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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre!
Mesdames et messieurs, la commission du budget et de l'administration
commence ses travaux. Le présent mandat de la commission est de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 2, Loi modifiant diverses lois fiscales et d'autres dispositions
législatives.
M. le greffier, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui. Il y a cinq remplacements pour cette
séance. M. Bissonnet (Jeanne-Mance) remplace M. Assad (Papineau), M.
Maltais (Saguenay) remplace M. Bélisle (Mille-Iles), M. Desbiens (Dubuc)
remplace Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Trudel (Bourget) remplace M. Chagnon
(Saint-Louis) et M. Doyon (Louis-Hébert) remplace Mme Hovington
(Matane).
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet; M. le Président, j'aimerais souhaiter la
bienvenue à des étudiants de l'école secondaire Vanier,
dans votre comté, qui sont ici avec un groupe de jeunes anglophones
d'Oshawa, dans le cadre d'un échange d'étudiants. Je vous
demanderais de leur souhaiter la bienvenue au nom de la commission.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Jeanne-Mance. Au nom de la commission, il me fait
plaisir de vous accueillir et je vous souhaite la bienvenue parmi nous, au
Parlement de Québec. Bonjour à vous tous.
Loi concernant l'impôt sur le tabac
(suite)
J'appelle l'article 29.9.3, deuxième paragraphe. M. le ministre
du Revenu.
M. Gratton: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a des
interventions?
M. Garon: J'aimerais d'abord vous poser une question.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: Hier, vous m'avez dit, à un moment donné,
que c'était une intervention de 20 minutes au maximum. S'il y a
plusieurs interventions d'une minute, Il n'y a pas de problème.
Le Président (M. Lemieux): Non, il n'y a pas de
problème.
M. Garon: Vous additionnez le temps.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement, M. le
député de Lévis. La dernière ligne de l'article 245
nous dit: "Ce temps de parole peut être utilisé - en
référant aux 20 minutes - en une ou plusieurs interventions."
M. Garon: D'accord. Je vais avoir plusieurs questions à
poser au ministre du Revenu et je vais poser des questions brèves. Ma
première question au ministre du Revenu est la suivante. Est-ce que le
ministre du Revenu a un avis juridique de ses fonctionnaires ou son contentieux
au ministère du Revenu sur la légalité ou la façon
de procéder dans le décret ministériel qu'il a
signé le 29 janvier et appliqué à partir du 4
février après la publication dans la Gazette officielle, en se
prévalant des dispositions de l'article 9.3 que noua allons
étudier ce matin, aujourd'hui, en commission parlementaire?
M. Gratton: M. le Président, je ne suis pas sûr que
ce soit pertinent à la discussion, mais je suis prêt à
répondre que non, je n'ai pas d'avis juridique écrit comme tel
concernant les allégations de l'Opposition; on n'a pas senti le besoin
d'en requérir.
Si cela pouvait rassurer l'Opposition et le député de
Lévis, je serais bien prêt à faire d'autres consultations,
pour s'assurer qu'on est a 100 % sécuritaire quand on affirme, comme on
continue de l'affirmer, qu'il n'y a aucune différence entre
l'application de l'article 29 du projet de loi et celle de tous les autres
articles. On peut faire des consultations et, s'il devait se
révéler qu'on se place dans une situation où il y aurait
risque d'une contestation juridique quelconque, on pourra toujours faire les
amendements qui s'imposent avant la fin de cette commission, si on obtient les
avis ou les résultats de cette consultation avant la
fin de nos travaux, ou à l'Assemblée nationale, au moment
où on devra étudier le rapport de la commission et
procéder au débat sur l'adoption du projet de loi. Je suis
prêt à m'engager à tâcher de rassurer le mieux
possible l'Opposition quant à la légalité qui, nous le
maintenons, existe par rapport à cet article 29.
Je ne sais pas si cet engagement de ma part pourra satisfaire
l'Opposition et lui permettre d'adopter l'article 29. J'en laisse la
décision à l'Opposition.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: M. le Président, c'est parce qu'il y a un point
qui est très anormal. Pour la première fois dans l'histoire du
Québec, le ministre du Revenu utilise un article qui n'est pas
adopté et l'applique comme s'il était le ministre des Finances
venant de faire un discours sur le budget.
M. Gratton: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Question de règlement. M. Garon: En
vertu de quel article?
M. Gratton: Je veux bien... Bien, la pertinence, 211. La
pertinence du débat, M. le Président. On est en train de parler
du geste de la semaine dernière. II me semble que les membres de
l'Assemblée doivent parler de l'article 29 et du paragraphe 9.3. Qu'on
l'adopte ou qu'on dise pourquoi on ne veut pas l'adopter mais qu'on ne vienne
pas demander pourquoi j'ai posé tel geste ou je ne l'ai pas posé
la semaine dernière. Ce n'est pas pertinent au débat.
M. Gendron: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de
règlement, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Que je sache, le ministre du Revenu vient de soulever
une question de règlement. C'est toujours la même chose.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Si vous dites qu'il s'agit bel et bien d'une question
de règlement, je voudrais avoir l'occasion de discourir quelques
secondes sur la question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): II s'agit d'une question de
règlement, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Je voudrais attirer votre attention, d'une
façon encore là très posée, très calme; nous
sommes de bonne humeur ce matin, comme nous l'avons toujours été,
mais on va s'acquitter de nos responsabilités. On n'acceptera pas de se
faire interpeller constamment sur la question de la pertinence alors qu'on sait
très bien qu'à l'article 9.3 -de quoi parle-t-on à
l'article 9.3? - on dit que le ministre du Revenu peut déterminer, de
temps à autre, conformément à telle affaire, telle
affaire, une hausse de taxes. Ce geste a été posé par le
ministre du Revenu la semaine dernière. On ne discute pas de taxe sur,
je ne sais pas moi, les pentes de ski. On discute d'une taxe sur le tabac.
L'article 9.3 parle de cela et le geste a été posé par le
ministre du Revenu la semaine dernière.
Nous sommes donc très pertinents. Nous parlons
spécifiquement de ce qui a été posé comme geste par
le ministre du Revenu. En ce qui nous concerne, on n'acceptera pas d'être
interpellés constamment sur la pertinence, surtout que tout le monde est
d'accord pour relier ces deux gestes. Ces deux gestes sont intimement
liés, à savoir celui qui a été posé la
semaine dernière par le ministre du Revenu et ce que nous
débattons. C'est tellement vrai, et ce sera ma conclusion sur la
question de règlement, que M. le ministre du Revenu, hier, pour la
première fois, du moins en commission parlementaire, admettait d'une
façon tout à fait correcte que oui, premièrement, il
s'était basé sur l'article 9.4 pour signer son décret
et... Oui, on peut le mettre ici en preuve avec les galées et,
également, les journaux ce matin. Cela a été dit ici. M.
Gratton - je termine là-dessus...
M. Gratton: ...sur le discours sur le budget.
M. Gendron: ...reconnaît toutefois que c'est la
première fois qu'un ministre se sert d'une nouvelle méthode de
calcul non encore sanctionnée pour faire son décret. Ce n'est pas
moi qui parle. Je cite le ministre du Revenu. Il me semble qu'on est on ne peut
plus pertinent.
M. Gratton: Ce n'était pas le ministre du Revenu. Je
citais un journal. Je peux faire sortir les galées.
M. Gendron: Non. Je cite le ministre du Revenu à partir
d'une déclaration du journal.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu, s'il
vous plaît.
M. Gratton: On sait la différence. Ah,
oui, faites donc cela.
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de règlement...
S'il vous plaît, je n'ai pas terminé sur là question de
règlement, M. le député d'Abitibi-Ouest, parce que vous
vous souvenez qu'hier les deux groupes parlementaires ont fait état que,
lorsqu'il y avait une question de règlement, il valait mieux la clore
tout de suite. Sur la question de règlement, M. le député
de Sainte-Anne.
M. Polak: Merci. C'est exactement le même débat
qu'on a eu à la fin de l'après-midi, hier. Le
député d'Abitibi-Ouest dit maintenant: Vous, vous commencez
à vous opposer tout le temps. C'est comme dire: Le plus souvent on est
illégal, un moment donné cela va devenir légal. C'est
ridicule, ce raisonnement. Vous êtes dans l'illégalité,
selon l'article 211, et j'ai vu hier qu'on n'a pas parlé du tout du
projet de loi 2. On invoque l'article 9.4 parce qu'à 9.3 le texte dit
que le ministre peut de temps à autre déterminer. Toujours en se
basant sur le discours sur le budget, et on ne va pas plus loin que le 23 avril
1985. C'est le projet de loi no 2 que vous avez rédigé. Tout ce
qui est différent, et on le dit clairement, c'est que le nom du ministre
a été remplacé, heureusement.
M. le Président, pour ce qui est du reste du projet de loi no 2,
il faut, et on insiste là-dessus, que vous - je vous respecte comme bon
nouveau président - tentiez certainement de donner le plus de latitude
possible à l'Opposition, mais tout de même il y a une règle
du jeu à suivre. La règle du jeu, c'est la pertinence. On est ici
pour étudier le projet de loi no 2 et ce n'est pas une question de
principe, parce qu'ils vont trop loin. Ils vont parler des
événements qui sont arrivés subséquemment, ceux qui
sont arrivés la semaine dernière; qu'ils questionnent le premier
ministre, qu'ils questionnent le ministre des Finances, plus tard au mois de
mars ou d'avril, qu'ils agissent comme ils veulent. Il y a toutes sortes
d'autres recours possibles, s'ils pensent que cela existe. C'est presque
insultant de demander à un ministre: Avez-vous un avis juridique?
Avez-vous un avis juridique pour le fait que vous êtes en train de violer
notre règlement? Je peux vous le dire, vous n'avez pas besoin d'un avis
juridique parce que l'article 211 dit que vous êtes en train de violer
notre règlement. On y dit que tout discours doit porter sur le sujet en
discussion. Vous devez vous limiter, vous tous et nous aussi, au projet de loi
2 et pas à autre chose.
M. le Président, il faut - je l'ai dit hier - parce que je l'ai
entendu... Quand le député d'Abitibi m'a répondu, à
un moment donné, que ce n'était pas la manière
d'intervenir et que j'aurais dû m'objecter contre quelqu'un, j'ai
laissé passer tout le monde parce que cela commençait à me
déranger pas mal, hier matin. Surtout, j'ai attendu que le nouveau
député en parle parce que c'était sa première
chance, mais il continuait à dire ce que le député
d'Abitibi disait déjà.
M. le Président, l'Opposition est en train de faire
peut-être une sorte de procès au ministre du Revenu sur une
affaire qui n'a rien à voir avec le projet de loi 2. C'est ridicule
parce qu'on ne peut pas discuter de choses qui ont eu lieu après ces
dates-là. Ça, c'est le principe qu'on a dit. Vous avez
posé une question la première journée au ministre du
Revenu. Est-ce que dans tout ce texte-là, il y a des changements qui
couvrent les événements qui ont eu lieu depuis le discours sur le
budget Duhaime, le 24 avril 1985? La réponse a été
catégorique: non. C'est votre loi, c'est votre projet de loi et on
devrait procéder à vraiment se limiter. On ne devrait pas non
plus être forcé chaque fois de faire une objection et de dire
qu'on s'objecte, qu'ils violent le règlement. On demande au
président, de prendre, disons la charge de renforcer notre
règlement et de dire: Du moment que vous réaliserez qu'il sont en
dehors du mandat qui est celui d'étudier le projet de loi 2, coupez-leur
la parole tout de suite afin qu'ils se limitent à cela.
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de règlement,
M. le député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, nous sommes à tel point
dans la pertinence du débat que nous songeons même - il est
possible que ce soit fait au cours de cette journée ou au cours de la
journée de demain - à saisir le président de
l'Assemblée nationale du fait que le ministre du Revenu a porté
atteinte au droit des membres de l'Assemblée nationale, puisqu'il a
appliqué une loi... Vous savez, M. le Président - vous
représentez ici le président de l'Assemblée nationale -
que le président de l'Assemblée nationale doit protéger le
droit des parlementaires. Depuis la Grande Charte -cela fait quand même
des centaines d'années les droits des parlementaires sont fondamentaux
et l'on ne peut pas appliquer... Il y a un cas d'exception dans le cas du
ministre des Finances sous la forme d'une tradition, mais il n'a pas le pouvoir
d'amender des lois d'avance. Lui-même a dit dans son discours: Dans le
cas des cigarettes, le mode de calcul de la taxe sera de plus
réformé pour être rendu semblable.
Le Président (M. Lemîeux): M. le
député de Lévis, tout libéral que je puisse
être dans le droit que vous avez, chacun des
groupes parlementaires, à vous laisser vous exprimer, vous
comprendrez que vous débordez un peu la question de
règlement.
M. Garon: Sur la pertinence du débat.
Le Président (M. Lemieux): La question qui a
été soulevée, c'est sur la pertinence comme telle du
débat...
M. Garon: Oui, c'est cela.
Le Président (M. Lemieux): ...eu égard à
l'article 211 et à son mandat. Vous débordez...
M. Garon: Pas du tout.
Le Président (M. Lemieux): ...légèrement, M.
le député de Lévis.
M. Garon: Laissez-moi finir mon intervention.
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît!
M. Garon: Ce que je dis, on peut aller plus vite au
président de l'Assemblée nationale, si vous le voulez. C'est
possible aussi. Ce qu'on dit, c'est qu'on est en train d'étudier un
article du projet de loi. Avant que l'article du projet de loi soit
adopté ou soit même étudié en commission
parlementaire, le ministre du Revenu l'a déjà
appliqué.
M. Gratton: Comme les 248 autres.
M. Garon: C'est ce qu'on dit. Le ministre du Revenu l'a
appliqué non pas en vertu de son pouvoir déclaratoire de ministre
des Finances devant l'Assemblée nationale, mais comme si sa loi avait
déjà été amendée, la loi qu'il administre
qui est la Loi concernant l'impôt sur le tabac. C'est une autre question,
une question complètement différente» Le ministre du
Revenu, dans notre esprit, a porté atteinte au droit des parlementaires
de l'Assemblée nationale en appliquant une loi qui n'est pas encore
adoptée.
Le ministre des Finances, dans sa déclaration, a parlé
d'une augmentation de taxe d'un certain montant. Cette taxe est
appliquée depuis le mois d'avril 1985. Ce que le ministre du Revenu a
fait, il a fixé... C'est justement l'article 9.3. Il a changé le
prix de vente au détail des cigarettes mentionné dans l'article
9.2, lequel sert au calcul de l'impôt prévu à l'article 8.
C'est exactement cela qu'il a fait. Le prix des cigarettes que le ministre des
Finances avait fixé à 1,50 $, le prix moyen de vente du paquet de
25 cigarettes qu'il a fixé le 23 avril en disant que la loi viendrait
changer plus tard, ça lui a été appliqué. Mais le
ministre du Revenu a fait un autre changement, en vertu d'un décret
ministériel du 4 février publié dans la Gazette
officielle, où il fait passer le prix de 1,50 $ qu'il était dans
le discours sur le budget, à 1,88 $; cela, sous sa propre
autorité, en vertu d'un projet de loi qui n'a pas encore
été modifié. Écoutez, c'est l'enfance de l'art: le
projet n'est pas modifié.
Le Président (M. Lemieux): Avez-vous terminé, M. le
député de Lévis?
M. Garon: On est exactement dans le débat puisque le
ministre a appliqué... avant que la loi soit adoptée, avant
même qu'on l'étudie. Il a appliqué quel article? L'article
9.3, en changeant le prix moyen de vente au détail des cigarettes, en le
faisant passer de 1,50 $ à 1,88 $. Jamais vous ne trouverez dans aucun
allégué du budget du ministre des Finances du 23 avril qu'il
faisait passer cela à 1,88 $; il le fixait è 1,50 $. Dans
l'énoncé budgétaire du 18 décembre 1985 le nouveau
ministre des Finances non plus n'a pas fait de déclaration pour changer
le prix de vente au détail de 1,50 $ à 1,88 $.
M. Gratton: L'article 9.3.
M. Garon: Le ministre du Revenu a fait ça en signant une
déclaration le 29 janvier pour avoir effet le 4 février en se
servant exactement de la disposition de la loi qu'on est en train
d'étudier.
Une voix: ...
M. Garon: M. le Président, sur le plan juridique je
m'étonne même actuellement qu'il n'y ait eu aucun avis juridique.
On est en matière rétroactive, on est en matière de
finance, on est dans les matières les plus délicates sur le plan
du droit parlementaire, et le ministre du Revenu, qui n'est pas de formation
juridique, n'a demandé aucun avis à personne. Lui, il se dit:
Moi, je marche là-dedans, pas de problème! On est dans les
matières les plus complexes actuellement sur le plan juridique et le
ministre du Revenu n'a même pas jugé bon - c'est ce qu'il a
répondu à ma question - de demander un avis juridique.
M. Gratton: Une question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Une question de
règlement M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Là, le député me prête des
propos. Il dit que j'ai précisé que je n'ai pas demandé
d'avis. Je n'ai jamais affirmé que je n'avais pas demandé d'avis.
J'ai fait des
consultations, j'ai eu des avis et j'ai même assuré, si
ça pouvait rassurer l'Opposition, que je ferais d'autres consultations.
Si le député de Lévis préfère continuer
à se tirer en l'air, libre à lui! Mais j'insiste pour qu'il
demeure pertinent et qu'il respecte la règle de la pertinence, l'article
211.
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de
règlement, M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. La question qui se pose
actuellement est: Pourquoi cette commission est-elle réunie? Vous avez
tout à l'heure donné lecture du mandat de cette commission. La
réponse aux questions que l'Opposition pose actuellement se situe
à l'intérieur de la lecture que vous avez faite du mandat de
cette commission. L'article 211 est extrêmement clair là-dessus.
Nous devons voir si l'article 9.3, qui est à l'étude
actuellement, pose des problèmes et s'il y a des questions au ministre
de la part de l'Opposition sur des détails et des dispositions de cet
article.
Le débat que tente d'engager le député de
Lévis se fait devant le mauvais forum, M. le Président. Si
l'Opposition décide de mettre en cause le gouvernement, le premier
ministre, le ministre du Revenu et le ministre des Finances, il faut qu'il
fasse cela ailleurs, à un autre moment, d'une autre façon.
Nous sommes ici pour discuter de l'article 9.3 qui émane
justement de l'ancien gouvernement, de l'Opposition. S'ils ont des questions
à poser, s'ils ne se les ont pas posées au bon moment alors
qu'ils ont rédigé cet article, on va tenter de répondre
à des questions qu'ils auraient dû se poser dans le temps, quand
ils le rédigeaient. S'ils n'ont pas fait leur job quand ils ont
proposé à l'Assemblée l'adoption d'une loi et que,
maintenant, ils ont des inquiétudes quant à des dispositions
législatives qu'ils nous ont proposé d'adopter à
l'Assemblée nationale, libre à eux. 3e suis convaincu que le
ministre du Revenu est prêt à répondre à ces
questions. (10 h 30)
On doit se référer, M. le Président, à
l'article 244 de notre règlement qui dit: "La commission saisie
étudie chaque article du projet de loi et les débats portent sur
les détails du projet." C'est de cela qu'on doit parler et c'est
à cela qu'on doit s'en tenir.
M. le Président, avec tout le respect que je vous dois, je vous
suggère que les tentatives d'intimidation dont vous faites l'objet
actuellement avec des hausses de voix, de ton, ne devraient pas...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Louis-Hébert, je ne suis point impressionné par les haussements
de voix qu'il pourrait y avoir des deux côtés des groupes
parlementaires.
M. Doyon: Je suis très heureux, M. le Président, je
savais que vous me répondriez cela. Je voulais vous l'entendre dire, M.
le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député,
avez-vous terminé?
M. Doyon: Non, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez continuer, M. le
député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Tout simplement pour dire que le débat qu'on a
ici, qu'on doit avoir, c'est un débat qui porte sur l'article 9.3. 11 ne
porte pas sur quelque chose d'autre. Il ne peut pas être sur quelque
chose d'autre. L'article 244 vous indique ce que doit faire cette commission,
ce pourquoi nous sommes réunis.
Si nous ne faisons pas cela, M. le Président, non seulement nous
ne nous rendons pas service, nous violons le règlement. Le respect du
règlement nous oblige non seulement à ne pas donner raison
à l'Opposition sur ce point de vue pour déborder sur quelque
chose d'autre, mais il nous empêche de le faire. Même si nous
voulions le faire, nous n'avons pas le droit.
Même si vous vouliez, dans un élan du coeur, M. le
Président, parce que vous êtes un homme magnanime et bon prince,
permettre à l'Opposition de déborder et de discuter de quelque
chose d'autre, on ne pourrait pas le faire, parce que le règlement ne
nous le permet pas. Alors, votre ligne est toute tracée, M. le
Président, et voudriez-vous faire autre chose que cela que cela ne vous
est pas permis par le règlement.
Dans ce sens, il va falloir qu'on s'en tienne le plus rapidement
possible aux articles qui sont là, que l'Opposition pose toutes les
questions - on lui fait confiance -qu'elle veut sur les articles de la loi - le
ministre est là avec son adjoint parlementaire, je suis sûr qu'ils
ont toutes les réponses - mais sur les dispositions législatives
qui sont devant nous. C'est pour cela que nous sommes ici, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Louis-Hébert. M. le député de
Saguenay, vous avez demandé la parole tout à l'heure.
M. Maltais: M. le Président, c'est simplement pour
rappeler que le député de Lévis a allégué
qu'on brimait les droits des membres de l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de
règlement?
M. Maltais: Oui, c'est sur la question de règlement, parce
que, dans son préambule, il a allégué qu'à l'heure
actuelle le gouvernement brimait les droits des membres de l'Assemblée
nationale et j'aimerais bien savoir sur quoi il se base pour dire cela, parce
que, tout à l'heure, il demandait des avis juridiques et j'ai
l'impression que les allégations...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saguenay, c'est antiréglementaire.
M. Maltais: ...la tentative d'intimidation, cela ne prend pas du
tout de ce bord. Que le député de Lévis soit calme et
à l'ordre.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saguenay, s'il vous plaît!
M. Maltais: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Relativement à la
question de règlement, y a-t-il d'autres interventions?
M. Gendron: M. le Président, oui, une très courte
intervention. Je voudrais tout simplement vous rappeler encore une fois que
même si on fait face ce matin à une nouvelle recrue de l'autre
côté et qu'on essaie de nous faire accroire que les articles 9.3,
9.4 émanent de nous, cela vient de notre gouvernement, on aura beau
poser des questions, on l'a fait ce débat, M. le Président, on
comprend tout cela. On n'a pas besoin du brillant député de
Louis-Hébert pour venir nous expliquer cela ce matin, on l'a convenu
avec vous.
Mais ce . qu'il va falloir que vous conveniez, M. le Président,
c'est qu'à l'article 9.3 on parle d'un geste qui a été
posé par le ministre du Revenu qui est en tout point correspondant
à ce que nous discutons à l'article 9.3 et admis par le ministre
du Revenu lui-même dans son arrêté ministériel. Dans
celui-ci, lui-même fait référence à l'article 9.3
que nous discutons aujourd'hui. Peut-on être plus pertinent que cela? On
n'acceptera jamais, M. le Président, de se faire bâillonner sur
les propos qu'on a à tenir sur l'article 9.3 quand le ministre du Revenu
lui-même...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saguenay, s'il vous platti Voulez-vous laisser M. le député
d'Abitibi-Ouest s'exprimer.
M. Gendron: ...d'une façon très correcte a dit:
Oui, M. le Président, je reconnais que c'est la première fois
qu'un ministre se sert d'une nouvelle méthode de calcul non encore
adoptée qui ne fait pas l'objet d'un projet de loi. C'est la
première fois que cela arrive et c'est de cela qu'on veut parler et on
va en parler à l'article 9.3 dans nos droits de parole respectifs, parce
qu'un droit de parole de vingt minutes, ce n'est pas juste poser des
questions.
M. Gratton: Cela va dépendre de la décision du
président. Êtes-vous d'accord?
M. Gendron: Oui.
M. Gratton: M. le Président, on est prêt à se
plier à votre décision.
Le Président (M. Lemieux): Relativement à la
question de règlement, vous n'êtes pas sans connaître
l'article 40 qui permet quelques remarques à l'occasion d'un rappel au
règlement. Quel est le mandat qui a été confié
à la présente commission? Effectivement, le mandat confié
à la présente commission a pour objet de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 2, Loi modifiant
diverses lois fiscales et d'autres dispositions législatives.
Dans le cadre de l'étude de ce projet, il va sans dire qu'on ne
doit pas aller, eu égard aux remarques qui peuvent être
apportées, à l'encontre du principe de ce projet, ni contredire
le mandat qui est confié à la commission.
L'article 211 se lit comme suit: "Tout discours doit porter sur le sujet
en discussion." On invoque la règle de la pertinence. Eu égard
aux règles de procédure, vous n'avez pas de définition de
ce qu'on peut qualifier de pertinent ou pas à un débat. On doit
donc s'en référer à un cadre juridique, qui est le
mandat.
M. le député de Lévis et M. le député
de Louis-Hébert, vous qui êtes tous deux avocats et qui faites
chacun partie d'un des groupes parlementaires, vous n'êtes pas sans
savoir qu'à défaut de définition dans une loi ou dans un
règlement, on se réfère à la loi de
l'interprétation, et celle-ci nous indique ceci: Qu'on doit s'en
référer, eu égard aux usages et aux aphorismes de droit,
à la règle coutumière, c'est-à-dire au langage
commun. À défaut de ce langage commun, on se réfère
au dictionnaire.
Or, après avoir entendu diverses tergiversations de la part des
deux groupes parlementaires, hier, je me suis informé de ce qui pouvait
être pertinent ou pas. La coutume, la règle ou le langage
parlé, eu égard à la population, qualifie de pertinence:
Qualité de ce qui est pertinent; qualité logique du rapport entre
un élément de preuve et le fait établi; pertinent: qui
convient exactement à la chose, à la question; qui a une valeur
significative établie par la condition de structure d'une langue. Ce qui
convient à la chose, à la question, il va sans dire qu'on doit se
référer d'une façon très spécifique au
mandat qui
nous a été confié par l'Assemblée
nationale.
Eu égard à certaines remarques, à ce sujet,
j'aimerais faire état de l'article 316.2 qui nous dit qu'il arrive
parfois, lorsqu'un parlementaire ou un député veut reprocher
à un autre député d'avoir porté atteinte aux droits
et aux privilèges de l'Assemblée ou à un de ses membres,
que cette motion ne peut pas être faite en commission. Il faut bien
comprendre que cette motion doit être faite en Chambre et non. pas en
commission même. Je fais référence, à cet effet,
dans le cadre du débat, du mandat que nous avons d'étudier
l'article 29.3, que ce n'est pas pertinent au débat... je fais
référence à une décision qui a été
rendue hier au niveau de l'article 77 où on disait qu'en ce qui concerne
un avis professionnel, une question ne peut pas viser à obtenir un avis
professionnel personnel d'un des groupes parlementaires.
Essayez de vous en tenir è ce cadre de débat. Je crois que
vous avez les grands paramètres, ils sont indiqués. Je ne
voudrais en aucun cas brimer les droits de parole. L'attitude que je veux avoir
face à cette présidence, c'est l'attitude que M. Lorrain a
définie dans le cadre de son mandat, à savoir que nous sommes ici
pour respecter les droits de la minorité. Je vais respecter le droit de
parole de la minorité, vous pouvez en être assurés, sauf
s'il déborde le cadre du mandat qui nous a été
confié.
Je pense avoir été très tolérant. Je fais
appel au bon jugement des deux groupes parlementaires à savoir que
maintenant, on essaie de cerner les débats selon le mandat qui nous a
été confié, soit l'adoption du principe de la loi.
M. Gratton: M. le Président... M. Garon: M. le
Président...
M. Gratton: Est-ce que je pourrais faire une suggestion avant
qu'on aborde les précisions de votre décision? J'ai dit
tantôt à l'Opposition que j'étais prêt à faire
d'autres consultations. Oublions tout le débat politique et pensons au
projet de loi 2. Je pose la question: Est-ce que ça pourrait dissiper
les craintes de l'Opposition si je... J'aimerais que le député de
Lévis écoute parce que c'est è lui, comme porte-parole de
l'Opposition, que je fais ma suggestion.
Est-ce que l'Opposition pourrait se satisfaire d'un engagement de ma
part de faire d'autres consultations et de voir si, effectivement, il y a le
moindre doute quant à la légalité du geste posé la
semaine dernière? Le cas échéant, en supposant qu'il
existerait des doutes, à ce moment-là, on proposera un amendement
dont je ne connais pas la teneur au moment où je vous parle, parce que
je continue de croire qu'il ne sera pas nécessaire, mais si j'en venais
à la conclusion que c'est nécessaire, on pourrait le
présenter. II n'est pas probable qu'on termine nos travaux cette
semaine, on pourrait suspendre entre-temps I'étude de l'article 29 pour
y revenir au moment de la reprise de nos travaux la semaine prochaine,
probablement mardi. Cela pourrait-il apaiser les craintes, tout au moins pour
le moment? On pourrait continuer l'étude des autres articles du projet
de loi 2, quitte à revenir à l'article 29 plus tard. Je ne peux
pas vous offrir plus que cela à ce moment-ci. Je ne suis quand
même pas pour vous dire que je suis convaincu que j'ai agi
illégalement, je ne le suis pas. Je suis convaincu d'avoir agi selon les
coutumes, selon les traditions, selon les précédents, selon la
loi. Si on devait me faire valoir quelque part, parmi les personnes que je vais
consulter, qu'il y a possibilité du moindre doute, j'en informerai la
commission la semaine prochaine et, le cas échéant, je verrai
s'il y a moyen de satisfaire les craintes de l'Opposition.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, y a-t-il consentement pour suspendre?
M. Garon: Je vais vous dire une chose, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Lévis.
M. Garon: On parle du mandat de l'Assemblée nationale, je
suis d'accord sur le mandat. Le mandat est daté du 18 décembre
1985 où, sur la motion de M. Gratton, le projet de loi 2 a
été envoyé pour étude détaillée
à la commission du budget et de l'administration. Cela est un mandat de
l'Assemblée nationale du 18 décembre 1985. Par après, un
mois et demi plus tard, alors qu'on n'a pas encore siégé, le
ministre du Revenu, dans un document daté du 29 janvier 1986, dit:
"Attendu que le ministre du Revenu peut, conformément à l'article
9.3 de la Loi concernant l'impôt sur le tabac, déterminer de temps
à autre un prix de vente en détail moyen et pondéré
pour 25 cigarettes." Ce pouvoir est compris à l'article qu'on va
étudier, à l'article 9.3. Il ne l'a pas, de cette façon,
dans la loi qu'il administrait jusqu'à ce moment-là et il se
prévaut d'une disposition de la loi...
M. Gratton: ...M. le Président et il ne répond pas
à ma question.
M. Garon: ...après l'ordre... Non, non. Quand je dis, par
exemple: une atteinte à l'Assemblée nationale... Après
l'ordre de la Chambre, on a un ordre de la Chambre d'étudier un projet
de loi. Lui n'attend pa3 qu'on ait étudié le projet de loi, qu'on
l'ait adopté ou quoi que ce soit, il administre
l'article 9.3, l'amendement de 9.3, comme s'il avait été
adopté.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: Et c'est dans ce sens-là que je dis que la
question est bien plus forte qu'on pense puisqu'il s'agit à ce
moment-là, dans notre esprit, d'une atteinte aux droits de
l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, je pense tout à l'heure vous avoir indiqué, lorsque
vous parliez d'atteinte aux droits de l'Assemblée nationale, l'article
pertinent. Quant à ma décision au sujet de la question du
règlement, je crois que vous avez très bien compris que j'ai fait
état que vous ayez à cerner davantage le mandat et les principes
de cet article.
Maintenant, vous êtes aussi bien conscient, M. le
député de Lévis, qu'un président de commission n'a
pas à interpréter la loi ni à trancher les questions de
droit en commission parlementaire. Je ne vous citerai pas ici la nombreuse
jurisprudence que j'ai devant moi, mais ce n'est pas de mon mandat.
Après avoir fait une recherche hier, je peux vous assurer en bonne et
due forme... Je vous inviterais même à consulter le traité
de droit parlementaire et de pratique du Dominion du Canada où on en
fait état et le règlement Geoffrion au paragraphe 2 de l'article
67 qui dit: "II n'appartient pas à l'Orateur de décider si une
proposition est inconstitutionnelle ou incompatible avec une disposition
déjà adoptée ou avec une loi existante."
Ce que je veux vous dire, M. le député de Lévis,
c'est que je n'ai pas à trancher les questions de droit ici en
commission parlementaire et ce n'est pas là de mon ressort. Ce qui est
de mon ressort, c'est de faire en sorte que les articles puissent être
adoptés, que les articles puissent être étudiés, que
vous puissiez vous exprimer dans le cadre du mandat qui nous a
été confié.
Je vous demanderais, d'abord, à la suite de ces remarques s'il y
a consentement pour suspendre l'article 29.
M. Gendron: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Avant d'accorder le consentement de suspendre, on
vous demanderait une suspension temporaire de la séance de cinq
minutes.
Le Président (M. Lemieux): Je vais suspendre la
séance pour cinq minutes.
(Suspension de la séance à 10 h 45)
(Reprise à 10 h 51)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux
relativement à l'étude de l'analyse du projet de loi 2, loi
modifiant certaines dispositions fiscales. M. le député de
Lévis.
M. Garon: M. le Président, nous serions consentants
à suspendre l'étude de l'article 29 à condition que le
ministre du Revenu demande un avis au ministère de la Justice sur
l'application de cet article puisque, actuellement, toute cette question est
devenue un débat qui déborde évidemment le
ministère du Revenu et qui concerne aussi le ministère des
Finances. Si le ministre du Revenu nous dit qu'il est prêt à
demander un avis au ministère de la Justice pour une prochaine
journée où nous continuerions l'étude du projet de loi,
nous serions d'accord pour suspendre l'étude de l'article 29 et
continuer avec les autres articles, soit l'article 30 et les suivants, en
attendant cet avis au cours de la prochaine journée où nous
allons en faire l'étude en commission parlementaire.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: M. le Président, j'ai suggéré
qu'on suspende l'étude de l'article 29 de façon que je fasse des
consultations pour faire rapport à la commission la semaine prochaine.
