To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Planning and the Public Domain

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Planning and the Public Domain

Version finale

39th Legislature, 2nd Session
(February 23, 2011 au August 1, 2012)

Tuesday, August 23, 2011 - Vol. 42 N° 14

Consultation générale et auditions publiques sur l'avant-projet de loi - Loi sur l’aménagement durable du territoire et l’urbanisme


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Morin): S'il vous plaît! Comme j'ai constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'aménagement du territoire ouverte. Comme à l'habitude, vérifiez vos téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques à l'égard de l'avant-projet de loi intitulé Loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.

Le Président (M. Morin): Merci, Mme la secrétaire. Donc, aujourd'hui, l'ordre du jour se résume ainsi: tout à l'heure, on reçoit la Coalition québécoise sur la problématique du poids et Centre d'écologie urbaine de Montréal; 10 h 30, L'Association des architectes paysagistes du Québec; 11 h 30, Conseil du patrimoine religieux du Québec. On a une suspension. On reprend nos travaux à 14 heures: Groupe de réflexion et d'action sur le paysage et le patrimoine; 15 heures, Fédération des chambres de commerce du Québec; 16 heures, Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs; et enfin 17 heures, Caucus des cités régionales de l'Union des municipalités du Québec; et 18 heures, ajournement.

Donc, vous êtes au courant qu'on a 60 minutes, dont 15 minutes pour l'exposé et 45 minutes pour les échanges avec les membres. J'inviterais donc la représentante de la Coalition québécoise sur la problématique du poids et Centre d'écologie urbaine de Montréal à se présenter et nous présenter les personnes qui vous accompagnent.

Auditions (suite)

Coalition québécoise sur la problématique du
poids et Centre d'écologie urbaine de Montréal

Mme Pellerin (Suzie): Bien, bonjour, bon matin. Je suis Suzie Pellerin, je dirige la Coalition québécoise sur la problématique du poids, qui réunit près de 150 organisations issues du monde municipal, scolaire, de la santé, qui sont tous préoccupés par l'épidémie actuelle d'obésité.

Alors, bon, pour m'accompagner aujourd'hui, je vous présente Annie Rochette, qui est du Centre d'écologie urbaine de Montréal, ainsi que Me Marc-André LeChasseur, qui est avocat spécialisé en droit municipal.

Au Québec, bien, près de un enfant sur quatre souffre d'embonpoint ou d'obésité. La problématique de l'obésité est complexe, influencée par différents facteurs. Bien que les choix d'habitudes de vie relèvent de l'individu, ils sont conditionnés par l'environnement bâti dans lequel on vit, c'est-à-dire l'environnement physique qui est construit par l'homme. Par exemple, plusieurs savent qu'on doit manger cinq à 10 fruits et légumes par jour, qu'on doit faire 30 minutes d'activité physique, mais, si on n'a pas d'accès ou, encore, ce n'est pas disponible, à ce moment-là on ne peut malheureusement pas répondre aux exigences. En mettant en place des environnements favorisant un mode de vie physiquement actif et une saine alimentation, nous contribuerons à réduire ensemble l'obésité ainsi que les maladies associées, comme le cancer, le diabète de type 2, les maladies cardiovasculaires.

Les récentes données canadiennes sur l'activité physique révèlent que seulement 15 % des adultes et seulement 7 % des jeunes atteignent le niveau d'activité physique recommandé. Cette situation est en partie causée par l'environnement dans lequel nous vivons, qui influence de différentes façons nos modes de vie. D'abord, bien, la popularité de l'automobile comme moyen de transport, qui a largement dépassé la marche et le vélo. Sachez pourtant que chaque tranche supplémentaire de 60 minutes par jour passée en voiture, que ce soit comme conducteur ou passager, bien, ça correspond à une hausse de 6 % de la probabilité d'être obèse.

Depuis 30 ans, les enfants marchent de moins en moins pour aller à l'école. En 1971, ils étaient 80 % à marcher pour se rendre à l'école; aujourd'hui, les récentes données nous indiquent qu'ils sont seulement 30 % à le faire. C'est clair que toute la question du sentiment de sécurité, le fait qu'on ait conçu aussi les villes d'abord pour l'automobile et non pas pour les déplacements actifs, bien, ça a une influence certaine.

Donc, les experts s'entendent sur l'importance de favoriser le transport actif comme la marche et le vélo pour contrer la sédentarité et favoriser un mode de vie physiquement actif. Donc, l'entretien et le développement du réseau routier devraient aussi tenir compte de la présence des cyclistes et des piétons, par la mise en place de trottoirs, de pistes cyclables, de mesures d'apaisement de circulation, sachant que chaque kilomètre parcouru à pied, sur une base quotidienne, est associé à une diminution de près de 5 % de la probabilité d'être obèse.

L'alimentation des enfants et des adultes est aussi influencée par le milieu de vie. Par exemple, plusieurs études ont démontré que la présence de restaurants rapides près des écoles, bien, accroît le risque d'obésité. L'Institut national de santé publique est d'ailleurs venu présenter dans la première phase des auditions, et, eux, ils chiffrent à 37 % le nombre d'écoles publiques au Québec qui est situé à moins de 15 minutes de marche d'un restaurant rapide.

L'obésité est engendrée, donc, par différents facteurs parmi lesquels l'environnement bâti occupe une place importante. Ainsi, les municipalités occupent un rôle stratégique dans la lutte à l'obésité et la prévention des maladies chroniques. Leurs interventions en matière d'aménagement du territoire ont des impacts immédiats sur les environnements et les modes de vie des citoyens. Je vais passer maintenant la parole à Mme Annie Rochette.

**(9 h 40)**

Mme Rochette (Annie): Bonjour. Donc, je vais vous parler au nom du Centre d'écologie urbaine de Montréal. Notre organisme a pour mission de proposer et de promouvoir des pratiques et des politiques publiques qui rendent les villes plus écologiques, démocratiques et en santé. L'aménagement urbain qui favorise les transports actifs est un de nos axes d'intervention.

L'aménagement du territoire a des effets directs sur la santé des communautés, qui est l'un des éléments principaux du développement durable. Un urbanisme favorable à la santé améliore à la fois la qualité de vie et l'environnement bâti. Donc, les questions de santé, de bien-être et de qualité de vie doivent absolument être envisagées dans la Loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme.

La santé et le développement durable sont intimement liés l'un à l'autre. Comme il est énoncé dans la Stratégie gouvernementale de développement durable 2008-2013, les principes de développement durable doivent être pris en compte dans la planification territoriale des municipalités locales, des MRC et des communautés métropolitaines, mais celles-ci doivent être outillées pour pouvoir le faire.

Les études ont démontré que la densité d'occupation, les systèmes de transport, les modes d'occupation du sol et le design urbain peuvent avoir d'importantes répercussions sur la santé des populations. Tous s'entendent sur la nécessité de favoriser la densité et une plus grande mixité des modes d'occupation du sol afin d'accroître l'accessibilité, la proximité des services des commerces, des lieux de travail, etc. Les experts insistent en particulier sur l'importance d'agir lors de la construction de nouveaux développements résidentiels ou de la revitalisation d'anciens quartiers en utilisant des instruments comme les règlements de zonage pour densifier les développements immobiliers, promouvoir la mixité des modes d'occupation du sol, augmenter la connexité des rues qui permettent des parcours directs à pied ou à vélo, et aménager des trottoirs, des voies cyclables ainsi que préserver ou créer des espaces verts, des parcs, des terrains sportifs.

L'environnement bâti a le privilège d'atteindre toute la population, peu importent son âge, le sexe, les aptitudes physiques, l'origine ethnique ou la situation économique. L'urbanisme a la possibilité ainsi que la responsabilité de réduire les inégalités qui touchent à la santé. Un urbanisme qui ne favorise pas la santé contribue à l'augmentation des dépenses de santé, de celles des services de police, des services sociaux, il alourdit aussi la charge économique et sociale générale des individus et des entreprises.

Mme Pellerin (Suzie): En somme, le projet de loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme est une occasion pour les municipalités d'occuper un rôle stratégique en matière de saines habitudes de vie. La loi doit donc offrir des leviers pour permettre aux municipalités de favoriser la santé. Par conséquent, il est nécessaire de préciser et aussi de présenter les orientations gouvernementales avant l'adoption du présent projet de loi. Ainsi, dans le respect de l'autonomie du monde municipal, la Loi sur l'aménagement durable et l'urbanisme doit comprendre des dispositions qui vont permettre d'élargir les références à la santé de manière à ce qu'elles facilitent le processus de classification et de développement du territoire.

En résumé, voici nos recommandations en ce qui a trait aux orientations gouvernementales. Il faudrait préciser que la santé publique, notamment les saines habitudes de vie ou, plus précisément, un mode de vie physiquement actif ou une saine alimentation constitue une base naturelle de la vie. Il faudrait aussi préciser les rôles et responsabilités de chacun.

Nous recommandons donc de considérer, dans les orientations gouvernementales, les différentes réalités des municipalités du Québec. Par exemple, bon, chaque municipalité pourrait adapter les actions en matière d'aménagement du territoire à sa réalité, mais en respectant les principes et les orientations favorables aux saines habitudes de vie définies par le gouvernement. Par exemple, ce pourrait être que, d'ici 2032, les plans d'urbanisme des municipalités du Québec comportent des mesures contribuant à ce que x % de la population adopte un mode de vie physiquement actif ou encore que x % de la population ait accès à des aliments sains à moins de 10 minutes en voiture en milieu rural ou à moins de 10 minutes à pied en milieu urbain. À ce moment-là, les municipalités pourraient atteindre le même objectif, mais l'adapter à sa réalité. Il faudrait aussi inclure une référence directe aux principes énoncés à l'article 6 de la Loi sur le développement durable dont le premier principe porte sur la santé et la qualité de vie.

Concernant les énoncés de vision stratégique, il faudrait mentionner, de façon plus explicite, l'impact de l'environnement bâti sur la santé, les habitudes de vie et le poids.

Mme Rochette (Annie): Selon nous, il serait aussi bien d'inclure des critères et du contenu obligatoires pour le schéma d'aménagement et le plan d'urbanisme. Concernant les schémas d'aménagement et de développement du territoire, nous suggérons de consolider les passerelles entre la santé publique et l'aménagement en assurant la participation des professionnels de la santé à leur révision, donc à la révision des schémas. Aussi, d'avoir recours, de manière plus systématique, aux études d'impact sur la santé lors de la construction ou de la rénovation d'infrastructures diverses nous semble également une avenue prometteuse, un peu à l'instar de ce qu'on fait en environnement. Pour l'instant, on procède à des études d'impact sur la santé des couleuvres dans les territoires, par exemple, mais on n'en fait pas encore sur la santé des humains qui y vivent.

Le Président (M. Morin): Bonjour.

Mme Pellerin (Suzie): Bien, dans le cadre d'un règlement à caractère incitatif, il faudrait aussi préciser qu'une norme de remplacement ne devrait pas aggraver les risques en matière de santé publique, de sécurité publique ou de protection de l'environnement.

Concernant l'environnement scolaire, élaborer des critères par voie de règlement afin que le MELS tienne compte notamment du potentiel piétonnier, de la densité, de la mixité avant d'autoriser la fermeture ou l'ouverture d'une école. Bon, le choix des terrains pour les futures écoles pourrait notamment faire l'objet de tels critères. Il est malheureux, par contre, parce qu'il y a déjà 20 nouvelles écoles qui seront construites prochainement et qui ont été annoncées, et on n'a peut-être pas toujours tenu compte, là, de ces éléments-là dans le choix des terrains. Puis pourquoi pas en tenir compte aussi pour l'ensemble des édifices publics? Donc, d'avoir en tête, là, le potentiel piétonnier, s'assurer que c'est au coeur des quartiers résidentiels, et, à ce moment-là, on atteindra nos objectifs de mixité.

Il faut aussi encourager les municipalités à constituer des environnements scolaires limitant les restaurants offrant de la malbouffe ainsi que prévoyant des aménagements pour limiter ou apaiser la circulation routière.

Mme Rochette (Annie): Dans les nouveaux projets immobiliers ou les projets de revitalisation de quartiers déjà existants, nous recommandons de prévoir une proportion du territoire qui serait préservée et non monnayable pour les parcs, les espaces verts, les espaces récréatifs et de loisirs, et les pistes cyclables.

Quand on parle de parcs ou d'espaces verts, on souhaite qu'il y ait des critères qui soient établis pour que ça soit des espaces suffisamment grands pour permettre l'activité physique des enfants. Souvent, avec les promoteurs, il va y avoir des négociations qui vont mener à la création d'un petit espace par un promoteur dans un nouveau projet, mais un miniparc, ce n'est pas suffisant pour que des enfants puissent s'activer physiquement et donc que ça contribue à leur santé. Donc, on espère que les critères vont permettre d'établir des espaces qui sont suffisamment grands dans ces nouveaux développements.

Mme Pellerin (Suzie): Il est également à noter que, dans le Plan d'action gouvernemental de promotion des saines habitudes de vie et de prévention des problèmes reliés au poids 2006-2012 -- Investir pour l'avenir, le MAMROT s'est engagé, dans le cadre des prochaines orientations gouvernementales en matière d'aménagement du territoire, à intégrer des objectifs qui vont favoriser l'aménagement des espaces urbains pour encourager les déplacements actifs, il faut s'en rappeler.

Pour conclure, les pouvoirs et les responsabilités doivent être délégués au niveau approprié d'autorité. Le développement du territoire est et doit demeurer une responsabilité des élus municipaux. Toutefois, le gouvernement doit faire preuve de cohérence, doit s'assurer que le développement et l'aménagement des villes soient favorables aux saines habitudes de vie. Le gouvernement doit également offrir les moyens et les ressources nécessaires aux municipalités pour rendre le tout réalisable.

Je vous remercie d'avoir lancé la tournée Au Québec, on aime la vie, qui a permis finalement à différentes municipalités qui sont partenaires de la coalition, d'autres qui ne le sont pas, de s'engager dans le domaine des saines habitudes de vie. On sent vraiment une volonté de la part des municipalités de s'engager en ce sens-là. Parfois, malheureusement, c'est les moyens qui manquent pour réaliser les ambitions. Alors, je vous remercie.

Le Président (M. Morin): Merci, Mme Pellerin et Mme Rochette. Maintenant, nous en sommes à la période d'échange. M. le ministre.

**(9 h 50)**

M. Lessard (Frontenac): Oui. Merci, M. le Président. Donc, bienvenue, Mme Pellerin, Mme Rochette et Me LeChasseur, merci pour la présentation puis l'intérêt que vous portez. Tout le monde se souvient, donc on est dans un avant-projet de loi, c'est une réforme importante de la loi sur l'aménagement et l'urbanisme durable. On introduit donc la notion de développement durable à l'intérieur, donc, pour toute considération de planification. Et tout le monde comprend bien qu'il y a un lien entre l'aménagement de son territoire et l'incidence sur la vie active des gens. Alors donc, je pense que c'est très à propos que vos regroupements viennent présenter en commission parlementaire, puis merci de ce souci-là.

Ça me faisait penser... Puis là, à force de vous entendre sur les saines habitudes de vie, ça m'a fait rappeler qu'on a amorcé une initiative avec un groupe qui était composé de Jean-Guy Breton, l'ancien maire des Etchemins, avec Hélène Laurendeau, la nutritionniste bien connue, et un joueur de hockey, Stéphane Quintal, qui ont fait le tour d'une dizaine de villes du Québec, là, pour les saines habitudes de vie, et des ambassadeurs, et avec des déclarations d'engagement formelles de chacune de ces villes-là. Je me souviens, entre autres, de Salaberry-de-Valleyfield qui s'engage à faire en sorte que, dans sa municipalité, ils puissent, donc, faire de l'aménagement qui favorise le transport actif... des aménagements, donc l'accessibilité, etc., qu'on favorise la marche. Donc, ça se traduit dans le patrimoine bâti de la ville, donc, une série d'engagements que les villes ont commencé à prendre, comme quoi aussi tout ne passe pas par la loi.

Je comprends que tout le monde voudrait que ce soit dans la loi, puis la loi va s'assurer que tu vas perdre du poids, puis la loi va s'assurer que tu n'ailles pas à un certain magasin de fast-food, puis la loi va... Il y a beaucoup de vertus liées à la loi, mais il y a beaucoup de vertus liées aux orientations gouvernementales aussi, et là-dessus, nécessairement, les orientations teintent les lois et les comportements attendus aussi des... Donc, on peut s'inscrire dans une tendance, et je pense qu'il faut combattre actuellement un des plus grands fléaux de l'histoire qu'est l'obésité, et ça passe par ton alimentation, ça passe aussi par ta vie active, donc des gens moins sédentaires, et on va le retrouver dans ta rue. Si, à toutes les fois que tu sors de ta maison, tout t'empêche de faire un pas, il y a un problème, ce qui veut dire qu'il faut favoriser quand même la marche, bon, comme on a pu faire avec les pistes cyclables, comme on a pu faire, donc, dans certains parcs qui favorisent même d'aller promener ton chien s'il le faut, pour éviter de tout le temps prendre ta voiture pour aller à l'épicerie, que tout favorise un déplacement par la voiture, donc, plutôt que de favoriser...

Même, j'entendais, je suis de la génération qui allait à école à pied à quelques kilomètres de la maison. Alors, la cuvée des années soixante-deux, là, a donné pas mal de cohortes. On descendait le village pour aller à l'école en bas. Alors donc, dans ce temps-là, c'était correct. Je ne sais pas si la préoccupation sur la sécurité des enfants a amené le fait qu'il faut que l'autobus passe à la porte de chaque maison pour s'assurer qu'ils se rendent à l'école par un transport, ce qui veut dire qu'ils ne marchent plus. Dans le temps, le bicycle à pédale existait, puis c'était le moyen de transport par excellence -- en tout cas, dans mon village. Alors donc, ça a été remplacé, puis maintenant, là, pour des raisons de sécurité parfois, on veut qu'ils prennent absolument l'autobus. J'ai été maire de la ville de Thetford, je me souviens d'avoir eu des appels parce que l'autobus ne passait pas au coin de telle rue, qui était la quatrième, puis d'autres, la sixième, puis qu'ils se trouvaient même à quelque 100 mètres de l'école, et ça semblait inacceptable parce que là il y avait une raison, il fallait qu'ils passent un boulevard ou autre, alors que, dans notre temps, on passait toutes les rues à travers, etc. Alors, ça a changé.

Mais, concernant, donc, les présentations que vous nous faites, nécessairement les orientations gouvernementales, la Direction de santé publique est venue faire des présentations, et nécessairement c'était l'occasion de venir nous présenter quelque chose, mais des fois -- je vous donne un petit devoir -- si vous êtes capables de nous aider à construire des outils pour aider les municipalités à prendre des meilleures décisions au sein des objectifs qu'on vise tous comme société... c'est vrai à l'agriculture, c'est vrai dans l'alimentation, c'est vrai dans ce qu'on exige de nos transformateurs de diminuer pas seulement les mauvais gras, mais aussi les sucres et peut-être le sel, la prochaine, ce serait de s'occuper du sel aussi. Alors donc, il y a des sociétés, comme New York ou autres, qui ont changé même la composition alimentaire en visant des objectifs bien précis, à cause des obésités énormes qu'ils vivaient puis des problèmes qu'il y a sur la santé publique, etc. Donc, il y a différentes actions qui doivent être faites dans différents ministères pour ce qui est de l'objet.

Maintenant, c'est sûr que l'objet de la loi, bon, les orientations gouvernementales, au nom du développement durable, qui comprennent nécessairement tout l'aspect de santé, santé publique, santé communautaire, l'esprit de la nouvelle loi est de diminuer et donner plus d'autonomie nécessairement aux municipalités, moins de contrôle gouvernemental, moins de paperasse, etc., donc une signature plus moderne qui donne aussi beaucoup plus de latitude aux municipalités, donc aux différents paliers de planification, mais qui exige aussi un nouvel ordre de planification au niveau métropolitain. Donc, les deux plans métropolitains d'aménagement du territoire, au nom de l'attractivité, la compétitivité, qui tiennent compte des objectifs de densité alentour du transport organisé, donc du transport collectif, favoriser que les gens se déplacent, donc c'est au coeur, ça se sent, là, dans le corps de l'acte.

Maintenant, on ne va pas aussi loin que de forcer des réglementations qui décrivent des contenus minimaux ou obligatoires pour respecter des objectifs de santé publique ou santé... On ne se rend pas jusque-là, vous voyez, dans la signature. Comment vous voyez votre participation à l'intérieur de... outre de venir présenter en commission parlementaire, qui est très bien, mais on vous demande de franchir un pas de plus dans des initiatives qui sont amorcées... Parce qu'il y a de la prévention, il y a de l'éducation, puis parfois il y a du contenu obligatoire. Comment vous voyez ça, ce rôle-là? Parce que je vois que vous avez écouté aussi ce que les autres ont dit avant. Vous vous inscrivez comment, dans la vie active, d'avoir à vivre tous les jours le fait de combattre l'obésité?

Le Président (M. Morin): Mme Pellerin.

Mme Pellerin (Suzie): Dans le fond, on a la chance, au sein de la coalition, de réunir différents partenaires, de nombreuses municipalités. Certaines sont partenaires officielles de la coalition, d'autres sont des partenaires non officiels mais avec qui on transige puis on partage, on échange.

C'est certain que la coalition rend disponible l'ensemble du contenu qu'on vient de vous présenter, le contenu du mémoire aussi est à la disposition des municipalités, ce qui leur permet finalement de cheminer, de prendre conscience, d'être aussi au fait des études scientifiques sur la question, donc un partage de connaissance en ce qui a trait à l'impact de la santé en lien avec l'aménagement du territoire.

Aussi, bon, on est parrainés par l'Association pour la santé publique du Québec, qui a produit un guide à l'intention des municipalités qui désireraient réglementer l'offre de malbouffe autour des écoles. Il y a eu une expérience pilote avec trois municipalités: Lavaltrie, Baie-Saint-Paul et Gatineau. Et, dans ce cadre-là, bien, on conclut qu'il y avait une possibilité légale... Tu sais, oui, ça tient la route, là, au niveau de la faisabilité, au niveau juridique, urbanistique et politique.

Ensuite, le Wikicipal a été lancé tout récemment. Il y a des municipalités qui sont partenaires de la coalition puis qui nous indiquaient qu'il y avait énormément de demandes de programmes, justement suite... Ça a eu son effet, votre tournée, M. le ministre, puisqu'ils ont dit: Bien, écoutez, tout le monde vient nous voir avec différents programmes, ils veulent qu'on s'engage dans le domaine des saines habitudes de vie, mais on ne sait pas trop comment réagir à la demande.

Donc, différents groupes... plus d'une dizaine de groupes, on s'est réunis et nous traitons de manière quotidienne avec les municipalités. On a décidé de développer un outil informatique qui s'appelle le Wikicipal, qui réunit en un même lieu l'ensemble des ressources à la disposition des municipalités qui seraient intéressées à s'engager dans le domaine des saines habitudes de vie. Alors, à ce moment-là, la municipalité qui veut, par exemple, adopter une politique alimentaire dans son aréna a différentes ressources, des personnes ressources, de la documentation.

Et, en phase II, bien, ça va permettre aux municipalités même de vraiment... on aurait le vrai Wiki, là, au sens propre. Donc, la municipalité pourrait interagir, dire: Bien, écoutez, moi, j'ai adopté telle politique; si vous voulez avoir ma documentation, communiquez avec telle personne. Donc, oui, il y a un souci, là, de travailler, répondre aux besoins des municipalités sur une base quotidienne.

Toutefois, c'est aussi nécessaire d'agir à tous les niveaux: on va développer des outils, des supports, mais également un encadrement ou une orientation très claire qui va nous permettre une cohérence sur l'ensemble au niveau de la province.

M. Lessard (Frontenac): Alors, merci. Donc, c'est des actions...

Le Président (M. Morin): Oui, un instant, M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Oui?

Le Président (M. Morin): Vouliez-vous ajouter quelque chose, Mme Rochette?

Mme Rochette (Annie): Je pourrais parler un peu de ce qu'on fait au Centre d'écologie urbaine de Montréal. Donc, on mène un projet dont la Coalition poids est partenaire, qui vise à repenser l'aménagement urbain dans les quartiers de villes comme Montréal mais qui pourrait aussi très bien se reproduire dans des plus petites municipalités. Donc, c'est un projet qui vise à repenser l'aménagement urbain pour favoriser les transports actifs.

Et un des volets, le principal volet de ce projet est de mener des processus participatifs de planification de quartier qu'on dit verts, actifs et en santé. Donc, des quartiers qui proposent des aménagements pour les piétons, pour les cyclistes, qui revoient le partage de la rue pour que tous sachent que la rue est un espace public, donc qui devrait être à la disposition de tous, et qui proposent aussi plus de verdissement, donc un environnement où il fait bon marcher, se déplacer en vélo en toute sécurité, donc on regarde aussi les besoins particuliers des enfants qui sont une population particulièrement vulnérable.

Et, dans ces projets-là, on travaille -- comme je disais, c'est un projet... ce sont des processus participatifs -- donc avec la communauté, les citoyens, les organismes, les commerçants, mais aussi l'administration municipale. Donc, il y a des représentants de la ville centre de Montréal qui sont impliqués, des professionnels des arrondissements dans lesquels les quartiers où on travaille se situent. Donc, on travaille avec eux en collaboration, ils participent aux différentes activités, des ateliers de design, et tout ça. Donc, on a une très bonne collaboration avec les arrondissements. La participation des professionnels nous permet de développer des solutions qui sont réalistes, qui sont adaptées au milieu.

Et, en même temps, nous, on apporte des idées nouvelles, parce qu'on regarde aussi ce qui se fait ailleurs, on regarde les meilleures pratiques qui ont été expérimentées à Montréal, hors Montréal, au Québec et ailleurs dans le monde aussi. Et on est en train, après avoir mené des projets pilotes à Montréal pendant deux ans, de développer une stratégie pour voir comment on pourrait travailler avec d'autres municipalités au Québec. Donc, comme je disais, ça pourrait être des municipalités de plus petite taille; même des villages avec un noyau urbain seraient tout à fait adaptés à ce genre de projet aussi.

**(10 heures)**

Le Président (M. Morin): M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Oui, c'est ça. Donc, c'est intéressant de vous entendre là-dessus parce qu'il y a des choses... beaucoup de choses qui se font. On regarde aussi la nouvelle tendance des éco-quartiers ou les quartiers d'Agenda 21, à Montréal principalement et dans d'autres régions, Baie-Saint-Paul, vous avez mentionné, qui a son Agenda 21, donc qui permet de planifier son développement autrement. On a vu La Cité verte ici, à Québec, les quelques quartiers d'Agenda 21, cette nouvelle tendance là où on se déplace, où on tient compte de l'impact de l'homme aussi sur sa santé et sa santé publique, en général.

Si je reviens dans le cadre de la loi, nécessairement, on donne cette latitude-là, puis on essaie, vous avez parlé d'impact, d'étude d'impact, on se soucie de la petite couleuvre zébrée dans le coin de l'échangeur Turcot, mais on ne se questionne pas sur l'ensemble. Il y a des outils maintenant qu'on met à la disponibilité de ceux qui auraient à prendre des décisions. Je prends Lévis, qui ont fait un centre des congrès: ça change, il y a quelque chose qui change sur l'environnement, ils doivent tenir compte de l'impact sur le trafic, du déplacement des personnes, de la sécurité publique, de la sécurité... etc. Donc, on leur demande... Et c'est sûr que les municipalités ont vu ça comme une contrainte additionnelle. C'est moins de paperasse vers le gouvernement, mais c'est plus de paperasse pour répondre à sa population. Et ça, le geste qui est posé dans l'avant-projet, c'est: il faut parler à la population qui vit soit les conséquences d'une mauvaise planification ou d'une bonne planification, et nécessairement on essaie de les intégrer dans ce projet de société là. Alors donc, pour les municipalités, ils voient comme une contrainte additionnelle qu'est-ce que ces rapports d'impact là ou d'analyse d'impact... Ce n'est pas de l'impact environnemental, là, on se distingue de ça, mais il y a certains groupes, comme le conseil du patronat de l'environnement, où on a demandé de nous aider à formuler ou à trouver un outil assez simple pour donner, donc, et mieux équiper les municipalités et... pas les apprivoiser, mais les mettre dans un environnement où c'est facile d'utilisation et que ça donne une référence ou un repère, parce que, si on croit au développement durable, il faut être capable de mesurer l'impact. Donc, là, on a quelques critères, là, pour dire: Bien, après 10 ans, on s'est-u améliorés en faisant tout ça? Il faut avoir quelques critères, là, pour être capable de s'évaluer. Et l'évaluation, en général, les gens n'aiment pas ça, sauf que, pour voir si la société progresse, on introduit dans la loi ces notions-là. Est-ce que vous pensez qu'on est dans la bonne direction? Et je sais que c'est dans le critère de développement durable, mais est-ce que c'est quelque chose que vous voyez que c'est difficile à relever ou pas?

Le Président (M. Morin): Mme Pellerin.

Mme Pellerin (Suzie): Oui. C'est certain que, lorsqu'on parle de développement durable, il y a un souci pour les générations futures. Donc, d'évaluer l'impact est, selon nous, un incontournable. Il faut aussi être réalistes selon l'ampleur des travaux. C'est certain que, si on impose une évaluation d'impact pour chaque décision municipale, changer les fenêtres, et tout ça, ça deviendrait plutôt lourd, puis on n'atteindrait pas l'objectif. Donc, on est conscients qu'il faut être réalistes dans nos demandes, et c'est certain que chaque projet d'envergure devrait contenir une évaluation d'impact. Me LeChasseur voulait rajouter.

Le Président (M. Morin): Me LeChasseur.

M. LeChasseur (Marc-André): Merci. J'ai manqué mon «cue» plus tôt, alors je suis heureux de pouvoir parler. En fait, la loi est bien rédigée, l'avant-projet de loi est très bon, et c'est un travail excellent, je pense. Il y a beaucoup de travail qu'on impose aux municipalités en aval, pour l'étude des projets, et c'est excellent. En amont, par ailleurs, on retrouve des changements qui sont peut-être un peu plus subtils, en termes de philosophie et documents, comme le plan métropolitain ou le schéma d'aménagement. On voit par ailleurs une certaine tendance à la protection et à la promotion de certains items, comme le transport collectif, par exemple. Bon, la promotion se fait par ailleurs à des échelons qui sont très individualisés.

Ce qu'on préconise, nous, à la coalition, c'est d'avoir une approche de promotion qui est plus large, enfin, parce que l'urbanisme et la santé publique sont des composantes qui sont interreliées. L'urbanisme est né d'un souci de santé publique, alors on pense devoir mettre dans les objectifs de la loi, aux articles 2 et suivants, pour les énoncés stratégiques, notamment, et pour le schéma d'aménagement, des énoncés plus précis en termes de protection de la santé et sécurité publique.

Il y a des exemples dans la loi où on voit par ailleurs, en ce qui a trait au schéma d'aménagement, que le volet santé publique est un volet lié à l'absence ou à la présence de nuisances. Ce qu'on pense... Donc, c'est un volet défensif, si on veut. Alors, on propose un volet plus promotionnel et où l'item «santé publique» vivrait de manière autonome, et ça, c'est le bout donc où la loi... c'est le volet d'étude en amont, si on veut, de la loi qui pourrait être un peu plus approfondi ou analysé.

Deuxième aspect, c'est le bloc II de la loi, si on veut, c'est les règlements d'urbanisme plus locaux, et ça, ça a été bien encadré. On voit qu'il y a des indicateurs de performance, on voit qu'il y a une préoccupation de ce qui se passe sur le terrain réellement, et les villes évidemment vont s'en plaindre. Est-ce que l'exercice se fera de manière sérieuse? Ça, c'est autre chose. On n'est pas en Europe ici. Il y a du territoire, il y a de la place. En Europe, on sait qu'ils le font parce que, la densité étant ce qu'elle est, il y a une pression. Ici, la pression est beaucoup moins forte.

Alors, je pense qu'il faut peut-être l'imposer de manière un peu plus rigoureuse ou stricte aux municipalités parce que tabler sur la vertu municipale peut être décevant un petit peu à long terme, et une loi peut-être un peu plus contraignante serait peut-être à cet égard-là plus avisée. Et, de nos jours, vous le savez, la Loi sur l'environnement, la Loi sur la santé publique et la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme sont un corpus interrelié, et ce n'est plus vrai que ce sont des disciplines qui sont distinctes. Alors, il y a peut-être un amarrage, si je peux dire -- c'est un mot qui n'existe probablement pas, là -- mais à faire entre les différentes lois de manière un peu plus stricte.

On sait qu'au niveau du schéma, par exemple, on se préoccupe beaucoup des plaines inondables et que l'Environnement va s'assurer que les dispositions se retrouvent dans les schémas et éventuellement dans les règlements de zonage. En termes de santé publique, on a moins de préoccupations, et les ministères sont moins impliqués dans l'analyse de ce qui se fait sur le terrain à cet égard-là. C'est un concept très large, on sait, mais c'est sur cette créativité-là peut-être qu'il faut travailler en amont pour affiner un peu les concepts.

En aval, maintenant, en ce qui a trait plus particulièrement aux normes de remplacement, le caractère incitatif qu'on voit à la loi, qui est une nouveauté en fait dans notre loi mais ce qui existe un peu partout dans le monde, là, en fait, l'objectif est très louable, on connaît les primes de densité qui existent ailleurs, par exemple, alors on prend un peu le même concept de manière un peu plus libérale, c'est très bien.

Par ailleurs, la loi ne prévoit pas spécifiquement comment assurer la pérennité en fait des aménagements publics qui sont installés en échange, si on veut, d'un bonus pour le promoteur. Et ça, c'est une préoccupation que j'ai depuis longtemps, et je ne sais pas qu'est-ce qu'on pourrait prévoir. Si on se fie sur les municipalités pour prévoir des règles de servitude, par exemple, ou de maintien, de publication au registre foncier, des mesures incitatives ou des... pardon, des aménagements publics, pour l'instant il n'y a rien dans la loi. On le voit souvent dans les différentes lois nord-américaines où on prévoit spécifiquement que la mesure de remplacement, l'aménagement public, le parc, la garderie qui a été construite, pour compenser l'étage supplémentaire que le promoteur a obtenu en échange du parc, fait l'objet d'une protection. Est-ce que ce sera le cas? Ça reste à voir, la loi est silencieuse à cet égard-là. Alors, de manière plus spécifique, c'est une notion très particulière, mais qui pourrait être améliorée à mon avis.

Le Président (M. Morin): Merci, M. LeChasseur. M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Oui. Bien, c'est intéressant de vous entendre parler de ce volet-là aussi concernant l'analyse de l'avant-projet de loi. Je pense qu'on rejoint des objectifs communs. Je pense qu'il nous reste beaucoup de travail aussi à faire dans les orientations gouvernementales qui n'apparaissent pas dans le travail. Évidemment, on aimerait commencer la feuille blanche, en disant: On va commencer par des orientations gouvernementales, après ça déposer un avant-projet de loi. On a un historique, on est quand même dans la continuité. Je pense cette loi-là qui avait été adoptée a quand même eu ses effets bénéfiques, parce que c'est la première fois qu'on se préoccupait d'un territoire, de ses orientations, des affectations. On est rendus peut-être à une maturité où est-ce que là on doit intégrer ce que la population vit à l'intérieur de ça, et ça a des conséquences.

Alors, moi, je pense qu'on rejoint des objectifs. Nous, il nous reste du travail à faire évidemment pour mieux préciser les orientations gouvernementales. Maintenant, comme je vous disais, tout ne se retrouve pas dans la loi. Le «bonus zoning», à savoir: mets deux étages de plus, puis on te donne une garderie, plusieurs sont venus nous dire: Bien, si ça arrive, il faudrait que ce soit le milieu immédiat qui en profite plutôt que la zone ou... Là, bien, les entrepreneurs sont venus nous dire: Mais, écoutez, là, si vous commencez à monnayer chaque fois... Vous voyez, il y a comme un équilibre, à savoir si mon coût de projet est réalisable ou pas.

Mais je pense que, dans des villes, on ne s'est pas désincarnés, il n'y a pas de rupture avec le passé, à savoir ce qu'on faisait en aménagement, on le continue. On réaffirme les principes que c'est une responsabilité partagée, que c'est une décision politique, et qu'on le fait au nom du développement durable, et que les villes vont être dans les consultations sur les orientations gouvernementales. C'est là qu'on franchit un pas de plus, là, pour qu'il soit avant que ça arrive plutôt que devant le fait accompli.

Mais, en même temps, on les fait travailler fort, à savoir que la notion de développement durable, ils doivent aussi l'incarner. Ça doit se traduire dans des outils qui sont plus exigeants qu'avant, on en convient, parce qu'on devra, comme vous le disiez, dire à la prochaine génération: A-t-on avancé avec notre planification sur le territoire? Est-ce qu'on a une vie plus sédentaire? Est-ce que nos rues sont encore construites de la même manière? Est-ce qu'il y a encore des trottoirs ou il n'y a plus de trottoirs? Pourquoi on a fait le choix de positionner l'école plus proche ou plus loin, dépendamment?

Alors donc, il y a un travail qui avait été amorcé quand même là-dessus, là, puis je veux vous rassurer. Vous avez dit: Il y a des nouvelles écoles de bâties. Moi, j'en ai fait une à Drummondville, dans un quartier résidentiel, donc, je veux dire, ils ont compris. Les enfants vont venir à la maison. Ils vont venir à l'école puis ils vont retourner manger le midi, puis ils vont être à pied ou en bicycle à pédales, etc. Plusieurs ont été agrandies.

Donc, on doit tenir compte aussi qu'il y a un certain patrimoine bâti, nécessairement, mais on peut l'améliorer. Alors donc, on donne des outils. Puis le geste ambitieux qu'il y a dans cette loi-là, qu'on ne parle pas assez souvent, nécessairement, si on croit à la densité ou à la densification, meilleure utilisation optimale du territoire, il fallait un peu décloisonner l'aspect du référendum et donner des zones franches au nom du principe de développement durable avec des transports collectifs, avec des trames qui répondent à ça. Pas n'importe où, pas n'importe comment. Mais, si on n'est pas capables de lever le voile du fait qu'il y aura...

De la densification, pour le monde qui nous écoute, là, c'est qu'il va y avoir, en hauteur... à un moment donné, on va utiliser la hauteur pour éviter l'étalement, donc combien il y a d'habitants au pied carré de façon plus intense. Ce qui a amené toute la discussion sur le plan métropolitain qui a été déposé par Montréal, alentour...

**(10 h 10)**

Le Président (M. Morin): Je vous invite à conclure, M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Oui. Donc, à suivre. Je vous demanderais de regarder... un coup d'oeil sur les deux plans métropolitains, et, si vous avez la chance de nous écrire, ça nous aide actuellement dans la réflexion ou le positionnement par rapport à ça. Votre travail est très utile pour les fins de cette commission.

Le Président (M. Morin): Merci, M. le ministre. M. le député de Blainville, à votre tour.

M. Ratthé: Merci, M. le Président. D'abord, évidemment, bonjour à tous. C'est un retour ce matin, et c'est intéressant de vous avoir avec nous, alors bienvenue, mesdames monsieur.

Je voulais au départ souligner le fait, et le ministre vient d'y faire un peu allusion... par rapport aux grandes orientations gouvernementales. Dans le monde idéal, ce qu'il nous disait, c'est qu'il aurait dû y avoir les orientations, l'avant-projet de loi et le projet de loi. Bon, l'avant-projet de loi est sur la table. Dans votre mémoire, vous nous indiquez clairement qu'il est nécessaire de préciser, de présenter les orientations gouvernementales avant l'adoption du projet de loi. C'est ce que vous recommandez, c'est vraiment logique.

Et j'ajouterais... La question que je vous pose par rapport à ça, ça serait: Qu'est-ce que vous suggérez? Est-ce que vous avez pensé à d'éventuelles orientations, justement, au niveau de ce que pourraient être les orientations gouvernementales?

Le Président (M. Morin): Mme Pellerin.

Mme Pellerin (Suzie): Oui. Tout à fait. Ça fait partie vraiment de notre première recommandation, là, véritablement, de connaître les orientations gouvernementales avant l'entrée en vigueur de la loi. En fait, ce qu'on a fait, c'est qu'on a créé un comité avec, bon, des acteurs municipaux, aussi différents organismes qui côtoient chaque jour les municipalités afin de voir ce qui pourrait être acceptable en matière d'orientations gouvernementales.

Bon, tout à l'heure, je vous en ai donné un avant-goût, c'est-à-dire, bon, par exemple, de tenir compte du potentiel piétonnier dans les plans d'urbanisme. Ça pourrait être une mesure, l'idée étant d'avoir des objectifs qui sont SMART, donc qui sont facilement mesurables.

Et ce qui a été cité en exemple par certains représentants de municipalités, c'était de s'inspirer des orientations en matière de développement durable, donc, d'ici telle année, d'atteindre... que le potentiel piétonnier soit pris en compte dans les plans d'urbanisme, par exemple, ou encore l'accès à des aliments sains, et bien sûr en tenant compte de la réalité de chacun. On ne peut pas imposer la mise en place ou la création d'une piste cyclable partout à travers le Québec. Peut-être que ça s'adapte moins bien à certaines réalités ou encore peut-être qu'un sentier piéton dans un boisé peut être plus approprié pour une municipalité.

Donc, véritablement de donner le cap, l'orientation, selon nous, c'est le rôle du gouvernement de le faire, et que ce soit suffisamment clair pour que ce soit bien interprété par les municipalités et les gens sur le terrain ou les représentants du MAMROT dans les régions.

Et bien sûr s'assurer qu'il y a un consensus des municipalités, donc une adhésion à ces orientations gouvernementales là, donc qu'elles soient partie prenante de la définition de celles-ci.

M. Ratthé: Je vais profiter du fait que vous êtes accompagnées d'un avocat. Me LeChasseur, bienvenue aussi. Écoutez, je regardais vos recommandations par rapport à... le type de commerce en alimentation qu'on devrait retrouver autour des écoles, entre autres. Vous avez parlé tout à l'heure de trois municipalités, je pense, qui ont fait une expérience dans ce sens-là. Toutefois, il y a quand même, au moment où on se parle, des commerces en alimentation rapide qui sont déjà implantés à côté d'institutions scolaires, qui pourraient peut-être souligner le fait qu'ils ont des droits acquis. Donc, je voudrais vous entendre là-dessus, à savoir: Est-ce que, d'après vous, une municipalité pourrait interdire les restaurants rapides qui existent déjà autour des écoles, par exemple, et est-ce qu'elle pourrait le faire? Est-ce qu'elle a le droit de le faire, d'après vous, Mme Pellerin ou Me LeChasseur?

Mme Rochette (Annie): Je vais commencer...

Le Président (M. Morin): ...

Mme Rochette (Annie): Oui, je vais commencer, puis... Alors, oui, les trois municipalités qui ont pris part au projet-pilote, ce que ça nous confirme, c'est certain que les droits acquis sont acquis. On ne peut pas agir sur ce qui est actuellement bâti. Toutefois, il y a des municipalités qui sont plus propices à des règlements d'urbanisme, par exemple, lorsque c'est en développement. Lorsqu'il y a des terrains vacants, on est en mesure d'orienter la destinée ou l'aménagement autour de l'école. Il faut également mentionner que, bon, l'obésité, c'est multifactoriel. Donc, ça ne réglera pas l'épidémie d'obésité, les règlements de zonage. Par contre, ça peut améliorer l'environnement alimentaire, dans certains cas, plus particulièrement pour les municipalités qui sont en développement.

Le Président (M. Morin): Me LeChasseur.

M. LeChasseur (Marc-André): Merci. En fait, il y a deux éléments que je veux porter à l'attention de la commission. Le premier, sur la gestion des droits acquis. En fait, les droits acquis, c'est lié à une activité réelle sur le territoire, hein? C'est une création jurisprudentielle. Quand le législateur fait le choix, dans sa loi, de reconnaître les droits acquis, il peut prévoir des exceptions, comme en matière d'affichage, par exemple, où il peut fait fi des droits acquis et imposer des nouvelles normes d'affichage avec un délai tampon, si on veut. C'est un choix qui est possible. Est-ce qu'on veut faire ce choix-là dans le contexte des restaurants rapides? Ça, c'est évidemment politique, difficile probablement à faire, par ailleurs, hein, on s'entend.

D'autre part, c'est important de comprendre que le projet ne vise pas à réglementer la malbouffe comme telle, hein? Ce n'est pas du zonage de menu qu'on fait. Il y a eu beaucoup de confusion autour de ça et il y a eu différentes prises de position qui étaient campées sur le fait qu'on zonait les menus ou qu'on tentait de zoner les menus. Alors, ce n'est pas ça du tout. En fait, on l'a fait au Québec depuis plusieurs années. Vous savez, l'exemple qu'on donne toujours, qui est assez grivois, puis vous me pardonnerez de le faire sur caméras, mais les danseuses nues se retrouvent dans les zones industrielles, et on ne zone pas les danseuses, hein, vous savez. On zone l'activité comme telle. Bon, alors, pour les pizzerias, c'est la même chose. On pourrait décider... ou les McDonald's, tout ce qui a un accès par véhicule, par exemple, au restaurant, qui implique une circulation rapide, une circulation accrue, décider, à cause que les composantes de l'usage sont distinctes, sont spécifiques, de les placer ailleurs sur le territoire, soit sur des zones où la circulation est plus importante, peut-être. Près d'une école primaire ou secondaire, ce n'est peut-être pas la place pour mettre des restaurants. Ce n'est peut-être pas la place pour mettre des industries non plus, ni mettre des centrales nucléaires, ni mettre des bars de danseuses.

Alors, l'idée, c'est de zoner l'usage et non pas de zoner le menu comme tel. Et je le précise, parce qu'évidemment certains font un certain millage là-dessus en disant qu'on veut restreindre la nature des usages à proximité des écoles. C'est le cas, oui, mais pour certains types d'usage qui ont des activités contraignantes sur l'environnement bâti immédiat et qui présentent un caractère dangereux, dans certains cas, pour la sécurité des gens qui circulent à pied, notamment, près des écoles.

Alors, le choix que le projet de loi ou l'avant-projet de loi pourrait faire, ça serait, évidemment, de faire en sorte que les droits acquis sont abrogés, si on veut, pour ces usages-là -- c'est un choix extrême, évidemment -- ou de faire la promotion, en fait, de la réglementation intelligente ou responsable des municipalités en ce qui a trait à des usages de cette nature-là. Ce qui s'est fait par la force des choses, dans certains cas, ce qui se fait moins, dans certains autres.

M. Ratthé: C'est intéressant de vous entendre parler d'usage plutôt que de zoner, comme vous dites, là, certaines habitudes en tant que telles, parce que j'allais vous demander, puis je vais quand même vous poser la question: Pourquoi, donc, utiliser la plateforme, celle-ci, entre autres, pour promouvoir les saines habitudes de vie? M. le ministre le disait, il y a plein d'autres endroits où on peut promouvoir les saines habitudes de vie. Vous arrivez avec une approche qui est intéressante. Vous parlez d'aménagement et d'urbanisme. On veut promouvoir les saines habitudes. Alors, pourquoi choisir cette plateforme-là plutôt qu'une autre?

Le Président (M. Morin): Mme Pellerin.

Mme Pellerin (Suzie): Oui. En fait, bon, les décisions que vous allez prendre dans les prochaines semaines vont tracer la voie pour les 30 prochaines années en matière d'occupation du territoire. Et, pour nous, il était essentiel de venir présenter notre point de vue puis vous sensibiliser, finalement, à la dimension de la santé publique, particulièrement de l'obésité et des saines habitudes de vie, pour que vous en teniez compte dans ces décisions prochaines là.

L'obésité est multifactorielle, je l'ai mentionné tout à l'heure. Donc, on a le territoire qui va influencer nos modes de vie, mais on a notre alimentation, la publicité, le marketing. Alors, pour nous, il est extrêmement important d'être en mesure d'agir, d'influencer, que les décideurs se rendent compte du pouvoir qu'ils ont sur la santé des générations futures. Il faut savoir que la génération actuelle, les enfants actuellement, c'est la génération qu'on qualifie de sacrifiée, hein? C'est la première génération qui vivrait moins longtemps et plus malade que la génération précédente. Alors, pour nous, il est extrêmement important d'influencer l'ensemble des acteurs dans les différents domaines où c'est clairement documenté scientifiquement que l'aménagement du territoire a une influence sur la santé et sur le poids de la population, sur son mode de vie physiquement actif et sur l'accès, bien sûr, aux aliments sains.

Alors, on est conscients que c'est une loi qui est extrêmement technique, mais on a à coeur et on espère être en mesure de vous sensibiliser et voir intégrer finalement ces dimensions-là dans les orientations gouvernementales, et que vous reteniez certaines de nos propositions d'amendement dans le cadre de l'étude article par article.

**(10 h 20)**

Le Président (M. Morin): Me LeChasseur, vous vouliez intervenir?

M. LeChasseur (Marc-André): Oui, s'il vous plaît. Juste un mot. Ce qu'on oublie parfois, c'est que l'aménagement... l'urbanisme est né ni plus ni moins des épidémies qui tuaient bien du monde à l'époque où on n'avait pas encore imaginé que la juxtaposition et la cohabitation de différents usages pourraient avoir un impact. Alors, on a commencé à faire de l'urbanisme -- et là je prends des raccourcis -- mais on a commencé à faire un peu d'urbanisme pour arranger tout ça, et ça s'est réglé un peu. On a inventé les pilules pour guérir le monde des épidémies et là, maintenant, bon, bien, tout va bien.

On revient un peu à la base, et je pense que c'est une opinion qui est partagée par plusieurs urbanistes et avocats qui travaillent dans le domaine, où cette loi-là qui est une loi... un avant-projet de loi qui est bien fait, on revient à la base où on tente de faire la promotion de saines habitudes de vie. Alors, ce n'est pas écrit comme tel, mais on énumère plusieurs items qui tendent dans cette direction-là. La position qu'on prend, nous, c'est de tenter de pousser un peu plus en termes d'orientations et en termes de contenu du plan et du schéma, notamment, pour que cette préoccupation-là qui est fondamentale, en fait c'est le principe cardinal à la base même de la loi, fasse l'objet d'une promotion accrue. Et c'est dans ce contexte-là qu'on pense que les orientations, qui devraient circuler éventuellement avant l'adoption de la loi, devraient être élaborées avec toujours comme prémisse que la santé publique est le vecteur premier de tout aménagement du territoire. Le reste, évidemment, c'est l'échantillonnage des composantes de ce qu'est la promotion de la santé publique, qui sont en fait des parties intrinsèques du concept, là.

M. Ratthé: Si je comprends bien, une espèce de complémentarité, si on peut dire, là, aux autres mesures, aux autres lois qui sont en place, donc de s'assurer que ça vient compléter, là, l'exercice de... On parlait de saines habitudes alimentaires, mais aussi qu'on puisse mettre à la disposition des gens aussi un environnement qui va leur permettre effectivement de pouvoir pratiquer ces saines habitudes de vie, là.

D'ailleurs, vous suggérez qu'un membre de la Direction de la santé publique siège sur le comité consultatif agricole. Je me suis demandé: Pourquoi pas sur le comité consultatif d'urbanisme? Parce que, dans les municipalités, c'est le CCU, comme on l'appelle communément, qui va justement délimiter, qui va parler d'aménagement, qui va parler d'urbanisme, qui va prendre des décisions dans ce sens-là, et j'étais un peu étonné de ne pas voir cette recommandation-là pour les CCU. Est-ce qu'il y a une raison particulière ou...

