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(Onze heures cinquante-huit minutes)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, mesdames et
messieurs!
La commission parlementaire des affaires sociales reprend donc ses
travaux pour recevoir les mémoires concernant le projet de loi no
27.
Les membres de la commission pour ce matin sont: M. Boucher
(Rivière-du-Loup) remplacé par Mme Lachapelle (Dorion); M.
Brouillet (Chauveau) remplacé par M. Lafrenière (Ungava); Mme
Dougherty (Jacques-Cartier), M. Houde (Berthier), M. Johnson (Anjou), Mme
Juneau (Johnson), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Leduc (Fabre), M. Rochefort
(Gouin), M. Sirros (Laurier).
Les intervenants sont: M. Beauséjour (Iberville); M.
Bélanger (Mégantic-Compton) remplacé par M. Rivest
(Jean-Talon), Mme Harel (Maisonneuve), M. Kehoe (Chapleau), Mme Lachapelle
(Dorion); M. Lafrenière (Ungava) remplacé par M. Brouillet
(Chauveau), M. Laplante (Bourassa), M. Mathieu (Beauce-Sud); M. O'Gallagher
(Robert Baldwin) remplacé par M. Lincoln (Nelligan).
M. Rochefort: Correction.
Le Président (M. Bordeleau): Oui.
M. Rochefort: Le député de Chauveau ne sera
remplacé par le député d'Ungava que cet après-midi.
Pour ce matin, le député de Chauveau demeure membre de la
commission.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous souligne que cela me
prend un consentement pour changer les membres en cours de séance, mais
je pense que cela ne posera pas de problème. On enlève la
substitution.
Mme Lavoie-Roux: De toute façon, du moment qu'on n'arrive
pas dix de chaque côté, il n'y a pas de problème.
Le Président (M. Bordeleau): De toute façon, je
vous souligne, M. le député de Chauveau, que je vous avais mis
intervenant à la place de M. Lafrenière (Ungava), ce qui revient
à peu près au même, sauf pour un vote.
Donc, voici le menu de la journée. Je vous donne l'ordre dans
lequel on devrait entendre les mémoires. Le premier, ce matin, s'appelle
la Fédération des CLSC du Québec, suivi cet
après-midi probablement du Comité provincial des malades, au
début de l'après-midi; l'Association des chirurgiens-dentistes du
Québec, l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec,
l'Association des centres d'accueil du Québec, la
Fédération des associations des étudiants en
médecine du Québec, l'Association québécoise des
pharmaciens propriétaires, l'Association des pharmaciens des
établissements de santé, le Congrès juif canadien,
l'Association de santé publique, onzième, l'Association des
cadres intermédiaires des Affaires sociales inc. Là, on en a
remis pour demain.
M. Johnson (Anjou): Non, cela est au dépôt. C'est au
dépôt cela ici.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord, c'est pour
dépôt; d'accord, il n'y a pas de témoignage.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je pensais qu'on venait et qu'on
commençait tout de suite. Hier, il me semble qu'on s'était
entendu pour que le Congrès juif canadien et l'Association de
santé publique soient appelés demain matin et je les retrouve sur
la liste aujourd'hui. Hier, vous m'aviez dit...
M. Johnson (Anjou): II y en aura demain.
Le Président (M. Bordeleau): Je veux faire juste une mise
au point. Je vous ai donné les dix organismes qu'on avait prévus
à notre menu pour aujourd'hui, sauf que, comme vous venez de le dire,
hier on s'était entendu pour en reporter deux ou trois demain, mais je
n'ai pas eu la confirmation jusqu'à maintenant. Je pourrai vous la
donner tantôt dans quelques minutes. Je voulais simplement qu'on puisse
vous donner l'ordre du jour qu'on nous avait remis hier, qui est officiel, et
auquel on pourra faire des modifications. (12 heures)
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis prête
à commencer, mais je voudrais
avoir la confirmation avant une heure.
M. Johnson (Anjou): Alors, je vous la confirme tout de suite pour
ce qui me concerne...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, si vous avez
des détails...
M. Johnson (Anjou): ... pour qu'on puisse commencer. Demain, il y
aurait l'Association des centres d'accueil, qui veut bien accepter de
témoigner demain plutôt qu'aujourd'hui, et l'Association de la
santé publique, d'accord?
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Je
pense que nous pouvons débuter maintenant et écouter le
mémoire de la Fédération des CLSC du Québec,
représentée par son président et porte-parole, M. Pierre
Ouimet. Je les prierais de s'avancer. Si c'est bien le cas, je demande donc
à M. Ouimet de nous présenter les personnes qui
l'accompagnent.
Fédération des CLSC du
Québec
M. Ouimet (Pierre): Merci, M. le Président. Je voudrais
d'abord vous présenter, à ma gauche, le vice-président de
la fédération, M. Roland Paradis; à ma droite, M. Maurice
Charlebois, directeur général; à sa droite, M. Michel
Lemay, conseiller à la Fédération des CLSC.
M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les
députés, le projet de loi no 27 met de l'avant certains principes
fondamentaux sur lesquels nous voulons, dès maintenant, dire que nous
sommes pleinement d'accord, savoir une affirmation la plus explicite possible
de la responsabilité du ministre à l'égard de la
santé publique, l'introduction de tous les instruments
nécessaires à une répartition équitable et
rationnelle des effectifs médicaux sur le territoire du Québec,
et aussi, une meilleure clarification du champ des négociations avec les
professionnels de la santé.
Il s'agit là de principes sur lesquels nous nous sommes souvent
appuyés, à la fédération, pour réclamer une
organisation plus rationnelle des services de santé au Québec. Je
m'excuse...
Mme Lavoie-Roux: ... votre deuxième principe...
M. Ouimet: Le deuxième? Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Ouimet: L'introduction de tous les instruments
nécessaires à une répartition équitable et
rationnelle des effectifs médicaux sur le territoire du
Québec.
Nous voulons donc, dès le départ, porter un jugement
d'ensemble favorable au projet de loi et à l'esprit qui l'anime à
l'égard des questions citées plus haut. Nous serions très
déçus - et nous insistons là-dessus - si la version finale
de la loi atténuait la portée de ces principes. Quant au
mémoire que nous présentons maintenant, il s'attarde surtout
à signaler un ensemble de modifications que nous souhaiterions voir
apporter aux diverses lois touchées par le projet de loi no 27. Il
contient donc des réactions aux dispositions mêmes de cette loi,
de même que des propositions par rapport à des sujets qu'elle
n'aborde pas.
Nos propositions sont organisées autour de trois thèmes
principaux, premièrement, les modifications au cadre juridique en vue
des négociations avec les professionnels de la santé;
deuxièmement, la gestion du réseau et troisièmement, la
gestion des établissements.
Je ne crois pas que notre mémoire soit très long. Je me
permettrai donc de le lire, il a une quinzaine de pages.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Avant que vous ne commenciez, M. Ouimet, si
vous permettez, je voudrais vous demander, tout en sachant qu'il n'est pas
là, peut-être de concentrer sur l'essentiel, puisque nous devrons
probablement suspendre nos travaux pour dix minutes, à 12 h 15, à
cause d'un vote à l'Assemblée. Nous reviendrons par la suite. Si
nous pouvions revenir pour l'échange et les questions, ce serait
l'idéal. Nous ne sommes pas maîtres de cet horaire, c'est la
Chambre qui en est maître.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je ne voudrais pas que vous voyiez mon
intervention comme voulant faire des difficultés. Je ne l'ai pas lu ce
mémoire, on vient de me le remettre. J'aimerais qu'on puisse passer
à travers, même si vous deviez passer des paragraphes.
M. Johnson (Anjou): Oui, absolument.
Mme Lavoie-Roux: On travaille dans des conditions qui sont
extrêmement difficiles.
Le Président (M. Bordeleau): Vous pouvez continuer, M.
Ouimet. Allez-y.
M. Quimet: Je peux y aller. Concernant les modifications au cadre
juridique en vue des négociations avec les professionnels de la
santé, la première partie du projet de loi no 27 prévoit
une série d'amendements à la Loi
de l'assurance-maladie en vue, selon l'intention déclarée
du ministre des Affaires sociales, de clarifier le cadre juridique des
prochaines négociations avec les professionnels de la santé. Nous
sommes fort concernés par ces négociations, et ce, à deux
niveaux: d'abord, comme employeurs, les CLSC, comme vous le savez, embauchent
à l'heure actuelle au-delà de 350 médecins dont la
quasi-totalité sont à salaire. Les conditions de travail qui
seront faites à ces employés nous intéressent au plus haut
point puisqu'elles détermineront, pour une grande part, la nature des
relations que nous aurons à entretenir avec eux.
Par ailleurs, on sait que la convention collective des professionnels de
la santé, particulièrement des médecins, constitue
beaucoup plus qu'une entente sur les conditions de travail. Il s'agit en fait
d'une sorte de loi sur les services privés de santé au
Québec. Dans la mesure où l'action de ces services privés
est déterminante, tant sur la réalisation de la politique de
santé que sur l'évolution absolument fantastique des coûts
de la santé au Québec depuis quelques années, nous
considérons de la plus haute importance de suivre de très
près ces négociations.
C'est donc à la lumière de ces deux préoccupations
que nous allons analyser les clarifications du cadre juridique des
négociations préconisées par le projet de loi no 27, et
pour cela, nous considérerons la question de la pénurie de
médecins en région éloignée, deuxièmement,
la question de la pratique médicale en institution, et celle enfin du
champ de négociation.
Les médecins en région éloignée. La loi
clarifie le cadre et le champ de la négociation pour cette question
brûlante. Il est évident que, derrière les amendements
proposés, il y a ce principe fondamental que le ministre des Affaires
sociales est la première autorité pour définir les
priorités de services en fonction des besoins de la population et qu'il
ne s'agit pas d'une matière à négociation sujette aux
intérêts de groupes particuliers. Nous sommes donc pleinement
d'accord avec le fait que le ministre désigne, en dernière
analyse, les districts jugés insuffisamment pourvus en professionnels.
Cependant, nous souhaiterions que, lors des consultations que le ministre
entend faire au préalable, il rencontre les représentants
autorisés des établissements en plus des représentants des
professionnels. Nous croyons que les établissements sont largement
habilités à émettre des avis sur cette question.
Concernant la rémunération éventuelle des
professionnels travaillant dans les régions désignées,
nous sommes d'accord avec le fait que la loi permette de réaliser des
ententes plus avantageuses. Nous insistons cependant sur le fait qu'il ne
s'agit pas d'une solution exclusive. Il y a plusieurs de nos membres des
régions éloignées aux prises avec des difficultés
de recrutement, comme vous le savez, qui nous indiquent qu'il n'y pas qu'un
seul facteur influençant la décision des professionnels d'aller
travailler en région éloignée et d'y rester un certain
temps. Il y a aussi des facteurs comme la formation, les relations avec
l'extérieur, etc.
Il ne faudrait donc pas utiliser cette solution comme une panacée
surtout que les professionnels bénéficient à l'heure
actuelle d'une situation de libre marché qui les avantage
démesurément. On croit qu'une saine combinaison de mesures de
contingentement et de divers autres incitatifs constitue probablement la piste
à privilégier pour régler ce problème. Quoi qu'il
en soit, il est important de se doter d'outils comme le fait la loi.
Nous sommes d'accord également avec la formule
préconisée à l'égard des jeunes médecins
pour qu'ils se dirigent vers les régions éloignées. On
trouve que la solution avancée constitue en quelque sorte un compromis
entre l'idée du service civique obligatoire et le libre marché
actuel. De plus, nous croyons normal qu'un mécanisme permette de
trancher la question en cas d'incapacité de s'entendre avec les
syndicats de médecins sur le niveau de rémunération dans
de telles circonstances. Nous croyons toutefois qu'il serait
préférable d'introduire un mécanisme d'arbitrage avec
décision exécutoire plutôt qu'un pouvoir
discrétionnaire du ministre. Cela nous apparaîtrait plus
compatible avec l'économie générale des relations du
travail dans les secteurs public et parapublic.
Maintenant la question de la pratique médicale en institution. Le
cadre juridique actuel, autant par la Loi de l'assurance-maladie que par la Loi
sur les services de santé et les services sociaux, contribue à
maintenir une confusion inacceptable entre les rôles et les pouvoirs des
médecins d'une part, et ceux de la structure hiérarchique des
établissements d'autre part.
À cet égard, nous considérons que la loi no 27
n'améliore pas les choses pour les établissements que nous
représentons, les CLSC, et nous espérons que le
législateur profite de cette occasion pour apporter d'autres amendements
qui nous apparaissent essentiels. Autrement dit, on voudrait voir
apparaître certains amendements qui n'apparaissent pas à la loi.
On essaie brièvement d'expliquer quelle est cette problématique
vécue par les CLSC; elle pourrait se décrire de la façon
suivante: La Loi sur les services de santé et les services sociaux
impose aux CLSC le même cadre et les mêmes structures que dans les
hôpitaux pour l'encadrement de la pratique médicale malgré
que la taille des CLSC, que la nature des activités des CLSC, que
leur
fonctionnement soient complètement différents à
plusieurs égards.
Nous sommes ainsi tenus de former un Conseil des médecins et
dentistes dès que trois médecins oeuvrent dans un CLSC. Le
Comité consultatif du personnel clinique existe aussi chez nous comme
dans les centres hospitaliers. Par la loi, les médecins ne font pas
partie de ce dernier comité mais siègent à son
exécutif. Si l'on revient au CMD, à partir d'un certain nombre de
médecins dans un établissement, un comité exécutif
est formé. N'oublions pas que ces divers comités constituent
aussi des collèges électoraux pour l'élection de deux
postes d'administrateurs au conseil d'administration.
Si nous considérons maintenant l'entente avec les
médecins, particulièrement le chapitre portant sur la pratique
médicale en établissement, nous voyons que les médecins,
indépendamment de la structure organisationnelle du CLSC, se regroupent
en département de médecine générale, se nomment un
chef qui a certains pouvoirs et certaines obligations à l'égard
du CMD.
Nous devenons littéralement envahis par les comités et
structures de toutes sortes. L'enchevêtrement des pouvoirs, rôles
et fonctions de tous ces comités ou postes désignés,
sème la plus totale confusion par rapport à la simple question
suivante: "Qui peut faire quoi?"
Cette confusion est accentuée par le fait que l'article 1 de la
loi actuelle stipule en toutes lettres que les médecins ne font pas
partie du personnel de l'établissement. Cela nous pose de sérieux
problèmes de relations du travail dans la mesure où l'entente
stipule que le conseil d'administration a le pouvoir d'embaucher, d'affecter et
de congédier un médecin. Comment peut-on exercer ces pouvoirs sur
des gens qui ne sont pas nos employés?
Il faut se rappeler que dans un CLSC le personnel médical est
salarié, que ce personnel est embauché pour travailler à
la réalisation de programmes ou à des services précis,
qu'il est très souvent intégré dans des équipes et
ce, au même titre que tout autre employé. Il faut comprendre
enfin, et c'est là que la situation devient un peu farfelue, qu'un CLSC
embauche, en moyenne, trois ou quatre médecins de telle sorte que nous
nous retrouvons, en définitive, dans la situation où, pour
occuper tous les rôles décrits plus haut, il nous manque
d'acteurs. Ce sont toujours les mêmes individus qui jouent
simultanément tous ces rôles et la direction de
l'établissement en vient à ne plus savoir à qui elle a
affaire.
Nous croyons important que le législateur profite de la
présente révision de la Loi sur les services de santé et
les services sociaux pour régler cette situation.
Nous demandons, en conséquence, que l'article 1 stipule
clairement que, dans les
CLSC, les médecins font partie du personnel de
l'établissement et qu'aucune obligation ne soit faite aux CLSC de
constituer un conseil des médecins et dentistes.
La question du champ de négociation. La clarification du cadre
juridique des négociations avec les professionnels de la santé ne
pouvait se faire sans aborder cette question. Nous avons vu un peu plus haut
que, dorénavant, la désignation des zones éloignées
ne sera plus sujette à négociation. Il est une autre disposition
qui touche le champ de négociation et qui apporte, selon nous, une
clarification fondamentale et à laquelle nous voulons manifester tout
notre appui. C'est la précision apportée à l'article 4,
1er alinéa. (12 h 15)
L'amendement ainsi proposé à la Loi sur
l'assurance-maladie vise à limiter le champ des négociations avec
les professionnels au strict domaine des conditions de travail. C'est, selon
nous, un principe fondamental qui fait défaut dans la loi actuelle et
qui permet aux ententes de déborder largement sur toutes sortes de
questions et qui, en définitive, contribue à accentuer les
problèmes identifiés plus haut dans un partage des rôles et
pouvoirs dans les établissements entre médecins et
administrateurs.
L'absence de ce principe dans la loi actuelle permet de plus - et c'est
là un problème encore plus important - d'entretenir deux
réseaux de santé au Québec. En effet, bien au delà
de la détermination des conditions de travail, les négociations
antérieures avec les professionnels de la santé ont abouti
à des ententes portant d'une part, sur des salaires et autres avantages
et d'autre part, sur le financement du réseau privé de
santé. Il y a probablement beaucoup de gens qui ne se
représentent pas avec clarté ce phénomène.
L'ambiguïté dans le contexte actuel, c'est que sous le couvert
d'une négociation sur la rémunération, on inclut en fait
tout le financement des polycliniques. Ainsi, si un médecin - pour
prendre un exemple - reçoit 10 $ pour un acte, environ 3,50 $ servent
à financer ses installations physiques.
Doit-on comprendre que l'amendement proposé aura une
portée telle que tout l'aspect financement des installations et du
fonctionnement des polycliniques ne sera plus automatiquement
intégré dans la convention collective? Doit-on comprendre que le
réseau privé de santé commencera à être
assujetti à un ensemble de règles s'apparentant à celles
que doivent suivre les établissements publics? Question que nous avions
déjà posée au minisommet en juin dernier. Lorsqu'un CLSC
est implanté cela découle d'une étude rigoureuse des
besoins de la population. La localisation du CLSC répond aussi à
des critères très précis; quant à son budget de
fonctionnement, il s'appuie sur la mise en oeuvre d'une programmation
précise. Au niveau des équipements, immobilisation, des
critères tout aussi rigoureux doivent être suivis. Ce sont
là des exigences, à notre avis, d'une saine utilisation des fonds
publics.
Au niveau des services privés, la situation est tout autre; quand
on regarde la concentration de cliniques en milieu urbain on comprend que leur
développement a été sauvage et a répondu aux
mêmes critères que ceux utilisés par les chaînes de
restaurants ou autres chaînes du genre. Or, il s'agit là de fonds
publics. Dans la conjoncture actuelle il est important que le gouvernement
introduise des contrôles. La présente loi vise à
régler plusieurs épi-phénomènes liés aux
entreprises privées de santé, comme par exemple, la question des
urgences à domicile ou des transports ambulanciers.
À notre avis, il faudra tôt ou tard s'attaquer non
seulement à l'épiphénomène mais au
phénomène lui-même et ce ne sera pas uniquement par une
refonte des modes de rémunération. Il faut être bien
conscient que tous les services publics sont en pleine compression
budgétaire à l'heure actuelle, et que les règles du jeu
à l'égard des médecins font qu'une partie importante des
fonds publics échappe complètement à cette vague
d'austérité. Si la portée de l'amendement n'est pas celle
que nous souhaitons, il faudra bien conclure que la loi continuera à
entretenir les mêmes ambiguïtés et les mêmes
contradictions.
La deuxième partie de notre mémoire concerne la gestion du
réseau et peut-être qu'on pourrait...
Est-ce que j'ai le temps, M. le Président.
M. Johnson (Anjou): Jusqu'à temps que les cloches
sonnent.
M. Ouimet: On attend que les cloches sonnent, comme à
l'école.
M. Johnson (Anjou): Je ne parle pas de celles de Noël.
M. Ouimet: Alors, la deuxième partie, la gestion du
réseau. Le premier point que nous désirons soulever, par rapport
à la volonté d'améliorer la gestion du réseau, et
ce au risque de nous répéter est lié à la
discussion qui précède. Nulle part dans la loi on ne
prévoit la possibilité pour les instances de coordination et de
concertation d'influer sur les réseaux privés de santé.
Nous croyons essentiel que la loi permette une telle éventualité
en élargissant les pouvoirs des conseils régionaux sur cette
question. Quant à ce qui est proposé pour les réseaux
publics, nous aborderons successivement à la question des modifications
à la composition des conseils d'administration et des CRSSS, la question
de leur nouveaux pouvoirs et la question des fusions.
D'abord la composition des conseils d'administration des CRSSS. On est
d'accord avec l'allégement préconisé au niveau du conseil
d'administration des CRSSS. Disons qu'il nous semble que le CRSSS sera une
instance fort importante, non seulement pour la planification des services au
niveau régional, mais aussi pour l'organisation rationnelle de ces
services. En conséquence, son conseil d'administration devient une
instance vraiment privilégiée de participation, de concertation
et de décision, cela va jusqu'à maintenant. Mais, il me semble
que deux groupes doivent prioritairement se retrouver sur ces conseils
d'administration. Il s'agit d'une part des citoyens bénéficiaires
ou usagers des services et les gestionnaires. Le projet de loi fait une bonne
place au premier groupe, les usagers, mais évacue le groupe des
gestionnaires, ce qui nous apparaît inacceptable. Il nous apparaît
tout aussi inacceptable que l'on prévoie un siège au conseil des
médecins et dentistes. Nous ne voyons pas pourquoi une catégorie
d'intervenants serait privilégiée, si l'intention est
d'intégrer le réseau privé, le collège
électoral devrait plutôt être les cliniques. En
conséquence, nous demandons que les représentants des quatre
catégories d'établissements soient des cadres supérieurs
et que l'on retire le représentant du conseil des médecins et
dentistes.
Le pouvoir des CRSSS. La loi consacre des choses qui leur étaient
déjà déléguées en vertu de décrets,
de règlements ou de directives. L'orientation générale
préconisée, en est une qui limite de plus en plus l'autonomie des
établissements pour les subordonner à une nécessaire
cohésion régionale. Nous avons toujours analysé le
phénomène dit de décentralisation du ministère des
Affaires sociales vers les CRSSS comme la reprise en main par le MAS, par
paliers intermédiaires interposés, du contrôle des
établissements. La loi 27 confirme cette analyse. Nous assistons en fait
à une déconcentration administrative des pouvoirs du
ministère des Affaires sociales. À notre grand étonnement
aujourd'hui, nous remarquons que le déplacement de pouvoir se fera des
établissements vers les CRSSS, plutôt que du MAS vers ces
derniers.
Quoiqu'il en soit, nous reconnaissons quand même la
nécessité d'une meilleure concertation régionale et nous
considérons que les pouvoirs prévus à l'article 38 sont
extrêmement larges et ne font aucunement référence à
la concertation, ce qui mériterait d'être ajouté.
Par rapport au pouvoir d'organisation des services à la
population, il y aurait lieu d'inscrire au paragraphe 3 de l'article 38, que
les CRSSS doivent tenir compte de la
vocation spécifique de chaque établissement, dans
l'accomplissement de cette tâche. Depuis quelques années, nous
avons été souvent témoins de volonté
régionale de tout chambarder le réseau par la base, sous
prétexte de rationalisation. Il nous apparaît fondamental que la
loi protège la spécificité des instruments collectifs
qu'on s'est donnés, au niveau des services de santé et des
services sociaux.
Quant aux pouvoirs prévus aux paragraphes 1 et 2 de l'article 38,
ils nous posent de sérieuses questions, tels qu'ils sont formulés
actuellement, par rapport à la survie d'organisations comme la
nôtre. Depuis plusieurs années, ces établissements, par le
biais de la libre association, se sont donné plusieurs services communs,
comme l'aide conseil en relations du travail, en gestion, en programmation.
Notre question: est-ce que la portée de ces amendements conduirait
à l'évacuation des associations d'établissements,
dès l'instant qu'un conseil régional décide de
développer un tel service? Si c'est le cas, cela nous semble
inadmissible et nier une réalité existant depuis
déjà longtemps et qui, de plus, semble satisfaire, au plus haut
point, les établissements. En conséquence, nous demandons de
retirer le mot "exclusive" de l'article 38.
Par ailleurs, la loi consacre, par l'article 39, la venue des CRSSS dans
la dispensation de services directs à la population. Nous avons
déjà eu l'occasion, M. le Président, de nous élever
contre une telle éventualité, lors de mémorables
discussions l'an dernier, entourant la prise en charge par le réseau
public des services d'urgence à domicile, à Montréal. Nous
continuons de croire, M. le Président, que les CRSSS devraient confier
à des corporations indépendantes la dispensation de tels
services. Je crois que le ministre des Affaires sociales affirmait, il y a
quelques jours, lors du sommet socio-économique sur les personnes
handicapées - je l'ai noté - que les conseils régionaux ne
dispensaient pas de services. Ils pourraient, à court terme, agir en
suppléance et la loi devrait être très précise
à ce niveau.
Il nous semble que la vraie mission du CRSSS en est une de coordination
et de concertation et que pour jouer pleinement son rôle, il ne faut pas
qu'il se laisse entraîner dans les services. Nous avons tous vu comment
d'autres organismes qui devaient faire de la planification et de
l'évaluation ont eu de la difficulté à remplir leurs
mandats quand ils étaient détournés vers les services, par
suppléance ou autrement.
Les fusions. Au niveau d'une meilleure articulation du réseau,
nous croyons que des améliorations importantes sont prévues.
Ainsi, que le ministre rende plus faciles les fusions d'établissements
ou de services ne saurait à notre avis que contribuer à
l'amélioration du système. Ces fusions doivent toutefois
respecter la spécificité des établissements. Encore une
fois, il nous apparaîtrait important de spécifier que de telles
fusions se feraient en respectant la vocation des établissements. De
plus, la loi devrait obliger le ministre à consulter les
établissements concernés au préalable.
Enfin, nous terminons avec la troisième partie, la gestion des
établissements. Dans la gestion des établissements, il y aura
deux parties, d'abord la composition des conseils d'administration, et enfin,
des points divers.
Concernant la composition des conseils d'administration, nous
accueillons très favorablement le fait que la loi garde une place
importante aux usagers dans les CLSC. L'expérience, de même que la
nature de l'établissement montrent que dans le réseau, c'est
probablement le seul endroit où la participation du citoyen peut
être significative. À cet égard, l'idée de
substituer les représentants de bénéficiaires aux usagers
dans les établissements hospitaliers est, à notre avis, fort
heureuse.
Il nous semble cependant que la définition d'usager aurait
avantage à être révisée. Plusieurs de nos membres
considèrent en effet que la loi devrait référer simplement
aux citoyens du territoire plutôt qu'aux usagers. Les CLSC offrent une
foule de services à la collectivité par les médias
très souvent ou par d'autres moyens qui ne sont pas
individualisés. Il nous semble que la notion d'usager mériterait
d'être élargie. Dans la mesure où le CLSC sera à la
basse du réseau social desservant les territoires correspondant aux MRC,
il y aurait lieu, dès à présent, de l'ouvrir sur toute la
communauté.
Quant aux autres membres du conseil d'administration des CLSC, nous
demandons de retirer le représentant du CMD - c'est une simple
concordance - dans la mesure où nous préconisons l'abolition de
cette instance dans les CLSC. La représentation des autres
catégories d'établissements nous apparaît être une
idée fort intéressante, mais pas très fonctionnelle.
L'expérience nous enseigne que ce n'est pas tellement au niveau du
conseil d'administration que la dynamique de rapprochement et de
complémentarité se joue. Il faut être conscient que pour
placer des représentants partout, soit sur plus de 1000 conseils
d'administration, les établissements ne pourront déléguer
dans tous les cas des représentants dynamiques et très
articulés. (12 h 30)
Nous souhaitons enfin que le représentant des organismes
bénévoles nommé par le CRSSS provienne du territoire du
CLSC. La loi devrait être explicite à ce niveau.
Enfin, un tas de points divers que j'énumère rapidement.
À notre avis, il y
aurait lieu de changer la date des élections pour les tenir
à un moment où les citoyens sont plus susceptibles d'être
disponibles, comme en avril par exemple. Un autre point, les
établissements ne devraient pas être tenus obligatoirement
à une assemblée publique annuelle. La participation à de
telles assemblées est très aléatoire, pour employer un
euphémisme. Cette obligation pourrait être remplacée par la
production d'un rapport annuel dont un résumé serait
publié dans les médias locaux. Une assemblée devrait
être tenue si 50 citoyens le demandent.
Un autre point. Pour éviter les situations de conflits
d'intérêts, la loi devrait interdire explicitement l'accès
à la présidence du conseil d'administration d'un
établissement aux employés y oeuvrant. Il faudrait amender
l'article 66a à cet effet. Nous avons des cas dont on pourra parler
tantôt, au moment de la période des questions.
Concernant les plans d'organisation, nous considérons que, de par
les nouveaux pouvoirs réglementaires que se donne le ministre, il y a
une ingérence excessive dans la gestion interne des
établissements. En effet, que le ministre définisse et les
services qu'un établissement doit offrir et la structure et les
qualifications des chefs de service nous indique que la marge de manoeuvre sera
très mince pour les administrateurs. Nous croyons que cette disposition
est incompatible avec l'esprit de la loi qui crée des
établissements autonomes et que le statu quo devrait être
maintenu.
Nous demandons aussi que la possibilité faite aux CRSSS de
rémunérer les administrateurs soit élargie aux
établissements du réseau. Il y a plusieurs citoyens qui
consacrent beaucoup de temps à la gestion des établissements et,
si le gouvernement est prêt à reconnaître une forme de
compensation pour ceux qui oeuvrent dans les CRSSS, il doit l'étendre
à tous.
Enfin, un dernier petit point. Nous considérons que les
informations auxquelles les chefs de département clinique et les CMD
auront accès en vertu de l'article 20 devraient également
être accessibles aux administrateurs et directeurs
généraux.
Sur ce, M. le Président, je termine. Dans les deux autres pages,
vous retrouverez un tableau synthèse des modifications que nous avons
demandées. Je ne crois pas nécessaire, étant donné
le peu de temps dont vous disposez, de lire ce tableau synthèse. Je vous
remercie beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M. Ouimet.
M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Merci, M. Ouimet, de votre exposé et
aux gens de la fédération d'avoir fait cet effort. On sait que
vous n'êtes pas sans ressources pour faire des efforts de cette
qualité.
Je vois là-dedans deux choses. Je vois d'abord ce que sont les
revendications des CLSC, ce que doit connaître fort bien d'ailleurs le
député de Laurier, depuis que les CLSC existent à cette
notion de médecine privée, de médecine publique, du
développement des polycliniques. Votre mémoire va très
loin. Je dois dire que cela ne m'étonne pas dans la mesure où je
connais la position de la fédération sur ces questions. C'est un
débat assez fondamental que la loi cependant ne prétend pas
trancher d'une façon qui vous satisfasse, nous le savons.
Deuxièmement, je vois aussi une série de commentaires sur
des choses, notamment des suggestions extrêmement intéressantes au
niveau de la participation et de certaines restrictions dans un esprit -
puisque vous en êtes le laboratoire de cela depuis une dizaine
d'années et que cela commence à être un laboratoire assez
gros d'ailleurs avec une centaine d'éléments - de participation
des citoyens, notamment par un mécanisme qui semble restrictif, mais
qui, je pense, a un but objectif, par exemple, que le président du
conseil d'administration ne puisse être un salarié de
l'établissement. Je pense que votre objectif, c'est de favoriser la
participation des citoyens, contrairement à l'apparence. Cela semble
restrictif, mais je pense qu'il y a un objectif de participation des
citoyens.
Mme Lavoie-Roux: II y a trop de dangers de conflits
d'intérêts, c'est dans ce sens que je le prends.
M. Johnson (Anjou): C'est ça et, en ce sens-là, je
trouve que c'est une suggestion extrêmement intéressante; je pense
qu'elle va dans le sens du genre de réflexion que les CLSC font
habituellement. J'aimerais peut-être vous entendre parler d'un ou deux
sujets, comme la répartition des médecins, des effectifs sur le
territoire. Vous dites dans le fond ce qu'on retrouve dans le projet de loi,
c'est quelque chose entre le statu quo et le service civique obligatoire.
J'aimerais vous entendre un peu là-dessus.
Le Président (M. Bordeleau): M. Ouimet.
M. Johnson (Anjou): Moi aussi, je dois vous dire... alors,
ça tombe bien.
M. Ouimet: Je pense que certains organismes, si je me souviens
bien, dont même la Corporation des médecins, à un moment
donné, ont déjà préconisé le service civique
obligatoire des médecins comme un solution. Je pense que, partout, on
entend dire que les fédérations de médecins
semblent elles aussi d'accord avec le fait qu'on puisse retrouver de
façon équitable des médecins dans les régions moins
bien pourvues, mais on se rend compte qu'après un certain nombre
d'années de négociations, on ne peut pas régler ce
problème par la négociation. C'est pour ça qu'on dit que
nous sommes d'accord avec l'intention du projet de loi, à savoir que le
ministre puisse désigner un certain nombre de régions, puisqu'il
est responsable de la santé publique au Québec, et que, s'il se
rend compte que certaines régions sont mal pourvues en médecins,
il puisse, par des mécanismes appropriés, désigner ces
régions et donner des incitatifs pour permettre que des médecins
s'y rendent. Vous faites probablement allusion au paragraphe où on dit
qu'il y aurait peut-être d'autres moyens que la
rémunération. On fait allusion à la formation, à
d'autres choses; peut-être M. Charlebois voudrait-il en dire un peu plus
là-dessus. C'est l'expérience que nous avons eue dans les
régions éloignées.
M. Charlebois (Maurice): La solution du service civique
obligatoire a circulé dans divers organismes, je dois dire qu'elle a
même circulé dans nos rangs, parmi les établissements, il y
a quelques années. Quand on va dans les régions
éloignées, quand on regarde les situations que les gens y vivent,
évidemment, le service civil obligatoire pourrait peut-être leur
amener des médecins, mais il y a aussi comme une espèce de
respect que ces populations voudraient bien avoir. Quand des gens viennent
oeuvrer chez eux et que ces gens sont forcés d'y aller, ça
crée comme une espèce de climat, si on veut, entre la relation
qu'il peut y avoir entre les professionnels et la population, une espèce
de frustration de la population. Nos membres ne voient pas finalement cette
éventualité comme étant très avantageuse pour eux,
de telle sorte que, même dans les régions éloignées,
même parmi nos établissements, il y a tout un éventail
finalement de solutions entre le service civique obligatoire et le libre
marché qu'on trouve à l'heure actuelle. Finalement, les gens, au
fond ce qu'ils voudraient, c'est que le professionnel choisisse de venir chez
eux. évidemment, pour quelque citoyen que ce soit, son coin de pays,
c'est toujours le plus beau. Au fond, ce qu'ils veulent, c'est que les gens
viennent. Dans la loi, actuellement, il y a des incitatifs, évidemment,
ça en prend, sauf qu'il y a en fin de compte la possibilité pour
le médecin de choisir. En ce sens-là, je pense, que c'est une
solution assez intéressante et respectueuse aussi des populations
éloignées.
M. Johnson (Anjou): Merci de vos commentaires. Je dois vous dire
qu'ils ne me surprennent pas, j'avais l'impression que c'est ce que vous
vouliez signifier par ça. Je dois vous dire d'ailleurs que c'est le
genre de motif et d'approche que nous partageons dans ce projet, cette notion
d'un choix qui reste là, qui dynamise la relation entre celui qui s'en
va dans ces territoires et la population qui l'accueille, puisqu'il ne passe
pas les huit premiers mois à être nostalgique d'être parti
et les huit derniers mois à se demander où il va retourner. En ce
sens, ça nous apparaît assez fondamental comme
mécanisme.
Il y a quelques questions qui touchent d'autres aspects très
précis. Je comprends toute la question, votre vision du médecin
comme faisant partie de l'établissement, etc., je sais quelle position
vous défendez là-dessus, je vous dis cependant que s'il n'y a pas
de CMD, même si on comprend qu'au niveau des nombres, c'est ennuyeux et
que votre solution ne manque pas de cohérence sur le plan administratif,
compte tenu de la dimension de vos CLSC, mais s'il n'y a pas de CMD, comment va
se faire l'évaluation du contrôle de l'acte médical et de
l'exercice de la profession, ce qui est le mandat dans le fond des CMD, ce qui
est fondamental dans la qualité de l'exercice?
Le Président (M. Bordeleau): M. Ouimet.
M. Ouimet: Ecoutez, quand il y a moins de trois médecins,
comment se fait le contrôle de l'évaluation? Là où
il n'y a pas de CMD comme dans les polycliniques, comment se fait le
contrôle de l'évaluation? C'est tout, je pense. Effectivement, il
y d'autres professionnels chez qui il n'y a pas d'équivalent de CMD;
comment se fait le contrôle de la qualité des soins offerts par
d'autres types de professionnels?
Enfin, je pense que les questions répondent par
elles-mêmes.
M. Charlebois: On peut peut-être ajouter un
élément de réponse aussi aux questions.
M. Johnson (Anjou): Vous avez le droit de vous poser des
questions et d'y répondre.
Le Président (M. Bordeleau): M. Charlebois.
M. Charlebois: J'ajouterais sur cette question que, quand il y a
quatre, cinq ou six médecins, il reste que cela se fait entre quatre ou
cinq personnes, toujours les mêmes et évidemment, on peut se poser
des questions là aussi, par rapport à la qualité.
M. Johnson (Anjou): Vous reconnaîtrez avec nous la notion
fondamentale à l'égard du contrôle de l'acte médical
et de l'exercice de la profession qui ne peut être fait que par des pairs
en vertu de nos lois,
en vertu de la tradition et en vertu du bon sens même dans le cas
de cette profession en particulier. C'est théoriquement vrai dans les
cas des autres aussi, mais dans celui-là, en tout cas, cela s'impose
sûrement compte tenu du degré d'expertise que ça exige.
C'est pour ça que la Corporation des médecins est là
d'ailleurs.
Deux questions: Une pour savoir pourquoi quatre représentants au
CRSSS seraient des cadres supérieurs, plutôt que des citoyens, qui
sont dans les établissements? Deuxièmement, pourquoi limiter les
possibilités de fusion aux établissements de même
nature?
Le Président (M. Bordeleau): Oui.
M. Ouimet: Concernant les fusions, notre mémoire ne dit
pas de limiter les fusions à des établissements de même
nature. On dit: Respecter la spécificité des vocations des
établissements.
M. Johnson (Anjou): D'accord. Je comprends ce que vous voulez
dire.
Vous dites, dans le fond, qu'il ne s'agirait pas d'empêcher un
centre d'accueil et un hôpital par exemple, de fusionner ou un CL5C et un
centre d'accueil...
M. Ouimet: Non, pas du tout.
M. Johnson (Anjou): ...mais de respecter la vocation de la
bâtisse ou de l'installation physique.
M. Charlebois: Excusez! Plus que ça. Plus que le respect
de l'installation et de la bâtisse, c'est le respect des missions. Il y a
eu, à travers l'histoire du réseau ces dernières
années, une foule de cas, dont certains ne sont pas encore totalement
réglés, de fusion où la dynamique même de deux
établissements de nature complètement différents a
conduit, dans certains cas, à la dénaturation, d'une certaine
manière, de la mission de l'un. Je me réfère aux
expériences de CH et CLSC, par exemple, dans certaines
circonstances.
M. Johnson (Anjou): ... se cache. M. Charlebois: Non,
non...
M. Johnson (Anjou): II y a des cas plus célèbres
que d'autres.
M. Charlebois: Je n'ai pas donné de nom. Finalement, la
seule chose que l'on voudrait voir apparaître dans la loi, c'est une
espèce de mesure de sécurité, c'est que des fusions se
fassent mais en respectant les missions et les vocations, en s'assurant que les
missions et les vocations vont continuer à survivre et il y a des
conditions pour ça.
D'ailleurs, il y a une politique du ministère qui a reconnu
ça.
M. Johnson (Anjou): Maintenant, le fait que vous souhaiteriez
voir quatre représentants qui soient les cadres supérieurs des
établissements aux CRSSS.
M. Charlebois: Par rapport à cette question, actuellement
au conseil régional le conseil d'administration est assez volumineux
mais il y a possibilité, pour les administrateurs des
établissements, les gestionnaires, j'entends, les directeurs
généraux ou cadres supérieurs d'y être. La
compréhension qu'on a des amendements proposés, c'est qu'il n'y
aurait plus, au conseil régional, que des citoyens, que des usagers et
les gestionnaires comme tels, ceux qui ont administré les boîtes
ne pourraient pas apporter leur contribution à cette table, une table
qui va devenir et qui devient de plus en plus fort importante au niveau de la
coordination des services. Mais aussi, le sens dans lequel va le projet au
niveau de l'organisation des services...
On ne voit pas dans la loi à partir de quel principe on
évacue de cette table la contribution des gestionnaires. Nous autres, on
reconnaît qu'au conseil d'administration du conseil régional tout,
comme dans un CLSC, il puisse y avoir une représentation fort importante
de citoyens, majoritaire, mais mettre autour de la table des gens qui ont la
responsabilité quotidienne de gérer des programmes dans l'une ou
l'autre des catégories d'établissements. (12 h 45)
On n'a pas déposé, finalement, dans notre mémoire
écrit de proposition bien concrète de répartition des
postes. On a quand même fait certains exercices, je vais quand même
en soumettre un qu'on a fait qui nous apparaissait intéressant. Outre la
représentation des maires et des organismes socio-économiques, il
pourrait y avoir des représentants des usagers ou des citoyens, si on
modifie la loi, et deux représentants des bénéficiaires.
Je pense qu'il y a un amendement qui est apporté à la loi pour
donner une place à ces gens-là, aux institutions. Alors, ce
serait peut-être intéressant qu'il y ait de la concordance au
conseil régional, qu'il y ait donc des représentants de citoyens
et des représentants de bénéficiaires, le
représentant des bénévoles et, ensuite, la
représentation des catégories d'établissements pourrait
être des gestionnaires, des directeurs, par exemple, ou des cadres
supérieurs. Ceci conduirait, en bout de ligne, à quelque chose
comme sept représentants de citoyens, étant entendu que les
représentants des socio-économiques, les deux
représentants d'usagers, les deux représentants de
bénéficiaires et le bénévole sont des citoyens
bénéficiaires des services, et quatre gestionnaires.
M. Johnson (Anjou): Et un représentant des CMD, mais pas
dans votre mémoire.
M. Charlebois: Pas dans notre mémoire, je parlais de notre
hypothèse.
On pense que ça ferait en sorte qu'il y ait un certain
équilibre autour de la table parce qu'il ne faut pas se leurrer, s'il y
a un conseil d'administration composé en totalité de citoyens
avec deux intervenants du réseau, c'est-à-dire un
représentant des médecins et le directeur général
du CRSSS qui va avoir le contrôle de l'orientation, etc., des politiques
qui vont se faire au niveau du conseil régional, c'est bien
évident qu'il n'y a pas de contrepoids, simplement au niveau des
connaissances de la gestion, des contraintes de la gestion. C'est notre
approche.
M. Johnson (Anjou): Je vous remercie, M. Ouimet et M. Charlebois,
de vos éclaircissements.
J'aurais peut-être quelques autres questions, mais je vais
permettre à l'Opposition d'intervenir.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux aussi
remercier la Fédération des CLSC pour son mémoire qui,
compte tenu du manque de temps que vous avez eu, est quand même pas mal
substantiel et touche à tous les aspects.
La première question que je voudrais vous poser: Est-ce que sur
ce mémoire-là vous avez pu consulter les membres, tous les
membres de votre fédération?
M. Ouimet: Je m'excuse, madame, je n'ai pas bien compris.
Mme Lavoie-Roux: J'ai la mauvaise habitude de ne pas me servir de
mon micro, je m'excuse. Je vous demandais si, dans l'élaboration de ce
mémoire-là, vous avez eu le temps de consulter les membres de
votre fédération.
M. Ouimet: Oui, nous avons eu le temps de consulter les
principales instances de notre fédération, de notre structure, et
je pense que ça reflète pour l'essentiel vraiment ce que nos
membres pensent. On aurait souhaité, sur un certain nombre de
détails, avoir une consultation beaucoup plus poussée, mais,
compte tenu des délais, on n'a pas pu le faire.
Mme Lavoie-Roux: Quand vous dites les principales instances,
c'est qui?
M. Ouimet: C'est le comité exécutif. Ce sont
également d'autres tables, qu'on appelle un comité aviseur, qui
regroupent des représentants de toutes les régions du
Québec, qui ont été saisies du projet de loi. On a
ramassé les principales suggestions qui nous étaient faites et
qu'on retrouve dans le mémoire.
Mme Lavoie-Roux: Parce que vous avez en fait de 80 à 90
membres dans votre fédération, alors ce n'est quand même
pas un très grand nombre. J'imagine que les problèmes doivent
varier passablement d'une région à l'autre, sans aucun doute.
Il y a deux parties dans votre mémoire.
Il y a la partie qui touche toute la réorganisation du
réseau et celle qui touche la négociation. Enfin, il y a une
dernière partie qui touche davantage, peut-être pas des
détails, mais des choses qui apparaissent, par rapport à ces deux
grands points, plus secondaires.
Dans la partie qui touche les négociations, vous soulevez des
questions assez importantes vis-à-vis de l'existence du réseau
public des soins médicaux et du réseau privé et public, le
privé se référant aux cliniques privées. Je vous
pose la question, je ne pense pas que vous ayez la réponse, mais si je
la pose, c'est que le ministre aura le temps d'ici la fin de la commission
parlementaire de nous trouver les réponses. Parce que j'imagine,
même s'il dit que vous étiez assez bien outillé, qu'il
l'est davantage ou que le ministère l'est davantage.
Est-ce qu'à votre connaissance des études ont
été faites - je n'aime pas beaucoup le terme, mais on va
l'utiliser, c'est quand même un terme qui correspond à la
réalité - quant à la rentabilité du médecin,
en service public, se référant à un CLSC et en clinique
privée? Je parle de la rentabilité au point de vue de la
quantité des services qui sont rendus. Evidemment, cela se
réfère aussi à des ressources financières. Je vais
vous dire au point de départ que je ne suis pas, et là-dessus
c'est un point sur lequel je m'entends avec le ministre d'ailleurs, cela me
fait plaisir qu'il s'entende avec moi, là-dessus...
Pour moi, la question du salariat des médecins, ce n'est pas une
question idéologique, c'est une question de savoir de quelle
façon assure-t-on les meilleurs services quant à la
quantité et quant à la qualité, dans une formule ou dans
l'autre. Voici ma question précise. Avez-vous des études
là-dessus, puisque vous semblez les voir un peu comme des
compétiteurs, non sans raison, du point de vue des services à
rendre dans un milieu donné? Dans quelle mesure aussi ont-ils nui ou
collaborent-ils avec des CLSC dans un sens de services complémentaires
ou de suppléance des CLSC?
À cet égard-là, est-ce que des médecins
salariés dans les CLSC offrent des services, par exemple, en fin de
semaine? Dans quelle mesure assurez-vous les services à la population,
sinon 24 heures sur 24, mais sur des périodes plus étendues?
M. Ouimet: Je peux répondre en...
Le Président (M. Bordeleau): M. Ouimet.
M. Ouimet: ...partie à votre dernière question sur
l'accessibilité et M. Charlebois pourra vous répondre sur la
question des études sur la rentabilité.
Sur l'accessibilité, il y a une image persistante que les CLSC ne
sont ouverts que de 9 heures à 5 heures, mais des études
récentes nous montrent que, sur les deux dernières années,
à partir de 1979, l'accessibilité des CLSC va en s'accroissant.
Il y a plusieurs CLSC qui sont ouverts le soir, il y en a un certain nombre qui
sont ouverts les fins de semaine et surtout, dans les régions rurales,
certains CLSC, pour certains services, sont ouverts sept jours par semaine.
Mme Lavoie-Roux: Vous n'avez pas ces chiffres avec vous?
M. Ouimet: Je ne les ai pas avec moi. Nous avons
préparé une petite étude, simplement pour le maintien
à domicile, et on se rend compte qu'il y a vraiment un accroissement de
l'activité de ce service en particulier. On a également des
chiffres sur l'ensemble des services et ce, en nous basant sur des états
de situations préparés par le ministère des Affaires
sociales.
M. Johnson (Anjou): Je peux confirmer à la
députée de L'Acadie les propos que tient M. Ouimet à cet
égard, le problème étant, dans le cas des CLSC, pas
uniquement, mais assez largement celui des ressources. Il est bien
évident qu'à bien des endroits les CLSC seraient peut-être
ouverts 7 jours par semaine, 24 heures par jour, s'il y avait plus de
ressources pour le faire, des équipes plus grandes. Il y a aussi
ça dont il faut tenir compte. Ils ne sont pas totalement maîtres
de ça, dans la mesure où les ressources qu'on leur accorde sont
limitées, d'une part, mais il y a effectivement un accroissement, y
compris au niveau de la disponibilité des services médicaux,
spécifiquement depuis un certain nombre d'années. Bien
qu'à certains endroits - je pense que la fédération, en
tant que fédération, ne peut pas en être responsable -mais
à certains endroits, ça prend un bon bout de temps avant qu'il y
en ait qui comprennent que c'était peut-être important.
M. Ouimet: Je voudrais ajouter qu'à notre congrès,
il y a deux ans, c'était un des objectifs principaux, d'inviter nos
membres à une plus grande accessibilité des services. Il y a
vraiment des efforts réels qui ont été faits.
Concernant l'autre point...
M. Charlebois: C'est maintenant partagé par l'ensemble des
membres, majoritairement par les congrès, c'est la façon dont ils
s'expriment, et il y a une tendance acceptée et marquée vers une
plus grande accessibilité. C'est clair que, bien qu'on puisse avoir
décidé ça un bon matin, le lendemain il n'y a pas
nécessairement toutes les ressources nécessaires pour avoir le
personnel pour ouvrir après 17 heures ou la fin de semaine.
Cependant, je pense que c'est important de signaler ici que la tendance
est prise et qu'il y a un consensus très large dans les CLSC pour se
diriger vers une plus grande accessibilité. C'est un peu une discussion
qui est réglée, quant à nous, au niveau de nos
membres.
Toujours sur la question de l'accessibilité des CLSC, il y a donc
beaucoup de choses qui peuvent circuler. Mais il faudrait aussi aller voir
l'accessibilité des polycliniques. Bien sûr, par le nombre, elles
sont accessibles, mais est-ce que les polycliniques sont toutes accessibles en
dehors de 9 heures à 17 heures, du lundi au vendredi et la fin de
semaine, la nuit, etc.? Ce n'est pas pour rien que des entreprises comme
Télé-Médic ont eu un succès fou. Il faudrait aussi
faire une certaine réflexion là-dessus et aller voir de ce
côté.
Concernant les études sur la productivité...
Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse, M. Charlebois.
On m'annonce de la part du leader qu'il faut se rendre en Chambre
immédiatement.
Mme Lavoie-Roux: J'ai cru comprendre qu'il indiquait qu'il n'y
avait pas de vote.
Le Président (M. Bordeleau): Tantôt, il nous disait
cinq minutes, et maintenant... Continuons dix minutes.
Mme Lavoie-Roux: Les cloches n'ont pas sonné, M. le
Président.
M. Charlebois: Je vais essayer de répondre aux questions
qui m'ont été posées. On marquera une étape.
Concernant les études sur la productivité des services en CLSC
par rapport à la productivité des services en polyclinique...
Mme Lavoie-Roux: Des services médicaux, parce que cela a
trait...
M. Charlebois: Oui, des services médicaux. J'ai bien
compris des services médicaux. Finalement, votre question se rapporte
carrément à la quantité des services. À ma
connaissance, il n'y a pas d'études comparatives qui ont
été faites et ce serait relativement difficile d'en faire, parce
que la nature de la pratique en CLSC est assez différente.
Au-delà des services dits individuels, presque tous les médecins
en CLSC sont amenés à oeuvrer à des programmes
d'intervention plus large, d'intervention communautaire. Comment se mesure la
productivité? On ne peut plus comparer les pommes avec les oranges
à partir d'un certain moment. Par ailleurs, il y a eu des études
qui ont été faites sur la productivité en clinique
uniquement, en comparant les oranges entre elles. Je vous rappelle des passages
du rapport Houle qui a été publié l'année
dernière où on a mis carrément le doigt sur une
pseudoproductivité. Je vous fais grâce finalement de toute
l'analyse du rapport, mais c'était explicite, en toutes lettres.
À ce moment, on n'accepte pas, pour deux raisons, parce qu'on compare
des oranges avec des pommes, on compare très sommairement les CLSC et
les polycliniques, et deuxièmement, on n'accepte pas de prendre comme
point de référence la pseudoproductivité qui existe dans
le secteur privé.
Concernant le salariat, à savoir si c'est une panacée, ce
n'en est pas une, loin de là. Les CLSC ne préconisent pas le
salariat universel pour les médecins. Cela n'apparaît pas dans
notre mémoire, cela n'apparaît pas non plus ailleurs dans notre
discours. On est cependant très critique et dans la foulée,
finalement... Je ne dirais pas dans la foulée, parce qu'on était
critique au préalable et on l'est aussi dans la foulée du rapport
Houle. On a fait, l'année dernière, les mêmes constats que
ceux qui ont été faits il y a dix ans, par rapport au mode de
rémunération prévalant à l'heure actuelle. J'ai
nettement l'impression que, dans les prochaines négociations ou celles
qui s'ouvrent, ces discussions vont faire l'objet de débats.
Mme Lavoie-Roux: II y avait une question précise. Dans
quelle mesure, au point de vue des services médicaux... Parlons de
services cliniques pour le restreindre et l'éloigner de la dimension que
vous donnez aux médecins en CLSC. Les cliniques privées ou,
comment les appelle-t-on? Non pas les mono...
M. Johnson (Anjou): Ce sont les polycliniques.
Mme Lavoie-Roux: Les polycliniques. Comment les uns par rapport
aux autres se complètent-ils? Est-ce qu'ils ne se complètent pas
du tout, si c'est du chevauchement ou s'ils jouent un rôle de
complémentarité, par exemple, là où le CLSC,
quelles que soient les raisons, financières ou autres, ne peut pas
fonctionner après telle heure, en fin de semaine, etc., parce que c'est
encore un nombre minime de CLSC qui fonctionnent sept jours par semaine, vous
le savez fort bien?
M. Charlebois: Est-ce qu'ils se complètent? Ils se
complètent sûrement sur le plan des services individuels. Il y a
deux sources de services pour le citoyen. Strictement à ce niveau,
à mon point de vue, les deux systèmes doivent se
compléter. Par ailleurs, on demande si on est en concurrence avec eux ou
s'ils sont en concurrence avec nous...
Mme Lavoie-Roux: Non, ce n'est pas en termes de concurrence,
c'est que, dans le fond, vous dites: II faut rationaliser les polycliniques. Je
pense que c'est assez clair dans votre mémoire. Je pense que tout le
monde est pour la vertu, tout le monde est pour la rationalisation, mais il
faut aussi penser en fonction de la disponibilité des services et, quand
on parle de services médicaux, ce sont quand même des services
essentiels pour la population.
Dans quelle mesure peut-on arriver à ceci sans ajouter des
coûts supplémentaires? Est-ce que vous avez fait une analyse plus
profonde, sauf ce que vous dites en termes peut-être pas très
clairs dans votre mémoire, mais qui y est quand même? (13
heures)
M. Charlebois: La discussion qu'on fait dans le mémoire
autour de la question de la limitation du champ de négociation, on ne
l'a pas tellement faite en termes de concurrence entre le CLSC et une clinique.
Ce qu'on introduit surtout comme élément de discussion - on
souhaiterait que par la loi on réussisse à régler ce
problème - c'est le fait qu'à travers tout le réseau des
services privés, à travers tout le financement de la pratique
médicale privée, il y a non seulement le financement des salaires
et des conditions de travail, mais il y a aussi le financement d'installations
pour au-delà de 200 000 000 $, si on ne se trompe pas. C'est deux fois
le budget des CLSC. Ce qu'on souligne, c'est que ce montant commencerait
à être assez important pour que le ministère des Affaires
sociales ait un contrôle dessus. Si on s'est soucié d'introduire
des contrôles sur le développement sauvage des services
médicaux à domicile, c'est parce qu'on avait l'impression qu'il y
avait une perte ou qu'il y avait finalement absence de contrôle et que
les gens s'en allaient n'importe où avec cela. Il s'agissait, si je ne
me trompe pas, à Montréal, d'une somme de 4 000 000 $ ou
de 5 000 000 $.
Par exemple, le transport ambulancier. Si on veut le contingenter, le
rationaliser, c'est encore une fois parce qu'il s'agit des fonds publics. C'est
quoi le montant total, je n'ai pas ce chiffre-là. À
côté, il y a 200 000 000 $ en installations qui ne sont pas
utilisés rationnellement et on ne peut pas nous le faire croire. Il y a
trois ou quatre cliniques dans une même rue des fois. On va faire des
études pendant des mois et des années pour savoir où on
situe deux CLSC pour ne pas qu'ils se dédoublent, on va faire des
comités de fou pour savoir si le DSC va dédoubler le CLSC, mais,
tout ça, c'est absolument marginal par rapport à cette somme qui
est dépensée. Au fond, on voudrait que ce qui apparaisse dans la
loi, ce soit la possibilité pour le ministère des Affaires
sociales, premier responsable de l'application, de l'organisation et du
développement d'une politique de santé, d'avoir un minimum de
contrôle sur ce volet-là.
M. Ouimet: À financement égal, contrôle
égal.
Le Président (M. Bordeleau): Je suspendrai les travaux
d'ici quelques minutes, quitte à reprendre cet après-midi.
M. Charlebois: C'est bien plus cette question-là,
finalement, qu'on soumet.
