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(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission du budget et de l'administration commence ses
travaux. Nous sommes réunis ce matin afin de procéder au mandat
suivant: soit l'interpellation du député d'Abitibi-Ouest et
leader adjoint de l'Opposition au ministre délégué
à l'Administration et président du Conseil du trésor sur
le sujet suivant: Les grandes orientations du Conseil du trésor dans le
contrôle des dépenses gouvernementales. M. le secrétaire, y
a-t-ii des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Rochefort
(Gouin) remplace Mme Blackburn (Chicoutimi): M. Desbiens (Dubuc) remplace M.
Parent (Bertrand). C'est tout.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le secrétaire.
J'aimerais vous rappeler brièvement les règles qui
régissent l'interpellation. La procédure à suivre et qui
s'applique à l'interpellation se trouve aux articles 295 à 303 de
nos règles de procédure. En vertu de ces règles, le temps
alloué est de 2 heures ou 120 minutes, selon l'article 298 des
règles de procédure. Dans un premier temps, c'est un débat
de 20 minutes divisé comme suit: 10 minutes en premier lieu au
député de l'Opposition, M. le député
d'Abitibi-Ouest, en vertu de l'article 300 des règles de
procédure et 10 minutes au ministre, député de Verdun,
président du Conseil du trésor, M. Gobeil. Dans un
deuxième temps, le débat dure 80 minutes, donc 16 interpellations
de 5 minutes en vertu de l'article 301 des règles de procédure; 5
minutes au député de l'Opposition, 5 minutes au ministre, 5
minutes à un député ministériel et 5 minutes
à un député de l'Opposition.
Vous remarquerez que, lors d'une intervention du député
ministériel, le ministre n'intervient pas et la parole doit être
cédée au député de l'Opposition. Le débat
prend fin à 20 minutes du temps requis, soit vers 11 h 40, par 10
minutes consacrées au président du Conseil du trésor et 10
minutes au député de l'Opposition, soit l'interpellant. Si un
membre utilise moins de 5 minutes, le temps non utilisé est perdu et la
parole est donnée à l'intervenant qui suit selon la
séquence que j'indiquerai.
M. le député d'Abitibi-Ouest, leader adjoint.
Exposé du sujet M. François
Gendron
M. Gendron: Bonjour aux membres de la commission. On se retrouve
ce matin à la commission du budget et de l'administration pour une
interpellation adressée au président du Conseil du trésor
et que j'ai libellée volontairement comme suit: Les grandes orientations
du Conseil du trésor dans le contrôle des dépenses
gouvernementales.
À première vue, cela peut surprendre les membres de cette
commission ou les parlementaires de même que les intéressés
par ces questions dans le sens suivant: Pourquoi sent-on le besoin
d'interpeller le président du Conseil du trésor, trois jours
à peine après l'adoption des crédits, adoption
précédée d'un débat de 200 heures d'étude
détaillée des crédits en commission parlementaire.
Normalement, ces 200 heures auraient dû suffire à informer
de façon satisfaisante les membres de cette Assemblée et, donc,
les citoyens et les citoyennes du Québec sur les grandes orientations du
gouvernement en matière de gestion et d'affectation des fonds
publics.
Cette étude devait permettre aux députés - surtout
à ceux de l'Opposition - de s'informer sur ce qu'entend faire le
gouvernement dans l'année qui vient et, par conséquent, de voter
les crédits nécessaires. À cet égard,
l'étude des crédits budgétaires et éventuellement
l'adoption de la loi sur les crédits est sûrement, dans notre
régime parlementaire, une étape tout aussi importante que le
discours sur le budget ou le discours d'ouverture dans le processus
parlementaire. Cependant, cette année je ne peux, malheureusement, que
déplorer que l'esprit sinon la lettre des dispositions gouvernant
l'étude des crédits n'ait pas été respecté,
à notre point de vue. Le pouvoir législatif n'a pas pu exercer de
façon satisfaisante son pouvoir de surveillance et de contrôle de
l'exécutif.
D'ailleurs, je vous rappelle qu'au tout début de l'étude
des crédits je m'interrogeais principalement sur la signification de
trois éléments particuliers: 196 000 000 $ de rationalisation
interne, 159 000 000 $ de
réduction de dépenses dites diverses et diffuses et 175
000 000 $ de crédits périmés escomptés au cours de
l'exercice budgétaire 1986-1987, le tout pour un total de quelques 530
000 000 $. Aujourd'hui, je suis obligé de vous dire que je m'interroge
encore sur la signification et l'affectation de la très grande partie de
ce9 530 000 000 $.
À mes interrogations sur ces questions, le président du
Conseil du trésor, lors de la commission parlementaire des
crédits, nous répondait que les ministres sectoriels seraient,
eux, en mesure de nous informer adéquatement sur l'ensemble des
questions que nous aurions à poser. On est obligés de constater
que l'information n'est jamais venue ou, à tout le moins, jamais de
façon satisfaisante. L'Opposition continue donc de s'interroger sur la
nature de ces éventuelles coupures de 530 000 000 $, mais beaucoup plus,
et vous le verrez dans quelques minutes, sur les orientations de ce
gouvernement en matière de grandes dépenses publiques. Il faut
bien comprendre que les crédits votés ne représentent pas
les véritables crédits affectés à chacun des
ministères, dans la mesure où il faudra bien un jour
étiqueter ces 530 000 000 $ d'une façon très
précise. Il est certain que plusieurs programmes seront affectés
à la baisse.
J'en conclus donc que l'on nous a demandé de voter sur des
enveloppes budgétaires dont on sait manifestement qu'elles sont
susceptibles d'être sérieusement affectées dans les mois
à venir, donc, qui ne représentaient pas véritablement la
situation des dépenses pour la prochaine année. Il nous faudra
être particulièrement vigilants pour surveiller l'évolution
des choses. Il va sans dire que la transparence n'est sûrement pas la
qualité première des documents budgétaires, - et cela a
été démontré par d'autres - non plus d'ailleurs que
celle du président du Conseil du trésor. Sur cet aspect
précis, l'Opposition entend faire plus que d'être è
l'affût d'éventuelles coupures annoncées les vendredis
après-midi du mois de juillet, comme on assiste d'ailleurs depuis des
mois régulièrement à une série de nominations. Tous
les vendredis, on a droit à la brique de nominations politiques. Toutes
les semaines, vers la fin du vendredi après-midi, on reçoit
à nos bureaux les nominations politiques de ce gouvernement et elles
sont nombreuses.
L'Opposition entend demander, de façon périodique, au
président du Conseil du trésor un état
détaillé des programmes affectés par ces rationalisations
diverses de 530 000 000 $. Cette information sera demandée par le biais
d'une question écrite au feuilleton. Je veillerai personnellement
à ce que les réponses soient claires, complètes et
précises.
Déjà, ces seules constatations suf- firaient à
elles seules a justifier la présente interpellation, mais de
façon plus large, parce que l'interpellation est une occasion
d'élargir le débat au niveau des grandes orientations.
L'étude des crédits a mis en relief un aspect inquiétant
du présent gouvernement. Nous, nous avons appelé cela la
réflexion sociopolitique sur le rôle et les priorités de
l'État. Cela repose, pour ce qu'on a pu en observer, en très
grande partie, pour ne pas dire presque uniquement, sur la seule initiative du
président du Conseil du trésor et du premier ministre.
Il est évident que cette année ta détermination des
crédits budgétaires de chacun des ministères n'a fait
l'objet d'aucune concertation sérieuse avec les différents
ministres sectoriels. Le président du Conseil du trésor a
fixé des objectifs comptables et, en conséquence, a envoyé
la facture à ses collègues. Ceux-ci n'ont manifestement pas eu
l'occasion de faire valoir leurs priorités ou celles des citoyens dans
cette opération mécanique.
Donc, le principal responsable de la réflexion sociopolitique au
gouvernement, c'est le président du Conseil, du trésor et sa
réflexion, d'après nous, est beaucoup plus comptable que
sociopolitique. Nous entendons savoir quel processus décisionnel le
président du Conseil du trésor a privilégié dans la
détermination des crédits 1986-1987, quels sont les principes qui
ont guidé sa réflexion, è l'exclusion de celui ayant trait
à l'équilibre budgétaire è moyen terme à
tout prix.
L'Opposition entend également connaître quel sera le sens
de sa démarche d'ici les prochains mois. Il est important de
connaître comment se prennent, dans ce gouvernement, les décisions
qui affectent ou qui affecteront l'ensemble des citoyens du Québec.
Voilà donc le contexte dans lequel se situe l'interpellation de ce
matin. À cet égard, d'ailleurs, certaines déclarations du
président du Conseil du trésor lèvent le voile sur sa
réflexion.
Par exemple, le 16 avril dernier, devant les membres de l'Association
canadienne des conseillers en administration, il indiquait que le comité
des sages sur l'organisation gouvernementale, comité qu'il
préside d'ailleurs, est d'avis que des changements importants devraient
être apportés au cadre de gestion des réseaux
décentralisés, c'est-à-dire les réseaux de
l'éducation, de la santé et des services sociaux, que nous
toucherons davantage ce matin, pour obtenir un meilleur équilibre entre
l'offre de services et une demande qui s'exprime actuellement sans aucune autre
considération des prix et des coûts.
Il reprenait ce commentaire dans son document du 23 mars sur les
crédits budgétaires. Le 7 mai dernier, cette fois, devant les
membres de la Fondation hospitalière de Verdun, il indiquait que non
seulement au Québec, mais également dans d'autres
provinces canadiennes, on s'interroge sur la nature des services qu'il faut
dorénavant financer. Il existe des services de santé de
première ligne et certains services dits "accessoires". Tous les besoins
ne sont pas des besoins fondamentaux, disait-il. Incontestablement, le
président du Conseil du trésor soulève subrepticement des
questions étroitement reliées à l'accessibilité,
l'universalité ou la gratuité de plusieurs services actuellement
fournis par l'État.
Voilà bien le genre de questions qui doivent
nécessairement faire l'objet de débats largement publics. L'on ne
peut permettre que des décisions sur ces questions se prennent
derrière des portes closes, derrière des rideaux sans que
personne n'ait pu faire connaître son point de vue avant le fait
accompli. On ne pourra pas accepter, M. le Président, d'une façon
inconsidérée que des énoncés sur les grandes
orientations sociales, éducatives ou autres d'un État
québécois puissent se prendre uniquement par le président
du Conseil du trésor sur la base de préoccupations comptables. Un
gouvernement a le droit de modifier ses orientations. Nous, nous
prétendons que ce droit-là, il doit l'exercer cependant à
la lumière, au vu et au su de tout le monde, parce que ce sont des
questions importantes.
Il y a également toute la question de la tarification. Compte
tenu de l'importance de la question de la tarification d'éventuels
services que le président du Conseil du trésor, lui-même, a
qualifié dans certains cas d'accessoires, d'autres de plus essentiels,
je ne vous cacherai pas, M. le Président, qu'une large part de
l'interpellation d'aujourd'hui portera sur le contrôle de
l'évolution des coûts en matière de santé et de
services sociaux, non seulement en termes d'équilibre budgétaire,
mais également en termes d'orientation gouvernementale. On n'a rien
contre cela, le contrôle de l'évolution des coûts en
matière de santé et de services sociaux, mais on veut savoir
comment, on veut savoir, en termes d'orientation, quelles seront les
clientèles les plus affectées et on voudrait avoir le plus
d'éclairage possible et la vérité sur les choses
concernant l'évolution de ces dossiers. C'est sur ces principaux
éléments que l'interpellation d'aujourd'hui portera.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député d'Abitibi-Ouest. M. le président du Conseil du
trésor.
Réponse du ministre M. Paul Gobeil
M. Gobeil: M. le Président, madame et messieurs les
députés membres de cette commission, il me fait plaisir
d'être ici ce matin à la demande de l'Opposition. J'ai
accepté avec plaisir de participer à la présente
séance de travail au cours de laquelle nous discuterons des grandes
orientations du Conseil du trésor dans le contrôle des
dépenses gouvernementales.
Dans un premier temps, permettez-moi de rappeler ce que chacun d'entre
vous sait probablement fort bien, soit que le Conseil du trésor exerce
des responsabilités à titre de comité ministériel
permanent du gouvernement et en vertu des pouvoirs qui lui sont
délégués par l'exécutif en matière de
préparation et de contrôle du budget de l'État.
Le Conseil du trésor exerce, bien sûr, un rôle de
conseiller auprès du gouvernement, comme le font également
d'autres comités ministériels. Mais comme son existence propre
est prévue dans la Loi sur l'administration financière, son
autorité est particulière et l'avis qu'il doit émettre sur
tous les projets de loi ou de règlements, de même que sur les
politiques ou interventions spécifiques qui sont susceptibles de
comporter des implications administratives et financières, porte
évidemment à conséquence.
Vous savez également qu'en vertu de la loi, le Conseil du
trésor est chargé de préparer les prévisions
budgétaires du gouvernement et qu'il est également responsable de
contrôler l'exécution du budget.
Le contrôle de l'exécution du budget s'exerce parfois de
façon ad hoc sur certaines dépenses ou sur certains types de
contrôle de subventions. Mais l'évolution des dernières
années a amené le Conseil du trésor à un
contrôle beaucoup plus axé sur les grands ensembles. C'est ainsi,
par exemple, que la plupart des ministères voient leur programme de
subventions contrôlé par le biais de programmations
budgétaires. Lorsqu'un ministère fait approuver sa programmation,
en début de l'année, par le Conseil du trésor, il peut par
la suite procéder au versement de ses subventions sans l'intervention du
Conseil du trésor et ce, peu importe le montant de la subvention,
à condition qu'il respecte la ventilation des montants et les normes de
subventions que comporte sa programmation budgétaire.
Le Conseil du trésor exerce également des
responsabilités concernant les politiques administratives devant
être adoptées par le gouvernement. Ces politiques et leurs
règlements concernent l'octroi de divers types de contrats et de
subventions. Le Conseil du trésor émet aussi des directives ou
procède à l'énoncé de politiques ou d'orientations.
Les premières lient les ministères, les secondes servent à
guider leur action.
Enfin, le Conseil du trésor exerce des responsabilités
dans le domaine des relations du travail, puisque d'une part il émet les
mandats concernant les grands réseaux
publics et d'autre part il est responsable de la négociation des
conditions de travail relatives à la fonction publique.