Mme Pellerin (Suzie): En fait, on parlait tout à l'heure de réalisme et on s'est vraiment assurés... Il faut savoir que le mémoire a été élaboré en collaboration avec différents acteurs qui sont soit spécialistes de l'urbanisme ou encore qui connaissent la réalité des municipalités ou de la santé publique. Il y a des ressources limitées actuellement dans les directions de santé publique et il serait illusoire d'avoir un membre des directions de santé publique au sein de tous les CCU. Alors, c'est la raison pour laquelle on propose qu'ils soient impliqués plus tôt dans les grandes décisions, donc lorsqu'il y aurait, par exemple, une évaluation d'impact sur la santé. Mais, lorsque le voisin change ses fenêtres, c'est peut-être mal utiliser les ressources que d'avoir un représentant de la Santé publique au sein de ce comité-là. Tout à l'heure, Mme Rochette voulait ajouter quelque chose, si vous permettez.

Le Président (M. Morin): Oui. C'est moi qui vais lui donner la parole. Mme Rochette.

Mme Rochette (Annie): Merci. À votre question précédente sur la raison pour laquelle on demandait que la Santé soit incluse dans la loi, vous demandiez: Est-ce que c'est le bon endroit pour demander ça? En fait, c'est que la Loi sur l'aménagement est vraiment la loi-cadre qui va orienter toutes les décisions subséquentes en matière d'aménagement et d'urbanisme. Plus tôt, M. Lessard disait: Tout le monde voit maintenant, tout le monde sait qu'il y a un lien entre l'environnement bâti et la santé. Mais, malheureusement, ce n'est pas si clair que ça pour tout le monde. Donc, que ce soit écrit de manière explicite dans la loi-cadre qui va orienter tout le reste, ça nous semble extrêmement important.

M. Ratthé: ...encore, M. le Président?

Le Président (M. Morin): Oui, oui.

M. Ratthé: Un des changements importants dans l'avant-projet de loi puis qui va probablement se refléter dans la loi, c'est le concept des zones franches. Il y a eu des représentations qui ont été faites avant vous, il y en aura sûrement qui seront faites après vous également. Vous, d'ailleurs, apportez une proposition d'amendement, entre autres à l'article 82. Je vais prendre le temps de le lire pour mettre les gens dans le contexte. L'article 82 dit que «le plan d'urbanisme peut délimiter toute partie de son territoire qu'il juge devoir prioritairement faire l'objet de rénovation urbaine, de réhabilitation ou de densification, qu'il définit en tant que zone franche d'approbation référendaire et à l'intérieur de laquelle aucune modification réglementaire ne sera sujette à l'approbation référendaire». Donc, on va délimiter un endroit, on va dire: À cet endroit spécifique là, on va pouvoir faire différentes choses que j'ai mentionnées, rénovation, réhabilitation, et on n'aura pas besoin d'aller en référendum auprès de la population pour leur demander leur avis.

Vous, vous dites: Bon, ça, ça va, c'est ce que je comprends. Et vous ajoutez un amendement qui est le suivant: «Ce périmètre ne peut comprendre toute partie du territoire soumise à des contraintes naturelles ou liées à l'activité humaine, devant être prises en considération pour des raisons de santé ou de sécurité ou de protection de l'environnement ou des contraintes majeures pour des raisons de sécurité publique, de santé publique [et] de bien-être général.»

J'aimerais juste que vous m'expliquiez un peu davantage, me donniez un peu plus de détails sur la proposition d'amendement que vous apportez, les impacts que ça aurait. Qu'est-ce que ça vient apporter de plus à cet article-là actuellement?

Le Président (M. Morin): Me LeChasseur.

M. LeChasseur (Marc-André): Il y a deux aspects à l'article 82 qui sont plus préoccupants, un petit peu. Il y a une tendance lourde, au sein des municipalités, à vouloir se débarrasser du référendum qui est souvent un empêcheur de tourner en rond et qui sert bien souvent à des fins qui ne sont pas du tout reliées à la protection du public et qui sont... vous savez, Provigo poursuit Metro, là, puis des choses comme ça, là, alors on en voit beaucoup. Les noms sont fictifs, hein, si vous reconnaissez des personnages, là. Alors, ça, évidemment on voit l'intention de faire en sorte qu'on puisse faire de l'aménagement intelligent ici, là, sans être arrêtés à chaque 15 secondes, là. Et ça, c'est louable.

Par ailleurs, le monde municipal étant ce qu'il est, c'est préoccupant de voir un article de cette nature-là exister. Et certaines municipalités pensent être des zones franches au complet, d'après ce que j'ai pu constater en amont, si on veut. Alors, il faudra voir comment ça va être interprété.

La zone franche, par ailleurs, peut contenir des secteurs qui sont plus sensibles, et la préoccupation qu'on a, c'est de voir ces secteurs-là, qui sont plus sensibles, faire l'objet de moins de précautions, en fait, dans le cadre de modifications réglementaires qui vont passer sous le radar, et sans que la population puisse être consultée, si on veut, au sens large, là. Et c'est pour ça qu'on a fait cette précision-là qui est une précision en fait qu'on retrouve dans la loi, à plusieurs égards, autant pour les dérogations mineures que pour les zones de contraintes anthropiques ou naturelles, là. Alors, on a associé en fait ce concept-là, qu'on pense viable, à l'absence de consultation de la population, en se disant: Bon, bien, ces secteurs-là, s'ils existent dans ce territoire-là, ils sont normalement sujets à une protection particulière dans les règlements d'urbanisme des municipalités qui sont responsables, parfois ils le sont moins.

Donc, on a essentiellement tenté d'ajouter une couche, en fait, en matière d'approbation, donc en aval du processus plutôt qu'en amont, en termes strictement réglementaires, en disant que, lorsqu'on retrouve ces caractéristiques-là sur le territoire, on devrait s'assurer que ce périmètre-là est une zone franche de zones franches, alors qu'il est sujet à consultations et qu'il est plus préoccupant, disons, et qu'il devrait faire l'objet d'une minutie plus accrue, si on veut.

Alors, disons que c'est une réponse à deux volets, là. Le premier, c'est la préoccupation liée, là, au référendum et comment ça va se monnayer dans la vraie vie -- et le terme «monnayer» est utilisé à bon escient -- et comment, en fin de compte, le développement du territoire se fera sur le terrain lorsqu'il y a des contraintes particulières et que ces contraintes-là ne sont pas prises en compte dans la consultation de la population.

M. Ratthé: Est-ce que vous avez un exemple à me donner, par exemple, dans... C'était mal dit: un exemple, par exemple. Mais, pour vous, là, si on voulait l'illustrer concrètement, pour les gens qui nous écoutent...

**(10 h 30)**

M. LeChasseur (Marc-André): Les contraintes de nature anthropique, par exemple, là, s'il y a des chemins de fer ou s'il y a des usines avec, vous savez, des impacts particuliers sur l'environnement. On pense aux usines de filtration des eaux. Celle de Sillery, je pense, sur la rue Einstein, dans ce coin-là, il y a une zone de protection qui l'entoure, on ne peut pas se bâtir là. Et, bon, si vous vous promenez là, il n'y a pas grand impact sur l'environnement autre que des odeurs, peut-être, mais, vous savez, ce n'est pas nucléaire, là. Alors, ce serait un peu le même concept qu'on pourrait reprendre dans ce cas-ci.

Le Président (M. Morin): Oui. Mme Rochette, vous vouliez intervenir tout à l'heure. Je ne m'en suis pas rendu compte, je m'excuse. Allez-y.

Mme Rochette (Annie): Oui. J'aimerais ajouter un petit point sur ce que Me LeChasseur a dit. À l'instar de certains groupes qui ont présenté à la première phase d'auditions, entre autres Vivre en ville, Équiterre, la Fondation Suzuki et le Regroupement des conseils régionaux de l'environnement, eux proposaient... ils étaient d'accord aussi avec le principe de zones franches pour l'approbation référendaire, mais, pour être sûrs que la population puisse quand même exprimer son avis sur les projets qui sont proposés, si le recours au référendum lui est enlevé, ces quatre organismes suggéraient qu'il y ait des mécanismes de consultation publique élargie, une consultation publique accrue à ce qui se fait généralement pour les projets de développement. Parce que, si j'ai bien compris, cet article-là va s'appliquer principalement à des projets majeurs. Donc, il faudrait s'assurer que la population puisse quand même exprimer ses craintes, son opinion, faire des recommandations et qu'elles soient prises en compte dans les projets définitifs, là, qui vont être mis en place.

Le Président (M. Morin): M. le député de Blainville.

M. Ratthé: Monsieur, est-ce que vous avez... M. le député de Berthier, peut-être.

Le Président (M. Morin): M. le député de Berthier?

M. Ratthé: Oui.

M. Villeneuve: Merci, M. le Président. Je crois que c'est Me LeChasseur tantôt qui parlait des municipalités. Il y en a quand même plus de 1 100 au Québec, et le fait justement de laisser un peu chacune des municipalités faire son bout de chemin, si je peux dire ça comme ça, dans cette lutte à l'obésité, pour la qualité de vie ou la santé publique, c'est un petit peu... ça devient un peu... En tout cas, ce n'est pas uniforme, mais pas du tout, et, si je comprends bien en fait votre démarche, ce serait que la législation puisse inclure, de façon assez claire, pour que justement le signal soit lancé pour que les municipalités du Québec aient finalement le même signal, aient toutes la même ligne de conduite, si je peux dire ainsi, là. Moi, c'est un peu ce que je décode, là, finalement, là.

Et vous parliez tantôt notamment du... Sur le long terme, au niveau des municipalités, par moments, c'est difficile, justement, et c'est votre travail, un peu, je pense, de sensibilisation et de prévention que vous faites. Vous parlez de trois municipalités. Il y en a plus de 1 100, je le répète. Alors, ça commence à être une tâche assez ardue. Donc, ce serait d'avoir une orientation plus claire et que l'ensemble finalement du Québec, des municipalités du Québec soit assujetti. C'est ce que je peux comprendre?

Le Président (M. Morin): Mme Pellerin.

Mme Pellerin (Suzie): Oui. Exactement. Pour nous, le rôle du gouvernement, c'est vraiment de montrer le cap et d'indiquer la destination où on veut arriver. Il faut savoir que l'obésité nous coûte, au niveau du Canada, 30 milliards par année, donc il faut engager l'ensemble des décideurs, là, pour réduire les coûts associés à l'obésité puis renverser la tendance actuelle. Donc, c'est certain qu'en donnant ce cap-là chacun va être engagé pour atteindre la destination, mais en utilisant les moyens qui sont plus réalistes ou plus près de leur réalité, en fait. Tout à fait. Donc, je suis contente de voir que notre message a été bien entendu et que les orientations gouvernementales seront flexibles, et adaptables, et réalistes pour l'ensemble des municipalités en matière de saines habitudes de vie.

Le Président (M. Morin): Oui. Ça va? Il reste quelques secondes. Ça va? Donc, Mmes Pellerin, Rochette et M. LeChasseur, de même que Mme Chénard, merci beaucoup, vos propos ont été fort intéressants. Donc, bon retour chez vous.

J'inviterais maintenant l'autre groupe, L'Association des architectes paysagistes du Québec, à venir prendre place.

Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 34)

 

(Reprise à 10 h 37)

Le Président (M. Morin): Nous reprenons nos travaux. J'inviterais M. Lambert à se présenter et à présenter la personne qui l'accompagne.

L'Association des architectes paysagistes du Québec (L'AAPQ)

M. Lambert (Yvan): Bonjour. Mon nom est Yvan Lambert, président de L'Association des architectes paysagistes du Québec. Je suis accompagné de Mme Marie-Claude Robert qui est la directrice générale de l'association.

Le Président (M. Morin): Bon, allez-y. Vous pouvez commencer.

M. Lambert (Yvan): Merci. Tout d'abord, bon, merci à M. le ministre, merci aux autres personnes présentes ici. On tient à remercier le ministère de nous avoir invités à présenter notre mémoire.

Tout d'abord, bon, je vais faire une présentation brève sur qu'est-ce que L'AAPQ, L'Association des architectes paysagistes du Québec. Nous existons depuis 1965. Notre mission, c'est de promouvoir l'architecture de paysage et de valoriser le paysage dans les milieux naturel et construit. L'objectif principal de L'AAPQ est aussi de voir à la protection du public et à la sécurité du public, comme un ordre. On fonctionne un peu comme un ordre, même si on n'est pas un ordre professionnel. D'ailleurs, nous avons un code de déontologie.

Nous sommes une corporation professionnelle qui est constituante de l'AAPC, l'Association des architectes paysagistes du Canada, et indirectement de la FIAP, la Fédération internationale des architectes paysagistes. Nous avons actuellement 463 membres et on a développé des partenaires, dans les dernières années, avec la FIHOQ, la Fédération interprofessionnelle de l'horticulture ornementale au Québec, la Conférence interprofessionnelle de design, la CIDQ, ainsi que Mission Design, qui est un organisme qui regroupe tous les joueurs importants dans le design au Québec. Nous sommes un membre fondateur de Mission Design.

Depuis 40 ans, nous avons une cohorte de professionnels. Un architecte paysagiste, c'est quelqu'un qui a un baccalauréat ou une maîtrise en paysage généralement. Ça, ça a contribué depuis une quarantaine d'années à faire émerger une meilleure compréhension de la question des paysages au Québec dans les diverses sphères d'application et à intégrer une culture paysages -- je vais vous revenir là-dessus un petit peu plus tard -- culture de paysages en termes de pratiques d'aménagement et de développement du territoire.

**(10 h 40)**

Maintenant, je vais intervenir plus précisément sur nos commentaires sur l'avant-projet de loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme. Bon, le champ de pratique professionnelle de l'architecture de paysage, c'est complémentaire à celui de l'urbanisme et de l'aménagement du territoire et un peu aussi de l'architecture. Dans ce contexte, l'avis de L'AAPQ sur l'avant-projet de loi consiste moins à prendre position sur le contenu technique ou précis de chacun des articles, ou sur l'aspect procédurier ou opérationnel, mais plutôt à commenter certains articles en général concernant directement la notion de paysage dans un contexte de planification territoriale. Donc, notre intervention est moins technique, moins réglementaire, mais plus généraliste, en termes de paysage.

En premier lieu, on est heureux de constater, à L'AAPQ, que la Loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme, dans son préambule même, fait référence à ce que le territoire doit faire l'objet d'un aménagement planifié et responsable, respectueux des principes du développement durable. Cette notion-là, c'est ça, la pratique de l'architecture du paysage, c'est la pratique de la notion de développement durable dans la vie de tous les jours.

Aussi, on constate avec intérêt la mention directe de la notion de paysage dans la loi. À notre connaissance, ce serait une première au Québec qu'une loi provinciale énonce la notion de paysage très clairement, comme ça, dans une loi. En effet, à l'article 2, il est mentionné: «[Les autorités chargées de l'aménagement du territoire] soutiennent, par des mesures d'aménagement et de développement du territoire, les efforts qui sont entrepris notamment aux fins: 1° de protéger les bases naturelles de [...] vie telles que le sol, l'air, l'eau, la forêt et le paysage.»

C'est une première de mentionner la notion de paysage, même si c'est un peu, peut-être, curieux que ça soit associé à un aspect de bases naturelles de la vie, mais on vit dans le paysage.

À l'échelle métropolitaine, à l'article 16, il est encore intéressant de constater que les objets sur lesquels portent les orientations, les objectifs, les critères du plan métropolitain d'aménagement et de développement sont, entre autres, à 2°: «la protection et la mise en valeur du milieu naturel et bâti ainsi que des paysages». Encore une fois, il est fait mention de «paysages».

Même chose à l'échelle régionale. Il est rassurant de noter, à l'article 19, que le contenu du schéma d'aménagement a pour principale vocation, entre autres, à 6°, «de contribuer à la conservation, à la protection et à la mise en valeur du patrimoine naturel, [...]bâti et des paysages».

Également, à l'article 20, il est mentionné que le schéma d'aménagement contient toute mesure visant à assurer sa mise en oeuvre, dont, à 5°, «[délimiter] toute partie [du] territoire présentant un intérêt particulier d'ordre historique, culturel, esthétique ou écologique et à l'égard de laquelle des mesures de conservation ou de mise en valeur sont indiquées». Cette mesure-là concerne, selon nous, directement le paysage. Ce n'est pas spécifié tel quel, mais c'est une autre façon de le mentionner.

Ceci étant dit... Si j'ai bien compris, j'ai 15 minutes environ de présentation, hein? C'est ça. O.K. Ceci étant dit, bien que la notion de paysage, mentionnée aux articles 2, 16, 19 et 20, soit un pas dans la bonne direction, L'AAPQ est d'avis que la référence à la protection du paysage, pour que ça puisse être réalisé par les autorités chargées de l'aménagement du territoire, ça devrait être accompagné de moyens, soit financiers ou techniques, et de ressources, soit humaines ou professionnelles, qui seraient mis à la disposition des autorités concernées. Ici, on peut parler soit des villes, des MRC; il faut que ces organismes-là aient les capacités de mettre en oeuvre la loi.

En effet, la connaissance du paysage, son inventaire, son analyse, son diagnostic, que ce soit tant à l'échelle métropolitaine que régionale ou même locale, municipale, cette connaissance-là, elle est essentielle avant toute définition d'enjeux de développement et de planification et avant toute mise en oeuvre de mesures de protection ou de mise en valeur. Donc, avant de pouvoir protéger ou déterminer un paysage, il faut faire son inventaire, son analyse. Et ça, ça nécessite des ressources techniques, humaines ou financières.

Toutefois, si, à l'échelle métropolitaine et régionale, la notion de paysage est inscrite dans la loi sur l'aménagement du territoire et l'urbanisme, il est malheureux de constater que ce n'est pas le cas à l'échelle locale, au niveau des municipalités, des villes, des villages. En effet, L'AAPQ déplore l'absence formelle de la notion de paysage dans le plan d'urbanisme d'une municipalité. À l'article 81, il n'est seulement mentionné que «le plan d'urbanisme guide l'exercice, par le conseil de la municipalité[...], de ses pouvoirs en matière de réglementation[...]. Il a pour but, eu égard à l'évolution des enjeux sociaux, économiques [ou] environnementaux et aux objectifs, stratégies et cibles qu'il définit, de favoriser l'aménagement et le développement cohérents et rationnels du territoire...» À L'AAPQ, nous pensons que ce contenu du plan d'urbanisme est très ou trop général, pas assez précis en termes de paysage.

Aussi, L'AAPQ se questionne à savoir pourquoi l'absence de tout contenu spécifique ou détaillé dans le plan d'urbanisme. Par rapport à la loi actuelle, aux articles 83 et 84, il est indiqué une liste très précise de choses qu'un plan d'urbanisme doit contenir. Dans la future loi ou le projet de loi actuel, toute cette liste-là semble être évacuée, et on se pose des questions à savoir pourquoi il y a eu cette approche-là de mise en place.

Pour éviter que la notion de paysage soit évacuée du processus de planification à l'échelle locale, la future loi mériterait, à notre avis, effectivement, à mieux définir le contenu du plan d'urbanisme et à y inclure, entre autres, qu'un des objets sur lesquels portent les orientations et objectifs du plan d'urbanisme soit la protection et la mise en valeur du milieu naturel et bâti ainsi que des paysages. Nous pensons que, dans la nouvelle loi, on doit intervenir à ce sujet.

En conclusion, L'AAPQ souhaite souligner que l'inclusion de la notion de paysage, reconnue par le MAMROT, le ministère des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire, comme étant suffisamment importante pour être mentionnée dans le plan métropolitain d'aménagement ainsi que dans les schémas d'aménagement des MRC, ça exprime une avancée importante pour la société québécoise en général et les collectivités métropolitaines et régionales en particulier. Toutefois, cette même notion, si elle est importante au niveau national ou régional, elle mériterait aussi d'être incluse dans le plan d'urbanisme d'une municipalité au niveau local et ainsi faire partie d'une pratique courante et intégrée dans un processus de planification. Donc, ce qui est bon au niveau régional, au niveau national, devrait être aussi bon au niveau local.

Dans ce domaine, l'architecte paysagiste est le professionnel désigné pour le développement des connaissances sur le paysage, qu'il soit local ou régional, par la réalisation d'inventaires, d'analyses et de diagnostics précédant l'élaboration et la préparation d'un plan paysage ou d'un projet de paysage pouvant faire partie d'un plan d'urbanisme ou d'un schéma. Ce qu'on veut mentionner par ça, c'est qu'au même titre qu'un plan d'urbanisme il pourrait y avoir, dans une municipalité régionale ou une MRC, un plan paysage, ce serait une nouvelle avenue intéressante à travailler. Donc, les municipalités régionales de comté, les municipalités locales qui intégreront des architectes paysagistes dans leur service d'urbanisme ou d'aménagement du territoire seraient mieux outillées, aussi, pour la mise en oeuvre de la notion de paysage incluse dans la loi. Ce qu'on mentionne, c'est ce qu'on a mentionné précédemment, c'est que bien que ce soit dans la loi, il va falloir qu'il y ait des moyens donnés aux municipalités locales ou régionales ou aux MRC ou aux ministères d'inclure des professionnels en paysage à l'intérieur des équipes professionnelles, soit par des personnes engagées directement ou par d'autres moyens techniques ou financiers.

Donc, ça résume en bref notre position, notre mémoire pour l'avant-projet de loi. Maintenant, je pense que, c'est quoi...

Le Président (M. Morin): Merci, M. Lambert. M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Oui, merci, M. Lambert et Mme Robert, donc merci de la présentation qui est faite et le souci, puis on me dit que vous avez travaillé très fort sur l'élaboration de guides que vous mettez en ligne pour aider à augmenter la connaissance et l'appropriation, nécessairement, de ce concept-là qu'on peut dire parfois difficile, un peu plus difficile à encadrer, parce que c'est vrai que c'est la première ou la deuxième fois que ça se retrouve dans une loi.

Ma collègue à la Culture est dans le patrimoine culturel de paysage dans lequel une municipalité peut demander à la ministre de définir un territoire... Je pense qu'elle est en consultation actuellement là-dessus. Ça vous encourage de continuer de faire vos représentations, ça donne des fruits. Et nécessairement, quand on le considère dans l'aménagement d'un paysage, ça a sa valeur, c'est une valeur peut-être matérielle, mais elle est conséquente avec le territoire, et je pense que, dans le bout de Charlevoix, on peut rapidement imager ce que ça peut donner d'adopter une politique du paysage. Nécessairement que, là, on comprend bien qu'on l'introduit, les orientations, le plan métropolitain en parle spécifiquement, puis je comprends, bon, il y a une hiérarchie des plans, là, vous dites: La faiblesse, c'est peut-être que ça ne se retrouve pas dans le plan d'urbanisme. On dit qu'il doit être, lui, il doit être conforme au schéma qui doit être conforme au plan. S'il y a une amélioration à y apporter ou un détail, quoique vous voyez qu'on n'a pas... en fait, le contenu obligatoire et formel du plan d'urbanisme, sachant qu'il doit être conforme aux orientations. Mais on va regarder qu'est-ce qu'on peut faire pour essayer d'améliorer le projet de loi là-dessus.

Parlez-moi des guides et de l'appropriation que les gens ont pu faire des outils de vulgarisation que vous avez faits. Parce que vous avez été très proactifs dans ce sens-là. Pouvez-vous m'en parler plus amplement, je veux dire, pour ceux qui nous écoutent, qu'est-ce que ça donne, en réalité, d'avoir ces plans-là et qu'est-ce que ça a eu comme impacts pour ceux qui l'ont fait?

M. Lambert (Yvan): Nous, ce qu'on...

Le Président (M. Morin): M. Lambert. Allez.

**(10 h 50)**

M. Lambert (Yvan): Oui, merci. L'AAPQ, un, on souhaite mentionner et souligner, je pense, une bonne initiative du MAMROT, ça a été le laboratoire rural. Actuellement, il y a une seule région, à ma connaissance, au Québec, c'est la région des Laurentides, il y a un laboratoire rural pour toute l'analyse, la caractérisation des paysages. Bon, où tout ça va aller, on ne sait pas encore, mais, je pense, c'est une première étape qui est essentielle. Chaque région du Québec devrait faire ses inventaires, ses analyses. D'autres régions comme la CMQ, la CMM ou la ville de Montréal ont fait certains inventaires, certaines analyses. Dans le Saguenay aussi, je crois, il y a eu quelque chose. Mme Robert pourra préciser là-dessus. Mais je pense... Si le MAMROT pouvait généraliser cette approche, donner à chaque région du Québec les possibilités techniques, et humaines, et professionnelles de faire les inventaires sur le paysage, ça permettrait de mieux connaître le territoire, et ensuite de pouvoir intégrer ça dans les schémas ou au niveau local, dans les villes.

Je vais laisser Mme Robert peut-être donner plus d'exemples ailleurs, au Québec, qu'est-ce que ça donne de faire ces études-là en termes de paysages.

Le Président (M. Morin): Oui, Mme Robert.

Mme Robert (Marie-Claude): Bon, tout d'abord nous avons fait naître le Conseil du paysage québécois après les États généraux du paysage en 1995. Donc, on est, bon, disons globalement, à une quinzaine d'années. Tout dossier d'aménagement, vous savez que c'est entre 20 et 30 ans, hein? On ne se contera pas d'histoires là-dessus. Donc, c'était le point sur le paysage québécois. On voyait où il s'en allait et où il n'allait pas, surtout.

Donc, là, on a identifié qu'il fallait faire parler de paysage et faire parler les paysages. D'abord, faire parler la population, parce qu'on manquait de vocabulaire au Québec pour dire... Le maximum, c'est j'aime, je n'aime pas. Donc, là, c'est tout et chacun. J'aime votre cravate. Je ne l'aime pas. Donc, le paysage était à ce niveau-là. Donc, on a voulu intégrer un peu plus de rationalisation, un peu plus de méthodologie dans la réflexion, et puis amener les gens à avoir des arguments qui étaient plus solides. Donc, ça a été un travail continu. La Chaire de paysage a travaillé là-dessus, le Conseil du paysage a travaillé là-dessus, ça a fait des petits, ça a fait des petits au Saguenay en matière de formation scolaire en matière de paysage et de parcours de découverte.

Parce que vous savez que tous les circuits culturels maintenant. Ils n'étaient pas là il y a 20 ans. Ils existent depuis 12, 15 ans, parce qu'on s'est aperçu que paysages et terroirs, c'était payant, c'était économiquement valable. Là, les régions essaient de garder de la population. Donc, quand on a coupé les taxes, quand on a à peu près tout le même niveau d'avantages qu'on peut leur offrir, c'est quoi? Bien, c'est l'intangible, c'est le paysage, c'est la qualité du paysage quotidien, c'est la qualité des grandes ambiances, des paysages emblématiques, mais donc disons que c'est le nouveau terrain de jeux.

On a commencé dans les années soixante avec le patrimoine; on a embrayé avec l'environnement; maintenant, on est dans le paysage, ce qui est tout à fait normal dans l'évolution d'une société puis dans l'évolution des compétences à acquérir pour aménager le territoire. On ne peut pas... On prend ça par couches, c'est comme des cours, O.K., des capsules. On a eu différentes capsules, et là on commence à avoir une certaine maturité, et on réalise qu'on a un peu la complexité du territoire. Et le développement durable, bien, il vient ramasser tout ça, parce qu'il vient dire... parler de l'environnement, de l'économie, du social.

Le paysage, c'est un transversal. C'est un transversal parce que c'est payant de bien aménager, c'est socialement intéressant d'être dans un environnement de qualité, un lieu de qualité. Puis je pense que... Pensez chacun à l'endroit que vous avez choisi pour habiter, puis, d'après moi, il doit y avoir des considérations de paysage là-dedans.

Et le troisième aspect, bien, c'est l'environnement. Donc, c'est certain que c'est une plateforme, le paysage, où les éléments de biodiversité environnementale et de proximité d'environnement naturel urbain et de qualité, ça fait partie du paysage. Il y avait des gens qui ont parlé de santé publique juste avant, et évidemment, eh bien, je vous dirais que, moi, j'ai été formée dans une compréhension que le paysage, c'était autant le paysage belvédère, touristique, et tout. À ce moment-là, il y a 40 ans, il n'y avait pas beaucoup de tourisme, on ne voyageait pas, c'était le paysage quotidien, c'était celui qu'on créait dans notre environnement immédiat.

Donc, on a fait beaucoup de travail là-dedans. L'Estrie a créé, avec la CRE, le Manuel des bonnes pratiques. On le diffuse aux officiers municipaux qui s'occupent de bâtiments et d'environnement, et ils disent: Ça nous prend ça pour travailler. Donc, on s'aperçoit que, oui, la bonne parole est passée, la sensibilisation est faite. Maintenant, les outils, où sont-ils donc passés? Les MRC n'ont pas d'architecte paysagiste, il y a seulement cinq municipalités au Québec qui en ont, dont Québec, Montréal, la CCN et Gatineau sont les mieux représentés. Ça veut dire qu'il reste plus de 1 000... proche de 1 100 municipalités qui n'ont jamais entendu parler de paysage, qui n'ont pas d'outils de paysage internes pour orienter même leurs décisions. Vous parliez tout à l'heure: trottoir, pas de trottoir. C'est fait sur des bases qui n'ont rien à voir avec l'accessibilité, la démarche...

Le paysage, ce n'est pas des zones. J'ai vu dans le document, dans la loi, des zones. Bien, on ne zone pas le paysage, c'est des réseaux de paysages. Parce que le paysage... Je prends l'exemple, un monte un mur. Tant qu'il n'y a pas de mortier, ça ne tiendra pas. Le paysage, c'est le mortier du mur. Donc, vous avez des routes, des industries, des commerces, des zones zonées résidentielles, toutes fonctions. Bien, le paysage, il est où? Il est partout un petit peu, c'est le liant. Donc, le plan paysage, c'est le liant de tous ces éléments-là, c'est ce qui fait que la sauce tient ou ne tient pas, c'est ce qui fait que la recette prend ou ne prend pas. Et ça, c'est simple à comprendre.

Je vais dans les ateliers des Fleurons depuis quatre ans, n'importe quel comité horticole, petit comme... conseiller municipal comprend ça, c'est le fondement. Et je vous dirai que c'est tellement simple qu'on n'a pas à se poser la question en tant qu'élu ou en tant que professionnel, on a juste à la regarder en tant que citoyens, et ça devient hypersimple. Donc, le plan paysage, ça fait quand même 30 ans que l'Europe le travaille. Pas tous les éléments d'un plan paysage peuvent entrer dans les règlements, mais de nombreux éléments. Ils ne viennent pas changer des règlements de base, ils viennent juste les rendre un petit peu plus compréhensibles.

Vous avez déjà lu des réglementations municipales? Des fois, on se dit: Mais quel est le principe qui est en arrière du règlement? Le fichu... Qu'est-ce que la personne voulait me dire? Et, quand j'en parle à des urbanistes, ils admettent d'eux-mêmes, quand je leur parle de paysage, parce que ça fait 40 ans que j'en parle, ils me disent: Oui, mais, nous, on n'a pas d'expertise. Bien, je dis: Je le sais, que vous n'en avez pas, d'expertise, vous n'avez aucune formation là-dedans.

Alors, ils font des règlements qui sont, je vous dirai, des vases creux, hein? On peut le tourner d'un bord, de l'autre, c'est comme une manette mais qui n'a pas de moteur en dessous, c'est-à-dire: Oui, on doit s'occuper de paysage, veiller à la qualité des paysages. Bien, quand vous avez dit ça, vous pourriez enlever le texte et mettre «À la grâce de Dieu» ou n'importe quoi, c'est pareil.

Donc, je vous dirais que j'ai lu des schémas d'aménagement en quantité, j'ai lu des plans d'urbanisme en quantité, puis, quand je parle aux urbanistes municipaux, c'est: Ouf! Comment on va mettre ça dans le plan? Bien, je dis: On va trouver des façons. Des fois, c'est par objectifs. Des fois, c'est pour expliquer la logique. Parce qu'un plan paysage, on peut le prendre... Comme on sait que c'est un réseau, vous mettez un vêtement, vous pouvez l'ajuster de différentes façons, l'ouvrir, le fermer, mais c'est un réseau. Donc, il y a des règles de réseau. Et celles-là, c'est ça qui doit guider après ça les actions.

Donc, tout n'a pas à être mis dans les règlements, mais, si on n'est pas capables de mettre par-dessus un plan d'urbanisme... Maintenant, on oblige les plans des milieux humides, bien, on colle le plan du milieu humide, puis, après ça, on va mettre le plan paysage. Puis là on crée des éléments de logique, de relation de réseaux. Et, dans certains cas, on aboutit sur soit des obligations ou des objectifs à atteindre par le promoteur et la municipalité, ça permet aux élus de dire: Bien, on peut-u négocier là-dessus, parce qu'il y a quelque chose qui nous dit, bien, on devrait aller là? Puis là, le projet, il a l'air d'aller dans une autre direction, on pourrait tendre dans cette direction-là. Donc, c'est un élément de négociation. Et, en plus, ça permet d'aller en consultation sur l'ensemble du territoire...

Le Président (M. Morin): Mme Robert?

Mme Robert (Marie-Claude): Oui?

Le Président (M. Morin): Je crois que le ministre aurait une couple de questions, là. Je veux dire, vous captez notre...

Mme Robert (Marie-Claude): Allez-y. Je m'excuse, je suis à pleine écoute.

Le Président (M. Morin): Vous captez notre intérêt. Je vois que vous êtes... Je vois que vous êtes une madame passionnée, donc vous êtes très intéressante. Mais là on a certaines petites questions pour aller chercher un plus.

M. Lessard (Frontenac): Non, mais, ça, c'est la passion -- ça, c'est bon -- et la connaissance. Donc, j'aimerais que vous m'entreteniez peut-être... Il y en a qui ont adopté des corridors panoramiques ou des paysages identitaires.

Quels défis ils ont eu à soulever et comment ça a pu, avec vos outils, permettre peut-être d'atteindre l'objectif? Il y en a quand même quelques-uns qui ont fait des choses. C'est assez, quand même, valorisé, cet aspect-là. Comment ils ont pu atteindre cet objectif-là, et ça a contribué...

Mme Robert (Marie-Claude): Ça dépend du dossier. On a pris la... Moi, j'ai fait la CMM puis la CMQ. Disons que, la CMQ, ils sont allés un peu plus loin. Ils ont d'abord fait leur atlas des paysages régionaux, c'est-à-dire qu'on a divisé le territoire sur des bases écologiques, ressources naturelles, pour arriver à une cartographie. Après ça, on arrive à identifier selon une grille de valeurs quelle est la valeur des paysages.

Et l'objectif de la CMQ et de la CMM, c'était d'avoir les paysages emblématiques de la métropole. À partir de là, ils ont fait une entente, c'est ce que je viens de travailler là-dessus récemment, ils ont fait une entente avec le MCCF...

Une voix: ...

**(11 heures)**

Mme Robert (Marie-Claude): ...c'est ça, MCCFQ, ils ont fait une entente sur des projets pilotes pour travailler sur quatre paysages identitaires, donc, chaque territoire, quatre territoires très près de Québec, qui sont des dossiers... Côte-de-Beaupré, ça, ça fait longtemps qu'on a ce dossier-là, plus près de Charlevoix. Donc, c'est vraiment des dossiers qui sont présents sur le territoire -- pour arriver à un plan directeur de paysage. Moi, je leur ai proposé un plan directeur de paysage, ou un plan de paysage, ou un plan de conservation, parce que, comme on est en projet de loi avec le ministère des Affaires culturelles, ça peut prendre plusieurs formes. Puis je leur ai dit: Pourquoi pas essayer l'Agenda 21, tant que vous y êtes? Mais c'est toujours dans une optique de paysage.

Donc, il faut passer toujours par évidemment la caractérisation. On peut faire une caractérisation qui est, comment dire, pas fonctionnelle, mais qui est orientée sur un problème. Par exemple, la MRC, je ne pourrais pas vous dire, dans le bout de Lachute, son nom m'échappe pour le moment -- Argenteuil: eux, ils avaient un problème avec plein de promoteurs de l'Ouest qui voulaient faire des projets domiciliaires de villégiature de 700 ou 800 unités dans des terrains très naturels et aussi humides. Alors là, c'était: Que fait la MRC, elle n'a pas d'outils? Alors, qu'est-ce qu'on a fait? On a dit: O.K. on fait une étude, on caractérise votre territoire, et là on se donne quelques règles qui sont des infractions à ne pas faire en matière de paysage. On ne construit pas, on dégage, la façon de construire si on veut travailler en montagne, la façon de construire quand on est en bord de lac, la densité requise en fonction des pentes. Donc, des règles, que j'ai d'ailleurs trouvées dans des livres d'urbanisme de la bonne époque, c'est-à-dire que ça a tout été mis dans des guides, mais il n'y a jamais de prescription. Beauport... Lac-Beauport, là, ils commencent à s'essayer sur des règlements qui touchent le paysage.

Donc, ça, c'est, je vous dirais, c'est: actuellement, le Québec travaille là-dessus, la CMQ, la CMM, le laboratoire. Le laboratoire, il est venu. Avant, il y a eu les chartes de paysages. Donc, c'est le contrat entre les communautés qui décident de travailler sur le paysage. Et, à toutes les MRC, je leur dis: Mais comment ça se fait que vous n'avez pas d'architecte paysagiste avec tous les dossiers de paysages que vous avez? On n'a pas d'argent. O.K., ça, ça va. Une fois qu'on a réglé ça, on a tout compris. Mais je leur dis: Pourquoi vous ne vous mettez pas trois ensemble puis vous engagez un professionnel qui, lui, va être votre interlocuteur et être capable d'être le passeur en matière de questions de paysages? Parce que, maintenant, je dis, la société civile est bien plus avancée que les élus. Je dis ça dans toutes les conférences que je fais. Les élus essaient d'attraper la bête, là, qu'est-ce qu'on fait avec cette bête-là? Puis la société civile dit: Nous, on veut que vous vous occupiez du paysage.

Le plan de paysage, il a toujours existé, au moins depuis 1970. Donc, ce n'est pas d'hier, là, on s'entend. Il fonctionne. Il est encadré. Évidemment, en France, il y a une loi du paysage. L'autre aspect, c'est qu'au Québec le paysage, il n'y en a pas, de porteur de ballon. Personne. Chacun a son petit bout. La Culture a le petit bout du «paysage patrimonial culturel» -- il faut mettre les trois mots collés à un bout -- vers la conservation et peut-être de la mise en valeur, si on peut. Le ministère des Affaires municipales ne s'en occupe pas de prime abord, n'a pas de professionnel et n'en a jamais eu. C'est quand même honorable, de la part d'un ministère, de ne jamais avoir eu même l'expertise dans le domaine -- ce sont des géographes ou des urbanistes, qui sont d'excellents professionnels, mais il n'y a pas d'expertise -- et qui fait des guides. Alors, il y a des guides. J'ai vu plusieurs guides, qui sont tous intéressants mais qui ont un gros désavantage: ils sont un peu superficiels, ils ne sont pas opérationnels. Alors, l'opérationnel en matière de paysage, les urbanistes ne l'ont pas, les MRC n'arrivent pas à mettre la main dessus.

J'ai regardé les plans... j'ai travaillé souvent avec des plans esthétiques, écologiques, historiques, etc., et alors, moi, je dis, la plupart du temps, aux urbanistes, je dis: Regarde, c'est un beau camouflage pour dire que c'est des éléments de paysage, mais vous en avez oublié plein. Et alors, là, quand on se met à scruter ces cartes-là qui sont sous-documentées... Parce que justement il n'y a pas d'inventaire. On se base sur des inventaires existants. On se base sur le macro-inventaire des années soixante-dix. On s'entend que le monde a changé depuis ce temps-là. Alors, on est complètement dans du périmé et on ne dote pas les structures en place d'un minimum d'outils. Je ne parle pas de grands outils, d'un minimum. Alors...

Le Président (M. Morin): ...

Mme Robert (Marie-Claude): ...actuellement, on compte sur les OSBL.

Le Président (M. Morin): Mme Robert... Oui, Mme Robert, je pense que le ministre a une autre petite question pour essayer d'aller en profondeur. Oui, M. Lambert?

M. Lambert (Yvan): ...non, je vais laisser le ministre poser sa question.

M. Lessard (Frontenac): Oui, oui, j'ai une question, mais c'est parce que c'est vraiment intéressant. On voit aussi qu'on est dans une autre génération, là. Vous dites: Les pastilles, ça se déplace, là. Ça a été la Culture, ça a été d'autres... là, c'est rendu à la protection des paysages, comme de quoi il faut créer la connaissance et continuer de l'enseigner. Merci de continuer de le faire.

Il y a eu quelques actions dans le temps. Comment vous liez le fait, quand il y a eu des plans d'intégration architecturale qui sont apparus dans les plans d'aménagement, donc qui était cette préoccupation-là de tenir compte que c'est un peu plus large, est-ce que c'est le grand-père de la protection des paysages ou... comment vous voyez le lien qui a été fait? Quand même, je pense, ça fait quelques années que ça existe -- avant nous, même. Et les municipalités ont commencé à l'utiliser pour venir apposer non pas des contraintes, mais en disant: Oh! Ça a un impact et c'est plus large que seulement le bâti ou les critères de construction. Pouvez-vous me parler de ce lien-là, peut-être, entre les deux?

Mme Robert (Marie-Claude): Bien, je peux vous en dire un aspect, c'est...

Le Président (M. Morin): Mme Robert.

Mme Robert (Marie-Claude): Oui. Excusez-moi.

Le Président (M. Morin): Allez.

Mme Robert (Marie-Claude): C'est arrivé... Je veux aussi passer la parole à Yvan parce qu'il est urbaniste aussi. Moi, j'ai travaillé sur des PIIA puis des plans d'ensemble, et évidemment c'est un petit peu lié au constat que l'urbanisme ne résout pas la beauté du monde. L'urbanisme fixe des occupations, des façons d'occuper, mais ça peut ne pas résulter dans rien d'intéressant. Ce n'est pas parce qu'on a les ingrédients d'une recette que la recette est bonne. Donc, c'est un peu ça, les PIIA sont nés un peu de ça. Moi, je les ai trouvés particulièrement trop réglementaires, parce qu'évidemment on n'a pas assez de mots ou de façons d'orienter le résultat. C'est très urbanistique, encore. Les plans d'aménagement d'ensemble sont beaucoup mieux travaillés, évidemment impliquent des équipes multidisciplinaires, et il y a toujours un architecte paysagiste dans le plan d'ensemble. Donc, on est présents. C'est devenu... parce que le plan d'ensemble impose d'avoir une multidisciplinarité, ce que n'impose pas le plan d'urbanisme.

Le Président (M. Morin): M. Lambert.

M. Lambert (Yvan): Oui, merci. Effectivement, bon, en termes d'urbanisme, il y a, bon, les fameux PPU, programmes particuliers d'urbanisme; il y a les PIIA, programmes d'intégration et d'implication architecturale. Quand on applique ça aux paysages, de façon générale, ça semble ne pas toujours fonctionner. Si on parle, par exemple, l'implantation en montagne, on s'aperçoit, malgré la présence de PIIA dans certaines municipalités, que le problème de conservation ou de gestion du paysage en montagne n'est pas réglé. Les dommages sont faits quand même. Donc, ça prouve que l'outil est là, mais ce n'est peut-être pas le bon ou le meilleur outil, ou peut-être qu'il n'y a pas eu -- je reviens encore -- d'inventaire ou d'analyse.

Avant de mettre en place le fameux PIIA, il faudrait peut-être savoir qu'est-ce qu'on veut protéger. Souvent, c'est un outil qui est pris comme de façon automatique par, bon, les aménagistes et les urbanistes en pensant que ça va régler le problème, mais c'est plus complexe. Il faut faire un pas avant, connaître le paysage et le territoire, et ensuite trouver le meilleur outil urbanistique.

Le Président (M. Morin): M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Oui. Quand vous parliez tantôt des Laurentides qui a un laboratoire sur les paysages, on me disait... Parce que j'ai fait des consultations sur l'avant-projet de loi dans ce secteur-là. On dit, d'un côté: À droite, il est interdit de couper une branche. Puis, de l'autre bord, on fournit tout le bois pour chauffer le poêle de l'autre gang.

Donc, il y a quand même la sensibilité. Les outils sont là, il faut quand même créer l'environnement favorable à ce que ça apporte une valeur de plus. C'est ce qu'on recherche, la valeur ajoutée à. Si tout le monde a les mêmes politiques de développement économique, etc., puis qu'on a tout... Qu'est-ce qui nous distingue, bien, c'est notre territoire. On a pris conscience de ça, les falaises ont une valeur, les plaines inondables ont une valeur, les...

Alors donc, vous ne pensez pas que c'est... Actuellement, il y a un moment opportun, et on est peut-être à une autre étape, là. Ce n'est peut-être pas des aménagistes partout, mais peut-être les urbanistes n'ont pas fait n'importe quoi non plus. Est-ce que...

Le Président (M. Morin): Très court, parce qu'il va falloir passer...

Mme Robert (Marie-Claude): Je voulais vous dire que «paysage» ne se limite pas à «protection». Actuellement, on est à la deuxième génération des villes. On les a industrialisées, on les a désindustrialisées, on est en train de les... on est à la ixième mouture, et on les densifie. Donc là, on est train de développer des villes et des territoires qu'on est en train de transformer. Il y a des paysages... on prendra la région de Québec, là, la catastrophe entre Lévis et, disons, Saint-Rédempteur, j'ai vérifié avec les urbanistes en place et ils n'ont pas prévu les zones tampons, ils n'ont pas prévu les outils de paysages pour préserver, au moins, un cadre autoroutier. Et alors c'est un zonage qui se fixe sur une limite, alors on n'est pas avec des outils de liants entre les fonctions, et ces outils-là sont à développer.

Le Président (M. Morin): Mme Robert, je m'excuse, là, on va transférer à l'opposition officielle. Le député de Blainville, vous continuerez peut-être avec... M. le député de Blainville, à vous.

M. Ratthé: Merci, M. le Président. Mme Robert, monsieur. Première question, j'aimerais vous entendre sur comment est-ce que vous envisagez la cohabitation des deux régimes de protection de paysages. On sait qu'il y a celui de la LAU, actuellement, et celui de la Loi sur le patrimoine culturel, le projet de loi n° 82.

Déjà, on nous dit que... certains promoteurs vont nous dire effectivement que des MRC et des municipalités locales peuvent demander au ministère de la Culture de protéger des paysages. Et les tenants de ce discours-là vont plus loin en disant: Bien, ça nous empêche de faire du développement, c'est déjà très protégé, pourquoi est-ce qu'on intégrerait, donc, ça davantage dans la LAU? Alors, comment vous voyez cette cohabitation-là?

**(11 h 10)**

Le Président (M. Morin): Oui, M. Lambert.

M. Lambert (Yvan): On a eu, là, sensiblement la même question quand on a déposé un mémoire pour la Loi sur le patrimoine culturel. La réponse va être, de mémoire, sensiblement la même. L'aspect paysage, ce n'est pas nécessairement de figer ou de protéger ou d'arrêter le paysage, c'est-à-dire on ne fait plus rien. Ce n'est pas ça, c'est de gérer le paysage. Bien, avant de gérer, je reviens encore, il faut faire les inventaires, les analyses, mais, un coup qu'une population locale a déterminé: O.K., ce paysage-là, il est important d'être protégé, il faut le gérer.

Maintenant, on fait le parallèle avec l'environnement. Il y a quelques années, les fameux promoteurs arrivaient dans un secteur et éliminaient tous les milieux humides parce que c'était la façon de faire. Maintenant, ce n'est plus la façon de faire. Le milieu humide est là comme le paysage est là. Il faut faire avec. L'un n'empêche pas l'autre.

Le paysage n'est pas un empêcheur du développement, et au contraire, même dans certaines MRC ou certaines villes, certains quartiers, c'est le paysage, hein, qui apporte une plus-value économique. Ça fait que ce n'est pas... il ne faut pas mettre les deux en opposition, là, il faut gérer le paysage, comment il se transforme dans le temps. Est-ce qu'on veut qu'il se transforme ou est-ce qu'on veut qu'il reste pareil? Dans certains cas, on souhaite que le paysage reste pareil. Dans certains cas, si on parle d'entrées de ville déstructurées, on souhaite que le paysage s'améliore, ça fait qu'il faut gérer le paysage.

Puis l'entrepreneur ou les promoteurs, je pense, il faut qu'ils s'adaptent à ça. Il faut que le paysage soit une ressource, comme une ressource naturelle ou économique, si on étire l'élastique un peu, et ça fait partie du processus, donc ça doit être intégré dans le processus de développement résidentiel. Nouveau quartier résidentiel en plaine agricole ou en montagne, il faut que le projet s'intègre au paysage. Ce n'est pas d'empêcher le développement, il y a une nuance à faire.

M. Ratthé: C'est intéressant. En fait, à la limite, on pourrait même dire qu'il pourrait inspirer le développement, parce que vous parlez d'intégrer, mais on pourrait prendre avantage du paysage pour dire: Dans un contexte, dans ce paysage-là, ça nous inspire tel type de développement, j'imagine.

M. Lambert (Yvan): Effectivement, les meilleurs projets, je pense, ça va être ceux qui vont être intégrés au paysage, qui vont prendre l'aspect unique ou identitaire d'un paysage puis ils vont même l'intégrer dans un projet. Que ce soit commercial ou résidentiel, je pense, ça fait des meilleurs projets qui ont une plus-value.

Encore le parallèle avec l'environnement: quand on intègre les milieux humides, les ruisseaux, les cours d'eau, dans un projet résidentiel par exemple, ça fait des meilleurs projets, tant au niveau de la santé publique qu'au niveau de la santé de l'environnement. On peut intégrer ensuite ces espaces-là dans un réseau vert, réseau de parcs. Même chose pour les paysages: ça peut être un système avec des belles balades, des sentiers. Je veux dire, il ne faut pas voir ça en opposition, là, que le paysage est contre le développement, je pense; au contraire.

M. Ratthé: À la lecture de votre mémoire, là, c'est clair que vous souhaitez inclure la notion de paysage dans le plan d'urbanisme. Est-ce que ça inclut également le paysage urbain? Et, si oui, est-ce qu'on devrait le préciser aussi dans la loi, l'inclusion du paysage urbain?

M. Lambert (Yvan): ...le paysage, c'est varié, c'est tant à l'échelle régionale qu'à l'échelle locale. Ça peut être un quartier. Le paysage, ça peut être une cour arrière, aussi, d'une résidence. Ça fait que, si on se rapporte au niveau d'un plan d'urbanisme au niveau local, je pense, effectivement, on... Dans la loi, on trouvait très intéressant que ça soit mentionné au niveau des MRC, des communautés métropolitaines, mais idéalement il faudrait même le ramener au niveau d'une municipalité, au niveau local.

Donc, plan paysage, ce serait de faire un inventaire- caractérisation dans une ville ou un village: quel est le paysage qui est sur place. Ensuite, la population, qu'est-ce qu'elle souhaite conserver, protéger, mettre en valeur, modifier, et d'intégrer ça au niveau de plan... comme un plan d'urbanisme, avec des règlements, des règlements de gestion du paysage. Donc, ça peut se faire, parce que ça semble être la volonté actuelle de le faire au niveau régional et à grande échelle d'une communauté métropolitaine. Donc, on peut le faire au niveau d'une ville.

