un peu plus tard, en 1964-1965, la Fédération des médecins spécialistes a été créée alors que la Loi actuelle existait, la Fédération des médecins internes et résidents a également été créée et la corporation a demandé, à plusieurs reprises, par écrit, de changer sa loi pour faire en sorte qu'elle s'occupe des intérêts de la population, de la compétence de ses membres et c'est ce que nous faisons.

D'un autre côté, les fédérations médicales s'occupent et doivent continuer à s'occuper des intérêts légitimes de leurs membres, les défendre pour que les médecins aient des conditions de travail raisonnables et qu'ils soient réglementés d'une façon raisonnable dans leurs activités professionnelles. Nous nous occupons de la question de la compétence, de la sécurité du public, de la qualité des soins et je puis vous assurer que nous le faisons très bien mais nous sommes également intéressés à ce que nos médecins soient heureux de pratiquer leur médecine parce que c'est un métier difficile; nous voulons qu'ils soient traités comme des citoyens normaux, qu'on cesse de les accuser de tous les maux de la société et qu'on cesse de dire qu'ils sont les générateurs de coûts. Nous avons accepté tous les régimes d'assurance-maladie, d'assurance-hospitalisation de bonne grâce, tous les changements dans la Loi des services de santé et des services sociaux et nous avons fait mémoires par-dessus mémoires.

Si on nous avait écouté dans le passé, peut-être y aurait-il beaucoup moins de problèmes qu'il y en a à l'heure actuelle. Nous pensons avoir fait notre devoir, nous continuons à le faire et nous avons une très bonne profession médicale au Québec, il ne faudrait pas évidemment s'organiser pour la détruire.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Alors, d'autres questions. Ça va.

M. Johnson (Anjou): M. le Président.

M. Lincoln: Je voudrais demander la parole M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, d'accord, M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: J'aurais voulu savoir si, d'après la nouvelle loi, à l'article 36, quand vous avez un conseil de médecins et de dentistes dans un établissement, ils ne peuvent plus faire partie du conseil consultatif, du personnel clinique, par rapport au conseil d'administration. Vous nous avez suggéré que, d'après l'article 112, le Conseil des médecins et dentistes dans l'établissement puisse avoir un droit de recommandation et de consultation auprès du conseil d'administration. Ce que je voulais savoir, c'est si, dans un cas semblable, vous ne pensez pas qu'il y aurait peut-être un genre de conflit d'intérêts, où le conseil d'administration recevrait des consultations et des recommandations des deux organismes, du conseil consultatif et du conseil des médecins et dentistes séparément? Est-ce que cette question ne pourrait pas causer des problèmes plutôt que de les résoudre?

Le Président (M. Bordeleau): M. Saint-Georges.

M. Saint-Georges: M. le député, je ne crois pas effectivement que cela puisse produire de conflit d'intérêts, pour une raison fondamentale, c'est que le fonctionnement, malheureusement, des conseils consultatifs du personnel clinique est très peu efficace, d'une part.

Deuxièmement, quand on analyse la loi antérieure des hôpitaux, on y voit qu'effectivement il s'agissait à ce moment d'une responsabilité du conseil des médecins et dentistes. Je pense que cela représentait un élément de motivation intéressant pour les médecins de pouvoir se sentir participants à l'organisation scientifique et technique de l'établissement, étant probablement parmi ceux qui avaient la plus grande compétence pour le faire. Quand la Loi sur les services de santé et les services sociaux a remplacé la Loi des hôpitaux, on a créé le conseil consultatif du personnel clinique et, pour tenter que tous les gens soient représentés, on a convenu que les divers professionnels y seraient représentés, dont les médecins. Actuellement, on propose que les médecins n'en soient plus partie. Nous, nous croyons que le fait de leur demander de faire des recommandations peut être de nature à les motiver et non pas à créer de conflits d'aucune espèce.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, j'ai quelques remarques en terminant. Ce

projet de loi, comme j'ai eu l'occasion d'en parler depuis qu'il est déposé et de le commenter en commission vise notamment à clarifier des rôles. Je vois dans la salle les présidents des fédérations: des internes et résidents, spécialistes ou omnipraticiens, ainsi que les représentants de la corporation. Je voudrais dire que je considère que les représentants des fédérations, à cet égard, quant à ces rôles que nous ne voulons pas clarifier dans la loi, mais qui, dans la réalité, sont très clairs, que les présidents des fédérations font ici leur boulot et ils le font avec la compétence que leurs collègues leur ont reconnue dans le cadre, je présume, des mandats qu'il leur ont donnés.

Je voudrais souligner aussi que, dans le coeur de son document, j'ai reconnu aussi que cette institution qu'est la corporation, avec sa vocation très spécifique de protection de la santé publique ou enfin d'intervention à l'égard de la santé publique, sous le regard du contrôle de la qualité de la pratique médicale et de la protection des citoyens, exerce une fonction qui a été fort bien accomplie dans ce mémoire, compte tenu des préoccupations que j'y vois. Je laisserai de côté deux événements antérieurs qui ont pu se produire et qui impliquent des personnes plutôt que des institutions. Je remercierai notamment le Dr Roy, puisque j'ai reconnu aujourd'hui, comme d'habitude, sa couleur. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.

M. Roy: Évidemment, dans la vie, tout est une question de rôles. On peut se retrouver à un moment donné dans des rôles différents; à ce moment là, il faut jouer le rôle que l'on nous donne. Merci.

Mme Lavoie-Roux: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Roy, ainsi que les personnes qui vous accompagnent.

J'invite maintenant, comme dernier intervenant pour ce soir, la Fédération des médecins résidents, représentée par le Dr Marc David, le président et qui en est porte-parole.

En attendant, j'aimerais d'abord avoir, dès maintenant, si c'est possible, le consentement des membres pour qu'on puisse prolonger la séance après minuit.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, merci.

Mme Lavoie-Roux: Vous voyez comme on collabore bien, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie de votre collaboration, Mme la députée.

Mme Lavoie-Roux: Mais, M. le Président, il ne faudrait pas en avoir trop demain, parce que vous n'aurez peut-être pas la même collaboration.

Le Président (M. Bordeleau): On a regardé la liste ensemble, je suis aussi dépendant que vous là-dessus. C'est la liste qu'on m'a remise.

Mme Lavoie-Roux: C'est quand même votre rôle, M. le Président, d'indiquer à qui de droit... Je pense que demain, c'est un maximum de gens qu'on peut recevoir, huit groupes. Il y en a un de plus, mais il y en a peut-être qui sont moins...

Le Président (M. Bordeleau): C'est-à-dire qu'il y en a sept de prévus.

Fédération des médecins résidents et internes du Québec

Mme Lavoie-Roux: Sept ou huit?

Le Président (M. Bordeleau): C'est jeudi qu'il y en a huit.

M. David, si vous voulez bien présenter les personnes qui vous accompagnent.

M. David (Marc): M. le Président, M. le ministre des Affaires sociales, mesdames et messieurs les députés, il me fait plaisir de vous présenter notre conseil d'administration et quelques personnalités assises à la table. Je commence par ma gauche: Me Jacques Castonguay, notre conseiller juridique, Mme Danielle Godbout-Bombardier, notre directeur administratif, le Dr Guy Brisson, qui représente l'Association des médecins résidents et internes de Sherbrooke, le Dr Léo Plouffe, président de l'Association des médecins résidents et internes de McGill, le Dr Léo Berger, de McGill lui aussi, président du comité responsable de l'entente collective et, enfin, le Dr Gaétan Tardif, qui représente l'Association des médecins résidents et internes de Québec. À ma droite: le Dr Pascal Labrecque, président de l'Association des médecins résidents et internes de Québec; à ses côtés, le Dr Danielle Marceau, de Québec aussi, présidente de notre comité d'éducation; à côté d'elle, le Dr Roch Parent, président du Syndicat des résidents et internes de Montréal. Il me fait plaisir d'avoir à mes côtés, en geste de solidarité, le Dr Paul Desjardins, de la Fédération des médecins spécialistes, le Dr André Czitrom, de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, et le Dr Claude Chicoine, de l'Association des chirurgiens dentistes de la

province de Québec.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous invite à faire part de votre mémoire à la commission.