Si j'ai jugé utile de rappeler brièvement ces rôles
et ces responsabilités du Conseil du trésor, c'est pour pouvoir,
dans un deuxième temps, indiquer aux membres de l'Assemblée
nationale ici présents que le Conseil du trésor ne remplace pas
et ne supplée pas à chacun des ministères sectoriels,
lesquels détiennent des pouvoirs et exercent des responsabilités
importantes en vertu notamment des lois constitutives des ministères et
des organimes.
Je voudrais vous dire très clairement que le président du
Conseil du trésor ne saurait intervenir en profondeur et à la
place de ses collègues responsables de ministères sectoriels sur
les questions qui relèvent de leur compétence propre et de leur
expertise. Donc, il faudrait bien distinguer entre les opinions que j'ai pu
émettre au cours des dernières semaines et les décisions
gouvernementales qui auraient un tout autre poids, évidemment. Au cours
des échanges qui suivront, dans tous les cas où des questions
trop précises relevant du champ de compétence de mes
collègues me seraient posées, vous ne m'en voudrez pas de vous
référer à eux pour de plus amples informations.
Cela étant dit, comme j'ai émis un certain nombre
d'opinions au cours des dernières semaines, je me ferai un plaisir de
préciser ma pensée et de pousser un peu plus loin chaque fois que
cela sera possible au cours des échanges de ce matin. Dans certains cas,
il s'agit d'orientations gouvernementales que j'ai rappelées, comme il
se devait. Certaines de ces opinions, je les ai émises notamment il y a
quelques semaines, au cours d'une allocution que j'ai prononcée devant
l'Association canadienne des conseillers en administration et auxquelles a fait
référence le député d'Abitibi-Ouest. Un certain
nombre de phrases ont été citées hors contexte, comme les
a citées aussi le député d'Abitibi-Ouest.
Permettez-moi de vous rappeler ce que je disais alors concernant le
rôle du gouvernement. En soulignant quelques grands défis qui nous
confrontent actuellement, je m'exprimais comme suit: Ces défis ont trait
à la nouvelle relation à établir entre la population et le
gouvernement. Le temps est venu de s'expliquer clairement sur ce que le
gouvernement doit faire, mais aussi sur ce qu'il ne doit pas faire. Le
gouvernement doit cesser de laisser croire aux citoyens que les fonds dont il
dispose sont illimités. Le gouvernement doit cesser de laisser croire
qu'il est là pour gérer tous les désirs, toutes les
aspirations, tous les besoins. Le gouvernement doit cesser d'agir comme s'il
était le seul gestionnaire, le seul grand administrateur. Le
gouvernement doit cesser d'envahir tous les champs et tous les domaines. Il
doit cesser de gérer è la fois des pentes de ski, des zoos, des
écoles, des centres de recherche et quoi d'autre! Le gouvernement doit
cesser de se donner des moyens administratifs et des services toujours plus
gros, toujours plus tentaculaires. Le gouvernement doit cesser de croire et
d'affirmer qu'il doit fournir, dans toutes les régions, à tous
les citoyens, toute la gamme possible de services publics.
Je pourrais continuer longuement dans cette veine. Mais, permettez-moi
de vous mentionner plutôt ce que le gouvernement doit faire. Le
gouvernement doit occuper une place très importante dans les domaines de
la culture, de la santé et de l'éducation. Ce qui ne veut pas
dire qu'il doit financer tous les niveaux de services dans ces
différents domaines. Là, comme ailleurs, il existe des services
de base, des services indispensables dont doivent bénéficier tous
les citoyens, quelle que soit leur condition particulière, mais il n'est
pas vrai d'affirmer que l'État doit toujours et toujours payer. Il y a
une différence importante, par exemple, entre l'enseignement obligatoire
et des sessions de cours de perfectionnement, entre les services de
santé de première ligne et certains services accessoires.
Quand je mentionne les services de santé de première
ligne, ceci veut dire, évidemment, les services essentiels, les services
de santé de base. Je pourrais étendre ces réflexions
à bien d'autres domaines, par exemple aux transports, aux loisirs, au
tourisme, aux communications, etc.
Là où l'intervention du gouvernement est moins
indispensable - quoi qu'on en dise parfois - c'est dans le domaine commercial.
Bien sûr, le courant actuel est très fort selon lequel les
gouvernements doivent privilégier de telles activités. Je vous
dirai que, tout en étant sympathique à cette idée, le
gouvernement est un peu méfiant quant à son application pratique.
Pour moi, le commerce, l'industrie, le commerce extérieur, les
activités économiques doivent prendre appui d'abord sur le
secteur privé. C'est ce secteur qui en est le moteur. Je ne reconnais au
gouvernement ni à ses bureaucraties la capacité d'occuper une
partie trop large de ce champ. Je me méfie des bonnes intentions du
gouvernement auxquelles on peut appliquer le slogan bien connu: Nous voulons
votre bien et nous l'aurons.
Je dirai enfin qu'il appartient au gouvernement de protéger
l'intégrité du territoire québécois et d'assurer
avec force la planification des grands circuits routiers, la qualité de
l'environnement et la cohésion des actions visant au
développement industriel. Toutes ces actions forment un peu le corps de
notre activité politique. Mais, au-delà de ce corps, on doit
retrouver une
âme à cette action. Cette âme s'exprime par les
convictions suivantes: notre gestion pour les prochaines années doit
être empreinte de sobriété et de rigueur. Nous devons
résister à la démangeaison de faire notre marque en
ouvrant de nouveaux dossiers sur tous les fronts. Nous ne devons pas avoir peur
de stopper ou de modérer, s'il le faut, certains projets
extrêmement coûteux. Nous devons miser avec détermination
sur les cerveaux, sur les ressources humaines et, pour ce faire, nous devons
nous entêter à créer des emplois, de vrais emplois.
Nous devons prendre toutes les dispositions pour favoriser la croissance
économique. Pour ce faire, inutile de vous dire qu'il nous faut bloquer
la voie à l'augmentation du fardeau fiscal du Québec qui est
toujours supérieur à celui de l'Ontario. Nous devons
procéder à une cure d'amaigrissement des secteurs public et
parapublic. Il s'y cache dans tous les coins et recoins un nombre incalculable
d'organismes qui ont tous été créés pour de bonnes
causes, mais qui font maintenant souvent double emploi, tout en maintenant
artificiellement des services devenus inutiles et trop dispendieux.
Si j'ai rappelé un peu longuement mes déclarations du 16
avril, c'est pour bien faire comprendre qu'il s'agit là de l'expression
d'une certaine conception du rôle de l'État. Cette conception
passe par un nouveau partage et par la certitude que des partenaires nouveaux
sont disponibles et prêts à partager avec le gouvernement des
responsabilités de développement et même parfois à
les prendre carrément en charge. Cette affirmation n'a pas pour effet de
prôner le désengagement total de l'État, pas plus qu'elle
n'a pour effet de maintenir une présence trop envahissante. L'ancien
président de la France, Laurent Fabius, n'écrivait-il pas dans
son livre "Le Coeur du futur", en parlant de la redécouverte de l'esprit
d'initiative et je cite: "Les Français ont beaucoup, et heureusement,
évolué sur ce point pour rassembler leurs forces autour de
l'entreprise. L'entreprise est devenue légitime. Entreprendre,
réussir et faire des profits sont devenus des valeurs positives. Les
Français comprennent que ces profits sont une mesure de succès et
que, s'ils sont utilisés à investir et à faire de la
recherche, ils entraîneront la création de richesses et
d'emplois.
Autant que je sache, M. Laurent Fabius n'était pas
président d'un gouvernement d'idéologie libérale.
Il est sûr que le rôle de l'Opposition est de poser des
questions et je suis prêt à répondre à ces
questions. Devant des affirmations de non transparence, je dois...
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor, je dois respecter votre temps de parole comme je dois
respecter celui des membres de l'Opposition. Votre temps de parole,
actuellement, est terminé. Par contre, je suis dans l'obligation, en
vertu des articles 300 et 301 de céder la parole au député
de l'Opposition. Vous pourrez quand même reprendre votre droit de parole
après que le député de l'Opposition aura terminé
son intervention. Vous aurez cinq minutes pour compléter votre sujet. M.
le député d'Abitibi-Ouest, s'il vous plaît.
Argumentation M. François Gendron
M. Gendron: Oui. Je remercie le président du Conseil du
trésor de nous avoir, pour la nième fois, indiqué les
responsabilités administratives, en termes de contrôle des
finances publiques, en termes de pouvoir sur les éléments
à portée financière, du Conseil du trésor. Ce sont
des choses qu'on a eu l'occasion d'entendre puisqu'il a dit avec franchise -
comme il le fait d'habitude -reproduire un peu le discours qu'il avait
prononcé au Club optimiste de Bromont. On avait déjà pris
connaissance de ces informations. Il nous a également indiqué que
le gouvernement ne peut pas être partout, ce dont on convient. Mais il a
été passablement volubile là-dessus en disant que le
gouvernement devrait cesser d'être ci, d'être ça. Cesser de
gérer plusieurs éléments. Il nous a également
indiqué qu'il s'est exprimé dernièrement sur plusieurs
orientations gouvernementales, mais qu'il s'agissait d'un point de vue
personnel. (10 h 30)
Je tiens à vous informer, M. le président du Conseil du
trésor, que, comme membres de l'Opposition, on ne peut pas savoir, quand
vous faites une déclaration, quel chapeau vous portez. On vous
perçoit comme étant un membre du gouvernement avec des
responsabilités ministérielles très importantes,
étant président d'une couple de comités de
réflexion, de sages, étant responsable de la gestion de la
dépense publique. Vous avez mis énormément d'insistance
comme gouvernement sur cette préoccupation que les colonnes
s'équilibrent le plus possible et vous avez même
énoncé publiquement une espèce de rêve
étatique à savoir qu'à la fin du mandat du Parti
libéral que, nous, on va souhaiter le plus court possible pour des
raisons évidentes chez la population, le déficit soit
complètement éteint. Qu'il n'y ait plus de déficit, que
votre véritable objectif est d'arriver à l'équilibre
complet.
Vous avez également, parce qu'il faut être objectif,
indiqué que le gouvernement doit prendre une place importante dans le
domaine de la culture, de la santé, des
affaires sociales et que pour le reste, en gros, il fallait encore
passer par une cure importante d'amaigrissement. Vous avez également
mentionné qu'il ne faut pas ouvrir des dossiers sur tous les- fronts.
Puisque, là, nous sommes dans la mécanique de l'interpellation,
mais d'une façon plus précise, puisque vous avez indiqué
qu'à des questions vous êtes en mesure de répondre, c'est
justement ce qu'on va faire dans quelques minutes. Mais au niveau des
principes, je voudrais vous rappeler que c'est un peu cela que vous avez
indiqué dans les diverses déclarations que vous avez faites, mais
jamais dans la perspective de nous donner les précisions qui s'imposent
concernant la place réelle que l'État québécois
doit jouer dans cette capacité d'infléchir une relance
économique, cette capacité de créer un nouveau dynamisme
économique qui ferait que le niveau de l'emploi augmenterait
considérablement. D'une façon très précise, ce que
je voudrais vous demander... M. le ministre et président du Conseil du
trésor, vous avez semblé donner comme orientation
générale qu'il était important pour le Québec
d'enrayer les difficultés de l'économie causées par deux
problèmes spécifiques: le sous-emploi et les investissements
insuffisants, de manière générale. Par contre, quand vous
vous exprimez sur la nécessité de freiner la croissance des
dépenses des programmes gouvernementaux, pour lesquelles d'ailleurs vous
allez recevoir prochainement, au début de mai, le rapport final de votre
comité, vous dites beaucoup de choses sur ce que l'État ne doit
plus faire. Durant les prochaines cinq minutes, j'aimerais vous entendre, comme
président du Conseil du trésor, sur les mesures précises
et concrètes que vous offrez à l'Etat québécois
pour effectivement relancer l'économie, relancer l'emploi et faire que,
dorénavant, il se fasse plus d'investissements au Québec afin
qu'ils deviennent plus suffisants et non pas insuffisants comme vous l'avez
mentionné. Dans ce sens, j'aimerais que vous puissiez nous indiquer un
peu plus vos préoccupations concrètes et, également, les
mesures spécifiques contenues aux crédits budgétaires pour
que l'emploi soit augmenté. Je n'ai rien vu dans les crédits qui
va faciliter l'augmentation de l'emploi si ce ne sont que les
équilibres, de même que 'la question d'investissements majeurs.
Dans quel créneau allez-vous aller et sur quels nouveaux fronts
allez-vous ouvrir tout en convenant qu'il n'y a pas lieu d'ouvrir sur tous les
fronts? Pouvez-vous m'identifier une couple de fronts que vous allez
privilégier comme président du Conseil du trésor dans les
prochaines années?
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député d'Abitibi-Ouest. M. le président du Conseil du
trésor. M. Paul Gobeil
M. Gobeil: M. le Président, lors de mon
énoncé initial, j'ai mentionné quelques principes. Je
pense que l'un de ceux-là entre dans le cadre de la question du
député d'Abitibi-Ouest. Je dois quand même lui rappeler, en
ce qui concerne le sous-emploi et le sous-investissement, que nous avons fait
face, le 2 décembre, après l'élection, è un
héritage peu enviable. Le portrait nous laissait voir une partie d'une
situation déficitaire avant l'élection et pour l'exercice
1986-1987. Lors de notre arrivée au pouvoir, nous avons pris conscience
de plus grandes mesures correctives à apporter. C'est ce que nous nous
sommes appliqués à faire dans les premières semaines de
notre mandat.
On ne peut aborder le sujet des finances publiques du Québec sans
d'abord examiner son économie. On sait que l'économie du
Québec est moderne, elle est diversifiée et fortement
industrialisée. Cependant, sa performance économique a
été nettement inférieure à son potentiel au cours
des dernières années. On retrouve principalement deux
problèmes: d'abord le sous-emploi et ensuite le sous-investissement.
Permettez-moi de rappeler que le taux de chômage au Québec
a crû de 7,2 % qu'il était pendant la période de 1971
à 1975 à 9,9 % pendant la période de 1976 à 1980 et
à 12,5 % dans la période de 1981 à 1985. Ce taux a
toujours été supérieur au taux de chômage de
l'Ontario et de la moyenne canadienne. Une des causes de ce sous-emploi est le
sous-investissement. Le taux d'investissement au Québec est d'environ 17
% du produit intérieur brut, comparativement à 20 % et 22 % pour
les pay3 de l'OCDE et à 25 % à 30 % pour les pays à
croissance rapide comme, par exemple, le Japon.