Le député de Lévis a assorti son consentement à ma
suggestion d'une condition, c'est-à-dire que j'aille expressément
au ministère de la Justice. Pour le cas qui nous préoccupe, je
n'ai pas d'objection de fond, parce que, finalement, ce serait retourner
là même où le projet de loi 2 a été
préparé, c'est-à-dire aux légistes du gouvernement
alors que celui-ci était assumé par le Parti
québécois. Je présume qu'ils confimeraient le
libellé qu'ils nous ont déjà fourni. Mais si je devais
accepter la condition que pose le député de Lévis, je
créerais un précédent. Je ferais en sorte qu'à
toute commission, au moment où l'Opposition ou un membre de
l'Assemblée nationale n'est pas d'accord ou prétend qu'il y a
matière à requérir un avis juridique, on doive consulter
le ministère des Finances. Je maintiens ma suggestion pour que nous
suspendions l'étude de l'article 29 jusqu'à ce que je puisse
procéder à certaines consultations. Si je reviens devant la
commission et que je vous dis, après consultation, que je maintiens mon
point de vue, il sera toujours temps, encore là, de faire le
débat que vous voulez faire aujourd'hui. Si, au contraire, je reviens et
je vous dis qu'après consultation, il y a peut-
être lieu de proposer des amendements au projet de loi 2, je le
ferai à ce moment-là et on pourra, encore là, faire la
discussion. Tout ce que je demande à ce moment-ci, tout ce que je
suggère de façon qu'on puisse procéder... Je tiens pour
acquis que l'Opposition veut vraiment étudier de façon
détaillée son projet de loi 2. Si ce n'est pas le cas, qu'on me
le dise et j'agirai en conséquence. Mais je tiens pour acquis que
l'Opposition est d'accord pour procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 2.
Nous avons une divergence d'opinion profonde sur l'article 29. Je dis:
suspendons en attendant que je fasse des consultations, mais n'en faites pas
une condition sine qua non que je doive aller au ministère des Finances,
ce ne sera peut-être pas nécessaire. Laissez-moi de la latitude.
Je vous donne ma parole que je ferai rapport à la commission avant de
poser quelque autre geste que ce soit. De toute façon, la commission ne
peut pas terminer ses travaux tant et aussi longtemps que l'article 29 est en
suspens. Il me semble que c'est raisonnable et qu'on devrait accepter ma
suggestion telle qu'elle est, sans l'assortir de conditions.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Garon: II faut que le ministre du Revenu comprenne comme il le
faut de quoi il s'agit. Quant à l'article 9.3, sur la mise en
application du budget Duhaime, il n'y a pas de problème.
M. Gratton: C'est le fond, cela, M. le Président.
M. Garon: Non, non.
Le Président (M. Lemieux): M. le député...
M. Garon: Je veux juste expliquer un peu, ce ne sera pas
long.
Le Président (M. Lemieux): Très brièvement,
s'il vous plaît, M. le député de Lévis.
M. Garon: Pour l'application du budget Duhaime, ce que nous
disons, c'est que par la suite, pour la mise en oeuvre de l'application de la
loi qui n'est pas encore amendée, qu'a faite le ministre du Revenu par
son décret ministériel du 4 février 1986, là,
l'article 9.3 ne sert pas à cela. Ce qu'on dit, c'est qu'il y a un trou
juridique entre...
M. Gratton: On sait ce que vous dites, cela fait vingt fois que
vous le dites.
M. Garon: Oui, il y a un trou juridique...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, s'il vous plaît!
M. Garon: ...non pas par rapport à ce qu'a fait le
ministre des Finances dans son discours du 23 avril mais par rapport à
ce qu'a fait le ministre du Revenu. C'est là-dessus qu'on veut avoir
l'avis juridique.
M. Gratton: Ah! Je ne le savais pas. M. Garon: Bien, voyons!
M. Gratton: Bien, voyons donc! On le sait, ce que vous dites.
M. Garon: Mais ce n'est pas cela que vous avez dit. Vous
êtes revenu sur la légalité en tant que telle de l'article
9.3. On ne doute pas de la légalité en tant que telle de
l'article 9.3 pour mettre en oeuvre le budget Duhaime. Sauf qu'entre-temps, le
ministre du Revenu l'a appliqué de façon illégale. C'est
là-dessus que nous demandons un avis du ministère de la Justice
parce que nous prétendons que le ministre du Revenu l'a appliqué
sans avoir le droit de le faire. On ne peut se demander à soi-même
un avis juridique; nous disons qu'il doit demander un avis au ministère
de la Justice qui, lui, est responsable. Il me semble que le ministre du
Revenu, s'il était tellement sûr de son droit, ne devrait pas
avoir peur de cela. Le ministre de la Justice est là pour faire
appliquer la justice dans l'ensemble du Québec.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, je permets une intervention au ministre du Revenu. Rapidement, M.
le ministre du Revenu.
M. Gratton: M. le Président, je n'ai peur de rien. Je
n'exclus pas de consulter le ministère de la Justice qui a
procédé à la rédaction du projet de loi 2; tout ce
que je dis, c'est que je ne veux pas que la suspension de l'article 29 soit
assortie de conditions. C'est tout ce que je dis.
M. le Président, je répète ma suggestion: Qu'an
suspende l'étude de l'article 29 jusqu'à ce que je revienne
devant la commission avec le résultat des consultations que je m'engage
à faire.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-il consentement...
M. Gratton: M. le Président, si vous me le
permettez...
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le ministre du
Revenu.
M. Gratton:...sans l'assortir de conditions. Je dis à
l'Opposition que si elle n'accepte pas cette suggestion, je devrai conclure
à un manque flagrant de bonne foi de sa part et, à ce
moment-là, on votera l'article tel quel et cela prendra le temps qu'il
faudra.
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest, est-ce que vous avez des faits nouveaux?
M. Gendron: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Des faits nouveaux?
M. Gendron: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest, s'il vous plaît.
M. Gendron: Si vous me le permettez, M. le Président,
très rapidement.
Le Président (M. Lemieux): Très rapidement.
M. Gendron: Je pense que ce sont des faits nouveaux, car il y a
une distinction à établir entre la responsabilité normale
du ministre du Revenu de faire les consultations d'usage qu'il entend faire -
c'est sa responsabilité normale et je suis très heureux
d'entendre le ministre du Revenu nous dire ce matin qu'effectivement il serait
d'accord si nous suspendions l'article 29 au complet afin qu'il puisse
poursuivre ses consultations; c'est sa responsabilité interne, c'est lui
qui a à administrer la loi concernant la taxation sur le tabac - et la
prétention que nous avons qu'à l'article 9.3 il y a une
présomption d'illégalité. Nous sommes tout à fait
dans la légitimité traditionnelle du parlementarisme d'exiger,
comme parlementaires... Ce n'est pas ce qu'on appelle une condition du
genre...
Une voix: C'est du marchandage.
M. Gendron: C'est du marchandage. Tout ce qu'on veut mentionner
au ministre du Revenu, c'est que, pour continuer l'étude des articles
9.3 et 9.4 subséquemment, nous voudrions, comme parlementaires,
au-delà des consultations normales que le ministre du Revenu a toute
liberté de tenir, parce que c'est sa responsabilité, compte tenu
de notre prétention, notre présomption
d'illégalité, quand nous reprendrons l'étude de l'article
29 au complet, que nous puissions nous appuyer sur un avis juridique du
ministère de la Justice comme c'est la tradition, comme c'est normal de
le faire. J'entendais tantôt un conseiller juridique du
gouvernement...
Une voix: ...
M. Gendron: Juste une seconde! ...dire: Écoutez! C'est
inhabituel. C'est faux...
Le Président (M. Lemieux): M. le
député...
Une voix: C'est censé être vrai...
M. Gendron: Oui, c'est faux. Le gouvernement, traditionnellement,
a toujours permis que les parlementaires puissent s'appuyer sur des documents
officiels qui débordent la responsabilité habituelle du ministre
du Revenu. Nous disons: Oui, on suspend, mais à la condition qu'on
puisse avoir un avis du ministère de la Justice, parce que c'est une
question fondamentale. Si on n'a pas d'avis du ministère de la Justice -
on ne le sait pas à ce moment-ci...
M. Garon: 145 000 000 $.
M. Gendron: ...on ne comprend pas pourquoi il y aurait Heu de
poursuivre avec les autres articles.
Le Président (M. Lemieux): Une dernière
intervention, si vous le désirez, M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: M. le Président, il n'est pas question
d'accepter des conditions, quelles qu'elles soient. J'ai fait une suggestion.
J'ai fait appel à la bonne foi de l'Opposition et je constate qu'il n'y
a pas de bonne foi de la part de l'Opposition. Alors, allons-y.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a consentement
pour suspendre l'article 29, paragraphe 9.3? C'est ce qui a été
demandé au début. Est-ce qu'il y a consentement?
M. Gendron: Non, il n'y a pas consentement puisqu'on nous
refuse...
Le Président (M. Lemieux): Alors, on reprend
l'étude de l'article 29, paragraphe 9.3. Est-ce que quelqu'un
désire intervenir sur cet article et, préalablement...
M. Gendron: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Préalablement, M. le
député d'Abitibi-Ouest, relativement à l'article 211, vous
me permettrez une directive concernant ta règle de pertinence. L'article
299 de la jurisprudence parlementaire de Beauchesne nous dit: "L'interdiction
des digressions abusives suppose l'application de ce qu'on appelle la
règle de la pertinence." Cette règle est difficile à
définir, mais doit être interprétée au
bénéfice du député.
"L'interdiction des répétitions est d'application
difficile, les diverses étapes prévues par la procédure
législative favorisant, quand elles ne les multiplient pas purement et
simplement, les occasions de revenir sans cesse sur les mêmes propos.
Dans la pratique, l'Orateur use largement de ses pouvoirs
discrétionnaires." Cette règle est appliquée avec une
certaine souplesse.
Eu égard à ce qui a été dit tout à
l'heure et à ceci, je vous demanderais, s'il vous plaît,
d'être le plus respectueux possible de l'article 211 des règles de
procédure.
M. le député d'Abitibi-Ouest, voulez-vous intervenir sur
l'article 29, paragraphe 9.3?
M. Gendron: Je vais essayer, M. le Président, d'être
le plus pertinent possible et je veux effectivement intervenir sur l'article
9.3.
Il est bon, M. le Président, à ce stade-ci, de rappeler
qu'à l'article 9.3 que nous avons le mandat d'étudier -
même si on rappelle qu'on a le mandat d'étudier le projet de loi
2, on a également le mandat d'étudier les articles qui composent
le projet de loi 2 - on fait référence à la Loi concernant
l'impôt sur le tabac et on mentionne que le ministre du Revenu est
chargé de l'application de la présente loi.
Dans cette loi, depuis 1964, il y a des dispositions qui ont fait que,
de tout temps, jusqu'à 1985, jusqu'au budget Duhaime, on n'a jamais
modifié ce qu'on appelle la formule de taxation et c'est la
première fois - le ministre du Revenu en a convenu -qu'un ministre se
sert d'une nouvelle méthode de calcul non encore sanctionnée pour
faire son décret. Le ministre du Revenu poursuivait en disant: "Quelle
différence y a-t-il juridiquement - je ne suis pas avocat -je cite
toujours le ministre du Revenu - je ne suis pas juriste - entre une hausse de
taxes qui est due à l'augmentation d'un pourcentage de la taxe et une
hausse de taxes qui est due à une façon différente de
faire le calcul?"
À ce moment-là, M. le Président, vous convenez que
le ministre du Revenu lui-même admettait que, pour la première
fois, nous nous servons d'une disposition qui n'a pas été
entérinée par un projet de loi et qui n'a pas été
appuyée d'un énoncé budgétaire par le ministre des
Finances. On a essayé d'établir hier et avant-hier que le pouvoir
de taxation, parce qu'il s'agit d'un pouvoir de taxation, règle
générale, est toujours établi à la suite de la
publication d'un budget ou à la suite d'un énoncé
budgétaire du ministre des Finances.
Donc, nous revenons toujours à la même situation. Nous
avons la prétention, comme parlementaires, qu'il y a présomption
d'illégalité quant à la perception de cette taxe. En
conséquence, nous sommes absolument incapables de concevoir comment il
se fait que le ministre du Revenu, dans son arrêté
ministériel publié le 29 janvier 1986, puisse s'appuyer sur des
dispositions qui n'ont pas encore été adoptées.
M. Doyon: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Question de règlement,
M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, j'écoute le
député d'Abitibi-Ouest tenter de nous faire accroire qu'il est en
train de...
Le Président (M. Lemieux): ...l'article du
règlement, M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Oui. C'est l'article 211 sur la pertinence, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Doyon: Et compte tenu des remarques que vous avez faites et
qui ont été consignées.
M. le Président, vous avez donné la parole au
député d'Abitibi-Ouest pour qu'il nous fasse part de ses
remarques sur l'article 9.3 et qu'il puisse éventuellement poser des
questions au ministre ou donner son interprétation de l'article 9.3, ce
qu'il y voit et ce qu'il n'y voit pas. Dans le moment, il est en train de
recommencer le même débat que tout à l'heure à
savoir qu'il y a illégalité dans la façon dont s'est
comporté le ministre du Revenu.
Si on est pour faire ce débat indéfiniment toute la
journée, on n'en sortira jamais. Votre décision a
été rendue. Elle est claire, elle est précise et elle
s'appuie sur le règlement, elle s'appuie sur la jurisprudence et elle
s'appuie sur l'analyse du mandat qui a été confié à
cette commission. On ne peut pas faire - M. le Président, vous
êtes avocat - indirectement ce que d'une façon ou d'une autre on
n'a pas le droit de faire directement. C'e3t ce dont on est témoin
actuellement.
Je répète ce que j'ai dit tout à l'heure, et ce
n'est pas pire que les répétitions que j'entends de l'autre
côté. Si ce débat doit être fait, on n'est pas dans
le bon forum. On n'est pas au bon endroit pour le faire. S'il y a des plaintes
ou des demandes à porter à l'attention soit de l'Assemblée
nationale ou du président de l'Assemblée nationale, ce n'est pas
à cette commission, qui a le mandat d'étudier le projet de loi 2
et, particulièrement au moment où on se parle, l'article 29 de ce
même projet de loi.
Qu'on revienne encore en m'expliquant d'une autre façon, et cela
se ressemble beaucoup d'une fois à l'autre, que le ministre
du Revenu aurait, selon les prétentions de l'Opposition, agi
illégalement, on n'est pas sorti du débat qu'on a eu tout
à l'heure. Il est près de 11 h 15. On siège depuis 10
heures. Si on veut faire ce jeu, je vous suggère qu'on ne passera jamais
à travers le projet de loi 2.
Le Président (M. Lemieux): M. le... Oui.
M. Doyon: Et, M. le Président, je fais appel à
vous, en même temps que je fais appel aux membres de l'Opposition, pour
que, - je ne demande pas de faveur - le règlement soit respecté.
Si on a des choses à demander, qu'on fasse référence aux
articles du règlement qui font que ce n'est pas dans une commission
parlementaire qui a un mandat précis de l'Assemblée nationale
qu'il faut faire ces choses. On n'est pas au bon endroit. Nous
prétendons que les gestes posés par le ministre du Revenu sont
légaux. Nos adversaires d'en face prétendent le contraire. Mais
là n'est pas le but de la réunion de ce matin. Le but de la
réunion de ce matin c'est de regarder et d'étudier, d'adopter ou
d'amender l'article 29. S'il y a des propositions d'amendement, qu'elles soient
déposées. On en discutera en fonction du règlement
après que vous les aurez reçues, M. le Président. Que je
sache, il n'y en a pas.
Je dois vous dire dès maintenant - je termine là-dessus,
M. le Président - que chaque fois qu'on va revenir sur cette question je
vais soulever une question de règlement pour amener une décision
de votre part.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, j'ai écouté attentivement vos propos. J'ai
écouté tout aussi attentivement les propos du
député d'Abitibi-Ouest dans les cinq dernières minutes
que, je dois vous dire, je considérais pertinents pour les raisons
suivantes. Vous citiez une maxime à savoir qu'on ne peut pa3 faire
indirectement ce que la loi nous défend de faire directement. Il y a un
autre axiome de droit qui dit aussi: lex dura sed scripta. Une fois la loi
écrite, on dit que même si elle paraît dure, elle doit
recevoir son interprétation. Dans le présent cas, M. le
député de Louis-Hébert, on ne doit pas en arriver à
une interprétation qui est stricte, mais on doit -comme j'en ai fait
mention hier - en arriver à une interprétation qui fasse en sorte
que le droit des parlementaires, en vertu de l'article 244, reçoive une
interprétation telle que le veut la loi de l'interprétation
à l'article 41, large, libéral, qui assure son esprit et sa
fin.
Je vous ai cité tout à l'heure le deuxième
paragraphe de la jurisprudence parlementaire de Beauchesne qui dit ceci, et je
vais le répéter: L'interdiction des répétitions est
d'application difficile. Les diverses étapes prévues par la
procédure législative favorisant, quand elle ne les multiplie pas
purement et simplement, les occasions de revenir sans cesse sur les mêmes
propos dans la pratique, l'Orateur usant largement de ses pouvoirs
discrétionnaires... Cela veut dire, M. le député de
Louis-Hébert, qu'il pourrait arriver qu'un parlementaire, dans le cadre
d'un article précédemment étudié, puisse reprendre
certains de ses propos et ces propos peuvent être jugés pertinents
s'ils -dans une certaine mesure - touchent ou se rapprochent de l'article
étudié. Ce serait vraiment, je pense, brimer les droits des deux
groupes parlementaires que de vouloir en arriver à une
interprétation plutôt stricte et littéraire des articles
244 et 245 qui octroient un droit de parole à chacun des parlementaires
de 20 minutes et, je crois, une réplique de cinq minutes au ministre du
Revenu sur chacun des paragraphes, sous-paragraphes, amendements et motions
étudiés. En conséquence, M. le député de
Louis-Hébert, dans les cinq dernières minutes, je dois vous dire
que j'ai jugé, et j'avais une oreille très attentive, les propos
du député d'Abitibi-Ouest, qu'ils étaient vraiment
pertinents.
Je demande maintenant au député d'Abitibi-Ouest, eu
égard à ce qui vient d'être dit encore une fois, de
reprendre la parole concernant l'article 29.9.3 et de s'en tenir avec une
diligence, eu égard aux remarques qui ont été faites aussi
par le député de Sainte-Anne et par le député de
Louis-Hébert, è la règle de la pertinence, eu égard
au respect des règles parlementaires et eu égard au respect des
gens qui vous ont élus. M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Merci, M. le Président, de votre
décision. Je pense que c'était on ne peut plus clair dans
l'arrêté ministériel publié le 29 janvier 1986 par
le ministre du Revenu, il était on ne peut plus clair que c'est en vertu
de l'article 9.3 que nous étudions présentement que le ministre
du Revenu a pris la décision qu'il a prise. C'est ce que je suis en
train d'exposer, que c'est carrément le mandat de la commission
d'étudier l'article 9.3 qui fait référence à ce que
dorénavant "le prix de vente en détail des cigarettes
mentionné dans l'article 9.2 sert au calcul de l'impôt
prévu à l'article 8, jusqu'à ce qu'il soit remplacé
par un prix de vente en détail moyen pondéré que le
ministre détermine de temps à autre, conformément à
l'article 9.4 pour 25 cigarettes."
Dans l'attendu ministériel du ministre du Revenu, le 29 janvier,
le ministre du Revenu, pour la première fois, et c'est cela qu'on veut
faire alléguer, disait ceci: Attendu qu'en vertu de l'article 9.4 de
cette
loi - parlant toujours de la Loi sur le revenu - sur le tabac qui lui
permet d'imposer une taxe, pour la première fois, on a modifié ce
que nous appelions, nous, la formule de taxation. Ce qu'on a voulu
prétendre, c'est que cette disposition aurait dû s'appuyer sur un
avis juridique formel parce que c'était la première fois qu'un
ministre du Revenu parlait sans nécessairement être appuyé
sur un discours sur le budget qui permettait de modifier la mécanique
ou, encore, sur un énoncé complémentaire qui aurait
été prononcé par le ministre des Finances.
Normalement, en droit parlementaire, seul le ministre des Finances par
le truchement d'un budget, ou le ministre des Finances, par une
déclaration ministérielle, peut effectivement autoriser des
prélèvements d'impôt sur la base d'une loi qui existe, sur
la base d'un énoncé ministériel qui existe. Or, dans le
présent cas, nous avons la prétention que le ministre du Revenu
n'avait pas ces documents sur lesquels il pouvait s'appuyer. Je voudrais,
aujourd'hui, grâce à mon droit de parole de vingt minutes sur
l'article 9.3, demander encore une fois comment il se fait que le ministre du
Revenu n'a pas eu cette présomption que nous, nous avons le droit, je
pense, d'avoir. S'il ne l'a pas eue, est-ce que c'est parce que lui, comme
ministre du Revenu, pouvait effectivement s'appuyer sur des choses qui n'ont
pas été mises en preuve, qui n'ont pas été
communiquées aux parlementaires. (11 h 15)
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Vous avez entendu le député
d'Abitibi-Ouest parler depuis votre dernière décision. Ne
croyez-vous pas que maintenant la preuve est claire, qu'il est en train de
violer cette règle de pertinence.
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous, M. le
député de Sainte-Anne m'indiquer, dans les propos du
député d'Abitibi-Ouest, en quoi celui-ci viole la règle de
la pertinence eu égard à l'article 29.9.3 qui dit - je vais le
répéter, M. le député de Sainte-Anne - qui dit que:
"Le prix de vente en détail des cigarettes mentionné dans
l'article 9.2 sert au calcul de l'impôt prévu à l'article 8
jusqu'à ce qu'il soit remplacé par un prix de vente en
détail moyen pondéré que le ministre détermine de
temps à autre conformément à l'article 9.4 pour vingt-cinq
cigarettes."
M. Polalc Exactement. Ça c'est pour donner suite au
discours sur le budget du...
Le Président (M. Lemieux): Je vous demande, M. le
député de Sainte-Anne, de m'indiquer les propos du
député d'Abitibi-
Ouest qui font en sorte que celui-ci a violé la règle de
la pertinence.
M. Polak: Pas des propos, M. le Président. C'est parce que
le député d'Abitibi-Ouest raisonne ex post facto. Il parle des
événements de février 1986. Nous ne pouvons pas remonter
plus loin que le 23 avril 1985. Je lui ai dit cela hier après-midi, je
le lui ai dit ce matin et je le lui répète depuis ce
temps-là. Nous sommes en train d'étudier le discours sur le
budget et tout ce qui le suit pour donner effet à cette loi jusqu'au 23
avril 1985. C'est cela que ça couvre théoriquement, le projet de
loi 2.
Si ce projet de loi avait été présenté au
mois de novembre, on n'aurait jamais eu ce débat-là. Il parle
maintenant des événements du mois de février. Il ne peut
pas parler de cela du tout, ce n'est pa3 pertinent. Parce que voyez-vous, M. le
Président, la semaine prochaine, on va être forcé de
revenir ici à cause de leur obstruction. Savez-vous ce qui arrive? On va
parler de3 événements d'aujourd'hui, de demain, de dimanche. Cela
ne tient pas debout. Nous sommes ici pour discuter du projet de loi 2. On ne va
pas plus loin que le 23 avril 1985. Chaque fois qu'il se lève pour
parler d'un événement subséquent, je dois m'opposer pour
dire qu'il y à violation de notre règlement, de la règle
de la pertinence.
Je sais que c'est pénible. C'est bien beau de dire: La ligne de
démarcation est fine concernant la pertinence. C'est très clair
pour nous la ligne de démarcation. On vous demande de dire une fois pour
toutes à l'Opposition: Vous avez toute la latitude voulue jusqu'au 23
avril 1985. Parce que savez-vous, M. le Président, l'article 9.3 dont on
parle, c'est exactement pour donner suite au budget du 23 avril 1985. Cela n'a
rien à faire avec le ministre du Revenu; il n'était même
pas ministre du Revenu à ce moment-là.
On est en train de parler des déclarations de février du
ministre du Revenu. Or, c'est un tout autre gouvernement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Sainte-Anne, effectivement, conformément à l'article 41.2, la
décision du président de l'Assemblée ne peut être
discutée. Je suis bien conscient, pour reprendre le précept et
l'axiome du député de Louis-Hébert, qu'on ne peut pas
faire indirectement ce que la loi nous défend de faire directement,
j'aimerais tout simplement ajouter ceci: c'est que nous sommes dans le cas
d'une loi rétroactive et dans le cadre de cette loi-là, je pense
que je dois me permettre d'entendre les propos du député
d'Abitibi-Ouest, et je juge que ce qu'il a dit durant les cinq dernières
minutes était
pertinent.
Voulez-vous continuer, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Merci, M. le Président. Oui, je veux continuer
parce que M. le ministre du Revenu avait invité celui qui vous parle
à vérifier au Journal des débats la transcription des
débats que nous avons en commission. Je voudrais citer ici la
pièce R-126-CB-4 à 16 h 45 hier. Effectivement, pour la
première fois le ministre du Revenu disait, et là je cite le
ministre du Revenu concernant cet article-là directement au texte: "Ce
que le député d'Abitibi-Ouest met en cause c'est la
méthode de calcul. Ce n'est plus l'augmentation du pourcentage de la
taxe." Et M. le ministre du Revenu avait tout à fait raison. Ce que nous
remettons en cause c'est que, pour la première fois, on a modifié
non plus ce qui avait été établi par le budget de M.
Parizeau, parce que pour ce qui est de la paternité, nous en convenons,
c'est M. Parizeau qui avait effectivement, dans le budget de 1980,
instauré ou introduit cette taxe dite ascenseur ou ad valorem.
Je continue à lire les propos du ministre du Revenu: "Soit, j'en
conviens, ce n'est jamais arrivé auparavant." Il me semble, M. le
Président, qu'on devrait au moins avoir l'attention des parlementaires
d'en face sur ce que leur propre collègue vient de dire. Je le cite dans
le Journal des débats. Le ministre dit ceci: "Soit, j'en conviens, ce
n'est jamais arrivé auparavant. Les arrêtés
ministériels dont j'ai parlé tantôt, eux, ne visaient
qu'à mesurer l'augmentation de la taxe due à l'augmentation du
pourcentage de 45 % à 55 %." Et c'est très important, parce que
toute l'argumentation du ministre du Revenu, c'était de dire: M. le
député d'Abitibi-Ouest, faites-moi la preuve que vous n'avez pas
effectivement appliqué cette formule de la même façon que
nous l'appliquons, et, à ce moment-là, je m'engage à
retirer immédiatement cette taxe que nous avons imposée. Ce n'est
pas moi qui parle, c'est le ministre du Revenu actuel qui a dit ces propos. Si
on était était capable d'établir que, pour la
première fois, non seulement on modifiait ce qui avait été
établi par les discours de M. Duhaime et de M. Parizeau,
c'est-à-dire l'augmentation des pourcentages, mais la méthode de
calcul utilisée, à ce moment-là, il convenait de retirer
cette taxe. Votre présomption d'illégalité, il faudrait la
regarder, a-t-il dit.
Hier, à 16 h 45, M. le ministre du Revenu a effectivement
mentionné que cela n'était jamais arrivé avant, et c'est
notre prétention. C'est pourquoi, en discutant sur l'article 9.3, on a
ia conviction que, pour être capable de se faire un jugement
définitif, il y a lieu d'être appuyé sur un avis juridique
du ministère de la Justice, afin d'être certains que, comme
parlementaires, nous ne posons pas un geste qui consacre
l'illégalité. Je répète que c'est bel et bien dans
l'arrêté ministériel publié dans la Gazette
officielle que le ministre du Revenu a dit: Dorénavant, je
décrète - c'est le ministre du Revenu qui a dit cela - que, pour
le calcul de l'impôt prévu à l'article 8 de ia Loi
concernant l'impôt sur le tabac, le prix de vente au détail moyen
pondéré pour 25 cigarettes est de 1,88 $. Il l'a fait uniquement
à partir d'une présomption de l'adoption du projet de loi que
nous discutons à cette commission en ce qui nous concerne. Si ce
n'était pas exact, on pense qu'un ministre du Revenu qui prend des
décisions comme celles qu'il a prises, doit les prendre au moins en
s1 appuyant sur des fondements juridiques que nous n'avons pas, que
jamais aucun membre du gouvernement de la présente commission n'a mis en
preuve ici même ce matin. Nous ne pouvons pas accepter de ne pas avoir
cette information, parce que c'est une information que n'importe quel
parlementaire responsable qui veut s'acquitter de ses responsabilités
peut être en mesure d'apprécier lui-même sur la base des
connaissances que nous avons.
Ma conclusion sur l'article 9.3, c'est encore une fois: Qu'est-ce que le
ministre du Revenu veut cacher? De quoi a-t-il peur? De quoi a-t-il vraiment
peur? S'il est certain que les dispositions de l'article 9.3 sont vraiment
consécutives à un énoncé budgétaire ou
à une déclaration du ministre des Finances dont on n'aurait pas
pu prendre connaissance, qu'il le dépose à cette commission,
qu'il nous permette d'en prendre connaissance. Là, on verra
effectivement si notre présomption d'illégalité est assise
aussi sur un fondement juridique, parce que, depuis deux jours, ce sur quoi
essentiellement on a essayé de faire la preuve, c'est que le ministre du
Revenu, pour la première fois, a utilisé une nouvelle
méthode de calcul et on ne croit pas qu'elle s'appuie sur une loi ou sur
un énoncé budgétaire qui, normalement dans la tradition
parlementaire, fait force de loi. Ce sont les arguments qu'on a essayé
de faire valoir. Ce sont les arguments que mes collègues vont continuer
de faire valoir, parce que l'article 9.3 est très intimement lié
à la décision prise par le ministre du Revenu le 29 janvier 1986.
Dans ce sens, je pense que chacun des membres de ma formation politique a un
droit de parole et ils vont l'exercer, puisque, tantôt, on a
demandé des choses très simples en disant: Oui, on serait
d'accord pour suspendre, à la condition qu'on puisse avoir un avis
juridique du ministère de la Justice, non pas une indication que le
ministre du Revenu va continuer de s'acquitter de ses responsabilités
comme ministre du Revenu, à savoir qu'il va poursuivre le dialogue avec
ses fonctionnaires, qu'il va poursuivre certaines
vérifications et, selon son jugement à lui et non sur la
base des droits des parlementaires de ce côté-ci de la table, il
nous indiquera si sa réflexion et ses consultations lui ont permis
d'aller chercher de l'information additionnelle. Nous ne lui avons pas
demandé d'aller chercher de l'information additionnelle suivant son bon
jugement, on lui a demandé d'arriver ici avec un avis juridique formel
du ministère de la Justice qui nous permettrait de progresser.
Quant à savoir si on a l'intérêt de poursuivre
l'adoption des autres articles de ce projet de loi, M. le Président, je
crois qu'on en a fait la preuve, nous sommes rendus à l'article 29. Si
on n'avait pas voulu adopter aucun des articles, on aurait utilisé
d'autres mécanismes de la procédure pour éviter de se
rendre à l'article 29.
M. le Président, en conclusion, je pense que le ministre du
Revenu a le devoir d'indiquer aux parlementaires de cette commission pourquoi
effectivement il ne veut pas prendre l'engagement de déposer en cette
commission un avis juridique formel qui nous permettrait de faire taire notre
éventuelle présomption d'illégalité. Nous sommes
tout à fait d'accord pour que le plus rapidement possible nous ayons
tout l'éclairage requis afin d'être en mesure de dire: Nous avions
une prétention, et à la lumière d'un avis juridique
officiel, non partisan et qui ne vient pas d'un parlementaire membre de cette
commission mais des instances habituelles qui fournissent ce genre d'avis pour
avoir l'éclairage requis pour se faire une idée
définitive, notre présomption était fondée ou elle
n'était pas fondée.
M. Gratton: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: En vertu de l'article 256, avant que mon
collègue de Montmorency n'intervienne...
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le
député.
M. Gratton: ...j'ai relevé plusieurs inexactitudes dans ce
qu'a dit le député d'Abitibi-Ouest, mais une en particulier. Il a
dit - je relève seulement celle-là - que ça fait deux
jours que l'Opposition tente de prouver que le ministre du Revenu a agi
illégalement. Je lui ferai remarquer que c'est seulement depuis hier
après-midi qu'on discute de l'article 29. Depuis deux jours, ce que
l'Opposition a tenté de faire, ça a été de prouver
que les taxes qui avaient été annoncées la semaine
dernière étaient des taxes décrétées par le
gouvernement libéral plutôt que déjà prévues
dans le discours sur le budget de M. Duhaime en avril dernier et dans les
équilibres financiers du 3Q septembre du gouvernement
péquiste.
J'aimerais attirer l'attention du député d'Abitibi-Ouest
parce qu'il obtient une réponse tout au moins de Alain Dubuc ce matin,
dans le journal La Presse. Alain Dubuc dit clairement qu'effectivement les
taxes, dont celles du tabac dont il s'agit ici à l'article 9.3, ont
été levées et avaient été prévues et
estimées dans les revenus anticipés au moment du discours sur le
budget de même qu'au moment de la publication des estimations
budgétaires en septembre dernier. Je ferai grâce... non, M. le
Président, je lirai trois paragraphes de l'article en question. Je cite:
"Dans la synthèse du deuxième trimestre, coup de
théâtre! On ne parle plus de 530 000 000 $ - en parlant des
revenus que rapporterait la taxe sur le tabac - mais bien de 548 000 000 $. Le
document où l'on trouve ce nouveau chiffre a été
publié au mois de novembre, en pleine campagne électorale, et
donc quand le Parti québécois était encore au pouvoir.
"Enfin, dans son mini-budget du 18 décembre, le nouveau ministre des
Finances, libéral, M. Gérard-D. Levesque, propose à peu
près le même chiffre, soit 551 000 000 $. "La question, c'est bien
sûr de savoir pourquoi le ministère des Finances a prévu en
novembre que les recettes de la taxe sur le tabac augmenteraient de 18 000 000
$. La réponse est simple. Le ministère des Finances s'attendait
qu'il y ait, au début de janvier, une nouvelle enquête sur le prix
des cigarettes et donc qu'il y ait une hausse de la taxe sur les cigarettes en
février. Les chiffres les plus récents montrent que les recettes
seront plutôt de 23 000 000 $ de plus d'ici le 31 mars."