Mme Lavoie-Roux: À la page 6 - il y aurait plusieurs
questions à vous poser - mais à la page 6 vous dites que
désormais l'amendement proposé à la loi visera à
limiter le champ des négociations avec les professionnels au strict
domaine des conditions de travail. Vous dites que c'est une bonne chose, parce
que les ententes permettent de déborder largement sur toutes sortes de
questions. Les médecins sont venus ici et nous ont dit que dans les
dernières ententes on a réussi a négocier
l'activité professionnelle qui, maintenant, du moins selon
l'interprétation que les médecins nous en ont donnée,
sortirait de l'entente. Dans la loi, il y a plusieurs données, plusieurs
dimensions de l'activité professionnelle qui sont incluses actuellement.
Mais est-ce que les travailleurs, où qu'ils soient - je pense aux
travailleurs de l'enseignement et j'imagine que c'est la même chose du
côté du monde infirmier - est-ce que, à moins qu'on ne se
comprenne pas sur ce que sont les conditions de travail, est-ce que les
conditions de travail ne débordent pas toujours sur l'activité
professionnelle? Par exemple, on dit: Vous allez avoir tant
d'élèves selon que vous ayez tel groupe, tel type d'enfants...
enfin, je comprends mal, parce que dans le fond tous les autres travailleurs
professionnels des autres champs d'activité ont aussi cette dimension
dans leur négociation de l'activité professionnelle.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Ouimet.
M. Ouimet: Nous, ce n'est pas ce qu'on dit. Il est évident
que, dans l'enseignement on va normaliser sur le nombre d'élèves,
mais nous ce qu'on dit c'est qu'on doit s'en tenir strictement aux conditions
de travail du médecin et ne pas financer, ne pas ajouter à cela
ce qu'on appelle les frais afférents.
Mme Lavoie-Roux: ...l'équipement dont vous parliez tout
à l'heure.
M. Ouimet: Le 10 $ et le 3,50 $.
M. Charlebois: Actuellement, on partage ce que vous dites.
Effectivement, dans les conventions collectives il y a des définitions
de tâches, il y a des définitions de postes et je ne pense pas que
le message de la Fédération des CLSC aujourd'hui soit de traiter
le corps médical différemment des autres employés des
réseaux public et parapublic, loin de là. Alors ça ne se
rapporte pas. Finalement, dans votre question, vous avez dit que ce sont les
médecins qui disent que ça va réduire leur liberté
au niveau professionnel, ce n'est pas nous qui avons dit cela. Il ne faudrait
pas nous prêter cette...
M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, ce que la
fédération nous dit c'est que non seulement ils ne voudraient pas
qu'ils soient traités différemment des employés des
réseaux public et parapublic, ils voudraient en faire des
employés des réseaux public et parapublic. Je pense que c'est un
peu...
M. Charlebois: Voilà vous avez bien compris, justement on
n'a pas eu de réponse à cette question.
M. Ouimet: Est-ce que les médecins seront
considérés comme du personnel de l'établissement du moins
pour les CLSC en ce qui nous concerne? Pourrait-on avoir vos commentaires
là-dessus? On demande que les médecins soient
considérés, par un amendement, comme du personnel de
l'établissement.
Mme Lavoie-Roux: On nous demande une opinion. C'était une
question que j'allais...
M. Charlebois: C'est un point un peu fondamental. Je pose la
question au ministre.
M. Johnson (Anjou): J'ai vu l'intérêt du
député de Laurier pour cette question, j'aimerais l'entendre
répondre là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: Non, non, ne tombe pas dans le piège.
M. Sirros: C'est lui qui exerce le pouvoir et c'est à lui
que la question est adressée,
M. Rochefort: Vous ne voulez pas qu'il parle.
Mme Lavoie-Roux: Non, non, il peut parler mais la question est
adressée au ministre, c'est le ministre qui va décider au bout de
la ligne.
M. Johnson (Anjou): Non, c'est la commission qui va
décider donc, le député de Laurier peut parler.
Mme Lavoie-Roux: Bon, c'est la commission qui va décider.
Fort intéressant!
M. Charlebois: Disons qu'on invite la commission à
étudier cette proposition de notre part très très
attentivement parce qu'elle crée effectivement des problèmes
majeurs dans les CLSC compte tenu du fait que, dans les CLSC, les
médecins sont dans un autre cadre de travail. Ce n'est pas un
hôpital, ils sont aussi des salariés et c'est important.
M. Johnson (Anjou): Je pense encore une fois à cette
question que vous soulevez à laquelle le projet de loi ne répond
pas. Il ne répond pas à certaines de ces questions parce que
c'est un choix. Dans ce cas-là spécifiquement, je dois dire
cependant que la réflexion que vous faites sur le petit nombre, la
nature de l'activité, le fait qu'ils soient à peu près
tous à salaire - dans le cas de l'entente d'ailleurs avec les
fédérations - les met presque dans un lien de préposition
comme "employés" et cela a été consenti, accepté
par les fédérations dans le cadre de négociations et
d'ententes. Il reste qu'à cause de la notion de contrôle de la
qualité de l'acte professionnel et de l'exercice professionnel, ils
restent soumis aux principes généraux qui gouvernent la pratique
quant à l'application de la loi de la corporation, d'une part, et,
deuxièmement, à la notion des conseils de médecins et
dentistes des établissements au sens du chapitre 48.
Je dois dire qu'il y a là une zone nettement ambiguë, et je
comprends les difficultés que ça pose aux CLSC. Je suis certain
que vous comprenez également les difficultés que cela pose au
législateur, sans présumer finalement de quelque chose qui est en
cheminement et qui jusqu'à maintenant est intervenu par entente, mais
dont toutes les conséquences juridiques et administratives n'ont pas
été consacrées. Ce que vous dites, c'est: Consacrez donc
les conséquences juridiques et administratives de cela dans les
CLSC. Si vous le disiez pour les hôpitaux, je dirais que je ne le
pense pas. Comme vous le dites pour les CLSC, vous invoquez le fait de la
petite dimension du CLSC, des petites unités, de la nature du travail,
de l'interdépendance, de la participation aux programmes où il y
a d'autres professionnels, et on comprend le problème que cela vous
pose.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier,
M. Sirros: Ma réponse sera un peu plus courte. Je dirais
que je suis d'accord sur le principe de cette idée, surtout d'accord sur
la notion d'abolir le CMD dans les CLSC. Peut-être qu'il y aurait lieu de
réexaminer cela si jamais ça arrive au point où il y a
dix, douze, quinze médecins dans un CLSC, mais ayant oeuvré dans
le milieu, puis ayant connu exactement les problèmes que vous soulevez
où ce sont toujours les mêmes acteurs qui remplissent des postes
parce qu'il y a effectivement manque, je pense que la recommandation aiderait
beaucoup à rationaliser non seulement la gestion de
l'établissement.
J'aimerais aussi soulever une couple d'autres remarques. Je ne toucherai
pas au côté des négociations - cela a été
amplement touché, je crois - mais par rapport, par exemple, aux conseils
régionaux, cela a été un sujet qui a vivement
été discuté ici, hier et avant-hier, et finalement je vois
que la position que prend la fédération est plus ou moins celle
qu'on a mise de l'avant en disant, par exemple, que le CRSSS ne devrait pas
faire l'objet d'une diminution de l'autonomie des établissements dans
une optique de décentralisation. Cela devrait être des pouvoirs du
ministère, des pouvoirs de concertation qui devraient aller là,
peut-être que ça va faire son chemin, cette idée-là.
Aussi par rapport aux fusions, la suggestion que vous faites a
été faite hier, à savoir qu'il y aurait aussi lieu de
consulter les établissements avant de procéder à des
fusions, et pas exclusivement le conseil régional.
En tout, je retrouve dans le mémoire l'excellente qualité
de travail qu'on a été habitué à avoir quand
j'étais DG d'un CLSC, et cela me fait plaisir vraiment de vous revoir
ici.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, le
député de Laurier.
Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je ne retrouve pas l'article de mémoire;
peut-être que le sous-ministre ou le ministre pourrait me le dire. On
prévoit dans les établissements un directeur de services
professionnels et, si ma mémoire est bonne, on n'en prévoit pas
dans
les CLSC ou on exclut les CLSC. Évidemment, quand un CLSC
débute, ils sont peut-être huit personnes pour le structurer; si
vous avez un DSP qui le coiffe vous allez vous perdre, encore une fois, dans la
"plomberie", comme dirait le premier ministre. Mais au moment où les
CLSC, quand même, deviennent beaucoup plus considérables - j'ai
mal compris, du moins en haut de certains effectifs, l'exclusion d'un DSP -
est-ce que vous ne trouveriez pas bon que vous ayez un DSP?
Le Président (M. Bordeleau): M. Ouimet.
M. Ouimet: D'abord, là-dessus, je pense que la loi
actuelle prévoit que, là où il y a vingt-cinq
professionnels, même dans un CLSC, il puisse y avoir un DSP. Elle le
prévoit déjà. Maintenant, ce que je voudrais faire
ressortir encore davantage, c'est que la loi actuelle, lorsqu'elle a
été élaborée, concernant les CCPC, CMD, toutes ces
structures-là, a tenu compte, à mon sens, des gros
établissements. À ce moment-là, les CLSC n'existaient pas
ou commençaient tout simplement à exister. On voudrait attirer
votre attention là-dessus. Les CLSC sont petits, ils ont des
particularités. Il faudrait qu'on leur donne des structures qui ne
soient pas des structures de fou, qui sont trop grosses, qui sont des Cadillac
alors qu'on a besoin d'une Volkswagen, d'une petite automobile. C'est juste
ça, c'est aussi simple que ça.
Quant aux mécanismes, je pense que si on avait eu plus temps, on
aurait pu en suggérer, mais on ne veut pas entrer dans la plomberie.
Mme Lavoie-Roux: Oui, je veux...
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que M. Charlebois a
quelque chose à ajouter? Rapidement, s'il vous plaît!
M. Charlebois: Bon, pour répondre
précisément à la question: Est-ce que le DSP ne pourrait
pas être une solution, peut-être, sauf que les délais qu'on
a eus finalement pour étudier ça, c'est une piste
possiblement.
Mme Lavoie-Roux: Vous ne l'excluez pas. C'est ça que je
veux dire.
M. Charlebois: On ne l'exclut pas, comme modifier le rôle
du CCPC pour que ce soit cette instance et qu'il existe un seul comité,
par exemple, dans l'établissement, qui s'occupe de ça. On ne
l'exclut pas; cependant, les délais qu'on a eus nous empêchent de
faire des propositions concrètes qu'on présenterait ici avec
beaucoup d'assurance.
On veut surtout vous sensibiliser au fait que ce qui existe actuellement
est absolument inopérant et non seulement inopérant, mais
ça nous empêche de fonctionner d'une façon efficace. La
réflexion devra se poursuivre, peut-être, pour trouver
l'alternative.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais les faire revenir, j'avais d'autres
questions à leur poser, mais, puisque j'ai convenu avec le ministre
qu'on le laisserait s'échapper à 13 heures parce qu'il
paraît qu'il a des gros problèmes à décider au
caucus du Parti québécois alors on va le laisser aller.
M. Johnson (Anjou): Ce ne sont pas des problèmes, mais des
solutions.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie d'abord,
messieurs de la Fédération des CLSC du Québec.
M. Johnson (Anjou): Merci infiniment, messieurs.
Le Président (M. Bordeleau): La commission suspend ses
travaux jusqu'à cet après-midi 15 heures où nous
entendrons le Comité provincial des malades.
(Suspension de la séance à 13 h 131
(Reprise de la séance à 15 h 26)
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît,
mesdames et messieurs! À l'ordre, s'il vous plaît!
La commission permanente des affaires sociales reprend ses travaux. Nous
entendrons, comme premier groupe, le Comité provincial des malades,
représenté par M. Claude Brunet, porte-parole. M. Brunet, vous
pouvez procéder. Je pense que vous n'avez pas de mémoire
écrit, mais cela ne change rien.
M. Brunet (Claude): M. le Président, M. le ministre...
Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse, s'il y a des
personnes avec vous que vous voulez présenter à la
commission...
Comité provincial des malades
M. Brunet: Je suis accompagné par le directeur
général du Comité provincial des malades, M. Joviano Vaz,
ainsi que par Mme Danielle Robichaud, qui est notre agent de liaison.
M. le Président, M. le ministre, mesdames, messieurs les
députés, comme vous le savez, la tenue de cette commission
parlementaire a coïncidé avec le déroulement d'un sommet
socio-économique
sur l'intégration des personnes handicapées, sommet qui se
prépare depuis plusieurs mois et nous avons dû y être
présents pendant deux jours.
La période très courte qui a séparé
l'annonce de la présente commission et sa tenue, tout le temps aussi que
nous avons dû consacrer au sommet socio-économique, joint à
des difficultés de santé très contraignantes, tout cela ne
nous permet pas de commenter et de critiquer le projet de loi 27 comme nous le
voudrions.
En passant, je voudrais présenter nos excuses à toutes les
personnes qui nous ont demandé copie de notre mémoire. Cela a
été absolument impossible. Plusieurs de nos propos ont même
été pris en notes sténographiques, ce matin, en
camionnette sur le chemin entre Montréal et Québec. Tout de
même, on voulait absolument venir et on remercie cette commission de nous
accueillir.
Puisqu'il faut se limiter, nous devons donc limiter nos commentaires,
suggestions et demandes aux points suivants. Je vais commencer par parler des
conseils régionaux. Nous nous opposons, M. le Président, à
ce qu'il n'y ait aucun représentant des bénéficiaires
auprès des conseils d'administration des CRSSS. Nous nous plaignons
depuis des années que les CRSSS sont loin des établissements et
qu'ils déçoivent une foule de bénéficiaires,
à tort ou à raison, le plus souvent certainement avec raison.
Alors est-ce qu'il ne serait pas grand temps que les CRSSS soient un peu plus
proches et plus réceptifs aux situations que vivent les
bénéficiaires? Par exemple, au lieu de nommer trois personnes
représentant les groupes socio-économiques, qu'il n'y en ait que
deux et qu'un bénéficiaire ou un représentant des
bénéficiaires soit nommé au niveau de chaque conseil
régional. Le Comité provincial des malades est disposé
à nommer de tels représentants si on voulait bien accepter une
telle collaboration de notre part. (15 h 30)
Comme vous le savez, le projet de loi dit que les CRSSS doivent
déterminer des politiques d'admission extraordinaire des
bénéficiaires, un autre point; fixer les normes concernant les
services d'urgence de ces mêmes établissements; fixer les normes
d'utilisation et de distribution des lits dans ces établissements.
Voilà quelques raisons parmi d'autres, raisons très importantes,
pour qu'on fasse en sorte que les bénéficiaires situés
dans tel ou tel établissement ou encore un représentant des
bénéficiaires, qui pourrait être nommé par le
Comité provincial des malades, soit présent au niveau de chaque
conseil d'administration des CRSSS.
Un autre point. Nous sommes très opposés à
l'idée que les pouvoirs conférés aux conseils
régionaux ne viennent entraver considérablement la liberté
qu'a toute personne résidant au Québec de choisir
l'établissement où elle désire recevoir les services de
santé. Nous craignons fort que l'effritement de cette liberté ne
donne lieu ou n'ouvre le chemin tout grand à la sectorisation, chose que
nous craignons beaucoup. Nous espérons qu'elle n'aura pas lieu et nous
nous y opposons très rigoureusement. Voilà pour ce qui est des
conseils régionaux pour le moment.
Maintenant, quelques propos au sujet des conseils d'administration. Je
vais me référer au texte de loi tout de suite. Conseil
d'administration ensuite 57. Ici c'est un détail mais quand même.
Le paragraphe a, article 57 on commence par dire: "Dans le cas où il
existe un comité de bénéficiaires en parlant des centres
hospitaliers, une personne élue par ce comité et choisie par les
membres de ce comité...
On n'aime pas beaucoup qu'on dise dans le cas où il existe un
comité de bénéficiaires... On sait que, par ailleurs, la
loi dit que dans tout centre hospitalier où il y a des soins
prolongés ou dans tout centre d'accueil, il doit y avoir un
comité de bénéficiaires. On préférerait de
beaucoup que le début de cette phrase dise simplement: "Dans les centres
hospitaliers qui offrent des soins prolongés" au lieu de "dans le cas
où il existe un comité de bénéficiaires".
Un autre point. Nous demandons instamment que le nombre de
bénéficiaires siégeant au conseil d'administration des
établissements de santé soit maintenu à deux et non pas
à un seul comme le voudrait le projet de loi.
Nous sommes en contact assez étroit avec notre ministre, M.
Johnson; nous connaissons sa pensée vis-à-vis des besoins des
bénéficiaires et nous ne pouvons pas concevoir que le ministre
ait définitivement consenti à une telle élimination des
efforts tellement souhaités, tellement importants des
bénéficiaires au niveau des fonctions d'un conseil
d'administration.
Pour nous il n'y a aucune raison pour que l'on fasse marche
arrière et que les bénéficiaires aient encore plus de
difficultés, qu'ils n'en ont actuellement, à se faire entendre et
à contribuer à des améliorations, évidemment, qui
les concernent au premier chef. Nous nous opposons donc au plus haut point
à ce que la participation des bénéficiaires soit ainsi
réduite.
Un autre point au sujet des conseils d'administration. Nous demandons
qu'un deuxième bénéficiaire fasse partie de chaque conseil
d'administration des centres hospitaliers, des centres d'accueil et des centres
de réadaptation, on le verra plus loin; ce deuxième
bénéficiaire devrait être légalement une personne
élue par le comité des bénéficiaires et choisie par
les membres
de ce comité, comme un paragraphe concernant les comités
de bénéficiaires le dit dans ce projet de loi.
Je reviens quelques instants, si vous me le permettez, aux conseils
régionaux. Je m'excuse, je passe aux comités de
bénéficiaires. Donc, à l'article 78... Concernant les
comités de bénéficiaires, le nouvel article 118.1 devrait,
selon nous, se lire comme suit: "Un centre hospitalier de soins
prolongés, un établissement qui offre de tels services, un centre
de réadaptation ou un centre d'accueil doivent mettre sur pied un
comité de bénéficiaires". Ce que je viens de lire, c'est
le texte exact de l'actuel projet de loi, sauf qu'on ajoute ce qui est dans la
présente loi, dans les règlements de la loi S-5, un centre de
réadaptation. On ne voit pas pourquoi maintenant avec les changements et
les améliorations qu'on veut introduire, le centre de
réadaptation soit exclu comme centre où un comité de
bénéficiaires doit exister.
Un autre point. Au troisième paragraphe de ce même article
118.1, on devrait lire ce qui suit: "Le comité adopte des
règlements pour sa régie interne et le remplacement de ses
membres et présente pour ratification par le ministre un budget conforme
aux normes définies par règlement." Ici, il y a des explications:
d'une part, au niveau des conseils d'administration il est prévu que le
mandat de chaque membre du conseil d'administration est de trois ans; or, c'est
le bénéficiaire - et nous voulons beaucoup qu'il y en ait deux -
qui doit faire partie du comité des bénéficiaires.
Or, il faudrait que la question des élections au niveau des
comités de bénéficiaires soit explicite et prévoie
un mandat également de trois ans. Mais la raison pour laquelle l'article
118.1 est ainsi, quant à nous, modifié, c'est que le
comité adopte des règlements pour sa régie interne et le
remplacement de ses membres - on ne parle pas d'élection pour le moment
- et présente pour ratification par le ministre un budget conforme aux
normes définies par règlement.
Tout à l'heure, je vais vous référer à un
autre article où est énuméré tout ce que peut faire
le ministre par règlement. C'est que, depuis le mois de juin,
l'assemblée générale des comités de
bénéficiaires, qui a eu lieu à Rivière-du-Loup,
demande fortement qu'un certain budget de roulement soit accordé
à ses comités. Vous savez, plusieurs fois, quelqu'un de l'Office
des personnes handicapées du Québec nous a dit, comment cela se
fait, il y a des comités de bénéficiaires qui nous
appellent, qui nous disent: Nous, on veut faire quelque chose, on veut aider
nos compagnes, nos compagnons mais on n'a pas un sou. Alors, l'Office des
personnes handicapées leur dit: Bien oui, mais vous êtes reconnus
par la loi, c'est normal que la loi prévoie également que vous
puissiez bénéficier d'un certain budget.
Donc, nous demandons, comme je l'ai dit, que dans l'article 118.1, on
dise: Ce sont des termes que nous proposons et l'on présente pour
ratification par le ministre, un budget conforme aux normes définies par
règlement. Je reviendrai sur ce point dans quelques minutes.
Le quatrième paragraphe de ce même article 78, qui devient
le nouvel article 118.1, devrait selon nous, se lire comme suit: Le mandat des
membres du comité des bénéficiaires est de trois ans.
Imaginez, dans la loi on dit: Le comité de bénéficiaires
adopte ses propres règlements de régie interne et fait ce qu'il
veut, plus ou moins; la date de l'élection, c'est lui qui s'arrange avec
cela. Mais l'expérience nous démontre qu'il y a un certain
fouillis qui se crée, qui se produit, qu'on constate. Il y a des
comités qui attendent deux ans, d'autres un an, d'autres six mois; il y
a des stratégies électorales qui se jouent là-dedans.
Donc, puisque les membres du comité des bénéficiaires, les
membres représentant des bénéficiaires au niveau des
conseils d'administration doivent également être membres du
comité des bénéficiaires en vertu de cette loi et, encore
une fois, on voudrait qu'il y en ait deux et pas un seul; il faudrait, puisque
le mandat des membres du conseil d'administration est de trois ans, faire en
sorte que les comités de bénéficiaires aient des
élections prévues par la loi tous les trois ans
également.
Autre point; ici, c'est une question que l'on pose, quelqu'un pourra
sûrement nous répondre. À l'article 118.2, on lit ceci:
"Les parents ou tuteurs de bénéficiaires âgés de
moins de 18 ans peuvent être élus membres d'un comité de
bénéficiaires". Notre question, à laquelle on pourra sans
doute revenir tout à l'heure, c'est: "Peuvent être élus",
est-ce que c'est facultatif et élus par qui, si les
bénéficiaires sont tous mineurs?
Autre point, le nouvel article 118.3, toujours à la même
section, le nouvel article 118.3 devrait se lire comme suit: Lorsque
l'état de santé des bénéficiaires d'un
établissement ne leur permet pas de faire partie d'un comité de
bénéficiaires, le conseil régional concerné
procède à la nomination des membres de ce comité, dont la
majorité doit être choisie parmi les parents des
bénéficiaires ou leurs représentants légaux.
Actuellement, dans la loi, on dit que, lorsque l'état de
santé des bénéficiaires, soit l'état physique ou
mental, ne leur permet pas de faire partie d'un comité, les personnes
formant le comité peuvent être des bénévoles choisis
par le conseil régional, après consultation du conseil
d'administration. On souhaite que ce comité soit formé en
majorité des parents des bénéficiaires. C'est
très important pour nous. Si le conseil régional doit les
nommer, il faut bien qu'il consulte le conseil d'administration de
l'établissement pour connaître des parents, au moins trois parents
de bénéficiaires. Nous demandons instamment que dans le cas
où, je le répète, la santé des
bénéficiaires ne leur permet pas de former un comité, ce
soit une majorité de parents de ces bénéficiaires qui
forment le comité.
Autre point, toujours le même article du projet de loi, mais le
paragraphe 118.5, les fonctions du comité de
bénéficiaires. On énumère quatre points
intéressants qui sont une amélioration sur les règlements
actuels, d'autant plus que maintenant, c'est dans la loi, mais il y a une chose
importante que nous demandons fortement depuis le mois de juin, depuis cette
assemblée générale à Rivière-du-Loup, c'est
que nous pensons que les comités de bénéficiaires peuvent
bénéficier du droit de pouvoir poursuivre en justice. Les
syndicats ont ce droit, cela ne cause pas de tapage, mais c'est un droit quand
même. (15 h 45)
On pense que les bénéficiaires qui sont appelés de
plus en plus à participer - surtout que maintenant, ils peuvent
s'adjoindre deux personnes de l'extérieur, ce qui est excellent, ce que
nous demandons depuis plusieurs années - pourraient très bien
bénéficier de ce droit, d'autant plus qu'il y a une raison
particulière, c'est que, lorsque vous savez que des
bénéficiaires sont appelés malheureusement, mais il faut
bien qu'ils le fassent - à être requérants, soit pour une
poursuite individuelle, soit pour un recours collectif, c'est pénible,
mais il va falloir passer par là, autrement on constate que ni les
administrateurs, malgré toute leur bonne volonté, ni les grands
magnats de nos gouvernants qui sont pourtant de bonne volonté et
puissants, sont incapables, sauf quelques rares exceptions, de protéger
les bénéficiaires lorsqu'il y a grève illégale. On
est très affligé par cela. Donc, les bénéficiaires
vont en venir à utiliser les tribunaux pour défendre leurs
droits. Dans le cas d'un comité de bénéficiaires, vous
allez vous présenter en Cour supérieure - il y a
déjà eu un jugement là-dessus en 1979 - le juge vous dit:
Je regrette, mais le comité de bénéficiaires n'a pas de
personnalité civile. Allez-vous en, revenez demain si vous voulez. S'il
y a un requérant, un individu qui veut être requérant,
d'accord, mais le comité comme tel n'a pas de personnalité
civile. Le syndicat l'a depuis très longtemps peut-être, en fait.
Donc, on demande que cette personnalité civile soit reconnue au
comité de bénéficiaires pour que lorsqu'un, deux ou trois
bénéficiaires quittent le comité pour raison de
santé ou à cause d'un décès, la même
poursuite puisse être intentée sans trop de difficultés par
le comité des bénéficiaires qui, lui, jouirait de la
personnalité civile nécessaire.
À l'article 118.5, on lirait les quatre points qu'on a dans le
projet de loi, mais la dernière phrase se lirait comme suit:
"Défendre les intérêts collectifs des
bénéficiaires ou, à la demande d'un
bénéficiaire, ses intérêts en tant que
bénéficiaire auprès de l'établissement ou de toute
autorité compétente, ou s'adresser en son nom propre aux
tribunaux, s'il y a lieu, pour faire respecter les droits des
bénéficiaires."
Un dernier point, à l'article 94, un peu plus loin, on
énumère des tas de choses sur lesquelles le ministre peut
décider par décret ou par règlement. Il y a une longue
suite de paragraphes, le paragraphe n, le paragraphe p, le paragraphe v et,
à la fin, nous proposons qu'il y ait un paragraphe, le paragraphe y, qui
pourrait se lire comme suit: "Établir des normes relatives à la
comptabilité, au budget et au financement, par subvention ou autrement,
des comités de bénéficiaires." Autrement dit, dans les
règlements, dans les possibilités qu'aurait le ministre de
décider de certaines choses, il pourrait établir des normes au
sujet d'un certain budget de roulement pour les comités de
bénéficiaires.
Pour le moment, c'est tout. Je tiens à vous remercier, chacune et
chacun, ainsi que le ministre. On voit avec satisfaction quand même qu'il
y a plusieurs points dans ce projet de loi qui répondent à
plusieurs de nos recommandations et on est sensible à cela.
Nous espérons, M. le Président, que notre ministre, celui
des Affaires sociales, bien sûr, ainsi que tous les députés
qui devront se prononcer sur ce projet de loi tiendront très
sérieusement compte des propos que nous avons tenus aujourd'hui et
qu'ils voudront bien reporter à plus tard, retarder de plusieurs mois,
si c'était nécessaire, l'adoption de ce projet de loi, au lieu de
passer trop rapidement à l'adoption et obliger des groupes de personnes
âgées ou malades à multiplier les démarches et les
pressions pour bien faire comprendre à nos gouvernants l'importance
primordiale que représentent pour les quelque 60 000
bénéficiaires qui vivent en permanence dans les
établissements de santé les éléments de changement
et de participation que nous venons de porter à votre attention.
Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Brunet. M. le
ministre.
M. Johnson (Anjou): M. Brunet, je vous remercie. Je m'excuse, au
nom de la commission, du retard que nous avons mis à vous entendre.
Deuxièmement, je vous remercie d'avoir fait l'effort,
malgré le fait que vous participiez au sommet de Montréal,
à travers
tout ça de trouver le temps de lire le texte et de nous apporter
vos réflexions. Je présenterai peut-être le présent
pour, plutôt que de voir d'où on vient, voir où on est
rendu. On introduit par cette loi la nécessité du comité
de bénéficiaires, ce qui n'existait pas antérieurement,
dans les centres hospitaliers de soins prolongés, comme dans les centres
hospitaliers de soins aigus, mais ayant des activités de soins
prolongés également. Or, cette nécessité n'existait
pas. C'était laissé au bon vouloir de la direction, d'avoir ou
non un comité; maintenant, c'est obligatoire, il devra y avoir un
comité. L'hôpital pourrait être un hôpital de soins
prolongés ou même un hôpital de soins aigus; de la
même façon qu'il y a un conseil des médecins et dentistes,
il doit y avoir un comité de bénéficiaires. Ça,
vous avouerez avec moi que c'est un peu différent que ce qui existait
antérieurement.
À l'égard des centres d'accueil et de réadaptation,
je vous ferai remarquer que votre préoccupation a une réponse
dans le texte même, la notion de centre d'accueil inclut la notion de
centre de réadaptation. Alors, vous n'avez pas à vous
inquiéter pour ça.
Troisièmement, nous introduisons une autre dimension - vous la
reconnaîtrez - qui est la nomination à différents endroits
dans le réseau, je devrais dire à tous les endroits dans le
réseau, de personnes provenant des organismes bénévoles,
parce que cela a un sens très précis dans notre
société. Les gens qui se dévouent passent une partie de
leur temps de loisirs ou autrement, dans des organismes bénévoles
qui oeuvrent dans le secteur de la santé et des services sociaux. Cela
peut tantôt être l'association de parents d'enfants atteints de
cancer, ça peut être la fondation des maladies du coeur, ça
peut être des douzaines pour ne pas dire des centaines d'associations
existantes. Il y a une espèce de présomption dans la loi que les
personnes qui oeuvrent dans ces organismes sont des gens qui le font d'une
façon qui est d'abord et avant tout désintéressée
et au service d'une idée ou d'une préoccupation au centre de
laquelle on retrouve le confort, le bien-être et le progrès des
êtres humains, notamment dans le secteur hospitalier ou dans le secteur
social.
Dans le cas des hôpitaux, quand on supprime la notion d'usager,
c'est parce qu'on met fin au travestissement qu'on connaît très
bien dans la majorité des endroits où l'assemblée des
usagers, c'étaient 12 personnes un dimanche après-midi dans une
salle, trois représentants des syndicats, deux amis des chirurgiens et
des gens du Parti libéral et du Parti québécois. On
trouvait que ça avait assez duré. Cependant, on a conservé
cette notion d'usager dans le cas des CLSC, où l'expérience
même de l'implication de la population implique cela.
Là où ça semble poser des difficultés,
peut-être, c'est dans le cas des centres d'accueil où la notion
d'usager en pratique recouvrait la notion de bénéficiaire. Mais,
je vous ferai remarquer qu'il y a quand même deux sièges, dont un
est accordé aux bénéficiaires, en d'autres termes, les
usagers du centre d'accueil et l'autre, également à quelqu'un
provenant des organismes bénévoles. Dans tous les autres cas,
c'est un gain net pour les bénéficiaires qui auront maintenant
non seulement un comité rendu obligatoire par la loi en vertu des
dispositions de la loi 27 dans tous les centres hospitaliers de soins
prolongés et dans les centres où il y a des soins
prolongés. Non seulement il y aura ce comité mais il y aura
également quelqu'un qui siégera au conseil d'administration et
ça c'est extrêmement important. C'est donc marquer un
progrès considérable sur ce qui existait antérieurement,
je pense qu'il faut le reconnaître.
Je reviendrai à la question des budgets que vous évoquez
pour l'article 53. Je vous ferai remarquer que ça n'a pas à
être dans la loi et c'est, sur un plan administratif, une décision
budgétaire. À partir du moment où nous transformons le
comité de bénéficiaires en organe qui fait partie de
l'hôpital, pas un vaque souhait ou une volonté du directeur
général et peut-être un règlement; il y a maintenant
un comité de bénéficiaires dans les institutions dont on
parlait; donc, ça fait partie de l'institution telle quelle. Alors,
l'assignation de budget devient une question administrative et ça n'a
pas à être dans la loi. Je ne m'engage pas pour autant, ce jour
même, à vous affirmer ou à vous confirmer - je pense qu'il
y a d'autres occasions et d'autres moments pour ça - qu'il pourrait y
avoir des budgets pour ces comités de bénéficiaires.
Maintenant, sur la question des pouvoirs du comité de
bénéficiaires et de ses fonctions je devrais dire, ce que la loi
reprend, comme vous l'avez vu, c'est assez largement le règlement qui
existait et qui était appliqué là où il y avait un
comité de bénéficiaires et notamment, à 118.5 on le
voit: "Défendre les intérêts collectifs des
bénéficiaires ou à la demande d'un
bénéficiaire, ses intérêts en tant que
bénéficiaire auprès de l'établissement ou de toute
autre autorité compétente; représenter et assister sur
demande un bénéficiaire qui désire porter une plainte
prévue au paragraphe c de l'article 18 qui est l'article 18 du chapitre
48 et non pas du projet de loi; participer à l'organisme des loisirs des
bénéficiaires et conseiller le conseil d'administration de
l'établissement sur toute question relative aux loisirs; renseigner les
bénéficiaires sur l'administration générale de
l'établissement."
Si je comprends bien, vous voudriez qu'on ajoute à cela le droit
de citer en
justice et je comprends votre préoccupation. Encore une fois,
faut-il voir d'où on est venu pour voir où on est rendu et
où on pourrait aller. Mais cette question du droit de citer en justice
pose des problèmes considérables sur le plan juridique. Vous
dites: Les syndicats peuvent le faire, oui, mais ils sont encadrés par
une loi qui est la Loi des syndicats. Par ailleurs, ils sont encadrés
par tout un appareillage juridique qui est le Code du travail. Les seules
personnes qui ont le droit de citer en justice au nom des autres sont, d'une
part, ceux pour lesquels le droit donne tout un mécanisme et, notamment,
dans le cas des syndicats, il y a un mécanisme qui, bien qu'il ne soit
peut-être pas parfaitement efficace, a été modifié
tout au moins il y a très peu d'années dans le cadre de la loi 45
où les syndicats ont maintenant des obligations, ce qu'on appelle les
"duty of fair representations" en anglais, des obligations à
l'égard de ceux pour qui ils assument collectivement le droit de citer
en justice, des devoirs d'équité et de justice.
D'autres personnes qui ont le droit de citer au nom des autres,
évidemment, ce sont les avocats; par définition, c'est leur
métier. Mais, il y a une chose qui s'appelle la Loi du barreau, le code
de déontologie, l'ordre qui est le barreau lui-même qui s'occupe
de toute cette notion et de tout ce qui doit entourer ce droit de citer en
justice. (16 heures)
Finalement, il y a le recours collectif que vous avez d'ailleurs
utilisé, je crois, avec un certain succès dans certains cas et
qui est ouvert à des organismes comme le vôtre dans la mesure
où les situations que vous vivez sont évidemment des situations
qui affectent plusieurs personnes.
Alors, j'espère avoir répondu à certaines de vos
préoccupations, tout en étant conscient que par définition
nous ne pouvons pas tout intégrer ce que vous revendiquez, surtout les
quelques inquiétudes qui procèdent de la lecture du projet de
loi. Les centres de réadaptation ne sont pas abolis, il n'y a pas de
comités de bénéficiaires d'abolis, bien au contraire,
c'est inclus dans la définition de centre d'accueil, alors aucun
problème quant à cela.
Le Président (M. Bordeleau): M. Brunet.
M. Brunet: M. le Président, quelques questions, s'il vous
plaît! M. Johnson nous affirme que la notion de centre de
réadaptation est incluse dans tout ce qui est dit sur les centres
d'accueil. Je m'excuse, je ne suis pas avocat, mais est-ce qu'il pourrait
à même le projet de loi nous expliquer un peu cela, s'il vous
plaît? À L'article 82, il est question d'un centre d'accueil.
M. Johnson (Anjou): C'est en vertu du chapitre 48, à
l'article 1 qui définit les différents organismes. Ça
devient purement... pardon?
M. Brunet: ...
M. Johnson (Anjou): Non, ce n'est pas dans la loi parce que c'est
déjà dans le chapitre 48. La loi vient modifier le chapitre 48;
donc, il faut retourner à certaines des notions du chapitre 48. La
notion de centre d'accueil qu'on retrouve à l'article 1, paragraphe k,
couvre à toutes fins utiles ce que sont les centres de
réadaptation. Sans cela, si elle ne les couvrait pas, on ne pourrait pas
leur donner de budget.
Alors, par définition, c'est là. Vous n'avez pas à
vous en faire pour cela, même s'il n'y a pas d'identification du centre
de réadaptation en tant que centre de réadaptation, il existe
juridiquement. La preuve, c'est qu'il y en a plusieurs centaines sur le
territoire et qu'il y a des millions qui sont dépensés dans ces
centres de réadaptation, mais c'est sous le vocable de centre d'accueil
dans le chapitre 48. Il y a, au ministère, sur le plan administratif une
direction des centres de réadaptation qui relève du sous-ministre
adjoint responsable des services sociaux.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Brunet.
M. Brunet: M. le ministre, merci. Encore un peu plus
d'éclaircissement, s'il vous plaît! On voit que dans le projet de
loi le comité de bénéficiaires devient obligatoire, mais
on ne nomme pas explicitement le centre d'accueil - excusez-moi si j'insiste
trop. Alors, est-ce qu'il n'y a pas le danger que, si le présent projet
est adopté, on dise: Oui, il est question du centre de
réadaptation dans la loi S-5, mais l'obligation d'avoir un comité
de bénéficiaires dans la nouvelle loi ne se rapporte qu'aux
centres d'accueil et aux centres hospitaliers.
M. Johnson (Anjou): D'accord, on se comprend bien et je veux
seulement apaiser votre inquiétude quant à cela sur le plan
juridique. Les centres de réadaptation sont compris dans les centres
d'accueil en vertu de ce que vous appelez la loi S-5, qui est en fait la loi de
1971, et qu'on a appelée la réforme Castonguay, la Loi sur les
services de santé et les services sociaux, chapitre 48. Là, on
définit ce qu'est un centre d'accueil. Dans la notion de centre
d'accueil est incluse la notion de centre de réadaptation et, par
règlement, on a déterminé les différentes
catégories de centres d'accueil dont les centres de
réadaptation.
On dit dans la loi 27 que dans les centres hospitaliers de soins
prolongés, les établissements qui offrent de tels services ou
les centres d'accueil, il y a un comité de
bénéficiaires; ça veut dire par définition que dans
les centres de réadaptation, en vertu de la loi, il y a
nécessairement un comité de bénéficiaires, si nous
pouvons adopter la loi. D'accord?
M. Brunet: Merci. Maintenant, M. le ministre, vous passez sous
silence une chose qui nous touche énormément, peut-être
pouvez-vous nous donner des explications là-dessus. Pour nous, c'est un
recul très sérieux, c'est un peu comme si on nous donnait d'une
main pour nous enlever l'équivalent ou plus de l'autre. Jusqu'ici,
depuis justement la réforme Castonguay, il y a deux
bénéficiaires, parfois des usagers qui n'étaient pas
tellement représentatifs des bénéficiaires, mais enfin la
loi permettait, dans les centres d'accueil et de réadaptation et les
centres de soins prolongés, que les choses étant ce qu'elles
sont, ce soient des bénéficiaires qui soient au conseil
d'administration. Il y en avait deux. Avec tous ces besoins avec ces
impératifs qui font que les bénéficiaires ont tellement de
choses à dire ou à commenter ou à manifester, ils doivent
donc se faire l'écho des choses qui se passent dans leur milieu.
Pourquoi glisse-t-on si facilement là-dessus, sur ce qui nous
paraît capital? Pourquoi tombe-t-on de deux bénéficiaires
ou représentants de bénéficiaires à un seul? Pour
nous, c'est tragique.
M. Johnson (Anjou): Qu'on me comprenne bien. Vous disiez tout
à l'heure connaître mes intentions. Vous me permettrez
d'être un petit peu étonné de votre réaction. Bien
au contraire, ce que nous tendons à faire dans le projet de loi, c'est
obliger l'implantation des comités de bénéficiaires qui
n'existaient pas. Nous obligeons les hôpitaux et les hôpitaux de
soins prolongés, les centres d'accueil à créer des
comités de bénéficiaires d'une part. Cela n'existait pas
avant.
Deuxièmement, on introduit également la notion que, dans
le cas des centres de réadaptation, cela devient purement du jargon
juridique, là où il y a des enfants notamment, il y en aura
aussi, et c'est également nouveau, par les parents; cela aussi est
nouveau.
Troisièmement, à l'égard de la composition des
conseils d'administration -c'est une autre chose qui est distincte des
comités bénéficiaires - nous introduisons maintenant que,
dans tous les centres, il y aura quelqu'un qui sera nommé par le
comité de bénéficiaires au conseil d'administration, par
opposition à l'ancienne notion, qui était une notion
d'élection par les usagers. Or, les usagers, à certains endroits,
pour différentes raisons, n'étaient pas nécessairement
uniquement des bénéficiaires. On donne ce statut de
bénéficiaire, alors qu'il n'existait pas antérieurement,
en remplaçant la notion d'usager par la notion de
bénéficiaire et en consacrant, par ailleurs, l'existence des
comités de bénéficiaires, ce qui est un renforcement
considérable du statut "juridique" des bénéficiaires dans
l'hôpital collectivement ou dans le centre d'accueil. Nous introduisons,
il est vrai, dans le cas des centres d'accueil, le remplacement de
l'élection de deux usagers par la présence d'un
bénéficiaire et également un représentant des
organismes bénévoles. Cela vaut pour les centres d'accueil,
qu'ils soient de réadaptation, d'hébergement ou n'importe quel
type de centre d'accueil, il y en a quatre sortes. Dans ce sens, je comprends
mal que vous parliez de recul.
M. Brunet: Si vous me le permettez, toujours au niveau des
conseils d'administration, il y a un tel besoin, une telle urgence, une telle
nécessité que les bénéficiaires soient plus
présents au niveau des conseils d'administration. Il y en a plusieurs
quand même qui ont compris, longuement, à travers beaucoup de
maladresse et certainement, on n'est pas administrateur, mais, ils ont appris
de pein-3 et de misère certaines choses. Là, ils auraient la
chance, toujours en restant au moins deux à un conseil d'administration
de douze membres, de faire part de leurs problèmes aux administrateurs,
aux gens très occupés qui ont toutes sortes de
préoccupations et d'intérêts, parfois pas toujours les
intérêts des bénéficiaires en premier lieu, mais
cela est humain. On enlève donc un bénéficiaire, alors
qu'il serait tellement souhaitable qu'ils restent deux, parce que vous vous
référez à des endroits où les usagers ont
été parachutés ou élus dans une élection,
comme on dit, paquetée ou des choses comme cela. Mais, dans beaucoup
d'endroits, centres d'accueil et centres de soins prolongés et
même centres de réadaptation, les choses ne se sont pas
passées ainsi, cela a été de véritables
élections dans la maison. Des gens ont été élus par
les bénéficiaires et c'est cela qu'on veut qui continue. Donc,
s'il vous plaît, c'est terrible pour nous de passer de deux à un
à ce niveau-là, parce qu'il y a un tel besoin de participation et
d'information et d'engagement de la part des bénéficiaires et
c'est possible. Donc, on n'accepte absolument pas qu'au conseil
d'administration il n'y ait plus qu'un seul bénéficiaire au lieu
de deux bénéficiaires.
M. Johnson (Anjou): Ce que vous dites dans le fond, pour qu'on se
comprenne bien, je voudrais seulement être sûr que vous ne
présentez quand même pas le projet de loi no 27 à
l'égard des bénéficiaires comme un recul, M. Brunet.
M. Brunet: Non.
M. Johnson (Anjou): Ce que vous dites, c'est qu'il y a une
difficulté quant à l'utilisation du mot "usager" qui est
remplacé par le mot "bénéficiaire", qui va permettre dans
200 établissements au moins, à travers le Québec, que vous
ayez des membres, alors qu'en ce moment il n'y en a pas. Vous dites: Cependant,
en cours de route, dans les centres d'accueil ou de réadaptation,
là où nous avions une vie active et où les
bénéficiaires avaient réussi, malgré le fait qu'il
n'y avait pas d'encadrement juridique, etc., et de peine et de misère on
réussit à bâtir une présence; ne nous en privez pas.
Il est bien entendu que ce n'est pas notre intention et qu'à cet
égard ce que vous soulevez, c'est la notion d'avoir deux membres, dans
les centres d'accueil et de réadaptation, qui puissent être
présents au conseil d'administration, indépendamment de la
présence ou pas, d'un bénévole, si je comprends bien.
En ce sens, si c'est vrai pour certains établissements et parmi
ces établissements, là où vous aviez réussi depuis
un certain nombre d'années à activer le milieu pour qu'il soit
présent, je vous ferais remarquer que par ailleurs dans le projet de
loi, c'est l'extension à tous les autres établissements. Je pense
qu'il faut que ce soit bien clair. Je pensais d'ailleurs qu'on s'était
bien compris là-dessus, au moment où vous m'avez posé les
questions sur les handicapés.
Je prends bonne note de vos préoccupations à cet
égard. Sur les autres, au niveau des CRSSS, votre préoccupation
est au niveau de la composition, d'une part. D'autre part, la notion de choix
de l'établissement au niveau des services de santé. C'est un
problème qui dure depuis longtemps, on le sait, dans les FASSQ, la
crainte de la sectorisation que vous avez est toujours fondée, dans le
secteur de la santé. C'est pour ça que nous tentons, de toutes
sortes de façons, à l'égard du respect du principe du
libre choix, de faire en sorte qu'il soit le mieux garanti possible. Mais vous
savez comme moi qu'il est également assez illusoire, dans bien des cas,
compte tenu des ressources disponibles et compte tenu des places libres, compte
tenu des situations d'urgence ou pas. Il ne faudrait pas voir la limitation du
libre choix dans la loi, alors que la limitation du libre choix est dans la
réalité, à bien des endroits.
En ce sens, je resterais sensible à ça, vous ne voudriez
pas que les lois viennent finalement consacrer la limitation réelle dans
la réalité pour les citoyens. On a un droit théorique
à certains libres choix, mais il n'est que théorique à
bien des endroits, parce qu'on n'a pas des CHSP, des centres d'accueil, des
CLSC, toutes les institutions, à tous les 20 milles ou même dans
de grands territoires, on ne les a pas tous. C'est évident que c'est
limité par la réalité, c'est le danger que vous soulevez,
nous en sommes conscients. Je vous remercie, M. Brunet.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de L'Acadie. Vous avez quelque chose à ajouter, M.
Brunet?
M. Brunet: Me permettez-vous de... ce n'est pas tous les jours
qu'on a la chance d'essayer de s'expliquer. J'enregistrerai vos questions avec
beaucoup d'intérêt, mais encore une fois, il y a des choses que
j'aimerais bien que le ministre nous explique ou nous précise. En ce qui
concerne les bénéficiaires, il y a des améliorations
importantes, mais il y a aussi des trous, des vides, des lacunes et ce n'est
pas du tout notre perception que ce projet de loi, quant aux
bénéficiaires, soit dans l'ensemble un recul, mais c'est un recul
très sérieux au niveau des conseils d'administration. (16 h
15)
Je vais vous poser deux questions. Ma première question:
Pourquoi, au nom du bon Dieu, nous enlevez-vous un bénéficiaire
au niveau des conseils d'administration? Deuxièmement, si on
prévoit qu'il y en a un, espérons que ce seront deux membres, qui
forment le comité des bénéficiaires et qui vont être
élus par ce même comité pour être au conseil
d'administration, pourquoi le mandat des membres du comité des
bénéficiaires ne serait-il pas de trois ans, tout comme les
membres du conseil d'administration, pour que le comité ne fasse pas une
élection au bout d'un an et que le représentant des
bénéficiaires au conseil, n'étant plus élu, doive
quitter? Pour qu'il y ait concordance entre la période d'élection
pour les comités de bénéficiaires et élection pour
trois ans de bénéficiaires au niveau du conseil d'administration.
Voilà mes deux questions.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Pour répondre à votre
préoccupation, M. Brunet, les objets essentiels des chapitres qui
touchent les bénéficiaires sont, d'une part, la
consécration de leur existence comme essentielle dans l'hôpital.
Je pense aux centres de soins prolongés. C'est la même chose dans
les centres d'accueil, donc dans les centres de réadaptation, et la
même chose dans les hôpitaux où il se fait des soins
prolongés, même si ce sont des hôpitaux qui, suivant les
permis, sont des hôpitaux pour soins aigus. Donc, c'est la base de la
loi. C'est donc l'extension du champ des bénéficiaires en rendant
obligatoires ces comités.
Deuxièmement, à l'égard des conseils
d'administration, c'est l'extension de la présence des
bénéficiaires dans toutes les institutions. Par ailleurs, la
traduction de cela, dans le cas des centres d'accueil où vous aviez des
membres sous le vocable "usagers", le vocable "usagers" sautant et étant
remplacé par "bénéficiaires" pour les fins de
l'étendre ailleurs, où cela n'existait pas, littéralement,
dans des centaines d'institutions fait que là où vous aviez
effectivement des bénéficiaires sous le vocable "usagers" qui
avaient deux postes, ils se retrouvent en ce moment avec un poste, mais il y a
aussi le poste d'une personne provenant des organismes bénévoles
oeuvrant dans le secteur de la santé et des services sociaux.
Je comprends, d'après votre question, que, dans une
minorité d'établissements, vous considérez que cela
affaiblit la position des usagers puisqu'ils disparaissent. Mais, compte tenu
du fait qu'on l'a remplacé par le mot "bénéficiaires",
cela augmente cette présence des gens auxquels vous êtes
identifiés, auxquels vous vous identifiez dans l'ensemble des
établissements. La vraie question que vous posez, c'est: Est-ce qu'on ne
devrait pas simplement amender le projet pour qu'à l'article qui touche
les centres d'accueil, on introduise un mécanisme qui permette de
conserver le statu quo là où il y avait des usagers qui, en
pratique, étaient des bénéficiaires? C'est ce que je
comprends. Vous ne devez pas voir là, encore une fois, une menace. Vous
faites cette remarque et elle est très bien comprise.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Brunet.
M. Brunet: Le fait que les bénéficiaires
représentant les autres bénéficiaires au conseil
d'administration doivent provenir d'un comité de
bénéficiaires, c'est excellent, bravo. Il faudrait qu'ils soient,
je me répète, élus pour trois ans au niveau du
comité des bénéficiaires, ne l'oublions pas, mais un
bénévole, si sympathique et dévoué qu'il soit, ne
représente pas véritablement les bénéficiaires.
Nous ne demandons pas de garder le statu quo pour les établissements de
soins prolongés ou les centres d'accueil, en termes d'élection
des bénéficiaires au conseil d'administration, mais, pour quelle
raison, quel est l'obstacle majeur? Est-ce que ce n'est pas possible qu'au lieu
d'en avoir un, il y ait deux bénéficiaires au comité des
bénéficiaires qui soient élus par leurs collègues
au niveau du CA? On ne demande pas le statu quo, parce que c'est mieux comme
cela. Mais pourquoi un seul?
M. Johnson (Anjou): Pourquoi un seul plutôt que deux?
M. Brunet: Oui.
M. Johnson (Anjou): Parce qu'en en introduisant un provenant des
bénéficiaires partout dans le système, c'est-à-dire
dans les 1000 établissements, à toutes fins utiles, du
réseau ou, dans ce cas-là, non pas dans les 1000, dans
probablement quelque 400 établissements du réseau, en consacrant
la présence d'une personne, alors que cela n'existait pas du tout avant;
cela fait que là où vous en aviez, cela tombe à un. En ce
sens, je dis: Je prends bonne note de votre remarque et vous aurez des
réponses à l'occasion du cheminement normal de ce projet de loi
en deuxième lecture.
Par ailleurs, sur le mandat et sur la durée du mandat, je vous
ferai remarquer que la loi prévoit que les membres du conseil
d'administration y siègent pour une durée de trois ans. C'est
vrai pour les bénéficiaires comme pour les autres. Ce qu'on ne
prévoit pas, c'est la durée pour quelqu'un qui est membre du
comité, mais, par définition, c'est tant et aussi longtemps qu'il
est dans l'établissement. Ce sont des questions de règlement,
c'est de la régie interne. Tant et aussi longtemps que quelqu'un est
dans l'établissement, il est un bénéficiaire. C'est
illimité dans le temps, d'une part.
Deuxièmement, le comité de bénéficiaires,
par opposition au conseil d'administration, a des règlements, et ces
règlements, en pratique, seront largement calqués sur la
réalité. Il y a des questions de régie interne qui seront
établies par les comités eux-mêmes et, en ce sens, il ne
faut pas voir là, encore une fois, un retrait ou un recul, bien au
contraire. Une fois qu'on est au conseil d'administration, c'est pour trois
ans; c'est étendu à trois ans pour tout le monde, y compris les
gens provenant des comités de bénéficiaires.
M. Brunet: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): On passe aux questions de Mme
la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
M. Brunet. Je pense que, même s'il a préparé une bonne
partie de ses remarques en descendant de Montréal, il a saisi plusieurs
aspects importants du problème.
Je dois vous dire qu'à la question des deux
bénéficiaires plutôt qu'un, le ministre m'a dit qu'il
écoutait ce qu'on disait; il est censé aussi en prendre note. Il
y aurait certainement moyen, M. le ministre, d'introduire un mécanisme
pour les centres d'accueil et les centres de soins prolongés où
il y aura un comité de bénéficiaires créé
par la loi. Ceci n'empêche pas l'addition d'un
bénévole.
Je comprends que les bénéficiaires dans
un centre d'accueil, qui doivent oeuvrer à l'intérieur
d'un conseil d'administration qui peut, être beaucoup plus mobile, qui
peut finalement faire appel à plus de ressources, etc., s'ils sont deux
au lieu d'un, un pouvant souvent manquer pour une raison ou autre, cela ne
semble pas une demande exagérée. Je pense que cela
n'élimine pas la possibilité d'y ajouter un
bénévole qui fort probablement pourra changer plus
fréquemment que les bénéficiaires, de toute façon,
parce qu'on est bénévole X nombre d'années, etc. En tout
cas, c'est une proposition qui ne me semble pas exagérée. Si
c'était le seul problème qu'on avait dans tout le projet de loi,
M. le ministre, il me semble qu'on pourrait s'entendre.
Quant à votre demande d'un budget conforme aux normes
définies par règlement, de mémoire, je ne le sais pas,
peut-être que ma collègue de Jacques-Cartier s'en souvient, mais
quand la loi 27 a été adoptée pour introduire les
comités de parents à l'intérieur des écoles, je
pense que, dans cette loi, il y avait une disposition qui prévoyait une
subvention pour le fonctionnement des comités d'école. De
mémoire - cela commence à faire longtemps - il me semble que
c'était 0,25 $ par tête d'enfant ou enfin quelque chose comme
cela. Je ne vous suggère pas les mêmes normes, surtout que cela
remonte à 1971-1972, encore une fois si ma mémoire est bonne. Je
pense que laisser cela uniquement à la discrétion de
l'administration a été votre réponse. En tout cas, je ne
veux pas ici en faire un grand débat, M. le ministre, mais on pourrait
peut-être voir qu'il y a ailleurs d'autres précédents dans
ce sens.
À l'heure actuelle, là où il y a déjà
des comités de bénéficiaires, il semble que -enfin dans
les établissements - on en soit venu à des arrangements. Je pense
que certains comités de bénéficiaires - je ne sais pas si
ça vient de l'administration de l'institution ou si ça vient
d'autres sources -ont un certain budget, mais qui peut-être ne leur est
pas assuré, tandis qu'il leur serait assuré d'une façon
permanente, s'il y avait une disposition en ce sens dans la loi.
C'est dans ce sens-là, que, moi, comme point de
référence, je vais prendre la loi no 27, qui a créé
les comités d'école et je pense qu'on pourrait trouver une
formule analogue pour ça.
Quant à votre mandat de trois ans, je pense que le ministre a
raison en disant que vous l'avez par l'article 78.1: "Le comité adopte
des règlements pour sa régie interne..." S'il décide que
ses membres ont un mandat de trois ans, pour concorder avec le mandat des
conseils d'administration, je pense que ça ne fait pas
problème.
Vous êtes les premiers bénéficiaires en fait,
à vous présenter à cette commission, et vous êtes
les premiers aussi à faire remarquer que, même s'il y avait
peut-être un certain sophisme, je pense, dans la façon dont le
ministre vous expliquait les choses, écoutez, la liberté de
choix, c'est relatif, on peut bien l'avoir théoriquement, on sait bien
que, dans des endroits éloignés, il n'y a pas de liberté
de choix, parce qu'il y a juste une institution.
Il reste qu'il ne faudrait pas oublier l'article 6 et c'est justement le
chapitre 48: Sous réserve de l'article 5 et de toute autre disposition
législative, rien dans la présente loi ne limite la
liberté qu'a une personne qui réside au Québec de choisir
le professionnel ou l'établissement duquel elle désire recevoir
des services de santé ou des services sociaux, ni la liberté qu'a
un professionnel d'accepter ou non de traiter cette personne. C'est quand
même un des principes fondamentaux; qu'on ne puisse pas l'exercer
partout, je pense que ce n'est pas une raison pour tenter de le limiter
là où il peut s'exercer.
M. Johnson (Anjou): II n'est pas changé, c'est ça
que je veux dire, ça reste le fondement de la loi, c'est bien ça
que j'ai dit.
Mme Lavoie-Roux: C'est ça...
M. Johnson (Anjou): Les limites sont dans la
réalité, elle ne sont pas dans la loi.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais vous y apportez une limite
supplémentaire. Vous êtes le premier groupe qui en ait
parlé, je l'ai mentionné en début de la commission. Quand
vous regardez les dispositions de l'article 31, si je ne m'abuse, c'est 39,
pardon, il dit bien que le conseil régional finalement est le seul
habilité à autoriser le déplacement d'un
bénéficiaire vers un autre établissement. Je ne veux pas
relire l'article 18.1, 18.2, mais il y a certainement là une limitation
possible de cette liberté de choix qui est un droit des
bénéficiaires. Je suis contente que, de votre côté,
vous l'ayez signalé. Nous, on va s'efforcer - j'espère que le
ministre écoute encore cette fois-là - on va essayer en tout cas
de limiter ce qui pourrait être définitivement une atteinte
à ce principe fondamental de la liberté de choix. Il y a des
droits à l'égard des bénéficiaires dans le chapitre
48 qu'il faut s'efforcer de respecter le plus possible, de ne pas entraver;
même si c'est pour une bonne raison administrative, je pense que c'est
extrêmement important.