M. Ratthé: O.K. Donc, outre la mise en valeur, j'allais dire, du milieu naturel et bâti et des paysages, est-ce qu'il y a autre chose, d'après vous, là, qui pourrait être inclus dans le plan d'urbanisme, mis à part ça?

M. Lambert (Yvan): Bien, vous savez, actuellement, ce qu'on peut constater, c'est que certains ministères semblent malheureusement travailler en silos. Bon, il y a la Loi sur le patrimoine culturel qui traite du paysage, la Loi sur l'aménagement du territoire et l'urbanisme. Dans un monde idéal, le paysage, il touche à tout, il touche à toutes les échelles. Ça touche à la culture, au patrimoine, à l'environnement. Je veux dire, le paysage, comme Marie-Claude... Mme Robert le mentionnait, c'est le liant de tout ça. Donc, ça doit être intégré, au niveau transversal, dans tous les ministères. Donc, pas seulement chaque ministère s'occupe... On ne peut pas découper le paysage, tu sais, il touche à tous les aspects.

M. Ratthé: Est-ce qu'une des préoccupations, là, qui est apportée, puis évidemment il y a les deux côtés de la médaille, mais vous avez probablement pu constater qu'un des grands changements, j'en parlais tout à l'heure, c'est les zones franches où on pourrait à la limite faire des modifications importantes sur les paysages sans qu'il y ait une consultation référendaire parce que la municipalité va pouvoir déterminer un endroit où... Est-ce que ça, ça vous inquiète? Est-ce que vous avez des recommandations à faire de ce côté-là?

M. Lambert (Yvan): Je ne suis pas très au fait de la notion de zone franche. Par contre, que la population soit consultée ou pas, avant tout ça, je pense, il faut avoir la connaissance de la zone franche en question en termes de paysages, donc, pour faire un inventaire ou une caractérisation. On revient toujours à ça. Ensuite, si quelque chose se démarque, à protéger ou à gérer, bien, on peut présumer que la ville, via sa réglementation, va mettre des critères, des objectifs que, si un promoteur arrive pour développer une zone franche, bien, il y a des critères à respecter de protection ou de gestion, de mise en valeur.

Le Président (M. Morin): Oui. Mme Robert.

Mme Robert (Marie-Claude): Relativement aux zones franches, en fait, je dirais que l'idée même de la zone franche, c'est un petit peu d'échapper à une notion territoriale qui ne fonctionne pas au niveau du référendum par rapport aux impacts réels du projet. Bon, ça, c'est une chose. Mais justement, le plan de paysage, ce qu'il amène de nouveau, c'est qu'on consulte avant sur l'ensemble du territoire de la municipalité. Idéalement, on l'a travaillé au niveau de la communauté métropolitaine ou de la MRC. Là, on percole évidemment au niveau de la municipalité, on détaille, on applique sur notre territoire les grandes idées. On connecte aux endroits le réseau où on pense qu'il doit se connecter entre les municipalités. C'est de l'intermunicipal qu'on travaille, et, dans la municipalité, on travaille à l'intérieur du quartier à un autre niveau. Donc, on sait qu'on a au moins... chaque échelle a ses niveaux de décision comme l'urbanisme. Ce sont deux métiers totalement parents, apparentés, mais ils n'ont plus les mêmes sphères d'expertise.

Et, à partir de là, bien, la zone franche, il y a certaines règles de paysage qui ont déjà été collectivement acceptées, ce qui simplifie quand une communauté a été consultée et a comme accepté un processus et certaines idées. La seule chose que ça introduit, c'est qu'effectivement ça amène, de la part des élus, une acceptation de voir, comment dire, leurs choix restreints par des choix collectifs assumés. C'est peut-être la seule chose, mais en général c'est plus facile même auprès des promoteurs, parce qu'ils savent où ils achètent leurs terrains en fonction d'un plan établi. Ils savent dans quel secteur... ils sont dans un secteur où ils vont avoir des contraintes, mais peut-être que la qualité de ce qu'ils vont construire est protégée dans le temps. L'acheteur va être... C'est très... comment dire, ce n'est pas l'oeuf ou la poule, mais c'est clair que la planification amène des impositions quand c'est accepté par la population, et, tous les 15, 20 ans, il faut le changer, parce qu'on change de paradigmes, dans une société.

Le Président (M. Morin): M. Lambert, vous vouliez intervenir?

M. Lambert (Yvan): Oui. Je pourrais donner un parallèle, un exemple. Il y a certaines municipalités qui ont maintenant des plans de gestion des cours d'eau. Là, on parle d'environnement. Jusqu'à quelques années, ça n'existait pas, et, au début, je peux vous dire, quand on parle des promoteurs, des entrepreneurs, pour faire un parallèle avec ce que Mme Robert mentionne, ça a été mal vu. Mais, avec l'expérience, ces municipalités-là, les promoteurs même préfèrent ça maintenant parce qu'ils ont eu une image, il y a eu une caractérisation du territoire en termes de cours d'eau. Donc, les gens, les promoteurs savent d'avance où sont les cours d'eau, lesquels il faut protéger, lesquels on peut éliminer, lesquels on peut déplacer. Donc, il y a une connaissance du territoire.

Ça revient... Même chose en paysage: donc, le fait de connaître, ce n'est pas une contrainte. Au contraire, même ça permet d'orienter le développement. Et, en paysage, ce serait la même chose, ça pourrait être un plan de gestion des paysages qui pourrait être fait au niveau local comme un plan de gestion des cours d'eau. On peut faire, je pense, un parallèle assez intéressant à ce niveau-là.

Le Président (M. Morin): M. le député de Berthier.

**(11 h 20)**

M. Villeneuve: Oui. Merci, M. le Président. Effectivement, lorsqu'on regarde l'ensemble du Québec, on connaît, je dirais... j'oserais dire, on connaît très mal notre territoire. Souvent, on va y aller sur des expertises pointues dans certains domaines, mais il reste que, sur le plan d'ensemble comme tel, c'est plutôt méconnu. Et j'écoutais madame tantôt parler, et ça me faisait penser au livre de Ségolène Royal, Pays, paysans, paysages, où, dans certains pays, on déplore effectivement que les paysages sont disparus, sont disparus parce qu'on n'y a pas prêté attention et on les a perdus, d'une certaine façon, pour toujours.

Je vous amènerais, moi, sur le fait que les municipalités ont beaucoup d'outils à leur disposition. Hein, il y a les PIIA, donc les plans d'intégration et d'intervention architecturale; il y a les PPU, hein, les plans particuliers d'urbanisme; il y a les plans d'aménagement d'ensemble qui, au niveau municipal, peuvent être utilisés -- MRC, bien sûr -- et maintenant vous parlez d'un «plan de paysage». Ces outils-là sont fort peu utilisés par les municipalités, en tout cas pas à leur plein potentiel, loin de là. Et, moi, j'aimerais vous entendre sur justement ajouter une nouvelle notion, comme les paysages, dans un plan d'urbanisme d'une municipalité, en quoi cela est-il garant justement de la possibilité qu'on puisse faire un bon inventaire et qu'on puisse mieux planifier notre développement du territoire? Quelle garantie qu'on aurait de supplémentaire? Parce que présentement, avec les outils qu'on a, les multiples outils qu'on a sont sous-utilisés, à mon avis, en tout cas.

Le Président (M. Morin): M. Lambert.

M. Lambert (Yvan): Bon, les outils sont peut-être sous-utilisés ou mal utilisés. Le problème, comme il a été mentionné aussi par Mme Robert un peu plus tôt, c'est que le paysage, ça ne peut pas être quantitatif. Puis le problème aussi, souvent, des PPU, des PIIA en particulier, c'est que c'est normatif puis c'est quantitatif. Puis souvent on ne peut pas gérer des problèmes juste avec des chiffres ou des normes, des distances de marges, ou des choses comme ça, ou des x pieds carrés à déboiser ou à conserver. C'est plus complexe. Puis, si on parle des PAE, plans d'aménagement d'ensemble, ça, c'est déjà peut-être une meilleure approche, mais, à ma connaissance, ce n'est jamais utilisé au Québec. Je ne connais pas de municipalité qui en a utilisé de façon régulière.

Peut-être ce qui se rapprocherait le plus avec un plan paysage, donc un projet... un secteur, un quartier d'une municipalité ou d'une MRC, on pourrait faire un immense PAE ou un plan paysage, mais il faut éviter de quantifier, de normaliser tout ça. Quand on parle du paysage, c'est encore plus complexe que juste de l'intégration architecturale x; x pourcentage de maçonnerie, par exemple, sur une façade. Même ça, ça, par expérience, dans un paquet de villes, ça ne fonctionne pas. Ce n'est pas parce qu'il y a 50 % de maçonnerie sur une façade d'une résidence que l'architecture va être intéressante ou le paysage offert sur la rue va être intéressant. Donc, ça prouve que cet aspect normatif là ne fonctionne pas pour régler certains problèmes plus esthétiques ou de paysage.

Le Président (M. Morin): M. le député de Berthier.

M. Villeneuve: Oui. Je vous amènerais sur un autre point. On sait que, présentement, les villes qui veulent identifier de façon formelle un paysage doivent nécessairement obtenir de Québec, finalement, l'autorisation finale. Comment verriez-vous qu'on pourrait fonctionner peut-être différemment et donner plus d'autonomie aux différentes régions du Québec et aux municipalités? Comment verriez-vous le fait qu'une municipalité pourrait décréter, finalement, un paysage d'elle-même, sans nécessairement avoir l'obligation de passer par Québec?

M. Lambert (Yvan): ...je pense, dans un monde idéal, ce serait que les municipalités locales, les villes, les villages, ça vienne de la base, ça commence par eux. C'est eux qui sont sur le terrain, c'est eux qui connaissent leur territoire, donc tout devrait venir de là et inverser la pyramide. Actuellement -- là, je parle peut-être un peu aussi au niveau personnel -- je pense que l'appareil gouvernemental prend peut-être trop de place au niveau ministériel. Donc, je pense que les localités... les municipalités locales ont la capacité, mais il faut leur donner les moyens -- je reviens à ce que je mentionnais tout à l'heure -- les moyens financiers, techniques ou professionnels. Donc, idéalement, je pense, ça devrait partir de la base, et ensuite aller peut-être au niveau du schéma de la MRC, et ensuite au niveau plus provincial ou ministériel.

C'est sûr que, si on parle de paysage identitaire à grande échelle, là, effectivement, il faut faire l'inverse. Il faudrait peut-être partir du niveau régional ou ministériel et descendre vers la base. Mais, dans certains... Je pense qu'il y a moyen d'avoir une pyramide à deux pointes, là, trouver une façon que tout ça fonctionne ensemble.

Le Président (M. Morin): Oui. Mme Robert.

Mme Robert (Marie-Claude): Ce sera court.

Le Président (M. Morin): Oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Robert (Marie-Claude): Quand on a eu besoin d'implanter des politiques culturelles, qu'est-ce qu'on a fait? On a mis des agents culturels sur le territoire. Quand on a eu besoin d'implanter des politiques agricoles, on a mis des agents agricoles sur le territoire. Quand on a eu besoin d'implanter des... foresterie, on a mis des agents forestiers sur le territoire. Bien, il reste à faire ça pour le paysage, parce qu'il n'y a pas de compétence, les gens ont besoin de formation. On est en train de préparer une formation pour les membres de la COMBEQ, pauvres petits inspecteurs en bâtiment et environnement qui doivent traiter des questions de paysage régulièrement et introduire ça dans leur façon de travailler. Donc, formation du personnel, expertise résidente en région. Des consultants, c'est excellent pour un mandat précis sur un site donné, mais ce n'est pas quelqu'un qui est sur le territoire et qui fait partie des meubles pour travailler les questions avec le milieu.

Et le paysage est obligatoirement un processus qui passe par la consultation de la population pour faire émerger certains consensus sur certaines choses. Il y a des choses qu'on veut protéger, il y a des choses qu'on veut réhabiliter. La carrière qui est abandonnée depuis 20 ans et que le ministère des Transports... On envoie passer une ligne de transport, le ministère est... Je vois que les petites municipalités sont mal prises avec un poste de transformation d'Hydro-Québec, elles ne pas capables de négocier avec Hydro. Donc, il faut quelqu'un qui a les arguments de paysage pour travailler dans le milieu pour aller «fronter» cette société d'État pour leur expliquer qu'en milieu urbain il faudrait être un petit peu civilisés quand on travaille. Et que le ministère des Transports, bien là, il a fait des coupes un peu sombres et que, là, il faudrait peut-être...

Alors, il n'y a pas de raison objective. La survie de la population n'est pas en jeu. C'est la qualité de leur territoire et de l'aménagement. Donc, au lieu de passer puis dire: Bon, bien, on ne peut rien faire, s'il y avait au moins un agent terrain... Comme je vous le dis, on les a trouvés, ces agents-là, dans tous les autres domaines. Pourquoi? C'est payant, la culture? Oui, on dit que oui, des fois on dit que non. Paysages, c'est payant? Oui, non. On sait que les ressources naturelles, les groupements forestiers, c'est quand même né dans les forêts privées et ce sont des gens qui travaillent, qui développent l'expertise même de leur clientèle. Bien, c'est ça. C'est pour ça qu'on peut mettre ces acteurs-là.

Je pense qu'on va le répéter à toutes les tribunes, c'est qu'actuellement il n'y a pas de ministère qui est le porteur de ballon. On a prié le ministère de l'Environnement de le faire, ils nous ont dit qu'ils nous trouvaient sympathiques mais pas assez intéressants; les Affaires culturelles, oui, mais le secteur, c'est le patrimoine -- on est d'accord avec ça; l'aménagement, bien, c'est la ville, est-ce le paysage? Alors, on n'est bienvenus ni chez les agronomes ni chez les forestiers, et chacun couve son petit lopin. Alors, on sait que, le MRN, il est en train de réfléchir aux villégiatures autour des lacs. Ils ont des...

Le Président (M. Morin): Mme Robert...

Mme Robert (Marie-Claude): Excusez-moi.

Le Président (M. Morin): C'est vous qui m'aviez dit que vous alliez être courte.

Mme Robert (Marie-Claude): Vous avez tout à fait raison, vous...

Le Président (M. Morin): Vous êtes intéressante, mais c'est vous qui m'aviez dit que vous alliez être courte.

Mme Robert (Marie-Claude): Oui...

Le Président (M. Morin): M. le député de Berthier. Voulez-vous intervenir, madame... Ça va, M. le député de Berthier?

M. Villeneuve: Oui. Je veux revenir au plan d'ensemble, parce que tantôt monsieur disait que c'était effectivement très, très, très rarement utilisé, le plan d'ensemble. Mais, bon, on a pratiquement tous été maires ou conseillers ici, autour de la table, là, et j'essaie de voir de quelle façon ça pourrait être plus... pas cohérent, mais, à tout le moins, que ça embrasse le maximum. Et je vois, dans le plan d'ensemble, à mon avis en tout cas, une possibilité fort intéressante d'intégrer justement le plan paysage. Parce qu'on ne peut pas non plus faire abstraction du reste, hein? Il y a ce qu'il y a déjà sur le terrain, qui est déjà existant, il y a des municipalités qui sont en plein développement. Et donc un plan d'ensemble, pour avoir, moi-même et avec les membres du conseil, envisagé la possibilité d'en faire un chez nous, ça nous semblait être une solution fort intéressante pour planifier tout le développement de la municipalité.

Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus. Parce qu'on peut bien développer... bien, développer, on peut bien se donner des outils, mais, encore là, si les outils qu'on se donne, ils sont facultatifs et ils ne sont pas accompagnés de mesures pécuniaires ou d'aide de ressources, bien, évidemment, les municipalités, avec toutes les charges qu'elles ont à assumer, toutes les nouvelles responsabilités qui occasionnent des frais extrêmement importants, fait en sorte que ces outils-là ne sont pas... Alors, moi, j'aimerais quand même voir avec vous, au niveau du plan d'ensemble, comment on pourrait justement intercaler peut-être le plan paysager dans le plan d'ensemble et avoir un outil plus complet, à mon avis, pour le développement des municipalités.

Le Président (M. Morin): M. Lambert, moins de deux minutes.

**(11 h 30)**

M. Lambert (Yvan): C'est ça. Je pense, ça n'a pas été utilisé beaucoup par les municipalités, le plan d'aménagement d'ensemble. C'est peut-être pour deux raisons: un, ce n'est pas quelque chose qui est quantitatif, dans le sens que ce n'est pas normatif comme un règlement ou comme des normes précises. C'est plus des objectifs à atteindre, comme, exemple, des densités, où on met les parcs, des choses comme ça. Et traditionnellement, je pense, le travail d'urbaniste a été plus vers l'aspect quantitatif, normatif. Donc, déjà, c'est un point pourquoi ça n'a pas été utilisé, je pense, ce n'est pas dans les moeurs.

L'autre chose, c'est du travail, faire un plan d'aménagement d'ensemble. Il faut caractériser le territoire, ensuite donner des objectifs, donc quelle sorte d'usage, quelle sorte de densité, où on met les routes, où on met les parcs. C'est un travail. Est-ce que c'est fait à l'interne ou au niveau municipal? Donc, il faut aller engager des gens, des urbanistes, ou autres, aménagistes, ou engager un consultant, donc une dépense. C'est peut-être pour ça que ce n'est pas utilisé plus que ça.

Si on fait un parallèle avec un plan paysage, ça va être un peu la même chose. Je pense que, si on veut faire des municipalités qui ont des plans paysage, il faut que les municipalités se donnent les ressources ou aient les ressources nécessaires via les ministères, donc, ou trouver une nouvelle façon de taxer, de tarifer, je ne le sais pas. Mais il va falloir que ces agents-là, qui ont déjà eu d'autres titres qu'«agent culturel», «agent agricole» ou «agent forestier»... Si on veut mettre sur le terrain des agents de paysage ou engager des architectes de paysage dans des villes ou des MRC, il faut donner des ressources financières aux villes ou aux MRC. Ça fait qu'il va falloir retravailler tout ça pour trouver des façons qu'il y ait soit des nouveaux systèmes de taxation ou... je ne sais pas, parce que, l'argent, il n'y en a pas plus, hein, on s'entend, là. Il y a une assiette x, donc il faut la redistribuer.

Le Président (M. Morin): Je vous invite à conclure. Oui, ça va?

M. Lambert (Yvan): Oui, ça va.

Le Président (M. Morin): Votre temps est écoulé. M. Lambert, Mme Robert, merci beaucoup, ça a été fort intéressant naturellement et très passionné, donc bon retour chez vous.

J'inviterais le Conseil du patrimoine religieux du Québec à venir prendre place. Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 31)

 

(Reprise à 11 h 34)

Le Président (M. Morin): Nous sommes de retour à nos travaux. Nous recevons le Conseil du patrimoine religieux du Québec. Donc, M. Groulx, si vous voulez vous identifier et présenter la personne qui vous accompagne.

Conseil du patrimoine religieux du Québec (CPRQ)

M. Groulx (Jocelyn): Oui, bonjour, mon nom est Jocelyn Groulx, je suis directeur au Conseil du patrimoine religieux du Québec. Et je vous présente M. Denis Boucher qui est chargé de projet au conseil.

Le Président (M. Morin): Vous avez 10 minutes.

M. Groulx (Jocelyn): Bonjour. Alors, d'entrée de jeu, j'aimerais rappeler les thèmes qui seront abordés dans la présentation du Conseil du patrimoine religieux du Québec. En premier lieu, il y aura un rappel de l'enjeu du patrimoine religieux en matière d'aménagement, d'urbanisme et de développement durable. On fera un aperçu du défi qui se présente, au Québec, quant à la réutilisation des bâtiments religieux excédentaires. On croit qu'il peut s'agir d'une opportunité pour nombre de collectivités locales. Nous aborderons comment devrait se faire l'arrimage entre le projet de loi n° 82 sur le patrimoine culturel et l'avant-projet de loi sur l'aménagement du territoire et l'urbanisme afin de faire une meilleure gestion, plus efficace, du patrimoine religieux bâti au Québec. Et finalement on traitera de quelques considérations sur la participation citoyenne et le respect des particularités locales.

Donc, le Conseil du patrimoine religieux du Québec est fier de participer à la consultation générale sur l'avant-projet de loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme. Le CPRQ considère que le patrimoine religieux est un enjeu d'aménagement et d'urbanisme d'une importance exceptionnelle dans le développement du Québec. Forts d'une expérience de 15 ans en matière de patrimoine religieux, nous croyons propice de suggérer des orientations qui pourraient être prises en compte, mais pas nécessairement dans des articles du futur projet de loi, mais dans l'actualisation des orientations gouvernementales en matière d'aménagement qui sera effectuée au cours des trois prochaines années, dans les visions stratégiques qu'auraient à produire des communautés métropolitaines et les MRC et finalement dans les objectifs des outils de planification qui sont le schéma et les plans d'urbanisme.

Le Conseil du patrimoine religieux entend par ailleurs affirmer son leadership en matière de patrimoine religieux au Québec et inviter les acteurs de l'aménagement à recourir à son expertise élargie. En cela, le CPRQ est appelé à accompagner les projets de conservation, de mise en valeur et de réutilisation du patrimoine religieux, donc à guider les acteurs dans l'utilisation des mesures et des outils pertinents, notamment la future Loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme.

Il va sans dire que le présent exercice de consultation doit permettre de prendre conscience de l'importance de doter le Québec d'outils intégrés d'intervention, basés sur la définition de nouvelles façons de faire, incluant ainsi l'héritage au sein des ressources durables pour l'avenir et non plus comme un fardeau du passé.

La mission du Conseil du patrimoine religieux. Donc, le conseil est une organisation à but non lucratif qui oeuvre à l'échelle du Québec. Il a pour mission de soutenir et promouvoir la conservation et la mise en valeur du patrimoine religieux québécois.

Depuis 1995, le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine a accordé au conseil 240 millions de dollars en vertu du programme Aide aux immobilisations. Avec la participation du milieu, des partenaires, quelque 355 millions ont été investis jusqu'à maintenant pour préserver les plus importants biens du patrimoine religieux au Québec.

Dans les projets du conseil, les différentes traditions religieuses travaillent de concert, en partenariat et en collaboration étroite avec les propriétaires, les collectivités locales et l'État québécois. Le conseil est composé de 12 tables de concertation régionales. À cela s'ajoutent également des comités spécialisés: on parle du comité des orgues, comité des oeuvres d'art, ainsi que le comité des archives.

Bien que, dans le cadre de l'aide financière à la restauration du patrimoine religieux, le conseil ait centré son action sur les édifices religieux encore utilisés à des fins religieuses, ses préoccupations englobent l'ensemble du patrimoine religieux, et notamment les éléments de ce patrimoine qui ne sont plus utilisés.

Maintenant, je céderais la parole à M. Denis Boucher qui va préciser l'avis du conseil concernant l'avant-projet de loi.

Le Président (M. Morin): Oui, M. Boucher.

**(11 h 40)**

M. Boucher (Denis): Oui, bonjour. Alors, merci. Alors, M. Groulx vous a énuméré tout à l'heure, en introduction, les cinq idées ou les cinq thèmes qu'on avait abordés dans le mémoire. On voulait rapidement revenir sur ces idées-là avec vous et en profiter pour vous donner peut-être quelques exemples ou des illustrations concrètes des idées qui avaient été formulées dans le mémoire.

Alors, au départ, on voulait réitérer et démontrer l'importance de cet enjeu-là en matière d'aménagement du territoire, parce que d'abord on considère -- et je pense que, ça, on peut tous en convenir -- que c'est un patrimoine fondateur, que nos établissements religieux font partie de nos tissus urbains et villageois partout au Québec, c'est souvent le patrimoine qui est le plus diversifié et le plus riche, et je pense que les efforts que l'État québécois a engagés depuis 15 ans le démontrent aussi. C'est un patrimoine fondateur et c'est aussi une composante majeure de nos paysages, on en parlait tout à l'heure. Je pense que l'ampleur et l'importance de ces monuments-là font en sorte que ça dépasse le strict caractère architectural. Ce sont des symboles, ce sont des repères, ce sont aussi des lieux de fierté. Et c'est à ce titre-là aussi qu'on voulait faire référence à l'enjeu en termes de réinvention, en termes de réutilisation de plusieurs de ces bâtiments-là qui sont appelés donc à changer de vocation dans les prochaines années.

On sait bien... et on a suivi bien sûr des projets, au cours des dernières années, on a eu des bons coups, on a eu des exemples, justement, où on a trouvé des vocations, on a réussi à partager souvent des espaces avec plusieurs partenaires, plusieurs acteurs, plusieurs usagers. On réalise aussi que, dans beaucoup de communautés, cet enjeu-là, il est à venir. Et c'est en partie pour cette raison-là que, ce matin, on voulait rappeler l'importance de cet enjeu-là au niveau de l'aménagement.

C'est un défi parce que, je vous le disais tout à l'heure, ce sont des édifices qui font partie de nos quartiers, de nos villages, de nos villes, ils en sont au coeur. On dit souvent que ce sont des éléments structurants de l'espace public, et, quand on parle d'espace public, bien, on parle aussi... il y a une dimension patrimoniale là-dedans. Et je crois que c'est le rôle des municipalités, des MRC, de l'État aussi d'assurer une saine gestion de l'espace public.

On pense aussi, bien sûr, au lien que l'on fait avec la paroisse, la paroisse qui était une organisation sociale, civile, administrative et religieuse du territoire. Et jusqu'aux années soixante, c'était le système qui régissait la vie, hein, des communautés partout au Québec. Donc, le fait d'avoir réorganisé, hein, les services communautaires, les services sociaux à travers le rôle des municipalités, de l'État, eh bien, on a un peu éclaté ces petits écosystèmes, et aujourd'hui, en matière d'urbanisme, il y a plein d'initiatives qui tentent de retisser ces écosystèmes, de recentrer les services, recentrer les avantages de vivre à proximité d'un coeur villageois ou au centre d'un quartier. Donc, on pense, nous, que cet enjeu-là, il est important, parce que, dans la perspective de redonner une nouvelle utilité à ces bâtiments-là, on pourrait en profiter pour justement trouver des façons de retisser ce lien social, de recomposer ces petits écosystèmes qui étaient si précieux pour la vie en société.

Notre deuxième idée, elle faisait référence, donc, évidemment au défi que représente la réutilisation de ces bâtiments-là. Très concrètement, il y a des initiatives qui ont été prises. Il y a des idées intéressantes qui avaient été énoncées lors des audiences de la Commission de la culture sur l'avenir du patrimoine religieux, qui se sont tenues en 2005. On disait d'ailleurs que... et je cite le rapport de la commission qui disait que, «dans une perspective globale de planification urbaine, il est important que les municipalités participent du choix des bâtiments à conserver et à recycler». Dans ce sens-là, il y avait aussi eu l'idée d'instaurer ou de proposer ce que l'on appelle souvent des clauses patrimoniales, c'est-à-dire que c'est un mécanisme administratif qui inciterait les municipalités mais aussi l'État, les organismes publics et parapublics afin de considérer en premier lieu l'utilisation des édifices patrimoniaux inoccupés pour combler leurs besoins d'espace plutôt que d'envisager une construction neuve. Alors, je pense que, dans une perspective de développement durable, c'était une idée qui avait été formulée, à l'époque, par la Commission de la culture.

Notre troisième... notre quatrième idée faisait référence davantage aux arrimages ou à la complémentarité intéressante entre le projet de loi n° 82 sur le patrimoine culturel et l'avant-projet de loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme. On faisait référence, dans le mémoire, à certains éléments intéressants qui pourraient, dans l'application de ces lois-là ou dans les dispositions qui sont proposées, permettre, au niveau du patrimoine religieux, d'avoir des outils plus efficaces. Concrètement, quand on parle notamment des outils utilisés, même au niveau de la planification du territoire, ça serait intéressant de voir comment le patrimoine religieux s'insère dans les schémas. On sait que, dans l'avant-projet, au sujet de l'obligation de procéder à des analyses des incidences anticipées pour toute modification au schéma, on pense que ça serait opportun de préciser que des études d'impact patrimonial pourraient être une formule intéressante pour justement évaluer les incidences dans les cas de modification.

Au niveau de la disposition relative à la démolition d'immeubles, ça serait intéressant que les bâtiments qui sont protégés, reconnus par la Loi sur les biens culturels ou la future Loi sur le patrimoine culturel, puissent être intégrés dans les règlements sur les démolitions d'immeubles. Donc, ça permet justement à deux outils d'être complémentaires.

Un autre exemple, ce serait sur la question des usages. On le disait souvent: On peut protéger un bâtiment, mais la loi sur le patrimoine ne permet pas d'orienter ou de guider l'utilisation qu'on va en faire. Dans le cas d'une église, d'un couvent ou d'un monastère, l'usage futur est très important, parce qu'il peut avoir une très forte incidence sur l'état de conservation ou les transformations qu'on va effectuer. Donc, on pense qu'encore là les biens qui sont protégés en vertu de la Loi sur les biens culturels pourraient être encadrés par la Loi sur l'aménagement pour que certains usages soient priorisés, pour éviter justement des transformations excessives.

Sur la question de l'arrimage avec le projet de loi n° 82, on avait aussi souligné l'idée des plans de conservation qu'on trouvait très intéressants, parce qu'ils introduisent justement une vision de gestion plus intégrée du patrimoine. Ce n'est plus seulement des mesures de conservation d'une enveloppe extérieure ou d'une forme architecturale, mais c'est aussi de projeter ce bâtiment-là dans l'avenir pour assurer sa viabilité et assurer, je dirais, sa vie utile pour la communauté. Donc, on pense encore là qu'il y a des liens qui pourraient être faits entre l'idée des plans de conservation et, par exemple, des secteurs protégés ou encadrés par des PIIA, hein, les fameux plans d'implantation et d'intégration architecturale, ou même, dans certains cas, pour des plans d'aménagement d'ensemble. Donc, dans ces cas-là, on pourrait donc, pour un PIIA, avoir un outil qui s'appelle le plan de conservation, qui permettrait aux deux lois, aux deux outils, dans le fond, d'être complémentaires.

En terminant, bien, sur la question de la participation citoyenne, on ne peut qu'être d'accord avec tous les efforts qu'une municipalité ou une MRC vont développer pour informer le public et développer des modes de consultation plus ouverts ou plus accessibles. On comprend bien sûr que l'enjeu en matière de patrimoine, c'est de faire comprendre, mais c'est aussi un enjeu de connaissance. Et souvent ce n'est pas une mauvaise volonté, c'est surtout une question de compréhension. On parle souvent du dialogue expert-gestionnaire-citoyen, on pense que les outils d'information et de consultation devraient intégrer donc des objectifs de connaissance sur les notions d'urbanisme, sur l'enjeu qui est en question, mais aussi sur les principes de conservation. Parce qu'on réalise que le citoyen, le public, il n'est pas insensible à ces questions-là, mais on n'a peut-être pas eu l'occasion de leur expliquer les principes et les règles ou enfin les objectifs que l'on avait au départ. Donc, voilà.

Et, en terminant, peut-être quelques éléments sur la question des particularités locales, hein, dans l'articulation des outils d'urbanisme et d'aménagement. On est encore là très ouverts à cette souplesse que l'on propose, mais en même temps on pense que, en matière de patrimoine religieux particulièrement, ça va être important qu'on puisse sentir l'importance d'intégrer cette dimension-là dans les outils de planification et de gestion, parce que, si on peut... si des régions ont cette liberté de déterminer leurs priorités pour les années à venir, on pense que toutes les régions du Québec devraient se doter de vision claire et très concrète pour la question du patrimoine religieux.

Donc, je pense que les particularités locales sont effectivement importantes. Les solutions, hein, au patrimoine religieux, elles sont souvent très locales, ce sont des besoins, ce sont des acteurs locaux qui font la différence, mais on pense qu'il y a aussi une priorité qui doit être exprimée par l'État à la base. Voilà.

Le Président (M. Morin): Oui, je vous invite à conclure.

M. Groulx (Jocelyn): Oui. À titre de conclusion, en fait, le Conseil du patrimoine religieux du Québec souhaitait, dans son mémoire, rappeler l'importance de l'avant-projet de loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme pour l'avenir du patrimoine religieux au Québec. Donc, on voulait rappeler donc l'enjeu majeur que représente la revalorisation des ensembles religieux patrimoniaux. De par leurs emplacements stratégiques et leurs rôles centraux dans l'espace public, ces édifices ont structuré le développement de tout le Québec. Donc, à l'heure des choix, leur réutilisation s'avère être un enjeu d'aménagement majeur pour le Québec mais aussi pour les communautés locales à la recherche de nouvelles assises pour le développement durable. Merci.

Le Président (M. Morin): M. Groulx, M. Boucher, merci. Maintenant, c'est la période d'échange. M. le ministre.

**(11 h 50)**

M. Lessard (Frontenac): Oui, merci beaucoup de la présentation. Évidemment, vous ne savez pas comment ça a teinté le Québec, le patrimoine religieux, parce que, dans le fond, l'ensemble des municipalités auquel j'écris, si je n'ai qu'à regarder mon comté: Saint-Méthode-de-Frontenac, Sacré-Coeur-de-Jésus, Sainte-Clotilde, Sainte-Praxède, en fait, en partant, la municipalité s'annonce comme étant une municipalité qui a donné sa vocation déjà en fonction de l'Église catholique la plupart du temps. Alors donc, ça a même teinté, on a bâti des villages alentour des églises ou à l'occasion en tout cas. Et ils choisissaient quand même pas rien de moins qu'à peu près le plus beau terrain dans le village ou le point le plus élevé, et on bâtissait les villages alentour de ça. Alors donc, nécessairement que le patrimoine religieux, on ne peut pas faire semblant qu'il n'existe pas, c'est le coeur souvent des villages, donc, et nécessairement la dimension des bâtiments qui ont été construits. Après ça, ne pensons qu'aux presbytères, aux cimetières, aux chemins de croix, etc., ce qui a pu teinter beaucoup de bâtiments.

On n'a qu'à penser à la région de Nicolet. Ils ne peuvent pas ne pas avoir un plan... Ça ne se peut pas qu'il n'y ait pas un plan d'ensemble sur tous les bâtiments religieux. Prenons aussi ici, à Québec, on n'a qu'à se promener le long du chemin Saint-Louis pour comprendre que les religieux avaient un sens très pratique et très business de prendre des terrains très appropriés, qu'ils favorisaient souvent le développement durable, ils protégeaient les arbres, etc., puis ils avaient un inventaire. Ils étaient de différentes cultures, donc.

Maintenant, une fois qu'on a ce patrimoine-là, nécessairement la loi sur la protection ou donc la mise en valeur et la réutilisation, parce qu'on boucle la boucle, là, après 400 ans, on a ceux qui ont protégé, mis en valeur, puis on a ceux donc qui sont à réutiliser le bâtiment, en disant: On n'aura jamais les moyens de se repayer ça, il faut lui donner une autre vocation.

Là, je comprends que, les 12 tables de concertation, vous vivez la problématique. On est à la phase qu'on investit pour protéger le patrimoine, le documenter, regarder quelle église ou quel équipement était à protéger ou, en tout cas, qui représentait des éléments de protection et de mise en valeur, et il y a toute la gamme.

Moi, je regarde à Thetford, dans ma ville, j'ai trois églises, là, qui sont fermées puis elles sont en réutilisation. La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme les touche. Moi, je demeure à côté de l'église, je ne peux pas être plus proche de l'église Notre-Dame que ça. Il y a l'église et nous sur ma rue, et, bon, on le voit, c'est immense, au coeur. Qu'est-ce qu'on va faire avec ça? À côté d'une école, souvent l'école n'était pas trop loin non plus. Alors donc, ça a un impact significatif.

Comment vous l'avez vécu à travers donc ceux qui veulent le protéger puis ceux qui devront le réutiliser, le démolir? À Québec principalement, j'ai plusieurs églises qui ont été démolies en plein coeur d'un quartier résidentiel, Saint-Sauveur particulièrement, ici, dans le bas de la ville, alors donc pour amener un nouveau bâtiment. Ou comme à Lévis, on prend le bâtiment religieux puis on le convertit en condos, et ça devient une aire de vie comme il se passe un peu partout ici. Puis il y a tout le temps le discours, là, sur les bâtiments des Augustines, etc., dans toutes les communautés religieuses qui sont à une fin ou à se départir de certains bâtiments, ceux qu'on appellerait excédentaires.

On trouve... on essaie... Est-ce que la loi vous a empêchés de faire quelque chose ou la loi vous a permis de faire quelque chose de plus, là, avec les plans d'ensemble, les plans d'intégration? Voyez-vous quelque chose qu'on améliore dans notre affaire ou vous pensez qu'on devrait aller un peu plus loin?

Le Président (M. Morin): Oui, M. Boucher ou monsieur...

M. Boucher (Denis): Oui.

Le Président (M. Morin): M. Boucher.

M. Boucher (Denis): Je pourrais peut-être commencer, et vous pourrez poursuivre, M. Groulx.

Alors, en fait, il faut voir que le Conseil du patrimoine religieux a, depuis une quinzaine d'années maintenant, eu à intervenir dans une approche de conservation, de restauration des lieux de culte les plus signifiants en termes de patrimoine culturel. Nous, dans ce rôle-là, je crois qu'on réalise aujourd'hui que l'enjeu est en train de se déplacer. L'enjeu de la conservation est toujours aussi important, mais, pour beaucoup de communautés, la priorité maintenant n'est plus seulement de justifier sa conservation, mais son utilisation future, parce que l'un ne peut pas aller sans l'autre. Donc, c'était un des points de notre message.

Maintenant, sur la question de l'outil et sur son utilisation jusqu'à maintenant, et si ça peut être efficace, utile, et si ça fait une différence, certainement, et c'est pour ça qu'on considère que, cette loi-là, elle est un des outils importants pour justement aider les communautés à passer à cette autre utilisation qu'on doit faire. Dans des cas très concrets, que ce soit par les zonages, par les PIIA, par des réglementations sur même les usages, ça avait une incidence sur les bâtiments religieux. À partir du moment où ces bâtiments-là doivent changer d'utilisation, il faut que les outils qui soient en place aient cette souplesse pour permettre aux communautés, là, de trouver des solutions et que ce soit davantage un levier qu'un frein ou qu'un obstacle dans les processus.

Je pense aussi que, dans le contexte actuel, il faut avoir le plus d'outils possible. On dit souvent, en matière d'urbanisme, que ce n'est pas nécessairement les outils qui manquent, c'est leur cohésion ou la capacité à les mettre ensemble pour avoir des solutions originales. Maintenant, je crois que, d'avoir un outil comme celui-là à la disposition des communautés, et surtout de les faire connaître et de faire comprendre le fonctionnement et leur mise en application, je pense que, là, il y a quelque chose qui peut être très utile pour l'avenir de ce patrimoine-là.

M. Groulx (Jocelyn): Mais, comme disait M. Boucher, le défi, c'est vraiment l'usage de ces nombreux bâtiments religieux. Donc, on est conscients que, pour le Québec, c'est un vaste chantier. Comme on l'expliquait dans notre mémoire, le conseil oeuvre depuis 1995 en partenariat avec le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine dans un vaste chantier de conservation, de restauration des édifices religieux patrimoniaux.

Et actuellement, bien, c'est sûr que ce n'est pas non plus une nouveauté, mais il y a vraiment une tendance, évidemment, au fait de devoir trouver des nouveaux usages ou partager des usages dans les édifices actuels. Et évidemment ce sont des défis qui sont importants. Ces projets-là demandent souvent plusieurs années de travail, de préparation, beaucoup de concertation, et c'est sûr que des outils comme l'avant-projet de loi qui est discuté aujourd'hui vont certainement permettre, dans le fond, de baliser un peu plus les résultats qu'on attend, dans le fond, parce que, dans le fond, il y a plusieurs solutions.

On est en train également de documenter tout ce qui se fait, ce qui s'est déjà fait comme projet de réutilisation au Québec, et on voit déjà qu'il s'est fait déjà des bons coups. Il y a de nombreuses municipalités maintenant qui ont des bibliothèques dans des églises. En fait, il y a plusieurs bons coups qui sont faits, pour utiliser cet exemple-là, et vraiment ce sont... C'est un vaste chantier. On est bien conscients qu'on entend parler régulièrement d'églises qui vont fermer, les débats que ça amène dans la population, à travers les médias, mais ce n'est un peu que la pointe de l'iceberg.

Le Président (M. Morin): M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Effectivement. Donc, dans l'aspect de la loi, nécessairement, nous autres, on réglemente les zonages et non pas les usages. Ce qui veut dire que le défi sur l'usage... on peut dire: Bon, dans telle zone, il y aura telle activité de permise, etc., mais non pas l'usage du bâtiment.

Et là les conflits d'usage, c'est là qu'ils arrivent, entre ceux qui disent qu'ils ont payé l'église, dépendamment de la confessionnalité, et l'usage. Bon, moi, je l'ai. À Sainte-Clotilde-de-Beauce, actuellement il y a un débat, là. Ça fait des années qu'ils veulent la convertir en disant: Bien, on pourrait mettre un gymnase dedans puis faire de l'église en même temps. La population est à 375 ou 500 de population. Et le conflit est plus sur l'utilisation que permettre... Ceux qui ont payé l'église en construction, le fait d'avoir un gymnase dedans, pour eux autres, c'est inconciliable. Donc, la loi ne va pas jusque-là.

Et c'est là que, quand on a une politique de consultation, elle se met avec le projet d'ensemble pour dire: Bien, voici, on va changer telle chose, on va autoriser telle affaire. Mais l'usage, là, l'acceptabilité... il y en a pour qui ça passe, puis il y en a qui ont mis des bibliothèques, il y en a qui ont fait du logement social, puis il y en a qui ont fait des théâtres d'été, dépendamment de la vocation ici, du côté de Lévis, des écoles de cirque, etc.

Donc, c'est très vaste, et on n'encadre pas ce volet-là. On pense que c'est aux communautés à régler. Ça demeure litigieux. Puis il y en a qui l'ont démolie carrément, donc, parce qu'il n'y a plus personne qui paie, puis là, bien, c'est par la contrainte. Mais on a la nouvelle génération. Il y a plusieurs communautés qui sont en attente de prendre ces décisions-là, d'avoir à dire: Bien là, on a formé une plus grande communauté, le curé s'occupe de neuf paroisses. Puis là la vraie question qu'on n'ose jamais poser au curé, c'est: Bon, allez-vous le dire, là, lesquelles vous n'allez plus utiliser? Et ça reste... Chez nous, là, le curé qui a pris la décision d'en fermer trois sur cinq. Évidemment, sur le coup, ce n'était pas populaire, là, tu sais, mais il était un gestionnaire, il a dû prendre la décision. Maintenant, on est à la réutilisation et on l'a là, on regarde tout ça.

Donc, merci de nous accompagner, de prendre ces décisions-là parce que, même quand on a tous les outils, les décisions restent difficiles, accrochées entre deux principes assez forts, là, sur le maintien ou la vocation, qu'un lieu religieux ne peut pas faire en sorte qu'une école de cirque s'installe dedans. Mais nécessairement que la loi ne tient pas compte de ça. On ne réglemente pas cet aspect-là, ce qui peut créer une déception dans vos attentes, là, mais on ne va pas jusque-là.

La question que je vous pose, par exemple, c'est: Comme on crée des zones franches, si, dans une zone franche, il y avait une église, l'église pourrait se retrouver aussi libre de toute contrainte référendaire. Mais ils devraient l'expliquer à la population que, exemple, l'église se retrouve dans la zone franche, libre, en expliquant quels sont les objectifs, les critères, pourquoi ils le font et qu'est-ce que ça... On a eu des représentations de certains groupes dans la région de Montréal, en disant: Lorsqu'on aura un bâtiment de haute valeur patrimoniale, on ne devrait peut-être pas faire en sorte que ça s'y retrouve. Il devrait y avoir des critères additionnels pour faire en sorte que, s'il y avait des projets à proximité, ça ne vienne pas contredire le fait qu'on les a... ou ait un impact majeur sur la préservation des bâtiments. Voyez-vous ça? Je ne sais pas si vous avez entendu le groupe qui est venu présenter cet aspect-là, là, sur le patrimoine religieux à Montréal, un comité?

**(12 heures)**

Le Président (M. Morin): Oui. M. Boucher.

M. Boucher (Denis): Oui. En fait, c'est ça: la question qui est très, très pertinente sur la capacité d'un bâtiment à recevoir une nouvelle utilisation ou un nouvel usage, c'est l'acceptabilité sociale d'abord, effectivement. Il y a aussi, bien sûr, le type d'usage qui est envisagé et la capacité aussi à ce que cet ouvrage-là s'intègre dans un bâtiment qui est souvent très particulier, hein? Dans le cas d'une église, on parle effectivement de pieds cubes. Ce sont des volumes qui sont très particuliers, et c'est surtout... et toute la question de l'emplacement de ces bâtiments-là dans un tissu urbain.

Il y a des usages qui seraient sûrement mieux intégrés que d'autres. Il y a des incidences aussi sur l'environnement immédiat, et, nous, on pense que c'est sûr que la loi sur l'aménagement permettrait de guider ces choix-là et permettrait aussi -- je pense aux mesures d'information et de consultation -- permettrait de vraiment amorcer des processus de connaissance et d'information sur l'ensemble de ces éléments-là et non seulement sur on conserve ou on réutilise. On réutilise comment et sur quel principe qu'on le fait?

Donc, je pense qu'il y a une particularité, là, par rapport à ces bâtiments-là, qu'il faut prendre en compte. Et je pense que, dans l'application de cette future loi là, ce serait important de préciser, dans les mesures de consultation et d'information, l'importance et la façon d'articuler ces séances d'information là.

M. Lessard (Frontenac): Oui, c'est ça. Le premier défi, ça a été, sans avoir toute la consultation, des politiques de consultation... Rappelez-vous la première génération des presbytères, donc, quand ils ont commencé à fermer les presbytères il y a plusieurs années. Bon, qu'est-ce qu'on va faire avec le presbytère? Alors donc, la génération que l'hôtel de ville se déplace au presbytère, ce n'est pas arrivé naturellement. Ce n'est pas arrivé même dans la première vague. Ils ont tout le temps essayé de vendre le presbytère pour le monnayer puis essayé de dire: Bien, il est gros, il est beau, il est ci, ça va loger, etc. Donc, il y avait une question d'intérêt pécuniaire au début.

Rapidement, la population s'est mise dedans, a dit: Voyons, ça n'a pas d'allure qu'il y ait un bar dans le presbytère! Donc, les gens en sont venus à essayer d'encadrer ça à cause probablement qu'il était situé immédiatement à côté d'une église, et il y avait la loi sur la régie des courses qui disait: Si tu es à plus de 100 pieds d'une église, tu as un critère additionnel.

Par la suite, on les a convertis en logements sociaux. Alors, ça, c'était acceptable pour la communauté de dire: Bien, on va convertir les presbytères en logements sociaux. Et là il y a eu la génération des logements sociaux dans le presbytère -- qui hébergeait le curé aussi, donc ça, en disant: Bien, il y a une petite place pour le curé puis une grosse place pour les résidents qui sont âgés.

Par la suite, là, il y a la génération des municipalités. Donc, l'hôtel de ville s'est déplacé, c'est une vocation qui était acceptable. On est à se questionner, donc on est en train de vivre la même génération mais pour les bâtiments d'église excédentaires pour lesquels on n'a pas encore une réponse automatique et systématique, parce que c'est des gros immeubles, et on n'a pas documenté.

Maintenant, dans la prise de décision, quand même, les municipalités peuvent mieux documenter. Tu sais, avec la protection du bois d'origine, de la pierre d'origine, l'architecte ou l'ingénieur ou lui qui a construit des églises, là, il a amené à documenter avant de prendre une décision éclairée sur sa valeur. Et vous avez beaucoup contribué à ça à savoir que ce n'est pas seulement dans le matériau, mais lui qui l'a bâti, ou la personne ou les groupes de travail, l'influence de tel bâtiment. Donc, vous avez augmenté la valeur patrimoniale avant de prendre une décision de la démolir, en disant: Elle est faite en pierre, elle est faite en pierre, mais là, attends un peu, ta pierre vient de telle carrière, et là historiquement, telle chose. Vous avez été capables de remonter un lien un peu plus important sur la dimension de prendre la décision.

Mais j'en reviens toujours sur... Il y a des périmètres dans lesquels les bâtiments seront inclus, peut-être dans des périmètres d'affranchissement dans lesquels le conseil aura à expliquer pourquoi cette zone-là et ce bâtiment-là seraient susceptibles d'avoir des projets. Et, à cause de la politique de consultation, ils devront refaire... à chaque fois qu'il y a un projet qui lie ce bâtiment-là, de venir réexpliquer à la population, mais ça serait libre d'affranchissement.

Je ne sais pas si c'est une préoccupation pour vous ou c'est quelque chose qui ne devrait pas se retrouver là-dedans, ou des critères additionnels devraient être pris si un élément du patrimoine se retrouve, sachant qu'il y a des lois aussi qui les protègent, des lois de biens classés, etc. Peu importe la zone, on ne peut pas faire n'importe quoi à cause de ces bâtiments-là.

Le Président (M. Morin): M. Boucher.

M. Boucher (Denis): Oui. Alors, sur la question des zones franches ou de l'intégration de bâtiments religieux dans des zones qui pourraient être identifiées comme telles, nous, on pense que la participation des citoyens dans des projets aussi importants doit se faire dans plusieurs étapes.

Et je pense que, dans un processus où le bâtiment a été jugé excédentaire et qu'on doit lui donner une nouvelle utilité, il y a un processus presque de deuil qui doit se faire auprès des gens. Il y a une compréhension aussi; donc, il y a un délai qui doit se faire. Et je pense que le fait de décréter une zone franche est peut-être intéressant dans la mesure où cette période d'acceptation est effective et qu'elle est aussi... elle est réalisée chez les gens. Sinon, je pense que ça peut justement avoir un effet de réaction ou un effet de ne pas vouloir être constructifs dans des nouveaux usages.

La question aussi des usages partagés est intéressante, parce qu'on a plusieurs projets où on a des espaces qui sont utilisés par plusieurs. Et ça, ça permet souvent de maintenir une fonction de culte, et donc qui permet justement d'intégrer tranquillement des nouvelles utilisations, tout en conservant cette utilité, cette symbolique religieuse et sacrée que les gens lui attribuent toujours.

Donc, c'est souvent un processus qui permet justement aux gens de faire ce cheminement-là et d'accepter... Et ensuite, donc, de pouvoir comprendre les projets qui peuvent être présentés.

Le Président (M. Morin): Ça va? Donc, M. le député de Blainville.

M. Ratthé: Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour. À mon tour de discuter avec vous sur le patrimoine religieux. Puis je lisais, à la page 5... déjà, vous nous dites, les églises: «...est renforcée par son paysage bâti environnant.» Puis on avait les gens qui nous parlaient de paysage. Souvent, dans un village, le paysage, c'est l'église, mais, vous en faites mention, c'est tout ce qui est autour aussi, hein? C'est le presbytère, M. le ministre le disait. Des fois, c'est l'école, c'est le collège, la salle paroissiale. Souvent, le paysage... l'église, on ne peut pas la prendre, en tant que telle, toute seule, elle fait partie d'un ensemble de bâti, là, que vous identifiez d'ailleurs très bien, vous appelez ça les «noyaux paroissiaux».