M. le Président, c'est cela qui était prévu, c'est
ça qui m'a amené à signer les arrêtés
ministériels et c'est ça qui fait que le projet de loi 2, dans
tous ses articles, n'est que le reflet juridique du discours sur le budget du
23 avril.
M. le Président, je répète que la bonne foi de
l'Opposition n'existe plus à cette commission à partir du moment
où elle a refusé de suspendre l'étude de l'article 29
alors que je m'engageais à faire des consultations et à faire
rapport devant la commission. L'Opposition - là je conviens que ce n'est
peut-être pas l'ensemble des membres du Parti québécois qui
siègent à la commission, je sais qu'ils ne sont pas maîtres
de la stratégie de leur parti. Il y a un grand absent en la personne du
député de Lévis qui, semble-t-il, décide de tout du
côté de l'Opposition. Cela, je regrette de vous le dire, c'est
votre problème, non pas le mien.
Le Président (M. Lemieux): M. le
député de Montmorency. (11 h 30)
M. Séguin: M. le Président, j'aimerais apporter
quelques commentaires un peu nouveaux à ce qu'on a déjà
dit relativement à l'article 29. 3e crois qu'il faudrait se replonger un
peu plus dans la mécanique puisque c'est cela qu'on semble vouloir
attaquer. Je relève là-dessus quelques propos du
député d'Abitibi-Ouest qui disait tantôt que c'était
sur la mécanique qu'il y aurait peut-être une question de
légalité à se poser.
Je pense qu'il faut nécessairement revenir au discours sur le
budget du 23 avril, à la page 31, où le ministre des Finances de
l'époque, M. Duhaime, précisait au troisième paragraphe,
quatrième ligne, et je cite: "À compter de minuit ce soir, le
taux de la taxe sur les tabacs sera porté de 55 % à 60 %." Cela
se reflète dans l'article 28 de la loi 2 que nous avons adopté.
Nous avons adopté l'article 28 de la loi 2. Cette phrase qui est dans le
budget, qui modifiait la mécanique de la taxe de vente le 23 avril, a
été adoptée hier.
L'article 29 qui suit équivaut à la phrase suivante que je
continue de citer: "Dans le cas des cigarettes, le mode de calcul de la taxe
sera de plus réformé pour être rendu semblable à
celui d'autres provinces: - je dis bien "deux points" -dorénavant le
taux de la taxe s'appliquera sur le prix de vente moyen d'un paquet de 25
cigarettes plutôt que sur celui d'une cartouche" - de 200 cigarettes.
Cela, c'est dans le document présenté par M. Duhaime le 23 avril.
Ce n'est pas nous qui l'inventons, c'est là.
Le projet de loi 2 ne vise qu'à refléter ces mesures et je
redis que la loi 2 a été préparée et
imprimée par l'ancien gouvernement, lequel projet de loi 2 était
prêt avant le 2 décembre. Nous l'avons représenté
intégralement sans en changer une virgule, ce qui veut dire qu'en ayant
adopté l'article 28 hier il serait totalement illogique de la part de
l'Opposition de prétendre que l'article 29 serait illégal,
puisque les deux indications budgétaires modifiant la loi sur la taxe
sur le tabac sont conséquentes l'une avec l'autre et qu'on n'a pas
soulevé la légalité hier, on a adopté l'article 28.
Aujourd'hui, si on soulève l'illégalité de l'article 29,
c'est absolument inconséquent. Ceci est le premier point.
Le deuxième: On dit que cette mesure ne serait pas appuyée
par un budget, une loi, etc., et, là, on soulève la
légalité - on en a parlé hier, on va en parler aujourd'hui
- du fait que cette mesure, qui a donné suite à un
arrêté ministériel en 1986, n'est pas appuyée par un
budget ou une loi. Or, ce qu'on a à discuter ici, ce n'est pas un acte
posé par le ministre du Revenu, c'est simplement de regarder si
l'article 29 est conforme à l'énoncé budgétaire du
23 avril.
S'il arrivait que, postérieurement à cela, le ministre du
Revenu ait commis ou pas des irrégularités, cela ne regarde pas
la présente commission parlementaire qui étudie l'article 29;
l'article 29 a été appliqué de facto depuis le 24 avril et
on ne peut pas changer cet état de fait. Les membres de l'Opposition,
qui ont exprimé leur droit de parole, ont fait des commentaires et je
suis convaincu qu'ils savent que toutes les autres dispositions de la loi 2 ont
le même traitement.
Le ministre du Revenu, depuis le 23 avril, a effectivement
appliqué l'ensemble de toutes ces mesures sans arrêté
ministériel, sans déclaration devant l'Assemblée nationale
tout simplement parce que le ministre de3 Finances a ordonné, non pas
uniquement par rapport à la loi de la taxe sur le tabac, mais par
rapport à la loi sur les impôts qui représentent des
avantages fiscaux, pour la première année, de près de 350
000 000 $ et, pour l'année 1987, de près de 500 000 000 $;
avantages fiscaux additionnels consentis à l'ensemble des contribuables,
ce qui a fait dire à la plupart des membres de l'Opposition que
c'était un bon projet de loi, la loi 2. J'en réfère en
cela aux déclarations faites le 17 décembre à
l'Assemblée nationale.
Or, qu'est-ce qu'on cherche? Est-ce que c'est de dire que si l'article
29 n'est pas légal... Effectivement, au moment où on se parle,
les articles 1 à 248 de la loi 2 n'ont pas force de loi, ne sont pas
légaux tant qu'ils ne sont pas sanctionnés. Alors, il faudrait
dire que les articles 1, 2, 3 et 4 qui ont été mis en marche par
le ministre du Revenu, qui a modifié les rapports d'impôt que
l'ensemble des citoyens ont reçus déjà, ce n'est pas
légal.
C'est vrai, ce n'est absolument pas légal, au même titre
que ne sont pas légaux les articles 28 et 29 particulièrement
soulevés par certains membres de la commission. Justement, c'est ce
qu'on fait ici; on étudie un projet de loi qui va sanctionner ces
mesures, et tout le monde le sait très bien. D'ailleurs, tous les
gouvernements sans exception ont tout le temps, année après
année, déposé des budgets et fait suivre une
législation dans un délai plus ou moins long après et,
tant que la loi n'est pas sanctionnée, toutes les mesures
budgétaires, techniquement, sont illégales ou, à tout le
moins, sans force de loi. C'est reconnu, tout le monde le sait.
Cependant, les tribunaux - pas besoin de citer les tribunaux anglais -
canadiens ont déjà confirmé qu'un gouvernement avait le
droit de déposer un budget, de mettre immédiatement ses mesures
en marche, d'adopter des lois plus tard et que ces lois pouvaient
rétroactivement confirmer l'application des mesures budgétaires,
de sorte que toute contestation sur la légalité
devienne inopérante ou inutile, puisque, dans le temps, un jour
ou l'autre, la loi va remonter à l'énoncé
budgétaire.
Dans notre cas, les articles 28 et 29, particulièrement l'article
29, sont rétroactifs au 24 avril 1985 et fidèles à
l'énoncé budgétaire du 23 avril déposé par
M. Duhaime. Or, je me pose la question: Où est
l'illégalité? Si c'est de dire que c'est parce que la loi n'est
pas encore adoptée, ce n'est rien de nouveau et l'adoption de la loi 2
va confirmer que, rétroactivement, c'était légal.
Si c'est de dire que le ministre du Revenu ne pouvait pas lever des
taxes, comme cela a été fait par l'arrêté
ministériel, il y a deux choses qu'il faut répondre, c'est que,
premièrement, cela n'a rien à voir avec la loi 2 puisque la loi 2
ne fait que confirmer un principe qui est sous-jacent au budget, tel que l'a
confirmé M. Duhaime et qui été appliqué par le
ministère du Revenu, et, deuxièmement, si on soulève la
légalité, il faudrait aussi soulever la légalité de
toutes les autres mesures qui ont été adoptées, qui ont
été mises en vigueur, qui ont permis au ministère du
Revenu de percevoir, de taxer, de rembourser. J'indique là-dessus que
les droits des contribuables, à l'heure actuelle, vont s'excercer, par
avis d'opposition, contestations devant les tribunaux, à partir de
maintenant, sur les modifications adoptées par le budget de M.
Duhaime.
Je pense qu'un point intéressant à noter, c'est que
l'ensemble des contribuables vivent déjà dans le système
fiscal créé lors du budget du 23 avril et qu'ils vont exercer
leur droit de contestation, s'il y a lieu. Si un contribuable prétend
qu'on a cotisé injustement, etc., quelles dispositions va-t-il
alléguer devant les tribunaux ou sur avis d'opposition? Le budget de M.
Duhaime, dont la loi n'est pas encore adoptée.
La loi de la taxe de vente ou la Loi concernant l'impôt sur le
tabac n'est pas différente. Je fais remarquer que la mécanique
n'a pas été modifiée. Il y a trois mots, je l'ai dit hier,
qui ont été changés à l'ancien article 29 pour en
arriver à l'article 29 qui est présentement à
l'étude. Je ferai remarquer également que l'article 28 qui
portait sur l'augmentation du pourcentage qui affecte le calcul, qui affecte la
mécanique, n'a pas été jugé illégal, il a
été adopté. En quoi, actuellement, faire porter le calcul
sur 200 cigarettes à 25 cigarettes constitue-t-il une
illégalité, alors qu'on le retrouve dans la mesure
budgétaire textuellement à la page 31?
Si l'Opposition décide de juger illégale cette mesure, il
faudra rejeter en bloc l'article 28 également et l'ensemble de toutes
les autres mesures. Cela veut dire qu'il faudra aviser tous les contribuables
du Québec que le rapport d'impôt qu'ils ont entre les mains est
illégal et qu'on devra en faire un autre parce que l'ensemble des
mesures ne sont pas encore adoptées dans la loi 2. Quand la loi 2 sera
adoptée, on leur enverra les corrections. Cela arrive exactement
à ce résultat. Suivez la logique, c'est ça que ça
veut dire.
Vous savez très bien que dans l'exercice parlementaire, il n'est
pas question de cela. On respecte l'énoncé budgétaire
comme ayant force de loi et on l'applique intégralement. Je termine en
mentionnant qu'on dit que c'est la première fois que c'est
appliqué. Je fais allusion à l'énoncé que faisait
là-dessus le député d'Abitibi-Ouest. C'est peut-être
la première fois, je ne suis pas en mesure de le contredire et je ne
veux pas le contredire; supposons que c'est la première fois. Quel
rapport y a-t-il entre un fondement juridique ou budgétaire ou
confirmé par l'exercice parlementaire et la première fois? Il y a
de3 lois et d'autres articles qui sont intercalés dans la loi 2 qui sont
opérationnels, mais qui, dans les faits, n'ont pas encore donné
lieu à des mesures par le ministre du Revenu. Cela ne veut pas dire que
lorsqu'il voudra, pour la première fois, appliquer un article qu'on aura
nous-mêmes bonifié dans la loi 2, il devra, à ce
moment-là, faire quelque chose de spécial. La loi ne tient pas
compte qu'il s'agit d'une première ou d'une deuxième fois. La
loi,' on la décide, et c'est le ministre du Revenu qui, un jour,
l'appliquera, et ce sera peut-être pour d'autres mesures qu'on a vues
aujourd'hui.
On a parlé hier de certaines mesures concernant les producteurs
forestiers. C'était la première fois, hier, qu'on donnait un
pouvoir additionnel au ministre du Revenu pour aller recouvrer des
remboursements d'impôt foncier donnés à des gens qui l'ont
demandé illégalement. On ne s'est pas demandé si c'est
parce que c'était la première fois, il fallait que le ministre
fasse une parade spéciale ou demande un avis juridique pour s'assurer
que c'est une première fois, il doit s'interroger nécessairement
sur cette mesure.
Je dois vous dire que sur les prochains articles qu'on va voir... Je
vous mentionne qu'à ce jour, on n'a pas encore vu la Loi sur les
impôts et que la loi 2, fondamentalement, c'est la Loi sur les
impôts et que la Loi concernant l'impôt sur le tabac est incidente.
De sorte qu'à partir de l'article 31, vous allez voir qu'il y a
énormément de dispositions nouvelles, qui n'ont pas encore
été appliquées par le ministre du Revenu et qui, à
travers leur interprétation, soulèvent des cas de
légalité. C'est pour ça que le ministère du Revenu
publie des bulletins d'interprétation en grande quantité, et
c'est pour cela que des contribuables - au-delà de 20 000 chaque
année - font des avis d'opposition, des contestations devant les
tribunaux. En cela,
il n'y a rien de nouveau ici, à savoir que lorsqu'on adopte une
loi, bien sûr que dans la province de Québec, des intervenants
font valoir des doutes sur l'interprétation que nous, en bons
législateurs, pensons correctes.
Je dis simplement que la loi est élaborée par le
ministère du Revenu avec l'aide d'avocats, juristes, habitués
à la rédaction des lois, traités par le ministère
de la Justice et qui eux, dans leur exercice, sont confiants que l'ensemble des
mesures qu'ils ont élaborées dans la loi 2 sont correctes. Nous
n'avons aucune raison, particulièrement sur l'article 28, 29, ou un
autre, de suspecter et de s'arroger peut-être l'autorité d'un
tribunal pour décider que c'est légal ou pas. Malgré les
débats des membres de l'Opposition et des membres de la commission, il
n'y a aucun fait apporté nous faisant croire que nous devrions nous
inquiéter de la légalité d'une mesure.
Je termine là-dessus, M. le Président. (11 h
45)
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Je vais prendre, bien sûr, la parole
sur l'article 9.3 et apporter aussi directement certains commentaires par
rapport aux propos du député de Montmorency qui vient de traiter
du sujet en particulier. Les propos du député de Montmorency
concernant l'éclaircissement qu'il veut apporter dans la façon de
faire du gouvernement et du ministre du Revenu sont fort intéressants.
J'ai écouté, pendant les dernières minutes, les propos du
député de Montmorency, sauf qu'il y a des points qui ne sont pas
clairs et je vais tenter de les éclaircir.
Premièrement, le député de
Montmorency se surprend un peu qu'on s'attache à cet article en
particulier, l'article 29 et 9.3, par rapport à
l'illégalité. Il s'est passé des choses très
particulières et très pertinentes entre la préparation de
ce document et le moment où on est en étude en commission
parlementaire.
Vous aviez raison de dire précédemment que ce document, le
projet de loi 2, est un document qui a été préparé
par l'ancien gouvernement; c'est un document dans lequel on n'a pas
changé une virgule et on nous en a... Ce qui est inquiétant et ce
qui nous amène à faire notre travail d'Opposition le plus
positivement possible - en tout cas j'en ai la conviction - et non pas de faire
de l'opposition systématique pour faire de l'opposition. Il s'est
passé des choses entre le moment où ce document-là a
été imprimé et entre le moment où on
l'étudie ici, en deuxième lecture, afin de faire des
recommandations à l'Assemblée nationale.
Ce qui s'est passé, et de façon très
spécifique, M. le Président, c'est que le ministre du Revenu a
décrété par arrêté ministériel, le 4
février dernier, un nouveau prix sur le tabac et qui s'est appuyé
pour faire ce décret sur l'article 9.2 en disant: "Attendu que l'article
9.2 du règlement no 2".
M. Gratton: Question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Je le fais de guerre lasse parce qu'il me semble que
c'est violer le règlement... Ce n'est pas un reproche que je fais au
député de Bertrand, en cela il fait exactement ce que le
député d'Abitibi-Ouest et tous ses collègues ont fait.
Quant è moi, on viole encore la pertinence. Ici, ce qu'il s'agit de
faire, c'est de déterminer si les articles, et particulièrement
le paragraphe 9.3 de l'article 29 est conforme à l'énoncé
du discours sur le budget du 23 avril dernier ou pas.
Que j'aie posé un geste et signé un arrêté
ministériel le 4 ou 5 février ou pas, ce n'est pas pertinent
à la discussion. Que le projet de loi 2 soit à l'étude
présentement, s'il avait été étudié avant,
on n'aurait pas fait cette discussion.
M. le Président, je continue de croire qu'il n'est pas pertinent
à ce moment-ci de nos travaux de décider si un geste posé
la semaine dernière était conforme ou pas au libellé de
l'article 29, paragraphe 9.3. Cela n'a aucune espèce d'importance. Cela
pourrait peut-être faire l'objet et pourrait être pertinent au
moment du débat sur l'adoption du projet de loi à
l'Assemblée nationale et j'ai même mes doutes là-dessus.
Mais sûrement qu'au moment de l'étude détaillée du
projet de loi, ce n'est pas pertinent.
Donc, M. le Président, je vous le suggère
respectueusement, et on respectera évidemment votre décision
à ce sujet-là comme toutes les autres.
M. Gendron: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest, sur la question de règlement.
M. Gendron: Oui, j'ai deux commentaires très rapidement. A
partir du moment où le ministre du Revenu dit que le
député de Bertrand est en train de faire exactement ce que le
député d'Abitibi-Ouest faisait et que vous avez reconnu, comme
président, que j'étais pertinent, vous allez avoir un
problème.
Le deuxième commentaire: II me semble, M. le Président,
que ce n'est pas parce que nous voulons mettre en cause que le ministre du
Revenu peut décider. II a raison, cela ne regarde pas la commission;
à
une différence près: ce dont il a parlé dans son
arrêté ministériel est exactement sur le sujet que nous
avons à étudier actuellement qui est l'article 9.3.
M. Gratton: Bien oui! Comme les levées de taxes sur les
assurances le sont aussi.
M. Gendron: Si le ministre du Revenu avait parlé d'autre
chose que ce que nous avons à étudier, il aurait raison de dire
que cela ne concerne pas les travaux de cette commission. Mais, comme par
hasard, son décret porte implicitement et explicitement sur ce que nous
discutons à l'article 9.3. C'est tellement vrai que, dans son
arrêté ministériel, pour faire sa conclusion, il s'est
servi des attendus portant sur le libellé même de l'article 9.3
qu'on étudie présentement. Il me semble que c'est tout à
fait pertinent à l'article 9.3 que nous étudions.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, sur la question de règlement.
M. Garon: M. le Président, la pertinence est tellement
évidente. Le problème c'est... Quand le ministre du Revenu
soulève la question de la pertinence, est-ce qu'il considère le
projet de loi déjà adopté? Est-ce qu'il considère
l'article 9.3 déjà adopté? Quand il a fait son
arrêté ministériel, il a fait comme si le projet de loi
avait déjà été adopté. Il a fait comme si
l'article 9.3 avait déjà été adopté. Il s'en
est servi comme si l'article 9.3 avait déjà été
adopté alors que le mandat de l'Assemblée nationale était
de l'étudier. Le 18 décembre, l'Assemblée nationale nous a
dit: Allez étudier le projet de loi 2 dans lequel est l'article 29 et,
dans lequel article 29, au premier paragraphe, deuxième alinéa,
il y a l'article 9.3. La question fondamentale... Ce n'est pas notre faute si
le ministre du Revenu s'est mis dans cette situation et a appliqué un
article qui n'avait pas été adopté. Il ne peut pas
raisonner en disant: Le ministre des Finances, lui, l'a appliqué. Le
ministre des Finances pouvait faire une déclaration sauf que le ministre
du Revenu, lui, a changé la base de l'application.
M. Gratton: Question de règlement.
M. Garon: II a changé la base...
M. Gratton: Je ne comprends plus rien.
M. Garon: ...de 1,50 $ le paquet de 25 cigarettes et il l'a mis
à 1,88 $ le paquet alors que la loi ne lui permet pas de faire cela.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, vous parlez sur le fond. M. Garon: Sur la pertinence?
Le Président (M. Lemieux): Sur le fond de la pertinence,
M. le député de Lévis.
M. Garon: C'est cela, sur le fond de la pertinence. Ha! Ha!
Ha!
M. Gratton: II est tellement au fond, M. le Président,
qu'on pourrait appeler cela par un autre nom.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu, s'il
vous plaît! M. le député de Bertrand, je crois avoir
donné les grands paramètres tout à l'heure. Je ne voudrais
pas revenir sur cette décision. Vous pouvez continuer tout en ayant
à l'esprit le mandat de cette commission qui est l'étude article
par article du projet de loi 2.
M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Je serai
bref, parce que je ne voudrais pas répéter les choses qui ont
été dites. J'ai trouvé ce matin que le ministre du Revenu
est arrivé avec de bonnes intentions. Nous aussi, on est arrivé
avec de bonnes intentions dans le sens de vouloir s'en sortir. La proposition
qui a été faite, je la trouve tout à fait correcte. Aucun
membre de cette commission, de quelque côté de la table qu'il
soit, ne pourrait voter sur l'article 29 en ayant l'esprit tranquille, sachant
qu'il y a un imbroglio sur le plan juridique. Ce n'est à personne
d'entre nous d'apporter quelque éclaircissement que ce soit sur le plan
juridique, parce que, premièrement, moi, je n'ai pas la formation et,
deuxièmement, je pense que cela doit être une expertise faite
à l'extérieur. Si on avait cela, on pourrait certainement passer
aux autres articles, ce qui est souhaité par tout le monde. Je pense
qu'il y a mauvaise foi dans le fait qu'on ne puisse pas nous fournir ce
document, tel qu'il a été demandé. J'espère que
l'article 9.3...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand, j'aimerais que vous fassiez preuve d'un peu plus de réserve en
ce qui a trait à la mauvaise foi des membres, peu importe le groupe
parlementaire, s'il vous plaît!
M. Parent (Bertrand): Je le mentionne parce que cela a
été apporté précédemment, le fait qu'on
était de mauvaise foi. Ce que j'essaie de dire - je ne veux pas porter
quelque accusation que ce soit - c'est que, si on veut s'en sortir une fois
pour toutes, comme il a été proposé par le
député de Lévis, on pourrait tout simplement avoir cet
avis, parce qu'on n'a rien à cacher. De part et d'autre, on
s'aperçoit qu'on a une
profonde conviction de ce qu'on avance. Tout ce que j'espère,
c'est qu'on pourra avoir cet avis. Je vous remercie.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: M. le Président, l'article 9.3... Je sais que,
tout à l'heure, le ministre du Revenu a invoqué l'article de M.
Alain Dubuc dans la Presse qui commet la même erreur de considérer
que c'est un automatisme. Il dit: "Le principe même d'une taxe ascenseur
est justement son automatisme", alors que ce n'est pas vrai.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, eu égard à la règle de la pertinence, vous
comprendrez que vous n'avez pas à discuter de l'article de M. Dubuc.
M. Garon: M. le Président, je suis en train de dire que
l'article 9.3 n'est pas un article automatique, que ce n'est pas une taxe
ascenseur automatique, que personne n'appuie sur les boutons. Je suis en plein
dans le sujet de l'article.
Le Président (M. Lemieux}: Je vous suis, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Bien oui, mais laissez-moi parler un peu.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse.
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Vous avez rappelé au député de
Lévis qu'il n'était pas ici pour rectifier les faits qui
paraissent dans un article d'un journal de ce matin et vous avez tout à
fait raison. Il faut au moins, faute d'être pertinent, M. le
Président, que le député de Lévis s'adresse...
M. Garon: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Lévis.
M. Gratton: Je suis déjà sur une question de
règlement. Je suis en train d'en faire une.
M. Garorc Je parle de l'article en question parce que le ministre du
Revenu en a parlé.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis...
M. Gratton: Dans un autre contexte, je n'ai pas parlé de
la taxe ascenseur.
Le Président (M. Lemieux): ...eu égard à
l'article de M. Dubuc, si vous en faites état à
l'intérieur de l'argumentation que vous pouvez apporter sur l'article
9.3, cela va.
M. Garon: C'est cela.
Le Président (M. Lemieux): La façon dont vous avez
commencé me laissait sous-entendre que vous étiez prêt
à commenter cet article.
M. Garon: Non, non.
Le Président (M. Lemieux): Alors, je m'excuse, j'ai mal
compris votre intention, M. le député de Lévis.
M. Garon: Ce que je veux dire, en citant l'article du journaliste
de la Presse, Alain Dubuc, c'est qu'il commet la même erreur. Depuis des
années, les gens parlent d'une taxe ascenseur comme d'une taxe
automatique. C'est faux, ce n'est pas une taxe automatique. Ce n'est pas vrai
que l'article 9.3 crée l'automatisme et que le ministère du
Revenu est sur le pilotage automatique. C'est faux. Je comprends que pendant
des années les libéraux l'ont dit. Il y a des gens qui l'ont dit
mais ce n'est pas parce que des gens l'ont dit que c'est vrai. C'est faux.
La preuve, c'est que si vous lisez l'article 9.3... Je vais lire
l'article pour qu'on le comprenne bien comme il le faut: "Le prix de vente en
détail des cigarettes, mentionné dans l'article 9.2, sert au
calcul de l'impôt prévu à l'article 8 jusqu'à ce
qu'il soit remplacé par un prix de vente en détail moyen
pondéré que le ministre détermine de temps à autre,
conformément à l'article 9.4 pour 25 cigarettes."
L'article vient dire ici qu'on va changer la façon de calculer,
parce qu'il faut faire la correspondance sur 25 cigarettes, mais le ministre
n'est pas obligé... Il peut, de temps à autre, après avoir
fait une étude... Il n'est pas obligé de faire une étude.
S'il fait une étude pour établir le prix moyen, c'est son choix:
il peut la faire ou ne pas la faire. Ce n'est pas vrai que ce sont les
fonctionnaires qui, d'eux-mêmes, décident cela. Ce n'est pas vrai
qu'une fois l'étude faite, automatiquement la taxe est augmentée,
c'est encore une décision ministérielle.
M. Dubuc est dans l'erreur quand il dit dans son article... Je le dis,
pourquoi? Parce que beaucoup de gens ont pensé cela. Quand les gens ont
parlé d'une taxe ascenseur, on a laissé entendre que l'ascenseur
fonctionnait
seul. C'est faux. Quand vous entrez dans un ascenseur, si vous ne faites
rien, l'ascenseur ne bougera pas. Si personne ne pousse un bouton à
l'intérieur de l'ascenseur, rien ne va se passer; il faut que quelqu'un
pousse sur un bouton pour que l'ascenseur monte ou descende. Une taxe
ascenseur, cela ne veut pas dire que l'ascenseur est sur le pilotage
automatique.
Comme M. Dubuc, des gens ont dit plus tard: Le principe même d'une
taxe ascenseur est justement son automatisme. C'est faux. On n'est pas encore
à l'ère des ascenseurs qui fonctionnent seul. Les ascenseurs
existent pour faire monter ou descendre, mais il faut que quelqu'un pousse un
bouton. En l'occurrence, ce que la loi dit à l'article 9.3, c'est que
c'est le ministre qui pousse le bouton; c'est le ministre du Revenu qui pousse
le bouton, ce n'est pas le Conseil des ministres.
C'est pour cela que nous disons depuis le début que c'est un
droit fondamental. Ce pouvoir, le ministre l'aura si on le lui donne. Si
l'Assemblée nationale ne le lui donne pas, il ne l'aura jamais.
Même si le ministre des Finances a fait un énoncé. La
couronne demande, mais c'est l'Assemblée nationale qui autorise. Les
patrons, dans cette affaire, sont les parlementaires. Je souhaite que les
députés ministériels soient conscients de cela et s'en
prévalent; ils vont se rendre compte que souvent les ministres doivent
parader devant les caucus pour rendre des comptes aux parlementaires.
Justement, plus ils paradent souvent devant des caucus de
députés, plus ils occupent leur bureau de comté et savent
ce qui se passe dans leur comté, plus les choses sont bien faites; mais
à condition que les parlementaires sachent qu'ils sont des
parlementaires et que c'est eux qui décident.
Je peux dire aux jeunes députés, qui ne le savent
peut-être pas encore, que quand un caucus dit...
Le Président CM. Lemieux): M. le député de
Lévis...
M. Garon: Non, non, je suis pertinent, écoutez, M. le
Président.
M. Gratton: Arrêtez cela.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, s'il vous plaît!
M. Garon: II y a des limites, là, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, je ne veux pas brimer... Oui, il y a des limites, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Ouais!
Le Président (M. Lemieux): Je ne voudrais surtout pas brimer
votre droit de parole, je trouve cela très intéressant. Mais,
s'il vous plaît, dans le cadre de la décision qui a
été rendue tout à l'heure, essayez de cerner un peu cela,
s'il vous plaît.
M. Garon: C'est ce que je cerne, là. (12 heures)
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Chauveau, s'il vous plaît.
M. Garon: Cela va?
Le Président (M. Lemieux): Allez-y! M. le
député de Chauveau...
M. Garon: Si les parlementaires disent qu'ils ne veulent pas de
cette loi-là, vous verrez que même le parti au pouvoir ne passera
pas son projet de loi parce qu'il ne pourra pas compter sur ses
députés, à plus forte raison s'il s'agit de I'ensemble de
l'Assemblée nationale qui dit: Nos pouvoirs, par rapport aux taxes, ce
sont nos pouvoirs. La couronne peut proposer mais, si on ne veut pas que les
gens soient taxés, on peut...
Je comprends que souvent, dans le passé, l'esprit de parti a
dominé, les députés ont suivi la philosophie du parti;
c'est une façon de fonctionner, mais les députés ne sont
pas obligés. On pourrait voter contre l'énoncé
budgétaire, si le Parti libéral disait: On vote contre
l'énoncé budgétaire de l'ex-ministre Duhaime du 23 avril.
On vous en a fait la démonstration hier. Les gens qui ont voté la
taxe sur les assurances, hier, ce sont les députés
ministériels. On s'est abstenu. Les cinq députés qui ont
voté pour ont voté pour la taxe sur les assurances et, s'ils
avaient voté contre, il n'y aurait pas eu de taxe sur les assurances
depuis le 23 avril. Pourquoi? Parce que le pouvoir du ministre des Finances
même est limité par le pouvoir des parlementaires. Le ministre des
Finances peut faire son discours parce que la tradition veut que son discours
soit entériné, mais les parlementaires ne sont pas obligés
de l'entériner.
C'est le point fondamental que je veux faire valoir. On ne peut pas
présumer qu'une loi sera votée. On ne peut pas présumer
que l'article 9.3 sera adopté. On a eu un mandat de la Chambre. Pourquoi
le président de la Chambre et l'Assemblée nationale nous ont-ils
demandé d'étudier le projet de loi? Est-ce qu'ils nous ont dits
Allez faire le "rubber stamp", allez le passer sans dire un mot, acceptez-le
tel quel, ne changez rien là-dedans? Est-ce qu'ils ont dit cela? Non.
Ils ont dit: Allez l'étudier. Quand on l'étudie, c'est parce
qu'on peut faire des changements, on peut regarder cela. Est-ce que notre
travail est utile ou inutile, M. le Président? C'est la question
fondamentale parce que, si on n'a rien à faire là-dedans,
c'est un exercice futile qu'on fait ici. Ou est-ce qu'on fait
l'étude d'un projet de loi pour dire: Nous, comme commission
parlementaire, on pense telle chose ou telle autre chose?
L'Assemblée nationale nous a donné le mandat - on se base
sur les droits fondamentaux des parlementaires - d'étudier un projet de
loi et de lui faire rapport. Quand la commission parlementaire sera finie, la
première chose qui se fera, c'est qu'un membre de cette commission
parlementaire - normalement, c'est le président de la commission - fera
rapport à l'Assemblée nationale et dira: Je remets le rapport de
la commission parlementaire du budget et de l'administration qui vient de faire
l'étude du projet de loi 2 et qui fait ses recommandations en vue
d'amendements, de changements ou d'abrogations.
À la suite de cela, on étudiera le rapport de la
commission et on peut reparler sur chacun des articles.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis...
M. Garon: Ensuite, il y aura une troisième lecture.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis...
M. Garon: M. le Parlement... M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): M. le Parlement, vous savez,
c'est beaucoup pour moi, M. le député de Lévis. Eu
égard aux directives qui ont été données tout
à l'heure, vous nous avez donné deux beaux exemples en ce qui
regarde la pertinence, lorsque vous avez fait un rappel sur les taxes sur les
assurances à savoir que cette disposition-là a été
étudiée. En ce moment, vous êtes en train de
discuter...
M. Gratton: De divaguer.
Le Président (M. Lemieux): Non, je m'excuse, M. le
ministre du Revenu. De discuter sur le fonctionnement...
M. Garon: On aurait moins de problèmes si le ministre
avait moins divagué.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, s'il vous plaît! Lorsque vous êtes en train de
discuter du fonctionnement de cette commission, vous comprendrez, eu
égard au fonctionnement de cette commission parlementaire, que cela
m'apparaît plus ou moins pertinent. Avec l'étude du projet, j'ai
beau être libéral, libéral, il faut quand même un
minimum...
M. Garon: ...
Le Président (M. Lemieux): Libéral, libéral,
M. le député de Lévis, dans le sens de réserver le
droit des parlementaires de s'exprimer. Il y a quand même un minimum
décent que je dois respecter par rapport au groupe parlementaire.
Plutôt que de nous expliquer le fonctionnement de la commission
parlementaire, j'essaierais de revenir à l'article de loi 29, paragraphe
9.3.
Lorsque vous nous expliquez ce qui se passera ensuite et le
fonctionnement de cette commission, la pertinence y est plus ou moins.
M. Garon: Non, non. Oh! un instant, M. le Président!
Supposons...
M. Gratton: ...le député de Lévis, M. le
Président. Un instant!
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, la décision est rendue là-dessus. Je connais
très bien le fonctionnement de cette commission et l'ensemble des
membres présents le connaissent bien. Essayez donc de revenir -c'est
très intéressant ce que vous nous dites - à l'article 29,
paragraphe 9.3, M. le député de Lévis.
M. Garon: Supposons un instant que l'article 9.3 soit
amendé en commission. Pensez-vous qu'il n'aurait pas des effets par
rapport à la décision du ministre du Revenu, des effets
considérables?
M. Gratton: Votons pour voir si ce sera amendé.
M. Garon: Quand on dit que parler de la décision du
ministre du Revenu par rapport à l'article 9.3, ce n'est pas pertinent,
on est dans le problème, le problème juteux. C'est justement
que... Cet article 9.3 - M. le Président, j'aimerais vous demander une
directive - est-ce qu'on peut l'amender?
Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez. Écoutezl M.
le député de Lévis...
M. Garon: Est-ce que la commission parlementaire peut
l'amender?
Le Président (M. Lemieux): ...vous connaissez tout aussi
bien que moi l'article 244 du règlement. Vous pouvez apporter des
amendements, M. le député de Lévis, effectivement.
M. Garon: Ah bon! Est-ce que le ministre du Revenu est conscient
qu'on peut l'amender?
