(Onze heures quarante-cinq minutes)
Le Président (M. Schneeberger) : Alors,
bon matin à tous. Alors, la commission... Je constate le quorum, alors la
Commission de l'aménagement du territoire est ouverte.
Je rappelle
que la commission est réunie aujourd'hui afin de poursuivre l'étude détaillée
du projet de loi n° 31, Loi modifiant diverses dispositions
législatives en matière d'habitation.
Est-ce que nous avons des remplaçants, M. le
secrétaire?
Le Secrétaire : Oui. M. Ciccone
(Marquette) est remplacé par Mme Prass (D'Arcy-McGee).
Étude détaillée (suite)
Le
Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, hier, selon mes
informations, nous en étions toujours à
l'article... l'amendement déposé de l'article 37.2. Il y avait des
sous-amendements déposés par la députée de Mille-Îles. Alors, nous
en sommes aux sous-amendements. Alors, nous poursuivons les échanges.
Mme Dufour : Les temps de parole, on
était rendus où?
Le Président (M. Schneeberger) : Les
temps de parole, oui. Alors, pour le sous-amendement, Mille-Îles, vous avez
14 min 35 s. M. le député de Laurier-Dorion, c'est
8 min 40 s. M. des Îles-de-la-Madeleine... le député des
Îles-de-la-Madeleine a 20 minutes, et Mme la députée de D'Arcy-MgGee,
20 minutes. Voilà. Alors...
Mme Dufour : Est-ce qu'on a repris
ou...
Le Président (M. Schneeberger) : ...est-ce
qu'il y avait des questions...
Mme Dufour : Mais on a repris, là?
Le Président (M. Schneeberger) : Oui,
oui, on est en ondes, les micros sont ouverts.
Mme
Dufour : O.K. De la façon que les gens parlent, on ne pensait
pas. D'accord. Bien, écoutez, M. le Président, pour ce qui est de la nécessité d'avoir une idée de l'implantation de la
mesure et de son impact, je pense que c'est nécessaire. On comprend, par
les échanges qu'on a eus avec la ministre, que ça ferait partie du rapport,
peut-être, annuel, donc on aurait ces
détails-là à ce moment-là. Donc, moi, ça faisait le tour du rapport en tant que
tel par rapport à la mesure, là.
Le Président (M. Schneeberger) : Merci.
Est-ce que nous avons des commentaires?
Mme Duranceau : Bien, je veux juste
réitérer... Moi, j'ai bien entendu ce que les oppositions ont mentionné. Je pense que notre modification, là, vise à
couvrir l'aspect transparence. Puis je m'engage, à travers le plan d'action,
là, à suivre cette mesure-là. Évidemment, on veut voir qu'est-ce que ça
va donner. Ceci dit... Puis je veux répéter que ce n'est pas pour n'importe
quoi. On demeure en zone résidentielle, on vise à accélérer, mais je m'attends
à ce que ce soit utilisé judicieusement par les élus. Je pense que le débat
qu'on a eu sur cet article-là vient en montrer l'audace puis vient aussi montrer l'importance, pour les élus qui vont choisir de
l'utiliser, de bien documenter leur approche, parce que ça va être scruté. Ça
fait que... Puis c'est une bonne chose, mais, en même temps, mesure
exceptionnelle, encore une fois, dans un contexte de crise
exceptionnelle.
Le Président (M. Schneeberger) : Merci
beaucoup. Est-ce que ça va? Oui? Alors, nous allons passer...
Mme Dufour : Je vais juste
souligner...
Le Président (M. Schneeberger) : Ah!
allez-y.
Mme Dufour : ...parce que la
ministre a dit : J'ai entendu les oppositions. Mais je rappelle que c'est
juste en zone résidentielle. C'est, en fait, ça, le problème, c'est que c'est
en zone résidentielle. C'est l'endroit où est-ce que l'intégration est la plus
problématique, c'est en zone résidentielle. C'est rarement en zone industrielle
que les gens s'opposent. Les grandes oppositions,
c'est en zone résidentielle. Les enjeux que j'ai soulevés, mes inquiétudes, je
n'ai parlé que de zones
résidentielles. Vous savez, quand il y a un projet... puis c'est justement le
réflexe qu'on avait comme élus, quand il y avait un projet d'ampleur, mais qu'on savait que
c'était entouré de zones commerciales ou industrielles, on ne se posait même pas la question, on savait
que l'intégration allait bien se faire. Mais, quand on est en zone
résidentielle, et particulièrement en zone résidentielle de plus basse
densité, c'est là qu'il y a le plus d'enjeux, et c'est là qu'on doit être prudent, et c'est pour ça que j'avais proposé
un amendement pour venir régir la densité, parce que, c'est ça, il y a
quand même une inquiétude que ce soit disproportionné par rapport au cadre bâti
adjacent. Voilà.
Le Président (M. Schneeberger) : Oui,
merci. D'autres questions, commentaires? Député de Laurier-Dorion.
• (11 h 50) •
M. Fontecilla :
Oui. Merci, M. le Président. Il y
a un aspect de l'évaluation qui doit être, selon moi, absolument... être
considéré, puisque la ministre démontre de l'ouverture à... ne serait-ce qu'à
évaluer la productivité de cette mesure-là, le rendement, dans son plan d'action, même si, de toute évidence, elle
va refuser ce sous-amendement-là, mais c'est... et je la sensibilise en même temps, c'est toute la question
du changement de zonage et l'effet sur les prix, là, d'un projet pour du
logement social, par exemple, versus un projet privé. On sait que
l'amendement 37.2 présenté par la ministre concerne toute forme de
logement, y compris du logement hors marché, là, donc du logement social, entre
autres, et du logement privé, là. Mais ce
que plusieurs intervenants ont mis de l'avant, là, c'est qu'un changement... Et
moi, je suis tout à fait d'accord d'accorder des allégements
réglementaires et urbanistiques aux projets de logements sociaux, et j'ai des
réticences, des fortes réticences, concernant l'allégement concernant le
logement locatif privé, mais on sait que, dans un contexte de nécessité de
produire un grand nombre de logements, l'effort d'investissement qui a été
souligné par la ministre aujourd'hui même, pendant la période de questions, là,
1,8 milliard pour construire 8 000 logements
sociaux ou abordables, selon ses termes, c'est nécessaire de mettre de l'avant
des allégements réglementaires pour arriver à l'objectif recherché.
Et la question du
zonage est fondamentale, M. le Président, là, dans cette... dans la facilité
pour produire du logement, là, parce que je m'inspire, entre autres, du mémoire
de l'organisme Vivre en ville, qui nous dit qu'un changement de zonage permet,
et je cite le mémoire qui a été présenté dans le cadre de ce projet de loi,
là : «Un changement de densité permet d'augmenter instantanément la valeur
d'un terrain, sauf si le potentiel de changement de zonage a été pris en compte dans la valeur d'une transaction parce
qu'une dérogation est jugée facile à obtenir. Si une telle dérogation
apparaît peu probable pour un projet privé mais est garantie pour un projet
sans but lucratif, ce dernier aura un avantage à la négociation en plus d'avoir
accès à un terrain à un prix par unité plus bas, ce qui réduit la part du
financement public requis.»
On sait que, dans
plusieurs municipalités du Québec, là, bien, en fait, dans la plupart, il y a
quand même une compétition pour avoir accès à des terrains, et, si on permet la
construction de davantage de logements d'habitation sur un terrain, sur un terrain donné, automatiquement, le prix de ce
terrain-là va augmenter parce que le prix est en fonction des revenus
qu'il pourrait générer dans le futur. Mais, en incluant le logement privé et
locatif privé et mettant sur le même pied d'égalité le logement privé et le
logement hors marché, social, par exemple, le logement social, on fait en sorte que l'argent public va être en compétition
avec des investissements privés, et ça va, encore une fois, produire un
risque... ça risque de produire un effet de marchandage qui ne fait que pousser
le prix à la hausse. Donc, si le gouvernement
voulait se donner véritablement les moyens de construire le plus rapidement
possible les 8 000 logements hors marché qu'il a promis à un moindre
prix, évidemment, là, et, si c'est possible, dépasser... avec le même
1,8 milliard sur la table, dépasser l'objectif de
8 000 logements, il est de mise de ne considérer que la possibilité
que d'octroyer des changements de zonage aux projets de logement social.
Il existe toujours,
d'après ce que je comprends de l'amendement 37.2... que les municipalités
pourront toujours choisir cette voie-là, donc octroyer des changements de
zonage seulement aux projets de logements sociaux, ce qui va donner automatiquement un avantage aux projets de logements
sociaux pour obtenir plus rapidement une entente à moindre prix. Donc,
il est impératif, selon moi, que la ministre considère la possibilité
d'effectuer une évaluation comparative des municipalités, du coût des projets
et de la facilité à les sortir de terre entre les municipalités qui ont octroyé
seulement des dérogations de zonage à augmenter la densité, en d'autres termes,
aux projets de logements hors marché versus les municipalités qui ont octroyé
des permis à du logement privé et à du logement hors marché.
Je crois, mais c'est
à la... après évaluation des projets soumis, que le gouvernement va, d'une
part, payer plus cher pour les projets... plus cher pour les terrains pour des
projets qu'il... ou, en tout cas, les contribuables vont payer plus cher pour
les terrains pour du logement hors marché, et ça va être plus difficile pour
ces projets d'arriver à une rentabilité, là. Donc, en privilégiant un secteur,
on facilite la réalisation des projets à moindre prix. Et j'incite la ministre
à considérer la possibilité d'évaluer de façon serrée la productivité de ces
mesures-là, de la façon dont on les applique, si c'est appliqué seulement à du
logement social ou si c'est appliqué à toutes sortes de... à des projets, soit
qu'ils soient privés ou qu'ils soient du logement hors marché.
Le Président (M.
Schneeberger) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Alors, ça va?
Oui. Ce sera dans les commentaires que...
M.
Fontecilla : Je voulais savoir si la ministre est consciente de cette
problématique-là.
Le Président (M.
Schneeberger) : O.K. c'est une question que vous posiez comme ça?
M.
Fontecilla : Oui.
Le
Président (M. Schneeberger) : Parfait. Alors, est-ce que nous avons une réponse
au niveau de la ministre?
Mme
Duranceau : Bien, je n'ai pas d'autres choses à ajouter, moi,
M. le Président, j'ai dit ce que j'avais à dire, là, sur cet article-là.
Le
Président (M. Schneeberger) : O.K. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires,
questions au niveau de l'amendement...
au sous-amendement déposé? Sinon, nous allons passer au vote. Alors, est-ce que
le sous-amendement de 37.2 est... Oui?
Une voix : ...un vote par appel
nominal.
Le Président (M. Schneeberger) : Vote
par appel nominal. Alors, M. le secrétaire.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. Mme Dufour (Mille-Îles)?
Mme Dufour : Pour.
Le Secrétaire : Mme Prass
(D'Arcy-McGee)?
Mme Prass : pour.
Le Secrétaire : Mme Duranceau
(Bertrand)?
Mme Duranceau : Contre.
Le Secrétaire : Mme Jeannotte
(Labelle)?
Mme Jeannotte : Contre.
Le Secrétaire : M. Girard
(Lac-Saint-Jean)?
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Contre.
Le Secrétaire : M. Gagnon
(Jonquière)?
M. Gagnon : Contre.
Le Secrétaire : M. Rivest
(Côte-du-Sud)?
M. Rivest : Contre.
Le Secrétaire : M. Fontecilla
(Laurier-Dorion)?
M. Fontecilla : Pour.
Le Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
Le Président (M. Schneeberger) : Abstention.
Alors, le sous-amendement est rejeté.
Alors, nous revenons actuellement au... à
l'amendement principal, qui est le 37.2. Questions, commentaires? Mme la
députée de Mille-Îles.
Mme
Dufour : Oui. Il y a un amendement qui a été envoyé, donc
peut-être suspendre, le temps qu'il soit reçu.
Le Président
(M. Schneeberger) : Alors, nous allons suspendre quelques instants
pour recevoir l'amendement.
(Suspension de la séance à 11 h 58)
(Reprise à 12 h 02)
Le
Président (M. Schneeberger) : Alors, nous reprenons les travaux. Alors, Mme la
députée de Mille-Îles souhaite déposer
un nouveau sous-amendement du 37.2. Alors, députée de Mille-Îles,
allez-y avec votre lecture et l'explication de votre sous-amendement.
Mme
Dufour : Oui. Alors, c'est assez simple, c'est de changer
de cinq ans vers trois ans le terme d'application de cet amendement.
Donc,
l'amendement introduisant l'article 37.2 du projet de loi est modifié,
dans le premier alinéa, par le remplacement des mots «cinq ans» par «trois ans»
au début de l'alinéa ainsi que dans le paragraphe 2°.
Et
donc je ne lirai pas tout, là, tout, parce que, là, c'est... il y a quand même
beaucoup de texte, mais, si on peut... je peux le déposer officiellement
puis, après ça, je pourrai en parler davantage.
Le Président (M.
Schneeberger) : Bien, vous pouvez y aller avec l'explication de votre
changement, pas de problème.
Mme Dufour : Parfait.
Parfait. Donc, voilà. Alors, on a parlé de tout... de l'impact quand même
important que ça pourrait avoir. Il y a aussi un élément, là, le trois ans,
c'est une façon... Tu sais, tout à l'heure, on a parlé d'un rapport après trois
ans. Ici, c'est la possibilité de se donner trois ans pour voir si ça
fonctionne, puis, par la suite... parce que c'est un superpouvoir exceptionnel,
et, par la suite, si le gouvernement souhaite le renouveler, bien, c'est
toujours possible, il y a des omnibus en habitation, en municipalités, à
tous... deux fois par année. Et donc, là, c'est un moment un petit peu moins
long, entre guillemets, de l'impact, peut-être le contraindre parce qu'on n'a
pas voulu limiter la densité, mais là on vient limiter le temps.
Et je vais peut-être
soulever que, dans le fond, en 2025, il y aura des élections municipales. On a
parlé beaucoup de : Ah! la cohorte d'élus municipaux actuels est
extraordinaire, puis les risques de dérives sont minimes, mais, en 2025, il y
aura une toute nouvelle cohorte d'élus municipaux, et on n'a aucune idée de ce
qui nous attendra. Je donnais l'exemple, je ne sais pas si c'était, ça, en
caméra ou à off, en dehors de la caméra, hier, mais je parlais de... en
Argentine, ils ont élu... ils ont fait tout un virage, disons, assez
dramatique, et donc on ne sait jamais ce qui peut nous arriver. Et là j'ai l'impression
qu'on fait des mesures en fonction... qu'on pense aux individus plutôt que de
penser à l'urbanisme.
Et là je vais
peut-être...
Le Président (M.
Schneeberger) : ...
Mme Dufour :
Oui?
Le Président (M.
Schneeberger) : Mme la députée de Mille-Îles, sur ces commentaires, je
voudrais dire que c'est le peuple qui décide des présidents ou des élus. Alors,
à ce moment-là, le choix des citoyens, c'est à eux autres, ultimement, de choisir. Alors, il faut être
conséquent toujours de qu'est-ce qu'on choisit. Alors, c'est juste, peu importe
les...
Mme Dufour : Sauf
que, là, on parle d'urbanisme, là. Je m'excuse, là, mais on encadre...
Le Président (M.
Schneeberger) : Oui, bien, ça, vous parliez des élections, là.
Mme Dufour : Bien oui, mais on encadre. On encadre l'urbanisme
assez serré avec la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme. Je peux
vous dire qu'elle fait pas mal de pages, cette loi-là. Si on l'encadre de cette
façon-là, c'est parce qu'on a jugé
qu'on ne pouvait pas juste laisser ça dans les mains d'individus élus qui,
parfois, n'ont aucune connaissance en urbanisme, et c'est la réalité,
qui sont à risque d'être soumis à des pressions. Et donc ce n'est vraiment pas
parce que des gens élisent des élus que ça veut dire que tout ce qui est fait
par ces élus-là est la... est parfait, là, loin de là. Et des exemples, je
pourrais vous en donner des dizaines, je pourrais passer tout mon 20 minutes
à vous donner des exemples des erreurs malheureuses qui ont été autorisées et
qui... aujourd'hui, on en paie le prix. Donc, je m'excuse, ce n'est pas...
Le Président (M.
Schneeberger) : ...mais vous avez probablement raison, là, mais je
voulais quand même le mentionner.
Mme Dufour : Ce
que je disais, c'est que je craignais... C'est qu'on a fait état beaucoup du
fait que, bien, on a une belle cohorte d'élus, là, actuellement, là, les
112 villes qui seraient touchées par cet amendement-là, là, bien, c'est des bons élus, là. Oui, mais dans... tu
sais, un, on ne les connaît pas tous très, très... dans tous les détails, de
deux, ils peuvent subir des pressions, de trois, dans deux ans, il
y aura des nouveaux élus, et on n'a aucune idée. Donc, l'idée, c'est que, si on a développé tous ces outils-là puis qu'on juge
que les élus des autres villes, on ne leur donne pas ce pouvoir-là,
c'est parce qu'on ne veut pas aller vers ces risques-là. Alors, moi, ce que je
dis, c'est qu'on pourrait prévenir en disant : Bien... tu sais, parce que
des projets, ça se développe quand même sur quelques années, donc un
trois ans, ça permet de développer des projets, de les débloquer.
Ceci
dit, maintenant je voudrais parler de ce que Maxime Pedneaud-Jobin a écrit ce
matin et je pense qu'il y a des éléments qui sont très pertinents à cet
élément-là. Et, je vais dire, il parle, par exemple, du fait que les
60 000... il y a deux ans, c'est... Puis ça, c'est un rappel important,
puis on n'en a pas assez parlé : «Il y a deux ans, il s'est construit
68 000 logements au Québec.» Ce n'est pas vrai que tous les logements
qui ne se construisent pas actuellement sont bloqués parce qu'il y a des problèmes
dans la municipalité. Ce n'est pas vrai. Il y en a que oui, mais il y en a que non, c'est d'autres éléments
qui les retardent, alors que cette mesure exceptionnelle là, on veut la donner
parce qu'on prétend qu'il y a trop d'affaires qui est pris dans la mélasse,
mais la mélasse, ce n'est pas que dans les villes, il y a aussi tout un
autre... tout un paquet d'autres circonstances.
Il
dit : «Un règlement de zonage est la transcription juridique d'une vision
pour un quartier. Multiplier les exceptions affaiblit ce plan d'ensemble. Les
contre-pouvoirs citoyens, comme les référendums, et la réglementation existent
parce que les projets de pacotille, sans vision, mal placés, laids, trop hauts
ou trop bas sont légion.» Ce sont ses mots. «Les mobilisations citoyennes nous
permettent d'éviter des erreurs avec lesquelles nous aurions à vivre
longtemps.» Et je vous l'ai dit, M. le Président, moi, j'en ai que j'ai vécu,
que je vis encore, parce qu'ils sont dans mon
entourage, je les vois, dans le quotidien, où je me promène. «On ne construit
pas pour cinq ans mais pour 100 ans.» Et c'est pour ça que je
dis que ce superpouvoir-là, il est important d'en réduire son temps dans le
temps, parce que ça peut laisser place à des dérives.
Il
dit : «Au lieu d'improviser une règle générale périlleuse, le gouvernement
aurait pu proposer un mécanisme pour que les villes puissent modifier
rapidement leur règlement de zonage pour augmenter la densité dans certaines
zones stratégiques, comme autour des stations de transport collectif, et ce,
après un processus de consultation.» C'est quelque chose qu'on avait parlé dans
le projet de loi n° 16. «Les promoteurs auraient pu ainsi construire de
plein droit, donc éviter la multiplication des assemblées publiques; le risque
de favoritisme aurait été moins grand et la vision d'ensemble, respectée. Tout
cela aurait été faisable en quelques mois.»
Il dit :
«Finalement — là,
il dit un peu ce qu'autant M. le député de Laurier-Dorion et moi-même disent depuis le début, là — si la capacité de suspendre les règlements
s'appliquait au logement social et au logement étudiant, donc au
logement à but non lucratif, elle serait utile et plus sûre. L'ouverture à tous
les projets a de quoi susciter l'inquiétude.»
En
terminant, il dit : «Les vrais cas de "pas dans ma cour"
existent — ce
que je vous dis — la
lourdeur administrative existe — je
le confirme — mais
ce ne sont que des diversions. Le désengagement de l'État, la démographie, les
coûts de construction et l'accès au capital sont les vraies explications
de la crise du logement.»
Je
ne peux pas le dire mieux que ce qui est écrit là. C'était dans La Presse ce matin et ça résume absolument... je pense que... tout ce que j'ai tenté de dire à propos de cet
amendement-là. Donc, voilà, ça conclut, M. le Président, pour moi.
Le Président (M. Schneeberger) : Alors,
merci pour votre... vos bonnes explications. D'autres... Oui. Députée de
D'Arcy-McGee.
Mme Prass : Oui.
Bien, je voudrais savoir sur quels principes, sur quelles données la ministre
s'est basée pour que ça soit cinq ans, en premier lieu. Et, justement,
parce que c'est des mesures exceptionnelles puis qui vont avoir des effets à long terme, je pense que ça
vaudrait la peine, parce que la mesure peut toujours être reconduite si elle a
du succès, puis, si c'est six ans sans entrave pour les habitations,
constructions, etc... Donc, je voudrais savoir sur quelles données la ministre
s'est basée pour déterminer que ça serait une période de cinq ans.
Le Président (M.
Schneeberger) : Mme la ministre.
• (12 h 10) •
Mme
Duranceau : Oui, M. le Président. Bien, écoutez, je l'ai mentionné
hier, il y a le projet de loi n° 16 qui prévoit,
là, tous les nouveaux schémas d'aménagement en lien avec les nouveaux... les
nouvelles orientations gouvernementales.
Alors, tout ça va se réaliser pour les villes, les plus grandes villes, du
moins, sur une période qui va s'échelonner probablement, de manière
réaliste, sur cinq ans, d'où la problématique. C'est trop long. C'est trop
long pour rendre ça fluide dans un contexte
de crise. Alors, le cinq ans, il est pour tenir compte de cette période
parallèle là pour ce qui découle du
projet de loi n° 16. Et puis le cinq ans tient compte aussi du fait
que tous ces projets-là, de manière générale, les projets immobiliers,
c'est long. Alors, le trois ans, pour moi, ça ne rencontre pas l'objectif.