M. David: En 1970, la population québécoise s'est dotée d'un régime universel d'assurance-maladie qui reconnaissait un droit légitime, à savoir l'accessibilité aux services médicaux, sans préjudice de statut social ou économique. Avec l'instauration de ce régime et fort des expériences vécues ailleurs, le gouvernement québécois entendait mettre sur pied un système de santé permettant une médecine de qualité à la fois globale et continue. Plus de dix ans se sont maintenant écoulés et, il faut en convenir, le projet de loi actuel nous le rappelle amèrement, certains des buts visés n'ont pas été atteints, et ce malgré des modifications à la loi qui donnaient au gouvernement des outils potentiels pour la résolution des disparités régionales persistantes. "La croissance rapide des effectifs médicaux n'a pas doté le Québec d'un nombre suffisant de médecins pour répondre aux besoins de la population dans toutes les régions du Québec", dit le ministre Johnson dans son communiqué du 19 novembre 1981. Il s'agit en effet d'une réalité indéniable, mais faut-il que le ministre, alors que l'on considère le régime québécois d'assurance-maladie comme le meilleur au Canada, en ce qui concerne l'approche des objectifs généraux assignés, alors qu'il avance lui-même que le système québécois constitue un acquis indéniable qu'il est important de conserver et de consolider et que la qualité des services de santé reçus par les Québécois se compare avantageusement avec celle des pays industrialisés, faut-il, dis-je, devant un constat d'échec partiel et dans la conjoncture économique actuelle, qu'il se donne des moyens additionnels vis-à-vis de la gestion du réseau des affaires sociales et vis-à-vis du fonctionnement du Régime d'assurance-maladie?

Le ministre affirme, en outre, que le coût du régime a augmenté. Permettez-nous d'en douter. Il ne faut pas cependant présumer que l'augmentation des dépenses du régime, s'il y a eu effectivement augmentation, est imputable à l'irresponsabilité de la profession médicale. Entre autres, les demandes de la population se sont faites plus nombreuses et plus exigeantes au cours de la dernière décennie, surtout avec l'avènement de la gratuité des soins. Le ticket modérateur doit-il être imposé seulement aux médecins? (Minuit)

De plus, il y a eu un souci accru de dépistage, voire de prévention de la part des médecins qui ont répondu aux préoccupations des organismes de santé et des politiques gouvernementales. Le dépistage et la prévention n'ont pas de prix. La technologie médicale a évolué elle aussi, en partie grâce à l'apparition d'aides diagnostiques et thérapeutiques raffinées mais coûteuses. Le vieillissement de la population et l'absence d'une certaine planification quant aux soins à dispenser ont engendré un accroissement injustifié des coûts, ces patients entre autres se retrouvant trop souvent dans des unités de soins aigus, et j'en passe.

Dans ce contexte, que faut-il penser des normes rigides incompatibles avec les libertés professionnelles reconnues traditionnellement que le ministre veut nous imposer?

Nous estimons donc que le ministre, pressé de résoudre le difficile problème de la répartition des effectifs qui aurait pu l'être par les dispositions actuelles, profitant de la présente conjoncture, dépose un projet de loi matraque de fin de session. Ce projet de loi, dans son essence même, assujettit encore plus la profession médicale aux caprices de la bureaucratie et fausse le processus des négociations en permettant l'utilisation du décret et de l'arrêté auxquels le projet de loi donne priorité. En privilégiant ainsi le pouvoir unilatéral, le projet de loi compromet dangereusement la raison d'être des fédérations et, de la même façon, des syndicats en général.

En rapatriant dans le projet de loi la normalisation réglementaire de l'activité médicale et en imposant des normes rigides vis-à-vis du fonctionnement du système de santé, ainsi que la fourniture des services de santé on risque fortement de compromettre les droits de la personne et les libertés professionnelles.

Par ailleurs, ce projet de loi, sous le couvert d'une décentralisation administrative au profit essentiellement d'une intégration des médecins à la gestion des établissements, en leur octroyant des responsabilités additionnelles à la structure hiérarchiques des pairs, semble vouloir, selon nous, plutôt instaurer une structure permettant un contrôle plus exclusif de la profession.

À partir de ce préambule, nous nous permettons de faire l'analyse du projet de loi no 27. Notre fédération représente des médecins en formation postdoctorale, mais elle est aussi l'instance syndicale reconnue actuellement par tous les intervenants. Notre analyse portera donc sur les articles qui ont une répercussion directe sur la formation actuelle et l'avenir de nos membres, ainsi que sur certaines implications syndicales du projet de loi.

À l'article 1, le troisième alinéa laisse place à plusieurs interprétations. Nous tenons à aviser le ministre que, si son intention est de ne plus considérer comme assurés des services fournis dans le cadre de notre formation, donc de ne pas rémunérer les

patrons pour tout acte délégué aux résidents, nous risquons de voir notre formation lourdement compromise. Le système actuel crée une situation qui fait que, fréquemment, les résidents, tout comme les internes, reçoivent une partie importante de leur formation de médecins qui ne sont pas nécessairement rémunérés par les universités à ces fins. Et les coupures budgétaires aux universités ne feront qu'accentuer cette tendance.

Nous sommes persuadés qu'une telle politique résultera en une diminution de la délégation de cesdits actes au détriment de la formation des résidents et, ultérieurement, pourrait avoir un effet négatif dans les soins dispensés à la population.

Par ailleurs, certains résidents profitent du peu de temps qu'il leur reste pour pratiquer la médecine ailleurs que dans le centre hospitalier où ils sont en stage. Ils pratiquent ainsi dans d'autres centres hospitaliers ou dans des cliniques privées et contribuent également aux services d'urgence à domicile. La très grande majorité des résidents s'accorde à souligner, en premier lieu, le caractère formateur de cette pratique. Ainsi, un résident, qui doit se confiner généralement à sa spécialité lorsqu'il travaille à l'hôpital, apprécie cette pratique dite générale qui lui permet de garder le contact avec toutes les branches de la médecine.

Suivant le troisième alinéa de l'article 3 de la Loi sur l'assurance-maladie, le résident ne pourrait plus pratiquer ailleurs que dans un centre hospitalier. Toute pratique générale en pratique privée, par exemple, ne serait plus rémunérée. En vertu de quelle logique accepterait-on qu'il pratique dans un centre hospitalier et non pas ailleurs?

Nous tenons donc, devant l'ambiguïté de l'alinéa, à ce que le ministre précise sa pensée.

À l'article 4, nous considérons le troisième alinéa qui prévoit une rémunération différente pour les médecins durant les premières années d'exercice, selon le territoire où ils exercent, comme discriminatoire. Cela confinerait, quant à nous, le jeune médecin à un statut de seconde classe, il servirait du même coup à financer les dispositions du second alinéa et à abaisser les coûts du système. Force nous est de nous opposer à une telle disposition. En effet, la médecine est un art autant qu'une science où l'expérience n'est pas gage de compétence. De plus, le jeune médecin est à la fine pointe des connaissances médicales, ce qui est une compensation plus que valable au manque d'expérience, selon nous.

Cet outil "incitatif" que se donne le ministre dans sa quête d'une solution entière et finale aux problèmes actuels est pour nous une atteinte directe aux libertés personnelles et professionnelles; d'autant plus pénalisant pour les résidents et internes en formation pour lesquels de telles conditions n'étaient pas partie au "contrat social" en début de formation.

Enfin, la possibilité pour le ministre de se servir du décret à défaut d'entente négociée donne - et nous insistons encore une fois - un dur coup à la libre négociation, limite le rôle des fédérations et compromet leur raison d'être. Il est de plus intéressant de rappeler encore une fois que le deuxième alinéa ne fait que confirmer le pouvoir qu'avait déjà le ministre en vertu de la section IX de la loi 84 et qui est d'accorder des primes d'encouragement pour l'établissement des médecins dans les territoires mal desservis. Or, malgré ces dispositions, en vigueur depuis février 1979, le système des primes d'encouragement n'a jamais été appliqué. Laissez-nous donc douter de la volonté réelle du ministre de mettre en branle dans l'avenir ce système de primes d'éloignement, conditionnel à une entente, puisqu'il se donne maintenant le pouvoir beaucoup plus facile de conscrire les jeunes médecins afin de remplir les cadres des territoires mal desservis et ce, par décret. C'est au troisième et au cinquième alinéa et non pas au quatrième. Il s'agit ici d'une erreur.

Une fois les territoires éloignés mieux pourvus par des médecins qui n'auront pas le choix, il est illusoire, quant à nous, de croire que le ministre verra la nécessité de négocier une entente qui leur accorderait une "vraie" prime d'encouragement.

Pour ces raisons, il est évident que nous sommes contre les modifications proposées et demeurerons contre. Par contre, si telle devait être l'opinion du législateur, vous nous permettrez de soulever certaines observations à caractère plus juridique.

Ainsi, cet article prévoit, au troisième alinéa, qu'une rémunération réduite pourra être incorporée aux ententes, pour les médecins qui débutent dans la pratique. Ce même alinéa ne détermine pas quelle pourrait être la durée de ce "purgatoire".

À défaut d'entente, l'alinéa 5 accorde au ministre le pouvoir de déterminer, par simple décret, quelle serait la rémunération réduite, ainsi que le nombre d'années durant lesquelles celle-ci pourrait s'appliquer. En agissant de la sorte, la loi impose toutefois au ministre une durée maximale de trois ans.

Le premier élément que nous soulevons porte sur la durée des "premières années" de pratique, s'il devait y avoir entente à ce sujet. Ainsi, si le ministre doit procéder par décret, il ne peut imposer plus de trois ans. Par ailleurs, si ceci devait faire partie d'une entente, il n'y a malheureusement pas de limite, quant à nous, sur la durée. Est-ce dire que les ententes pourraient prévoir une

durée plus longue? D'un strict point de vue juridique, rien ne peut l'empêcher, quant à nous.