Vous avez signalé aussi, M. Brunet, la question du centre de
réadaptation. J'aimerais quand même avoir votre opinion
là-dessus. La loi 10 avait introduit, je pense que c'est à
ça que vous faites allusion, du moins, je le pense on retrouve cela
d'ailleurs dans le chapitre 48, la notion du centre de
réadaptation fonctionnelle. La loi 10 a d'ailleurs
été adoptée par le gouvernement actuel, elle avait
été préparée sous l'ancien, mais le gouvernement
actuel l'a adoptée en 1977 ou 1978, c'est en 1977, je pense, le
sous-ministre pourrait me dire ça. Il y avait uniquement au
Québec quelques centres, je pense, peut-être Lucie-Bruneau et
quelques autres, mais on n'a jamais étendu cela à d'autres
centres. Or, cela pose le problème fondamental. Si on avait
créé ou pensé à cette notion de centre de
réadaptation fonctionnelle, il y avait une philosophie derrière
ça. À ce moment-ci, en le réintroduisant uniquement dans
la catégorie générale de centre d'accueil, qui a une
vocation d'institution de soins prolongés, beaucoup plus que ce qu'on
voulait entendre par centre de réadaptation fonctionnelle, en tout cas,
on pourrait au moins en discuter. J'aurais aimé que le comité de
liaison des malades, pardon, des handicapés physiques, qui devait venir
puisse venir, parce que c'est une notion qui les intéressait beaucoup.
Il ne vient pas, je le regrette. Je ne sais pas si vous avez une opinion
là-dessus, M. Brunet. (16 h 30)
Le Président (M. Bordeleau): M. Brunet.
M. Brunet: Le comité de liaison a certainement une
expérience très proche de la fonction des services rendus par un
tel centre de réadaptation fonctionnelle. C'est pourquoi nous voudrions
que cette catégorie d'établissements soit explicitement
nommée dans ce projet de loi. Si ce n'est pas vraiment
nécessaire, eh bien, on se fie à ce que vous dites et ça
nous paraît être un danger que, par abus d'interprétation,
on en vienne à laisser tomber cette catégorie de centres,
c'est-à-dire qu'on ne l'inclue plus, comme actuellement, parmi les
centres qui doivent ou qui peuvent avoir un comité de
bénéficiaires. Maintenant, ils devraient en avoir un, c'est
pourquoi on a mentionné ça.
M. Johnson (Anjou): D'accord. Je voudrais simplement rappeler
là-dessus, pour le bénéfice de la députée de
L'Acadie, notamment, d'abord, que de fait les centres de réadaptation
fonctionnelle existent. Ce que vous avez évoqué là, ce
sont des institutions qui existent, que ce soit François-Charron,
Lucie-Bruneau, bon, il y en a d'autres.
Mme Lavoie-Roux: Les instituts de réadaptation.
M. Johnson (Anjou): C'est ça. Donc, ils existent. Ils
existent en vertu du chapitre 48 sous le vocable de l'article 1, paragraphe j,
"centre d'accueil" et, en vertu d'un règlement découlant de
l'article 1, paragraphe j, il y a la définition de ce qu'est un centre
de réadaptation.
En 1977, je crois, par la loi 10, on a introduit la définition de
"centre de réadaptation fonctionnelle" dans la loi, mais aucun centre de
réadaptation fonctionnelle, en vertu de la loi 10 qui modifiait le
chapitre 48, n'a été créé. En ce sens-là,
c'est une disposition qui est restée caduque, mais la
réalité a continué d'évoluer comme elle
évoluait et ça n'a aucune signification dans la loi en ce moment.
Il faut voir ça comme une technicité au niveau de la loi
puisqu'il n'y a pas eu ce qui aurait pu être finalement un cloisonnement
ou une compartimentation additionnelle à l'égard de ces
établissements qui, au contraire, évoluent depuis un certain
nombre d'années à un rythme qui est un rythme nécessaire
et qui vient avec les préoccupations générales que la
société a depuis un certain nombre d'années, notamment
depuis quatre ou cinq ans, à l'égard des personnes
handicapées, où on a mis des ressources et on en met de plus en
plus dans ce secteur-là.
Il faut bien comprendre qu'on n'abolit aucune sorte
d'établissement. Ce n'est vraiment qu'une affaire
d'interprétation et, sur le plan juridique, il n'y en a jamais eu qui
découlait de cette notion introduite dans la loi. Il y a quand
même toute une direction générale au ministère qui
ne fait que ça.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la député
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, je pense que, techniquement,
avec l'explication que vous venez de donner, vous avez raison d'ailleurs, cette
catégorie disparaît en... Peu importe le paragraphe, mais il reste
que - je ne veux pas faire le débat ici - il n'y a pas eu d'extension ou
d'application, mais il y avait déjà quelques centres de
réadaptation qui portaient ce nom-là. Derrière cela, il y
avait un philosophie parce qu'on voulait détacher ça de la notion
de médicalisation des centres de réadaptation. Je pense que vous
comprenez ce que je veux dire.
Je ne veux pas faire le débat ici, mais le gouvernement a choisi
de ne pas étendre ou de ne pas catégoriser cela, et on a eu des
représentations en 1978 et 1979 du Comité de liaison des
handicapés physiques qui s'inquiétaient du fait que le
gouvernement n'établissait pas ce genre d'établissement qui, pour
eux, correspondait à une philosophie différente. Je ne veux pas
faire le débat ici mais je pense que vous avez raison et que je n'ai
peut-être pas tort.
L'autre chose... Oui, excusez-moi.
M. Brunet: Non, je vous en prie, terminez.
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est un autre
point que je voulais aborder.
M. Brunet: Deux questions, en passant si vous me le permettez.
J'apprécie la patience avec laquelle vous nous écoutez parce que
je pense qu'on a dépassé le temps qui nous est alloué.
J'aurais deux questions; j'en aurais une autre importante mais, enfin,
j'espère avoir le droit de parole un peu plus tard.
M. le ministre, ce qui arrive c'est que nous, nous sommes en contact
avec des comités de bénéficiaires tous les jours et il y a
des bénéficiaires qui décident, à un moment
donné, de faire des élections au bout de six mois, d'un an ou
d'un an et trois mois, et c'est bien dommage. Le règlement de
régie interne est là. Si la direction ou le CRSSS leur dit:
Écoutez, les amis, c'est sérieux ce que vous faites là,
vous ne pouvez pas changer ça comme vous voulez pour faire élire
quelqu'un ou débarquer un tel parce que, là aussi, il y a parfois
de petites chicanes entre des membres de comités de
bénéficiaires. Alors, nous, on voit mal comment, si les
règlements de régie interne sont libres ou imprécis au
point de laisser les comités de bénéficiaires
décider quand les élections auront lieu... On est convaincu
qu'ils ne diront pas, eux: On suit les conseils d'administration; à
l'avenir, cela va être à tous les trois ans. Ils ne diront pas
cela, ils vont faire des élections de temps en temps, lorsqu'ils ne sont
pas trop malades ou lorsqu'il y a de la chicane ou lorsqu'ils veulent remplacer
un tel. Si la loi prévoit que le mandat des membres des comités
de bénéficiaires est également de trois ans, ça
règle la question. Ils sont libres de voir à leurs
règlements de régie interne quant au remplacement de leurs
membres, etc., mais, pour les élections, il y a une période
fixée par le CRSSS, par exemple, comme ça se fait depuis quelques
années pour les conseils d'administration. L'élection se fait de
façon impartiale, c'est affiché, les bénéficiaires
n'ont pas à faire eux-mêmes leur affichage et c'est un gros
problème de réglé. Voilà ma première
question.
Ma deuxième question s'adresse au ministre. Tout à
l'heure, il a dit: Nous avons éliminé à peu près,
je ne me souviens pas des mots exacts... Le ministre a dit: Nous avons
remplacé la notion d'usagers par la notion de
bénéficiaires. Alors, ma première question est au sujet du
mandat de trois ans ou de X années des membres du comité de
bénéficiaires; ma deuxième question: Qu'est-ce que voulait
dire le ministre Johnson lorsqu'il a dit: Nous avons remplacé la notion
d'usagers par celle de la notion de bénéficiaires?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): D'abord, je vais venir à votre
première question au sujet des élections, M. Brunet. Ce sera aux
comités de bénéficiaires de déterminer
eux-mêmes leurs règlements. Je pense que ce serait un peu odieux
que ce soit le gouvernement qui décide à la place des
comités eux-mêmes. Ce n'est pas le directeur général
de l'hôpital, le ministre ou qui que ce soit qui décide; en vertu
de la loi, ce sont les bénéficiaires eux-mêmes qui
détermineront ces règlements de régie interne. Je pense
que ça doit leur appartenir à eux, c'est ce que la loi
prévoit. C'est qu'il y a mise sur pied obligatoire de tels
comités et ce sont les comités eux-mêmes qui
déterminent cela. Je pense que c'est une règle
démocratique, une règle de participation qui fait que je ne pense
pas qu'il faudrait que des structures, quelles qu'elles soient, viennent leur
imposer des limites comme celles-là, pas plus qu'on en impose à
d'autres structures en vertu de nos lois.
Maintenant, qu'il y ait un effort de standardisation, qu'il y ait un
effort de cohérence dans les régions ou sur le territoire,
ça m'apparaît normal. C'est pour cela qu'il y a toutes sortes
d'associations volontaires, notamment la vôtre, dans ce
secteur-là, qui réunissent des bénéficiaires et
où il y a des échanges là-dessus. Si vous avez une sorte
de règlement interne, de régie interne qui paraît
acceptable à la majorité des comités créés
en vertu de la loi, tant mieux. Ce sera bien plus l'objet d'un consensus
qu'imposé, je pense que c'est important de conserver ce principe
démocratique.
Deuxièmement, je pense qu'il faudrait que les conseils
régionaux de la santé et des services sociaux puissent, dans la
mesure du possible, faire un suivi pour faciliter l'établissement de ces
comités qui naissent...
Le Président (M. Bordeleau): Madame la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Un point particulier. À qui l'institution
envoie-t-elle son rapport annuel? Au CRSSS ou au ministère?
M. Johnson (Anjou): Le rapport du comité, le rapport
annuel? Le rapport annuel des établissements va au ministère.
Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'il pourrait y avoir, dans le rapport
du ministère, une rubrique, à savoir: Est-ce qu'il y a un
comité de bénéficiaires qui a été
établi, oui ou non, qui...
M. Johnson (Anjou): Par définition, par définition
puisqu'il est créé dans la loi. Il va falloir que ce soit
évoqué dans tous les rapports.
Mme Lavoie-Roux: À ce moment-là, le suivi, s'il
n'existe pas...
M. Johnson (Anjou): C'est intéressant que le suivi soit
fait au niveau des conseils régionaux qui peuvent suivre cela de plus
près finalement et inciter les directeurs généraux, les
établissements à faciliter la tâche aux comités de
bénéficiaires qui deviennent, encore une fois, obligatoires en
vertu de la loi.
Quant à la question d'usagers et de bénéficiaires,
en étendant, en supprimant la notion d'usagers de la loi, à
l'exception des centres de services sociaux et des CLSC, il est bien
évident que ceux qui siégeaient à titre d'usagers quelque
part disparaissent aussi automatiquement. Sur le plan de la technique
juridique, en supprimant le mot, on supprime par définition le mot
partout. Donc, c'est ce qui explique qu'on ait supprimé la notion
d'usagers dans ce cas-là.
Par ailleurs, puisque notre préoccupation, ce sont les personnes,
les citoyens à travers cela, on introduit un nouveau principe qui est le
suivant: partout dans le réseau, là où il y a des
bénéficiaires, il va y avoir des bénéficiaires
à ce titre-là qui siégeront quelque part au conseil
d'administration; et c'est une extension encore une fois. Cela devient
obligatoire, non seulement cela, mais également ils sont choisis par le
comité de bénéficiaires. C'est encore extrêmement
important, parce que cela consacre, je dirais, non pas cette catégorie
mais cette personnalité de l'établissement qu'il y a une telle
chose pour les bénéficiaires et qu'il faudrait que ce soit
traduit dans nos lois et qu'éventuellement avec le temps,
l'activité de ces personnes fasse que de plus en plus on soit
préoccupé par ce que font, ce que disent, ce que veulent les
bénéficiaires pour leur donner un canal d'expression
précis.
En cours de route, dans le cas des centres d'accueil, qu'ils soient de
réadaptation ou d'hébergement, et des CHSP, en remplaçant
la notion d'usagers et en introduisant celle de bénéficiaires et
en mettant un bénéficiaire partout, cela veut dire qu'on a mis
dans ces établissements-là un bénéficiaire en
pratique, en faisant sauter deux usagers, et on a remplacé partout une
personne représentant les organismes bénévoles. La
question, c'est de savoir si oui ou non on va mettre deux
bénéficiaires. C'est cela la question que vous posez, je pense
que c'est clair. Je ne vous donnerai pas la réponse aujourd'hui, parce
que ce n'est pas le rôle de la commission. Vous soulevez la question, on
échange et on aura l'occasion, je suis sûr de cela, au cours de la
semaine d'en discuter ici au niveau de la commission.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.
Est-ce que cela va pour les questions? Un dernier petit commentaire, M.
Brunet? En vous demandant, si c'est possible, de le faire au minimum.
M. Brunet: Etant donné qu'au niveau des conseils
d'administration il y a effectivement des élections pour les membres
dont le mandat est prévu pour trois ans, nous ne voyons pas pourquoi, au
sujet des comités de bénéficiaires, il y aurait un mandat
également de prévu pour trois ans. Ce à quoi nous croyons
beaucoup, mais je ne demande pas de réponse, ce sera une interrogation
dont vous pourrez tenir compte, c'est qu'un comité de
bénéficiaires fait des élections, nomme un
représentant, espérons que cela va être deux, au conseil
d'administration et, au bout d'un an, six mois ou quinze mois, décide de
faire des élections. Alors, celui qui est au CA pour trois ans, il va
quitter, parce que le comité de bénéficiaires ne l'aura
pas réélu, parce qu'il n'aura pas été
réélu par les bénéficiaires. C'est cela, le mandat
est de trois ans, mais cela ne veut rien dire, puisque, s'il y a des
élections de façon plus ou moins capricieuse, malheureusement
cela existe, ce membre du CA, ce bénéficiaire représentant
les autres, qu'est-ce qui lui arrive? Son mandat n'est plus bon, il est
expulsé.
M. Johnson (Anjou): Je peux répondre à cela, la loi
dit qu'une fois qu'il est au conseil d'administration, c'est pour trois ans. Le
comité de bénéficiaires peut passer tous les
règlements qu'il veut pour changer cela, il ne pourra pas le changer
parce que c'est dans la loi.
M. Brunet: Un dernier commentaire. S'il n'y a pas moyen que le
projet de loi accorde au comité de bénéficiaires le droit
d'ester en justice, lui reconnaisse sa personnalité civile, il va
falloir que les comités de bénéficiaires, du moins ceux
qui sont les plus actifs, demandent leur incorporation en vertu de la
troisième partie de la Loi sur les compagnies. Mais il y a des
conseillers juridiques qui nous disent: II y a des chances que le
ministère des Institutions financières refuse à des
comités de bénéficiaires de s'incorporer, parce qu'ils
sont des créatures qui existent en vertu d'une loi et que - je vous
donne une raison bien sommaire, je ne suis pas du tout avocat - leurs fonctions
étant déjà prévues, définies dans une loi,
ils ne peuvent s'incorporer. Donc, à défaut d'accorder aux
comités de bénéficiaires une personnalité civile,
est-ce qu'il n'y aurait pas moyen qu'on réfléchisse pour que les
comités de bénéficiaires, que les règlements, les
fonctions du comité de bénéficiaires prévoient que
ces comités peuvent demander
l'incorporation? En dernier lieu, je voudrais vous demander, M. le
Président, ou M. le ministre, quand aura lieu la deuxième lecture
de ce projet de loi. (16 h 45)
M. Johnson (Anjou): Sur cette question du droit d'aller
représenter les autres en justice, je dirai que c'est vrai pour les
autres comités qui existent dans l'établissement. Vous savez, le
conseil des médecins et dentistes, qui existe en vertu de la loi, n'a
pas le droit d'ester en justice pour ses membres, mais il a des fonctions
définies dans la loi. C'est la même chose pour un comité de
bénéficiaires qui, encore une fois, disons-le, avec la loi 27,
devient obligatoirement un comité statutaire avec des pouvoirs, des
attributions, un rôle, et qui n'est donc pas soumis à l'arbitraire
administratif, en tant que comité.
Je ne vous dis pas que la vie est toujours facile dans ces
comités, à cause de l'habitude, vous l'avez évoqué
vous-même, ce n'est pas partout que les gens membres des comités
des bénéficiaires ont la formation, ont l'habitude, peuvent
être confrontés avec ces choses, mais ça vient, ça
se forme de plus en plus. Ce que vise le projet de loi, c'est de rendre
ça effectivement de plus en plus possible, mais que ce soit
incarné dans des personnes, qu'il y en ait partout sur le territoire,
dans tous les établissements à travers le Québec, et
ça va prendre son temps.
Par ailleurs, l'incorporation en vertu de la troisième partie de
la Loi sur les compagnies présente les difficultés que j'ai
évoquées tout à l'heure. Théoriquement, rien
n'empêcherait des personnes, mais des individus et non pas une structure,
de s'incorporer avec des objets spécifiques, mais ça devient des
individus, ce n'est plus le comité au sens des lois. C'est un long
débat juridique, qui est complexe, mais trancher dedans, c'est trancher
dans l'essentiel. Qui a le droit, dans notre société, qui a ce
droit d'ester en justice pour des tiers? Ceux qui ont ce droit dans notre
société, ce sont ou bien des individus qui ont un
intérêt en tant qu'individus et non pas en tant que structure, ou
bien des structures qui sont prévues dans un encadrement complexe, que
ce soit le Code du travail ou la Loi sur les syndicats professionnels, ou que
ce soit l'encadrement des avocats eux-mêmes, à travers la Loi sur
le barreau. Créer une exception à ce principe, sur le plan des
institutions, présente un problème considérable. C'est
beaucoup plus, je vous le dirai, une question qui relève du
ministère de la Justice, ce n'est pas le fond.
Ce qu'on peut faire, nous, à l'intérieur des institutions,
telles qu'elles existent, dans ce droit fondamental qui est très
important dans une société, du droit d'ester en justice et qui
doit être encadré, je ne peux pas donner le droit d'ester en
justice, sans encadrer l'exercice de ce droit, car qui va protéger la
personne qui subirait un abus de ceux qui ont ce droit? C'est le
problème de fond qui se pose.
Cependant, c'est le rôle du ministère de s'assurer que, de
plus en plus, les bénéficiaires de notre réseau puissent
trouver un canal d'expression et c'est ce que vise la loi 27, en consacrant
cette structure dans le projet de loi, en l'étendant à des
endroits où ça n'existait pas, même pas par
règlement, notamment dans les établissements pour enfants, et en
lui assurant la possibilité de faire des nominations, notamment au
niveau du conseil d'administration, qui reste une partie importante,
finalement, en renforçant ses attributions dans le cadre de la loi, dans
la définition de ses fonctions et de ses attributions.
M. Brunet: M. le Président, M. le ministre, je remercie
beaucoup tous les membres de cette commission de la patience et de l'ouverture
d'esprit avec lesquelles vous nous avez entendus aujourd'hui. J'ai seulement
une dernière question: Quand prévoyez-vous que la deuxième
lecture du projet de loi aura lieu?
M. Johnson (Anjou): Je peux vous dire, M. Brunet...
M. Brunet: À peu près.
M. Johnson (Anjou): ...que ça va être, par
définition, la semaine prochaine. Je ne peux pas vous dire le jour,
étant donné que le leader va décider de ça, demain
sans doute ou en fin de semaine. Je peux vous dire qu'en ce qui me concerne, je
souhaite, comme cette loi est là pour régler des problèmes
et non en créer, que nous puissions l'adopter avant Noël et c'est
essentiellement l'Opposition qui en décidera.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Au nom de l'Opposition, je me sens...
M. Johnson (Anjou): ... un peu visée.
Mme Lavoie-Roux: ... touchée, concernée. Il y a une
expression à l'Assemblée nationale là-dessus. Je voudrais
simplement rappeler au ministre que, dans les notes préliminaires du
président du comité des malades, comme au cours des conversations
que nous avons eues avec un grand nombre de groupes qui sont venus devant nous
- le ministre était bien présent lui aussi - tout le monde
s'étonnait de la rapidité avec laquelle on procède pour
l'adoption de ce projet de loi. Il y a eu
plusieurs demandes de faites dans le sens de ne pas précipiter
les choses. Cela ne veut pas dire qu'il faut se traîner les pieds. Je ne
voudrais pas, parce que le ministre a décidé deux semaines avant
la fin de la session de nous arriver avec un projet de cette envergure, qu'il
fallait à tout prix qu'il soit adopté avant Noël et que,
s'il n'était pas adopté, la responsabilité en incomberait
à l'Opposition... C'est bien ce qui est insinué...
M. Johnson (Anjou): Affirmé.
Mme Lavoie-Roux: ... je n'aime pas beaucoup le mot
"insinué", mais en tout cas c'est bien ce qui est affirmé dans
vos remarques. C'est pour cela que c'est important de faire cette mise au
point, parce qu'il y a aussi un sens des responsabilités à
exercer quand on ne pratique pas indûment une hâte ou une
précipitation uniquement pour répondre à des
impératifs que le ministre ou son gouvernement a établis seul et
sans consultation avec qui que ce soit d'autre. Il n'y a rien de plus vrai que
dans le cas de la loi que nous traitons présentement.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mme la
députée de L'Acadie. Des commentaires, M. le ministre?
M. Johnson (Anjou): M. le Président, vous me permettrez
là-dessus - cela m'apparaît essentiel - en plus de remercier M.
Brunet, ce à quoi je passerai dans quelques secondes, de dire que cela
m'apparaît fondamental que... D'abord, ce projet de loi a
été déposé dans les délais prévus par
les procédures de l'Assemblée, c'est-à-dire avant le 1er
décembre.
Mme Lavoie-Roux: Le 25 novembre. M. Johnson (Anjou): Si on
me permet... Mme Lavoie-Roux: Oui, je m'excuse.
M. Johnson (Anjou): Deuxièmement, ce projet de loi vise
encore une fois à régler des problèmes plutôt
qu'à en créer. Troisièmement, il contient une série
de dispositions qui font l'objet de beaucoup de discussions depuis quinze ans,
depuis six ans, depuis sept ans, selon le cas, au Québec, et sur
lesquelles on a écrit beaucoup, on a dit beaucoup. Ce qui manquait,
c'était de se brancher à un moment donné. On a cela dans
le projet de loi pour régler certains problèmes. Je dis que si
l'Opposition, alors que c'est la ferme intention du gouvernement de voir ce
projet adopté, avec les amendements qu'il faudra y apporter en cours de
route - nous sommes ouverts à cela, c'est pourquoi il y a une commission
parlementaire, qu'on a entendu d'excellentes suggestions, notamment
aujourd'hui, même s'il y a eu beaucoup d'éclaircissements et
d'échanges là-dessus - compte tenu de ce que je viens de dire,
que si l'Opposition, dis-je, décidait d'en faire autrement, je suis
sûr qu'elle devra s'en justifier, ce qui est son rôle.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais juste faire
une petite mise au point, puisque...
Le Président (M. Bordeleau): Oui.
Mme Lavoie-Roux: ... cela provoque un court débat, et on
n'a pas souvent l'occasion de le faire parce que, généralement,
on n'a pas interrompu ou retardé nos invités pour ce genre de
propos. Pardon?
M. Johnson (Anjou): On pourrait peut-être les remercier et
continuer le débat autour de cela.
Mme Lavoie-Roux: Non, cela va prendre une seconde, puisque c'est
M. Brunet, qui a posé une question en vertu de l'article 34 en vous
demandant quand sera la deuxième lecture, qui a déclenché
ce débat. Quand vous vous justifiez en disant que cela a
été déposé dans les délais prévus,
Dieu merci, c'était trois jours avant les délais prévus!
Vous admettrez, M. le ministre, que je connais peu de projets de loi - on m'a
dit qu'il y a eu un autre cas où c'était encore moi qui
étais la victime - où, dans un délai d'une semaine, on a
entendu 30 groupes sans compter ceux qu'on n'a pas voulu entendre.
Là-dessus, je dois dire que j'avais convenu avec le ministre d'une
convocation limitée et que le lendemain ou le surlendemain, les
mémoires nous arrivaient - je n'en fais reproche à personne, sauf
pour les organismes très bien organisées, je m'excuse de la
redondance - à la dernière minute et il nous fallait
réagir dans les 48 heures. Vous êtes dans les délais,
techniquement, mais je ne sais pas si c'est respecter l'esprit du
parlementarisme où on veut prendre ses responsabilités le mieux
possible et dans l'intérêt de la population, M. le
Président. Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Je vous remercie, M.
Brunet, de vous être présenté devant nous, ainsi que les
personnes qui vous accompagnent. J'appellerai le groupe suivant, soit
l'Association des chirurgiens dentistes du Québec.
Association des chirurgiens dentistes du
Québec
J'imagine que le représentant et président, M. Claude
Chicoine, est ici. M.
Chicoine, je vous invite à nous présenter les gens qui
sont avec vous et à nous faire part de votre mémoire.
M. Chicoine (Claude): M. le Président, avant de
présenter les gens qui m'accompagnent, je veux remercier le ministre des
Affaires sociales de nous avoir invités à cette commission
parlementaire.
Pour ce qui est des gens qui m'accompagnent, j'ai, à ma gauche,
Me André Tremblay, qui est mon adjoint; le Dr Yves Giguère, qui
est directeur exécutif à l'Association des chirurgiens dentistes;
le Dr Daniel Pellan, qui est le premier adjoint à l'exécutif de
l'association; le Dr Jean-Pierre Martel, qui est membre du comité de
négociation de l'Association des chirurgiens dentistes; à ma
droite, Me Yvan Brodeur, qui est le porte-parole à la table de
négociation de l'association. Pour manifester aussi de la
solidarité face aux implications du projet de loi 27, il me fait plaisir
de vous présenter des invités de marque: le Dr Paul Desjardins,
président de la Fédération des médecins
spécialistes du Québec; le Dr André Godin,
représentant de la Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec et président de l'Association des
médecins omnipraticiens de la région de Québec et le Dr
Pascal Labrecque, vice-président de la Fédération des
médecins résidents et internes du Québec. (17 heures)
Avant de débuter la lecture du mémoire, j'aimerais
apporter une précision que je considère importante. Pour avoir
assister aux travaux de la commission parlementaire depuis ses débuts
mais pas, jusqu'à la limite des heures en fin de journée, je
tiens à préciser que notre mémoire est une critique
sévère mais juste, croyons-nous du projet de loi que nous avons
devant nous et que jamais cette critique se veut être un procès
d'intention vis-à-vis qui que ce soit. C'est notre interprétation
des différentes clauses auxquelles nous allons vous livrer nos
commentaires.
Dans le communiqué de presse 351181 qu'il émettait le 19
novembre 1981, jour du dépôt du projet de loi no 27, le
ministère des Affaires sociales affirmait, je cite: "Le système
de santé québécois constitue un acquis indéniable
qu'il est important de conserver, de consolider. En plus de viser
l'amélioration de l'état de santé de la population, le
système de santé doit évoluer vers une utilisation
optimale des ressources. Déjà perturbé par les contraintes
de la situation budgétaire, son évolution commande des
réaménagements significatifs à la fois sur le plan de la
gestion du réseau des affaires sociales et sur celui du fonctionnement
de la Régie de l'assurance-maladie. Dans ces circonstances, le
ministère des Affaires sociales a besoin de moyens additionnels s'il
veut assurer au sein de son réseau, une gestion plus cohérente de
même qu'un développement plus ordonné."
Il est vrai, que le projet de loi no 27 vise à
réaménager de façon significative la Loi sur les services
de santé et les services sociaux et la Loi sur l'assurance-maladie, en
donnant au ministère des Affaires sociales des moyens additionnels. Plus
précisément, ce projet de loi permet au ministère des
Affaires sociales d'atteindre ses objectifs par le truchement de la
réglementation et de décisions unilatérales plutôt
que par les voies de la concertation et de la collaboration. Le projet de loi
no 27 pèche par autoritarisme.
C'est ainsi que ce projet de loi repose sur un postulat fort
présomptueux, à savoir que le sens des responsabilités,
l'intelligence, l'imagination et l'efficacité sont nécessairement
l'apanage de ceux qui détiennent le pouvoir exécutif ou
bureaucratique et que les solutions au problème sont d'autant plus
appropriées et équitables qu'elles sont imposées
d'autorité.
Nous ne partageons pas cette croyance. Nous ne croyons pas qu'il soit
possible de bâtir un système de santé à coups de
décrets gouvernementaux et de décisions unilatérales pas
plus qu'il n'est possible de bâtir l'économie du Québec
sans une concertation des divers intervenants. Nous croyons inappropriée
et néfaste l'approche choisie par le ministère des Affaires
sociales pour apporter des réaménagements significatifs à
la gestion du réseau et au fonctionnement de la Régie de
l'assurance-maladie. Les faiblesses du projet de loi no 27 sont
particulièrement évidentes. En ce qui a trait aux dispositions
touchant la répartition géographique, les pouvoirs de la
régie, le champ de la négociation, les pouvoirs des conseils
régionaux, le contrôle des coûts médicaux et
dentaires en centres hospitaliers. 1. La répartition
géographique: l'article 4 du projet de loi, représente
l'illustration la plus évidente de l'approche autoritaire et
unilatérale du ministère des Affaires sociales. Cette disposition
constitue une négation pure et simple du droit de tout syndiqué
à la négociation collective de son contrat. Ainsi, le projet de
loi prévoit que: a) à défaut d'entente quant à la
rémunération des médecins durant les premières
années d'exercice, le gouvernement peut, par décret publié
à la Gazette officielle du Québec qui tient lieu d'une entente,
fixer cette rémunération. b) Si le ministre estime que, dans une
région, l'absence de services médicaux met en péril la
santé publique, il peut convenir avec tout professionnel de la
santé de conditions de travail différentes de celles qui sont
prévues à une entente. c) Le ministre peut, à titre
expérimental, rendre applicable, par arrêté qui tient lieu
d'une entente, un mode de
rémunération prévu à une entente, à
l'ensemble des professionnels d'un département ou à l'ensemble
des professionnels qui y exercent le même genre d'activités,
pourvu qu'il ait l'accord des professionnels concernés, du conseil
d'administration et du conseil des médecins et dentistes de
l'établissement.
Alors que par ailleurs le gouvernement vante les mérites de la
syndicalisation des travailleurs, il soumet un projet de loi lui permettant de
décréter des conditions de travail, au cas où la partie
syndicale s'aviserait de ne pas accepter les propositions gouvernementales. Il
s'agit là d'une conception du syndicalisme que l'on n'oserait
sûrement pas imposer au président de la FTQ, M. Laberge.
Alors que l'on se dit favorables au principe de la négociation
collective, on présente un projet de loi qui permet au ministre
d'ignorer l'agent négociateur pour transiger avec son membre et, qui
plus est, de décréter d'autorité que l'entente
individuelle devient collective. 2. Les pouvoirs de la Régie de
l'assurance-maladie. Le projet de loi 27 consacre les pouvoirs exorbitants et
discrétionnaires de la Régie de l'assurance-maladie.
C'est ainsi que: a) Lorsque la régie est d'avis que des services,
dont le paiement a été obtenu au cours des 36 mois
précédents, étaient fournis non conformément
à l'entente, elle peut se rembourser par compensation ou autrement. Le
professionnel de la santé peut alors s'adresser au tribunal d'arbitrage
prévu à la Loi sur l'assurance-maladie pour obtenir l'argent
qu'on lui a retiré unilatéralement. b) Lorsque la régie
est d'avis que des services, dont le paiement a été obtenu au
cours des 36 mois précédents, étaient des services qui
n'ont pas été fournis, que le professionnel de la santé
n'a pas fournis lui-même ou qu'il a faussement décrits ou des
services non déterminés comme services assurés par
règlement, elle peut se rembourser par compensation ou autrement. Le
professionnel de la santé doit alors s'adresser aux tribunaux civils
pour obtenir l'argent qu'on lui a retiré unilatéralement.
Les remarques suivantes s'imposent: Le pouvoir discrétionnaire de
la régie consacré par l'expression "lorsque la régie est
d'avis" est l'illustration du postulat qui voudrait que le sens des
responsabilités, l'intelligence et l'efficacité soient
nécessairement l'apanage de ceux qui détiennent un pouvoir
bureaucratique. L'efficacité administrative ne justifie pas la
consécration d'un pouvoir discrétionnaire qui ouvre la porte aux
pires abus.
Le tribunal d'arbitrage prévu à la Loi sur
l'assurance-maladie devrait avoir juridiction exclusive, dans tous les cas
où un professionnel de la santé conteste une décision de
la régie. L'obligation, faite à un professionnel, de saisir un
tribunal de droit commun de sa demande plutôt que le tribunal d'arbitrage
prévu à la loi, est injustifiable et inappropriée. En
effet, le tribunal d'arbitrage prévu à l'article 13 du projet de
loi est, sans aucun doute possible, un tribunal statutaire.
En conséquence, il n'existe légalement aucun obstacle
à ce que sa juridiction couvre non seulement l'interprétation et
l'application d'une entente, mais également le bien-fondé des
décisions de la régie à l'effet que les services dont le
paiement a été obtenu au cours des 36 mois
précédents ne répondent pas aux exigences de la loi,
à savoir qu'ils n'ont pas été fournis, que le
professionnel de la santé ne les a pas fournis lui-même, qu'il les
a faussement décrits ou qu'il s'agit de services non
déterminés comme services assurés par règlement.
L'obligation faite à un professionnel de la santé de se pourvoir
devant un tribunal de droit commun est non seulement injustifiable, elle est
aussi inappropriée. En effet, cette obligation prive le professionnel du
recours le plus facilement accessible, le plus expéditif et le plus
approprié, soit le tribunal d'arbitrage, puisqu'il possède
normalement une expertise du secteur de la santé que ne possèdent
pas les tribunaux de droit commun. 3. Le champ de la négociation. Le
projet de loi no 27 vise à soustraire du champ de la négociation
le domaine de l'activité professionnelle en établissement pour en
faire un simple objet de réglementation. C'est ainsi que l'article 173i
actuel prévoit que le gouvernement peut faire des règlements
concernant les plans d'organisation et en particulier l'activité
professionnelle sous réserve cependant des ententes conclues en vertu de
la Loi sur l'assurance-maladie. Le projet de loi no 27 fait disparaître
cette réserve.
Nous croyons essentiel de souligner que le problème de
l'activité professionnelle en établissement est indissociable du
problème de la qualité de l'acte médical ou dentaire. Le
fait de soustraire l'activité professionnelle du champ de la
négociation a pour effet de confier unilatéralement au
gouvernement et aux fonctionnaires l'élaboration des normes qui
conditionnent la qualité des actes professionnels.
Ce nouvel empiétement du pouvoir réglementaire explique
d'ailleurs la modification apportée à l'article 19 de la Loi sur
l'assurance-maladie selon laquelle le ministre négociera les conditions
de travail dés professionnels de la santé, ceux-ci étant
donc limités à négocier leurs conditions de travail
à l'exclusion de l'activité professionnelle en
établissement. 4. Les pouvoirs du conseil régional. Le nouvel
article no 18.1 de la Loi sur les
services de santé et les services sociaux veut que le conseil
régional établisse les politiques d'admission et de transfert des
bénéficiaires dans les établissements de sa région,
fixe les normes de fonctionnement des services d'urgence, fixe les normes
d'utilisation et de distribution des lits et autorise le déplacement
d'un bénéficiaire vers un autre établissement en cas
d'engorgement.
Nous croyons que ce transfert de pouvoir du centre hospitalier vers le
conseil régional aura pour effet de compliquer davantage la solution des
problèmes en en confiant la responsabilité à une nouvelle
catégorie de bureaucrates. 5. Les coûts médicaux et
dentaires en centre hospitalier. La plupart des pays occidentaux sont
présentement en difficulté sur le plan économique et en
particulier le gouvernement du Québec qui doit faire face à des
problèmes budgétaires sérieux. On comprend donc que le
gouvernement surveille de près les dépenses publiques et tente de
contenir leur évolution à l'intérieur de balises
raisonnables. On comprend notamment que le ministère des Affaires
sociales cherche à freiner l'évolution du coût des services
hospitaliers et des services rendus par les professionnels de la santé.
Il s'agit là cependant d'une intervention délicate qui
nécessite la collaboration des professionnels de la santé, que le
projet de loi no 27 prévoyant plutôt un ensemble de
mécanismes réglementaires normatifs et punitifs qui en dernier
ressort joue à l'encontre du patient, du professionnel et en fait de la
société québécoise.
Analysons les composantes de ce nouveau système.
Le Président (M. Rochefort): Est-ce que ce serait possible
que vous ne lisiez pas les articles que nous avons déjà au projet
de loi pour favoriser une meilleure discussion par la suite?
M. Chicoine: Le mémoire n'est pas tellement long, je
comprends votre désir d'accélérer, mais il s'agit de
discuter en commission parlementaire de choses qui vont affecter notre vie de
façon très significative. Qu'on nous donne une heure pour
discuter de notre avenir... Je conviens que le Québec est pressé
dans cette espèce de putsch législatif de fin d'année.
Cependant, j'aimerais bien avoir l'occasion de lire mon mémoire en
entier puisqu'on en est rendu à la moitié; je ne pense pas
prendre plus de temps que d'autres à expliquer ma position.
Le Président (M. Bordeleau): Non, M. Chicoine, je ne
voudrais pas vous brimer de quelque façon que ce soit dans votre droit
de parole, sauf que dans votre mémoire vous vous reportez textuellement
aux articles de la loi. Je pense... remarquez...
Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Madame la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'il ne s'agit pas de perdre du temps
en faisant une longue discussion, mais le texte est très
aéré, il a 17 ou 18 pages et, honnêtement il est plus court
que bien des mémoires. Moi, je pense qu'on est mieux de le laisser
aller, c'est parce que la réflexion avait trait à un article de
la loi. Je suis certaine que le ministre n'a pas voulu, c'était
seulement un bon conseil qu'il vous donnait.
Le Président (M. Bordeleau): De toute façon, cela
ne venait pas du ministre, cela venait de la présidence, c'était
simplement pour tenter d'accommoder tout le monde.
Ce que je dois vous dire simplement, c'est qu'on tente de garder un
temps approximativement semblable pour tout le monde et que le temps qu'on
prend à lire le mémoire, c'est du temps qu'on enlève pour
la période des questions.
M. Chicoine: J'aimerais ajouter pour le bénéfice de
la présidence que les articles qui sont cités ne sont pas dans le
même ordre que le projet de loi et que cela va certainement faciliter
leur compréhension. (17 h 15)
M. Rivest: II est bon d'ailleurs qu'ils les entendent.
M. Chicoine: Analysons les composantes de ce nouveau
système. a) Le plan d'organisation d'un centre hospitalier doit
prévoir le nombre de médecins et dentistes qui peuvent exercer
leur profession dans chacun des départements. Ce plan d'organisation est
soumis à l'approbation du ministre. Il s'agit de l'article 49 du projet
de loi. b) Le conseil d'administration d'un centre hospitalier accepte la
candidature d'un médecin ou dentiste en tenant compte du nombre de
médecins et dentistes prévu au plan d'organisation et du
coût engendré par l'engagement de ce médecin ou dentiste.
C'est l'article 85 du projet de loi. c) Le médecin ou dentiste dont la
candidature est refusée parce que le nombre prévu au plan
d'organisation est atteint ou au motif du coût projeté de son
engagement, ne peut en appeler de cette décision. C'est l'article 80 du
projet de loi. d) Le conseil des médecins et dentistes adopte, pour
chaque département clinique, des normes sur la fourniture des soins
requis et l'utilisation des ressources disponibles. Ces normes peuvent
prévoir des sanctions administratives pour, notamment, limiter ou
suspendre le droit d'un médecin ou dentiste
d'utiliser les ressources disponibles dans le centre hospitalier. Le
conseil des médecins et dentistes accomplit également les autres
fonctions déterminées par décret gouvernemental. Voir les
articles 73 et 74 du projet de loi. e) Le chef de département voit
à l'application des normes sur la fourniture des soins requis et
l'utilisation des ressources disponibles et il impose les sanctions
administratives qui peuvent y être prévues. C'est l'article 51. f)
Les statuts et privilèges d'un médecin ou dentiste sont
accordés conformément au décret gouvernemental et leur
jouissance est assujettie au respect des normes adoptées par le conseil
des médecins et dentistes. C'est l'article 83. g) La Régie de
l'assurance-maladie est autorisée à transmettre au conseil des
médecins et dentistes les profils de pratique des médecins et
dentistes de l'établissement. C'est l'article 19.
Les remarques suivantes découlent de l'analyse de ces
dispositions du projet de loi:
Le ministre pourra, par voie de contingentement, refuser l'accès
des centres hospitaliers aux nouveaux médecins et dentistes. Cette
approche d'autorité a pour effet de pénaliser injustement les
jeunes médecins et dentistes et de rendre improductive une partie
importante de l'investissement que notre société a consentie dans
l'éducation depuis une quinzaine d'années.
Le pouvoir consenti au conseil des médecins et dentistes
d'adopter des normes sur la fourniture des soins requis et l'utilisation des
ressources disponibles rompt de façon fondamentale avec les principes de
l'autonomie professionnelle et de la responsabilité professionnelle.
Cette "trouvaille" qui consiste à faire normaliser par des pairs ce qui,
en tout état de cause, ne devrait pas faire l'objet de normalisation,
causera plus de problèmes qu'elle ne pourra en résoudre.
À partir de quels critères, le conseil des médecins
et dentistes pourra-t-il fixer des normes quant aux ressources disponibles? De
toute évidence, en tenant compte que l'ensemble des besoins des
bénéficiaires doit être satisfait à partir des
ressources disponibles. En d'autres termes, plus les ressources rendues
disponibles par le gouvernement seront faibles, plus les normes devront
être à la baisse. On entend de toute évidence confier au
conseil des médecins et dentistes et au chef de département la
responsabilité de gérer la mauvaise qualité des soins
médicaux et dentaires.
D'autre part, il est évident que les normes adoptées par
le conseil des médecins et dentistes quant aux soins requis seront
conditionnées par les budgets disponibles au niveau du
département. En effet, étant donné que le niveau de la
qualité des soins dispensés par le professionnel engendre des
coûts au niveau des ressources disponibles, les normes quant à la
fourniture des soins requis devront nécessairement tenir compte des
ressources disponibles. Puisque telle est la portée du projet de loi, on
devrait en faire état de façon claire et non ambiguë.
On est donc justifié de se demander ce qu'il advient de
l'autonomie professionnelle du médecin et du dentiste en
établissement hospitalier. On peut aussi se demander ce qu'il adviendra
du corollaire de l'autonomie professionnelle, soit la responsabilité
personnelle du médecin et du dentiste vis-à-vis de son patient.
Ne devrait-on pas prévoir au projet de loi une disposition dans le sens
qu'un médecin ou un dentiste ne pourra faire l'objet d'une action en
dommages et intérêts de son patient s'il se conforme aux normes
sur la fourniture des soins requis et l'utilisation des ressources
disponibles?
Comme nous le disions plus avant, nous comprenons que le gouvernement
tente de contenir l'évolution des dépenses publiques à
l'intérieur de balises raisonnables. Nous ne croyons pas cependant que
le gouvernement atteigne cet objectif par la multiplication des contrôles
et des normes. Cette approche ne peut que faire croître les coûts
de la gestion bureaucratique au détriment de la qualité des
services. Pour ce qui est de l'Association des chirurgiens dentistes du
Québec, nous avons eu l'occasion récemment de soumettre au
ministre des Affaires sociales une proposition concernant l'implantation d'un
programme public de soins dentaires préventifs, proposition qui
éviterait notamment l'arrivée de quelque 350 hygiénistes
dentaires dans la fonction publique. À cet égard, nous avons
écrit au Conseil des ministres, dès le 24 octobre 1980, pour
manifester notre désir d'ouvrir des discussions quant à ce
problème.
Le 26 juin 1981, nous écrivions au ministre des Affaires
sociales, lui signifiant que nous serions heureux de le rencontrer dans les
meilleurs délais pour échanger ouvertement et dans un esprit de
franche collaboration relativement à l'ensemble de ce problème.
La réponse à ces deux lettres nous parvenait le 22 octobre 1981,
le sous-ministre des Affaires sociales nous réitérant les
positions du ministère, sans pour autant nous convier à une
rencontre. Ne nous avouant pas vaincus, nous avons réitéré
verbalement notre désir d'ouvrir des discussions avec le
ministère des Affaires sociales. On nous demanda d'écrire au
ministre pour formaliser notre désir de négocier.
Le 17 novembre 1981, nous écrivions donc ce qui suit au ministre
des Affaires sociales: "L'Association des chirurgiens dentistes du
Québec propose que l'entente en vigueur soit modifiée pour y
prévoir que les
actes de prévention seront dispensés dans les
écoles par les dentistes et leur personnel auxiliaire sous la
coordination des départements de santé communautaire et suivant
un mode de rémunération à être
déterminé. L'Association des chirurgiens dentistes du
Québec est, dès à présent, convaincue que ce
programme pourra être mis sur pied à un coût
inférieur à celui du programme suggéré par le
ministère des Affaires sociales et elle est disposée à
engager les discussions sur cette base. Quoique nous demeurions convaincus de
l'avantage pour la population de conserver les soins de prévention en
cabinet privé, il nous faut malheureusement constater la volonté
arrêtée de votre ministère de transférer ces
services du cabinet privé au réseau public. Nous sommes aussi
convaincus que ce transfert affectera fondamentalement la qualité des
soins dentaires dispensés aux enfants du Québec si la mise sur
pied d'un tel programme implique que les dentistes sont réduits à
ne poser que des actes curatifs. "Une telle dissociation du curatif et du
préventif sera coûteuse pour le gouvernement,
désavantageuse pour la population et inacceptable, sur le plan
professionnel, pour les dentistes. Vu les délais très courts qui
nous sont imposés, le présent dossier devant être soumis
à l'attention du conseil d'administration de la Régie de
l'assurance-maladie le 8 décembre 1981, nous sollicitons une rencontre
avec vos représentants dans les prochains jours afin d'examiner les
implications de notre proposition. Nous croyons fermement qu'il est possible,
dans un très court délai, de parvenir à une solution
avantageuse pour tous les intervenants."
Une lueur d'espoir, nous devons rencontrer les représentants du
ministère dans les prochains jours, soit un an, un mois et quelques
jours après notre demande initiale de rencontre. Les dentistes, comme
les autres professionnels de la santé, travaillent quotidiennement et
concrètement à l'amélioration de l'état de
santé des Québécois. Cela était vrai il y a
cinquante ans, cela est vrai aujourd'hui et cela demeurera vrai demain. Ils
assument cette responsabilité avec autant de dévouement et de
sens social que les hommes politiques assument leurs propres
responsabilités. Ils n'acceptent pas que les décisions concernant
la santé des Québécois deviennent l'apanage exclusif des
hommes politiques et des fonctionnaires. Ils croient juste d'affirmer que les
décisions imposées d'autorité, de façon
unilatérale, sont des décisions souvent peu
éclairées et peu imaginatives, par ce fait même que leur
élaboration ne repose pas sur le dialogue, la concertation et la
négociation.
L'Association des chirurgiens dentistes du Québec allègue
donc à cette commission parlementaire que l'étude du projet de
loi 27 par l'Assemblée nationale devrait être reportée de
quelques mois pour permettre aux divers intervenants du secteur de la
santé d'apporter une contribution franche et ouverte aux
problèmes visés par le projet de loi 27.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Chicoine.
M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Merci, M. Chicoine. En ce qui a trait
à la répartition géographique, je vous renvoie aux propos
et aux échanges qu'il y a eu en commission et auxquels vous avez
assisté puisque vous étiez assis à la table avec les deux
fédérations de médecins spécialistes. Il en va de
même pour la question des pouvoirs de la Régie de
l'assurance-maladie; étant donné l'échange qu'on a eu hier
avec le procureur de l'Association des optométristes, l'argumentation
qui y est développée est absolument identique. Le problème
reste le même qu'hier. Cela n'a pas évolué depuis hier
soir, au niveau de la définition de la question que vous y voyez.
Quant à la question du champ de négociation, je me
permettrai de vous renvoyer également à cette très
intéressante discussion autour de la notion des conditions de travail et
de ce qui a été évoqué en termes de liens de
subordination que cela pourrait "impliquer" et que nous n'entendons pas
insérer comme notion.
Quant aux pouvoirs des conseils régionaux, j'en prends bonne note
et je vous dirai, comme aux autres, que vous faites partie de la même
charge de cavalerie, à peu près pour les mêmes motifs. Les
coûts des soins médicaux et dentaires... Pardon?
Mme Lavoie-Roux: Le Comité provincial des malades
aussi...
M. Johnson (Anjou): Oui, c'est parce qu'ils veulent avoir un
siège.
Mme Lavoie-Roux: ... qui était trop loin de la
population.
M. Johnson (Anjou): C'est cela. Quant à la question du
coût, au-delà des mots que je vois au bas de la page 9 et en haut
de la page 10, qui se réfèrent à l'économie
générale peut-être - c'est l'expression qui est
utilisée quand on veut... - des citations des pages 10, 11 et jusqu'en
haut de la page 12, qui sont la reprise de ce qu'on a déjà
évoqué, j'entrerai dans les remarques qui s'ensuivent à la
page 13. À l'égard de cette question des plans d'effectifs qui,
en pratique, on le sait, dans le cas des dentistes, ne les touche pas, à
toutes fins
utiles, à moins que je ne me trompe... Peut-être que je
pourrai vous entendre là-dessus. Je comprends, par ailleurs, qu'à
l'égard des médecins spécialistes et des omnipraticiens,
ce sont des remarques qui n'ont peut-être pas pris tout à fait la
même forme mais qui étaient évoquées.
J'évoquerai, quant à moi, à ce sujet, que le
système de santé et de services sociaux est d'abord et avant tout
au service des citoyens et qu'il compte sur un degré de motivation,
d'intervention et d'implication des professionnels pour être efficace,
c'est bien entendu.
Quant à la question de l'intervention des pairs à
l'égard des pairs, de tout ce mécanisme visant à permettre
aux professionnels de la santé de prendre leurs responsabilités
collectivement, de se solidariser, à certains égards, dans
l'établissement et, finalement, de prendre la place que les
professionnels sont à même de prendre, je vous renvoie aux
considérations de la Corporation des médecins qui est
entrée dans force détails sur cela et qui, de façon
générale, a évoqué le fait qu'indépendamment
des mots utilisés encore une fois, normes par opposition à
règles de soins, ce qui est une notion assez intéressante, ce
sont en fait des choses qui existent à de nombreux endroits, qu'il ne
faut pas voir là des démons administratifs et bureaucratiques, ce
qui vaut également pour la page 14 et la page 15 du mémoire dans
les circonstances. (17 h 30)
Quant à la question du programme de santé dentaire,
effectivement, il y a des pourparlers entre les ministères et votre
association, je pense que vous avez rencontré récemment M. Fortin
du ministère. Je n'entrerai pas dans les détails. Il est bien
entendu que, quand on parle d'un objet spécifique comme celui-là,
qui ne fait pas partie de la loi proprement dite, sinon qu'en termes
très généraux, et qui serait applicable à d'autres
choses, on est ouvert à des discussions, on est toujours ouvert à
des discussions au ministère et d'autant plus ouvert de ce temps-ci
qu'on est en période de négociation sur certaines choses. Je
comprends que cela préoccupe tout le monde.
Quant aux conclusions, vous me permettrez de ne pas être d'accord
avec votre dernier paragraphe. C'est le seul commentaire que je puisse faire.
Je vous remercie.
Je n'ai pas de questions, étant donné que, je pense, tous
ces objets ont été traités de façon très
abondante dans d'autres cadres, d'autant plus que vous y assistiez. Je
considère que je suis absolument informé, très clairement
informé de la position de votre association. Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de L'Acadie.
M. Chicoine: M. le Président, est-ce que je pourrais
ajouter un commentaire?
Le Président (M. Bordeleau): Oui.
M. Chicoine: En ce qui concerne le champ de la
négociation, pour avoir entendu le ministre, évidemment, notre
mémoire a été préparé avant la commission
parlementaire. On ne connaissait pas tout à fait ses intentions. On
lisait les articles du projet de loi et on les interprétait selon ce qui
était écrit.
Pour ce qui est de la répartition géographique, j'aimerais
mentionner aux membres de cette commission que, s'il y a une chose qui a
fonctionné dans notre entente, c'est bien la répartition
géographique. Il y a juste deux choses, en fait, qui n'ont pas
fonctionné dans notre entente, ce sont les articles 3401 et 3501 qui
disent qu'avant l'adoption d'une loi ou avant de présenter un projet de
loi ou un décret, on doit consulter l'association. Cela n'a jamais
fonctionné. Ce sont les deux seules choses qui n'ont pas
fonctionné dans notre entente.
En ce qui concerne la répartition géographique, Me
Tremblay peut apporter des précisions là-dessus. C'est lui le
responsable de ce dossier. Nous avons en peu de temps, avec l'accord du
ministère et la bonne volonté des gens qui se sont assis à
cette table, organisé un bon système de distribution.
Certes, il y a encore des lacunes; ce n'est pas le régime
parfait, mais je peux vous dire qu'en ce qui nous concerne, cela a très
bien fonctionné, quand nous avons signé la répartition
géographique et quand nous en avons fait un objet de négociation,
parce que nous étions disposés à collaborer pleinement.
Cela m'inquiète de voir retrancher cet objet de négociation de
notre entente. Ce n'est pas de bon augure pour la collaboration future.
Vous avez pris bonne note en ce qui concerne les CRSSS. Je ne pense pas
que je sois un chef de cavalerie, même si j'aime bien monter les chevaux.
J'aime mieux faire de la chasse à courre que de charger des
individus.
J'ajouterais seulement ce qui me fait craindre, j'ai
étudié les systèmes dentaires d'environ 23 ou 24 pays
différents et il m'est arrivé en même temps de toucher
à la médecine un peu, parce que les gens nous l'expliquaient. Ce
que vous proposez existe en partie en France et en Angleterre et surtout en
Angleterre, avec le résultat que, quand on veut faire hospitaliser notre
épouse, notre mère, notre soeur ou notre frère, la
meilleure façon, c'est d'acheter une bouteille de gin aux fonctionnaires
qui décident si on peut l'amener dans les hôpitaux ou pas. Il y a
un danger, M. le ministre. Je ne dis pas
que les gens qui sont là actuellement vont faire cela, mais il y
a un danger.
En ce qui concerne l'utilisation des ressources disponibles dont on a
parlé dans notre mémoire et qui a été bien
développé par les médecins, comme les dentistes dans les
hôpitaux ne sont qu'en devenir et que, souvent, on prend leur budget,
parce qu'il y a des choses plus importantes, je vous donnerai l'exemple des
cliniques de santé de la ville de Montréal, avant que les soins
dentaires soient couverts pour tous les enfants ou pour les moins de 16 ans.
Dans ces cliniques, on fonctionnait selon les ressources disponibles, avec le
résultat qu'au mois de novembre on n'avait plus d'argent et on traitait
les enfants à froid; ce n'est pas cela qui a favorisé
l'accessibilité des soins dentaires ou qui a aidé les gens
à aller chez le dentiste. En ce qui concerne la partie de la
prévention, pour la transférer du secteur privé au secteur
public, il y aura une première rencontre mardi prochain. Pendant qu'on
va discuter de cette chose, on met déjà en branle tout le
processus gouvernemental pour l'arrêté en conseil. D'une part, on
s'en va discuter et, d'autre part, on a l'impression qu'on va nous servir un
cadeau de Grec. J'aimerais ajouter, pour le bénéfice des gens de
la commission, que notre proposition est très simple. Nous disons au
ministre: Au lieu d'engager 385 hygiénistes, on est prêt à
mettre 1500 ou 2000 dentistes qui vont aller travailler à un coût
moindre que celui que vous avez évalué. Cela veut dire quoi? Cela
veut dire qu'on va tout simplement les payer pour leurs déplacements et
leurs repas, et ceux de leur personnel. Vous allez économiser une
dizaine de millions. Je tiens à préciser ici que la
dernière étude actuarielle ou les derniers chiffres du
ministère comportent une erreur de 2 500 000 $. C'est un trou qui va
s'accroître avec le temps.
Alors, si on a cette ouverture d'esprit, M. le ministre, c'est qu'on
veut bâtir le Québec avec vous, mais on veut prendre cette part
dans un climat de concertation. Le Québec s'est doté du meilleur
système de soins dentaires qui existe, non seulement dans
l'Amérique du Nord, mais aussi dans les deux Amériques, si on
peut comparer ce continent. C'est le meilleur système de soins qui
puisse exister. Lorsqu'on se promène en Europe ... J'ai de la
misère à faire deux choses à la fois.
M. Johnson (Anjou): Je veux seulement que vous compreniez que
ça arrive souvent, en commission parlementaire, qu'on doive
échanger que ce soit avec les fonctionnaires ou les collègues.
Vous disiez...
M. Chicoine: Lorsqu'on se promène en Europe et qu'on parle
des dentistes et que vous demandez aux Européens quels sont les
meilleurs dentistes, ils ne disent pas que ce sont les Canadiens
français, ils disent que ce sont les Québécois. On est
bien identifié.
Mme Lavoie-Roux: Comme M. le ministre.