Encore là, c'est une
mesure qui se veut souple, que les choses avancent. Donc, je maintiens ma
position initiale. La transparence, je l'ai
ajoutée. J'entends ce que les urbanistes disent, ils ont le droit d'avoir leur
vision. Il y a beaucoup d'autres gens qui ont des visions qui diffèrent. Ce
qu'on... Ce qui est important de souligner, c'est qu'on ne peut pas
faire n'importe quoi. Il y a beaucoup de mesures qui demeurent applicables
quand on pense aux restrictions en matière environnementale, en matière... on
l'a... vous l'avez abondamment regardé hier, là, au niveau bien-être, qualité de vie. Alors, il y a bien des règles qui
restent applicables dans ce contexte-là. On vient juste sauter des processus
souvent trop longs d'approbation puis de délai pour accélérer le logement.
Puis, effectivement,
c'est... Les logements bloqués, ce n'est pas toujours à cause de processus
administratifs; d'autres fois, c'est
d'autres raisons. Bien, si ce n'est pas applicable, cette mesure-là ne trouvera
pas application. Mais là il faut des
mesures qui sont à la hauteur, qui sont audacieuses. C'est ce que la population
nous a demandé. C'est ça qu'on livre comme mesure.
Mme Prass : Mais, compte tenu, justement, de tous les
processus qui vont être suspendus avec cet article, je vois difficilement pourquoi trois ans ne seraient
pas acceptables. Puis ensuite, comme j'ai dit, on peut revoir à ce moment-là si
ça a été... si ça a bien fonctionné pour le reconduire pour une autre période
de temps. Parce que, là, ça va avoir des effets, toutes ces constructions vont
avoir des effets à long terme suite à la mesure. Et je veux savoir : Par
curiosité, est-ce que vous avez estimé
combien de logements vous vous attendez puissent être construits à chaque année
de cette mesure exceptionnelle?
Mme Duranceau :
Non, je n'ai pas estimé ça. J'espère le plus possible, on a besoin
d'augmenter l'offre. C'est ça, la vraie
problématique qui crée toutes les autres discussions. Donc, c'est un des
outils. On a dit que ça prenait une multitude d'outils pour amoindrir la
crise, alors, ça, c'en est un. Peut-être que ça n'aura aucun impact, peut-être
que ça en aura, mais au moins on donne de la latitude.
Puis,
encore une fois, on permet aux gens sur le terrain de pouvoir être agiles.
C'est une des grosses problématiques, c'est...
Au Québec, c'est l'enjeu majeur, toute l'agilité puis la capacité de construire
rapidement. Les autres provinces nous battent sur ça. Donc, on a choisi
cette approche-là, on ne serre pas la vis aux villes, on ne leur impose rien.
Encore une fois, les élus vont avoir le choix de l'appliquer ou pas et de
prendre les commentaires qui viendront avec dans
leur municipalité. Mais là il y a trop... il y a de trop petits groupes qui
s'élèvent contre des projets qui bénéficieraient à la majorité puis, à
un moment donné, il faut que ça soit la majorité qui soit entendue, là.
Mme
Prass : Est-ce que c'est des groupes, ces groupes, ou
c'est des groupes qui sont juste opposés à ce que vous demandez? Parce
que, tu sais, des petits groupes, ça s'additionne.
Mme Duranceau : ...«pas dans ma
cour», là, sur des projets spécifiques.
Mme Prass : D'accord. Donc, encore
une fois, tu sais, c'est des mesures exceptionnelles, puis on suspend des mécanismes qui sont en place. J'ai de la difficulté,
encore une fois, à comprendre pourquoi vous y tenez nécessairement, à
cinq ans, parce qu'avec les constructions qui pourront se faire vous êtes
prête à faire une évaluation dans le rapport annuel,
donc je ne comprends pas pourquoi ça, ça ne pourrait pas faire partie de cette
même pensée là, et donc revoir dans trois ans
à quoi... quels sont les résultats, quel est le consensus de la population,
etc., puis ensuite pouvoir le reconduire,
si nécessaire. Parce que cinq ans, c'est une longue période et
cinq ans, bien, ça veut dire qu'il y aura des élections municipales
qui vont avoir lieu entre-temps.
Et, comme on
l'a dit, là on veut faire confiance aux élus municipaux, mais qui vont changer
d'ici... qui peuvent changer d'ici la prochaine élection. Ou, comme j'ai
mentionné la semaine dernière, moi, dans mon comté, il y avait eu un projet que le maire voulait qui aille de
l'avant pour... à Hampstead pour la construction d'un immeuble de condos
de 12 étages, et ça n'a pas fonctionné, c'est une des raisons pour
laquelle le maire n'a pas été reconduit, donc là vous remettez la
responsabilité sur les élus qui, dépendamment de ce qu'ils vont faire, vont
être réélus ou non. Mais c'est beaucoup au hasard, si vous voulez remettre la
confiance dans des gens qu'on ne connaît pas leurs motivations.
Donc, je pense que, par précaution, il serait
responsable de votre part de ramener ça à trois ans, et ensuite, comme
j'ai dit, de voir où nous sommes rendus et de pouvoir le reconduire si c'est un
succès, si c'est nécessaire. Parce qu'aussi
d'ici trois ans, justement, comme vous ne savez pas combien de logements
vont être construits, on est tous d'accord qu'il faut en construire,
mais trois ans, cinq ans, ça pourrait donner un nombre satisfaisant
d'ici trois ans. Donc, encore une fois,
je ne comprends pas la raison pour laquelle vous y tenez nécessairement à ce
que ça soit cinq ans.
Mme Duranceau : M. le Président, je
vais le répéter pour une dernière fois. On s'attend à ce que les OGAT
printemps-été 2024, ça prenne deux ans, après ça, ça va prendre un
autre... Je m'excuse, il y a les OGAT printemps-été 2024, on va avoir
deux ans pour réviser les schémas d'aménagement, après ça il va y avoir un
autre deux ans pour concordance des
règlements municipaux, puis, avec tous les délais, tout ce qui découle du p.l.
n° 16, c'est cinq ans. Alors, la logique de cette mesure-là,
temporaire, c'est cinq ans pour qu'au bout de ce périple-là les villes
soient plus souples, plus agiles.
Je le répète, il y a une obligation de
consultation citoyenne. Si les maires, mairesses, administrations municipales
veulent faire fi des consultations citoyennes, bien, ils en feront fi, mais ils
vont être obligés de vivre avec les
conséquences de ça. Ou moi, je pense qu'il va y avoir des consultations, le
projet sera adapté en conséquence.
Là, on a une problématique d'offre, il faut
augmenter l'offre. Il faut arrêter le «pas dans ma cour». Et c'est une mesure
qui, très bien, suscite des craintes, suscite des commentaires, c'est parfait,
ça veut dire qu'elle va être dans le radar de tout le monde, puis on va la
surveiller. Puis moi, je répète, je m'engage à ce qu'annuellement on fasse un
décompte de ce qui découle de cette mesure-là.
Mais cinq ans, c'est cohérent avec le
projet de loi n° 16, c'est cohérent avec la manière... le temps requis
pour gérer des projets, pour démarrer des projets puis les livrer, alors je
pense que tout ça tient la route. Puis on s'évite un processus, même de notre
côté, un autre processus législatif, encore là, qui n'est pas nécessaire.
Le Président (M. Schneeberger) : Merci.
Mme la députée de D'Arcy-McGee.
Mme Prass : Merci. Là, vous venez de
dire que les élus vont devoir vivre avec les conséquences de ces décisions, mais
ce n'est pas juste les élus, c'est tous les citoyens qui vont devoir vivre avec
les conséquences de ces décisions-là. Donc, un élu, tu sais, il ne peut pas
être... possiblement, ne sera pas réélu, mais les gens qui habitent dans ces quartiers, dans ces municipalités-là,
eux, ils vont être pris avec les conséquences de ces décisions à long terme.
Donc, vous le dites vous-même, des conséquences, et je pense qu'il ne faut pas
juste remettre les conséquences sur les élus, mais les effets de ces
conséquences sur les municipalités et leurs citoyens.
Mme Jeannotte : M. le Président,
est-ce que je peux intervenir?
Le Président (M. Schneeberger) : Oui.
Bien, vous avez le droit, parfaitement. Députée de...
Mme Jeannotte : ...rebondir un petit
peu sur ce qui se passe ce matin. J'aimerais rebondir un petit peu parce que, vous savez, au Québec, on nous reproche de ne
rien faire quand il y a une crise du logement, et là on a un gouvernement, une ministre qui veut faire quelque
chose d'audacieux, c'est vrai, mais c'est... puis là on nous reproche encore d'agir. Moi, là, il y a quelque chose que je ne
comprends pas. On se fait dire qu'on a trop de réglementation, que c'est lent.
La ministre l'a très bien expliqué, pourquoi on a besoin du cinq ans, les
OGAT.
• (12 h 20) •
Puis, au-delà de ça,
là, ça... Il faut qu'on regarde la «big picture» puis qu'on réalise qu'on est
en crise puis que ceux qui ont les leviers,
c'est les municipalités. Puis là c'est un petit peu triste d'entendre qu'on
s'enfarge sur le fait qu'il va peut-être y en avoir un, enjeu, un
dossier qui va faire ombrage. La ministre l'a expliqué aussi, hier, que c'était
une question d'évaluation des risques. Mais, dans un moment de crise, il faut
penser en dehors de la boîte, puis là c'est ce qu'on propose.
Moi, ça va me
chercher parce que ça fait plus d'un an qu'on entend des entrepreneurs
dire : On n'est pas capables d'avancer, c'est trop lent. Puis,
honnêtement, je trouve ça triste qu'on ne regarde pas plus, au contraire, le
fait que l'État, là, il veut aller plus vite, pour une fois. Ça fait que, je
pense, c'est salué par l'Union des municipalités, par la FQM, c'est salué par les maires. Pour une fois, on... les maires,
au contraire, ils sont heureux de ça. Donc, c'était plus fort que moi,
je voulais intervenir, M. le Président.
Le Président (M. Schneeberger) : Vous
avez parfaitement le droit d'intervenir, tout comme tous les députés. Alors,
député... Là, je ne sais pas lequel des deux avait levé la main en premier, là,
mais je vais y aller avec le député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla :
Merci, merci, M. le Président.
Moi aussi, je réagis à la déclaration de la députée de Labelle, là. Elle a
dit : Il faut qu'on réalise qu'on vit une crise, là. Je suis bien content
que le parti au pouvoir, la CAQ, réalise enfin qu'on vit une crise, là,
et c'est un peu... C'est très paradoxal. Parce que c'est la... certains de nos
collègues, là, qui se plaisent à le répéter quotidiennement au salon bleu, là,
ce gouvernement-là est en sa cinquième année...
Une voix : ...
M.
Fontecilla : ...sixième, merci, donc deuxième mandat, et c'est un peu
drôle parce que ce gouvernement-là a passé son premier mandat, 90 % du
temps, à nier l'existence de la crise du logement. Et là voilà un deuxième
mandat, il y a un... on va dire, il y a un réveil par rapport à cette réalité-là.
Et c'est comme les... Il y a un mouvement d'oscillation, là, qui va d'un
extrême à l'autre. On est passés de la négation de cette crise-là à une
situation où est-ce qu'on veut tout faire
pour produire du logement. Du logement, ça prend longtemps à faire, là, et,
voilà, on dirait que, dans cette
volonté-là, dans ce réveil-là, ils veulent aller... Le gouvernement veut aller
trop vite et, comment dire, passer outre, encore une fois, tout un... des systèmes qu'on a créés pour encadrer
démocratiquement et en respect des communautés locales, là, le
développement de nos municipalités.
Donc, on passe d'un
extrême à l'autre. C'est bien, et je salue le réveil du gouvernement par
rapport à la crise du logement. Je salue, là, la députée de Labelle, là, qui
dit qu'il faut qu'on réalise qu'on vit une crise, là. Moi, ça fait
cinq ans que je réalise, et pas juste moi, beaucoup de gens, beaucoup de
gens réalisent que depuis longtemps qu'on vit
dans une crise du logement. Mais, encore une fois, il ne faut pas... il ne faut
pas abattre, il ne faut pas détruire tout ce qu'on a... passer outre nos... tous les mécanismes qu'on a créés pour
faire un développement cohérent, respectueux des communautés locales, qui admet
l'expression démocratique des citoyens et citoyennes. Évidemment, il y a toujours
le phénomène «pas dans ma cour», là, mais il faut encadrer les... mieux
encadrer les... comment dire, l'allègement, là, que le gouvernement est en
train de... qu'on est en train d'adopter maintenant.
Donc, bien d'accord
d'alléger, d'alléger la réglementation entourant l'approbation des projets
domiciliaires, mais il faut faire ça de la bonne façon pour, encore une fois,
ne pas se... faire un recul, un recul en arrière. Oui, il faut construire plus
de logements, mais il ne faut pas non plus défigurer nos municipalités pour y
arriver.
Le Président (M. Schneeberger) : Merci
pour les commentaires. Députée de D'Arcy-McGee, vous... je pense que
vous souhaitiez aussi un... questionner ou émettre un commentaire.
Mme Prass : Oui,
merci, justement pour répondre aux commentaires de la députée de Labelle. Moi,
ce que j'entends de l'autre bord, c'est
toujours... on parle des municipalités, puis on parle des développeurs, puis on
ne parle pas de ceux qui sont victimes de la crise du logement, donc les
locataires. Oui, ça prend de la construction, etc...
Une voix : ...
Mme Prass : ... — je
veux finir ma parole — oui,
ça prend de la construction, etc., mais, encore une fois, on met toute la... on
met tout le pouvoir dans la main de... dans les mains de certains sans prendre
en compte l'effet à long terme que cela va avoir sur les municipalités. Donc,
c'est... ça ne peut pas être un «free-for-all» : on va faire de la construction, tout le monde vont construire ce
qu'ils veulent construire, puis on aura plus de logements. Mais ce n'est
pas comme ça, d'une façon responsable, qu'un
gouvernement gouverne. Et donc j'ai de la difficulté à toujours entendre de
la part du gouvernement qu'on a parlé aux développeurs, on a parlé aux
municipalités, mais que, suite à ça, on ne consulte
pas les autres parce que ce n'est pas leurs opinions qui sont importantes.
Donc, je ferais ce commentaire-là. Merci.
Le Président (M.
Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors...
Des voix : ...
Le Président (M. Schneeberger) : Alors,
nous... Juste rappeler d'en... généralement, qu'il serait quand même
bien de... les commentaires aux questions qui se... comportent toujours sur
l'article, ou l'amendement, ou le sous-amendement déposé. Voilà.
Alors, est-ce que
nous avons d'autres... Oui, députée de Mille-Îles. Micro, s'il vous plaît.
Mme Dufour : Merci,
M. le Président. Écoutez, la députée de Labelle a quand même soulevé des... a
dit que les oppositions reprochaient des éléments puis elle a... elle a
dit : On nous reproche de ne rien faire, on nous reproche qu'il y a la crise du logement. Par rapport à cet
amendement-là, là, je vais rappeler que, depuis le début, mon reproche, le
seul reproche, c'est qu'on n'a pas pu consulter les groupes sur l'amendement.
Ça aurait dû faire partie du projet de loi lorsqu'on a eu les consultations
particulières.
J'ai proposé à un
moment donné qu'on le sorte, puis qu'on le mette dans un projet de loi tout
seul, puis qu'on traite juste de ça, pour être capables d'avoir des
consultations exprès pour ça. J'aurais bien aimé pouvoir entendre les groupes,
et ça aurait dû être fait comme ça. Ça aurait dû être fait comme ça, parce
qu'on change complètement, puis, en questions ce matin en période de
questions, le député de... le député des Îles-de-la-Madeleine l'a bien dit, là,
on change complètement la nature du projet de loi. Et je comprends la ministre,
qu'elle veut réagir, mais ça reste qu'on a
changé la nature du projet de loi. On a consulté des groupes sur un projet de
loi qui est substantiellement différent, de par cet amendement-là. Le 37.2 change toute la donne. Il aurait dû... Il
aurait pu faire partie du projet de loi n° 16 — il
n'était probablement pas prêt à ce moment-là — il aurait pu être le premier projet de loi, ça
aurait pu être un projet de loi
séparé, peu importe, mais ça n'aurait pas dû faire partie d'un... d'être
intégré, présenté comme un amendement d'un projet de loi qui est
complètement différent.
Alors, c'est un peu
normal, je vous dirais, là, qu'on réagisse, puis qu'on propose des amendements,
puis qu'on veuille avoir des échanges. La partie ministérielle a dit avoir
consulté des groupes. Mais ce n'est pas ça, une consultation officielle d'un
projet de loi, c'est les consultations particulières qu'on a des groupes qu'on
s'entend, puis qu'on entend tous la même
chose, puis que les groupes extérieurs puissent mettre des mémoires là-dessus.
Il n'y a personne qui a été... qui a
pu émettre dans leurs mémoires... La ministre a dit : J'ai entendu les
groupes, ils ont fait... ils ont fait
leurs plaidoyers dans les consultations particulières. Mais personne ne s'est
exprimé sur le 37.2 spécifiquement parce qu'ils n'ont pas eu la chance,
il est arrivé après, il est arrivé il y a 10 jours. Donc, ce n'est pas
vrai. C'est ça, le reproche qui est fait, tout simplement, et c'est là-dessus
qu'on aurait dû le gérer séparément. Il y a vraiment, là, ici, à mon... En tout cas, je pense que je vais me...
perdre mes... je suis en train de perdre mes... les gonds, là, mais je vais me
recentrer.
Moi, je vais poser
une question, parce que...
Le Président (M.
Schneeberger) : Prenez une gorgée de café, ça a été servi.
Mme Dufour : Oui.
Ce n'est pas du café, je ne bois pas de café.
Mais, maintenant, je
vais poser une question, parce que j'ai entendu la ministre dire que... Bien,
elle a parlé du cinq ans. Pourquoi c'est important, le cinq ans,
parce qu'il y avait les OGAT, après ça qu'il fallait que les plans
d'aménagement de territoires soient... les PMAD, et compagnie, soient adaptés,
etc., après ça les schémas, les plans d'urbanisme. C'est vrai que ça prend du temps.
Puis d'ailleurs j'avais eu une rencontre, lorsque j'étais à la ville de Laval, avec le ministère où j'avais parlé de ça,
puis, officiellement, nous, chez nous, à Laval, ça a pris 10 ans,
au-dessus de 10 ans avant que ça arrive sur le terrain des vaches. Ça fait
que même le cinq ans, là, c'est court pour les processus actuels,
donc c'est clair qu'il faut les revoir. Puis ça, ça a été dit. Moi, je l'ai dit
lorsque j'étais aussi présidente de l'Association québécoise d'urbanisme. On a
eu des consultations pour la politique nationale d'aménagement du territoire.
Je l'ai dit, ça n'a aucun sens, le délai entre le temps qu'on adopte des OGAT,
les nouvelles orientations gouvernementales, puis le temps qu'elles arrivent
sur le terrain. C'est dément.
Maintenant, il y a
quand même d'autres choses qui peuvent être faites entre-temps, parce qu'on n'a
pas besoin des OGAT pour être capables de
densifier, là. Les plans d'aménagement peuvent être modifiés... en fait, les
plans d'urbanisme peuvent être modifiés, tout simplement. Il y aurait eu
d'autres... Il y aurait possibilité d'avoir d'autres formules.
• (12 h 30) •
Et
j'aimerais entendre, dans le fond, le... sur la proposition qui a été faite,
dans le fond, par Maxime Pedneaud-Jobin, où il dit qu'au lieu... il dit,
dans le fond, on aurait pu proposer un mécanisme pour que les villes puissent
modifier rapidement leur règlement de zonage. Et moi, j'ai demandé, j'en ai
parlé avec la ministre des Affaires municipales lors du PL n° 16 : Il faut revoir le processus de consultation
de zonage. C'est urgent. Ça fait que, dans ce trois ans-là que je propose, ce processus-là pourrait se faire. Il
y aurait possibilité de revoir le processus de consultation de zonage, que
les villes, elles, entre-temps, revoient leurs règlements de zonage pour
augmenter la densité en même temps qu'elles utilisent la proposition de la
ministre. Les deux pourraient se faire. On n'a pas besoin d'attendre les OGAT
et que ça découle, ça s'en aille sur le
terrain, là. C'est ça que j'aimerais entendre la ministre sur cette
possibilité-là, qu'on travaille là-dessus en attendant, mais qu'on n'ait
pas besoin de cinq ans pour que tout ça se mette en branle, à mon avis.
Le Président (M. Schneeberger) : Merci
beaucoup. Est-ce que nous avons d'autres commentaires, questions? Oui?
Mme
Duranceau : Bien, j'ai donné tous mes commentaires, là, sur ça. C'est
cinq ans. C'est ça, les délais. Il faut que ça avance, puis c'est une
excellente mesure pour permettre aux villes d'être plus agiles.
Mme
Dufour : Je n'ai pas entendu la réponse à la question, à
savoir : Est-ce qu'on peut, entre-temps, pendant... moi, je propose
trois ans, mais revoir le processus de consultation de zonage pour que ça
soit... Parce que l'affaire, c'est que, si on ne fait rien d'autre que cette
mesure-là, bien, dans cinq ans ou dans trois ans, peu importe, tout
le monde va dire : Bien, il faut la refaire, puis il faudrait la
faire pour toujours parce que les processus sont trop compliqués. Bien, c'est vrai qu'ils sont compliqués, il faut les
revoir. Ça fait qu'il faut commencer le processus pour les revoir. Donc, est-ce
que... ça, est-ce qu'on va s'engager à le faire?
Le Président (M. Schneeberger) : Merci.
Oui, Mme la ministre.
Mme
Duranceau : Dernier commentaire de ma part. Ce que la députée
de l'opposition propose, c'est louable, je comprends, mais ça va prendre
trois ans à exécuter. Alors, cette mesure-là, elle est adoptée, elle est
en vigueur. En 2024, en 2024,
les villes peuvent bouger, peuvent partir des projets. Il faut des mesures pour
assouplir puis pour augmenter l'offre. Alors, c'est ça, là.
La perfection n'est pas de ce monde. Et la
perfection, dans un contexte de crise, elle ne peut être atteinte. On pèse les pour, les contre, puis on fait ce qui est
le mieux dans les circonstances. Puis là on vient donner des moyens pour agir
à cet égard-là. Alors là, c'est tout ce que je peux ajouter, M. le Président.
Le Président (M. Schneeberger) : Merci.
Donc, ça va? Bon, alors...