En dollars canadiens, l'investissement par personne en 1984 était
aux Etats-Unis de 3490 $, au Canada, de 3125 $, en Ontario, de 2925 $ et au
Québec, de 2500 $ seulement. Un autre fait qui nous inquiète est
la chute du taux d'investissement privé. Alors qu'il représentait
9,9 % du produit intérieur brut en 1975, il ne représentait plus
que 7,7 % en 1985. On peut identifier certains éléments qui ont
contribué à cette chute comme, par exemple, l'insuffisance de la
demande, l'exode des sièges sociaux, la capitalisation inadéquate
des entreprises, des taux d'intérêt élevés, une
fiscalité non concurrentielle et une réglementation
gouvernementale que je qualifierais parfois et souvent de contraignante. En
plus, on a dû faire face à un alourdissement sans
précédent de la dette gouvernementale au Québec au cours
des dernières années. Que l'on se souvienne de quelques
données que le
ministre des Finances du Québec a publiées le 5 mars
dernier dans son document: "Les finances publiques du Québec, l'urgence
d'un redressement".
Comme la dette nette a quintuplé en neuf ans, elle était
de 5 000 000 000 $ en 1977, elle est maintenant supérieure à 28
000 000 000 $ en 1986. Le déficit annuel qui s'est stabilisé
à peu près à 3 000 000 000 $ au cours des dernières
années aurait été de 4 500 000 000 $ si on n'avait pas
apporté les correctifs nécessaires dans les dernières
semaines. Évidemment, il y a eu un gonflement du Service de la dette:
4,2 % des revenus budgétaires en 1974-1975; 13,5 % en 1985-1986. Comme
l'ont mentionné plusieurs fois le ministre des Finances et le premier
ministre, on a au cours des dernières années emprunté pour
financer les dépenses courantes. Depuis 1978-1979, le solde des
dépenses courantes, soit la différence entre les revenus
budgétaires et les dépenses, est négatif. L'accroissement
de la dette nette a aussi eu comme conséquence la menace d'une baisse de
la cote des crédits si nous n'avions pas apporté les correctifs
nécessaires.
Un peu plus tard, j'aurai l'occasion de revenir sur quelques
commentaires concernant les actions globales qu'entend prendre le gouvernement
pour augmenter l'investissement et diminuer le sous-emploi. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
président du Conseil du trésor. M. le député de
Saint-Louis.
M. Jacques Chagnon
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Dans l'exposé
que faisait le député d'Abitibi-Ouest à l'égard des
crédits, il est intéressant de noter que certaines expressions
"claires-obscures", semble-t-il, desquelles n'a pas jailli la lumière
dans son esprit, laissaient croire et laissaient entendre que le Conseil du
trésor, et particulièrement son président, aurait agi de
façon autoritaire pour... Si on allait un peu plus loin dans le
raisonnement du député d'Abitibi-Ouest, on pourrait quasiment
parler de dictature auprès de ses collègues ministres pour
forger, orienter et organiser l'ensemble des crédits de chacun des
ministères. Or, évidemment, ce n'est pas le cas, pour plusieurs
raisons. D'une part, chaque ministre est responsable des crédits et des
dépenses à l'intérieur de son ministère. Il a
l'entière responsabilité de faire en sorte que les projets que
son ministère défend et organise puissent se réaliser. Le
président du Conseil du trésor a fait mention, et nous l'avons
cité en commission parlementaire, particulièrement à la
commission parlementaire où on étudiait les crédits du
Conseil du trésor, de la façon dont ces crédits avaient
été organisés avec chacun des ministères. Chaque
ministre a été invité au Conseil du trésor à
faire valoir de quel niveau de compressions il pouvait avoir besoin, avec quel
niveau de compressions il pouvait vivre dans son ministère, pour,
premièrement, l'organisation du ministère et pour l'organisation
aussi des organismes parapublics qui relèvent de chacun des
ministères.
L'opération était délicate. L'opération
était difficile, mais elle relevait d'une révélation
qu'avait faite le ministre des Finances le 5 mars dernier au moment où,
dans la présentation de son document, "L'urgence d'un redressement",
parlant des finances publiques, il apprenait au Québec que nous nous
retrouvions dans une situation où nous avions un déficit
supplémentaire de 1 500 000 000 $ par rapport à celui qui
était appréhendé: 1 500 000 000 $ de déficit de
plus que les 3 000 000 000 $ annoncés par le ministre des Finances
précédent. Il est évident que dans une situation comme
celle-là, le ministre des Finances, le président du Conseil du
trésor et l'ensemble des membres du cabinet n'avaient aucun autre choix
que de diminuer les dépenses de fonctionnement pour 1985-1986 et
évidemment aussi pour 1986-1987, freiner ce rythme
d'accélération des dépenses publiques.
Effectivement, c'est l'organisation de ce processus qui s'est
établie pour, comme je le disais tout à l'heure, avec chacun des
ministres, permettre de découvrir le niveau de compressions que chaque
ministère pourrait absorber sans mettre en doute soit des acquis
sociaux, soit des programmes qui relevaient du caractère fondamental de
certains ministères. Je pense, entre autres, aux Affaires sociales ou
à l'Éducation.
Mais plus fondamentalement encore, au Conseil du trésor, des
principes de gestion ont été mis sur pied. Le président en
parlait tout à l'heure lorsqu'il disait: Notre gestion, pour les
prochaines années, doit être empreinte de sobriété
et de rigueur. C'est comme une évidence, mais une évidence qui
n'est pas toujours apparue clairement au cours des années
précédentes* Pensons uniquement au fait que l'an dernier on avait
budgété, dans le domaine de l'assainissement des eaux, 450 000
000 $ et qu'on s'est retrouvé, en fin d'année financière,
avec au-delà de 680 000 000 $ de dépensés ou
d'engagés.
On a dit aussi: Nous devons résister à la
démangeaison de faire notre marque en ouvrant de nouveaux dossiers sur
tous les fronts. Les gens se rappelleront la profusion de projets arrivant avec
son et lumière à Montréal, le parc agroalimentaire, la
salle de l'OSM, etc., sans étude préalable. On a dit enfin: II ne
faut pas avoir peur de stopper ou de modérer certains projets
excessivement
coûteux. Pensons uniquement aux nationalisations du type de
l'Asbestos Corporation, du type de Quebecair. Ce sont des projets dans lesquels
nous n'avons pas l'intention de nous embarquer.
Il faut miser, on l'a dit aussi, avec détermination sur les
cerveaux québécois. Il nous faut mettre de l'avant, pour le
début de l'été, une politique de formation professionnelle
et éviter surtout de tomber dans le piège du gouvernement
précédent qui, dans les quatre dernières années de
son mandat, a créé 105 000 emplois, mais seulement 5000 emplois
permanents. Nous voulons faire en sorte que les emplois que nous
créerons soient davantage des emplois permanents pour l'avenir, pour
l'ensemble des jeunes Québécois et Québécoises,
pour l'ensemble des Québécois.
Le Président (M. Trudel): Merci, M. le
député de Saint-Louis. La parole est maintenant à M. le
député de Gouin.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Merci, M. le Président. Je dirai, dans un
premier temps, que nous sommes heureux d'entendre de la bouche et du ministre
président du Conseil du trésor et de son adjoint parlementaire
que les compressions budgétaires de chacun des ministères ont
été acceptées pleinement par l'ensemble des ministres
sectoriels. Disons donc, pour l'instant, que cela va au moins mettre fin
à ce jeu de ping-pong qui a existé en sourdine dans certaines
rencontres où des ministres sectoriels disaient: Vous savez, ce n'est
pas moi, c'est le président du Conseil du trésor. Nous sommes
donc heureux de la réponse que vient de nous donner le président
du Conseil du trésor et même son adjoint parlementaire. (10 h
45)
Deuxièmement, M. le Président, je voudrais reprendre la
première intervention du président du Conseil du trésor
qui dit: "Comme président du Conseil du trésor, comme
gouvernement, nous voulons établir une nouvelle relation entre la
population du Québec et le gouvernement. Nous voulons comme gouvernement
nous expliquer devant la population.
M. le Président, ce matin, nous voulons offrir une très
bonne et très belle opportunité au président du Conseil du
trésor de commencer à établir véritablement, sur
des bases solides, cette nouvelle orientation d'une relation plus suivie, plus
soutenue entre la population et le gouvernement, donc de s'expliquer.
Dans le domaine de la santé et des services sociaux, on sait que
le président du Conseil du trésor a été très
voiubiîe. Il semble avoir des idées très
arrêtées, des orientations bien définies. Je reprendrai un
certain nombre de ces interventions sur lesquelles je le questionnerai un peu
plus tard.
Dans un premier temps, nous avons appris que le président du
Conseil du trésor s'interroge, et je le cite: Gn s'interroge au
gouvernement du Québec sur la nature des services qu'il faut
dorénavant financer -donc, dorénavant, on va les restreindre. Il
existe des services de santé de première ligne et certains
services accessoires - tous les besoins ne sont pas des droits
fondamentaux.
Deuxièmement, le président du Conseil du trésor
nous dit: Nous n'envisageons d'aucune façon de restreindre
l'universalité des programmes pour l'instant. De la même
façon, il nous dit: Nous n'avons pas l'intention d'instaurer de ticket
modérateur pour l'instant, pour le moment. Plus profondément, le
président du Conseil du trésor nous dit que son comité de
sages est d'avis que des changements importants devraient être
apportés au chapitre de la santé et des services sociaux,
notamment, en repensant leur mode de financement pour obtenir un meilleur
équilibre entre l'offre de services et une demande qui s'exprime
actuellement sans aucune considération des prix et des coûts.
Lorsqu'on essaie de voir à quoi le président du Conseil du
trésor fait référence quand il parle de
rééquilibrer l'offre et la demande, il nous dit: Non, ce n'est
pas sur l'offre que je veux intervenir, c'est sur la demande. Donc, sur la
consommation par la population des services de santé et des services
sociaux. Le président du Conseil du trésor veut freiner, limiter,
comprimer la demande en services de santé et services sociaux. Celui-ci
d'ailleurs nous dit qu'il veut imposer des tarifs sur certains services de
santé et services sociaux.
Quand on prend la définition que le ministre des Finances donnait
dans son propre budget, le 1er mai dernier, de la tarification, il nous dit,
d'une part, que c'est pour aller chercher des revenus additionnels et
deuxièmement, que c'est pour freiner la demande de services. M. le
Président, c'est inquiétant. Le ministre va plus loin, il nous
dit: II faut mettre fin aux abus que le gouvernement n'a pas réussi
à contrôler jusqu'à maintenant dans le domaine de la
santé et des services sociaux. Il faut mettre fin au magasinage d'un
médecin à l'autre. Il faut mettre fin au magasinage d'un centre
hospitalier à l'autre par les Québécois et les
Québécoises. Comme si là, il y avait, M. le
Président, des sommes énormes en abus de services de santé
et de services sociaux. Le président du Conseil du trésor ajoute:
II faut faire la différence entre des services de première ligne
et certains services accessoires, par exemple, toutes les prothèses ne
sont pas indispensables, tous les soins -
là, on ne parle plus de services - tous les soins ne sont pas des
droits fondamentaux.
J'ajoute, M. le Président, que le président du Conseil du
trésor nous dit: Le gouvernement doit cesser de croire et d'affirmer
qu'il doit fournir dans toutes les régions, à tous les citoyens,
toute la gamme des services publics. Comme s'il y avait deux, trois sortes de
citoyens et de besoins dans les différentes régions du
Québec.
M. le Président, devant cela, nous sommes inquiets. Nous voulons
savoir où le président du Conseil du trésor s'en va en
matière de santé et de services sociaux et nous voulons savoir,
puisqu'il a affirmé qu'il voulait maintenir pour le moment
l'universalité des services, nous aimerions connaître quelle est
sa définition à lui, personnelle et comme président du
Conseil du trésor, de l'universalité des services de santé
et des services sociaux au Québec.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Gouin. La parole est maintenant au président du
Conseil du trésor.
M. Paul GobeU
M. Gobeil: M. le Président, j'ai le goût de dire au
député de Gouin, une phrase et d'arrêter là, mais je
continuerai après ma phrase. Je vais lui dire: II faut apprendre
à vivre selon ses moyens. Je pense que c'est fondamental.
M. le Président, il est bien connu qu'on avait, qu'on faisait
face à un dépassement budgétaire, à un
déficit qui s'en allait vers 4 500 000 000 $ pour l'exercice 1986-1987.
Nous avons dû comme gouvernement faire des compressions par rapport aux
demandes des divers ministères qui étaient sur la table du
Conseil du trésor au moment de notre arrivée au pouvoir, le 2
décembre. Nous n'avions pas le choix. On l'a dit, on l'a expliqué
et on l'a redit. Je ne crois pas que, ce matin, il soit nécessaire de le
redire et de l'expliquer une autre fois. Nous avons dû faire des choix
budgétaires, appliquer des compressions sur les demandes de façon
à limiter le déficit pour l'année 1986-1987 à un
niveau acceptable. Chacun des ministres, chacun des ministères a pris
ses responsabilités et a soumis au Conseil du trésor des
éléments de compressions par rapport aux demandes. On vient me
dire, ce matin, qu'on avait entendu que les compressions n'étaient pas
pleinement acceptées. Je regrette de dire au député de
Gouin que je n'ai jamais vu de déclaration en ce sens. Je suis convaincu
que mes collègues ministres ont assez de courage et de volonté
pour suivre l'orientation de ce gouvernement et travailler ensemble à
l'assainissement de nos finances publiques.
Évidemment, il n'est jamais facile de réduire des
dépenses. Je pense que les députés de l'Opposition sont en
mesure de comprendre très bien cela. Il faut faire des choix. Nous avons
fait nos choix avec la collaboration de tous les ministères, mais de
façon à toujours protéger les acquis sociaux, et nous les
avons même bonifiés. Permettez-moi de vous mentionner quelques
chiffres entre l'écart des crédits de 1986-1987 et les
dépenses probables de 1985-1986. À la santé et à la
réadaptation sociale, nous avons remis dans le système 422 000
000 $; à l'éducation, 260 000 000 $; à la
sécurité du revenu, 83 000 000 $; à la main-d'oeuvre, 69
000 000 $. Ces bonifications identifient bien nos préoccupations
sociales, y inclus même un montant de 204 000 000 $ que nous avons remis
dans les crédits de 1986-1987 pour de nouveaux
développements.