M. Chicoine: On est bien identifié, en ce qui concerne la
qualité des soins. Je soumets à cette commission, étant
donné qu'on a l'intention ou que l'intention est manifestée de
procéder dans ce dossier par décret... J'ai lu le mémoire
que vous avez présenté au Conseil des ministres; étant
donné que l'on va procéder par décret, donc à
l'insu de l'Opposition qui aura certainement son mot à dire
là-dedans et qu'on va procéder par décret sans une
véritable consultation, croyons-nous, de la profession, il y a un danger
qu'on détruise une bonne partie que ce qu'on a mis dix ans à
construire.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Un commentaire à ajouter à
ça. D'une part, je veux simplement assurer le Dr Chicoine qu'une
commission parlementaire, c'est une des formes les plus démocratiques de
consultation dans une société démocratique.
Deuxièmement, à l'égard de cette question du dossier de la
prévention dentaire, je lui ferai remarquer qu'il s'agit d'un projet de
règlement qui est devant la régie et ce projet de
règlement qui est devant la régie est soumis à la
règle de la confidentialité à ce que je sache, en vertu
même des règlements de la régie. C'est tout ce que j'ai
à dire là-dessus.
M. Chicoine: II n'y a aucun problème là-dessus,
ça ne change pas la nature du problème ce que vous avancez, M. le
ministre. Le président de la régie l'a avancé l'autre jour
pour tenter de faire perdre de la crédibilité à celui qui
vous parle. Ici, en commission parlementaire, je n'ai pas donné la
teneur de ce projet de règlement, je vous ai tout simplement dit, M. le
ministre, que pendant que nous discutions, votre ministère, vos
fonctionnaires élaboraient un projet de règlement; je craignais
que ça ne devienne, pour nous, un cadeau de Grec.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
l'association des dentistes d'être venue devant cette commission pour
présenter son point de vue. Je ne toucherai pas à toute la partie
concernant la négociation, je vais laisser ça à mon
collègue de Jean-Talon. Je voudrais quand même dire qu'il y a un
point sur
lequel je suis d'accord avec vous, c'est que le gouvernement, dans tout
ce projet de loi - et j'oublie même tout ce qui touche les
médecins et dentistes dans l'ensemble du projet de loi - a
définitivement abandonné la concertation pour procéder par
bureaucratisation et autoritarisme. Je pense qu'on pourrait en faire la
démonstration facilement, mais il paraît que le ministre va
corriger ça, c'est ce qu'on attend de voir.
J'ai quand même quelques petites questions à vous poser.
À la page 12, vous dites que le ministre pourra, par voie de
contingentement, refuser l'accès des centres hospitaliers aux nouveaux
médecins et dentistes. Je ne comprends pas tout à fait le
raisonnement que vous faites quand vous dites que cela pénalisera
injustement les jeunes médecins. Je comprends qu'ils pourront être
pénalisés parce qu'ils auront des revenus moindres mais "rendre
improductive une partie importante de l'investissement que notre
société a consenti dans l'éducation depuis une quinzaine
d'années..." Honnêtement, je ne fais pas le lien entre les deux
choses.
M. Chicoine: Je vais laisser le soin à Me Brodeur de
parler là-dessus.
M. Brodeur (Yvan): II faudrait, madame, que vous reveniez
à la page 10 du mémoire, au bas de la page, où on se
réfère à l'article 49 du projet de loi qui dit que le plan
d'organisation d'un centre doit prévoir le nombre de médecins et
dentistes qui peuvent exercer leur profession dans chacun des
départements et que le plan est soumis à l'approbation du
ministre. II est donc évident que, par le truchement de l'approbation
des plans d'organisation, on va pouvoir limiter le nombre de médecins et
dentistes dans chacun des établissements. Je vois mal, pour une foule de
spécialités médicales ou dentaires, que l'on puisse
pratiquer sa profession sans être dans un centre hospitalier. Il y a donc
là une forme de contingentement.
Mme Lavoie-Roux: Ou je vous ai mal compris ou je ne comprends pas
encore, mais il ne me semble pas qu'un dentiste qui a terminé ses
études soit nécessairement obligé de pratiquer à
l'intérieur d'un centre hospitalier. Ce n'est pas ce que vous dites?
M. Chicoine: Je pourrais peut-être répondre par un
exemple précis. Je viens d'aider, même s'il ne fait pas partie de
mon association, un jeune chirurgien buccal qui a dû attendre un an avant
de pouvoir faire de la chirurgie en centre hospitalier parce qu'on lui disait
qu'il n'y avait pas de place pour lui. Il pratiquait à Montréal
et il a même essayé de se rendre jusqu'à
Saint-Jérôme et plus loin dans les centres hospitaliers des
Laurentides pour être capable de faire des interventions chez des gens
qui en avaient besoin. Ce n'est que récemment, grâce à la
collaboration du CRSSS Montréal métropolitain, que nous avons pu
lui trouver une place et ce jeune chirurgien buccal opère ou peut
opérer un patient par mois. Donc, quand on dit que ça peut le
rendre improductif ou le pénaliser, on l'a quand même aidé
à faire sa formation, on a investi énormément dans ce
bonhomme et il ne peut absolument pas rendre des services pour la formation
qu'il a acquise. Il y a donc, un danger à ce niveau-là.
M. Brodeur: Voyez-vous, madame, un des changements du projet de
loi et qui est majeur, je pense, c'est qu'autrefois on ne pouvait pas refuser
la candidature d'un médecin ou d'un dentiste dans un
établissement. Je dis autrefois, c'est actuellement, en vertu de la loi
actuelle; on ne pouvait pas le refuser pour ce motif-là, pour des motifs
de compétence peut-être, mais pas pour ce motif-là, tandis
qu'aujourd'hui on pourra le faire. Non seulement pourra-t-on le faire, mais,
dans ces cas-là, il n'y aura aucun droit d'arbitrage pour cette personne
devant la Commission des affaires sociales. Non seulement cela, mais on pourra
également le refuser au cas où les ressources ne seront pas
suffisantes, même si le nombre prévu au plan d'organisation n'est
pas atteint. (17 h 45)
II est évident qu'il y a des jeunes qui vont aller pratiquer
ailleurs, c'est cela. C'est l'explication de la phrase qui est là, qui
est au mémoire, à savoir qu'un investissement dans
l'éducation s'effrite à ce moment-là.
Mme Lavoie-Roux: II y a présentement un contingentement
des résidents, on va parler des médecins, des résidents
dans les centres hospitaliers, ce qui est dû justement à cette
disposition qui existait de par cette loi 103, je pense, au contingentement
dans les centres universitaires.
Maintenant, on l'étend à l'ensemble des centres
hospitaliers et c'était déjà établi dans les
centres universitaires. Est-ce que ceci avait causé des
inconvénients, d'après l'exemple que le Dr Chicoine nous avait
donné? Est-ce que ce sont des cas isolés ou si ça peut
arriver? Il semblerait que vous ayez trouvé le canal à ce
moment-là pour la solution au problème, par
l'intermédiaire du CRSSS, si je crois vous comprendre?
M. Chicoine: Vous avez entièrement raison, en ce qui
concerne les dentistes par rapport aux médecins; ce sont des cas
isolés, en ce qui concerne les dentistes; par rapport aux
médecins, ce sont des cas isolés, parce que les dentistes en
milieu hospitalier, ce n'est qu'en devenir.
Mme Lavoie-Roux: II y a un point intéressant; à la
page 14, vous dites que, désormais, si la loi est adoptée telle
quelle, on devra fonctionner selon des normes, et qu'il serait logique que si
c'est l'état de fait, on devrait prévoir au projet de loi une
disposition stipulant qu'un médecin ou un dentiste ne pourra faire
l'objet d'une action en dommages et intérêts de son patient s'il
s'est conformé aux normes sur la fourniture des soins requis
d'utilisation des ressources disponibles.
Est-ce que cela en soi est suffisant pour mettre quelqu'un à
l'abri de poursuites, parce que même s'il s'est conformé aux
normes, il les a appliquées d'une façon adéquate au plan
professionnel aussi? Il me semble qu'il y a deux dimensions à la...
M. Brodeur: II n'y a pas de réponse tout à fait
sûre. Un tribunal aurait à trancher chacun des cas suivant son
mérite, mais il est certain qu'on place un professionnel dans un
situation délicate si on l'oblige à suivre des normes quant aux
soins requis.
Le ministre a déjà fait une remarque à cet
égard en parlant plutôt de règles de soins. Des normes
quant aux soins requis, comme terminologie, c'est nouveau dans cette loi-ci,
dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Cela
existe dans la Loi sur l'assurance-maladie au niveau des comités de
révision de la Régie de l'assurance-maladie. Cette question est
extrêmement délicate, parce que, quand on parle de normes quant
aux soins requis -requis, c'est requis d'un patient - il est évident
qu'on touche à la liberté thérapeutique. Il est donc
certain qu'un professionnel pourrait considérer que la norme
établie, la norme de soins requis, si c'est cela le texte qui demeurait,
ne représente pas ce qui pour lui devrait être la norme, et la
norme que lui individuellement appliquerait, tenant compte de sa
responsabilité professionnelle, de son expertise, de sa formation et de
ses convictions professionnelles. Il est évident, à ce moment,
que si un professionnel, suite à cela, était poursuivi, il
soulèverait sûrement en défense la question des normes
qu'il était obligé de suivre dans une certaine mesure, et la
jurisprudence trancherait là-dessus. Mais, comme je le disais au
départ, c'est certain que cela placerait le professionnel dans une
situation délicate. Par contre, sur toute cette question-là, on
peut aller plus loin peut-être que le mémoire.
Si, par contre, on laissait au conseil des médecins et dentistes
le contrôle de la qualité de l'acte, que le chef de
département s'occupait plutôt de la partie budgétaire et si
d'autre part, on parlait de soins requis et de normes ou de règles de
soins et de ressources, considérant en somme toute cette
question-là comme une question qui est budgétaire et strictement
cela, à ce moment le problème se poserait de façon
différente. Je pense que tout dépend du type de situation, du
type de contrôle et du type de vocable aussi qu'on utilise, parce que
finalement ces vocables-là sont interprétés.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question, parce que je pense
que mes collègues avaient des questions à poser. C'est sur le
fameux problème de la prévention dentaire dont vous parlez dans
votre mémoire. Je sais que le ministre vient d'indiquer que cela fait
l'objet de négociations. Sans vouloir être méchante, je ne
suis jamais sûre si...
M. Johnson (Anjou): ... discussion dans ce cadre-là.
Mme Lavoie-Roux: ... vous avez commencé à
négocier, si vous vous proposez de négocier, si vous les invitez
à négocier ou si vous avez négocié.
Mais j'admettrai, M. le ministre, que c'est une taquinerie un peu
sérieuse quand même.
Très brièvement, parce que le temps passe, il me semble en
tout cas que vous n'êtes pas sur la même longueur d'onde, pas quant
à la réglementation, si on laissait cela de côté,
mais, quel est le type de proposition - je voudrais comprendre - que vous
faites dans ce cadre de la prévention dentaire?
M. Chicoine: En fait, dans un premier temps, lorsque le
gouvernement voulait transférer les actes qui existaient en cabinet
privé au secteur public, nous avons produit une étude actuarielle
et cela lui coûtait plusieurs millions de dollars de plus. Suite à
cette étude, il a modifié son tir et maintenant on va
désassurer des soins en cabinet privé et on va assurer une
certaine prévention dans le réseau public, mais qui n'est pas
équivalente à ce qui se faisait dans les cabinets privés.
Même là, parce que sur la prévention on peut discuter de
philosophie, il peut y avoir toutes sortes d'écoles et on peut finir par
ne pas s'entendre en fin de compte, même si on dit pratiquement la
même chose. Même là, devant la croissance possible ou
l'avènement possible de plus de 325 nouveaux fonctionnaires,
étant donné la situation financière ou économique
du Québec et étant donné que l'on veut absolument
conserver - le lien est essentiel - la qualité des soins quant à
une non-dichotomie ou une non-séparation du préventif et du
curatif, nous avons offert au ministre des Affaires sociales, sous la
coordination des DSC, parce qu'ils veulent le faire comme ça, on dit
qu'on est prêt à entrer dans le jeu, on est prêt à
entrer dans vos structures, on est
prêt à entrer dans vos normes. Vous allez nous
démontrer combien ça va coûter, vous allez mettre les
chiffres sur la table et on vous dit que notre proposition, on va la faire
à moins. On vous le promet d'avance, on va respecter notre parole
là-dessus. C'est ça, l'essentiel de la proposition.
Seulement, lié à ça, il y a eu un document sur la
santé dentaire qui n'est pas secret. Alors, on va en parler. Le document
dit que, pour réaliser tout ça, on doit déléguer
des tâches. En fait, la réglementation actuelle, compte tenu de ce
que le ministère veut faire dans son programme de prévention, a
besoin de zéro délégation de tâches et les
tâches qu'on veut déléguer, ce sont 24 tâches
différentes. Donc, on ne vise plus seulement la prévention, on
veut faire autre chose avec ces personnes. Il y a là un danger qu'on
n'explique à personne et que l'on cache très bien.
Remarquez que ce n'est pas un nouveau problème. C'est un
problème qui existait avant l'avènement de ce gouvernement, c'est
un problème qui existait avec l'ancien ministre des Affaires sociales et
ça fait cinq ans qu'on en parle avec le gouvernement actuel au pouvoir.
Ça fait cinq ans qu'on offre notre collaboration et là, on nous
offre de rencontrer un fonctionnaire à la programmation. Je n'ai rien
contre ça. Dès le premier appel téléphonique, il
nous a demandé si on était disposé à travailler le
soir, plutôt que de nous parler de normes et de structures, pour voir si
on était capable de "fitter" dans sa patente. C'est aussi clair que
ça. Il n'y a pas d'école ouverte le soir; je pense que, dans la
convention collective, les professeurs doivent être là trois soirs
par année pour recevoir les parents; il y a seulement ça.
Donc, on essaie de nous garrocher un "monkey wrench" tout de suite,
avant d'entreprendre des discussions véritables là-dessus et, si
on veut avancer dans le dossier, les fonctionnaires disent: Les dentistes
veulent gagner du temps, c'est pour ça qu'ils nous font cette
proposition. Cela fait cinq ans qu'ils perdent du temps, eux, on ne pourra
jamais regagner le temps qu'ils ont perdu.
Mme Lavoie-Roux: Merci, Dr Chicoine.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: J'ai un certain nombre de questions à vous
adresser qui visent à essayer de me donner une meilleure
compréhension de toutes ces questions. J'aimerais que vous essayiez de
faire la distinction telle que vous la voyez, tant en ce qui a trait au curatif
qu'au préventif entre les fonctions des assistants dentaires ou
assistantes dentaires, des hygiénistes dentaires et des dentistes.
M. Chicoine: Le préventif, c'est cette partie qui fait que
l'on va motiver les patients à pouvoir prévenir des
défauts de santé. Le curatif, c'est cette partie où l'on
donne le soin approprié. Dans le cas d'un dentiste, le soin
approprié est plus souvent qu'autrement un soin chirurgical, parce que,
même pour faire une obturation, on coupe du tissu dur. Donc, du moment
que l'on coupe du tissu, qu'il soit dur ou mou, c'est tout simplement une
intervention curative. Si l'on dissocie la prévention ou le
préventif du curatif, qu'est-ce qui va arriver? D'abord, dans le
programme proposé, on dit que les hygiénistes dentaires - elles
ont la formation pour faire du préventif, je ne nie pas cela -vont faire
les examens pour dépistage. Si l'on vise réellement dans la
prévention, que ceci va nous permettre d'épargner sur des
coûts parce qu'on n'aura pas de soins à donner, voyons quel est le
premier élément de ce dépistage. C'est un examen avec
diagnostic.
Or, j'ai en main des dossiers qui me démontrent que les
dépistages qui ont été faits dans les écoles ont
les conséquences suivantes: d'abord, un enfant qui est retourné
chez le dentiste parce qu'on ne fait pas la différence entre une
obturation, un plombage et une carie, on n'a pas la formation pour cela. Les
parents sont en maudit, ils sortent de chez le dentiste et ils se font dire par
l'hygiéniste qu'ils doivent y retourner, alors que ce sont des
obturations et non des caries. J'ai aussi des dossiers où pour un enfant
- cela a été fait par l'ancienne présidente de la
Corporation des hygiénistes - on a fait un dépistage. L'enfant a
dit qu'il avait une douleur sourde. On lui a prescrit de l'aspirine. La
mère inquiète est venue chez le dentiste et il a eu besoin d'une
intervention chirurgicale à cause de la présence d'un kyste
important.
Quel est le danger le plus grand de ce dépistage ou de ces
examens pour dépistage? C'est de créer de la fausse
sécurité chez les patients. On le sait, il n'y a personne qui
aime aller chez le dentiste. De toute façon, on va là moins
souvent qu'on peut aller dans n'importe quelle réunion sociale ou chez
le médecin. Chez le médecin, cela ne fait pas peur, mais il n'y a
personne qui aime aller chez le dentiste, même pas moi. Quand j'y vais,
c'est parce que je suis convaincu qu'il faut que j'y aille.
Cela crée une fausse sécurité. On va regarder dans
la bouche de l'enfant. Il n'y a pas de caries apparentes. On lui dit: Tu n'as
pas de caries, avec le résultat qu'il y a eu des enfants qui sont
allés chez le dentiste, que les parents ont amenés quand
même et qui avaient 17 ou 18 caries. En créant cette fausse
sécurité, ceux qui n'y vont pas vont
se réveiller avec des problèmes beaucoup plus grands et
avec des traitements plus élaborés et beaucoup plus coûteux
pour l'État.
Vous me parlez des tâches des assistantes, des hygiénistes
et du dentiste. Je n'ai pas avec moi la différenciation; je pense
qu'actuellement les assistantes dentaires n'ont pas de tâches
déléguées; il y a tout simplement une loi
générale ou un règlement général à
l'Ordre des dentistes qui dit: Elles doivent faire tout ce qu'elles peuvent
faire autour du dentiste, mais ne peuvent pas mettre les mains dans la bouche.
Actuellement, c'est ce qui existe.
Quant aux hygiénistes dentaires, le Code des professions,
à l'article 37k dit: "Dépister les maladies buccodentaires et,
sous la direction d'un dentiste, utiliser des méthodes scientifiques de
contrôle et de prévention des affections buccodentaires." La
réglementation actuelle existante en ce qui concerne les tâches
des hygiénistes dentaires: à l'article 4 d'un règlement,
on dit: "Procéder à l'enlèvement des taches et des
dépôts de tartre de la surface exposée des dents ainsi
qu'au polissage; donner des instructions et démonstrations de mesures
d'hygiène buccale; exécuter les actes opératoires
suivants: prise de radiographies, application topique de médicaments
pouvant contrôler la carie." (18 heures)
Dans le projet du ministère des Affaires sociales contenu dans la
politique de santé dentaire, ils en ont assez pour tout faire cela.
Là où est le hic, c'est que le gouvernement dit: On devrait
déléguer ce que l'on appelle de la surveillance à
distance. Voyons ce que les mots en français veulent dire. L'article 37k
dit "sous la direction". Diriger veut dire gouverner, administrer,
gérer, conduire l'activité. Surveiller veut dire observer avec
une attention soutenue de manière à exercer un contrôle et
une vérification. Je soumettrai humblement que "surveillance à
distance", ce n'est pas français. La surveillance à distance,
c'est travailler sous la direction. C'est cela que cela veut dire.
Déjà, dans la loi, vous avez tout ce qu'il faut comme provisions
pour faire de la surveillance à distance. Travailler sous la direction,
cela veut dire qu'il y aurait un dentiste à Québec et que tous
les hygiénistes du secteur du DSC seraient sous sa direction; il
n'aurait pas besoin d'aller faire de la surveillance "over the shoulder", comme
disent les Américains. Maintenant, ce qu'on veut à la place et ce
qui est proposé...
Le Président (M. Bordeleau): Juste pour vous
demander...
M. Chicoine: Je voudrais répondre à sa question
tout simplement
Le Président (M. Bordeleau): Je voudrais tout simplement
que vous essayiez de répondre d'une façon la plus concise
possible, parce que j'ai plusieurs intervenants et je ne voudrais brimer
personne dans son droit de parole.
M. Chicoine: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): J'en ai déjà
quatre autres, alors...
M. Chicoine: ... je vais procéder immédiatement
pour accélérer.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord.
M. Chicoine: Ce que l'on veut déléguer aux
hygiénistes dentaires actuellement, c'est prendre des radiographies,
procéder au test de vitalité de la pulpe - c'est un acte
diagnostique qui n'est pas enseigné - essayer les porte-empreintes et
prendre les empreintes pour les modèles d'étude, procéder
au détartrage suprasubgengival, au curetage gengival - c'est un acte
chirurgical - à l'aplanissement de la racine et au polissage de la dent
- ça, c'est l'acte le plus difficile à rendre quant au
succès et il n'y a pas un dentiste généraliste qui fait
ça. C'est seulement un spécialiste qui peut le faire
-poinçonner la digue, la mettre en bouche, procéder au polissage
de l'obturation, appliquer topiquement des agents canticarriogènes,
placer un pansement temporaire - je me suis laissé dire par un haut
fonctionnaire du ministère - que c'était comme un "plaster", un
pansement temporaire, mais les indications d'un pansement temporaire peuvent
être que vous pouvez accentuer la venue d'un abcès chez un enfant,
alors, je me demande bien ce que ça fait là - insérer,
sculpter et finir les restaurations - on a eu des informations selon lesquelles
le ministère ne voulait pas déléguer ça - et
procéder à l'anesthésie papillaire. L'anesthésie
papillaire est une vieille forme d'anesthésie qui existait chez les
dentistes et qui n'existe plus aujourd'hui; c'est l'anesthésie la plus
douloureuse; et on veut déléguer ça aux hygiénistes
dentaires -insérer un ciment de base, enlever un pansement temporaire,
procéder au jumelage des dents et choisir, poser et enlever la bague
d'orthodontie, installer un fil simple d'orthodontie et cimenter temporairement
un mainteneur d'espace.
Quand on veut déléguer une série de 25 actes, alors
qu'on veut en faire poser quatre ou cinq dans le secteur public, je m'interroge
sur la portée du règlement et je m'interroge sur la portée
de ce que les fonctionnaires veulent faire accepter au ministre des Affaires
sociales. Ce problème-là, il a été aigu du temps de
M. Forget. Quand le Parti québécois est arrivé au pouvoir,
M. Denis
Lazure m'a affirmé qu'il n'entrerait jamais dans ces
données-là et, aujourd'hui, il revient. C'est que tout simplement
les fonctionnaires ont convaincu d'autres personnes pour le placer là.
Avec une histoire comme celle-là, je me demande bien pourquoi on
formerait des dentistes.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, monsieur... merci.
M. Rochefort: Oui, là-dessus, je ne voulais pas entrer
dans les détails d'un projet de règlement que je n'ai pas devant
moi et que je n'ai pas vu, je voulais plutôt voir les distinctions
fondamentales que vous faisiez entre les différents rôles. Tout ce
que je vous dirai là-dessus et toujours, je le répète,
sans entrer dans un projet de règlement auquel vous faites allusion et
que je n'ai pas, il faut quand même considérer qu'il y a tout
l'aspect de la question de l'éducation à l'hygiène
dentaire qui, quant à moi, est un rôle qui peut très bien
être assumé par des hygiénistes dentaires. D'autre part, il
faut aussi considérer ce qu'on a vécu personnellement et ce que
beaucoup de citoyens nous rapportent, que plusieurs gestes de
prévention, dans un sens aussi large que celui que vous décriviez
tantôt sont aussi assumés en cabinet par des hygiénistes
dentaires.
Il y a une autre question que je voulais aborder avec vous et que j'ai
abordée hier soir avec le directeur général de
l'ordre.
Le Président (M. Bordeleau): Je ne veux pas vous priver de
votre question. Je dois vous souligner qu'il est 18 h 05, que j'ai trois autres
intervenants - ça me prend d'abord le consentement - soit le
député de Fabre le député de Jean-Talon la
députée de Jacques-Cartier, et je voudrais qu'on trouve un peu de
temps pour aller peut-être manger quelque chose et revenir vers 20
heures. Je demande la collaboration de tout le monde afin qu'on fasse ça
assez rapidement. Allez-y, M. le député de Gouin.
M. Rochefort: Oui, M. le Président, j'ai une ou deux
questions et je vais terminer là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: Non, je m'excuse.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Gouin, c'est à vous la parole, allez-y!
Mme Lavoie-Roux: Je retire mon...
M. Rochefort: Vous n'avez pas de discours à faire,
vous?
M. Rivest: Non.
M. Rochefort: Je voudrais savoir votre opinion en ce qui a trait
aux urgences dentaires dans la région de Montréal durant les fins
de semaine. On en a discuté longuement et largement hier avec le
directeur général de la corporation ou de l'ordre, je pense que,
dans votre profession, on appelle ça l'ordre, j'aimerais un peu voir
quelle est votre position en ce qui a trait à cette question.
M. Chicoine: Remarquez que je suis flatté que vous
abordiez cette question, parce que je suis le responsable d'un système
d'urgence dentaire à travers le Québec et pas seulement à
Montréal, même si ce n'est pas notre rôle en tant que
syndicat de faire ça. Mais ceci prouve qu'on peut assumer notre
rôle social aussi parfois. Ceci étant dit, je ne sais ce qui a
été discuté hier, je n'étais pas là.
Seulement, le système d'urgence dentaire que nous avons mis sur pied
à Montréal, c'est un répondeur téléphonique
avec un numéro central. Nous avons fait de la publicité dans les
hôpitaux, les pharmacies, les cabinets des médecins et des
dentistes. Il y a des dentistes qui, les fins de semaine, quand ils partent,
disent tout simplement pour leurs patients: Appelez tel numéro en cas
d'urgence dentaire.
Pourquoi ont-ils fait ça? C'est qu'au départ nous avions
six dentistes de garde de 8 heures le matin à minuit le soir. On s'est
aperçu que six, c'était trop et que 8 heures le matin à
minuit le soir, c'était trop long. Le résultat a
été que nous avons concentré nos gens de garde dans les
cliniques où il y avait plusieurs dentistes de façon que, si
jamais il y avait un afflux plus grand de patients, on pourrait compenser en
appellant tout simplement un confrère et lui dire: Viens m'aider, on a
trop d'urgence.
La moyenne des urgences dentaires pour toute la fin de semaine pour un
dentiste qui est de garde ne dépasse pas dix patients. Donc, ce n'est
pas un problème si aigu que les urgences dentaires; ce n'est pas comme
l'urgence médicale, j'en conviens. D'autant plus, que je vous souligne
respectueusement qu'avant d'avoir mal aux dents, comme ça ça
prend environ cinq à dix ans à une carie pour se rendre à
la pulpe, lorsque le gars a mal aux dents le samedi soir, il a eu mal aux dents
la veille.
M. Rochefort: Votre service est disponible jusqu'à quelle
heure en fin de semaine?
M. Chicoine: Actuellement, il est disponible de 9 heures à
6 heures parce qu'il n'y avait pas de patients.
M. Rochefort: Je vous dirai rapidement en résumé,
M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Très rapidement.
M. Rochefort: ... ce dont j'ai fait part au directeur
général de l'ordre hier. Moi, je suis en mesure d'affirmer le
contraire.
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Rochefort: Non, M. le Président, je demanderais
à la députée de L'Acadie de ne pas me prêter des
intentions. C'est comme de l'argent: pour en prêter il faut en avoir.
Mme Lavoie-Roux: Ce ne sont pas des intentions, je dis que vous
avez été traumatisé par vos maux de dents.
M. Rochefort: Tout ce que je veux vous souligner c'est que je ne
suis pas d'accord sur l'affirmation que vous faites. Je prétends qu'il y
a des urgences dentaires importantes qui se produisent en fin de semaine
à Montréal et que les citoyens sont absolument mal desservis. Il
me semble qu'il y aurait lieu, quand on parle d'assumer des
responsabilités sociales d'avoir au moins un dentiste à
Montréal disponible 24 heures par jour en fin de semaine. Je vous
répète que je suis en mesure de l'affirmer, et là-dessus
il y a une question que je veux vous poser. Vous êtes au courant que le
CRSSS du Montréal métropolitain est à mettre sur pied une
centrale des urgences pour la région de Montréal. Il vise
à être en mesure de recevoir des appels pour tout type d'urgence.
Qu'est-ce qu'on va répondre à quelqu'un qui va appeler le samedi
soir à minuit et demi pour avoir un dentiste?
M. Chicoine: D'abord je vous dirai que le système
d'urgence, je pense que je le connais mieux que le député qui
vient de...
M. Rochefort: M. le Président, je vous ferai remarquer que
comme citoyen...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, oui.
M. Rochefort: ... on fait aussi des rencontres avec d'autres
citoyens, on fait face à des problèmes qui ne sont pas
nécessairement ceux qui remontent à votre bureau. Je ne voudrais
pas qu'on...
M. Chicoine: En ce qui concerne le système d'urgence
dentaire, il y a peut-être un aspect que je n'ai pas couvert, mais je
peux vous dire qu'il y a un réseau complémentaire aussi. Pendant
qu'on a des dentistes de garde dans les cabinets privés, il y aussi
certains hôpitaux de Montréal qui ont des dentistes de garde. Je
ne sais pas de quel type d'urgence vous voulez parler, mais lorsqu'il s'agit
d'une urgence traumatique importante, le mieux c'est de le diriger à
l'hôpital, ce n'est pas dans un cabinet dentaire qu'on peut faire ce
genre d'intervention. Selon les normes de l'urgence dentaire, celui qui a ce
qu'on appelle dans le langage commun une rage de dents le samedi soir à
minuit, je continue à maintenir, monsieur, que ce gars-là avait
mal aux dents une semaine avant et durant le jour. Maintenant, qu'est-ce qui
arrive quant au CRSSS...
M. Johnson (Anjou): ... M. Chicoine: Pardon?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, s'il vous
plaît!
M. Johnson (Anjou): Vous avez dit les normes de rage de dents.
J'ai cru vous entendre dire les normes d'urgence dentaire, c'est cela...
M. Chicoine: Non, j'ai parlé de...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît,
rapidement un petit peu, M. Chicoine.
M. Chicoine: M. le Président, en ce qui concerne le CRSSS
Montréal métropolitain qui met sur pied un service d'urgence,
nous avons contacté ces gens-là et nous allons collaborer avec
eux. Dans un premier temps, ils vont s'occuper de faire la publicité du
système d'urgence qui existe déjà; cela ne donne rien de
mettre en place un autre système parallèle et de dédoubler
des coûts à certains égards. Si on nous fait la
démonstration que ce n'est pas suffisant, nous allons y voir, parce que,
si nous avons mis sur pied un système d'urgence régional à
travers la province de Québec... Il y a juste une région avec
laquelle on a des difficultés et je m'en vais voir ces gens quand je
vais partir d'ici. Cela ne représente pas tellement un gros bassin de
population, seulement je tiens à ce que ce système-là
fonctionne. Si on me fait la démonstration sérieuse qu'il y a des
lacunes, je vous dis que nous allons les corriger et nous n'attendrons personne
pour les corriger à notre place. On va prendre nos
responsabilités comme on les a toujours prises.
Le Président (M. Bordeleau): Merci.
M. Rochefort: Je vous transmets au moins cette information, parce
que je maintiens qu'il y a un problème d'urgence dentaire la fin de
semaine et la nuit, à Montréal. Je termine, M. le
Président, avec une dernière question. J'aimerais savoir...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Gouin, je m'excuse.
M. Rochefort: C'est ma dernière, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Je considère que je
vais devoir brimer. Si on a le temps et si j'ai le consentement de tout le
monde, on y reviendra, mais je voudrais passer au député de Fabre
et ensuite aux députés de Jean-Talon et de Jacques-Cartier.
M. Rochefort: Je ne peux pas poser ma dernière question,
M. le Président?
Le Président (M. Bordeleau): Cela n'a pas... M. le
député de Fabre.
M. Rochefort: Bon, écoutez...
Le Président (M. Bordeleau): Si on a le temps, on y
reviendra.
M. Rochefort: ... on s'assurera que la prochaine fois, les deux
côtés de la table aient le même temps pour le questions.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Fabre.
M. Leduc: Je reviens sur la bouteille de gin que vous
évoquiez tantôt. Ce n'est parce que j'ai eu de l'eau devant les
yeux tout l'après-midi, mais...
Une voix: Ce serait mieux d'avoir du scotch.
M. Leduc: ... c'est parce que je trouve l'exemple ou enfin les
propos que vous avez tenus intéressants à un point de vue, en
tout cas. Peut-être aussi parce que c'était hors mémoire...
Ce n'est pas parce que votre mémoire n'est pas intéressant. Cela
me porte à poser la question suivante: Qu'est-ce qui fait que la
conscience professionnelle des médecins, des dentistes est au-dessus de
la conscience des professionnels que sont les fonctionnaires et qui sont comme
vous des syndiqués? Je me permets de faire ces commentaires et de poser
cette question, parce qu'à la page 4 de votre mémoire, vous vous
définissez comme des syndiqués, vous faites même allusion
au fait que vous êtes des syndiqués injustement traités et
il me semble que chez les syndiqués, il existe une solidarité
syndicale qui fait que le mépris n'a pas sa place.
Le Président (M. Bordeleau): Un commentaire...
M. Chicoine: Non, je pense qu'il a quand même fait un
commentaire...
Le Président (M. Bordeleau): Vous voulez faire un autre
commentaire, M. Chicoine?
M. Chicoine: ... et posé un élément de
question et j'aimerais bien l'aborder. Quand on compare le système
anglais, c'est celui qui fonctionne à peu près le plus mal, parce
que tous les gens jouent le système, y compris les
bénéficiaires. J'ai été témoin d'un dentiste
qui a reçu un patient qui avait un "flair up", la moitié de la
figure était rendue de l'autre bord et son personnel auxiliaire lui a
tout simplement fait les actes de prévention et la radiographie, parce
que c'était dans le National Out Service. Comme le gars avait un
abcès important et qu'il avait de la douleur, il a dit: "I would like to
be treated. If you want to be treated, is it on privacy, it will cost you 5
pounds." Le monsieur a déboursé ses cinq livres de
différence. Ce qui veut dire qu'en Angleterre tout le monde joue le
système.
Pour répondre au coeur de votre question, à savoir
qu'est-ce qui fait que les médecins seraient différents des
fonctionnaires, je n'ai pas voulu faire ce commentaire en disant que tous les
fonctionnaires vont agir dans le système en se faisant soudoyer. J'ai
tout simplement voulu illustrer un problème qui existait ailleurs quant
à une réglementation et que ça pourrait être
possible que cela arrive ici. C'est ce que j'ai voulu dire. (18 h 15)
La différence entre le médecin et le fonctionnaire, ou le
dentiste et le fonctionnaire, il y a la question de la responsabilité.
Celui qui admettrait la mauvaise personne à l'hôpital par rapport
à une autre et qui aurait sur les bras une poursuite à cause d'un
décès, ce serait beaucoup plus facile d'aller le pointer.
Maintenant, ce que j'ai voulu illustrer par là, M. le
député de Fabre, c'est que tout simplement lorsqu'on
transfère des responsabilités, on le fait toujours par bonnes
intentions, j'en conviens et, lorsqu'on arrive avec un projet de loi, on ne l'a
pas écrit parce qu'on était mal intentionné. Je ne pense
pas qu'aucun gouvernement ferait ça.
Ce que j'ai essayé de démontrer, par cette image,
l'exemple était peut-être mal choisi, c'est que parfois, on vise
un objectif et à la longue, on arrive ailleurs et on est surpris. Tout
simplement, j'ai voulu dire au ministre: Faites attention, parce que j'ai
été témoin d'une chose comme celle-là. Si vous
voulez quand même le transférer, le message suivant que je n'ai
pas dit, mais que le ministre a certainement pu comprendre, c'est que je vais
faire une réglementation où je vais mettre des normes de
façon que cela ne se fasse pas, si moi, je veux le faire comme cela
parce qu'ailleurs, on a eu telle expérience. Là-dessus, je lui
fais confiance.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Chicoine.
M. Leduc: Vous avez dit tout à l'heure que nos dentistes
avaient la réputation d'être les meilleurs dentistes au monde,
peut-être que nos fonctionnaires aussi ont cette réputation.
Le Président (M. Bordeleau): ... le député
de Fabre. M. le député de Jean-Talon.
M. Rivest: Dr Chicoine, étant donné l'heure, je
voudrais vous dire, concernant toute la partie du régime syndical, que
le ministre a indiqué qu'il reprendrait, peut-être dans un sens
non péjoratif, une expression qui a été employée
dans un autre domaine, "son brouillon". Je pense bien qu'avec vos
collègues, les omnipraticiens et les médecins
spécialistes, en particulier, l'Association des optométristes...
À cet égard, on attendra les choses. Un des aspects qui m'ont
intéressé particulièrement, il en a été
question hier, c'est la répartition des effectifs. Vous dites que cela a
fait l'objet d'une négociation. Votre conclusion - à moins que le
ministre n'ait une autre évaluation, mais je ne le pense pas - a
été qu'en négociant ce genre de problème, on arrive
à des résultats qui risquent d'être bien meilleurs que des
solutions qui sont normalisées.
M. Tremblay (André): Exactement. Voici...
Le Président (M. Bordeleau): Vous êtes M.
Tremblay?
M. Tremblay (André): Oui, c'est cela.
Le Président (M. Bordeleau): Pour le journal des
Débats, allez-y.
M. Tremblay (André): Nous avons des clauses dans notre
entente quant à la répartition géographique depuis 1979.
Dans notre cas, cela a fonctionné merveilleusement bien. Je vous
répondrai en trois points: premièrement, lorsque le comité
mixte prévu par notre entente s'est mis à l'oeuvre, on a dû
premièrement faire l'analyse des équipements dentaires dans la
province. Tout cela s'est fait très rapidement. En dedans de 14 mois,
nous avons convenu, le ministre des Affaires sociales du temps et
l'association, d'une liste d'endroits désignés où
attribuer les bourses décernées par la Régie de
l'assurance-maladie. En collaboration avec les représentants du
ministère, je pense que cela a été très vite et
très bien. Nous avons procédé, la deuxième
année, à une seconde liste plus large parce que nos analyses ont
été continuées. Deuxième point que j'aimerais
souligner: nous avons fait une entente particulière en deux mois pour
les régions éloignées. Malheureusement, nous avions une
entente, mais elle n'a été approuvée que quatre mois plus
tard. Je ne blâme pas le ministre précédent, il y a eu le
Conseil du trésor, et tout cela. C'est pour dire que la
négociation entre le ministère et l'association s'est
déroulée en deux mois; c'est quasiment un record, je pense, dans
le domaine.
Troisièmement, lorsque nous avons signé l'entente en 1979,
on nous a imposé des modes de rémunération en
établissement. Nous avions prévu à ce moment-là
qu'il surviendrait des problèmes. Ils sont survenus. Nous avons consenti
à amender l'entente générale pour régler ces
problèmes qui étaient urgents, parce qu'il y a des cas où
il n'y avait qu'un seul dentiste; un bassin de population se trouvait alors ne
plus être desservi. Encore là, nous avons procédé
très rapidement. Je pense que dans notre cas, et je le souligne, avec la
collaboration des représentants du ministère, les clauses de
répartition de notre entente ont très bien fonctionné.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre, un
petit mot de la fin.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je voudrais remercier
les représentants de l'Association des chirurgiens-dentistes du
Québec pour leur mémoire, leurs propos. Cet échange aura
été la moyenne du temps alloué et nous aura permis
d'échanger, je pense, tout à fait adéquatement. Merci,
messieurs.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M.
Chicoine, ainsi que les personnes qui sont avec vous.
Nous allons suspendre nos travaux et reprendre vers 20 h 15. Est-ce que
cela vous irait?
M. Johnson (Anjou): 20 h 15.
Le Président (M. Bordeleau): 20 h 15, avec l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 h 15.
(Suspension de la séance à 18 h 19)
(Reprise de la séance à 20 h 24)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, mesdames et
messieurs, s'il vous plaît! La commission des affaires sociales reprend
donc ses travaux qui sont d'entendre les mémoires concernant le projet
de loi no 27. Le premier groupe que j'appellerai, c'est celui des
représentantes ou représentants de l'Ordre des infirmières
et infirmiers du Québec.
M. Sirros: M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier, oui.
M. Sirros: J'aimerais simplement informer l'auditoire et l'ordre
des infirmières que Mme Lavoie-Roux sera avec nous bientôt. Elle
est retenue en Chambre pour l'instant et on pourrait commencer pour ne pas
retarder la séance; elle se joindra avec nous.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord, avant de
débuter, je voudrais simplement rappeler aux membres de la commission et
aux intervenants, sans brimer qui que ce soit de son droit de parole et du
temps qu'il veut passer avec nous, que nous avons, selon notre menu du jour,
pour ne faire attendre personne, cinq mémoires à entendre ce
soir. Je demanderais donc à tout le monde d'être le plus concis
possible, tout en respectant le droit de parole de chacun également.
Nous sommes prêts à vous entendre. Votre présidente et
porte-parole est Mme Jeannine Pelland-Beaudry. C'est bien ça? Mme
Beaudry, si vous voulez bien nous présenter les personnes, les dames qui
vous accompagnent, nous sommes prêts à vous entendre.
Ordre des infirmières et infirmiers du
Québec
Mme Pelland-Beaudry: Merci, M. le Président. J'ai à
ma gauche Francine Mathieu-Jacques, vice-présidente de l'Ordre des
infirmières et, à ma droite, Thérèse Guimond,
directeur général, et, à côté d'elle, Odile
Larose, directeur du secteur nursing à l'ordre.
M. le Président, M. le ministre des Affaires sociales, mesdames,
messieurs les membres de la commission, je tiens à vous remercier de
nous avoir invités à venir vous faire part des commentaires qu'a
suscités chez nous le dépôt du projet de loi no 27. Je vais
mentionner, comme bien d'autres avant moi, une plainte qui est devenue
complainte, c'est-à-dire celle d'avoir eu très peu de temps pour
pouvoir préparer les réactions de l'Ordre des infirmières
et infirmiers du Québec, mais ceci a un avantage, c'est que notre
mémoire est très court et, je pense bien que je pourrai le lire.
Il n'a que huit pages.
Le projet de loi déposé à l'Assemblée
nationale apporte plusieurs modifications aux lois existant dans le domaine de
la santé. L'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec
a procédé à l'analyse des articles de ce projet de loi
à la lumière des principes véhiculés depuis la
réforme du système de distribution des services de la
santé et des services sociaux. Il s'est, de plus, inspiré de son
mandat d'assurer à la population du Québec des services de
qualité en matière de soins infirmiers pour commenter les
modifications proposées.
C'est dans un esprit constructif et de collaboration que l'ordre
transmet le résultat de son analyse dans ce mémoire
présenté aux membres de la commission élue permanente des
affaires sociales. Dans un premier temps, des commentaires
généraux sont énoncés quant aux dispositions
prévues dans le projet de loi en regard des mécanismes de gestion
des services médicaux, des pouvoirs attribués aux conseils
régionaux de la santé et des services sociaux, de la composition
des conseils d'administration des établissements de santé et des
comités de bénéficiaires.
En deuxième partie, l'Ordre des infirmières et infirmiers
du Québec suggère des clarifications quant aux fonctions des
directeurs de soins infirmiers, compte tenu des modifications prévues
aux fonctions des directeurs des services professionnels et des chefs de
département clinique.
Commentaires sur l'ensemble du projet de loi. Mécanismes de
gestion des ressources médicales.
L'ordre est conscient des besoins de la population dans les
régions périphériques et isolées relativement aux
soins de santé. Il considère que des mécanismes doivent
être envisagés pour favoriser une qualité et une
accessibilité uniforme des soins de santé et des services sociaux
pour tous les citoyens du Québec. L'ordre accueille donc favorablement
les dispositions prévues à l'article 4 du projet de loi qui vise
à remédier à la situation de pénurie que vivent
actuellement certaines régions du Québec en regard des effectifs
médicaux. Des mesures semblables devraient être également
précisées pour assurer la présence des autres
professionnels de la santé dans ces régions.
L'ordre est également en faveur de la transmission des
renseignements concernant des profils de pratique individuels et collectifs des
professionnels, tel que prévu à l'article 20, de même que
de la gestion des bourses de recherche par le Fonds de la recherche en
santé du Québec. En outre, le cadre juridique
précisé dans le projet de loi pour délimiter les
conditions de travail ne concerne pas uniquement les médecins et
dentistes ni certains autres professionnels de la santé puisqu'en plus
des pouvoirs actuels prévus à l'article 154, le gouvernement
s'accorde celui de déterminer les normes et les barèmes quant aux
conditions de travail, non seulement des directeurs généraux et
des cadres supérieurs, mais également celles des cadres
intermédiaires et des autres membres du personnel. Ces dispositions
législatives, juxtaposées à celles qui déterminent
les fusions d'établissements, les changements de vocation, l'octroi de
contrats de services, constituent un accroissement considérable des
contrôles du gouvernement dans la gestion des ressources du
système de distribution des soins.
L'ordre trouve dommage qu'il faille une loi pour tenter de rationaliser
l'utilisation des ressources dans le domaine de la santé et des services
sociaux. Il est certes conscient de l'accroissement constant des coûts
des services et de la nécessité d'accentuer les contrôles
de la gestion des ressources pour éviter les abus. Néanmoins,
qu'on en arrive à des contrôles aussi serrés dénote
non seulement un problème économique, mais aussi un malaise
sociologique au coeur même des valeurs collectives qu'une loi ne saurait,
à elle seule, résoudre.
Fonctions des conseils régionaux de la santé et des
services sociaux.
La précision d'une fonction des conseils régionaux
concernant l'échange, la répartition des services et leur
regroupement dote les conseils de pouvoirs qui peuvent sembler excessifs
à première vue, mais la conjoncture économique actuelle
incite l'ordre à les approuver dans une optique de rationalisation des
ressources. (20 h 30)
Quant aux fonctions relatives aux normes d'utilisation et de
distribution des lits, aux politiques d'admission et de transfert des
bénéficiaires, elles peuvent apporter une véritable
coordination dans la répartition des responsabilités des
établissements d'une région.
Par ailleurs, le rôle qui peut être confié, par
règlement, aux conseils régionaux relativement aux services
d'urgence, à leurs normes de fonctionnement, aux centrales de
communication et à la répartition des demandes est un mode de
fonctionnement nécessaire à l'amélioration de la situation
vécue dans certaines régions quant à l'organisation et
à la coordination de la distribution des services d'urgence, en vue de
faciliter l'utilisation adéquate des ressources existantes.
La régionalisation de ces services est en effet préalable
à la constitution d'un système cohérent de services
d'urgence, outil essentiel pour poursuivre des objectifs de qualité et
d'efficacité dans ce secteur d'activité. Incidemment, les
dispositions prévues à l'égard des services ambulanciers
contribuent également à leur accessibilité tout en
permettant un certain contrôle des coûts et en rationalisant leur
développement.
Composition des conseils d'administration des établissements.
Dans leur ensemble, les modifications proposées dans la composition des
conseils d'administration, des conseils régionaux, des centres
hospitaliers, des centres de services sociaux, des centres d'accueil et des
centres locaux de services communautaires concrétisent davantage la
notion de réseau par l'articulation de ses composantes puisque chacune
des catégories d'établissements se trouve alors
représentée au sein du conseil d'administration d'un
établissement auquel elle est susceptible d'être associée,
favorisant ainsi une meilleure prise de conscience de la
complémentarité des services.
En outre, la représentation des organismes
bénévoles au sein du conseil d'administration des conseils
régionaux et de celui des établissements apporte un correctif
à l'oubli de ces organismes dans le passé. Perçus alors
comme des groupes de moindre importance, ils seront dorénavant
participants à part entière, au même titre que les autres,
dans la gestion du réseau de services de santé et de services
sociaux.
Comités de bénéficiaires. Le projet de loi
précise la composition des comités de bénéficiaires
et leur ajoute une fonction d'information des bénéficiaires sur
l'administration générale de l'établissement. De plus,
dans les établissements où ils existent, ces comités sont
représentés au sein du conseil d'administration. Il s'agit
là d'un pas de plus pour assurer la sauvegarde des intérêts
des bénéficiaires dans la gestion générale des
établissements et pour accroître leur participation directe au
conseil d'administration où ils auront la possibilité de faire
connaître leurs attentes tout en étant renseignés sur le
coût des services dont ils bénéficient.
Clarification concernant les responsabilités du Conseil des
médecins et dentistes et les fonctions du chef de département
clinique. L'ensemble des modifications prévues aux différentes
lois dans le domaine de la santé a été accueilli
favorablement par l'Ordre des infirmières et infirmiers du
Québec. Il tient toutefois à discuter les dispositions
législatives qui concernent le chef de département clinique et le
Conseil des médecins et dentistes, pour en arriver à la
clarification de leurs responsabilités et de leurs fonctions, par
rapport à celles du directeur des soins infirmiers.
L'article 112 de la loi sur les services de santé et les services
sociaux est modifié par les deux additions suivantes. Première
addition, le Conseil des médecins et dentistes d'un centre hospitalier
remplit également les autres fonctions déterminées par
règlement. L'article 112.1, le Conseil des médecins et dentistes
d'un centre hospitalier doit adopter pour chaque département clinique
des normes sur la fourniture des soins reguis et l'utilisation des ressources
disponibles. Ces normes peuvent prévoir des sanctions
administratives.
Soins requis et ressources disponibles reviendront plus tard, mais
à chaque endroit ils ne sont pas qualifiés, je le fais remarquer
tout de suite.
En outre, l'article 118 de cette loi
spécifierait dorénavant les fonctions du directeur des
services professionnels dans les termes suivants: Coordonner et surveiller les
activités des chefs de département clinique et les
activités professionnelles et scientifiques qui s'exercent dans
l'établissement, sous réserve des responsabilités
données par les règlements ou le plan d'organisation aux autres
directeurs envers les professionnels de la santé autres que les
médecins et dentistes. Ces responsabilités données aux
autres directeurs devraient, par ailleurs, être précisées
par règlement dans le plan d'organisation de l'établissement,
puisque l'article 173 spécifie les pouvoirs de réglementation du
gouvernement à cet égard dans les termes suivants: i)
déterminer les directions, services et départements que le plan
d'organisation d'un établissement doit prévoir, leurs rôles
et activités et les qualifications et fonctions du chef de ces
directions, services et départements. Or, le projet de loi 27
insère dans la loi même et non dans ses règlements, les
responsabilités du chef de département clinique en ces
termes.
À l'article 71.1, le chef de département clinique d'un
centre hospitalier est responsable de l'utilisation des ressources de
l'établissement par les médecins et dentistes de son
département et de la gestion des ressources de son département.
Il surveille la façon dont s'exerce la médecine dans son
département; et deux fois, les ressources ne sont pas qualifiées
non plus. Il veille à l'application des normes sur la fourniture des
soins requis et l'utilisation des ressources disponibles
élaborées par le Conseil des médecins et dentistes,
conformément à l'article 112.1 et il impose les sanctions
administratives.
L'ordre a considéré, dans une première analyse, les
modifications proposées comme une intégration explicite des
médecins et dentistes dans la structure administrative des centres
hospitaliers, intégration fort justifiée, si on se
réfère à l'importance de l'impact des activités
médicales sur l'ensemble de la gestion financière de
l'établissement, puisque le médecin est le seul professionnel
reconnu à l'heure actuelle, comme pouvant procéder à
l'admission et au congé des bénéficiaires dans les centres
hospitaliers.
Cette formulation des responsabilités du Conseil des
médecins et dentistes, du directeur des services professionnels et du
chef de département clinique favorisera une meilleure utilisation des
ressources, tout en préservant l'autonomie professionnelle des
médecins et dentistes, puisque ce sont leurs pairs qui auront la
responsabilité d'établir les normes et de coordonner les
activités médicales. Du moins, c'est là ce que l'ordre a
compris des intentions véhiculées par le gouvernement en
proposant ces modifications et, dans cette optique, il ne peut qu'y
adhérer.
Même si les dispositions visent une meilleure coordination et la
gestion optimale des activités professionnelles des médecins, et
même si les médecins semblent être considérés,
à tort ou à raison, comme le moteur de la production des services
médicaux et des services de santé, il ne faudrait pas oublier la
spécificité et l'apport des autres professionnels de la
santé, notamment des infirmières et des infirmiers, dans la
production des services de santé offerts à la
collectivité. C'est pourquoi l'ordre craint qu'il puisse exister des
malentendus quant à l'interprétation des mesures contenues dans
ces articles et quant à leur application dans les centres hospitaliers,
si certaines clarifications n'étaient pas apportées.
Les expressions "fourniture de soins requis" et "utilisation des
ressources disponibles", comme je l'ai souligné aux articles 112.1 et
71.1, dans le projet de loi pourraient laisser entendre en effet que les
prérogatives des médecins concernent tous les domaines des soins
et toutes les ressources matérielles, humaines et financières,
donc, y compris les soins infirmiers.
La modification de cette formulation au profit de "fourniture de soins
médicaux reguis" et "utilisation des ressources médicales
disponibles" serait de nature à dissiper toute ambiguïté
à cet égard. Une autre façon de clarifier la teneur des
articles en cause et de prévenir tout problème
d'interprétation dans les centres hospitaliers serait d'insérer
dans le projet de loi une addition à l'article 115 de la Loi sur les
services de santé et les services sociaux disant que le directeur des
soins infirmiers assure la gestion, la coordination et la surveillance des
activités relatives aux soins infirmiers.
L'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec a tout
lieu de croire qu'il existe plusieurs interprétations quant au contenu
de ces énoncés que le projet de loi propose. L'application dans
plusieurs centres hospitaliers des dispositions relatives au département
de santé communautaire ajoute aux craintes des infirmières et
infirmiers et incite l'ordre à demander au ministre des Affaires
sociales de donner suite aux clarifications suggérées,
puisqu'elle faciliterait la compréhension des fonctions des directeurs
des services professionnels et des chefs de département par rapport
à celles qui sont exercées et reconnues au directeur des soins
infirmiers et aux infirmières-chefs des unités de soins.
En dernier lieu, l'ordre désire qu'à l'intérieur du
projet de loi actuel soient apportées des additions pour résoudre
les problèmes des milieux concernant la responsabilité de la
gestion des soins
infirmiers dispensés aux bénéficiaires et aux
usagers dans les centres d'accueil et les centres locaux de services
communautaires. En effet, dans les centres d'accueil où
séjournent les bénéficiaires dont la condition requiert
des soins infirmiers, il est nécessaire que soit désignée
une infirmière ou un infirmier pour planifier, coordonner et
contrôler les activités relatives aux soins infirmiers. En outre,
dans plusieurs centres locaux de services communautaires, l'absence d'un
responsable de soins infirmiers dûment mandaté amène des
problèmes de gestion des ressources en soins infirmiers ainsi que
d'organisation et de mise en application de programmes de santé
destinés à la population.
Puisqu'on attribue au Conseil des médecins et dentistes de ces
établissements la gestion de l'utilisation des ressources
médicales, il serait normal que le présent projet de loi
spécifie aussi le mode de gestion des ressources en soins infirmiers, en
ajoutant l'obligation pour les conseils d'administration de ces centres de
désigner une infirmière ou un infirmier à cet effet. Cette
mesure législative aurait pour conséquence de faciliter la
complémentarité des rôles de différentes ressources
d'un établissement de santé tout en assurant l'utilisation
rationnelle de ces ressources.
Conclusion et recommandations. Après avoir procédé
à l'analyse du projet de loi 27 modifiant diverses dispositions
législatives dans le domaine de la santé, l'ordre adhère
à la majorité des modifications proposées.
Quant à l'ensemble des modifications visant la gestion des
ressources médicales, les fonctions des conseils régionaux de la
santé et des services sociaux, la composition des conseils
d'administration et des comités de bénéficiaires, ils
contribuent à améliorer l'administration du système de
distribution des services de santé et des services sociaux et la gestion
des établissements.
Par ailleurs, pour éviter toute ambiguïté et
prévenir les difficultés d'interprétation et d'application
des articles du projet de loi concernant les responsabilités du Conseil
des médecins et dentistes, du directeur des services professionnels et
du chef de département clinique, l'ordre émet les recommandations
suivantes:
Que l'article 112.1 se lise comme suit: "Le Conseil des médecins
et dentistes d'un centre hospitalier doit adopter pour chaque
département clinique des normes sur la fourniture des soins
médicaux requis et l'utilisation des ressources médicales
disponibles." 2. Que l'article 71.1 se lise comme suit: "Le chef de
département clinique d'un centre hospitalier est responsable de
l'utilisation des ressources médicales de l'établissement par les
médecins et dentistes de son département et de la gestion des
ressources médicales de son département. Il surveille la
façon dont s'exerce la médecine dans son département. "Il
veille à l'application des normes sur les fournitures des soins
médicaux requis et l'utilisation des ressources médicales
disponibles élaborées par le Conseil des médecins et
dentistes, conformément à l'article 112.1 et il impose les
sanctions administratives." 3. Que l'article 115 sur la Loi des services de
santé et les services sociaux se lise comme suit: "Le conseil
d'administration de tout centre hospitalier doit nommer un directeur de soins
infirmiers, après avoir pris l'avis du directeur général.
Ce directeur doit être membre en règle de l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec; il doit, sous
l'autorité du directeur général, coordonner et surveiller
les activités des unités de soins et les activités
professionnelles relatives aux soins infirmiers; il exerce de plus les autres
fonctions prévues au plan d'organisation et au règlement." 4.
Qu'un article soit ajouté pour spécifier l'obligation, pour un
conseil d'administration, de désigner une infirmière ou un
infirmier pour assumer la responsabilité de planifier, coordonner et
contrôler les activités relatives aux soins infirmiers dans les
centres d'accueil où séjournent des bénéficiaires
dont la condition requiert des soins infirmiers de même que dans les
centres locaux de services communautaires.