M. Arseneau : ...
Le Président (M. Schneeberger) : Oui,
député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Oui. Bien, alors, je
voudrais me prononcer sur l'amendement qui a été proposé de réduire, donc, la
période pendant laquelle la réglementation d'urbanisme serait suspendue ou
pourrait être suspendue dans plusieurs municipalités où il y a des projets qui y
sont déposés et qui, essentiellement, contreviennent aux règles d'urbanisme. Je
pense que c'est ça qui est la plus grande inquiétude, moi, que je peux exprimer
aujourd'hui. C'est le fait que, pendant
cinq ans, on permette à des projets d'aller de l'avant, qui, dans les
circonstances régulières, n'auraient probablement
pas été approuvés. Et pourquoi ils n'auraient pas été approuvés? Parce qu'ils
ne respectaient pas le cadre juridique dans lequel on évolue.
Alors, on a bien beau vouloir invoquer la crise,
qui est d'ailleurs assez extraordinaire, aujourd'hui et depuis deux jours... en fait, d'entendre parler de
l'urgence d'agir parce qu'on est en crise, de faire des parallèles avec
l'urgence sanitaire, alors que, pendant cinq ans, souvenons-nous,
le mot en c était banni, nous ne pouvions pas parler de crise, il n'y avait pas de crise, il y a eu une espèce de
virage à 180 degrés qui est quand même extraordinaire et, j'allais dire,
presque admirable, mais qui est aussi révélateur d'une certaine contradiction
dans l'approche gouvernementale, où on se disait qu'on allait faire les
choses... les choses correctement et dans l'ordre et on a... on voulait agir
sur un certain nombre d'éléments. C'est ce
qu'on avait proposé dans le cadre du projet de loi qui était déposé en juin
dernier, ce défunt projet de loi qui, maintenant, n'existe plus ou qui a
été transformé de façon tellement majeure qu'il n'est plus l'ombre de lui-même parce qu'il aborde toute une série de règles et
de... et touche à toute une série de prérogatives qui ne sont pas celles
qui étaient identifiées au départ, et que j'ai déjà eu l'occasion de dénoncer
préalablement. Alors, ça fait en sorte qu'on
crée une certaine confusion, je pense, un peu partout, là, avec l'idée que,
maintenant, la panacée, la façon de régler le dossier... puis on a
besoin de cinq ans...
D'ailleurs,
d'où vient ce cinq ans? Pourquoi pas 10? Pourquoi ne pas suspendre les
règlements ad vitam aeternam et dire que... Puisqu'on fait confiance aux élus
municipaux, là, pourquoi leur faire confiance seulement pour cinq ans?
Si on veut un vote de confiance, si on présume que tout le monde est de bonne
foi, est bienveillant et prend toujours les meilleures décisions en tout temps,
pourquoi attendre une période de crise pour le faire? Pourquoi ne pas
simplement leur donner les clés de la
réglementation gouvernementale ou territoriale et dire : Bien, finalement,
vous ferez bien ce que vous voudrez quand vous voulez parce que vous êtes élus.
Puis vous rendrez des comptes une fois aux quatre ans, et puis nous,
bien, on va prendre les données, on va les récolter une fois par année. Puis là
on ne sait pas encore si ces données-là seront rendues publiques de façon
transparente et s'il y aura une évaluation de ce qui a été fait. Moi, je pense
que c'est une préoccupation qu'on va amener et qui me semble absolument
légitime, si tant est qu'on adopte la proposition, là, du 37.2.
Mais, pour revenir sur la question des cinq ans
ou des trois ans, moi, je pense qu'il faut... On est, à l'heure actuelle, à
déréglementer de façon débridée, voire sauvage, les règles qui existent
présentement dans le milieu municipal. Et moi, je ne suis pas certain que ça
fait l'unanimité dans la société civile. Et la raison pour laquelle je ne suis
pas certain, c'est parce qu'on n'a pas eu l'occasion de poser la question à
quiconque parce qu'il n'y a pas eu, donc, le dépôt de cette proposition-là dans
les règles de l'art ici, en commission parlementaire, en consultations
particulières, avec des groupes, avec des mémoires qui étaient déposés sur cet
objet-là, comme sur tous les autres qui nous ont été apportés de façon surprise
ou tardive et qui n'ont pas fait l'objet de débats, et de réactions, et
d'analyses de ce que ça peut aussi avoir comme conséquences. Alors, moi, je dis
que le trois ans vaut bien le cinq ans dans la mesure où, dans trois ans, on a
quand même le temps. Je ne crois pas que ce soit pour la construction, puis
l'ouverture, puis l'inauguration, puis la coupe du ruban, là, on parle de
l'approbation d'un projet.
Ce que je comprends... puis je voudrais savoir,
à ce moment-ci, si je suis juste dans mon évaluation du fait que les cinq ans
qui sont proposés par la ministre ou encore les trois ans dans l'amendement qui
est devant nous, c'est pour donner une approbation, donc
pour donner l'autorisation d'un projet, ou si c'est pour faire en sorte que le projet, lui, se concrétise et soit essentiellement
inauguré, habité, si on parle d'habitation, à l'intérieur du délai imparti.
Alors, je ne sais pas si la ministre ou ses... les membres de son équipe
peuvent me dire si je comprends bien le fait que
les cinq ans initiaux puis les... si on adoptait les trois ans, c'est les
paramètres à l'intérieur desquels les municipalités peuvent accorder le permis. Donc, ça ne calcule
pas la durée de construction, qui, elle, peut évidemment, là, s'étaler sur plusieurs
mois, voire plusieurs années.
Le Président (M. Schneeberger) : Oui.
Merci beaucoup pour le questionnement. Alors, est-ce que nous avons du... Oui,
Mme la ministre.
Mme Duranceau : Bien, je vais
répéter, là, parce que je l'ai expliqué, le cinq ans, là, il y a... un petit
peu plus tôt. Le cinq ans, c'est parce que tout ce qui découle du projet de loi
n° 16 ne verra le jour de manière réaliste qu'au
terme de cinq années, avec toutes les étapes qui doivent être franchies pour
mettre à jour toute la réglementation municipale.
Là, on a des projets d'habitation qui pourraient
voir le jour dès 2024 dans la mesure où on est capables, par résolution, de
faire avancer les choses. Et donc c'est ça. C'est ça, le cinq ans. C'est parce
qu'il ne se passera rien au niveau LAU qui
aura des effets tangibles sur le terrain. Alors, on dit : Bien, dans
l'intérim, on a une mesure qui permet aux municipalités d'être agiles,
et ça va permettre de débloquer des projets ou d'autoriser des projets
d'habitation plus rapidement.
M. Arseneau : Plus précisément,
j'avais entendu cette explication-là sur l'idée qu'il s'agit d'une mesure
transitoire entre le projet de loi n° 16 puis autre chose. Un nouveau
cadre réglementaire ou d'urbanisme dans les municipalités, ça, on a compris
puis on pourrait en débattre. Mais moi, je veux savoir si la période de cinq
ans, c'est strictement pour autoriser les projets ou pour les voir naître, et
se déployer, et être complétés, auquel cas l'argumentaire
que je vous soumets, c'est qu'on aurait trois ans pour débloquer des projets
qui vont se réaliser non pas dans les trois premières années, mais dans
les six premières années.
• (12 h 40) •
Mme Duranceau : Pendant cinq ans,
les municipalités vont pouvoir se prévaloir de cet article de loi, là. Donc,
année 4, avant-dernière journée, techniquement, ils peuvent encore s'en
prévaloir.
M. Arseneau : C'est ça. Mais, encore
une fois, qu'on se comprenne bien, si, à l'année 4... à la fin de la cinquième année, puisqu'on parle, au départ, d'un
projet de cinq ans, la municipalité peut autoriser un projet au 364e jour de la cinquième année, mais le projet, le
lendemain, il ne sera pas complété, il ne sera pas construit. L'autorisation
sera donnée de construire sur une période de construction régulière,
n'est-ce pas?
Le Président (M. Schneeberger) : Mme
la ministre.
Mme Duranceau : Tout à fait. Tout à
fait. C'est ça.
M.
Arseneau : D'accord, mais d'où l'idée que la période de
construction peut s'étaler bien au-delà des cinq ans. Et, si on
appréhende un certain nombre de projets qui contreviennent au règlement
d'urbanisme, donc la durée d'application ou les conséquences d'une suspension
de la réglementation sur cinq ans vont s'étaler sur une période bien supérieure aux cinq ans, probablement six ou
sept ans. Alors, la proposition de ma collègue de Mille-Îles,
dans ce cadre-là, est intéressante puisqu'elle réduit la période
d'autorisation, mais elle maintient essentiellement la période pendant laquelle
des projets pourront être... voir le jour... en fait, être mis à terme. Et, si
c'est l'objectif de la ministre, il serait
atteint, mais dans une période un peu plus restrictive, ce qui nous
permettrait, justement, probablement de remplir cette période, là, où la
ministre semble croire que tout projet est bloqué parce que la réglementation,
on vient de le découvrir au cours du dernier été, empêche
25 000 habitations ou projets de se réaliser.
Et la question qui est le corollaire de tout ça,
c'est que cette information-là, nous, on ne l'a pas de première main. On travaille sur du ouï-dire, et ça, c'est
assez inadmissible dans le cadre d'une commission parlementaire qui se veut sérieuse, une institution comme l'Assemblée
nationale. Et moi, j'aimerais avoir devant nous, ici, là, les représentants
des organisations qui nous disent et qui nous prouvent, données probantes à
l'appui, que les 25 000 projets, là, c'est parce que les villes se
traînent les pieds puis parce qu'il y a une lenteur administrative qui fait en
sorte qu'ils ne débloquent pas ou s'il y a d'autres facteurs qui font en sorte
qu'ils ne débloquent pas. Est-ce que ça peut être tout simplement parce que ces
projets-là, dans une certaine mesure, certains de ces projets-là ne cadrent
tout simplement pas avec les orientations
des villes, des municipalités et des citoyens qui les habitent dans la mesure
où ils se sont donné des règles
d'urbanisme qui ont été votées démocratiquement et qui faisaient en sorte qu'on
avait une vision de l'avenir pour le développement et le... de la
municipalité, de la ville, la préservation du paysage, la densification dans
certains secteurs, bien sûr, mais également la préservation d'autres secteurs
aussi?
Et ces 25 000 projets dont on parle,
on n'a pas d'information non plus sur la capacité des promoteurs de les livrer dans le cadre actuel, là, d'une inflation
galopante, d'une pénurie de main-d'oeuvre, des règles aussi, là, qui régissent
la construction. Puis on demande aussi de changer ces règles-là, là, les
classes, là, d'emploi dans le domaine de la construction. Je sais que le
collègue de la ministre responsable du Travail va aussi déposer une loi pour
réviser, là, les corps d'emploi. Je ne veux pas m'éloigner, mais est-ce qu'on a
décidé de suspendre des règles puis que n'importe qui pouvait faire n'importe quoi dans le domaine
de la construction en attendant qu'on change les règles? Non. On a dit que
les règles actuelles s'appliquaient jusqu'à ce que de nouvelles règles entrent
en vigueur.
Là, ici, on dit : En attendant que de
nouvelles règles viennent en vigueur, on va suspendre les règles. Moi, j'ai
rarement vu... ou jamais vu, en fait, là, dans une société de droit, une
logique telle que la réglementation actuelle, qui était jugée inopérante, ou
inadéquate, ou peut-être vétuste, à revoir, était suspendue le temps qu'on y
arrive. En fait, ce qu'il faut, c'est
accélérer le processus. Accélérer le processus et lever les barrières pour la
construction, j'en suis, mais abolir
toutes les barrières puis ne pas accélérer le processus de révision qui mène à
des nouvelles règles d'urbanisme, ça, j'ai un petit problème avec ça.
Et c'est là où j'ai l'impression qu'on a un
diagnostic, mais qui est très, très partiel. C'est comme si on saisissait
aujourd'hui, là, non seulement l'impact de la crise, mais qu'on se servait de
la crise pour l'instrumentaliser à des fins,
disons, qui permettraient un peu de faire passer des projets qui, autrement,
n'auraient jamais vu le jour parce qu'il y avait effectivement une
inadéquation entre le projet puis la vision des citoyens qui se sont donné ces
règles-là dans chacune de leurs municipalités.
Puis il ne faut pas oublier non plus qu'il y a
un volet citoyen. Et je crois qu'on l'a peu abordé jusqu'à présent dans la commission et je trouve ça dommage. Parce
que l'idée de dire qu'il y a des projets qui sont bloqués tout simplement
par le réflexe du «pas dans ma cour»,
qu'est-ce que ça veut dire, le «pas dans ma cour»? C'est l'expression de
citoyens qui ont une vision, une
approche, une conception du vivre-ensemble qui fait en sorte... et qui sont
déjà installés, qui sont des payeurs de taxes puis qui vivent dans un quartier,
dans un secteur, dans une ville, quelque part au Québec, et qui
expriment leur opinion sur des projets qui vont bousculer leur quotidien, qui,
bien souvent, sont amenés par des promoteurs qui ne les ont pas nécessairement
consultés ou mis dans le coup.
Et évidemment c'est très attrayant pour les...
des élus municipaux de dire : Bien, regarde, il faut stimuler la construction, il faut stimuler également... oui,
la construction et le développement économique, et cet impératif-là peut
parfois nous faire perdre de vue qu'il y a des citoyens qui peuvent se sentir,
à bon droit, brimés par des projets qui sont déposés et là, actuellement, ne
pas pouvoir s'exprimer autrement que par une consultation dont on sait que la
conclusion est déjà écrite d'avance. Ce n'est pas comme si le fait de tenir une
consultation, c'était gage qu'on va modifier
le projet, qu'on va prendre en contre... en compte, pardon, l'opinion des
citoyens. C'est comme si on s'imposait, là, une espèce de procédure où on va informer les citoyens. Mais
qu'est-ce qui garantit qu'on va prendre en compte leurs objections? Et ça, vous
nous direz : Bien oui, bien, il appartient au conseil municipal, aux élus,
ils représentent leur population, et
tout ça. Ils représentent leur population, mais sous pression, sous la
pression, oui, de la crise du logement. C'est une pression économique,
c'est une pression des promoteurs également.
Et il n'est pas dit, à l'heure actuelle, qu'il
n'y a pas un déséquilibre dans l'opinion et dans le point de vue des uns et des
autres. Et de négliger, de cette façon-ci, le point de vue des citoyens, des
résidents, des contribuables de nos villes
et de nos municipalités au Québec en disant que ce sont des gens qui sont...
contrairement à ce qu'on disait, là, des élus municipaux, qui sont
exemplaires et de bonne foi et qui vont toujours prendre les meilleures
décisions dans l'intérêt des citoyens, bien, à l'inverse, on décrit les
citoyens comme des empêcheurs de tourner en rond. Ce sont des gens qui, si on suit la logique, n'ont pour objectif que de
faire perdurer la crise de l'habitation et puis qu'ils ne veulent rien
savoir de projets qui pourraient être structurants, qui pourraient être
intéressants pour leur communauté. Moi, je trouve que le raisonnement est
plutôt court, M. le Président.
Je ne sais pas s'il me reste encore quelques
minutes ou...
Le
Président (M. Schneeberger) : Je n'ai pas les minutes exactes, mais il vous
reste encore un peu de temps.
M.
Arseneau : Il me reste encore un peu de temps. Si vous voulez
m'avertir, me signifier quand il me restera...
Le Président (M. Schneeberger) : Inquiétez-vous
pas, je vais vous arrêter, vous pouvez être sûr.
M.
Arseneau : Bien, je voudrais que vous m'arrêtiez juste avant
que je manque de temps, si vous le voulez bien, là...
Le Président (M. Schneeberger) :
Avant. Parfait.
M. Arseneau : ...parce que je veux
bien m'assurer qu'on puisse faire le tour de la question.
Et, encore une fois, la question, j'y reviens,
c'est sur le fait que, bon, il y a beaucoup de projets, nous dit-on, qui sont
bloqués par la réglementation actuelle et qu'on ne sait pas quelle est la
nature des obstacles qui se posent devant ces projets-là, à savoir s'ils sont
strictement bloqués parce que la réglementation est désuète ou parce qu'ils
n'ont pas... bien, «réglementation est désuète», oui, mais est-ce que la... En
fait, la question qui se pose, c'est : Est-ce que la réglementation correspond toujours à un consensus dans nos
communautés? Alors, si la réglementation peut évoluer, j'en suis, mais,
pour avoir participé à des discussions sur justement les règles du
vivre-ensemble dans une situation municipale
ou même de MRC, ces arbitrages-là sont extrêmement complexes. Et, si,
aujourd'hui, on a un cadre, bien, c'est... un cadre juridique, c'est
parce qu'on en a débattu longuement.
• (12 h 50) •
Et aujourd'hui ce qui m'irrite le plus
profondément comme législateur, c'est de dire qu'on n'en débatte pas
suffisamment ou en profondeur, qu'on n'ait pas l'analyse complète de la
situation puis qu'on ne puisse pas poser un diagnostic
sur la base de données probantes et de dire... et logiquement faire le
cheminement, avec la ministre et son équipe, et de dire : Bien,
évidemment, voici l'état de situation, voici les problèmes qu'on a identifiés,
voici comment on les a caractérisés, comment on les a
analysés, et voici les solutions logiques qui s'imposent, et c'est la raison
pour laquelle nous amenons ici une réglementation qui est nouvelle. Là, il y a
comme une espèce de solution fourre-tout qui dit : Bien, pour le nombre d'étages, bien, on n'aura plus à compter, pour le
revêtement, ce n'est pas important, les cases de stationnement, on s'en balance. Mais quoi d'autre encore? Quels sont les
autres aspects de la réglementation qui seront carrément bafoués
simplement parce qu'on a pour objectif de couper des rubans puis de faire
monter des projets?
Ce qu'on va créer, et ça, je le crains, dans
certains cas, c'est des projets immobiliers qui vont... avec lesquels on sera
pris pour des années et des années, des décennies et des décennies, avec ce que
ça comporte sur le plan, évidemment, esthétique, visuel, mais sur le plan, je
dirais aussi, du vivre-ensemble et avec les reculs que ça implique quant aux
règles qu'on s'était données pour, je dirais, progresser de façon à pouvoir
avoir un aménagement qui soit certes fonctionnel et agréable pour les gens,
mais qui puisse aussi procéder d'une certaine logique dans la mobilité, par
exemple, dans la passation des services de proximité, dans la vision et
l'approche d'aménagement d'un territoire et d'urbanisation qui nous permette
d'aller de façon cohérente vers un objectif commun qu'on s'est donné, des
villes plus vertes, par exemple.
Et moi, je ne suis pas certain, à l'heure
actuelle, que, dans la hâte puis dans... sous cette pression-là, en disant que c'est la crise et que tous les projets,
finalement, bons, moins bons ou carrément mauvais, doivent être adoptés parce qu'il y a cette espèce de raison d'État, là, de
construire pour construire, ça, pour moi, ça m'inquiète. Et je pense qu'il y a
des opinions, à l'heure actuelle, qu'on n'a pas entendues et qui... des voix
qui devraient être justement entendues publiquement, non pas seulement, là,
dans des chroniques ou dans des lettres publiées, des lettres ouvertes publiées
dans les journaux, mais dans un processus formel où on puisse faire la part des
choses. Et je pense que c'est notre objectif, c'est notre fonction, c'est notre
responsabilité de législateurs de le faire.
Alors, je
terminerai en mentionnant que, si j'appuie la proposition d'amendement de ma
collègue de Mille-Îles, c'est
dans un objectif de limiter les dommages. Cinq ans, c'est long, et surtout
lorsque l'on va voir la façon dont on peut exploiter au maximum... Et je ne veux pas prêter de mauvaises intentions
aux élus, mais je peux imaginer que certains promoteurs puissent
découvrir qu'il y a là quelque chose comme une voie rapide pour faire un peu du
n'importe quoi. Et plus on va avancer dans
le temps, une année, deux années, plus on va voir qu'il y a comme des choses
qui... qu'on ne pensait pas possibles qui peuvent maintenant le devenir
et qui peuvent être extrêmement dommageables pour nos municipalités, pour nos
villes et pour ceux et celles qui les habitent.
Alors,
là-dessus, M. le Président, j'ai complété ma... mon point de vue pour soutenir
l'amendement de ma collègue de Mille-Îles.
Le
Président (M. Schneeberger) : Merci. Merci beaucoup. Alors, nous allons... Ça va
comme ça? D'autres... Député de Laurier-Dorion.
M.
Fontecilla : Oui, M. le Président. Tout d'abord, j'aimerais
compléter une affirmation de notre collègue de Mille-Îles, là, qui nous
disait tantôt que personne n'a eu l'opportunité de s'exprimer publiquement sur
cette modification quand même majeure de notre cadre législatif, là, qui
dirige, en quelque sorte, le développement immobilier domiciliaire à
travers tout le Québec, là. En fait, oui, presque personne, mais il y a eu une
seule instance qui s'est prononcée par voie de communiqué de presse, c'est
l'Ordre des urbanistes, par voie de communiqué de presse, là, donc très... par
sa nature même, de façon très succincte. Et les autres, bien, c'est... les
autres, tout ce qu'on sait, c'est que, semble-t-il, les municipalités, on ne
sait pas lesquelles, ont appelé Mme la ministre de l'Habitation pour lui dire
qu'elles étaient d'accord. Moi, j'aimerais... et je pense que je ne suis pas le
seul, l'ensemble des parlementaires, ici, en commission, on aimerait pouvoir les voir, les entendre
directement, leur poser des questions et voir avec eux, là, si c'est la
meilleure façon d'orienter et d'accélérer le développement domiciliaire
du Québec.
Je reviens sur la notion de l'amendement de la
collègue de Mille-Îles, donc de limiter cette... comment dire, cette dérogation
généralisée au schéma d'urbanisme des différentes municipalités de cinq ans à
trois ans, là. Encore une fois, c'est un changement majeur, là, qui peut
produire des effets délétères dans les communautés locales.
La ministre dit vouloir combattre le phénomène
de «pas dans ma cour», et, comment dire, j'abonde dans le sens du collègue
député des Îles-de-la-Madeleine, là. Les «pas dans ma cour», il ne faut pas
oublier non plus que c'est des citoyens, des citoyennes qui se mobilisent de
façon démocratique pour exprimer leur voix. Et, des fois, ils portent des...
ils portent des motifs, des raisons ou des critiques, là, qui sont tout à fait,
tout à fait valables, et il est important
d'écouter ces gens-là. Je pense que, nous, en tant... ici, autour de la table,
là, l'ensemble des parlementaires, on est bien conscients que les
citoyens se mobilisent. Et, chaque fois, que ça arrive, bien, on est à l'écoute
de ce qu'ils ont à nous dire parce que c'est important de les écouter, parce
que c'est nos commettants, au final, là.