Nous sommes conscients que nous devons protéger les acquis
sociaux; nous le faisons et nous l'avons fait. Nous sommes conscients aussi de
l'évolution des coûts dans la majorité des
ministères. C'est pour cela que malgré les compressions que nous
avons dû effectuer, les dépenses probables de 1986-1987 par
rapport aux dépenses probables de 1985-1986 seront supérieures de
1 137 000 000 $ représentant une augmentation estimée à
4,1 %, y compris le service de la dette et les régimes de retraite qui,
principalement, en ce qui concerne le service de la dette, sont très
dispendieux en raison des déficits qui ont été
acceptés par le gouvernement précédent principalement au
cours des cinq dernières années. Si on exclut le service de la
dette et le coût des régimes de retraite, l'augmentation est de
2,8 %, soit moins que l'inflation. Nous avons fait ce que nous devions faire et
nous avons pris nos responsabilités. Je suis convaincu que la
majorité des citoyens et des citoyennes de cette belle province de
Québec sont en mesure de comprendre que cette situation ne pouvait
continuer à exister et qu'ils nous appuient dans les décisions
difficiles, je l'admets, que nous avons dû prendre. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député de Chauveau, s'il vous
plaît.
M. Rémy Poulin
M. Poulin: Merci, M. le Président. Vous connaissez les
problèmes auxquels nous faisons face, une augmentation de l'ordre de 1
500 000 000 $ du déficit qui découle d'une croissance trop rapide
des dépenses publiques depuis quelques années. Ces
dépenses ont atteint un niveau qui se situe au-delà des moyens du
gouvernement. Ce déséquilibre doit être corrigé et
notre gouvernement s'est engagé à le faire. La
croissance économique repose sur une réduction des
dépenses publiques dans l'économie. C'est pour cela que des
mesures rigoureuses ont été nécessaires. Je voudrais
rappeler que, grâce aux mesures déjà entreprises pour la
fin de l'année financière 1985-1986, le taux de croissance des
dépenses de l'État a ralenti énormément. En effet,
le produit intérieur brut se situait à 26,5 % en 1984-1985, celui
de 1985-1986 se situe maintenant à 26,1 %. En diminuant les
dépenses de 1 500 000 000 $ par rapport aux prévisions, le
Conseil du trésor a limité la hausse des dépenses à
4,1 %, soit 2 % de moins que prévu du produit intérieur brut.
Il ne faut pas oublier non plus que cet effort de rationalisation s'est
fait avec la collaboration de tous, de tous les ministres, même celle de
la députation ministérielle pour les gens de l'Opposition, qui
ont dû effectuer des compressions importantes réparties dans
l'ensemble des secteurs d'activité gouvernementale. Mais, nous n'avons
pas oublié de protéger l'essentiel des acquis sociaux qui nous
apparaissent fondamentaux. Le gouvernement les a même bonifiés en
leur attribuant des ressources financières supplémentaires. Je
trouve triste que le député de Lévis ne soit pas ici
aujourd'hui, parce que hier soir, j'ai eu le plaisir de l'écouter dans
un discours à l'emporte-pièce, où il nous accusait, nous
les députés de la région de Québec, de ne pas
protéger Radio-Québec dans la région. Je lui demande ce
qu'il a fait, lui, avec les coupures de 20 %; cela n'a-t-il pas attaqué
les régions? Les 100 000 000 $ qu'ils ont coupés dans les
affaires sociales, à les entendre parler, cela n'a pas nui aux
régions. Je pourrais dire au député de Lévis qu'on
n'a pas de leçon à recevoir de lui.
C'est ainsi que le domaine de la santé voit ses crédits
augmenter de 422 000 000 $; dans le domaine de l'éducation, un autre
secteur prioritaire. Le gouvernement a également consenti un effort
importants, c'est-à-dire des crédits supérieurs de 260 000
000 $ aux dépenses probables. Nous n'avons pas négligé non
plus le domaine de la sécurité du revenu et celui de la
main-d'oeuvre, lesquels bénéficient de sommes
supplémentaires. Certaines activités ont vu leur niveau
réduit par une révision des priorités gouvernementales.
Plusieurs projets n'apparaissant pas comme prioritaires pour l'instant, compte
tenu du contexte actuel des finances de l'État, ils sont reportés
à des dates ultérieures.
Aussi, certaines activités gouvernementales sont partiellement ou
complètement abolies. Toutes ces décisions ont été
prises en fonction des contraintes budgétaires sérieuses et en
respectant un ordre de priorités pour l'ensemble du gouvernement. Toutes
ces orientations, il ne faut pas l'oublier, sont dans le but d'assainir les
finances publiques qui sont, rappelons-le, l'héritage désastreux
laissé par l'ancien gouvernement.
Donc, il est évident pour nous tous que ce redressement de la
situation financière du gouvernement du Québec est une
nécessité. Mais, ce redressement ne, doit pas se faire n'importe
comment et il doit respecter un certain nombre d'engagements et de
priorités bien clairs et bien définis.
La rationalisation nécessaire et vigoureuse dans laquelle
s'engage le Conseil du trésor a été faite, je crois, dans
une perspective de vraie croissance économique, sans remettre en
question nos acquis dans le domaine de la santé, de la culture et de
l'éducation. Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci M. le
député de Chauveau. M. le député de Gouin, s'il
vous plaît.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Merci, M. le Président. D'abord, je dirai
que je suis heureux aussi d'un nouvel aveu, ce matin, de la part du
député de Chauveau qui parlait sûrement au nom de ses 98
collègues. Il a dit: Tous les députés libéraux sont
d'accord avec toutes les décisions budgétaires. On en prend bonne
note. On est heureux que les Québécois sachent que, maintenant,
vous êtes unanimes derrière les décisions
budgétaires qui ont été prises. On sera heureux de vous
voir faire du bureau de comté pour expliquer cela au monde.
Dans sa réplique, tantôt, à mon intervention, le
président du Conseil du trésor nous a dit - je résumerai
cela dans une phrase: Il faut apprendre à vivre selon ses moyens. Mais,
M. le député de Verdun, où étiez-vous en campagne
électorale quand le Parti québécois vous
répétait, tous les jours, après chaque engagement
rédigé, conçu et imprimé par votre petit ordinateur
Créatec: Vous allez trop loin, vous n'aurez pas les moyens de
réaliser de tels engagements, vous dépassez la limite du possible
pour l'État? Où étiez-vous, M. le président du
Conseil du trésor, quand le premier ministre essayait de faire accroire
au monde qu'il y avait, au début, une marge de manoeuvre de 600 000 000
$, de 400 000 000 $, alors que tout le monde, non seulement au Parti
québécois, mais tous les analystes financiers et politiques vous
disaient: C'est faux, il n'y a pas de marge de manoeuvre? Vous repasserez avec
votre "il faut vivre selon ses moyens". (11 heures)
C'était devant le peuple qu'il fallait le dire au monde.
J'imagine que vous étiez trop occupé à faire du
porte-à-porte pour vous faire élire. Vous auriez peut-être
dû commencer à assumer pleinement vos
responsabilités dès ce moment.
Le ministre nous dit: "Nous avons aussi protégé les acquis
sociaux". Est-ce que c'est protéger les acquis sociaux que de
désindexer les prestations d'aide sociale? Est-ce que c'est
protéger les acquis sociaux quand on coupe dans les soins dentaires pour
les enfants? Est-ce que c'est protéger les acquis sociaux quand un
ticket modérateur de 23 $ sera facturé aux parents pour une
deuxième visite chez un dentiste pour que des soins curatifs soient
apportés aux jeunes enfants québécois? Est-ce que c'est
protéger les acquis sociaux que de se mettre à tarifer des
services de santé et des services sociaux, comme vous le projetez?
Est-ce que c'est protéger les acquis sociaux quand on vient tenter de
mettre fin à l'universalité des programmes?
M. le Président, le ministre est beaucoup plus volubile devant
les clubs sociaux qu'il ne l'est en campagne électorale et ici, à
l'Assemblée nationale. Là où il doit rendre des comptes
sur son mandat.
Je répète mes questions. Le ministre nous dit qu'il faut
obtenir un meilleur équilibre entre l'offre de services et une demande
qui s'exprime actuellement sans aucune considération des coûts.
Lorsque Marc Laurendeau, à l'émission Téléservice
de Radio-Québec, lui dit: Mais vous ne pensez pas qu'il y a aussi des
administrateurs, les médecins, donc, ceux qui sont responsables de
l'offre de services qui génèrent des coûts importants? le
président du Conseil du trésor ' dit: Non non non non, il y a
peut-être là de petits abus, mais les gros abus, ce sont les
consommateurs, ce sont les citoyens qui consomment des services de santé
et des services sociaux. Je pourrais déposer le document et citer le mot
à mot de la réponse du ministre deux fois sur cela. Il dit: Ce
n'est pas sur l'offre qu'il faut intervenir, c'est sur la demande.
M. le Président, voici la question que je pose au ministre:
S'agit-il là de réflexions superficielles d'un comité de
sages qui parlent de choses qu'ils ne connaissent pas? S'agit-il là de
réflexions superficielles de gens qui discutent entre eux en prenant un
bon repas après une grosse journée de travail où ils font
toutes sortes de réflexions à haute voix sur lesquelles le
président du Conseil du trésor base ses affirmations?
Le président du Conseil du trésor, s'il allait
étudier ses dossiers, s'il était rigoureux dans ses
décisions, dans ses orientations quant à savoir s'il faut faire
porter le rééquilibrage plutôt sur l'offre que sur la
demande, verrait que toutes les grandes autorités
québécoises, canadiennes et nord-américaines en
régimes publics de santé et de services sociaux s'entendent pour
dire qu'il faut intervenir sur l'offre et non sur la demande.
Pas plus tard qu'à l'étude des crédits de la
Régie de l'assurance-maladie du Québec, cette année, M.
Mockle, qui est une des deux ou trois plus grandes autorités en
Amérique du Nord en la matière! nous disait que les abus
dénotés par son système très sophistiqué de
contrôle était è l'extrême limite de la marge.
Il disait même, dans son intervention de février dernier
devant les administrateurs des régimes publics, que c'était faire
fausse route que d'intervenir sur la demande, mais qu'il fallait intervenir sur
l'offre si on voulait rééquilibrer l'offre et la demande en
matière de santé et de services sociaux.
M. le Président, je répète mes questions au
ministre. Où étiez-vous quand il était temps de dire aux
Québécois qu'il fallait y aller selon nos moyens en pleine
campagne électorale? Quelle est votre définition de
l'universalité des programmes de santé et des services sociaux et
pourquoi voulez-vous faire porter vos interventions sur la demande plutôt
que sur l'offre?
Déposez-nous vos études qui vous amènent à
ces conclusions ou bien taisez-vous jusqu'à ce que vos réflexions
soient faites.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Gouin. M. le président du Conseil du
trésor.
M. Paul Gobeil
M. Gobeil: M. le Président, je ne me tairai pas, parce que
la population du Québec a le droit de savoir. Nous avons l'intention de
dire à la population du Québec ce qu'elle est en droit de savoir.
Quand le député de Gouin me demande où j'étais
pendant la campagne électorale, j'étais à faire une
campagne électorale à Verdun avec ce qu'avait bien voulu nous
révéler l'ancien gouvernement.
Mais, je le dis et je le redis, on ne nous a pas tout dit; on n'a pas
tout dit à la population. On trouve à la page 8 du document du 5
mars: "Les finances publiques du Québec, L'urgence d'un redressement"
à la deuxième colonneî "Révision de la fin mai 1985,
variation du déficit depuis le 23 avril, 1 262 000 000 $."
Une voix: Un mois!
M. Gobeil: Pourtant, le ministre des Finances de l'époque,
dans son budget du 23 avril, un mois avant que ces chiffres soient connus du
gouvernement, nous avait dit: Le déficit sera de 2 970 000 000 $.
Pourtant, un mois après, la prévision de déficit
était rendue - pour l'exercice 1986-1987 - à 4 232 000 000 $. En
novembre 1985 -l'élection avait lieu le 2 décembre 1985, quelques
semaines avant - le déficit connu du gouvernement était de 4 262
000 000 $.
Ce sont des chiffres du gouvernement. Pourquoi à la fin du mois
de mai, en juin ou en juillet jusqu'en septembre, jusqu'en octobre, jusqu'au 2
décembre l'ancien gouvernement n'a-t-il pas renseigné la
population sur ces chiffres? Où étiez-vous, M. le
député de Gouin? Où étiez-vous les autres
députés qui sont encore ici aujourd'hui membres de
l'Opposition?
Aujourd'hui, M. le député de Gouin m'a demandé:
Où étiez-vous M. le député de Verdun? Il ose me
dire de me taire. Lui s'est tu. Lui aurait dû, en tant que membre de ce
gouvernement, en tant que membre du Conseil exécutif, aviser la
population de cet état de fait, agir pour corriger cette situation. Non.
Et aujourd'hui il me demande de me taire? Non, M. le Président, je ne me
tairai pas parce que la population a le droit de savoir. C'est notre devoir
qu'elle sache et elle saura. Quand on dit qu'il n'y a pas de transparence,
c'est faux. Il y a de la transparence. Je pense bien que mes confrères
de l'Opposition comprendront qu'il y a aussi des temps et des lieux où
on ne peut pas, dans l'appareil gouvernemental, ouvrir toutes les
données. Il faut quand même protéger certaines choses. Les
deux membres de l'Opposition membres de cette commission, en face de moi, avec
leur expérience qui est plus grande que l'ensemble de
l'expérience des députés de ce côté-ci de la
Chambre, je pense qu'ils savent cela.
Je n'ai pas été élu député de Verdun
pour me taire. J'ai été élu député de Verdun
pour, premièrement, représenter mes concitoyens de Verdun;
deuxièmement, en tant que membre du Conseil exécutif,
représenter la population du Québec; troisièmement, en
tant que ministre délégué à l'Administration et
président du Conseil du trésor, m'assurer, premièrement,
que la gestion des finances publiques de ce gouvernement est bien faite. C'est
ce que j'ai l'intention de faire. Je consacrerai toutes mes énergies,
toutes mes capacités, toute mon intelligence à assainir les
finances publiques du Québec, avec les difficultés que cela
comporte. Je ferai face à ces difficultés dans le rôle qui
m'est dévolu avec l'appui de mes collègues ministres et
députés, que j'ai à 100 %. Je suis convaincu que chacun
appuie les députés et les ministres de ce gouvernement, appuie
l'action gouvernementale que nous avons entreprise depuis le début de
décembre, nous appuie dans nos organisations et je suis convaincu que
nos députés sont capables, ont l'intelligence voulue pour
expliquer à leurs concitoyens et concitoyennes, è leurs
commettants et commettantes de comté le but de ces compressions et le
pourquoi de ces compressions face à cette situation. Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. Mme la députée de Matane.