On pourra certes soulever que les interlocuteurs de l'État verront à ne pas donner leur accord à une durée plus longue que trois ans. C'est possible et même probable. Toutefois, dans la mesure ou la FMRIQ n'est pas partie aux négociations et, par le fait même, aux ententes, nous ne pouvons accepter que la loi n'impose aucune limite de temps dans les ententes. Si ce projet de loi devait être accepté tel quel, tous nos membres actuels en seraient directement affectés dans un avenir rapproché. Il est inconcevable que la FMRIQ accepte, au nom de ses membres, que la durée puisse être théoriquement prolongée à plus de trois ans.

En ce qui concerne le pouvoir de décret attribué au ministre dans le cinquième alinéa, nous ne pouvons, encore une fois, y souscrire. Suivant le texte actuel, le ministre a toute discrétion lorsqu'il agit. En plus de déterminer la durée des honoraires réduits, il peut, toujours par décret, préciser quels montants et les taux de réduction. Tous savent qu'un arrêté ministériel, sauf indication contraire dans la loi, peut être modifié en tout temps. Le ministre pourra donc, suivant sa seule discrétion, modifier le taux de réduction des honoraires, les territoires et les spécialités touchés, aussi souvent qu'il le voudra. Cette procédure a sans doute comme avantage de donner au ministre la plus grande marge de manoeuvre possible. Mais qu'en sera-t-il des médecins eux-mêmes en début de pratique? Comment pourront-ils planifier leur début de carrière? Le ministre pourra, à tout moment, modifier le taux de réduction des honoraires. Un territoire non touché à l'origine pourra, par simple décret, devenir sujet à la réduction. Il en est de même pour une spécialité donnée.

Il est de commune renommée que la mise sur pied d'un cabinet de médecine nécessite l'investissement de sommes considérables, plus particulièrement dans certaines spécialités. Comment le jeune médecin pourra-t-il démarrer s'il n'est sûr de rien? Comment pourra-t-il s'engager financièrement si, du jour au lendemain, ses honoraires peuvent être réduits par simple décret?

Cette façon de voir les choses paraît inconcevable de nos jours. Il est important que la loi accorde une protection plus grande et que certains principes de base y apparaissent. Ainsi, il nous semble extravagant que la loi ne contienne pas certaines limites aux modifications et qu'elle ne reconnaisse pas que le médecin qui débute puisse bénéficier de droits acquis, c'est-à-dire l'assurance qu'il n'y aura pas de modification en cours de route.

Nous tenons à rappeler au ministre les recours déjà existants dans la loi et dont il ne s'est pas encore prévalu. A-t-il besoin de changer les règles du jeu, alors que certaines cartes n'ont pas encore été jouées?

Nous tenons aussi à informer le ministre que les dispositions du sixième alinéa de ce même article au sujet d'ententes particulières à titre expérimental outrepassent encore une fois les droits des fédérations. Nous voyons en cela une source de discorde éventuelle entre groupes de médecins qui n'en demeurent pas moins des hommes; c'est tout simplement machiavélique.

Article 20. L'article 20 vient modifier la loi par l'addition de l'article 66.1 à la loi sur les services de santé et les services sociaux: transmission au chef de département clinique du profil de pratique individuel des professionnels de la santé de son département. Cela ressort encore une fois comme une atteinte à l'autonomie professionnelle, car elle donne à un seul tiers le contrôle d'un instrument qui pourrait être préjudiciable voire inique.

Nous profitons de ce commentaire pour vous souligner notre inquiétude face aux pouvoirs donnés par le projet de loi au chef de département clinique. Il est évident que les responsabilités qu'on lui donne sur l'utilisation des ressources de l'établissement par les médecins de son département et la surveillance de la façon dont s'exerce la médecine dans son département lui reviennent à bon droit, mais il ne saurait imposer à lui seul les sanctions administratives qui peuvent être prévues selon l'article 112.1 du projet de loi, car sa nomination, faite par le conseil d'administration, et sa rémunération prévue à l'article 1 lui octroient un statut qui l'élève au-dessus de ses pairs. Or, cette position privilégiée peut donner cours à l'arbitraire.

La discipline et le contrôle de la qualité de l'acte médical sont du ressort des pairs, donc du Conseil des médecins et dentistes. Le ministre semble, quant à nous, oublier ou diminuer l'importance de cette collégialité, que ce soit pour l'élection du chef de département ou pour l'imposition des sanctions administratives. Nous ne saurions être assujettis à un syndic hospitalier, car s'il devait en être ainsi, c'est la qualité même des soins médicaux hospitaliers et le droit du patient à recevoir les meilleurs soins qui seraient battus en brèche. En effet, le chef du département, payé et nommé par l'administration et sous le contrôle du directeur des services professionnels, pourrait à sa guise interpréter les normes établies par le Conseil des médecins et dentistes en ce qui a trait à la fourniture de soins et imposer, sous peine de sanctions administratives, sa vision de la médecine qui devrait être pratiquée dans son département.

Ainsi, le médecin qui, pendant près de

dix ans, aura été formé pour prendre des décisions dans le meilleur intérêt de son patient se verra relégué au rôle de simple exécutant d'une médecine standardisée, nivelée par la base au gré des administrateurs qui, eux, il faut le dire, sont loin des patients.

Nous tenons à aviser le ministre que les CMD, quant à nous, doivent demeurer libres de toute contrainte extérieure dans l'élaboration des normes sur la fourniture des soins requis et l'utilisation des ressources disponibles. Or, certaines dispositions du projet de loi ainsi que les coupures budgétaires quant aux ressources vont limiter encore une fois la liberté collégiale.

Article 38. L'article 38 du projet de loi donne au CRSSS des pouvoirs trop étendus. Le désir du ministre est de former un organisme, non pas bureaucratique, mais un moteur de la coordination régionale dans la dispensation des services de santé.

En donnant au CRSSS la possibilité d'établir les politiques d'admission et de transfert des bénéficiaires, de fixer les normes de fonctionnement des services d'urgence, de fixer les normes d'utilisation et de distribution des lits, d'autoriser le déplacement des bénéficiaires vers un autre établissement, le ministre, dans sa volonté d'améliorer le flux d'autorité de décision de travail et aussi d'information, instaure une structure qui, à notre point de vue, ne fait qu'alourdir le système par une bureaucratie qui pourrait s'avérer insuffisamment souple dans l'environnement complexe et dynamique auquel il s'adresse. De plus, alors que le ministre désire une plus grande implication des médecins dans l'administration et la planification des services de santé régionaux et locaux, comment expliquer la diminution substantielle de leur représentation potentielle de trois membres au sein même des conseils d'administration? S'agit-il de bâillonner les médecins quand vient le temps d'établir les politiques régionales et d'assurer ainsi un contrôle plus rigoureux sur ceux-ci?

Article 49. L'article 49 consacre, selon nous, l'omnipotence du ministre et de la fonction publique sur la dispensation des services de santé. (0 h 15)

Alors que le chapitre 63 des lois de 1979 ne prévoyait des plans d'organisation que pour les centres hospitaliers universitaires et que ces plans étaient approuvés par le CRSSS, le ministre étend, avec le nouvel article, sa juridiction sur tous les hôpitaux québécois. Le ministre se donne ainsi, dès l'adoption du projet de loi et malgré les justifications des centres hospitaliers, l'autorité de fermer tous les centres hospitaliers des régions non désignées à de nouveaux médecins. Il leur enlève ainsi tout statut et tous privilèges hospitaliers, même si ces nouveaux médecins sont prêts à assumer la tarification diminuée.

L'incitation risque donc de devenir obligation, car la pratique de la médecine, même privée, est reliée au centre hospitalier. Et ces plans d'organisation, à partir de quoi seront-ils élaborés? Leurs justifications premières seront-elles le bien-être du patient ou les intérêts du ministre?

Et que penser de la sclérose qui pourrait se développer sans adjonction de sang nouveau dans les centres hospitaliers et du danger qui guette, de facto, le dynamisme universitaire où le renouvellement est gage de qualité et d'excellence de formation et de dispensation des soins?

L'incertitude des résidents quant à la possibilité d'entreprendre une carrière universitaire risque de diminuer grandement le stimulus nécessaire pour aller chercher une formation particulière à l'étranger, formation essentielle quant à nous à l'avancement de la médecine québécoise et gage d'un niveau élevé de compétence qui est un droit de la population.

Article 57. L'article no 57 du présent projet relègue aux oubliettes le résident ou l'interne qui pouvait siéger au conseil d'administration, abaissant la représentation médicale à un seul membre.

Nous notons ainsi avec déception que l'État entend, dans sa prétendue réforme, retirer la représentation des résidents et internes au conseil d'administration des centres hospitaliers.