Donc, la ministre nous dit qu'il faut combattre
le phénomène des «pas dans ma cour» comme si, en quelque sorte, on était, comment dire, dans un conflit
avec... un conflit musclé, dirais-je même, là, avec des citoyens qui ne font qu'exercer
leur devoir, leur prérogative démocratique. Donc, j'aimerais un peu, comment
dire, dégonfler ou baisser le ton, là, par
rapport à ces mobilisations citoyennes qu'on décrit souvent comme des
phénomènes de «pas dans ma cour», mais rappelons-nous que c'est des
personnes qui ne font qu'exercer leur prérogative, leur devoir citoyen.
Ceci étant dit, là,
l'ampleur de cet amendement-là est tellement... est tellement importante, là,
que la ministre aurait pu parfaitement
considérer la possibilité d'inscrire, dans son amendement, un trois ans. Et, à
la limite, je lui dis, je lui suggère ça comme ça, ce serait peut-être à
étudier, c'est donner la capacité de renouveler pour un deux ans
supplémentaire, par voie réglementaire, par exemple, afin de ne pas être
obligés de passer par un nouveau projet de loi,
et renouveler, par voie réglementaire, cette disposition-là pour se permettre,
après trois ans, là, de voir ce qui a été fait, est-ce que ça a produit,
effectivement, les effets escomptés, est-ce qu'on a produit des nouveaux
logements, des nouveaux projets d'habitation et quelle
est la qualité de ces projets-là, quel est l'état de... les oppositions ou les
comportements des différentes municipalités par rapport à ces nouveaux pouvoirs
et constater que peut-être on est allés trop loin et que c'est le temps de
mettre un frein, et de ne pas renouveler, et ne pas aller jusqu'à
cinq ans, justement, pour lui donner la capacité de moduler l'application
de cette règle-là. Parce que tout ce qui va être fait à partir de la sanction de cette loi-là, avec l'article 37.2, jusque
dans cinq ans, ça a été amplement dit par différents collègues, là, mais on va en vivre... on va vivre les
conséquences pendant plusieurs décennies, là. Et on sait qu'après 35,
40 ans, là, un édifice, là, un bâtiment, là, bon, bien, on doit considérer
à soit le rénover ou soit le démolir. Mais 40 ans, c'est très... Et,
si on décide de le renouveler... de le
rénover, bien, on a pour 80 ans. Donc, on va vivre avec les conséquences
pendant très longtemps, les conséquences qui peuvent être négatives, là.
Je ne dis pas que ça va être nécessairement négatif, mais la ministre devrait
se donner l'opportunité, donner l'opportunité à son ministère d'évaluer cette
mesure-là après trois ans, quitte à se... encore une fois, à se donner, par
voie réglementaire, l'habilitation, là, pour renouveler pour un autre deux ans, là, le temps que le plan d'aménagement...
au schéma d'aménagement, là, soit adopté par les différentes
municipalités.
Mais ici...
Le Président (M.
Schneeberger) : M. le député de Laurier-Dorion, compte tenu de
l'heure, on... nous allons suspendre pour la pause midi. Nous reprenons à
14 heures.
(Suspension de la séance à
13 heures)
(Reprise à 14 h 38)
Le Président (M.
Schneeberger) : Alors, bon après-midi à tous. Nous reprenons les travaux.
Alors, suite aux discussions, et c'est pour ça que la commission a tardé à
réouvrir cet après-midi, il y a eu des discussions, alors, Mme la députée de Mille-Îles, suite aux
discussions, je pense que vous souhaitez retirer le sous-amendement déposé en avant-midi.
Alors, j'ai besoin du consentement de la table.
Des voix : Consentement.
Le Président (M.
Schneeberger) : Consentement. Et là vous allez redéposer un nouveau
sous-amendement. Alors, on vous écoute.
Mme Dufour : Alors,
M. le Président, dans l'article 37.2 — c'est toujours un
sous-amendement — donc :
1° remplacer, dans le
premier alinéa, «cinq ans» par «trois ans» partout où cela se trouve;
2° ajouter, à la fin,
l'alinéa suivant:
«La ministre
responsable de l'habitation peut prolonger le terme prévu au premier alinéa
pour une période n'excédant pas deux ans.»
Le Président (M.
Schneeberger) : Merci beaucoup.
Mme Dufour : Donc
là, ça ouvre le débat.
Le Président (M.
Schneeberger) : O.K. Alors, parfait. Est-ce qu'il y a des discussions
suite au dépôt du sous-amendement?
Mme Dufour :
...
Le Président (M.
Schneeberger) : Micro. Voilà.
Mme Dufour : Parfait.
Je peux peut-être juste expliquer. Dans le fond, tout à l'heure, j'avais déposé
un amendement pour réduire le terme à trois ans, le terme s'appliquerait, puis,
lors des échanges avec le député de Laurier-Dorion, il a été suggéré de donner
une possibilité de le prolonger pour, finalement, arriver aux cinq ans qui sont
visés par la ministre, mais que ce ne soit pas automatique. Et la ministre a
accepté et offert, là, dans le fond, de... c'est
ça, d'aller de l'avant avec cette proposition-là, donc c'est pour ça que j'ai
retiré et redéposé un nouveau sous-amendement.
• (14 h 40) •
Le Président (M.
Schneeberger) : Parfait.
Mme Dufour : Donc,
ça ouvre...
Le Président (M.
Schneeberger) : Alors, c'est bien correct comme ça. Alors, tout le
monde semble satisfait. Alors, à ce moment-là, nous allons mettre aux voix le
sous-amendement.
Mme Dufour : Attendez, M. le
Président.
Le Président (M.
Schneeberger) : Oui, Mme la députée de Mille-Îles.
Mme Dufour : Oui.
J'avais quand même des points que je n'avais pas pu exprimer tout à l'heure et
je voudrais juste pouvoir les dire, parce qu'un coup qu'on va avoir voté, moi,
il ne me restera plus de temps après ça pour
parler. Donc, j'aimerais quand même pouvoir le dire, parce que c'était le temps
du sous-amendement précédent, puis ça, il m'en restait.
Je
voudrais juste mentionner... Le collègue des Îles-de-la-Madeleine a
mentionné ce matin que c'est un arbitrage complexe, mettre en place des règlements de zonage. Faire un plan
d'urbanisme, ça prend du temps. Et je l'ai vécu, là, à... je l'ai fait
pour la ville de Laval, ça a pris trois à quatre ans, toutes les études qui ont
été nécessaires. C'est sûr que c'était une
refonte complète des règlements d'urbanisme, mais il y a eu énormément d'études
afin de déterminer c'étaient quoi, les meilleures densités, les
meilleures hauteurs, selon les secteurs, le type de volumétrie existante puis
jusqu'où on pouvait aller sans enfreindre,
dans le fond, le droit à avoir du soleil, à avoir... ne pas vivre des vents à
n'en plus finir, parce que, des fois,
certaines tours créent du vent, etc. Donc, tout ça a nécessité beaucoup,
beaucoup, beaucoup d'études pour en
arriver là. Alors, c'est certain, puis je dois le dire, que de ne plus avoir ce
contrôle-là, de permettre qu'on passe par-dessus ces contrôles-là, c'est
quand même inquiétant.
Et je voudrais
souligner que j'ai fait une tournée des promoteurs d'un certain secteur pour
aller capter, un peu comme la députée de
Labelle l'a fait, mais à plus petite échelle, aller capter c'étaient quoi, les
enjeux principaux. Puis c'est vrai qu'il y a des enjeux avec les villes, puis
je l'ai vécu, comme conseillère municipale, où j'ai vu que ce n'est pas
toujours facile, mais ce qu'on m'a le plus mentionné cet été, lorsque j'ai
rencontré les promoteurs, c'est que ce n'est pas
ça, actuellement, qui retarde la majorité des projets. Même, d'ailleurs, j'ai
rencontré des promoteurs qui me disaient : Mon projet, je l'ai,
l'autorisation... puis j'en ai rencontré plusieurs, là, qui m'ont dit ça, ils
ont les autorisations, mais ils ne vont pas de l'avant. Pourquoi? Parce que le
marché, actuellement, fait en sorte que c'est trop d'argent investi sans avoir l'assurance qu'ils vont vendre leurs
unités ou les louer, mais c'est aussi parce que l'équité qui est demandée
par les banques, avec les taux d'intérêt actuels, fait en sorte que c'est trop
d'argent qui est mis dans les projets, que, s'ils le mettent dans un projet,
bien, c'est un autre projet qui ne pourra pas se faire. Ils sont obligés de
faire des choix. Et c'est vraiment... Ça a doublé, ce n'est pas compliqué, là,
ça a doublé, l'équité, actuellement, par rapport à ce que c'était il y a deux,
trois ans.
Et c'est une bonne
partie de ce qui explique pourquoi, il y a deux ans, on construisait
68 000 logements puis que, cette année, on n'en construira même pas
40 000. Ce n'est pas que c'est dans la mélasse dans les villes, ce n'est pas ce que les... ce n'est pas la majorité, du
moins. Puis, vraiment, ils m'en ont parlé beaucoup, de ça. Alors, même avec
l'amendement 37.2, là, il y a quand même beaucoup de projets qui ne
sortiront pas de terre parce que les promoteurs, ils ne peuvent... juste
financièrement, ça n'arrive... ils n'arrivent pas, donc.
Puis
peut-être une petite note, là, que je voulais absolument corriger, parce que le
député de Laurier-Dorion a parlé de
bâtiments qui duraient 40 ans. C'est beaucoup plus long que ça, là, et je
pense que, tu sais, le... Maxime Pedneaud-Jobin a parlé de 100 ans
ce matin dans sa chronique; c'est beaucoup plus près de ça. Donc, je voulais
juste le préciser, là, parce que des bâtiments, quand ils sont construits...
quand ils sont bien construits, ils sont faits pour durer facilement 100 ans en ayant les rénovations nécessaires
en cours de route, l'entretien nécessaire. Donc, ça fait le tour de ce que je
voulais mentionner. M. le Président, là, j'avais besoin de corriger ces
faits-là. Merci.
Le Président (M.
Schneeberger) : Merci beaucoup pour les explications. Alors, à ce
moment-là, nous allons mettre aux voix le sous-amendement de
l'article 37.2. Est-ce que le sous-amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Schneeberger) : Adopté.
Parfait. Alors, maintenant, nous en sommes au 37.2 tel qu'adopté...
Une voix :
...
Le
Président (M. Schneeberger) :
Tel qu'amendé, voyons, excusez-moi. Voilà. Une chance que vous suivez, hein?
C'est le fun, hein?
Une voix : J'essaie,
j'essaie.
Le Président (M.
Schneeberger) : Alors, nous en sommes à l'adoption de l'amendement qui
introduit l'article 37.2. Est-ce que 37.2 est adopté?
Mme Dufour : Vote
par appel nominal, s'il vous plaît.
Le Président (M.
Schneeberger) : Vote par appel nominal. M. le secrétaire.
Le
Secrétaire : Pour, contre, abstention. Mme Duranceau (Bertrand)?
Mme
Duranceau : Pour.
Le Secrétaire : Mme Jeannotte
(Labelle)?
Mme Jeannotte :
Pour.
Le Secrétaire : M. Gagnon
(Jonquière)?
M. Gagnon : Pour.
Le Secrétaire : M. Girard
(Lac-Saint-Jean)?
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Pour.
Le Secrétaire : M. Rivest
(Côte-du-Sud)?
M. Rivest : Pour.
Le Secrétaire : Mme Dufour
(Mille-Îles)?
Mme Dufour : Contre.
Le Secrétaire : Mme Prass
(D'Arcy-McGee)?
Mme Prass : Contre.
Le Secrétaire : M. Fontecilla
(Laurier-Dorion)?
M. Fontecilla : Contre.
Le Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
Le Président (M. Schneeberger) : Abstention.
Le Secrétaire : Adopté.
Le
Président (M. Schneeberger) : Alors, l'article est adopté. Maintenant, si je
suis bien la procédure, je pense que nous changeons de thème, le
thème 5... le bloc 5, c'est bien ça?
Mme Duranceau : Effectivement.
Le
Président (M. Schneeberger) : Bon, alors, si nous en sommes au bloc V, nous
allons débuter par l'article 7.
Mme Duranceau : Effectivement. Oui.
Donc, l'article 7. Alors :
Le Code civil
est modifié par l'insertion, après l'article 1978, de la sous-location...
de la sous-location suivante :
«8.1. — De la cession du bail
«1978.1.
Lorsque l'avis de cession prévu à l'article 1870 concerne un bail de
logement, il doit indiquer la date de cession prévue par le locataire.
«1978.2. Le locateur qui est avisé de
l'intention du locataire de céder le bail peut refuser d'y consentir pour un motif autre qu'un motif sérieux visé au premier
alinéa de l'article 1871. Le bail est alors résilié à la date de cession
indiquée dans l'avis transmis par le locataire.»
Ça va? O.K. Alors, bon, bien, écoutez, je pense
que ça, il y a déjà eu beaucoup de choses dites à ce sujet-là. Ce que je
pourrais venir peut-être préciser ici, c'est que c'est un ajout. Donc, déjà, on
prévoyait deux situations où un locataire pouvait se départir de ses
obligations ou pas, là, relatives à un bail. Et, quand un locataire décidait de
céder son bail, le propriétaire pouvait
accepter la cession, il pouvait aussi refuser la cession dans le cas où il y
avait des motifs sérieux, souvent, si la jouissance paisible des lieux
allait être remise en cause ou si le nouveau locataire, pour des raisons
financières, là, n'allait pas être en mesure de payer son loyer.
Et là ce qu'on vient ajouter, c'est de
permettre, par exemple, à un propriétaire de duplex de choisir le locataire qui viendra s'installer au-dessus de sa
tête, donc. Et, si, dans ce cas-là, le propriétaire décide, donc, de refuser la
cession de bail pour décider qui viendra habiter en haut de sa tête, bien, il
doit, par ailleurs, résilier le bail, donc décharger le locataire qui
quitte de son obligation. Alors, du point de vue du locataire qui quitte, il
est déchargé de ses obligations, c'est ce qui est souhaité par cette mesure-là,
et, du point de vue du locateur, bien, il pourra choisir qui va habiter
au-dessus de sa tête dans l'immeuble qu'il détient. Alors, voilà.
Le Président (M. Schneeberger) : Merci
beaucoup pour les explications. Oui, députée de D'Arcy-McGee.
Mme Prass : Oui, merci. Donc, comme
vous l'avez mentionné, c'est un article qui a fait beaucoup de bruit dans les
médias, et on a entendu le premier ministre suite aux chiffres qui sont sortis
sur l'itinérance, et la première raison pour cette
itinérance étant l'expulsion des logements. Donc, le 14 septembre, le
premier ministre dit, à propos de cet
article, de la cession de bail, qu'«on n'exclut rien et que nous sommes ouverts
aux propositions». La ministre a dit la même chose le... 16 août,
excusez-moi, qu'elle était ouverte à des modifications. Et là, le
30 septembre, on a un article avec une
citation de la ministre qui dit qu'elle reste inébranlable sur la cessation de
bail. Donc, on parle ici d'un droit acquis qui existe depuis 50 ans
cette année, depuis 1973, et moi, je suis curieuse à savoir quelle est la motivation de la ministre derrière cet article,
compte tenu qu'on estime que c'est 1 % ou 2 % des baux signés chaque
année qui passent par une cessation de bail. Et on comprend également
que c'est un des rares mécanismes que les locataires ont pour, justement,
essayer de faire en sorte que les prix des logements n'augmentent pas de façon
faramineuse.
• (14 h 50) •
Donc là, je vais vous lire, justement, un des
mémoires qui a été déposé dans le cadre de cette commission, pour ce projet de loi, du Regroupement des comités
logement et associations de locataires du Québec. Donc, je cite leur
mémoire en faisant référence à l'article 7 : «Cet article a été fort
mal accueilli par les locataires car les raisons mises de l'avant pour
justifier le retrait de ce droit acquis ne tiennent pas la route. Le cabinet de
la ministre de l'Habitation dit vouloir plus de latitude au locateur lors de la
[cessation] de bail. Cette explication est irrecevable car elle revient à
encourager les pratiques discriminatoires des locateurs et des hausses de loyer
abusives en permettant ces pratiques lors de la cession de bail. Or, les
locateurs ne possèdent pas de droit à la discrimination et aux hausses
abusives. Le gouvernement devrait encourager la lutte contre la discrimination
et faciliter la [cessation] de bail plutôt que de mettre fin à cette pratique honorable.
«La [cessation] de bail
n'est pas un mécanisme très populaire. Une infime minorité, que nous
estimons à 1 % ou 2 %, des baux signés chaque année passent par une
[cessation] de bail. Ainsi, en 2022, le Tribunal
administratif du logement a rendu
seulement 16 jugements relatifs à une demande d'autorisation d'une
[cessation] de bail, un nombre qui pourrait être à la baisse cette
année. Il n'en demeure pas moins que les locataires du Québec peuvent y avoir recours pour empêcher les
propriétaires d'imposer des hausses abusives en changement de locataire et
pour contourner la discrimination
omniprésente dans l'accès au logement, surtout en période de pénurie de
logements.
«Ce qui est
au centre de la [cessation] de bail, c'est la discrimination que subissent les
locataires à la recherche d'un logement. Donc, il y a deux types de
discrimination à l'oeuvre, une discrimination statistique et une discrimination
fondée sur l'intention malveillante qui
implique des préjugés personnels. Un contexte de pénurie de logements encourage
la discrimination, très souvent de nature économique, et permet au
propriétaire-bailleur d'être sélectif et d'accélérer les pratiques
discriminatoires comme l'augmentation des loyers.»
Et justement, dans la dernière année, on a vu
une augmentation de 14 % des loyers sur l'île de Montréal, et on se
comprend que les salaires n'ont pas augmenté de 14 % dans la dernière
année. Donc, difficile de voir comment on veut enlever un des rares outils
contre les abus que les locataires ont... auxquels ils ont droit. Surtout que
c'est utilisé très peu, comme on a dit,
1 % ou 2 % des baux qui sont signés à chaque année. Donc, pourquoi
vouloir s'attaquer à un outil que les
locataires ont pour, justement, essayer de contrer des hausses fulgurantes des
loyers? Donc, je voudrais savoir quelle est la motivation de la ministre
avec cet article.
Le Président (M. Schneeberger) : Oui.
Alors, Mme la ministre.
Mme Duranceau : Oui, merci. Je le
répète, là, on n'a rien enlevé au locataire. Le Locataire qui souhaite quitter
les lieux va être en mesure de le faire puis il a une option additionnelle, il
a une option additionnelle : dans un cas où
le propriétaire n'est pas d'accord avec la cession de bail, bien, il va
résilier le bail. Donc, le locataire qui veut quitter un logement a une
option de plus. Donc, on n'enlève rien au locataire.
Ce qu'on vient faire, c'est que... On a un
paquet de petits propriétaires, au Québec, là, qui ont des triplex, des duplex,
puis qui veulent... Tu sais, je pense que c'est très raisonnable que quelqu'un
qui a un duplex veuille choisir qui va habiter au-dessus de sa tête puis ne
veuille pas qu'un locataire qui quitte vende son bail à quelqu'un d'autre ou
cède son bail sans avoir un mot à dire, sans pouvoir dire : Aïe! Qui va
habiter au-dessus de ma tête? Alors, c'est ça qu'on vient corriger. Je ne suis
pas en train de m'attaquer et de vouloir nuire à qui que ce soit, je viens
juste corriger une anomalie qui existait dans la loi. Alors, on vient corriger
cet élément-là et on n'enlève rien au locataire.
Puis, je le répète depuis plusieurs mois, le
gros enjeu en ce moment, c'est le manque d'offre de logements. Si on avait une offre qui est suffisante, bien, ce
que vous décrivez comme potentielle sauvegarde, là, de redonner au suivant,
bien, ce ne serait pas soulevé parce qu'on
aurait une offre suffisante. Par ailleurs, bien, on va discuter de d'autres amendements
qui sont déposés dans le projet de loi en lien avec la conformité relative à la
clause G puis d'indiquer quel est le
loyer le plus bas payé dans l'année précédente... quel était le loyer
payé dans l'année précédente. Alors, je pense que l'ensemble des mesures, dans
le thème 5, qui sont proposées viennent circonscrire la situation, là,
puis adresser la problématique que vous soulevez.
Mme Prass : ...on se comprend que
les duplex ne représentent pas la majorité des baux, c'est surtout les
appartements, et également que c'est pour des périodes écourtées. Quand on fait
une cessation de bail, c'est pour une période de temps qui reste dans le bail
d'une année. Donc, ce n'est pas qu'on est pris avec cette personne, qu'on est
pris avec ce locataire à long terme, et ce n'est pas parce qu'on ne fait pas
confiance à la personne qui a signé le bail original que la personne à laquelle
ils vont faire le transfert ne sera pas respectueuse des lieux de la même
façon.
Donc, c'est
un petit peu de la discrimination, ce que... je trouve, votre explication, dans
le sens que, bien, il y a certaines
personnes qu'on veut qui habitent au-dessus de nous puis certaines personnes
qu'on ne veut pas qui habitent au-dessus de nous, mais on ne fait pas la
distinction à savoir laquelle ce serait. Également, là, on parle de motif
sérieux, tandis qu'auparavant il y avait quand même un recours pour aller
devant le Tribunal administratif du logement. Et là tout
ce que ça prend, un motif sérieux, et on ne sait pas ce que c'est, comment ça
va être défini, ce terme de «motif sérieux».
Je voudrais
vous lire un autre passage d'un mémoire qui a été déposé dans cette commission
sur ce projet de loi, de l'Association des juristes progressistes, et je
cite : «Le droit de céder un bail n'est pas sans limites et fait l'objet
d'une abondante couverture sur le tribunal au fil du temps. Actuellement,
l'article 1871 du Code [...] du Québec prévoit que le locataire peut refuser
une [cessation] de bail pour des motifs sérieux. Les propriétaires sont
autorisés à procéder à une enquête sur la
solvabilité de locataires et de faire toute vérification nécessaire. L'accès
aux antécédents des cessionnaires est devenu facile, rapide et peut se
faire via des plateformes en ligne ou même par des agences créées à cet effet.