M. Gratton: Absolument.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, je pense que tout membre de cette commission en est
conscient.
Une voix: C'est le but de l'exercice.
M. Garon: Est-ce que le ministre du Revenu l'a déjà
appliqué, jusqu'à maintenant, en présumant qu'on ne
l'amenderait pas?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis...
M. Gratton: Est-ce que le député de Lévis
veut que je lui réponde?
M. Garon: J'aimerais cela.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: La réponse, c'est oui. On l'a appliqué
en présumant qu'il serait adopté, de la même façon
qu'on a perçu les taxes sur les primes d'assurance en présumant
que le projet de loi serait adopté, de la même façon qu'on
a modifié les tableaux d'exemption pour tenir compte des modifications
qui sont dans le projet de loi 2 en présumant qu'il serait
adopté, de la même façon que cela s'est toujours fait. M.
le Président, je trouve cela formidable parce que ce que le
député de Lévis vient de faire, c'est qu'il vient de dire
exactement le contraire de ce que son collègue d'Abitibi-Ouest nous
disait tantôt. Le collègue d'Abitibi-Ouest disait: Dans le cas
spécifique de l'article 9.3, ce n'est pas comme les autres. Le
député de Lévis est en train de nous dire: II ne faut pas
présumer. M. le Président, oui, on a présumé que
l'article 9.3 serait adopté. On a même présumé que
le Parti québécois serait d'accord avec son propre projet
de loi et avec son propre budget. On ne pensait pas qu'il y aurait
incohérence à ce point, du côté de l'Opposition,
qu'elle viendrait maintenant s'abstenir de voter des articles du projet de loi
2 qui est son projet de loi, qui a été préparé par
ses ministères respectifs avant qu'ils se fassent battre. Le moins qu'on
puisse dire, c'est qu'il était temps qu'ils se fassent battre, compte
tenu de la façon... J'espère qu'ils n'administraient pas la
province comme ils s'administrent à cette commission parlementaire
aujourd'hui.
M. le Président, effectivement...
M. Gendron: J'aimerais savoir où le ministre du Revenu est
rendu?
M. Gratton: Je réponds à la question du
député de Lévis.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu,
M. Garon: Nous autres, on le laisse parler. C'est correct.
M. Gendron: Bien, il parle de notre administration. 11 n'est pas
pour...
M. Gratton: Je m'égare peut-être un peu, mais...
M. Gendron: Ah bon!
M. Garon: ...
M. Gratton: C'est parce que parfois il y a des... de votre
côté.
M. Gendron: Oui, cela arrive.
M. Gratton: Je suis votre exemple. Je m'en excuse, je ne le ferai
plus jamais.
M. Gendron: D'accord. Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Président (M. Lemieux): Je suis conscient, M. le
ministre du Revenu, que vous puissiez nous faire part qu'effectivement vous
vous étiez égaré quelque peu.
M. le député de Lévis, s'il vous plaît! Vous
pouvez reprendre votre droit de parole.
M. Garon: Je veux reprendre ce qu'a dit le ministre du Revenu.
J'ai posé une question et il y a répondu. Il a dit: Oui, mais
comme la taxe sur les primes d'assurance. Or, ce n'est pas comme la taxe sur
les primes d'assurance parce qu'il y a eu une déclaration du ministre
des Finances le 18 décembre 1985. De toutes les choses dont il a
parlé, soit qu'il n'y a eu aucun changement par rapport au budget
Duhaime du 23 avril 1985, soit qu'il y a eu une déclaration par le
ministre des Finances dans son énoncé de politique
budgétaire du 18 décembre 1985. Dans le cas dont on parle
actuellement, cela n'a pas eu lieu. La déclaration qui a
été faite, l'arrêté ministériel du ministre,
c'est lui qui l'a fait en agissant comme si la loi était
déjà amendée. Le ministre des Finances aurait pu, dans son
énoncé du 18 décembre, dire: Je vais augmenter les taxes
de telle façon ou le ministre du Revenu va le faire ou on va avoir une
augmentation des revenus pour tel objet.
D'ailleurs, dans les lois fiscales, si on regarde la doctrine d'Erskine
May, l'autorité reconnue dans le Parlement britannique, au Canada ou au
Québec - c'est le même type de doctrine parce que nous sommes dans
le parlementarisme britannique - il parle de
cela. Il le dit expressément que c'est une déclaration, un
énoncé budgétaire qui peut être appliqué,
mais qui va avoir sa pleine validité lorsque le Parlement aura
adopté la loi qui va sanctionner la déclaration du ministre des
Finances. Mais le ministre du Revenu, dans ce cas, n'avait plus sa loi,
c'est-à-dire qu'il aurait pu le faire selon sa loi qui est encore en
vigueur, la loi du ministre du Revenu, sauf que cela aurait créé
un imbroglio. Ce qu'on vote maintenant, c'est ce que doit devenir l'article 9.3
de la Loi concernant l'impôt sur le tabac.
Actuellement l'article 9.3 de l'impôt sur le tabac ne parle pas de
25 cigarettes. Ce n'est pas la procédure qui est utilisée. C'est
une nouvelle procédure qui est instituée par l'article 9.3, une
nouvelle façon de faire le calcul de l'impôt sur le tabac. Le
ministre du Revenu, qui n'est pas le ministre des Finances, ne peut pas
appliquer une loi qui n'a pas encore été amendée en
supposant qu'une déclaration du ministre des Finances a amendé sa
loi. Si le ministre des Finances avait, dans son énoncé
budgétaire du 18 décembre, dit que le ministre du Revenu ferait
cela, il n'y aurait aucun problème. Je ne dirais pas un mot, parce que
le ministre des Finances aurait dit: J'amende; je fais une déclaration
au point de vue fiscal dans laquelle la taxe va être augmentée sur
le tabac. Mais ce n'est pas ce qu'il a fait. Il a agi comme si sa propre loi
avait déjà été amendée. Le ministre du
Revenu ne peut pas appliquer une loi qui n'a pas déjà
été amendée. Un énoncé budgétaire
n'équivaut pas à un amendement dans une loi pour application d'un
autre ministre.
Le ministre devait se contenter d'appliquer l'énoncé
budgétaire tel quel, d'appliquer les 60 % sur 1,50 $, point. Mais il ne
pouvait pas augmenter le 1,50 $, c'est-à-dire augmenter le prix de vente
au détail des cigarettes tel qu'il est mentionné à
l'article 9.3, comme si cette nouvelle façon de procéder
était déjà établie. Ce n'est pas encore
établi. Le ministre des Finances, lui, pouvait, parce qu'on peut
ratifier ce qu'il fait. Mais lui, il ne s'est pas servi pour mettre en oeuvre,
comme ministre du Revenu, dans son arrêté ministériel,
d'une décision ou d'une déclaration du ministre des Finances. Il
a établi une taxe additionnelle, en dehors de tout discours sur le
budget, en dehors de tout énoncé budgétaire. C'est cela
qu'il a fait et c'est pour cela qu'on dit: Sa taxe, il n'avait pas le droit de
faire cela.
Si M. Levesque, l'actuel ministre des Finances, dans sa
déclaration du 18 décembre, avait dit: Nous allons faire passer
le prix moyen en détail des cigarettes par paquet de 25 cigarettes de
1,50 $ à 1,88 $, cela se serait appliqué exactement au moment
où il l'aurait voulu. Normalement, c'est au moment de sa
déclaration ou à partir de minuit. Là, il n'y aurait pas
eu de problème parce que, pour qu'une mesure prenne effet dans le
domaine fiscal, nous prétendons, particulièrement avec l'article
9.3, que le ministre avait besoin d'une loi. Sa loi ne dit pas cela. Il a
appliqué une loi qui n'est pas encore amendée. Le ministre des
Finances peut également, par une déclaration ou dans son discours
sur le budget. Ce sont les façons. Mais actuellement le ministre du
Revenu a agi en dehors de la déclaration du budget du 23 avril 1985
puisqu'il a fait passer le taux... Le prix moyen justement dont on parle
à l'article 9.3, le prix de vente en détail des cigarettes
mentionné dans l'article 9.2 sert au calcul de l'impôt
prévu à l'article 8, jusqu'à ce qu'il soit remplacé
par un prix en détail moyen pondéré que le ministre
détermine de temps à autre...
Bien, il a déterminé, le 4 février, qu'il faisait
passer ce prix de 1,50 $ à 1,88 $. Alors que le ministre des Finances,
dans son budget du 23 avril, l'avait fixé à 1,50 $ et que cela
n'a pas été changé depuis par aucun discours sur le
budget. Ce ne sont pas les fonctionnaires. Quand on me dit que ce sont des
synthèses de fonctionnaires, je regrette, les fonctionnaires n'ont pas
le pouvoir d'augmenter les impôts. S'il fallait que, dans notre droit,
les fonctionnaires - parce qu'ils écrivent des chiffres sur un papier
augmentent les impôts, ce serait épouvantable. Quand on essaie de
faire référence à des synthèses administratives
publiées sous la signature de fonctionnaires et dire: On assume que les
impôts vont être augmentés, je vais vous dire que cela,
ça voudrait dire que le gouvernement a abandonné ses pouvoirs de
décider, qu'il ne décide plus si les impôts augmentent ou
non. La preuve, c'est qu'on ne les a pas augmentés sur le tabac parce
qu'ils avaient été augmentés de 0,25 $ par le ministre des
Finances, le 23 avril, à partir de minuit, le 24, et par le gouvernement
fédéral, le 23 mai, cela encore de 0,25 $. On a dit 0,50 $ dans
un mois, c'est assez. Ce n'est pas les fonctionnaires qui peuvent assumer,
présumer ou déterminer que le ministre va décider de telle
ou telle façon à un moment un peu flou, comprenez-vous?
Autrement, dans quel capharnaüm serions-nous si l'administration des
finances se faisait de cette façon. Cela n'a pas de bon sens. (12 h
15)
Le fait même pour un ministre de dire: Oui, mais dans les
états c'est marqué. Je vais vou3 dire que tout ce qui vient sur
son bureau et qui est marqué par les fonctionnaires, on va le signer. On
n'a plus besoin de ministre, à ce moment. Mettons tous les
ministères sur les pilotes automatiques. Au contraire! Combien de fois
il va arriver des papiers sur le bureau d'un ministre et qu'il va dire: Je ne
suis pas d'accord avec cela. Les fonctionnaires
proposent, mais le ministre n'est pas obligé de signer. Quand
est-ce que le ministre est obligé de signer les papiers des
fonctionnaires? Est-ce que M. le nouveau ministre du Revenu veut nous dire que
dans n'importe quel cas, il s'agit que les fonctionnaires lui mettent des
papiers sous le nez pour qu'il les signe? Je n'ai jamais vu cela. Le rôle
d'un ministre, c'est justement d'exercer sa discrétion
ministérielle dans les cas où la discrétion
ministérielle est d'agir quand la loi l'oblige d'agir. Dans ce cas, il
n'est pas obligé de faire une enquête. Quand il y a une
enquête, il n'est pas obligé de déterminer, comme le dit
l'article 9.3, de temps à autre. Il détermine quand il veut. De
temps à autre, c'est la traduction de "from time to time". Il y a assez
eu d'articles écrits là-dessus.
Il est certain que le député de Louis-Hébert se
rappelle les cours de droit qu'on suivait ensemble. Je ne me rappelle pas si
c'est lui. C'est peut-être lui qui avait pris des notes de cours cette
fois. Il y avait des cours où c'est lui qui y allait et l'autre c'est
moi qui y allais. On a très bien fini tous les deux. Mais, il y avait
l'expression "from time to time". Je me rappelle et il se rappelle très
bien de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. On disait: Qu'est-ce
que cela veut dire: "From time to time"? Il y a eu beaucoup de discussions
là-dessus. Est-ce que cela veut dire périodiquement? Est-ce que
cela veut dire obligatoirement? À quel intervalle? Alors que dans
l'article 9.3, on dit: Le ministre détermine de temps à autre...
Cela veut dire: Quand il veut. La preuve, c'est que quand il a adopté
son arrêté en conseil, qu'est-ce qu'il a dit parce que c'est
là-dessus qu'il a dit... Attendez un peu, je vais vous le dire ici
là.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Chauveau, s'il vous plaît!
M. Garon: Non, il ne l'a pas marqué dans celui-là.
Il l'a marqué dans un autre arrêté en conseil. À un
moment donné, il dit: Occasionnellement, à un endroit, comme
interprétation de "de temps à autre". Pourquoi? Parce
qu'occasionnellement, de temps à autre, occasionnellement, mais à
l'occasion qu'il détermine, qu'il choisit. Il n'y a pas un ministre qui
voudrait abandonner ses prérogatives. Pourquoi essayer de faire croire?
Je sais que pendant des mois, pendant peut-être deux ou trois ans, les
libéraux ont essayé de faire croire que c'était
automatique? Ce n'est pas vrai. L'article 9.3 ne donne pas un pouvoir
automatique.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis...
M. Garon: II donne un pouvoir au ministre d'exercer sa
discrétion...
Le Président (M. Lemieux): Je vous inviterais à
conclure.
M. Garon: ...après avoir fait une enquête. S'il ne
la fait lui-même, il peut la faire faire, mais le ministère n'est
pas sur le pilote automatique et c'est le ministre qui décide. C'est
pourquoi...
Le Président (M. Lemieux): Je vous invite à
conclure, M. le député de Lévis. Il vous reste environ une
minute, M. le député de Lévis.
M. Garon: II me reste une minute?
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Lévis.
M. Garon: Vous ne comptez pas le temps lorsque le
président parle.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, j'aimerais vous faire remarquer que la présidence, hier,
vous a accordé 3 minutes et 42.
M. Garon: Vous êtes bien gentil.
Le Président (M. Lemieux): Cela me fait plaisir. Vous
pouvez continuer, M. le député de Lévis.
M. Garon: Pour faire la compensation, je vais arrêter
immédiatement.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Lévis.
Y a-t-il d'autres intervenants sur le projet de loi? M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: Ce qui arrive actuellement, M. le Président,
c'est qu'on étudie la pertinence d'adopter l'article 9.3 qui parle de
remplacer le prix de vente de temps à autre. On a changé en
même temps une structure de base sur laquelle on s'appuyait auparavant
pour augmenter les revenus de la province. Le problème qui se pose
fondamentalement pour nous, c'est vrai qu'il y a un mandat qui a
été confié à la commission à partir du 18
décembre 1985, mais, comme on vit au Québec, on est obligé
de vivre avec ce qui se produit, et je ne pense pas que la Chambre pouvait
savoir, au moment où ce mandat a été donné, qu'il y
aurait des changements d'apportés par le ministre du Revenu concernant
le prix de base des cigarettes. C'est exactement le dilemme dans lequel on se
trouve, à savoir qui a préséance au point de vue des lois.
Est-ce la Chambre, l'Assemblée nationale ou est-ce un ministre
qui pourrait avoir un pouvoir éventuellement? M. Doyon:
Question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyorc M. le Président, nous sommes réunis ici
ce matin - cela continue -de façon à voir si l'article 9.3 - je
vais le lire, M. le Président - qui se lit comme suit: "Le prix de vente
au détail des cigarettes mentionné dans l'article 9.2 sert au
calcul de l'impôt prévu à l'article 8, jusqu'à ce
qu'il soit remplacé par un prix de vente au détail moyen
pondéré que le ministre détermine de temps à autre,
conformément à l'article 9.4, pour 25 cigarettes."
Que le député de Jonquière, aujourd'hui, se pose la
question existentielle: Est-ce que le Parlement est soumis ou si la commission
parlementaire peut agir ou est-ce le ministre qui a priorité? Qui doit
agir le premier? Là n'est pas la question de notre rencontre ici ce
matin. Notre rencontre, ce matin, n'a qu'un seul but. Est-ce que le
député de Jonquière peut nous dire, au nom de sa formation
politique, lorsque l'article dit, par exemple, que le prix de vente au
détail mentionné, etc., sert au calcul de l'impôt
prévu à l'article 8, s'il veut que cela se fasse autrement que
par les moyens prévus par l'article 8, par exemple? Il pourrait nous
faire une dissertation là-dessus. Il pourrait nous parler de cela, mais
il ne semble pas avoir d'idée là-dessus. Je ne suis pas sûr
qu'il en ait sur grand-chose d'ailleurs.
Le Président (M. Lemieux): M. le député!
M. Doyon: ...jusqu'à ce qu'il soit remplacé par un
autre prix de vente au détail, M. le Président.
M. Dufour: ... la question de règlement de la part de M.
le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, il n'y a pas de question de
règlement à cette commission parlementaire.
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît! Est-ce
qu'il y a un appel au règlement, M. le député de
Jonquière?
M. Dufour: II y a un appel au règlement dans le sens qu'il
s'attaque directement à l'individu.
M. Doyon: Quel article, M. le Président?
Le Président (M. Lemieux): Quel article, M. le
député de Jonquière?
M. Doyon: L'article. En vertu de quel article?
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Louis-Hébert. Voulez-vous...
M. Dufour: Respect de...
Le Président (M. Lemieux): Un instant! S'il vous
plaît!
M. Doyon: Quel article?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Louis-Hébert! Je ne voudrais pas...
M. Doyon: Je veux savoir l'article, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): J'ai un chat dans la gorge. Je
ne voudrais pas crier plus fort, parler plus fort que vous deux, mais
j'aimerais vous rappeler, M. le député de Louis-Hébert,
qu'on s'adresse au président, s'il vous plaît. J'aimerais vous
rappeler, M. le député de Jonquière, de ne pas brimer le
député de Louis-Hébert dans son droit de parole.
J'aimerais aussi vous rappeler l'article 36: "Que le député qui a
la parole ne peut s'adresser directement à un autre député
et qu'un député ne peut pas imputer des motifs indignes à
un député ou refuser d'accepter sa parole." Essayez d'être
tolérants les uns pour les autres, s'il vous plaît!
M. Doyon: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Louis-Hébert, vous pouvez continuer sur la question de règlement
et vous pouvez conclure.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Ce que je disais, c'est
que l'étude qui nous est assignée de l'article 9.3 fait en sorte
que les députés autour de cette table ont le droit de proposer
d'autres moyens d'arriver aux fins qui sont déterminées à
l'article 9.3. Comme je le disais, si on veut que cela se fasse autrement que
par une enquête par le ministre, on peut proposer cela. On peut aussi
discuter à savoir si cela devrait être le prix de vente au
détail moyen ou si cela devrait être autre chose. On peut discuter
de tout cela.
Cependant on ne peut pas, à cette commission, discuter des gestes
qui peuvent avoir été posés par le ministre mais qui n'ont
pas rapport au texte de cet article. Sur les gestes qu'a posés le
ministre, en admettant - ce que je conteste - que l'Opposition ait des raisons
de croire qu'ils n'étaient pas fondés juridiquement, le
débat ne peut pas se faire ici. Ce débat doit se
faire ailleurs, à la première occasion, et ce n'est pas
à nous de leur donner des recettes et des moyens d'intervention à
ce sujet; cela ne nous regarde pas. Ce n'est pas notre propos, c'est leur
problème. Ce sont eux qui inventent ce problème. Ils en font une
question de scrupule, ils en font une question personnelle. Qu'ils vivent avec!
Ce que je dis, c'est qu'ils ne peuvent pas prendre la première occasion,
qui est cette commission parlementaire qui n'a pas été
réunie pour discuter des gestes et des actions du ministre; ce n'est pas
cela qu'on est venu faire ici aujourd'hui. Si on continue comme cela...
Je suis d'accord avec votre interprétation sur la pertinence:
faire preuve de flexibilité, de souplesse, etc., mais quand on met le
doigt dans l'engrenage, le corps risque d'y passer. On en a la plus belle
preuve. Un propos est toujours justifiable par rapport au
précédent. On arrive peu à peu à un propos qui n'a
pas de rapport avec l'article 9.3. La meilleure preuve, ce sont les propos que
tenaient il y a deux minutes le député de Jonquière. Il se
posait la question très grave - et le député de
Lévis avait commencé ce propos - à savoir où se
situe le Parlement, où se situe le pouvoir des parlementaires, etc.?
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous conclure, M. le
député?
M. Doyon: M. le Président, je conclus là-dessus. Ce
n'est pas cela que l'article 9.3 nous amène à discuter, ce n'est
pas cela, c'est de savoir comment on va procéder en ce qui concerne la
taxe sur les cigarettes. Si l'Opposition a des suggestions à faire, des
propositions, si elle n'est pas d'accord avec la façon dont les
choses...
M. Gendron: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous conclure, M. le
député de Louis-Hébert, s'il vous plaît?
M. Gendron: ...oui, cela va faire.
M. Doyon: S'ils ne sont pas d'accord avec la façon dont
propose de le faire l'article 9.3...
M. Gendron: Question de règlement.
M. Doyon: Je suis déjà sur une question de
règlement, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, mais je vous invite
à conclure, M. le député de Louis-Hébert. J'ai
très bien compris votre intervention et je vous invite à
conclure.
M. Doyon: II faut qu'on s'en tienne à cela. Je reviens
à cette nécessité que l'on a de s'en tenir au texte que
nous avons devant nous.
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de
règlement, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Très rapidement, M. le Président, je
voudrais que vous teniez compte du fait qu'il est tout à fait faux et
même mensonger d'accepter la version du député de
Louis-Hébert qui dit qu'un député n'a pas pleine et
entière latitude dans son propos de vingt minutes pour autant qu'il s'en
tienne à la pertinence. Le seul point que je veux souligner en
conclusion, c'est ceci: quand le député de Louis-Hébert
prétend que si on n'est pas d'accord avec l'article 9.3 on n'a
qu'à proposer d'autres dispositions, c'est la liberté de
l'intervenant, sa façon d'utiliser son droit de parole. Je peux prendre
vingt minutes, tout en étant pertinent, sur l'article 9.3 et faire le
choix de ne pas proposer autre chose, tout en parlant de l'article 9.3 sur
lequel il a des explications à donner.
C'est ce que mon collègue est en train de faire. Je pense qu'il
était tout à fait pertinent et il n'appartient pas du tout aux
députés de l'Opposition de nous dire: Si vous n'êtes pas
d'accord, vous n'avez qu'une seule chose à faire, c'est de proposer des
modifications. Notre choix est d'utiliser nos vingt minutes de droit de parole,
en étant pertinent, sur l'article 9.3 et je pense que le
député de Jonquière parlait effectivement de l'article
9.3. C'est dans le mandat de la commission d'étudier l'article 9.3.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière, s'il vous plaît, voulez-vous vous en tenir à des
propos factuels et non pas susceptibles de se produire dans le cadre de
l'étude du mandat relativement à l'article 9.3? Vous avez bien
compris les directives eu égard à la pertinence et à
l'explication que j'ai essayé d'en donner tout à l'heure. Je
crois que, dans une certaine mesure, le député de
Louis-Hébert a raison; dans une certaine mesure, je dis bien. Veuillez
essayer de vous en tenir à des choses factuelles eu égard
à l'article 9.3.
M. Dufour: Mais peut-être pas de la manière dont
c'est dit.
Le Président (M. Lemieux): La manière, M. le
député de Jonquière, je n'ai pas à la commenter.
Vous pouvez continuer.
M. Dufour: En fait, ce que j'essayais de dire, c'est qu'il y a eu
un changement, cet article propose un changement de base. Au lieu de fixer un
prix par rapport à une cartouche de cigarettes, on se base sur les
25 cigarettes. C'est un changement fondamental qui a été
fait par une déclaration du ministre dans son discours d'avril 1985. Ce
changement a été appliqué, un changement a
été apporté.
Un deuxième changement a été apporté
dernièrement, à savoir une deuxième augmentation du
coût des cigarettes.
Pour nous qui avons à voter sur un semblable amendement, le
problème se pose puisque, n'ayant pas été avertis que des
augmentations seraient apportées à ces coûts-là, on
se demande si on va plus loin que le mandat qui nous a été
confié au départ, d'étudier le projet de loi qui est
devant nous. Autrement dit, un projet de loi a été
déposé, il n'est pas encore adopté et on a
déjà appliqué des décrets par rapport à ce
projet de loi. Est-ce que je peux être ou essayer d'être plus clair
en disant... M. le député de...
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît! M. le
député de Louis-Hébert.
Une voix: Ne t'occupe pas de lui, il est comme cela tout le
temps.
M. Dufour: Vous avez déjà commencé...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière, s'il vous platti On suspend la séance dans 30
secondes, messieurs les députés de Jonquière et de
Louis-Hébert.
M. Dufour: Un projet de loi a été
déposé devant nous et avant qu'on ait eu le temps de
l'étudier, un décret s'appliquait sur cet article-là. Je
me demande si légalement j'aurais le droit d'approuver cette partie du
projet de loi.
M. Gratton: Oui, oui, ce n'est pas grave.
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration suspend ses travaux jusqu'à cet après-midi 15
heures. Merci.
M. Gratton: 14 heures, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse. De consentement,
14 heures?
M. Gratton: Ce sont les mêmes heures qu'à
l'Assemblée, c'est 14 heures le jeudi.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le ministre du
Revenu. La commission du budget et de l'administration suspend ses travaux
jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
(Reprise à 14 h 27)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux
après la suspension, ce matin, à 12 h 30.
La parole est à M. le député de Jonquière
sur l'article 29.9.3. M. le député de Jonquière.
M. Dufour: M. le Président, je terminais ce matin en me
posant la question à savoir si la loi ou l'article de la loi qu'on est
en train d'adopter n'avait pas été un peu mise de
côté, puisque le ministre du Revenu a fait ce qu'aucun ministre du
Revenu n'a fait jusqu'à maintenant, c'est-à-dire s'appuyer sur
une loi présumément acceptée pour décréter
une application d'une partie de cette loi. Quand on l'a fait de notre
côté, cela a toujours été en partant d'une
déclaration du ministre des Finances lors d'un discours sur le budget.
On n'a pas eu, jusqu'à maintenant, réponse à cette
question. C'est vraiment le sens de la question qui, depuis ce matin ou depuis
hier, a fait l'objet de beaucoup de débats. Est-ce que le ministre du
Revenu a un avis juridique concernant la légalité des actions ou
du décret qu'il a imposé au mois de février? Si oui,
est-ce qu'il peut le déposer? J'ai entendu - c'étaient ses
propres paroles -qu'il avait demandé des avis, mais il n'a pas dit que
c'était nécessairement un avis juridique. Il a dit qu'il allait
en demander d'autres, mais, encore là, on est resté dans le
vague. Je pense que c'est drôlement important pour les membres de la
commission, comme parlementaires du gouvernement et également comme
représentants de la population, de savoir si les actions qui ont
été posées jusqu'à maintenant sont légales.
Alors, si le ministre a un avis juridique, qu'il nous le montre pour que nous
puissions savoir de quoi on parle et où on va avec cet article.
À mon sens, il me semble qu'on s'est substitué en quelque
sorte, jusqu'à un certain point, au pouvoir des parlementaires qui, eux,
ont le droit de lever des taxes. Le ministre du Revenu, à mon sens, s'il
n'avait pas ce pouvoir ou s'il avait le droit de le faire, devrait nous montrer
le décret. Je ne pense pas que ça va déranger qui que ce
soit. S'il est dans la légalité, on ne dira plus un mot et on
dira: II était bien correct. On va applaudir. Mais ce n'est pas ce qui
est arrivé et, à ce moment-ci, j'insisterais, je me ferais le
porte-parole de notre bord ici pour demander, s'il y a eu des avis juridiques
de demandés et s'il en a, est-ce qu'il est prêt à les
déposer et, ensuite, on pourrait peut-être aller un peu plus
loin.
Le Président (M. Lemieux): Mme la
députée de Chicoutimi, tout comme hier, vous avez
été remplacée ce matin par le député de
Dubuc et, pour que je puisse vous permettre de vous exprimer, il me faut le
consentement. Est-ce que j'ai le consentement?
Une voix: Sûrement, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse. Cela, c'est en ce
qui vous concerne, M. le député. Mais, est-ce que j'ai le
consentement? Oui, M. le député de Lévis.
M. Garon: II y a comme un problème là parce que le
député de Jonquière pose une question au ministre. Le
ministre n'est pas là. L'adjoint parlementaire n'est pas là.
C'est la première fois que je vois qu'on va étudier le projet de
loi d'un ministre et qu'il ne sera pas là pour le défendre. Il
faudrait quand même que le ministre soit présent. Est-ce que c'est
vous qui allez prendre note des questions qui vont lui être posées
pour qu'après cela il y réponde une à une? II y a des
questions qui s'adressent au ministre. Le ministre n'est pas là.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous en faites une
question de règlement, M. le député de Lévis?
M. Garon: Normalement, le ministre est là pour
défendre son projet. Cela ne me fait rien qu'on suspende. Je sais que
j'ai été souvent en retard quand j'étais ministre et que
j'avais une commission...
Une voix: Même dans l'Opposition.
M. Garon: ...excepté que la commission ne siégeait
pas. Ce qui est préférable, au fond, c'est de s'entendre sur une
heure qui fait notre affaire. On comprend que le ministre - je ne veux d'aucune
façon qu'on interprète que je dis cela pour essayer de l'ennuyer
- a des activités. Il a des choses à faire à son
ministère aussi et que c'est peut-être lui qui va prendre le moins
de temps pour dîner. Sauf qu'il faudrait s'entendre sur une heure. On ne
peut pas siéger sans que le ministre responsable qui défend son
projet de loi ne soit présent. Cela n'a pas de bon sens.
Le Président (M. Lemieux): M. le .député de
Lévis, je vais remettre la parole au député de Sainte-Anne
sur la question du député de Lévis et nous allons revenir
après. C'est une question de règlement? Vous ne répondez
pas, M. le député de Sainte-Anne, à la question du
député de Jonquière. Vous intervenez sur...
M. Polak: Non, je n'ai pas la compétence.
Le Président (M. Lemieux): Alors, vous voulez intervenir
sur la question possible de règlement soulevée par le
député de Lévis. Cela va, M. le député de
Sainte-Anne, brièvement, s'il vous plaît.
M. Polak: M. le Président, très brièvement.
C'est que j'ai constaté moi-même que le ministre et l'adjoint
parlementaire ne sont pas ici. L'adjoint parlementaire était dans une
boîte téléphonique, il y a trois minutes. Ah, il vient
d'arriver.
Une voix: Ah, sauvé!
Le Président (M. Lemieux): M. le
député...
M. Polak: Est-ce que je peux continuer à parler
jusqu'à ce qu'il prenne son siège? On n'a pas besoin...
Le Président (M. Lemieux): Non, M. le député
de Sainte-Anne. Cela va.
M. Polak: Comme je vous l'ai dit, M. le Président,
c'était sur un point de règlement, mais le problème semble
être résolu.
Le Président (M. Lemieux): Le problème est
résolu. M. le député de Jonquière, je vais vous
permettre - madame, voulez-vous arrêter le temps en ce qui concerne le
député de Jonquière? - de reprendre votre question
brièvement et seulement la question.
M. Dufour: Le problème en litige qui nous
préoccupe, c'est è savoir: Est-ce que les actions qui ont
été posées par le ministre du Revenu concernant la hausse
sur le tabac sont légales ou pas? À la suite de cela, je pose la
question suivante: Est-ce que le ministre du Revenu possède des avis
juridiques concernant cette question? Si oui, pourquoi il ne les dépose
pas. À partir de cela, on pourrait certainement faire un bout de
chemin.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Enfin, comme l'a fait lui-même le
ministre du Revenu antérieurement et comme on l'a allégué
nous-mêmes - je dirais même plus précisément
moi-même ce matin - la loi 2 a été préparée,
et particulièrement l'article 29, avec toute la prudence que commande
une rédaction de loi, avec des juristes, des experts, de sorte que nous
n'avons, jusqu'à présent, aucune indication sérieuse qui
remet en cause la légalité ou qui laisserait présumer
qu'une mesure tel l'article 29, serait illégale. Il se peut que, dans ce
projet de loi, plusieurs
dispositions se révèlent illégales dans l'avenir
à la suite d'une interprétation que pourra faire un tribunal ou
d'autres instances, comme il est d'usage de comprendre qu'une loi peut faire
l'objet d'interprétations et d'interventions juridiques dans le
temps.
Le législateur fait ce qu'il peut. Nous, nous croyons que
l'ensemble de ces mesures respecte l'esprit du budget et je pense que la
légalité sur laquelle on devrait s'interroger, c'est de savoir si
l'article 29 représente légalement ce que le ministre des
Finances disait è la page 31 de son budget. Si on convenait que ce
n'était pas le reflet fidèle, effectivement l'article 29 ne
serait peut-être pas légal, mais nous n'en avons actuellement
aucune indication. Et malgré les débats faits depuis hier, rien
ne nous permet de dire que ce qui est écrit à l'article 29 n'est
pas le reflet de ce qui est écrit dans le budget, n'est pas, par
conséquent, le reflet de l'intention du ministre des Finances lorsqu'il
a prononcé son discours le 23 avril.
Par conséquent, on est obligé de répéter que
l'ensemble du projet de loi 2 a été préparé - vous
le savez - sous votre administration, alors que vous formiez le gouvernement.
Et je suis convaincu que l'ensemble des gens qui ont participé à
la préparation du projet de loi l'a fait professionnellement parlant; je
ne vois aucune indication qu'il y a illégalité à l'article
29.
Si vous voulez soulever la question de la légalité d'un
geste posé par le ministre du Revenu postérieurement au 23 avril,
c'est votre droit. Mais je ne crois pas que c'est l'endroit ici, alors que nous
discutons du projet de loi 2, lequel ne fait que se rapporter au 23 avril, afin
de savoir si ce projet de loi est fidèle à l'énoncé
budgétaire.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Chicoutimi, y a-t-il consentement?
M. Dufour: II y aurait peut-être lieu de continuer et de
poser des questions, parce que le ministre du Revenu a dit ce matin: J'ai
demandé des avis - moi, je ne sais pas s'ils sont écrits ou
verbaux - je peux en demander d'autres. Encore là, je ne sais pas s'ils
sont écrits ou verbaux. Je me dis: Si ce que vous me dites est officiel,
je suis prêt à faire amende honorable et j'accepterai ce que vous
me dites jusqu'à un certain point. Par contre, si le ministre dit: Ce
serait mon devoir de le faire, ce n'est peut-être pas suffisant pour
s'assurer, de ce côté-ci, que...