Mme Claire-Hélène Hovington
Mme Hovington: Oui. Je voudrais dire d'abord au
député de Gouin qu'il est vrai qu'en tant qu'équipe
libérale nous sommes à l'unanimité derrière le
ministre et derrière le budget. C'est ainsi qu'en tant que gouvernement
nous réussirons à assainir non seulement les finances publiques,
mais à assainir le climat de division et de chicane qui a
régné pendant neuf ans dans l'équipe du Parti
québécois. Je voudrais ici surtout, ce matin, faire un bref
rappel du rôle du Conseil du trésor. Le Conseil du trésor a
d'abord été créé en avril 1971 par la Loi sur
l'administration financière.
Le Conseil du trésor est un comité du Conseil
exécutif dont l'objectif premier est de planifier, contrôler,
évaluer l'allocation et l'utilisation des ressources humaines et
financières du gouvernement du Québec. J'aimerais m'attarder
surtout sur l'aspect des ressources humaines, sur le rôle du Conseil du
trésor en matière d'accès à
l'égalité. En vertu de la Loi sur la fonction publique, on sait
que le Conseil du trésor est chargé d'établir des
programmes d'accès à l'égalité pour les personnes
susceptibles d'être victimes de discrimination dans l'emploi, soit les
femmes, les personnes handicapées, les autochtones et les membres des
communautés culturelles.
En ce qui a trait aux femmes, M. le Président, on sait qu'elles
se retrouvent toujours dans une proportion appréciable dans la fonction
publique, mais qu'elles sont en nombre insuffisant au niveau des chefs
d'équipe, des cadres, de la gestion. Dans les emplois supérieurs,
permettez-moi de vous donner des exemples. Dans la catégorie
d'administrateurs 01, il y a 54 hommes pour 2 femmes; dans la catégorie
d'administrateurs 02, il y a 254 hommes pour 4 femmes et ainsi de suite; par
exemple, dans la catégorie 04, il y a 1060 hommes pour 69 femmes. Au
total, 2618 hommes pour 160 femmes.
J'aimerais entendre le président du Conseil du trésor nous
confirmer les réalisations du Conseil du trésor en matière
d'accès è l'égalité. Je sais que, dans la fonction
publique, il y a un programme touchant tous les groupes cibles. Mais la
difficulté rencontrée avait été d'identifier ces
groupes cibles, ce qui ne permettait pas de fixer des objectifs
spécifiques et de suivre de façon systématique
l'évolution de ces groupes cibles. Je sais que l'Office des ressources
humaines pilote actuellement un recensement qui sera complété
à l'été.
Il est sûr, M. le Président, qu'il sera plus difficile pour
le Conseil du trésor de privilégier l'accès à
l'égalité, s'il n'y a pas
de recrutement régulier de personnes. Mais ce dossier pourra
sûrement être actualisé dans un contexte de compressions des
effectifs. Les résultats ne seront sûrement pas les mêmes en
situation d'expansion, mais nous comptons sur le vieillissement de l'effectif
et les retraites qui en découleront viendront balancer un peu ce nombre
plus restreint de postes à combler. Mais il se fait encore du
recrutement. Depuis la coupure de 1600 postes annoncée à la
mi-décembre, il y a quand même 208 postes en deux mois qui ont
été comblés par les ministères et les organismes.
Il y a aussi le programme de relève féminine à la gestion,
le programme Formacadres et il faudra sûrement continuer à inciter
les différents ministères et organismes à recourir aux
membres des groupes cibles pour les emplois occasionnels.
Enfin, M. le Président, il appartient aux différents
ministères et organismes de faire preuve de créativité et
de détermination dans ce domaine. Nous avons à faire un choix de
société. Comme le disait le président du Conseil du
trésor tout à l'heure, nous ne pouvons plus continuer à
vivre au-dessus de nos moyens. Nous devons penser à l'avenir et à
la jeunesse. Notre devoir, en tant que gouvernement, est de laisser à la
jeunesse du Québec un Québec fort culturellement et un
Québec fort économiquement. C'est ce à quoi nous nous
employons depuis le 2 décembre. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, Mme la
députée de Matane. M. le député de Gouin.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Oui. Merci, M. le Président. Pour commencer,
en réaction à quelques affirmations du président du
Conseil du trésor qui, notamment, me demandait où j'étais
durant la campagne électorale, je lui dirai que j'ai fait 28
circonscriptions électorales et que, dans chacune d'elles, j'ai pris la
parole et j'ai tenu le même discours que l'État n'avait pas les
moyens de faire des dépenses à l'infini. J'ai tenu le même
discours...
Une voix: Combien en avez-vous gagné là-dessus?
M. Rochefort: ...que le Parti libéral était
irresponsable de prétendre qu'une marge de manoeuvre existait alors que
nous l'avions dit sur toutes les tribunes, qu'il n'y avait pas de marge de
manoeuvre, qu'il n'était pas possible de faire des promesses
électorales de 200 000 000 $, 300 000 000 $, 400 000 000 $ et 600 000
000 $ comme le Parti libéral l'a fait, comme le président du
Conseil du trésor a été associé à ces
décisions. Mais on comprend qu'il fallait gagner le pouvoir coûte
que coûte, même si on coupe court quand vient le temps de dire la
vérité aux gens. On en prend bonne note, on a vu cela.
M. le Président, quand le président du Conseil du
trésor et son caucus nous disent: II faut vivre selon ses moyens. S'il
faut vivre selon ses moyens et que nos moyens sont réduits, pourquoi
choisir, au moment où on retouche fondamentalement aux acquis sociaux,
au moment où on touche aux revenus des citoyens les plus démunis
dans notre société, de baisser les impôts des riches, des
mieux nantis dans notre société qui auraient très bien pu
attendre un an ou deux avant de connaître des baisses d'impôt comme
celle que vous avez accordée dès le mois de décembre 1985?
Non! Non! Ce sont des choix! On baisse les impôts des riches et,
après cela, on dit: On n'a pas de moyens! (11 h 15)
M. le Président, le président du Conseil du trésor
laisse entendre que je lui demande de se taire. Non, je lui dis depuis le
début de la commisison: Dites la vérité; répondez
aux questions. Quand je lui dis de se taire, je lui dis: Quand vous ne savez
pas de quoi vous parlez, plutôt que de parler, attendez donc de
connaître vos dossiers pour parler. C'est seulement dans ces
circonstances que je préférerais que le président du
Conseil du trésor cesse d'y aller de réflexions superficielles
à haute voix qui ne font que créer de l'incertitude et sur
lesquelles il refuse de répondre, après ma troisième
tentative, tantôt sa quatrième intervention. Jamais il ne nous a
dit sur quoi il appuyait ses discours en matière de santé et de
services sociaux. On n'a pas eu sa définition de l'universalité
des programmes. Le président du Conseil du trésor ne nous donne
aucune réponse à savoir pourquoi il veut intervenir sur la
demande des consommateurs en matière de santé et de services
sociaux plutôt que sur l'offre. Le président du Conseil du
trésor ne nous dit pas sur quelles études il s'appuie pour
prétendre qu'il y a des abus importants en matière de
santé et de services sociaux chez les citoyens et chez les
consommateurs.
M. le Président, aucune réponse. Le président du
Conseil du trésor, quand il entre dans cette enceinte à
l'Assemblée nationale, devient quoi tout à coup? Il n'a plus la
volubilité qu'on lui connaît. Je vais essayer d'aider le
président du Conseil du trésor dans ses réflexions. Je
vais le renvoyer à la page 40 du discours du président de la
Régie de l'assurance-maladie, M. Mockle, prononcé le 11
février dernier. Il disait justement sur ces questions d'offre et de
demande et de contrôle des coûts en matière de santé
et de services sociaux: Du point de vue de l'État, certes l'on pourrait
être tenté de contraindre l'accroissement des dépenses de
santé ou de
diminuer la part de l'État par le jeu de la substitution des
ressources, c'est-à-dire faire payer par les individus ce que
l'État payait. Le système de santé en serait sauf;
l'État sortirait gagnant, mais cela n'aurait pas beaucoup d'influence
sur les coûts totaux de la santé. C'est ce que feraient
probablement des mesures apparentées au financement comme
l'établissement de primes, de franchises, l'imposition de tickets
modérateurs. Je n'en sais rien, ajoutait-il, mais il semble que de
telles mesures visant essentiellement à restreindre la demande de
services soient considérées comme une forme d'imposition
rétrograde, donc à proscrire. Il continuait en disant: Plusieurs
spécialistes en économie de la santé sont d'avis que l'on
devrait plutôt agir sur l'offre.
Voici une étude, M. le Président. Voici une intervention
d'une des grandes sommités nord-américaines en la matière.
Je voudrais que le président du Conseil du trésor nous cite
maintenant ses études, ses références lorsqu'il nous dit
qu'il faut intervenir sur la demande, lorsqu'il nous dit qu'il y a des abus
considérables en matière de santé et de services sociaux.
Je répète, M. le Président: Qu'est-ce que le
président du Conseil du trésor veut dire quand il dit: Ce n'est
pas vrai que l'État va assurer tous les services de santé et
services sociaux dans toutes les régions du Québec a tous les
citoyens du Québec. Y aura-t-il différentes classes de citoyens?
Y aura-t-il différentes catégorisations de régions pour
les services de santé et les services sociaux au Québec, à
partir des orientations du président du Conseil du trésor? Vers
quoi allons-nous avec de telles affirmations? Nous voulons des réponses.
Nous sommes tout ouïe pour vous entendre. Vous avez une occasion de vous
exprimer en toute franchise et en toute ouverture, M. le président du
Conseil du trésor.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Gouin. M. le président du Conseil du
trésor.
M. Paul Gobeil
M. Gobeil: M. le Président, je suis bien heureux
d'entendre ce matin que le député de Gouin a prononcé des
allocutions dans 28 circonscriptions pendant la campagne électorale. Je
dois lui dire qu'il n'a sûrement pas eu le succès escompté
puisqu'on voit qu'il n'y a que 23 députés dans l'Opposition
actuellement. Qu'il ait dit qu'il n'y avait pas de marge de manoeuvre, je n'ai
pas eu l'occasion de l'entendre de sa bouche, mais il ne m'a pas
mentionné ce matin qu'il avait avisé la population du
Québec qu'il y avait un trou de 1 300 000 000 $ plus ou moins par
rapport au budget Duhaime.
M. Rochefort: Question de règlement, M. le
Président, en vertu de l'article 212.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Gouin, question de règlement.
M. Rochefort: M. le Président, je n'ai jamais
affirmé qu'il y avait des trous. Ce que j'ai dit et ce que je
répète...
M. Chagnon: Question de règlement.
M. Rochefort: J'ai dit au cours de la campagne électorale
que nous n'avions pas les moyens de faire des promesses électorales
à n'en plus finir comme le Parti libéral le faisait et qu'il
n'existait pas de marge de manoeuvre. Que le président du Conseil du
trésor, s'il ne veut pas parler, soit au moins attentif lorsqu'on
parle.
M. Gobeil: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): J'aimerais faire état de
l'article 212 du règlement: "Tout député estimant que ses
propos ont été mal compris ou déformés peut donner
de très brèves explications sur le discours qu'il a
prononcé»" Deuxième paragraphe: "Il doit donner ces
explications immédiatement après l'intervention qui les suscite.
Elles ne doivent apporter aucun élément nouveau à la
discussion, ni susciter de débat."
Sur la question de règlement, M. le président du
Conseil?
M. Gobeil: Sur la question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis, je crois que l'intervention du député de Gouin est
tout è fait pertinente eu égard à l'article 212 des
règles de procédure, dans le sens que ses propos ont
été mal compris ou déformés. Il était en
droit, réglementairement, de soulever cette question de
règlement.
M. Chagnon: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Je n'entendrai plus de
commentaire relativement a cet article 212. Je considère la chose close.
Il était en droit de le faire. M. le président du Conseil du
trésor.
M. Gobeil: Merci, M. le Président. Avec la permission du
député de Gouin, ce que j'ai dit, je le répète,
c'est que j'étais bien heureux d'entendre le député de
Gouin dire que, au cours de ses visites dans les 28 circonscriptions, il avait
mentionné qu'il n'y avait pas de marge de manoeuvre. J'ai dit, par
contre que je n'ai pas entendu le député de Gouin nous dire qu'il
avait dit, lors de
ses allocutions, qu'il y avait un trou d'environ 1 300 000 000 $. C'est
ce que j'ai dit, M. le Président, au début de mon allocution.
C'est la vérité, je pense que c'est clair dans "Le document des
finances publiques du Québec", "L'urgence d'un redressement", du 5 mars
1986. C'est assez clair. C'est un document qui est maintenant public et la
population connatt maintenant la vérité telle qu'elle
était sur ce point dès la fin de mai 1985.
Le député de Gouin me dit qu'on doit intervenir sur
l'offre. Je n'ai pas d'objection à cela. Il y a des analyses à
faire, nous sommes en train de les faire. Je voudrais seulement lui rappeler
que la ministre de la Santé et des Services sociaux est intervenue
récemment sur l'offre. Hier, j'ai entendu le député de
Gouin critiquer cette intervention sur l'offre. Sans vouloir minimiser les
décisions de la ministre de la Santé et des Services sociaux, il
y a des faits connus, des faits publics aujourd'hui: il y a eu, pour une partie
des soins dentaires, une désassurance concernant le deuxième
examen chez les dentistes. À ma connaissance, hier, le
député de Gouin s'est opposé radicalement à cette
mesure. Alors, je ne sais pas où se situe sa constance.
M. le Président, le domaine de la santé et des services
sociaux est considéré par ce gouvernement, comme il
l'était sûrement par le gouvernement précédent,
comme très important. On consacre, en 1986-1987, environ 8 000 000 000 $
à la santé et aux services sociaux, incluant la Régie de
l'assurance-maladie. Comme je l'ai mentionné précédemment,
nous avons injecté de nouvelles sommes, supérieures à 400
000 000 $, dans le système de la santé au Québec. Je suis
convaincu qu'autant le député de Gouin que le
député d'Abitibi-Ouest, que mes confrères, que mes
collègues députés ici autour de moi, nous sommes tous
d'accord que la santé est très importante. C'est primordial, sauf
que dans le cadre de l'allocation de3dits budgets, il faut quand même,
sans renier l'importance de ce domaine, y incorporer une forme de
contrôle et une forme d'allocation en termes de montants de budget. C'est
ce que nous avons essayé de faire, c'est ce que nous avons fait
effectivement. Je le redis, nous avons remis dans le système de la
santé au-delà de 400 000 000 $ cette année.
