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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Wednesday, February 22, 2017 - Vol. 44 N° 113

Special consultations and public hearings on Bill 122, An Act mainly to recognize that municipalities are local governments and to increase their autonomy and powers


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

Vivre en ville

Association du transport urbain du Québec (ATUQ)

Association des vérificateurs généraux municipaux du Québec (AVGMQ)

Alliance Ariane — Pour une politique nationale de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme

Projet Montréal

Démocratie Québec

Coalition pour la pérennité de la presse d'information au Québec

Intervenants

M. Pierre Michel Auger, président

M. Guy Hardy, président suppléant

M. Martin Coiteux

Mme Agnès Maltais

M. Martin Ouellet

M. Mario Laframboise

M. Germain Chevarie

*          M. Alexandre Turgeon, Vivre en ville

*          M. Christian Savard, idem

*          M. Marc-André Varin, ATUQ

*          M. Alain Mercier, idem

*          Mme Stéphanie Deschênes, idem

*          M. Luc Richard, idem

*          Mme Michèle Galipeau, AVGMQ

*          Mme Andrée Cossette, idem

*          M. Michel Samson, idem

*          Mme Jeanne Robin, Alliance Ariane  Pour une politique nationale de l'aménagement du territoire
et de l'urbanisme

*          Mme Marie-Odile Trépanier, idem

*          Mme Valérie Plante, Projet Montréal

*          M. François William Croteau, idem

*          Mme Anne Guérette, Démocratie Québec

*          M. Denis L'Anglais, idem

*          M. Martin Cauchon, Coalition pour la pérennité de la presse d'information au Québec

*          M. Richard Tardif, idem

*          M. Gilber Paquette, idem

*          M. Brian Myles, idem

*          M. Donald LeCavalier, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures vingt-sept minutes)

Le Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'aménagement du territoire ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 122, Loi visant principalement à reconnaître que les municipalités sont des gouvernements de proximité et à augmenter à ce titre leur autonomie et leurs pouvoirs.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Rousselle (Vimont) est remplacé par Mme Vallières (Richmond); M. Gaudreault (Jonquière) est remplacé par Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve); Mme Richard (Duplessis) est remplacée par Mme Maltais (Taschereau).

Auditions (suite)

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de Vivre en ville. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation, et par la suite il y aura une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous identifier, par la suite vous pourrez commencer votre exposé. À vous la parole.

Vivre en ville

M. Turgeon (Alexandre) : Oui, bonjour. Merci, M. le Président. Alexandre Turgeon, je suis le président et membre fondateur de Vivre en ville. Je suis accompagné, à ma droite, de Christian Savard, le directeur général de l'organisation, et de Catherine Craig-St-Louis, qui est conseillère à la direction générale, qui nous a aidés dans la préparation et dans la rédaction du mémoire.

Je vais simplement dire en ouverture qu'on est d'accord avec les principes et changements qui sont prévus dans le projet de loi. On a évidemment, vous l'avez peut-être vu dans notre mémoire, quelques recommandations, ajustements qui sont proposés pour assurer un meilleur équilibre possible entre développement urbain, démocratie locale et autonomie municipale.

Vous savez, des organisations comme les nôtres, en général, ont une pensée assez homogène, les gens s'entendent assez bien sur les débats. Moi, depuis l'automne, ça fait trois organisations auxquelles je participe à des débats sur les questions entourant les modifications sur les changements... l'approbation référendaire liée aux changements de zonage. Et c'est trois débats que j'ai vus, qui ne sont pas faciles, où justement, là, on n'a pas d'avis qui sont extrêmement consensuels. Mais Vivre en ville, on est assez contents. J'étais assez sceptique, mais au conseil d'administration, vendredi, on est arrivés à un consensus que je croyais impossible et qui nous semble être une solution assez équilibrée.

Alors, je vais passer la parole à Christian pour qu'il puisse faire la présentation des grandes lignes de notre mémoire.

• (11 h 30) •

M. Savard (Christian) : Donc, merci, Alexandre. Bonjour à tous. Notre mémoire contient 20 recommandations sur les quelque 257 articles du projet de loi n° 122, quelques chantiers qu'on propose pour le Québec. Je ne pourrai évidemment pas passer à travers chacune d'entre elles. Je vais commencer, d'entrée de jeu, avec un des éléments qui mènent le plus à débat, donc toute la question sur l'approbation référendaire des changements de zonage, et j'espère pouvoir avoir le temps pour terminer avec quelques autres aspects, là, qui nous semblent intéressants.

Donc, bien, d'entrée de jeu, en ce qui concerne l'approbation référendaire des changements de zonage, il faut préciser qu'il s'agit là de l'encadrement d'exception. Le règlement de zonage est le contrat social entre une ville et ses citoyens sur qu'est-ce que sera le devenir de la ville. Et le changement de zonage, c'est lorsqu'un projet semble assez intéressant pour que la ville accepte de rouvrir ce contrat social là pour changer ce zonage-là. Donc, c'est pour ça que la loi sur l'aménagement du territoire et l'urbanisme et les différentes chartes des villes prévoient des mécanismes pour encadrer ce changement-là du contrat social.

Donc, nous, de manière générale, nous sommes d'accord avec les intentions et l'esprit du projet de loi n° 122. Si vous voulez avoir un résumé, là, de notre ligne directrice, vous l'avez à la page 10, ça tient en une page synthèse avec une petite carte.

Donc, pour nous, bien, il existe déjà un outil pour encadrer les changements de zonage, qui s'appelle le Programme particulier d'urbanisme, où, quand une ville considère qu'une zone a une forte pression immobilière ou elle a des intentions de réaménagement précises, peut faire un programme particulier d'urbanisme qui lève par la suite — et il y a des consultations publiques qui viennent avec ça — l'obligation d'approbation référendaire.

La nouveauté du projet de loi n° 122, qu'on trouve très intéressante, c'est l'idée des zones de requalification, les secteurs qui ne sont pas obligatoirement à très forte pression mais où est-ce que la municipalité veut qu'il y ait une densification, par exemple, une consolidation dans ces secteurs-là, et s'attend à avoir parfois des projets, et là vous prévoyez un mécanisme de consultation et d'étude d'impacts.

Et, pour le reste, dans les villes en dehors de Montréal et de Québec, ce qui est prévu dans le projet de loi, c'est qu'on garde le processus référendaire tel qu'on le connaît. Notre proposition va dans ce sens-là, à la différence, qu'est-ce qu'on pense qui va venir équilibrer le projet de loi et en faire un projet de loi qui peut être un coup de circuit, selon nous, avec ces ajustements-là, bien, c'est de faire en sorte que Québec et Montréal soient également assujetties au régime qui est proposé pour les autres villes du Québec. Les villes de Montréal et de Québec sont capables de décider à quel endroit on veut faire des zones de requalification et que là, bien, il n'y aura plus d'approbation référendaire. Donc, vous allez obtenir le même résultat, mais avec une finesse d'aménagement et des garanties aussi pour les citoyens de ces deux villes-là.

Parce que le projet de loi, actuellement, tel qu'il est écrit, bien, on se fie un peu sur la bonne volonté des villes, de Québec et de Montréal, de faire des consultations. Mais, si on tombe sur... À l'époque, le maire Bourque avait tout simplement dit : Ah! Il n'y en a plus, de ce genre de choses là. Donc, ça pourrait arriver. Donc, on pense que le projet de loi devrait quand même inclure des dispositions pour Montréal et Québec et que les dispositions pour les autres villes sont une bonne idée pour Montréal et Québec aussi parce qu'elles viennent justement venir encadrer les objectifs d'aménagement, mais également la démocratie locale. Donc, on va atteindre les mêmes résultats, mais en gardant quand même un certain contrepoids et une assurance de consultation pour les citoyens. Donc, dans le fond, on reprend les bonnes idées du projet de loi, mais on les applique aussi à Montréal et Québec.

Également, on pense qu'il faut quand même venir préciser certains éléments du processus de consultation, parce que pour l'instant, dans la loi, c'est écrit que la ville adopte une politique de consultation et d'information. Nous, on propose des éléments qui devraient faire partie de cette politique-là, que vous devriez demander aux villes, par exemple, l'application d'avis simples et clairs, mais plus que sur Internet. Ça peut être sur le site, ça peut être aussi dans des adresses proches de l'endroit où est-ce qu'il y a des changements de zonage. C'est des choses qui existent, là, par exemple, en Europe, là, où est-ce qu'on s'assure que tout le monde est informé, et on ne va pas par en dessous juste par un avis sur Internet. Je pense que c'est des petits éléments comme ça. Et, par exemple, que la consultation soit menée un peu sur le modèle de l'OCPM, à Montréal, où est-ce qu'il y a un commissaire indépendant. Pour les citoyens, l'idée que le rapport soit fait par quelqu'un d'indépendant et non pas par les services municipaux est souvent un gage de confiance. Donc, aller dans ce sens-là ferait ça également.

Donc, et aussi, en ce qui concerne, bien, les endroits où est-ce qu'il va rester l'approbation référendaire, on propose que la zone soit un peu plus large. Je pense que la ville de Gatineau a parlé de ça dans son propre mémoire. Nous, on propose que les zones contenues dans un rayon de 250 mètres fassent partie de la zone pour ces endroits-là. Les endroits où est-ce qu'il restera l'approbation référendaire, c'est des endroits où est-ce que les villes n'ont pas d'intention de requalification ou de consolidation, de densification. Et donc on pense qu'il faudrait vraiment que le processus référendaire puisse être maintenu dans ces secteurs-là.

Donc, avec ces ajustements-là, on pense qu'on établit, là, le bon équilibre, dans le projet de loi, qui va mener à une meilleure... à la fois une démocratie locale renforcée, mais également, à travers les trois régimes, les programmes particuliers d'urbanisme, les zones de requalification, et le reste, on va arriver aussi avec une meilleure planification de nos villes qui va dans le sens de l'urbanisme durable, et tout ça.

Donc, ça résume, pour la partie sur la gestion des changements de zonage, notre position qu'on pense qui va être rassembleuse, qui va être bonne pour les citoyens, qui va être bonne pour les promoteurs et qui va être bonne pour les élus municipaux.

Puisqu'il me reste un tout petit peu de temps, je terminerais quand même sur un ou deux éléments, là, qui ne sont pas spécifiques aux changements de zonage. Donc, je mentionnerais qu'on souscrit encore, comme on l'a fait lors du projet de loi sur la capitale nationale, à l'ouverture que vous démontrez en ce qui concerne la fiscalité municipale, donc de dire aux villes : Bien, vous avez maintenant le droit de ne pas faire un certain nombre de choses, puis le reste, vous le faites en fonction de votre milieu, de vos demandes. Donc, ça, on trouve ça très intéressant.

Un autre élément très intéressant, c'est les taux de taxation différenciés pour le non-résidentiel. Très bonne initiative. Ça a été le petit coup de coeur de notre... du mémoire... du projet de loi n° 122. On ne l'avait pas vu venir. On est contents que ça soit là parce que les villes vont pouvoir se montrer justement, là... vont pouvoir aider un petit peu plus les commerces qui ont une pression, là, qui n'est pas due à leur travail de commerçant, mais souvent à une spéculation foncière résidentielle. Donc, voilà une bonne idée.

Et, pour finir, je terminerais que, maintenant qu'on a réglé la question de l'autonomie municipale, il faut maintenant s'attaquer à la question de l'aménagement du territoire et que le Québec doit se diriger vers une politique nationale d'aménagement du territoire et d'urbanisme. Je vous remercie.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons débuter les échanges. M. le ministre, vous avez 16 minutes à votre disposition.

M. Coiteux : Oui. Bien, d'abord, un gros merci pour votre présentation. Puis ce n'est pas la première fois qu'on a l'occasion de se rencontrer. Effectivement, on s'est rencontrés, notamment, je pense, dans le cas du... bien, certainement dans le cas du projet de loi sur la capitale nationale, mais je me demande si on ne s'était pas vus dans un autre projet de loi auparavant. Donc, à chaque fois, j'apprécie la qualité de votre mémoire, la qualité de votre... Bien, on sent, là, qu'il y a de la densité d'expérience puis de connaissance. Et puis c'est fort apprécié. C'est fort apprécié.

C'est vrai qu'il y a deux modèles qui sont proposés sur la question de la consultation en matière d'urbanisme dans le projet de loi. Il y a un modèle qui est proposé pour les deux villes qui ont... l'une qui a déjà obtenu son statut particulier et l'autre qui, moyennant l'adoption du projet de loi n° 121, qui est un autre projet de loi qui a été adopté avec la ville de Montréal... donc, les deux qui auraient un statut particulier. Il y a un régime pour elles, il y a un régime pour elles qui est basé en bonne partie sur la connaissance de leurs mécanismes de consultation citoyens, l'existence, et la connaissance, et l'observation du fonctionnement de leurs modèles de consultation. Et puis il y a d'autres qui, sans doute, dans certains cas, ont déjà des modèles de consultation, puis quand on parle avec un certain nombre de ces villes-là, elles sont en train de mettre en place des modèles de consultation plus robustes.

Vous, vous avez regardé ça puis vous vous êtes dit : Ça serait peut-être mieux que ça soit plus uniforme, là, les modèles, à travers le Québec. Puis vous avez plutôt choisi le modèle qu'on destinait aux villes autres que Québec et Montréal, plutôt que de dire : Bien, le modèle Québec et Montréal pourrait s'appliquer également à d'autres villes, qui a été une position qui a été défendue hier. Hier, on nous a dit : Pourquoi, au moins pour les grandes villes du Québec... Puis j'avais posé la question : C'est quoi, une grande ville? Puis on m'avait répondu : Bien, à mon époque... parce que c'est un ancien ministre des Affaires municipales, il nous avait dit : Bien, à mon époque, il y en avait neuf, donc j'ai compris qu'on parlait de villes de 100 000 habitants et plus; pourquoi ne pas appliquer le même modèle que Montréal puis avoir la même vision de confiance? Est-ce que vous avez regardé cette avenue-là? Puis qu'est-ce que vous en pensez?

• (11 h 40) •

M. Savard (Christian) : En fait, merci de la question. Justement, ça me permet de préciser une chose. Ça nous a surpris un peu que Montréal et Québec ne soient pas assujettis pour une raison, parce que c'est là où est-ce qu'il y a le plus de pression. Et, de par la forme urbaine, la densité, c'est là où il peut y avoir davantage de conflits par rapport à la densification. Donc, c'est là qu'on trouve où il faudrait davantage protéger le droit du citoyen à une consultation pleine et entière.

Nous, notre lecture du projet de loi fait en sorte qu'un maire très autocrate, O.K., pourrait ne plus avoir de consultation ou avoir quelque chose de minimaliste, de la manière qu'on lit. Et on comprend le projet de loi, parce que le mécanisme des zones de requalification que vous avez pour les autres villes fait en sorte que, bien, dans les zones de requalification, il peut y avoir des changements de zonage sans approbation référendaire, s'il y a une politique, s'il y a une consultation et une étude d'impact. Mais ça, puisque vous faites un peu... je vais prendre... je veux dire, sauter l'approbation référendaire pour Montréal et Québec, bien, il n'y a plus cette obligation-là, en fait, c'est un peu au bon vouloir des villes, à notre lecture. Donc, peut-être que c'est quelque chose à préciser.

Et justement, pour revenir à votre question plus précisément, on pense que c'est au contraire, que, Montréal et Québec, on doit s'assurer à travers la loi... On fait la loi pas parce que, bien, Montréal n'est pas pire, dans ce temps-ci, sur la consultation, on ne leur donnera pas d'obligations. Il faut faire la loi pour les décennies à venir, les années à venir. Donc, on pense que ça serait une bonne idée de l'inscrire et on pense aussi que les zones de requalification sont une bonne idée, d'un point de vue d'aménagement du territoire et d'urbanisme, comme outil.

M. Turgeon (Alexandre) : Puis, si je me permettrais d'ajouter, entre ne plus avoir du tout de processus d'approbation référendaire et le compromis auquel on est arrivés, là où on prévoit qu'il devra toujours y avoir un processus d'autorisation référendaire, on mentionne quand même, dans notre mémoire, qu'il devrait y avoir des exceptions, qu'on devrait prévoir des cas de densification douce, par exemple. Permettre le deuxième logement sur un lot ne devrait pas faire l'objet d'une approbation référendaire parce qu'on modifie le zonage pour permettre un deuxième logement. La transformation d'un garage en deuxième logement, par exemple, l'ajout d'un étage sur un duplex de deux étages, le changement d'usage mineur, il y a plein d'éléments, à notre avis, qui devraient être spécifiés, qui ne devraient pas faire l'objet d'approbation référendaire, même dans ce qu'on décrit dans le compromis comme devant... les zones où on devrait garder le processus d'approbation référendaire.

C'est un peu ça, le compromis qu'on a cherché, parce que... Vous savez, en gros, là, c'est une question de confiance, hein? Il y a des gens qui détestent le mécanisme actuel parce qu'il empêche tout changement, il permet à une poignée de citoyens de bloquer tout projet de changement au zonage. Mais, de l'autre côté, il y a des villes où il y a... à deux, trois conseillers qui sont très proches des promoteurs immobiliers, qui réussissent, là, tu sais... eux autres, ils parlent plus fort que les autres conseillers puis qui réussissent à imposer leur voix sur des changements de zonage proposés. Et, dans ces cas-là, on veut qu'il y ait des mécanismes qui permettent, à quelque part, de donner un poids, un pouvoir aux citoyens de dire : Aïe, minute, là! C'est-u vraiment ça qu'on veut?

Alors, c'est une question qui n'est pas facile à trancher, puis comment trouver l'équilibre, et comment partager les pouvoirs entre les élus et les citoyens qui veulent essayer d'améliorer leur qualité de vie.

M. Coiteux : ...poursuivre là-dessus, sur la question des... Vous dites : Pour certains types... Vous avez noté, par exemple : supposons qu'on fait une pièce additionnelle au-dessus du garage, il ne devrait pas y avoir la nécessité d'une approbation référendaire. Est-ce qu'il y a d'autres types d'usage que vous verriez dans la même catégorie d'exceptions, style, je ne sais pas, moi, pour une école, pour...

M. Turgeon (Alexandre) : Ah! ça, c'est clair. Tout usage public ne devrait pas... ou même communautaire, à vocation sociale, sur les questions de changement d'usage, à moins... On devrait être assez flexibles pour permettre de ne pas passer par une autorisation référendaire.

Parce que ce qu'il faut savoir, c'est que nos règlements de zonage, là, ils sont... On a beau avoir une loi sur l'aménagement et l'urbanisme qui date de 1979 et des plans d'urbanisme à travers le Québec, qui ont été modifiés à la suite de ça, notre zonage est encore un zonage essentiellement inspiré des années 50, 60, où on privilégiait la très faible densité, les très faibles hauteurs puis la très grande ségrégation des fonctions, qui est à l'encontre de la vision d'un urbanisme durable. Et, conséquemment, c'est normal qu'il faut se donner des flexibilités, des moyens aux villes pour sortir de ce zonage-là qui a été pensé à l'époque du modernisme à la Le Corbusier puis qui est à l'encontre de ce qu'on veut avoir comme villes, comme milieu de vie aujourd'hui.

Maintenant, il y a des citoyens qui, eux autres, leurs quartiers à 10 logements-électeurs, ils aiment ça, puis monofonctionnel résidentiel, ils aiment ça. Mais, à un moment donné, là, de permettre un usage complémentaire, le bureau à domicile, la garderie dans le fond du terrain, il y a plein d'usages différents pour lesquels ça n'a pas vraiment d'incidence sur le voisinage puis qu'on pense qu'il faut qu'on ait une beaucoup plus grande flexibilité. On avait demandé, en C.A. : On peut-u faire un listing d'exemples? Puis finalement on s'est dit : Bien, le ministère des Affaires municipales nous donnera le contrat puis on fera l'exercice plus approfondi.

M. Coiteux : Je reviendrais sur une chose que vous avez dite tout à l'heure. Vous me direz si j'ai bien interprété, mais, dans le fond, vous regardez le modèle actuel de Montréal avec son Office de consultation publique, puis, pour vous, ça a l'air d'être un bon modèle, notamment parce que c'est conduit par une entité, une personne indépendante, là, dans ce cas-ci. Mais vous avez dit : Oui, mais on est à la merci d'une administration différente, autocrate. J'ai entendu ça. Bon. Et hier j'ai senti aussi, dans certaines questions que j'ai posées, les gens disaient : Oui, à l'époque, il n'y avait peut-être pas de référendums, mais c'était une autre administration, ça fonctionnait différemment, il y avait une autre philosophie. Et j'ai senti des fois que ce n'est pas tant les institutions qui importaient que les élus en place.

Or, nous, quand on fait une loi, on fait une loi sur la base de caractéristiques institutionnelles qu'on espère survivre, effectivement, à des élections. Donc, si les modèles — puis je prends l'exemple de Montréal — étaient, dans le fond, consacrés, là, qu'ils s'institutionnalisaient, en quelque sorte, auriez-vous les mêmes craintes face à un modèle Montréal qui soit différent de celui de la zone de requalification?

M. Savard (Christian) : Bien, en fait, vous mettriez, à la limite, plus de pression dans des zones où qu'il n'y a peut-être pas besoin de ce modèle-là, qui est un peu plus lourd, mais très démocratique. Donc, c'est pour ça que la zone de requalification est intéressante, parce que peut-être qu'il va y avoir des changements de zonage en dehors des zones de requalification, là où est-ce qu'il y a encore... et qu'il n'y aura pas personne parce que ça va être bien correct. Mais, si tu fais un changement de zonage dans ces endroits-là, tu vas être obligé de faire une consultation publique de type OCPM, même quand c'est mineur. Mais on croit qu'il y a des endroits où ce n'est pas nécessaire, à la limite, lorsque c'est plus petit, puis, si les citoyens ne lèvent pas la main puis ça passe facilement, bien, c'est parce que c'était un projet relativement mineur.

Donc, je pense que d'obliger à travers la loi, partout, ce n'est pas une bonne idée. Dans les zones de requalification, c'est une bonne idée parce que c'est souvent là qu'il est plus sensible, et, en dehors des zones de requalification, lorsqu'il y aura encore approbation référendaire, bien, il restera le contre-pouvoir, justement, citoyen. Mais on pense que peut-être que dans ces endroits-là on n'a pas besoin d'un gros processus de consultation lorsque c'est quelque chose de mineur au changement de zonage. Et peut-être que même, comme le disait Alexandre, qu'il y a certaines choses qu'on peut juste soustraire, des choses relativement mineures. Donc, je trouve qu'il faut un bon équilibre entre les différents morceaux, les différentes zones, mais on pense que notre proposition y arrive.

M. Turgeon (Alexandre) : Nous, la raison pour laquelle on aime, entre autres, le modèle de l'OPCM... Puis c'est le modèle du gouvernement du Québec aussi, avec le Bureau d'audiences publiques en environnement aussi. Ce n'est pas les ministres... Le ministre des Transports, là, ce n'est pas lui qui va consulter la population sur un projet de développement d'une autoroute puis qui entend les citoyens, là.

Nous, on pense que c'est sage que... Les conseillers municipaux, là, à Montréal, là, ils vont aller assister, ils sont dans le fond de la salle, ils observent, ils regardent qu'est-ce qui se passe, ils vont recevoir un rapport puis, à la fin, ils vont prendre une décision. On pense que c'est un modèle qui est sage, plutôt que de les mettre sur le stage, en avant, puis ils sont placés sur la défensive, quand les citoyens ne sont pas contents du projet qui leur est présenté, dire : Il y a un projet qui est analysé par des professionnels, il y a des recommandations, il est étudié par une instance indépendante, puis, à la fin, il y a un rapport, puis les élus observent tout ce processus-là, ils prennent une décision à la fin. Nous, on pense que c'est plus sage, ça va améliorer la qualité de vie des élus aussi.

Parce que je ne sais pas si vous savez que des élus qui se tapent des consultations publiques trois soirs par semaine, là, à travers le Québec, il y en a beaucoup, notamment à Québec. Être responsable de l'aménagement du territoire à Québec, là, c'est à peu près la pire job, là, en termes de qualité de vie, là. Alors, de donner à une instance indépendante le soin de faire les consultations... Que les élus restent présents et assistent à ces séances-là, pas de problème, mais en arrière, puis qu'à la fin ils tranchent. C'est pour ça qu'on le trouve intéressant comme modèle.

• (11 h 50) •

M. Coiteux : Justement, ça, ça m'intéresserait parce que vous avez la vision des deux grandes villes et des deux modèles, finalement. Comment vous les comparez, les deux modèles de consultation, celui de Québec et celui de Montréal?

M. Savard (Christian) : Bien, de manière générale, le modèle à travers l'Office de consultation publique de Montréal est préférable pour les raisons qu'Alexandre vient de nommer. Et, juste pour vous montrer le niveau de confiance que les citoyens ont, il y a le pôle logistique, dans l'est de Montréal, où, bien, les citoyens... Il y a une consultation menée par l'arrondissement, mais des citoyens ont fait une pétition, il y a 5 000 citoyens qui ont demandé qu'il y ait une consultation publique, mais pas juste de l'arrondissement, de l'OCPM. Et là, bien, là, les citoyens étaient satisfaits, et donc se sont mis autour de la... et ils sont prêts à aller autour de la table, au lieu d'être juste en mode opposition, ils ont confiance que leurs points de vue soient entendus.

Donc, ça démontre... on voit dans cet exemple-là comment les citoyens ont confiance dans un... Et après ça il reste la marge de manoeuvre, hein, à la ville, là, pour prendre les recommandations. Mais les citoyens se disent : Bien, celui qui m'écoute, il m'écoute au complet, il n'a pas juste en arrière de la tête de faire passer son projet. C'est là le niveau de confiance qu'amènent les commissaires indépendants ou une institution indépendante. Et d'ailleurs, pour les plus petites villes, lorsqu'il y aura un changement de zonage, ça pourrait être juste un processus, là. Ils ne sont pas obligés de tenir un bureau de manière permanente, là. On ne demandera pas à toutes les villes du Québec d'en avoir un, là. Ça serait surstaffé, là. Mais il y a moyen, là, tout à fait, d'imaginer un processus qui va dans ce sens-là.

M. Turgeon (Alexandre) : Sur Québec, je pense que la ville de Québec a fait des efforts pour améliorer les choses à plusieurs niveaux, mais il y a encore place à amélioration. J'ai donné l'exemple des consultations aux villes, où c'est les fonctionnaires de la ville et les élus qui sont à l'avant, puis qui présentent le projet, puis qui reçoivent les commentaires. Et, à plus petite échelle, au niveau des quartiers, les plus petites modifications, les conseils des quartiers, là aussi il y a... J'ai dit : Je pense que les élus et même les fonctionnaires devraient être un peu plus sur le bord, regarder les grandes consultations, donner ça à une instance indépendante.

Au sein des conseils des quartiers, pour les petites consultations qui ne devraient pas relever d'une instance indépendante, je pense qu'il faut leur donner plus de temps, hein? Je vous ai déjà expliqué le processus, un conseil de quartier, là : l'urbaniste et le promoteur arrivent, ils présentent leur projet; les citoyens, live, ont trois minutes pour faire leurs commentaires; quand, au bout de 45 minutes, les commentaires sont finis, on demande à chacun des neuf membres du conseil de quartiers : Qu'est-ce que vous en pensez? On ne les a pas permis de se retirer, de réfléchir ensemble, d'émettre un avis comme conseil de quartier, on leur demande de donner leur avis, là, tout de suite, à chaud, devant les citoyens, puis qu'ils veulent... Puis souvent les membres du conseil de quartier ne veulent pas heurter les citoyens qui viennent dire quelque chose, puis dire l'inverse. Ça fait que c'est un peu inconfortable, là, comme processus.

Les conseils des quartiers aimeraient pouvoir prendre du temps, formuler un avis comme conseil de quartier, et non pas neuf avis individuels, puis faire ça à une séance ultérieure, quitte à même recevoir des avis supplémentaires, des questions supplémentaires qu'ils pourraient poser aux professionnels avant de formuler leurs avis. Donc...

Le Président (M. Auger) : Merci. Désolé...

M. Turgeon (Alexandre) : ...il y a des choses à améliorer aux deux niveaux.

Le Président (M. Auger) : Merci. Nous allons maintenant poursuivre avec l'opposition officielle. Mme la députée de Taschereau, avec 10 minutes.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs, mesdames de Vivre en ville. Effectivement, on s'est vus récemment sur le projet de loi de la capitale nationale, puis on avait pris quelques-unes de vos suggestions d'amendement, puis on les avait intégrées, c'était très bien. Et effectivement on respecte beaucoup votre organisation pour, je dirais, sa maturité.

Je comprends de votre mémoire que vous... Je le résumerais comme ci : la loi devrait s'appliquer de la même façon pour tout le monde. C'est-à-dire qu'il y ait des zones... pour que tout le monde comprenne, qu'on soit petite ou grande municipalité, qu'il y ait trois types de zones avec un processus différent de consultation selon la zone.

Maintenant, il y a quelque chose que vous évacuez, dans votre compromis, si j'ose dire — parce que c'est comme ça que vous l'avez dit, vous avez fait un compromis — c'est le départ... la perte du pouvoir citoyen. Je comprends qu'on est dans une relation entre la ville et le ministre des Affaires municipales pour essayer d'alléger les villes, leur donner plus souplesse. Je comprends aussi qu'on va avoir plusieurs types de zones, plusieurs moyens de consultation. Mais après ça, à la toute fin, même quand ça ne fonctionnait pas — sauf dans les PPU, j'y reviendrai — il y avait, à la fin, un pouvoir du citoyen d'en appeler aux gens autour d'eux. Ce pouvoir-là, il disparaît, je dirais même, dans... quasiment plus... il disparaît aussi dans votre proposition, sauf dans la dernière partie. Je suis un peu surprise puis j'aimerais ça comprendre pourquoi vous faites disparaître ça, même dans les zones de requalification.

M. Savard (Christian) : Bien, je pense que je vais laisser Alexandre répondre. Je veux juste dire que nous, on considère qu'on a une proposition équilibrée et non pas comme un compromis. Mais, si on peut le présenter comme ça, oui.

Mme Maltais : ...

M. Savard (Christian) : Oui, oui.

M. Turgeon (Alexandre) : C'est peut-être moi qui l'ai dit comme ça. Écoutez, vous avez soumis les cas de l'îlot Irving, l'îlot Esso, lorsque la ville de Québec est venue en commission la semaine dernière. Pour nous, c'est deux cas où... Il y a des cas, au Québec, où on est capables de dire : Ah! La crainte d'avoir un référendum, au bout du compte, a permis d'améliorer un projet. On en cite un, à Sainte-Foy, dans notre mémoire. Mais on est aussi capables de faire la liste de projets où c'est l'inverse. Puis l'îlot Irving, l'îlot Esso, c'est deux cas où les gens qui ont vu le premier projet se disent : Les gens s'opposaient pour des mauvaises raisons, et le projet qui nous est atterri sur le terrain est de moins bonne qualité, est moins intéressant, sur le plan social, que le premier projet qui nous était présenté.

D'ailleurs, d'avoir eu 47 % de gens qui ont voté en faveur du premier projet de l'îlot Irving, ça montre quand même qu'il y avait un appui, une adhésion extrêmement importante. Mobiliser des gens dans un référendum sur une modification... c'est extrêmement difficile. C'est toujours plus facile, dans des processus comme ça, de mobiliser les gens contre. Et ça fait en sorte qu'il y a plein de projets qui tombent ou même des promoteurs qui, quand ils sont en train... on n'est même pas rendu à l'étape du référendum, là, on n'est même pas en train d'arriver en consultations publiques, le promoteur fait juste commencer à travailler avec les urbanistes à la ville, puis là, quand il sait que, ah! ça, c'est une modification de zonage, ça, ça va être soumis à l'approbation référendaire : Non, on n'ira pas là. Les urbanistes de la ville essaient de pousser pour créer une place publique puis, en contrepartie, ils permettent de construire deux étages, mais le promoteur : Non, non, je vais construire sur 100 % de mon lot, le zonage me le permet, puis je n'aurai pas ma place publique. Ça fait que, donc, pour ces raisons-là...

Mme Maltais : ...

Le Président (M. Auger) : ...Taschereau. Juste un instant! Mme la députée...

M. Turgeon (Alexandre) : ...on pense que ce n'est pas le bon mécanisme.

Le Président (M. Auger) : Mme la députée.

Mme Maltais : O.K. C'est parce que je veux juste vous dire, c'est parce qu'on a huit minutes à deux, à peu près, là. C'est comme assez court. Bien, je ne suis pas tout à fait... écoutez, je n'ai pas les mêmes... Moi, je suis députée du coin où ont lieu ces deux bâtiments-là, puis, si je suis en partie d'accord avec vous sur Irving, je ne suis pas d'accord avec vous sur Esso. Donc, vous voyez? Mais il y en a eu cinq en 15 ans.

M. Turgeon (Alexandre) : Il y en a eu cinq...

Mme Maltais : Il y en a eu cinq, et la menace... Attendez, je vais terminer.

Le Président (M. Auger) : Juste un instant, un instant. Mme la députée.

Mme Maltais : Il y en a eu cinq en 15 ans, mais on est venu nous dire aussi que cette idée, cette menace d'un référendum fait que le promoteur serait plus prudent pour essayer d'avoir un projet qui corresponde à la volonté populaire. Donc, moi, je me dis : Si le processus de consultation est très fort, avant, j'ai l'impression — mais je vous écoute vraiment, là, pour voir si j'ai tort — que, si le processus de consultation est bien encadré, il ne va rester à la fin, en approbation référendaire, que quelque chose qui fera vraiment répulsion, qui sera vraiment terriblement... qui ne fonctionnera vraiment pas.

Le Président (M. Auger) : M. Turgeon... M. Savard.

M. Savard (Christian) : Oui. Il y a des cas où est-ce que les promoteurs... je pense à La Cité verte, là, pour nommer un cas de la ville, où, à la fin, là, il y avait des gens de la rue Monk qui voulaient garder la vue sur le soleil le soir, quand ça se couchait, et que, peu importe le projet qui aurait été présenté par le promoteur, ils l'auraient bloqué. Donc, puisque ça, c'est un projet de plus de 25 000 mètres carrés, ça a été...

Mme Maltais : ...il y a déjà ce mécanisme-là.

M. Savard (Christian) : C'est ça, il y a déjà... Mais, moi, je pense qu'avec un mécanisme de consultation fort, avec des commissaires indépendants, il n'y aura pas trop... Ça va être des promoteurs sérieux qui vont être là pour écouter. Donc, l'espèce de gêne qu'on doit garder à travers la consultation publique va demeurer, si on renforce la consultation publique, versus le référendum, qui lui, à la fin, peut ultimement bloquer.

Le Président (M. Auger) : Mme la députée.

Mme Maltais : Tout simplement, donc, on renforce la politique de consultation, un organisme indépendant, et, à ce prix-là, on peut peut-être... on peut lâcher l'approbation référendaire. C'est votre position.

M. Savard (Christian) : C'est exactement ce qu'on dit dans notre mémoire.

Mme Maltais : Oui, mais il faut que ce soit bien, bien clair que ce n'est pas quartier libre à la ville de Québec.

M. Savard (Christian) : C'est ce qu'on dit dans notre mémoire.

Le Président (M. Auger) : M. le député de René-Lévesque.

• (12 heures) •

M. Ouellet : Merci, oui. Il ne nous reste pas beaucoup de temps. J'aimerais vous entendre sur votre recommandation 13, qui est de modifier les articles 4 et 5 du projet de loi qui reconnaissent le pouvoir des municipalités pour les rendre conformes à ce qui avait été adopté dans le projet de loi sur le statut de Québec. J'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît. Page 25 de votre mémoire.

M. Savard (Christian) : Oui, bien, en fait, c'était la notion... c'est un détail, là, mais, dans le projet de loi sur la capitale nationale, il y avait la mention d'aménagement rationnel, donc, qui amenait... c'est le genre de choses symboliques mais qui des fois peuvent vouloir dire quelque chose lorsqu'on est dans une contestation ou pas, là, et l'idée d'aménagement rationnel est disparue. C'est bien ce qu'on me précise.

Donc, c'est un petit ajustement qu'on pense qui serait intéressant. Pourquoi l'avoir écrit dans la capitale nationale et ne pas l'avoir écrit dans celui-là? Mais je pense que, lors de votre étude, ça pourrait être...

Mme Maltais : O.K. Là, il y a... Selon votre travail, les PPU seraient hors approbation référendaire, les zones de requalification aussi. J'échange avec vous parce que je sais que le ministre se pose des questions, des fois, sur les processus à Québec puis du climat de crainte que je pense qui teinte un peu le projet de loi, je vais être honnête, là, et ça vient probablement du fait qu'il y a des consultations sur des PPU.

Et l'exemple le plus courant qui est sorti, c'est le PPU de Sainte-Foy, où il y a eu deux consultations pour le PPU; pas une, il y en a eu deux. Et, à la fin, malgré que la consultation ait été claire puis qu'on ait décidé 30 étages, le maire est arrivé puis il a dit : Bon, bien, ça va être 65 étages en collaboration... après avoir discuté avec un promoteur. C'est peut-être un très beau projet de 65 étages pour qui aime les 65 étages, ce qui n'est pas moi, mais, si ça se savait à l'époque, pourquoi on ne l'a pas su pendant la consultation? Et c'est là que ça a entraîné... je pense, c'est cette affaire-là qui a entraîné le plus grand problème de méfiance à Québec. Alors, comment pallier à ça?

Le Président (M. Auger) : M. Turgeon.

M. Turgeon (Alexandre) : Bien, je ne vois pas de solution. De toute façon, sans le projet de loi, la ville de Québec peut permettre le Phare à 65 étages, là. Ça fait que c'est un débat, à mon sens...