Est-ce que, d'après vous, d'une part... Parce que, là, on parle beaucoup de l'église, mais souvent, dans ces ensembles, même là, de bâtiments, est-ce que vous seriez d'avis qu'on devrait avoir une vue d'ensemble justement sur qu'est-ce qu'on va mettre? Parce qu'il peut y avoir des contradictions en termes d'usage, mais aussi des contradictions en termes... On pourrait décider qu'on démolit l'école puis on va bâtir un bâtiment qui est plus moderne, a une autre allure, qui ne tiendra pas compte effectivement du reste dont on vient de mentionner. Est-ce qu'on devrait être plus spécifiques, justement, sur les noyaux paroissiaux? Est-ce qu'on devrait dire: Bien, quand il y a justement ces éléments-là ensemble, on devrait tenir compte de l'ensemble, dans le plan d'urbanisme par exemple, où à un autre endroit ou...

Le Président (M. Morin): Oui, M. Boucher.

M. Boucher (Denis): Oui, merci. Je peux peut-être justement illustrer cette piste-là par des cas concrets où on a eu, par exemple, à réutiliser une partie de l'église. Ça peut être simplement la sacristie dans un premier temps, dans une première étape, qui devenait, par exemple, une garderie qui est adjacente à l'école primaire, qui est adjacente au parc municipal. Alors, voyez-vous, la complémentarité des utilités, des usages autour de l'église.

Et ça, ça permet non seulement de maintenir ce que l'on appelait tout à l'heure les espaces publics ou des espaces qui sont au coeur de la vie du quartier, ça permet souvent aux enfants qui fréquentent l'école de continuer de le faire à pied ou à quelque distance de marche. C'est aussi une façon d'avoir des arrimages possibles entre, par exemple, une école et un service de loisir municipal qui peuvent, à ce moment-là, travailler sur des projets communs. Donc, c'est cette façon-là, je pense, d'intégrer les utilités autour de l'église qui permet souvent, même à l'église aussi, de trouver tranquillement des nouvelles utilités. Donc, je pense que les noyaux paroissiaux, on les a appelés comme ça tout à l'heure, c'est un ensemble d'opportunités aussi, je pense, qu'il faut voir.

Et, dans bien des cas, c'est amorcé, hein? Vous parliez de l'école, le presbytère, souvent il y avait le couvent ou le collège qui étaient à proximité. Souvent, les collèges ont déjà été réutilisés, c'est des bibliothèques, c'est des services administratifs, c'est les municipalités qui s'en sont portées acquéreurs, mais ils ont toujours une vocation qui est compatible avec ce qui se fait autour. Donc, je pense, ça, c'est des avenues... Dans les plans d'urbanisme, je pense que ça, c'est fondamental.

**(12 h 10)**

M. Ratthé: Dans votre mémoire effectivement, quand vous parlez des noyaux paroissiaux, vous dites: Bien, évidemment, des fois ça peut être le point de départ d'une initiative de développement local, par exemple. Tu sais, on pourrait partir de là; vous parlez de réutilisation.

Mais concrètement, dans la loi, là, pour vous, ça devrait se traduire comment? Est-ce que ça devrait être dans les orientations, ça devrait être... Comment est-ce que, concrètement, on pourrait donner effectivement, là, un sens précis au développement de ces secteurs-là dans la loi même? Est-ce que vous avez des suggestions à nous faire de ce côté-là?

M. Boucher (Denis): Oui. Bien, je pense qu'au départ, au niveau des schémas, je pense que, même si on permettrait, donc, aux MRC de définir leurs priorités, ça serait important que déjà, dès le départ, on exprime, de façon très claire, l'importance de ces noyaux paroissiaux et de leur utilisation à des fins publiques.

Mais aussi, je pense -- tout à l'heure, on faisait allusion aux PIIA qui ont souvent déjà été implantés dans ces secteurs-là -- de permettre à ces PIIA là d'être gérés avec des plans de conservation où est-ce que, là, on pourrait même appeler des plans de développement, hein? Si on préfère le terme «développement», de dire: Oui, on conserve l'ensemble de ces bâtiments-là, mais qu'est-ce qu'on veut faire avec dans les 10, 15 prochaines années? Donc, le plan d'urbanisme peut déjà donner des orientations intéressantes et précises, mais en plus, le plan de conservation, lui, il permet de définir des acteurs et des rôles. Donc, il n'y a pas seulement le service d'urbanisme de la municipalité qui peut intervenir, mais différents acteurs qui sont déjà souvent intégrés dans ce secteur-là. Et les plans de conservation ou plans de développement, si vous préférez, permettraient aussi d'impliquer des citoyens. Parce que ça, c'est un autre élément du patrimoine et du patrimoine religieux, c'est que l'enjeu semble toujours être celui des autorités publiques, alors qu'il faut de plus en plus intégrer les comités de citoyens, il faut de plus en plus permettre aux gens d'avoir leur mot à dire, mais surtout de les impliquer dans des projets concrets. C'est le patrimoine à conserver qui devient un patrimoine comme projet. Et collectivement je pense que c'est, à l'échelle de tout le Québec, là, plein de potentiel, là aussi.

M. Ratthé: Vous parlez de plans de conservation, évidemment, qui ont été produits dans la loi n° 82, et vous nous parlez d'arrimage aussi entre les deux lois, là. Je pense que c'est important, vous le voyez comment, cet arrimage? Qu'il y ait des liens dans le projet de loi qui font référence au projet de loi? Comment vous voyez cet arrimage-là, pour que ça se parle? Parce que tantôt on nous faisait allusion que, dans certains cas... je pense que c'est dans le cas des paysages, on disait: Bien, le patrimoine a une politique, un autre ministère a une autre politique, puis c'est tout en silo. Alors, vous nous dites, ici: Bien, peut-être qu'entre la 82 et celle-ci, il devrait peut-être y avoir un meilleur arrimage. Vous l'identifiez comment, cet arrimage-là?

M. Boucher (Denis): Bien, souvent, on dit que les mesures qui touchent le patrimoine mais qui relèvent de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme sont des mesures qui sont plus facilement opérationnelles ou qui permettent d'intégrer des critères, des objectifs -- je pense au PIIA -- ce que la Loi sur les biens culturels actuelle ne permet pas ou, enfin, elle n'est pas précise là-dessus.

Donc, nous, ce qu'on pense, c'est que la Loi sur le patrimoine culturel est une loi de reconnaissance, c'est une loi qui permet d'identifier des valeurs, des qualités qui, collectivement, sont reconnues, mais, en même temps, il faut aussi qu'on puisse appuyer ces valeurs-là ou ces qualités-là par des mesures de gestion. Et on pense que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme est justement une loi qui permet d'opérationnaliser davantage. Et on le voit, ce qu'on a appelé parfois une superposition de règlements, mais en fait l'idée est intéressante: c'est que déjà, actuellement, ça s'est déjà fait, c'est-à-dire qu'on a protégé un bâtiment, on a cité en vertu de la Loi sur les biens culturels, mais on a aussi adopté un PIIA pour encadrer le développement du secteur autour. Donc, ça permet à ces deux lois-là d'être complémentaires.

Nous, ce qu'on dit, c'est qu'avec la nouvelle loi, le projet de loi n° 82, bien, l'idée des plans de conservation permet justement de rendre ça encore plus concret et de permettre à toutes les communautés qui ont un monument cité ou qui ont un site du patrimoine, d'avoir aussi un plan qui met, autour de la table, plusieurs acteurs et qui permet de dégager une vision sur ce qu'on veut faire de ces édifices-là plutôt que de s'en tenir à des objectifs de maintien en bon état.

M. Ratthé: Vous parlez de favoriser à ce que chaque municipalité et communauté ait son plan en tant que tel, et, dans votre mémoire, en fait, vous soulevez peut-être un petit drapeau en disant: Écoutez, il faudrait quand même faire attention. Parce que vous appelez ça des «particularismes» qui risquent de ne pas être pris en compte dans un cadre formel, uniforme à la grandeur du Québec. Donc, vous dites: Il faudrait faire attention, dans ces grandes orientations-là ou dans ce qu'on veut mettre dans le projet de loi, qu'on ne soit pas nécessairement dans le mur-à-mur.

Est-ce qu'on doit comprendre que vous êtes plutôt favorable à ce que les municipalités aient une plus grande latitude, plus grande marge de manoeuvre dans justement, là, tout ce qui touche le patrimoine religieux? Comment ça se traduirait pour vous, pour éviter justement que... Parce qu'effectivement chaque municipalité a des fois ses particularités, ses secteurs spécifiques. Comment vous le traduiriez? Donc, une plus grande marge de manoeuvre au niveau des municipalités ou...

M. Boucher (Denis): En fait...

Le Président (M. Morin): M. Boucher.

M. Boucher (Denis): Oui, merci. En fait, cette marge de manoeuvre ou cette capacité des municipalités à faire peut-être davantage ou être davantage impliquées dans ces enjeux-là, ça sous-entend aussi qu'elles disposent de moyens et d'expertises, je pense que ça a déjà été abordé comme question antérieurement, mais l'enjeu de l'expertise est aussi très important. Quand on regarde, par exemple, des projets de réutilisation, où on a réalisé des études de potentiel ou des études de préfaisabilité, si vous voulez, ça nous permettait souvent d'aller chercher une expertise pour éclairer très concrètement les capacités portantes, les structures, les espaces disponibles, les accès aussi des bâtiments. Et donc, concrètement, ça permettait ensuite aux acteurs locaux d'avoir une lecture du bâtiment qui était beaucoup plus précise. Donc, je pense que ça, l'enjeu de l'expertise... Si on veut qu'on assure cette souplesse-là, qu'on permette aux municipalités d'utiliser ces outils-là selon leurs besoins spécifiques, il faut aussi qu'en parallèle de ça on ait des moyens et des expertises accessibles et disponibles pour ces gestionnaires-là, là.

M. Ratthé: Souvent, vous parlez d'expertises, d'enjeux. Vous soulignez le fait que, souvent, c'est au sein du CCU que ces décisions-là sont prises. Et une des recommandations importantes, vous dites que ça devrait en fait sortir du CCU, si j'ai bien compris ce que vous nous dites, ou du moins qu'on élargisse... en tout cas, qu'on ne s'en tienne pas juste au comité... au conseil d'urbanisme. Donc, si on ne maintient pas uniquement ça au sein du CCU, vous voyez ça... Vous parliez de citoyens, d'une part; vous parlez d'une expertise au niveau aussi... mais ce n'est pas nécessairement toutes les municipalités qui sont en moyens, j'allais dire, ou qui ont la possibilité de faire ce que vous... Alors, est-ce que vous voyez une intervention au niveau du ministère, au niveau du gouvernement? Comment vous voyez qu'on puisse donner cette chance-là?

Parce que, moi, je pense entre autres à une municipalité dans ma circonscription qui doit effectivement sauvegarder... qui a le désir de sauvegarder son église, mais, au niveau de l'expertise, ils sont obligés d'aller à l'extérieur. Il y a des coûts quand même importants. Vous parliez de réhabilitation tantôt de certains immeubles. Des fois, ça coûte plus cher de réhabiliter l'immeuble que de le jeter à terre puis d'en faire un autre. Il y a plusieurs grands défis, et souvent, relativement, la décision va se prendre plutôt au Comité consultatif d'urbanisme qu'ailleurs. Et vous nous dites: Bien, peut-être qu'on devrait sortir ça de là, ou, du moins, élargir ça. Alors, concrètement, là, pour vous, ça se passe comment dans...

M. Boucher (Denis): Bien, en fait, la référence au CCU et leur rôle, c'était davantage de souligner l'importance que ces enjeux-là soient débattus avant et que, quand il y a un projet concret sur la table, ce projet-là puisse faire l'objet d'un processus d'information, de consultation, avant que le projet soit déposé à la table des comités consultatifs d'urbanisme.

C'est que, souvent, la... comment dire, l'implication citoyenne dans des cas comme ça, elle est nécessaire parce qu'il y a une acceptation qui doit se faire. C'est comme on le disait tout à l'heure, il y a un processus, et c'est un processus qui peut prendre un certain temps. Donc, il faut permettre aux citoyens de prendre acte de la situation, de la fermeture de ces bâtiments-là, mais aussi de voir les possibilités, donc d'accepter, au fur et à mesure, les autres usages qu'on pourrait en faire. Et la question des usages compatibles, là, va se poser, mais, avant que ce soit analysé au CCU, on pense qu'il y a tout un travail de réflexion et de... il y a un débat qui doit se faire avant.

M. Ratthé: Est-ce que -- puis on se posait la question -- ça ne vient pas un peu en contradiction avec justement le concept des zones franches?

M. Boucher (Denis): Oui...

M. Ratthé: Ce n'est pas toujours facile, hein, parce que la zone franche va venir protéger quelque chose, on va dire, mais, en même temps, pourrait, à l'inverse, ne pas le protéger, dire: Bien, dans cette zone-là, il y a une église puis on fera ce qu'on voudra. Vous parlez de consultations préalables, c'est... de trouver le milieu n'est pas toujours évident, non plus, là.

M. Boucher (Denis): Oui. Et -- si vous me permettez -- la question de l'expertise, elle s'exprime aussi à travers les CCU, et je pense que la commission des comités consultatifs d'urbanisme, bon, ça a déjà été discuté, mais on pense que c'est important que, particulièrement dans des petites municipalités, les CCU puissent disposer peut-être d'un appui ou d'un support... une expertise, qu'elle puisse provenir de la MRC ou d'une autorité régionale, mais qu'ils puissent avoir une aide pour justement analyser en profondeur un projet et prendre les décisions les plus éclairées possible. C'est sûr que, dans la mesure où il y a une zone franche qui est établie et que le CCU doit procéder à l'analyse de projet, il faut qu'on ait des conditions réunies pour que les différents regards et les différentes lectures se fassent.

**(12 h 20)**

M. Ratthé: Est-ce c'est un peu... je veux dire, est-ce que c'est un peu à ça que vous faites allusion quand vous dites qu'il devrait y avoir une obligation d'adopter des politiques d'information, de consultation qui devraient inclure des mesures spécifiques pour des enjeux patrimoniaux? C'est un peu, j'imagine, à ça que vous pensez, là...

M. Boucher (Denis): Oui, tout à fait.

M. Ratthé: ...l'implication de spécialistes, la consultation citoyenne, donc de mettre le plus de personnes possible autour pour en fait définir l'usage et l'utilisation de ces bâtiments-là.

M. Boucher (Denis): Oui.

M. Ratthé: O.K. Je ne sais pas si mes collègues ont d'autres questions. Moi, M. le Président...

Le Président (M. Morin): Ça irait?

M. Ratthé: ...ça fait pas mal le tour.

Le Président (M. Morin): Oui...

M. Ratthé: Je vous remercie beaucoup, messieurs.

Le Président (M. Morin): M. Groulx, M. Boucher, merci beaucoup.

Donc, on va terminer nos travaux pour ce midi avec vous. Bon retour, bon dîner. Merci beaucoup.

Je suspends les travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 21)

 

(Reprise à 14 h 2)

Le Président (M. Morin): Bonjour, tout le monde. Comme nous avons le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'aménagement du territoire ouverte. Je demande, comme à l'habitude, à toutes les personnes de vérifier vos cellulaires.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre la consultation générale et de tenir des auditions publiques à l'égard de l'avant-projet de loi intitulé Loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme.

Nous recevons cet après-midi comme premier intervenant le Groupe de réflexion et d'action sur le paysage et le patrimoine. Donc, Mme Lefèvre, s'il vous plaît, vous identifier et nous présenter le monsieur qui vous accompagne.

Groupe de réflexion et d'action sur le
paysage et le patrimoine (GRAPP)

Mme Lefèvre (Patricia): O.K. Donc, je représente le Groupe de réflexion et d'action sur le paysage et le patrimoine, dont je suis la coordonnatrice et cofondatrice, et je suis accompagnée de M. Christian Lamontagne. Mon nom à moi, c'est Patricia Lefèvre. Et M. Lamontagne est un des administrateurs du Groupe de réflexion et d'action sur le paysage et le patrimoine.

Le Président (M. Morin): Bienvenue chez vous. Vous avez 15 minutes pour nous faire part de vos commentaires.

Mme Lefèvre (Patricia): Je vous remercie. Donc, pour préciser, le Groupe de réflexion et d'action sur le paysage et le patrimoine, c'est un groupe de citoyens des Cantons-de-l'Est qui s'est donné pour mission de promouvoir un aménagement et une gestion responsables des villages et des campagnes.

En préambule à ma présentation, je crois important de préciser que notre expertise en matière d'aménagement n'a pas été acquise sur des bancs d'école, mais provient du travail de fond que nous avons mené durant cinq ans avec la communauté de Sutton pour forcer nos élus à adopter un plan et des règlements d'urbanisme contribuant à réduire l'étalement et à protéger les milieux sensibles. Pour arriver à nos fins, nous avons dû user très largement du mécanisme d'approbation référendaire faisant partie intégrante de l'actuelle Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et renouveler par deux fois notre administration municipale.

Sans autres ressources que le bénévolat intensif de citoyens convaincus et la mobilisation de la communauté, nous avons ainsi dû réaliser un travail que ni la MRC ni le MAMROT n'étaient en moyens de faire, à savoir forcer notre administration à se conformer à des politiques de développement qui ne faisaient pas l'affaire des principaux promoteurs immobiliers de notre région. En effet, bien que notre MRC ait adopté dans ses politiques particulières d'aménagement une disposition révolutionnaire interdisant l'ouverture de chemins hors des périmètres urbains et limitant ainsi l'étalement de façon radicale, cette disposition est allègrement contournée par toutes les municipalités de la région, et personne n'a les moyens de la faire appliquer, sauf des citoyens convaincus de son bien-fondé et disposant d'un droit de veto sur les nouveaux règlements municipaux.

Tout en saluant le remarquable travail de clarification et de simplification de la loi, nous nous inquiétons de plusieurs dispositions qui semblent manifestement aller dans le sens contraire des objectifs et principes énoncés dans la Loi sur le développement durable du Québec dans la mesure où elles semblent réduire la capacité des citoyens à s'impliquer dans le développement de leur milieu, renforçant par le fait même le pouvoir d'influence d'un lobby dont le manque d'éthique et de transparence fait régulièrement les manchettes depuis bientôt deux ans.

Nous ne croyons évidemment pas que restreindre les pouvoirs démocratiques des citoyens, accroître les risques de corruption, réduire l'accessibilité à l'habitation ou privilégier l'étalement résidentiel au détriment des milieux naturels soient les buts de la Loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme. Nous sommes cependant persuadés que ce seraient des conséquences inévitables, particulièrement en milieu rural, des dispositions contenues aux articles 82, 85 à 91, 109 à 117, 204 et 205 de cet avant-projet de loi, qui diminuent de façon dramatique la capacité de contrôle des citoyens sur la gestion de leur territoire et multiplient par la même occasion les risques de pratiques questionnables sur tous les plans, qu'il s'agisse du plan éthique, économique, social ou environnemental. Comme la loi réduit par ailleurs le rôle du gouvernement à celui de gentil accompagnateur, nous ne nous étonnons pas que le lobby de la construction salue ces dispositions comme une grande victoire.

Du point de vue d'habitants du territoire rural, le concept de zone franche nous prive de tout droit de regard sur le développement des secteurs les plus stratégiques de notre habitat. Sans même parler de développement durable, les articles 82 et 205 sont contraires aux plus élémentaires principes de démocratie. Compte tenu du contexte actuel du développement immobilier au Québec et des énormes potentiels de dérapage qui accompagnent ce «bar open», il est totalement injustifiable de supprimer le seul contre-pouvoir capable de s'opposer à des opérations immobilières douteuses. En entrouvrant la porte, sous prétexte de revitalisation, à d'éventuelles possibilités d'expropriation et de subventions municipales au profit du secteur privé, par le biais des articles 85 et 86, la loi n'est pas non plus d'ordre à rassurer les citoyens inquiets des affaires de collusion et de corruption faisant régulièrement les manchettes.

Dans un contexte où les taxes foncières demeurent de loin la principale source de revenus des municipalités rurales, le fait d'écarter les densités des objets d'approbation référendaire risque de précipiter une densification rurale qui va se traduire par des banlieues à faible densité. C'est probablement le pire scénario d'étalement possible.

La suppression du recours au référendum nuit également à la qualité d'écoute des promoteurs immobiliers face aux demandes d'inclusion de logements abordables. Par ailleurs, les dispositions sur le logement abordable, dont nous soulignons l'inclusion dans la loi, on trouve que c'est vraiment bien qu'il y ait des nouvelles dispositions à ce sujet-là, mais ça concerne juste les développements de plus de 20 unités. En milieu rural, les développements résidentiels sont rarement de 20 unités. Et il y a des gros problèmes de gentrification rurale dans des municipalités telles que Sutton ou de nombreuses municipalités de villégiature, et on ne sera pas plus outillés pour faire face avec ces dispositions-là.

Finalement, l'introduction d'un comité décisionnel en urbanisme, ça ne favorise certainement ni la transparence, ni la rationalisation des décisions, ni la participation citoyenne à la démocratie municipale. Ça permet plutôt au processus décisionnel de mieux échapper au regard d'une éventuelle opposition municipale tout en compliquant le suivi des décisions. Ça, c'est dans les articles 109 à 112. Et le pouvoir discrétionnaire laissé aux municipalités en matière d'information, ça ne garantit en rien l'existence d'une information de qualité. Le fait de supprimer le processus d'approbation référendaire, ça réduit les consultations publiques à de simples opérations de relations publiques parce qu'il n'y aura aucune conséquence. La Loi sur le développement durable place la participation et l'engagement citoyen au coeur de ces principes. Tel que projeté, la Loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme va à l'inverse de ces principes. Elle risque de réduire la capacité d'information, de participation et d'engagement citoyen en limitant considérablement un droit acquis depuis les tout débuts du zonage, celui de l'approbation référendaire. La réduction de ce droit risque en retour de compromettre l'atteinte de nombreux autres principes de développement durable.

Dans le contexte actuel du Québec, nous ne comprenons pas la pertinence de mettre la hache dans le processus d'approbation référendaire qui demeure le plus efficace des indicateurs d'acceptabilité sociale des projets de développement. Un pays comme la Suisse, où l'urbanisme fait une très large part à la démocratie participative, est aussi connu pour la qualité d'aménagement de son territoire que pour la quantité de référendums auxquels les citoyens sont tenus de participer à la moindre occasion. Remplacer un pouvoir décisionnel par un droit de consultation n'est sûrement pas de nature à faire avancer la démocratie, c'est plutôt une façon de réduire à peau de chagrin le peu qu'il en reste.

**(14 h 10)**

Afin de permettre un meilleur équilibre dans la défense des intérêts des différentes parties prenantes que sont les promoteurs privés, les firmes d'experts-conseils, les citoyens et leurs élus, nous croyons donc qu'il serait préférable:

1° d'éliminer la possibilité de zones franches d'approbation référendaire;

2° de simplifier et moderniser l'actuel mécanisme d'approbation référendaire tout en soumettant les projets d'intérêt public à l'approbation de l'ensemble des citoyens concernés plutôt qu'à quelques voisins afin de rendre le processus plus équitable;

3° de maintenir la densité parmi les objets de zonage susceptibles d'approbations référendaires, particulièrement dans les secteurs non desservis où l'augmentation des densités se traduit par plus d'étalement et par la destruction de milieux naturels et agricoles;

4° d'interdire toute possibilité d'expropriation à des fins privées;

5° de baliser les pouvoirs d'acquisition et de subvention des municipalités en matière de revitalisation et de réserver les subventions à des projets à portée sociale et à but non lucratif;

6° de maintenir un processus d'approbation périodique par la collectivité de l'ensemble des règles d'urbanisme gouvernant le territoire;

7° d'assujettir tous les projets de développement de plus de trois unités à une contribution à l'habitation abordable correspondant à un pourcentage de la valeur du développement, en nature ou en argent, sur le même principe que la contribution à fins de parcs, le fameux 10 %.

Et, finalement, de réserver les comités décisionnels en urbanisme aux municipalités dont les conseils comprennent plus de sept membres, afin qu'ils ne s'appliquent qu'aux très grosses municipalités pour lesquelles ils peuvent réellement faciliter les processus décisionnels.

Pour conclure, depuis la parution du guide Habiter la campagne... sans la détruire, en mai dernier, qui résume l'ensemble de la démarche du GRAPP ainsi que les constats et principes qui la sous-tendent, nous avons été contactés par plusieurs groupes de citoyens et plusieurs administrations rurales de plusieurs coins du Québec. Dans tous les cas, il s'agissait de communautés aux prises avec des promoteurs immobiliers qui voulaient les forcer à accepter des projets de subdivision non conformes aux aspirations et aux intérêts de la collectivité. Dans tous les cas, nous les avons invités à s'appuyer sur le pouvoir d'approbation référendaire des citoyens qui demeure l'ultime garde-fou du bien commun face aux pouvoirs démesurés de certains promoteurs plus intéressés par leurs profits à court terme que par le développement à long terme des communautés rurales. En effet, même lorsque les municipalités souhaitent faire appliquer la volonté de leurs électeurs, elles ont besoin de leur support pour légitimer leurs décisions face à des entrepreneurs dotés de beaucoup plus gros moyens financiers que bien des petites municipalités et qui menacent régulièrement de les traîner en cour s'ils ne respectent pas leur sacro-saint droit d'user et d'abuser de notre plus précieux patrimoine collectif: la terre.

Nous ne pouvons pas croire que vous allez laisser abattre l'ultime garde-fou de la démocratie municipale en supprimant le peu qui en reste, actuellement, au Québec. Vous êtes les gardiens de la démocratie, vous ne pouvez pas remettre aux loups les clés de la bergerie. Nous espérons donc que, grâce aux amendements que vous saurez apporter à cet avant-projet de loi, l'aménagement durable pourra se retrouver ailleurs que dans son titre et se traduire, au bout du compte, par une occupation plus harmonieuse du territoire. Merci de votre attention.

Le Président (M. Morin): Merci, Mme Lefèvre. M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Oui, merci beaucoup, et bon travail. Une approche citoyenne pratique, c'est ça, ce que j'entends, là. On a eu des universitaires tantôt, là, on a les praticiens terrain.

Juste pour me rappeler, parce que je n'ai pas toute l'expérience de ce qui s'est passé à Sutton, je sais qu'il y a eu changement de conseil puis, éventuellement, je pense que la vision que vous aviez était intégrée par le conseil dans son plan d'urbanisme, là. Est-ce que la première question, c'était: C'est le référendum ou ce n'est rien ou c'est plutôt: Bien, venez vous asseoir, on va regarder ce que vous avez, puis on verra comment ça peut améliorer nos affaires? Juste... Racontez-moi donc l'histoire de Sutton telle que...

Mme Lefèvre (Patricia): O.K., je vais essayer de faire une longue histoire courte. À Sutton, il y a eu la révision du plan et des règlements d'urbanisme, ça a commencé en 2005, c'était suite à la fusion du canton et du village de Sutton et aussi parce que ça n'avait pas été révisé depuis très longtemps et que le schéma d'aménagement était en révision lui-même. La première mouture de... Il faut savoir qu'à Sutton il y a un gros mouvement en faveur de la conservation des milieux naturels. Il y a le Corridor appalachien, il y a des citoyens très conscientisés sur le plan environnemental depuis des années. La première mouture de règlement qui a été proposée... le plan d'urbanisme, en fait, lui-même, correspondait pas mal à la vision des citoyens de Sutton parce que ça avait été élaboré de façon originale, c'est-à-dire que la consultation publique avait eu lieu en amont de la réalisation du plan d'urbanisme, et donc les citoyens s'étaient impliqués au niveau de la réalisation du plan d'urbanisme.

Jusque-là, tout allait bien. Là où ça a dérapé, ça a été au moment des règlements qui allaient avec le plan d'urbanisme, et les règlements allaient, suivant la compréhension des citoyens, à l'inverse de ce qu'ils avaient marqué dans le plan d'urbanisme. Et là les citoyens n'ont pas accepté que ça soit ça, donc on a fait un recours à la Commission municipale. La Commission municipale a décidé que c'était correct. Donc, le seul outil qu'il nous restait à ce moment-là, c'était le référendum. Donc, on a bloqué l'adoption des règlements par registre... En fait, on n'est pas allés jusqu'au référendum, il y a eu un registre d'approbation référendaire. Après ça, il y avait des élections qui approchaient, ça fait que c'est resté un petit peu dans le vague. Et puis, finalement, il a fallu changer deux fois d'administration municipale pour en arriver à nos fins. Tout ce temps-là, les citoyens ont usé de la menace du référendum pour dire qu'ils bloqueraient les règlements tant que ça ne correspondrait pas à ce qu'ils voulaient. Et là les règlements ont fini par être adoptés ce printemps. Il y a encore en ce moment des amendements qui se font, mais... C'est ça. C'est ça, un peu, l'histoire.

M. Lessard (Frontenac): O.K. Je comprends mieux maintenant. Maintenant, vous voyez que la loi sur l'aménagement, telle qu'on la propose, garde quand même ces objectifs, il y a les orientations gouvernementales, les plans métropolitains, les schémas d'aménagement, les plans d'urbanisme qui doivent être conformes. Donc, avez-vous... J'ai de la misère un petit peu à concilier le... Vous êtes contents qu'il y ait le développement durable, mais ça vise aussi les objectifs de densification, dans lesquels le «pas-dans-ma-cour» est là, on crée une zone franche au nom d'objectifs et de critères dans lesquels on s'affranchit, mais en indiquant à la population qu'il faut se doter d'une politique de consultation et d'information pour le faire, en leur disant: Voici le périmètre et les objectifs et critères, voici pourquoi je veux m'affranchir à l'intérieur de ce critère-là, de ces objectifs-là, et je consulte ma population pour le faire. Ce n'est pas tout le village, ce n'est pas toute la région qui va être une zone franche, donc il faut être capable de bien faire le travail.

Vous dites: Il faudrait faire d'autre chose, il faudrait retourner au référendum. Les référendums ne sont pas abolis. D'ailleurs, pour adopter les règlements, juste pour vous dire, si le même sujet arrivait aujourd'hui avec la loi adoptée, vous pourriez toujours battre par référendum les règlements que vous ne trouvez pas conformes au plan d'urbanisme.

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, moi, de ce que j'ai compris de la lecture de la loi et de ce que je m'en suis fait expliquer par des urbanistes, entre autres des profs d'urbanisme, là, c'est que la désignation des zones d'approbation référendaire elle-même n'était pas soumise à un référendum, de même que le plan d'urbanisme n'est pas et n'a jamais été soumis à un référendum. Donc, on peut soustraire du processus d'approbation référendaire tout ce qui va se passer à l'intérieur des zones franches, donc on n'aura plus notre mot à dire là-dedans du tout. C'est ça que j'ai compris.

M. Lessard (Frontenac): Mais au nom des trois objectifs de la réhabilitation, de la densification et de la rénovation.

Mme Lefèvre (Patricia): Et, comme je l'expliquais précédemment, c'est que la densification, nous, on n'est pas contre. Le Groupe de réflexion et d'action sur le paysage et le patrimoine... le contrôle de l'étalement, c'est un de nos chevaux de bataille, c'est là-dessus qu'on se bat. Mais sauf que, si on ne définit pas exactement ce qu'on entend par «réhabilitation», «densification» ou «revitalisation», ça peut vouloir dire n'importe quoi. Comme exemple, les premiers règlements de zonage, le premier plan de zonage qui nous était proposé, on faisait de la densification sur des dizaines et des dizaines de kilomètres carrés autour du village. C'était de la densification, on augmentait les densités. Ce qu'on arrivait comme résultat, c'était avec de la banlieue lousse, la pire forme d'étalement qu'on ne peut pas avoir. Plus étalé que ça, ça ne se pouvait pas, mais c'était de la densification. Et, à partir du moment où on empêche les citoyens de se prononcer sur, justement, les densités partout sur le territoire, puisque, pour... Moi, je n'ai pas vu les densités... Dans la loi, la nouvelle loi, je n'ai pas vu les densités comme un objet d'approbation référendaire nulle part. Donc, je ne vois pas comment maintenant est-ce qu'on va être capables d'empêcher ça.

Et l'autre point, ce que j'essayais de vous expliquer aussi, c'est qu'on avait, dans Brome-Missisquoi, une disposition révolutionnaire qui a été adoptée par notre municipalité régionale de comté pour répondre aux politiques d'aménagement du ministère des Affaires municipales, la disposition révolutionnaire, c'était d'interdire l'ouverture ou le prolongement de nouveaux chemins partout en dehors du périmètre d'urbanisation.

Nous, on était super contents, on s'est dit: Génial, on n'a plus besoin de rien faire. Mais on était un peu méfiants aussi. On s'est dit: Ça nous étonnerait que ça marche. Et, effectivement, cette disposition, elle a beau être là dans les politiques particulières d'aménagement de la MRC, être écrite noir sur blanc, je me suis fait répondre par le ministère des Affaires municipales que la MRC pouvait l'interpréter comme elle voulait. Ça avait beau être écrit qu'il ne fallait plus ouvrir de chemins, toutes les municipalités de la MRC continuent de vouloir ouvrir des chemins en dehors des périmètres d'urbanisation, puisque, pour le moment, leur seule façon de se financer, c'est avec l'argent des taxes, puis elles ne voient pas tellement à long terme, mais à court terme. Et actuellement le ministère ne peut pas empêcher ça, la MRC ne peut pas empêcher ça, et la seule façon qu'on peut l'empêcher et qu'on a été obligés de forcer réellement la municipalité de Sutton à se confirmer à ça, et uniquement à Sutton parce qu'il y avait des citoyens éduqués, et convaincus, et mobilisés, ça a été par l'approbation référendaire qui a forcé à l'adoption de règlements contraignants. Sinon, ça ne voulait rien dire.

**(14 h 20)**

M. Lessard (Frontenac): Donc, vous aviez les outils pour le faire. Donc, vous aviez un outil pour le faire si vous avez réussi à les contraindre.

Mme Lefèvre (Patricia): On avait un outil que vous allez nous retirer.

M. Lessard (Frontenac): O.K. Donc, je vois... c'est à cause de la densification. Je ne sais pas... J'ai mon spécialiste. Moi-même, je ne suis pas spécialiste. On en a. Là, vous parlez peut-être d'un cas particulier, j'essaierai de documenter qu'est-ce que ça veut tout dire, là.

Qu'est-ce que vous proposez pour cet équilibre-là? Un, moi, j'ai entendu des gens qui disaient: Le pouvoir au peuple. C'est-à-dire: On ne se fera pas élire, mais on va tellement contrôler tout que, là, les élus, ça ne donne plus rien d'en avoir. J'ai entendu la contrepartie des élus qui disent: Bien, voici, oui, on va travailler à avoir des outils de planification puis avoir des politiques d'information, de renseignement, puis, en général, les municipalités, c'est ce qu'elles ont, et, en général, ça fonctionne, là. Je ne connais pas un conseil qui veut aller se faire battre par 150 personnes dans une salle, là, puis pendant quatre mois de temps, puis etc., là, puis leur rentrer ça dans la gorge, mais, quand ça arrive, s'il y en a qui abusent du pouvoir, évidemment ça prend la contrepartie. Alors, il y en a... Tantôt, les cités régionales vont venir dire, peut-être, qu'il y a des outils trop lourds. On a déjà entendu qu'il y a déjà trop d'outils, etc., pour la population.

Comment vous conciliez de faire du développement durable, donc de la densification nécessairement, parce que l'étalement... on combat l'étalement, on veut du développement intelligent, planifié, bien ordonné, etc., et comment arriver à... Et on nous l'a dit, Vivre en ville, Équiterre sont venus dire: L'outil, malgré qu'on l'aime, qu'on enlève quand même le droit de faire un référendum, ça nous apparaît l'outil le plus approprié pour l'instant. Alors donc, à quelque part, plusieurs sont pour la densification mais pas dans leur cour, c'est-à-dire pas d'étalement, puis pas monter en étages, puis pas de voisins, puis pas de ci, pas de ça.

Je l'ai vécu ici, à Québec, avec la Cité verte. Tout le monde disait: C'est mon terrain. Le gros terrain qu'on voit, ça, je l'ai, c'est à moi, etc. Au commencement, ça a un peu brassé, puis on est capables de faire, pourtant, un écoquartier. Alors, vous voyez, ils disaient: Oui, c'est bien, mais pas chez nous.

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, je comprends. C'est vrai, là, que souvent les gens ont une vision différente de ce qui concerne le collectif et de ce qui concerne eux-mêmes en particulier, mais je ne pense pas que... je pense que la densification, d'abord, ça se justifie très bien à l'intérieur d'un périmètre urbain et là où on a déjà des infrastructures à rentabiliser. Faire de la densification à la campagne, dans les secteurs non desservis, et c'est ça, ce que j'ai vu, et les téléphones que j'ai reçus de gens de municipalités rurales depuis la publication de notre guide, là, c'est complètement une autre musique.

Puis, la densification, je comprends que ça peut servir des intérêts écologiques et environnementaux, mais je comprends aussi que ça dessert encore mieux certains intérêts immobiliers parce que c'est la baguette magique. C'était M. Nicolas Rousseau, qui était l'ancien directeur général de la ville de Bromont, qui nous avait expliqué le coup de baguette magique de la densification et les pouvoirs du zonage, hein? C'est la façon de fabriquer de la richesse avec un coup de baguette magique. Et la densification, ça peut être approprié, mais ce n'est pas une solution géniale qui va régler tous les problèmes mur à mur.

Et, plus largement, si on parle de densifier et que ça ne s'accompagne pas de mesures sérieuses pour du logement social et abordable, tout ce que vous faites, c'est que vous chassez vos pauvres en dehors, puis il va falloir qu'ils se rendent bosser pareil, là. Ça fait que, dans le fond, ce genre de densification là, je ne suis pas sûre que ça n'a pas un effet qui va continuer à faire de l'étalement aussi. Donc, nous, en tout cas, ce qu'on propose, c'est que, si on limite le droit des citoyens à juger de la pertinence ou pas de la densification, ça devrait se faire dans les secteurs desservis mais certainement pas dans les secteurs non desservis parce qu'il n'y a aucune justification pour ça. Et c'est la porte ouverte pour massacrer des boisés, pour remblayer des zones humides, pour faire tout ce que vous voulez au nom de la densification.

Et c'est de la densification. Si vous avez cinq habitants par kilomètre carré et puis vous en mettez 20 à la place, ou 40, ou 60, c'est de la densification. Est-ce que c'est du développement durable? Je ne le crois pas. Puis, en ce qui concerne le développement durable lui-même, il me semble que, dans les principes de base du développement durable, les citoyens doivent être impliqués dans le processus. Il faudrait peut-être mieux leur expliquer. Quand on a travaillé avec les citoyens de Sutton pour les amener à accepter certains trucs, là, il a fallu qu'on monte tout un argumentaire parce que le ministère des Affaires municipales était arrivé avec l'idée qu'on n'ouvrait plus de chemins en dehors des périmètres urbains, mais il n'avait pas expliqué pourquoi.

M. Lessard (Frontenac): Oui. Je reviens là-dessus. Quand on parle de la loi, la loi prévoit, donne des outils. S'ils sont mal appliqués, là, ça, c'est une autre affaire. La politique de consultation, la planification, comment faire les choses, ça, honnêtement, les outils sont dans la loi. On en ajoute. Et je pense qu'on a rencontré 20 groupes jusqu'à maintenant. La première affaire qu'ils saluent, c'est d'avoir une politique de consultation et d'information avant que les projets commencent. Alors, bien documenter, faire les bons diagnostics avant de poser des gestes pour détruire, changer, modifier, ou etc.

Je pense que ce qui est salué, c'est le barreau de l'équilibre, à savoir la population, l'environnement puis le développement économique, là. Au niveau du développement durable, on vient renforcer ça, plus des outils qui aident à la planification pour les conseils. Maintenant, un conseil qui l'utilise mal, c'est un conseil qui l'utilise mal.

Alors, et l'autre affaire, dans la loi... Malheureusement, les municipalités, c'est ainsi constitué, c'est: Si c'est prévu dans la loi, c'est ça qu'elles ont le droit de faire, puis, si ce n'est pas prévu, ça les empêche de le faire. Alors, une municipalité qui empêche quelque chose, si la loi habilitante ne lui permet pas d'empêcher, ils peuvent, techniquement, alors, dépendamment, là, des décideurs, comment ils l'appliquent. Alors, c'est pour ça que la population doit être dans le coup nécessairement. Et, parfois, ça prend plus qu'une fois. Mais, nécessairement, la loi actuellement donne ça, certainement, de ce que j'ai entendu, de beaucoup, beaucoup et encourage fortement à travailler.

D'ailleurs, curieusement, je suis critiqué pour faire ça. On est critiqué, comme gouvernement, d'ouvrir trop, puis d'avoir tout le temps les citoyens dans les pattes, on va utiliser ce que j'ai entendu, puis de les avoir tout le temps, puis là il faut que tu les informes, la politique, comment on organise ça. Alors que ce qu'on pense, c'est que, si on croit au développement durable, ça prend les citoyens, mais pas uniquement les citoyens. Il faut que l'organisme-conseil fasse bien son travail aussi et tienne ses équilibres entre le développement de l'environnement et des affaires aussi.

Donc, vous avez sûrement un conseil qui vous a écoutés. Peut-être que finalement...

Mme Lefèvre (Patricia): Oui, mais, monsieur, le conseil nous a écoutés parce qu'on avait un pouvoir d'approbation référendaire, parce qu'on était en mesure de bloquer les choses tant qu'il ne nous écoutait pas. Pour essayer de clarifier la chose, je l'ai déjà un peu expliquée comme ça, j'ai deux enfants, j'ai une fille qui a 17 ans puis j'ai un petit garçon qui a sept ans. Mon petit garçon qui a sept ans, je dois le consulter sur qu'est-ce qu'il veut mettre comme paire de short pour aller à l'école; ma fille, elle a le droit de décider de quelle paire de short elle va mettre pour aller à l'école. Remplacer un pouvoir décisionnel par un pouvoir consultatif, à mon avis, c'est infantiliser les citoyens du Québec.

M. Lessard (Frontenac): Et c'est sur certains objets seulement. Alors, les municipalités prennent exactement le même... Il dit: Moi, j'ai été élu pour faire ça, j'ai présenté mon plan à la population, il y a des objets qui sont sujets à... comme votre enfant, de mettre ses vêtements ou pas, puis à la plus vieille de décider. Bien, il dit: Si le peuple n'est pas d'accord, bien, ils feront comme nous autres, ils se feront élire, puis ils viendront au conseil municipal, puis ils utiliseront les outils pour lesquels... Parfois il faut consulter, parfois il faut décider pour la collectivité.

Vous voyez, on a cet équilibre fragile là à offrir aussi à ceux qui se font élire, puis qui vont devant la population, puis ils disent: Moi, je crois avoir un développement durable, puis respectueux, puis etc. Donnez-moi des bons outils. Ça se peut qu'avec des meilleurs outils je prenne les pires décisions de la terre, puis ça se peut qu'avec les mêmes outils... Il y en a qui avec pas d'outils vont faire un bon plan de développement durable, voyez-vous? Je pense qu'il faut aller chercher cet équilibre-là. Jusqu'à maintenant, on a entendu, puis c'est perfectible, là, c'est un avant-projet de loi, c'est pour ça qu'on fait des consultations, puis on apprécie le fait que vous nous présentiez votre version, vue du terrain, avec une mauvaise expérience qui a donné un bon résultat.

Mais j'essaie de voir comment concilier le fait du «pas-dans-ma-cour». C'est l'affaire qui a empêché le Québec d'avancer jusqu'à maintenant. Tout le monde aime le discours, hein, de: C'est bien, il faut faire du développement durable, de l'aménagement, il faut éviter l'étalement. La journée que ça arrive, bien, il dit: Oui, mais pas chez nous. Alors donc, comment avoir un outil pour l'ensemble mais sachant qu'il va se vivre des réalités parfois à la dure et à la... Ça, c'est sûr.

**(14 h 30)**

Mme Lefèvre (Patricia): Pour commencer, il y aurait vraiment un point en tout cas sur lequel, nous, le GRAPP, on insiste beaucoup, c'est qu'il n'y a pas une seule réalité. Vous ne pouvez pas faire une loi qui s'applique uniformément aux grosses métropoles, aux banlieues puis aux petits villages paumés, là. Ce n'est pas la même réalité, ça ne se gère pas de la même façon. Puis nos problématiques à nous, c'est plus de la dispersion du résidentiel à travers tout le territoire, même encore plus que de l'étalement. Puis il n'y a pas une seule façon de se développer. Là, nous, on a l'impression que la loi... On comprend très, très, très bien la problématique avec laquelle doivent composer les élus dans les grandes agglomérations comme Montréal, ou Québec, ou Sherbrooke peut-être, là où il y a vraiment comme un problème majeur avec ces banlieues qu'il va bien falloir densifier un jour, ça, on le comprend. Mais, sauf que, pour répondre à ça qui est vraiment un problème, on s'en va provoquer d'autres problèmes dans des municipalités rurales, parce que c'est ça, vraiment, que ça va avoir comme résultat. Je pense, pour le NIMBY, je pense que c'est quand même... il ne faut pas exagérer non plus avec le NIMBY. Bien là, souvent, on a accusé des gens de faire du NIMBY, alors qu'en fait, leur cour, ce n'était pas juste leur cour à eux, mais c'était souvent comme une cour pas mal plus large qu'ils défendaient. Et bien souvent des citoyens qui se sont fait accuser de NIMBY, il y a des organismes environnementaux qui sont arrivés après puis qu'ils n'habitaient pas exactement dans la cour du monsieur, là, puis ils défendaient le même point de vue.

Et, en ce qui concerne le NIMBY aussi, il faut peut-être se dire -- et ça, j'ai entendu ça d'un monsieur à l'INRS-Urbanisation -- que, si, les gens, ils ne sont pas d'accord, c'est peut-être que la répartition des coûts et bénéfices n'est pas tout à fait équitable et que, eux, ils doivent supporter tous les coûts pour des bénéfices finalement qui ne leur reviennent pas. Et il y a quelque chose, je pense, qui est vraiment essentiel, je l'ai déjà demandé au ministère des Affaires municipales, je le demande à chaque fois que j'ai l'occasion de parler à des gens qui auraient l'occasion de le faire: il serait temps qu'au Québec on produise une réelle analyse des coûts et bénéfices du développement immobilier en faisant un peu ce qu'ils ont fait aux États-Unis, là, en faisant des analyses de coût des services publics et en comparant ce que ça rapporte en taxes puis ce que ça coûte en dépenses publiques quand on fait du développement immobilier. Ça, c'est des études qui se font depuis 20 ans, aux États-Unis. Ça ne s'est jamais fait au Québec, et à date le résultat de ces études-là, une méta-étude qui a été faite par le Farmland Information Center, sur 120 études qui avaient été faites à travers 20 ans aux États-Unis, c'est que le développement résidentiel en milieu étalé, particulièrement en milieu rural, ça coûte toujours plus cher que ça rapporte. À partir du moment où les citoyens du Québec, et les municipalités, et les maires des petites municipalités l'auront compris, on aura peut-être plus de collaboration.

Le Président (M. Morin): Oui. Si vous voulez être un peu plus courte, le ministre a quelques questions.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lessard (Frontenac): Non, c'est correct.

Mme Lefèvre (Patricia): Excusez-moi.

M. Lessard (Frontenac): Je me posais... Le «not in my backyard», curieusement, vous demandez que l'approbation référendaire soit non seulement aux zones limitrophes, mais à... Ce n'est pas là un peu le reflet de pas-dans-ma-cour, celui-là qui n'est pas directement concerné vient... Parce que, si vous consultez tout le monde qui a le droit à l'adresse référendaire, ça veut dire que même ceux qui ne sont pas directement concernés mais que, si ça se passe dans la municipalité, je pourrais dire: Bien, je suis formellement contre, alors que la première couronne pourrait être pour. Est-ce que vous ne pensez pas que ça, c'est un pouvoir... Je vous dis ce que j'entends. Et...

Mme Lefèvre (Patricia): Oui, oui, oui.

M. Lessard (Frontenac): ...et on dit déjà qu'on est aux zones contiguës dans certains règlements d'agglomération, et qu'ils ont le pouvoir de bloquer à cause de l'affaire du nombre, je trouvais... ils trouvaient que, là, si tout le monde est consulté, là, ce n'est pas plus...

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, je pense...

M. Lessard (Frontenac): Vous ne pensez pas que c'est justement le discours de pas-dans-ma-cour, peu importe si ma cour est très, très loin de l'objectif?

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, moi, il me semble qu'il y a vraiment quelque chose d'injuste quand c'est des projets de grande ampleur et qu'il y a juste deux, trois personnes qui peuvent se prononcer dessus. Et il me semble que ça rétablirait quand même un certain équilibre. Je ne dis pas forcément que ça soit toute la municipalité, mais que la consultation soit proportionnelle comme aux impacts, aux retombées du projet, là. Puis je pense aussi que le...

M. Lessard (Frontenac): Oui.

Mme Lefèvre (Patricia): ...le fait d'exempter certains projets de l'approbation référendaire, il me semble que ça serait beaucoup plus logique d'y aller par projet. D'ailleurs, finalement, on a déjà des exemptions pour des raisons de sécurité publique, d'environnement, et tout ça. Mais on pourrait peut-être ajouter justement comme, par exemple, les refuges, tu sais, pour personnes maltraitées ou des choses comme ça qui suscitent beaucoup d'opposition, mais là il y a vraiment un intérêt public majeur qui le justifie. Par contre, quand on pense à tous les développements commerciaux, là, qui vont se faire exempter, là, là, moi, je ne trouve pas que ça le justifie, là. Je ne vois pas, l'intérêt public, où est-ce qu'il est dans cette histoire-là.

M. Lessard (Frontenac): Quand on regarde, parce que vous parlez de Sutton et plusieurs petites municipalités, bien, j'ai fait des préconsultations auprès de certaines MRC un peu partout, autant à Tremblant qu'ailleurs à Montmagny, donc rencontré différents territoires. Des territoires que j'ai rencontrés, ils disent: Nous autres, on regarde la loi puis je ne sais même pas un jour si on va avoir à appliquer ça. Parce qu'un chapelet de villages de 350, quand tu me parles de densification, restructuration, de rénovation, je ne le sais pas, là, on dirait que vous parlez du chinois. Donc, nous autres, on n'est pas inquiets, c'est rien que ça nous tanne un peu de retourner sur les bancs d'école, là, comme aménagistes ou urbanistes, etc., pour avoir à expliquer aux élus la portée de la loi. Mais, de toute évidence, les villages que nous sommes, là, on ne voit pas comment on va faire de la revitalisation urbaine ou... donc, on ne se sent pas menacés, et on aurait de la misère à désigner un bout de rang comme, je ne sais pas, rénovation ou...

Alors donc, vous voyez, c'est drôle, parce qu'en même temps vous dites: Bien, c'est peut-être les villages plus organisés, vous craignez ce développement domiciliaire là ou commercial ou, je ne sais pas, un village qui a perdu complètement sa vocation minière, qui sera converti... la forêt, peut-être des villages où est-ce que la scierie est en plein coeur du village, peut-être qu'un jour, une fois que la scierie est fermée puis elle est fermée pour toujours, il va peut-être être obligé de faire une zone, dire qu'est-ce qu'on fait avec la scierie? Comme il y en a qui se posent: Qu'est-ce qu'on fait avec l'église, qu'est-ce qu'on fait avec le presbytère, qu'est-ce qu'on fait avec le magasin général qui n'est plus magasin général et est-ce qu'on est capables de redéployer tout ça?