Je comprends que les choix peuvent être discutés, peuvent
être discutables aussi. Nous avons fait ces choix. La ministre de la
Santé et des Services sociaux a fait ses choix, qui ont
été approuvés par le Conseil du trésor, au meilleur
de sa connaissance, au meilleur de notre connaissance sans, nous le croyons,
affecter les services ou l'essentiel des services, M. le Président. Je
suis convaincu que c'est ce qui est important dans les circonstances. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
président du Conseil du trésor. J'aimerais apporter une courte
explication au député de Gouin. Je ne voudrais pas, à la
suite d'une interprétation du règlement, qu'on soit dans un
imbroglio. Effectivement vous avez le droit, en vertu de l'article 39, de faire
un appel au règlement. Le deuxième paragraphe de l'article 212
dit: "Il doit donner ses explications immédiatement après
l'intervention qui les suscite." L'explication que vous devez donner ou le
rétablissement des faits doit se faire après que le ministre ait
terminé son intervention. C'est strictement le petit point d'ordre, M.
le député de Gouin, que j'aimerais ajouter relativement à
l'interprétation de l'article 212, paragraphe 2, parce qu'il serait
très facile pour n'importe quel député, vous le
comprendrez très bien, d'interrompre à tout moment le ministre.
C'est simplement ce petit obiter dictum que j'aimerais ajouter.
M. Rochefort: Sur cette question de règlement que je
respecte pleinement, M. le Président, je veux simplement vous dire que
j'ai vu, à l'occasion, l'application de l'article 212 se faire à
l'instant même où les propos tenus contrevenaient au sens
donné par le discours tenu. Deuxièmement, je voulais
éviter que le président du Conseil du trésor ne fasse un
long développement à partir d'une erreur de perception.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Gouin, j'ai très bien compris le sens de votre intervention et je sais
que vous avez très bien compris le sens de la mienne.
M. le député de Champlain.
M. Pierre-A. Brouillette
M. Brouillette: Merci, M. le Président. En tant que
nouveau député, je dois vous dire que j'écoute
attentivement l'Opposition depuis mon élection. A les entendre parler,
on dirait que ces personnes n'ont jamais exercé le pouvoir. Je voudrais
profiter de l'occasion pour leur rafraîchir la mémoire. Ces
mêmes députés péquistes, en 1976, ont pris les
commandes de la province avec un déficit de 5 000 000 000 $.
Aujourd'hui, après neuf ans de règne péquiste, le
déficit actuel est au-delà de 28 000 000 000 $.
Il est mentionné dans le discours sur le budget que la dette du
gouvernement a triplé, passant de 10 000 000 000 $ en 1980 à 28
000 000 000 $ actuellement. Les services de la dette représentent 7,3 %
des revenus consacrés au paiement des intérêts de la dette
comparativement à 13,9 % actuellement. Vous comprendrez que cela
réduit la marge de manoeuvre du gouvernement. C'est une des
raisons qui ont incité le président du Conseil du trésor
è corriger cette situation le plus rapidement possible.
M. le Président, la population du Québec est en droit de
s'attendre que son gouvernement prenne les moyens nécessaires pour
rétablir la situation financière. C'est pourquoi il est important
de revoir le rôle de l'État envers les entreprises. Il faut
réduire le rôle interventionniste de l'État par rapport
à l'entreprise privée. Pour arriver à ces objectifs, le
gouvernement a mis sur pied des comités ad hoc tels que le Comité
sur la privatisation, le Comité sur la déréglementation,
le Comité sur la révision des structures et des programmes
gouvernementaux. Voici des engagements qui ont été pris en
campagne électorale pour favoriser l'entreprise privée. Pourquoi
de telles mesures? Parce que l'entreprise privée est un des moteurs
essentiel de l'économie du Québec. Si l'entreprise privée
se porte bien, il en est de même pour l'économie du Québec.
Il faut créer un climat propice au développement de l'entreprise
privée qui est l'employeur de 60 % de la main-d'oeuvre
québécoise.
Dans le dernier budget, le gouvernement entend faciliter la
création de nouvelles entreprises par une exonération
d'impôts et de taxes sur le capital pour toute nouvelle corporation
constituée après le 1er mai 1986.
En terminant, nous nous trouvons devant une économie lamentable
qui est le résultat de l'administration péquiste. Il faut donc
absolument redonner de la force, de la vigeur et du dynamisme à
l'entreprise privée, ce qui aura pour effet d'offrir enfin un
véritable avenir à nos entreprises et à notre
jeunesse.
En conclusion, M. le Président, je voudrais juste
rafraîchir la mémoire du député de Gouin, sur une
intervention qu'il a faite tantôt quand il disait qu'on va faire du
bureau, et lui dire que nous, les députés libéraux, si
nous avons été élus c'est pour faire du bureau, c'est pour
travailler pour les personnes de notre comté. Nous avons
été élus pour décider, nous avons été
élus pour gérer, nous avons été élus pour
administrer et non pas pour légiférer, comme vous Pavez fait
pendant neuf ans. C'est pour cette raison qu'aujourd'hui on retrouve la
province de Québec dans une situation aussi pitoyable; au lieu de
travailler, de gérer ou d'administrer, vous avez
légiféré. 3e dois vous dire que faire du bureau pour les
députés libéraux ça ne nous fait pas peur et c'est
pour cela que nous allons être à l'écoute de nos citoyens.
Je pense que plusieurs problèmes se règlent et que beaucoup
d'interventions viennent de nos bureaux dans les comtés. Je vous
remercie, M. le Président.
(11 h 30)
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Champlain. M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: M. le Président, les propos du
député de Champlain devaient être sûrement d'un
intérêt consommé puisque tous ses collègues sont
sortis au début, quand il a commencé. Je pense qu'on assiste
à une redite des perroquets ministériels qui ont tous traduit sur
papier ce matin le même cantique: la situation des finances publiques
était lamentable et désastreuse. Or tout le monde convient que
depuis plusieurs années ces mêmes personnes nous critiquaient de
ce côté parce qu'on appliquait, disaient-ils, des coupures trop
importantes et trop significatives dans le domaine de la santé des
affaires sociales et de l'éducation. Nous aussi nous avions compris
qu'il fallait réduire le rythme de croissance des dépenses
publiques. On a commencé à le faire, tous les documents
l'attestent et, contrairement à leur prétention - ils sont les
seuls à le croire - les finances publiques avaient été
effectivement contrôlées et assainies depuis plusieurs
années. Lorsqu'on a essayé de gonfler la balloune de 1 300 000
000 $ toutes les personnes avisées ont reconnu que ça avait
été volontairement gonflé pour l'impact du budget qui
devait créer dans la population une espèce de sentiment du
"ouf!", puisqu'il a été qualifié comme cela par un
chroniqueur politique chevronné en matière économiques, M.
Dubuc, de la Presse. Nous, nous avons assumé nos responsabilités
dans la réduction du rythme de croissance des dépenses
publiques.
Moi, en ce qui me concerne, je ne veux pas que le président du
Conseil du trésor ne parle pas, mais je veux que lorsqu'il parle ce soit
sur des choses qui ont été dûment réfléchies
et dûment discutées è l'intérieur d'une
équipe gouvernementale qui doit avoir des orientations. Ce n'est pas du
tout ce qu'on sent. M. le Président, il faut appeler les choses par leur
nom de temps en temps, il faut avoir de la franchise et de la transparence. Je
donne un exemple. Ce n'est sûrement pas avoir beaucoup de franchise que
de continuer è parler comme le président du Conseil du
trésor l'a fait pour ce qui est des négociations du secteur
public et dire que - je prends ça juste à titre d'exemple - tout
va bien bien. Il est le seul à penser que les négociations
avancent. Tout le monde convient que ça ne marche pas du tout. Il ne se
passe rien aux tables. On a encore vu cela au Téléjournal, hier,
où la plupart des intervenants disent que ce n'est pas parce qu'il y a
eu tant de séances à une table de négociation... Si on est
encore à discuter des questions de partage entre le
niveau local et le niveau central, ce n'est pas beaucoup le contenu des
négociations. M. le président du Conseil du trésor est
à peu près le seul au Québec actuellement à croire
que les négociations avancent, fonctionnent et marchent. J'appelle cela
manquer de transparence par rapport à la vérité des faits
et à la vérité des choses. Ce qu'on demande aujourd'hui au
président du Conseil du trésor c'est de répondre
clairement des orientations de ce gouvernement en particulier en matière
de santé et de services sociaux. Il a dit énormément de
choses. Il a donné des orientations fondamentales et, encore une fois,
au nom de la transparence, au nom de ce qu'il prétend avoir,
c'est-à-dire l'appui de la population. Je crois que l'appui de la
population ils ne pourront pas l'avoir longtemps quand la population va se
rendre compte - elle s'en rend compte - qu'elle se fait mentir
allègrement et qu'elle se fait dire des choses qui, dans les faits, ne
correspondent pas du tout aux discours que ces gens tenaient. La belle phrase:
II faut vivre selon nos moyens! Il me semble que pendant un mois et demi de
campagne électorale c'est nous qui avons rappelé à la
population justement que parce qu'il fallait vivre selon ses moyens on ne
pouvait pas prendre d'engagements farfelus, on ne pouvait pas faire de farces
avec la population et lui faire accroire que nous avions des finances publiques
qui permettaient de faire toutes sortes d'engagements et de promesses pour
lesquels on n'avait pas les finances publiques nécessaires pour leur
donner suite.
Si on revient aux questions précises, moi, j'en ai une qui a
été posée par mon collègue à trois reprises.
Je m'essaie, ça va être la première fois que je la lui
pose. Quand le président du Conseil du trésor, qu'on interpelle
aujourd'hui, mentionne que le gouvernement doit cesser de croire et d'affirmer
qu'il doit fournir dans toutes les régions et à tous les citoyens
toute la gamme de services publics possible, je lui pose clairement la
question: Est-ce à dire qu'on va avoir un gouvernement qui a une
conception des services offerts avec des différentiations par rapport
aux unités régionales ou à l'unité centrale? Est-ce
à dire concrètement, pour ce qui est de la région de
l'Abitibi-Témiscamingue, par exemple, que nous n'aurions pas droit
è certains types de services qui sont offerts à Montréal
ou à Québec? Si oui, quels sont les services, en Abitibi, dont on
apprendra, dans quelques mois, qu'on n'y a pas droit comme contribuables? C'est
écrit comme cela: On ne peut pas fournir dans toutes les régions
à tous les citoyens toute la gamme de services publics possible. C'est
strictement en ce qui concerne la capacité, comme citoyen de l'Abitibi,
d'avoir droit à des services de santé... Le président du
Conseil du trésor me dit: II y a certains services auxquels vous n'aurez
plus droit en Abitibi-Témiscamingue. Je veux savoir, de la part du
président du Conseil du trésor, à quels services il fait
référence?
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. M. le président du Conseil du
trésor.
M. Paul Gobeil
M. Gobeil: M. le Président, d'abord, concernant une
remarque qu'a faite le député d'Abitibi-Ouest relativement aux
négociations des secteurs public et parapublic, aujourd'hui, au moment
où je vous parle, je n'ai pas l'impression que j'ai de leçon
à recevoir de l'ancien gouvernement ni du député
d'Abitibi-Ouest. Je m'excuse, mais qu'on se réfère à la
dernière ronde de négociations, je pense que c'est tout à
fait compréhensible, compte tenu de ce que veulent les syndiqués
par rapport au processus de négociation: ils veulent justement
négocier. Je ne pense pas que je doive recevoir de leçon, comme
je l'ai dit, de l'Opposition en cette matière.
Quant à l'autre question qu'il m'a posée directement, la
réponse, c'est non et non pas oui. Je pense qu'il faut lire la phrase
telle qu'elle est dite. Cette phrase dit qu'il faut faire des choix. Quand on
mentionne "dans toutes les régions", je n'ai jamais dit qu'on devait
faire des distinctions entre les régions. J'aurais pu aussi bien dire:
Dans toute la province de Québec, dans toutes les régions du
Québec. Alors, il n'y a pas de distinction à faire entre les
régions. Ce que j'ai dit, c'est qu'il y a des choix à faire dans
l'offre des services dans l'ensemble de la province de Québec, ce qui
inclut toutes nos régions administratives ou "députamentales", si
je peux m'exprimer ainsi, représentées par 122
députés à l'Assemblée nationale. Ceci est en vertu
de notre capacité de payer - je le répète - en vertu du
fait que même l'État a des moyens limités et qu'il faut
cesser de laisser croire que les moyens de l'État sont
illimités.
Il y a des choix à faire. Les choix doivent être
étudiés, analysés et ils doivent être les meilleurs
possible. C'est ce que nous nous appliquons à faire, comme équipe
ministérielle. Je pense que c'est assez évident. Si ce n'est pas
évident pour les 23 députés de l'Opposition, cela me
semble évident d'après ce que j'entends de la part d'une grande
majorité de la population. J'ose croire que si les 23
députés d'en face sont maintenant dans l'Opposition, ils vivent
quand même encore dans un monde réel.
J'ai mentionné, il y a quelques minutes, que la santé,
pour nous, pour ce gouvernement, c'était très important, comme
cela l'était pour le gouvernement antérieur, j'en conviens. C'est
pour cela que, malgré cette
situation budgétaire difficile, nous avons réintroduit,
par rapport aux dépenses probables 1986-1987, des montants d'argent
significatifs, soit au-delà de 400 000 000 $. Si on inclut à cela
le domaine culturel, le domaine éducatif, le domaine de la protection du
revenu, nous avons réintroduit, sur une augmentation de 1 137 000 000 $
par rapport aux dépenses probables de l'an passé, 822 000 000 $.
Je pense que cela démontre que malgré les choix que nous avons
dû faire, nous sommes conscients que les acquis sociaux doivent
être protégés. Nous avons protégé l'essentiel
de ces acquis sociaux. C'est l'intention de ce gouvernement de continuer dans
cette veine de protection, mais ceci ne veut pas dire qu'il faut se fermer les
yeux et payer la facture quelle qu'elle soit. Il faut quand même
organiser les réseaux, les systèmes afin qu'il y ait quand
même un contrôle rigoureux, mais raisonnable, des dépenses,
compte tenu des besoins.