Comment on respecte les consultations, comment on respecte les outils collectifs qu'on se donne à travers un PPU, c'est des débats qui, avec ou sans le projet de loi n° 122, vont demeurer, à notre sens. Il va toujours falloir que les citoyens, les organismes de la société civile demeurent vigilants et exigeants envers les villes sur la qualité des projets qu'ils vont présenter. Tu sais, soit dit en passant, nous, on trouve que 30 étages, de toute façon, qui est du consensus à Sainte-Foy, c'était trop élevé. Pas vrai qu'on va avoir la vision urbaine de la requalification du boulevard Laurier et de l'Église dans ce secteur-là si on permet du 30 étages partout. C'est trop de pieds carrés sur un trop grand territoire et, en 2050, bien, ça va encore avoir l'air du strippe commercial que c'est là.

Alors, 122 ne réglera pas tout, ne réglera pas ça. D'ailleurs, on fait un encadré, ceci dit, sur le Phare, là, pour l'illustrer, là. Puis je voulais peut-être ajouter aussi... tu sais, vous avez dit : Il n'y a eu que cinq référendums à Québec. Ce qu'on oublie de dire, là, ce que 90 % du temps, là, quand il y a le nombre de signatures suffisantes pour exiger la tenue d'un référendum pour avoir l'approbation de la modification au zonage, là, il n'y a pas de référendum. Les villes reculent, et ça, on ne le dit pas, puis ça, même la ville de Québec n'a pas été capable de nous donner les stats sur le nombre de fois qu'ils ont reculé.

Le Président (M. Auger) : Merci, M. Turgeon. Nous allons poursuivre avec le député de Blainville pour 6 min 30 s.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. M. Turgeon, M. Savard, Mme Craig-St-Louis, merci.

J'avoue que depuis hier... d'abord, le maire de Gatineau m'a ébranlé, vous l'avez souligné tantôt, parce que lui-même, à l'intérieur des zones de requalification, il voulait maintenir les référendums puis il est aux portes de l'Ontario, où il n'y en a pas de référendum, en Ontario, là. Donc, c'est pour ça que votre solution d'équilibre équilibré, là, je la trouve intéressante, là. Je la trouve intéressante.

Par contre, mon questionnement... parce que Montréal, de toute façon, avec l'article 89 de la charte de la ville, Montréal peut soustraire à un référendum. Il y a cette possibilité-là. Donc, ce serait quoi l'avantage de Montréal d'adhérer à votre position équilibrée, exemple?

M. Savard (Christian) : Bien, c'est ça le problème. C'est que là, le projet de loi n'ayant plus d'approbation référendaire, l'article 89 devient un peu caduc, donc ne sert plus à rien.

Donc, ce qu'on fait, c'est que nous, on institutionnalise un petit peu, là, ou, en tout cas, on légifère l'article 89 pour que ça devienne systématique lors des changements de zonage. Donc, on fait en sorte que, disons, dans les zones de requalification, là, je ne sais pas, moi, le long du métro à Montréal, là où on veut densifier, donnons cet exemple-là, dans ces endroits-là, lorsqu'il y aura un changement de zonage — il ne faut pas oublier que c'est un régime d'exception, c'est quand il y a un projet spécial qui arrive — bien là, il y aura automatiquement une consultation publique comme un article 89.

Donc, au lieu de nous faire disparaître l'article 89, on propose que, finalement... si on veut, tu sais, caricaturer, c'est comme si l'article 89 se mettait systématiquement dans les zones de requalification à Montréal.

M. Laframboise : Sauf qu'il pourrait les perdre dans les zones... c'est parce que, pour lui, là — je me mets à la place du maire de Montréal — là, il les perdrait dans les autres zones, là, parce que là, présentement, il peut utiliser 89 partout, là. C'est juste ça.

M. Savard (Christian) : Est-ce qu'il peut utiliser 89 partout? J'ai comme un petit doute, mais effectivement il perdrait... On pourrait garder 89 aux grosses limites, là — là, je parle... je réfléchis en vous parlant — pour les autres zones, là, pour les projets d'une certaine envergure peut-être.

M. Laframboise : J'achète votre zone de qualification parce que la zone de requalification... Puis pourquoi? Parce que, quand tu dois modifier ton règlement puis tes plans d'urbanisme, tu dois quand même aller demander l'autorisation à Québec, là, tu sais, parce qu'avant... tu sais, ils vont avoir besoin d'une autorisation préalable par rapport à la zone de requalification, qui va probablement être autorisée, là, mais, quand même, c'est quelque chose qui est public parce qu'on doit faire une demande. Puis après que la zone, elle est autorisée, bien là, à ce moment-là, c'est ce qui s'applique.

Je suis d'accord avec vous, avec votre mémoire dans lequel vous dites : Bien, tant qu'à avoir un processus d'information puis de consultation, bien, faisons-le comme il faut. Puis ça, là-dessus, là, je pense que ce que vous nous apportez... puis je vais vous laisser le soin de nous développer les éléments, là, vous voudriez qu'on ajoute, là... tant qu'à faire un processus, vous voudriez qu'on le fasse, là... Puis allez-y, là, expliquez-nous.

M. Savard (Christian) : O.K. Bien, là-dessus, effectivement, on propose publication d'avis publics simples et clairs, accessibilité de l'information diffusée par voie électronique, mais également la porte peut-être de la zone concernée, mais également sur le site. C'est un truc qui m'a toujours frappé en Europe. Lorsqu'il y a des grands projets, là, il y a les détails sur le site de qu'est-ce que va être le projet. Des fois, ici, là, c'est marqué : Nouveau projet, venez acheter des condos. Les gens voient ça, ils disent : Hein, qu'est-ce qui se passe? Tu sais, il n'y a pas de détail. Donc, l'information est très importante, ça augmente le niveau de confiance.

Distinction entre les étapes d'information, de consultation et de prise de décision. Le BAPE est un peu sous ce modèle-là, le moment où est-ce que tu t'informes, le moment où est-ce que tu fais des propositions. Donc, là-dessus, ça me semble intéressant.

Et encore une fois, on le répète, la neutralité des gens qui émettent le rapport de consultation. Ça devient, après ça, un outil pour les citoyens de dire : Regardez, c'est ça que dit le rapport. Donc, il y a une espèce de distance qui se crée et qui donne un contrepoids aux citoyens versus le référendum qui peut juste, à la fin, là, parfois être juste du blocage.

M. Laframboise : ...que l'OCPM à Montréal, il faut être honnête, là, même les organismes qui veulent maintenir le référendum disent que l'OCPM fait un excellent travail, là. Donc, à quelque part... parce que c'est un tiers neutre. Donc, je pense que c'est ce qu'il faut faire. Le maire de Québec, lui, les tiers neutres, il aime moins ça un peu, il nous l'a dit, là, mais c'est un choix encore, c'est un choix que le gouvernement a à faire par rapport à ça, mais j'aime cette idée-là. Puis évidemment vous le prenez... vous dites : Bon, bien, écoutez, plutôt que de prendre Québec et Montréal puis l'appliquer au reste du Québec, pourquoi ne pas prendre la solution du reste du Québec puis l'appliquer à Québec et Montréal?

Moi, tout ce que je veux m'assurer, c'est que Montréal ne perde pas au change avec 89, là, tu sais. Je veux juste m'assurer que Montréal, là, ne se verra pas reculer parce que là, pour lui, là, il y a déjà des choses qui pourraient être faites. Mais ça, je pense que ça peut...

M. Savard (Christian) : Peut-être que Montréal pourrait s'appliquer... le 89 pourrait s'appliquer dans les zones qui ne sont pas sous zone de requalification ou sous PPU peut-être. Ce serait une avenue.

M. Laframboise : C'est ça. Puis, si on le fait à Québec, exemple, là, ça, ça veut dire qu'on l'oblige à avoir un OCPM là ou un OPCQ, là.

M. Savard (Christian) : Un OCPM ou un processus. À la grosseur de Québec, ils ont déjà pas mal de personnel qui s'occupe des questions de consultation. Donc, ce personnel-là qui irait dans un OCPM de Québec, ce ne serait pas très difficile.

M. Turgeon (Alexandre) : Franchement, on n'a jamais discuté de la question avec le maire de Québec, de cette question-là, mais je pense qu'il faut qu'il y voie les avantages. Il n'y a pas de perte de pouvoir de sa part d'avoir un processus indépendant qui tient les consultations, mais il faut qu'il voie les avantages sur la qualité du processus puis surtout sur comment les élus ne seront pas constamment sous pression, parce que c'est eux qui sont au bat à tenir ces consultations-là.

Moi, je pense qu'il y aura un gain incroyable pour ces élus puis pour la qualité des processus sur la confiance. Puis qu'il y ait un rapport aussi, parce que, souvent, on tient une consultation puis, après ça, bien, on annonce c'est quoi, la décision, mais il n'y a pas de rapport, on ne sait pas pourquoi on est arrivé à ça.

Alors, moi, je pense que la ville de Québec aurait tout à gagner à avoir un processus comme ça.

Le Président (M. Auger) : 15 secondes, M. le député.

M. Laframboise : Oui. D'autant plus qu'à la fin, bien, la ville n'est pas obligée d'accepter le rapport. C'est comme le BAPE, le gouvernement du Québec n'est pas obligé d'accepter le rapport du BAPE. Par contre, quand ils ont des points intéressants, c'est assez rare que les élus vont aller contre. Merci.

Le Président (M. Auger) : C'est tout le temps que nous avions. Donc, Mme Craig-St-Louis, MM. Savard et Turgeon, merci beaucoup pour votre participation aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 10)

(Reprise à 12 h 12)

Le Président (M. Auger) : Nous reprenons nos travaux en souhaitant la bienvenue aux représentants de l'Association du transport urbain du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation. Par la suite, nous allons procéder à une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous identifier et, par la suite, vous pourrez commencer votre présentation. À vous la parole.

Association du transport urbain du Québec (ATUQ)

M. Varin (Marc-André) : Alors, Marc-André Varin, directeur général de l'Association du transport urbain du Québec.

M. Mercier (Alain) : Alain Mercier, directeur général du Réseau de transport de la Capitale.

Mme Deschênes (Stéphanie) : Stéphanie Deschênes, secrétaire générale et chef des affaires juridiques du Réseau de transport de la Capitale.

M. Richard (Luc) : Luc Richard, directeur des services administratifs du Réseau de transport de la Capitale.

Le Président (M. Auger) : Merci et bienvenue. À vous la parole.

M. Varin (Marc-André) : Merci. Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, merci de l'invitation à cette commission pour faire part de nos commentaires, de nos recommandations sur le projet de loi n° 122. Bien que je suis bien entouré des gens du RTC, nous sommes ici pour représenter les neuf sociétés de transport en commun au Québec, alors non seulement Montréal et Québec, mais il y en a d'autres à travers la province également. Alors donc, c'est à ce titre que nous sommes ici, que nous avons revu le projet de loi et vous proposons des commentaires, des recommandations dans le cadre de notre mémoire.

À titre d'information, en 2015, les sociétés de transport du Québec ont acheté pour plus de 1,4 milliard en biens et services, et donc c'est un élément important. Nous sommes particulièrement interpellés par le projet de loi puisque nous sommes régis par la loi sur les sociétés des transports. Et l'ATUQ, pour vous dire quelques mots sur l'ATUQ, c'est pertinent également, parce que ce n'est pas seulement une association qui offre des services de représentation, mais l'ATUQ également, pour ses membres, est impliquée dans des achats regroupés particulièrement pour le matériel roulant. Alors, il y a des achats regroupés pour avoir des économies d'échelle et une certaine standardisation. Alors, on est impliqué dans ces achats-là. On a des forums d'échange également au point de vue technique pour appuyer les gens des différentes sociétés de transport.

Vous avez reçu notre mémoire, je pense, avec neuf recommandations. L'objectif, dans les 10 prochaines minutes, ce n'est pas de passer à travers toutes les recommandations, mais d'en signaler quelques-unes en particulier assez rapidement et naturellement de répondre à vos questions.

Alors, c'est toute la question de l'autonomie et de la flexibilité, si on comprend bien les fondements du projet de loi et ce qu'on accueille favorablement, naturellement. Et on voudrait mettre ça dans le contexte assez particulier des sociétés de transport, les sociétés de transport qui ont des activités commerciales, qui sont dans un contexte assez particulier, qui ont un lien naturellement avec leurs municipalités, un lien très, très fort avec les municipalités, mais qui sont dans un contexte quand même assez particulier.

À ce titre-là, on peut faire même certaines analogies entre les sociétés de transport et certaines sociétés d'État qui sont également dans des activités commerciales de cette nature-là. Et on ne dit pas qu'on veut aller jusqu'à la flexibilité et l'autonomie de sociétés d'État, mais il y a quand même une certaine flexibilité. Il y a certaines limites qu'on voit apparaître dans le projet de loi sur lesquelles on voudrait mentionner et faire certaines recommandations.

Alors, ça prend une certaine marge de manoeuvre. Il y a une certaine réalité commerciale qui doit se refléter du côté contractuel surtout et pour laquelle on a fait des recommandations.

Dans un premier temps, c'est l'objet de notre première recommandation, on traite, dans le projet de loi, des contrats d'emphytéose, qui n'est pas un instrument qui est communément utilisé par les sociétés de transport, mais, quand même, il y a des opportunités de ce côté-là. Si on peut penser, par exemple, à des terminaux, à des infrastructures que les sociétés de transport pourraient avoir besoin pour développer leur réseau dans des contextes immobiliers, commerciaux, résidentiels, ça pourrait être un genre de situation. Et donc on parle de partenariats, on parle d'ententes sur le long terme, on parle de financement sur le long terme, dans lequel le principe d'un appel d'offres comme on le connaît n'est peut-être pas tout à fait approprié. Alors, de ce côté-là, ça prend peut-être un peu plus de flexibilité pour s'assurer qu'on a le meilleur contrat, la meilleure entente possible à long terme pour bien appuyer les sociétés de transport.

Alors donc, de ce côté-là, on peut penser à des entrepreneurs qui ont une présence locale, qui sont dans un projet immobilier, et sous un principe qu'on connaît, d'appel d'offres, à ce moment-là, ça n'assurerait pas le meilleur match, la meilleure opportunité pour la société de transport. Et nous nous interrogions également sur l'opportunité d'assujettir de tels contrats à des procédures d'appel d'offres, alors que des contrats de vente immobilière, mêmes conditionnels parfois à certains travaux, n'y sont pas assujettis.

Notre troisième recommandation fait référence à l'ouverture de la négociation dans les processus pour la sélection de fournisseurs ou d'entrepreneurs, qu'on accueille tout à fait favorablement. On pense que c'est un élément important, qu'on voit souvent dans d'autres contextes, et c'est tout à fait approprié également dans le contexte des sociétés de transport. Cependant, ce qu'on note, c'est que ça prendrait certaines clarifications, selon ce qu'on voit au projet de loi, sur les différentes étapes, modalités ou limites de ce dialogue compétitif. Alors, ça fait référence à des éléments fondamentaux de l'appel d'offres, de la nature de l'appel d'offres, et peut-être que des balises seraient requises pour mieux encadrer ce dialogue, les principes, et s'assurer que tout soit fait dans les règles de l'art. Et ce serait peut-être des éléments qu'il faudrait ajouter, bonifier au projet de loi pour s'assurer qu'il n'y ait pas d'insécurité juridique, de zones grises, et qu'on soit plus en confiance de ce côté-là en ce qui a trait, donc, aux étapes du dialogue compétitif.

La question des compensations financières également dans les contrats, compensations financières qu'on voit souvent. Moi, j'ai été impliqué avec des offres dans le cadre de PPP, par exemple. Alors, ce genre de compensation financière là au proposeur qui n'est pas retenu est quelque chose qu'on voit habituellement et également nous sommes tout à fait favorables. On parle naturellement d'ententes assez importantes à ce moment-là.

Cependant, le projet de loi fait référence à un mécanisme d'autorisation préalable auprès du ministre avec des délais administratifs possibles. On a certaines appréhensions de ce côté-là, et ça serait peut-être mieux de fixer, dans la loi ou dans des règlements, possiblement, la nature de ces compensations financières là, quand peuvent-elles s'appliquer, de quelle façon elles pourraient être établies, qu'elles s'appliquent seulement aux soumissionnaires qui sont conformes et qui ont bien soumis. Alors, il y a peut-être des clarifications, de ce côté-là, qui pourraient venir encore une fois bonifier le projet de loi. Alors, ça, c'est l'objet de la recommandation n° 5 de notre mémoire. Alain.

• (12 h 20) •

M. Mercier (Alain) : Oui. Merci. Je vais poursuivre un peu. Nous souhaitons profiter de l'occasion pour aussi demander la bonification des outils contractuels mis à la disposition des sociétés de transport en commun afin de bénéficier des outils déjà utilisés par les organismes publics assujettis à la loi sur les contrats d'organismes publics. On peut se comparer à la Société des traversiers du Québec et d'autres entités similaires, si on se rappelle que les sociétés de transport disposent de tous les pouvoirs d'une personne morale pour réaliser toute autre activité commerciale. Donc, on se prend dans ce contexte-là.

Un exemple, par exemple, ça serait que les sociétés de transport devraient pouvoir considérer le coût total de l'acquisition d'un bien et lui permettre de les ajouter au prix soumis pour déterminer la soumission la plus basse au sens de la loi. On peut prendre pour acquis, quand il y a un niveau de transition dans la technologie ou il y a des changements importants dans les méthodes de livrer nos services...

Deuxièmement, dans le contexte de contrats à commande, lorsque les besoins sont récurrents ou que la quantité de biens, le rythme ou même la fréquence de leurs acquisitions sont incertains, les sociétés de transport pourraient retenir plusieurs fournisseurs afin de sécuriser l'approvisionnement d'une société. Imagine, on est des sociétés souvent... on a besoin de multiples produits comme des pneus, des moteurs, des activités de remorquage où souvent c'est dans les intérêts de maintenir un niveau de service, d'avoir plusieurs fournisseurs disponibles pour offrir les services au moment nécessaire.

Les sociétés souhaitent avoir la possibilité de procéder, dans certaines circonstances, à un appel d'offres en deux étapes, tant pour les contrats de services et d'approvisionnement que pour des contrats de construction, où la première étape, celle d'une démonstration de la qualité, est requise sans révéler l'identité des soumissionnaires.

Tous les soumissionnaires ayant démontré un niveau de qualité minimal seront invités à présenter une offre comportant uniquement le prix. Le contrat est ensuite adjugé au soumissionnaire présentant le meilleur prix parmi ceux qui ont atteint la qualité minimale. On prend, par exemple, des appels d'offres, par exemple, pour acheter des véhicules, où on fait des appels d'intérêt à l'échelle internationale. On reprocède après ça par un deuxième concours complet.

Le Président (M. Auger) : Juste un instant, M. Mercier. Juste pour savoir si... vous avez encore pour combien de temps votre présentation, parce que le temps dévolu de 10 minutes est terminé. M. le ministre. Oui? Vous pouvez continuer, M. Mercier.

M. Mercier (Alain) : Je vais terminer en dedans d'une minute. C'est bien?

Donc, le processus d'appel d'offres public dans de nombreuses étapes pourrait nous bénéficier à rendre le produit plus compétitif et de plus haute qualité à un meilleur prix pour les sociétés.

J'aimerais conclure aussi en mentionnant que la majorité des articles de la loi réfèrent à la notion de société. Toutefois, certains articles réfèrent au conseil d'administration. Une de nos recommandations, c'est de porter attention, d'assurer... que c'est nécessaire d'éviter tout l'ajout de contraintes à la gestion en désignant spécifiquement l'autorité habilitée à exercer un pouvoir plutôt que de déléguer le pouvoir à la société même. Donc, c'est une précision. On porte l'exemple... l'article 96.1 et 99.0.8, par exemple, où on désigne le conseil d'administration versus la société.

Et, pour finaliser, l'ATUQ propose aussi des mesures pour une gouvernance efficiente au niveau de la publication d'informations. On sait tous aujourd'hui, d'octroyer plus de flexibilité et modernité dans le mode de publication des règlements de la société, où actuellement on affiche seulement dans les publications de journaux... et aujourd'hui on peut rejoindre beaucoup, en grande partie, la population par d'autres moyens, à moindre coût. Et finalement de fixer au 31 mars plutôt qu'au 31 janvier la date limite de la publication de la liste des contrats de plus de 2 000 $ au même contractant, si l'ensemble dépasse 25 000 $.

Donc, j'aimerais vous remercier pour votre écoute.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons débuter les échanges. M. le ministre, il vous reste 14 minutes.

M. Coiteux : Bien, je vous remercie beaucoup. Alors, on va parler surtout de contrats, hein, de mode d'adjudication des contrats, parce que c'est vraiment là-dessus qu'a porté... Ça se peut qu'on ait quelques questions supplémentaires, là, mais ça va être d'abord et avant tout là-dessus.

Bon, de façon générale, je pense que votre demande, c'est de dire : Écoutez, élargissez aux sociétés de transport un certain nombre de modalités contractuelles qui sont permises aux organismes publics. De façon générale, c'est ça. Vous citez notamment les processus en deux étapes, c'est-à-dire on sélectionne d'abord sur la qualité. Donc, on n'a pas pondéré qualité-prix dans un premier temps. Et ensuite, évidemment, ceux qui se qualifient sur la qualité, bien là, on va à la question du prix. Vous parlez aussi du coût total d'acquisition, et puis je pense qu'il y en avait un autre aussi, mais notamment, en tout cas, ces deux-là pour commencer.

J'aimerais juste ça que vous nous disiez dans quel type de contrat ça s'appliquerait, l'un ou l'autre ou l'un et l'autre, dans votre réalité, là, votre propre réalité d'affaires.

Le Président (M. Auger) : M. Richard.

M. Richard (Luc) : M. le ministre, pour le coût total d'acquisition, je vais vous donner un exemple, qui est arrivé dernièrement, entre autres. Quand vient le temps de changer d'institution bancaire, on voit que les institutions bancaires peuvent offrir des rabais ou prendre en compte le coût que ça amène à une société, parce que, vous le savez, là, ça amène plein de dépenses supplémentaires de changer d'institution bancaire. Mais ça, c'est un cas simple. Si ce n'est pas pris en compte, il faudrait trouver la manière de l'inclure dans le coût total d'un transfert s'il ne vient pas avec des rabais. Ça, c'est simple.

Maintenant, s'il y a des coûts pour la société, dans d'autres cas, on pourrait penser changer de fournisseurs en TI, par exemple, où est-ce qu'il y a un coût d'apprentissage pour les gens de l'interne. Il faut... puis là en ce moment, ça, c'est plus difficile. On n'est pas capable de le faire. Il faut trouver un moyen de capturer ces coûts-là et de les ajouter aux coûts de la soumission dans le but de déterminer le prix le plus bas. Je ne sais pas si ça répond.

M. Varin (Marc-André) : Un autre exemple, sans trop rentrer dans la technicalité, on commence à regarder, naturellement, les véhicules électriques. Les véhicules électriques ont différentes infrastructures de recharge, il y a quelques options qui existent. L'infrastructure de recharge, elle va être plutôt au garage ou plutôt en route, sur les différents circuits. Donc, le bus, c'est une chose. L'infrastructure de recharge qui vient avec, ça va faire partie du coût total de l'exploitation de ce bus-là, de ce réseau d'autobus là. Ça pourrait être un autre exemple, également, et on va regarder ces modalités-là cette année, particulièrement.

M. Coiteux : Bien, ça, ça va avoir tendance vers des coûts élevés dans la première phase d'acquisition, mais ensuite vous allez comparer combustibles versus les coûts des recharges électriques, etc. Donc, ça pourrait être un profil différent sur les décaissements, mais néanmoins vous pourriez vous retrouver où l'acquisition des autobus électriques serait, dans certains cas, mieux, même si le prix d'acquisition, au jour 1, était le plus bas. C'est un peu ça.

Et là vous me dites qu'actuellement, là, dans les modalités de la loi telle qu'elles s'appliquent aux sociétés de transport, vous ne seriez pas capables de faire ça, de considérer ces facteurs-là?

M. Mercier (Alain) : M. le ministre, essentiellement, c'est notre réalité, parce que souvent, quand on va aller en appel d'offres, on est dans une demande de fournir un produit. L'exemple de l'autobus est très bien. On fait une demande pour aller en appel d'offres pour un autobus avec une spécification très particulière. On ne demande pas, par exemple, la fourniture de services auxiliaires. Je vais vous... simplement pour dire, par exemple, si on change de fournisseur, ça pourrait arriver que l'impact sur l'inventaire va être énorme. Il y a une nouvelle acquisition d'inventaire à faire avec d'autres fournisseurs, des sous-assemblés qui composent un bus.

Alors, souvent, on n'est pas dans la capacité, dans la définition d'un appel d'offres concret, de prendre en considération qu'il va y avoir des coûts futurs — pièces, outillage, formation — des fois, qui peuvent aller jusqu'à 10 % ou 15 %, le coût d'acquisition d'un actif de bus, par exemple, alors qui ne seront pas éligibles, dans notre approvisionnement, directement avec un fabricant de véhicules qui ne pourrait pas offrir ces services-là. Donc, on le fait en deux temps et, à la fin, on pourrait acheter un bus à un plus bas prix par un fournisseur, mais ça va nécessiter des achats supplémentaires, dans le futur, à cause de changement de technologies. On ne peut pas regrouper l'effet global des deux ensemble.

M. Coiteux : Ça m'amène à vous poser une autre question. Quand on travaille en coût total d'acquisition, il y a différentes façons de le regarder, mais une façon de le regarder, c'est le coût du changement, là, c'est-à-dire on est déjà avec un fournisseur et passer à un autre fournisseur, même si le prix semblait être bon au départ, peut entraîner d'autres coûts. Mais, des fois, c'est le contraire, c'est-à-dire on peut passer avec un nouveau fournisseur dont le prix initial va être plus élevé, mais, compte tenu de la technologie qu'on va utiliser à long terme, ça va être à meilleur coût.

Peut-être que vous allez nous dire que ça va dépendre des situations, mais néanmoins, si demain, là, vous étiez devant la possibilité de faire davantage d'appels d'offres basés sur le coût total d'acquisition, auriez-vous l'impression que vous changeriez plus souvent de fournisseurs ou vous resteriez plus attachés à vos fournisseurs actuels?

• (12 h 30) •

Le Président (M. Auger) : M. Mercier.

M. Mercier (Alain) : Oui, certainement. Ça dépend du cas particulier, ça dépend de quel marché qu'on parle. Si on regarde, par exemple, les autobus, présentement il y a deux fabricants en Amérique du Nord qui ont la capacité de livrer un autobus, alors ça dépend...

Une voix : Hybride.

M. Mercier (Alain) : ...hybride, mais il y a très peu de fabricants dans l'échelle. Un bon exemple, c'est qu'on est allé en appel d'offres pour un véhicule à l'échelle internationale. Donc, on espère, à la fin du processus, d'avoir un cycle de vie plus bas. Il y a des nouveaux fournisseurs, on va voir l'impact, mais on ne peut pas prendre pour acquis, dans notre processus d'évaluation, comment ça va s'établir parce que le marché est très limité dans ce secteur-là.

Quand on parle de technologies, embarquer des technologies pour information voyageurs, les nouvelles technologies pourraient améliorer la qualité de notre service. Il y a beaucoup d'exemples où on va avoir des bénéfices qu'on va développer dans le temps, donc, en effet, il pourrait y avoir l'effet que vous avez constaté qu'en effet on va avoir des baisses de coûts futures, mais souvent on ne peut pas les inclure dans notre évaluation à l'achat.

M. Coiteux : La question, maintenant, des contrats d'emphytéose. Vous avez débuté votre présentation là-dessus, vous dites : C'est peu utilisé jusqu'à maintenant. Il y a une part de ça qui semble être due à la rigidité des processus contractuels qui vous sont permis. Pourriez-vous juste élaborer un petit peu plus là-dessus? Peut-être là-dessus, puis en même temps nous dire, oui, mais quel genre de contrat aurait avantage à être conclu sous cette forme-là.

Le Président (M. Auger) : Me Deschênes.

Mme Deschênes (Stéphanie) : Oui. En fait, je pense qu'effectivement, jusqu'à maintenant, les sociétés de transport en général n'ont pas eu nécessairement à se servir ou n'ont pas décidé de servir de ce type de véhicules contractuels là. Toutefois, toujours dans l'objectif... l'objectif étant éventuellement de réduire le fardeau financier des sociétés de transport et de l'impact aussi au niveau des gouvernements, de plus en plus on tend à aller vers des partenariats avec l'entreprise privée afin de faire des montages juridiques et financiers qui nous permettent d'assumer une grande part de nos coûts de mise en place et ensuite d'exploitation. Alors, pour nous, dans les développements qu'on entrevoit dans le futur, notamment la mise en place d'infrastructures de transport en commun, ça pourrait être un véhicule très intéressant que de conclure avec un partenaire la possibilité qu'il prenne en charge, sous forme d'un contrat d'emphytéose, la mise en place de telles infrastructures, avec l'avantage que ça nous assure tout de même la pérennité des infrastructures parce qu'au terme ils reviennent dans le patrimoine financier de l'organisation.

M. Coiteux : Comme quoi, des ateliers d'entretien, des garages?

Le Président (M. Auger) : M. Mercier.

M. Mercier (Alain) : Oui, certainement. On arrive dans une période où la possibilité de développement d'infrastructures de transport en commun, c'est dans l'actualité, hein, avec l'investissement fédéral, alors il y a certains réseaux, comme le nôtre, qui vont faire des investissements, par exemple à des terminus. À cause des infrastructures qu'on va développer au niveau de l'aménagement global d'un terminus dans un milieu urbain, bon, on passe par l'acquisition du fonds de terrain. Ça, c'est la réalité. On est propriétaires de nos terrains où non seulement on veut construire un terminus, je vais utiliser cet exemple-là, mais on veut faire un développement immobilier autour de qu'est-ce qu'on appelle dans le jargon de transport un «transit-oriented development» pour incorporer l'aménagement global sur un environnement, mais ça va prendre un niveau de flexibilité à optimiser ces genres de transactions là au bénéfice d'une société de transport. Est-ce qu'il va y avoir, par exemple, à assumer les coûts d'entretien par un développeur, assumer un développement, une rente qui pourrait revenir aux sociétés de transport? Donc, il y a une notion de partage de risques qui devient nouveau pour les sociétés de transport, et ce risque-là prend un peu de flexibilité. C'est de nous donner des options au lieu de...

M. Coiteux : Juste pour bien... Est-ce que j'ai encore un peu de temps?

Le Président (M. Auger) : 3 min 30 s.

M. Coiteux : Juste pour bien comprendre, où est l'obstacle, actuellement? Est-ce que c'est parce que ce type de contrat là, typiquement, se fait de gré à gré? Quelle est la nature, là, de l'obstacle? Puis, si vous aviez une suggestion à faire, quelle est l'ouverture qui devrait être incluse dans la loi, dans ce projet de loi n° 122, pour permettre, là, dans le meilleur intérêt des utilisateurs et des citoyens, bien entendu, d'avoir accès à des formes contractuelles un peu plus flexibles?

Le Président (M. Auger) : Me Deschênes.

Mme Deschênes (Stéphanie) : En fait, ce que nous, on recommande, c'est que ce ne soit pas inclus au même titre que les autres contrats. L'emphytéose n'était pas incluse. C'est un avènement... C'est nouveau, c'est un nouvel avènement par l'introduction de cette disposition-là au projet de loi n° 122. Ce que nous, on recommande, c'est que ça soit exclu pour nous permettre soit de continuer de pouvoir négocier et de conclure ce type d'entente de gré à gré ou encore de nous permettre d'identifier nous-mêmes les règles d'adjudication de ce type de contrat là, là, par une politique de gestion contractuelle, par exemple.

Le Président (M. Auger) : M. le ministre. Oui, en complément, M. Varin.

M. Varin (Marc-André) : Un dernier exemple, également, pour être en communication avec les gens à Montréal, de la STM, on parle des stations de métro, également, qui sont dans des contextes similaires. On parle d'utilisation des droits aériens, dans certains contextes, qui appartiennent à la STM, qui pourraient être utilisés dans le cadre d'ententes avec des partenaires commerciaux, justement dans un contexte accessoire à l'opération du métro et du transport en commun.

Le Président (M. Auger) : M. le ministre.

M. Coiteux : Bien, c'est ça. Ce que je cherchais à comprendre, là, en relation avec ce qu'on propose dans projet de loi n° 122, est-ce que, pour avoir un tel partenariat financier à long terme, là, le mécanisme d'appel d'offres est quand même quelque chose qu'il rend possible ou c'est quelque chose qu'il rend tout à fait impossible?

Le Président (M. Auger) : M. Mercier.

M. Mercier (Alain) : Oui, certainement. Peut-être la souplesse qu'on recherche, c'est... On est habiles en des processus d'appels de propositions qui peuvent avoir une flexibilité d'identifier des partenaires, par exemple, plus limitatifs. Ça nous permet aussi de rentrer en négociation pour optimiser, comme j'ai dit, le transfert de risques, qui est nécessaire dans ces genres de contrat là, ou d'optimiser les rentes futures potentielles. Alors, un appel d'offres avec des règles d'adjudication fixes et fermes peut limiter le potentiel économique pour une société de transport versus maximiser les rentes potentielles dans le futur. Donc, c'est de garder une souplesse versus une rigidité.

Le Président (M. Auger) : 30 secondes.

M. Coiteux : Bien, simplement pour vous dire qu'on va étudier attentivement les propositions que vous faites, et on va les analyser avec tout le sérieux dont sont capables nos équipes, et on va être en contact avec vous. Merci.

Le Président (M. Auger) : ...poursuivre avec le porte-parole de l'opposition officielle pour 10 minutes, M. le député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à vous quatre, madame messieurs. J'aimerais vous amener sur la recommandation n° 5, soit de «prévoir que la possibilité d'accorder des compensations financières aux soumissionnaires soit encadrée par la loi, laquelle énoncera les conditions préalables à l'utilisation de cet incitatif». Donc, vous faites mention, dans votre mémoire, de votre appréhension possible de dédales administratifs pour obtenir ces autorisations-là dans le futur et vous nous proposez, dans le projet de loi en question, de limiter ou d'établir sur quels critères on pourrait effectivement donner ces compensations-là au lieu de demander l'autorisation à...

Le ministre a parlé beaucoup d'autonomie et de pouvoirs délégués aux municipalités. Là, on parle de pouvoirs et d'autonomie délégués aux sociétés de transport. Présentement, ça vous permet de faire à peu près ce que vous voulez, si ce n'est que de demander la permission, alors que votre prétention c'est : Encadrez-nous et nous n'aurons plus à demander la permission. J'essaie de comprendre en quoi votre proposition vous servirait plus que celle qui est maintenant dans le projet de loi en question, là.

M. Varin (Marc-André) : Bien, quand on regarde les projets majeurs, le processus administratif — les approbations requises à tous les niveaux, les différents ministères et municipalités — est très lourd, si ce n'est... Moi, je suis impliqué quotidiennement dans des acquisitions d'autobus. Si je regarde les niveaux d'approbation requis, le temps requis pour toutes ces approbations-là, c'est quand même assez substantiel. Alors, ce qu'on recherche, comme on le mentionne dans le mémoire, c'est un petit peu de flexibilité de ce côté-là. Ce n'est pas la possibilité de donner un chèque en blanc, mais c'est donner certaines balises et paramètres qu'on pourrait utiliser pour éviter, encore une fois, d'escalader cette décision-là pour avoir l'approbation pour aller de l'avant avec l'inclusion de telle clause ou modalité dans un appel d'offres.

M. Ouellet : Est-ce qu'à l'effet contraire, si, dans la disposition de la loi, on mettait une indication que le ministère doit vous donner une réponse un délai x, ça pourrait vous faciliter... Donc, on ne vient pas normer les critères, mais le ministère a l'obligation de vous fournir une demande dans, mettons, 15, 20, 25 jours, selon vos besoins, est-ce que ça, ça serait...

• (12 h 40) •

M. Varin (Marc-André) : Ça serait définitivement une amélioration de ce qu'on voit dans le projet de loi, peut-être pas autant qu'on voudrait avoir. Moi, je pense qu'on pourrait fonctionner avec des balises qui seraient très raisonnables et qui seraient déjà préétablies. Et, s'il y a exception, s'il y a situation exceptionnelle pour quelque raison que ce soit que je ne peux pas imaginer, à ce moment-là il faudrait escalader au ministre. Mais je pense qu'à la base on pourrait avoir certaines limites qui seraient imposées. Ça pourrait peut-être être un compromis.

M. Ouellet : Donc, si je comprends bien, les délais, c'est que vous devez savoir si vous allez avoir l'autorisation de donner des compensations avant même de lancer l'appel et, tant que vous n'avez pas ça, vous ne pouvez pas progresser dans les discussions ou dans les rencontres pour, exemple, en avant-projet, arriver à l'établissement des besoins initiaux, là.

M. Varin (Marc-André) : Exactement. Et, déjà, il y a déjà, quand on demande des dérogations, des modalités un petit peu différentes, il faut déjà escalader ces demandes-là particulières au ministre pour pouvoir les refléter dans l'appel d'offres avant d'aller en appel d'offres, avant de publier l'appel d'offres.

M. Ouellet : J'adore votre image, escalader, donc par étapes, ça semble une montagne. Je comprends que les gens du ministère et le ministre entendent aussi ces situations-là, qui vous interpellent.

Coûts d'acquisition, tout à l'heure, vous avez ouvert un peu — ouvert beaucoup, d'ailleurs — pourquoi vous demandez que ce soit, je vous dirais, pris en compte. Mais je vous entendais, puis... Est-ce que, dans le cas des nouvelles facilités pour la gestion de la fluidité, à savoir les sociétés de transport, je peux connaître, à temps précis, à quel moment le transport en commun est rendu... donc, bref, par application. Ce sont des logiciels qui sont vendus et, de ce que je comprends, ce sont des logiciels qui sont vendus avec des données fermées. Donc, une fois qu'on achète l'application, on est pris avec un état de fait, alors que, si vous demandez qu'on puisse calculer le coût d'acquisition, on pourrait faire affaire avec des entreprises qui permettent d'avoir des données, donc, plus ouvertes et donc on pourrait modifier dans le temps, selon les besoins et les usages de la société de transport... de meilleures applications.