Alors, pour les rangs et les autres, ils trouvent que je parle du chinois, puis, pour leur noyau urbain, leur noyau villageois, ils trouvent que ça pourrait être un outil parce que, à toute évidence, avec les bons pouvoirs référendaires qu'ils ont actuellement, ils ont été incapables de faire rien pendant 20 ans, parce qu'il y a tout le temps quelqu'un qui est contre, en quelque part, de... modifier l'église ou le centre communautaire ou le centre paroissial en je ne sais pas trop quoi, une idée venue d'ailleurs, qui a tout le temps l'air d'agression.

Mais je vous pose la question sur quelles sont, en dehors du noyau villageois, les grandes préoccupations que la Loi sur l'aménagement viendra enlever en zones référendaires, je ne vois même pas où est-ce que ça peut s'appliquer.

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, ce que je vous dis, là, c'est-à-dire de supprimer les densités partout, là, de supprimer les densités...

Le Président (M. Morin): Je m'excuse...

Mme Lefèvre (Patricia): ...comme objets d'approbation...

Le Président (M. Morin): Oui. Excusez, madame.

Mme Lefèvre (Patricia): Oui.

Le Président (M. Morin): Donc, je dois... Oui, allez-y.

Mme Lefèvre (Patricia): Oui, je vous en prie.

Le Président (M. Morin): L'opposition officielle vous permet de répondre à...

Mme Lefèvre (Patricia): O.K., excusez-moi.

Une voix: ...

Le Président (M. Morin): Oui.

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, c'est ça, comme le fait de supprimer la densité des objets d'approbation référendaire, ça ne posera peut-être pas un problème dans les villages miniers ou les villages du Grand Nord. Puis je ne connais pas leur situation. Nous, la situation de notre village, c'est un village qui est en gentrification rapide, parce qu'il y a des énormes pressions... bien, des énormes, des grosses pressions immobilières à des fins de villégiature et de développement de résidences pour les gens qui s'en vont à la retraite, et il y en a de plus en plus, des gens qui s'en vont à la retraite. Et, des villages comme nous, il y en a beaucoup à travers le Québec, et c'est pour ces villages-là que ça va poser des problèmes majeurs. Des villages aussi petits, j'ai été conseillère municipale du village d'Abercorn, 450 habitants, et je peux vous dire qu'ils sont en train d'essayer de tricoter quelque chose pour être capables d'aller faire un développement dans un endroit totalement inapproprié, parce que justement il y a aussi le fait que ces petits villages, comme mon petit village d'Abercorn, imaginez-vous quand vous vous retrouvez face à un gros promoteur immobilier, là, vous n'êtes pas capables de faire face à la musique. Mon maire, il savait à peine lire. Ce n'est pas des blagues. En tout cas.

M. Lessard (Frontenac): On espère que d'autres savent lire alentour.

Le Président (M. Morin): Oui, c'est ça. Donc, M. le député de Blainville.

M. Ratthé: Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue à vous deux. Merci, c'est très intéressant, ce que vous nous apportez. J'ai presque le goût de vous féliciter sur la bataille que vous avez menée à Sutton. Évidemment, j'allais dire, dans ce que vous nous apportez qu'il ne faut pas faire du mur-à-mur, j'allais dire aussi: ces batailles-là, on ne peut pas non plus les faire mur-à-mur, effectivement, ça ne peut pas s'appliquer partout.

Dans votre mémoire, vous nous dites clairement que le recours aux zones franches semble faire primer l'intérêt de certains lobbys privés sur les intérêts des résidents, et je vous dirais que plusieurs intervenants aussi sont venus un peu nous dire l'inverse, on a les deux côtés de la médaille, en disant: Bien, écoutez, des fois il y a une poignée de résidents qui empêchent des développements à intérêts collectifs d'avancer, et je pense que ce que le ministre voulait voir tantôt, c'est un peu comment on fait cet équilibre-là entre les deux.

Je me demandais si... Parce que je lisais... dans l'article 82, on y dit: Bien, il faut que ça fasse l'objet de rénovations urbaines, de réhabilitation, de densification. Ça nous semble un peu large. Si on était plus précis sur le type, par exemple, je ne sais pas, moi, de réhabilitation, de densification ou si, je ne sais pas, moi, on allait avec un encadrement plus serré en termes peut-être de dire, je lance un chiffre, là, 5 % du territoire, est-ce que, pour vous, ça serait déjà plus acceptable si on était déjà beaucoup plus précis sur la définition de la zone franche puis qu'est-ce qu'on entend? Parce qu'effectivement rénovation urbaine, là, c'est très large. Ça peut laisser place à interprétation, c'est un peu ce que vous semblez craindre, ou si vous dites...

Mme Lefèvre (Patricia): Bien...

M. Ratthé: ...on parlait densification tantôt, c'est quoi, la densification? Est-ce que, pour vous, si on était plus précis dans la définition peut-être ou même dans le pourcentage qui pourrait être acceptable ou le type, est-ce que ça serait déjà plus acceptable pour vous?

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, ça serait certainement plus acceptable s'il y avait une définition un peu plus claire, là, qui fasse qu'on ne puisse pas entrer n'importe quel projet dedans, c'est sûr que ça serait quand même un peu mieux. Mais, sur le fond du principe... Ce n'est pas pour faire du populisme, mais quand même la démocratie, normalement, il me semble que, les gens, ils ont le droit de se prononcer sur leur milieu de vie, particulièrement en ce qui concerne les secteurs les plus stratégiques de leur milieu de vie. Donc, sur le fond de la chose, ou on décide que la démocratie, ce n'est pas bon puis que, les gens, ils ne sont pas capables de savoir ce qui est bon pour eux, puis on se fait un autre système de gouvernement, comme vous voulez, ou bien donc on décide que la démocratie, c'est perfectible et puis on donne peut-être plus d'éducation, d'information, et tout ça, aux gens pour qu'ils comprennent mieux vers où on s'en va. Mais, de la même façon que je ne pense pas qu'on peut imposer la démocratie à la pointe du fusil, je ne pense pas qu'on peut imposer le développement durable à coups de bâton sur la tête.

**(14 h 40)**

M. Ratthé: Non.

Mme Lefèvre (Patricia): Oui.

M. Ratthé: En contrepartie, et puis en fait, c'est vraiment mettre un éclairage très concret sur ce que vous dites, ce qu'on nous dit actuellement, en contrepartie, dans le projet de loi, c'est que, bon, il n'y aura plus d'approbation référendaire, mais on va mettre en place des séances de consultation, d'explication, on va rencontrer les citoyens, on va les sensibiliser, on va les consulter et on nous dit: Bien, nous, on pense qu'en agissant ainsi on va être capables -- j'allais dire -- d'aplanir les objections, de faire en sorte qu'on va rallier les gens. Vous ne croyez pas que cette approche-là pourrait être entièrement efficace? C'est ce que vous nous dites.

Mme Lefèvre (Patricia): Je crois que c'est une approche totalement inefficace. Je pense qu'on appelle ça «de la gestion des perceptions ou des relations publiques». Je ne sais plus, là, comment on peut appeler ça. Mais, à partir du moment où la personne qu'on consulte n'a aucun pouvoir, aucun pouvoir, la personne qui consulte, elle, a le pouvoir d'écouter ou de fermer ses oreilles comme elle veut, là. Et, de notre expérience de ce qu'on a vécu -- je ne sais pas comment ça se passe ailleurs -- mais, de ce qu'on a vécu, nous, si on nous a écoutés, c'est parce qu'on avait le pouvoir de résister jusqu'à ce qu'il y ait des règlements acceptables, sinon ça n'aurait servi à rien, on nous aurait... D'ailleurs, en général, quand il y a des consultations publiques mais que c'est juste consultatif, c'est rare qu'on écoute. Mais je vous parle quand même.

Le Président (M. Morin): Oui?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Tremblay: Oui...

Le Président (M. Morin): Oui, M. le député de Masson.

M. Tremblay: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Tantôt, vous en avez parlé un petit peu, vous avez parlé un peu des logements sociaux, de permettre des zones franches pour des logements sociaux. Vous savez, des fois, puis je le vis présentement dans mon comté, on a des problèmes avec des écoles. On veut amener une école dans une quartier... Vous savez, le phénomène «on n'en veut pas dans ma cour», les hôpitaux, les organismes communautaires aussi des fois qui veulent venir s'implanter dans une communauté.. Puis tantôt vous avez dit, pour ces phénomènes-là, vous seriez peut-être partante d'accepter des zones franches parce que c'est des... Est-ce que vous intégriez aussi les écoles, les hôpitaux puis tous les organismes communautaires?

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, plutôt que des zones franches, ça seraient, je ne sais pas, là, des objets francs, là, ou en tout cas, disons, il y a des motifs pour lesquels... des types d'usage, voilà, il y a des types d'usage pour lesquels peut-être ce serait bien de dire: Bon, bien là, le monde, ça va leur prendre longtemps avant d'être éduqué puis de comprendre. Ça fait que, là, bon, bien, O.K., là, pour ces choses-là, là, c'est vraiment quelque chose d'intérêt public, ça mérite vraiment de passer, puis tant pis, là, pour les trois voisins qui ne sont pas contents. Il me semble que ce serait plus acceptable qu'une «zone franche».

M. Tremblay: Excellent. Ma dernière question sur les zones franches -- je vais reprêter la parole à mon collègue de Blainville: depuis tantôt, vous en parlez, puis je vois que vous avez une petite problématique avec le terme «densité». Le reste des autres, on en a parlé un petit peu moins, mais, si on enlevait le terme «densité» au niveau de la zone franche, est-ce que vous seriez plus apte à accepter le...

Mme Lefèvre (Patricia): Je ne pense pas, parce que je crois que l'idée de cette zone franche, si j'ai bien compris, encore une fois, je ne suis pas une professionnelle de l'urbanisme, mais il y a tout le fait que les citoyens ne pourront plus se prononcer du tout, du tout, du tout, sur les règlements d'emprunt non plus, hein? Alors, on va pouvoir... Bon, déjà, on leur a coupé pas mal leur pouvoir de se prononcer sur les règlements d'emprunt, mais là on leur coupe toute possibilité de se prononcer sur ce qui ce passe avec l'argent de leurs taxes. Moi, il me semble que ce n'est pas fort.

Le Président (M. Morin): M. le député de Blainville.

M. Ratthé: Donc, fondamentalement, évidemment, là, c'est -- et on vous comprend bien -- ce droit de retrait... en fait, c'est ce retrait de consultation référendaire ou que le citoyen a à se prononcer qui vient effectivement, je pense, enlever un droit démocratique, comme vous le mentionnez.

Vous parlez également -- je pense, c'est à la page 3 de votre mémoire -- vous dites... vous parlez de suppression de l'approbation quinquennale des règlements. Est-ce que vous parlez de l'abrogation de l'obligation de réviser le schéma, c'est de ça que vous nous parlez, à tous les cinq ans?

Mme Lefèvre (Patricia): Oui. Bien, l'obligation de réviser le plan d'urbanisme et les règlements, c'est vrai que ce n'était pas vraiment respecté chez nous. Ça n'avait pas été révisé depuis la Saint-Glinglin, là, mais... Donc, de toute façon, ça ne se faisait pas. Mais quand même, dans un processus de gestion continue, là, mettons, d'amélioration continue, là, c'est quand même une bonne idée de réviser régulièrement et surtout dans une perspective dite de développement durable, vu que ça s'appelle la Loi sur l'aménagement durable du territoire, le fait de rassembler les gens de façon périodique pour un peu faire une révision de ce qui se passe chez eux. Moi, je trouve que c'est un super outil, là. Peut-être que les cinq ans, c'était trop court, je ne sais pas, mais d'enlever l'idée qu'il y ait une révision régulière dans laquelle les citoyens sont impliqués, je trouve, c'est dommage.

M. Ratthé: Je trouvais intéressant dans votre mémoire... évidemment, vous nous faites des recommandations, mais en même temps vous nous illustrez aussi... je pense qu'il y a des choses qui ont bien fonctionné, évidemment, de votre côté, et vous nous parlez, entre autres, du mécanisme de redistribution. Et vous dites que ça a fait ses preuves au Vermont. Et j'aimerais vous entendre, j'ai lu, là, les quelques lignes, mais j'aimerais peut-être vous entendre plus verbalement sur ce mécanisme de redistribution et en quoi consiste... comment...

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, ce qui est vraiment original, au Vermont, là, c'est qu'ils perçoivent... c'est sur les taxes, à peu près sur l'équivalent des taxes de bienvenue. Donc, il y a un pourcentage à chaque fois qu'il y a des transactions immobilières qui se font. Ce n'est pas juste sur les projets de développement, mais, à chaque fois qu'il y a des transactions immobilières, ça s'en va dans un fonds qui est géré à l'échelle du Vermont et qui est redistribué à des organismes locaux pour des projets qui peuvent être soit des projets d'habitation, soit des projets de conservation de milieux naturels ou agricoles. C'est là-dedans que le Vermont est très, très original, parce qu'ils ont lié les deux problématiques ensemble, et ça, ça fonctionne quand même depuis une vingtaine d'années au Vermont. Je ne pourrai pas vous dire les chiffres par coeur de projets qu'ils ont réussi à développer à travers tout le Vermont, des kilomètres carrés qu'ils ont réussi à conserver, mais c'est quand même quelque chose qui fonctionne bien. Et le fait d'avoir comme un peu une centralisation de cet argent-là, et que ça soit quand même géré à l'échelle de l'État, ici ça serait à l'échelle de la province, là, ça permettrait quelque chose aussi d'un peu plus «clean» et de plus significatif que si ça se faisait municipalité par municipalité, mais ça pourrait peut-être se faire région par région, là. Parce que vraiment le problème avec ça, c'était une préoccupation par rapport au fait de protéger les milieux sensibles.

On s'est fait beaucoup reprochés, à Sutton, qu'on était justement élitistes parce que la protection du paysage et du patrimoine, et tout ça, ça n'allait pas dans le sens des intérêts des moins nantis, là. Alors de lier les deux ensemble, c'est quelque chose de vraiment intéressant.

M. Ratthé: Vous sembliez, puis ça me paraît aussi logique, et ce serait peut-être le compromis, ce que vous sembliez dire au ministre c'est qu'on ne devrait peut-être pas faire du mur-à-mur, dans le sens que, quand on parle de densification, par exemple, dans la CMM, sur l'île de Montréal versus la densification dans une municipalité comme la vôtre, donc ce que vous nous suggérez, c'est peut-être qu'il y ait des cas différents ou dépendamment, à vrai dire, de la zone, du secteur, de l'endroit, si on est dans une communauté métropolitaine ou si on est dans un endroit où on est beaucoup plus dans un endroit de villégiature, donc qu'il y ait des règles différentes qui s'appliquent, c'est ce que vous nous dites, en termes de densification, ou en termes même... Iriez-vous jusqu'à dire que des règles s'appliquent différemment en termes même de définition de la zone franche, de consultation référendaires? Ou vous dites: Non, partout au Québec, la consultation référendaire, on la conserve, mais, par contre, pour définir une zone franche, elle pourrait être différente si elle est, par exemple, en milieu métropolitain que si elle est dans un milieu rural ou villégiature, ou...

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, peut-être pas, mais juste le contraire.

M. Ratthé: O.K., allez-y.

Mme Lefèvre (Patricia): C'est-à-dire qu'à mon sens, comme je vous l'ai exprimé, la zone franche, à mon sens, est totalement inacceptable, peu importe où c'est au Québec. Par contre, le fait de pouvoir se prononcer, mettons, sur les densités, là, ça revêt une coloration tout à fait différente si on est dans un milieu de villégiature ou dans un milieu rural. En fait, c'est vraiment très différent si on est dans un secteur non desservi dans un secteur non urbanisé ou si on est dans une grosse agglomération. C'est à ce niveau-là que je pense que ça devrait vraiment être ajusté. Parce que ça n'a pas du tout les mêmes conséquences. La densité, en ville, ça s'exprime par la hauteur des bâtiments. Quand vous êtes à la campagne, ça s'exprime par la grandeur des terrains. On peut même jouer sur la hauteur des bâtiments, ça changera rien de nous donner ce droit-là, là.

M. Ratthé: D'accord. Donc, si je résume bien, pas de zone franche partout au Québec?

Mme Lefèvre (Patricia): Oui.

M. Ratthé: On conserve le droit de s'exprimer par voie de référendums. On pourrait peut-être faire des...

Une voix: Des lieux francs.

M. Ratthé: Oui, des lieux francs, c'est un peu ce qu'on disait, ou des... Mais des aménagements peut-être différents, dépendamment si on est en milieu métropolitain ou en... Et, à la toute fin, dans les recommandations, je veux être bien sûr, parce que tantôt on a parlé de la suppression de l'approbation référendaire... quinquennale, pardon, sur le règlement du schéma, à tous les cinq ans. Et vous nous dites, dans les dernières recommandations que vous faites, bien, de prévoir un processus d'approbation périodique... Est-ce que vous voulez qu'on réhabilite ça? En fait, qu'on ne le supprime pas ou qu'on le modifie, qu'on prévoit autre chose? Est-ce que c'est plus au niveau... Je me demandais, quand vous dites: Prévoir le processus d'approbation du périodique par la collectivité, est-ce que c'est vraiment plus à tous les cinq ans, par exemple, sur le schéma, sur le plan d'urbanisme?

Mme Lefèvre (Patricia): À vrai dire, je n'ai pas pensé comme dans les détails à la période, mais qu'il y ait vraiment quelque chose qui se fasse de façon récurrente au niveau des plans d'urbanisme, au niveau local, là, je pense que c'est important, parce que c'est vraiment là que la collectivité va se rejoindre puis qu'il y a une... On ne peut se forger comme réellement une vision de développement à l'échelle d'une MRC. Même la MRC Brome-Missisquoi, c'est tellement des réalités différentes d'un village à l'autre, là, on peut peut-être voir comment le gérer de façon... mais on ne peut pas vraiment... il n'y a pas vraiment une communauté... chaque village a sa vision. Ça fait qu'il me semble que, pour cet exercice-là, il est vraiment pertinent au niveau des collectivités locales.

M. Ratthé: C'est intéressant parce que... Mais je ne me souviens malheureusement plus... je ne me souviens plus quel groupe nous avait soulevé un point un peu similaire, mais en nous disant -- peut-être M. le ministre s'en souviendra -- que, si le plan d'urbanisme était approuvé à l'avance puis que tout se retrouvait dans le plan d'urbanisme, le groupe nous disait: Bien, pourquoi retourner en référendum si le plan d'urbanisme est approuvé? Alors, si on dit qu'on approuve le plan d'urbanisme, on sait où vont être les choses, c'est un petit peu leur argument, à ce groupe-là, dont le nom m'échappe, mais je me souviens bien qu'ils avaient dit: Bien, à ce moment-là, on a fait notre consultation, on a fait approuver notre plan d'urbanisme, alors pourquoi on retournerait en référendum puisque les gens savent qu'est-ce qu'on va faire? Vous, vous dites: Il y a quand même un chien de garde à garder, là, parce que, ce que vous nous dites, dépendamment des administrations municipales qui sont en place, ça peut peut-être varier au niveau de l'interprétation, c'est un peu là, peut-être.

Mme Lefèvre (Patricia): Bien, tout ce qui est vraiment important à tenir compte, c'est que le plan d'urbanisme, ce n'est pas opposable en cour. La vraie affaire, c'est les règlements. Alors, vous pouvez avoir un plan d'urbanisme plein de pieuses, belles intentions merveilleuses, et après des règlements qui vont aller dans le sens contraire. Et c'est le règlement en cour, là, si... Ça commence, ça commence à se faire maintenant qu'il y a des citoyens aussi, ce n'est plus juste les promoteurs immobiliers, là, qui parlent d'aller en cour, il commence à y avoir des citoyens aussi qui parlent d'aller en cour. Mais, je veux dire, le plan d'urbanisme, c'est un énoncé d'intentions. La vraie chose, elle est dans le règlement.

M. Ratthé: ...je veux dire, un processus référendaire évite de judiciariser tous ces processus-là, parce que le seul recours qui reste après, par la suite, c'est si une municipalité, je pense, ne se conforme pas à l'article 82 ou si les citoyens voulaient le contester, c'est d'aller en cour. Et là on vient de judiciariser le processus, les attentes sont longues.

Mme Lefèvre (Patricia): Exactement. Je ne veux pas «stooler» personne, mais, dans notre long combat qu'on a mené à Sutton, j'ai fréquemment communiqué avec le ministère des Affaires municipales, avec un monsieur super sympa, et à chaque fois il me disait: Bien, allez en cour, tu sais. Bien là, moi, je lui disais: Aïe, moi, je ne suis pas riche, je ne peux pas aller en cour, là. Bon. Alors, c'est sûr que c'est quand même vraiment mieux d'avoir un système avec des règlements clairs, un système qui est transparent, qui est le même pour tout le monde, que tout le monde est capable de comprendre, puis qui va être appliqué, parce que c'est marqué dans le règlement, puis qu'on n'est pas obligés d'aller en cour.

M. Ratthé: Bien, je vous remercie beaucoup. Ça a été fort intéressant, un mémoire bien élaboré qui apporte un éclairage sûrement qui va nous permettre de réfléchir. C'est un avant-projet de loi, alors c'est le but de l'exercice. Merci de vous être déplacés, merci de votre mémoire fort intéressant.

Le Président (M. Morin): Mme Lefèvre, merci beaucoup, M. Lamontagne. Bon retour chez vous. J'invite maintenant à se préparer la Fédération des chambres de commerce du Québec. J'ajourne pour quelques... C'est-à-dire que je suspends.

(Suspension de la séance à 14 h 54)

 

(Reprise à 14 h 56)

Le Président (M. Morin): Nous reprenons nos travaux et nous recevons la Fédération des chambres de commerce du Québec. J'invite le président du conseil d'administration à se présenter à nous et à présenter la personne qui l'accompagne.

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

M. Bernier (Louis): Alors, merci, M. le Président. Alors, mon nom est Louis Bernier, je suis président du conseil d'administration de la Fédération des chambres de commerce et je suis accompagné de M. Denis Hamel, qui est vice-président aux affaires publiques de la fédération. Alors, nous allons tous les deux présenter notre mémoire et, bien sûr, nous serons disponibles pour répondre aux questions des membres de la commission.

Le Président (M. Morin): On vous écoute. Vous avez 15 minutes.

M. Bernier (Louis): Merci.

M. Hamel (Denis): Alors, je vais débuter. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, bonjour. J'imagine que vous connaissez la Fédération des chambres de commerce du Québec. Depuis plus de 100 ans, nous sommes les défenseurs des gens d'affaires sur l'ensemble du territoire québécois. Nous représentons plus de 60 000 entreprises, 125 000 gens d'affaires actifs sur l'ensemble du territoire québécois en vue de la promotion du développement économique.

Comme il s'agit d'un avant-projet de loi, évidemment, nous ne nous sommes pas attardés à étudier exhaustivement l'avant-projet de loi article par article. D'abord, c'est un avant-projet de loi qui est assez volumineux, on a été d'ailleurs étonnés de la complexité de ce projet de loi, et, comme nous ne sommes pas des spécialistes en aménagement du territoire, notre perspective est plutôt celle des gens d'affaires des entreprises désireuses de participer au développement du Québec dans le respect du développement durable.

Nous avons étudié, dans notre mémoire, plus de questions que de réponses. Espérons que nous aurons des réponses à nos interrogations. Parce qu'au-delà des grands principes que nous appuyons, c'est-à-dire de remettre au goût du jour l'ancienne loi, l'ancien projet de loi n° 125, la Loi sur l'aménagement du territoire, nous avons, donc, cette... nous appuyons ces principes-là, mais il y a dans cet avant-projet de loi des interrogations qui nous préoccupent.

Le développement durable, on l'oublie trop souvent, c'est qu'il y a également une notion de dimension économique. La fédération s'est donné comme responsabilité de rappeler l'importance de celle-ci dans le processus de décision et dans le débat public. C'est forte de cet engagement, d'ailleurs, que la FCCQ recommandait la création, il y a déjà quatre ans, d'une agence de développement économique afin d'équilibrer le débat public, du point de vue impartial et indépendant, à l'instar du rôle du BAPE qui l'a fait sur la question environnementale.

La Commission de l'aménagement du territoire tient ses audiences cette semaine dans le cadre de la consultation sur l'avant-projet de loi. Ce nouveau cadre législatif et réglementaire viendrait modifier de façon importante le processus d'approbation de projet. Comme elle l'a déjà mentionné par le passé, la fédération considère que l'environnement et le développement durable sont des avenues incontournables pour les entreprises. Toutefois, ce nouveau cadre législatif et réglementaire aurait des impacts majeurs sur les opérations et les entreprises oeuvrant au Québec si toutes les nouvelles dispositions prévues devaient être adoptées.

Notre mémoire porte donc sur les principales modifications envisagées par le ministère des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire à la Loi sur l'aménagement durable du territoire et de l'urbanisme de façon spécifique sur quatre points: le maintien d'un processus décisionnel lourd; les impacts potentiels du transfert des responsabilités entre paliers gouvernementaux et sur les entreprises; l'arrimage par le gouvernement de la cohabitation des différents usages du territoire et du partage du pouvoir décisionnel avec les instances régionales ou locales; et enfin sur la consultation préalable plutôt que l'approche référendaire.

Comme nous l'avons souvent mentionné, le Québec traverse présentement une période sans pareille en matière de contestation de projets de développement économique et de délais de plus en plus longs pour les faire approuver. La Fédération des chambres de commerce du Québec constate que l'approche de l'approbation locale jusqu'à l'approbation ministérielle demeure très lourde dans l'avant-projet de loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme, alors qu'elle est censée s'alléger.

En effet, même en omettant le besoin d'une approbation référendaire de règlement d'urbanisme d'une municipalité locale, nous avons évalué qu'il pouvait s'écouler jusqu'à 1 145 jours, c'est-à-dire plus de trois ans, pour des projets importants qui devraient faire en sorte de modifier les plans d'urbanisme, les schémas d'aménagement ou un plan métropolitain d'aménagement pour que tout soit conforme. Il y a différentes étapes: par exemple, 120 jours entre le moment du dépôt et l'acceptation de l'énoncé de vision stratégique; un 45 jours pour l'acceptation du plan d'urbanisme modifié; 120 jours pour l'avis du conseil de la MRC, et ainsi de suite, comme vous avez pu le voir dans les premières pages de notre mémoire; enfin, l'adoption de toute résolution ou de tout règlement de concordance par le conseil de la municipalité locale ou de la MRC qui a adopté le plan ou le règlement qui doit faire l'objet de ces consultations dans les 12 mois suivant l'entrée en vigueur d'un plan métropolitain révisé ou d'un schéma révisé.

L'allégement réglementaire n'est pas un concept qui s'applique seulement à diminuer le nombre de formulaires ou de paperasserie pour les entreprises, c'est aussi l'occasion de repenser notre façon de faire lorsqu'on effectue une mise à jour d'une loi, et ultimement de mieux faire les choses et de simplifier le processus. La FCCQ considère que cela n'a pas été fait dans l'avant-projet de loi.

Si l'acceptabilité sociale est une expression à la mode pour désigner l'approbation par une majorité de la population d'un projet de développement économique sur son territoire, son emploi conduit hélas trop souvent à confondre majorité et unanimité. Un projet durable doit certes comporter des éléments d'information et de consultation, mais ce doit cependant être plus efficace que celui qui est proposé. Il doit avoir une chance de se concrétiser à brève échéance car, dans l'expression «développement durable», il y a le mot «développement». Les entreprises doivent avoir un signal que les choses tourneront plus rondement au Québec dorénavant.

La FCCQ recommande donc au gouvernement de revoir le processus dans les délais d'approbation de l'énoncé de vision stratégique, du plan d'urbanisme, du schéma d'aménagement, du plan métropolitain d'aménagement et de l'avis du ministère, de la résolution ou du règlement de concordance final du conseil de la municipalité locale ou de la MRC.

La FCCQ se questionne sur l'approche de décentralisation de certains pouvoirs vers les municipalités locales et les municipalités régionales de comté, que nous observons déjà depuis quelque temps, et qui pourrait ajouter des délais d'approbation aux projets. Trois exemples: le projet de loi n° 82, qui élargit la notion de patrimoine culturel aux paysages culturels patrimoniaux et au patrimoine immatériel; la possibilité bien concrète, là, du projet de loi n° 14 sur les mines de confier aux municipalités une partie... de soustraire le territoire à l'exploration minière; et le présent avant-projet de loi sur l'aménagement durable du territoire et l'urbanisme, qui indique que les futurs schémas d'aménagement devront tenir compte de la protection des bases naturelles de la vie, tel le sol, l'air, l'eau, la forêt et le paysage.

Or, nous avons des exemples dans le passé que les budgets, les ressources et le soutien ne suivent pas les transferts de responsabilités entre paliers gouvernementaux. On n'a qu'à penser au transfert de la responsabilité des ponts et ponceaux du ministère des Transports du Québec vers les municipalités de 100 000 habitants et moins, qui a dû être retransférée en partie à nouveau au MTQ, puisque l'entretien minimal n'était pas assuré.

Selon la FCCQ, les orientations gouvernementales et la réussite de projets procurant un enrichissement collectif ne peuvent être laissées aux élus locaux qui n'auront pas les ressources financières et humaines à leur disposition pour analyser un projet sous toutes ses facettes. Dès qu'un projet d'envergure est présenté par un promoteur au gouvernement, le ministère des Finances et le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation sont rapidement mis dans le coup. Il y a une bonne raison à ça: c'est que ces ministères disposent de l'expertise pour analyser ces projets d'envergure.

Il est crucial d'avoir un portrait global d'un projet avant de se prononcer sur la pertinence de procéder aux modifications à l'aménagement du territoire et à l'urbanisme ou de les refuser. Un bon exemple de ce manque de ressources humaines et financières est de pourvoir la délégation de surveillance pour les bâtiments assujettis au Code de construction. L'avant-projet de loi prévoit qu'une municipalité pourrait régir la qualité des constructions en prévoyant des normes sur la performance environnementale des constructions conformes à des critères de certification verte pour des bâtiments durables. Or, les municipalités du Québec peuvent déjà exiger de telles conditions mais ne peuvent, dans la pratique, les mettre en application faute de ressources. En effet, la Régie du bâtiment favorise la conclusion d'ententes de délégation de surveillance pour les bâtiments assujettis au Code de construction. Selon le site Internet de la Régie du bâtiment, seulement six municipalités se sont prévalues d'une telle entente de délégation. Il est donc impératif que les ressources humaines et financières suivent l'accroissement des responsabilités si le gouvernement veut aller dans la décentralisation des pouvoirs.

Il est reconnu que les ressources naturelles appartiennent à tous les Québécois et les Québécoises et que le Québec devrait donc les gérer en conséquence. Conséquemment, les décisions doivent être prises dans l'intérêt de l'ensemble des Québécois. La recherche du bien commun doit prévaloir sur l'aspect local puisque les aides gouvernementales pour développer nos ressources proviennent de tous les Québécois et Québécoises et que le gouvernement les gère en leur nom. Cette approche est sensée dans les projets d'envergure qui nécessitent d'importants investissements en capitaux dont les retombées économiques et fiscales ne peuvent être évaluées qu'à leur pleine mesure au niveau provincial.

Un des problèmes avec la décentralisation des pouvoirs, c'est qu'un investisseur pourrait développer un projet qui passe tous les critères dans une MRC et un autre projet identique ne passe pas la rampe dans une autre. L'investisseur qui aura pris une décision entre autres sur la base du succès du premier projet pourrait s'en trouver grandement affecté.

Il est difficile pour les entreprises d'investir lorsque l'environnement d'affaires est incertain. La prévisibilité réglementaire est primordiale pour les investisseurs. La FCCQ considère que l'actuel avant-projet de loi sur l'aménagement du territoire et l'urbanisme ne va pas dans ce sens. Le fait que l'avant-projet de loi confie aux municipalités locales la responsabilité du plan d'urbanisme et des règlements d'urbanisme, de même que certains pouvoirs leur permettant d'atténuer la rigidité inhérente à l'application et à l'administration d'un régime réglementaire, peut faire en sorte de confronter une orientation gouvernementale en matière d'aménagement du territoire.

Je vais inviter Me Louis Bernier à poursuivre.

M. Bernier (Louis): Merci. La cohabitation des différents usages du territoire est toujours complexe. Plus que jamais, les municipalités veulent avoir leur mot à dire dans le développement des ressources naturelles. Ainsi, nous avons constaté, lors de l'étude du projet de loi n° 79 modifiant la Loi sur les mines, que les discussions autour de l'article 246 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, qui accorde préséance à la Loi sur les mines, ont soulevé beaucoup de passions. Selon les doléances entendues, cet état de fait limite fortement l'action d'une municipalité qui voudrait encadrer le développement minier ou gazier sur son territoire. Pourtant, dans le rapport du BAPE concernant le développement durable de l'industrie des gaz de shale, l'organisme a reconnu qu'en raison du caractère collectif des ressources naturelles le gouvernement doit en assumer une gestion adéquate pour permettre leur exploitation et leur développement de façon harmonieuse et profitable pour l'ensemble des Québécois.

L'avant-projet de loi prévoit qu'il serait possible d'établir des standards et des règles communes à l'ensemble des municipalités. Le ministre pourrait en effet déterminer des indicateurs en plus de prescrire les conditions et modalités de leur implantation par les autorités municipales. Mais, la réalité étant ce qu'elle est, et dans la mesure où les municipalités réclament toujours de plus en plus de pouvoirs en matière d'aménagement du territoire, le ministre ne serait-il pas tenté d'agir, sachant pertinemment que ces dernières, les municipalités, verront toute intervention de sa part comme une intrusion dans leurs nouvelles compétences liées au processus de décentralisation?

L'idée d'un règlement du gouvernement qui déterminerait les cas pour lesquels les interventions gouvernementales devraient faire l'objet d'une procédure de vérification de leur conformité aux plans métropolitains et aux objectifs des schémas est certainement intéressante. Toutefois, abolir l'article de la loi qui précise tous les éléments qui doivent être inclus dans un schéma d'aménagement et distingue ceux qui sont obligatoires de ceux qui sont facultatifs nous apparaît être une moins bonne idée puisqu'elle laisse trop de place à des décisions arbitraires. Il y aurait plutôt lieu de vérifier s'il n'y aurait pas d'autres moyens et outils existants sur lesquels le MAMROT pourrait se baser pour actualiser la loi. Dans le mémoire, vous trouverez d'ailleurs un certain nombre d'exemples à cet effet, à cet égard, et ces exemples, finalement, impliquent un partage du pouvoir du gouvernement avec les autorités régionales ou locales de façon à respecter ultimement le fait qu'en bout de ligne c'est la responsabilité du gouvernement. Alors, que ce soient les exemples qui proviennent de la Colombie-Britannique, de l'Alberta ou, plus près de nous, des exemples en matière de développement éolien ou de gestion du territoire agricole, ce partage des pouvoirs et des responsabilités ne signifie pas abdication ou renonciation, de la part du gouvernement, à assumer pleinement ses responsabilités de gouvernement national.

L'avant-projet de loi maintient le processus référendaire d'entrée en vigueur de certains règlements d'urbanisme d'une municipalité locale, tout en proposant aux municipalités une nouvelle voie favorisant le développement de certains secteurs. Il offre aux acteurs municipaux la possibilité de s'affranchir du processus référendaire, dans certains cas, lorsqu'il s'agit de cibles qui ont été précisées dans le plan d'urbanisme. Le fait que l'avant-projet de loi offre aux acteurs municipaux la possibilité de s'affranchir du processus référendaire dans certains cas viendra probablement plutôt jeter de l'huile sur le feu à chaque fois que des élus voudront bénéficier de cette prérogative.

**(15 h 10)**

Selon la fédération, il est temps d'abandonner l'idée que l'entrée en vigueur de certains règlements d'urbanisme d'une municipalité locale soit assujettie à l'approbation référendaire conformément à la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités. Dans tous les cas, l'avant-projet de loi prévoit, de toute manière, la tenue de consultations publiques préalables. Cette disposition nous apparaît suffisante. L'élaboration par le milieu municipal d'une politique d'information et de consultation, qui favorisera, de manière significative, une participation et une implication plus actives des citoyens au processus de planification et de réglementation, est un outil amplement adéquat. Préserver l'approche référendaire pour résoudre des conflits de voisinage, dans de nombreux cas, ne nous apparaît pas une approche souhaitable.

Le Président (M. Morin): ...à moins que j'aie le consentement, vous avez quasiment terminé votre 15 minutes. Est-ce qu'on laisse... Consentement à ce que vous finissiez votre texte.

M. Bernier (Louis): Merci.

Le Président (M. Morin): Merci.

M. Bernier (Louis): L'avant-projet de loi prévoit que les communautés métropolitaines, MRC et municipalités ont l'obligation d'adopter une politique d'information et de consultation. Cela concorde bien plus avec une période de consultation publique préalable plutôt qu'avec un référendum. Sinon, les tenants de l'immobilisme tenteront vraisemblablement de créer des spectacles médiatiques à l'approche d'une approbation référendaire, si cette disposition devait être maintenue dans le futur. Cela viendrait encore allonger les délais pour la réalisation de projets. Il ne faut pas oublier que, dans l'expression «aménagement durable du territoire», il y a le mot «aménagement» qui signifie action, manière d'aménager et de disposer. Nous n'y retrouvons pas le mot «arrêt» ou «empêchement».

La population choisit ses élus une fois aux quatre ans pour prendre des décisions, notamment en matière d'aménagement durable du territoire et d'urbanisme. C'est la force même d'un régime démocratique comme le nôtre. Avec un taux de participation d'environ 60 % aux élections générales et d'environ 8 % seulement aux élections des commissions scolaires, à titre d'illustration, nous nous demandons, en toute candeur, si le taux de participation qui prévaudrait dans un processus d'approbation référendaire viendrait vraiment donner à une décision la pleine légitimité qu'elle doit recevoir et qu'elle reçoit lorsqu'elle est prise par des élus en matière, entre autres, d'aménagement durable du territoire et d'urbanisme et pour laquelle ces élus ont toutes les compétences et aptitudes voulues pour prendre justement de telles décisions. Si les citoyens ne sont pas satisfaits de leurs décisions, ils ont toute la latitude prévue, voulue pour exprimer leur mécontentement aux élections suivantes.

Nous recommandons donc au gouvernement de miser exclusivement sur une période de consultation -- et, à nouveau, le projet de loi est extrêmement précis et exhaustif à ce niveau-là -- donc de miser sur une période de consultation publique préalable et d'abandonner l'idée que l'entrée en vigueur de certains règlements d'urbanisme soit également assujettie à l'approbation référendaire.

En conclusion, nous recommandons donc au gouvernement de reconsidérer certaines des dispositions de cet avant-projet de loi afin que, premièrement, les processus et les délais d'approbation de l'énoncé de vision stratégique, du plan d'urbanisme, du schéma d'aménagement, du plan métropolitain, etc., soient raccourcis et soient allégés. Nous avons un souci de diligence dans la façon dont ces différents outils de gestion du territoire devront être conçus et définis.

Deuxièmement, nous souhaitons que le gouvernement demeure l'arbitre ultime et conserve un contrôle important de ses orientations en matière d'aménagement du territoire, principalement dans le cas des projets d'envergure. Cela doit aller au-delà de l'accompagnement du milieu municipal par les ministères et organismes gouvernementaux.

Troisièmement, le partage de pouvoirs avec les autorités régionales locales doit exister. Nous y croyons. Mais, à nouveau, il doit demeurer sous la responsabilité ultime du gouvernement de veiller à l'aménagement du territoire et de prendre et de définir les orientations voulues à cet égard.

Quatrièmement et dernièrement, nous réitérons l'importance, nous y croyons, de donner plein effet à des mécanismes de consultation et de discussion publique préalable sans toutefois aller jusqu'à la consultation référendaire. Merci.

Le Président (M. Morin): Merci, M. Hamel. Donc, M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Oui. Merci beaucoup à vous deux, donc, de la présentation, et, au nom de la Fédération des chambres de commerce, évidemment, on comprend l'importance de la présentation que vous faites aux décideurs locaux et gouvernementaux.

Je ne veux rien que vous rassurer en partant, c'est qu'on est en continuité avec l'ancienne loi quand même, donc la loi qui a été adoptée dans les années passées, c'est-à-dire c'est un pouvoir partagé. Donc, c'est une décision politique, l'aménagement du territoire, on est encore dans des plans de hiérarchie: donc, c'est les orientations gouvernementales qui dictent pour la planification des plans métropolitains d'aménagement durable, les schémas d'aménagement et les plans d'urbanisme. Donc, ce n'est pas un exercice de décentralisation. On a eu cette discussion-là avec les unions municipales, la ville de Montréal, la ville de Québec. Dans le préambule, qui reconnaît dans le fond que le... Le projet, c'est un projet de société, évidemment, dans lequel ils prennent des décisions puis dans lequel le gouvernement prend des décisions, et ce n'est pas un exercice de décentralisation, c'est-à-dire qu'on confère une nouvelle responsabilité, comme pouvoir de taxation, etc., donc telle que la décentralisation.

Est-ce qu'on peut améliorer les délais? On peut-u diminuer certains délais envers l'État? On a pris un engagement d'environ 35 % de moins de paperasse pour certaines réglementations, d'envoi de documents, etc., et on s'est donné, nous autres aussi, un petit monitoring pour s'assurer de dire aux partenaires: Voici ce qui est moins de paperasse envers l'État. Ça ne veut pas dire que c'est plus de paperasse pour les municipalités, parce qu'on leur donne des outils en introduisant dans la loi l'aménagement... le développement durable qui doit te donner un talon, une mesure pour faire du monitorage: Est-ce que je m'améliore? Est-ce que je présente bien à ma population? Est-ce que les objectifs sont clairs? Est-ce que les rapports de consultation... On essaie de les mettre dans le coup avant pour éviter les contestations, parce qu'on nous dit en général que, quand les gens sont bien informés, en général il n'y en a pas, de référendums.

Maintenant, la question à savoir: Est-ce qu'il n'y aura plus de référendums?, vous voyez qu'on fait le choix d'un mitoyen, il y a des référendums pour certains objets. Mais, à l'usage, on voit que, quand on a des grands enjeux au nom de la réhabilitation, la rénovation et la densification, il y en a qui disent: On est pour le principe, en général, mais pas dans ma cour. Alors, où est-ce qu'est l'intérêt public, le balancier? Vous avez entendu tantôt une présentation sur Sutton. Il y a aussi les gens qui ont cette préoccupation-là, qui présentent peut-être un intérêt un peu différent, là, quand on veut faire du développement économique. J'en reviens, puis je comprends, puis j'entends bien ça.

On est capables d'identifier des projets. Quand on dit: Ça a pris 1 000 jours pour des grands projets. Le dossier de pipeline d'Ultramar, ça a pris une loi privée avec un pouvoir, donc, donné même d'expropriation s'il n'y avait pas d'entente, mais, nécessairement, sur quelques 100 kilomètres entre Montréal et Lévis, ça a été très, très, très long, et, bon, pour le gouvernement, c'est terminé, mais il reste encore quelques procédures même juridiques pour certaines municipalités; le dossier Rabaska en est un autre; certains dossiers d'éoliennes. Alors donc, il faut que tout le processus... Est-ce qu'en général la loi vient toucher tous ces éléments-là? Non, mais elle essaie de donner un meilleur environnement pour que les municipalités soient capables de se donner de la latitude.

Et là je vois, Me Bernier, que ça vous inquiète un peu de savoir qu'on passe d'une loi où tout est écrit, avec tous les contenus... Si tu veux voir ce que ça écrit, ce que tu dois faire dans une MRC, là, tu lis la loi, puis l'article 29b, alinéa a, ii, c'est marqué tout, là, bêtement qu'est-ce que tu dois faire. C'est sûr qu'on passe à une signature où est-ce qu'on pense qu'il y a une certaine maturité, puis ils peuvent constituer le contenu de leur... et ça, ça insécurise. J'ai fait une prétournée de certains, même, aménagistes ou urbanistes de MRC. Bien, ils disent: Oui, mais, si ce n'est pas écrit, je peux-tu le faire? Alors, voyez-vous, tout de suite en partant, ils disent: Je peux-tu le faire? Oui, tu peux le faire. Bon. Il ne faut pas oublier le passé, là, mais, nécessairement, ça insécurise du fait que ce n'est pas... alors ce qui nous a amené certains groupes à dire: Pourriez-vous au moins documenter? Il y a une certaine partie du contenu... Pourriez-vous au moins étaler?

Alors, entre tout puis rien, là, il faut trouver un équilibre, parce que les gens craignent, devant ces nouveautés-là, même, que le ministère ne l'applique pas, c'est-à-dire qu'ils sont tellement créatifs dans leurs nouvelles façons de le faire qu'ils pensent que le ministère va dire: Bien, ta créativité est intéressante, mais elle ne correspond pas aux objectifs. Alors, on a à créer la connaissance des guides puis un petit peu d'orientations, parce qu'une libre composition semblerait peut-être inquiéter aussi le monde des affaires, parce qu'il dit: Bon, bien, si on veut... Êtes-vous prévisibles? Où est-ce que tu as pris ça? On en a tout le temps des plus créatifs que d'autres. Parfois, ça amène des limitations.

**(15 h 20)**

Alors, sur le dossier des affaires, gaz de schiste, et autres, on a vu, quand on est bien documentés, même dans l'éolienne, le problème, c'est que ça finit par toujours atterrir... quoi que vous inventez, M. le Président, ça finit toujours dans une municipalité. Ta bonne idée de trouver de l'or est à quelque part dans une municipalité. La bonne idée de trouver un gaz de shale à quelque part est à quelque part dans une municipalité.

Et là, la contrepartie de la municipalité, puis on l'a vu apparaître... Bon, je pense que tout le monde est pour le développement éolien fait correctement, puis etc. La seule affaire, c'est que chacun a fait son démarchage, est allé voir les corridors de vent existants. Ils ont dit: Bien, parfait, c'est des propriétaires privés, mais on va signer des ententes pour être capables de répondre à l'appel d'offres gouvernemental. Donc, ils répondent à l'appel d'offres gouvernemental, puis ils disent à leur monde dans les régions: Bien, il est là, le corridor de vent, là, on va capturer le vent. Puis, un jour, bien, là, le projet se réalise, puis il dit: Wo! c'est dans ma cour. Puis là c'est devenu collectif. Ce qui était un projet privé avec des propriétaires privés dans une municipalité est devenu: Mais comment ça vous ne me l'avez pas dit qu'il allait y avoir des éoliennes pas loin de chez nous ou pas loin de vue de chez nous? Et c'est devenu, là, soudainement d'intérêt collectif. Et là c'est le pas-dans-ma-cour, il y en a toujours trop. Si tu en vois trois, c'est trois de trop, etc.

Alors, vous voyez comment les municipalités en sont venues à demander plus de pouvoirs, bien, en tout cas, d'information. On le voit dans la loi n° 14 sur les mines. Un jour, il y a quelqu'un qui arrive avec son équipement, qui débarque chez vous. Puis le gaz de shale, c'est pareil. Ils rentrent sur le terrain. Souvent, ils ont avisé puis ils doivent avoir l'approbation du propriétaire. Mais le propriétaire n'appelle pas ses 42 voisins de terre pour dire: En passant, il y a quelqu'un qui va creuser chez nous. Mais, comme ils voient la patente débarquer puis que l'outil a de l'air à pomper quelque chose qui est souterrain, qui n'est pas rien que... là, ça devient aussi collectif, et là tout le monde a un mot à dire là-dessus. Et c'est là que les municipalités ont demandé plus de pouvoirs, en tout cas, ou plus d'information, ou plus de formation au préalable pour qu'on puisse diffuser. Parce qu'à la fin, le monde, ils n'appellent pas la compagnie, etc., pour savoir qu'est-ce qu'ils font. Ils appellent le maire puis ils disent: Maudit, comment ça, toi, tu ne le sais pas? Toi, tu devrais le savoir.

Là, il y a les outils, je pense, des bons outils de communication puis d'affirmation. Vous avez fait des représentations sur la loi n° 14 aussi, donc, concernant les mines puis les sites de villégiature. Alors donc, on essaie de trouver cet équilibre-là. Mais, je veux rien que vous rassurer, ce n'est pas un exercice de décentralisation, et le ministère doit... et c'est d'intérêt public effectivement. On essaie d'être le bon accompagnateur, mais il y a quand même un pouvoir discrétionnaire du ministre. Tantôt, il y a du monde qui va venir dire qu'on en a encore trop. Mais, à la fin, on a dit: C'est un pouvoir partagé. Alors, si c'est partagé, bien, l'ensemble des ministères a quand même quelque chose à dire. Malgré que la nouvelle signature semble, en tout cas, donner l'impression peut-être que ça va être toutes les municipalités qui décident tout, puis le gouvernement n'a plus rien à dire, là, rassurez-vous, le lien de hiérarchisation des plans, c'est encore la façon de faire qui était suivie, puis je pense que les sociétés modernes sont encore là-dedans.

On a décidé volontairement de ne pas judiciariser les décisions politiques qui sont prises. Dans le reste du Canada, vous voyez, il y a des tribunaux spécialisés qui entendent même sur l'opportunité politique, donc ce qui fait que les projets parfois n'avancent plus pantoute parce qu'il n'y a jamais personne qui va décider.

Donc, je reviens sur vos différentes propositions et surtout préoccupations, là. On fait l'accompagnement, on essaie de raccourcir les délais qu'on peut envers l'État. Peut-être que la préoccupation, du fait qu'il y aura plus de documentation sur les impacts, peut être vue, par votre part, comme étant un facteur de ralentissement de projets. Plutôt, on veut le mettre avant qu'ils prennent la décision, on dit: Tu as-tu évalué que, si tu fais ton centre des congrès à telle place, bien, pour toutes les affaires, le déplacement, la sécurité, etc., as-tu bien évalué ça, qu'en réaménageant tel territoire, tu donnerais l'information à la population? Les maires craignent un peu ce volet-là et peut-être les gens d'affaires aussi. Je ne sais pas si c'est votre perception de la loi, même si vous me dites: C'est vrai que c'est complexe, puis ça me prend comme tout le temps deux aménagistes, un urbaniste, puis trois de 30 ans d'expérience pour m'accompagner à travers tout ça, là. Mais, donc, il y a des éléments qui sont franchis, je pense, ils sont dans la bonne direction.

D'un autre côté, d'autres nous taxent de ne peut-être pas en faire assez ou de ne pas rester le patron à 100 %. Ça dépend qui nous le demande. Je pense que mon collègue de l'opposition a pu entendre ça aussi, là. Alors donc, on essaie de trouver un dosage pour qu'on puisse encore faire de la business.

Et effectivement, on ne le mentionne pas assez, le volet économique, M. le Président, n'apparaît pas assez souvent. D'ailleurs, il faudra le reprendre parce qu'on parle beaucoup du côté social, socialement acceptable environnement dans le volet environnement pur mais le développement durable tient aussi l'équilibre de l'économique. Et on va faire un effort additionnel pour préciser le volet économique dans différents aspects de cette loi-là, parce qu'elle a une incidence économique directe et parfois cette «path» d'équilibre là, là, elle n'apparaît pas assez, je pense. Je vais franchir un pas avec vous autres, sur vos représentations, d'indiquer à plusieurs endroits le volet plus économique des choses, même peut-être dans le préambule.

Le Président (M. Morin): M. Bernier ou Hamel?