Je ne dis pas que ce qui est écrit là n'est pas exact,
dans ce projet de loi, mais je dis: II y a des choses qui ont été
faites et qui y sont rattachées. Comment fait-on pour les toucher
quelque part? S'il y a des avis juridiques, pourquoi n'est-on pas capable de
les obtenir? Je sais qu'il y a la Loi sur l'accès aux documents des
organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, mais on
n'ira pas jusque-là. En tout cas, à première vue, je
n'irai pas jusque-là.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Je présume que je peux répondre
à votre interrogation, si vous me le permettez. Vous l'avez dit
vous-même, vous ne doutez pas de la légalité de l'article
tel qu'il est écrit par rapport à ce qu'on constate dans le
budget. Mais vous dites que des choses se sont faites après et que c'est
cela qui met en doute la légalité. Or, l'exercice qu'on fait ici,
c'est de voir si on peut adopter la loi 2 en tant que reflet fidèle de
l'énoncé budgétaire. Je ne prétends pas qu'il n'y a
pas certaines mesures qui seront peut-être l'objet
d'interprétations sérieuses quant à leur
légalité, cela se peut, dont l'article 29 que vous soulevez, mais
je ne crois pas que c'est ici qu'il va falloir analyser tous et chacun des
articles et se demander s'ils sont légaux ou pas. Je vous avertis, il en
reste plus de 200. Ils sont tous sujets à une interprétation plus
ou moins confirmative de leur légalité. Ceux-là sont
simples, il y en a d'autres beaucoup plus complexes qui - l'avenir nous le
démontrera - feront l'objet d'interprétations par les tribunaux.
La Loi sur les impôts est l'exemple classique de contestations
habituelles et annuelles, tout au long de l'année, sur chacune des lois;
c'est normal.
Je ne vois pas ce qu'on pourrait ajouter, sauf pour préciser
encore une fois que le ministère du Revenu a une division dans sa
nomenclature qui relève d'un sous-ministre adjoint, qui est
composée de plusieurs juristes qui préparent les lois, en
collaboration avec la Justice, de sorte que, lorsque le ministre du Revenu dit
qu'il a eu des consultations, c'est que les propres conseillers du ministre, en
vertu de la loi, lui ont remis le projet de loi 2, en lui confirmant qu'ils
étaient confiants que ce projet de loi était acceptable sur des
bases juridiques normales. Si vous avez l'indication claire d'un
élément illégal particulier, soit à la suite d'un
jugement dans une autre province, soit parce qu'un élément
apparaît à sa face même illégal, nous sommes
prêts à l'examiner, mais, à ce jour, aucun
élément que vous avez présenté à sa face
même ne démontre une illégalité.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Chicoutimi. M. le député de Jonquière.
M. Dufour: Est-ce que vous pouvez me nommer, M. l'adjoint et
député de
Montmorency, d'autres éléments dans cette loi qui
subissent des applications qui découlent d'énoncés
budgétaires, qui ne s'appuient pas sur une déclaration
ministérielle directement et où quelqu'un s'est approprié
un pouvoir qui n'avait pas été donné avant?
M. Séguin: À l'inverse.».
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Excusez-moi, M. le Président, je prends
la parole. À l'inverse de votre énoncé, M. le
député de Jonquière, on pourrait se demander si une des
dispositions de la loi 2 a fait l'objet, depuis le 23 avril, d'un
arrêté ministériel autre qu'à l'article 29. Je ne
crois pas, à mon humble avis, qu'il y en ait eu, parce que la plupart
des mesures qu'on a devant nous, vous le savez, sont opérationnelles et
ne nécessitent pas, dans le plupart des cas, des arrêtés
ministériels. À partir du 23 avril, le ministre du Revenu
constate les énoncés budgétaires et respecte les
ordonnances du ministre des Finances lorsqu'il dit que tel
élément de la Loi sur les impôts est modifié
à partir de telle date à telle date. Le ministre du Revenu les
applique et, plus tard, une loi viendra avec effet rétroactif confirmer
juridiquement ces éléments.
Alors, cela fait, à ma connaissance, deux jours qu'on discute de
ce principe qui demeure toujours vrai que la loi est rétroactive
à l'énoncé budgétaire du 23 avril et il n'y a rien,
jusqu'à maintenant, qui change.
S'il y avait une mesure dans le budget du 18 décembre qui
apportait une modification, nous serions quand même obligés de
regarder la loi 2 telle qu'elle est là et d'examiner si, pour le temps
qu'elle a été appliquée, sans être affectée
par le budget du 18 décembre, elle est bien acceptable dans sa
façon d'être écrite et on serait obligé de
vérifier si l'article 29 est bien conforme à ce que le ministre
des Finances de l'époque voulait faire dans son budget.
C'est cela qu'on a à se poser comme question de
légalité. À moins que vous ne me démontriez,
à la lecture de l'article 29, que ce n'est pas le reflet de
l'énoncé budgétaire à la page 31 qui est
expliqué en détail à l'annexe de la page 49, je dois
conclure qu'on n'a aucune raison de s'interroger davantage sur une question
d'illégalité qui n'apparaît nulle part. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Mais on se rend compte, tout de même, que ce
n'est pas une mesure habituelle; parce que, de l'aveu même du ministre du
Revenu, il a dit quelque part: Bien oui, je me suis appuyé sur cela en
pensant que la loi pourrait être acceptée pour
décréter une hausse de taxe.
Je prends bonne note que vous me dites: C'est possible que... Je pense
que dans les faits, c'est comme cela; c'est le seul endroit où on ne
s'appuie pas sur un énoncé clair, net, précis du discours
sur le budget pour prendre action, parce qu'on donne un nouveau pouvoir. Cela
m'intrigue beaucoup; c'est qu'à sa face même l'action a
été prise à partir d'une toi qui n'est pas adoptée.
(14 h 45)
Qu'est-ce qu'on fait? Je ne pourrais pas, demain matin, dire à
quelqu'un, en supposant que je change la loi sur la vitesse: Tu ne peux pas
aller à 50 kilomètres à l'heure demain, parce que j'avais
l'intention de changer la loi après-demain. C'était 30
kilomètres que je voulais mettre. Tu as passé à 50, je
t'arrête pour la veille. C'est un petit peu ça, grosso modo.
J'essaie de trouver une réponse. On se fait dire: Le ministre a
fait un décret sur une loi dont il a présumé l'adoption.
Sans être légiste, sans être un grand compétent, cela
me cause un problème de conscience, et un sérieux
problème. C'est pour cela que j'insiste pour savoir s'il y a des avis
juridiques qui se rapportent à cela.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Ce que vous venez de dire, M. le
député de Jonquière, n'est pas exact. Je ferais appel,
à ce moment, peut-être même à ce que peut en penser
le député de Lévis. On a parlé, depuis trois jours,
du principe de la rétroactivité d'une loi fiscale. J'aimerais, si
vous le voulez bien...
M. Garon: Question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): Oui, je m'y attendais, M. le
député de Lévis.
M. Garon: En vertu de l'article 246 où il est dit: "Le
ministre ou le député qui présente un projet de loi - en
l'occurrence, c'est le ministre du Revenu qui présente un projet de loi
- outre le temps de parole dont il dispose au même titre que les autres
intervenants, a droit à un temps de parole de cinq minutes après
chaque intervention." Cela ne vaut pas pour l'adjoint parlementaire; cela vaut
pour le ministre qui présente un projet de loi, ou un
député qui présente un projet de loi en son nom. Dans ce
cas-ci, je pense qu'il va falloir...
Le Président (M. Lemieux): Un instant, M. le
député. Relativement à votre question
de règlement, si je vous réfère à la Loi sur
l'Assemblée nationale, article 25 des adjoints parlementaires, il est
bien dit: "Le gouvernement peut nommer, parmi les députés, un ou
plusieurs adjoints parlementaires à un ministre pour l'assister dans
l'exercice de ses fonctions. L'adjoint parlementaire peut répondre aux
questions adressées au ministre ou en prendre avis en son nom." Le
député de Montmorency, en s'exprimant, s'exprimait sur son temps.
J'ai à vérifier, effectivement, si son temps de parole n'est pas
dépassé et j'accepte votre question de règlement. Je vais
vérifier son temps de parole.
M. Garon: L'article auquel vous référez, la
nomination des adjoints parlementaires, vaut pour l'Assemblée nationale,
pour la période des questions, mais pas pour la défense d'un
projet de loi qui est une responsabilité ministérielle. On
applique le règlement. Or, le règlement nous dit que c'est le
ministre qui présente un projet de loi.
Le Président (M. Lemieux): J'accueille votre question de
règlement, M. le député de Lévis. À
l'article 246, il est bien dit: "Le ministre ou le député qui
présente un projet de loi, outre le temps de parole dont il dispose au
même titre que les autres intervenants, a droit à un temps de
parole de cinq minutes après chaque intervention." L'article 246 stipule
bien "le ministre". Je crois que ce3 prérogatives, si le
législateur avait voulu qu'elles s'étendent aux adjoints
parlementaires, il l'aurait dit, effectivement.
Y a-t-il d'autres interventions? Je crois que Mme la
députée de Chicoutimi a cédé son droit de parole.
Non. Alors, Mme la députée de Chicoutimi, de consentement.
Une voix: Consentement.
Le Président (M. Lemieux): II y avait consentement tout
à l'heure; alors, de consentement.
Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président, de
même que les membres de la commission. Comme hier, je vais tenter
d'être brève. Mon propos porte, évidemment, sur l'article
29.3 de la loi 2.
La déclaration du ministre du Revenu repose sur un article de la
loi 2, article qui modifie une autre loi. Je ne veux pas présumer de la
mauvaise foi et de la mauvaise volonté des gens d'en face, mais il me
semble qu'on ne saisit pas tout à fait la même chose. Ce qu'il y a
d'important et qui fait la différence, c'est que l'article ainsi
modifié, qui en modifie un autre, n'a pas été
adopté par l'Assemblée nationale; il n'est pas venu devant les
parlementaires. On ne s'est pas prononcé sur cette modification à
une loi qui en modifie une autre.
Le député de Montmorency nous disait, ce matin, je pense -
il lisait un rapport - Si vous avez accepté l'article 28, vous devriez
aussi accepter l'article 29. L'article 28 porte sur le pourcentage
d'augmentation de la taxe et non pas sur la base de calcul de la taxe. Ce n'est
pas sur le pourcentage qu'on se prononce, c'est sur la base de calcul qui a
été modifiée.
J'ai écouté les arguments de part et d'autre de la Chambre
et je demeure convaincue qu'il y a un vice de forme qui fait que le ministre du
Revenu s'est arrogé un droit qui appartient aux parlementaires.
La règle générale veut que les augmentations soient
décrétées soit par le ministre des Finances ou à
l'occasion du discours sur le budget. Si un ministre -j'allais dire un simple
ministre, mais disons un ministre - peut décréter une
augmentation de taxes en se basant sur un article d'une loi qui en modifie une
autre et sans que cela vienne devant les parlementaires, qu'est-ce que les
parlementaires font ici?
On peut présumer, comme le ministre l'a fait, que la loi va
effectivement être adoptée, et il est certain qu'elle va
l'être: à 99 contre 23, je sais compter. Sauf que cela
m'apparaît un peu déroger aux règles et pas très
respectueux, non plus, de l'Opposition.
Le ministre du Revenu nous faisait ce matin une proposition que j'ai
appréciée. Il a dit: Je vais faire preuve de beaucoup de
libéralisme, d'ouverture d'esprit; je vous propose de suspendre l'examen
de cet article et je vais consulter et vous apporter le fruit de ma
consultation mardi, à la reprise des débats. J'ai
apprécié, sauf que j'aurais apprécié et reconnu la
sincérité du geste s'il était allé aussi loin que
je pense qu'il devrait aller, c'est-à-dire à un avis juridique.
J'ai de la difficulté à comprendre, avec l'assurance des gens
d'en face, qu'ils sont dans leur droit. S'ils sont autant dans leur droit,
pourquoi refuse-t-on cela? J'ai peine à comprendre cela.
Je ne suis pas certaine, non plus, que la population le comprenne. Je
vais le rappeler et je vais y revenir. On est ici pour essayer de régler
les choses, d'adopter des lois qui respectent au mieux la population qui nous a
élus. Étant donné que la question est soulevée,
à mon avis, la population a le droit de savoir où se trouve la
vérité.
Ma question est la suivante: Est-ce que le ministre a en main un avis
juridique sur la question? Est-ce que le ministre a pris connaissance de cet
avis? Sinon, est-ce qu'il est prêt à nous en produire un? J'estime
que c'est le droit de l'Opposition d'avoir un tel avis, mais, plus encore,
j'estime que c'est le droit du public de savoir où se trouve la
vérité. Je vais le répéter, un peu comme je l'ai
dit hier, je ne laisserai pas les parlementaires oublier qu'on est ici pour
cela. Si cette taxe est légale, je ne comprends pas
l'hésitation du gouvernement à nous produire un tel avis. Je me
demande de quoi il a peur.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Est-ce qu'en vertu de l'article 213 j'aurais la
permission de poser une question à Mme la députée?
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Montmorency. Est-ce que vous acceptez, Mme la députée de
Chicoutimi, que le député de Montmorency vous pose une question
en vertu de l'article 213?
Mme Blackburn: Oui.
M. Séguin: Est-ce que vous accepteriez comme suffisant le
dépôt d'un jugement de la Cour suprême qui dit qu'il est
légal pour un gouvernement de déposer un budget, d'en adopter les
mesures, quitte à ce que la loi éventuelle qui sanctionne ce
budget ait un effet rétroactif à la date de
l'énoncé du budget?
Mme Blackburn: Mais, oui, cela me paraît... C'est
généralement déposé et c'est le droit du
gouvernement de le faire. En l'occurrence...
M. Séguin: C'est ce qu'on a fait.
Mme Blackburn: ...ce qui est arrivé ici, c'est une
déclaration ministérielle. Cela n'apparaît pas comme tel...
Ce n'est pas sur l'ensemble du projet de loi 2. Je pense bien que
là-dessus on s'est compris.
M. Garon: On est d'accord avec cela.
M. Séguin: C'était dans l'ancienne loi. C'est
l'article 9.3 de la loi actuelle.
M. Garon: Personne n'a jamais mis cela en doute.
M. Séguin: Alors, il n'y a plus de question de
légalité?
M. Garon: Répondez aux questions.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
Mme Blackburn: Si vous me le permettez, M. le Président,
j'ai posé des questions et j'aimerais qu'on y réponde. Le
ministre est là et...
M. Gratton: M. le Président, on a déjà
répondu à toutes ces questions. Je regrette, mais on ne
contribuera pas à l'obstruction systématique que fait
l'Opposition. On n'est quand même pas pour y participer
nous-mêmes.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Chicoutimi, le ministre n'a pas l'obligation, si vous regardez bien, l'article
des règles de la procédure - je crois que c'est l'article 245 -
de répondre; il peut le faire, mais il n'en a pas l'obligation.
M. Gratton: J'assure Mme la députée que ce n'est
pas pour être désagréable, mais j'ai déjà
vécu ce genre d'exercice où l'Opposition essaie d'entraîner
les membres du parti ministériel à participer au "filibuster". Je
sais que ce n'est pas là votre intention, mais votre
sincérité n'est pas partagée ou je ne la prête pas
à tous les membres de votre parti. Donc, je n'entends pas
répéter des réponses qu'on a déjà
données ici.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Madame n'avait pas terminé, je
pense.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Si vous me le permettez, M. le Président.
Le ministre a répondu à une première question ce matin en
nous disant - et je reprends la transcription des débats - "Non, je n'ai
pas d'avis juridique écrit comme tel". À la première
question, j'estime que la réponse a été fournie.
La seconde question: Est-il possible, en se fondant sur les doutes
sérieux que l'on entretient à l'endroit de la
légalité de cette taxe, qu'on puisse avoir un avis juridique?
M. Gratton: Absolument, et je vous suggérerais d'en
obtenir un. Ce matin, j'ai proposé à l'Opposition de faire toutes
les consultations qui pourraient m'amener à revenir devant la commission
avec les avis nécessaires pour prendre les actions nécessaires.
L'Opposition a voulu assortir cela de conditions; j'ai conclu à la
mauvaise foi de l'Opposition et je persiste à croire en la mauvaise foi
de l'Opposition. Cela se limitera à cela, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Chicoutimi.
M. Gendron: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Lemieux): Selon quel article du
règlement, M. le député d'Abitibi-Ouest?
M. Gendron: L'article qui dit que dès que quelqu'un
intervient sans rapporter fidèlement des propos...
Le Président (M. Lemieux): Quel article, M. le
député?
M. Gendron; Je ne le sais pas; nous avons un président
d'assemblée pour cela.
M. Bissonnet: Vous connaissez le règlement, M. le
Président.
M. Gendron: Très simplement, M. le Président, je
fais référence à l'article...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jeanne-Mance, oui.
M. Gendron: ...où on peut invoquer que les propos d'un
député ne sont pas rapportés fidèlement.
Le Président (M. Lemieux): Oui, effectivement, je vais
vous donner le numéro de l'article.
M. Gendron: ...dès que l'intervenant a fini de parler.
M. Gratton: Les propos de quel député?
M. Gendron: En l'occurrence, ce sont les propos du ministre du
Revenu et non pas d'un député.
M. Gratton: Alors, l'article 212 ne s'applique pas à des
propos que j'ai tenus; ce n'est pas à vous de les rectifier,
certain.
M. Bissonnet: Le ministre peut le faire s'il y a lieu.
M. Gratton: Vous pouvez rectifier vos propres propos - et je vous
le conseillerais -mais pas les miens.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député d'Abitibi-Ouest, je vais vous faire la lecture de
l'article 212. Je pense que vous le connaissez tout aussi bien que la
présidence: 'Tout député estimant que ses propos ont
été mai compris - il s'agit de ses propos à lui - ou
déformés peut donner de très brèves explications
sur le discours qu'il a prononcé."
M. le député d'Abitibi-Ouest, la parole était
è Mme la députée de Chicoutimi.
M. Gendron: Un instant, M. le Président. Sur la question
de règlement, ce sont mes propos qui ont été
déformés, car M. le ministre du Revenu a dits "J'ai offert
à l'Opposition ce matin..." Je suis membre de l'Opposition et c'est moi.
J'ai ici la transcription où le ministre du Revenu, à une
question du député d'Abitibi-Ouest, répond ceci: "Ce que
je vous offre, c'est de faire des consultations et de faire rapport devant la
commission."
M. Gratton: Ce sont mes propos.
M. Gendron: Je le sais, je vous cite en réponse à
une question que je vous ai posée. Le ministre du Revenu vient de nous
dire qu'il nous a fait l'offre, il vient de faire l'affirmation qu'il nous a
offert autre chose que ce qu'il a dit ici, et c'est dans ce sens que je pense
important de rectifier ses propos.
M. Gratton: M. le Président, question de
règlement.
M. Gendron: Laissez-moi poursuivre.
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît:
M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.
Comment "laissez-moi poursuivre"?
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît:
Une voix: C'est à vous de le laisser poursuivre.
M. Gratton: Bien, voyons donc:
M. Gendron: Oui, c'est à lui de me laisser poursuivre.
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le
député d'Abitibi-Ouestl
M. Doyon: C'est cela, quand on ne demande pas le respect du
règlement.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu. (15
heures)
M. Gratton: Je lis l'article 212 qu'invoque le
député d'Abitibi-Ouest. Il se lit comme suit: "Tout
député estimant que ses propos ont été mal compris
ou déformés peut donner de très brèves explications
sur le discours qu'il a prononcé." Donc, M. le Président, le
député d'Abitibi-Ouest n'a pas à donner des explications
sur les propos que j'ai tenus. Je suis le seul, en vertu de l'article 212, qui
peut rectifier mes propos et je n'ai rien à rectifier, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest, le sens des mots de l'article 212 m'apparaît tout aussi
clair. Je dois vous dire que j'accepte l'argumentation du ministre du Revenu
à savoir qu'il doit s'agir de ses propres propos.
Mme la députée de Chicoutimi, est-ce que vous aviez
terminé?
Mme Blackburn: Non, M. le Président.
M. Gratton: C'est très important de citer le numéro
de l'article.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: J'ai apprécié, je le
répète, le fait que le ministre du Revenu nous propose de nous
faire part de sa consultation mardi, si on acceptait de suspendre la discussion
sur l'article 29. Il s'est toutefois refusé à ajouter - je ne
dirais pas de le faire de façon exclusive - à sa démarche
une demande d'avis juridique sur la question. Cela n'excluait pas pour autant
l'ensemble des autres consultations qu'il est en droit et en mesure de faire,
je n'en doute pas, malgré qu'il y ait des compressions chez le
personnel.
Je voudrais savoir ce qui fait, lorsqu'on est si certain d'être
dans son droit, qu'on hésite autant à produire un avis juridique
qui serait à la satisfaction de toutes les parties, je pense. La
population serait informée, l'Opposition estimerait qu'on lui a rendu
justice en cette matière et je ne pense pas que, d'une façon ou
d'une autre, s'il était démontré qu'on a erré dans
la circonstance, cela porte un préjudice grave au gouvernement.
Je me demande ce qui fait qu'on refuse ce droit et cette information
à la population de façon générale.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: J'ai déjà répondu à cela
ce matin, M. le Président. Ce matin, quand j'ai offert à
l'Opposition de faire des consultations, je n'excluais pas de demander les avis
juridiques nécessaires sauf que l'Opposition a refusé, a voulu
poser une condition à savoir qu'il fallait que ce soit un avis du
ministère de la Justice. J'ai les avis du ministère du Revenu qui
m'amènent à...
M. Garon: Ah!
M. Gratton: Oui. Si vous en avez un autre, M. le
député de Lévis, déposez-le.
M. Garon: Je n'en ai pas.
M. Gratton: Oui. De toute façon, l'offre était
là, l'Opposition l'a refusée. Inutile d'insister maintenant,
après avoir utilisé deux ou trois heures du temps de la
commission à faire un débat quant à moi inutile, pour me
demander de vous faire la même offre. Il n'en est pas question, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous avez
terminé, Mme la députée de Chicoutimi?
M. le député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Je cite les
propos que tenait ce matin le ministre du Revenu: Je suis prêt à
faire d'autres consultations et à vous assurer qu'on est à 100 %
sécuritaire quand on affirme et qu'on continue d'affirmer qu'il n'y a
aucune différence entre l'application de l'article 29 du projet de loi
par rapport à tous les autres articles.
J'aimerais dire qu'il y a une différence fondamentale dans le cas
de l'article 29 par rapport aux autres articles. Les propos du
député de Montmorency étaient relativement rassurants
tantôt, quand il disait qu'effectivement tout ce projet de loi 2 est
rétroactif. Je pense qu'on est pleinement conscient, de ce
côté-ci, que ce projet de loi est rétroactif et qu'il a
trait au contenu de l'énoncé budgétaire du 23 avril 1985.
Cependant, lorsque le député de Montmorency affirme que l'article
29 est comme les autres articles, c'est là qu'on est sur une discordance
et c'est là qu'on dit que l'article 29 est totalement
différent.
On ne pourrait pas ici - je parle en notre nom, du côté de
l'Opposition - et les autres membres de cette commission, je pense, ne
pourraient pas voter l'article 29 en leur âme et conscience quand ils
savent très bien que nous sommes dans un imbroglio juridique. C'est
important, peu importe qui siège à cette commission, et j'en ai
la profonde conviction. Le ministre du Revenu nous a dit, il y a quelques
minutes, qu'il avait des avis en main. Est-ce qu'il pourrait rassurer les
membres de la commission, et les membres de l'Opposition, que les avis qu'il a
entre les mains actuellement de fonctionnaires de son ministère sont des
avis positifs quant à ce qu'il affirme? Est-ce que le ministre du Revenu
peut nous confirmer cela? Les avis qu'il a entre les mains actuellement, est-ce
que ce sont tous des avis qui sont positifs quant à leur position par
rapport à cela?
M. Gratton: M. le Président, c'est une question qu'on
pose? Les avis que j'ai sont des avis verbaux que j'ai déjà
énoncés. Tout ce à quoi j'invite l'Opposition, si elle a
des avis écrits, c'est à les déposer. Quand j'aurai des
avis écrits, je les déposerai. Je n'en ai pas au moment où
on se parle.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Cela répond à ma
question.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: Sur l'article 29. 9.3, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): L'article 29. 9.3, oui, vous
m'en aviez fait état.
M. Desbiens: M. le Président, le parti ministériel
semble croire, comme on l'a dit tantôt, qu'on fait de l'obstruction
systématique ou encore, comme un autre l'a dit ce matin, qu'on veut
démontrer que cette taxe est une taxe libérale plutôt
qu'une taxe péquiste. Je pense qu'on n'est plus sur cet aspect. C'est
fait. Je pense que le ministre a lui-même reconnu hier que c'était
une taxe libérale. On est sur quelque chose de plus fondamental.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Mon ami Hubert me fait dire des choses que je n'ai
pas dites.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu, s'il
vous plaît!
M. Gratton: Je vais invoquer l'article 213, M. le
Président.
M. Desbiens: J'inviterais le ministre du
Revenu à lire sa déclaration d'hier: R-115-
CBA, page 1, 15 h 50. Je peux la lire. C'est implicite.
M. Gratton: Cela va être moins compliqué que de dire
quelque chose de...
M. Desbiens: J'entends déjà le discours des gens
qui vont nous dire: Vous aviez des choix; vous auriez pu ne pas lever la taxe
sur le tabac, peut-être bien maintenir celle sur les primes d'assurance
personnelle. Justement, on a fait des choix dont celui de prélever une
taxe sur le tabac. On a fait des choix.
M. le Président, ce n'est pas là l'objet de mon
intervention. Il n'y a pas d'obstruction systématique. De l'avis de
l'Opposition, en tout cas - je pense que les députés
ministériels vont être d'accord - il s'agit d'un droit fondamental
des parlementaires qui est en cause. Un ministre s'est arrogé un droit
qui appartient vraiment aux parlementaires. Avant même que la loi soit
étudiée, même pas sanctionnée, mais
étudiée par l'Assemblée nationale, par les parlementaires,
il a pris une décision, signé un arrêté
ministériel pour exercer une action gouvernementale. Je ne suis pas un
spécialiste des questions parlementaires, mais je rappelle quand
même ce que le député de
Lévis soulevait ce matin, à savoir qu'un des
spécialistes en droit parlementaire, M. May, dit bien "a charge does not
acquire full validity until authorized by legislation". Je ne sais pas si
vous... C'est donc cet aspect qui nous trouble. C'est pour cela que constamment
on demande au ministre de nous donner une garantie juridique objective.
D'ailleurs, c'est pour cela que le ministre, hier, pour justifier
l'action qu'il a prise, a dit que le gouvernement précédent,
parce que c'est le seul qui a agi quant à cette loi... C'est une loi du
gouvernement précédent, c'est une loi de M. Parizeau, une loi de
1980.
Je reprends la transcription des débats d'hier, à
R-B-113-CBA, pages 1 et 2. M. Garon pose une question au ministre: "Est-ce que
le ministre du Revenu pourrait nous dire la date où les
arrêtés ont été votés et quand est-ce que les
lois ont été votées? Les arrêtés ont
été adoptés à la suite de lois qui ont
été votées régulièrement ou avant?" M.
Gratton, finalement, répond: "Pour répondre même à
la question qui n'en est pas une, évidemment, l'arrêté
ministériel a été voté après la loi parce
que j'imagine..." Là, il y a des points de suspension. Il dit: "II y a
eu un budget le 25 mars 1980. Il y a eu un arrêté
ministériel le 4 juillet 1980." Le ministre devrait m'écouter, je
pense.
M. Gratton: J'écoute.
M. Desbiens: Oui? Je ne suis pas sûr.
M. Gratton: J'écoute, mais c'est parce que je l'ai
déjà entendu.
M. Desbiens: C'est vous qui l'avez dit. "Il y a eu un
arrêté ministériel le 4 juillet 1980 où le prix de
vente a augmenté et la taxe a augmenté de 0,0248 $. 11 y en a eu
un autre le 12 ou le 5 décembre 1980 signé par un ministre
péquiste qui a fait augmenter la taxe sur le tabac. Je signale que la
loi n'était pas adoptée à ce moment. La loi qui
prévoyait ces arrêtés ministériels n'était
pas adoptée."
Justement, c'est là l'objet de ma démonstration. Je
suppose que ce que le ministre a dit là, il l'a dit de bonne foi. Je ne
veux pas mettre sa bonne foi en doute, mais il a complètement
erré et a induit, sans le vouloir, je le crois, tous les membres de
cette commission" en erreur. C'est la démonstration que je veux faire:
il tente de s'appuyer sur le gouvernement précédent, sur le
gouvernement péquiste pour dire que ce qu'il a fait le 5 février
1986 est correct: Au contraire, le gouvernement du Parti
québécois n'a jamais agi à rencontre des droits et
privilèges de l'Assemblée nationale en ce qui concerne ce projet
de loi, cette loi spécifiquement.
Pour cela, je me reporte à 1980,
au discours sur le budget du 25 mars 1980, à la page 10. M.
Parizeau, dans son budget, dit donc sur la taxe sur le tabac: "À compter
de minuit le soir du discours sur le budget, la taxe sur les cigarettes passe
de 0,018 $ à 0,0120 $ par cigarette, soit le niveau de la taxe
ontarienne sur les cigarettes. Simultanément, la structure de taxation
de tous les produits du tabac est transformée en une taxe ad valorem
exprimée en fonction du prix de vente au détail. Le taux de cette
taxe est fixé à 40 %." C'est l'article 8. C'est à partir
de ce moment qu'une nouvelle loi a été proposée à
l'Assemblée nationale pour établir, justement, cette nouvelle
structure de taxation que le ministre du Revenu pourrait ultérieurement
utiliser, qui permettrait au ministre du Revenu de déterminer le prix
moyen avec les articles 9.1, 9.2, 9.3, 9.4, 9.5. L'autorité du ministre
du Revenu porte sur ce point, sur l'article 9. L'autorité du ministre
des Finances sur le taux de la taxe.
De 1980 à 1985, on peut relire chacun des discours sur le budget
en question; à la page 30 du budget de 1981-1982, le ministre Parizeau
annonce donc que les taxes sont portées de 40 % à 45 %, etc.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc, voulez-vous vous en tenir au discours sur le budget se rapportant
directement à l'adoption?
M. Desbiens: C'est ça, mais c'est pour faire ma
démonstration. Je suis obligé de faire un peu d'historique.
Le Président (M. Lemieux): Vous savez toutes les
directives... Oui, j'ai bien senti cela.
M. Desbiens: C'est important, je pense, en fonction de ce qu'on
débat. La structure est restée identique jusqu'à 1985, au
discours sur le budget de M. Duhaime. Là, il y a une nouvelle
modification, à la page A-49, où, à l'article 8, M.
Duhaime dit: "La taxe sera portée de 55 % à 60 %." Dans la phrase
qui suit: "Par ailleurs, en ce qui concerne la vente de cigarettes, le taux de
la taxe est actuellement appliqué sur un prix de vente moyen
déterminé de temps à autre sur une cartouche de 200
cigarettes. Dorénavant, ce taux sera appliqué sur le prix de
vente moyen d'un paquet de 25 cigarettes." Donc, il annonce une modification
à la loi, à l'article 9.1, 9.2, 9.3, 9.4, 9.5, pour
déterminer le prix moyen des cigarettes. Ce ne sera plus 200 cigarettes.
Il y a une loi nécessaire pour modifier les pouvoirs du ministre du
Revenu pour que l'établissement de son prix moyen, qui portait sur 200
cigarettes, porte maintenant sur vingt-cinq cigarettes. (15 h 15)
C'est évident, M. le Président, qu'il est faux de la part
du ministre du Revenu de prétendre qu'il a agi comme les
précédents gouvernements ont agi. Tous les arrêtés
ministériels portant sur des modifications à la taxe sur les
cigarettes ont toujours été faits, en vertu... Par la suite, il
n'y a eu aucune modification à cette taxe-là. Si on regarde la
Loi concernant l'impôt sur le tabac, il n'y a eu aucune modification
à ce jour des articles 9.2, 9.3, 9.4 et 9.5. La première
modification a été annoncée dans le budget de M. Duhaime.
C'est à partir de cela que le doute existe sur la
légalité. C'est à partir de cela qu'on insiste tellement
pour obtenir un avis juridique écrit. Comme le disait tantôt le
ministre du Revenu, ce qu'il a fait ce matin, ce n'était pas
déposer un avis juridique. La transcription des débats est
très claire; c'est le ministre du Revenu qui le dit: Je m'engageais
à faire des consultations et à faire rapport devant la
commission.
Ce qu'on demande, c'est plus que des consultations orales ou autrement
parce qu'on veut avoir la certitude, et c'est bon et valable pour tous les
membres de cette assemblée, qu'il était vraiment dans la
légalité pour agir. C'est ça que je ne comprends pas. Je
reprends presque la question de ma collègue de Chicoutimi: Si le
ministre est si certain d'avoir fait tout cela dans la légalité
complète, qu'est-ce qui l'empêche d'en fournir la preuve
d'éclairer ici les membres de cette assemblée, aussi bien de son
parti que de l'Opposition, pour s'assurer que, finalement, les droits des
parlementaires sont vraiment respectés?
Il y a un élément fort important sur lequel je veux
terminer, M. le Président, c'est lorsqu'il a dit qu'il y avait eu un
arrêté ministériel le 4 juillet 1980, un autre du 5
décembre 1980 alors que la loi n'était pas adoptée
à ce moment-là...
NI. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu,
question de règlement.
M. Gratton: En vertu de l'article 212, M. le Président. On
est en train de me faire dire que j'ai dit des choses au sujet de 1980 alors
que l'exemple que j'ai donné hier, documenté avec des dates
précises, c'était en 1982. Reprenez vos notes et prenez cela en
note, M. le député.
M. Desbiens: Non, non, c'est la transcription des
débats.
M. Gratton: Oui, j'ai parlé, évidemment, d'un
ensemble. Je suis parti de 1980 et je suis allé jusqu'à 1985, et
j'ai démontré que la seule année où ii n'y a
pas
eu d'augmentation de taxe automatique sous votre règne a
été l'année où il y a eu une élection, comme
par hasard. Je me rappelle avoir fait cela. J'ai parlé d'une
année, j'ai donné un cas d'espèce, et c'était celui
de 1982.
Une voix: 26 mai 1982.