La réglementation actuelle énonce clairement que nos membres ne font pas partie du Conseil des médecins et dentistes. S'il ne sont pas membres du CMD, et s'ils sont exclus du conseil d'administration, quelle sera notre représentativité dorénavant? En vertu de quelle logique les résidents et internes seraient-ils ainsi exclus? Nous nous opposons fortement à cette démarche qui nous semble à la fois arbitraire, injustifiée et inacceptable.

Le résident ou l'interne est, à notre avis, le seul individu qui connaît véritablement le fonctionnement de l'hôpital 24 heures sur 24. De plus, les résidents et internes ont un droit de regard, via le conseil d'administration, sur des décisions ayant des implications importantes sur la formation. Qui d'autre qu'un résident peut mieux expliquer à un conseil d'administration la nécessité d'unités d'enseignement clinique, la pénurie de documentation à la bibliothèque et voir à ce que le conseil d'administration se préoccupe sérieusement de la formation donnée par son centre hospitalier? Ce n'est pas uniquement à la personne nommée par l'université qu'il advient de le faire.

Le ministre, par ailleurs, raye d'un seul trait l'occasion pour un résident ou interne de s'intégrer graduellement dans l'administration de services de santé et d'acquérir une expérience administrative

adéquate, alors qu'il prône une participation plus active des médecins...

En conclusion, pour les raisons que nous venons d'énoncer, nous n'avons d'autre choix que d'exiger le retrait pur et simple de ce projet de loi no 27.

Bien que la FMRIQ ne soit pas partie aux ententes conclues entre l'État et les médecins, en vertu de la Loi sur l'assurance-maladie, nous nous permettons toutefois de dénoncer avec force un tel processus qui vient matraquer avant l'heure tout le système de la libre négociation.

L'actuel article 19 de la Loi sur l'assurance-maladie donne au ministre toute la latitude voulue pour négocier de bonne foi et tenter d'en arriver à un règlement raisonnable et acceptable avec les médecins. Rien dans la loi n'interdit au ministre de voir à une distribution adéquate des soins médicaux par tout le Québec. En agissant de la sorte, l'État bafoue toute négociation éventuelle, semblent en constater l'échec avant même qu'elle ne commence.

Pour qu'une négociation aboutisse à un règlement, il est nécessaire que chacune des parties ait tout au moins l'impression de traiter d'égal à égal avec son interlocuteur.

Quant à la façon elle-même de répartir les effectifs médicaux au Québec, ce n'est certes pas en imposant une réduction d'honoraires que l'État pourra en arriver à ces fins. D'autres mesures incitatives pourraient être honnêtement tentées, ayant le mérite de ne pas être imposées de force contre le gré des principaux intéressés.

Quant à la restructuration administrative des établissements de santé prévue dans le projet de loi, nous sommes d'avis que ce n'est pas en imposant un contrôle à outrance de la part de l'État qu'on réglera tout le problème. Nous doutons fortement qu'une telle méthode puisse réduire les coûts d'une façon sensible et appréciable. Par ailleurs, réduire les médecins à de simples exécutants ne pourra qu'être néfaste à plus ou moins long terme pour la population. Merci

Le Président (M. Bordeleau): Merci M. David. Alors M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Merci, Dr David. D'abord une question, ensuite je vais peut-être passer à quelques commentaires rapides sur certaines choses. A la page 12, vous dites: "De plus, alors que le ministre désire une plus grande implication des médecins dans l'administration et la planification des services de santé régionaux et locaux, comment explique-t-on une diminution substantielle de représentation au sein même du conseil d'administration des CRSSS?" Il doit y avoir une erreur qui s'est glissée quelque part. Dans la mesure où maintenant nous prévoyons qu'il y aura obligatoirement un médecin sur le conseil d'administration des CRSSS. Peut-être que vous vouliez parler des établissements.

M. David: Pour la correction, nous avons ajouté "potentielle", nous comprenions l'ancien article comme pouvant permettre la représentation de trois membres, entre autres un membre d'un centre hospitalier, d'un centre d'accueil et d'un CLSC, à moins que nous ayons mal interprété l'ancien article.

M. Johnson (Anjou): D'accord, je comprends. Mais de fait, ce dont se plaignait la profession, avec raison diront certains, pas avec raison diront d'autres, vous avez entendu ça ce matin, ça dépend des points de vue dans le réseau, c'est qu'ils n'y étaient pas. En pratique, ce que l'on vise à faire dans le projet de loi, c'est d'assurer un siège à une personne à cause du fait qu'elle est médecin. Alors...

M. David: Me permettez-vous un petit commentaire?

M. Johnson (Anjou): Oui, je vous en prie.

M. David: Nous nous demandons quand même pourquoi les médecins qui sont probablement les plus impliqués n'ont qu'une voix sur quatorze. J'ai l'impression...

M. Johnson (Anjou): Vous savez, je pourrais vous dire que c'est une bien longue histoire, dans l'histoire du développement du réseau des Affaires sociales au Québec. Je pourrais vous dire que c'est l'époque de Soeur Joseph qui est révolue. Soeur Joseph, je dois vous dire, était une soeur dans une communauté dont je ne me rappelle pas du nom et qui réglait ses problèmes au téléphone avec M. Duplessis; ça permettait l'ouverture de salles d'opération sur simple coup de téléphone mais ça ne fonctionnait pas tout le temps et le Québec s'est beaucoup développé depuis ce temps-là. Ça avait ses avantages, remarquez, mais ça avait de drôles d'inconvénients aussi. Au fur et à mesure des années et surtout avec la réforme de 1971, il y a eu une certaine marginalisation, voulue probablement, carrément, dans l'esprit des gens, des médecins. Je regarde certaines réactions que je vois encore dans le réseau, on a peur des médecins. Je pense qu'on n'a pas raison d'avoir peur des médecins. Je voudrais être bien convaincu que les nouvelles générations de médecins qui montent sont sensibles aux dimensions collectives dans le réseau, comme certains de leurs aînés le sont à travers d'autres activités; je parle de leurs aînés sur le plan de la profession. Quelques remarques, une remarque générale, je pense que vous me le pardonnerez bien, Dr David, là-dessus, il y

a des éléments où on voit beaucoup de machiavélisme peut-être, beaucoup de mauvaises intentions, beaucoup de méchanceté et de complots dans nos actions. C'est pour ça qu'il y a des commissions parlementaires, c'est pour être sûr qu'on ne fait pas ça juste au niveau des procès d'intention.

Le pouvoir de décrets, je pense que j'en ai traité assez abondamment ce matin. L'article 1, à cet égard, vise essentiellement des restrictions sur ce qui s'appelle le "moon lighting". Encore une fois, l'étendue du "moon lighting", ou de la réaction devant ce qu'on appelle le "moon lighting", varie comme je le disais, de la liberté absolue qu'on réclame. C'est-à-dire qu'un résident réclame de pouvoir se prévaloir du fait qu'il est, par définition, un médecin, donc pouvant pratiquer comme omnipraticien, à l'autre extrémité qui est la position des doyens ou de certains doyens, je devrais dire - pas nécessairement tous - à l'effet qu'un médecin résident ne devrait pas sortir des activités universitaires. Et on a pris une décision qui est quelque part entre les deux, parce qu'il arrive que, dans la vie, on prenne des décisions quelque part entre les deux, parce qu'il y a des divergences d'intérêts, de points de vue, qui visent à toutes fins utiles à confiner la possibilité de pratique pour le résident, en établissement. Notamment, en ayant à l'esprit que dans certaines spécialités... On reconnaît le rôle majeur que jouent souvent des résidents senior, notamment, à certaines spécialités. Par exemple, un résident senior en cardiologie qui s'en va à Mégantic, il y a des chances qu'il puisse suivre s'il est R-3 en cardiologie, un peu mieux les arythmies que beaucoup d'autres médecins dans l'établissement et il peut, à cet égard, être un élément de soutien important à l'établissement et, en même temps, se faire des revenus auxquels il a bien droit, puisqu'il rend des services.

J'avoue que cela manque de la cohérence hermétique ou totale que voudraient y voir les doyens et de la cohérence absolue que vous voudriez voir qui permet de continuer le système tel qu'il existe, avec les désavantages qu'on lui connaît.

Quant à l'article 4, je pense qu'il est fondamental. Je reviendrai là-dessus. Je pense que la vraie discussion que nous aurons à faire, c'est là-dessus, les échanges qu'on pourra avoir. D'abord, je vous ferai remarquer que, dans les dimensions techniques, les trois ans ont un caractère maximal, la limite étant, en vertu des principes d'interprétation du droit, celle des parties, si cela n'est pas prévu autrement. J'aurais peine à croire que des parties négocient ce que vous appelez le purgatoire, ce que je ne considère pas comme purgatoire. Je vous suggérerais d'ailleurs, à cet égard, de lire le projet de loi de mon collègue de Sainte-Marie, si vous voulez voir ce qu'est un purgatoire. C'est une limite de trois ans qui est imposée, si jamais on doit y arriver par décret. Je reviendrai là-dessus. Donc, sur le plan technique, je voulais évacuer cette question.