M. Hamel (Denis): Merci. Bon, votre intervention, M. le ministre, m'amène beaucoup de réflexions.

D'abord, j'apprécie votre ouverture sur le côté économique, vous savez que c'est un des credo de la fédération de mettre, au même titre que l'environnement et le développement et le social, le côté économique, parce que trop souvent on l'a mis de côté. Et c'est probablement beaucoup trop facile de regarder uniquement juste l'aspect négatif d'un projet sans regarder la contrepartie positive. S'il y a du développement économique, ça bénéficie à tout le monde. Que ça soit un petit, un moyen ou un très grand projet, il y a toujours des retombées économiques. Je pense qu'on est capables de minimiser les inconvénients. Mais, si ces projets existent, c'est souvent plus de taxes, plus d'emplois, plus d'impôts versés au gouvernement, amélioration d'un service, vous connaissez la chaîne. Donc, c'est vraiment une préoccupation pour laquelle on insiste qu'elle soit toujours mise de l'avant.

Au chapitre de la décentralisation, je voulais dire, vous nous rassurez quand vous dites que ce n'est pas un exercice de décentralisation. Je sais que le milieu municipal exige plus de consultations, situation à laquelle on est tout à fait d'accord. Je pense qu'en 2011 il est impossible de réaliser un développement économique, quelle que soit sa grandeur, sans au moins mettre tous les intervenants dans le coup par un processus d'information, processus de consultation, sans tomber dans l'extrême où on donne un droit de veto à n'importe qui, sans tomber dans l'excès. Vous avez mentionné le syndrome «pas dans ma cour», on le voit de façon... un petit peu trop souvent au Québec. Puis vous mentionnez les éoliennes. Je pense que récemment le projet de Saint-Valentin, qui était accepté par la communauté mais refusé par les communautés environnantes, a donné lieu à plusieurs débats.

Ce qui est important pour le milieu des affaires, c'est la prévisibilité. Je crois même que vous l'avez mentionné dans votre intervention. Et c'est là aussi que se situent nos inquiétudes. Au-delà de la complexité du projet de loi, comme je le disais en introduction, on voit qu'il y a beaucoup d'étapes à franchir. Et on se demande, pour un promoteur de projet d'importance, est-ce qu'il va y avoir une certaine homogénéité d'une MRC à l'autre, d'une région métropolitaine à l'autre? Est-ce qu'il n'y a pas trop de flou à ce niveau-là? Donc, la question de prévisibilité, elle est importante, parce que le Québec se bat avec d'autres juridictions en Amérique du Nord pour attirer des entreprises, pour attirer des projets de développement, et les entreprises ont la nature d'aller là où c'est le plus facile, là où elles se sentent accueillies. Alors, comme on souhaite tous avoir du développement économique au Québec, on veut les avoir chez nous, et cette prévisibilité-là, elle est vraiment essentielle. Donc, un avant-projet de loi comme celui-là ne nous donne pas l'impression, et corrigez-moi si je me trompe, ne donne pas l'impression de clarifier ou de simplifier les démarches que devront utiliser ou que devront entreprendre les entreprises pour mener à bien un projet.

Et enfin, je dirais, sur la question de la lourdeur administrative, vous savez qu'il y a déjà plus de 1 000 formulaires qui s'adressent aux entreprises. Considérant que 90 % des entreprises du Québec, c'est des 20 employés et moins, est-ce qu'on n'ouvre pas à ce moment-là encore une lourdeur additionnelle déjà qui a... Le gouvernement fait des efforts actuellement, par la commission présidée par M. Audet, de simplifier le travail des entreprises pour leur permettre d'être plus performantes, plus compétitives. Nous craignons, encore là, qu'il y ait une lourdeur ou une rigueur administrative additionnelle qui va s'imposer sur les petites entreprises. Donc, c'est essentiellement là que résident nos préoccupations.

**(15 h 30)**

M. Lessard (Frontenac): D'accord. Je comprends, puis ici, vous êtes venus pour avoir des réponses. L'approche n'est pas basée... Est-ce que le client qui fait affaire avec la municipalité va diminuer ses délais? Le pouvoir qu'on pouvait faire... Parce que, vous voyez, on demande aux municipalités, aux municipalités régionales de comté, à la communauté métropolitaine de faire des plans. C'est qu'on disait: Ceux avec qui vous contractez, l'État va essayer de se contracter. À savoir qu'on est capables de donner une réponse plus rapide, on est capables d'enlever de la paperasse. Arrête de m'envoyer tel document dans lequel tu as déjà fait une consultation, étant donné que ta consultation a donné exactement le même résultat que la paperasse que tu m'as déjà envoyée. Donc, si on a l'objectif de réduire de 35 % de ce que votre partenaire, qui est la municipalité... Souvent, c'est avec une municipalité, rarement avec une municipalité régionale de comté, on va dire ça comme ça. Alors, si on est capables d'alléger tout le processus et de raccourcir les délais, je pense qu'on est en train d'aider l'entreprise.

Maintenant, le statu quo est-il meilleur, sachant qu'il y en a qui sont conformes aux orientations de 1988, d'autres de 1994, d'autres de 1992? Déjà, vous avez des MRC à géométrie variable si votre projet s'étend sur plus d'une MRC, pour reprendre, donc, le projet de gazoduc qui a été sûrement très, très complexe pour Ultramar et compagnie.

Alors, la prévisibilité, c'est: Est-ce que les municipalités vont adopter une nouvelle génération? Je comprends que la prévisibilité aussi... Ces nouveaux schémas là s'appliquent-ils immédiatement? Donc, la période de transition... Il faudra répondre à ça, donc, pour s'assurer que la réglementation existante est bien connue des entreprises, elle peut varier d'une MRC à l'autre, ça dépend quels sont les objectifs.

Honnêtement, je pense qu'un jour on vivra ou on ira demeurer dans une municipalité régionale de comté qui sera rendue à huit sur 10 en développement durable, c'est-à-dire qui aura intégré la façon d'être et de se comporter, même dans sa réglementation, et que le mieux-vivre de la société, ça paraîtra. Je choisirai de vivre là parce qu'ils respectent beaucoup d'éléments de développement durable, alors que le voisin peut être assez paresseux, ou ça ne l'intéresse pas du tout, ou il voit même de là une contrainte, ce qui veut dire que, là, on va essayer de plutôt faire avancer le moins intéressé plutôt que de fouetter lui qui est déjà en avant de la parade.

Mais c'est déjà la réalité un petit peu partout au Québec. Il y a des places où on peut réaliser des projets d'envergure, et d'autres non. C'est de changer constamment que je pense que l'industrie n'aime pas, en disant: Je connais ta règle aujourd'hui, mais, si ta règle, la semaine prochaine, a changé, il y a un problème. Vous étiez dans un certain immobilisme au niveau de l'aménagement, parce qu'il y a des plans qui avançaient très peu, sur la conformité, parce qu'il y a une obligation de réviser après cinq ans, etc., ce qui n'est jamais arrivé à peu près, alors, tu sais, je n'aime même pas faire le tableau de ceux qui sont à date, là, ça fait quasiment peur, donc... D'où l'importance que, quand c'est trop complexe à changer, il n'y a plus personne qui change. Tout ce qu'ils font, ils font des règlements de contrôle intérimaire, ils font des règlements pour vous empêcher. Ça, ils le contrôlent très bien, puis le reste de l'État, bien, on va patienter.

Alors, on essaie de leur donner un outil qui est plus moderne, plus souple, qui correspond mieux aux attentes de vivre dans une communauté plutôt que dans une municipalité. Alors donc, on va essayer d'atteindre ces objectifs-là. Mais je comprends vos préoccupations, on va essayer de le traduire sur l'économique aussi. Mais, non, ce n'est pas un exercice de décentralisation, etc.

Alors, je ne sais pas si, dans l'ensemble, on répond à... Je ne sais pas si vous aviez d'autres préoccupations, mais... C'est un avant-projet de loi. On espère que, dans la signature de la loi qu'on va déposer cet automne, là, on pourra peut-être faire un petit tour de roue avec vous pour voir si ce qu'on dit... les bottines suivent les babines, c'est-à-dire qu'on améliore de beaucoup le texte, quitte à en préciser certaines règles.

Et, juste pour terminer, le groupe d'avant, le GRAPP, qui semblait plus réfractaire, quand on regarde ça de l'extérieur puis on les... puis ils disaient: Bien là, si vous favorisez... puis plus de densification, ça veut dire que le peuple n'a plus rien à dire s'il y a un affranchissement. Je ne veux rien que faire une petite distinction, puis on aura à le travailler tantôt avec les unions municipales. Quand on parle de rénovation puis de réhabilitation, on parle de bâtiments existants, qu'on connaît déjà la trame. Quand on parle de densification, là, on parle vraiment de nouvelles zones d'expansion. Ça veut dire que, dans un site de villégiature ou dans un site agricole, évidemment, aussitôt que j'augmente d'une propriété... si tu avais une propriété à l'hectare, puis que j'en mets deux, c'est sûr qu'on est en train de faire de la densification.

Et là ça veut dire qu'alentour d'une zone de villégiature... pour prendre... je connais le Mont-Tremblant, mais, le Mont-Tremblant, ça a pris une loi pour faire ça. La journée qu'ils ont décidé de densifier, bien, ils ont mis des maisons partout dans la montagne, etc. Alors, s'ils avaient décidé de faire une zone franche référendaire en disant: Voici ce que je vais développer, c'est sûr que toutes les maisons qui rajoutaient étaient de la densification, puis là la population ne pourrait plus se prononcer là-dessus si on ne met pas des critères ou, en tout cas, on...

Il y a quelque chose qu'il faudrait encadrer parce que, là, on est en train de faire nécessairement de la densification alentour d'un noyau de villégiature, alentour d'un lac, alentour du mont Mégantic. Je comprends que, si c'est compensé par le fait que tu n'utiliseras pas d'autres parties du territoire... Donc, il faut se questionner quand on crée de la nouveauté dans le développement.

Voyez-vous, on parle d'expansion plutôt de... bien, tel quartier, il n'y a plus d'usine, on prend l'usine, qu'est-ce qu'on fait avec? AbitibiBowater laisse des entreprises, on la reconvertit comment? Ça, tout le monde comprend très, très bien cette notion-là de densification, si on la convertit, on met des condos dans l'église. Mais la zone d'expansion en dehors des zones de... ça, c'est une nouvelle. Alors, on invoquera peut-être l'occupation du territoire, évidemment de vivre là où le milieu veut vivre plutôt que de me faire rester à la croisée de chemins du village de Saint-Modeste. Alors donc, la société doit correspondre aussi à ces attentes et qu'est-ce que la population veut vivre.

Rassurez-vous, on crée aussi des opportunités là-dedans, beaucoup. La zone référendaire... oui, c'est vrai, il y a encore des référendums mais pas sur tout, et la zone référendaire, donc, d'exemple de référendum, est accompagnée d'une politique de consultation et d'information, en disant à la population: Voici, pour tel quadrilatère dans lequel il y a un métro, puis que ce n'est plus le centre mère-enfant de telle affaire, parce que l'hôpital est fermé, qu'on reconvertit en condos et qu'on va faire un petit marché, on va faire... etc., puis une piste cyclable. Là, on veut avoir un corridor, parce qu'il y a une autoroute qui passe à côté, et on veut faire du développement durable, puis on veut faire des parcs, mais des parcs... si on ne peut pas faire un parc, on va faire du logement abordable en compensation parce que l'espace est réduit. Ça, on va dire à la population: Voici le carré, voici dans quoi on veut procéder, voici les critères, les objectifs, mais ça ne sera pas partout qu'il y aura de ces zones franches là. Parce qu'on pourrait souhaiter de dire: Bien, là, il n'y a plus de contraintes, il n'y a plus de référendum, puis arrêtez de nous achaler avec ça, on va vous informer. Il y en a qui vont les consulter pour maintenir l'équilibre d'une passerelle à l'autre. Je pense qu'il y a différentes réalités. Je n'atteins pas tous vos objectifs en faisant en sorte que ce n'est jamais... «pas dans ma cour», mais on n'amplifie pas du fait que toute la population est invitée à voter dessus même si ce n'est pas dans sa cour. Alors, on garde la notion de zone, etc., là, parce qu'on a eu des problématiques par rapport à ça.

Le Président (M. Morin): Merci, M. le ministre. Monsieur...

M. Hamel (Denis): Oui. J'aurais peut-être une petite réaction. D'abord, je veux saisir la...

Le Président (M. Morin): Oui, parce que le temps imparti...

M. Hamel (Denis): O.K. Oui. Bien, d'abord, je saisis la balle au bond. Vous avez invité... lorsque vous serez à l'étape du projet de loi, évidemment la fédération est toujours désireuse de travailler avec les membres de l'Assemblée nationale sur tout l'avancement de projets de loi qui répondent à nos objectifs, et on le fera avec très grand plaisir.

Évidemment, lorsqu'on regarde un projet de loi comme celui-là, c'est toujours difficile de voir a priori comment ça va se matérialiser avec les années. L'interprétation... Lorsque vous parlez de développement durable, je vous avouerai qu'on a une petite crainte de voir que le développement durable s'intègre dans les schémas d'aménagement, pas par le principe mais par l'application. Il y a déjà un ministère du Développement durable qui est assez exigeant envers les entreprises mais au moins il a le mérite d'être clair et d'être uniforme sur l'ensemble du territoire. On a des règles à respecter, des règlements à respecter. Et j'espère que ça ne viendra pas contrecarrer ce travail-là ou, pire, s'ajouter en plus avec l'ensemble des règlements pour lesquels les entreprises seront confrontées.

Un autre exemple d'interprétation...

Le Président (M. Morin): Merci, M. Bernier. Je suis obligé de vous arrêter parce que le temps imparti...

Une voix: ...

Le Président (M. Morin): On peut le laisser... Merci, monsieur. Avec consentement, ça va bien.

M. Hamel (Denis): O.K. Merci. L'autre élément, c'est lorsque vous parliez de la densification. Je pense qu'encore là c'est un principe auquel on souscrit, qu'il faut éviter de l'étalement urbain et se concentrer sur les zones déjà occupées pour favoriser justement un meilleur transport collectif, améliorer le... pour ne pas avoir à distribuer les services sur une trop grande surface. Par contre, il faut faire attention de ne pas contraindre les municipalités qui sont en développement afin de créer de la spéculation immobilière. Alors, il faut une certaine latitude. Et qui va être le chien de garde? Dans certaines municipalités, ils ont déjà... ils sont en très, très forte croissance, si on pense à la couronne de Montréal notamment. Des municipalités en très forte croissance, si on les limite dans leur développement, ça va se traduire par de la spéculation foncière ou des coûts toujours croissants qui devront être répartis par un nombre x de contribuables et de commerces. Donc, il y a encore là un effet qui, pour nous, actuellement, pourrait être un effet, je dirais, pervers ou un effet négatif d'une bonne orientation.

Les gens qui nous ont précédés tantôt ont parlé de l'exemple de Sutton et de la gentrification. Vues de notre côté de la lorgnette, souvent des municipalités rurales justement deviennent des cartes postales pour des retraités et des villégiateurs et freinent le développement économique. Alors, on ne voudrait pas justement que ce genre de situation ou que l'avant-projet de loi, qui se traduirait en projet de loi, vienne favoriser ce genre de situation.

Le Président (M. Morin): Merci, M. Hamel. M. le député de Blainville.

**(15 h 40)**

M. Ratthé: Merci, M. le Président. Messieurs, content de vous recevoir. C'est quand même assez intéressant de voir qu'en l'espace de deux heures on a pratiquement deux positions, j'allais dire, presque diamétralement opposées -- vous avez pu entendre ce que les citoyens nous disaient. Mais je pense qu'en même temps il faut faire la part des choses. Je pense qu'autant d'un côté que de l'autre, des fois, il peut y avoir des cas extrêmes ou des abus.

Cependant, une des positions que vous... Vous vous prononcez présentement pour l'abolition des référendums. Est-ce que je comprends bien? C'est l'abolition des référendums au-delà même des zones franches, si je comprends, peut-être clarifier ça avec moi. Comme vous le savez, en plus, il y a les autres provinces où il n'y a pas de référendum. Je pense, entre autres, à d'autres provinces où il n'y a pas de référendum, mais les citoyens ont quand même un droit d'appel à un tribunal administratif.

Alors, est-ce que c'est une chose que vous... selon vous, serait une solution qui est préférable? Parce qu'en fin de compte ce que les gens nous disaient tantôt... Et souvent, dans un projet, je voulais dire, commercial ou industriel, la difficulté que rencontrent les gens du secteur industriel ou commercial, c'est souvent -- et vous faisiez peut-être évoquer la situation -- le manque d'information. Donc, vous nous dites: Remplacez les référendums par des séances d'information, de consultation, qu'on informe bien les gens. Et, moi, j'irais en vous disant: Bien, si on fait bien le travail, même s'il y avait un référendum, en principe, ça devrait passer.

Alors, je voudrais un peu vous entendre là-dessus, parce que vous dites: Bien, les référendums, on veut qu'ils soient abolis. Et ce que vous nous dites -- je veux être bien sûr que je comprends -- c'est qu'il n'y aurait aucune forme de recours pour le citoyen, ce que la dame nous disait tantôt. Je lui ai demandé: Bien, écoutez, on nous dit qu'on va consulter, qu'on va informer. Et le point de la dame de tantôt, c'était: Oui, mais je n'ai aucun recours, donc je ne peux pas m'y opposer. Si une administration, par exemple, ne se conformait pas à la situation, je ne peux pas m'y opposer. Alors, je veux peut-être vous entendre là-dessus, si vous voyez une certaine forme de recours. Si oui, laquelle?

Le Président (M. Morin): Oui, M. Bernier.

M. Bernier (Louis): Merci. Vous avez bien saisi la portée de notre opposition. Oui, nous souhaitons qu'il n'y ait plus de recours, un processus référendaire, y compris, là, au-delà des zones franches d'approbation référendaire. Nous n'envisageons pas de mécanisme d'appel ou de création d'un nouveau tribunal administratif qui viendrait... Alors qu'on réglerait, selon nous, une certaine problématique du côté gauche, on créerait une nouvelle problématique du côté droit, en ajoutant des délais, en rendant encore plus complexes l'implantation de projet et la prise de décision.

Ce que nous croyons, je l'ai mentionné, je prends l'occasion que vous me donnez de le réitérer, nous sommes très satisfaits de cette portion de l'avant-projet de loi, qui est extrêmement bien étoffée, à notre avis, sur l'obligation de définir des mécanismes de consultation, des mécanismes d'information, des mécanismes de consultation et de discussion qui sont sur la place publique, et qui, à notre avis, donne amplement les moyens voulus à tous les opposants, quelle que soit la teneur de leur opposition, de faire valoir publiquement à travers ces mécanismes, et nous sommes fermes là-dessus. Nous croyons dans ces mécanismes-là. Nous croyons que c'est la véritable solution qui permet aux projets d'être canalisés et d'aller de l'avant sans, d'une part, risquer d'être gelés par des mécanismes d'appel auprès d'un éventuel tribunal administratif, ni non plus d'être en quelque sorte pris en otages dans un processus référendaire qui risque de donner finalement la voix la plus claire aux opposants à tous crins de tout projet de développement.

Alors, nous sommes des tenants du développement économique. Nous préférons favoriser le développement économique. Et nous croyons que des mécanismes de discussion, d'information et de consultation extrêmement raffinés et très bien développés... Et à nouveau l'avant-projet de loi va dans cette direction-là que nous appuyons: permettre, dans le fond, à tous les opposants d'un projet de faire valoir leurs points de vue sur la place publique et d'utiliser à satiété tous les outils qui sont mis à leur disposition dans le cadre de ces mécanismes et bien sûr dans le cadre -- il ne faut pas le perdre de vue -- dans le cadre de la médiatisation que ces processus de discussion et de consultation revêtent nécessairement.

Et l'exemple de Sutton, je ne le connais pas, j'en ai entendu parler il y a quelques minutes par la voix de ces représentations. Mais, vous savez, je suis avocat de formation et, quand j'étais jeune avocat, j'ai plaidé une cause où je me suis fait vraiment ramasser -- si vous me permettez l'expression -- et le juge, en lisant son jugement sur le banc, m'a dit: Vous savez, il y a un vieil adage en anglais qui dit: «Bad facts made bad law». Alors, je ne pense pas qu'on devrait s'en remettre à un mauvais exemple -- je n'ai nullement l'intention ni le droit de mettre en doute ce que cette dame disait sur la situation à Sutton -- pour maintenir l'obligation d'approbation référendaire, parce que, justement, il existe des mécanismes qui vont dans le sens de nos préoccupations: prévisibilité, diligence, efficacité et parti pris -- pourquoi pas, et nous le disons haut et fort -- parti pris favorable au développement économique.

M. Ratthé: Je vous entends très bien, effectivement, puis effectivement on pourrait nommer quelques projets, effectivement, qui ont avorté, on va utiliser un terme comme ça, parce qu'effectivement il y a eu contestation de la part des citoyens, peut-être des projets même qui auraient été bénéfiques pour l'ensemble de la collectivité, sûrement on serait capables d'en nommer.

Où ça m'étonne quand même dans votre position... Je comprends bien, là, puis je suis un de ceux qui vous disaient tantôt: Bien, je pense qu'il faut informer davantage, il faut consulter les gens, il faut leur donner toutes les informations, les tenants et les aboutissants pour qu'ils soient bien au fait de ce qui va se passer dans leurs municipalités. Mais, je vous dirais, je suis quand même assez étonné de dire: On peut bien parler pendant des heures, là, et puis leur permettre de s'exprimer, de passer à la télévision, dans les journaux, mais ils n'ont aucun recours.

Et ce que vous nous dites aujourd'hui, c'est un peu ça, vous dites... Et je trouve ça particulier, parce que vous dites: Bien, on est pris un peu en otages parfois d'un certain groupe qui ne veut pas que les choses avancent alors peut-être que la majorité désirerait que ça se fasse. Et puis à vous entendre, excusez-moi, mais j'ai quasiment l'impression que vous allez prendre maintenant l'inverse, la population en otage: Écoutez, vous pouvez nous dire que vous n'êtes pas d'accord, vous pouvez nous dire que vous n'êtes pas satisfaits, vous pouvez nous dire que ça ne devrait pas avoir lieu, vous pouvez le dire pendant des jours, des semaines et des mois, mais, de toute façon, en bout de ligne, on va le faire quand même. Corrigez-moi si j'ai tort, mais c'est ce que j'entends, là, et je trouve ça un peu surprenant quand même qu'aucun recours ne soit disponible. Parce que vous dites: Même pas un tribunal administratif, aucun recours, on ne veut plus de processus référendaire; on informe les gens, ils ont le droit de dire qu'ils ne sont pas contents, puis finalement, en bout de ligne, on le fait quand même. Et je trouve ça un peu drastique.

Le Président (M. Morin): M. Hamel.

M. Hamel (Denis): Oui. Je dirais qu'on a une grande confiance envers les élus. Les élus municipaux sont élus aux quatre ans et sont là pour représenter les intérêts de la majorité. Quand un projet suscite une grogne, je dirais, majoritaire, si la ville, le village en entier dit: On n'est pas d'accord avec ça, il y a quelque chose qui est incompatible avec notre développement, ça ne veut pas dire que le conseil municipal va aller de l'avant. Je pense que le conseil municipal a son devoir d'écouter les citoyens. Et ce qu'on veut éviter justement, c'est qu'il se crée constamment des petits groupuscules non représentatifs qui, eux, vont prendre le leadership du dossier et l'empêcher de se développer.

Donc, le conseil municipal est d'abord et avant tout à l'écoute de ses citoyens. Et j'ai vu et je comprends très bien que, si ce n'est pas le cas, sa longévité ne sera pas très grande aux prochaines élections, ça serait un suicide politique d'aller à l'encontre d'une majorité, d'une majorité de la population.

M. le ministre tantôt mentionnait avec justesse la question du gazoduc d'Ultramar qui est un projet qui, en termes de développement durable, est tout à fait souhaitable: on remplace des trains et des camions par un système de gazoduc. Et vous avez vu la complexité de venir à bout de toutes les démarches, l'obtention des permis, parce que justement certains petits groupes, certains individus, même, ont bloqué le projet.

Alors, imaginez, d'instaurer un processus référendaire, je ne crois pas qu'on prenne en otage la majorité de la population, comme vous l'avez mentionné en boutade, mais justement on veut éviter qu'une infime minorité, comme on l'a vu trop souvent, ait un peu le gros bout du bâton et ait un veto contrairement au voeu de la majorité.

Le Président (M. Morin): M. le député de Masson.

M. Tremblay: Très rapidement. Vous savez, tantôt j'ai bien aimé monsieur à votre gauche qui est monsieur... Pardonnez-moi.

Le Président (M. Morin): M. Bernier.

M. Tremblay: Bernier, merci. C'est M. le président tantôt qui m'a mélangé.

Le Président (M. Morin): Oui, oui, je...

**(15 h 50)**

M. Tremblay: Donc, M. Bernier, tantôt vous avez mentionné... lorsqu'il y a des individus... dans des élections municipales, on parle environ d'entre 50 % et 60 % de participation. Puis, les intervenants dans les chambres de commerce, on les voit, c'est des gens impliqués dans leurs milieux.

Mais est-ce que vous croyez qu'en ayant des gestes comme vous dites, des fois des gens de mauvaise influence qui vont arriver, qui vont développer un terrain qui, avec une zone franche, ne fait pas nécessairement l'unanimité, est-ce que vous croyez que ça va redorer l'image, puis ça va redonner encore plus la confiance aux gens d'aller voter puis de participer à l'exercice démocratique, en ayant des agissements de cette façon-là? On enlève des droits à des citoyens. On est dans une société de démocratie. À quelque part, il faut... C'est beau de donner le pouvoir de l'autre côté, mais il faut avoir un juste milieu. C'est pour ça que, moi, je voudrais vous entendre un petit peu là-dessus. Vous êtes des gens impliqués dans vos milieux, vous êtes des gens qui sont impliqués à fond. Les chambres de commerce, on les voit dans toutes nos communautés. Je voudrais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Morin): M. Bernier.

M. Bernier (Louis): Merci. Votre question a un contenu philosophique assez fondamental et assez important. En fait, nous, ce qui... Puis on travaille très étroitement, nous, on représente plus de 100 000 gens d'affaires au Québec, puis il faut savoir que la Fédération des chambres de commerce est elle-même une chambre, donc nous avons plus de 1 000, 1 500 membres corporatifs, des entreprises de toutes tailles qui sont chez nous, des petites, des moyennes et des grandes, et, à travers le réseau des chambres, donc 153 chambres, on représente 100 000 individus et entreprises au niveau des chambres.

Et ce qu'on vous dit aujourd'hui, ça reflète les préoccupations de notre membership, et notre membership croit fermement qu'une personne élue au niveau d'une communauté urbaine, au niveau d'une MRC, au niveau d'une municipalité locale, c'est cette personne qui est élue. Et, à partir du moment où on assujettit une décision de cette personne élue à un processus extrêmement exigeant de définition d'un projet, d'information, de discussion, de consultation et tout ça se fait sur la place publique, on croit fondamentalement que cette personne, elle était et elle continue d'être redevable envers l'électorat et elle doit... Puis il faut prêter bonne foi aux gens aussi, et nous, on prête bonne foi aux élus et on pense que la majorité des élus sont responsables, et encore une fois on ne doit pas faire des règles pour des bavures, on doit faire des règles qui donnent crédit aux décisions prises par les élus, et encore une fois ces décisions étant encadrées par des mécanismes de consultation extrêmement exigeants. Et, nous, on est satisfaits de ça.

Puis encore une fois la fédération, au nom de ses membres, réitère notre appui à un aspect de l'avant-projet de loi, qui est assez constant dans l'avant-projet de loi, aux différents niveaux de la hiérarchie, là, qu'on retrouve, même si on souhaite qu'elle soit plus clarifiée, cette hiérarchie-là, pour revenir à des commentaires qu'on a faits plus tôt, mais on retrouve un souci dans l'avant-projet de loi que les décisions ne soient pas prises en catimini, ne soient pas prises en vase clos, mais soient prises au vu et au su de la population, et ça, on appuie cette dimension de l'avant-projet de loi.

Le Président (M. Morin): Oui, M. le député de Blainville.

M. Ratthé: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Morin): Vous revenez à la charge.

M. Ratthé: J'aimerais aborder rapidement avec vous un point, parce que vous nous parlez de décentralisation, je trouvais intéressant d'entendre le ministre qui disait que ce n'était pas de la décentralisation, on pourra éventuellement y revenir, mais le point qui m'intéressait, je pense qu'il est très clair, je n'ai pas cru percevoir, en tout cas, que vous étiez contre la décentralisation, mais vous nous dites: S'il y a décentralisation, que les moyens et les ressources suivent. Ce qui n'est pas le cas. Dans bien des cas, on a vu des municipalités recevoir plusieurs nouvelles responsabilités, et souvent les moyens et les ressources humaines, les ressources... les compétences souvent ne sont pas nécessairement là. Est-ce que j'interprète bien ce que vous nous dites? Vous dites: Si vous décentralisez... Un, vous parlez d'un guichet unique, vous parlez d'un endroit où au moins, on... pour aider à ce qu'on s'y retrouve, et que, si on décentralise quelque chose, un pouvoir, il faut absolument que, hein, on va dire, l'argent et les ressources suivent pour que, rapidement, on ne tourne pas en rond, puis on ne sache pas où s'adresser. J'imagine que j'interprète bien ce que vous nous dites. Donc, ce n'est pas être contre la décentralisation. Mais, si on le fait, on le fait correctement.

Le Président (M. Morin): Oui, M. Hamel.

M. Hamel (Denis): Oui. Je veux préciser là-dessus. A priori, la décentralisation, c'est un peu, je dirais, comme un voeu pieux, plus on se rapproche des citoyens, mieux on est servis. Mais, si on est contre une forme de décentralisation, c'est d'abord parce qu'on sait -- on est conscients de l'état des ressources financières du gouvernement -- qu'il n'y aura pas ce transfert de fonds. Et puis, donc, est-ce qu'on doit augmenter les impôts, augmenter la taxation? Évidemment, on s'oppose à ça. Donc, notre objection vient de par cette réalité incontournable que, lorsqu'il y a eu des efforts de décentralisation ou des exercices de décentralisation, ça s'est souvent soldé par un échec. Au-delà de ça, la décentralisation dans les domaines de compétence du gouvernement du Québec nous apparaît une mauvaise chose, parce qu'on a parlé tantôt de prévisibilité. Un élément derrière la prévisibilité est l'uniformité. Si les règles qui encadrent le développement de certains projets varient d'une municipalité à l'autre, d'une MRC à l'autre, on est loin de la prévisibilité. Alors, tout ce qui est du domaine de juridiction du gouvernement du Québec -- alors, on pense par exemple, essentiellement, les ressources naturelles -- ne devrait pas être décentralisé. C'est vraiment le gouvernement qui doit être l'arbitre, le seul et unique arbitre dans ces domaines. On l'a vu récemment, lors de l'étude du projet de loi n° 82, qu'une partie du patrimoine ou de la définition de «patrimoine culturel» pouvait être confiée aux MRC, notamment le paysage culturel. On avait des réticences par rapport à ces dispositions-là, parce que justement ça donne une hétérogénéité de l'interprétation et, en plus, la possibilité, encore là, de pression sur le gouvernement municipal pour dire: Regardez, j'ai un beau paysage ici, je ne veux pas de développement économique. Et, même si le projet serait au bénéfice de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, pourquoi qu'un groupuscule freinerait, sous prétexte de l'utilisation de cette décentralisation, pour le faire? Donc, pour toutes ces raisons, nous préférons que le gouvernement soit le seul et unique maître d'oeuvre dans ces domaines.

M. Ratthé: Dans le même ordre d'idées, vous nous parlez de prévisibilité. Vous dites effectivement que les investisseurs doivent savoir dans quel contexte évidemment ils prennent leurs décisions pour pouvoir anticiper le contexte à moyen terme. On ne peut pas changer les règles du jeu, il me semble, en cours de route, sans... Vous dites qu'on ne peut pas changer les règles sans porter un préjudice, donc ça doit être prévisible, on doit savoir de quoi... Ma compréhension, puis corrigez-moi si je me trompe, c'est que, dès qu'une demande est déposée et qu'elle est conforme, moi, ma compréhension, c'est qu'il y a déjà des droits acquis qui sont attachés à cette demande conforme là. Et, si je comprends bien, pour vous, ça, ce n'est pas suffisant. Il faudrait qu'on ait...

Parce que, quand une demande de projet est déposée et qu'elle est conforme, bien, là, c'est accepté, il y a comme un droit acquis qui est là, et on ne peut pas vraiment revenir en arrière. Ce processus-là, on le comprend. Peut-être profiter du fait qu'on a un avocat avec nous, là, mais... Donc, cette mesure-là ne vous paraît pas suffisante en tant que telle. Parce que vous nous dites: Il faut qu'on sache dans quel contexte ce sera prévisible, donc on veut le moins de surprises possible. Moi, je ne comprends pas qu'on puisse revenir en arrière si un projet est conforme, là. C'est un peu la question que je vous pose.

M. Hamel (Denis): Je pourrais vous donner une réponse. Avec un avocat et quelqu'un qui a étudié en aménagement du territoire, je pense qu'il n'y a pas de changement par rapport à la loi actuelle. C'est sûr que, si on parle d'un projet qui est conforme... bien, soit règlement de contrôle intérimaire ou règlement en vigueur qui est conforme au schéma, la question ne se pose pas. Sans que ce soit un droit acquis, c'est un projet qui est conforme, qui nécessite quand même une chaîne d'approbations, là, s'il y a différents ministères ou la municipalité ou... Mais ce n'est pas là le problème, c'est lorsqu'il y a nécessité de modifier soit le schéma ou le règlement de contrôle intérimaire. Parce que, par exemple, lorsqu'on arrive avec un projet d'envergure, on va penser aux pipelines, ou aux éoliennes, ou un projet minier, par exemple les mines, on les découvre souvent par hasard ou sans savoir, elles le sont. Donc, il y a une modification réglementaire au chapitre des grandes orientations et c'est là qu'on entre dans un engrenage qui nous semble extrêmement complexe.

M. Ratthé: Il me reste encore un peu de temps, M. le Président?

Le Président (M. Morin): Oui, il vous reste moins de deux minutes.

M. Ratthé: Bon, on va faire ça rapidement. Un dernier point que j'aimerais éclaircir avec vous. Vous dites également qu'abolir la loi qui précise tous les éléments qui doivent être inclus dans un schéma d'aménagement et distingue ceux qui sont obligatoires de ceux qui sont facultatifs est une moins bonne idée, puisqu'elle laisse trop de place à des décisions arbitraires. Alors, je voudrais vous entendre là-dessus. Quand vous dites: Ça laisse trop de place à des décisions arbitraires, qu'est-ce que vous entendez exactement? Peut-être m'illustrer ça rapidement, là.

**(16 heures)**

M. Hamel (Denis): De notre perception, c'est lorsqu'au niveau municipal surtout, au niveau proche du citoyen, donc plus proche des influences, il faut vraiment une bonne clarification des pouvoirs. Parce qu'il y a souvent deux approches en droit, ça fait qu'on autorise, et ce qui n'est pas autorisé n'est pas permis ou bien on interdit, puis le reste est permis. Tout ce qui s'en va dans le... et là, vous allez dire que je me répète, mais tout ce qui est prévisible, tout ce qui permet aux entreprises, lorsqu'elles veulent avancer dans l'élaboration d'un projet, de voir sur quel terrain elles sont va faciliter les choses. Donc, on aime mieux évoluer, bien sûr, dans un environnement où on sait ce qui est permis qu'être dans un flou dans lequel, bon, il peut y avoir de l'interprétation, de la contestation. Déjà, comme on l'a dit, ce n'est pas facile démarrer un projet économique au Québec. Au moins, si on peut avoir un terrain solide lorsqu'on avance au niveau réglementaire et dans l'étape d'adoption ou d'aller chercher chacun des permis, on est beaucoup plus solides à ce moment-là, donc les entreprises vont être beaucoup plus intéressées à faire affaire au Québec dans un tel contexte.

Le Président (M. Morin): Merci beaucoup. Je m'excuse, le temps est terminé. Merci, M. Hamel, Me Bernier, merci pour votre approche, pour votre travail. Bon retour chez vous.

J'inviterais maintenant à se préparer les gens de la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs.

Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 1)

 

(Reprise à 16 h 5)

Le Président (M. Morin): Nous reprenons nos travaux en recevant la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs. J'inviterais le porte-parole à se présenter à nous et à présenter les personnes qui vous accompagnent.

Fédération québécoise des chasseurs
et pêcheurs (FedeCP ou FQCP)

M. Latraverse (Pierre): Je m'appelle Pierre Latraverse. Je suis le président du conseil d'administration de la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs. Et je suis accompagné par M. Alain Cossette, qui est notre directeur général, et par M. Michel Baril, qui est notre biologiste.

Nous vous remercions de nous recevoir, et nous vous avons déposé un nouveau mémoire puisque nous avons eu le temps de consulter nos membres de façon adéquate.

Le Président (M. Morin): Vous avez 15 minutes, cher M. Latraverse.

M. Latraverse (Pierre): Merci. La Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs est un organisme sans but lucratif qui a vu le jour en 1946. C'est un des plus anciens organismes à vocation faunique du Québec et sa mission est de contribuer, dans le respect de la faune et de ses habitats, à la gestion, au développement et à la perpétuation de la chasse et de la pêche comme activité traditionnelle, patrimoniale et sportive.

Elle a comme objectif d'unir et d'affilier les associations de chasse et de pêche, de collaborer avec d'autres sociétés à la conservation et à l'aménagement de la faune et d'autres ressources naturelles, dans une perspective de développement durable. Elle voit aussi à représenter les intérêts des chasseurs et pêcheurs sportifs et à protéger les activités cynégétiques et halieutiques et à en faire la promotion afin d'en assurer la pérennité. La FedeCP compte aujourd'hui plus de 200 associations, regroupant à leur tour plus de 125 000 membres répartis dans toutes les régions du Québec.

Alors que le Québec possède une expertise enviable dans la gestion des espèces fauniques et que celles qui y sont prélevées y sont abondantes, une problématique paradoxale de plus en plus inquiétante se dresse devant la pratique des activités de chasse et de pêche: l'inaccessibilité aux territoires municipalisés pour les pratiquer. Après étude de la question, il apparaît aux membres de la FedeCP que cette problématique émane du fait que peu ou pas de place n'est accordée à la chasse et à la pêche dans la planification des usages du territoire et dans les plans de développement économique des régions.

L'avant-projet de loi sur l'aménagement durable du territoire et de l'urbanisme ne fait pas exception, et, autant en regard de la chasse que de la pêche, nous y décelons des failles qui laissent entrevoir de sérieux problèmes pour ces activités si celui-ci n'est pas modifié.

Avant toute chose, laissez-nous vous rappeler qu'au Québec la légitimité des activités de prélèvement de la faune est défendue, depuis 2002, par les articles 1.3 et 1.4 de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Ainsi, la pratique de la chasse et de la pêche étant un droit, les citoyens s'attendent à ce qu'elle reçoive considération du gouvernement et de ses ministères.

Voici donc nos craintes. Tout d'abord, en regard de la chasse, elles sont à l'effet que l'avant-projet de loi présente des dispositions qui ajouteront aux actuels problèmes d'accès causés par des réglementations municipales visant l'interdiction de la chasse. L'article 19, alinéa 5° de l'avant-projet de loi annonce en effet que les schémas d'aménagement des municipalités régionales de comté auront comme vocation, entre autres, de prévenir et de diminuer les dangers, les risques ou les nuisances susceptibles d'affecter la sécurité publique et la santé publique.

Pour nous, le libellé de cet article est très similaire à celui de l'article 62, apparaissant dans la Loi sur les compétences municipales, qui donne le droit d'adopter des règlements en matière de sécurité dont certaines municipalités se servent pour interdire la chasse sur leur territoire. Ainsi, sans pouvoir interdire directement la chasse, les villes peuvent limiter cette activité en adoptant des règlements qui interdisent l'utilisation d'armes de chasse. Ceci porte aussi préjudice à des activités telles que le tir en champ de tir, le tir à l'arc sur parcours avec cible animalière, ou le tir au pigeon d'argile.

Pourtant, plusieurs villes du Québec présentent de vastes territoires agroforestiers d'un très grand intérêt pour les activités de prélèvement faunique. Ces territoires sont recherchés par les amateurs et environ 70 % de l'ensemble des activités de chasse du Québec se pratiquent dans ces lieux. Lorsque les administrateurs municipaux adoptent des règlements interdisant l'usage d'armes de chasse sur leur territoire, ce sont d'immenses zones, souvent parmi les plus accessibles et les plus productives pour certaines espèces de gibier, qui sont soustraites aux activités de prélèvement faunique.

Puisque nous travaillons depuis plusieurs années à faire solutionner cette problématique qui émane de la Loi sur les compétences municipales, nous voulons donc à tout prix nous assurer qu'il ne surgira pas, dans une nouvelle loi, des dispositions permettant d'interdire l'usage d'arme de chasse, ceci viendrait anéantir nos efforts.

Pour la FedeCP, la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et les nombreux règlements qui lui correspondent suffisent à assurer la sécurité des citoyens partout en territoire québécois, et le fait que d'autres lois puissent intervenir dans son champ de compétence est extrêmement inquiétant. En l'occurrence, nous demandons que le texte de l'avant-projet de loi soit modifié et qu'on y ajoute, d'une façon ou d'une autre mais hors de tout doute, que ni la chasse ni aucune autre activité de prélèvement ne seront touchées par l'alinéa 5° de l'article 19. Si cet article a été inclus pour de bonnes raisons, dans un but précis, nul doute qu'il vaut la peine de le clarifier. Bien entendu, notre démarche vise l'intérêt de ceux qui pratiquent des activités de prélèvement, mais l'insertion d'une telle précision dans l'avant-projet de loi faciliterait également le travail des gestionnaires de la faune gouvernementaux aux prises avec la gestion d'espèces trop abondantes.

**(16 h 10)**

Beaucoup d'arguments militent pourtant en faveur du maintien de la chasse en milieu municipalisé. Tout d'abord, il est connu que le paysage naturel du Québec a beaucoup changé depuis les débuts de la colonisation. Depuis cette époque, le développement des villes et les modifications des milieux forestiers en zone de culture ont favorisé plusieurs espèces animales, telles que le cerf de Virginie et la grande oie des neiges, qui ont vu leur population augmenter au point de se trouver en surnombre. Si on ajoute à cela l'adoucissement des hivers, on peut dire que la vallée du Saint-Laurent, ainsi que tout le sud du Québec, sont devenus des paradis pour de nombreuses espèces.

Les impacts négatifs de ces populations trop nombreuses sont multiples. On constate que les accidents routiers impliquant la faune ont augmenté de façon inquiétante au cours des dernières années et que ce sont plus de 6 000 qui surviennent chaque année, et la majorité se produit dans le sud du Québec, dans les zones municipalisées où l'on tend à interdire la chasse. Ces données sont éloquentes. Les décès et les blessures causent de profonds désarrois au sein des familles qui les vivent. Les dommages matériels comportent, pour leur part, d'importants désagréments. De plus, tous ces accidents engendrent d'énormes coûts sociaux, notamment ceux qui commandent des indemnisations de la part de la Société de l'assurance automobile du Québec. En contrepartie, rappelons-le, jamais un chasseur n'a atteint d'un projectile un non-chasseur.

La chasse est par ailleurs une activité sécuritaire encadrée par des lois et des règlements inspirés par des besoins de conservation et de gestion des ressources fauniques. Les adeptes doivent participer à un minimum de deux modules de formation qui mènent à l'obtention du certificat du chasseur, indispensable pour se procurer les permis nécessaires pour pratiquer la chasse avec arme à feu. Il existe de plus un cours spécifique pour les citoyens désirant pratiquer la chasse au dindon sauvage. Il est aussi important de savoir que la chasse est un outil le plus efficace et le plus rentable pour contrôler les espèces animales. Souvent, l'interdiction d'utilisation d'arme à feu, préconisée par des municipalités pour calmer les craintes injustifiées des citoyens, entraîne des problèmes extrêmement plus graves que le dérangement ponctuel et très occasionnel d'une décharge d'arme à feu.

On peut affirmer que la chasse est l'outil de gestion le plus efficace et surtout le plus adéquat économiquement pour résoudre les problèmes causés par la faune en milieu municipalisé. La chasse étant une activité de toute évidence sécuritaire, économiquement rentable pour le contrôle de la faune et légalement bien encadrée, c'est pour ces raisons que nous demandons que soit modifié l'article 19 de l'avant-projet de loi.

Voici maintenant nos craintes en regard de la pêche. Ici, aucun article de l'avant-projet de loi ne porte directement préjudice à la pêche. Nous avons toutefois remarqué le peu d'attention portée à l'eau comme milieu de villégiature. Alors que les lacs et les rivières du Québec devraient demeurer des milieux naturels accessibles à tous les Québécois, nous notons, depuis quelques années, de nombreux cas où les pêcheurs sportifs sont confrontés à de sérieux problèmes d'accessibilité aux lacs et aux rivières et à des mesures restrictives excessives sur lesquels le gouvernement devrait intervenir.

Des exigences tarifaires imposées à ces derniers par les municipalités pour mettre leurs bateaux à l'eau portent à réflexion. Pour nous, il est grand temps que le gouvernement intervienne, établisse les standards et fixe les coûts maximums raisonnables pouvant être exigés pour permettre aux citoyens d'accéder aux lacs et aux rivières. Certaines municipalités exigent 10 $, 50 $ ou même 500 $ par jour à un pêcheur visiteur pour utiliser une rampe de mise à l'eau, alors que ce sera gratuit pour le résident. Des déboursés supplémentaires peuvent être exigés pour le lavage du bateau ou le stationnement. Dans certaines municipalités, la mise à l'eau pour les visiteurs est tout simplement impossible.

Nous nous attendons à ce que le gouvernement réagisse et mette de l'ordre dans ce dossier. Nous sommes tout à fait d'accord à ce que le concept d'utilisateur-payeur soit appliqué, mais les lacs et les rivières du Québec sont des lieux de villégiature qui doivent être accessibles à l'ensemble des Québécois, et les rampes de mise à l'eau doivent demeurer des infrastructures publiques. Des normes justes, convenables, doivent être impérativement mises en place.

Ces demandes ne sont pas simplement celles d'un groupe qui défend aveuglément les droits de ses membres. Au contraire, elles sont appuyées sur le Code civil du Québec, sur la Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau visant à renforcer leur protection et sur la Politique nationale de l'eau, publiée en 2002, qui, tous, défendent le caractère collectif de l'eau. On y constate aussi, à maintes occasions, que le gouvernement a exprimé l'importance d'accorder une place spéciale à l'accès aux plans d'eau et à la pêche sportive dans le développement socioéconomique de notre province. Étonnamment, on peut lire, dans la Politique nationale de l'eau, que les municipalités, par le biais de leurs règlements de zonage, ont la possibilité et le pouvoir d'aménager et de réserver des accès publics à l'eau. Elles ont également le pouvoir d'aller jusqu'à l'expropriation pour retenir des sites d'usage public permettant l'accès à l'eau. L'avant-projet de loi est une excellente opportunité pour offrir aux municipalités des pouvoirs en cette matière. Il pourrait contenir des balises leur demandant de prévoir, dans leurs schémas d'aménagement du territoire, des stratégies pour favoriser l'universalité de l'accès à l'eau, ce qui préserverait les activités de pêche.

La chasse et la pêche représentent des moteurs économiques importants au Québec. Pourtant, ceci semble en général fort peu considéré dans les stratégies de gestion municipale. En 2010, 526 000 permis de chasse et 748 000 permis de pêche ont été vendus au Québec. Les adeptes ont par ailleurs déboursé plus de 1,1 milliard de dollars pour leur activité, et signalons que 1,1 million de certificats du chasseur sont en circulation.

Les activités de prélèvement faunique doivent recevoir une meilleure attention des ministères autres que celui des Ressources naturelles et de la Faune. Ces derniers devraient éviter, par équité et par efficacité, d'entraver la pratique de la chasse et de la pêche. Ces ministères, dont celui des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire, devraient même, à notre avis, soutenir le ministère des Ressources naturelles et de la Faune dans ses efforts à travailler avec les intervenants du milieu faunique pour améliorer le cadre de la pratique de la chasse et de la pêche. La chasse a sauvé plus de vies et fait épargner beaucoup plus d'argent qu'elle n'a causé d'incidents ou d'accidents; il s'agit même d'une activité qui, de par sa nature, améliore la qualité de vie des Québécois. La pêche est, quant à elle, une activité de plein air qui assure le ressourcement de plus de 1 million de Québécois et un soutien économique à plusieurs communautés en région.

Nous demandons que le texte de l'avant-projet de loi soit modifié et qu'on y ajoute, d'une façon ou d'une autre mais hors de tout doute, que ni la chasse, ni aucune activité de prélèvement, ni les activités connexes à la pratique de la chasse ne seront touchées et que ces éléments déterminant un accès équitable au milieu naturel aquatique y soient précisés. La chasse et la pêche sont des outils économiques puissants dont les municipalités devraient se servir pour atteindre leurs objectifs de développement. Ce sont des activités patrimoniales saines et rassembleuses qu'elles devraient être fières de promouvoir. Merci.

Le Président (M. Morin): Merci, M. le président. Je vois que vous êtes habitué aux règlements, vous êtes rentré dans votre temps de 15 minutes. Donc, M. le ministre, c'est à vous maintenant à la période d'échange.

**(16 h 20)**

M. Lessard (Frontenac): Oui. Merci, M. le président ainsi que les gens qui vous accompagnent, donc, de venir faire la présentation. Souvent, quand tu lances un avant-projet sur la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, on s'aperçoit que ça fait émerger différents intérêts pour différents groupes de voir parfois, dans la loi, une intention, soit avouée, soit cachée, de changer quelque chose. Honnêtement, quand j'ai vu que vous vous inscriviez, j'ai dit: Qu'est-ce c'est qu'on a changé dans la Loi de l'aménagement et de l'urbanisme qui peut bien toucher la chasse et la pêche?

Alors, je veux rien que vous rassurer: si vous voyez, dans l'article 19.1°, une façon de changer la Loi sur les compétences municipales, il n'en est rien. La Loi sur les compétences municipales, c'est la Loi sur les compétences municipales. Le volet 19.5°, là, dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, c'est... donc, oui, on parle de prévention et de diminution des dangers, des risques, des nuisances susceptibles d'affecter la sécurité et la santé, mais c'est plutôt dans un cadre des changements climatiques où est-ce que nécessairement on a à reconsidérer puis prendre des actions par rapport à des zones de risque sur la prévention, l'atténuation puis la correction des... la priorité, donc, à la source des problèmes. Ce n'est pas du tout dans un changement d'activité de chasse ou de pêche ou autre activité, honnêtement.

Alors donc, je veux vous dire que je ne change pas la Loi sur les compétences municipales. La Loi sur les compétences municipales, ce débat-là, vous êtes venus le faire, je crois, lorsque ma collègue, qui est ministre des Ressources naturelles, était en titre aux Affaires municipales, concernant la préoccupation sur le fait qu'on puisse interdire ou pas des zones de chasse. Et on se souvient des débats qu'il y a eu à ce moment-là: l'utilisation de la poudre noire, les temps de chasse, à l'arc, à ci, puis à proximité des zones, en bas du bassin sud, en haut du... alors les zones. Alors, je pense que vous aviez fait beaucoup de représentations. Ce débat-là, il a été fait, à ma connaissance, et je n'ai pas vu de nouveau cas. La Loi sur l'aménagement, je veux rien que vous rassurer, puis peut-être ça va vous... ça ne vient pas changer toutes les autres lois dans ce principe-là.