C'est ce que nous nous appliquons à faire depuis quelques mois et
c'est ce que nous continuerons à faire dans les prochaines années
de notre mandat et dans les mandats subséquents, parce que je suis
sûr que chacun et chacune des citoyens et des citoyennes du Québec
comprendront ceci et nous appuyeront dans nos démarches. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député de Limoilou.
M. Michel Després
M. Després: M. le Président, la croissance rapide
des dépenses budgétaires et la mauvaise administration du Parti
québécois ont contribué à ce
déséquilibre financier persistant au cours des neuf
dernières années. Ces dépenses toujours grandissantes sont
maintenant au-delà des moyens du gouvernement. Ce
déséquilibre doit être corrigé et le gouvernement
s'engage présentement à le faire pour favoriser la croissance
économique et la position concurrentielle du Québec.
Le redressement des finances publiques nécessite d'abord la
compression des dépenses sans pour autant affecter l'essentiel des
acquis sociaux. Lorsqu'on parle des soins de santé, je suis un peu
déçu de voir le député de Gouin s'attaquer
continuellement aux milieux des soins de santé, alors qu'on sait qu'une
des priorités était Ies salles d'urgence dans les
hôpitaux.
Lorsqu'on voit un budget qui atteint près de 8 000 000 000 $ et
qu'il y a plus de 400 000 000 $ supplémentaires qui ont
été injectés dans les services de santé, je pense
que le gouvernement prend ses responsabilités, des
responsabilités sociales très importantes.
C'est donc dans cette perspective, M. le Président, que le
ministre des Finances s'est empressé de déposer en Chambre le
budget de dépenses de l'État le 25 mars dernier, qui faisait
état de diminutions et de compressions budgétaires de 1 010 000
000 $ pour 1986-1987. Cet exercice de rationalisation dans tous les
ministères constitue une première étape dans le travail
rigoureux qu'a décidé d'entreprendre le gouvernement du Parti
libéral depuis son arrivée au pouvoir.
La préoccupation majeure du gouvernement, M. le Président,
est de mettre de l'ordre dans les priorités budgétaires de
l'État, tout en s'assurant qu'on sera en mesure de répondre aux
besoins de ta population en matière de développement social,
culturel, économique, et ce malgré un contexte budgétaire
difficile.
Ainsi, pour la première fois depuis 1980, le déficit du
Québec, en 1986-1987. passera sous la marque de 2 900 000 000 $ et il
est estimé, pour 1988-1989, à 2 600 000 000 $. Selon le
journaliste et critique financier de la Presse cité tout à
l'heure par M. le député d'Abitibi-Ouest, M. Alain Dubuc, les
projections indiquent que, dans les années qui viennent, les finances
publiques de la province s'approcheront d'une situation que l'on peut qualifier
de saine.
Mais notre tâche, M. le Président, ne s'arrête pas
là. Nous devons également nous consacrer avec plus de vigueur que
jamais à notre objectif de relancer l'économie
québécoise et de créer 400 000 emplois d'ici à
1990. Lorsqu'on parle des jeunes et qu'on parle de ces méchantes
coupures que le gouvernement a faites dans son budget -vous savez que les
dépenses probables pour l'année 1986-1987 sont de 28 480 000 000
$ et ces fameuses coupures draconiennes dont on parle représentent 3,5 %
des dépenses probables* Je ne pense pas que ce soit si alarmant qu'on le
dit - lorsqu'on dit dans l'Opposition que le gouvernement ne se
préoccupe pas des dossiers jeunesses dans les crédits qui ont
été votés, dans les programmes de création
d'emplois, lorsqu'on parle des programmes de jeunes volontaires qui avaient
comme dépenses probables pour 1985-1986, 10 940 000 $ et lorsqu'on parle
des bons d'emploi plus et lorsqu'on parle des programmes de groupes de soutien
aux initiatives jeunesses, qu'on parle aussi des programmes de jeunes
promoteurs, on avait comme dépenses probables en 1985-1986, 19 000 000 $
et les crédits qui ont été votés en 1986 sont de 40
000 000 $. (11 h 45)
Si on ajoute à cela les programmes d'employabilité de
bénéficiaires de l'aide sociale qui étaient des
dépenses probables de 19 000 000 $ à 71 000 000 $, on est
monté à 90 000 000 $ avec un budget comparatif
de crédits votés de 111 000 000 $, ce qui fait une
augmentation nette...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Limoilou, je dois malheureusement vous arrêter dans votre droit de parole
comme je le fais pour l'Opposition. Maintenant la parole est à M. le
député de Gouin.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Dans sa dernière réponse que faisait
le président du Conseil du trésor, je crois qu'il a
illustré de façon manifestement éloquente que
l'état de ses réflexions quant à sur quoi doivent porter
les efforts gouvernementaux pour rééquilibrer, comme il dit,
l'offre et la demande dans les services de santé et les services sociaux
est purement superficiel. Quand le président du Conseil du trésor
vient affirmer ici en Chambre, de son siège, que ce qui a
été fait dans le domaine de la santé dentaire est une
intervention sur l'offre, le président du Conseil du trésor ne
sait ou bien absolument pas de quoi il parle, ou bien il cherche à
triturer la réalité. Lorsqu'on dit aux consommateurs, vous aurez
maintenant un seul examen de payé plutôt que deux et pour le
deuxième vous aurez un ticket modérateur comme citoyen à
payer de 23 $ pour avoir accès aux services d'examens préventifs
et de soins curatifs payés par la suite par l'État, on appelle
cela intervenir sur ' la demande, c'est-à-dire sur la consommation des
services de santé et des services sociaux par les citoyens.
Quand vous affirmez que votre décision sur le dossier de la
santé dentaire c'est une intervention sur l'offre, vous êtes dans
les patates complètement. Je souhaite, compte tenu de la réponse
que vient de nous faire le ministre, qu'il cesse de s'impliquer dans ce
dossier. On va se retrouver dans n'importe quoi avec une approche aussi
superficielle, irréfléchie, improvisée que celle du
président du Conseil du trésor sur ces dossiers. Laissez cela
à d'autres. II y en a peut-être d'autres qui connaissent cela un
peu mieux et qui sont un peu plus rigoureux que vous sur ces questions, de
grâce!
Au nom des Québécois et des Québécoises, je
voudrais que le président du Conseil du trésor, une fois en deux
heures de débat, réponde un peu aux questions qu'on lui a
posées sur les services de la santé et les services sociaux,
d'autant plus que c'est celui qui a le plus parlé sur ces questions
depuis le 2 décembre dernier dans son gouvernement et que sa
collègue, la ministre de la Santé et des Services sociaux, m'a
dit en commission parlementaire sur l'étude de ses crédits: Ce ne
sont pas mes déclarations, ce sont celles du président du Conseil
du trésor! Interrogez-le sur ces questions, il sera sûre- ment
heureux d'y répondre.
M. le Président, serait-il possible que le président du
Conseil du trésor, une fois aujourd'hui, daigne répondre de ses
déclarations en matière de santé et de services sociaux?
Je poserai une question bien précise: Comment peut-il concilier de
limiter les abus, comme il dit, de tarifer des services, de distinguer de
services de base par rapport à des services accessoires et de limiter
les services dans certaines régions, pour certains citoyens? Comment
peut-il prétendre que certains soins ne sont pas des droits
fondamentaux? Comment peut-il prétendre que certains besoins en
matière de santé ne doivent pas être assumés par
l'État? Comment peut-il affirmer que toutes les prothèses ne sont
pas nécessaires alors que la définition de l'universalité
des programmes qui a été celle des gouvernements libéraux
de 1960 à 1976 et qui est celle du président de la Régie
de l'assurance-maladie du Québec, M. Mockle qui, je le
répète, est une grande sommité partout en Amérique
du Nord et dans le monde occidental en matière de régimes publics
lorsqu'il dit: L'universalité, cela veut dire un régime gratuit
indépendamment du niveau de revenu des bénéficiaires, peu
importe qu'ils y contribuent financièrement ou non, offert à des
conditions identiques. Ce principe présuppose qu'il n'y a pas de limites
ni de surprimes pour les mauvais risques.
Comment allez-vous concilier vos démarches, vos affirmations, vos
décisions, vos organisations de services de santé et de services
sociaux avec la définition de l'universalité qu'en donne M.
Mockle? D'autant plus qu'en matière de santé et de services
sociaux, cela a été votre première promesse
électorale de maintenir l'universalité. Quand la ministre nous a
présenté ses grands objectifs pour l'année et pour son
mandat, elle nous a répété que son premier objectif serait
de maintenir l'universalité. Pouvez-vous concilier cela, M. le
président du Conseil du trésor, une fois, pour l'information non
seulement des députés, mais pour la population qui elle
reçoit, parce qu'elle en a besoin, des services de santé et des
services sociaux chaque jour et qui est dans une situation de confusion et
d'incertitude à partir des déclarations irresponsables,
improvisées et irréfléchies que vous avez faites sur ces
questions.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Gouin. Conformément à la procédure
que j'avais établie dès le commencement et selon l'article 302
qui nous dit que 20 minutes avant la fin de la séance, le
président accorde un dernier temps de parole de dix minutes au ministre
et un droit de réplique de même durée à
l'interpellant, nous allons maintenant
entendre le président du Conseil du trésor et la
séance va se terminer à 12 h 10 en raison du fait que nous avons
commencé à 10 h 06 et que nous avons débattu des questions
de règlement pendant quatre minutes. M. le Président du Conseil
du trésor.
Conclusions M. Paul Gobeil
M. Gobeil: Merci, M. le Président. Il me semble que si le
député de Gouin a des questions précises à poser
dans le domaine de la santé, elles devraient, comme je l'ai
mentionné au commencement, s'adresser plutôt à la ministre
de la Santé et des Services sociaux. Quant à moi, les
déclarations que j'ai faites s'inscrivent dans la ligne de pensée
et l'orientation qu'a la ministre de la Santé et des Services sociaux
concernant le domaine de la santé. Permettez-moi de rappeler au
député de Gouin les cinq grandes orientations qu'a prises la
ministre de la Santé et des Services sociaux dans la
budgétisation des crédits de 1986-1987 pour les ministères
et organismes dont elle est responsable. Permettez-moi de dire que je souscris
entièrement à ces orientations et que je les endosse
entièrement.
La première orientation est de maintenir le principe de
l'universalité ainsi que d'améliorer l'accessibilité et la
qualité du réseau de la santé et des services sociaux.
Comme deuxième principe ou comme deuxième orientation, devrais-je
dire, privilégier dans toute la mesure du possible le maintien, dans le
milieu de vie naturel, des différentes catégories de
bénéficiaires auxquels s'adressent les services du réseau;
troisièmement, valoriser le personnel par un plus grand respect de leurs
compétences respectives et de leur autonomie afin de leur assurer une
évaluation professionnelle satisfaisante; quatrièmement, investir
dans les services plutôt que dans les structures. Finalement,
cinquièmement, donner au réseau de la santé et des
services sociaux une place prioritaire - je dis bien prioritaire - dans
l'allocation des budgets gouvernementaux.
M. le Président, nous vivons dans une société qui
évolue fort rapidement autant dans ses phénomènes sociaux,
économiques que démographiques. Cette situation amène de
nouvelles réalités irréfutables et notre
société doit s'ajuster. Les besoins en matière de
santé, conjugués au développement technologique sans cesse
en croissance, augmentent continuellement le coût de la pratique
médicale, alors que, je le répète, les moyens de
l'État n'évoluent pas au même rythme.
L'État providence ne peut plus pourvoir à toute la
demande. Le Québec ne peut plus se le permettre. D'ailleurs, il n'y a
plus d'État qui ne soit pas contraint à vivre selon ses moyens et
comme la demande de services est en hausse constante, l'État doit
choisir de gérer en fonction de sa capacité de payer. Les
coûts des nouveaux développements et des nouvelles façons
de répondre aux besoins devraient dorénavant trouver une partie
de leur financement dans une meilleure utilisation des ressources
déjà en place. La conjoncture économique des
dernières années, l'augmentation et l'alourdissement des
clientèles nous obligent plus que jamais à
réévaluer les façons de faire de l'État. Je l'ai
dit et je le répète: II n'est pas vrai d'affirmer que
l'État doit toujours et toujours payer.
Les Québécois et les Québécoises ne sont
peut-être pas suffisamment conscients du coût que
représentent les soins de santé au Québec: 8 000 000 000 $
sur un budget total de 28 500 000 000 $. Mais, pour améliorer la
qualité sans affecter la quantité, nous devons coordonner nos
efforts. Les administrateurs des diverses catégories
d'établissements ont travaillé et travaillent, à mon point
de vue, souvent trop en vase clos, sans faire appel et sans même
reconnaître suffisamment les autres ressources sur leur territoire.
Les établissements de santé, tout en respectant leur
vocation, doivent poursuivre leurs efforts d'ouverture vers les autres
ressources. Pour ce faire, il est de leur devoir de prendre connaissance de ces
ressources du milieu et d'établir des mécanismes de concertation
pour assurer une complémentarité des services entre eux.
Les sondages ainsi que les enquêtes d'opinion publique
démontrent que la santé demeure une priorité pour la
majeure partie de la population et elle demeure une priorité aussi pour
le président du Conseil du trésor, M. le Président. Ceci
n'empêche pas de profondes remises en question. Notre système de
services de santé et de services sociaux est à un point tournant.
Nous devons relever un défi de taille, soit reprendre un débat
positif et progressif sur tout ce qui touche la santé et le
bien-être de la population québécoise à
l'intérieur d'un budget qui ne peut être, de façon
illimitée, croissant. Non seulement au Québec, M. le
Président, mais aussi dans d'autres provinces canadiennes, on
s'interroge sur la nature des services qu'il faut dorénavant financer.
Il existe des services de santé de base, des services accessoires et je
l'ai mentionné et je le répète.
D'ailleurs, une commission d'enquête sur les services de
santé et les services sociaux a été formée afin
d'évaluer le fonctionnement et le financement du système de
santé et de services sociaux, afin d'étudier les solutions
possibles aux divers problèmes que connaît le système et de
faire au gouverne-
ment les recommandations qui lui semblent les plus appropriées
pour assurer le maintien et le développement des services de
santé et des services sociaux. L'enquête de cette commission
Rochon devrait être complétée en septembre 1987. D'ici
là, ses commentaires, ses évaluations préliminaires et les
autres suggestions du milieu devront et guideront le gouvernement dans la
préparation du prochain budget pour 1987-1988.