Est-ce que je crois comprendre que, si on mettait ces dispositions-là de coûts d'acquisition à l'achat, ces données ouvertes qui permettent de modifier une application dans le temps, ce serait beaucoup plus avantageux, considérant l'évaluation des besoins versus l'achat d'une technologie qui est fermée et qui, malheureusement, ne survit pas dans le temps selon la modification des besoins que vous avez?

Le Président (M. Auger) : M. Mercier.

M. Mercier (Alain) : Oui, certainement. Je pense, l'exemple précis ne nous causerait pas de difficulté parce que notre pratique, dans notre industrie, c'est que les technologies où on va investir, les données appartiennent aux sociétés de transport, ça, c'est primaire. Alors, ça ne serait pas applicable, peut-être, dans ce contexte-là.

M. Ouellet : Dans le cas des contrats, parce qu'on en a parlé beaucoup, là, dans différentes sociétés d'État et d'organismes publics, est-ce que vous êtes tenus, effectivement, d'acheter des... ou de faire affaire avec des entreprises qui, malheureusement, vous offrent des solutions qui sont fermées dans le temps, qui ne vous permettent pas d'être évolutifs?

Le Président (M. Auger) : M. Richard.

M. Richard (Luc) : Non, on n'a pas cette obligation-là. Quand on part en appel d'offres, puis on l'a fait dernièrement, tu peux aller avec des solutions. Le débat ne serait pas tout à fait là parce que la question des données ouvertes, données fermées ou d'être propriétaire du code, ça peut se négocier avec les processus qu'on a actuellement.

Toutefois, la question des TI est un très bel exemple parce que, justement, il faut prévoir dans le temps l'évolution de ces technologies-là, et avec les façons de faire actuelles, c'est un petit peu plus difficile. Si on avait le coût total d'acquisition, bien entendu, ça forcerait les sociétés à évaluer à plus long terme et à inclure ça dans les appels d'offres. Cette flexibilité-là, ça nous amène un «burden» de plus, aux sociétés, mais tellement gagnant pour tous. Donc, de ce côté-là, ça pourrait être bénéfique, là, pour répondre à votre question.

M. Ouellet : Ça devient un enjeu essentiel pour votre clientèle, à savoir la fluidité, l'accessibilité, la rapidité ou, dans le cas qu'il y a des pépins, de quelle façon je peux être mieux connecté avec mes usagers. Je pense que ce serait un avantage pour vous.

Les avis publics, vous demandez d'avoir les mêmes dispositions que les municipalités pour ne plus être obligés de les faire paraître dans la presse locale parce que vous voulez rejoindre plus de clientèles. C'est ce que je comprends. Mais présentement vous pouvez le faire par les médias non traditionnels, à savoir le Web, les chaînes de lettres, les applications. Ça, vous pouvez déjà le faire, donc la loi ne vous empêche pas de le faire. Ce que je crois comprendre, c'est : Enlevez-nous l'obligation d'avis publics, les sommes sauvées pourraient être investies à une meilleure diffusion ou à une meilleure propension. Est-ce que je comprends?

Le Président (M. Auger) : M. Varin, la réponse.

M. Varin (Marc-André) : Oui, exact, c'est bien ça.

Le Président (M. Auger) : Trois minutes.

M. Ouellet : Oui, merci. Une autre recommandation, 6 : «De permettre d'adjuger à plusieurs fournisseurs un contrat d'approvisionnement, de services ou de construction répondant aux mêmes besoins et retenir ensuite les fournisseurs ou entrepreneurs selon leur disponibilité et leur rang respectif.» J'aimerais vous entendre sur cette spécificité-là de votre recommandation 6, à la page 13.

Le Président (M. Auger) : Me Deschênes.

Une voix : C'est le deuxième picot.

Mme Deschênes (Stéphanie) : Oui, alors, le deuxième picot de la recommandation 6, effectivement. En fait, c'est qu'il arrive qu'il soit opportun qu'on veuille, si on veut, regrouper certains besoins pour faire un appel d'offres. Je donne l'exemple : au lieu d'aller à la pièce chercher des services qu'on pourrait peut-être octroyer de gré à gré en raison des montants, on décide des fois de regrouper ces services-là pour en faire un appel d'offres général. Ça va arriver, par exemple, en technologies de l'information, ça peut arriver au niveau des architectures. Souvent, c'est ce qu'on appelle dans notre jargon des contrats ouverts où on va chercher, dans le fond, une liste de prix. Et, en fonction du soumissionnaire qui a obtenu le meilleur pointage final, le contrat lui est accordé pour une période de temps, et à ce moment-là, dans le temps, lorsqu'on a des mandats spécifiques, on se tourne vers l'adjudicateur du contrat pour faire réaliser le mandat. Comme ce n'est pas un contrat qui est fixe dans le temps, parce que vous aurez compris que c'est pour la réalisation de plusieurs mandats sur une longue période de temps, il arrive que notre approvisionnement soit mis en péril parce que les fournisseurs ne sont pas nécessairement disponibles dans le temps qu'on leur demande. Alors, ce qu'on aimerait avoir, à l'instar de ce qui se fait dans la Loi sur les contrats des organismes publics, c'est de pouvoir procéder à un appel d'offres, aller choisir, par exemple, les trois meilleurs fournisseurs, et, lorsqu'on a un besoin, on s'adresse au premier, et, s'il n'est pas disponible, on peut se retourner à ce moment-là sur le deuxième ou le troisième. Actuellement, notre loi est assez rigide et ne nous permet pas réellement de pouvoir assurer la sécurité de notre approvisionnement.

M. Richard (Luc) : ...

M. Ouellet : Oui, allez-y.

Le Président (M. Auger) : Oui, 45 secondes, M. le député.

M. Richard (Luc) : En complément, M. le député.

M. Ouellet : En complément, oui.

M. Richard (Luc) : Merci. Cette façon de faire pourrait aussi favoriser l'ouverture du marché parce que souvent un fournisseur n'osera pas soumissionner par crainte de ne pas toujours être capable de répondre au niveau de ressources demandées. Donc, ça pourrait à la fois faciliter l'ouverture des marchés.

M. Ouellet : Donc, on sécurise la chaîne d'approvisionnement mais aussi on obtient de meilleurs prix en ayant plusieurs compétiteurs qui, selon le niveau de disponibilité, pourraient être là sur la deuxième ou la troisième disponibilité si le premier n'est pas là. Est-ce que je comprends?

M. Richard (Luc) : Oui.

M. Ouellet : O.K. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Auger) : Merci. M. le député de Blainville, pour 6 min 30 s.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, madame messieurs. Moi, je vais me concentrer sur l'emphytéose parce que je pense que c'est important, là. Bon, je suis notaire de formation, donc... Évidemment, l'emphytéose, c'est un démembrement du droit de propriété. Donc, pour moi, c'est plus équivalent à une vente, tu sais, puis déjà on appelait ça le bail emphytéotique. Maintenant, on appelle ça... Parce qu'un bail, bien, théoriquement, tu n'es pas propriétaire, mais l'emphytéose fait que tu es quasi propriétaire pour un certain nombre d'années puis après ça tu remets ça au propriétaire en titre, là. Donc, vous, vous dites : De toute façon, on n'a pas l'obligation dans les ventes, puis là vous nous obligeriez à aller en appel d'offres pour les emphytéoses. Puis moi, je comprends ça, pourquoi vous avez... Mais informez-nous, là. Pourquoi vous avez besoin de la marge de manoeuvre, quand vous faites des achats, de ne pas toujours être obligés d'aller en appel d'offres? Parce que, finalement, vous avez des endroits précis, vous avez un pouvoir de négociation que beaucoup d'autres n'ont pas. C'est vous qui choisissez où vous mettez vos terminaux, vos... Donc, c'est ça qu'il faut faire comprendre à la commission, là, que, finalement, vous avez besoin de garder votre pouvoir de faire des acquisitions. Puis, dans ma tête à moi, une emphytéose, c'est comme une acquisition, là. Mais juste nous expliquer ça, pourquoi vous avez besoin de cette marge de manoeuvre là, s'il vous plaît.

Le Président (M. Auger) : Me Deschênes.

Mme Deschênes (Stéphanie) : Juste pour être certaine qu'on se comprenne bien, ce qui a été introduit par le projet de loi n° 122, c'est lorsque nous-mêmes — je veux juste m'assurer qu'on se comprend bien — sociétés de transport, sommes propriétaires du terrain et que nous voulions confier par emphytéose ou vendre?

M. Laframboise : Bon, O.K., donc, acquisition ou vente. Dans votre cas, c'est vente, là, bon.

Mme Deschênes (Stéphanie) : C'est ça. C'est ça.

M. Laframboise : Allez-y. Pourquoi vous avez besoin d'avoir votre marge de manoeuvre pour faire vos transactions sans être obligés d'aller toujours en appel d'offres public, là?

Le Président (M. Auger) : Me Deschênes.

Mme Deschênes (Stéphanie) : C'est sûr que, dans ce type de montage là, on parlait tout à l'heure que ça pourrait être un montage approprié pour, par exemple, des infrastructures majeures en matière de transport en commun. Je pense qu'il est important parce qu'on fait comme se départir, effectivement, du droit de propriété, en quelque sorte, pour une longue période, mais on demeure quand même liés parce qu'au retour l'infrastructure va revenir dans notre patrimoine. Alors, je pense qu'il est important qu'on puisse négocier les termes relatifs à ce type d'entente là. C'est important pour nous.

D'autre part, je vous dirais que les infrastructures de transport en commun ne sont pas nécessairement situées toujours de façon correspondante aux grands pôles de développement économique du secteur. Alors, déjà, d'attirer certains joueurs, d'attirer certains promoteurs privés pour investir avec nous dans ce genre d'infrastructure, ça peut déjà en soi être un défi. Alors, s'il faille qu'on soumette ces gens-là à un processus aussi contraignant qu'un processus d'appel d'offres avec qualification, etc., je pense qu'on pourrait créer l'effet inverse, et de venir, en quelque sorte, réduire notre marge de manoeuvre, et nous empêcher d'avoir le meilleur contrat possible.

• (12 h 50) •

M. Laframboise : Si je comprends bien votre exemple du concept TOD, là, il est frappant, là, c'est-à-dire qu'on installe un terminus mais on veut, autour du terminus, un complexe d'habitation. Et on fait un développement, donc, inévitablement, ce n'est pas garanti qu'il va y avoir une rentabilité. Donc, c'est ce que vous nous dites, là : Nous, on veut prendre un risque, on veut faire ça. Puis ça, évidemment, là, le PMAD oblige... Moi, qui est de Blainville, et tout ça, il va falloir vivre cette situation-là. Puis les TOD sont un bel exemple, il faut les installer. Donc, inévitablement, vous, vous dites : On doit être capables d'avoir la marge de manoeuvre nécessaire pour atteindre notre objectif. C'est un peu ça, là.

Une voix : C'est exactement ça.

M. Laframboise : Et sur les autres... Parce que probablement que ça n'a pas été fait juste pour les exemples que vous donnez là, là. Donc, quelle autre situation d'emphytéose que vous pouvez vivre?

Mme Deschênes (Stéphanie) : Au niveau des sociétés de transport? Essentiellement, c'est le développement immobilier, là, de nos grandes infrastructures, là, qui sont sur les prochains plans d'investissement qu'on a, là. C'est essentiellement sur ces aspects-là.

M. Laframboise : Parfait. Puis vous, vous n'utilisez jamais l'emphytéose pour acquérir des droits, là, pour vous-mêmes, là. Vous, vous êtes toujours acheteurs, vous n'êtes pas...

Mme Deschênes (Stéphanie) : C'est arrivé une fois, on a conclu un contrat d'emphytéose avec un partenaire pour l'installation d'un terminus, mais là ce n'était pas nous, effectivement, qui étions propriétaires du fonds. Nous sommes propriétaires des installations sur le fonds, mais là c'est donc l'inverse, à ce moment-là.

M. Laframboise : Par contre, c'est encore la même chose, vous ne pouvez pas demander un appel d'offres... Vous avez besoin de vous installer à tel endroit, tu sais...

Mme Deschênes (Stéphanie) : C'est fondamental.

M. Laframboise : C'est ça. Si vous faites un appel d'offres, tout ce que ça peut faire, créer une diversion dans la communauté puis dire : Bon, bien là, ce n'est pas là qu'on l'aurait mis, le terminus, mais l'appel d'offres a fait qu'il va être plus loin parce que c'était lui qui était le moins cher, puis ce n'est pas ça qui nous intéressait, là. C'est un peu ça.

Mme Deschênes (Stéphanie) : Tout à fait. Le situs de ces infrastructures-là est fondamental. Alors, c'est pour ça qu'on a besoin de conserver un libre marché pour être capables de négocier avec des promoteurs qui peuvent être intéressés à développer des investissements communs avec nous dans ces secteurs-là en question, là.

M. Laframboise : Tout à fait. Ça va.

Le Président (M. Auger) : Ça va, M. le député de Blainville?

M. Laframboise : Oui.

Le Président (M. Auger) : Donc, Me Deschênes, MM. Mercier, Varin et Richard, merci beaucoup pour votre participation aux travaux de la commission.

Et la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 53)

(Reprise à 15 h 6)

Le Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 122, Loi visant principalement à reconnaître que les municipalités sont des gouvernements de proximité et à augmenter à ce titre leur autonomie et leurs pouvoirs.

Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des vérificateurs généraux municipaux du Québec. Bonjour à vous quatre. Donc, je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour votre présentation, et par la suite nous aurons une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Donc, dans un premier temps, bien vouloir vous identifier, et par la suite vous pourrez commencer votre présentation.

Association des vérificateurs généraux
municipaux du Québec (AVGMQ)

Mme Galipeau (Michèle) : Alors, mon nom est Michèle Galipeau. Je suis la vérificatrice générale de Montréal et la présidente de l'Association des vérificateurs généraux municipaux du Québec. Et je vais vous présenter mes collègues dans ma présentation.

Donc, M. le Président, M. le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire, mesdames et messieurs les membres de la commission, c'est avec plaisir que l'Association des vérificateurs généraux municipaux participe aux auditions publiques sur le projet de loi n° 122 qui donne suite à la volonté exprimée par les unions municipales de redéfinir leurs institutions à la lumière des enjeux d'aujourd'hui. Nous vous remercions de votre invitation.

Notre association réunit les vérificateurs généraux des 10 municipalités du Québec de 100 000 habitants et plus. Je suis accompagnée aujourd'hui par trois d'entre eux, que je m'empresse de vous présenter : Mme Andrée Cossette, vérificatrice générale de la Ville de Trois-Rivières, M. Michel Samson, vérificateur général de la Ville de Québec, et M. Yves Denis, vérificateur général de la Ville de Lévis.

D'entrée de jeu, permettez-moi de vous rappeler le rôle du vérificateur général. Il consiste principalement à fournir au conseil municipal et aux citoyens un regard objectif et indépendant sur la qualité de la gestion de la Ville, qu'il s'agisse de l'utilisation efficace, économique et efficiente des ressources, de la conformité aux lois et règlements ainsi que de la fiabilité des états financiers.

Compte tenu de notre rôle et de nos observations sur les enjeux qui nous occupent, nous croyons être en mesure d'apporter des éléments de réflexion pertinents sur le travail mené jusqu'ici en vue d'accroître l'autonomie et les pouvoirs municipaux. En ce sens, l'Association des vérificateurs généraux municipaux est d'avis que cette redéfinition des institutions municipales doit s'accompagner de mesures de gouvernance et de mesures de reddition de comptes et de transparence. Notre intervention d'aujourd'hui portera donc essentiellement sur ces deux volets du projet de loi ainsi que sur l'adjudication des contrats.

Débutons par la gouvernance et plus particulièrement les rapports financiers. L'Association maintient premièrement qu'il faut soumettre la présentation de tout rapport émis par le vérificateur général au conseil et non au trésorier. Le vérificateur général, rappelons-le, relève du conseil municipal. C'est donc à ce dernier qu'il doit faire rapport. Nous croyons aussi que le rapport financier devrait être approuvé par le conseil municipal et non déposé à celui-ci par le trésorier. Nous nous interrogeons sur la portée du nouvel article 105.2.1 prévoyant que le trésorier puisse faire la correction du rapport financier, qui, rappelons-le, est audité.

• (15 h 10) •

Deuxièmement, nous sommes d'avis que la possibilité d'imposer aux vérificateurs généraux municipaux la production de tout autre document déterminé par le ministre pourrait entraîner une impasse sur le plan financier. En effet, le budget des vérificateurs généraux municipaux est fixe dans la loi et il est non compressible en raison des obligations prévues par la loi dont ils doivent s'acquitter. Par conséquent, l'ajout de tout document, effectué à la demande du ministre, pourrait compromettre la vérification des comptes et affaires de la municipalité, de l'optimisation des ressources et de la conformité. Une telle demande ne peut avoir préséance sur les obligations du vérificateur, tel que prévu à l'article 107.12 de la loi.

Troisièmement, l'association déplore l'absence de modifications apportées au projet de loi en ce qui a trait à la nomination obligatoire d'un comité de vérification, car, selon nous, la nomination d'un comité de vérification, composé notamment de personnes indépendantes et détenant l'expertise et les compétences requises en matière de vérification, constitue le meilleur moyen qui soit pour assurer le suivi de la reddition de comptes de l'administration.

Nous allons plus loin. Un tel comité de vérification devrait pouvoir jouer ce rôle et bénéficier de l'appui d'une charte ou de règles de régie interne répondant à certains paramètres et pratiques de saine gouvernance. Enfin, nous considérons que le comité de vérification devrait, entre autres, participer activement au processus d'approbation des états financiers et soutenir le conseil municipal à cet égard.

Au chapitre de l'adjudication des contrats, nous estimons que le projet comporte certains risques, surtout suite à la tenue de la Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans le secteur de la construction, devant laquelle, rappelons-le, notre association a déposé un mémoire.

Par ailleurs, l'association comprend que le projet de loi favorise le décloisonnement des règles d'attribution afin d'accorder plus de souplesse aux responsables de la gestion contractuelle municipale... en ayant les coudées franches, pourront optimiser leurs pratiques de saine gestion. Cela dit, nous sommes d'avis que cette démarche devrait s'accompagner d'un mécanisme de rétroaction auprès des soumissionnaires afin qu'ils soient mieux informés de l'évaluation qualitative de leurs soumissions et des moyens de bonifier leurs propositions futures. Un tel mécanisme existe déjà, et il est mis en oeuvre par les organismes publics assujettis à la Loi sur les contrats des organismes publics.

Contrairement aux règles en matière d'information et de consultation publique, aucune balise n'est fixée par le projet de loi quant à la politique d'attribution des contrats qui comportent une dépense entre 25 000 $ et 100 000 $. Or, il nous apparaît nécessaire de corriger cet aspect dans le projet de loi n° 122. Pourquoi? Pour prévoir, un peu à la manière de l'article 14 de la Loi sur les contrats des organismes publics, l'obligation d'évaluer systématiquement la possibilité, pour ces contrats précis, de procéder par appels d'offres publics ou sur invitation, de mettre en place des dispositions de contrôle relatives au montant de tout contrat ou de toute dépense supplémentaire qui s'y rattache, plus particulièrement lorsqu'il s'agit d'un contrat conclu de gré à gré, de se doter d'un mécanisme de suivi permettant d'assurer l'efficacité et l'efficience des procédures utilisées à l'égard de tout contrat dont le montant est inférieur au seuil d'appels d'offres publics.

Quant au champ d'application des règles d'attribution des contrats, prévu par les articles 573 à 573.3.4 de la Loi sur les cités et villes, l'association s'interroge sur la portée des pouvoirs de vérification de ses membres au regard de l'application de l'article 107.7. En effet, force est de constater que le champ de compétences décrit à l'article 107.7 pourrait exclure certaines entités par ailleurs assujetties aux règles d'adjudication des contrats en vertu de cette nouvelle disposition. De même, les organismes désignés par le ministère comme étant assujettis aux règles d'attribution des contrats ne sont manifestement pas couverts par l'article 107.7. C'est pourquoi il y aurait lieu de clarifier cette question afin de permettre aux vérificateurs municipaux de procéder aux vérifications de conformité d'usage auprès de ces entités.

Abordons maintenant la question de la reddition de comptes et de la transparence. Selon notre compréhension, l'article 474.1 de la Loi des cités et villes serait abrogé par le projet de loi et mettrait ainsi fin au dépôt du rapport du maire sur la situation financière de la municipalité. Or, selon nous, l'autonomie et les pouvoirs accrus conférés par le projet de loi ne doivent pas inciter les organisations à se soustraire à l'obligation de rendre des comptes, bien au contraire. D'autant que le rapport du maire a toujours donné au maire, qui est le chef exécutif de l'administration municipale, l'occasion de s'adresser aux citoyens en toute transparence.

Si ce mécanisme de communication avec les citoyens doit être revu, il doit être résolument axé sur le bilan des résultats au regard des objectifs initiaux et de la communication des objectifs pour la prochaine année tant en termes de gouvernance, d'administration que de projets d'immobilisations. Cet exposé assurerait ainsi une reddition de comptes accrue.

Enfin, toujours dans un souci de transparence et dans le but d'améliorer la reddition de comptes au sein des municipalités, nous croyons en l'importance de rendre obligatoire la publication des décisions du comité exécutif.

En terminant, l'association comprend que le projet de loi n° 122 vise à redéfinir les institutions municipales à la lumière des enjeux actuels, et ce, en leur accordant plus d'autonomie, de souplesse et de pouvoir. Toutefois, comme nous venons de le démontrer, dans un souci de responsabilisation et de transparence des municipalités envers leurs citoyens, cette démarche doit être bien encadrée et s'accompagner de mesures de gouvernance claires et de redditions de comptes rigoureuses. Afin de s'assurer de la conformité des décisions prises par les administrations municipales et de la saine gestion des nouveaux leviers mis à leur disposition, il est indispensable que le projet de loi tienne compte du renforcement du rôle de l'autonomie et de l'indépendance de la fonction du vérificateur général municipal.

Pour mieux faire leur travail en toute indépendance, sans que la loi ne permette quelque interprétation quant à leur possibilité d'ingérence dans les travaux ou de la gestion des fonds alloués, l'association profite de l'occasion pour rappeler qu'elle effectue depuis plusieurs années des demandes de modifications législatives. En ce sens, notre intervention d'aujourd'hui s'inscrit dans la poursuite des meilleures pratiques en matière de gouvernance et de reddition de comptes dans lesquelles se retrouve le rôle du vérificateur général, un des piliers essentiels de la gouvernance des municipalités, qui, rappelons-le, rassure le conseil municipal et les citoyens quant à la gestion efficace, efficiente et économique des fonds publics.

Voilà l'essentiel des observations qui découlent de notre analyse du projet de loi. Nous sommes maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons débuter la période d'échange. M. le ministre, pour les 15 prochaines minutes.

M. Coiteux : Oui, merci. Merci beaucoup pour votre présentation. Puis ce n'est pas un reproche, mais, comme on vient tout juste de recevoir le mémoire — écrit, du moins — on n'a pas eu le temps d'en faire l'analyse complète, donc certainement qu'il y aura des... On va faire ça puis on va faire très certainement ça, donc peut-être qu'on aura, à ce moment-là, d'autres consultations qu'on voudra faire ultérieurement avec vous. Mais je vais quand même poser quelques questions sur des aspects, là, qui m'intéressaient plus particulièrement. Ce n'est pas que le reste ne m'intéresse pas, mais je vais juste me concentrer sur un aspect pour commencer puis, ensuite, je vais aller sur des questions plus générales, si vous me permettez bien.

Concernant les contrats de 25 000 $ à 100 000 $, vous parlez notamment, là, de la possibilité de se doter de... ce qu'on prévoit d'ailleurs dans le projet de loi, sans nécessairement préciser ce qu'il y aurait à ce stade-ci dans un éventuel règlement ou recommandation, vous parlez d'une politique contractuelle puis là vous dites : La possibilité de regarder un certain nombre de choses ici. Et vous parlez notamment d'effectuer une rotation parmi les concurrents ou les contractants auxquels la municipalité fait appel ou de recourir à de nouveaux concurrents ou contractants. Est-ce que vous voyez ça pour tout type de contrat ou pour des contrats particuliers? Est-ce que vous voyez ça différemment... de la même manière, indifféremment de la taille des municipalités, des situations régionales?

• (15 h 20) •

Mme Galipeau (Michèle) : Écoutez, ce qu'on fait dans le projet de loi, c'est qu'on donne la possibilité... En fait, ce qu'on permet pour les 25 000 $ à 100 000 $, c'est que la politique de la municipalité va avoir préséance sur la loi. Alors, nous, ce qu'on dit, c'est que, dans les mécanismes potentiels qu'ils peuvent mettre, il faudrait qu'il y ait des éléments qui soient justifiés pour tout type de contrat, effectivement, qu'il y ait, entre autres, par exemple, des éléments au niveau de la rotation des concurrents. Donc, c'est un des éléments qu'on met.

Mais c'est sûr qu'aujourd'hui ce qu'on vient faire, c'est qu'on donne un pouvoir, aux municipalités, plus grand pour les 25 000 $ à 100 000 $. On dit : Votre politique va avoir préséance sur la loi. Alors, ce sera la municipalité qui décidera. Mais par contre on doit mettre des mesures. Et ce qu'on dit, nous : Ce serait un des éléments. Et c'est déjà prévu dans une loi provinciale, à l'article 14, sur les lois, donc on a repris exactement ces éléments-là en disant : Bien, un des éléments, ça pourrait être les rotations, effectivement, des fournisseurs de services quels qu'ils soient.

M. Coiteux : Bien, je pense en particulier à des petites municipalités ou pour des petits contrats où il y a peut-être juste un ou deux... deux entreprises ou même personne, des fois, qui sont en mesure de rendre le service dans la municipalité. Ou je pense aussi à des cas possibles, pour faire une rotation, ça serait passer d'un bon service à un mauvais service, puis un bon service, puis à nouveau un mauvais service. Est-ce que ça ne pourrait pas être quelque chose qui...

Mme Galipeau (Michèle) : On parle quand même de contrats de gré à gré, là, ici. Il va falloir justifier. On parle de 25 000 $ à 100 000 $. On donne une latitude aux municipalités. Elles devront... Comme on dit, il faut procéder par appels d'offres, et il va falloir justifier pourquoi elles le font. Elles auront, à ce moment-là, à documenter le pourquoi elles le font et leur décision, là.

M. Coiteux : Non, ça, je comprends, mais je voulais juste qu'on puisse...

Mme Galipeau (Michèle) : À ce moment-là, je pense que...

M. Coiteux : ...discuter ensemble que, des fois, ce qui pourrait être intéressant en soi devient compliqué dans certaines situations particulières de certaines municipalités.

Mme Galipeau (Michèle) : Elles auront à le justifier puis à rendre compte en conséquence, là.

M. Coiteux : Oui. Bien, il est prévu qu'elles doivent publier tous les contrats de façon transparente.

Mme Galipeau (Michèle) : ...2 000 $ et plus pour un minimum de 25 000 $, c'était déjà dans la loi, là, c'était dans le rapport du maire. Maintenant, on me dit de le mettre sur SEAO, mais en réalité, là, on n'explique pas vraiment pourquoi on a pris ce choix-là par rapport à un autre fournisseur de services, là. Alors, aujourd'hui, ce qu'on dit, c'est : Mettez des balises et que les gens viennent rendre compte du choix, et si, effectivement, dans certaines petites municipalités, il y a peu de fournisseurs de services par rapport à ça, bien, écoutez, ils auront à justifier, là, pourquoi elles ont choisi un fournisseur versus l'autre.

M. Coiteux : Est-ce que vous avez regardé aussi ce qui se fait... parce que, là, vous avez regardé l'aspect municipal, mais cette règle du 100 000 $ pour les contrats d'appels d'offres, elle tient actuellement pour les commissions scolaires, notamment. Est-ce que vous avez regardé comment ça se passe dans ce secteur-là?

Mme Galipeau (Michèle) : ...vérificateurs généraux des municipalités, là, je pense qu'on va s'en tenir à notre rôle à nous, là, des municipalités.

M. Coiteux : Mais est-ce que vous voyez des problèmes particuliers, dans les municipalités, que vous ne verriez pas dans d'autres entités du secteur public? Parce que c'étaient les seuls, là, qui n'étaient pas uniformisés de ce point de vue là avec le reste du secteur public.

Mme Galipeau (Michèle) : ...aujourd'hui, c'est que la loi permet de rendre de 25 000 $ à 100 000 $. Là, ce qu'on dit après ça, c'est : Il faut avoir des mesures de gouvernance et de la reddition de comptes. On ne dit pas qu'il y a un problème par rapport à le rendre ou ne pas le rendre. Ce qu'on dit aujourd'hui, c'est : Il faudra que ça soit justifié, il faudra qu'on rende compte de la reddition de comptes par rapport ça. Alors, c'est les éléments qu'on rajoute, là.

M. Coiteux : Je veux juste explorer une autre chose. Puis après ça je pense que...

Mme Galipeau (Michèle) : Écoutez, tout montant... Si vous me permettez.

Le Président (M. Auger) : Oui, juste un instant. Mme Galipeau.

Mme Galipeau (Michèle) : Oui. Tout montant... Écoutez, vous pouvez augmenter, là, de 25 000 $ à un autre montant. Ce qu'on ne requestionne pas, c'est qu'on voit que le projet de loi veut donner les coudées franches aux municipalités et que leurs politiques aient préséance sur la loi par rapport aux 25 000 $ à 100 000 $. Alors, ce qu'on dit aujourd'hui : C'est bien, O.K., si vous faites le choix de faire ça. Néanmoins, il va falloir qu'il y ait des mesures de gouvernance puis qu'il y ait de la reddition de comptes qui soit faite par les municipalités. Et, si elles choisissent de prendre un fournisseur de services comme vous expliquez, là, dans une plus petite municipalité, bien, elles devront justifier le pourquoi elles ont pris ce fournisseur de services là.

Le Président (M. Auger) : M. le ministre.

M. Coiteux : Ensuite, vous parlez d'instaurer des mesures favorisant l'acquisition de biens, de services ou de travaux de construction auprès de concurrents ou de contractants de la région concernée. Je veux juste comprendre dans quel état d'esprit vous avez inscrit cette disposition-là.

Mme Galipeau (Michèle) : ...qu'on avait ajouté, c'est vraiment l'article 14 de la Loi sur les contrats des organismes publics, puis ce qu'on a dit, c'est : De voir aussi à favoriser les gens de la région puis effectivement de donner une chance à pas juste un fournisseur de services, mais à plusieurs fournisseurs de services, là, qui peuvent faire affaire avec la municipalité, là. Ce n'est pas de concentrer...

M. Coiteux : ...contre ça, pas du tout, loin de là, mais...

Mme Galipeau (Michèle) : Encore une fois, c'est de le justifier, c'est de rendre compte des mesures qu'ils auront mises en place, là. On donne certains exemples, dans la présentation, des éléments qu'on pense qui pourraient être mis dans le projet de loi pour, en fait, que les municipalités rendent compte des choix qu'ils ont pris.

M. Coiteux : Non, non, je ne suis pas contre ça, là, forcément. C'est juste que je le mets en rapport avec votre rôle, notamment pour vérifier l'optimisation des ressources, tout ça. Parfois, ça peut aller à l'encontre de l'optimisation des ressources, de telles mesures, parce que ça impose une espèce de contenu local face peut-être à un concurrent qui serait un peu plus loin, qui aurait un meilleur produit ou un meilleur rapport qualité-prix. Je ne dis pas que c'est forcément le cas puis je ne suis pas contre les politiques de développement local, ce n'est pas ça que je dis. Je dis juste que je suis juste un petit peu surpris que ça vienne de vous, ce genre de recommandation là.

Mme Galipeau (Michèle) : Qu'est-ce qu'on a fait, c'est qu'on a repris vraiment l'article et on a dit : Il va falloir... En fait, notre message, globalement, c'est qu'il y ait des mesures de gouvernance, et qu'il y ait des redditions de comptes, et que ce soit public, et qu'on rende compte, à ce moment-là, de vraiment ces éléments-là par rapport aux municipalités, et que les municipalités justifient pourquoi elles ont fait ces choix-là par rapport à un autre fournisseur de services. Et, si le service est meilleur à l'extérieur, bien, ils auront à justifier leur choix.

M. Coiteux : Bien, est-ce que je comprends, dans le fond, que la démarche...

Le Président (M. Auger) : Juste un instant. Oui, M. le ministre, allez-y.

M. Coiteux : Est-ce que je comprends que la démarche, ici, c'est dire... vous cherchez une plus grande symétrie entre les politiques du gouvernement du Québec et celles des municipalités, vous voulez que ça soit assez uniforme, finalement, nos règlements, leurs règlements, que ça soit à peu près pareil?

Mme Galipeau (Michèle) : ...des exemples par rapport à ça, puis on se dit que c'est des éléments qui pourraient être considérés, effectivement, dans les municipalités, comme étant des éléments à considérer effectivement.

Le Président (M. Auger) : ...Mme Cossette?

Mme Cossette (Andrée) : Oui. À titre d'exemple, comme dans la loi 14, où est-ce que c'est spécifié, des barèmes de reddition ou d'encadrement de cette politique-là. Donc, c'est, à titre d'exemple, de venir préciser l'encadrement.

Le Président (M. Auger) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui. Merci, M. le Président. Vous savez, ce qu'on voit souvent dans nos mandats, lorsqu'on effectue nos travaux puis lorsque ce sont des contrats donnés de gré à gré, la question, souvent, ce n'est pas : Il n'aurait pas dû le donner — excusez l'expression — c'est : Comment vous le justifiez? C'est ce qu'on ne retrouve pas, souvent. Et je me permets de dire : De mon ancienne vie au Vérificateur général du Québec, c'était aussi une problématique importante. Ce que Mme Galipeau vous dit, le message qu'on vous livre, c'est : Il n'y a pas de problème à ce que ça se fasse de gré à gré, peu importe la limite, mais donnons un certain encadrement ou des mesures pour que les municipalités doivent justifier pourquoi le contrat est donné de gré à gré, une question de transparence puis de... Sinon, pourquoi il est donné? C'est là que ça laisse supposer toutes sortes de choses, parce que c'est difficile de venir porter un jugement par après.

Le Président (M. Auger) : M. le député des Îles-de-la-Madeleine. À peu près 5 min 30 s.

M. Chevarie : Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais ça, par rapport au rapport financier, qui est un élément de reddition de comptes, j'aimerais ça vous entendre, pour le bénéfice de nos téléspectateurs puis ici, savoir, habituellement, là, comment ça se passe quand vous présentez votre rapport financier. À qui et quel est... les étapes qui sont subséquentes.

Mme Galipeau (Michèle) : Le rapport financier, aujourd'hui, de par la loi, c'est le trésorier qui dépose le rapport financier. Ce rapport-là, il est audité, mais c'est un dépôt. Alors, c'est le trésorier qui a tout ça sur ses épaules, et c'est celui qui est responsable de la production. En fait, il y a un dépôt par le trésorier du rapport financier de la ville au conseil municipal, directement.

M. Chevarie : Bien, vous, comme firme de vérification, vous le présentez au trésorier?

Mme Galipeau (Michèle) : Nous, en fait, aujourd'hui, on fait rapport au conseil, mais... notre rapport est adressé au conseil, mais c'est le trésorier qui prend le rapport du vérificateur et qui le rajoute au rapport financier, qui le dépose au conseil municipal. Aujourd'hui, il n'y a pas... en fait, le conseil municipal n'approuve pas l'état financier, c'est un dépôt.

M. Chevarie : Et, dans les situations où il peut y avoir des notes aux états financiers et il peut y avoir également des recommandations, qui sont deux choses différentes, dans ces situations-là, de ce que j'en comprends, une note, c'est moins sévère qu'une recommandation. Non?

Mme Galipeau (Michèle) : Non, non. Il faut faire attention. La note aux états financiers fait partie intégrante du rapport financier, là. L'état financier... la note, elle est très importante, là. Pour un comptable, là, les notes aux états financiers sont auditées. Pour nous, c'est aussi important. Les informations qu'on met dans les notes sont importantes, aussi importantes, là. Le rapport financier, ça ne comprend pas juste les états, là. Au début, ça prend toutes les notes, c'est l'ensemble de tout ça.

Les recommandations de contrôle interne, aujourd'hui, dépendant, là, des villes, parce qu'on n'a pas une obligation d'avoir un comité de vérification, bien, elles sont déposées, effectivement, elles sont présentées souvent à l'administration, parce qu'il n'y a pas d'obligation par rapport au comité de vérification. Quand il n'y a pas de comité de vérification, il n'est pas présenté au comité de vérification.

Mais, dans mon exemple... par exemple, pour Montréal, lorsqu'il y a un comité de vérification, c'est sûr qu'on les présente au comité de vérification, mais ce n'est pas déposé au conseil. La loi n'exige pas que ces recommandations-là soient déposées au conseil. Ce qui est déposé, c'est le rapport financier, et toutes les notes aux états financiers font partie intégrante... Quand on parle de rapport financier, là, c'est tout, tout, tout compris, incluant les notes, toutes les pages, là.

• (15 h 30) •

M. Chevarie : Et, en général, le comité de vérification, c'est des élus ou des personnes indépendantes? Parce que dans votre...

Mme Galipeau (Michèle) : ...premièrement, ce n'est pas obligé aujourd'hui. Ce n'est pas une obligation, donc il y a des villes qui n'ont pas du tout de comité de vérification. Dans les grandes villes, je peux vous dire, c'est à peu près 50 % qui n'en ont pas.

Deuxièmement, dépendant... puisqu'il n'y a aucune obligation dans la loi, des fois c'est des élus, parfois il y a des membres indépendants. Dans certaines villes, il y a des membres indépendants; dans d'autres villes, il n'y en a pas. Là, c'est à la volonté de la ville, là...

M. Chevarie : O.K. Merci.

Mme Galipeau (Michèle) : ...puisque ce n'est pas légal.

Le Président (M. Auger) : ...Saint-François, 2 min 30 s, à peu près.