Ce sont là les recommandations que l'Ordre des infirmières
et infirmiers du Québec a jugé essentiel de formuler afin que le
contenu des articles en cause soit interprété conformément
aux intentions du ministre des Affaires sociales pour favoriser une meilleure
gestion de l'utilisation des ressources dans le système de distribution
des services de santé et des services sociaux et conséquemment
d'assurer à la population des soins de qualité. (20 h 45)
Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mme
Pelland-Beaudry.
La période des questions. M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Merci, Mme Pelland-Beaudry.
Malgré le fait que vous participiez à ce que vous appeliez
tout à l'heure la complainte du temps qui passe, cela n'empêche
pas que votre mémoire, même s'il est bref, ne manque pas de
profondeur et je pense qu'il a saisi non seulement l'essentiel, mais
également identifié l'essentiel de la problématique aux
yeux de l'ordre.
Je vais le prendre rapidement page par page. Quant aux mécanismes
de gestion des
ressources médicales de façon générale
à l'égard de la répartition sur les territoires de
l'information, de la nécessité d'une meilleure circulation de
l'information, je prends bonne note de vos commentaires positifs et qui
encouragent à continuer dans ce sens. Pour ce qui est des fonctions des
conseils régionaux, j'y vois votre connaissance de la
nécessité que certains pouvoirs spécifiques soient
donnés aux conseils régionaux, notamment en ce qui a trait aux
urgences, qui est finalement la clé de bien des choses, mais tout en
tenant compte aussi d'autres réserves que vous avez, qui sont un peu de
caractère général à l'égard de la
réglementation et de la centralisation de certains pouvoirs.
Quant à la composition des conseils d'administration, je crois
comprendre que, de façon générale, vous avez un avis
favorable à l'orientation que manifeste le type de composition; on sera
amené cependant à modifier certains articles à la suite de
différentes interventions. Quant aux comités de
bénéficiaires, je prends également bonne note de vos
commentaires à cet égard.
Là on arrive à ce qui touche plus spécifiquement
l'ordre, à compter de la page 4, qui est finalement ce que je pourrais
peut-être appeler le rapport entre les soins infirmiers et les soins
médicaux ou le rapport entre les personnes selon leur appartenance
à un ordre ou à l'autre et selon le rôle respectif qu'ils
ont. Dans ce contexte, j'aimerais que vous précisiez. Je pense que la
meilleure façon d'approcher cela est peut-être de regarder vos
recommandations, puisque vous touchez de façon très
schématique ces questions aux dernières pages de votre
mémoire. Page 8: Pourriez-vous expliciter un peu le contenu de la
recommandation 3, où vous souhaitez que nous modifions l'article 115 de
la Loi sur les services de santé et les services sociaux et dire aux
membres de la commission comment cela fonctionne de façon
générale? Je sais que c'est inégal selon les
établissements, selon le type d'activités. Pourriez-vous
éclairer les membres de la commission là-dessus?
Y a-t-il toujours un directeur ou une directrice des soins infirmiers?
Relève-t-il(elle) toujours du directeur général ou est-ce
qu'à l'occasion, selon le type d'établissement et le type
d'activités, il (elle) ne relève pas du directeur de
département ou du DSC dans certains cas?
Mme Pelland-Beaudry: Si j'ai bien compris, vous parlez du
directeur des soins infirmiers.
M. Johnson (Anjou): C'est bien cela, j'ai peut-être fait un
lapsus.
Mme Pelland-Beaudry: Je crois, enfin, la majorité du
temps, je dirais même qu'il relève du directeur
général. C'est un poste qui est rattaché directement au
directeur général; je ne crois pas qu'il soit rattaché au
directeur des services professionnels. Je ne comprends pas très bien la
question telle que vous me la posez.
M. Johnson (Anjou): Quel est le but, en d'autres termes, de
l'ajout que vous voulez qu'on fasse à 115 et en réponse à
quelle situation? Vous nous dites, à la page 8: "Que l'article 115 de la
Loi sur les services de santé et les services sociaux se lise maintenant
comme suit", et vous ajoutez, à l'intérieur de la loi telle
qu'elle existe: "II doit, sous l'autorité du directeur
général, coordonner et surveiller les activités des
unités de soins et les activités professionnelles relatives aux
soins infirmiers; il exerce de plus..."
Mme Pelland-Beaudry: D'accord, je ne comprenais pas le sens de
votre question, M. le ministre. Actuellement, ces explications-là sont
contenues dans le règlement, mais nous voyons que, dans le projet de
loi, on spécifie davantage en ce qui a trait aux fonctions du directeur
des services professionnels et surtout en ce qui a trait aux fonctions du chef
de service. On se demande pourquoi ça n'apparaîtrait pas dans la
loi comme au sujet du directeur des soins infirmiers. Toutes ces fonctions qui
sont reconnues et qui sont exercées à l'heure actuelle, pourquoi
elles n'apparaîtraient pas dans la loi comme les autres directorats, dans
le fond, puisque maintenant ça apparaît dans les
règlements?
M. Johnson (Anjou): Je prends bonne note et je pense que votre
intervention est très claire. Ensuite, quant à l'article 4:
"Qu'un article soit ajouté pour spécifier l'obligation, pour un
conseil d'administration, de désigner un infirmier ou une
infirmière... pardon, une infirmière ou un infirmier..." C'est un
des rares textes où on commence par le féminin...
Mme Pelland-Beaudry: Oui, elle est féminine.
M. Johnson (Anjou): "... pour assumer la responsabilité de
planifier, coordonner et contrôler les activités relatives aux
soins infirmiers dans les centres d'accueil où séjournent des
bénéficiaires dont la condition requiert des soins infirmiers et
même dans les centres locaux de services communautaires."
Je vous ferai remarquer que, techniquement, ce serait possible, par
règlement. On m'assure qu'on n'aurait pas besoin de dispositions
législatives spécifiques pour le faire. Les précisions que
vous souhaitez voir apporter à 1 et 2 sur
l'utilisation des ressources, c'est tout le ... Mme Pelland-Beaudry:
M. le ministre. M. Johnson (Anjou): Oui.
Mme Pelland-Beaudry: Vous me dites, à l'article 4, qu'il
serait possible de le spécifier par règlement. Pourquoi n'est-ce
pas possible de le spécifier dans la loi?
M. Johnson (Anjou): Ça devient de longs débats
entre juristes sur l'utilité d'inclure dans la loi... La contrainte
qu'on a à partir du moment où c'est dans une loi, c'est qu'on y
perd le caractère de souplesse, étant donné que ce sont
les tribunaux qui interprètent. Tandis qu'un règlement est
habituellement issu d'une disposition assez générale, mais elle
permet, par voie de consultation etc., au Conseil des ministres d'adopter un
règlement qui lui-même peut être modifié simplement
par le Conseil des ministres, par un arrêté en conseil, alors
qu'une loi exige ce processus auquel vous participez, mais évidemment on
ne peut pas se permettre de faire cela à tous les six mois. Je ne sais
pas quand, la dernière fois, vous avez eu l'occasion... Vous êtes
sans doute venus à l'occasion de l'étude de la question des
services essentiels, mais disons que c'est peut-être un peu
exceptionnel.
Mme Pelland-Beaudry: Non, nous ne nous sommes pas
présentés, à ce moment-là.
M. Johnson (Anjou): Non. Alors, l'utilité du pouvoir
réglementaire, c'est ça, sa contrainte étant cependant que
ça fige moins les choses dans le ciment que d'avoir un pouvoir
réglementaire, et ça consacre moins les choses.
Mme Pelland-Beaudry: Je comprends fort bien vos explications M.
le ministre, et je comprends que ça peut amener des
interprétations des tribunaux, mais à l'heure actuelle nous
vivons avec des interprétations des milieux et je pense qu'elles ne sont
pas tout à fait comiques. Et interprétation pour
interprétation, nous préférerions peut-être les
interprétations des tribunaux que celles des milieux qui amènent
des situations qui sont parfois fort désagréables, nous vous
avons écrit il y quelques mois pour vous faire part de situations
malheureuses du point de vue soins infirmiers dans certains centres d'accueil,
et vous avez reçu favorablement nos recommandations, alors nous pensons
qu'une telle disposition amènerait peut-être l'obligation d'avoir
une personne responsable des soins infirmiers et qui empêcherait
peut-être les situations malheureuses que nous vous avons fait
connaître, et dont le bénéficiaire est souvent celui qui en
souffre à la fin.
Le Président (M. Bordeleau): Vous permettez...
M. Johnson (Anjou): II me semblait qu'il devait y avoir aussi une
raison autre que le principe général au sujet de la
réglementation en plus du contexte historique qu'on connaît du
partage des domaines de compétence d'activité. S'ils n'existaient
pas il n'y aurait pas d'office des professions sans doute il est là pour
cela parce qu'il y a une certaine harmonisation, mais ce n'est jamais
parfait.
Il y a une autre raison, c'est que la notion du centre d'accueil au sens
de la loi couvre aussi les centres de réadaptation, et dans certains cas
au niveau des centres de réadaptation la majorité des
professionnels qui sont impliqués sont, par exemple des
psycho-éducateurs. Alors, à ce moment-là, il faudrait
également prévoir que dans le cas de d'autres types de
corporations et on voit tout de suite la complexité de ce que
représente une législation dans ce domaine, mais je...
Mme Pelland-Beaudry: Je pense qu'il est nettement
mentionné dans ce point 4 que ce sont les centres d'accueil où
séjournent les bénéficiaires dont la condition requiert
des soins infirmiers.
M. Johnson (Anjou): Je m'excuse.
Mme Pelland-Beaudry: Je dis qu'au point 4, il est nettement
spécifié que ce sont les centres d'accueil où
séjournent les bénéficiaires dont la condition requiert
des soins infirmiers.
M. Johnson (Anjou): Ce qui donc, par définition est
prévu au plan d'organisation qui par ailleurs est imposé. En
d'autres termes, ce que je veux dire c'est qu'il pourrait y avoir une
réponse au niveau réglementaire à l'objectif qui est
recherché là dans le cadre de l'application de la
nécessité du plan d'organisation révisé et d'une
décision de nature administrative à cet effet.
Mme Pelland-Beaudry: La solution de la réglementation est
probablement une solution assez facile, mais le pouvoir est tellement large, le
pouvoir donné au gouvernement est tellement large par la
réglementation, que nous souhaiterions que vous regardiez de très
près cette recommandation, toujours dans le but d'assurer de meilleurs
soins au bénéficiaire.
M. Johnson (Anjou): Je peux vous assurer que c'est comme cela que
je prends votre suggestion.
Mme Pelland-Beaudry: Cette
recommandation est importante.
M. Johnson (Anjou): Je ne doute pas deux secondes que vous y
accordiez beaucoup d'importance. Je pense qu'il y a un mérite
considérable quant au fond, la question est plus sur
l'opportunité de l'inclure législativement. C'est ainsi que je
prends votre suggestion et je vous en remercie.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier.
M. Sirros: Merci, M. le Président. C'est à mon tour
de remercier l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec pour
son mémoire. Je constate en le lisant que finalement, un de vos soucis
majeurs dans le mémoire, c'est la possibilité d'une certaine
confusion qui pourrait exister entre le chef de département clinique et
les infirmières et que vous consacrez une couple de pages à cela.
Je présume à travers les propos qu'a tenus le ministre tout
à l'heure que ce n'était nullement son intention de voir ce genre
de confusion exister. Vous semblez dire qu'avec l'ajout des mots:
médical et médicaux, cela clarifie le problème. J'aurais
un peu le goût, peut-être, de vous demander ce qui vous
amène à avoir cette crainte dans vos relations de tous les jours,
mais je vous laisse...
Mme Pelland-Beaudry: Des tentatives qui ont déjà
été faites dans certains milieux, à l'heure actuelle.
M. Sirros: C'est quelque chose que vous vivez actuellement, qui
vous amène à avoir cette crainte.
Mme Pelland-Beaudry: C'est-à-dire que nous ne le vivons
pas, il y a eu des tentatives pour essayer de regrouper les infirmières
responsables de soins spécialisés sous des chefs de
département, en excluant l'autorité directe avec le directeur des
soins infirmiers. Et je dis qu'il y a eu des tentatives; ce n'est pas fait.
Alors, s'il y a des tentatives, si les gens y pensent, on peut croire qu'il y
aurait interprétation de ces articles dans ce sens.
M. Sirros: Je n'ai pas d'autres questions. Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Mme la
députée de L'Acadie et ensuite, M. le député de
Chapleau.
Mme Lavoie-Roux: Laissez passer le député de
Chapleau.
M. Kehoe: Si vous me permettez, à la page 7 de votre
rapport, vous parlez de la responsabilité de la gestion des soins
infirmiers dispensés. Actuellement, quel est le système en
vigueur? Sont-ce les infirmiers et les infirmières qui planifient et
coordonnent le programme actuel dans les centres d'accueil ou centres locaux ou
sont-ce les médecins et dentistes qui sont responsables de cela?
Mme Pelland-Beaudry: Dans certains centres locaux, il y a des
infirmières responsables de la coordination, dans d'autres, il n'y a pas
de responsable de la coordination.
M. Kehoe: Vous préconisez que ce soit une
infirmière qui soit nommée pour coordonner toute
l'organisation.
Mme Pelland-Beaudry: II me semble que c'est normal, quand
même, que ce soit une infirmière qui ait la responsabilité
de la coordination des soins infirmiers.
M. Kehoe: Puis, nécessairement ce sera enlevé aux
médecins qui font le travail actuellement. C'est cela?
Mme Pelland-Beaudry: Ce ne sont pas toujours des médecins
qui font actuellement ce travail et les médecins ont à faire la
coordination des soins médicaux. Il serait souhaitable que ce soit une
infirmière qui fasse la coordination des soins infirmiers.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Mme la
députée de L'Acadie. (21 heures)
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse de mon retard, j'étais de
l'autre côté à parler de coupure budgétaire dans les
hôpitaux et de déficit des hôpitaux. C'était une
bonne cause, M. le ministre?
Plus sérieusement, vous vous réjouissez et je pense,
à bon droit, qu'on tente de vouloir régler le problème des
urgences dans les hôpitaux et à cet égard, vous vous
montrez favorable aux efforts qui sont faits. Vous qui vivez à...
Le Président (M. Bordeleau): Mme
Pelland?
Mme Pelland-Beaudry: On nous a demandé notre collaboration
au CRSSS de la région de Montréal quand on a appliqué le
programme des urgences et nous continuons à collaborer avec le CRSSS;
et, 30 de nos membres sont déjà en place pour préparer le
travail de la coordination des urgences par l'intermédiaire du
CRSSS.
Mme Lavoie-Roux: Dans l'hypothèse où la centrale
fonctionnerait comme un papier de musique, est-ce que vous, dont les membres
oeuvrent à l'intérieur des hôpitaux, qui avez vécu
avec beaucoup d'acuité et qui
vivez encore les problèmes d'urgence dans les hôpitaux,
particulièrement dans les grands centres comme Montréal et
Québec, croyez-vous que ce sera suffisant, parce qu'il y a aussi un
manque de lits, soit qu'ils soient fermés ou qu'il n'y en ait pas
suffisamment? Est-ce que vous pensez que, même avec une centrale qui
serait articulée de façon impeccable, ce sera suffisant pour
résoudre les problèmes d'urgence, particulièrement dans
les grands centres?
Mme Pelland-Beaudry: Mme la députée, je vais
demander à la directrice générale de répondre
à cette question. Elle a beaucoup d'expérience des milieux
hospitaliers.
Le Président (M. Bordeleau): Mme
Guimond, c'est ça?
Mme Guimond (Thérèse): Oui.
M. Johnson (Anjou): Si je peux me permettre, Mme Guimond, une
seconde.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Si vous voulez absolument que votre avocat
siège à côté de vous quand vous allez
répondre...
Mme Guimond: Pardon, je n'ai pas compris: que mon avocat...
M. Johnson (Anjou): Si vous voulez absolument amener vos avocats
pour répondre...
Mme Guimond: Ah bon!
M. Johnson (Anjou): Je vous dis ça parce que je sens que
la députée de L'Acadie, tout à fait de bonne foi, vous
demande de porter un jugement. Je comprends très bien la situation
délicate dans laquelle vous êtes et on va accepter votre
réponse à sa face même.
Mme Lavoie-Roux: Ne conditionnez pas les réponses, M. le
ministre, c'est la libre expression ici.
M. Johnson (Anjou): Non, je pense que c'est...
Mme Lavoie-Roux: Vous avez raison de dire que c'était fait
de bonne foi, parce que c'est une question qui a intéressé tout
le monde, on en a assez parlé, Dieu merci!
Le Président (M. Bordeleau): Oui, Mme Guimond.
Mme Guimond: Mme la ministre et M. le ministre Johnson...
Mme Lavoie-Roux: Bon, on a deux ministres.
Le Président (M. Bordeleau): On est rendu avec deux
ministres.
Mme Guimond: ... nous connaissons tous les deux la même
urgence. Vous êtes passé à Maisonneuve et moi de
même, alors vous vous attendez un peu à la façon dont je
vais répondre. Mme Lavoie-Roux, selon mon expérience, le
système qu'on est en train d'établir à Montréal est
le début pour essayer de mettre un peu d'ordre et faire partager les
responsabilités des soins d'urgence dans notre Montréal
métropolitain. Cependant, je ne pense pas que ce soit la solution
à tous les problèmes d'urgence et je ne pense pas qu'on puisse
penser ça. On verra peut-être au bout d'un certain nombre de mois
d'expérience ce qui va se passer, si on va vraiment voir une diminution
des engorgements dans certains hôpitaux de Montréal et si la
population jouera le jeu d'être redistribuée selon les endroits
où on offre des services de soins.
Je crois aussi que ce n'est que le début d'une
réorganisation, qu'il va falloir que les institutions, par le truchement
du CRSSS, se penchent sérieusement sur la vocation des
différentes institutions de santé de Montréal, entre
autres; je connais plus le milieu de Montréal. Il y a eu un rapport qui
nous a donné un fait assez pertinent selon lequel il manquait un certain
nombre de lits de soins de courte durée à Montréal. C'est
un rapport qui n'a pas fait tellement parler de lui...
Mme Lavoie-Roux: On l'a tenu un peu secret. Je l'ai eu par...
Mme Guimond: Oui. On peut le comprendre. On ne peut pas penser,
avec les coûts actuels, qu'on puisse construire un autre hôpital;
je pense qu'il y a des efforts de faits pour la rive sud. Je pense que les
hôpitaux généraux, avec tous les budgets qui sont enfouis
là, devraient avoir la possibilité d'offrir des services de soins
aigus, pour qu'on utilise au maximum le point de vue technique, le point de vue
scientifique, les ressources humaines très spécialisées,
ultraspécialisées que nous avons dans tous les centres
hospitaliers d'enseignement universitaire, entre autres.
On verra peut-être, au bout d'un an, s'il y a lieu vraiment de
repenser nos ressources en soins prolongés et en centres d'accueil. On
verra aussi si les soins à domicile devraient être plus
développés. On est assez timides de ce côté. On
verra aussi probablement un effort - c'est à souhaiter, en tout cas, je
ne veux pas d'angélisme non plus - dans le sens que les CLSC, les
départements de santé communautaire, les CSS se donneront un peu
plus la main pour
travailler pour une juste redistribution de la clientèle aux bons
endroits.
Tout cela pour vous dire qu'il faut essayer le système d'urgence
à Montréal. Je ne peux pas croire que cela n'aidera pas la
situation si la population veut bien utiliser ce système qu'on lui
offre.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie. Il y a une autre question que
je voulais vous poser, justement parce que vous oeuvrez dans les centres
hospitaliers depuis longtemps et que vous vous occupez des malades. Je me
demande comment vous réagissez aux recommandations de l'article 59 - je
pense que vous y avez fait allusion dans vos commentaires tout à
l'heure, savoir qu'un conseil régional désigné par
règlement est la seule autorité habilitée a autoriser le
déplacement d'un bénéficiaire vers un autre
établissement, etc., et à établir les politiques
d'admission et de transfert des bénéficiaires? Vous vous occupez
des bénéficiaires directement. Comment réagissez-vous
à cela? Vous vous dites que c'est bon pour la rationalisation. Vous
n'avez pas de restriction à cet égard d'aucune façon?
Le Président (M. Bordeleau): Mme Guimond.
Mme Guimond: Oui, j'en aurais évidemment. Vous savez,
quand on pense aux CRSSS, c'est encore très gros. C'est un peu
éloigné directement au niveau de la clientèle. Par contre,
avec les expériences que nous avons vécues depuis quelques
années - j'ai travaillé dans un CHSP aussi pendant les
dernières années - je dois dire qu'on n'a pas réussi, les
CSHP, à nous entendre pour vraiment faire des efforts pour favoriser,
par exemple, l'hospitalisation ou l'institutionnalisation dans un endroit qui
soit près de la résidence de la personne, etc. Alors, on voit des
gens de l'Ouest qui sont dirigés vers des institutions de l'Est de
Montréal, et vice versa. Le CRSSS, c'est le regroupement de toutes les
institutions. On peut toujours avoir envoyé nos renseignements et nos
opinions au niveau du CRSSS. Le CRSSS peut être une personne morale qui
devrait avoir plus d'objectivité que les institutions prises en
particulier. Même si on peut penser à une bureaucratie, il va
falloir bien surveiller le CRSSS pour ne pas alourdir et dépersonnaliser
ce travail de coordination. C'est peut-être la restriction que j'y
mettrais, parce que c'est malheureux, mais dès qu'on pense à un
niveau de gouvernement, soit provincial, soit régional,
déjà on trouve cela énorme. Montréal, entre autres,
a un problème d'énormité que peut-être d'autres
CRSSS n'ont pas. Je suis tentée de dire qu'il faut essayer cette
formule, puisque, individuellement, on n'a pas réussi et que cela fait
assez longtemps que cela dure. C'est ma position.
Mme Lavoie-Roux: II y a une autre question que je voudrais vous
poser. Je pourrais peut-être aller vous le demander privément,
mais je ne voudrais pas que le ministre le prenne... je ne veux pas le placer
nécessairement dans le contexte des coupures budgétaires. C'est
vraiment dans le contexte des soins aux malades. C'est vraiment l'esprit dans
lequel je le fais. Dans le moment, à la suite de coupures
budgétaires qui peuvent être bonnes - ce n'est pas de cela que je
veux discuter - dans des centres d'accueil, il se fait une transformation de
postes d'infirmières en postes d'auxiliaires infirmières. On a
des représentants des centres d'accueil dans la salle. Les centres
d'accueil, on sait comment ils se sont développés, quel type de
clientèles ils ont accueilli dans leur début et comment elles...
Est-ce qu'au plan professionnel, dans les centres d'accueil, il devrait y avoir
- ce n'est peut-être pas une question, c'est peut-être vous mettre
dans une situation difficile aussi - un certain équilibre entre... Je
vais poser ma question autrement. Dans quelle mesure les centres devraient-ils
conserver un certain nombre d'infirmières diplômées? Je
vous mets peut-être en conflit d'intérêts en vous posant
cette question, mais il reste qu'il y a des plaintes qui nous arrivent et je
voudrais avoir votre réaction à cela.
Le Président (M. Bordeleau): Mme
Pelland-Beaudry.
Mme Pelland-Beaudry: Je pense que je peux vous répondre,
Mme Lavoie-Roux. Chaque professionnel a une part de responsabilité dans
les soins et l'infirmière auxiliaire a certaines responsabilités
qu'elle ne peut pas excéder et nous avons nos
responsabilités.
Je pense que vous le saviez en posant la question, il est très
difficile de poser un jugement de valeur, parce que nous ne connaissons pas la
situation exacte de chacune des institutions auxquelles vous vous
référez. Il est un fait cependant que transformer certains postes
d'infirmières en postes d'infirmières auxiliaires à
l'heure actuelle place peut-être l'infirmière auxiliaire dans la
situation délicate d'être amenée parfois à donner
des soins qu'elle n'est pas préparée à donner, et cela
place aussi l'institution dans une situation délicate, mais cela place
le bénéficiaire dans une situation délicate et je pense
que ce n'est ni la faute de l'infirmière auxiliaire, ni la faute de
l'infirmière, ni la faute du bénéficiaire.
Compte tenu de la lourdeur de certains bénéficiaires dans
les centres d'accueil, ce à quoi je me référais tout
à l'heure quand je disais au ministre: Nous vous avons écrit,
c'est que nous avons senti l'obligation de
faire connaître au ministre que, dans certains centres d'accueil,
il n'y avait pas d'infirmières à certaines périodes du
soir et de la nuit et, compte tenu toujours de la lourdeur - j'y reviens - des
soins que réclamaient certains bénéficiaires, nous nous
sentions obligés de dire que ces bénéficiaires
n'étaient pas dans une situation de sécurité.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre, le
petit mot de la fin.
M. Johnson (Anjou): Juste deux remarques d'abord pour dire
à Mme la directrice générale qu'effectivement on est
passé à travers les mêmes locaux avant que le bloc 9 ouvre.
Il semble que, malgré l'ouverture du bloc 9, à Maisonneuve, il
arrive encore à l'occasion des situations d'engorgement. Je partage
assez largement sa perception.
Deuxièmement, je veux lui dire, ainsi qu'à la
présidente, que, jusqu'à maintenant, nous avons eu des
échos qui n'étaient que des éloges quant à la
qualité du personnel qui est en train de mettre en place la dimension
"nursing" dans l'opération qui consiste à mettre sur pied un
centre de coordination d'urgence à Montréal.
Je veux lui rappeler, quant à cette question des contraintes
budgétaires qui pose les problèmes que l'on sait, que, s'il est
vrai qu'à certains endroits on transforme des postes
d'infirmières en des postes d'infirmières auxiliaires, à
d'autres endroits, je sais que c'est le contraire. Le président de la
commission pourrait d'ailleurs vous en parler abondamment, puisqu'il semble que
dans certains endroits, en Abitibi notamment, ce soit le contraire.
Je me dis cependant qu'au niveau de la responsabilité, puisque
c'est une préoccupation, je pense, des dames qui sont en face de nous,
elles sont conscientes qu'il y a quelque part une autorité qui assume
cette responsabilité et c'est un membre de l'ordre qui assume cette
responsabilité, en étant conscient encore une fois qu'il peut y
avoir des situations difficiles et délicates, mais, ultimement, c'est un
jugement professionnel qui est porté dans le cadre de ces contraintes et
ce n'est pas purement démocratique. C'est cela que j'essaie de dire. Il
y a une notion d'évaluation de l'impact et il y a une ligne
hiérarchique et d'autorité qui décide.
Encore une fois, je ne veux pas minimiser ce que disait la
présidente, par ailleurs, que cela peut poser dans des zones grises des
situations qui sont celles qui ont toujours fait l'objet des contentieux
d'ailleurs entre l'ordre et... Est-ce que c'est la corporation ou
l'association"?
Une voix: L'ordre.
M. Johnson (Anjou): L'ordre, entre les deux ordres, mais,
ultimement, c'est un membre de cet ordre qui en assume la
responsabilité, puisque c'est la directrice des soins infirmiers qui
participe à la décision. Je voudrais vous remercier infiniment,
mesdames, de votre participation articulée et intéressante.
Merci. (21 h 15)
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, une
dernière petite question de la députée de L'Acadie, un
commentaire.
Mme Lavoie-Roux: C'est plutôt un commentaire à la
suite des remarques du ministre. Le sens de ma question... Évidemment,
il y a tout le problème de la délégation des gens et je ne
veux pas entrer là-dedans, parce que je sais que... En admettant que
chacun a été bien délégué d'un
côté comme de l'autre, enfin que la répartition a
été bien faite, le sens de ma question, c'est que je voulais
m'assurer que, dans un contexte de coupure budgétaire, pour des
questions d'économie, quant, à un moment donné, on vous
dit: Coupez de 200 000 $ ou peu importe le montant... Parce qu'un type de
professionnel coûte moins cher ou plus cher, que ça ne soit pas la
considération et qu'on ne sacrifie pas la qualité des services et
la nécessité pour les patients de recevoir des services
adéquats. C'était le sens de mon intervention.
Mme Pelland-Beaudry: Je pense que nos directeurs de soins
infirmiers sont très sensibles à cette dimension. Je voudrais
ajouter que j'ai essayé de faire la différence entre la
préparation des infirmières auxiliaires et la préparation
des infirmières, mais que nous sommes en excellents termes avec la
Corporation des infirmières et des infirmiers auxiliaires de la province
de Québec.
Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup, Mme
Pelland-Beaudry, ainsi que les autres personnes.
J'appelle maintenant le prochain groupe qui est l'Association des
centres d'accueil du Québec. Alors, je présume que c'est M.
Jean-Guy Doucet, le porte-parole?
M. Doucet (Jean-Guy): Oui.
Le Président (M. Bordeleau): II y a aussi d'autres
personnes que vous voudrez bien nous présenter. Maintenant, comme le
ministre ainsi que des personnes de l'Opposition sont sortis pour deux minutes,
qu'on me dit... Étant donné l'ampleur de votre mémoire,
peut-être qu'on pourrait s'entendre... Je ne veux pas réduire
votre droit de parole par rapport à celui des
autres, mais, comme il est passablement volumineux, je veux simplement
savoir s'il est possible de résumer certains points ou de... Remarquez
que je laisse ça à votre discrétion. Si on passe une heure
de lecture, la période des questions sera beaucoup plus courte.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je suis sûre qu'ils vont faire des efforts
pour résumer, mais je pense qu'il ne faudrait pas qu'ils sentent que
leur temps...
Le Président (M. Bordeleau): C'est exactement ce que j'ai
dit, Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Excusez, j'étais en arrière, j'ai
mal entendu. Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Je ne veux surtout brimer
personne. Je voulais simplement faire part d'un commentaire que, d'ailleurs,
certains membres de la commission m'ont déjà fait à
l'occasion d'un mémoire plus volumineux. Alors, M. Doucet, vous pourriez
peut-être nous présenter les personnes qui sont avec vous. Ils
n'en ont pas pour longtemps, deux minutes.
M. Doucet: Est-ce que vous voulez que je commence?
Mme Lavoie-Roux: Non, on va l'attendre parce qu'ils
m'attendent.
Le Président (M. Bordeleau): Vous pourriez peut-être
présenter...
Une voix: Mme la député de Dorion, je vous en
prie.
Mme Lavoie-Roux: Qu'est-ce qu'elle a dit?
Une voix: C'est dans le journal des Débats.
Association des centres d'accueil du
Québec
M. Doucet: À ma gauche, Me Huguette April-Morin et
à mon extrême droite, M. Gilles Langelier, directeur des services
professionnels et M. Pierre Cloutier, directeur général de
l'Association des centres d'accueil du Québec.
Le Président (M. Bordeleau): Bon, alors on y va. M. Doucet
vous pouvez y aller.
M. Doucet: M. le Président, M. le ministre, mesdames,
messieurs les députés membres de cette commission, je voudrais
d'abord vous remercier de nous avoir invités à produire nos
commentaires et recommandations à cette commission. Même si on
vous fait veiller un peu tard, si on vous présente notre mémoire
un peu à l'heure du digestif, il ne faudrait peut-être pas le
prendre comme une liqueur fine. C'est plutôt un vin jeune, effervescent,
vous comprendrez le temps qu'on a pris pour le produire.
M. Johnson (Anjou): II est abondant.
M. Doucet: Oui, il est abondant. Je vais essayer, M. le ministre,
justement de vous priver peut-être d'une lecture et de vous livrer
davantage ce que nous ressentons de la façon dont nous percevons, dont
nos membres perçoivent le projet de loi qui est soumis à notre
attention.
D'abord, permettez-moi de vous dire que l'Association des centres
d'accueil représente près de 400 établissements, 43 000
bénéficiaires qui reçoivent nos services: personnes
âgées, jeunes mésadaptés socio-affectifs,
handicapés mentaux, physiques, femmes nécessitant des services
d'assistance maternité, personnes alcooliques et toxicomanes et tout
cela, dans un réseau distribué dans toute la province.
Notre réseau a voulu s'ajuster, comprendre l'évolution des
services, notre réseau est très proche des
bénéficiaires, très près des
bénéficiaires, ce sont généralement des petits
établissements. Les gens sont près des
bénéficiaires, les gens comprennent ce que c'est que de donner
des services efficaces à la population. Les gens ont essayé aussi
de comprendre la situation plutôt difficile, au plan financier, de notre
réseau; nous avons essayé de collaborer le mieux possible
à cette compréhension globale des grands objectifs du
réseau, de la compression budgétaire. Vous vous souviendrez
certainement qu'on a abordé cette période, on l'a même
prévue, je pense, et dès le mois de mars l'an passé, on
lançait le document dans un colloque, des idées, des
économies.
Face aux compressions budgétaires, je pense que notre
réseau a essayé aussi de comprendre la situation, a essayé
de s'adapter, a essayé de donner les meilleurs services possible dans le
contexte. Et tout cela, pour vraiment faire sentir au ministre des Affaires
sociales que nous comprenons ces grands objectifs. C'est peut-être ce qui
explique un peu certaines amertumes qu'on a laissé voir dans notre
mémoire, car nous en partageons les grands objectifs, mais au niveau des
moyens, on arrive mal à comprendre comment ce projet de loi permettra de
responsabiliser davantage les
administrateurs du réseau, les conseils d'administration, les
directions des établissements qui sont proches des
bénéficiaires qui, eux, peuvent administrer efficacement à
condition qu'on veuille bien partager avec eux les grands objectifs, leur
permettre d'assumer les grandes responsabilités.
C'est surtout à ce niveau, au niveau des moyens, que nous avons
le plus de recommandations, que nous comprenons mal comment dans un projet de
loi qui nous est quand même présenté assez rapidement.
"Notre réseau est assez vaste, nos établissements sont assez
petits, distribués dans tout le Québec, et on n'a peut-être
pas eu tout le temps voulu; mais encore là, on peut toujours comprendre
les raisons qu'un ministère peut avoir pour présenter un tel
projet.
Je comprends mal la période de l'année à laquelle
ça nous a été présenté aussi. On a mis
beaucoup d'énergie pour travailler, présenter des propositions au
sommet sur l'intégration de la personne handicapée, on a
passé tout le début de la semaine à ce sommet, on a
travaillé à ce niveau énormément, et il a fallu en
même temps consulter et nous présenter nos réactions. On
comprend mal aussi le caractère omnibus du projet de loi.
On a aussi déjà présenté il y a à
peine deux ans un mémoire assez volumineux dans lequel on disait qu'il
fallait rafraîchir le chapitre no 48 S-5; on était d'accord avec
cela et on aurait voulu contribuer davantage à ce
rafraîchissement. Puisqu'il y a plusieurs grands sujets sur lesquels on
avait voulu se prononcer à ce moment et qui ne sont pas touchés
dans le présent projet de loi, définition des centres d'accueil,
rôle et autonomie des conseils d'administration... Alors, vous avez cela
dans le mémoire, je vais vous priver d'une énumération.
Alors, pour toutes ces raisons, c'est bien sûr qu'on aurait aimé
que le projet de loi, au moins la partie qui concerne les amendements au
chapitre no 48, soit reporté au printemps et qu'on ait le temps de
continuer cette collaboration qu'on assure toujours au ministère et
qu'on est capable de faire avec nos établissements quand on nous en
donne le temps. (21 h 30)
On voudrait aussi situer notre réflexion dans un cadre plus
global. On essaie d'inscrire notre réflexion dans l'esprit de la
réforme Castonguay-Nepveu. Un des buts fondamentaux poursuivis par la
réforme était d'assurer une plus grande participation de la
population en général à la gestion et à la
surveillance du système de santé et de services sociaux en
permettant à cette population et aux bénéficiaires d'avoir
des représentants au conseil d'administration. Cette réforme
prévoyait les principes directeurs suivants: décentralisation des
décisions, participation de la population au régime, autonomie
des organismes du réseau. C'est dans cet esprit global qu'on aurait
aimé continuer notre réflexion.
Nous voulions aussi baser notre réflexion sur quelques valeurs
fondamentales. Les bénéficiaires de nos centres d'accueil, nous y
croyons, nous travaillons avec eux, nous sommes près d'eux et nous
croyons qu'ils peuvent participer efficacement à l'évolution de
notre réseau. Nous croyons aussi au partage des pouvoirs et des
responsabilités. Notre réseau a été fondé
sur la notion de partage des pouvoirs et des responsabilités. Les
conseils d'administration des centres d'accueil refusent de devenir de simples
contrôleurs. On croyait aussi à l'implication des intervenants et
c'est dans ce sens-là qu'on vous a fait quelques recommandations.
L'A-C-A-Q croit essentiel que tous les intervenants d'un centre
d'accueil soient impliqués dans le processus de prise de
décision. On veut impliquer le bénéficiaire personnel, les
cadres, les membres de conseils et les autres organismes. On croit aussi au
principe de décentralisation. L'A-C-A-Q croit que les décisions
doivent être d'abord la responsabilité de ceux qu'elles
concernent. Pour nous, c'est un principe de fond.
Complémentarité dans le réseau; je pense qu'on peut
y arriver. Ce n'est peut-être pas nécessaire d'entrer les morceaux
du casse-tête à coups de marteau. Je pense qu'il y a moyen de les
disposer, de prendre un petit peu plus de temps et d'arriver quand même
à former le casse-tête.
Utilisation optimale des ressources. Mon petit commentaire du
début, je pense, nous situait là-dedans. Je pense que le
réseau des centres d'accueil a été responsable dans
l'utilisation des ressources. Il n'y aura pas beaucoup de déficit cette
année, on a appliqué le plan de compression budgétaire
sans y être forcé. Le document "Des idées... des
économies" a même été publié avant que les
directives nous arrivent. Je pense que là-dessus les citoyens qui
participent à nos conseils, les membres des anciennes corporations qui
participent à nos conseils et qui ont souvent créé ces
institutions sont responsables. Ils agissent souvent en bon père de
famille, ils font des économies. Souvent même il faut surveiller
de très près, parce qu'on est porté à faire des
économies qui vont même jusqu'à la coupure de services. On
a le sens des responsabilités de l'équilibre budgétaire
qui va jusque-là et sans se le faire imposer.
Alors, toutes ces considérations et ces principes, on y tenait
beaucoup.
J'aimerais vous présenter quelques réflexions ou
commentaires particuliers sur le projet de loi. M. le Président, nous
croyons
beaucoup aux objectifs énoncés par le ministre des
Affaires sociales, lorsqu'il dit dans le préambule du texte de la loi
qu'il vise la coordination de la gestion des ressources des
établissements par les conseils régionaux sur leur territoire
respectif et la rationalisation de la fourniture des services de santé
et des services sociaux par les établissements. L'A-C-A-Q souscrit
à de tels objectifs, son inquiétude se situe davantage à
l'égard des moyens que le ministre des Affaires sociales entend prendre
pour atteindre ses buts.
Quelques commentaires porteront davantage sur les centres de
réadaptation fonctionnelle. À ce niveau-là, on a eu une
demande de plusieurs de nos établissements pour discuter de cela avec le
ministère. On aurait aimé avoir le temps de l'étudier
davantage, on aimerait un moratoire sur cet aspect-là. Faute de
moratoire, nous recommandons au moins que soit modifiée l'appellation
"centre d'accueil" par les suivantes: que les mots centre d'accueil et de
réadaptation soient remplacés par l'appellation "centre de
services de réadaptation". Cela correspondrait davantage à ce
qu'on fait dans le réseau. Que le nom centre d'accueil
d'hébergement soit remplacé par le centre de services
gérontologiques. Avec une définition et un peu de temps, je pense
qu'on pourrait collaborer avec votre ministère pour trouver des
définitions qui conviennent à ce qui se fait dans le
réseau.
On aurait aussi quelques commentaires au niveau des pouvoirs que le
ministre semble prendre dans ce projet de loi. J'aurais quelques questions
à poser là-dessus. À l'instant où on prévoit
la fusion d'établissements, pourquoi ne prévoit-on pas
également, par le biais de la réglementation, un mécanisme
de concertation entre les établissements et avec les conseils
régionaux pour les réaliser? De ce côté,
l'Association des centres d'accueil et les établissements sont
prêts à envisager les fusions comme étant un des moyens de
rationaliser l'utilisation des ressources. On a même offert notre
collaboration, on a demandé que soit élaboré le cadre qui
permettrait d'aborder les fusions de façon positive.
Pourquoi le ministre ne prévoit-il pas la consultation
auprès des établissements concernés, lorsqu'on songe
à la modification de la catégorie, de la classe, du type ou de la
capacité des établissements? Pourquoi le ministre ne peut-il pas
préciser ce qui lui apparaît être d'intérêt
public? Ce sont des mots qu'on retrouve souvent dans le projet de loi. Pourquoi
le ministre fait-il des gestionnaires d'établissements, par le biais
d'une réglementation, des commis, à toutes fins utiles?
Je pense qu'à ce niveau on aurait un grand nombre de questions.
Vous pouvez les retrouver dans le mémoire. On arrive à des
recommandations assez concrètes.
On voudrait que soient établis des mécanismes de
consultation entre le MAS et les associations d'établissements, entre
les conseils régionaux et les établissements, pour
l'élaboration de la réglementation visant notamment les fusions
d'établissements, les modifications de la catégorie, de la
classe, le type, ou la capacité en permis.
On voudrait que soit définie la notion d'intérêt
public qu'on utilise souvent dans le projet de loi; que les fonctions
visées à la gestion des établissements soient
confiées à leurs administrateurs et gestionnaires; ça,
pour nous, c'est fondamental.
On voudrait que l'élaboration des plans d'organisation soit la
responsabilité des administrateurs des établissements; ça
aussi, c'est élémentaire, pour nous, comme principe de gestion;
il faut qu'un conseil d'administration, si on veut qu'il soit responsable, soit
capable de faire son plan d'organisation.
On voudrait encore que la notion de budget global à l'intention
des établissements soit préservée; que l'utilisation des
revenus autogénérés par l'établissement soit
encadrée par des règles incitatives et de partage, et on voudrait
aussi que le pouvoir illimité de réglementation que le ministre
se donne en vertu de l'article 94x soit retiré.
Rôles, pouvoirs et fonctions du CRSSS. Encore là, je trouve
qu'on va très loin. On tient à signaler au législateur que
les moyens préconisés dans cet article ne correspondent d'aucune
façon à un objectif de coordination et de concertation des
ressources. Il reflète davantage un désir de contrainte par la
mise en place d'un jeu de force; vouloir maintenir tous ces pouvoirs au niveau
des conseils régionaux équivaut à assujettir les
établissements à un système fortement centralisateur.
On risque d'obtenir un désengagement des administrateurs de nos
établissements, qui ne les administrent pas si mal depuis fort
longtemps. On risque de freiner l'initiative et la créativité, on
risque aussi des résistances à la collaboration forcée. Je
pense que ce n'est pas le meilleur moyen. On recommande que l'article 38 soit
révisé et que les paragraphes premier et troisième de
l'article 39 soient aussi retirés du projet.
Composition des conseils d'administration des CRSSS. On en aurait,
encore là, très long à dire. On recommande que soit
maintenue la proposition d'intervenant du réseau et de personnes
hors-réseau dans la composition des conseils d'administration. Pour se
résumer, à ce niveau, c'est qu'on pense que les conseils
d'administration y gagnent à garder des intervenants du réseau,
qui connaissent le réseau. On est bien d'accord qu'il y ait des gens de
l'extérieur du réseau, mais il serait important pour nous de
maintenir aux
conseils d'administration des CRSSS des gens qui viennent du
réseau.
Composition et pouvoirs des conseils d'administration des centres
d'accueil. On voudrait maintenir les deux sièges de
bénéficiaires ou d'usagers sur nos conseils d'administration.
Pour nous, c'est très important, les bénéficiaires d'un
centre, ils peuvent participer bien davantage à la gestion des centres
d'accueil. On voudrait aussi que soit maintenu l'actuel mode de
représentation des anciennes corporations aux conseils d'administration
des centres d'accueil.
Vous comprendrez que dans notre réseau, les anciennes
corporations ont souvent été à l'origine de nos centres.
Ce sont des bénévoles fortement impliqués qui ont un
suivi, qui ont souvent de très grandes capacités et qui assurent
une très bonne stabilité dans nos centres d'accueil. On trouve
très regrettable que les membres de ces anciennes corporations passent
de quatre à un. Pour nous, cela risque d'affaiblir grandement les
conseils d'administration. Cela risque de démotiver les anciennes
corporations, parce que plusieurs anciennes corporations, ayant seulement un
représentant au conseil d'administration, vont tout simplement
délaisser, n'auront plus de capacité d'influencer le centre
d'accueil.
Je continue d'accélérer, M. le ministre. À ce
niveau, on a une recommandation qui touche les pouvoirs et les
responsabilités des conseils d'administration des conseils
régionaux pour qu'ils soient le reflet réel d'une
décentralisation par opposition à une déconcentration du
pouvoir tel qu'on le voit dans le projet. Que les conseils d'administration des
établissements jouissent d'une autonomie réelle dans
l'administration interne des établissements. Si on enlève cette
autonomie des centres d'accueil, on risque encore là de démotiver
les membres. Vous voyez, M. le ministre, que c'est au niveau des moyens. On
veut ici rendre la gestion de nos centres efficace, et ce pour atteindre les
mêmes objectifs. On veut même l'élargir.
On est bien d'accord pour que le comité de
bénéficiaires apparaisse. On voudrait même en
élargir le rôle. On pense que la fonction du comité de
bénéficiaires devrait être élargie et englober la
dimension des programmes et de la qualité de vie à
l'intérieur. Je pense qu'on peut les faire participer à ce
niveau. On souhaite aussi que les comités de bénéficiaires
soient réellement des comités de bénéficiaires,
c'est-à-dire qu'ils soient tous nommés par des
bénéficiaires, des parents des bénéficiaires ou des
enfants des bénéficiaires, dans certains cas, mais toujours
nommés par les bénéficiaires lorsque ce ne sont pas des
bénéficiaires eux-mêmes. Je pense qu'on y gagnerait. C'est
un petit amendement qui pourrait être fait au projet de loi.
On a situé une perception qui, de la façon dont on la
livre dans le mémoire, est un peu sévère face au projet de
loi. Je voudrais qu'on retienne l'esprit de collaboration, l'esprit dans lequel
on a toujours travaillé. On partage les objectifs. Nos
établissements nous ont envoyé de nombreuses lettres,
télégrammes, nous ont demandé d'intervenir. C'est au
niveau des moyens qu'on est inquiet. On pense qu'on va diminuer
l'efficacité de nos établissements.
On croit que si le ministère continuait à collaborer avec
nous, à nous faire partager vraiment ses objectifs... M. le ministre, je
pense que vous avez beaucoup de charisme à ce niveau, au niveau de nos
établissements. On voudrait travailler dans cet esprit de collaboration.
Ce n'est peut-être pas nécessaire d'avoir des pouvoirs
illimités comme ceux-là. Les gestionnaires de nos
établissements sont capables d'être responsables et ils vous l'ont
prouvé. La gestion des services est d'une grande qualité dans nos
établissements. Notre gestion financière répond
actuellement aux grands objectifs que vous nous avez fixés. C'est dans
cet esprit que nous soumettons aux membres de cette commission, et
particulièrement au ministre des Affaires sociales, les quelques
recommandations que vous pourrez analyser plus en détail dans notre
mémoire.
Je m'excuse d'avoir été un petit peu rapide,
peut-être un peu trop, mais je pense que vous allez retrouver tout cela
dans notre mémoire. On est bien disponible pour répondre à
vos questions.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Doucet. Nous en
sommes rendus aux questions. M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Je voudrais d'abord vous remercier pour un
mémoire abondant qui, je pense, révèle des efforts
considérables d'y consigner les objectifs de votre association qui sont
bien connus du ministère, étant donné qu'ils ont pu
être exprimés à différentes reprises et de
différentes façon également.
J'aurais d'abord une question et ensuite une série de
commentaires très rapides. J'ai pris votre mémoire. Je me suis
permis, pendant que je vous écoutais d'une oreille attentive, mais d'une
seule, de me concentrer sur les pages 47 à 50 en prenant chacune des
recommandations. J'ai cru voir là une façon de reformuler cela
dans votre discours et je vous en... (21 h 45)
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Doucet.
M. Doucet: Ce n'est pas une oreille, c'est de la
mémoire.
M. Johnson (Anjou): Oui. Je vais d'abord vous poser une question.
Vous parlez de pouvoirs abusifs, de pouvoirs énormes. Est-ce que je
pourrais savoir où dans le projet de loi, s'il vous plaît?
M. Doucet: Particulièrement...
M. Johnson (Anjou): Je vais vous dire, c'est peut-être
parce que vous ne tombez pas très bien, mais on en est au
troisième jour et cela fait assez de fois que j'entends cela. J'aimerais
que quelqu'un m'explique à quel article.
Mme Lavoie-Roux: Franchement, c'est désolant, si vous
n'avez pas encore compris.
M. Johnson (Anjou): Non, mais, jusqu'à maintenant...
M. Doucet: Entre autres, l'article 94, où on dit: Tous les
autres, ceux qu'on aurait pu oublier cela nous a frappés pas mal.
M. Johnson (Anjou): D'accord. M. Doucet, je vous ferai remarquer
que c'est une clause qui existe dans l'ensemble des lois. Depuis plusieurs
années, c'est la clause panier du pouvoir réglementaire des
gouvernements. Est-ce qu'il y a un autre article? En d'autres termes, ce que je
vous dis, c'est: II n'y a rien là, dans cet article. Ensuite?
M. Doucet: Un instant, M. le ministre!
M. Johnson (Anjou): Sur le plan technique.
M. Doucet: Oui.
M. Johnson (Anjou): Parce que, si vous vous étiez
basé là-dessus pour me dire que c'est énorme, je vous dis:
II n'y a rien là-dedans, parce qu'on retrouve cela partout ailleurs et
ce n'est pas un pouvoir qui permet de faire autre chose que de moduler
certaines choses qui font déjà l'objet d'une disposition
habilitante.
M. Doucet: Au niveau des fusions, M. le ministre...
M. Johnson (Anjou): Oui.
M. Doucet: ... il y a un pouvoir, je pense, actuellement. C'est
après le consentement des établissements.
M. Johnson (Anjou): C'est cela.
M. Doucet: Tel qu'on le lit dans le nouveau projet de loi, je
pense que vous vous donnez le pouvoir de procéder à des fusions
sans le consentement des établissements.
M. Johnson (Anjou): C'est cela. Si je comprends bien...
M. Doucet: Est-ce qu'on interprète bien? C'est justement
cela qu'on n'a pas eu le temps de faire, c'est-à-dire d'en discuter.
M. Johnson (Anjou): D'accord. Enfin, j'ai cru voir dans votre
mémoire que vous êtes fort bien équipés, en termes
de ressources, je pense, pour approcher ces lois. C'est l'article 79, n'est-ce
pas?
Essentiellement, il y a une notion qui est celle de
l'intérêt public. Vous avez dit: On retrouve cela souvent; on le
retrouve à deux endroits et, dans les deux cas, cela touche, à
toutes fins utiles, la vocation ou la structure juridique de
l'établissement, c'est-à-dire que c'est dans le cas du permis ou
c'est dans le cas d'une modification au permis, ou encore dans le cas de
fusion. La notion d'intérêt public est une notion qui met en cause
la légitimité des personnes qui siègent autour de cette
table dans une société et elle est assez fondamentale. La notion
d'intérêt public, que je sache, dans notre législation, de
façon générale, n'est pas plus explicitée que cela,
sauf qu'à un moment donné, il peut y avoir une
interprétation judiciaire qui s'en fait.
Je ne nommerai pas le pays, mais, si on était dans une quelconque
république d'Amérique latine où tout se fait par pouvoir
de décret depuis 45 ans, j'avoue que la notion d'intérêt
public serait inquiétante, mais on n'est pas dans une république
de bananes où tout se fait par décret depuis 40 ans, on est dans
un État démocratique où il y a des gens élus qui en
répondent, notamment le gouvernement en Chambre tous les jours à
la période de questions, ce qui permet à ma collègue de
m'entretenir de ses préoccupations une fois par semaine, et il y a
d'autres balises, il y a la liberté de la presse, il y a toutes sortes
de choses dans notre société, la notion de pouvoir de
décret interprétée dans le contexte de nos institutions
démocratiques et la notion d'intérêt public dont doivent se
justifier les hommes et les femmes qui sont élus. Je pense qu'il y a une
limite à charrier ça comme étant quelque chose d'abusif,
c'est pour ça qu'on se fait élire, c'est pour
l'intérêt public. Je pensais que c'était important que je
vous le dise, est-ce qu'il y a autre chose que vous trouvez abusif?
Incidemment sur les fusions, deux choses: d'abord il y a une
consultation que vous souhaiteriez, en soi il y a beaucoup d'articles où
c'est possible d'introduire des notions de consultation qui sont une contrainte
additionnelle imposée au pouvoir politique quand il prend des
décisions, surtout quand cette consultation implique l'opinion d'un
groupe régional, notamment les CRSSS cela a une utilité.
Deuxièmement, il y a une
notion de prépublication, dans la Gazette officielle, il n'y a
personne qui va faire ça de nuit, signer des papiers et c'est fini le
lendemain matin. La prépublication est également une technique
importante dans notre société, ce qui fait qu'il y a beaucoup de
visibilité à cette décision, et ceux qui veulent prendre
des décisions sont obligés d'en aviser les participants. C'est
clair que l'article 79 cependant, signifie qu'il n'est pas vrai que
l'État québécois va continuer d'attendre le consentement,
tout le temps, dans toutes les situations, de toutes les administrations quand
l'intérêt public est en jeu. Parce que parfois les
intérêts de certains établissements peuvent être
différents de l'intérêt public au sens où les hommes
politiques peuvent le défendre. Est-ce qu'il y a d'autres articles que
vous trouveriez abusifs?
M. Doucet: Écoutez, ce n'est peut-être pas le mot
qu'on a utilisé, M. le ministre, on a dit qu'il y avait beaucoup de
pouvoir, le pouvoir délimité.
M. Johnson (Anjou); Vous avez divisé le mot
illimité mais ça je pense que c'était 94 et je pense qu'on
s'est expliqué.
M. Doucet: Si on continue, on peut changer la catégorie
classe, type ou capacité d'établissement, au niveau, par exemple,
d'un pouvoir qui a toujours appartenu aux établissements, achats,
services en commun, où dans l'ancien texte, on retrouvait le rôle
du CRSSS qui était de promouvoir les achats en commun, les services en
commun. Maintenant c'est devenu organisé. Pour nous, ça n'a pas
la même consonance...
M. Johnson (Anjou): D'accord.
M. Doucet: ... organiser ou promouvoir. On est bien d'accord
qu'il faut arriver à rendre efficace le système, comme vous venez
de le souligner au niveau des fusions. Maintenant ce qu'on disait, M. le
ministre, c'est qu'il y a possibilité d'arriver aux mêmes fins; on
n'est pas contre les fusions, loin de là, même si on a une lettre
qui est déposée au bureau du sous-ministre où on demande
d'encadrer pa un peu plus, de dire pourquoi. J'espère que vous comprenez
l'inquiétude actuelle des établissements qui voient venir
beaucoup de fusions en raison des compressions budgétaires. On est
d'accord à en faire, on est prêt à collaborer mais on
voudrait définir le contexte qui rend nécessaires ou utiles ces
fusions, le définir, savoir où on veut arriver avec ça, le
nombre de centres d'accueil, le mode de distribution de services et, à
ce moment-là, vous allez obtenir notre collaboration.
M. Johnson (Anjou): Je vous fais une parenthèse au sujet
du pouvoir des CRSSS. Je vous ferai remarquer que le chapitre 48, adopté
en 1971 à l'époque où M. Castonguay était au
ministère des Affaires sociales prévoyait que les CRSSS avaient
notamment comme fonction de promouvoir l'échange, l'élimination,
dédoublement, une meilleure répartition des services dans les
régions, ainsi que la mise en place de services communs - promouvoir,
c'est vrai - à ces établissements et suivant les circonstances,
d'établir, de maintenir et d'administrer de tels services communs. En
vertu de cette règle, il y a maintenant quinze mois, il y a eu une
directive qui été émise et, effectivement, des politiques
d'achat en commun élaborées par certains CRSSS,
coordonnées et administrées par certains CRSSS, ont permis des
économies d'échelle considérables. On a d'ailleurs eu
l'occasion d'en discuter assez longuement à l'occasion du passage ici
des CRSSS eux-mêmes et de certaines questions de l'Opposition. Y
aurait-il autre chose que vous trouveriez abusif dans le projet? Ou enfin, ou
illimité ou trop centralisateur?
M. Doucet: On a quand même mentionné plusieurs
éléments; si on regarde, par exemple, les anciennes corporations.
On a souligné ça aussi; on fait disparaître ces membres de
corporation c'est-à-dire qu'on tombe de quatre à un comme
représentant au conseil d'administration.
L'article 94, comme on vous l'a souligné, ça aussi, nous
inquiétait. C'est le sens de l'inquiétude du réseau, M. le
ministre, qu'il faut donner ici et le sens de la rapidité avec laquelle
ça s'est fait et on vous a exprimé le désir d'être
consultés. On vous a dit qu'on avait travaillé au chapitre 48,
qu'on avait produit un mémoire et on nous arrive avec un projet de loi
comme ça, dans dix jours. C'est ça qui nous a
inquiétés.
M. Johnson (Anjou): D'abord, à l'égard des
corporations, rapidement, on se rappellera que M. Castonguay, en 1971, avait
annoncé l'abolition des corporations et que, pour une période
transitoire, disait-il, nous permettrions aux corporations de nommer quatre
personnes aux conseils existants. Le choix qu'a fait le Conseil des ministres,
cette année, sur ma recommandation, ça n'a pas été
d'abolir les corporations, mais bel et bien de les maintenir, tout en
réduisant leur participation. Par ailleurs, sur le reste, je pense que
M. le directeur général avait un commentaire.
M. Cloutier (Pierre): On pourrait aussi reprendre la question que
vous posez sous un autre angle.
Il y a, dans les pages 22, 23 et 24 de notre mémoire, un certain
nombre de questions qui sont posées. Vous savez,
inscrire des intentions ou des permissions dans un projet de loi ne
garantit pas une saine utilisation de ces permissions. On pourrait aussi poser
comme hypothèse qu'aucun corridor, aucune balise, aucune
réglementation n'est déposée dans l'application des
projets ou des propositions que vous nous faites.