Ces mesures sont suffisantes afin de laisser la latitude au locateur de
sélectionner un locataire qui serait capable d'assumer toutes les obligations
découlant du bail de logement. Les raisons qui amènent un locataire à refuser
la cession doivent être objectives, raisonnables, réelles et sérieuses, et
l'utilisation du terme "sérieux" par le législateur laisse clairement
transpirer l'intention de ce dernier de restreindre la marge de manoeuvre du
locataire. La proposition vient essentiellement anéantir le droit à la
[cessation] de bail et dénuer de tout sens les mécanismes de la [cessation] de
bail.
«Nous croyons
par ailleurs que la proposition faite n'est pas appuyée d'une analyse
approfondie du mécanisme et des données disponibles à cet effet. Encore
une fois, le rapport de gestion 2021‑2022 du Tribunal administratif du
logement est silencieux sur le nombre de demandes introduites par les
locataires afin de statuer sur la cession de bail. Plus encore, ces
restrictions au droit à la [cessation] de bail sont contraires à des années de
décisions établies en la matière et risquent de déstabiliser un courant
jurisprudentiel bien établi, consolidé et unanime.
«L'adoption de cet article...», excusez-moi, «les
titulaires des...» Oui, un instant, je vais juste revenir. Donc : «Suivant
l'adoption de cet article, les titulaires de baux commerciaux bénéficieront de
plus de droits en matière de [cessation] de bail que les titulaires de baux de
logement, les locataires. Il nous semble évident qu'il s'agit d'une anomalie et
d'une erreur juridique qui favorise ainsi les entreprises au détriment des
locataires. Il faut tout de même ajouter qu'il est connu et reconnu que la
[cessation] de bail est devenue avec le temps un mécanisme de lutte contre la spéculation immobilière et les effets
pernicieux de la crise du logement. La [cessation] de bail est un moyen pour
les personnes issues de groupes
marginalisés de céder leur bail à des membres de leur propre communauté, des
personnes qui autrement seraient victimes de discrimination lorsqu'elles
cherchent un logement sur le marché de l'immobilier.»
Et je voudrais
mentionner aujourd'hui la question, durant la période de questions, de notre
collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques, que j'ai trouvée vraiment poignante, dans le sens qu'une personne...
voici une personne qui a vécu cette
expérience-là et qui vient vous témoigner que, si ce n'était pas pour ce
mécanisme, il y aurait la possibilité
qu'elle se serait trouvée dans la rue.
Donc, je trouve difficile, encore une fois, avec... le fait que, là, les
locataires commerciaux auront toujours droit... auront toujours accès à
cette mécanique, mais... et que ça... encore une fois, ça représente un très
petit nombre de bails au cours... de bails signés au cours de l'année. Donc,
j'ai quand même de la difficulté à
comprendre. À part le fait que quelqu'un ne veut pas qu'une personne en
particulier habite en haut dans un duplex,
que je trouve, honnêtement, un petit peu raide, comme réponse, je ne vois pas
en quoi ça va avoir un effet vraiment sur la crise du logement quand,
justement, c'est une façon pour des gens qui se sentent marginalisés et
discriminés d'avoir une autre option, un
outil qui est à leur disposition justement pour faire face à la crise du
logement et de l'augmentation des loyers.
• (15 heures) •
Mme Jeannotte : ...
Le Président (M. Schneeberger) : Comment?
Mme Jeannotte : Est-ce que je
pourrais juste rebondir rapidement, rapidement?
Le Président (M. Schneeberger) : Bien,
vous avez... bien, ça va dépendre. Est-ce que...
Mme Jeannotte : Si c'est correct?
Le Président (M. Schneeberger) : Je
veux juste savoir si la députée de D'Arcy-McGee avait fini.
Mme Prass : Oui.
Le Président (M. Schneeberger) : O.K.
Parfait. Alors, à ce moment-là, oui, vous avez le droit.
Mme Jeannotte : Parce que, juste à
votre argument de dire...
Le Président (M. Schneeberger) : Mme
la députée de Labelle.
Mme Jeannotte : Merci beaucoup, M.
le Président. Juste à votre argument de dire qu'on peut juste... ça donne juste le choix au propriétaire de choisir,
j'aimerais juste amener un autre élément pour votre gouverne. Parce que j'ai eu la chance de rencontrer et des
propriétaires et des locataires. C'est toujours un contrat, hein, un bail,
justement, ça le dit. Puis, en règle générale, il y a une bonne entente
entre le propriétaire et le locataire, mais ce qu'on oublie souvent, c'est que, lorsqu'il y a une sous-location,
le sous-locateur n'a pas la conversation avec le propriétaire sur des règlements comme, par exemple, les animaux, le
stationnement, les interdictions de fumer, et ça crée un impact sur les autres
locataires, qui, eux, sont en colère. Parce que cette sous-location là, le
sous-locataire, lui, il n'était pas au courant
du contrat initial qu'il y avait eu. Donc, vous comprenez pourquoi que, là, on
appelle ça un... c'est là où le droit du propriétaire prend tout son
sens, qu'il a le droit d'avoir un contrat avec celui qui signe. Me suivez-vous?
Est-ce que je suis claire?
Mme Prass : Oui, je vous suis tout à
fait. Sauf que, quand la personne signe le bail, la cessation de bail, la
deuxième personne qui arrive, quand elle signe le bail, donc, elle est obligée
de suivre, justement, tout ce qui est... bien...
Mme Jeannotte : C'est ça. Ce n'est
pas lui, le propriétaire. Ce que je vous explique...
Mme Prass : Non, mais... non, non,
mais, quand on signe un bail, ce n'est pas question de propriétaire. Quand on signe un bail, on s'engage à... que ce
soit de ne pas fumer, pas d'animaux, etc. Donc, quand la deuxième personne
arrive puis qu'ils font la cessation de bail, eux, ils doivent également,
oui...
Des voix : ...
Mme Prass : Non. Ils doivent
également suivre les règles dans le bail. Ce n'est pas qu'on donne de l'argent
à quelqu'un, et ensuite il n'y a plus de contrat qui nous... auquel on est
soumis.
Mme Jeannotte : Moi, j'ai eu la
chance d'écouter de part et d'autre, et c'est ce qu'on m'a dit du côté des
propriétaires. Et le sous-locateur n'a pas la même relation, lui, avec le
propriétaire. L'entente initiale, elle n'est pas suivie. C'est juste un
argument de plus que je voulais vous amener parce que je l'ai entendu. C'est
juste ça. Merci.
Le Président (M. Schneeberger) : Députée
de Labelle puis députée de D'Arcy-McGee, s'il vous plaît, juste ne pas vous
interpeler à chaque fois, parce que, là, ça devient dur à suivre.
Mme Jeannotte : C'est bon.
Le
Président (M. Schneeberger) : Alors, un à la fois, s'il vous plaît, sinon
j'interviens. Alors, c'est pour vous.
Mme Jeannotte : Merci.
Le Président (M. Schneeberger) :
Alors, je pense que Mme la ministre voulait intervenir.
Mme Duranceau : Encore là, le
propriétaire du duplex, c'est à lui de choisir puis d'avoir la discussion avec le prochain locataire. Ce n'est pas au locataire
qui quitte et qui souhaite se départir de ses obligations en vertu du bail de
décider ce qui va se passer pour les cinq, 10, 15, 20 prochaines années en
haut du duplex. Il s'en va, lui, ça ne le regarde plus. Celui qui a le droit de choisir ce qui se
passe dans son duplex ou dans son triplex, c'est le propriétaire du duplex
ou du triplex. C'est juste ça qu'on dit.
Le locataire qui veut quitter, il quitte, il se
départit de ses obligations, ça fait partie du passé, puis lui, il passe à
d'autres choses, mais la personne qui a tout mis son argent de côté pour
investir pour sa retraite dans son duplex ou dans
son triplex, je pense que c'est raisonnable de dire que c'est cette personne-là
qui a le droit de choisir ce qui va se passer en haut de sa tête.
Et actuellement on voit plein de cas où il y a
des histoires d'horreur : les locataires quittent, ils vendent leur bail, ils font de l'argent sur le dos du
propriétaire, qui... Bien, vous pouvez en douter, là, mais on les a vues, ces
histoires-là. Donc, ça n'a pas lieu.
Il y a des injustices de tous les côtés, là, il faut avoir un équilibre. Et
puis cette mesure-là, elle vient rétablir l'équilibre dans ces
situations-là bien précises.
Et puis je tiens... Là, personnellement, je ne
fais pas reposer le règlement de la crise du logement sur cette mesure-là, je
viens simplement, dans ce projet de loi ci, corriger une anomalie. Ce n'est pas
ça qui va régler la crise du logement. Il faudrait arrêter de faire reposer la
crise du logement sur les cessions de bail puis sur les propriétaires de duplex puis de triplex qui souhaitent décider
ce qui va se passer en haut de leur tête. C'est juste ça que je dis, ou que
je m'évertue à dire, ou que j'essaie de dire
depuis plusieurs semaines et mois, mais le discours s'en va dans d'autres sens,
là.
Ceci dit, je pense que ça, c'est clair, puis il
n'y a personne qui peut m'accuser de ne pas être raisonnable dans ce
raisonnement-là.
Mme Prass : Vous parlez de plein de
cas où il y a eu des débrayages, disons. Est-ce que vous avez des chiffres à
cet effet-là? Parce que, quand on dit que ça représente... les cessations de
bail représentent 1 % ou 2 % des baux...
et vous parlez aussi de gens qui se font de l'argent sur le dos des
propriétaires. Avez-vous des chiffres à cet égard-là?
Mme Duranceau : Bien, je suis bien
certaine qu'ils ne déclarent pas ça dans leurs déclarations d'impôt. Alors, non, je n'ai pas des chiffres. On a des
statistiques, au même titre qu'il y a des statistiques à plein d'égards en
matière de logement. Bien, ce qu'on nous dit du côté des propriétaires,
c'est que c'était une mesure qui était... qui était peu utilisée par le passé, mais que, depuis deux...
deux ans, même, c'est très fréquent, très fréquent, jusqu'à 50 % des
renouvellements de baux, dans le cas de certains propriétaires à qui j'ai
parlé, où il y a des histoires de cession de bail.
Alors, ce n'est pas ça, l'outil, ce n'était pas
ça. Un locataire veut se départir de ses obligations, il y a des conditions
dans lesquelles ils peuvent le faire. On vient de lui en donner une nouvelle,
une nouvelle option : Tu peux quitter,
tu auras... ta cession est refusée, mais tes obligations sont... ton bail est
résilié. Alors, qu'est-ce que tu veux de plus, là? C'est...
Mme
Prass : Et là vous dites que... Bien, parce qu'aussi, je
suis curieuse, vous continuez de parler de duplex et de triplex, et,
encore une fois, il y a plein d'appartements...
Mme Duranceau : ...majorité des
logements locatifs au Québec, là.
Mme Prass : Bien, il y a des
appartements aussi. Je pense que...
Mme Duranceau : Ça fait partie des
appartements, là. Un haut de duplex, c'est un appartement.
Mme Prass : Oui, mais des
appartements dans un immeuble... Quand vous dites : On ne veut pas... On
veut savoir qui va habiter en haut de nous... mais, quand on habite dans un
immeuble où il y a 50 ou 100 logements, ce n'est pas la même réalité. Je
veux dire, chacun a le droit de se retrouver un logement. Puis, si ça a
augmenté dans les deux, trois dernières
années, c'est parce que, justement, c'est un outil pour contrer les prix de
logements qui n'arrêtent d'augmenter. Donc, si c'est utilisé davantage,
c'est parce que la situation fait en sorte que, justement, c'est un des rares
outils où les personnes peuvent trouver des loyers à prix raisonnable, qui
n'augmentent pas tout le temps.
Donc, je
trouve que... bien, je trouve que votre argument ne tient pas debout, dans le
sens que, si ça a augmenté, c'est parce que c'est un outil qui est... qui est
efficace et nécessaire, donc, et là vous voulez justement le soustraire,
à un certain point, donc.
Mme Duranceau : Ce n'est pas le bon
outil, ce n'est pas l'outil pour exercer un contrôle de loyers. Pour le
contrôle des loyers, on a le Tribunal administratif du logement, on a la clause
G. On va discuter de pénalités pour une clause G qui n'est pas respectée. C'est
ça pour faire... pour contrôler les loyers. La cession de bail, c'est un outil quand un locataire veut quitter et se départir de ses
obligations, il y a trois... il y a trois options qui s'offrent à lui. Alors,
ce n'est pas un outil de contrôle des loyers, cette histoire-là. Je comprends
que les locataires l'utilisent pour ça, mais ce n'est pas ça, le bon
outil.
Mme Prass : Mais là vous... vous
mentionnez... excusez-moi, j'ai perdu mon fil, vous mentionnez... Oui. Donc, encore une fois, vous parlez des
locataires... vous parlez des... des propriétaires. On entend très rarement, de
ce côté de la table, qu'on parle des droits des locataires, seulement
des propriétaires. Parce que, dans votre argument, c'est les locateurs... c'est
les propriétaires qui ne veulent pas se mettre dans une situation où,
peut-être, il y aurait des dégâts parce qu'on ne connaît pas la personne qui a
repris le logement, mais, encore une fois, vous ne parlez pas des locataires
qui, eux, ont de la difficulté à trouver des logements à prix abordable et qui
font en sorte que... si vous voulez l'admettre ou non, on le dit, puis je peux
vous lire une douzaine de citations de mémoires qui ont été déposés, qui disent
que, justement, c'est un outil pour... contre les abus d'augmentation de loyer.
Donc, je trouve que vous représentez un certain
point de vue, et vous n'êtes pas... vous ne faites pas la part des choses pour
regarder les deux côtés de la médaille. Vous vous êtes vraiment focussée sur
les propriétaires, et leurs droits, et ce qui les importe plutôt que, encore
une fois, ceux qui sont dans le coeur d'une crise du logement, donc les gens
qui sont vulnérables et qui ont de la difficulté à trouver des logements à prix
raisonnable.
• (15 h 10) •
Mme Duranceau : Écoutez, c'est une
mesure... Les mesures d'éviction... vous n'étiez peut-être pas à l'écoute, là,
quand on a parlé des mesures d'éviction en début d'étude détaillée, mais les
mesures d'éviction, ça visait à aider les locataires. Et là cette mesure-ci, c'est
un juste équilibre entre les deux, parce que les locataires ont une option de
plus quand ils souhaitent se départir de leurs obligations. La cession de bail,
il ne faut pas l'oublier, c'est un outil pour se départir d'une obligation en
vertu d'un bail, ce n'est pas un outil de contrôle de loyer. Alors, le locataire qui veut se départir de son obligation
en vertu du bail a une nouvelle option. Si le propriétaire refuse, eh bien,
il peut résilier le bail, et le locataire s'en trouve donc mieux parce que son
obligation... son obligation est retirée.
Et, je le répète, la cession de bail, ce n'est
pas l'outil de contrôle de loyer. On va, dans le thème 5, aborder d'autres
éléments qui viennent, justement, retravailler la notion de contrôle des loyers
entre deux locataires. Et, je répète,
l'instance qui est là pour contrôler les loyers, c'est le Tribunal administratif du logement, ce n'est pas la cession de bail entre
deux locataires.
Mme Prass : O.K. Là, je vais lire un
autre passage d'un autre mémoire qui a été déposé à la commission, qui
dit : «...la [cessation] de bail, qui est un des seuls instruments dont
disposent collectivement les locataires pour empêcher les augmentations
abusives lors du changement de locataire, au moins dans une partie des logements
concernés. Le Code civil prévoit présentement que les propriétaires ne peuvent
refuser de consentir à une [cessation] sans un motif sérieux. Le projet de loi
vient affirmer que, dorénavant, ils et elles pourront le faire pour un motif
autre qu'un motif sérieux. Tout refus pourrait directement mettre fin au bail.
«L'expérience démontre que
c'est à l'occasion des déménagements que les hausses de loyers sont plus
marquées. Dans l'ensemble des centres urbains du Québec, les loyers des
logements de deux chambres à coucher ont en moyenne augmenté de 13,2 %
entre 2021 et 2022. Dans la grande région de Montréal, ces augmentations ont
respectivement été de — a
été de 14,5 %.
«[...]pour pouvoir permettre aux locataires de
défendre leurs droits sur la base d'informations facilement disponibles et
véridiques que le regroupement des locataires revendique depuis des années un
registre public des loyers résidentiels», que, jusqu'à présent, vous avez
refusé, même si Vivre en ville vous a proposé de leur... de partager le sien,
qu'ils ont mis en ligne, avec vous. Et cette demande, pour le registre public
des loyers résidentiels, «a récemment été reprise par les maires et mairesses
de 14 municipalités du Québec, dont Québec, Gatineau, Laval, Sherbrooke,
Trois-Rivières, Saguenay et Rimouski.»
Donc, pour vous, ce n'est pas un outil.
Clairement, pour les groupes de défense des locateurs, ça l'est. Encore une
fois, je vous demande d'avoir un esprit plus ouvert et de prendre en
considération les... plus que... de prendre en considération la réalité des
locataires et non juste ceux des propriétaires.
Le Président (M. Schneeberger) : Mme
la ministre.
Mme
Duranceau : Bien, écoutez, je comprends, là, le... mais ce
sont les mêmes arguments. Alors, moi, j'ai dit ce que j'avais à dire sur
ça.
Le Président (M. Schneeberger) : Alors,
est-ce que nous avons d'autres...
Une voix : ...
Le Président (M. Schneeberger) : ...oui,
questions? Député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla : Oui. Tout d'abord,
M. le Président, j'aimerais... j'aimerais, en quelque sorte, m'attarder, là,
sur la vision très idyllique et très politique, hein, présentée par la
ministre, là, en parlant du petit propriétaire qui veut choisir son locataire
au-dessus de sa tête, là, puis elle l'a utilisée à plusieurs reprises, là,
comme si c'était la grande... la grande
majorité des locateurs qui sont des petits propriétaires qui veulent choisir la
personne... qui veulent choisir la personne, pour des motifs autres que sérieux,
donc ça peut être des motifs futiles, là, au-dessus de leur tête.
Je rappelle à la ministre que 43 % du parc
locatif est possédé par des propriétaires... par des... de six logements et
moins, 41 % du parc locatif est possédé par des propriétaires ayant entre
sept et 99 logements, 41 %, et 800 propriétaires ont plus de
100 logements, ce qui correspond à 16 % du parc. Si on regroupe les
propriétaires qui ont 100 logements et plus et les propriétaires qui ont
entre sept et 99 logements, ça fait exactement 57 % du parc de
logements qui est la propriété des grands proprios, 57 %, là. On est loin
de l'image idyllique, là, que nous donne la ministre aujourd'hui, là, comme
quoi c'est le pauvre petit propriétaire qui veut choisir qui va demeurer en
haut de sa tête, là. Pour la plupart du
temps, c'est des grands... des grands propriétaires. Et on pourrait même se
poser la question si un propriétaire qui a six logements et plus, là,
c'est un petit propriétaire qui veut choisir le locataire qui va vivre en haut
de... au-dessus de sa tête.
Donc, la ministre, en utilisant ces images-là,
elle induit... elle induit une fausse image de ce qui est le parc locatif
actuel, là, qui est en grande... en grande proportion, dans sa majorité,
possédé par des propriétaires qui ont entre
sept et plus de 100... de 100 logements, là, donc, d'une part. Et je me
demande bien qu'est-ce que le propriétaire... quel est le droit... le droit sacré du propriétaire qui possède, on va
aller... on va aller à l'échelle moyenne, là, entre sept et
99 logements, qui possède 41 % du parc locatif, là, quel est son
droit sacré à ne pas accepter, pour un motif autre que sérieux, la
cession... la cession de bail.
Ceci étant clarifié, là, c'est important de
faire... de remémorer un petit peu l'histoire, là. Le gouvernement de la CAQ,
après avoir passé quatre ans à nier la crise du logement, a été réélu au mois
d'octobre dernier, et ils ont nommé une
nouvelle ministre de l'Habitation, qui avait comme mandat d'en quelque sorte
régler la crise du logement, parce qu'ils se sont rendu compte que, finalement,
il y avait... il y avait un petit problème, là, que... et il fallait...
il fallait s'y attaquer. La ministre nous a rapidement promis qu'elle allait
faire une tournée de consultations au... à partir
du mois de janvier, là, pour consulter les différents acteurs, et nous arriver,
et proposer une nouvelle loi, là, qui allait... qui allait régler, si ce
n'est pas l'ensemble de la crise du logement, bien, en tout cas, un certain
nombre de problèmes qu'on retrouve tout particulièrement dans le marché
locatif, non pas... et je ne parle pas ici du déficit de constructions, le parc... le parc locatif actuel,
là, qui fait... dans lequel on retrouve 40 % de la population québécoise,
quand même, là, et 1,4 million de ménages.
Ça a pris six mois. Ça a pris six mois de
consultations pour voir arriver cette loi-là. Elle l'a présentée, on connaît
l'histoire, à la toute dernière journée de la session. Ça... On a repris au
mois de septembre dernier. Ça a pris un mois avant de commencer l'étude
détaillée. Et, dans ce projet de loi, on retrouve plusieurs mesures, là, mais
dont deux, là, qui concernent... qui concernent étroitement le monde du... les
relations entre locateur et locataire, donc deux mesures : premièrement la
cession de bail, là, qui a été amplement décriée par les locataires, et une
autre... une autre mesure qui renverse le fardeau de la preuve... de la preuve
concernant les évictions.
Très bien. Ça fait longtemps... Moi-même, depuis
l'ancienne législature, j'ai réclamé à l'ancienne ministre des Affaires
municipales et de l'Habitation de corriger cette anomalie de... et aller vers
le renversement de la preuve, là, concernant les évictions, qui a des... des
évictions, qui a des lourdes conséquences sur la vie d'un ménage, mais la ministre, elle nous sort une mesure que personne n'avait
réclamée jusqu'à maintenant, en tout cas, publiquement, c'est la cession de
bail, là.
Donc, on a
l'impression... on a l'impression que la ministre s'est dit : Bon, je vais
régler un problème criant — parce
que, depuis longtemps, les médias sont remplis d'articles sur ce sujet-là, sur
les rénovictions — je
vais régler cette... ce problème-là, mais je ne peux pas m'arrêter là, je dois
donner quelque chose de l'autre bord aussi aux locateurs, là, puis elle s'est
rabattue sur la cession de bail, là, en faisant... sous l'excuse qu'il faut
maintenir l'équilibre. On ne parle pas d'équilibre ici, monsieur, et on ne
devrait pas parler d'équilibre, on devrait parler de justice, point à la ligne,
là, de justice et de régler cette crise du logement, qui affecte tout
particulièrement des locataires. Et ça fait des drames humains horribles de...
comme, par exemple, celui de faire perdre un toit à un ménage et induire un
grand nombre de personnes à l'itinérance, comme l'a démontré le dernier
dénombrement des personnes en situation d'itinérance à Montréal. Un quart des
personnes dénombrées en situation d'itinérance ont été... sont devenues
itinérantes à la suite d'une augmentation abusive de loyer ou d'une
rénoviction. C'est ça, le véritable problème, non pas la cession de bail, là.