Quant aux taux qui suivraient ou aux taux différentiels "à la baisse" qui suivraient le résident qui se promène sur le territoire, je ferai remarquer que je pense que la loi ne le permet pas. Primo, ce n'est pas notre intention. Deuxièmement, de l'avis de nos juristes, quitte à échanger plus profondément là-dessus avec les vôtres, à mon avis, la loi ne permettrait pas de faire un suivi. Bien au contraire, parce qu'à partir du moment ou le médecin qui est soumis aux taux différentiels, quelle que soit la région qu'il ait choisie, est dans le système, il bénéficie de l'espèce de statut de tous ceux qui sont dans le système, c'est-à-dire qu'il conserve, qu'il a ses acquis, qui ne peuvent pas être modifiés durant l'année subséquente. Je veux simplement vous rassurer quant à cette interprétation et, à notre avis, c'est implicite.

Quant à l'article 20 sur l'information, je me permettrai de vous renvoyer à la vision qu'en a la Corporation professionnelle des médecins, elle me semble passablement différente de la vôtre. Je n'ai pas à présumer que les informations sur les profils cliniques vont servir de fouet ou de férule à des chefs de département qui, par ailleurs, même s'ils restent des hommes ou des femmes, restent également des personnes dont on pourrait présumer que, de façon générale, elles se conduisent de façon responsable, à l'exception des deux extrémités, où c'est la cloche de gaz.

Sur la notion d'autorité et de standardisation, je vous renvoie également à la vision qui est la nôtre et que nous partageons avec l'expérience concrète, notamment, celle que vous vivez, je pense, dans les établissements universitaires. S'il est vrai qu'il y a des chocs et des chocs nécessaires et sains pour l'évolution de la profession entre la vision de la génération de ceux qui sont en formation et ceux qui sont en place, le système n'empêcherait pas l'introduction ou une précision du rôle des chefs de département qui exercent déjà en pratique dans les universités, on le sait, dans les départements universitaires, à peu près ces fonctions dans bien des cas. Cela ne serait pas la base d'une vision standardisée de la médecine. Je connais trop l'esprit de liberté des 15 000 médecins du Québec pour m'imaginer que simplement quelques modifications aux pouvoirs des CMD amèneraient une vision standardisée de la médecine sur le territoire.

Quant au CMD, vous faites bien de nous mettre en garde contre toute ingérence extérieure mais, comme il n'y en a pas, cela

ne m'inquiète pas, il n'y en a pas dans le projet de loi et je ne vois pas comment il pourrait en être autrement.

Quant à l'article 38, le pouvoir réglementaire, je vous renvoie aux échanges qu'on a eus là-dessus ce matin. Encore une fois, il ne faut pas chercher noise, bien que j'avoue qu'à i, j, k et l, cela revient dans tous les mémoires. On va discuter de i, j, k et 1 dans les pouvoirs de réglementation, c'est bien évident.

À l'égard des CRSSS, je remarque que vous faites partie de la brigade anti-CRSSS que nous avons vue défiler devant nous depuis ce matin. Vous tirez également la chevrotine sur cet organisme un peu comme tout le monde, mais je persiste à croire qu'il y a là une expertise et une structure qui peuvent être très utiles aux citoyens en fin de compte. Ce n'est pas pour rien qu'on veut y intégrer certains des éléments de la profession. (0 h 30)

Quant à la notion des plans d'effectifs qu'il faut relier, je pense, à la question des régions, j'y reviendrai également, c'est le gros bloc. La participation des médecins résidents aux conseils d'administration, avec nos regrets, c'est une erreur de texte à l'imprimerie. Il y avait, dans les décisions que nous avions à prendre à cet égard, une série d'hypothèses. Pour une raison ou pour une autre, c'est le mauvais papier qui est parti. Au contraire, on vise l'extension même de cette possibilité dans la mesure où nous permettrons à d'autres organismes que les centres hospitaliers d'être affiliés aux universités. On pense qu'au niveau de la formation, cela peut être utile de façon générale pour la profession et pour les citoyens en même temps, dans la mesure où des centres d'accueil, comme des CLSC de plus en plus, pourront être associés aux universités et faire partie des programmes de résidence.

Quand on pense notamment à tout le problème auquel notre société devra avoir à faire face très bientôt, qui est le nombre de personnes âgées, avec des difficultés qui sont particulières aux personnes âgées, et la tendance de vouloir voir ces problèmes réglés seulement par des gériatres m'apparaît peut-être un peu dangereuse si on ne voit dans cette solution que l'investissement additionnel seulement dans les spécialités. Il y a plus que ça. Je pense qu'il faut ventiler et permettre aux universités de se ventiler au niveau des expériences cliniques disponibles pour les médecins en formation.

Donc, si vous me permettez de disposer du procès d'intention de la page 14 qui s'ensuit, quant aux conclusions, je pense que ce sont les réflexions générales qui font partie, à bien des égards, de celles que nous avons entendues des autres fédérations.

Je reviens à la question de la répartition des effectifs sur le territoire. Ce que la loi introduit, je pense que vous l'avez très bien décrit, à cette exception près où on pourrait avoir une divergence d'opinions, soit l'affaire des trois ans. Sur le plan technique, encore une fois, vous avez décrit avec beaucoup de précision le mécanisme. C'est un mécanisme qui, effectivement, introduit un principe de différenciation en fonction du moment d'arrivée dans le système et non pas de l'âge. Je vous rappellerai à cet égard que comme société, à ma connaissance, aucun métier, aucune profession, ne donne le genre de garantie que la médecine donne à ceux qui sortent de nos universités. À la fois en termes de mobilité et d'une garantie d'un certain niveau de revenu.

Je ne prétends pas que c'est facile de s'installer où que ce soit. Je prétends cependant que c'est plus facile que dans à peu près n'importe quel métier du monde, sur notre territoire. Et le niveau de revenu dont on parle, nonobstant le fait que décider de partir en bureau privé implique des dépenses et tout le reste - on est bien conscient de ça, on est au courant, on a lu les mêmes études, même si on n'a peut-être pas la même façon de les présenter que certains des syndicats où il y a peut-être des divergences d'interprétation sur la composante technique - ce niveau de revenu des médecins, de façon générale, quand ils sortent de l'université, est un niveau de revenu qui, pour les trois premières années, est absolument incomparable à celui de quelqu'autre catégorie de professionnels ou de citoyens dans notre société. Je ne prétends pas que l'expertise, la responsabilité qui vient avec ce métier et l'ensemble des contraintes qu'il implique sur le plan du type de vie qu'on y mène quand on le pratique ne rendent pas méritoire et ne justifient pas que la société reconnaisse qu'il y a là un niveau de revenu supérieur à d'autres catégories. Bien au contraire. C'est d'ailleurs vrai dans la plupart des pays du monde, y compris les pays où la médecine est vraiment socialisée. Ne vous en faites pas, ici elle ne l'est pas. Il y a juste l'État qui est payeur, c'est une nuance.

Cependant, il reste qu'à travers le genre de difficultés que nous connaissons comme société en ce moment, et je me permettrai d'être en profonde divergence sur une affirmation que vous faites dans votre mémoire au sujet du fait que la médecine, étant un art autant qu'une science, la notion d'expérience a quelque chose de... j'allais dire le mot anglais, je m'excuse, j'ai bloqué dessus en le prenant en anglais...

Mme Lavoie-Roux: Dites-le donc! Est-ce qu'il y a une loi qui vous en empêche, M. le ministre?

Une voix: La prévention n'a pas de prix...

M. Johnson (Anjou): Non, ça n'a rien à voir. Non, ce n'est pas "la prévention n'a pas de prix", c'est la remarque que vous faites à l'égard du fait que la médecine étant un art, l'expérience n'a pas grand-chose à voir avec la qualité, ou quelque chose comme ça. J'essaie de me souvenir de la phrase. Peut-être pourriez-vous m'indiquer la page, avant que vous disiez que c'est discriminatoire. L'article 4... Ah bon! "La médecine est un art autant qu'une science où l'expérience n'est pas gage de compétence."

Je veux bien tenir ça pour acquis, que l'expérience n'est pas un gage de compétence. C'est peut-être plus facile de régler certains problèmes, je pense, quand on a pratiqué un peu; en ce sens-là, sans prétendre que ce projet introduise, d'une façon systématique, la notion d'un revenu en fonction de l'ancienneté, absolument pas. Le principe que nous introduisons à l'article 4, c'est qu'il n'est pas écrit dans les tables de Moïse qu'en sortant de l'université, on puisse être assuré, parce qu'on est médecin, du niveau de revenu dont il est question, de façon absolue. C'est là qu'est introduite la notion de ces territoires désignés.