On ne peut pas se leurrer. La gestion du système de soins de
santé sera une des questions budgétaires les plus
épineuses auxquelles sera confronté le gouvernement au cours des
prochaines années. Est-ce que cette croissance de coûts
reflète un contrôle financier insuffisant ou est-elle la
résultante d'un système dont le fonctionnement est devenu
lui-même incontrôlable? Connaître les paramètres du
système, poser la question, c'est en même temps y
répondre.
M. le Président, certains gestes majeurs ont été
posés. Par contre, d'autres défis aussi majeurs se dressent
à l'horizon. Et plus près de nous, les négociations avec
les employés des secteurs public et para public sont en cours. J'ai
déjà dit que ces négociations devraient se dérouler
dans un délai raisonnable et je crois sincèrement qu'une entente
négociée est encore possible à court terme, mais je ne
voudrais surtout pas, M. le Président, que la santé et le
bien-être des citoyens deviennent l'enjeu de ces négociations.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député de Gouin.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Merci, M. le Président. Dans un premier
temps, comme remarque de conclusion, je dirai qu'on a devant nous, un
gouvernement de Ponce Pilate. La ministre de la Santé et des Services
sociaux nous dit: Voyez le président du Conseil du trésor sur ces
déclarations; moi, je m'en lave les mains. Le président du
Conseil du trésor nous dit: Voyez la ministre de la Santé et des
Services sociaux; moi, je parle en dehors de la Chambre, je me lave les mains
devant les parlementaires des déclarations que j'aurais faites.
M. le Président, le président du Conseil du trésor
nous dit souvent qu'il faut faire des choix budgétaires. Quant à
nous, nous avons fait des choix budgétaires. Bien, justement M. le
Président, est-ce qu'on baisse les impôts des riches? À
deux reprises, consécutivement, en quelques mois, en même temps
qu'on coupe l'indexation des prestations d'aide sociale, en même temps
qu'on ne donne pas suite aux promesses du Parti libéral quant à
l'aide sociale, en même temps qu'on coupe le programme de prêta et
bourses pour les jeunes Québécois, en même temps qu'on
atteint directement au coeur le programme de la santé dentaire pour les
jeunes Québécois où on fera en sorte qu'il y aura un frais
modérateur de 23 $ pour avoir accès à un deuxième
examen...
M. Chagnon: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Saint-Louis, question de règlement.
M. Chagnon: M. le Président, vous avez cité tout
à l'heure l'article 302 qui dit qu'il y a dix minutes au ministre et un
droit de réplique de même durée à l'interpellant.
Est-ce que l'interpellant n'était pas le député
d'Abitibi-Ouest?
M. Rochefort: M. le Président. (12 heures)
M. Gendron: Très rapidement, c'est parce qu'on avait
convenu qu'on a le droit de le faire, l'interpellant a droit de partager la
réplique avec un collègue; on va faire cinq-cinq.
Le Président (M. Lemieux): Écoutez...
M. Gendron: C'est régulier, c'est fréquent, c'est
courant.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement, l'article 302
parle de l'interpellant, mais j'aimerais attirer votre attention sur l'article
181 du règlement qui dit que les règles d'interprétation
s'appliquent: "Un statut doit recevoir, en vertu de l'article 41 de la Loi
d'interprétation, une interprétation large, libérale qui
assure... son esprit et fin." Et: "L'interpellation, anciennement
appelée la question avec débat, est un instrument de
contrôle parlementaire, c'est une interrogation au ministre sur un sujet
d'intérêt général." J'emploierais ce vieil axiome de
droit qui dit: Folle est la sagesse qui veut être plus folle que la
loi.
Je pense qu'actuellement, M. le député de Saint-Louis, il
est de plein droit que l'interpellation joue son rôle et que le
député de Gouin puisse bénéficier de son droit de
parole de dix minutes. M. le député de Gouin.
M. Rochefort: Merci, M. le Président. Je poursuis. Donc,
on nous dit qu'il faut faire des choix budgétaires. On fait des choix en
favorisant les mieux nantis de notre société, en le faisant sur
le dos et en "clenchant", en diminuant les revenus des moins bien nantis de
notre société. Faites des choix, mais faites les bons choix et
défendez les acquis sociaux, non pas dans vos discours pompeux, mais
dans la pratique
quotidienne des décisions et des gestes que vous posez.
Le président du Conseil du trésor nous dit que, en
matière de santé, il faudra débattre de ces questions,
faire des débats importants. Bien, ce à quoi on assiste: Quand le
président du Conseil du trésor est devant des clubs sociaux, il
parle; quand il est ici, à l'Assemblée nationale, il n'a plus
rien à dire. Ce matin, il n'a pas une seule fois apporté de
réponses aux questions qu'on lui a posées dans le dossier de la
santé et des services sociaux. Pour lui, "débat", est-ce que cela
veut dire qu'on va faire cela en cachette, qu'on va essayer de poigner le monde
à la dernière minute, dans le détour? Est-ce que cela va
être votre façon de faire?
M. le Président, je suis inquiet quant à la façon
de faire du président du Conseil du trésor. J'ai des
appréhensions quant à ce que l'été pourrait
réserver aux Québécois en mauvaises surprises,
particulièrement dans le domaine de la tarification dans le secteur de
la santé et des services sociaux. Quand je vois l'attitude absolument
improvisée, irréfléchie et superficielle du
président du Conseil du trésor, qui prend des décisions,
qui fait des affirmations et qui donne des orientations à son
gouvernement en matière de santé et de services sociaux et qui
commet des bourdes comme tout à l'heure alors qu'il fait la
démonstration d'une ignorance totale, qu'il ne sait même pas
distinguer l'offre et la demande dans le domaine de la santé et des
services sociaux, cela est inquiétant.
Nous souhaitons qu'il y ait un peu plus de rigueur, non seulement au
Conseil du trésor, mais dans votre gouvernement et dan3 votre caucus
parlementaire. Nous souhaitons qu'enfin vous fassiez les vrais débats
avec toute la population. Soyez courageux et ouverts; associez l'ensemble des
Québécois aux débats de société dans
lesquels vous les embarquez actuellement. Nous souhaitons que tous les
Québécois puissent dire leur mot sur ces questions, qu'ils
puissent voir venir les conséquences des discours que vous tenez, en
cachette, dans les clubs sociaux, souvent en l'absence des journalistes et
jamais en présence des parlementaires. C'est ce que vous avez encore
illustré ce matin: vous refusez d'aborder ces questions quand vous
êtes en présence des parlementaires, parce que vous avez peur du
contrôle parlementaire. Vous êtes incapable d'assumer votre
responsabilité parlementaire devant l'Assemblée nationale quant
aux décisions que vous avez prises.
Je conclus, en ce qui me concerne, en disant que le président du
Conseil du trésor devrait se retirer du dossier de la santé et
des services sociaux et se rappeler que la première promesse de sa
formation politique au cours de la campagne électorale dans le domaine
de la santé et des services était celle de maintenir
l'universalité de tous les programmes, c'est-à-dire de faire en
sorte que tous les Québécois, sans aucune distinction, soient
traités de façon identique dans le domaine de la santé et
des services sociaux et que les services demeurent gratuits.
Respectez donc votre engagement et demandez donc à la ministre de
respecter les objectifs qu'elle a répétés au cours de la
commission parlementaire, lesquels elle s'est fixés pour les prochaines
années. C'est comme cela que le Québec se portera mieux. Quant
à vos choix budgétaires, faites-les donc porter aux bons
endroits. Si vous êtes obligés de couper les gens qui sont les
moins bien nantis de notre société, commencez donc par cesser de
baisser les impôts des riches pour que cela se fasse sur le dos des moins
bien nantis de notre société.
M. Gendron: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): M. le député
d'Abitibi-Ouest, je ne voudrais quand même pas créer un
précédent. Je crois avoir peut-être l'assentiment du
président du Conseil du trésor afin que vous terminiez
l'intervention. J'aimerais quand même vous dire que l'esprit et la lettre
de l'article 302 parle d'un droit de réplique de même durée
à l'interpellant, soit à une personne. Je devrais, M. le
député d'Abitibi-Ouest, permettre au député de
Gouin d'écouler le temps qui est d'une durée de dix minutes
environ. Je ne veux pas ici créer un précédent. Je vais
quand même vous permettre de terminer ce temps avec l'assentiment du
président du Conseil du trésor.
M. François Gendron
M. Gendron; Merci, M. le Président, d'autant plus que vous
aviez pris la décision avant même de conclure comme cela qu'on
fractionnerait la conclusion. Je passe à la conclusion très
rapidement mais, avant de la faire, sur l'essentiel des propos qui ont eu libre
cours lors de cette interpellation, je voudrais quand même revenir
à une phrase sur les négociations, parce que le président
du Conseil du trésor semble avoir laissé un message au sujet des
négociations en disant qu'il souhaitait toujours un règlement. Je
veux lui dire qu'à partir du moment où il n'y a aucune
circulation d'air entre l'offre plancher et l'offre plafond, je pense que cela
va être très difficile d'envisager une conclusion. Si vous voulez
qu'il y ait une conclusion heureuse des négociations, il y aurait
sûrement lieu d'offrir à quelques tables un peu plus de contenu
pour que les négociations se déroulent autrement que strictement
sur les partages des matières à être
négociées. Je n'ai pas de leçon à vous
donner. Je ne veux pas vous en donner une non plus. Sur les
négociations, je n'ai pas parlé de faire la leçon. J'ai
demandé tout simplement de commencer à vous en occuper pour qu'il
y ait des matières à négocier aux tables de
négociation - c'est bien différent -et, deuxièmement, d'au
moins dire la vérité à la population. Les
négociations ne bougent pas du tout alors que vous êtes le seul au
Québec à croire que cela va bien. C'est ce que j'ai dit sur les
négociations.
Concernant le débat de ce matin, ce qu'on a appris c'est que,
contrairement, encore là, à ce qu'on voulait savoir, compte tenu
que c'est le président du Conseil du trésor qui a fait ces
déclarations en matière de santé, un domaine très
important pour une société, même en croissance, même
en évolution, même en difficultés budgétaires... Je
pense que le domaine de la santé demeurera toujours au Québec un
domaine vital, important, surtout quand on a la fausse prétention, comme
cela a été mentionné ce matin, que ces gens,
imaginez-vous, ont fait des compressions avec l'optique de protéger les
acquis sociaux. Il faut avoir du culot. Il faut vraiment être
effronté de penser qu'on protège les acquis sociaux quand on
désindexe les bénéficiaires de l'aide sociale, donc, les
plus démunis de la société, quand on désassure
certains services de santé, en particulier, les soins dentaires, quand
on nous dit - et là-dessus, on a été très clair...
Le président du Conseil du trésor a dit - moi, je sais, à
moins que les mots de la langue française n'aient changé de
signification -que le gouvernement doit cesser de croire et d'affirmer qu'il
doit fournir dans toutes les régions, à tous les citoyens, toute
la gamme des services publics. Pas les caprices, les services publics. Je ne
peux pas vous offrir la gamme des services publics qu'on offre ailleurs. C'est
cela que cela veut dire. C'est cela qui est le texte. Je le cite mot à
mot dans le texte, je n'interprète même pas.
Ces gens vont nous dire ce matin: Nous, on protège les acquis
sociaux. C'est faux et c'est à nous de le dire qu'on ne peut pas, en
désindexant l'aide sociale, en désassurant certains biens, en
cessant d'offrir certains services dans plusieurs régions, il me semble
qu'on ne peut pas, à ce moment, prétendre qu'on protège
les acquis sociaux et surtout faire comme certains perroquets
ministériels et en ajouter. Eux autres n'ont pas dit: On protège,
mais: On bonifie. Imaginez-vous! C'est le comble du comble. On bonifie les
acquis sociaux.
II n'y a eu aucune bonification. Les sommes d'argent additionnelles
inférieures à l'inflation dans le domaine des services sociaux.
De toute façon, lorsqu'il est donné, l'argent ne sert pas, il
n'est pas productif, parce que c'est pour payer des déficits. Ce n'est
pas comme cela qu'on augmente, je pense, les acquis sociaux et les services en
termes sociosanitaires. Je pense qu'on ne peut pas parler des deux
côtés de la bouche et faire accroire, comme ces gens l'ont fait,
qu'ils sont pour l'universalité. Ils sont pour l'universalité
sauf que tous les gestes qu'ils posent sont des entraves majeures à la
notion universelle de ce qu'est l'universalité, c'est-à-dire
gratuit et offert à tous les citoyens et les citoyennes du
Québec, contribuables de la même façon. Moi, il me semble
que ces gens - c'est clair - ce sont des gens qui ont appliqué les
compressions budgétaires sans aucune vision d'ensemble, sans politique
d'ensemble.
Je conclurai avec la phrase suivante: Ce n'est pas tout de couper des
budgets, d'amenuiser les subventions et d'inventer une nouvelle source de
financement. Le faire sans aucune vue d'ensemble de ce que devrait être
demain un système fiscal équitable, san3 choisir de
véritable priorité pour le développement de la
société et non pas uniquement de la santé et du
système d'administration public, quand on fait cela, on appelle cela
gérer. On n'appelle pas cela gouverner.
Ce dont on se rend compte depuis cinq mois, c'est que ce gouvernement ne
gouverne pas. Ce gouvernement gère. Il me semble qu'un État
québécois, c'est beaucoup plus large que celui de gérer
uniquement. Vous n'avez pas été élus pour être de
bons comptables, vous avez été élus pour vous assurer
qu'à l'intérieur de l'État québécois, on ne
le rapetisse pas, qu'on continue à avoir un État
québécois qui offre des services à l'ensemble de la
population tout en surveillant effectivement la question importante des
finances publiques, mais non pas uniquement en gérant. Il faudrait
gouverner et on a senti, ce matin, que gouverner avec une vue d'ensemble, cela
ne vous intéresse pas.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. La commission du budget et de
l'administration, ayant terminé son mandat relativement à une
interpellation sur la question soulevée par le député
d'Abitibi-Ouest, soit les grandes orientations du Conseil du trésor dans
le contrôle des dépenses gouvernementales, ajourne sine die.
Merci.
(Fin de la séance à 12 h 11)