M. Hardy : Merci, M. le Président. Bonjour, tout le monde.

Écoutez, ma question est presque pareille à celui du député des Îles-de-la-Madeleine parce que vous marquez dans votre rapport que... «Nous nous interrogeons sur la portée du nouvel article 105.2.1 prévoyant que le trésorier puisse faire la correction du rapport financier qui, rappelons-le, est audité.»

J'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus, s'il vous plaît.

Mme Galipeau (Michèle) : ...ce qui arrive, c'est que le nouveau projet de loi permet au trésorier d'apporter des corrections. Normalement, lorsqu'un rapport financier est audité, on ne devrait pas avoir à apporter des corrections, même à la demande du ministre, sans passer par le vérificateur, parce que normalement, quand le vérificateur a émis son opinion, c'est qu'il représente, dans tous les aspects significatifs, la situation financière. Donc, normalement, ce rapport-là devrait être correct.

Alors, si on commence à dire : Bien là, fais-moi des changements, on permet de faire des corrections, bien, à ce moment-là, il faut absolument que le vérificateur soit mis au courant. Le vérificateur peut être en désaccord avec certaines corrections, là. L'état financier, il est audité. Lorsqu'on fait un travail d'audit financier, on vient émettre un rapport. Il y a beaucoup, beaucoup de travaux qui sont faits, et lorsqu'on émet le rapport et ce rapport-là est déposé au conseil, c'est que le vérificateur externe et le vérificateur général ont émis leurs rapports. Ils ont fait tout le travail d'audit pour s'assurer que ça représente significativement la situation financière.

Là, on vient ouvrir une porte en disant : Bien, il peut y avoir des corrections. C'est parce qu'on est... ce qu'on dit, c'est que c'est très dangereux. De un, normalement, il ne devrait pas y avoir de corrections importantes et, à ce moment-là, il faut que le vérificateur soit mis au courant s'il y a des corrections, quelles qu'elles soient. Mais normalement il ne devrait pas avoir des... Nous, on émet une opinion en termes des normes comptables. Il ne devrait pas y avoir de corrections, là.

M. Hardy : ...c'est dangereux qu'il y ait des corrections qui soient faites par le trésorier.

Mme Galipeau (Michèle) : ...le vérificateur ne soit pas au courant alors qu'il a émis une opinion sur les états financiers.

Le Président (M. Auger) : Merci. 15 secondes. Ce n'est pas suffisant?

M. Coiteux : Si jamais un collègue veut poser la question... À la page 7 de votre mémoire, là, vous avez des questionnements autour de la modification aux articles 573 à 573.3.4 de la Loi sur les cités et villes et le lien avec l'article 107.7. Si vous avez l'occasion de clarifier ça, j'aimerais bien. Sinon, on s'en reparlera.

Le Président (M. Auger) : Merci. Nous allons maintenant poursuivre avec le porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de René-Lévesque, pour les neuf prochaines minutes et 30 secondes.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à vous quatre.

Bon, vous avez parlé de votre... pas de votre interrogation, mais votre appréhension de maintenant permettre des appels d'offres entre 25 000 $ et 100 000 $. Puis pourquoi je veux qu'on aborde ça, c'est parce que... Bon, ce n'est pas la première fois qu'on en parle, ça a été mis dans les médias quand la disposition est apparue, et là on a vu des maires contents de cette nouvelle disposition-là et on a vu des citoyens plutôt sceptiques d'amener ce niveau-là. Tu sais, on sort de la commission Charbonneau, on a parlé, dans certains cas, de corruption dans certaines municipalités. Et là les maires, tout de suite, ont dit : Bien là, attendez, on n'est pas tous des comme ça, on n'est pas tous croches, faites attention, on est capables de bien nous gérer. Puis je pense que ça a transcendé aussi dans certaines discussions qu'on a eues avec les gens ici, notamment du milieu municipal.

Ce que vous nous dites, c'est que, si le projet de loi est plus d'autonomie, plus de pouvoirs, dans le cas de cette nouvelle disposition là, il faut que nos maires et nos mairesses soient capables aussi de jouer dans la cour des grands de la gouvernance et de la reddition de comptes. C'est ce que vous nous dites?

Mme Galipeau (Michèle) : Absolument.

M. Ouellet : Donc, si on veut mettre la main sur cette disposition-là, il faudrait être capable aussi, en contrepartie, d'être capable de justifier le pourquoi de cette décision-là. Et, dans le cas de l'exemple que vous nous donnez, justement, d'instaurer des mesures favorisant l'acquisition de biens et services régionaux, c'est d'expliquer avant pourquoi on le fait. Comme ça, quand la décision, elle est prise, bien, le soumissionnaire qui ne l'obtient pas, qui pose une question, va savoir que, dans le cadre x, c'était déjà prévu, tel qu'inscrit, qu'une municipalité peut, de gré à gré, procéder de cette façon-là.

Mme Galipeau (Michèle) : Un des éléments qu'on a ajoutés, qu'on a parlé justement, c'est la rétroaction par rapport au soumissionnaire qui n'a pas obtenu nécessairement la soumission. Même si on va de gré à gré, on peut inviter plusieurs soumissionnaires, là. Rien ne nous empêche de le faire, là. Je peux vous le dire que je le faisais même comme vérificateur général, mais ce qu'on dit, c'est qu'il faut donner rétroaction et être capable de justifier pourquoi cette personne-là n'a pas eu le contrat, mais de justifier pourquoi aussi on a fait ce choix-là. Ce n'est pas parce qu'on permet...

Aujourd'hui, ce qu'on demande dans le projet de loi, ce qu'on met, c'est qu'on dit : On veut donner plus d'autonomie, plus de latitude aux villes parce qu'elles sont plus grandes. Puis effectivement, vous l'avez bien dit, nous, ce qu'on dit, c'est : Si vous voulez avoir plus d'autonomie, pas de problème, mais il faut que vous puissiez rendre compte aux citoyens et de justifier le pourquoi de vos décisions et de rendre compte aussi, de dire... par exemple, un des exemples que j'ai vus dans la loi sur les organismes publics, s'il y a des excédents de plus que 10 %, de venir... de justifier certains contrats, donc de venir justifier et de venir rendre compte aux citoyens. Parce qu'en bout de piste, du moins, je l'espère, c'est... Je pense que le projet de loi, à la toute fin, c'est qu'on vient mieux servir les citoyens. Alors, si on veut mieux servir les citoyens, il faut qu'on rende compte aux citoyens de ce que l'on fait des fonds publics. C'est hyper important.

Donc, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut mettre des mesures de gouvernance en termes de contrat. C'est donc dire... de venir justifier le choix que l'on a fait, s'il y a des dépassements, de venir l'indiquer, de rendre compte de l'information puis de mettre des balises, certaines balises puis pouvoir avoir l'information disponible.

M. Ouellet : Écoutez, sur la notion, est-ce qu'un trésorier peut réécrire un rapport du vérificateur général, ça n'a aucun sens. Ça, je suis d'accord avec vous, là, c'est...

Mme Galipeau (Michèle) : En fait, le rapport du vérificateur général ne peut pas être réécrit par personne d'autre que le vérificateur général.

M. Ouellet : C'est ça, c'est ça. C'est votre compétence qu'on va chercher. C'est votre opinion.

Mme Galipeau (Michèle) : Mais, dans nos normes comptables, je peux vous dire qu'à partir du moment où on utilise le rapport du vérificateur général dans n'importe quel document, on doit obtenir son approbation. Ce sont nos normes. Et aujourd'hui, si on amène des correctifs, tu sais, ce qu'on vient dire, c'est que le vérificateur qui a fait son audit et qui a émis une opinion, bien, on vient dire : Écoute, il y a des changements à apporter. Alors, le vérificateur, normalement, quand il a émis son opinion, selon lui, l'état financier ou le rapport financier qui a été produit représente fidèlement la situation financière dans tous les aspects significatifs. Alors, ça, c'est important, là.

M. Ouellet : Vous accordez une attention particulière au fait qu'au lieu que votre rapport soit déposé, il soit approuvé. Selon vous... Pourquoi la nuance?

Mme Galipeau (Michèle) : Aujourd'hui, les municipalités ont fait... c'est le trésorier qui a, je dirais, la responsabilité sur ses épaules de déposer le rapport financier. On veut donner plus d'autonomie aux municipalités, et en matière de gouvernance, normalement, une entreprise va ou un organisme va autoriser ses états financiers. Ça veut dire qu'il va falloir qu'il soit beaucoup plus... c'est une grande responsabilité vis-à-vis le citoyen. Lorsqu'on autorise, ce n'est pas le dépôt. On ne donne pas seulement au trésorier, qui fait partie de l'administration municipale. Là, on donne au conseil municipal l'exigence...

Nous, ce qu'on recommande, c'est qu'il autorise l'état financier. Moi, je peux vous dire qu'à Montréal j'ai 18 paramunicipaux en plus de la ville de Montréal, mais les 18 paramunicipaux ont un conseil qui autorise leurs états financiers. Ça veut dire, on comprend l'état financier que l'on a et on l'autorise parce que le conseil municipal, c'est l'instance suprême dans une ville. Elle devrait autoriser son état financier.

M. Ouellet : ...accepte ce qui est à l'intérieur.

Mme Galipeau (Michèle) : Je comprends ce qu'il y a dans l'état financier.

M. Ouellet : Dans le cas de notre commission, je ne sais pas si vous avez pu suivre...

Mme Galipeau (Michèle) : Je pourrais peut-être juste rajouter une chose. C'est qu'aujourd'hui les conseils municipaux approuvent leur budget déjà alors que le rapport financier vient rendre compte, par rapport au budget, quels sont les résultats. Pourquoi il ne viendrait pas approuver ça et pourquoi il ne viendrait pas expliquer aux citoyens que voici le budget que j'avais, voici les résultats que j'ai obtenus et expliquer les variances importantes? Dans les municipalités, aujourd'hui, on a des budgets, on a des plans triennaux d'investissement, on a beaucoup de documents où on fait beaucoup de promesses. Nous, ce qu'on dit : O.K., les promesses, maintenant, il faut rendre compte par rapport aux promesses.

M. Ouellet : Lors de la commission, je ne sais pas si vous avez pu suivre tous les travaux, mais on a rencontré plusieurs groupes, puis un des groupes nous a parlé de l'opportunité que d'autres municipalités de moins de 100 000 soient assujetties au vérificateur général. Ils soumettent la proposition de 34 000... en haut de 35 000 jusqu'à 100 000.

J'aimerais vous entendre là-dessus. Qu'est-ce que vous en pensez? Parce que vous parlez beaucoup de reddition de comptes, de gouvernance. On veut donner plus d'autonomie, et on sait que le vérificateur général, par ses travaux, par la résultante, peut avoir un effet intéressant sur la modification des comportements, mais aussi une certaine reddition de comptes vers les citoyens sur certaines décisions qui ont été prises par le passé et la conséquence sur l'état des finances de la municipalité.

• (15 h 40) •

Mme Galipeau (Michèle) : Il est évident pour nous que le vérificateur général, c'est un pilier de la gouvernance. C'est un rapport qui vient rassurer le conseil municipal et les citoyens quant à la gestion efficace, efficiente et économique des fonds publics. Mais je vous dirais, avant d'entreprendre... puis il y a différents modèles, là, qu'on peut prendre pour augmentation la gouvernance.

Mais je vous dirais aujourd'hui, moi, comme représentante de l'Association des vérificateurs généraux municipaux du Québec pour les 10 plus grandes villes, je vous dirais, avant de faire ça, depuis plusieurs années, l'association demande à avoir des modifications au niveau législatif. Et pour nous, aujourd'hui, je vous dirais : Avant d'augmenter le nombre de vérificateurs généraux, et je ne peux pas vous dire qu'on est contre ça, là, je vous dirais qu'il est important d'apporter les modifications législatives dans la loi actuelle pour donner aux vérificateurs généraux toute la latitude pour pleinement remplir leur mission qui est de rassurer le conseil municipal et les citoyens quant à la gestion efficace, économique et efficiente des fonds publics.

M. Ouellet : Combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Auger) : 1 min 30 s.

M. Ouellet : Écoutez, on aurait beaucoup de choses à redire là-dessus, mais je veux juste prendre la balle au bond. Le ministre l'a dit à quelques reprises, parce que ça fait plusieurs projets de loi que nous avons ensemble et nous abordons la façon d'améliorer le travail et les dispositions législatives qui touchent les vérificateurs généraux, son intention... je ne veux pas lui remettre les mots dans la bouche, mais son intention, c'est d'avoir, à un autre moment, ce genre de discussion là qui pourrait être vue de façon plus globale. Oui, on pourrait parler des VG dans d'autres municipalités, mais ce que je vous entends, il y aurait d'autres dispositions et d'autres améliorations que nous pourrions apporter. C'est ce que je comprends?

Alors, je présume que l'intention et l'écoute du ministre est au même endroit aujourd'hui de ce qu'on a pu entendre et qu'assurément nous pourrions nous revoir dans une autre disposition par rapport au vérificateur général. Ça serait votre souhait.

Mme Galipeau (Michèle) : Oui, puis je crois que ce dont on vous parle aujourd'hui au niveau gouvernance et reddition de comptes doit être en parallèle avec le projet de loi n° 122. On ne peut pas donner plus d'autonomie sans apporter ces règles de gouvernance et reddition de comptes là en même temps.

M. Ouellet : Donc, rapidement, nous devrions travailler sur un projet de loi qui adresse ces questions-là et qu'ensemble on trouve...

Mme Galipeau (Michèle) : En parallèle, les deux en même temps. Et, quand je dis je crois, là, nous croyons... excusez-moi.

M. Ouellet : Nous croyons, oui.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant poursuivre avec le porte-parole de la deuxième opposition, M. le député de Blainville, pour 6 min 30 s.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Mesdames messieurs, merci. Quand même Montréal, Québec, Trois-Rivières, Lévis, là, on a une bonne orientation du Québec, là.

Moi, je suis tout à fait d'accord avec vous, là, par rapport à la reddition de comptes. C'est sûr qu'un projet de loi comme celui-là, qui fait passer les contrats de gré à gré de 25 000 $ à 100 000 $, a un impact peut-être différent chez vos membres, mais un impact important. Et la même chose pour la nouvelle façon d'aller en appel d'offres, là, parce que, là, ce n'est plus le plus bas soumissionnaire, puis c'est correct, on peut tous être en accord avec ça, mais il y a une reddition de comptes à la fin, puis ça, ça m'inquiète depuis les tout débuts, là.

J'ai regardé le rapport de votre prédécesseur à Montréal, là, parce qu'il a souligné le problème d'indépendance, puis je vois que vous avez les mêmes préoccupations. Est-ce que vous sentez que vous avez la pleine indépendance présentement?

Mme Galipeau (Michèle) : Écoutez, je pense que tous les gens qui sont assis ici, en avant, veulent beaucoup l'indépendance, mais au cours des années, certains vérificateurs généraux ont vécu des choses qui ont touché leur indépendance. Et là ce qu'on dit, quand on n'a pas...

Je vais donner... un des premiers dossiers qu'on demande depuis des années, c'est le budget, les ressources suffisantes. En donnant pleinement toutes les ressources nécessaires, je dirais, un plancher à 300 000 $, pour une grande ville, pour faire l'audit d'optimisation, l'état financier, l'audit d'états financiers de conformité aux lois, il faut comprendre que nous avons le même rôle. Québec est un pilier à ce niveau-là, là, en termes de gouvernance, avec les vérificateurs généraux municipaux par rapport... On a le même rôle que le Vérificateur général du Québec et le Vérificateur général du Canada, mais par contre il faut que nous ayons... Nous, on a des obligations à faire. En audit financier, on fait les mandats. Par la suite, on regarde les fonds qu'il nous reste. Il faut voir qu'est-ce qu'on a de disponible.

On a l'indépendance, mais, au cours des années, nos collègues et même moi, là, j'étais à Laval avant, on a vécu des situations où on a interprété la loi différemment, et ça, quand les vérificateurs généraux doivent se battre à coup d'avocats avec les fonds publics pour défendre leur indépendance... ce qu'on voudrait aujourd'hui, c'est que les modifications soient apportées à la loi pour donner pleinement... il n'y ait aucune source d'interprétation différente.

Vous parliez de mon prédécesseur, mais mon prédécesseur, je veux dire, c'est public, a vécu des choses où il a été... des caméras, ses courriels, des choses qui sont inadmissibles. Tout ce qu'on veut, c'est que... le vérificateur général, c'est un pilier de la gouvernance, et il est là pour rassurer le conseil municipal et les citoyens. C'est son rôle, mais laissons-le faire son travail avec tous les remparts, tous les garde-fous pour qu'il n'y ait pas d'interprétation et qu'on puisse faire notre travail en paix pour sept ans. On est là pour sept ans.

M. Laframboise : Vous avez tout à fait raison, parce que je regarde, là, entre autres le rapport de votre prédécesseur, là, bon, il a fait des recommandations, les suivis. Ma question : Avez-vous le personnel? Tu sais, c'est la même chose que la Vérificatrice générale du Québec. Elle, elle fait sa recommandation, mais elle, après ça, elle peut dire : Je vais faire une enquête et j'envoie mon personnel pour faire le suivi. Là, vous, je ne suis pas sûr que vous êtes capables de tout faire la même chose.

Mme Galipeau (Michèle) : Moi, à Montréal, c'est différent, là, j'avais un beaucoup plus gros budget. Il faut comprendre tout ça, là, mais, si je parle de ma collègue de Trois-Rivières à côté de moi, là, écoutez, un plancher à 300 000 $ pour faire le même métier que moi, moi qui ai un budget de près de 6 millions, on va se le dire, bien, ce n'est pas acceptable, là. Elle a le même métier que moi, là, aujourd'hui.

Mme Cossette (Andrée) : On demande un budget minimum plus élevé pour être en mesure d'avoir les ressources nécessaires pour bien faire notre travail. Ce sont les mêmes obligations. Qu'on soit à Trois-Rivières ou à Montréal, les obligations sont les mêmes.

M. Laframboise : Et d'être capable de faire le suivi, lorsque vous ciblez un problème, de dire : Bon, bien là, oui, mais il faut que j'aie les ressources pour être capable de faire le suivi. Sinon, ça devient quelque chose qui fait...

Puis c'est ça qui est inquiétant, dans le sens où... puis je l'ai dit, ce n'est pas la première fois, là, depuis le début de l'audition de témoins, c'est de dire : Ça nous prend une contrepartie. Là, vous, vous nous dites : C'est la reddition de comptes, puis c'est ça que ça prend... parce que nous, pour qu'on dise aux citoyens maintenant : Bien là, les contrats, c'est de 25 000 $ à 100 000 $. Drummondville, là, ça va être 47 %, puis avant, c'était aux alentours d'un petit peu moins que 30 %. Ça, ça veut dire que tu as 20 % des contrats qui évidemment vont pouvoir se donner de gré à gré. Il faut être capable de... S'il y a un problème, ce n'est pas tout le monde que... Vous, vous avez le BIG à Montréal, là, puis, au pire, vous pouvez peut-être faire un téléphone, puis appeler le BIG, puis dire : Je pense qu'il y a un problème, là, parce que...

Mme Galipeau (Michèle) : ...exemples qui ont sorti dans les journaux, un élément qui a été fait par mon prédécesseur sur les contrats de déneigement, où le vérificateur général voyait potentiellement... a fait un mandat et, à la fin, a dit : Il y a potentiellement des éléments de collusion... et donné à BIG. Mais pas tout le monde a les moyens d'avoir un BIG. On va s'entendre, hein, on va se le dire.

Et l'élément que M. le ministre parlait précédemment, sur la portée, là, du 573 à 573.3.4, c'est la même réalité pour BIG, là. Il y a la même disposition que moi, là. Donc, ça, ce n'est pas tout le monde qui a ces moyens-là financiers.

Par contre, le Québec a dit qu'il voulait des vérificateurs dans une loi il y a plus de 15 ans, des vérificateurs généraux municipaux pour les villes de 100 000 et plus, et, depuis 15 ans, le plancher n'a pas varié. Le coût de la vie a changé, on va se le dire, et on donne... On a tous le même métier.

M. Laframboise : Et si la Vérificatrice générale... parce que j'étais là, elle nous disait qu'elle n'avait pas les budgets même pour pouvoir être capable d'aller chercher du personnel, parce qu'elle trouvait qu'elle avait des contraintes. Donc, si elle, elle en a, des contraintes, vous avez sûrement des contraintes à avoir du personnel dans chacune de vos boîtes, là. Parfait. Donc, merci beaucoup, messieurs dames.

Le Président (M. Auger) : Mmes Galipeau et Cossette, MM. Denis et Samson, merci beaucoup pour votre participation aux travaux de la commission.

Je vais suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 49)

(Reprise à 15 h 51)

Le Président (M. Auger) : Nous reprenons nos travaux en souhaitant la bienvenue aux représentants de l'Alliance Ariane. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation, et, par la suite, nous procéderons à une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous identifier, et, par la suite, vous pourrez commencer votre exposé. Donc, à vous la parole.

Alliance Ariane — Pour une politique nationale de
l'aménagement du territoire et de l'urbanisme

Mme Robin (Jeanne) : Bonjour. Alors, merci de nous accueillir ici. Donc, je suis Jeanne Robin. Je coordonne les travaux de l'Alliance Ariane qui regroupe des experts et des organisations, je dirais, passionnés par les questions d'aménagement du territoire et qui ont à coeur qu'elles deviennent une priorité au Québec. Je suis accompagnée de Mme Marie-Odile Trépannier qui est urbaniste émérite et membre du comité directeur de l'Alliance Ariane.

Les points qu'on va vous présenter aujourd'hui sont le fruit du travail de plusieurs organisations membres de l'Alliance, et donc ce mémoire est soutenu à la fois par la Fondation David-Suzuki, Héritage Montréal, l'Ordre des architectes du Québec, le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec, l'Union des producteurs agricoles et Vivre en Ville ainsi que par Clément Demers et Marie-Odile Trépanier qui sont également membres du comité directeur de l'Alliance Ariane.

Alors, l'Alliance Ariane était particulièrement intéressée par le projet de loi n° 122 qui, pour nous, s'inscrit dans la redéfinition des relations entre l'État et les municipalités, qui est un dossier d'intérêt pour l'Alliance Ariane puisque l'État et les municipalités se partagent la compétence de l'aménagement du territoire. Donc, c'est pour ça qu'on l'a consulté avec attention. Vous verrez que les points qu'on va porter à votre attention aujourd'hui concernent principalement des éléments qu'on suggère d'ajouter dans les attendus du projet de loi et puis des points sur ce qui devrait constituer la suite, une fois que ce projet de loi sera adopté, donc davantage en contexte et puis des étapes ultérieures. Pour les points de détails, un certain nombre d'organisations de l'alliance ont présenté ou présenteront des mémoires distincts.

Donc, je voudrais commencer avec trois principes qui sont présentés dans notre mémoire. Donc, tout d'abord, considérant qu'il s'agit de reconnaître les municipalités comme gouvernements de proximité et de redéfinir la relation de l'État avec ces organisations, l'Alliance Ariane suggère de réaffirmer le caractère partagé de la compétence d'aménagement du territoire, et cela, dès le préambule du projet de loi pour, c'est ça, le reconnaître comme compétence partagée.

Au niveau des principes d'encadrement de la loi, l'Alliance Ariane recommande également de reprendre certains des éléments qui ont déjà figuré dans le projet de loi n° 47 qui devait réviser la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et qui établissait clairement que les nouvelles prérogatives et les nouvelles compétences données aux municipalités devaient s'inscrire sous l'égide du développement durable. Donc, on recommande, là encore, d'insérer, dans le préambule ou dans un nouvel article 1, une référence explicite aux principes énoncés dans la Loi sur le développement durable, qui fait partie de l'arsenal législatif de l'État québécois et qui serait utile pour expliciter, disons, les intentions de l'État dans ses relations avec les municipalités en tant que gouvernements de proximité.

Par ailleurs, l'Alliance Ariane a regardé avec attention toutes les mesures qui sont contenues dans le projet de loi. Il nous apparaît que ces mesures-là vont avoir divers effets et il importe de mesurer ces effets-là. On va reconnaître des nouveaux pouvoirs, on va modifier la reddition de comptes des municipalités, on va changer les relations des municipalités avec l'État, mais aussi avec leurs citoyens, et, à notre avis, c'est important de pouvoir faire un exercice d'évaluation de ces effets-là par rapport à l'application des principes du développement durable, par exemple, par rapport aux objectifs de la loi elle-même, par rapport aux effets sur la démocratie municipale.

Donc, c'est pour ça qu'on suggère de préciser dans les attendus que l'État, les gouvernements de proximité, la société civile participeront à une évaluation quinquennale des effets de cette loi-là qui est fondatrice pour les gouvernements de proximité. Et on suggère également qu'il y ait la création d'un observatoire de la gouvernance de proximité, qui serait chargé, en fait, de permettre cet exercice quinquennal là, puisqu'on sait qu'un exercice quinquennal, ça se prépare dans les cinq années précédentes, finalement.

Donc, c'est nos suggestions en ce qui concerne les principes qui devraient encadrer la loi. Après, on a un certain nombre de recommandations un petit peu plus précises sur des éléments du projet de loi.

D'abord, ce projet de loi crée les gouvernements de proximité. Il assume donc que les municipalités sont un nouvel ordre de gouvernement, et l'Alliance Ariane est d'avis que ça doit venir, cette reconnaissance-là, avec une amélioration, en tout cas, un renforcement de la démocratie locale qui, pour le moment, est... cet objectif de renforcement là ne se lit pas clairement dans le projet de loi. Donc, on suggère de prévoir des mécanismes plus forts, plus précis et de commencer par l'affirmer dans les attendus que maintenant que les municipalités sont redevables envers leurs citoyens et non plus seulement envers le gouvernement, il faut que la démocratie locale soit renforcée.

On a également une proposition, où il y a un élément de la loi qui touche la protection du territoire agricole, pour lequel on recommande de ne pas passer outre la Commission de protection du territoire agricole, mais plutôt de modifier... en fait, de ne pas passer outre ses recommandations par un décret gouvernemental, dont on trouve que ça élargit trop le pouvoir discrétionnaire, mais de passer plutôt par une révision de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et de définir précisément les éléments qui devraient être exclus de la compétence de la CPTAQ. C'est nos recommandations 8 et 9.

J'en arrive à un point plus fort en matière de participation de la société civile aux pratiques d'aménagement du territoire, à la définition des orientations gouvernementales en aménagement du territoire. L'Alliance Ariane a pris acte que, dans le projet de loi, le gouvernement reconnaît les municipalités comme vis-à-vis dans l'élaboration des orientations gouvernementales et s'engage donc, à cet effet, à les consulter à l'occasion de l'élaboration des orientations gouvernementales en aménagement du territoire.

Ça nous apparaît essentiel que les instances municipales et leurs représentants soient consultés, mais on recommande que cette consultation-là ne s'arrête pas aux représentants des municipalités, mais aille au-delà, auprès de la société civile, parce que l'aménagement du territoire a des effets considérables sur divers enjeux, et que, donc, plusieurs organisations ont une expertise à livrer et devraient donc être consultées à cet effet-là, et qu'à notre avis il doit y avoir un vrai exercice de consultation, un exercice public transparent et ouvert dans la définition des orientations gouvernementales en aménagement du territoire. On est en train de vivre cette redéfinition-là, et actuellement, justement, il y a une intention de consultation de la part de divers ministères, qu'on salue, d'ailleurs, et on pense que ça, ça devrait être inscrit précisément dans la loi.

• (16 heures) •

J'en arrive au dernier point de notre mémoire, qui est l'appel à la définition d'une politique nationale de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme au Québec. En fait, une fois les municipalités reconnues comme des gouvernements de proximité, à notre avis, il reste deux chantiers à ouvrir pour l'État. D'abord, s'assurer de la contribution des municipalités à l'atteinte des grands objectifs du Québec, hein? On pense à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, à l'amélioration de la santé, bon, la protection du territoire agricole. En tout cas, il y a beaucoup d'objectifs que se fixe l'État et qui dépendent de la participation et de l'implication des municipalités, et ça, à notre avis, c'est nécessaire d'ouvrir un réel chantier là-dessus et ça ne peut passer que par une politique nationale qui permettrait à tous ces acteurs-là de travailler ensemble. En fait, les municipalités, ce projet de loi là fait en sorte qu'elles n'auront plus une reddition de comptes sur... en tout cas, une reddition de comptes moins forte vis-à-vis de l'État sur les moyens utilisés. Donc, on pense que ça veut dire qu'il faut aller vers davantage une reddition de comptes par rapport aux résultats attendus et que ce chantier-là, il est à ouvrir.

Et puis l'autre chantier qu'il est nécessaire d'ouvrir, c'est un engagement de l'État, de l'ensemble de ses ministères et organismes à établir une meilleure cohérence dans l'ensemble des actions d'aménagement du territoire et une meilleure cohérence à la fois des actions de l'État entre elles mais aussi vis-à-vis des orientations des municipalités locales, et notamment en ce qui concerne la localisation des édifices et des activités gouvernementales. En fait, l'État est un très gros acteur d'aménagement du territoire, c'est un très gros acteur immobilier. Les décisions de l'État ont une influence essentielle et structurante sur l'organisation du territoire des municipalités, sur les besoins de transport, sur l'accès aux services, et en raison de cette importance-là on croit qu'il faut absolument réfléchir avec une vue d'ensemble et donc se doter d'une politique nationale de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme. Je vous remercie.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons poursuivre avec la période d'échange. M. le ministre, pour 16 minutes.

M. Coiteux : Oui. Merci beaucoup. Peut-être que je vais commencer par le dernier point de votre... ce n'est pas dans le projet de loi, mais vous avez noté que, dans le projet de loi, à tout le moins on a l'intention, et on le met dans la loi, de consulter les municipalités sur les nouvelles orientations gouvernementales en matière d'aménagement du territoire. On va faire un exercice très important, là, au cours des prochains mois à cet effet. Ça va être quelque chose de probablement aussi important pour ses impacts à moyen et long terme que le projet de loi n° 122 lui-même. Je pense qu'il faut prendre les choses ensemble pour voir qu'est-ce qu'on va faire au cours des deux prochaines décennies, disons, en la matière.

Alors, j'aimerais vous entendre un petit peu plus sur cette question de la politique nationale de l'aménagement du territoire. Comment vous voyez ça? D'abord, qu'est-ce que ça pourrait nous permettre d'accomplir, au-delà de ce que vous voyez être les conséquences probables du projet de loi n° 122, d'une part, puis d'un exercice ambitieux de renouvellement des OGAT?

Mme Robin (Jeanne) : Bien, d'abord, l'objectif d'une politique nationale... Bien, je veux déjà préciser que, bon, c'est le mandat principal de l'Alliance Ariane que le Québec se dote d'une politique nationale de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, là. Donc, au moment de sa création, l'Alliance Ariane a élaboré ce qu'on a appelé une déclaration pour une politique nationale de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme qui établit un certain nombre de principes sur lesquels devrait s'appuyer cette politique-là. Et cette déclaration-là, après avoir été rendue publique, a été signée par à peu près 2 000 personnes, dont je dirais que l'essentiel sont des professionnels de ce domaine-là ou des personnes qui se sentent particulièrement concernées par ces éléments-là, que ce soient des médecins, par exemple, ou des acteurs environnementaux, à titre d'exemple.

Donc, cette politique-là, l'Alliance Ariane n'est pas la seule à l'appeler de ses voeux. Il y a un grand nombre de personnes au Québec qui jugent important d'accorder davantage de priorité à l'aménagement du territoire et à l'urbanisme. Donc, le premier objectif d'une politique, ce serait de se donner une vision et que cette vision-là soit reconnue et partagée par l'ensemble des acteurs à l'issue d'une réflexion conjointe, donc vraiment de se dire qu'est-ce qu'on veut faire de notre territoire et voici ce qu'on s'engage à faire pour notre territoire. Ça, c'est le premier point.

Après, il y a un grand nombre, actuellement, d'organismes, de ministères gouvernementaux mais aussi de différents acteurs sur le terrain qui font de l'aménagement du territoire sans le savoir. Bon, le ministère des Transports fait de l'aménagement du territoire, et je pense que, maintenant, il le sait. Mais, par exemple, le ministère de l'Éducation en fait également avec les choix de localisation des écoles, avec les différentes politiques. Même les politiques éducatives contribuent à faire de l'aménagement du territoire en modifiant la taille des écoles, en modifiant les bassins de desserte, par exemple. Le ministère de la Culture fait de l'aménagement du territoire avec les programmes de soutien et le fait que, par exemple, il finance la création de bibliothèques en intégrant ou pas des critères de localisation qui peuvent faire en sorte que ces bibliothèques-là vont se trouver sur le bord d'une autoroute ou se trouver au coeur d'un quartier. La Société des alcools du Québec fait de l'aménagement du territoire en délocalisant... en fait, je dirais, défait de l'aménagement du territoire, plutôt, en délocalisant actuellement certaines de ses succursales pour les enlever de rues principales et les amener plutôt dans des zones commerciales périphériques. Donc, tous ces acteurs-là qui font de l'aménagement du territoire sans le savoir doivent être convoqués dans un exercice national pour mettre en cohérence leurs actions parce que sinon on se retrouve toujours à défaire d'une main ce qu'on a fait de l'autre.

Et l'Alliance Ariane a travaillé avec de nombreux acteurs sur des ébauches de chantiers puis dans certains cas, des ateliers qui ont réuni un grand nombre de professionnels de différentes origines, et c'est une réflexion fréquente que l'État ne respecte pas toujours les propres orientations qu'il se fixe, que ce n'est pas toujours le meilleur élève dans une municipalité. C'est parfois justement les acteurs gouvernementaux qui vont aller à l'encontre à la fois des orientations gouvernementales en aménagement et puis des orientations locales aussi des objectifs de la municipalité. Donc, c'est des éléments qui permettraient d'être résolus par une politique nationale.

Le Président (M. Hardy) : M. le ministre.

M. Coiteux : Merci. Je vous amènerais... On va rester dans les grandes questions. Je pense que c'est à ce niveau-là que j'aimerais que l'on discute plutôt que d'articles spécifiques, en tout cas pour l'instant. S'il nous reste un peu de temps, on ira sur des articles spécifiques. Il nous reste 11 minutes.

Vous avez parlé de la démocratie municipale, donc de tout ce qui peut permettre d'animer encore davantage la démocratie municipale. Il y a un objectif, hein, dans ce projet de loi là... je ne sais pas s'il est évident pour tout le monde, mais il y a un objectif de l'animer davantage. Vous avez dit que ce n'était pas évident pour vous. Je pense que vous avez dit ça. Mais il y a le pari qui est ici fait que, justement, en donnant plus d'autonomie, en donnant plus de capacités décisionnelles qui ne passent pas par le paternalisme du gouvernement du Québec, qui ne passent pas par des normes mur à mur, nationales imposées par le gouvernement du Québec, des modèles uniques... il y a ce pari que, justement, les citoyens des villes vont moins systématiquement venir faire pression sur les élus provinciaux pour obtenir des résultats dans les municipalités et davantage s'impliquer dans la vie démocratique de leurs municipalités, dans le fond, pour demander à leurs élus municipaux de prendre des grandes orientations, de prendre des grandes décisions, d'établir des politiques pour leurs villes. C'est vrai en matière d'aménagement du territoire, c'est vrai en matière d'urbanisme, c'est vrai en une série de matières. Il y a cet espoir-là, il y a ce pari-là.

Et puis on a différents groupes qui viennent, là, ces jours-ci, dans nos consultations, et je sens qu'il y a encore un peu de résistance à ça de certains groupes qui reviennent à dire : Bien, non, on ne peut pas confier la possibilité aux villes de faire ça, il faut que ce soit le gouvernement qui établisse, par une loi, une norme, il faut que ce soit partout pareil, il faut que ce soit le même modèle, il faut qu'il y ait des exigences, il faut que la reddition de comptes soit uniforme, il faut que le gouvernement reste en contrôle. Je sens encore ça beaucoup. Moi, je pense qu'on est rendus à un point où je pense qu'on va animer davantage la démocratie municipale si on fait confiance aux villes. Parce que, si on fait confiance aux élus municipaux, on fait confiance aux citoyens ensuite pour pas juste faire pression, mais s'impliquer localement dans la politique locale. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Moi, c'est le pari que je fais.

Le Président (M. Hardy) : Mme Trépanier.

• (16 h 10) •

Mme Trépanier (Marie-Odile) : Oui. Je n'ai pas lu tous les mémoires, mais il y a eu beaucoup de propositions qui ont été faites dans différents mémoires. Vous dites «faire confiance aux élus», je ne pense pas que ça correspond au climat social actuel et je pense que ça a été mentionné dans les journaux récemment. On lit de plus en plus d'articles dans les journaux, d'éditoriaux qui disent : Donner carte blanche aux élus, c'est donner carte blanche aux promoteurs, par exemple. Ce n'est pas moi qui dis ça, là, c'est écrit dans les journaux.

Alors, il me semble qu'au lieu de juste dire «faire confiance aux élus», vous pourriez aussi dire «faire confiance et aider les citoyens à entrer en contact avec les élus et à suivre les élus». Aider les citoyens, c'est peut-être leur donner un peu plus d'outils, un peu plus de moyens pour rejoindre les élus. Alors, bon, il y a plein de propositions qui ont été faites.

Ce qui est décevant dans le projet de loi, bon, on le sait, c'est toute la question du référendum, l'abolition du référendum dans Québec, Montréal. Ce qui est choquant pour les citoyens, c'est qu'il n'y a pas de justification, il n'y a pas d'explication et il n'y a pas de mécanisme alternatif. Alors, qu'est-ce que ça veut dire? Le maire a pris la parole, il nous a dit : On a l'office. Oui, mais il y a juste Montréal qui a l'office, un. Puis, deux, l'office, quand est-ce qu'on fait appel à l'office? Tout ça est aléatoire, on ne le sait pas, on ne le sait pas quand on fait affaire à l'office. Il y a quelques règles de base dans la loi ou dans les règlements, mais, si on enlève le référendum, qu'est-ce qui va se passer par ailleurs? Comment va se rétablir l'équilibre? C'est ça, le problème, là. C'est que vous enlevez beaucoup de contrôle sur les élus, mais on ne voit pas le rééquilibrage des pouvoirs qui est fait. On ne le sent pas, ça.