Il y a un choix fort simple dans tout ça, c'est la notion de service obligatoire, compte tenu du fait que ça coûte cher, former des médecins dans la société, compte tenu du fait qu'en plus de ça, une fois que les médecins pratiquent leur profession, ça coûte cher à l'État. Encore une fois, je ne prétends pas qu'ils ne rendent pas de services, mais, au fait, ça coûte cher à la collectivité. Ce n'est pas un reproche, c'est un constat. Il y a des pays où ils l'ont réglé comme ça, que ce soit à travers le service militaire ou autrement. Oui, il y a un caractère obligatoire à ça, je n'ai pas retenu cette notion. Pardon, madame?

Mme Lavoie-Roux: Je trouve que vous faites un peu de paternalisme, M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Non, je constate qu'il y a des pays qui ont réglé ça autrement que nous autres et ce n'est pas ça qu'on a retenu.

Mme Lavoie-Roux: Depuis le début, ce ne sont pas vos dernières remarques.

M. Johnson (Anjou): Peut-être est-ce ma façon de répondre à certains procès d'intention qu'il y avait dans ce mémoire. En ce sens, nous n'avons pas retenu cette suggestion. Ce que nous avons retenu comme principe, c'est celui de la différenciation qui fait que, si le médecin exerce son choix, sa liberté de faire un revenu et les conditions plus ou moins difficiles qu'il pense rattachées au niveau du revenu qu'il voudrait faire, qui est celui de ses collègues, il peut le faire dans un cadre où ça rend aussi service à la société, pour un certain nombre d'années. Là, il regagne tous les privilèges de ses collègues.

Je pense qu'il reste un élément de choix important là-dedans. Je pense que c'est peut-être un peu injuste de présenter ça comme étant coercitif comme le service obligatoire. Il reste un élément de choix. On me dira: Quel genre de choix? Quant aux tarifs différentiels, il reste à négocier et, faute d'être négocié, il pourrait être décrété en vertu de la loi, ce qui, incidemment, n'est pas une responsabilité très gaie à porter pour quelque gouvernement que ce soit, celle de décréter des conditions de travail dans une société démocratique. On n'est pas dans les goulags ici. Il y a des contrôles et ça passe à la télévision tous les soirs; il y a des commissions parlementaires où des députés posent des questions. Le pouvoir de décret, dans une société comme la nôtre, ce n'est pas exactement le pouvoir de décret de l'Union des républiques socialistes soviétiques, ça ne se fait pas tout à fait dans le même contexte. Le gouvernement répond de ses décrets.

C'est le contexte dans lequel se présente ce projet. Je pense que, depuis ce matin, on a répondu à certaines de vos inquiétudes, certaines de vos interrogations. Il reste que, sur la question de fond, qui touche la répartition, je présume que vous aurez des choses à nous dire. Merci.

M. David: Nous permettez-vous de répondre aux commentaires du ministre?

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. David.

M. David: Premièrement, vous avez dit vous-même que notre mémoire était entaché au moins d'émotivité, d'aucuns pourraient dire d'extrémisme. Nous avons constaté, en lisant la loi, qu'elle pouvait prêter à interprétation et, quant à lui donner une interprétation, nous lui avons donné celle qui était la plus extrême qu'on pouvait faire. Pour nous, il était nécessaire de dire: Nous craignons maintenant, plutôt que de dire, dans un an: Nous aurions dû craindre.

Deuxièmement, pour ce qui est du "moonlighting", entre les branches, nous avons appris que dans le rapport Landry on suggérait fortement d'utiliser les résidents pour faire du "moon lighting" en régions désignée et que cela réglerait peut-être à court terme la pénurie de médecins. J'aimerais peut-être que le ministre nous en parle.

M. Johnson (Anjou): L'article le

permet, soit dit en passant, à l'établissement. Vous l'avez remarqué?

M. David: Vous n'avez pas spécifié les établissements.

Pour ce qui est des profils de pratique remis aux chefs de département clinique et pour ce qui est aussi des pouvoirs que vous leur donnez, pour en avoir parlé moi-même à certains chefs de département, ils ne sont pas prêts à assumer ce que vous voulez leur voir assumer. Vous dites que vous êtes d'accord pour que les CMD ne souffrent pas d'ingérence extérieure. Je considère que des coupures budgétaires, cela peut être une ingérence extérieure sur l'application des normes par un CMD.

Pour ce qui est de l'erreur pour les résidents et internes, je vous remercie de nous redonner notre représentativité. Pour ce qui est du manque d'expérience dans le début de pratique de la médecine, vous considérez qu'un jeune médecin devrait avoir une rémunération moindre. Nous nous apercevons que c'est le médecin d'une région non désignée qui pourrait avoir une rémunération moindre. Est-ce que nettoyer une oreille vaut 8 $ à Montréal et 12 $ à Chibougamau ou à Mont-Laurier?

Vous dites que la médecine québécoise n'est pas socialisée et que l'État n'est que payeur. J'ai l'impression, avec plusieurs des points qui sont dans la loi, que la médecine devient de plus en plus socialisée. Pour ce qui est des autres commentaires, je laisse à notre conseiller juridique le soin de prendre la parole s'il a des choses à dire.

M. Castonguay (Jacques): J'aurai seulement un commentaire, sur la question du pouvoir de décret. S'il y a un décret, jusqu'à quand peut-il durer? Je ne veux pas entrer dans une argumentation juridique à outrance là-dessus, mais il me semble, d'après la loi en tout cas, telle qu'elle est présentement, qu'il y aurait possibilité de la modifier en cours de route à la fois pour les territoires, à la fois pour les taux et également aussi pour les spécialités. Néanmoins, si ce n'est pas votre intention et si ce n'est pas ce que la loi est supposée dire, à mon sens, elle n'est pas très claire là-dessus.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, à 0 h 45 et après avoir entendu le long laïus du ministre qui, j'en suis certaine, a apaisé tous les esprits, je voudrais simplement remercier l'association d'être venue présenter son mémoire. Je dois dire, et ce n'est pas nécessairement parce que je suis membre de l'Opposition qu'il y a au moins certains principes ou certaines choses que vous avancez qui m'apparaissent exactes.

On n'a pas eu le temps jusqu'à maintenant de discuter des coûts des services médicaux et je pense que vous avancez certaines raisons pour l'augmentation des coûts, par exemple, une plus grande sensibilisation de la population au dépistage, à la prévention. Je n'en fais pas reproche au gouvernement, mais cela fait partie de l'évolution de notre société, toutes les règles gouvernementales ou lois qui, justement, font que ces examens préventifs se multiplient, si on prend tous les cas de santé et sécurité au travail, des retraits préventifs qui exigent des examens médicaux.

Vous avez la même chose dans le domaine scolaire, où on n'accorde même plus foi aux parents si un enfant, comme dans bien des cas, est absent de l'école pour X temps, il faut un certificat médical. Si on veut une exemption de la culture physique, il faut un certificat médical. Enfin, on pourrait multiplier les exemples, les professeurs qui sont absents depuis trois jours. C'est fait pour des raisons administratives et tout cela, ce n'est pas cela que je veux remettre en question, mais je pense que ce sont tous des facteurs qui contribuent et ont contribué à l'augmentation des coûts. Dans bien des cas, je pense que c'est pour le mieux-être de la population; dans d'autres cas, c'est peut-être pour des raisons administratives parfois justifiées, parfois moins justifiées. Mais enfin, c'est la réalité des choses. (0 h 45)

Je pense qu'on ne saurait assez observer le vieillissement de la population, personne n'en est responsable. On va tous y arriver un jour, vous autres après moi, mais, enfin, il reste que cela aussi coûte très cher. L'augmentation des personnes de 80 ans et plus est très rapide par rapport aux 65 ans et plus en termes de taux, évidemment, pour les 80 ans et plus, on requiert... C'est aussi le respect d'une société pour la dignité de la personne. On pourrait ajouter une foule d'arguments.

C'est évident que cela coûte cher - je n'ai pas les outils - mais ce serait peut-être intéressant qu'un jour le gouvernement ou les fédérations médicales, celui qui en aura le moyen, décortique un peu cette espèce de grand énoncé: Les coûts ont augmenté d'une façon prodigieuse. Je pense qu'il y a des raisons. Il ne faut surtout pas dire - je ne pense pas que c'est ce que le ministre a dit, il a même dit que ce n'était pas cela - on est porté à crier dans la population: C'est la faute de la profession médicale. Que quelqu'un me corrige autour de la table: j'ai entendu dire dernièrement qu'un médecin générait 250 000 $ de dépenses. Je pourrais vous dire qu'un député ne génère pas loin de 150 000 $ et je n'ose pas dire ce qu'un ministre génère. Blague à part, je pense que ce serait important de remettre les choses dans un contexte plus réel que celui qu'on

avance comme ci comme ça. D'ailleurs, faut-il rappeler au ministre que le coût des soins de santé au Québec, qui comprennent les soins médicaux et les soins hospitaliers, sont de 3 $ moindres que ceux de la moyenne canadienne et que notre longévité est moins prononcée que celle de la moyenne canadienne. D'ailleurs, le ministre en fait état dans un de ses communiqués de presse. Le ministre n'aime pas mon discours, mais je l'ai écouté longtemps.