Donc, la question...
la question que je poserais à la ministre, là : Pourquoi elle a fait ce
troc, en quelque sorte, je donne quelque chose aux locataires et je donne quelque
chose aux propriétaires, au fi de ce qui... on pourrait appeler une justice
naturelle, non pas une notion d'équilibre mais de justice, pour régler un
problème criant, là, qui sont les évictions
abusives, les évictions de mauvaise foi, les évictions qui causent tant de
souffrances à tant de familles?
• (15 h 20) •
Le Président (M.
Schneeberger) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la
ministre.
Mme
Duranceau : Bien, écoutez, là, je ne sais pas quoi rajouter de plus,
là. C'est vous, M. le député de Laurier-Dorion, là, qui êtes dans une dualité
propriétaire-locataire, là. Moi, je suis dans une logique de corriger ce qui ne
fonctionne pas. Puis, pour moi, c'était clair qu'en matière d'évictions il
fallait agir, puis c'est ça qu'on a fait. Puis on a adopté, je pense, des
articles qui sont... qui vont être très bénéfiques. Puis ici je pense qu'il
faut agir aussi. Il y a... Il y a quelque
chose qui ne fonctionne pas, dans la vie de tous les jours, pour un grand
nombre de personnes, puis ce n'est pas logique... puis je vais dire peu
importe le nombre... si vous ne voulez pas que je parle seulement des
propriétaires de duplex et de triplex, qui, selon les chiffres que moi, j'ai,
là, représentent une grande majorité des propriétaires de logements locatifs au
Québec, bien, ce n'est pas logique que ces gens-là voient se passer des choses
au-dessus de leur tête ou sous leur nez puis qu'ils ne puissent pas réagir.
Alors, cette... je le
répète, la cession de bail n'est pas un outil pour contrôler les loyers. Je
comprends que ça soit décrié puis que les gens utilisaient ça, mais ce n'est
pas le bon outil. Alors, on va venir travailler sur la manière dont on contrôle
les loyers, mais ce n'est pas à travers la cession de bail. Et, je le répète, on
donne une option de plus aux locataires qui souhaitent quitter pour qu'ils
puissent se départir de leurs obligations.
Alors,
moi, je ne suis pas dans être juste avec un... je veux être juste pour
l'ensemble puis qu'il y ait un équilibre pour l'ensemble. Et puis cet
élément-là se devait d'être corrigé depuis plusieurs années, puis c'est ce
qu'on fait. Crise du logement ou pas crise
du logement, c'est un... c'est un élément qu'il fallait corriger puis qui
était... qui était déficient.
Le Président (M.
Schneeberger) : Député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla :
Il y a eu... ça a été... ça a été
rapporté par le mémoire de l'Association des juristes progressistes, ma
collègue de D'Arcy-McGee l'a cité tantôt, il y a eu 16 cas au Tribunal administratif du logement, là, pour contester des cessions de bail,
là. Est-ce que c'est ça qui... Est-ce que c'est ça, le problème généralisé qui
vous a incitée à légiférer de cette
façon-là, Mme la ministre? Est-ce que... Est-ce que c'est à cause de
16 cas au Tribunal administratif
du logement, là? J'aimerais connaître l'étendue du problème, là.
Mme
Duranceau : Bien, écoutez, je ne sais pas où vous avez pris votre 16,
là. Moi, j'ai 160 comme chiffre, donc... Puis, spécifiquement pour la cession
de bail... Ah! c'est le total cession de bail et sous-location... En tout cas,
le chiffre que j'ai, 2023‑2024...
Des voix : ...
Mme
Duranceau : Selon le motif. Donc, en 2022‑2023, 185, puis, en ce
moment, 160.
M.
Fontecilla : 183...
Mme
Duranceau : Non, mais ce n'est pas... M. le député de Laurier-Dorion,
là, ce n'est pas par rapport aux chiffres,
là, ils ne se rendent pas tous au tribunal, là, ces causes-là, c'est par
rapport à quelque chose qui ne fonctionne pas. Puis, on le voit, les...
ça nous a été relaté, ma collègue députée de Labelle a fait des consultations,
c'est un outil qui, dans le contexte actuel,
est utilisé tel que vous le décrivez, puis ce n'est pas le bon outil. Je
comprends qu'il est utilisé pour ça, mais ce n'est pas le bon outil, ce
n'est pas le bon remède pour le problème. Il faut construire plus, il faut
augmenter l'offre. Ça tombe bien, on a 1,8 milliard pour construire
8 000 logements, on va travailler sur ça. Mais là on a la chance d'avoir un véhicule législatif pour
corriger des choses qui ne fonctionnent pas bien dans la loi. Vous m'avez fait des bonnes suggestions en matière
d'évictions, on les a faites adopter. Ici, votre suggestion, malheureusement,
elle ne tient pas compte de l'ensemble de l'oeuvre, et je viens corriger
quelque chose qui ne fonctionne pas bien, sans rien enlever aux locataires, là.
On répète, la cession de
bail, c'est une mesure qui a été introduite pour quand quelqu'un voulait se
départir de son obligation et ne pas mettre,
par ailleurs, le propriétaire dans le pétrin. On est venu encadrer comment
quelqu'un pouvait se départir de son obligation en vertu du bail, et là
on vient rajouter un élément, une règle quand quelqu'un veut se départir de son
bail. Un propriétaire qui ne veut pas accepter une cession peut, par ailleurs,
résilier le bail.
Donc, encore là, le locataire qui choisit de
quitter et de vouloir se prévaloir de la cession de bail, il le peut toujours. Il y a eu beaucoup de mésinformation sur
ça, mais le locataire a une option de plus quand il veut quitter, et là
il peut se départir de son obligation en voyant son bail résilié. On n'a rien
enlevé au locataire.
On vient, par ailleurs, corriger en donnant une
option du côté du propriétaire qui désire choisir qui sera dans son logement,
soit au-dessus de sa tête si c'est un duplex, soit dans son sixplex, parce que,
les autres locataires, il les connaît bien, son immeuble va bien, il choisit
qui s'en vient s'installer dans son sixplex, qu'il a payé avec ses économies
puis qu'il a le droit, de manière raisonnable, là, de gérer comme il le veut.
Alors, ce n'est pas une question de prendre le
parti d'un ou de l'autre, c'est vraiment de corriger ici quelque chose qui ne fonctionne pas bien. Puis on va se
rendre éventuellement aux mesures qui viennent corriger le contrôle... ou,
en tout cas, essayer d'encadrer un peu mieux les hausses de loyer entre deux
locataires. Ça, ça va être les bons outils.
Le Président (M. Schneeberger) : Député
de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla : Plusieurs éléments.
On va aller... On va aller par... On va laisser, pour un autre moment qui va arriver, la question de qu'est-ce... pourquoi
la... pourquoi la cession de bail est devenue, par la force des choses, un outil
de contrôle des loyers. C'est parce que les autres... les autres outils qui
existent, on va se le dire, ne fonctionnent pas.
C'est la seule mesure qu'ont les locataires pour tenter, tant soit un peu, là,
d'avoir un minimum de contrôle sur les loyers, mais on va y revenir plus
en profondeur.
J'aimerais... Je sais que la ministre de
l'Habitation m'a dit que ce n'est pas un problème de... ce n'est pas un
problème de chiffres, mais j'aimerais quand même revenir dans les chiffres.
Elle me dit qu'il y a 160 quelques cas qui
ont été, l'année dernière, traités à la Régie du logement, donc des
contestations, je suppose. Logiquement, ça devrait être des locateurs qui ont
contesté la cession de... la cession du bail faite par leurs locataires.
Combien de décisions ont été rendues qui... dans le sens, là, de rejeter
cette demande-là parce qu'elle ne constituait pas... l'opposition à la cession
n'était pas fondée sur un motif sérieux? Et j'insiste sur le mot «sérieux».
Mme Duranceau : On me dit que ce
n'est pas de l'information qui est disponible, là. On ne fait pas un registre
des décisions rendues sur un sujet versus un autre, là, dans ce niveau de
détail.
M. Fontecilla : On va aller... On va
aller plus précisément, là, dans l'amendement que la ministre... pas
l'amendement, l'article que la ministre a déposé, là. C'est un changement très
petit, hein, très minimal mais qui fait en sorte de vider de sa substance, là,
la notion de... la notion de cession de bail, là, qui existe depuis 1973, qui a
été modifiée, sous sa forme actuelle, en 1993, je crois, vous allez me
corriger, mais qui existe depuis déjà 50 ans, qui fait partie intégrante
du droit régissant les relations entre les locateurs et les locataires au
Québec, là, qui fonctionne très bien. Ça a été dit, il y a une vaste
jurisprudence, là, établie sur ce droit-là qui a été octroyé par le législateur
et qui, aujourd'hui... parce qu'on ignore
les raisons, là, ce n'est pas très, très clair, là, parce que la ministre en
exercice a décidé que, bien, voilà, il fallait rétablir un équilibre
puis il fallait vider de sa substance, là, la... les dispositions concernant la
cession du bail, là.
Mais revenons au texte. Le texte nous dit que
«le locateur qui est avisé de l'intention du locataire [à] céder le bail peut
refuser d'y consentir pour un motif autre qu'un motif sérieux visé au premier
alinéa de l'article 1871».
Je m'attarde sur le «peut refuser d'y consentir
pour un motif autre qu'un motif sérieux». Avant, le locateur pouvait refuser
une cession de bail, là, seulement pour un motif sérieux. Et, à travers les
années, les tribunaux, l'ancienne Régie du logement et l'actuel Tribunal
administratif du logement, là, ont balisé cette notion de «sérieux». Mme la ministre l'a nommé tantôt, ça peut être...
ça peut être une personne qui suscite des nuisances, ça peut être une personne
qui a eu, dans le passé, de la difficulté à payer... à payer son loyer, ça peut
être une personne... ça peut être d'installer
un nombre de personnes dans l'appartement qui excède la capacité du logement.
Bref, c'est... Et je suis sûr que Me Simard, président de la régie... du
Tribunal administratif du logement, pourrait nous expliquer plus en profondeur
c'est quoi, les motifs sérieux pour lesquels
un... le Tribunal administratif du logement, le TAL, peut refuser de consentir à
une cession de bail, là, mais il reste que ça... il reste que ça doit être un
motif sérieux.
• (15 h 30) •
Maintenant,
la ministre nous dit, là... c'est une tournure assez drôle, là, mais qui est
lourde de conséquence, là, elle nous dit qu'un locateur peut refuser
pour un motif autre que sérieux. Dans une... comment dire, dans une... dans le
langage courant, un motif autre que sérieux, c'est un motif futile. Donc, ce
qu'est en train de nous dire, là, Mme la ministre,
c'est qu'un locateur peut refuser la cession de bail pour un motif futile, par
exemple pour un motif discriminatoire. Et,
on sait, et ça a été amplement prouvé et ça a été apporté par différents
intervenants dans le monde du logement, là, que la cession de bail est
un outil justement utilisé pour éviter les situations de discrimination qui
existent.
D'ailleurs, j'aimerais rappeler à la ministre de
l'Habitation que, dans l'ancien mandat de son gouvernement, il y a eu la mise
en place, là, d'un groupe d'action contre le racisme qui a très bien établi que
les situations de discrimination existent dans les... dans la location de
logement et que c'est une... c'est une réalité objective, là, qui est
amplement... amplement prouvée. Et la cession de bail, entre autres, est
utilisée aujourd'hui, malheureusement, pour éviter que des ménages soient
discriminés dans la recherche de logement.
Mais
revenons à la formulation, là, telle qu'elle est dite. Si ce n'est pas un motif
sérieux, c'est un motif futile, n'est-ce pas, Mme la ministre?
Le Président (M.
Schneeberger) : Mme la ministre.
Mme
Duranceau : Oui. Quand on parle de motif sérieux dans la loi, là,
c'est un terme qui est juridique. Alors, je vais vous référer, si vous le
voulez bien, à notre juriste pour commenter sur ça. Il n'est pas... Ce n'est
pas du tout ce en quoi... ce à quoi vous référez.
Le Président (M.
Schneeberger) : Oui. Alors, ça me prend le consentement pour que
M. Dumont puisse prendre la parole. Consentement?
Des voix : Consentement.
Le Président (M.
Schneeberger) : Consentement. Parfait. Alors, M. Dumont, juste vous
présenter par votre titre, et puis vous pouvez répondre.
M. Dumont
(Luc) : Oui. Bonjour. Luc Dumont, avocat à la Direction des affaires
juridiques du ministère des Affaires municipales.
Donc, la notion de
motif sérieux, on va en parler, là, par rapport... a été élaborée, a été
développée par la jurisprudence du Tribunal
administratif du logement. C'est généralement reconnu qu'un motif sérieux est
un mauvais dossier de crédit ou un mauvais dossier auprès du Tribunal
administratif du logement, c'est-à-dire moult évictions, notamment. C'est les deux principaux cas qui
ont... dans le fond, qui font quand même l'objet, là, d'une jurisprudence
étoffée par rapport à ça.
Le Président (M.
Schneeberger) : Oui. Monsieur... Laurier-Dorion.
M. Fontecilla :
Merci beaucoup. Est-ce que vous pourriez me définir un motif autre que
sérieux?
M. Dumont
(Luc) : Dans ce spectre-là, un motif autre que sérieux serait, en
fait, effectivement toute autre chose, jusqu'à présent, sous réserve du
développement... de d'autres développements jurisprudentiels à venir parce
qu'on ne sait jamais. Mais, autre que ça, ce qui ne rentre pas dans, par
exemple, un mauvais... un mauvais dossier de crédit, mauvaise créance ou
mauvais dossier auprès de la régie du... bien, pardon, auprès du Tribunal
administratif du logement, pour l'instant, selon l'état actuel du droit, ce
serait... ça ne tombe pas dans les motifs sérieux.
M.
Fontecilla : Donc...
Le Président (M.
Schneeberger) : Mme la... Mme la ministre voulait intervenir.
Mme
Duranceau : Encore là, «motif sérieux». Donc, tu refuses la cession de
bail puis tu dis au locataire : Organise-toi, mais tu continues de me
payer. Alors, c'est pour ça qu'il y a la notion de motif sérieux. C'est que
moi, je refuse pour des motifs sérieux, donc toi, tu es obligé de rester pris
avec ton bail puis de continuer de me payer. Alors, c'est pour ça qu'il faut
encadrer la notion de refus avec motif sérieux, définir c'est quoi, les motifs,
là, puis restreindre ça, parce qu'on vient restreindre le droit du locataire de
quitter puis de céder son bail. Alors, dans cette deuxième option là, il y a
les motifs sérieux pour faire en sorte que ce ne soit pas à toutes les sauces
que le locataire soit pris avec son bail.
Puis, si on ne veut pas invoquer un motif sérieux, on dit : O.K., tu as le
droit de choisir les motifs pour lesquels tu refuses, mais dans ces
conditions-là, si le motif ne se qualifie pas de motif sérieux, à ce moment-là,
tu résilies le bail. Tu dois résilier le
bail du locataire et le décharger de ses obligations. Donc, c'est une nuance
qui est importante à faire, là.
Une voix : ...
Mme
Duranceau : Bien, c'est sûr, quand on le regarde comme il faut, la
cession de bail, c'est ça.
M.
Fontecilla : Tout à fait. Si un locataire est obligé de payer son
bail, là. Sinon, il y a des conséquences assez rapides, hein? C'est... à moins
que vous me disiez le contraire, là, c'est la... lorsqu'on ne paie pas un bail,
là, c'est la procédure la plus expéditive au Tribunal administratif du logement,
là. En quelques...
Mme
Duranceau : Non. Ça, c'est faux. C'est faux, M. le député de Laurier-Dorion.
M.
Fontecilla : Ça prend combien de semaines pour un locataire... On va
aller... On va aller dans le détail, Mme la
ministre. Combien de semaines, après le retard de paiement d'un locataire,
combien de semaines, au minimum, un locateur pourrait expulser son
locataire?
Mme Duranceau : Ça prend... Les
délais sont de...
Le
Président (M. Schneeberger) : ...
Mme Duranceau :
Oui. Les délais sont de
1,7 mois. Alors que, quand on a un cas de santé-sécurité, c'est
10 jours.
M.
Fontecilla : Et un cas d'insalubrité?
Mme
Duranceau : Bien, c'est ça, c'est 10 jours.
M. Fontecilla :
10 jours?
Mme
Duranceau : Oui.
M. Fontecilla :
C'est tout à fait le contraire de
ce que les comités logement nous disent, là. Ça prend des mois et des
mois, là.
Mme Duranceau :
Je sais. Les comités logement ont
leurs propres statistiques. Mais moi, je me fie... en général, je me fie
aux chiffres de la Société d'habitation du Québec puis du Tribunal
administratif du logement.
M.
Fontecilla : Revenons... Revenons à l'essentiel, là, les motifs
sérieux ou pas sérieux. On vient de l'entendre par des juristes, là, que la
jurisprudence n'a pas une définition exacte de ce qui n'est pas... n'est pas sérieux, là. Je vous pose la question, Mme la
ministre : Avoir trois enfants en bas âge, est-ce que c'est un motif
sérieux pour refuser la cession de bail ou pas? C'est-à-dire, le
prochain locataire qui va rentrer, là, qui est... qui est le destinataire de la cession de bail, là, c'est une
femme monoparentale avec trois enfants. On lui refuse de... Le locateur
lui refuse cette cession-là. Est-ce que c'est un motif sérieux ou n'est pas
sérieux?
Mme
Duranceau : Ce n'est pas... Ce n'est pas un motif qui est visé ici,
là, dans ce cas-là. De discriminer sur la base du nombre d'enfants, de la
couleur ou de tout autre élément, ce n'est pas visé par ces articles-là, là. On
a le... On a le Protecteur du citoyen, qui est là, on a la Commission des
droits de la personne qui est là. Ce n'est pas cet article-là. Je veux dire, je
le sais que vous voulez beaucoup faire porter la cession de bail, là, que tout
repose sur ces deux articles-là, là, mais ce n'est pas ça. Il y a un autre
contexte pour ces cas-là.
M.
Fontecilla : Mme la ministre, vous êtes en train de me dire que vous
êtes en train de conseiller à une femme monoparentale d'une autre ethnie qui
s'est fait refuser une cession de bail, là, vous lui dites : Bien, allez à
la Commission des droits de la personne, contestez pour des... parce
qu'apparemment il y a eu de la discrimination, là, alors que ça va prendre
18 mois, deux ans, trois ans, quatre ans avant de prouver, parce qu'il n'y
a rien de plus difficile que prouver une
situation de discrimination, alors que cette femme-là a besoin d'un logement
maintenant? C'est... Vous faites preuve d'angélisme, madame... Mme la
ministre.
Je vous pose la
question : Qu'est-ce qui est un motif autre que sérieux? Est-ce que le
fait d'avoir... Est-ce qu'on pourrait... un propriétaire pourrait refuser une
cession de bail parce que, par exemple, la personne qui est bénéficiaire de la
cession de bail, là, a trois enfants, là? Est-ce que c'est un motif sérieux ou
pas sérieux? Je ne sais pas, là. Je vous
pose la question, là, parce que, là, c'est le terme que vous utilisez, Mme la
ministre, là, «pour un motif autre [que] motif sérieux visé au». Donc,
qu'est-ce qui est non sérieux, là? Ça peut... On peut refuser un bail pour
n'importe quelle raison, si je comprends bien, là.
Mme
Duranceau : Là, écoutez, là, j'ai de la misère à vous suivre, bien
franchement, là. Il y a un article dans le
Code civil qui prévoit les cas de discrimination dont vous parlez puis qu'on ne
peut pas aller là, comme propriétaire, quand tu choisis de louer à
quelqu'un ou pas. Alors là, vous invoquez beaucoup de choses, toujours en lien
avec la cession de bail, qui est comme la solution à tout, là. Mais ce n'est
pas ça, là. Je ne sais pas ce que vous voulez dire.
• (15 h 40) •
M.
Fontecilla : J'essaie, j'essaie, Mme la ministre, de déterminer
qu'est-ce que c'est, «un motif autre qu'un motif
sérieux». Est-ce que vous avez une idée, là? Est-ce que vous pourriez nous dire
qu'est-ce que c'est, un motif autre que sérieux?
Mme
Duranceau : Bien, dans l'état actuel du droit, un motif autre que
sérieux, là, ça peut tout simplement être de dire : Écoute, je vais en
profiter pour faire de la peinture puis changer les tapis dans l'appartement,
ça fait que ça ne fait pas mon affaire que
tu cèdes ton bail à quelqu'un à la date que tu veux, quand tu veux, puis que tu
empoches un profit. Ça va être ça, un motif autre que sérieux. Mais, par
contre : Tu souhaites, toi, M. le locataire, quitter le logement, là, bien, je t'enlève toutes les
obligations que tu as en lien avec ton bail, je résilie ton bail, donc tu
accomplis ton objectif, M. le locataire, tu peux quitter le logement
puis tu n'as pas d'autres obligations. Après ça, ce que je décide de faire ou ce que le propriétaire décide
de faire avec son logement, c'est son affaire. Ce n'est pas au locataire qui
quitte à décider de ce qui adviendra dans le logement.
M.
Fontecilla : Est-ce qu'il y aurait d'autres interventions?
M. Arseneau : ...
Le
Président (M. Schneeberger) : Député des Îles-de-la... voyons, excusez
ma voix, de-la-Madeleine. Pardon.
M. Arseneau : Bon, soyons sérieux et
parlons de motifs. Je vais continuer sur la même thématique, mais d'abord avec
une question d'ordre législatif, si on veut, là. Et peut-être que la ministre
pourra me répondre, peut-être que c'est... un membre de son équipe pourra le
faire.
Si je comprends bien, le Code civil, à son
article 1871, demeure inchangé. Et l'article en question dit :
«Le locateur
ne peut refuser de consentir à la sous-location du bien ou à la cession du bail
sans un motif sérieux.
«Lorsqu'il refuse, le locateur est tenu
d'indiquer au locataire, dans les 15 jours de la réception de l'avis, les
motifs de son refus; s'il omet de le faire, il est réputé avoir consenti.»