Alors, on n'a pas des réponses précises, mais on pense qu'on devrait aller plus loin. Et ce n'est pas clair, l'objectif de la loi. Est-ce que c'est juste enlever des contrôles administratifs mais sans toucher à la démocratie — ce qui n'est pas le cas? Est-ce que c'est créer des véritables gouvernements? Ça, créer des véritables gouvernements, là, c'est quasiment un changement constitutionnel. Vous savez ce qui se passe dans d'autres pays quand il y a des changements constitutionnels? Il y a des référendums. Alors, pourquoi est-ce qu'on ne fait pas un peu plus d'efforts pour rejoindre les citoyens pour expliquer, pour leur donner des outils? Mystère.

Le Président (M. Hardy) : M. le ministre.

M. Coiteux : On est restés à un niveau général pour l'instant, je vais vous amener à un niveau plus spécifique qui est sur la divulgation, la transparence dans la divulgation des informations, l'accès aux informations concernant les villes, les projets de règlement, les avis de motion, etc. Donc, vous avez remarqué qu'il y a un certain nombre d'outils qui sont donnés aux villes à cet effet mais aussi des obligations de divulgation dans le projet de loi. Comment vous voyez ça?

Le Président (M. Hardy) : Mme Robin.

Mme Robin (Jeanne) : Bien, je pense que, là-dessus, justement, le fait de créer un observatoire de la gouvernance de proximité et s'assurer à faire un bilan quinquennal des effets de cette loi-là est particulièrement important parce qu'il y a plusieurs propositions qui visent à améliorer la divulgation d'information. Les mesures qui sont proposées vont certainement améliorer certains effets, là, mais est-ce qu'on va priver certains pans de population de l'accès à une information? Est-ce que les municipalités vont choisir les bons vecteurs? Est-ce qu'elles ont l'expertise? Est-ce que tous les outils sont là? Je pense que, là-dessus, il faut, en tout état de cause, se donner les moyens de suivre les effets de ces mesures-là. Je pense qu'il y a un grand nombre de chercheurs compétents au Québec qui sont capables d'apporter leur vision là-dessus puis leur oeil acéré et expert pour suivre les effets de la loi sur ce plan.

M. Coiteux : Est-ce que...

Le Président (M. Hardy) : Quatre minutes.

M. Coiteux : On a encore quatre minutes? Par exemple la question des avis, des avis publics, là, qui, dans une loi très, très ancienne, oblige à aller publier dans les journaux plutôt que par des moyens plus... d'abord, par d'autres moyens possibles, là, s'il y a d'autres plateformes qui existent, notamment sur Internet. Comment vous voyez ça?

Mme Robin (Jeanne) : Je dois vous dire que, là-dessus, le comité directeur de l'Alliance Ariane ne s'est pas penché sur cet élément-là précis.

M. Coiteux : D'accord. Un dernier sujet peut-être, en ce qui me concerne, à moins qu'un collègue ait une question. Vous avez brièvement parlé de la question des articles de la loi qui touchent aux compétences de la CPTAQ sur certains domaines. Je sais que l'UPA... je pense, c'est l'UPA, qui fait partie de votre alliance, on les a rencontrés de façon spécifique, ils sont venus ici de façon spécifique, puis on a eu des échanges à cet effet juste pour bien établir que l'objectif de ces modifications-là, d'abord, c'était vraiment des aspects très circonscrits de la Loi sur la protection du territoire agricole, ça touchait, loin de là, à l'ensemble et que c'était vraiment dans un objectif de faciliter la vie notamment des agriculteurs, par exemple en permettant de façon beaucoup plus simple, et rapide, et moins tatillonne sur le plan administratif que le conjoint ou la conjointe d'un agriculteur puisse, dans le domicile, sur la ferme, avoir une activité professionnelle. Bon, alors, ça, c'est des éléments qu'on facilite dans les articles qui sont proposés. Et, d'autre part, autant l'UPA que la CPTAQ nous disaient : Écoutez, en ce qui concerne ces usages non agricoles en zone agricole qui sont portés, finalement, à l'attention et à la décision de la CPTAQ, il y en a toute une série, on nous a dit. On nous a parlé d'une liste qui, dans le fond, n'aurait pas besoin d'être présentée à la CPTAQ.

Alors, on est en train de parler avec les parties prenantes de ça pour dresser cette liste-là parce que je pense que l'élément qui soulevait peut-être des inquiétudes, c'est qu'est-ce qu'il y aura dans cette liste-là, qu'est-ce qu'il y aura dans ce règlement-là, si le règlement est la voie de suivi, mais ça peut être tout simplement mettre dans le corps de la loi la liste de ces activités-là. C'est supposé faire l'affaire de tout le monde. Donc, les objectifs qui sont poursuivis dans ces articles-là ne sont nullement de remettre en question la protection du territoire agricole, mais de faciliter la vie des gens qui vivent en milieu agricole, essentiellement, sans renier la protection.

Je ne sais pas si ça vous rassure comme alliance. Je voulais simplement partager ça avec vous parce que peut-être que vous avez eu l'écho ou pas de cette discussion-là qu'on a eue avec l'UPA et avec la CPTAQ.

Mme Robin (Jeanne) : Bien, écoutez, c'est sûr que la consultation des parties prenantes fait partie des recommandations apportées par l'Alliance Ariane. Maintenant, en ce qui concerne la réalisation d'activités autres qu'agricoles sur le territoire agricole, ça dépasse un petit peu la question de la CPTAQ, qui est là vraiment pour protéger la zone agricole et les activités agricoles, enfin, la loi puis son bras de la CPTAQ, mais on parlait de se donner une vision pour l'aménagement du territoire. Puis il ne faut pas oublier que tout ce qu'on interdit en zone agricole, ça veut dire qu'on l'oriente ailleurs, et donc on l'oriente en réalité vers les coeurs villageois, vers les noyaux villageois existants. Donc, en concentrant, en réservant la zone agricole à des activités purement agricoles ou vraiment très proches, associées, comme ça se fait déjà et comme ça se dessine un peu plus dans l'avenir, bien, on favorise quand même le renforcement de noyaux villageois. Donc, c'est loin d'être anodin, en fait, d'alléger les exigences de la Loi sur la protection du territoire agricole, c'est loin d'être anodin pour les conséquences sur le territoire.

Le Président (M. Hardy) : Merci beaucoup. Le temps alloué au gouvernement est passé. Maintenant, je cède la parole à l'opposition officielle pour 9 min 30 s. M. le député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le nouveau Président. Bien, bonjour, mesdames. Écoutez, le ministre a fait beaucoup mention de ce projet de loi là comme étant quelque chose de nouveau et qu'on n'avait jamais vu depuis plusieurs années en matière de politique municipale. Avec ce projet de loi là, on semble tourner un nouveau chapitre de la politique municipale. Mais, quand je lis votre mémoire, quand je vois les recommandations que vous nous faites, j'ai l'impression que, si on prend juste la tendance de dire «faites confiance aux élus», «faites confiance aux gens qui les élisent», ça nous amène dans un drôle d'abîme qui va nous amener que la démocratie locale ne sera plus saine. C'est un peu la perception que j'ai.

Alors, vous les mettez dans votre mémoire, certains vecteurs qui vont nous permettre d'évaluer si ce qu'on fait aujourd'hui aura la portée, et les conséquences, et surtout les résultats qu'on devrait avoir. Vous placez la démocratie locale comme étant la pierre angulaire de la réussite de cette délégation de pouvoirs et cette délégation d'autonomie, et la façon d'y arriver, c'est d'abord d'évaluer si ce qu'on fait en démocratie locale est bien fait et pourrait être amélioré. Donc, votre observatoire serait une organisation indépendante pour, je vous dirais, donner des orientations sur l'impact qu'auront eu les différentes dispositions que nous avons mises de l'avant. Comment pourrions-nous les améliorer, mais surtout — et c'est là que je veux vous entendre — comment ces dispositions-là auront amélioré la démocratie locale dans les municipalités? Est-ce que je comprends bien que c'est ça que vous voulez qu'il se passe?

Le Président (M. Hardy) : Mme Robin.

• (16 h 20) •

Mme Robin (Jeanne) : Oui, effectivement, l'objectif de l'observatoire, c'est, vous l'avez bien compris, d'être une organisation indépendante, de pouvoir faire des recommandations, de s'assurer de réunir l'information nécessaire pour évaluer le succès de la loi en matière de démocratie locale. C'est difficile d'établir le cahier des charges de cet observatoire-là, d'abord tant que la loi n'est pas votée puis qu'on ne sait pas exactement ce qu'elle recourt, là. Il y a peut-être des modifications qui vont être apportées. Puis c'est difficile de le faire d'autant plus que, si on a demandé la création d'un observatoire, c'est notamment parce qu'on n'était pas en mesure, en tout cas dans le temps imparti pour le travail sur le projet de loi, là, pour la réflexion sur le projet de loi, d'établir précisément les éléments qui devraient être évalués parce qu'il y a vraiment beaucoup de choses dans cette loi-là.

Et c'est pour ça qu'on s'est dit : Si nous, autour de la table, qui réunissons plusieurs compétences, plusieurs organisations, on n'est pas en mesure, rapidement, de dresser une liste des objectifs à atteindre avec la loi, des moyens que cette loi donne pour y parvenir puis des résultats attendus, c'est qu'on a besoin d'une expertise plus forte et donc d'une organisation comme un observatoire. Je ne suis pas sûre de répondre à votre question.

Mme Trépanier (Marie-Odile) : Je pourrais ajouter que ce n'est pas juste une question de démocratie, là. Toutes les mesures fiscales, économiques, financières qui sont introduites dans la loi, comment ça va s'appliquer? Est-ce que ça va générer d'autres problèmes? C'est des changements majeurs qui sont apportés alors que ça fait 100 ans, 150 ans qu'on a des créatures de la province et maintenant on change les choses. Alors, c'est un suivi qui devrait être fait, qui est normal et qui est sain, à notre avis.

M. Ouellet : Pour avoir de l'autonomie ou des pouvoirs, dans le projet de loi on a l'impression qu'on donne des choses aux municipalités et, dans certains cas, on leur en enlève. À votre avis, à votre connaissance, qu'est-ce qu'on enlève aux citoyens dans ce projet de loi là et qu'est-ce qu'on leur donne pour améliorer la démocratie locale?

Le Président (M. Auger) : Mme Trépanier.

Mme Trépanier (Marie-Odile) : Oui. Je pense qu'on a déjà abordé cette question-là avec le ministre. C'est sûr qu'on leur donne des moyens d'information, qu'on facilite l'information, donc il y a des éléments qui sont positifs de ce point de vue là, mais on leur enlève aussi des moyens de s'exprimer, notamment en matière d'urbanisme.

M. Ouellet : Et, selon vous, qui y gagne, présentement, dans la démocratie locale? Est-ce que ce sont les gens qui sont élus ou les gens qui choisissent de les élire?

Mme Trépanier (Marie-Odile) : Qui choisissent?

M. Ouellet : Les électeurs. Selon vous, là, dans le projet de loi, là, en question... parce que vous parlez beaucoup, dans votre mémoire, de l'importance de la démocratie locale, de la faire vivre, de la faire grandir. Ce que je veux savoir, c'est, quand vous avez regardé de façon transversale ce projet de loi là, est-ce que ce sont les élus qui y gagnent ou, selon vous, ce sont les citoyens qui élisent les élus qui sont gagnants là-dedans?

Mme Robin (Jeanne) : Bien, vous savez, on est un peu tous dans le même bateau, de toute façon, sur notre territoire, la façon dont tu l'utilises, la façon dont on gère une ville. Au final, l'objectif, ce n'est pas de déterminer qui est gagnant et qui est perdant. Ce qui est sûr, c'est que, nous, ce qu'on cherchait un petit peu dans le projet de loi, c'étaient des garanties de recherche de l'intérêt collectif, et actuellement on ne les trouve pas suffisamment. Et c'est pour ça qu'on a proposé notamment d'établir des principes au départ, par exemple en lien avec la Loi sur le développement durable, et d'établir clairement certains éléments sur un aménagement rationnel du territoire, sur les objectifs de l'aménagement du territoire. Donc, c'est cette intention-là qu'on cherche à introduire dans le projet de loi pour que, justement, les intentions soient claires à la fois pour les électeurs, et pour les élus, et pour les professionnels des municipalités. Je dirais qu'on veut donner aux municipalités de nouveaux pouvoirs et de nouvelles responsabilités associées à ces nouveaux pouvoirs là, donc rappeler les principes fondamentaux qui devraient guider l'action des décideurs aux différents paliers de gouvernement, du reste.

Le Président (M. Auger) : 2 min 45 s.

M. Ouellet : Vous faites beaucoup de place à la société civile. Vous demandez, à la recommandation 6, que dans l'article 1.2, lorsqu'on parle des orientations gouvernementales, bon, quelques objectifs, des orientations poursuivies au gouvernement, on arrive au milieu municipal, ça va, et qu'on rajoute que la société civile... à la suite d'un exercice public, et transparent, et ouvert.

Donc, ce que vous voulez, c'est qu'il y ait un endroit, un moment où est-ce que la société civile prend part à la discussion, prend part à l'action et prend part, dans certains cas, à la recommandation. Cependant, est-ce que vous n'êtes pas plutôt d'avis... lorsque les gens font leur choix d'élire quelqu'un, ce n'est pas ça, le premier acte de prendre part à? Parce que j'essaie de voir un peu comment est-ce qu'on pourrait réaliser cet exercice-là de consulter la société civile avec le gouvernement sur plusieurs changements. Est-ce que les élections ne sont pas un premier moyen de la consulter?

Mme Robin (Jeanne) : Oui, tout à fait. L'élaboration d'un programme politique sur lequel les gens vont voter, c'est un acte démocratique fondamental, et le vote, c'est un acte démocratique fondamental. Maintenant, la plupart des paliers de décision font déjà appel, dans le cadre de consultations, aux compétences de la société civile. En fait, on ne peut pas se priver de l'expertise de la société civile, que ce soient les chercheurs, que ce soient les différents experts, les associations constituées. Je pense qu'il y a une grande expertise dans la société civile québécoise et que, pour l'élaboration des orientations gouvernementales en aménagement du territoire, on ne peut pas s'en priver mais on ne peut pas s'en priver non plus dans la réalisation de divers projets. Et d'ailleurs c'est extrêmement fréquent, de la part des municipalités, de constituer des tables de concertation, d'avoir des comités de réflexion sur les grands travaux, sur les grands sujets, aussi bien pour l'actualité, qu'on continue. Donc, je pense que ça ne va pas du tout à l'encontre du rendez-vous démocratique que constituent les élections que de continuer à travailler ensemble entre deux élections.

Le Président (M. Auger) : 45 secondes, M. le député.

M. Ouellet : À l'article 177, on vient préciser, faire apparaître la Table Québec-Municipalités et sa composition et on dit que c'est l'instance privilégiée de concertation entre le gouvernement et le milieu municipal. On dit que le maire de Montréal, le maire de Québec, ou la mairesse de Montréal, ou la mairesse de Québec, ainsi que les présidents et présidentes des unions de la FQM, UMQ pourraient siéger et même présidées par le premier ministre. On n'a pas la société civile. Selon vous, est-ce que c'est un manque? Parce que, si on est pour discuter des orientations à donner à des projets de loi qui ont un impact sur le quotidien de tous et chacun, ce ne serait pas là un beau moment d'avoir cette discussion-là?

Mme Robin (Jeanne) : C'est normal qu'il existe une table...

Le Président (M. Auger) : Malheureusement, c'est tout le temps que nous avions. Nous devons poursuivre avec la deuxième opposition. M. le député de Blainville, pour 6 min 30 s.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, mesdames. Hier, la MRC de Vaudreuil-Soulanges est venue nous dire qu'ils reconnaissaient, dans le projet de loi, les modifications qui vont faire en sorte que les ministères, avec leurs mandataires, vont être obligés maintenant de respecter les schémas d'aménagement puis la réglementation des MRC. Est-ce que vous avez vu ça ou vous n'avez pas vu ça dans le projet de loi?

Mme Robin (Jeanne) : C'est une excellente question. C'est un projet de loi quand même volumineux. En tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'actuellement, même si c'est dans les intentions des ministères de respecter les schémas et que, dans la plupart des cas, ils en respectent la lettre, ils n'en respectent pas forcément l'esprit. Et là-dessus il y a vraiment un travail à faire pour ranger les différents ministères et organismes derrière cet objectif-là.

Mme Trépanier (Marie-Odile) : Oui, ce n'est pas dans le projet de loi, c'est dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, en principe, que les ministères doivent respecter les schémas d'aménagement auxquels ils contribuent, par ailleurs. Mais l'application pose problème, et c'est pour ça qu'on veut, avec la politique nationale d'aménagement du territoire, monter d'un cran cette mise en cohérence non seulement avec des orientations, ou des politiques, ou des contenus plus étoffés, mais aussi avec des mécanismes qui s'assureraient de cette cohérence.

On parle des fois de... bien, dans un prochain projet de loi que vous allez examiner, le réflexe Montréal. Bien, vous devriez avoir aussi le réflexe territoire, plus globalement le réflexe aménagement du territoire. Ça veut dire que chaque ministère, chaque organisme gouvernemental, quand il prend une décision, devrait se poser la question : Quel est l'effet de la décision que je prends sur le territoire? Et, s'il ne se pose pas la question, il devrait y avoir un mécanisme au sein du gouvernement pour s'assurer que la question est posée et qu'on a la réponse, et ce n'est pas le cas, actuellement.

• (16 h 30) •

M. Laframboise : ...c'est important que vous apportiez les éclaircissements parce que... bon, vous parlez de politique nationale d'aménagement du territoire, d'urbanisme. Moi, je peux être en accord avec vous. Moi, évidemment, je suis à Blainville, Communauté métropolitaine de Montréal, le Plan métropolitain d'aménagement et de développement, le PMAD, a été adopté à la dure. Est-ce que votre politique nationale d'aménagement va recommencer ça ou vous voulez juste qu'on arrime tout ça? Parce que, tu sais, ça n'a pas été facile, le PMAD, là, dans la CMM, là. Donc, est-ce qu'on se doit de se relancer dans une opération urbanisme ou ce que vous souhaitez, c'est une politique qui va arrimer tout ça? Je veux comprendre votre orientation.

Mme Robin (Jeanne) : L'objectif de la politique, c'est justement de s'assurer que les actions qui sont posées et les orientations qui sont prises aillent dans le sens d'un aménagement plus rationnel, plus économe, d'une utilisation plus économe du territoire et davantage en lien avec les orientations qui ont été prises. Donc, c'est sûr que les orientations qui sont dans le PMAD font partie de la réflexion sur une politique nationale.

Ce qui est sûr, c'est que, dans le projet qu'on propose, de politique nationale, avoir une politique nationale va rendre plus facile l'examen de certains projets, de certaines politiques. Le travail de démarrage va déjà être fait, et donc probablement que, s'il fallait adopter un PMAD alors que le Québec s'est déjà doté d'une politique nationale d'aménagement et d'urbanisme, ce serait beaucoup moins à la dure justement et ce serait beaucoup plus facile.

M. Laframboise : Mais est-ce que vous considérez que le PMAD est une réussite, tout simplement? Vous l'avez analysé, sûrement, vous l'avez regardé, là.

Mme Robin (Jeanne) : Bien, pour le moment, en tout cas, il a permis qu'il n'y ait pas de dézonage agricole sur le territoire, ce qui est déjà un élément. Pour le reste, il y a énormément de mesures qui sont inscrites dans le PMAD puis qui restent à être mises en oeuvre, là. C'est vraiment une mesure plus à long terme.

M. Laframboise : Oui, considérant que chacune des MRC, des villes devraient ajuster leurs réglementations, et tout ça.

Bon, ça m'amène à tout le volet protection du territoire agricole, pour lequel on est tous sensibles, là, mais vous êtes conscients que présentement la CPTAQ n'est pas efficace, là, c'est-à-dire que les délais sont disproportionnés. Il y a une partie... le ministre semble vouloir le régler, là, il y a une partie des dossiers qui sont à la CPTAQ qui ne devraient pas y aller, là. Je comprends que vous voulez voir le produit avant que ça arrive, là, c'est un peu ça que vous nous dites. Vous voudriez même... Bien, en tout cas, vous nous dites qu'on devrait retirer l'article 185 puis le remplacer par des... s'il y a des exceptions, bien, de les énumérer carrément, là. C'est ça que vous nous dites, là, finalement?

Mme Trépanier (Marie-Odile) : Oui, bien, parce que, quand on lit l'article 185, on dit : Le gouvernement peut, par règlement, prévoir «les cas où l'utilisation des lots à une fin autre que l'agriculture est permise sans autorisation de la commission». Bien, ça, ça ressemble beaucoup à changer la loi de la commission, changer la loi de protection agricole, parce que la loi de protection agricole dit : C'est la commission qui décide, et puis là, avec cet article-là, on dit : Bien, ce n'est plus la commission, c'est le gouvernement. Alors, c'est trop fort, c'est trop gros.

On est tous d'accord sur les objectifs. On est d'accord qu'il faut alléger le travail de la commission, il faut arrêter de lui donner plein de petites affaires. Et puis c'est vrai qu'il y a beaucoup de monde qui demande toutes sortes d'exceptions à la commission. Alors, comment alléger ça? Bien, on est d'accord avec l'UPA qu'il faut travailler ensemble et ne pas donner un gros pouvoir, aussi gros au gouvernement...

Le Président (M. Auger) : Désolé, c'est tout le temps que nous avions, malheureusement. Donc, Mmes Robin et Trépanier, merci beaucoup pour votre participation aux travaux de la commission.

Je suspends quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 34)

(Reprise à 16 h 37)

Le Président (M. Auger) : À l'ordre! Chers collègues, nous allons reprendre nos travaux en souhaitant la bienvenue à la chef de l'opposition officielle à la ville de Montréal. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation. Par la suite, il y aura une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous identifier, et, par la suite, vous pourrez commencer votre présentation.

Projet Montréal

Mme Plante (Valérie) : Parfait. Merci beaucoup. Alors, merci, M. le Président. Bonjour, M. le ministre. Bien sûr, bien, bonjour à tous et toutes, MM. et Mmes les députés.

Alors, oui, je me présente, Valérie Plante, la chef de l'opposition à Montréal, et je suis accompagnée de mon collègue François William Croteau, qui est le maire de l'arrondissement de Rosemont—La Petite-Patrie.

Le Président (M. Auger) : Bienvenue.

Mme Plante (Valérie) : Merci beaucoup. Alors, bien sûr, je tiens à vous remercier de nous accueillir cet après-midi. Je tiens également à souligner d'entrée de jeu que je suis extrêmement préoccupée par le projet de loi n° 122, qui retire non seulement les référendums, mais aussi fragilise les consultations publiques tenues par l'Office de consultation publique de Montréal. Il s'agit d'une attaque directe contre les fondements de la démocratie participative et des mécanismes de consultation publique. Cette décision va à l'encontre de toutes les tendances actuelles en matière d'acceptabilité sociale et constitue un recul majeur pour les citoyens.

Je suis d'autant plus préoccupée qu'alors que je me présente de bonne foi ici devant vous, devant cette commission chargée d'étudier avec sérieux ce projet de loi j'ai appris par l'entremise des médias que le ministre des Affaires municipales n'avait pas l'intention de retirer du projet de loi n° 122 la mesure prévoyant l'abandon des référendums. C'est le comble de l'ironie que de voir un ministre déclarer, pendant l'étude d'un projet de loi sur le retrait des consultations publiques des citoyens, qu'il n'a que faire des arguments des gens qui se présentent devant cette commission et que son idée est déjà arrêtée.

Je vais malgré tout exprimer une seconde préoccupation, soit le fait que l'article 68 du projet de loi révise les plafonds d'attribution de contrats pouvant être octroyés de gré à gré, les faisant passer de 25 000 $ à 100 000 $. Nous craignons que l'augmentation du plafond à 100 000 $ n'ouvre la porte à des abus. Nous avons d'ailleurs plusieurs exemples de contrats ou d'embauches qui se situent tout juste sous le seuil de 25 000 $ faits par la présente administration municipale montréalaise et qui soulèvent de nombreuses questions éthiques.

Nous aurions pu croire que le gouvernement aurait tiré des leçons de la commission Charbonneau. Hélas, non! Nous invitons donc le gouvernement à réfléchir à deux fois avant de céder aux pressions de ceux qui demandent ces assouplissements sous prétexte d'aller plus vite. L'histoire récente nous montre qu'en cette matière la prudence est la meilleure conseillère et qu'au bout du compte c'est plutôt le manque de rigueur et de transparence qui finit par coûter cher aux contribuables.

J'aimerais maintenant céder la parole à mon collègue François Croteau.

• (16 h 40) •

M. Croteau (François William) : Merci beaucoup, Valérie. Alors, j'aimerais tout d'abord commencer par un bref état de la consultation et de la participation publiques à Montréal, car la situation est bien différente entre Montréal et les autres villes québécoises.

Comme toutes les villes, lorsqu'elle procède à un changement de zonage, la ville de Montréal doit proposer aux résidents d'entamer ou non un processus d'approbation référendaire. Ces changements de zonage visent souvent à permettre un projet immobilier.

L'exemption pour Montréal, c'est que, contrairement aux autres municipalités, son conseil municipal dispose d'un pouvoir unique de court-circuiter les référendums en urbanisme et d'opter plutôt pour une consultation publique devant l'Office de consultation publique de Montréal, soit l'OCPM, qui, grâce à l'article 89 de la charte de Montréal, prévoit cette clause.

À ces outils de participation et de consultation, la ville de Montréal ajoutait, en 2010, le droit d'initiative de consultation publique. Afin d'avoir droit à une consultation publique sur un enjeu qui les préoccupe, les citoyens doivent recueillir de 5 000 à 25 000 signatures. En sept ans, seul un groupe de citoyens y est parvenu. Malheureusement, comme l'a bien souligné Mme Carole Poirier en cette commission, avoir à ramasser 5 000 signatures pour être entendu sur un projet préoccupant pour une communauté, c'est une forme de déni de démocratie.

Enfin, Montréal s'est dotée, en 2002, de l'Office de consultation publique de Montréal, l'OCPM, un organisme neutre dont le mandat est d'accueillir l'opinion des citoyens sur des projets immobiliers majeurs et des changements au plan d'urbanisme. Ceci dresse un tour d'horizon des outils de participation et de consultation publique de Montréal.

Le projet de loi n° 122 abolit le référendum en urbanisme pour les villes de Montréal et de Québec sans leur demander de mettre en place des mécanismes compensatoires. Cette situation met en péril à la fois l'approbation référendaire des projets immobiliers et les consultations publiques tenues par l'OCPM.

En effet, il faut souligner que le recours à l'OCPM, lors d'un projet immobilier ou de changement aux règlements d'urbanisme, est et restera facultatif. L'article 89 de la charte précise que le conseil peut — et nous mettons l'emphase sur le «peut» — permettre un projet structurant sans qu'il soit susceptible d'approbation référendaire.

C'est la menace du référendum qui incite la ville à envoyer de nombreux projets à l'OCPM. En éliminant les référendums, vous retirez le seul incitatif à soumettre les projets à une consultation publique de l'OCPM. Imaginez un instant qu'une cour de triage, ou une usine, ou un vaste développement immobilier voit le jour au coin de votre rue. Est-ce que vous aimeriez connaître les impacts de ce projet et être entendu sur vos préoccupations? Le retrait des référendums et son corollaire, la perte des consultations publiques devant l'OCPM pour les projets d'envergure, créera un dangereux précédent.

Premièrement, le législateur prive les citoyens d'un levier démocratique qui protège leurs droits. La venue d'un important projet immobilier ou industriel peut entraîner des nuisances importantes, faire diminuer la valeur d'une propriété et porter gravement atteinte à la qualité de vie des résidents.

Deuxièmement, l'abolition du processus référendaire aura pour effet de concentrer les pouvoirs de décision en aménagement du territoire et en urbanisme entre les mains seules des élus. En cette ère post-commission Charbonneau, il est important plutôt de préserver les mécanismes de reddition de comptes des élus envers les citoyens.

Nous sommes en droit de nous demander si les processus référendaires représentent un réel problème. Même si l'administration montréalaise a qualifié l'approbation référendaire d'irritante pour les promoteurs, dans les faits, rares sont les projets qui se sont rendu jusqu'à l'étape du référendum dans les cinq dernières années.

Certains prétendent que le processus référendaire permet à un faible nombre de résidents de bloquer les projets d'envergure qui seraient bénéfiques pour toute une communauté. Nous l'avons démontré plus tôt, rien n'est plus faux. Le législateur a prévu une procédure d'exemption afin que ces projets voient le jour pour le bien commun. M. le Président, reprenons l'exemple cité par M. le maire Denis Coderre lors de son passage dans cette commission parlementaire. Il a affirmé qu'un projet de bâtiment multifonctionnel près du métro Vendôme avait été bloqué par référendum. Cet argument a été taillé en pièces par les journalistes après une vérification des faits en bonne et due forme. La réalité, c'est plutôt que ce projet de supermarché, assorti d'une résidence pour personnes retraitées, aurait pu faire l'objet d'une mesure d'exemption au processus référendaire. Rien n'empêche le projet de voir le jour dans le cadre du système actuel. Ainsi, l'argument voulant que les référendums en urbanisme soient un frein au développement n'est pas validé par l'expérience montréalaise.

Notre expérience est plutôt la suivante. Un promoteur présente un projet mal adapté à son milieu d'insertion. Les citoyens informés du projet déclenchent la première étape du processus référendaire pour signifier leur désaccord, et ainsi le promoteur est alors renvoyé à la planche à dessin et à soumettre un projet bonifié. De nombreux projets immobiliers ont été améliorés grâce aux référendums en urbanisme.

Maintenant, je vais céder la parole à ma collègue Valérie Plante.

Mme Plante (Valérie) : Merci beaucoup, François. Donc, le message que nous portons aujourd'hui à ceux qui veulent bien l'entendre, c'est qu'au lieu d'être simplement aboli, le processus référendaire pourrait être repensé afin d'être simplifié et bonifié. Le processus actuel place les citoyens devant une proposition de projet fini qu'ils sont appelés à approuver ou refuser. À aucun moment au cours du processus on ne cherche à recueillir l'avis et les commentaires des citoyens afin d'améliorer le projet avant qu'il ne soit présenté dans sa forme finale. Cette approche est contre-productive et elle retarde le développement. En changeant cette disposition pour permettre une consultation proactive plutôt que réactive, on pourrait éviter l'ouverture du registre et, le cas échéant, un référendum en urbanisme.

Les effets négatifs associés au projet de loi n° 122 surpassent grandement quelconque éventuelle conséquence positive. Par ailleurs, ce projet de loi ne tient pas compte de la spécificité montréalaise et notamment de l'article 89. Tout ce que ce projet accomplit, c'est de retirer aux citoyens d'importants outils dont ils disposent pour participer au développement de leur quartier.

À la lumière des effets négatifs présentés, Projet Montréal demande que le processus d'approbation référendaire ne soit pas aboli mais plutôt amélioré, car il s'agit d'un fondement de la démocratie participative et des mécanismes de consultation publique. Projet Montréal demande également au législateur de protéger le droit des citoyens d'être consultés sur des projets d'envergure et, à cette fin, d'amender le projet de loi n° 122 afin que la Charte de la ville de Montréal entraîne systématiquement une consultation obligatoire pour les projets structurants. Ainsi, à l'article 89 de la Charte de la ville de Montréal, il est demandé de remplacer le verbe «peut» par «doit».

Finalement, nous demandons au gouvernement de réviser attentivement l'article concernant l'augmentation du plafond d'attribution des contrats de gré à gré et de s'assurer que les mécanismes adéquats de reddition de comptes soient en place de façon à ce que les abus dont nous avons été témoins dans le passé ne se répètent jamais. Merci beaucoup.

Le Président (M. Auger) : Merci pour votre présentation. M. le ministre, pour les 15 prochaines minutes.

M. Coiteux : Oui. Bien, merci quand même. Je dirais «quand même», parce que vous avez abordé ça, disons, d'une certaine façon... peut-être que j'anticipais parce que vous l'aviez anticipé par Twitter aussi avant d'être présente en commission.

Je vous dirais ceci : C'est normal qu'un gouvernement qui propose un projet de loi croie dans son projet de loi, hein? Je pense que c'est normal. Alors, si on fait un certain nombre de propositions puis que ça se traduit par certains articles, bien, je pense qu'il faut s'attendre à ce que le gouvernement défende son projet de loi. C'est normal.

Et maintenant... puis on a eu de multiples occasions de le faire dans cette commission, ici. On a souvent réussi à trouver des terrains par lesquels on a amélioré les projets de loi qu'on a proposés. Ça tenait compte d'une disposition d'esprit qui était celle de la collaboration puis de la recherche de solutions à des problèmes qui sont, finalement, reconnus de part et d'autre. Et il y a des groupes qui viennent en commission qui ont cette attitude-là, ils disent : Écoutez, il y a tel aspect du projet de loi, on est heureux de ça, ici on a un problème, puis ils cherchent un terrain d'entente.

Notamment, avec la CPTAQ, et d'emblée, il y avait des articles qui ne leur plaisaient pas tels quels. Ils nous ont fait part de leurs préoccupations, et puis on a eu l'occasion d'échanger là-dessus de façon très constructive, puis je pense que déjà, sans avoir fait de proposition d'amendement encore, parce qu'on n'est pas rendus à l'article par article, bien, je pense qu'on a déjà rassuré pas mal de monde sur des questions comme ça. Mais c'est normal que je défende le projet de loi, et, en l'occurrence, c'est vrai que je pense que le système qu'on a actuellement, ce n'est pas le meilleur système au monde. Je pense que ce n'est pas la meilleure façon d'avoir les meilleurs projets. Moi, j'en suis convaincu.

Mais, si j'étais le seul... mais ce n'est pas ça. On a eu des groupes qui sont venus ici, qui nous ont dit que c'était une bonne idée de changer le modèle qu'on avait actuellement, notamment sur la question des référendums en matière d'urbanisme. Il faut faire attention, là. Il faut que les gens nous écoutent, là, là-dessus, là. On n'est pas en train de dire... on n'est pas dans un système où toute la ville, tous les citoyens de la ville votent dans un référendum comme on a eu, nous, à l'échelle du Québec à deux reprises par la volonté de l'opposition officielle, qui était au gouvernement à l'époque, où là, c'étaient des questions fondamentales où tous les citoyens participaient.

• (16 h 50) •

Ici, souvent, et c'est ce que nous disent les villes, il y a des petits projets, ou des moyens projets, ou parfois des grands projets mais parfois des petits projets qui seraient tout à fait conformes aux politiques d'aménagement, aux schémas d'urbanisme, aux objectifs qui sont poursuivis par la ville et l'administration qui, oui, a été élue par ses citoyens, souvent pour défendre ces choses-là, et qui sont bloqués par une minorité. Et donc, souvent, ce n'est pas nécessairement dans l'esprit de ceux qui voient ça autrement que vous, ce n'est pas nécessairement l'expression de la démocratie, mais plutôt l'expression d'un droit de veto d'une minorité sur les intérêts de la majorité. Alors, il y a tellement de gens qui nous disent ça puis de groupes qui nous disent ça, y compris certains qui sont venus ici, en commission, que je pense que c'est légitime qu'on remette en question ces choses-là puis qu'on cherche un modèle alternatif.

Alors, écoutez, il y en a qui nous ont dit : Regardez, pourquoi pas le modèle... pourquoi pas on prendrait le modèle proposé pour Montréal et Québec, que vous n'aimez pas visiblement? Vous avez le droit de ne pas l'aimer, ce modèle-là qu'on propose. On ne pourra pas l'étendre à toutes les grandes villes du Québec. Puis ils sont arrivés avec des arguments pour nous dire que ce serait une bonne idée de faire ça. Puis il y en a d'autres qui nous ont dit le contraire, ils nous ont dit : Regardez, prenez le modèle que vous proposez pour toutes les autres villes, à la place de Québec, puis appliquez-le à Montréal et à Québec, mais j'ai vu d'autres groupes qui sont arrivés avec une attitude aussi négative et aussi confrontationnelle. Je voulais dire ça au départ, parce que, je pense, vous avez pris ce ton-là au début puis, je pense, ça méritait quand même une humble opinion de ma part. Je voulais la partager.

Maintenant, je comprends aussi... vous savez, on a eu des groupes d'experts qui sont venus, des gens en urbanisme, des gens qui sont indépendants de la politique partisane. Nous, on est en politique partisane forcément, bon, on est là-dedans, nous, vous aussi, vous êtes là-dedans. On a eu des groupes indépendants qui sont venus, qui sont indépendants de cette joute-là, qui ont émis des opinions d'une certaine façon. Mais, puisque vous êtes en politique municipale, je me permettrais de vous poser une question qui serait la suivante. Elle est générale, là, mais j'aimerais ça vous entendre vraiment là-dessus.

Supposons que vous seriez élue en novembre prochain, hein, puis vous aspirez à ça, vous allez vous présenter comme candidate à la mairie avec une équipe, supposons que vous êtes élue, les Montréalais vous choisissent comme mairesse et qu'entre-temps on ait adopté le projet de loi n° 122, hein — peut-être qu'on l'aura adopté d'ici là, peut-être, là — la question que je vous poserais, c'est : Quels sont les éléments de flexibilité? Quels sont les éléments de nouveaux pouvoirs? Quels sont les éléments d'oxygène, qu'on donne à la gestion des villes, vous souhaiteriez nous voir vous retirer à partir du jour où vous seriez mairesse plutôt que candidate à la mairie?

Le Président (M. Auger) : Mme Plante.