M. Gratton: Le discours sur le budget du 26 mai 1982,
arrêté ministériel signé le 7 juillet, prenant effet
le 17 juillet sans qu'il y ait de déclaration ministérielle
à l'Assemblée nationale; une autre le 18 octobre 1982, pas 1980,
et la loi, elle, sanctionnée seulement le 16 décembre 1982,
situation identique à celle qui existe ici, exactement.
M. Desbiens: Mais non. M. le Président, sur la question de
règlement...
M. Gratton: M. le Président, si le député de
Dubuc essaie de lire les épreuves du Journal des débats, il
devrait les lire de façon conforme à la vérité.
C'est de 1982 qu'il s'agissait hier et non pas de 1980.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc,
nous allons lire l'article 212 ensemble qui dit: "Tout député
estimant que ses propos ont été mal compris ou
déformés peut donner de très brèves explications
sur le discours qu'il a prononcé."
M. Gratton: II a déformé mes propos.
Le Président (M. Lemieux): Je crois que la question de
règlement soulevée par le ministre du Revenu était
recevable. Sur la question de règlement, M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: M. le Président, je ne sais plus quoi...
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de
règlement. Selon l'article 212, j'ai fait mention que la question de
règlement était recevable.
M. Desbiens: Oui, alors, il les a fait ses... Moi, je ne reviens
pas là-dessus; je relis le texte de la transcription des débats,
M. le Président. C'est la transcription des débats que j'ai lue
là, le mot à mot. Je relis, M. le Président: R-B-113-CBA,
page 2, à 15 h 40 hier. Allez le chercher et lisez-le, M. le ministre.
C'est M. Gratton qui parle, c'est marqué: "M. Gratton:...
M. Bissonnet: Deux "t".
M. Desbiens: Oui, deux "t" aussi. "Pour répondre
même à la question qui n'en est pas une, évidemment,
l'arrêté ministériel a été voté
après la loi, parce que j'imagine..."
M. Bissonnet: À la ligne.
M. Desbiens: Non, il n'y a pas de point à la ligne. Donne
donc une copie au député.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jeanne-Mance, s'il vous plaît!
M. Desbiens: "II y a eu un budget le 25 mars 1980." Ce n'est pas
moi qui dis cela, c'est écrit là.
M. Gratton: Oui.
M. Desbiens: Oui. "Il y a eu un arrêté
ministériel le 4 juillet 1980 où le prix de vente a
augmenté et la taxe a augmenté de 0,0248 $. Il y en a eu un autre
le 12 ou le 5 décembre 1980 signé par un ministre péquiste
qui a fait augmenté la taxe sur le tabac. Je signale que la loi
n'était pas adoptée à ce moment." Ce n'est pas moi qui dis
cela, c'est vous. La loi était adoptée. Elle a été
sanctionnée le 18 juin 1980.
M. Gratton: Parlez donc de 1982.
M. Desbiens: Un instant! Vous avez induit la commission en
erreur.
M. Gratton: Parlez de 1982.
M. Desbiens: Je vous le démontre.
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: Vous vous êtes basé sur cela pour dire
que ce que vous avez fait était conforme à ce qui se faisait
précédemment. Ce n'est pas vrai.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Puis-je demander au député de Dubuc
s'il est en mesure d'affirmer qu'en 1982 la situation n'était pas
analogue à celle-ci?
M. Garon: 1980.
M. Desbiens: Je l'ai fait, M. le Président.
M. Gratton: 1982.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: M. le Président, je lui ai dit tantôt
d'écouter ce que je disais.
M. Gratton: 1982.
M. Desbiens: II ne m'a pas écouté.
M. Gratton: 1982.
M. Desbiens: Regardez le projet de loi. Cela le dit. Je ne suis
pas un juriste, mais je le sais. S'il y avait eu une modification au paragraphe
9.2, ce serait inscrit ici. Il n'y a pas eu de modification au paragraphe 9.2
depuis 1980, ni aux paragraphes 9.3, 9.4 et 9.5. Ce que j'ai
démontré est absolument exact. J'y reviens, l'offre qu'il a faite
ce matin, ce n'était pas une offre de déposer un avis juridique
démontrant la légalité, mais de faire des consultations et
de faire rapport à la commission.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu,
avez-vous des commentaires?
M. Gratton: Non, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-il d'autres interventions
sur l'article 29, paragraphe 9.3, du projet de loi 2? J'appelle le paragraphe
9.4 de l'article 29.
M. Gendron: M. le Président, je veux intervenir à
ce moment-ci en suggérant aux membres de cette commission, suivant, bien
sûr, la réponse du ministre du Revenu... Lorsque le ministre du
Revenu, ce matin, nous a fait la suggestion de suspendre l'ensemble de
l'article 29, nous croyions qu'avec les arguments additionnels qu'on
évoquerait sur la prétention d'illégalité en
débattant le contenu de l'article 9.3 nous réussirions à
convaincre le ministre du Revenu non pas de donner suite aux engagements que...
À ce moment, j'ai l'occasion de le faire. Les engagements qu'il avait
pris ce matin, contrairement à ce qu'il a affirmé, c'est de nous
faire rapport de ses consultations. Encore là, contrairement à ce
qu'il a dit à l'occasion d'une question posée par ma
collègue, la députée de Chicoutimi, qu'il s'engageait non
seulement à faire rapport de ses consultations, mais effectivement
à nous fournir l'ensemble de l'éclairage et, en particulier, par
la demande d'avis juridiques... Nous serions entièrement d'accord
qu'à ce moment-ci nous suspendions l'étude de l'article 9.4, de
même que le paragraphe 2 de l'article 29.
Une voix: Le paragraphe 3...
M. Gendron: Oui, le paragraphe 3, est en ce qui concerne la
votation; puisque le droit de parole étant épuisé en ce
qui nous concerne sur l'article 9.3, on se réserverait le droit de
parole de notre formation parlementaire sur l'article 9.4, à la
condition...
Une voix: Paragraphe 2.
M. Gendron: ... - paragraphe 2, bien sûr; cela fait partie
également de l'article -que le ministre du Revenu puisse, en
début de commission, nous faire rapport non pas de ses consultations,
mais des demandes qui ont été faites par l'Opposition de
déposer, ici à cette commission, des avis juridiques sur lesquels
il pourrait s'appuyer pour confirmer sa prétention de parfaite
légalité, non pas sur tout ce qu'on nous a dit être
parfaitement légal... On a toujours été très
précis là-dessus. Nous voudrions avoir un avis juridique
seulement sur deux choses.
M. Gratton: En vertu de quoi, M. le député
d'Abitibi-Ouest?
M. Gendron: M. le Président, c'est en vertu de l'appel de
la discussion sur l'article 9.4.
M. Gratton: C'est cela, vous discutez de l'article 9.4.
M. Gendron: Je ne discute pas du fond, M. le Président, je
propose...
M. Gratton: Bien oui, mais proposez quelque chose.
M. Gendron: Si vous écoutiez. Je pensais que vous aviez
écouté au moins depuis une minute.
M. Gratton: Bien oui, j'écoute depuis au moins cinq
à dix minutes.
M. Gendron: Je parle juste depuis deux minutes. Alors...
M. Gratton: Cela m'a paru comme cinq à dix minutes.
M. Gendron: Ah bon, d'accord.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, voulez-vous circonscrire...
M. Garon: Le député de Lévis...
Le Président (M. Lemieux): Pardon, je m'excuse. M. le
député...
M. Gratton: Ne l'invitez pas à faire quoi que ce soit!
Une voix: Ne le provoquez pas!
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest, je vous invite à circonscrire, s'il vous plaît,
pour le bénéfice du ministre du Revenu et de la commission.
M. Gendron: Je ne peux pas circonscrire plus qu'il ne le faut, M.
le Président. Je veux tout simplement
expliquer pourquoi je suggère aux membres de cette commission de
suspendre à ce moment-ci l'étude de l'article 9.4. J'ai
expliqué pourquoi je pense qu'il y aurait lieu de suspendre l'article
9.4. Pour être franc, on n'aura pas beaucoup d'autres arguments à
soulever à l'article 9.4, autres que ceux qu'on a soulevés
à l'article 9.2 et 9.3, puisqu'il s'agit exactement du même
contenu et de la même prétention que nous avons.
Je n'ai aucune objection à ce que nous fassions chacun nos 20
minutes sur l'article 9.4. C'est le gouvernement qui nous a accusés de
vouloir retarder le projet de loi et de ne pas vouloir avancer. J'aurais le
goût d'avancer. On a pris seulement quelques heures pour essayer de
convaincre le gouvernement de la légalité de notre point de vue,
en prétendant toujours qu'il y avait illégalité dans le
processus suivi par le ministre du Revenu. On lui demande de nous fournir un
avis juridique sur le geste qu'il a posé le 5 février.
Une voix: Le 4.
M. Gendron: Le 4 ou le 5 février, en tout cas. Je pense
que c'est le 5 février, le décret que nous avons du ministre du
Revenu. On veut qu'il puisse appuyer le fait que, lorsqu'il a signé ce
décret, il avait ce qu'il faut - selon lui, en conscience - pour
être certain que le geste qu'il posait était légal. M. le
Président, on a essayé de convaincre les membres du gouvernement,
on n'a pas réussi. Alors, nous n'avons pas d'objection à
recommencer, on est six de ce côté, on peut faire le débat,
chacun nos 20 minutes, sur l'article 9.4.
M. Gratton: Recommencez!
M. Gendron: On a la prétention...
M. Gratton: Écoutez, recommencez!
M. Gendron: ...qu'à ce moment-ci cela ne contribuera pas
à faire avancer les choses. Ce que je suggérerais, c'est de
suspendre l'article 9.4 et de continuer avec l'article 30.
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest, vous êtes bien conscient du fait que le mandat de la
commission est de procéder à l'étude article par article
et, pour une suspension, je dois avoir le consentement. Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Gendron: C'est cela. C'est ce que je veux savoir.
M. Gratton: Absolument pas. Est-ce que je peux expliquer
pourquoi, M. le Président?
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Oui, cela va me prendre moins de temps qu'il en a
fallu au député d'Abitibi-Ouest pour faire sa proposition.
M. Gendron: Vous prenez moins de temps pour dire non à
quelque chose que pour l'expliquer.
M. Gratton: M. le Président, je suis satisfait. Je
répète que je suis entièrement satisfait des avis que j'ai
présentement disant que le libellé de l'article 29, tel qu'il se
retrouve dans le projet de loi 2, traduit fidèlement les dispositions du
budget de M. Duhaime du 23 avril dernier, point à la ligne.
J'ai fait une offre, ce matin, que l'Opposition a choisi d'ignorer en
assortissent son consentement de conditions qui seraient susceptibles de
créer des précédents. Après trois heures de
répétition de la même argumentation, le
député d'Abitibi-Ouest, tout bonnement et tout gentiment, me
propose maintenant de suspendre et d'en arriver à la même fin que
ma proposition de ce matin, de façon à ne pas devoir
répéter la même argumentation. Je ne jouerai pas le jeu de
l'Opposition. Non, on ne suspendra pas. On aurait pu suspendre ce matin, mais,
là, on trouve cela tellement intéressant, l'argumentation de
l'Opposition, que je pense qu'on devrait continuer à l'écouter,
M. le Président. Alors, je vous prie d'appeler l'article 9.4.
Le Président (M. Lemieux): J'appelle l'article 29, 9.4, du
projet de loi 2, Loi modifiant certaines dispositions fiscales. Est-ce qu'il y
a des membres qui désirent intervenir sur l'article 9.4?
M. Gendron: Oui, mon collègue de Lévis va
intervenir.
Le Président (M. Lemieux}: M. le député de
Lévis.
Une voix: "The show must go on".
M. Garon: M. le Président, j'aimerais...
Le Président (M. Lemieux): Pour le bénéfice
de la commission, M. le député de Lévis, j'aimerais lire
l'article 9.4.
M. Garon: Très bien. M. Gratton: Bonne idée!
M. Garon: Ce serait bon que le ministre par la suite puisse
donner des explications.
Le Président (M. Lemieux): En ce qui me concerne, M. le
député de Lévis, voici le libellé de l'article 9.4:
"Le ministre détermine le prix de vente en détail moyen
pondéré pour 25 cigarettes au moyen d'un échantillonnage
statistique représentatif du prix des cigarettes, excluant l'impôt
prévu par la présente loi, en vigueur dans les débits au
détail de tabac situés sur l'île de Montréal. "Le
présent article a effet depuis le 24 avril 1985."
M. le député de Lévis. (15 h 30)
M. Garon: J'aimerais que le ministre responsable du projet de loi
puisse donner des explications concernant l'article qu'il veut faire adopter,
l'article 9.4. Vous n'avez pas d'explications?
M. Gratton: Non, je les ai déjà données.
M. Garon: On l'aborde, on n'a pas encore étudié
l'article 9.4.
M. Gratton: Oui, mais je les ai données. Au tout
début, j'ai expliqué l'article 29 au complet. C'est au Journal
des débats, M. le Président.
M. Garon: Je comprends que le ministre ne veut pas dire
grand-chose. J'aimerais signaler, M. le Président...
M. Gratton: Oui, mais cela me prend moins de temps que vous
à ne pas dire grand-chose, par exemple.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: Non, mais je n'induis pas la commission en erreur, par
exemple. Hier, j'ai demandé au ministre du Revenu - c'est la
première occasion que j'ai de le faire, parce que je viens d'avoir la
transcription - s'il pouvait nous dire la date où les
arrêtés ministériels ont été adoptés,
à la suite des lois qui ont été votées
régulièrement, ou avant.
Je dois dire que je suis sur une question de règlement; je ne
suis pas à l'article 9.4 parce que c'est une question de
règlement. Le ministre du Revenu a répondu à cela: "Pour
répondre même à la question qui n'en est pas une..."
M. Gratton: Un instant, M. le Président. Une question de
règlement, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Pourrais-je vous inviter à être
vigilant? Le député de Lévis est en train de dire qu'il
intervient sur une question de règlement présentement.
Le Président (M. Lemieux): Pouvez-vous me dire, M. le
député de Lévis, de quelle question de règlement il
s'agit? .
M. Gratton: Avertissez-le qu'il utilise son temps de parole, M.
le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, sur quelle question de règlement intervenez-vous, s'il
vous plaît?
M. Garon: C'est la question de règlement concernant
la...
Le Président (M. Lemieux): Pouvez-vous me citer l'article
de ce règlement pour le bienfait de la présidence?
M. Gratton: Article 149? Non? Article 212? Non?
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu, s'il
vous plaît!
M. Gratton: Enfantillagesl
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, s'il vous plaît!
M. Garon: Vous avez induit la commission en erreur.
M. Gratton: Si c'est cela, l'Opposition officielle!
M. Garon: Vous avez dit des faussetés, des mensonges
flagrants.
M. Gratton: Parlez au président.
M. Garon: Je regrette, en commission parlementaire, et c'est
enregistré, vous avez dit que le ministre avait fait telle chose alors
que la loi n'avait pas été votée, alors que c'est
complètement faux. Je regrette, vous allez retirer vos paroles et on ne
laissera pas la commission être induite en erreur par un ministre qui
fait preuve d'incompétence.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: Un instant, je vais trouver l'article du
règlement.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Lévis.
M. Gratton: Suspendons un jour ou deux! Enfantillage, M. le
Président! Ce n'est qu'enfantillage.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu, s'il
vous plaît! Est-ce que vous avez besoin de quelques minutes, M. le
député de Lévis, pour trouver l'article du
règlement? Alors, je vais suspendre pendant trois minutes.
M. Garon: II y a un article dans le règlement; je n'ai pas
le numéro.
Le Président (M. Lemieux): Alors, je suspends pendant
trois minutes pour vous permettre de retracer cet article, M. le
député de Lévis.
(Suspension de la séance à 15 h 33)
(Reprise à 15 h 44)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre! La commission
du budget et de l'administration reprend ses travaux. M. le
député de Lévis, sur un rappel au règlement.
M. Garon: M. le Président, en vertu de l'article 35,
paragraphe 6 où il est dit que le député qui a la parole
ne peut "imputer des motifs indignes à un député ou
refuser d'accepter sa parole"» Le règlement me dit de prendre la
parole du ministre et, maintenant que nous avons reçu la transcription,
j'ai la preuve que ce qu'il a dit hier était complètement faux.
Il a fait des déclarations à la suite d'une de mes questions
où je lui avais demandé: "Est-ce que le ministre du Revenu
pourrait nous dire la date où les arrêtés ont
été votés et quand est-ce que les lois ont
été votées?"
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
M. Garon: Je suis sur une question de règlement, M. le
Président, et je vais finir mon intervention.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu, nous
allons laisser terminer le député de Lévis.
M. Gratton: II est en train de dire que j'ai induit... En vertu
de l'article 35, M. le Président. Cela, ce n'est pas vrai.
Le Président (M. Lemieux): Vous êtes toujours sur
l'article 35.6, sur la question de règlement?
M. Garon: Qu'est-ce qu'on peut faire là-dedans? L'article
nous dit de prendre la parole du ministre ou du député et
moi...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, relativement à votre...
M. Garon: Écoutez, vous pouvez le faire en dehors de la
Chambre, si vous le voulez.
M. Séguin: Allez le faire à l'Assemblée
nationale, faites une motion de blâme si vous voulez, mais ne vous cachez
pas derrière des questions de règlement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, M. le ministre du Revenu, M. le député de
Lévis...
M. Séguin: Ayez le courage de faire les choses...
M. Garon: Ayez le courage de déposer un avis
juridique.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, j'attire votre attention sur l'article 66 des règles de
procédure qui dit que "toute violation des droits et privilèges
de l'Assemblée ou d'un de ses membres peut être signalée
à l'Assemblée".
M. Garon: Est-ce que ça veut dire, M. le Président,
que le ministre peut dire n'importe quelle fausseté et qu'il faut
prendre sa parole quand il dit n'importe quoi, alors qu'il y a des preuves? La
loi existe. Il a dit que la loi n'existait pas, et elle existe. Je peux faire
la preuve mathématique, juridique que la loi existait, alors qu'il nie
l'existence de la loi au moment où les faits ont été
accomplis.
Le Président (M. Lemieux): Cela veut dire, M. le
député de Lévis, que vous devez faire une motion à
l'Assemblée. L'article 69 vous dit ceci: "Le député qui
constate une violation de droit ou de privilège peut la signaler tout de
suite après le fait. Il peut aussi aviser par écrit le
président, au plus tard une heure avant la période des affaires
courantes, de son intention de la soulever." Il vous est loisible de faire une
motion à l'Assemblée.
M. Garon: Aussitôt qu'il en a connaissance, c'est ça
que je veux dire. On est en commission parlementaire, le ministre a fait des
affirmations, nous avons fait venir la transcription, on a fait les
vérifications et maintenant, on est en état de dire que...
M. Gratton: Question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: L'article 35 qu'invoque le député de
Lévis, au cinquième paragraphe...
Une voix: 6.
M. Gratton: Non, j'ai le droit de parler du cinquième: "Le
député qui a la parole ne peut: 5. attaquer la conduite d'un
député si ce n'est par une motion mettant sa conduite en
question."
Si le député de Lévis retrouve des choses, dans la
transcription, qui lui permettent de mettre ma conduite en question, qu'il le
fasse par une motion à l'Assemblée nationale, qu'il mette son
siège en jeu. Qu'il fasse ce qu'il y a à faire, mais qu'il ait le
courage de le faire au bon endroit, à l'Assemblée nationale, de
la bonne façon, par une motion et non pas en soulevant ici des
pseudo-questions de règlement qui n'en sont pas.
M. le Président, je conseillerais au député de
Lévis de consulter les légistes qui travaillent pour
l'Opposition; je pourrais même en nommer qui vont peut-être...
Évidemment, eux non plus, n'ont pas plus de succès que ses
collègues à convaincre le député de Lévis de
faire les choses convenablement, mais, tout au moins, il ne devrait pas essayer
d'invoquer l'article 35 pour faire exactement le contraire de ce que cet
article dit.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: M. le Président, je voudrais demander au
ministre...
Le Président (M. Lemieux): Brièvement, M. le
député de Lévis.
M. Garon: ...s'il maintient les paroles qu'il a dites hier,
lorsqu'il a dit: "Pour répondre même à la question qui n'en
est pas une, évidemment, l'arrêté ministériel a
été voté après la loi..."
M. Gratton: Question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: En quoi la question que me pose le
député de Lévis est-elle pertinente au paragraphe 9.4 de
l'article 29?
Le Président (M. Lemieux): Intervenez-vous sur la question
de règlement, M. le député de Lévis?
M. Garon: Sur la question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): Tenez-vous-en strictement
à la question de règlement.
M. Gratton: Comment, sur une question de règlement,
pourrait-il me poser une question à titre de ministre du Revenu. Il y a
toujours bien une limite, M. le Président!
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, je vous invite à parler...
M. Gratton: Non, vous êtes complètement...
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le ministre du
Revenu. Je vous invite à parler strictement sur la question de
règlement et non pas à faire un débat...
M. Gratton: C'est un beau "fair-play".
Le Président (M. Lemieux): ...à intervenir ou
à poser des questions au ministre du Revenu. Strictement sur la question
de règlement.
M. Garon: Sur ta question de règlement, M. le
Président, nous sommes en commission parlementaire...
Le Président (M. Lemieux): 35.6, celle que vous avez
soulevée.
M. Garon: Oui, c'est cela. Nous sommes en commission
parlementaire, nous sommes au début de février, il n'y aura pas
de séance de l'Assemblée nationale avant le 11 mars. Nous avons
un ministre qui répond à des questions que nous lui posons
concernant ses projets de loi. Il fait l'affirmation qu'il y a eu des cas
semblables, invoque des choses...
M. Gratton: Je le répète, en 1982.
M. Garon: Non, non, vous avez dit 1980, je regrette.
M. Gratton: 1982.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis...
M. Gratton: Ce n'est pas une question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): ...sur la question de
règlement.
M. Garon: Maintenant, nous avons fait venir la transcription des
débats d'hier. Il est évident qu'on ne peut pas vérifier
tout ce qu'a dit le ministre du Revenu dans son allocution. Nous avons fait
venir la transcription, nous avons fait les vérifications et,
aujourd'hui, nous avons la preuve que ce qu'il a dit est complètement
faux, que la loi avait été adoptée avant que les
arrêtés ministériels soient signés. C'est dans la
transcription. C'est en 1980; cela a bien été dit, c'est à
R-B-113-CBA, page 2.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, je vous ai indiqué les
articles pertinents, les articles 66 et suivants relativement à
la question de règlement que vous avez soulevée. Si vous voulez
agir, vous devez le faire par motion. Ma décision est donc que votre
question de règlement est irrecevable.
M. Garon: Sous-article 9.4. Je voudrais dire que la Loi
concernant l'impôt sur le tabac a été amendée
à de nombreuses reprises, notamment en 1980 par ce qui est devenu le
chapitre 14 sanctionné le 18 juin 1980; les articles 9.1, 9.2 et 9.3 ont
été insérés après l'article 9 par l'action
de l'article 22 du chapitre 14 de la Loi modifiant la Loi concernant la taxe
sur les carburants et modifiant d'autres dispositions législatives, qui
a été sanctionnée le 18 juin 1980. Le ministre des
Finances, qui a adopté des arrêtés ministériels par
la suite, les a adoptés uniquement après que la loi eut
été sanctionnée.
M. Gratton: Pertinence, M. le Président.
M. Garon: M. le Président, il s'agit exactement des
mêmes articles, qui n'ont pas été amendés une seule
foi3.
M. Gratton: L'article 9.4; pas 9.1, 9.2, 9.3, c'est 9.4.
M. Garon: Oui, je peux continuer. L'article 22 que ne semble pas
connaître le ministre du Revenu - je ne sais pas ce qu'il connaît
en droit - dit: "Cette loi est modifiée par l'insertion, après
l'article 9, des suivants...
M. Gratton: Mon père a été directeur du
journal Le Droit pendant 35 ans.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Garon: "ouvrez les guillemets - "9.1, 9.2, 9.3, 9.4. et
même 9.5". Ces articles ont été adoptés en 1980,
avant l'ajournement de la session du mois de juin 1980.
M. Gratton: Pertinence, M. le Président.
M. Garon: Ces articles n'ont pas été amendés
une seule fois depuis, comme il apparaît dans les Statuts refondus du
Québec, où vous pouvez voir que les articles dont il est question
dans le projet de loi, c'est-à-dire 9.2, 9.3 et 9.4 ont
été amendés la dernière fois en 1980. Ils ont
été établis, à toutes fins utiles, en 1980 au
chapitre 14, article 22. Cela est indiqué dans les statuts refondus du
Québec. Je veux bien croire qu'on est ici avec un mandat de
l'Assemblée nationale pour étudier des articles, mais il faut que
ceux qui viennent étudier, justement, aient étudié avant
un peu, surtout ceux qui ont fait les projets de loi. Ces articles n'ont pas
été modifiés une seule fois depuis 1980. C'est leur
première modification cette année par le projet de loi. En
1980...
Je n'ai pas parlé de 9.1. L'article 9.1 n'est pas touché
actuellement; il a été amendé après.
Le Président (M. Lemieux): M. le député.
M. Garon: Les articles 9.2, 9.3 et 9.4 eux, tel qu'il
apparaît dans les statuts refondus, n'ont pas été
modifiés depuis 1980. C'est la première fois qu'ils sont
modifiés. Cela veut dire que nous n'avons jamais été dans
la situation, du point de vue de ces articles, dans laquelle le ministre du
Revenu actuel nous a placés par son arrêté
ministériel signé le 29 janvier pour prendre effet le 5
février 1986.
Même si on essayait de dire qu'il y a eu des cas identiques
antérieurement, c'est faux. La formule de la taxe ad valorem a
été établie en 1980 et modifiait le régime
antérieur* Le ministre des Finances de l'époque a
été assez prudent pour attendre, comme les autres ministres des
Finances ou les autres ministres du Revenu l'avaient fait, et ne pas faire de
déclaration avant que cette loi soit adoptée par le Parlement et
sanctionnée pour être mise en vigueur.
C'est pourquoi dans le cas de l'article 9.4, quand il est indiqué
que "le ministre détermine le prix de vente en détail moyen
pondéré pour 25 cigarettes au moyen d'un échantillonnage
statistique représentatif du prix des cigarettes, excluant l'impôt
prévu par la présente loi, en vigueur dans les débits au
détail de tabac situés sur l'île de Montréal", il a
déterminé, tel que l'a dit l'article 9.4, le prix de vente en
détail moyen pondéré pour 25 cigarettes avant même
que la commission parlementaire étudie cet article. Je vous lis
l'article, M. le Président, c'est bien 9.4 et seulement 9.4, pas autre
chose que 9.4 dont je parle: "Le ministre détermine le prix de vente en
détail moyen pondéré pour 25 cigarettes".
Maintenant, je peux vous lire l'article 9.4 antérieur. Je pense
bien qu'on ne me rappellera pas à la pertinence. L'article qu'on
modifie, c'est l'article 9.4 qui a été adopté en 1980, qui
dit: "Le ministre détermine le prix de vente en détail moyen
pondéré pour 200 cigarettes au moyen d'un échantillonnage
statistique représentatif du prix des cigarettes, excluant l'impôt
prévu par la présente loi, en vigueur dans ie3 débits au
détail de tabac situés sur l'île de Montréal."
C'est évident qu'un prix de vente en détail moyen
pondéré pour 200 cigarettes, c'est-à-dire par cartouche,
ce n'est pas la
même taxe, ce n'est pas la même base qu'un prix de vente en
détail moyen pondéré pour 25 cigarettes. Cela veut dire',
à ce moment-là, que le prix moyen pondéré dans les
magasins... On dit où, l'article dit où: "en vigueur dans les
débits au détail de tabac situés, sur l'Ile de
Montréal". Prendre le prix moyen d'une cartouche de 200 cigarettes et
prendre le prix moyen de cigarettes vendues au paquet de 25 à un prix
moyen pondéré, il ne s'agit pas du même calcul.
Pour établir cette taxe, il s'agit d'un article nouveau qui va
remplacer l'article 9.4, mais qui n'est pas adopté. Le ministre des
Finances, lorsqu'il fait son énoncé budgétaire, n'amende
pas d'une façon automatique les articles de loi. Il vient dire comment,
lui, par sa déclaration, vient changer l'impôt; ensuite, l'article
de loi doit venir ratifier, pour que sa déclaration soit valide, ce
qu'il a fait. C'est là le but de l'article 9.4.
Entre-temps, le ministre du Revenu ne pouvait pas s'arroger le droit, en
vertu d'autres dispositions de la loi, d'utiliser l'article 9.4 comme s'il
avait été adopté, comme s'il était
déjà dans sa loi. Il ne pouvait pas faire cela.
Évidemment, cela aurait eu l'air curieux, mais il aurait pu utiliser sa
loi en établissant un prix moyen pondéré pour 200
cigarettes. Mais comme l'annonce était faite que cette loi devait
être changée et comme le ministre des Finances avait dit, le 23
avril: II faut que cette loi soit changée... C'est dans son discours sur
le budget, si ma mémoire est bonne, à la page 11.
Il dit, dans son discours sur le budget, dans le cas des cigarettes: "Le
mode de calcul de la taxe sera, de plus, réformé pour être
rendu semblable à celui d'autres provinces." Il dit qu'il va y avoir une
réforme, mais, lui, par sa déclaration, n'amende pas les lois. Il
dit, pour les fins de la taxe qu'il fixe dans ce discours sur le budget du 23
avril, quelle sera la taxe à partir de minuit ce soir-là, taxe
qui est en application depuis le 24 avril, où il a augmenté la
taxe de 0,25 $ le paquet de cigarettes.
Le gouvernement fédéral, par ses lois le 23 mai, a
augmenté ses taxes de 0,23 $ le paquet de cigarettes. Le ministre des
Finances du temps, à l'automne, a décidé de ne pas se
prévaloir de l'article pour augmenter la taxe. Pourquoi? Parce que la
taxe se calcule sur la base du prix de vente au détail moyen. Le
ministre des Finances n'a pas voulu le faire. Ce qui est arrivé, c'est
que l'actuel ministre du Revenu, au mois de février, a
décidé de se prévaloir d'un article qui n'était pas
adopté, que la commission parlementaire venait d'avoir le mandat
d'étudier. C'est ce que nous faisons actuellement, nous étudions.
Le ministre du Revenu ne peut pas se prévaloir d'un article qui n'a pas
été adopté, qui est un sujet d'étude, comme s'il
avait été transposé dans sa loi. Nous ne nions pas le
pouvoir du ministre des Finances.
C'est pour cela que quand il nous parle du jugement de la Cour
suprême... On connaît le jugement de la Cour suprême qui
accepte que le ministre des Finances puisse, dans un budget, faire une
déclaration et, plus tard, que cette déclaration devant
l'Assemblée nationale retrouve sa pleine valeur juridique, sa valeur
complète et entière, par l'autorisation que donne
l'Assemblée nationale à cette déclaration du ministre, en
adoptant une loi qui met en oeuvre ce qu'il a énoncé dans son
budget. Sauf que l'Assemblée nationale pourrait ne pas voter ce projet
de loi. (16 heures)
Comme il y a un nouveau gouvernement, si les membres du Parti
libéral voulaient dire: Nous ne voulons pas voter cette augmentation de
taxe, nous ne voulons pas voter cet article-là, ils auraient le droit.
L'Assemblée nationale est souveraine et elle ne mettrait pas en
vigueur... Ce serait d'autant plus acceptable que le ministre des Finances
n'est plus le même, que le gouvernement a changé. D'autant plus
qu'au cours de la période électorale, ils ont sans cesse dit
à quel point on avait été méchant d'adopter ces
augmentations de taxes, que s'ils avaient été là ils ne
l'auraient pas fait. Ils ont toute liberté de ne pas l'adopter. Ils ont
le droit de ne pas le faire.
Les équilibres budgétaires, c'est une question
complètement autre. C'est pourquoi je dis 3ur l'article 9.4 que
l'Assemblée nationale est souveraine. La commission parlementaire peut
recommander à l'Assemblée nationale de ne pas voter cet
article-là, de ne pas voter ces augmentations de taxes qu'on a vues dans
le projet de loi 2 et le projet de loi 2 pourrait ne pas être voté
par l'Assemblée nationale, M. le Président. D'autant plus que le
gouvernement actuel a tellement parlé contre ces taxes-là. Je
suis convaincu que la sincérité des gens du Parti libéral
serait beaucoup plus crédible si, justement, avec leur immense
majorité, avec 99 élus ils se prévalaient de leur force
pour dire: Nous n'adoptons pas ce budget que nous avons tant
décrié.
Nous dirions: Voilà un parti qui a de I'échine,
voilà un parti qui a de la volonté politique. Ils feront les
équilibres budgétaires à leur goût, à leur
façon. Ou, encore, ce qu'ils pourraient dire, c'est: Comme
l'année est avancée, nous allons voter l'effet du budget Duhaime
jusqu'au 1er avril et l'an prochain ce sera notre budget. On ne veut pas de ces
taxes que nous n'aimons pas. Ils peuvent aussi dire: Nous allons voter ces
taxes-là, nous allons les maintenir, nous allons nous en
prévaloir et nous allons être
contents d'avoir les revenus qu'elles donnent et même les
augmenter, ce que l'actuel ministre du Revenu a fait. Il a tellement
aimé les mesures qui étaient proposées qu'il en a
même profité pour les augmenter à son compte. Le 4
février dernier il a déterminé le prix de vente en
détail moyen pondéré. Il a dit: Ce n'est pas 1,50 $ comme
dans le budget du 23 avril, je ne maintiens pas cela. J'augmente cela, à
partir du 4 février, à 1,88 $. C'est ce qu'il a fait.
Essentiellement, sa déclaration du 4 février c'est de
dire: C'est devenu 1,88 $. Il s'est prévalu de ces articles, cela
apparaît clairement dans les attendus. Je vais les lire
complètement pour que vous voyiez à quel point il
réfère justement à l'article 9.4 que nous étudions.
On va me dire que c'est le respect de la Chambre d'utiliser un article qui
n'est pas encore voté "Arrêté ministériel concernant
la fixation d'un prix de vente en détail moyen pondéré des
cigarettes. "Attendu que le ministre du Revenu peut, conformément
à l'article 9.3 de la Loi concernant l'impôt sur le tabac,
déterminer de temps à autre un prix de vente en détail
moyen pondéré pour 25 cigarettes."