Cet article-là demeure intact. Il n'est pas
touché. Il reconnaît évidemment le droit à la cession de bail. Et là, ensuite, on ajoute un nouvel article, qui porte le
numéro 1978.2, qui dit le contraire de ce que je viens de lire, à peu
près, là. Et j'aimerais savoir
pourquoi on a utilisé cette mécanique où, au Code civil, on a deux articles qui
s'invalident l'un, l'autre. J'aimerais vraiment comprendre la logique de
ça. Parce qu'il me semblait... je ne souscris pas à l'intention de la ministre
là-dessus, mais il me semble que, si on avait amendé directement le 1871 en
disant «le locateur peut refuser de consentir sans motif sérieux», ça réglait
un peu le problème que vous semblez vouloir régler. Pourquoi une contorsion
légale de ce type-là?
Le Président (M. Schneeberger) : Je
passe à Me Dumont, qui va répondre.
M. Dumont (Luc) : Oui. Donc, Luc
Dumont, avocat à la Direction des affaires juridiques du ministère des Affaires
municipales.
C'est... C'est une très bonne question. En fait,
la disposition initiale dont vous parlez, elle se trouve aux règles générales
du bail, donc de tout type de bail, ça peut être le bail pour un véhicule, ça
peut être un bail pour une scie mécanique. C'est tout bail. Et il y a une
section particulière qui déroge, en fait, aux règles générales de la location, et c'est celle de la section sur le bail
de logement. Donc, il n'y a pas que les articles qui sont actuellement proposés.
En fait, toute la section, en général, sur les règles particulières du bail de
logement déroge aux règles générales. Donc,
lorsqu'on a une dérogation à ces règles générales là, il faut les...
lorsqu'il... lorsqu'il s'agit d'un logement, il faut les mettre dans la
section qui est visée pour ça.
Le Président (M. Schneeberger) : Député
des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Oui. Alors, la
question, en fait, pour laquelle... la raison pour laquelle je posais cette
question-là, c'est que je comprends que le principe est valide, celui qui est
inscrit au Code civil, pour tout type de location. Mais là, en pleine crise du
logement, la ministre dit : Il ne faudrait pas qu'il soit valide lorsqu'il
est question du droit au logement. Lorsqu'il
est question du logement, là ça... Si c'est pour louer une voiture, c'est
totalement possible, là, de faire de
la cession de bail. Si c'est pour question d'un outil, là, une scie mécanique,
on vient d'utiliser l'exemple, ça, il n'y a pas de problème, ça ne
déroge pas. Il n'y a pas... Le propriétaire n'a pas un mot à dire là-dessus,
là, tu sais. Puis, pour le logement, bien là on va faire une exception quand ça
vient toucher la capacité de quelqu'un, d'une famille à se loger. C'est ça
qu'on vient défendre ici aujourd'hui en commission parlementaire. C'est quand
même ahurissant, non? Si le principe est reconnu au Code civil pour tout sauf
le logement... bien, en fait, tout, y compris le logement, et là on vient faire
l'exception pour le logement, ce n'est pas assez important, pour nous, de
reconnaître ce droit-là.
Le Président (M. Schneeberger) : Mme
la ministre.
Mme Duranceau : Je vais répondre.
Puis peut-être que soit Me Simard ou notre juriste pourra compléter. Mais, l'article général, il vise les baux
commerciaux aussi. Puis, en commercial, le propriétaire, le locateur a le droit
de dire : Tu ne céderas pas ton bail. Alors, ça, c'est la règle
générale, autant commerciale que résidentielle.
Puis on vient préciser après ça ce qu'on permet
de faire. En résidentiel, tu es obligé de la permettre, la cession, elle est
là. Alors, il y a un article qui prévoit ça. Là, nous, on vient encadrer les
conditions de cession.
Et, encore là, on donne un droit additionnel. On
donne une option additionnelle au locataire. Je le sais qu'il n'y a personne
qui a parlé de ça comme ça, là, mais il y a une option additionnelle au
locataire ici. C'est-à-dire qu'on n'a pas besoin de notion de motif sérieux,
qui était très limitative. Et, dans un contexte où un propriétaire dit :
Non, bien, tu ne céderas pas, mais je vais te résilier ton bail, bien, le
locataire qui veut quitter son logement — parce que c'était ça, son
but, quitter son logement — bien,
il va pouvoir le faire sans autre obligation.
Une voix : ...
Mme Duranceau : Bien oui. Bien oui.
M. Arseneau : Je comprends ici, là,
que... je reviens sur l'argument de départ, que cet article-là n'a jamais été
vu comme un problème important durant une cinquantaine d'années. Et aujourd'hui
je vais poser un peu le même genre de questions que mes collègues. Je... On l'a
entendu dans les consultations particulières, que c'était peut-être le plus
mauvais moment pour corriger ce que la ministre décrit comme une anomalie. Et
j'aimerais savoir ce qui fait qu'aujourd'hui on le voit
comme un problème majeur alors qu'on est en pleine crise et qu'effectivement la
cession de bail peut être utilisée. C'est à peu près le seul moyen de contrôle
des loyers qui fonctionne, même si, comme le... selon ce que la ministre nous
dit, il n'était pas destiné à ça. Pourquoi? Qu'est-ce qu'elle répond, en fait,
à ceux qui disent que c'est le plus mauvais
moment de choisir d'abolir cette possibilité-là, de cession de bail, sur le
plan... même pas sur le plan individuel, sur le plan, disons, collectif,
puisque les outils qui sont en place ne fonctionnent pas pour réduire
l'augmentation des loyers à quelque chose de raisonnable, de l'ordre de
l'inflation? Parce que les chiffres le prouvent.
Le Président (M. Schneeberger) : Mme
la ministre.
Mme Duranceau : Bien, je réponds
qu'il y a un ensemble de mesures proposées...
M. Arseneau : Qui ne fonctionnent
pas.
Mme Duranceau : Bien, on ne les a
pas encore analysées, là. Je ne sais pas si vous restez jusqu'à la fin. On va
probablement s'y rendre, là, mais on n'a pas analysé tout le thème 5. Puis
il y a plusieurs amendements proposés par
les oppositions et par nous pour faire en sorte que tout ça se tienne. Parce
que, je le répète, la cession de bail, ce n'est pas l'outil pour le
contrôle des loyers. Ce n'est pas prévu pour ça. C'est peut-être utilisé par
certains pour ça, mais ce n'est pas le bon
outil. Alors, c'est pour ça qu'on vient le corriger. Parce que, là, on... ces
règles-là n'ont pas été revues depuis 40 ans. Vous voyez que ça
soulève quand même des passions, là, quand on y touche.
Alors là, on adresse les problématiques de part
et d'autre, et pour essayer aussi de créer un climat qui est favorable à la
construction de plus de logements, à la détention de logements puis pour
s'assurer que les locataires sont bien traités dans un contexte où il y a une
crise de logement puis qu'il y a peu de disponibilité de logements.
La cession de bail, ce n'est pas une histoire
pour redonner au suivant, là. La cession de bail, c'est que, quand un locataire
veut quitter, il a la latitude de quitter sans avoir d'obligations qui le
suivent. C'est ça qu'on vient de lui donner, là, comme opportunité ici.
M. Arseneau : Sauf que vous dites
que c'est... ça ne doit pas servir à ça. Mais, dans le contexte où aucun autre
levier ne permettait d'empêcher les hausses abusives, c'est devenu un peu le
seul outil qui fonctionnait. Et vous dites :
Ça ne fonctionne pas. Est-ce que vous admettez au moins, Mme la ministre, qu'à
l'heure actuelle, avant, là, l'adoption de ce projet de loi là et des
mesures dont on pourrait débattre, effectivement... Et on pourra voir jusqu'à
quel point vous voulez vraiment aller
jusqu'au bout dans les mesures qui pourraient permettre le contrôle des loyers,
par exemple le registre, on y reviendra. Mais est-ce que vous reconnaissez qu'à
l'heure actuelle, même si ce n'était peut-être pas la fin à laquelle
elle était destinée, la cession de bail fonctionne pour ralentir un tant soit
peu les hausses de loyer?
• (15 h 50) •
Mme Duranceau : Écoutez...
M. Arseneau : Est-ce que... Est-ce
que ça a cet effet-là? C'est ce qu'on entend.
Mme
Duranceau : Bien, ça a peut-être cet effet-là, mais ce n'est
pas le bon outil pour ça. Donc, ce n'est pas... ce n'est pas de cette façon-là
qu'au Québec on va adresser les hausses de loyer entre deux locataires. Ce
n'est pas ça, l'outil.
M. Arseneau : Bien, ce n'est pas ça,
l'outil, c'est votre point de vue. Mais c'est un outil qui est actuellement à
la portée des locataires et qui fonctionne. Et ce qu'on dit, ce que les groupes
nous ont dit, c'est : Conservons-le en attendant de voir si les autres
outils qu'on va proposer fonctionnent mieux ou davantage ou plus encore.
Mme Duranceau : Mais vous regardez
toujours ça d'un seul... d'un seul point de vue, là. On va les... On les aide, les locataires. Il y a différentes façons
d'aider les locataires. Il y a des programmes d'aide au logement, il y a des
programmes de supplément au loyer, il y a des subventions pour construire plus.
Ça va être ça, les vraies mesures.
Là, on a la chance de faire un projet de loi qui
vient toucher un paquet de règles en matière de relation locataire-locateur,
des excellentes mesures pour les cas d'éviction, les fardeaux de preuve qu'on
transfère au propriétaire. Je pense qu'on fait beaucoup de choses. Puis ça n'a
pas été touché souvent. Puis on comprend pourquoi. Vous voyez l'intensité que
ça entraîne, là, dans les débats publics. Là, on le regarde, on le travaille.
Puis, cet élément-là, c'est une règle qui, à la
base, comme je le dis, visait à s'assurer que les locataires qui voulaient
partir, bien, c'était encadré, puis qu'un propriétaire pouvait décider
d'accepter une cession de bail ou de la refuser dans certains cas avec des
motifs raisonnables. Puis là, on vient ajouter un volet où, si tu refuses,
bien, tu dois résilier. Si tu n'as pas de motif raisonnable au sens où l'entend
la loi en ce moment, bien, tu dois résilier. Donc, pour le locataire... Je
comprends que les locataires ne veulent plus bouger. Mais il demeure que
c'était ça, le... c'est ça, l'esprit de la cession de bail. C'est, quand un
locataire veut bouger, on encadre son départ. Là, malheureusement, c'est
utilisé à d'autres fins. Ce n'était pas ça, l'esprit de cette règle-là. Alors,
on vient corriger une règle qui n'est plus utilisée pour la raison pour
laquelle elle avait été prévue.
M. Arseneau : Mais elle avait été
prévue pour s'assurer que le locateur n'y perde pas au change si le locataire
quittait. Et là, à l'heure actuelle, ce qu'on voit, c'est que le déséquilibre
actuel dans le marché est tel que, pour le locateur,
bien, il n'y a plus vraiment de risque de ne pas se retrouver... de se
retrouver le bec à l'eau parce que les demandeurs de logement sont plus
nombreux que jamais. Et il peut, au surplus, aller chercher un revenu
supplémentaire en modifiant le loyer. C'est... C'est ce qu'on constate, là,
dans la vraie vie.
Alors, je comprends
qu'à l'heure actuelle c'est une mesure qui peut faire l'affaire de certains
locataires, mais... de locateurs, pardon,
mais je voudrais encore une fois savoir quel est le préjudice qu'on voit
aujourd'hui, par le maintien de l'article tel qu'il est, par rapport au
préjudice qui pouvait exister il y a 20 ans ou 25 ans. Objectivement,
en quoi est-ce que le propriétaire des lieux, il y a 25 ans, n'était pas
d'aucune façon affecté négativement par cet article-là et qu'il l'est
aujourd'hui, si ce n'est qu'aujourd'hui il a la possibilité d'augmenter son
loyer de façon abusive? C'est une
possibilité. Je ne dis pas qu'ils le font tous. Quel est le préjudice? C'est...
C'est... et qu'on essaie de régler en changeant la loi à l'heure
actuelle? Moi, c'est la grande question que je me pose. Parce que, sinon, on a
un argumentaire qui est de l'ordre de l'idéologie, à savoir, bon, un
propriétaire devrait pouvoir choisir son locataire. Mais c'était aussi le cas il y a 20 ans, il y a 30 ans, et
personne ne s'en offusquait, du fait qu'on puisse céder le bail sans que
le propriétaire puisse s'y opposer avec un motif autre que sérieux.
Mme Duranceau :
...il y a... il y a 30 ans,
là, on donnait des mois de loyer gratuits pour remplir les logements. Alors, le contexte était différent. Donc, c'est
pour ça qu'il y a 30 ans, ce n'était pas problématique. Là, ce l'est parce
que le contexte est différent. L'offre n'est pas assez grande. Il faut
augmenter l'offre.
L'autre chose, si on
y va très concrètement, là, ce qui se passe sur le terrain, c'est que, bien
qu'on dise que le locateur peut refuser pour des motifs sérieux, bien là il
refuse tout simplement en ce moment la cession de bail, O.K., ou... Ça fait que, ça, c'est des cas qui se
produisent aussi. Alors, il refuse la cession de bail, donc là le locataire qui
veut... le cessionnaire qui veut... bien, en fait, le cédant doit
introduire une demande au TAL pour dire : Bien non, écoute, ce n'est pas
des motifs qui sont valables. Et, pendant ce temps-là, le cessionnaire, donc
celui qui aurait bénéficié de la cession de bail, bien, il est obligé
d'attendre après ces délais-là. Puis finalement, bien, il faut qu'il se trouve
un logement. Alors, l'aventure ne se concrétise pas, là. Donc, on voit beaucoup
de cas comme ça, qui, finalement, ne sont pas utiles. Si on pouvait résilier le
bail, tel qu'on le propose, le locataire qui veut quitter, il quitte, puis il
n'y a pas de problématique pour lui. Puis là je comprends la volonté de vouloir
redonner au suivant, mais je pense qu'en bout de ligne ce qu'il va souhaiter,
c'est se départir de son obligation, là, ultimement, le cessionnaire.
Alors, je ne suis pas
sûre que le statu quo sert bien qui que ce soit, ni du côté des locataires
cédants ou cessionnaires, et nécessairement pas, dans ce cas-ci, du côté du
propriétaire aussi, qui n'est pas capable de choisir qui va habiter au-dessus
de sa tête. Alors, ce n'est pas la bonne... je le répète puis je... en tout
cas, je vais continuer de le répéter, mais ce n'est pas la bonne mesure.
M. Arseneau :
Oui, mais, c'est quand même intéressant, ce que la ministre vient de nous
dire. C'est qu'à l'époque où il était plus difficile de trouver un locataire,
le préjudice posé par cet article-là au locateur, bien, il était déconsidéré. Ce n'était pas si important. Pour le
propriétaire, là, d'un duplex, de connaître ou non... de juger de sa capacité
à payer ou être un bon voisin, là, dans son... dans le logement qu'on lui
offre, ce n'était pas si important que ça. Et aujourd'hui ça devient la valeur
cardinale du législateur. J'ai... Je pense qu'il y a ici, là, une question
économique qui est très intéressante et qui nous éloigne du principe qui semble
être celui de : Il faut toujours faire le choix, lorsqu'on est
propriétaire, de qui va pouvoir occuper nos lieux.
Mme
Jeannotte : ...
Le Président (M.
Schneeberger) : Oui. Députée de Labelle.
Mme
Jeannotte : Merci, M. le Président. Il y a... À cette époque-là, le
propriétaire, dans le fond, lui, il perdait un mois de loyer, supposons, parce
que le locataire voulait partir ou il y avait une promotion ailleurs. Donc, à
cette époque-là, dans un marché où l'offre et la demande étaient plus
équilibrées — même,
il y avait beaucoup plus d'offre que de
demande — le
propriétaire, lui, il avait... c'était correct d'avoir ce... l'esprit de la
cession bail comme ça parce qu'il pouvait se faire payer. Puis il y
avait une entente entre les deux. C'est ça, un bail, hein? C'est un contrat entre les deux. Puis il ne perdait pas un mois de
loyer. Puis, par ailleurs, le locataire, lui, qui avait une promotion ailleurs,
pouvait partir.
Mais dans un marché
comme on a aujourd'hui, où est-ce que l'offre et la demande est carrément
rompue, il n'y a plus d'offre, eh bien, là, c'est là que se créent des effets
pervers. L'effet pervers, c'est que... La cession de bail, c'est que le
locataire sous-loue, et donc le droit est rompu entre les deux. C'est ça qu'on
veut venir corriger.
Puis savez-vous ce
que je me suis fait dire? Le pire de tout, c'est que... l'effet pervers ultime,
là, c'est que les propriétaires, là, se découragent tellement qu'ils ne font
plus rien. Et il s'ensuit une dégradation du parc locatif à un point tel que ça finit par décourager tellement le
propriétaire qu'il vend son immeuble. Et c'est là qu'arrivent les pires
conséquences, dans le fond, pour même le locataire parce que c'est là que les
propriétaires font des évictions pour devoir tout rénover. Ça fait que, tu
sais, c'est complexe, mais j'espère que ça répond un peu plus à votre question.
M. Arseneau :
Ce qu'il faut comprendre de l'explication de la ministre puis de ma
collègue ici, c'est qu'à l'époque où cet article-là permettait de protéger les
locateurs puis bénéficiait aux locateurs, il était valide puis, à partir du
moment où il bénéficie davantage aux locataires, il devient invalide. Moi,
c'est ce que j'en conclus.
Puis la
ministre a dit tout à l'heure qu'il y avait beaucoup de cas où, finalement, si
on faisait appel au Tribunal
administratif du logement, bien, il y
avait des délais tels que, de toute façon, le cessionnaire se retrouvait le bec
à l'eau et sans logement, puis il devrait s'en trouver un
de toute façon parce qu'il y avait des procédures qui étaient mises en
place et qui étaient présumément longues.
• (16 heures) •
Ce qui m'amène à la question : Beaucoup de
cas? Et est-ce que les chiffres qui ont été avancés tout à l'heure par ma
collègue de D'Arcy-McGee, vous les corroborez ou non, au ministère de
l'Habitation, sur le pourcentage des baux
qui sont effectivement cédés? Lorsqu'on parle de 1 % ou 2 % des baux
qui sont... qui font l'objet d'une cession, est-ce que... est-ce c'est valide? Est-ce que... Est-ce que le chiffre
est très grand ou est-ce que les chiffres sont différents, ceux que vous
possédez?
La raison pour laquelle je vous pose la
question, c'est qu'on peut s'imaginer que, s'il y a un pourcentage très, très
faible des baux qui font l'objet d'une cession, le nombre de cas qui font
l'objet d'un litige doit... doit être aussi assez limité sur le pourcentage
déjà faible. Et ceux qui se rendent justement dans les cas qu'on vient
d'illustrer doivent l'être encore davantage.
Est-ce qu'on n'est pas en train essentiellement de travailler pour régler un
problème qui est extrêmement marginal d'une part en tant que préjudice
causé au locateur par rapport au préjudice causé au locataire et en regard de
la hausse des loyers qui explosent un peu partout au Québec?
Mme Duranceau : Encore là, tu sais,
tout ce débat-là, là, il ne fonctionne pas, là, parce que le locataire qui
quitte, là, il n'en subit pas, de préjudice.
Là, c'est qu'on essaie de faire suivre le bail
pour tous les locataires subséquents, là. Le locataire, celui qui a le contrat
de bail avec le locateur, ne subit aucun préjudice. Au contraire, on vient
donner une option additionnelle pour se départir de son bail. C'est juste que,
là, toute la logique de redonner au suivant vient teinter toute l'analyse. Cet
outil-là n'est pas là pour contrôler les loyers. Cet outil-là est pour prévoir
les conditions dans lesquelles tu te départis de tes obligations en vertu d'un
bail. C'est tout. Mais là on veut tout faire poser... reposer la suite sur cet
article-là. Ce n'est pas ça, la logique. Je le sais que c'est parti comme ça
dans le marché, là, mais ce n'est pas ça.
M. Arseneau : Mais je n'ai pas de
chiffres. Est-ce que c'est un problème qui est important?
Mme Duranceau : C'est un problème de
plus en plus important, oui.
M. Arseneau : Mais de plus en plus
important?
Mme
Duranceau : Les données, je ne les ai pas. Je n'en ai pas au
ministère. On ne les collecte pas, ces données-là.
M. Arseneau : Bien, alors...
Mme Duranceau : Par contre, on se
fie aux différentes associations à qui on a parlé. Clairement, du côté des
locataires, il y en a. Il doit y en avoir. Si ça fait un tollé comme ça, c'est
parce que c'est largement utilisé. Il y a des groupes
Facebook de 50 000 personnes qui veulent se transférer des baux.
Clairement, il y a de l'appétit de ce côté-là. Puis, du côté de la CORPIQ, on nous dit : C'est une mesure qui...
je pense qu'il y avait, selon leur sondage, c'était 10 %, il y a... il y a deux ans... deux ou trois ans, seulement
10 % d'occurrences, puis là on est rendus à plus que 33 %, là. Le
tiers des répondants... Plus du tiers des répondants disaient vivre
cette situation-là. Alors, clairement, des deux bords, des deux côtés, c'est
une mesure qui...
Une voix : ...
Mme Duranceau : ...qui n'est pas
adéquate, non, puis qui est utilisée... ou en tout cas qui semblait servir les
intérêts de certains, mais clairement pas l'intérêt du locataire. Le vrai
locataire, qui est dans les lieux puis qui a le contrat de bail, lui, s'il
quitte, il ne subit aucun préjudice.
M. Arseneau : En tout... En tout
respect...
Le Président (M. Schneeberger) : Député
des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Moi, je... en tout
respect, je voudrais vous soumettre que, si le locateur est... peut refuser de
consentir pour un motif autre qu'un motif sérieux, peut... peut refuser, donc,
une cession de bail, moi, je vous dis, comme législateurs, là, on ne devrait pas
consentir à un changement de la loi sans motif sérieux, et j'estime qu'à l'heure actuelle nous n'avons pas de motif sérieux
pour modifier la loi, tel que le propose la ministre, tout simplement
parce que ça ne repose que sur l'opinion de certains groupes de propriétaires
qui ont fait un sondage à l'interne et qui peuvent être mis en doute tant et
aussi longtemps qu'une instance gouvernementale neutre et objective n'a pas
fait un travail sérieux là-dessus, et... parce qu'on dit : Ça doit être un
problème. Ça doit être un problème de ne pas pouvoir augmenter le loyer quand
un locataire quitte, ça, moi, je peux l'admettre, effectivement. Puis, si on
dit que c'est utilisé par les locataires
puis par, donc, les citoyens pour... dans une espèce de marché noir qu'on
semble évoquer, là, bien, à ce
moment-là, s'il y a une pratique qui est illégale ou qui est à réprimer,
pourquoi est-ce que le gouvernement ne met pas en place des mesures pour
justement que cessent des pratiques qui seraient illégales?