Mme Plante (Valérie) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. Coiteux, pour votre question par rapport à la... je tiens, moi aussi, à m'exprimer sur la question de la confrontation. J'aurais tendance à peut-être vous renvoyer aussi... Je pense que de commenter de façon publique un processus comme celui-ci, pour moi, je crois que c'est de la confrontation. Je m'attends de la part de mon gouvernement qu'il ait une attitude d'ouverture complète qui soit en pleine transparence du processus qui est en cours.

Alors, pour moi, de venir cet après-midi m'adresser à vous avec les informations que vous avez communiquées dans les médias, vous dites que c'est normal d'y croire, c'est normal de croire dans votre projet de loi, mais, moi, c'est dans mon droit de me sentir lésée de venir ici, en commission, en ayant l'impression que c'est peut-être peine perdue.

Ceci étant dit, pour répondre à votre question, mais j'aimerais... avant, vous avez parlé de la notion comme quoi... comment des groupes de citoyens peuvent freiner un projet. Je pense qu'il faut donner une information importante, c'est qu'il ne faut pas oublier que c'est seulement les projets dérogatoires qui peuvent être contestés et pour lesquels on peut avoir un droit de référendum. Et ça, c'est important de le mentionner parce que les règles d'urbanisme font en sorte que, déjà, le zonage, les hauteurs, tout est déterminé. Le schéma d'aménagement fait en sorte qu'on sait à quoi s'attendre.

C'est seulement quand on demande... par exemple, si on est dans un environnement où c'est tout des trois étages, puis il y a un promoteur qui veut bâtir un 15 étages, on appelle ça un projet dérogatoire. C'est à ce moment-là que des citoyens autour peuvent se rassembler et peuvent demander un droit de référendum. Et je tiens à le mentionner parce qu'il ne faudrait pas donner l'impression à toute la population que tout le monde peut faire un droit de référendum à chaque fois que quelqu'un change sa porte ou qu'on construit, je ne sais pas, une annexe à sa maison.

Enfin, lorsque je serai mairesse, ce que je vais demander... la première chose que je vais faire, je dois vous le dire, ça va être de consulter la population montréalaise, parce que, dans le cadre du projet de loi n° 122 et la façon dont, présentement, le maire de Montréal se positionne, là où j'ai un problème, c'est que ça soit fait derrière des portes closes, qu'on ne demande pas l'avis des Montréalais et des Montréalaises. Même ici, moi, aujourd'hui, je vous présente un point de vue, mais, si j'avais le temps, les moyens et les ressources, je consulterais les Montréalais pour savoir ce qu'eux en pensent de ce qui est amené aujourd'hui.

Alors, l'oxygène, premier geste que je poserais, ce serait de consulter les Montréalais, les Montréalaises et, dépendamment de la réponse, eh bien, j'entrerais en représentation avec Québec. Merci.

Le Président (M. Auger) : Juste une consigne avant de continuer, on ne doit pas... en fait, au niveau du décorum, on doit appeler non pas par les noms de famille, mais par leur titre, soit député ou ministre.

Mme Plante (Valérie) : Je m'excuse.

Le Président (M. Auger) : Aucun problème. M. le ministre.

M. Coiteux : Vous les consulterez sur quel article du projet de loi qui donne des nouveaux pouvoirs aux villes, dont Montréal, que vous souhaiteriez éventuellement vous voir retirer?

Mme Plante (Valérie) : Non, bien, moi, en fait, vous savez, c'était l'article 24, donc c'est vraiment sur celui-là qu'on se positionne présentement. Nous, ce qu'on voudrait, en fait, on ne veut pas que le droit de référendum soit aboli en tant que tel. Aujourd'hui, on vient vous voir pour vous dire qu'est-ce qu'on peut faire. Puis, honnêtement, moi, je trouve que c'est de l'ouverture, de savoir qu'est-ce qu'on peut faire, comment est-ce qu'on peut conserver le droit de référendum tout en l'améliorant ou... parce qu'on veut s'assurer que la population, on peut continuer à la consulter. Parce que c'est bien un des problèmes, présentement, ils se prononcent sur un fait accompli, sur un projet une fois qu'il est final, et leur dernier recours est d'aller en droit de référendum. Donc, d'une part, il y a cet élément-là.

Et finalement on voudrait que l'article 89 s'applique pour tous les projets structurants, que systématiquement, quand il y a un projet d'intérêt public de grande envergure, le projet se retrouve devant l'Office de consultation publique de Montréal. Ça, c'est les deux éléments, par rapport à l'article 24, qui nous intéressent beaucoup.

M. Coiteux : Et les autres aspects du projet de loi?

Mme Plante (Valérie) : Bien, en fait, il y avait l'article — il ne faut pas que je me trompe — 89 sur les contrats de gré à gré. On en a parlé, je vous en ai parlé en ouverture. Donc, c'est l'aspect comme quoi on passe de 25 000 $, pour des contrats de gré à gré, à 100 000 $, et on considère que c'est assez risqué. Si on se base sur le taux de l'inflation, on pourrait le majorer, on pourrait aller peut-être à 33 000 $, 35 000 $, mais de passer de 25 000 $ à 100 000 $, on s'explique mal cette hausse et on pense que ça peut amener des dérives. On pense qu'il peut y avoir des risques de collusion et on veut éviter ce genre de problématique là, surtout avec ce qu'on a vécu à Montréal dans les dernières années.

M. Coiteux : D'accord. Donc, est-ce que j'en conclus que les autres aspects du projet de loi, vous considérez que c'est tout à fait positif, vous êtes contente avec ça?

Mme Plante (Valérie) : Oui, tout à fait. Bien oui, parce qu'en venant vous parler on a décidé de se concentrer sur les aspects sur lesquels on considère qu'il y a de l'amélioration à faire, mais, pour l'ensemble de l'oeuvre, je vous dirais qu'on est d'accord.

M. Coiteux : Bon, ce n'est pas si mal, il y a 260 articles, vous me parlez de deux. Bon, sur les seuils d'appels d'offres, vous dites : 25 000 $ à 100 000 $, c'est un peu trop, peut-être 25 000 $ à 33 000 $, ça fonctionnerait, grosso modo, donc.

Mme Plante (Valérie) : ...quatrième, qui est l'article sur la diffusion des avis publics, n'est-ce pas? J'ai oublié le nom de l'article, j'ai oublié le nom, mais c'était le dernier élément qui posait problème. Mais le plus important, définitivement...

Une voix : 52.

Mme Plante (Valérie) : 51? Merci.

Une voix : 52.

Mme Plante (Valérie) : 52.

M. Coiteux : ...mettre ça sur Internet plutôt que dans les journaux.

Mme Plante (Valérie) : En fait, la raison... on n'est pas contre. Je ne pense pas qu'il faut nous mettre dans une... On n'est pas contre le fait de le mettre sur Internet, on est pour la plus grande diffusion de l'information possible. Il y a des gens qui n'ont pas Internet, il y a des gens, à travers le Québec, que, dans leur région, l'Internet à haute vitesse ne se rend pas. Pour pouvoir toucher toutes les populations, même les populations vieillissantes, je pense que c'est important de garder des façons de communiquer avec eux qui sont plus traditionnelles, disons-le.

M. Coiteux : Je voulais juste vous rassurer sur une chose, Mme Plante, c'est qu'effectivement, si vous êtes élue en novembre puis qu'il y a cette question des avis publics, ce que propose le projet de loi, ce n'est pas de vous obliger à le faire autrement que par les journaux. Vous pouvez continuer de le faire par les journaux, vous n'aurez même pas besoin de consulter votre population là-dessus, si elle était d'accord avec vous. Je voulais juste vous rassurer à cet effet.

Il y a beaucoup de groupes qui sont... oui, quand même beaucoup, je n'ai pas fait toute l'énumération, mais il y a plusieurs groupes qui nous ont dit qu'ils aimaient ça le processus de consultation par l'office public de Montréal. Ils ont dit que c'était même un très bon modèle. Ils l'ont cité en exemple. Il y a des gens qui disaient que ça devrait faire école dans d'autres villes du Québec. Il y en a qui se sont dit peut-être que même Québec pourrait s'inspirer de ça. Vivre en ville nous en ont parlé aujourd'hui même. Alors, je comprends que ça, c'est un instrument qui est positif pour vous, ça.

Mme Plante (Valérie) : Tout à fait. Je vais laisser la parole à M. Croteau.

Le Président (M. Auger) : M. Croteau.

• (17 heures) •

M. Croteau (François William) : Oui. Merci pour votre question, M. le ministre.

En effet, c'est d'ailleurs le point fondamental de notre argument. Contrairement aux autres municipalités, Montréal a une clause spécifique pour éviter ce qu'on peut appeler les «pas-dans-ma-cour», ce qu'on appelle les irritants, entre autres les quelques individus qui voudraient, entre guillemets, empêcher des projets. Le gouvernement, en 2000, a introduit une clause, qui est l'article 89, et a créé l'OCPM pour permettre d'éviter... la ville de Montréal de mettre en place des projets structurants. C'est exactement ce qui se produit à l'heure actuelle, et c'est pourquoi il n'y a aucun projet structurant à Montréal qui a été bloqué par une menace de référendum, parce que systématiquement la ville a fait appel à l'article 89.

Je pourrais vous énumérer plusieurs projets, mais je vais vous donner un exemple tout récent, qui s'est produit dans Rosemont—La Petite-Patrie, c'est dans l'arrondissement que je dirige, qui est le projet Angus, qui est un projet phare, qui est un projet structurant tant sur le point de vue immobilier qu'économique. Et, en effet, il y a des gens qui ont menacé d'ouvrir un registre pour un référendum, et, à la face même des commentaires que nous entendions, on pouvait prétendre que c'était, en effet, du «pas-dans-ma-cour». Nous avons donc demandé au conseil de ville de passer par l'article 89, et le projet pourra avoir cours. Et l'OCPM a l'avantage d'être un instrument consultatif qui permet à l'ensemble de la communauté de faire valoir leurs points de vue sur un projet majeur qui va avoir un impact sur des décennies à Montréal.

Maintenant, si on enlève l'article sur le référendum, étant donné que l'article 89 dit «peut» et non «doit» pour des projets d'envergure x, quand on parle de 25 000 pieds carrés, ça devient un élément facultatif. Donc, le recours à l'article 89 pour envoyer devant l'OCPM, il est utilisé strictement pour éviter justement qu'un petit groupe d'individus vienne empêcher un projet structurant. C'est le fondement même de la création de l'OCPM et de l'article 89. C'est pourquoi, aujourd'hui, on vient dire que c'est inutile, dans le cas de Montréal spécifiquement, de retirer les référendums parce qu'ultimement ils permettent deux choses, et je vais parler en connaissance de cause.

Dans la plupart des projets qui sont déposés dans les arrondissements — parce qu'on sait, à Montréal, contrairement aussi aux autres villes, l'urbanisme est géré par les arrondissements et non pas par la ville de Montréal — les projets dérogatoires qui sont proposés, il y a deux choses qui se produisent lorsque des citoyens peuvent s'opposer : la première, le promoteur immobilier va retirer son projet initial, va aller rencontrer les groupes pour connaître leurs arguments puis trouver un point de rencontre et un point d'entente, il va redéposer un nouveau projet bonifié. Je peux vous dire une chose, M. le ministre, c'est que, dans tous les cas qui se sont produits, on est arrivés avec un projet qui a fait consensus et qui s'est même amélioré, de l'avis des promoteurs même.

Je peux aussi vous donner des exemples de projets immobiliers où les promoteurs, sachant le processus, sachant où ils allaient s'implanter, allaient consulter la communauté en amont pour être certains que, lorsqu'ils déposaient un projet, il allait satisfaire l'ensemble de la communauté. C'est un peu ce qu'on vient aussi proposer dans l'article actuel, de venir bonifier.

Le Président (M. Auger) : Excusez. C'est tout le temps que nous avions pour le premier...

Une voix : ...

Le Président (M. Auger) : Non. Absolument pas. Nous allons maintenant poursuivre avec l'opposition officielle et M. le député de René-Lévesque pour les neuf prochaines minutes.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Mme Plante, M. Croteau, bien, tout d'abord, merci d'être là. Grâce à quelques coups de téléphone, on a réussi à vous faire apparaître à la commission. C'était important pour nous parce qu'on a entendu beaucoup de choses en commission parlementaire, mais on a aussi entendu... on s'est fait dire : Bien, parce qu'on est élus, on représente la majorité, on peut prendre des décisions en fonction de la majorité. Alors, à ce que je sache, vous êtes élus et vous représentez des gens qui vous ont fait élire. Donc, pour nous, votre voix compte, et c'est pour ça qu'on trouvait important de vous entendre aujourd'hui et d'entendre, d'ailleurs, l'opposition officielle de la ville de Québec juste après vous.

Cela étant dit, avant de passer la parole à ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, j'aimerais vous entendre sur la recommandation que vous faites concernant les contrats de gré à gré. La prétention qu'on avait ou les discussions qu'on a eues, dans certains cas, c'est que, pour ce qui est des grandes municipalités... des petites municipalités, pardon, de passer 25 000 $ à 100 000 $, c'était peut-être beaucoup, dans le cadre des contrats de gré à gré, peut-être risque de collusions. Bref, plusieurs choses ont été dites, mais surtout plusieurs prétentions ont été portées à certains élus, et, dans certains cas, de mauvais égards. Alors que notre prétention aurait pu être le contraire : dans le cas de Montréal, 100 000 $, dans le fond, quand on regarde la grosseur des budgets, le nombre des contrats, c'est peut-être le temps de se rendre jusque-là dans le cas de Montréal. Alors que vous arrivez à une position très, très, très près du 25 000 $, en nous disant : Bien, écoutez, si on mettait ça à l'IPC, ça nous donnerait à peu près 33 000 $. Donc, soyons logiques, si l'IPC a augmenté jusqu'à ce niveau-là, donnons ces contrats, cette fonction-là.

Alors, j'aimerais vous entendre sur la pertinence de garder encore à Montréal de petits contrats à tout près de 33 000 $, alors qu'au nombre de budgets puis aux volumes Montréal a ses outils, elle a ses compétences pour, je pense, avoir le maximum de mécanismes pour éviter les dérives qu'on a pu connaître par le passé.

Le Président (M. Auger) : M. Croteau? Mme Plante?

Mme Plante (Valérie) : Non, ça sera Mme Plante.

Le Président (M. Auger) : Mme Plante, bien sûr, avec plaisir.

Mme Plante (Valérie) : Bien, écoutez, vous l'avez un peu dit, dans le contexte actuel ou plutôt à cause du passé, je pense qu'on doit faire preuve de beaucoup de prudence. L'ère post-Charbonneau, tout ce climat de méfiance, même on a un certain cynisme envers les classes... envers les élus, à Montréal et ailleurs. Mais, à Montréal, on a eu notre lot, là, de scandales à ce niveau-là. Donc, pour nous, à Projet Montréal, on s'inscrit surtout dans une continuité de s'assurer que les Montréalais vont pouvoir faire confiance à leurs élus et se dire : Bon, bien, le gré à gré, je veux bien, mais on va s'en tenir à un taux somme toute raisonnable.

Puis vous l'avez dit vous-même, il existe tellement de mécanismes, on vote énormément de très gros contrats, mais le fait que ça passe en conseil municipal pour des sommes supplémentaires, mettons 35 000 $, moi, je pense que c'est garant d'une transparence et d'une bonne pratique de gestion, vraiment. Et je ne vois pas la nécessité d'augmenter ce taux-là, d'augmenter le montant, là, des prêts de gré à gré. Je pense que ça demeure... C'est très simple, comme réponse, mais étant donné ce qui s'est passé, le passé, je pense qu'on préfère s'en tenir à ce taux.

Le Président (M. Auger) : M. Croteau.

M. Croteau (François William) : Oui. Si je peux aussi compléter. Il faut savoir que principalement, à Montréal, si on regarde les contrats qui sont donnés de gré à gré sous les 100 000 $, ce sont principalement des contrats d'ordre... de services professionnels, firmes d'ingénierie, firmes comptables, firmes de relations publiques, etc., et, pour nous, c'est très problématique étant donné justement ce qui s'est passé.

Actuellement, on le voit très bien, il y a beaucoup de contrats qui se sont donnés à 24 999 $ à certains individus qui, pour nous, étaient encore dans l'ordre du douteux. Et je ne veux pas faire plus d'évocation de sujets, ici, à ce propos, là, mais juste pour vous dire que c'est problématique, surtout en ce qui a trait aux firmes d'ingénierie et particulièrement dans le contexte où Montréal, plutôt que d'augmenter son expertise interne en matière d'ingénierie, a plutôt diminué son expertise interne. Montréal est plus dépendante que jamais des firmes d'ingénierie qu'avant la commission Charbonneau. Et d'augmenter le seuil vient encore plus accentuer le danger dans lequel on pourrait se retrouver dans l'avenir, surtout avec la capacité d'emprunt que Montréal a actuellement, donne plus que jamais de contrats d'infrastructures.

Et en ce moment même les firmes d'ingénierie ont de la misère à répondre aux demandes de la ville de Montréal, donc vous pouvez vous imaginer, si on ouvre la voie aux octrois de contrats de moins de 100 000 $ de gré à gré à des firmes d'ingénierie, avec tous les contrats qu'on va donner, on a peur à une grande dérive et qu'on se retrouve dans la même situation post-commission Charbonneau.

Le Président (M. Auger) : Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve pour quatre minutes.

Mme Poirier : Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux, mes voisins. On va aller sur le référendum. Je regarde vos propositions, entre autres la numéro 4, à l'effet que tout ce qui passe par 89 fasse l'objet obligatoire d'une consultation, et j'apprécie la précision sur le fait que ce ne sont pas tous les projets qui sont soumis à l'option référendaire, mais bien ceux qui sont dérogatoires, là. C'est important de remettre ça dans le contexte, là.

Cependant, je nous ramènerais un petit peu à l'histoire. En 2011, le projet de loi n° 47 du ministre... actuel ministre de l'Agriculture, là, qui était ministre aux Affaires municipales, allait beaucoup moins loin dans sa proposition, et il proposait essentiellement des zones franches dans les plans d'urbanisme sans référendum. Moi, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Auger) : M. Croteau.

M. Croteau (François William) : Oui. Merci beaucoup pour votre question, Mme la députée. En effet, le projet de loi du ministre Lessard, à l'époque, proposait des zones franches, ce qu'on pouvait appeler des zones de redéveloppement, en fait. Donc, principalement à Montréal, on parlait des zones, autrefois industrielles, où il y avait eu une délocalisation de plusieurs entreprises. Par exemple, principalement, il y en a beaucoup dans Hochelaga-Maisonneuve, dans Rosemont‑La Petite-Patrie, il y en a dans le Sud-Ouest, dans Ville-Marie, des usines, des anciennes usines, manufactures transformées en résidentiel. Et parfois, plutôt que d'aller vers soit les PPU ou d'autres types de planification et qui pourraient, donc, arriver à des freins, des longueurs au point de vue administratif, le ministre proposait des zones franches.

Par contre, un de ces éléments-là, qui était manquant, c'était justement les consultations préalables requises à un tel processus. Je pense que, comme dans le cas des PPU à Montréal, les PPU doivent nécessairement passer devant l'Office de consultation publique avant d'être adoptés, ce qui est pour nous nécessaire, que la population puisse s'exprimer avant d'adopter un projet de planification urbain de cet ordre-là. Et donc ce sont des éléments d'urbanisme qui peuvent être introduits, qui empêchent justement tout type de dérives. Et je pense que, pour une ville comme Montréal, il y a trop peu de plans de planification urbanistiques, il y a trop peu de PPU. Et nous, ce qu'on a peur avec cette réglementation-là, c'est que justement ça fasse en sorte qu'on en adopte de moins en moins, de la planification urbaine, et que Montréal devienne juste un gros Griffintown, ce qui serait donc de laisser la ville complètement aux promoteurs et que ce soient eux qui...

• (17 h 10) •

Le Président (M. Auger) : Juste une minute. Mme la députée de Taschereau. Madame...

Mme Maltais : Une minute. Vous me permettez?

Une voix : Oui.

Mme Maltais : Parce qu'avant on avait une heure, maintenant on a 45 minutes, gracieuseté du gouvernement libéral. Le processus de consultation de la ville de Montréal a souvent été cité comme étant un exemple, par exemple, pour la ville de Québec, qui ne veut pas avoir ce type d'organisme. Est-ce que vous êtes satisfaits de ce type d'organisme, de ce que ça donne comme résultat de consultation?

Mme Plante (Valérie) : Tout à fait. L'Office de consultation publique de Montréal est fabuleux. Et c'est pour ça qu'on est ici. Parce qu'entre autres, il ne faut pas l'oublier, le droit de référendum permet justement d'utiliser ce mécanisme-là pour éviter des référendums. Alors, il y a plein de projets qui jamais n'auraient été devant l'Office de consultation publique, s'il n'y avait pas eu une certaine grogne ou une certaine mobilisation de la population. Donc, c'est une excellente idée que d'autres villes s'inspirent peut-être de l'OCPM, mais encore faut-il qu'il y ait un incitatif pour qu'on l'utilise à pleine capacité. Et je dois vous dire que l'OCPM se demande un peu, si jamais le droit de référendum, on l'abolit, qu'est-ce qu'ils vont faire. Parce que ça fait partie de leur mandat.

Le Président (M. Auger) : Merci. Merci beaucoup. Nous allons maintenant poursuivre avec, pour les six prochaines minutes, M. le député de Blainville.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Mme Plante, M. Croteau, merci. Hier, la ville de Gatineau m'a ébranlé. Puis je vous disais ça aujourd'hui, votre participation à notre commission parlementaire est à point nommé. C'est-à-dire qu'hier le maire de Gatineau, évidemment, membre de l'UMQ puis une des grandes villes du Québec, puis voisins d'Ottawa, puis le reste, tu sais... Bon, ce qu'on nous a dit, depuis les tout débuts de la commission parlementaire, c'est qu'ailleurs au Canada il n'y en a pas, de référendum, il n'y en a pas aux États-Unis non plus, donc pourquoi nous, on est différents des autres? Et lui, le maire de Gatineau, il est voisin d'Ottawa puis lui, il nous a demandé de maintenir les référendums. Bon, pour moi, là, c'est...

Puis je vais prendre la peine de le lire, parce que ça vaut la peine, là, puis ce n'est pas bien long. Parce que lui, il voulait une modification à 85.5, en disant : «Une municipalité peut délimiter dans son plan d'urbanisme toute partie de son territoire qui constitue une zone de requalification à l'intérieur de laquelle elle peut élargir le bassin des personnes habiles à voter lorsqu'une modification réglementaire est susceptible d'approbation référendaire.» Donc, lui, ce qu'il dit, c'est finalement : Dans les zones de requalification, il faut maintenir le référendum, mais être capables de... parce que peut-être que le processus référendaire actuel, ce n'est pas la solution idéale. Il faudrait s'attaquer au processus référendaire, mais le maintenir. Moi, je trouve ça intéressant puis... Je trouve ça intéressant.

Par contre, à Montréal, mon problème puis depuis le début... Parce que l'article 89... Moi, évidemment, je suis porte-parole de mon parti pour la métropole. Bien, Montréal a l'article 89, ce que Québec n'a pas. Donc, théoriquement, mon grand questionnement : Pourquoi le maire veut absolument... Parce qu'il a déjà une façon, lui, d'opérer. Je comprends que c'est pour les grands projets, quand je lis 89, c'est pour les plus grands projets, et là, les plus petits projets, ça relève des arrondissements, donc ça relève de vous, M. le maire d'arrondissement, donc ça relève de vous et de vos collègues. Parce que vous n'êtes pas seul, et il y en a quelques-uns à Montréal. Et ça, évidemment, donc, vous, vous ne voyez pas de problème à ça, puis j'aimerais que vous donniez, sans partisanerie politique, là, comment ça se vit, pas juste dans le vôtre, chez vos voisins, là. Est-ce qu'il y a un problème, dans les arrondissements de Montréal, par rapport au référendum, là, si on maintenait la situation telle qu'elle est présentement, exemple?

Le Président (M. Auger) : M. Croteau.

M. Croteau (François William) : Merci pour votre question, M. le député. En fait il faut se rappeler que, dans le projet de loi n° 121, on demande que, dans l'article 89, on rabaisse le niveau à 15 000 pieds carrés, ce qui rendrait... ce qui qualifierait des projets de plus petite envergure qu'actuellement. Donc, c'est un peu contradictoire, si on demande de rabaisser les niveaux pour les amener devant l'OCPM, quand, d'un autre côté, on demande l'abolition des référendums, qui mènerait à rendre caduque l'article 89. Donc moi, je pense qu'on est d'accord pour le 15 000 pieds carrés dans le projet de loi n° 121, qui permettrait d'amener les projets vers l'OCPM. Mais il faut nécessairement maintenir...

Pour regarder un peu le quotidien d'un arrondissement, puis je vais parler de façon générale, parce que je suis là depuis 2009 puis j'ai travaillé avec beaucoup de mes collègues, les arrondissements peuvent émettre facilement 3 000 permis de rénovation et de construction dans une année. Depuis 2009, j'ai personnellement fait face à trois menaces de processus référendaires dans Rosemont—La Petite-Patrie puis on a émis pour 5 000 permis... 5 000 unités de construction depuis 2009. Ça vous donne une idée à quel point il n'y a pas de problème avec le processus référendaire. Et, dans tous les cas, et ça se produit ailleurs à Montréal, les promoteurs ont retiré leur projet, et l'ont bonifié, et même ils sont arrivés avec de la créativité.

Moi, je pense que, dans un système économique libéral comme le nôtre, on doit pousser les entrepreneurs comme les créateurs à l'innovation, à la créativité. Si on enlève les obstacles qui poussent les gens à se dépasser, on amène à la paresse. Et je peux vous dire que la plupart des projets qui nous ont été proposés où les gens se sont... dans tous les arrondissements confondus, là, c'est qu'ils étaient inquiets par rapport à ce qu'ils voyaient. Et les législateurs ont des limites dans leurs pouvoirs, au point de vue, je dirais, du bon goût et des impacts sur la qualité de vie des résidents. Et ça, je pense que c'est important de le mentionner.

Et honnêtement, quand on parle, là, qu'il y a des problèmes à Montréal, je fais juste référence à Ville-Marie, parce que le maire de Montréal est aussi le maire de Ville-Marie et il a à gérer des octrois de permis dans son arrondissement, le plan d'urbanisme fait en sorte qu'il y a rarement des projets dérogatoires dans Ville-Marie. En fait, à ma connaissance, il n'y en a pas, de projet dérogatoire dans Ville-Marie. Il n'y a pas eu de groupes qui se sont opposés. Donc, quand le maire Coderre a évoqué ces éléments-là, j'ai du mal à comprendre à quel projet il fait référence, parce qu'il n'y a eu aucun processus référendaire qui a été mené à son terme pour tous les projets immobiliers au cours des 10 dernières années à Montréal.

Donc, à mon sens, l'article 89 a joué son rôle, et, dans les arrondissements, les projets de plus petite envergure ont été gérés localement, de bonne foi avec les promoteurs, qui a fait en sorte qu'on a pu faire du développement sans entrave.

Le Président (M. Auger) : 30 secondes, M. le député.

M. Laframboise : Si on vous donnait une zone de requalification des zones franches mais avec un processus référendaire, pour lesquelles on pourrait modifier, là, est-ce que ça serait acceptable? Exemple, les zones franches qu'avait déposées le ministre, à l'époque, mais avec un processus référendaire qui pourrait faire votre affaire.

M. Croteau (François William) : Bien là, je ne veux pas parler au nom de tout mon parti, parce qu'on n'a pas parlé de cet aspect-là. Personnellement, si je parle de mon expérience comme maire de Rosemont—La Petite-Patrie, je serais porté à vous dire oui.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup, donc, Mme Plante et M. Croteau, de votre participation aux travaux de la commission.

Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 18)

(Reprise à 17 h 20)

Le Président (M. Auger) : Nous allons reprendre nos travaux, en souhaitant la bienvenue à la chef de l'opposition officielle à la ville de Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation, et par la suite il y aura une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Donc, dans un premier temps, bien vouloir vous identifier, et par la suite vous pourrez commencer votre présentation. À vous la parole.

Démocratie Québec

Mme Guérette (Anne) : Merci beaucoup. Alors, m'avez-vous demandé de m'identifier?

Le Président (M. Auger) : De vous identifier, effectivement, et par la suite vous pourrez commencer votre présentation.

Mme Guérette (Anne) : O.K. Alors, je suis Anne Guérette, chef de l'opposition à la ville de Québec, chef du parti Démocratie Québec et conseillère municipale également dans le district du Cap-aux-Diamants.

Alors, M. le Président...

Le Président (M. Auger) : ...accompagnée de?

Mme Guérette (Anne) : Bien, je vais vous le présenter.

Le Président (M. Auger) : Ah!

Mme Guérette (Anne) : Inquiétez-vous pas, je m'en viens, là! M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, merci de nous accueillir ici, aujourd'hui, pour nous permettre de vous présenter nos remarques sur le projet de loi n° 122. Je suis accompagnée de Me Denis L'Anglais, président du parti Démocratie Québec, le parti qui est actuellement justement à l'opposition à la ville de Québec.

Démocratie Québec est un parti qui est né du désir de plusieurs d'amener plus de démocratie à la ville de Québec. Notre vision, c'est une démocratie ouverte, dynamique, participative, qui priorise son action en fonction de ce qui s'exprime sur le terrain et pas juste aux quatre ans. C'est une démocratie où les citoyens sont invités à prendre une part active au sujet des enjeux qui ont un impact sur leur cadre de vie, particulièrement les enjeux d'urbanisme et d'aménagement du territoire, qui sont, et vous le savez, des enjeux très sensibles qui ont un impact à long terme sur la vie des gens et aussi sur la qualité du territoire.

Démocratie Québec est un parti qui est en faveur d'une densification, mais une densification qui s'effectue en harmonie dans son environnement, en harmonie dans son environnement naturel, dans l'environnement également, dans le cadre bâti et aussi dans son environnement social, ce qui veut dire, bien sûr, avec une acceptabilité de la population.

Vous comprendrez donc, suite à ce que je viens de vous dire, que, pour nous, Démocratie Québec, éliminer le processus référendaire va à l'encontre de notre mission et de notre vision de la démocratie et du développement urbain. Alors, notre position est claire et sans équivoque, nous demandons à ce que le référendum soit maintenu. Nous demandons à ce que le référendum soit étendu dans les plans particuliers d'urbanisme, qu'on appelle les PPU, parce qu'actuellement ils sont soustraits de l'obligation de référendum. Et nous demandons également l'abolition de l'article 74.4 qui permet de soustraire au processus référendaire des projets à caractère communautaire, culturel ou ayant une surface, une superficie de 25 000 pieds carrés et plus.

En ce qui concerne...

Une voix : ...

Mme Guérette (Anne) : Mètres carrés? Mètres carrés, pardon. En ce qui concerne la consultation, je pense que tout le monde s'entend pour dire que le processus de consultation publique est désuet ou déficient un peu partout au Québec, incluant, bien sûr, à la ville de Québec, et l'Institut du Nouveau Monde le mentionne également dans son rapport qui est sorti il y a quelques jours. La politique actuelle de consultation publique a démontré, à Québec, son inefficacité à plusieurs reprises. Mais, pour nous, à Démocratie Québec, même lorsque la politique de consultation publique sera rénovée, mise à jour et modernisée, nous tenons quand même à avoir, à conserver le processus référendaire.

Évidemment, plus notre politique de consultation publique sera adéquate, moins les citoyens, normalement, auront recours au processus référendaire. Mais, je veux dire, pourquoi avoir peur de le conserver? Tant mieux si on n'a pas besoin de l'utiliser, mais, pour nous, le processus référendaire est une forme de police d'assurance.

Donc, pourquoi on veut absolument conserver le processus référendaire? Parce qu'on veut garantir aux citoyens que non seulement ils seront entendus, mais que l'essence de ce qu'ils vont exprimer sera réellement prise en compte dans la décision. Et, advenant que les élus fassent fausse route à cet effet, les citoyens auront en main un véritable levier permettant de forcer soit l'abandon total d'un projet ou encore son amélioration pour faire en sorte que l'acceptabilité sociale soit suffisante.

Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, les référendums sont une forme de police d'assurance qui permet de prévenir les erreurs, les abus et le manque d'écoute. Et disons qu'à Québec, dans les 10 dernières années, nous avons quand même été servis. Nous avons vécu plusieurs projets où les citoyens ont senti qu'ils n'étaient pas entendus, que tout ce qu'ils exprimaient n'était pas pris en compte et qu'on leur imposait des projets où il n'y avait pas d'acceptabilité sociale.

Alors, je termine en vous disant, ma partie à moi, que nous sommes ici pour représenter l'intérêt des citoyens de Québec, qui comptent sur vous pour que vous mettiez tout en oeuvre pour préserver la démocratie à Québec et rassurer les citoyens à l'effet qu'ils auront réellement leur mot à dire en matière d'aménagement de leur territoire et qu'on ne donnera pas carte blanche à un maire ou une mairesse qui pourrait avoir envie de tout contrôler et de faire fi de l'opinion des citoyens qu'il ou elle représente. Merci.

Le Président (M. Auger) : M. L'Anglais.

M. L'Anglais (Denis) : M. le Président, l'abolition des référendums dans les villes rendrait les citoyens incapables d'avoir une prise et une voix au chapitre sur les projets dérogatoires ayant un impact sur le milieu de leur vie... en fait, sur leurs milieux de vie. Mais, malgré les objections formulées par des gens qui ne sont pas des inconscients à plein temps, pour reprendre l'expression du maire Labeaume, la ville de Québec n'a pas administré la preuve d'une menace réelle ou appréhendée résultant de l'usage du référendum ni n'a fait la démonstration du caractère antidémocratique du recours occasionnel au référendum au cours des 15 dernières années. Ceux-ci servent davantage à moduler les projets dérogatoires de développement qu'à les empêcher. En conséquence de quoi la ville n'a démontré ni l'urgence, ni l'opportunité, ni la pertinence d'abolir les référendums.

M. Labeaume a cité abondamment le rapport L'Allier, mais de ce rapport le maire ne retient qu'une seule recommandation, c'est l'abolition du référendum, en occultant toutes les autres recommandations visant la mise en place d'un partenariat performant entre les citoyens et les élus. Ce rapport date déjà de près de 10 ans, et entre-temps, cependant, l'expression citoyenne à Québec a fait peau de chagrin à coups de substitution du conseil municipal aux pouvoirs de l'arrondissement en vertu de l'article 74.4 de la charte, à coups de diminution du pouvoir de consultation des conseils de quartier, de recours aux PPU, de discrédit public à l'encontre des citoyens, aux groupes de citoyens qui ne partagent pas son avis ou qui veulent simplement améliorer le projet en question.

Les propos du maire sur le soi-disant recours abusif des politiques des référendums par les citoyens, sur son caractère antidémocratique sont alarmistes et, à notre avis, tiennent davantage des faits alternatifs que de la réalité.

En Suisse, où rien en se fait sans qu'il n'y ait référendum, ce pays n'est pas devenu pour autant anarchique ni n'est un pays sous-développé. Pourquoi est-ce qu'il en serait différemment à Québec et à Montréal? Il y a, à mon avis, tentative d'instrumentaliser la commission permanente... la commission parlementaire en laissant entendre qu'il y a péril dans la demeure, alors qu'il n'en est rien. Malgré les nombreux outils à disposition de la ville, qui la met à l'abri des référendums, M. le maire cherche l'adoption d'une mesure législative dont il n'a pas besoin pour continuer ce qu'il fait déjà, hélas! trop bien.

Nous demandons à la commission parlementaire, donc, de maintenir le recours au référendum décisionnel dans les municipalités, même à la lumière des recommandations de l'Institut du Nouveau Monde, si on les met en application, qui devraient améliorer sérieusement, donc, le processus consultatif et... référendums.

À nouveau, les référendums modulent les projets mais ne les empêchent pas. De fait, ils modèrent la voracité des promoteurs immobiliers qui carburent à la marge bénéficiaire au mètre carré et aux rendements aux actionnaires. Le citoyen, son milieu de vie, sa qualité de vie semble, de très loin, la dernière des préoccupations. Puisqu'ils ne sont pas élus, ils n'ont pas de comptes à rendre auprès de l'électorat.

Quant au maire Labeaume, même s'il affirme qu'il n'est pas un inconscient à plein temps, qu'il sait juger ce qui est bon, ce qui ne l'est pas, puisque l'aménagement urbain est une affaire politique et que, si les personnes ne sont pas contentes, elles devront se faire élire, il est, d'abord et avant tout, une personne intéressée à plein temps. Il est juge et partie dans ce processus-là et surtout lorsqu'il se prononce sur la pertinence d'un projet, puisque ce sont des recettes fiscales, c'est une recherche d'équilibre budgétaire, c'est l'obsession de la réduction de la dette de 1,6 milliard, constituée au fil des ans depuis qu'il y est.

Enfin, ce projet, et c'est ça l'enjeu majeur, heurte de plein fouet plusieurs des 16 grands principes de la Loi sur le développement durable, qui a été adoptée par l'Assemblée nationale il y a maintenant 10 ans. En effet, ce projet s'apprête à exclure les citoyens, partie prenante et au coeur du processus décisionnel touchant leurs milieux, à les écarter de la définition d'une vision concertée du développement, à faire de la fiscalité... de la rentabilité fiscale au mètre carré le centre des préoccupations de la ville, au détriment de l'équité, de la solidarité, de l'engagement, de la participation citoyenne et au détriment du rapprochement des lieux de décision avec les citoyens concernés.

• (17 h 30) •

Alors, M. le Président, déjà, Mme Guérette a évoqué quelles étaient nos demandes, maintenir le recours au référendum à titre de police d'assurance pour les citoyens, indépendamment de ce qu'il arrivera du rapport de l'Institut du Nouveau Monde. Nous souhaitons élargir bien sûr au PPU le recours à l'approbation référendaire, l'abrogation, bien sûr, de l'article 74.4 et nous proposons en contrepartie de hausser les seuils de signature des registres pour la mise en oeuvre du processus référendaire comme nous proposons en même temps d'élargir les zones contiguës des personnes admises à voter pour donner davantage de légitimité au processus référendaire. Enfin, nous proposons que le projet de loi n° 122 puisse se référer à la Loi sur le développement durable de façon que les grands principes qui apparaissent à cette loi-là y soient.