Il reste que tout cela mis ensemble, il ne faudrait pas non plus faire de la démagogie sur un groupe en particulier. Cela n'empêche pas le fait qu'on doive avoir une administration rigoureuse, qu'on sévisse contre les abus là où il y en a, mais qu'on n'essaie pas de dire que les citoyens en général abusent, que les médecins en général abusent ou que les autres professionnels de la santé en général abusent. Il y a un peu d'exagération là-dedans.

On vous a dit que vous étiez dans la brigade qui s'était attaquée aux CRSSS. Je ne sais pas si, après mon intervention de tantôt, je fais maintenant partie de la brigade. Ce qui me désole un peu, c'est qu'on s'apprête à accorder plus de pouvoirs aux CRSSS - le ministre l'a dit - en disant: Ils ont une expertise qui est fort utile. C'est vrai qu'ils ont une expérience qui est fort utile. Mais à partir de cet énoncé on dit allègrement et on trouve tout à fait naturel d'y ajouter un paquet d'autres pouvoirs - il ne faut pas que j'exagère moi non plus, pas un paquet, mais de nombreux autres pouvoirs... Je pense qu'il faudrait se demander si une telle brigade qui vient de différents milieux, pas seulement des médecins, et qui va venir demain d'autres groupes - on représente peut-être aussi une petite partie de la population - il faudrait peut-être, sans dire qu'il faut plus de CRSSS, faire un examen sérieux du fonctionnement des CRSSS, des rôles qu'ils doivent remplir, de la façon dont leur rôle a évolué et quelles sont les responsabilités qu'on devrait leur ajouter ou leur soustraire. On est parti allègrement dans une vague - je serai plus ou moins partisane - en disant qu'en période de difficultés économiques comme celle que nous traversons, c'est fort utile d'avoir les CRSSS qui font la besogne, à bien des égards, du gouvernement.

Vous aurez noté - je ne veux pas revenir en détail là-dessus - et le ministre ne peut pas le nier... Le gouvernement peut avoir fait ce choix. C'est lui qui en prend la responsabilité, alors on n'a qu'à l'accepter peut-être, mais il fait certainement un accroc à la libre négociation. On sait fort bien qu'il n'aurait même pas osé présenter les choses qui sont à l'intérieur de cette loi comme, par exemple, le modèle d'expérimentation et le droit qu'il se réserve de signer des ententes pour des bonnes fins.

On pourra peut-être, comme je le disais cet après-midi, le baliser; mais ce sont quand même des accrocs sérieux à la négociation libre.

Je voudrais simplement vous poser une couple de questions. Au moins, je vais donner raison au ministre sur un point; je partage son point de vue, même si c'est assez élégant; la médecine est un art autant qu'une science et l'expérience n'est pas gage de compétence. J'ai, moi aussi, des réserves sur cela, mais je pense que ce n'est pas le fond du problème.

Il y a un point que vous avez soulevé quant à la qualité, c'est-à-dire non pas la qualité, mais l'expérience que vous pourriez avoir si, par exemple, vous n'étiez plus rémunéré pour les actes que vous faites quand vous êtes en résidence. Si j'ai bien compris, je pense que cela se rapporte à l'article 4. C'est à l'article 1, pardon! Vous dites que ceci vous priverait peut-être d'une certaine expérience qu'autrement vous auriez. Je veux savoir si j'ai bien compris. Est-ce qu'il y aurait moins d'actes qui seraient posés, par exemple, pour un diagnostic, un traitement ou quoi que ce soit? Je comprends mal la raison derrière cela. Est-ce que vous pourriez me l'expliquer, s'il vous plaît?

M. David: En fin de compte, comme nous le disions tantôt, on avait retenu deux interprétations. On disait que si c'était la première, à savoir que le actes délégués au résident par le spécialiste... Si le spécialiste qui nous délègue l'acte, il n'est plus payé pour cet acte; il risquerait de le faire lui-même. Donc, à faire moins d'actes, nous deviendrions à la longue probablement de moins bons médecins, puisqu'on apprend par la répétition des actes, mais il semble bien que le ministre m'assure qu'il n'en est pas question. J'accepte donc sa parole là-dessus.

Mme Lavoie-Roux: À la page 10, vous parlez du chef de département qui deviendrait en quelque sorte une espèce de "syndic hospitalier". Est-ce que, dans votre esprit, vous craignez qu'à la longue - à ce moment-ci, vous les connaissez, vos chefs de département; je ne pense pas que vous les affubliez du titre de "syndics hospitaliers", en tout cas d'une façon générale, mais cela peut peut-être arriver dans des cas particuliers - à un moment donné, celui qui est devenu chef de département, probablement à cause de sa compétence ou enfin de sa spécialité, etc., compte tenu du fait qu'il serait rémunéré, pourrait devenir un type de fonctionnaire ou enfin être davantage associé à un fonctionnaire qui, à ce moment-là...

M. Johnson (Anjou): Dans le sens d'un employé à temps plein.

Mme Lavoie-Roux: Pardon?

M. Johnson (Anjou): Dans le sens d'un employé à temps plein.

Mme Lavoie-Roux: Oui, dans le sens d'un employé à temps plein. Là, on prête des intentions, évidemment. Pourrait-il devenir plus soucieux de la norme strictement administrative que de la norme médicale ou de celle sur la qualité de soins? Enfin, cela ne ferait peut-être pas un heureux équilibre ou cela n'harmoniserait pas, pour utiliser un terme du ministre, les deux aspects.

M. David: Je crois qu'il est important que quelqu'un qui a une tâche administrative soit payé pour la faire. Mais là où nous ne sommes pas d'accord, c'est qu'un chef de département puisse avoir un pouvoir unilatéral. Nous savons tous que des conflits de personnalités, cela arrive et il ne faudrait pas qu'une personne qui puisse avoir le droit d'imposer des sanctions puisse le faire sur une question de conflit de personnalités.

Si les sanctions étaient imposées par le CMD ou acceptées par le CMD après que le chef de département les a imposées, ce serait beaucoup plus acceptable, parce que nous croyons à l'autodiscipline à l'intérieur de la profession médicale, mais l'autodiscipline ce n'est pas: Je te surveille; tu me surveilles; on se surveille. C'est: Nous nous surveillons. Donc, une autodiscipline en collégialité et non pas déléguée à une personne.

Mme Lavoie-Roux: C'est plus en fonction de la dimension des sanctions qu'en fonction d'un rôle qui deviendrait trop strictement administratif que vous avez des craintes?

M. David: Je crois qu'un chef de département clinique a un rôle administratif et qu'il doit être rémunéré pour le faire, que ce soit par un salaire fixe ou une vacation. Mais l'important c'est qu'il ne devienne pas l'autorité suprême dans l'hôpital pour ce qui est des sanctions administratives entre autres.

M. Labrecque (Pascal): Est-ce que je peux me permettre une question?

Mme Lavoie-Roux: Oui, s'il vous plaît! Le Président (M. Bordeleau): Oui.

M. Labrecque: Je pense que ce qu'on craint, à l'heure actuelle, c'est qu'éventuellement la loi actuelle fait que le chef de département est nommé par le conseil d'administration, qui sera, par les nouvelles dispositions, sous l'autorité du directeur des services professionnels et qui aura la responsabilité de la gestion des ressources d'une part ainsi que, d'autre part, il aura la responsabilité de surveiller l'activité médicale dans son département. Alors, le chef de département coiffera un peu deux chapeaux; on pense qu'à l'heure actuelle, étant donné que les chefs de département sont des gens désintéressés parce qu'ils n'avaient pas d'incitatifs pécuniaires, ils étaient nommés après consultation, ce qui est encore le cas mais ce n'est qu'un pouvoir de consultation, par les autres membres du département. Tout ceci faisait qu'il devait y avoir une certaine communion d'esprit avec les membres du département et donnait des relations relativement harmonieuses.

Avec les pouvoirs accrus que vont avoir, à l'avenir, les chefs de département qui seront associés à des sanctions administratives, puisque les modes de nomination des chefs de département ne sont pas modifiées - ils sont toujours nommés par les conseils d'administration - on pourrait voir, éventuellement, à long terme, dans une administration placée à la tête des départements cliniques, des personnes qui partagent leur vue de gestionnaires sur les ressources. Ceci pourrait aussi, à ce moment-là - étant donné que l'administration de l'hôpital sera le patron du département clinique, à toutes fins utiles - cela pourrait mettre beaucoup de pression sur le directeur de département clinique, ce qui fera qu'il va délaisser peut-être un petit peu l'importance qu'il accorde à la qualité médicale des actes pour se consacrer plus à la gestion comme vous disiez. D'autant plus qu'il a le pouvoir maintenant d'appliquer les normes administratives qui, elles, ont trait aux deux c'est-à-dire à la gestion des ressources et à l'application de la qualité des normes déterminées par les CMD; on se dit que c'est peut-être dangereux ça.