Par exemple, concernant les cadres, il y avait un certain nombre de
règles qui existaient concernant les conditions salariales, etc., des
cadres. Vous y ajoutez la notion de conditions de travail au sens plus large et
la notion de cadre intermédiaire qui est le troisième palier
à l'intérieur de la gestion d'un établissement. Je pense
qu'on peut convenir ensemble que c'est quand même un pouvoir que
possédaient les conseils d'administration des établissements,
sinon le directeur général au sujet duquel vous avez le
goût à un certain moment dont vous ne profitez sûrement pas,
mais qui vous permettrait d'aller voir ce qui se passe et qui vous permettrait
un certain nombre d'actions très précises, selon les pouvoirs qui
sont décrits dans le projet proposé... Cela nous fait douter un
peu de la confiance que vous nous faites ou, en tout cas, cela vous permettrait
d'aller discuter au troisième niveau de gestion de notre
établissement, par exemple, et les pages 22, 23 et 24 sont un peu dans
cette lignée de demandes que l'on vous fait.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que je pourrais venir tout de suite
sur cette question des cadres qui vous préoccupe? D'abord, la directive
que vous avez évoquée, je pense que c'est normal qu'elle vous
préoccupe puisque ça semble nouveau, mais ça ne l'est pas.
D'une part, il y a une directive qui existe, vous l'avez évoqué
vous-même, et cette directive n'a pas d'assise législative, elle
est basée strictement sur une espèce de consensus et le consensus
s'est établi au point où, effectivement, la directive de
façon générale est appliquée, notamment quant
à la progression des salaires, et vous y souscrivez, je le sais. Alors,
ce qu'on vient faire dans la loi, c'est asseoir sur une base législative
ce qui est, à toutes fins utiles, une directive qui a le
caractère d'un règlement.
Deuxièmement, si je comprends bien, l'association des cadres
intermédiaires du réseau est d'accord avec cela, l'ACIAS, elle
est d'accord avec cette approche, et ça m'apparaît normal parce
que c'est beaucoup de monde, et on sait qu'à certains endroits ces
conditions peuvent être très variables, notamment en ce qui n'a
pas trait directement aux conditions proprement salariales. Certains avantages
sociaux font aussi l'objet d'une difficulté à certains endroits.
Il s'agit pour le gouvernement d'assumer ses responsabilités à
cet égard puisque de toute façon il s'agit d'argent qui provient
des fonds publics. C'est aussi une chose qu'il ne faut jamais oublier quand on
parle des établissements, je pense que vous ne l'oubliez pas, mais on en
parle rarement. L'argent, mesdames et messieurs, que vous dépensez dans
le réseau des affaires sociales, c'est l'argent des
Québécois, ce n'est pas l'argent des établissements. Dans
ce sens-là, ça prend un relais quelque part et quelqu'un qui en
prenne la responsabilité. C'est dans ce sens-là, encore une
fois.
Quant à cette question du réseau et des pouvoirs du
ministre et de la centralisation et de la décentralisation, le
réseau, c'est tout le monde, ce sont les établissements, mais ce
sont aussi un peu les CRSSS sur certaines choses, ou beaucoup, sur certaines
autres choses. Ce sont les fonctionnaires, c'est mon bureau au quinzième
étage aussi, c'est le gouvernement. C'est tout cela, le réseau
des affaires sociales.
La vision que je crois voir et qui semble transparaître, je pense,
à travers votre mémoire, c'est que le réseau,
essentiellement, ce sont les établissements qui veulent bien se
concerter et donner leur consentement. Or, je trouve que c'est une vision assez
limitative de ce qu'est le réseau, où la notion de concertation
ne souffre pas autre chose que l'unanimité et le parfait consentement de
tout le monde.
Je pense en fait que c'est peut-être la consécration d'une
certaine - vous me passerez l'expression - atomisation du réseau des
affaires sociales, tout en reconnaissant la caractéristique essentielle
de vos établissements.
C'est vrai que vous êtes très près des
bénéficiaires et vous n'aurez pas noise avec moi
là-dessus, j'y crois beaucoup. S'il y a un endroit dans le réseau
des affaires sociales notamment où, dans ce qu'il y a de plus fragile en
même temps et de plus fondamental, pour des gens, pour des citoyens qui
oeuvrent dans le réseau des affaires sociales en dehors de la relation
entre un médecin et le patient, c'est sans doute dans les centres
d'accueil qu'on le retrouve, parce que c'est une fragilité quotidienne
à travers même monter des marches d'escalier et pas seulement dans
l'expression de la pathologie. (22 heures)
Je ne doute pas que les établissements soient près des
bénéficiaires, bien au contraire. Je dis que le réseau,
c'est aussi autre chose. Il y a des ressources ailleurs. On peut contribuer au
succès des entreprises auprès des bénéficiaires et
des efforts qui sont faits pour les citoyens du Québec en se disant que
le réseau, ce ne sont pas seulement les établissements, c'est
tout le monde et c'est un peu ce que vient confirmer ce projet.
J'aurais peut-être d'autres remarques, mais je peux
peut-être faire rapidement, à partir de la page 47, quelques
remarques rapides. À l'article 1, évidemment, on demande de
reporter cela. Je pense qu'on va entendre cela pas mal dans les jours qui
viennent, à la gauche du président. Même chose pour
l'article 2. À l'article 3, la notion de "centre d'accueil". En fait on
demande un ajout à la loi et non pas un retrait. À l'article 4,
on demande de la consultation; je n'ai jamais rien eu contre cela. À
l'article 5, je pense que c'est une question technique sur le plan de
l'interprétation juridique de la notion d'intérêt public.
À l'article 6, on demande un ajout à la loi. À l'article
7, on demande un ajout. L'article 8 et l'article 9 connaissent la
résolution dans le cadre de l'application des budgets. L'article 10 est
de nature technique. On en a parlé, c'est le pouvoir
réglementaire. À l'article 11, on demande un ajout. L'article 12,
intéressant, mais, comme dans d'autres mémoires, on nous a
parlé de cela. À l'article 13, quant à la proportion des
intervenants, je ferai une parenthèse. Cela semble être un peu
contraire au consensus qui s'est dégagé jusqu'à maintenant
quant à qui devrait siéger aux sièges du CRSSS où
on demande finalement une plus grande proportion de gens intraréseau.
L'article 14 vise simplement à accorder une plus grande mobilité
à certaines personnes dans le réseau. Notamment permettre
à un directeur d'établissement ou de CRSSS de justement venir en
aide à l'ensemble du réseau, et je ne vois pas pourquoi on le
supprimerait. L'article 15, intéressant à l'égard des
bénéficiaires. On a entendu M. Brunet un peu dans ce
sens-là. À l'article 16, vous suggérez le statu quo; on
l'a évoqué tout à l'heure. L'article 17 et l'article 18
ont le caractère de voeux intéressants, mais qui dénotent
votre philosophie et votre approche. L'article 20, je le relie également
à cette question des bénéficiaires avec M. Brunet.
L'article 19 est également extrêmement intéressant comme
approche, et je pense que ce n'est pas incompatible avec le projet de loi.
En somme ce que j'essaie de vous dire, M. le Président, c'est que
vous proposez une réforme en profondeur et nous, nous n'en proposons
pas. Ce que nous suggérons, ce n'est pas de remettre en cause
fondamentalement cet extraordinaire réseau que les
Québécois ont mis sur pied depuis 1971. C'est d'essayer d'y voir
certains ajustements. Et s'il est vrai que votre association a eu le
mérite, dans le passé notamment, de nous fournir des
mémoires extrêmement intéressants, qui vont dans le sens
des intérêts des établissements que vous
représentez, encore une fois, je pense que votre mémoire, ce
qu'il suggère, c'est de faire une réforme en profondeur. Or, le
projet de loi, ce qu'il veut faire, c'est surtout essayer de régler
quelques problèmes. Peut-être que c'est intéressant, la
réflexion sur une réforme en profondeur, et j'ai remarqué
que le mot "réflexion" venait souvent dans votre propos. Mais, à
un moment donné, il faut faire quelque chose; c'est ce qu'on fait en ce
moment. On a décidé d'arrêter de réfléchir
sur certains problèmes, d'écouter ce que les gens ont à
dire sur une orientation des décisions qui vont prendre un
caractère plus définitif lors de la deuxième lecture et de
l'étude article par article. C'est dans ce sens que je veux que vous
compreniez que l'accueil que je fais à votre mémoire au niveau de
sa recherche de retard est un accueil extrêmement négatif, je
pense que mon ton le démontre. Par ailleurs, sur le fond, je retiens
qu'au-delà des ajouts qui impliqueraient une réforme en
profondeur du système, vous avec des remarques, je pense, dont nous
pourrons tenir compte et qui sont extrêmement intéressantes,
notamment en ce qui a trait à tout ce qui entoure le service au citoyen
directement. Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je suis en train de me demander, à
entendre le ministre, si on a passé trois jours ici à essayer de
recevoir les gens poliment pour leur dire: On vous aime bien, et: Retournez
chez vous. Je n'ai jamais réalisé l'inconscience que le ministre
semble avoir ou qu'il affiche, quand il nous dit: Vous demandez une
réforme en profondeur. Nous, ce qu'on veut, ce n'est pas une
réforme en profondeur, on veut corriger des petits ou des gros
problèmes... je ne sais pas quelle expression il a utilisée...
des gros problèmes. Écoutez, je vais essayer de vous en faire la
démonstration rapidement. Je ne sais pas si je m'adresse à vous
ou au ministre, mais que voulez-vous, cela fait trois jours que je suis avec
lui, de temps en temps on fait une blague, parce que c'est un peu long, mais le
reste du temps on a quand même été sérieux et on a
écouté les gens, et ceux-ci sont venus ici présenter des
mémoires d'une façon très sérieuse.
Ce que le ministre fait - il sait qu'il le fait, ou il est totalement
inconscient, ce que je ne crois pas - quand il dit... Dans l'exemple qu'il a
donné tout à l'heure sur les corporations, le ministre
Castonguay, en 1971, a décidé que, pour une période
transitoire, on maintiendrait les corporations. Le choix que le ministre
Castonguay a fait -je n'y étais pas - il aurait pu intégrer
complètement les établissements dans le réseau public; il
a choisi de garder des corporations pour respecter ce qui était
là. Cela fait peut-être un cliché d'utiliser cette
expression, parce qu'il n'y en a pas d'autres
qui me viennent à l'esprit, mais il y avait une partie du
patrimoine dans les établissements qui était souvent à
l'origine des établissements religieux, il y avait là une
tradition, il y avait là un esprit de continuité.
Aujourd'hui, je ne sais pas ce qui pique le gouvernement, mais, tout
à coup, il ne faut plus que ça existe. On réduit leur
représentation aux conseils à un membre, alors que les conseils
d'administration des établissements, en général, se
félicitaient d'avoir quatre membres, parce que souvent, ça en
neutralisait d'autres qui pouvaient être en conflit
d'intérêts, parce qu'ils étaient membres de
l'établissement ou représentants de groupes avec des
intérêts plus particuliers.
Écoutez, je ne connais pas la motivation du gouvernement
derrière ça. Il va arriver une évolution où ces
corporations vont disparaître d'elles-mêmes. On a voulu faire appel
à de la concertation, on a voulu faire confiance aux gens, les choses
évolueront et, un jour, il n'y en aura peut-être plus. Mais non,
il faut qu'on les fasse disparaître le plus vite possible. Je pense que
c'est la différence, M. le ministre, avec l'approche que vous prenez
aujourd'hui. Vous tranchez au couteau des choses qui pourraient évoluer
normalement, qui ne nuisent pas au réseau, mais qui, au contraire,
aident au réseau. Je pense que c'est un exemple. Vous vous
référez à la décision de M. Castonguay. Elle a
été basée justement sur cette attitude de dire: Ça
fait partie des choses, ça fait partie de la vie, c'est une contribution
qui a été importante, qui est encore importante, qui continue
encore aujourd'hui d'être importante. On a eu le témoignage des
centres d'accueil, on a eu le témoignage de l'Association des
hôpitaux du Québec. Je pense que c'est une illustration de la
façon dont vous procédez. Vous les mettez au banc des
accusés et vous dites: Montrez-moi que nous centralisons.
M. le ministre, prenez l'article 38, si vous en voulez un en exemple. On
va l'examiner en détail, pas trop en détail, mais un peu en
détail. "D'organiser l'échange de biens et services, leur
répartition adéquate et l'élimination de leurs
dédoublements dans la région." Vous vous êtes
référé à la réforme Castonguay qui disait de
"promouvoir la concertation, la mise en commun des ressources, etc., la
planification... et au besoin". Je pense que ces mots "et au besoin" avaient un
sens de suppléance. Ici, vous leur donnez en exclusivité les
fonctions suivantes: Vous allez "établir et administrer des programmes
d'approvisionnement de biens et services communs aux établissements de
sa région". À ce moment-là, vous allez les obliger
à créer chez eux de nouveaux services, à alourdir ce
qu'est le CRSSS, alors qu'ils ont de la difficulté... Je ne les en tiens
pas responsables, en tout cas, je ne suis pas en mesure de juger, mais ils ont
déjà de la difficulté à s'acquitter de leur
tâche de planification, de concertation, d'animateurs des
établissements, etc.
Vous continuez, dans cet article, "regrouper des services fournis par
plusieurs établissements; d'exercer, à l'intérieur de son
territoire, toute autre fonction que le ministre lui confie en vertu de la
loi".
M. Johnson (Anjou): ...dans la loi.
Mme Lavoie-Roux: Bien oui, mais, dans la loi, vous lui en confiez
passablement. Continuez à l'article 39, 18.1, 18.2, 18.3, vous essayez
de vous faire faire une démonstration. Vous avez lu la loi, vous l'avez
écrite, vous l'avez préparée. Vous n'avez pas vu
ça?
Écoutez, je ne suis pas pour continuer dans cette veine. Vous
avez fait allusion tout à l'heure, en disant: Ils le disent en d'autres
termes, je le dirai en des termes qu'on utilise ici, à l'idée de
scinder le projet de loi. Vous avez dit: La gauche du président va
s'affairer dans ce sens d'ici quelques jours. Je peux vous assurer que oui tout
de suite qu'on va s'affairer dans ce sens. On va s'affairer là parce que
le gouvernement, parce que c'est vrai qu'il y a des problèmes
réels, il y a des problèmes de dédoublement de services,
il y a des problèmes d'effectifs médicaux non suffisants en
régions éloignées. Ce sont des problèmes
réels, mais il y a surtout un problème bien plus profond que cela
auquel le gouvernement fait face présentement, ce sont ses
problèmes économiques, les difficultés économiques
qu'il s'est créées lui-même. Il se dit que la meilleure
façon de faire cela, c'est de tout contrôler. C'est la solution du
désespoir, en mettant de côté tout le respect qu'on devrait
avoir pour ce qui a été accompli dans le réseau. Il y a
des défaillances dans le réseau, M. le ministre. Je ne veux pas
vous faire un discours de deuxième lecture. C'est votre
inconscience.
M. Johnson (Anjou): Je prends des notes.
Mme Lavoie-Roux: Vous prenez des notes. Il paraît qu'il
prend des notes, cela peut aider à modifier des choses. Je vais
continuer. Je ne suis pas sûre parce qu'il a parlé tout à
l'heure de la démocratie. On va voir si cela joue, l'Opposition, dans la
démocratie. Je me demande parfois si la démocratie ne se joue pas
seulement tous les quatre ans, au moment où l'électeur va...
M. Rochefort: ... oui, entre autres.
Mme Lavoie-Roux: ... où l'électeur va. C'est
cela.
M. Rochefort: Le 13 avril, cela a joué aussi.
Mme Lavoie-Roux: Cela joue uniquement dans ce sens. Je ne
conteste pas votre légitimité, ni votre légalité,
ni tous les titres que vous voulez vous donner qui sont fort légitimes.
Ce que je dis, c'est que si notre démocratie ne s'exerce que de cette
façon, tout ce qu'on fait ici, tout ce que l'Opposition fait, cela
devient assez factice et assez inquiétant au point de vue de la
démocratie elle-même. On a ici de part et d'autre, tant de la part
de nos invités que de la part de l'autre côté de la
Chambre, tenté de comprendre les représentations que les gens
venaient nous faire ici. J'ai pu croire aussi que le ministre le faisait, et
peut-être l'a-t-il fait, mais à moins qu'il ait un dessein - j'en
connais dans le cabinet, des ministres qui ont des lignes directes ou des
genres d'obsessions, j'en ai vécu...
M. Johnson (Anjou): ... obsédée?
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est pour cela que j'ai pris soin de dire
que j'en connaissais, je n'ai pas dit que c'était vous. J'ai bien pris
soin de dire cela. C'est très difficile de les faire dévier. Je
m'excuse auprès de nos invités parce que ce n'est vraiment pas le
lieu pour dire ce que je viens de dire. Je pense qu'ils ont tout à fait
raison quand ils disent que dans ce projet de loi, il y a deux
éléments principaux ou deux parties importantes: une qui touche
le problème de la négociation, et l'autre qui touche la remise en
question de la philosophie qui a présidé à l'organisation
de notre système de santé et de services sociaux. À cet
égard, quand ils vous font une recommandation de dire qu'il y aurait
peut-être lieu de voir à une meilleure concertation avant de
procéder à la deuxième étape, je pense qu'ils ont
le droit de l'exprimer, pas parce qu'elle va dans le sens de ce que je pense,
mais je crois que c'est fondé. Je dirai le reste en deuxième
lecture, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Très bien, Mme la
députée.
Mme Lavoie-Roux: Le ministre fait aussi des commentaires dans ses
moments.
M. Johnson (Anjou): Oui.
Mme Lavoie-Roux: Alors, nous ne sommes que deux et ils sont cinq
ou six de l'autre côté.
M. Rochefort: Vous viendrez nous voir.
Mme Lavoie-Roux: Non, je vous vois toujours et je vous
écoute aussi quand vous parlez.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée,
avez-vous des questions à poser à nos invités?
Mme Lavoie-Roux: Oui, je veux continuer. Je suis heureuse de vous
voir ramener la notion de centre de réadaptation fonctionnelle. Je l'ai
mentionné cet après-midi à un autre groupe. Il semblerait
qu'un certain nombre de groupes sont à faire une étude pour
justement creuser davantage le bien-fondé de cette notion, ce qu'elle
recouvre, ce qu'elle donnerait comme services. Elle n'a jamais
été utilisée depuis que la loi 10 a été
adoptée - vous étiez peut-être ici cet après-midi.
Avant de la faire sauter, elle recouvrait quand même une philosophie qui
tentait de donner un sens plus dynamique à ces centres où se fait
de la réadaptation dans un cadre plus défini ou plus
limité dans le temps. Je pense que les personnes handicapées
elles-mêmes étaient fort conscientes de cela et avaient
déjà fait des représentations à la suite de
l'adoption de la loi 10. C'est peut-être bon de l'examiner plus avant. Je
ne dis pas qu'il ne faille pas éventuellement l'enlever, si cela ne
correspond à rien, mais en tout cas, c'est un point. (22 h 15)
En page 26, vous faites des recommandations dans lesquelles vous dites
que la notion de budget global à l'intention des établissements
devrait être préservée, que l'utilisation des revenus
autogénérés par les établissements devrait
être encadrée par des règles incitatives et de partage.
Peut-être que cela m'a échappé; moi non plus, je n'ai pas
lu ma loi complètement ou je ne l'ai pas saisie complètement.
Est-ce que, selon vous, ces deux recommandations que vous faites disparaissent
en fonction de la loi, la notion de budget global par institution...
M. Johnson (Anjou): Bien oui, c'est budgétaire.
Mme Lavoie-Roux: ...et l'autre de revenus
générés? Ce sont quand même deux notions importantes
dans le fonctionnement autonome d'institutions. Oui, c'est budgétaire,
mais je voudrais quand même qu'ils me le disent. S'ils en font une
recommandation, ils ont dû penser que cela pouvait partir.
M. Cloutier: Certains gestionnaires de l'établissement
s'inquiètent un peu du pouvoir du ministre qui existait
déjà - mais, il nous semblait mieux encadré
précédemment - du fait qu'il puisse commander au besoin telle ou
telle formule, sortir de l'enveloppe budgétaire globale telle ou telle
partie. Par exemple, on dit que le ministre, à un article
- cela va me revenir - peut déterminer qui sont les responsables
des départements, des services, quelles sont les activités qui
seront faites dans ces services. Autrement dit, le plan d'organisation dans son
plus...
Mme Lavoie-Roux: C'est l'article 94, je pense, n'est-ce pas?
M. Cloutier: ... fin détail peut être assujetti
à un regard du ministre qui existait auparavant, mais sur demande. On
ajoute quelques éléments dans la nouvelle proposition, ce qui
pourrait nous amener... C'est l'inquiétude des gestionnaires qu'on tente
de représenter, des conseils d'administration, de dire: Cela peut aller
à la limite, à l'abolition du budget global et à faire du
budget détaillé. Je pense que ce que les gens veulent qu'on vous
traduise, c'est que la notion du budget global en soi est un
élément fort intéressant comme outil de gestion et ils
désirent la conserver. C'est plutôt dans cet esprit que cette
chose vous est soumise.
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi.
M. Cloutier: Pour ce qui est des revenus, qui était
l'autre volet de la question de Mme Lavoie-Roux, l'endroit que je vous signale,
c'est l'article 94v: que l'utilisation des revenus par l'établissement
soit la part de ces revenus qui doit être retournée au ministre,
utilisée aux fins que celui-ci prévoit, défalquée
des dépenses ou versée au conseil régional
concerné. Ce qu'on vous suggère - on devrait, je pense,
réfléchir et ce n'est pas la première fois que
l'Association des centres d'accueil vous suggère ce genre d'approche par
rapport aux revenus de l'établissement - c'est qu'il y ait des
incitatifs pour les établissements à s'embarquer dans ces
processus de générer des revenus.
Je peux vous citer un cas à Montréal. Durant les
Olympiades de 1976, un bonhomme dont l'établissement était vide
durant l'été et dont les enfants sont en colonie de vacances avec
les éducateurs, etc., a fait vraiment des efforts majeurs pour que,
durant la période des Olympiades, on puisse recevoir des invités
de l'extérieur. À la fin de l'année, en septembre, le
ministère des Affaires sociales a pris les revenus de
l'établissement et les a mis au budget de fonctionnement. Vous allez me
dire: II a fait "sa job" comme il devait la faire. Probablement. S'il y avait
eu un incitatif à l'établissement, par exemple, 5%, 10% de
revenus qui auraient pu être utilisés sans générer
d'autres dépenses, cela aurait peut-être été
intéressant pour le gestionnaire qui se serait embarqué dans une
opération comme celle-là et d'autres auraient fait pareil sous
d'autres angles, etc. C'est l'esprit qu'on vous propose, en tout cas,
derrière cette chose-là.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que, là-dessus, M. le
Président, cela ne demande pas des réformes en profondeur. Je
pense que c'est au plan des règles budgétaires. Je pense qu'il y
a là des choses constructives, parce que, si on veut que les gens
utilisent leur initiative, soient responsables, soient un peu créateurs
dans la mesure où ce n'est pas toujours en argent qu'on est
nécessairement créateur, il reste qu'il faut de ces incitations
et, si on enlève toute incitation au réseau, si le réseau
n'en a vraiment pas - cela vaut pour n'importe quel type d'entreprise - je
pense que vous enlevez tout facteur de créativité ou toute
motivation. Je pense que ce sont des recommandations intéressantes.
À la page 22, vous dites: "Pourquoi fait-il du ministre un
gestionnaire, etc., en lui confiant, par le biais de la réglementation,
la détermination des barèmes et normes pour la sélection,
la nomination, la rémunération du personnel allant jusqu'au
troisième palier de l'organigramme, soit celui des cadres
intermédiaires"?
D'abord, n'existe-t-il pas déjà des barèmes, des
échelles salariales pour chaque catégorie d'employés ou de
travailleurs?
M. Cloutier: II y a effectivement là ce qu'on appelle,
dans le jargon du réseau, les manuels de conditions de travail des
cadres. Il y en a un adressé aux cadres supérieurs et un autre
adressé aux cadres intermédiaires. L'Association des centres
d'accueil, d'ailleurs, en termes de consultation avec les officiers du
ministère des Affaires sociales, a rencontré et convenu de ces
contenus, des conditions de travail en question, avec l'ACIAS dont M. le
ministre parlait tantôt. Je pense que pour ce bout-là, ça
va.
On peut aussi vous dire qu'il est peut-être arrivé, une
fois ou deux et peut-être qu'on pourrait en trouver trois, des places
où on a eu un peu de difficulté d'application. Ça, je
pense que ça peut arriver. De là à se donner un outil qui
soit complètement, disons, inséré dans les pouvoirs du
ministre, il me semble que, en tout cas, de la part de nos gestionnaires... On
dit que ce n'est pas à cause de deux cas d'exception qu'il faut tout
remettre en question. C'est dans ce sens qu'on vous suggère de laisser
ce minimum de pouvoirs aux conseils d'administration et aux directeurs
généraux d'établissements.
M. Johnson (Anjou): Je pense que c'est assez important parce que
ça préoccupe au plus haut point les gens qui sont essentiels au
fonctionnement du réseau que sont les cadres. C'est vrai qu'il y a en ce
moment ce qu'on appelle un répertoire des conditions de travail mais qui
n'a pas de base juridique; ce qu'on vise, c'est lui donner des bases
juridiques.
Par ailleurs, on veut aussi donner des bases juridiques pour
établir certaines interventions du ministère dans des cas d'abus
flagrants. Par exemple, il y a un centre hospitalier, qui est connu, qui a
déjà offert une prime de 15 000 $, une allocation mensuelle de
250 $ en plus, un salaire réel qui dépassait de 13 000 $
l'échelle de l'annexe B. Un autre centre hospitalier a payé des
congés de maladie pour 72 000 $ à ses cadres et cinq semaines de
vacances pour autre chose; un CLSC a donné 30 jours de vacances par
année; un autre des primes non imposables. Il y a certains
établissements qui ne veulent pas appliquer le mécanisme d'appel.
Je pense qu'il faut aussi que les cadres aient une certaine protection. Le
gouvernement, au niveau de ses fonctionnaires, tente de leur donner, faute de
syndicalisation, ce qui pose un gros problème, on le sait, la
syndicalisation des cadres... On sait que c'est revendiqué par beaucoup
de cadres du réseau, mais que, sur le plan juridique, ce n'est pas
facile. On essaie, dans la société, d'établir une
espèce d'équilibre pour être sûr que, dans la mesure
du possible, ils ne soient pas soumis au plus pur arbitraire. Alors, on veut
donner une assise juridique, notamment, au mécanisme qui permettrait
à un cadre d'en appeler, par exemple, d'une décision qu'il
considérerait comme injuste à son égard.
Dans le fond, ça dépend comment on le voit et j'ai
l'impression que c'est vrai pour la plupart des lois qui touchent au pouvoir
réglementaire. Encore une fois, si on regarde ça
précisément, si on veut baliser et qu'on veuille des exemples, je
pense qu'on peut toujours en donner. Je comprends votre préoccupation
mais je pense que vous devez voir aussi notre intention.
Mme Lavoie-Roux: On pourra en discuter en commission
parlementaire. Je pense que c'est vrai qu'il y a des abus qui peuvent se
glisser, mais il doit quand même y avoir des vérificateurs qui
font au moins une vérification responsable.
Une voix: Ils y ont droit.
M. Johnson (Anjou): C'est ça. Le problème qui se
pose à cet égard, c'est que, sans prétendre "normer"
complètement les conditions de travail des cadres pour laisser cette
espèce de jeu à l'appréciation du conseil d'administration
qui peut valoriser un bon travail par différentes choses, il ne faut pas
oublier que ce sont les fonds publics. Ce ne sont pas des magasins ni des
dépanneurs, les hôpitaux et les centres d'accueil, ça
fonctionne avec l'argent des taxes de tout le monde. Je ne prétends pas
que les abus que j'ai cités... on en a quelques pages, il n'y a pas
seulement trois ou quatre cas. C'est généralisé, mais
est-ce qu'il ne faudrait pas se donner quelques instruments pour empêcher
que ça ne déborde à certains endroits? Il y en a
même qui prétendent qu'une couple de cadres dans le réseau
ont des salaires qui rendraient certains médecins envieux, puisque les
gens parlent beaucoup des médecins de ces temps-ci. Encore une fois,
c'est de trouver cet équilibre sans prétendre tuer l'initiative
locale nécessaire et la marge de manoeuvre nécessaire, mais
aussi, pour des raisons positives comme des raisons de contrôle, c'est se
donner quelques instruments qu'on a dans le répertoire, mais qui n'ont
pas d'assise juridique dans bien des cas.
Le Président (M. Bordeleau): Je pense que M. Doucet a
quelque chose à ajouter.
M. Doucet: Peut-être en boutade M. le ministre, vous ne
trouverez peut-être pas cela dans le réseau des centres d'accueil,
mais je pense que, lorsqu'on discute de chacun des articles de la loi, on
comprend davantage que - vous l'avez, d'ailleurs, très bien
exprimé - vous n'avez pas voulu faire une réforme en profondeur.
C'est peut-être au niveau de l'attente qu'on avait dans les centres
d'accueil, qu'on avait en 1979 lorsqu'on a déposé notre
mémoire et qu'on avait encore au début de l'automne, parce qu'on
s'attendait qu'il y aurait un remaniement et on s'était annoncé
pour faire des recommandations, discuter davantage, que se situe notre niveau
d'incompréhension dans la rapidité, dans le peu de temps qu'on a
eu pour échanger là-dessus, et cette rapidité-là
nous a fait peur un peu.
Maintenant, on est quand même heureux, M. le Président, de
voir que le ministre des Affaires sociales, en tout cas, semble accepter
positivement plusieurs recommandations, particulièrement celles qui
touchent nos bénéficiaires parce que c'est un point qui nous
tient vraiment à coeur. On voulait que le comité de
bénéficiaires ait une conception un peu élargie, qu'il
participe davantage à la gestion de nos établissements. Je pense
qu'on est très satisfait de voir que quelques propositions comme
celles-là sont acceptées. On n'est pas satisfait, on reste sur
notre appétit; on va revenir et on va demander une réforme plus
en profondeur. M. le ministre nous indiquait tout à l'heure qu'il
s'agissait de quelque chose d'assez urgent et qu'il fallait une petite
"réformette", qu'il fallait faire rapidement quelques ajustements - je
pense que c'est le mot qui a été utilisé - à la loi
et on a précisé bien clairement, -en tout cas, c'est de
même que je l'ai perçu - qu'il ne s'agissait pas d'une
réforme en profondeur, alors que notre mémoire réagit,
demande jusqu'à un certain point une réforme plus en
profondeur.
C'est peut-être là-dessus que, sur
plusieurs aspects, on a un certain niveau d'incompréhension parce
qu'on aurait pu aborder dans une réforme en profondeur la notion de
participation des réseaux, de motivation. Je crois que vous êtes
dur lorsque vous dites que le réseau des centres d'accueil est un peu
fermé sur lui-même; vous avez employé le mot
"atomisé" quelque chose comme cela. Alors, à ce niveau-là,
c'est une perception qu'on a de la volonté des gens de vraiment
participer à la gestion publique. Vous avez relié cela à
la gestion financière, à la responsabilité
financière de l'État. Cette responsabilité-là,
nous, dans une réforme en profondeur, on aurait essayé de
démontrer qu'elle est bien servie, qu'elle est peut-être mieux
servie par la responsabilisation des gens, en faisant confiance aux gens, en
leur donnant des mandats plus clairs, des objectifs plus clairs, certainement,
des balises; bien sûr qu'on le reconnaît. Vous avez soulevé
quelques exceptions, on est d'accord avec vous sur les exceptions, mais est-ce
qu'on y gagne pour corriger ces quelques exceptions? Nous, ce qu'on craignait
là-dedans, c'est de démotiver le reste du monde.
On vous l'a dit tout à l'heure, et je pense que vos
sous-ministres vont vous le confirmer, le réseau des centres d'accueil
cette année va avoir appliqué intégralement le plan de
compressions budgétaires, et c'est la responsabilité des
administrateurs qui permet d'atteindre ça. Dans les articles qu'on vous
a soulevés tout à l'heure, selon la réaction qu'on a
obtenue de notre réseau, en peu de temps, bien sûr, - on n'a pas
eu le temps de se parler bien gros pour se comprendre et c'est ça qu'on
vous reproche au départ, mais vous avez vos raisons qu'on ne comprend
peut-être pas - on a une crainte que le réseau, s'il est trop
réglementé, si les pouvoirs sont trop centralisés, puisse
perdre de son efficacité, parce que la personne humaine à la base
de cela, c'est elle qui permet de la faire, l'économie, c'est elle qui
permet de le donner, le service de qualité, c'est elle qui permet de
contrôler le service, de contrôler sa qualité, qui humanise
ce service-là. Mais, bien sûr, avec des exceptions, si on ne le
réglemente pas comme c'est actuellement; il y a des exceptions, il y a
des gens qui en abusent, il y a des gens qui sont peut-être moins
responsables que d'autres ou il y a des gens à qui on n'a
peut-être pas fait comprendre suffisamment les objectifs du
réseau. Il y aurait un gros travail. (22 h 30)
On a parlé des fusions tout à l'heure. Il se fait
actuellement des fusions, il y en a qui accrochent, on en sait quelque chose;
il y en a qui accrochent, mais ça prend un petit peu plus de temps, sauf
qu'il s'en fait. Il y en a plusieurs d'annoncées et, par une meilleure
sensibilisation, si on connaissait davantage le contexte de ça... C'est
ce qu'on a demandé d'ailleurs. On a dit: Dites-nous le contexte et on va
même participer à sensibiliser nos établissements à
ça. Et il va s'en faire, volontairement, par la
compréhension.
On avait peur. C'est ça qu'on vous a exprimé,
peut-être un peu d'une façon amère, parce qu'on n'a pas eu
le temps, comme je vous disais, de mûrir, de laisser vieillir, de nuancer
nos arguments; on l'a fait aussi rapidement, dans le contexte qu'on vous a
souligné. Mais c'est cette crainte et on espère, du moins, que
ça va éveiller un nouveau regard sur le projet de loi.
Peut-être que, dans une réforme en profondeur, on pourra
réexaminer les objectifs de fond. Je pense que là, c'est
ça qu'il faudrait toucher. C'est pour ça qu'on disait: Pourquoi
ce n'est pas possible de passer les choses qui doivent être
passées rapidement, les points importants dont vous avez besoin tout de
suite, de reprendre les points comportant plus de réforme en profondeur
au printemps et de dialoguer: comités conjoints, tous les
mécanismes qui sont en place, pour cheminer là-dedans.
C'était une de nos recommandations, elle n'a pas semblé
retenue.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Merci, M. Doucet.
D'autres questions, Mme la députée de L'Acadie?
Mme Lavoie-Roux: Je suis un peu étonnée par les
propos de M. Doucet. Vous êtes venu nous dire que vous étiez
extrêmement inquiet parce qu'on changeait les règles du jeu dans
le réseau, et là, vous nous dites: Ce n'est plus une
réforme en profondeur que vous faites. Vous imaginez-vous qu'une fois
que ça va être centralisé de la façon que c'est
centralisé, vous allez pouvoir, dans un deuxième temps, le
décentraliser? C'est ça, le fond du problème.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que je peux me permettre...
Le Président (M. Bordeleau): Je vous rappelle que...
M. Johnson (Anjou): ... je pense que la question avait quelque
chose de rhétorique.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous rappelle que l'heure
file...
Mme Lavoie-Roux: Non, je me demandais s'il allait réagir,
mais il n'est pas obligé non plus. Ça m'a l'air que le ministre
va réagir, lui.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre...
M. Johnson (Anjou): Peut-être, en terminant...
Le Président (M. Bordeleau): ... un petit commentaire
avant la fin.
M. Johnson (Anjou): ... je voudrais tout simplement assurer les
représentants de l'ACQ qui joue un rôle extrêmement
important dans le réseau et qui a une vie régionale
extrêmement importante également, contrairement à certaines
autres associations... Je voudrais les remercier encore une fois. Je ne peux
pas les rendre responsables des circonstances qui les ont amenés ici et
peut-être du cheminement du ministère depuis quelques
années. Peut-être qu'il y a eu une accélération dans
ce cheminement depuis quatre ou cinq mois, pour un tas de raisons sur
lesquelles, j'en suis sûr, j'aurai l'occasion de revenir en
deuxième lecture. Je veux simplement les assurer que je ne les rends pas
responsables de ce contexte. C'est bien entendu. Mes remarques ne voulaient pas
être autre chose qu'une réaction tout à fait
spontanée et absolument respectueuse du travail qui est fait à
l'association. Je vous remercie infiniment, messieurs.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Doucet. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais remercier les membres de
l'Association des centres d'accueil et leur dire que, de toute façon,
moi, je retiens les messages qui sont dans le mémoire. Nous essaierons
que le ministre puisse en tenir compte dans l'étude article par article,
après la deuxième lecture. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, madame; merci,
messieurs.
J'appelle maintenant le groupe suivant, la Fédération des
associations des étudiants en médecine du Québec. Je
demande à ses représentants de s'approcher de la table. Le
porte-parole est M. Laliberté.
M. Laliberté (Pierre): M. le Président, avant que
mon collègue présente...
Le Président (M. Bordeleau): Peut-être qu'on
pourrait attendre une minute ou deux, pour laisser le temps aux gens de prendre
leur place.
(Suspension de la séance à 22 h 35)
(Reprise de la séance à 22 h 38)
Le Président (M. Bordeleau): Alors, on s'excuse messieurs
de vous avoir fait attendre quelques minutes.
M. Laliberté: M. le Président, comme je le disais,
avant que mon collègue procède à la présentation
du...
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous voulez
d'abord vous présenter et présenter l'autre personne?
Fédération des associations des
étudiants en médecine du Québec
M. Boucher (Jean-Pierre): Oui, c'est ce que je vais faire, si
vous me laissez le temps, M. le Président.
Avant que mon collègue ne procède à la lecture du
mémoire de la Fédération des associations des
étudiants en médecine du Québec et, tout en
présentant les membres de notre importante et imposante
délégation, j'aimerais corriger des allégations qui sont
inscrites à l'ordre du jour soit à la position no 6. Il s'agit
bien de la Fédération des associations des étudiants en
médecine du Québec, on y indique Pierre Laliberté et
moi-même, président de Québec. Je ne suis pas
président du regroupement des étudiants en médecine de
Laval, mais bien membre du conseil d'administration et mandaté par le
conseil d'administration et une assemblée générale
spéciale aux fins de prendre position au sein de la
Fédération des associations des étudiants en
médecine du Québec sur le projet de loi no 27.
Il en est de même de mon collègue, Pierre Laliberté
qui est président de la promotion 1981-1982 à l'Université
de Montréal. Or, nous sommes tous deux dûment mandatés par
la Fédération des associations des étudiants.
Dans un deuxième temps, je voudrais peut-être essayer
d'enlever le fait que pendant un bout de temps, il y a eu des interrogations
à savoir si c'était les étudiants de Laval qui
présentaient le mémoire ou la fédération. Dans le
premier temps, on avait communiqué avec nous et Laval avait
répondu positivement mais par la suite, la fédération a eu
le temps en toute dernière minute de prendre une position qu'on
considère comme nationale et représentant les quatre
universités, de sorte que c'est bel et bien la fédération
qui se présente ici ce soir.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord.
M. Boucher (Jean-Pierre): M. le Président, M. le ministre,
mesdames, messieurs les membres de la commission.
La Fédération des associations des étudiants en
médecine du Québec est heureuse de vous présenter,
aujourd'hui, le présent mémoire sur les dispositions du projet de
loi no 27: Loi modifiant diverses dispositions législatives dans le
domaine de la santé.
Les étudiants en médecine sont reconnaissants de
l'occasion qui leur est donnée d'exprimer leurs critiques et
recommandations sur un projet qui modifiera sensiblement la pratique
médicale.
Nous demeurons convaincus que la commission parlementaire accordera
à nos propos toute l'attention qu'ils méritent, espérant
que notre démarche soit perçue de façon positive.
La Fédération des associations des étudiants en
médecine du Québec, FAEMQ, a été incorporée
en 1975 et regroupe les associations étudiantes suivantes: Association
des étudiants en médecine de l'Université de
Montréal AEMUM, Association générale des étudiants
en médecine de l'Université de Sherbrooke, McGill Medical
Students Society et le Regroupement des étudiants en médecine de
l'Université Laval.
La fédération est reconnue comme le seul organisme
officiel, représentant les intérêts des quatres
associations ci-haut mentionnées. Elle constitue le porte-parole de
l'ensemble des 3000 étudiants en médecine du niveau
prégradué au Québec. Ces étudiants forment un
ensemble distinct des fédérations professionnelles, y compris de
la FMRIQ qui représente les résidents et internes et à ce
titre offre un éclairage original en rapport avec l'étude des
différents dossiers qui concernent le monde médical.
La FAEMQ regroupe donc les médecins de demain. Ceux-là
mêmes qui auront à vivre en harmonie avec le système de
santé que la présente loi 27 est à modifier. Ce sont ces
futurs médecins, sur lesquels on compte entre-autres, pour combler les
déficits des zones de pénurie. Les dispositions de la loi 27
touchent directement le futur praticien. On ne peut de toute évidence,
ignorer les étudiants prégradués dans ce débat.
Au fin de la rédaction du présent mémoire, et
malgré le peu de temps à notre disposition, un processus
d'information et de consultation fut rapidement institué au sein des
structures de la FAEMQ. Les assemblées générales
d'étudiants eurent lieu à Montréal, Québec et
Sherbrooke. Les conseils d'administration des différentes associations
membres se sont réunis, le tout ayant permis d'élaborer une
position représentative, telle qu'exprimée clairement et
directement par la majorité des étudiants
prégradués.
La critique du projet de loi 27 contenue dans le présent
mémoire demeure fragmentaire. Il nous apparaissait utopique de
prétendre apporter une critique exhaustive de l'ensemble du projet de
loi, compte tenu du peu de temps à notre disposition. La critique
étudiante, volontairement orientée sur l'article no 4 du projet
de loi, se veut par ailleurs détachée de toute orientation
politique et de toute défense exclusivement égoïste des
"droits" du médecin.
Nos objectifs sont les mêmes que ceux véhiculés par
le projet de loi 27, et repris, assurément, par les membres de cette
commission, soit l'amélioration de la qualité et de la
quantité des services de santé offerts à la population, le
tout devant se faire dans le respect des libertés et des droits de tous
les intervenants.
La présentation du projet de loi 27, une démarche
déplorable. Il n'est un secret pour personne ici, que, depuis plus de
six mois, les médecins omnipraticiens du Québec sont sans contrat
de travail. Depuis déjà plusieurs mois les deux partis en cause
dans ce renouvellement d'entente, soit le gouvernement et la FMOQ, jouent de
tactique, bien légitime par ailleurs, afin de situer le cadre des
négociations à leur avantage.
Par ailleurs un mouvement de mécontentement dans l'opinion
publique s'est exprimé de plus en plus clairement dernièrement,
vis-à-vis les conditions de travail jugées trop avantageuses de
l'ensemble des employés de l'État. Les médecins
n'échappent pas à cette critique. C'est donc dans un cadre de
pseudonégociation, où il était d'avantage question de gros
sous que de santé publique, que le projet de loi 27 fut
déposé, Était-il à l'avantage du gouvernement de
continuer à entretenir l'ambiguïté dans l'esprit de tous,
ambiguïté issue de la coexistence d'un renouvellement d'entente, et
d'un projet de loi portant en partie sur les cadres de cette entente. On serait
porté à le croire lorsque l'on consulte les communiqués de
presse gouvernementaux, ayant accompagné la présentation du
projet de loi. On y mélange allègrement projet d'entente et
projet de loi. Était-il à l'avantage des
fédérations professionnelles que d'entretenir la même
ambiguïté. Encore ici les démonstrations de "force" des
professionnels, déjà prévues dans le cadre du
renouvellement d'entente mais réorientées en dernière
minute vers l'opposition au projet de loi 27 entretiennent la confusion.
La population demeure polarisée mais surtout fort mal
informée de l'enjeu réel du présent débat. En
effet, les étudiants déplorent l'atmosphère de tactique de
"négociation" qui accompagne la présentation d'un projet de loi,
devant porter exclusivement sur le mieux être de notre système de
santé et conséquemment sur une amélioration de la
santé publique. La coïncidence brouille le débat et fausse
la relation.
Par ailleurs, il est un principe en démocratie qui veut que
l'atteinte d'un objectif, devant être commun, passe par la consultation
et la concertation. Ainsi on s'assure de la prise en considération des
différentes facettes complémentaires d'un
même problème.
Grâce à l'expertise de chacun, on est plus en mesure de se
rapprocher des meilleurs moyens à être utilisés pour
répondre aux objectifs communs. De plus, on s'assure de l'appui, souvent
indispensable, des différents niveaux d'interventions, pour
l'application de ces mesures. (22 h 45)
Le projet de loi no 27 fut élaboré dans le plus grand
secret et ce, à l'encontre du principe de consultation ci-haut
mentionné. Face particulièrement aux problèmes des zones
de pénurie, il nous apparaît inconcevable que les futurs
professionnels qui auront à combler le déficit aient
été exclus de l'étude des moyens envisagés pour
résoudre le problème, car finalement, ce sont eux qui vont
résoudre ce problème. Ce projet de loi aurait au moins pu
être précédé d'un livre blanc.
Finalement, malgré la présence de cette commission et
l'opportunité qui nous est donnée de faire connaître notre
position, vous comprendrez que les quelques jours laissés à la
disposition des étudiants afin de prendre connaissance de l'ensemble du
projet, d'en analyser les conséquences et d'articuler les positions
concertées de l'ensemble de nos 3000 membres furent grandement
insuffisants. Sans l'expertise plus exhaustive des étudiants sur ce
projet de loi, on se prive encore ici d'un élément essentiel
à la discussion.
En conséquence, étant donné, premièrement,
le manque de consultation préalable effectué par les concepteurs
du projet auprès des étudiants, étant donné le
manque de temps laissé pour l'élaboration d'une critique plus
exhaustive du projet de loi, étant donné l'ambiguïté
engendrée par la présentation de ce projet de loi dans un
contexte de renouvellement d'un contrat de travail, la FAEMQ dénonce
avec vigueur la démarche accélérée soutenant la
présentation et éventuellement l'adoption du projet de loi 27, et
conséquemment s'oppose fortement à cette démarche.
Loi 27, article 4. Si, dans le passé, les lois, règlements
ou ententes en matière de santé n'impliquaient pas directement
les étudiants en médecine, il en va autrement du projet de loi
27, tel que rédigé sous sa forme actuelle. Second et
quatrième alinéas. Un des buts visés par la loi est d'en
arriver à une meilleure répartition des effectifs médicaux
à travers la province. À cet effet, l'article 4 modifiant le
second alinéa de l'article 19 de la Loi sur l'assurance-maladie
établit que pour les professionnels de la santé
déjà en exercice, une entente à intervenir pourra
prévoir une rémunération différente. Cette
rémunération différente sera applicable a ceux qui
exerceront la profession dans des territoires estimés par le ministre
comme étant insuffisamment pourvus en effectifs. On peut noter
immédiatement que c'est le ministre qui détermine le territoire
et que ce n'est que la différence de rémunération qui est
soumise à la négociation. La seule limite au pouvoir d'estimation
du ministre est celle qui est stipulée au quatrième alinéa
du même article et constituée par la consultation préalable
des organismes représentatifs.
On peut donc imaginer qu'une entente surviendra à l'effet
d'améliorer la rémunération des professionnels
exerçant dans les régions désignées par le ministre
après consultation.
Dans l'ensemble des mesures possibles pour en arriver à une
amélioration des services en zone périphérique, les
alinéas 2 et 4 constituent une mesure incitative en ce qu'ils auront
pour effet de créer des avantages à pratiquer la médecine
dans une zone désignée, avantages dont les médecins
intéressés à une telle pratique pourront se
prévaloir ou non.
La loi pose donc qu'en principe une mesure incitative sera de nature
à améliorer les contingents de médecins dans les
régions mal desservies.
Troisième alinéa. L'alinéa qui concerne plus
précisément les étudiants en médecine est
libellé d'une façon et sous une forme totalement
différentes.
En effet, à la lecture du troisième alinéa, on peut
comprendre qu'il s'agit d'une rémunération inférieure
à celle des praticiens déjà établis et ce, en
fonction du territoire où les nouveaux diplômés exerceront
leur profession.
En ce qui concerne le libellé de l'alinéa 3, de ce qui
deviendrait le nouvel article 19, nous tenons à porter à
l'attention des membres de la commission les remarques suivantes: La
rémunération différente est partie de l'entente
négociable avec les professionnels de la santé. À aucun
endroit, il n'est fait mention d'une consultation préalable
auprès de ceux qui sont appelés à vivre l'entente qui
interviendra, soit les étudiants en médecine exclusivement.
L'alinéa 3 contrairement à l'alinéa 2 ci-haut
exposé ne fait aucune référence à un critère
d'insuffisance d'effectif dans la détermination du territoire.
Dans le débat engagé depuis quelques semaines, il a
été souvent mentionné que le besoin de services
médicaux en périphérie justifiait les mesures
envisagées vis-à-vis des futurs praticiens. Il est curieux que
l'alinéa 3, bien qu'inséré entre Jeux alinéas qui
traitent du manque d'effectif, ne contienne aucune référence au
principe le justifiant. Qu'adviendra-t-il du troisième alinéa
quand le but visé par le ministère de desservir
adéquatement les régions éloignées sera atteint?
Quels sont les véritables buts visés par l'alinéa 3?
L'alinéa 3 ne fait aucune mention d'une limite inférieure
applicable à l'entente, ni en
temps, ni au niveau de la rémunération. En effet, la seule
limite qui existe est celle de trois années, mais elle est contenue dans
l'alinéa qui traite de la possibilité d'un décret pour
tenir lieu d'entente.
Le même alinéa laisse la possibilité de la
création d'un ou de plusieurs territoires qui ne soient pas
nécessairement en corrélation avec ceux établis en vertu
des alinéas 2 et 4.
L'interprétation large du troisième alinéa pourrait
laisser place à la création de plusieurs territoires et
conséquemment, non pas d'une, mais de plusieurs
rémunérations différentes.
On peut donc conclure que les mesures appliquées aux nouveaux
praticiens sont de nature restrictive. De plus, rien dans le projet ne garantit
que les mesures incitatives dont nous avons discuté en traitant du
second alinéa seront aussi applicables aux jeunes praticiens qui
voudront bien aller exercer dans les territoires visés par
l'arrêté du quatrième alinéa.
Comme nous l'avons déjà exposé, les mesures
contenues dans le projet de loi 27 ont grandement surpris l'ensemble des
étudiants. Tout en partageant les objectifs visés par le projet
de loi en ce qui concerne la nécessité d'une amélioration
des services en zone périphérique, la FAEMQ s'oppose au
caractère discriminatoire des dispositions à l'étude. Les
étudiants considèrent, à juste titre, que la nature
même du contrat intervenant entre le praticien et le
bénéficiaire de même que la responsabilité qui en
découle sont équivalentes, que ce soit pour les anciens
médecins ou les médecins qui en sont à leurs
premières années de pratique.
En ce qui concerne le sérieux problème de la
répartition des effectifs médicaux, la FAEMQ déplore
qu'aucun moyen autre que le système de bourse d'éloignement n'a
été expérimenté jusqu'à maintenant. De plus,
les bourses de la RAMQ ont constamment été
dénoncées par les étudiants en médecine comme ne
répondant pas aux objectifs visés. Aucun effort n'a
été déployé du côté de l'information,
des attraits ou de la mise en valeur du milieu où les nouveaux
diplômés auraient à s'établir.
Alinéa 5. Le cinquième alinéa est très
explicite - toujours à l'article 4. Il établit le pouvoir qu'a le
gouvernement d'imposer un décret, à défaut d'entente, sur
la rémunération à être appliquée à une
catégorie précise de professionnels de la santé, soit les
médecins qui en sont à leurs premières années de
pratique. La seule restriction à poser au pouvoir de décret est
la limite à trois années de pratique; aucune limite n'a
été établie quant au territoire, pas même une
consultation préalable auprès des étudiants n'a
été envisagée.
La FAEMQ porte à l'attention des membres de la commission que
dans toutes les innovations et changements de principe apportés par ce
qui deviendrait le nouvel article 19, seuls les alinéas 3 et 5 ne
s'appliquent pas aux professionnels de la santé en
général, mais bien aux seuls médecins qui débutent
en pratique.
Nous considérons que le pouvoir de décret à telles
fins constitue une brèche dans ce qui est fondamentalement du domaine de
la négociation et de la bonne entente entre les parties également
responsables du mieux-être des soins de santé au Québec.
Ces alinéas 3 et 5 créent une nouvelle classe de jeunes
médecins distincts de leurs aînés, ayant des droits et
libertés fondamentales fortement amputés au plan de la
négociation et des conditions d'exercice, et ce, sans que nous puissions
déterminer le motif réel justifiant ces dispositions.
Articles 31 et 109. Outre les considérations déjà
exposées, les étudiants tiennent à faire connaître
aux membres de la commission leurs convictions dans les valeurs d'un sain
exercice du droit syndical et leur opposition en ce sens aux articles 31 et 109
du projet de loi 27, de même qu'à certaines dispositions contenues
à l'article 4, lesdits articles établissant la
préséance de la loi sur les ententes intervenues.
Conclusion. Pour les motifs exposés au présent
mémoire, la FAEMQ soumet aux membres de la commission ses
recommandations: que le projet de loi 27, 1°, ne soit pas adopté
immédiatement et ce, aux fins de permettre une étude plus
approfondie des différentes conséquences rattachées aux
mesures touchant les étudiants; 2 , ne contienne aucune disposition
discriminatoire à l'égard des nouveaux praticiens et qu'en
conséquence les alinéas 3 et 5 de l'article 19 de la Loi sur
l'assurance-maladie soient retirés du projet de loi 27; 3°,
établisse, à tout le moins, un mécanisme de consultation
sérieux et démocratique auprès des
intéressés; 4°, soit repensé après qu'un
système incitatif, tel que suggéré aux présentes,
ait été établi ou tout le moins qu'on ait rendu le
régime des bourses de la RAMQ conforme aux objectifs visés; 5 ,
que le projet de loi 27 ne crée aucun pouvoir de la nature d'un
décret se substituant à une entente et que l'alinéa 5 soit
donc doublement retiré du texte final; 6 , ne contienne aucune
disposition allant à l'encontre de l'exercice du droit d'association et
de négociation.
Annexe 1, le problème de pénurie d'effectifs
médicaux en zone éloignée: des éléments de
solution. Je ne voudrais pas qu'on s'étende trop longtemps
là-dessus, M. le ministre. C'est tout simplement pour vous montrer notre
bonne foi et la coopération qu'on vous offre. On a déjà
fait le survol de ce qu'on considère comme des éléments de
solution relativement au problème de la
pénurie d'effectifs. Afin de garantir à l'ensemble de la
population du Québec un minimum essentiel de ressources en effectifs
médicaux, deux avenues s'offrent aux dirigeants: l'incitation ou la
contrainte. Assurément, la première nous apparaît comme la
plus efficace et la plus souhaitable des solutions.
Dans la mesure où des tentatives sérieuses de mise en
place de moyens incitatifs véritables avaient, dans le passé,
fait la preuve de leur inefficacité, nous devrions, à
contrecoeur, nous tourner vers l'application de mesures contraignantes et ce,
pour des impératifs de santé publique, dans les zones le
justifiant; mais, tel n'est point le cas.
Jamais, au fil des ans, aucune mesure incitative n'a été
mise en place pour résoudre le problème. Les étudiants ne
furent sollicités d'aucune façon et rien, absolument rien n'a
été appliqué pour "vendre le produit" aux futurs
diplômés.
Toujours est-il que la situation ne trouve pas de solutions par
elle-même, encore que le ratio médecin/population n'a cessé
de croître partout au Québec au cours des dernières
années et ce, contrairement à ce que laisse entendre souvent le
gouvernement.
Cependant, le gouvernement affirme être maintenant justifié
d'envisager l'application de mesures à tendances coercitives devant
l'urgence de la situation.
Selon les étudiants prégradués, dans la mesure
où l'article 4 modifiant l'article 19 de la Loi sur l'assurance-maladie,
alinéas 3 et 5, vise réellement et exclusivement à
régler le problème des zones de pénurie, le
législateur fait erreur.
Une approche cohérente de tout problème suppose la
connaissance des buts fixés. Dans le cas présent, il ne s'agit
pas uniquement d'amener les médecins à pratiquer leur profession
en zones de pénurie selon un schème de néo-colonialisme,
mais bien d'amener une pleine intégration sociale et culturelle du
médecin dans son milieu de pratique. Cette intégration volontaire
et recherchée est seule garante de la participation globale et continue
du médecin vis-à-vis de la santé de "sa" population.
Pour ce faire, l'incitatif financier n'est pas la solution. Bien
sûr, dans les cas d'urgence réelle il peut constituer le seul
élément d'incitation. Mais, dans ces situations, il s'agit
davantage d'éteindre des feux que de construire à long terme. Par
ailleurs, si l'incitatif financier n'est pas la solution
privilégiée, il va de soi que le médecin qui pratique en
zone éloignée ne devrait pas être pénalisé
à ce chapitre vis-à-vis de son confrère des grands
centres.
La pratique en zone éloignée doit être mise en
valeur par les caractéristiques mêmes de cette pratique et du
territoire et ne pas se fonder exclusivement sur la création
d'incitatifs artificiels. Il s'agit donc avant tout de rendre public ce qui
existe déjà, mais qui est inconnu ou mal connu.