Écoutez bien le prochain: "Attendu qu'en vertu de l'article 9.4
de cette loi le ministre du Revenu détermine le prix de vente en
détail moyen pondéré pour 25 cigarettes au moyen d'un
échantillonnage statistique représentatif du prix des cigarettes
en vigueur dans les débits au détail de tabac situés sur
l'île de Montréal. "Attendu qu'en vertu de l'article 9.5 de cette
loi le prix de vente en détail moyen pondéré des
cigarettes déterminé par le ministre du Revenu
conformément à l'article 9.4 est publié à la
Gazette officielle du Québec et entre en vigueur à la date qui y
est indiquée; "Le ministre du Revenu décrète que, pour les
fins du calcul de l'impôt prévu à l'article 8 de la loi
concernant l'impôt sur le tabac, le prix de vente en détail moyen
pondéré pour 25 cigarettes est de 1,88 $, que ce prix de vente en
détail moyen pondéré a effet à compter du 5
février 1986 et que cet arrêté ministériel soit
publié à la Gazette officielle du Québec." C'est
signé le 29 janvier 1986, le ministre du Revenu, Michel Gratton.
M. Gratton, qu'est-ce qu'il vient de faire? Il ne vient pas de mettre en
oeuvre le budget du ministre des Finances du 23 avril 1985. Lui, il disait 1,50
$. Si vous lisez le discours sur le budget du ministre des Finances du 23 avril
1985, il disait 1,50 $ pour 25 cigarettes. Il augmente le prix à 1,88 $,
mais, en plus, il ne se prévaut pas de la loi telle qu'elle existait
à ce moment, le 4 février. Il se prévaut de la loi qui va
devenir ce qu'elle va être si nous l'adoptons en commission
parlementaire, à l'Assemblée nationale, et si elle
sanctionnée par la suite.
Et on va me dire aujourd'hui, alors que la loi n'est pas votée,
c'est l'ancienne loi qui est encore en vigueur... Est-ce qu'on va me dire -
j'en prends à témoin tous les avocats qui sont membres de cette
commission - que la Loi concernant l'impôt sur le tabac du ministre du
Revenu, qu'il administre telle qu'elle est en vigueur aujourd'hui, avant qu'on
ait voté ces articles, est inopérante, ou si ce n'est pas elle
précisément qui est opérante?
Est-ce l'article 9.4 qui est en vigueur aujourd'hui, le 13
février 1986? C'est celui que nous étudions pour adoption ou
l'article qui est dans les Statuts du Québec, chapitre XIV, de 1980,
à l'article 22, à l'alinéa 9.4, qui dit: "Le ministre
détermine le prix de vente en détail moyen pondéré
pour 200 cigarettes au moyen d'un échantillonnage"? Qu'est-ce qui est en
vigueur aujourd'hui? Qu'est-ce qui était en vigueur le 4 février?
Qu'est-ce qui va être en vigueur demain? Qu'est-ce qui était en
vigueur hier? Qu'est-ce qui va être en vigueur tant que l'article 9.4 que
nous étudions actuellement ne sera pas adopté? Je vous dis celui
qui est en vigueur, évidemment, avec la faiblesse qu'il a, parce qu'il y
a eu déclaration d'un énoncé budgétaire qui disait
que cet article va être reformulé, mais il n'est pas encore
reformulé légalement pour les fins d'application de la loi du
ministre du Revenu par arrêté ministériel.
On va me dire que, sur le plan juridique, le ministre du Revenu peut
utiliser un article de loi qui va être légal si nous l'adoptons,
alors qu'il y avait un article de loi encore en vigueur qu'il n'a pas
utilisé. Cela avait l'air tellement évident que le ministre du
Revenu ne pouvait pas faire cela. Écoutez! C'est question de
sécurité juridique. C'est le rôle des parlementaires de
faire la sécurité juridique. Quand on demande au ministre
d'obtenir un avis du ministère de la Justice, si le ministère de
la Justice lui dit: II n'y a pas de problème, il y a au moins une
certaine sécurité juridique. Je ne dis pas qu'il a
réglé tous ses problèmes, loin de là. Je ne dis pas
qu'il a réglé tous ses problèmes, mais il y a au moins
cela. Mais il ne veut même pas le demander. Cela veut dire que sa
sécurité, sa certitude n'est pas très grande depuis que la
loi est adoptée, depuis que nous avons fait le débat sur cet
article et les articles qui l'entourent. Il faut qu'il y ait eu assez de monde
qui ait mis un doute dans leur esprit, qu'il n'ose même plus demander une
opinion juridique du ministère de la Justice, qu'il craigne l'opinion
que le ministère de la Justice va donner. Au contraire, c'est cela qui
peut l'aider. À supposer que le ministère de la Justice dise - ce
que nous pensons qu'il va dire - que ce n'est pas correct, que le ministre a
erré en droit, qu'il a fait un abus de droit et qu'il
n'avait pa3 ces pouvoirs de faire, ce n'était pas une
façon de faire, à ce moment-là, il va falloir que le
Parlement fasse quelque chose, adopte des articles de loi rétroactifs ou
oublie ce qui a été fait pendant un certain temps. Le
gouvernement pourra, à ce moment-là, adopter d'autres mesures
pour l'avenir.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: Mais, actuellement...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Je vous inviterais à
conclure. Il vous reste environ deux minutes.
M. Garon: Comme je ne voudrais pas perdre ces deux minutes, je
vais les mettre en banque et je vais arrêter mon intervention
immédiatement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Je vais me limiter à deux minutes, M. le
Président. J'ai deux brefs commentaires simplement pour ajouter à
tout ce qui a déjà été dit, dans le but, toujours,
de clarifier. Au sujet du 1,88 $, le député de Lévis
semble dire que c'est du droit nouveau ou, enfin, que cela aurait dû
être confirmé par une mesure législative ou
budgétaire. Or, l'article 9.3 de la loi actuelle, avant les amendements
apportés par la loi 2, permet au ministre du Revenu, de temps à
autre, de faire des sondages et de réaffirmer le prix du marché
pondéré qui sert de calcul à la taxe. Donc, le ministre,
actuellement, même si on n'adoptait pas l'article 29 ou la loi 2,
pourrait, s'il constatait que le prix moyen pondéré était
plus élevé que 1,50 $ - en l'occurrence, il est de 1,88 $ -
pourrait le décréter comme il l'a fait par arrêté
ministériel.
On n'a pas besoin de la loi 2 pour cela. Je pense que c'est important
que ce soit clair pour les membres de la commission que l'exercice de faire
porter à 1,88 $, le prix de référence, n'a rien de
nouveau. Il est déjà consenti dans la loi à l'article 9.3
où on dit: Le ministre pourra, de temps à autre,
déterminer le prix qu'il constatera lors d'une enquête sur
l'île de Montréal. Je conviens que là où il y a du
nouveau, c'est au sujet du nombre de cigarettes servant au calcul où
l'article 9.3 de la loi ancienne ou actuelle, dit 200 cigarettes, et où
le budget, par l'énoncé de M. Duhaime, changeait le nombre de
cigarettes aux fins du calcul à 25 cigarettes comme prix de
référence. Je constate avec plaisir que le député
de Lévis semble conclure à l'illégalité en disant
que le ministre aurait utilisé un article de la loi 2 pour apporter ce
changement, ce qui serait illégal, étant donné qu'il ne
serait pas adopté. Or, c'est un argument qui me fait plaisir
étant donné qu'il est faux. Je m'en réfère à
la Cour suprême du Canada qui a déjà jugé - et j'ai
offert, déjà, de produire un jugement de la Cour suprême
qui dit qu'un ministre des Finances, lorsqu'il dépose son budget, peut
mettre en application immédiatement des mesures qui seront
bonifiées dans le temps par une loi rétroactive. Et cela a
été jugé tout à fait valide et vous le savez, et je
ne crois pas qu'aucun membre de la commission conteste ce principe.
Or, il y a quelques minutes, le député de Lévis
faisait appel à l'illégalité en mentionnant que le
ministre aurait utilisé un article de loi de la loi 2 non encore
appliquée, parce que non sanctionnée. On tourne en rond sur
l'argument parce que, d'un côté, on dit que c'est illégal
parce que la loi n'est pas appliquée. D'un autre côté, on
dit que c'est vrai, mais parce que la loi 2 sera rétroactive, elle aura
un effet de bonification dans le temps pour remonter au 23 avril. Si on doute
de la légalité de tout cela, je pense qu'on devrait s'en
référer à la Cour suprême du Canada ou à des
opinions expertes sur le sujet et je pourrais produire trois ou quatre
traités sur le sujet, si on veut. Je pense que là, sur cet
argument, on tourne en rond et cela n'apporte absolument rien de plus.
Merci.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres... M.
le député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Merci. J'aimerais, à ce moment-ci,
au sujet de l'article 9.4 dont il est question, mentionner ou répondre
à ce que le ministre a affirmé hier à la suite de mes
propos. Je vais, si vous le permettez, le citer très rapidement. Il
demandait - M. le ministre parlait à ce moment - d'aller vérifier
ce que le gouvernement avait fait en 1982. Il disait que les recherchistes de
l'Opposition pourraient vérifier si les données qu'il venait de
fournir étaient véridiques ou non, et qu'on pourrait reprendre le
débat. Si l'Opposition persiste, sans prétention, qu'on n'a pas
de droit nouveau, qu'on puisse passer à autre chose. Il a, de plus, mis
au défi le député de Bertrand - montant de la gageure,
n'importe quoi - sur le fait qu'il maintient, jusqu'à preuve du
contraire, et preuve mieux étoffée que l'affirmation gratuite du
député de Bertrand, si la situation que nous vivons
présentement, donc la situation dont nous parlons à 9.4, est
identique à celle de 1982. (16 h 15)
La preuve est relativement simple. Il est impossible que la situation
que nous vivons actuellement, soit identique à celle de 1982 puisque la
situation dont il est question à l'article 9.4 actuellement
relève de la Loi concernant l'impôt sur le tabac et cette
loi-là, 9.1, 9.2, 9.3, 9.4 et 9.5, n'a pas été
amendée depuis 1980. Donc, la preuve qui est demandée par le
ministre du Revenu soutenant que la situation rapportée hier à
cette commission parlementaire est - et ce sont les propos du ministre - une
situation identique à celle de 1982... C'est tout le litige et c'est
clair que ce n'est pas une situation comme on en a vécu en 1982. La
preuve est là: c'est que la Loi concernant l'impôt sur le tabac
n'a jamais été modifiée depuis 1980. Donc, on ne pouvait
pas, en 1982, vivre exactement le sénario qu'on vit actuellement et dont
il est question de façon très spécifique à
l'article 9.4.
Dans la Loi concernant l'impôt sur le tabac, comme l'a
mentionné le député de Lévis
précédemment, les articles 9.1 à 9.5 inclusivement n'ont
pas été amendés depuis 1980. Ça c'est très
clair. Présentement, on vit une situation où, dans la loi 2,
à l'article 29, on veut les amender. C'est la première fois et ce
sera le premier amendement depuis 1980. Donc, on ne peut pas dire, et c'est la
preuve très claire, M. le Président, que la situation de 1982
telle qu'elle était discutée hier devant cette commission, est
une situation analogue que nous vivons actuellement. C'est la réponse
que j'avais promis de fournir hier. Je vous remercie.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? M» le député de Jonquière.
M. Dufour: C'est marqué quelque part dans le
règlement, M. le Président, qu'on a le droit de demander le
dépôt d'un document. L'adjoint au ministre du Revenu dit qu'il y a
un jugement de la Cour suprême qu'il est prêt è
déposer concernant ce qui se passe depuis deux jours.
Je voudrais aussi savoir à quel article il réfère
à ce moment-là, spécifiquement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière, il n'y a pas de dépôt de document en commission
parlementaire.
M. Dufour: Il a dit que s'il décidait... Je l'ai vu
quelque part...
Une voix: C'est une référence seulement.
M. Dufour: ...s'il réfère à un article ou
à un jugement, il peut le déposer.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, oui.
M. Séguin: Ce que j'ai offert de fournir, c'est l'ensemble
de la documentation portant sur la question du droit ancillaire relatif
à la rétroactivité d'une loi adoptée
postérieurement à un budget qui a mis en marche des mesures
budgétaires antérieurement. Il y a des écrits abondants en
fiscalité. Le député de Lévis, j'en suis convaincu,
le sait. Il a déjà probablement enseigné ces
notions-là à l'époque. Ce sont des notions très
claires en fiscalité. Je pense que dans à peu près tous
les pays qui appliquent la loi fiscale, vous le savez, la loi est toujours
postérieure au budget; il y a toujours un effet rétroactif. Je
pense que sur ce principe-là c'est très clair.
Je me suis limité à dire que l'article 29 de la loi 2 a un
effet rétroactif au 24 avril. Si on met en doute la
légalité que nous adoptions l'article 29 tel qu'il est là
pour lui donner effet le 24 avril, je suis prêt à fournir toute la
documentation très abondante sur le sujet.
Mais, je pense que la question des membres de l'Opposition est
excédentaire à ce dont je parle. C'est qu'on voudrait
étudier la légalité d'un arrêté
ministériel signé en février 1986, ce qui est
postérieur, à mon humble avis, à l'étude de la loi
2 que nous faisons ici. La légalité, à mon point de vue de
l'article 29 est par rapport au 23 ou 24 avril 1985.
Je ne veux pas enlever le droit aux membres de poser la question de la
légalité d'un arrêté ministériel qui a voulu
appliquer dans les faits cette mesure. Cela pourrait être débattu
ailleurs ou par d'autres moyens parlementaires. Je pense qu'au niveau de la
commission, à l'étude article par article, il s'agit de
vérifier si l'article 29 est vraiment conforme à
l'énoncé budgétaire, ce qui n'empêche pas qu'on
puisse se demander si l'application qui a été faite dans le temps
s'est avérée exacte après. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le...
M. Gendron: M. le Président, j'ai une question à
poser au député de Montmorency, puisqu'il a lui-même dit
qu'il faisait référence à une décision d'un
jugement de la Cour suprême. La simple question qu'on veut lui poser,
c'est s'il peut nous donner la référence, point. C'est seulement
cela que je veux savoir. C'est vous qui nous avez offert cela.
M. Séguin: Oui, je vais vous la donner cet
après-midi.
M. Gendron: Vous pourriez nous donner la référence
cet après-midi?
M. Séguin: Je pense que oui.
M. Gendron: Avant la fin des travaux. M. Séguin: Oui.
M. Gendron: On pourra enregistrer la référence au
Journal des débats.
M. Séguin: Je pourrais même vous donner une
photocopie de l'arrêt.
Le Président (M. Lemieux): Vous êtes bien conscient,
M. le député d'Abitibi-Ouest, que ce document ne peut être
déposé qu'avec le consentement du président.
M. Gendron: Oui, c'est lui qui nous l'a offert.
Le Président (M. Lemieux): Alors, il ne fera que citer le
document.
M. Garon: Non.
Le Président (M. Lemieux): II ne fera que vous donner la
référence. C'est ce que le député de Montmorency a
dit.
M. Garon: On accepte l'offre qu'il nous a faite. Il nous a offert
une décision de la Cour suprême qui démontrait qu'il n'y
avait pas de problème. On a dit: D'accord, on accepte votre offre.
M. Séguin: Vous allez sans doute juger que ce n'est pas
pertinent à l'article 29. C'est une autre histoire.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Dufour: Je me suis appliqué, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière, s'il vous plaît!
M. Dufour: C'est une question de privilège. Je ne suis pas
familier. Je ne suis pas juriste.
M. Gratton: Cela n'existe pas, une question...
M. Dufour: Écoutez ce qu'on dit: Citation de document,
dépôt d'un document cité. Article 214.
Le Président (M. Lemieux): Je vais vous lire l'article
214. "Lorsqu'un ministre - je l'ai devant moi - cite, même en partie, un
document, tout député peut lui demander de le déposer
immédiatement." J'aimerais vous référer...
M. Gratton: À l'Assemblée seulement et non en
commission.
Le Président (M. Lemieux): Non en commission. J'aimerais vous
référer à l'article 162 en ce qui a trait...
M. Gendrofn M. le Président, question de règlement. Vous
avez tout à fait raison.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: M. le Président, je pense que c'était
sur l'"invite", si vous me permettez l'expression...
Le Président (M. Lemieux): Du député de
Montmorency.
M. Gendron: ...du député de Montmorency è la
suite, de toute façon, des propos du ministre du Revenu. Le ministre du
Revenu nous a indiqué à plusieurs reprises que c'est le
député de Montmorency, qui est spécialiste en la
matière, qui répondrait è certaines questions. Il me
semble que mon collègue de Jonquière simplement disait: Puisqu'il
nous en a fait l'offre. Il me semble que... Je sais que le règlement dit
cela mais puisque, souvent, il agit comme porte-parole du ministre du Revenu
par voie de consentement, il me semble que cela n'aurait pas été
compliqué, puisqu'il nous offrait, comme membre de la commission
parlementaire, de nous donner au moins la référence, d'ici
à la fin de la séance, concernant ce sur quoi il s'est
basé.
Le Président (M. Lemieux): C'est ce que vous avez...
M. Séguin: Je n'ai pas objection de donner une
référence d'ici à la fin de la séance.
Le Président (M. Lemieux): La question est
réglée, M. le député de Montmorency et M. le
député d'Abitibi-Ouest. M. le député de
Jonquière, vous aviez la parole. Vous n'aviez pas demandé la
parole?
M. Séguin: Non, pas pour le moment.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-il d'autres interventions sur
l'article 29, 9.4, du projet de loi 2, Loi modifiant certaines dispositions
fiscales?
M. Gratton: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): L'article 29, 9.4, est-il
adopté?
M. Gratton: Oui, M. le Président.
M. Gendron: Non, M. le Président, on n'a adopté ni
l'article 9-2...
Une voix: Ni l'article 9.3. M. Gendron: ...ni l'article 9.3.
Le Président (M. Lemieux): L'article 29 est-il
adopté?
M. Gratton: Oui, M. le Président.
M. Gendron: Non, parce que l'article 29 n'est pas terminé.
Il reste l'élément 2: "Le présent article a effet depuis
le 24 avril 1985." Comme on avait convenu qu'on intervenait sur chacun des
points et qu'on faisait précisément la discussion sur chacun des
points, j'aimerais que vous appeliez l'article 29.2: "Le présent article
a effet depuis le 24 avril 1985."
Le Président (M. Lemieux): J'appelle l'article 29.2: "Le
présent article a effet depuis le 24 avril 1985."
M. Gratton: C'est adopté quant à moi, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-il des interventions sur
le deuxième paragraphe de l'article 29?
M. Gendron: Sur le deuxième paragraphe de l'article 29,
j'aimerais au moins, M. le Président, que le ministre du Revenu nous
explique depuis quand on peut appliquer une dimension rétroactive
à une modification. C'est toujours selon notre prétention. Je
veux avoir vos explications et, après cela, je vais argumenter.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: M. le député de Montmorency.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Vous voulez savoir depuis quand une mesure peut
être rétroactive?
M. Gendron: Non, je veux savoir depuis quand on a la
possibilité de donner un effet rétroactif à une mesure qui
n'est pas encore adoptée, parce que selon notre logique, depuis deux
jours, on essaie de vous prouver que les dispositions 9.3 et 9.4 font suite
à la décision du ministre du Revenu de signer un
arrêté en conseil qui lui permettait de modifier la formule
d'imposition, toujours pour fins de discussion. Nous avons la prétention
que c'est illégal. À partir du moment où on a la
prétention que c'est illégal, je veux savoir sur quoi vous vous
êtes basé pour mentionner que le présent article a effet
depuis le 24 avril 1985, mais un effet rétroactif, non pas une
rétroaction sur une loi ou un énoncé du ministre des
Finances en Chambre, mais sur un arrêté ministériel
signé par le ministre du Revenu sur lequel on ne peut absolument pas
s'appuyer ni sur aucun document législatif.
M. Séguin: M. le Président, j'ai déjà
indiqué au député d'Abitibi-Ouest que le principe de la
rétroactivité est un principe reconnu dans les lois fiscales par
l'ensemble de tous les pays au monde qui lèvent des taxes. Le projet de
loi 2 dans son ensemble est rétroactif au 23 ou au 24 avril. Si vous me
demandez depuis quand, c'est à peu près depuis la Deuxième
Guerre mondiale, ce qui est à peu près l'époque où
on a commencé à lever des taxes et à faire des lois. Dans
l'ensemble, tous les ans, tous les gouvernements qui ont levé des
taxes... Pour prendre une période que vous connaissez bien, depuis 1976
à aujourd'hui, les budgets qui ont été
déposés, à titre d'exemple, par M. Parizeau, ont tous fait
l'objet d'une loi rétroactive bonificatrice en ce qui concerne les
mesures déjà appliquées. J'indique à titre
d'exemple que la taxe sur les primes d'assurance incluse dans le budget du 23
avril 1985, c'est également une disposition du projet de loi 2. Cette
taxe a été perçue à partir du 23 avril même
si la loi que nous discutons pour la faire adopter n'est pas encore
sanctionnée. L'ancien gouvernement, que vous composiez à
l'époque, a perçu des sommes d'argent è même cette
disposition non sanctionnée, puisqu'elle n'est pas encore
adoptée. Ce gouvernement a levé des taxes, comme les taxes sur
les primes d'assurance, en vertu du principe qu'un jour il y aura une loi, en
l'occurrence la loi 2, et que cette loi aura une disposition
particulière faisant remonter dans le temps à la date de
l'énoncé budgétaire l'application de la loi. Alors,
l'article 29, comme on le lit, est identique à toutes les autres mesures
du budget et à toutes les autres mesures du projet de loi 2. Nous
étudions un projet de loi après le dépôt du budget
et on doit en toute logique lui donner un effet rétroactif pour ne pas
qu'il y ait de trou juridique entre le budget et le moment où la loi
entre en vigueur. Je pense que c'est un principe reconnu et suivi par tous les
Parlements, et la province de Québec fait exactement le même
exercice depuis des années. Cela va continuer au cours de toutes les
années à venir. Dans toutes les lois fiscales que nous allons
étudier, il y aura toujours cet effet rétroactif
postérieurement inscrit dans une loi qui sera adoptée quelques
mois après le budget. Merci.
M. Gendron: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Je suis heureux d'avoir pu, encore une fois,
enregistrer la prétention du député de Montmorency
à savoir que, de tout temps - il a même parlé de je ne sais
quelle guerre - les mesures budgétaires ont toujours fait l'objet de
mesures rétroactives. Moi-même, j'ai été membre d'un
gouvernement qui s'est servi de cette formule, à savoir de percevoir par
dispositions budgétaires des taxes lorsque nous pouvions les appuyer sur
des lois non sanctionnées ou non adoptées. Je pense que le
député de Montmorency confirme la prétention qu'on a
essayé de faire valoir depuis le début de cette commission, que
c'est exact lorsque nous pouvons nous appuyer sur une disposition
budgétaire consécutivement à un budget ou lorsque nous
pouvons nous appuyer sur un énoncé complémentaire d'un
ministre des Finances ou une déclaration ministérielle d'un
ministre des Finances. Mais mon collègue de Lévis a exposé
d'une façon on ne peut plus claire, sur l'article 9.4, qu'actuellement
nous travaillons avec une loi sur la taxe sur le tabac qui, jusqu'à
nouvel ordre, avait un libellé, à l'article 9.4, qui n'est pas
celui que nous retrouvons à l'article 9.4 du projet de loi 2. (16 h
30)
En conséquence, la disposition du projet de loi 2: Le
présent article a effet depuis avril 1985, c'est un effet
rétroactif à partir d'une disposition dans laquelle on ne peut
pas retrouver un appui ou un fondement juridique d'un énoncé
budgétaire ou à partir du budget d'un ministre des Finances
puisque, comme on l'a énoncé d'une façon on ne peut plus
claire, la loi d'imposition sur le tabac ne fait pas référence au
libellé que nous retrouvons dans le paragraphe 9.4 du projet de loi 2.
C'est ce qu'on a essayé de faire valoir, M. le Président, d'une
façon la plus objective possible depuis hier.
Nous maintenons toujours qu'il y a présomption
d'illégalité et que c'est un peu inconsidéré de la
part des membres d'un nouveau gouvernement, comme première mission pour
de nouveaux parlementaires, d'essayer rapidement de leur faire adopter un
article d'un projet de loi qui, prétendons-nous, pourrait, à tout
le moins, offrir des aspects d'illégalité. On a essayé
à plusieurs reprises de demander au ministre du Revenu s'il était
complètement certain, s'il était assuré... Je pourrais
prendre beaucoup de temps pour illustrer qu'à plusieurs occasions, dans
la conférence de presse qu'il donnait le 6 février 1986, il a
laissé voir à la population et aux collègues que toutes
ces choses lui arrivaient par hasard, tout autant la disposition du paragraphe
9.3 qui lui permettait de faire une évaluation à partir d'un
échantillonnage que la disposition qui modifiait la formule d'imposition
qui ne porte pas non plus sur la loi de l'impôt qui dit que le calcul se
fait sur 200 cigarettes et non pas sur 25 cigarettes, soit une imposition
à partir du paquet.
Je pense que mes collègues sont un peu déçus de ne
pas avoir obtenu des documents que normalement un gouvernement responsable est
en mesure d'offrir à des parlementaires pour élargir leur
éclairage, pour leur permettre de faire un travail un peu plus
respectueux - du moins en tout cas, des précédents parlementaires
- qui nous permettrait de dire que nous avons, comme membres d'une commission
parlementaire, pu témoigner et puis palper et puis toucher un document
qui nous aurait donné toutes les garanties, qui nous aurait donné
toutes les assurances que lorsque le ministre du Revenu a décidé,
le 5 février dernier, d'être signataire d'un arrêté
ministériel qui venait modifier une disposition législative sans
pouvoir, lui, lui donner un fondement juridique, si nous, comme membres d'une
commission parlementaire, avions pu nous appuyer là-dessus, il me semble
qu'on aurait prouvé à la population que lorsqu'on a comme mandat
de l'Assemblée nationale d'étudier un projet de loi article par
article, nous devons à tout le moins nous assurer, lorsqu'on fait
l'étude de chacun des articles, qu'on ne pose pas d'une façon
présomptueuse - c'est notre prétention - de geste
illégal.
Ce n'est pas compliqué, ce que nous demandions. J'en profite,
encore là, parce que cela a été dit par le ministre du
Revenu, pour répliquer que jamais nous n'avons refusé
l'invitation qu'il nous a faite. Dans le texte des galées que j'ai fait
sortir, le ministre du Revenu nous disait: "II me fera plaisir, si vous
suspendez, que je vous fasse rapport de mes consultations, que je fasse rapport
de mes considérations au niveau de divers autres intervenants". Je
regrette, M. le Président, mais la demande qui a été
formulée par l'Opposition n'est pas d'avoir un rapport sur les
considérations et les consultations, aussi larges soient-elles, que le
ministre du Revenu aurait tenues. La demande qui a été faite par
les membres de l'Opposition était, pour pouvoir continuer l'étude
article par article de ce projet de loi, d'obtenir un avis juridique officiel
du ministre de la Justice du Québec - parce que c'est de cette
façon que nous devons procéder - pour faire taire
complètement toute présomption d'illégalité et
avoir l'assurance que le geste qui a été posé le 6 ou le 5
février dernier l'a été sur un fondement juridique, comme
un ministre responsable doit normalement s'acquitter de sa tâche.
En conséquence, M. le Président, pour ma part, je n'ai pas
d'autre chose à ajouter puisque nous avons vraiment essayé de
faire notre travail le plus honnêtement possible, le plus objectivement
possible. Mais il semble d'une façon on ne peut plus claire que le
gouvernement ne veut même pas donner les
outils nécessaires au moins aux parlementaires de l'Opposition
pour s'acquitter de leurs responsabilités et, en conséquence, M.
le Président, je pense que nous devons conclure qu'au contraire jamais
l'Opposition n'a essayé de ne pas s'acquitter de ses
responsabilités et d'analyser article par article, sauf qu'on avait
simplement demandé de nous fournir les outils qui, normalement, doivent
accompagner notre travail parlementaire. Le gouvernement s'y est refusé
et, en conséquence, je n'ai rien d'autre à ajouter sur l'article
2.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 29, paragraphe 2, du projet de loi 2 modifiant
certaines dispositions fiscales? Est-ce que l'article 29, paragraphe 2...
M. le député de Jonquière.
M. Dufour: M. le Président, c'est évident que,
lorsqu'on reparle d'aller en arrière ou d'un fait rétroactif de
la loi, il faut regarder tout ce qui entoure cette rétroactivité.
Je peux reprendre un peu les propos du député d'Abitibi-Ouest qui
nous dit: Vous avez déterminé sans fondement et c'est
là-dessus qu'on discute depuis deux jours. C'est difficile de savoir sur
quoi se base le gouvernement pour avoir posé ce geste-là.
Si on fait un peu référence à la conférence
de presse du ministre du Revenu, on peut voir que c'eét vraiment lui qui
a déterminé le prix puisqu'on lui pose la question... Ce qu'on
veut vous dire, M. Gratton, c'est qu'au moment du budget vous saviez que cette
taxe allait...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière, voulez-vous dire M. le ministre du Revenu au lieu de M.
Gratton s'il vous plaît?
M. Dufour: ...allait venir au début de l'année. Il
répond: Évidemment. À la page 12, on pose la même
question. "Si je comprends bien, M. le ministre du Revenu, vous étiez
donc au courant de cette hausse depuis au moins le budget que vous avez
présenté vous-même en décembre." Réponse:
"Est-ce que vous parlez du gouvernement ou de moi personnellement?"
Réponse: "Vous personnellement, M. le ministre du Revenu." Il
répond: "J'étais au courant depuis le 29 janvier." À la
page 10, on dit qu'on est au courant au début de l'année et,
à la page 12, qu'on est au courant juste depuis le 29 janvier.
Il me semble qu'il y a des éléments de contradiction. Un
autre point qu'on doit relever. Le même ministre du Revenu dit; "Il ne
faut jamais dire jamais." Et, à la page 14, cela ressemble à du
jamais; "Je vous promets que ça ne recommencera plus, je ne le ferai
plus."
À la page 20, un autre point qui me surprend un peu. On s'appuie
sur une lettre d'un sous-ministre pour dire qu'il n'y aurait pas d'augmentation
sur le tabac au cours de l'année, on s'appuie sur des enquêtes et
on nous affirme, presque hors de tout doute, que cela dépend des
fonctionnaires s'il y a eu des augmentations. Donc, si c'est vrai qu'un
sous-ministre peut écrire qu'il n'y aura pas d'augmentation, comment un
directeur de service peut-il avoir le droit de le dire? Il me semble en tout
cas que cela sonne un peu beaucoup faux.
En même temps, ce qu'on peut retenir aussi, c'est que le ministre
du Revenu -c'est un aveu qu'il nous fait à la page 21 -dit qu'il a
appris rapidement. C'est depuis plusieurs années parce qu'il doit avoir
du plaisir actuellement, nous sommes nouveaux. Il est mieux de s'amuser dans
les premiers jours et dans les premiers mois; ce ne sera peut-être pas
pareil tout le temps. On dit qu'un arrêté ministériel et
qu'un décret, ce n'est pas la même chose et il a appris cela
après tout ce temps passé au Parlement.
Je veux vous dire encore une fois, M. le Président, qu'à
mon point de vue, pour cet article, nous n'avons pas obtenu satisfaction. On a
demandé un avis juridique concernant la légalité de cet
article. Si ce n'est pas vrai pour le reste, cela ne peut pas être vrai
pour la rétroactivité.
Quant à moi, je ne peux pas m'inscrire favorable à cet
article qui dit qu'il aura effet depuis le 24 avril 1985.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 29, paragraphe 2?
M. le député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. Sur la
question de la rétroactivité au point 2, j'aimerais
brièvement mentionner à la commission que si l'on veut que cette
rétroactivité prenne force, tel que mentionné au
paragraphe 2, il faut que ce soit mentionné dans l'énoncé
budgétaire. Dans l'énoncé budgétaire du ministre
Duhaime du 24 avril, comme l'a démontré
précédemment le député de Montmorency, il
était question que, dans l'application de cette taxe, il y ait
rétroactivité. Cependant, toujours en fonction des
événements récents, on ne peut pas parler de
rétroactivité puisque cette augmentation de taxes ou ce
décret qui a été signé par le ministre du Revenu,
et dont il est question dans ce débat, n'était pas
mentionné dans l'énoncé budgétaire du 18
décembre par le ministre des Finances. Je réitère que si
on veut appliquer une rétroactivité au 24 avril 1985, ce que je
conçois et comprends très bien, par rapport à
l'énoncé budgétaire du ministre Duhaime, cela va. Mais
là où cela ne fonctionne plus,
c'est qu'il y a toujours cet énoncé budgétaire
auquel on doit maintenant référer, parce qu'il y en a eu un autre
entre-temps, celui du 18 décembre du ministre des Finances, c'est qu'on
ne peut pas ou oh ne pourra pas, en toute légalité, aller de
l'avant et adopter l'article 29.2 puisque cette rétroactivité ne
pourra prendre effet étant donné qu'il n'était pas fait
mention dans l'énoncé budgétaire du 18 décembre, de
quelque façon que ce soit, d'un décret à venir sur les
augmentations de taxe sur le tabac dont il est question.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que voua avez
terminé, M. le député de Bertrand?
M. Parent (Bertrand): Certainement. J'avais dit que je serais
bref, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Bertrand. M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: M. le Président, je serai également
bref. On a essayé de notre mieux de manifester nos
préoccupations, qui doivent être celles de la population, à
l'égard de cet article 29 concernant la taxe sur le tabac. On reste
toujours avec la même préoccupation et la même
présomption parce que le ministre n'a pas accepté de nous donner
ce qui nous aurait semblé, en tout cas, un argument important, du moins
un élément d'éclaircissement, soit un avis juridique
objectif, si je peux dire, du ministère de la Justice, qui nous aurait
donné une assurance - en tout cas, je l'espère - de la
légalité de l'action que le ministre du Revenu a posée le
5 février 1986.
Une voix: ...
M. Desbiens: C'est évident que, à compter du moment
où nous n'avons pas eu la possibilité d'obtenir ces
éclaircissements, d'obtenir ces éléments
d'assurance...
Une voix: ... Une voix: ...
M. Desbiens: ...l'Opposition se trouve...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Chauveau
et M. le député de
Sainte-Anne, s'il vous plaît! M. le député de Dubuc,
vous pouvez continuer.