Je comprends que vous saisissez l'occasion aussi, ça permet de reparler de l'importance de la chasse et de la pêche, mais sincèrement je n'ai pas beaucoup, beaucoup de questions à vous poser par rapport à ça, ce n'est pas l'objet de cette loi-là. Mais j'apprécie le fait que vous présentez tout l'intérêt quand on touche la vitalité du territoire par la chasse, la pêche. Alors, moi, je n'aurais pas beaucoup, beaucoup de questions à vous poser, peut-être mes collègues qui suivent les travaux. Mais je tiens à vous le dire et à le réitérer, ce n'est pas l'objet de la loi de changer la Loi sur les compétences.

Je ne sais pas si vous avez un commentaire ou y voyez, dans 19.5°, plus d'agression, comme j'ai dit tantôt, ou avez-vous vécu des cas de zonage ou de changement de zonage qui seraient venus faire l'objet de l'interdiction que vous confère la loi pour avoir les droits de chasse et de pêche? Peut-être, avec votre expérience, vous pourrez peut-être éclairer les travaux de la commission?

Le Président (M. Morin): M. le président.

M. Latraverse (Pierre): Nous vous remercions de l'engagement que vous prenez, M. le ministre. Par contre, si vos intentions sont claires, il serait bon de les préciser, parce que présentement plusieurs municipalités se servent de lois pour interdire la décharge d'armes à feu au nom de la sécurité. Et le terme «sécurité publique», tel qu'écrit présentement dans la loi, peut porter à interprétation. Et ce serait pour baliser cette interprétation que nous aimerions qu'il y ait des termes qui soient employés pour que justement la Loi sur l'aménagement du territoire, cet avant-projet de loi ne permette pas justement une interprétation trop large du terme «sécurité publique».

On pourrait vous donner plusieurs exemples. Je vous en donne un entre autres, la municipalité de Varennes, où il est interdit de décharger des armes à feu. Il y a des gens qui ont reçu des contraventions même s'ils étaient à plusieurs kilomètres en arrière du fleuve, qu'ils chassaient dans des champs de maïs, l'automne, les oies blanches qui causent des dommages à l'agriculture. Et ces gens-là ont reçu des contraventions parce qu'ils avaient déchargé une arme à feu dans le territoire municipalisé. Même si le territoire qui est municipalisé était très grand, qu'il n'y avait aucune maison à plusieurs centaines de mètres autour, qu'ils sont dans le milieu d'un champ, il existe une loi qui avait été passée par le conseil municipal, et les gens ont été arrêtés par des agents pour justement décharge d'armes à feu. Et là-dessus il y a plusieurs exemples qui existent. J'ai pris l'exemple de Varennes, mais il y en a d'autres.

M. Lessard (Frontenac): Je comprends seulement que ça ne peut pas être en vertu de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme qu'ils vous ont donné une infraction, cette loi-là ne donne pas de prescription en matière de ça. Maintenant, c'est parce que vous voyez apparaître l'aspect «sécurité publique»...

Une voix: ...qui existe...

M. Lessard (Frontenac): Pardon?

Une voix: Qui existe déjà dans...

M. Lessard (Frontenac): Que ça existe... on me dit, puis j'ai reçu un courriel de mon spécialiste, là, qui me chuchote à l'oreille et par courriel...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lessard (Frontenac): Donc, ce concept de «sécurité publique» là existe déjà dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, c'est rien que, rédigé de cette façon-là, c'est là qu'est votre crainte. C'est sûr qu'on ne rédige pas les lois en disant: Bien, la loi précise ça, mais, pour toutes les lois suivantes, voici, elle n'affecte pas les lois suivantes, là, la rédaction serait difficile.

Je vais regarder comment on peut peut-être mieux l'exprimer, mais je vous le dis, l'essence puis le coeur même de cette loi-là, ce n'est pas de revoir la Loi sur les armes à feu et la chasse et la pêche, c'est... Si la municipalité que vous citez ou d'autres ont exercé des pouvoirs, il faut que ça soit nommément dans une loi qui lui permette d'interdire de faire l'activité prescrite et avec les pénalités prévues à la loi ou aux réglementations habilitantes.

La loi qu'on a ici n'habilite pas à faire ce pour quoi vous êtes venus en commission, mais, comme ce n'est pas évident puis on n'est pas tous des spécialistes de la loi... Je comprends que vous venez faire de la représentation, puis, moi, je suis content d'entendre tout l'autre volet économique, M. le Président, de l'importance de la chasse puis de la pêche au Québec, dans toutes ces activités, dans l'accessibilité au territoire. Ça permet de donner une écoute, parce qu'on parle aussi... mais prochainement on parlera de vitalité du territoire.

La vitalité du territoire, c'est de préserver la... prélever la ressource aussi dans les points d'eau du Québec. On achète une propriété, on n'achète pas un lac. On achète un boisé, on n'achète pas toute l'espèce animale qui s'y trouve, etc. Donc, on n'achète pas tous les chevreuils qui sont dessus parce qu'ils ont passé dessus. Alors, ça rappelle un certain équilibre, là, entre le bien privé puis le bien public.

Mais je tiens à vous le dire, là, je vous écoute, j'aimerais bien ça qu'on en parle que ça vient enlever des droits de chasse. Ce n'est pas le cas, ce n'est pas visé par ça, ça ne concerne pas cet usage-là. Ça ne donne pas le pouvoir habilitant de le faire non plus. Même si ça s'appelle «sécurité publique», le mot est déjà utilisé partout dans la loi.

Alors, si, un jour, vous avez à aller en cour, vous sortirez ce que l'intention du législateur était, là, et, si on est capables de leur préciser autrement, on le trouvera, mais ce n'est pas en redéfinissant toutes les lois auxquelles ça touche que je pourrais le faire. Parce que d'autres sont venus dire: Bien, il ne faudrait pas que ça précise telle affaire. Alors donc, ce n'est pas de l'intérêt... puis ça ne touche pas cette loi-là, puis ça ne vise pas ça. Ça ne vise pas non plus à venir restreindre d'autres lois dont les débats ont été largement documentés et faits antérieurement. Je sais que vous vous étiez occupés beaucoup de ça.

Alors, pour ma part, là, ça limitera peut-être notre temps d'intervention là-dessus; à moins que mes collègues aient d'autres mots à dire pour des expériences qu'ils ont pu vivre aussi. Mais, si vous avez des cas patents que, à cause de la Loi de l'aménagement et de l'urbanisme, une municipalité, une municipalité régionale de comté est venue limiter le droit de chasse et de pêche, je demanderais de l'avoir pour qu'on puisse aller un peu plus loin, là, si on est capables d'éviter ces côtés-là non recherchés.

Le Président (M. Morin): Voulez-vous ajouter quelque chose, M. le président? Vous, monsieur... Oui, allez-y, M. Cossette.

M. Cossette (Alain): Oui. Je vous remercie beaucoup. Comme vous le mentionnez si bien, aujourd'hui vous êtes là présentement pour jouer le rôle de législateur, puis, pour nous autres, c'est important de pouvoir parler, s'exprimer aujourd'hui. Et, dans ce cadre-ci, pour nous autres, c'est important que ça soit inscrit nommément que la chasse ne peut pas être nuisible face à cette législation-là. Ça va venir asseoir nos bases pour le futur.

Et, en plus ce ça, l'autre portion aussi qu'il faut regarder... puis là on rentre carrément dedans, puis, dans notre mémoire, comme on vous l'a dit, on l'a fignolé plus dans les derniers temps parce qu'on a eu plus le temps de consulter, c'est au niveau justement de l'aménagement durable du territoire et de l'urbanisme. Et, à ce niveau-là, pour nous autres, c'est très important, parce que les lacs, présentement, c'est un bien collectif, et souvent on est en train de les rendre... de les privatiser et on est en train de retourner en arrière avec ce bien collectif là. Et là vous avez la chance aujourd'hui de jouer un rôle et de mieux définir et d'encadrer ce qui peut être fait. Et c'est pour ça qu'on s'exprime ici aujourd'hui, et, pour nous autres, c'était très important de le mentionner.

M. Lessard (Frontenac): Oui. Ah! bien, ça, j'entends... ça, vous ne perdez jamais une tribune pour mentionner l'importance de vos revendications, puis les commissions parlementaires sont là-dessus. Nécessairement que 19.5°, pour le rappeler à ceux qui nous écoutent, là, qui parfois peuvent trouver ça plate parce que, on le dit, c'est une loi quand même assez aride, c'est une loi assez technique, etc., là, on est quand même dans le contenu du schéma, on dit:

«Le schéma planifie l'aménagement et le développement du territoire de la municipalité régionale de comté; il tient compte de l'énoncé de vision stratégique et de l'évolution des enjeux sociaux, économiques et environnementaux sur ce territoire.

«Il a principalement pour vocation...»

Et là un des points, c'est «de prévenir et de diminuer les dangers, les risques [...] [de] nuisances susceptibles d'affecter -- donc -- la sécurité publique et la santé».

Et je tiens à le rappeler, ça ne vise pas... et je ne pense pas mettre toutes les déclinaisons. Là, je comprends, là, puis vous allez être déçus, là, mais je ne pense pas, dans la rédaction de la loi, qu'on vient dire: Ça ne touche pas les lois une telle, une telle, une telle. Alors, si, nommément, on ne le vise pas, ce n'est pas l'objet, etc., donc, dans l'écriture.

J'entends ce que vous dites, je vais essayer de trouver une façon peut-être de mieux l'exprimer, mais de le reprendre et de dire tout ce que ça ne touche pas, je n'ai pas vu de loi, là... Ça fait huit ans qu'on fait des lois, je n'en ai pas vu comme tel. Mais, s'il y a une façon, dans la rédaction, d'atteindre l'objectif, je vais regarder ça, là, avec tous ceux qui me guident à la rédaction. Mais sincèrement, je vous écoute, là, mais c'est comme... l'objet dont vous me parlez, c'est comme: moi, je vends des souliers mais vous voulez avoir des chapeaux.

On n'est pas à la même loi. Si j'étais dans la Loi sur les compétences municipales, je dirais: On est dans la bonne affaire. Là, il y a précisément des choses qu'on doit indiquer, mais... Je ne veux pas vous vexer, mais je ne comprends pas comment j'arriverais à identifier toutes les lois, parce que... Là, vous êtes un groupe, il y en a eu d'autres, comme la loi sur les... On m'a demandé: Est-ce que tu peux nommer qui sont les professionnels dans la loi sur l'aménagement? C'est des aménagistes, c'est des urbanistes, c'est des... Je ne modifie pas la loi sur l'ordre professionnel qui détermine qui est un urbaniste, qui est un aménagiste, etc. Alors, des fois, il y a des objets de loi dans lesquels on ne reprend pas. Mais je comprends que vous voudriez qu'on le fasse, là, mais, en respectant la façon dont on écrit les lois, là, je vais essayer de trouver une façon d'exprimer, mais ça ne pourrait pas être écrit comme vous le voulez.

**(16 h 30)**

Le Président (M. Morin): Oui, M. Cossette.

M. Cossette (Alain): Bien, ce que je veux mentionner là-dessus... Merci beaucoup. Ce que je veux mentionner au niveau... J'espère que vous allez trouver une façon quelconque de pouvoir placer, parce que c'est des activités qui sont très importantes au niveau économique puis pour les régions, et c'est des activités qui sont mises en cause et en jeu souvent par méconnaissance. Et c'est pour ça que, nous autres, on juge l'importance au niveau de la chasse et de la pêche. Je comprends, dans votre portion du côté chasse, que vous allez regarder.

Dans le cadre du côté de la pêche et de l'accessibilité aux plans d'eau, ça regarde carrément cette portion-là. Et c'est pour ça que, dans notre deuxième mémoire, on vous a mis... celui qu'on a fignolé un peu plus, on en parle beaucoup plus. Et c'est une problématique qui est de plus en plus criante et qui est en train de prendre de l'ampleur. Vous avez des endroits que vous devez payer 500 $, 400 $, 300 $ pour mettre une embarcation à l'eau, utiliser des rampes qui ont souvent été construites même avec l'argent du fédéral à l'époque, et puis après ça vous avez d'autres aspects où est-ce qu'on dit, dans la Politique de l'eau, qu'on doit tout faire pour mettre en oeuvre, pour redonner l'accessibilité à ce bien-là. Mais, pour nous autres, je pense, ça regarde carrément la commission ici et ce qui en est.

Puis, au niveau chasse, on comprend que vous allez regarder...

M. Lessard (Frontenac): ...

M. Cossette (Alain): ...comment vous allez procéder, mais, au niveau aussi de l'activité de pêche...

M. Lessard (Frontenac): Oui...

M. Cossette (Alain): ...il y a les grands dangers et les grands enjeux. On est en train de privatiser les cours d'eau au Québec, là, présentement, là.

M. Lessard (Frontenac): Je veux juste...

M. Cossette (Alain): Puis c'est un processus qui s'accélère.

M. Lessard (Frontenac): Oui. Je ne veux pas avoir l'air du gars qui pleut sur la parade, là, mais, si j'étais dans la Loi sur les compétences municipales, je comprendrais très bien ce que vous dites, puis c'est la bonne commission, peu importe le sujet.

La loi sur les compétences, sur l'encadrement, sur le pouvoir réglementaire de la ville de Montréal, la ville de... toutes les villes peuvent taxer, là, des stationnements, peuvent forcer de faire bien des affaires, etc. Prenez-les toutes, là: sur la signalisation, toutes. Alors...

Une voix: ...

M. Lessard (Frontenac): Sur la fiscalité. Mais le problème que vous indiquez, il est vrai, mais ce n'est pas dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme qu'on fait ça. Je ne dis pas qu'ils ne doivent pas peut-être en prendre compte. Mais nécessairement, c'est... Si j'avais à changer une autre loi, là je vous dirais: Venez-vous-en, on a un problème, il faut régler ça, c'est dans la Loi sur les compétences. Mais je ne touche pas à Loi sur les compétences; le débat, il a été fait là-dessus.

C'est dans la loi de l'aménagement, et là l'aménagement, ça donne des grandes aires d'affectation, qui, après ça, va faire des règlements d'urbanisme, règlements de construction, etc. Mais je ne mets pas en question la loi sur la pêche, la loi sur la chasse, la façon d'accéder... Puis on est en train de privatiser, peut-être à cause de la Loi sur les compétences, mais, si je la rouvre, je vous invite, c'est clair. Pour le reste, je vais regarder... Sincèrement, j'ai beau essayer de faire un débat là-dessus, là, la loi que je suis en train de changer, je ne suis pas dans la bonne affaire. Mais, si je touche à l'autre, je vous appelle.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Morin): Ça va? Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter, M. Latraverse?

M. Latraverse (Pierre): Pardon?

Le Président (M. Morin): Est-ce que vous avez des choses à rajouter?

M. Latraverse (Pierre): Non, pas nécessairement...

M. Cossette (Alain): Ça va.

M. Latraverse (Pierre): ...mais il faut être conscient aussi que 70 % des activités de prélèvements fauniques sont faites dans les territoires municipalisés. Et, ayant été moi-même conseiller municipal pendant plusieurs années, j'ai vu de plus en plus de gens téléphoner à la municipalité et porter des plaintes parce qu'ils entendaient des coups de feux, faire venir la Sûreté du Québec. Et j'ai été obligé d'avertir la Sûreté du Québec qu'à partir de telle date à telle date, dans telle partie de la municipalité, il y avait des activités de chasse et que c'était réglementé, que c'était permis par la loi. Et les gens, par sécurité publique, faisaient des pressions sur les conseils municipaux, et c'est vis-à-vis ces pressions-là sur les conseils municipaux qu'on a un peu une appréhension. Nous avons une appréhension forte que des gens, une fois que la loi soit promulguée, arrivent au conseil municipal et disent: Maintenant, on a un outil qui s'appelle la sécurité publique sur l'aménagement du territoire, et mon territoire dans lequel je vis, je ne veux pas qu'il y ait de décharge d'armes à feu.

Et c'est un territoire municipalisé. Là, les municipalités seront prises avec ce dilemme, que le M. le ministre nous dit, de savoir dans quel type de loi: Est-ce que c'est l'aménagement du territoire? Est-ce que c'est la Loi sur les compétences municipales? Et ça, cette valeur de trancher adéquatement dans quel type de loi que ça s'applique, je ne suis pas certain que tous les élus municipaux de la province de Québec sont en mesure de faire ce jugement. Et c'est dans cette optique-là, étant donné que c'est un aménagement du territoire et que l'aménagement du territoire touche tous les aspects du territoire, que nous voudrions, un peu comme la loi sur l'environnement, qui a préséance sur toutes les lois, que la Loi sur la mise en valeur et la conservation de la faune ne puisse pas être modifiée par une loi du ministère des Affaires municipales, des Régions et la loi, là, du ministère qui s'occupe de ces choses-là.

Et c'est dans cette optique-là de prévention et de clarification de problèmes qui pourraient surgir dus à une mauvaise interprétation de la loi que nous voulons vous sensibiliser. Cette mauvaise interprétation de la loi pourrait être clarifiée d'une façon ou d'une autre, mais clarifiée de façon systématique pour que tout soit clair au niveau des décideurs régionaux, et c'est pourquoi nous voulons vous sensibiliser.

Le Président (M. Morin): Merci, M. le président.

M. Lessard (Frontenac): ...savez-vous, vous avez bien fait de venir, parce que non seulement ça a sensibilisé, mais ça a documenté au niveau des pièces ici, parce que tout est enregistré et c'est ce qui constitue, donc, ce qu'on appelle certainement l'intention du législateur, à tout le moins.

Et je tiens à le mentionner, on est dans l'article 19.5°, on est dans un schéma d'aménagement, on n'est pas dans un règlement, on n'est pas dans un pouvoir contraignant, on dit: Voici les orientations, voici le schéma, qu'est-ce qu'il doit prendre en considération, donc les schémas au niveau des municipalités régionales de comté. Après ça, les municipalités vont passer leurs plans d'urbanisme, de là découleront des règlements, mais je ne fais rien que vous réitérer que des réglementations pour empêcher des nuisances puis des utilisations de sols, etc., ça existe déjà dans la loi, là, qui est repris dans la loi en général. Mon courriel d'urbanisme à côté m'a appris que, dans l'article 121 sur la réglementation sur le zonage, le lotissement, sur la construction, il existe déjà... puis c'est repris, c'est des textes... «La réglementation sur le zonage peut, dans toute partie du territoire identifiée au plan d'urbanisme comme étant soumise à des contraintes reliées à la sécurité publique, à la santé publique [...] à la protection de l'environnement, interdire toutes [...] nouvelles utilisations du sol ou érections de toute nouvelle construction ou [...] ouvrage», mais pas rapport avec les armes à feu, pas rapport avec une décharge d'arme à feu, c'est par rapport vraiment à des préoccupations de zones d'aménagement et non pas par rapport à une utilisation d'un individu avec son arme. Alors, juste le fait d'avoir clarifié ça en commission, documenté, enregistré dans le verbatim, ça valait la peine de venir.

M. Latraverse (Pierre): Merci.

M. Lessard (Frontenac): Et l'autre affaire, c'est qu'il y a un volet très économique aux prélèvements qui sont faits dans les lacs et rivières et sur les territoires de chasse au Québec. Il y a des territoires destinés à ça. L'île d'Anticosti vit de quoi? Ma région, Chaudière-Appalaches, sur le prélèvement du cervidé, on trouve même qu'il y en a qui se tuent un peu trop, même sur les «hoods» d'auto, sur les pare-brise, mais honnêtement on fait du prélèvement, puis on fait des droits de chasse additionnels, puis ça fait une activité économique, et les propriétaires en bénéficient, en général.

Donc, c'est cet équilibre-là qu'on a atteint. Je pense qu'on a trouvé l'équilibre au Québec: on est capables de chasser puis de piéger puis de pêcher dans nos lacs et rivières. Ça n'a pas empêché la Loi sur les compétences municipales de venir réglementer puis de percevoir un droit de stationnement puis un droit d'exiger le nettoyage de ton bateau pour éviter la propagation de la moule zébrée d'un lac à l'autre, etc. Il y a un intérêt de protection de la ressource et non pas de protéger le fait que la municipalité va te collecter 25 $ pour nettoyer ton bateau. C'est qu'à un moment donné on a dit: Bien, là, on n'en aura plus, de poisson tantôt, parce que la moule zébrée va envahir tellement tous les lacs. Puis là, bien, on les promène de bateau en bateau, de lac en lac.

Alors donc, je pense que, quand on trouve l'équilibre... On l'a, au Québec, l'équilibre. À ma connaissance... Je ne ferai pas de débat public, puis c'est bien de continuer d'en faire la promotion. Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de problème qu'il ne peut pas y en avoir. Donc, vous saisissez toujours l'occasion de venir nous parler de la faune et du prélèvement des ressources en général. Donc, moi, je l'apprécie, mais je pense, pour moi, le point, il est fait. Si c'est votre préoccupation, ce n'est pas l'objet du mémoire...

**(16 h 40)**

Le Président (M. Morin): Merci...

M. Lessard (Frontenac): ...et les schémas d'aménagement ne visent pas cet objectif-là.

Le Président (M. Morin): Merci, M. le ministre. M. le député de Blainville, c'est à votre tour.

M. Ratthé: Merci, M. le Président. D'abord, messieurs, merci de nous sensibiliser à cette problématique que vous rencontrez. On sait quand même que... On parlait d'équilibre, il y a quelques minutes, là; les chasseurs et pêcheurs assurent justement un équilibre, au sein de nos communautés, en termes de population et surpopulation.

Et je suis un peu... De prime abord, je dirais que je suis un peu du même avis du ministre pour ce qui est de l'article 19.5°, qui est plus sur le contenu du schéma. Et l'intervention que je veux faire, c'est peut-être... je le souligne au ministre, parce qu'on a cherché un peu plus puis il y a peut-être certains endroits qui n'ont pas été identifiés par vous mais où que, nous, on dit: Bien, peut-être qu'il y aurait un effet d'interprétation qui pourrait aller dans le sens de ce que vous nous dites.

La Loi sur les compétences municipales, effectivement, M. le ministre, même c'est clair, l'article 2, là, dit que cette loi-là ne doit pas être interprétée «de façon littérale et restrictive». Au contraire, on dit, dans cette loi-là: On peut l'interpréter de façon très large. Et je suis convaincu que l'article de la Loi sur les compétences municipales qui parle de sécurité publique, au départ, ne devrait pas s'adresser nécessairement aux chasseurs. Mais, comme vous nous l'indiquez, comme on y donne une interprétation très large et c'est ce qu'on souhaite qu'elle soit faite, bien, certaines municipalités l'appliquent dans le cas des décharges d'armes à feu de chasseurs.

Alors, je voulais juste apporter à l'attention du ministre... puis il y a tellement d'articles de loi puis c'est tellement technique qu'il faudrait peut-être regarder, M. le ministre, si ça s'applique. Peut-être... En fait, je suis pas mal certain que ça ne s'applique pas de la façon dont c'est rédigé dans la loi, mais est-ce qu'on pourrait l'interpréter de cette façon-là. Au titre IV, Réglementation en matière d'urbanisme, l'article 104 dit que les articles 2 -- donc, l'article 2 sur les compétences municipales, qui donne une interprétation très large -- on dit que les articles 2, des compétences municipales, 3, 5 et 6 s'appliquent à tous les articles de loi qui sont dans la réglementation en matière d'urbanisme, donc du titre IV. Alors, si on autorise que l'interprétation soit plus large en vertu de l'article 2 de tous les articles de loi qui sont là, bien, il y a peut-être un ou deux articles qui ne sont pas là nécessairement pour empêcher à ce qu'il y ait de la chasse en tant que telle, mais qui font référence à la sécurité publique. Et ce que je demanderais peut-être au ministre, c'est d'aller s'assurer qu'effectivement, comme on les soumet à la Loi sur les compétences municipales, de pouvoir s'assurer qu'effectivement on ne pourra pas les interpréter de façon large. Parce que, là, actuellement, dans la loi, on dit... on parle d'articles 2. Alors, ces articles-là, M. le ministre, c'est le 121, où on nous parle de sécurité publique, réglementation sur le zonage, puis dans toute partie du territoire identifiée sur un plan d'urbanisme comme étant soumise à des contraintes reliées à la sécurité publique. Évidemment, on ne vise pas la chasse ici, mais, comme on réfère à la Loi sur les compétences municipales, qui dit qu'on peut l'interpréter largement, ça pourrait être un moyen de le faire.

Il y a également l'article 161, si je ne me trompe pas... 160, pardon, où on fait encore référence à des permis et à la sécurité. En lisant les articles, c'est sûr que, moi, je les lis puis je me dis: Il n'y a pas grand rapport avec la chasse, non plus. Mais on fait encore référence à la sécurité, et c'est un peu le même exemple qu'on nous donnait tantôt. Je suis sûr que l'article auquel on nous référait dans la Loi sur les compétences municipales, ça ne devait pas viser la chasse. Et vous avez l'article 200 aussi, toujours dans le même titre, le titre IV, donc qui est soumis à l'article 2 sur la Loi des compétences municipales, on fait aussi référence à la sécurité publique.

Alors, la seule chose que je dirais, M. le Président, pour s'assurer effectivement... parce que j'ai bien entendu la volonté du ministre de dire: Cette loi-là, elle n'a pas le but d'interdire la chasse au Québec. Peut-être qu'on pourrait porter une attention un petit peu plus particulière. Et, si nécessaire, effectivement, pour pas qu'il y ait une mauvaise interprétation de ces articles-là puisqu'on les soumet à la Loi sur les compétences municipales, il y aurait peut-être lieu, à ce moment-là, d'être plus spécifiques dans le cas de ces articles-là. Mais je laisse ça à la discrétion du ministre, parce qu'effectivement, moi aussi, en vous entendant, je me disais: Bien, l'article 19.5° auquel vous référez actuellement existe déjà dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, ça existe déjà. Par contre, comme la Loi sur les compétences municipales a permis des interprétations larges, je comprends que, dans le cas de ces trois articles-là, qui sont soumis à la Loi sur les compétences municipales, ou du moins qui y font référence, pourraient être interprétées différemment et peut-être pas, mais, disons que j'apporte le point, moi aussi, au ministre, pour dire: Bien, je vous entends bien, là, sur cette préoccupation-là, pour pas qu'on en fasse une mauvaise interprétation ou une interprétation plus large puisqu'on l'autorise dans le projet de loi.

Alors, ce serait peut-être les seuls points que je soulève, là... parce que, évidemment, je suis un peu dans le même avis que le ministre: cette loi-là n'a pas pour but d'interdire la chasse, mais, comme on fait référence puis qu'il est question de sécurité, quand vient le temps d'interpréter, là, on voudrait s'assurer, effectivement, que ça ne soit pas interprété de cette façon-là, quitte à ajouter l'amendement que vous avez mentionné, à savoir que, quand on parle de sécurité publique dans ces articles-là, on ne réfère pas à la chasse, évidemment.

Alors, M. le Président, c'est...

Le Président (M. Morin): ...

M. Latraverse (Pierre): Pour nous, le principe de clarifier certains articles de la loi est important pour bien encadrer les différentes interprétations qui pourraient être faites de la loi.

Il y a quelques années, la Loi sur l'environnement ne visait pas la chasse et la pêche, mais pourtant certaines gens, dans certaines municipalités, ont décrété que les bruits excessifs causés par des armes à feu modifiaient la qualité de leur environnement. Et certaines municipalités, à cause justement que les armes à feu font un certain bruit, ont interdit la décharge d'armes à feu suite à la modification de l'environnement sonore de ces gens-là.

Et il s'agit simplement qu'une personne ou qu'un groupe de citoyens bien intentionnés, bien éduqués regardent le projet de loi, lisent et en fassent une interprétation et arrivent à leur conseil municipal et disent: Nous, en vertu de la Loi sur l'aménagement du territoire, nous croyons que, notre sécurité, elle est perturbée par le fait qu'il y a de la chasse avec des arcs ou avec des arbalètes à 100 m ou 200 m ou 300 m de notre demeure, ou encore une décharge d'arme à feu à quelque 100 m de ma demeure, même si c'est un fusil. Et on sait tous qu'un fusil ça va à 50 m, mais que ça a un son qui porte très loin. Donc, ces interprétations-là partent de mauvaise connaissance de ce qu'est la chasse... peut apporter des interprétations qui sont très préjudiciables.

Et présentement, lorsqu'on va dans différents forums et qu'on demande que les activités de chasse, les activités de pêche soient maintenues dans un certain environnement municipalisé, on est reçus quelques fois de façon assez cavalière. Et, si vous prenez certains exemples, présentement, où plusieurs gens retournent à la campagne, qui ont vécu en ville, et, à ce moment-là, la première chose qu'ils font, c'est qu'ils font des demandes pour justement qu'il n'y ait pas de son l'automne, qu'il n'y ait pas de flèches, que ce soient des arcs ou des arbalètes, ou qu'il y ait de la chasse près de leurs propriétés.

Pourtant, la chasse maintient un équilibre des populations et fait en sorte que les populations de certains types comme le chevreuil causent moins d'accidents. Parce que, si les municipalités interdisent la décharge d'arme à feu ou encore la décharge d'arc ou d'arbalète puis qu'il y a plus de chevreuils, ça va coûter plus cher au régime de l'assurance maladie, ça va coûter plus cher à la SAAQ, ça va coûter plus cher à toute la province.

Il y a un équilibre à préserver, et nous sommes conscients que 70 % des activités de prélèvement faunique se font dans les territoires municipalisés du Québec, et, la plupart du temps, dans le sud du Québec. Et, comme on le dit dans notre mémoire, dans le sud du Québec, il y a beaucoup de nourriture, les hivers sont plus doux, les populations sont abondantes et elles causent de plus en plus de dommages. On a rien qu'à penser à la grande oie des neiges: combien d'argent le gouvernement donne pour l'assurance récolte, pour préserver les dommages que cause la grande oie des neiges? Et certains cas, certaines municipalités et même certains agriculteurs empêchent les gens d'aller chasser pour la chasse à la grande oie des neiges. Donc, il y a comme une certaine incohérence en quelque part, là-dedans.

Le Président (M. Morin): M. le député de Masson, vous voulez intervenir? Oui, c'est vous, M. le député de Blainville.

M. Ratthé: Oui. Pardon, M. le Président.

Le Président (M. Morin): Allez!

**(16 h 50)**

M. Ratthé: Non, écoutez, je pense que votre point a été bien fait. On comprend tous, ici, votre préoccupation, qui est légitime, effectivement. Comme fédération, je pense, M. le ministre le demandait tout à l'heure, mais je n'ai pas saisi, je ne pense que vous ayez... Est-ce que vous avez été en mesure d'identifier le nombre de municipalités, par exemple, qui se sont servies de cette interprétation-là de la loi?

Et ma deuxième question par rapport à ça aussi: Est-ce que la fédération a tenté de contester ces règlements municipaux là en disant qu'on en fait justement une interprétation qui n'est pas celle qui devrait être la bonne interprétation? Est-ce que vous avez pris des recours? Est-ce que vous avez tenté de contester les lois ou, du moins, de façon plus cordiale, faire des représentations auprès des municipalités pour les sensibiliser? Les arguments que vous m'apportez aujourd'hui m'apparaissent très bons. Donc, quel travail la fédération a fait, autant au niveau de faire la promotion de ce que vous nous dites aujourd'hui et de la contestation de règlements, peut-être, qui vous semblent abusifs?

Le Président (M. Morin): Je présume que, M. Cossette, c'est vous qui allez répondre?

M. Cossette (Alain): Oui, exactement. Dans ce cadre-ci, juste pour faire un peu le préambule, voilà une dizaine d'années, on a dressé, à la fédération, le portrait de ce qui se passait comme loi en milieu municipalisé, et on appelé ça notre pizza «all-dressed» parce qu'il n'y a pas une place que la réglementation municipale était pareille.

Pour aller chercher l'information, nous avons dû contacter le milieu municipal à trois reprises, et on n'a pas reçu l'information, par le milieu municipal, au complet. On en a eu assez pour dresser un bon portrait de la carte du Québec, et c'est ce que nous avons fait. Nous avons poursuivi, lorsque vous parlez, à cet effet-là, avec le ministère, et présentement le ministère des Ressources naturelles et le MAMROT sont en discussion pour regarder ce qui se passe avec l'aide. Le ministère veut redresser le portrait qu'on avait fait pour l'actualiser. Et, afin d'avoir moins de barrières pour aller chercher le plus de données possible, c'est supposé être travaillé avec les fonctionnaires du ministère -- du MAMROT -- qui, eux autres, vont dire à leurs municipalités: Répondez. Le ministère vont colliger l'information.

Mais le problème qui survient, c'est que ça change continuellement. C'est là que ça devient lourd. Une municipalité, elle arrive, les chasseurs ne sont pas là, un citoyen se présente dans la salle: Ah! Moi, je suis tanné du bruit et j'entends des coups de feu, je n'aime pas ça, j'ai peur. C'est de la méconnaissance. Là, le citoyen... la municipalité, il y a une bonne écoute. O.K., on passe une réglementation, tout d'un coup, pour découvrir...

Le bel exemple que je vais vous donner: Lévis, à côté. Ils ont mis en place une réglementation qui interdisait la décharge d'arme à feu à 1,5 km, c'est ça, 1,5, 2 km... 3 km -- excuse, oui, eux autres, c'est 3, eux autres -- 3 km de toute habitation que plus personne ne pouvait chasser. Vous rendez-vous compte? Mais, quand ils ont passé la réglementation au niveau municipal, ils disaient: Aïe! pas de problème. Mais là ils se sont rendu compte par après que, là, ils venaient de créer des incidences et des problématiques, parce qu'il y avait des dommages à des terres, soit par l'oie, soit par le cerf de Virginie. Il y avait des accidents aussi dans certains endroits, et ça s'est rétabli. Mais ça, c'est des processus qui sont longs, là. Ça, ça n'a pas pris une semaine, ça a pris des mois.

Et là, quand je vous parle de ça, c'est que nos gens, c'est des bénévoles sur le terrain. Ça fait que, dans une municipalité, ça peut jouer au yo-yo, là. Ça peut venir une année, O.K., l'autre conseil municipal se rend compte que ça n'avait pas de bon sens, ils remettent ça en place. Là, ils reviennent à un autre, puis ça repart. Ça n'a plus de fin. Ça n'a plus de fin. On n'est plus capables de suivre. Nos bénévoles sont épuisés. On n'est pas capables de suivre ça au nombre de municipalités qu'on a au Québec. Puis on l'apprend souvent par hasard, ou quand quelqu'un reçoit un ticket d'une police qui dit: Tu n'as pas le droit. Mais c'est là qui est une grande problématique. Ici, nous autres, qu'est-ce qu'on dit: Faites donc de la prévention. On a la chance, aujourd'hui, de vous informer. Vous avez la chance de jouer un rôle de législateurs. Donc, à partir de là, pour nous autres, c'est important que vous mettiez en place ce principe-là, pour que les gens le sachent, puis que le monde municipal l'utilise quand c'est le temps. Ça, c'est la portion pour la chasse.

Au niveau du schéma d'aménagement, il y a un problème qui se produit, de plus en plus grand, pour l'accessibilité aux plans d'eau. C'est important que les municipalités fassent tout en leur possible pour maintenir cette accessibilité-là à l'ensemble des Québécois; c'est un bien qui nous appartient à tous, nous autres, les Québécois. Donc, c'est important d'en parler ici, aujourd'hui, de le mettre...

On a parlé de chasse, mais aussi on veut parler de pêche, aussi. Les problèmes s'en viennent de plus en plus criants. On privatise... Je vous le dis, là, ce n'est pas une farce. Et les municipalités devraient avoir une forme d'encadrement pour les aider, pour pouvoir donner plus d'accès aux gens lorsque les lacs sont enclavés, puis ceux qui ne sont pas enclavés, de s'assurer que vous leur donnez des normes. Charger 500 $ pour mettre un bateau à l'eau pour une journée, je ne pense pas que c'est quelque chose qui est raisonnable. Qu'on charge un montant, un 10 $ pour mettre un bateau à l'eau, pendant une journée, ça, on pense que c'est raisonnable.

Donc, à partir de là, vu qu'il y a exagération à plusieurs endroits, je pense qu'il faut mettre des normes et normer en conséquence, encadrer ces activités-là et de s'assurer que, dans le monde municipal, on va vouloir donner de l'accessibilité à ces plans d'eau là. Pour nous autres, c'est important, et on a la chance, aujourd'hui, de s'exprimer et vous avez la chance de jouer votre rôle de législateurs là-dessus.

Le Président (M. Morin): On entend bien, M. Cossette. M. le député de Blainville.

M. Ratthé: Bien, non, parce que ça fait le tour. Puis, écoutez, votre message est entendu. Je pense qu'on a tous une volonté... J'entendais le ministre, tantôt, dire: Oui, il faut s'assurer effectivement que les lois qu'on met en place ne viennent pas nuire ou être... j'allais dire plutôt, ne soient pas interprétées dans un sens autre que celui que le législateur entend le faire. Et je vous remercie beaucoup de nous avoir sensibilisés à ces deux problématiques-là, donc la chasse et la pêche, et, on va sûrement, en tout cas, nous, voir comment on pourrait en faire tenir compte. Et ce que j'ai entendu du ministre aussi, là, c'est qu'il avait l'intention aussi de s'assurer que cette loi-là ne soit pas interprétée d'une façon pour laquelle elle n'a pas été conçue. Merci, messieurs, de votre présentation.

Le Président (M. Morin): Ça vous va? Merci beaucoup, MM. Latraverse, Cossette et Baril.

Des voix: Merci.

Le Président (M. Morin): Bon retour chez vous.

J'inviterais maintenant le Caucus des cités régionales de l'Union des municipalités du Québec à se préparer.

Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 56)

 

(Reprise à 16 h 59)

Le Président (M. Morin): Nous reprenons nos travaux. Nous recevons, comme je l'ai dit tout à l'heure, le Caucus des cités régionales de l'Union des municipalités du Québec. J'inviterais le porte-parole à se présenter à nous, et je peux vous dire que vous êtes le dernier pour aujourd'hui, mais nous sommes en pleine forme pour vous écouter. Allez-y, mon cher monsieur.

Caucus des cités régionales de l'Union
des municipalités du Québec

M. Berthold (Luc): J'espère bien, M. le Président, que vous êtes en pleine forme. En tout cas, nous, on est en pleine forme pour présenter le fruit de notre travail. On a passé beaucoup de temps à préparer ce mémoire-là.

Je suis Luc Berthold, président du Caucus des cités régionales et maire de Thetford Mines. Je suis accompagné par Mme Vicki May Hamm, mairesse de la cité régionale de Magog, et par M. Martin Lessard, directeur général de la cité régionale de Victoriaville. Donc, ça nous fait plaisir, M. le Président, d'être là. M. le ministre, Mmes, MM. les députés, merci beaucoup de nous recevoir.

Je suis heureux, à titre du président du Caucus des cités régionales... -- madame, oui, il y en a juste une, mais ça me fait plaisir quand même -- ça me fait plaisir, à titre de président du Caucus des cités régionales, de prendre part à la consultation sur l'avant-projet de loi.

**(17 heures)**

Le Caucus des cités régionales, peut-être pour situer les députés qui n'auraient pas encore entendu parler de notre caucus, je vais vous expliquer un peu ce que l'on est pour que vous puissiez après ça comprendre mieux la position que l'on défend. C'est 26 municipalités de taille moyenne dans toutes les régions du Québec. On compte, dans nos territoires municipaux, près de 1 million de citoyens et citoyennes partout sur le territoire du Québec. Une cité régionale, c'est quoi? C'est une ville d'agglomération au coeur des régions du Québec. Il y a 75 % des citoyens des MRC qui comptent une cité régionale qui sont des citoyens des cités régionales. Donc, on joue un rôle très majeur au niveau des différentes MRC où nos cités régionales sont situées.

On a comme caractéristiques communes de réunir les services de santé, d'éducation supérieure, les médias, les entreprises de service et de plus en plus des lieux de recherche et d'innovation. À notre échelle, pour nos MRC, les cités régionales, puis c'est un peu... on joue le même rôle que les grandes villes au Québec, que ce soit dans les domaines du transport, du logement social, de l'entretien des infrastructures, de la sécurité publique, du vieillissement de la population, des loisirs, de la culture et, évidemment, du développement économique.

Pour encore être plus précis, pour que vous sachiez si vous représentez une cité régionale, permettez-moi de vous nommer les cités régionales du Québec. Ça ne sera pas trop long, mais je pense que c'est important. Il y a les villes... les cités régionales d'Amos, Alma, Baie-Comeau, Cowansville, Dolbeau-Mistassini, Drummondville, Granby, Joliette, La Tuque, Lachute, Magog, Matane, Rimouski, la ville de notre président de notre union, Rivière-du-Loup, Rouyn-Noranda, Saint-Georges-de-Beauce, Saint-Hyacinthe, Saint-Jean-sur-Richelieu, Saint-Jérôme, Salaberry-de-Valleyfield, Sept-Îles, Shawinigan, Sorel-Tracy, Thetford Mines, Val-d'Or et Victoriaville. Donc, je suis persuadé que vous avez trouvé, dans cette liste-là, une ville à laquelle vous pouvez vous rattacher ou à tout le moins que vous connaissez, vous avez passé d'agréables moments dans ces villes-là.

M. le ministre, nous tenons d'entrée de jeu à vous saluer pour votre volonté de vous attaquer à cette tour de Babel qu'est la réforme de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Je dois vous avouer que depuis mon élection comme maire, quand il est question de schémas d'aménagement dans les MRC, ça prend beaucoup de temps à comprendre, puis ça prend encore plus de temps procéder à la révision d'un schéma. Donc, je peux, en mon nom personnel puis au nom des membres de notre caucus, saluer votre initiative d'avoir voulu vous attaquer à ce projet-là. Votre volonté exprimée dans le préambule du projet de loi, vous l'avez entendue souvent celle-là, nous laisse entrevoir de beaux changements dans la loi que vous présentez, dans l'avant-projet de loi. Cependant, on tient à vous faire part de quelques inquiétudes, quelques attentes que l'on a par rapport au contenu de l'avant-projet de loi.

On veut partager avec vous nos inquiétudes sur le fait que ce projet de loi là, tel qu'il est rédigé actuellement, l'avant-projet de loi, ne vous permettra pas d'atteindre les objectifs souhaités et certaines améliorations tangibles devraient être apportées pour répondre également aux attentes des élus des cités régionales. Pour vous faire part de ces attentes, je céderai la parole à ma collègue, Mme Hamm, mairesse de Magog, pour ce qui est des attentes des élus. Par la suite, M. Lessard vous fera part des attentes de nos administrateurs, parce que c'est conjointement, et les élus des cités régionales et les administrateurs, qu'on tenait absolument à présenter notre position. Donc, Mme Hamm.

Le Président (M. Morin): Mme Hamm, allez-y.

Mme Hamm (Vicki May): M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, merci de nous entendre. Donc, comme le disait M. Berthold d'entrée de jeu, je sais qu'on vous en a parlé un peu du préambule, on va vous en parler encore un petit peu. Selon nous, notre première réaction à la lecture de cet avant-projet de loi là, c'est que le préambule reflète clairement une volonté politique de reconnaître le rôle des élus municipaux, d'augmenter leur pouvoir en matière de règlement en urbanisme.

Comme le disait le ministre dans ses remarques préliminaires, le préambule campe également les enjeux majeurs. Donc, on parle de règlements innovants, de moins de lourdeur, de moins de paperasse, de plus d'efficacité. Nous ne pouvons que nous en réjouir et avons le sentiment que le gouvernement du Québec comprend les défis des élus municipaux et reconnaît les besoins de ceux-ci qui font de la planification et du développement au quotidien. Toutefois, nous croyons que cette position exprimée dans le préambule ne reflète pas les articles de loi.

Heureusement, il s'agit d'un avant-projet de loi, donc des changements importants peuvent être apportés afin de moderniser cet outil qui encadre la fonction d'élu municipal. Le projet de loi doit, à notre avis, traduire concrètement la volonté du gouvernement du Québec de renforcer le rôle des élus municipaux. Dans ce sens, on ne va pas s'attarder dans les détails des libellés mais plus parler de quatre grands enjeux, là, qui émanent de nos recommandations. Donc, on va vous entretenir un petit peu du partage du pouvoir, du rôle des professionnels, du développement économique et évidemment de la participation citoyenne.

Donc, tout d'abord, concernant le pouvoir des élus municipaux versus les pouvoirs discrétionnaires du ministre, nous croyons que ceux-ci doivent s'exercer dans le respect des rôles et responsabilités dévolus aux différents acteurs du territoire. En fait, c'est vrai qu'il est naturel et normal que le ministre conserve des pouvoirs discrétionnaires, cependant ceux-ci doivent s'exercer en respect des pouvoirs de chacun, spécialement des élus municipaux qui sont également imputables -- on se parle entre élus, là -- face à la population, ce pouvoir devant porter davantage sur les orientations du gouvernement que sur les façons de faire des municipalités.

Également, concernant le rôle des professionnels, on sent, dans l'avant-projet de loi, une tendance à augmenter le recours à des ressources externes, entre autres quand il est question des diagnostics. Nous, on voudrait faire reconnaître qu'à l'intérieur de nos organisations nous avons des professionnels, nous sommes encadrés, et supportés, et soutenus au quotidien. D'ailleurs, la preuve, on a apporté un professionnel avec nous. Donc, on souhaiterait que ce soit reconnu à l'intérieur du projet de loi.

Également, on s'en voudrait de ne pas parler de développement économique. Selon nous, il faut que soient consacrés dans la nouvelle loi les pouvoirs des élus municipaux en matière de développement de notre territoire. Les élus doivent créer des conditions gagnantes pour maintenir les entreprises et attirer les entreprises chez eux. Cela passe très souvent par l'aménagement du territoire. Les attentes des citoyens envers les élus municipaux à ce niveau-là, en termes de développement économique, sont très importantes, mais les outils à notre disposition sont très peu nombreux, et on souhaiterait que dans le projet de loi on reconnaisse ça puis on reconnaisse que c'est étroitement lié avec l'aménagement du territoire.

Enfin, on ne pouvait pas ne pas parler de participation citoyenne. On sait que la question des référendums, plusieurs y tiennent parce qu'ils ont peur, on croit, de perdre un droit. Mais nous, comme élus municipaux, on souhaiterait davantage qu'on parle vraiment de participation citoyenne, c'est-à-dire de participation en amont plutôt que de réaction, parce que souvent les référendums, pour en avoir vécu quelques-uns, servent à bloquer des projets, servent une minorité, puis on perd de vue l'intérêt collectif. Alors, on pense qu'on peut de façon innovante impliquer en amont les élus. Et la révision de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, pour nous, est une occasion en or pour renverser la dynamique qui oppose souvent citoyens et élus alors que ça n'a pas sa raison d'être; on peut travailler avec ces gens-là en amont.

Donc, voilà. Merci beaucoup de votre attention. Je vais céder la parole à M. Lessard.

Le Président (M. Morin): M. Lessard.

M. Lessard (Martin): M. le Président, M. le ministre, honorables membres de cette commission, je m'adresse à vous à titre de directeur général d'une cité régionale, Victoriaville, mais aussi d'urbaniste membre de l'Ordre professionnel des urbanistes du Québec. Depuis plus de 30 ans, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme est connue comme une loi-phare qui influence le quotidien de centaines de milliers de Québécoises et de Québécois tout autant que celui de milliers d'élus qui siègent sur les conseils de nos municipalités, et ce, sans parler de tous les professionnels qui oeuvrent chaque jour en tenant compte des paramètres imposés par cette loi.

Alors que le gouvernement du Québec adoptait en 2005 la Loi sur les compétences municipales qui est un modèle de souplesse et de modernité, voilà que, dans le cadre de la refonte de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, on se retrouve avec un projet de loi qui ressemble davantage à un pot-pourri de propositions administratives qui ont été accumulées au fil des années et qui visent à pallier à des faiblesses, à tout le moins du point de vue gouvernemental, de la loi actuelle, et ce, sans véritable profondeur, sans véritable vision. Pourtant, les intentions annoncées par le ministre allaient exactement dans le sens d'un changement visant à donner à cette loi une deuxième vie qui allait consacrer le rôle des municipalités en cette matière et simplifier les façons de faire. Mais, au contraire, alors que ce projet de loi devait consacrer le pouvoir aux élus locaux en matière d'aménagement et de développement, on y additionne les mesures de contrôle direct de l'État sur le monde municipal; alors que ce projet de loi devait favoriser l'autonomie locale et régionale, on y additionne les mesures venant contraindre encore plus les municipalités dans leur manière de gérer leur développement au quotidien.

J'ouvre une parenthèse ici, et vous constaterez que je parle souvent de «développement» à défaut seulement d'utiliser le mot «aménagement». C'est qu'il faut connaître le monde municipal pour comprendre qu'on ne peut dissocier l'aménagement du développement du territoire. Or, ce projet de loi est complètement venu occulter cette notion de développement économique, alors que, tel que je l'ai mentionné, ces deux notions sont indissociables.

Alors que ce projet de loi devait faire du développement durable un principe transversal, il se contente d'introduire de timides mesures de protection de l'environnement et demeure silencieux sur les aspects sociaux et économiques associés à l'aménagement et au développement. Aussi, plusieurs questions subsistent. Pourquoi n'avons-nous pas profité de la refonte de cette loi pour faire en sorte de faciliter l'arrimage entre le gouvernement et les municipalités en faisant en sorte que soient regroupées les orientations gouvernementales en matière d'aménagement? Pourquoi, si les élus locaux sont imputables de l'aménagement et du développement de leur territoire, n'avons-nous pas prévu des mécanismes qui assujettissent les organismes sectoriels ou territoriaux à une démarche de conciliation de leurs plans aux instruments locaux et régionaux d'urbanisme? Pourquoi ne pas avoir profité de l'occasion pour harmoniser la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et la Loi sur la protection du territoire agricole, maintenant deux régimes parallèles? Pourquoi ne pas assujettir le gouvernement à la loi?

En somme, mesdames et messieurs, le projet de loi sur l'aménagement qui nous est proposé manque, tant sur le plan administratif que politique, la cible qu'avait clairement identifiée le ministre.

**(17 h 10)**

Une voix: Merci beaucoup.

Le Président (M. Morin): Oui, vous avez terminé?

M. Berthold (Luc): Je peux continuer un petit peu, oui, si...

Le Président (M. Morin): Ah, bien sûr. Vous avez encore...

M. Berthold (Luc): J'ai encore un peu de temps, je crois?

Le Président (M. Morin): Il reste 3 minutes et deux tic-tacs.

M. Berthold (Luc): 3 minutes. Écoutez, je suis persuadé que tous les parlementaires ont lu notre mémoire, mais, juste pour m'en assurer, je voudrais rappeler les principales recommandations du mémoire.