Soit en premier lieu: 1. La mise en valeur des attraits culturels,
sociaux et humains de la zone en question. 2. Faire percevoir l'incitation bien
réelle que constitue le défi d'une pratique médicale en
zone éloignée. 3. Encourager les étudiants
prégradués à faire des stages d'apprentissage dans ces
milieux. 4. Réorganiser le service des bourses d'éloignement en
s'inspirant des précédents énoncés et
également de l'application de ce service en Ontario.
Par ailleurs: 1. Faciliter l'intégration sociale et au travail du
conjoint. 2. Aplanir les désavantages financiers découlant d'un
style de pratique différent. 3. Faciliter les sessions d'enseignement
médical continu et d'autres.
Les bourses d'éloignement. C'est succinct dans notre
mémoire, M. le ministre, mais on a également des renseignements
qui pourraient vous être donnés lors de la période des
questions. Les membres de cette commission seront sûrement surpris
d'apprendre que, dans le passé, les associations des étudiants en
médecine ont souvent invité leurs membres à boycotter le
système des bourses d'éloignement, en raison du peu d'avantages
réels que constitue l'engagement à ce service et surtout en
raison du manque de souplesse dudit régime. Des tentatives de correction
furent tentées auprès des responsables du service, mais sans
succès.
Encore ici, les étudiants ne demandent pas mieux que de
contribuer avec les autorités compétentes afin de rendre sa
pertinence au service des bourses d'éloignement.
Nous avons voulu par le présent mémoire et malgré
le mangue de temps à notre disposition d'abord suggérer les
correctifs nous apparaissant primordiaux au projet de loi 27. Dans un
deuxième temps, c'est dans un esprit de franche coopération que
nous offrons notre collaboration totale à tous ceux qui placent
l'amélioration de la santé de la population en tête de
leurs préoccupations, mais encore faudrait-il un peu plus de temps pour
rendre cette coopération effective.
Le Président (M. Bordeleau): Pour les questions, M. le
ministre.
M. Johnson (Anjou): Merci, monsieur. Une seule remarque, c'est un
mémoire remarquable, fort bien présenté, excellemment
articulé qui, à quelques nuances près, pose les vrais
problèmes, les
vraies questions, devrais-je dire, plutôt que les vrais
problèmes, mais évoque des solutions comme des notions
d'alternative, ce qui n'empêche pas qu'il y a là-dedans des
questions d'orientation qui restent fondamentales et sur lesquelles j'aimerais
qu'on puisse parler un peu pendant quelques minutes. (23 heures)
Tout d'abord, je voudrais remercier tous ceux qui ont participé,
je pense notamment à ceux qui sont en train d'étudier le signe de
CREB? de ce temps-ci. Ce n'est jamais bien gai de faire autre chose que le
signe de CREB, quand on voit les examens venir, surtout en sciences
fondamentales. C'est d'ailleurs pour cela que les sociologues qui essaient de
nous apprendre ce qu'est quoi la médecine préventive en
première année ne parviennent jamais à nous le faire
comprendre, parce qu'on pense à l'examen à choix multiples qui
s'en vient. Néanmoins, que vous ayez fait ces efforts pour ramasser,
comme vous l'avez fait, les données sur le contenu du projet de loi, je
pense, mérite d'être souligné. Je ne parlerai pas des
intentions, j'y reviendrai un peu plus loin.
L'article 19, sur le plan de sa facture juridique et des détails
qui pourraient survenir, introduit essentiellement trois principes. Le premier
principe, c'est que les territoires en pénurie, c'est une
responsabilité gouvernementale de les désigner. Il faut toujours
essayer de voir un projet de loi avec les principes et, après cela, on y
colle les exceptions et les interprétations. C'est un principe
fondamental qui est affirmé là. Le deuxième principe
fondamental, c'est qu'entre les territoires il y a un tarif
différentiel, et le troisième principe fondamental, c'est qu'il
peut y avoir un tarif différentiel qui soit relié au fait qu'on
est nouvellement arrivé dans le système. Le principe additionnel,
qui est un principe d'exception dans nos lois, c'est que le gouvernement peut
procéder par décret pour déterminer quel est ce
différentiel dans le cas seulement de ce qui s'applique aux nouveaux
arrivants.
Soit dit en passant, c'est essentiellement une raison de technique de
relations de travail au sens où, s'il n'y avait pas cet article, les
fédérations, les représentants ou les organismes
représentatifs au sens de la loi, en pratique les
fédérations, et le gouvernement pourraient se regarder comme des
chiens de faïence pendant quatre ans et ne rien décider. Il s'agit
de créer un entonnoir juridique qui fera que les parties des deux
côtés de la table de négociation n'auront pas
intérêt à ce que survienne cet événement qui
est de décréter unilatéralement quelque chose. C'est
très difficile pour un gouvernement de faire cela, parce qu'il y a
là un caractère un peu odieux, c'est ce qu'on lui prête
habituellement et, par ailleurs, cela va aussi obliger la partie d'en face de
faire les efforts maximaux pour ne pas amener le gouvernement à
être obligé de le faire. C'est comme cela qu'il faut le voir.
Parmi les questions que vous posez auxquelles je me permettrai de
répondre, il y a d'abord le temps. Il est très clair que, si
jamais le pouvoir de décret devait être utilisé, il ne
pourrait fixer une rémunération différentielle "à
la baisse", entre guillemets, que pour une période maximale de trois
ans. Ce qui est implicite, c'est qu'au niveau de l'entente cela ne peut pas
être plus que la durée de l'entente non plus. Vous n'avez pas
à voir la possibilité d'un échelonnement de plus que de
trois ans autrement que dans le contexte de la loi.
Deuxièmement, s'il est vrai que le projet de loi ne parle pas
d'une rémunération différente moindre dans les territoires
qui ne sont pas en situation de pénurie, c'est parce que cela pourrait
être autre chose aussi. Je vous donne l'exemple. D'abord, il est clair
que l'objectif à l'égard des nouveaux entrés dans le
système, c'est d'établir un système différentiel
qui fasse que le tarif de tout le monde, de l'ensemble des collègues qui
sont dans le système soit celui des nouveaux arrivés dans le
système, à condition qu'ils aillent dans les territoires
désignés. Normalement, ce serait un tarif moindre dans les autres
territoires, les villes, les endroits de concentration urbaine, les endroits
qui ne sont pas identifiés comme étant situation de
pénurie. Mais rien n'empêche non plus qu'au niveau de la
négociation, cela implique - je pense notamment à certains types
de spécialités -qu'un territoire fortement urbanisé soit
en pénurie de certaines disciplines pour lesquelles le gouvernement
considère que le tarif différentiel devrait être à
la hausse pour favoriser une entrée; exemple: la médecine du
travail, je ne le donne que comme exemple parce que ces choses-là seront
négociables et négociées éventuellement. C'est pour
ça que la loi ne prévoit pas à 3 que c'est seulement
à la baisse c'est parce que ça pourrait être ouvert
à la hausse à cause de certains types, je pense à la
gériatrie, je n'en donnerai pas d'autres mais bref, il y a eu beaucoup
de discussions et beaucoup de choses qui ont été écrites
là-dessus. Il reste quand même que, pour la majorité de vos
membres, ce qu'on évoque ici c'est une notion de tarif
différentiel à la baisse.
Le pourquoi de ça. Il y a de nombreuses raisons mais je n'en
évoquerai qu'une très précise. Il y a des pays qu'on ne
peut pas exactement considérer comme des pays non démocratiques,
qui ont introduit des notions de service civique obligatoire notamment à
travers l'armée dans bien des cas, ce qu'on n'a pas ici. J'allais dire:
Dieu
merci, on n'a pas de service militaire obligatoire.
Il y aurait une alternative à l'approche qui est là,
à partir du postulat suivant. Ça coûte très cher
à la collectivité pour former un médecin et,
deuxièmement, une fois que le médecin est formé, il va
tirer sur des ressources de la collectivité pour son revenu à un
niveau qui n'est pas exactement celui d'un diplômé de secondaire
V. En ce sens-là, il n'est pas inconcevable, je pense, que la
collectivité dise: Est-ce que ça ne vaut pas quelque chose,
ça? C'est à partir de cette idée qu'on l'a introduit dans
un contexte qui est celui qu'on connaît, l'évolution très
rapide des coûts du système notamment, par l'arrivée, de
plus en plus, de nouveaux médecins au Québec, plus que n'importe
où ailleurs sur le continent et probablement plus qu'à peu
près n'importe où ailleurs au monde, au rythme où on les
forme, dans un contexte où il n'y a pas de marché et dans un
contexte où, finalement, on peut établir relativement son niveau
de revenu assez rapidement.
Deuxièmement, de vouloir maintenir une notion de choix. On
pourrait dire qu'à la fin du cours de médecine, il y a un contrat
avec la société et on va au service de l'État deux ans
pour un salaire de subsistance, ce qui existe, encore une fois, dans certains
pays. Cela enlève la notion de choix complètement. La notion du
tarif différentiel introduit une notion de choix plus limitée,
c'est évident, que le choix parfait qui existe en ce moment mais quand
même un choix. C'est le choix d'accepter une rémunération
moins haute pour une certaine période de temps si on décide de ne
pas utiliser ce canal de services à la population, qui est d'aller dans
les territoires désignés. Finalement, je dirai que la notion de
territoire désigné, ça ne veut pas nécessairement
dire l'Ungava ou une île au large de Povungnituk. Rouyn-Noranda ou
Val-d'Or, où les hôpitaux ne sont pas faits en bois rond et avec
des toits de chaume, qui ont des vrais appareils de radiologie et avec beaucoup
de monde. C'est vrai qu'ils n'ont pas la Place des arts et qu'ils n'ont pas
tout l'appareil socioculturel qu'on a dans les grands centres urbains, mais ce
n'est pas exactement le fin fond de l'Afrique, et cela en serait un, territoire
désigné, cette région-là, pour certains types de
spécialités et d'activités. Tout ça tombe sous le
sens commun, on n'aurait pas de problèmes et on ne serait pas en train
d'en parler s'il n'y avait pas eu notamment celui-là.
Il faut bien comprendre que la notion de territoire
désigné ne veut pas dire la brousse et, en ce sens-là, je
pense que ça permet de corriger quelques images qui ont pu circuler.
C'étaient les commentaires généraux que je voulais
faire. Je sais que ma collègue a sûrement des questions à
poser à ces messieurs.
Le Président (M. Bordeleau): Peut-être un
commentaire, M. Boucher.
M. Boucher (Jean-Pierre): Est-ce que je peux répondre tout
de suite?
Le Président (M. Bordeleau): Oui, allez- y.
M. Boucher (Jean-Pierre): Si je comprends bien, finalement on est
pas mal chanceux de s'en tirer avec si peu de mesures coercitives. Ça
aurait pu être bien pire que ça, et on est peut-être mieux
de s'en aller, à ce que je comprends, si on ne veut pas aggraver notre
cas.
D'autre part, dans l'article 4, vous mentionnez trois principes, trois
buts, et j'ai attendu jusqu'au troisième afin d'entendre le but qui
depuis le début de ce débat-là est brandi partout à
l'intérieur des médias qui est la répartition des
effectifs. Vous n'en avez pas parlé dans les trois principes. Vous avez
dit: Premièrement, désignation des territoires, tarifs
différents des territoires, et tarifs différentiels selon le
nombre d'années. Ce qui rétablit certains faits à mon
sens, et je pense que c'était sous-entendu et implicite...
M. Johnson (Anjou): Si vous permettez, je vais vous interrompre,
je vais vous permettre de ne pas me faire le procès d'intention. Les
buts, c'est au niveau de la rédaction. Maintenant, voulez-vous qu'on se
parle de répartition des médecins sur le territoire? C'est un
autre débat. Voulez-vous qu'on se parle de cela? Moi, je parlais de la
loi et de votre mémoire, les principes - et non pas les buts que vous
retrouvez dans la rédaction sont les suivants - ce sont des principes de
droit. Maintenant, les principes de droit ne flottent pas comme des purs
esprits. Ils sont habituellement un but et c'est la répartition des
effectifs sur le territoire. Je pourrais vous en parler, docteur.
M. Boucher (Jean-Pierre): Si vraiment c'est le but visé
par l'article no 4 pour employer des expressions consacrées qui ont
été utilisées, on ne peut pas concevoir que ce soit
l'unique but attribué à cet article no 4, et puis dans la mesure
où il nous apparaît assez clair qu'on vit dans un régime
d'austérité au niveau économique. Le premier
énoncé de votre réponse me fait dire qu'effectivement il y
a également, au-delà de l'objectif général de la
répartition qui pourrait être visé, mais pas dans le sens
parce qu'elle se base sur des...
Finalement ce qu'on a dit dans le mémoire, c'est que, pour
arriver à vraiment
régler le problème en zone de pénurie,
procéder par voie financière ne nous apparaît pas
être la solution. Je pense que vous êtes d'accord avec cela qu'il
s'agit d'une intégration plus globale et puis qu'à cet effet ce
n'est pas satisfaisant de dire: On règle le problème avec ces
principes de rémunération différente. Ça va plus
loin que cela, et puis non seulement ça ne répond pas à
l'objectif qu'on se fixe, ça y répond mal du moins, et le but
n'étant pas de créer des incitatifs artificiels basés
simplement en une strict rémunération différente, qu'elle
soit à la hausse ou à la baisse, mais davantage d'insister sur
une intégration globale. Je pense que l'article no 4 ne répond
pas à cela. Je pense qu'on s'entend sur l'ouverture qu'il y aurait
à établir sur d'autres moyens pour arriver vraiment à
répondre à ce problème-là.
M. Johnson (Anjou): On peut retrouver ces moyens-là, mais
pas dans une loi.
M. Boucher (Jean-Pierre): D'accord. Si vous dites que, dans
l'article no 4, il y a plus notamment que les principes qui sous-tendent, c'est
un des points sur lesquels notre mémoire insiste beaucoup, soit le
principe d'une certaine discrimination vis-à-vis le jeune
diplômé. Vous semblez dire qu'il apparaît totalement normal
que le jeune diplômé ait par ailleurs les mêmes exigences au
niveau du contrat à intervenir avec son patient. La nature même du
contrat médical qui intervient ne change pas et la responsabilité
qui en découle est également la même.
On se dit: Nous, ce n'est pas parce que les étudiants veulent
avoir un gros pouvoir d'achat. On ne veut pas aller dans le sens de l'entente
du renouvellement. On se dit juste qu'on en a contre le caractère
discriminatoire, premièrement au niveau de la
rémunération, peu importe ce qu'elle pourra être, et aussi
au niveau du décret vous avez dit: Finalement le décret se
justifie parce que, dans le cadre de la négociation, ça risque de
nous donner des outils. Je dis: Pourquoi ne pas y aller carrément et
insérer le décret à l'ensemble de la négociation;
ce sera un bel outil. Pourquoi le discriminer simplement au niveau des trois
premières années? Pourquoi l'étudiant devient l'otage
d'une négociation avec l'ensemble des professionnels? À ce
sens-là, il est discriminatoire.
M. Johnson (Anjou): Premièrement, je n'accepte pas une
partie de votre vocabulaire sur l'otage, la discrimination, etc. J'ai
été formé comme vous à l'école de
l'individualisme, qui nous était bien inculqué en même
temps que le reste de ce qu'on apprend à la faculté de
médecine et j'ai beaucoup de respect. Je ne suis pas porté
personnellement beaucoup vers la discrimination.
La notion qu'il y a intrinsèquement dans le contrat
médical qui intervient entre le médecin et le patient, c'est
quelque chose qui ne varie pas selon les années d'expérience;
ça serait vrai aussi pour les avocats, les ingénieurs et
l'ensemble des professions couvertes par le Code des professions. Je ne faisais
pas de comparaison avec des salariés parce que je pense que c'est une
dimension différente et que c'est couvert par un ordre. Je prendrai le
cas de ceux qui ne sont pas salariés et qui sont des "professionnels"
sur le plan fiscal également. (23 h 15)
Or, je connais des avocats qui s'installent; quand ils s'installent, ils
ne demandent pas 200 $ la consultation. Ils ont la même
responsabilité légale, les mêmes contraintes, ils sont sous
le joug du même syndic du barreau; c'est la même chose pour les
ingénieurs et les architectes. Intrinsèquement, il n'est inscrit
nulle part, dans aucune charte des droits, que parce qu'on est
diplômé d'une université en telle année, ou à
tel âge, on a le droit de faire le même salaire ou les mêmes
émoluments que madame ou monsieur Untel qui a été
diplômé trois ans avant et qui a tel âge. C'est seulement
que dans les faits, cela a été cela pour les médecins au
Québec depuis le régime, mais cela n'est pas un principe
fondamental dans notre société sur le plan du droit, ni à
l'égard des droits et libertés de la personne. Demandez cela
à des ingénieurs, à des avocats, j'en connais qui sont en
chômage là-dedans et, en ce sens-là, je voudrais être
bien sûr... Parce que le mot "discriminatoire" est assez grave, c'est
peut-être discriminatoire effectivement, mais c'est une perception qui
révèle le fait que vous ne voyez pas cela et que vous ne comparez
pas avec d'autres dans la société. C'est un changement pour la
profession médicale au Québec, qu'il y ait une notion dans le
temps qui permet d'accéder au statut du même niveau de revenu que
les autres. Mais encore une fois, il ne faut pas en faire une question de
droits fondamentaux dans la société, je pense que cela est
très différent. En ce sens, je veux seulement être
sûr que ce n'est pas comme cela que vous avez évoqué le mot
"discriminatoire". On se comprend bien?
Le Président (M. Bordeleau): M. Laliberté.
M. Laliberté: Ce n'est pas tout à fait comme cela
qu'on a évoqué le mot discriminatoire, M. le ministre, mais je
trouve que vos exemples pour comparer les médecins à d'autres
professionnels, comme les avocats ou les ingénieurs, sont un peu
boiteux. En ce sens - je ne voulais pas le mentionner à la commission
forcément - je
suis avocat moi-même et je sais pertinemment bien que, à la
Loi du barreau, il y a un tarif judiciaire de prévu, de même qu'il
y a un tarif payé par l'aide juridique. Il n'y a aucune discrimination
à ce niveau, que ce soit un jeune praticien ou...
M. Johnson (Anjou): C'est un tarif minimal.
M. Laliberté: ... un plus vieux, il est sûr que le
marché est totalement différent et qu'un gars qui s'engage
à salaire dans un bureau, parce qu'il fait bien et qu'il négocie
son contrat dans ce sens, n'aura pas la même rémunération
que son confrère supérieur ou conseiller de la reine, c'est
sûr. Mais son niveau de responsabilité...
M. Johnson (Anjou): Mais Me, c'est un tarif minimal.
M. Laliberté: C'est un tarif minimal que l'avocat est
responsable de négocier avec son client, par ailleurs. Mais il est
sûr que le jeune avocat, à l'intérieur d'une étude
juridique, n'a pas le même niveau de responsabilité que son
confrère qui a dix ans d'expérience parce qu'on ne lui laisse pas
prendre le même niveau de responsabilité. Quitte à lui de
s'installer à ses frais, à sa propre étude, mais à
son risque, tout simplement en négociant avec son client, son taux de
compétence et le travail qu'il peut mettre là-dedans et en
faisant valoir l'aspect dynamique d'une pratique jeune et avant-gardiste.
C'est dans ce sens que je veux dire que ce n'est pas tout à fait
correspondant avec les autres professionnels de la santé. Quand on va
recevoir un patient, on négocie un contrat avec la même
responsabilité qui s'y rattache au point de vue du temps, de
l'éthique professionnelle que de la responsabilité juridique tout
court.
M. Boucher (Jean-Pierre): Vous avez, en comparant avec d'autres
professionnels finalement amené le caractère dynamique de la
pratique médicale qui nous semble diminué actuellement dans le
projet de loi. Les jeunes praticiens constituent, à n'en pas douter, un
élément très dynamique, au niveau des centres hospitaliers
où on se propose, dans le projet de loi, de limiter leur entrée.
Et au niveau des territoires, il y a également, je pense, un autre
article, article 85 dont on n'a pas discuté en mémoire, mais qui
va dans le même sens d'une restriction, si on veut, qui s'applique
pratiquement exclusivement aux jeunes praticiens, aux futurs
diplômés, en ce sens qu'ils pourraient difficilement, selon le
plan d'organisation de l'hôpital, s'insérer dans une pratique en
une région et faire partie de l'hôpital à part
entière. À ce niveau, il n'y a pas de sauvegarde d'une saine
concurrence professionnelle et cette concurrence professionnelle est de nature
à hausser constamment le niveau de compétence de chacun. Je
voulais simplement, mentionner, au niveau de l'article 85, ce qu'on n'avait pas
discuté auparavant.
M. Laliberté: J'aurais une question avant de passer
à un autre point, si c'était possible.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Laliberté.
M. Laliberté: Merci, M. le Président. Comme il est
prévu à l'alinéa 3 qu'il y aura une
rémunération différente de négociée et que
le territoire, si on lit l'article au point de vue de la facture juridique,
comme le disait M. le ministre tout à l'heure... Est-ce qu'on pourrait
en avoir au moins une idée, puisqu'on ne sera jamais partie à une
quelconque association et encore moins au pouvoir de décret? De quelle
sorte de rémunération différente s'agirait-il en
pourcentage ou en taux, ne serait-ce qu'un aperçu?
M. Johnson (Anjou): Je ne vous le dirai pas au bout de la table
ici parce que, comme vous le savez, la loi dit que c'est négociable. Je
peux vous dire que j'ai donné un mandat de négociation, je sais
de quel ordre il est, mais il ne m'appartient pas de vous le dire ici. Si c'est
pour vous, je ne dirai pas vous sécuriser...
M. Laliberté: ... rassurer...
M. Johnson (Anjou): ... je peux vous dire que ça ne sera
pas insignifiant comme différentiel, mais ça ne sera pas tel non
plus que l'on puisse affirmer qu'à toutes fins utiles c'est
l'équivalent du service commandé. La notion de choix doit
être une vraie notion de choix, parce que je pense qu'elle est positive
pour les gens dans la région et vous le soulignez très bien, il
ne faut pas avoir une approche néo-coloniale quant à cette
question-là et envoyer un médecin, un professionnel de la
santé avec une espèce de couteau ou de baïonnette dans le
dos, pour que pendant les huit premiers mois il soit nostalgique en pensant
à ce qu'il a quitté et que les dix derniers mois il pense
à l'endroit où il va s'en retourner. Si vous permettez que
l'incitation, ou le choix, ou la désincitation soit telle que c'est un
vrai choix, vous favorisez la réceptivité de ces conditions en
termes culturels, notamment que vous évoquez, et bien d'autres. Mais je
pense que ce n'est pas le moment et surtout pas l'heure, je sais que ma
collègue veut prendre la parole, de revenir là-dessus, mais il y
aura, j'en suis sûr, de nombreux débats,
de nombreux forums là-dessus dans les semaines à
venir.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président, je voudrais
remercier l'Association des étudiants et des étudiantes en
médecine du Québec. Je voudrais lui dire que je trouve son
mémoire positif et très responsable. Vous n'êtes pas venus
ici quémander, vous êtes venus ici demander des éclairages
et je pense que vous en êtes totalement justifiés. Je ne
relèverai pas les titres que techniquement le ministre pouvait utiliser
à l'égard de M. Laliberté, je crois, et à
l'égard de M. Boucher, ce qu'il n'a fait à l'égard d'aucun
autre, maîtres et docteurs, je vous laisse le soin d'en faire
l'interprétation. Je pense que ce qui a causé le problème
ici, c'est évidemment, et vous avez raison de vous poser des
questions... On n'aurait probablement pas soulevé autant de
protestations ou de représentations - ce n'était pas
nécessairement des protestations -si on avait procédé
à une consultation quelconque. Je pense que, devant l'attitude positive
que vous avez ici ce soir, cela aurait probablement été plus
facile si, au lieu de précipiter les choses, on vous avait
consultés, comme d'ailleurs on avait consulté les
fédérations. On sait que - le ministre le soulignait hier
à bon titre - les lois, ça ne se négocie pas, mais on peut
quand même consulter, et on l'a fait en d'autres occasions pour changer
le cadre juridique, par exemple, des négociations avec d'autres
catégories de travailleurs.
Maintenant, quand le ministre dit - et à certains égards
il a raison, c'est du moins ce que j'ai interprété - : Un
décret dans le fond c'est un peu, il n'a pas dit que c'était une
balise, mais c'est quelque chose qui rend les deux parties prudentes, quand on
sait que le décret est là; ça peut servir d'instrument de
modération. Je pense qu'à certains égards c'est vrai, mais
c'est encore la façon précipitée avec laquelle on arrive
avec ce décret-là au moment où on est en
négociation, ce n'est pas encore très clair si on est en
négociation ou pas, et c'est l'intrusion à ce moment-ci, je
pense, qui a soulevé le tollé de protestations qu'on
connaît. Pour M. Laliberté en particulier, qui est avocat,
l'article 31 a certainement raison de soulever des inquiétudes de part
et d'autre.
Mais ces commentaires étant faits, le message que je retiens de
votre mémoire, c'est que vous n'êtes pas venus ici - quoique que
ce soit bien humain de dire si on s'en va ailleurs - est-ce qu'on va être
pénalisé à 50, 75 si on reste ici, par rapport aux autres?
Mais ce n'est pas ça. Ce que vous êtes venus dire, c'est un
message disant que l'incitatif pécuniaire peut être un facteur,
mais c'est loin d'être le facteur le plus important. Et ce qu'il y a
d'étonnant, c'est que le ministre y concourt lui-même et je ne
sais pas dans quelle mesure. À part ce mécanisme qu'on a retenu,
il pourrait avoir d'autres modifications à ajouter. Maintenant, est-ce
qu'on peut ajouter des mécanismes ou si c'est vraiment une question
d'attitude de la part de la communauté qui reçoit quelqu'un?
Enfin, je demande si vous avez pensé à quelque chose dans ce sens
là. Une autre question précise. Je l'ai cherché, c'est
pour ça que je me suis levée tout à l'heure, pour voir si
je ne le trouverais pas. Je ne sais pas si vous avez quelque chose touchant
l'Ontario, mais ce n'est pas ici ni dans le premier mémoire que j'ai
reçu. Alors, sur ce, si vous pouviez expliciter d'avantage.
Une dernière question, compte tenu de l'heure. Il y a parmi vous,
peut-être, des boursiers. Est-ce que vous avez eu le temps d'examiner
dans quelle mesure, c'est-à-dire quelle a été la
persévérance des boursiers qui, eux, ont dû aller, soit
pour un an, deux ans ou trois ans dans les régions
éloignées? Ceci pourrait peut-être être indicatif de
l'influence que peut jouer, enfin la dimension pécuniaire dans la
stabilité des professionnels qui s'en vont dans les régions
éloignées. Je pense qu'il est grand temps - le ministre en est
d'ailleurs conscient - qu'on ne trouve pas des solutions qui soient uniquement
à court terme et que si on n'y ajoute pas des mécanismes qui
assurent une certaine stabilité, on pourra bien ramener la loi, la
modifier ou s'en faire une autre, mais on pourrait fort bien être au
même point où nous en sommes présentement dans trois,
quatre ou cinq ans. Alors si vous avez quelques commentaires à faire sur
ces points-là, j'apprécierais. Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. Alors M. Boucher.
M. Boucher (Jean-Pierre): Oui.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Boucher.
M. Boucher (Jean-Pierre): II m'apparaît évident que
tout le monde est d'accord pour dire que, dans le projet de loi, on ne fait
mention que d'incitatifs à caractère financier et on s'entend
tout le monde pour dire que ce n'est pas la solution. Donc, il faudra se
repencher sur ça et on imagine que, lorsqu'on aura à le faire,
les étudiants pourront apporter davantage de collaboration qu'on a eu
l'occasion de le faire pour la rédaction du présent projet de
loi.
Il va de soi que l'un n'empêche pas l'autre et puis que les
mécanismes à caractère financier, pour être vraiment
efficaces, doivent se doubler de mécanismes
complémentaires visant justement l'intégration dont on
parlait tout à l'heure. Et c'est à ce niveau surtout qu'on
mentionnait dans le mémoire que rien, absolument rien n'a
été fait. Le seul caractère qui existait, et ça
fait longtemps, c'est un problème dans les bourses d'éloignement.
C'est depuis 1974 que cela a commencé à être mis sur pied.
D'ailleurs la formule n'a pratiquement pas changé depuis ce
temps-là, malgré qu'au fil des ans les étudiants aient
dénoncé cette mesure-là comme ne répondant pas aux
objectifs visés. Ce qui arrivait, la plupart du temps, c'est que les
étudiants qui prenaient la bourse d'éloignement étaient
déjà des étudiants qui étaient soit vendus à
l'idée d'aller à l'extérieur et ils voyaient tout
simplement là un surplus de revenus faciles. On n'a pas vraiment fait de
recrutement avec ce régime-là. D'autant plus que, lorsqu'on fait
la comparaison avec l'Ontario, je ne pourrais vous donner de façon
très précise les détails du régime en Ontario, mais
globalement il se caractérise surtout par une plus grande souplesse au
niveau de la détermination du territoire. (23 h 30)
Vous savez, les étudiants reprochaient au régime actuel -
et je pense que vis-à-vis de cela, il faudra se pencher là-dessus
-surtout deux choses. Il y a le manque d'incitatif réel. Le seul
incitatif qui était vendu là-dedans, c'était l'incitatif
financier et, comme on l'a dit tout à l'heure, on trouvait que ce
n'était pas bon. Ce n'était pas associé à une forme
de publicité ou une forme d'intégration, quelle qu'elle soit.
Même après que la bourse a été attribuée, le
type s'engageait et il pouvait être des années sans entendre
parler de la région en question, on n'essayait pas de l'amener, de
l'intégrer, ce qui aurait dû être fait, à mon avis.
Finalement, il y a le point de vue strictement financier et là se
limitait le caractère incitatif de l'affaire. Cela avait plus ou moins
sa valeur, d'autant plus que si on prend la bourse d'éloignement qui est
d'une valeur de 6000 $ par année après la troisième,
quatrième et cinquième année, au moment où
habituellement les gens ont droit au régime des prêts et bourses
du ministère de l'Education, cela nous empêchait d'avoir
accès à ce régime des prêts et bourses. Le
ministère nous donnait d'une main 6000 $, et il allait rechercher 5000 $
du régime des prêts et bourses auquel on n'avait plus droit.
Alors, financièrement, ce n'était pas intéressant.
Au niveau de la souplesse, pour celui qui signait l'engagement, la forme
était encore plus coercitive que dans l'armée. Dans
l'armée, on peut toujours s'en tirer en payant les frais avec
l'intérêt, tandis que là, il n'y avait plus moyen de se
tirer de cela. On devait absolument rendre les années de service, sans
quoi on n'avait plus le droit d'exercer dans le cadre de la Régie de
l'assurance-maladie, au Québec. On avait la notion d'un territoire
donné, on n'a encore d'ailleurs - tout ce dont je vous parle, cela
existe encore - la notion d'un territoire donné que six mois avant la
fin de l'internat. C'est-à-dire que pendant toutes les années...
Finalement, on ne peut pas vendre un territoire et intégrer un type
à un territoire, si on lui dit, deux mois avant qu'il parte, où
il ira. Il faudrait que cela se prépare davantage. En Ontario, les gens
peuvent choisir parmi un certain nombre de territoires. Ils font leur choix
plus tôt, ils ont une formule de désistement qui permet le... Il y
avait des choses aberrantes, comme le fait que finalement un étudiant
qui décidait de se marier, disons en quatrième année, avec
une compagne qui avait également pris le régime des bourses
d'éloignement... On a refusé de les assurer qu'on les enverrait
tous les deux à la même place. C'est peut-être un peu
caricatural, mais c'est le genre d'accueil qu'on a reçu quand on a dit
qu'on voudrait au moins s'assurer que si le type est retenu pour quelques
années à Montréal pour des impératifs comme cela,
soit un conjoint qui est encore aux études... On lui dit: Non, tu ne
peux pas attendre deux ans, il faut que tu fasses ton service
immédiatement, parce que tu ne peux pas pratiquer dans le régime
tant que tu ne l'as pas fait. C'est le genre de chose qui se produit et cela
n'a pas été changé, ce n'est pas parce qu'on ne l'a pas
exprimé souvent. Ici, j'ai des articles et des lettres qui datent de
1976, 1977 et 1978 et il n'y a rien qui a été fait à ce
niveau.
Mme Lavoie-Roux: 1979.
M. Boucher (Jean-Pierre): J'aimerais quand même terminer
sur une question, M. le Président, si vous me permettez.
Le Président (M. Bordeleau): Allez-y.
M. Boucher (Jean-Pierre): Je reviens encore, M. le ministre,
à la question de "discrimination". Je lui ajoute des guillemets cette
fois-ci. Est-ce que, finalement, vous croyez que les arguments qu'on vous
avance sont absolument futiles, vis-à-vis de ce qu'on croit être
une discrimination? Est-ce que vous croyez que d'emblée, vous
n'êtes absolument pas touché par - je dirais -notre argumentation
à ce niveau, que c'est peine perdue et que, de toute façon, votre
idée est bien arrêtée là-dessus? Est-ce que,
finalement, il n'y a pas quelque chose de vrai un peu là-dessus,
à savoir que dans toute la procédure... Même si on est
d'accord peut-être avec une certaine dette à la
société, faut-il que la dette à la société,
ce soient les jeunes et exclusivement les
jeunes qui la paient? On dit qu'il y a des médecins qui sont
là, qui ont profité également des mêmes avantages,
semble-t-il, et vous dites qu'en plus de cela, ils profitent encore du
système depuis nombre d'années. Et, présentement, on
limite aux seuls jeunes le décret, la rémunération
inférieure. Les étudiants en médecine en sont rendus
qu'ils ont peur de s'afficher comme tels, parce que, dans l'esprit de tout le
monde, ils constituent une cible privilégiée. Je me pose la
question: Est-ce vraiment une demande de privilégié que je fais
là ou cela ne fait-il pas appel à une saine équité
au niveau d'une profession qui se veut égalitaire au niveau de
l'ensemble des professionnels de la santé?
M. Johnson (Anjou): Je répondrai à votre
question... Pardon?
Le Président (M. Bordeleau): On n'a pas entendu.
M. Laliberté: Je vais répéter. Non, je ne
veux pas répéter la remarque de mon confrère. Je voulais
savoir si on considère ou on présume que la formation qu'on peut
recevoir est inférieure de beaucoup à celle de nos
confrères qui nous précédaient, il y a quelques
années.
M. Johnson (Anjou): Non, absolument pas...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): ...il n'y a pas de présomption
à cet égard. Écoutez, il y a une affaire qui a la
priorité dans cette loi, c'est la population, on n'en a pas parlé
beaucoup ici lors de notre conversation, mais vous en avez parlé dans
votre mémoire. Je trouve ça important et je vais revenir
là-dessus dans deux secondes. Vous dites: Est-ce complètement
farfelu de dire qu'il y a un caractère discriminatoire, parce que nous
sommes seuls à payer ça? Vous n'êtes pas seuls à
porter le fardeau d'un effort qui consiste à permettre aux gens dans les
régions du Québec d'avoir des services qui ont de l'allure, alors
qu'on sait qu'on forme plus de médecins dans notre société
que n'importe où ailleurs et que, pourtant, il reste des choses criantes
qui n'ont pas d'allure et qui n'ont pas de sens.
À cet effet, je pense que ce n'est pas votre faute, c'est
peut-être relié à bien des choses dans notre
système, mais l'effort qu'on fait, notamment à travers cette loi,
c'est de s'arranger pour qu'une partie du fardeau additionnel, soit
assumée, pour que soit assuré cet objectif de mieux desservir les
citoyens par les diplômés nouveaux, par les médecins dans
le système et par le gouvernement lui-même, si on parle du fardeau
financier. En d'autres termes, dans les mandats de négociation, d'abord,
dans la loi, il y a la notion qu'en entrant dans le système, il n'y a
pas de garantie automatique de faire le même niveau de revenu qu'un
collègue qui y est déjà; deuxièmement, dans les
mandats de négociation, il y a une notion de péréquation
des sommes nouvellement injectées pour régler l'entente, il n'y
en a pas beaucoup, il n'y a pas beaucoup d'argent dans la société
québécoise en ce moment. C'est vrai pour vous autres, c'est vrai
pour tout le monde. Demandez ça à n'importe qui a
renouvelé une hypothèque il n'y a pas longtemps, surtout s'il ne
fait pas 10 000 $ par année. Allez voir ce que fait l'inflation à
des gens qui sont en bas du salaire industriel moyen.
Donc, pour ceux qui sont déjà dans le régime, et on
l'a annoncé, il y aura une forme de péréquation, des
sommes additionnels qui vont être versées pour
l'amélioration des conditions en région. Troisièmement, du
côté du gouvernement lui-même, ça veut dire, en
termes de ressources, s'engager à faire des transferts de ressources
quand il faudra en faire, et, d'autre part, mettre de l'argent nouveau dans le
"système". En ce sens-là, si le projet de loi, à cet
article, donne l'apparence que les seuls qui vont régler et le seul
moyen de le régler, c'est ça, ce n'est pas du tout ça, il
y a aussi les mandats de négocier qui ont été
annoncés dans ce cadre, ça fait partie d'un effort
intégré.
En terminant, avant de laisser, je pense au chef de l'Opposition qui
voulait intervenir ou à mes collègues, je voudrais vous dire
combien tous les membres de la commission aussi, je pense, ont
été impressionnés par la page 3 de l'annexe de votre
document, quand vous élaborez votre pensée autour de ces notions
des attraits socio-culturels, sociaux, humains, la notion du défi, les
stages d'apprentissage, les services de bourses et bien d'autres choses, qui
sont des éléments qu'on avait évoqués. Cela me
convainc que ce dynamisme, ce n'est pas seulement au niveau du gouvernement et
dans des décisions de nature législative qu'on va le
créer, c'est à partir de ceux qui vont le vivre. Si c'est vrai
qu'il y a quelque chose de contraignant dans cette loi à votre
égard, il y a aussi une réceptivité à participer au
progrès et le progrès, c'est une meilleure répartition des
ressources pour le service des citoyens au Québec. Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Nelligan.
M. Lincoln: Est-ce que vous pourriez m'éclairer sur la
question des bourses d'éloignement? Je voulais vous demander quelle
était l'attitude des étudiants, enfin, votre attitude à
vous si, par exemple, je sais
que, dans les écoles de médecine - je sais ça par
mes fils qui sont dans ce cas - c'est très difficile d'entrer dans les
écoles de médecine et je sais qu'il y a des listes d'attente
très longues. S'il y avait un système incitatif qui donnait une
priorité quelconque aux étudiants qui, à leur
entrée en médecine, sont disposés à signer un
contrat pour aller dans un territoire d'éloignement qui serait
identifié, alors, ils sauraient où ils vont. Je vous donne un
exemple, qui n'est peut-être pas bon, celui de parler des choses
militaires, mais le Collège militaire royal fait ça. On y
entraîne des étudiants en génie, en pilotage ou en
photographie, etc., je connais des cas comme ça, mais ils s'engagent
à l'avance, pour trois ans, à servir dans certains
paramètres, certaines régions. Ils sont obligés de le
faire, ils ont signé un contrat à l'avance.
Ils signent un contrat, sachant qu'il va avoir une éducation
gratuite, des bourses, et finir avec une promotion après trois ans de
service. Est-ce que vous pensez que, s'il y avait ce genre d'incitation, qu'au
lieu d'une bourse d'éloignement comme vous décriviez, cela
pourrait peut-être attirer beaucoup de jeunes qui veulent entrer dans un
corps de métier, mais maintenant, c'est un peu une loterie.
M. Laliberté: ... mesure qui mériterait
sûrement la peine d'être étudiée en profondeur et
d'être soumise aux étudiants et qui, au moins, pour l'instant,
aurait l'avantage de mettre l'étudiant dans la position suivante,
à savoir qu'il pourrait connaître d'avance dans quelle
région il va aller, et non pas rester dans une sempiternelle incertitude
sur l'endroit où il aura à dispenser ses services pendant toute
sa formation.
Le Président (M. Bordeleau): Avez-vous quelque chose
à ajouter, M. Boucher?
M. Boucher (Jean-Pierre): Évidemment, on suppose que les
qualités de l'étudiant qui serait ainsi choisi seraient
comparables à un étudiant d'un grand centre. Disons qu'à
qualité égale...
M. Lincoln: ... à qualité égale.
M. Boucher (Jean-Pierre): C'est cela. C'est une proposition qui a
souvent été soulevée par le Dr Roy, de la corporation, qui
en faisait... Je sais qu'il y a eu des précédents en Colombie
britannique à ce niveau. Au niveau légal, cela avait même
posé des problèmes parce que cela allait à l'encontre...
Il semble qu'il faudrait que ce soit inséré dans une loi si
éventuellement on se basait là-dessus. D'emblée,
possiblement que cela pourrait favoriser l'étudiant venant d'un certain
milieu défavorisé à un retour à une
intégration plus adéquate, mais à ce niveau non plus, ce
n'est pas une garantie. Les hôpitaux montréalais - c'est moins
vrai de nos jours - étaient bondés d'étudiants
étrangers qui devaient supposément retourner dans leur pays et
qui finalement demeuraient dans le réseau...
De toute façon, toutes ces solutions -je pense que ce soir, ce
n'est pas la place pour discourir trop longtemps là-dessus - les
étudiants sont prêts à en discuter. Je trouve
également regrettable qu'on ne puisse pas continuer à argumenter
sur le caractère "discriminatoire" de cette loi. Encore là, si le
projet peut nous donner un petit peu plus de temps afin de poursuivre cette
argumentation, soyez certains que les étudiants vont se faire
entendre.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: Merci, M. le Président. Ce n'est pas une
question comme un commentaire.
Le Président (M. Bordeleau): Un commentaire.
M. Rochefort: J'avoue que c'est un commentaire que j'aurais pu et
que j'aurais peut-être dû faire à tous ceux qui nous ont
précédés qui représentaient vos seniors. Toutefois,
c'est peut-être parce que je pense que c'est vous qui êtes
peut-être les plus susceptibles de le comprendre et de l'accepter, et au
minimum, de le considérer. Je comprends que dans votre mémoire,
vous ne vous arrêtez pas, et je pense que le ministre l'a signalé
dans sa dernière intervention uniquement comme considération
financière. Je trouve que c'est quelque chose de très positif.
C'est une des premières fois qu'on voit qu'il y a des gens qui ont
élaboré quelque chose d'assez structuré là-dessus.
Par contre, on ne doit pas se cacher qu'il y a la question de la
rémunération qui vous agace de façon particulière
aussi, entre autres, tantôt quand vous nous disiez que vous auriez
aimé aussi pouvoir ne pas aller en région et rester à
Montréal au même tarif que vos seniors. Quand je vous parle de
seniors, ce n'est peut-être pas une bonne expression dans le cas des
professions, mais je ne suis pas professionnel moi-même, alors vous me
passerez l'expression.
Je comprends que les études que vous faites sont difficiles, sont
longues et que cela demande des sacrifices importants pour les faire, sauf
qu'il me semble qu'il est prévu à l'heure actuelle dans le projet
de loi de vous demander au maximum trois ans en région, ce qui vous
permettrait ensuite de revenir dans un centre urbain et de recevoir le plein
tarif pour chacun des actes que vous
posez. Il me semble que ce n'est quand même pas quelque chose
d'absolument impensable quand on considère - c'est sur cette
considération que j'aimerais vous laisser - qu'il y a quand même
près de 50% des Québécois qui gagnent moins de 10 000 $
par année. Je pense que c'est une considération qu'on ne peut pas
perdre de vue quand on fait des débats comme ceux-là, mais je
vous répète ce que j'ai dit au début de mon intervention,
que cela s'applique à tous ceux qui vous ont
précédés là-dessus, mais que je considère
que vous êtes peut-être de ceux qui peuvent être les plus
sensibles à une considération comme celle-là.
M. Boucher (Jean-Pierre): D'accord. J'aimerais faire une remarque
sur votre commentaire. On n'a pas parlé d'argent comme tel. C'est une
question de principe.
On s'attendait que quelqu'un nous demande: Ne trouvez-vous pas qu'un
jeune de 23 ou 24 ans qui - le ministre a déjà posé la
question - gagne 75 000 $ ou 80 000 $ par année, c'est trop? Je vous
dirais qu'on n'a pas à répondre à cela. Cet aspect
concerne un niveau de négociation qui ne touche pas le cadre du
débat sur le projet de loi. (23 h 45)
II faut parler de rémunération dans la mesure où
les propos qui sont tenus dans le projet de loi sont de nature discriminatoire.
Si, éventuellement, la rémunération des médecins
à venir dans l'entente était négociée à 22
000 $ par année, peu importe, si pour notre catégorie de
professionnels, il y avait une rémunération vers le bas, je
dirais: Ce n'est pas correct. Les arguments sur lesquels on se base pour
justifier une rémunération à la baisse me semblent
davantage tenir de considérations économiques - je vous comprends
à ce niveau - que de réelles considérations autres au
niveau de... C'est de bonne guerre; il faut couper quelque part et vous coupez
sur nous autres; cela nous apparaît assez clair. On n'en a pas sur le
montant global de la négociation, ce seront les
fédérations qui le négocieront. Mais le montant comme tel,
on n'en parle même pas; on en a contre le principe. On croit qu'il ne
devrait pas y avoir de distinction entre le professionnel qui commence et celui
qui a plusieurs années de pratique.
M. Rochefort: Juste deux minutes là-dessus. Je peux vous
dire qu'au niveau du principe, il y en a un autre qui prévaut à
peu près partout, tant dans l'entreprise privée que dans le
secteur public, qui est la rémunération selon l'ancienneté
pour une même définition de tâches, pour un même type
de responsabilité et tout cela. Vous connaissez sûrement beaucoup
de citoyens autour de vous autres qui vivent selon un régime comme
celui-là et, à ce que je sache, personne ne prétend que
c'est discriminatoire en soi.
Finalement, je vous dirai que, quand vous me dites que, vous autres,
vous ne voulez pas vous poser la question à savoir si c'est logique que
vous gagniez 75 000 $ après tant ou tant d'années, que vous
n'avez pas à répondre à cela à l'heure actuelle, je
peux vous dire que moi, comme député, j'ai à
répondre à cela, parce qu'il y a aussi l'autre groupe dont je
vous parlais tantôt, les 50% de citoyens qui gagnent moins de 10 000 $ et
qui seront vos patients plus tard. Il ne faut pas le perdre de vue,
personne.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie MM. Boucher
et Laliberté d'être venus nous présenter votre
mémoire.
Mme Lavoie-Roux: Merci beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord.
Il semble que, pour le prochain groupe, il y a eu une entente et que
nous recevrons maintenant le Congrès juif canadien. C'est le
mémoire no 26.
Mme Lavoie-Roux: On va se rappeler les paroles du
député de Gouin quand l'augmentation des députés va
arriver, surtout qu'on a entendu dire que le caucus bloque...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
(Suspension de la séance à 23 h 48)
(Reprise de la séance à 23 h 50)
Mme Lavoie-Roux: M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, Mme Lavoie-Roux, on va
ouvrir la commission d'abord; oui ça marche.
Mme Lavoie-Roux: Je ne pensais pas qu'il fallait la rouvrir. Je
m'excuse.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, vu qu'on l'a
fermée. Oui, Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: C'est simplement qu'il y a ici un groupe et je
pense qu'il faudrait s'excuser auprès de ces gens, c'est l'Association
des pharmaciens des établissements de santé, qui n'ont pas
été avertis officiellement que l'ordre avait été
interverti.
M. Johnson (Anjou): Ce sont les pharmaciens
propriétaires.
Mme Lavoie-Roux: Non, l'autre aussi également.
M. Johnson (Anjou): Ah bon! II n'est pas interverti demain, il
n'y a pas de problèmes.
Mme Lavoie-Roux: Non, mais il est interverti par rapport à
ce soir.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais ils avaient
été avertis hier.
M. Johnson (Anjou): Ah bon! vous ne connaissez pas l'ordre de
demain, si je comprends bien.
Mme Lavoie-Roux: Alors, vous saviez que vous ne passeriez pas
aujourd'hui. Ah bon! d'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Je peux le donner
immédiatement, ça va probablement vous intéresser.
Effectivement, vous seriez les premiers demain matin. Alors, on commencera par
l'Association des pharmaciens des établissements de santé;
ensuite, l'Association de santé publique et, finalement, l'Association
des pharmaciens propriétaires qui devait passer ce soir, mais qu'on a pu
remettre avec son consentement. Vous serez les premiers demain matin, vers 11
heures, 11 h 30.
Mme Lavoie-Roux: Moi, je pense que 11 h 30, c'est peut-être
plus raisonnable.
M. Johnson (Anjou): Avez-vous une grosse période de
questions demain?
Mme Lavoie-Roux: Ça va durer au moins trois quarts
d'heure, non!
M. Johnson (Anjou): Ça commence à 10 heures.
Ça pourrait être 11 h 15 au plus tôt.
Le Président (M. Bordeleau): C'est ça. 11 h 15, 11
h 30. Ça va?
Une voix: Demain.
M. Johnson (Anjou): Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, nous recevons
maintenant le Congrès juif canadien qui est représenté par
M. Frank Schlesinger.
M. Schlesinger (Frank): C'est très bien
prononcé.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous laisse
présenter les personnes qui vous accompagnent et je m'excuse au nom des
membres de la commission de vous recevoir si tard.
Congrès juif canadien
M. Schlesinger: On est assez heureux d'avoir été
invités et on vous en remercie.
M. le Président, M. le ministre, M. le chef de l'Opposition,
membres de la commission parlementaire, permettez-moi de vous présenter
les membres de la délégation qui m'accompagne.
À mon extrême droite, on a M. Many Weiner, qui est
directeur exécutif des services communautaires juifs; Mme Lily Shatsky,
présidente du Centre des services sociaux juifs à la famille; M.
Léon Ouaknine, qui est directeur général du Centre des
services sociaux juifs à la famille; Me Louis Orenstein, C.R., qui est
président de l'hôpital Mont Sinaï, président du
conseil communautaire juif, président sortant du Centre des services
sociaux juifs à la famille, président sortant du Baron de Hirsch
Institute, président sortant de la Jewish Immigrate Aid Society et
ancien membre de CRSSM.
Ensuite, à ma gauche - je vais présenter Me Avrum
Orenstein après - M. Mayer Levy, qui est directeur des relations
communautaires du Congrès juif canadien, région de Québec;
M. Bernard Finestone, qui est président de l'hôpital juif Sir
Mortimer B. Davis.
À ma droite, M. Avrum Orenstein, qui est le porte-parole de la
délégation et moi-même, Me Frank Schlesinger,
président du Congrès juif canadien, région de
Québec.
Le but principal de ce mémoire est de démontrer la
coopération très étroite qui existe entre les divers
organismes de santé et d'aide sociale de la communauté juive
ainsi que les liens très étroits qui existent entre ces
organismes et la communauté juive. En outre, nous voulons souligner
l'apport considérable des bénévoles ainsi que l'aide
financière communautaire qui permettent à nos organismes de
donner un surplus de services aux bénéficiaires de ces centres.
Nous tenons à souligner que ces services sont également rendus
à toute la population de la région de Montréal, quelles
que soient la race, la couleur ou la religion. Les personnes qui m'accompagnent
sont pour la plupart très versées dans le domaine des services de
santé et des services sociaux.
Le Congrès juif canadien est l'organisme représentatif de
la communauté juive ainsi que son porte-parole officiel par le biais
d'une élection de délégués qui a lieu au terme d'un
processus démocratique. Les services communautaires juifs de
Montréal constituent l'organisme coordonnateur de planification sociale
de 19 agences membres constituantes dans les domaines de la santé, du
bien-être et de la culture.
Les parties de ce mémoire reconnaissent la
nécessité de tenter de contrôler et de réduire les
dépenses publiques. Nous réalisons que la loi actuelle fut
rédigée en vue de régler la situation qui
existe à travers la province. Cependant, il arrive parfois
qu'à vouloir trop embrasser on en arrive à des situations
imprévues. La communauté juive de Montréal a de tout temps
collaboré et a l'intention de continuer à collaborer avec le
gouvernement afin de fournir les meilleurs services sociaux et de santé
qu'il soit possible de donner de la plus efficace des manières. La
communauté pense que certains des articles du projet nieront l'esprit de
la loi, chapitre no 48, et détruiront l'engagement de la
communauté au sein des centres hospitaliers affectant la
communauté ainsi que les services fournis par ces institutions.
L'engagement des bénévoles de la communauté dans ce
domaine d'activité est un fait bien connu qui remonte dans notre
histoire à 1863, c'est-à-dire 118 ans depuis
l'établissement des services juifs à la famille, institut Baron
de Hirsch.
Certains services sociaux et services de santé qui furent au tout
début créés et maintenus par la communauté juive
ont graduellement été subventionnés au cours des
années par le gouvernement et sont à l'heure actuelle en grande
partie financés à même les deniers publics. Pendant toutes
ces années, il y a eu un lien continu entre la communauté qui
avait créé ces services et les établissements qui les
fournissaient. Ces liens existent sous différentes formes. Les services
sont assurés par la communauté juive sous forme de fonds et de
main-d'oeuvre bénévole.
Des dizaines de milliers d'heures de travail et des millions de dollars
viennent s'ajouter chaque année au fonds du gouvernement par ces
corporations. Les conseils de directeurs désirent maintenir dans ces
établissements une ambiance et un caractère juifs. (Minuit)
Cet engagement communautaire finance les programmes et les services que
le gouvernement est incapable de fournir, assure le fait que les
établissements publics juifs manifestent une responsabilité et
une contrainte dans leurs activités financières et fournissent
les services spéciaux si indispensables à la survie de notre
communauté. Cet engagement est l'intérêt de la
communauté juive envers les établissements publics juifs qui
doivent être maintenus tout d'abord, afin de protéger et d'assurer
l'aspect culturel et religieux compte tenu de ces établissements, ce qui
est absolument indispensable au bien-être de la majorité des
bénéficiaires des services de nos institutions et afin de
maintenir le niveau de supplément financier fourni à ces
établissements.
Maintenant, je passerais le micro à Me Orenstein, ancien
président du Centre des services sociaux juifs à la famille.
M. Orenstein (Avrum): M. le Président,
M. le ministre, à la demande de la commission,
premièrement je pense, vous donner simplement une perspective globale
que notre mémoire prévoit seulement et est limité aux
effets de la loi 27 en ce qui concerne la communauté juive comme
communauté juive.
Deuxièmement, de souligner pour la communauté juive des
établissements qui font partie intégrante de notre
communauté. En conséquence, nous parlons de la survivance d'une
partie intégrante de notre communauté quand nous parlons de notre
réseau. Une destruction de notre réseau juif aura pour effet de
désorganiser la communauté et de détruire une partie
intégrante de la communauté.
De plus, je dois souligner que la manière dont la
communauté juive appuie les établissements, tombe
carrément dans les discours de l'ancien ministre Castonguay,
c'est-à-dire une participation locale, enracinée dans la
communauté, autonomie de gestion et des services requis par les
bénéficiaires de ces établissements et le tout dans le
cadre des politiques du ministère des Affaires sociales.
Le moyen de continuer à préserver l'engagement de la
communauté se trouve dans le bilan du maintien de la coopération
et dans celui du réseau de l'établissement juif qui s'appuient
mutuellement, dont l'antériorité socioculturelle a
été garantie dans le passé par tous les gouvernements, y
compris le gouvernement actuel. Quand je dis tous les gouvernements, nous avons
annexé, à titre d'information, une lettre qui a été
envoyée par le ministre Denis Lazure à la communauté juive
concernant la réalité socioculturelle qui doit être
respectée.
De plus, nous avons, dans une autre annexe, un arrêté en
conseil au sujet de Miriam Home faisant une autre fois allusion aux
communautés juives et aux établissements juifs. De plus, au mois
de septembre 1981, lors d'une rencontre avec le ministre Pierre-Marc Johnson,
le ministre a dit une autre fois qu'il va tenir compte de la
réalité socioculturelle affectant les communautés juives.
Au sein de la communauté juive, les coopérations qui
entretiennent les établissements publics et qui sont
propriétaires d'un bien immobilier ne sont pas seulement des
propriétaires ou des vestiges d'une époque révolue, elles
sont elles-mêmes des associations bénévoles ayant un
accès de 40 000 contribuables annuels en fonds et en temps. Nous rendons
des services appuyant la recherche médicale, lançons des projets
pilotes et rendons de multiples services à la communauté juive et
à l'ensemble de la société. Je dois dire que 40 000
contribuables d'une population de 110 000 incluant les enfants et les autres
bénéficiaires représentent presque 100% des
communautés juives de Montréal, soit environ
110 000 personnes. C'est précisément par le bilan de ces
coopérations dynamiques qu'il existe un appui communautaire ainsi qu'un
apport continuel envers des établissements publics. Cet appui fait en
sorte que les établissements fournissent des services de haute
qualité dans les camps des limites telles qu'établies par le
ministère des Affaires sociales et que requièrent les
bénéficiaires.
Toutefois, les modifications proposées au projet de loi no 27
pour le non-respect des services sociaux, les services de santé et
particulièrement, les articles du projet de loi qui se rattachent
à la présentation des coopérations au sein du conseil des
directeurs auront pour effet de rompre les liens de la communauté juive
envers ces établissements de services sociaux et de santé
publique. En ramenant la représentation des corporations de quatre
membres à un membre dans un conseil d'administration de 11, 12 ou 13
personnes, l'engagement et donc l'effet que ces corporations et la
communauté auront sur les établissements en seront
sérieusement diminués.
En outre, les dispositions du projet de loi qui déclarent que la
représentation auprès des conseils des établissements de
la part d'établissements complémentaires se ferait sur une base
territoriale, plutôt que sur une base de parties cocontractantes,
auraient pour effet d'atteindre très gravement ces institutions
publiques juives entre elles. Toutes ne se trouvent pas dans la même
région ni même dans le même secteur. Cependant, même
en envisageant les choses sous leur meilleur jour, la représentation en
sera sérieusement estompée.
On pense que des dispositions spéciales doivent être faites
dans la législation afin de prendre en considération le
caractère unique de la région 6A, la région de
Montréal métropolitain, afin de refléter son
caractère ethnique, multiculturel et divers.