Enfin, on termine, M. le Président, en réaffirmant qu'il n'y a pas de menace réelle ou appréhendée, que la mesure législative recherchée par M. Labeaume constitue une mesure à contre-courant de la volonté citoyenne, mais aussi à contre-courant des grands principes de développement durable et contrairement à ce que le Québec a adopté et à l'instar de ce qui se fait sur le plan international. Et, enfin, nous affirmons que les membres de la commission parlementaire, au nom des citoyens de Québec, devraient s'imposer comme le rempart contre les dérives autoritaires en maintenant et en développant la démocratie citoyenne à Québec et au Québec, en ayant à l'esprit ce proverbe cité par Gandhi, Mandela et plus récemment M. L'Allier : Tout ce que tu fais pour moi, si tu le fais sans moi, tu le fais contre moi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Auger) : Merci pour votre présentation. Nous allons débuter la période d'échange. M. le ministre, il vous reste 13 minutes.

M. Coiteux : Mme Guérette, M. L'Anglais, merci beaucoup. Je veux juste faire une petite introduction un peu différente, mais en même temps un peu similaire à celle que j'ai faite auparavant avec des représentants de l'opposition officielle à la ville de Montréal. Nous, de part et d'autre, ici, dans cette commission, on est en politique partisane aussi, hein? Donc, c'est vrai qu'on a des différends qui sont teintés par cette nature de ce qu'on fait, hein, bien sûr, et c'est votre cas aussi, donc, et c'est le cas du maire de Québec qui est venu, et c'est le cas du maire de Montréal qui est venu. Et c'est normal que vous dites que vous parlez au nom des citoyens, que vous voulez défendre des citoyens, puis c'est tout à fait correct, et légitime, et normal. Vous êtes là pour ça. Vous êtes là en politique pour faire ça.

Mais le maire de Québec est venu nous dire la même chose. Quand, lui, il défend un modèle alternatif à celui qui existe aujourd'hui, notamment en matière de référendum, en matière d'urbanisme, il ne dit pas : Je le fais dans mon intérêt personnel, il dit qu'il le fait dans l'intérêt des citoyens. Puis il y a d'autres maires, à travers le Québec, qui ont été élus par leurs citoyens puis, des fois, il y a même des membres de leurs oppositions qui sont d'accord avec certaines dispositions du projet de loi. Peut-être que, pour d'autres villes que Montréal, Québec, c'est un modèle différent, mais néanmoins c'est un modèle qui change la donne par rapport au modèle actuel des référendums en matière d'urbanisme.

Pourquoi je dis tout ça? C'est parce qu'on a des débats là-dessus, c'est légitime, c'est tout à fait normal, mais le gouvernement fait une proposition, là, ici, hein? Il fait une proposition de faire en sorte que ça soit la démocratie municipale, locale qui définisse les modèles de consultation de leurs citoyens en matière d'urbanisme. C'est ça qui est le modèle, c'est un modèle de confiance. Et on a eu des groupes, notamment l'Institut de développement urbain du Québec, puis ils étaient représentés par quelqu'un qui a été ministre des Affaires municipales en plus et qui a eu une expérience gouvernementale, qui nous a même dit que le modèle qu'on propose pour Québec et Montréal, on devrait même l'étendre à toutes les grandes villes du Québec.

Puis on eu ce matin les gens de Vivre en ville, qui, eux, nous ont dit : Non, non, prenez le modèle que vous proposez pour toutes les autres villes que Montréal et Québec puis appliquez-le également à Montréal et Québec, de telle sorte que le point de vue que vous défendez, il est tout à fait légitime, mais il ne faut pas penser que c'est la seule façon de vouloir représenter l'intérêt citoyen. C'est juste ça que je voulais dire, on a des désaccords, des désaccords légitimes là-dessus.

Ça, c'était mon introduction, vient maintenant ma question. Supposons que ça n'avait jamais existé ça, ces référendums en matière d'urbanisme au Québec... parce qu'ailleurs dans le monde, ce n'est pas partout que ça existe. Vous avez cité la Suisse que je connais très bien. Ce n'est pas juste en matière d'urbanisme, eux, ils ont des référendums sur des questions aussi profondes que : Devrait-on avoir une armée? Alors, ça va loin. Les taux de participation sont faibles par contre, sont très, très faibles, de telle sorte qu'on se pose des questions parfois sur la représentativité de ces exercices-là. Je n'en dirai pas plus long. Mais justement les gens, dans le modèle actuel, ils trouvent qu'il y a peu de citoyens, souvent des minorités très organisées... ça ressemble plus, dans certains cas, à une minorité de blocage qu'à l'expression de l'intérêt citoyen, et les gens cherchent des modèles alternatifs.

Alors, supposons que ça n'avait jamais existé et supposons que vous gouverniez, parce qu'on parle de gouvernement de proximité maintenant, la ville de Québec, puis vous diriez : On a actuellement un modèle de consultation, qu'est-ce que vous feriez pour améliorer le modèle actuel de consultation pour qu'il donne les résultats que vous souhaitez sans passer par le mécanisme des référendums?

Le Président (M. Auger) : Mme Guérette.

Mme Guérette (Anne) : Oui. Alors, qu'est-ce qu'on proposerait? En fait, c'est sûr que, le problème habituel, c'est quand on arrive avec des projets démesurés, c'est quand on arrive avec des projets qui sont en dehors du zonage. Ça fait que qu'est-ce qu'on propose, qu'est-ce qui est très, très important, bien sûr, c'est la consultation en amont. C'est certain, la consultation en amont, c'est le moment où on consulte notre collectivité avec tous les citoyens au sens large du terme, autant les citoyens ordinaires que les citoyens corporatifs, que les gens du milieu culturel ou communautaire. On entend toutes les parties, les professionnels aussi, les experts, et là on établit le grand cadre, les règles du jeu de comment on pense... qu'est-ce qui est bien pour encadrer le développement de notre territoire.

Donc, ce qu'il faut qu'on fasse, c'est qu'est-ce qu'on fait, donc, quand arrive un projet qui est complètement en dehors de ça. Bien, il faut aller consulter les citoyens et puis c'est sûr qu'il faut faire les lois pas en fonction des personnes qui gouvernent. On peut avoir toutes sortes de personnalités, et donc il faut faire fi de ça, mais il faut assurer les citoyens que ce qu'ils diront en consultation publique sera réellement pris en compte. Et le référendum est comme un levier qui donne un équilibre dans le rapport de force. Sans ce levier-là, eh bien, un maire ou une mairesse qui voudrait imposer ses projets sans tenir compte de ce qui s'exprime, pourrait le faire, puis on l'a vécu à Québec.

On l'a vécu à Québec, parce que l'îlot Esso, l'îlot Irving, ce sont des projets où on avait consulté les citoyens en amont. Pour l'îlot Esso, c'était 13 mètres, la hauteur de bâtiment. Alors, qu'est-ce qui est arrivé? C'est que la mairie a permis qu'un projet de 21 mètres soit étudié, travaillé, dessiné par les promoteurs, étudié par la commission d'urbanisme pendant presque trois ans. Donc, c'est sûr que, deux ans ou trois ans plus tard, quand le promoteur arrive devant les citoyens qui, eux, s'étaient entendus sur un contrat de 13 mètres, on arrive avec un projet fini de 21 mètres, et là les citoyens disent : On ne veut pas voir ça. C'est sûr que, là, tout le monde est malheureux. Les promoteurs ne sont pas contents, les citoyens ne sont pas contents, les fonctionnaires se font ramasser. Il n'y a personne qui est content. Donc, évidemment, la consultation en amont, respecter la consultation en amont, c'est fondamental. Donc, moi, je pense que ça prend un levier. Il faut permettre aux citoyens un levier.

Et je veux revenir sur la question des minorités. Moi, j'ai vécu de près plusieurs référendums. Depuis 15 ans, je suis sur le terrain avec les citoyens et je l'ai été comme citoyenne pendant cinq ans. J'ai mené le premier référendum de l'histoire de la ville de Québec fusionnée en 2004 et moi, je n'ai pas connu de minorité contre le développement. À chaque fois qu'il y a eu une mobilisation et que les citoyens ont réussi à traverser ce processus référendaire qui est très exigeant, c'est parce qu'il y avait vraiment un projet sur la table qui n'était pas acceptable socialement et qu'il fallait se rasseoir ensemble pour améliorer, bonifier.

Alors, si on n'avait pas eu ce processus référendaire, bien, on aurait un bâtiment peut-être de huit étages au coin Cartier—René-Lévesque. Et, sur la rue Cartier, les citoyens m'interpellent au quotidien, peut-être un peu moins, mais, au lendemain du référendum, les gens sont tellement contents qu'on ait évité cette construction démesurée qui aurait brisé notre avenue Cartier. Non, il a fallu se battre. Pourquoi? Parce qu'il n'y avait pas d'écoute, malheureusement. Parce que, moi, comme conseillère du district, je l'ai dit en amont bien longtemps : Je connais mes citoyens, je vous le dis tout de suite, moi, je pense que ça ne passera pas. Vous pouvez continuer de pousser si vous voulez. Moi, je vous le dis, là, les citoyens, ils n'accepteront pas ce projet-là.

Donc, on a continué quand même de pousser, puis les citoyens, finalement, sont allés jusqu'au bout du processus, ont gagné le référendum, et c'est un processus citoyen, qui a été très exigeant, que les citoyens ont traversé. On a réussi à améliorer les choses.

Dernière petite chose avant... Je veux parler de l'IDU, parce que M. Coiteux, tout à l'heure...

• (17 h 40) •

Le Président (M. Auger) : M. le ministre.

Mme Guérette (Anne) : ...M. le ministre, pardon. Tout à l'heure, vous disiez qu'on peut avoir différentes visions, qu'il y a plein de gens qui sont venus ici parler de l'intérêt citoyen. Je veux juste vous dire que l'Institut de développement urbain, c'est un regroupement de promoteurs immobiliers qui, je crois, représente autour de... de milliards. Je n'ai pas le nombre exactement, mais des milliards de chiffre d'affaires.

Donc, c'est des gens qui ne veulent pas voir le processus référendaire, c'est bien évident. Ce n'est pas dans l'intérêt des citoyens, c'est dans l'intérêt de leur entreprise, c'est dans l'intérêt de leurs actionnaires, et on les comprend. Si on était à leur place, on viendrait ici, on vous ferait la même demande. Mais ce n'est pas dans l'intérêt des citoyens que l'IDU vient vous demander le retrait du processus référendaire. Je voulais juste le préciser.

Le Président (M. Auger) : M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie : Merci, M. le Président. Tout d'abord, merci pour votre présentation. C'est intéressant et c'est justement l'objectif de ce genre de commission parlementaire, d'entendre différentes personnes, différents groupes pour exprimer une opinion.

Et je reviens sur la question du référendum, parce que ça nous semble un enjeu du projet de loi, et on entend des gens qui sont pour puis d'autres qui sont opposés au retrait. Maintenant, j'aimerais savoir de votre part, est-ce que le processus référendaire est un... Je vous dirais quasiment, pour ce que j'entends à certains points de vue, c'est quasiment le seul processus d'une démocratie citoyenne ou d'une participation citoyenne. Et, quand je regarde les chiffres, particulièrement à Québec, on parle de cinq référendums sur une période de 15 ans, ce qui fait en moyenne un référendum aux trois années. Alors, ce n'est vraiment pas optimal. Peut-être, il y a un problème avec le processus référendaire, mais on ne pourrait pas considérer que c'est un élément extrêmement positif pour les citoyens, optimal pour avoir une discussion avec sa ville ou avec le conseil municipal. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Mme Guérette (Anne) : Absolument, c'est sûr que ce qui... Il ne reste plus grand, grand, grand place pour donner aux citoyens un levier, parce qu'on le sait, le PPU, à partir du moment où la ville décrète un programme particulier d'urbanisme sur un territoire, il n'est pas susceptible d'approbation référendaire. Donc, on a utilisé allègrement quand même cette façon de faire dans les dernières années à Québec.

Donc, oui, c'est le seul levier qu'il reste aux citoyens pour tenter soit de bloquer un projet qui, selon eux, vient briser leur cadre de vie, et c'est comme une police d'assurance, c'est-à-dire que la police d'assurance, bien sûr, on a tout avantage, tout le monde, à mettre tout en oeuvre pour ne pas avoir à s'en servir, mais, quand elle est là, elle peut être très utile, parce qu'effectivement notre développement urbain... Quand on construit un bâtiment, c'est pour des décennies, voire des siècles, donc ce n'est pas à prendre à la légère. On a vu déjà... La Révolution tranquille, vous le savez, il y a eu beaucoup d'erreurs urbaines qu'on a faites à cette époque-là et aujourd'hui il faut tenter d'éviter ces erreurs-là encore, et c'est un levier qui permet, selon nous, d'éviter des erreurs, de prévenir les abus de certains dirigeants qui auraient beaucoup de pouvoir et qui pourraient l'utiliser pour imposer des projets qui, un peu comme le disait tout à l'heure mon collègue M. L'Anglais, rapportent beaucoup de taxes.

C'est sûr que la question aussi de la fiscalité, évidemment, tu sais, c'est un problème qu'il va falloir adresser éventuellement, parce que c'est sûr qu'on est encore tenté, certains maires sont encore tentés, évidemment, d'aller... Notre pain puis notre beurre, c'est les taxes. Donc, c'est sûr que des gros projets, c'est tentant encore, parce que ça rapporte des taxes à court terme. Puis la sagesse citoyenne, elle, elle nous calme un peu pour nous dire : Bien là, qu'est-ce qu'on est en train de faire sur le long terme? Est-ce qu'on est en train de briser notre ville? Donc, oui, c'est un levier, une police d'assurance. Merci.

Le Président (M. Auger) : Nous allons poursuivre avec Mme la députée de Taschereau pour les neuf prochaines minutes.

Mme Maltais : Merci. Mme la chef de l'opposition, M. L'Anglais, bienvenue à cette commission parlementaire.

J'ai trouvé très intéressante l'envolée du ministre parce qu'elle vient de me prouver qu'il a compris que le sujet venait de se recadrer. C'est assez étonnant, ce qui vient de se passer. D'abord, je vais le rassurer, je ne suis pas ici... Une fois assis autour de la commission parlementaire dans un projet de loi, dans une audition, on n'est pas là de façon partisane, puis je pense qu'il l'a vu autour de l'attitude qu'on a eue autour du projet de loi sur le statut de la capitale nationale, où... Maintenant, on est là dans une option d'assurer une qualité de vie démocratique à notre société québécoise. Puis ce projet de loi là touche à des éléments de la démocratie puis c'est là que le sujet vient de se recadrer.

Le titre du projet de loi, c'est de reconnaître que les municipalités sont des gouvernements de proximité, augmenter leur autonomie et leurs pouvoirs. Donc, le projet de loi, quand le ministre l'a présenté, c'était entre la municipalité et le gouvernement, mais il y a un citoyen en quelque part là-dedans, et la surprise dans ce projet de loi là, ça a été de découvrir qu'on enlevait des pouvoirs aux citoyens et aux citoyennes des villes. Et c'est là que le débat se fait et c'est là que le débat s'est recadré. Je pense que c'est ça, la... ce que je viens de comprendre un peu de la surprise du ministre par rapport à la façon dont on pouvait accueillir cette loi, parce que sur l'autonomie on est d'accord, mais c'est sur ce retrait du pouvoir d'un citoyen qu'il y a tout à coup, je vais l'appeler comme c'est avec ce que je vois, une levée de boucliers qui grandit. Puis je trouve ça important puis je trouve ça intéressant comme le mouvement qui vient de se faire de l'autre côté, mais qui se fait partout. Moi aussi, je me posais des questions sur la loi puis je dirais que mon idée s'affermit de plus en plus.

Vous avez critiqué que les conseils de quartiers avaient perdu des pouvoirs ou, enfin, des consultations. Vous dites que les PPU sont aussi des endroits où on enlève le pouvoir référendaire. On sait que l'article 74.4 existe à Québec, qu'il permet de soustraire un édifice de plus de 25 000... carrés à l'option référendaire. Quels seraient, pour vous, les éléments qui pourraient nous permettre d'ajuster les choses pour permettre peut-être un meilleur équilibre, ce que souhaite le gouvernement et ce que souhaitent les maires et mairesses, je pense? Vous savez, une des propositions, c'est élargir la zone d'approbation référendaire. Pouvez-vous nous en parler? Et, si vous avez d'autres suggestions comme ça, on va les entendre.

Le Président (M. Auger) : M. L'Anglais.

M. L'Anglais (Denis) : Merci, M. le Président. Mme la députée, l'abolition de l'article 74 permet au conseil municipal de s'approprier les pouvoirs des arrondissements et de décider par-dessus la tête des arrondissements les projets qui intéressent l'arrondissement. Alors, qu'on abolisse cet article-là, ça va redonner le pouvoir aux arrondissements, ça va rapprocher le gouvernement de proximité, qui est celui de l'arrondissement, près des citoyens, et ce sont les conseils d'arrondissement qui vont gérer les projets et, en même temps, qui vont gérer les référendums dans leur territoire ou sur leur territoire. Un, augmenter les seuils de contribution au registre pour qu'il y ait davantage... augmenter le niveau pour qu'on ouvre les registres et, ensuite de ça, élargir les zones contiguës pour donner davantage de légitimité au processus référendaire.

Mais il y a certainement d'autres considérations à faire. Écoutez, si on retirait ou si on abolissait le référendum, il ne faudrait pas que ce projet de loi interdise les villes de pouvoir mener, envers et contre tous, un référendum si elles estiment que c'est utile. Il faudrait donc qu'on ne se retrouve pas à l'image de la Constitution espagnole qui interdit le référendum en Catalogne. Il ne faudrait pas qu'une loi empêche le référendum dans un arrondissement ou dans une ville. Je pense qu'on ferait fausse route.

L'idée, c'est de redonner dans un principe... en coordination avec les grands principes de développement durable, c'est-à-dire de remettre le citoyen au coeur de la décision qui le touche, et donc je pense qu'on devrait aller dans ce sens-là plutôt.

Mme Maltais : Je vais juste faire un autre commentaire avant de passer la parole à mon collègue qui est le meneur du dossier, mais je voudrais juste vous dire qu'il y a, dans votre mémoire, beaucoup d'articles... vous parlez d'articles où on élimine, par exemple, l'obligation du maire de présenter annuellement la situation financière, tout ça. Sur la reddition de comptes, c'est vraiment fouillé. Ça, on n'a pas entendu ça dans les autres mémoires. Ça fait qu'on va sûrement revenir là-dessus, mais on va échanger avec le gouvernement ou avec vous pour essayer de savoir exactement ce sur quoi vous voulez nous alerter, mais on est sur le grand débat démocratique actuellement. Mon collègue va prendre la suite.

Le Président (M. Auger) : M. le député de René-Lévesque, il vous reste à peu près quatre minutes.

• (17 h 50) •

M. Ouellet : Merci beaucoup. On a parlé des différents modèles, et, à travers les différentes discussions de la commission parlementaire, comme le ministre l'a rappelé, il y a différentes façons de voir la façon d'améliorer le sort des lois existantes. Et une des façons qui a été explorée ou qui a été échangée, c'est pour ce qui est de la ville de Québec, donc d'imiter un peu, là, la résultante de Montréal avec son office, donc quelque chose de vraiment indépendant.

J'aimerais vous entendre là-dessus. Si on avait à introduire ça dans la loi, parce que présentement, ce n'est pas cas... pour abolir les référendums de Québec, il n'y a pas de contrepartie à l'intérieur de la loi, il n'y a pas d'obligation, alors que les municipalités, pour perdre leur droit référendaire, doivent avoir une politique de consultation et d'information. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus. Québec n'a rien comme obligation, mais, si on avait à mettre quelque chose, quelque chose qui fonctionnerait, qui serait une véritable reddition de compte, une véritable participation citoyenne, ce serait quoi, selon vous, madame?

Le Président (M. Auger) : Mme Guérette.

Mme Guérette (Anne) : Ce serait une combinaison de plusieurs choses. Bien sûr, l'amélioration de la politique de consultation en amont, c'est fondamental. La conservation du processus référendaire et la création d'un office de consultation publique indépendant pour Québec, nous y avons réfléchi. J'en ai parlé déjà, lors de ma course à la chefferie, que moi, je m'engageais à créer pour Québec également un office de consultation publique indépendant.

Si vous le mettez dans la loi, nous, ça va être bien reçu par nous, c'est certain. Donc, nous, ce qu'on veut, comme je l'ai dit d'entrée de jeu, c'est plus de démocratie et non pas d'enlever... donc d'enlever du pouvoir aux citoyens. Donc, l'office de consultation public indépendant pourrait être très intéressant, justement, pour les projets de plus grande envergure, parce qu'à Québec l'article 74.4... puis ça, les citoyens me le disent souvent, c'est drôle de constater que plus un projet est gros, moins on a notre mot à dire dessus. Donc, à partir du moment où un projet a 25 000 mètres carrés et plus, là, on n'a plus rien à dire. Pourtant, c'est un projet majeur, au contraire, sur lequel les citoyens d'un large périmètre devraient avoir la possibilité de s'exprimer.

Donc, à travers la création d'un office de consultation publique indépendant, on pourrait, sans faire exactement comme à Montréal... il faudrait l'adapter pour notre réalité à nous parce que nous avons des conseils de quartier, ce que Montréal n'a pas. Donc, il n'est pas question d'abolir les conseils de quartier. Il est question de continuer de consolider le processus qui permet un débat ouvert à la recherche des meilleurs projets pour que notre ville grandisse toujours en beauté, en harmonie, en créant plus de richesse collective et de qualité de vie pour les citoyens.

Le Président (M. Auger) : 1 min 45 s, M. le député.

M. Ouellet : Merci. Ma collègue, tantôt, elle a vu juste en disant : On est en train de recentrer le débat sur l'essentiel. Qu'est-ce qu'on perd, qu'est-ce qu'on gagne, du côté du citoyen?

Mais je vous entendais parler tout à l'heure sur les avis publics, donc cette possibilité de maintenir, dans le fond, l'obligation de mettre les avis publics dans les médias écrits. J'ai l'impression qu'en vous entendant on vient de déplacer un peu l'endroit où est-ce que l'information va se trouver mais surtout la façon de l'obtenir. Anciennement, là, si on ne prend aucune disposition puis on garde la loi actuelle, là, l'information, elle se rend au citoyen. Quand je prends les nouvelles dispositions à plusieurs variables, j'ai l'impression que maintenant, le citoyen, il faut qu'il trouve l'information. Et ça, à vous entendre parler, c'est devenu un petit peu plus clair à mes yeux, mais à vous entendre parler, on manque un petit peu de reddition de comptes, mais on demande au citoyen de faire plus d'efforts.

Est-ce que cet effort-là sera soutenu? Est-ce que cette information-là va être facilement trouvable? J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce qu'on est en train de perdre, dans le fond, cette proximité que nous avions de rendre l'information disponible en la transposant comme étant une responsabilité du citoyen à la trouver, maintenant.

Le Président (M. Auger) : En 30 secondes, Mme Guérette.

Mme Guérette (Anne) : Oui, 30 secondes. Effectivement, on s'inquiète à plusieurs égards dans le projet de loi par rapport à l'éloignement ou à l'obligation pour le citoyen d'aller chercher l'information, que ce soit dans la diffusion des avis publics, que ce soit dans le rapport annuel sur le taux global de taxation qui ne sera plus au conseil municipal, que ce soit dans l'obligation du maire de présenter la situation financière de la ville, que ce soit en trait à la liste des contrats de 2 000 $ à 25 000 $. Donc, on a fait un peu un détail de quelques éléments comme ça qui, selon nous, va rendre l'information plus difficile à trouver. Il n'y aura pas de débat au conseil municipal...

Le Président (M. Auger) : Merci. C'est tout le temps que nous avions. Nous allons maintenant poursuivre avec le porte-parole de la deuxième opposition. M. le député de Blainville, pour six minutes.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Mme Guérette, évidemment, M. L'Anglais, merci de votre présence à notre commission parlementaire.

Comme j'ai eu la chance de l'expliquer tantôt à ceux qui vous ont précédés, depuis hier, là, moi, là, depuis que le maire de Gatineau qui... j'expliquais qu'il est voisin de l'Ontario, qu'ils n'ont pas de référendum, et puis c'était une prémisse qu'on s'était dite en commission parlementaire, depuis le tout début : les référendums n'existent pas dans le reste du Canada. Il n'y en a pas aux États-Unis, question d'efficacité. C'est quelque chose qui se tient, là.

Là, hier, le maire de Gatineau qui est venu nous dire : Moi, je veux les garder, les référendums. Et les zones de requalification, pour lui, c'est intéressant, mais il veut regarder le processus référendaire à l'intérieur des zones de requalification. Bon, ça, Gatineau, c'est Gatineau. Québec, c'est plus gros. Par contre, tout ça peut s'intégrer, là. Parce que je vous écoute, là, vous nous dites, vous êtes pour un office de consultation publique. Donc, Montréal a déjà un office. Montréal, par contre, a l'article 89 dans la charte, c'est-à-dire que pour les grands projets il n'y a de référendum, on s'en va en consultation publique plutôt qu'avoir un référendum. Donc, ça, c'est le modèle Montréal.

Et les arrondissements tantôt nous ont dit... le représentant de Rosemont—La Petite-Patrie nous a dit : Bien, moi, si j'avais une zone de requalification pour les plus petits projets avec référendum, pour lesquels on modifie... évidemment, l'important, c'est le seuil de signature, parce que c'était ça que le maire de Gatineau nous disait, là, il faut revoir le processus référendaire, ce n'est peut-être pas équitable présentement. Est-ce que ça pourrait s'appliquer à Québec, là, tu sais? Aidez-moi un peu, là.

Le Président (M. Auger) : M. L'Anglais.

M. L'Anglais (Denis) : M. le Président, M. le député, en réponse à la question, il faut se souvenir que, dès que le maire M. Labeaume a pris le pouvoir en 2007, dans les mois qui ont suivi, il a fait adopter une résolution demandant l'abrogation du référendum et ensuite de ça, le 19 mai 2011, devant cette même commission, il a demandé que l'ensemble du territoire de Québec soit déclaré zone franche de référendum, et ça, c'est dit dans les documents, donc, de la commission parlementaire. Alors, que ce soit pour un projet ou un projet de requalification seulement, alors que M. le maire Labeaume demande la totalité de la zone franche pour l'ensemble du territoire de la ville de Québec, il le demande depuis 2007... et là ça fait maintenant depuis 10 ans qu'il le demande. C'est une quête personnelle, il veut absolument et impérativement qu'il n'y ait pas de référendum.

Alors, est-ce qu'on y va juste pour une question de zone franche pour des projets de requalification, sachant la volonté démontrée et farouche depuis 2007? On se dit, il y a peut-être un risque, là, sur le plan politique. Et alors qu'on devrait pouvoir utiliser d'autres techniques, dont améliorer le processus référendaire, il y a quelque chose qui n'a pas été beaucoup utilisé, c'est le référendum consultatif de la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités. C'est un processus qui est admissible, et les villes ont très peu utilisé ce processus consultatif sur des projets majeurs. On n'a pas permis ou on n'a pas voulu l'utiliser à l'initiative des villes, et pourtant c'est disponible, ça fait partie des outils disponibles par les villes.

Alors, il y a une requalification, il y a une précision, il y a une amélioration du processus référendaire. On ouvre les registres, on améliore les zones contiguës, on élargit les zones contiguës, mais en même temps il faut essayer de redonner la capacité des citoyens d'intervenir sur leur propre milieu.

M. Laframboise : Donc, ce que vous nous dites, contrairement à Montréal qui, eux, vivent présentement avec l'article 89, pour lequel on peut se soustraire du processus référendaire par l'office, vous, ce n'est pas ça que vous voulez. Vous voulez... de toute façon, peu importe, on veut une consultation référendaire quand même, même s'il y a un office, là. Allez-y.

Le Président (M. Auger) : M. L'Anglais.

M. L'Anglais (Denis) : M. le Président, nous, on a dit oui à l'office. S'il y a un office qui est né, bien sûr, l'ensemble de la démarche va passer du côté de l'office. Et, oui, on trouve que c'est beaucoup plus garant d'un débat neutre, d'un débat non partisan s'il y avait un office. Ça, pour nous, là, ça va de soi, mais en même temps, en attendant que l'office se mette en place, en attendant... parce que la ville continue à évoluer, il y a encore des choses qui doivent se faire. Il faut qu'on permette donc la tenue d'un référendum jusqu'à ce qu'un office puisse se mettre en place.

M. Laframboise : Donc, quand l'office sera mis en place, ça pourrait être comme Montréal?

M. L'Anglais (Denis) : Tout à fait.

M. Laframboise : Parfait. Donc, c'est important qu'on le comprenne parce qu'il faut essayer de trouver quand même un processus qui soit équilibré pour toutes les villes du Québec.

Bon, évidemment, par rapport aux octrois de contrats gré à gré et tout ça, je voudrais vous entendre. Puis il me reste combien de temps, monsieur...

Le Président (M. Auger) : 1 min 15 s.

M. Laframboise : Je vais vous laisser la minute 15 secondes pour expliquer comment vous voyez ça, là. Vous avez des réticences par rapport à ce qui est dans le projet de loi.

Le Président (M. Auger) : M. L'Anglais.

M. L'Anglais (Denis) : M. le Président, oui, des réticences, effectivement. Pour nous, le 25 000 $ déposé ou la liste des contrats de 25 000 $ déposée au conseil municipal, ça permettait une vigilance accrue sur les contrats qui étaient octroyés, et nos amis de Montréal ont fait la référence à l'utilisation du 24 900 $, là, de façon systématique.

Et qu'on ajoute l'indice des prix à la consommation pour porter ça à 33 000 $ ou à 35 000 $, je ne pense pas qu'on voit d'inconvénient à la chose, mais il n'en demeure pas moins qu'il faudrait qu'un règlement prévoie la mise à jour de cet indice-là à chaque année, donc de façon que ça passe à 35 000 $, 36 000 $, 37 000 $ éventuellement.

Mais l'idée, c'est que ces contrats-là ne doivent pas donner ouverture... parce que 35 000 $ à Québec est une chose et 35 000 $ à Montréal en est une autre, mais 35 000 $ à Saint-Séverin de Beauce, c'est autre chose. En d'autres termes, il y a des tentations qui sont probablement plus grandes dans certaines villes, villages, par rapport aux grandes villes. En d'autres termes, d'abord et plus...

Le Président (M. Auger) : Désolé, c'est...

M. L'Anglais (Denis) : ...de transparence.

Le Président (M. Auger) : ...tout le temps que vous avions. Donc, Mme Guérette et M. L'Anglais, merci beaucoup pour votre participation aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 18 h 3)

Le Président (M. Auger) : Nous allons reprendre nos travaux, en souhaitant la bienvenue aux représentants de la Coalition pour la pérennité de la presse d'information au Québec.

Donc, je vous rappelle que vous disposez d'une période de 10 minutes pour votre présentation. Par la suite, il y aura une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous identifier, et par la suite vous pourrez commencer votre exposé. À vous la parole.

Coalition pour la pérennité de la presse d'information au Québec

M. Cauchon (Martin) : Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, mesdames messieurs quasi ex-collègues — même si j'étais à Ottawa à l'époque, j'ai eu l'occasion de me présenter ici régulièrement — je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui et de nous permettre de nous exprimer sur le projet de loi n° 122.

Mon nom est Martin Cauchon, et je suis président exécutif de Groupe Capitales Médias et co-porte-parole de la Coalition pour la pérennité des médias d'information au Québec. Je suis accompagné aujourd'hui de mes collègues, qui vont se présenter eux-mêmes. Voilà.

M. Tardif (Richard) : Alors, M. Richard Tardif, directeur général, Association des journaux régionaux du Québec, Québec Community Newspapers Association.

M. Paquette (Gilber) : Gilber Paquette, directeur général d'Hebdos Québec, un regroupement de 31 journaux ou hebdomadaires indépendants.

M. Myles (Brian) : Brian Myles, directeur du Devoir. Le Devoir.

M. LeCavalier (Donald) : Donald Lecavalier, vice-président principal finances, Transcontinental TC.

Le Président (M. Auger) : Merci. Bienvenue.

M. Cauchon (Martin) : Merci beaucoup, M. le Président, M. le ministre et chers députés. Notre coalition représente 178 publications, des quotidiens et des hebdomadaires qui sont publiés dans toutes les régions du Québec et qui rejoignent plus de 6 millions de Québécoises et Québécois dans leurs foyers.

Nous sommes ici aujourd'hui en tant que coalition pour discuter de deux points en particulier : d'abord, la question des avis publics soulevée par les articles 51 et 90 du projet de loi n° 122; ensuite, nous voulons saisir l'opportunité que nous avons pour vous sensibiliser aux revendications de la coalition, alors que l'ensemble de nos membres traversent une période de transition où ils doivent revoir et redéfinir leurs modèles d'affaires.

Parlons d'abord du projet de loi. Mmes, MM. les députés, lorsque vos prédécesseurs ont décidé de mettre dans le Code municipal et, plus tard, dans la Loi sur les cités et villes des dispositions obligeant les administrations municipales à publier des avis publics, ils ne l'ont pas fait pour aider les journaux. Non. Ils ont fait cela par souci de transparence. Ils ont fait cela car ils croyaient que les citoyens et citoyennes avaient le droit de savoir comment étaient gérées et dépensées leurs taxes ou encore comment leur milieu de vie serait-il affecté par un développement ou encore un règlement. Bref, comme vous, vos prédécesseurs étaient animés par l'idée fondamentale de maintenir une saine démocratie. Toutes ces raisons existent toujours aujourd'hui.

Selon nous, la question que vous devez vous poser est la suivante : Si on permettait l'adoption des articles 51 et 90 du projet de loi, articles qui modifient le mode de publication des avis publics, est-ce que le droit des citoyens à l'information serait affecté? Est-ce que le nouveau mode de publication se ferait en faveur d'une plus grande transparence? La réponse pour nous, respectueusement soumise, est claire : Tout ceci se ferait aux dépens d'une saine démocratie.

En effet, nous tenons à souligner que les avis publics se trouvent déjà sur les sites Internet des municipalités. Une enquête de Léger Marketing a clairement démontré que les citoyens consultent ces avis dans leurs journaux imprimés, mais à peu près jamais sur le site de leur municipalité. De plus, tout le monde n'a pas accès à Internet. Par exemple, dans le 20 % des moins fortunés de notre population, c'est près de la moitié des ménages qui n'a pas d'accès à Internet à la maison. De même, toutes les enquêtes démontrent que, parmi les personnes les plus âgées, le réflexe de consommer de l'information en ligne n'est pas toujours très présent.

Par ailleurs, l'argument utilisé pour justifier l'abandon des avis publics dans les journaux imprimés est la question des économies que cela pourrait générer pour les municipalités. Ici, nous vous posons une question : Depuis quand les notions de transparence, de participation citoyenne et de saine démocratie doivent-elles être gérées exclusivement à travers une ornière économique?

Encore aujourd'hui, les avis publics jouent un rôle important. Par exemple, un citoyen peut apprendre, dans un de ces avis publics, qu'une nouvelle usine polluante viendra s'installer dans son quartier. Est-ce que ce citoyen serait allé sur le site de la municipalité consulter les avis publics? Certainement pas. Seuls les promoteurs eux-mêmes et les journalistes feront cela. Aujourd'hui, dans nos quartiers et dans nos villes, dans nos villages, les journaux sont distribués à nos portes souvent gratuitement, et ces informations précieuses sont livrées à l'ensemble de la population. Je pense que le retrait des articles 51 et 90 est un pas minimal.

M. le Président, si j'étais à votre place, chers membres de l'Assemblée nationale, j'irais même plus loin. De plus en plus, les avis publics, même ceux qui sont publiés dans les journaux, utilisent un langage technique difficile à comprendre. Nous avons mis un exemple frappant dans notre mémoire en page 6. Si l'objectif souhaité est la transparence, et nous le pensons, on devrait exiger que ces avis soient rédigés dans un langage clair de sorte qu'un citoyen ordinaire puisse comprendre de quoi il s'agit.

Je passe maintenant la parole à mon collègue Brian Myles.

• (18 h 10) •

M. Myles (Brian) : Merci, Martin. M. le Président, Mmes et MM. les députés, notre deuxième proposition est d'appuyer les demandes de notre coalition. L'industrie des médias n'est pas une industrie comme les autres. Nous sommes pour ainsi dire les chiens de garde de la démocratie. Nous sommes responsables d'assurer que les citoyens du Québec soient bien informés. Et vous êtes à même de constater qu'il n'y a pas un problème de société au Québec qui n'a pas été abordé d'une façon ou d'une autre par les médias. On a joué ce rôle, au fil des ans, d'éclaireurs, éclaireurs de nos réussites, mais aussi de nos dysfonctions collectives.

Et au moment où je vous parle, encore une fois, le Québec se prépare à vivre une autre commission d'enquête, cette fois sur la protection des sources journalistiques, une commission dont la création a été applaudie par l'ensemble de la classe politique au Québec, y compris le monde municipal. C'est bien la preuve que tous reconnaissent le rôle important des journalistes et des médias dans le maintien de notre démocratie et que des protections spéciales sont requises pour assurer la diffusion et la libre circulation de l'information.

Mais pourtant, au moment même où on vit un âge d'or du journalisme et du journalisme d'enquête, notre industrie traverse une crise sans précédent. Et je ne vais pas vous faire l'inventaire de nos problèmes, puisqu'on pourrait déprimer longtemps, vous les connaissez. Essentiellement, la révolution numérique a mis à mal, pour ne pas dire détruit complètement le modèle traditionnel d'affaires des médias de masse. Les médias qui dépendaient largement de revenus publicitaires à l'imprimé ne retrouvent pas ces revenus au numérique. Et, pire encore, c'est que les recettes numériques, elles existent, mais elles nous échappent. En ce moment, on a deux conglomérats étrangers, Google et Facebook, qui accaparent presque 80 % des recettes publicitaires. Cette réalité est aussi bonne au Québec, elle est bonne au Canada, elle est bonne dans le reste du monde. Bref, on a créé une situation, avec ces outils, où les gouvernements, les annonceurs, quiconque veut placer de la publicité le fait maintenant chez des multinationales étrangères, et ça vient accélérer la destruction de notre industrie.