C'est
comme si on essayait, en fait, de répondre à une demande qui n'a pas, à mon
sens, à l'heure actuelle, été justifiée et démontrée comme étant un
problème majeur et c'est absolument le contraire de ce qu'on avait comme
argumentaire lorsqu'il était question de l'article 37.2 sur la suspension
des règles d'urbanisme. C'est-à-dire, on disait essentiellement, du côté ministériel, qu'on ne faisait pas d'omelette
sans casser des oeufs, puis, même si le fait de soulever... de suspendre les règlements d'urbanisme, ça
pouvait donner certaines aberrations, il fallait courir la chance qu'on le
fasse pour régler une partie de la crise du logement et faire sortir de
terre des projets.
Là, on dit que... En tout cas, moi, je constate
que c'est une pratique qui semble relativement anecdotique, qui semble poser un
problème, mais qui n'est pas adéquatement et scientifiquement démontrée, mais
il faut absolument le régler même si ça crée, par ailleurs, un impact majeur
sur la collectivité de gens qui ne sont pas propriétaires, donc qui sont locataires. Et, si, individuellement, et
je voudrais terminer là-dessus, le cédant n'est pas celui qui est visé ou qui
est affecté par le changement qu'on veut mettre en oeuvre, il faut le voir
comme étant un groupe de gens, de locataires qui, eux, de toute façon, dans un marché où, dans l'ensemble de cette
mesure-là... disparaît, c'est l'ensemble des loyers qui vont augmenter, parce que c'est un phénomène
qui est sans contrôle, et, un jour ou l'autre, les individus seront touchés parce
qu'ils peuvent aussi migrer d'un logement à l'autre.
Alors, de voir ça sur une base strictement
individuelle au moment où il y a un bail en particulier qui est l'objet d'une
cession, c'est une façon, je dirais, commode d'évacuer le fait que,
collectivement, ce à quoi on assiste au Québec et à Montréal en particulier,
c'est une hausse majeure au-delà de la capacité de payer des locataires, une
hausse des loyers au-delà... largement au-delà de l'inflation également, et ça,
ça affecte un peu tous les locataires, cette augmentation du taux moyen ou des
loyers moyens au Québec et dans les villes québécoises, à travers le
territoire, et c'est cet élément-là qu'on essaie de faire valoir. Et, s'il
fonctionne actuellement, c'est parce qu'il tire... La cession de bail peut,
jusqu'à un certain point, agir comme contrepoids à l'augmentation des loyers
qui a cours lorsqu'on refuse justement de céder... la cession de bail ou encore
lorsqu'on change de locataire sans nécessairement respecter les règles
générales, là, qui sont prescrites par le TAL.
Le
Président (M. Schneeberger) : Oui, est-ce que la ministre veut intervenir? Non?
Non, aucune intervention? Oui, Mme la députée de D'Arcy-McGee.
Mme Prass : Oui, je voudrais revenir
au point de mon collègue de Laurier-Dorion quand on parlait de motif autre que
sérieux pour ne pas accepter la cession de bail. L'exemple qu'il a donné en est
une bonne... Donc, une mère monoparentale avec plusieurs enfants qui se voit
refuser... Votre réponse est que, justement, il y a des garanties dans la loi
pour contrer cette discrimination, et, comme il a mentionné, ces recours
peuvent prendre des mois, peuvent prendre des années, le temps que cette mère
monoparentale là et ses enfants ne trouvent pas de loyer à prix raisonnable.
Vous niez que c'est un outil pour le contrôle des loyers, mais, dans le cadre
de cette consultation... de ses consultations, l'administration Plante, donc la
mairesse de Montréal, dans le mémoire qu'ils ont déposé ici, avance que la
cession de bail constitue un refuge contre les abus et que, lors des
changements de locataire, le loyer augmente en moyenne de 14 % à Montréal.
Donc là, on a la ville de Montréal, la municipalité, qui prend acte et se
prononce sur le fait qu'eux, ils reconnaissent que, quand il y a un changement
de locataire plutôt qu'une cession de bail... qu'il y a une augmentation des
loyers.
• (16 h 10) •
Et, juste pour vous faire un petit historique,
parce que, là, on dit que ça fait 50 ans que ce droit acquis est en place, donc, c'est dans les années... en 1973,
dans les années 70, excusez-moi, le gouvernement du Québec a commencé
à reconnaître le besoin de protéger les droits des locataires et à promouvoir
la flexibilité dans les contrats de location. En 1973, la Loi sur le Régie du
logement a été adoptée, établissant un cadre juridique pour la location
résidentielle au Québec. Cette loi a introduit le droit à la cession de bail,
permettant aux locataires de transférer leur bail à une autre personne avec
l'accord du propriétaire.
Au fil des ans, la législation sur la cession de
bail au Québec a été modifiée et mise à jour pour refléter les besoins et les
réalités changeantes du marché locatif. Par exemple, en 1996, la loi a été
modifiée pour permettre aux locataires de céder leur bail à un membre de leur
famille sans avoir à obtenir l'accord du propriétaire. En 2006, la loi a été à
nouveau modifiée pour renforcer les droits des locataires en matière de cession
de bail. Les propriétaires ont été tenus de motiver le refus de cession par
écrit afin de prévenir les refus arbitraires ou discriminatoires. De plus, les locataires ont obtenu le droit de contester les
décisions de refus de cession devant la Régie du logement afin de garantir
un processus équitable et transparent.
Plus récemment, en 2018, la loi a été modifiée
pour introduire des mesures visant à protéger les locataires contre les abus et
les pratiques déloyales en matière de cession de bail. Par exemple, les
propriétaires ont été tenus de fournir aux locataires des informations claires
et précises sur les droits et les obligations liés à la cession de bail afin de garantir une compréhension mutuelle de toutes
les parties. L'historique du droit de cession de bail au Québec montre
une évolution progressive vers la protection des droits des locataires et la
promotion de la flexibilité dans les contrats de location.
Donc, 50 ans, et on voit qu'avec les années
la loi s'est ajustée pour faire face aux différentes réalités, mais toujours
dans un esprit de donner un droit à ces locataires et de s'assurer que les
refus ne peuvent être arbitraires ou discriminatoires. Donc, quand vous enlevez
le motif de sérieux et que vous l'adaptez plutôt pour que ce soient des motifs autres que sérieux, vous êtes en train de
revenir en arrière dans le temps, parce qu'en 1996, comme j'ai mentionné, on a pris acte de... excusez-moi, en 2006, on a
pris acte de cette possibilité de refus pour des raisons arbitraires ou discriminatoires et on a fait en sorte de modifier
la loi pour renforcer les droits des locataires en matière de cession de bail.
Alors,
encore une fois, vous n'avez pas de chiffres en tant que tels, à part des
chiffres qui vous ont été fournis par un groupe concerné. Donc là, on est en
train de prendre 50 années de droits acquis, d'une loi qui a été adaptée
au fur et à... au cours des années pour
justement renforcer ce droit pour les locataires, et là, basé sur des chiffres
que vous n'avez pas vraiment, vous voulez faire tout à fait le contraire
et donner droit au propriétaire pour n'importe quelle raison. Ça peut être : Je n'aime pas la composition de ta famille,
je n'aime pas ta face, quoi que ce soit. Et, oui, ces gens ont peut-être un recours, mais un recours à aller
devant ensuite un tribunal qui prendra des années avant que leur cause
ne soit entendue.
Donc, encore une
fois, basé sur des chiffres qui vous ont été fournis par un groupe d'intérêt,
je ne comprends pas pourquoi, après
50 ans et avec... à chaque... au cours des années, comme j'ai dit, on a
adapté la loi pour renforcer ce droit aux propriétaires, qu'est-ce qui
fait en sorte qu'aujourd'hui, parce que j'habite dans un duplex puis je veux
décider qui habite en haut de chez nous... bien, ça, ça fait en sorte que, tu
sais, moi, je peux dire non à telle personne parce
que je n'aime pas leur face. Donc, personnellement, à part le fait que je veux
décider qui habite en haut de chez moi, puis je ne trouve pas ça un
motif sérieux, je ne comprends pas le raisonnement de vouloir faire en sorte
d'enlever le motif sérieux pour des motifs autres que sérieux, qui peuvent être
complètement arbitraires et discriminatoires.
Le Président (M. Schneeberger) : Oui,
merci. Alors, est-ce que nous avons une réplique sur les questions ou...
Non? Ça va?
Mme
Duranceau : Non. Je pense que j'ai tout dit, là.
Le Président (M.
Schneeberger) : Parfait. Alors, d'autres interventions?
M.
Fontecilla : Oui, M. le Président. Là, Mme la ministre nous a dit
tantôt qu'un motif non sérieux, autre que sérieux, pour reprendre la
formulation du projet de loi, motif que j'ai qualifié... si ce n'est pas
sérieux, c'est donc futile, bon, ça pourrait être, par exemple, que le
propriétaire va procéder au changement de tapis, faire de la peinture, des
améliorations locatives. C'est important, dans ce type de débat là, de mettre
en parallèle différents types de phénomènes qui sont corrélés, qui vont l'un
avec l'autre, même concomitants, donc qui sont... qui ont un rapport l'un par
rapport à l'autre. S'il y en a un qui bouge, l'autre phénomène risque de
bouger.
On sait que, et je
suppose que Mme la ministre est amplement consciente de ce phénomène-là... que
c'est lorsqu'il y a un changement de locataire qu'il y a une augmentation de...
le locateur procède à une augmentation de loyer,
et souvent une augmentation très, très, très salée, là, dans le contexte de
pénurie de logements actuelle, parce qu'ils savent que les locataires
sont obligés de payer des montants nettement exagérés pour avoir accès à un
toit sur leur tête parce que les locataires
n'ont pas de propriété. S'ils n'ont pas de... ne réussissent pas à se trouver
un logement, ils sont à la rue, contrairement aux locateurs.
Donc, c'est lors du
changement de locataire qu'on procède à un changement du bail, là, et qu'on
augmente de façon substantielle, souvent de
façon abusive, sans même ne pas remplir la clause G... et, même si le locateur
remplissait la clause G, le locataire, à court de solutions pour se
trouver un toit sur sa tête, là, il va être obligé d'accepter ce loyer
beaucoup... dont il sait que le prix a été... En tout cas, il devine que le
prix a été augmenté et, même si la clause G était remplie, il sait que le prix
a été augmenté, donc, et là la question qui se pose est à savoir si un motif
autre que sérieux pourrait être, par exemple, la recherche... Dans des
termes... Dans le jargon technique, on pourrait appeler ça l'optimisation de sa
propriété, donc l'optimisation de son logement locatif, là, bref,
l'enrichissement. Est-ce qu'un motif autre
que sérieux pourrait être, là, de gagner plus d'argent? On va se le dire sans
détour, ce que certains appellent l'optimisation, d'autres appellent
s'enrichir, etc., et je ne le dis pas que... sans jugement de valeur, mais
gagner plus d'argent. Je pose la question à la ministre. Donc, est-ce qu'un
motif autre que sérieux pourrait être celui d'engranger plus d'argent à travers
le loyer?
Le Président (M.
Schneeberger) : Mme la ministre.
Mme
Duranceau : Est-ce qu'il y avait une question de formulée?
M.
Fontecilla : Je peux la répéter. Je voudrais savoir si, dans les
motifs autres que sérieux qui sont déjà stipulés dans le code... bien, dans la
jurisprudence, ça pourrait être... Par exemple, tantôt, on a parlé de la
possibilité de discrimination. Donc, ça ne
me tente pas d'avoir une locataire qui a trois enfants et qui va me déranger.
Bien, ça pourrait être un autre
motif... et je reprends le terme de la ministre, qui nous disait : Je
vais... je profite du changement de locataire pour faire de la peinture, changer les tapis. De façon empirique, on
sait comment ça se passe, là. C'est lors du changement de locataire
qu'on profite pour faire des augmentations substantielles de loyer. Est-ce que,
pour elle, l'opposition à la cession de bail
pour un motif autre que sérieux... le motif autre que sérieux, ça pourrait être
celui d'optimiser son loyer ou de gagner tout simplement... autrement
dit, gagner plus d'argent?
• (16 h 20) •
Mme
Duranceau : Là, premièrement, là, sur la question de discrimination,
là, l'article 1899 du Code civil prévoit que «le locateur ne peut refuser
de consentir un bail à une personne, refuser de la maintenir dans ses droits ou
lui imposer des conditions plus onéreuses pour le seul motif qu'elle est
enceinte ou qu'elle a un ou plusieurs enfants, à moins que son refus ne soit
justifié par les dimensions du logement». Bon, je peux continuer, là. Donc, la
notion de discrimination, là, elle est
prévue dans la loi, puis ce n'est pas cet article-là qui vient protéger ou pas
contre la discrimination, première des choses.
L'autre
chose, c'est qu'on semble penser qu'elle est parfaite, là, la mesure de cession
de bail, puis qu'elle sert à toutes les
fins. Premièrement, l'objectif de cette mesure-là, c'est de relever un
locataire, donc celui qui a un bail avec un propriétaire, de relever ce
locataire-là de ses obligations en vertu du bail s'il souhaite quitter, O.K.?
Après ça, là, c'est utilisé à plein d'autres fins qui ne sont pas celles qui
sont prévues par la mesure. C'est ce qu'on vient corriger, mais on s'imagine
que c'est parfait, là, toutes les cessions de bail, entre guillemets,
illégales. Le locataire qui rentre, là, qui a payé 5 000 $ pour se
prévaloir d'un bail à bas prix, bien, je m'excuse, il n'a pas le loyer à bas prix qu'il était supposé avoir. Il y a eu une
petite prime de chargée au passage, et puis ce n'est pas le loyer qu'il aurait
dû avoir selon la clause G puis selon les règles établies. Ça fait que je pense
qu'on généralise puis on prétend que cette clause-là, elle marche à la
perfection puis qu'elle sert les intérêts de tout le monde, là, mais c'est
complètement faux. Elle n'est pas utilisée pour les raisons pour lesquelles
elle a été mise en place. C'est ce qu'on vient corriger. Et éventuellement on
va se rendre aux autres mesures qui sont proposées dans le thème n° 5,
qui viennent gérer puis encadrer les hausses de loyer.
Et puis aussi je
pense qu'il faut arrêter d'avoir les oeillères juste d'un seul côté, là, quand
on regarde cette clause-là. On a des gens qui ont mis toutes les... leurs
économies dans des petits immeubles et qui doivent gérer leurs immeubles pour
qu'à la fin de l'année ça balance aussi, là. Alors, si les gens décident de
refuser une cession de bail, de résilier un bail et de prendre la chance d'être
capables ou de n'être pas capables de relouer le logement après, ils ont le
droit de faire ça. Ils ont le droit de réinvestir dans leurs immeubles pour en
améliorer la qualité, puis je ne pense pas que c'est au locataire qui décide de
céder son bail parce qu'il vient d'obtenir un emploi dans une autre ville de
décider qui viendra s'installer dans le logement en question.
Le Président (M.
Schneeberger) : Oui, député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla :
Oui, M. le Président. Bien, je
n'ai pas eu la réponse tout à fait que je voulais, là, c'est difficile, parce
que Mme la ministre dit tellement de choses intéressantes que ça a tendance à
nous dévier, là, du débat, là, mais, tout d'abord, j'aimerais...
Elle nous parle
évidemment, là, du petit propriétaire qui a mis toutes ses économies dans son
duplex et qui veut choisir la personne qui va rester au-dessus de sa tête, mais
je suis convaincu qu'une femme cultivée comme Mme
la ministre sait très bien qu'il y a un phénomène qu'on appelle la
financiarisation, qui commence à faire son oeuvre aussi au Québec, là, et il
s'agit de grands... On est loin du petit propriétaire de... qui cherche à
assurer ses vieux jours, là, mais on parle de grands intérêts financiers qui
sont cotés en bourse, là, qui cherchent à optimiser, et ça veut dire monter
les loyers, là, pour engranger plus de profits, et qui, eux aussi, ne sont pas
intéressés à la possibilité de la cession de bail, là, parce que, justement, ça
garde les loyers... ça les empêche d'augmenter les loyers, là.
Mais je veux revenir
à ma question et j'aimerais ça qu'elle me réponde, parce que ça a été... Entre
autres, l'Association des juristes progressistes l'ont soulevé. Il y a
plusieurs... Le Tribunal administratif du logement a traité à plusieurs
reprises de cet... du cas de figure suivant, c'est-à-dire un propriétaire qui
refuse d'accepter une cession de bail, là, parce que lui, il veut justement
pouvoir monter le loyer, suite au départ du locataire, lorsqu'il va recevoir un
autre locataire, et le Tribunal administratif du logement a statué, selon les
lois actuelles, selon... avec la cession du bail
telle qu'elle est, il a statué que la poursuite de l'enrichissement d'un
propriétaire ne peut être considérée comme un motif valable. Et, puisque
la ministre n'avait pas répondu directement à cette question-là tantôt, je pose
la question au président du Tribunal administratif du logement, là. Est-ce que,
dans l'état actuel du droit, la poursuite d'obtenir davantage de gains
pécuniers, là, en refusant la cession de bail est acceptée par la jurisprudence
en ce moment?
Le Président (M.
Schneeberger) : Mme la ministre.
Mme Duranceau :
M. le Président, on mélange tout, là. Je veux dire, la cession de bail, là,
ce n'est pas une histoire en vase clos, là,
qui... qu'une fois que ça s'applique, là, il n'y a plus rien autour, là. Il y a
encore des règles, là. La clause G est encore là, on va finir par en
parler, et le Tribunal administratif, il est encore là. Il y a des règles. Un
propriétaire qui refuse une cession de bail, et qui résilie le bail, et qui
choisit de relouer à quelqu'un d'autre, il est assujetti aux mêmes règles que
les autres propriétaires. Donc là, c'est un épouvantail, là, pour faire croire
que, là, s'il n'y a plus de cession de bail,
ça devient le far west. Ce n'est pas ça, là, les mêmes règles s'appliquent, et
c'est prétendre que tout notre système ne fonctionne pas, là, d'aller où
vous allez. Donc, ça, je ne suis pas d'accord avec ça.
L'autre chose, vous
me parlez de financiarisation, là, les chiffres, on les a, la majorité,
88 % des logements, c'est des petits propriétaires. Oui, il y a des grands
propriétaires puis des sociétés cotées en bourse. Savez-vous quoi? Les sociétés
qui sont cotées en bourse, là, bien, elles ont des règles à respecter puis
elles ont des critères ESG, environnement,
social, gouvernance, à respecter, puis respecter les lois, ça fait partie des choses
qu'il faut qu'ils respectent.
Alors, moi, je ne
m'inquiéterais pas outre mesure des grands propriétaires qui sont cotés en
bourse, parce qu'ils ont l'environnement réglementaire dans lequel il faut
qu'ils opèrent ici, au Québec. Puis je suis bien... Je vous dirais que je suis
pas mal sûre qu'ils font avec les règles, et ce n'est pas là qu'on a des
problématiques. Il y a des propriétaires cow-boys, peut-être, mais on ne va pas
faire reposer toute la crise du logement sur la cession de bail puis sur des
règles qui ne sont pas bien adaptées puis qui ne visent pas... qui ne sont plus
appliquées pour les raisons pour lesquelles elles avaient été conçues, pour ce
que vous décrivez.
Le Président (M.
Schneeberger) : Des explications? Député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla : Oui, M. le
Président. Il me reste combien de temps sur cet article-là, M. le Président?
Le Président (M.
Schneeberger) : Il vous reste... Je n'ai pas le temps, mais il vous en
reste encore. Mais, de toute façon, il reste trois minutes à la session.
M. Fontecilla : Je sais bien, là.
Écoutez, de toute évidence, on n'a pas le même chiffre, M. le Président, là. Je
les ai nommés tantôt, 57 % du parc de
logements au Québec, là, est détenu par des propriétaires qui ont entre sept et
plus de 100 portes. Donc, on est
loin de l'image idyllique, là, que Mme la ministre veut nous... veut forger,
là, dans l'étude qui nous occupe aujourd'hui, mais je reviens à ma
question, là. Elle ne m'a pas répondu encore, là. Un motif autre que sérieux
pourrait être la recherche d'une augmentation de loyer, là. On va aller au plus
simple. Est-ce que c'est un motif autre que sérieux?
Mme Duranceau : Je veux dire, là,
vous vous présumez que tout le monde augmente le loyer puis ne tient pas compte
des règles, là. Cette clause-là, elle vise à relever un locataire qui veut
quitter de ses obligations en vertu du bail, puis le locateur qui choisit de
refuser la cession de bail et de résilier, bien, s'il veut augmenter le loyer,
bien, il va pouvoir l'augmenter en lien avec
ce qui est prescrit par le Tribunal administratif du logement puis en tenant
compte des travaux qu'il aura faits dans le logement. C'est un motif...
Ce n'est pas une question de motif autre que sérieux. Il y a une troisième option où tu n'as pas de motif à donner, puis
peut-être que ça sera ça, les intentions du propriétaire, mais, je le
répète, c'est sa prérogative, comme propriétaire du duplex, du triplex ou du
sixplex, de décider ce qu'il veut faire, compte tenu de son investissement dans
ce logement-là, et de vouloir que... quand il va le relouer à quelqu'un d'autre, que les lieux soient mis à
jour, plus neufs, rénovés. Je pense que c'est un motif qui est très valable, puis
il devra toutefois se plier aux règles.
M. Fontecilla : Avec un loyer plus
cher.
Mme
Duranceau : Oui, mais là, M. le député de Laurier-Dorion, rien
ne se perd, rien ne se crée. Alors, s'il y a des investissements qui sont
faits, il y a des calculs qui sont prescrits par le Tribunal administratif du
logement, puis un locateur a le droit d'augmenter en conséquence son
loyer.
Le Président (M. Schneeberger) : Merci
beaucoup.
Alors, compte tenu de l'heure, la commission
ajourne ses travaux à mardi, le 28 novembre, 10 heures.
(Fin de la séance à 16 h 30)