C'est, premièrement, concernant le développement durable, c'est que les principes de développement durable qui réfèrent aux enjeux sociaux, économiques et environnementaux soient traduits et mis en valeur partout dans le texte de la loi; s'assurer que les planifications sectorielles ou globales des ministères ou leurs directions puissent se concilier avec les orientations d'aménagement élaborées par les municipalités; s'assurer que les pouvoirs discrétionnaires du ministre s'exercent dans le respect des rôles et responsabilités des différents acteurs territoriaux; qu'étant donné que, dans la prise de décisions et pour les soutenir dans les relations avec le milieu, les élus consultent et mandatent régulièrement des professionnels de l'aménagement du territoire, que le rôle de ces derniers soit aussi reconnu, et que le professionnalisme et que l'expérience des municipalités soient aussi reconnus par la loi; en respect du pouvoir et des responsabilités dévolus aux élus municipaux, s'assurer que, pour entrer en vigueur, tout plan sectoriel d'aménagement ou de développement du territoire doive faire l'objet d'un avis de conformité, soit au plan métropolitain ou au schéma d'aménagement et de développement; étant donné que les notions de développement économique et d'aménagement du territoire sont indissociables, confirmer le rôle des élus municipaux en matière de développement économique; de laisser aux élus le soin de déterminer quels types de documents de support sont nécessaires en soutien aux démarches de consultation et de décision; de réintroduire l'obligation de l'État d'être assujetti à la loi; de conjuguer à une participation citoyenne en amont de la prise de décision pour permettre aux élus de pouvoir juger de l'opportunité d'un référendum dans le cas de projets structurants ou de sites stratégiques; et prévoir que les orientations gouvernementales soient consolidées et regroupées pour aider le travail des élus municipaux.

En terminant, M. le ministre et les membres de la commission, je tiens à vous rassurer sur un point: les élus des cités régionales ne sont pas seuls pour assurer la saine gestion de leur territoire. On peut compter sur des professionnels de l'urbanisme qui connaissent leur métier et qui ont autant à coeur le développement du Québec que tous les spécialistes de toutes les firmes qui peuvent exister au Québec ou de tous les ministères. Ils ont, en plus, la connaissance fine de leur territoire et surtout ils connaissent le terrain dont ils ont la charge de l'aménagement. Si nous, comme élus municipaux, leur faisons confiance pour nous guider, alors vous, les élus en charge de fixer les balises, vous pouvez nous faire confiance dans la gestion et l'aménagement de nos municipalités et de nos MRC. Merci beaucoup.

Le Président (M. Morin): Merci, M. Berthold. Vous m'avez facilité le travail, vous êtes rentré dans votre temps. Donc, M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Alors, oui, merci beaucoup à la présentation que font les cités régionales puis aux maires, mon maire de ma municipalité, où il y a tout le temps un petit côté, je dirais, «homer», donc je veux saluer mon maire avant tout et son leadership, premièrement, de s'impliquer dans les cités régionales que sont les municipalités comme Magog. Je tiens à saluer la mairesse de Magog. J'ai eu l'occasion, dans le temps, de travailler avec le maire avant, alors donc je veux vous saluer. Et je les ai pris à comploter à Thetford Mines en train d'organiser leur présentation d'aujourd'hui. Alors, je leur ai laissé un petit peu de chance de jaser entre eux autres.

M. Lessard, là, du côté de Victoriaville, je veux souligner, juste d'entrée de jeu, j'ai vu l'affiche de développement durable de Victoriaville sur l'autoroute 20. C'est quand même important puis c'est tous les concepts que ça transcende un peu, donc, comme la Loi sur l'aménagement. Donc, l'aménagement de Victoriaville, comme les autres cités régionales, ça change quelque chose dans la vie des citoyens; c'est un peu l'objectif qu'on vise. Et quand même que vous annoncez que, bon, c'est une bonne intention de modifier la loi, on comprend que l'écriture de la loi puis du préambule, il y a un décalage, et on l'avait affirmé dès l'entrée de jeu.

Parce qu'il y a plusieurs années les municipalités, les deux unions municipales, ville de Québec, ville de Montréal, ont travaillé sur la réécriture de la loi dans un contexte politique qui n'avait pas changé. À partir de 2010, on a essayé de donner une signature plus moderne, plus engageante, moins de paperasse de l'État, etc., donc dans le but de réduire les délais puis être capable, aux municipalités, de donner plus de latitude. Ce n'est pas de la décentralisation, c'est une meilleure opérationalisation des opérations quand on veut changer les règlements, répondre à la population, être capable de s'adapter. On a un objectif de réduire de 35 %. Puis on veut faire un tableau nous autres aussi pour être capable, avec les partenaires, de le dire, ce qui fait que c'est vrai qu'il y a un décalage entre l'écriture telle qu'on la connaissait, avec les partenaires puis vos aménagistes urbanistes, et ce qui est présenté. Mais, comme on veut aller de l'avant, c'est pour ça qu'on a déposé un avant-projet de loi, pour être capable de dire aux unions: Voici le préambule, c'est ce qu'on veut faire. Et là on va s'assurer que, dans l'écriture juridique, il y a un processus continu, malgré nos consultations, et, à l'occasion de nos consultations avec les comités techniques, de réécrire... je veux dire, c'est vraiment ça qu'on voulait dire, et tous les commentaires qui sont appelés ou donnés, comme vous autres aujourd'hui, ça nous aide à la rédaction de la loi.

Donc, je ne prends pas ça sévèrement. On l'avait dit d'entrée de jeu, il y a un effort à faire. Il faut être un peu ambitieux, quand même, pour changer cette loi-là, là, qui est une loi, quand même, qui vient contraindre puis qui a 25 ans d'âge, 30 ans d'âge. On est dus pour une nouvelle génération. D'ailleurs, quand une ville est rendue à inscrire que c'est une ville de développement durable, ce n'est plus «Bienvenue, parc industriel», là, c'est vraiment «développement durable», donc la population est dans le coup, l'économique, l'environnement. Puis j'entends votre discours, là, du côté de Magog aussi. Mon maire m'en a souvent parlé, on ne parle pas souvent de la... c'est de l'économique, la Fédération des chambres de commerce en a parlé tantôt. On va réajuster le tir dans la loi. Parce que c'est vrai qu'on a fait la politique de consultation et d'information, ça paraît bien que le citoyen est au coeur de la décision aussi, mais l'aspect économique apparaît moins dans plusieurs déclinaisons. Et souvent, quand on voulait dire «environnement», c'est aussi «environnement économique». Alors, pas seulement le terme «environnement» pris sévèrement.

Concernant maintenant le texte de loi, le libellé, c'est vrai que le pouvoir discrétionnaire du ministre, quand on travaillait avec les unions, on disait: Bien, il me semble qu'il a plein de pouvoirs partout. Donc, on laisse plus de latitude, mais, à quelque part, on a dit: Bon, c'est un pouvoir partagé, donc, à quelque part, le mot «ministre» doit réapparaître, là, à quelque part. Qu'est-ce qu'il fait à la fin? Il fait-u rien que recevoir le document ou s'il a quelque chose à dire? On essaiera de préciser ça, pourquoi... ses objets à lui, le ministre, en fonction de la planification du gouvernement. Donc, je pense que ça, c'est nécessaire de le redire. On essaie de limiter... de l'encadrer par rapport à sa fonction ministérielle, non pas par rapport à la décision politique que prend la région lorsqu'elle est à l'intérieur de sa juridiction puis sa compétence. Je pense que c'est nécessaire de le répéter.

L'autre, quant aux professionnels des municipalités, bien, vous avez entendu la commission, il n'y a pas un urbaniste, puis pas un aménagiste, puis un agronome qui n'est pas venu me dire que, dans la loi, il fallait préciser que c'est eux autres, les professionnels, alors que, non, on va laisser plutôt aux professionnels et à la compétence qui est exercée... On n'est pas en train de changer la loi... l'ordre sur les professions, le Code des professions. Donc, je veux rien que vous dire, à tout le monde qui sont passés, là, je les ai un peu déçus, mais c'est pour leur dire que, non, la loi ne viendra pas préciser c'est qui, le professionnel. Alors donc, ils sont repartis un petit peu avec ça.

Participation citoyenne, je ne sais pas, peut-être j'aimerais ça vous réentendre, parce que, nécessairement, c'est un processus, parfois il y a des municipalités qui voient là une contrainte, de tout le temps mettre la population dans le coup. Mais on laisse la municipalité organiser sa consultation et son information en disant: Bien, prenez les moyens puis mettez les dans le coup pour envisager donc d'éviter une lourdeur puis que, tout le monde, ça soit égal. Puis il y en a qui sont très avancés, puis il y en a qui n'ont pas beaucoup avancé là-dessus. Donc, je vais rien que vous dire qu'on donne... on essaie de laisser la latitude possible. Parce que, des fois, c'est banalisant puis, parfois, c'est tellement contraignant que plus personne ne veut faire la consultation; ça a l'air plate, puis les citoyens ne se sentent pas interpellés.

J'ai entendu, aussi, parler... bon, l'aspect de développement durable et des mesures de contrôle. Évidemment, le développement durable, c'est exigeant. Quand on embrasse tout le développement durable, c'est qu'on s'expose à avoir des critères, d'avoir à se mesurer, est-ce qu'on fait du monitoring, puis là, souvent, quand tu t'évalues toi-même, est-ce que ça avance avec tes objectifs. Là, la question, est-ce que la population doit savoir si tu as avancé ou tu as reculé, l'impression que tu caches quelque chose, j'ai entendu ça aussi. On va essayer de trouver l'équilibre entre on a des critères puis pourquoi on change la loi. Parce que vous avez vu que la loi ne change pas automatiquement, ce n'est pas une obligation aux cinq ans. Si tu as atteint tes objectifs, tu changes, tu le dis à ta population: Voici les nouveaux objectifs qu'on veut atteindre. Alors, ça, c'est quelque chose donc qu'il faut se donner, des mesures de contrôle pour la municipalité dans sa prise de décision.

**(17 h 20)**

Concernant maintenant le... Ça a l'air d'un fourretout, mais j'ai entendu des arguments que j'aime reprendre, là. Bon, oui, le gouvernement est assujetti aux objectifs, mais est-ce qu'il a la primauté du schéma sur toutes les planifications? La réponse, c'est non. La Loi sur la protection du territoire demeure la Loi sur la protection du territoire -- j'espère d'y faire des avancées, comme on a pu faire une avancée dans la Loi sur les mines -- elle se met des arrimages, puis tout n'est pas la même échelle de planification. Ceux qui planifient la forêt ne sont pas à la même échelle que le zonage... qu'on peut l'avoir dans nos schémas d'aménagement; la gestion de bassins versants, c'est la même chose. On doit en tenir compte. Ils doivent en tenir compte aussi, de notre démarche, comme on tient compte de la planification, mais, non, le schéma n'a pas la primauté sur toutes, toutes les planifications. Alors donc, c'est plutôt: chacun doit en tenir compte. Mais on a fait une espèce d'arrimage où on est en train de proposer quelque chose qui va dans le sens que vous indiquez. Grosso modo, c'est ce qu'on est en train de travailler actuellement.

Alors, j'aimerais peut-être aussi vous entendre sur... parce qu'on a entendu du monde qui disait: Bien, la démocratie directe, là... Il y a un groupe qui est venu dire: On devrait vous dire, aux élus qui ne comprennent rien, là, on va vous dire comment ça marche, puis on pognera le bon conseil. Donc, une espèce de démocratie directe. Ça existe au États-Unis. Il y a des propositions qui sont déposées, puis ça dit au conseil: Voici ce pourquoi vous allez réglementer, et ça prendra une super majorité pour battre ça ou pour le faire, etc. On n'en est pas là, hein? On n'en est pas à la démocratie directe. Ici, on est à essayer de trouver l'équilibre entre un référendum, ce qui le déclenche, puis pas de référendum et des zones où est-ce qu'on pourrait s'affranchir des référendums.

Là, j'aimerais... Parce que vous en vivez, des réalités, là. Donc, en dehors des grandes villes, là, c'est des cités régionales, c'est exactement le bon... Par exemple, vous avez de l'agricole, vous avez du rural, vous avez de l'urbain, vous représentez, à trois, là, exactement le portrait typique du Québec, là, dans toutes ses facettes. Vous vivez la centralité, vous vivez la densification et les problèmes très urbains mais aussi en même temps très ruraux parce que vous avez des vastes territoires. J'aimerais ça vous entendre sur ces réalités-là, sur l'affranchissement. Est-ce que c'est un bon outil ou ce n'est pas nécessaire? On pourrait-u s'en sortir autrement? Je pense que vous avez des idées là-dessus.

Le Président (M. Morin): M. Berthold.

M. Berthold (Luc): Bien, je veux juste mentionner que j'apprécie beaucoup le processus d'une consultation sur un avant-projet de loi. Pour moi, c'est un grand «brainstorming» où on peut justement échanger avec les parlementaires sur ce qu'on souhaite. Et on n'a pas nécessairement toutes les réponses mais on peut soulever des problématiques pour amener des gens à y réfléchir.

Premièrement, juste deux ou trois petites précisions, par rapport aux professionnels de l'urbanisme, nous aussi on a pris connaissance des revendications des professionnels de l'urbanisme et on ne se prononce pas sur cette question-là. Ce qu'on dit au gouvernement, c'est que nous embauchons des professionnels, donc nous faisons en sorte d'avoir l'expertise nécessaire pour être capables de mener à bien les mandats que vous nous donnez. Toutes les villes, aujourd'hui, ont des professionnels de l'urbanisme, toutes les cités régionales, ce qui n'était peut-être pas le cas au début, quand on a mis en place les MRC puis les schémas d'aménagement, mais le tout a évolué. Maintenant, nous sommes outillés pour faire les travaux d'aménagement à l'échelle locale. Et c'est la reconnaissance de notre professionnalisme, entre guillemets, comme municipalités qu'on souhaite faire reconnaître, ce n'est pas le... on n'embarque pas dans le débat par rapport aux ordres nous non plus. On a chez nous des gens qui sont capables puis qui connaissent le métier.

Par rapport à s'assurer de... les différents projets, soit qu'on parle de bassin versant, de Loi de protection du territoire agricole, ce qu'on souhaite, c'est un meilleur arrimage. C'est qu'il n'y a de processus qui fait en sorte qu'un est obligé de consulter l'autre ou avoir l'avis de l'autre. Donc, c'est des silos en ce moment dans ces différentes étapes là d'aménagement. Puis, ce qu'on souhaite, c'est d'être en mesure de donner un avis comme quoi les différents plans d'aménagement qui émanent soit de la Faune, soit du côté agricole, soit du côté des organismes de bassin versant, qu'ils demandent un avis pour voir est-ce qu'ils sont conformes à notre schéma d'aménagement pour qu'on puisse voir venir les coups avant qu'ils ne se produisent, avant qu'on ne se retrouve devant des directions diamétralement opposées.

On n'est pas du tout d'accord non plus pour une démocratie directe. Je pense que ce n'est pas pour ça qu'on a été élus puis qu'on passe des périodes électorales à tous les quatre ans. On a la démocratie directe à tous les quatre ans, c'est que les gens choisissent leurs représentants et, pendant ces quatre années-là, on estime que les gens nous ont donné le mandat de justement gérer leurs territoires puis gérer leurs dossiers. Ce qu'on souhaite au niveau de la consultation citoyenne, c'est d'être en mesure d'intégrer et d'avoir la possibilité d'intégrer les citoyens plus au départ d'un projet pour faire en sorte d'être capables de juger, à un moment donné, est-ce qu'en fonction des consultations puis de la réaction des gens on peut passer l'étape du référendum. Et c'est là qu'est le défi, et c'est là qu'on demande au gouvernement d'être innovant par rapport aux fameux référendums qui permettent souvent à une poignée de citoyens opposés...

Moi, j'ai vu des citoyens d'une rue dans ma ville empêcher un développement résidentiel de l'ensemble du secteur parce que la zone contiguë entoure cette rue-là, puis ils veulent ne pas voir de résidents autour d'eux. Ils sont capables de m'empêcher de faire le développement de cette zone-là au complet parce qu'il y a deux zones, la leur et l'autre à côté, et il n'y a pas de citoyens dans l'autre zone, mais il y en a sept dans cette rue-là. Donc, les sept m'empêchent de développer un secteur au complet de la municipalité, ce qui est contraire aux intérêts collectifs de la municipalité. Sauf qu'on peut travailler avec ces citoyens-là pour établir des normes, on peut travailler avec eux pour essayer de rendre ce projet-là acceptable. Mais, en ce moment, quand bien même on voudra négocier avec eux, c'est eux qui gardent le gros bout du bâton jusqu'à la fin. C'est de cette façon-là qu'on vous demande de faire preuve... de saisir cette occasion-là pour tenter, peut-être avec nous, peut-être avec les unions, avec le caucus... On est prêts à collaborer là-dessus pour trouver une façon de faire cette participation citoyenne là un succès.

Puis, concernant le développement durable, je sais que M. Lessard voulait rajouter un élément.

Le Président (M. Morin): Un instant. M. le ministre.

M. Lessard (Frontenac): Oui, bien, juste peut-être pour revenir sur la primauté des schémas. La piste qu'on envisage... Nécessairement, là, il y a la gestion de bassins versants. Puis là, bien, la CRE, ils ont leur planification quinquennale, puis, à un autre niveau, il y a l'aménagement de la forêt. Ce qu'on recherche, c'est peut-être de regarder dans les lois sectorielles non pas la primauté mais la réciprocité. C'est qu'ils doivent tenir compte... la gestion de bassin versant doit tenir compte du schéma d'aménagement, etc. Puis nous autres aussi, lorsqu'ils font des modifications, donc, il faudrait comme s'inviter. Mais, comme ils ne l'ont pas dans leurs lois, finalement, cet aménagement, là, on ne le retrouve pas parce que ce n'est pas du même ordre de planification. Quand on gère le bassin versant, on n'est pas, là, dans le zonage, là, c'est un autre ordre. Ça, c'est le mot.

Concernant maintenant la zone franche... vous permettrait sûrement d'atteindre peut-être un des objectifs si on vise une rénovation urbaine ou autre. C'est sûr que, si on n'est pas dans ce cadre-là puis c'est seulement un développement, là, il y a peut-être le cadre de densification qui pourrait... Mais peut-être qu'ils vont venir... les sept vont venir s'exprimer à tout le moins que vous voulez vous affranchir des référendums, mais ça donnerait un outil pour être capables de dire: Bien, ce secteur-là, on va arrêter d'allonger le tuyau, là, on est rendus là, puis, moi, je n'ai pas de problème à rallonger mon réseau si je peux développer ce territoire-là.

Je comprends qu'ils n'en veulent pas. C'est exactement ce pourquoi la zone franche arrive, c'est tous ceux qui disent qu'ils n'en veulent pas. Ils sont pour le fait de la densification, mais ils sont contre le fait que ça soit à côté de chez eux, parce qu'eux autres ils ont acheté le boisé... Tu sais, ils ont acheté la propriété, mais le boisé qu'il y a en avant, avec leurs yeux, et tout ça, c'est à eux autres, puis le lac qui est à côté, c'est à eux autres aussi, puis l'eau, le poisson qu'il y a dans le lac, c'est à eux autres aussi, puis le chevreuil qui a passé en arrière, c'est pour remplir le congélateur, c'est à eux autres aussi. Ça, là, ça existe. Ils ont acheté une paix, là, qui est épouvantable, donc que vous ne pourrez jamais développer le boisé urbain qui se situe dans la ville de Thetford, si c'est celui-là que vous faites référence.

Alors donc, on est dans des enjeux semblables parce qu'évidemment ça freine. Et tout à l'heure... Puis ils ont le droit de l'exprimer, là, d'étendre à toute la population -- ce n'est plus les zones contiguës -- à toute la population pour venir s'exprimer là-dessus, c'est exactement ce qu'on ne veut pas. Ça, ça n'arrivera pas, mais comment on peut encadrer, donner un contrepoids quand même à la population, ça, il faut quand même le faire.

Le Président (M. Morin): Oui, M. Lessard, vous vouliez intervenir tantôt, quelques moments?

M. Lessard (Martin): Si vous le permettez, M. le Président.

Le Président (M. Morin): Oui, je le permets.

**(17 h 30)**

M. Lessard (Martin): M. le ministre a mentionné un peu plus tôt qu'il fallait être ambitieux pour s'attaquer à cette loi-là et à la changer, à la moderniser. Et, en ce sens-là, je lui lève mon chapeau parce que c'est vrai, ça prenait une détermination pour s'attaquer à ce projet-là, à cette loi-là.

Je veux juste revenir une seconde sur l'idée de la primauté des schémas puis l'interaction avec les organismes sectoriels, et ainsi de suite, là. Ce qu'on dit, nous, c'est que, si on vient, par la loi, consacrer le pouvoir aux élus municipaux en matière d'aménagement du territoire, il faut trouver une façon de s'assurer que, justement, dans leur propre planification, les organismes sectoriels viennent s'arrimer à la vision et aux orientations déterminées par les élus municipaux.

Pour ce qui est du développement durable, j'entendais M. le ministre, tantôt, parler de monitoring, parler également des efforts qu'on retrouve dans la loi. Nous, ce qu'on dit, c'est que développement durable ne signifie pas seulement environnement. Pour vous exprimer ça, je vais vous donner un exemple concret qu'on a vécu récemment à Victoriaville, dans notre parc industriel. Alors, un parc industriel de 10 millions de pieds carrés à l'intérieur de notre périmètre urbain, donc qui était voué à être développé à des fins industrielles. Or, on se retrouve à un moment donné à avoir un avis du ministère de l'Environnement qui nous dit: Bien, c'est bien de valeur, mais il y a 1 million de pieds carrés dans votre parc industriel qui est de la zone... du milieu humide, alors vous allez devoir protéger le milieu humide dans le parc industriel. Pas de problème, on va protéger le milieu humide, le million de pieds carrés dans le parc industriel. Le problème que ça cause, c'est que la pression qui s'exerce après ça, la prochaine étape, c'est que je vais aller faire mon développement dans la zone agricole. Alors, on est en processus présentement à Victoriaville de dézonage en zone agricole parce qu'on nous a demandé de protéger des pieds carrés d'un point de vue environnemental. On n'est pas venus tenir compte de l'aspect économique, on n'est pas venus tenir compte également de l'aspect de l'impact social qu'avait cette requête-là de protéger ce milieu humide là.

Je tiens aussi à profiter de l'occasion pour mentionner... M. le ministre le disait, référait au fait qu'on souhaitait avoir un État moins paperasse, essayer d'éviter les lourdeurs et ainsi de suite. Et on est arrivés un petit peu plus tôt à cette commission parlementaire là aujourd'hui pour assister. Dans mon cas, c'était une première expérience, ça me permettait de voir comment ça se déroulait. Dans les 40 minutes où on a été là un petit peu plus tôt, j'ai entendu à la fois M. le ministre parler, à un moment donné, de l'aridité et du caractère technique de l'avant-projet de loi puis j'ai entendu un député de l'opposition faire la même chose en parlant du caractère très technique de l'avant-projet de loi. Or, il me semble qu'on avait recherché, depuis le début, puis je l'ai lu dans les propos aussi, à un moment donné, qu'on a entendus, qui venaient du ministre, du gouvernement, des intervenants du gouvernement, qu'on cherchait à simplifier les procédures, simplifier les choses, et c'est en ce sens-là qu'on référait à: Pourquoi ne pas s'être servis ou s'être inspirés de la Loi sur les compétences municipales qui, elle, à tous égards, est beaucoup plus simple et beaucoup plus moderne?

Le Président (M. Morin): M. le ministre, vous réagissez?

M. Lessard (Frontenac): Je reçois un courriel de mon spécialiste à côté, là, qui pourrait peut-être répondre, évidemment si vous lui donnez la chance.

Le Président (M. Morin): Est-ce qu'il y a consentement? Oui. Voulez-vous vous identifier?

M. Boivin (Jacques): Jacques Boivin. Merci, M. le Président. Autant que faire se peut, on a allégé les procédures. Premier facteur à tenir compte, c'est les structures municipales et le principe de hiérarchie. Quand vous regardez le texte de loi, ce qui est important de noter, c'est qu'il reste qu'il y a un cadre minimal à tenir pour établir les rapports qui existent entre les différents paliers, et c'est ça qui rend l'aspect mécanique. Quand on parle d'une Loi sur les compétences municipales, c'est une loi qui est attributive de pouvoirs dans un ordre général. Et, si vous regardez bien le texte de loi, on retrouve cet esprit-là dans le cadre des pouvoirs réglementaires. Mais, si on parle strictement du cadre mécanique et des structures, alors là on essaie autant que possible de le faire. Mais il reste qu'on va garder malgré tout une certaine mécanique pour les transmissions, les documents. Puis tenez compte du fait qu'au Québec il y a les communautés métropolitaines, il y a les MRC, il y a les conseils d'agglomération sur un territoire, il y a la municipalité locale et il y a le cadre réglementaire. Ce qui fait que, tous ces éléments-là pris ensemble, il y a toute une mécanique qui se décline entre eux. Et donc ça, oui, on essaie de faire ce qui est possible, mais il y a des limites, et c'est ces limites-là qu'on a atteintes.

M. Lessard (Frontenac): Oui. Donc, en clair ça reste compliqué parce qu'on a les ordres de planification. Honnêtement, il n'y a pas de rupture entre le passé. On a regardé les lois les plus modernes aux États-Unis, en Angleterre, on s'est inspirés des meilleures pratiques. En Angleterre, vous avez vu qu'on n'a pas choisi de judiciariser. Il y a des allégements dans d'autres législations, mais ce qu'ils proposent en contrepartie, c'est de déjudiciariser les décisions politiques en créant des bans spécialisés, comme en Ontario. Donc, ils jugent sur l'opportunité politique. Et là, bien oui, c'est bien souple d'un bord, mais, de l'autre bord, tu te retrouves tout le temps devant les tribunaux.

On a gardé cette gymnastique-là parce que ça semble encore la plus moderne, donc il n'y a pas de rupture avec le passé qui avait été adoptée. La mécanique, on s'est donné quand même un objectif de 35 % de réduction de paperasse puis de documents. Tu sais, quand vous avez fait la consultation puis que le document, il était exactement identique sauf à la page 29, envoyez-moi rien que la page 29, envoyez-moi pas tout le document, etc. Donc, y a-tu des délais dans la consultation? On vous donne pleine latitude et on va déposer ces cahiers-là.

Moi, j'ai pris l'engagement, avec les unions, de dire: Voici, là où il y a des gains de réduction de paperasse vers l'État, maintenant vous allez avoir de la documentation, du monitorage pour prendre les meilleures décisions, etc., ça vous appartient, ça ne sera pas l'objet d'approbation ou de conformité de la part du gouvernement, etc., mais on veut mieux les équiper. Mais, dans ce sens-là, on va faire un effort de simplification. Il y en a un. On a rencontré plusieurs groupes, vous êtes peut-être le 20e, 23e, 24e, plusieurs sont venus nous voir, puis des spécialistes, puis des urbanistes, puis ceux qui trouvent que la loi n'est pas parfaite, mais en même temps ils disent: Sur ce côté-là, là, on peut voir qu'il y a une amélioration. Puis, avec les unions, on s'est engagés à pointer là où il y a des gains à faire. Est-ce que c'est parfait? Non, mais c'est en train de s'améliorer nettement. Et donc on veut quand même, avec tout... comment il vient de l'expliquer, à cause de la hiérarchisation des plans, il y a un certain niveau de contrôle. J'aimerais qu'il n'y ait pas de contrôle, d'une certaine façon, tout le monde est venu nous dire: Ça m'inquiète que ce soient les municipalités. Moi, ça ne m'inquiète pas, parce qu'en général les municipalités le font bien, les municipalités régionales de comté, puis en particulier, parfois, quand je regarde la nature de la réponse qu'on donne, bon, on comprend que, bien encadré, le pouvoir discrétionnaire, quand c'est limité, ça permet de viser seulement l'objet pour lequel ça dépasse, parce que souvent, le document, à 90 %, il est correct puis, à 10 %, il y a l'aménagement. Mais je veux rassurer quand même les cités régionales, parce que vous êtes très, très représentatives de ce qui se passe en général, autant dans le milieu rural que dans le milieu urbain.

Le Président (M. Morin): Je me dois de vous...

M. Lessard (Frontenac): Et je vous remercie, puis j'apprécie la présentation que vous avez faite. Il y a toujours lieu de critiquer un projet de loi, c'est mieux de le faire en avant-projet, après ça, la loi, on sera plus proche d'une réalité et ça nous force aussi d'aller au-delà d'un discours creux que...

Le Président (M. Morin): Merci...

M. Lessard (Frontenac): ...on change des beaux mots.

Le Président (M. Morin): Merci, M. le ministre. M. le député de Blainville.

M. Ratthé: Merci, M. le Président. À mon tour, Mme la mairesse de Magog, M. le maire de Thetford, M. le D.G. de Victoriaville, de vous souhaiter la bienvenue. Évidemment, écoutez, à titre de porte-parole de l'opposition en matière d'affaires municipales, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme qui a été votée sous le gouvernement de M. Lévesque, on est contents et heureux de participer à ces consultations-là et on est un petit peu dans la même veine que vous. En regardant le préambule, on aurait souhaité peut-être plus de décentralisation, si on peut le dire ainsi, je pense, même la loi actuelle souhaitait peut-être ce genre d'orientation là. Et le ministre nous l'a bien dit aujourd'hui, il ne s'agit pas d'une loi de décentralisation. Même dans l'explication de M. Boivin, on voit bien que ce n'est pas orienté de cette façon-là. Si elle était orientée davantage comme la Loi sur les compétences municipales, effectivement, ce serait déjà moins complexe, plus facile, mais ce n'est pas le... il semble en tout cas que, pour l'instant, ce ne soit pas le but de la loi. Et, quand je lisais votre mémoire, à deux ou trois endroits justement, vous parliez effectivement du rôle, du respect, en fait, des pouvoirs discrétionnaires du ministre, mais de déléguer plus de pouvoirs au niveau municipal, que ce soit, également, vous parliez en termes de plan d'urbanisme, quand on parle entre autres, ce qui est très d'actualité actuellement, est-ce qu'on va décider si on pourrait peut-être avoir un droit de regard si les gaz de schiste dans notre municipalité ou de... hein?

Et c'est intéressant une journée comme aujourd'hui, parce que vous étiez là pour une quarantaine de minutes, c'est bien, mais, nous, on était là depuis ce matin, puis on a des points de vue divergents qui viennent... nous être rapportés. Puis je pense que l'avantage du projet de loi, c'est ça, c'est qu'on peut entendre différents points de vue puis espérer pouvoir influencer la décision du ministre. Mais entre autres, sur ce point-là, sur la décentralisation, bon, d'une part, on voit bien, on se rend bien compte que cette loi-là décentralise peu de choses. D'autre part, la Fédération des chambres de commerce était un petit peu même, j'allais dire, un petit peu à l'encontre de vouloir décentraliser. Alors, eux, je pense qu'ils préfèrent beaucoup que le ministre garde ses pouvoirs étant donné que les moyens ne suivront pas. Ils sont un peu réalistes, je pense, en disant: Bien, écoutez, les moyens ne suivent pas, on connaît les budgets. Et même je vous dirais que, sur le point de vue d'avoir un droit de regard sur, par exemple, si on revient aux ressources naturelles, la Fédération des chambres de commerce, d'ailleurs, disait qu'au niveau des ressources naturelles, au niveau de l'aménagement de ce genre d'infrastructure là ça devrait relever du Québec carrément, que les municipalités n'avaient pas un droit de regard. Alors, c'est intéressant de voir de part et d'autre comment les gens voient les choses.

Donc, je crois comprendre, et je pense que, de notre côté, on vous appuie, d'une part, je crois comprendre que vous auriez souhaité avoir -- et c'est ce que vous recommandez -- plus un rôle plus prédominant à jouer, parce que vous êtes, comme on dit, près des citoyens. Et ce que je peux comprendre, c'est qu'actuellement les articles de loi, les articles qui sont inclus dans ce projet de loi là ne rejoignent pas nécessairement les objectifs que vous souhaitez.

**(17 h 40)**

M. Berthold (Luc): Disons qu'on a, en lisant le préambule, beaucoup d'attentes et qu'on souhaite que les attentes se retrouvent mieux inscrites... les réponses aux attentes mieux inscrites dans le projet de loi. Et, comme on est dans un avant-projet de loi, on a voulu vraiment saisir l'occasion pour dire: Écoutez, il y a une chance, on ne refait pas cette loi-là, comme je l'ai mentionné, pour des nouveaux élus puis des gens qui arrivent dans le domaine municipal ou encore un citoyen, une entreprise qui a à faire affaire avec des changements de zonage ou n'importe quoi. Quand j'ai qualifié ça de tour de Babel, juste lui expliquer, c'est plus long que de présenter le projet, là. Donc, c'est un peu ça qu'on a dit. On a une opportunité en or, alors pourquoi est-ce qu'on ne va pas un peu plus loin pour donner aux élus municipaux, justement, le pouvoir d'agir directement sur leur territoire. On l'a déjà, mais on souhaitait aller encore un peu plus loin.

Je vous écoutais parler de la Fédération des chambres de commerce. J'ai entendu les gens de l'industrie minière cette semaine parler des municipalités en disant qu'il y a 600 millions de projets en péril parce que les méchants maires allaient tout arrêter. Bien, écoutez, je pense que c'est la responsabilité de l'industrie de convaincre les milieux que leurs projets, c'est des bons projets pour le milieu. Et les maires, les élus municipaux, les communautés sont les mieux placés pour se faire convaincre que le projet est bon. S'il y a 600 millions de projets en péril, c'est qu'il y en a peut-être 400 millions de mauvais projets aussi, là. Tu sais, il faut se dire les vraies affaires. C'est qu'il y a des bons projets, il y a des mauvais projets, et ce n'est pas nécessairement les élus municipaux qui vont arrêter le développement économique du Québec, voyons donc!

Moi, comme maire, là, je veux que ça travaille dans ma communauté. Moi, comme maire, puis Mme Hamm de Magog, ce qu'elle veut, c'est que sa communauté se développe puis qu'il y en ait, des projets. Mais, si on nous dit qu'on va aller construire une usine de traitement d'uranium à côté de notre source d'eau potable, on va dire non. Puis c'est ça, des élus municipaux. C'est ça qu'on veut être mesure d'être capables d'appliquer sur notre territoire: notre jugement pour le bien de notre communauté. Et c'est ce qu'on dit. On est des élus, on est là justement pour représenter nos intérêts.

En matière de développement économique, je peux-tu vous dire qu'on en fait beaucoup de développement économique, les maires, un peu partout. Tous les maires de cités régionales, quand on a des rencontres, là, on parle de projets économiques, des projets sociaux, des projets d'habitation. Puis, si on n'était pas là, le développement économique de nos municipalités n'irait pas aussi bien en région. Pourquoi? Parce qu'on doit créer un environnement, un climat propice à l'entrepreneur. Et c'est pour ça qu'on a besoin de tous les outils. Et l'aménagement du territoire, pour nous autres, c'est un outil essentiel pour être capable de faire ça. Oui, on souhaite effectivement avoir une meilleure mainmise sur l'aménagement de notre territoire, effectivement. Puis, oui, les élus municipaux, c'est aussi des élus responsables, quoi qu'en disent plusieurs groupes de pression en ce moment, et imputables.

M. Ratthé: Oui. Écoutez, pour avoir été moi-même conseiller municipal, je pense que quasiment, autour de la table, presque tout le monde a été sur un conseil municipal, on comprend bien vos préoccupations. Et d'ailleurs, toute la notion du développement économique, on sait à quel point, effectivement, dans sa municipalité, un maire et son conseil municipal sont directement impliqués. Et je demandais... justement, dans la Loi sur les compétences municipales, l'aspect développement économique est probablement l'endroit où on donne le moins de compétences... ou de latitude, alors que, tout le reste de la Loi sur les compétences municipales, on spécifie même qu'on doit l'interpréter à un sens large, qu'on ne veut pas que ce soit restrictif, alors que c'est très restrictif dans la Loi sur les compétences municipales. Je me demandais, justement, ce pouvoir des élus là en matière de développement de territoire, de développement économique, pourquoi le favoriser davantage dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme alors que plutôt... ou, pas plutôt, dire: Pourquoi on ne donne pas une grande latitude dans la Loi sur les compétences municipales? Parce que justement cette loi-là permet déjà beaucoup de latitude. Et, il me semble que peut-être que c'est, à mon avis, mais j'aimerais vous entendre: Est-ce qu'on ne devrait pas modifier la loi sur les compétences municipales en matière de développement économique, justement?

M. Berthold (Luc): Moi, j'aimerais bien avoir un avant-projet de loi sur les compétences municipales où on aborderait directement la notion de développement économique. J'aurais sûrement aussi beaucoup de choses à dire. Je peux vous dire que notre union travaille beaucoup afin d'améliorer nos capacités d'intervenir en matière de développement économique. Compte tenu de la nouvelle réalité d'aujourd'hui, compte tenu aujourd'hui aussi qu'avec les crises économiques qu'on a sur la scène mondiale de plus eh plus de villes américaines investissent directement dans le développement économique et que, nous, on a effectivement bien peu de moyens pour contrer cette vague-là de gens qui viennent chercher des entreprises... Carrément, ils achètent des emplois à coups de millions. Puis ça, c'est très, très, très inquiétant, puis, personnellement, je trouve qu'on ne s'en préoccupe pas assez encore ici, au Québec, de cette vague-là. Il y a des gens qui travaillent à temps plein pour venir acheter des entreprises au Québec, là. Donc, heureusement qu'on a des Québécois qui pensent encore que c'est bon de garder leur entreprise chez nous, parce qu'on pourrait se réveiller avec un méchant mal de tête à un moment donné.

M. Lessard voulait compléter sur la notion de développement économique aussi. Je pense qu'il en connaît un petit bout là-dessus.

Le Président (M. Morin): M. Lessard.

M. Lessard (Martin): M. le Président, en réponse à la question du député, et le ministre le sait très bien, le premier professionnel qu'un maire va consulter lorsqu'il a rencontré un promoteur qui vient lui présenter un projet pour sa municipalité, dans 90 % des cas, c'est son urbaniste ou son professionnel de l'aménagement s'il n'a pas un urbaniste qui travaille pour lui. Pourquoi? Parce que, justement, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, c'est l'outil à la disposition... c'est ce qui fournit, en fait, les outils aux élus pour créer des conditions favorables au développement économique sur leur territoire. On ne crée pas de job dans les municipalités, ce n'est pas nous autres. Ça, c'est l'entreprise privée qui crée des emplois. Nous autres, ce qu'on essaie de faire, c'est créer des conditions qui sont favorables au développement économique sur le territoire des municipalités. Et c'est justement la raison pour laquelle il faut que la loi sur l'aménagement... la nouvelle Loi sur l'aménagement et l'urbanisme prévoit des conditions plus souples pour nous permettre, à nous, de réaliser des projets, de créer de la richesse sur nos territoires.

M. Ratthé: Je vous remercie. Écoutez l'autre point... en fait, il y a deux autres points que je voudrais aborder. Je peux difficilement ne pas aborder le point du droit référendaire. Vous savez, comme je vous ai dit, j'ai été dans le milieu municipal. Je sais aussi que, dans certains cas, il y a des citoyens, une poignée de citoyens viennent empêcher un développement qui est important pour le reste de la communauté, et j'ai l'impression qu'on va du côté d'un balancier pour s'en aller complètement de l'autre. Je vous dirais, quand on pense qu'on désire... et je sais, j'étais à Boucherville, lors des assises de l'UMQ, là, à la consultation citoyenne, on veut que les citoyens soient davantage impliqués. On veut que la participation citoyenne au niveau des élections soit augmentée. On souhaite tous, autant des élus du Québec que dans les municipalités, j'allais dire rehausser notre crédibilité.

Et, quand on voit d'autre part que parce qu'effectivement dans certains cas il y a des.. j'allais dire un emploi abusif des référendums, on nous dit aujourd'hui: Bien, on va enlever ce droit référendaire là dans des zones franches, c'est sûr que ça suscite des réactions assez fortes au niveau des citoyens, des citoyennes, des regroupements qui viennent nous voir. On nous dit: Bien, on va compenser ça par de plus grandes consultations. Et, d'autre part, on va mieux informer, mieux consulter, faire en sorte que les gens soient plus au fait de ce qu'on veut faire, mais, en même temps, on leur enlève le droit de pouvoir exercer un pouvoir de contestation, on dit même si on les informe mieux. Je vais vous faire un petit parallèle amical. Tantôt, vous me parliez des mines. Si je vous disais: Vous pouvez bien parler autant que vous voulez, mais, en bout de ligne, les gens vont quand même décider de faire le projet. Peut-être que vous me diriez: Ouf! une petite atteinte à ma démocratie. Puis, c'est ce que les gens nous disent, ce que les gens viennent nous dire.

On nous a suggéré des pistes de solution pour peut-être venir trouver un juste milieu, je voulais entendre un peu là-dessus. On nous parle, par exemple, d'élargir le bassin de consultation pour ne pas faire en sorte que ce soient les sept, huit qui sont autour, les 12 qui vont empêcher. On nous parle aussi peut-être de mieux définir. Ce qui semble faire la crainte des gens, c'est que... Ce que l'article 82 vient nous dire, c'est qu'on dit: «...faire l'objet de rénovation urbaine, de réhabilitation ou de densification...» Les gens nous disent: Bien, c'est vague. Tu sais, ça laisse beaucoup de place à interprétation. Peut-être qu'on pourrait être plus spécifique sur ce que c'est que la zone franche. On me donnait des exemples, par exemple: logement social, écoles, hôpitaux. On sait qu'il y a des secteurs résidentiels, on veut implanter une école, puis ils ne veulent pas non plus.

Et j'ajouterais à ça que tantôt vous faisiez référence donc à ces référendums-là qu'on tient, puis qui empêchent les choses de bouger, mais c'est souvent dans le cas... en fait, c'est dans le cas d'un changement de zonage. Parce que, quand on achète une propriété dans une municipalité, on le connaît, le zonage. Donc, en principe, dans le zonage, on va nous dire, je ne sais pas moi: En face de chez vous, il va y avoir des condos, en arrière, il va peut-être y avoir des triplex. Il devrait y avoir une école, un parc. C'est quand on veut modifier le zonage qu'on est obligés d'aller, si on est obligés, là, en consultation référendaire.

Alors, compte tenu de tout ça, est-ce que vous seriez ouvert à ce qu'on balise mieux, qu'on définisse davantage, qu'on apporte certaines restrictions dans le but de dire: Bien, s'il n'y a pas un droit référendaire, au moins on vient mieux encadrer ça. Alors, je voulais vous entendre un peu de ce côté-là.

Le Président (M. Morin): M. Berthold.

M. Berthold (Luc): Le problème... puis la solution n'est pas facile, on est tous conscients de ça. Mais le problème, c'est que, quand on arrive devant le citoyen présentement... Le projet, là, il y a des gens qui ont investi des sous, les urbanistes ont passé du temps à préparer les changements, puis tout ça, et c'est trop tard dans le processus. C'est vraiment... le principal problème, c'est qu'on arrive en bout de ligne, c'est là: ça passe ou ça ne passe pas. O.K.?

Quand tous les efforts ont été mis, ce qu'on dit, c'est qu'il faut trouver un moyen de faire ces consultations-là avant. On a une idée, mais ça, y a-tu moyen de consulter sur l'idée avant d'aller réaliser tout l'ensemble des projets puis que tout le monde va avoir dépensé ses sous puis ses énergies pour faire présenter le projet? Et là on ne bloque pas un projet, on consulte, on l'améliore et on aurait des possibilités de faire en sorte de le rendre acceptable pour les citoyens. Mais je sais que les promoteurs ont souvent un rôle majeur à jouer là-dedans, et, nous, on doit les accompagner. Bon, ça ne se fait pas tout le temps. Il y a des lacunes actuellement. Si on est là à en parler, c'est parce que ce n'est pas un système parfait, qu'on doit trouver des manières de l'améliorer.

La consultation plus large, tant et aussi longtemps que ça va rester un blocage de projets à la fin, que ça va être illustré comme celui-là, je pense que les citoyens... Puis je suis content que vous ayez parlé des assises qu'on a eues non loin de Montréal, là, parce que justement les gens sont venus nous dire qu'ils veulent collaborer à ces projets-là. Mais, moi, je tends la main, puis je dis: Oui, trouvons ensemble une façon d'élaborer un processus de consultation qui va éviter cette politique.

Mais il va toujours y avoir des gens contre. Il va toujours y avoir des gens pour, et, à un moment donné, il y a aux quatre ans ce qu'on appelle des élections qui nous permettent de dire: Bien, vous n'avez pas pris les bonnes décisions, on va vous changer. Il faut, à quelque part, qu'on reconnaissance qu'il y a des gens. Dans la mesure où les élus ont fait clairement exprimer leur vision, bien, les citoyens aussi ont leur part de responsabilité par rapport à ça. Et Mme Hamm voudrait compléter.

**(17 h 50)**

Le Président (M. Morin): Oui, Mme Hamm. Allez donc.

Mme Hamm (Vicki May): Je... dans son angle mort. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Morin): On voulait entendre votre voix, là.

Mme Hamm (Vicki May): Simplement vous dire que la question du référendum, ce n'est pas... c'est très souvent une minorité qui se prononce puis qui bloque un projet, ou un groupe de pression, ou des citoyens. M. Berthold a donné un exemple chez eux, mais des fois, chez nous, c'est un droit de vue qu'ils pensent avoir, ça fait qu'ils bloquent tout projet qui empêcherait d'avoir une belle vue. Mais finalement, si tu veux garder ton droit de vue, tu achètes le terrain.

Mais tout ça pour dire que la question référendaire aussi, c'est coûteux pour une municipalité quand on décide d'aller en référendum, c'est de l'argent, c'est du temps, c'est des ressources humaines et puis c'est une question fermée. Donc, on pose une question fermée, oui ou non. On ne donne pas place aux débats, aux échanges puis à la bonification. C'est pour ça que, de plus en plus, on essaie de faire des consultations en amont, mais on se rend compte qu'on n'a pas les outils. Puis, de toute façon, même si on fait une super bonne consultation en amont puis qu'on a une bonne acceptabilité du projet, on a réussi à avoir une acceptabilité sociale du projet, il y a quand même une minorité qui peut venir le bloquer. Puis là on a fait le travail, on perd de vue l'intérêt collectif, puis c'est vraiment ça, l'inquiétude en ce moment.

M. Ratthé: Non, je vous entends bien évidemment, là, parce qu'effectivement ce sont les conséquences. Mais, comme on est là un peu pour refléter la voix de tous les gens qui se présentent ici, j'allais presque vous dire que, si effectivement on fait de bonnes consultations, de bonnes séances d'information, qu'on obtient l'appui de la majorité, on réduit d'autant plus la contestation. Et souvent, dans des projets qui ne passent pas, on réalise après coup en se disant: Bien, peut-être qu'on aurait dû mieux informer, qu'on aurait dû faire... Alors, peut-être que les chances qu'un aussi grand nombre de projets soit refusé seraient amoindries, puis je vous dirais peut-être que l'un n'empêche pas l'autre, mais je vous...

Je pense qu'il va falloir réfléchir encore à ça, parce qu'effectivement on tient tous, je pense, à avoir cette collaboration citoyenne. Et, pour l'instant, le message, la façon de l'interpréter, en tout cas, du moins, là, je n'irais pas jusqu'à dire pour l'instant que c'est le message qu'on envoie, mais de la façon dont on l'interprète, c'est qu'on enlève un droit aux citoyens, puis là c'est difficile de dire: On vous enlève un droit, ou du moins c'est votre perception qu'on le fait, et en même temps on aimerait ça pouvoir compter sur vous puis collaborer. Alors, je pense qu'il va falloir qu'on travaille encore plus, mais c'est l'avantage d'être en avant-projet de loi.

Comme il me reste peu de temps, il y a quelque chose qui a quand même attiré mon attention dans votre mémoire, vous mentionnez de réintroduire l'obligation de l'État d'être assujetti à loi. Je pense que c'est quelque chose d'important et je voulais avoir un peu plus d'explications à cet égard-là au niveau de l'assujettissement de l'État à loi. Je pense que c'est quand même quelque chose d'important, puis je voulais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Morin): M. Lessard, je pense que c'est vous qui avez la réponse à cette question.

M. Lessard (Martin): Oui. Si je peux me permettre, il me reste combien de temps? Quelques minutes?

Le Président (M. Morin): Il reste quatre minutes.

M. Lessard (Martin): Quatre minutes. Je suis capable de répondre à la question. Et, en même temps, sur les zones franches, parce que c'est un sujet très intéressant, là, sur les zones franches, vous disiez: Il me semble que les critères sont assez larges, tu sais, justement, dans l'avant-projet de loi pour permettre de définir lesdites zones franches. De grâce! laissez ça comme ça, parce que ça permet justement aux élus de prendre une décision. Puis c'est eux qui vont être imputables de la décision après ça. S'ils prennent la mauvaise décision, ils vont se le faire dire au bout de quatre ans. Mais autrement ils peuvent, ils peuvent prendre une décision, et ça, au contraire, je pense, chapeau au ministère d'avoir proposé ça.

Bon, réintroduire l'obligation de l'État d'être assujetti à la loi, on le mentionne dans notre rapport, c'est qu'en fait il existe dans l'actuelle Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, à l'article, de mémoire, 2 ou l'article 3, en tout cas, mais de mémoire, l'article 2 où on dit que l'État est assujetti à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, puis étrangement on ne le retrouve pas dans l'avant-projet de loi. Alors, quel message ça envoie? Encore là, on revient un peu, et au risque de me répéter, ce projet de loi là devait venir consacrer le pouvoir des élus locaux en matière d'aménagement du territoire. Est-ce qu'on est en train de dire que le gouvernement va avoir toujours préséance lorsqu'il y aura des projets d'État ou des sociétés d'État ou encore d'autres organismes? Alors, il y a ça, là, qui était un peu particulier, on voulait le soulever.

M. Ratthé: Bien, je pense que pour l'instant, effectivement, s'il n'y a pas de correction, c'est un peu ce que ça viendrait dire, là, que le gouvernement a ce droit de regard là.

Il me reste quelques minutes, M. le Président?

Le Président (M. Morin): Oui, allez, 2 min 30 s.

M. Ratthé: Donc, écoutez, un point de clarification. Dans votre mémoire, vous dites que tout plan sectoriel d'aménagement et de développement de territoire devrait faire l'objet d'un avis de conformité au plan métropolitain et, le cas échéant, ou au schéma d'aménagement et de développement. Pour des fins de clarification, je voulais juste savoir à quel plan sectoriel ou développement vous référez plus précisément?

Le Président (M. Morin): M. Berthold.

M. Berthold (Luc): Exemple parfait, les organismes de bassin versant qui ont, en ce moment, des plans directeurs à mettre en place, donc il faut qu'ils tiennent compte des schémas d'aménagement qui ont déjà été pensés. C'est exactement ce qu'on disait tantôt, de faire en sorte que les décisions prises par les élus concernant l'aménagement de leur territoire bien soient prises en compte par tous ceux et celles qui vont avoir à se prononcer ou à adopter des plans d'aménagement, que ce soit en matière agricole, des bassins versants ou tout autre qui peuvent exister.

M. Ratthé: Parfait, ça répond à ma question. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Morin): Ça va?

M. Ratthé: On pourrait en parler encore longtemps, mais, en tout cas, on a un bon mémoire puis on a vos recommandations, puis je suis sûr que ça va venir contribuer au travail qu'on fait au niveau de l'avant-projet de loi. Merci de vous être déplacés.

Le Président (M. Morin): Donc, M. Berthold, Mme Hamm et M. Lessard, merci beaucoup de votre dextérité et surtout de votre leadership, ça fait du bien à entendre. Bonne soirée.

J'ajourne les travaux de la commission au mercredi 24 août, à 9 h 30. Merci beaucoup, bonne fin de soirée tout le monde.

(Fin de la séance à 17 h 56)

Document(s) related to the sitting