Si une interprétation stricte est donnée aux articles 79,
81 et 82 des modifications proposées, alors, par exemple, tous les
centres hospitaliers de la région 6A éliraient ensemble un
représentant au conseil d'administration de chacun des trois centres de
services sociaux de la région, et les trois centres de services sociaux
éliraient ensemble un représentant au conseil d'administration de
chacun des hôpitaux de la région. Nous doutons que cela soit
l'intention du législateur.
Pour une plus grande certitude et afin de maintenir des connexions entre
chaque établissement et son système d'appui, il vaudrait mieux
maintenir un système de représentation croisée des
conseils d'administration en se basant sur les contrats de services et les
comités d'admission, pour la région de Montréal tout au
moins.
La situation particulière qui prévaut à
l'Hôpital Mont Sinaï doit être portée à votre
attention. Cet hôpital, qui se trouve dans la région 6B et dont
les biens immobiliers sont détenus par une corporation qui fait partie
du réseau d'agences juives, est en train de terminer le processus de
relocation dans la région de Montréal. Entre-temps, si les
changements proposés étaient appelés à entrer en
vigueur, il y aurait risque que cet hôpital soit isolé de son
conseil corporatif et de la communauté juive nourricière du
Montréal métropolitain.
La communauté juive a déjà promis de donner entre 3
000 000 $ et 3 500 000 $ pour la construction ou la reconstruction d'un
hôpital Mont Sinaï à Montréal. Nous demandons que le
caractère superrégional de cet hôpital soit conservé
jusqu'à ce qu'il soit transféré à
Montréal.
Nous avons, dans la partie 4, des recommandations. Ce sont des
changements minimaux pour permettre à notre réseau de continuer
de fonctionner en garantissant l'orientation de la loi et en réduisant
les effets sur nos établissements.
Premièrement, la composition des conseils des centres. 1.01. Que
le nombre de représentants au conseil du centre des corporations qui
soutiennent les établissements ou qui sont propriétaires des
biens immobiliers utilisés par l'institution soit maintenu au nombre
actuel de quatre. Le nombre total de membres du conseil d'un centre peut
être facilement accru pour pourvoir à ceci sans pour autant
frustrer le but de la loi. 1.02. Que les représentants d'une
catégorie d'établissements aux conseils d'administration d'une
autre catégorie d'institutions soient basés sur les contrats de
services ou la participation aux comités d'admission, comme c'est le cas
actuellement, et que cela ne soit pas fondé sur la base d'un territoire.
1.03. Que la personne nommée par un "groupe bénévole" soit
restreinte à ces groupes bénévoles qui travaillent
à l'intérieur de l'établissement. 1.04. Que dans les
établissements où des comités de
bénéficiaires existent et où l'état de santé
des bénéficiaires ne leur permet ni de voter ni de participer aux
comités des bénéficiaires ou des conseils
d'administration, il serait bon que les parents ou les
bénéficiaires puissent voter et oeuvrer.
Deuxièmement, la composition du conseil régional. 2.01.
Qu'il y ait des dispositions spéciales afin de prendre en
considération le caractère particulier de la région 6A de
Montréal métropolitain où prévaut une
diversité culturelle, ethnique et linguistique, et où, à
l'encontre des autres régions, il existe trois centres de services
sociaux.
2.02. Que la représentation au conseil régional passe d'un
représentant à deux représentants dans ces
catégories où il y a représentation ou élection par
d'autres groupes d'établissements et que des dispositions
spéciales soient prises pour prendre en considération l'aspect
socioculturel particulier de la région 6A à cet effet. 3.
Consultation et appel. Que les décisions prises par le ministre ou par
le conseil régional qui affectent la nature, la structure ou l'existence
même d'un établissement soient a priori sujettes à une
consultation ou à une procédure d'appel auprès d'une
commission ou d'un tribunal. 4.01. En général, que les contrats
de services avec d'autres institutions publiques régies par le chapitre
48 et ayant des liens tant socioculturels qu'historiques entre elles ne
requièrent pas d'approbation du conseil régional. Exemple:
contrat de services entre les centres de services à la famille et
l'hôpital Mont-Sinaï. 4.02. Nous recommandons qu'à l'avenir,
une législation aussi importante que le projet de loi no 27 qui affecte
de façon fondamentale la fonction, le caractère et l'existence
même des établissements publics, soit diffusée avec un
délai raisonnable afin que le public puisse avoir l'occasion de faire
des démarches sur une question qui le touche profondément.
Nous sommes persuadés que la commission des affaires sociales et
l'Assemblée nationale considéreront de façon favorable la
révision telle que proposée à la lueur des recommandations
contenues dans ce mémoire.
Nous avons ajouté une annexe à la dernière page de
notre mémoire. Illustration des services interreliés fournis
à la communauté par un réseau juif de services sociaux et
de services de santé avec reconnaissance des dimensions culturelles et
religieuses.
Nous avons pensé que cette démonstration serait meilleure
que simplement l'expliquer. Nous avons pris le cas d'un établissement de
centre de services sociaux juifs à la famille en indiquant,
premièrement, les liens entre ce centre et les autres
établissements publics. Il y a sept autres établissements
publics. Il y a des contrats de services avec chacun des sept ainsi que
l'hôpital Mont Sinaï et il y a des recommandations, des
références.
Par la corporation, pour vous indiquer clairement que les corporations
sont elles-mêmes des organisations bénévoles, nous avons
pris une autre fois le cas des centres de services sociaux juifs à la
famille, la corporation lance le service juif à la famille, l'Institut
Baron de Hirsch. Cette corporation donne, en coût annuel pour fournir les
services, environ un million de dollars par année. Les fonds sont en
grande partie fournis par une campagne publique des services communautaires
juifs de Montréal. Là, les corporations fournissent les services
suivants: il y a des suppléments financiers pour le placement des
personnes âgées dans des établissements privés, ou
pour la nourriture kascher, les Bar-Mitzvah, les leçons, etc., des
services juridiques, des services dentaires, des clubs de consommateurs pour
alimentation kascher, rabais pour produits pharmaceutiques, vêtements,
etc., un directeur bénévole pour obtenir des volontaires pour le
CSSJF, éducation et vie familiale, services sociaux scolaires aux
écoles juives.
Il y a aussi un Foyer Baron de Hirsch Inc. qui est un édifice
pour un groupe de foyers d'accueil, supplément de Kachroute, provisions,
divertissements pour enfants. Il y a aussi un cimetière Baron de Hirsch
Inc. qui est pour l'enterrement gratuit des indigents et l'entretien des
tombes.
Il y a d'autres agences de notre service communautaire juif de
Montréal qui font aussi partie de notre réseau, par exemple, des
centres d'orientation juifs, orientation et formation; les camps B'nai B'rith
pour enfants adoptés et enfants dont les parents ont un salaire
marginal; les YM/YWHA pour plusieurs services divers; la Fondation Hillel qui
se trouve au niveau universitaire à l'Université de
Montréal, à McGill et à Concordia; l'Agence juive d'aide
aux immigrants; le Conseil de l'éducation juive: libre ou frais minimes
pour la scolarité; les services communautaires juifs qui donnent des
lits pour des personnes âgées; le Conseil des personnes
âgées qui est relié aussi à ce centre et qui donne
des soins à domicile pour des personnes âgées; le projet
Genèse qui est financé en partie par les services communautaires
juifs, pour les bénéficiaires qui ont des problèmes avec
les propriétaires; la Bibliothèque publique juive et Caldwell,
qui est un hébergement à loyer modique pour personnes
âgées; la Communauté sépharade du Québec et
aussi l'Association de l'âge d'or qui donne des services aux personnes
âgées.
Je dois souligner que d'autres établissements juifs ont des liens
similaires entre eux. Je pense que l'annexe ainsi que nos explications vont
démontrer que, pour nous autres, pour notre communauté, les
établissements font partie intégrante de notre communauté.
Le réseau lui-même forme une partie intégrante de la
communauté et nous voyons les effets de la loi no 27 comme une
destruction d'une partie de ce réseau et de notre communauté.
Nous avons suggéré des amendements qui se trouvent dans l'annexe
B, amendements que nous avons déjà dactylographiés, dans
l'espoir que ce soit amendé tout de suite. De toute façon, nous
avons suggéré des amendements
pour que ça corresponde à ce que nous avons dit dans notre
mémoire. (0 h 15)
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, des questions
ou commentaires?
M. Johnson (Anjou): Oui. Me Orenstein, merci de votre
mémoire et de sa clarté, en même temps que de sa
brièveté. Je voudrais en profiter pour saluer Me Orenstein
père, avec qui j'ai eu l'occasion de parler à de nombreuses
reprises dans d'autres types de commission parlementaire.
Je comprends que ce qui vous préoccupe à l'égard du
projet de loi, c'est essentiellement la présence de la communauté
à travers les structures; ce ne sont pas tellement les pouvoirs.
À cet égard, je vous rassurerai sur le pouvoir de fusion; vous
avez sûrement pris connaissance, aussi bien que moi, de l'article 79 qui
prévoit que, dans le cas d'une corporation dont les biens immobiliers
n'ont pas été acquis en majorité par des subventions de
l'État, évidemment, les dispositions de l'article forçant
la fusion ne peuvent s'appliquer. À cet égard, tous les biens
immobiliers appartenant à des corporations et représentant plus
que la moitié, pour prendre un chiffre comme ça, ne pourraient
être sujets à la fusion.
Ceci est fait en pensant, notamment, à des établissements
qui appartiennent à la communauté juive, comme à d'autres
regroupements, et en vertu d'un principe général qui dit qu'on
peut difficilement s'arroger, même comme État, ce pouvoir, sans
une forme de désintéressement. Donc, je présume
qu'à cet égard vous n'entretenez pas les inquiétudes que
j'aurais pu soupçonner. Non?
M. Orenstein: Franchement, dans notre mémoire, on ne fait
aucune référence à cette question de fusion. Je pense que
dans le comité des Juifs, la plupart des immeubles étaient
achetés avec l'argent de la communauté.
M. Johnson (Anjou): C'est ça. En ce sens, je voulais
être sûr que pour vous, il n'y avait aucun doute quant à
ça. Parfait.
La question de la représentation des corporations. Je vous
répondrai dans des termes généraux; j'écoute vos
préoccupations et vous êtes allés suffisamment loin dans
vos préoccupations pour préparer ce qui pourrait être des
papillons en commission parlementaire. C'est un travail qui, s'il était
fait par tout le monde, simplifierait la vie des députés,
souvent.
Mme Lavoie-Roux: Surtout de l'Opposition.
M. Johnson (Anjou): Ah, surtout de l'Opposition, bon!
Je prends bonne note de cela et je tiens pour acquis que cette remarque,
c'est celle que nous avons entendue venant de quelques groupes aussi, à
l'égard du poids relatif des corporations qui est diminué...
Mais, vous invoquez que dans le cas de la communauté juive, compte tenu
du caractère particulier de la communauté, c'est plus
contraignant. Dans le cas des établissements, effectivement, nous
supprimons la notion de contrats de services. Pardon?
Mme Lavoie-Roux: Je ne voulais pas vous interrompre, M. le
ministre, je m'en excuse.
M. Johnson (Anjou): Je pensais que vous me parliez.
Mme Lavoie-Roux: Non, non.
M. Johnson (Anjou): Dans le cas des établissements par
contrats de services, c'est-à-dire des sièges reliés aux
établissements qui ont des contrats de services, effectivement, dans la
loi, nous supprimons la nécessité de l'existence de contrats de
services, pour le sens de la qualification, si on veut, des administrateurs.
Ceci viendrait modifier, dans le cas de la communauté, ou
théoriquement, permettrait des modifications de la répartition et
de faire en sorte que les liens que vous avez très amplement
décrits dans votre annexe ne seraient pas garantis, si je comprends
bien.
Vous dites que la personne nommée par un groupe
bénévole soit restreinte à ces groupes
bénévoles qui travaillent à l'intérieur d'un
établissement. J'aimerais peut-être entendre un peu
là-dessus vos motifs.
M. Orenstein: D'accord. Sur cette question, il y a des groupes
bénévoles qui travaillent dans le réseau total, par
exemple dans la région 6A. Il y en a d'autres qui travaillent d'habitude
dans quelques-uns des établissements. Chez nous, il y a les clubs comme
B'nai B'rith qui travaillent dans les établissements juifs; il y a un
autre groupe qui peut être le Ladies' Auxiliary d'un hôpital, qui
travaille surtout dans cet hôpital. Ce que nous prévoyons, c'est
qu'à la place d'avoir un représentant de n'importe quel groupe
bénévole on ait un représentant de groupes
bénévoles qui consacrent du temps et du travail dans
l'hôpital ou dans le centre en question, parce que la loi prévoit
simplement un représentant d'un groupe bénévole reconnu
comme tel par le CRSSS. Premièrement, je me demande qui peut être
reconnu par le CRSSS, de toute façon. C'est simplement pour dire que
cela ne donne pas aux personnes qui travaillent dans les établissements
une représentation dans ces mêmes établissements.
M. Johnson (Anjou): Cela peut être très
intéressant. Compte tenu du nombre d'établissements et du
caractère assez homogène de la population non seulement qui les
fréquente, mais qui y travaille, vous comprendrez qu'en termes
généraux il est très difficile d'appliquer ce type
d'approche, compte tenu de nos objectifs. "1.04: Que dans les
établissements où des comités de
bénéficiaires existent et où l'état de santé
des bénéficiaires ne leur permet ni de voter ni de participer aux
comités, il serait bon que les parents ou les
bénéficiaires puissent voter et oeuvrer". Je prends très
bonne note de cette remarque qui me paraît extrêmement
intéressante et probablement judicieuse, mais vous me donnerez quelques
jours avant de décider si c'est vraiment judicieux. Je pense que M.
Brunet a évoqué quelque chose d'analogue, d'ailleurs.
Composition du conseil régional. Je vois deux choses dans ce que
vous évoquez, vous me corrigerez si ce n'est pas le cas. D'une part, la
région 6A étant un territoire d'une telle ampleur, à la
fois sur le plan de la population, des institutions, etc., vous
considérez que le conseil régional devrait peut-être
être plus nombreux pour pouvoir refléter un peu cette
diversité non seulement ethnique ou culturelle, mais religieuse, dans
une grande agglomération urbaine. Je trouve intéressant comme
notion que vous évoquiez la loi des nombres. Sur la Côte-Nord, on
a exactement le contraire. Sur la Côte-Nord, en ce moment, il y a plus de
postes ouverts au CRSSS qu'il y a d'établissements, alors qu'à
Montréal c'est plutôt l'inverse. Je trouve intéressant que
vous introduisiez cette notion qui nous amènera à une
réflexion ou à des débats intéressants.
Je vois, d'autre part, une autre notion que vous voudriez voir, envers
laquelle je suis a priori beaucoup plus rébarbatif, c'est la notion de
dispositions spéciales pour prendre en considération l'aspect
socioculturel particulier de la région. Cette approche sur le plan de la
confirmation dans la législation fait l'objet normalement d'un
comportement qui, historiquement, a toujours permis l'exercice de cette
relation malgré des moments tendus à l'occasion, mais dont,
finalement, le bilan est celui d'une vie réciproque et d'une
tolérance assez remarquable entre les communautés.
Intrinsèquement, dans le cas d'une structure comme le CRSSS,
prévoir des dispositions aussi spécifiques que la
représentation socio-culturelle me paraît aller à
l'encontre d'une philosophie générale qu'il faut appliquer au
niveau des lois, ce qui n'empêche pas que, dans la réalité,
beaucoup de ces choses. C'est le cas, par exemple, des ententes de services qui
vous permettent d'avoir, à partir du centre de services sociaux, par le
jeu des ententes administratives, à toutes fins utiles, une certaine
homogénéité au niveau du fonctionnement. Pourtant, rien de
tout cela n'est dans les lois ou dans les règlements. C'est
l'arrangement qui a l'extraordinaire avantage d'être à la fois
souple et à la fois garant d'un comportement de respect et de
dignité réciproque.
La consultation et l'appel...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, je
m'excuse.
M. Johnson (Anjou): Oui.
Le Président (M. Bordeleau): Je pense qu'on a
peut-être un commentaire ou une réplique.
M. Johnson (Anjou): Ah bon!
M. Finestone (Bernard): M. le ministre, je fais en ce moment
partie du conseil régio- nal comme représentant des
hôpitaux. Il y a présentement trois dispositions qui existent par
arrangement entre les hôpitaux de l'Université de Montréal
et de McGill. Je vous assure que, quand on est confronté avec des
problèmes, c'est absolument nécessaire que les deux
systèmes siègent. Je ne peux pas parler pour les hôpitaux
représentés par l'Université de Montréal comme ils
ne peuvent discuter de nos problèmes. C'est une chose qui existe
seulement dans notre région.
M. Johnson (Anjou): Je ferai juste une parenthèse, il y a
aussi le siège pour les universités au CRSSS cependant. Je
comprends qu'il y a quatre universités à Montréal, mais il
y a quand même un siège pour les universités en plus de
celui des hôpitaux.
M. Finestone: Exactement.
M. Johnson (Anjou): Que la notion de consultation dans le cas de
changements ou de décisions qui pourraient affecter la structure ou
l'existence d'un établissement soit a priori sujette à une
consultation ou à une procédure d'appel... La procédure
d'appel, à mes yeux, non, évidemment, pour les raisons, je pense,
dont vous vous doutez bien, M. Finestone, puisqu'il s'agit finalement d'une
notion d'intérêt public impliquant la responsabilité du
pouvoir politique dans l'administration de l'argent prélevé par
voie d'imposition à partir du principe que c'est ici que cela se
décide. La notion de consultation, cependant, je pense, est plus souple
et plus signifiante dans notre régime démocratique, étant
donné qu'elle n'a rien de superficiel dans notre régime.
Quant aux contrats de services avec les autres institutions qui ne
requièrent point l'approbation du conseil régional,
j'aimerais
peut-être vous entendre quelques secondes là-dessus, s'il
vous plaît!
M. Orenstein: Sur l'article 4.01?
M. Johnson (Anjou): Je m'excuse, sur l'article 4.01.
M. Orenstein: Oui, cela reflète précisément
la question des liens, des contrats de services entre les établissements
juifs. Pour nous autres, et je pense aussi pour l'Ordre des infirmières
et infirmiers, l'idée, c'était d'avoir des contacts, sinon des
contrats, avec un établissement qui est susceptible d'avoir un tel
contact.
Pour nous autres, les établissements, les institutions avec
lesquels, par exemple, le Centre des services sociaux juifs à la famille
veut contracter... C'est une chose naturelle de contracter. C'est comme
l'hôpital juif général Sir Mortimer B. Davis et les autres.
C'est ce que nous prévoyons. Il y a dans le projet de loi une
disposition qui indique que le ministre peut par règlement
décider quel contrat doit être approuvé par le conseil
régional et quel contrat peut être seulement
déposé.
Ce que nous demandons, c'est que les contrats de services avec les
autres institutions publiques régies par la loi, ayant des liens tant
socioculturels qu'historiques entre elles, ne requièrent pas
l'approbation du conseil régional, c'est-à-dire que, si des
règlements étaient adoptés, qu'ils ne prévoient pas
l'approbation du conseil régional pour les contrats de services entre
des établissements du réseau juif.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Oui, M. Finestone.
M. Finestone: Nous savons que vous avez des problèmes en
ce moment avec les contrats que des institutions ont avec d'autres institutions
qui ne sont pas publiques. Notre point ici, c'est quand deux institutions
publiques veulent contracter entre elles. Ce n'est pas une chose qui doit
être le problème du conseil régional.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que vous excluez ou vous incluez la
notion d'approvisionnement commun? Il y a peut-être deux ou trois
dispositions que vous pourriez viser par ces commentaires. Est-ce que vous
visez notamment les dispositions qui veulent donner au conseil régional
le pouvoir qu'en pratique il exerce déjà en vertu
d'arrêtés en conseil et de directives, de procéder à
!a mise en commun de certains services, notamment au niveau des achats.
Voudriez-vous? Non? Ce n'est pas ce que vous visez. (0 h 30)
Le Président (M. Bordeleau): M.
Orenstein.
M. Orenstein: Non, M. le ministre. Ce que nous prévoyons
dans cet article du projet de loi qui parle de services professionnels, ce sont
des contrats de services professionnels qui doivent être approuvés
par le conseil régional, selon le règlement du ministre.
M. Johnson (Anjou): Je voulais seulement être sûr que
c'était effectivement 81. Le but de ces dispositions n'étant pas
une intervention ad hoc chaque fois, mais de faire en sorte que les
procédures gouvernementales qui ont été mises en vigueur
depuis un certain nombre d'années et qui visent à obtenir une
distribution plus équitable de ceux qui contractent avec l'État,
notamment au niveau de la construction, que le type de procédure soit
étendu au réseau dans la mesure où, effectivement, il
s'agit de fonds publics qui sont dépensés. C'est ce que recherche
l'article 81 modifiant 124, ce qu'on appelle entre nous, dans le jargon
parlementaire, le boulier; je pense que mes collègues de l'Opposition
savent à quoi je me réfère. C'est une disposition
habilitant à l'utilisation du boulier, notamment dans les grosses
immobilisations.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Orenstein.
M. Orenstein: Oui, je comprends bien, sauf qu'avec chaque loi il
y a un but et il y a des effets et nous voulons être plus certains que
les effets de la loi ne seront pas simplement d'interdire ou de soumettre
à l'approbation des conseils régionaux des contrats de services
entre un établissement comme le CSSJF et l'hôpital Jewish General,
par exemple.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Seulement pour corriger. J'ai effectivement
fait un lapsus, je me référais à un autre article que 81,
je m'en excuse; je pense que je vous ai induit en erreur là-dedans. Vous
me pardonnerez, à l'occasion à cette heure-ci, il nous arrive de
faire des lapsus.
Je me référais plutôt à 95 qui modifie 173.1
où on dit que le ministre peut, avec l'approbation du Conseil du
trésor faire des règlements sur la procédure relative
à l'octroi de contrats de services par les établissements. Si je
comprends bien, vous ne visez pas ces dispositions dans votre commentaire, mais
vous visez plutôt celles de 81 qui impliquent des contrats de services
"inter établissements". Bon, d'accord, je m'excuse.
Le Président (M. Bordeleau): C'est 81 qu'ils visent dans
leur mémoire.
M. Johnson (Anjou): C'est 81 qu'ils visent dans leur
mémoire et non pas 173.
M. Lincoln: À l'article 81, vous n'avez pas d'objection
à leur interprétation de deux établissements par rapport
aux services professionnels qui ont un lien socioculturel. Est-ce que je
comprends dans votre remarque que vous n'avez pas d'objection à
cela?
M. Johnson (Anjou): Non, je pense que vous ne comprenez pas mes
remarques. La distinction de nature socioculturelle dans le cadre de
l'application de choses comme celles-là, quant à moi, ne doit pas
être introduite. À l'occasion, cependant, en procédant par
d'autres voies, il arrive que la loi permette que l'objectif recherché
soit atteint sans pour autant que l'on fasse référence à
cette notion de socioculturel dans nos lois.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Schlesinger.
M. Schlesinger: Oui, il faut comprendre que ce que nous
cherchons, c'est de conserver notre identité à titre de
réseau juif, de pouvoir contracter entre les différentes
institutions, enfin, de conserver ce caractère de réseau.
Si vous me permettez, je vais saisir l'occasion de faire un pas en
arrière pour la question d'appel. Vous êtes passés assez
vite là-dessus, mais vous savez qu'il y a déjà dans la loi
actuelle les articles 147 et 148 qui prévoient un appel à la
commission dans certains cas. Ce que l'article 139 vise à faire, c'est
d'éliminer complètement tout appel même s'il y a une
procédure abusive, ce qui est contraire à l'esprit de la loi
québécoise à mon sens. Je n'ai rien contre l'esprit de la
loi qui prohiberait un appel à la commission pour ce genre de
décision qui, après tout, peut même éliminer une
institution ou un établissement qui existe depuis plus de 118 ans.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Orenstein.
M. Orenstein: Oui, je veux seulement ajouter aux remarques qui
ont été faites par M. le ministre disant que dans l'annexe nous
avons vu certains articles proposés et rien n'indique les mots
"socio-culturel". C'est sûrement un moyen pour obtenir
précisément le même effet. Nous avons souligné les
coopérations, nous avons souligné la question des contrats de
services. M. le ministre a indiqué que c'était supprimé
étant donné que, théoriquement, ça pouvait poser un
problème. Je pense qu'il n'est pas difficile de simplement l'amender
pour dire: "des contrats de services". Cela va éliminer le
problème théorique et ça peut devenir plus pratique.
M. Johnson (Anjou): C'est la distinction entre le contrôle
de l'opportunité et le contrôle de la légalité, que
vous connaissez. Je ferai remarquer que là où il y a un appel
possible en vertu du chapitre 48, c'est dans le cas de l'application de la
suspension du permis à l'article 146, mais pour des motifs qui
impliquent un caractère d'irrespect de la loi, notamment, si la personne
a commis une infraction à la loi, ne remplit plus les conditions
requises au permis, est insolvable ou ne peut assurer les services de
santé et les services sociaux adéquats.
Si le ministre, au sens de la loi, suspend un permis en vertu de
l'article 146, il m'apparaît tout à fait normal qu'il y ait un
droit d'appel. Dans ce qui est visé par les autres dispositions,
notamment à l'article 139, il s'agit d'un jugement au nom de
l'intérêt public et il s'agit d'un jugement d'opportunité.
Je pense que c'est très différent. Je ne pense pas qu'on doive
laisser aux tribunaux les jugements d'opportunité. Les jugements
d'opportunité doivent demeurer la responsabilité des pouvoirs
publics que sont la Législature, le gouvernement et le Conseil
exécutif. C'est dans ce sens-là.
M. Schlesinger: Vous avez raison, en effet, il y a une grande
différence. Il faut quand même respecter le fait que, lorsqu'une
décision peut abolir même l'existence d'un établissement,
même s'il y a ce pouvoir exécutif pour le faire, il faut quand
même avoir le droit non seulement de respecter la règle audi
alteram partem, sur laquelle vous êtes d'accord, d'après vos
commentaires, mais aussi le droit de comparaître, peut-être pas
devant les tribunaux, mais devant la commission, pour faire valoir des motifs
d'appel.
Les pouvoirs accordés au ministre sont tellement draconiens qu'il
faudrait avoir un moyen de les réviser ou de demander la
révision. Autrement, par le simple biais d'une ordonnance, on peut
complètement éliminer l'existence d'un établissement. Je
trouve que c'est un peu draconien.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Je ferai juste une remarque là-dessus.
Quand vous parlez de la commission, le parallèle que les juristes me
suggèrent, c'est celui du Tribunal d'expropriation. Jamais le Tribunal
d'expropriation ne se prononce sur l'opportunité de l'expropriation. Il
se prononce sur sa légalité ou les conditions l'entourant en
termes de dédommagement,
etc. L'opportunité n'a pas à être jugée, je
pense, par un tribunal administratif. Cela me paraît évident.
En ce sens, non seulement y a-t-il les garanties nécessaires sur
le plan immobilier quand on parle de fusion, mais, quant aux notions de permis,
je pense que la règle démocratique, encore une fois, doit jouer.
On ne peut pas chercher l'illusoire garantie d'un tribunal administratif dans
des jugements d'opportunité. Je pense que ce serait un
précédent inadmissible.
M. Schlesinger: Après tout, les établissements qui
ont été fondés par la communauté, qui ont
été payés par la communauté, qui ont
été maintenus à même les fonds communautaires, avec
le pouvoir accordé au ministre, tout cela peut disparaître
très facilement. Il me semble que le principe de
représentativité est un principe que vous endossez. S'il faut
être représentatif, il faut aussi donner le droit aux personnes
affectées d'avoir de plus amples recours qu'une simple décision
administrative.
Je ne peux pas, franchement, faire le lien entre ce domaine et le
domaine de l'expropriation. Le domaine de l'expropriation, c'est quand
même quelque chose d'appréciable en argent. Ce n'est pas la
même chose. Ici on parle de la destruction des services rendus à
une communauté par les institutions qui ont été
fondées pour servir à une communauté, qui ont
été fondées parce qu'il y avait un besoin. L'existence
même et les caractères de ces institutions doivent être
davantage protégés que sujets à un décret. Un
gouvernement peut décider, un moment donné que c'est plus
d'utilité publique, que ce soit ce gouvernement ou un autre
gouvernement. Je trouve que c'est inacceptable dans une démocratie de
n'avoir aucune avenue d'appel.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Encore une fois, je pense qu'on oublie une
couple de choses. Ce sont des fonds publics. Je comprends qu'en termes
d'acquisition on pourra me dire que, dans le cas de la communauté juive
notamment ou dans le cas d'autres institutions, il y a une participation de
fonds privés ou de fonds sui generis de la communauté ou du
groupe. Mais le budget d'administration, la santé publique,
l'intérêt public et l'argent que l'État met pour les
maintenir et les soutenir, ça reste quelque chose qui relève de
la Législature et du Conseil exécutif. Cela m'apparaît
absolument évident. Je comprends que vous disiez qu'il faut qu'il y ait
moyen d'être entendu; sûrement, en soi, intrinsèquement, il
n'y a pas de problème. Je vous dirai que je ne suis même pas
sûr qu'on ait besoin de ça dans les lois, parce qu'en pratique
c'est comme ça que ça se fait dans la réalité et
qu'il y ait des ouvertures au niveau de la loi pour un processus consultatif,
on a les notions de prépublication qui existent déjà dans
le cas de la fusion notamment, au nom de l'intérêt public, des
choses comme celles-là. Mais renvoyer à un tribunal administratif
une décision d'opportunité, cela m'apparaît tout à
fait incompatible avec le mandat, la légitimité et le devoir de
ceux qui exercent les fonctions exécutives.
M. Schlesinger: On peut peut-être aller jusqu'à
l'absurdité. Si le ministre décidait qu'il n'y a plus
d'utilité publique d'avoir l'hôpital général juif,
à ce moment-là, d'un coup, le permis ne serait peut-être
pas renouvelé et on se trouverait dans la situation où on a perdu
l'institution. Je ne trouve pas que ce soit du ressort tout simplement du
gouvernement de décider, d'un coup, que ce n'est plus d'utilité
publique. Il faut un moyen que la communauté ait de faire appel quelque
part.
M. Johnson (Anjou): J'ai très bien compris, M.
Schlesinger, ce que vous dites, mais je vous répète et je pense
que je veux que ce soit clair, et je pense qu'on aura peut-être
l'occasion, en troisième lecture, d'en discuter article par article.
Mais il reste qu'à mes yeux aucun tribunal administratif ne doit venir
infirmer ou confirmer une décision de cette nature. Mais je vais vous
dire que le premier qui, ici autour de cette table ou dans n'importe quel
gouvernement du Québec, penserait suspendre le permis de l'hôpital
général de votre communauté, je pense qu'il lui arriverait
une sanction bien pire que celle des tribunaux.
Le Président (M. Bordeleau): J'ai reconnu M. Finestone et
M. Orenstein. Peut-être après.
M. Finestone: M. le ministre, je vous assure que ce n'est pas un
problème juif, franchement. Je veux dire que ce n'est pas un
problème juif ça, je vous assure. C'est un problème
général et comme un homme qui est, de temps en temps un petit peu
politicien, j'ai beaucoup de sympathie avec votre point de vue. Mais
franchement, c'est un pouvoir qui découle de cela. Je conçois que
les ministres sont très intelligents et bien motivés. Ils ne
prendront pas de décision s'ils pensent que ce n'est pas au
bénéfice de toute la population. Mais c'est possible que vous
fassiez une erreur de temps en temps. Il y a une petite possibilité, au
moment où vous proposez ce projet de loi, une erreur peut continuer
jusqu'à la destruction de l'institution. La suggestion ici, c'est qu'on
doit avoir une occasion
d'examiner, non pas votre droit de prendre une décision, mais si
c'est bien basé sur les faits... (0 h 45)
M. Johnson (Anjou): Probablement pour clore cette partie du
débat, pour permettre à mes collègues de l'Opposition
d'intervenir -je sais qu'ils ont des choses à dire - d'une part, je
répète ce que je vous ai dit sur la notion de contrôle
d'opportunité et, deuxièmement, sur la notion
d'intérêt public qui n'est pas la fantaisie au gré du jour
du ministre qui se lève de bonne humeur ou pas ce matin-là. C'est
l'intérêt public. En plus, l'intérêt public peut
donner lieu à l'émission d'un bref par la Cour supérieure.
Si jamais on voulait faire la preuve et qu'on pouvait faire la preuve que ce
n'est pas dans l'intérêt public, rien n'empêche de recourir
aux tribunaux de droit commun à cet égard en termes de
contrôle de la légalité de la décision. Je vous
ferai remarquer - c'est ma dernière remarque aussi - que dans ces
débats extraordinaires où, pourtant, on balise
considérablement les pouvoirs que se donne le gouvernement ou le
ministre, selon le cas, on semble oublier qu'il ne s'agit pas de
dépanneur ou de commerce privé, il s'agit d'établissements
qui non seulement oeuvrent dans les secteurs public et parapublic au service
des citoyens mais qui sont également financés à même
les fonds des citoyens.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. J'ai
reconnu M. Orenstein père. Est-ce que c'est bien cela?
M. Orenstein: Hier matin, à dix heures,
c'est-à-dire jeudi dernier, on est maintenant vendredi - j'ai
plaidé devant le Tribunal du travail et j'ai énoncé la
même théorie qui est énoncée ce soir par l'honorable
ministre Johnson. J'ai expliqué que ce n'était pas au tribunal
d'adopter des lois, il ne peut qu'appliquer la loi telle qu'elle existe. S'il y
a une lacune dans la loi, c'est au gouvernement d'y remédier. Mais on ne
parle pas d'une règle générale dans le moment. On parle de
certaines restrictions seulement, pas des restrictions en
général.
Je suis d'accord avec la position qui a été prise par le
gouvernement il y a quelque temps. C'est un bon système.
L'administration des hôpitaux, des centres sociaux et des autres
institutions publiques doit être la responsabilité, dans une
grande partie, de la population; je suis d'accord avec cela. Mais ce n'est pas
suffisant que justice soit rendue, il doit y avoir aussi apparence de justice.
Je crois bien, à moins que je me trompe, que cela ne peut pas causer
d'ennui au gouvernement. Je pense que cela va donner le sens des
responsabilités à la population. Je pense que la population
québécoise est assez sage pour assumer cette
responsabilité et de ne pas en abuser. Au moins, il faut avoir
confiance. Elle a le droit de demander justice. Le Protecteur du citoyen
n'existait pas il y a 25 ans. C'est dernièrement qu'on l'a
créé pour qu'il fasse le pont entre le gouvernement et la
population d'un pays, la population d'une ville, la population d'une
province.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Orenstein. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je vais en premier lieu céder la parole
au chef de l'Opposition et, si vous me le permettez, je reviendrai par la
suite.
Le Président (M. Bordeleau): Très bien. Comme je
n'ai pas entendu d'objection, M. le chef de l'Opposition, j'ai pensé
qu'il y avait consentement.
M. Johnson (Anjou): II est implicite.
M. Ryan: C'est parce que j'ai déjà eu un traitement
différent à d'autres commissions.
Le Président (M. Bordeleau): Ah!
Mme Lavoie-Roux: Ici, c'est une commission très
démocratique.
Le Président (M. Bordeleau): II devait y avoir des
méchants. Ici, les gens sont bien gentils.
M. Johnson (Anjou): Sur le projet de loi no 1.6?
M. Ryan: Non, là, j'ai été bien reçu.
M. le Président, je voudrais dire aux représentants de la
communauté juive que nous sommes très heureux, du
côté de l'Opposition, de les accueillir ici ce soir. J'ai eu
personnellement l'occasion à de très nombreuses reprises au cours
des 35 dernières années de vérifier la qualité
exceptionnelle des services sanitaires et sociaux offerts à la
population par la communauté juive. Ce sont des services qui ont d'abord
été conçus pour une clientèle juive, mais qui sont
ouverts aussi à d'autres clientièles et je peux vous assurer
qu'ils sont très appréciés par de nombreux
Québécois qui ne sont pas de la communauté juive. C'est
pour cela que nous accueillons de ce côté-ci avec
énormément d'intérêt la détermination avec
laquelle vous défendez non seulement vos institutions individuelles mais
le réseau qu'elles ont été appelées à former
au cours des années. Il y a une complémentarité qui s'est
développée dans ce réseau entre les diverses institutions
qui en font partie, qui est un élément essentiel de sa
vitalité, à mon point de vue. Je pense que c'est très
important que le législateur
tienne compte de ce facteur dans les mesures qu'il veut prendre.
Vous avez souligné tantôt, M. Orenstein, quand vous avez lu
le mémoire, que la communauté juive a investi des sommes
considérables et continue d'investir des sommes considérables
à la fois dans le développement et le fonctionnement de toutes
ces institutions et services et je puis vous assurer que j'apprécie
vivement les très grands services que ce déploiement
d'énergie et de ressources rend à toute la communauté
québécoise et au premier chef à ceux qui en
bénéficient immédiatement, mais je pense que cela a
été, en de très nombreuses occasions, un exemple qui a
servi à toute la communauté. C'est pour cela qu'autant nous
tenons à ce que soit maintenu le caractère distinctif de vos
institutions, autant nous souhaitons que l'intégration à
l'ensemble du réseau puisse se faire dans des conditions acceptables
à la fois pour votre communauté et pour la communauté
québécoise en général.
Dans cette perspective vous formulez un certain nombre de
recommandations sur lesquelles je ne me prononcerai pas ce soir parce que je
vais laisser cela à nos représentants qui ont suivi les travaux
de la commission depuis le début. J'aurais seulement une couple de
questions à vous poser en guise d'introduction. Quand vous parlez de la
représentation des institutions au conseil régional, est-ce que
les recommandations que vous formulez dans l'annexe de votre mémoire,
quand vous dites qu'on pourrait porter le nombre de membres du conseil
régional de 14 à 17 et d'avoir deux représentants pour
certaines catégories plutôt qu'un seul, est-ce que cela dispose de
votre inquiétude? Est-ce qu'avec cela vous considérez que la
nécessité de tenir compte de considérations
socioculturelles serait satisfaite ou voulez-vous quelque chose de plusque cela encore?
Le Président (M. Bordeleau): M.
Orenstein.
M. Orenstein: C'est le conseil régional seulement quand
nous parlons de plus d'un représentant, c'est suffisant pour nous
assurer qu'aux conseils régionaux on va avoir un mélange de
groupes socioculturels.
M. Ryan: Si je comprends bien, au lieu d'avoir un
représentant des centres hospitaliers, il y en aurait deux, au lieu d'un
représentant des conseils de médecins et dentistes, deux, au lieu
d'un représentant des CLSC, deux, au lieu d'un représentant des
centres de services sociaux, deux; les centres de service d'accueil, deux au
lieu d'un. Vous trouvez que cela ferait 17 en tout et vous enlèveriez
les représentants des universités. Est-ce que vous les laissez
là, eux, ou les enlevez-vous? Et les cégeps, vous les
laissez?
M. Orenstein: Nous avons laissé les représentants,
nous avons seulement ajouté dans quelques-unes des catégories
deux représentants pour avoir cette possibilité.
M. Ryan: Vous ajouteriez six membres, en somme. Au lieu de 14,
ça ferait 20.
M. Orenstein: Oui, à peu près.
M. Ryan: Alors, vous ne demandez pas, par conséquent,
qu'il y ait des représentants, disons, de la communauté juive, de
la communauté chinoise, de la communauté grecque. Vous demandez
simplement qu'il y en ait six de plus.
M. Johnson (Anjou): Dans le mémoire, on évoque
qu'additionnellement au nombre il devrait y avoir des dispositions
spéciales qui tiennent compte de... Mais si je comprends bien ce que
vous dites, c'est qu'en permettant l'accroissement en termes de nombre, ces
choses-là peuvent jouer. C'est ce que je comprends.
M. Ryan: Cela veut dire que vous seriez satisfaits, si je
comprends bien, si, pour le conseil régional de la région 06...
C'est ça? S'il y avait un conseil de 20 membres au lieu d'un conseil de
14 membres. Si on incluait les modifications que vous proposez, il y aurait
assez de marge, assez de jeu pour assurer une meilleure diversité au
sein du conseil. Par conséquent...
Oui? Oui, d'accord, je vais écouter votre réponse.
M. Orenstein: Oui, monsieur, sur la question du conseil
régional, pour vous donner un exemple. Actuellement, pour les centres de
services sociaux, il y a trois sièges au conseil régional et,
actuellement, deux pour le Montréal métropolitain. L'autre,
c'était, une année, pour le CSSJF et une autre, pour Ville-Marie.
Je pense qu'avec deux représentants d'un groupe on peut avoir chacun
notre tour au conseil pour essayer d'avoir un "input" sur les décisions
du conseil régional.
M. Ryan: J'ai remarqué que vous ne formulez aucune
observation au sujet des pouvoirs des conseils régionaux. Est-ce que le
texte du projet de loi est acceptable à vos yeux de ce point de vue?
N'avez-vous pas d'inquiétude ou de préoccupations de ce
côté, sauf ce que vous avez dit pour les contrats de services et
les fusions?
M. Orenstein: M. le chef de l'Opposition, nous avons
indiqué au début que nos remarques étaient limitées
aux effets de la loi 27 sur la population juive et les
établissements juifs. Nous avons eu des inquiétudes sur
quelques-uns des pouvoirs; nous l'avons constaté, par exemple, pour le
pouvoir du ministre sur les questions en appel ou des choses semblables. Nous
avons essayé, autant que possible, de restreindre nos remarques à
cette dimension. Je dois ajouter que nous en avons trouvé une autre qui
dit qu'il peut y avoir des règlements si le ministre le croit utile, ou
quelque chose de semblable. Nous n'avons fait aucune remarque sur cela,
limitant nos remarques sur le comité juif, les problèmes
juifs.
M. Ryan: Sur l'hôpital Mont Sinai, pourriez-vous donner
quelques précisions?
M. Orenstein: L'hôpital Mont Sinai ne se trouve pas dans la
région 6, il se trouve actuellement dans la région 6B. C'est un
hôpital spécialisé. Mon père est le président
de cet hôpital. Cet hôpital est lié au comité juif de
Montréal, l'appui vient du comité juif de Montréal; il y a
beaucoup d'argent qui est donné à cet établissement par le
comité juif de Montréal. De plus, il y a des discussions, depuis
longtemps, sur le déménagement de cet hôpital, de
Sainte-Agathe où il se trouve actuellement, à Montréal. Le
comité a promis une somme de 3 000 000 $ ou 3 500 000 $ pour la
construction de cet établissement à Montréal. Je dois dire
que le Mont Sinai, comme les autres établissements, accepte des patients
qui ne sont pas juifs. Au Mont Sinai, il y a environ 65% des patients qui ne
sont pas juifs. Je dois dire qu'au Jewish General c'est plus de 50% des
bénéficiaires qui ne sont pas juifs, mais les deux sont
liés à notre réseau et sont appuyés par notre
communauté.
M. Ryan: Vous voulez que le caractère superrégional
de l'hôpital soit maintenu, soit préservé.
M. Orenstein. Le caractère superrégional est simplement
pour avoir un accès de la communauté juive de Montréal au
Mont Sinai, que cela ne devienne pas un hôpital régional,
seulement pour la région, et on a l'appui de la communauté de
Montréal.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Finestone.
M. Finestone: M. le chef de l'Opposition, un arrangement a
été fait à l'instigation de l'ancien ministre. La
population de Sainte-Agathe a besoin d'autres établissements pour les
personnes âgées; les gens ne veulent pas construire un nouvel
hôpital là, et ils nous ont pressentis. Ils nous ont dit: Vous
êtes intéressés à déménager le Mont
Sinai à Montréal et nous avons besoin d'autres
établissements pour la population de Sainte-Agathe; peut-être
qu'on peut faire un arrangement. Nous avons dit: Oui, c'est intelligent, on
veut en discuter. Il y aurait eu une possibilité de conclure cela avant
les élections mais, comme tout le temps, c'est une chose qui attendait
les élections et maintenant, on attend encore. L'offre que vous voyez
dans notre mémoire ici, pour dépenser une somme de près de
3 000 000 $, c'est pour encourager cet arrangement qui ferait l'affaire de la
population de Sainte-Agathe et celle de notre institution aussi.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je veux remercier également la
communauté juive d'être venue. J'ai l'impression que vous devez
avoir un "standing committee" qui examine les lois au fur et à mesure
qu'elles sont adoptées parce que vous avez réagi quand même
rapidement. Je pense que les préoccupations que vous exprimez,
peut-être dans une dimension moins grande, sont certainement aussi la
préoccupation d'autres communautés. Elles ont peut-être peu
d'institutions, mais je pense à la communauté chinoise, par
exemple. Si je pense à elle, c'est que j'ai eu à aller chez elle
il n'y a pas tellement longtemps. Je trouve intéressant que vous veniez,
au nom de la communauté juive, apporter cette préoccupation qu'on
doit avoir aussi à l'égard d'autres groupes culturels. Le
ministre ne s'est pas réjoui, mais il se disait: Vous n'insistez pas sur
les pouvoirs. Enfin, il semblait heureux que ce ne soit pas... Non, tout
à l'heure, dans vos remarques préliminaires. Je vous
écoute tout le temps, M. le ministre. (1 heure)
M. Ryan: Je vais essayer de corriger.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que vous avez expliqué que votre
préoccupation, vous vouliez la centrer sur cette dimension culturelle ou
de la communauté juive, mais j'ai quand même senti, même
à travers votre mémoire, si vous faites très peu allusion
à cette question de partage des pouvoirs et également à
travers les réponses que vous avez données, que cette
préoccupation est quand même sous-jacente, par exemple, quand vous
parlez du bénévolat qui peut disparaître, de la moins
grande motivation; tout ça est relié, en fait, au niveau de
participation qu'on laisse aux personnes localement. C'est dans ce sens, je
pense, que ça peut rejoindre des préoccupations que d'autres ont
exprimées beaucoup plus radicalement et directement que vous l'avez
fait. Je pense que c'est bien là. J'ai un seul point. Comme il semble
qu'on est tout à coup entouré de beaucoup d'hommes de loi,ça pourrait faire un sujet de discussion. On a abordé tout
à l'heure l'article 79. Le
président dit: Pas ce soir. M. le Président, c'est
à vous de les limiter. Sérieusement, vous avez dit: L'article 79,
on n'y a pas touché. Le ministre a expliqué et, d'ailleurs, je
pense que c'est de bonne foi que le ministre ait dit ça et je pense que
le ministre, tant qu'il sera ministre, respectera enfin l'interprétation
que lui-même fait de la loi où on dit, cependant: Un
établissement visé dans le paragraphe a de l'article 10, soit un
établissement public - en tout cas, je ne vais pas vous lire l'article -
dont les actifs immobiliers ont été acquis à même
les fonds provenant en majeure partie de subventions du gouvernement - ce qui
exclut ceux qui n'auraient pas été subventionnés
majoritairement par les fonds provenant du gouvernement.
D'ailleurs, il y avait eu passablement de contestation en 1979 au moment
de l'adoption de la loi 103 où, à ce moment, le gouvernement
arrivait, comme on le dit, avec ses grosses bottes. Cela a été
retiré. Mais il reste que, selon la façon dont serait fait - il y
a un terme juridique - le calcul de désintéressement, on pourrait
arriver, à un moment donné, selon ce calcul qu'on ferait,
à établir que ce qui appartient traditionnellement à une
communauté soit culturelle, religieuse ou autre, devient dans ce calcul
une institution dont les actifs immobiliers sont majoritairement
propriété du gouvernement, même si, au point de
départ, on n'a pas ce sentiment. Par exemple, je n'en nommerai pas, mais
on peut prendre un hôpital X, peut-être l'Hôtel-Dieu ou un
autre, je ne sais pas si cela s'applique à l'Hôtel-Dieu, où
la mise de fonds au point de départ a pu être très minime,
compte tenu que l'institution a 100 ans ou a 75 ans, etc., et que l'ajout par
la suite d'une aile ou d'une partie immobilière qui soit de même
grandeur, moins grande ou plus grande, peu importe, mais, compte tenu des
coûts auxquels le gouvernement aurait contribué dans une
étape ultérieure, dans un calcul de
désintéressement, pourrait faire que finalement cette
propriété soit déclarée comme ayant
été majoritairement fondée, construite par de l'argent
provenant du gouvernement et, ensuite, ce qui entrerait dans les actifs
immobiliers, c'est peut-être une autre chose à deviner. Moi, j'ai
des doutes à savoir que ceci soit absolument étanche du point de
vue de la protection d'un patrimoine religieux ou culturel dans un sens
très large. Je ne sais pas si vous avez dit que vous ne l'aviez pas
examiné, mais en tout cas, c'est une question que je me pose et
peut-être que le ministre aurait une réponse.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): C'est-à-dire que d'abord, dans ce
cas-là, on parlerait d'expropriation puisqu'on dit que si les actifs
immobiliers n'ont pas été acquis à même les fonds
publics, on ne peut pas procéder à l'application de l'article sur
la fusion et, si je poussais le type de raisonnement que la
députée de L'Acadie tient analogiquement quant au budget de
fonctionnement, je dirais: II n'y a rien non plus qui oblige le gouvernement
à fournir un budget de fonctionnement. C'est évident que si le
gouvernement fournit un budget de fonctionnement, c'est parce que c'est un
service public et que cela fait partie des décisions que l'État
prend de consacrer une partie des ressources de la collectivité qu'il
obtient par voie de taxation à la santé, il n'y a rien qui nous
oblige à donner un budget de fonctionnement à un
établissement qui ne serait pas subventionné par le gouvernement
ou dont les actifs immobiliers, c'est-à-dire, ne sont pas...
Mme Lavoie-Roux: C'est parce qu'elle rend des services à
la population que vous décidez de le subventionner.
M. Johnson (Anjou): Mais oui, c'est évident. C'est cela,
mais...
Mme Lavoie-Roux: Mais moi, je m'en tiens strictement aux actifs
immobiliers.
M. Johnson (Anjou): Ils rendent des services à la
population parce qu'ils ont des subventions et ils ont des subventions parce
qu'ils rendent des services à la population. Ce qu'on dit, dans le fond,
c'est que justement, ces choses-là, dans la réalité,
s'arbitrent en dehors de l'absurde.
M. Ryan: Je vais vous poser une question. S'il arrivait qu'une de
vos décisions entraîne des conséquences injustes, des
dommages, par exemple, pour une institution, ne serait-il pas possible de
prévoir un recours à ce moment-là, un droit d'appel pour
un dédommagement raisonnable?
M. Johnson (Anjou): Au chapitre de ce qui pourrait relever de la
fusion prenant un caractère d'expropriation sous l'article 79...
Une voix: Changement de vocation.
M. Johnson (Anjou): Ah! Changement de vocation, c'est régi
par d'autres...
M. Ryan: Oui, je sais bien.
M. Johnson (Anjou): ...et où c'est le critère de
l'intérêt public qui doit s'appliquer et il y a un droit d'appel
devant les tribunaux de droit commun par bref d'évocation ou autre bref
selon l'étape de la procédure administrative.
M. Ryan: Mais si vous avez tous les pouvoirs, les droits de
l'autre sont réduits d'autant, même en appel devant les
tribunaux.
M. Johnson (Anjou): Mais l'autre ici étant l'État
lui-même... C'est cela. Qui, finalement, peut arbitrer d'une notion
d'intérêt public, donc, qui peut arbitrer d'une notion
d'opportunité de jugement sur l'intérêt public mieux que le
législateur lui-même, mieux que le pouvoir politique
lui-même? C'est un débat assez fondamental, je pense, auquel nous
convie le chef de l'Opposition, mais je pense que la réponse est dans la
légitimité et le droit de taxation et le fait qu'on n'est pas
dans une république de bananes ici. On est dans une démocratie,
et la notion de décision ministérielle ne se fait pas en catimini
à trois heures du matin sans que personne ne s'en aperçoive. Cela
est publié dans la Gazette officielle. Il y a une série de choses
dans l'appareil démocratique. C'est un jugement sur notre système
démocratique que vous semblez poser, dans ce cas-là.
M. Ryan: Non, moi, ce que je crois comprendre dans les
représentations de la communauté juive...
M. Johnson (Anjou): Le juriste me confirme qu'en vertu de
l'article 407 du Code civil, le principe qui veut qu'on ne puisse pas - je vois
le député qui a l'air hésitant - sans
dédommagement... Si des torts sont causés, on est soumis au Code
civil. Je ne comprends pas autrement que de dire dans le fond... J'essaie de
voir quelle est l'alternative. L'alternative est de dire: II y a une
espèce de régie d'État où il y a des juges ou en
tout cas des gens qui relèvent du judiciaire, qui poseraient des
jugements d'opportunité de ce qu'est l'intérêt public et de
ce qu'est une décision qui vise à dispenser des soins à la
population avec l'argent du public et des décisions qui s'ensuivent. Je
ne comprends pas cela.
M. Ryan: Regardez, M. le ministre. À moins que je ne
comprenne mal, je vais poser le problème pour les témoins qui
sont ici, car c'est eux qui sont au centre du débat. Supposez que la
communauté juive investisse 3 000 000 $ dans une nouvelle installation
pour le Mont Sinaï et que vous, dans votre sagesse omnipotente, vous
décidiez, en vertu de l'article - est-ce que c'est l'article 79 ou... En
tout cas, l'article qu'ils ont évoqué - de changer radicalement
la vocation de cette institution.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas l'article 79.
M. Ryan: C'est plus loin.
Mme Lavoie-Roux: C'est l'article 88.
M. Ryan: L'article 88. Oui, en vertu de votre pouvoir sur le
permis.
M. Johnson (Anjou): Oui.
M. Ryan: À ce moment-là, cela entraîne une
orientation complètement différente des ressources qu'ils ont
investies là-dedans.
M. Johnson (Anjou): Oui.
M. Ryan: II me semble que, je ne sais pas, la notion de tort, en
tout cas, devrait être considérée d'une manière
spéciale. Il me semble que ça ne relève pas seulement d'un
article du Code civil.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): J'écouterai, si vous me le permettez,
un conseil fort sage, d'ailleurs, de ne pas creuser à cette heure-ci,
cette notion. Je suis sûr qu'on aurait un beau débat, mais je
pense qu'on a déjà assez glissé dans ce qui risque de
devenir un peu immodeste sur le plan de nos capacités juridiques
à 1 h 15 du matin. Le mémoire est là et les gens de la
communauté se sont fait entendre et fort bien, d'ailleurs. Ils nous ont
bien expliqué leur position et je pense qu'auprès de l'Opposition
ils ont eu un relais très précis de certaines de ces
préoccupations. Je pense qu'on aura tous les forums les meilleurs et
probablement que le bon sens devrait nous amener à considérer
qu'on refera ce débat dans un contexte où on est mieux
équipé pour le faire.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que...
Mme Lavoie-Roux: Je pense que monsieur voulait ajouter quelque
chose.
M. Orenstein: La question qui a été soulevée
ce soir à propos de l'article 79 amendant l'article 121 est assez
intéressante. Je ne veux pas poser une question pour répondre
à une question, mais la question que je veux poser, c'est la suivante.
Nous avons construit l'hôpital du Mont Sinaï il y a 72 ans
maintenant. Est-ce qu'on doit prendre l'évaluation en dollars d'il y a
72 ans ou en dollars de 1981 ou 1982? Je me rappelle bien quand on a
commencé à percevoir l'argent pour construire l'hôpital
juif général, Sir Mortimer B. Davis. J'étais assez jeune
à ce moment mais je me rappelle bien qu'on a demandé à mon
père de payer 500 i. Pour un petit marchand du boulevard Saint-Laurent,
500 $, c'est une somme énorme. Cela a pris cinq ans pour payer ce
montant.
Alors, est-ce qu'on parle des dollars qui ont existé en 1929 et
qu'elle est la valeur de ces dollars aujourd'hui? J'aimerais encore être
un jeune avocat...
M. Johnson (Anjou): Me Orenstein...
M. Orenstein: ... parce que je peux croire qu'on aura beaucoup de
litiges sur cette question, mais malheureusement, je suis trop vieux maintenant
pour m'engager trop là-dedans. Alors, je vais me taire, mais il faut
considérer cela.
M. Johnson (Anjou): D'accord. Me Orenstein, je prends bonne note
de cette préoccupation et de vos nombreuses questions. Nous aurons sans
doute l'occasion de pousser plus à fond ce débat au niveau de la
commission parlementaire. Merci.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Finestone, je pourrais peut-être vous donner un petit mot de la
fin vu que la commission est à...
Mme Lavoie-Roux: On recommence demain matin.
Le Président (M. Bordeleau): ... son ajournement ou
près.
M. Finestone: Je vais faire une observation très
brève. Cela a été très gentil à vous
d'entendre notre mémoire. Je sais qu'il y aura des difficultés
avec ça. Les questions qu'on vient de discuter étaient
très intéressantes et cela m'intéresse aussi, mais je ne
veux pas perdre de vue les choses primordiales qui nous ont incités
à venir ici. Ce ne sont pas ces questions. Il y a une question
primordiale pour nous, c'est de maintenir les liens entre nos institutions pour
quelques raisons qui nous intéressent, la préservation de nos
sociétés. Et c'est une chose exactement comme ça. Et aussi
pour les législateurs et pour le ministère, nous avons
démontré la chose que nous mettons sur la table, nous travaillons
beaucoup, très fort. (1 h 15)
Le personnel auxiliaire de mon hôpital compte 10 000 personnes. Et
on y met chaque année notre argent, exactement parce que ces
institutions sont très précieuses pour nous. Je ne veux pas
perdre votre appel, M. le ministre et tous les législateurs, sur l'autre
question.
Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup. Au nom des
membres de la commission, je vous remercie madame, messieurs du Congrès
juif canadien, d'être venus présenter votre mémoire devant
la commission.
Mme Lavoie-Roux: Merci. Bonsoir.
Le Président (M. Bordeleau): Bonsoir. Alors la commission
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 1 h 16)