Ce qu'on préconise c'est qu'à tout le moins, s'il y a des sanctions administratives qui sont appliquées par le directeur de département clinique, elles devraient être entérinées par le Conseil des médecins et dentistes parce que lui, il pourrait dire qu'effectivement ces mesures disciplinaires ont été prises en fonction des normes de la qualité des actes qu'on détermine et non pas en fonction des normes que les gestionnaires impriment au directeur de département. C'est ça la différence qu'on voudrait voir.

Mme Lavoie-Roux: Merci bien.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, excusez-moi, une seconde. J'aimerais simplement que vous vous identifiez, pour le bénéfice du journal des Débats.

M. Labrecque: Oui, je suis le Dr Pascal Labrecque.

Le Président (M. Bordeleau): Hamel?

M. Labrecque: Labrecque.

Le Président (M. Bordeleau): Labrecque.

M. Labrecque: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. On continue.

M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Une remarque sur les derniers commentaires du dernier intervenant; je pense que, sur le plan mécanique c'est assez important qu'on se comprenne bien, sur ce qu'on prévoit quant aux pouvoirs du chef de département.

D'abord le chef de département, en vertu des règlements qui existent depuis toujours, qui remontent à 1973, est nommé par le conseil d'administration après consultation des membres du département et du CMD. Par ailleurs, on prévoit, dans le projet de loi, que des sanctions qui pourraient être prises par le chef de département le seront absolument comme si c'était dans une bulle de verre, il devra aviser le Conseil des médecins et dentistes ce qui implique une participation des pairs encore une fois.

Maintenant, quelles sont ces sanctions et, dans le cadre d'application, quelles choses doit-on sanctionner? Je pense qu'on a eu, tout à l'heure, un exposé particulièrement intéressant, de ce que cela peut être comme contenu, par des gens qui ont beaucoup d'expérience au niveau de la corporation. D'abord, les règles de soins ou normes, on les appellera comme on voudra, exemple: Est-ce que oui ou non on hospitalise les gens dans le département de chirurgie pour la chirurgie élective, le samedi? C'est un exemple. Ceci n'est pas exposé par un administrateur ni par un technocrate ou un fonctionnaire de Québec ou du CRSSS, c'est le CMD qui a élaboré des normes quant à l'utilisation des ressources ou quant à la nécessité ou la possibilité d'hospitaliser les fins de semaine pour les fins de chirurgies électives. C'est un exemple très concret. (1 heure")

Deuxièmement, il y a des sanctions, ces sanctions seront élaborées par le CMD. Elles devront faire l'objet d'une approbation c'est-à-dire l'ensemble des règles applicables. Je donne un exemple: une sanction pourrait être dans le cas... Cela n'a rien à voir intrinsèquement avec la qualité de l'acte qui est un mandat, qui existe en ce moment, des CMD et qui va continuer d'exister; cela va continuer d'être appliqué par les CMD, mais on parle de ce type de règles de soins ou de normes ou d'utilisation des ressources.

Les sanctions sont élaborées encore une fois en tant qu'appareil de sanctions et appliquées par le chef de département, le cas échéant. Encore une fois, ce n'est pas suspendu dans les airs, ce n'est pas le pouvoir arbitraire absolu, c'est dans un contexte de collégialité, pas nécessairement au niveau de l'application de chacune des décisions, mais au niveau de l'élaboration et de la mécanique normale; ça reste des êtres incarnés. Celui qui se conduirait d'une façon si déviante, si aberrante que celle qu'on pourrait invoquer, comme une espèce de dictateur, j'ai l'impression qu'il passerait par là à la prochaine étape. Ce sont des êtres humains qui agissent ensemble, c'est un partage assez équilibré qui permet de faire jouer une relation normale entre des êtres humains qui occupent des fonctions de responsabilité dans une organisation médicale, à l'égard des médecins et entre eux, sans intervention d'un tiers, bureaucrate ou autre.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, à moins que vous ayez un commentaire final. M. Labrecque.

M. Labrecque: II y a une question que je voudrais poser au ministre au sujet de l'article 4. Au deuxième alinéa, il confirme les pouvoirs qu'il avait de négocier des primes d'éloignement, si on veut, ou des primes d'encouragement ou de rémunération différentielle en région éloignée ou en région mal desservie. C'est un outil qu'il possède déjà depuis plusieurs années et comme plusieurs intervenants l'ont souligné aujourd'hui, qui n'a pas été appliqué; on peut se demander pourquoi.

Maintenant que le ministre introduit un nouvel outil probablement très efficace pour combler les besoins en périphérie, ce qui est le pouvoir par décret de déterminer une rémunération différentielle telle que les nouveaux médecins n'auront pas d'autre choix que d'aller s'installer en périphérie, on se demande quelle insistance il mettra maintenant pour arriver à une entente, au deuxième alinéa, qui va prévoir une rémunération différentielle pour les médecins en périphérie, ceux qui sont déjà installés ou ceux qui vont s'installer, alors qu'à toutes fins utiles on n'aura plus besoin de cette prime positive, si on veut, pour assurer une présence médicale suffisante dans les territoires qui sont actuellement mal desservis.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Deux choses et au-delà des considérations purement techniques. Le deuxième paragraphe, une entente peut prévoir une rémunération différente, vise en pratique essentiellement à assurer que l'entente puisse prévoir, sur une base négociée, mais on donne l'assise juridique à

la possibilité que ça puisse être un tarif différentiel pour ceux qui sont dans le système. Donc, la notion de prime attachée non pas à un individu, docteur Untel qui va à Amos dans telle catégorie de territoire, telle catégorie prévue dans les ententes dans le cas du montant et dans la décision gouvernementale, dans le cas de la détermination des territoires...

Deuxième question. Quel intérêt le gouvernement va-t-il avoir à négocier? Il y en a un intérêt, parce que si on voulait être méchant comme vous semblez laisser entendre qu'on voudrait l'être, et imposer des tarifs tels qu'à toutes fins utiles le jeune médecin est obligé d'aller dans les territoires éloignés, je vous dirai que ce n'est pas une décision facile à prendre par décret encore une fois et que l'intérêt que le gouvernement a, comme les fédérations, de négocier cela, c'est de n'être ni l'un ni l'autre dans la situation odieuse de justifier qu'un geste unilatéral a dû être posé.

Si vous voulez, en relation de travail, je vous dirais que c'est un peu une approche de "last offer"; je souhaite que ce type de disposition soit négocié. Dans le cas des primes pour ceux qui sont dans le système, c'est clair que cela va être négocié et il n'y aura jamais de règlement tant que ce ne sera pas négocié. Il y a un pouvoir de décret attaché dans le cas des nouveaux qui viennent dans le système pour obliger les parties à être dans une situation où elles n'attendront pas deux ans à la table de négociation, parce que si on ne met pas cette espèce d'entonnoir sur le plan juridique, tout ce qu'on a à faire, c'est de faire ce qui s'est passé au Québec notamment quant à la désignation des territoires. Je ne dis pas que c'est la faute des fédérations ou du ministère, mais peut-être de la mécanique elle-même. Je ne voudrais pas blâmer les fédérations intrinsèquement là-dessus; c'est peut-être le système qui a fait que, comme c'était entièrement négociable et que personne n'était pressé pour négocier, cela n'a pas donné de désignation. Ce qu'on voudrait éviter dans le cas du tarif différentiel, c'est cela. Comme ce qu'on évite au niveau de la désignation en disant que le gouvernement va être obligé de prendre sa décision et ses responsabilités dans ce domaine-là. Mais l'objectif étant d'y parvenir par voie de négociation, l'autre c'est un instrument s'il n'y en a pas.

Je voudrais vous remercier, Dr David, ainsi que vos collègues. D'abord, merci beaucoup d'avoir attendu et encore une fois nos regrets d'avoir dû vous mettre dans cet entonnoir dans le temps aussi, encore une fois. Je présume qu'on entendra parler de vous à nouveau et vous verrez qu'on a été à l'écoute de votre mémoire. Je vous remercie.

M. David: Merci.

Mme Lavoie-Roux: Merci bien.

Le Président (M. Bordeleau): Merci également, Dr David, au nom de la commission.

Je pense que nous avons bien fait notre menu de la journée.

Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si on l'a bien fait, mais...

Le Président (M. Bordeleau): Avant d'ajourner pour demain, je pense qu'il serait peut-être intéressant pour les membres de la commission de savoir ce qui est prévu au menu pour demain. Ce sont sept organismes, je vais vous dispenser de les lire, par exemple, donner les noms, sinon on commence par la Fédération des médecins spécialistes...

Mme Lavoie-Roux: On pourrait peut-être les entendre tout de suite...

M. Johnson (Anjou): On ne peut pas commencer tout de suite?

Le Président (M. Bordeleau): L'heure de la commission, ce serait vers 11 h 30, après la période des questions, qui sera déterminée par le leader en Chambre demain matin.

Donc, la commission va suspendre ses travaux sine die, en fait, avec la nouvelle commande de demain.

(Suspension de la séance à 1 h 07)

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