M. Desbiens: Merci, M. le Président. Je concluais que,
étant donné qu'on n'a pu avoir ces éclaircissements qui
auraient pu nous permettre de prendre une décision
éclairée, évidemment notre vote sera conséquent
à ce manque d'information que le ministre n'a pas voulu nous donner.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 29.2? M. le député de Bertrand. (16 h
45)
M. Parent (Bertrand): II me restait quelques minutes. En
référence à ce que j'ai mentionné
précédemment sur le paragraphe 2 de l'article 29, M. le
Président, j'avais une citation que je voulais faire parce que les
membres du gouvernement nous ont demandé des éclaircissements sur
les énoncés que l'on faisait ou les prétentions que l'on
avait. Dans le but de bien éclairer le paragraphe 2, c'est-à-dire
toute la question de la rétroactivité, je voudrais apporter au
ministre du Revenu et aussi à son adjoint parlementaire, le
député de Montmorency, l'éclaircissement suivant. Par
rapport aux énoncés budgétaires, par rapport à la
rétroactivité, dans un texte des propos du professeur Driedger de
l'Université d'Ottawa, de la Faculté de droit, qui est un
professeur éminent, dans une publication de l'Association canadienne
d'études fiscales de 1982, on mentionne très clairement que,
selon la façon de procéder en ces Parlements, tant au point de
vue du système que nous avons au Canada qu'ici, à
l'Assemblée nationale, lorsqu'on veut qu'une loi soit
rétroactive, il en a été fait mention dans le budget.
C'est à cela que je fais référence; j'y ai fait
référence aussi il y a quelques minutes, à savoir que dans
l'énoncé budgétaire du 18 décembre 1985 du ministre
des Finances il n'était pas question, d'aucune façon, de cette
augmentation et du décret qu'on a connu le 5 février de la part
du ministre. Je pense que c'est très important d'apporter cet
éclaircissement. C'est terminé, merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Bertrand. M. le député de Lévis,
il vous restait, tout à l'heure, deux minutes et deux secondes.
M. Garon: Je n'ai pas parlé encore.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, c'était sur l'article 29.9.4. Vous aviez raison. M. le
député de Lévis.
M. Garon: En matière de rétroactivité, en
droit, nous sommes dans les matières interprétées toujours
de façon très restrictive. Ce ne sont pas des matières qui
sont interprétées largement, mais d'une façon très
restrictive. Ce sont des matières, de fait, qui sont habituellement
interprétées par les tribunaux de la façon la plus
restrictive. Il ne s'agit pas, à ce moment-là, d'un cas où
les pouvoirs sont considérés comme extensibles. Au contraire, les
juges ou les
tribunaux disent, et toute la doctrine juridique dit, que comme les gens
n'ont pas vu venir une disposition qui s'applique à eux d'une
façon rétroactive ces pouvoirs ou cette façon de faire
rétroactive doit être rigoureusement interprétée.
Or, personne n'a soupçonné». Vous pouvez être certain
que si les gens du Parti libéral avaient soupçonné cela au
cours de la campagne électorale, ils nous en auraient dit un mot, mais
personne n'a soupçonné que le discours sur le budget du ministre
des Finances, le 23 avril dernier, avant d'être adopté, avant
d'être autorisé par l'Assemblée nationale sous forme de loi
adoptée, serait utilisé par le ministre du Revenu dans cette
affaire.
J'irai plus loin dans ce cas. Je voterai contre le paragraphe 2, si on
l'adopte séparément. Je vais demander un vote
séparé parce que j'estime qu'il y a abus de droit, que les gens
n'ont pas pu voir venir cela. Ce que le ministre des Finances a fait le 23
avril, c'est d'adopter une loi qui changeait un système de calcul, qui
calculait les cigarettes au paquet de 25 cigarettes au lieu de la cartouche de
200. Cela avait pour effet également de fixer le prix moyen de vente
à 1,50 $.
Ce que le ministre du Revenu voudrait, c'est qu'on vote
rétroactivement non seulement le discours sur le budget, mais il
voudrait aussi essayer de donner un effet légal à son
arrêté ministériel du 4 février. Je dis que jamais
le Parti québécois n'a concouru d'une façon ou de l'autre
à cette augmentation de taxe qui est en vigueur depuis le 5
février dernier. Le ministre du Revenu essaie de nous faire concourir
à une taxe qui est la sienne, dont même son chef a essayé
de se dissocier lorsqu'il est allé rencontrer les journalistes le 6
février dernier. Le sous-ministre des Finances, d'ailleurs, dans un
télégramme qu'il expédiait au Conseil canadien du tabac,
le 8 octobre 1985, faisait état... Si cela ne vous intéresse
pas...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Sainte-Anne et M. le député de Louis-Hébert, s'il vous
plaît!
Cela m'intéresse grandement, M. le député de
Lévis, vous pouvez continuer, je vous écoutais d'ailleurs.
M. Garon: Nous, on accepte que les membres de la commission
soient changés du côté ministériel. On pense qu'ils
sont changés par des gens plus intéressés, pas par des
gens moins intéressés.
M. Polak: Cela fait quinze fais le même argument.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Sainte-Anne, s'il vous plaît!
M. Garon: Non, c'est la première fois qu'on parle de
cela.
M. Polak: Nous ne sommes pas intéressés par la
répétition.
M. Garon: C'est la première fois qu'on parle du paragraphe
2 de l'article 9.4. Cela donne un effet rétroactif» "Le
présent article a effet depuis le 24 avril 1985."
M. le Président, ce que le ministre du Revenu a tenté de
faire c'est de se greffer à ce changement pour se donner à
lui-même un pouvoir qu'il n'a pas, qu'il a adopté sans pouvoir, et
il veut essayer de se greffer à la rétroactivité de la loi
pour le budget du ministre des Finances du 23 avril, en disant: Cette
rétroactivité jouera pour moi aussi.
Je regrette, en matière d'affaires rétroactives, les
tribunaux ont toujours interprété de façon restrictive.
Quand le ministre des Finances a fait son discours sur le budget, le 23 avril
1985, il ne pouvait anticiper d'aucune façon - d'autant plus que
lui-même ne s'en est pas prévalu - que le ministre du Revenu, quel
qu'il soit, se prévaudrait de cette disposition pour accrottre les taxes
de son propre chef. Ce n'est pas pour rien, M. le Président, que le
ministre des Finances a eu peur de venir devant cette commission parlementaire.
Le ministre des Finances a été invité, il n'est pas venu.
Il a préféré, nous dit-on, la Floride aux travaux de la
commission.
Nous avons adopté aussi des dispositions pour permettre au
premier ministre de venir lorsqu'il sera de retour de la France, lui qui
semblait ne pas être d'accord sur cette décision. Il a amplement
les moyens, amplement les moyens, et il faudra penser à faire un
amendement, ici, pour dire au paragraphe 2 que le présent article a
effet depuis le 24 avril 1985 seulement - j'en fais une proposition - en ce qui
concerne les déclarations du ministre des Finances du 23 avril 1985,
pour que cette disposition soit vraiment rétroactive. Je suis
persuadé que le premier ministre sera peut-être le premier
à m'envoyer un télégramme de félicitations parce
qu'il semble qu'il n'était pas heureux qu'un fonctionnaire du
ministère du Revenu annonce cette augmentation de taxes.
Je vais demander quelques instants au président de la commission
pour lui formuler cet amendement par écrit. Cet amendement que je veux
proposer est dans le cadre de cet article. Aux gens qui travaillent ici, quand
j'aurais parlé un peu davantage, je formulerai de façon plus
précise cet amendement que je voudrais présenter.
Essentiellement, nous sommes en matière rétroactive et nos
concitoyens ont le droit de compter sur les parlementaires comme leurs
défenseurs, comme des gens qui sont prêts à batailler pour
leurs droits fondamentaux, les droits fondamentaux des
parlementaires. Moi, jamais vous ne me ferez dire que je suis trop
fatigué pour siéger le soir, trop fatigué pour
siéger le samedi, trop fatigué pour siéger le vendredi.
Jamais vous ne m'entendrez dire cela. Pourquoi? Parce qu'un parlementaire c'est
quelqu'un qui représente ses concitoyens, c'est quelqu'un qui a une
tâche considérable. Vous savez, nous ne sommes pas nombreux ici,
nous sommes quelques-uns, mais ce que nous allons faire va toucher 6 500 000
citoyens. Évidemment, ils ne fument pas tous, mais il y a d'autres
dispositions qui les touchent. 6 500 000 citoyens vont être
touchés. Si on regarde le projet de loi 2, tous seront touchés
d'une façon ou de l'autre. Ce projet ne peut pas être
escamoté et les façons de procéder ne pourront pas non
plus être escamotées. C'est pourquoi il est important pour nous de
prendre tout le temps qu'il faut, de donner toutes les assurances qu'il faut
pour faire en sorte que ce projet de loi ne puisse pas servir à autre
chose que ce qui a été prévu à l'article 9.2 dans
son effet rétroactif.
Il faudra, dans mon amendement justement se référer
à l'article 9.2, puisqu'on dit que le prix de vente était la
décision du ministre des Finances» C'était
l'énoncé du 23 avril: "Le prix de vente au détail devant
servir au calcul de l'impôt prévu à l'article 6 est, dans
le cas des cigarettes, de 1,50 $ pour 25 cigarettes." L'effet rétroactif
ne doit pas aller plus loin que le budget du ministre des Finances du 23 avril
1985. Si le ministre des Finances actuel, le 18 décembre 1985, voulait
aller plus loin, c'était à lui de le dire. Là-dessus - je
sais qu'il y en a qui vont peut-être vouloir discuter d'une
légalité de l'amendement - on ne fera pas d'interprétation
sur le banc. Il va falloir véritablement des interprétations,
parce que nous sommes en matière rétroactive, nous ne sommes pas
dans une matière formelle. Nous ne sommes pas dans une matière
régulière, nous sommes dans une matière exceptionnelle et,
je dirai, la plus exceptionnelle. En droit, il n'y a rien. J'en prends à
témoin le député de Louis-Hébert, le
député de Sainte-Anne, le député de Montmorency. Il
n'y a rien de plus exceptionnel que de légiférer des
matières rétroactives. C'est pourquoi cette législation en
matière rétroactive doit être restrictive, se restreindre
à ce qui a été l'énoncé du ministre des
Finances. Le ministre du Revenu l'a dit lui-même: Le projet de loi 2 - je
le prends à témoin - est pour mettre en oeuvre uniquement, non
pas autre chose, le discours sur le budget du ministre des Finances du 23 avril
1985. Après cela, il a dit: J'aurai un autre projet de loi pour mettre
en oeuvre le discours sur le budget du ministre des Finances du 18
décembre 1985.
À ce moment-là, Il est clair que nous respectons... Le
ministre du Revenu nous avait mis au défi. Par cet amendement, nous
allons le mettre au défi de respecter sa parole, puisque nous ne voulons
pas... Le but de l'article 29.2 est de donner un effet rétroactif
à la loi. Nous disons, nous, de l'Opposition, nous, comme parlementaires
respectueux des droits des citoyens, nous, comme les derniers ramparts des
citoyens lorsqu'ils sont imposés, parce que le gouvernement et les
ministres proposent, mais c'est l'Assemblée nationale qui autorise, que
nous devons protéger les droits des citoyens. Je m'attends que tous les
députés qui siègent ici à cette commission, du
côté ministériel comme du côté de
l'Opposition, concourent à faire en sorte que le ministre du Revenu ne
s'arroge pas des droits qu'il n'a pas, alors que nous n'avons pas à lui
donner des pouvoirs qu'il n'a pas. Lorsque les projets de loi seront
adoptés, s'il veut, par la suite, augmenter les taxes, se servir de
dispositions qui ne seront pas rétroactives, mais qui lui
appartiendront, qui seront dans le processus, il pourra, s'il veut peser sur le
"piton" de l'ascenseur, monter un étage, monter deux étages,
monter trois étages en fonction de la loi, une fois qu'elle aura
été adoptée. Mais nous ne pouvons pas permettre un effet
rétroactif à autre chose qu'au discours sur le budget du 23 avril
1985. C'est le rôle des parlementaires et c'est pourquoi ce rôle
doit être joué dans toute son ampleur. (17 heures)
II n'y aura pas beaucoup de questions aussi importantes qui seront
débattues en même temps au cours de tout notre mandat de quatre
ans. Nous aurons rarement à la fois une question rétroactive, une
question de fiscalité et une question qui suppose du droit aussi
exceptionnel. Le député de Sainte-Anne le sait, nous sommes en
matière de droit exceptionnel quand nous parlons de
rétroactivité, quand nous parlons de taxation. De la même
façon que, pour les assurances, quand les juges se trouvent devant des
stipulations de compagnies, ils ont toujours une interprétation
favorable aux bénéficiaires, de la même façon, en
matière de fiscalité, ils ont toujours une interprétation
favorable aux contribuables parce que les lois, si elles ne sont pas claires,
si elles sont faites de telle façon, c'est le gouvernement qui a
légiféré et il n'avait qu'à les clarifier. On n'a
pas à faire jouer le doute en faveur du gouvernement. C'est au
contribuable, au citoyen qu'on doit penser dans tout le travail que nous allons
faire au cours des prochaines heures et des prochains jours. C'est pourquoi,
dans ce cas, je vais proposer un amendement écrit. Je sais que des gens
pourront penser qu'aujourd'hui les citoyens n'ont aucun droit. Le rôle de
l'Opposition, en particulier... Les députés au pouvoir ne le font
pas tout le temps, parfois au caucus, mais, souvent, cela
ne déborde pas le caucus; souvent au caucus aussi; souvent, cela
prend plus de courage pour aller plus loin. Le courage est une vertu qui n'est
pas aussi étendue...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: ...et qui n'a peut-être pas autant de
façons de s'exercer que dans le passé.
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous revenir au sujet,
M. le député de Lévis?
M. Garon: Actuellement, le rôle de l'Opposition et de tous
les parlementaires, c'est de protéger les citoyens contre les abus de
l'administration. Le mouvement du premier ministre, le 6 février
dernier, lorsqu'il est allé devant les journalistes, n'était pas
un mauvais mouvement. Il a dit: Cela n'a pas de bon sens que les taxes
augmentent par l'effet d'une déclaration d'un fonctionnaire. Si cela
avait été ainsi, cela n'aurait pas eu de sens. C'est justement
parce qu'il ne faut pas que cela soit, parce qu'il ne faut pas que les taxes
remontent avec un effet rétroactif en vertu de pouvoirs qui n'ont pa3
été prévus pour être appliqués de cette
façon et qui constituent un abus de droit complet par le ministre du
Revenu. Nous n'avons pas à essayer de faire des dispositions pour mettre
en oeuvre ces projets de loi, contrairement à ce qui a été
déterminé lors de l'énoncé budgétaire du
ministre des Finances. C'est pourquoi, à la fin de mon intervention, je
présenterai un amendement.
Une voix: Ce n'est pas fini?
M. Garon: II reste combien de temps? Je devrais avoir fini ou
presque.
Le Président (M. Lemieux): II vous reste quatre minutes
trente environ.
M. Garon: M. le Président, comme vous m'avez dit, hier,
que j'en avais utilisé trois et demie de trop...
Le Président (M. Lemieux): Et trente et une tout à
l'heure où vous avez compensé.
M. Garon: Je vous ai donné une minute. Je vous en donne
deux autres et demie. Alors, vous m'en devez deux.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis...
M. Garon: Avant d'arrêter mon intervention, je vais vous
demander quelques minutes pour vous formuler...
Le Président (M. Lemieux): L'amendement par
écrit.
M. Garon: ...par écrit l'amendement que je vais proposer
à l'article 2...
Le Président (M. Lemieux): C'est bien, M. le
député de Lévis.
M. Garon: ...au paragraphe 2.
Le Président (M. Lemieux): Je suspends les travaux pour
trois ou quatre minutes.
(Suspension de la séance à 17 h S)
(Reprise à 17 h 13)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre!
La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux. M.
le député de Lévis, nous avons prolongé votre temps
de deux minutes à pas loin de cinq minutes. M» le
député de Lévis, votre motion d'amendement est-elle
prête afin que la présidence puisse la lire aux membres de la
commission parlementaire?
Motion d'amendement
M. Garon: Au paragraphe 2 de l'article 29.1, l'amendement se
lirait comme suit: "Ajouter à la fin les mots "dans les limites du
montant du prix de vente en détail de 1,50 $ pour 25 cigarettes -
attendez un peu - fixé par l'article 9.2."
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous m'en remettre une
copie, M. le député de Lévis?
M. Garon: Moi, je mets le signe de piastre avant.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Lévis. L'amendement tel que proposé par
le député de Lévis se lirait comme suit: "Les articles 9.2
à 9.4 de ces lois sont remplacés par les suivants: 29, paragraphe
2..." M. le ministre du Revenu!
L'amendement se lirait comme suit: "29, paragraphe 2. Le présent
article a effet depuis le 24 avril 1985 dans les limites du montant du prix de
vente en détail de 1,50 $ pour 25 cigarettes fixé par l'article
9.2 de la loi no 2."
M. Gratton: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Désirez-vous intervenir
sur l'amendement, M. le ministre du Revenu?
M. Gratton: Sur la recevabilité de l'amendement, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Sur la recevabilité de
l'amendement, je m'excuse.
Débat sur la recevabilité
M. Gratton: J'aimerais vous suggérer, en vertu de
l'article 192 du règlement, que cette motion d'amendement du
député de Lévis a une incidence financière. Il
devrait savoir que seul un ministre peut faire une motion qui a une incidence
financière et que, donc, par le fait même, la motion est
irrecevable.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur la recevabilité de l'amendement?
M. Garon: M. le Président, si on se réfère
à l'article 192 de notre règlement, seul un ministre peut
présenter une motion visant l'engagement de fonds publics. Il ne s'agit
pas d'engager des fonds publics, de faire une dépense.
Deuxièmement, l'imposition d'une charge aux contribuables. Il ne s'agit
pas d'imposer une charge aux contribuables, il s'agit de diminuer une charge
aux contribuables. La remise d'une dette envers l'État. On ne remet pas
de dettes envers l'État. Quatrièmement, l'aliénation de
biens appartenant à l'État.
On ne tombe pas dans les cas d'exception. Au contraire, c'est
pour améliorer le projet de loi du ministre, tel qu'il le souhaite
lui-même, parce qu'il a dit que le projet de loi 2 avait pour but
uniquement de mettre en oeuvre le budget Ouhaime et qu'il y aurait un autre
projet de loi pour la mise en oeuvre des politiques de son gouvernement. En
faisant cet amendement, nous allons mettre en oeuvre mot à mot le budget
Duhaime. L'augmentation de 0,25 $ qui est en oeuvre depuis le 24 avril telle
que stipulée au discours sur le budget du 23 avril sera mise en oeuvre
rétroactivement, comme la loi le mentionnera, mais elle sera
rétroactive uniquement pour le discours sur le budget du ministre
Duhaime qui a annoncé une fixation du prix de vente en détail
devant servir au calcul de l'impôt prévu à l'article 8
à 1,50 $ pour 25 cigarettes.
Ce sera la prérogative du ministre du Revenu de mettre dans
l'autre projet de loi qui doit établir les politiques du gouvernement
actuel, tel qu'il l'a mentionné, sa taxe sur les cigarettes qu'il
établit en augmentant le prix de vente en détail à 1,88 $.
Le gouvernement aura droit à tous les montants qui ont été
prévus dans le budget de M. Duhaime, l'ex-ministre des Finances, le 23
avril 1985, en fixant le prix de vente, comme il l'a mentionné dans son
budget, à 1,50 $ en établissant la nouvelle technique qu'il a
mentionnée mais, par ailleurs, sans mettre en oeuvre d'autres
dispositions qui n'étaient pas dans le discours sur le budget du 23
avril 1985.
C'est vraiment l'ordre de la Chambre, M. le Président, qui nous
dit d'étudier le projet de loi 2 tel que l'a déclaré en
Chambre le ministre des Finances qui mettra en oeuvre les mesures fiscales qui
ont été adoptées par le ministre des Finances lors de son
discours du 23 avril 1985, et pas autre chose.
Si on mettait l'amendement 2.2 ici... Il faut comprendre que, lorsque
cet article a été fait, le ministre l'a dit: II a
été fait par les fonctionnaires, par vos gens avant qu'on arrive
là. Vous pouvez comprendre qu'ils n'ont pas pu prévoir que le
ministre du Revenu augmenterait, le 4 février, le prix de vente au
détail à 1,88 $. C'est pourquoi ce projet de loi n'est plus
correct et qu'il faut faire un amendement justement pour qu'il mette en oeuvre
le budget Ouhaime du 23 avril, mais uniquement le budget Duhaime du 23 avril et
pas autre chose. Je ne dis pas que le ministre du Revenu ne pourra pas, par
d'autres dispositions dont c'est sa responsabilité, en concertation avec
le ministre des Finances et le premier ministre du Québec,
établir la taxe, la taxe additionnelle qu'il veut établir, mais
le procédé n'est pas bon. Il a raison quand il dit: C'est votre
loi. Mais notre loi, qui a été préparée par des
fonctionnaires, qui était même imprimée - nous a-t-il dit -
prête à être imprimée, ne pouvait pas prévoir
du tout que le ministre du Revenu changerait les dispositions du discours sur
le budget du 23 avril 1985 du ministre des Finances. Il ne pouvait pas deviner
non plus que le gouvernement fédéral, le 23 mai, augmenterait lui
aussi sa taxe. C'est pourquoi l'amendement que je propose a pour effet de
rendre ce projet de loi conforme à 100 % à ce qu'a
mentionné le ministre du Revenu lorsqu'il nous a mis au défi.
C'est lui qui nous a mis au défi. Il a fallu travailler fort, mais on a
relevé le défi. Le défi, cela veut dire que le projet de
loi 2, tel qu'il l'a dit, ne va pas plus loin que le discours sur le budget du
23 avril 1985 du ministre des Finances. L'amendement que j'ai proposé
est recevable parce qu'il va permettre de mettre en oeuvre exactement ce qui a
été mentionné à l'Assemblée nationale par le
ministre des Finances.
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest, brièvement, s'il vous plaît.
M. Gendron: Oui, très brièvement, M. le
Président, sur la recevabilité. Je pense qu'il faut encore se
référer aux notes explicatives du projet de loi 2 où,
d'une
façon on ne peut plus claire, on dit que "Ce projet de loi
modifie diverses lois fiscales de même qu'un certain nombre de
dispositions législatives afin de donner suite aux déclarations
ministérielles du 19 décembre 1984 et du 8 mai 1985 du ministre
des Finances...
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que c'est sur la
recevabilité, M. le député d'Abitibi-Ouest?
M. Gendron: Oui, sur la recevabilité, ...ainsi qu'aux
discours sur le budget du 22 mai 1984 et du 23 avril 1985 prononcés par
ce dernier."
L'amendement de mon collègue, le député de
Lévis, vise effectivement à s'assurer qu'en aucune façon
nous ne puissions aller plus loin que les effets prévus au budget
Duhaime. Lorsque nous arrêtons la disposition rétroactive au 5
février 1986, c'est parce que c'est exactement à ce
moment-là qu'entre en ligne de compte une autre disposition où le
ministre du Revenu a changé l'article du budget Duhaime où la
perception autorisée était de 1,50 $ pour le paquet de 25
cigarettes et non 1,88 $.
Sur la recevabilité, par rapport à l'article 192, je ne
suis pas en mesure de voir en aucune façon comment on pourrait
être accusé de présenter une motion qui a comme
conséquence d'engager des fonds publics parce que nous n'engageons pas
de fonds publics par rapport aux responsabilités du budget Duhaime. Nous
les restreignons effectivement à la portée du budget Duhaime dont
une application était prévue jusqu'au 5 février 1986 et
non au-delà de cette application. C'est la même chose pour l'autre
disposition. Il ne s'agit pas de l'imposition d'une charge aux contribuables.
Il s'agit d'une restriction d'une imposition que nous ne partageons pas. Il me
semble, M. le Président, que vous avez là un amendement qui est
tout à fait recevable parce qu'il est en tout point conforme à ce
qu'on a entendu depuis le début de cette commission, à savoir que
c'est un projet de loi qui ne reprenait que les dispositions, mais d'une
façon exclusive, du budget Duhaime. Pour reprendre les dispositions
exclusives du budget Duhaime, il faut absolument s'assurer que l'imposition qui
est prévue soit le montant fixé par le budget Duhaime, soit 1,50
$ le paquet de 25 cigarettes et non 1,88 $. Donc, il ne s'agit pas d'une
augmentation pour les contribuables, mais effectivement d'une restriction. La
portée de l'amendement n'a pas te caractère d'aller chercher plus
de fonds. Vous auriez raison, car ce ne serait pas une responsabilité
autre que celle du ministre du Revenu. Puisque l'amendement de mon
collègue de Lévis s'arrête le 5 février 1986, c'est
pour exclusivement respecter la limite imposée par le budget Duhaime
qui, lui, a un fondement juridique parce qu'il a été
présenté en bonne et due forme par le ministre des Finances.
M. Gratton: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Très brièvement. Je reprends
l'expression même du député d'Abitibi-Ouest qui nous dit:
Cela ne comportera pas une nouvelle charge. Cela comporte plutôt une
restriction. C'est bien cela que le député d'Abitibi-Ouest a dit?
C'est une restriction. On ne veut pas que la charge s'impose
complètement. On veut restreindre cette charge additionnelle. Je vous
citerai un précédent. Une décision rendue le 6 juillet
1972. On la retrouve dans le précis de l'ancien règlement.
À ce moment, l'article 192 était plutôt l'article 64. Je
conviendrai que la formulation n'était pas textuellement la même
parce que effectivement tous les nouveaux articles ont été
changés pour être rédigés dans un meilleur
français et pour toutes sortes d'autres raisons. D'ailleurs, ils ne sont
pas numérotés dans le même ordre non plus.
Voici ce que disait le sens de l'ancien article 64 qui est exactement le
même que le nouvel article 192. Voici la décision qui a
été rendue le 6 juillet 1972. Un amendement à un projet de
loi présenté par un député de l'Opposition qui a
une implication fiscale qui diminuerait les revenus de l'État - c'est ce
que vise à faire la motion d'amendement - ne peut être
reçu. Je peux vous remettre la citation, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): J'ai copie de ce jugement. M.
le ministre, avez-vous terminé? Une dernière intervention sur la
recevabilité de l'amendement.
M. Gratton: Je terminerai, M. le Président, en
ajoutant...
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le ministre du
Revenu.
M. Gratton: ...que dans le discours sur le budget lui-même,
on sait que les annexes du discours sur le budget font partie intégrante
du discours sur le budget. Est-ce qu'on peut s'entendre là-dessus? Je
n'ai pas besoin d'aller le lire. Dans les annexes du discours sur le budget,
à la page A-49 sous la rubrique "Taxes sur le tabac" on lit ce qui suit:
"Le taux de la taxe sur le tabac qui est présentement de 55 % sera
porté à 60 % à compter de minuit ce soir", etc.
Dorénavant, ce taux sera appliqué sur un prix de vente moyen d'un
paquet de 25 cigarettes. Ce prix est fixé avant taxe à
minuit ce soir, le soir du discours sur le budget, à 1,50 $.
Dorénavant, à compter du 23 avril à minuit, ce taux sera
appliqué sur un prix de vente moyen d'un paquet de 25 cigarettes. M. le
Président, si on devait adopter la motion d'amendement du
député de Lévis, on se trouverait a aller à
l'encontre même du discours sur le budget du 23 avril dernier.
Deux raisons pour déclarer cet amendement irrecevable. La
principale étant celle que seul un ministre peut faire une motion qui
peut résulter en une réduction des revenus ou, comme le dit la
décision elle-même textuellement: ...qui a une implication fiscale
qui diminuerait les revenus de l'État ne peut être
reçu.
Le Président (M. Lemieux): Une dernière
intervention sur la recevabilité, M. le député de
Lévis.
M. Garon: D'abord, je vais faire mon intervention en deux points.
Sur le plan doctrinal, Erskine May, dans son chapitre sur "Debate on main
stages of finance bills", à la page 793, établit ce qu'il appelle
les règles interdisant l'augmentation des charges fiscales: Rules
forbidding the increase of charges. Il dit: "Amendments must not exceed the
scope, increase the amount or extend the incidence of any charge upon the
people, defined by the terms of the ways and means resolutions, by which the
provisions proposed to be amended are authorized." Il dit et remarquez bien, il
fait référence: "By the terms of the ways and means resolutions"
ce qui veut dire que par la motion du discours sur le budget du ministre des
Finances, c'est ça les "ways and means resolutions", c'est le discours
du ministre des Finances, il dit: On ne peut pas augmenter ce qu'il a
établi. Les amendements ne peuvent pas faire cela.
Tantôt, lorsque le ministre du Revenu a cité l'annexe A
à la page 49, il n'a pas lu la phrase suivante. Il a dit:
Dorénavant, ce taux sera appliqué sur un prix moyen de vente,
sera un prix de vente moyen d'un paquet de 25 cigarettes et la phrase suivante
dit: Ce prix est fixé avant taxe à minuit le soir du discours sur
le budget à 1,50 $...
M. Gratton: Je l'ai lu.
M. Garon: Non, non, vous ne l'avez pas lu. C'est fixé.
M. Gratton: Je l'ai lu, M. le député. Vous avez les
oreilles bouchées, certain.
M. Garon: Le discours sur le budget le fixe. Il dit quel est le
montant. Il n'a pas dit autre chose, ce qui veut dire que l'amendement a pour
but, justement, de faire en sorte que la loi 2, à moins qu'il ait
changé d'idée, comme nous l'a dit le ministre du Revenu, voulait
mettre en oeuvre, uniquement le discours sur le budget du ministre des
Finances. Alors, cet amendement n'a pas pour but de changer quoi que ce soit,
mais de mettre vraiment en oeuvre le discours du ministre des Finances du 23
avril 1985, mais seulement cela.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, je vous remercie. Alors, je vais suspendre...
M. Gratton: M. le Président, si vous suspendez,
pourrais-je vous citer juste un autre précédent.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le ministre du
Revenu.
M. Gendron: Objection.
M. Gratton: Bien, il y a eu trois interventions de ce
côté-là.
M. Gendron: Non, non, il y a eu deux interventions. M. le
Président avait mentionné que c'était la dernière.
J'ai aucune objection si M. le ministre du Revenu veut vous éclairer
davantage. J'aurais également, moi, à vous soumettre une courte
phrase si vous permettez au ministre du Revenu d'y aller d'un éclairage
additionnel.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: M. le Président, je cite une décision
qui a été rendue à la commission de l'éducation et
de la main-d'oeuvre, le jeudi 6 décembre 1984. On n'a pas besoin de
remonter à Erskine May. La motion d'amendement - vous pourrez la
retracer - était du genre de celle qu'on a aujourd'hui. Voici la
décision. 11 s'agissait d'une motion d'amendement du
député d'Argenteuil, qui était dans l'Opposition à
ce moment-là, et la décision se lit comme suit: "Or, la motion
d'amendement du député d'Argenteuil aurait, si elle était
adoptée, un caractère exécutoire puisqu'elle deviendrait
partie intégrante d'une loi." C'est le cas de la motion d'amendement
d'aujourd'hui. "Elle contient d'après le ministre dont la parole ne peut
être mise en doute, une. implication directe sur les dépenses
d'argent." C'est le cas, quant à la rentrée d'argent.
M. Gendron: Bien oui, tout le temps.
M. Gratton: Bien oui, mais on a lu l'autre
précédent qui dit qu'un défaut de rentrée doit
être traité de la même façon qu'une dépense.
"Troisièmement, n'est pas exprimé en
termes généraux puisque la motion propose une date
précise." Non seulement elle propose une date précise, mais elle
parle même d'un prix, M. le Président, dans le cas de la motion du
député de Lévis.
Pour toutes ces raisons, encore une fois...
Une voix: Vous devriez nous en remettre copie.
M. Gratton: Oui, je vous en remets copie. Parce qu'il y a une
conséquence financière et que seul un ministre peut faire une
motion d'amendement ayant une conséquence financière, je soutiens
que la motion du député de Lévis n'est pas recevable.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, on a dit la dernière intervention. Il y a eu consentement
des deux côtés pour que ce soit M. le ministre et qu'on termine
brièvement, très brièvement, avec le député
d'Abitibi-Ouest. C'est bien ce que vous m'avez mentionné, quelques mots
à part cela.
M. Gendron: Je pense qu'il faut effectivement, M. le
Président, en rester è la conséquence financière,
mais par rapport au discours sur le budget. Or, je veux juste reprendre que
quand le ministre du Revenu prétend qu'il y aurait effectivement une
conséquence financière par rapport au budget Duhaime, la
réponse est non parce qu'en arrêtant au 5 février,
l'application de la rétroactivité, à ce moment-là,
il n'y a pas d'effet financier, point.
M. Gratton: M. le Président, en vertu de l'article 246 qui
me permet d'intervenir après chaque intervention ici à
l'Assemblée, le moins qu'on puisse dire c'est que si
effectivement...
Le Président (M. Lemieux): Pas sur une question...
M. Gratton: Oui, oui, sur toute question, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): C'est sur un article, M. le
ministre du Revenu. M. le ministre du Revenu, vous pouvez intervenir
après cinq minutes. Si vous lisez bien l'article 245, c'est quand il
s'agit d'un article et non pas sur une question de règlement.
M. Gratton: Bien, M. le Président, voulez-vous qu'on le
lise ensemble?
Le Président (M. Lemieux): Non, M. le ministre du Revenu.
Je me sens suffisamment informé, M. le ministre du
Revenu, sur la recevabilité de cet amendement et je vous
remercie. Je vais suspendre jusqu'à 17 h 50.
M. Gratton: M. le Président, je vous prierais de revenir
à 17 h 45. Nous, ça va, c'est aussi bon.
Le Président (M. Lemieux): Je vais m'efforcer d'être
ici pour 17 h 45.
(Suspension de la séance à 17 h 30)
(Reprise à 17 h 58)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux.
Relativement à l'amendement présenté par le
député de Lévis à l'article 29.2, le
président de la commission du budget et de l'administration prend cet
amendement en délibéré et rendra ultérieurement une
décision.
Comme il est 18 heures, nous suspendons nos travaux jusqu'à ce
soir, 20 heures.
M» Gratton: M. le Président, nous nous sommes entendus avec
l'Opposition pour ajourner nos travaux à mardi, 15 heures.
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration ajourne ses travaux à mardi, 15 heures.
(Fin de la séance à 17 h 59)