Essentiellement, les revenus publicitaires dans les journaux ont diminué de 40 % à 60 %, selon les circonstances, depuis une dizaine d'années. On subit cette concurrence des grands groupes étrangers et on le prend difficilement. Parce qu'au fond un budget publicitaire des gouvernements et des agences, ce n'est rien de moins que les taxes et les impôts des Québécois qu'on transforme en budget. Et de plus en plus on voit les agences prendre ces budgets-là et les placer directement sur les médias sociaux, alors que nous, on développe quantité de patrons numériques, on a pris le virage, on n'a pas attendu qu'on vienne nous sauver. Le Devoir se décline sur une application mobile, une tablette, un site Internet, et tous les membres de la coalition ici font pareil. Mais force est de constater qu'on déploie de plus en plus de plateformes, de plus en plus d'efforts et d'investissements pour ces plateformes-là, alors que les gouvernements eux-mêmes placent leur argent chez Google et Facebook. Ce n'est pas banal.

Et les circonstances, bien elles sont réelles. Il n'y a pas une salle de rédaction, vraiment, qui est en croissance au Québec en ce moment. On a géré la décroissance, les mises à pied, le non-remplacement des départs à la retraite. Bref, on fait toujours plus, c'est-à-dire on alimente toujours plus de plateformes, mais on le fait avec des effectifs qui sont soit stables ou soit en diminution. Et il s'est perdu énormément d'emplois dans l'industrie des médias au Québec et dans le reste de l'Amérique du Nord au cours des dernières années.

Alors, ce modèle d'affaires est mis à mal. Et le Québec, on a parfois des défauts : on est le dernier de classe en matière d'aide de l'État à la presse. Ça existe, de l'aide de l'État pour la presse. Les champions toutes catégories, c'est les Finlandais, les Suédois, les Norvégiens. En Finlande, de mémoire, on dépense 92 $ par habitant en aide directe ou indirecte à la presse. Au Québec, c'est à peu près 3,50 $, peut-être 4 $. On dépense moins qu'aux États-Unis, qui est pourtant le champion de la non-intervention dans les médias.

Cette aide, nous estimons qu'elle est nécessaire et raisonnable, en ce moment, et c'est une aide transitoire, que l'on demande. Les médias du Québec ne demandent pas le modèle français, où les médias français ont été sous perfusion étatique pendant longtemps, trop longtemps, et cette aide a été prise pour acquise et a généré une situation où on a freiné l'initiative. Nous, ce qu'on vous demande, c'est une aide ponctuelle, transitoire, de cinq ans, pour nous aider tous autant que nous sommes à affronter les défis du numérique et à poursuivre notre transition d'un monde analogique, d'un monde imprimé à un monde numérique avec des plateformes numériques.

Nous avons eu l'occasion de faire certaines demandes, je les réitère ici, aujourd'hui, d'autant plus que nous approchons de l'échéance du budget. Nous demandons essentiellement un programme et des crédits... programme ou des crédits d'impôt remboursables pour les coûts de production de l'information. Parce qu'on fait vivre des gens, on fait vivre des familles, on emploie des salariés qui sont principalement syndiqués. L'industrie des médias est un créateur net d'emplois au Québec.

On demande également des programmes ou des crédits d'impôt remboursables pour nos investissements numériques, le développement de nos fameuses plateformes; une exemption de la contribution payante en argent pour les services de collecte sélective municipale, qui est notre bête noire.

Là, je vous invite à retourner dans vos circonscriptions respectives et aller demander à vos citoyens, vos concitoyens s'ils accepteraient une hausse de taxe de 1 075 % en 10 ans. Si vous en trouvez, envoyez-les-moi, s'il vous plaît, on va faire un portrait dans le journal, ça va être très rare. C'est le lot des médias traditionnels. Le fardeau de la taxe sur le recyclage, c'est une augmentation de plus de 1 000 % pour nous. La collecte sélective, c'est un monstre tentaculaire, c'est une entreprise qui n'a pas su gérer ses coûts de développement. Et, alors que les journaux éprouvent des grandes difficultés à faire leur virage numérique, on est pris avec une taxe qui ne cesse d'augmenter. C'est un non-sens. Le tonnage global de papier diminue, mais la taxe continue d'augmenter. Cherchez l'erreur.

Ensuite, on demande l'abolition de la taxe de vente pour les journaux vendus, la TPS et la TVQ. On estime que, si le livre est un produit culturel, un objet culturel qui n'est pas un objet de consommation comme les autres, on devrait traiter les journaux imprimés de la même façon. Ce ne sont pas des objets comme les autres, ce sont des outils pour s'informer, ce sont des instruments qui permettent de faire avancer le débat d'idées et la démocratie.

Et, enfin, une politique éthique, une politique de placement publicitaire qui, avant d'enrichir des étrangers qui ne paient pas de taxes et d'impôts chez nous, va venir consolider notre industrie, donc une politique de placement publicitaire et des budgets augmentés d'une manière significative dans nos médias, sur nos plateformes numériques.

À court terme, je vous invite à réfléchir à l'importance de protéger le droit du public à l'information, et j'appuie Martin Cauchon et tous les membres de la coalition l'appuient d'ailleurs quand on demande le retrait des articles 51 et 90 du projet de loi n° 122. L'enjeu, ce n'est pas seulement un enjeu financier, pour nous, c'est un enjeu de transparence et de reddition de comptes.

Le Président (M. Auger) : Un instant, M. Myles. On a déjà dépassé de trois minutes le temps prévu qui était de 10, et M. le ministre avait des questions à vous poser. Donc, peut-être une conclusion très rapide.

M. Myles (Brian) : Alors, je conclus en vous disant qu'on a un enjeu fondamental en ce moment, c'est la survie de nos médias d'information au Québec, et je vous invite à vous saisir de ce problème d'une manière urgente et immédiate. Merci.

Le Président (M. Auger) : Merci pour votre présentation. Donc, M. le ministre, 12 minutes.

M. Coiteux : Et les gens de plume sont également gens de parole, et puis je ne voulais surtout pas vous couper la parole, c'est pour ça que je vous ai laissé un peu de mon temps. Donc, j'aurais peut-être un peu moins de temps pour les échanges, mais ce n'est pas grave parce que c'était important de vous entendre. Vous avez parlé de deux choses, en fait, la transparence puis vous avez parlé d'enjeux économiques, d'enjeux économiques particulièrement du côté des médias. Je vais commencer peut-être par la partie économique puis ensuite j'irai à la question de la transparence.

Mais sur la question économique, les villes nous disent que c'est un réel enjeu pour elles, cette obligation. Puis il y en a qui nous disent : Écoutez, donnez-nous le choix, donnez-nous le choix. Puis là, il y en a qui sont venus nous voir pour nous dire qu'eux c'était tellement... Parce que des petites municipalités, il y en a une qui est venue nous voir, ils sont 500 habitants. Saint-Denis-De La Bouteillerie. Je ne sais pas si ça vous dit quelque chose. Ils sont venus nous voir puis ils nous ont dit que, pour eux, là, c'était un gros enjeu, ça, cette question-là, puis ils seraient capables de faire les choses autrement et de manière tout aussi transparente. C'est sûr que c'est une petite municipalité, peut-être que la somme que ça représente pour les médias n'est pas grande, mais pour eux, c'est un gros enjeu.

Donc, lorsqu'on parle de ce que ça coûte en moyenne pour les municipalités, ça cache de grandes disparités. Donc, il y a beaucoup, beaucoup de villes du Québec qui, depuis des années, nous disent : Pourquoi une loi du Québec nous oblige à choisir une façon particulière de publier nos avis? Pourquoi ne pas nous donner le choix? Puis il y en a qui nous disent, puis il y en a qui sont venus nous dire que, devant ce choix, ils continueraient de publier les avis publics dans les petits journaux.

Et je vous écoute, vous êtes... bien là, vous êtes tous des hommes aujourd'hui, là, mais il y a aussi des femmes dans les médias, vous êtes hommes de plume, mais hommes de parole, et je suis certain que dans certains cas vous allez en convaincre des élus municipaux, dans certaines villes, de continuer de publier leurs avis publics sur des plateformes. Je suis convaincu que vous allez être capables. Mais est-ce qu'on doit pour cela obliger tout le monde à passer par le seul mécanisme?

Puis je vous ai lu, en particulier M. Myles, au mois de décembre, là-dessus, vous dites : Peut-être qu'on pourrait même, nous, proposer notre propre plateforme électronique. Qu'est-ce qui vous empêcherait de le faire, justement, si vous avez des produits qui vont intéresser les municipalités? Alors, essentiellement, pourquoi ne pas choisir la voie de travailler, vous, avec les municipalités dans un contexte où ils ont le choix?

Parce que, pour certains, ça va être un gros enjeu, pour d'autres, moins, ou d'autres vont tellement tenir à maintenir une certaine proximité — je ne parle pas de proximité pour influencer le contenu, j'espère qu'on me comprend bien — qui vont vouloir tellement s'impliquer dans la survie de leurs hebdos qu'ils n'auront pas de problème à travailler avec vous. Mais pourquoi les obliger? Pourquoi ne pas justement avoir confiance en vous-mêmes? Ils ont la capacité de proposer des solutions à des prix raisonnables, des solutions qui vont faire l'affaire des municipalités, que ça soit sur un format électronique ou sur un format traditionnel papier, quitte à ce que certains vous abandonnent puis trouvent d'autres moyens? Pourquoi pas? Pourquoi on n'est pas rendus là?

Le Président (M. Auger) : M. Myles.

• (18 h 20) •

M. Myles (Brian) : Écoutez, je vous dirais que le cas de Saint-Denis est, de mon point de vue, anecdotique. Et on a fait nos devoirs, on a colligé les informations, les avis publics, partout au Québec, ça représente 10 millions de dollars pour les journaux, sur des budgets municipaux de 18 milliards. C'est un vingtième de 1 %. Et plus la ville est grande, notamment Montréal, plus le poids des avis publics est marginal. Les avis publics de Montréal sont, au Devoir, en ce moment... je vous dirais, c'est de la poussière d'étoiles. Ce n'est pas vrai que c'est un argument économique. Et je le ramène à l'enjeu de la transparence. Et je vous dirais que ça arrive à un très mauvais moment. Ça arrive à un moment où l'industrie des médias, au Québec, a un genou à terre. Et, si on pouvait au moins reporter cette réflexion à plus tard, on serait tous gagnants, je vous dirais. Et ça nous permettrait ensuite de développer notre offre numérique.

Et, si vous décidez d'amender le projet et si vous estimez qu'il est encore nécessaire de changer la donne, je vous dirais qu'au minimum il faut qu'on permette puis qu'on force les municipalités à annoncer dans des médias, hein, que ce soit numérique ou papier, mais que ça reste dans les médias. Parce que, si vous donnez à la ville, aux villes, la possibilité d'annoncer sur leurs propres plateformes, leurs sites Internet, les avis publics, ça va devenir un secret confidentiel que les gens ne verront plus. Et ça nous ramène à l'enjeu de la transparence.

Le Président (M. Auger) : M. le ministre.

M. Coiteux : Je vous entends. J'écoute ça, la question de la transparence. Mais moi, je suis convaincu qu'ils peuvent être transparents autrement. Pourquoi ils ne pourraient pas être transparents autrement? Pourquoi ils ne pourraient pas davantage rejoindre leurs citoyens autrement? Je ne suis pas convaincu par cet argument-là. Je ne suis pas convaincu. Ça peut être ma... On peut mal faire les choses sur une plateforme papier comme on peut mal faire les choses sur une plateforme électronique, mais a priori, on ne peut pas dire que, s'ils choisissent un autre moyen que le format papier, ça va être nécessairement moins transparent. Ça dépend comment ça va être fait. Ça dépend comment ça pourrait être encadré. Ça dépend de quel guide de bonnes pratiques on pourrait établir, d'une part.

Mais vous avez utilisé le mot «forcer» : les forcer à aller vers quelque chose. C'est justement la philosophie de ce projet de loi, au-delà même des articles qui vous concernent directement, c'est de les forcer beaucoup moins et de leur faire confiance dans leurs propres choix. C'est ça, la philosophie de ce projet de loi là, faire confiance aux élus municipaux pour qu'ils fassent les bons choix dans l'intérêt de leurs citoyens. Et je me demande pourquoi vous ne vous faites pas confiance à vous-mêmes, comme entreprises médiatiques présentes, notamment, dans les régions. Pourquoi vous ne vous feriez pas confiance à vous-même pour être capables de présenter des bonnes solutions aux municipalités, qui vont faire en sorte que certaines d'entre elles — mais peut-être pas toutes, si on ne les force pas, peut-être pas toutes, mais en même temps ça va vous amener à innover, aussi — choisissent de continuer de travailler avec vous peut-être sur format papier, peut-être sur format électronique?

Le Président (M. Auger) : M. Cauchon.

M. Cauchon (Martin) : Si vous permettez, M. le ministre, écoutez, je vous entends et je vous suis aussi. Vous savez, de temps en temps, on peut être en matière de politique privée; ici, on est en matière de politique publique. Si vous me dites : Faites-vous confiance, je pense que je vais me faire confiance. Et, quand je regarde le bout de chemin qu'on a fait, Groupe Capitales Médias, en deux ans, avec l'équipe, c'est extraordinaire ce qu'on a pu faire pour réussir à maintenir une qualité d'information dans l'ensemble des régions du Québec, qui est notre mandat, une bonne information de qualité, de proximité. Mais, ici, ce dont on parle, M. le ministre, c'est une question de politique publique.

J'ai moi-même été dans un siège similaire au vôtre, et combien de fois il aurait été facile pour moi d'écouter et de me dire : C'est vrai, en bout de ligne, on devrait donner la latitude dans tel dossier parce que ça va leur permettre d'économiser, ça va leur donner beaucoup plus de flexibilité, et, de l'autre côté : Je devais d'abord et avant tout aller de l'avant et poser un geste au nom de l'intérêt public et au nom d'une saine politique publique. Je pense que le débat ici, outre la question économique, le débat, c'est ça.

Et, quand vous regardez la réalité sur le terrain... Et oubliez la question de : nous, nos modèles sont en transformation. On s'en occupe. Je crois comprendre que le gouvernement a bien compris. Mais, si on met ça de côté, regardez les outils. Le but que vous avez, c'est de faire en sorte que tout ce qui doit être publié par avis public le soit effectivement et aille chercher le plus grand nombre de personnes possible. Ça, c'est un élément important. C'est certain que, moi, si je suis maire, vous me donnez la latitude, je vais aller dans mon Internet parce que je vais sauver des sous. Par contre, est-ce que vous rencontrez votre objectif public d'aller chercher le plus grand nombre de personnes? À mon point de vue, respectueusement, M. le ministre, la réponse, c'est non.

Exemple, si vous faites un survol, et demandez à votre équipe de le faire, de regarder tous les outils publics dont on dispose au Québec, en matière de communication, commencez avec les sites Internet des municipalités et des villes et regardez par la suite les outils qu'offrent les gens qui sont ici aujourd'hui. Regardez, par exemple, l'équipe de Transcontinental, qui ont des hebdos partout, et vous regardez le... en anglais l'«outreach» de leurs publications, de leurs sites Internet, de leurs plateformes électroniques, dans certains cas, la visibilité auprès du lectorat, auprès de la population est 10 fois plus grande.

Donc, ce que je soumets respectueusement, ici, ce n'est pas une question de politique privée, c'est une question de politique publique. Ce n'est pas une question d'économie, c'est une question de rencontrer des objectifs pour maintenir une saine démocratie. Les avis publics, ça existe, ça existe pour une raison, et la raison, elle est encore là aujourd'hui, M. le ministre, je le soumets respectueusement. Vous savez, on parle d'avis publics, ici, on ne parle pas d'avis de recherche. Ça fait qu'il faut s'assurer de pouvoir le communiquer le plus possible à l'ensemble des contribuables.

Le Président (M. Auger) : ...M. le ministre, 2 min 30 s M. le ministre.

M. Coiteux : Bien, si je peux me permettre juste une question — vous choisirez qui y répondra, vous êtes nombreux : Si c'était aujourd'hui qu'on avait eu à prendre cette décision-là, dans l'univers technologique d'aujourd'hui, là, pas dans celui de... Je ne me souviens pas, d'ailleurs, depuis... Depuis quand on a cette obligation, M. Croteau, vous qui êtes un sage de ces matières?

M. Croteau (Marc) : ...pas dire un vieux, là, c'est ça que vous dites?

M. Coiteux : Non. Un homme de grandes connaissances.

M. Croteau (Marc) : Non, ça fait plusieurs dizaines d'années, là.

M. Coiteux : Plusieurs... quelques décennies, donc, hein? L'univers technologique était radicalement différent. Si c'était aujourd'hui qu'on prenait cette décision-là, pensez-vous vraiment qu'on aurait donné l'obligation que ça soit dans des médias écrits?

Le Président (M. Auger) : M. Cauchon.

M. Cauchon (Martin) : Je pense que, si l'objectif était de communiquer les avis publics, à l'époque, au plus grand nombre de personnes dans la population pour assurer une saine gestion, je pense qu'aujourd'hui on ferait exactement la même chose.

Et, encore une fois, M. le ministre, je le répète : Demandez à votre équipe de regarder, faire le tour des sites Internet des différentes cités et villes et des villages au Québec, comparez-les avec le lectorat de n'importe quel membre ici. Dans certains cas, c'est jusqu'à 10 fois supérieur. Donc, si vous voulez communiquer, je pense qu'en matière de politique publique ce qui se fait présentement était une saine décision politique, à l'époque, et une saine décision démocratique, et, à mon point de vue, elle l'est toujours aujourd'hui.

M. Paquette (Gilber) : Je me permettrais peut-être d'ajouter... j'ai un exemple concret. Les hebdos indépendants, on a lancé un portail qui contient tous nos journaux, à l'automne. On a 1,5 million de lecteurs papier toutes les semaines; on a 22 000 téléchargements à ce jour. Alors, si on ne passe pas les avis publics dans les journaux mais bien sur cette application-là, il y a 1 480 000 personnes qui ne seront pas exposées à nos journaux. Le projet de loi, dans sa forme actuelle, renverse la responsabilité, force le citoyen à aller chercher son information. Et le citoyen, il n'est pas rendu là, Bryan l'a dit tantôt, pour deux raisons : les médias vivent une crise, mais les citoyens dans les régions ne sont pas sur le Web puis ils ne s'informent pas...

Le Président (M. Auger) : Juste un instant. Dernière question, 45 secondes, M. le ministre.

M. Coiteux : En fait, ça va être un commentaire, puis, je veux dire, ce n'est pas pour clore la discussion puis avoir le dernier mot. Je ne doute pas, là, des études que vous faites sur l'impact, là. Vous faites sûrement ça de façon très professionnelle. Mais c'est sûr que, lorsque les journaux sont distribués, vous pouvez dire : Bien, ils ont été mis à la porte, hein? Je ne sais pas si les gens ont lu tous les avis, je ne sais pas si vous êtes capables d'aller à ce degré de sophistication. Et, en ce qui concerne les plateformes électroniques et tout ça, c'est peut-être une indication que vous avez des produits à développer davantage, les rendre plus attrayants. Puis il y en a qui le font, au Québec, cette chose-là. On est dans un monde de changements technologiques, puis vous n'avez pas le choix, vous allez devoir vous inscrire de toute façon là-dedans. C'est ce que je crois.

Le Président (M. Auger) : Merci, M. le ministre. Nous allons maintenant poursuivre avec l'opposition officielle. M. le député de René-Lévesque, pour les neuf prochaines minutes.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, merci d'être là. Si vous êtes ici, vous êtes venus nous dire que, si on ne change pas la disposition, les avis publics qui sont placés dans vos médias risquent de fragiliser votre modèle d'affaires. Et le ministre disait, tout à l'heure : C'est un enjeu que les maires ont commencé à discuter, et pourquoi qu'on est obligés de faire ça? On va reculer la cassette un peu parce que je pense que c'est important de faire la mise en contexte, là.

Il y a un pacte fiscal qui dit aux municipalités : On vous enlève 300 millions par année, mais on va trouver un moyen d'augmenter vos revenus et de baisser vos dépenses. Alors, on a eu un paquet de projets de loi, n° 83, n° 110, la capitale de Québec, et, dans certains cas, dans le projet de loi actuel, on dit : Écoutez, dans le cas des revenus, on va vous donner un nouveau pouvoir de taxation, on va vous donner des redevances. Dans le cas du projet de loi n° 110, on est venu jouer dans les relations de travail. Alors, on est venu donner aux municipalités des nouveaux moyens et on a trouvé pertinent, dans le projet de loi en question : Bien, écoutez, peut-être que ça vous coûte trop cher, de le mettre dans les médias écrits, alors on va vous enlever cette obligation-là. Alors, vous avez compris que, si je vous donne moins d'argent de Québec aux municipalités, bien, c'est de l'argent que vous avez moins à dépenser dans les médias.

• (18 h 30) •

Ce qui était plus aberrant, en plus, c'est qu'on a la FQM, des élus, des préfets qui sont venus nous dire : Écoutez, M. le ministre, dans certaines dispositions de la loi, vous nous dites que vous allez pouvoir rendre publics les documents par Internet, mais vous savez quoi, on n'est pas prêts, on aurait besoin d'une mesure financière de transition pour nous amener à faire ce virage-là. Alors, ce que je suis en train de vous dire, là, c'est que, si on adopte la disposition telle quelle puis que les représentations des maires et mairesses dans les municipalités font qu'ils mettent la main sur un fonds de transition, bien, en plus, les municipalités vont avoir des moyens pour contourner l'obligation qu'ils avaient à faire et, malheureusement, ne plus avoir affaire avec vous. Vous comprenez, là, l'aberration.

M. le ministre vous a posé la question : Aujourd'hui, si on avait à prendre la décision de garder, oui ou non, l'obligation pour les médias écrits... Parce que, pour lui, c'est acquis; pour nous, c'est fondamental. La question serait la même qui s'est posée par rapport à ça puis ça serait la même qui se pose aujourd'hui. Pour les régions du Québec, pour la ruralité du Québec, le journal se trouve à la porte, se trouve dans les restaurants, se trouve dans les centres d'achats, bref, l'information trouve son lecteur. Et, comme vous le disiez tout à l'heure et comme je l'ai dit aux différents groupes juste avant vous, là, présentement on a renversé, et c'est maintenant le lecteur qui doit trouver son information. Et dans certains cas, et surtout dans le cas des avis publics, ce n'est pas la chose à faire si on veut donner plus de transparence et plus de redditions de comptes.

Moi, quand je vous regarde, les gars, là...

Mme Maltais : C'est pertinent.

M. Ouellet : ...je vois des nouvelles locales, je vois des journalistes qui suivent les conseils municipaux puis qui ramènent les enjeux aux citoyens, citoyennes qui n'ont peut-être pas le temps d'être au conseil parce qu'ils ont les enfants à la garderie, ou ils ont le kid qui joue au hockey, ou ils ont la fille qui est en train de faire un cours de gymnastique, ça fait que c'est leur relais d'information.

Quand je vous regarde, je vois des élus qui se font poser des questions — puis des fois qui ne veulent pas y répondre — par vos journalistes. Quand je vous vois, je vois vos journalistes faire un travail d'enquête. Ma crainte... Parce que c'est ça, le vrai débat aujourd'hui, là, ce n'est pas de savoir si les avis publics sont rentables ou pas pour vos journaux. C'est quoi, la suite pour les médias locaux? C'est quoi, la suite pour les médias généraux? C'est ça, le vrai débat qu'on a aujourd'hui, là.

Alors, moi, si on adopte cette disposition-là, considérant le contexte avec lequel vous êtes, moi, demain matin, là, je ne vois plus mes journalistes, je ne vois plus mes nouvelles, je ne vois plus les enquêtes et je n'ai plus de vitalité démocratique. C'est ça que j'ai devant moi aujourd'hui.

Le Président (M. Auger) : M. LeCavalier.

M. LeCavalier (Donald) : Oui, je peux confirmer. D'ailleurs, lorsqu'on parle de rempart par rapport à la transparence, on a expliqué un peu plus tôt les statistiques par rapport à la portée des avis publics dans nos journaux qui sont beaucoup plus grandes. Donc, je dirais que c'est le premier rempart.

Le deuxième rempart, comme vous l'avez dit, M. le député, dans certaines villes, villages, le journaliste, le seul journaliste qui suit le maire, c'est de notre journal. Or, si on affecte le modèle financier d'un journal local, premièrement, en lui enlevant des revenus d'avis publics, c'est probablement la précarité du journal local qu'on met en jeu. Et, deuxièmement, si le journal disparaît, c'est le deuxième rempart par rapport à la transparence qui disparaît parce que le seul journaliste qui peut suivre les activités de la municipalité disparaît aussi. Donc, c'est un élément important.

La deuxième chose que je pourrais rajouter aussi, M. le ministre, vous avez mentionné qu'on est des hommes de plume. Je suis un homme de chiffres, moi, je suis en finances. Et effectivement ça peut représenter des enjeux pour les villes d'avoir à déposer des avis publics dans les journaux. Si vous demandez aux gens de finances des sociétés publiques au Québec, ça représente beaucoup d'enjeux d'avoir présenté nos chiffres à l'AMF, mais je verrais mal des demandes des sociétés publiques dire : Dorénavant, nos chiffres, on va les mettre seulement sur notre site Internet. Donc, à ce niveau-là, oui, c'est un enjeu, mais je pense que c'est un enjeu qui défend la transparence et qui fait un rempart important à ce niveau-là.

Le Président (M. Auger) : Merci. Mme la députée de Taschereau, il reste 3 min 45 s.

Mme Maltais : Merci. Bonjour, messieurs. J'ai lu attentivement vos demandes. Accorder l'exception culturelle, j'aime bien la formule. Vous avez référé à un des sujets qu'on a beaucoup aimés au Québec, l'exception culturelle. Vous avez quatre ou cinq éléments que vous proposez comme solutions. Est-ce qu'il y a des choses plus importantes ou des éléments plus importants qui nous permettraient de dire : La solution, elle est là?

Ceci dit, mais je pense que l'esprit que vous avez, c'est conserver quand même les avis publics. Ça, je comprends parce qu'une annonce à la radio, il faut l'attraper, sur Internet, il faut avoir l'Internet, mais le journal local, je peux le dire au ministre, là, il traîne sur les tables dans la maison puis il est là 24 heures sur 24.

Mais, dans vos demandes qui sont en page 14, programme de crédit d'impôt sur la production, sur les investissements numériques, et tout ça, quel serait l'ordre? Comment enchaîner ça? Quel serait l'ordre? Vous parlez de cinq ans. Pourquoi cinq ans? Qu'est-ce qui se passe?

Le Président (M. Auger) : M. Myles.

M. Myles (Brian) : Pourquoi cinq ans? Parce qu'on a tous entrepris un virage — puis on n'est pas dupes, on sait que l'avenir est au numérique et qu'un jour on vivra dans un monde postpapier — mais il n'y a pas personne qui a été capable de prédire la date exacte de la disparition du papier. Il en restera peut-être différentes itérations comme un produit de niche, mais on sait que l'avenir est au numérique, d'où l'importance du cinq ans, pour ne pas qu'on s'assoie sur nos lauriers.

Maintenant, qu'est-ce qui est important? Je vous dirais, pour ma part, peut-être que mes collègues pourront me contredire ou compléter, c'est la notion de crédits sur le virage numérique, qu'on puisse avoir accès à des crédits d'impôt au même titre que les autres industries culturelles, hein, que le cinéma, la télé, les producteurs, les éditeurs de livres. L'écosystème culturel québécois n'existerait pas sans une intervention de l'État indirecte par des programmes de crédits d'impôt. Ça nous permettrait de poursuivre le virage.

La taxe sur le recyclage, c'est pénible. C'est pénible d'autant plus que le journal, c'est une des matières les plus recyclées, les plus réutilisées, alors on n'est pas la bête noire des mouvements écologiques qu'on voudrait nous faire croire.

Et enfin moi, j'insiste sur le placement publicitaire. Il s'en place, il y en a, de la publicité. La publicité numérique au Québec, c'est maintenant 790 millions par année, globalement. C'est plus que la publicité de télé ou la publicité dans l'imprimé. Mais cette publicité numérique là, 8 $ sur 10 $ à Silicon Valley.

Mme Maltais : Est-ce qu'on devrait demander... Est-ce qu'il y a des règles gouvernementales pour que la publicité soit dans les médias québécois? Je pense qu'on n'a pas, à mon souvenir, ce type de règle là.

M. Myles (Brian) : On n'a pas ça encore, et d'où l'importance de la recommandation 5, une politique de placement éthique et une politique qui valorise le placement publicitaire dans nos médias à nous. Avant d'enrichir les autres, est-ce qu'on peut penser à, au moins, assurer la pérennité de notre industrie?

Mme Maltais : Petite question : Vous avez parlé de la lisibilité des avis publics, voulez-vous commenter un peu? Parce qu'effectivement c'est quelque chose, lire un avis public.

M. Paquette (Gilber) : ...c'est-à-dire que le langage qui est utilisé est assez technique, et l'avis ne dévoile pas tout. Je vais donner un cas très, très concret. J'ai vécu pendant sept ans à Sainte-Adèle et à Saint-Sauveur. Il y avait un projet de construire un Canadian Tire. L'avis public qui a été publié dans le journal local ne spécifiait pas quel était le projet au juste mais qu'il y avait une demande de dézonage pour la construction d'un magasin à grande surface. Il a fallu qu'un citoyen se rende à la mairie pour avoir plus d'information, et après ça les gens se sont monopolisés. L'avis public devrait donner toute cette information-là d'entrée de jeu, sans obliger le citoyen à faire une recherche pour avoir tous les morceaux du casse-tête.

Le Président (M. Auger) : Merci. Et finalement, pour les six prochaines minutes, M le député de Blainville.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, messieurs, de votre participation à notre commission. D'abord, sur le volet économique, moi, je vais vous suivre par rapport aux investissements dans le numérique. Ça, je pense que vous avez besoin d'aide. Dans le recyclage également parce que, je vais vous dire, le contrôle des dépenses, là, que vous avez dit tantôt, dans tout le secteur du recyclage, qui est souvent contrôlé par les villes, c'est le fun qu'ils demandent des choses, mais il faudrait peut-être qu'ils fassent un effort de l'autre côté. Puis ça, là, je suis très conscient de ça, qu'il va falloir qu'on suive tout le milieu du recyclage, le contrôle des dépenses parce que vous en faites les frais. Bien, par rapport au recyclage, là, c'est un genre de combat de société, ça, c'est difficile de dire : On retire un secteur. Bien, qu'on contrôle les dépenses dans ce secteur-là parce qu'à quelque part c'est contrôlé par les municipalités puis, tu sais, eux autres, tout ce qu'ils font, c'est demander à ce que les coûts augmentent. Ça, je pense qu'à un moment donné il faut que ça cesse, là, parce que, sinon, là, il n'y a plus de fin à ça.

Ça m'amène à l'article 51 puis l'article 90. La pénétration, vous l'avez. Donc, théoriquement, là, votre discours, là, M. Cauchon, de dire : Si je suis un bon gestionnaire public, je veux m'assurer que la population ait connaissance... Vous représentez la pénétration dans les foyers que n'a pas les villes. Ce n'est pas parce qu'ils ne veulent pas. C'est que, moi, là, si j'utilise mon... puis comme on le fait tous, là, on va aller voir vos médias parce qu'on veut avoir les nouvelles. Je vais aller voir le site de la ville de Blainville, je vais vous dire, une fois à tous les deux mois, là, alors que je vais y aller dix fois par jour pour vous autres, là. Puis c'est la réalité de tous les citoyens. Donc, vous avez le taux de pénétration. Ça, je pense que vous l'avez.

Mon problème, il est économique, pour les villes. C'est-à-dire, vous avez eu une restructuration du milieu très importante. Comment je peux garantir à mes villes que, tu sais, ils vont en avoir pour leurs argents? Je vous donne ça, là, comme exemple, là, puis je vais être bien ouvert avec vous autres, là, quand ils ont réformé le Code de procédure civile, tout le secteur des huissiers, ils ont décidé d'imposer un tarif. C'est le gouvernement qui a dit : Bon, bien, pour faire des significations, c'est le privé qui le fait, ça va vous coûter tant. Est-ce que c'est pensable qu'un jour on s'assoit pour dire... Parce que moi, théoriquement, je vous dirais que vous êtes incontournables. On devrait se servir de vous puis on devrait maintenir les avis. Mais comment je fais pour me garantir qu'il n'y aura pas une surenchère dans le milieu? Est-ce que c'est pensable qu'on dise que les avis, bien, ça marche à la ligne agate, ou je ne sais pas quoi, là, puis il y a un tarif qu'on peut négocier avec le gouvernement? Il y a-tu quelque chose qu'on peut faire pour garantir aux citoyens que toute cette réforme, là, qu'il y a eu dans l'industrie ne fait pas qu'à un moment donné, finalement, les villes paient... Tu sais, ils n'ont pas le choix, il faut qu'ils publient, c'est nous autres qui les obligeons, puis en même temps, bien, ils n'ont pas le choix de payer le prix parce qu'il n'y a plus de compétition, là. C'est ça que j'aimerais vous entendre.

• (18 h 40) •

Le Président (M. Auger) : M. Myles.

M. Myles (Brian) : Très rapidement, écoutez, les appels d'offres, le coût à la ligne agate a diminué d'une manière assez importante, principalement parce que les contrats sont donnés sous appel d'offres et qu'on est tous en compétition les uns avec les autres pour avoir les contrats des différentes municipalités. Alors, ça, ça permet aux villes d'avoir le meilleur prix pour le service. C'est un outil important.

M. Laframboise : Sauf que moi, j'ai juste un joueur, là. Tu sais, dans le milieu local, là, pour Thérèse-De Blainville, j'ai un joueur. Donc là, il n'y a pas de... Tu sais, c'est ça que je veux vous dire, là.

M. Myles (Brian) : Si c'est juste ça, le problème, je suis convaincu qu'on peut trouver une solution.

M. Paquette (Gilber) : Vous êtes un cas particulier parce que, dans d'autres marchés, la plupart du temps... Si je suis à Sainte-Agathe et je veux desservir le marché de Saint-Sauveur, comme ville de Saint-Sauveur, j'aurais le droit d'annoncer à Sainte-Agathe parce qu'ils m'ont offert un meilleur prix. Ils mettent en concurrence des journaux locaux. Ils nous mettent en concurrence, nous, les indépendants, contre TC Media, et le meilleur va l'emporter. Il faut savoir qu'un avis public, là, plus petit que ça dans un journal, c'est en moyenne 260 $. C'est un très petit prix. C'est moins cher qu'une publicité traditionnelle qu'un annonceur local va payer. Comme Brian disait, les prix ont fortement chuté dans les dernières années.

M. Laframboise : O.K. Bien là, bon, en tout cas, moi, ça va faire partie de mon analyse.

Puis, pour ce que vous demandez, l'aide économique, là les crédits, est-ce que vous avez déjà analysé par rapport aux crédits d'impôt? Sûrement, là, vous êtes... Est-ce que vous avez fait une analyse approfondie des besoins, des demandes? C'est-u comparable à d'autres...

Le Président (M. Auger) : M. Cauchon.

M. Cauchon (Martin) : Si vous permettez, M. le Président.

Le Président (M. Auger) : Oui.

M. Cauchon (Martin) : Ce qu'on a demandé, les recommandations qui ont été mentionnées par Brian, la question du crédit d'impôt, c'est un crédit d'impôt qu'on veut, évidemment, remboursable qui porte sur les salles de nouvelles et tous les artisans qui sont autour des salles de nouvelles. Pourquoi? Parce que, rapidement, on est projeté dans l'ère numérique. Quand vous nous regardez, on a tout l'ensemble des produits dont un annonceur peut rêver dans l'univers numérique. Donc, tout ça, on y est déjà. Sauf que ce qui demeure central dans notre monde à nous, c'est le contenu. On est des producteurs de contenu sur du multiplateforme. Donc, pour nous, ce qui devient drôlement important, c'est d'être capables de maintenir nos salles de nouvelles et éventuellement les faire croître parce que, vraiment, c'est le moteur de l'ensemble de nos entreprises. Donc, de ce côté-là, un crédit d'impôt remboursable pour les salles de nouvelles, comme ça peut se faire en matière de, je ne sais pas, moi, recherche et développement, par exemple.

L'autre élément aussi, c'est qu'il existe beaucoup de programmes pour l'ensemble des entreprises. Je connais ce qui s'est passé au cours des années... fin des années 1990, 2000, on a éliminé les subventions à cause d'un certain nombre de règles, particulièrement au niveau international. On a décidé d'aller de l'avant avec ce qu'on appelait des contributions remboursables. Donc, il y a des programmes qui existent, un peu partout dans les ministères, qui offrent des contributions remboursables sans intérêt. Mais, pour nous, ça, c'est des éléments importants. Puis, quand on regarde les différents programmes, c'est comme s'il n'y avait rien pour nous, alors que, quand vous regardez chez nous, par exemple, c'est 450 emplois dans l'ensemble des régions du Québec, des emplois de qualité. Donc, il me semble qu'on devrait être traités comme une autre entreprise à certains égards.

Le Président (M. Auger) : C'est tout le temps que nous avions. Donc, MM. LeCavalier, Cauchon, Myles, Paquette et Tardif, merci beaucoup de votre contribution aux travaux de la commission.

Et la commission ajourne ses travaux au jeudi 23 février 2017, après les affaires courantes, où elle poursuivra son mandat.

(Fin de la séance à 18 h 44)

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